HARVARD UNIVERSITY LIBRARY OF THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZOÔLOGY GIFT OF THOMAS BARBOUR oJ:^i^n, l'ivi^ (LhuutaB Brirlimir (^ / Ù ty / V, s y ICHTHYOLOGIE ou HISTOIRE NATURELLE DES POISSONS. PREMIERE PARTI E, ] . IW INTRODUCTION. Vje n'est pas pour les savans seuls que j'ai com- posé cet ouvrage; j'ai songé en même tems à l'in- struction de ceux qui s'appliquent à l'économie rurale. Il est donc nécessaire, avant que d'en- trer en matière, de donner une explication des terniCb de l'art, de déterminer l'usage des diffé- rantes parties du corps des poissons, de nommer les instrumens qu'on emploie pour la pèche; enfm, d'enseigner les moyens généraux et les précautions nécessaires pour transplanter et aug- menter les poissons. Comme je me borne aux poissons dont je puis donner les ligures enluminées d'après nature, je ne crois pas devoir me soumettre ici exactement a l'ordre sys,fématique de iJnné. Je tacherai cepen- VI INTRODUCTION. dant de mV conformer autant qu'il me sera possi- ble, et je ferai en sorte de n'interrompre ni les genres ni les classes. Cependant comme je me propose aussi de considérer les poissons relative- ment à leur utilité pour les besoins de la vie, je commencerai par ceux qui sont les plus communs dans nos contrées et qu'on peut transplanter avec plus de facilité. Je prends le mot poisson selon le sens que l'usage y attache, et j'entends par -la tous les liabitans des eaux qui se meuvent dans cet élément. 11 s'ensuit de - là que je fais entrer dans mon plan les baleines et les amplii- bies nageans de Linné. Cet ouvi'age consiste- ra en six parties dont les quatre premières con- tiendront la description de 26^ poissons représen- tés sur 216 planches que l'on trouvera dans les deux dernières parties. Aussi y trouvera -t- on sur la i9Ul£. pb des figures bien remarquables et intéres- santes du développement des poissons dans l'œuf, et sur la circulation du sang en général. Ayant eu le bonheur de trouver dans tou- tes les quatre parties du monde des amis qui m'ont envoyé des poissons; de même celui d'avoir eu l'occasion de profiter des dessins faits par le père Plumier et par le Prince Maurice, en Amérique, je me suis trouvé en état de donner plusieurs nouvelles espèces. INTRODUCTION. Vil Je commencerai par donner quelques no- lions générales sur le corps des poissons. Le corps de la plupart des poissons est comprimé, c'est- à- dire, plus haut que large, comme dans le hareng; quelques-uns sont appla- tis ou plus larges que liauts, comme la sole; d'au- tres sont ronds comme l'anguille. La plupart ont au-dessus des mâchoires supérieures deux os connus sous le nom de moustache; qui se joi- gnent au milieu^ et que les poissons peuvc^nt avan- cer et retirer. Chez quelques uns ils sont ca- chés sous les lèvres, comme chez l'es labres qui ont des- lèvres grasses. Chez qaeh|ues-un^ com- me chez le sihire etle goujon on trouve la bouche garnie d'appendices veriuiformes, qu'an nomme cirrhes» Les poissons n'ont pas proprement des pau- pières ; mais au lieu de paupières, la nature a donné à plusieurs espèces, telles que la lote, une peau qui les remplace, que l'on nomme ; ineinhrane clignotante. Les opercules des oûics sont des deux côtés. Dans les poissons à écailles, ils sont ordinairement com- posés de deux ou trois lames osseuses; et dans d'autres, tel que l'anguille, ils sont membraneux. La membrane des ouïes est composée de rayons osseux ou cartilagineux, et placée à la gueule. Quelquefois elle est entièrement couverte par les VIII - ITCTRODUCTION. opercules comme dans les soles; d'autres fois elle ne l'est qu'à moilié, ou enfin elle est totalement decou/erte, comme au scorpion àç mer. Sous ces opercules on trouve à chaque côté, des ouïes qui consistent en un arc osseux ou cartilagineux, et en un double rang de franges, entre lesquels le sang circule dans des vaisseaux très -déliés. C'est par le moyen des ouïes que les poissons respirent. Ils attirent l'eau par la bouche et ferment un même tems l'ouverture des ouïes. Bientôt après le pois- son ouvTeles opercules, et l'eau en ressort à l'instant de la même manière que l'air sort des pou- mons par la respiration. De cette manière les ouïes sont dans les poissons, relativement à la circulation du sang, ce que les poumons sont dans les autres animaux pour l'inspiration de l'air. Le nombre des ouïes n'est pas toujours le même: la plupart des poissons en a 4. Les Lam- proies en ont 7. Les Raies et les Ftequins en ont 5. Les ouvertures de ces derniers sont étroites et appellées events. Ces évents sont en bas chez les Raies et au côté chez les Requins. La partie située en bas, entre la membrane des ouïes et l'ouverture de la bouche, se nomme menton. Le poisson n'a point de cou, sa tête est attachée immédiatement au tronc. Le corps de la plupart «des poissons est couvert de petites plaques bril- f INTRODUCTIOiSr. IX lantes de la nature de la corne qu'on nomme écailles. Quelques espèces, telles que le lièv^re marin, le tur]jot et l'esturgeon, ont au lieu d'e- cailles, des protubérances osseuses ou cartilapi- neuses; d'autres sont couverts de boucles comme les épinoches, d'autres enfm ont la peau entière- ment lisse et sans écailles, mais enduite d'une ma- tière visqueuse et gluante; comme le silure. Le tronc comprend la -poitrine y le ventre et la queue, La poitrine est séparée du ventre par une membrane blanche et brillante nommée dia- phragme. On ap-pelle ventre la. partie située en- tre la poitrine et l'anus; le reste du corps est ap- pelle queue. On désigne sous le nom de côtés, l'espace compris entre le ventre et le dos. On remarque sur les côtés une ligne qui va depuis la tète jus- qu'à la nageoire de la queue, appellée ligne la- térale. Les nageoires prennent leur nom des parties auxquelles elles sont attachées; ainsi l'on dit les nageoires dorsales, pectorales, les nageoi- res du ventre, de l'anus, et de la c|ueue. Les na- geoires dorsales sont tantôt simples comme dans le genre des carpes, tantôt doubles comme celles de la perche, tantôt triples comme celles de la morue. Quelques espèces, comme les saumons, ont une nageoire au dos, qui n'est qu'une mem- X INTRODUCTION. brane allongée, qu'on nomme nageoire adipeuse. Les nageoires de la poitrine sont toujours au nombre de deux. Elles sont placées près des ou- vertures des ouïes ; et le poisson s'en sert en guise de rames pour avancer dans l'eau. Dans quelques uns ces membranes sont tellement allongées, que le poisson peut, avec leurs secours, s'en servir com- me de deux ailes, pour se soutenir pendant quel- que tems en l'air; cependant il y en a qui n'en ont point du tout, comme la murène. 11 y a diverses espèces de poissons qui n'ont point de nageoires au ventre ; et par cette raison on les nomme apo- des ou sans pieds, telle est l'anguille. Les na- geoires du ventre sont pourles poissons des espèces ' de pieds dont ils se ser\^ent pour s'appuyer au fond del'eau. Cesnageoires sontsituéessouslapartiein- férieure du corps, mais leurplacen'est pas toujours déterminée. On les trouve tantôt sous le men- ton, tantôt à la poitrine ou au ventre. Dans le pre- mier cas,les poissons se nommentyw^w/a/rej; ce sont l'aigrefin et la lote; dans le second, on les appelle thoracl tiques telles que la perche et l'épinoche; dans le troisième, ils prennent le nom à'abdoini- nnux. On compte entr'autres dans cette dernière classe, le brochet, le saumon et la carpe. La nageoire de l'anus placée entre le ventre et la queue, contribue, avec celle du dos, à tenir le INTRODUCTION. XI poisson en équilibre. La nageoire de la queue termine la partie externe du poisson: le poisson s'en serve pour avancer, et diriger ses niouve- mens. La forme de la nageoire de la queue est variable: elle est ou droite ou arrondie ou four- chue, ou elle a la forme de croissant, comme on peut le v^oir à l'espadon, à la brème, à la tanche et au carassin. Toutes ces différences sont autant de marques distinctives qui servent à ranger les pois- sons en classes, en genres et en espèces. Les nageoires sont formées d'une peau soutenue par plusieurs rayons osseux ou car- tilagineux, et unies au corps par de cer- tains os particuliers. Elles sont traversées par divers muscles au moyen desquels le poisson peut les mouvoir en différens sens. Le nombre des rayons est très- varié et fournit un des princi- paux caractères qui servent à distinguer les espè- ces et les geni'es. Dans quelques - uns ils sont durs et pointus, et dans d'autres mous et pliants. Les poissons dont les parties les plus solides ne sont que cartilagineuses, comme celles delà lam- proie et du lièvre marin, ont aussi des rayons de la même nature. Outre les nageoires, il y a des pois- sons qui ont des appendices particulières, qui quand elles sont situées à lajpoitrine, prennent le nom de doigts comme dans le rpuget, Il y en a XII inthoductiox. d'autres qui ont immédiatement au-dessus des nageoires du ventre, une partie pointue et sépa- rée de la peau, nommée appendice ventrale. Elle sert à soutenir et fortifier la nageoire du ventre. La conformation des parties intërievues des poissons est différente, à bien des égards, de celle des autres animaux. La langue du poisson est cartilagineuse; et dans quelques espèces voraces, telles que les éperlans et les truites, elle est même garnie de dents ; d'autres n'en ont point du tout; ce qui fait croire que cet organe, chez les poissons, .est plutôt destiné à retenir la nourritu- re qu'à faire éprouver à l'animal le sentiment du goût. Pline a soutenu que les poissons éprou- vent la sensation de l'ouïe; et quoiquil se soit élevé dans la suite plusieurs doutes à ce sujet, la chose paroît cependant assez bien démontrée de nos jours. Quant aux sens de l'odorat et du tou- cher, on n'a jamais douté que les poissons n'en fussent pourvus; quelques-uns même, comme le scorpion marin, poussent un cri quand on les touche. Le cœur des poissons est triangulaire, n'a qu'une oreillette, et ne forme que du sang froid. Le canal des intestins est le plus souvent court, sur-tout dans les poissons voraces; et dans un grand nombre, l'estomiic n'est point séparé des IN'J'I\0DUCT10N. XIII intestins, comme clans les carpes. Le saumon, la perche et plusieurs autres poissons, ont près de l'es- tomac de petits intestins ou appendices, destines à retenir plus lon.a>tems la nourriture dans le corps, ces petits intestins sont par conséquent les princi- paux organes de la nutrition. Le poisson étant un corps compact, il est plus lourd que l'élément dans lequel ilestyjorté: ilresteroitpar conséquent tou- jours au fond, s'il n'étoit pas pourvu d'une vessie qu'il-peut rem j)lir d'air à son gré. En elTet, on remar- que dans les T)oissons un cana], que Ton nomme vésicule aérienne, et qui sert à introduire et à re- jetter l'air. Le poisson peut au'ssi, par le moyen de cette vésicule, (en y introduisant plus ou moins d'air) se rendre, à son gré, plus ou moins pesant que l'eau, ou rester en équilibre a\'ec elle. Les œufs des poissons sont très -petits en comparaison de ceux des autres animaux: j'en ai vu de la grosseur d'un pois et de celle d'une noi- sette dans les truites, et dans quelques silures. Il n'en est pas de même de la quantité; les poissons surpassent, à cet égard, les autres ani- maux; ils en font tous les ans un très - grand nombre; et j'en ai souvent compté cent mille et plus, dans un poisson qui ne pesoit qu'une livre. On admireici les sages dispensations du Créateur, qui a voulu prévenir parla, et la manière incertaine dont XIV INTRODUCTION. les œufs sont fecon(Jes, et les dangers continuels auxquels ils sont exposés, soit par les inondations et les tempêtes, soit par la quantité d'animaux voraces, qui sont avides, et des œufs et des petits. Les œufs des poissons ne sont pas fécondés com- me ceux des autres animaux dans le ventre de la mère: lorsque la femelle les a jettes, le mâle la suit, pour y répandre la liqueur séminale qui sort de ses laites; mais comme il n'y a que la plus petite partie des œufs qui reçoive cette liqueur, la plupart restent stériles. D'ailleurs les poissons jettent leurs œufs sur toutes sortes de corps, qui, souvent portés hors des bords par les tempêtes où par l'agitation des vagues, laissent le frai sur le rivage: les œufs et les petits périssent en grande partie quand les eaux se retirent. Un froid subit empêche aussi souvent la femelle de frayer, ou glace le sang dans les petits, nouvellement éclos. Une partie des œufs devient aussi la proie des épi- noches, de l'anguille et des autres poissons vora- ces. Les oiseaux aquatiques même, ne dédaignent pas cette nourriture. Une partie des œufs reste souvent au fond de l'eau sans éclorre, faute de chaleur. En général, on trouve que dans les poissons, les espèces voraces sont non seulement plus nombreuses que parmi les animaux terrestres et les oiseaux, mais qu'elles sont aussi plus avides INTRODUCTION. XV et plus insatiables, en ce qu'elles n'épargnent pas même leur propre espèce ; ce que les autres ne font que lorsque la faim les y force. Ajoutez à cela, la quantité de moyens que l'iiomme a ima- ginés pour s'emparer des poissons, et vous con- viendrez, que des animaux exposés à tant de dan- gers, auroient trouvée leur ruine totale depuis longtems, si la prévoyance du Créateur n'eût pré- venu la perte des espèces par la quantité innom- brable d'œufs dont il a fécondé les femelles. Les œufs dans quelques poissons, sont renfermés dans un, et chez la plupart, dans deux espèces de sacs, qu'on nomme ovaires, situés devant la vési- cule aérienne; et l'on voit auprès de l'anus une ouverture particulière, nommée nombril, qui sert à leur passage. La laite du mâle est tou- jours double. Si, dans le tems du frais, on en met sur un morceau de verre, autant qu'on en peut tenir sur la pointe d'ime aiguille, et qu'après l'avoir dé- layé dans une goutte d'eau, on la regarde au mi- croscope, on y découvre une grande quantité de petits corps organiques qui se meuvent. La li- queur séminale sort aussi par le nombril. On trouve plusieurspoissons qui sont vivipares, comme la lo te vivipare (pi. 72), le perce-pierre de llnde (pi. 163), et le gros yeux. Les autres viscères qui concou- rent aussi à la digestion des poissons et à la for- . XVI lIsTiVODUCTiOi\. niation du chyle, sont le foie et la vésicule du jQel. Il y a quelque tems que Mr. Guillaume Heuson y a découvert des vaisseaux lymphati- ques. Dans les poissons, l'urine est aussi filtrée par les reins et sort par le nombril. Les parties les plus solides des poissons sont osseuses dans les uns, cartilagineuses dans d'autres. Ils ont à répine du dos plus d'articulations et de vertèbres que les quadrupèdes et les oiseaux. Dans quel- ques-uns, comme dans l'anguille, j'en ai compté jusqu'à 90 ; ce qui ne contribue pas peu à la légè- reté de leurs mouvemens. Les poissons parviennent à un âge très-avan- cé ; et quand ils sont bien nourris, ils croissent promptement. Les diverses espèces de poissons se plaisent dans des endroits difFérens. Un grand nombre, comme la baleine, restent toujours en pleine mer. Dans le tems du frai, qtielques poissons, comme l'aigrefîn, cherchent les côtes et les rochers; d'autres, comme le saumon, quittent alors la mer, et remontent les lleuves. Il y a quel- ques espèces de poissons qui ne peuvent vivre que dans les eaux douces et coidantes: telles sont les loches etc. ; d'autres ne peuvent souffrir que l'eau des lacs, comme le carassin. La plupart cher- ' client leur nourriture pendant le jour; quelques espèces, comme l'anguille, ne la cherchent que \ INTRODUCTION. XVII pendant la nuit. Il y a plusieurs espèces de poissons qui vivent dispersées, comme le brochet; il y en a d'autres qui aiment à aller en troupes, sur- tout dans le frai: telles sont les rosses et les brèmes; d'au- tres enfin, comme le hareng et le saumon, entre- prennent des voyages considérables^ Les poissons fesant une grande partie de notre nourriture, ont forme dans tous les tems, une branche de commerce* A cet égard, ils méritent assurément l'attention des économes. Les digues, les chaussées et les autres ouvra»- ges que l'on construit sur les rivières, ne contri- buent pas peu à diminuer le nombre des poissons. D'un autre côté le luxe et l'avidité des riches engloutissent de plus en plus les espèces» Ce- pendant on n'a presque pas encore pensé jusqu'ici à les transporter, pour les faire multiplier dans d'autres contrées. Les poissons qui trouvent tou* jours dans les eaux une température conforme à leur nature, sont bien moins sensibles au chan* gement de climat que les quadrupèdes et les oiseaux* Que Ton transplante un poisson d'un pays chaud, où les eaux ne gèlent jamais, dans un pays froid ou leur surface est couverte de glace; il évi* tera en partie les inconvéniens de ce changement et de la rigueur du climat, en se tenant totijours XVIll INTRODUCTION. au fond de l'eau. Toutes les contrées offrent aussi dans certaines saisons, aux poissons, une températu- re assez chaude pour favoriser leurs amours et leurs pontes, et pour faire éclorre heureusement leurs œufs^ Avantage que la nature semble avoir re- fusé aux quadrupèdes et aux oiseaux: c'est ce que Texpérience a suffisamment confirmé. Ainsi les carpes se sont naturalisées en Dannemarck, en Suède, en Hollande et en Angleterre. Le sterlet s'est accoutumé au climat de la Suède et de la Poméranie; la carpe dorée de la Chine, s'est accommodée des étangs des principales villes de l'Europe. Mais pour réussir dans la trans- plantation des poissons, il faut observer s'ils aiment les eaux courantes ou dormantes, s'ils sont ac- coutumés à un fond de marne, de pierre, de sable, de glaise, ou à un fond couvert d'herbages. En général, toutes les espèces de poissons se plaisent dans des lacs d'une profondeur considérable, où il se trouve des sources ou des eaux courantes qui les traversent, et dont le fond est diversifié par du sable, de la glaise et des herbages. Les lacs dont les bords sont élevés, sont moins propres à recevoir de nouveaux poissons que ceux dont le rivage est bas et uni. L'élévation des bords em- pêche les rayons du soleil de porter dans le fond assez de chaleur pour y faire éclorre heureuse- INTRODUCTION. ' XIX ment les œufs. Cependant on peut mettre des poissons dans ces sortes de lacs, pourvuqu'on ait soin d'y construire, près des bords, des viviers de planches. Ces sortes de viviers doivent être lar- ges, plats et découverts. Les cloisons des cotés doivent être posées de manière qu'on puisse les ôter après le tems du frai. Le fond et les côtés seront garnis de branchages de sapin, oii les pois- sons pourront se frotter et déposer leurs œufs. Le tems le plus favorable pour transpor- ter des poissons, est celui où ils sont sur le point de frayer. Si l'on veut faire multiplier plusieurs espèces à la fois, il est de la prudence de donner à chacune un réservoir particulier, où les pois- sons aient un espace proportionné à leur gros- seur et à leur nombre. Après le frai, on tire les poissoîiis du vivier avec un épervier ou autre filet, et on les met ailleurs. Alors on écarte les bran- chages, afin d'exposer autant qu'il est possible aux rayons du soleil, les œufs fécondés, et de leur procurer la chaleur qui doit les faire éclorre* Cette manière de multiplier les poissons dans de nouvelles eaux, pouvant en produire une quanti- té prodigieuse, au moyen de quelques individus seulement, doit être employée sur-tout à l'égard des poissons rares, ou de ceux que l'on trouve dans des contrées éloignées» Onyréussijroitbienplusfa- b a XX INTRODUCTIOX. sèment de la manière suivante: Il faut prendre, peu de tems après le frai, des herbages, ou des pierres contre lesquels les poissons ont déposé leur frai, et les transporter dans d'autres eaux pour y éclori'e. Jai fait éclorre de cette inanière plusieurs œufs de poissons dans ma chambre com- me des œufs de carpe de brème etc. Ce ne sont pas seulement les lacs profonds et à bords unis, dans lesquels on peut mettre de nouveaux poissons: les eaux troubles et bourbeuses recevront des sibèles et des tanches. Il faut aussi avoir égard à la saison en transportant des poissons. Le printems et l'automne sont les plus favorables. En Été, la chaleur et les orages qui peuvent sur- venir, font mourrir les poissons. Il faut encore faire attention à l'espèce de poissons qu'on veut transporter. Ceux qui ont la vie dure, comme l'anguille, la brème et la carp-e, n'exigent pas tant de précautions que ceux qui, comme le san- dre, l'éperlan et l'ablette, meurent quelque tems après être sortis de l'eau. Quelques-uns, comme les loches et les truites, ont la vie si foible qu'ils meurent dès que l'eau, dans laquelle on les met, est un peu tranquille. Ainsi il est nécessaire que les vaisseaux dans lesquels on les transporte soient toujours en mouvement, même lorsque la voi- ture qui les porte est arrêtée, et il est fortpru- INTPlODUCTIOîC. . XXI dent, dans les grandes chaleurs, de ne voyager que pendant la nuit. Une autre précaution enco- re, est de ne point trop remplir les tonneaux, aiin qu'ils ne se blessent pas la tète lorsqu'ils montent précipitamment vers le haut. Pour transporter environ un quintal de poisson, il faut un tonneau qui contienne au moii^is vingt seaux d'eau. Dans un Ions; vova2:e, il faut de tems en tems changer l'eau courante, sur- tout lorsqu'on transporte des poissons tels que les truites et les loches, qui sont accoutumées à ces eaux. Aussi faut -il avoir soin en Été de ne remplir les ton- neaux qu'à moitié, parceque dans les grandes chaleurs, ils ont besoin, plus que jamais, d'air frais. En général, il faut, dans toutes les saisons, laisser à l'air une libre entrée dans les vaisseaux. - Ce- pendant en laissant le trou du bondon ouvert, il ftint prendre garde qu'un mouvement trop violent n* ii fasse jaillir l'eau, ou ne lui communique trop d'agitation; car dans ces deux cas les poissons poussés les uns contre les autres, peuvent être blessés et périr. 11 est facile de prévenir la trop grande agitation de l'eau, en mettant dans les tonneaux une couronne de paille, ou quelques petites planches minces. On empêche aussi l'eau de jaillir, en adaptant au trou du bondon un tuyau quarré de bois. Ce tuyau d'environ un XXII INTRODUCTION. pied et demi de long, doit Hnir en pointe par le haut, être assujetti au trou du bondon par de pe- tites lattes, et avoir par le haut plusieurs petits trous, afin de laisser à l'air la communication li- bre. D'ailleurs, en prennant les poissons, il faut prendre garde de ne pas les heurter et de ne pas les presser trop fort dans les mains. En général, il vau^ droit mieux, quand l'éloignement n'est pas trop considérable, porter les poissons, que de les voitu- rer. Pour empoissonner, il faut prendre des pois- sons qui soient un peu grands, ou qui soient âgés de trois à quatre ans, et mettre deux mâles pour une femelle. Les poissons d'un an sont encore trop jeunes pour cet usage. Quand on veut trans- planter des poissons voraces, il faut y joindre ceux qui leur servent ordinairement de nourriture; et on préfère, à cet usage, ceux dont on fait peu de cas pour les tables: tels que la rosse, la bordeliè- re et la gibèle. On y met aussi l'éperlan et le goujon, qui se plaisent dans les mêmes eaux que les poissons voraces, Comnxe il est important à l'économe de connoître les instrumens dont on se sert pour la pêche, nous en traiterons dans la suite en parlant des différentes espèces de poissons* Mais com- me nous n'avons encore aucun livre sur lamaniè- re de pêcher dans l'eau douce, je vais commencer INTRODUCTION! XXIII d'en donner ici une idée à mes lecteurs, par une courte description: Uanguilliere est une espèce de nasse ou pa» nier fait de jonc, d'osier ou d'autres branches fle- xibles , dont les baguettes sont plus ou moins serre'es, selon la grosseur du poisson qu'on veut prendre. Les meuniers placent ordinairement cet instrument au - dessous de l'aiiire du moulin. C'est ainsi qu'ils prennent les anguilles que le courant de l'eau y entraîne. Le carrelet est une espèce de filet en quarré. Les mailles du milieu sont plus serrées que celles du bord. On le borde d'une petite corde forte et unie. Les quatre coins de ce filet sont atta- chés à des perches courtes et pliantes, de manie- re qu'il forme un creux. On attache ces perches à une autre grande perche, qui sert de manche au iilet. On plonge ce filet dans l'eau; et dès qu'on voit des poissons qui nagent au-dessus, on le relève promptement. Le poisson appercevant le mouvement, plonge vers le fond, se précipite sur le filet, et devient ainsi la proie du pêcheur. Il faut observer que plus la maille de ce filet est grande, plus il est aisé à tirer de l'eau : commo- dité qui n'est pas à négliger; car si le carrelet se tire lentement, les gros poissons sauteront par- dessus. ' , XXIV . INTRODUCTION, Ijccoleret est un grand filet qnî ressemble en tout à la seine, si ce n'est qu'il est ordinairement tiré par des hommes; au lieu que la dernière l'est par des bateaux. il y a des colerets de différentes espèces qui diffèrent par la grandeur. Les hameçons dorinans se font de la manière suivante: Prenez une corde longue à proportion de la largeur de la rivière où vous voulez pécher j attachez -y de distance en distance, environ de deux pieds chacune, des petites ficelles armées par le bout d'un hameçon long d'un pouce; amor- cez l'hameçon avec des achées, ou de petits pois^ sons; ensuite attachez un des bouts de la corde à un des bords de la rivière où vous voulez pécher ; puis après avoir attaché une corde ou un plomb à l'autre bout, lancez- le vers l'autre bord le plus loin que vous pourrez, Uhanieçon ou ligne est un instrument fort connu, et qui sert plutôt d'amusement aux per- sonnes qui aiment la pêche, que d'instrument pour les pécheurs de profession. C'est une espè- ce de crochet de fer, plus ou moins grand, dont l'extrémité qui soutient l'appât est formée en dard, de manière que s'il arrive au poisson goulu d'avaler l'hameçon avec l'appât qu'on lui présente, les efforts qu'il fait ensuite pour le rejetter, et le INTRODUCTION. XXV coup de poignet que donne le pêcheur, ne ser- vent qu'à l'engager dans les chairs. L'autre ex- trémité de l'hameçon est platte, et s'attache à une iicelle ou fil qui pend à une longue perche, qu'on appelle ligne, Le hnvenet est un filet monté sur deux per- ches croisées de bois léger, qui le font ouvrir et fermer au gré du pécheur. Il se traîne, et n'est chargé ni de plomb, ni d'autre chose lourde, afin qu'on puisse le relever plus facilement. Les per- ches sont tenues ouvertes par une petite traverse, qui s'emboîte à la mortaise d'un bout, et qui est fourchue de l'autre: elle est placée environ à . trois pieds sur la longueur des perches du côté du pécheur, qui pousse cet instrument devant lui. Le reste du sac est amarré sur les côtés de la perche, et fermé d'un petit filet qui retient le poisson. I La ligne flottante consiste en un hameçon que l'on attache au bout d'une ficelle longue de cinq à six brasses: on attache l'autre bout de la Hcelle à un petit paquet de jonc, afin que la ligne flotte sur l'eau et qu'on puisse la retrouver. Celte ligne se jette le soir, et se lève le matin. La ligne volante ou turlotte est une espèce de ligne qui se fait de la manière suivante : Il faut avoir un hameçon et un bout de jfil d'archal jau- XXVI INTRODUCTION. ne, de la grosseur d'une fine épingle, qu'on plie en deîix, et qu'on tortille de manière qu'il fasse un petit cliaînon, au bout duquel on laissera un petit anneau. A l'égard des deux bouts du fil d'archal qui resteront du chaînon, on doit les attacher à la queue de l'hameçon avec de la soie ou du fil, en sorte que ce qui sera attaché ne des- cende pas plus bas que l'endroit vis- à- vis le cro- chet de riiameçon. Cela fait, il faut faire un cornet d'un gros carton, ou, si Ton veut, de terre à potier, dont le dedans ne soit pas plus large que la grosseur du tuyau d'une grosse plume à écrire, et de la longueur environ du petit doigt; ensuite passer à travers du cornet l'hameçon at- taché au fil d'archal ; puis faire en sorte que toute la queue de l'hameçon, depuis l'endroit vis-à-vis le crochet, et environ delà longueur d'un travers de doigt du chaînon, soit cachée dans le cornet; et emplir le dit cornet de plomb fondu, en te- nant l'hameçon par le bout du chaînon, afin que ce qui doit être enchâssé se trouve dans le milieu et enveloppé également par -tout; après quoi on arrondit les deux extrémités du plomb. L'ha- meçon ainsi accomodé, il faut avoir un fer de la longueur de quatre pouces à peu près, qui soit fait de manière qu'on puisse faire entrer dans la queue le bout d'un bâton de la longueur d'une % i INTRODUCTION. XXVII canne, et qu'il y ait au bout un petit anneau par lequel il soit aisé de faire passer la ficelle; on tient le bâton de la main droite, et de la gauche le paquet de ficelle,, qu'on détortille autant qu'il est nécessaire pour jetter dans la rivière l'amorce, qu'il faut laisser aller à fond, et la faire sautiller en retirant la ligne par petits bonds. Quelques pécheurs mettent un goujon à cette ligne; d'au- tres se contentent de mettre au-dessus de l'hame- çon une petite plaque de cuivre luisante, qui atti- re le poisson, et ils la fond briller dans l'eau en la tirant de dessus un bateau qui va avec beaucoup de rapidité. La louve est un filet fait en manière de coffre long et rond, garni.de trois ou quatre cerceaux, un â chaque bout; et l'autre, ou les deux autres, dans le milieu. On y met deux perches, de la longueur du filet, fourchues par les deux bouts, afin d'assujettir les deux cerceaux des extrémités et de les tenir tendues. "Les deux entrées du filet sont ouvertes et garnies d'une espèce de po- che qui va toujours en diminuant. Ces poches sont attachées l'une à l'autre au milieu du filet par des ficelles qui se croisent. Quand ce filet est tout monté, et qu'on est arrivé à l'endroit de la rivdère où l'on veut pêcher, qui doit être pour Tordinaire rempli de joncs ou XXVIII i]n:ti\oductxon. autres herbes, on prend une faux ou autre instru- ment seiubîable, pour faucher les herbes oujoncs. Plus l'espace fauche aura d'étendue, plus on aura lieu d'espérer que les poissons viendront dans le fi- let. Cela fait, on prend quatre grosses pierres, qu'on attache aux bâtons de la louve, afin qu'elle aille au fond de l'eau; ensuite on met à ce iilet une corde assez longue, pour qu'elle aboutisse sur le bord de l'eau, où on l'attache à un piquet : elle sert à tirer la louve quand le poisson est pris. Ensuite, après avoir mis ]a louve dans l'é- tat ou elle doit être, on prend de ces herbes ou joncs, dont on la couvre, faisant néanmoins en sorte de n'en point mettre à l'entrée du filet; car elles empècheroient le poisson d'y entrer. La manche est un grand sac, ou verveux sans cercles, monté sur une corde: un côté de l'ouverture est assujetti dans le fond par une pier- re; le côté opposé est attaché à un bateau. Le pécheur fait aller le bateau dans l'eau jusqu'à ce que l'on sente qu'il y a du poisson. La nasse est une espèce de cage d'osier, qui finit en pointe, au fond de laquelle on met un app'at. On la place au fond de l'eau sur le côté. Vers le milieu, il y a des bouts d'osier mobiles, qui laissent une entrée libre au poisson; mais INTRODUCTION. XXIX qui, se réunissant lorsqu'il est entre, l'empèclient de sortir. Lies parcs sont une sorte de pêcherie parti- culière, qui se fait de la manière suivante: Les pêcheurs forment une grande enceinte, ou parc en fer achevai: le fond en est expose à la mer. A cliaque bout, ils pratiquent un retour en cro- chet d'environ six pieds de long: ce crochet est fait avec des piquets de trois à quatre pieds île hauteur. Au centre, il y a une ouverture de quinze à dix-huit pouces de largeur, qui sert d'is- sue au poisson qui suit les convolutions du retour en crochet, et qui va se rendre à ce cul -de -sac, où la marée en se retirant le laisse à sec. Le retour en crochet est rond ou quaiTe; c'est à la vohDnté du pêcheur. Pour ne pas ten- dre inutilement, les pêcheurs s'assurent si le poisson donne à la côté, par les traits ou fillages qu'il laisse imprimés sur le sable lorsqu'il se reti- re avec la marée. L'enceinte du crochet, garni de rets de bas- parcs et de piquets, est montée d'une pièce de trente à trente - cinq brasses de chaque côté. Pour la continuer, on se sert de hautes perches de quatorze à quinze pieds, qui suiv^ent immédia- tement les rets de bas -parcs. Le pied des gran- des perches est du côté de la mer: on les penche XXX INTRODUCTION. un peu vers la terre; et c'est là -dessus que l'on place les rets de jets, qui ont près de trois brasses de haut. Les pêcheurs ne les tendent point de mer basse; ils se contentent de les arrêter seule- ment par le pied sur le bas des perches. Ainsi les jets sont en paquets le long de ces perches : ils sont couverts d'un peu de sable, ainsi que les flottes. Pour les relever à la marée, on a mis au haut de chaque perche une petite poulie, sur la- quelle passe un cordage frappe sur la tête des jets. On a recouvert les filets de sable, afln que le poisson plat passe aisément par dessus lorsqu'il monte dans la baie avec la marée. Les perches qui servent aux rets de jets, sont toujours dans les bassures entre les bancs: l'enceinte se conti- nue en y mettant alternativement des rets de bas- parcs sur les piquets ou penchans. Ces rets ten- dent à demeure; parceque la marée qui survient, les couvre facilement, et laisse passer le poisson sans le gêner: ce qui n'arriveroit pas s'ils étoient tendus sur les hautes perches. Sur celles-ci, ils placent des filets; après ces filets placés sur les hautes perches, ils pratiquent des bas-paixs jus- qu'à ce que l'enceinte soit toute formée, obser- vant que les crochets, ou retours, soient de rets de bas - parcs montés sur leurs petits piquets. Lorsque la marée est siu' le point de s'en retour- INTRODUCTION. XXXI ner, les pêcheurs hissent les lignes des poulies, dégagent les jets du sable qui les couvre, et les tiennent élevés à fleur d'eau, tandis qu'ils sont arrêtés au pied des perches, et qu'ils calent par des plombs. Ils restent ainsi tendus jusqu'à ce que la marée se soit retirée. Ces sortes de parcs ne prennent rien qu'au reflux de la marée montante. Le fond, exposé à la mer, est couvert par la dis- tance des perches de jets ; et les crochets des deux bouts regardent la terre. On prend quelquefois beaucoup de poisson à cette sorte de pêchej sur- tout du poisson rond. La seine est un filet long de plus de cent brasses, avec des ailes de douze toises. Au fond est mie espèce de sac, ou verveux simple sans goulet et sans cercle, qui est plus Ou moins long suivant la longueur des ailes. La partie destinée à rester sur l'eau est garnie de bois; et l'autre est tirée à fond par le moyen des pierres qui y sont attachées. Lorsque le fond est vaseux, on enve- loppe les pierres dans de la paille, afin qu'elles ne s'enfoncent pas trop avant. Les pêcheurs se mettent ordinairement sur deux batelets pour tirer ce filet: on s'en sert dans les grands lacs pohr pêcher sous la glace. Le traînait est un filet composé de trois rangs de mailles les unes devant les autres, dont XXXIl INTRODUCTION. t celles de devant et de derrière sont fort lar^res et faites d'une petite ficelle. La toile du milieu, qui s'appelle la nappe, est faite d'un Hl délie: elle s'engage dans les grandes mailles qui en bou- chent l'issue au poisson qui y entre. Il y a des tramails de différentes espèces. La truhle, qu'on appelle en quelques en- droits étiquette, est un petit filet qui a à peu près la figure d'un grand capuchon à pointe ronde, dont l'ouverture est attachée à un cerceau, ou a quatre bâtons suspendus au bout d'une perche. ICHTHYOLOGIE, OU HISTOIRE NATURELLE DES POISSONS. PREMIERE CLASSE. POISSONS ABDOMINAUX. Ii;e Genre. CARPE, CYPRINUS. PREMIERE SECTIOIV. nés carpes en général. Les dents dans l'esopliage , la vésicule aérienne dans l'abdomen. Fisces dentibus in œsoplia- go y vesica aè'rea in abdornine, Cypriuus, Arted. Gen. 3. Barbeau, Goiian, gezi. 47. — Liiin. S. N. gcn. Poissons d'eau douce de la 139- famille des Aloses. Du- — Gron. Zooplî. 103. - iiam. Pèch. II. /i^jq. — Klein. M. P. V. Carp. Penn. B. Z. III. gen. 58. Brama. 61. Mystus.63. ^o. Leuciscus. 64. Les dents qui sont placées chez ces poissons au commencement du canal intestinal, et ].i A 2 DES CARPES vesiciile aérienne, qu'on trouve dans l'abdomen font les caractères distinctifs de ce genre. Les poissons compris sous ce genre, sont nommes ordinairement poissons blancs , et carpes par les auteurs systématiques. Ils ont le corps couvert d'écaillés grandes et brillantes. Une partie des poissons de ce genre sont étroits, allongés, et les autres sont larges, courts et minces: ce qui a donné l'idée à quelques ichthyologistes de diviser les carpes en larges et étroites. Les premières ont ordinairement la tête petite, et les autres l'ont grosse. Elles ont sept nageoires, une sur le dos, deux à la poitrine, autant au ventre, une derrière l'anus et une à la queue, La ligne latérale commence «i la nuque. Dans la plupart , elle forme une courbure vers le ventre, et finit au milieu de la nageoire de la queue. L'ouverture des ouïes est large et les opercules sont composées de trois lames osseuses, dont la supérieure est la plus grande. Les narines sont divisées en deux ouvertures particulières par une peau qui les sépare; les ouvertures antérieures sont rondes, et les autres ovales. Dans les gosiei*, il y a de petits os raboteux qui servent au poisson à tenir ferme les corps qu'il veut avaler. Dans résopliage on remarque deux mâchoires garnies de dents, dont nous avons parlé; mais comme ces dents ne sont de la même forme et XES CARPES. 5 en même nombre dans toutes les espèces de ce genre, j'en parlerai à part dans la descriplion de chaque poisson. Ces poissons n'ont point proprement d'estomac: le canal des intestins commence tout près des dents , où il est le plus large, et finit à l'anus. Dans la plupart, ce canal n'a que deux courbures; dans quelques autres il en a trois et même quatre. La vésicule aérieime est blanche, brillante, ronde, et divisée en deux parties de grandeur inégale. Les ovaires sont doubles aussi bien que la laite. Le tems des amours est ordinairement Avril et Mai. Mais tous les poissons de la même espèce ne frayent pas en même tems: les gros frayent plutôt que les petits. Ces poissons vivent de glaise, d'argile, de craie, de vers, d'insectes, de plantes et de fumJer. (2uelques - uns avalent aussi des petits poissons. Ils mordent ordinairement à l'hameçon. Mais comme ils ne clierclicnt pas tous la même nourriture, il faut avoir égard à leur goût qiïand on pêehe à la ligne, et leur mettre un appât convenable. On prend, par exemple, le vilain avec des pois cuits; l'orphe 'avec un morceau de hareng, et la carpe avec un ver de terre. La plupart des poissons de ce genre habitent les lacs et les rivières. Quelques-uns, comme la tanche et le carassin, se plaisent aussi dans Au ^ DES CARPES. les marais ; quelques - autres , comme la serte et le nase , entreprennent des voyages considéra- bles. Au printems ils sortent de lacs, pour pas- dans les rivières qui y commmiiquent, et reviennent après avoir jette leur frai. . Ces poissons appartiennent sur -tout aux eaux douces de la partie septentrionale de l'Europe. Voilà pourquoi ils ont été inconnus aux Grecs et aux Romains, à l'exception de la carpe dont parlent Aristote a) et Vline bj, A la vérité, on trouve dans leurs ouvrages les mêmes noms dont se servent les naturalistes pour désigner plusieurs poissons dont nous parlons ici-tels que LeuclscuSj Ballerus et PJioxinus : mais l'obscurité de leurs descriptions ne nous met pas à même de juger s'ils ont compris sous ces noms des poissons du genre des carpes ou de queîqu' autre o;enre. Ausone au commencement de son poème, parle des poissons de la Moselle: il nomme le barbeau cj , le goujon dj , la tanche ej ^ Va\Ae fjj le céphale £2iy'; Bellon, la rosse /z^, le véron ijy le spirlin /y', la brème IJ, et llondelet la a) H. A. 1. 2. c. 13. 1.4. /) V. 116. C. Alburnus. c. g. 1. 6. c. 14. 1. g. c. 30. o) V. 6-5. — • Cepliahis. h) N. H. 1.32. c. 11. h) Aqu. 318. C.Riitiliis. c) V. 94. C. Barbus L. ») *~* 3^^* — Plioxinus. d) V. 132. — Gobio. k) — 515. — Leuciscus. e) V. 140. — TJuca. .1) — 317. — Brama. DES CARPES. bordelière mj. Outre quelques-uns de ceux dont nous venons de parler, Snlvian parle de deux autres, auxquels il donne les noms albo et pigo nj, C'eft aux naturaliftes italiens à examiner si ces deux poissons sont du nombre de ceux que ncus connoissons , ou s'ils font par- ticuliers ri ce pays. Enfuite Gesner nous fit con- noître le vilain o), la dobule -pj y la raphe qj ^ l'orphe tJ, le nase sj , le carassin tj\ et la serte uj , Schoneveld , l'apliye xj] Jonston, la reine des carpes yj^ Schwenclifeld, la gibèle, et le rotenglezy'; et Willughhy , le grislage aj. Bientôt après Marsigli , nous donna la description du rafoir hj\ Artécliy celle de la bierque cj, de la farène clj , de l'ide ej ^ et de la sope fj. Ce soYitjtrente espèces en tout qui ètoient connues du tems d'Artèdi. Comme cet auteur omet la reine des carpes, le rafoir, la bordelière et la gibèle, il n'auroit dû en décrire que vingt -six. Cependant il en compte trente- trois; mais la ferte, la raplie et l'oi-phe, font m) De Fisc. II..' if/\. n) Aqu.85. ^7. o) Parai. 9. C Jefes. ■p) Tliicib. 170. C.Dobnla. 9) — 170. — Aspiiis. '•) — i(î6. b. — Orfiis. s) 170.]). — Nasiis. — 166. b. — Caras- sius. «) — iQo. — Viinba. a) Ichtli. 16. C. Apliia. y) De l'isc. t. 29. f. 2. 2) Siles. 424. 45<^' a) Iclitli.265. C.Giislaginp. h) Danub. IV. 2i, C. cul- tvatiis. c) Syn. 15. C. Biorrkna. d) — 13. — Farenus. e) — 14. — Ici us. /■) — 12. — Ballerus. 6 DES CARPES. chez lui chacune deux poissons diiFérens et on ne sait, ce que c'est son sargus (n. 15), son wapper (n. 21.) et sa bubulca (n. 53), Kàrri' jyfer gj, Gronov hj , Tlasclquist ij, et Linné hj, nous ont fait connoitre chacun une nouvelle espèce, et ForskaàllJ deux espèces. Ces six nouvelles espèces jointes à celles que j'ai rapportées , font trante - six espèces connues du tems de Linné. Mais comme cet auteur omet la bordelière, la reine des carpes, la gibèle, le pigo, l'albo et la carpe orientale de Haselcjidst y il ne décrit que trente espèces. A la vérité, il en compte trente -une: mais le dentex de Ilaselqulst est un faumon. Retranchons maintenant l'itbare, que je crois être fon ide, et il ne restera proprement à Linné que vingt neuf espèces. Depuis ce tems -là Lcpechin inj , Fors ter nj ^ Schô'pf ojy et Falnn pj , ont découvert chacun une nouvelle espèce; F allas qj, Molirm^rJ, chacun quatre, et "•) Japan. 155. C. auratns. o) Sclirift. d. N. G. VIII. h) Zoop]i. 11. 199. C. Go- 132. noryncluis. p) Oiyctograpli. Aragon, z) Reis. 4.54. C. orientalis ^) Ptcis. in 4to. III. 703. 435* C Labeo , Centoce- k) C. americanus. phalus , Seiiceus et /) Descript. n. ing. 104. C. Clupeoifles. bynni, C. niloticus. ,.) Chili, C. Regins, C. i/j) Reif. II. 1.9. P. 4.5. ^ Caucns, C. Malclius, 77) Pliil. Trans.LXIII. 155. C. Juins. V DES CARPES. 7 moi je décrirai autant 5J, qui ne sont connues, de sorte que, autant que je puis' faire foi furies descriptions des auteurs, et sur les poissons que j'ai eu occasion d'observer, je crois qu'on peut cojupter cinquante - trois espèces sous ce genre. Les auteurs les plus anciens qui ont écrit sur l'Ichtyologie, ont traité les poissons de ce genre avec beaucoup d'obscurité et de désordre. Ceux qui ont divisé les poissons selon les endroits de leur séjour, ou qui les ont diftribués par ordre alphabétique, ne nous disent rien de plus satisfaisant à cet égard, que ceux qui n'ont adopté aucun système ou classification. Dans les uns et les autres , les figures sont mauvaises, les descriptions insufHsantes et les espèces confondues. IVlllughhy y qui vers le milieu du dernier siècle se distingua dans cette partie, observa le premier le nombre des rayons des nageoires , et attribua comme caractères distinctifs au genre des carpes , une bouche sans dents et une seule nageoire dorsale. Artédi t) célèbre ichtyologiste, qui vivoit au commencement de ce siècle, eut aussi égard dans la détermination des genres, aux rayons des la membrane des ouïes. Cette méthode caractérise le genre de Loclies aussi bien que celui des carpes. D'ailleurs ses descriptions des espèces sont beaucoup trop courtes, et ne s) Gen. 2. Syn.3. t) Voyés. Pi. 12. 15. 17.95- 3 DES CARPES. donnent pas toujours une idée parfaite de ces poissons. Klein, dont l'esprit systématique caractérise ses ouvrages, publia, au milieu de ce siècle, un traité des poissons; et pour mieux faire connoître ceux de -ce genre, il les divise en quatre genres tj, et y fait entrer les variétés comme espèces différentes w^. Quelque tems après, Gronov publia sur Ticlithyologie im ouvrage en 1754, où les carpes sont rangées sous deux divisions : avec des barbillons et sans barbillons xj. Mais comme il compte dix-sept espèces, et qu'on en trouve treize dans la seconde division, on ne sauroit tirer im grand avantage de sa méthode. Un autre ouvrage yj du même auteur, qui parut en 1763, n'approclie pas plus du but. Il y range les carpes sous trois divisions; mais la seconde, qui comprend les carpes étroites, l'enferme toujours onze espèces. Vers le même tems. Cramer nous fit connoître les carpes de la Basse-Autriche z) : il suit la méthode dArtédi; et faisant naître des doutes sur le nombre des rayons et la durée des couleurs, il augmente encore l'obscurité et l'incertitude. Après Cramer, WulfF nous donna les poissons de la PruITe aji ouvrage peu important , sans descriptions t) Cypriuus. M. P. V. 5g. k) Mus. I. 2. Brama. 61. Mystus. 65. y) Zoopli. 103 — 111. Leuciscus. 64. z) Eleiich. 590. Il) Cyprimis n. 2. Brama a) Iclitli. Boruss. n. 3. Mystus n. 2. JDES CARPES. ^ particulières, et où le peu d'exactitude de la plupart des citations a servi à induire en erreur plusieurs de ceux qui l'ont confulté. Le célèbre Linné suivit en grande partie Artédi dans la détermination des poissons, et crut perfectionner sa méthode en rangeant sous quatre divisions ce genre nombreux. Mais comme les trois premières ne contiennent que sept espèces, et que la quatrième en comprend vingt-quatre, dont la plupart ont les nageoires rouges et souvent le même nombre de rayons , il est diUicile , d'après la courte description qu'il donne de chaque poisson, de le dlftinguer exactement. Il y a quelque tems que Muller hj , Leske cj et Fennant dj nous ont fait connoître les carpes de leur patrie, mais comme ils ne les décrivent que selon Linné, ils ne jettent pas sur cette matière la lumière cju'on pourroit délirer. Duhamel a aussi décrit les poissons qu'on trouve dans sa patrie ej\ mais comme ses figures ne sont pas coloriées, il m'arrive quelquefois d'être dans l'incertitude et de douter si quelques- uns sont les mêmes que j'ai décrits, ou si ce sont des poissons particuliers à la France: voilà ce qui m'est arrivé par rapport au gardon, à la platane/^ et à quelques autres. Je ne fais, par h) Z. D. n. 426 — 442. e) Pêcli. IL 489—521. c) Specim. Iclith. lips. f) — — Pi. 24. f. i. ^) J3. Z. IIL 553 - 3:^5. PI. 26. f. 4. I O DES CARPES. exemple, si le gardon ou la vancloise sont le même poisson que celui que nous nommons dobule. Quoique je ne falTe point ici de divisions particiilières , j'espère cependant lever toutes les difficultés, en plaçant à la fuite les uns des autres, les poissons que leur grande ressemijlance peut faire confondre aisément; en les désignant tous par leurs marques distinctives. Voilà pour- ^ quoi j'ai mis à la suite les uns des autres le rotengle et larosse; le nase et la serte; la zope, la bordélière, la gibèle et le carassin. Enfm il reste encore de dire qu 'Albert a déjà remarqué que le barbeau et la vandoise ont les dents dans l'oesopbage. DU ROTENGLE. I I ARTICLE SECOND. Des carpes en particulier. I. LE BOTENGLE, Cyprinus ErytJirophtJiahnus. Iî;e Planche. Carpe large, l'iris jaune, les nageoires du ventre, de l'anus et de la queue d'un rouge vermeil. Cyprinus latus, iricle a'oceny pinnis ventralihus y ajii, cauclœque cinnnbrinis, P. xvi. K, x. A, xiv. C, xx, D. XII, Cyprinus Ei-^ilirophtalmns Linn. S. N. 550. n. ig Arted. Gen. 5. n. 2. Syii '4' n« 3« Spec. f). n. 2 Gronov. Zoopli. 11. 340 Biam.i. Klein JM. P. V. 63 n. 5. t. 13. f. 3. The Ixnd. Penn. Z. HT. 563. n. 170. La Piosse (îe rivière, Rocc, Rose f Roclie. Duham. Péch. II. 499. PL 34. f. Le rotengle appartient à l'espèce des carpes qui sont larores et courtes : il a l'iris couleur d'orange, les nageoires de l'anus, du ventre et de la queue d'un rouge vermeil: ce sont les 12 I>U ROTENGLE. caractères distincdfs de cette espèce. Celui que j'ai actuellement sous les yeux a dix pouces de long, trois et demi de large, cinq quarts de pouce d'épaisseur, et pèse àix onces. La tête est petite et arrondie à l'extrémité; les mâchoires sont d'égale longueur: cependant lorsque la bouche est ouverte, la mâchoire inférieure, qui est courbe, surpasse la supérieure. Au-dessus de la xiageoire dorsale^ l'extrémité du dos forme un tranchant; au-dessous il est rond, la nageoire du dos est plus éloignée de la tête que celle du ventre. La ligne latérale a trente points élevés. Le rotengle est un des poissons les plus communs de nos coAtrées. On le trouve dans la Marche de Brandebourg et en Poméranie, dans les lacs et les rivières qui ont un fond sablon- neux. Autrefois ce poisson étoit si commun aux en^drons de l'Oder, qu'on le donnoit aux cochons, faute de pouvoir le vendre aj. Le rotengle nuiltip lie beaucoup: et l'on peut s'en servir avantageusement pour nourrir le sandre, la perche, le brochet et la truite. Gomme il a la vie dure, on peut le transporter aisément. Il fraye en Avril ; et lorsqu'il y fait chaud pour la saison, le frai ne dure communément que quatre jours, Il dépofe ses œufs sur toutes sortes de a) Belcmann, Cliurm. I. 565. DU ROTENGLE. I 5 plantes aquatiques. Les pêcheurs profitent ordinairement de cette circonstance: ils enfon- cent dans l'eau des pieux en forme de cercle; ils y adaptent des nasses quils couvrent de branches de bruyères. Le poisson entre de lui-même dans les nasses; mais il en sort bientôt, si l'on n'a pas foin de les lever bien vite. Une des causes de la grande multiplication du rotengie, vient sans contredit de ce qu'il ne peut pas depofer ses œufs tout d'un coup, mais peu à peu. Quand le froid, les inondations ou quelqu autre cause en détruit une partie, l'autre est toujours conservée. Dans un poisson de dix onces, le double sac qid contient les œufs , pefoit fept dragmes, et contenoit environ 91,720 œufs jaunes. Dans le tems du frai, on peut voir sur les écailles des mâles, de petites excroissances dures, pointues, qui disparoissent après le tems. On le prend dans toutes les saisons de l'année. Dans le tems de ses amours on le pêche le plus aisément au filet et à la nasse. Le rotengie parvient à peine à la longueur d'un pied, et pèse rarement une livre. Dans le tems du frai et en hiver, il est ordinairement maigre; .mais en été, il est gros, et sa chair est l>lanche et d'un bon goiit, sur-tout lorsqu'il est jeune. Cependant comme il a beaucoup d'arrêtés, il n'y a guère que les gens du peuple qui s'en nourrissent. Comme il n'est pas gras, sa clialr donne une bonne nourriture 14- DU iVOTENGLE. Da reste, ce poisson et du nombre de ceux dans le corps desquels on trouve quelquefois une espèce de vers solitaire hj. Des deux côtés de chaque mâchoire, le rotengle a deux rangées de dents un peu cour- bées et en forme de scie: cinq sont à la rangée antérieure, et trois à la poltérieure: ces dernières sont plus courtes que les autres. Le canal des intestins a deux courbures ; l'épine du dos trente-fept vertèbres ; et il y a feize côtes de chaque côté. • Le rotengle est connu sous plusieurs noms. On le nomme : plôtze , dans la Marche électorale, dans la Poméranie, la Silésie et la Prusse; rotliaugey en Saxe, en Autriche et en Empire; ruisch et jietvooren, en Hollande. rud et fins cale ^ en Angleterre; sarf, en Suède. skalle et rôdsJLallc, en Dannemarc; flah-roie, en Norwège; -ploc et plothriy en Pologne, szârnyuketzegh , en Hongrie ; rotengle , rosef rosse, roce et roche, en France ; sorok, en Russie et tnrntschan , en Tarterie. Les anciens ichtyologistes ne parlent point de ce poisson, sans doute parce qu'ils l'ont confondu avec la rosse, qui lui ressemble beaucoup. 6'67ute7ic/^e/. Z. ITI. PI. 72. €l) Iclith. 2 j'> t. Q. 3. f. I. k) L. S. IV. t. 2. f. 5. e) Syn. 5. n. 5. /) Péch. II. Pi. 24. i". z. f) Donul). IV. 1. 13. f.4. "0 Zoopli.n. 540. g) M.r.V. t. 15. f. 2. , 7;) Ichlc. 11.60. lO DE LA ROSSe. II. LA ROSSE, Cyprinus Rutilus. lime Planche. L'iris rouge, les nageoires de même couleur, douze rayons à la nageoire de l'anus. Cyprinus iride, pinnis omnibus Tubris, nni radiis xii* P. XF. V, ix, A. xm C. xx. D. XIII. Cyprinus Rutilus , Linn. S. Act. Helvet. IV. 26g. n. 183. N. 529. n. 16. Artedi Leuciscus Klein M. P. V- 67. Gen. 3. n. 1. Syn. 10. n. 9. t. i8« f- i« n. 18. Spec. 10. n. 3. Roacli. Pcnn. Z. B. III. 565. Gronov. Zooph. n. 338- n. 175. iîg. au frontispice. Mus. I. n. Q. Variet. d. De l'ouvrage. I v a rosse se distingue à ses nageoires rouges , à l'iris de même couleur , et aux douze rayons de la nageoire de l'anus. Les mâchoires sont d'é£:ale longueur, el les narines sont près des yeux. La nageoire dorsale est placée vis - à - vis decelle du ventre, et la queue fourchue. Ce pois- son tient le milieu entre les carpes larges X.A ROSSE, X7 et étroites; car sa tête est plus petite qi:e celle des carpes étroites, et plus grosse que celle des laro;es ; et son corps n'est ni si large que celui des dernières, ni si étroit que celui des pre- mières. Ce poisson pèse une livre et demie. Il aime les eaux claires et les fonds sablonneux ou marneux: voilà pourquoi on le trouve aussi bien dans nos grands lacs que dans les rivières d'Allemagne, de France et d'Angleterre. Le Dr. S chôpf trouva, ce poisson en Amérique, et Falk dans beaucoup de lacs et de fleuves de Russie et de Sybérie. Avant qu'on eût desséché les maré- cages de roder, on le prenoit aussi dans ces en- droits en si grande quantité, qu'on s'en servoit dans les villages voisins pour engraisser les co- chons aj. Lie tems du frai arrive ordinairement au milieu de Mai. Dans nos contrées, où les pécheurs poursuivent presque sans cesse les poissons, il ne fraye ordinairement que vers midi, pendant que le pécheur est occupé àdiner. C'est le plus rusé de tous les poissons de nos contrées; et il reste tou- jours caché dans le fond tant qu'il entend quel- qu'un sur l'eau. Selon les observations de Lund bj^ les rosses passent dans l'ordre suivant, des mers où l'on pèche rarement, pour aller frayer dans les rivières. Une partie part quelques jours aupa- ravant, et forme l'avant -garde. Ce qu'il y a de singulier, c'est que cette première troupe n'est a) Bckm. Cliurin. I. 565. h) Scliwed, Abli. XXIII. \^\. 1^ ig LA KOSSE. composée que de mâles. Ensuite viennent les femelles; puis encore des mâles. C'est un spectacle divertissant de voir avancer en ordre, les bataillons de cette petite armée. Chaque divi- sion est composée de poissons d'égale grandeur, qui nagent tout près les uns des autres : dix, vingt , cinquante à cent de file. Quelquefois , ce qui pourtant arrive rarement, cet ordre est inter- rompu par la frayeur ou par quelqu'accident : mais ils se remettent bientôt, et cherchent les endroits d'herbage ou de branches, pour y dé- poser leurs œufs. Cette espèce multiplie beau- coup : ses œufs sont verdàtres. Dans le double ovaire, pesant environ deux tiers d'once, j'en ai compté 84,570. La cuisson leur donne une cou- leur rouge. Ce poisson a la vie dure, et peut servir de nourriture aux espèces voraces. Sa cou- leur brillante le fait distinguer agréablement au milieu des eaux. On le pèche en grande quantité dans le tems du frai , quoiqu'avec assez de peine. On se sert pour cela de colerets, de seines et d'autres filets : il mord aussi à l'hameçon. Sa chair blanche est d'assez bon goût, mais garnie d'arrêtés fourchues, qui ne le rendent pas propre à la table des riches. Comme il n'est ni trop gras ni trop visqueux, il se digère facilement. Il se nourrit d'herbages et de vers aquati- ques, et a pour ennemis tous les poissons voraces et les oiseaux pêcheurs. JLA KOSSE. 19 La rosse n'a qu'une simple rangée de dents, et cinq dents à chaque mâchoire. Ces dents sont comprimées des deux côtés, et courbées vers la pointe. Le canal des intestins a deux courbures. Jusqu'à présent je n'ai point trouvé devers dans le corps de ce poisson. Dans plusieurs endroits de ces contrées, on confond la rosse avec le rotengle, et on donne à l'une le nom de l'autre. On la nomme : plôtze, en Prusse, enPoméranie et dans la Marche; rodo, en allemand populaire; rotliauge etroetliele, en Saxe; rothfricder, à Magdebourg; rotliflosser, en toute l'Allemagne; voorn, en Hollande; rœsknlle et fies -raie , en Norwège; rudskalle ^ en Dane- marc; roncliy en Angleterre ; rousse, en France; -piota, en Italie; jotz et gacicUf en Pologne; rotJi- nu^e, radnne etrnudi, enLivonie; gnsi, soi'oka, tscliuWj tschebakf et gelegen, enViMssie'y lesBasch- kales la nomment nssan - balik; les Wotjaques schabnr; les Ostiaques pedie et kol et en Tartarie elle est connue sous le nom de twatschan. Comme plusieurs ont confondu la rosse avec le rotengle, et que d'autres ne l'onf regardée que comme mie variété, il ne sera pas inutile de rapporter les caractères qui distinguent les deux espèces. 1) Le rotengle est plus mince et plus large, que la rosse. 2) La tète de cette dernière est plus grande, et a l'iris rouge; au lieu que le rotengle a la tète plus petite et 12 O LA ROSSE. luis jaune d'orange. 5) Le rotengle a les nageoi- res du ventre, de l'anus et de la queue d'un incar- nat très - foncé , et la membrane qui sépare les rayons est de la même couleur. Dans la rosse, la couleur est plus claire, et la membrane bru- nâtre. 4) Les écailles de la rosse sont plus gran- des, et forment trente -six raies de chaque côté; celles du rotengle sont plus petites, et ne forment que trente raies. 5) Dans la rosse, la nageoire de l'anus n'a que douze rayons; dans le rotengle, elle en a quatorze. 6) Chez le dernier, la na- geoire dorsale est plus éloignée de la tête que chez la première. 7) L'anatomie indique aussi d'autres différences entre ces poissons. Le ro- tengle a rnie double rangée de dents; la rosse n'en a qu'une. L'épine de la rosse a 44. vertèbres; celle du rotengle n'en a que 37. 8) La rosse est beaucoup plus paresseuse que le rotengle, et par conséquent beaucoup plus difficile à prendre. L'une fraye au mois de Mai, et l'autre en Avril. D'abord Gronov regarda la rosse comme ima variété du rotengle c); dans la suite, il l'a consi- dérée comme ime espèce particulière d). c) Mus. i.n. g. Variet.d. à) Zoopliyl. n. 558. LE KASE. ô 1 III. LE N A S E, Cyprinus Nasus. Illrrie P L A N C H E . Le ventre noir intérieurement : Cyprinus ahdo- mine intus nigro. P. xvi» V, xiii. A. xr. C. XXII. D, XII. Cyprinus Nasus. Linn.S.N. Ilelv. IV. 263. n. 13.4. 530.11.21. ArtédiGen.5. Leiiciscus. Klein M. P. V. n. 15. Syn. 6. n. g. Gro- 66. n. 6. t. 16. f. 1. 3. MOV. Zooph. n. 332. Act* 1 l e nase se distingue des autres poissons de ce genre par la noirceur du péritoine. Cette cou- leur lui a fait donner dans quelques contrées le nom d écrivain et de ventre -noir: mais elle est cause aussi que plusieurs personnes ne veulent point en manger par dégoût. La nageoire dor- sale est placée tout à fait vis-à-vis de celle du ven- tre, à laquelle on remarque une appendice ven- trale. Une chose fort singulière, que j'ai remar- quée dans le poisson que j'avois sous les yeux; sa I>E NASE. c'est que la partie de la nageoire de la queue, la plus près du dos , avoit la couleur de la nageoire dorsale, et l'autre etoit rougeàtre comme celle du ventre. Ce poisson appartient au genre des carpes oblongues. Il doit probablement le nom de nase, nez y à la mâchoire supérieure qui s'avance en pointe émoussée au-dessus de l'inférieure. La bouche se trouve au-dessous: et l'ouverture est quarrée. ' Le nase qui est représenté ici pésoit une livre. Cependant on en trouve quelques - uns d'une livre et demie, et même de deux livres. Il habite ordinairement dans le fond des o^rands lacs, tant en Allemagne qu'en Fuissie, dans le Don et le Wolga: mais au printems il remonte en foule dans les rivières. Il fraye en Avril ; il dé- pose ses œufs dans des endroits profonds et con- tre des pierres exposées au courant. Les deux: ovaires de celui-ci pésoient une once et un quart; les œufs étoient blanchâtres , de la grosseur d'un grain de millet; et j'en ai compté sept mille neuf cents. Pendant le tems du frai , il paroît sur le corps et sur les nageoires des mâles de petites taches noires, dans le milieu desquelles on apper- çoit de petits points élevés. C'est dans ce tems qu'on le pêche dans des nasses, au filet et à la ligne. Au printems, on le trouve en abondance dans la Viltule, l'Oder, l'Elbe et le Rhin: mais il ILE jSTASE.- 25 ne passe comme les antres poissons' cle ces grands fleuves dans les petites rivières qui s'y déchargent; du moins cela est fort rare dans nos contrées. Du reste, sa chair est molle, fade et pleine de petites arrêtes, et par conséquent peu eftimée. Comme c'est ordinairement le peuple qui l'achète, on lui a donné dans quelques endroits le nom de pois- s.on de tailleur, Sclineiderfisdu Il a à chaque maclioire six dents comprimées des deux côtés, et qui engreinent les unes dans les. autres. Le canal des intestins a plusieurs cour- bures. Ce poisson avoit un pied trois pouces de long, dix-huit côtes et quarante-quatre vertèbres, l^es autres viscères ne diffèrent point de ceux des autres poissons du même genre. Albert le grand est le premier qui donna à ce poisson le nom de nasus: voilà pourquoi les ichthyologistes le désignent sous le nom àenasub Alherti, nase d'Albert. On le nomme: uns e on ôeslingj dans la plupart des provinces d'Alle- magne; schnripcr et sdavavzhaucli, enPoméranie; schneidcj'jiscli y à Danzig; ncisting, en Autriche; et weisjisch quand il ne pèse pas plus d'une de- mi-livre; nase et sclirelher, en Suisse; nase, en France; jiose^carp, en Angleterre; elradusta, foodust, woi^eX bagton, en Russie. , Marsiuli nous donne deux fioures de ce poisson aj. Le plus étroit doit représenter la a) Danub- IV. t. 3. femelle; mais ce n'est autre chose quun jeune poisson de la même espèce ; car les femelles sont toujours plus larges que les mâles de même âge. Klein a donné trois ligures du nase hj mais la seconde, qui doit représenter la femelle, est la serte; car cette prétendue femelle a i-ino^t- ^ deux rayons à la nageoire de l'anus; au lieu qu'on n'en trouve à celle du nase que quinze. Ses écailles sont aussi plus petites et la nageoire dorsale est plus éloignée de la tète : ce qui con- stitue les caractères distinctifs de la serte. La troisième figure n'est qu'un jeune mâle, i) M. P.V. 1. 16. IV. L A S E R T E, C yp ri nus J^imba. IVnie Planche. La mâchoire supérieure avancée , vingt - trois rayons à la nageoire de l'anus : Cyprinus rnaxilla superiore prominentc , pinnae ani radiis xxiii, P. xFii. V. xj. A, xxiii. C. xx. Cyprinus Vimba. Linn. S, Leuciscus. Klein. M. P. V, N. 531. n. 25. AitédiSyn. 65. 11. 3. t. 16. f. 2. g. n. 13. et n. 32. r JL.a serte se distmgue des autres poissons du même genre par l'avancement de la mâchoire I.A SERTE. 25 supérieure et les vingt-trois rayons de la nageoire de l'anus. La tête est petite ; la mâchoire supérieure, qui est tronquée, avance sur l'inférieure, et forme luie espèce de nez. L'ouverture de la bouche est ronde, l'œil grand, et le dos tranchant entre la tête et la nageoire; l'autre partie est ronde, bleu- âtre et un peu courbée. La ligne latérale forme une courbure vers le ventre, et est garnie de points jaunes. Au-dessus de cette ligne, les côtés sont bleuâtres ; au - dessous, ils sont argen- tins , aussi bien que le ventre. La serte est un poisson de passage, qui sort vers la St. Jean de la mer Baltique, ou du moins des baies de cette mer, et remonte dans l'Oder; puis dans l'Inna et dans la Varthe. Elle cherche dans ces rivières des pierres propres et lavées par les courans; elle se frotte contre ces pierres, et dépose ses œufs. Ce poisson devient long d'un pied et demi. Celui que j'ai examiné pésoit une livre et demie; et ses œufs, qui étoient environ au nombre de g8j8oo> ^t de la grosseur des grains de pavot, pésoient trois quarts d'once.- On le prend en quantité dans le tems du frai aux environs de Landsberg sur la Varthe, et dans ceux de Custrin. Cette pêche qui se fait surtout de nuit, ne dure ordinairement que trois semaines; car après ce tems on n'en voit guères. On se sert pour cela 2.6 I>A SERTE. du carrelet, d'autres iîlets et d'une ligne, au bout de laquelle on met un ver de terre. Dans tout autre tenis, il n'est pas aisé de le prendre^ Il multiplie beaucoup, aime les eaux claires, un fond pierreux et sablonneux. Il se nourrit de vers et de plantes comme les autres poissons de ce genre. Il croît lentement, a peu de vie, et meurt bientôt après être sorti de l'eau.. Mon- sieur de Marwibz a essayé de transporter la serte a); et le succès de ses essais nous a prouvé que ce poisson peut aisément être mis dans des lacs profonds et marneux. Les ennemis de la serte sont le silure et le brocliet. Ils la prennent quand elle est encore jeune. Sa chair est blanche, d'un très -bon goût: , on la mange fraîche et ma- rinée. Ordinairement on marine ce poisson pour l'envoyer de tous côtés. Voici comme on s'y prend : On met les sertes sur un gril posé sur un brasier ardent; on les fait un peu griller; puis on les met dans des barils par lits de cinq à huit, que l'on parsème de feuilles de laurier; ensuite on prend de bon vinaigre froid qu'on îf fait boul- lir, et on en arrose les poissons. C'est de cette manière qu'on les prépare à Landsberg, qu'on les envoie hors de la province. On trouve ce poisson en Russie dans plusieurs fleuves tels que le Wolga. On le pèche en grand nombre aux envi" a) Bescliiiftig. IV. 93. . LA SERTE. «27 roris de No^vogorôd où on l'envoyé à Peters- bourg et à Moscaii après qu'on l'a saupoudre de sel, et qu'il a été un peu fumé. La serte a à chaque mâchoire une raie de cinq dents, dix -sept côtes de chaque côté, qua- rante-deux vertèbres à l'épine du dos, et deux courbures au canal des intestins. Dans quelques endroits de ces contrées , on confond le nase avec la serte , et on donne à l'un le nom de l'autre. On la nomme: zàrtJie, en Prusse, en Silésie et dans la Marche; gàse, à Drambourg sur le Drage; iviinba, en Suède; flij'e et Ijlikhe y eiiDannemarc; weinsi'alle, wehi' gfilley luiitihy winuiiy sehriSy enLivonie; tnraun, gusteray tscliniOy sinaivciy hnnick et sirty en Russie; serte, en France et viinhay en Aiîgleterre. Comme la forme de la mâchoire supérieure a souvent fiut confondre ce poisson avec le nase, il ne sera pas hors de propos d'établir les caractè- res distinctifs de ces deux poissons, avant que de rectifier les auteurs qui en ont parlé. La bouche du nase est en travers; celle de la serte est en long. Dans le premier, la bouche ouverte fait un quarré; dans la seconde, elle forme une figure ronde. Le nase n'a que quinze rayons à la nageoire de l'anus ; la serte en a vingt- trois. Le premier a aussi une appendice ven- trale, que l'autre n'a point. Le ventre du nase est noir intérieurement; celui de la serte, aucon- 23 ^A SERTE. traire^ est d'une couleur brillante et argentine. De plus, la serte n'a que deux courbures au canal des intestins, et le nase en a un plus grand nom- bre. Enfin, les écailles du nase sont plus grandes, et il fraye avant la serte. Quant aux auteurs qui ont parle de ce pois- son, voici les renicirques que j'ai cru devoir faire: i) Ce que je viens de dire doit lever entière- ment le doute de Willughhy bj, et prouve qu'on peut répondre affirmativement à la question dArtédi cj , de Klein dj et de Krarner ej , qui demandent si le nase et la serte sont deux espèces différentes. 2) Artédi a parlé, de la serte sous deux noms diiférens : une fois sous le nom de Caput anadro^ mus fj; et ensuite il la désigna comme un pois- son suédois gjy qu'il nomme virnba. 11 s'ensuit de -là: 3) Que le Cyprînus vîriiba de Ilnné, n'est pas im poisson particulier à la Suède; mais qu'il est aussi connu en Allemagne; c'est-à-dire, que c'est notre serte que les anciens ichthyologistes ont décrite sous le nom de Caput anadromus. Si l'on en doutoit, il suffiroit pour s'en convaincre, de comparer les descriptions c^ Artédi et Linné font du vinibay avec celles qu'on a du Caput anU" droinus, ou celle que je donne de la sei"te, on ver- h) Iclitli. 257. d) M.RV. 66. /) Syn. 8- 15- c) Syn.g. n.13. e) Eleiicli. 594.n. i2. g) — 14.11.32. LA SERTE. ^ 129 roit d'une manière évidente, que toutes ces descriptions appartiennent au même poisson. 4) C'est à tort que Linné hj attribue à sa serte, la noirceur du ventre intérieur. 5) Mûller ij et l'auteur de l'article des carpes, dans le nouveau spectacle de la nature hj^ don- nent même la noirceur du ventre comme im des caractères distinctifs de la serte. 6) J'ai déjà marqué plus haut, que la prétendue femelle du nase dont parle Klein est notre serte. 7) Je ne puis répondre qu'affirmativement à Leske ï) , lorsqu'il demande, si notre serte est le mêine poisson que le viinba de Linné et à'^rtédi, et s'il faut la ranger dans le troisième ordre des poissons blancs de Klein. s) Il n'y a point d'exactitude dans toutes les citations que fVulff mj a faites au sujet de notre poisson, excepté dans celle qu'il fait de SchiDenck» feld. 9) Schoneveld a tort de ne faire qu'une espèce du nase et de la serte nj. 10) Enfin, je remarquerai encore que l'auteur de l'article Cyprinus capite anadromus , dans le dictionnaire d'iiiftoire naturelle oj, se trompe en disant, que Gesner, Jonston, Willughby^ Arbédi^ Gronov, et peut-être aussi Linné, n'ont donne le h) s. N. 551. n. 25. m) Iclitli. 45. n. 59. i) L. S. IV. 397. n) — 52. k) Schaupl. d. N. IV. 411. o) Scliaiipl. d. N. III. 574. /) Specim. 44. 50 X.A SEPtTE. nase que comme une variété de ce poisson; car Gesner distingue expressément ces deux espè- ces p). Il donne à l'un le nom de nasus et ap- pelle l'autre anadromus. Il dit du premier, qu'il reste toujours dans l'Elbe , et que c'est un poisson dont on fait peu de cas; au lieu que selon lui l'autre remonte de la mer dans l'Elbe, et t)fFre un mets fort délicat. • . p) Tliierb. 170. 180. V. LA D O B U L E , Cyprinus D o b u l a. Vme Planche. Carpe étroite, onze rayons aux nageoires de l'anus et du dos. Cyprinus oblojigus, pinnœ ani dorslque rndiis xi. P. xr. /^. jx. ^. xj. C. xFiii. D. XJ. Cyprinus Dobula. Linn. S. Leuciscus. Klein M. P. 66. N.528. n. 13. Artédi Syn. 10. n. 5. n. 17. JLa dobule est une carpe étroite et allongée, qui a onze rayons aux nageoires de l'anus et du dos. La mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure, et les narines sont au-dessus des yeux. '^ LA DOBULE. 51 Les écailles sont d'une grandeur médiocre, bril- lantes €t garnies sur les bords de points noirs. Quand on les regarde avec un microscope, elles offrent un spectacle très-agréable. La dobule ne devient pas grosse. Celles qu'on pêche dans la Havel, ne pèsent pas plus d'une demi-livre; cel- les de la Sprée, au contraire, pèsent quelquefois jusqu'à une livre et demie. La dobule aime les eaux claires , un fond de marne ou sablonneux. Elle habite le fond des grands lacs, et remonte les rivâères au printems ; elle fraye dans les mois de Mars et de Mai. C'est vers ce tems qu'elle dépose ses œufs sur les pierres des rivières. Dans le même tems il paroi t de petites taches noires sur le corps et sur les nageoires des mâles qui sont en- core jeunes. On prend ce poisson avec les autres, dans des filets, des saines ,^ et sur -tout dans le tems du frai. Il se nourrit d'herbages et de vers; et mord par conséquent à l'hameçon. Le Dr. Traites a observé, qu'il cherche particulièrement les petites sangsues noires et les jemies limaçons blancs qui s'attachent aux herbages aj. Il a peu de vie , et meurt bientôt hors de l'eau. Dans les lacs qui n'ont pas une profondeur considérable, on le voit, dans les grandes chaleurs, monter sur l'eau et y mourir, si la chaleur continue. Sa chair est blanchâtre, pleine d'arrêtés; et par consé- «) Ricliter, Iclith. 234. • . 52 LA. DOBULE. quent peu estimée. Comme il n'est ni trop gras ni trop visqueux, il peut passer pour un mets as- sez sain. Il se plait dans les mêmes eaux que le sandre et la fruité ; et peut, par conséquent, leur servir de nourriture. La dobule se multiplie lentement. On en prend peu dans nos contrées, même dans le tems du frai. On la trouve dans roder, l'Elbe, le Veser, le Rliin, et dans les rivières qui s'y jettent. Ce poisson habite aussi le Don et la Vistule. Celle que j'ai examinée, pésoit quatre onces et demie; et les deux ovai- res, trois quarts d'once. Les œufs étoient ver- dàtres, de la grosseur de la graine de pavot; et j'en ai compté 26,460. Chaque mâchoire est ornée de deux rangs de dents à pointes recourbées: on en trouve cinq sur le devant , et deux sur le derrière. Le canal des intestins n'a que deux courbures. Le fiel est très - amer. On compte quarante vertèbres à l'é- pine du dos, et quinze côtes de chaque côté. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme: dôbel, sand-dôbcly diebel, bievel, ehrl et sand-ehrl , dans les différentes contrées de l'Allemagne; weissdôbel, quand il est jeune et que ses nageoires sont encore blanches ; rothdô- bel, quand il est plus âgé et que ses nageoires sont rouges; diebel, tabelle et tabarre, en Prusse; hàssling et weissjish, en Poméranie et en Silésie; hdssling, enSaxe'j dobule, en France; dobeler LA* DOEULE. 33 I et inaus eh eis S er, àans quelques environs de l'Elbe; dover, dans le Holstein; hnssely dans l'Autriche; schnottfisch ou chnattjisch , à Strasbourg; hessele et hesling, enDannemarc; dobulay en Angleterre; golnwly en Russie; asUy en Tar tarie; dubieUy en Pologne. J'ai examiné beaucoup des poissons de cette espèce, j'ai toujours compté onze rayons àla nage- oire de l'anus; et c'est faute de recherches qu'^r- tédi n'en compte que neuf. Comme ce poisson est étranger à la Suède, Artédi s'en est rapporté là- dessus à Willu^hby bj , qui n'en compte non plus que neuf. Il tombe dans de pareilles erreurs tou- tes les fois que l'impossibilité de faire lui-même des observations l'oblige de se régler sur cet au- teur. Willuglihy n'a point compté les petits rayons qui sont au bout des nageoires, comme on peut s'en convaincre par ses descriptions du bar- beau, du nase et de plusieurs autres. Parmi les -poissons àxilDanuhe àont Marsis^li cj nous a donné la description , il en comprend un, qu il désigne sous le nom de Hasel, Cephnlus flu-' viatilis s eu Squalus minor Gesneri. Si sa descrip- tion étoit exacte, ce poisson devroit être le même que notre dôbel; mais la figure prouve que c'est le laugele de GesneVy ou le Leuciscus de Linné. b) Ichth. 261. c) Danub. IV. t. 4. f. 2. c 34 ^^ VILAIN. C'est à tort que JT^wZ^^ rapporte à ce poisson celui que S chioenkfeld nomme Aland, et Richter ïovphc. e) Iclitli. 44. n. 53. VI. LE VILAIN, Cyprinus j e s e s. VI^ Planche. La tête grosse, quatorze rayons à la nageoire de l'anus. Cyprinus capite crasso , pinnae ani ra- dits xir. P. XVI. V, ix. A, xiv* JD. xx. C. xi, Cyprinus jeses, Linn. S. N. teau, garbottin , garbot- 530. 11.20. Arted. Syn. 7. teau, chaboifleau , sche- n.ii. rech , kon, meunier, vi- Leuciscus. Klein, M. P. V-63. lain. Duliam. Pèche IL n. 15. j 502. PI. 24. f. 4. Clievanne, chevesne, che- Tlie chub, or chevin, Penii. venne, testard, barbot- B. Z. III. 368. n. 175. JLie vilain ou meimier a pour caractères distinc- tifs, la tête grosse, et quatorze razons à la na- geoire de l'anus. Les narines sont placées plus haut que les yeux. La ligne latérale est assez droite et marquée de cinquante-huit points. La nageoire du dos est plus éloignée de la tête que 1.E VILAIN. 