Ti HISTOIRE NATURELLE OISE AUX. TOME SEIZIÈME. LÀ \ TR Rd - HISTOIRE ©??? NATURELLE Pan BUFFON, DEDIÉE AU CITOYEN LACEPEDE, MEMBRE DE L INSTITUT NATIONAL. OISEAUX. TOME SEIZIEME. Vi oi 288 LOT : | éasorian tu | RICHMOND % COLLECTION: s: PARIS En ES À LA LIBRAIRIE STÉRÉOTYPE BE P. DIDOT z "AÎNÉ, GALERIES DU LOUVRE, N° 3, XT FIRMIN DIDOT, RUE DE MPANEEE, N° 116. AN VII. — 1799. } : 2100 À UC; Tom 16, A _ A = , & Ÿ è N À Ÿ à : = . sl = . , HISTOIRE, NATURELLE DUAL T EP MALE 7 VULGAIREMENT "+ LA PIE DE MER. Lss oiseaux qui sont dispersés dans nos champs, ou retirés sous l’ombrage de nos forêts, habitent les lieux les plus rians et . … * Voyez les planches enluminées, n° 029. Quelquefois hecasse de mer ; en anglois, sea- … pie, oysler-caicher ; en Islande , z1/dur (le mêle), tillra (ia femelle), ce qui indiqueroit une diffé- » rence extérieure enire le mâle et la temelle, dont … les auteurs ne parlent pas; en latin de nomencla- LE: ostralega ; et par un nom formé du grec, n mais qui ne Caraciérise point en particulier cet » oiseau, hæmalopus. 6. HISTOIRE NATURELLE les retraites les plus paisibles de la Nature: mais elle n’a pas fait à tous cette douce destinée; elle en a confiné quelques uns sur les rivages solitaires , sur la plage nue que les flots de la mer disputent à la terre, sur ces rochers contre lesquels ils viennent mugir et se briser , et sur les écueils isolés et battus de la vague.bruyante. Dans ces lieux déserts et formidables pour tous les autres êtres, quelques oiseaux , tels que l'huîtrier , savent trouver la subsistance, la sécurité, les plaisirs mêmes et l'amour. Celui-ci vit de vers marins, d’huîtres, de patelles et autres coquillages qu'il ra- masse dans les sables du rivage. Il se tient constamment sur les bancs, les récifs dé- couverts à basse mer , sur les grèves où il _ suit le reflux, et ne se retire que sur les falaises , sans s'éloigner jamais des terres ou des rochers. On a aussi donné à cet huîtrier, ou mangeur d’huîtres, le nom | ‘de pie de mer, non seulement à cause den son plumage noir et blanc, mais encore parce qu'il fait, comme la pie, un bruit ou cri continuel, sur-tout lorsqu'il est à en troupe. Ce cri, aigre et court, est. er re db. Es SE cs cd t # neo I UUAL EUR ER 7 répété sans cesse, en repos et en volant. Cet oiseau ne se voit que rarement sur la plupart de nos côtes : cependant on le comuoît. en Saintonge ét en Picardie; il pond même quelquefois sur les côtes de cette dernière province, où il arrive en troupes très-considérables par les vents d’est.et de nord-ouest. Ces oiseaux s’y reposent sur les sables du rivage, en at- tendant qu’un vent favorable leur per- mette de retourner à leur séjour ordinaire. On croit qu'ils viennentde la Grande-Bre- tagne , où ils sont en effet fort communs, particulièrement sur les côtes occidentales de cette île. Ils se sont aussi portés plus avant vers le nord ; car on les trouve eu Gotland , dans l’île d'Oéland, dans les îles du Danemarck , et jusqu’en Islande et en Norvége. D’un autre côté, M. Cook cn a vu sur les côtes de la terre de Feu et sur celles du détroit de Magellan ; ilen a retrouvé à la baie d'Usky, dans la nou- velle Zélande. Damopier les a reconnus sur les rivages de la nouvelle Hollande; ct Kæmpfer assure qu'ils sont aussi com- - muns au Japon qu'en Europe. Ainsi les- PF. Ex f - TU Bu | RER ORAN 8 HISTOIRE NATURELLE # pèce de lhuîtrier peuple touslés rivages de l’ancien continent, et l’on ne doit pas être étonné qu'il se retrouve dans'le nou- veau. Le P,Feuilléé la observé sur li'côte de la terré ferme d'Amérique: Wafer , au Darien ; Catesby ,'à la Caroline’et aux îlés Bahamas Ié Page du Pratzi ,;à la Loui- siane!': et cette espèce si répandue lest ‘sans variété ; elle est par-tout la mème, et parôît isolée et distinctement séparée de toutes les autres espèces *. Il n’en est point en effet parmi les oiseaux de rivage qui ait, avec la taille de l'hufîtiier et ses jambes courtes, un bec de la forme du sien , non plus que ses liabitudes ét ses mœurs. | * Cet oiseau est de la grandeur de la cor- neille, Son bec, long de quatre pouces, * On ne peut s'assurer que la pie de mer des îles Malouines de M. de Bougainville soit l’hui- trier, plutôt que quelque espèce de pluvier : car il dit que cet oiseau se nourrit de chev rettes ; qu la ur sifflement aisé à 1mtler, Ce qui indique un pluviers de plus, qu'ii a les pattes Elanches , ce qui ne convient pas à la vraie pie de mer ou à lhuftrier, qui les à rouges. b F7. i ee PU P'HUITRIER. © est rétréci et comme comprimé verticale- ment au-dessus des narines, et applati par les côtés, en manière de coin, jus- qu’au bout, dont la coupe quarrée forme un tranchant ; structure particulière qui rend ce bec tout-à-fait propre à détacher, soulever , arracher du rocher et des sables les huîtres et les autres coquillages dont l'huîtrier se nourrit. Il est du petit nombre des oiseaux qui n'ont que trois doigts. Ce seul rapport a sui aux méthodistes pour le placer, dans l’ordre de leurs nomenclatures, à côté de l’outarde. Ou voit combien il en est éloi- sné dans l’ordre de la Nature ; puisque non seulement il habite sur les rivages de la mer , mais -qu’il nage encore quel- quefois sur cet élément, quoique ses pieds soient presque absolument dénués de membranes. Il est vrai que , suivant M. Baillon , qui a observé l’huîtrier sur les côtes de Picardie , la manière dont il nage semble n'être que passive, comme s’il se laissoit aller à tous les mouvemens de Veau sans s’en donner aucun ; mais il n'en est pas moins certain qu'il ne craint 10 HISTOIRE NATURELLE point d'affronter les vagues, et qu’il peut se reposer sur l’eau et quitter la mer lors- qu'il lui plaît d’habiter la terre. | Son plumage blanc et noir, et son long bec, lui ont fait donner les noms égale- ment impropres de pie de mer et de bécasse de mer. Celui d’Auftrier lui convient, puis- qu'il exprime sa manière de vivre. Cates- by n’a trouvé dans son estomac que des : huîtres, et Willughby , des patelles en- core entières. Ce viscère est ample et mus- culeux , suivant Belon , qui dit aussi que la chair de l’huîtrier est noire et dure, avec un goût de sauvagine. Cependant, selon M. Baillon, cet oiseau est tou- jours gras en hiver, et la chair des jeunes est assez bonne à manger. Il a nourri un de ces hufîtriers pendant plus de deux mois : il le tenoit dans son Jardin , où il vivoit principalement de vers de terre, comme les courlis ; mais ilmangeoit aussi de la chair crue et du pain, dont il sem- bloit. s’accommoder fort bien. Il buvoit indifféremment de l’eau douce ou de l’eau | de mer, sans témoigner plus de goût pour l'une que pour l’autre : cependant, dans DE'L’'HUITRIER. 1E l'état denature, ces oiseaux ne fréquentent point les marais n1 l'embouchure des ri- vières , et ils restent constamment dans le voisinage et sur les eaux de la mer; mais c’est peut-être parce qu'ils ne trou- veroïent pas dans les eaux douces une nourriture aussi analogue à leur appétit que celle qu’ils se procurent dans les eaux salées. L'huîtrier ne fait point de nid : il dé- pose ses œufs, qui sont grisâtres et tachés de noir, sur le sable nud, hors de la portée des eaux , sans aucune préparation pré- liminaire ; seulement il semble choisir pour cela le haut des dunes et les endroits parsemés de débris de coquillages. Le nombre des œufs est ordinairement de quatre ou cinq, et le temps de l’incuba- tion est de vingt ou vingt-un jours : la femelle ne les couve point assidument : elle fait à cet égard ce que font presque tous les oiseaux des rivages de la mer, qui, laissant au soleil, pendant une par- tie du jour , le soin d’échauffer leurs œufs, les quittent pour l'ordinaire à neuf ou dix heures du matin, et ne s’en rap- 32 HISTOIRE NATURELLE prochent que vers les trois heures du soit ; à moins qu'il ne survienne de la pluie. Les petits, au sortir de l'œuf, sont cou- verts d’un duvet noirâtre : ils se traînent sur le sable dès le premier Jour ; ils com- mencent à courir peu de temps après, et se cachent alors si bien dans les touftes d’herbages , qu'il est diflicile de les trou- ver. L’'huîtrier a le bec et les pieds d’un beau rouge de corail. C’est d’après ce caractère que Belon l’a nommé /ærmatopus , en le prenant pour l’2imantopus de Pline; mais ces deux noms ne doivent être ni con- fondus , n1 appliqués au même oiseau. Hœmatopus signihe &@ jambes rouges, et peut convenir à l'huîtrier ; mais ce nom n’est point de Pline, quoique Daléchamp l'ait lu ainsi; et l’£ëmantopus, oiseau à jambes hautes, gréles et flexibles, sui- vant la force du terme ( Zoripes }, n’est point lhuitrier, mais bien plutôt Pé- chasse. Un mot de Pline, dans le même passage, eût pu sufhüre à Belon pour reve- nir de son erreur : Prœcipuè ei pabulum muscæ. L'himantopus qui se nourrit de dt. dé à DE L'HUITRIULER. 13 , mouches, n’est pas l’huîtrier qui ne vit que de coquillages. Willugbby , en nous avertissant de ne point confondre cet oiseau , sous le nom _ d’æmantopus, avecl'.imnantopus à jambes longues et molles, semble nous indiquer encore une méprise dans Belon , qui, en décrivant l’huîtrier, lui attribue cette mollesse de pieds , assez incompatible avec son genre de vie, qui le conduit sans cesse sur les galets, ou le confine sur les rochers ; d’ailleurs on sait que les pieds et les doigts de cet oiseau sont revétus d'une écaiile raboteuse , ferme et dure. Il est donc plus que probable qu'ici, comme ailleurs, la confusion des noms a produit celle des objets : le nom d’.iman- opus doit donc être réservé pour l’é- chasse , à qui seul il convient; et celui d’Aæmatopus, également applicable à tant d'oiseaux qui ont les pieds rouges , ne - suffit pas pour désigner l’huitrier, et doit être retranché de sa nomenclature. Des trois doigts de l’huîtrier, deux, l'extérieur et celui du milieu , sont unis jusqu'à la première articulation par une 2 Le L. y! 14 HISTOIRE NATUR ELLE portion de membrane, et tous sont en< tourés d’un bord membraneux. Il a les paupières rouges comme le bec, et l'iris, est d’un jaune doré ; au - dessous de chaque œil est une petite tache blanche. La tête, le cou, les épaules, sont noirs, ainsi que le manteau des ailes ; mais ce noir est plus foncé dans le mâle que dans la femelle. Il y a un collier blanc sous la gorge. Tout le dessous du corps, depuis la. poitrine, est blanc , ainsi que le bas du dos, et la moitié de la queue, dont la pointe est noire; une bande blanche , for- mée par les grandes couvertures, coupe dans le noir brun de l’aile. Ce sont appa- remment ces couleurs qui lui ont fait don- ner le nom de la pie, quoiqu'il en diffère à tous autres égards, et sur - tout par le peu de longueur de sa queue, qui n’a que: quatre pouces , et que l’aile pliée recouvre aux trois quarts ; les pieds, avec la petite partie de la jambe dénuée de plumes au- dessus du genou, n’ont guère plus de deux pouces de hauteur, quoique la lon- gueur de l'oiseau soit d'environ seize pouces. v@ | 1 - LE COURE-VITE *. Lee s deux oiseaux représentés dans les n°795 et 892 de nos planches enluminées sont d'un genre nouveau, et il faut leur donner un nom particulier. Ils ressemblent au pluvier par les pieds, qui n’ont que trois doigts ; mais ils en diffèrent par la forme du bec, qui est courbé, au lieu que les pluviers l’ont droit et renflé vers le bout. Le premier de ces oiseaux, repré- . senté n° 795 , a été tué en France, où il 4 4 4 étoit apparemment égaré , puisque l’on n’en a point vu d'autre ; la rapidité avec laquelle il couroit sur le rivage , le fit appeler coure-vite. Depuis , nous avons recu de la côte de Coromandel un oiseau tout pareil pour la forme , et qui ne dif- -fère de celui-ci que par les couleurs , en “sorte qu’on peut le regarder comme une . variété de la même espèce, ou tout au F ï f. moins comme une espèce très-voisine. Ils * Voyez les planches euluminées , n°5 7095 et 692: 16 HISTOIRE NATURELLE. . ont tous deux les jambes plus hautes les pluviers ; ils sont aussi grands , mais moins gros; ils ont les doigts des pieds . très - courts, particulièrement les deux» latéraux. Le premier a le plumage d’un gris lavé de brun roux ; il y a sur l’œil un trait plus clair et presque blanc, qui s'é- tend en arrière, et l’on voit au - dessous un trait noir qui part de l’angle extérieur de l'œil ; le haut de la tête est roux; les penunes de l'aile sont noires, et chaque plume de la queue, excepté les deux du milieu, porte une tache noire avec une autre tache blanche vers la pointe. Le second *, qui est venu de Coroman- del, est un peu moins grand que le pre- mier. Il a le devant du cou et la poitrine d’un beau roux marron , qui se perd dans du noir sur le ventre; les pennes de l’aile sont noires ; le manteau est gris ; le bas du ventre est blanc ; la tête est coiffée de roux , à peu près comme celle du pre= mier ; tous deux ont le bec noir, et 169 pieds blanc Jaunâtre. | “4 dy # Voyez les planches enluminées, n° 892. x AD gr ns A ON Er AN CN M A enr 25 sur Mas si té be F= = \ : "4 un 3 ë + ‘ “ "es “ æ ; à : Le » Je « : ; $ l î « = de . c s Là 4 . { î 7. ” LE A M Pr #1 d #>" ü a. Pris be A - ses D AURA * 1 VS ñ à Pl: 4 : Rue 0 LE TOURNE PIERRE. J {oauqut | e + * n : LE TOURNE-PIERRE* N ous adoptons le nom de fourne-pierre, donné par Catesby à cet oiseau , qui a l'habitude singulière de retourner les pierres au bord de l’eau , pour trouver dessous les vers et les insectes dont il fait sa nourriture , tandis que tous les autres oiseaux de rivage se contentent de la chercher’sur les sables ou dans la vase. « Étant en mer , dit Catesby , à quarante « lieues de la Floride , sous la latitude « de trente-un degrés , un oiseau vola sur « notre vaisseau €t y fut pris. Il étoit fort _« adroit à tourner les pierres qui se ren- À controient devant lui: danscetteaction, il se servoit seulement de la partie supé- neure de son bec, tournant avec beau- « coup d'adresse et fort vite des pierres « de trois livres de pesanteur ». Cela sup- pose une force et une dextérité particu- 4 A * Voyez les planches euluminées, n° 856, sous le nom de coulon-chaud. | 9 | ’ 18 HISTOIRE NATURELLE lières dans un oiseau qui est à peine aussi gros que la maubèche: mais son bee est d’une substance plus dure et plus. cornée que celle du bec grèle et mou de tous ces petits oiseaux derivage, quil’ont conformé comme celui de la bécasse ; aussi létourne-pierre forme-t-il, au milie de leur genre nombreux , une petite fa- mille isolée. Son bec dur et assez épais à la racine va en diminuant et finit en pointe aiguë ; il est un peu comprimé dans sa partie supérieure , et paroît se relever en haut par une légère courbure; il est noir et long d’un pouce. Les pieds, dénués de membranes , sont assez courts et de couleur orangée. Le plumage du tourne-pierre ressemble à celui du pluvier à collier, par le blanc et le noir qui le coupent , sans cepen- dant y tracer distinctement un collier, et en se mélant à du roux sur le dos; cette ressemblance dans le plûmage est apparemment la cause de la méprise de MM. Brown, Willughby et Ray , qui ont donné à cet oiseau le nom de morinellus, quoiqu'il soit d’un genre tout différent VA ?, DU TOURNE-PIERRE. 39 des pluviers, ayant un quatrième doigt, et tout une autre forme de bec. L'espèce du tourne-pierre est commune aux deux continens. On la connoît sur les côtes occidentales de l'Angleterre, où ces oiseaux vont ordinairement en petites compagnies de trois ou quatre. On. les connoît également dans la partie mari- time de la province de Norfolk, et dans quelques îles de Gottlande ; et nous avons lieu de croire que c’est ce même oiseau auquel, sur nos côtes de Picardie, on donne le nom de bune. Nous avons recu du cap de Bonne - Espérance un de ces oiseaux , qui étoit de même taille, et, à quelques légères différences près , de même couleur que ceux d'Europe. M. Ca- tesby en a vu près des côtes de la Floride ; et nous ne pouvons deviner pourquoi M. Brisson donne ce tourne-pierre d’'Amé- rique comme différent de celui d'Angle£ terre , puisque Catesby dit formellement qu'il le reconnut pour le même : d’ailleurs nous avons aussi recu de Cayenne ce même oiseau avec la seule différence qu'il est de taille un peu plus forte ; ct 20 HISTOIRE NATURELLE, 4 M. Edwards fait mention d'un autre qui lui avoit été envoyé des terres voisines … de la baie d'Hudson. Ainsi cette espèce, - quoique foible et peu nombreuse en. individus , s’est , comme plusieurs autres espèces d'oiseaux aquatiques , répandue du nord au midi dans les deux continens, en suivant les rivages de la mer, qui leur fournit par-tout la subsistance. Le tourne-pierre gris de Cayenne nous paroît étre une variété dans cette espèce, à laquelle nous rapporterons les deux individus représentés dansnos planches enluminées', n°s 340 et 857, sous Les déno- minations de coulon-chaud de Cayenne, et de coulon-chaud gris de Cayenne; car nous ne voyons entre eux aucune diffé- rence assez marquée pour avoir droit de les séparer ; nous étions même portés à les regarder comme les femelles de la première espèce , dans laquelle le mâle doit avoir les couleurs plus fortes : mais nous suspendons sur cela notre Jugement, parce que Willughby assure qu’il n'y a point de différence dans le plumage entre le mâle et la femelle des tourne-pierrés qu'il a décrits, ,. = = Pr “à F ED RARES TS 4, Pom DC * k 5 È : ee É e : / 5 SE A Ne PNR SA RE # EYE « e 8 TES y sd si Ps Tom .16.. 23. Lay. 2%, LE MERLE D EAU. V4 Dauquer er. LE MERLE D’EAU*. = + 0 Lz merle d’eau n’est point un merle, quoiqu'il en porte le nom : c’est un oiseau aquatique , qui fréquente les lacs et les ruisseaux des hautes montagnes, comme le merle en fréquente les bois et les Vallous; il lui ressemble aussi par la taille, qui est seulement un peu plus courte , et par la couleur presque noire de son plumage ; enfin il porte un plastron blanc ‘ comme certaines espèces de merles: mais il ést aussi silencieux. que le vrai merle est Jaseur ; il n’en a pas les mouvermens vifs et brusques ; il ne prend aucune de . ses attitudes , et ne va ni par bonds n& par sauts ; il marche légèrement d’un pas * Voyez les planches enluminées, n° 940. Les Italiens, aux environs de Belinzone, l’ap- pellent Zerlichirollo ; et ceux du lac Majeur , folur d'agua, suivant Gesner; les Allemands, 6ach- amsel, wasser-amsel ; les Suisses, wasser-trosile; les Anglois, water-ouzel. | nt L aw/1 « de »2 HISTOIRE NATURELLE compté , et court au bord des fontaines. et des ruisseaux, qu'il ne quitte jamais , LL fréquentant'de Dréle nee les eaux vives. et courantes , dont la chüte est rapide LÉ le lit entre-coupé de pierres et de mor- ceaux de roche. On le rencontre au voi- sinage des torrens ct des cascades , et particulièrement sur les eaux limpides qui coulent sur le gravier. Ses habitudes naturelles sont très-sin- gulières : les oiscaux d’eau qui ont les pieds palmés , nagent sur l’eau ou se plongent; ceux de rivage, montés sur de hautes jambes nues, y entrent assez avant sans que leur corps y trempe: le merle d’eau y entre tout entier en mar- chant et en suivant la pente du terrain ; on le voit se submerger peu-à-peu , d’a- bord jusqu’au cou, et ensuite par-dessus la tête, qu'il ne tient pas plus élevée que s’il étoit dans l’air ; il continue de mar- cher sous l’eau , descend jusqu’au fond et s'y promène , comme sur le rivage sec. C’est à M. Hébert que nous devons la première connoissance de cette habi- tude extraordinaire , et que je ne sache DÜ MERLE D'EAU. 23 pas appartenir à aucun autre oiseau. Voici les observations qu'il a eu la bonté de me communiquer. « J’étois embusqué sur les bords du « lac de Nantua, dans une cabane de « neige et de branches de sapin , où « J'attendois patiemment qu'un bateau « qui ramoit sur le lac , fît approcher du « bord quelques canards sauvages : j’ob- « servois sans être apperçcu. Il y avoit « devant ma cabane une petite anse, « dont le fond en pente douce pouvoit « avoir deux ou trois pieds de profondeur « dans son milieu. Un merle d’eau s’y « arrêta , et y resta plus d’une heure que « J'eus le temps de l’observer tout à mon «aise; je le voyois entrer dans l’eau, s’y « enfoncer , reparoître à l’autre extrémité « de l’anse , revenir sur ses pas; il en « parcouroit tout le fond et ne paroissoit « pas avoir changé d’élément; en entrant « dans l’eau il n’hésitoit ni ne se détour- « noit : je remarquai seulement à plu- « sieurs reprises , que toutes les fois qu’il © y entroit plus haut que les genoux, il & déployoit ses ailes et les laissoit pendre Re 24 HISTOIRE NATURELLE _« Jusqu'à terre. Je remarquai encore ques « tant que je pouvois l'appercevoir au « fond de l’eau , il me paroissoit col « revêtu d’une couche d’air qui le ren « doit brillant ; semblable à certains in- « sectes du genre des scarabées , qui sont « toujours dans l’eau au milieu d’une « bulle d’air : peut-être n’abaissoit-il ses « ailes en entrant dans l’eau que pour « se ménager cet air ; mais il est É «qu'il n'y no Jamais , et il les « agitoit alors comme s’il eût tremblé. Ces « habitudes singulières du merle d’eau « étoient inconnues à tous les chasseurs « à quiJ'en ai parlé; et sans le hasard « de la cabane de neige, Je les aurois « peut-être aussi toujours ignorées: mais «je puis assurer que l'oiseau venoit « presque à mes pieds, et pour l’observer « long-temps je ne le tuai point.» Il y a peu de faits plus curieux dans l'histoire des oiseaux , que celui que nous offre cette observation. Linnæus. avoit bien dit qu'on voit le merle d’eau des- cendre et remonter les courans avec faci- lité; et Wiliughby , que quoique cet ’ DU MERLE D'EAU. 25 oiseau ne soit pas palmipède, il ne laisse pas de se plonger: mais l'un et l’autre paroissent avoir ignoré la manière dont il se submerge pour marcher au fond de ee l’eau. On concoit que pour cet exercice il faut au merle d’eau , des fonds de gravier et des eaux claires, et qu’il ne pourroit s’accommoder d’une eau trou- ble , ni d’un fond de vase : aussi ne le trouve-t-on que dans les pays de mon- tagnes , aux sources des rivières et des ruisseaux qui tombent des rochers, eomme en Angleterre dans le canton de Westmorland et dans les autres terres élevées , en France dans les montagnes du Bugey et des Vosges , et en Suisse. IL se pose volontiers sur Îles pierres entre lesquelles serpententles ruisseaux ; il vole fort vîte en droite ligne , en rasant de près la surface de l'eau comme le martin-pe- cheur. En’ volant il jette un petit cri, sur-tout dans la saison de l’amour , au printemps : on le voit alors avec sa fe- moelle ; mais dans tout autre temps on le rencontre seul. La femelle pond quatre eu cinq œufs , cache son nid avec bcau- Ge 9 NO dt at 2 id 26 HISTOIRE NATURELLE coup de soin , et le place souvent prés des roues des usines construites sur les ruisseaux. Là saison où M. Hébert a Eire: le * merle d’eau , prouve qu'il n’est point oiseau de passage ; il reste tout l'hiver dans nos montagnes ; il ne craint pas même la rigueur de l'hiver en Suède, où 1l cherche de même les chütes d’eau et les fontaines rapides qui ne sont point prises de glace. Cet oiseau a les ongles forts et courhés ; avec lesquels il se prend au gravier en . marchant au fond de l’eau : du reste, il a le pied conformé comme le merle de terre et des autres oiseaux de ce genre; il a, comme eux, le doigt et l’ongle posté- rieurs plus forts que ceux de devant, et ces doigts sont bien séparés et n’ont point de membrane intermédiaire |, quoique Willughby ait cru y en appércevoir; la jambe est garnie de plumes jusque sur le genou ; le bec est court et grêle, l’une et l’autre mandibule allant également en s’efflant et se cintrant légèrement vers la pointe ; sur quoi nous ne pouvons nous . DU MERLE D'EAU. 27 empêcher de remarquer que par ce ca- ractère M. Brisson n’auroit pas dû le placer dans le genre du bécasseau, dont un des caractères est d’avoir le bout du bec oblus, Avec le bec et les pieds courts, et un cou raccourci , on peut imaginer qu'il étoit nécessaire que le merle d’eau apprit à marcher sous l’eau , pour satisfaire son appétit naturel et prendre les petits pois- sons et les insectes aquatiques dont il se- nourrit ; son plumage épais et fourni de duvet paroît impénétrable à l’eau, ce qui lui donne encore la facilité d'y sé- journer ; ses yeux sont grands, d’un beau brun , avec les paupières blanches, et il doit les tenir ouverts dans l’eau pour distinguer sa proie. Un beau plastron blanc lui couvre la gorge et la poitrine ; la tète et le dessus du cou jusque sur les épaules et le bord du plastron blanc ,; sont d’un cendré roussâtre ou marron ; le dos, le ventre, et les ailes ; qui ne dépassent pas la queue , sont d’un cendré noirâtre et ar- doisé; la queue est fort courte et n’a rien de remarquable, LA GRIVE D’EAU" Es WARDSs appelle ina tacheté l'oiseau que, d’après M. Brisson, nous nommons ici g7ive d’eau. Il a effectivement le plu- mage grivelé et la taille de la petite grive, : etil a les pieds faits commele merle d’eau, c'est-à-dire , les ongles assez grands et crochus, et celui de derrière plus que ceux de devant : mais son bec est conformé comme celui du cincle, des maubèches et des autres petits oiseaux de rivage; et de plus, le bas de la jambe est nud. Ainsi cet oiseau n’est point une grive, ni même une espèce voisine de leur genre, puis- qu'il n’en tient qu’une ressemblance de plumage, et que le reste des traits de sa conformation l’apparente aux familles des oiseaux d’eau. Au reste, cette espèce paroît être étrangère, et n’a que peu de rapports avec nos oiseaux d'Europe : elle se trouve en Pensilvanie. Cependant M. Edwards présume qu’elle est commune aux deux 'continens , ayant recu, dit-il, HISTOIRE NATURELLE. 29 uu de ces oiseaux de la province d’Essex, où , à la vérité , 1l paroissoit égaré, et le il qu'on y ait vu. | Le bec de la grive d’eau est long de onze à douze lignes ; il est de couleur de chair à sa base, et brun vers la pointe; la partie supérieure estmarquée , de chaque côté, d’une cannelure qui s'étend depuis les narines jusqu’à l'extrémité du bec. Le dessus du corps, sur un fond brun oli- vâtre , est grivelé de taches noirâtres, comme le dessous l’est aussi sur un fond plus clair et blanchâtre. Il y a une barre blanche au-dessus de chaque œil, et les pennes de laile sont noirâtres. Une petite membrane joint vers la racine le doigt extérieur à celui du milieu. LE CANUT. Ir ÿ a apparemment dans les provinces du Nord quelque anecdote surcet oiseau, qui lui aura fait donner le nom d'oiseau du roi Canut, puisque Edwards le nomme ainsi *. Il ressembleroit beaucoup au van- neau gris s’il étoit aussi grand, et si son bec n’étoit autrement conformé : ce bec est assez gros à sa base, et va en diminuant jusqu'à l'extrémité , qui n’est pas fort pointue, mais qui cependant n’a pas de renflement comme le bec du vanneau, Tout le dessus du corps est cendré et ondé ; les pointes blanches des grandes couver- tures tracent une ligne sur l'aile; des croissaus noiratres sur un fond gris blanc marquent les plumes du croupion ; tout le dessous du corps est blanc, marqueté de taches grises sur la gorge et la poi- * Canuti regis avis, the knot. Suivant Wil- lughby, c’est parce que-le roi Canut aimoit singu= lièrement la viunde de ces oiseaux. | HISTOIRE NATURELLE. 3x trine ; le bas de la jambe est nud; la queue ne dépasse pas les ailes pliées , et le canut est certainement de la grande tribu des petits oiseaux de rivage. Wil- Jlughby dit qu'il vient de ces oiseaux canuts dans la province de Lincoln , au commencement de l'hiver ; qu'ils y sé- Journent deux ou trois mois , allant en troupes , se tenant sur les bords de la mer, et qu'ensuite ils disparoissent. Il ajoute en avoir vu de même en Lancas- ter-shire , près de Liverpool. Edwards à trouvé celui qu'il a décrit, au marché de Londres ; pendant le grand hiver de 1740; ce qui semble indiquer que ces oiseaux ne viennent au sud de la Grande -Bre- tagne que dans les hivers les plus rudes: mais il faut qu'ils soient plus communs dans le nord de cette île, puisque Wil- lughby parle de la manière de Les engrais- ser, en les nourrissant de pain trempé de lait, et du goût exquis que cette nourri- ture leur donne. Il ajoute qu’on distin- gueroit au premier coup d'œil cet o1i- seau des maubèches et guignettes (/ri79æ) par la barre blanche de l'aile, quand il L 2 A L _ 1n ! 