S.9H. •w/^-' . INTRODUCTION OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, SUR L'HISTOIRE NATURELLE ET SUR LES ARTS, AVEC DES PLANCHES EN TAILLE - DOUCE , D £ D I £ E S a Mcnseigneur LE COMTE D'ARTOIS; Far M. UAlbe Rozier, Chevalier de I'Eglife de Lyon, de VAcadimit Royaledes Sciences, Beaux-Arts & Belles-lettres de Lyon, de Villefranche de Dijon , d: Marseille *de Nifmes, de FkJ/ingue , de la Sociiti Impiriale de Phyfijue & de Botanique de Florence , de Zurich , de Madrid, Correfpondant de la Socitti des Arts de Londres, de la Socie'te Philofophique de Philadel- phie , Oc. ancien Direcleur de VEcole Roy ale de Midecine-Vitirinaire de Lyon. TOME PREMIER. A PARIS, ChezfLE JAY» Libraire, rue Saint-Jacques, au Grand Corneillc. (BARROIS, PAine', Libraire, Quai des Auguftins. M. D C C. L X X V II. AVE C P RIV ILECE DU ROl »: A MONSEIGNEUR X£ COMTE D'ARTOIS. M ONSEIGNEUR, Les productions utiles ont des droits ajjuris a la protection des Princes , & les progres des Arts & des Sciences , font toujours proportionnes a Vaccueil favorable qifils leur accordent. Moins frappe, Mo nseign eur, de V eclat augujle qui vous environne, que des heureufes qualites que la France admire en vous; c'ejl a votre Perfonne, Jvilibt I 7 7 i , Tome L A i \ & non a votre rang, queje dedie cet Ouvrage : parol f- fant fous vos aufpices , & fon but ham Vudlite publi- que, il fera favorablement recu. Quel heureux prefage pour la Patrie , de voir un Prince qui , dans le printems de fon age , cheat & protege les Arts & les Sciences ! Puijje la pojlirite la plus reculee gouter les fruits dont nous admirons les fleurs. J'ai Vhonneur d'etre , avec le plus profond ref peel, De Monseigneur.* Le tres-humble 8c trcs- obe'iflant Serviteur, l'Abbe ROZIER. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE j SUR L'HISTOIRE NATURELLE ET SUR LES AR T S. DISSERTATION, Zuc a V Academic Roy ale des Sciences de Stockholm , par M. Fernee , Confeillcr an College de la Chanccllerie , & Profejfeur de Mathi- mathiques. 'EAU de la mcr diminue-t-elle, ou la mer reprend-elle d'un cote le terrein qu'elle cede de I'autre ? Cette queftion ft difcute'e depuis long-terns par les Phyficiens ; & nous „ levons a leurs travaux, fur cette matiere, quantite' d'excel- lenteb ui.lervations, quclques fyftemes hardis & dangereux , & de fort bons ouvrages. C'eft principalement en Suede qu'elle a ere agitee avec le plus de conftance, parce que ce royaume prefente a cet e'fard des fairs finguliers , & dont on n'efpere trouver la folution que dans celle du probleme. M. Ferner a rraite' cette hypothefe, a-peu-pres comme un Avocat gene'ral plaide une caufc devant la Cour. II rend compte des fairs qui font pour & contre,cite les ouvrages qui out paru fur ce finer, Juillet i 7 7 I , Tome f. S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , en expofe les principes , en difcute les raifons. Sa diflertation feule prefente une idee pre'eife de tout ce qui a etc e'erit en ce genre. Nous* penfons que le Public la vcrra avec plaifir, 8c qu'il nous faura gre' de l'avoir traduite du Suedois. Commc l'ouvrage de M. Ferner n'eft lui- meme qu'un analyfe, il n'eft pas poffible d'en donner une ide'e par des extraits. II eft quelquefois aife', dit M. Ferner, de connoitre les loix de la nature, quand elle exe'eute fes operations dans un terns precis, dont le terme n'eft pas eloigne'; fur-tout, quand on a la facilite' d'e'pier fes de'marches, de 1'examiner fans cefle, & de la prendre, pour ainii dire, fur le fait; mais il n'en eft pas ainfi lorfqu'il faut des fiecles, & meme des milliers de fiecles enchaine's les uns aux autres, pour s'aflurer d'un effet qu'elle produit fucceflivemenr , 8c pour connoitre les loix d'ac- ce'le'ration ou de rallentiflement dans fes ope'rations. On doit alors confide'rer le genre huniain commc un homrne qui , par intervalles , a fait des recherches pour de'couvrir des ftcrets ; mais qui, bientot lafTe