35 celle du ventre : ce qu on remarque aussi dans le poisson précédent et dans celui qui va suivre. La nageoire de la queue est large, peu fourchure et grosse. Au-dessus de la nageoire du ventre, on remarque une appendice. Le vilain est im poisson de grande rivière. Il nage avec rapidité; et peut par -là éviter la poursuite du brochet et des autres poissons vora- ces. Il aime sur -tout les endroits où le courant est le plus rapide; et on le trouve le plus ordi- nairement auprès des buttes de sable et des mou- lins, où Ton peut très - aisément le prendre à la ligne , avec un appas de poids amollis. Son séjour auprès des moulins, lui a fait donner le nom àe meunier. Il fraye, vers le tems de Pâ- ques, de la même inanière que ceux que nous ve- nons de décrire ; et alors on le prend en quantité dans des poches et autres filets. Le tems du frai dure ordinairement huit jours: mais dès que le poisson apperçoit que le tems paroît vouloir se rafraîchir, il a fini en trois jours. Le vilain par- vient à une grosseur assez considérable. On en prend quelquefois qui pèsent huit à dix livres. Sa chair est grasse, garnie d'arrêtés, et paroît jaune quand elle est cuite. On le marine comme la serte. Comme la chair est grasse et molle, elle n'est pas si facile à digérer que celles des poissons dont nous venons de parler. Il a la vie assez dure; il multiplie beaucoup, et ne croît que C a 56 i-E VILAIN. lentement. Un jenne vilain d'un an a à peine trois pouces de long. On le trouve pendant toute l'année, dans les rivières de l'Allemagne, de la France et de l'Angleterre, de la Russie, dans le Don, le Jaïk, le Wolga, TUral et les rivières qui s'y jettent. . Le vilain a à chaque mâchoire huit dents en deux rangées. Les cinq qui sont sur le devant sont grosses, et les autres petites. Dans celui que î'ai observé, au lieu des dents ordinaires, on voit à la mâchoire supérieure, trois pointes avancées. Comme toutes les autres dents étoient grosses, il est vraisemblable que les poissons changent aussi de dents. Ce poisson pésoit une livre et demie; l'ovaire sept onces trois quarts; et j'y ai compté 92,720 œufs jaunâtres de la gros- seur de la graine de pavot. L'épine est composée de quarante vertèbres, et il a dix -huit côtes de chaque côté. Le canal des intestins a deux courbures , comme dans les poissons précédents. Le reste des intestins et la nourriture ne diilèrent point de ceux que nous venons de décrice. Ce poisson est connu sous dilFérens noms. On le nomme: alandy dans la Marche ; gûse ou jese, en Prusse; hai'tkopf, pagenfisch et dively en Poméçanie; dnhel^ en Saxe, tant qu'il est petit; giebely dikkopj et bratjisch, quand il est grand; genglingy en Autriche, quand il ne pèse pas ^me I.E VILAIN. ^ 37 li\Te et demie, bratfiscli, quand il est plus gros; deverekesegi, en Hongrie; scherech et schercsper, enFtussie; hertas et kusir, en Tartarie; vilain^ ineunier, cfievanne , chevesne, cJicvenne, testard, harhotteaUy garbottin , srarbotLeaii et cliaboLscaUy en France; cliiib or cl iciin, en Angleterre. On confond souvent le vilain avec la doLu- le; mais il en diffère en ce qu'il a la tête beau- coup plus épaisse et le corps plus gros. Le vilain pèse jusqu'à dix livres, et a la largeur d'une cai-pe; au lieu que la dobule est étroite, et ne pèse jamais plus d'une liv^re et demie. De plus, la dobule a de petites écailles; celles du vilain sont, au con- traire, arandes. La dobule est d'une couleur ver- dàtre; au lieu que celle du vilain est bleuâtre. Eniin, ces deux poissons sont encore distingués par le nombre des rayons des nageoires. Beh- itiann n'a aucune raison de faire deux espèces du vilain de la gàse ci), Pennant se trompe, quand il croit que le cephale de Linné est son chub bj: car la figure de la nageoire de la queue, et le nombre des rayons dans la nageoires de l'anus prouvent que ce sont deux poissons dilférens. a) Clunm. 375. ^) B. Z, UT. 3% \ 38 ^^^ RAPIIE. VII. L A R A P H E, Cyprinus A s -p i ii S ^ Vllme Planche. La mâchoire inférieure recourbée, seize rayons à la nageoire de l'anus. Cypi'inus viaxilla iri' feriore incurvata, pinnae anijadiisxri. P,xx, V, IX, A, XVI, Cxx, D, XI, C^-piinus aspius, Linn. S. Spec. 14. n. 6. et 3- "• 1^ N. 550. n. 23. Arted. Gen. Leuciscus, KleiiiM. P. V.65. 6. n. ig. Syn. 14. 11. 31. n, 1. vJn distingue la raphe aux seize rayons cle la nageoire de l'anus, et à la forme de la mâchoire inférieure, qui forme un arc: elle est avancée quand la bouche est ouverte; et quand elle est fermée, sa pointe recourbée s'emboîte avec l'é- chancrure de la mâchoire supérieure* Les écail- les à la ligne latérale ressemblent à celles du vi- lain, si ce n'est que les premières sont un peu plus petites. Dans les jeunes poissons de cette espèce, j'ai trouvé autant de lignes parallèles à la ligne latérale, que le poisson avoit de rangées d'écaillés. La raphe est du nombre des poissons de ri- vière qui parviennent à ime grosseur considé- rable. Il n'est pas rare dans nos contrées, d'en LA RAPIIE. 39 trouver qui pèsent jusqu'à douze livres. Cette espèce forme pour ainsi dire le passage entre les poissons voraces et ceux qui ne le sont point. Elle mange des poissons comme les premiers, et vît aussi d'herbes et de vers comme les seconds. Mais comme sa gueule n'est pas aussi grande que celle des poissons proprement voraces, elle est obligée de se contenter de petits poissons. Elle aime un fond propre, se plaît dans les rivières dont le courant n'est pas rapide, et dépose son frai vers la fm de Mars , sur les pierres du fond. Sa chair est blanche et d'un bon goût: mais elle tombe en morceaux lorsqu'on la cuit. D'ailleurs, elle est traversée de petites arrêtes ; et comme elle est molle et grasse, les estomacs foibles ne la digèrent pas aisément. La raphe a peu de vie; et par conséquent ne se transporte pas aisément. Elle croît promptement. On peut dire de ses dents ce que j'ai dit de celles du vilain. Quand ce poisson est encore petit, il devient souvent la proie des espèces voraces : mais dans la suite, il use de représailles. Il sait sur-tout si bien assembler les ablettes, qu'il lui est facile de s'en rendre maître. Dans l^e tems du frai et en automne, on le prend en quantité avec des filets, des poches et des lignes, auxquelles on attache un petit poisson. On le trouve dans la Marche^ la Poméranie, la Prusse, en Saxe, en Autriche, en Suède et en Nor^vège. On en pêche sur- tout 4-0 LA KAPIIE. nne grancle quantité dans le Ciiriscli-Have et le Frisch-Ha\"e, en Prusse. Le canal des intestins a trois courbures;- l'épine du dos quarante - quatre vertèbres , et dix -huit côtes de chaque côté. Ce poisson se nomme: rappe, en Sïlesie; rappe, aland, raubalet, en Saxe ; rapen, en Prusse ; schiedy en Autriche; asp, en Suède; hlaa-spol, en NoTwège; sclieresper, en Russie. Artédi range ce poisson sous difFérens nu- méros. Il en parle une fois comme d'un poisson connu aux ichthyologistes aj; puis il le donne pour un poisson Suédois hj. Mais si l'on com- pare ses descriptions avec la mienne, on verra sans en pouvoir douter, que la Rapfe d'Alle- magne et Tafp de Suède n'est qu'un seul poisson. JVuJff cj rapporte faussement à la raphe, le cé- phale de Linné: et c'est ce qui a donné lieu à Pennant de regarder comme un seul poisson notre raphe et son céphale dj, a) Syn. 8* n. 12. c) TcKtli. 45' b) L. c. 14. 11.31. d) B.Z. III. 363. iE SPIRLIN. 41 VIII. LE SPIRLIN, C y p rinu s bipun c t a t us, VlIIme Planche. Fjg. 1. La ligne latérale rouge, seize rayons à la nageoire , de Tanus. Cyprinus linea laterali ruhrnj pinnae ani radiis xrx. P. xiii. J^, viii. A,xFi> c. XX, D. X. Jue spirlln est reconnoissable par les seize ray- ons de la nageoire de l'anus , et par la ligne la- térale, qui est rouge. Ce poisson qui appartient à la classe des carpes larges, a une grosse tête pro- portionnée au corps; ce qu'on ne trouve ordinai- rement que dans les espèces étroites. Sa ma- clioire supérieure est un peu avancée. Les dos est orqné. Le corps est couvert de petites écailles tachetées de noir. La ligne latérale est rouge, et forme une courl3ure vers le ventre. Sa couleur ses points noirs et le fond blanc sur lequel ils sont placés, donnent au poisson une apparence charmante. La couleur rouge de la ligne laté- rale se perd quand le poisson vieillit ou qu'il meurt. 4.2 \ LE SPERLIN. Le spirlin ne réussit que dans les eaux cou- rantes dont le fond est couvert de sable ou de cailloux. Il fraye dans le mois de Mai. Alors il cherche les endroits les plus rapides , aRn de pouvoir se frotter contre les petits cailloux. Hors de ce tenis , il se tient ordinairement sur la sur- face de l'eau. J'ai trouvé dans ce poisson un si grand nombre d'œufs, qu'ils pesoient presqu'au- tant que le poisson même. Ils étoient si petits, qu'il me fut impossible de les compter. Depuis quelque tems on a trouvé ce poisson dans le Ve- ser ^ et il s'y multiplie sans doute beaucoup ; car on en prend un grand nombre à la ligne et au iilet. Ce poisson peut très -bien servir de nour- riture à la truite, parce qu'il se tient dans les mê- mes eaux. Comme il est petit, il devient facile- ment la proie de toutes les espèces voraces . Il se nourrit comme les autres carpes, d'herbes et de vers. Sa chair est blanche et d'assez bon goût. Le canal des intestins a deux courbures; l'épine du dos trente-trois vertèbres; et on trouve quinze cotes à chaque côté. On nomme ce poisson: alandhleke, enWest- phalie ; lauhen, en Bavière ; spirlin, en France et en Angleterre. Nous ne saurions décider si ce poisson fut connu aux anciens ichthyologistes , et si c'est celui qu'ils ont nommé Bambèle à gj'osses écaiU LE SPIRLIIC. 45 les bj. Les mauvaises figures et le manque de descriptions, nous laissent dans l'incertitude à cet égard. La figure du poisson auquel Marsigli donne le nom àe Reislauben cj a, à le vérité, beau- coup de ressemblance avec la notre. Mais com- me il avoue lui-même que son dessin n'est pas exact, il est douteux si c'est le nôtre ou un autre poisson. La description que Leske nous donne de son ElritzCy convient assez à notre spirlin dj-^ et je croirois volontiers que c'est le même poisson, si les auteurs qu'il cite à ce sujet, ne nous prou- voient qu'il n'a pas voulu parler du spirlin, mais du véron , que l'on nomme en allemand Elritze, h) Gesn.TI1i01b.158* 1*^10- ximiis squamosus ma- jor. Williiglibli. 268. JonXlon. 144. tab. 27. f. 5. c) DaiiTib. IV. 64. tab. i8- fig. 2. d) Specim. Tclitli. 47* V 44 ^^ BOUVIERE. IX. liA BOUVIERE^ Cyprinus arnarus.^ VlIIme Planche. Fig. 3. Sept rayons aux nageoires de la poitrine et du ventre. Cyprinus pinnis pectoralihus ventrci' lihusqueradiis m. P. vu. V.vii» A.xi. C.xx* D. X. La bouvière ou péteuse. Duham. Pècîie II. $1/!^. PI. 6. iîg. 5. La bouvière est le plus petit poisson du genre des carpes. On le distingue des autres espèces aux sept rayons des nageoires pectorales et ven- trales. Ce petit poisson est du nombre des carpes larges; car il n'a jamais plus de deux pouces de long, et a plus d'un demi-pouce de large. Il est transparent comme presque tous les petits pois- sons. La tête est petite et cunéiforme. Les mâ- choires sont égales ; les yeux petits. Les écail- les \n.ies à la loupe, paroissent marquées de petits points noirs. Le dos est efïilé au-dessus de la nageoire dorsale, rond au-dessous. LA BOUVIERE. 45 La bouvière aime les eaux pures et couran- tes qui ont uu fond de sable. On ne la trouve que dans les rivières ou dans les lacs qui sont traversés par un rivière. La chair de ce poisson est anière ; ce qui lui a sûrement fait donner par les allemands le nom de bibterlin^, l'amer. On . le sert raremenr sur nos tables. Comme il ne fait pas un objet de gain pour les pêcheurs, ils y font si peu d'attention, que je n'ai pu apprendre d'eux le tems du frai. Tout ce que je sais, c'est qu'il a un grand nombre d'oeufs blancs , et si petits qu'il est impossible de les compter. Mal- gré la grande quantité d'oeufs de ce poisson, et quoique l'amertume de sa chair l'expose rare- ment à la poursuite des homines, il ne multiplie cependant pas beaucoup. Comme il est petit, il devient fréquemment la proie des espèces vo- races. On trouve quatorze côtes de chaque cote, et trente vertèbres à l'épine. On' nomme ce poisson hUterling, en Alle- magne; bouvière et -peteusc, en France, etbittev' carp, en Angleterre. La transparence de ce poisson me fit croire que c'est Vjïphya de Linné aj. Mais la différence du nombre des rayons, et la description^ que cet auteur en donne, m'ont convaincu qu'il avoit sous a) S. N. 533. n. 11. h) Faun. Suec, n. 374. 4-6 l-A BOUVIERE. les yeux un petit poisson rond et différent du nôtre. En général, la transparence ne forme pas un caractère distinctif chez les petits pois- sons; parce qu'ils ont tous cette propriété tant qu'ils sont jeunes. Richter fait mention d'un poisson, auquel il donne le nom de bitterling , elritze et ivetterfis^ch- lein cj: mais les cculeurs qu'il lui donne, et le nombre des rayons des nageoires, prouvent qu'il n'a rien de commun avec notre bouvière. Birck- Jioltz dj , au contraire, qui indique en peu de mots un petit poisson, qu'il appelle bitterling, paroît l'avoir connue. ^ Il me paroît vraisemblable que notre bou- vière est le même poisson que le petit phoxinus de Rondelet ej, la petite hmnbhle à écailles de Gesner fj, et le phoxinus squamosus de Jon- s ton s;J, c) IchtTi. 910. /) Thierb. 158- b. d) riscli. 6. n. 5. g^ De Pisc. ^^^ e) De Fisc. II. 204. i^'able. 47 X. L* A B L E, Cyprînus Alhurnus, VlIIme Planche. Fi g. 4. La mâchoire inférieure avancée; vingt et un rayons à la nageoire de l'anus. Cyprînus maxilla infcTiore longiore; pinnae ani radiis xxj. P. -^/iiv, V. IX. A. xxj. C XVIII. D. X. Cyprinusalburnus, Linn. S. Bleac, Penn. B. Z. III. 370. N. 531. n. 24. Arted. Syn. n. 176. PI. 73. io.n.19. Spec. 17. Gronov. Able, ablette, ovelle, able- Zooph.n.33(S. borde. Duliam. Pêcli. II. Leuciscus. Klein. M. P. V. 4^3. Pi. 23. f. 12. 6Q. 11. 16. t. i8- f. 3. JLj'able se distingue aisément des autres carpes par l'avancement de la mâchoire inférieure, et les vingt -un rayons de la nageoire de l'anus. Sa tête finit en pointe. Le front est plat. Le corps est couvert d'écaillés minces et brillantes, qui se dé- tachent aisément. On s'en sert à Paris pour don- ner aux fausses perles l'éclat des perles fines. On enlève les écailles en ratissant le poisson à l'ordi- naire: on les met dans un bassin d'eau claire, où ou les frotte comme si on vouloit les broyer. Cette opération, qui occupe à présent dans Paris un grand nombre d'ouvriers, se répète dans dif- férentes eaux, jusqu'à ce que les écailles ne dépo- sent plus de teinture: la matière argentée se pré- cipite au fond. On verse l'eau surabondante, en inclinât le vase; et l'on s'arrête lorsqu'il n'y a plus qu'une liqueur argentine, que l'on nomme effence d Orient, On mêle à cette essence un peu de colle de poisson; ensuite on a des grains de verre creux très -minées, couleur de gyrasole, ou bleuâtres, dans lesquels on insinue, à l'aide d'un chaliuneau, une goûte de cette essence d'O- rient, que l'on agite pour faire étendre la liqueur sur toute la surface des parois. Le dos est pres- que droit et olivâtre, et les côtés brillans, d'une belle couleur argentine. Le marchand Jean Dur?' fit pêcher, en 1772, tout le long du Rhin, depuis le lac de Constance jusque dans les pays- bas , il établit seulement à Clève trois comptoirs, où les pêcheurs apportent les écailles. Dans cet endroit plus de 50 personnes gagnent leur vie à ce travail. Ce poisson est large vers le ventre; mais il devient étroit par derrière, et la ligne latérale est coiubée. La nageoire du dos est plus éloignée de la tête que les nageoires ven- trales. L'able se trouve dans les lacs et dans les rivières, de l'Allemagne, de la France, de l'Angleterre et de la Russie. Sa longueur or- L AELE. 49 dinaire est de quatre à cinq pouces. On en trouve cependant dans di ITé rens endroits qui parviennent jusqu'à huit pouces. Comme elle a beaucoup de ressemblance, avec la petite ma- rène, on la vend pour telle. Mais comme la dernière appartient au genre des saumons, et qu'elle a par conséquent une nageoire epaise, il est aisé de la reconnoître à ce caractère et de découvrir la tromperie. Quand ce poisson est gros, il est d'un assez bon goût; mais à cet égard il n'approche pas de la marène. Comme il a beaucoup d'arrêtés, il n'y a guère que les gens du peuple qui l'achètent. L'able multiplie beau- coup. On la prend pendant toute l'année au filet et à la ligne. En hiver, on en prend en quantité sous la glace , avec de grands vervcux ; et au printems, dans des nasses d'osier, auxquelles elle aime à se frotter pour déposer son frai. Ce poisson fraye en Mai et en Juin. Comme il .t petit, il devient non seulement la proie de la plu- part des espèces voraces, mais aussi des oiseaux pêcheurs. Quant à la nourriture et aux parties intérieu- res, il ressemble aux autres poissons du même genre, si ce n'est qu'il a sept dents, cinq devant et deux derrière. Le canal des intestins a deux courbures, j'y ai souvent trouvé une espèce de ver solitaire nj, (t) Voyez mon traite de vers 3. D 50 L ABLE. De Table et du rotengle proviennent clés mulets, dans lesquels j'ai remarqué des écailles plus grandes, un corps plus large, et moins de rayons à la nageoire de l'anus, qu'à la véritable able. Ce poisson est connu sous difFérens noms. On le nomme: ûckeley, dans la Marche, en Po- méranie et en Prusse; ockelei, enSilésie; schneU dcrjischely spitzlauben et windlauberiy en Autriche; blûtey bleickCf ochelbctze, ùckeley, et weidenblabt^ en Saxe; nestelingy dans l'Empire; zurnj)eljisch* lein, dans quelques autres provinces; nlbely en Suisse; inayblecke, en Westphalie; alplienaar, en Hollande; witinck et witecke, en Schleswig; skalle, luyer etblikke, enDannemarc; mort, en Norsvège ; loja, en Suède ; lueissjiscli, plite, rnaile, JValykalla, enLivonie; kalinka, kaniok, ukleika et gnrnioky en Russie; aukschle, en Lithuanie; gusczova, en Pologne; able, ablette, ovelle et borde y eu France; bleack, en Angleterre. L£ GOUJON. 51 XL LE GOUJON, C y p r i n u s G o b i . VIIIii^ Planche. F/g. 2. Le corps étroit et tacheté; deux barbillons à la bouche. Cyprinus oblongus, varias; cirris duobus, P. XFJ, V. IX, A, X. C. xjx. D, x. Cyprinus gobio, Liiin. S.N. IV. 50. n. 5. t. 15. f. 5. 526. n. 5. Aited. Gen. 4. Gud^eonjI'enn.B.Z. 111.3^1. n.2o. Syn. 11. n.20. Spec. n. 163» 15. Grunov. Mus. 11. u. Goujon de rivière. Du- 149. Zoopli. n. 52;). ham. Pccli. II. 497. Pi. 25. Encheliopus, Klein. M. P. f. 5* JLe goujon e$t un poisson du genre des carpes étroites. On le distingue aisément à deux bar- billons placés chacun à un côté de son museau, et aux taches dont son coi^s est couvert. Sa tète est grosse, et l'œil petit. Quand la bouche est fermée; la mâchoire supéideure avance un peu. Le corps est rond et couvert de grandes écailles. La liEne latérale est droite et couverte de taches bleues. Les nageoires sont tantôt rougeàtres, tan- tôt jaunâtre, selon l'âge du poisson et la nature de l'eau où il vit. Ordinairement 1 âge des poîs- D 2 52 LB Goujon. sons, la nourriture, l'eau, le teins du frai, influent sur la couleur des poissons. On remarque plu- sieurs taches noires sur les nageoires de la queue et du dos ; et la dernière est vis-à-vis de celles du ventre. On trouve ce poisson dans les lacs et dans les rivières de France, d'Angleterre, d'Allemagne et de Russie, dont le fond est pur et sablonneux, Il est ordinairement de la grosseur marquée sur la planche VlIIiiie. Cependant dans quelques lacs, où il trouve une bonne nourriture, il par- vient à la longueur de huit pouces. Sa chair est blanche, très-bonne au goût et de facile digestion. C'est par cette raison qu'on le confeille prèféra- blement à tout autre poisson, aux personnes foi- bles et maladives. Dans le printems, le goujon sort des lacs pour passer dans les rivières: là il dépose son frai contre les pierres, non tout d'un coup, mais peu à peu; ce qui dure un mois. En automne, il retourne dans les lacs, où on le prend en grande quantité en Septembre et en Octobre. Alors il est à si bon marché, sur-tout en Poméranie, que, selon Richter, on en a pour trois sous de quoi rassasier six personnes qj. On le prend au iilet et à l'hameçon. Dans un village qni est à cinq ou six milles de NorwicJi, en Angle- terre, les pauvres gens pèchent ce poisson dans a) Iclitli. 904. I.E GOUJO^^ 53 lin riusseaii voisin. Voici la manière dont ils s Y prennent: ils choisissent une branche d'aubépine, qui a beaucoup d'épines ; et après en avoir coupé luie, ils y attachent une Rcelle; ensuite ils pren- nent un ver, qu'ils attachent, tant à la ficelle, qu'à l'épine l'autre bout de la ficelle est lié àunepetite branche qui pend sur le ruisseau. Ils font plus de cent de ces trébuchets à la fois, et ne manquent jamais de prendre un grand nombre de poissons : car à peine le poisson a-t-il avalé le ver, et qu'il veut se retirer avec sa proie, qu'il se sent arrêté, et que l'épine lui perce le gozier bj. Quoiqu'il soit sans cesse exposé à la poursuite des hommes, des poissons voraces et des oiseaux pêcheurs, il se multiplie cependant beaucoup. La manière . dont il fraye, fait que ses œufs produisent beau- coup plus, à proportion, que ceux àes autres poissons. Cette multiplication et sa, vie dure, le rendent très -propre à servir de nourriture aux sandres, aux perches et aux truites. On trouve quelquefois une espèce de ver so- litaire dans ce poisson cj. Le canal intestinal a deux sinuosités. Les œufs sont d'un bleu clair et si petits, qu'on ne sauroit les compter. Il a cinq dents à cliaque mâchoire; mais elles sont si petites , que dans un poisson long dé quatre pouces, on avoit bien de la peine à les distin- h) Hamb. Magaz. II. 436. c) Voyez mon traité sur les ver. 5. 54 ^^ GOUJON. «nier à l'œil. J'ai trouvé à chaque c6ré qua- torze côtes, et trente -neuf vertèbres à l'épine du dos. Le goujon est connu sous diiFérens noms. On le nomme: grûndling ou gressUng, en Alle- magne; greyling et gudgeon, en Angleterre; goujon de rivière j en France; goijfon, à Lyon; grunipel, sandhest, grundling et gyinpel, en Dannemarc; grondely en Hollande; poJips et grundulis , en Livonie ; goliz , piskor , goljan et goljantschik y en Russie. XII. LE V É R O N, Cyprinus P h o x i n u s. VlIIme Planche. F/ g. 5. Le corps arrondi; dix rayons aux nageoires du ventre, de l'anus et du dos. Cypriniis tere- tiusculus; pinnis ventralibus ^ ani dorsique radiis x. F. xrji. V, x. A, x. C. xx. D. x. Cypiinus Phoxinus, Linn. ham. Pêclie. II. 515. Pi. 26. S. N. 523. n. 10. Aitcd. Syn. f. 7. 13. n. 23. Minow. Penn. B. Z. III. 573. Le vaiion ou véron. Du- ii* i77» \^e joli petit poisson se fait distinguer par les dix rayons qu'il a aux nageoires du ventre, de JLE VERON, 55 Tanus et du dos. La tête est cunéiforme. Les yeux sont petits. Le corps est allonge, rond, et couvert de petites écailles minces et gluantes Il y en a qui ont le dos tout noir; d'autres l'ont d'un bleu clair. Les couleurs diverses des raies et des taches donnent aux côtés un coup d'oeil charmant. Chez quelques-uns, le bleu, le jaune et le noir y diversifient agréablement les raies; chez d'autres, c'est un beau rouge, un bleu clair et un blanc argentin. Ils ont pres- que tous des raies bleues, qui vont du dos à la li^rne latérale. La li^rne latérale et le dos sont droits. Quoique ce petit poisson ne devienne pas plus gros qu'il est indiqué sur la planche, sa chair est cependant blanche, tendre, saine et de très -bon goi'it. On trouve ce poisson en Silésie, en West- phalie, en France, en Angleterre et en Russie, dans plusieurs rivières; et il passe pour im des poissons les plus délicats du Véser. On le prend dans toutes les saisons; mais sur -tout vers la St. Jean. On se sert pour cela de petits filets Uns, ou de la ligne. Il mord très-promp- tement à l'hameçon. Comme il a la vie fort tendre, il meurt bientôt après être sorti de l'eau. Ses ennemis les plus dangereux sont le brochet et la lote. A trois ou quatre ans, il commen- ce à frayer; ce qui se fait ordinairement vers la fm de Juin et dans le fond de l'eau. Il a une ^6 LE \'ERO]S. granrle quantité d'oeufs, et multiplie considé- rablement. Il aime une eau pure et courante, le fond sablonneux ou pierreux, et se tient par troupes dans les endroits où il n'y a point d'au- tres poissons: voilà pourquoi on le prend rare- ment avec ceux d'une espèce différente. Il se nourrit comme les autres poissons du même genre, et ne croît que lentement. Comme il aime la chaleur, il se tient ordinairement vers la surface de l'eau. Jai trouvé dans ce poisson deux courbures au canal intestinal; environ trente - quatre ver- tèbres à l'épine du dos, et quatorze à seize cô- tes de chaque côté. Ce poisson est connu sous difFérens noms. On le nomme; Elritze, en Silésie; ^rhnpely en Westphalie; elritze et elbute, en Dannemarc; erwel et elritze ^ enLivonie; ellerling, en basse- Saxe; elwe-ritze, en Nor^vège; olszanka, en Pologne; vairon ou véron, en France; sangui- nerolla, en Italie; morellay à Rome; -pinck, mi' now et rriinhn, en Angleterre; wZa/i, en Tar- tarie. I.A SOPE. 57 XIII, LA SOPE, Cypriiiu s Bal le rus^ » IXme Planche. Quarante et un rayons à la nageoire de l'anus. Cyprinus pinnae nni rndiis iuli. P. xri/. 7^. jx. A. XLi. C. XIX. D. X. Cyprinus Ballerus, Linn. S» 51.5^5. Arted. Syn. 12. n. N. 532. II. 31. Faun. Suec. 24. Spec. 23. n. 11. vjn distin^ie cette espèce des autres carpes par les quarante et un rayons de la nageoire de Tanus. La tête est petite et arrondie par le bout. La mâchoire inférieure est recourbée et un peu av^ui- cée lorsque la bouche est ouverte. Le corps de la sope est très mince, sur -tout depuis l'anus jusqu'à la nageoire de la queue. La ligne laté- rale a une direction droite, le dos finit en tran- chant. Les écailles sont petites. La nageoire 58 ^A SOPE. du dos est plus éloignée de la tête que celles du ventre; celle de l'anus est très large, celle de la queue est taillée en croissant, et a la partie in- férieure plus longue que la supérieure. Ce poisson habite ordinairement les eaux du Hâve, en Poniéranie, celles du Curisch-Have, en Prusse, et dans les rivières, qui s'y jettent. Selon le Prof. Bok, la sope va vers l'autom- ne, du Curisch-Have pour passer dans les riviè- res. C'est dans ces eaux qu'on le prend au pi'intems dans des filets et dans des poches. Il ne se multiplie que lentement, et on ne l'estime guère, parce qu'il a peu de chair et une quantité d'arrêtés. Conune il n'est pas gras, il fournit une nourriture assez saine. La sope ne devient guère plus grosse qu elle est représentée sur la neuvième planche: alors elle pèse environ une livre et demie. Cependant on en trouve quelquefois qui pèsent jusqu'à trois livres. Le tems du frai est vers la fin d'Avril. C'est vers ce tems que j'examinai une femelle: elle pesoit quinze onze; l'ovaire en particulier en pesoit cinq et trois quarts, et contenoit 67,500 œufs de la grosseur de la graine de pavot. Il a à chaque mâchoire cinq dents com- primes des deux côtés, et pointues par en haut* Le canal intestinal a deux sinuosités; IVpne du dos quarante -huit vertèbres; ^et on trouve uix-huit côtes à chaque côté. TA SOPE. 5<> Ce poisson est connu sous cliiFérens noms. On le nomme: zop^, clans la Marche et en Prusse; schiuope et schivuppe, en Poméranie et à Ham- bourg; sapa et senez, en Russie; /lire et blikke^ enDanncmarc; brasen et bunhe, en Noi-^vège; ilicca, blecca, braxenblicca , braxen-panka et braxeufllay en Suède; bleyei'y rudulis elsargy en Livonie; sporn et spore , enLitlmanie; sope, en France; b aller -carp, en Angleterre. Comme notre sope ne se trouve que dans les environs de la mer Baltique, il n est pas étonnant que les anciens ichthyologistes n'en ayent point fait mention. Arbécli fut le premier qui en donna une description : mais vu qu'il la regardoit comme un poisson déjà connu, il négligea pas de la mesu- rer aj. Dans la suite Linné en parle, mais en peu de mots. JVuljf en ïàiX. aussi mention comme d'un poisson de la Prusse, et la rapporte faussement à la farène de Linné bj. Enfin, Mùllcr la donne pour un poisson du Dannemarc c). Quoiqu'on prenne ce poisson en quantité dans le Curiscli-Have, le célèbre Klein a cepen- dant douté de son existence. D'abord il se trompe en prenant le ballerus ^Artédi pour la . bordélière. Mais comme il ne compta que vingt -cinq rayons à la nageoire de l'anus, (car a) Spcc. 23. n. 11. c) Prodr. Z. D. n. 442. b) Ichth. 11. 63. 6o i-a soPE. il ne comptoit point les petits rayons du bout) il tomba dans une autre erreur, qui étoit de , soutenir, qu'il n'y avoit aucune carpe qui eut quarante rayons à une nageoire d), Kranier en parlant du poisson connu en Autriche sous le nom de schein-pleinzen e), cite le ballerus à'^rtédi, de Linné et des autres écrivains qui ont parlé de la bordélière. Il est très -vraisembla- ble que le poisson qu'il a décrit n'est aucun de ces deux, mais la brême^ Car: i) Il doit être difficile de trouver la s ope dans les pays méri- dionaux de l'Europe. 2) Son poisson pèse six à sept livres ; au lieu que notre sope ne passe guère deux à trois livres. Il est plus vraisem- blable qu'il a eu en vue la brème; car c'est le seul poisson des carpes larges qui parvdenne à cette grosseur. La vraisemblance augmente encore en ce que lYTarsigli en décrivant la brè- me dudanube, sous le nom de hleimen JJk d) M. P. V. 62. not. d. /) Danub. lY. 49. e) Elencli. 595. n. 8« LA BORDELIERE. ' 6l XIV. LA BORDÉLiÈrE, Cyprin us Blicc a, Xme Planche. Carpe large à \ângt-cinq rayons à la nageoire de l'anus. Cyprinus latus pînnne ani radiis xxr. P. xr. P^. X. A» xxF. C. xxjj. D. ii^ii, Cyprinus latissimus. Gro- Brama. Klein. M. P. V» 62. nov. Zoopli, n. 3/14. u. 4« \Jn reconnoit la bordélière à son corps large et mince, et aux vûngt-cinq rayons de la na- geoire de l'anus. La tête de ce poisson est pe- tite, et linit en pointe. Lorsque la bouche est fermée, la maclioire supérieure avance un peu sur l'inférieure. L'ouverture de la bouche est si petite, que, dans im poisson de huit pouces, je n'ai pu y introduire le petit doigt qu'avec force. Le corps est couvert d'écaillés minces de moyenne grandeur. Le dos est tranchant par le haut et rond par le bas et forme un arc. La ligne latérale est courbe et garnie de points jaunes. La nageoire du dos est plus 62 LA BORDELIERE, éloignée de la tète que celles tlu ventre. La nageoire de la queue est fourchue; et la parties inférieure plus longue que la supérieure. La bordélière est lui de nos poissons les plus communs. On le trouve pendant l'année dans tous nos lacs et dans toutes nos rivières dont le cours est tranquille, et le fond sablon- neux ou marneux. On ne l'estime guère, parce qu elle est peu charnue et qu'elle a beaucoup d'arrêtés. Il n'y a presque que le peuple qui l'acheté. Elle fraye au mois de Mai et de Juin, sur l'herbe des rivages unis. Alors elle est si occupée de cette action, qu'on peut la prendre à la main. Hors de ce tems, elle est fort peu- reuse, se précipite dans le fond au moindre bruit, et est par conséquent assez difficile à prendre. La manière dont ce poisson fraye, donne occasion d'en distinguer trois classes. La plus grosse paroît la première, et fraye aussitôt après la brème. Elle coinmence à pondre au lever du soleil, et continue jusqu'à dix heures du matin: elle fmit dans trois ou quatre jours, a moins qu'un froid subit ne se fasse sentir; car alors elle Unit dans la journée. Neuf jours après, paroissent celles de la seconde grandeur; ensuite les plus petites iaprès un autre espace de neuf jours. Toutes frayent en faisant un grand bruit, causé par leurs divers mouvemens, La bordélière nuiltiplie extraordinairement. Celle X.A BORDEI.1ERE, 03 que j'ai examinée pesoit quatre onces, et avoit environ cent huit mille oeufs verdàtres plus pe- tits que des grains de millet. Ce poisson ne pèse ordinairement que trois à quatre onces: cependant on en trouve quelquefois qui pèsent jusqu'à une livre. On le prend à la ligne, au iilet et à la nasse. Il vit comme les autres, d'herbes et de vers; il est aussi très-a\4de du frai du ro- tengle. Pour lui, son frai ne devient la proie d'aucune espèce; ce qui fait qu'il multiplie beau- coup. Le canal des intestins a deux courbures o^; l'é- pîne du dos trente neuf vertèbres, et chaque ma- a) C'est sur -tout dans la cavité du bas -ventre de la bordélière que se tient ordinairement lever que Linné nomme fasciola inttstinalis. On y en trouve fort souvent jus- qu'à six à huit, longs d'un pied chacun. On connoît aisément à Ten- flurc du ventre quand ce pcisson est attaqué de ce ver. Comme on sait qu'il est sujet à cette maladie, plusieurs per- sonnes en ont du déii;oùt, et n'en man2;ent point. Les pèclieurs tàclient de faire sortir le ver en pressant le ventre du poisson ; mais ils n'y réussissent que rare- ment, parce qu'il s'en- tortille ordinairement autour des intestins. Au printems, on trouve ra- rement ce ver. Peut-être que pressé par les oeufs elles laites qui augmen- tent alors , il est iorcé de quitter ce poisson, et disparoit entièrement. Il attaque pluj communé- ment les jeunes que les vieux. On trouvera pi us de détails sur ce sujet dans mon Traité sur les vers des intestins. Il est remarquable qu'Aristote a observé ce ver dans la bordélière, pourvu que son balUrus soit le même que notre poisson. Vov*. son H. N. 1. Q. c. 20. 9 64- ^^ BORDELIERE. choire sept dents en deux rangées. Les autres parties intérieures sont comme dans les autres carpes. La bordélière a pour ennemis tous les pois- sons voraces, les oiseaux d'eau et Taigle de mer. Les pêcheurs de ce pays en font un appât pour prendre des anguilles à la ligne. La chair de la bordélière est molasse: mais comme elle n'est pas fort grasse, ells ne peut pas être mal -saine pour les personnes foibles. Ce poisson est connu sous difFérens noms. On le nomme: Giister, dans la Marche électo- rale; geusber, en Poméranie; pliten o\\ -plitjlsch^ à Hambourg; iveissfisshy bleicke et jûstery en Prusse; hleyweisbjisch et bleyblicke , à Dantzig; neuster, guchsteTii et weissjisch, enSilésie; plôtze et hleyer, en Saxe; bley et bliec/Le, en Hollande; hrasen et bunka, en Norwège; bordélière et jjlestie, en France; gûstraa, en Kussie et blicca en Angleterre. Comme ^rtédi et Linné ont pris leur sope et notre bordélière pour le même poisson; il n'est pas étonnant que Klein bj , Wuljf cj , Gro- nov dj, MiÀller ej €t Bomare fj , qui ont écrits après eux, ayent aussi pris la sope pour la bor- délière. Mais TVillughby gj qui doutoit si la b) M. P. y. 62. n. 4. c) L. s. IV. 399. c) Icht. 51.11.69. f) Diction. II. 166. <^) ZooT)h. 11.3'^. g) Icluh. ?50. JLA BOr.Di:LlEI\E. 6^ bordelière et le carassin étoient le niêine pois- son, paroit n'avoir eu aucune idée distincte^ ni de l'une, ni de l'autre. Notre bordelière ne seroil-elle point la bierkna à'ylrtédi lij et de Linné V^ La descrip- tion de cette dernière hj convient parfaitement à notre poisson. Mais comme Linné assure ex- pressément IJ que dans cette espèce il a trouvé à la nageoire de Tanus, trente -cinq rayons, et non vingt -cinq comme Artédi, on n'aura quel- que chose de certain là -dessus, que lorsque quelque naturaliste suédois aura montré lequel de ces deux auteurs a raison. Pallas se trompe quand il croit que notre poisson, ou la gûster des allemands , est le même que la viinbn de Linné mj car comme cet auteur dit que sa x^imba a le bec en forme de nez nj, elle ne peut être la bordelière, qui a les mâ- choires d'éo:ale lon^ricur. La sope a beaucoup de ressemblance avec la bordelière, à cause de son corps large et mince. Cette ressemblance jointe aux mauvais dessins que les anciens ichthyologistes nous ont donnés de ces poissons, peuvent servir d'excuse à Arté" dioj et il Linné pjf qid ont pris ces deux espèces 7/) Syn. 13. n. 27. in) N. Eeytr. I. g.\. i) S. N. 552. n. 2g. 7/) S. N. 551. n. 21. k) Spec. 20. 11. 9. o) Syii. 12. 11. 24. /) Faun. n. 571. p) Fa un. n. 365. E 66 J-A BOl\pELIliR_ pour le même poisson, et ont rapporte à la sope ce que les écrivains avoient dit de la bordélière. Voici les vrais caractères dis tinc tifs de ces deux poissons; i) La bordélière est courte; la sope est al- • longée. 2) La dernière a la tête tronquée , celle de la preinière est pointue. 5) Cliez la sope la mâchoire supérieure sur- passe un peu l'inférieure; dans la bordélière les deux mâchoires sont d'égales lono:eur. 4) Les nageoires pectorales et ventrales de la bordélière sont rouges; celles de la sope sont jaunes et bordées de bleu. 5) La sope a quarante-et-un rayons à la nageoi- re de l'anus; la bordélière n'en a que vingt-cinq. 6) La bordélière est un poisson des plus com- muns, non seulement dans les Etats du Roi de Prusse, mais encore dans toute l'Allemagne, en Suisse, en Hollande, en France, et probablement aussi dans toute l'Europe. La sope, au contraire, ne se trouve que dans la mer Baltique et à l'em- bouchure des fleuves qui s'y déchargent. Voilà sans doute pourquoi Ricliter, qui écrivoit cepen- dant en Poméranie, ne connoissoit pas ce^ pois- son même de nom; et Brùsi^^ejiiaun ne l'a point rapporté dans le catalogue des poissons de la Poméranie. LK CARASSIN. 6j 7) La bordelière a deux rangées de dents: la S ope n'en a qu'une. g) Celle-ci a quarante -huit vertèbres à l'e- pine du dos; celle-là n'en a que trente -neuf. 9) Enfin, la bordelière pèse à peine une demi -livre; au lieu que la sope en pèse jus- qu'à trois. ^ XV. LE CARASSIN, Cypriniis Car assius. XIï_ne Planche. La ligne latérale droite; dix rayons à la nageoire do l'anus. Cyyrinus Une nlaterali recta; pin- nae ani radu:> x. P. xiii. V, jx. A. x. A, x. C. xxj. Z). XXI. Cypiînns carassius, Liun. S. C)prinus. Klein. M. P. V- N. 526. 11. 5. Artcd. Qtn. ^^g. ,1,^. 1. 11. f, 1, 4.11.7. Syn.5.n.5. Spec. ' ''. „ t, 7 ttt A/ , /^ -7,1, diician. reiin. -D.Z.lll. 'ÂOi. 29.11.15. Urojiov. Zoopli. ^T n.543. Mus. I. 11. 11. "• ^7,^* PI- 7-' JL/e carassin est du genre des carpes larges, et se distingue des autres par sa ligne latérale, qui est droite; el par les dix rayons de la nageoire de l'anus. La lète est petite et arrondie à l'extre- E G 68 ^^ CAIVASSIN. mite. Les yeux sont petits; les narines plus près de l'œil que de la bouclie. Quoique ce pois- son ait déjà le corps plus large que tous les autres du même genre, il est aussi hors cela épais, et couvert d'écaillés de moyenne grandeur. Le dos est arqué , d'une forme tranchante vers la na- geoire, et ronde au-dessous. Le carassin aime un fond marneux ; et on ne le trouve que dans les étangs et les petits lacs. Il réussit sur-tout dans les fonds de o;laise. Sa chair est blanche, tendre, n'a pas beaucoup d'arrêtés, et est par conséquent fort estimée. Comme il n'est pas gras, il fournit un aliment assez sain aux personnes foibles et maladives. Il est remar- quable que le carassin lorsqu'on le met dans une eau dont le fond est fangeux, n'y prend pas sitôt un mauvais goût que le brochet, la perche et les autres poissons. Il a la vie dure, vit assez long tems hors de l'eau, sur-tout en hiver; de sorte qu'on peut le transporter facilement dans de la neiiïe, dans des feuilles de chou et de laitue. Un avantage considérable qu'il offre anx cultivateurs, sur-tout dans le pays où les poissons sont rares ; c'est qu'il réussit assez bien dans de petites eaux dormantes. Ce poisson se prend au filet et dans des nasses. Il mord aussi à l'hameçon, auquel on a mis un pois cuit. Il vit de bourbe, de plan- tes et de vers : et comme sa noumture est la mê- me que celle des carpes, il ne faut pas en mettre LE CARASSIN. 69 iine trop grande quantité dans les étangs à carpes, de peur qu'ils ne leur enlèvent la nourriture. Le carassin ne croît que lentement, et ne pèse pas ordinairement plus d'une demi-livre. Quelque- fois on en trouve qui pèsent une livre. Pmitoppi- dan assure, qu'on en trouve dans un lac sur une montagne, en Norwège, qui a trois lieues de haut, d'aussi grands, qu'une assiette o^. Il a pour ennemis- toutes les espèces voraces et tous les oiseaux pécheurs. Si on veut les fiiire multiplier et les engraisser, il ne faut leur donner à manger que du pain de clienevis, du fumier de brebis, des pois et des fèves cuites. Le carassin fournit un mets délicat à la table des riclies. On trouve à cîiaque maclioire cinq dents lar- ges. Le Ci-^nal intestinal a cinq sinuosités. L'é- pine du dos est composée de trente vertèbres, et a quinze côtes à cliaque côté. J'ai trouvé dans les ovaires environ 95,700 œufs jaunâtres de la grandeur de la graine de pavot. Il fraye en Mai^ quelquefois en Avril, quand la saison est cliaude, et il commence dès l'âge de deux ans. Ce poisson est connu sous diiTérens noms. On le nomme: zohclpleinzl et hraxen, en Autri- che; gaieiSf dans la plupart des provinces méri- dionalas de l'Allemagne; Aari^^z, en Westphalie; karausclie y en Scixe; ruda et carussa, en Suède; a) Norw. II. 556. qOr LA GIBELE. karudse, en Dannemarc; hamburger ou sten- karper^ en Hollande; coraSy en Hongrie; kn- rausseriy en Pomeranie; karausse, en Silésie; crucian , en Angleterre ; carassin , en France ; karaSy en Russie ; les Baschkales ; les Barabinzes et les Tartares le nomment tahan^ tahanballk et kàraha; les Kalmouques, Vdtu; lesTeleuteSjjesw- balik; les Tscheremisses, korak et les Wotiaques korask. XVIL LA GIBELE, Cyprinus G i h e l i o • Xllnie Planche. Dix -neuf rayons à la nageoire dorsale; la na-, geoire de la queue en forme de croissant. Cyprinus pinnae dorsi radiis xix , caudn la» nulata. P. xf. V, ix. A, viii, C xx. D. xix, Cyprinus. Klein. M. P. V. 60. n. 4. var. t. 11. f 2. JLa gibèle est du genre des carpes larges, et se distingue des autres par sa queue echancree en forme de croissant et par les dix -neuf rayons de la nageoire dorsale. LA GIEELE. 71 La tête est grosse. Les maclioires sont . égales; la bouche est de la même forme que celle de la carpe, et les narines sont placées près de l'oeil. Les yeux sont grands, le corps est couvert de grosses écailles, même au ventre, qui dans les autres espèces n'en a que de petites. Le dos est arqué, et sa nageoire est plus près de la tête que les ventrales. La ligne latérale est garnie de points bruns, et courbée vers le ventre. Les extrémités des rayons sont divisées en huit branches. La gibèle multiplie considérablement. Elle fraye dès sa troisième année, dans les mois de Mai, Juin et Juillet. Mais cliacune ne fraye pas ■ trois fois comme le croyent les gens de la cam- pagne; le tems est différent selon leur âge: les vieilles fra}'ent plutôt que les jeunes. Les ovai- res de ce poisson sont très considérables. Ce- liUL que j'ai exannné avoit, au mois de Janvier, tems auquel les œufs sont encore petits, un ovaire de cinq onces , et le poisson entier n'en pesoit que quinze. La seizième partie des ovai- res contenoit 5600 œufs; ainsi l'on peut sans ciainte de se tromper, faire monter le tout à 500,000. Quelle quantité prodigieuse pour une seule année! Mais si nous considérons que ce poisson n'a pour séjour que les petits lacs et les marais, o\x il est exposé à être dévoré non seu- -2 LA GIBELE. \ lenient par les cigognes, les hérons, les oies, les corneilles et les pies, mais encore par les grenouilles qui l'entourent: Nous voyons que cette sage précaution de la nature n'est pas su- perflue. La gibèle ne devient pas grosse, sur- tout lorsqu'il s'en trouve un grand nombre ensem- ble, parcequ elles se dérobent nmtuelleinent la nourriture. Ainsi, quand on veut en avoir de grosses, il faut mettre avec elles quelques- uns de leurs ennemis, afin qu'ils diminuent la progéniture, et que les plus âgées trouvent assez de nourriture pour grossir. La gibèle ne pèse guère plus d'un quarteron ou d'une demi livre. Cependant lorsqu'elle trouve abondamment de quoi manger, ou qu'on la nourrit comme la carpe, elle parvient jusqu'à près d'une livre et demie. Mais il n'est pas bon de lui donner à ]Tianger; car s'il arrive qu'on ne lui fournisse pas une quantité suffisante, elle y perd plus qu'elle n'y gagne; parce que par- là elle se dés- habitue de cliercher sa nourriture. Tant que la gibèle est petite, elle a beaucoup de ressem- blance avec la jeune carpe: ainsi en achetant de l'alevin de carpe pour le mettre dans des étangs, il faut bien prendre garde de ne pas prendre des gibèles pour des carpillons Un grand désavan- tage qu'il y auroit; c'est que la plupart des gi- bèles ne devient pas aussi grosse que les car- pes , et que d'ailleurs elles multiplient beaucoup et afFameroient les dernières. On prend la gibèle au tramail, à la nasse et au verveux; mais elle ne mord pas à l'hame- çon. Comme elle a la vie dure, on peut fiici- lement la transporter dans de l'herbe ou des feuilles vertes. Elles ne meurent pas non plus aisément dans les eaux dormantes et exposées au soleil; parce que pendant la chaleur du jour, elles se cachent dans la bourbe. Pendant l'hi- ver, elles vivent sous la glace, pourvu qu'il y ait quelques pouces d'eau. Elles réussissent dans toutes les eaux tranquilles, et ont par dessus les autres poissons, l'avantage de prendre diffi- cilement un goût de» Ijourbe. On peut les met- tre dans les marcs, marais et dans toutes les eaux bourbeuses; ce "qui est un grand avantage pour les économes. La chair de ce poisson est tendre, a peu d'arrêtés, et n'est pas mal saine poui' les malades. La gibèle a huit petites dents pointues en deux rangées ; le canal des 'intestins forme deux courbures, j'y ai trouvé une espèce de ver soli- taire nj] répine du dos a vingt -sept vertèbres et dix- sept côtes à cliaque côté. Ce poisson est connu sous diiférens noms. On le nomme: gîebel, dans la Marche de Bran- a) Voyez mon Trait. Jes ver««3. 74 ^^ GIBELE. deboiirg et en Ponierariie ; giehen, en Prusse; kleiner liarnss et giblicJien, en Silésie; steinka- rauschy en Saxe; gibele^ en France, et gibel en Angleterre. On trouve la gibèle clans la Marche, en Po- menmie, en Silésie, en Prusse et dans plusieurs autres contrées de rAlleina2;ne. Les anciens icîithyologistes l'ont connue: Gesner bj , Schwencl^feld cj et IFillughby d), en parlent comme d'une espèce pardculière. D'a- près cela, il paroît très - étonnant qu^Artédi, Linné y Gronov et Kramer n'en ayent point fait mention, et que Klein ej et Leske ne l'ayent regardée que comme une variété du carassin. Comme elle diflére beaucoup du ce poisson par les parties internes et externes, j'ai cru devoir en faire une espèce particulière. Voici les ca- ractères qui distinguent ces deux poissons: i) La gibèle est allongée, et le carassin est non seulement beaucoup plus large,' mais en- core le plus large de toutes les carpes. 2) Le carassin a la tête et les écailles beaucoup plus petites que la gibèle. 3) Dans la gibèle, la ligne lalérale est courbée et la nageoire de la queue en forme de croissant; dans le carassin, elles sont droites toutes deux, et de plus, il a l) Icoii. A. 298. ' d) Iclitli. 250. c) Tlieriotr. 424. e) M. P. Y. 60. JLA GIBELE. 75 le clos beaucoup plus courbé que la gibèle. 4.) La gibèle a huit rayons à la nageoire de l'anus, et dix -neuf à celle du dos; le carassin, au con- traire, en a dix à la première, et vingt -et -un à la seconde. 5) Le carassin a une rangée simple de dents arrondies ; au lieu que la gibèle en a une double rangée de pointues. 6) Le canal intesti- nal du carassin a plus de sinuosités, et l'épine du dos un plus grand nombre de vertèbres. 7) La gibèle a la vie plus dure, et dépose ime bien plus grande quantité d'œufs que le carassin. Les économes prétendent que la carpe et la gibèle produisent une espèce bâtarde, à la quelle ils donnent le nom de gibèle -carpe. rjS LA BREME. XVII. LA BREME, Cypi'inus Brama, XIII«îe Planche. Les nageoires noirâtres; vingt -neuf rayons à la nageoire de l'anus. Cyprinus pinnis ni- j2;rescejitibuSj pînnae ani rndiis xx jx. P. :xfii. T^, zx. A. XX JX. G. xjx. J). ^11. Cyprinus Brama, Linn. S.N. Bream. Penn. B. Z. III. ^(^-2, 551. n. 27. Arted. Gen.^ 6. t. 70. 11. 169. n. 17. Syn. 4. n. 2. Gro- LaBrèine, Diiliam.Pècli. IL nov. Zoopli. n. 5 J5. (304. Pi. 27. Brama, Klein. M.P. V.6i.n.i. (^e poisson se distingue des autres par ses na- geoires noirâtres et les vingt -neuf rayons qu'il a à la nao^eoire de l'anus. La brème a la tête tronquée; la bouche pe- tite', et la mâchoire supérieure un peu avancée. Quand ce poisson est parvenu au point de son ac- croissement, il est assez large et épais. Les jeunes , au contraire, sont minces et d'une formée allongée. I] est couvert d'écaillés assez gi^andes. Son dos est tranchant, et représente un arc tendu. La ligne latérale est garnie d'environ cinquante LA BREME. 77 points noirs, et on remarque au-dessus de la na- geoire du ventre une appendice, qu'on ne trouve points dans les autres carpes larges. La partie inférieure de la nageoire de la queue, est plus longue que la supérieure. La nageoire dorsale est plus éloignée de la tête que celles du ventre. Ce poisson est lui des plus important de nos contrées. On le trouve dans tous les grands lacs, et dans les rivières d'un cours tranquille, dont le fond est composé de marne, de glaise et d'her- bages. On le prend principalement sous la gla- ce: alors la pêche en est si considérable dans quelques lacs des états dulloi dePrusse,qu'on en prend quelquefois pour trois, cinq et jusqu'à sept cent écus d'un seul coup. On en prend aussi une grande quantité dans le Holstein aj , le Meck- lenbourg hj y en Livonie cj et en Suède. Dans un lac de ce royaume, situé auprès de Nordkio- ping, on en prit au commencement du mois de Mars 1749, cinquante mille en un seul coup, qui pesoient 18,200 livres dj. Sir Calwel a péché en un jour, près de Balliliannon, dix-sept quintaux de brèmes et de brochets ej. La brème devient assez grosse. On en trouve conmiuné- ment qui sont longues d'un pied et d'un pied et demi, et qui pèsent douze à quatorze livres : on a) Sclionev. Iclitli. 55. d) Richter. Iclitli. ^26. h) Flemm. J;igerb.4ii- e) Bibl. 11. 11. IV- 70. c) Fischer Liefl. 127. 78 ^-^ bplEme. en a \ti aussi de vingt livres fj. Behnann assure qu'on a pris dans l'Uker plusieurs centaines de ces poissons dont chacun pesoit 18 — 20 livres gj^ Ce poisson se tient ordinairement dans le fond de l'eau, où il vit d'herbes, de vers et de terre grasse. Au printems , il cherche les rivages unis , garnis de joncs et d'autres plantes» Lorsqu'il se trouve dans un lac qui communique avec quelque riviè- re, il y remonte avec le courant de l'eau. C'est-là qu'il dépose ses oeufs sur des herbages. Ordinaire- ment la femelle est suivie de trois à quatre mâles. Il sembleroit que ces animaux, qui se trouvent alors en grande quantité, et qui font un grand bruit dans l'eau, devroient s'y accoutumer; ce- pendant au moindre son étranger, ils s'effrayent et se précipitent au fond. En Suède, une expé- rience de plusieurs années a prouvé , qu'il suffi- soit quelquefois du son d'une cloche pour faire fuir les brèmes d'un endroit 011 elles s'arrêtoient en quantité depuis longtems: voilà pourquoi on évite durant le terns du frai, de faire le moindre bruit, même aux jours de fête, dans les villages où l'on pèclie ces poissons lij, La brème fraye au mois de Mai, ou à la fm d'Avril quand il y fait chaud. Cette opération se f*iit en trois fois : les plus grosses commencent; les moyennes viennent ensuite, et eniin les plus petites. Quand f) Onom. foiest. I. 565. //) Scliwed. Abh. XXIII. o) Cliium. I. 115. 137. LA BKEME. 79 iliiiitbeau, il se passe toujours neuf jours entre chaque époque; mais quand il fait froid, rien n'est réûlé, et elles frayent au premier beau lems. Dans le tcms du frai, il vient sur les écailles des mâles, comme c'est l'ordinaire chez les autres mâles de ce genre, de petits boutons, qui leur font donner diflerens noms par les pécheurs, riiiie a remarqué les mêmes excrescences aux poissons des lacs Larius et T^CV'- hanusij'y et Salvin les décrit exactement en par- lant du poisson qu'il nomme Pigo. qui est une espèce de carpe. Il dit que les boutons ne pa- roissoient que sur les mâles; qu'on les remar- quoit ordinairement sur le dos et sur les côtés, et qu'ils disparoissoient au bout d'un mois A). Lorsqu'il survient un tems froid pendant le tems du frai, ce poisson se retire dans le fond: le nombril des femelles se referme, s'enflamme; le poisson enfle, dépérit et meurt. Il est sin- gulier que dans les poissons comme dans les au- tres animaux, les femelles en propageant l'espèce, sont exposées à un plus grand nom])re de mala- dies que les mâles. Quoique les mâles de la brème se retirent aussi dans le. fond lorsqu'il sur- vient un mauvais tems, ils ne sont pourtant pas sujets à cette maladie. On m'a apporté ime brème dont le corps avoit dépéri, et dont le i) N. H. I. 9. t. 18. ^) Aqu. 83. 80 LA BREME. ventre étoit excessivement enflé. Elle pesoit trois livres et trois quarts. Vers l'enflure, les écailles paroiss oient aussi grandes que celles de la carpe; ce qui venoit sans doute de la trop grande tension de la peau; car au lieu d'être rangées les unes sur les autres comme des tuiles, elles étoient rangées les imes à côté des ausres en lignes parallèles. Ayant ouvert le poisson, j'y trouvai une substance gluante et rou- geàtre, qui paroiss oit aussi granuleuse que le mil- let cuit. J'en ils cuire mie partie; maïs au lieu de devenir rouge ou jaune comme les œufs cuits des poissons, elle se changea en bouillie blanche. Outre cette maladie, la brème, aussi bien que le sandre, est sujette à la phthisie. J'en ai vu une attaquée de cette maladie, qui étoit si maigre et si exténuée , que lorsque je vouliis la pren- dre par la tète, le tronc tomba coinme un chif- fon. On trouve dans l'intérieur du bas -ventre de ce poisson, sur-tout lorsqu'il est jeune, le Fieck , espèce de ver solitaire. J'y ai aussi trou- vé, dans le canal intestinal, le le'chin; c'est une autre espèce de ver des intestins IJ, Ce poisson a de petits œufs rougeâtres. J'en ai trouvé environ 137,000 dans une femelle qui pesoit six livres. Quoiqu'il en soit sans cesse exposé à la poursuite des hommes, du silure, l) Voyez mon Trait» sur les vers des intestins. 3- iA BREME. 81 du brochet, de la perche, du sandre, de la lotte, de ranguille et des oiseaux pécheurs , il n'est pas étonnant qu'avec une si grande quantité d'œufs, il se multiplie si prodigieusement. Le grèbe iet le plongeon sont aussi du nombre des ennemis de ce poisson. Ces oiseaux s'assendjlent ordi- nairement en automne, en troupes de dix ou douze, et plongent les uns après les autres. Les petites brèmes effrayées par la couleur blanche de leur plumage, se retirent. Les oiseaux con- tinuent à plonger jusqu'à, ce qu'ils ayent poussé les poissons vers le bord, où ils les prennent et les maniient. Ouaud on veut avoir des brèmes pour empoissonner quelque pièce d'eau, il est très -aisé alors de les prendre à la truble. La buse cherche aussi souvent à contenter sa faim aux dépens de la vie de la brème; mais elle y perd quelquefois la sienne lorsqu'elle veut atta- quer une grosse brème. Le poisson plonge au fond dès qu il sent les serres de l'oiseau. Si ce- lui-ci n'a saisi que la chair du poisson, le bruit des ailes de la l)use liJ fait faire nn eRort, et le morceau reste entre les serres de l'oiseau; mais s'il a saisi l'épine du dos, le poisson tire avec lui son ravisseur dans le fond de l'eau. On prend la Ijrème, dans le tems du frai, à la louve, à la nasse et au coleret. Eu hiver, on la pèche sous la glace avec la seine. Com- me elle est a\ide de^. vers, elle mord aussi fort F ■i 3 a I-A BREME. aisément à l'hameçon : et dans un endroit où il y en a beaucoup, on peut avec cet instrument en prendre une douzaine en un quart d'heure. M. Taube, médecin de la cour à Zelle, décrit ime manière de pécher ce poisson, qui est en usage dans ce pays -là. Au mois d'Août, quel- ques pêcheurs se mettent dans un bateau par un tems clair. Pendant que les ims rament à force, un autre fait du bruit avec un tambour; deux autres, de chaque côté de la rivdère, battent l'eau avec des perches, et chassent aussi les brè- mes vers une partie de la rivière, où d'autres pêcheurs les attendent avec des filets, et en pre- nent ordinairement une grande quantité rnj. Ce poisson, quand il est bien nourri, croît aussi vite que la carpe. Sa cliair est blanche, de bon goût, et assez généralement estimée. On peut le transporter à peu de frais: il suffit de prendre, dans le tems du frai, des herbes sur lesquelles il a frayé, et de les mettre dans un petit vase avec un peu d'eau; ensuite il faut les déposer vers des bords unis. Au bout de quelques jours, on voit sortir plusieurs milliers de petits poissons. Je suis d'autant plus sûr du succès de cette expérience, que je l'ai faite plu- sieurs fois dans ma chambre, et que des amis à qui j'avois donné des herbes de cette espèce, ont vu les mêmes effets. Ils seront bien plus m) Beytrâge zur Naturkunde des Herzogtli. Zelle, 1. St. 56. LA BREME. 83 féconds, sans doute, si on met les œufs dans l'élément qui leur convient. Ces petits poissons ont vécu pendant plusieurs semaines dans ma chambre. La brème a la vie assez dure, sur -tout pendant la saison froide. En l'empaquetant dans de la neige, après lui avoir mis dans la bouche un morceau de pain trempé dans de l'eau-de-vie, on peut la transporter vivante à vingt lieues: mais pendant la chaleur elle meurt bientôt. Parmi ces poissons, on en trouve quelque- fois lui qui se distingue des autres par sa belle couleur, et que les pêcheurs nomment chef des brèmes. Il est toujours suivi d'une nombreuse suite, qu'il seml^le conduire. Lorsque les pé- cheurs le prenent, ils le rejettent ordinairement, afin que les autres brèmes le suivent et qu'ils en prenent une phis grande quantité. J'ai ob- servé un de ces poissons, qui étoit long de treize pouces, et large de quatre; et j'y ai remarqué les différences suivantes: i) L'œil est plus grand que dans la brème ordinaire, et l'iris est bleu- âtre. 2) La tète et le fond des nageoires sont d'un beau rouge pourpre, et les dernières sont bordées d'une bande rougeàtre. 5) Les écailles sont plus petites et plus épaisses. 4) Il a sur le corps plusieurs taches rouges d'une forme irrégulière. 5) Enfin, il étoit couvert d'une matière visqueuse. S'il en faut croire les pêeheurs, ce poisson ne pèse jamais plus de trois à quatre livres. Ne proviendroit-il point de la brème et du roten- gle? Les nageoires rouges, le corps court et large, et son peu de pesanteur le feroient con- jecturer avec assez de vraisemblance. On trouve encore une autre espèce, qui^ tient de la brème et de la bordélière, et qui resseml)le en partie à l'une et à l'autre. La bordélière fraye ordi- nairement plus tard que la brème: cependant il arrive quelquefois, lorsqu'il survient im tems froid, que la dernière fraye au même tems. Quand elles se trouvent toutes deux dans la nasse ou Hlet, il arrive souvent que les œufs de l'une sont fécondés par les laites de l'autre; ce qui produit l'espèce bâtarde dont nous venons de parler. Dans cette sorte de poisson, j'ai trouvé la tète aussi petite et le corps aussi large que dans la bordélière: mais les nageoires étoient semblables à celles de la brème. Les pécheurs m'ont assuré que cette sorte est une fois plus lourde que la bordélière; mais qu'elle ne de- venoit jamais aussi grosse que la brème. Le canal intestinal de la brème a deux courbures; l'épine du dos trente -deux vertèbres, et quinze côtes à chaque côté. On trouve dans chaque mâchoire cinq dents larges finissant en pointes par en haut et un peu courbées. - La brème est connue sous différens noms. JLA BREME. 85 On la nomme: Schoss-hley, dans la Marche électorale, lorsqu'elle n'a pas plus d'un an ou deux; bley-flink, lorsqu'elle a trois ans; bley, lorsqu'elle est plus âgée; juindlauberiy dans quel- ques contrées, lorsqu'elle est encore jeune; schlehn-hleitzen, en Autriche, lorsqu'elle est encore jeune; hrassen, enpoméranie; hressnien, en Prusse; rlieîn onven-hraxeriy àDantzig; hleye et brassle, en Saxe; bleitzen, brassen, bressen et braden, dans les autres provinces d'Allemagne; braXj en Suède; brasevi, en Dannemarc; brâ- chejiy bressein, fliissbrachsen^ plaudi^ plaudis et latticas, en Livonie; letsch, podlescJitsch, tschaiv et cloinn, en Russie; scluihovj ischuback et Awr- ban-bcdlc y en TarLarie; scliubcif ziiba et ziobio, chez les Cahnouques; brasen, en Hollande; brecntiy en Angleterre ; brcine^ en France; klor- zez, en Pologne; -pesse^i, en Hongrie; ^scn/dfa et scardolny en Italie; braexcn, en Portugal. Quand la bréjne est jeune, on la confond souvent avec la bordélière, à laquelle elle res- s'emble beaucoup : mais avec un peu d'attention, on verra que la première est plus allongée; que la queue ou la partie qui est entre l'anus et la na- geoire de la queue, est plus longue, et qu'elle est plus courte dans la bordélière. La bordélière a les nageoires rougeàtres,roixverture de la bouche très -petite ; au lieu que la brème a les nageoires noires et rouverlure de la bouche plus grande. 86 jLA breime. Il y a apparence que Kravier a confondu ce poisson avec la bordclière; car sa description convient également à l'une et à l'autre. Il la nomme gareisely et dit qu'on la trouve aussi dans les marais , mais qu'elle pèse ordinairement une livre, et rarement une livie et demie nj: ce qui convient fort bien à la bordélière. Mnrsisdi a tort, comme on le voit par son dessin oj, de donner une jeune brème pour luie femelle de cette espèce. Klein pj et Schoneveld qj se trompent en faisant une espèce particulière de la brème qui semble servir de conducteur aux autres, et qu'ils nomment hrêi ne -conducteur ou zwerg-bley. Le poisson qu'ils décrivent n'est autre chose qu'une brème dont la queue etoit gâtée et difforme. Schoneveld dit aussi lui-même, que ce poisson a la queue courbe et sillonée comme si elle eût été cassée deux fois. Cette difformité vient, selon moi, de ce que le poisson, quand il étoit encore jeune, s'est embaiTassé dans des herbages, et s'est forcé l'épine du dos en voulant se débarras- ser. Linné a aussi trouvé des brèmes bossues rj. Il a trouvé la même difforiuité dans la perche 5^; et j'ai rencontré la même chose dans le sandre et dans la rosse. n) Elench. 591. n. 5. p) M.P. V. 62. n.2. r) Faun.n.560. o) Danub. ly. t. 17. y) Iclitli. 53. s} L. c. 11.333. LA TANCHE. 87 XVIII. LA TANCHE, Cyprin us T i n c a, XIVrae Planche. Les écailles petites; les nageoires épaisses. Cy^ prinus squcnnis parvis ^ pinnis crassis, P. "XFIII. V, ,.X/ui, XI, C. XIX, D, XII. Cypriiius Tinca . Linn.S.N. Zeelt. Gronor. Mus. I. 11. $"26. n. 4. Artetl. Gen. 4. iQ. n. 6. Syn. 5. 11. 7. Spcc. Tench. Penn. B. Z. III. 359. 27. n. 14.. F n. 167. Biama, Klein. M. P. V. 63. Tanche, Duham. Pecli. IL n.6. 506. Pi. 27, JL/a tanche se distingue des autres espèces de car- pes par les petites écailles dont son corps est cou- vert, que llichter aj fait monter au nombre de trente mille, et par ses nageoires épaisses et opa- ques. La tète est grosse; le front large; l'œil pe- tit, à chaque coin de la bouche, on trouve un petit barbillon. Les mâchoires sont d'égale grandeur, et les lèvres aussi fortes que celles de la carpe. Elles font du bruit en mangeant comme celle des dernière. Le dos qui est rond forme un arc lâ- che. J'ai vu des tanches noires, vertes, et jaunâtres. a) Ichth. S^S' 88 ^^ TAIvCIIE. Il seroit diiîicile de trouver un poisson sur lequel la couleur de Teau influe d'avantage que sur ce- lui-ci. Les mâles différent aussi des femelles, soit pour la couleur, soit pour la bonté de la chair. Les premiers ont une couleurs plus claire, la chair plus grasse et meilleure; ils ont les nageoires ven- trales plus grandes, et les os plus forts. Cette dif- férence leur fait donner différens noms dans nos contrées. On appelle les mâles hnochen-sclileyef et les femelles baucli-schleie. Dans aucun poisson je n'ai trouvé les os auxquels sont attachés les nageoires et ventrales aussi forts que dans la tan- che. Tout le corps du poisson est couvert d'une matière épaisse et visqueuse; ce qui le fait glis- ser dans la main comme l'anguille. Les écailles sont sous cette matière, et ne paroissent que lors- qu'elle estôtée: elles sont attachées fortement à une peau noire qui couvre une chair blanche. Ce poisson aime les eaux tranquilles. On le trouves dans toute les parties du monde, et pres- que dans tous les lacs et dans tous les marais. Il a la vie dure» Il se tient pendant l'été dans les eaux stagnantes; et pendant l'hiv^er sous la glace; sans qu'on soit obligé de fiiire des trous pour lui donner de l'air. M. de Bergen a soutenu hj que la tanche dort pendant tout l'hiver. Je sais par expérience, que dans nos contrées, on n'en prend point dans les pèches qu'on fait sous la glace. On h) Diss. cle anim. hiem. rîormiens. 15. XA TANCHE. 89 sait que la loche de marais c) et l'anguille se cachent dans la bourbe pendant l'hiver, et y restent sans inouvenient. La tanche peut se met- tre dans des marais, mares, abreuvoirs et autres petites eaux. Quand on la nourrit bien, elle croît promptement, et devient assez grosse. On en trouve quelquefois de sept à huit livres. Comme sa chair est molle et limoneuse, les estomacs foi- bles la digèrent diiTicilement. Au mois de Juin, elle cherche les endroits couverts d'herbages pour y déposer ses œufs, et nuiltiplie beaucoup. On la prend au Tilet et à l'hameçon. Quand le beau tems veut venir, elle saute hors de l'eau, comme Cardanus cl) l'a déjà remarqué. Ses ennemis, quand elle est petite, sont la perche et le brochet. Elle évite souvent leur poursuite, en se cachant dans la bourbe. Quant à la conformation des parties internes, ce poisson diifère des autres du même genre, en ce qu'il a à chaque mâchoire quatre dents courtes et larges, seize côtes de chaque côté, et trente- neuf vertèbres à l'épine du dos. Le canal intesti- nal a deux courbures. J'y ai trouvé des vers; et Bonnet ej y ^ aussi trouvé le ver solitaire. La vésicule du fiel est grande ; le fiel est d'un verd foncé et très-amer. Les œufs de ce poisson sont verdàtres et très -petits. A la fin de Mai; c'est- c ) Cobilis fossilis. riet. lib. 7. 414. d) Tract, de rerum va- é) Trait. d.iiisect. 4^. 90 LA TANCHE. à-dire, avant le tems du j'ai remarqué qu'ils frai sont un peu moins gros que la graine de pavot. Dans uns poisson de trois livres et trois quarts. les œufs pesoient près de cinq onces, et ëtoient au nombre d'environ 297,000. La nourriture de la tanche est la même que celle de la carpe. Un bon économe ne doit point souffrir de tanches dans les étan2:s oii il nourrit des carpes ; parce qu'elles leur enlèvent la nour- riture, et valent moins qu'elles. La tanche est connue sous différents noms. On la nomme: schley-f en Allemagne; schuhina- cher y enLivonie; kuppeschy lichniSy Une et schleye, en Estonie; zeelb, en Hollande; viiiythonden, en Frise; tencliy en Angleterre ; sutore, en Suède; sùder et slie y enDannemarc; ^a/zc/^e, en France; tencHy en Italie i toca, en Espagne; Uuy tscliuw et goroivaly en Russie ; liora halihy en Tartarie ; kir sagassirty chez les Calmouques; les Arméniens la nomment zugnuy les Wot jaques alnei^ les Ostiaques kaive et les Polonois, Uny. Nous avons dit plus haut que ce poisson prend uoe couleur plus claire ou plus foncée sui- vant la couleur de l'eau où il séjourne et la nature du fond. Ainsi Artédiy Klein et Gronov ne par- lent pas exactement quand ^ils regardent la cou- leur noire comme un caractère distinctif de ce poisson. Richter se trompe aussi, quand il dit que les I.A TANCHE. 91 femelles sont sujettes à irne purgation men- sruelle fj,. Linné à^ns la première édition de son fauna^ donne onze rayons à la nageoire de l'anus de ce poisson, mais dans la dixième édition de son 5y- sthnCy où il se sert de chiffres au lieu de lettres pour marquer le noinbre des rayons, il en met vingt-cinq au lieu de onze. C'est sans doute une faute d'impression. Cette faute se trouve non seulement dans la seconde édition de son fauna^ mais encore dans toutes celles de son système ^ et dans plusieurs ouvrages modernes gj. Elle est d'autant plus pardonnable, que Linné et ceux qui ont écrit après lui, n'ont pu examiner de nouveau en particulier chaque animal dont ils donnent l'histoire. Mais quand le traducteur du système ajoute, qu'il y a onze à vingt- cinq rayons à la nageoire de l'anus, chacun pourroit en conclure cjue les rayons des nageoires varient dans ces ani- maux. Comme les poissons se meuvent par le moyen de leurs nageoires ainsi que les autres ani- maux avec leurs pieds et leurs ailes: et que dans les oiseaux le nombre et la grandeur des plumes des ailes et de la queue, et dans les autres ani- maux, le nombre et la grandeur des pieds et des doigts sont proportionnés aux besoins et à la structure du corps , il en est de même dans les poissons. Chaque espèce a autant de nageoires /) Iclith, 503. g) Wuliî, Pemiant, Zûclcert et Fischer- 92, LA TANCHE. et de rayons que ses besoins le demandent; et l'expérience confirme cette observation.. Une autre raison qui fiiit que les auteurs ne sont point d'accord sur le nombre des rayons, c'est la manière dont ils les comptent. L'un compte les petits rayons simples; et l'autre ne les compte point. Le barbeau et la brème peu- vent nous en offrir un exemple. Linné donne au premier onze rayons à la nageoire dorsale, et dit que le second est dentelé h), JLeske, au contraire, en compte douze , et fait le troisième dentelé ij, Tous deux ont raison. Leske compte le premier petit rayon, que Idnné omet. Artédi k) et Gro- nov l) donnent vingt-sept rayons à la nageoire de l'anus de la brème. Leske m) et moi, nous en comptons vingt -neuf. Les premiers ne comp- tent point le premier petit rayon, et ne comptent que pour un les deux derniers, qui paroissent en effet unis l'un à l'autre. Je remarque aussi qiiArtédi dans la descrip- tion des poissons de la Suède; c'est-à-dire, ceux qu'il a été en état d'observer lui-même, leur donne presque toujours deux rayons de plus que Linné et Gronov; mais que lorsqu'il les décrit ^ d'après Willughhy , qui ne compte pas non plus les petits rayons, il est d'accord avec les autres, h) s. N. p. 525. n. 1. /) Zoopli. n, 345. £) Specim. 30, m) L. c. 73. k) Spec. 31. LA TANCHE. 95 Dans les poissons jeunes ou gras, il faut beau- coup d'attention pour déterminer exactement le nombre des rayons des nageoires du dos et de l'anus. Si le poisson est gras , la peau est épaisse, et le premier rayon de la nageoire dorsale est ca- ché; et voilà probablement la raison pour la- quelle Linzte attribue au second rayon de la car'pe la dentelure que Gronov et Leske n'attribuent qu'au troisième. Cependant je ne voudrois pas soutenir que le même no mine de rayons se trou- ve toujours dans chaque individu; car il peut ar- river quelqu'accident qui en divise ou détruise quelques-uns. 11 se peut aussi qu'étant blessés dans leur jeunesse, plusieurs rayons se réunissent et croissent ensemble; ou que quelqu' autre cause inconnue en fiisse croître un plus grand nombre; de même qu'il arrive aussi quelquefois qu'on a plus de cinq doigts Jij. On n'a pas estimé également ce poisson dans .tous les tems» Les Romains le méprisoient beau- coup ; et il n'y avoit que le peuple qui le man- geât; comme on le voit dans Ausone, Dans le royauine de Congo, il passe pour un morceau très - délicat : il n'y a que la Cour qui en niange; et il y a peine de mort contre quiconque pêche n) J'ai trouvé une fois une Pai vu aussi une plume d'oi- cavpe qui avoit au coté une seau qui avoit trois barbes, nageoire, qui commençoit Le règne végétal nous offre vers celle du ventre, et nne grande quantité d'excrn- ^àlloit jusqu'à la dorsale. . pies de cette nature. 94- ^A TANCHE. une tanche et ne la porte pas à la cuisine roya- le oj. En Allemagne, elle n'est pas générale- ment aimée; en Livonie c'est par mépris qu'on lui donne le nom de SchuinacJier , cordonnier p). En Angleterre, on l'aime assez généralement (/^. Il y a autant de sentimens diilerens sur son uti- lité que sur son goût. Quelques-uns croyent que ce poisson donne la lièvre à ceux qui en man- gent; d'autres prétendent qu'en le coupant et ie mettant sous la plante des pieds, il guérit la liè- vre; qu'en l'appliquant vivant sur le front, il ap- paise les maux de tête; qu'en l'attachant sur la mique, il calme l'inflammation des yeux. 6) Allgem. Reis. IV. 693. ix, A,ix, C. XIX, D. XXIF. Cyprinus Carpio , Linn. S. Thecarp, Penn. B.Z.III.353. N. 525. n. 12. Aitédi Gen. "^ 165. PI. 70. à. Syn. 3. 1. Gronov. Mus. La carpe, Duham. Péch. II. I. n. ig. Zoopli. n. 550. 501^. Pi. 26. f. 1. Klein. M. P. V. 5y. "• l.^ y^e poisson, connu dans presque tous les pays S0U8 le nom de cai-pe, donne le nom à ce genre G 98 LA CARPE. Son caractère distinctif est d'avoir le troisième rayon dentelé à la nageoire de l'anus et du dos. La tète est grosse; le front large. Les lèvres avec lesquelles elle fait du bruit en mangeant, sont fortes et garnies de deux barbillons, accom- pagnés de deux autres plus courts, qui sont au nez. Le dos est tranchant au-dessus de la na- geoire, et rond au-dessous. La ligne latérale est courbée et garnie de petits points noirs. Aristobe aj et Tline bj ont déjà connu ce poisson. C'est sans contredit dans les parties mé- ridionales de l'Europe qu'il faut chercher la pa- trie de la carpe; car s>i on la trou\'^ dans les pays septentrionaux, ce n'est que parce qu'on l'y a transportée. En 1514, Marschal les porta en Angleterre cj ^ où elles sont aujourd'hui aussi communes que chez nous. Environ l'an. 1560, sous le règne de Frédéric 11, Pierre Oxe les porta enDannemark dj. Selon le rapport du Prof.jBoAy le Bourggrave Gaspar de Nosliz a fait venir la carpe en Prusse dans le seizième siècle ej. On les a aussi portées en Hollande et en Suède eJ, Mais plus ce poisson avance vers le nord, plus il dégénère et devient petit ^» Voilà pourquoi on a) H. A. L. c. 10. m'a assuré que les étangs h) îl. N. 1. 32. c. 11. à carpes ducointedeMolh- c) Penn. B. Z. III. 355. ke lui rajoportoieiit deux d) Pont. Dann. 190. Mr. mille écus par an. Schlegel, conseiller delà é) Linn. Faun. n. 35g. justice à Coppenhague, f) Pont. Noi"weg. II. 256. - LA CARPE. 99 envoie tous les ans de Prusse à Stockholm plu- sieurs vaisseaux chargés de carpes. On trouve les carpes dans les eaux qui coulent doucement, dans les lacs et les étançrs. Leur croût diffère se- Ion les eaux où elles séjournent: voila piuirquoi on les distingue en cai'pes de rivières, de lacs et d'étangs. Les premières passent pour le meilleu- res; les dernières pour les plus mauv^aises: mais les meilleures de toutes, ce sont celles qui vivent dans un lac ou étang traversé par un ruisseau qui leur fournit continuellement des eaux fraîches. On reconnoît déjà à leur couleur dans quelles eaux elles ont été péchées. Celles des rivières et des grands lacs, sont plus jaunes, et celles des étangs plus vertes ou plus noires. Les demie es ont aussi ordinairement un goût de bourhe; mais elles le perdent quand on les met quelques se- maines, avant de les manger, dans une eau claire, ou qu'on les laisse pendant quelques jours, dans une huche placée dans le courant d'une mdère. La carpe a la vie si dure, que, pendant l'hiver, on peut la garder dans des caves, dans des réservoirs ou des citernes. On peut les y engraisser, en leur donnant du pain et de. la laitue. On peut aussi les transporter à trente lieues, en les empa- quetant dans de la neige et leur mettant dans la bouche un petit morceau de pain trempé dans de leau-de-vie. Quand ce poisson est bien nour- ri , il croît vîte, et devient d'une grosseur consi- G 2 lOO JLA CARPE. dérable. L'ete dernier, on m apporta une carpe, qui avoit été prise en Saxe dans les terres de M. le comte de Schulenbourg; elle p es oit vingt- deux livres, et elle n'étoit pas des plus grosses qu'on prend ordinairement dans cet endroit. Près d'Angerbourg en Prusse, on en trouve qui pèsent jusqu'à quarante livres gj. A Derlz, dans la Nouvelle-Marche, sur les frontières de la Pomé- ranie , on en prit une de trente-huit livres , et on la porta comme une rareté au Roi, qui et oit pour lors à Stettin. En 1752, on en prit une autre, qui étoit grosse comme un enfant, dans le lac Lagau, situé dans le cercle de Sternberg îij. En 1711, on en prit encore une à Bischofshause, près de Francfort sur l'Oder, qui avoit deux au- nes et demi de long, une de large; elle pesoit soixante et dix livres , et ses écailles étoieut aussi grandes que des pièces de \dngt- quatre sous ij. Dans le lac de Golitz, près du bailliage de Lenin, on en pêche qui pèsent trente livres et plus. On en prend dans le Dniester, qui sont si grosses, qu'on fait des manches de couteau de leurs ar- rêtes kj. La Hongrie offre aussi des carpes de quatre pieds de long, et qui sont si grasses, que leur panse paroît garnie de lard IJ. Avec les œufs de ce poisson, on fait du caviar, qu'on vend g) Breslauiscîie Saniml. XV. 387. . h) Ricliter. 803. £) Bckm. Clinrm. I. 574. k) Rzazynsky. N. H. 142. 1) IVIarsigli.Danub.IV.58' I.A CARPE. 