1 Ü ANA TFERA : 32 HISTOIRE NATURELLE. n'y auroit pas d’autres différences. Il ob- serve encore que le bec est d’une subs- tance plus forte que ne l’est généralement: celle du bec de tous les oiseaux qui l'ont conformé comme celui de la bécasse. Une notice donnée par Linnæus, et que M. Brisson rapporte à cette espèce , marqueroit qu'elle se trouve en Suède, outre que son nom indique assez qu’elle appartient aux provinces du Nord. Cepen- dant il y a ici une petite difficulté : le ca- nut appelé #zot en Angleterre a tous les doigts séparés et sans membrane , sui- vant Willughby ; l'oiseau canut de Lin- nœæus a le doigt extérieur uni par la pre- auière articulation à celui du milieu. En supposant donc que ces deux observa- teurs aient également bien vu, 1l faut ou admettre ici deux espèces, ou ne point rapporter au #zot de Willughby le #irga de Linnæus. \ D” LES RALES. Css oiseaux forment nne assez grande famille, et leurs habitudes sont difé- rentes de celles des autres oiseaux de rivage, qui se tiennent sur les sables et les grèves : les râles n’habitent,au contraire, que les bords fangeux des étangs et des rivières , et sur-tout les terrains couverts de glaïeuls et autres grandes herbes de marais. Cette mauière de vivre est habi- tuelle et commune à toutes les espèces de râles d’eau ; le seul rale de terre habite dans les prairies , et c’est du cri désa- gréable ou plutôt du râlement de ce der- nier oiseau , que s’est formé dans notre langue le nom de réle pour l'espèce en- tière : mais tous se ressembhient en ce qu'ils ont le corps grèle et comme applati par les flancs , la queue très - courte et presque nulle , la tête petite, le bec assez semblable pour la forme à celui des galli- macés , mais seulement bien plus alongé, \ | M LS RE NEES Pr. RO 34 HISTOIRE NATURELLE quoique moins épais ; tous ont aussi une portion de la jambe au-dessus du genou dénuée de plumes , avec les trois doigts antérieurs lisses, sans membranes et très- longs, Ils ne tente leurs pieds sous le ventre en volant, comme font les autres oiseaux ; ils les 1e Ent peudans. Leurs ailes sont petites ét fort concaves , et leur vol est court, Ces derniers caractères sont communs aux râles et aux poules d’eau, avec lesquelles ils ont en général beau- coup de ressemblances. w MA: ŒLILI Zont.10 , LE RALE DE TERRE ou DE GENET . DES RALES: Ve RE LE RALE DE TERRE ou DE GENÉÈT, RÉ RENT ROT DÉS CAILLES #, Première espèce. las les prairies humides , dès que l'herbe est baute , et jusqu’au temps de la récolte , il sort des endroits les plus touf- fus de l'herbage, une voix rauque, ow plutôt un cri bref , aigre et sec, crèf: crék crëk, assez semblable au bruit que l’on exciteroit en passant et appuyant forte- ment le doigt sur les dents d’un gros peigne ; et lorsqu'on s’avance vers cette voix, elle s'éloigne , et on l’entend venir * Voyez les planches enluminées, n° 750. - En latin moderve, rallus; en i'alien, re de * auaglie ; en anglois, daker-hen, land-rail; en aliemand, schryck , schrye , wachtel-kœnig. TA CRT 36 HISTOIRE NATURELLE de cinquante pas plus loin: c’est le râle de terre qui jette ce cri, qu'on prendroit pour lé croassement d’un reptile. Cet oi- seau fuit rarement au vol ; mais presque toujours en marchant aveo vitesse, et passant à travers le plus touffu des herbes, il y laisse une trace remarquable. On com- mentce à l'entendre vers le 10 ou le 12 de mai , dans le mème temps que les caiiles, qu’il semble accompagner en tout temps Û L car il arrive et repart avec elles. Cette cir- constance, Jointe à ce que le râle et les cailles habitent également les prairies, qu'il y vit seul, et qu'il est beaucoup moins commun et un peu plus gros que la caille, a fait imaginer qu’il se mettoit à la tête de leurs bandes , comme chef ou conducteur de leur voyage; et c’est ce qui lui a fait donner le nom de 7oi des cailles : mais il diffère de ces oiseaux par les caractères de conformation, qui tous lui sont communs avec les autres râles, et en général avec les oiseaux de marais, comme Aristote l’a fort bien remarqué. La plus grande ressemblance que ce râle ait avec la caille est dans le plumage, r DeG, RARES. 37 qui néanmoins est plus brun et plus doré, Le fauve domine sur ies ailes ; le noirâtre et.le roussatre forment les couleurs du corps ; elles sont tracées sur les flancs par lignes transversales, et toutes sont plus pâles dans la femelle, qui est aussi un peu moins grosse que le mâle. C’est encore par l'extension gratuite d’une analogie mal fondée que l’on a supposé au râle de terre une fécondité aussi grande que celle de la caille : des observations’multipliées nous ont appris qu'il ne pond guère que huit à dix œufs , et non pas dix-huit et vingt. En effet, avec une multiplication aussi grande que celle qu’on lui suppose , son espèce seroit nécessairement plus nombreuse qu’elle ne l’est en individus , d'autant que son nid , fourré dans l'épaisseur des herbes, est difficile à trouver : ce nid, fait négli- gemment avec un peu de mousse ou d'herbe sèche , est ordinairement placé dans une petite fosse du gazon. Les œufs, plus gros que ceux de la caille, sont ta- chetés de marques rougeätres plus larges. Les petits courent dès qu'ils sont éclos, Oiseaux, X VI: C” Ste a 33 HISTOIRE NATURELLE. en suivant leur mère; et ils ne quittent la prairie que quand ils sont forcés de fuir devant la faux qui rase leur donti- cile. Les couvées tardives sont enlevées par la main du faucheur; tous les autres se jettent alors dans les champs de blé noir , dans les avoines , et dans les friches couvertes de genêts, où on les trouve en été, ce qui les a faitnommer réles de genét; quelques uns retournent dans les prés en regain à la fin de cette même saison. Lorsque le chien rencontre un râle, on peut le reconnoître à la vivacité de sa quête, au nombre de faux arrêts, à l’o- piniâtreté avec laquelle l'oiseau tient et se laisse quelquefois serrer de si près, qu'il se fait prendre : souvent il s’arrête dans sa fuite, et se blotit, de sorte que le chien , emporté par son ardeur, passe par-dessus et perd sa trace; le râle, dit- on, profite de cet instant d’erreur de l'ennemi pour revenir sur sa voie et don- ner le change. Il ne part qu’à la dernière extrémité , et s'élève assez haut avant de filer ; il vole pesamment , et ne va Jamais join. On en voit ordinairement la remise: DES RALES: 39 mais c'est inutilement qu’on va la cher- cher ; car l'oiseau a déja piété plus de _ cent pas lorsque le chasseur y arrive. Il sait donc suppléer par la rapidité de sa marche * à la lenteur de son vol: aussi se sert-il beaucoup plus de ses pieds que de ses ailes; et toujours couvert sous les herbes , il exécute à la course tous ses petits voyages et ses croisières multipliées dans les prés et les champs. Mais quand arrive le temps du grand voyage, il trouve , comme la caille, des forces in- connues pour fournir au mouvement de sa longue traversée : il prend son essor la nuit ; et secondé d’un vent propice, il se porte dans nos provinces méridionales, d’où il tente le passage de la Méditerra- née. Plusieurs périssent sans doute dans cette première traite ainsi que dans la seconde pour le retour , où l’on a remar- qué que ces oiseaux sont moins nom- . breux qu’à leur départ. * Albin tombe ici dans une étrange méprise. « On appelle, dit-1l , cet oiseau rallus ou grains, « parce qu’il ne s- doucement, » hs OPUS FANS 49 HISTOIRE NATURELLE Au reste, on ne voit le râle de terre dans nos provinces méridionales que dans ce temps de passage. Il ne niche pas en Provence ; et quand Belon dit qu’il est rare en Candie ; qisoiqu'il soit aussi com- mun en Grèce qu'en Italie, cela indique seulement que cet oiseau ne s’y trouve guère que dans les saisons de ses passages au printemps et en automne. Du reste, les voyages du râle s'étendent plus loin vers le Nord que vers le Midi; et malgré la pesanteur de son vol, il parvient en Pologne, en Suède, en Danemarck, et jus- qu’en Norvéze. Il est rare en Angleterré, où l’on prétend qu'il ne se trouve que dans quelques cantons * , quoiqu'il soit assez commun en frlande. Ses migrations semblent suivre en Asie le même ordre qu'en Europe. Au Kamtschatka comme en Europe , le mois de mai est également celui de l’arrivée de ces oiseaux ; ce mois * Turner dit n'en avoir pas vu ni entendu ail- leurs qu'en Northumbrie ; mais le docteur Tancrède Robinson assure quon en trouve aussi dans Ja partie septentrionale de la Grande-Bretagne, et Sibbalil le compte parmi les oiseaux d'Ecosse, x DES RALES. 4 s'appelle fava foatchk, mois des râles. Tava est le nom de l’oiseau. Les circonstances qui pressent le râle d'aller nicher dans les terres du Nord, sont autant la nécessité des subsistances que l’agrément des lieux frais qu'il cherche de préférence ; car, quoiqu'il mange des graines, sur-tout celles de genêt, de trèfle, de grémil, et qu'il s’engraisse en cage de imillet et de grains, cependant les insectes, les limacons, les vermisseaux, sont non seulement ses alimens de choix, mais une nourriture de nécessité pour ses pe- tits, et il ne peut la trouver en abon- dance que dans les lieux ombragés et les terres humides. Cependant , lorsqu'il est adulte |, tout aliment paroît lui profiter également ; car il a beaucoup de graisse, et sa chair estexquise. On luitend,comme à la caille, un filet, où on lPattire par J'imitation de son cri, crék crék crék, en frottant rudement une lame de cou- teau sur un os dentelé. La plupart des nos qui ont été donnés au râle dans les diverses langues ; ont été formés des sons imitatifs de ce cri SIDQU- 42 HISTOIRE NATURELLE 1 lier *, et c’est à cette ressemblance que Turner et quelques autres naturalistes ont cru le reconnoître dans le crex des anciens. Mais, quoique ce nom de crex convienne parfaitement au râle, comme son imitatif de son cri, il paroît que les anciens l’ont appliqué à d’autres oiseaux. Philé donne au crex une épithète qui dé- signe que son vol est pesant et difficile ; ce qui convient en effet à notre râle, Aristo- phane le fait venir de Libye. Aristote dit qu'il est querelleur ; ce qui pourroïit en- core lui avoir été attribué par analogie avec la caille : mais il ajoute que le crex cherche à détruire la nichée du merle ; ce qui ne convient plus au râle, qui n’a rien de commun avec les oiseaux des forêts. Le crex d'Hérodote est encore moins un râle, puisqu'il le compare en grandeur à l’ibis, qui est dix fois plus grand. Au reste, l’avocette et la sarcelle ont quel- quefois un cri de crex crex ; et l’oiseau à qui Belon entendit répéter ce cri au bord * Schryk, schaerck, korn kaaerr, corn-crek ; er notre mot même de râle, à ñ n + DER AA LUE 6. 43 du Nil, est, suivant sa notice, une es- pèce de barge. Ainsi le son que représente le mot crex, appartenant à plusieurs es- pèces différentes, ne suffit pas pour dési- guer le râle, ni aucun de ces différens oiseaux en particulier. : . 44 HISTOIRE NATURELLE “à .® : un if GS |: LE RAL ED ED Seconde espèce. LL râle d'eau court le long des eaux stagnantes aussi vite que le râle de terre dans les champs; il se tient de même tou- jours caché dans les grandes herbes et les jones : il n’en sort que pour traverser les eaux à la nage etméme à la course; car on le voit souvent courir légèrement sur les larges fenilles du nénuphar, quicouvrent | les eaux dormantes. Il se fait de petites : é Voyez les planches enluminées, n° 740. En anglois, water-rail , et par quelques uus, bilcok et brook-ouzell ; en allemand , schwartz wasser heunle aesch-heunlin ; Gesner lui donne quelque part le nom de samethounle (poule d’eau de soie), à cause de sou plumage doux et moelleux comme la soie; à Venise on l’appelle forzane ou porzana , UOM qui se donne également aux poules d’eau. Tom 28. - | D / SLag 44 LE RALE D'EAU. à DaugetS. Le. ET TE = MS CNRS NS pds DÆS RALES. 49 . routes à travers les grandes herbes ; on y tend des lacets , et on le prend d'autant ‘plus aisément, qu'il revient constamment à son gîte, et par le même chemin. Au- trefois on en faisoit le vol à l’épervier ou au faucon ; et dans cette petite chasse, le plus difficile étoit de faire partir l’oi- seau de son fort : il s’y tient avec autant d’opimâtreté que le râle de terre dans le sien ; il donne la même peine au chasseur, la même impatience au chien, devant lequel il fuit avec ruse, et ne prend son vol que le plus tard qu'il peut. Il est de la grosseur à peu près du râle de terre; mais il a le bec plus long , rougeûtre près de la tête. Il a les pieds d’un rouge obs- cur : Ray dit que quelques individus les ont Jaunes , et que cette différence vient peut-être de celle du sexe. Le ventre et les flancs sont rayés transversalement de bandelettes blanchâtres , sur un fond noi- râtre ; disposition de couleurs commune à tous les râles. La gorge , la poitrine, l'estomac, sont, dans celui-ci, d’un beau gris ardoisé ; le manteau est d’un roux brun olivâtre. | pe } — 46 HISTOIRE NATURELLE On voit des râles d’eau autour des - sources chaudes pendant la plus grande partie de l'hiver ; cependant ils ont, comme les râles de terre, un temps de migration marqué. Il en passe à Malte au printemps et en automne. M. le vicomte de Querhoent en a vu à cinquante lieues des côtes de Portugal, le 17 avril; ces râles d’eau étoient si fatigués, qu'ils se \ laissoient prendre à la main. M. Gmelin en a trouvé dans les terres arrosées par le Don. Belon les appelle réles noirs, et dit que ce sont oiseaux connus en foules con- trées, dont l'espèce est plus nombreuse que celle du râle de terre, qu’il nomme räle rouge. Au reste, la chair du râle d’eau est moins délicate que celle du râle de terre ; elle a même un goût de marécage , à peu près pareil à celui de la poule d’eau. a réf L DNS NAS | + LA MAROUETTE *. Troisième espèce. L à marouette est un petit râle d’eau qui n’est pas plus gros qu’une alouette. Tout le fond de son plumage est d’un brun oli- vâtre, tacheté et nué de blanchâtre, dont le lustre , sur cette teinte sombre, le fait paroître comme émaillé ; et c’est ce qui l’a fait appeler réle perlé. Frisch l’a nommé poule d'eau perlée : dénomination im- propre ; car la marouette n’est point une poule d’eau , mais un râle. Elle paroît dans la même saison que le grand râle d’eau ; elle se tient sur les étangs maré- * Voyez les planches enluminées , n° 997. On l'appelle girardine en Picardie, et dans le Milanois, girardina ; en quelques endroits de la France, cocouan , suivant M. Brisson; dans le Bolonoïs, porzana ; en Alsace, winkernell, selon Gesner. —— 48 HISTOIRE NATURELLE 1 CEE 0 cageux ; elle se cache et niche dans les roseaux. Son nid , en forme de gondole, est composé de jonc, qu’elle sait entrela- cer, et, pour ainsi dire , amarrer par un des bouts à une tige de roseau, de ma- nière que le petit bateau ou berceau flot- tant peut s'élever et s’abaisser avec l’eau sans en être emporté. La ponte est de sept ou huit œufs. Les petits, en naissant, sont tout noirs. Leur éducation est courte ; car, dès qu'ils sont éclos, ils courent, nagent , plongent, et bientôt se séparent ; chacun va vivre seul ; aucun ne se re- cherche , et cet instinct solitaire et sau- vage prévaut même dans le temps des amours ; car, à l'exception des instans de l'approche nécessaire , le mâle se tient écarté de sa femelle, sans prendre auprès d’elle aucun des tendres soins des oiseaux amoureux, sans l’amuser ni l’égayer par le chant, sans ressentir ni goûter ces doux plaisirs quiretracent et rappellent ceux de la jouissance : tristes êtres qui ne savent pas respirer près de l’objet aimé ; amours encore plus tristes , puisqu'elles n'ont pour but qu'une insipide fécondité, DIEIS IR ANRES.: | 49 Avec ces mœurs sauvages et ce naturel stupide , la marouette ne paroît guère susceptible d'éducation , ni même faite pour s’apprivoiser : nous en avons cepen- dant élevé une; ellea vécu durant tout un été avec de la mie de pain et du chènevis. Lorsqu'elle étoit seule, elle se tenoit constamment dans une grandejatte pleine d’eau ; mais, dès qu’on entroit dans le cabinet où elle étoit renfermée,, elle couroit se cacher dans un petit coin obscur ; sans qu’on l'ait jamais entendu crier nimurmurer : cependant, lorsqu'elle est en liberté , elle fait retentir une voix aigre et percante , assez semblable au cri d’un petit oiseau de proie; et quoique ces oiseaux n'aient aucun attrait pour la société , on observe néanmoins que l’un Wa pas plutôt crié qu’un autre lui ré- pond , et que bientôt ce cri est répété par tous les autres du canton. La marouette , comme tous les râles, tient si fort devant les chiens , que sou- vent le chasseur peut la saisir avec la main ou l’abattre avec un bâton. S'il se trouve un buisson dans sa fuite, elle y 5 _5o HISTOIRE NATURELLE. monte , et du haut de son asyle regarde : passer les chiens en défaut : cette habi- tude lui est commune avec le râle d’eau; elle plonge , nage, et même nage entre deux eaux lorsqu'il s’agit de se dérober à l'ennemi. Ces oiseaux disparoissent dans le fort. de l’hiver : mais ils reviennent de très- bonne heure au printemps , et dès le mois de février ils sont communs dans quelques provinces de France et d'Italie; on les connoît en Picardie sous le nom de girardine. C'est un gibier délicat et -xecherché ; ceux sur-tout que l’on prend en Piémont, dans les rizières , sont très- gras et d’un goût exquis. OISEAUX ÉTRANGERS DE L'ANCIEN CONTINENT QUI ONT RAPPORT AU RALE. ‘AE T'EK LON: O ÙU RALE DES PHILIPPINES*. Première espèce. | O: donne aux Philippines le nom de tiklin à des oiseaux du genre des râles ; et nous en connoissons quatre différentes espèces sous ce même nom et dans ce même climat. Celle-ci est remarquable par la netteté et l’agréable opposition des couleurs : une plaque grise couvre le _ * Voyez les planches enluminées, n° 774. PA 5: HISTOIRE NATURELLE devant du cou; une autre plaque d’un | roux marron en couvre le dessus et la tête; une ligne blanche surmonte l’œil et forme un long sourcil ; tout le dessous du corps est comme émaillé de petites lignes transversales , alternativement noires et blanches en festons ; le manteau est brun nué de roussâtre et parsemé de petites gouttes blanches sur les épaules et au bord des ailes , dont les pennes sont mélangées de noir , de blanc et de marron. Ce tiklin est un peu plus grand que notre râle d’eau. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 53 LE TIKLIN BRUN #*. Seconde espèce. à E plumage de cet oiseau est d’un brun sombre uniforme , et seulement lavé sur la gorge et la poitrine d’une teinte de pourpre vineux , et coupé sous la queue par un peu de noir et de blanc sur les couvertures inférieures. Ce tiklin est aussi petit que.la marouette. ve * Voyez les planches enluminées, n° 773 Li #4 HISTOIRE NATURELLE LE TIKLIN RAYÉ. Troisième espèce. Csrur-cr est de là même taille que le précédent. Le fond de son plumage est d’un brun fauve, traversé et comme — ouvragé de lignes blanches ; le dessus de la tête et du cou est d’un brun marron ; l'estomac, la poitrine et le cou sont d’un gris olivâtre ; et la gorge est d’un blanc roussâtre. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 53 LE TIKLIN À COLLIER. Quatrième espèce. Crrur - Cr est un peu plus gros que notre râle de genêt. IL a le manteau d’un brun teint d’olivâtre sombre ; les joues et la gorge sont de couleur de suie; un trait blanc part de l’angle du bec, passe sous l’œil et s'étend en arrière ; le devant du cou, la poitrine, le ventre, sont d’un brun noirâtre, rayé de lignes blan- ches ; une bande d’un beau marron, large d’un doigt, forme comme un demi-collier au-dessus de la poitrine. RL 56 HISTOIRE NATURELLE OISEAUX ÉTRANGERS DU NOUVEAU CONTINENT QUI ONT RAPPORT AU RALE. LE RALE A LONG BEC *. Première espèce. Les espèces de râles sont plus diver- sifiées et peut-être plus nombreuses dans les terres noyées et marécageuses du nou- veau continent, que dans les contrées plus sèches de l’ancien. On verra par la description particulière de ces espèces, qu'il y en a deux bien plus petites que les autres , et que celle-ci est au contraire plus grande qu'aucune de nos espèces * Voyez les planches enluminées, n° 840. \ DES OISEAUX ÉTRANGERS. 57 européennes ; le bec de ce grand râle est aussi plus long , même à proportion, que celui des autres râles. Son plumage est gris , un peu roussaire sur le devant du corps , et mêlé de noirâtre ou de brun sur le dos et les ailes ; le ventre est rayé de bandelettes transversales blanches et noires , comme dans la plupart des autres râles. On trouve à la Guiane deux espèces ou du moins deux variétés de ces râles à long bec , qui diffèrent beaucoup par la grosseur , les uns étant de la taille de la barge , et les autres , tels que celui de la planche 849, n’étant qu’un peu plus gros que notre râle d’eau. ORPI ” MAR D. 2) 1h, : dde , 58 HISTOIRE NATURELLE LE KIOLO *. Seconde espèce. Css par ce nom que les naturels de la Guiane expriment le cri ou piaulement de ce râle ; il le fait entendre le soir , à # Ja même heure que les tinamous , c’est-à- dire, à six heures, qui est l'instant du coucher du soleil dans le climat équi= noxial. Les kiolos se réclament par ce cri pour se rallier avant la nuit; car tout le jour ils se tiennent seuls, fourrés dans les haïliers humides : ils y font leur nid . entre les petites branches basses des buis- sons, et ce nid est composé d’une seule sorte d'herbe rougeñâtre ; il est relevé en petite voûte , de manière que la pluie ne peut y pénétrer. Ce räle est un peu plus * Voyez les planches enluminées, n° 368, sous le nom de rdle de Cayenne; et n° 753, sous la dénomination de réle à ventre roux de Cayenne. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 5g petit que la marouette ; 1l a le devant du corps et le sommet de la téte d’un beau roux , et le manteau lavé de verd olivâtre , sur un fond brun. Les nos 368 et 755 de nos planches enluminées ne représentent que le même oiseau , quine diffère que par le sexe ou l’âge. Il nous paroît aussi que le râle de Pensilvanie, donné par Edwards , est le même que celui-ci. 6o HISTOIRE NATURELLE LE RALE TACHETÉ. DE CAYENNE *. Troisième espèce. te beau râle, qui est aussi un des plus grands , a l'aile d’un brun roux ; le reste du plumage est tacheté, moucheté, liséré de blanc sur un fond d’un beau noir. Il se trouve à la Guiane comme les précédens. _* Voyez les planches enluminées, n° 775. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 6€ EDS PRIT EEE LE RALE DE VIRGINIE. Quairième espèce. LL Cor oiseau, qui est de la grosseur de la caille , a plus de rapport avec le roi des cailles ou râle de genét , qu'avec les râles d’eau. 11 paroît qu’on le trouve dans l'étendue de l'Amérique septentrionale , jusqu'à la baie d'Hudson , quoique Catesby dise ne l’avoir vu qu’en Virginie ; il dit que son plumage est tout brun , et il ajoute que ces oiseaux deviennent si gras en automne , qu’ils ne peuvent échapper aux sauvages, qui en prennent un grand nombre en les lassant à la course , et qu'ils sont aussi recherchés à la Virginie que les oiseaux de riz le sont à la Caroline, et l’ortolan en Europe. 6 HISTOIRE NATURELLE LE RALE BIDI-BIDE Cinquième espèce. Drnr-srpr est le cri et le nom de ce petit räle à la Jamaïque : il n’est guère plus gros qu'une fauvette ; sa tête est toute noire ; le dessus du cou, le dos , le ventre, la queue et les ailes, sont d’un brun qui est varié de raies transversales blanchâtres sur le dos, le croupion et le ventre ; les plumes de l'aile et celles de la queue sont semées de ‘gouttes blan- ches; le devant du cou et l'estomac sont d’un cendré bleuatre. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 63 LE PETIT RALE DE CAYENNE *. Sixième espèce. Ce; petit oiseau n’est pas plus gros qu’une fauvette : il a le devant du cou et la poitrine d’un blanc légèrement teint de fauve et de Jaunâtre ; les flancs et la queue sont rayés transversalement de blanc et de noir; le fond des plumes du manteau est noir, varié sur le dos de taches et de lignes blanches, avec des franges roussâtres. C’est le plus petit des oiseaux de ce genre , qui est assez nom- breux en espèces. Du reste, ce genre du râle paroïît en- core plus répandu que varié : la Nature a produit ou porté de ces oiseaux sur les terres les plus lointaines. M. Cook en a vu au détroit de Magellan; il en a trouvé * Voyez les planches enluminées, n° 847« Ke | à 64 HISTOIRE NATURELLE: dans différentes îles de l'hémisphère aus tral, à Anamocka , à Tanna, à l’île Nor- | folk ; les îles de la Société ont aussi deux espèces de râles , un petit râle noir tacheté (pood-née) , et un petit râle aux yeux rouges ( #7ai-ho ); et il paroît que les deux acolins de Fernandès, qu'il appelle des cailles d’eau , sont des râles , dont l'espèce est propre au grand lac de Mexique; sur quoi nous avons déja remarqué qu'il faut se garder de confondre ces acolins ou râles de Fernandès avec les colis du même naturaliste, qui sont des oiseaux. que l’on doit rapporter aux perdrix. Tbmz16. PL 6. Lay 6, JF dauguet 1 CODE UT ra Pi bé L'ESC'AU RATE, O U PETIT PAON DESTROSES:: À Je considérer. par la forme du bec et des pieds , cet oiseau seroit un râle : mais sa queue est beaucoup plus longue que celle d'aucun oiseau de cette famille. Pour exprimer en même temps cette diffé- rence et ces rapports, il a été. nommé cauréle (râle à queue) dans nos planches enluminées : nous lui conserverons ce nom plutôt que celui de petit paon des roses qu’on lui donne à Cayenne. Son plu= mage est , à la vérité , riche en couleurs, quoiqu'elles soient toutes sombres? ; et pour en donner une idée, on ne peut 1 Voyez les planches enluminées, n° 782. 2 On imagineroit peut-être quelque rapport de cet oiseau au paon, du moins dans sa manière d’étaler ou de soutenir sa queue; Imals on nous assure quil ne la relève point. 6 Lau nd LUS” LE us “ + L , RAR : ‘ 6 -HISTOIRE NATURELLE We mieux le comparer qu ‘aux ailes de ces beaux papillons phalènes , où le noir s' le brun, le roux, le fauve etle gris blanc, entremelés en ondes , en zones , en zig- zags , forment de toutes ces teintes un eusemble moelleux et doux. Tel est le plumage du caurâle , particulièrement sur les ailes et la queue. La tête est coiffée de noir , avec de longues lignes blanches dessus et dessous l’œil ; le bec est exactement un bec de râle , excepté qu'il est d’une dimension un peu plus longue , comme toutes celles de cet oiseau, dont la tête , le cou ct le corps sont plus alongés que dans lerâle ; sa queue, longue de cinq pouces , dépasse l’aile pliée de deux ; son pied est gros et haut de vingt- six lignes , et la partie nue de la jambe l'est de dix ; le rudiment de membrane entre le doigt extérieur et celui du milieu est plus étendu et plus marqué que dans le râle. La longueur totale, depuis la pointe du bec, qui a vingt-sept lignes, jusqu’à celle de la queue , est de quinze pouces: Cet oiseau n’a point encore été décrit ; DU CAURALE. 67 et n’est connu que depuis peu de temps; _ on le trouve , mais assez rarement , dans l’intérieur des terres de la Guiane , en remontant les rivières, dont il habite les bords ; il vit solitaire et fait entendre un sifflement lent et plaintif, qu’ on imite pour le faire approcher. LA . er wv « 1 BOF LA POULE D'EAU *. L 4 Nature passe par nuances de la forme du râle à celle de la poule d'eau, quia de même le corps comprimé par les côtés, le bec d’une figure semblable , mais plus accourci , et plus approchant par-là du bec des gallinacés. La poule d’eau a aussi le front dénué de plumes et recou- vert d’une membrane épaisse ; caractères dont certaines espèces de rales présentent les vestiges. Elle vole aussi les pieds pen- dans ; enfin elle a les doigts alongés comimne le râle, mais garnis dans toute. leur longueur d’un bord membraneux ; nuance par laquelle se marque le passage des oiseaux fissipèdes , dont les doigts sont nuds et séparés , aux oiseaux pal- mipèdes, qui les ont garnis et Joints par une membrane tendue de l’un à l’autre 5 AU * Voyez les planches enluminées, n° 877. En anglois, water-hen, more-hen ; en allemand, rohtblaschen. Zom 16 . A 7. Leg 68. » à SEE Sy ET d£ Ko Su NN t : LA POULE D'EAU. IT. uquet- SJ HISTOIRE NATURELLE. 