de la lenteur des expediences , s'eft livre aux conjectures, & a voulu pre'eipiter fa marchc dans la Phyfique; fes erreurs l'ont oblige de revenir fur fes pas , d'intetroger de nouveau la nature , de la peindre telle qu'elle s'eft ofrerte a fes yeux, 8c telle qu'elle parozt a 1'inftanc prefent. C'eft ainfi qu'il prepare des materiaux, qu'il les difpofe , pour que les obfervateurs puiffent, dans les fiecles futurs, e'lever un e'difice folide, auquel les expe'riences tk les remarques faites dans les fiecles paffes 8c pre'fens, ferviront de bafe & de fondement, Tout changement lent & progrefllf fe rcmarque rarement ; & lorf- qu'enfin on commeTice a s'en appercevoir , il fe paffe fouvent encore un tems confide'rable , avant qu'un obfervateur hafarde fon jugement. Quelles obligations n'aurions-nous pas a ceux qui e'tudienr la na- ture, fi dans chaque ficclc ils eufTent trace fur des rochers la hauteur du lit de la mer! De femblables obiervations deviendroient d'autant plus importantes, que les changemens dans cette hauteur qui varie, fui- vaut les diffe'rentes faifons de l'annee, feroi;nt aujourd'hui entie'rement connus. Il eft certain que la diftance de l'eau au-defTus ou au-deflbus de cette marque auroit c'te' aftez frappante dans ce laps de tems , pour donner la mefure la plus infaillible. Mais comme ces obfervations , quoique tres ne'cclTaires , n'ont pas eu lieu, ou que les Ancic-ns & les Modernes qui les ont faites n'ont pas ete exa&ement d'accord , il eft ne'eeflaire de les de'tailler, 8c d'examiner fe'pare'ment ce que chacun d'eux a dit fur cet objet. Newton penfe que les exhalaifons des Cometes, reftituent a la terre les vapeurs qui s'en exhalent continuellement ; que tout ce qui ve'gete, doit a l'eau fon plus grand accroiffement , finon fon accroiftement total , 8c que les Plantes ne fe de'truifent que pour devenir des corps SUR VH1ST. NATURE LLE ET LES ARTS. 7 folides. Les plus ce'lebres Chymiftes , tcls que de Lavignere , Borri- chius , Hook, Nicuwenryt, Hierne, &c. fi on en excepte Boerhaave, conviennent tous unanimement, & prouvent par des expediences, que l'eau connent une portion rerreufe , Si qui eft re'ellemenc re'duire en rerre, de pluiieurs tnaniercs. Boerhaave loutient que la terre qui rcfte dans la re'eorte chaque fois apres la diftillation , n'eft qu'un amis de la poulliere qui e'toit rc'pandue dans l'air, & qui s'eft mele'e avec l'eau, loir avant, foit pendant , foit apres la diftillation : mais M. Vallerius , ProfciTeur d'Upial , demande, avec raifon , fi la poulliere eft volatile en l'air, pourquoi ne Peft-clle pas de meme dans la re'torte ? Si elle eft folide, pourquoi ne fe fixe-t-elle pas au fond du vafe, dans la diftilla- tion d'un efprit (a)? M. Leidenrroft a de'montre l'inconfe'quence de l'explication de M. Boer- haave, par plufieurs expe'riences faites fur l'eau la plus pure, tombanc en goutte dans une cuiller de fer poli & e'ehauffe'e : cetre eau y a tou- jours laifle quelque terre. M. Eller confirme eette preuve par les expe'- riences fuivantes. II diftilla au bain-marie, l'eau pure d'une fontaine, & enfuite , la verfa dans un flacon hcrme'tiquement ferme : cetre can' flit tenue dans le flacon pendant tout 1'e'te, & fur expofe'e a l'ardeur du loleil ; peu de terns apres , elle devint trouble; une efpece de pelli- cule verre ie forma a la furface. Cette pellicule fe'pare'e de l'eau Sc diftille'e , produifit une matierc inflammable , Sc une efpece d'acide, M. Marggraf a encore fait a ce fujet des expe'riences plus exactes. II diftilla la meme eau plus de quarante fois, Si il trouva toujours qu'elle ie troubloit de plus en plus , Si qu'elle depofoit de la terre fur les cote's de la- retorte. Cette meme eau , mife fous une cloche de verre , fut enticfrement evapore'e par Paction des rayons du foleil qui tom- boient diredtement fur elle. Apres cette evaporation, il refta de la terre «)ans le vafe. On peut s'aflurer encore plus