101 'aux Juifs de Constantinople. Comme on nouiTit des carpes dans les étangs, non seulement pour le profit, mais aussi pour, le plaisir, on a eu oc- casion de s'assurer qu'elles atteignent un âge très- avancé. Ledel dit qu'il y a dans la Lusace des étangs où l'on garde des carpes depuis deux cents ans inj, Mr. àeBuffon même dit avoir vu dans les fosses de Pont - Chartrain des carpes qui avoient sûrement plus de 150 ans n). Dans le jardin, royal de Cliarlottenbourg, on en voit qui sont d'une grosseiu' prodigieuse, et qui sont si vieilles, quelles ont la tête couverte de mousse oj» Ce poisson vit, comme tous ceux de ce genre, de plantes, de terre grasse, de vers et d'insectes aquatiques. Il aime sur-tout le fumier de brebis, et prospère dans les étangs où les pluies amènent le fumier des troupeaux. La carpe fraye en Juin, et même en Mai, quand le printems est cliaud. Alors elle cherche les endroits couverts d'herbes , pour y déposer m) N.ScIiaiijîl.IV. 33^. n) H. N. IV. 167. o) Si les poissons [vivent si lonpjtems, c'est à ce qu'il paroît, parce qu'ils vivent continuellement tlans un élément humide, où leurs fibres conservent pentl.uit plus longtems leur iltxi- bilité. D'ailleurs , ils jouissent dans l'eau d'une température uniforme, et sont sujets à beaucoup moins de maladies que d'autres cré- autres, qui par le change- ment continuel des saisons, se trouvent tantôt dans un climat froid, tantôt dans un climat chaud, et éprouvent successivement l'humidité et la sécJicresse de l'air. La nourriture réelée dont ils usent doit aussi y coxitribuer beaucoup. 102 LA CARPE. ses œufs. Ordinairement une femelle est accom- pagnée de trois mâles. Dans le tems du frai , les carpes de rivière nagent en troupes vers les eaux tranquilles, auxquelles la rivière communique; et lorsque dans leur course , elles rencontrent une grille qui les empêche de passer outre, elles sautent par -dessus, quand elle auroit quatre à six pieds de haut. Après le frai , elles reviennent dans les rivières. Ces sauts des carpes ressem- blent à ceux du saumon: on les remarque sou- vent dans les étangs. Elles viennent sur la sur- face de l'eau, se mettent sur le côté, courbent la tète et la queue au même instant , de manière quelles décrivent un cercle parfait; ensuite s'é- tendent tout à coup, battent l'eau avec vivacité, et s'élèvent ainsi à la hauteur de quatre à six pieds, et aussi loin de l'endroit où elles ont sau- te, du coté où leur mouvement s'est dirigé -pj. Les petites , qui ne sont pas assez fortes pour sau- p) Lorsqiieles carpes sortent du Rhin, pour aller dans les lacs , les liabitans de ces contrées regardent cet- te retraite comme la mar- que d'une inondation pro- chaine; et lorsqu'elles se sont rendues dès le mois de Mai dans les eaux tran- quilles , ils sont assurés que le Rhin se débordera bientôt. C'est sûrement la chaleur du printems qui fait que ce poisson fraye de bonne heure, que la nei- ge fond , et que le Rhin gros- sit plutôt qu'à l'ordinaire. Alors la carpe trouve une nourriture abondante , se« œufs se développent plus vi- te , enflent le ventre, et for- cent le poisson à chercher plutôt qu'à l'ordinaire le» endroits couverts d'herbages frais, pour s'y frotter, et se délivrer par - là d'un senti- ment désagréable. JLA CARPE. 103 ter par - dessus les grilles , restent dans l'étang, et appartiennent au propriétaire. Lorsque les carpillons ont atteint huit à dix pouces, on les ôte de l'étang par les eaux basses , pour les ven- dre ou les transporter dans d'autres étangs. On a vu par expérience , que ces sortes de carpes quand elles sont bien nourries, deviennent fort grosses, et sont d'un bon goût. Quoique la carpe soit exposée à la poursuite des poissons voraces et des oiseaux pêcheurs, elle se nuiltiplie pourtant beaucoup, vu qu elle a reçu delà nature une si grande quantité d'œufs, que j'en ai vu jusqu'à 235,000 dans une carpe qui pe- soit neuf livres et trois quarts. Bientôt après M. de Schlegelf conseiller provincial à Grossen, m'en- voya une de ses carpes, dont il avoit coutume de se servir pour empoissonner ses étangs. Il m'é- crivit en même tems, qu'il ne savoit comment faire pour empêcher d'avoir une quantité d'alvin aussi grande que celle qu'il avoit eue jusqu'alors : car la grande quantité les empêchoit de trouver la nourriture convenable, et d'atteindre à la gros- seur de six à sept pouces, pour être en état d'être transportée dans d'autres eaux. Quelques car- pes seulement lui dounoient 100,000 carpillons. La carpe en question pesoit neuf livres, et ses œufs une livre et quatorze onces. Or, comme une drachme de ces œufs en contenoit 1295, 1*^" vaire entier étoit de 621,600. On voit par-là. 104 ^^ CARPE. i) quun gros poisson a infiniment plus d'œufs qu'un petit; 2) qu'on peut expliquer par- là la grande différence que l'on trouve dans les diiFé- rens écrivains par rapport au nombre des œufs des poissons; 5) qu'on ne peut jamais détermi- ner ce nombre , parce que l'âge et la nourriture peuvent y apporter des changemens considéra- bles. Les carpes des étangs de M. Schlegel de- viennent très -grosses; ce qu'il faut attribuer à la plante nommée nayade qj, qui y croit en grande quantité. Cette plante est si alcaline , qu'elle ébouillit avec de l'eau forte; et comme elle a des graines , on pourroit aisément la faire venir dans les autres étangs. Quand un économe s'apperçoit que ses mè- res-carpes donnent trop d'œufs; ce qu'on peut connoître aisément à l'épaisseur et à la dureté du ventre; il se conduiroit avec beaucoup plus de sûreté, pour obtenir de bonne semence, en ne mettant dans son étang qu'une seule carpe œuvée et une seule laitée . Mais si malo^re cela le nom- bre étoit encore trop grand; il faudroit aussitôt après le frai , mettre avec les carpes un petit pois- son rorace pour détruire l'alvin superflu, ou une partie des herbes où sont déposés les œufs; ou enfin au lieu de poisson , n'employer que des herbages chargés d'œufs. (f) Naya. Linn. I.A CARPE. 105 Dans les g^rands lacs , on pèche ce poisson avec la seine; dans les étangs, on le prend avec des colerets, des louves et des nasses dans les- quelles on met un appât. En général, la carpe ne se laisse pas prendre aisément; car dès qu'elle apperçoit le filet , elle enfonce sa tête dans la bourbe, et le laisse passer par -dessus son corps. Si le fond est dur, elle fait avec sa queue nn cer- tain mouvement , qui la fait sauter de quatre à cinq pieds par - dessus le filet. Voilà pourquoi dans les petits lacs on se sert pour les pécher de deux trubles^ dont les ouvertures sont tellement placées , que lorsque la carpe saute de l'une, elle retombe dans l'autre. On les prend aussi à l'ha- meçon quand on les attire avec des pois cuits, ou quelqu'autre nourriture , qu'on jette à l'endroit où on leur donne à manger, ou qu'on attache un ver à un hameçon. La diiférence qu'il y a entre la conformation des parties internes de ce poisson et celle des au- tres du même genre, c'est qu'il a â chaque mâ- choire cinq dents larges , qui forment au milieu im angle obtus. Le canal des intestins a cinq courbures; l'épine du dos trente- sept vertèbres, et on trouve seize côtes de chaque côté. La vési- cule du fiel est grosse, et le fiel est d'un verd fon- cé, très -amer, et fournit au peintre ime couleur verte. Comme elle a la chair molle et grasse, on ne sauroit la reconuuander aux malades. S'il 106 JLA CARPE. arrive qu on crève la vésicule du fiel en vidan? la carpe, on peut faire passer l'amertume avec du vinaigre fort. Les carpes sont les meilleures de- puis l'automne jusqu'au printems. Ce poisson se nomme: Karpfe ou karpfenen Allemange, strich ou karpfenbrut^ lorsqu'il na qu'un an : saarnen ou satz , dans sa seconde et troisième année ; Aarp , en Suède ; carp , en Angleterre, karper, en Hollande, carpe en Fran- ce, carpUy en Italie, carpena^ dans les environs de Padoue ; rnyna à. Venise; pontty et poiàka^ en Hongrie; sasan^ en Tartarie; sasin, chez les Calmouques. Il y a des hermaphrodites parmi les carpes; et je pourrois en convaincre par leurs propres yeux, ceux qui en douteroient; car je garde dans ma collection les entrailles d'une carpe de cette nature. L'ovaire, qui, dans ce poisson, consiste toujours en deux sacs, est aussi double dans cel- le-ci, avec la différence , qu'un des sacs est inter- rompu au milieu par la laite qui y est contenue; de manière qu'elle est bordée également en haut et en bas par les œufs , qiii sont verdàtres. La laite, au contraire, est simple; elle a cependant à l'extrémité inférieure une petite pièce , et est une fois plus épaisse qu'elle ne l'est ordinaire- ment. Le reste des intestins conserve sa situation et sa forme ordinaire. La carpe d'où l'on a tiré ces entrailles pesoit trois livres , et elle n offroit LA CAKPE. 107 extérieurement aucune difFérence. Selon toute apparence, un hermaphrodite de cette nature a trois manières de se reproduire. i) Par hii-mème; car comme dans les pois- sons la fécondation s'opère hors du corps de l'ani- mal, il peut en se frottant contre les plantes jetter successivement les œufs et la laite, et féconder les premiers par la dernière. 2) Quand sa laite tombe sur d'autres œufs. 5) Quand ses œufs sont fécondés par la laite d'un autre poisson. Le carassin et la gibèle produisent avec la carpe des poissons qui sont phis gros que les deux premiers, mais qui ne deviennent jamais aussi gros que la carpe: ils ne pèsent guère plus de trois livres. Gesnei'y Aldrovcuidy Scliwenchfeldy Schoneveldy Marsigli, Wlllughby et Klein par- lent de la même espèce bâtarde, que les posses- seurs des étangs et les pécheurs de nos contrées connoissent sous diftérens noms rj. On les re- connoît 1) à leurs écailles plus petites et qui sont plus attachées à la peau; 2) aux lignes qui sont sur les écailles , qui sont de la longueur du pois- son; 5) à leur tête, qui est plus grosse et plus courte. Ils ne doivent pas non plus avoir de bar- billons ; mais cela n'a lieu que lorsque les œufs r) Karigs • karpfe f karsch- micîiiis, halh-karisSj karp- karpe j karutzken - karpc , karisy y Carassii seciiudum karp - karass f halb - karass, genus. Gesn. Carassus adul- sitiig-karpf; Cliarax cias- tcr.uiis, C)prinus iiotlius, sior, longior, Carassus di- Cyprin us tertius. JVIarsi^li. 108 I^A CARPE. de la carpe ont été fécondés par un carassin 'ou une gibèle ; car les espèces bâtardes ont toujours la tête et la queue du père. Comme je n'ai point encore eu occasion d'examiner moi-même un de ces poissons, j'ai dit ce que m'en a appris un éco- nome habile. J'ai voulu mettre les naturalistes à même d'observer ces faits , que plusieurs révo- quent en douté. Il seroit aisé de s'en assurer, en mettant dans un étang des carpes femelles, avec des carassins ou des gibèles mâles. Les auteurs dont nous venons de parler, se trompent en fai- sant de ces poissons une espèce particulière; car ils ne peuvent jamais être produits sans le con- cours de deux espèces. D'ailleurs si ces poissons produisent eux-mêmes, ils retombent alors dans la première espèce, même quand ils seroient fé- condés par des espèces différentes; c'est ce qui arrive aussi fort souvent dans le règne végétal. Je rapporterai encore une chose que les anciens ont regardé comme un phénomène étonnant, et les modernes comme une fable. Nous trouvons dans Rondelet s), Gesner tj et Aldrovand ujy des figu- res de carpes qui ont une tête de mort; Richter eu rapporte une qui a une tête de morue xj; et il y en a une dans Meyer y) qu'on voit avec une tête de dauphin. Nous ne rendrions pas justice à ces auteurs si ces faits augmentés par l'imagination et s) De Fisc. II. 154. u) De Fisc. 640. y) Tliierb. I. 12. t) Ac[uat.3i4. oc) Iclitli. 550. I.A CARPE, 109 l'amour du merveilleux nous parojssoient autre chose que ce qu'ils sont en effet. Ces formes sin- gulières ne viennent que de quelque blessure, qui aura produit une cicatrice dans la tête. Cela peut arriver lorsque par un tems cliaud les carpes vien- nent se cacher dans l'herbe épaisse des bords, où les fauclieurs peuvent d'un coup de faux leur faire une blessure considérable à la tête, ou même leur enlever un morceau tout entier. Circon- stance qui prouveroit encore combien ce poisson a la vie dure. Cette dernière qualité se confirme encore en ce qu'on peut les châtrer. Tully pêcheur anglois, a inventé cette opération pour faire engraisser les carpes zj ; et la Tour a vu par expérience que de plus de deux cents carpes ainsi châtrées, il en mouroit à peine quatre aj. La carpe est très -estimée chez plusieurs peuples de l'Orient. Le giand Mogol avant que d'aller en guerre ou d'entre -prendre une affaire importante, pose ses doigts siu" une grosse carpe, en faisant une prière bj. Comme la carpe est un poisson généralement estimé , il a excité l'attention de ceux qui ont tâché de le transporter et de le naturaliser dans leurs lacs. Je vais parler des moyens qu'ils ont pris pour y réussir. Les possesseurs d'étangs divi- z) Pliilos. Trans, V. 43* mesure qu'on eu tire les «) Pour faire cette opération, oeufs ou les laites. on ouvre le ventre du h) Allg, Reis. II. 240.' poisson, et on le reçout à IIO LA CARPE. sent les carpes en privées et en sauvages. Les premières sont celles que les hommes ont trans- portées et mises dans les étangs, où ils les gar- dent et les nourrissent pour s'en ser\dr au besoin. Les autres sont celles qui vivent dans les lacs et les rivières. Quoiqu'il se trouve quelquefois un grand nombre de cai-pes dans les rivières , telles que la Havel, la Sprée et le Rhin, la pèche des carpes sauvages n'est pas cependant fort considé- rable , si on la compare avec celle des carpes pri- vées, qui offre une branche très - considérable d'économie. On fait de ces pêches considérables en Lusace, en Bohème, en Silésie et en Prusse. Le Roi de Prusse a fait faire en 1768, dans les environs de Zossen, des étangs à carpes qui ont très -bien réussis. Les carpes privées sont nourries et engrais- sées dans trois différentes sortes d'étangs, qu'on a nommés: étang de frai (Streichteich), étang d' accroissement (Streckteich) et étang à engrais^ ser (Fetteich). Tout étang doit être situe et disposé de ma- nière que dans toutes les saisons il puisse être rempli d'une quantité suffisante d'eau et être vidé jusqu'au fond quand le cas l'exige. On choisit pour cet effet, de préférence, des marais, ou des endroits à peu près en bassin, où l'eau se ren- de sans peine, et d'où elle puisse sortir commo- dément, et qui soient couverts de joncs ou de ro- LA' CARPE. 111 seaux; ou enfin des près ou des pâturages, situés dans des lieux trop profonds et trop marécageux pour produire un bon foin. Il faut cependant observer que les carpes ne réussissent pas dans un mauvais terrain dont le fond est froid, 11 faut creuser ces endroits en pente, de manière que les eaux puissent s'y réunir comme dans un bassin, et en sortir avec la même facilité. On peut faire sortir cette eau , soit qu'elle vienne d'une source ou d'ailleurs, par le moyen d'un canal pratiqué vers la chaussée, et d'une bonde qui se lève ou se baisse à volonté. Comme on est presque tou- jours dans le cas de creuser, pour former l'étang, un fossé large et profond, qui règne dans toute la longeur du terrain , il faut que l'eau puisse s'a- masser à une hauteur suffisante , non seulement pour remplir le fossé , mais encore pour rester trois pieds au-dessus des prés. i) Les étangs de frai où l'on ]net des carpes mâles et femelles pour peupler, ne doivent avoir qu'un ou deux arpens ; c'est-à-dire, environ 80 à 100 toises en quané, et être situés vers l'ori- ent ou le midi, afin que la chaleur du soleil puis- se bien y pénétrer. Il est donc nécessaire d'en éloigner avec soin toutes sortes d'arbres, et sur- tout les aunes , dont les feuilles pourroient être nuisibles au poisson. Elles doivent avoir aussi des bords unis qui, s'aliaissant de tous côtés par une pente insensible, forment un bassin de cinq 112 LA CARPE. à six pieds , couvert d'une assez grande quantité de joncs et d'herbages , pour faciKter le frai du poisson. Il faut observer cependant que les her- bages ne doivent pas être trop hauts. Pour pra- tiquer ces sortes d'étangs, on choisit, de préfé- rence , dans le meilleur endroit d'une campagne, tm fond couvert d'herbages. Ces étangs ainsi pla- cés dsns une campagne découverte, ont beaucoup d'avantage sur ceux pui sont dans les bois. Si ce- pendant on étoit obligé d'en faire dans ces derni- ers endroits, il faudroit avoir soin d'ôter les bran- ches et les autres morceaux de bois, qui peuvent nuire au poisson. Tant qu'on y conserve la se- mence, il ne faut pas en laisser sortir la moindre quantité d'eau, de peur que le nourrain n'en sorte en même tems. Il faut tâcher aussi d'en éloigner les grenouilles; parce qu'elles mangent la se- mence. Quelques économes prétendent que le m.eilleur moyen d'y parvenir, est d'y mettre des écrévisses , qui prennent et mangent les grenouil- les. Il ne faut cependant pas que les écrévisses y soient en trop grande quantité, parce qu'à la fin elles n'épargneroient pas même le poisson, et mangeroient le nourrain. Les canards , qui sont très -friands de la semence, doivent aussi être écartés avec soin. On y parvient par le moyen des épouvantails; c'est-à-dire de longues perches, au bout desquelles on attache des chiffons. Il ne oeroit pa» bon non plus, d'y mettre des brochets, LA CARPE. 115 des perches, ni d'autres espèces voraces. Les ca- rassins et les gibèles doivent aussi en être exclus; parce qu'ils frayeroient av^ec les carpes, et pro- duiroient des espèces bâtardes. On choisit pour les alevinières des carpes de six ans, qui soient bien constituées, d'une bonne grosseur, dont le dos soit noir, le ventre gros et opposant de la résistance quand on le presse avec le doigt. Ce- pendant on peut aussi employer pour cela des carpes, de sept, huit et même de douze ans. Il y a des personnes qui prétendent, qu'il ne faut les mettre dans l'étang que vers le milieu de Juin; c'est-à-dire, lorsque l'eau est sufHsamment échauffé e. On mettra deux ou trois mâles pour une fe- melle; on proportionnera le nombre d l'étendue de l'étang, et on mettra douze cai-pes siu' chaque arpent de terrain. Dans quelques endroits, on, se sert de moyens artificiels pour augmenter le penchant naturel des poissons pour le frai. On frotte, par exemple, les nageoires et le tour om- bilical avec du castor euin et des essences faites avec des épiceries. Mais ces moyens nuisent en ' général au poisson, qu'on est obhgé pour cela de manier et de presser. D'ailleurs, le Créateur a mis dans tous les animaux un penchant pour se multiplier, qui n'a pas besoin des resources de l'art. Quelques économes laissant la semence dans les alevinières jusquau printems. Mais H 114 ^^ CARPE. alors ils sont exposes à sécher en été, et à geler en hiver. Ce qu'il y a de inieux, c'est de pêcher sur la fin de l'automne, le poisson qu'on veut faire multiplier, et de le mettre dans des étangs d'hiver ou dans des carpières , ou enfin dans des réservoirs , s'ils sont assez grands. Cependant si les étangs d'accroissement étoient disposés de manière à ne faire craindre, ni la sécheresse de l'été, ni la gelée de l'hiver; c'est-à-dire si l'on pouvoit en augmenter et en diminuer l'eau à vo- lonté, par le moyen d'une source, onpourroity laisser le nourrain pendant l'hiver. Quand on vide la carpière, il faut mettre devant la bonde, un filet à petites mailles, afin que les petites car- pes ne passent point avec l'eau. Quand l'étang est vidé et que les carpillons sont rassemblés dans le bassin, on les prend avec une truble, ou un coleret à petites mailles , et on les met dans des tonneaux pleins d'eau. On peut cependant se passer des carpières et ne point faire ce que nous venons de prescrire, si l'on fait prendre dans une carpière des herbages pleins d'œufs, et qu'on les dépose sur les bords de l'étang qu'on veut em- poissonner. Par ce moyen, on peut à peu de frais peiipler un étang d'un nombreux nouiTain, comme je l'ai dit à l'article de la brème. a) Il faut les laisser deux ans dans l'étans: d'accroissement. Cet étang doit être plus grand que la carpière, et ne contenir aucun poisson tô- LA CAIVPE, I15 race. Quand les carpes sont grosses et de la bonne espèce, dans l'espace de trois ans, elles ont ordi- nairement six pouces de long; mais quand elles sont de la mauvaise espèce, elles ne parviemient, dans le même espace, qu'à la mode de cette lon- gueur. Quand elles sont d'une excellente espèce, et qu'on les nourrit bien , elles parviennent pis- qu'à huit pouces; ce qui ne laisse pas d'avoir beaucoup d'influence par la suite. Une carpe de la mauvaise espèce, ne pèse qu'une livre et demie au bout de six ans ; une de l'espèce moyenne en pèse trois, et les meilleures vont jusqu'à quatre à cinq livres, quoiqu'elles ayent eu les mêmes soins et la même nourriture. Au bout de dix ans, les premières pèsent quatre à cinq livres, les secondes six à huit, et les dernières dix à douze. S'il arrive par quelqu'obstacle que le nourrain soit rabougri , quand même on Jui donneroit de la nourrieure en abondance, cette espèce, au bout de dix ans , pèse à peine une livre et demie: alors la tête est grosse, les arrête* fortes, et la chair en petite quantité. Il faut bien cinquante cai^pes de cette espèce pour faire un quintal. Quand les carpes ont resté deux ans dans l'étang d'accrois- sement, et qu'elles ont trois ans, on les met dans 3) l'étang à engraisser, où au bout de trois ans elles pèsent trois à quatre livres , et peuvent être assez grasses et assez bonnes pour être ven- dues, pourvu toutefois qu elles soient dune bonne H a Il6 I-A CARPE. espèce et qu'elles ayent été bien nourries. Maii ceux qui ne sauroient se procurer eux-mêmes de la semence pour l'empoissonnement de ces sortes d'étangs, trouveront rarement du profit dans cette branche d'économie. Il en coûte d'acheter cette semence: on est souvent trompé; et le transport et difficile, sur-tout lorsque l'endroit est éloigné. La nourriture des carpes consiste en une terre grasse composée de plantes pourries, semblables au terre des jardins. Cette terre se forme peu a peu sur les prairies par les plantes qui y pour- rissent. Les carpes fouillent profondément dans cette terre, et en tirent un suc nourrissant, tel qu'on le trouve dans les petits trous des lacs qu'on vient de vider. Quand cette espèce de tourbe est posée sur un fond limoneux, la carpe trouve ime nourriture encore meilleure, qu'elle tire aussi de ce fond. Outre cela, elles manixent aussi toutes sortes de plantes et de racines pourries, les jeunes plantes aquatiques, et pendant l'été, les insectes et les vers. En Juillet et Août, tems auquel les carpes cherchent ordinairement leur nourriture sur les bords, il ne faut pas , sans nécessité, y al- ler chercher de l'eau fraîche, ni permettre que les bergers, les chevaux ou les vaclies s'en appro- chent; parce que le bruit interrompt les carpes et les empêche de prendre leur nourriture. Il est bon aussi de placer des abreuvoirs auprès des étangs, afin que la fiente du bétail y fournisse LA CARPE. 117 une plus grande quantité de parties nourrissantes. Quand les basses -cours ne sont pas éloignées des étangs, il est bon de pratiquer des conduits qui y fassent passer l'eau du fumier. Il en est de même des eaux des cuisines. On jette aussi dans le fond des étangs de la glaise mêlée avec des crottes de ])rebis, que l'on nièle dans des tonneaux, et que l'on fait sortir par des trous que l'on perce au- tour. D'autres y jettent des fèves, des pommes de terres coupées, de navets, de l'urine, des fniits pourris, du pain moisi, du poisson gâté et du pain de clienevis. I^es carpes aiment toutes ces choses. Mais comme cette nourriture entraî- iieroit de trop grandes dépenses, les possesseurs d'étangs ou fermiers ne peuvent mieux faire, que de jetter de tcms en tems dans les étangs, delà fiente de cheval , de brebis, ou de vache, seule ou mêlée avec du limon. Quand on a commencé à leur donner à manger, il faut continuer; parce que par -là elles se désliabituent de chercher leur nourriture, comme nous l'avons décrit à l'article de la gilîèle. Il y a des cultivateurs qui font voi- turer en hiver quelques tombereaux de fumier sur la glace, afin que les carpes trouvent de la nourriture aussitôt qu'elle est fondue. M. le ba- ron de Sclndenhurgy qui a lui-même essayé de le faire, dit que cela contribue beaucoup à l'accrois- sement des carpes. Quand les carpes qu'on veut engi*aisser ont Il3 LA CARPE. six ans, on vide l'étang, et on en tire les carpes qni se rassemblent dans le bassin. Dans ce cas, pour qu'elles soient bonnes, il faut qu'il n'y en ait pas plus de trente à trente -cinq au quintal. Cependant il n'est pas toujours nécessaire de pê- cher et de vendre les carpes dans la sixième an- née. Il y en a qui les laissent encore trois ans, ou qui les transportent dans d'autres étangs, et ne les vendant qu'à l'âge de neuf ans. Alors cha- que carpe pèse six, huit, dix et jusqu'à douze li- vres , selon la qualité de la nourriture et la bonté de l'espèce. Mais comme il est bon de retirer son capital aussi souvent qu'il est possible, il est à craindre qu'on n'ait plus de perte que de profit à laisser devenir les carpes si vieilles. Ordinaire- ment après la troisièine année, on laisse un an à sec l'étang à engraisser. Cette précaution est né- cessaire à plus d'un égard. D abord cela détruit les poissons voraces, la trop grande quantité de joncs et de roseaux, qui nuissent au poisson. En second lieu, comiue les carpes ont mangé toutes les racines des plantes, on leur procure une nou- velle nourriture, en labourant au printems le ter- rain de l'étang, et en semant de l'avoine, des ra- ves ou des vesses. Quand l'avoine est mûre , on la fauche et on l'amasse: les racines restent, et servent de nourriture aux carpes qu'on y met l'année suivante. En Silésie, on sème dans plu» sieurs étanirs du froment, duseiale, et souvent LA CARPE. 119 aussi on y plan Le des clioux blancs. Quant au nombre clés carpes qu'on peut mettre sur une cer- taine étendue, il n'y a point de proportion déter- minée. Ordinairement on compte soixante pois- sons pour un arpent; c'est-à-dire, la première année, et lorsque le fond est bon. Cependant on peut augmenter ce nombre, comme je l'ai dit, quand le fond est d'un limon bien gras. Tout ceci ne peut non plus avoir lieu que lorsqu'il y a une quantité su/Ilsante d'eau, pour couvrir les prés de trois pieds. Mais si le fond de l'étang se dessèche entièrement en été , on ne sauroit en faire im étang à carpes. Il n'est pas nécessaire d'avertir les posses- seurs ou les fermiers , de pendre garde aux vo- leurs , qui emploient toutes sortes de moyens pour prendra les carpes pendant la nuit. Ils em- ploient sur- tout les nasses garnies d^appàts; le feu, par le moyen duquel ils attirent le poisson, qu'ils saisissent ensuite avec des tridens; l'huile d'aspic, dont ils frottent des morceaux d'étoffe de laine, qu'ils attaclient à leurs trubles. c) L'o- deiu* de cette huile attire les poissons. Ils jettent aussi dans l'eau de la coque de levant, de l'ésule, de l'aristoloclie et d'autres drogues qui les endor- ment; après quoi ils les prennent à la main. Du o) Pour empêcher les vo- pieux d'un bois bien sec, leurs dé pèclier avec cet longs d'un pied ou d'nn engin, il faut placer dans pied et demi, et qui soient le fond de rétang des cacliés sous l'eau. n 120 LA. CARPE teiîis de Pline on connoissoit déjà la plupart de ces secrets d). Lh'iver est la saison qui exige le plus de soins. 11 faut sur -tout prendre garde que les poissons n'étouffent sous la glace. Quand l'étang est gelé, il faut le vider un peu, afin qu'il se fasse un creux sous la glace, et qu'il reste lin peu d'air entre l'eau et cette glace, Les trous que l'on fait à la glace et dans lesquels on met des joucs ou de la paille , peuvent suffire dans les froids qui ne sont pas excessif e). Mais il faut pendre garde de faire ces trous trop près du bas- sin y) sans cela on troubleroit les carpes; elles sauteroient sur la glace, où elles gèleroient. On a aussi remarqué que lorsque le tonnera tombe dans un étaug ou dans mi lac, les poissons d) N. H. 1. 23. c. 8- s) Ces trous sont au nombre de deux ou trois , suivant la grandeur de l'étang. Si Ton a soin de les laisser toujours ouverts, il n'est pas nécessaire de faire écouler l'eau de dessous la glace; cela ne feroit que tourmenter les carpes , et leur faire quitter leur re- traite. Mais dès qu'on ap- perçoit dans ces trous une espèce de ver noir et long, ou que les carpes y parois- seiU, il est nécessaire alors d'ôter un peu de l'ancien- ne eau, pour y en intro- duire de la nouvelle. Cet- te dernière précaution est aussi nécessaire quand il y a beaucoup de neige et qu'il arrive un dégel subit, f) Lorsque l'étang commen- ce à geler, les carpes clier- client les endroits les pins profonds: elles fouillent dans la terre, y font des trous en forme de bassin, et s'y j'ressent aussi près les unes des autres que des harengs dans un tonneau; et c'est là qu'elles passent l'hiver endormies et sans nourriture. On a remar- qué qu'une carpe à trois livres et demie ne perd pas plus d'un quarteron pen- dant tout le tems d'un si f2;rand jeûne. LA CAKPE 121 meurent en peu de jours. Il faut yre venir cet accident, en vidant aussitôt l'ancienne eau pour y en introduire delà nouvelle. Avec cette précau- tion, il n'en meurt que très -peu. Les carpes sont aussi exposées à quelques maladies , qui sont connues sous le nom de peti- te -vérale et mousse. La première consiste dans des pustules qui se manifestent entre la peau et les écailles , et elle est rarement mortelle. La seconde consiste dans de petites excrescences , qui ressemblent à de la mousse: elles sont visibles sur la tète et tout le long du dos. Les carpes en meurent fort souvent. Cette maladie est causée par les eaux corrompues amenées par les grandes pluies. On la fait cesser en renouvellant l'eau de l'étang. Les carpes deviennet aussi malades lors- qu'un dégel subit fait tomber dans l'étang une grande quantité d'eau déneige. Pour prévenir cet accident, il est bon en constmisant un étang, de l'entourer d'un fossé, qui retienne les eaux de nei- ge, et qui dans les grandes eaux de pluie, empêche les inondations et la perte des carpes, qui sortent alors de l'étang. En été , quand les carpes ont une quantité suffisante de bonne eau; ce qu'on peut leur procurer en l'augmentant, la diminu- ant ou la renouvellant au besoin, quand la cha- leur n'est pas trop grande, et qu'en hiver elles n'étouifent passons la glace, on n'a ni maladies; ni autres inconvéniens à craindre. 122 l'A REIJS'E DES CARPES. XXL LA REINE DES CARPES, ou LA CARPE A MIROIR, Re !c Cyprinoruin. XVIIme Planche. Les écailles très-grandes. Cyprinus squaniîs via- ximis, F, xvut- V. xx. A, /zx. C. xx^^z. T). XX. Rex Cyprinoluin. Linn.S,N. Cai*pe à miroir. Duham. eJit.VI. 49. n.20. Pècli. II. Sect. III. Pi. 26. Cypiinus. Kleiu.Y. 5g. 11.2. f. 2. (Jn distingtie la reine des carpes par ses grandes écailles. Elles sont quatre fois plus grandes que celles delà carpe ordinaire, ne couvrent qu'une partie du corps, et laissent l'autre unie. Il n'y a pas encore longtems que j'en ai vu une, dont les écailles avoient un pouce et denii de large. Or- dinairement ses écailles sont en deux rangées, dont l'une est parallèle au dos, et l'autre à la ligne latérale. Le ventre est aussi couvert d'écaillés, mais qui ne sont pas placées en droite ligne com- me les autres. Ces écailles sont rayées, ontime cou- leur jaime, ne tiennent pas aussi fortement au corps J.A REINE DES CARPES. 125 que celle des autres carpes; car elles se perdent souvent en péchant; ce qu'on remarque aux pla- ces sous lesquelles on voit le sang, qui en sont dépourvues. La peau de la partie découverte est beaucoup plus dure que celle qui est couverte. La première est noire; la seconde jaune. On ne voit que rarement ce poisson dans nos contrées; mais il y en a une grande quantité dans le pays d'An- halt, à Torgau, à Dresde n), dans la Franconie h) et la Bohème c) , où on la nourrit dans des étangs. Elle devient aussi d'une grosseur consi- dérable, et sa chair est meilleure que celle de la cai'pe ordinaire. Les anciens ne disent rien de ce poisson; Jonston est le premier qui en parle, et le nomme, le. roi des carpes , rex cyprinorinn. d) Après lui Marsi^li ej , Klein fj , et Linné gj , d?ins la si- xième édition de son Système , en parlent sous ce nom , et le regardent comme une espèce parti- culière ; mais Linné n'en a rien dit dans sa der- nière édition; peut être qu'il a regardé la par- ticularité des écailles comme quelque chose d'accidentel. Mais comme les petites de ces car- pes ont les écailles de même nature pue les gran- des, comme on peut le voir dans ma collection, et par les dessins que nous a donnés Sclioejjer lij ^ a) Klein. M.P.V.59. ^) Daniib. IV. 59. h) Vollkom. Fisch. 133. f) Le livre cité. c) Onomat. II. 453. o) ^g. n. 20. d) De Pisc. t. £y. f. 2. h) StuJ. Iclit. 24. f. 2. 124- I.A CARPE A MIROIR. il faut considérer ce poisson comme une espèce particulière. Kramer ij y. Leske k) n'en font qu'une variété. Les places nues ne paroissent pas être le caractère distînctif de ce poisson; car Jonston IJ et Duhamel 771J ont représenté son corps entièrement couvert.. M. Lœvennoiis parle de carpes qui n^ont point d'écaillés du tout , et que l'on trouve dans un étang de la seigneurie de Wuschen en Silésie nj. La reine des carpes exige les mêmes soins et les mêmes précautions à l'égard du transport et de l'augmentation, que la carpe ordinaire. On nomme ce poisson en Allemagne spie- gelkarpfen; carpe à miroir et reine des carpes en France et royal-carp en Angleterre. i ) Elencli. 390» h) Specim. 23. l) La planche citée. ,11) Pècli. II. PL 26. f. 2. n) Abh. der Hull, Gesell. I. ^^ LE BARBEAU. 12^ XXII. LE BARBEAU, Cyprinus Barbus. XVIII me Planche. La mâchoire supérieure avancée, quatre barbil- lons à la bouche. Cyprinus jnaxilla supe- riore proniinente, cirris quatuor. P. xvii, V, zx. A, viJi, C. XIX. D. XII. Cyprinus Barbus. Linn. S, Mystus. Klein. M.P.V. 64. n.i. N. 525. n. 1. Arted. Gen. The Barbel. Penn. B. Z. III. 4. n. 11, Syn. g. n. 14. 357. n. 166. Pi. 71. Gronov. Zoopli. n. 331. Barbeau. Duliam. II. 51g. ' Mus. I. n. £0. PI. 27. f. 7. v^e poisson, dont la patrie sont les pays méri- dionaux de l'Euroge , se distingue de toutes les autres carpes par l'avancement considérable de la mâchoire supérieure sur l'inférieure , et par les quatre barbillons qu'il a à la bouche. Le barbeau, par son corps allongé, ressem- ble beaucoup au brocliet. La tête est oblongue et finit en pointe. L'ouverture de la bouche est oblongue, placée au dessous de la tête. La lè- vre supéi ieure est forte, le poisson peut l'avancer et la retirer à son gré. On trouve, les quatre bar- billons à la mâchoire supérieure: les deux de la 126 LE BARBEAU. pointe sont plus courts que les autres. Comme ces barbillons forment une espèce de moustache, on a donné à ce poisson le nom de barbeau. Les narines sont tout près des yeux. Les écailles sont rayées et dentelées , d'une moyenne grandeur, attachées fortement à la peau , et sont , selon Kichter aj, au nombre des plus de 5000. Le dos est rond et la ligne latérale droite. Au dessous des nageoires ventrales, on voit une appendice. Le barbeau se plaît dans les courans rapides sur un fond de cailloux. Il se tient ordinaire- ment caché sous les bords escarpés et entre les grosses pierres. Il vit de chélidoine , de lima- çons, de vers et de petits poissons. J'ai trouva dans la bouche d'un gros Barbeau une perche vi- vante. Il aime aussi beaucoup la chair humaine; car en 1683 > après le siège de Vienne, comme on avoit jette pêle-mêle dans de Danube les Turcs et les animaux , on en trouva une quantité autour des cadavres humains, dent on prit la plus gran- de partie bj. Avec une nourriture si variée, il n'est pas étonnant que les barbeaux croissent fort vite. On en prend dans l'Oder qui ont deux à trois pieds de long, et qui pèsent six à huit li- vres. Ceux du Veser eu pèsent douze à quinze. On en trouve en Angleterre qui pèsent jusqu'à dix - huit livres cj On les pêche dans l'Oder, la a) Ichthyol. 813. * c) Peint. B. Z. III. 353. b) Marsigl. Danub. IV. 19. I.E BARBEAU. 127 Saale, lElbe, le Rhin et le Vc'ser. Dans ce der- nier fleuve , le lin qu'on met dans l'eau les rend si gras, quils ne le cèdent en rien au saumon pour lebongotit. Comme ce poisson suit le lin, les pécheurs profitent de cette occasion pour le pren- dre en grande quantité. Dans la fleuve de l'Aik, la pêche des barbeaux et des Silures est la princi- pale occupatin des Cosaques en hiver. Le barbeau se trouve aussi en Russie dans la plupart des lacs et rivières, ovi l'on en prend qui pèsent jusqu'à trente livres. En été, un barbeau de cette gros- seur ne coûte que cinq à huit copecs; mais en hi- ver , on le vond trente jusqu'à quarante copees. A Astracan et auTerek, on marine la lano-ue de ce poisson; ensuite on en remplit des barils, et on les envoie à Petersbourg. Les Cosaques qui habi- tent aux environs du fleuve Uralck font de la col- le avec la vessie aérienne du barbeau ; mais elle est de beaucoup inférieiue à celle qu'on tire du grand -esturgeon c). Le barbeau ne peut produire que vers la quatrième ou la cinquième année. Le tems du frai est en Mai; et en Juin quand le printems est froid. Alors il remonte les fleuves , et dépose ses œufs sur les pierres du fond, dans les en- droits ou le courant est le plus rapide. On le prend pendant toute l'année avec des filets, des poches, ou à la ligne, en fonnant un appât avec «) Falls Rcis. III. 429. 1G8 ■ LE BARBEAU. du fromage , du jaune d'œuf et un peu de cam- phre, et en mettant le tout dans un petit morceau de toile. On prend aussi pour cela des sang- sues. Afin d'avoir toujours des sang -sues prêtes, on en amasse une quantité ; on les sèche, et on les fait ensuite revenir quand on en veut faire usa- ge. Enfin , on le prend aussi avec la ligne de fond , en attachent à l'hameçon un ver de terre ou un petit poisson. Tant qu'il est jeune, il a pour ennemis tous les poissons voraces, et sur- tout la Loche. Le barbeau a la vie dure, la chair blanche et de bon goût; et par conséquent, quand il n'est pas trop gras, il offre une nourri- ture assez saine aux personnes délicates. C'est au mois de Mai qu'il est le plus gras. Ce poisson a à chaque mâchoire dix dents recourbées vers le bout, et placées en deux ran- gées. Le canal intestinal est comme dans la car- pe. Jy ai découvert des échines blanches et jau- nes, et une nouvelle espèce de vers solitaires fj. Le fiel est jaune. Dans un poisson de trois livres et demie, péché au mois d'Avril; c'est-à-dire^ peu de tems avant le frai, l'ovaire ne pesoit pas plus de trois quarts d'once, et contenoit 8025 œufs de la grosseur et de la couleur des grains de millet. Il avoit quarante - six vertèbres à l'épine du.dos , et seize côtes de chaque coté. On donne dilférens noms à ce poisson dans /) Voyés mon Trait, des vers t. 6. f. 9 — 15. LE BARBEAU 129 les différentes provinces d'Allemagne. On le nomme: Barb, liarbel, barbelé y bcirble, bàrbel, barrney steinbnrberiy rotlibart; bnrniy bevjTLy et barbeel , en Plollande ; bar bel y en Angleterre; barbeau, en France; sasana, ussatch et sasan en Russie; barbio et barbo , en Italie; barbio et bar^ vOy en Espagne, etnierennCy en Hongrie. Les anciens auteurs prétendent que les œufs de ce poisson sont venimeux, et qu'il arrive des accidens fâcheux à ceux qui en mangent gj. Mais c'est un prej Lige qui vient sans doute de ce qu'ils pretendoient que les femelles ont un écoulement menstruel à chaque nouvelle lune. Comme ils étoient persuadés que ces sortes d'écoulemens etoient, en général, un poison que la nature re- jettoit, ils croy oient que les œufs dévoient aussi en être un. Cette assertion est soutenue par plu- sieurs modernes hj; mais elle est combattue par l'expérience ij. Je pourrois moi-même en four- nir mie preuve. J'ai mangé des œufs de ce pois- son avec toute ma famille, et personne n'en a jamais été incommodé. Klein parle aussi d'im roi des barbeaux com- me d'une espèce particiJière A^, qui se distingue g) lonst. de Pisc. 151. ]"5on- JVIat. aliment. 265. Miil- net, Med. sept. I. 60. Mise. 1er. L. S. 550. Nat. car. dec. II. A. I. obs. i) Pachter. Icliili. 314 Salv. 25. Aqu.Qfi. b. N. ScJianpi. 1. A) Eomar.Dict. 11.558. Kra- 553. mer. Elcucli.59i. Zùckert. h) IMystiis, 11. 2. M.P.V. 6/|,. 130 I^E BARBEAU. des autres par ses longues nageoires. Mais comme il lavoue lui-même, il n'en a vu qu'un seul dans le cabinet de Dresde; et d'ailleurs, comme les autres auteurs ne font point mention de ce pois- son, il y a apparence que la longueur de ses nage- oires n'est qu'un accident particuliei', ou une tromperie de quelque marchand de curiosités na- turelles. On dit aussi, dans un nouvel ouvrage 1)^ que le barbeau fait ses petits au mois d'Août: mais c'est peut-être une faute d'impression. /) Onomat. H.N. IL 137. XXIII. L* I D E, Cyprinus I d u s. XXXVIme Planhe. *) Le corps gros ; treize rayons à la nageoire de l'a- nus. Cyprinus corpore crasso y pinnae uni radiisiKJii, P.xm. l^.xi, Jl.xiii. C.xjx. D.x. Cyprixius Idiis. Linn.529. n. 17. Arted. Syn. 14- "• 30. \^ette carpe se distingue de celles dont nous avons parlé, par la grosseur de son corps, et les treize rayons de la nageoire de lanus. *) L'histoire de ce poisson et j'y ti'^iite de leur genre. J'ai les six suivantes se trou- cite les planclies sur lesquel- vciit dans le supplément de les ils sont représentés sans l'édition in fol. J'ai préféré observer l'ordre clironologi- d'en parler ici: parcec|ue que. L IDE. 131 La tête est grosse eL tronquée, et l'ouverture de la bouche petite. La mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure. La ligne latérale forme une courbure en arrière près de la tête. Le dos est rond, et forme un arc lâche. On voit au-dessus de la nageoire ventrale une appendice. On trouve l'ide en Poméranie, en Vestpha- lie, en Suède, en Nor^vège, en Dannemarc et en Russie. Il habite les grands lacs où il 7 a une eau claire et de grosses pierres. Il en sort au mois d'Avril dans nos contrées, et en Suède en Mai, pour passer dans les fleuves, et y reprodui- re son espèce. Il cherche les endroits les plus rapides, et fraie dans le fond sur les pierres nues. Il \^t d'herbaiies et de vers comme les autres es- pèces de carpes; il a les mêmes ennemis; croît lentement; commence cà frayera trois ans; par- vient à la longuer d'un à deux pieds, et pèse alors six à huit livres. Il a la vie dure, et multiplie beaucoup. On le prend avec le Hlet, le manche, et à l'hameçon. Il mord sur- tout, quand on prend pour appât des queues d'écrévisses , ou des grillots. Sa cliair est blanche, tendre et de bon goût. Au commencement de l'œsophage, on trouve deux os, sur chacun desquels on voit deux ran- gées de dents im peu courbées vers la pointe : les cinq qui sont sur le davant, sont et fortes grosses ; les deux qui sont sur le derrière petites L'esto- I 2 152 LIDE, mac continue avec le canal, sans interruption, ei n'a que deux courbures. Le foie est long et rou- ge : il consiste en trois lobes, La vésicule du fiel est grosse , et le Hel est d'un verd foncé. La rate est d'un rouge foncé , et formée de deux pe- tites pièces. La laite est double, aussi bien que l'ovaire, En Avril, j'ai trouvé dans un poisson de trois livres 67,600 petits œufs jaunes de la gros- seur de la graine de pavot. On trouve quinze co- tes de cliaque côté, et quarante -une vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous difFérens noms. On le nomme: SDaehel, en Pomeranie^ kûliling, en Westphalie ; nerfllng , erfling , brcidjisch^ en Autriche; end y en Dannemarc; id et tiosckf- jacling, en Suède ; rôd-Jinerig, en Norwège; jass et plotiua, en Russie; poluwann, en Tarta- rie; ide en France, et idus-cai^p en Angleterre. Uidiis et ïidbarus de Linné ne seroient-ils point le même poisson? Je le soupçonne; parce que ni Linné dans sa Faiina , ni Artédi dans sa Description des poissons suédois , n'ont parlé du dernier, qui est pourtant naturel à ce pays. LE RASOIR. 133 XXIV. LE RASOIR, Cyprin us cuit i- abus, XXXVIIîTie Planche. La ligne latérale près du ventre. Cyprînus lûiea laterali prope veintreni. P. xr. l^, lyn, A. xxx. C. XIX, D. IX, Cyprintis cultratus. Liiin* Ijucius. Klein Miss. V. 7-J. 531. 11. 23. n. 2. 3. t. 20. f. 3. \^^ette carpe se distingue des vingt -trois espèces dont nous avons parlé, par la ligne latérale, qui est près du ventre* La tête qui est comprimée est très petite, et a une élévation en haut près de l'ouverture de la bouche. Lamaclioire inférieure qui est arquée, avance sur la supérieure. La bouche s'ouvre comme celle du hareng. Les narines sont lar- ges , et placées près des yeux, qui sont très- «:rands. Le dos est rond et forme une li^rne droi- te. Les côtes sont comprimées et le ventre est tranchant. La lliine latérale a une direction d'u- ne variété remarquable: elle commence au-des- sous de l'opercule des ouïes. Après avoir par- couru l'espace d'im pouce en longueur, elle tour- 154- I^^ TiASOIR. ne en bas vers le ventre, forme nn angle optus, et iinit au milieu de la nageoire de la queue après avoir encore serpente plusieurs fois. Les écail- les , excepté celles de la nuque , sont grandes, minces et se détachent aisément. Nous trouvons ce poisson en Prusse, en Po- méranie, presque dans toutes les rivières du voi- sinasse de la Baltique; en Suède, dans le Danube dans le Jaik. Linné le met au nombre des pois- sons de la Baltique, et le regarde comme un pois- son rare en Europe. J'ai reçu celui que je décris ici de Mr. de MarwitZy de la Nouvelle -Marche. Il a été tiré d'un lac, où on l'avoit transporté: il étoit long d'un pied et demi, large de quatre pouces, et pesoit une livre et un quart. On en trouve cependant de plus gros et de plus lourds. Il aime l'eau claire et vit de vers, d'herbages et de terre grasse, et se tient ordinairement sur les bords. C'est là qu'au mois de Mai, il dépose son frai sur les herbages. Il a dans les oiseaux de proie et les poissons voraces un grand nombre d'ennemis, dont il devient souvent la proie, par- ce que son éclat les frappe et les attire ; ce qili fait qu'il ne multiplie pas beaucoup. On le prend avec des filets et avec des nasses dans le tems du frai. Il mord aussi facilement à Thameçon. Le peu de chair qu'il a est blanche , molle , maigre et traversée de plusieurs petites arrêtes four- chues. Ainsi il n'y a guère que le peuple qui le JLE HASOIR. 155 mange. Ce poisson diffère des autres poissons de rivière non seulement par la forme extérieure, mais encore par la structure intérieure de son corps. J'ai trouvé la cervelle en arrière près des yeux, recouverte par la chair du dos: je n'ai pu remarquer les petits os du cerveau, que l'on trou- ve ordinairement dans les autres poissons. On voit dans l'ésophape , deux os , dont chacun a sept dents pointues en deux rangées. La cavité du ventre est longue et large. L'estomac se perd dans le canal intestinal , comme dans les autres espèces de carpes. Le dernier a deux courbures et est de la longueur du poisson. Le foie consiste en deux lobes, dont le plus long va jusqu'au trou ombilical La vésicule du fiel est petite, de mê- me que la rate, qui est brune. Le fiel est jaune. Les deux ovaires , qui sont placés le long du dos, sont grands, et chncun est divisé par une raie en deux parties égales. Dans im poisson d'une li- vre et un quart , tout les œufs pesoient deux on- ces et demie. Les œufs étoient gris , et au mois de Mars, ils étoient presque de la grosseur de la graine de millet , et l'ovair^e contenoit 105,74.0 œufs. J'ai trouvé vingt côtes de chaque côté, et quarante -sept vcrtè])res à l'épine du dos. Le dos est droit ; le ventre mince et tran- chant. C'est cette forme qui lui a fait donner en Suède le nom de skerhni)' (lasoir); en Autriche celui de sichel (faucille); en Hongrie celui de 156 LE RASOIR. soeblar (sabre); de niénic que sa maigreur lui a fait donner en Prusse le nom de zies^e , et celui de zicAe (chèvre) en Poméranie ; les Russe le nomme, tsechon , les francois racoir; et les anglois knefe-carp. C'est cette même forme et la nas^eoire située fort loin derrière le dos, de même que sa oouche sans dents qui ont été cause que les écrivains l'ont pris tantôt pour un hareng, tantôt pour un bro- chet ou une carpe. Illarsigli, le premier qui le décrivit et le représenta en 1726 a), croit qu'il a beaucoup de rapport avec le saracho ^ Aldrovand h), dont cependant il diffère beaucoup. 'Klein le décrivit en 1749 , et en donna aussi un dessin. Il en Ht un brochet: il croit que personne ne l'avoit encore ni décrit ni représenté , et le rapporte à deux espèces différentes ; savoir , le ziege et le sichling cj. Bientôt après Linné en fit nne espèce de carp d)^ Quelque tems ^.^xhsyKrainer en fit aus- si mention en 1756, comme d'un poisson tout-à- fait nouveau , et le détermina comme Linné ej» Enfin, JVulJf en fit un hareng^. Il se trompe encore d'un côté quand il le prend pour le chnlcis de Rondelet et de Jonston\ de l'autre, quand il donne ce poisson foible et sans arme pour l'enne- mi le plus redoutable de l'esturgeon, qui est un poisson fort et armé de tous les côtés gj, Il faut a) Daniib. IV.21. t. g. d) Gotlil.Reis. 103. t.2.f. 2. h) De Fisc 665. , e) Eieiich. 392. c) M. 74. n. 1.2.3. t. 20. £5. y)Iclit. 11.51. «)Aii lien cité. I.A DORANDE CHINOISE. 137 aussi que Richtcr n ait pas bien observé ce pois- son , sans quoi il n'auroit pu lui donner des écail- les aiguillées et tranchantes hj, h) Ichth. 693. LA DORADE CHINOISE, Gypi'inus a u r a t u s» XCIIInie ET XCIVme PlaNCHE. La couleur d'un rouge brillant. Cyprinus colore rubro, F.xfi. V, yH^A.Gi: C,x:x.yii, Z).xx. Cypriiiusauiatus. Linn, y^y. Poisson doré de la Chine. 11.7. Gron.Zoopli. n.342. Duhain. III. 57. Pi, 10. Gold-lish. Penn. 37/|. n. 174. iî^. 1 — 5. • I a couleur l^rillante comme l'aurore , dont ce poisson est décoré, le dislingne des autres espè- ces de carpes. Les narines sont doubles, larges, et placées près des yeux. Le tronc est cou\'ert de grosses écailles. La liane latérale a une direction droite près du dos. La nageoire de la queue est four- chue. Cependant je ne connois aucun poisson où les nageoires soient si variables que dans celui-ci. J'en possède un dont la nageoire du dos n'a que 153 ^^ DORADE CHINOISE. deux rayons ; dans d'autres elle manque entière- ment , comme à celui qui est représenté sur la XCIVme planche. Uu autre encore a seulement une élévation au lieu de nageoire, et un troisiè- me à deux élévations semblables. Dans mi, la nageoire de Tanus est double et celle de la queue comme une fourchette à trois pointes, comme on peut le voir aiixjig. i et 2 de la planche citée. Dans un autre encore, cette dernière nageoire est extrêmement longue, et les autres nageoires sont plus longues qu'elles ne le sont ordinairement. Les deux nageoires de l'anus sont placées près l'u- ne de l'autre; mais la partie superflue de la na- geoire de la queue croît comnumément au milieu du côté. Il semble que lorsque la force de la na- . ture diminue d'un coté dans la production, ou le développement des nageoires, elle s'augmente de l'autre : cela dépend probablement du plus ou moins de soiu qu'on prend en nourrissant ces pois- sons. Une chose remarquable, c'est que les cou- leurs de ce poisson changent avec son âge. Dans les premières années ; elles sont ordinairement noires : couleur que la nature offre assez souvent dans le genre minéral et dans les quadrupèdes, très -rarement dans les insectes, les oiseaux et les plantes, et fort sase dans les poissons. Dans les cours de quelques années , ils oIFrent ordinaire- ment des points argentins, qui augmentent insen- siblement jusqu'à couvrir nntièrenient l'animal. LA DORADE CmxOISE. I39 Après cela, il devient rouge, et s'embellit à me- sure qu'il avance en âge. Cependant , il arrive aussi quelquefois qu'il devient rouge avant que de prendre la couleur argentine ; quelquefois aussi, il est rouge dès le commencement. La dorade est le plus beau poisson. Javoue qu'à la première \iie, j'ai été frappé de son éclat, quoique jepossèdeplusieursbeaux poissons étran- gers. Car à travers du bocal, où je le reçus dans de l'eau, il avoit une couleur lumineuse, sem- blable à celle d'un charbon ardent. Les gens riches de la Chine et du Japon, qui le re- gardent comme un de leurs plus beaux pois- sons , le gardent comme un ornement dans leurs étancrs et bassins. Ils en tiennent aussi dans des vases de porcelaine. 11 sert sur -tout de récréa- tion aux Dames de qualité : elles s'amusent à le le nourir. Ce poisson est originaire d'un lac qui est peu éloigné de la haute montagne qu'on nom- me Tsienkins; , près de la ville de TchanglioUy si- tuée dans la province de TJie Kiang, à trente de- grés vingt -trois minutes de la hauteur du pôle. Delà, il a été transporté dans les autres provin- ces de cet Empire, ainsi qu'au Japon et en Euro- pe. A présent, on le trouve non -seulement en Angleterre et en France, mais aussi en Hollande et dans plusieurs villes de l'Allemagne. Il fut apporté en Angleterre l'an 1611, et en 1728, il y étoit déjà généralement connu. Ce poisson 1/j.O I>A DORADE CHINOISE. multiplie beaucoup voci ce que Mr. OelricJis à Brème a écrit à ce sujet : Je possède un as- sez bon nombre de dorades chinoises , qui sont provenues de huit que j'ai reçues de Mr. le Doyen Rouwe. Je les garde dans un petit bassin d'en^drou trente -six pieds de long, que j'ai fait creuser exprès , où elles vivent très -bien; et je n'ai pas remarqué qu'il en soit mort une seu- le. Les huit premières , qui avoient un demi- doigt de long lorsque je les reçus , ont déjà telle- ment grossi , que deux d'entr'clles sont comme de petits harengs. Les petits qu'elles ; ont] fait ne croissent pas si vite; peut-être parce que le bassin en est trop rempli. Les huit premières étoient noirâtres lorsque je les reçus. A présent, deux sont toutes rouo-es: une autre commence a le devenir, et n'a plus que le dos noir; les autres ont conservé leur couleur. Parmi les jeunes; j'en ai remarqué avec le tems, qui étoient toutes rouges, lorsqu'elles avoient à peine la longueur d'un doigt. Il n'y a que les roTiges qui devien- nent argentines, mais seulement quand elles sont vieilles , parce que la couleur rouge pâlit peu à peu , et devient enfin blanche. Les taches rou- ges frappent la vue, sur -tout dans celles qui sont noires. Ces taches commencent à paraître au bout de la queue. Je les nourris comme les car- pes , avec du pain blanc. LA DORADE CIII]N"OISE. 14.I Son Excellence Mr. le Comte de Heyderiy Envoyé de Hollande , en a apporté à Berlin , il y a quelque tenis. C'est à sa bonté que je dois la belle dorade dont je donne le dessin. Quand on garde les dorades chinoises dans des verres, ou dans des vases rie porcelaine, on les nourrit avec de petites oublies , de la mie de pain blanc bien fine, des jaunes d'œufs durs mis en poudre , ou de la cil air de porc hachée et de limaçons , dont, à ce qu'on dit, elles aiment beaucoup la muco- sité. Elles prennent aussi volontiers les mou- ches qu'on leur jette. En été, il faut les changer d'eau deux fois par semaine, et plus souvent en- core quand l'air est cliaud et étouilant. En hiver, il suffit de la renouveller tous les huit ou quinze jours. Dans les étangs dont le fond est de terreau ou de terre grasse, ils n'ont pas besoin d'autre nourriture. Mais si le fond est sablonneux, on peut les entretenir avec (hi pain de chenevis, du fumier , ou du pain. En hiver , elles ne man- gent point: car les Chinois ne leur donnent point de nourriture pendant trois ou quatre mois; c'est-à-dire, tant que dure cette saison. Com- ' me on pouroit aisément les blesser en les prenant des vases , on se sert d'un petit filet. Ces pois- sons aiment les lieux ombrairés, ainsi on fiiit bien de leur jetterun peu de verdiire, pour s'y caclier. Mais il faut prendre des branches qui ne donnent pas une mauvaise odeur à l'eau ; ce qui feroit 142, LA DORADIl CHINOISE. mourir les poissons. Comme les petits sont beau- coup plus vifs que les gros , on les préfère ordi- nairement pour les mettre dans des vases : cepen- dant, il ne faut pas y en mettre trop; sans cela ils mourroient. Afin que l'on puisse voir de loin leurs mouvemens et leurs belles couleurs, il faut prendre principalement de grands et larges bocals de verre blanc. L'ouverture ne doit pas être trop petite, afin qu'ils puissent respirer aisément il ne faut pas non plus qu'elle soit trop large, parce qu'alors ils pourroient sortir hors du vase et périr. Quand l'étang n'a ni herbages dans le fond, ni des bords unis, où les femelles puissent déposer leurs oeufs, il faut y jetter des branches vertes. Ce poisson a un grand ovaire et fraie en Mai. Il a la vie dure : car s^lon Mr. Basber un de ces poisson, qui avoit sauté hors d'un bocal, et étoit tombé par terre, où il resta une heure, se remua encore lorsqu'il fut remis dans l'eau a). Ces poissons ont l'ouïe Une. Pour»leur donner à manger, on les attire aisément sur la surface de l'eau avec un certain signe. Ils apprennent aussi à reconnoître ceux qui leur donnent ordinaire- ment à manger; car ils se présentent, dès qu'ils les entendent venir de loin. Les Chinois ont un petit siiïlet aux vaisseaux où il les conservent,afin de les accoutumer à un certain son. Lorsqu'ils sont enfermés dans des vases, ils ne deviennent a) Hor. Subs. IL S4. LA DORADK CHINOISE. 14-5 guère plus long que de six à huit pouces; mais dans les étangs, ils parvienneni: à la longueur de douze à quatorze pouces. Ce poisson se nomme: Kins^jOy dans la Chine; kin-ju, au Japon; golclfisli, en Angleterre ; gold- vishy en Hollande; gold-jish^ en Suède; gold- karpfen, en Allemagne; dorée de la cliînc, en France. Linné hj et Gronov cj croient avoir trouvé le caractère distinctif de ce poisson dans la queue à trois fourchons; mais ce caractère est aussi incertain que celui qu'ils tirent dans un autre en- droit de la nageoire de l'anus, qui est double ej: car ces marques sont accidentelles. Il est vrai que la couleur rouge, que je donne pour carac- tère, ne se trouve pas toujours dans les jeunes poissons; mais alors les caractères distinctifs ne i sont pas toujours clairs. h) Fiiun. n. 351. d) S. N. 527. n. 7. Zoopli. n. c) Mus. I. n. 15. 543. 144 ^^ CAKPE DE BUGGENIIAGEN, XX VJ. LA CARPE DE BUGGENHAGEN, Cyprinus Buggenhagii. XCVme Planche. Dix -neuf rayons à la nageoire de Tanus. Cypri- nus pinnae ani racliis xix. P. xz/. J^. x. A. xjx. C. XVIII. D, XII, I jOs dix -neuf rayons que Ton trouve à la na- geoire de l'anus, distinguent cette carpe des au- tres espèces. La tête et l'ouverture de la bouche sont pe- tites. La mâchoire supérieure est plus longue que l'inférieure. Les narines sont doubles et près des yeux. Sur la nuque, on remarque un enfoncement dirigé en travers. Le dos, qui for- me un arc, est tranchant. Les côtés sont com- primés. L'anus est situé fort loin à la partie postérieure du cqrps. On apperçoit à la na- geoire ventrale une appendice. Nous trouvons ce poisson dans la Poméranie Suédoise, dans la Pêne et les lacs qui y commu- niquent. C'est à M^i. de Buggcnhagen que je suis redevable de 'celui dont je donne le dessin. 11 parvient à ]a longueur de douze à quatorze pou- LA CAPtPii DE liUGGENHAGEN. I4.5 ces. Sa chair est blanche mais traversée de petites arrêtes; et par conséquent, on n'en fait pas grand cas. On le prend avec les mêmes engins que la brème. Il n'en diffère point non plus quant anx parties intérieures. Les- pêcheurs se réjouissent quand ils en prennent dans leurs filets; parce que l'expérience leur a appris , que lorsque ce pois- son paroît, la pêche des brèmes est abondante. Us croient que les brèmes suivent notre poisson, et se laissent conduire par lui: voilà pourquoi ils lui ont donné le nom de leiter (conducteur). A la première vue, on prendroit ce poisson pour une jeune brème, ou une sope: mais le petit nombre des rayons à la nageoire de l'anus, prouve le contraire. XXVII. L' O R P H E, Cyprinus O r p h u s, XCVI^ Planche.. Le corps couleur d'orange; quatorze rayons à la nageoire de l'anus. Cypriniis corpore colore croceOy pinnnc nui radiis xir. F. xr. V, x. A» yiiv, C. xxji. Z). X. Cyprinus Orfns, Lin n. 550. Vrow-fish 5. n. 6. Leu- n. 18. Artéd. Syn. 6. n. 3. ciscus. Klein. M. V. 66.11.4. j ,a couleur jaune dont brille ce poisson, et les quatorze rayons de la nageoire de l'anvis , le K 146 LOKPIIE. distinguent des autres espèces de carpes. La tête est petite. La mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure. Nous pouvons en quel- que façon mettre cette belle cai-pe à côté de la dorade chinoise. Ce poisson est originaire des parties méridionales de l'Allemagne. On le trouve sur - tout dans les environs de Nùrembere: et d'Augsbourg. Il séjourne dans les rivières, lacs et étangs. Il n'a pas la vie dure ; car il meurt dès qu'il est sorti de l'eau. Si ce poisson étoit con- nue dans le nord de l'Allemagne on pourroit le multiplier dans les étangs avec beaucoup moins de frais que la dorade chinoise, de même qu'on fait dans la partie méridionale de l'Allemagne, où on le nourrit dans les fossés de villes pour les orner. Sa chair est blanche, quelquefois rougeàtre, et de bon goût, sur-tout en Avril et en Mai: alors elle est aisée à digérer. Ce poisson vit de vers, d'insectes , de terre grasse et des œufs des autres poissons. Il aime sur-tout beaucoup le pain; car quand 011 en jette dans les étangs où il y a de ces poissons, ils viennent aussitôt sur la surface de l'eau pour le prendie. Il a pour ennemis le bro- chet, la perche et le silure; cependant il multi- plie beaucoup. L'orphe fraie en Mai et en A\Til, et dépose sur les herbages ses œufs, qui sont pe- tits et jaunes. ♦ Les parties intérieures de ce poisson, sont de la même nature que celles de la carpe. On trouve quarante vertèbres à l'épine du clos, et vingt-deux côtes à chaque côté. Ce poisson se nomme: Orjf, ^^ff* cerve, cerflingf wirflingy elft el frauenjischy en Alle- magne; jakcsekey en Hongrie; jasz^ en Illirie; golowljn et golobiy en Russie; oiphey en France, et VTOiv 'Jich y en Angleterre. Linné dit que ce* poisson se tient dans le Rhin et dans les rivières de l'Angleterre aj. Mais je doute qu'on le trouve ni dans l'un, ni dans les autres. Gesner qui est le premier qui a décrit ce poisson en a donné un très -mauvais dessin bj, La beauté singulière de ce poisson peut ser- vir d'excuse à TVilîugliby, quand il doute si celui qu'il a vu à Ratisbonne, n'avoit pas reçu ses cou- leurs de quelque secret de l'art c); et quand le mième auteur demande, si notre orphe est le même poisson que le rudd des Anglois , il faut lui répondre négativement; car ce dernier est le roteniile. o a) S. N. 530. h) Tliicib, 166. b. c) Iclitli. 253. K a 148 ^A. VANDOISE. XXVIII. LA VANDOISE, Cyprinus Leuciscus* XCVIIme Planche. Fjg. i. Onze rayons à la nageoire de l'anus et dix à celle du dos. Cyprinus pinnae, ani radiis xj. dorsique x, P. xr. /^. xx. A, xi. C. yiviii, D, x. Cyprinus Leuciscus. Linn. - Dace. Pcnii. 366. n. 175. 523. n. 12. Artéd. Syii. 9. Vandoise ou Dard. Duliam. n. 16. II. 501. t. 24* ^' 3* JLjes onze rayons qui sont à la nageoire de l'anus, et les dix à celle du dos, sont les caractères de ce poisson. Ce poisson a le corps allongé, la tête petite, les écailles de moyenne grandeur et une ligne la- térale arquée. L'ouverture de la bouche est de moyenne grandeur. L'opercule des ouïes con- siste en deux petites plaques. Nous trouvons ce poisson dans la partie mé- ^ ridionale de l'Allemagne, ainsi qu'en France, en Italie et en Angleterre. 11 parvient à la lon- gueur de 8-10 pouces, mais en Allemagne, il n'en a guère plus de 6-8. On en trouve assez souvent I.A VANDOISE. 149 en France, qui ont un pied «), et quelquefois en Angleterte, qui pèsent jusqu'à une livre et demie h). Ce poisson aime une eau pure et courante. Il vit de cousins et de vers. Le tems du frai tombe en Juin. Il mulliplie beaucoup, quoiqu'il ait pour voisins des ennemis voraces et puissans, tels que le brochet et la perche; mais il sait leui' échap- per par la rapidité avec laquelle il nage. On le prend avec des filets, et dans le tems du frai, avec des nasses couvertes d'herbages. Il s'y prend de lui-même en voulant déposer ses œufs sur les her- bages. Sa chair est légère et aisée à digérer; mais elle est désagréable à cause de la quantité de pe- tites arrêtes dont elle est traversée; de sorte quil n'y a guère que le peuple qid le mange. Le péritoine est d'une blancheur éclatante et parsemé de points noirs. Le foie , qui est d'un rouge pflle, consiste en deux lobes d'inégale lon- Siieur. La rate est rouiieàtre. La laite et l'ovai- re sont doubles. Le dernier contient beaucoup d'œufs blanchâtres très -petits. On nomme ce poisson : weisfisch , en Alle- magne ; lauhen , ivlndlauben , en Ba^dère et en Autriche; seele , en Suisse, tant qu'il est petit; zinnjjschy à Constance; agônen, lagoneiif quand il devient plus âgé ; laugele , quand il a atteint toute sa grosseur; iLltbertjc y en Hollande; dace et dare , en Angleterre; vandoise ou dard ^ eu a) Duliam. II. 501. b) Venu. ^66. 150 LAPHIE. France ; ahu grymhy , guhruinhi , hudjenn , en Arabie. XXIX. 1 L' A P H I E, Cyprinus A j) h i e , XCVIIme Planche. F/g. 2. Neuf rayons à la nageoire du dos et de l'anus. Cyprinus rndiis ix. pinnœ ani dorsique. P. xj/. V. VIII. A, IX. C. XX. Z). zx. Cyprinus Apliya. Liiin. 523. n. 11. Artéd. Syn. 13. n. 29. JLies neuf rayons de la nageoire du dos et de l'a- nus, distinguent ce poisson des autres espèces de carpes. L'ouverture de la bouche est de moyeune grandeur; et quand elle est fermée, sa mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure. Le corps est allongé, épais et rond. Les écailles se détachent aisément. La tète est de moyenne grandeur. Le veutre est rouge chez quelques- uns, blanc chez d'autres. La ligne latérale suit le milieu du corps dans une direction droite. - l'aphie. 151 Nous trouvons ce poisson dans la Baltique sur les rivages , les côtes et clans les fleuves qui s'y jettent; ainsi que dans presque tous les ruisse- aux de la Suède, de la Norwè^re et de la Sibérie* On les trouve ordinairement en troupes, En Suède, selon Linné y ce poisson n'a guère plus d'un pouce et demi ou deux pouces de longueur: cependant celui dont je donne le dessin, eii avoit quatre et demi. Il m'a été envoyé de Norvrège, La chair de l'apliie est blanche, de bon <:^oût, saine et aisée à digérer. Les pêcheurs Suédois s'en servent en guise d'appàl , pour prendre des perches. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme : S]nerUng,nioderUcshen, en Allemagne; niutterloscJ.cn , en Prusse ; p/rille , en Bavière; mudd, huddj en Suède; quiddy i£!:glijigf en Da- lekarlie; gli, en Gothie; gllrr et glb-ren , dans la Botnie occidentale; alkutta, enDalie; solscn- sudg , en Laponie ; gcdlien , en Sibérie ; LôiCy gôrloie, kûne, gorkûnCf et gorhyttey en Nor- •vvege. Quand Artcdi demande , si la niutterlosekcn de Schonefcld est le même poisson que le nôtre, on peut lui répondre aillrmativement. 152 DE LA MANIERE DE LA MANIÈRE D'ÉCLORE DES OEUFS DE POISSON. XlXme Planche. l'aurois dû traiter cette matière au commence* ment; mais comme il n'y a pas longtems que j'ai eu occasion de faire des expériences là-dessus, j'ai cru devoir sans délai en pubKer le résultat, puis- qu'il a une grande influence sur la multiplication et le transport des poissons d'un lieu à un autre. Le transport des poissons dans d'autres eaux est non seulement coûteux, mais entraîne aussi beaucoup de difficultés. D'un côté, on ne trouve pas toujours les poissons dans les tems les plus favorables au transport; d'un autre côté, ils meu- rent souvent en route, sur-tout lorsque la distance des lieux est considérable. Divers poissons, comme la truite, périssent au moment où on les pêche; d'autres, conune les loches-franches meu- rent lorsque la voiture s'arrête après avoir été en mouvement: un o^rand nombre souffrent beau- ci coup quand ils sont maniés et secoués. On peut, selon moi, éviter tous ces insonvéniens, en fai- sant éclore dans des étangs ou des lacs les œufs fécondés. Comme je n'ai point de lacs à ma dispo- sition, j'ai fait ces expériences dans ma chambre. rr DECLORF. DES OEUFS DE POISSON. . 15 M. Lund coniljiU la possibilité de cette méthode aj; mais mes expériences prouvent le contraire. Je fis prendre dans la Sprée des herbages où il y avoit des œufs de perche, de brème, de ro- tengle, de bordélière, de rosse, d'able, de carpe et de plusieurs autres. Je les fis apporter dans un peu d'eau; je les mis ensuite dans un vase de bois plein d'eau de rivière, que je fis renouveller d'un jour à l'autre; et au bout de sept jours, j'eus le plaisir de voir mon eau peuplée de plusieurs milliers de petits poissons. Comme le vase étoit resté dans une chambre exposée à la chaleur du soleil, et que les eanx dans lesquelles on veut faire éclore des œufs ne jouissent pas toujours de cet avantage, j'ai fait les expériences suivantes: Je fis mettre dans quatre vases les herbes où étoi- ent les œufs; j'exposai l'un au soleil du midi; le second au soleil du matin; le troisième au soleil du soir, et je lis porter le quatrième dans un en- droit où le soleil ne donnoit jamais. Le septième jour, je vis de petits poissons dans le premier; dans le second et le troisième, ils ne parurent que le huitième jour, et dans le quatrième, le neu- vième bj. J'ai remarqué plus haut, que tous les a) ScliweJ. Ahh. XXIII. 191. j'avois reçu les œufs fé- b) C'est avec d'autant plus coudés, n'avoieutvu dan? de confiance, que je mai- leur nasse le jour d'aupa- que ici précisément les ravant, ni poisson de cct- joiirs, que je suis certaiu te espèce, ui des ceufs que les pèclieurs, dont aux plantes. 154- ^^ ^^ MANIERE œufs ne sont pas fécondés par le mâle. Il ar- riva de-là, que de cent œufs qui étoient sur une plante, je n'en voyois pas éclore un seul; au lieu qu'une petite branche, que j'avois mise dans une tasse, fit éclore soixante petits poissons. Parle moyen d'une loupe, on peut s'assurer si les œufs sont fécondés ou non. Dans le premier cas , ils paroissent toujours plus clairs, plus transparens et plus jaunes. Ces signes deviennent toujours plus sensibles après le second ou le troisième jour, de sorte que les jours suivants, on peut re- marquer cette différence à la simple vue. Ceux qui ne sont pas fécondés, deviennent de jour en jour plus troubles, plus épais, plus opaques; ils perdent tout leur éclat, et ressemblent bientôt à un petit grain de grêle qui commence à fondre. Je mis des œufs fécondés, à part, dans des verres de montre, ou il y avoit de l'eau, afin de pouvoir observer le développement du poisson. L'œuf de poisson a une forme parfaitement ronde, et on y reconnoît le jaune, le blanc, et entre l'un et l'autre, une place claire en forme de croissant. Le jaune , qui est ordinairement en- vironné de blanc, est rond, et n'est pas placé dans le milieu , mais toujours vers un côte ilg. 3, a). Entre le jaune et le blanc, on app^rçoit cette pla- ce claire; et ces parties se remarquent aussi dans les œufs qui ne sont pas fécondés: la différence qu'il y a, c'est qu,e le jaune est moins foncé. On DECLORE DES OEUFS DE VOISSOI^, 155 ne peut découvrir extérieurement sur les œufs fé- condes aucune trace de fécondation. La laite est placée de long de l'épine du dos- tantôt dans un sac, tantôt dans deux. Elle con- siste en une substance blanche, qui, dans le tems du frai, devient aussi claire que du lait, et jaillit par le trou ombilical, dès qu'on presse tant soit peu le poisson. J'en pris un peu avec la pointe d'une aiguille, et je la mis sur mi morceau de ver- re; je la délayai dans un peu d'eau claire, et je l'observai avec la plus forte lentille sous un mi- croscope composé: j'y remarquai une fourmilière de petits animaux ronds ^^. 13. de grandeur iné- gale, connus chez les autres sous le nom d'ani- maux sperinatiques et queBuITon nomme jnolécu- les orgnniques. Quelque tems après la mort du poisson, je vis disparoître tout mouvement dans la semence ou laite. En général , les principes de la génération sont encore couverts d'un nuage épais ; mais cela a lieu sur-tout cliez les poissons, où la féconda- tion se fait hors de la mère et dans un élément froid. Il est incompréhensible comment des ani- maux infiniment tendres et délicats ne sont pas détruits, sur- tout dans les endroits profonds, où l'eau coule avec le plus de rapidité , et où un grand nombre de poissons déposent leurs œufs. La manière dont les œufs éclosent n'est pas moins étonnante. Quelques poissons frayent en hiver, 156 DE LA MANIERE comme la Lote, etc. Chez les poissons il n'y a point de copulation entre les sexes. La femelle pond les œufs inféconds, et les mâles qui la sui- vent, les fécondent ensuite , en laissant couler sur eux leur laite ou semence. Jai dit, en par- lant des carpes , la raison pour laquelle les fe- melles quittent les fonds dans le tems du frai, pour venir déposer leurs œufs dans les endroits unis et couverts d'herbages. C'est par la même raison que les mâles quittent leur retraite d'hiver, et accompagnent les femelles, La laite ainsi que les ovaires des poissons, sont enfermées dans deux sacs, et à peine visibles après le tems du frai; de hième que les testicules des oiseaux après la couvée. Après le long sommeil des poissons, durant l'hiver , la laite commence à augmenter, s'enfle, presse les entrailles, étend les parties ex- térieures du bas -ventre; ce qui lui cause une douleur dont il cherche à se débarasser , comme la femelle, en se frottant contre les herbes ou les pierres. Comme la gonflement est bien plus con- sidérable dans les femelles , elles sont aussi les premières qui cherchent à se soulager, et à trou- ver des endroits propres à déposer leurs œufs. Les œufs qui sont imprégnés d'une matière glu- ante restent attachés aux plantes , aux pierres et aux autres corps durs , et sont ensuite fécondés par les mâles de la manière que nous avons dite. Cette matière gluante ne se crouve point sur les r> ECLORE LES OEUFS DC POISSOX. 3 / œufs lorsqu oncles a fait sortir av^ant le tems, en pressant le ventre de la femelle. Dans les animaux tels que nous les connois- sons, les deux sexes sont ordinairement en pro- portion cj y si l'on en excepte cependant les vers des intestins, où les femelles sont en beaucoup plus grand nombre que les mâles. Chez les pois- sons , au contraire, on a remarqué que les mâles sont au moins une fois aussi nombreux que les fe- melles. La raison de cette dilTérence se trouve sans donte dans la manière dont ces animaux se reproduisent; car comme les œufs sont fécondés hors de la femelle, si le nombre des mâles n'é- toit pas plus considérable, la plupart d'entr'eux resteroient infécondés. Le développement du poisson dans l'œuf n'est pas moins merveilleux. J'en parlerai en peu de mots. J'ai dit plus haut ce qu'on remar- que dans un œuf le premier jour. Le second, la p lace en forme de croissant , dans laquelle on re- marque de tems en tems un point qui se meut fj, et devient un peu trouble. Le troisième jour, o) Il est vrai que dans quel- ques espèces troiseaux, tel- les que les faisans et les perdrix, on trouve plus de mâles que de femelles; mais cette iiiép;alire est né- cessaire pour la consei'va- Von de l'espèce. Les mâ- les sont plus hardis que les femelles , et par consé- quent plus exposés aux embiichcs des hommes et des aniiriaux carnaciérs; au lieu que les dernières plus timides , se cachent» et échappent à leurs pour- suites, o) Puuctum saliens. 1^3 ^^ ^^^ iMANIERli on remarque en cet endroit une niasse plus épais- se, qui d'un côté est fortement attachée au jaune, et de l'autre est lihre. Jig. 5. 7. A un bout de la partie qui touche au jauue , on appcrçoit le con- tour du cœur , dont le mou^'emcnt s'augmente alors, la masse elle-même, où l'embrion se re- mue de tems en tems du côté qui est libre; c'est- à-dire , de la queue. Le quatrième jour, on voit augmenter les battemens du pouls , de même que le mouvement de tout le corps. Le cinquiè- me jour, dans une certaine position que prend le poisson dans ses divers monvemens , on apperçoit la circulation des humeurs dans les vaisseaux. Le septième , on découvre à la simple vue dans l'œuf, deux points noirs Jig, 6. 7., qui sont les yeux: alors on aperçoit déjà toute la forme du poisson, et les vertèbres et les côtes sont si dis- tinctes , quon peut les compter sans beaucoup de peine à l'aide d!une louppe ordinaire. Quoique le jaune diminue à proportion que l'embrion aug- mente, le poisson n'a pourtant pas assez de place pour se tenir dans une ligne droite , et il fait une courbure avec la queue.^^. 