6 doigt ; passage dont nous avons déja vu l'ébauche dans la plupart des oiseaux de rivage, qui ont ce rudiment de mem- brane tantôt entre les trois doigts , et tantôt entre deux seulement , l'extérieur et celui du milieu. Les habitudes de la poule d’eau répon- dent à sa conformation : elle va à l’eau plus que le râle , sans cependant y nager beaucoup, si ce n’est pour traverser d’un bord à l’autre ; cachée durant la plus grande partie du jour dans les roseaux , ou sous les racines des aunes , des saules et des osiers , ce n’est que sur le soir qu'on la voit se promener sur l’eau; elle fréquente moins les marécages et les ma= rais que les rivières et les étangs. Son nid , posé tout au bord de l’eau , est construit d’un assez gros amas de débris de roseaux et de joncs entrelacés ; la mère quitte son nid tous les soirs ,; et couvre ses œufs auparavant avec des brins de jones et d'herbes : dès que les petits sont éclos , ils courent comme ceux du râle , et suivent de méme leur mère , qui les mène à l’eau; c’est à cette faculté lé AL ie 4 * ro HISTOIRE NATURELLE _ naturelle que se rapporte sans doute le soin de prévoyance que le père et la mère montrent en ‘plaçant leur mid toujours très-près des eaux. Au reste , la mère conduit et cache si bien sa petite famille, qu'il est très-difficile de la lui enlever pendant le très - petit temps qu’elle la soigne ; car bientôt ces jeunes oiseaux, devenus assez forts pour se pourvoir d’eux-mémes , laissent à leur mère fé- conde le temps de produire et d'élever une famille cadette’, et même l’on assure qu'il y a souvent trois pontes dans un an. Les poules d’eau quittent en octobre les pays froids et les montagnes, et passent tout l'hiver dans nos provinces tempérées, où on les trouve près des sources et sur les eaux vives qui ne gèlent pas. Ainsi la pouie d'eau n’est pas précisément un oiseau de passage, puisqu'on la voit toute l’année dans differentes contrées , et que tous ses voyages paroissent se borner des. montagnes à la plaine, et de la plaine. aux montagnes. Quoique peu voyageuse et par - tout assez peu nombreuse ,; la poule d’eau : # D { DE LA POULE D’EAU. 7E paroît avoir été placée par la Nature dans la plupart des régions connues , et même dans les plus éloignées. M. Cook en a trouvé à l’île Norfolk et à la nouvelle Zélande ; M. Adanson , dans une île du Sénégal ; M. Gmelin , dans la plaine de Mangasea en Sibérie , près du Jénisca, où il dit qu’elles sont en très-grand nombre. Elles ne sont pas moins communes dans les Antilles, à la Guadeloupe, à la Ja- maïque et à l’île d’ Aves, quoiqu'il n’y ait point d’eau douce dans cette dernière île. On en voit aussi beaucoup en Canada; et pour l’Europe , la poule d’eau se trouve en Angleterre, en Écosse, en Prusse , en Suisse , en Allemagne, et dans la plupart de nos provinces de France. Il est vrai que nous ne sommes pas assurés que toutes celles qu'indiquent les voyageurs, soient de la même espèce que la nôtre. M. le Page du Pratz dit expressément qu’à la Louisiane elle est la meme qu’en France, et il paroït encore que la poule d’eau décrite par le P. Feuillée à l’ile Saint-Tho- nas, n’en est pas différente. D'ailleurs mous en distinguons trois espèces ou 72 HISTOIRE NATURELLE variétés , que l’on assure ne pas se mêler, quoique vivant ensemble sur les mêmes eaux , sans compter quelques autres es- pèces rapportées par les nomenclateurs au genre de la poule sultane, et qui nous paroiïssent appartenir de plus près à celui de la poule d’eau , et quelques autres encore dont nous n’avons que lindica-, tion ou des notices imparfaites. Les trois races ou espèces reconnues dans nos contrées peuvent se distinguer par la grandeur. L'espèce moyenne est la plus commune ; celle de la grande et celle de la petite poule d’eau , dont Belon a parlé sous le nom de poulette d’eau, sont un peu plus rares. La poule d’eau moyenne ap- proche de la grosseur d’un poulet de six mois ; sa longueur, du bec à la queue, est d’un pied, et du bec aux ongles, de quatorze à quinze pouces. Son bec est jaune à la pointe, et rouge à la base; la plaque membraneuse du front est aussi de cette dernière couleur , ainsi que le bas de la jambe au-dessus du genou ; les pieds sont verdâtres; tout le plumage est d'une couleur sombre gris-de-fer:, nué de : DE LA POULE D'EAU. 93 blanc sous le corps, et gris brun ver- dâtre en dessus ; une ligne blanche borde l'aile ; la queue ; en se relevant, laisse voir du blanc aux plumes latérales de ses couvertures inferieures : du reste, tout Île plumage est épais, serré et garni de du- vet. Dans la femelle , qui est un-peu plus petite que le mâle, les couleurs sont plus claires , les ondes blanches du ventre sont plus sensibles, et la gorge est blanche. La plaque frontale, dans les jeunes, est couverte d’un duvet plus semblable à des poils qu’à des plumes. Une jeune poule d'eau que nous avons ouverte, avoit dans son estomac des débris de petits poissons et d'herbes aquatiques melés de graviers; le gésier étoit lort épais et mus- culeux ; comme celui de la poule domes- tique; l'os du sternum nous a paru beau- coup plus petit qu'il ne l'est généralement dans les oiseaux ; et si cetté différence ne tenoit pas à l'âge, cette observation pour- roit coufirmer en partie l’ässertion de Belon., qui dit que le sternum , aussi- bien que lisehion dela poule d’eau, est de forme différente de celle de ces mêmes os dans les autres oiseaux. Oiszaux, XVI. 7 > 1 A 1 74 HISTOIRE NATURELLE LA POULETTE D'EAU. C: nom diminutif, donné par Belon, ne doit pas faire imaginer que cette poule d’eau soit considérablement plus petite que la précédente. Il y a peu de différence; mais on observe que, dansles mêmes lieux, les deux espèces se tiennent constamment séparées sans se mêler. Leurs couleurs _ sont à peu près les mêmes ; Belon trouve seulement à celle-ci une teinte bleuâtre sur la poitrine, et il remarque qu’elle a la paupière blanche. Il ajoute que sa chair est très-tendre , et que les os sont minces et fragiles. Nous avons eu une de ces pou- dettes d’eau ; elle ne vécut que depuis le 22 novembre jusqu’au 10 décembre , à la vérité sans autre aliment que de l’eau. On la tenoit enfermée dans un petit ré- duit qui ne tiroit de jour que par deux carreaux percés à la porte : tous les ma- tins, aux premiers rayons du jour , elle ) DE LA POULE D'EAU 5 _s’élançoit contre ces vitres à plusieurs reprises différentes ; le reste du temps elle se cachoit le plus qu’elle pouvoit, tenant la tête basse. Si on la prenoit à la main , elle donnoit des coups de bec ; mais ils étoient sans force. Dans cette dure prison on ne lui entendit-pas jeter un seul cri. Ces oiseaux sont en général très-silencieux ; on a même dit qu'ils étoient muets : cependant, lorsqu'ils sont en liberté, ils font entendre un petit son réitéré , bri, bri, bri. L. r 76 HISTOIRE NATURELLE LA PORZANE, O ÙU LA GRANDE POULE D'EAU. PATES LA Csrre PA d’eau doit être commune enltalie, aux environs de Bologne, puis- que les Riot be de cette contrée lui ont donné un nom vuigaire( porzana }. Elle est plus grande dans toutes ses dimensions que votre poule d'éau commune. Sa lon- gueur, du bec à la queue, est de près d’un pied et demi. Elle a le dessus du bec jaunâtre, et la pointe noirâtre ; le cou et la tête sont aussi noirâtres ; le manteau est d’un brun marron; le reste du plu- mage revient à celui de la poule d’eau commune , avec laquelle on nous assure que celle-ci se rencoutre quelquefois sur nos étangs. Les couleurs de la femelle sont plus pâles que celles du mâle. DE LA POULE D'EAU. ‘#7 LA GRINETTE. Cr oiseau , que les nomenclateurs ont placé dans le genre de la poule sultane, sous paroît appartenir à celui de la poule d’eau. On lui donne à Mantoue le nom de porzana , que la grande poule d’eau porte à Bologne ; cependant elle est beau- coup plus petite, puisque ; suivant Wil- Jughby , elle est moindre que le raie, et son bec ést très-court. À en juger par ses différens noms , elle doit être fort connue dans le Milaänois* ; on la trouve aussi en Allemagne, suivant Gesner. Ce natura- liste n’en dit rien autre chose, sinon qu'elle a les pieds gris, le bec partie rou- geatre et partie noir, le manteau brün roux, et le dessous du corps blanc, * À Milan on l'appelle grunetta ; à Mantoue, porzana ; à Bologne, porcellana ; aïlleurs, g7rar- della columba ; à Florence, fordo gelsemino. | pe … 78 HISTOIRE NATURELLE LA SMIRRING. C: nom, que Gesner pense avoir été don- né par ozomatopée, ou imitation de cri, est en Allemagne celui d’un oiseau qui paroît appartenir au genre de la poule d’eau. Rzaczynski, en le comptant parmi les espèces naturelles à la Pologne , dit qu'il se tient sur les rivières, et niche dans les haïlliers qui les bordent. Il ajoute que la célérité avec laquelle il court lus a fait: quelquefois donner le nom de érochilus ; et ailleurs ( {uct. pag. 380) il Le décrit dans les mêmes termes que Gesner. «Le fond. « de tout son plumage , dit-il , est roux ; «les petites plumes de l'aile sont d’un « rouge de brique; la tête, le tour des «yeux et le ventre sont blancs ; les « grandes pennes de l'aile sont noires; « des taches de cette même couleur par- « sèment le cou , le dos, les aïles et la « queue ; les pieds et la base du bec sont « jaunâtres, » | sin. -DE LA POULE D'EAU 79 DA CLOUT. | Cr oiseau est une poule d’eau , sui- vant Gesner ; il dit qu’elle fait entendre une voix aiguë et haute comme le son d’un fifre. Elle est brune , avec un peu de blanc à la pointe des ailes; elle a du blanc autour des yeux, au cou, à la poitrine et au ventre ; les pieds sont verdâtres , et le bec est noir. En - », VT'ULER He OISEAUX ÉRRR NT ES QUI ONT RAPPORT À LA POULE D'EAU. LA GRANDE POULE D BAU DE CAYENNE* L'orsrau ainsi nommé dans nos plan- ches euluminées , paroît s'approcher dü héron par la longueur du cou , et s’éloi- gner encore de la poule d’eau par la lon- gueur du bec ; néanmoins il lui ressemble par le reste de sa conformation. C’est la plus grande des poules d’eau ; elle a dix- huit pouces de longueur. Le cou et la tête, la queue , le bas-ventre et les cuisses, sont d’un gris brun ; le manteau est d’un olivatre sombre ; l'estomac et les pennes des ailes sont d’un roux ardent et rou- * Voyez les planches enluminées, n° 352. HISTOIRE NATURELLE. Sr. geâtre. Ces oiseaux sont très-communs dans les marais de la Guiane, et l’on en voit jusque dans les fossés de la ville de Cayenne. Ils vivent de petits poissons et d'insectes aquatiques. Les jeunes ont le plumage tout gris, et ils ne prennent de rouge qu'à la mue. : 82 HISTOIRE NATURELLE! L'EUNTVETERO Fan Los relations du Groenland nous parlent, sous ce nom, d’un oiseau qu'elles in- diquent en même temps comme une poule d’eau , mais qui pourroit aussi bien être quelque espèce de plongeon ou de grèbe. Le mâle a le dos et le cou blancs, le ventre noir , et la tête tirant sur le violet; les plumes de la femelle sont d’un jaune mêlé et bordé de noir , de manière à pa- _ xroître grises de loin. Ces oiseaux sont fort nombreux dans le Groenland , principa- lement en hiver ; on les voit, dès le ma- tin, voler en troupes, des baies vers Les îles , où 1ls vont se repaître de coquillages, et le soir ils reviennent à leurs retraites dans les baies, pour y passer la nuit. Ils suivent en volant les détours de la côte et les sinuosités des détroits entre les îles. Rarement ils volent sur terre, à moins que la force du vent, sur-taut quand il DES OISEAUX ÉTRANGERS, 892 souffle du nord, ne les oblige à se tenir sous l’abri des terres : c’est alors que les chasseurs les tirent de quelque pointe avancée dans la mer, d’où l’on va en canot pêcher ceux qui sont tués; car les blessés vont à fond et ne reparoissent guère. 84 HISTOIRE NATURELLE LE KINGALIK. Lzs mêmes relations nomment encore poule d’eau cet oiseau de Groenland. Il est plus grand que le canard , etremarquable par une protubérance dentelée qui lui croît sur le bec, entre les narines, et qui est d’un Jaune orangé. Le mâle est tout | noir, excepté qu’il a les ailes blanches, et le dos marqueté de blanc. La femelle n’est que brune. Ce sont là tous les oiseaux étrangers que nous croyons devoir rapporter au genre de la poule d’eau; car il ne nous paroît pas que les oiseaux nommés par Dampier poules gloussantes, Soient dela famille de la poule d’eau, d’autant plus qu'il semble les assimiler lui - même aux crabiers et à d’autres oiseaux du genre des hérons. Et de même la belle poule d’eau de Buenos-Ayres, du P. Feuillée, n'est pas une vraie poule d’eau, puis- DES OISEAUX ÉTRANGERS. 85 qu'elle a les pieds comme le canard. Enfin la petite poule d’eau de Barbarie ( water- ken) à ailes tachetées, du docteur Shaw, qui est moins grosse qu’un pluvier, nous paroît appartenir plutôt à la famitle du râle qu’à celle de la poule d’eau propre- ment dite. LE JACANA*. Première espèce. Lez jacana des Brasiliens , dit Marcgrave; doit être mis avec les poules d’eau , aux- quelles il ressemble par le naturel, les habitudes , la forme du corps raccourci, la figure du bec et la petitesse de la tête. Néanmoins 1l nous paroît que le jacana diffère essentiellement des poules d’eau par des caractères singuliers, et même uniques , qui le séparent et le distinguent de tous les autres oiseaux : il porte des éperons aux épaules, et des lambeaux de membrane sur le devant de la tête; ila les doigts et les ongles excessivement grands ; le doigt de derrière est d’ailleurs aussi long que celui du milieu en devant; tous les ongles sont droits, ronds, effilés comme des stylets ou des aiguilles. C’est apparemment de cette forme particulière # Voyez les planches enluminées, n° 322. Zôm 16. | 718. Pag 66. LE JACANA. Î Jaquet: ie ; HISTOIRE NATURELLE. 67 de ses ongles incisifs et poignans qu’on a donné au jacana le nom de chirurgien *. L'espèce en est commune sur tous les ma- rais du Bresil , et nous sommes assurés qu’elle se trouve également à la Guiane et à Saint-Domingue ; on peut aussi pré- sumer qu’elle existe dans toutes les régions et les différentes îles de l'Amérique entre les tropiques et jusqu’à la nouvelle Es- pagne , quoique Fernandès ne paroisse em parler que sur des relations , et non d’a- près ses propres connoissances, puisqu'i fait venir ces oiseaux des côtes du Nord, tandis qu'ils sont naturels aux terres du Midi. Nous connoissons quatre ou cinq Jaca- nas, qui ne diffèrent que par les couleurs, leur grandeur étant la même. La première espèce, donnée par Fernandès, est la qua- trième de Marcgrave. La tête, le cou et le devant du corps de cet oiseau , sont d’un noir teint de violet ; les grandes pennes de l’aile sont verdâtres ; le reste du manteau est d’un beau marron pour- * C’est sous ce nom qu’ils sont connus à Salint- Dominguc. | - "| un 88. HISTOIRE NATURELLE. pré ou mordoré. Chaque aile est armée d’un éperon pointu qui sort de l'épaule, et dont la forme est exactement sem- blable à celle de ces épines ou crochets dont est garnie la raie bouclée; de la racine du bec naît une membrane qui se couche sur le front, se divise en trois lambeaux, et laisse encore tomber un barbillon de chäque côté ; le bec est droit, un peu renflé vers le bout, et d’un beau Jaune jonquille | comme les éperons ; la queue est très-courte , et ce caractère , ainsi que ceux de la forme du bec, de la queue , des doigts et de la hauteur des jambes , dont la moitié est dénuée de plumes, conviennent également à toutes les espèces de ce genre. Marcgrave paroît exagérer leur taille en la comparant à celle du pigeon; car les Jacanas n’ont pas le corps plus gros que la caille , mais seu- lement porté sur des jambes bien plus hautes : leur cou est aussi plus long, et leur tête est petite. Ils sont toujours fort maigres , et cependant l’on dit que leur chair est mangeable. Le jacana de cette première espèce est VO | DES JACANAS. 8g assez commun à Saint-Domingue, d’où il nous a été envoyé, sous le nom de che- valier mordoré armé, par M. Lefebvre Des- hayes. « Ces oiseaux, dit-il, vont ordi- « nairement par couple ; et lorsque quel- « que accident les sépare, on les entend «se rappeler par un cri de réclame. Ils « sont très-sauvagés, et le chasseur ne « peut les approcher qu’en usant de ruses, « en se couvrant dé feuillages, ou se cou- « lant derrière les buissons’, les roseaux. « On les voit régulièrément à Saint-Do- « mingue durant ou après les pluies du « mois de mai ou dé novembre : néan- « moins 1] en paroît quelques uns après « toutes les fortes pluiesiqui font déborder « les eaux ; ce qui fait croire qué Les licux « OÙ Ces oiseaux se tiennent habituelle- « ment, né sont pas éloignés. Du reste, on « ne les trouve pas hors des lagons , des « marais, ou dés bords des étangs et des « ruisseaux. «Le vol de ces oïseaux est peu élevé, « Mais assez rapide. Ils jettent en partant « un Cri aigu et glapissant, qui s’entend « de loin , et qui paroît avoir quelque 90 HISTOIRE NATURELLE «rapport à celui de l’effraie : aussi les « volailles dans les basses-cours s'y mé- « prennent et s’'épouvantent à ce cri, «comme à celui d’un oiseau de proie, « quoique le jacana soit fort éloigné de «ce genre. Il sembleroit que la Nature « en ait voulu faire un oiseau belliqueux, « à la manière dont elle a eu soin de l’ar- «mer; néanmoins on ne connoît pas. « l'ennemi contre lequel il peut exercer « SeS armes. » Ce rapport avec les vanneaux armés, quisont des oiseaux querelleurs etcriards, joint à celui de la conformation du bec, paroît avoir porté quelques naturalistes à réunir avec eux les Jacanas soûs un même genre : mais la figure de leur corps et de leur tête les en éloigne, et les rappro- cheroit de celui de la poule d’eau , si la conformation de leurs pieds ne les en séparoit encore; et cette conformation des pieds est en effet si singulière , qu’elle ne se trouve dans aucun autre oiseau : on doit donc regarder les jacanas comme formant un genre particulier , et qui paroît propre au nouveau continent. Leur "0 \« DES JACANAS. 9£ séjour sur les eaux et leur conformation indiquent assez qu'ils vivent et se nour- rissent de la même manière que les autres oiseaux de rivage ; et quoique Fernandès dise qu'ils ne fréquentent que les eaux salées des bords de la mer, il paroît, selon ce que nous venons de rapporter , qu'ils se trouvent également dans l'intérieur des terres , sur les étangs d’eau douce. | oz HISTOIRE NATURELLE « » : )2 ñ . tie ton: LE JACANA NOIR. , Seconde espèce. T'ourr la tête , le cou, le dos et la queue de ce Jacana , sont noirs ; le haut des ailes et leurs pointes sont de couleur brune ; le reste est verd , et le dessous du corps est brun ; les éperons de l'aile sont jaunes, ainsi que lebec, de la racine duquel s'élève sur le front une membrane rougeâtre. Marcgrave nous donne cette espèce comme naturelle au Bresit. MR ST AC AUNCAISEN ou LE JACANA VER D. Troisième espèce. Marcerave loue la beauté de ect oiseau, dont 1l a fait sa première espèce de ce genre : 1l a le dos, les ailes et le ventre teints de verd sur un fond noir; et l’on voit sur le cou briller de beaux reflets gorge de pigeon ; la tête est coiffée d’une membrane d’un bleu de turquoise; le bec et les ongles, qui sont d’un rouge de ver- millon dans leur première moitié, sont jaunes à la pointe. L’aualogie nous per- suade que cette espèce est armée comme les autres, quoique Marcgrave ne lé dise pas. 94 HISTOIRE NATURELLE L E JACANA-PECA. Quatrième espèce. \ Less Brasiliens donnent à cet oiseau le nom d'agua-pecaca ; nous l’appelons ja- cana-péca, pour réunir son nom géné- rique à sa dénomination spécifique et pour le distinguer des autres Jacanas: ses traits sont cependant peu différens de ceux de l'espèce précédente. « Il a , dit « Marcgrave, des couleurs plus foibles et « les ailes plus brunes ; chaque aile est « armée d’un éperon , dont l'oiseau se sert « pour sa défense : mais sa tête n’a point « de coiffe membraneuse ». Le nom de porphyrion , sous lequel Barrère a donné ce jJacana , semble indiquer qu’il a les pieds rouges. Le même auteur dit que l'espèce en est commune à la Guiane , où les Indiens l’appellent #apoua, et nous pré- sumons que c’est à cet oiseau que doit se rapporter la note suivante de M. de la Borde. « La petite espèce de poule d’eau DES JACANAS. 05 « ou chirurgien aux ailes armées est, dit-il, « très-commune à la Guiane ; elle habite « les étangs d’eau douce et les mares. On « trouve ordinairement ces oiseaux par « paire ; mais quelquefois aussi on en « voit jusqu'à vingt ou trente ensemble. « Il y en a toujours en été dans les fossés « de la ville de Cayenne; et dans le temps « des pluies , ils viennent même jusque « dans les places de la nouvelle ville ; « ils se gîtent dans les Joncs, et entrent « dans l’eau jusqu’au milieu de la jambe; « ils vivent de petits poissons et d'insectes « aquatiques ». Au reste, il paroît qu’il y a dans la Guiane, comme au Bresil, plu- sicurs espèces ou variétés de ces oiseaux, et qu’on les connoît sous des noms diffé- rens. M. Aublet nous a donné unenotice, dans laquelle il dit que l’oiseau chirurgien est assez commun à la Guiane dans les mares, les bassins et petits lacs des sa- vanes; qu’il se pose sur les larges feuilles d’une plante aquatique , appelée vulgai- rement volet (zymplea), et que les na- turels ont donné à cet oiseau le nom de hinkin, mot qu'il exprime par un son aigu, CORRE: T'L' AE ES 66 HISTOIRE NATURELLE. LE JACANA VARIE *.. Cinquième espèce. Le plumage de cet oiseau est en effet plus varié que celui des autres jacanas, sans sortir néanmoins des couleurs domi- nantes et communes à tous : Ces couleurs sont le verdâtre , le noir et le marron pourpré. Il: y a , de chaque côté de la tête , une bande blanche qui passe par- dessus les yeux ; le devant du cou est blanc, ainsi que tout le dessous du corps: on peut voir la planche enluminée pour le détail des autres couleurs, qu’il seroit difficile de rendre. Le front est couvert d'une membrane d’un rouge orangé ; et il y a des éperons sur les ailes. Cet oiseau nous est venu du Bresil. Edwards le donne comme venant de Carthagène; ce qui montre, comme nous l’avons observé, que lesjacanassontcommunsaux diverses contrées de l’Amérique situées entre les : tropiques. | © # Voyez les planches enluminées, n° 846, \ $ CE RE Pe 4 Et Ci } ! l “x T a L PET mai \ Pur hs og A Te j ! < dw «a | ANNE ls # 1 ty cie Vos ÿ ‘ A ._ LA POULE SULTANE - ow LE PORPHYRION. J Jauquer- Ÿ. À d \ LARBPOULE SULTANE, OÙ LE PORPHYRION*. #7 s modernes ont appelé poule sultane, uu oiseau fameux chez les anciens sous le nom de porpayrion. Nous avons déja plusieurs fois remarqué combien les déno- minations données par les Grecs, et la plupart fondées sur des caractères distinc- tifs, étoient supérieures aux noms formés eomme au hasard dans nos langues ré- centes , sur des rapports ou fictifs ou bizarres , et souvent démentis par l’ins- pection de la nature. Le nom de poule suliane nous en fournit un nouvel exem- ple ; c’est apparemment en trouvant quel- que ressemblance avec la poule et cet oiseau de rivage , bien éloigné pourtant * Voyez les planches enluminées, n° 810, sous la dénomination de 1alève de Madagascar. Œ 98 HISTOIRE NATURELLE + du genre gallinacé , et en imaginant un degré de supériorité sur la poule vulgaire par sa beauté ou par son port , qu'on l’a nommé poule sultane : mais le nom de porphkyrion, en rappelant à l'esprit le rouge ou le pourpre du bec et des pieds , étoit plus caractéristique et bien plus juste. Quene pouvons-nous rétablir toutes les belles ruines de l'antiquité savante, ct rendre à la Nature ces images brillantes et ces portraits fidèles dont les Grecs l’a- voient peinte et toujours animée, hom- mes spirituels et sensibles qu’avoient tou- chés les beautés qu’elle présente, et la vie que par-tout elle respire! | Faisons donc l’histoire du porphyrion, avant de parler de la poule sultane. Aris- tote, dans Athénée, décrit le porphyrion comme un oiseau fissipède à longs pieds , au plumage bleu, dont le bec couleur de pourpre est très-fortement implanté dans le front, et dont la grandeur est celle du coq domestique. Suivant la lecon d’Athé- née, Aristote auroit ajouté qu'il y a cinq doigts aux pieds de cet oiseau ; ce qui, seroit une erreur , dans laquelle néan- DE LA POULE SULTANE. o moins quelques autres anciens auteurs sont tombés. Une autre erreur plus grande des écrivains modernes , est celle d’Isi- dore , copiée dans Albert, qui dit que le porphyrion a l’un des pieds fait pour nager et garni de membranes, et l’autre propre à courir comme les oiseaux de terre ; ce qui est non seulement un fait faux , mais contraire à toute idée de nature , et ne peut signifier autre chose, sinon que le porphyrion est un oiseau de rivage , qui vit aux confins de la terre et de l’eau. Il paroît en effet que l’un et l’au- tre élément fournit à sa subsistance ; car 1l mange, en domesticité , des fruits, de la viande et du poisson : son ventricule est conformé comme celui des oiseaux qui vivent également de graines et de chair. | : On l'élève donc aisément : il plaît par son port noble, par sa belle forme , par son plumage brillant et riche en couleurs méêlées de bleu pourpré et de verd d’aigue- marine ; son naturel est paisible; il s’ha- bitue avec ses compagnons de domes- ticité,, quoique d’espèce différente de la 100 HISTOIRE NATURELLE sienne , et se choisit entre eux LE | ami ve prédilection *, À Il est de plus oiseau bols éraivai comme le coq ; néanmoins il se sert de ses pieds comme d’une main pour porter les ali- mens à son bec : cette habitude paroît résulter des proportions du cou , qui est court, et des jambes, qui-sont très-lon- gues ; ce qui rend pénible l’action de ramasser avec le bec sa nourriture à terre. Les anciens avoient fait la plupart de ces remarques sur le porphyrion , et c’est un des oiseaux qu'ils ont le mieux décrits. Les Grecs, les Romains, malgré leur luxe déprédateur, s S'abetinitettt également de manger du porphyrion. Ils le faisoient venir de Libye ?, de Comagène et des îles * Voyez dans Élien l’histoire d’un porpbyrion qui mourut de regrel après avoir perdu le coq son camarade. | 2 Alexandre de Myndes, dans Athénée, compte le porphyrion au nombre des oiseaux de Libye, et témoigne qu’il étoit consacré aux dieux dans cette région. Suivant Diodore de Sicile, 11 venoit des porphyrions du fond de la Syrie, avec diverses autres espèces d'oiseaux remarquables par leurs riches couleurs, DE LA POULE SULTANE, vof Baléares , pour le nourrir et le placer dans les palais et dans les temples , où on le laissoit en liberté , comme un hôte digne de ces lieux par la noblesse de son port, par la douceur de son naturel et par la beauté de son plumage. Maintenant, si nous comparons à ce porphyrion des anciens notre poule sul- tane représentée n° 810 des planches en- Juminées , il paroît que cet oiseau, qui nous est arrivé de Madagascar sous le nom de falève, est exacternent le méme. MM. de l'académie des sciènces ; qui en ont décrit un semblable, ont reconnu comme nous le porphyrion dans la poule sultane. Elle a environ deux pieds,du bec aux ongles. Les doigts sont extraordinai- rement longs et entièrement séparés , sans vestiges de membranes : ils sont disposés à l’ordinaire, trois en avant et un en ar- rière; c’ést par erreur qu'ils sont repré- sentés deux et deux dans Gesner. Le cou est très-court à proportion de la hauteur des jambes , qui sont dénuées de pluines ; les pieds sont très-longs, la queue très- courte ; le bec, en forme de cône, ap- 9 A dé d 74 hd xo2 HISTOIRE NATUREL plati par les côtés , est assez court ; et le dernier trait qui caractérise cet oïseau , c’est d’avoir, comme les foulques, le front chauve et chargé d’une plaque qui, s'étendant jusqu’au sommet de la tête, s’élargit en ovale, et paroît être formée par un prolongement de la substance cor- _mée du bec, C’est ce qu’Aristote, dans Athénée , exprime quand il dit que le porphyrion a le bec fortement attaché à Ja tête. MM. de l'académie ont trouvé deux cœcums assez grands qui s’élargissent en sacs , et le renflement du bas de l’œso- phage leur a paru tenir;lieu d’un Jabot, dont Pline a dit que cet oiseau manquoit. Cette poule sultane , décrite par MM. de l'académie, est le premier oiseau de ce genre qui ait été vu par les modernes ;. Gesner n’en parle que sur des relations et . d’après un dessin; Willughby dit qu’au- cun naturaliste n’a vu le porphyrion : nous devons à M. le marquis de Nesle la satisfaction de l'avoir vu vivant, et nous Jui témoignons notre respectueuse recon- moissance, que nous regardons comme une dette de l’histoire naturelle, qu'il Le = / “ DE LA POULE SULTANE. 103 enrichit tous les Jours par son goût éclairé autant que généreux ; il nous a mis à por- tée de vérifier en grande partie sur sa poule sultane , ce que les anciens ont dit de leur porphyrion. Cet oiseau est effecti- vement très-doux, très-iInnocent, et en même temps timide , fugitif, aimant, cherchant la solitude et les lieux écartés, se cachant tant qu'il peut pour manger. Lorsqu'on l'approche, il a un cri d’effrot, d’une voix d’abord assez foible, ensuite plus’ aiguë, et qui se termine par deux ou trois coups d’un son sourd et inté- rieur. Il a pour le plaisir d’autres petits accens moins bruyans et plus doux. Il pa- roît préférer les fruits et les racines, parti- culièrement celles des chicorées , à tout autre aliment, quoiqu'il puisse vivre aussi de graines : mais Îui ayant fait présenter du poisson , le goût naturel s’est marqué ; 11 l’a mangéavecavidité. Souventil trempe ses alimens à plusieurs fois dans l’eau; . pour peu que le morceau soit gros, il ne manque pas de le prendre à sa patte et de l’assujettir entre ses longs doigts, en ramerant contre les autres celui de der- \ 304 HISTOIRE NATURELLE. ; rière , et tenant le pied à demi élevé. 1 mange en mofcelant. 