pofitivement que l'eau fe convertit en corps folide ; fi l'on confid%ere que quand la chaux & le fable font mele's enfemble dans l'eau, Si cuits pour en faire de la brique, cette brique» lorfque l'eau eft e'vapore'e , acquiert plus de poids que la chaux & 1c fable pefe's fepare'ment ; ce qui , continue M. Marggraf, s'obferve e'gale- ment pour- le platre, ainfi que pour plufieurs autres matieres qui gagnent en pelanteur par la fixation de l'eau. Ces expe'riences de'montrenr egalement que tous les ve'getaux doivent (a) Nous nc nous arreterons pas ici a difcuter fi l'eau comient de la terre ou nons ce qui interromproit ta le il eft de'montre que cette pie'tendue augmentation de terrein ne peut etre audi considerable. Ainfi,quel- que fuppofition que l'on puiffe imaginer , on ne trouve ricn qui puifTe lever la difriculte'. J'ai pris ces inurs pour exemple, pre'ferablement a tout autre ba- riment, pour eviter les objections qu'on pourroit tirer du recre'pif- fage 8c des decombres , &c. qui t'levent le fol des terreins habite's , comme aulli celles que prefentent les changemens accidentels arrive's, foit par des tremblemens de terte, foit par des inondations, tkc. dont les effets font plus fentibles dans un pays de peu d'etendue que dans deux contre'es audi vaftes. Suivons cet examen. Si je trouve fur la pente d'une montagne des couches tres-regu- lieres, placees horifontalement ou e'galemcnt penchantes & paralleles; fi unc partie de ces couches font d'une pierre dure ; fi en fuivant ces memes couches, je de'eouvre que la pierre s'amollilTancfucceflivement , fetcrmine enfin par une terre molle de meme grain & de meme na- Juillet 1 7 7 1 , Tome L 24 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ture ; je convicns qu'un eel exemple favorile fingulic'rement I'opinion de ceux qui penfeivt que de telles montagnes ont e'te fucceffivement formees foils l'eau •> j'avoue racrae que les objections les plus fortes de'truifent difricilement cctte fuppolition. Or, Pon voic des couches abfolument femblables a celles que je viens de de'erire a Cainsham Sc Sommerfct-Shire, Sc au pied d'Hol-Well , dans lc voifinagc de Briftol. Si nous comparons a pre'fent la maifon carre'e de Nifmes , conf- truite. fous PEmpereur Augufte, Sc batie en groffes pierres de taille, avec les murs qu'Adrien ou Severe firent elever en Ecoffe ou en An- gleterre ; nous nc ferons pas moins embarraffe's. Le premier de ces monumensj place' dans une Ville trcs-ancienne & tres-comraercante, tjui a etc fujerte a plufieurs re'volutions, eft vraifemblablement en- core aujourd'hui aufli eleve qu'il Pc'toit du terns d' Augufte. Comment concilier l'antiqufte' de ce morceau d'architecture avec les nouvelles decouvertes faites dans la mcrae contre'e, de plufieurs edifices du pre- mier fiecle qui font abfolument enfevelis ? Des variations audi furpre- nantes obferve'es dans des efpaces plus rapprockes, Sc comparees avec celles qu'on decouvre a des diftances ties - eloigners , commc de Nifmes a Briftol, oil en Ecoffe, portent naturellemenr a dourer de la forme conftante de la furface de la terre , que ccpendant il faut nc- ceffairement fuppofer telle , pour pouvoir juger de 1'c'le'vation ou de l'abaiffement du niveau de l'eau. Ce foupcon devient prefque une certitude, fi Ton confidere en grand PItalie qui eft le pays donr nous avons les relations les plus anciennes , les plus authentiques Sc les plus multipliees. Je ne parle pas des changemens qui (e font fubitement dans quel- ques endroits de pen d'e'tenduc , tel que celui qui , par exemple, arriva a Monte-Novo, pres dc Pouzzol , lorfquc pendant la nuit du i 9 au 2.0 Septembre 1 528 , il s'eleva tout d'un coup une montagne de 2400 pieds perpendiculaires. La montagne Marrckle-Hill en Hereford- shire, prefenre un phenomene aulli frappant. On vit en 1571 une etendue de 20 arpens de terre laboure'e & de prairies ie feparer de la mafic commune , & etre infenfiblement