7. Alors les mouve- mens sont si vifs, que lorsqu'il tourne le corps d'un côté et d'autre, le jaune tourne en même tems; et ces mouvemens augmentent à proportion qu'il s'approche du moment de sa naissance, qui arrive entre le septième et le neuvième jour. Les coups répétés de la queue contre la peau de l'œuf, la DECLORE I.ES OEUFS T)K POISSOX. I59 rendent si mince, qu'elle crève à la fin: alors le poisson sort, la qiieue la preniièreyi^. Q. , en re- doublant ses niouvemens, afin de détacher sa tête qui tient au jaune, et de se mettre en liberté. Bientôt après, il se réjouit de son existence dans le nouvel élément qu'il habite, et court çà et là dans l'eau. Comme les poissons éclosent par le moyen de la clialeur du soleil, et que dans le tems du frai, ses rayons n'écliauilent pas toujours également les eaux, le développement du poisson n'a pas toujours lieu dans le même tems; et l'on peut voir les changemens que j ai indiqué, un jour plutôt ou plus tard. Outre les œufs des poissons dout j'ai parlé plus haut, j'ai fait éclore aussi de ceux de quel- ques autres poissons; et j'ai fait les mêmes obser- vations. Il est remarquai )le que dans l'œuf mê- me, on peut distinguer d'abord la brème de la Bordélière, parce que dans cette dernière l'iris jaune est déjà sensible dans l'œuf. C'est un spec- tacle fort amusant de voir se remuer avec tant de vivacité dans l'eau, plusieurs petits animaux de cette espèce , extrêmement délicats, et tels qu'on les voit fi g. ç). a. D'ailleurs, quoique le poisson croisse as- sez lentement, son accroissement devient cepen- dant visible les Iniit premières heures. Dans ce court espace, son corps acquiert tout d'un coup Ja grosseur marquée à li^Jig' 9. b. Mais après ce- l6o DK I.A IVIAJNrrERE la il croît d'une manière si peu sensible qu'au bout de trois semaines il n'est que de la grandeur indi- quée par layi 9. c. Le neuvième jour, outre les deux points noirs, on en remarque un troisième, qu'on apperçoit à l'aide du microscope; c'est l'estomac avec la nourriture qu'il contient, fig. 10. a. Le même jour, j'ai compté soixante battements de pouls dans une minute; an lieu que le cœur de l'embrion n'avoit que trente à quaranre articula- tions dans le même espace. Les petits globes sont rouges tant qu'ils sont dans le cœur; mais dès qu'ils passent dans d'autres vaisseaux, ils pren- nent ime couleur blanche. Le second jour, ceux du cœur de\dennent plus rouges , et ceux des vais- seaux jaunes. Le troisième jour, ils sont entiè- rement d'un rouge clair. Dans les veines, ils prennent nn rouge pâle, et forment alors ce fluide auquel on donne le nom de sang. Outre cela, on reconnoît dès le premier jour les nageoires de la poitrine; mais les autres nageoires sont invisi- bles , aussi bien que les intestins ; parce qu'étant extrêmement tendres, ils laissent passer les rayons de lumière. Ce n'est que le troisième jour qu'on apperçoit la nageoire de la queue, qui est encore droite. yï^. 10. b. Celle du dos paroît le cinquiè- me ; celles du ventre et de l'anus se découvrent le liuitième jour à l'aide d'un microscope. Environ vers ce tcms , on découvre sur le corps avec un bon microscope, des points noirs, Jig, ii,b.b. les DECLORE EES OEUFS. l6l uns grands, les autres petits , tels qu'on les voit à l^ Jig* 15» «• ^' c. Ce sont les premiers con- tours (les écailles dont le poisson doit être cou- vert. Ceux de la tête sont les plus petits ; ceux du dos les plus grands , et ceux des côtes tiennent le milieu entre les premiers et les seconds. On remarque aussi à la queue ime écliancrure en for- me de croissant ^g". 11. c. Ces parties offrent déjà à l'œil un spectacle fort agréable; mais il est bien plus amusant encore de considérer la circu- lation du sang et des autres liqueurs. Ici si pré- sentent des jets d'une couleur rouge, composés de petits globes extrêmement délicats. Près de la tête , on remarque le cœur , qui consiste en un sac membraneux et mince fi g, 14. a. ; qui verse le sang dans une artère en forme de sa.c fj, Jig, 12. b, 14. b. qui dès qu'elle l'a reçu se ressere pour le faire passer dans l aorte Jig, 14 c. Pendant que l'artère se comprime, la veine cave porte du nou- veau sang au cœur qui étoit sans action; Jig, 14. i, et alors le cœur le fait jaillir dans les veines, qui pour lors sont aussi sans action. Comme les poissons ont la poitrine très -courte, et point de cou, ces animaux n'ont point d'artères carotides; mais l'aorte passe tout d'un coup aux ouïes, qui sont fort près ; et de -là dans les autres parties du corps. Comme dans les jeunes poissons , les ouïes ne sont pas encore visibles, j'ai vulesaitè- J) Saccus artcriosus. l6<2 DE LA MANIERE res monter immédiatement à la tête , revenir derrière l'œil , et descendre ensuite le long de l'é- pine du dos ^J fig. 14. e. J'en ai remarqué ime autre sur le devant , qui descendoit le long du ventre jusqu'à la queue ^g. 14. d, d., qui com- mençoitprès de la tête, et tiroit son origine de l'aorte. De la première sort, en angle droit, à chaque vertèbre , uneartère^^. i^.y^y. qui prend -sa direction le long de la côte. Le sang qui pas- se par les artères , qui sont extrêmement délica- tes , se rassemble en partie dans la veine cave as- cendante^^. 14. /z. et en paitie dans la descendante fiS' ^^y' ë* ^^^ deux veines se touchent en angle obtus fig. 14. i. derrière la vésicule aérien- ne, et^ conduisent de nouveau le sang vers le cœur. Dans les poissons nouveaux-nés la tête est petite en comparaison des autres animaux , et la vésicule aérienne est grosse; ce qui tient l'animal en éqmlibre quand il est dans une situation droite. Une chose qu'il est encore bon de dire ici, c'est qu'il faut écarter les mouches aquatiques 7i)> parce qu'elles mangent les petits. J'avois trente petits poissons dans im vase, [où les plantes avoi-» ent déposé des vers et d'autres insectes aquati- ques ; mais au bout de quelques jours les pois- sons disparurent tout- à-fait, sans qu'on pût re- marquer la 3iioindre trace de leurs corps. Ayant ensuite trouvé un petit limaçon à la gueule d'une g) Aiteriae intercostales. h) Phryganaea grandis, L. d'eclore les oeufs 163 • phryofane, cela me fit croire que cet insecte avoit aussi mangé mes poissons D'après ce petit nombre d'expériences , je crois pouvoir tirer des conclusions utiles pour l'économie et la physiologie. » 1) Onpeut empoissonner les lacs et les étangs à très -bon marché et d'une manière très -commo- de, en obsei'vant le tems précis du frai de chaque espèce. Comme les poissons de la même espèce ne frayent pas à la fois , mais en trois périodes, selon la différence de leur grosseur ; et comme d'ailleurs il y a un intervalle de neuf jours après chaque époque, et que les œufs restent encore huit à neuf jours avant que d'éclore, on a assez de tems pour se poun^oir des plantes où ils dépo- sent leurs œufs. Q.) Par le moyen de cette méthode , on se trouve à l'abri des tromperies des marchand> de poisson, et on ne risque pas d'acheter des caras- sins ou des gibèles pour des carpes, et de confon- dre le nourrain de la brème, de la bordélière, du rotengle , de la rosse et de l'ablette , qui sont très-difllcilesà distinguer les uns des autres, tant qu'ils sont petits. 3) Les expériences décident avec assez de certitude la question agitée tant de fois, et sur laquelle les philosoplics de nos jours sont encore partagés 5 si le mélange de la semence du mâle et de la femelle est nécessaire pour la fécondation : La 164 I>E J-A MANIERE car on peut assurer du moins que chez les pois- sons ce mélange n'a pas lieu. 4) On voit que la femelle fournit le germe ou les corps , et que le mâle lui donne la vie ou le miouvemant : c'est la semenee du mâle qui cominunique au cœur le premier mouvement. Je laisse à d'autres à examiner si cette vapeur i) légère pui se manifeste dans la plupart des ani- maux par une odeur desagréable passe de la laite dans l'œuf pour mettre de cœur en mouvement; ou si ce sont les animaux spermatiques qui y pé- nètrent et produisent cet elFet par leur mouve- ment rapide. La dernière opinion me paroît très -vraisemblable; car je n'ai pas remarqué la moindre odeur à la laite des poissons. Ces par- ticules volatiles paroissent plutôt propres aux autres espèces d'animsux , à qui la nature a don- ne un attrait invincible pour la propagation de leurs semblables. Ce penchant n'est pas néces- saire chez les poissons; la nature se sert pour les multiplier d'un autre moyen, c'est-à-dire, du gonflement des laites qui pressent les autres in- testins, et causent ainsi dans le bas-ventre une sen- sion désagréable. Cette manière paroît aussi propre aux oiseaux. Je n'ai remarqué non plus aucune odeur dans leur semence; et dans le tems de la ponte les testicules leur enflent considéra- blement; de sorte que dans quelques espèces ces i) Aura seminalis. ...... d'kCLORE LES OEUFS. 165 testicules , qui étoient à peine visibles aupara- vant, deviennent aussi gros et même plus gros qu'une noisette. 5) Onpeut aussi expliquer par -là pourquoi, parmi les mâles des poissons il ne se manifeste point de jalousie dans le tems des amours ; car on voit plusieurs mâles suivre les femelles tran- quillement et dans la meilleure intelligence. Et, entre les femelles, on ne remarque pas non plus le moindre signe par lequel elles excitent les mâ- les à l'amour. 6) Le cœur dilate les vaisseaux sanguins et opère par ce moyen le développement général. 7) Le germe et l'embrion qui en proviennent sont enveloppés avec le jaune dans une membrane commune; et ils sont si intimement luiis par le moyen des viscères du poisson et des vaisseaux du jaune, qu'ils ne sont pas encore séparés, mê- me lorsque le poisson est à moitié sorti de l'œuf. g) Les poissons ne viennent pas au monde par la tête comme les autres animaux, mais par . la queue. 9) Le tems nécessaire pour la formation et la naissance n'est pas déterminé comme dans les autres animaux, parce que cette opération peut être accélérée ou retardée par le plus ou le moins de chaleur. 10) Le jaune qui diminue toujours à pro- portion que l'embrion grossit , est destiné à la l66 DE LA INIAXIERE nourrîtuie cTu germe; le blanc au contraire, a la liberté des mouveniens, de même que leau con- tenue dans la matrice des 'savipares. 11) Le germe préexiste dans l'œuf, et tou- tes les hypotbèses contraires à cette préexistence tombent d'elles-mêmes. 12) Les animaux spermatiques des poissons sont difFérens de ceux des autres animaux. 15) Il ne faut pas plus de tenis pour faire éclore les œufs des gros poissons que ceux des petits : car ceux de la brème et de Table sont éclos le même jour. Au lieu que chez les oiseaux et les quadrupèdes le tems nécessaire au dévelop- pement est proportionné à la grosseur de lanimal. 14) Autant le développement du poisson dans l'œuf est prompt, autant son accroissement après 5a naissance est lent. Dès le second jour après la fécondation, j'ai \-u remuer le cœur, et le coi-ps remuoit au troisième ; au lieu qu'un poisson de deux ans avoit à peine quatre à cinq pouces. 15) Les nageoires pectorales, qui sont les principaux instrumens de la natation, et com- mencent les premières à se former. 16) La circulation du sans: dans l'embrion est beaucoup plus lente qu'après la naissance. 1-) Dans un jeune poisson le sang circule beaucoup plus lentement que dans les autres jeu- nes animaux. ig) Le cœur ne pousse pas immédiatement d'eclore les oeufs. 167 le sang dans les artères; maïs elles le reçoivent par le mouvement de compression du sac artériel. Enfin il y a entre ces deux parties un mouvement alternatif de compression et de dilatation, 19) Les globules sanguins qui paroissent rouges au troisième jour dans le cœur, et blancs dans les autres vaisseaux, prouvent que cette cou- leur du sang vient de la compression du cœur qui, déjà formé, a plus de tension kj, Jai fait graver sur l'espace qui me restoit de cette planche les objects suivants, qui sont assez remarquables: lia» 15. Des œufs de truite formés. Fig, 16. Vn morceau d'ovaire de saumon dont les œufs sont enfermés par couclies dans des luembranes particulières arrangées les unes sur les autres en forme de plis. Fig, 18. Des œufs de perche en forme de filets. Fig. 17, Une petite masse de six œufs atta- chés ensemble formant mie figure à six côtés, comme on le remarque a l'aide d'une louppe. k) On peut llrcr de-là de» nées, despoissons chaudes, conclusions importante» des bains etc. Lorsqu'au pour la médecine. Dans " contraire le sazig est peu une saignée, lorsque le rouge, c'est une preuve que sang est d'un rouge clair, les parties solides sont re- c'est preuve d'une tension lâchées , et il faut alers em- trop forte dans les partie» ployer une méthode con- solides , et il est bon alors traire à celle que nous ve- dc prescrire des émcdliens, nous de prescrire, comme des nouvelles saig- l68 I>E LA MANIERE D ECLORE LES OEUES. EXPLICATION DE LA PLANCHE XlXme. F. I. De riieibe avec des œufs fécondés. F. 2. De riierbe avec des œufs qui ne sont pas fécondés. F. 5. Un œuf vu au microsco- pe. a. Lie jaune. b. Le blanc. F. 4. Oeuf du septième jour, où l'on remarque les yeux de Tembrion. F. 5. Oeuf de la même espèce vu au microscope. F. 6. Oeuf où la queue de l'em- brion est déjà sortie. F. 7. a. Une brème nouvelle- ment née de grandeur na- turelle. h, La même de huit heu- res. c. La même de trois se- maines. F.3« Une brème d'un jour couchée sur le ventre, vue au microscope. a. L^estomac. F. 9. Le même poisson d'un jours couché sur le. coté, vu au microscope. 1). L'estomac. F. i.a. Le cœur. h. Le sac artériel. Fi 12. Une brème de quatre jours couchée sur le côté, vue a. un bonne lentille. a. Le cœur. h. Le sac artériel. f. L'aorte. d. d. L'artère antérieure, e.e. L'artère postérieure. J.f. Les artères intercosta- les. g. La veine cave inférieure. h. Laveine cave supérieure. z. Réunion de ces veines. k. La vésicule aérienne. F. 10. Les écailles vues aune bonne lentille. a. Ecaille de la tête. b. Ecaille du dos. «, Ecaille du côté. LES SAURIONS. 169 lime Genre. LES SAUMONS, S a l 7n o. PREMIERE SECTIOTC. Des Saumons en général. Le corps couvert d'écaillés, une nageoire adipeuse sur le dos. Fisces corpore scjumnato, jfinna adiposa. Saîrtio. Linn. gen. 173. Salinon. Penn.B.Z. III. gen. — Gronov. Zooph. i2o. 35. Anostomus 122. Cliarax 123. Saumons, Truites. Goûan. Corieji;oims. Artérl. Gen. 9. II. d. P. gen. 41. 107.191. Osmerus. 10. Sairno. 11. Saumons. Duliam. Pèch. II. Tiutta. Klein. Miss. V. 16. iQi. V_Jn reconnoît les poissons de ce genre au tronc qui est couvert d'écaillés et à la seconde nageoire du dos qui est adipeuse. Ce sont presque les poissons les plus beaux de l'Europe. Ils ont ordinairement le corps al- longé, orné de belles taches et garni de huit na- geoires. La tète est sans écailles et comprimée. La bouche est grande et l'on y trouve des dents 170 ^ I^ES SAUMONS. pointues; quelques-uns ont aussi des dents dans le gosier et sur la langue, cette dernière est carti- lagineuse et libre. Les narines sont divisées par une membrane, et se trouvent entre les yeux e! la lèvre supérieure. L'ouverture des ouïes est grandes", et les opercules consistent en trois la- mes osseuses. La membrane des ouïes est garnie de rayons forts , et qui dans quelques-uns, vont jusqu'au nombre de douze. Le dos est rond, et . forme une ligne presque droite avec la tète et la queue. La ligne latérale , qui approche plus du dos que du ventre, forme une ligne presque droi- te de la tète à la queue. Les côtés ne sont qu'un peu comprimés. Le ventre est droit, et l'anus est placé assez près de la nageoire de la queue. Des huit nageoires de ce genre , deux sont pla- cées vers l'ouverture des ouïes; deux sous le ven- tre, une à l'anus , une la queue et deux au dos. Ces poissons vivent de proie , aiment les eaux qui courent rapidement sur un fond de fable ou' de cailloux, et meurent aisément quand on les en sort. Quelques-uns se tiennent dans l'océ- an, comine le saumon, la truite saumonée et l'ombre d'Auvergne ; mais au printems ils remon- tent dans les rivières , font de longs voyages , et reviennent dans les eaux salées lorsqu'ils ont frayé. Les parties intérieures des poissons de ce genre diffèrent visiblement de ceux dont nous LES SAUMONS. 171 avons parlé. L'ésophage a de larges plis, l'esto- mac est séparé, et consiste en une peau épaisse. Le canal intestinal n'a que deux sinuosités , et est garni au commencement de plusieurs appendices. La vésicule aérienne n'est point divisée, et la lai- te est enfermée aussi bien que les œufs dans un double sac. Le iiel est jaune et peu amer, et la cavité du ventre est très -longue. On a mis près qu'autant de désordre dans les nombreuses espèces de ce genre que dans celui dont nous venons de parler. Ce qui vient sans doute de la grande resreml)lance que quelques- imes ont entr'elles , et de la variation des cou- leurs, qui changent selon l'âge de l'animal, la nourriture et la nature de l'eau. Les poissons qui appartiennent à ce genre, habitent pour la plupart l'océan septentrional. Les eaux de l'orient, de l'occident et la mer mé- diterrannée en nourrissent peu d'espèces, de sorte qu'il n'est pas étonnant que les naturalistes grecs et romains ne fassent mention que de quelques- uns. Aclicin est le premier qui parla de l'ombre d'Auvergne a); Vliue du s^iumon Ij)\ Anihroîse de la truite c)\ etBcllon de l'omble Jy', de l'ombre du chevaliçr ej ; de léperlan fj^ et du lavaret s^Jj a) N, A. 1. 14. c. 21. Salmo il) Aqu. 2^6. Salmo Salve- Tliymalns. L. linus. i) H.N.1.9. c.i8- Salm.Salar. • f) — -^gy. — Umbla. c) Hexam. 1. 5. c. 3. Salmo /) — 2(3g. — EpeiLimns. Faiio. g) — 234. — JLavarctus. IJQ, LES SAU310N5. A peu près clans le même tems Salvîan nous faii connoître le carpion hj^le salmarin f^, le lézard A), et Rondelet l'hauting IJ^ Ensuite Gesner décrivit l'heuch inj et l'ombre bleu njy la grande truite oj et la truite des alpes -pj ; JVillughby le saumon grisr/J; M'arcgrfif/^ la truite argentée rj ; Charle- ton la truite saumonée tj; Artédi Table uj; le petit saumon vj et la double -mouche wj. Tout cela fait ensemble vingt espèces, parmi lesquelles Artédi ne compte point celle àe Marcgraf, Après cela Cntcsby xj et Habelquist y) nous en ont fait connoître chacun une; Gronov trois zjf.\, et Linné six ajj ce qui fait trente et une avec celles que nous venons de rapporter. Mais comme Linné regarde comme une carpe le saumon- denté de ilnselquist, et qu'il omet avec raison le petit saumon de Ray et di Artédi, parce que ce n'est qu'un jeune sauinon, il ne donne que vingt -neuf espèces à ce genre. K) Aqu.99. SalmoCarpio. ») Syn. ig. n. 1. SulmoAlbula. £) — 102. — Salmarinus» v) — 26 — 12. k) — 240. b. — Sauras. w) — Spec. 44* Salmo bima- l) De Pisc. II. Kj^. Salmo culatus. Oxyrinchus. 3c) Carol.II.2. SalmoFœtens. m)Tliierb. 174. Salm.IIiicIia. y) Pieis. 437* Cyprin, dentex. n) — i87.b. Albula cœru- 2) Zooph. gibbosiis. n. 380. lea. cyprinoides. n.373> anos- 0) — 189. Salmo lacustris. tom us 576. L. jj) —- 190. — alpiuus. a) S. N. S. Vimba, notatus, y) Iclitli. 193. — Eriox. immaculatus , niloticus, r) Brasil. 170. — Argen- pulvérulent us et rliom* tinus. beus. t) Onom. 155. — TrutU. LES SAUMONS. 175 Ensuite Pontoppidan h), Strôjji cj, Mûller d), jiscnnius ej , Fahricius fj , Fennant gj et Le- pecliin hj nous en ont fait connoître chacun une nouvelle espèce; Fontoppidan ij et Martini kj donnent à la vérité le angniarset pour une espèce de hareng ; mais il appartiennent à notre genre à cause de sa nageoire adipeuse , comme on le voit par le dessin que Olaffsen nous en a donné IJ. Nous devons a Fallas cinq ni) et moi j'en décrirai autant qui ne se trouvent point dans le système de Linné, ce qui fait en tout quarante neuf espèces. Mais je pense qnylrlcdi et Linné, trompés par les mauvais dessins et les descrip- tions défectueuses des anciens ichtyologistes, ont donné quelquefois plusieurs noms à la même espèce. Par exemple, je crois que le salmarin, et le salvelin, de même que la grande truite et le saumon gris ne sont pas fort dillérens du saumon ordinaire. Willughhy fut le premier qui en Ht un genre sous le nom de truite, et qui donna la nageoire adipeuse pour son carectère distinctif nj. Mais il y a beaucoup de silures qui en ont aussi. Ar^ b) Norw. 254. Lodclc. k) Naturlex. II. 537. c) Sniulmcr2ij2. Muldkcifec. /) Rcise. II. t. 2Q. il) Prodr. II. 415. m) Rcis. in 410. III. 775. n. 42. c) Icon. t. 24' S. filas. 44"47« ^' Schokiir, Nasiis. /) Failli, n. 126. — stap;nalis. auiuninalis, kiuidsclia et ^^) B.Z.IJ 1.502. Wliiie, aiTticus. h) Reis. II. 192. S. Nelma. n) Icluh. 132. ^ ) Au lieu cité. 174- ' I-ES SAUMONS, tédi en fit de trois genres, qu'il nomma ombre ojy éperlan j)J y et saumon qj. Bientôt api'ès Klein les reunit encore, et leur donna le même nom que Wïllugkby y excepté qu'il divise les dix-sept espè- ces qu'il décrit en deux classes, qu'il nommé den- tées et édentées tJ, Gronov , qui décrivit les poissons de son cabinet, en trois genres s), Linné les réunit de nouveau, choisit le nom du saumon et pour plus de clarté, il fit quatre divisions: i) Truites, 2) éperlans 3) ombres et 4) saumons larges tJ, o) Coregonus, gen. VII. tulfc. M. P. V. 16. p) Osmerus — VIII. s) Zooph. n. 367 -376. q) Saimo -- IX. t) S. N. 509—513. /•) TiutLSB dentatae et eden- LE SAUMON. 175 SECONDE SECTION. Des S auinons en particulier. I. LE SAUMON, ET LE BECARD *), Sahno 6'alar, Tiias et foemina» Eo'^ ET 98^^ Plan HE. La mâchoire supérieure un peu avancée, treize rayons à la nageoire de l'anus: Sahno jnaxilla superîore sublon^iore, pinnac ani radiis ^iii, B, XII, F, xir. J^. X. A. xiii. C. xxz. D. xir, SdlmoSalar, Linn. s. N. 50g. Salmoii. Penn. B.Z. III. 29^^. n. 1. Artédi gen. 11. n. 1. "• i43' pl- 58- /o Le Saumon. Duliamcl. Pèch. svn. 22. n. 1. spec. âQ. ^ ^ ^ II. 184- PI. 1. f. 1- Gronov. Mus.II. 12. n. 163. rp _ ^r^ • i\/r tr •^ Tiutta. Klein. M. p. V. 17. Zooph. 120. n.5^. ,1.2. t. 5. f. 2. La mâchoire supérieure qui avance un peu sur l'inférieure et les treize rayons dans la nageoire de l'anus, font le carectère du saumon. Dans les mâles qui ont piis tout leur Accroissement, la mâchoire supérieure fniit en crochet émoussé qui s'emboîte dans un enfoncement de la m.a- clioire supérieure. Dans les deux mâchoires, on *) L'iiistoire du bécaid et de ici , pour suivre la métliode quelques autres saunions se que j'ai choisi en parlent des trouve de dans le supple- carpes, ment r£dit. en f. je la placo 176 LE SAUMOîC. voit des dents pointues entre lesquelles on en trouve de plus petites qui sont mobiles. La mâ- choire supérieure en a plus que l'inférieure, et on trouve aussi des deux côtés du palais une rangée de dents pointues. Outre cela, il y encore des deux côtés de l'ésophage, un os avec des dents semblables; et sur la langue il s'en trouve six ou huit dens retourbées par derrière. Les côtés sont quelquefois garnies de taches noires «).Onm'écrit de Minden et de Wesel que les saumons qu'on y prend en autoumne, quand ces poissons retour- nent a la mer, sont d'une couleur grise et tout -à fait sans taches. On voit une appendice au-des- sus des na2;eoires du ventre. Les écailles sont de moyenne graudeui' et se détachent aisément. Ce poisson forme la connexion entre les pois- sons de mer et ceux de rivière. Il naît dans l'eau douce, croît dans la mer; et dans la suite il passe l'été dans les rivières et l'hiver dans la mer. Il est naturel à l'océan septentrional, d'oii il sort ordinairement 'pour aller frayer dans les rivières qui s'y déchargent, de sorte qu'on le trouve non seulement dans les pays de l'Europe, qui communiquent avec l'océan par le moyen des fleuves, mais aussi à Kamtschatka, dans la mer «) .Willugliby dit aussi, que taches lorsqu'il sort de la le saumon n'est pas tou- mer, mais qii'il les perd jours marqué decestaclies. dès qu'il a vécu un peu de Ichtli. igg. lonstonaremar- tems dans l'eau douce. De que, que le saumon a des Fisc. 106. LE SAU310N. 177 Caspienne, clans la Grœnlande, la nouvelle Hol- lande et le Nord de l'Amérique. On voit aussi par ce poisson, la force du penchant qu'ont les animaux pour la propagation de leur espèce. Il abandonne les mers qui fourmillent d'animaux, et où il trouve ime nourriture abondante , va dans les fleuves que les hommes dépeuplent, tâ- che par toutes sortes de ruses d'échapper au pê- cheur , surmonte mille obstacles divers dans le cours de ses longs voyages , et tout cela pour trouv^er un endroit commode où il puisse dépo- ser ses œufs. Le tems du frai qui dure six à huit jours , tombe dans le mois de Mai, dans les pays méridionaux, comme en Bretagne a). Dans le Nord, comme en Suède, il ne tombe qu'en Juil- let bj. Une cliose remarqualile, c'est que le sau- mon retrouve l'endroit où il a frayé, comme l'hi- rondelle le bâtiment où elle a fait son nid cj. De la Lande en a fiut l'expérience en mettant une marque à des saumons comme on en a mis à des hirondelles. Il acheta aux pécheurs de Château- lin dj une douzaine de saumons, à la queue des- quels il mit un aimeau de cuivre, puis il leur ren- dit la liberté. Dans la suite les pécheurs lui ont assuré que la première année ils avoient pris cinq «) Bomare X. 273. b) Scliwed. AblK VIL 75. c) Cours d'il, liât, V. 293. il) Petite ville de Li basse - Bretaii;ne, où Ton pêclie quelquefois jusque 4000 par an. M 173 ^^ SAUMOX. de ces poissons marques ; la seconde année troit, et la troisième aussi trois e). Vers le prmtems , lorsque la glace commen- ce à fondre sur les côtes , il cherche les eaux dou- ces , et on le trouve par conséquent en plus gran- de quantité dans les fleuves dont l'embouchure est étroite , parce qu'ils poussent leurs eaux beau- coup plus avant dans la mer ; on en trouve moins dans ceux dont l'embouchure est vaste. Il sort ordinairement au printems avec le flux et le vent que les pêcheurs appellent vent de saumon, et passe dans les Heuves» Dans les contrées chaudes de l'Europe il part dès le mois de Février ou de Mars ; dans celles du Nord il ne part qu'en AvTil et en Mai. Le saumon aime les eaux qui ont un fond de sable ou de cailloux, et dont le cours est rapide ; il y reste jusque vers l'automne, et après Y av^oir laissé sa progéniture , il retourne dans les mers. Cependant il passe aussi quelque- fois l'hiver dans les eaux douces , car il arrive as" sez souvent en Suède où les rivières cèlent de. bonne heure , que les glaces l'empêchent de re- tourner dans la merfj. On a fait la même obser- vation en Irlande: plus la marée est haute, plus «) Les princes orientaux, poissons qu^on a découvert, qui aimentbeanconp lajiè- à cequ*'ondit, la comrauni- clie, font ordinairement cation de lu mer Caspieiine mettre des anneaux d'or ou avec la mer Nord et le d'argent aux saumons, puis golfe Persique. les font rejetter dans l'eau: cVst par le moyen de ces J^ NeuesteMamiigf. IIL542. LE SAUMON. 179 le poisson amve en grande quantité. Or comme ce sont les grands vents qui soullent contre les fleuves qui élèvent la marée, et comme les fleu- ves coulent dans la mer dans des directions diffé- rentes, on peut juger, même à quelque distance, et prédire avec assez de certitude si la pèche des saumons sera abondante pour tel ou tel pays. Il faut cependant faire attention aloi^s au tems où les fleuves ne cliarient plus de glaces; ce qui dépend du plus ou moins de chaleur du printems. Car plutôt la rivière est dégagée des glaces , plutôt le saumon y arrive. Mais s'il arrive que la ma- rée n'ait lieu qu'à la fln de Mai, on ne peut atten- dre qu'une mauvaise pèche de saumon pour le pays, parce que ce poisson a déjà passé dans d'au- tres fleuves avec la marée. Les pêcheurs ont ob- servé que la pèche du saumon doit être abondan- te, lorsqu'on trouve beaucoup de ternes samnO' nées s^J sur les ouïes ; car l'expérience a appris, qu'il entre alors en plus grande quantité dans les fleuves rapides , pour pouvoir se débarasser de cet hôte incommode. Lorsque le saumon entre dans les fleuves , il le fait ordinarement en troupes et en deux ran- gées qui forment les côtés d'un triangle dans l'or- dre suiv^ant : Ordinairement le plus gros, qui est une femelle , ouvre la marche; ensuite à la dis- tance d'une brasse, il en vient deux autres, et la g) Lernea salmonea. L. igO I^E SAUMON. marche continue ainsi; de sorte que s'il s'en trou- ve trente et un ensemble, il y en a quinze de cha- que côte. Lorsque l'ordre est interrompu par une cascade, une digue, ou quelque bruit , ils se remettent dès que l'obstacle est franchi, et pré- sentent bientôt le même ordre. Mais s'ils don- nent contre un filet , ils font halte ; quelques- uns cherchent à s'échapper par dessous, ou vers les côtés ; et dès qu'un de la troupe a trouvé une issue, les autres le suivent: et ils reprennent leur ordre. Les femelles précèdent ordinairement ; les plus gros mâles les suivent; ensuite les plus petits ferment la marche; de sorte que lorsque les pécheurs prennent de petits mâles , ils savent d'avance qu'ils ne peuvent plus rien attendre de la troupe. Les troupes sont quelquefois si con- sidérables , qn'en réunissant leurs forces , elles déchirent les filets qu'on leur oppose, et échap- pent. Lorsque les saumons nagent , il se tien- nent au milieu des fleuves et près de la surface de l'eau. Comme ces poissons font beaucoup de bruit en avançant, on les entend de loin comme Une espèce de tempête qui gronde. Quand le .tems est orageux ou trop chaud, ils se tiennent alors au fond de l'eau, et on n'apperçoit point le passage. La raison pour laquelle ces poissons se tiennent vers la surface de l'eau et au miheu des fleuves , vient sans doute du penchant qu'ils ont pour les eaux rapides ; car selon les observations liE SAUMON. l8l de Mariotte, les rivières sont plus rapides au mi- lieu que vers les bords, et vers la surfiice que dans le fond. Le saumon parcourt les fleuves et fait de très -longs voyages. Par exemple, il passe de la mer du Nord dans l'Elbe, et va jusqu'en Bohème par la Moulde , et jusqu'en Suisse par le Pthin. Si une digue ou une cascade s'oppose ent à son passage, il saute par dessus. Après s'être appuyé sur de grosses pierres, il tient sa queue ferme dans sa bouche, et forme ainsi un cercle ; ensuite il remet avec vitesse son coi-ps dans sa longueur ordinaire, frappe avec force sur l'eau, et s'élève ainsi cinq à six pieds au-dessus de la surface lij. Dès qu'il est parvenu au-dessus de la cascade, il bat de la queue, pour témoigner sa joie, et con- tinue sa route. Il arrive quelquefois, vers les grandes cascades , qu'il retombe ; mais après s'ê- tre reposé, il fait un nouvel essai jusqu'à ce qu'il sok parvenu à son but, ou qu'il en ait senti l'im- possibibté: alors il rebrousse chemin. Si celui qui conduit la troupe saute heureusrment , les autres le suivent. Ils tombent toujours sur le côté , parce qu'ils tiennent la tête en l'air de peur de se blesser. Lorsque le saumon au commcji- h) Près de la mer, on il a la distance à laquelle il encore beaucoup de for- s^élcvc, va à vingL pieds, ces, il s'élève bien à la hau- comme on peut le voir teur de quatorze pieds; et près de Bullyshanon, ^) Iclith. 194. c) De Fisc. IL 167. e) M.P.V. 16. N 2 igG l-li SAUMON. teurs qui ont parlé de ce poisson: mais son dessin prouve clairement qn il avoit une truite saumon- ' née , sa mâchoire inférieure recourbée , et le , poids de quarante - deux livres quil donne a ce poisson, prouvent qu'il a voulu décrire un sau- mon et non une truite. Je donne encore un dessin du saumon au 98"-*" Pi. qui, si on le compare avec celui de la vingtième planche, paroitroit comme un poisson différent; mais en assurant que celui-ci représente un mâle, et l'autre une femelle, montrerai par -là, que dans quelques poissons , il y a une différence très- sensible dans les deux sexes, de même que dans plusieurs autres animaux. La tête est bcciucoup plus longue, et ressemble à un groin de cochon. La mâchoire supérieure est taillée en forme d'arc par les côtés : elle se termine en pointe, et avan- ce sur l'inférieure. En dedans , ve^^s la Hn , elle a un enfoncement, dans lequel emboîte le crochet de la mâchoire inférieure. Le cro- chet qui, dans les mâles, se trouve à la mâ- choire inférieure, est cartilagineux et mobile. Le palais est garni de deux rangées de dents; mais dans la femelle, je n'ai pu remarquer que quel- ques dents isolées. Dans le premier, la tête est ornée de plusieurs taches rondes , jaunes et bru- nes ; mais dans la dernière, je n'en ai remarque qu'une à l'opercule des ouïes. Dans les mâles, les côtés sont marqués d'im bien plus grand nom- LE SAUIVIOX. 197 bre de taches noires de figures indéterminées. Chez les femelles, elles sont plus rares, et ont une forme de croissant. Les premiers ont aussi sur les côtés, vers le ventre, plusieurs taches d'un rouge jaune ou de couleur de cuivre, qui manquent aux dernières. C'est sans doute ce qui lui a fait donner en allemand le nom de Kup/cj'» lacJis (saumon couleur de cui^^ie). Lie saumon à crochet , a été décrit comme une femelle -pRY Bellojtf)^ mais Rondelet^ SalvieUf Gesner^ Gronov et Linné l'ont donné pour un mâle. Mr. Gôden, de Rugenwalde, quia une pêche considérable dans son baillage , me ïnarque, que de plusieurs milliers de ces pois- sons que ses gens ont ouverts, pour les fumer, il ne s'est pas trouvé une seule femelle qui eût un crochet. Les écrivains ne sont pas non plus d'ac- cord au sujet du crochet: quelques-uns croient qu'il le perd après le frai ; d'autres qu'il ne l'a que dans la mer. Cependant je puis assurer que jdl'ai trouvé également à quelques-uns qui avoi- ent été péchés à l'cmbouchiu'e de la Wippre, au moment où ils sortoient de la mer, et dans d'au- tres qui avoient été pris en y retournant. Quand Mr. DuJimnel croit que ce crochet ne commen- ce à paroître que par une maladie, et lorsque le poisson devient maigre ^), l'expérience le con- tredit. f) Aqu. 27g. g) Pêc]i. II. 294. 19S LA TPtUITE SAUMORNEE. Ce poisson se nomme: hakenlachs, en Alle- magne; saumon bécard, en France; rgni balik, en Tartarie; etjarga, chez les Calmouques. IL LA TRUITE SAUMONNÉe, S alino Tr ut t a. XXIme Planche. Le corps couvert de taches noires , posées sur un fond clair; onze rayons à la nageoire de l'anus. Sahno rnanulis nigris iridibus lucidioribus^ finnae ani radiis xr. JB. ':^ji* P. xir. /^. x. -^. xj. C XX. D,.xir. Salmo Trutta. Linn. S. Ni 509. n. 4. Artéd. gen. 12, n.4. Syn.24.n.5. Spec. 51. Gronov. Mus. II. n. 164. Trutta. Klein. Miss. V. 16. f. 3. f. 1. Sea - Trout. Penn. B. Z. III. 296. n. 145. Truite de mer. Duliam.pêch. 11.200. pi. 2. f.3. La truite saumonnée se reconnoit aux taches noires qui couvrent la tète et le tronc, et qui sont sur un fond clair, et [aux onze rayons de la nageoire de l'anus. LA TRUITE SAUMONNEE. I99 La tête est petite et cunéiforme; les machof* res sont d'égale longueur, et garnies de dents pointues et un peu recourbées, qui emboîtent les unes dans les autres lorsque la bouche est fermée. Outre cela, le palais a aussi trois rangées de dents, et la langue en a dix ou douze en deux rangées. Les yeux sont petits , le dos est un peu courbé, et la ligne latérale presque droite. Les écailles sont petites, sur-tout celles qui sont aux nageoi- res pectorales. Les nageoires ont des rayons à plusieurs branches. Il y a aussi des truites sau- monnées , dont les taches sont angulaires nj. Ce poisson mérite à juste titre le nom qu'il porte; car il a quelque chose de commun avec l'un et l'autre poisson. Il parvient â la grosseur d'un saumon médiocre; il est tacheté comme les truites, et fraye comme elles en hiver. 11 lial)ite comme le saumon, tantôt les mers, tantôt les fleuves; il passe aussi dans ces derniers pour dé- poser son frai; mais il ne quitte pas la mer de si bonne heure que le saumon : on en voit rarement paroitre avant le mois de Mai. 11 ne fraye qu'en Novembre ou Décembre, de ]a même manière que le saumon. Mais comme alors les rivières gèlent, il ne se retire dans la mer qu'après le dégel. Il vit comme les autres poissons du même genre, d'insectes aquatiques, de vers et de petits pois- sons : il aime comme eux une eau \ive et cou- a) Liim. Faun. Suec. n. 347- Fisclier Liefl. 122. 200 . I-A TRUITE SAUMONNE. rante, et qiii ait un fond de sable ou de cailloux. Sa chair est rouge et de bon goût , sur-tout avant le tems du frai, et il a cela de comnum avec le saumon, que sa chair devient meilleure , suivant les eaux où on le prend. Par exemple, la truite saumonée de l'Oder a la chair pâle, coriace et maigre j mais lorsqucHe a passé de -là dans le Trago par la Warte et la Netze, elle devient grasse et de bon goût: mais celles qu'on pèche à leur retour sont toujours de mauvais goût. La couleur et les taches changent aussi beaucoup, lorsqu'elles ont passé l'hiver dans une rivière dont l'eau est plus ou moins pure. Elle n'a pas la vie dure, et meurt bientôt après être sortie de l'eau. La tniite saumonnée parvient à une grandeur considérable. On en trouve de huit à dix li^TCS. Celle dont je donne ici le dessin, me fut envoyée du Frisch-Have; elle étoit longue de %dngt-cinq pouces, épaisse d'un pouce et demi et pesoit cinq livres trois quarts. J'eus lieu de me convaincre que ce poisson possédoit au plus haut degré la qualité de jetter de la lumière dans l'obsciuité comme plusieurs autres poissons de mer. Le palais, la langue, les ouïes et les yeux jettoient sur-tout beaucoup de lumière. Quand on touchoit ces parties avec 1« doigt, elles jettoient aussi de la lumière 5 et lors- qu'après avoir touché une de ces parties , si on en 3LA TRUITE SAUMONKE. 2201 frottoit une autre, on lui communiquoit la mê- me qualité. Il paroit que la matière lumineuse est contenue clans la matière gluante qui couvre ces parties; car la chair n'ofFroit pas la moindre apparence de lumière. J'ai gardé ce poisson pen- dant huit jours, et il s'afFoiblit à mesure que la matière visqueuse dessécha. On prend la truite saumonnée avec les filets les nasses, et les lignes de fond, auxquelles on attache un ver ou une sang -suc. Dans les envi- rons de Hambourg, on la pêche dans l'Elbe dès la commencement de Mai ; mais on la trouve plus tard dans l'Oder. Le tems où l'on en [pêche le plus, c'est entre la St. Michel et la Noël. Dans nos contrées , on la pêche sur - tout près de Zilen- zig, Prenzlow, Friedcberg et dans le Trago. Dans les endroits où l'on en prend une grande quantité, on la sale, on la marine, ou on la fu- me. Par exemple, on la sale en Ecosse comme le haieno:, et elle est une branche considérable du commerce de ce pays -là. Voici comme on la^ marine: Après l'avoir vidée, on la met dans le sel, où on la laisse pendant quelques heures ; en- suite on la fait sécher: on l'arrose de beurre ou d'huile d'olive, et on la fait griller sur le gril: puis on la met dans un tonneau. On fait d'abord une couche de feuilles de laurier, de romarin, de tranches de citron ; de clous de girofles et de poivre: puis on met une couche de truites; et 202 LE SAU3I0N. l'on continue ainsi alternativement jusqu'à ce que la tonneau foit plein: alors on y verse 'du vinai- gre que l'on a fait bouillir; puis on ferme le ton- neau. Dans quelques endroits on les fume aussi: On prend un tonneau sans fond, que Ion perce autour et en haut, et on le place sur trois pier- res; on allume par- dessous des fagots de bran- ches de chêne mêlés de grains de genièvre, et on fait passer pendant trois jours la fumée dans le tonneau oîr sont pendues les truites; ensuite on les garde à l'air. La truite saumonnée est un excellent mor- ceau; sa chair est tendre et d'un bon goût, sur- tout quand elle est grasse : elle est aussi fiicila à digérer, et on peut par conséquent la conseiller aux personnes foibles et maladives, Quant aux parties intérieures , elle ne diffè-^ re du saumon, qu'en ce qu'elle a quelques vertè- bres et quelques côtes de plus. J'ai aussi re- marqué le ve?' solitaire dans son canal intestinal, avec cette différence, que les vers de la truite sau- monnée sont plus minces que ceux du saumon. Selon Pontoppidan b,J la truite est souvent su- jette à la consomption : alors la tète est grosse, le corps maigre et les intestins couverts de petites pustules. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme: laclisforelley en Allemagne: lachs- h) Norw. II. 263. LE SAU3I0N. £03 kinclcheriy en Saxe; lachsfnhren, en Prusse; taU jfien , taimini , en Liv^onie ; rheinmike ou rheiii' lanke f sur le Rhiu ; orlax , tucmspol ^ bôrting, sichfiat , lôdjor, en Suède; laX'Ortinaskrog-orty en Dannemarc ; sôhôrting , en Laponie ; soe - hôr- tin g y aurride, enNorwège; scdTiiforell, en Hol- lande; sea-trout elsnliiion-trouty enAngleterre; bull'trout, dans la province deNorthumberland; grey-trout et scurf, dans d'autres; tiuite sau- monnée et truite de mer, en France. Linné donne six points à la nageoire de la poitrine comme un caractère distinctif de la trui- te saumonnée cj'^ mais celle que j'ai eu sous les yeux n'en avoit pas un seul. IVuIJJ a tort de rap- porter à ce poisson le fario de Linné dj. J'ai trouvé les opercules des ouïes rondes et non poin- tues comme le prétend Gronov ej. J'ai déjà dit plus haut que Klein a confondu la truite saumon- née avec le saumon. Au commencement du cin- quième siècle, .Ausone en parlant des poissons de la Moselle, a fort hicn peint notre truite sau- monnée sous le nom Ac fario, en disant qu'il tient le milieu entre le saumon et la truite y^. Bel- Ion g) croit qu'il faut entendre par le poisson à'^usone la grosse truite, qu'on trouve dans les c) s. N. 509. n. 3. q»p» qui jiec dum Fario, nec d) IcJilii. 55. n. 4-j* jiim Salar, anibiii;uiisqiie Ain- e) Mus. II. n. 164. boium nicdio Fario inier- f) Tetjne inter i^jeniinas spe- ceptc siib œvo. cies,iieuuiuîi^ue eLutrujii- g) A<^u. 230. 204- I^E SAUMON. lacs, et qui pèse jusqu'à cinquante livres» Mais je crois qu'il se trompe en ce qu'il confond nos truites saumonnées de mer avec la truite de lac, qui n'ont été connue que beaucoup plus tard sous le nom de heuch hj, Gesner prétend au contrai- re, que, comme Ausonc n'a décrit que les pois- sons de la Moselle, et qu'on ne trouve les gran- des truites que dans les lacs , il faut qu'il ait com- pris sous le nom àefario un saumon de moyenne grosseur, et un jeune saumon sous celui de sa- larij. Mais si ce naturaliste avoît obsen^-é avec plus d'attention, il auroit vu que la truite sau- mormée passe de la mer, par le Rliin, dans la Mo- selle. Les ichthyologistes modernes paroissent être du sentiment de Gesner ; Artédi hJ y et Jjinné IJ , citent Charleton et Johnson mj comme les premiers écrivains qui parlent de ce poisson. Mais supposé qiiAusoite n'eût pas eu en vue notre truite, Schwenkfeld nj et Schoneveld oj l'ont pourtant décrite avant ces auteurs. Le premier en parla en 1603, et le dernier en 1624; au lieu que Charleton pj n'en parle qu'en 1668, et Johnson qu'en i686\ h) Gesner. ThieiB. 175. jn) Willugbli. 44g. f) — Aquat. 1007. n) Theiiotrop. 195. k) 8511.24.11.5. o) Ichth. 65. 11.5. i} Faiin..Suec. n. 347.. p) Onoii. 155. 11.2. I.A TRUITE. «20' IIÏ. L A T R U I T E, S a l m o F a r i 0. XXIIme Planche. Le corps couvert de taches rouges clans un cercle bleu; onze rayons à la nageoire de l'anus. Sahno jnaculis ruhris iridibiis coeruleis y pi?!- nne ani radiis xi. JB. x. P. x. V^, xiii. A. xi. C. XVIII. D. xir, SalmoFaiio. Linn.S.N. 509. La Truite. Duhamel. Pècli. 11.4. Avted. gen. 12. n. .5 II. 202. PI. II. f. 2. Syu. 23. n. 3. Spec.5i.ii.4« Gronov. Zoopli. n. 571. The Tiout. Penn. B. Z. III. TiuLta. Kleiu. M. P. V- JQ- ^7- n. 146. PI. 59. f. 2. n. 9. t. 5- f. 3. (^e poisson se distingue des autres espèces de truites par les taches rouges .et rondes qui sont dans mi cercle bleu, et dont tout le corps est cou- vert, et par les onze rayons de la nageoiie de l'anus. La tête est assez grosse, comparée avec cel- le des autres truites. On la reconnoit encore à ses deux mâchoires garnies de dents pointues et QOG I^A TRUITE. recourbées en dedans , et dont l'inférieure avance un peu sur la supérieure lorsque la bouche est fermée. De chaque côté du palais , on apperçoit trois rangées de dents, dont celles du milieu sont les plus grosses; la langue ^est aussi armée de six à huit dents. Les joues sont jaunes mêlées de verd. L'œil est de moyenne grandeur. Le corps est étroit et couvert d'écaillés très petites à la tête et au dos ; ce dernier est rond, garni de taches noirâ- tres, qui sont sans bordures. La ligne latérale est droite et étroite. Au dessus des nageoires du ventre , on voit une petite appendice. Cette espèce de truite est la plus belle de toutes; les femelles sur -tout se distinguent par l'éclat de leur beauté. Il est remarquable que ce poisson, qu'on trouve dans toutes les parties du monde, et qui se distingue autant par sa beauté que par sa bonté ait été inconnu aux anciens. Ni les Grecs , ni Pline n'en parlent : l'évéque Ausone, qui vivoit au commencement du cin- quième siècle, est le premier qui en ait parlé. Ce poisson a un corps étroit et allongé com- me le brochet ; il est ordinairement long d'un pied, et pèse une demi -livre, On en trouve ce- pendant dans les étangs qui pèsent jusqu'à trois livres. On en a pris en Saxe im de huit livres, qu'on a envoyé à l'électeur George 1., à cause de la rareté nj. a) riemm. Jtiî^eib. IL 410* I,A TRUITE* 207 La truite aime une eau claire , froicle , qui sort des montagnes, qui coule avec rapidité et dont le fond est pierreux : voilà pourquoi elle se tient ordinairement dans les ruisseaux qui pren- nent leurs sources dans les montao;nes. Elle na- ge avec rapidité, et saute comme le saumon à cinq ou six pieds, pour surmonter les obstacles qui s'opposent à son passage. Elle vit de vers, de petits poissons, d'escargots, de coquillages et d'insectes aquatiques. Elle attrape , sur - tout sur les bords des cousins h), des mouches éphé- mères c) et des phiyganes dj. Elle fraie en Sep- tembre; dans quelques contrées en Octobre, et dans ce tems elle se fourre entre les racines des arbres et les grosses pierres, pour y déposer ses œufs. Les truites multiplient beaucoup, quoi- qu'elles aient beaucoup moins d'œufs que les au- tres poissons de rivière. Cela vient sans doute de ce que les poissons voraces ne se tiennent pas ^ dans les eaux froides où ^^vent les truites. Elles multiplicroient beaucoup plus encore , si elles n'étoient pas si gourmandes, qu'elles ne se dévo- rassent pas les unes les autres ;^ car on a souvent trovivé de jeunes truites dans la gueule des gros- ses et que leur ^^oisin, l'ombre d'Auvergne, ne fut pas si avide de leurs œufs. h) Eplicmeva vul^'^ta et cu« c) Epliemera lutea. Uci formis. d) PJiryganaa giaiiJiî. £08 LA TRUITE. On prend orclmaircment ce poisson à la tiTible, à la nasse et à la ligne. Il faut lever xâte la première dès qu'on apperçoit que le poisson y est entré; sans quoi il fait un saut et s'échappe. Pour l'attirer dans la louve, ou la nasse, on se sert d'un appât qui a une odeur forte; on le compose de castor eujii et de camphre : on fait fondre ces deux matières dans une poêle sur le feu> et on les brouille avec de l'huile de lin; on trempe un linge dans cette matière ; on le noue en forme de bourse, et on l'attache dans la louve ou nasse. Les lignes dont on se sert pour pêcher la truite, doivent avoir une verge forte et un fil aussi fort ; car la truite fait des mouvemens précipités qui pourroient casser l'une ou l'autre. L'appât de l'hameçon doit être fait avec de la chair d'écré- . visse , prise de la queue des pattes : ou bien des petites boules faites avec une partie de camphre, deux parties de graisse de héron, quatre parties de saule pourri et un peu de miel. On peut aussi prendre des vers de terre et des sang-sues coupées par morceaux. Les anglois, qui aiment beaucoup la pêche à la ligne, ayant remarqué que les truites sautent souvent hors de l'eau, pour attrapper les insectes forment des figures d'insectes ej avec de *) De l;i soie, du crin, du fil, avec du camelet, de Li moire, des boyaux de vcr-à-soie, et d'autres étolTes fines de dif- qu'on tire de la Cliiue, ou férentes couleurs. On fait Ale.ur défaut des boyaux les antennes et le velu avec de chat. Ou fornicle corps de la laine, qu'on frotte avec LA TRUITE. !209 la soie ou an crin; et comme la nature produit tous les mois de nouveaux insectes, ils savent aussi le changer de même. Ils agitent çà et là les faux insectes sur l'eau attaches à une ligne, et le pois- son \dent si prendre. Cette pêche réussit sur-tout vers le lever du soleil , ou par im tems beau. On les prend encore mieux au feu pendant la nuit. Mais dans le tems du frai, on n'a pas besoin de tous ces moyens, elles se laissent prendre fort ai- sément, même à la main. Dans les pays où la pêche de ce poisson est abondante, tels que les pays de montagnes et ceux où l'on n'en trouve pas le débit, on les marine comme les saumons, ou on les sale comme les harenf^s fj. Dans nos contrées, on les trouve dans diverses petites rivières de la nouvelle-Mar- che , et dans divers étangs, où on les entretient; dans les parties montagneuses de la Silésie, et sur -tout dans les environs de Danzig £ij. La truite a la chair tendre et d'un bon goût. Plus, l'eau où elle a vécu est froide, plus son goût est acrréable. On trouve à la source de l'Orbe, qui sort d'un rocher dans le canton de Berne, des tniites qui ont un goût d'écrévisse, et qui surpas- sent toutes les autres en bonté, sur -tout si on les de la ciie He diiTcrentcs cou- avecdesmembranesminces leurs, de même que de poils ou des plumes d'oiseaux, pris sur di/Tcientcs parties des /) Bomare, Dict. XI. 499* animaux. Les ailes se font g) Klein. M.P.V. iQ* G 210 LA TJ\U1T£. accommode dès qu'elles sont sorties de l'eau iV- Les truites sont grasses quand les autres poissons sont maigres, et maigres quand ils sont gras. De sorte qu'en hiver, elles X)ntune chair blanche et de mauvais goût; mais en été elles ont la chair roûore et tendre. La truite passe pour le roi des poissons d'eau douce. Du tcms des Romains, il ornoit déjà les tables les plus somptueuses kj. Dans plusieurs pays , les seigneurs se sont réservés les truites, et en ont défendu la pèche sous des peines sévères. En Saxe, cette pêche est défendue sous peinrî de prison. Dans quelques autres provinces d'Alle- magne, sous peine de perdre la main; dans le ro)- aume de Congo, sous peine de la \de IJ. La chair de la truite est de facile digestion, et elle peut fournir ime bonne nourriture aux personnes foibles et maladives. Les parties intérieures sont telles que je l'ai dit dans la première section, en parlant de ce genre. La peau de l'estom^ac est seulement beau- coup plus forte, et elle a soixante vertèbres à l'é- pine du dos et trente côtes de chaque côté. Ce fut pour moi un spectacle impré\T^i, et en même tems agréable, de voir en ouvrant cette truite, des œufs couleur d'orange, si'os comme des pois nj y placés en rangées les uns à côté des au- i) BoTnaie, au 1. c. l) Allgcm. Reis. IV. 693. k) Joev dit: Trutta dcciis m) Vo) es Pi. 13. f. 13, meusae. LA TRUITE. 211 très. Cela me surprit d'autant plus, que dans les plus gros poissons, coninie le silure et l'estur- geon, je n' avois jamais trouvé des œufs plus gros que de la graine de millet. Cette truite étoit au moment du frai , et les œufs étoient séparés de la peau dans laquelle ils sont ordinairement. Ces œufs cuits sont aussi un manger fort délicat. On s'en sert d'appât pour prendre l'ombre d'Au- vergne. Il est remarquable que la couleur de ces œufs est si durable, que j'en conserve depuis dix ans dans de l'esprit de vin , qui n'ont presque rien perdu de leur vivacité. Ce poisson se nomme : Fore, hnch fore, for el- le, teicliforelle et goldforelle, en Allemagne; fo- relie, en Dannemarc; lashens et norjar, enLivo- ràe\ forel-hrfi, elv-krà, jnuld-krci, or-rivie, en Noi^svège; forell, stenbit, hdckrn et rôjisk, en Suède; krasnnja ryha, en Russie; daivatschan^ enTartarie; trotta, toi'rentinn, en Italie; truite ou troutte, et truite de rivière, en France, et trout^ en Anirleterre. Selon ce que nous venons de voir, la truite est un des principaux poissons de nos rivières; et comme elle ne séjourne que dans les ruisseaux des contrées montagneuses, elle est aussi un des plus chers. Elle mérite par conséquent l'atten- lion de l'économe. 11 est dommage que tous les endroits ne soient pas propres à nourrir ce poisson. Pour former im étang à truites, il faut: O 2 212 LA TKUITE. i) une eau claire et froide, avec un fond de sable ou de cailloux. 2) Des sources, ou un ruisseau qui y ramène toujours de l'eau fraîche. Si c'est un ruisseau, il faut qu'il coule sous des ombrages frais, ou qu'il ne soit pas fort éloigne de sa source, sans quoi l'eau est trop chaude en été lorsqu'elle entre dans l'étang. 5) Les bords doivent être éle- vés, sans quoi la truite, qui aime à sauter, tou- cheroit à terre et y périroit. 4) L'étang doit être entouré de grands arbres , dont l'ombrage pro- cure de la fraicheur à ses eaux. Il doit y avoir dans le fond ou des racines d'arbres, ou de gros- ses pierres entre lesquelles le poisson puisse frayer. 5) On doit y prévenir les inondations, soit par un fossé, soit de quelqu autre manière: il faut sur - tout prendre garde que les ravins n'y conduisent des eaux de pluie sales et bourbeuses. 6) Il faut que l'étang ait sept à dix pouces de pro- fondeur, sans quoi la truite monte sur la surface de l'eau en tems d'orage, et elle y meurt souvent, si l'orage dure longtems. On peut prévoir sa mort, à de petits points pâles qui paroissent sur son corps : plus il y en a, plus le poisson est près de sa iin ; de sorte qu'il faut se presser de le pren- dre. 7) Il faut sono-er à leur fournir une nourri- ture suffisante. Comme les truites sont cama- cières, il faut mettre avec elles des poissons qui vivent dans une eau de même nature, mais qui ne soient point voraces. Les plus convenables sont £A TB.UITE. fi 1 3 les goujons, les loches, les dobules , les raphes, lèverons, les meuniers et Table. Mais comme on n'a pas toujours de ces poissons, sivr-tout dans les pays de montagnes, on peut aussi leur donner de petits morceaux de foie liacliés, des entrailles d'animaux, des gâteaux secs, faits de sang de bœuf et d'orge mondé. Il faut réduire l'orge en bouil- lie^ on y mêle le sang de bœuf; on jette le tout sur une planche garnie d'un rebord; on le laisse refroidir; on le coupe en petits morceaux, que l'on fait sécher et qu'on garde pour s'en servir au besoin. Il faut casser la glace dans les étangs de truites comme dans ceux de carpes , et regar- der tous les jours que les embouchures ne gèlent pas. Du reste, il faut garnier la bonde d'une grille fine, pour arrêter ^ale^^n. Enfin, il n'est pas besoin de dire, qu'il faut tâcher d'en éloigner les poissons voraces et les oiseaux pécheurs, de même que les grenouilles et les voleurs. I^e meilleur, endroit pour former un étang à truites, c'est une vallée ombragée, qui ait une source ou un ruisseau dont la source soit peu éloignée. Quand la source est trop éloignée, il faut en conduire l'eau dans l'étang par un canal qui soit ou très-profond, ou couvert. On ne sau- roit déterminer la grandeur dç l'étang; cela dé- pend de la quantité d'eau qu'on peut y faire en- trer. On compte ordinairement soixante pois- sons par arpent. Le fond doit être d'abord de 214- I^A THUITE. glaise ou de terre grasse tanee, sur laquelle on jette ensuite du sable ou des cailloux. La pre- mière empêche l'eau de s'écouler, et le sable ou les cailloux la conservent claire. Il faut qu'il y ait en haut et en bas, comme aux étaniis de car- pes, une bonde, une grille et une vanne, afm qu'on puisse à son gré faire baisser ou augmenter les eaux. Aux deux bondes, il faut avoir soin de mettre deux caisses grillées, en forme de nasse, où les truites soient retenues quand elles sautent au-dessus de la grille. Le mois de Septembre est le ineilleur tems pour empoissonner. Quant aux truites que l'on prend pour cela, il faut pren- dre garde i)de n'en mettre que peu dans le même vase; û) que la voiture sur laquelle on les trans- porte, ou du moins le vase, ne reste point tran- quille; 5) de renouveller souvent l'eau, sur-tout quand le transport est long. Monsieur le lieutenant Jacohi a trouvé une méthode particulière pour se procurer les truites et les saumons. On fait une caisse longue de douze pieds, large d'un pied et demi, et profonde de huit pouces. Par le haut, où l'eau doit couler, on attache un morceau de bois en travers, qui a au milieu un trou de six pouces de long et quatre de large. On fait à la planche d'en bas un trou de quatre pouces en quarré, pour faire écouler l'eau: les deux ouvertures seront fermées avec des gril- lages de fer d'archal , de manière que l'alevin ne I-A TRUITE. S 15 puisse sortir. Pour empêcher les rats d'eau d'y entrer et les autres animaux vo races, on couvrira la caisse d'un couvercle percé de plusieurs trous. Le fond sera couvert de gravier, et le vaisseau sera placé de la manière que l'eau puisse s'y intro- duire, par en haut, et en sortir par en bas, dès qu'elle est parvenue à deux pouces au dessus du gi'avier. Tout cela ètunt fait, on prend dans le tems du frai des mâles et des femelles, et on leur fait sortir les œufs et les laites du coi-ps, en leur pres- sant le ventre. On les met dans un petit vase avec de l'eau que l'on remue ensuite avec la main, et que l'on jette après cela dans la caisse dont nous ve- nons de parler. Monsieur /acoZ^i dit ensuite; si les œufs sont exposés pendant cinq semaines sous l'écoulement continuel d'ime bonne fontaine, les poissons rompent d'eux-mêmes avec leurs tètes la peau , qui les retient dans l'œuf; et après qu'ils se sont remués çà et là pendant une demi-heure, on y voit une si grande ouv^erture, qu'ils peuvent en sortir leur ventre, qui est aussi gros que le jaune de l'œuf. Après cela, ils restent tranquil- les pendant deux jours, et ils vivent les trois ou quatre premières semaines du jaune d'œuf qui est encore enfermé dans leur ventre ; de sorte que le jaune diminue à proportion que le poisson aug- mente: alors il est tems de les mettre dans de plus grands endroits avec l'eau qui les contient. Nous avons vu plus haut que les poissons sortent 2 1 6 I^ A TRUITE BRUNE. des œufs dans l'espace de neuf jours; mais il est possible que les truites aient besoin de cinq se- maines pour se développer. Mais quand Mr. Jacobi'àlt qu'elles apportent le jaune avec elles; cette particularité ne meparoît pas vraisemblable, vu qu'en général la constitution de leur corps est assez semblable à celle des autre poissons. IV. LA TRUITE BRUNE, Salmo Fario variété 25^ Planche* V^ette belle truite est ime variété de la précé- dente. Elle en diffère non seulement par la cou- leur, mais aussi par l'endroit de son séjour. La tête est plus grosse et d'un brun noir. Lorsque la bouche est fermée; la maclioire supérieure avance un peu sur l'inférieure, et elles sont toutes deux garnies de dents pointues, aussi bien que le palais et la langue. L'iris est bleu, et la prunelle noire, avec une bordure rouge. Le dos est rond, et les côtés sont bruns jusqu'à la ligne latérale, et garnis aussi Inen que la tête de taches violet- tes. Le ventre est blanc et plus gros que dans la précédente. Je trouve le même nombre de ILA TPtUITE BRUNE. Û 1 7 rayons à la membrane des ouïes et aux nageoires, si ce n'est celle de la queue qui en a quelques-uns de plus , et qui est par conséquent plus large que dans le poisson précédent. Elle habite comme les autres, les ruisseaux pont l'eau est pure et froide , et qui ont un fond de cailloux ; toute la différence, c'est qu'elle préfère les ruisseaux om- bragés. Elle est d'un meilleur goût que l'autre. Dans tont le reste elle ressemble à la truite ordi- naire; ainsi il seroit inutile de nous y arrêter plus longtems. J'ajouterai seulement, que sa chair devient rouge par la cuisson. On nomme ce poisson; wnlcU et steinforelley en Allemagne; truite brune y en France j etbrujt' frout^ en Angleterre. <2l8 r OMBRE d'au VERONE. V. L'OMBRE D'AUVERGNE, Sahtio ThyninlluSn. i24,rne^ Pl ANCHE. Vingt - trois rayons à la nageoire du dos. Sàtino . pinnae dorsî radiis xxiii, B. x. P. xFi. A, xiv» C. xriii. D, XXIII. SalmoTliymalliis. Linn. S.N» Thym aie, ombre d'Auvergne. 512.11.17. Core^ouusAnédi Duham. Pècli. II.232. PL 3. £ f Gen. 10. n.3. Syn. 20. n. 3. rr-i ' ^^ t t» rr Tlie GraA'linp;. Penn. B. Z. Gronov. Mus. II. n. 162. ttt ^, , V^^ 1 /^, 111.311.11.150. pi. 01. X^'Ombre d'Auvergne se distingue aise'nient par la beauté, la grosseur et les diverses couleurs de la nageoire du dos, qui a vingt-trois rayons. La tête est petite, arrondie, parsemée de points noirs, brune par en haut, et sur les côtés d'un blanc tirant sur le bleu. Lorsque la bouche est fermée, la mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure. Dans les deux mâchoires, on trouve une rangée de petites dents, en forme de coin, dont celles d'en haut sont un peu plus gros- ses. Sur le devant du palais, et près de l'ésopha- ge, on trouve aussi d'autres petites dents. La langue est unie. Le corps est allongé, couvert I.03IBRE D AUVERGNE. «21Q d'écaillés grosses et dures. Le long des cotés descend de la tête jusqu'à la queue, une ligne droite sur chaque rang d'écaillés ; celle du milieu est garnie de petits points noirs. On voit une ap- pendice à la nageoire ventrale. A la nageoire dorsale les cinq premiers rayons sont simples; les autres se partagent en huit branches. L'ombre d'Auvergne n'a pas été inconnu aux anciens auteurs : Aelien ci) en parle au commen- * cément du second siècle , et Ainhroise vers la Un du quatrième hj. Ce poisson aime l'eau rapide, froide et pure, avec im fond de sable ou de cail- loux. On le trouve par conséquent dans les ruis- seaux ombragés et qui sont dans le voisinage des montagnes. Il paroît n'être pas naturel à la Nor- "Nvège; car Pontoppidnn n'en parle point. En Laponie au contraire, il est si conunun, que les habitans de ce pays se servent de ses entrailles au lieu de pressure, pour faire du fromage avec le lait de leurs rhennes c). On le trouve en Alle- magne, en Angleterre, en France, en Italie, et en Russie dans le Don, et dans le mer Caspienne. Il se nourrit d'escargots et de^ coquillages, dont on trouve les coquilles en quantité dans son esto- mac, de même que d'autres insectes et de petits poissons. Il aime eur-tout les œufs de la truite a) De Aiiim. t. 12. c. 9. nensis Ilexametron, Lib. h) ]J.ins son poème, intiiulJ: VI. l^asilea 1566. iii [o\. Divi Anibrosii, inediola- c) JLinn. Faim. n. ^'/^, 2.2.0 ïi OMBRE D AUVERGNE. et clii saumon. Voilà pourquoi les pêcîienrs sué- ciois pensent que les saunions ne sont pas loin, quand ils apperçoivent l'ombre d'Auvergne dj, pieds il croît fort vîte, devient long d'un ou de deux et pèse alors deux ou trois liiTes. En Angle- terre, on en trouve de quatre livres et plus ej,. Ce poisson fraie en Avril et Mai, et dépose ses œufs sur les pierres du fond. Il nage fort vite et est par conséquent fort difficile à prendre hors le tems du frai. On prend l'ombre d'Auvergne avec le coleret, la louve, la nasse et à la ligne, sur-tout quand on met des insectes pour appât y^. Sa chair est blanche, ferme, douce et de très-bon- ne goût. Les anciens en faisoient grand cas gj; et de nos jours , il y a diverses provinces oii cette pèche est réservée au seigneur. Afin de les lais- ser grossir, il faut que les mailles des filets dont on se sert pour les pécher soient assez larges pour laisser passer les petits poissons. L'automne est le tems où il est le plus gras; mais c'est en hiver qu'il est de meilleur goût, sur-tout quand il fcût bien froid. Comme d'ailleurs il ne se cor- rompt pas- aisément, on peut le conseiller aux J) ScLwed. Abli. VII. 277. cTie. Ainsi ce n'est point une e) Penn. B. Z. IIJ. 312. nouvelleinvcntion, comme J^) Noms remarquerons ici, plusieurs le prétendent, qu'il y a plus de trois cents Voyez Gesner.Thierb. 174. ans que les pécheurs du g) Ambroise dit en §*adres- Rliiu se sont servi d'iusec- saut à ce poisson : Quid tes artificiels pour cette pê- suavitatc tuajuundius? l/OMBlŒ D AUVEilGNJh:. Û21 personnes foibles et maladives. Non seulement on a donne à ce poisson l'avanlage sur tous les autres, mais on attribue aussi à l'huile que Ion tire de sa graisse, la propriété de guérir les mar- ques de la petite -térolc, les taches de la peau, et d'autres maladies externes. Ce poisson ne multiplie pas considérable- ment ; 1 ^2^ parce qu'il es t. très - délicat ; g^^ parce que les oiseaux pécheurs en sont fort avides, et sur-tout les colimbes. Il meurt bientôt quand il est hors de l'eau, et même clans une eau tranquil- le: voilà pourquoi il est difficile de le mettre dans d'autres eaux que celles qu'il habite ordinai- rement, à moins que ce ne soit dans un lac pro- fond où il y ait des fontaines, ou des ruisseaux. Si l'on veut conserver ces poissons dans des hu- ches, il fimt qu'elles soient placées dans le courant d'une rivière , et leur donner à manger du foie, ou le gâteau dont nous avons parlé à l'article de la truite. Une chose fort remarquable, c'est l'o- deur agréable qui;s'ex]iale du corps de ce poisson. Aelicn l'a comparée au tliym, et Amhroise k l'o- deur du miel lij. Fannnni nie L'existence de cette odeur ij ; mais la chose en elle-même neparoît pas sans fondement, car ce poisson avale des in- sectes qui ont une odeur forle, qu'ils peuvent lui /i) Voicicetjii'ilendit:: Quod pore tuo spiras. Ilex.nn.l. niella fvaeiant, liuc tu cor- * • ^* "• B. Z. Iir. 312. 222. l'ombre d'aUVERGNE. conimnniquer. Tel est le tourniquet kj qui, se- lon Rnsel IJ a tant d'odeur, que lorsqu'il y a quelques - uns de ces animaux ensemble , on peut les sentir de cinq à six pas. Or comme ces in- sectes ne se trouvent pas toujours et en égale quantité, on peut regarder l'odeur de l'ombre d'Auvergne comme une qualité variable qui existe dans un tems , et qui disparoit dans un autre. • Au printems, l'ombre d'Auvergne remonte de la mer du Nord et de la Baltique dans les fleu- ves de même que le saumon et la truite saumon- née, pour y déposer son fruij et en automne, il remonte dans la mer. Excepté Richter, aucim auteur n'a parlé de ce passage ; cela vient peut- êrre de ce qu'on ne les trouve que rarement dans les grands fleuves. Mais de ce qu'on ne les y pèche point, il ne faut pas en conclure qu'ils ny passent point; car ils y ont plus de moyens que dans le petits, d'échapper aux pièges des pêcheurs: ce qui est le cas des saumons et des truites sau- monnées. Ainsi l'on ne prend aucun de ces deux poissons dans laNetze; au lieu qu'on les trouve en quantité dans le Kuddow et leDiago, qui se jettent dans la Netze. La peau de l'estomac est si dure dans ce pois- son, qu'on croiroit toucher un cartilage;, La vé- sicule du flel est petite; le flel jaune et transpa- k) Gytinns natator. /) Iiisect, III. 14^. L OMBRE D AUVERGr^E. 2,1^ rent; les autres intestins sont comme dans les autres poissons de ce genre. On trouve ciuquante- neuf vertèbres à 1 épine du dos, et trente- cpiatre côtes de chaque côte. Ce poisson est connu sous dilFèrens noms. On le nomme: Aschy àsclie, esche y escher^ en Al- lemagne; kressling, en Suisse, la première année; iser y la seconde; âscherluig et rischc, ensiute; yprensUngy innyling et cische ^ en AiUriche; spelt, stallin^ , en Dannemarc; zhjotzlijay enLaponie; harr, en Suède et en Nor^vège; tcmelOy en Italie; graylin!^, en Angleterre ; hincî of trout, sitielling' like y tliymCy dans quelques provinces; onihre dAuver<2;ne et tliymale y en France ; tevuilo et tetnarOy en Italie; c/ia77U5, en Russie ; lesTschere- misses l'appellent, kadaina; les Tartares, karn et ken grain; les Barabes, palok; les Teleutes, kara- balik'j les Bascckales , herhy-ballky et les "Wotja- osipul. SelonAelleriy on ne peut prendre l'ombre d'Auvergne qu'avec un liameçon, auquel on at- tache im cousin; mais il faut en conclure," que les cousins de la Grèce avoient plus de consistence que les nôtres, qu'il scroit difficile de faire tenir à un hameçon. Je ne crois pas, comme le tra- ducteur à!Aelien m) y que cet auteur ait entendu m) Voici la traduction de les et dies homini infesta, Gesner : Nonlianiatis esca- qtiod haec sola delectetur, runi haliariirn illecebris, compiehenditur. De Natu- aedsolo culice, besiia noc- ra. lib. i2. 0.49. ;24- LE LAVARET. le cousin ordinaire: il est plus vrais emblalile, quil a voulu parler de Yepheniera vulgata n), qni est assez gros pour être attaché à l'hanieçon, et dont la forme approche beaucoup de celle du cousin ordinaire. n) Cet inseste est si commnn dans la Carintliie, que, se- lon Scopoli, les paysans en fument leurs terres. Ils au- gurent mal de la moisson lorsque chaque particulier n"'en ramasse pas loiisles ans environ vingt tomberaux. Entomol. 264* VI. LE LAVARET, Salino Lavaretus, 35^ Planche. La mâchoire supérieure avançant en forme de nez. Salino rostro nasiforini, B, viii* P. xr. V, XII, A, xir. C XX. JD. xr. Salmolavaretus. Linn. S. N. 512. n. 15. Artédi Gen. 10. n.2. Syn.ig.n,2. variet. &. Spec. 57. . Le Lavaret. Duliam. Pêch. II. 253. Tlie Gwiniad. Peiui. B. Z. III. 516. 11. 155. pi. 62. La forme de la mâchoire supérieure, qui res- sem.ble assez à un nez, est un caractère certain LE LAVARET. 225 / qui distingue ce poisson des autres espèces de saumons. La tête est petite en comparaison du corps, qui est long et épais; elle est cunéiforme et à demi- transparente jusqu'aux yeux. La mâchoire supé- rieure qui avance, finit en une pointe émoussée, molle et charnue de couleur noire. La mâchoire la plus courte s'emboîte dans l'autre; et lorsque la bouche est fermée, elle se trouve entièrement couverte par la grosse lèvre supérieure. La bou- che est petite, sans dents, et s'ouvre en travers par le bas. La langue est blanche, cartilagineuse, courte et un peu rude. La ligne latérale est droite, ornée de quarante-cinq points, et plus près du dos que du ventre. Les écailles ont au milieu du bord, une petite échancrure, qui est sur-tout re- marquable à celles qid sont sur la ligne latérale. La nageoire dorsale est plus près de la queue que de la tète. La nageoire adipeuse est en losange, et celle de la queue fourchue. Nous trouvons le lavaret dans la mer du Nord et dans la Baltique; dans les rivières de la Russie et de la Sibérie. Il s'y tient dans le fond, d'où il sort quand le hareng commence à frayer, et il le suit de près pour manger ses œufs. De sorte que lorsque les pécheurs ont pris beaucoup de liarengs dans une nuit, ils prennent ordinaire- ment la nuit suivante vingt- quatre, jusqu'à qua- rante lavarets. Si on les ou\ re dans ce tems, on r 226 LE LAVARET. trouve le canal intestinal plein d'œufs de harengs. Cependant l'ombre d'Auvergne use de représail- les envers le lavaret, il le suit aussi quand il fraie, et dévore ses œufs. Le lavaret se montre encore dans un autre tems: c'est lorsqu'il fraie lui-mèine; ce qui arri- ve ordinairement depuis Août jusqu'en Octobre: alors on trouve la famelle en quantité entre les anses, les havres, et aux embouchures des fleuves dans les endroits où l'eau tombe avec le plus de rapidité dans la mer. Le mâle suit la famelleet ils se frottent l'un et l'autre contre les pierres et les cailloux, pour se débarrasser des œufs et des laites. Une partie de ces poissons remonte les fleuves, dans lesquels elle avance en troupes de deux rangées, qui forment un angle aigu. A la pointe de l'angle s'avance un lavaret qui conduit toute la troupe. S'il arrive que les vents soient trop forts et les arrêtent dans leurs courses, ils retournent, et fraient dans les endroits que nous venons de dire. Mais lorsque le vent leur est favorable, et aug- mente la vitesse de leur course, ils entrent en quantité dans les fleuves; et plus il est rapide, plus ils font d' efforts pour s'y opposer: alors ils font une heue en vingt-quatre heures ; au lieu que lorsque le fleuve ne coule que lentement, ils ne font pas la moitié autant de cheinin dans le même espace de tems. Les pêcheurs qui savent cela, dressent leurs filets en conséquence. Car comme LE JL AVARE T. 22 7 le lavaret est rusé, et trouve aisément un trou dans le Fond pouT échapper, ils l'attrapent, en je Liant leurs filets tous les jours à une lieue ou une denii-lieue plus haut, selon que l'eau est plus ou moins rapide. Ils avancent dans le fond, où le fleuve est le plus fort. Quand il survient quel- qu'orage, ou tempête, ils ne vont pas plus avant: l'ordre de la marche est rompu; et cliaque pois- son tâche d'échapper comme il peut et de trouver dan.^ le fond un endroit pour se cacher. Les pê- cheurs qni savent trouver ces animaux dans les , endroits les plus cachés, savent aussi les prendre alors, en tendant des nasses appâtées avec des œufs de brochets ou d'autres poissons. Lorsque la tempête s'est appaisée, ils se rassemblent de nou- veau en troupes, et continuent leur route comme nous j'avons dit: mais ils ne remontent pas dans les petites rivières comme les saumons et les trui. tes saumonnées; ils s'arrêtent seulement vers leurs embouchures , ou les chûtes d'eau, et dans des endroits où ils trouvent des pierres ou d'au- tres choses propres à faciliter le frai. C'est dans ces endroits que les pêcheurs peuvent les trouver^ Le lavaret sent une tempête quelques jours avant qu'elle arrive : alors ils se retirent en foule dans les endroits du frai, lorsqu'ils n'en sont pas éloignés. Les pê( heiir5 ne se trompent pas à ce signe. Après le frai, ces poissons retournent dans la mer sans conducteur et sans ordre. Une cliose P 2 22 8 J-E LAVARET. fort remarquable , c'est que le retour de ce pois- son indique si l'hiver viendra plutôt ou pins tard. Quand le lavaret revient de bonne heure, c'est une marque que l'hiver approche; quand il re- vient tard, c'est une preuve que les froids retar- deront aussi. Le jeune lavaret reste dans le lieu de sa naissance jusqu'à ce qu'il ait atteint à peu près la grosseur ^e trois pouces ; alors il est em- porté par la violence de la marée dans la mer, ou il reste jusqu'à ce que le désir de la propagation le porte à en sortir; ce qui arrive ordinairement à l'âge de cinq à six ans. Les ennemis de ce poisson sont, outre les poissons voraces, le chien de mer, qui les pour- suit souvent jusques sur les côtes , de sorte que les pêcheurs espèrent une riche pêche lorsqu'ils apperçoivent ce monstre marin près de filets qu'ils ont tendus. Outre cela ils dévorent eux- mêmes leurs œufs les uns aux autres ; ce qui est sans doute une des causes qu'il ne se multiplie fort. Dans nos contrées , on pêche le lav^aret avec le tramail, le grand filet et la louve, dans l'Elbe, près de Boitzenbourg, et en Prusse dans le Cu- risch-Have. Les pêcheurs suédois se servent de tridens. La chair de ce poisson est blanche, tendre et de bon goût, et est par conséquent un des meil- leurs poissons de nos tables. Dans les endroits où la pêche de ce poisson est considérable, on le fume on on le sale. Cette dernière préparation, se fait de la manière suivante: Après avoir net- toyé, vide et lavé le poisson en dedans et en dehors , on le met dans une corbeille sur le ventre, afin que Teau puisse s^égoutter» Après cela on le sale, on le place par couches ; et après l'avoir laissé ainsi pendant trois fois vin^^t- quatre heures, on le lave de nouveau. Par ce moyen on en ote tout le limon et le sang; puis on le sale comme les harengs , en couches alter- natives sur lesquelles on met une pierre pour les faire porter les unes sur les autres, et on les bou- che. On conserve ainsi le bon goût qu'ils ont, quand ils sont pris par un tems frais. Quand on les a pris dans la chaleur, il faut les fendre avant que de les saler; leur ôter la tète et l'épine du dos , qui se gâtent aisément, et donnent un mau- vais goût au poisson* Le lavaret n'a pas la vie dure; il meurt bien- tôt après être sorti de l'eau. On peut cependant. le transporter dans des étangs , avec des précau- tions. Il faut que le lac ou l'étang où on les met soit grand, profond, et qu'il ait un fond de sable; c'est ce que prouvent les expériences de Geider aj. Le lavaret qu'il transporta avoit deux ou trois pouces de long. Dans l'espace de quatre ans, il parvint au poid d'une jusqu'à deux livres. On voit à la bouche de ce poisson, qui est dépourvue a) Scliwed. Abli. XV. 308- 230 tE LAVERET. de dents, qu'il ne vit point de proie, mais d'her- bes, devers, d'insectes et d' œufs de poisson. J'ai aussi trouvé dans son estomac des petits coquil- lages4 La peau de l'etomac est forte ; le canal intes- tinal est court, et à son commencement, entouré de petites appendices. La laite et l'ovaire sont doubles: l'ovaire contient environ 57,000 œufs jaunes de la grosseur de la graine de navette. J'ai trouvé cinquante-neuf vertèbres à l'épine du dos, €î trente-huit côtes de chaque côté. Ce poisson se nomme: Schnepel, dans nos contrées; sik et stor-siky en Suède et en Norvège; helt, enDannemarc; sihka, sieg et sia-lialle, en Livonie; lavaret, en France; et gwiniad, en Angleterre, sik^ en Russie ; akkongi^ala, en Tar- tarie; les Teleutes l'appelle balik. Nous trouvons chez les anciens plusieurs poissons qui portent le nom de lavaret h), alhu^ la nohilis cj y nlhula cœrulca, bezola dj albula -parva ej etfarra fj, et qui appartiennent au h) Ron(3el. II. 162. Gesner. Aqu29. Tliierb. i87- Al- drov.657. Jonst. 