11 n’y a guère d'oiseaux plus beaux par les couleurs : le bleu de son plumage moelleux et lustré est embelli de reflets brillans ; ses longs pieds et la plaque du sommet de la tête avec la racine du bec, sont d’un beau rouge, et une touffe de piumes blanches sous la queue relève l'éclat de sa belle robe bleue. La femelle he diffère du mâle qu’en ce qu'elle ést uu peu plus petite. Celui-ci est plus gros qu’une perdrix , mais un peu moins qu'une poule. M. le marquis de Nesle à rapporté ce couple de Sicile, où, suivant la notice qu’il a eu la bonté de nous communi- quer , ces poules sultanés sont Conrnuües sous le nom de gallo-fagiani; onles trouve sur le lac de Lentini, au-dessus de Ca- tane. On les vend à un prix médiocre dans cette ville, ainsi qu'à Syracuse et dans les villes voisines ; on en voit dé vivantes dans les places publiques, où élles se tiennent à côté des vendeuses d’herbes et de fruits, pour en recueillir les débris. Ce bel oiseau , logé chez les Romains dans DE LA POULE SULTANE. roi les temples, se ressent un peu , comme l'on voit, de la décadence de l'Italie. Mais une conséquence intéressante que présente ce dernier fait, c’est qu'il faut que la race de la poule sultane se soit vaturalisée en Sicile par quelques couples de ces porphyrions apportés d'Afrique, et il y a toute apparence que cette belle espèce s’est propagée de même dans quel- ques autres contrées; car nous voyons par un passage de Gesner, que ce natu- raliste étoit persuadé qu'il se trouve de ces oiseaux en Espagne et même dans nos provinces méridionales de France. Au reste, cet oiseau est un de ceux qui se montrent le plus naturellement dispo- sés à la domesticité , et qu’il seroit agréable et utile de multiplier. Le couple nourri dans les volières de M. le marquis de Nesle a niché au dernier printemps(1778): on a vu le mâle et la femelle travailler de concert à construire le nid ; ils le posèrent à quelque hauteur de terre, sur une avance du mur, avec des büchettes et de Ja paille en quantité. La ponte fut de six œufs blancs , d’une coque rude , exacte- 106 HISTOIRE NATURELLE. meut ronds et de la grosseur d’une demi- bille de billard. La femelle n’étant pas assi- due à les couver, on les donna à une poule; mais ce fut sans succès. On pourroit sans doute espérer de voir une autre ponte réussir plus heureusement, si elle étoit couvée et soignée par la mère elle-même: il faudroit pour cela ménager à ces oi- seaux le calmeetla rétraite qu’ils semblent chercher, sur-tout dans le temps-de leurs amours, …— > OISEAUX QUI ONT RAPPORT A LA POULE SULTANE. LE: PÈCE primitive et principale de la poule sultane étant originaire des con- trées du midi de notre continent, il m'est pas vraisemblable que les régions du nord nourrissent des espèces secondaires dans ce genre : aussi trouvons-nous qu'il en faut rejeter plusieurs de celles qui y ont été rangées par M. Brisson , et qui sont ses 4, 5, 6, 7 et 8° espèces, auxquelles il suppose gratuitement la plaque fron- tale, quoique Gesner, dont il a tiré les indications relatives à ces oiseaux, ne désigne cette plaque ni dans ses notices ni dans ses figures. La seconde de ces espèces paroît être un râle , et nous l’a- vous rapportée à ce genre d'oiseaux; les quatre autres sont des poules d’eau, comme l’auteur original le dit lui-même; et quant à la neuvième espèce du même | | à: vi 1c8 HISTOIRE NATURELLE M. Brisson, qu’il appelle poule sultane de la baie d'Hudson , elle doit être également Ôtée de ce genre à raison du climat, d’au- tant que M. Edwards la donne en effet comme une foulque, quoiqu'il remarque en même temps qu’elle se rapporte mieux au râle. Malgré ces retranchemens , il nous restera encore trois espèces dans l’an- cien continent, qui paroissent faire la nuance entre notre poule sultane*, les foulques et les poules d’eau ; et nous trouverons aussi dans le nouveau conti- nent trois espèces d'oiseaux qui. semblent être les représentans, en Amérique, de la poule sultane et de ses espèces subalternes de l’ancien continent. | -* M. Forsier:a trouvé à Middelbourg , Pune des îles des Amis, des foulques à plumage bleu, qui paroissent être des poules sultanes. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 109. LA POULE SULTANE VERTE. Prernière espèce. Cr oiseau , que nous rapportons à la poule sultane d’après M. Brisson', est bien plus petit que cette poule, et pas plus gros qu’un râle. I! a tout le dessus _ du corps d’un verd sombre, mais lustré, et tout le dessous du corps blanc , depuis les joues et la gorge jusqu’à la queue. Le bec et la plaque frontale sont d’un verd jaunâtre. On le trouve aux Indes orien- tales,. Oiseaux, XKX V Î: 10 MAL ou 0 ,i « ro HISTOIRE NATURELLE nm LA POULE SULTANE BRUNE *. Seconde espèce. | Csrre poule sultane, qui vient de la Chine , a quinze à seize pouces de lon- gueur. Elle ne brille point des riches couleurs qui semblent propres à ce genre d'oiseaux, et 1l se pourroit qu’on n’eût ici représenté qu’une femelle : elle a tout le dessus du corps brun ou d’un cendré noirâtre , le ventre roux; le devant du corps, du cou, de la gorge et le tour des yeux, blancs. Du reste, la plaque frontale est assez petite, etlebec s'éloigne un peu de la forme conique du bec de la vraie poule sultane : il est plus alongé, et il se rapproche de celui des poules d’eau. * Voyez les planches enluminées, n° 896, sous Je nom de poule suliane de la Chine. Lee DES OISEAUX ÉTRANGERS. x L’ANGOLI. Troisième espèce. Nous abrégeons ce nom de celui de eaunangoli, que porte vulgairement à Madras l'oiseau que les Gentous nomment boollu-cory. I est difficile de décider si lon doit plutôt le rapporter aux poules sul- tanes qu'aux poules d’eau , ou même aux rales ; tout ce que nous en savons se borne à la courte notice qu’en donne Petiver dans son addition au Synopsis de Ray : mais cette notice, faite, comme toutes les autres de ce fragment, sur des figures envoyées de Madras, n’exprime point les caractères distinctifs qui pour- roient désigner le genre de cet oiseau. M. Brisson , qui en a fait sa dixième poule sultane , lui prête en conséquence la plaque nue au front, dont la notice ne dit rien ; elle lui donne, au contraire, 112 HISTOIRE NATURELLE un bec longuet (7osfrum acutum , teres, « longiusculum ), avec les noms de crex et rail-hen , qui semblent la rappeler au râle : mais sa taille est bien supérieure à celle de cet oiseau , et même à celle de la poule d’eau. 11 ressemble done plus à la poule sultane ( magniludine anatis ); c’est tout ce que nous pouvons dire de cette espèce , Jusqu'à ce qu’elle nous soit mieux connue. | DES OISEAUX ÉTRANGERS. #12? LA PETITE POULE SULTANE. Quatrième espèce. L £ genre de la poule sultane se retrouve, comme nous l’avons dit, au nouveau monde , sinon en espèces exactement les mêmes , du moins en espèces analogues. Celle-ci, qui est naturelle à la Guiane, n’est qu’un peu plus grande que le râle d’eau ; du reste, elle ressemble si bien à notre poule sultane, qu’il y a peu d’exem- ples dans toute l’histoire des oiseaux, de rapports aussi parfaits et de représenta- tions aussi exactes dans les deux conti- nens *. Son dos est d’un verd bleuûtre, et tout le devant du corps est d’un bleu * C’est la raison pour laquelle on n’a point donné cette petite poule suliane dans nos planches enlu- minées ; des objets que la différence de grandeur, Le peu sentie entre des figures réduites , disingue seule , devant paroître répétés, L® 114 HISTOIRE NATURELLE violet doux et moelleux, qui couvre aussi le cou et la tête, en prenant une teinte plus foncée, Elle nous paroît la même que celle dont M. Brisson fait sa seconde es- pèce ; mais ce n’est qu’en conséquence du préJugé qui lui a fait transporter la grande poule sultane en Amérique , qu'il trans- porte aux grandes Indes cette espèce réel- lement américaine, et que nous avons recue de Cayenne. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 715 PANFAVNORITET Cinquième espèce. C°ss7 le nom donné , dans nos planches enluminées, à une petite poule sultane qui est à peu près de la grandeur de la précédente , et du même pays. Il se pour- roit qu'elle ne fût que la femelle dans cette même espèce, d'autant plus que les couleurs sont les mêmes, et seulement plus foibles : le verd LR des ailes et des côtés du cou est d’une teinte affoi- blie ; le brun perce sur le dos et domine sur la queue; tout le devant du corps est blanc. * Voyez les planches enluminées, n° 897, sous le nom de favorite de fax gars: 116 HISTOIRE NATURELLE TA CAPTER Sivième espèce. Gr oiseau mexicain, que M. Brisson rapporte à notre poule sultane ou au por- phyrion des anciens , en diffère par plu- sieurs caractères : outre l’opposition des climats, qui ne permet guère de penser qu’un oiseau de vol pesant ; et qui est naturel aux régions du Midi, ait passé d’un continent à l’autre, l’acintli n’a pas les doigts et les pieds rouges , mais Jaunes ou verdâtres ; tout son plumage est d’un pourpre noirâtre , entremélé ‘de quelques plumes blanches. Fernandès lui donne les moms de guachiltoa et d’yacacintli; nous avons adopté le dernier et l'avons abrégé » mais la dénomination d'avis siliguastrini capilis, que ce même auteur lui applique, est très-sigmificative, et désigne la plaque . frontale applatiecommeunce large silique; \ DES OISEAUX ÉTRANGERS. 117 caractère par lequel cet oiseau s’unit à la famille de la foulque ou de la poule sultane. Ce même auteur ajoute que l’a- cintli chante comme le coq pendant la nuit et dès le grand matin; ce qui pour- roit faire douter qu'il soit en eflet du genre de notre poule sultane, dans Îla- quelle on n’a pas remarqué cette habi- tude , et dont la voix n’a rien du clairon bruyant et sonore du coq. Un oiseau d’espèce très-voisine de celle de l’acintli, si ce n’est le même , est dé- crit parle P.Feuillée sous le nom de poule d’eau. Il a le caractère de la poule sultane, le large écusson applati sur le front , toute la robe bleue, excepté un capuchon de noir sur la tête et le cou. En outre, le P. Feuillée remarque des différences de couleurs entre le mâle et la femelle, qui ne se trouvent pas dans nos poules sul- tanes , dont la femelle est seulement plus petite que le mâle , mais auquel elle res- semble parfaitement par les couleurs. La Nature a donc produit, à de grandes distances, des espèces du genre de la poule sultane , mais toujours dans les latitudes x18 HISTOIRE NATURELLE. ‘méridionales. Nous avons vu que notre poule sultane se trouve à Madagascar. M. Forster en a trouvé dans la mer du Sud; et la poule d’eau couleur de pourpre, que le même naturaliste voyageur a vue à Anamocka , paroît encore être un oiseau de cette mème famille. sé be da db : COOP ON POLORN ET CALE PE TE CE TS 1 ( ne. p , Zom. 10 , 210 .Pag 219 : LA FOULQUE oz LA MORELLE . [ F Dauqguet”. P. Cp 240" Le : HER OULOUE +. L'rsrècr de la foulque, qui, dans notre langue , se nomme aussi zorelle, doit être regardée comme la première fa- mille par où commence la grande et nom- breuse tribu des véritables oiseaux d’eau. La foulque, sans avoir les pieds entière- ment palmés , ne le cède à aucun des autres oiseaux EE nice etrestemême plus constamment sur l’eau qu'aucun d'eux, si l’on en excepte les plongeons. Il est tri rare de voir la foulque à terre ; elle y pa- roît si dépaysée, que souvent ellese laisse prendre à la main. Elle se tient tout le Jour sur les étangs, qu’elle préfère aux * Voyez les planches enluminées, n° 197. En latin, fulica, fulix; en italien, follega, follata; et sur le lac Majeur, pullon ; en an- glois , - coot; en allemand, wasser-houn , ror- heunle, taucherlein ; dans plusieurs de nos pro- vinces de Frauce, ke: ou Jon OU - en Pi- cardie , blérie. 120 HISTOIRE NATURELLE » 4 - rivières , et ce n’est guère que pour pas- ser d’un étang à un autre qu’elle prend pied à terre : encore faut-il que la traver- . sée ne soit pas longue ; car, pour peu qu'il y ait de distance, elle prend son vol en le portant fort haut : mais ordinaire- ment ses voyages ne se font que de nuit. Les foulques , comme plusieurs autres oiseaux d’eau , voient très-bien dans l’obs- curité, et même les plus vieilles ne cher- chent leur nourriture que pendant la nuit *. Elles restent retirées dans les Joncs pendant la plus grande partie du Jour; : et lorsqu'on les inquiète dansleurretraite, elles s’y cachent, et s’enfoncent même dans la vase , plutôt que de s'envoler. IL semble qu’il leur en coûte pour se déter- mniner au mouvement du vol, si naturel aux autres oiseaux ; car elles ne partent de la terre ou de l’eau qu’avec peine. Les plus jeunes foulques , moins solitaires.et * Selon M. Salerne, la foulque , au défaut d’autre nourriture (qui pourtant ne doit guère lui manquer), plonge et arrache du fond de l’eau la racine du grand jonc (scirpus), qui est blanche et AT et la donne à sucer à ses peus. DE LA FOULQUE. 121 moins circonspectes sur le danger, pa- roissent à toutes les heures du jour, et jouent entre elles en s’élevant droit vis-à- vis l’une de l’autre, s’élancant hors de l’eau et retombant par petits bonds. Elles se laissent aisément approcher ; cependant elles regardent et fixent le chasseur, et plongent si prestement à l’instant qu’elles appercoivent le feu , que souvent elles échappent au plomb meurtrier : mais dans l'arrière-saison , quand ces oiseaux, après avoir quitté les petits étangs, se sont réunis sur les grands, l’on en fait des chasses dans lesquelles on en tue plusieurs centaines *. On s’embarque pour cela sur nombre de nacelles qui se rangent en ligne et croisent la largeur de létang; cette petite flotte alignée pousse ainsi devant elle la troupe des foulques, de mamière à la conduire et à la renfermer dans quelque anse; pressés alors par la cramte.e* la nécessité, tous ces oiseaux s’envolent ensemble pour retourner en pleine eau , en passant par-dessus la tête * Particulièrement en Lorraine, sur les grands étangs de Thiaucourt et de Lindre. 11 24 QT U v22 HISTOIRE NATURELLE des chasseurs, qui font un feu général et } en abattent un grand nombre ; on fait ensuite la même manœuvre vers l’autre extrémité de l’étang, où les foulques se sont portées ; etce qu'il y a de singulier , c'est que ni le bruit et le feu des armes et des chasseurs , ni l'appareil de la petite flotte , ni la mort de leurs compagnons, ne puissent engager ces oiseaux à prendre la fuite; ce n’est que lä nuit suivante qu'ils quittent des lieux aussi funestes , et encore ytrouve-t-on quelques traîneurs , le lendemain. à Ces oiseaux paresseux ont, à justetitre, plusieurs ennemis: le busard mange leurs œufs et enlève leurs petits, et c’est à cette destruction qu’on doit attribuer le peu de.population dans cette espèce , qui par elle-même est très-féconde; car la foulque pond dix-huit à vingt œufs d’un blanc sale et presque aussi gros que ceux de læ poule ; et quand la première couvée est perdue , souvent la mère en fait une seconde de dix à douze œufs. Elle établit son nid dans des endroits noyés et cou- verts de roseaux secs ; elle en choisit une My DE LA FOULQUE. 123 touffe , sur laquelle elle en entasse d’au- tres, et ce tas, élevé au-dessus de l’eau, est garni dans son creux de petites herbes sèches et de sommités de roseaux , ce qui forme un gros nid assez informe et qui se voit de loin *. Elle couve pendant vingt-deux ou vingt-trois Jours ; et dès que les petits sont éclos, ils sautent hors du nid et n’y reviennent plus. La mère nue les réchauffe pas sous ses ailes ; 1ls couchent sous les Jones alentour d'elle. Elle les conduit à l’eau , où , dès leur nais- sance , ils nagent et plongent très-bien. Ils sont couverts dans ce premier âge d’un duvet noir enfumé , et paroissent très- laids ; on ne leur voit que l'indice de la plaque blanche qui doit orner leur front. C'est alors que l'oiseau de proie leur fait une guerre cruelle , et 1l enlève souvent * Il y a peu d'apparence que la foulque , comme le dit M. Salerne, fasse deux nids, l’un pour cou- L . ver , l'autre pour loger sa couvée éclose. Ce qui peut avoir donné lieu à cette idée, c'est que les petits me reviennent plus en effet au nid une fois qu'ils Pont quitié, mais se gîtent avec leur mère dans les joncs, MA nés dt, 124 HISTOIRE NATURELLE la mère et les petits !. Les vieilles foulques . qui ont perdu plusieurs fois leur couvée, instruites par le malheur, viennent éta- blir leur nid le long du rivage, dans les glaieuls , où 1l est mieux caché; elles tiennent leurs petits dans ces endroits fourrés et couverts de grandes herbes. Ce sont ces couvées qui perpétuent l'espèce ; car la dépopulation des autres est st grande, qu’un bon observateur, qui à particulièrement étudié les mœurs de ces oiseaux ?, estime qu'il en échappe au plus un dixième à la serre des oiseaux deproie, particulièrement des busards. Les foulques nichent de bonne heure au printemps , et on leur trouve de petits œufs dans le corps dès la fin de l'hiver : elles restent sur nos étangs pendant la plus grande partie de l’année ; et dans, 1 Le même M. Salerne prétend qu’elle sait se défendre de l'oiseau de proie, en lui présentant les yriffes, qu'elle porte en effet assez aiguës; mais il paroît que cette foible:défense n'empêche pas qu'elle ne soit le plus souvent la proie de son ennemi. 3 M, Ballon. DE LA FOULQUE. 725 quelques endroits elles ne les quittent pas même en hiver *. Cependant en automne elles se réunissent en grande troupe, et toutes partent des petits étangs pour se rassembler sur les grands; souvent elles y restent jusqu’en décembre; et lorsque les frimas , les neiges , et sur-tout la gelée, les chassent des cantons élevés et froids, elles viennent alors dans la plaine, où la tem- pérature est plus douce, et c’estle manque d’eau plus que le froid qui les oblige à changer de lieu. M. Hébert en a vu dans un hiver très-rude sur le lac de Nantua, qui ne gèle que tard ; il en a vu dans les plaines de la Brie, mais en petit nombre, en plein hiver : cependant il y a toute apparence que le gros de l'espèce gagne peu à peu les contrées voisines qui sont plus tempérées ; car comme le vol de ces oiseaux est pénible et pesant , ils ne doi- vent pas aller fort loin, eten effet ils repa- roissent dès lé mois de février. On trouve la foulque dans toute l’Eu- rope , depuis l'Italie jusqu’en Suède; on * Comme en basse Picardie, suivant les obser- vauons de M. Baïllon. 2 126 HISTOIRE NATUREMDE | la connoît également en Asie; on la voit en Groenland, si Essede traduit bien deux noms groenlandois , qui, selon sa ver- sion , désignent la grande et la petite foul= que.Ou en distingue en effet deux espèces, ou plutôt deux variétés, deux races, qui subsistent sur les mêmes eaux sans se méler ensemble, et qui ne diffèrent qu’en ce que l’une est un peu plus grande que l’autre ; car ceux qui veulent distinguer la grande foulque ou zracroule, de la petite foulque ou zzorelle, par la couleur de la plaque frontale, ignorentque, dans l’une et l’autre , cette partie ne devient rouge que dans la saison:des amours, et qu'en tout autre temps cette plaque. est blanche , et pour tout le reste de la con- formation la macroule et la morelle sont entièrement semblables * Cette membrane épaisse et nue quileur couvre le devant de la tête en forme d'écusson , et qui a fait donner par les anciens à la foulque l’épithète de chauve, * M. Klein ne les regarde, et peut-être avec raison , que comme deux variétés de la même espèce. DE LA FOULQUE. : rz7 paroît être un prolongement de la couche supérieure de la substance du bec, qui est moileet presque charnue près de la racine; ce bec est taillé en cône applati par les côtés , et il est d’un blanc bleuâtre, mais qui devient rougeâtre lorsque dans le temps des amours la plaque frontale prend sa couleur vermeille. | Tout le plumage est garni d’un duvet épais , recouvert d’une plume fine et ser- xée ; 1l est d’un noir plombé , plein et profond sur la tête et le cou, avec un trait blanc au pli de l'aile. Aucune différence n'indique le sexe. La grandeur de la foul- que égale celle de la poule domestique, et sa tête et le corps ont à peu pres la mème forme. Ses doigts sont à demi pal-” més , largement frangés des deux côtés d’une membrane découpée en festons , dont les nœuds se rencontrent à chaque articulation des phalanges ; ces mem- branes sont , comme les pieds, de couleur plombée. Au-dessus du genou une petite portion de la j#mbe nue est cerclée de rouge ; les cuisses sont grosses et char- nucs. Ces oiseaux ont un gésier, deux LE nd sé dk ef 128 HISTOIRE « ATOME grands cœcums , une ample vésicule de à fiel. Ils vivent principalement , ainsi que les poules d'eau, d'insectes aquatiques , de petits poissons , de sangsues ; néan- moins ils recueillent aussi les graines et avalent de petits cailloux. Leur chair est noire , se mange en maigre et sent un peu le marais. … Dans son état de liberté , la foulque a deux cris différeus , l’un coupé, l’autre traînant : c’est ce dernier, sans doute, qu’Aratus a voulu désigner en parlant du présage que l’on en tiroit, comme il paroît que c’est du premier que Pline entend parler en disant qu’il annonce la tempête ; mais la captivité lui fait apparemment une impression d’ennui Si forte, qu'elle perd la voix ou la volonté de la faire entendre, et l’on croiroit qu’elle est absolument muette. LA MACROULE, O0 GRANDE FOULQU_E "*. T'our ce que nous venons de dire de la foulque ou morelle, convient à la macroule ; leurs habitudes naturelles, ainsi que leur figure , sont les mêmes : seulement celle-ci est un peu plus crande que la première ; elle a aussi la plaque chauve du front plus large. Un de ces oiseaux pris au mois de mars 1779, aux environs de Montbard , dans des vignes, où un coup de vent piste jeté, nous à fourni les observations suivantes durant un mois que l’on a pu le conserver vivant. Il refusa d’abord toute espèce de nourri- ture apprêtée , le pain , le fromage, la viande cuite ou crue : il rebuta également * Autre espèce de poule d’eau, autrement nom- anée macroule , où diable de mer. 130 HISTOIRE NATURELLE ï les vers de terre et les petites grenouilles | mortes ou vivantes, et il fallut l'embé- quer de mie de pain trempée. Il aimoit beaucoup à être dans un baquet plein d’eau , il s’y reposoit des heures entières ; hors de là il cherchoit à se cacher: cepen- dant il n’étoit point farouche , se laissoit prendre , répoussant seulement de quel- ques coups de bec la main qui vouloit le saisir , mais si mollement , soit à cause du peu de dureté de son bec , soit par la foiblesse de ses muscles , qu’à peine fai- soit-il une légère impression sur la peau; il ne témoignoit ni colère n1 impatience, ne cherchoit point à fuir, et ne marquoit ni surprise ni crainte. Mais cette tran- quillité stupide ,sans fierté, sans courage, n'étoit probablement que la suite de l’é- tourdissement où se trouvoit cet oiseau dépaysé , trop éloigné de son élément et de toutes ses habitudes. Il avoit l’air d’être sourd et muet; quelque bruit que l’on fit tout près de son oreille, il y paroissoit entièrement insensible , et ne tournoit pas la tête ; et quoiqu’on le poursuivit et l’a- gacât souvent, on ne lui a pas entendu : " \r LM A SORT DE LA MACROULE 1x3 jeter le plus petit cri. Nous avons vu la poule d’eau également muette en capti- vité. Le malheur de l'esclavage est donc encore plus grand qu’on ne le croit, puisqu'il y a des êtres auxquels il ôte la faculté de s’en plaindre. à LA GRANDE FOULQUE A CRÉTE* Dune cette foulque, la plaque charnue du front est relevée et détachée en deux lambeaux qui forment une véritable crête : de plus, elle est notablement plus grande que la macroule, à laquelle elle ressemble en tout par la figure et le plu- mage. Cette espèce nous est venue de Madagascar : ne seroit-elle au fond que la même que celle d'Europe , agrandie et développée par l'influence d’un climat plus actif et plus chaud ? * Voyez les planches enluminées, n° 797. rt) LP ALAMNOPES, N ous devons à M. Edwards la première counoissance de ce nouveau genre de pe- tits oiseaux, qui, avec la taille et à peu près la conformation du cinele ou de la guignette, ont les pieds semblables à ceux de la foulque; caractère que M.Bris- son a exprimé par le nom de plalarope*, tandis que M. Edwards, s'en tenant à la première analogie, ne leur donne que celui de #ringa. Ce sont en effet de petits bécasseaux , ou petites guignettes, aux- quelles la Nature a donné des pieds de foulque. Ils paroissent appartenir aux terres ou plutôt aux eaux des régions les plus septentrionales : tous ceux que M. Edwards a représentés venoient de la baie d'Hudson , et nous en avons recu un de Sibérie. Cependant, soit qu’ils voyagent ou qu'ils s’égarent , il en paroît quelque- * En adoptant celui de pAalartis pour le vrai nom grec de la foulque. 12 134 HISTOIRE NATURELLE fois en Angleterre, puisque M. Edwards | fait mention d’un de ces oiseaux tué en hiver dans le comté d’Yorck : il en décrit quatre différens, qui se réduisent à trois espèces ; car il rapporte lui-même le pha- larope de sa planche 46, comme femelle ou Jeune, à celui de sa planche 143; et cependant M. Brisson en a fait de chacun une espèce séparée. Pour notre phalarope de Sibérie , 1l est encore le même que le phalarope de la baie d'Hudson, planche 143 d’Edwards , qui fera 1ci: notre pre- inière espèce. CT KE } DES PHALAROPES, 135 LE PHALAROPE CENDRÉ *. Première espèce. ls a huit pouces de longueur du bec à la queue , qui ne dépasse pas les ailes pliées ; son bec est grèle, applati hori- zontalement , long de treize lignes , légè- rement renflé et fléchi vers la pointe; il a ses petits pieds largement frangés, comme la foulque, d’une membrane en festons , dont les coupures ou les nœuds répoudent de même aux articulations des doigts; il a tout le dessus de la tête, du cou et du manteau , d’un gris légèrement ondé sur le dos de brun et de noirûtre; 1l porte un hausse-col blanc encadré d’une ligne de roux orangé; au-dessous est un tour de cou gris, et tout le dessous du corps est blanc. Willughby dit tenir du * Voyez les planches enluminées, n° 766, sous le nom de phalarope de Sibérie. x36 HIST OIRE NATU RELLE docteur Johnson que cet oiseau a la vo percante et clameuse de l'hirondelle do mer : mais il a tort de. le ranger avec ces hirondelles, sur-tout après avoir d’abord reconnu qu'il a un rapport aussi évident avec les foulques. FA ‘Ne DES PHALAROPES. 137 | LÉ PHALAROPE ROUGE. Seconde espèce. Cs phalarope a le devant du cou, la poi- trine et le ventre, d’un rouge de brique ; le dessus du dos , de la tête et du cou avec la gorge, d’un roux brun tacheté de noi- râtre ; le bec tout droit comme celui de la guignette ou du bécasseau ; les doigts largement frangés de membranes en fes- tons. Il est un peu plus grand que le pré- cédent , et de la grosseur du merle d’eau. ° 138 HISTOIRE NATURELLE. LE PHALAROPE À FESTONS DENTELÉS. Troisième espèce. £ Lys festons découpés, lisses dans les deux espèces précédentes, sont, dans celle- ci, délicatement dentelés par les bords ; et ce caractère Île distingue suffisamment. Il a , comme le premier, le bec applati horizontalement, un peu renflé vers la pointe, et creusé en-dessus de deux can- nelures ; les yeux sont un peu reculés vers le derrière de la tête, dont le som- met porte une tache noirâtre; le reste en est blanc, ainsi que tout le devant et Île dessous du corps; Le dessus est d’un gris ardoisé, avec des teintes de brun et des taches obscures longitudinales. Il est de la grosseur de la petite bécassine, dont le traducteur d’'Edwards lui donne mal- à-propos le nom. LE GRÈBEY*. Première espèce. Lr grèbe est bien connu par ces beaux mauchons d’un blanc argenté qui ont, avec la moelleuse épaisseur du duvet , le ressort de la plume et le lustre de la soie. Son plumage, sans apprèt, et en particu- her celui de la poitrine, est en effet un beau duvet très-serré, très-ferme, bien peigné, et dont les brins lustrés se couchent et se joignent de manière à ne former qu’une surface glacée, luisante, et aussi impénétrable au froid de l'air qu'à l'humidité de l’eau. Ce vêtement à toute épreuve étoit nécessaire au grèbe , qui, dans Îes plus rigoureux hivers, se tient constamment sur les eaux comme * Voyez les planches enluminées, n° 941. En laum, co/ymbus ; en anglois, dobchick-diver, arsfoot-diver, great loon-diver; en allemand, deucchel ; à Venise, fisanelle. 149 HISTOIRE NATURELLE nos plongeons , avec lesquels on l'a sou- vent confondu sous le nom commun de colymbus, qui, par son étymologie, con- vient également à des oiseaux habiles à plonger et à nager entre deux eaux : mais ce nom n’exprime pas leurs différences ; car les espèces de la famille du grèbe dif- fèrent essentiellement de celles des plon- geons , en ce que ceux-ci ont les pieds pleinement palmés , au lieu que les grèbes ont la membfane des pieds divisée et cou- pée par lobes alentour de chaque doigt, sans compter d’autres différences particu- lières que nous exposerons dans Îles des- criptions comparées. Aussi les natura- listes exacts, en attachant aux plongeons les noms de nergus, uria, œthya, fixent celui de colymbus aux grands et petits grèbes , c’est-à-dire, aux grèbes propre- ment dits et aux castagneux. . Par sa conformation, le grèbe ne peut être qu'un habitant des eaux : ses Jambes, placées tout-à-fait en arrière , et presque enfoncées dans ie ventre, ne laissent: pa- ‘roître que des pieds en forme derames, dont la position ct le mouvement naturel DEÉSLGRÈRBES. |. 14 - sont de se Jeter en dehors, et ne peuvent soutenir à terre le corps de l'oiseau que quand il se tient droit à plomb. Dans cette position , on concoit que le battement des ailes ne peut, au lieu de l’élever en l'air, que le renverser en avant, les jambes ne pouvant seconder l'impulsion que le corps recoit des ailes : ce n’est que par un grand eHort qu'il prend son vol à terre; et comme s’il sentoit combien il est étranger , on a remarqué qu'il cherche à l’éviter , et que pour n'y être point poussé , 1l nage tou- jours contre lc vent; et lorsque par mal- heur la vague le porte sur le rivage , it y reste en se débattant, et faisant des pieds et des ailes des efforts presque toujours inutiles pour s'élever dans l’air ou retour- ner à l’eau. On le prend donc souvent à la main , malgré les violenus coups de bec dont il se défend. Mais son agilité dans l’eau est aussi grande que son im- puissance sur terre ; il nage, plonge, fend l'onde, et court à sa surface eu effleurant les vagues avec une surprenante rapidité; on prétend même que ses mouvemens ne sont jamais plus vifs, plus prompts et Le L L'ALS INYVTLE Le #2 HISTOIRE NATURELLE | plus rapides, que lorsqu'il est sous l’eau; il y poursuit les poissons jusqu'à une très-grande profondeur; les pêcheurs le prennent souvent dans leurs filets ; il des- _cend plus bas que les macreuses, qui ne se prennent que sur les bancs de coquillages découverts au reflux, tandis que le grèbe se prend à mer pleine, souvent à plus de vingt pieds de profondeur. | Les grèbes fréquentent également la mer et les eaux douces, quoique les natu- ralistes n'aient guère parlé que de ceux que l’on voit sur les lacs, les étangs et les anses des rivières. Il y en a plusieurs es- pèces sur nos mers de Bretagne , de Pi- cardie , et dans la Manche. Le grèbe du lac de Genève, qui se trouve aussi sur ‘ celui de Zurich et les autres lacs de la Suisse , et quelquefois sur celui de Nan- tua , et même sur certains étangs de Bour- gogne et de Lorraine , est l'espèce la plus connue. Il est un peu plus gros que la SE — foulque ;sa longueur, du bec au croupion, est d’un pied cinq pouces, et du bec aux ongles, d’un pied neuf à dix pouces. Il a tout le dessus du corps d’un brun foncé, DASGRÉEBES. 143. mais lustré , et tout le devant d’un très- beau blanc argenté. Comme tous les autres grèbes, 1l a la tête petite , le bec droit et pointu, aux angles duquel est un petit espace en peau nue et rouge qui s’é- tend jusqu’à l'œil. Les ailes sont courtes et peu proportionnées à la grosseur du corps : aussi l'oiseau s’élève-t-il difficile- ment ; mais ayant pris le vent, il ne laisse pas de fouruir un long vol. Sa voix est haute et rude ; la jambe, ou, pour. mieux dire , le tarse est élargi et applati latéralement; les écailles dont il est cou- vert, forment, à sa partie postérieure, une double dentelure; les ongles sont larges et plats. La queue manque absolument à tous les grèbes : ils ont cependant au croupion les tubercules d’où sortent or- dinairement les plumes de la queue; mais ces tubercules sont moindres que dans les autres oiseaux , et 1l n’en sort qu’un bouquet de petites plumes, et non de véritables pennes. Ces oiseaux sont communément fort gras; non seulement 1Îis se nourrissent de petits poissons, mais ils mangent de 144 HISTOIRE NATURELLE l’algue et d’autres herbes, et avalent dû 4 limon. On trouve aussi assez souvent des - plumes blanches dans leur estomac, non qu'ils dévorent des oiseaux, mais appa- remment parce qu’ils prennent la plume qui se Joue sur l’eau pour un petit pois- son. Au reste, il est à croire que les grèbes vomissent, comme le cormoran, les restes de la digestion ; du moins trouve-t-on aw fond de leur sac des arêtes PPT et sans altération. Les pêcheurs de Picardie vont sur la côte d'Angleterre dénicher les grèbes , qui, en effet, ne nichent pas sur celles de France ; he trouvent ces oiseaux dans des creux de rocher, où apparemment ils volent, faute d’y pouvoir grimper, et d’où il faut que leurs petits se précipitent dans la mer. Mais sur nos grands étangs le grèbe construit son nid avec des ro- seaux et des Jones entrelacés : il est à demi plongé, et comme flottantsur l’eau, qui cependant ne peut l'emporter; car il est affermi et arrêté contre les roseaux, et non tout-à-fait à flot, comme le dit Linnæœus.On y trouve ordinairement deux 4 DES GRÈBES. 145 œufs, et rarement plus de trois. On voit, dès le mois de Juin, les petits grèbes nou- veau-nés nager avec leyr mère. Le genre de ces oiseaux est composé de deux familles , qui diffèrent par la cran- deur. Nous conserverons aux grands le nom de grèbes, et aux petits celui de cas- sagneux. Cette division est naturelle, an- cienne, et paroît indiquée dans Athénéé par les noms de colymbis et de colymbida ; ear cét auteur: joint constamment à ce dernier l’épithète de parvus : cependant il y'a dans la famille des grands grèbes des espèces considérablement plus petites les unes que les autres, Oiseaux, X VI, 13 US VOLE LE in f46! HISTOIRE NATURELLE » ’ \ TA Û ‘A % LE PETIT GRÉBE*.. Seconde espèce. Crrvr-cr , par exemple , est plus petit que le précédent , et c’est presque la seule différence qui soit entre eux ; mais si cette différence est constante, ils ne sont pas - de la même espèce , d'autant que le petit grèbe est connu dans la Manche et ha- bite sur la mer , au lieu que le grand grèbe _se trouve plus fréquemment dans les eaux douces. | * Voyez les planches enluminées, n° 942. * DES GRÈRBES. 147 ( LE GRÈBE HUPPÉ*. Troisième espèce. Lrs plumes du sommet de la tête de ce grèbe s’alongent un peu en arrière, et lui forment une espèce de huppe qu’il FINTaet ou baisse selon qu'il est tranquille ou agité. Il est plus grand que le grèbe com- mun , ayant au moins deux pieds du bec aux ongles ; mais il n’en diffère pas par le plumage : tout le devant de son corps est de même d’un beau blanc argenté, et le dessus d’un brun noirâtre , avec un peu de blanc dans les ailes ; et ces couleurs forment la livrée générale des grèbes. Il résulte des notices comparées des ornithologistes, que le grèbe huppé se trouve également en mer et sur les lacs, dans la Méditerranée comme sur nos côtes * Voyez les planches enluminées, n° 944. (hate: Mad. che 7 à À f L AE. 148 HISTOIRE NATURELLE de l'Océan ; son espèce même se trouve dans l'Amérique septentrionale, et nous l'avons reconnu dans l'acili du lac du Mexique de Hernandès. | L'on a observé que les jeunes grèbes de cette espèce, et apparemment il en est de mème des autres , n’ont qu'après la mue leur beau blanc satiné ; l'iris de l'œil, qui est toujours fort brillant etrougeûtre, s’enflamme et devient d’un rouge de rubis dans la saison des amours. On assure que cet oiseau détruit beaucoup de jeunes merlans, de frai d’esturgeon, et qu’il ne mange des chevrettes que faute d'autre. nourriture *. L'n * Observations faites dans la Manche par M. Baillon, de Monireuil-sur-mer. À 2 } / DES GRÈBES. 18 LE PETIT GRÈBE HUPPÉ. Quatrième espèce. Cr: grèbe n’est pas plus gros qu'une sar- celle , et il diffère du précédent non seu- lement par la taille, mais encore en ce que les plumes du sommet de la tête qui forment la huppe, se séparent en deux petites touffes , et que des taches de brun marron se mêlent au blanc du devant du cou. Quant à l'identité soupconnée par M. Brisson, de cette espèce avec celle du grèbe cendré de Willughby, il est très- difficile d’en rien décider , ce dernier na- turaliste et Ray ne parlant de leur grèbe cendré que sur un simple dessin de M. Brown. 150 HISTOIRE NATURELLE 4 ve à LE GRÉÈBE CORNU *. / Cinquième espèce. Cr grèbe porte une huppe noire parta- gée en arrière, et divisée comme én deux cornes : il a de plus une sorte de crinière ou de chevelure enflée, rousse à la ra- cine, noire à la pointe, coupée en rond autour du cou; ce qui lui donne une physionomie tout étrange , et Pa fait regarder comme une espèce de monstre. Il est un peu plus grand que le grèbe commun ; son plumage est le même, à l'exception de la crinière et des flancs, qui sont roux. : L'espèce de ce grèbe cornu paroît être fort répandue ; on la connoît en Italie, en Suisse, en Allemagne, en Pologne, en Hollande , en Angleterre. Comme cet * Voyez les planches enluminées , n° 400. Zom 10, Âlz.Pag 130 , LE GRÉBE CORNU. J SD auquet- KE K A Lo W DES GR È BES. 157 oiseau est d’une figure fort singulière, il a été par-tout remarqué; Fernandès, qui l'a fort bien décrit au Mexique , ajoute qu’il y est surnommé lièvre d'eau, sans eu dire la raison. DD. LEA e HA 1$2 HISTOIRE NATURELLE LE PETIT GRÉBE CORNU *. Sixième espèce. r y a la même différence pour la taille entre les deux grèbes cornus qu'entre les deux grèbes huppés : le petit grèbe cornu a les deux pinceaux de plumes qui, par- tant de derrière les yeux, lui forment ses cornes d’un roux orangé ; c’est aussi la couleur du devant du cou et des flancs. Il a le haut du cou et la gorge garnis de plumes renflées , mais non tranchées ni coupées en crinière : ces plumes sont d’un brun teint de verdâtre , ainsi que le des- sus de la tête ; le manteau est brun, et le plastron est d’un blanc argenté, comme dans les autres grèbes. C’est de celui-ci en particulier que Linnæus dit que le nid est flottant sur l’eau dans les anses. Il ajoute * Voyez les planches enluminées, n° 404, fig, 2, sous le nom de grébe d'Esclaronie. _ : DES GRÈBES. , 153 que ee grèbe pond quatre ou cinq œufs, fo et que sa femelle est toute grise. Il est connu dans la plupart des con- trées d'Europe , soit maritimes, soit mé- diterranées. M. Edwards l’a recu de la baie d'Hudson. Ainsi il se trouve encore dans l'Amérique septentrionale : mais cette raison ne paroît pas suffisante pour lui rapporter, avec M9 Brisson, l’yaca- pitzahoac de Fernandès , qui, à la vérité, paroît bien être un grèbe, mais que rien ne caractérise assez pour assurer qu'il est particulièrement de cette espèce ; etquant au #rapazorola de Gesner , que M. Brisson y rapporte également , il y a beaucoup plus d'apparence que c’est le castagneux, ou tout au moins il est certain que ce n’est pas un grèbe cornu, puisque Gesner dit formellement qu'il n’a nulle espèce de erête. LEA ‘a54 HISTOIRE NATURELLE à À | "+ * LE GRÈBE DUC-LAART. Septième espèce. A A D." N ous conservérons à ce grèbe le nom que lui donnent les habitans de l'île Saint- Thomas, où il a été observé et décrit par le P. Feuillée. Ce qui le distingue le plus, est une tache noire qui se trouve au mi- lieu du beau blanc du plastron, et la couleur des ailes, qui est d’un roux pâle. Sa grosseur , dit le P. Feuillée, est celle d'une jeune poule. Il observe aussi que la pointe du bec est légèrement courbée; caractère qui se marque également dans d'espèce suivante. CCR LR RTE GUEEE) Le MINS GR LR S. 155 LE GRÉBE DE LA LOUISIANE*. Huitièrne espèce. Ovrre le caractère de la pointe du bec légèrement courbée, ce grèbe diffère de la plupart des autres, en ce que son plas- tron n’est pas pleinement blanc, mais fort chargé aux flancs de brun et de noi- râtre, avec le devant du cou de cette dernière teinte. IL est aussi moins grand que le grèbe commun. e * Voyez les planches enluminées, n° 943. re AS 56 HISTOIRE NATURELLE | ! . LE GRÈBE À JOUES GRISES, cu LE JOUGRIS+. Neuvième espèce. ER Pour dénommer particulièrement des - espèces qui sont en grand nombre, ct dont les différences sont souvent peu sen- sibles , il faut quelquefois se contenter de petits caractères , qu’autrément on né penseroit pas à relever : telle est la néces- sité qui a fait donner à ce grèbe le nom de jougris, parce qu’en effet il a les joues et la mentonnière grises; le devant de son cou est roux, ef son manteau d’un brun noir. Il est à peu près de la grandeur du grèbe cornu. * Voyez les planches enluminées, n° 931. C smenenenennes | DES GRÈBES. 159 LE GRAND GREÉBE#*. Dixième espèce. C: E sr moins par les dimensions de son corps que par la longueur de son cou que ce grèbe est le plus grand des oiseaux de ce genre; cette longueur du cou fait qu'il a la tête de trois ou quatre pouces plus élevée que celle du grèbe commun , quoi- qu'il ne soit ni plus gros ni plus grand. Il a le manteau brun, le devant du corps d’un roux brun ; couleur qui s'étend sur les flancs et qui ombrage le blanc du plas- tron, lequel n’est guère net qu’au milieu de l’estomac. Il se trouve à Cayenne. Par l’énumération que nous venons de faire , on voit que les espèces de la famille du grèbe sont répandues dans les deux continens. Elles semblent aussi s'être * Voyez les planches enluminées, n° 404, fig. 1, sous le nom de grébe de Cayenne. 14 158 HISTOIRE NATURELLE. 1 portées d’un pole à l’autre : le Aaarsaak et l'esarokitsok des Groenlandois sont, à ce qu’il paroît, des grèbes; et du côté du pole austral, M. de Bougainville a trouvé aux îles Malouiniél deux oiseaux qui nous Paroissent être des grèbes plutôt que des plongeons. | : MMAMOLTEE AND AL “ — Æ #- PE SIRET ER ER ON ANR EN À dE leger Gin 2 L; 3 r . Lac 2e per Ann aq Far Samyoe Gurtinéthtle bp aSeM " 4 ” dé + = Er FPE 6 \ 1 À L % -E LE CASTAGNEUX* Première espèce. N ous avons dit que le castagneux est un grèbe beaucoup moins grand que tous les autres; on peut même ajouter qu’à l'exception du petit pétrel, c’est le plus petit de tous les oiseaux navigateurs : il ressemble aussi au pétrel par le duvet dont il est couvert au lieu de plumes; mais . du reste il a le bec, les pieds et tout le corps entièrement conformés comme les -grèbes. Il porte à peu près les mêmes con- leurs; mais comme il à du brun châtain ou couleur de marron sur le dos , on lui a donné le nom de castagneux. Dans quel- ques individus ,;le devant du corps est gris, et non pas d’un blanc lustré ; d’autres sont plus noirâtres que bruns sur le dos, et cette variété dans les couleurs a été désignée par Aldrovande. Le castagneux . * Voyez les planches enluminées, n° 905. 16o HISTOIRE NATURELLE n’a pas plus que le grèbe la faculté de se tenir et demarcher sur la terre; ses jambes traînantes et Jetées en arrière ne peuvent - s’y soutenir, et ne lui servent qu'à nager. Il a peine à prendre son vol; mais une fois élevé , il ne laisse pas d’aller loin. On le voit sur les rivières tout l'hiver, temps auquel il est fort gras ; mais, quoi- qu'on l’ait nommé grèbe de rivière, on en voit aussi sur la mer, où il mange des chevrettes , des éperlans , de même qu'il se nourrit de petites écrevisses et de me- nus poissons dans les eaux douces. Nous lui avons trouvé dans l’estomac des grains de sable; il a ce viscère musculeux et revêtu intérieurement d’une membrane glanduleuse , épaisse et peu adhérente ; les intestins, comme l'observe Belou, sont très-gréles ; les deux jambes sont atta- chées au derrière du corps par une mem- brane qui déborde quand les jambes s’é- tendent , et qui est attachée fort près de l'articulation du tarse ; au-dessus du crou- pion sont, en place de queue, deux petits pinceaux de duvet qui sortent chacun d’un tubercule ; on remarque encore que | DES CASTAGNEUX. 16# les membranes des doigts sont encadrées d’une bordure dentelée de petites écailles symétriquement rangées. je | Au reste, nous croyons que le #ropazo- rola de Gesner est notre castagneux. Ce _ naturaliste dit que c’est le premier oiseau qui reparoisse après l'hiver sur les lacs de Suisse. | à 14 362 HISTOIRE NATURELLE 1 J n 2 à | Mi LE CASTAGNEUX. DES PHILIPPINES* _ Seconde espèce. Qvorqus ce castagneux soit un pe _ plus grand que celui d'Europe, et qu’il en diffère par deux grands traits de cou- leur rousse qui lui teignent les joues et les côtés du cou, ainsi que par une teinte de pourpre jetée sur son manteau , ce n’est peut-être que le même oiseau modifié par le climat. Nous pourrions prononcer plus affirmativement, si les limites qui séparent les espèces, ou la chaîne qui les unit, nous étoient mieux connues ; mais qui peut avoir suivi la grande filiation de toutes les généalogies dans la Nature? Il faudroit être né avec elle, et avoir, pour Ev, J * Voyez les planches enluminées, n° 045. DES CASTAGNEUX. 163 ainsi dire, des observations contempo- raines. C’est beaucoup, daus le court es- pace qu’ilnous est permis de saisir, d’ob- server ses passages, d'indiquer sesnuances, et de soupconner les transformations ie nies qu’elle a pu subir ou faire depuis les temps immenses qu'elle a travaillé ses ouvrages. ne “164 HISTOIRE NATURELLE | [ LE CASTAGNEUX A BEC CERCLÉ. Troisième espèce. 4 Ux petit ruban noir qui environne le milieu du bec en forme de cercle, est le caractère par lequel nous avons cru de- voir distinguer ce castagneux ; il a de plus une tache noire remarquable à Ja base de la mandibule inférieure du bec. Son plumage est tout brun , foncé sur la tête et le cou , clair et verdâtre sur la poi- trine. On le trouve sur les étangs d’eau douce, dans les parties inhabitées de la st DES CASTAGNEUX. x16% LE CASTAGNEUX DE SAINT-DOMINGUE. Quatrième espèce. Ox voit que la famille des castagneux ou petits grèbes n’est pas moins répan- due que celle des grands. Celui-ci, qui se trouve à Saint-Domingue, est encore plus petit que le castagneux d'Europe ; sa longueur , du bec au croupion, n’est guère que de sept pouces et demi : il est noirâtre sur le corps, et gris blanc argen- té , tacheté de brun, en-dessous. De 1: 166 HISTOIRE NATURELLE LE GRÈBE-FOULQUE *. Cinquième espèce. - L A Nature trace des traits d'union pres- que par-tout où nous voudrions marquer des intervalles et faire des coupures ; sans quitter brusquement une forme pour pas- ser à une autre, elle emprunte de toutes deux , et compose un être mi-parti qui réunit les deux extrêmes, et remplit Jus- qu'au moindre vide de l'ensemble d’un tout, où rien n’est isolé. Tels sont les traits de l'oiseau grèbe-foulque , jusqu’à ce Jour inconnu , et qui nous a été en- voyé de l’Amérique méridionale. Nous lui avons donné ce nom , parce qu’il porte les deux caractères du grèbe et de la foulque ; il a, comme elle, une queue assez large et d'assez longues ailes ; tout # Voyez les planches enluminées, n° 893. 17 LD : Le “th 4 A CAL ! es SA: : . { ide 1 DES CASTAGNEUX. 167 son manteau est d’un brun olivâtre, et tout le devant du corps est d’un très-beau blanc ; les doigts et les membranes dont ils sont garnis , sont barrés transversale- ment de raies noires et blanches ou Jau+ nâtres ; ce qui fait un effet agréable. Au reste , ce grèbe-foulque , qui se trouve à Cayenne, est aussi petit que notre casta- gneux. ! LES PLONGEONS "” Ovorqur beaucoup d'oiseaux aqua- tiques aient l'habitude de plonger, même jusqu’au fond de l’eau , en poursuivant leur proie, on a donné de préférence le nom de plongeon à une petite famille particulière de ces oiseaux plongeurs, qui diffère des autres en ce qu’ils ont le bec droit et pointu , et les trois doigts antérieurs Joints ensemble par une mem- brane entière, qui Jette un rebord le long du doigt intérieur , duquel néanmoins le postérieur est séparé. Les plongeons ont de plus les ongles petits et pointus?, la 1 Le plongeon, en général, se nomme en latin mergus ; en hébreu et en persan, kaath ; en arabe, semag ; enitalien, mergo , mergone ; en anglois, diver, ducker ; en allemand, ducher, duchent , taucher ; en groenlandois, navïarsonck. 2 C’est du grèbe, et non pas du plongeon, qu'il faut entendre ce que Schwenckfeld dit, que seul eutre les oiseaux, 1l a les ongles applatis : Merso | unico inter aves lati sunt ungues. Tom 16. Ll13. lag. 1268, LE PLONGEON. 1TDauquer S j hi: amie (il de Nr tn ù Lit M HISTOIRE NATURELLE. 169 queue très-courte et presque nulle , les pieds très-plats et placés tout-à-fait à l’ar- rière du corps ; enfin la jambe cachée dans l'abdomen , disposition très-propre à l’ac- tion de nager , mais très-contraire à celle de marcher : en effet, les plongeons, comme les grèbes, sont obligés sur terre à se tenir debout dans une situation droite et presque perpendiculaire, sans pouvoir maintenir l'équilibre dans leurs mouvemens , au lieu qu'ils se meuvent daus l’eau d’une manière si preste et si prompte, qu'ils évitent la balle en plon- geant à l'éclair du feu, au même ins- tant que le coup part : aussi les bons chasseurs, pour tirer ces oiseaux, adap- tent à leur fusil un morceau de car- ton, qui, en laissant la mire libre, dé- robe l'éclair de l’amorce à l'œil de l’oi- seau. Nous connoissons cinq espèces dans le genre du plongeon , dont deux , l’une assez grande et l’autre plus petite, se trouvent également sur les eaux douces, dans l'intérieur des terres et sur les eaux salées , près des côtes de la mer ; les trois 19 170. HISTOIRE NATURELLE © autres espèces paroissent attachées unis quement aux côtes maritimes , et spé=! cialement aux mers du Nord : nous allons donner la descri ption de chacune en par« | ticulier., | * DES PLONGEONS. x7r 2 \ LE GRAND PLONGEON *. Première espèce. C E plongeon est presque de la grandeur et de la taille de l’oic. Il est connu sur les lacs de Suisse , et le nom de s/vder qu'on lui donne sur celui de Constance , marque, selon Gesner, sa pesanteur à terre et l’im- puissance de marcher, malgré l’effort qu'il fait des ailes et des pieds à la fois. Il ne prend son essor que sur l’eau : mais dans cet élément ses mouvemens sont aussi faciles ct aussi légers que vifs et rapides; il plonge à de très-grandes profondeurs, et nage entre deux eaux à cent pas de , distance sans reparoître pour respirer ; une portion d’air renfermée dans la tra- chée-artère dilatée fournit pendant ce temps à la respiration de cet amphibie ailé, qui semble moins appartenir à l’élé- ment de l’air qu’à celui des eaux. Ii en _.*# Voyez les planches enluminées, n° OI4» LES | ‘172 HISTOIRE NATURELLE est de même des autres plongeons et des grèbes ; ils parcourent librement et en tout sens les espaces dans l’eau : ils y trouvent leur subsistance, leur abri, leur asyle ; car si l’oiseau de proie paroît en l'air |, ou qu’un chasseur se montre sur le rivage, ce n’est point au vol que le plongeon confe sa fuite et son salut ; il : plonge, et, caché sous l’eau, se dérobe à l'œil de tous ses ennemis. Mais l’homme, plus puissant encore par l’adresse que par la force , sait lui faire rencontrer des em- bûches jusqu’au fond de son asyle; un filet, une ligne dormante amorcée d’un petit poisson , sont les piéges auxquels l'oiseau se prend en avalant sa proie:il meurt ainsi en voulant se nourrir, et dans l'élément même sur lequel il est né; car on trouve sou nid posé sur l’eau , au milieu des grands joncs dont le pied est | baigné. | Aristote observe, avec raison , que les plongeons commencent leur nichée dans le premier printemps , et que les mouettes ne nichent qu’à la fin de cette saison ou au commencement de l'été : mais c'est LE PrAT CPE à CADRES ALES 14210 0 20, HAN | Lu | DES PLONGEONS. 173 improprement que Pline , qui souvent ne fait que copier ce premier naturaliste , le contredit ici, en employant le nom de mnergus pour désigner un oiseau d’eau qui niche sur les arbres ; cette habitude, qui appartient au cormoran et à quelques autres oiseaux d’eau , n’est nullement celle du plongeon, puisqu'il niche au bas des joncs. NRA ES Quelques observateurs ont écrit que ce grand plongeon étoit fort silencieux : ce- pendant Gesner lui attribue un cri parti- culier et fort éclatant ; mais apparem- ment on ne l’entend que rarement. Au reste, Willughby semble recon- noître dans cette espèce une variété qui diffère de la première , en ce que l'oiseau a le dos d’une seule couleur uniforme, au lieu que le grand plongeon commun a le manteau ondé de gris blanc sur gris brun , avec un même brun nué et poin- tillé de blanchäâtre sur le dessus de la tête et du cou, qui de plus est orné vers le bas d’un demi-collier teint des mêmes couleurs , terminées par le beau blanc de la poitrine et du dessous du corps. 15 #4 HISTOIRE NATURELLE LE PETIT PLONGEON *. __ Seconde espèce. { Cr petit plongeon ressemble beaucoup au grand par les couleurs, et a de même tout le devant du corps blanc ; le dos et le dessus du cou et de la tête, d’un cendré noirâtre, tout parsemé de petites gouttes blanches : mais ses dimensions sont bien moindres ; les plus gros ont tout au plus un pied neuf pouces du bout du bec à celui de la queue , deux pieds jusqu’au bout des doïgts, et deux pieds et demi d'envergure, tandis que le grand plon- geon en a plus de quatre, et deux pieds et demi du bec aux ongles. Du reste, leurs habitudes naturelles sont à à peu ue les mêmes. | On voit en tout temps les plsbbébs de cette espèce sur nos étangs, qu'ils ne . quittent que quand la glace les force à se ‘* Voyez les planches enluminées , n° 92, sous la déuommation de plongeon. | | / © DES PLONGEONS. 179. transporter sur les rivières et les ruisseaux d’eau vive ; ils partent pendant la nuit, et ne s’éloignent que le moins qu'ils peuvent de leur premier domicile. L’on avoit déja remarqué, du temps d’Aris- tote , que l'hiver ne les faisoit pas dispa- roître. Ce philosophe dit aussi que leur ponte est de deux ou trois œufs; mais nos chasseurs assurent qu’elle est de trois où. quatre, et disent que quand on approche du nid, la mère se précipite et se plonge, et que les petits tout nouvellement éclos se jettent à l’eau pour la suivre. Au reste, c’est toujours avec bruit et avec un mou- vement très-vif des ailes et de la queue, que ces oiseaux nagent et plongent ; le mouvement de leurs pieds se dirige em nageant, non d'avant en arrière , mais de côté et se croisant en diagonale. M. Hé- bert a observé ce mouvement en tenant captif uu de ces plongeons, qui, retenu seulement par un long fil, prenoit tou- jours cette direction : il paroissoit n’avoir rien perdu de sa liberté naturelle ; il étoit sur une rivière où il trouvoit sa vie en happant de petits poissons. : ‘ , TU ! 476 HISTOIRE NATURELLE L) LTUA } , LE PLONGEON CAT-MARIN. Troisième espèce. à] Cr plongeon, fort semblable à notre petit plongeon d’eau douce , nous a été envoyé des côtes de Picardie, qu'il fré- . quente, sur-tout en hiver, et où les pê- cheurs l'appellent cat- marin (chat de - mer ), parce qu'il mange et détruit beau- coup de frai de poisson. Souvent ils le prennent dans les filets tèndus pour les macreuses , avec lesquelles ce plongeon arrive ordinairement ; car on observe qu'il s'éloigne l'été, comme s’il alloit pas- ser cette saison plus au nord : quelques * uns cependant, au rapport des matelots, nichent dans les Sorlingues , sur des ro- chers où ils ne peuvent arriver qu’en par- tant de l’eau par un effort de saut , aidé du mouvement des vagues; car sur terre ils sont, comme les autres plongeons, dans DES PLONGEONS. +77 l'impuissance de s'élever par le vol; ils ne peuvent même courir que sur les vagues, qu'ils efleurent rapidement dans une atti- tude droite ; et la partie postérieure du corps plongée dans l’eau. Cet oiseau entre avec la marée dans les embouchures des rivières. Les petits mer- lans, le frai de l’esturgeon et du congre, sont ses mets de préférence. Comme il nage presque aussi vite que les autres oiseaux volent , et qu’il plonge aussi bien qu'un poisson , il a tous les avantages possibles pour se saisir de cette proie fugitive. | Les jeunes , moins adroits et moins exer- cés que les vieux , ne mangent que des chevrettes ; cependant les uns et les autres, dans toutes les saisons, sont ex- trèemement gras. M. Baillon, qui a très- bien observé ces plongeons sur les côtes de Picardie , et qui nous donne ces dé- tails , ajoute que , dans cette espèce, la femelle diffère du mâle par la taille , étant ae deux pouces à peu près au-dessous des dimensions de celui-ci, qui sont de deux pieds trois pouces de la pointe du bec au 178 HISTOIRE NATURELLE bout des ongles, et de trois pieds deux, pouces de vol. Le plumage des Jeunes, jusqu’à la mue, est d’un noir enfumé, sans aucune des taches blanches dont le dos des vieux est parsemé. Nousrapporterons à cette espèce, comme variété, un plongeon à tête noire , dont M. Brisson a fait sa cinquième espèce, en lui appliquant des phrases de Willughby et de Ray , lesquelles désignent l’imbrim ougrand plongeon des mers du Nord, dont nous allons parler, et qui ne doivent pas être rapportées aux petits plongeous. Au reste, une remarque que l’on a faite , sans l'appliquer spécialement à une espèce particulière de plongeouns, c'est que la chair de ces oiseaux devient meil- leure lorsqu'ils ont vécu dans la baie de Longkh - foyle, près de Loudoudery en Irlande , d’une certaine plante dont la tige est tendre et presque aussi douce , dit-on , que celle de la canne à sucre. | » h P? CAS SUR ? 7 17) D y hs L'IMBRIM - fl lo GRAND PLONGEON DE LA MER DU NORD. }. Dau quë a nee rm 6 re =zx = meme = « = L’IMBRIM, oO D. GRAND PLONGEON DE LA MER DÜ NORD e Quatrième espèce. li mis 1. MBRrIM est le nom que porte à l’île Feroé ce graud plongeon, connu aux Orcades sous celui d’enmberyoose. I est plus gros qu’une oie, ayant près de trois pieds du bec aux. ongles, et quatre pieds. de vol. Il est aussi très-remarquable par un collier échancré en travers du cou, et. tracé par de petites raies longitudinales, * Voyez les planches enluminées, n° 952. Huubrye, par les, Islandois, selon Anderson, gui dit que cet oiseau ressemble beaucoup au vau= iour (geir-fugl) par sa grosseur ét par ses cris; mais ce prétendu vautour ést un harle, 180 HISTOIRE NATURELLE alternativement noires et blanches ; le fond de couleur dans lequel tranche colle bande, est noir , avec des reflets verds au cou et violets sur la tête; le manteau est à fond noir, tout parsemé de mou- chetures blanches ; tout le dessous du corps est d’un beau blanc. Ce grand plongeon paroît quelquefois en Anplétarre dans les hivers rigoureux *: mais en tout autre temps il ne quitte pas les mers du Nord, et sa retraite ordinaire est aux Orcades , aux îles Feroé , sur les côtes d'Islande et vers le Groenland; car àl est aisé de le reconnoître dans le zuglek des Groenlandois. ‘Quelques écrivains du Nord, tels que Hoicrus, médecin de Berghen, ont avancé que-ces oiseaux faisoient leurs nids et leurs pontes sous l'eau : ce qui, loin d’étre vrai, n’est pas même vraisemblable ; et ce qu’ on lità ce sujet dans les Pr tions philosophiques, que l’imbrim tient ses œufs sous ses ailes, et les couve ainsi en les portant par -tout avec lui, me. * Nous en avons même reçu uu qui à ÉLÉ LU cet : hiver (1700) sur la côte. de Picardies4uu es ds à DES PEONGEONS. 