171. Char- let. 163. Willuglib. 133. Ray.6i.n.5. Duliam.Pèch. II. 233. Descript. des Arts et Met. T.X.576. f) Gesn. 33. Sclionev. i2. Jpnst. t. 46. f. 1. Ray. 60. n. 1. d) PiOndel. P. II. 165. Gesner. Aquat.31. Tliierb. 137. b. Aldrov. 658. Jonst. 171. Chaiiet. 164. é) Gesn. Aquat. 134. Tliierb. 133. b. Aldrov. 659. Jonst. 173. Charlet. 164. Ray. 61. n.6. Willup;bli. 13.^1. f) Rondel. P. II. 1G4. Gesn. Aqu. 31-35. TJiierb. i38f Aldr. 663. Cliarl. 164. Jonst. 174. Willughb. 185. Ï.E LAVARET. 23 1 genre des saumons. Les ichthyologistes moder- nes, tels qi\ Artédiy Linné, Klein, WulfF, Fennant et JMnrtinl gj, les ont tous décrit sous le nom de lavarety et n'en font qu'une seule espèce. Au- tant qu'on peut en juger par les mauvais dessins qui nous en restent, on voit que ces poissons sont de difFérentes espèces. On peut dire du moins que le lavaret n'est pas de la même espèce que lalbuln cœrulea de Gesner\ c'est ce dont je me suis convaincu par le dessin que m'en a commu- nique mon ami Mr. le Dr. Wnrhnnnn de St. Gall, et par la description exacte qu'il a donnée de ce poisson hj. Comme ce savant m'enverra aussi les autres espèces de saumous de son pays, je les publierai de même, afm de pouvoir compaier et concilier les auteurs. Sclioneveld décrivit notre poisson en 1624, sous le nom (Xalhuln nohilis ij , et en donna un dessin assez fidelle, que JonstoUy fVillughhy et Paiysch ont copié. Statiiis Miiller kj se trompe en prenant no- tre schnepel pour le snbno nlbula de Linné. Dans le dernier, c'est la mâchoire inférieure qui avan- ce; dans le premier; c'est la supérieiu'e. Zilh'- kert IJ se trompe aussi quand il confond notre poisson avec Yoxyrinchus de Linné. Selon ScJio- g) Natiulex. I. 272. k) L. S. IV. 326. h) Besclijft. III. 205. O Mat. Alim. 265. i) Iclitli. 12. 252 LE L AVARE T. nevelcl mj, le helt des danois est le même pois- son que le schnepel des allemands. Mais comme Fontoppidnn nj et Frédéric Muller prennent le premier pour le lavaret de Linné y et le dernier pour son oxyrinclius y il faut bien que ce soit des poisson difle'rens. Dans le dessin qiijdscajùus donne du helt oj , je ne trouve point du tout la ligure de la inachoire supérieure de notre lavaret. Selon Linné pj et Artédi qj le lavaret et le sik est le même poisson: mais comine Artédi a remarque de petites^ dents et 17 rayons dans na- geoire de l'anus rj, il ne peut pas être le lavaret, qui n'a que 14. rayons dans la dite nageoire et la bouche dentée. En général, on ne pourra sortir du labyrintKe des auteurs que nous avons cités, à moins d'avoir une description exacte, ou un dessin fidelle de ces poissons. m) Icluli. 3 2. p) Faun. n. 352. n) Dannem. 139. q) Gcn. 10. n. 2> o) Icon. pi. 35. r) Spec. 37. LE LAVARET LAr.GE. ^55 VIL LE LAVARET OU THYMALE LARGE, Sahno Tliyniallus latus. <26n2£ Pi' ANCHE. La mâchoire siipcrieure comme celle du lavaret le coi'ps plus large. Snhno rostro nasiforviiy corpore Invareto latiore» B, ix. 1\ xn. l^. XI. Jl. xii\ C. XX. D. yiiXJ* Trutta. Klein. Miss. Fisc. Lappsiick.ScliweJ.Abh.XV. V.i2o. 11. 13. t. 6. f. 1. i(j8* Lelavaret. Ascan.Icon. t. 30. JL^a srande ressemlilance cle ce poisson avec le précédent , peut le faire regarder comme une variété de cette espèce. Il en diflère cependant par les caractères suivans: i) Par la diiTé rente proportion de la largeur et de la longueur. Dans le lavaret, la largeur est à la longueur comme i à 4^ ; dans le lavaret large, comme 1 à 5-î. Les deux poissons que j'ai examinés, avoient presque tous deux la m'-me longueur; et leur corps étoient également pleins d'œufs : de sorte qu'on ne peut regarder la lar- £54- ^^ LAVARET LARGE. ffeur fin lavaret laige que comme une chose acci- dentelle. 2) Les nao^eoires du lavaaet lar^e sont plus courtes que celles de j'autre. 5) Celui-ci a la piunelle de l'œil ronde;, celle de l'autre forme un angle aigu vers le nez. 4) Dans le lavaret lar£:e, le dos offre une courbure à l'endroit où tiennent les nageoires; ce qu'on ne trouve pas à l'autre. 5) Les écailles du lavaret ordinaire ont une petite échancrure au bord; celles du lavaret large, sont toutes rondes. 6) Le dernier offre outre cela plus de points sur la ligne latérale, et autant des rangs d'écaillés. 7) Dans le lavaret large, l'ouverture de la bouche est plus entra- vers; et la bouche est plus grosse que dans le lavaret ordinaire, s) Le dos du lavaret large est tranchant jusqu'à la nageoire; celui du lavaret or- dinaire est tout rond. 9) Le ventre fmit par un applatissement dans le premier; il est rond dans le second. 10) Le lavaret large pèse quatre li\Tes ou quatre livres et demie; le lavaret ordinaire ne pesé pas une livre et demie. 1 1) Sur. le lavaret large, on voit des deux côtés, des lignes qui s'é- tendent dans toute la longueur; ce qu'on ne trou- ve pas à l'autre qj. On voit par ce que ]'e Wens de dire, que le lavaret large est à peu-près au lavaret ordinaire ce à) INIr. Ascaninç dit, à la vé- qu'au tem? du frai; mais je rite, dans son troisième lésai trouvées aussi sur les Fasciculus, que ces lignes femelles. nese trouvent sur les maies I.E LAVARET LARGE. 235 que le rotengle est à la rosse; et qu'ainsi on peut comme ces derniers , les ranger en deux espèces particulières, comme on le fait en Suède où on leur donne deux noms dilTérens. Cependant, afin de ne pas trop multiplier les espèces de ce genre, déjà assez nombreux, j'ai mieux aimé le regarder comme une variété du lavaret, et je n'ai pas jugé à propos de faire une description parti- culière de ses parties, qui sont tout-à-fait sembla- bles à celles de ce poisson, à l'exception des dif- férences que je viens d'indiquer. Ce poisson se nomme : IVelssJiscliy à Danzig ; brcîte âscliey en Poméranie dans les environs de la mer Baltique; jc/z^zrp^/, à Hambourg; suck^ en Dannemarc; lappsùcky en Suède; lavaret large, en France; et broad-giviniad, en Angleterre. 236 ^^ GRANDE iM ARENE. VIIL LA GRANDE ]M ARENE, S a l m o JVl a r a e n a* fiyij^ Planche. Le corps blanc; la mâchoire supérieure tronquée. Sahno cor-pore albo, niaxilla superiore triin- cnta, B. viiJ, F, xir» V, xi. A. xv» C. xx. D. xir. JLja mâchoire supérieure tronquée et le corps blanc, sont des marques suiFisanLes qui distinguent la marène des autres espèces de saumons. La tête est tronquée ; la bouche sans dents, et petite à proportion de celle des autres poissons du même genre. La mâchoire inférieure est plus étroite et plus courte que la supérieure, et est couverte quand la bouche est fermée. Au bord de la mâchoire supérieure, on voit deux petites ouvertures rondes. Le nez et le front sont noirs, de même que le dos, qui est rond. Les yeux sont gros; et la prunelle forme un angle aigu vers JLA GRANDE M ARENE. 237 le museau, ils sont argentins a). La ligne laté- rale, qui est garnie de quarante -quatre points blancs, fait une petite courbure près de la tête. Les nageoires de la poitrine, du ventre, du dos et de l'anus sont grandes ; les rayons finissent en plusieurs branches. On voit une appendice à la nageoire du ventre. Les trcaillcs sont grandes, minces, brillantes, et se détachent aisément. La grande marène plus grosse, que l'on nomme aussi 7/î^rmc de Madui, tire ce dernier nom du lac Madid bj\ où l'on a cru faussement jusqu'à présent la trouver exclusivement: on la trouve aussi dans les lacs Hitzdorfer cj , et CallU ser dj. Elle a été absolument inconnue aux écrivains systématiques. Le poisson que je décris avoit deux pieds trois pouces de long, depuis le commencement du museau jusqu'aubout de la queue. Sa plus grande largeur étoit de cinq pouces j son épaisseur de a) Dans le lac Madni, oii ce poisson se trouve naturel- lement. On en pèclie d'un côté du lac qui sont ar- gentins, et des gris de l'au- tre côté. Voyez rieniining, Jagerb. 450. h) Le lac Madni est un lac très - poissonneux, fituc dans le bailliage de Kol- batz, près de Stargard, dans la ba^se Ponierauie^ a trois lieues de Stettin. Il a quatre lieues de lon- gueur, une jusqu'à deux de large ; il a vingt à vingt- cinq brasses de profon- deur, et le fond est mar- neux. c) Près du village du même nom, au'bailliae;e de Mari- enwalde. d) Près de la petite ville Je Callies, danslaNouvelle- iVlarciie. 258 ^^ CRAICDE I\I ARENE. quatre, et il p es oit quatre livres et demie: on en trouve cependant quelquefok; qui ont quatre pieds de long. Il passer pour un très-bon manger: sa chair est blanche, tendre, de bon goût, et n'a point de petites arrêtes. Ces poissons se tien- nent dans les. eaux profondes , qui ont un fond de sable ou de glaise: ils cherchent les endroits les plus profonds, et y demeurent en troupes. Ils ne viennent vers le haut que dans le tenis du frai, qui tombe en Novembre, et au printems, pour manger les coquillages et les petits escargots. Comme ce poisson, même dans les tems dont nous venons de parler, reste toujours à cent cin- quante et jusqu'à deux cents pas des bords, et qu'il ne paroît que dans les endroits qui ont au moins quelques brasses de profondeur, il n'est pas étonnant qu'on ne le trouve ni dans la Plœne, qui se décharge dans le Madui, ni dans le lac Dammer et le Friscli-Have , qui communiquent tous deux avec le premier, par le moyen de cette rivière, elle n'a pas assez de profondeur pour at- ' titer ce poisson. Il faut aussi attribuer au goût de ce poisson pour les endroit profonds, de ce qu'on le prend rarement hors le tems dont nous avons parlé , si ce n'est sous la glace avec les grands filets. Il meurt dès qu'il est sorti de l'eau, et devient même malade en été. Lors qu'en pour- suivant un insecte, ou en évitant lui-même la poursuite du brochet, il s'approclie trop de la LA GRANDE M ARENE. Û59 surface de l'eau, il devient hydropique, et meurt peu à peu. La grande marène ne commence- qu'a cinq ou six ans à reproduire son espèce : alors elle a environ un pied de long. Elle cherche les endroits couverts de mousse, ou d'autres herbes; et c'est là qu'elle fraye. Elle muUiplie beaucoup. On en pèche auprintems, en automne et la plupart en hiver sous la glace trois mille par an, l'un por- tant l'autre, dans le lac Madiu. En automne, on la prend avec le filet de huit brasses de profon- deur; et en liiver, sous la glace, avec le grand filet. Le frai commence à la St. Martin, et dure quinze jours au-delà de Verben et en deçà vers Kunovv ; car il n'y a que ces deux places dans les grands lacs où les marènes fraient. S il surWent une tempête, elles disparoissent tout à coup. El- les ont pour ennemis, quand elles sont encore petites, le sandre, le brochet, le silure et la per- che, de même que le coq de mer ejy qui les pour- suit avec avidité, et qui indique par -là aux pê- cheurs l'endroit oi\ elles sont ; -car ils conduisent leurs filets à l'endroit qu'ils voient fixé par ces oi- seaux. Ces poissons fort bons, sont recherchés au loin. Les pêcheurs se sei-vcnt pour les pren^ die de filets à grandes mailles, afin que les petits puissent échapper et croître. On les envoie fort $) Colymbus aurkus. L. a/^.q I.A GRANDE INIARENE. loin, en les empaquetant clans de la neige; et ils conservent leur bon goût pendant un mois. Ceux qu'on pèche au printems sont les meilleurs, parce qu'ils sont plus gras. La différence qu'il y a entre les parties in- ternes de ce poisson et celles des précédens, c'est que la vésicule du fiel est plus petite, et le fiel très-pâle. Le commencement du canal intestinal est garni de cent quarante à cent cinquante appen- dices. Or, comme le suc nourricier s'arrête long- tems dans tous les petits boyaux, et s'y prépare convenablement, il est aisé de comprendre com- ment ce poisson peut devenir si gras avec un canal intestinal si court, qu'il n'a pas même la longueur du poisson. Quoique la niarène meure dès qu elle sort de l'eau, on peut cependant la transporter la faire passer d'une eau dans une autre, en pren- nant les précautions nécessaires , comme l'oiit prouvé les essais de Mr. de 3Iarivit:z de ZernickoAv. Cet excellent économe acheta deux cents vingt marènes, et les fit porter dans sa campagne, éloignée de huit lieuco du lac Madui: il en mou- rut quatre -vingt en chemin; et il mit les autres dans un étang. Pendaut toute l'année, il n'en mourut aucune. L'hiver suivant, il les fit pêcher sous la glace, et on en prit sept du premier coup ; et comme jusqu'à présent on n'en a encore trouvé aucune de morte, il n'est pas douteux que ce poisson réussit dans les étangs. Je recomman- LA GRARDE MARENE. 24. l derai ici aux économes deux règles que Mr. de Marwlbz a observées. 1) Comme ce poisson meirrt dès qu'il est sorti de l'eau, il faut avoir des vaisseaux, pleins d'eau tout prêts dans les endroits où on les prend, afin qu'ils puissent y passer en sortant du Iilet; et il faut bien prendre garde de ne pas les presser, les pousser, ou même de les jetter. 2) L'eau dans laquelle on les met, doit être assez profonde, pour qu'en été la chaleur ne puisse pas pénétrer jus- qu'au fond; et le fond doit être de sable ou de glaise. • XI. LA PETITE MARE N E, S a lui o 31 a r œ nul a, 28me Planche. F/g. 3. La maclioire infc'rieure avançant et sans dents. Sahno itKixlllii iiijcriore lon^iore cdentulnijue, B. ru. P. xr. V. xi. A, x/r. C xx. Z). x. Salmo albula. Liiin. S.N.512 "n. 1. S)n. iQ, 11.1. 82300.40. 11. 16. "•2- Tijitta. Klein, Miss. Y. 21. n, Corregouus. AitiJi Gen. g. 16. t. 6. f. 2. JLi' avancement de la mâchoire inférieure, qui est sans dents, est le caractère qui distingue ce pois- son de ceux de son ircnre. (24-2 ^-A" PETITE oMARENE. La tête, qui finit en pointe, est à demi- transparente. Les narines sont près des yeux 5 la bouche est sans dents; la mâchoire inférieure recourbée, plus étroite et plus longue que la su- périeure. La langue est cartilagineuse et courte. La ligne latérale, qui se trouve près du dos, est droite, et garnie de cinquante-huit points noirs. Les écailles, qui, selon Richter, sont au nombre de 1750, sont minces, argentines, et se détachent aisément. Tout le poisson est ordinairement long de six à huit pouces, large d'un pouce ou d'un pouce et demi, et épais d'un demi pouce: alors il pèse deux onces à deux onces et demie. Mais on en trouve aussi quelquefois de dix pou- ces de long. Ce poisson se trouve dans la Marche, la Si- lésie, la Prusse, la Poméranie, le Mecklenbourg, la Suède et le Dannemarc, dans les lacs qui ont un fond de sable ou de glaise. Il vit au plus profond de l'eau, et ne paroit que dans le tems du frai, qui arrive à la St. Martin: alors il cher- che les endroits couverts d'herbages, pour y dé- poser son frai. On ne peut le prendre que dans ce tems et en hiver sous la glace. Il multiplie beau- coup; mais il meurt dès qu'on le sort de l'eau. 11 vit d'herbnges, d'insectes, de vers; mais il a lui-même des ennemis redoutables dans les pois- sons voraccs et les oiseaux pêcheurs. Sa chair est blanclie, tendre et de très-bon goût. AMorin LA PETITE MAREXE. 245 et à Joachimsthal, on le fume dans des tonneaux comme le hareng, après l'avoir arrosé de bierrej dans d'autres endroits , on l'encaque aussi somme ce poisson. La petite marène peut être trans- portée dans des étangs , en usant des mêmes pré- cautions que j'ai rapportées pour la grande. Ce poisson est connu sous dilTércns noms. On le nomme : Marœnc, dans la MarcIie, en Po- méranie et en Prusse; iiiorcne, dans le Mccklen- bourg et en Silésie; fiklôjay en Suède; s tint ^ en Dannemarc; sinaa-jLsk, ùlcge, lake-sild et veimne, en Norv. ège. Schicenchfeld a décrit ce poisson au com- mencement du dernier sièole aj. Quelque tenis après, c'est-à-dire en 1624, Sclioncveld fi), en a parlé fort au long. IVillu^liby h) en fit men- tion en iG8^; t'L Rcdus au commencement de ce siècle. Ce dernier l'a mis faussement dans la classe des harengs c), ll'idJJ dj se trompe aussi lorsqu'il met ce poisson dans le genre des car- pes. a) Tlieriotr. 437. * c) Syn. 107. n. 12. h) Icluliyol. /fb'. d) Icliihyol. 4^. Q 2 24-4- l'epeulan d'eau douce. X. L'EPERLAN D'EAU DOUCE. 23me Planche. Fjc. 2. La niaclioire inférieure avancée; dix-sept rayons à la na2;eoire de l'anus. Sahno maxilla in- feriore longiorCy pinnae ani radlis xrii. B. VII* P. xr. /^. VIII. A, -X.VI1. C. xjx. D. xj. Salmo Eperlanus. Linn. S. Triitta. Klein. Miss . V. 20. N.511.11.15. Gron.Zooph. n.i3. t.4. f.3 — 4. n.573. Mus. I. n.49' TlieSmelt. Penn. 313. n. 151. Osmerus. Artédi Geii. 10 pi. 61. n.i. Syn. 21. n. 1. Spec. Eperlan. Duliam. Pècli. II. 4f . 230. pi. 4' f' 2. (Jn reconnoît ce petit poisson à sa mâchoire in- férieure qui est avancée, et aux dix-sept rayons de la na2;eoire de l'anus. L'éperlan brille d'un vif éclat, et présente successivement le verd, le bleu et le blanc dont il est orné. Le corps est rond, et devient plus mince en avançant vers la queue et vers la tète; de sorte qu'il ressemble assez à un fuseau. La tête est petite et finit en pointe émoussée. Les yeux sont grands et ronds ; la maclioire inférieu- re est recourbée; la supérieure est droite. Tqu- LEPERLAiS^ DEAU DOUCE. 24.5 tes deux sont, ainsi que le palais, poui'vues de petites dents recourbées en dedans. On voit aus- si quatre à cinq dents sur la langue. Son corps j qui n'a pas ordinairement plus de deux ou trois pouces de long, est couvert d'écaillés minces, ar- gentines, qui se détachent aisément. Ce poisson est si transparent, qu'on peut distinguer dans la tète, les parties du cerveau, et compter dans le corps les vertèbres et les côtes. La couleur de ce poisson est fort agréable: mais son odeur fort dés agréable. On trouve ce poisson dans plusieurs lacs de nos contrées qui ont un fond de sable; et comme il se tient dans le fond, on le prend rarement hors le tems du frai, à moins qu'on ne l'aille chercher dans les endroits où il se retire. C'est ce qui ar- rive au commencement de la glace: alors on l'ap- porte en quantité dans nos marcIiés des environs du Miiggel et des mitres lacs voisins. Mais dans les teins du frai qui tombe en Mars, il quitte les fonds, remonte en grosses troupes dans les ri\'iè- res, et dépose son frai sur Je sa]>le du fond. Il multiplie beaucoii])* Tons les ans on envoie dans nos marchés une quantité de grandes ton- nes qui viennent des lacs des environs. A Upsal on en forme dans le marché des montagnes, qui répandent une mauvaise odeur dans les rues aj, a) Ijinn. Faun. n. 5^0, 24G LEPEULAN d'eau DOUCE. Ce poisson vit de vers et de petits coquilla- ges. On le prend avec un filet à mailles très- etroites. Il n'a pas la vie dure ; car il meurt un pfU après être sorti de l'eau. Comme la chair de ce poisson n'est pas facile à digérer, on ne sauroit en conseiller l'usage aux persoimes foibles et va- létudinaires. L'estomac de l'éperlan est très-petit, et on X'-oit quatre à six appendices au canal intestinal. L'ovaire est aussi simple, et a des œufs jaunes très-petits, et si tendres qu'on ne sauroit bien les compter. Le péritoine est argentin et garni de points noirs. On trouve cinquante -neuf verte* bres à l'épine du dos, et trente-cinq côtes de cha- que côté. Ce poisson est connu sous difFerens noms. On le nomme ; S tint ^ en Allemagne ; Jdciner stintj lôJJ^ehtint , kurzer stint et stintites ^ en Livonie; jern lodder et sincl lodder, en Lapponie; nors, en Suède; S]nering^ en Hollande; sinclt^ en An- gleterre et en Dannemarc; lodde , roi^n - siUU loddcy rô/Le, krôckley enNorvvège; sjlro iwOy au Japon; et éperlan d'eau douce, en France. On peut aussi transporter l'éperlan pour le faire multiplier dans d'autres eaux, pourvu que l'endroit où on le met soit profond, et que le fond soit sablonneux. Ce poisson est si commun et à si bon marché, qu'il ne mérite pas la peine de le transporter; mais comme il multiplie beau- I^ErERLAlNT D EAU DOUCE. Q/\.J coup, on peut le faire serv^ir de noumture au sandre et à la truite. Ricliter ne connoissoit aucun auteur qui eût écrit sur ce poisson Z?^; et cela est. très -naturel, puisqu'il le clierclioit dans la classe des carpes. L'éperlan de rivière de Bellon cj est une espèce de carpe. Chai'leton a tort de ranger ce poisson parmi ceux qui n'ont point d'écaillés dj, h) Ichth. 916. c) Aqn. 291. tl) Onom. 153. n. 2. XI. L'EPERLAN DE MER, Snhno Eperlano ^ Mnrinus. <3,^me Planche. F ici. Salmo Eperlauus. Linn. S. n. il. t. t\. f. 2. N. 511. n. 15. L'c'perlaii. Duham. Péch, Trutta. Klein. Miss. Y. 20. Jl. 250. pi. 4» f- i* y^e poisson qui ressemble au premier, soit pour la forme extérieure, soit pour la dcmi-tianspa- rence, et le nombre des rayons, en diffère dans les choses suivantes : i)Par la grandeur ctl'épaiiseur du corps. C'est un géant en comparaison du pre- *248 l'ePERLAN de 3IEII, mier. L'eperlan ordinaire n a qne 5 — 4 pouces de long; celui-ci en a 10-12. En Angleterre, on en trouve qui ont treize pouces de long et qui pèsent une demi-livre: Narborough en a vu dans le détroit de Magellan qui avoient vingt pouces de lona; , et huit pouces de circonférence nj. s) Par l'endroit du séjour: le premier vit dans les eaux douces ; le second dans les eaux salées. 5) Far l'odeur, qui n'est pas si forte dans le gros que dans le petit Z^. Ces différences m'ont engagé à le regarder comme une variété du précèdent. Il habite dans les profondeurs de la mer du Nord et de la Balti- que, d'où il sort en Novembre, Décembre et Janvier, et se montre sur les côtes. En Angle- terre, il entre vers ce tenis dans les fleuves cj: mais il n'y vient qu'en petites troupes. Mais dans le teins du frai, qjii arrive en Mars, il y va en grande quantité, pour y déposer ses œufs sur les pierres nues. C'est dans ce tems qu'on en prend une grande quantité, sur-tout en PiTisse, où on le fait sécher par l'air, comme le petit, pour le mettre ensuite dans des tonneaux et l'envoyer en eux d'après une truite vivante des Alpes. Le tems du frai tombe en Février , et dure pendant huit jours» Ce poisson dépose ses œufs près des bords en forme de cercle. Quand lés pécheurs remarquent ces cercles, ils y mettent leurs iilets, pour prendre les autres poissons qui ont coutume de s'y trouver. Sa chair est rouge, de bon goût, et facile <à digérer. Les Lapons prennent ce pois- son en quantité sur leurs montagnes, nj Selon Mr. Pennnnt , on le trouve aussi en An2:le terre sur les montagnes, dans la province de Galles et dans le Westmiinster bj. Tous les ichtyologistea ont donné la truite des Alpes pour une espèce particulière. Mais je crois qu'elle ne dillère paint de rom])le, et que la dilTérence des couleurs v4ent de la qualité de l'eau. La description que JLlnnc nous donne de ce poisson dans son Voyage de Gothland, coniir- a) Linn. Faun. 125. h) B. Z. III. 307. flCG TRUITE DES ALPES. nie mon opinion; car il ne parle point de la cou- leur bleue qu'il avoit donnée pour caractère dans son système. Linné se tonne avec raison, de quoi vivent les truites qui habitent les montagnes, puisque les montagnes continuellement couvertes déneige et de glace, n'olFrentniplantes, ni insectes, ni aucun autre poisson. Mr. le VroîesseurScJirank fait la même remarque de l'omble àii Kœjiigssée'^ cai' l'eau est si nette ,qu'il ne s'y trouve un insecte. Ce poisson senomme: hergforellej en Alle- magne ; truite des Alpes , en France ; ckarr, et red chnrr , en Angleterre ; rôîe et rôr , en Nor- vège; eJiallaeJif iviJisaroh, en Groenlande; ro- ding et raud , en Suède; raudo , en Lapponie; rodj Biitingur et vatuasilungr^ en Islande. l'ombre bleu. 267 XVIII. i; O ]M B R E BLE U, S a l m o IV a r t m a n n L i05me PLANCHE. Le corps bleu, la mâchoire supérieure tronquée: Sahno cneruleus, jnaxilla superiore truncata. B, IX. P. xni, V, x/j. A, x/r. C. xxuj. D. xr. JLa couleur bleue , et la mâchoire supérieure tronquée, sont les caractères de ce poisson. La tète est petite. Les deux mâchoires sont d'égale longueur. La bouche n'a point décents. Les ouvertures des ouïes et de l'odorat se trou- vent près des yeux. Ce poisson est du nombre des saumons lariies et minces; Les écailles sont très -petites à la gorge et au-dessus des nageoires pectorales , de même que près de la nageoire de la queue. L'ombre bleu se trouve dans plusieurs lacs de la Suisse, et sur- tout dans celui de Constance, 011 on le pèche en très-giande quantité. Dans 268 ^ OMBRE BLEU. la première année, ce poisson a un a deux ponces de long; trois à quatre^ dans la seconde; cinq à sept dans la troisième; huit à neuf dans la qua- trième; treize dans la sixième, et quatorze à dix- sept dans la septième. Le tems du frai tombe en Décembre y et dure huit jours. Ce poisson se tient ordinairement dans les fonds ; mais dans ce tems, il cherche les lieux unis, et dépose ses œufs dans les inégalités du fond. Après cela il retourne dans les endroits profonds, où il reste jusqu'au printems. Il se multiplie considérable- ment, et est en petit pour les pécheurs du lac de Constance , ce que le hareng est en grand pour les peuples du Nord: car depuis le mois de Mai jusqu'en automne , on en prend plusieurs millions que l'on envoie dans les cantons et dans les pays étrangers. En été, vingt à cinquante bateaux partent ordinairement tous les soirs pour cette pêche: les plus petits sont montés par deux hom- mes ; les grand par quatre. Les filets dont on se sert pour cela, sont hauts de 60 - 70 brasses : car le poisson se tient le plus souvent dans une pro- fondeur de ,50 brasses et plus. Cependant lors- qu'il y a un orage , ou qu'il tombe une grosse pliûe, il s'approche à 2.0 et quelquefois même à 10 brasses de la surface de l'eau. Plus le tems est orageux, et l'eau agitée, et plus la pèche est abondante. Chaque bateau s'en retourne ordi- nairement le matin avec une capture de 200 - 500 poissons. Mais quand la saison commence à de- v^enir froide, ils se retirent dans des fonds de 100 -Qoo brasses; et comme les filets ne saii- roient aller si bas, on n'en prend alors qu lui très- petit nombre. Il est défendu par une loi, de pêcher l'alevin ou ceux qui n'ont qu'un ou deux ans. Mais on pèche ceux de trois ans, qui sor- tent des fonds, à l'entrée du printems; et le loo se paie communément sur la place 5-5 ilorins^ et même 10 quand la pèclie n'est pas bonne. Il passe pour le meilleur poisson du lac de Con- stance. Ceux qu'on exporte sont ou marines tout frais, ou grillés auparavant; puis, mis dans des barils. On en envoie en l'Allemagne et en France. En automne , l'ombre bleu de trois ans prend une couleur rougeàtre; et comme on croit alors qu'il est malade , on ne le mange pas. En Dé- cembre, qui est le tems du frai, la pèelie recom- mence: mais dans ce tems, sa chair n'est pas si tendre qu'en été. Il vit d'herbages, devers, d'in- sectes et àeJjscJibrootf espèce de mousse aquati- que, dont Mr. le Dr. JJhrhnann nous a promis une description exacte. Outre les poissons voraces, il a pour ennemi la tanche, qui mange ses œufs. 11 n'a pas la vie dure, car il meurt dès qu'il est sorti de l'eau. L'estomac est dur, étroit, et garni de plu- sieiu's appendices. Le foie est gros ; le iiel ver J; ÛTO I.OMBRK liLEU. Ht la vésicule aérienne sans division , et située le long du dos. Ce poisson se nomme: lieuerling elmaydely en Allemagne dans la première année ; stuben et steuben j dans la seconde; gan^Jischy dans la troisième; rhenhen, dans la quatrième, halbfelch^ dans la cinquième : dreyer , dans la sixième ; blaU'- felilcheUf dans la septième; oinbre bleuet bézola, en France ; et bleu - salinon , en Angleterre. Gesner fait de l'oinbre bleu trois espèces différentes. Car son aluulci miniina n'est autre chose qu'un ombre bleu d'un an ; et son cdbula -parva un ombre bleu de trois ans. C'est ce qui a iwàwil en ^rrewr Aldrov and , Jonston, CJiarletoji, TT^llugliby et Ray y qui en ont fait aussi trois espèces. Artédi ajet Linné' bj se trompent aussi en regar- dant ïalbula minîjna de Gesner pour leur saumon blanc suédois cj'j car dans ce dernier poisson la mâchoire inférieure est avancée ; au lieu que dans le nôtre , elle est d'égale longueur avec la superiére. a) Syn. iQ. ii. i. c) SalniO albula. i) Fa un. ii, 5^3. LES SERPES. 271 niMe Genre. LES SERPES. Gasteropeeecus. Article Premier. Des serpes en gênerai. Lie ventre arqué et tranchant. Pîsces ventie ar< cuato aciitocfue, Casteropelecus. Gronoy. Mus. IL 7. Zooph. 135. -L'e caractère qui distint^ue les poissons de ce genre est le ventre arqué et tranchant. La tête est un peu large par en liant, et gar- nie de deux longs sillons. La bouche s'ouvre par en haut. La niaclioire inférieure s'élève et avancée sur la supérieure. L'une et l'autre sont garnies d'une rangée de dents pointues , placées près les unes des auLres. Le corps est mince. Le tronc est pour\ii de huit nageoires. La li^nc la- térale estprès du dos , et lui estparallèle. L'anus 272 I-A SEP.PE. est placé au milieu du corps. Ces poissons sont carnivores; ils vivent du frai des autres poissons, de vers et d'insectes aquatiques. a\ R T I C I. E S E C O K D. I Des Serpes en particulier. LA SERPE, GASTERO PELE eus. *> - • ■ f)7itie P L À N C H £► FiG. 3. -'' Deux rayons à la seconde nageoire du dos. Gastc^ ropclecus pinnae dorsi secundae radiis II.- ' B. Jii. P, IX. F. II, A. XXX IF. C, XXII. D. XII. II» Clupea Sima. Llnii. 524. n. Zoop^i. n. 409* f* ?• ^' 5* 7. Sternicla, n. g. Salmo Gasteropelecus. Pal- Gasteropelecus. Gronov» las. Spic. YIII. 50. t. 3. f. 4"' J_jes doux rayons de la seconde nageoire du dos, sont le caractère distinctif de ce poisson. La tête et le tronc sont fort comprimés. L'ouverture de la bouche est grande , ainsi que LA SERPE. Û75 les écailles, à prvoponion de la grosseur clii pois- son. La langue est blanche , unie et épaisse. ' Entre la lèvre supérieure et les yeux, on apper- çoit les narines. Depuis la gorge jusqu'à l'anus, s'étend un os tranchant, qui est aussi mince que du papier, et qui par son tranchant et sa forme àuquée ressemble à une serpe de jardinier; c'est pourquoi je lui ai donné ce nom. Cet os est cou- vert d'écaillés. Il sert de point d'appui aux na- geoires pectorales. Ce poisson nage avec beaucoup de prompti- tude , car il n'a que peu d'o])stacles à vaincre. Sa patrie est la Caroline et Surinam. Il se nour- rit du frai des autres poissons, de vers et d'insec- tes. Ceux que je possède ne sont pas plus grands que le dessin que j'en ai donné. On voit par cette description , que ce pois- son n'est semblable à aucun de ceux connus jus- qu'à présent. Le rasoir que j'ai décrit, est celui auquel il ressemble le plus , à cause des trois rayons de la membrane des ouïes, du peu d'épais- seur de son corps et de son ventre tranchant. Mais les dents dont sa bouche est armée, l'ex- cluent du genre des carpes, auquel appartient le rasoir. Ainsi Gronov a eu raison d'en ïàire un genre particulier. Mais il s'est trompé en lui refu- sant les nageoires ventrales, en ne donnant que deux rayons à la meml)raiie des ouïes, et en ne faisant pas remarquer la seconde nageoire du dos. Après 274 - ^^ SEPiPE. quoi Linné a fait la même chose; et ce grand na- tmaliste a commis une nouv^elle faute, en le ran- geant dans la classe des harengs nj et en faisant deux espèces. Les rayons de la seconde nageoire du dos, et ceux des nageoires du ventre, sont si délicats , qu'on ne peut les appercevoir qu avec peine; de sorte qu'il n'est pas étonnant que Gro^ nov et KÔhlreuter bj n'aient pas remarqué la der- nière, et Fnllas la première. Statius Mùller se trompe , . quand il dit que la serpe n'a point de dents cj» a) Cltipea Sima et S ter- h) Nov. Com. III. 404. nickLi. c) L. N. S. IV. 375. n. 8^ ICHTHYOLOGIE ou HISTOIRE NATURELLE DES POISSONS. SECONDE PARTIE. ICHTHYOLOGIE OU HISTOIRE NATURELLE DES POISSONS. EN SIX 'parties AVEC 2l6 PLANCHES DESSINEES ET EXLU3IInÉeS d'apuÈs NATURE. V A n MARC ELIESER BLOCH Docteur en mcdeciiie; IMemhre de la Socicté des Scruiafciirs de la îv'^atiire de Berlin, de celles de D.int/,ig, Halle, Zurich, Loiulrc; de l'Académie impériale; des Académies des Sciences de Gottingcn, Franc- lort sur l'Oder, Harlem, Utrecht,' Vliesingen et Mayence ; de la Socicté économitinc de v'^t. rc-tersbonrg, de celles de Eeip/àg, de Bavière et de Zelle. SECONDE PARTIE. A BERLIN, CHEZ l' A U T E U n, et en Commission cliez Bulim, Libiiiiie à Leipzig. 1 7 9 G. LES HARENGS. 275 IV^me Genre, LES HARENGIS. Article Premer. Des Harengs en général. Un enfoncement en forme de canot sur la tête. Pisces fossula scaphaformi in capite. Cliipea. Linn. gen. i38' — Gronov. Zuopli.p. III. — Artéd. Gen. 5. Ilareiigus. Klciii. v. Gg. Hening, Penn. gen. 5g» Hiirengs. Goiian. gen. 45* L'Alose Duham. II. 51^. Ilaiengus Klein, V. 63. vJnreconnoît les poissons de cegcnrepar l'enfon- cement en forme de canot qu'ils ont sur la tête. La tête est applarie des deux côtes comme le corps. La bouche est cliez quelques uns pour- vu de petites dents. Dans quelques-uns , la mâchoire supérieure avance, dans d'autres , c'est l'inférieure. La langue est courte , finissant en pointe êmoussêe. Les yeux sont de moyenne grandeur , ronds , et placés au bord de la tête. Les narines sont douilles, en losanges, et placées entre l'ouverture de la bouche et l'œil, au milieu des deux. Les opercules des ouïes sont en trois S z ZyG LES HARENGS OU quatre petites lames osseuses. Le corps est couvert d'ecailles de moyenne grandeur, et garni de sept nageoires courtes : il n'y a que celle de la queue qui soit longue et fourchue. Le ventre est serre. La ligne latérale est droite , et près du dos , avec lequel elle est parallèle depuis la tète jusqu à la queue. Ces poissons habitent les profondeurs de l'océan. Ils se nourrissent de vers et d'insectes, sur -tout ceux du genre des écré visses: ils man- gent aussi les petits escargots et les œufs des autres poissons. Ils multiplient beaucoup, et meurent bientôt après être sortis de l'eau. Les poissons de ce senre sont connus des anciens icli- tyologistes sous les noms de clialcis , clupeay halec, harengus , trlssa , alosa , encrasicolus et sardina. Ils n'en faisoient que trois espèces: le hareng f l'alose et la sardelle. Dans la suite, lyîllughby nous fit connoître le sprat nj\ Mar- graf le cyprinoides hj'^ Nieuhof celui de la Chine cj. Après cela Osbeck nous a fait connoître deux des Indes orientales i^ZJ, et Linné un de Suri- nam ej. Quelque tems après Forskael six d'Ara- bie et Brumnche un de la mer Acbiaque gj. Je possède dans ma collection quatre quinesontpas a) Iclith. 221. e) Cl. atlieiinoiJes. 523. n, 5, 5) P>ias.i79.Caniarapuguicii. /) Descr. XVI. t. n. 43' "45* r) Ind. II. 2^3. Cl. cliineus. n. iû6. - loQ. d) China. 535. Cl, Mystus et g) Fisc. Mass. 101. iropica. 593. ILES HARENGS. 277 connus. Ce qnifail en tout dix neuf espèces, dont Linné n'en a connu que neuf. Il en rapporte bien onze , mais la sinia et la sternicla ne sont qu un poisson, qui ayant une nageoire adipeuse n'appartient pas à ce genre, comme nous l'avons dit plus haut. Klein admet huit espèces Jijj mais c'est à tort qu'il regarde comme une espè- ce particuhère ce qu'il appelle le l'oi des harengs : car il n'est distingué des autres que par la cou- leur plus ou moins rouge, que l'on voit tantôt sur la tète , tantôt d'un côté seulement. h) Miss. V. 71. n. 2. 378 ^E HARENG. Article Second. Des Harengs en -particulier I. LE HARENG.; XXIXme Planche. Fig. i. Le mâchoire inférieure avancée ; dix - sep t rayons à la nageoire de l'anus. Clupea maxilla in- feriore longiore , pinnae ani radiis xrn. B, nii. P. xFiii. V, IX. A. xni. C. xriii. jD. xnii. Clupea Harengus Linn. S.N. 71. T. 19. i. 2. 5. V. 522. 11. I. Artédi Gen. Ilerino. Penn. B. Z. III. 535. 7. n. 1. Syn. 14. Spec. p.37. u. 160. pi. 63. Gronov. Zoopli. n. 543. Le Hareng. Duhara.Pèch. II. Harengus. Klein. M. V. p. 555. PL 4- f- i- 2. JLe hareng du Nord, ou le strôviling de la Bal- tique, se distingue des autres poissons du même genre par l'avancement de la mâchoire inférieure, qui est recourbée, et par les dix -sept rayons de la nageoire de l'anus. lE HARENG. 279 La tête et roiiverture de la bouche sont pe* tites, la langue est courte, pointue et garnie de petites dents* Les opercules des ouïes offrent ordinairement une tache violette ou rouge, qui disparoi t bientôt après la mort du poisson. La ligne latérale, est à peine visible. Hors le tems du frai, le ventre est tranchant et dentelé. Ce poisson d'un usage si général, qui est s er* vi également et sur la table du riche, et dans la cabane du pauvre , fut connu il y a longtems de nos ancêtres. Mais iJs n'en tiroient pas tout le proiit, que nous en tirons depuis quelques siècles: ilnétoit pas pour eux, comme pour nous, une branche considérable de comnierce; parce qu'ils ne savoient pas le préserver de la corruption, comme on l'a fût depuis par le moyen du sel de mer. Vers la fm du treizième siècle, le hazard offrit à Guillaume BeucJde , bon ^Brabançon , ce secret qui fait vivre tant de gens, comme il avoit offert à Schwnrz la poudre à canon , pui en fait périr un si grand nombre. Le dessein de BeucLel étoit sans doute de garder ce poisson pendant quelque tems; ce qui le conduisit à trouver la manière de les encaquer avec du sel de mer. A force de soins et de réflexions, on est parvenu à perfectionner sa méthode et à la porter au point où elle est aujourd'Iiui. Ce bienfaiteur du genre humain, méritoit bitn l'atlention de l'empereur Charles P^,, qui cent cinquante ans après sa mort 230 LE HARENG. célébra cette invention , en mangeant un hareng sur son tombeau. Cette invention est d'autant plus importante, que c'est en lui-même un poisson mou et gras , que l'on prend sur -tout dans les plus grandes chaleurs de l'été, et qui se gàteroit bientôt sans cette précaution. Nous trouvons ce poisson dans l'océan sep- tentrional et dans la mer Baltique, ovi il habite les fonds, dont il sort partie au printems, partie en été , ou en automne, pour venir sur la surface de l'eau dans les embouchures des fleuves , afin d'y frayer et d'y chercher sa nourriture. C'est une opinion assez générale, que, pen- dant l'hiver, les harengs se retirent dans la mer Glaciale, et que de -là ils entreprennent de grands voyages dans les parties méridionales de l'Europe et en Amérique. Voici ce qu'en disent Vennnnt aj , yinderson bj y Duliainel cj , et Eojnnre. Les harengs effrayés de la quantité d'ennemis , qui les poursuivent, se retirent dens la mer GL^ciale, où ces ennemis ne peuvent vivre sous la glace, parce que l'air leur manque. Mais comme ces poissons se multiplient prodigieusement dans cette mer, ils sont obligés, faute de nourriture, d'envoyer des colonies au commencement de cha- que année. Ces colonies ayant passé sous la glace, s'étendent dans une largeur de quelques centaines û) B. Z. III. 556. e) Pèch. II. 542/ h) Isl. 59 78- iE HARENG. figl àe milles : mais comme ils trouvent dans leurs routes, une grande quantité d'ennemis, qui les attaquent , ils sont dispersés , et se séparent en deux ailes : la droite tire vers l'occident, et la gauche vers l'orient. Les premiers se pressent les uns sur les autres, et clicrclient un asvle vers les côtes d'Irlande , où ils arrivent au mois de Mars; puis ils tournent du côté de l'occident, et arrivent au banc de Terre-Neuve. On ne sait pas précisément où ils vont ensuite. Les autres au contraire , prennent leur route vers le Sud, et se divisent en deux colonnes, dont Tune des- cend le lon' et la lo- che franche bj ; et Gesner la loche d Etang (^. Dans ' la suite, Séha nous fit connoître le gros-ye x JJ; Artédî fit un genre des trois premières sous le nom général de loche, et fit un genre particu- lier de la dernière e). Ensuite Klein plaça ces poissons parmi les anguilles bâtardes (EnchelyO' pus). Il en compte cinq espèces : mais comme il met la loche d'étang sous les N^. i et 2; et le goujon, qid est du genre des carpes, au N° sfji a) De Fisc. II. 204. Cobids tl) Thes.III.103. CobitisAna- Taenia. bleps. h) Cobids barbatula. L. e) Anableps. gen. 25. $) A^uat.404. Cûbrdsfomiis. /) M. IV. 59, I.ES LOCHES. 521 il n'a en elFet que trois espèces. Après cela Gar- den nous fit connoître la Caroline ^J. De sorte que Ldnné a rappoté cinq espèces. Dans le der- nier temps Ilouttuyn a décrit une nouvelle espèce hj. ARTICLE SECOND. Des Loches en particuîler. LA LOCHE D' ETANG. C o hi t i s f o s s i l i s. 3irtie Planche. Fi g. 1. Dix bar] allons à la liouclie. Cohitis ciinis clecein, B. ir. F, XI. /^. FUI. yî. nu. C. xif. D. vu. Cobitis fossilis. Linn. 500. Enclielyopus, Klein M. IV. îi. 4- Artotl. Syn. 5, 11. 5, 59. 11. 1. 2, t, 15. f. 3. Oroiiov. Zooph. 11,201. Oix barbillons à la lèvre supérieure, et quatre à la lèvre inférieure, distinguent ce poisson des autres espèces de loches. Les premiers sont 5) Cobids heterocliia. h) Ilaailem. M. XX. 2. 337. 522 LA LOCHE D ETA]S;G. beaucoup plus grands que les autres; et parmi les derniers, ceux du milieu Sjont les plus petits. La tête finit en pointe. L'ouverture de la bouche est longue, et chaque mâchoire est gar- nie de douze petites dents pointues, dont la troisième, la quatrième et la cinquième avan- cent sur les autres, et sont pourvues en haut d'un bouton. La langue est petite et pointue. Les narines sont près des yeux, et on voit une épine au - dessus. La matière gluante dont ce poisson est cou- vert, a fait douter long tems qu'il eût des écailles : cependant leur existence est maintenant avérée; et j'en ai représenté sur la planche quelques-unes, vues plus grandes que nature. Il leur manque cependant cette belle couleur perlée, qui donne tant d'éclat aux écailles des autres poissons. Elles sont minces, légèrement rayées, et trans- parentes. La peau qui couvre ce poisson est coriace. Nous trouvons la loclie d'étana; dans toutes les eaux de nos contrées, qui ont un fond bourbeux ou marécageux; de même que dans les lacs et les ri\dères où il se trouve des en- droits de cette nature. Elle a la vie très -dure, et ne meurt ni sous la glace, ni dans les marais, pourvu qu'il y reste tant soit peu d'eau. Lors- qu'on dessèclie les marais, elle se cache dans la bourbe; et c'est ce qui a donné lieu à la fable, I.A LOCHE D ETANG, 325 que ce poisson sort de la terre a) y et qu'il n'est porté dans les rivières que par les inondations bj. On a remarqué que dans les teins d'orage, ce poisson quitte le fond, pour venir sur la surface de l'eau, et témoigne beaucoup d'inquiétude. Il peut par conséquent servir de baromètre, en le mettant dans un verre avec un peu de terre grasse et de l'eau de pluie ou de rivière. Dans cet état, il s'agite toujours vingt -quatre heures avant le commencement d'un orage ou d'une tempête, il trouble l'eau, monte et descend; au lieu que par un tems calme, il reste ordinairement en repos sur la terre. On peut garder ce poisson plus d'un an dans une chambre, en le changeant d'eau et de terre deux fois par semaine, et seu- lement mie fois en hiver. Pendant le froid, il faut le mettre dans une chami)re chaude et dans un endroit proche de la fenêtre. J'ai remarqué que ce poisson jette de tems en tems des bulles d'air par l'anus; ce que les autres poissons font par la bouche. I^a loche d'étang parvient à la longueur de lo à 15 pouces. Pendant l'hiver, elle se cache dans la bourbe comme l'anguille, d'où elle sort au printeins, pour déposer son frai sur les herbages. Elle multiplie beaucoup, quoiqu'elle devienne souvent la proie du brochet, de la perche, et niême de l'écrévisse. Cette der- nière la saisit avec ses pattes, lorsqu'elle est en- «) Gtsa. Aqu. 373. h) Oiiomat. H. N. lll^ 14. X 2 324- ^'^ I-OCHE D ETANG. core jeune et la lue. La grenouille mange aussi les petits nouvellement éclos. Elle se nourrit de vers, d'insectes, de petits poissons et déterre grasse. Dans le tems du frai, elle entre dans les nasses garnies d'herbaiiej. D'ailleurs, on la prend au iilet et à la truble. Sa chair est molle et douce; et par conséquent peu estimée, sur- tout parce qu'elle est couverte d'une glu tenace et qu'elle a un goût marécageux. L'estomac est petit; le canal intestinal court et sans courbure; le foie long; la vésicule du iiel grande; la laite et l'ovaire sont doubles. Ce der- nier contient environ 157,000 oeufs brunâtres, de la grosseur de la graine de pavot. Le coeur est allongé. Il y avoit trente cotes de chaque côté, et quarante -huit vertèbres à l'épine du dos. On nomme ce poisson : scklaiiunpitz^er , sclilcnmnheissery pritzker, peisskery pitzkery pfuU Jiscliy inisgurn, fisgurn, schaclitfeger, en Alle- magne; prizker, scklcninnbeisser, pihkstej en Li- vonie; grundel , en Pologne; mural j en Boliè- me; wijwi et piskuni, en Russie; jimcldy-loch, en Angleterre; loche d'étang, en France. Klein ne donne que trois barbillons à ce poisson cy»; Meyer dj et Friscli ej lui en don- nent six; Linné fj , Miillcr gj , Fischer hj huit. c) M. IV. r^g. n. 2. f) S. N. 500. n. 4. (l) Tlieib. JJ. 2.Ck o) L. s. IV. 2^\. e) Mise. Berol. VI, iig. V) Licil. 120. I.A LOCHE D ETANG. 525 Ces errnirs -^Tennent sûrement de ce que ces au- teurs n'ont pas observé ce poisson assez attenti- vement. Il en est de même de ceux qui, comme Doebely llicliter ij y FrifcJi kj et JMnrsigli IJ) lui refusent les écailles, comme l'ont fait les anciens ichtyologistes. IVilliighhy inj et Ray n), de même que Klein oj, Fàcliter pj et un écrivain de nos jours r^, ont regardé notre poisson comme deux espèces dilférentes. C'est par erreur que FfiscJi regarde ce poisson et le suivant comme une espèce de lamproie. Il se trompe aussi, en donnant à ses barbillons les mêmes boutons que l'on vo'jI à l'extrémité des cornes des escargots rj^ et en leur attribuant le même usage. Les bar- billons , comme je le montrerai dans la suite, ont une destination toute diilérente. Enfin, quand Artcdi s) demande si la locbe d'étang est la même que la poeciliu de ScJiojieield, et la iniistclafossilis de Gcsncr et des autres écrivains, nous pouvons lui répondre afrirniativemcnt. i) Iclitliyol. go/f. o) M. lY. 59. 11. 1. 2. k) Au lieu cite. p) Au lifu cité. /) Danub. lY. 59, y) N. Scliaupl. YIII. 40. n. ï7i)Misguni.IcluJi. iig. Pt'its- 1. 2. ker. 124, ;) Mise. Bcr. VI. 119. Il) Syn. 69. n. 6. 20. u. 9. s) Syn. 3. n. 5. 3^6 LA LOCHE DE RIVIERE. IL LA LOCHE DE RIVIERE. Cohitis Taenia, ^ime Planche. Fi g. <2. Une pointe fourcliue de chaque côté de la tète. Cobitis aculeo hijurco in utroque latere capibis, B. III. P. XI. /^. rii. yl. IX. C. xrir. D. x. Cobitis Taenia. Linn. 4gg. Enclielyopiis. Klein. M.IV. 11. 5. Artéd. Syn. 3. n. 2. 5g. n. 4* Groiiov. Zoopli. n, 200. On distingue ce poisson a la pointe fourchue qu'il a de chaque côté de la tête, non loin de l'oeil, et 'dont la pointe inférieure est la plus longue. La tète est tronquée et comprimée. La mâchoire supérieure avance sur l'inférieure. L'ouverture de la bouche est petite, et la bou- che édentée. On y remarque six barbillons, dont deux sont à la lèv^re supérieure, et quatre à linférieure. Ceux qui sont au coin de la bou- clie, sont les plus longs; les deux autres sont plus courts, et les plus courts de tous, sont ceux de la lèvre supérieure. Les yeux sont 3LA LOCHE DE KIVIERE. 527 très -petits. La ligne latérale divise le coi'ps en deux parties égales. Le corps entier, qui n'est que rarement long de cinq pouces et large d'un demi -pouce, est couvert d'une matière gluante, sous laquelle sont cachées des écailles petites, fines et molles. On trouve ce poisson dans les rivières de l'Allemagne, où il se tient ordinairement entre les pierres. Il a la vie dure, et quand on le prend, il pousse une e5])èce de siitlement sem- blable à celui de la loclic d'étang. Je mis deux de ces animaux dans un verre plein d'eau de ri- vière avec du sable; et lorsque par un tems cal- me, la loche d'clang restoit tranquille, l'autre au contraire, ne pouvoit rester longtems à la même place; elle remuoit sans cesse tout son corps, et sur- tout ses lèvres, auxquelles elle donnoit un mouvement assez semblable à celui des lapins, ou des graissets» La chair de ce poisson est maigre et coriace; ce qui fait qu'on ne l'aime guère. Ses pointes sont aussi dèsa^ gréables; parce qu'on ne sauroit guère les tou- cher sans se blesser. Dans les pays où les pois- sons sont rares, on le mange comme le précè- dent. Cependant le brocliet, la perche et les oiseaux d'eau, trouvent sa chair fort bonne. On pourroit par conséquent le faire servir de nour- • riture à ces poissons. La loche de rivdère se nourrit de vers, d'insectes aquatiques, et des 328 ^^ LOCHE DE niVIEPtE. oeufs des autres poissons. Elle fraie en Avrilet en Mai, et dépose ses oeufs dans le fond. Le coeur n'est guère plus gros qu'un grain de clienevis. Le foie est long: et rouireàtre; la vésicule du fiel petite; le canal intestinal court et sans sinuosités. L'épine du dos consiste en quarante vertèbres, auxquelles sont attachées vingt -huit côtes de chaque côté. Ce poisson se nomme: steinpitzger, steiben- eisscTy stelng7'unclelj. sbeinsclnnerly en Allemagne; schuiecrpùtte y steinbicker, dans le Schless^vig; steinbeisel, en Autriche; tànglnkc , en Suède; Tiialewka, en Russie ; dorngriindd, nlaninaaTciU'- siSf enLivonie; sclunerbutùe, steinbilLei', en Dan- nemarc; loche de rivière, en France, et river- loch, en Angleterre. FriscJt dit que ce poisson ne sauroit fermer la bouche, et que la nature l'a pourvue d'une membrane, avec laquelle il ferme et ouvre l'ou- verture à son gré. Mais j'ai souvent observé, qu'elle ouvroit et fermoit la bouche. Je puis aussi répondre affirmativement à la question de Klein, qui demande s'il faut rappbrter la loche de rivière à la cobitis barbatula nculecita de Ges- ner et de IVillughby, et à la lampreta pungens de Frise] i. Dans IVillughby et Ptoi, on trouve ce pois- son sous deux dénominations différentes, aussi bien que dans Jonston et Riiysch: une fois sous LA LOCHE DE RIVIERE. 309 celui de cohibis hnrhatuln aculeatay et une autre fois sous celui de taenia cornuta, La plupart des iclityologistes ont aussi refusé des écailles à ce poisson. ni. LA LOCHE FRANCHE* Cohitîs hnrbatula. ^tme Planche. Fi g. 5. La tête sans pointes; six barbillons à la bouche: Cohitis capitc inernii, cirris sex, P. x, l\ ix. ^. nii. C. x/ j/. D. zx. Cobitis bavbatnla. Liiiu. Enchclyopus* M. IV. 59. 11, 499- n. 2. Ancd. Syii. 2. 3. t. 13. f. 4. n. 1. Gronov. Zoopli. Tlie Jîe.udcd-locli. Peim. igs. n. 202. n. 142. pi. 53. \^e poisson qui a comme les précédcns six bar- billons à la bouche, en diffère pourtant en ce qu'il n'a point de pointes. Les six barbillons sont placés à la lèvre supérieure, dont quatre sont au milieu, et un à chaque coin de la bouche. 330 LA LOCHE FHANCIIE. La tête est abaissée par devant, et se ter- mine en pointe énioussée. La mâchoire supé- rieure avance sur linférieure. L'ouverture de la bouche est petite, aussi bien que l'oeil. La bouclie est édentée. Le corps est rond, et cou- vert de petites écailles, dont j'en ai représenté une sur la planche plus grande que nature. La ligne latérale a une direction droite, ainsi que le ventre et le dos, entre lesquels elle va de- puis la tête jusqu'à la queue. Ce. poisson n'a guère plus de trois ou qua- tre pouces de long. On le trouve dans tous les petits ruisseaux qui ont un fond de cailloux ou de pierres, sur -tout naturel aux pays de mon- tagnes, de l'Allemagne, de l'Angleterre, de la France et de la Russie. Dans nos contrées, on le trouve en abondance dans le Bober, la Neiske et près de Treuenbriezen. La loche meurt dès qu'elle est sortie de l'eau, et même quand elle reste pendant quelque tems dans une eau tran- quille. Comme dans ce dernier cas elle perd beaucoup de son bon goût, il faut avoir soin d'agiter les vaisseaux dans lesquels on la trans- porte du marché, ou de la rivière à la cuisine. Si l'on veut la conserver pendant cjuelque tems, il faut la mettre dans une huclie trouée , au mi- lieu du courant d'une rivière, afin quelle re- çoive toujours de l'eau nouvelle. La chair dé- licate de ce poisson surpasse celle de tous les ILA LOCHE FRANCHE. 531 autres pour le bon goût, sur- tout aux mois de Novembre et de Mai; et comme elle est de fa- cile digestion, les personnes foibles et valétudi- naires peuvent en manger sans danger. La loche vit de vers et d'insectes aquatiques. Elle fraie en Mars, et multiplie beaucoup. Quand elle est petite, elle devient souvent la proie des au- tres poissons. On la prend avec des filets légers, le carrelet, la louve et la nasse, que l'on place dans le courant de la rivière. On prétend que le goût de ce poisson est plus délicat quand on le fait mourir dans du vin ou du lait. On le marine comme les lamproies, et on peut le gar- der lono-tems de cette manière. On peut aussi transporter ce poisson d'une eau dans une autre; cependant il est nécessaire alors de le faire dans un tems frai, et de tenir dans ime agitation continuelle l'eau dans laquelle on les transporte. C'est ainsi que Frcdéric I, roi de Suède en fit venir d'Allemagne, et les naturalisa dans son pays. La St. Martin est le tems le plus favorable pour cette opération. Pour construire des fosses à loches, il faut choi- sir dans un ruisseau, un endroit qui ait un fond de cailloux, ou qui reçoive de l'eau d'une source. Cette fosse doit être profonde de la moitié de la hauteur d'un homme, longue de six à huit pieds, et moitié aussi large. Elle sera garnie de planches percées, on revêtue d'un ouvrage 552" I^A rOBIIE FRANCHE. de vànier, cle manière cependant qu'il y ait wn espace d'un demi -pied entre cet ouva'age et les côtes. Cet espace sera rempli de fumier de bre- bis bien entassé. Alors on conduira l'eau dans la fosse, et on garnira l'ouverture d'une plaque de fer -blanc trouée; non seulement afin d'éviter l'entrée des corps étrangers, mais aussi celle des rats d'eau. Au-dessous, on pratique à la méjne hauteur, une issue à l'eau superflue, et on y met pareillement une plaque de fer -blanc. Il doit y avoir trois à quatre pouces de fond plein de cailloux, et avec quelques grosses pierres, afin de fournir au poisson des endroits propres . à frayer. Les loches que l'on met dans ces fos- ses, trouvent une nourriture abondante dans le suc du fumier et dans les vers qui s'y forment Cependant on leur donne aussi du pain de clie- nevis ou de la graine de pavot. Comme elles nuiltiplient en grande quantité, et que le grand nom1)re de petits pourroit les empêcher de croître, on fait bien de se conduire à cet égard comme pour les carpes; c'est-à-dire, d'avoir trois fosses: l'une pour le frai; l'autre pour l'a- levân, et une troisième pour les loches destinées à la cuisine. Le foie et la vésicule du fiel sont grands. Le canal intestinal est court. Le coenr est en losange et d'un rouge vermeil. Quand on con- sidère la queue de ce poisson au microscope, on LA LOCHE F1\ANCHE. 353 distingue aisément la circulation du sang. Il y a quarante vertèbres à l'épine du dos, et vingt côtes de chaque côté* Ce poisson se nomme: sclnnerl, dans pres- que toute l'Allemagne; sclniLcrUng, schuierLeiu, en Prusse; grûndel, grûndliug, hartgrundcly en Silésie; sinerle, sinirlirif on Saxe; grundel, en Autriclie; suierlins:. en Danncmarc; "ronlinsTn en Suède; pishosopy en Faissie; Jioogkyher^ en Hollande; ùcarded-locJie en Auglelcrvc, ici loche franche et peut bcirhot, en France. 554 ^^'^ BROCHETS, Vlme Genre.' LES BROCHETS. Es o X. ARTICLE PREMER. Des Brochets en général, La tête applatie ; la nageoire dorsale près de la queue. IHsces capite depresso, pinna dorsi ad caudam, , Esox. Linn. 515. gen. 130. Synodus. Gron. Zoopli. îi2. Aitéd. gen. 14. Spliyrae- Esox. 117. na. 34. Pike. Peiin. gen. 134. Mastaccembelus. Klein. M. L'Aiguille. Goiian. gen. 43' IV. 21. Psalisostonuis. 22. 107. 145. Lucius. M. V. 75. J_^es poissons de ce genre ont la tête applatie, et la nageoire dorsale est vis-à-i-is de celle de l'anus. L'ouverture de la bouche est grande. Les mâchoires sont armées de dents pointues; tantôt c'est la supérieure qui avance, tantôt l'in- féiieure. La langue est large, libre, et chez la LES BKOCIIET6. 355 plupart garnie de dents. Le palais est uni ; la gueule grande. Les narines sont doubles, et se trouvent près des yeux. Les opercules des ouïes sont grands et l'ouverture large. Le corps est alloncre et couvert d'ecailles dures. Le dos est rond; le ventre large, et les côtés sont compri- més. La ligne latérale, qui est à peine visible, est droite et plus près du dos que du ventre. La cavité du ventre est longue. Le corps est garni de sept nageoires. Ce poisson vit de proie. Il se multiplie beaucoup, croît promptement, et nage avec ^-ivacité. Les Grecs et les Romains ne parlent que du spret aj , de l'orphie bj et du brochet cj, TVillughhy dj, Marcgraff ejy Browne f) , Cntes^ hy g) y Gronov hj, Linné ij y Forshnel h) et Mo- lina l) ont décrit chacun une nouvelle espèce; ce qui fait onze, dont nous en trouvons trois en Eu- rope et sept en Amérique. a) Esox Spliyraena. f) Piper. Jam. 443, E. Ilep- h) — Belone. setns, c) — Luciiis. D-) Vulpes. Cavol. E. vnlpes. il) Iclit. App. 22. t. P. 8- f. 2. h) Zooph.n. 142. E. Synodus. E. Osseus. i) E. Gymnoceplialiis. 517. e) Tiniiicu Brasil. 168. E. k) — marginatua.Desc. A.67. Brasiliensis. /) Cliili 507» 356 LE BROCHET. ARTICLE SECOND. Des Brochets en particulier. I. LE BROCHET. Esox Lucius. ^2^ P L A N C H £♦ Le museau large, la tête applatl. Esox capîte couipresso , rictu mnplo, B, xr. P. xjf. P\ x. A. xFJi. C XX. D, XX. Esox Lucius. Linn. 516. Pike, Pikerel. Penn. 320. ii. n. 5. Artéd. Syn. 36. 153. pi. 65. u. I. Brochet. Duliam. II. 522. pi. Gronov. Zoopli. ji. 561. 27. f. 6. \ ,e poisson commun et si connu, a la tête d'une forme singulière. La partie antérieure est ap- platie, et la postérieure comprimée. La tête est irrosse: l'ouverture de la bouche large, et s'étend presque jusqu'aux yeux* La inachoire inférieure avance un peu sur la supé- LE BROCHET. • 337 rieure: on y voit une rangée de dents, dont les antérieures sont petites, et les postérieures plus grosses et plus fortes. La mâchoire supérieure n'a qu'une petite rangée de dents feur le devant: celle du milieu est petite; les autres sont pins grosses et rentrées en dedans. Ces dernières sont posées, partie dans la peau, partie dans les mâchoires: elles sont au nombre de sept cents, sans compter celles qui sont derrière, vers les ouïes autour de l'ésophage. 11 est re- marquable que les dents de la mâchoire sont successivement fermes et mobiles d'une à une. Le corps est quarré, en ce que le dos est large jusqu'à sa nageoire; de mê/ne que le ventre fus- qu'à la nageoire de l'anus, et que les côtés sont comprimés. On trouve quelquefois des brochets dont le fond est d'un jaime d'orange, sur lequel il y a des taches noires. Les pêcheurs hollan- dois lui donnent le nom de roi des brochets, La première année, il est généralement verd; la seconde, le verd se change en gris, et l'on voit paroitre des taches pâles, qui deviennent jaunes l'année suivante. Quelquefois ces taches sont si nombreuses, qu'elles rentrent les unes dans les autres et forment des raies. La liirne latérale est droite, et le corps couvert de peti- tes écailles oblongues et dures, dont Rlchter fixe le nombre à 17,000. Y 338 J-Ii BKOCHET. On trouve ce poisson dans presque toutes les paj ties du monde; excepté en Espagne et en Portugal, selon Ainatus, Il habite les fleu- ves, les rivières, les lacs et pre<^que toutes les autres eaux dormantes. Mr. Falk dit qu'on le trouve en Russie et en Sibérie dans tous les lacs d'eau douce qui, en été, n'ont pas plus d'une demi-dragme de sel sur douze onces d'eau. Dans les contrées des Barabinzes, des Ischimsches et des Isettisches, on prend, en été, une quantité prodigieuse de ces poissons; et après les avoir éventrés^et salés, on les étend pour les faire sécher à l'air: quelquefois on les met par tas, en plein air, jusqu'à ce qu'on les vende. Mr. y allas raconte qu'aux bords du Wolga, on fait du caviar des oeufs du brochet: mais il n'est pas aussi bon que celui de l'esturgeon. Le brochet nage avec rapidité, est très-vorace et fait un giand tort à la pêche. Il n'épargne pas même son espèce. Non seulement il prend les petits poissons; mais il sait aussi s'emparer de ceux' qui sont presqu aussi gros que lui, en les pre- nant par la tête, et en les tenant serrés entre les dents jusqu'à ce que la partie antérieure soit amollie dans son large gosier et préparée à la digestion; puis il retire petit à petit le reste jusqu'à la queue. Quand il attrape une perche, il ne l'avale pas tout d'un coup, de peur de se blesser par les pointes de la nageoire du dos; 1.E BROCHET. 339 mais il la tient entre ses dents jusqu'à ce qu'elle soit morte, C'est par la même raison qu'il voit tranquillement l'épinoche, jouer autour de lui. Il n'y a que le jeune brochet sans expérience, qui la morde quelquefois, lorsque la faim le presse; mais il lui en coûte la vie, parce que l'épinoche avec sa pointe perce son gosier d'ou- tre en outre. Il n'y a pas longtems que je reçus un brochet qui avoit t^iuis la bouche une épino- che, dont la pointe de la nageoire dorsale lui sortoit par les narines. Le brochet ne se con- tente pas des poissons, il avale aussi les autres habitans des eaux, tels que les oiseaux, les rats, les serpens, etc. On a aussi trouvé dans sa gTieule des parties de corps humain , des jeunes chiens ou chats qu'on avoit jettes dans l'eau. Une chose remarqua])le; c'est que malgré sa vo- racité, il distingue très -bien les choses véné- neuses. On a vu un brochet, qui étoit dans ime huche, à qui on jettoit des grenouilles et en- suite des crapauds, gol^er avec avidité les pre- mières, et rendre les derniers après les avoir avalés nj. Le brochet est de tous les poissons que je connois celui qui croît le plus prompte- ment. La première année ; il parvient à la lon- gueur de hmt à dix pouces; la seconde, à celle de douze à quatorze, et la troi:>ième, de dix- huit à vinat. Selon les obsen^ations de IledeV' o a) Willughby. £56. Y 2 340 OLE BJIOCHET. strÔTiiSf un Lrochet de six ans doit avoir une aune et demie de long; un de douze ans, deux aunes bj'^ il parvient jusqu'à la longueur de six â huit pieds cj. On en trouvée même dans nos contrées, qui restent morts ou malades sur les bords du lac Arend dj, qui sont aussi grands ^ue des hommes. Comme ce lac est plein de monticules et de collines, qui empêchent qu'on ne puisse le pêcher jusqu'au fond, les gros bro- chets se cachent dans les fosses; et s'il arrive par hasard qu'ils en prennent un dans leurs Hlets, il les déchire, et s'échappe. Richtcr parle d'un brochet qui pesoit 45 livres, qui fut pêche en 1752 à Mortzbourg près de Dresde ej. Le Dr. Brand en a vu un de sept pieds, qui avoit été pris dans sa terre de Zesen, près de Berlin: et on a vu des brochets, qui pesoient 200 livres^. Scheffer raconte qu'il y a en Laponie des bro- chets plus grands que des hommes g). Mais les plus grands se trouvent en Russie dans le Wol- ga 11). Ce poisson parvient aussi à un âge très- avancé. Rzaczynsky ij parle d'un brochet qui avoit quatre-vingt-dix ans; et celui dont nous allons parler en avoit au moins deux cents soi- xante-neuf. Tline met le brochet au nombre b) Schw'cà. Abh. XXI. 218- è) Bresl. Sainml. Ann. 1725. f) Klein. M. V. 74. 175. (l) Bekni. I. 1077. '0 Millier. L. S. IV. 340. e) Ricluer. 759. £) H. N. Pol, 152, /) Laponia. 354. LE BROCHET.- 54.1 des poissons qui parviennent au poids clé près fie mille livres JiJ, En 14.97, on en prit un à Kay- serslautern dans le Palatinat, qui avoit dix -neuf pieds de long, et qui pesoit trois cents cinquan- te livres. On la peint dans un tableau, que Ton conserve au château de Lautern, et Ton voit son squelette à Manlieim. L'empereur Barhej'osse , qui le fit mettre en 1250 dans cet étang, lui fit mettre un anneau de cmvre dore, qui pouvoit s'élargir par ressort. Il fat pèche deux cents soixante -sept ans après. On conser- ve encore cet anneau à Manheim, en mémoire de ce poisson extraordinaire. Le tems du frai du brochet dure depuis le mois de Février jusqu'au mois d'Avrih II fraye en trois divisions. La première se nomme en allemand Ilornlicchty brochet de Février, parce qu'elle fraye dans ce mois. Dans ce tems, ils cherchent dans les lacs, des endroits unis, cou- verts de plantes ; ou lorsque les rivières ont communication avec les lacs, ils remontent dans ces dernières, et vont y frayer sur \e^ herbages. Alors ils sont si occupés de ce qu'ils font, qu'on peut les prendre à la main; ce qui fait que les petits deviennent dans ce tems la proie des oi- seaux pécheurs. La seconde division, qid est plus grosse, paroît au commencement de Mars; ce qui lui a fait donner par les pécheurs alle- k) N. H. 1. 9. c. 15. 54-2 LE BrvOCHET. mands, le nom de brochet de Mars. La troi- sième se montre en Avril, et se nomme en Allemagne brochet à grenouilles, parce quelle fraye en même tems que cet animal. Le brochet a la vie si dure, qu'on peut lui ouvrir le ventre et le coudre ensuite, sans qu'il en meure. On fait souvent, à ce qu'on djt, cette opération en Angleterre: car comme il eât fort estimé, quand il est gras, et fort peu quand il est maigre, les pécheurs pour s'en assurer, lui ouvrent le ventre, le recousent, et le re- jettent dans le lac s'il ne leur consent pas l). Les ennemis du brochet sont, la perche et le sandre, auxquels il échappe cependant par la rapidité avec laquelle il nage. Mais ils se dé- truisent beaucoup les uns les autres. On pèche ce poisson avec le colleret, la truble, l'épenner, la louve , la nasse et la ligne. Lorsque le tems est orageux, la faim le fait courir après les ap- pâts; parce qu^alors les autres poissons se reti- rent au fond de leau. Le clair de lune favorise la pêche du brochet; sans doute parce qu'alors le poisson que l'on attache à l'hameçon frappe plutôt sa vue. On prend aussi le brochet à la turlotte. En Suède, on le prend au trident, et au fiu ptndant la nuit; et cela toute l'année. En Allemagne, cette pêche ne se fait qu'en hi- ver sous la glace. La pêche du brochet sous la 1) Gesner. Aquat. 503. LE BROCHET. 343 glace est sur -tout la plus faroral)le et la plus abondante. Lorsque le brochet est attrappé, il rend la proie qu'il a avalée. Comme la chair du brochet nest pas arasse et quelle est facile à diiiérer, elle fournit une bonne nourriture aux persounes foibles et valétudinaires, sur- tout quand le poisson est petit. En Allemagne, com* me en Laponie, on sale, on sèche et on fume ce poisson, pour l'envoyer dans de^ tonneaux dans les pays étrangers. Voici la manière de le saler: Après l'avoir vidé et bien nettoyé, on le coupe par morceaux: on le couvre de sel, et on le met dans des tonneaux. Ceux que l'on veut faire sécher ou fumer, doivent rester trois jours dans la saumure après avoir été préparés comme nous venons de le dire. On fait grand commerce de cette marchandise, et on l'envoyé dans les pays catholiques. L'ésophage, aussi bien que l'estomac, sont garnis de grands plis, qui sont pâles dans le pre- mier, et rouges dans le second. On les recon- noît aisément aux fibres charnues qui vont en long et en large. Le mouvement qui résulte de cette direction, met le brochet en état de ren- dre à son gré les corps qu'il a avalés. L'esto- mac va jusqu'à la moitié du corps. Le canal intestinal n'a qu'une sinuosité: j'y ai trouvé sou- vent le ver solitaire à trois pointes inj^ et j'ai ■N m) Beschâft. IV. 541. t. 15. 544- ^^ EROGIIET* quelquefois tire cinquante et jusqu'à cent vers dans un brochet de trois livres. Entre les plis de résophage, j'ai trouvé le double troUy et Yécldnoryngue dans le canal intestinal nj. Le coeur forme un quarré long, sur lequel est l'o- reillette, et au-dessus le sac artériel. Le foie, est, long et sans division. La vésicule du fiel est grosse, et le fiel jaune. La rate est petite et'qiiarrée; les reins sont placés le lonn; de l'é- pine du dos, et la vessie est près de l'orifice du nombril. La vésicule aérienne est simple, et la laile est double aussi bien que l'ovaire. Au mois de Mars, j'ai compté 156,500 oeuFs jaunes de la grosseur de la graine de millet dans un brochet de six livres. Dans dilTérens pays, on fait du caviar avec les oeufs de ce poisson. Dans la Marche -Electorale, on le prépare av^ec des sardines, et on en fait un mets excellent, connu sous le nom de netzin. Il a soixante et une vertèl)res à l'épine du dos. et trente côtes de chaque côté. Ce poisson se nomme: heclib^ en Allemagne; graslieclity quand il n'a qu'un an ; heclit, aua;^ en Livonie; szuk et szuka, en Pologne; stuklin et csu]>n, en Hongrie; tschukay en Russie; tschor- tun et tsortauy en Tartarie; zurnba et tscliorba, chez les Calmouques; tscJiopugy chez les Wot- jaques; gidddey en Suède; gidde, en Danne- k) Le 1. c. 557. t. 14. I.E EROCIIET. 545 marc; snoek el^eep-viscJij en Hollande; pike et pikerelle^ en Angleterre; Innceroti ou lançon, en France, quand il est petit; brochet et poU gnardj quand il est de moyenne grandeur; brO' chet carreau y quand il est gros; luzzo et luccto, en Italie; trigle, dans l'ile de Malthe; etkamas, au Japon. Comme le brochet est un poisson ge'nérale- ment estime, qu'il croît promptement, et qu'il vit dans toutes les eaux, un économe ne fera pas mal de faire des étangs à brochets, sur -tout dans les contrées où les poissons sont rares. Pour cet effet, on peut prendre les étangs qui ne seroient pas propres aux carpes, à cause des ombiages, ou qui auroient une source froide dans le fond, ou un fond marécageux. Il faut seulement songer à leur fournir une nourriture suffisante; ce qu'on fait avec des poissons de peu de valeur, tels que le rotengle, la rosse, le gardon, la bordélière, le carassin, et la cai'pe, selon la nature des eaux. Les trois premiers conviennent à im fond sablonneux, et les trois dernières espèces se plaisent mieux dans une eau marécageuse. Il faut avoir attention d'empois- sonner avec de pelits brochets, et de choisir pour nourriture de gros poissons sur le point de frayer; parce qu'un gros brochet avaleroit bien- tôt la mère et les petits. On peut espérer un double avantage, quand on met de jeunes bro- 34-6 LE BROCHET. cïiets dans un étang à carpes, où il y a de pe- tits poissons blancs: car comme ces derniers cherchent la même nourriture que les carpes et que les brochets nian^ent les petits poissons blancs; cela fait que les carpes y profitent aussi; parce qu'alors elles trouvent plus de nourriture. Il est prudent d'ôter les Viochets dès quils ont acquis une certaine gro&seur; sans quoi ils pour- roient devenir aussi dangereux aux carpes. Pline remarque que le brochet à l'ouïe ex- trêmement fme qjy et Morel raconte, que du tems de Charles IX ^ on nourrissoit dans un ca- nal du Louvre, im brochet, qui s'approchoit pour manger toutes les fois qu'on l'appelloit pj, Richter assure aussi qu'il a vu un exemple de cette nature. On croit que le brochet ne fut connu en Angleterre quen 1537, sous le règne de Henri VIII^ où on le mit dans les eaux de ce pays qj» 6) N. H. 1. 10. c. 70. éj) Penn. 520. p) Rictt. Ichtli. 62. L OPiPIIIE. 54.7 IL L' O R P H I E. Esox Eelone, 53"li Planche. Les deux mâchoires en forme de poinçon: Esox rostro buhulato, B, x/r. P. xiu. /^. vu. A. y^y^iu. C y^ymi, U, xx. Esox Belone. Linn. 517. Mastaccembelus. Klein. M. n. 6. Aitéd. Syii. 27. IV. 2i. 11. 1. t. 3. f. 2. 11.2. Gronov. Zooph. 117. The Gar-Pike. Penii.J524. n. n. 362. 154. pi. 63,. J_Jeux lono^ucs mâchoires finissant en pointe, et dont la supérieure est plus longue que l'in- férieure, dislinouent ce poisson des autres espè- ces de brochets. Ces maclioires sont rondes et garnies de dents noires, qui engrainent les unes dans les autres, et qui leur donnent un air de scie. L'ouverture de la bouche va jusqu'aux yeux. La tête est petite en elle-même^ si on la considère sans le long bec. Les narines sont rondes et placées près des yeux. Le corps est 348 , i/oRpiriE. étroit, long et presque quarre; sa longueur est à sa largeur comme 15 à i. Cette figure étroite et longue, lui a fait donner par les anciens le nom d'aiguille. Les côtés sont couverts de lon- ^gues écailles tendres. ILe m s. 127. 58. 11. 17. Batradius M. Le Silure. Goïiaii. H. d, P. V. 85- gen- 24. 105. 157. V_/n reconnoît les poissons de ce genre à leur coi-ps sans écailles, et à la bouche garnie de barbillons. La tète est grosse, large et applatie. L'ou- verture de la bouche et la gueule sont larges; les lèvres épaisses; les mâchoires garnies de dents. La langue est épaisse, unie et courte. Les yeux sont petits, et \ts opercules des ouïes Z.BS SILURES. 555 peuvent a peine se mouvoir. La membrane des ouïes est épaisse, large, et l'ouverture petite et de côté. Le tronc est allongé, comprimé, cou- vert d'une matière visqueuse, et par conséquent glissant. La ligne latérale est près du dos; le ventre court et gros, et le corps garni de sept naiieoires courtes. Ordinairement celle de la poitrine ou du dos est garnie d'un rayon den- telé. La plupart des silures ont aussi une na- geoire adipeuse au dos. Ils vivent de rapine, na- gent lentement, et restent pendant le joiu- au fond. 11 est singulier que de vingt et une espèces comprises dans ce genre, selon les caractères distinctifs que nous venons d'indiquer, il n'y en ait qu'ime qui soit naturelle à l'Europe; et c'est par cou équent la seule que les anciens ichtyo- logistes ont décrite. Mnrcgrnf est le premier qui nous fit connoître deux silures du Brésil nj\ NicuJtoffen a décrit un des Indes bj'^ IJ^illugJiby cj et liciy cl) ont fait des premiers un genre parti- culier, et ont décrit le dernier sous le nom de lamproie des Indes ej. Qiioiqa^rtédi ait beau- boup profité de ces prédécesseurs, TVillanJiby et Rnjy il n'a pourtant pas compris ces poissons dans son système. Artédi ne rapporte que deux espèces, dont la seconde, qui est notre lote, a) Bagre. Brasil. 173. S. Ba- c) Ichth. 13g. gre et Catiis. d) Syii. ^\. n. 1 — 6. h) lud, 11.271. S, Anguillaris. e) App. 4. Ray. Syn. 1^0. 354- ^^^ SILURES. n'ppparlient pas à cette division, mais aii genre des cabliaux, où il l'a placée dans une autre en- droit^. Bientôt après Sébn nous fit connoitre quatre espèces de l'Amérique; savoir, le silure dauphin gj, le silure à bandes hj , le casque ij et le silure rude kj. Peu de tems après Catesby décrivit le silure cuirassé IJ» Dans la suite, RuS' sel JiiJ nous fit connoître un silure d'Asie; //a- selquist n) deux du !Nil; Garden, un d'Améri- que o)'^ Gronov, un des Indes pj , et quelque t(^ms après Tinné sept silures de Surinam et des Indes orientales, qu'il avoit tirés de divers cabi- nets dhistoire naturelle* De sorte que nous connoissons maintenant vin^^t espèces de silures. Parmi les vingt étrangères, nous en devons sept à Linné sept q) à Séba deux , à Marcgraf , autant à Haselquist y à NieuhoJjF, Russely Garden, Cn^ tesby et Gronov, chacun une, et eniln, Fors^ kacl nous en a fait connoître deux du Nil 7;^ et une de la Méditerrannée. J) Syn. 53. n. 15. 7i) Schilde et Cheilan. Rcis. 5) Thesanr. IJI. 87. ii. 15. p. 412. 41 5. SilurusMystus Silinus CaJliclithys. L. et Clarias. L. /i) Le livre cité. 34. n. 6. Silu- o) Silurus Felis. L, ruî« fasciatiis. L. ^) Zuopli. 11.385- costatus.L. ï) — — — 35. n. 7. ^alca- 9) Asotiis. n. 1. Etrachiis. n. tus. lu. 6. unHecimalis. n. 7. mi- k) — — — 36.11.10. Aspre- litaiis. n. 3- ineimis. n. g. do. L. carinatus. 11. 14. Ascita. /) Suppl, p. p. Silurus cata- n. iq- phvacins. L. r) Silurus Docmak, Bajad. m) Hist. of Aleppo. p. 8g. et cornutus, Descr. Anim. cous. L. p. 6^, LE SILURE. 355 ARTICLE SECOND. Des Silures en particulier I. LE SILURE. Sllurus Glanis, ; 4.nie Planche. 17 Une nao|;eoire au dos , six barbillons à la bouclie. Sllurus pitina dorsi union ^ cirris sex. B, xvi, P. xr/ii. V^. :s.iii. A, xc. C. x/ 11. T), r. SiliiTiis Glanls. Linn. 50J. Gronov. Zooph. 11. 525. Klein. n. 2. Artcd. S) 11, 110.11. j. M. IV^ 10. n. 1. t. 1. i". 1. Une seule nageoire au dos, et six barbillons à la bouche, di>nt ceux de la lèvre supérieure sont les plus longs, forment les caractères distinctifs de ce poisson. La tète a la figure d'une pelle. L'ouver- ture de la bouche est très -grande, et les deux mâchoires, dont rinfcrieiire avance un peu, sont 556 JLE SILURE. garnies d'une quantité de petites dents recour- bées. Outre cela, on trouve dans la gueule quatre os, qui sont pourvus de mêmes dents. Les narines, qui sont rondes, sont placées en- tre les deux plus longs barbillons. Le ventre est court et large; le corps est épais et long; et couvert de limon. On trouve ce poisson, presque dans toutes les eaux douces de l'Europe, mais pas dans celles de l'Angleterre. Ce poisson est avec l'esturgeon le plus gros poisson d'eau douce. RicJiter nj assure qu'on a pris pi es de Limritz^ en Poméranie, un siliu'e qui avoit la gueule si grande, qu'on pouvoit y faire entrer un enfant de six à sept ans. Selon Aldrowand bj , un si- lure a valé près de Prèsbourg, un enfant qui se baignoit. Ce poisson devient fort long et fort gros. Aristote cj en connoissoit de trois pas de long, et Fline dj en avoit vu qui pesoit 225 livres. Richter en a vu, un sur une charette, qui étoit beaucoup plus long que la voiture. Ou en trouve dans la Wolga qui ont vingt em- pans ej. Selon Kramer fj , il y en a dans le Danube qui pèsent plus de 500 livres, et dont"" le ventre est si gros , que deux hommes ne sau- roient l'embrasser. Ils sont aussi si gras, que a) Ichth. 