18€ paroît également fabuleux.Tout ce qu’on peut inférer de ces contes, c’est que pro- bablement cet oiseau niche sur des écueils ou des côtes désertes , et que jusqu’à ce jour aucun observateur n’a vu son nid. D) Oisraux, XV I. H LEARN PSS PP RU ON D'ART J “y ide HISTOIRE NATURELLE f vd (r H yrret vA . . + : < TR » , { | . , ir M +): . CT y mn et ' ‘ + . L L L l; v / PAL À 3 » Ld 7 Le 4 . + L _<. | { .: re dat do d 1h E L U M M E, k el LOL À s'il À UP # r La en * Es a OU PETIT PLONGEON DE LA MER /. DU NORD *. » Cinquième espèce. DRE TIENNE ENT An ja ou /oom en lappon veut dire boiteux, et ce nom peint la démarche chancelante de cet oiseau lorsqu'il se trouve à terre, où néanmoins il ne s’ex- pose guère , nageant presque toujours, et nichant à la rive même de l’eau sur les côtes désertes. Peu de gens ont vu son nid , et les Islandois disent qu’il couve ses œufs sous ses ailes cn pleine mer ; ce qui n’est guère plus vraisemblable que la cou- vée de l’imbrim sous eau. * Voyez les planches PP A n° 308 , la femelle, sous la dénomination de plongeon a 80r8° JOuge | de Sibérie. MEN 1 DES PLONGEONS. 183 Le lumme-est' moins grand que l’im: brim, et n’est que de la taille du canard Il a le dos noir , parsemé dé petits quarrés blancs , la gorge noire, ainsi que le de- vant de la tête, dont le dessus est cou- vert de plumes grises ; le haut du cowest garni .de semblables plumes grises , et paré en devant d’une longue pièce nuée de noir changeant en violet et en verd ; un duvet épais, comme celui du cygne, revêt toute la peau, et les Lappons se font des bonnets d'hiver de ces bonnes fourrures. ". k IL paroît que ces plongeons ne quittent. guère la mer du Nord, quoique de temps en temps, au rapport de Klein, ils se montrent sur les côtes de la Baltique , et qu'ils soient bien connus dans toute la Suède. Leur principal domicile est. sur les côtes de Norvége, d’Islande et de Groen- land ; ils les fréquentent pendant tout l'été, et y font leurs petits, qu'ils élèvent _avec des soins et une sollicitude singu- \lière. Anderson nous fournit à ce sujet des détails qui seroient intéressans s'ils étoient tous exacts. Il dit que la ponte 184 HISTOIRE NATURELLE n’est que de deux œufs , , et qu’ aussitôt qu'un petit lumme est assez fort pour quitter le nid, le père et la mère le con: duisent à L'edi l’un volant toujours au- dessus de lui pour le défendre de l'oiseau de proie, l’autre au-dessous pour le rece- voir sur le dos en cas de chûte, et que si, malgré ce secours, le petit tombe à terre, les parens s’y précipitent avec lui, et, plutôt que de l’abandonner, se laissent prendre par lés hommes ou manger par les renards, qui ne manquent jamais de guetter ces occasions, et qui, dans ces régions glacées et dépourvues de gibier de terre, dirigent toute leur sagacité et toutes leurs ruses à la chasse des oiseaux. Cet auteur ajoute que quand une fois les : lummes ont gagné la mer avec leurs petits , ils ne reviennent plus à terre ; 1l assure même que les vieux qui par hasard ont perdu leur famille, ou quiont passé le temps de nicher, n’y viennent Jamais, nageant toujours par troupes de soixante ou nr cent. « Si on jette, dit-il, un petit « dans la mer devant une de ces troupes, « tous les lummes viennent sur-le-champ DES PLONGEONS. 185 _ « l'entourer, et chacun s’empresse de l’ac- « ot : au point de se battre entre « eux autour de lui, jusqu’ à ce que le « plus fort l’emmène ; mais si par hasard « la mère du petit survient, toute la que- « relle cesse sur-le-champ , et on lui cède __«< son enfant. » TO A l'approche de l'hiver, ces oiseaux s’'éloignent et disparoissent jusqu’au re- tour du printemps. Anderson conjecture que, déclinant entre le sud et l’ouest, ils seretirent vers l'Amérique, et M. Edwards reconnoît en effet que cette espèce est commune aux mers septentrionales de ce continent et de celui de. l'Europe : nous pouvons y ajouter celles du continent de l'Asie ; car le plongeon à gorge rouge venu de Sibérie, et donné sous cette indi- cation dans nos planches enluminées , n° 308, est exactement Le même que celui de la planche 97 d'Edwards, que ce na- turaliste donne comme la femelle du lumme , d’après le témoignage non sus- pect de son correspondant M. Isham , bon observateur , qui lui avoit ra DpOHÉ l’un et l’autre de Groenland. 16 LL " N'a ‘ Nm "6 Vs VAUT (aa 186 HISTOIRE NATURELLE | Dans la saison que les lummes LR sur les côtes de Norvége, leurs différens, cris servent aux habitans de présage pour le beau temps ou les pluies ; c’est appa- remment par cetteraison qu'ils épargnent la vie de cet oiseau, et qu'ils n’aiment pas même à le trouver pris dans leurs filets. 7 Linnœæus distingue dans cette espèce une variété, et dit, avec Wormius, que le lumme niche à plat sur le rivage, au bord même de l’eau ; sur quoi M. Ander- son semble n'être pas d’accord avec lui- même *. Au reste, le Z4mb du Spitzherg * Tome I°* de son Histoire naturelle d'Islande ct de Groenland , page 93, il dit que le lumme niche sur les rives désertes au bord de l’eau, elle- ment qwil peut rentrer immédiatement de la mer dans son nid, et même boire restant assis sur ses œufs. Tome IT, page 52, 1l prétend que les lummes font leurs Hs sur les plus hauts rochers, et sur de petits morceaux saillans du roc: Ceute contrariété ne peut se concilier qu ’en disant que ces oiseaux savent placer leurs nids suivant que la côté leur offre pour cela une grève or ou des bords escarpés. , | DES PLONGEOGNS. 1:87 de Martens paroît, suivant l'observation de M. Ray , être différent des lummes du Groenland et d'Islande , puisqu "il a le bee crochu , quoique d’ aileitret son affection pour ses petits, la manière dont il les conduit à la mer en les défendant de l’oi- seau de proie , lui donnent beaucoup de rapports avec ces oiseaux par les habi- tudes naturelles; et quant aux /oms du navigateur Bareutz, rien n’empeéche qu’on ne les regarde comme les memes oiseaux que nos lummes, qui peuvent bien en effet fréquenter la nouvelle Zemble. L* _ LE HARLE#. Pramièle espèce. æ”- Lr harle , dit Belon, fait autant de dé-. gât sur un étang qu’en pourroit faire un bièvre ou castor : c’est pourquoi , ajoute- t-il, le peuple donne le nom de bièvre à cet oiseau: Mais Belon paroît se tromper ici avec le peuple, au sujet du bièvre ou castor, qui ne mange pas de poisson, mais de l'écorce et du bois tendre ; et c’est à la loutre qu’il falloit comparer cet oiseau ichthyophage , puisque de tous les ani- maux quadrupèdes aucun ne détruit atu- tant de poisson que la loutre. . | Le harle est d’une grosseur intermé- * Voyez les planches enluminées, n° 057, Je mâle, et n° 953, la femelle. Éd | En anglois, goosander, et la femelle , DE diver, sparling-foul ; en allemand, meer-rach , weltsch-eent ;-et sur le lac de Constance, gan ou ganner; en ttlic, autour du lac re gare ETNEY GAIÉ \ p | Tom16 LL 126 Leg 286 . SET LE BE AN MA c \ ra LP dément NA 1 PAR UN RON MNR Prend € à io ah Dre tr Ru NNICIE à ‘ HISTOIRE NATURELLE. 189 diaire entre le canard et l’oie : mais sa taille, son plumage et son volraccourci, lui donnent plus de rapport avec le ca- _mard. C’est avec peu de justesse que Ges- ner lui a donné la dénomination de »er- ganser(oie-plongeon), par la seule ressem- blance du bec à celui du plongeon , puis- que cette ressemblance est très-impar- faite. Le bec du harle est à peu près cylin- drique et droit jusqu’à la pointe, comme celui du plongeon : mais il en diffère en ce que cette pointe est crochue et fléchie en manière d’ongle courbe, d’une subs- tance dure et cornée ; et il en diffère en- core en ce que les bords en sont garnis de dentelures dirigées en arrière. La langue est hérissée de papilles dures et tournées en arrière comme les dentelures du bec; ce qui sert à retenir le poisson glissant, et même à le conduire dans le gosier de l'oiseau : aussi, par une voracité peu me- surée , avale-t-il_ des poissons beaucoup trop gros pour entrer tout entiers dans son estomac; la tête se loge la première dans l’œsophage , et se digère avant que le corps puisse ÿ descendre. oo HISTOIRE NATURELLE Le harle nage tout le corps submergé et la tête seule hors de l’eau ; il plonge pro: fondément, reste tent sous l’eau, et parcourt un grand espace avant de re- paroître. Quoiqu'il ait les ailes courtes , son vol est rapide , et le plus souvent il file au-dessus de l’eau, et il paroît alors presque tout blanc : aussi l’appelle-t-on harle blanc en quelques endroits, comme en Brie , où il est assez rare. Cependant ül a le devant du corps lavé de jaune pâle ; le dessus du cou avec toute la tête est d’un noir changeant en verd par reflets ; et la plume, qui en est fine, soyeuse, longue, et relevée en hérisson depuis la nuque jusque sur le front , grossit beau- coup le volume de la tête. Le dos est de trois couleurs , noir sur le haut et sur les grandes pennes des ailes , blanc sur les moyennes et la plupart des couver- tures, et joliment liséré de gris sur blanc au croupion; la queue est grise; les yeux, les pieds et une partie du bec sont rouges. Le harle est, comme on voit, un fort bel oiseau ; mais sa chair est sèche et 1 / PMU A RLETIU ‘ro mauvaise à manger *. La forme de son corpstest large et sensiblement applatie sur le dos. On a observé que la trachée- artère a trois renflemens , dont le der- nier , près de la bifurcation , renferme un labyrinthe osseux : cet appareil contient l'air que l’oiseau peut respirer sous l’eau. Belon dit aussi avoir remarqué que la queue du harle est souvent comme frois- sée ét rebroussée par le bout, et qu'il se perche et fait son nid , comme le cormo- ran , sur les arbres ou dans les rochers : mais Aldroyande dit au contraire ,etavec plus de vraisemblance, que leharle niche au rivage, et ne quitte pas les eaux. Nous n'avons pas eu occasion de vérifier ce fait: ces oiseaux ne paroissent que de loin à loin dans nos provinces de France ; et toutes les notices que nous en avons re- cues , nous apprennent seulement qu’il se trouve en différens lieux , et toujours en hiver. On croit en Suisse que son-appa- rition sur les lacs annonce un grandhiver; . * Belon rapporte le proverbe populaire, que qui voudroit régaler le diable , lux serviroit Bièvre #1 COTrmOraT. ; Lu ñ TP A , #43" D: | ‘192 HISTOIRE NATURELLE # "4 et quoique cet oiseau doive être assez connu sur la Loire , puisque c'est là, sui- vaut Belon , qu’on lui a imposé le nomde Aarle ou 4erle , il semble , d’après cet ob- servateur lui-même , qu'il se transporte en hiver dans des climats beaucoup plus méridionaux ; car il est du nombre des oiseaux qui viennent du Nord jusqu’en Égypte pour y passer l'hiver, suivant Be- lon, quoique , d’après ses propres obser- vations , il paroisse que cet oiseau se trouve sur le Nil en toute autre saison que celle de l'hiver , ce qui est assez dif- ficile à concilier. Dr. . Quoi qu'il en soit, les harles ne sont pas plus communs en Angleterre qu’en France ; et cependant ils se portent jus- qu’en Norvége, en Islande , et peut-être plus avant dans le Nord. On reconnoît le harle dans le gerr-fugl des Islandais ,auquel Anderson donne mal-à-propos le nom de vautour, à moins qu'on ne suppose que le harle , par sa voracité , est le vautour de la mer. Mais il paroît que ces oïiseaux n’habitent pas constamment la côte d’Is- lande , puisque les babitans , à chacune 7 D: TU TU TE & R'LE. 193 de leurs apparitions, ne manquent pas d'attendre quelque grand événement. Dans le genre du harle, la femelle est coustamment et ns ndent plus petite que le mâle. Elle en diffère aussi, comme dans la plupart des espèces d’oi- seaux d’eau, par ses couleurs : elle a la tête rousse et le manteau gris; et c’est de cette femelle , décrite par Belon sous le nom de bièvre , que M. Brisson fait son septième harle, comme on peut s’en con- vaincre eu comparant sa notice, page 254, et sa figure, planche 25, avec notre plauche enluminée , n° 953, qui repré- sente cette femelle. re \ RT 194 HISTOIRE NATURELLE LE HARLE HUPPÉ*. Seconde espèce. L > harle commun que nous venons de décrire , n’a qu’un toupet, et non pas une huppe : celui-ci porte une huppe bien formée, bien détachée de la tête, et com- posée de brins fins et longs , dirigés de l'occiput en arrière.ll est de la grosseur du canard ; sa tête et le haut du cou sont d’un noir violet changeant en verd doré ; la poitrine est d’un roux varié de blanc; le dos noir ; le croupion et les flancs sont rayés en zigzags de brun et de gris blanc; l'aile est variée de noir et de brun, de blanc et de cendré. Il y a des deux côtés de la poitrine vers les épaules , d’assez Jongues plumes blanches bordées de noir -qui recouvrent le coude de l’aile lors- * Voyez les planches enluminées, n° 207. L DU HARLE. 195 qu'elle ps pliée. Le bec et les pieds sont rouges. La femelle diffère du mäle en ce qu'elle a la tête d’un roux terne , le dos gris, et tout le devant du corps blanc foiblement teint de fauve sur la poitrine. Suivant Willughby, cette espèce est très-commune sur les lagunes de Venise; et comme Muller témoigne qu’on la trouve en Danemarck, en Norvége, et. que Linnæus dit qu’elle habite aussi en Lapponie , il est très-probable qu’elle fré- quente les contrées intermédiaires : et en effet Schwenckfeld assure que cet oiseau passe en Silésie, où on le voit au com- mencement de Res sur les étangs dans les montagnes. M. Salerne dit qu'il est fort commun sur la Loire : mais par la manière dont il en parle , il paroît l’a- voir très-mal observé. be RUES er LA Er | p 34 196 HISTOIRE NATURELLE Es carS LA PIETTE, O U LE PETIT HARLE HUPPÉ +. Troisième espèce. L, piette est un joli petit harle à plu-_ mage pie, et auquel on a donné quelque- fois le nom de religieuse, sans doute à cause de la netteté de sa belle robe blan- che, de son manteau noir, et de sa tête coiffée en effilés blancs, couchés en men- tonnière et relevés en forme de bandeau, : que coupe par-derrière un petit lambeaw de voile d’un violet verd obscur; un demi- | collier noir sur le haut du cou achève la parure modeste et piquante de cette petite religieuse ailée. Elle est aussi fort com- * Voyez les planches a n° 449 e: le ; Ant la femelle. # Tom 16 | PLATS Lay 196. à LA PIETTE oz LE PETIT HARLE HUPE.. ETC J: Le te -à ASS J y 4 ê ph A M. She de dat à ‘ FUMER c w De ne F. DU HARLE.. 197 mune ; sous le nom de piefle, sur les rivières d’Are et de Somme en Picardie, où il n’est pas de paysan, dit Belon, qui ne la sache nommer. Elle est un peu plus grande que la sarcelle, mais moindre que le morillon; elle a le bec noir et les pieds d’un gris plombé; l’étendue du blanc et du noir dans son plumage est fort sujette à varier, de sorte que quelquefois rl est presque tout blanc. La femelle n’est pas aussi belle que le mâle; elle n’a point de huppe ; sa tête est rousse, et le manteau est gris. | 17 pdt. ati prés à h _ 28 HISTOIRE NATURELLE. \ + 1 - AN ] LE HARLE A MANTEAU NOIR. . Quatrième espèce. , > ( Le N ous réunissons ici sous la même es- pèce le harle noir et le harle blanc et noir de M. Brisson, qui.sont les troisième et sixième harles de Schwenckfeld , parce qu'il nous paroît qu'il y a entre eux moins de différences que l’on n’en observe dans ce genre entre le mâle et la femelle, d’au- tant plus que ces deux harles sont à peu près de la même taille. Belon, qui en a décrit un sous Île nom de fiers, dit qu’on l'appelle ainsi parce qu’il est comme moyen ou eZ tiers entre la canne et le mo- rillon, et que les ailes, par leur bigar- rure , imitent la variété des ailes du mo- . rillon : mais il a tort de joindresonharle liers à cet oiseau, puisque le bec est en- tièrement différent de celui du morillon:; et quant à sa taille, elle est plus appro- dec d ‘BUHA R LE: 109 chante de celle du canard. Au reste, il a la tête, le dessus du cou , le dos, les grandes pennes de l'aile d le coupion noirs , et tout le devant du corps d’un beau blanc , avec la queue brune. Cette description convient donc en entier au. harle blanc et noir de M. Brisson, et elle convient également à son harle noir, ex- cepté qu’au cou de celui-ci on voit du rouge bai, et qu'il a la queue noire. Tous deux ont le bec et les pieds rouges. Schwenckfeld, en disant du premier qu'on, le voit rarement en Silésie , n’insinue pas que le dernier y soit plus commun, en observant qu'il paroît quelques uns dé ces oiseaux sur les rivières au mois de mars, à la fonte des glaces. 200 HISTOIRE NATURELLE nn LE HARLE ÉTOILÉ. Cinquième ps L, grande différence de livrée entre le mâle et la femelle dans le genre des harles a causé plus d’un double emploi dans l’é- numération de leurs espèces, comme on peut le remarquer dans les listes de nos amomenclateurs : nous soupconnons for- tement qu'il y a encore ici une de ces méprises qui ne sont que trop communes en nomenclature ; il nous paroît que l’es- pèce de ce harle étoilé, mieux décrite et mieux connue , ne sera peut-être qu’une femelle des espèces précédentes. Willugh- by le pensoit ainsi : il dit que ce même harle étoilé, qui est le r12ergus glacialis de Gesner , n’est que la femelle de la piette; et ce qui semble le prouver, c’est que le mergus glacialis se trouve quelquefois tout blanc ; particularité qui appartient à la : € SE he { RU TES RL E- |... S0R piette. Quoi qu’il en soit, M. Brisson tire la dénomination de arle étoilé, d’une tache blanche figurée en étoile que porte, à ce qu’il dit , ce harle , au-dessous d’une tache noire qui lui enveloppe les yeux ; le dessus de la tête est d’un rouge bai, le manteau d’un brun noirâtre ; tout le devant du corps est blanc, et l’aile est - mi-partie de blanc et de noir ; le bec est noir ou de couleur plombée, comme dans la piette ; et la grosseur de ces deux oiseaux est à peu près la même. Gesner dit que ce harle porte en Suisse le nom, de canard des glaces (y sentle), parce qu'il ne paroît sur les lacs qu’un peu avant le grand froid qui vient les glacer. 20% HISTOIRE NATURELLE | 42 * [ LE HARLE COURON L : Sivième espèce. ra ar Cr harle , qui se trouve en Virginie, est très-remarquable par sa tête couronnée d’un beau limbe, noir à la circonférence et blanc au milieu , et formé de plumes relevées en disque ; ce qui fait un bel effet, mais qui ne paroît bien que dañs l’oiseauw vivant, et que , par cette raison , notre planche enluminée ne rend pas. Onle voit dans la belle figure que Catesby a don- née de cet oiseau, qu'il a dessiné vivant. Sa poitrine et son ventre sont blancs ; le bec, la face , le cou et le dos , sont noifs; les pennes de la queue et de l’aile brunes; celles de l'aile les plus intérieures sont noires et marquées d’un trait blanc. Ce * Voyez les planches enluminées, n° 935, le mâle , sous la dénomination de Aarle huppé de Virginie ; n° 036, la femelle. NÉ* ggmse np #@}e HA -R- LE: 203 harle est à peu près de la grosseur du canard. La femelle est toute brune ; et sa huppe est plus petite que celle du mâle. Fernandès a décrit-l’un et l’autre sous le nom mexicain d’ecarototl, en y ajoutant le surnom de avis venti (oiseau du vent), sans en indiquer la raison. Ces oiseaux se trouvent au Mexique et à’la Caroline, aussi-bien qu’en Virginie, et se tiennent souvent sur les rivières et les étangs. [1 LÉ BP É L'ICANE Là Lr pélican est plus remarquable ,; plus intéressant pour. un naturaliste, par la hauteur de sa taille et par le grand sac qu’il porte sous le bec , que par la célé- brité fabuleuse de son nom , consacré dans les emblèmes religieux des peuples ignorans. On a représenté sous sa figuré la tendresse paternelle se déchirant le sein pour nourrir de son sang sa famille lan- guissante ; mais cette fable que les Égyp- tiens racontoient déja du vautour , ne devoit pas s'appliquer au pélican, qui vit. dans l’abondance*, et auquel la Nature/ WANT ne 08 S ce 1 Voyez les planches enluminées, n° 67 En latin, onocrotalus ; et en ancien latin, fruo : - en espagnol, groto; en italien , agrotio ; à Rome, truo ; et vers Sienne et Mantoue, agroiti; en an- gibis ; pélecage ; en allemand, Meergans, schnée- gans ; et en Autriche, okn-vogel. 2 Saint Augustin et saint Jérôme paroissent être les auteurs a l'application de cette fable, orjginai- rement Ferpoones ‘au péhcan. / Zom 16 zÔ . 204 AL A fu a] À LI aigue SJ à ed " PU (OP TS cree 1e DNS EE HISTOIRE NATURELLE. 205 à donné de plus qu'aux autres oiseaux pêcheurs une grande poche, dans laquelle | il porte et met en réserve l’amplé provi- sion du produit de sa pêche. | | Le pélican égale sde même surpasse’en grandeur le ‘cygne !, et ce seroit le plus grand des oiseaux d’eau si l'albatross n’étoit pas plus épais, et si le flam- mant n’avoit pas les jambes beaucoup plus hautes. Le pélican les a au contraire très-basses, tandis que ses aïles sont lar- gement étendues , que l’envergure en est _ de onze ou douze pieds ?. Il se soutient * donc très-aisément et très-long-temps _ dans l’air ; il s’y balance avec légéreté, etne change de place que pour tomber à plomb sur sa proie, qui ne peut échap- + M:Edwards estime celui qu'il décrit, du double plus grand et plus gros que le cygne. « Celui dont « parle Elbs éozt, dit-il, deux fois plus fort « qu'un gros cygne. » 7 ? Les pélicans décrits par MM.-de l'académie _dés sciences avoient onze pieds d’envergure; ce qui est, suivant leur remarque, le double des cygnes et des aigles, 1e | 18. r bé | per ; car. É LA re ui cela ml. étendue des ailes qui frappent etcouvrent la surface de l’eau... la font bouillonner, tournoyer, et étoyxdissenten méme temps le poisson ,.qui dès- lors ne pent fuir, C’ est de cette manière que les-pélicans péchent lorsqu'ils sont seuls: mais en, troupes ils savent varier leurs manœuivres.et agir de + concert; on les: voit se dispéser.en ligne | et nager de compagnie, en formant un grand. cercle qu'ils resserrent peu à peu pour y renfermer le poisson etse partager la,;capture à leur,aise: --:0b 6 8040" 4 Ces oiseaux prennent ,;;pour pécher, Ÿ les heures du matin et dii soir où Île | poisson..est le. plus en mouvement. et * choisissent les liéux où il estle plus. abon- dant ; c’est un spectacle de les voir raser l'eau, s'élever de quelques piques ! au- dessus , et tomber. le cou roide «et leur sac à demi plein, puis se relevantavec effort retomber de nouv eau, Let continuer ‘ce manége jusqu’ à ce, ue CE be- sace soit entièrement remplies ils, mont alors manger et digérer à l'aise sur'quél- . que pointe de rocher, où ils restent em L Di BU LR CSA NS TT bo repos et comme assoupis Jusqu'au soir. Il me paroît qu’il seroit possible de tirer parti de cet instinct du pélican , qui n’a- vale pas sa proie d’abord , mais l’accu- mule en provision , et qu’on pourroit en faire , comme du cormoran , un pécheur domestique; et l’on assure que lesChinois. y ont réussi. Labat raconte aussi que des sauvages avoient dressé un pélican qu'ils envoyoientle matin après l'avoir rougi de rocou , et qui le soir revenoit au carbet le sac plein de poissons, qu'ils lui faisoient dégorger. | | Cetoiseäu doit ètre un excellent nageur : il est parfaitement pa/mipède , ayant les quatre doigts réunis par une seule pièce de membrane ; cette peau et les pieds sont rouges ou jaunes suivant l’âge. Il paroît aussi que c’est avec l’âge qu'il prend cette belle teinte de couleur rose tendre et comme transparente , qui sem- ble donner à son plumage le lustre d’un vernis. Les plumes du cou ne sont qu’un duvet court ; celles de la nuque sont plus alon- : gées , et forment une espèce de crête ou A PA «1 A Ÿ LA Fi LA A D 208 HISTOIRE NATURELLE ES de petite huppe * , La tête est applatie les côtés ; les yeux sont petits et mc dans deux larges joues nues ; la queue.est | composée de dix-huit pennes. Les couleurs du bec sont du jaune et du rouge pâle sur un fond gris, avec des traits de rouge vif sur le milieu et vers l’extrémité; ce bec est applati en-dessus comme une large lame relevée d’uïte arête sur sa longueur , et se terminant par une pointe en éroe; 1e dedans de cette lame, qui faitla man- dibule supérieure, présente cinq nervures _saillantes , dont les deux extérieures forment des bords tranchans; la man- dibule inférieure ne consiste qu’en deux branchesflexibles qui se prêtent à l'exten- sion de la poche membraneuse qui leur est attachée , et qui pend au-dessous comme un sac en forme de nasse. Cette ‘poche peut contenir plus de vingt pintes de liquide ; elle est si large et si longue, 2 ET * C'est ce que Belon exagère dans sa figure, en lui donnant un panache , qu’il compare mal-à-propos à celui du vanneau ; en quoi Gesner et Aldrovande Pont suivi dans fi leurs. Celle de Gesner est en gore plus vicieuse, en ce qu'elle porte cinq doïgis. pu PÉLICAN 209 qu’ on y peut placer le pied , où y faire entrer le bras jusqu’au coude. Ellis dit avoir vu un homme y cacher sa tête; ce qui ne nous fera pourtant pas croire ce ue dit Sanctius u’un de ces oiseaux » q 3 laissa tomber du: haut des airs un enfant nègre qu'il avoit emporté dans son sac. Ce gros oiseau paroît susceptible de quelque éducation, et même d’une cer- taine gaieté, malgré sa pesanteur; il n'a En de farouche, et s’habitue volontiers avec l’homme *. Ge en vit wir dans l’île de Rhodes, qui se promenoit fami- lièrement par la ville; et Culmanun, dans Gesner, raconte l’histoire fameuse de ce pélican qui suivoit l’empereur Maxuni- lien, volant sur l’armée quand elle étoit cu be. et s’élevant quelquefois si haut, qu’il ne paroissoit plus que comme une hirondelle, quoiqu'il eût quinze pieds ( du Rhin) d’un bout des ailes à l'autre. | | / / * Rzaczynski parle d’un pélican nourri, pendant quarante ans à la cour de Bavière, qui se plaisow. Hanceup en compagnie, ct paroissoit prendre uæ p! laisir singulier à entendre Ge Ja musique. 18 LA 210 HIS TOIRE NATU E Cette grande puissance de vol seroit F, néanmoins étonnante dans un oiseau qui pèse vingt-quatre ou vingt-cinq livres , si elle n’étoit merveilleusement secondée par la grande quantité d’air dont som corps se gonfle, et aussi par la légéreté de sa charpente : tout son squelette ne pèse pas une livre et demie ; les os en sont si minces, qu'ils ont de la transparence ; et Aldrovande prétend qu'ils sont sags moelle. C’est sans doute à la nature de ces . parties solides qui ne s’ossifient que tard, que.le pélican doit sa PÉSTonse vie * L'on a, même Cobra qu’en captivité il vivoit plus long-temps que la plupart des | autres ciseaux. | | Au reste, ts pélican, sans être tout-à- fait hands nos contrées, y est pour- tant assez rare, sur-tout res l’intérieur des terres. Nos) avons au Cabinet les dé- pouiiles de deux de ces oiseaux, l’un tué * Turner parle d’un pélican privé qui yécut cinquante ans. On conserva pendant quatre vingie celui dont Culmann fait l’histoire, et dans sa vicil- Jesse il éioit nourri, par ordre de l’empereur, à quatre écus par jour. { + 4 DU PÉLICAN. 21 en Dauphiné, et l’autre sur la Saone * Gesner fait mention d’un qui fut pris sur le lac de Zurich, et qui fut regardé comme “un oiseau inconnu. il n’est pas commun dans le nord de l'Allemagne , quoiqu'il y en ait un grand nombre dans les pro- vinces méridionales qu’arrose le Danube. Ce séjour sur le Danube est une habitude ancienne à ces Oiseaux ; car Aristote les rangeant au nombre de ceux qui s’at- troupent, dit qu’ils s’envolent du Stry- mon, et que, s’attendant les uns les autres au passage de la montagne, ils vont s’a- battre tous ensemble et nicher sur les rives du Danube. Ce fleuve et le Strymon paroissent donc limiter les contrées où ils se portent en troupes du nord au midi dans notre continent; et c’est faute d’a- voir bien connu leur route que Pline les fait venir des extrémités septentrionales de la Gaule; car ils y sont étrangers , et paroissent l'être encore plus en Suède et dans les ciimats plus septentrionaux, du * M. de Piolenc nous mande qu’il en a tué un dans un marais près d'Arles; et M. Lottinger, ur autre sur un étang entre Dieuze et Sarrebourg. 212 HISTOIRE NATUR) LL moins si l'on en juge par le silence naturalistes du Nord; car ce qu’en dit. Olaïüs-Magnus , n’est urine compilation mal digérée de ce que les anciens ont écrit sur l'orocrotale, sans aucun fait qui prouve son passage OU son séjour dans les contrées du Nord.Il ne paroît pas même fréquenter l'Angleterre, puisque les auteurs de la Zoologie britannique me le comptent pas dans le nombre de leurs animaux bretons , et que Charleton rap- porte qu’on voyoit de son temps dans le parc de Windsor des pélicans envoyés de Russie. Il s’en trouve en effet, et même : assez fréquemment, sur les lacs de la Rus- sie rouge et de la Eithuanie , de même qu'en Volhinie, en Podolie et en Pokutie, comme le témoigne Rzaczynski, mais non pas Jusque dans Les parties les plus septen- trionales de la Moscovie, commele prétend Ellis. En général, ces oiseaux paroissent appartenir spécialement aux climats plus chauds que froids. On en tua un de la plus grande taille, et qui pesoit vingt- cinq livres, dans l' ile de Mayorque, près de la baie d’Alcudia, en juin 1975. Il en \ DO De NMUB EE RCA N>i1T 203 paroît tous les ans régulièrement sur les lacs de Mantoue et. d'Orbitello. On voit d'ailleurs par un passage de Martial , que: les pélicans étoient communs dans le territoire de Ravenne. On les trouve aussi … dans l'Asie mineure , dans la Grèce, et dans plusieurs endroits de la mer Médi- terranée et de la Propontide. Belon a même observé leur passage étant en mer, entre Rhodes et Alexandrie: ils voloient ev troupes du nord au midi, se dirigéant vers l'Égypte; et ce même observateur jouit une seconde fois de ce spectacle vers les confins de l’Arabie et de la Palestine. Enfin les voyageurs nous disent que les lacs de la Judée et de a yoeet les rives du Nil en hiver, ét celles du Strymou en été, vues du. A des.collines, paroissent "re tA par le grand nombre de pélicans qui ies couvrent. En rassemblant les témoignages des dif- férens navigateurs , nous voyons que les pélicans se trouvent dans toutes les con- trées méridiouales de notre continent, et qu'ils se retrouvent avec peu de diffé- rence et en plus grand nombre dans celles \ 214 HISTOIRE N À TU RE: _du nouveau monde. Ils contra dgert. muns en Afrique. sur les bords du Séné- gal et de la Gambra, où les Nègres leur donnent le nom dé pokko : la grande Ù langue de terre qui barre l'embouchure. | de la première de ces rivières, en est rem- | plie. On en trouve de méme à Loangoet : sur les côtes d’Angola, de Sierra-Leona et de Guinée. Sur la baie de Saldana ils sont imélés à la multitude d'oiseaux qui semble reinplir l'air et la mer de rare plage. On . les trouve à Madagascar , à Siam , à la Chine, aux îles de la Phi ét aux Philippines, sur-tout aux pécheries du grand lac de Manille. On en rencontre quelquefois en mer; et enfin on en a vu sur les terres lointaines de lPOcéan in- dien, comme à la nouvelle Hollande, où M. Cook dit qu'ils sont PURE grosseur | extraordinaire En Aiédiqis , on areconnu des péli- KL e— cans depuis les Antilles et la terre ferme, -TVisthme de Panama et la baie de Cam- péche, jusqu’à la Louisiane et aux terres ; voisines de la baie d'Hudson. On en voit vbs sur les îles et les anses inhaitees près de Saint-Domingue, et en plus grande quantité sur ces petites îles couvertes de la plus belle. verdure , qui avoisinent la Guadeloupe, et que différentes espèces d'oiseaux semblent s'être partagées pour leur servir de retraite..'une de ces îles a même été nommée l’//e aux grands gosiers. Ils grossissent encore les peuplades des oiseaux qui habitent l’île d’ Aves; la côte très-poissonneuse des Sambales les attiré en grand nombre ; et dans celle de Pana- ma on les, voit fondre en troupes sur les bancs de sardines que les. grandes marées y.poussent ; enfin tous.les écueilis et les îlets voisins sont couverts de ces oiseaux en si grand. nombre, qu'on en charge des, canots , et qu’on. en fond la graisse, dout on se sert comme d’ huile, Le pélican. pêche en eau douce comme en mer; et dès-lors on ne doit pas être surpris de,le trouver sur les grandes ri- vières ;: mais il est singulier qu'il ne s’en tienne pas aux terres basses et humides arrosées par de grandes.rivières, et qu il fréquente aussi les pays les plus secs comme l'Arabie «et la Perse, où il est . ef É » (LR = [7 AT 216 HISTOIRE NATURE L connu sous! le non dé porteur. nd cab}).Oua observé que comme il est CES à d'éloigner son nid des eaux trop fréquen- 4 tées par Îles Caravanes , il porte de très- loin de l’eau douce dans son sac à ses | petits. Les bons Musulmans disent très religieusement que Dieu a ordonné à cet oiseau de fréquenter le désert pour abreu- ver , au besoin , les pélerins qui vont à la Miébque ; cqune autrefois il envoya le corbeau qui ourrit Élie dans la solitude: Aussi les Égyptiens, en faisant allusion à la manière dont ce grand oiseau garde de l’eau dans sa ‘poche, P ont surnommé le chameau de la rivière. Au reste, il ne faut pas ériadée le pélican de Éithrie dont parle le docteur Shaw , avec le véritable pélican a puisque ce voyageur dit qu'il n est pas plus g gros qu’un vanneau. Il en est me: même du pélican de Kolbe , qui est P oiseau spatule. Pigafetta , après avoir bien reconnu le pélhican à La côte d’Angola, se trompe ef. donnant son nom à un oiseau de Loango à jambes hautes comme le hérom! Nous Bu aussi beaucoup que l'alcatraz, WU AA" 4 Le L PE DU PÉLICAN. 217 que quelques voyageurs disent avoir ren- contré en pleine mer, entre l’Afrique et. l'Amérique, soit notre pélican , quoi- que les Espagnols des Philippines et du Mexique lui aient donné le nom d’a/catraz; car le pélican s'éloigne peu des côtes, et. sa rencontre sur mer annonce la proxi- mité de la terre. Des deux noms pelecan et onocrotale que les anciens ont donnés à ce grand oiseau , le dernier a rapport à son étrange voix, qu'ils ont comparée au braiement d’un âne. Kiein imagine qu'il rend ce son. bruyant le cou plongé dans l’eau. Mais ce fait paroît emprunté du butor; car le péli- can fait entendre sa voix rauque loin de l’eau , et jette en plein air ses plus hauts cris. Élien décrit etcaractérise bien le péli- can sous le nom de cela; mais l’on ne sait pas pourquoi il le donne pour un oiseau des Indes, puisqu'il se trouve et sans doute se trouvoit dès-lors dans la Grèce. ed Le premier nom pelecan a été le sujet d’une méprise des traducteurs d’Aristote, et même de Cicéron et de Pline ; on a traduit pelecan par platea ,; ce qui a fait Oiseaux, XVI. 19 Re INyX nn 14 ni ÉTÉ bibi à 4 0 70) k ( JA 218 HISTOIRE NATURELLE confondre le pélican avec la spatule : “ et Aristote lui-même , en disant du pelecar qu'il rar des coquillages minces , et les rejette à demi digérés pour en séparer les écailles , lui attribue une habitude qui convient mieux à la spatule, vu la struc- ture de son œsophage ; car le sac du péli- can n’est pas un estomac où la digestion soit seulement commencée , et c’est im- proprement que Pline compare la manière dont l’onocrotale ( pélican ) avale et re- prend sés alimens, à celle des animaux qui ruminent. « nl n’y a rien ici, dit très- « bien M. Perrault, qui ne so dans le « plan général de l’organisation des oi- « seaux ; tous ont un jabot dans lequel « se resserre leur nourriture: ke pélican «l’a au dehors et le porte sous le béc , au « lieu de lavoir caché en dedans ét placé «au bas de lœsophage ; mais cé jabot « extérieur n’a point la chaleur digestive « de celui dés autres oiseaux , et le péli- « can rapporte frais dans cette poché les « poissons de sa pêche à ses petits. Pour « les dégorger, 1l ne fait que presser ce « saç sur sa poitrine; et c'est cet acte très- js 3 DU PÉLICAN. 219 « naturel qui peut avoir donné lieu à la « fable si généralement répandue, que le « pélican s'ouvre la poitrine pour nourrir « ses petits de sa propre substance. » Le nid du pélican se trouve communé- ment au bord des eaux ; il le pose à plate terre, et c’est par erreur et en confon- dant , à ce qu’il paroît, la spatule avec le pélican , que M. Salerne dit : Le il niche sur les arbres. Il est vrai qu'il s’y perche malgré sa pesanteur et ses larges pieds palmés ; et cette habitude, qui nous eñt moins étopnés dans les pélicans d'Amé- rique, parce que plusieurs oiseaux d’eau s'y perchent * , se trouve également dans les pélicans d’Afrique et d’autres parties de notre continent. | Du reste , cet oiseau, aussi vorace que grand déprédateur , engloutit dans une seule pêche autant de poisson qu'il en faudroit pour le repas de six hommes. Il avale aisément un poisson de sept ou huit livres ; on assure qu’il mange aussi * Voyez l’article des tinamous et des perdriæ de la Giuane, tome VIII de cette Histoire des oiseaux. 230 HISTOIRÉ RATUELE des rats et d’autres petits animiaur Pier | dit avoir vu avaler un petit chat vivant | par un pélican si familier, qu'il venoit au marché, où les pécheurs se hâtoient de lui lier son sac, sans quoi il leur enle- voit. subtilement PS PrE0mR de pois- son. Il mange de côté ; et quand on lui jette un morceau , il le happe. Cette poche où : il emmagasine toutes ses captures, est composée de deux peaux : l’interne est continue à la membrane de l’œsophage ; l’extérieure n’est qu’un prolongement de la peau du cou ; les rides qui la plissent servent à retirer le sac, lorsqu’étant vide il devient flasque. On se sert de ces poches de pélican comme de vessies pour enfer- mer le tabac à fumer : aussi les appelle- t-on dans nos îles , blagues ou blades, du mot anglois biddér, qui signifie vessie. On prétend que ces peaux préparées sont plus belles et plus douces. dé des peaux d'agneau : quelques marins s’en font des bonnets ; les Siamois en filent des cordes d'instrumens , et les pêcheurs du Nil se servent du sac, encore attaché à la mâ- À OR * LE. Fat à T4. à v A NN h AD: RTE NP ENS DU PÉLICAN. * 91 choire, i pour en faire des vases propres à rejeter l’eau de leurs bateaux , ou pour en contenir et garder ; car’ cette peau ne sepénètreninese corrompt par son séjour dans l’eau. Il semble que la Nature ait pourvu, par une attention singulière , à ce que le pélican ne füt point suffoqué quand ; pour engloutir sa proie, il ouvre à l’eau sa poche toute entière ; la trachée-artère, quittant alors les vertèbres du cou, se jette en devant, et s’attachant sous cette poche, y cause un gonflement très-sen- sible : en même temps deux muscles en sphincter resserrent l’œsophage de ma- nière à fermer toute entrée à l’eau. Au fond de cette même poche est cachée une langue si courte, qu’on a cru que l'oiseau n’en avoit point. Les narines sont aussi presque invisibles et placées à la racine du bec ; le cœur est très-grand; la rate très-petite; les cœcums également petits, et bien moindres à proportion que dans l'oie , le canard et le cygne. Enfin Aldro- vande assure que le pélican n’a que douze côtes, et il observe qu’une forte mein- 19 At PO UA NC eRAN : PET E ES ‘ v+ y PF: ne . n 222 HISTOIRE ! NATURELLE brane, fournie de muscles é épais, recouvre les nil des ailes. - Mais une observation très - intéressante. est celle de M. Méry et du P. Tachard, sur l'air répandu sous la peau du corps entier du pélican ; on peut même dire que cette observation est un fait général qui s’est manifesté d’une manière plus évidente dau le pélican , mais qui peut se recon- noître daus tous les oiseaux , et que M. Lorry, célèbre et savant médecin deParis, a démontré par la communication de l'air jusque dans les os etles tuyaux des plumes des oiseaux. Dans le pélican , Paix passe de la poitrine dans les sinus axil- laires, d’où il s’insinue dans les vésicules d'une membrane cellulaire épaisse etgon- flée, qui recouvre les muscles et enveloppe tout le corps, sous la membrane où les plumess’implantent ; ces vésicules en sont enflées au point qu’en pressant le corps de cet oiseau , on voit une quantité d'air fuir de tous côtés sous les doigts. C'est. dans l'expiration quel'air, comprimé dans la poitrine, passe dans les sinus , et de là se répand dans toutes les yésicules du DWPÉLICAN. 223 tissu cellulaire ; on peut même, en souf- flant dans la trachée-artère , rendre sen- sible à l'œil cette route de l'air, et lon conçoit dès-lors combien le pélican peut augmenter pee - ]à son volume sans prendre plus dé poids , et combien le vol de ce grand oiseau doit en être facilité. Du reste , la chair du pélican n'avoit pas besoin d’être défendue chez les Juifs comme immonde; car elle se défend d'elle-même par son mauvais goût, son odeur de marécage et sa graisse huileuse: néaumoins quelques navigateurss’en sont accommodés. VARIÉTÉS DU PÉLICAN. 7 ( Nous avons observé dans plusieurs articles de cette Histoire naturelle, qu’en général les espèces des grands oiseaux, comme celles des grands quadrupèdes, existent seules, isolées, et presque sans variétés; que de plus elles paroiïssent être ! par-tout les mêmes, tandis que sous chaque genre ou dans chaque famille de “petits animaux , et sur-tout dans celles des petits oiseaux , il y a une multitude de races, plus ou moins proches parentes, Dh mciioé on doune improprement le mom d'espèces. Ce nom espèce, et la no- tion métaphysique qu'il renferme, nous ‘éloignentsouvent de la vraicconnoissance des nuances de la Nature dans ses produc- tions, beaucoup plus que les noms de variété, de race et de famille. Mais cette filiation , perdue dans la confusion des “branches et des rameaux parmi les petites PRONÈRE L TO ON 1 258 espèces , se maintient entre les grandes ; car elles admettent tout au plus quelques variétés , qu'il est toujours aisé de rap- porter à l'espèce première , comme une branche immédiate à sa souche. L’au- truche , le casoar , le condor, le cygne, tous les oiseaux majeurs , n’ont que peu ou point de variétés dans leurs espèces ; ceux qu'on peut regarder comme les seconds en ordre de grandeur ou de foree, tels que la grue, la cigogne, le pélican, l’albatross, ne présentent qu’un petit nombre de ces mêmes variétés, comme nous allons l’exposer dans celles du péli- can , qui se réduisent à deux. 28 CINE POUR SEE 226 HISTOIRE NATURELLE } LE PÉLICAN BRUN#. Première variété. | Novs avons déja remarqué que le plu- mage du pélican estsujet à varier, et que, suivant l’âge, il est plus ou moins blanc, et teint d’un peu de couleur de rose : il semble varier aussi par d’autres circons- tances ; car il est quelquefois mêlé de gris et de noir. Ces différences ont été obser- vées entre des individus qui néanmoins étoient certainement tous de la mêmé es- pèce; or il y a si peu loin de ces mélanges de couleur à une teinte générale grise ou brune , que M. Klein n’a pas craint de. prononcer affirmativement que le pélican brun et le pélican blanc n'étoient que des variétés de la même espèce. Haus Sloane, qui avoit bien obServé les pélicans bruns d'Amérique , avoue aussi qu'ils lui pa- roissent être les mêmes que les pélicans * Voyez les planches enluminées , n° 957- DU PÉLICAN. 227 blancs. Oviedo, parlant des grands gosiers… à plumage cendré que l’on rencontre sur pères aux Antilles, remarque qu'il en trouve en même ge d’un fort PT blanc ; et nous sommes portés à croire que la couleur brune est la livrée des plus jeunes, ear l’on a observé que ces pélicans bruns étoient généralement plus pétits que les blancs. Ceux qu'on a vus près dela baie d'Hudson, étoient aussi plus petits et de couleur cendrée : ainsi leur blanc ne vient pas de l'influence du chimat froid. La même variété de couleur s’observe dans les climats chauds de lan- cien continent. M. Sonnerat, après avoir décrit deux pélicans des Philippines , l’un brun , l’autre couleur de rose, soun- conne comme nous que c'est le même oiseau , plus ou moins âgé ; et ce qui con- dirme notre opinion, c’est que M. Brisson mous à donné un pélican des Philippines qui semble faire la nuance entre les deux, ét qui n’est plus entièrement gris ou brun , mais qui a encore les aïles et une _ partie du dos de cette couleur, cet Le reste blanc, f TR AP uilatl 228 HISTOIRE NATURELLE. 3 “ . " + F LE PÉLICAN A BEC DENTE! É. Seconde variété. LS S 1 la dentelure du bec de ce pélican du Mexique est naturelle et régulière comme celle du bec du harleet de quelques autres | oiseaux , Ce caractère particulier sufhroit pour en ue une espèce différente de la première , quoique M. Brisson ne la donne que comme variété : mais si cette dentes lure n’est formée que par la rupture acci= dentelle de la tranche mince des bords du bec, comme nous l’avons remarqué sur le bec de certains calaos, cette diffé- rence accidentelle, loin de faire un ca- ractère constant et naturel, ne mérite pas même d'être admise comme variété; et nous sommes d'autant plus portés à le : présumer, qu'on trouve, selon Hernan- dès, dans les mêmes lieux, le pélican ordinaire et ce pélican à bec dentelé. VE RE a otre E » CPP LE CORMORAN, Paquet D. i LE CORMORAN: Le nom cormorar se prononcoit ci-de- vant cormaren, cormarin, et vient de cor- beau marin ou corbeau de mer. Les Grecs ap- - peloient ce mème oiseau corbeau chause*® ; cependant il n’a rien de commun avec le corbeau que son plumage noir, qui méme diffère de celui du corbeau en ce qu’il est duveté et d’un noir moins profond. Le cormoran est un assez grand oiseau à pieds palmés , aussi bon plongeur que 1 Voyez les planches enluminées, n° 927. Eu latin, corous aguaticus ; en italien, corvo marino ; en espagnol, cuervo calso ; en allemand, scarb , w'asser-rube; en anglois , cormorant ; dans quelques unes de nos provinces de France, crot-pescherot. mb 2 Phalacrocoraz , à la lettre, corbeau chauve. Daus Aristote, on lit sainplement corax : maïs c’est d’un oiseau d’eau qu’il s’agit ; et aux caractères que je philosophe lui donne, on reconnoît clairement le eormoran. 20 EN NT ds tai h a a #3 330 HISTOIRE Re nageur, et graud destructeur de poissôn. Il est à peu près de la grandeur de l'oie, * mais d’une taille moins fournie, plutôt mince qu'épaisse , et alongée par une d grande queue plus étalée que ne l'est À communément celle des oiseaux d’eau : cette queue est composée de quatorze plumes roides comme celles de la quéue « du pic; elles sont , ainsi que presque tout | le plumage, d’un noir lustré de verd. Le manteau est ondé de festons noirs sur un fond brun : mais ces nuances varient dans : différens individus; car M. Salerne dit que la couleur du plumage est quelquelois d’un noir verdètre. Tous ont deux taches blanches au côté extérieur des Jambes, avec une gorgerette blanche qui ceint le haut du cou en mentonnière, et il y a des brins blancs, pareils à des soies, hérissés sur le haut du cou et le dessus de la tête, dont le devant et les côtés sont chauves. Une peau également nue garnit le des- . Ê . «“ l£ sous du bec, qui est droit jusqu’à la À na Î À pointe, où il se recourbe fortement ent un croc très-aigu. Cet oiseau est mn petit nombre de ceux Fr Le DU CORMORAN. 23r qui ont les quatre doigts assujettis et liés ensemble par une membrane d’une seule pièce, et dont le pied, muni de cette large rame , sembleroit indiquer qu'il est très-grand nageur : cependant il reste moins dans l’eau que plusieurs autres o1- * scaux aquatiques dont la palme n’est ni aussi continue ni aussi élargie que la. sienne ; il prend fréquemment son essor, et se perche sur les arbres. Aristote lui attribue cette habitude , exclusivement à tous les autres oiseaux palmipèdes :néan- moins il l’a commune avec le pélican, le fou , la frégate, l’anhinga et l'oiseau du tropique; et ce qu'il y a de singulier, c'est que ces oiseaux forment , avec lui, le petit nombre des espèces aquatiques qui ont les quatre doigts entièrement en- gagés par des membranes continues. C’est cette conformité qui a donné lieu aux ornithologistes modernes de rassembler ces cinq ou six oiseaux en une seule fa- mille , et de les désigner en commun sous le nom générique de pélican *. Mais * Klein, Linné, ont formé cette famille : le 232 HISTOIRE NATURELLE ce n’est que dans une généralité scholas- tique, et en forçant l’analogie , que l’on peut, sur le rapport unique de la simili- tude d’une seule partie, appliquer le même nom à des espèces qui diffèrent autant entre elles que celle de l'oiseau du tropique, par exemple, et celle du véri- table pélican. Le cormoran est d’une telle adresse à pêcher, et d’une si grande voracité, que quand il se jette sur un étang, il y fait seul plus de dégât qu’une troupe entière d’autres oiseaux pécheurs. Heureusement 1 se tient presque toujours au bord de la ner , et il est rare de le trouver dans les contrées qui en sont éloignées. Comme il peut rester long-temps plongé, et qu'il nage sous l’eau avec la rapidité d’un trait, sa proie ne lui échappe guère, etilrevient presque toujours sur l’eau avec un pois- son en travers de son bec. Pour l’avaler, il fait un singulier manége ; il jette en l'air son poisson , et il a l’adresse de le recevoir la tête la première, de manière ” cormoran y figure sous le nom de pelecanus carbo; la frégate . sous celui de pelecanus aquilus , etc. / DU CORMORAN 23 que les nageoires se couchent au passage du gosier, tandis que la peau membra- neuse qui garnit le dessous du bec , prête et s'étend autant qu'il est nécessaire pour admettre et laisser passer le corps entier du poisson | qui souvent est fort gros en comparaison du cou de l'oiseau. Dans quelques pays, comme à la Chine, Ar 4 ) L] À » À Li ni du t'Q ? + f \ « 7 h À [N + , « “ + / { AU + | 2° LA DE L'OISEAU DU TROPIQUE. 279 « LE GRAND PAILLE-EN-QUEUE *. Première espèce. Crsr sur - tout par la différence de grandeur que nous pouvons distinguer les espèces ou variétés de ces oiseaux. Celui-ci égale ou méme surpasse la taille d’un gros pigeon de volière ; ses pailles ou brins ont près de deux pieds de lon- gueur , et l’on voit sur son plumage tout blanc de petites lignes noires en hachures au-dessus du dos, et un trait noir en fer- à-cheval. qui embrasse l'œil par l'angle intérieur ; le bec et les pieds sont rouges. Ce paille-en-queue, qui se trouve à l’île Rodrigue, à celle de l’Ascension et à Cayenne , paroît être le plus grand &e tous ces oiseaux. * Voyez les planches enluminées, n° 998, sous la dénomination de paille-en-queue de Cayenne. Li pa . die, a SEAL ts) ue t 4e 280 HISTOIRE RU «| # | nu PATENT LE PETIT PAILLE-EN-QUEUE *.. Seconde espèce. Csrur-cr n’est que de la taille d’un petit pigeon commun , ou même au-des- sous ; il a, comme le précédent , le fer-ä< cheval noir sur l'œil, et de plus il est . tacheté de noir sur les plumes de l’aile voisines du corps , et sur les grandes pennes : tout le reste de son plumage est blanc , ainsi que les longs brins. Les bords du bec, qui, dans le grand paille- eh-queue, sont découpés en petites dents de scie rebroussées en arrière, le sont beaucoup moins dans celui-ci. Il jette par intervalles un petit cri, chiric, chiric, et pose son nid dans des trous de rochers escarpés. On n’y trouve que deux œufs, # * Voyez les planches enluminées, n° 369, sous -a dénomination de parlle-en-queue de l'ile ‘do France. RON ET. AECRET po, DE L'OISEAU DU TROPIQUE. 281 _ suivant le P. Fewillée, qui sont bleuätres et un peu plus gros que des œufs de pi- geon. Par la comparaison que nous avons faite de plusieurs iudividus de cette se- conde espèce, nous avons remarqué à quelques uns des teintes de rougeâtre ou fauve sur le fond blanc de leur plumage; variété que nous croyons provenir de l’âge , et à laquelle nous rapporterons le paille-en-queue fauve de M. Brisson, avec d'autant plus d'apparence, qu'il le donne. comme plus petit que le paiile-en-queue blanc. Nous avons aussi remarqué des variétés considérables , quoiqu'indivi- duelles, dans la grandeur de ces oiseaux; et plusieurs voyageurs nousont assuré que les Jeunes n'ont pas le plumage d’un blanc pur , mais tacheté ou sali de brun ou de noirâtre. Ils diffèrent aussi des vieux, en ce qu'ils n’ont point encore de longs bee | à la queue, et que leurs pieds, qui doivent devenir rouges , sont d'un bleu pâle. Ce-'' pendant nous devons observer que quoi- que Catesby assure en général que ces oiseaux out les pieds et le bec rouges, 24 cela n’est vrai sans pa Li hit, pour ‘ l’espèce précédente. et la suivante; car. des celle-ci, qui est despèbe commune à l’île de France, le bec est jaunâtre où R one de corne , et les pieds sont noirs. is k LIT PAR Len , | À 4 DE L'OISEAU DU TROPIQUE. 283. LE PAILLE-EN-QUEUE A BRINS ROUGES"*. Troisième espèce. * Le deux filets ou longs brins de la queue sont, dans cette espèce , du même rouge que le bec ; le reste du plumage estblanc , à l'exception de quelques taches “noires sur l'aile près du dos, et du trait noir en fer-à-cheval qui engage l'œil. M. le vicomte de Querhoent a eu la bonté de nous communiquer la note suivante au sujet de cet oiseau, qu’il a observé à l’île de France. « Le paille-en-queue à filets « rouges niche dans cette île, aussi-bien « que le paille-en-queue commun ; le der- « nier dans des creux d’arbredela grande « le; l’autre dans des trous de petits îlets « du voisinage. On ne voit presque jamais * Voyez les planches enlumines, n° 979, sous la dénonination Ge paille-en-queue de Vile de France, AN: M a Naud j.: 284 HISTOIRE a TUPEUÉS à: «le paille-en-queue à filets rouges venir «à la grande terre; et hors le temps des «amours , le paille-en- queue commun … «ne la sé ibnfe aussi que rarement. Ils « passent leur vie à pêcher au large, et «ils viennent se reposer sur la petite île «< du Coin-de-mire, qui est à deux lieues « au vent de l’île de France, où setrouvent « aussi beaucoup d’autrés oiseaux de mer: « C'est en septembre et octobre que J'ai « trouvé des nids de païlle-en-queue; chia- «Cun ne contient que deux œufs d’un « blanc jauuâtre, marquetés de taches « rousses. On m'assure qu'il ne se trouve souvent qu'un œuf dans le nid du grand « paille-en-queue : aussi aucune de ‘ces « espèces ou variétés de ce bel oiseau du « tropique ne paroît étre nombreuse. » Du reste, ni l’une ni l’autre de ces trois espèces ou variétés que nous venons de décrire , ne paroît attachée spécialement à aucun lieu déterminé ; souvent ‘elles se trouvent les deux premières ou l'és deux dernières ensemble , et M. le vicomte de QREAOÈRE dit les avoir vues toutes. trois réunies à Pile de PAscension. L À = En | 4 ; Ze: k Le L JPauqut.: P DS, FO US. p. Le D xs tous les êtres bien organisés , l'instinct se marque par des habitudes suivies. qui toutes tendent à leur con- servation; ce sentiment les avertit et leur apprend à fuir ce qui peut nuire, comme à chercher ce qui peut servir an main- tien de leur existence et meme aux ai- sances de la vie. Les oiseaux dont nous allons parler, semblent n'avoir recu de la Nature que là: moitié ‘de cet instinct : grands et forts, armés d’un bec robuste, pourvus de ‘:T'rabe ailes et de pieds 4 - tièrement et largement palmés, ls ont tous les attributs nécessaires à l'exercice de leurs facultés, soit dans l'air ou dans l’eau. Ils ont donc tout ce qu'il faut pour * En anglois, 400by. (fou, stupide ),. d'où on a fait le nom de boubie, qui se lit si fréquemment dans les relations de la mer du Sud; par les Por- tugais des Indes; paxaros bobos, ou fols oiseaux; eu latin moderne et ée nomenclature, sula. NET v L 266 HISTOIRE NATURELLE agir et pour vivre, et cependant ils sem blent ignorer ce qu'il faut faire ou ne pas | faire pour éviter de mourir ; répandus d’un bout du monde à l’autre, et des mers du Nord à celles du Midi, nulle part ils m'ont appris à connoître leur plus dange- reux ennemi : l’aspect de l’homme ne les effraie ni ne les intimide ; ils se laissent prendre non seulement sur les vergues des navires en mer, mais à terre, sur les îlets et les côtes, où on les tue à coups de bâton, et en grand nombre, sans que la troupe stupide sache fuir ni prendre son essor, ni même se détourner des chasseurs, qui les assomment l’un après l’autre, et jusqu’au dernier. Cette indifférence au péril ne vient ni de fer- meté ni de courage, puisqu'ils ne savent ni résister ni sé défendre, et encore moins ‘attaquer , quoiqu'ils en aient tous les moyens , tant par la force de leur corps que par celle de leurs armes. Ce n’est donc que par imbécillité qu'ils ne se défendent. pas ; et de quelque cause qu’elle pro- vienne, ces oiseaux sont plutôt stupides que fous ; car l’on ne peut donner à la pe ES EF OUI: 287 plus étrange privation d’instinct un nom ne ne convient tout au plus qu’à l'abus qu'on en fait. Mais comme toutes les facultés inté- rieures et les qualités morales des ani- maux résultent de leur constitution , om doit attribuer à quelque cause physique cette incroyable inertie qui produit l’a- bandon de soi-même , et 1l paroît que cette cause consiste dans la difficulté que ces oiseaux ont à mettre en mouvement leurs trop longues ailes * ; impuissance peut-être assez grande pour qu'il en ré- sulte cette pesanteur qui les retient sans mouvement dans le temps même du plus pressant danger , et Jusque sous les coups dont on les fébpe, _ Cependant, lorsqu'ils échappent à la main de l’homme , il semble que leur manque de courage les livre à un autre ennemi qui ne cesse de les tourmenter ; cet ennemi est l’oiseau appelé /a frégate: * Nous verrons que la frégate elle-même, malgré Ja puissance de som vol , paroît éprouver une peine semblable à prendre son essor. Voyez ci-après l’article de cet oiseau. | 288 HISTOIRE NATURELLE elle fond sur les fous dès qu'elle les ap< perçoit, les poursuit sans relâche, etles à force |, à coups d'ailes et de bec, à lui livrer leur proie, qu'elle saisit et avale à l'instant ; car ces fous imbécilles et lâches ne manquent pas de rendre gorge “à la première attaque , et vont ensuite chercher une autre proie qu'ils perdent _ souvent de nouveau par la même pirate rie de cet oiseau frégate. | Au reste, le fou pêche en planant, les ailes presque immobiles, et tombant sur le poisson à l'instant qu “il paroît près de : la surface de l’eau. Son vol, quoique ra- pide et soutenu, l’est infiniment moins que celui de la frégate : aussi les fous s'éloignent-ils beaucoup moins qu’elle au