5.J0. d) N. II. 1. 4. c. 14. h) De Pisf.. 563. e) Pall. Reis. I. 213. c) H. A. 1. 9. c. 13. /) Elencli. 383. LE SILURE» 357 dans quelques contrées près de ce fleure, on fait sécher à l'air la peau grasse de cet anima], et on s'en sert au lieu de lard hj. Selon Mr. Falky ce poisson se trouve dans la mer Caspienne, dans le Terec, le Wolga et l'Ural. A Astracan, il est en si grand nombre, qu'en hiver le pied, ou 40 livres, de la chair de ce poisson, ne coûte que quinze à vingt -cinq copecs. Dans ce pays, on écorche le silure, et la peau après avoir été fro- tée avec delà graifFe, tendue et féchée, devient comme de la corne: l'on s'en sert même dans les grandes maisons, au lieu de verre, pour les vitres et les lanternes. La colle faite de ce pois- son est mauvaise; dans les environs de l'Ural la livre, de la première main, ne coûte que cinq copecs. On peut donc, à certains égards, re- garder le silure comme la baleine d'eau douce. On en trouve aussi dans nos contrées d'une iiros- seur considérable. Il n'y a pas longtems qu'on en a péché, dans un lac de Spando^v un silure qui pesoit 120 livres. En 1761, on en prit un à Writzen sur l'Oder, dont la chair salée rem- plit deux tonnes et demie: une tonne pèse ordi- nairement trois cents livres. Le silure est un poisson fort nonchalant. Ses nageoires sont courtes; son corps gros, et il ne peut nager que lentement. Il est entre les poissons ce que le //) Marsigl. IV. 8- 558 ^E SILURE. jjnresseux est parmi les quadrupèdes. Il vit de pr'^ie. Il ne se jette pas sur sa proie comme les autres poissons: il l'épie dans des creux et dans des embuscades comme le jourini-lion épie les mouches. Il se retire ordinairement dans des bateaux enfoncés, sous des planches et des poteaux pourris. Sa paresse pourroit bien l'ex- poser au danger de mc^urir de faim, si le créa- teur n'avoit pourvu d'un autre manière à sa sub- sistance. La structure de son coi-ps est telle que les autres poissons s'en approchenh sans le remarquer. Il est d'une couleur obscure, qui fait qu'on le distingue peu de la bourbe, dans laquelle il se couche: il na point d'écaillés bril- lantes qui puissent le trahir, et ses yeux sont trop petits, pour que l'on puisse remarquer l'éclat phosphorique qu'ils jettent, comme dans la ph'ipart des autres animaux. D'ailleurs, ses longs barbillons lui servent pour attirer le pois- son: car lorsqu'il joue avec ses barbillons, les poissons les prennent pour des vers, et au mo- ment où ils s'emparent de leur proie, le filure les gobe. Voila selon moi, la destination des barl)illoRs; car je ne saurois m'imagincr, com- me quelques auteurs, qu'ils ne soient d'aucune uiih'té; ou comme d'autres, qu'ils servent aux pois-sons comme les antennes aux insectes ij. Cette destination des barbillons me paroît d'an- Iliclit. Ichih. 731. Frisch. Mise. Beiol. IV. 119. LE SILURE. 559 tant plus naturelle, que les autres espèces de poissons qui ont la mâchoire supérieure avancée de manière à les empêcher de s'emparer aisé- ment de leur proie, ont des barhillons qui leur fiicilitent cette prise. Tels sont l'esturgeon, le barbeauez. Comme le silure se tient dans les creux, il a peu de chose à craindre des autres poissons v^oraces. Mais ses oeufs sont dévorés avec avidité par Tépinoche, l'angnille et la lotte: de même que ses petits le sont par les grenouil- les. Cependant il ne multiplie pas beaucoup; parce -qu'il n'a qu'une petite quantité d'oeufs. Il croît aussi lentement. On le prend à l'hame- çon et au trident, mais rarement au lilet, parce qu'il se tient dans les creux. Au printems, il sort à minuit, et vient sur les bords pour se rassasier des oeufs des autres poissons; mais ils rentre bientôt dans son trou. 11 a la vie dure, et ne paroit pas avoir beaucoup de sensibilité. Celui que j'ai représenté ici resta longtems dans la position oii on le voit, sans remuer autre chose qu'un peu les bail)illons de tems en tems. La chair du silure est blanche, grasse, douce- reuse, et peu estimée et comme elle est grasse, visqueuse et molasse, elle est dilllcile à digéier. Dans les environs du Wolga, où ce poisson se trouve en grande quaritité, on fait de la colle avec la v^ésicule aérienne; mais elle n'est pas si l)onne que celle qu'on fait avec le grand esturgeon. 560 LE SILURE. L'ésophage et l'estomac sont pourvus de grands plis. Le canal intestinal est court, et n'a qu'une courbure. Le foie est gros, et consiste en un lobe court et un lonfi:. La vésicule du iiel est longue, et le fiel qu'elle contient est jaune. La vésicule aérienne est courte, large, et divisée dans sa longueur selon limpression que fait sur elle l'épine du dos. La laite est double, aussi bien que les ovaires. Les derniers contenoient environ 17,500 oeufe verdàtres dans un silure de trois livres. On trouve cent dix vertèbres à l'épine du dos, et \dngt côtes de chaque côté. Le silure est connu sous difFérens noms. On le nomme: ivels, en Allemagne; schaden, en Autriche; mal y en Suède; mail et malle, en Dannemarc; wels et ckams-wels, en Livonie soin, en Rus&iè; dschiuin et jain, en Tartarie zolharte et tschalboltuch, chez les Calmouques lako-zugna, chez les Arméniens; szum, en Po- logne; hardscha, en Hongrie; harcha, en Italie; rneerval, en Hollande; sheat-Jish, en Angle- terre; et silure, en France. -^ Aristote h.J et Vline IJ disent que le mâle ^) H. L. 6. c. 14. Je ne m'at- savoir, qneroeiif fécondé est tendois pas à trouver dans pl'^s clair que celui qui ne ce pliilosophe des obser- Test pas, et que les yeux dé- valions faites dans un siè- viennent visibles quelques cle qui étoît privé de tant jours après la fécondation, de moyens pour en faire: /) IL N. 1. 9. c. 31. LE SILURE. 361 reste couché pendant quarante à cinquante jours sur les oeufs pondus par la femelle, et empêche par -là que les autres poissons ne les dévorent: mais cette assertion est contredite par l'expé- rience. Car, 1*^. les petits éclorent entre le sixième et le neuv^ième jour. 2°. Le silure dès quil a frayé retourne dans le trou où il se re- tire ordinairement. Artédi vij se trompe avec plusieurs autres écrivains, quand il croit que Pline a entendu notre silure par son glnnis nj, puisque dans ce chapitre il n'est question que de poissons de mer. Linné qjy Kranier pj et Gro- nov qj rapportent ici à tort le Inke suédois di Ar- tédi , qui n'est autre chose que notre lotte. Le silure et Vichthyocolla de Bellony Ron» deletf Gesnevy Charleton, Aldrownnd^ Jonston, Ruysch et dAitédi, ne sont qu'une espèce. m) Syn, iio. p) Elcncli. 588. n) L. 9. c. 45. y) Zooph. 323. v) Faïui. 122.11.344. I 362 JLE BARBARIN. II. LE B A R B A Fx I N. Sllurus Clarias, 55^ Planche. Fi g. 1. q. Les barbillons plus longs que le corps: Silurus ciiTis corpore longioribus, B. vi, P. x/. /^. vu. A, XI, C. xnii. D, nu, Silurus Clarias. Liun. 504. Mystus. Groii. Zoopli, n. n. 15. 584. JL/es lonp;s barbillons distinguent ce poisson des autre5 silures. De ces six barbillons, deux sont situes sur la lèvre supérieure, et quatre au men- ton. Parmi ces derniers, ceux du milieu sont les plus petits, et les supérieurs sont plus longs que le corps. La tête est large par devant; l'ouverture de la bouche grande. La mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure : toutes deux sont aussi bien que le palais, garnies de petites dents pointues. Les narines séparées par une mem- brane, ne sont pas loin du bord de lamac])oire. Les yeux sont grands en comparaison de ceux ©U BARB^RIN. 565 (lu précèdent. On remarque entr'eux deux sil- lons oblongs. L'opercule des ouïes consiste en une petite lanice. La nuque est large; le dos eilllé jusqu'à la nageoire dorsale: l'un et l'autre sont couverts de fortes plaques osseuses. Au- dessous de cette nageoire, le dos est rond: il a deux nageoires, et forme un arc làclie. Les côtés sont comprimés; le ventre court, gros et large. La ligne latérale commence près de la nuque, fait une petite courbure au milieu en dessous, et se termine au milieu de la nageoire de la queue. Les nageoires de la poitrine sont courtes; le premier rayon est osseux et dentelé des deux côtés: c'est une arme avec laquelle ce poisson peut blesser des hommes. Je doute qu'il foit venimeux comme Ilaselqidst a voulu le prouver par la mort d'un homme qui avoit été lilcssé par im de ces poissons a). Il peut y avoir beaucoup d'autres choses qui ont causé l'inilammation et la mort de cet homme. Im- médiatement au-dessus de la nageoire de la poi- trine, on voit un gros os, qui a trois angles, destiné particulièrement à la soutenir. A la grande nageoire du dos, le premier rayon est aussi dentelé des deux côtés. A toutes les na- geoires, les rayons sont ramifiés, excepté les premiers. «) Rcise, 41/3, 3^4- ^U BARBARIE'. On trouve ce silure dans les rivières du Bré- sil et de Surinam , de même que dans le Nil. Il parvient à la longueur de douze à quinze pouces, et à la largeur de trois à quatre. Ce poisson se nomme: langhart, en Alle- magne; barbarin, en France; sclieilnn, en Ara- bie; laengstrùiiad tajtdjaegy, en Suède; étions- bearded, en Angleterre. L' A S C I T E. 55^ Planche. Fig. ^, Six barbillons à la bouche; dix -huit rayons à la nageoire de l'anus. Silurus ch-ris sex, ra- diis xviii pinnae anû P. xiii, V.vi, A.:kvxii, C, Kriii. D, IX. Silurus Ascita. Linn. 505. n. 13.. JLjes six barbillons de la bouche, et les dix-huit rayons de la nageoire de l'anus, sont les caractè- res qui distinguent ce poisson des autres silures. La tête est petite, un peu élevée, arrondie, et les deux narines sont tout devant. Des six barbillons, deux sont placés à la lèvre supé- rieure, et quatre au menton. Aux nageoires de la poitrine, le premier rayon' est pointu. Les l'ascite. 365 nageoires clu ventre sont plus petites que celle de l'anus; celle de la queue est fourchue. Le premier rayon de la dorsale est dur en dessous et ]nous par en haut. Les oeufs de ce poissons qui sont très grands, ne sont pas conipo.-ës comme les autres d'un j'aune, d'un blanc et de diverses membra- nes qui environnent l'un et l'autre: ils n ont qu'un jaune et une peau mince, dans laquelle est l'embrion. On y remarque plusieurs vais- seaux, qui s'étendent depuis le nombril de l'em- brion jusqu'au de -là du jaune, comme on le voit Ji^, 5. L'enveloppe de l'oeuf se fend à l'endroit où esl la tête de l'embrion. Comme alors la bouclie paroît d'abord avec ses barbil- lons, et que le reste du corps reste enveloppé dans une espèce de gaze transparente, la peau se retire toujours insensiblement; et alors l'em- brion paroît entièrement sur le jaune dans une situation recourbée; il n'est attaché à rien, si ce n'est à l'endroit qui joint son nombril au jaune. Toutes ses parties sont tellement dev^eloppées, qu'on pourroit compter les rayons des nageoires, si sa posture recourbée n'empéchoit pas de le faire. Le déchirement de la peau autour du jaune, s'opère par le mouvement répété de l'embrion qui se dépeloppe; et il a sur -tout lieu à la tète, parce qu'elle est cunéiforme. Il se débarasse donc de cette peau. 566 LES GOUJONS. SECONDE CLASSE. LES TORACHIQUES. Thoracici, VII l^ Genre. LES GOUJONS. Gohius. PREMIERES SECTIOÏs'. Des Goujons en général. Les nageoires ventrales tournées en forme de cornet. Pisces pinnis ventralibus coadunatis, cavani ejj-orinantibus, Gobius. Linu. S. N. ^en. 15g. Boulerots, loches. Goujons Anéd. oeil. 25. Zoopli. 8i. de mt-r. Goiian. H. d. P. et Eleotris. 83. gen. 8* Gobiû. Klein. Miss. V. 26. Coby. Penn. gen. 21. J_ies poissons de ce genre se distinguent des au- tres par les nageoires du ventre, qui sont coali- sées et roulées en forme de cornet. Ces nageoi- res, selon les écrivains, leurs servent à s'atta- L.ES GOUJONS. 367 cher aux rochers : ce qui cependant me paroît peu vraisemblable, puisque ces nageoires n'ont point de parties qui les mettent en état de pou- voir pénétrer dans la surface unie des pierres. Aristote njf parle des goujons: mais com- me il ne les a point décrits, on ne sauroit assu- rer s'il a voulu parler de plus d'espèces que du goujon du Nil bj et de cehii de mer cj. Bel' Ion cl), outre les deux goujons à'Aristote décrit aussi le goujon noir. Rondelet ^ est, à ce cjue je crois, le premier qui en a décrit quatre esj)è- ces. Quoiqu'il ne donne qu'une nageoire dor- sale à son boulerot blanc, léiat et la forme de là première nageoire dorsale, joint à ce qu'il le décrit parmi les poissons de mer, prouvent qu'il a vouki parler d'un goujon de nu'r. Les ich- thyologi.stes qui sont venus après, jusqu'à I.imiéy s'en sont tenus là. lVillus:Jdfy lappoite l)ien cinq espèces; mais la cinquième, qui est le lie- vre de iner fj ^ appartient .aux poissons caitila- gineux, même selon les principes de dixision éta- blis par ]ui - même. Rciy compte neuf espèces jT//; mais la quatrième est notre chabot hj, et la sep- tième notre catapJiracte ij. Comme ils n'ont ni a) L. f). c. 13. 1. 8. c. ïj. 19. e) II. d. P. I. 195. c. 2. -^7. /) Ichtli. 203. h) Gobius Apliya. g) Syii. 76. c) Jozo. h) Cottiis o;obio. d) Aqu. 233. G. niger, i) — c.itapiiractus. 568 LES GOUJONS. l'un ni l'autre les nageoires ventrales en forme de cornet, ils n'appartiennent pas à ce genre. On peut dire de la sixième espèce ce que j'ai dit contre JVillughby, Je ne saurois juger de la huitième ni de la neuvième, faute de dessin, et parce que dans sa description il ne paile point de la forme des nageoires ventrales. Klein rap- porte cinq espèces kj\ mais la quatrième et la cinquième n'en font qu'une, qui est YnpJde, Gronov décrit une nouvelle espèce l) , que Linné n'a pas juge à propos de faire entrer dans son système. D'ailleurs, il di\dse les goujons en deux genres, qu'il nomme eleotris et gobius. Après cela Lagerster mj nous Ht connoître deux nouvelles espèces de goujons et Linné deux au- tres nj. Ce sont huit espèces, que Linné donne à ce genre» Mr. Briinniche paroît aussi en avoir remarqué quelques nouvelles oji Ensuite Kôhlreuter p) et Mr. Ephrasen qj, ont cha- cun décrit une nouvelle, et Mr. le professeur F allas quatre rj» Enfin, Forskael fait aussi mention de trois autres nouvelles espèce sj. J'aurai occasion d'augmenter encore ce nombre. Les A:) Miss. V. 28- p) N. Comm. VIIT. 421. /) Zooph. n. 277. ^) N. Scliwed. Abli. VU. 65. m) G. Eleotris et pectiniro- 7) C. schlosseri, boddarti, la- stris. L. goceplialiis etcyprinoides. v) G. baibatus et ano;uillaris. Spic. VIII. 5 — Ig. o) Fisc. M. 30. u. 41. 42. I.ES GOUJONS. ^ 369 Les goujons se tiennent ordinairement au fond de la mer, entre les pierres. Ils ont le corps allonge, arrondi et couvert d'écaillés: ils ne parviennent pas à une grosseur fort considérable. La tête est petite, et com- primée. Les yeux sont au sommet de la tête, placés l'un près de l'autre; entre eux, on voit l'une derrière l'autre, deux petites ouvertures rondes, qui sont sans doute les naiines et les ouvertures des oreilles. L'ouverture de la bou- che est petite, et les deux mâchoires sont ar- mées de petites dents pointues. La langue est courte, tronquée, et le palais est garni de qua- tre os raboteux. Les membranes des ouïes ont ■quatre à cinq rayons. L'ouverture des ouïes est petite et ronde. La ligne latérale est droite. Ces poissons vivent de vers, d'insectes aquati- ques, et d'oeufs de poissons. s) Descr. 25. G, anguillaris et nebulosus. Aa 370 LE BOULEROT. ARTICLE SECOND. Des Goujons en particulier. I. LE BOULEROT. Gobius niger. 53me Planche. Fig, 2. 3. Le corps tacheté de blanc et de brun; seize ra- yons à la seconde nageoire dorsale, Gobius ex albo etfusco varius, pinnae dorsi secundae radiis xrj. B, iv, P, kvui. V, x. A, xjj. C. Xjr. Z). VI» XFJ. Gobius niger. Linn. 449» n.i. Gobio. Klein. Miss. V. 27. Avtéd. Syn. 46. n. 1. n. 1. Eleouis. Gronov. Zoopli. Black Goby. Penn. 215. n. 95. n. 280. pi. 33. J__ie goujon noir se distingue aisément par ses taches jaunes et noirâtres semées sur un fond blanchâtre, et par les seize rayons de la seconde nageoire du dos. XE BOTJLEROT. 571 Ce poisson est cunéiforme; car la tête est grosse, et il diminue peu à peu en allant vers la queue. Les mâchoires sont d'égale longueur, et armées de deux rangées de dents pointues. L'ouverture de la bouche est de moyenne gran- deur, et la langue est libre. Les narines sont rondes et placées entre les yeux l'une derrière l'autre. La nuque est large et couverte comme le tronc de petites écailles grises et dures. La membrane des ouïes est grande auséi bien que leur ouverture. Le dos est marqué de bandes noires , et la ligne latérale n'est pas visible. Le ventre est large et jaune; l'anus est au mibeu du corps. Les rayons de la nageoire du dos et de l'anus sont simples; les autres sont ramifiés: tous sont mous, excepté ceux de la première nageoire dorsale, qui sont lui peu plus durs. Ce poisson habite la mer du Nord et d'au- tres mers. Mr. Fnlck le trouva dans l'Achtuba et le Wolga. Au printems, il vient sur les côtes et vers l'embouchure des fleuves, où on le trouve en quantité, occupé à la propagation de son espèce. Il fraie en 3Iai et Juin. ArU stote a remarqué nj que les goujons déposent leurs oeufs sur les pierres; et cette observation est confirmée par celle de Vontoppidan h). Ils parviennent à la grosseur de cinq à six pouces; et quand ils sont encore petits, iLs deviennent a) H. N, 1. 6. c. 15. h) Daenn. 137, Aa a 572 J-E BOULEROT. souvent la proie du clorse et de l'égrefin. La chair est de bon goût, et semblable à celle de la petite perche. On le trouve dans les Golfes et près de Heiligeland, où on le pêche dans le niêiTie tejns que régréfin. L'estomac est court, oblong, et la peau épaisse. Le canal intestinal a deux courbures. Le foie est grand, d'un jaune pâle, et en forme de coeur. La rate est épaisse, longue, et poin- tue en haut et en bas* La vésicule aérienne est large vers l'estomac et étroite vers l'anus. La laite et l'ovaire sont doubles et placés des deux côtés de la vésicule aérienne. Les reins sont longs et placés sur le deiTière vers l'épine du dos. Ce poisson est connu sous diiFérens noms. On le nomme : hûJiling, scJiwnrzer gob ou ineer- gobf à Hambourg et dans le Holstein; kutlingj smorhutling y en Dannemarc ; govecken, en Hollande; go et gojet, à Venise; zolero et mis^ sori, à Rome; sea-gudgeon, rock-fish et pink, en Angleterre; et houlerot ou goujeon de iner, en France; naZ, en Norwège. Salvian s'est trompé en représentant le dos avec trois nageoires cj'^ Jonsbon et Ruysch l'ont imité dans cette faute d). Klein ej a tort de rap- porter à notre poisson celui que Tllllugliby a c) Aqu. 395. d) De Fisc. t. 15. f. 11, e) Miss. V- 37- LE BOULEROT. 373 représenté sur la 12 pi./*. 1.; car ce poisson a la mâchoire inférieure fort avancée sur la supé- rieure; et dans le nôtre, les deux mâchoires sont d'égale longueur. On ne voit point non plus dans ce dessin les nageoires du ventre tel- les (qu'elles conviennent à cette espèce. IL LA LANCETTE. Gohius îanceolatus. 53nie Planche. Fi g. 1. . La nageoire de la queue en forme de lance. Gohius -pinna caudae lanceolata. B. v. P. xn. V^, x/. A. xrz. C. XX. D. vi. ^fiii. Gobius cauda longissîma, Gobius caucîa lanceolaU. acuminata.Gionov.Zooph. Plumier. Manuscir. n. 277, t. 4» f. 4. X_ja nageoire de la queue large, pointue et al- longée par le bout, distingue ce poisson des autres goujons. 374 ^^ LANCETTE. Le coi*ps est allongé et n'est guère plus gros vers 1 extrémité de la tète que vers le bout de la queue. La tête est oblongue et tronquée par devant. Les deux mâchoires sont d'égale longueur et armées de petites dents pointues. La langue est libre et pointue. L'opercule des ouïes consiste en deux petites lames, et l'ouver- ture des ouïes est large. L'anus est beaucoup plus près de la tête que de la nageoire de la queue. On remarque que les écailles qui sont à l'extrémité de la queue, sont beaucoup plus grandes que celles de l'extrémité de la tête. Les rayons des nageoires du dos et de l'a- nus sont simples et mous, et les autres rami- fiés. Ceux qui sont à la première nageoire du dos, ont de longs bouts qui avancent beaucoup. On trouve ce poisson en quantité dans la plupart des rivières et des ruisseaux de la Mar- tinique, où le père Plumier en a vu un grand nombre. Selon lui, il a une chair d'un très- bon goût. Grojiov est le premier qui ait décrit ce pois- son. Mais à en juger par la représentation qu'il en donne, le poisson qu'il avoit sous les yeux etoit petit et endommagé, «) Zoojih. n. 277, t. 4. f. 4. LES CHABOTS. 375 LES IXme Genre. CHABOTS. Cottus, A n T I C L £ PREMIER. De Chabots en géiiérnl. Le corps sans écailles, deux nageoires au dos. IHsces dipteryQUy corpore alepidoto. Cottus. Linn. geu. 160. Artéd. gen. 3.^}. Gronov. Zooph. 78. Cataphractus. Klein. Miss. IV. 42. n. I et 3. Peicis 43. n. 17. Coiystioii. 46. n. 3 et II. La tête -d'Ane, ou le chabot. Goiian. H. d. P. gen. 20. TheBul-Hcad. Penn.gen. 22, l_jes poissons de ce genre, qui n'ont point d'é- cailles, se reconnoissent aux deux nageoires du dos. La tête est grosse, garnie de pointes ou de bosses, et arrondie par devant. L'ouverture de la bouche est grande, et chaque mâchoire est garnie de petits dcnls. Les yeux sont placés au sommet de la tcte, et garnis d'mie membrane 57^ i^es chabots. cb'gnatante. Les narines , qui sont à peine visi- bles, se trouvent doubles et placées près des yeux. Les opercules des ouïes sont grands. La membrane des ouïes, contient six ravons. Le corps a ime forme ronde. Le ventre est gros. Ces poissons habitent les mers, si l'on en ex- cepte une seule espèce. Les Grecs et les Romains paroissent ne les avoir pas connus. Bellon a décrit le premier le chabot sous le nom de boulerot a) et Aldrovand y nous a fait connoître le scorpion de mer h). Dans la suite, Schoneveld y a ajou- té le catapJiracte elle quadricorne c) \ mais com- me il n a point donné de nom particulier au der- nier, les ichtyologistes qui sont venus après lui n'y ont point eu égard jusqu'à Artédi dj, qui le décrivit exactement. Quelque tems après MarC' graf nous lit connoître un chabot ej du Brésil. Artédi en fit le premier un genre, dans lequel il fait entrer cinq espèces. Il en exclut cep en- . dant celle de Mnj'cgraf; et au lieu de cela il y fait entrer le grondeur^, qui n'y appartient point. Linné gj, Pallas kj, Euphrasen ij, Schôpf kj, ont fait connoître chacun une et ForS" fl) Aqii. 521. Cottus Gobio. /) Syn. 77. n. 4. Callioiiy. h) De Fisc. 202. Scorpio. nuis dracunculus. c) Jchth. 67. C. catapiitactus g) C. scaber. et quadricoriiis. h) Spic. Zool. Tasc. VU. 31. d) Spec, ^. C. japoniciis. e) iNii|ui. Jirasil. 173. C.gru- i) NeueSchwed.Abh.VII.64. niens. k) Schrift. VIII. 146. I^S CHABOTS. 377 hàl IJ deux nouvelles espèces, et moi j'en pos- sède aussi deux nouvelles dans mon cabinet. Cela fait par conséquent 15 espèces. Linné ne fait entrer que six espèces dans ce genre. ARTICLE SECOND. I> e S Chabots en p ar ticulier. I. (LE CHABOT. Cottus Gobio, t 5gTT»e Planche. Fi g. 2. .Près de l'ouïe deux piquants crochus. Cottus spinis duohiLS ad operculwn, B. iv. P. xiv, V. IV, A, xii. C. X. D. vu, yivii, Cottus gobio, Linn. 45'2.n. 6. Pevcis. Klein. V. /fS-n* i?» Cottus. Aitéd. Syii. 76. 11. 1. The river BuUiead. Penn- Groiiov. Zoopii. n. 270. 216. 11. 97. pi. 31. J_jes deux piquants crodhiK*; qu'on trouve à cha- que opercule dss ouïes près des joues, distin- guent ce poisson des autres du même genre. L'un de ces piquants est grand, et tourne sa /) Snndm. 323. 378 I^E CHABOT. pointe vers la bouche; l'autre est petit, et a la pointe tournée vers le tronc. Les écrivains ne parlent point de ce dernier; mais pour le sentir, il suffira de passer le doigt le long de la tète. La tète est applatie, plus étroite devant que derrière, et forme un angle de chaque côte. Les mâchoires sont d'égale lon^rueur et comme le palais et le gozier, garnies de plusieurs ran- gées de petites dents pointues. La langue est libre et lisse; la membrane des ouïes large et saillante. Les naiines se trouvent près des yeux, et on ne peut les distinguer à l'oeil simple. Les yeux sont au milieu de la tète et petits. Les opercules des ouïes ne consistent qu'en une lame, qui se termine en angle aigu. Le tronc devient toujours plus mince en avançant vers la queue; il est couvert d'une matière ghiante et visqueuse. On remarque sur tout le corps de petites bosses rondes. La ligne latérale, que la matière visqueuse couvre prcs qu'entièrement, passe par (e milieu du coips. On v^oit sur tou- tes les parties des taches noires de forme indé- terminée. Le v^entre est large, gris et tacheté de brun chez les màlcs ; tout blanc chez les fe- melles. Celles-ci se distinguent encore par la couleur jaune et les taches brunes des nageoires ventrales, et par la bordure rougeàtre de la se- conde nageoire dorsale; au lieu que chez les mâles toutes les naireoires sont bleuâtres et ta- LE CHABOT. S 79 chetées de noir. L'anus est au milieu du corps, Les rayons des nageoires de la poitrine et de la queue sont ramifiés; tous les autres sont simples. Ce poisson habite les ruisseaux qui ont une eau de source pure et un fond de cailloux. Nous le trouvons dans la Marche - électorale, en Saxe, en Silésie, en Autriche et dans d'autres contrées de l'Allemagne; en Dannemarc, en Groenlande, en Sibérie, en France et en Angle- terre. Le chabot parvient à la longueur de quatre à cinq pouces. 11 se meut avec beaucoup de vitesse, et passe comme un trait d'un endroit à l'autre. Il ^it d'insectes aquatiques, de frai et des oeufs des autres poissons ; et j'ai trouvé dans son estomac des puces et des hannetons aquatiques entiers. Il est si vorace, que, selon ce qu'assure Gesner aj , il n'épargne pas sa pro- pre espèce; mais il a des ennemis redoutables dans la perche, la truite et le brochet. Ce poisson fraie en Mars et en Avril. Il n'est poin,t du tout vraisemblable, comme le dit lAnné, qu'il couve ses oeufs dans des nids faits exprès, et qu'il ne les quitte pas même au péril de sa vie bj ^ ni, que la femelle reste dessus pendant un mois cj. Il séjourne ordinairement dans les creux que fait l'eau sous les grosses pierres. a) Thierb. 162. e) Danub. IV. 75. h) S. N. 4-32. 380 liE CHABOT. On prend ce poisson avec de petits filets, des nasses et à la ligne. On le pêche aussi à la main pendant la nuit, lorsque le clair de lune ou la lumière du feu l'éblouit. La chair est non seulement de bon goût, mais aussi fort sai- ne: elle devient rouge par la cuisson. L'estomac du chabot est grand; et est gar- ni de quatre appendices. Le canal des intestins n'a qu'une courbure; et Mr. Fahricius y a trou- vé le ver solitaire, La laite et l'ovaire sont doubles. Le péritoine est noir, le foie gros, simple et jaune. On trouve dix cotes de cha- que côté, et trente et une vertèbres à l'épine du dos. Les différentes dénominations qu'on lui donne, proviennent sur-tout de la grosseur de sa tête, par laquelle ce poisson se distin- gue de tous les autres poissons de rivière, et par la matière visqueuse qui lui couvre le corps. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme: MiXller et kaulkopf, dans nos contrées et en Silésie; hoppen, en Autriche; rotzkolhey en Franconie et en Thuringe; kauU quap-pCy en Westphalie; steinpikker: turzhull, dans le duché de Schleswig et en Dannemarc; st(fcn'Siinpay slaa^g-shnpn, en Suède; itekivd' . lek, kanikitsokj ujarangmis, dans la Groen- lande; govic ou gobicheiiy en Hollande; hulU I.E CHABOT. . 581 head, cull ou rnûllers-thuinh; en Angleterre; chabot y en France; cahurlant, à Toulouse; missori, en Italie; capo grosso, à Rome; glaU' schCf en Esclavonie; glonnaez, en Pologne. Salviarij qui décrit d'ailleurs notre poisson assez exactement, lui attribue mal -à -propos des écailles e). Gronov le rapporte faussement à deux espèces différentes y^). Frisch se trompe en pensant que le gohius paganellus des iclityo- logistes est notre poisson g). é) Aqu. 215. pus. ZoopL.n.270. Cottus. /) Mus. II. II. 166. Uraiioscû- o) Mise, Ber. VI. 123. 38- ^^ CATAPIIRACTE. II. LE CATAPHRACTE. Cottus cataphractiis. 3 grae Planche. Fi g. i. Des larbillons au menton, le corps octogone. Cottus cirris pluriinis inentnlibuSy corpoi'c octO' gono. B. ri. P. xr. V,iii» A, vi. C.x. Z). v,vi. Cottus catapîiractus. Linn. Catapliractus. Klein. Miss. 451. n. I. Artéd. Syn, 77. IV.42. n. i.etii.3. t. 13. f. 1. n. 5. Gronov. Zoopli. 11. Tlie Armed Bulliead. Penii. 271. 216. n. 98. pi. 59. JLjes barbillons, qui se trouvent au- dessous cle la tète distinguent ce poisson de toutes les au- tres espèces de ce genre. La forme de ce poisson et les boucliers qui le couvrent, le rendent très - remarquable. La tête est large, applatie et garnie au-dessus de pointes. Le tronc, qui est octogone, dimi- nue insensiblement en allant vers la queue; et au lieu d'écaillés il est couvert de boucliers. La mâchoire supérieure avance sur l'inférieure: toutes deux aussi bien que le palais, sont ar- XK CATAPHRACTE. 583 mées de plnsieiu*s rangées de petites dents poin- tues. L'ouverture de la bouche est en dessous; elle est de moyenne grandeur et en forme de croissant. La langue est large et mince. La partie supérieure de la tête est couverte par un massif osseux, qni a des deux côtés et en haut des élévations pointues et des enfoncemens. Les quatre pointes qui avancent vers le museau, et qui forment deux échancrures en forme de crois- sant, donnent sur- tout à ce poisson un aspect singulier. A côté de ces pointes, on appercoit les narines en forme de tuyaux. On voit aux deux mâchoires plusieurs barbillons rangés en rangs courbes. Les boucliers qui couvrent le tronc, sont osseux; ils iiniesent par en haut en pointe courbée, sont rayonnes par en bas, et emboîtent les uns dans les autres: ils sont pla- cés en longueur, en huit rangées, et sont la cause de la forme octogone de ce poisson. Quand on considère ces boucliers avec une loup- pe, ils paroissent semblables à ceux de l'estur- geon. Le ventre est large , et l'anus placé beau- coup plus près de la tète que de la nageoire de la queue. La ligne latérale a une direction droite. Les rayons de la première nageoire du dos sont pointus. Ce poisson ne parvient qu'à la longueur de six pouces. Il se tient ordinairement dans le sable, entre les pierres. On le trouve dans 584- ^^ GATAPimACTE. l'Océan septentrional, en Groenlande, en Islan- de, en Angleterre, en Hollande, dans la nier du Nord, sur -tout aux embouchures de l'Elbe et de l'Eyder, dans la mer Baltique et dans la Pêne en Poméranie suédoise. Il se nourrit d'in- sectes aquatiques et sur -tout du gi'angon aj. On le prend dans des filets dans le même tems que régrésin. On lui coupe la tête, et on le dépouille de sa couverture avant que de l'ac- commoder. On le trouve fort bon dans la plu- part des pays où on le pêche; mais les Groen- landois ne sauroient le souiFrir bj. Le cataphracte fraie en Mai, et dépose ses oeufs entre les pierres près du rivage. Les parties intérieures de ce poisson sont comme dans le précédent. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme: Gepanzerte groppe, . en Alle- magne; steinpiclicr y inuller, turssbuil, à Ham- bourg et dans le Holstein; botn-mus et ben-sini" pUy en Suède; kaniovdluck, kanîortluk, dans la Groenlande; sexroending, en Islande; botn-vius, en Dannemarc: harnas ' manne t je, en Hollande; poggc et arnied bul'heady en Angleterre; pogge et cataphracte y en France. Charleton prend notre poisson pour une espèce d'esturgeon cj. Il en diffère cependant a) Cancer Grangon. \ s) Onom. 151. b) Fabvic. Ta un. 156. ILE CATAPIIRACTE. 385 en ce que celui-ci est du nombre des poissons, cartiLigineux; au lieu que la nôtre est du nom- bre des osseux. Klein met dans la troisième espèce de ses poissons maillés, un poisson de la Baltique, qui n'a qu'une nageoire dorsale et aucune naoeoire ventrale dj. Quand on com- pare son dessin avec notre catapbracte, on vv)it qu'il ressemble entièrement à sa première espè- ce, c'est-à-dire, a la nôtre. IIL LE SCORPION DE ME R. Cûttus Scorjno, 39 ^I^ Planche. La macboire supérieure avancée; les rayons in- divis à la nageoire de la poitiine. Cof-tus maxilln superiore longiorey radiis -piiinaruin ■ -pectornlium hidivisis. B. ji. 1\ xm, P^, m. X A, XII. C. xriii. D. — . xri. X Cottng scorpins. Liiin. 4'32. Scorpion de mer. Çiiliim. n. 5. Artéd. S) n. 77. n. 3. IIJ. 57. pi, 2. ï. 2. Gionov. Zoopli. 11. 26^3. TJie fatlicr-laslicr. Penn. Cor) siion. Kltiii. Miss. IV, £18. 11.99. P^* 4^* 47. 11. 11. t. 15. i'. 2.3. ft J_j'avancement de la jnaclioire supérieure, et les rayons indivis à la nageoire de la poitrine, d) Miss. IV. 1. 13. f. 1. Bb 586 i>E scorpioî; de ivl&r. distinguent ce poisson des autres poissons de son genre. Plusieurs bosses finissant en pointes, les piquants et les os des joues, donnent à ce pois- son une forme polygone et un aspect alFreux. Deux de ces piquants sont placés devant les yeux: ils sont mobiles; mais il y en a trois ou quatre de chaque côlé qui sont inunobiles. L'ouverture de la bouche est très -grande. Les mâchoires, sont armées, aussi bien que le pa- lais, d'une quantité de dents pointues. Les os des joues sont fort larges. La langue est cour- te, épaisse et dure. On voit au palais deux ôs louons, rudes en forme de lime. Les narines sont simples, petites et placées à peu. de di- stance des yeux. Ceux-ci sont au sommet de la tête. Les os des orbites avancent beaucoup par en haut, et forment un sillon qui va jus- qu'au dos. L'opercule des ouïes consiste en deux lames. Le corps s'amincit en allant vers la queue, et au lieu d'écaillés, il est couvert de petits boucliers pointus, qui le rendent rude au toucher: les boucliers ou verrues sont moins considérables chez les femelles que chez les mâles. La ligne latérc^le est droite et plus près du dos que du ventre. Le ventre est gros, large, blanc dans les femelles, jaune dans les mâles avec des taches blanches. Dans les mâ- les, les nageoires de la poitrine sont plus gran- LE SCORPION DE MER. S87 fies que clans les femelles; de sorte qu'on peut disiinguer aisément les deux sexes dès la pre- mière vue. L'anus est situé au milieu du ven- tre. Les nageoires du ventre sont à raies blan- clies et noires dans les femelles ; mais dans les mâles ils sont d'un rouse incarnat et tachetées de blanc. Les rayons sont simples, excepté ceux de la queue qui sont fourchus. On trouve ce poisson dans la Baltique, dans les mers du Nord et de l'Améiiquf', sur -tout sur les côtes de Groenlande, sur celles de Neu- foundland et de Sibérie. Ils s'v tiennent ordi- iiairement en quantité dans les fonds, et ne vien- nent en liant que lorsqu'ils sont pressés par la faim et qu'ils cherchent leur proie. Celui dont je donne ici le dessin , m'a été envoyé par Mr. Goeden de Riigenwalde sous le nom de see- îtiurre ou l^urrlLaii'. dénominations tirées du biiiit quil fait quand on le presse dans la main. Cet habile observateur m apprit en menu- tems, qu alors il ouv^roit la bouclu- jusqu à la déchi- rer, qu'il étendoit ses nageoires, et faisoit dans la main un mou^-ement tiemblant. Le scorpion de mer nage très-promptement; ce quil fait sui -tout par le moyen de ses grandes nageoires pectoraks. Dans nos contrées, il n'a guère plus d'un pied de long; mais en Norwè£i;e, on en trouve qui ont deux brasses aj. Isous ne a) Pont. Norw. II. 501. Bb 2 583 ^^ SCORPIOX DE MER. mangeons point de ce poisson; on le donne aux ■ cochons î peut-être par un préjugé qui fait croi- re qu'il est venimeux. Cette opinion vient sans doute de ce que la piquure de ses pointes a été dangereuse dans certains cas bj. En Dannemarc, où il passe pour indigeste, il n'y a que les pau- vres qui le mangent. En Noi-^vège, on ne fait usage que du foie, avec lequel on fait de l'huile. I es Groenlandois au contraire, le trouvent fort Lon, et le donnent à leurs malades comme une nourriture très -saine. On le mange chez eux bouilli, sec, et quelques-uns le mangent même Cl Li : ils se nourrissent aussi de ses oeufs cj. On voit par- là combien les goûts et les préjugés des nations sont souvent contraires et contra- dictoires. En été, ce poisson cherclie le5 côtes; mais en hiver, il s'enfonce dans les profondeurs de la mer. Il est vif et hardi; mais sa voracité le rend imprudent; ce qui fait qu'on le prend aisément à la ligne. Il est fort rapace et sait s'emparer même des poissons qui sont plus gros que lui. Il poursuit sur -tout les perce -pierres, les petits saumons et les harengs. En général, il n'épargne aucun poisson, et mange aussi l'é- crévisse maillée. On le prend aisément avec le dorse et les autres poissons de mer, parce qu'il les pom^uit jusque dans les filets. Il fraie .en h) Schoiiev. Iclitli. C7. c) Ott. rabiic.Faun. Grocnl. • ' 157- LE SCOPtPIOX DE MER. 539^ Décembre et Janvier, et dépose ses oeufs parmi l'alge. L'ésophage est large et garni de plusieurs . plis; l'estomac est long, et le canal intestinal n'a qu'une courijure. On trouve quatre appen- dices au commencement de ce canal, et j'y ai trouvé le ver nommé Yécldne clj. Le foie est grand, et consiste en deux morceaux, l'un grand, l'autre petit. La laite et l'ovaire sont doubles. Les rognons soiit placés des deux cô- , tés de répine du dos , et se terminent par ime large vessie, qui a son ouverture derrière le trou ombilical. On trouve dix côtes de chaque côté du ventre, et trente- cinq vertèbres à l'é- pine du dos. Ce poisson est connu sous diPiérens noms. On le nonune: Wnllkutze, hnurpa^e\ à Ham- bourg; ivulky dans le Holstein; bidossCy dans le Dittmarc; sturrc , à Ileibgcland; secinurre, Jxnurrhnhn et kurlinliiij en Poînéranie; rôt-sini' ^ pa, skrabbcty sldoelritn^ idh>.ny jnmdkay en Suède;, kiôhenhaviis, tOTsk^ Ji-ske-syiiipCf vid-kieft ^ soè-, scorpion, mar-ulke , en Norvvège; kauiocli, ka- ^ nhdnack: on appelle en particulier le. nicàle.Af- vake, jinlektursok, et la femelle nariksok, en. Groenlande; doucrkrôtey en Livonie; dondcv' pndy en Hollande; posthoojdt et potbhoofdt, en Flandre; fablier-Jcisclier et scoipion-Jish, en An- «^) Vovez mon trait, sur les ver. 61. 590 I^E SCORPION DE MER, glpterre ; scoJ-pingy à Neufoundland ; scov" fione j en Italie; scoiyion de mer, en France; hmntcJinj en Sibérie. Je trouve dans jildrovand ej le premier dessin du scorpion de mer: mais il n'en parle qu'en peu de mots, et comme une variété du scorpion marin de Bellon. Quelque tems après, Scltoîiereld fj , le décrivit sous le nom de ^cor- pion de mer, JVillughby en donna ensuite une description plus exacte, comme d'un poisson sem])lable au scorpion de Bellon gj ; puis com- me un poisson de la Virginie hj, -^«y, le re- garda aussi comme deux espèces différentes ij, Artédi, Linné et Fennant, d'après ïVillughbyf regaident notre scorpion et celui de Bellon comme le même poisson. Mais ils ont des dif- férences bien sensibles. Car, i*^. la figure que donne Bellon n'a qu'une nageoire dorsale; 2°. son cojps est couvert d'écalies; au lieu que le nôtre n en a point du tout. Klein regarde les nageoi- res ventrales de ce poisson comme des barbil- lons; et comme elles manquoient à un de ces poissons, peut-être par la même raison que dans le précédent, il le regarda comme une va- riété, et en donna deux dessins kj. Selon lui, ces poissons doivent pousser un cri à l'approche e) De pisc. 202. h) Append. 25. /) Iclitii. 67. i) Syn. 142. 145. o) Icluh. 24g. k) Miss. IV. t. 13, f. 2. 5. LE SCORPION DE 3IER. 59 1 des tempctes. Mais selon toute apparence, ils sont aussi muets alors que clans tout autre tenis. Ce son vient de la sortie soudaine de l'eau de la bouche et de l'air de la vessie aérienne, qui est l'eiTet d'un retirement subit du corps. Nous remarquons ce son dans plusieurs poissons, tels que la loche de marais^ les coqs de mer y la dO' rée, etc. On voit que ce que j'ai rapporté est la véritable cause de ce l)ruit, parce que ce poisson ne peut le faire qu'une seule fois, à moins qu'il ne soit remis dans l'eau; du moins cela arriva- 1- il ainsi à la loche de marcds, sur laquelle j'ai fait des expériences. On peut ré- pondre a/Tirmativement à Klein quand il deman- de si notre poisson est le même que le scorpio virgiinnjuis de IJ^dluglihy. 39^ XES DOREES. Xnie Genre. LES DOREES. Zeus* ARTICLE PREMIER. _ 1 Des Dorées en général. Le corps coniprinië; des rayons capillaires à la pr. iiiière nageoire dorsale. Zeus corjjore ca- tlietoplateo, radiis JilanLentosis in prima pinna dorsali, Zeus. Linn. gen. 162. Artéd. Le e;al. Goûan. Hist. d. P. gc'n.35. Groiiov.Zoopli.g6« gen. 21. Tetrn^onoptrus. Klein. Mise. The Dorée. Pemi. gen. 25. IV.39. Kjes poissons se distinguent des autres par leur coips mince, large et conipriihé, et par les longs capillaires qu'on voit à la première na- fi^eoire du dos: ils ont une forme singulière. La tète est abbaissèe comme dans les quadrupè- des. La tète et le corps sont aussi plats quune planche, et brillent comme du métal: On trou- J-ES DOPiEES. ' 393 ve ces poissons clans différentes mers tle l'Euro- pe, de l'Amérique et de l'Asie. La tète et la bouche sont grandes, et les mâchoires sont pourvues de dents. Les yeux sont grands et ronds. L'ouverture des ouïes est lar£i;e, et on trouve sept rayons dans la niein- brane branchiostèoe. Le tronc e^t court, larire et couvert de petites écailles. Ils vivent des autres poissons. Aristote ne fait point mention des poissons de ce genre, et VUne ne parle que de la dorée ci). Hondelet nous fit connoître le snniilier h). Les ichtyologistes qui vinrent ensuite s'en tinrent là jusqu'à Maraxrnf, qui, au milieu du siècle passé, nous fit connoître une dorée du Brésil ej. Après cela Strôiii trouva une nouvelle espèce dans la nwr du Noid dj y que Vennant décrit exactement eJ. Enfin, Idnné y ajouta la dorée d'Amérique fj et SibbaUl une de la mer d'Ecos- se £^J y ce qui fait en tout six espèces, dont on en trouve trois en Europe et autant en Amérique. a) 1. g. c. iQ. Zcus. Fabcr. e) Ij. Z. III. 225. b) De Pisc. I. 32Q. Z. Aper, f\ Z. voiner. c) Bris. 161. Z. Gallus. g) Ilist. Scot. t. 6. A) S un dm. 523. 594- ^^ DOREE. ARTICLE SECONDe Des Dorées en particulier. LA DORE E. JZeus Faher. /^ime Planche. Une tache brune aux côtés. Zeus macula fusca in lateribus, B. vu. P. xii. /^. ix. yi, v. xxi. C XI jj. D, X. XXI. Zeus Faber. Linn. 454. 11. 5. Tlie dorée. Penn. 2ni, n. 100. Artéd. Syn. 78. n. i. Gro- t. 41. nov. Zoopli. n. 311. La dorée. Duliara. III. Sj* Tetragonoptrus, Klein. Miss. pi. 1. f. 1, IV. 59. n. 11. V_7n reconnoit la dorée à la tache brune qu'on trouve aux côtés. La tête est grosse, et l'ouverture de la bouche grande. La mâchoire inférieure avance sur la supérieure. On apperçoit au menton deux pointes, et une à chaque coin de la ma- LA DOREE. 395 choire. Les clents sont pointues, placées en ranaées et recourbées en dedans* Les niousta- ches sont larges, et les yeux grands. Immé- diatement avant, on voit les narines. Les oper- cules des ouïes sont grands et composés de deux lames. Les rayons de la mem])rane des ouïes sont larges et longs. Les omoplates qui servent de soutien aux nageoires pectorales, offrent deux pointes qui avancent, l'une plus longue, l'autre plus courte: la première est tournée vers le ventre, et la seconde vers le dos. La ligne latérale sort de derrière l'oeil et forme une ligne courhe vers la queue. Le dos est garni de pi- quures aussi bien que le ventre. Le premier a une rangée simple de pointes jusqu'au bout de la seconde nageoire dorsale; de -là jusqu'à la nageoire de ia queue, il a une rangée de dou- bles pointes inégales en longueur. Les premiè- res sont les apophyses des rayons de la nageoire dorsale; les autres sont formées par les extré- mités des boucliers qui couvrent le dos. Les écailles sont petites et minces; ce qui fait sans doute que Salvien et les autres ichtvologistes ont douté de leur existence. Ce poisson, selon GelliuSy doit aussi lorsqu'on le saisit, rendre un son, qui vient selon lui, du mouvement de la grande opercule des ouïes. Les premiers rayons de la nageoire de l'anus sont durs. 596 LA DOREE^ On trouve ce poisson dans la mer du Nord., 11 est de la Méditerrannée; mais comme Ovide en parle comme d'un poisson rare, il faut qu'il n'y soit pas fort commun. Il parvient à la grandeur d'un pied ou d'un pied et demi, et on en a pêche qui pesoient dix à douze livres. Ce- liii dont je donne ici le dessin, m'est venu de Hambourg, où les pécheurs lui donnent le nom de roi des linren^s. Sa grande voracité est cause qu'il mord presque à toute sorte d'appât. On le trouve vers les bords et les côtes, où il se , rend pour poursuivre les poissons qui viennent y frayer. Sa chair est de bon goût, sur -tout quand il est gras. • ^ L'estomac est petit, et le canal intestinal a plusieurs courbures. Le foie est d'un jaune, pâle; la rate rougeàtre. La laite et l'ovaire sont doubles. On trouve trente et une vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous dilFérens noms. On le nomme: St, peterjisch, sonnenjischy en Allemagne; lieringskônigy à Heiligeland et à Hambourg; skrabba, en Suéde; sonnenvis, en Hollande; la dorée, ou -poule de mer, en France; coq, à Bayonne; troueie et st. picri'e, à Mar- seille; pesce San piedro , citula et 7*c>twZ<7, en Ita- lie; pesce fahro , en Sardaigne; Vaurata, dans l'île de Malthe; fabro, en Dalmatie; et dorée en Angleterre. LA DOREE. 397 Colwnella se trompe quand il dit qu'on ne trouve la dorée que dans la mer Atlantique a). Nous devons la première connoissance de notre poisson à Vline hj^ et le premier dessin à Bellon cj. Xlme Genre. LES SOLES. Fleuronectes, ARTICLE PREMIER. Des Soles en général. Les yeux à la surface supérieure. Fisccs oculis in Intere superiore, Pletironectes. Linn.e;en. 163. Passer. 32. et PJiombus. 34. Artéd. geii. 14. Gionov. La sole. GoCiaii. Ilist. d. P, Zoopli. 72. gen. 30. Solea. Klein. Miss, IV. 31. Flounder. Peiin. gen. 24. J_je caractère distinctif de ce genre, es^ l'état anomalique des deux yeux à la surface supé- rieure du corps, dont l'un est ordinairement a) De re riist. 1. Q. c. 16, h) 1. 9. c. 18. c) A(][uat. 151. 398 ^^^ SOLES. plus grand que l'autre. Non seulement -cet te partie, mais aussi toutes les autres, ont des pro- portions toutes différentes que celles des autres poissons. Le corps est applati et mince. JLa surfi^ce supérieure est im peu élevée et dune couleur obscure; l'inierieure est toute plate et blanche: cependant on en trouve aussi où le coté inféiieur est brun en partie, ou couvert de taches brunes. J'en possède plusieurs dans mon cabinet qui sont de cette espèce, les François, les appellent sols doubles: parce qu'elles ont l'air d'être composées de deux poissons dilTé- rens. Le dos et le ventre sont teriiiinés en fort me de tranchant. Ces poissons ont lair dêtre, la moitié d'un autre poisson. Ils ont des écail- les; excepté le turbot qui a des piquants. La tête est petite; la bouche forme un arc; les mâ- choires sont d'inégale longueur et garnies de dents. Les yeux sont placés l'im près de l'au» tre, et ont une membrane clignatante. Les narines sont doubles et placées près des yeux. L'opercule des ouïes consiste en trois lames, et la membrane des ouïes qui est dessous, a 4 à 7 rayons. Dans quelques-uns la ligne latérale forme une direction droile; dans d'autres elle est arquée; quelquefois elle est lisse; d'autres fois garnie de piquants. Le ventre est très- court. L'anus est près de la tête; le tronc est garni de sept nageoires, dont deux sont à la LE SOLES. 599 poitrine, deux au ventre, une à la queue, une à l'anus et une au dos. Les deux dernières sont très - longues , et les autres rondes et courtes. Ces poissons n errent pas dans leur élément comme les autres; ils se tiennent ordinairement tranquilles au fond de la mer; ils caclient leur corps dans le sable jusqu'à la tète. De cette manière ils sont moins exposés que les poissons qui nagent sur la surface, à devenir la proie des animaux voraces; mais tant qu'ils sont petits, ils ont tout à craindre des raies, qui viv^ent aussi au fond de l'eau. Les lingues sont aussi un de ces ennemis; et j'ai trouvé dans Testomac d'une de ces dernières trois à. quatre espèces de soles, dans une longueur de six à huit pouces. Elles ne se meuvent pas non plus dans une direction droite; mais leur corps s'avance toujours de biais; de sorte qu'elles paroissent nager de côté. C'est ce qui porta Artédl à leur donner le nom de nageurs de côté, plcuronectes. Comme ces poissons n'ont point de vésicule aérienne, on comprend aisément pourquoi ils ne peuvent pas s'élever jusqu'à la surface de l'eau. Ils nagent au £pnd dans une ligne droite, et tracent un sil- lon dans le,sa])le, que l'on apperçoit plus de deux heures après, quand l'eau est tranquille, ce qui sert d'indice aux pécheurs. Ces poissons habitent la mer Baltique, mais sur -tout l'océan du Nord; et on n'en trouve 400 LES SOLES. que quelques espèces clans la nier Méditerra- née et dans les eaux de l'Amérique. Ils vivent d'insectes et de vers. Aristote ne parle que du moineau de mer aj] Pline de la barbue bj et de la sole c), Bellon décrit outre ces trois, la jilie dj, le pôle ej, la liinande f), le turbot g:J, le fiez JiJ, le fie tan ij et l^. feuille kj ; Rondelet la cithare^ le -pcrpeire et la petite sole IJ, qui font ensem- ble treize espèces. Gesner mj et TVillughby nj rapportent quatorze espèces ; Aldrovand a) quinze; B.ay pj dix-sept, et Klein vingt et uner^; mais ce ne sont que des figures multipliées. Les anciens ichtyologistes étoient accoutumés de rap- porter séparément les poissons que les moder- nes ont. raniré en un trenre; mais comme les poissons de ce genre se distinguent aisément des autres, ils les ont décrits tous ensemble. JViU lughby les rangea le premier en deux classes: il donna aux uns l'épithète de longs et aux au- tres celle de larges. Ray a adopté la même di- vision. Klein les divisa en deux classes; les uns qui outres yeux à droite, les autres à gauche, a) 1. 4. c. 11. 1. 5, c. 9. Pieu- i) Aqu. 144. Pi. Ilippoglos- ron. passer. sus. h) 1. 9. c. 37. Pi. Kliombiis. k) — 143. Taenia altera« c) 1. g. c. 16. 20. Pi. Solea. /) H. d. P. I. 250. 260. il) A411. i/f2. PI. Platessa. "0 ïhierb. 50 — 56. — 14,8- — Linguatula. - v) Iditli. 93 — io2. f) — 145- — Liniaiida. o) De Pisc. 235 — - 350. §) — "i-^o. — maximus. p) Syii. 31. //) — 144. -^ riesus, q) Miss. IV. 31 — 35. I.ES SOLES. 401 et il sulicln^îsa chaque espèce en lonp:s et laro^es. Artécli les reunit en un seul génie et ne rappor- te que dix espèces; la dixième, ou la sole d'Am- boine étoit inconnue aux anciens ichtyologistes. Mais il omet la feuille de Bellon, la cithare, la •perpeire, la petite solle de Rondelet , et les deux de Rny-j dont nous parlerons bientôt. Ensuite Sloane nous fit connoître la sole rayée rj, IVIarC' grcif une du Brésil s), Ray deux d'Angle- .terre t), Cateshy une de la Caroline ujj Gcirden deux du même pays x), Gronov la cyno classe et une de la mer d'Amboine y), et Idnné une sole de Surinam z). Telles sont les dix -sept espèces que Linné a ran^^ées dans son Système sous un genre, et qu'il divise avec raison en deux classes, à raison de la position des yeux à droite ou à gauche. Il a aussi omis, les trois de Rondelet, les deux de Ray et celle d'Amboi- ne de Gronov y dont nous venons de parler. Depuis, Vallas en a ajouté une de la mer gla- ciale a), Fahvicius une de la Groenlande bj, Bi'Oivn trois de la Jamaïque C/', et moi jft décri- rai aussi quatre nouvelles espèces des Indes. r) Jam. IL 2Q7. PI. lincatus. z) PI. ocellatns. s) Bras. i3i« PI. papillosus. c) — u,lacialis.Reis.III. 706. t) Syn. 162. n. 1. 2. n. 43* I*) Carul. II. 27. b) — platessoides. Faun. n. oc) Pi. dentatus et plagiusa» 119. y) Zoopli. n. 2j2, 255. J'iniaic. 445. n. 1 — 5. Ce ^02 LES SOLES Comme j'ai suivi la division de Linné, re- lativement à la position des yeux à droite ou à gauche, je donnerai pour plus de clarté, d'a- bord une sole de chaque classe; puis toutes cel- les qui ont les yeux à droite, et ensuite celles qui les ont à gauche. Or pour juger exactement dans quelle division on doit ranger chaque espè- ce de sole, il sufFit de poser le poisson sur le côté plat, et les yeux paroicsent alors sur celui qui est élevé. Lorsque la mâchoire inférieure, les nagreoires ventrales et l'anus lont dirigés de notre côté, et que les yeux sont placés vis-à-vis de nous à notre droite, on dit que le poisson a les yeux à droite; mais s'ils sont à notre gau- che, c'est le contraire. LA PLIE. 403 ARTICLE SECOND. Des Soles en particulier. PREMIERE CLASSE. JDes Soles qui ont l'oeil à droite. LA PLIE. Pîeuronectes Plates s a. ^2Tne Planche. Six éminences osseuses à la tète. Pîeuronectes tuberculis sex capitis. B, f^i. P. xii. V. ri. A. iir. C. XIX. D. z.xnii. Pîeuronectes Platessa. Linn, n. 5. et 6. t. 7. f. 1.5. 45^. n. 6. Artéd. Syn. 30. The plaise. Peiiu. 22Q. n. 103. n. 1. Gionov,Zoop]i.n,2/|6. La plie. DiJioni, III. Q.^^. Passer. Kleiii, Misa, IV. 35. pi. 5- f' 3^ vjette espèce de sole se clistingiie de toutes les autres par les six éminences qu'elle a à la tète. Le corps de ce poi.^^on est rev^êtu d'écaillés minces et molles, placées dans de petits enfon- Cc a 404. I A PLIE. ccniens; ce qui fait que le poisson semble uni au toucher. Les écailles se détachent aisément du tronc; mais à la tête, elles tiennent si forte- ment, qu'on ne peut les détacher qu'avec beau- coup de peine. La bouche est petite; la mâ- choire inférieure avance sur la supérieure, et l'on y voit des moustaches larges. Les narines sont près des yeux, qui sont de moyenne gran- deur. Derrière les yeux, on trouve les six éminences dont j'ai paillé: la première est plus grosse que les autres. Les deux mâchoires sont armées d'une rangée de petites dents émoiissées. On trouve à l'ésophage deux os rudes. Le pa- lais et la langue sont unis. La membrane des ouïes, qui est cachée sous les opercules, a des rayons ronds. Le tronc est marbré de brun et de gris, cendré en dessus, et blanc en dessous: il est parsemé de taches rondes couleur d'oran- ge, aussi bien que les nageoires du dos et de l'anus. La ligne latérale passe au milieu du corps dans ime direction droite. Les nageoires du dos, de l'anus et de la queue, sont couveres jusqu'à la moitié d'écaillés. La nageoire dor- sale commence immédiatement au-delà de l'oeil, et finit près de celle de la queue. Avant la na- geoire de l'anus, on trouve un fort piquant. Nous trouvons ce poisson en quantité dans la Baltique, et sur -tout dans la mer du Nord. Il sort du fond dans la belle saison, pour cher- -^ LA PLIE. 405 cher les endroits des côtes et des fleuves où les rayons du soleil favorisent sa propagation. Il vit de petits poissons, mais sur- tout de coquil- lages et de petits escargots. J'ai trouve dans les intestins une quantité de coquilles pulvéri- sées. La plie parvient à une grosseur assez con- sidérable, et pèse jusqu'cà quinze à seize livres. Elle fraie en Février et Mars, et dépose ses oeufs entre les pierres et dans les herbages. On prend les plies avec des hameçons dormans, auxquels on attache des petits poissons. On les prend aussi de la manière suivante : Lorsqu'il fait un beau soleil, et que l'eau est tranquille, les pêcheurs cherchent les places urnes sur les cotes, le rivage, ou les bancs de sable. Lors- qu'ils y découvrent une plie, ils lui lancent un plomb attaché à ime ficelle, et auquel on a as- sujetti un fer à trois ou quatre pointes crochues. Lorsque les crochets tomljent bien sur le corps, le mouvement circulaire du falde fait connoître au pécheur que le poisson fait des efforts pour se détacher des crochets. Lorsqu'il n'y a pas plus de deux cà trois brasses de fond, ils pren- nent la plie avec ime perche, à laquelle ils atta- chent des crochets de la même espèce; et de cette manière, le poisson leur échappe rare- ment. Cependant dans ces deux cas, il est né- cessaire que le bateau soit dans un repos parfait; et quand quelques petites vagues l'agitent, ils /J.o6 I^A PLIE. tâchent de le mettre en repos par de rimile qu'ils jettent dans l'eau. La plie est un poisson de bon goût, presque généralement estimé; mais qui n'est pas par -tout également bon. Les plus petites et les plus minces sont les plus mau- vaises, parce que leur chair devient molle et • gluante par la cuisson. Les grosses ont au con- traire, la chair* ferme, grasse et de bon goût. Les premières sont par -dessous d'un blanc bleu- âtre^ les autres ont une couleur d'un blanc rou- geàtre. Les plus mauvaises se salent, se sèchent à l'air, et on en fait des paquets qu'on envoie de tous côtés. On les fait ensuite ramollir et cuire avec des pois. Cependant elles ne sont pas une bonne nourriture. L'espèce la plus grosse et la meilleure se sèche aussi; et après en avoir ôté la peau, on la mange en guise de fromaoe. On accommode les fraîches de diife- rentes manières. La cavité de la poitrine est petite, et le coeur forme un carré long. Le foie est long, simple, et la vésicule du fiel grosse. L'esto- mac est long et pas fort large. Le canal des in- testins a plusieurs courbures; et au commence- ment, on trouve quatre appendices. Le foie est rond et d'un brun rouge. La laite et l'ovaire sont doul>les. Le diaphragme est noir par en haut, et blanc par en bcis. On trouve quarante- trois vertèbres à l'épine du dos. LA PLIE. 407 Ce poisson est connu sous JiiTérens noms. On le nomme: Scholle, à Hambourg; et platt' eijs, dans quelques endroits de l'Allemagne; roed'Spaettey huiler, en Dannemarc; sondinoer- honUi vaav'guld, floender-slaetery enNorwège; skallUf en Suède; karJ^ole, en Islande; scholle^ en Hollande; -plaise, en Angleterre; plye ou plie, en France; coine etjei, au Japon; bot ou plie, aux îles Molucques. Bellon, Rondelet, Gcsner et Aldrovand ont représenté ce poisson avec les deux yeux à gau- che. Cette faute \âent sans doute de ce que ces auteurs n'ont pas pris assez d'attention à diriger le travail de leur artiste. Le graveur gra^'e son modèle à rebours sur le cui^TC, afai de le faire paroître sur l'épreuve dans la situation de l'ori- ginal. Or comme notre poisson a les yeux du même côté, il auroit fallu ou le dessiner à rebours, ou le graver à la lueur d'un miroir. C'est une chose à laquelle ni Bellon ni ses suc- cesseurs n'ont pas fait attention. Chez Jonston, on voit, planche 22, fig. 7 et 8, ce poisson comme nous l'avons dit; à la fig. 9, il est re- présenté à droite. Chez Ruysch, qui a copié Jonston, on trou\'e dans toutes les figures la queue tournée du coté où sont dirigées les tè- tes des figures de Jonston, et réciproquement. Cette chose indifférente dans tout autre genre, ne l'est point du tout ici, puisque la position 408 I^A PLIE. des yeux cle ces poissons à droite ou a gauclie foiine leur caractère distinctif. C'est cette c»>n- fuv-iuii de dessins qui, selon moi, a multiplié sans nécessité les espèces chez les anciens ich- tyologistes. Nous répondons négativement à Klein quand il demande s'il faut regarder com- me notre plie le struffôut de Schoneveld nj: car le ùh'uffbuty qui est notre uioiuenu de mer bj, a des piquants au fond de la nageoire du dos et à celle de l'anus. Cet auteur rapporte aussi faus- sement notre poisson comme deux espèces cj, ~ IL LA BARBUE. rieuronectes Rhoinhus» ^^rae Planche. !Le corps large et uni, les yeux à gauche. FleU" ronectes corpore lato et glabro, ocuiis shiùtris. B. ri, F, XII. /^. FI, A. LVii, C. xri, D.L:ii^xi, PleiironectesRhombiis.Linii. Pearl. Penn. 25Q. n. 110. 453. n. 12. Artéd. S) n. 31. Barbue ou turbot lisse. Du- n.5.Groaûv.Zoopli. 11.253. hani. III. 261. pi. 5. vJe poisson se distingue des autres du même genre, par son corps large et uni, et par la po- sition des yeux à gauche. a) Miss. IV. 34. II. 5. h) PI. Passer. c) Au lieu cité. n. 5. 6. LA BARBUE. 409 La tète est petite et large, et TouverLure (le là bouche en forme cVarc. La mâchoire in- férieure est un peu avancée sur la supérieuie: l'une et l'autre sont armées de plusieurs rangées de petites dents pointues, "dt#nt les antérieures sont les plus grandes. Les narines sont tout près des yeux. Les opercules des ouïes sont dirigés vers le dos en forme d'angle obtus. Les écailles, sont oblongues ; et connue elles sont molles, le corps paroît uni au toucher. La ligne latérale forme une courliure près de la tète; puis elle passe au milieu du corps dans une diiection droite. Ce poisson est un des plus communs de tout le genre. On le trou\-e dans tous les en- droits de la mer du Nord, dans la Méditcrran- née et sur les côtes de Sardaiirne. Il est avec le turbot le plus large de tout ce genre, et par- vient à une grosseur considérable. On en pécha un, sous le règne de l'empereur Doitdticn, qui avoit vingt amies de long et un pied d'épais- seur nj. On le prend et on l'accomode de la même manière que le précédent. La l)arbue a Tésophage large, la membrane de l'estomac épaisse, et deux appendices en for- me d't^ntonnoir. Les autres parties intérieures sont comme dans le poisson précédent. a) Cetti Sard. III. 121. 41 o i^A eaubue. Ce poisson est connu sous diiFérens noms. On le nomme; Glabthutt, winckelbutt ^ en Alle- magne; elbhutt, à Hambourg; slaetwnry en Dan- nemarc; sand-flynder, enl^iox^yh^e^ -piggliuarSy en Suède; gi'iet, en Hollande; pearl, à Londres; lug-aleaf, dans la province de Corn\Yallis; bar» bue, tui'bob lisse et rhomboide , en France; rhoni^ ho, en Italie. ÎVillughby bj et Ray cj ont fait de leur lug-alef et du rhomboïde de Rondelet deux espè- ces; mais on n'a qu'à comparer les descriptions' et les figures qu'ils en donnent et l'on verra que ce n'est qu'une espèce. h) Iclitli. 95. 96. * c) Syn. 31. 32. I.E FLEZ. 411 III. L. E F L E Z. Pleiironectes Flesus. 44-"^^ Planche, L.e cote supérieur garni de plusieurs piquants. Fleuronectes spinulis pluriniis in Intere supC' rlore, B, ri. F. xri. /^. fi. A. xxir. C. xn. J). iiyi. Fleuron. Flesus, Linn. S.N. Passer, Klein. Miss. IV. 53. 457. n. 7. Anéd. S} Ji. 31. n. 1. t. 2. f. 4. et Passer n. 4. II. 3. Groiiov. Zoupli.n.248' Floundcr. Penn. 22Q. n. 104. v^ette espèce de sole, qui a les yeux à droite, se distingue des autres de cette classe par la quantité de petits piquants, qui rendent sa sur- face inégale et rude. Si l'on considère au microscope les piquants de la tète et du tronc, les uus paroissent cour- bes, les autres droits. Les premiers sont dis- persés sur toute la surface du corps; les autres sont places sur la ligne latérale et à la marge inférieure des nageoires du ventre, de l'anus et du dos , où ils sont rangés en croix sur les émi- ncnces osseuses que l'on trouve sur ces nageoi- 4.12 LE FLEZ. res. On voit aussi au cote inférieur des pi- quants sur la marge inférieure des nageoires et à la ligne latérale. Les deux côtés sont cou- verts d'écaillés minces et oblongues, qui sont tellement enfoncées et attachées à la peau, qu'on peut à peine les appercevoir. L'ouverture de la bouche est petite; la mâchoire inférieure plus longue que la supérieure; la langue courte et étroite. Les yeux sont avancés. Les oper- cules des ouïes forment une pointe émoussée. La ligne latérale, qui s'approche un peu du dos, forme une courbure au-dessus de la nageoire pectorale. On voit un fort piquant entre la na- ^ aeoire de l'anus et celle du ventre. On trouve le Hez dans la mer du Nord, et dans la Baltique. Au printems , il se rend com- me le précédent vers les rivages et les embou- chures des fleuves. En Angleterre, il remonte fort avant dans les fleuves; mais chez nous il ne vient que dans le Haff. Selon Willughuy, ceux que l'on prend dans les rivières, ont une chair plus molle et une couleur plus claire que ceux de la mer. La ressemblance de la couleur avec celle du moineau, leur a fait donner par quelques auteurs le nom de moineau de mer. On le prend comme le précédent. La pêche s'en fait en Poméranie, auprès de B-ïigenwalde, depuis le piintems jusqu'en autonme; car après la St. Jean, c'est le tems où il est le plus charnu I.E l'LJLZ. 415 et le plus gras. Ceux que l'on prend près de Meinel, passent pour les meilleurs de la Balti- que. On l'acconiode comme le précèdent. Le riez ne parvient pas à la grosseur de la plie; les plus gros ne pèsent pas plus de six livres. Il a la vie dure, et s'avance dans les eaux douces. Comme on peut le transporter dans des vais- seaux l'espace de quelques milles, il seroit à souhaiter que nous le missions dans des étangs comme ont fait les liabitans de la Frise. Les parties intérieures de ce poisson sont comme celles de la plie, excepté qu'il na que deux appendices à l'entrée du canal des intestins. On trouve trente -cinq vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous dilTérens noms. On le nomme: ITuidcr cl flonder , en Prusse; hutte elflunder^ en Livonie; butteSy lestes^ plehk^ stes, chez les Lettes; Liest et kmnlids, en Esto- nie; skey, 5/^/;zfL A7-a<7, en Nor'vvège; kola et Iwa, en Islande; flounder et hut^ en Angleterre; fiez^ en France; butte y sandskreble y en Dannemarc; Jlundra et ôlaettslLneda , en Suède; bot, amster- dmnse-boty fey-boty en Hollande; het-tcy, aux environs de la mer. Rondelet se trompe, en prenant le helhut des anglois pour notre poisson nj, Klein a tort de citer la -plie de IFlllugJtby et le rhomboïde de Sclioneveld pour noLre poisson bj. Le dessin a) Ilist. d. P. I. 255. h) Miss. IV. 33. n. 1. 414 I-E' FLEZ. de cet auteur ressemble aussi plus à la plie qu'au fiez çj. Quand Artédi dit que le côté gauche de ce poisson n'a point de piquants d), il faut quil ait examiné un jeune poisson, où ces piquants nétoient pas sensibles. Gronov cite mal- à -pro- pos comme notre poisson, la quatrième espèce du passer de Ray y et la limande de Linné ej. IV. LA S O L. E. Fleur onc et es S oie a. ^.^me Planche. Le corps raboteux; la maclieire supérieure avan- cée. Fleuronectes squaniis asperis, maxilla sj^pei'iore longiore, B, yi, P. x. f^. yi. A, ixr. C. xni. D. ixxx. Pleuronectes solea. Linn.457. The sole. Penn. 231. n. 107. n.g. Artédi Syn. 32. n. g. La sole. Duham. III. 357. Gron. Zooph. n. 251. pi. 1. 2. vjette espèce de sole se distingue des autres poissons de ce genre, par l'avancement de la mâchoire supérieure, et par ses écailles dures et raboteuses. c) Tab. 7. /xg. 1. à) Syn. 31. n. 3. e) Zooph. n. 243, LA SOLE. ' 415 Ce poisson est presque trois fois aussi long que large. Le côté supérieur et l'inférieur sont couverts de petites écailles dures, dentelées et fortement attachées; ce qui les rend rudes au toucher. La tête est petite et arrondie par en haut. L'ouverture de la bouche se distingue en ce que la mâchoire supérieure est taillée en croissant: la mâchoire inférieure seule est gar- nie de plusieurs rangées de petites dents poin- tues. A résophage, on trouve en haut deux os ronds en forme de lune, et autant en bas, qui sont longs. Le menton est garni d'un grand nombre de petits barbillons de couleur blanche. Les narines sont cylindriques: l'une est au côté supérieur, et l'autre à l'inférieur, tout près des bords de la bouche. Les yeux ne sont pas si près l'un de l'autre que dans les autres ef^pèces de ce genre. L'opercule des ouïes est ronde, et consiste en une seule lame, sous laquelle est cachée la membrane des ouïes. La ligne laté- rale est droite, et un peu plus près du dos que du ventre. Près de l'anus, on voit un piquant court et fort. La naoeoire dorsale commence au-dessus de l'ouverture de la bouche. La na- geoire de l'anus et celle du dos est couverte d'é- cailles jusqu'à la moitié. Nous trouvons ce poisson non seulement dans les eaux de la mer Baltique et du Nord, mais aussi dans la nier Méditerrannée et dans 4-l6 JLA SOLE. celle de l'Amérique. Cependant on le prend rarement dans la Baltique aux environs de la Poinéranie; mais on le pèche en grande quan- tité sur les côtes d'Orjtana et de St. Antioche en Sardaigne a). Il vit des oeufs et des petits des autres poissons. Il a pour ennemis les cra- bes, qui mangent ses petits. 11 ne devient pas plus long que deux pieds; et pèse alors huit li- vres. Une chose remarquable, c'est que sur quelques côtes d'Angleterre, ce poisson ne passe pas la pesanteur d'une livre h) , et sur d'autres, on en trouve de six à huit livres. Tout ce que nous avons dit du frai, de la pêche et de la ma- nière d'accomoder la plie, peut être appliqué à la sole. Nous remarquerons seulement encore, que celle-ci a la chair beaucoup plus tendre que les autres espèces ; ce qui lui fait donner en France le nom de -perdrix de mer. Celles qu'on prend au Cup de Bonne-Espérance, passent pour les meilleures. En général, les plus petites ont la chair beaucoup plus tendre que les grosses. La cavité du ventre étoit courte dans le poisson que je représente ici: elle s'étendoit en- tre les deux cotés et les vertèbres de la lon- gueur de trois pouces vers la queue. Le canal des intestins avoit plusieurs courbures, et étoit presoq'une fois aussi long que tout le corps. Les autres intestins étoient pareils à ceux des a) CcLti. Sard. III. 121. h) Penii. 251. XA SOLE. 417 précedens. J'ai trouve quarante - liiiit vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous diiFérens noms. On le nomme: zungc, en Allemagne; tuns^e, hunde - tunge y tungc-pledde?', hnv-agei'f liôney en Dannemarc; tunga sola, en Suède; tonge^ en Hollande et en Norwège; 50/, en Angleterre ; sole et perdrix de mer, en France; Ungiinta, en Italie: sagliola, en Sardaigne; linguato, en Espagne; dil baluch, en Turquie; smnacinusi cj, en Arabie; sole, zeetong et bob, à Surinam. Dans Bellon, qui a le premier décrit la sole, les yeux sont à droite. Chez Rondelet, ils sont à gauche. Gesner les a représentés une fois à droite, une fois à gauche. Dans Aldrovnnd, RuyscJi et TVillughhy, les dessins sont justes; celui de Jonston ne l'est pas. Quant à ce que dit Artédi dj , que les deux narines se trouvent sur le côté supérieur, l'expérience m'a montré le contraire. Boitinre se trompe en disant que notre poisson n'a point de dents. c) C'est - a - dire poisson de Mvysc. il) Aitéd, Spec. 6o. Dd 4-18 LA LIMANDE. V. LA LIMANDE. Tleuronectes Lùnanda. /^6ine Planche. Les écailles rudes; la ligne latérale arquée. PleU' ronectes squarnîs asperis ; linea laterali arcuata. B» V, P, XI, V» VI. A, uii. C. y;.v. D. z.xxr. PleuronectesLimanda. Linn, TlieDab. Penn. 230. n. 105. 457. n.8. Artéd. Syn.33. n.g. La Limande. Duham. III. Passer. Klein. Miss. IV, 33. 269. pi. 6. II. 4- I les écailles dures, dentelées, et l'arc que for- me la ligne latérale à son commencement, sont les caractères qui distinguent ce poisson des au- tres du même genre. Ce poisson est jaune sur le coté supérieur, et blanc sur l'inférieur. Ces deux côlés sont couverts d'écaillés assez grandes. La tête est petite, oblongue, et l'ouverture de la bouche étroite. Les deux mâchoires sont d'égale lon- gueur: à la supérieure, on voit beaucoup plus de petites dents qu'à l'inférieure. Ce poisson se trouve également dans la Baltique, dans la Méditerranée et dans la mer LA LIMANDE. 419 du Norrl. On m'en a envoyé un de Poméjanie sous le nom de glahrke, et un autre de Ham- bourg sous celui de Jdiesche. La limande n'est pas si comnume que le fiez et la plie, ni si épaisse que cette dernière. D'ailleurs, on la pèche et on la prépare de la même manière. Quoiqu'elle ne soit pas si grosse que la plie, elle la surpasse cependant en bonté. Les mois où elle est la meilleure, sont ceux de Février et d'Avril. Elle fraie plus tard que les précé- dents, c'est-à-dire, au mois de Mai; et quand il fait froid, en Juin. Dans ce tems, sa chair est molle et de mauvais goût. Elle vit d'insec- tes et de vers, et sur -tout de petites crabes: j'en ai trouvé souvent dans son estomac. Les intestins de ce poisson sont semblables à ceux de la plie. L'épine du dos n'a que cin- quante et une vertèbres. Ce poisson est connu sous diiTérens noms. On le nomme: Jdeische et Lliesclie, à Hambourg; gldJii-key en Poméranie; skrubbcy en Dannemarc; grettCy en Hollande; dab ^ en Angleterre; li- THcuide y en France; lima y en Sardaigne. Belloii est le premier qui ait décrit ce pois- son, et Rondelet en a donné le premier dessin. Dans cet auteur, ainsi que dans Aldiovand et Willugliby j la limande a les yeux à droite; dans GesncTy elle les a à gauche. Klein se trompe quand il dit que le poisson qui est représenté Dd 2 J.2 LA LliVIANDE. sur la planche F. 5. de TVillughby est le nôtre qj: c'est sûrement une faute du copiste ou de l'im- primeur. Enfin, je n'ai pu remarquer les pi- quants qui , selon Linné, doivent se trouver sur les nageoires du ventre et du dos bj. VI. LE FLETAN. Pleuronectes Hippoglossus. /^rjme Planche. La nageoire de la queue en forme de croissant. Fleur onectes , -pinna caudae lunulata, B, vu, F, xr. F'* VII, A, L^^xJi, C. kvi, D. cvii. Pleuronectes Hippoglossus. Holibut. Penn. 226. n. 102. Linn. 456. n. 4* Artéd. Le Flétan. Duliam. III. 271. Syn. 3i.n.3. Zoopli. n,247. pi. 7. f. 1. Passer. Klein. Miss. IV.53-n.2. JLie flétan se distingue des autres espèces de so- les, par réchancrure de la nageoire de la queue en forme de croissant. Le côté supérieur de ce poisson est cou- leur de cuir; l'inférieur est blanc. La couleur a) Miss. IV. 33. n. 4. h) S. N. 457. n. 8- TE FLETAN. 421 change selon que le poisson est plus ou moins gras» Cliez le flétan, les maigres sont d'une couleur noirâtre. Les deux côtés sont couverts d'écaillés oblongues, fortement attachées, et qui étant molles et couvertes d'une matière v^is- queuse, ne se sentent presque point au toucher: on ne les remarque que lorsque le poisson est sec. La tête est petite; l'ouverture de la bou- che large, et les deux mâchoires garnies de plusieurs dents longues, pointues, courbes et séparées les imes des autres. Les moustaches sont larges. L'opercule des ouïes consiste en trois lames; l'ouverture des ouïes est grande, et leur membrane découverts. L'anus est plus éloigné de la tête que dans les autres pois- sons de ce genre. On voit im piquant au com- mencement de la nageoire de l'anus. La ligne latérale forme un arc à la poitrine, et va en- suite dans une direction droite jusqu'à la na- geoire de la queue. Le flétan paroît faire en quelque sorte le passage des soles aux autres genres de poissons. Elle approche plus que tout^e autre espèce de sole des autres genres de poissons, par la for- me de la nageoire de la queue, la largeur de la membrane des ouïes, la grandeur des yeux, l'ouverture de la bouclie, la grandeur de son corps charnu et allongé. Après la balaine, le flétan est le plus gros de tous les poissons. On en pêclie en Angleterre qui pèsent clenx à trois cents livres nj, et en Islande, on en a pris de quatre cents bj. Olafsen en a vu qui a voient cinq aunes de long. En Nor^vège, on en prend qui sont si gros, qu'un seul sufEt pour couvrir une nacelle de ce pays. Ce poisson mériteroit par conséquent plutôt le surnom de rnaxîinus que celui à qui on l'a donné. On le trouve dans l'Océan septentrional, dans la mer du Nord; et ce sont les Anglois et les peuples septentrionaux qui le pèchent en plus grande quantité. Les Anglois le tirent de Neufound- land cj , et les François de Terre-Neuve dj. Le flétan est si rapace, qu'il dévore les raies, les crabes et les égrejms\ il avale aussi les lie» vres de mer qui sont attachés aux rochers. Ces poissons se tiennent en rangées dans le fond de la mer, et épient, la gueule ouverte, les pois- sons qui passent, afin de les engloutir. Quand ils sont alFamés, ils se mangent la queue les uns les autres. On prend ce poisson au croc, ou a l'hameçon. Les Suédois prennent pour appât de la merluche verte, et les Groenlandois du scorpion de mer. Les pécheurs du Nord nom- ment cet instrument gangvnaden: il consiste en une grosse corâe de la longueur de trois a) Penn. 226. c) Pontopp. Norw. II. 220. b) Anders. Reis, 101. les pècheurt peuvent plus aisément les découvrir dans les bas fonds Plus tard, ils ne le pèchent plus; car comme après ce tems l'air devient fort chaud, ce pois- son qui est extrêmement ^'^ras, ne peut plus si bien sécher, et le rnf et raehel qu'ils font avec sa chair ne se conserve pas. Nous parlerons bientôt de cette préparation. /^2/^ . I^E FI.ETAN. 11 arrive par fois qu'à quelques-uns de ces poissons, qu'on nomme dree- queue, sont atta- ches une quantité d'insectes de mer ej. On les regarde alors comme étant ordinairement très- vieux; mais j'en doute, parce qu'ils sont petits. Ils sont en général très -gras et d'un mauvais goût. Peut-être est-ce la maladie qui les obli- ge de quitter le fond. Ils deviennent assez sou- vent la proie des animaux voraces qui nagent vers la surface, et particulièrement de l'aigle de mer J^, Celui-ci est quelque fois victime de sa témérité. Quand le poisson est assez fort, il l'entraîne avec lui dans l'abîme: l'aigle atta- ché au dos du poisson, fait des efforts et des cris inutiles, et est obligé de périr dans cet état. Les Groenlandois mangent la chair de ce pois- son fraîche et séchée; ils mangent aussi la peau et le foie après l'avoir préparé avec de Verupe^ tron a:). Ils se servent de la membrane de l'estomac pour faire des carreaux de fenêtres. En Suède, en Islande, et sur -tout en Norwège, on fait de ce poisson ce qu'on appelle rnjj- et roeckel. Le premier n'est autre chose que les nageoires avec la peau grasse à laquelle elles sont attachées; le second, des morceaux de la chair grasse de ce poisson coupés en long. On coupe aussi la chair maigre en longues bandes, e) Sclirift. d. G. N. Tr. III. /) Vultur albiola. 