large, et leur rencontre en mer annonce assez sûrement aux navigateurs le voisi- nage de quelque terre. Néanmoins quel- ques uns de ces oiseaux qui fréquentent les.côtes de notre nord, se sont trouvés dans les îles les plus lointaines et les plus isolées au milieu des océans; ils y ha-. bitent par peuplades avec les mouettes , les oiseaux du tropique, etc. ; et la fré- Doesrous li 4 Fe : TR Apr OR gate , qui les poursuit de préférence, n’a pas manqué de les y suivre. Dampier fait un récit curieux des hos- tilités de l'oiseau frégate, qu'il appelle _ Le guerrier, contre les fous , qu’il nomme Boubies *, dans les îles Alcranes, sur la côte d'Yucatan. « La foule de ces oiseaux « « « « « Ca L< « < La) « « « y est si grande , que Je ne pouvois, dit- il, passer dans leur quartier sans être incommodé de leurs coups de bec. F’ob- servai qu'ils étoient rangés par couplés; ce qui me fit croire que c’étoient le mâle et la femelle... .... Les ayant frappés, quelques uns s’envolèrent : mais le plus grand nombre resta ; ils ne s’envoloïrent point malgré les efforts que Je faisois pour les y contraindre. Je reimarquai aussi que les guerriers et les boubies laissoient toujours des gardes auprès de leurs petits, sur- tout dans le temps où les vieux alloient faire leur provi- sion en mer. On voyoit un assez grand nombre de guerriers malades ou estro= piés qui paroissoient hors d’état d’allex * C’est le mot anglois, 600oby, sot, stupide. Oiseaux, ZX VI. 29 290 HISTOIRE NATURELLE l« chercher de quoi Se nourrir : ils ne de- \ «meuroient pas avec les oiseaux de leur : « espèce ; et soit qu'ils fussent exclus de la société, ou qu'ils s’en fussent sépa- « rés volontairement , ils étoient disper= « sés en divers cod oite, pour y trouver « apparemment l’occasion de piller. J’en « vis un Jour plus de vingt sur une des «iles, qui faisoient de temps en temps : « des sorties en plate campagne, pour « enlever du butin; mais ils se retiroient « presque aussitôt. Celui qui surprenoit « une Jeune boubie sans garde, lui don- « noit d’abord un grand coup de becsur le dos pour lui faire rendre gorge, ce qu'elle faisoit à l'instant ; elle rendoit «un poisson ou deux de la grosseur du « poignet , et le vieux guerrier l’avaloit «encore plus vite. Les guerriers vigou- « reux jouent le même tour aux vieilles « boubies qu'ils trouvent en mer. J’en vis «un moi-même qui vola droitcontre une « boubie , et qui ; d’un coup de bec, lui « fit rendre un poisson qu’elle venoit d’a- « valer : le guerrier fondit si rapidement « dessus, qu’il s'en saisit en l'air avant _« qu'il fut tombé dans l’eau.» | y À à Lay L< Le) «. La) \ Le #8 DES E OUS: 207 C'est avec les cormorans que les oiseaux fous ont le plus de rapport par la figure et l’organisation , excepté qu’ils n’ont pas le bec terminé en croc, mais en pointe légèrement courbée ; ils en diffèrent en- core en ce que leur queue ne dépasse poiut les ailes. Ils ont les quatre doigts unis par une seule pièce de mi l’ongle de celui du milieu est dentelé intérieurement en scie ; Le tour des yeux est en peau nue ; leur bec, droit, conique, est un peu crochu à son extrémité, cet. les bords sont finement dentelés : les na- rines ne sont point apparentes; on ne voit à leur place que deux rainures en creux. Mais ce que ce bec a de plus remarquable, c’est que sa moitié supé- rieure est comme articulée et faite de trois pièces , jointes par deux sutures, dont la première se trace vers la pointe, qu'elle fait paroître comme un onglet détaché ; l’autre se marque vers la base du bec, près de la tête, et donne à cette moitié supérieure la faculté de se briser et de s'ouvrir en haut, en relevant sa pointe à plus de deux pouces de celle de la mandibule inférieure. | "AO 202 HISTOIRE : NATURELLE Ces oiseaux jettent un cri fort qui par À ticipe de ceux du corbeau et de loie; et. c’est sur-tout quand la frégate les pour- suit qu'ils font entendre ce cri, ou lors= qu’étant rassemblés ils sont saisis de quekw que frayeur subite. Au reste , ils por-" tent en volant le cou tendu et la queue * étalée. Ils ne peuvent bien prendre leur vol que de quelque point élevé : aussi se À perchent- -ils comine les cormorans. Dam- pier remarque même qu'à l'ile d’/ves 11s nichent sur les arbres, quoiqu’ailleurs on les voie nicher à ren , cttoujours” en grand nombre , dans un même Me tier ; car une communauté, non d'ins-" tinct, mais d’imbécillité, semble les ras- sembler. Ils ne pondent qu’un œuf ow « LA RS +” à .* M. Valmont de Bomare, en cherchant la rats son qui à fait donner à cet oiseau le nom de fou, se trompe bearcoup en disant qu'il est le‘seul dés palmiptdes qui se perche, puisque non seulement le cormoran, mais le pélican, Panbinga l'oiseau du tropique, se perchent; et ce qu est de plusm singulier, tous, ces oiseaux sont ceux. du genre le plus complétement palmipède, puisqu'ils ont Is quatre doigts liés par une MERE Note JUN \ 4 ‘1 DS TOUS... 20% deux. Les petits restent long-temps COU- verts d’un duvet très-doux et très-blanc dans la plupart ; mais le reste des parti- cularités qui peuvent concerner ces o1- seaux , doit trouver sa place dans l'énu< mération de leurs espèces. | ù \ AP he * #7 r A} LU if PETE LE FOU be ; Prernière espèce. . / ÿ C - Csr oisean , dont l’espèce paroït être la plus commune aux Antilles, est d’une taille moyenne entre celles du canard et de l’oie. Sa longueur, du bout du bec à celui de la queue, est de deux pieds cinq. pouces, et d’un pied onze pouces au bout des ongles ; son bec a quatre pouces et demi, sa queue près de dix. La peau nue qui entoure les yeux est Jaune , ainsi que la base du bec, dont la pointe est brune ; les pieds sont d’un Jaune pâle ; le ventre est blanc , et tout le reste du plumage est d’un en brun. | Toute simple qu'est cette livré ée, Cates-. by observe que seule elle ne peut avisé riser cette espèce , tant il s’y trouve de variétés individuelles. « J'ai observé, dit- «il, que l’un de ces individus avoit le « ventre blanc et le dos brun; un autre, | + « la poitrine blanche comme le ventre; «et que d'autres étoient entièrement __« bruns ». Aussi quelques voyageurs sem- blent avoir désigné cette espèce de fous par le nom d'oiseaux fauves. Leurchair est noire et sent le marécage ; cependant les matelots et les aventuriers des Antilles s’en sont*souvent repus. Dampier raconte qu'une petite flotte françoise qui échoua sur l'ile d’Aves, tira parti de cette res- source , et fit une telle consommation de ces oiseaux , que le nombre en diminua beaucoup dans cette île. On les trouve en grande quantité non seulement sur cette île d’Aves, mais dans celle de Remire, et sur - tout au Grand- Connétable, roc taillé en pain de sucre et isolé en mer , à la vue de Cayenne. Ils sont aussi en très-grand nombre sur les îlets qui ayoisinent la côté de la nouvelle Espagne , du côté de Caraque ; et il pa-, roît que cette même espèce se rencontre sur la côte du Bresil et aux îles Bahama , où l’on assure qu’ils pondent tous les mois de l’année deux ou trois œufs , ou quel- quefois un seul, sur la roche toute nue. "AIDES ro S: “Si LS 2er 1m AUDE L* } LE FOU BLANC Seconde espèce. 4 { Novs venons de remarquer beaucoup w de diversité du blanc au brun dans l’es- u . pèce précédente; cependant il ne nous” paroît pas que l’on puisse y rapporter . celle-ci, d'autant plus que du Tertre, qui a vu ces deux oiseaux vivans, les dis) tingue l’ un de l’autre. Ils sont en 'efettrès il | diérens. puisque l’un a blanc ce que” l’autre a brun , savoir, le dos, le cou cet. la tête, et que d’ailleurs celui-ci est un“ peu plus grand : il n’a de brun que les” pennes de l'aile et partie de ses cou vertures ; de plus, il paroît être moins stupide. Il ne se perche guère sur les arbres, et vient encore moins se faire | prendre sur les vergues des navyires. Ce pendant cette seconde espèce habite dans les mêmes lieux avec la première. On les POESIE OU S. 207 trouve également à l’ile de l’Ascension. «Ilya, dit M. le vicomte de Querhoent, _« dans cetteîle, des milliers de fous com- -« muns ; les blancs sontmoins nombreux : « on voit les uns et les autres perchés sur « des monceaux de pierres, ordinaire- «ment par couples ; on les y trouve à « toutes les heures , et ils n’en partent «que lorsque la faim les oblige d’aller « pêcher. Ils ont établi leur quartier-gé- « néral sous le vent de l'île; on les y ap- « proche en plein jour, et on les prend « mème à la main. Il y a encore des fous « qui diffèrent des précédens; étant en « mer par les 10 degrés 36 secondes de lati- « tude nord, nous en avons vu quiavoient « la tête noire. » ; ANA 2" TE 298 HISTOIRE NATURELLE he LE GRAND FOU. Troisième espèce. z C ET oiseau, le plus grand de son genre; est de la grosseur de l’oie, et il a six pieds d'envergure. Son plumage est d’un brun foncé , et semé de petites taches blanches sur la tête, et de taches plus larges sur la poitrine , et plus larges encore sur le dos; le ventre est d’un blanc terne. Le mâle a les couleurs plus vives que la femelle. Ce grand oiseau se trouve sur les côtes: de la Floride , et sur les grandes rivières de cette contrée. « Il se submerge, dit « Catesby, et reste un temps considérable « sous l’eau, où j'imagine qu'il rencontre. «-des requins ou d’autres grands poissons « voraces , qui souvent l’estrapient ou le « dévorent ; car plusieurs fois il m'est «arrivé de trouver sur le rivage de ces. « Oiseaux estropiés ou morts. » D'ES FOUS. 299 Ün individu de cette espèce fut pris dans les environs de la ville d’Eu, le 18 octobre 1772. Surpris très-loin en mer par le gros temps , un coup de vent l’avoit sans doute amené et Jeté sur nos côtes. L'homme qui le trouva n'eut, pour s’en rendre maître, d'autre peine que celle de lui jeter son habit sur le corps. On le nourrit pendant quelque temps. Les pre- miers Jours il ne vouloit pas se baisser pour prendre le poisson qu’on mettoit devant lui, et il falloit le présenter à la hauteur du bec pour qu'il s’en saisît. IL étoit aussi toujours accroupi et ne vou- Joit pas marcher ; mais peu après, s’ac- coutumant au séjour de la terre , il mar- cha , devint assez familier , et même se mit à suivre son maître avec importuni- té, en faisant entendre de temps en temps ua cri aigre et rauque. \ 300 HISTOIRE NATU LE PETIT FOU*. { £ \ Quatrième espèce. ". C. sr en effet le plus petit que nous connoissions dans ce genre d'oiseaux fous: sa longueur , du bout du bec à celui de. la queue, n suère que d’un pied et. demi. Il a la gorge, l'estomac et le. ventre blancs, et tout ie reste du plu- mage est noirâtre, Il nous a été envoyé de Cayenne. - : { * Voyez les planches enluminées, n° 073, sous” la dénomination de fou de Cayenne. RMRE SF OU S. 30 € " è sde és k “ ; LE PETIT FOU BRUN #*. L Cinquième espèce. Cxr-oisean diffère du précédent en ce qu'ii est entièrement brun; et quoiqu'il soit aussi plus grand , il l’est moins que le fou. brun commun de la première espèce. Ainsi nous laisserons ces deux espèces sépa- rées , en attendant que de nouvelles obser- vations nousindiquent s’il faut les réunir. Toutes deux se trouvent dans les mêmes . e LE « \ eux, et particulièrement à Cayenne et: aux îles Caribes. r * Voyez les planches enluminées, n° 974, sous la dénomination de fou brun de Cayenne. \ 26 LE FOU TACHETÉ*. Sixième, espèce. # \ pie ses couleurs, et mème par sa taille, cet oiseau poufroit se rapporter à notre + troisième espèce de fous, si d’ailleurs il. $ -n’en différoit pas trop par la briéveté des 1 ailes , qui même sont si courtes dans l'in- dividu représenté planche 986, que lon seroit tenté de douter que cet oiseau ap-. partint réellement à la famille des fous, si d’ailleurs les caractères du bec et des pieds ne paroissoient l’y rappeler. Quoi qu'il en soit, cet oiseau, qui est de la grosseur du us plongeon , a, comme lui, le fond Un plumage d’un PAR noi fête tout tacheté de blanc, plus fine- ment sur la tète, plus linge al sur le dos et les ailes, ne l’estomacetleventre : ondés de brunâtre , sur fond blanc. * Voyez les planches enluminées , n° 086, sous: la dénomination de fou tacheté de Cayenne. Frs “= D RÉ ART ee enr. ln LT x SEE re Ne | Dre A “DES FOUS. 30% LE FOU DE BASSAN : Septième espèce. 146 L':Lr de Bass ou Passan, dans le petit golfe d’Édimbourg, n’est qu’un très-grand rocher qui sért de rendez - - VOUS à Ces O1- seaux, qui sont d’une grande et belle Pépate On les a nommés fous de Bassan , parce qu’on croyoit qu'ils ne se trou- voient que dans ce seul endroit ; cepen- dant on sait , par le témoignage de Clu- sius et de Sibbald, qu'on en rencontre également aux îles de Féroé ?, à l'île 1: Voyez les planches enluminées, n° 276. En anglois ;soland goose. 2 Hector Boetius, dans sa Description de lE- cosse , dit aussi que ‘ces oiseaux michent sur une des îles Hébrides; mais ce qu’il ajoute, savoir, qu'ils y apportent pour cela tant de bois, qu'il fait l2 provision de l’année pour les habitans, paroit 304 :HISTOI RE NA TURELLE d’Alise et dans les autres îles F Cet oiseau est de la grosseur d'une oie 5 il a près de trois pieds de longueur 71 jet} plus de cinq d'envergure. Ilesttoutblanc, à l'exception des plus grandes pennes Pie l'aile, qui sont brunes ou noirâtres, et. du derrière de la tête , qui paroît tel de} jaune ?; la peau nue du tour des yeux | fabuleux , d'autant se il paro’ Fe ces oiseaux, à l’île de ‘Bassan, pondent, comme les autres fous d’A mériqué > sur la roché nues 70m 1 Quelques personnes nous assurent qu Al parc oît quelquefois de ces fous, jetés par les vents . sur les côtes de Bretagne, et même jusqu'au milreu des terres, et qu'on en a vu aux environs/de Paris: 0" 2e Je serois ienté.de croire que d'est uné’ marque & de vieillesse. Cette. taché, jaune est.de la même « nature que celle;qu'ont au bas du cou. les spatules ; « j'en ai vu en qui cette partie étoit presque dorée. « La même chose arrive aux poules blanches; élles « jaunissent eu vieillissant ». (Vote mes à par M. Ballon.) a, 4aOË e 114 oct it) Ray est de cet avis: quant : au AG de AS TE et, suivant Willughby, les petits, dans Je premier âge, sont marqués de brun ou de noiètre surule dos. pay dés up Are "an j} Li ti DS DES FOU Si 0 11, 26 est La 4 eau bleu , ainsi que le-bec., qui a jusqu’à six pouces de long, et qui s’ouyre au point de donnér passage à un poisson de la taille d’un gros maquereau ; et cet énorme morceau ne suffit pas tou- jours pour satisfaire sa voracité. M. Bail- lon nous a envoyé un de ces fous qui a été pris en pleine mer, et qui s’étoit étouHé lui-même en avalant un trop gros poisson |. Leur pêche ordinaire dans l’île de Bassan et aux Ébudes ,' est celle des harengs. Leur chair retient le goût du poisson ; cependant celle des jeunes, qui sont toujours très-gras ?, est assez bonne pour qu'on prenne la peine de les aller dénicher, en se suspendant à des cordes et descendant le long des rochers. On ne peut prendre les jeunes que de cette 1 Envoi fait de Montreuilssur-mer, par M. Bail- lon, en décembre 17773 mais c’est un conte que l’on fit à Gesner, de lui dire que cet oiseau voyant un nouveau poisson, rendoit celui quil venoit d'avaler, et ainsi n’emportoit jamais que le dernier qu’il eût pêché. 2 Gesner dit que les He font de la graisse de cet oiseau une espèce de très-bon onguent. 3%6.HISTOIRE NATURE AR. manière. Il seroit aisé de tuer es Ux à coups de bâton ou de pierres; ‘mais léur. chair ne vaut rien. Au resté, ils sont * tout aussi imbécilles que les autres fous. M Ils nichent à l’ile de Bassan ; dans les trous du rocher, où ils ne pondeént qu’ un œuf : le peuple dit qu'ils le couvent sim- plement en posant déssus ui de leurs pieds. Cette idée a pu venir de la largeur du pied de cet oiseau : il ‘est largement palimé, et le doigt du EE aitisi que l'extérieur, ont chacun près dé quatre pouces de longueur, et tous lés quatre sont engagés par une pièce entière de membrane. [a peau n'est point adhérente aux muscles, ni collée sur le corps; elle n’y tient ds par dé petits faisceaux de fibres placés à distances inégales, comme d’un à deux pouces, et capables de s’a- longer d'autant, de manière qu’en tirant la peau flasque elle s'étend commé une … membrane f et qu’en la souflant elle s’enfle comme un ballon. C’est l'usage que sans doute en fait Foiseau pour renfler * son volume et se rendre par-là plus léger À dans son vol. Néanmoins on ne découvre 1 ; 1 3 : _… De 7e « me Re Er - + RMS DÉS FOUS 307 # re pas de canaux qui communiquent du thorax à la peau; mais il se peut que V'air y parvienne par le tissu cellulaire, comme dans plusieurs autres oiseaux. Cette observation , qui sans doute auroit lieu pour toutes les espèces de fous, a été faite par M. Daubenton le jeune, sur un fou de Bassan envoyé frais de la côte de Picardie. Ces oiseaux, qui arrivent au printemps pour nicher rh les îles du nord, les quittent en automne, et, descendant plus au midi, se rapprochent, sans doute, du. gros de Lee espèces, qui ne quittent pas les régions méridionales; peut-être même, si les migrations de cette dernière espèce étoient mieux connues , trouveroit-on qu'elle_se ralhie et se réunit avec les autres espèces sur les côtes de la Floride, rendez-vous général des oiseaux qui : au cendent de notre nord} et qui ont assez de puissance de vol pour tr averser les mers d'Europe en Amérique. ï Ls meilleur voilier, le plus vîte de nos vaisseaux , là frégate, a donné son nom à l'oiseau qui vole le “pis rapidement et le plus constamment sur les mers. La fré- gate est en effet de tous ces navigateurs ailés celui dont le vol est le plus fer, le plus puissant et le plus étendu : balancé sur des ailes d’une prodigieuselongueur, se soutenant sans mouvement sensible, cet oiseau semble nager paisiblement dans l'air tranquille pour attendre l'instant de fondre sur sa proie avec la rapidité d'un | trait; et lorsque les airs sont agités par la teribeté, légère comme le vent, la frégate s'élève jusqu'aux nues, et va chercher le calme en s’élançant au-dessus des orages. Elle voyage en tout sens, en hauteur . < Voy ez les planches LÉ n° 061, sous la dénomination de grande frégate 7 Cayenne. En anglois, fregate bird; à la Jamaïque, man je war bird; en espagnol 7 rabihorcado. Re 6 ne Zl 22, Pag 808, LA FRÉGATE. F Joarquet D. a HISTOIRE NATURELLE. 309 _ comme en étendue; elle se porte au large à plusieurs Pince de lieues, et. fournit tout d’un, vol ces traites immenses, aux- quelles la durée du Jour ne suffisant pas, elle continue sa route dans les ténèbres de la nuit, et ne s'arrête sur la mer que dans les Le qui lui offrent une pâture abondante. | Les poissons qui. voyagent. en troupes dans les hautes mers, comméiles poissons volans, fuient par colonues.et s’élancent en l'air. pour échapper aux bonites aux dorades, qui les poursuivent, n’échappent point à nos frégates. Ce sont ces memes poissons, qui. les attirent au large. Elles discernent de :très-loin les endroits où passent leurs troupesen colonnes qui sont quelquefois si serrées, qu’elles font bruire les eaux et blanchir la surface dela mer: les frégates fondent alors du haut des airs, et, Hléchissant leur vol.de manière à raser l'eau sans la toucher, -elles enlèvent. en passant le. poisson qu’elles, saisissent avec le bec, les griffes, etsouvent avec les deux à la fois, selon qu'il se-présente, soit en nageant sur la surface de l’eau, ou bondissant dans l'air. LL 'OCIN", cu P* NN 310 HISTOIRE NATU RELLE Ce n’est qu entre les tropiques, oé un peu au-delà, que l’on rencontre là fré- gate dans les mers des deux mondes. Elle exerce sur les oiseaux de la zone torride une espèce d'empire: elle en force plu- sieurs, particulièrement les fous, à lui servir connre de pourvayeurs; les frap- pant d'un coup d’aile, ou les pincant ‘dé son bec crochuü,, elle leur fait dégorger le poisson qu'ils avoient avalé, et s’en saisit avant qu'il ne soit tombé. Ces hostilités lui ont fait dofiner par les navigateurs lé surnom de guerrier, qu’elle mérite à plus d’un titre, car son audace la porte à bra- ver l’hommé même. « En débarquant à « l’île de lAscension, dit M. le vicomte de « Querhoent, nous FrhéS entourés d'une « nuée de frégates. D'un Coup dé canne « J'en terrassai une qui vouloit meprenare « un poisson que je tenois à lä main; en « même teinps'plusieurs voloient à quél- « ques pieds au-dessus de la chauditré « qui bouilloit à terre pour en ‘énlever la « viande, cs une partie de l'équipage « füt alentour. _ Cette témérité dé la fr égdté tient autant. A ts: ds Y + \ \ VE ELA FRÉGATE: :: ÿr à la force de ses armes et à la fierté de son vol, qu’à sa voracité. Elle est en effet armée en guerre : des serres perçantes ; un bec terminé par un croc très-aigu ; les pieds courts et robustes, recouverts de plumes, comme ceux des oiseaux de proie ; le vol rapide, la vue percantèe ; tous ces attributs semblent lui donner quelque rapport avee l'aigle, et en faire de même le tyran de l'air au-dessus des ners. Mais du reste, la frégate, par sa conformation , tient beaucoup plus à l’élé- ment de l’eau; et quoiqu’on ne la voie presque jamais nager, elle a cependant les quatre doigts engagés par une mem- brane échancrée *; et par cette union de tous les doigts, elle se rapproche du genre du cormoran, du fou, du pélican , que l’on doit regarder comme de parfaits pal- mipèdes. P’ailleurs le bec de la frégate, très-propre à la proie , puisqu'il est ter- miné par une pointe percante et recour- bée , diffère néanmoins essentiellement * Dampier n’y avoit pas regardé d’assez Près » lorsqu'il dit qu'elle a les pieds Jaits comme ceuæ des autres oiseaux terrestres: x BR à d | 32 HISTOIRE NATURELLE du bec des oiseaux de proie en bne parce qu'il est très- long , un peu concaye A dans sa partie Dé AE , et que le croc placé tout à la pointe semble faire une’ pièce détachée, comme dans le bec des fous, auquel celui de la frégate ressemble “par ces sutures et par le défaut de na- rines Her na | La frégate n’a pas le corps plus gros qu'une poule ; mais ses ailes étendues ont huit, dix et jusqu’à quatorze pieds d'envergure. C’est au moyen de ces aïles prodigieuses qu’elle exécüte ses longues courses, et qu'elle se porte jusqu'au mi- lieu des mers, où elle est souvent Pa- nique objet du s'offré entre le ciel et l'o- céan aux regards ennuyés des maviga- teurs ; mais cette longueur excessive des ailes embarrasse l’oiseau guerrier comme ’ l'oiseau poltron , et empêche la frégate , : comme le fou , de reprendre leur vol lors- qu'ils sont posés , en sorte que souvent ils se laissent assommer au lieu de prendre leur essor. Il leur faut une pointe de ro- cher ou la cime d’un arlfre, et encore x'est-ce que par effort qu'ils s'élèvent en DE LA FRÉGATE, 313 partant. On peut même croire que tous césoïiseaux à pieds palmésquise perchent, ne.le font que pour reprendre plus aisé- ment leur vol; car cette habitude est « contraire à la structure de leurs pieds, et c’est la trop grande longueur de leurs ailes qui les force à ne se poser que sur des points élevés d’où ils puissent, ex partant, mettre leurs ailes en plein exer- cice. A _ Aussi les frégates se retirent et s’éta- blissent en commun sur des écueils élevés ou des îlets boisés, pour nicher en repos. Dampier remarque qu’elles placent leurs nids sur les arbres, dans les lieux seli- taires et voisins de la mer. La ponte n’est que d’un œuf ou deux ; ces œufs sont. d’un blanc teint de couleur de chair ; avec de petits points d’un rouge cramoisi. Les petits, dans le premier âge, sont cou- verts d’un duvet gris blanc ; ils ont les pieds de la même couleur , et le bec pres- que blanc : mais par la suite la couleur du bec change ; il devient ou rouge ou noir , et bleuâtre dans son milieu , et il en est de même de la couleur des doigts ; 2% d 314 HISTOIRE NATUREDLE la tête est assez petite et applatie en dess sus ; les yeux sont gratds , noirs et bril= 4 Le , et environnés d’une peau bleuâtres | Le mâle adulte a sous la gorge une grande membrane charnue d’un rougé vif, plus | cu moins enflée ou pendante. Personne n’a bien décrit ces parties; mais si elles n’appartiennent qu'au mâle, elles pour roient avoir quelque rapport à la fraise du dindon , qui s’enfle et rougit dans cer- tains momens d'amour ou de colère. On reconnoît de loin les frégates en . mer, non seulement à la longueur déme: surée de leurs ailes, mais encore à leur queue très-fourchue*.Toutleplumage est ordinairement uoir avec reflet bleuâtre, | du moins celui du mâle. Celles qui sont ; brunes, comme la petite frégate figurée dans Edwards; paroissent être les jeunes, et celles qui ont le ventre blanc sont les femelles. Dans le nombre des frégates vues à l’île de l'Ascension par M.le vicomte de Querhoent, et qui toutes étoient de law même grandeur , les unes paroissoient * Les Portugais ont donné à la frégate le nom de rabo forcago > à cause de sa queue très-fourchue. , Ÿ DE LA FRÉGATE. 315 toutes noires; les autres avoient le dessus du corps d'un brun foncé, avec la tête et le ventre blaues. LeS plumes de leur cou sont assez longues pour que les insu- laires de la mer du Sud s’en fassent des bonnets. Ils estiment aussi beaucoup ia graisse ou plutôt l'huile qu'ils tirent de ces oiseaux , par la grande vertu qu'ils supposent à cette graisse contre les dou- leurs de rhumatisme et les engourdisse= mens. Du reste , la frégate a ; commele fou , le tour des yeux dégarni. de plumes; elle a de même l’ongle du milieu dentelé intérieurement. Ainsi les frégates, quoi- que persécuteurs nés des fous, sont néan- moins voisins et parens ; triste exemple de la Nature; d’un genre d'êtres qui, comme nous , trouvent souvent leurs en nemis dans leurs proches! FÙ Fin du iome seizième. es a 19 A B LE Des articles contenus dans ce volume: J lv; EL HÜITRIER ; vulgairement la “pie de mer, MORE Ji Le coure-vite, 15: Le tourne-pierre , #7. Le merle d’eau, 21. La grive d’eau, 28. Le cauut, 30. ENT s: | | y É “ n. a Le râle de terre ou de gent, valgairement r roi des cailles, Je Le râle d’eau, 44. La marouette, 47. Oiseaux étrangers de l'ancien, continent qui ont rapport au râle , 51. | F Le uüklin, ou rûle des 1 pe 101. ’ Le tüuklin brun, as Le uklin rayé, 54. F Le tiklin à collier, 55. ' RE TABLE, : 317 OnL 3 Oiseaux étrangers du nouveau continent A rapport au râle, 56. | Le râle à long bec, ibid. . Le kiolo, 58. Le râle tacheté de Guyenne) EL!" Le rile de Virginie, 61. ré ie Le sale Didi bidi,, 62. 4 PSE PET : Le petit râle de Cayenne, 63, ! Le caurâle, ou petit paon des rofés:, 652 La poule d’eau ie Maieiann à GONE LS La poulette d'eau, 74 pi à La porzane, ou la grande poule. d'eau, TO La grinette, 77e La : simir"ing ; 70. fi La glout,, 79»: té les Oiseaux étrangers qui ont rapport, ke la poule d’eau , 60. La dei poule d’eau de Cayense 4 Le mitiek, 82. | ! Le kingalik, 84. | pin "Un Le jacana » 86. Le jacana noir, 92: Le jacana verd, 93. Le jacana-péca, 94. Le jacana varié, 96. 318. ur, RARE 1500 * La poule sultane, ou le porphyriow, 97. ET ) À Oiseaux qui ont rapport à la poule. sultane 107. La poule sultane verte, 109. Fr é* La poule soins a: no % 2 Re L'angoli, t11. ? La petite poule sultane, 213% La favorite, 115. L’acntli ; 116,: La foulque, LE9e La macroule, ou grande foulque, 124: La grande fouique à crète, 132.1 Les phaläropes, 133. Le phalarope cendré, 135. Le phalarope rouge, 137. #. Le de à festons ge 138. Le grèbe. : 139. là LES Re" Le petit ét ps : Le grèbe huppé; 147- 4 Le petit grebe huppé, 149. Le grèbe corou, 150. Le petit grèbe cornu, 152. Se Le grèhe duc-laart, 194. Le grèbe de la Louisiane, 155. Le suis à joues grises, ou le jongris ; 156, Le grand grèbe, aps "SET TABLE, Le castagneux, 159: Le castagneux des Philippines, 162. Le castagneux à bec cerclé, 164 Le castagreux de Saint-Domingue , 165, Le grèbe-foulque, 166. Les plongeons, 168. Le grand plongeon, 171. Le petit plongeon, 174. Le plongeon cat-marin , 176. . L’imbrim, ou grand plongeon de la mer du Nord, 179. . Le lumme, ou petit plongeon de la mer du Nord, 162. Le bare, 198. Le barle huppé, 194: ; La piette, ou le petit harle . buppé, 196,4 Le harle à manteau noir, 198. Le Parle étoilé, 200. Le harle couronné, 202, \ Le pélican, 204. Variétés du pélican, 224. Le pélican brun, 226. Le pélican à bec dentelé, 228, Le cormoran, 229, Le petit Dre a ou le nigaud , 238, M _ *: 4 : L . Je : *: - dx > | ' ÿ 4 à , 4°, 8 "A # » Eh: eur TABLE. * Les hirondelles de mer, 2460: Free picrre-garin, où la grande birondelle œ mer de nos côtes, 252. | » - La petite birondelle de. mer, 259. La quifette, 2615: | La guifette noire, ou lé épouvantail, Le Ki Le gachet, 266. D. "* L'hirondelle de mer des Philippines, 267. | L’hirondelle de mer à grande envergure, 268. La grande hirondelle de mer de Cayenne, 271. L'oiseau du tropique, ou Je paille-en-queue $ 274 Le grand paille-en-queue, 279. - ‘Le petit paille-en-queue, 280." 200 Le pailewiquens * à brins s rongés, LR +0 es fous , 285, Le fou commun, 294 Le fou blanc, 206. ni Le gran lou, 206. à Le petit fou , 3606.‘ : | LEE * Le petit fou brun, “30. LES Te te à Te fou tacheté, 302. LÉ e OISE + fou de Bassan , 303. LOUE 18e LS La fige, 3 be % DEL IMPRIMERIE DE PLASSAN, “42 81" TE Pa , + é | 3 9088 00769 6255