94. t. 1. f. 4.6. ^) EmpeLruni uigrum. LE FLETAN. 4^5 que l'on nomme skare-flog ou squai're'queite. Tous ces morceaux , avant d'être emballés , sont salés et sèches à Tair sur des bâtons. On les sale aussi comme le hareng, et on prétend qu'ils valent mieux. Le meilleur roŒ et le meilleur roechel viennent de Samosé près de Bergen^ celui qu'on prépare en hiver est préfé- ré, parce que le froid de cette saison contribue beaucoup à sa bonté. Cet aliment n'est guère en usage que pour les gens de la campagne et les matelots, qui ont un estomac robuste; car il incommoderoit les gens de la ville, dont la délicatesse offoiblit le tempéranmient. En Hol- lande et à Hambourg, on donne la chair fraî- che de ce poisson à bas prix; mais la tète, qui est délicate, est très chère. Ce poisson fraie au printems, et dépose ses oeufs d'un rouge pâle sur le ri\'age, entre les pierres. Tant que ces poissons sont encore jeunes, ils deviennent la proie des raies; mais les plus gros ont dans le daujjJdn un ennemi redoutable, qui avec ses fortes dcnrs, arrache des morceaux de chair de son corps hj. Les pécheurs en ont trouvé sou- vent qui étoient ainsi nnuilés. Le poisson dont je donne ici l'anatomie, avoit vingt et un pouces et demi de long, sans compter la nageoire de la queue, et dix pou- ces et demi de large, sans compter la nageoire h) Scliwed. Abh. XXXIII. 246. 4-26 LE FLETAN. du dos et celle de l'anus; il étoit épais de deux pouces et demi, et pesoil six livres. La cavité du ventre étoit petite, le foie oblong et posé en travers. L'estomac étoit grand: la peau en étoit mince; et j'y ai trouvé un poisson du gen- re des cnhlinux long de six pouces. Le canal intestinal avoit huit pouces de long et deux si- nuosités. Une chose remarquable, c'est qu'il avoit à l'esLomac un appendice long de deux pouces et demi, qui communiquoit avec le principal canal. L'ovaire étoit double, et cha- que partie avoit la forme d'une lancette. Dans cet ovaire, qui pesoit six onces et demie, j'y ai trouvé 552,400 oeufs. J'ai compté soixante- cinq vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous diiférens noius. On le nomme: heilhuttj Itilibuty à Hambourg; hellcflynder , en Dannemarc; liaelsflundra y en Suède; liclleflynder, qveite , smidskiebhey shrob- he-flynder, en Norwège; flydra^ lieilo-p Jish, en Islande; la petite qveite 'harn, dans la Groen- lande; la moyenne, styving et la grosse, netar- nnk\ haldeSy en Laponie; licilbot, en Hollande; holibut, turbot ou turbut, en Angleterre; flétan ou faitan , en France. Rondelet est le premier qui ait donné un dessin avec les yeux à droite. Gesner^ qui le tira de Rondelet y lui mit les yeux à gauche. D.ms Aldrovand y ils ont la même position, et LE FLETAX. 427 son dessin ressemble autant à la sole qu'à notre poisson. C'est à fVillugJiby que nous devons le premier dessin supportable de notre poisson. Cet auteur l'a représenté avec les yeux placés dans leur juste position. Dcins Jonston, ils sont de même; mais chez Ruyscli, ils sont mal pla- cés. Quand Artédi ne lui donne que deux pieds de long ij y il paroit n'avoir pas connu le gros flétan que l'on pêche dans la mer du Nord. Boiiiare se trompe quand il dit que notre pois- son n'a point d'écaillés. Une question singulière que fait cet auteur; c'est si le flétan n'appar- tient point au genre des raies kj? il est du nom- bre des poissons osseux, et non des cartila- gmeux. /) G en. 17. n. j. k) Diction, a rardcle sole. 4.28 X ARGUS. SECONDE CLASSE. Des Soles qui ont les yeux à gau&lie. VII. L' A R G U S. Pleuronectes Argus, ^.grne P L a N C H E. Des taches en forme de croissant. Pleuronectes maculis lunatis. P. x. J"^. viii» A, ixix. C. xrix. jD. ixxix. Pleuronectes lunatus. Linn. n. 3- 459. n. 17. Parser oculatus. Plumier, Solea. Klein. Miss. IV. 32. Maniisciipt. VJette espèce de sole se distingue des antres poissons de ce genre qui ont les yeux à gauche, par les taches bleues en forme de croissant. Ce beau poisson a sur la surface supérieure de son corps des taches d'un jaune clair, gar- nies de points bruns, bordées d'un bleu clair, et formant tantôt un cercle entier, tantôt deux L ARGUS. 4^9 OU trois segments. Entre ces segments, on voit par -tout de petites taches bleues et des points d'un brun fonce. La tête est large; les yeux sont à une grande distance l'un de l'autre. L'oeil qui est tourne vers le dos, est plus grand que l'autre. Les mâchoires sont d'égale lon- gueur, et armées de petites dents pointues. La nageoire de la poitrine a, comme celle de la queue, des rayons à plusieurs branches. Le côté inférieur est cendré: Les écailles sont pe- tites et molles. L'anus et les autres parties sont comme dans les autres poissons de ce genre. IMnrcgraf trouva Vars]!;us au Brésil; le père Plumier, aux environs des Antilles; Catesby, dans l'Ile de la Caroline; Solander, dans celle d'Uthaite, et Foister, dans celle de Rotterdam. Ce poisson parvient à la longueur de deux pieds. En hiver, il se tient dans le fond de la mer; au prinLems, il remonte dans les fleuves, où il reste pendant l'Eté. C'est L'I où sa chair devient tendre et d'un goût fort estimé. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme: Slcliclschwnrtz et argus, en Al- lemagne; anzus, en France; arainnca, au Bré- sil, linguadaf cuhrlcunha, en Portugal; tunge, en Hollande; patJà-niaurey dans l'île d'Utahite; hadéy dans l'île de Rotterdam, ou Anamoka. 430 L ARGUS. Mnrcgraf est le premier qui nous fit con- noître Y argus; mais le dessin qu'il en donne est faux. FisOf IVillugliby-y 'Jonsbon et Ruysch l'ont copié. Cnteshy nous en donna un dessin oii la nageoire pectorale et la ligne latérale man- quent: les écailles sont aussi trop grandes, et le poisson trop allongé. Dans Marcgraf , FisOy fVUluîilihy , Cabeshy et Ruysch y Var^us a les yeux placés à droite; dans Jonstoriy Plumier et Broussonety ils sont à gauche. Linné se txora- pe en disant que notre poisson a la nageoire de la queue en forme de croissant, et en citant Ynrmnaca de Marcgraf à sa sei^-ième espèce de sole. I.E TURBOT, 431 VIII. LE TURBOT. ' , Pleuronectes inaxhnus, 4- 9^ Planche. Le corps garni cl'éniinences osseuses. Vleuro^ ncctes tuberculis osseis. B. vu, 1\ x. /^. yi, A. :^LVi, C. yir. D. Lxrii. Pleuronectes maximus.Linn. t. 8- f- !• 2. et t. 9, f. 1. 459.11.14. Artéd. Syn, 32. ïlxeTuibot.Penn.323. n. 10g. 11.7. Gionov. Zoûpli. n. Le Turbot. Cours d'iiist. nat. 254. Tom. V. p. 5. Rliombus. Klein. Miss. IV". Turbot. Duliam. III. 261. 35, 11. I. et Ilhumbus i\, 2, pi. 3. JL/cs petites emincnces osseuses terminées en pointes, distinguent ce poisson des autres espè- ces de la même classe. - Ce poisson a le corps arrondi ; il est mar- bré, brun et jaune sur le côté supérieur, et sur l'inférieur blanc avec des taclies brunes. Les éminences du côté supérieur sont beaucoup pins grosses que celles de Tinfé rieur : les imes et les autres sont couvertes d'écaillés minces. La tète est laroe ef rude au toucher comme le 452 LIi TURBOT. tronc, à cause des éminenccs qui la rendent in- éfi^rJe. Les yeux sont grands. L'ouverture des ouïes est large; la mâchoire inférieure avance, et l'une et l'autre sont armées de plusieurs ran- gées de petites dents. La ligne latérale, après avoir formé un arc à la poitrine, divise le corps en deux parties égales, et n a point d'éminences. ^ • Nous trouvons ce poisson non seulement dans la mer du Nord et la Baltique, mais aussi dans la Méditerrannée. Il parvient à une gros- seur très - considérable. Ptondelet en a vu qui àvoient cinq aunes de long, quatre de large et un pied d'épaisseur nj. En Angleterre, on en prend qui pèsent \dngt à trente livres hj, La pêche de ce poisson est si considérable dans ce pays, qu'on en apporte annuellement aux mar- chés de Londres plus de trente mille livres c). On prend ce poisson comme les précédens; mais sur -tout avec l'hameçon de fond. En Suède, on se sert du hareng pour appât, et en Angle- terre de l'égrefin et du hareng coupés en petits morceaux: ce sont les poissons qu'il aime le mieux. Cependant, comme ce poisson est fort difficile dans le choix de sa nourriture, et qu'il ne mord pas à toute sorte d'appât, sur -tout quand il y a douze heures que le poisson est mort, on prend pour cela des poisosns vivans, et sur-tout de petites lamproies, qui ont la a) Hist. cl.P, I. 310. h) Penn. 235. c) Art. of Aiigl, 115. LE TURBOT. 433 vie très -dure. Pour cet effet, les pêcheurs d'An2:leterre achètent tous les ans aux pêcheurs hollandois pour plus de sept cents K\Tes ster- lings de lamproies d). Pour pêclier ce poisson, les Anglois prennent un canot, où ils se met- tent trois. La ligne dont ils se servent, a trois milles angloises de long; et cliaque pêcheur a trois lignes de cette espèce: ils y attachent à une certaine distance d'environ six pieds deux pouces un crochet, par le moyen d'une ficelle de crin : de sorte qu'un tel canot jette dans la mer deux mille cinq cents et vingt crochets de cette espèce. Ils attachent un plomb à la cor- de de la ligne, afm de l'assujettir au fond, et y attachent aussi des morceaux de liège, afin de pouvoir la retrouver quand ils veulent. Com- me le flux et reflux change toutes les six heu- res sur les côtes d'Angleterre, les pêcheurs doi- - vent se régler en conséquence pour jet ter et lever leurs lignes. Le turbot a la chair ferme et de bon goût. On le prépare comme la plie. Il habite les pro- fondeurs de la mer comme les autres poissons de son genre. Il a une membrane chgnatante, qui lui sert, comme aux autres espèces, à em- pêcher, pendant les tempêtes, le sable de lui faire du mal. Il est du nombre des poissons voraces, et vit sur -tout d'insectes et de vers. il) Peiiii. 237. Ee ^54- ^^ TUPiBOJ'. Les intestins sont comme ceux de la barbue. Ce poisson est connu sous dilTerens noms. On le nomme: stcinhutt, dans nos contrées; hotte et steinbotte j en Prusse; pigvaVf tonne et steenbuty en Dannemarc; vrang flônderj skrahe- flynder, en Norwège ; butta, en Suède ; tarboth, en Hollande; turbot et breet^ en Angleterre; turbot y en France; bertonneau, en Normandie; rombi aspri, en Sardaigne; turbot y à Surinam. TFîllughby et Rciy les rapportent notre poisson sous deux noms diiFerens : une fois sous celui de rhonibe à jDointes, et l'autre sous celui de grand rlionibe. Klein l'a aussi décrit comme deux espèces difFérentes, et cite faussement le moineau de mer èiArtédi, Jonston et B.uysch ont fait aussi deux espèces différentes de ce poisson. Bellon l'a représenté faussement avec les yeux à droite. C'est ce que font aussi ses suc- cesseurs Rondelet, Gesner et Ruysch, ïVïllughby l'a aussi représenté une fois avec les yeux à droite, et une autre fois à gauche. I.E MOINEAU DE MER, 4.55 IX. LE MOINEAU DE MER. Tleuroncctes Passer. ^ome Planche. La ligne latérale garnie de piquants vers la tète. Pleuronectes linea laterali versus caput acu^ leata. B, vi* F- x/j% /^. vi. A, xli, C, xvi, D. iix. Pleuronectes passer. Linn. Rliombus. Gronov.Zooph. 459. 11. J5. Artéd. Syn. 32. n-253- var. fi. Klein. Miss. n. 6, IV. 35. n. 3. t. 8- f. 3- 4. JLies piquants qui se trouvent sur la surface de ce poisson, depuis la tête jusqu'à la moitié de la ligne latérale, forment son caractère di- stinctif. Outre la tête et la ligne latérale, le fond des rayons des nageoires du dos et de l'anus est aussi garni d'éminences osseuses, sur lesquelles sont des piquants: le reste du corps est uni à sa surface supérieure. Sur le côté inférieur, je n'ai remarqué aucun piquant, si ce n'est au fond des nageoires, et quelques-uns à la tête. Le Corps est allongé. La maclioire inférieure avan- Ee 2 ^1.56 3-E ÏYlOIjSJiAU DE IVIER. ce sur la supérieure: l'une et l'autre sont armées de petites dents. Les yeux sont petits, près l'un de l'autre. Les deux côtés sont couverts de petites écailles niinces. La ligne latérale a une direction presque droite. On trouve ce poisson en quantité dans la mer du Nord et dans la Baltique. On le prend et le prépare comme les autres espèces de ce genre. Sa chair a bon goût, et est un peu plus dure^ que celle du liez. Le tems du frai et la conformation des parties intérieures sont les mêmes que dans les autres du même genre. Il par\âent ordinairement à la grosseur de la plie: on en trouve cependant de six à huit livres. Le moineau de mer est confondu dans quelques pays avec le liez. Ce poisson est connu sous diiFérens noms. On le nomme: theerbobt, à Danzig; sruffbutt^ à Hambourg; et verkehrter elbutt, pour le distin- guer àii fiez', stachelhut, en Livonie; alite et grabbe, chez les Lettes; vioineau de iiiej-, en France; passere, en Sardaigne; et lest 'flounder^ en Angleterre. Les anciens ichtyologistes n'ont pas su non plus distinguer ce poisson du fiez, Artédi est le premier qui en Ht une espèce particulière; mais il cite faussement pour ce poisson les au- teurs qui ont parlé du turbot a), La courbure c) Syn. 32. n. 6. LE MOINEAU DE ZMER. 4.57 de la ligne latérale que lui donne Bellon bj ; le poids que lui attribue Rondelet cj , et la quan- tité d'éminences que le dessin oiTre, prouvent que ces écrivains ont voidu parler du turbot et non du moinenu de iiicr.. Gronov se trompe lorsqu'il regarde comme une variété du fiez, le rlionibus maxiinus de Klein dj , qui est notre poisson. J^e fiez a les yeux à droite, et l'autre à gauche. Par consé- quent toutes les parties de ce poisson vers IcK tête, sont dans une proportion renversée; et en na£;eant, il doit prendre une direction opposée. Ajoutez à cela que le fiez est garni de piquants par tout le corps; au lieu que notre poisson n'en a qu'à la tète, à la ligne latérale et aux fonds des nageoires du dos et de l'anus. Enfin, on voit sur le premier deux espèces de piquants, des droits et des courbes, et ceux du moineau de vier sont tous droits. Par les mêmes raisons, je ne saurois ap- prouver Mr. Vennnnt quand il' ne fait qu'une espèce de notre poisson et àii fiez ej. On répond aussi alllrmativement à Klein et à Gronov quand ils demandent si la dixième espèce à'yîrtédi et le passer de Linné sont le même poisson que le troisième rhombe de Klein, b) Aquar. 15g. r/) Zooph. 11. 248. e) Ilist. d. F, I. 243. e) B. Z. III. 229. 458 ^^^ Ï^EUCHES. Xllme Genre.' LES PERCHES. ARTICLE PREMIER. Des Perches en général. Les écailles et les opercules dentelés. Pisces squamis operculisque serratis. Perça. Linn.gen» 163. Artéd. Percîi. Penn. gen. 26. gen. 50. Gronov* Zooph. La Perclie. Goiian. Ilist. d. 86. Klein. Miss. V. 35* Poiss. gen, 16. \Jn reconnoît les poissons de ce genre à la den- telure de l'opercule des ouïes, et à leurs écail- les dures et dentelés. L'ouverture de la bou- che est large. Les mâchoires sont armées de dents pointues et courbées, et ordinairement il y en a quelques unes qui avancent sur les au- tres. La langue est courte et mobile, et le pa- lais est garni d'os rudes. Les yeux sont grands, et ordinairement au sommet. Les narines sont LES PERCHES 439 doubles, et divisées par une nienibréne. Les opercules des ouïes consistent en trois lames dures, dont la supérieure est dentelée. L'ou- verture des ouïes est grande, et la membrane branchiostège a sept rayons. Le dos forme un petit arc avec la ligne latérale: ils ont une di- rection parallèle. L'anus est plus près de la queue que de la tête. La première nageoire du dos est garnie de rayons durs. Les Grecs et les Romains n'ont connu que la -perche de rivière aj , ]a perche sawnonnée h) et la perche de mer cj, Bellon est le premier qui ait décrit la petite perche dj , Rondelet Vapron ej, Gesner le sandre fj , et IVillughby le schract- ser gj. Ces sept espèces, qui sont décrites dans les auteurs anciens, furent rangées en un seul genre par Artédi, Mcwcgrctf nous fit connoî- tre ime nouvelle perche d'Amérique hj , Séba trois ij , Cateshy huit kj, Gnrden cinq IJ, Ilaselquist trois injy et Linné neuf nj, Quelque a) Peica ilii\Maiilis. tata, veneiiosa, melanura, h) — l.ibrax. scctatrix, et foiniosa. c) — iiiavina. 7) Perça piinctatiia, ocellata, il) — coinua. philadtlpJiica, atraria, tri- e) •— asper, furca. f) — lucio-perca. i?0 ï^eise. P. aegiptiaca, lutli, i;) — scliraeLser. 4"^' "ilotica, n. Qi — 83. h) — guttata. ;?) P. ^lalpabiosa, vittata, i) — • nobilis , pol)ord. Si le créa- teur n'avoit pas pourvu de telles armes ce petit poisson foible, qui vit peu de tems, et qui, re- lativement aux autres poissons, n'a pas un oeuf sur mille, l'espèce seroit bientôt finie. A la nageoire du dos et de l'anus, le premier rayon est un aiguillon. Nous trouvons ce poisson dans toutes les eaux vives et dormantes. 11 de- vient long d'environ trois pouces, fraie en A\'ril et Juin, et dépose son frai sur les plantes aqua- tiques; on en trouve sur- tout sur les tiges du nénupJia?' jainie et blanc. Il multiplie beau- coup, et quand il se trouve une fois dans im en- ;^Ca JLEPINOCIIE. droit, on a de la peine à le détruire. Dans le tems du frai, il sort des lacs, pour remonter dans les fleuves qui y sont joints. L'épinoche vit d'oeufs et de petits poissons des autres espè- ces; elle mange aussi des vers et des insectes; mais sur- tout des demoiselles. Quoique ce pois- son soit très -petit, il ne devient pas aisément la proie des espèces voraces, qui redoutent ses aiguillons; mais il a beaucoup à craindre des vers qui percent les intestins. Car selon les ob- servations de Frischj Linné , dAnnone et de FallaSj il est tourmenté par le ver solitaire; et selon Mr. Fabricius, par plusieurs autres espè- ces de vers. Le dommage que ce poisson fait à la pêche, est cause qu'on le jette: il n'y a que le peuple qui en fasse usage à cause des oeufs. Dans les endroits ori il y en a beaucoup, les économes s'en servent pour fumer leurs terres. Près de Danzig, où il y en a une grande quan- tité, on s'en sert pour faire de l'huile. On peut s'en servir encore plus utilement, en y joignant de la glaise, pour engraisser les jeunes canards, et pour nourrir les porcs. L'estomac de ce poisson est grand, et le canal intestinal court, comme dans les autres espèces voraces. Le foie consiste en trois lobes. La vésicide du fiel est petite. . La laite et l'o- vaire sont xloubles. Le péritoine est garni de petits points blancs et noirs, et les oeufs, que l'epinociie. 465 je ne trouvai qu'au nombre de cent trente dans les deux ovaires, sont de la grosseur de la grai- ne de millet. On trouve quinze côtes de cha- que côte, et trente vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous dilTérens noms. On le noinme: sticliling, stacheljiscliy dans nos ~ contrées; steclibubtel, stechlingy en Prusse; stik-^ llngy hornsille y lilley tindy ourCy iLunchteyie, hundsta^e y en Norwège; skittspiggy skuthaer den stoerrCy en Suède; kakilisah, en Groenlande; hornsillCy en Islande; steckelhnarSy en Hollande; sticklehacky handsticley scarplingy en Angleterre; hunde-steyle, gund'Stlkely luuid-stigely dnd orety en Dannemarc; epinochey eschardey epi- nardcy en France; ragathka et koUuscJdin, en Russie. Ptondclct est le premier qui en ait donné un dessin assez mauvais n). Les ichtyologistes suivans se sont contentés de le copier. Klein nous en a dédommagé par deux meilleurs hj. Mais il se trompe, en donnant l'un comme une variété à cause des deux aiguillons. Peut-être ' que dans sa première espèce,^ le troisième rayon étoit placé à la nageoire du dos, et qu'il ne l'a pas remarqué. a) Ilist. d. P. II. 150. h) Miss. IV. t. 13. f. 4. 5. 4.64 ^^ PETITE EPINOCIIE DE MEK. IL LA PETITE EPINOCHE DE MER. Gasterosteus Pungitius.' 5 ^me P L a' N C H E. iTlC. 4. Le dos garni de dix aiguillons. Gasterosteus spînis dorsalibus decenu JB. m. P, x. f^, i. A. -Kiji. C :^ii. JD, xj. GasterosteusPungitiiis.Linn. Centriscus. Klein. Miss. IV- 491. n. g. Artédi Syn. 80. 48- ^^- 4- n. 3. Gronov. Zoopli. n. TlieTen-Spiiied-Stickleback. 406. Penn. 262. n. 130. pi. 50. J_ies dix aiguillons du dos, distinguent cette epinoche des autres. Ce petit poisson a les parties de la tête comme le pre'cédent; mais le tronc est un peu plus allongé; on n'y remarque ni écailles, ni boucliers. La naaeoire du ventre consiste en un seul aiguillon; et à la nageoire de l'anus, le premier rayon est aussi piquant. Ce poisson ne passe pas une once et demie. C'est sans contredit le plus petit de tous les LA PETITE EPINOCHE DE MER. 465 poissons, et le seul dont les hommes ne puis- sent faire aucun usage. On le trouve dans la Baltique et la mer du Nord, de même que dans tous les lacs et les havres qui communiquent avec ces mer. Mais on le prend rarement, parce qu'il passe à travers les mailles des filets. On le trou- ve quelquefois pris entre plusieurs autres pois- sons; mais les pécheurs le jettent comme inutile. Le coeur est triangulaire, et à peine aussi gros qu'un grain de chenevi; mais le foie est gros, et consiste en trois lobes, dont l'un est si long, qu'il va jusqu'à l'anus. La petite vési- cule du iiel y est attachée. La rate est trian- gulaire et très -petite; l'estomac long et gros. Le canal intestinal n'a qu'une courbure et sans appendices. La laite et l'ovaire sont doubles. La vésicule aérienne est simple et sa peau épaisse. Le péritoine est blanc et garni de points noirs. Ce poisson est connu sous difFérens noms. On le nomme: sticliUng et stichhuttely à Ham- bourg; seesticJdbigy stecherllng, stacheljiscli y en Livonie; o^siallck et ou^s^nhiuch. en Estonie: skittspîg den lidndre, hcnnwige, gaddsor, oor^ quadf en Suède; steclclbuiirs ^ en Hollande; les- ser et ten-sticklebach, en Angleterre; petite epi- nocJie de mer, en France; sphinrolny en Italie; Aa- liky en Pologne; rageska et kaliuscJika, en Russie. Gg 1^66 I^A PETITE EPINOCIIE DE MER. III. LA GRANDE E P I N O C H E. Gasterosteus Spinacliia, 53^ Planche. Fig. i. Quinze aiguillons sur le dos. Gasterosteus spi- nis dorsaUhus cjuindechn, B, m, P. x. \ II I /^. —-. u4, — » c, XII. JD. — . II VI VI GasterosteusSpinacliîa.Linn. Centriscus. Klein, Miss. IV. 493, n, 10. Artéd. Syn. gi. 48- "• i* n. 5. Gronov. Zoopli. n. Fifteen- Spined - Stickleback. 407. Penn. 263. n. 131. pi, 50. JLjes quinze aiguillons du dos sont une marque certaine qui sert à distinguer ce poisson. Ce poisson a le corps allongé; la tête est cylindrique, le tronc est à cinq côtés, et la queue est applatie. La tête est unie. L'ouver- ture de la bouche est petite. La maclioiïe su- périeure avance sur l'inférieure. L'opercule des ouïes et le bouclier de la poitrine sont bruns par dessus, blanc et rayés par en bas. La ligne latérale est élevée, tranchante, composée de plusieurs petits boucliers. De chaque côté du ventre, on voit un bouclier long et étroit qui LA GRANDE EPINOCIIE. 467 avance. Ces quatre avanceinens avec les aiguil- lons du dos, donnent au tronc la forme d'un pentagone. Les nageoires du ventre consistent en deux piquants ou aiguillons , dont l'antérieur est le plus long. Le premier rayon de la na- geoire de l'anus consiste en un piquant courbé; les rayons des autres nageoires sont mous et ra- mifiés. Les piquants du dos sont courbés en arrière, et on ne les sent plus au toucher, dès que le poisson les a abaissés: ils sont petits en comparaison des précédents. Ces poissons se trouvent également dans la Baltique et la mer du Nord: ils sont sur -tout très -communs en Hollande; on en rencontre aussi souvent auprès de Lùbeck. Ce poisson par\dent à la longueur de six à sept pouces. J'ai trouvé dans l'estomac de petites écrévisses. La grande épinoclie ne va point comme les au- tres dans les embouchures des fleuves; elle reste toujours dans la mer, où on la prend parmi les autres poissons. D'ailleurs, on peut en pren- dre aussi { une grande quantité en allumant du feu, qui l'attire en foule dans les filets. On en tire une huile pour la lampe, et ensuite on en fume les terres. Cependant les pauvres gens la mangent quelquefois. Le foie consiste en quatre lobes, dont ce- lui qui est à droite est aussi long que toute la cavité du ventre, et n'est que peu attaché aux 4.68 I^A GRANDE EPINOCHE. autres. L'estomac est en forme de sac; le canal intestinal a deux sinuosités, et la partie supé- rieure est large. L'ovaire consistoit en deux cylindres, qui se réunissoient au trou ombili- cal, et contenoit 184 oeufs d'un jaune pâle, gros comme des grains de millet. Le péritoine est blanc, parsemé d'un grand nombre de points noirs. La peau de la vésicule aérienne est très- mince. J'ai compté dix -sept côtes de chaque côté, et quarante-une vertèbres à l'épine du dos. On nomme ce poisson: steinbicker, à Kiel; erfshruper , en Heiligeland; tj-angsnajTe , ers^ kraber, en Dannemarc; temkantiga spiggen, en Suède; store, tind-oure, en NorAvège; Jifteen- spireendf stickleback, great prickleback, en An- gleterre et grande epinoche, en France. Schoneveld est le premier qui ait décrit ce poisson et qui nous en ait donné un dessin. Les ichtyologistes qui sont venus après lui, l'ont peu observé; car sans cela Linné et Mr. Pennanb ne lui auroient pas refusé la nageoire du ventre. liES MAQUEREAUX. 469 XlVme Genre. LES MAQUEREAUX* ARTICLE PREMIEIU Des Maquereaux en général, La nageoire de la queue roide. Pisces pinna cauclae rigicla. Scombcr. Linn. ^en. 170. Le Maquereau. Coûan. gen. Artéd. gen, 25. Zooph. 93. 11. Pelamys. Klein. Miss. V. 11- Mackiel. Penn. gen. 29. JLia nageoire de la queue roide, est le caractère distinctif des poissons de ce genre. Le corps est oblong. La tête lisse; l'ou- verture de la bouche grande; le tronc couvert de petites écailles, et dans la plupart la queue est garnie de plusieurs petites nageoires; elle est dure et presque quarrée. La membrane des ouïes a sept rayons. Le tronc a huit nageoires. Les poissons de ce genre habitent l'océan et sont de la classe des poissons voraces: quel- ^^O I^ES MAQUEREAUX. ques-uns de^dennent très -gros. Comme on trouve aussi ces poissons dans la mer du Nord, dans la Baltique et dans la Me diterr année, il n'est pas étonnant que les anciens naturalistes en ayent eu connoissance. Aristote parle de six a), Fline de sept bj, Rondelet d'onze cjy Gesner de douze cl) et ïVillughhy de sept espè- ces ej» C'est ce dernier qui les rangea le pre- mier en un genre sous le nom de tliynnus. En- suite Artédi en fit aussi un genre, qu'il nomma scojiiber, auquel il ne donne que cinq espèces, sans doute parce que les descriptions de ces auteurs sont trop courtes et leurs dessins trop mauvais, pour pouvoir juger si ce sont autant de différentes espèces, ou si ce ne sont que des variétés. Klein a décrit onze espèces dans ce genre sous le nom de -pelavds fj. Après cela, Gnrden nous en donna deux de la Caroline gj y Osbech hjy Sloan i) , Cetti kj et Linné IJ, ont fait connoître chacun une espèce. à) H. A. 1. 6. c. 17. Scomber. 1. 2. c. 13. Tliyiiniis. 1. ^» c. 9. Pelamis. 1. g. c. 2. Tracliiirus. 1.2. c. 15. Amia. 1. 8- f . 2. Cordyla. i) Sconiber N. II. 1. g. c. 15. Thynjius, Pelamis, Cor- dyla et Amia 1. 9. c. 15. Orcynus 1. 32. c. 11. Glau- cus I. g. c. 16. c) Sienreil, Maquereau, Co- gnoil, Boniton, Pelarayde, Bize, Thon, Pompile, Der- bio, Liche et Glaiiciis, Hist. A, P. I. 190 — 203. d) Thierb. S7 — ^2. e) Ichth. 126. /) Miss. V. 10 — 15. g) Scomber Ilippos etCbry- suriis. //) CJiina. 84- Se* Pelamis, i) Jain. I. I. I. f. I. k) Sartl. IJI. 198. I) Se. pelagicus. ILES MAQUEREAUX. 47 1 Lmne rangea ces dix espèces sous un genre, au- quel il donna le même nom quudrtédL Forskael décrit onze espèces sans compter les variétés mj. J'en trouve aussi deux dans les dessins du père Plwnier, et cinq nouvelles espè- ces dans ma collection de poissons. De ces 50 espèces, 5 appartiennent seulement aux eaux de r Allemagne. Je me bornerai ici à décrire ces trois dernières; savoir, le maquereau y le thon et le inaquereau bâtard.. fîi) Se. Lysan,speciosTis, Fer- falcatus, Equiila, Meil- dan, io;nobiîis , fulvop;uc- lict et Rliombus. X)escr.A» tatus, Sansum, Diediba, 54 — 53* 4.72 • ^^ MAÇUEREAU. . ARTICLE SECOND. Des maquereaux en particulier. I. LE MAQUEREAU. Scomber Scotnher, •5^me Planche. Cinq petites nageoires de chaque côte àe la queue. Scomber pinnulis v in inargine utriuS" que caudae. B. vu, P. xx. J^. vi» A, kiii, C, XX. £). XII, :x.ii. Scomber Scomber. 492. n. i« The common Mackrel. Peiin. Artéd. Syn. 43. n. 1. Gro- 264. n« 132. pi. 51. nov, Zoopli. n. 304. ' Le Maquereau. Duliam. III, Pelamys. Klein. Miss. V. 12. 166. n. 5. t. 4. f« 1. ijes cinq petites fausses nageoires que l'on trouve à la queue en haut et en bas, sont une marque sûre pour distinguer ce poisson des au- tres du même genre. Ce poisson a la tête longue Tmissant en pointe émoussée. L'ouverture de la bouche est I.E MAQUEREAU. 473 large; la langue libre, pointue et unie. Le pa- lais -est uni dans le milieu; mais aux bords il est garni aussi bien que les deux mâchoires, d'un rang de petites dents pointues, dont les dernières engrènent les imes dans les autres. La mâchoire inférieure avance un peu sur la su- périeure. Les narines sont oblongues, doubles, et plus près de l'oeil que de la pointe de la bouche. En automne, il se forme, comme chez le sandre, une peau au-dessus de l'oeil, qui est plus considérable au printems; ce qui fait que le poisson a l'air d'être aveugle. En été, cette peau disparoît. ScJioueveld a remar- qué cette particularité dans notre poisson, mais elle mériteroit d'être examinée plus soigneuse- ment. Le tronc est quatre vers la queue. La ligne latérale est plus près du dos, avec lequel elle est parallèle. L'anus est plus près de la queue que de la tête, et le premier rayon de la nageoire de l'anus est piquant. Les rayons de toutes les autres nageoires sont mous et ramifiés, excepté le premier de la nageoire dorsale. On trouve le maquereau non seulement dans les mers du Nord et la Baltique, mais aussi dans les îles Canaries, à Surinam, à St. Croix, et dans plusieurs endroits de l'Océan. Il est, comme l'a remarqué Aristote cij, du a) H, A. 1. 9. c. 2. 4-74- ^^ MARÇUEREAU. nombre des espèces qui vont en grandes trou- pes. En hiver, il se cache dans le fond; au printems, il paroît sur les bords, soit pour s'y multiplier, soit pour y chercher sa nourriture. Selon Pline, ce poisson est celui de toutes les espèces de maquereaux qui paroît le premier bj. Anderson cj, et plusieurs après lui, disent qu'il habite en hiver dans la mer du Nord, qu'ensuite au printems il passe, comme le ha- reng, devant l'Islande, l'Ecosse et l'Irlande, se rend dans la mer d'Espagne^ et de -là dans la Méditerrannëe, et qu'une partie passe vers les côtes de Hollande et va dans la Baltique. Si cela ëtoit, ce poisson auroit à faire un voyage beaucoup plus long que le hareng; car on le trouve même en Egypte, au Japon et à Suri- nam, de mêine que dans toutes les îles septen- trionales et méridionales de l'Amérique. Il se- roit superflu de m'arrêter à réfuter cette opinion, on peut appliquer ici presque tout ce que j'ai dit sur les longs voyages du hareng. La pêche des maquereaux fait chez diiférens peuples un objet considéiable. En Juin et Août les mar- ches de Hollande sont pleins de ce poisson, et pendiuit tout l'Eté on le trouve dans ceux d'An- gleterre, mais sur- tout en Juin qui est le tems du fiai. Comme le maquereau est gras et qu'il se corrompt aisément, c'est le seul poisson qu'il h) N. H. 1. 9. c. 15. c) Isl. 103. XE MAQUEREAU. . 475 soit pennis de vendre dans ce pays publique- ment les jours de fête. En Norvège, il paroît en quantité au printems^ au grand déplaisir des pécheurs, car il poursuit le hareng avec achar- nement. Comme les maquereaux paroissent en grandes troupes , et qu'ils vont d'une baie à l'au- tre, ils épouvantent souvent ces poissons, et on en prend plusieurs avec ceux-ci. Le maque- reau est un poisson vorace qui se jette sur tout ce qu'il rencontre, et qui, à ce qu'on dit, n'é- pargne pas même les hommes. Fontoppidan raconte qu'un matelot qui se baignoit dans le port de Lnrcule en Norvège, vit disparoître tout d'un coup un de ses camarades qui nageoit, et quelques minutes après il le ^'it reparoître mort, le corps déchiré et couvert d'une quantité de maquereaux acharnés sur lui. Les maque- reaux de la Baltique et de la 3Iéditcrrannée sont plus petits qTie ceux de la mer du Nord. Dans les deux premitres il n'a jamais guère plus d'un pied de long, et il ne pèse pas plus d'une li\Te, mais dans la mer du Nord on en trouve de deux pieds; et à ce qu'assure M. Fennnnt il n'y a pas longtems qu'on en a péclié un en An- gleterre qui pesoit cinq livres. Ce poisson fraie en Juin, et dépose ses oeufs entre les pierres du rivage. Il nuiUiplie beaucoup, et rend une lumière phosphorique lorsqu'il n'y a pas long- tems qu'il est sorti de la mer. Il n'a point du 4-7^ ^^ MAQUEREAU. tout la vie cture. Non seulement il meurt bien- tôt après être sorti cle l'eau; mais même il meurt dans l'eau lorsqu'il s'avance avec trop de vivacité contre le filet. On le prend avec cet instiiinient ; mais sur-tout à l'hameçon dormant, auquel on attache pour appât des petits harengs, ou du hareng gâté, des morceaux d'autre pois- son ou de viande. Sur les côtes occidentales de l'Angleterre, on le pêche de la manière suivan- te: Les pêcheurs fichent un pieu dans le sable, non loin du bord; ils y attachent le bout d'un iilet, dont l'autre bout tient au bateau; ensuite ils s'éloignent du pieu aussi loin que le permet la longueur d.u filet, et forment av^ec le filet un cercle vers le bord. A un certain signal, on retire le filet. Il arrive assez souvent que l'on prend de cette manière quatre à cinq cents pois- sons d'un coup dj, La pêche est sur-tout favo- rable, lorsqu'il fait un vent frais et fort; que Ion appelle par cette raison en Angleterre, le vent des maquereaux ej. Les habitans de St. Croix le prennent d'une manière différente, mais aussi avantageuse. Dès que la nuit com- mence, et que la mer est aussi calme qu'ils le désirent, ils se munissent de flambeaux, et se dispersent sur des bateaux dans toute la rade, sur un espace d'un mille. Quand ils sont arri- vés à l'endroit où ils pensent qu'il y a beaucoup tî) Art. of Angling. £36- e) Mackiel gale. Penn. 265. I>E MAQUEREAU. 477 de poissons, ils font arrêter les bateaux, et ils tiennent leurs flambeaux au-dessus delà surface de la mer, de manière qu'ils ne les éblouissent point. Dès qu'ils remarquent que les poissons commence à se jouer sur l'eau, ils jettent promptement leurs filets, et les vident dans leurs bateaux fj. Les Islandois méprisent ce poisson, et ne se donnent pas la peine de le prendre ^. Le maquereau a une chair de bon goût, sur -tout quand on le mange en sortant de l'eau. Mais comme sa chair est grasse, et par conséquent diUlcile à digérer, on ne sauroit en conseiller l'usage aux personnes foibles et valétudinaires. En Italie, on le marine; en Norsvège et en AngleteiTC, on le sale. Dans ce dernier pays, on le sale de deux manières: après l'avoir vidé, on le remplit de sel, on le lie, et on le met en paquet dans des tonnes, avec lui lit de sel et un lit de poisson alternati- vement; ou bien on le met dans de la saumure, où on le laisse jusqu'à ce qu'il en soit suilisam- ment imprégné; ensuite on le met dans des ton- nes en paquet, de la manière que nous venons de dire. Un passage de Cohunelle et de Pline nous prouvent que cette manière de le préparer est très - ancienne , et qu'elle a été connue des Romains JiJ, En Ecosse, on le prépare comme /) Adanson. Seneg. 9. h) Pliii, N, II. 1, 31. c. g. o) Adcisoii. Isl. lo2. 4-78 I^E MAÇUEREAU. le hareng, et on choisit pour cela les plus gros, qui sont les meilleurs. C'est avec ce poisson que les Romains composoient leur fameux ga- rinn. On estimoit sur- tout celui de Carthagène, où Strnbon nous assure que l'on prenoit un grand nombre de maquereaux ij. Selon Fline^ ce garwn étoit une branche très - considérable de commerce pour ce pays ; car non seulement on s'en servoit pour accommoder les mets kj, mais aussi il étoit usité en médecine, pour les obstructions du foie et plusieurs autres ma- ladies. Le foie est rougeâtre, sans division, et la rate est noirâtre. L'estomac est long, et l'ou- verture est garnie d'un cercle de plusieurs ap- pendices. Le canal intestinal, qui n'a que deux courbures, en a aussi de semblables. La laite et l'ovaire sont doubles. Dans im maquereau qui pesoit une livre et deux onces, l'ovaire con- tenoit, au 'mois de Juin, 54.6,631 oeufs. On trouve onze côtes de chaque côté, et trente et une vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous diiTérens noms. On le nomme: Machrelây en Allemagne; rna- krilly en Suède; geier, en Dannemarc, quand t) Geograph. 1. 3. Voici ce captorumScombrariamyVO- qu'il en dit : De hinc Her- cant, ex c/uibus Gorum con- culis iusuîa esty ad Cartha- ditur. ginein spectans , quam a /c) L» 5^' *-• 8* Scomhrorum mulUtudine I.E MAQUEREAU. 4-79 il est petit; inakrel, quand il est plus gros; stocknaly quand il est très -gros; mahrill et z/ia- krell, en Hollande; 7nackrel, mncarel, en An- gleterre; maquereau, en France; auiiol, à Mar- seille; scoTtibro, à Venise et en Sardaigne; y/za- carello, à Rome; carallo ou cavallo, en Espa- gne; koUos-balùck, en Turquie; maquej'cau, à Surinam; guarapuca, à la Jamaïque; saba, au Japon. Il est faux que le maquereau fraie en Fé- vrier comme le dit Aristote IJ. C'est à Bellon que nous sommes redevables du premier dessin de ce poisson. Il lui refuse les écailles; et après lui Roiulcîet, Sclioneveld et Bomare en font autant; mais l'expérience prouve que ces auteurs se sont trompés. Le dernier se trompe aussi en regardant comme le même poisson le inaijuereau et le collas, que Rondelet et Salvian ont décrit exactement. /) H. A. 1. 6. c. 17. . 480 LE THON. IL LE THON. Scoinher Tliynnus, 5 6^}^^ Planche. La ligne latérale unie et courbée près de la tête. Scomber linea laterali laevi, superius curvata, F. yi^ii. /^. VI, A, :kiii, C. xxr. D, xr. kh. Scomber Tliynniis.Liinn. 495. n. 5. n. 2. Artéd. Syn. 49» «• 3» The Tunny, Peiin. 266. n. Pelamys. Klein. Mise. V. IS. . 155- pL 52. < V^n reconnoît cette espèce de maquereau à la ligne latérale, qui est un peu courbée par en haut vers le dos. Le corps de ce poisson a la forme d'un fu- seau: il est épais au tronc, et mince vers la tète et la queue. La tète est petite, et Unit en pointe émoussée. Louverture de la bouche est large; la mâchoire inférieure avance sur la su- périeure; l'une et l'autre sont garnies de petites dents pointues. La langue est courte et unie. Les narines sont placées près des yeux, qui sont LE THON. 431 grands. Le dos est rond; la queue quarree, garnie en haut et en bas de sept à onze fausses nageoires, et des deux côtés d'une peau qui avance un peu en forme de nageoire adipeuse. On trouve ce poisson dans la nier du Nord et dans la Méditerranée ; dans les contrées de ]a Guinée, du Brésil, près des îles Antilles, Ma- louines, à Chili et à la Chine; de même que vers Tabago et la Jamaïque. Il a ordinairement un à deux pieds de long; mais quelquefois il est d'une grosseur monstrueuse. On en trouve sur les côtes de Guinée qui ont la grosseur et la grandeur d'un homme qj, sur celle du Brésil, on en pêche qui ont sept pieds. Fermant en décrit un de sept pieds dix pouces, qui avoit cinq pieds sept pouces de circonférence, et oui pesoit 460 livres. Schoneveld parle d'un autre, pris sur les côtes du Holstein, qui avoit huit pieds et demi de long, ylristote parle d'un thon qui pesoit quinze talens hj'^ ce qui revient à 652 livres; et Cetd nous assure qu'il n'est pas rare d'en trouver de 1000 livres, et que quelquefois même on en pêche de 1800 ej. Ce poisson est probablement le plus gros de tous les haliitans des eaux qui nous servent de nourriture. Cette grosseur monstrueuse l'a fait regarder par quel- ques écrivains comme ime espèce de baleine. Il se nourrit ordinairement de harengs. Il pour- à) Allg. Rcis. ly, 27g. h) II. A. 1. 3. c. 50. c) SaiJin, III. 145. . Hh ^82 ' LE IIIOX. suit aussi les maquereaux, et il épie les harengs qui écliapperit aux iilets des pécheurs. Il a pour ennemi le requin. Fllne rapporte qu'ils suivent les vaisseaux pendant plusieurs jours de suite, et qu'aucun bruit ne peut les éloigner dj. Selon Aristote e) et Pline, le thon dans la cani- cule, est tourmenté par un insecte qui a la gros- seur d'une araignée et la forme d'un scorpion, et qui se met sous les nageoires de la poitrine. Le thon piqué par cet animal, devient furieux, au point que, selon Oppian, il saute dans les vaisseaux et sur le rivage. La raison pour la- quelle cet insecte s'attache plus particulièrement au thon qu'aux autres poissons, c'est que la peau du thon est très -molle sous les nageoires de la poitrine. Il est vraisemblable que dans cette espèce le mâle parvient à une grosseur plus considérable que la femelle; car, selon Mr. Cetti, on trouve toujours des laites dans les plus gros, que l'on prend dans les environs de Sardaigne. Selon l'opinion populaire, ce poisson voyage de la mer du Nord dans la Mé- diterranée fj. Il seroit inutile de répéter ici les raisons pour réfuter cette opinion, comme nous l'avons déjà dit au hareng et au maquereau, d'autant plus que Cetti assure qu'on en a décou- vert, en liiver, une grande quantité dans la il) H. N. 1. 9. c. 15. é) II. A, 1. 8- c. 19. /) Labat. Span. I.75. LE THON. 485 jîier (le Sarclaigne ^J. Pendant l'InVer, ce pois- son hal)ite les fonds de la Mediterrannée, de la mer Noire et de l'Océan. Au printems, il sort du fond, et cherche les côtes, pour y déposer son frai. Aristote a déjà remarqué que le thon ne dépose pas ses oeufs comme les autres pois- sons à l'enihoucliure des fleuves, mais dans la ]Tier luéme h). Il fraie en Mai et en Juin. Mal- gré la grosseur de ce poisson, ses oeufs ne sur- passent pas la grosseur d'un grain de millet. Dans le tems du frai, les thons se rassemblent vers les côtes en grandes troupes de plusieurs centaines, et quelquefois de mille; ils forment un quarré long, et font un grand bruit. Selon IHutnrqiœ , ils doivent, comme le rapporte GeU lias y se presser comme les harengs, les uns con- tre les autres, et former des rangs; de sorte que ceci feroit comprendre ce que Pline dit de la Hotte (}i Alexandre le Grand. Les vaisseaux, dit- il, ne pouva*it passer un à un à travers cette armée de poissons, qu'aucun bruit ne pouvoit disperser, ils furent obligés de se former en bataille rangée, et d'avancer contre ces pois- sons, comme si c'eut été l'ennemi ij. Ceux qui passent de la mer Noire dans la Méditerranée, sont sur la côte droite du détroit; mais lors- qu'ils en sortent, on les trouve sur la côte gau- g) Sardin. III. 143. h) II. A. 1. 4. c. 10. i) N. H. 1. 9. c. 5. Il h 2 /. 84- ^'^ TiiON. clie. Arîstote /J, et après lui Aeliariy Jove et Vline en ont conclu, que ce poisson voit plus clair de l'oeil droit que du gauche. Mais com- me toutes les parties de leur corps ont une for- me égale des deux côtés, il y a apparence qu'il en est de même des yeux. 11 est plus probable que la raison de ce changement déplacé, se trouve dans la différente direction des fleuves: car ce poisson, de même que nous l'avons re- marqué dans le saumon, remonte les fleuves au printems, et suit après cela leur courant. II n'est pas inutile de remarquer encore que, se- lon Aristote, lorsque ce poisson veut dormir ou se reposer, il se retire derrière les pierres et les rochers IJ : particularité que l'on a remar- quée de nos jours à l'égard des saumons. La plus grande partie de ces poissons vient de l'Océan dans la mer Méditerranée. Ils se divi- sent en deux troupes; l'une cherche les côtés de l'Afrique, et l'autre celles de l'Europe. Ceux de la dernière troupe vont dans la mer d'Espagne, de France, de Ligurie et dans le ca- nal de Piombino ; ensuite ils passent par le canal de l'île d'Elba et de Corse, et viennent en Sar- daigne. Après avoir frayé, ils retournent dans les mêmes mers d'où ils sont sortis. On prend le thon avec un grand filet en forme de sac, connu en France sous le nom de k) H. A. 1. 8- c. 10. î) H. A. 1. 4. c. 16. I.E Tiiox. 485 inadragc, et en Italie sous celui de tonnnro. La personne la plus importente pour cette pè- che, est nommée Rais y ou grand Commandant. Ce chef doit avoir une connoissante su/lisante de tout ce qui a rapport à la pêche du thon. Il faut qu'il connoisse à- fond le naturel de ce poisson; il faut qu'il sache avec la plus grande exactitude, les endroits où il y a des fonds, ou des élévations , et qu'il connoisse aussi les cou- leurs qui peuvent influer sur la pêche. Puis, d'après un plan conçu auparav^ant, former un édifice immense avec un illet tendu avec vitesse et solidité en pleine mer; de sorte qu'au milieu d'une tempête, il soît immobile comme un ro- cher. Les pêcheurs ne paroissent dans la mer que vers le commencement du mois d'Avril; et c'est dans ce tems qu'ils préparent leurs tonna' vos. Ils forment une espèce de forteresse mari- time, qu'ils élèvent à grands frais, avec de gros illets, qu'ils fixent au fond de la mer avec des ancres et des poids de plomb. On peut se faire une idée d'un tonnaro par ce qu'en^it Mr. Cetti^ monté sur un petit l)àlimeiit léger qui alloit par le moyen de dix rames ; il lui falloit trois quarts d'heure pour aller d'un bout à l'autre. Quand les pêcheurs abordent, on les reçoit au bruit du canon. Ces tonnaros s'élèvent toujours dans les passages qui sont entre les rochers et les îles : lieux où l'on trouve ordinairement une 486 LE Tiroisr. grande quantité de thons. On bouche soigneu- sement l'entrée de ces passages avec des Rlets: on n'y Laisse qu'une petite ouverture, qu'on nomme la porte extérieure du tonnnro. Cette porte conduit dans la première chambre, ou salle comme on l'appelle. Dès que les poissons sont entrés dans la salle, les pécheurs qui sont aux aguets, bouclient la porte extérieure, en laissant tomber un petit morceau de filet, qui empêche les thons de sortir. Ensuite ils ou- vrent la porte intérieure de la salle, qui con- duit dans la seconde chambre, qu'ils appellent V antichambre. Pour les faire entrer dans cette chambre, on se sert de l'artifie suivant: on prend une poignée de sable, que l'on jette sur les poissons, et on répète cet exercice jusqu'à ce qu'ils soient tous dans la partie qu'on nomme Y antichambre. Le thon est si sensible, que dès qu'il sent les grains de sable, il s'effraie, et se sauve dans l'antichambre. Mais quelquefois le sable n'est pas suffisant pour l'effrayer: alors on descend dans la mer ime figure effrayante, faite avec une peau de mouton. Si tout cela ne suf- fit pas encore, on ferme la chambre par un grand filet, que l'on nomme liagiarro; et on force enfin le poisson à céder. Dès qu'ils sont tous entrés dans l'antichambre, on ferme aussi la porte intérieure, et on ouvre Textérieure, afin de faire entrer une nouvelle compagnie. m; '^'iiox. 487 Quelque?^ tonnciros sont composés d'une grande quantité de cl lanil^res, dont chacune a son nom particulier inj: niais la dernière se nomme tou- jours la chambre des morts; et elle est compo- sée de filets et d'ancres plus forts que les au- tres. Dès qu'on a amassé une quantité sufllsan- te de thons, on les fait tous passer des autres chamhres dans celle des morts, où la bataille commence. Les pcclieurs, et quelquefois des personnes de distinction, sont armés d'une pi- que ou javelot, et tombent sur ces animaux sans défense. Ceux-ci poussés au désespoir, se dé1)attent vivement, font jaillir l'eau, déchirent les filets, se brisent souvent la cervelle contre les rochers ou les bateaux de leurs ennemis. C'est un malheur pour les pèclieurs quand Veiii' pereiir entre par hasard dans la tominro', car il la déchire, et fait sortir les thons avec lui. Le thon est pour les peuples des environs de la Méditerranée ce que le hareng est pour les peuples du Nord. On fait monter à 4.00,000 le nomljre de ceux qui sortent de l'Océan et passent par le détroit de Gibraltar. Quel ne doit pas être le nond)re de ceux qui passent l'hiver dans la Méditerranée, et qui entrent par m) Camcra (îi morte, camer.i di ponente, ilBastardo, Bor- donale di ponente , il i^iande ossia Foratico, Bordonale di IcA-ante, Caméra di levante, Coda , Codaido. Cclti. Sard. III. t. 2. 488 ^^ THON. le détroit de Constantinople! Depuis 30 ans la pèche du thon est devenue très-importante pour la Sardaigne; car on en prend année commune 4.5000. Or, en comptant chaque poisson seule- ment à trois scudi; car les plus gros se vendent sept séquins, cette pêche monte du moins à 155000 scudi. On prend ce nombre par le moyen de douze tonnaros, Porto Scus en four- nit la plus grande partie. Jagernann raconte qu'à Porto 'Louis la pêche du tlion rapporte tous les ans 25,000 écus d'Italie *). La pêche du thon est sujette à des révolutions comme toutes les choses d'ici bas. Dans le tems des Grecs et des Romains, la pêche du thon étoit très -importante au Cap de Bizance, comme nous l'apprenons par Aristote, Aelian, Strabo et Pline, Avec la perte des sciences et des arts, l'industrie de cette pêche s'est aussi perdue. Les Espagnols, qui jadis s'appliquoient beaucoup à la pêche, s'approprioient aussi celle du thon. On comptoit sur les cotes d'Espagne dix -sept tonnaros, parmi lesquelles celle d'auprès de Co- nil étoit la plus célèbre. Un seul jour suilit pour ôter à ce royaume la riche pêche du thon, et la faire passer à d'autres nations. Ce fut le jour fameux, où la ville de Lisbonne fut dé- truite par un tremblement de terre. Le thon fraie dans une profondeur d'environ cent pieds, *) Briefe ûber Ital. III. 5gter Biief. LE ruoK, 489 et évite les rivages où la mer n'a pas cette pro- fondeur. Par ce tremblement de terre, une grande quantité de sable et d'autres corps mari- times furent détachés des côtes de l'Afrique, et s'accumulèrent sur les côtes d'Europe; de sorte , que le fond de la mer d'Espagne fut considéra- blement élevé; en même tems que les havres de Tetuan, et Sale en Baibarie furent vidés et nettoyés. Le printems suivant, lorsque le thon passa de l'Océan dans la 3Iéditerranée, il trouva les côtes d'Espagne presque comblées par les sa- l)les; de sorte qu'il se tint à une si grande di- stance des côtes, qu'on auroit eu besoin pour le prendre, de filets d'une longueur immense. Enfin la pèche du thon tomba en Sardaigne et à Naples jij. La pèche du thon est un des plus grands divertissemens de la Sardaigne. Alors plusieurs personnes de distinction ont coutume de s'y ♦ rendre des contrées éloignées. Les pécheurs après avoir préparé, en Avril, leurs grands filets faits en forme de poches, et les avoir faits bénir par leurs prêtres, les .jettent dans la mer. On tire la veille le nom du Saint qui doit être le patron du lendemain. Pour cet effet, on met plusieurs noms dans une roue de fortune: on tire, et le nom du Saint qui sort, est le seul 7j) Cetti. Siird. III. 164, 49 o ^ i^E THON. invoqué pendant toute la journée oj. Du reste, les matelots les prennent aussi en pleine mer, en voyageant, avec une espèce de turlotte faite d'étain et de plomb, à laquelle ils attachent des plumes blanches , pour imiter le hareng volant. Ils attachent cette turlotte à une corde qui tient au bâtiment. Enfui, on les prend aussi au har- pon et avec des grosses lignes dormantes, gar* nies d'un grand nombre d'hameçons. Quoique ce poisson paroisse bien redoutable par sa gros- seur monstrueuse; cependant il est si peureux lui-même, qu'il ne donne pas beaucoup de pei- ne aux pêcheurs lorsqu'il est mie fois, pris : car dès qu'il a senti que ses premiers efforts sont inutiles, il paroît se soumettre sans résistance à son sort, et reste tranquille dans les filets. " On mange ce poisson frais et mariné. Pour le saler, les pêcheurs le pendent par la queue, lui ouvrent le ventre, et après en avoir tiré les entrailles et avoir séparé la chair de l'épine du dos, ils la coupent par morceaux, et la mettent dans la saumure. On le vend sous le nom de tonnine ; et on en envoie sur-tout beaucoup à Constantinople. Autrefois le commerce du thon étoit beaucoup plus considérable qu'il ne l'est à présent; car il tenoit lieu du hareng de Hol- lande, du caviar de Russie, des sardelles et des auclioix de France. On l'estimoit sur-tout beau- 6) Cctti. 171. LE THON. 491 coup en Italie, et on clonnoit dilTérens noms aux diverses parties de son corps. On appelloit tarentella les petits morceaux maigres coupes en long, et ventresca et sorra les morceaux gras du ventre. La chair de ce poisson varie d'une manière incroyable: elle change presque à cliaque endroit et à chaque profondeur diflé- yente; tantôt elle est ferme, tantôt molle; dans quelques endroits elle ressemble à la chair du veau; dans d'autres, à celle du porc. Voilà pourquoi, en Sardaigne, on donne difFérens noms à la chair de ce poisson pj. Autrefois les Italiens et les Espagnols estimoient tant le thon à cause de son utilité pour le commerce, que selon Lnbat qj, on le grava sur les mon- noies d'Espagne, et selon Bellon r) sur celles d'Italie. Selon rdcliter^ le thon étoit clicz les an- ciens l'image de la fidélité conjugale, et on en jnanoeoit ordinairement aux noces. Les Grecs l'avoient consacré à Diane. Le foie de ce poisson est gros, rougeâtre, et consiste en trois lobes. La rate est d'un bleu foncé; résophage large et ganii de larges plis. L'estomac est allongé. De sa partie supérieure naît le canal intestinal; et à une petite distance . p) La spinella bianca, la spi- netta,Bnsingalia. Cetti.i37' iiella )iera, la sorra, le duc «7) Span. I. 30. codellc biaucae liera, carne r) A^ii. 106. 492 LE THON. de l'estomac, on trouve deux appendices, dont chacun se divise en deux brandies, qui se par- tagent encore en plusieurs rameaux; de sorte qu'a la lin on compte seize extrémités. Le ca- nal intestinal a trois courbures; mais ce qui pa- roît sur -tout remarquable à l'égard des entrail- les, c'est la vésicule du fiel, qui est aussi lon- gue que la cavité du ventre^ et attachée au ca- nal intestinal. Ce poisson est connu sous dilFérens noms. On le nomme: tliun, ou thunjlscli, en Alle- magne; springei'y à Heiligeland; tantcie, en Dannemarc; mahrell- stoerie , en Norwège et en Laponie; bhonyn, en Hollande; tunny, en An- gleterre; thon y en France; thonnOy en Italie et chîcora, quand il n'a qu'un an; scmnphTO, en Sar- dai2;ne, quand il ne pèse pas quatre cents livres; rnezzO'tonno y quand il n'en pèse que trois cents; tonni goljitaniy ceux qui viennent dans les gol- fes; tonni corsa y ceux qui restent dans la mer; alhacore, en Espagne; abbacovy aux îles Cana- ries; cavalay en Portugal; gerémouy aux An- tilles; tallingy aux Maldives; ittoUy à l'île de Maltlie; guarnpuca , au Brésil. Aristobe prend faussement le cordyle pour le thon quand il n'a que six mois, et le bonnet pour un tlion plus âgé. Il a communiqué son erreur non seulement aux Grecs et aux Ro- mains, mais encore à diiférens auteurs aile- HE THON. 495 mands, tels que Jonston et Aldrovand^ Eelîon est le premier qui observa que le bonnet àiïïère du jeune thon par les raies noires qui manquent à celui-ci sj', et Scalige?' confirma cette opinion par l'expérience des pécheurs de Marseille, qui lui assurèrent qu'une pelaniite ne devenoit ja- mais un tlioii tj. TVillughby a donc raison de séparer ces deux poissons. I^^^y ^ suivi son exemple. Une chose étonnante; c'est qiiArté- diy qui d'ailleurs a coutume de suivre ÎVillugh' hy, ait regardé le bonnet comme un jeune thon^ et le cordyle comme une variété du même pois- son uj. Ces deux poissons diiïèrent du tJion non seulement par leur grosseur qui est moin- dre, et par la différence du nombre des rayons €t des fausses nageoires, 'mais aussi parce que le bonnet a dus raies noires et le cordyle a des boucliers sur une partie de la ligne latérale. Aristote se trompe en croyant que le thon croît si promptement, qu'on peut le voir grossir tous les jours à vue d'oeil xj. Il se trompe aussi quand il dit qu'il ne Wt que deux ans. Cette on de roche bj. Dans la suite fVillu^hby nous fit connoître le roi des surmulets cj y et détermina en même tems les caractères qui di- stmvuoient les deux espèces de surmulets. Il traite ces deux espèces ensemble, et fait un chapitre particulier du roi des surmulets. Il re- garde celui de yi(irc2;rnf comme une variété du petit surmulet. Mais Ray, Artédi et Linné n'en fonî: point mention. Les trois espèces qnAi'" tédi connoissoit, il les joignit aux milans de mer dj , quoiqu'ils soient diiFérens, et qu'ils soient séparés dans JVillughby, Klein eut rai- son de les rassembler en un genre, auquel il donna cinq espèces; savoir, les trois dont nous venons de parler, et deux de Marcgraf ej. Mais je crois que sa cinquième espèce n'appar- tient pas à ce genre; c'est plutôt le pilote, com- me on peut le voir par la description de MarC' g^'ctf* Linné distingue les surmulets des milans de mer; mais il se borne à trois espèces. Enfin, Forsknel nous a fait connoître deux nouvelles es-pècesfj. De ces six espèces, il n'y a que le surmulet rayé qui soit naturel aux eaux de nos contrées. Je vais en donner la description. b) Antill. 150. e) Miss. V. 25. c) Iclith. 236. MuUus ira- /) M. Auriflamma et vitta- berbis. tus. Descr. A. n. 19. ao. d) Syn. 71. n. 1 — 3. LE SURMULET. 50 ♦7 ARTICLE SECOND. Des Barbeaux de mer' en particulier I. L E S U R M U L E T. JMullus Sunnuletus» ^yme Planche. Le corps avec des raies jaunes. Mullus corpore, striis luteis. B. m. P. xr.. /^. fi. A, vu, C. xxJi. D. VII. IX,. Mullus Siirmuletus. Linu. Mullus. Klein. Mise. V. 22. 496. n. 2. Gronov. Zooph. /i. 2^6. Tiigla. ^ Aitéd. Syn. 72. Surmulet. Penn. B. Z. III, n. 3. zji. 11. 135. JLjes raies jaunes placées en long, distinguent sulTisaniment ce poisson des autres de ce genre. La mâchoire supérieure avance un peu sur l'inférieure. Le dos a par devant un sillon de- stiné à recevoir et à cacher la nageoire dorsale lorsque le poisson la relire. La ligne latérale 504- ^^ SURMULET. est parallèle au dos. Le corps est rouge, et les raies, qui'^ont d'un jaune d'or, passent dès que les écailles tombent, parce qu'elles ne sont que sur la superficie de ces écailles. Mais cette couleur rouge, qui se voit à travers les écailles transparentes, paroît plus belle encore lorsque ces écailles sont tombées. Les rayons de la nageoire antérieure du dos sont durs et simples; les autres sont mous et ramifiés. Nous trouvons ce poissons dans la mer du Nord , dans la Baltique , la mer Méditerranée, aux Antilles; m.ais de différente grosseur. Dans la Baltique, il est rarement plus long que la main; FUne, dans la Méditerranée, qui est particulièrement sa patrie, on en trouve de tems en teins d'un pied de long. Juvenal fait mention d'un poisson de cette espèce qui pesoit six livres; et comme il le nomme un uionstre, il faut que celui de la mer Rouge, dont parle FUne, qui pesoit quatre -vingt livres a) y ait été un autre poisson. Ce surmulet a, outre ses belles couleurs, la chair blanche, ferme et feuilletée, qui, lorsqu'elle n'est pas trop grasse, fournit une nourriture facile à digérer. Les Grecs et les Romains en faisoient un très-grand cas. Ceux qui le pêchoient, aimoient mieux en faire de l'argent que de le manger; ce qui est exprimé par un proverbe encore usité au- a) L. 9. c. 13. LE SUniMULET. 505 jourd'hiii en Italie: IL ne mange -pas ce quil jjvend bj. Ce que dit Juvenal de ce poisson, prouve a quel excès la prodigalité étoit montée chez les Romains, On donnoit pour un de ces poissons son pesant d'argent. Galien deman- dant un jour à quelqu'un pourquoi il achetoit si cher un poisson, dont la chair étoit indi- geste. C'est, lui répondit l'autre, à cause de deux bons inorceaux, le foie et la tête. Le poète reproche donc avec raison, à Calliodore, d'avoir dépensé pour quatre surmulets 1200 se- sterces en un seul soupe. Selon Senèquc, l'em- pereur Tibère Ht vendre un de ces poissons, qui pesoit quatre livres, et dont on lui avoit fait présent: Octave ne crut pas le payer trop cher en donnant 5000 sesterces. Vline assu- re, que le consul Celer en paya un 8000 sester- ces cj'^ et selon Suétone, sous le même Empe- reur, on vendit trois de ces poissons 50,000 se- sterces dj. Il faut attril)uer le cas qu'en fai- soient les Romains, non seulement à sa chair délicate, mais aussi à la belle couleur dont il brille; car selon Varron, on, le gardoit dans les viviers comme un ornement ej, Cicéron repro- i) Non inaiigia la tiiglia, calcul d'Arbiitnot, Ciim- clii la piglia. bcilaud, Gieaves et de c) L. 9. c. 17. Ilooper, un sesterce val- d) Cette somme revient à loit, sous l'empereur Ti- milie écus d'Empire, ou à bère, 9^- pféii. arifent d'Al- quatre mille livres de Fran- lemagne. ce à peu près. Selon le é) De re rustica. lib. 3. c. 17. 5.o6 I^E SURMULET. che à ses compxitriotes, qu'ils se croy oient au- dessus de tout, quand ils pouvoient montrer les surmulets quils conser violent dans leurs vi- viers fj. Ce n'est pas tout; selon Séneque, dans leurs repas, ils faisoient mourir ces pois- sons dans leurs mains, alin de se divertir en voyant la diversité des couleurs qui se succé- doient sur le poisson à mesure qu'il expiroit ^J, Les Grecs l'avoient consacré à Diane; et cela, selon Flutarque j parce qu'il poursuit et tue le loup de mer, qui est le plus grand ennemi des hommes. Le surmulet est du nombre des poissons voraces. Selon Aelien, i\ mange tout ce qu'il rencontre, et il aime sur-tout la chair des hom- mes et des animaux lij. Ordinairement, il vit de petits poissons, d'écrévisses et de coquilla- ges. Selon Pline f les coquillages lui donnent une odeur désagréable i^; et selon Gnlien, il a une odeur désagréable lorsqu'il s'est nourri d'ér crévisses k)» En général, ce médecin paroît n'avoir pas aimé notre poisson; car il assure qu'il n'a pas un fort bon goût, et que la chair des gros est dure et diflicile à digérer. Aristote au contraire, assure que sa chair est délicate, f) Nostri autem principes di- Attic. 1. 2. parad. i6. gito secoelumputant attin- g) Quaest. nat. 1. 3. c. 17. g^re, si Miilli barbati in h) L. i2. c. 31. piscinis sunt , c/ui ad ma- i) — 9. — i/. num accédant. Epist. ad k) De Alim. Class. II. LE SUKIMULET. 507 sur -tout en automne IJ. Les surmulets sont aussi du nombre des poissons qui s'assemblent en troupes. Au printems, ils sortent du fond de la mer, et vont déposer leurs oeufs dans les embouchures des fleuves. Cependant, selon AristotCy c'est le seul de tous les poissons qui fraie trois fois par an et le plus tard mj. On le prend dans des filets, des louves, des nasses, et à l'hameçon sur -tout, en mettant pour ap- pât une queue d'écrévisse. Afin qu'il ne se gâte pas quand on l'envoie dans les endroits éloignés, on le fait bouillir dans de l'eau de mer aussitôt qu'il est pris; ensuite on le saupoudre de fari- ne; puis on l'entoure d'une pâte, afin d'empê- cher l'air d'y pénétrer. Ce poisson est connu sous différens noms. -, On le nomme: RoJubarty en Allemagne; pe- teriiiaenuchen et goldeckerif dans le Holstein; schmerbutten et ha^untken, près d'Eckernfoer- de; jHulle, barbe, enDannemarc; honig van dç haarins;, en Hollandt; byenaneque et ban,rb' viannetje^ aux iles Moluques hollandoises; sur- mulet et striped surmulet y en Angleterre; sur- mulet y barbarin, rou2:et barbé et mulet barbé y en France; rouget y à Marseille; tri^liay en Ita- lie; rouget barbé et surmulet y à Venise; tehyr^ en Turquie; ikaii tamary à la Chine, /) L. 9, c. 37. m) L. 5. c. 9. 508 I^E SURMULET. Le foie est rougeâtre, et la rate noire. La vésicule du fiel est petite , et l'estomaG rond. Le canal intestinal est court et entouré à son coniniencenient de vingt- six appendices. Ce qui a fait croire à Aristote, Pline et Aelien que ce poisson fraie trois fois dans l'an- née, \dent sans doute des dilFérens tems de l'an- née où il fraie suivant son âge. Bellon, Ron- delet et Salvîen se trompent en refusant les dents à ce poisson; et par conséquent Athénée ne mérite pas le reproche que ce dernier lui fait, de lui en avoir donné. Les quatre raies jaunes qiie Linné et Artédi donnent comme un caractère distinctif de ce poisson, sont une marque incertaine: car on en remarque tantôt plus, tantôt moins. Ainsi j'en trouve cinq dans le manuscript du père Fluinier^ et seulement deux dans Pennnnt, Le mien est conforme au dessin de Salvien, qui n'a que trois raies. Artédi remarque que Salvien est le premier qui ait décrit ce poisson. Mais il se trompe; car Bellon en a non seulement donné une description exacte, mais aussi lui dessin. Gronov rapporte faussement à notre poisson le barbus major de Ray nj. Ce dernier n'appartient point du tout à cette classe, mais à celle des cabliauXy comme on le voit par le dessin oj, n) Zoopli. n. 236. o) Ray. Syn. 164. pi. «• f. ?• GadusLuscus. JLES MILANS DE MER, 509 XVIme Genre. LES MILANS DE MER. ARTICLE PREMIER. Des Milans de mer en général. Des appendices articulées devant les nageoires de la poitrine. Visces appendicibus articula' ds ad pinnas pectorales, Trigla. Linn.gen. 172. ArtéJ. IV. 42. Corystîon. 45, gen. 32. Groii. Zoopli. S^'f. Gurnard. Penn. III. gen. 31. Catapliractus. Klein. Miss. Milan. Goiian. gen. 19. J__ies poissons de ce genre se reconnoissent aux appendices articulées , placées devant les nageoi- res pectorales, et attachées avec elles. Elles sont séparées l'une de l'autre: il n'y a que dans l'hirondelle de mer où elles >soient réunies par une membrane. Elles consistent en plusieurs petites articulations, et conservent la courbure qu'on leur donne; de sorte qu'elles méritent le nom de doigts, qui leiu' a été donné par plu- sieurs écrivains. Ces appendices leur servent sans doute à attirer la proie. 510 LES MILANS DE MER. La tête est grosse, et la queue étroite. La première est entourée d'un gros os, qui lui sert comme d'armure, et qui finit en pointes à la nuque et aux côtés. Dans plusieurs, outre ces pointes, on en trouve encore deux à la par- tie antérieure. On remarque au-dessus de la cavité des yeux, des piquants courbés en arrière. Les yeux accompagnés d'une membrane cligna- tante, sont ronds et placés près du sommet, à une grande distance de l'ouverture de la bouche. Comme l'os des orbites avance par en haut, cela forme une espèce de sillon ou fente. L'ouver- ture de la bouche est grande. Les mâchoires et le palais sont garnis de petites dents pointues.' Les narines sont doubles, et près de l'oeil. L'opercule des ouïes consiste en une seule lame à rayons, et finit en piquants. L'ouverture des ouïes est large, et on trouve sept rayons À la membrane branchiostège. Le tronc, excepté dans V hirondelle de mer et le malarniaty est couvert de petites écailles, et a huit nageoires, dont la première du dos est à piquants. Le dos est droit, et a un sillon dans sa longueur, garni de chaque coté d'une bordure raboteuse. Les côtés sont un peu comprimés. La ligne la- térale, qui est plus près du dos qne du ventre, va dans une direction droite. Le ventre est gros, et l'anus au milieu du corps. I>ES MILAKS DE MER. 5II Ces poissons habitent la mer du Nord, la Baltique, la Méditerranée et diverses contrées de l'Océan. Ils sont du nombre des espèces car- nacières. Lorsqu'on les touche, ils dressent la nageoire dorsale, pour piquer avec les pointes dont elle est garnie, ceux qui les tiennent. Comme en même tems, ils compriment leur ventre, ils rejettent de l'eau et de l'air avec un certain bruit. C'est ce qui leur a fait donner le nom de Girondins, AHstote a connu trois espèces de ce poisson; savoir, Yldrondelle de mer aj , le rouget bj , le malariiiab cj. VUne est le premier qui ait décrit le corbeau de mer dj , Athénée la lucerne e) , Bellon le gour- neaufj, et Rondelet le milan de mer , Yliubria^ co et le cavillone g). TTlllugliby donna ces espè- ces en un genre JiJ ; Artédi les rangea avec les surmulets en im genre. Klein sépara comme JFlllu^Jiby'y les surmulets ^ et divisa deux par- ties: il en réunit ime à ses poissons cuirassés, et l'autre à ses poissons casqués ij. Linné les réunit en un genre, auxquels il en joignit un d'Asie et le -petit milan volant de Browne hj. J'ai fait mention de la confusion qui se trouve dans les anciens ichtyologistes au sujet des car- a) Trigla volitans. f) Aqu. 207. T. Gurjiardus. b) — Ciiculus, ^) II. <î. P. I. 232 — 254. c) — L) ra. . h) Icliili. 278. ii) — Luccrna. i) Miss. IV. 42. 45. *-) — Iliiuudo. k) T. asiatiijua et evolans. 512 I^ES MILANS DE MER. pes, àes çaumons et des plies. Ce désordre eft encore bien plus grand dans le genre dont nous parlons; car dilFérens auteurs font une espèce de plusieurs, ou plusieurs d'une seule. Tels sont pour le premier cas, Jonston et Gronov; pour le dernier, Gesner^ Aldrovandy Willugh^ hy et Klein y comme je le montrerai par des ' exemples, en décrivant les espèces. J'ai fait mon possible pour me retrouver au milieu de cette confusion générale, et j'espère, par le ' moyen des originaux que j'ai sous les yeux, pouvoir jetter quelque lumière sur ce qu'ont dit les écrivains au sujet de cqî> poiçsons. Com- me de toutes ces espèces, il n'y en a que trois qui se trouvent dans les eaux d'Allemagne, je me bornerai par conséquent à décrire ces trois dernières. LE GURNEAU. 515 O ARTICLE SECONP. Des Milans de mer en particulier. LE GURNEAU. Trlgla Gurnardus. ^ Qme Planche. La ligne latérale large et rude. Trîgla llnea laterall lata aculeataquc. B. vu, P. x. T^, ri. A, yivii. C. IX. D, Fii, XIX, Trigla Gurnaicliis. Linn.497. 46. 11, 5. t. 14. f. 2.^ n. 3. Avtéd. Syii. 74. n. 3* Tlie Giey Curnavd. Pé^iu. Gronov. Zoopli. 11. 283. 276. n. 157. pi. ^j. Corystioii. Klein. Miss. IV. J_ja li2:ne latérale larirc et rude, est le carac- tère clistinctif de cette espèce. Le corps est allongé, et la tête plus grosse que dans les autres espèces de ce génie. L'os qui est au-delà de la lè\Te supérieure, a une écliancrure par devant, des deux côtés de la- quelle on trouve trois à quatre pointes. L'ou- Kk ^1^ I-E GUKNEAU. verture de la bouche est grande; et chaque mâchoire garnie de petites dents pointues. Sur les joues, on voit plusieurs étoiles composées de petits points argentins réunis, et qui sont coupés dans les intervales par une couleur rou- ge. L'opercule des ouïes, ainsi que Tomoplate, finissent en pointe. On remarque un sillon en- tre les yeux et les narines. Le tronc est cou- vert de petites écailles blanches, bordées de noir. La ligne latérale est formée par des écailles grandes, épaisses, rudes, noires au mi- lieu, et blanches sur les bords. La nageoire de l'anus est plus près de la tête que de celle de la queue. On trouve ce poisson dans la mer du Nord, dans la Baltique, et sur les côtes de l'Amérique méridionale. Dans ce pays , il a ordinaire- • ment i| pied de long; en Angleterre, il en a 2 — 5. Frezier raconte qu'on le trouve en fort grand nombre à Chili, à la rade de Valporaiso, et que sa chair est d'un très;bon goût *). Le gurneau habite le fond, oti il cheiche les écré- visses et les moules. Il fraie en Mai et Juin. Dans ce tems, il se rend sur les côtes, pour y propager son espèce, et dépose ses oeufs dans des endroits unis. On le prend avec des iilets, et sur- tout à la ligne de fond, à laquelle on attache pour appât un morceau de poisson, ou *) Voyag. I. 212. LE GURNEAU. 5I5 un morceau detofFe rouge. Ce poisson a la chair ferme et de bon goût. Le aurneau est connu sous dilFérens noms. Qn le nomme: Sclnniedekneclit , dans le Hol- stein; Seelinhuy kurre et kurreJiscJi, à Heilige- land; gurned et grey gurnedy en Angleterre; knorhaarîf en Hollande; bellicant, en France; gourneaUf à Marseille; tigiega, à Malthe; AiV- lanidsj ' baliick f en Turquie. Le foie est pâle; la rate d'un rouge fon- cé, et l'estomac est formé par une membrane épaisse. Le canal intestinal a plusieurs courbu- res, et au commencement plusieurs appendices. La vésicule du fiel est petite, jaunâtre et trans- parente. J^TJugliby est le premier qui donna un dessin de ce poisson, mais il a omis les nageoi- res du ventre et de l'anus nj» Klein a tort de dire que ce poisson n'a point de nageoires ven- trales. Linné donne pour caractère de ce pois- son les taches rouges, mais j'avoue que je ne les ai remarquées dans aucun de ceux que j'ai vus. Artédi ne caractérise pas suffisamment ce poisson par le museau à deux coins, et les deux piquants des yeux bj. Ces caractères se trouvent encore dans d'autres poissons de ce genre. a) Icluh. S. 2, f, I. h) Syu. 74. n. g. Kk 2 l6 LE TxOUGET. II. LE ROUGET, Tiîgla Cuculus, 5gme P L A N C H E. Le corps rouge, une tache noire à la première nageoire du dos. Trigla corpore rubro, ma' cula nigin in pinna dorsali prima, B. vu, F. X. f^. VI, A, ^11, C, XV, D» X. XVIII, Trigla Cuculus, Linn. 497. 46. n. 6. t. 4- f* 4* n. 4. Artéd. Syn. 74. n. 7. TlieR.ecl-GunLard. Penn.273. Corystioii. Klein, Miss. IV. n. 138, pi. 57. l_ja couleur vive et rouge dont brille ce pois- son, et la tache noire quil a à la première na- geoire du dos, le distingue des autres poissons du même genre. Ce poisson a, comme le précédent, le corps efTilé; cependant la tète et l'ouverture de la bouche sont plus petites, l'échancrure de de- vant moins forte, et les quatre pointes plus courtes. Les narines sont doubles, placées près de la bouche. La li^rne latérale consiste en écailles épaisses, larges et argentines, bordées de noir. LE ROUGET.. 517 N0113 trouvons ce poisson clans les mêmes eaux que le préce'dent, et dans les environs du Cap' de Bonne -Espérance. Il n'a pas plus d'un pied de long. Il est de toute beauté dans l'eau; et lorsqu'il en. est tiré et que le soleil donne dessus^ on apperçoit des reflets de couleur va- riée, qui font un aspect charmant. I.e rouget est du nombre des poissons voraces. Au prin- tems, il paroît sur les côtes, pour y. déposer son frai. Mais comme hors ce tems, il reste en pleine mer, Aristote a douté, si c'étoit un poisson de côte ou de pleine mer aj. On le prend en grande quantité avec la ligne de fond, et rarement dans les filets. Sa chair- est beau- coup plus tendre et plus ferme que celle du précédent; et c'est dc-là, à ce qu'on dit, qu'il a reçu le nom de capone à Rome. La saison où ce poisson est le meilleur, c'est au prin- tems, et en Eté dans les mois de Juin et Juil- let: alors sa cliair est blanche; et comme il a encore l'avantage de n'avoir presque point d'ar- rêtés, on le sert sur les meilleures tables. Une chose remarquai de, c'est que ses couleurs se distinguent encore lorsqu'il est cuit. Gcilien le re^rarde comme un mets dur et difllcile à diiré- rer bj, T^es parties intérieures sont de la même nature que dans le précédent^ a) L. 3. c. 15. l) De Alim. 1. 2, 518 .LE PiOUGET. Ce poisson est connu sous difFérens noitis. On le nomme: rot'her seehahn, en Allemagne; hunclie, . en Hollande; rcd ^ gurnard et rot' clied, en Angleterre; rouget, rouget grondin et morrude, en France; cnvillone, en Langue^ doc; caponCy à Rome; lucerna^ à Venise; tri" glia, à l'île de Malthe. Bellon se trompe quand il dit que notre poisson n'a point d'écaillés cj. IIL LA GALLINE ou LE PERLON, Trigla Hirundo, 6omG^ Planche. Les nageoires pectorales larges. Trigla pinnis pectoralibus latis, B. vu, P. xx. Z-^. rj. -<^. xir. C. XVI, D, VIII, xr. Trigla Hirundo» Linn. 497. Corystion. Klein. Miss. ÎV, n. 6. Artéd. Syru 73. 45. n. 2. lî. 4* Gronov. Zoopli. The Sappliiriue Gurnard. n. 234. Penn. 2Q0. n. 140. pi. 56. v^e beau milan de mer se distingue par ses na- geoires pectorales, qui sont aussi larges que longues. c) Avège ; knorrhane, knoding^ k?iot et scJuned, en Suède; tub'Jish et sappJdrine gurnard, en Angleterre; cahote, galline, galinette, linette, en France* o ào LA GAJLLINE. ■perlon, à Botirdeaux; caponCy à Rome; tigie* ë^ à Malthe. Salvien nous a donne le premier dessin de ce poisson, mais il l'a mal représenté, en lui donnant trois nageoires ventrales aj, JVillughby est tombé dans la même erreur bj. Les pi- quants de la tête, et les trois appendices des nageoires pectorales qaArtédi prend pour le caractériser, sont des marques trop générales. On peut dire la même chose de la ligne latérale rude et des trois doigts par lesquels Linné le caractérise. Ces choses sont communes à plu- sieurs milans. Ces deux ichtyologistes rapppr- tent à tort notre poisson à l'hirondelle de mer de Jonston, planche 17. f. Q, 9: car c'est le hareng volant, comme on peut le voir par sa tête unie et petite, par la nageoire pectorale, qui est sans appendices, et par la position des nageoires ventrales, qui sont fort reculées, du ventre. a) Acj^u. 194. h) Icluli. s. 4. I.E5- Vn-E5. 521 TROISIEME CLASSE. LES JUGULAIRES. Jugulares, XVII^ Genre. ES VIVES. Tracliînus, A11TICI.E PREMIER, * Z)es T^ives en gehérciL L'anus près de la poitrine, yïnus prope pectus. TracJilmis. Liiin. gen. 153. Corystion. Klein. IV, 4^. Artcd. gcn. 51, Gionov, La Vive. Goiiaii. gen. 4« Zooph. Qo. Weever. Ptnn. gen, iQ. JLi'amis place près de la poitrine, peut être regardé comme im caractère distinctif des pois- sons de ce genre. Le corps est allongé, très - comprimé des deux côtés, et couvert de petites écailles qui 523 TES VINTES. tomlîent aisément. Le tronc est garni de huit nageoires. ^ Arisbote parle de la vive a) ^ et Vline de Yarnignée de mer bj, Salvien a décrit deux espèces de vives y et en donna les dessins cj, Aldrovand les multiplia sans raison jusqu'au nombre de quatre d), Artédi^ qui n'admet qu'u- ne espèce et qu'une variété, les range en un seul genre avec Vuranoscope, Linné au contraire, n'a qu'une espèce de vive^ et en fait, aussi bien que de Yuranosco'pe , deux genres particuliers, comme aussi cela Osbeck ej, Strôm fjy nous ont fait connoître chacun une nouvelle espèce. a) L. 8- c. 15. c) Aqu. 71. J) De Fisc, 256 — 261, é) Chin. 383. Tr. ascensio- 111 s. /) Dronh. Schr. III. 400» Burke lange. LA VIVE. 523 ARTICLE SECOND. Des f^ives en particulier. I. LA VIVE. Tracliinus JDraco. 6iîne Planche. La maclioire inférieure avancée ; cinq piquants à la première nageoire dorsale. Tracliinus maxilla inferiore longiore, radiis f, pinnae dorsi priniae, B, vi, P. — . xii, V* n. A, xxr. V C. xr. Z). r. xx/r. Tracliinus Draco. 43^' n- *• Corystîon. Klein. IV. 46. n. 9. Aitéd, Syn. 70. n. 1. Gro» Tiie Wever. Peua» i6c^.n. 71. nov- Zooph. Qa. 11.274. pi. 22* jL-i'avancement de la mâchoire inférieure, et les cinq rayons de la première nageoire dorsale, sont les caractères distinctifs de ce poisson. L'ouverture de la bouche est large, et la mâchoire inférieure est dirigée de bas en haut. 5 G 4- ^^ VIVE. Les deux maclioires sont garnies de dents poin- tues. La langue est luiie, étroite, et finit en pointe. Les yeux sont au sommet, près l'un de l'autre, peu éloignés de l'ouverture de la bouche; entre l'un et l'autre, on remarque en dessus un enfoncement. A l'opercule des ouïes, on remarque un piquant fort. L'ouverture des ouïes est large. La première nageoire du dos est noire et garnie de cinq piquants roides, aux- quels on peut aisément se blesser. Mais il est douteux qu'ils soient venimeux comme le dit Pline aj, et comme le soutiennent plusieurs iclityologistes. Car on n'use pour se guérir que des remèdes employés contre la piquure des autres corps pointus; c'est-à-dire, qu'on cberclie à dilater la partie blessée. Les pê- clieurs Anglois ont coutume d'arroser la piquu- re avec de l'urine chaude, et l'enveloppent dans du sable mouillé hj. Les faits que rapporte Linné à ce sujet n'ont rien de probable cj. Comme ce poisson se débat beaucoup quand il est pris, il faut prendre garde de ne pas se lais- ser piquer par ses pointes, c[ui peuvent encore blesser après la mort du poisson. C'est ce qui a- donné lieu en France à une ordonnance de police, qui défend de vendre ce poisson avec les piquants dj. Ce poisson, qui na pas plus a) L. 9. c. /^Q. û) ^Yestgorlll. Reis. 203. b) Venu, iro, J) Bomar. Dict. IV. 123. LA VIVE. 525 d'un pied de long, se trouve en quantité aux environs de la Hollande et de l'Oslfrise; de même que dans la Méditerranée et dans plu- sieurs contrées de l'Océan. Ordinairement, il séjourne dans le fond, et paroît en Juin dans les endroits unis. C'est dans ce mois et dans le suivant qu'on le prend en quantité, sur ^ tout en Hollande dans des filets et des nasses. La chair de la vive est de très-bon goût, aisée â digérer, et les Hollandois en font un très-2;rand cas. Ce poisson vit d'insectes aquatiques, des petits des autres poissons, d'escargots et d'écrévisses. Quand il est encore jeune, il a pour emicmis toutes les espèces voraces. L'estomac est large; la vésicule du fiel grande; le canal intestinal court, et a huit ap- pendices à son commencement. Ce poisson est connu sous différens noms. On le nomme: Vetenuncnnclicny en Allemagne; Jiaerslng, siLtrd-fisk, steeji'hllJ.er , inuller, en Dannemarc; -joeterinand, sue -cirage, en Nor- wège; JuLcr^lng, fiasslugy en Suède; pieter- iiimiJiy en Hollande; iceevcr, seadragon, en Angleterre; vive, ou dragon de mer, en Fran- ce; arangio, à INIarseille; trasclna, pesée ra- gna, en Italie; liagina, à Kome; ragniia, en SardaigiH^; inujino ta rocca, à 3Ialthe; pesce arano, en Espagne. C'est à tort que Gronov rapporte à notre 5^6 I.A VIVE. poisson Vuranoscojje de Rondelet et de Gesnei-; et qaAldrovand er Hay en font plusieurs espè-^ ces* L'auteur du Cours d'histoire naturelle se trompe, en plaçant dans les narines de tenibles piquants ej, Aelien dit que la blessure des piquants de ce poisson est venimeuse et quand on le prend de la main droite, il fait résistance, et cède au contraire, lorsque c'est de la main gauche^. Mais c'est encore une erreur de ces tems, aussi bien que ce que dit GelliuSy qui prétend que lorsqu'il pique dans le tems du frai, il s'engen- dre des petits poissons dans la plaie. Il faut penser la même chose de ce que dit Fline gj, que si l'on écorche la gencive avec l'os de ce poisson, dans une douleur de dents, elle cesse. C'est à tort que Salvien refuse les écailles à ce poisson h). Quand on dit dans la Description des Arts et Métiers ij que les Allemands n'ont point de nom pour ce poisson, il faut que l'au- teur de cet article n'ait pas connu le Thierbuch de Gesner, où ce poisson y est nommé nieer- drachen, ni Ylchtyologia de Schoneveld, qui l'a décrit sous le nom de jjeteimaennclien. e) Tom. V. 155. A) Aqu. 72. b. /) L. 5. c. 28. i) Tom. XI. 657. -) L. 32. c. 7, LES AIGREFINS. 527 XVIUinP Genre. LES AIGREFINS. ARTICLE PREMIER. t Des Aii^rejins en général. Les nageoires du ventre Unissant en pointes. Pisces pinnis vcntralibus in acwnine attenuatis. Cadus. Linii. gen. 154- Ar- Callarias. V. 4« téd. gen. iC. Gronov. Le Merlan. Goiian. gen. 35. Zoopli. 97. La Morue. Duhani. II. 36. Enchel) opus. Kleiu. IV. 57. The Cod-Fisli. Peiui. gen. 19. J_jes poissons de ce genre se distinguent des autres de cette classe, par les nageoires du ven- tre qui sont étroites et finissent en une pointe mince. Le corps est allongé, épais, un peu com- primé des deux côtés, et couvert de petites écailles unies, qui tombent facilement. La tète est allongée, cunéiforme, et a un front large. L'ouverture de la bouche est grande, et les deux mâchoires sont garnies de petites dents -(28 ^^S AIGREFINS, pointues, rtecourbées en dedans. Ouelques-uns ont des barbillons à la mâchoire inférieure. La langue est large, unie; mais le palais est rabo- teux, à cause des petites dents dont il est gar- ni: on y lemarque vers le gozier pUisîeurô os qui sont aussi raboteux. Les yeux sont près du sommet, ronds, grands, et recouverts d'une membrane clignatante. Les narines sont dou- bles et auprès des yeux. L'ouverture et l'oper- cule des ouïes sont grands. Cet opercule con- siste en trois lames, dont l'inférieure est bor- dée d'une peau. La membrane des ouïes est forte, et soutenue par sept à huit rayons. On trouve au tronc sept à dix nageoires. . On trouve ces poissons dans la mer du Nord et la Baltique, quelques-uns dans la mer Méditerranée et TOcéan septentrional. Tous, • excepté la lote, habitent les mers, et ne pas- sent pas aisément dans les fleuves. Les auteurs Grecs ne font mention que de la merluche aj, Fline parle aussi de T officier' bj: mais je ne ba- zarderai pas de décider quelle espèce il a en- tendu sous le nom de hacchus cj. Bellon a con- nu le coliti clj , V aigrefin ej , la morue fj , la lote gj, la lote de mer h) et la lingue ij. Quel- û) Gadus merluccius, f) Gadas morliua. h) — minutua. g) — Iota. L. q. G. 17. Ji) — nmsLela. c/) Gailus carboiiariiis. O — molva. e) — acoltHiuis, LES AIGREFINS. 529 que tems après Ray nous fit connoxtre une nou- velle espèce hj. Artédi et Linné n'ont pas adop- té la dernière dans leurs systèmes. Les ichtyo- logistes qui suivent, s'en tinrent là jusqu'à Scho' neveldy qui nous fit connoître le lieu IJ, le dor^ se m) et Y aigrefin verd nj. De ces 12 espèces, qu'on trouve dans les auteurs sous diflérens noms, ÏVillughby en fit im genre oj. Il le nomma asellas, et le divisa en deux: ceux qui ont trois nageoires dorsales, et ceux qui n'en ont que deux; il y ajouta le merlu barbu pj, Artédi les rassemble en un genre sous le nom de Gadus ; il regarde Yaigrejui verd et le lieu comme la même espèce, et omet aussi la se- conde liiustcla de Bellon, Klein décrit ces pois- sons sous le nom générique de callarias, et les divise en deux classes, selon qtiils ont, de barbillons ou non. Il compte quatorze espè- ces dans les deux classes, auxquelles nappar- ' tient pourtant pas la curvata pininut de Marc^ graf. Il fiât deux espèces de VoJ/lcier, et range la lote parmi les poissons qui ont la forme d'an-r guille. Dans la suite, Strussenfeld nous fit .connoître le cimbre qj Gcirden le tau rj, et Linné un nouvelle espèce de la mer Méditerra- k) Gadus baibatiis. o) Ichtli. 165. /) — pollacliiiij, p) Gadus luscus. "0 — callariiis. 9) — cimbrius. w) — virens. t) — tau. Ll 530 LES AlGiiEFlAi. née sj. Ces 17 espèces, cet auteur les a décrit dans son Système. Ensuite Brûnniclie nous en fit connoître une nouvelle espèce à deux na- geoires dorsales tj , et Fallas une à trois uji toutes deux sous le même nom x) et comme habitant la Méditerranée; et Peîinant en dé- crivit une de la mer du Nord à une nageoire dorsale y), Stroein z), Ascanius a) et Olnf* sen h) ont augmenté ce nombre: le premier, de deux nouvelles espèces, et les derniers chacun d'une de la mer du Nord; ce qui fait en tout 23 espèces. s) Gadiis mediterraneus. ted liacîce. t) Pisc. Mass. n. 34. 2) Sôiitmôr. I. 272. u) Spic. Zool. VIII. 47. a) G. brosme. t. 17. oc) G. blennoides. h) Isl. I, t, 25. G. upsc. j) B. Z. 196. n. 84. Trifurca- I. AIGREFIN. 551 akticiIe second. Des Aigrefins en -particulier* I. L' A I G R E F I N. Gadus Aeglejinus. 6!2£ne PLANCHE. Un barbillon au menton; la ligne latérale noire. Gadus cirro vientali, linea Interali nisirn. B. VII, V. x/x. P\ VI. A, ^xii. XXI. C -X.XVII, Z). XVI, XX. XIX, Gadus Aeglcfinus. Linn.435. Anon. Duliam. II. 133. pl.25. n. 1. Arttîd. Syii. 56. 11. 7. f. 1. Gronov. Zoopli. u. 521. Tlie Iladock. Penn. ij^g. Callarias, Klein. Miss, V. 6. n. 74. l_ia ligne latérale noire, et le barbillon au menton, distinguent ce poisson des autres pois- sons du même genre. • . Les yeux sont grands. Les écailles petites, rondes et fort attachées à la peau. On apperçoit une tache noire près de la nageoire pectorale, Ll a 552 LAI G lŒFlN. Ce poisson habite la mer du Nord. On le prend en grande quantité en automne près de Heiligeland, d'où on l'amène à Hambourg. Il est remarquable que l'ai grelin ne passe point par le Simd dans la mer Baltique, et que le dorse, qui est un liabitant de la Baltique, ne passe point par la Manche dans la mer du Nord, quoiqu'on les trouve en quantité près l'un de l'autre dans ces deux mers. On le trouve aussi autour de la Hollande, de l'Ostfrise et dans la Manche; mais sur -tout en Angleterre, où il paroît en grandes troupes, et qui passent ordi- nairement d'une cote à l'autre: de manière ce- pendant qu'ils ne s'assemblent que dans un espa- ce large de trois quarts de mille et long de six milles. Si les pêcheurs jettent leurs lignes hors de cet espace, ils ne prennent rien. Ils parois- sent quelquefois en troupes si nombreuses, que dans l'espace d'un mille d'Angleterre, trois pé- cheurs peuvent remplir leurs canots deux fois par jour. Ainsi ce poisson est à si bon marché, qu'on en donne vingt des plus gros pour vingt- quatre sous de France, et autant de petits pour quatre, et quelquefois même pour moitié moins. On voit ordinairement les plus gros depuis No- vembre jusqu'en Janvier; et depuis ce tems jus- quen Mai, paroissent les plus petits aj. Dans la Groenlande, ils habitent les fonds, et vien- fl) Penn. igo. i8i. l'aigreiïx. 533 nent vers le soir sur la surface de Veau, sur- tout lorsqu'elle est agitée; et c'est -là c[ue les pêcheurs les épient. Quelquefois aussi ils sau- tent hors de l'eau, pour éviter la poursuite des chiens de mer. Ceux-ci les prennent avec leurs pattes entre les fentes de la glace, où ils se tiennent pour prendre l'air bj. On pêche ce poisson aussi en Sardajgne. I_.a grandeur de ce poisson est ordinairement d'un pied; et alors il pèse une livre et demie. Quelc^uefois on en trouve aussi qui ont deux ou trois pieds et plus, et qui pèsent quatorze livres. Il fraie en Fé- vrier: alors les femelles viennent en grandes troupes déposer leurs oeufs entre l'algue, non loin du rivage. Ensuite les mâles y viennent séparément, et fécondent les oeufs. L'aigrefm se nourrit d'écrévisses et d'autres insectes de mer. Il poursuit sur- tout le harengs dont il s'engraisse pendant tout l'Eté; au lieu que dans l'arrière saison, il est maigre, parce qu'il ne vit C[ue de vers de mer. Dans les tems orageux, il se cache dans le sable, ou entre les herbages, où il se tient tranquille jusc^u'à ce que le calme soit revenu. On le voit parceque, dans ces tems, les pêcheurs n'en prennent point, et que ceux qui paroissent ensuite, sont couverts de malpropretés et de plantes qui indiquent leur séjour. La chair de ce poisson est blanche, h) O. Fabric. Fauii. Gr. 145- ferme et de bon oroût; elle est feuilletée et fa- cile à digérer. Outre le chien de mer, il a en- core pour ennemis les autres gros poissons vo- races. On le prend principalement avec des lignes de fond. Les pêcheurs de la Frise, en jettent plusieurs vers le soir, qui sont de la longueur de quelques brasses, et y mettent des petits poissons pour appât. Quand ils les tirent le matin, ils trouvent ordinairement un poisson à chaque hameçon, sur -tout par un beau tems. De sorte qu'un pécheur retourne souvent chez lui avec une pêche de cent poissons et plus, suivant le nombre de lignes qu'il a tendues. Nous rapporterons ici ime coutume louable; c'est que chaque pêcheur est obh'ge de tendre une ligne pour les veuves des pêcheurs du vil- lage, et de leur en envoyer la pêche cj. Les Groenlandois les prennent à la main, dans des trous qu'ils font dans la glace, et où les pois- sons se pressent les uns sur les autres, pour prendre l'air dj. Le foie de ce poisson est blanchâtre, et consiste en deux lobes de différente longueur, La rate est triangulaire et placée sous l'esto- mac, qui est long, épais et entouré d'un cercle de plusieurs petits appendices. Le canal inte- stinal a trois courbures , et est large par en bas. «) MuU. L. S. IV. 80. ^ O. Fabr. 144. LAIGREFIX. 555 La vésicule aérienne est longue, simple, et en- duite d'une matière glutineuse. Les reins, la laite et l'ovaire sont doubles, et les oeufs jau- nes. J'ai trouvé quinze côtes de chaque côté, et trente -cinq vertèbres à l'épine du dos. / Ce poisson est connu sous dilTérens noms. On le nomme: Schellfisch, en Allemagne; kuU ler^ en Dannemarc; kollie, hyse^ en Norwège; isUj en Islande; dluckso, en Laponie; inisar kornuck et ekalluack, en Groenlande; kaljor^ en Suède; schelvis, en Hollande; aigrefin ou églefirij en France; nnoiiy en haute Normandie; hadock, en Angleterre; daguet ou guellekens, en Flandre; scheljiscie^ en Sardaigne. 556 LE DORSE. IL LE DORSE. Gadus Callarias. " 631106 Planche. La ligne latérale large et tachetée. Gndus lînea Interali laba maculataque. B. m. F, xvii. V. VI, A. laviiiy xFii. C, xxFj, D. XF, xrr, xviir, Oadus Callarias. Linn. 43^- Callarias. Klein. Miss. V. 6. n. 2. Artéd* Syn. 35. n. 5. t. i. f. 2. n. 6. t. 2. f. 1. n. 3. n. 7. t. 3. f. 2. J_ja ligne latérale large et tachetée, est le ca-^ xactère distinctif de cette espèce. La tête est plus petite que dans raigrclln; sur laquelle on voit des taches brunes en Eté et noires en hiver. La mâchoire supérieure est plus longue que l'inférieure et a plus de ran- gées de dents: à l'inférieure, on trouve un bar- billon, et elle n'a qu'une rangée de dents. Les écailles sont minces, petites et molles. Ce poisson se trouve en quantité dans la Baltique dans l'Océan septentrional et dans la LE DORSE. 557 mer de Sardaigne. Il avance dans les fleuves tant que les eaux de la nier se mêlent avec leurs eaux. On le prend en Poméranie près de Riigenwalde pendant toute l'année; mais sur-, tout en Juin. On en prend aussi une quanlité près de Travemunde, Oehland, Goihland, Born- holm, Lubek, en Prusse, et en Livonie. En Groenlande, le printeius et l'automne sont les saisons les plus favorables à cette pêche. Plus loin vers le Nord, dans le golfe de la Fine, et vers St. Pétersbourg, on n'en trouve presque plus. On prend ce poisson dans des rades , sur les côtes, et vers les emboucluues des fleuves, non seulement avec des lignes que l'on tend ordinairement vers le soir, mais encore avec des nlets. On fait usage de toutes sortes de petits poissons pour appât. Les Groenlandois se servent pour cela du scoi'pion de mer en au- tomne et au printenis. En liiver, ils font des trous dans la glace, et attirent le poisson par des morceaux de ploml3 brillants, ou par des petites boules de verre. Leurs lignes se font avec des morceaux de balçinç, ou avec de la peau de veau marin. Le dorse a la chair ten- dre e^ meilleure que celle de tous les autres poissons de ce genre. On peut la donner sans danger aux personnes foiblcs et valétudinaires. Il vit d'autres poissons, O, Fahriclus a trouvée dans l'estomac de ce poisson le scorpion de mer, 538 I^E D0RS3S. des ammoclîtes, des écrévisses et dirers vers marins. Ordinairement il pèse que i — 2 li- vres: cependant on en trouve auprès de Rûgen- ^vaide qui pèsent 7 — 3 livres, et quelquefois 14. Schoneveld parle d'un dorse qui avpit 4 pieds de long. Il fraie en Janvier et Fe'vrier. Les Islandois le salent et le sèchent, et lui don* nent alors le nom de titteling. Les parties intérieures ressemblent à celles des précédents , si ce n'est que le canal intesti- nal n'a que deux courbures. On trouve iSJcô- tes de chaque côté, et 55 vertèbres à l'épine du dos. Ce poisson est connu sous dilFérens noms. On le nomme: Dorsch, en Allemagne; -parnu^ chely en Prusse; Jaegerclien^ quand il est mai- gre; gras-pamuchel, quand il a mie couleur jaune; sclieibendorsch, à Hambourg; torskf en Suède; gma, guulagtig , smaa torsk, en Dan- nemarc; poinuchla, en Pologne; di'oscJi, en Sar- daigne^ dorsch, en Courlande; menza et durs^ ka, chez les Lettes; tursk, en Estonie; tare' torsk, bitling, en Norwège; tare- torsk et rôd^ torsk y en Laponie; snraulidk, en Groenlande; Htlingy tyrsklingur , en Islande; torsk, en Fran- ce; et dorsh, en Angleterre. Gronov rapporte faussement à la inorue aj a) Zoopli. n. 31g. LE DOP.îrB. 539 le dorse ^Artédi, Dans Klein le dorse paroît sous trois espèces; savoir, le steinjjmnuchel, le jaegerchen et le graspairiuchel hj. J'ai trouvé aussi chez quelques-uns la belle couleur jaune du dernier. Millier doute que le tare torsk des Norvvégiens soit le même que notre poisson cj. Mais O. Fahricius , qui a observé attentivement ce poisson, en Groenlande même, est d'un avis contraire dj, Artédi se trompe en donnant pour noti'e poisson le cod-JisJi des Anglois, qui est la morue e), V) Miss. V. 6. n. 5. 6. 7i ^ Faun. n. loi. •) Prodr. n. 543. r) Syn. 55. n. 4, 540 I^A MOIIUE. III. LA M O R U E. Gadus Morliua. Ç^me Planche. Les écailles plus grandes que dans les autres. Gadus squamis majoribus. B, ni. P. xn. /^. n. yd, xrii. xn. C. xxx. JD. xr. xix. xxi, Gadus Morlnia. Linn. 43^* La Morue. Duliam. II. 37. 21. 5. Artéd. Syiï. 55. 11. 6. pi. 4. f« 5' Gronov. Zoopli. n. 51g. Tlie Conimon, Cod - Fisli. Callarias. Klein. Miss. V. 5. Penn. 172. n. 73. 11. I, ±_ies écailles proportionnellement plus grandes, distinguent la morue des autres poissons de ce genre. Quand les jeunes poissons de cette espèce habitent un fond de rochers, leur ventre est d'une couleur rougeàtre, avec des taches jau- nes: mais cette couleur se perd quand ils de- viennent plus vieux et qu'ils quittent ces fonds; et alors ils reprennent leur couleur naturelle. L'ouverture de la bouche est grande; la mâ- choire supérieure avancée, et on trouve un pe- I.A MORUE." 541 tit Barbillon à rinférieure. L'anus est plus près de la tête que de la queue. Ce poisson est un habitant de l'Océan, où il se tient entre le 40 et le 66 degré de la lati- tude septentrionale* On le pèche bien aussi, à un plus haut degré, comme en Groenland e; mais il n'y est pas de si bonne qualité, et ne s'y trouve qu'en petit nombre. On le trouve au contraire, en très -grande quantité près de Ter- re-Neuve, du Cap Breton, de la Nouvelle- Ecosse, de la Nouvelle -Angleterre, sur les cô- tes de la Norwège et de l'Islande; de même que vers le banc de Dogger et dans les environs des îles Arcades. La morue est pour plusieurs nations, une branche considérable de nourri- ture et de commerce: elle est sur- tout une grande source de ricliesses pour les. Anglois. Elle nourrit les Islandois, rapporte par an aux Norwégiens quelques tonnes d'or, et occupe une grandu quantité de marins Anglois, Hol- landois et François, comme nous le verrons dans la suite. La morue devient ordinairement longue de <2 — 5 pieds, et pèse 14. — 20: ce- pendant on en trouve de beaucoup plus grosses. Il n'y a pas longtems qu'on en a pris une en Angleterre, longue de cinq pieds huit pouces, qui avoit cinq pieds de circonférence à la partie la plus grosse du corps, et qui pesoit 78 li\T:es qj, a) Peun. ijQ: 54-2 LA MORUE, Elle habite ordinairement les profondeurs de la ' pleine mer, et vient sur les bancs et vers les côtes dans le tems du frai. Elle se nourrit d é- crévisses, de polypes, de harengs et d'autres espèces de poissons, et elle est si avide, quelle n'épargne pas même ses propres petits. Elle a comme les oiseaux de proie, la faculté de re- jettcr par le vomissement les corps qu elle ne sauroit digérer» Selon Andcrson, son estomac digère avec tant de célérité, que les pécheurs de Heiligeland ont trouvé qu'au bout de six heures, les aigrefins qu'ils leur avoient donnés pour appât, étoient digérés dans leur esto- mac hj* Le tems du frai est différent comme dans les autres poissons, suivant leur âge, le plus ou moins de froideur du fond qu'ils habi- tent, la nature de l'air et la température des saisons. En Angleterre, elles fraient ordinaire- ment au mois de Janvier, et paroissent alors vers les côtes jusqu'au mois suivant; ensuite elles disparoissent, et il en vient à la place de plus petites, qui fraient jusqu'à la fm d'Avril; car on leur trouve des oeufs jusqu'à ce tems. En Islande, elles ne paroissent qu'au mois de Février, et au banc de Jerre -Neuve, en Avril. Elles déposent leurs oeufs dans les fonds iné- gaux, entre les pierres. La pèche à l'hameçon dans la mer, pendant le tems du frai, a im suc- l) Isknd. 25. LA MORUE. 54-3 ces tout cliiFerent que celle des eaux douces avec des filets et des nasses. Là, l'ardeur de l'amour les fait aller sans crainte dans les pièges qu'on leur a tendus; et c'est par conséquent le tems le plus favorable poiu* les pécheurs; au lieu que ce même amour les empèclie de man- ger; et comme elles ne peuvent être attirées par l'appât, on n'en prend pas un grand nom- bre de cette manière. Mais après ce tems, la faim les oblige à se jetter avec d'autant plus d'ardeur sur la nourriture, et elles mordent alors à tous les corps brillants, comme cro- chets, pierres, etc. et dans ce tems, on trouve ces choses dans leur estomac. Par cette raison, les Islandois se servent avec succès, pour appât des morceaux de coquillages et des fausses per- les. Les lignes ne pendent du bateau que de 7 — 8 brasses. Il y a dans cliaque bateau 2 pécheurs, dont l'un rame et l'autre épie quand un poisson a inordu. De cette manière, on remplit souvxnt le bateau o. — 3 fois par jour. Comme ce poisson ne mord pas beaucoup pen- dant le tems du frai, les Norsvégiens et les au- tres nations, jettent dans les endroits oii il y en a une grande quantité de rassemblés, des hame- çons à 3 crochets; et il arrive souvent qu'ils en tirent un ou plusieurs qui s'y trouvent ])ris. Depuis quelque tems, on se sert sur quelques côtes de Nor^yège, de filets à pointes. Ils sont 544- ^^ MORUE. ordinairement de 20 brasses de Ions: et 1 de haut. ^ Les mailles ont 3 pouces en quarre, et on les laisse tomber dans un profondeur de 70 brasses. Un bateau monte de 6 hommes, porte dans un tems orageux , 1 8 filets de cette espèce, et 24 par le calme. Cependant il arrive assez souvent qu'il s'en perd quelques-uns, parce qu'ils sont entrâmes par les tempêtes ou par les gros animaux marins. On tend ces filets le soir, et on les lève le matin ordinairement avec une proie de 500 — 500 poissons. Quelqu avanta- geuse que parût cette pèche dans les commen- cemens, on s'apperçut bientôt quelle ètoit réel- lement très - désavantageuse: car les poissons ont entièrement quitté les endroits où on les a péchés ainsi; et les habitans de plusieurs côtes, les ont perdus. Telle est, par exemple, la pa- roisse de Roeden près de Traenen; il y avoil; autrefois une pêche si considérable, qu'on y' venoit de plusieurs contrées du Nord, et qu'un bateau monté de 4 hommes, rapportoit 4 — 6000 poissons; au lieu qu'à présent un pareil bateau en rapporte à peine 6 — 700 cents cj. La raison de cette diminution vient sans doute de ce que les poissons sont interrompus dans leur frai, et que les fdets détruisent les pois- sons avec les millions de petits qu'ils devroient produire. Les Norvégiens ont éprouvé dans c) Sclivvcd. Abli. XXXII. £97. 503. LA MORUE. 54.5 la péclie de la morue, les mêmes dommages que la pêche des Ulets étroits ont fait éprouver dans certains endroits aux Suédois et aux Prus- siens pour la pêciie des harengs. Il nen est pas de même de Ja pêche à l'hameçon: elle n'empêche pas le poisson de reproduire tran- quillement son espèce. Les bateaux dont on se sert pour cette pê- che, sont de difFérente grandeur. Les côtiers se servent ordinairement de canots, où l'on peut mettre 3 — 4 hommes. Mais ceux qui viennent des contrées éloignées pour faire cette pêche, ont des bàtimens depuis 4.0 — 150 ton- neaux, sur lesquels sont depuis 15 — 30 hom- mes. Selon l'éloicrneiuent des lieux d'où ils viennent, ils sont pourv^us de vivres pour a — mois, et ont une provision sufllsante de sel de mer pour saler le poisson, de tonnes pour le mettre et pour garder le foie; de petits barils pour mettre les oeufs, la vésicule aérienne et la langue, et du bois pour la préparation de la morue' sèche. Un vaisseau de 90 tonneaux ou lasts, porte 19 personnes, tt un de 150, ^5 — 50 personnes. Ceux des Hollandois et des François sont ordinairement de 70 — igo ton- nés; leurs lignes sont plus courtes et mo{ns fortes que celles dont se servent les NorAvè- giens. Ceux-ci les font de chanvre fin, afin de les rendre plus fortes et qu'elles ne soient pas Al m 24^ LA JMORUE. si difficiles à diriger. Lorsque les crochets des hameçons sont d'acier, ils entrent plus aisément dans le poisson; mais ils cassent aussi d'autant plus aisément lorsqu'ils tombent sur un fond de rocher: voilà pourquoi on se contente de les acérer. On prend pour appât toutes sortes de petits poissons, sur-tout le hareng, et le ca- pelan à Terre-Neuve. Au défaut d'appât frais, on prend des harengs salés, des maquereaux et des orphies. Cependant on fait bien de les fai- re dessaler auparavant. On se sert aussi pour le même usage de la viande gâtée dans le ba- teau. La morue mord sur- tout aux poissons frais, aux coquillages démoules, aux écrévdsses et aux morceaux de crabes. Par cette raison, les Anglois entretiennent toujours à Terre-Neuve quelques bateaux pour prendre des poissons frais destinés à servir d'appât. On emploie sur- tout aussi pour cela les petites morues, à cause de leur peu de valeur. Faute d'appât, on se sert d'un poisson de plomb fondu, de drap rou- ge, et.de poissons à mioitié digérés, que l'on trouve dans l'estomac de ceux que l'on a pris. Quand la pêche ne réussit pas, il faut sacrifier quelques morues, parce que ce poisson est très- avide de chair fraîche et encore saignante. Les Islandois prennent aussi pour cela le coeur des oiseaux aquatiques, et les Norwégiens l'éperlan de mer et la sèche: car quand l'éperlan et la I.A IMORUE. 54.7 sèche vont vers les bords pour frayer, ils sont toujours suivis d'une grande foule de morues. Il en est de même en Amérique lorsque le ca- pelan paroît dans la même intention; car il poursuit ces poissons par -tout: voilà pourquoi on prend aussi ce poisson pour appât. Lors- qu'un bateau est suffisamment fourni d'appât, et qu'il rencontre par un beau tems, une con- trée poissonneuse; ce qui arrive ordinairement vers les bancs, où l'on trouve beaucoup de moules et d'écré visses; un tel bateau, dis -je, monté de 4. hommes, peut dans l'espace de 24. heures faire un pèche de 4. — 600 morues; et quand le tems est beau pendant l'espace de 2 ou 3 semaines, on peut compter sur une prise de 5 — Cooo. On pèche ce poisson presque pen- dant toute l'année en Norwège, en Angleterre et en Amérique. Mais le tems où on le prend en plus grande quantité sur les côtes de Norwè- ge et d'Islande, c'est depuis Février jusqu'à la fin de Mars, et même jusqu'au milieu du mois d'Avril. En Amérique, la plus grande pêche se fait en Mai et Juin. Depuis le mois de Juil- let, il disparoit, et reparoît en Septembre. Mais comme dans ce tems les eaux de ce pays sont couvertes de glaces, la pêche est incertaine pour les Européens. Dans le Nord, il s'assem- ble pour la pêche de la morue, 4. — 5000 hommes, cpmposés de Normands, Danois, IMm 2 548 ^'^ MORUE. Suédois, Hambourgeois, HoUandois et Franr , rois. Les HoUandois sont ceux qui en tirent le plus de profit: car comme ils préparent et met- tent leurs morues dans les tonnes avec plus de soin, elles sont toujours meilleures que celles des autres nations. Mais comme il est défendu à eux, aussi bien qu'aux autres nations, de faire sécher le poisson dans le pays, ils en sa- lent une grande partie, et n'en pendent que peu à des perches, qui sont sur les vaisseaux, pour les faire sécher. La manière de préparer ce poisson pour le conserver, consiste en partie à le faire sécher à l'air, en partie à le saler, ou faire l'un et l'au- tre. La première manière fait ce qu'on appelle au Nord stockJiscJi, morue sèche; la seconde, laherdan, morue salée, et la troisième, klipp' fiscli, morue blanche. Les Islandois, dont le poisson est presque la seule nourriture, tachent d'en prévenir la disette lorsqu'ils l'ont en abon- dance: ils le font sécher, et le donnent alors sous le nom commun de stockJiscJi, Il y en a de deux espèces, dont Tune se nomme flack- Jiscli, morue fendue, et l'autre hnengejisch. Voici comme ils les accommodent: Lorsque les hommes ont débarqué avec leur prise, ils la jettent sur le rivM^e. Les femmes coupent aus- sitôt la tète du poisson, lui ouvient le ventre, et après en avoir tiré les entrailles, elles fen- LA moplUE. 54-9 dent le tlos en dedans, et ôtent l'épine du- dos, excepté les trois dernières vertèbres* Ensuite elles font cuire les tètes pour les manger, et les hommes prennent les ouïes pour leur servir d'appâté On fait sécher les arrêtes, et on s'en sert pour faire du feu, ou on les donne à man- ger aux bestiaux. Ils amassent les foies à part, pour en faire de l'huile. Lorsque les hommes se sont reposés et recréés en buvant de l'eau- de-vie, ils portent les poissons ainsi fendus dans des endroits où il y a des rochers; là, ils les étendent, et les laissent jusqu'à ce que le vent les ait tout-à-fait séchés; ce qui arrive ordinairement dans l'espace de trois semaines ou un mois. Mais quand il souffle un grand vent du Nord, il ne faut que trois à quatre jours. Dans les endroits où il n'y a point de rochers, et que le terrain est un peu sablon- neux, ils font un lit de pierres, qu'ils assem- blent les unes près des autres; ensuite ils y mettent les poissons tournés sur le côté inté- rieur, afm que la chair soit à l'abri de la pluie, qui la gâte. On assemble en tas les poissons séchés de cette manière, et on les laisse à l'air jusqu'à ce qu'on trouve occasion de les vendre. Le linenp^ejisch se prépare de la même manière; mais avec la différence qu'il a le dos coupé par derrière, qu'il est fendu entièrement, et qu'on lui fait une ouverture au côté pour passer les 550 I^A MOKUE. perches (îont on se sert pour les suspendre sur les cabanes de pienre. Comme les pierres de ces cabanes sont seulement posées les unes sur les autres, l'air peut passer librement par les espaces qu elles laissent libres entr'.elles. Les cabanes sont couvertes d'un toit de planches ou de gazon, qui les met à l'abri de la pluie. La préparation de ce poisson chez les Norwégiens diffère de celle des Islandois, en ce qu'ils y ajoutent du sel. Après leur avoir ôté la tête et les avoir vidés, ils les mettent dans un grand tonneau , garni de sel de France; et huit jours après, ils les mettent par tas sur un gril, pour faire écouler la saumure et le sang. Après cela, ils les frottent de sel d'Espagne; puis, ils les pressent fortement dans un tonneau pour les vendre sous le nom de laberdan; ou ils les font sécher sur les rochers, et ce sont alors les klippjische. On fend les gros afin que le sel y pénètre mieux; mais on ouvre seulement le ventre aux petits. Les derniers se nomment rundjische, et les autres plnttJiscJie, Ils les font aussi sécher sur des perches, et les nomment rothjische. Toutes ces espèces sont portées à Bergen, d'où on les envoie dans toutes les con- trées de l'Europe. Les têtes se mangent dans le ménage; et dans les contrées oi^ le fourrage manque, on les donne aux animaux. Les ha- bitans du Nord font sécher ces têtes sur le I.A 3I0RUE. 5 5'^ rivage, et les mêlent ensuite avec des plantes marines, qu'ils donnent à leurs bestiaux. Les vaclies qui mangent cette nourriture, donnent infiniment plus de lait que celles qu'on nourrit de paille et de foin. Comme la vésicule aérienne de ce poisson est très -gluante, les Islandois en font une colle qui approche beaucoup pour la qualité à la colle de Russie. Ils la font de la manière suivante: Après avoir laissé en tas les épines du dos avec les v^ésicules aériennes, qui y sont attachées jus- qu'à ce quelles, soient près de se corrompre, on les met sur un bloc, et on bat les vertèbres, jusqu'à ce que les vésicules se détachent, aussi bien que les bandes qui les attachent aux vertè- bres, et qu'on appelle -poches. Ensuite on cou- pe les vésicules; on les met sur une table ou un bloc, sur lequel on a cloué une brosse rude, qui ;=e7t à nettoyer le couteau dentelé dont on se sert à gratter la première peau des vésicules et des bandes* Les vésicules étant alors netto- yées, on les met pour un certain tcms dans de l'eau de chaux, afin d'en détacher entièrement les parties graisseuses qui pourroient y être re- stées encore; ensuite on les rince dans de l'eau claire; puis, on les fait sécher; après quoi, on peut s'en servir comme de l'autre colle de pois- son. A Terre- Neuv^e, on a taché de faire la même chose; mais comme on manquoit de 552 i^A ivionuE. tems et de place pour toutes ces préparations, on sale les vésicules, et on les garde pour l'oc- casion, ou bien on les mange. Quand on veut en faire de la colle, il faut les dessaler dans de Teau. Les vésicules les plus épaisses sont les plus propres à cet usage, quoique la colle qu'on en tire ne soit pas si claiie que celle des vési- cules minces. Les NorAvé^riens manfient la vé- sicule aérienne fraîche, ou la font sécher pour la vendre: ils la nomment sunde-inaver; c'est- à-dire, stomacale , parce qu'ils croyent qu'elle est saine pour l'estomac. Outre cela, à Terre- Neuve, on tire encore parti de la langue: on la mange fraîche, ou on la sale, et on l'em- porte pour la manger comme un morceau déli- cat. Les NorAvégiens, les Islandois et les au- tres nations font de l'huile avec le foie: car quand il est parvenu à un cerLain degré de cor- ruption, les parties huileuses s'écoulent d'elles- mêmes peu à peu. On préfère cette huile à celle de baleine, parce qu'elle conserve le cuir plus longtems souple, et que lorsqu'elle est clarifiée et qu'on la brûle, elle donne moins de vapeur. On rassemble avec soin les oeufs, on les sale, on les met dans des petits tonneaux, et on les vend aux Hollandois et aux François. Ces derniers, aussi bien que les Espagnols, ne peuvent s'en passer pour prendre les sardelles et les anchois. Ils en o-arnissent les filets desti- XD LA !MOI\UE. 553 nés à prendre ces poissons. On exporte an- nuellement de Bergen 40 — 60 cargaisons, ou 2.0 — 22000 barils de ces oeufs. Chaque baril se vend à peu près 8 — 9 francs. Les vaisseaux qui vont en Norwège et à Terre-Neuve, partent ordinairement en Mars; quelquefois aussi plutôt ou plus tard, selon le chemin qu'ils ont à faire; et ils reviennent chez eux vers la fin de Septembre. Dès qu'ils sont arrivés à l'endroit de la pèche, ils font sur le vaisseau, une galerie qui va du grand mât jus- qu'à la pouppe, et quelquefois d'un Ijout à l'au- tre du vaisseau. Cette galerie extérieure, est garnie de tonneaux défoncés par lui bout, dans lesquels les matelots se mettent, pour être à l'abri des injures du tems, et leur tète est cou- verte d'un toit assujetti aux tonneaux. Dès qu'ils détachent une morue de l'iiameçon, ils lui coupent la langue; ensuite ils la donnent à un mousse, qui la porte au videur. Celui-ci lui coupe la tète, lui arrache le foie et les en- trailles, et la laisse ensuite tomber par un trou sur le faux tiliac, où le préparateur lui ôte l'é- pine du dos, et la laisse ensuite tomber par un autre trou dans un endroit où on la sale et la met en tas. Le saleur prend bien garde qu'il y ait assez de sel entre les couches que forment ces tas, afin que le poisson ne vacille point; mais il ne faut pas qu'il y en ait trop. Le trop 554- ^-^ MORUE. ou le trop peu de sel sont également nuisibles : tous les deux diminuent la bonté et le prix de la morue. Dans les tems anciens comme à pré- sent, les nations étrangères alloient sur les cô- tes de Norwège et d'Islande, pour prendre des morues. En 1568, la ville d'Amsterdam reçut de la couronne de Suède, la permission de for- luer à cet elFet, un établissement sur l'ile de ScJicnen. Les Anglois pèchent aussi la morue depuis longtems: car nous voyons qu'en 1415 Henri J>\ fit faire satisfaction par le roi de Dan- nemarc, à quelques-uns de ses sujets, auxquels on avoit fait quelques violences dans ce ro- yaume. Dans la suite, les Anglois perdirent le droit de pèclier dans ces contrées: car Elisa' beth racheta de la couronne de Dannemarc, pour ses sujets, la permission d'y pêcher. Mais son successeur ayant épousé une princesse de Dannemarc, les Anglois usèrent tant de cette permission, qu'ils y envoyèrent annuellement environ quinze cents vaisseaux. Les François et les Hollandois envoient aussi un grand nom- bre de vaisseaux à cette pêche; et cependant toutes ces nations laissent encore assez de pois- son pour que les Islandois en tirent la plus grande partie de leur entretien, et que les Nor- %végiens, comme nous l'avons dit, en tirent tous les ans nombre de tonnes d'or. Quelque considérable que soit, dans le Nord, la pêche rA 3ioi\UE. 555 de la morue, elle n'est pourtant pas compara- ble à celle qu'on fait clans l'Amérique septen- trionale, et sur -tout sur le grand banc de Ter- re-Neuve nj. Cette pèche doit être bien -im- portante pour les Anglois, puisqu'ils y em- ploient; quinze à vingt mille marins, sans comp- ter ceux qui s'occupent de la construction des vaisseaux, des instrumcns etc. Un autre avan- tage que cette nation en retire, c'est qu'ils ga- gnent encore des sommes considérai jles par les exportations qu'ils font en Portugal, en Espa- gne et en Italie. Outre cela, ces matelots ne laissent pas que de faire de bons soldats en tems de guerre. On voit par une requête que les marchands Anglois présentèrent en 1765 au Gouvernement, quel étoit alors l'état brillant de la pcchc. Selon eux, on y employoit 150 v^aisseaux d'autant de tonnes chacun, et 1500 plus petits, sans compter les 500 bàtimens mar- chands qui portent l'huile et le poisson dans le royaume d'une ville à l'autre. Un schoner de ,50 — 70 tonnes, contient ordinairement 850 d) Ce banc a cent soixan- Jong et soixante de large, te milles d'Allemagne de La profondeur varie depuis long, quatre virg. dix de quinze jusqu'à soixante bras- large, et est situé entre le ses. Le fond est couvert de quarante -troisième et le rochers, et Teati y est dans quarante - cinquième de- «"«-• agitation continuelle, à gic de latitude sepicntrio- cause de la diversité de ladi- nale. Mais les bancs où rection des courans qui s'y se fait partfculièrcment la tiouvent. pèche. Ont cent lieues de 556 I>A MORUE. quintaux; une clialoupe 500, et les plus petits bàtimens goo. Ainsi l'on peut compter que ces bàtimens mènent l'un portant l'autre 450 quin- taux. Le quinlal du meilleur poisson, pris sur la place, coûte environ 14. livres de France; de la moyenne qualité, 10 liv., et le rebut, 6 liv. Or la pèche produit j^^ de grands pois- sons; autant de luoycns, et f™^ de petits. Le quintal de ce poisson Tan poitant l'autre, coûte Ainsi le prix de 1500 petits vaisseaux seroit de . . 8,030,080 liv. Les foies de 100 quintaux de poisson donnent une pipe d'huile, qui vaut ordinai- rement I 24 livres. Ainsi 1500 vaisseaux à 450 quin- taux chacun, font 67500 tonneaux d'huile ; ce qui monte a . . -. •. . 853,000 Ixv. La cargaison d'un vaisseau de 150 tonnes, vaut 7200 liv. Ainsi la valeur de 150 de cette espèce est de . . 10,800,000 liv. En tout . . . . . 19,715,080 liv. Mettons l'un portant l'autre 10 hommes sur les petits bàtimens, et 20 sur les plus grands, nous avons un nombre de 18000 ma- rins; et si Ton y joint ceux qui sont sur les ILA MORUE. 557 300 petits vaisseaux marchands, on peut comp- ter vingt mille hommes qui servent à cette pè- che. Et tout cela sans compter l'avantage con- sidérable que les Anglois tirent de cette même pèche sur leurs propres côtes. Tel ètoit à peu près en Amérique l'état de la pèclie avant la rupture des colonies. Mais comme celles-ci font actuellement im état à part; qu'elles ont non seulement la lilierté de pécher sur les bancs de Terre-Neuve, et qu'on a aussi cédé à cette fm aux Franç«)is une contrée dans l'Amérique septentrionale, cette branche de commerce ne doit plus tant rapporter aux yVnglois. Les Amé- ricains y gagnent beaucoup; car la seule ville de Boston prend annuellement dans le golfe de Massachuset 50,000 quintaux de ces poissons. La pèche de Terre-Neuve est aussi très -avan- tageuse aux François. En 1768, ils y envoyè- rent 1 14. vaisseaux,.. qui portoient en tout 15590 tonnes. Chaque vaisseau contcnoit l'un portant l'autre 6000 poissons; de sorte que toute la pè- che montoit à 24. millions et 66000 poissons, ou 19^,5^0 quinteaux. Or, en comptant que le quintal se vend en France au prix moyen de 16 liv. 9 sous et 9 deniers, le tout monte à, 3,174,305 liv. 8 sous. Si ces poissons fournis- sent en tous 1925 tonneaux [d'huile, le tonneau compté à 120 liv., cela monte à «251,000 liv. Et comme indépendamment de cela, les Fran- 558 ^^ ïMORUE. çois pèchent sur les côtes d'Islande et dans la Manche, on peut juger le profit que ce poisson procure à ce royaume. Cependant cette gran- de quantité ne suffit pas pour les François dans le carême; car les Hollandois leur en vendent encore considérablement. Suivant M.i\ S cJ do ezeVf dans ses Stants-An» zeigeUf Heft, S- Tom. X. de l'année 1787, pl^is de 500 v^aisseaux de sont occupés, en France, de la pêche se ce poisson, depuis la guerre de sept ans. Une partie de ces vaisseaux se rend à l'île de Terre-Neuve, où l'on fait aussi sécher les morues qu'on a prises. D'autres font leur pêche sur le grand Banc, près de Terre-Neuve, et rapportent de -là les poissons salés. Une au- tre partie encore apporte des marchandises aux îles de Miquelon et de Saint -Pierre, et les tro- que contre des poissons secs. Ces vaisseaux de- stinés à rapporter les morues sèches, ont 60 - — 90 hommes d'équipage. La wileur d'un de ces vaisseaux, y compris l'armement et la cargaison, est estimée à 70,000 livres. Ceux qui se ren-. dent au grand Banc, n'ont que quinze hoinmes d'équipage; et on en estime la v^aleur à 25,000 livr. Les vaisseaux destinés enfin à troquer des marchandises contre des poissons, ont quin- ze â vingt hommes d'équipage; et leur valeur moyenne monte à 50,000 livr. Voici une liste de l'état actuel: LA MORUE. 559 Villes. St. Malo . Granville . St. Brieiix Bienie . . Portiieux . Bayonne . Vaisseaux. Matelots. Frais de Varrne- iiient. ... 5^ . . 3,340 2,530,000 liv. • • • 35 . . 2,275 3,45i25 6,603,000 iiv. Supposons doHC que chaque vaisseau pren- ne 2200 quintaux de poissons, alors les 125 vaisseaux rapporteront seulement en France 270,000 quintaux: ce qui fait 6,750,000 livr. en comptant 25 livr. par quintal. Le principal débit se fait à Marseille , à Cette, à Bourdeaux et dans les autres villes maritimes de la France. Outre cela les vingt -trois vaisseaux envoyés aux îles de St. Pierre et de Miquelon pour troquer, en ont rapporté 20,000 quintaux de poissons, ou pour 500,000 livr., le quintal à 25 livr. Par conséquent Ja vente des poissons secs rapporte en France la somme totale de 7,250,000 livr. PECHE DES MORUES FRAICHES. Villes. Vaisseaux. Matelots. Frais de Vanne- ment. St. Malo . . , . . • 51 ' ' 765 1,275,000 liv. Granville . , , . . • 57 • • 555 925,000 Dieppe » , . ... 26 • . 590 650,000 Honileur . , , ... 16 240 400,000 Treport , , , . . . Il . . 165 275,000 St. Valéry . . ... 25 • • 575 625,000 Olonne , . . ... 16 2)0 400, 000 \%2 2,73^ 4^550,000 liv. 560 l'A IVIORUE. COMMERCE D'ECHANGE. Villes. Vaisseaux. Matelots. Frais de Varme- uient. St. Malo . . . Gianville . . . ... 16 ... 7 140 430,000 liv. 210,000 \ 23 4'')o 690,000 liv. Le nombre total des vaisseaux dans l'année 1786 étoit par conséquent de 550; celui des matelots de 11,515, et les irais de Tarmement de 11 millions 848,000 livr. Il est à remarquer que ce commerce n'oc- cupe pas seulement 12,000 matelots, qu'il rend capables au service de mer, mais encore qu'un nombre incroyable d'ouvriers, d'artisans, d'ar- tistes, etc., sur -tout dans les villes maritimes, en tirent le plus grand profit; de manière que les intéressés et les propriétaires des vaisseaux ne tirent que liuit -pour cent de leur argent, tan- dis que la plus grande partie est pour la classe la plus industrieuse. Les péages des poissons introduits l'année passée rapportent au Roi 97,920 liv^r. La cinquième partie de la vente, dont on paya la solde aux matelots, monta à î^>559,4^i5 livr.; et en y ajoutant encore les sommes données aux personnes employées à débarquer et transporter les poissons, celles de l'assurance, etc. , le tout fait ensemble ime som- me de 19,511,810 li^T. La pèche à TeiTe- Neuve a été aussi très- abondaïue pour l'Angleterre en 17855 elle a I.A MORUE. 5G1 occupé 220 vaisseaux. Mr. Pennant assure, dans son jîrctic Zoologie y qu'on prend un si grand nombre de caheliaux près du Do^xersbanc et du IVeltbanc, qu'ils pourroient dédommager les Anglois de la diminualion de la pèche de Neujoundland. Suivant le rapport de 3Ir. Frezier, la mo- rue paroît en grand nom])re dans la mer du Chili au mois de Novembre ej. L'admirai yln- son assure que ce poisson est dune grosseur prodigieuse et que, selon le témoignage de plusieurs de ses gens qui a\'oient été à la pèche de Terre-Neuve, on l'y trouvoit en aussi grand nombre qu'au dernier endroit fj. Mr. le Dr. ScJ 10 epf trouva aussi ce poisson à Terre-Neuve. L'abbé Molina assure que la pèche des morues, sur les côtes de Gio Fernande s y est si abon- dante, qu'on peut observer ici la même chose qu'on voit aux bancs près de Terre-Neuve; c'est- à-dire, qu'il sufllt de jeter les hameçons pour les retirer aussitôt chargés de poissons. La morue, qui par la bonté bienfaisante de la nature, mul- tiplie extrêmement, paroît^ aussi sur les côtes de F^al-parcdso y dans les mois d'Octobre, de Novembre et de Décembre; mais seulement lorsque la mer est orageuse. Les habitans qui d'abord n'en faisoient point de cas, sesont, de- puis quelques années, appliqués à cette pèche O Voyait;, I. 212. j) llcis. II, 103, Nn 562 LA MOIVUK. lucrative, et sèchent tous les ans un grand nombre de ces poissons. Un françois, appelle LuisoUy a été le premier de ce pays à tirer pro- fit de cette branche de commerce gj. Selon Andersoriy c'est en 1536 que les François envoyèrent le premier vaisseau à la pèche de Terre-Neuve; et en 1578, ils y en envoient déjà un très -grand nombre. Il s'en trouva cette année cent de l'Espagne qui por- toient ensemble cinq à six mille tonnes; du Portugal cinquante à trois mille tonnes; de la France cent cinquante à sept mille tonnes, et de l'Angleterre trente à cinquante tonnes. Mais lorsque les Anglois se furent de plus en plus étendu dans les provinces septentrionales du Nouveau -Monde, ils détournèrent insensible- ment les autres nations de cette pêche, et iirent tant que les Espagnols même, qui ne sauroient se passer de ce poisson, à cause de la grande quantité de monastères qui sont dans le royau- me, se virent obligés de renoncer eux-mêmes au droit de la pêche. Ils ne la permirent qu'aux François seuls; mais comme ils avoient peu de place pour faire sécher leurs poissons sur terre, ils se virent obligés, pour les garantir de la conuption, d'y mettre une fois autant de sel que les Anglois ; ce qui les a rendus moins bons. Les Anglois au contraire, font tremper pendant g) Mollina C]ûli, 195. LA MOAUE. 563 quelque tems leurs poissons dans une forte sau- mure, et les mettent ensuite à terre pour les faire sécher à l'air; de sorte qu'avec moitié moins de sel, ils se gardent Lien mieux que ceux des François. On s'étonne avec raison de la prodigieuse quantité de morues , qui depuis plusieurs siècles ont été prises par les hoiumes. Celle qui est dévorée par les poissons voraces et par les mo- rues elles-mêmes, est assurément aussi grande, et peut- être plus grande encore. Selon Hore^ boiv, les Islandois trouvèrent dans l'estomac d'une baleine six cents morues vivantes, sans compter les autres animaux JlJ, Mais si nous considérons la quantité d'oeufs que le Créateur a donnée â cette espèce, nous ne devons pas craindre de la voir détruire, tant qu'on se bor- nera à la pèche à l'hameçon. LeuenJiock fait monter à 9,54.4,000 le nombre des oeufs d'une morue moyenne ij. La morue n'a pas la vie dure; elle meurt dès qu'elle sort de l'eau salée, ou qu'on la fait passer dans une eau douce. Comme elle est d'un bien meilleur goût quand on la mange fraîche, les pécheurs Hollandois tâchent, par le moyen de vaisseaux troués, de la mener en vie dans les grandes villes ma- ritimes. Ce poisson est connu sous dilTérens noms. h) Isl. ^15. Linn, S. N. 437» n. 3. Nn a 564. ^^ MORUE. On le nomme: Kahcljau, en Allemagne et en Dannemarc; stockjischy quand il est séché; Inberdan, quand il est salé; hlippjisch, quand il est salé et séché; h.luhhe*tOTsk et bolch, ca" bliau, skrey'y silcl-torsk, vaar-torsky en Nor- ■\vege; torskur et kablnUy en Islande; saraud* lirksoak et ekàlluarksoak, en Groenlande; vaar' torsky skrey, en Laponie; kabbeljày en Suède; cabiljaUy en Hollande; cabillaud y bacaillou, en Flandre; codjishy keelingy rnelwely stokjish, ha^ herdine , greenfish et barrel-cod , en Angleterre ; morue ou rnolue, en France; et codjish, à Neu- yorck. L'estomac de la morue est giand, et il y a au commencement du canal intestinal six ap- pendices qui se divisent en plusieurs branches. Le foie est d'un rouge pâle, et consiste en trois lobes. La rate est d'mie couleur noirâtre et allongée. La laite et l'ovaire sont doubles. Baster a trouvé parmi ces poissons des herma- phrodites. On répond ^négativement à Duha- mel, lorsqu'il demande si le dorse de la Bal- tique est le même poisson que la morue de la mer du Nord kj, Schoneveld prétend que no- tre morue est le même poisson que les Grecs ont connu sous le nom de Bci:i£^oç IJ, Mais je doute de la vérité de cetre assertion, sur-tout parce que les poissons des mers du Nord ont K) Péch. II. J18. /) Idith. 13. n.3. ILA 3T0I\UE. 565 été inconnus à cette nation. Duliamcl raconte après Rondelet y que la morue, contre l'ordi- naire fies autres poissons voraces, attrape aussi les poissons par la queue, et que c'est pour cela qu'elle a deux os particuliers mj. Je laisse à d'autres à examiner cette particularité; car pour moi, dans toutes les morues que j'ai observées, je n'ai remarqué aucun os particulier. IV. LE MERLAN. Gadus Mcrlangus. 651116 Planche. La mâchoire supérieure avancée ; l'inférieure sans barbillons. Gadus iinhcrhis, maxilla su- periore longiore, B. rii. P. xx. ^. vi. A. XXX, XX. C XXX j. D. xrj. ^viii, xzx. Gadus Mcilane;us. Linn. Tlie Wliidng. Penn. 190. 438- "• 8- Artéd. Syn. 54, n. S^- n. 1. Le ÏNIerlan. Duliani. II. 123* Callarias. Klein. ÎNIiss. V. 8« . P^- ^^' ^- !• Il» ^« t. A« !• 2, J_j' avancement de la maclioire supérieure et le manque de barbillons à la mâchoire inferieiu^e, m) Pcch. II. 113. £-65 lE MERLAN. sont des caractères suffisans pour distinguer ce poisson. Le merlan a le corps allongé, et couvert de petites écailles rondes, minces et argentines. La tête iinit en pointe, et les yeux, dans le voi- sinage desquels se trouvent les narines, sont ronds. La mâchoire supérieure est garnie de plusieurs rangées de dents, dont les antérieures sont les plus longues, et l'inférieure n'a qu'une rangée de dents. Dans le palais, en devant, on trouve de chaque côté, im os triangulaire; dans la gorge, deux os ronds en bas; et en haut, deux os longs et raboteux. A la ma- clioire inférieure, on apperçoit de chaque côté, neuf à dix points enfoncés. L'anus est plus près de la tète que de la queue. La ligne laté- rale a une direction droite, et l'on remarque une tache noire au commencement des nageoi- res pectorales. Ce poisson habite la mer Baltique, celle du Nord et de la Sardaio:;ne: cependant on ne le trouve qu'en petite quantité dans la première. Mais il paroît en abondance sur les côtes de Hollande, de France et d'Angleterre. Le mer- lan est ordinairement long d'un pied: on n'en trouve que fort peu qui ait li, et très -rare- ment de 2. Cependant, sur le banc de Dogger, on en prend qui pèsent depuis 4. — 8 Hvres. Ce poisson se tient dans le fond de la mer, et LE MEKLAK. 567 xdt de petites écrévisses, de vers et de jeunes poissons. On trouve sur-tout dans son estomac des sprats et des jeunes harengs. Les pêcheurs se servent aussi de ces poissons en guise d'ap- pât; et au défaut de petits poissons, ils pren- nent des morceaux de hareng frais ou dessalé; et un seul sulTit pour garnir 8 — lo hameçons. Comme ce poisson se tient sur- tout dans le fond, la ligne de fond est le principal instru- ment dont on se serve pour le pêcher; elle a ordinairement soixante -quatre brasses de long, et est garnie de cent à deux cents hameçons. Un vaisseau qui va à la pêche, jette <20 lignes de cette espèce, garnies de 4000 hameçons, et on les laisse au fond pt-ndant l'espace de 2 — 3 heures. La plus grande pêche se fait sur les côtes de France, depuis Décembre jusqu'en Fé- vrier; mais sur celles de Hollande et d'Anole- terre, elle se fait dans l'Eté. Ce poisson paroît en si grande quantité sur les côtes Britaniques, qu'on le voit en troupes longues de trois milles d'Angleterre, et larges d'un et demi. Comme on le prend sur ces côtes en trop grande quan- tité pour pouvoir le consiuner dans le pays, on le sale; mais comme alors il perd beaucoup de la délicatesse de son goût, on le garde pour le manger dans les vaisseaux, et alors on le nom- me buckthorn. Outre cela , on peut l'avoir tou- te l'année; et comme il poursuit ordinairement 574 ^^ CAPELAN. écailles sont minces, très -petites, et se déta- chent facilement. Nous trouvons ce poisson dans la mer Bal- tique et la mer du Nord; mais sur -tout dans la mer Méditerranée. Quand il paroît dans la première, il excite la joie des pécheurs, parce qu'il leur annonce une pêche abondante de mo- rues, de dorses et d'aigrefms; de sorte qu'ils l'appellent poisson -conducteur. Car comme il est petit, et qu'il va en troupes, ces animaux voraces le suivent de près, et deviennent eux- mêmes la proie des hommes, qui les épient. L'officier vit dans les fonds de petits poissons, de coquillages, d'escargots, d'écrévisses et de vers de mer. Pour frayer, il vient dans les en- droits unis, et dépose ses oeufs entre les cail- loux et les plantes marines. Comme ce pois- son est petit, il a plusieurs ennemis dangereux: voilà pourquoi on ne remarque pas qu'il multi- plie beaucoup dans nos contrées. La chair de ce poisson est blanche et de bon goût. Celui que je représente ici m'a été donné par mon ami Mr. le docteur Wallbaum^ de Lùbeck. On le prend comme les autres poissons du même genre, avec la ligne de fond et les filets. Le péritoine de l'officier est noir, et l'ex- trémité inférieure de l'estomac, est pourvue de plusieurs appendices. Les autres intestins sont comme ceux des précédents. LE CAPELAN. ^ 575 Ce poisson est connu sous difFerens noms. On le nomme: Zivergdorschj krwnstert, en Allemagne; leitfisch, à Schleswig; Jaegerchen^ à Danzig; ulfs-skrcppey en Norwège; poor^ en Angleterre; oj/lciery en France; capelan, à Marseille; munkana , à Malthe. Klein se trompe, en faisant deux espèces différentes de notre poisson a/, Ray doute que V officier soit différent du whiting-pout des Anglois ou de notre merlu barbu bj. Mais ce doute est aisé à lever; car le dernier est beau- coup plus large, et a la ligne latérale courbée. a) Miss. V. 79. n, 9, 10. h) Syn. 56. 576 LE TAU, VIL LE TAU. Gadus Tau* grjme Planche. Beaucoup' des barbillons â la mâchoire infé; rieure. Gadus cirris -pluriniis, B, vi, P. xx. /^. VI. A. xr. C XII, JD, III, XX. Gadus Tau. Linn. 439« n. 15» X-jes petits barbillons qui sont en quantité à la mâchoire inférieure, font le caractère distinctif de .ce poisson. La tête de ce poisson est grosse, large, et applatie. La mâchoire inférieure avance, et les barbillons dont elle est garnie, forment lin demi - cercle. Les deux mâchoires sQiit armées de dents pointues de différente longueur. A la mâchoire inférieure, elles forment deux ran- gées, et im plus grand nombre à la supérieure. Au palais, on remarque aussi deux rangées de dents de chaque côté. La langue est courte et dur. Les yeux sont grands, avancent hors du sommet de la télé. Entre les yeux, on remarque I.E TAU. 577 à la nuque un enfoncement et une ligne jaune en travers. Des deux côtés des yeux, on trou- ve deux raies de petites verrues, qui ont leur direction vers le menton. L'opercule des ouies consiste en deux petites lames, qui se termi- nent par trois pointes. La membrane des ouïes est dégagée; elle est grande et soutenue par six rayons. L'anus est un peu plus près de l'ou- verture de la bouche que du bout de la nageoi- re de la queue. Le tronc est couvert d'un li- mon, est uni, et les écailles sont molles, min- ces et si petites, qu'on ne sauroit les distinguer à la simple vue. Le premier rayon des nageoi- re ventrales est fort, roide, et en même tems le plus long. La première nageoire du dos est courte, et consiste en trois rayons piquants. Ce poisson est naturel dans l'Amérique. Sans contredit, ce poisson est du nombre des poissons voraces; car il a la bouche grande et bien armée. Je ne saurois déterminer sa gros- seur: celui que je possède, n'est pas plus grand que le dessin que j'en ai donné. On appelle ce poisson: ^Kroetenjjschj en Allemagne; tau y en France; et toad-codjish, en Angleterre; et en Amérique, les Indiens à la baie Hudson, l'appellent marthy. Oo 578 ^E LIEU. VIII. LE LIEU. Gadus Follachius» 68lîlf Planche. La mâchoire inférieure avancée, trois nageoires dorsales, la ligne latérale courbée. Gadus tripterygiuSy Une a laterali curva, rnaxilla iii" feriore longiore. B. vu» P, xix, V, vi* A, xFiii. x/x. C. KLii» D. Kiii, xriii, XIX. Gadus Pollacliius. Linn.439. Le Lieu. Duham. II. 121, n. 10. Artéd. Syn. 35. n,^. pi. 30. f. I. ThePollack. Penn. igS- n. 79- jL*avancement de la maclioire inférieure, les trois nageoires dorsales, et la courbure de la ligne latérale, distinguent le lieu des autres poissons du même genre. Les deux mâchoires sont armées comme dans le poisson précédent. La langue est cour- te, pointue, et rude vers la partie postérieure. Le corps est couvert de petites écailles minces, oblongues et bordées de jaune. On trouve également ce poisson dans la Baltique et dans l'Océan septentrional. 11 s'y LE LIEU. 579 tient dans les fonds formes par des rochers, et dans les endroits où la mer est le plus agitée. On en trouve quelquefois dans la Baltique près de Lùbeck, et dans la mer du Nord près de Heiligcland, mais seulement dispersés et un à un. En Norwège, au contraire, et en Angle- terre, ils sont très -communs, et ils y arrivent en Eté par grandes troupes. Ces poissons re- stent vers la surface de l'eau, et sautent quel- quefois au-dessus, en prenant diverses formes, et attrapant tout ce qui nage sur les vagues. Dans ce tems-là, on les épie avec des hame- çons, auxquels on attache des plumes d'oie. Le lieu parvient ordinairement à la longueur d'un pied et demi, et pèse alors 2 — 5 livres. Mais on en trouve aussi qui sont longs de 5 — 4 pieds, et larges de 6 — 8 pouces. Sa chair est blanche, ferme, meilleure que celle du cohn, et inférieure à celle du dorse et du merlan. Il vit de petits poissons, et sur -tout de lançons, que Ton trouve ordinairement dans son estomac. On prend ce poisson à la ligne, et en Norwège avec des filets. Le foie est d'un rouge pale, et composé de trois lobes, dont l'un est petit. La rate est allon£:ée et d'un bleu foncé. Les autres inte- stins sont comme dans les précédents. Le Heu est connu sous différens noms. On le nomme: Follack et iceùser ou f^elùer Oo 2 580 J-E LIEU. hohhnaul, en Allemagne; lyrhleck^ zai, lerhlc" kingy en Suède; lyr, lysse, en Norwège; foU Inckf en Angleterre; llcu^ en France. Il règne une grande confusion dans les écri- vains à regard de ce poisson, du coli?i et de V aigrefin verd, Schoneveld en a fait trois espè- ces aj. TVillughhy bj et Ray cj l'ont imité. Mais ils se sont trompés en rapportant le lieu à deux espèces particulières; une fois sous le nom de huitting-pollack, et une autre, comme le gelbe kohlmaul de Schoneveld, Artédiy qui ne décrit que le colin et le lieu, pense que Vaigre^ fin verd de ScJioneveld pourroit bien être la même espèce que le lieu dj, Klein ej y Duha» rnel fj et Fennant gj ne regardent le lieu et Yaigrejin verd que comme une seule espèce. Gronov lij et Gunner, regardent aussi le dernier et le colin comme la même espèce. Le premier se contredit dans la description du lieu: ime fois il dit que la mâchoire inférieure est avancée kj , et dans im autie endroit, il dit que les mâchoires sont égales IJ, Linné rnj les regarde avec Schoneveld com- me trois espèces différentes, sans cependant les .«) Ichtli. ig. n. fj. g. g. g) B. Z. III. 183. b) 167. 16g. 173. h) Zooph. n. 317. c) Syn. 53. n. 2. 3. 6. z) Lcern. Lapland. 167. d) — 34. n. 5. k) Mus. I. 11. 57. e) Miss. V. 8- n- lo. /) Zooph. n. 313. /) Pèch. II. 121. m) S. N. 458. n. 7. g. 10. LE LIEU. 531 caractériser de manière à rendre la dilTérence sensible. Pour se constituer juge dans cette div^ersité d'opinions, il faudroit avoir l'occasion de voir et d'observer ces trois poissons en même tems. Pour moi, je suspends mon jugement à l'égard de V aigrefin verdy parce que je n'ai v\\ que les deux dont je donne ici les dessins. Si l'on pouvoit faire fond sur les dessins diAsca- nias nj , il seroit aisé de les distinguer tous les trois; car le colin a la ligne latérale droite, le lieu a la ligne latérale courbe, et tous les deux ont la maclioire inférieure plus longue que Yni- grelin vercL Quand Wllluglihy oj et Artédi pj demandent, si Vcdgrejln verd de Schoneveld est le même poisson que son -pollackj on peut leur répondre négativement, de même qu'.à Ton- nant qj, lorsqu'il demande, si le sey des Nor- wégiens et le grasick des Suédois est les mê- mes que notre poisson. n) Icon. A. t. 23. p) Syn. 53. n. 5. v) Icliih. 175. q) B. Z. III. 13,3. 583 I^E LINGUE. IX. LE LINGUE. Gadus Molva, ^9^ Planche. Deux nageoires dorsales; la mâchoire supé- rieure avancée. Gadus dipteTygius, inaxilla superiore loiigiore. B. vu, P. xrx. V^. vi. A, Lix. G, xxxnii. Z). xr. zxiii, Gadus Molva, Linn. 439. Le Lingue. Duham. IL 145. n. 12. Arjtéd. Syii. 36. n. 9. pi. 25. f. i. Enchelyopus. Klein. IV. 53. Tlie Ling. Penn. 197. n. 85. n. 16. X-j' avancement de la mâchoire supérieure, et les deux nageoires du dos, sont les signes ca- ractéristiques du lingue. Le lingue est le plus étroit et le plus long de tous les poissons de ce genre: forme qui lui a fait sans doute donner le nom qu'il porte. La tcte est grosse, applatie et terminée en pointe émoussée. L'ouverture de la bouche est large; la langue blanche, mince et terminée en pointe. La ligne latérale a une direction droite. L'anus est un peu plus près de la tête que de la queue. ILE LINGUE. 585 Les écailles sont oblongues et fortement atta- chées à la peau. « Le lingue habite l'Océan septentrional, et sur -tout la mer du Nord. Celui dont je donne ici un dessin, est pêche à l'embouchure de l'Elbe. Il a voit 4. pieds de long, 7-^- pouces de large, 51 d'épaisseur, et pesoit 18 livres. Mais on en trouve aussi qui ont 7 — 8 pieds de long a). Il se tient dans les fonds, vit d'écrévisses, de crabes et de poissons: car j'ai trouvé dans son estomac non seulement des gurneaux, mais aussi des plies à moitié digérées. Ce poisson fraie en Juin, et dépose ses oeufs dans les fonds fan2:eux au milieu des herbasres. Sa chair est de très -bon goût, sur -tout depuis Février jus- quen Mai; et alors on le préfère à la morue. Dans ce tems, son foie est blanc et si imbibé d'une huile de bon goût, qu'on en tire ime gran- de quantité à un feu léger. Mais ensuite cette couleur blanche se change en rouge; le foie devient plus petit, et rend peu d'iiuile. Diffé- rence que l'on trouve aussi dans les autres espè- ces de poissons, mais d'ime manière moins sen- sil)le que dans celui-ci. Après le hareng et la morue, ce poisson est, à cause de sa grande multiplication, le plus important pour le com- merce de plusieurs nations. En Angleterre, on le sale en grande quantité, et on le consomme o) Penn. 198. 584- rE LINGUE. dans le pays: on l'exporte aussi dans les pays étrangers. Celui qui a 26 pouces de longueur est vendable; celui qui est au-dessous, est mis au rebut, n'est que d'un bas prix bj. On en exporte tous les ans de la Nor-vvège en-^ viron 900,000 livres cj. En Angleterre, on le prépare comme la morue: il est plus propre que cette dernière à se conserver pour les vo- yages de longs cours. On fait aussi de l'huile avec son foie; et avec sa vésicule aérienne, une colle qui approche de la colle de Russie. En Norwège, le tems de la pèche est le printems; et les endroits les plus favorables pour cela sont les bancs de sable près de Storregen, De petites bulles qui s'élèvent sur la surface de l'eau, annoncent l'endroit où ils se tiennent au fond. Outre cela, on en prend encore près de Spitzberg et Terre-Neuve; mais ils ne sont pas aussi bons. Il y en a aussi dans la Groenlande et la Laponie. Ceux d'Islande sont si mauvais, que les habitans du pays sont obligés de les manger eux-mêmes, faute de pouvoir les ven- dre aux étrangers dj. Les meilleurs se pèchent en grande quantité au mois d'Août près de Hitt- land , et on les y sèche comme la morue. Pour prendre ce poisson, on se sert de lignes de fond de la longueur de soixante brasses, qu'on ap- pâte avec des harengs ou d'autres poissons. On h) Penn. 198. c) Pont. Norw. IL 247. «0 Anders. Isl. 95. tE LINGUE. 585 mange le lingue frais, séché, et préparé d'au- tant de manières diverses que la morue. Le gozier de ce poisson est large, et garni de longs plis, qui ont leur direction en lon- gueur. L'estomac est mince et en forme de sac, A sa partie supérieure, est la naissance du canal intestinal, qui se recourbe quatre fois. Au commencement de ce canal, on trouve 34 ap- pendices fort longs. La peau de la vésicule aérienne est aussi épaisse que du maroquin. Le foie est rond, le iiel d'un verd foncé, la rate oblongue et brune. J'ai compté vingt côtes de chaque coté. Ce poisson est connu sous dilTérens noms. On le nomme: Loenge et leiigy en Allemagne, Dannemarc, Norwège et Islande; laenga, en Suède; juirksoak, en Groenlande ;Zi/î^, en An- gleterre; lingue, en France. Artédi paroît croire que c'est Clinrleton qui a le premier fait mention de ce poisson e) ; mais Bellon fjtt Gesner gj en ont parlé longtems auparavant. C'est Bellon qui nous en a donné le premier dessin /z^; et quoiqu'il le représente sans écailles, ce dessin vaut cependant encore m.ieux que celui que Duhamel a publié depuis peu; car dans ce dernier les écailles manquent également, et l'on a représenté la première na- e) Syn. 36. n. 9. g) Aquat. 95. /) Acjuat. 135. h) Au lieu cité. 586 l'E LINGUE. geoire du dos en forme de demi-cercle ij, . Jori' s ton a tort de représenter un requin pour notre poisson k). Wîllughhy et Ray se trompent, en faisant de notre poisson deux espèces différent tes : car leur clarins nilobica de Bellon n'est au- tre chose que notre lingue y comme on peut le voir par le dessin que Willugliby en donne IJ* LA L. O T E. Gadus Lota» 70^16 Planche. Les mâchoires de longueur égale; deux nageoi- res au dos. Gadus dipterygius^ maxillis aequalihus. B, ni. P. xx. ^. n. ^. lxï'u, C. xxxn. D. xir. ixnii. Gadus Lota. Linn. 4/0. n. Enclielyopus. Klein. IV. 57. 14. Artéd. Syn. 53. 11. 13. n. 15. t. 15. f. 2, et Siliirus m. Spec. 107. TlieBurbot. Penn. 199. n. g6, Giouov. Zoopli. 97. n. 313. X-i'égalité des mâchoires, et les deux nageoires au dos , distinguent suffisamment la lote des au- tres poissons de ce genre. i) Pèch. II. pi. 25. f. I. k) De Pisc. t. 2. f. 6. l) Tab. H. 4. f. 2« LA LOTE. 587 La tête est grosse, large et applatie. L'ou- verture de la bouche est grande; les deux mâ- choires sont garnies de sept rangées de petites dents pointues, et l'inférieure a lui barbillon. Cependant quelquefois auprès du grand, on en remarque aussi un plus petit. La langue est large, et l'on trouve dans le palais divers os raboteux. Les narines sont doubles , et les an- térieures sont couvertes d'une membrane. La membrane des ouïes est placée en travers, et est large. Ce poisson est couvert d'une matière gluante, de petites écailles molles et minces. La ligne latérale est droite. L'anus est plus près de la tête que de la queue. Parmi ce genre nombreux, la lote est le seul poisson qui vive en eau douce, et égale- ment dans les rivières et les lacs. Elle est na- turelle non seulement à l'Allemagne et autres pays de l'Europe, mais encore aux Indes orien- tales aj y et en Amérique bj. Ce poisson aime particulièrement mie eau claire, et se cache au fond dans les creux formés par les pierres, d'où il épie les poissons qui passent avec rapi- clité: d'ailleurs, il \dt aussi de vers et d'insectes aquatiques. Au défaut d'autre nourriture, les lotes se dévorent mutuellement, et s'attaquent fl) Bondi. Ind. ig. Talck h) Schrift. B. 8. 141. Reis, III. 421. 583 V ^^ LOTE. même à l'épinoclie, où elles perdent souvent la vie: car l'épinoche en se débattant, enfonce son aiguillon dans le gozier de la lote. J'en ai vu ime dont un aiguillon de cette espèce passoit au-dessus de la tête. Ses ennemis sont le bro- chet et le silure, dont elle en devient souvent la proie. Quand elle est bien nourrie, elle croît promptement, et parvient à la longueur de <2 — 5 pieds, et pèse jusqu'à lo — 12 livres. Comme elle a la vie dure, on peut la conser- ver pendant quelque tems en vie, en lui don- nant des coeurs de boeuf, ou des petits pois- sons. Mr. Falck assure | qu'on trouve la lote dans toutes les eaux de la Russie et de la Sibé- rie. En plusieurs endroits on en fait de la colle de poisson, dont la livre se vend 5 — 10 co- pecs; mais cette colle est bien plus mauvaise que celle des esturgeons. En Sibérie et en plu- sieurs endroits de la Russie sur -tout chez les gens de campagne et les nations anciennes, on se sert de la peau de ce poisson, au lieu de ^'i- tres. Elle est aussi claire qu'un papier huilé. Les Ostiaques et les Tartares-Tschulymsches se font de la peau de ce poisson, ainsi que de celle de bien d'autres de ces animaux, des ha- bits d'été, et des sacs pour y garder les pelle- teries. Le tems du frai de ce poisson tombe vers la lin du mois de Décembre et de Janvier. Alors il sort des creux des lacs, et vient dans LA LOTE. ^ 589 les fleuves chercher les endroits unis, pour y déposer sou frai. Il multiplie beaucoup. Sa chair est blanche, garnie d'arrêtés, et d'un bon goût. Comme elle n'est pas grasse , elle n'est pas contraire aux estomacs foibles. On regarde sur -tout le foie comme un morceau fort déli- cat. Une Comtesse de Beuchlingen, en Thurin- ge, aimoit tant ce mets, qu'elle y employoit une grande partie de ses revenus c). Le foie suspendu dans un verre, et placé auprès d'un poile chaux, ou à l'ardeur du so- leil, donne une huile qui est un remède efficace contre les durillons. C'est ce qui a été aussi confirmé par IJaen d) et par plusieurs autres ej. On prend ce poisson au filet, à la ligne flottan- te et à la ligne de fond. Autrefois celte pêche étoit si abondante aux environs de l'Oder, que les pécheurs ne pou^'ant se défaire de tout le poisson qu'ils prenoient, coupoient les plus gras en morceaux étroits, les faisoient sécher, et s'en servoient au lieu d'alumettes y^'. L'ésophage et le gozier sont larges, et ont de grands plis comme dans le brochet. Le ca- nal intestinal a deux courbures, et on y trouve trente appendices de différente longueur, dans lesquels Ricltter a trouvé des vers solitaires ^J, c) Jonst, 152. /) Bekmann. 5^3, ^0 Rat. Med. X. 295. g) Icluh. 314. e) Strals, Magaz, I, 460^ 590 Ï^A LOTE. Le foie est grand et d'un rouge pâle. La laite et l'ovaire sont doubles. Le dernier contenoit 128,000 petits oeufs d'un blanc jaunâtre» On trouve cinquante -huit vertèbres à l'épine du dos, et dix -huit cotes de chaque côté. Ce poisson est connu sous différens noms; On le nomme: Çuappe, en Poméranie, en Prusse et dans la Marche -Electorale; anlquap- pCy aalraupe, enLivonie, en Silésie et en Saxe ; rutte et aah'uttey en Autriche; trusche^ dans l'Empire; ruffolck, dans les contrées du Haut- Rhin; ruzych, rutteii et rnenyhal, en Hongrie; rninincky en Bohème; mient, en Pologne; pe- gorella, en Esclavonie; schijatschnn, en Tarta- rie; kurta, chez les Calmouques; lotây lochcy en France; strinzo et bottatrise , en Italie; botta, à Milan; putael, en Hollande; hurbot et eel- put, en Angleterre; dsjoo, au Japon; naliui, en Russie; burbot, en Amérique.. Les habitans des environs de Vûka, nomment ce poisson inantus; les Tartares, les Barabes et les Teleu- tes, korte-balik; les Tartares lui donnent en- core le nom de schainle ; les Baschldres et les Kirgises l'appellent sclimiiba-balik; les Wogu- les, tschi; les Wotjaques, naliin\ les Ostiaques, mukol; les Tscheremisses, lanba; les habitans des contrées de l'Ukraine, ineniok; et les Cal- mouques, chotubre. JjA jlote. 591 Quoique l'on trouve ee poisson dans pres- que toutes les eaux douces, il règne cependant ime grande confusion dans ce que les auteurs en ont dit. Bellon lij j Rondelet ij et Willugh' hy h) l'ont regardé comme deux espèces diffé- rentes, et Ray comme trois IJ, Gesner après avoir rapporté les deux espè- ces de Bellon et de Rondelet, décrit quatre au- tres espèces mj'^ mais qui toutes ensemble n'en font qu'une, et ne sont distinguées que par la couleur, la grosseur et le séjour. A cet égard, Aldrovand nj, Jonston oj et Ruysch l'ont copié fidèlement.' Artédi le considère aussi une fois comme un aigrefin , et une autre fois comme une espèce de silure pj. JVillughby cp et Ray rj ont tort, de prendre pour des barbillons la lon- gue membrane des narines, et de citer notre poisson comme deux espèces; savoir, la Iota mustela fluviatilis et la Iota rondeletii, Klein est dans l'erreur, lorsqu'il ne regarde les deux na- geoires dorsales que ^comme une seule nageoi- re sj. Gronov se trompe aussi, en citant la gadus jnustela de Klein pour notre poisson tj. h) Aqu, 303. 304. o) De Fisc. 146. i6g. Hist. d. P. II, 120. 131, p) Syn. 37. 11. 13, III, k) Iclith. 125. 126. cf) IchtJi. 125, /) Syn. 67, n, 2, 3. 4, r) Syn. 6g. m) Aqu. 599. j) Miss. IV. 57. n) De Fisc. 577, 648, Zooph. n. 313. 592 I^A LOTE. Nous répondons alHrniativement à ce dernier, lorsqu'il demande, si la lote de Ray est la même que la nôtre uj. Nous répondons de même à Fennanty lorsqu'il demande, si 1'^//- quappe de Schoneveld est notre lote xj. C'est sans raison que Salvien yjy Gesner z) y Schonc-- veld aj et Marsigli bj refusent les écailles à no- tre poisson, lî) Au lieu cité. z) Thierb, 141, b. 5c) B. Z. m. igg. a) Icluli. 49. y) Aqu. 213. b. h) Daiinub, IV, 71.