tranfporte'e en trois jours a 40 pas de diftance. Ce qu'il y cut de plus fingulier , fut qu'on nfentendit aucun bruit. Lorfque ce terrein ambulant fe fut fixe , la terre s'enfia fubitement, & il fe forma une ele'varion tres confiderable. De tels e've'nemens fixent aife'ment notre attention , en excitant en nous l'e'pouvante Sc la confirmation, ou Padmiration Sc la lurprife ; mais les changemens qui arrivent peu-a-peu, 5c qui, dans un long •eipace de terns, elevent ou abaiffent uniformement une e'tendue de pluln-urs mi'licrs de licues, e'ehappent facilement a nos regards, &: ne font prclquc jamah remarque's. Cependant , on a les plus fortes railons de les prefumcr , par exemple, les fameux chemins coniulaires prouvent que SUR L'HTST. NATURELLE ET LES ARTS. 25 que la face de 1'Italie n'eft plus aujourd'hui la mane que dit terns de I'ancienne Rome. Le Cenfeur Appius Claudius fit commencer un de ces chemins, il y a 1138 ans, il avoit 14 pieds de largeur , & conduifoit en ligne droite de Rome a Capouc. Pour le niveler, il fit couper pluficurs nionragnes , parmi lefquellcs on voit encore aujourd'hui celle qu'on nomine Pifca Marina , prcs Terracine. Elle eft perce'e a une hauteur de 200 pieds, & chaque dixaine de pieds eft marque'e par des lettres Romaines fur les parois de la montagne. Le fond de ce chemin etoit fi ferme , & les pierrcs etoient fi etroitement lie'es, que dans les eu- droits oil on l'a retrouve de nos jours, il eft aufli entier & aufli fo- lide, que lors de fa conftrudtion : on ne peut pas meme faire pcW- trer la pointe d'une epe'e dans les joints de (es pierres. Ncanmoins, il fe trouve actuellement impraticablc pendant 1'ctendue de plus dc 60 lieues d'ltalie , e'eft-a-dire , depuis Rome jufqu'a Torre - Dellc- Mole ; enfin, il fe perd dans le vafte & profond Marais Pomptin, duquel il fort tout entier. On peut alors 1c fuivre fans interrup- tion pendant plus de 10 lieues d'ltalie, jufqu'a Sainte Agathe, oil Ton eft oblige dc le quitter de nouvcau. Un autre chemin confulaire, nomme Via Flaminia, traverfe l'ltalie depuis Rome jufqu'a Rimini. II a ete' conftruit depuis environ 1990 ans, &C depuis ce temps, il a e'prouve' des changemens bien confide- rables. On voit deux inferiptions , l'une fur le Pont de la Citta Caf- tellana , & l'autrc au-deffus de la Porte d'une Hotellerie a Caftelnovo , qui annnoncent que toute la belle partie de ce chemin, depuis Otri- coli , jufqu'a Caftelnovo , ( dans une etendue de plus de vingt lieues d'ltalie, ) a etc enfevelie durant plufieurs fiecles. Aujourd'hui , les vovageurs peuvent fuivre cette route. En faifant des recherches plus foigne'es a ce fujet, on trouveroit ptobablement que tous les autres chemins confulaires , ont eprouve de femblables changemens. Si l'on ajoute a tout cela que deux degre's de diffe'rens meridiens, mais a meme e'le'vation du pole, mefures avec la meme exactitude, n'ont point une e'gale courbure, on pourra croire avec aftez de fondement , que le niveau de la mer eft peut-etre beaucoup moins fujet au changement, que la furface du continent. En fuppofant done, comme il y a beaucoup d'apparence , que toute l'l- talie s'eft abaiftee vers le milieu , en fe hauffant ou en rctenant fa pre- miere fituation vers les deux extre'mitcs, il n'eft plus etonnant de trouver des Mofaiques , des urnes , &c. fur les rivages qui font beau- coup eleve's au-deflus de ce niveau. Ne feroit-il pas alors aife dc trouver la raifon dc ce qu'a Tareiue & ailleurs , on ne s'appercok d'aucune elevation du niveau dc l'eau, &c. Ce qui eft arrive' en Italic, peut avoir lieu; dans les autres pays$ Juillj-t I 77 1 , Tome 2, D 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , & en en faifant l'application aux parries de norrc globe d'une plus grande e'rendue, on a roure la rerre , il refultera qu'une portion de fa furface s'eleve peu-a-peu dans le meme reins qu'une autre s'abaiffe : ainfi, ce qui autrefois a etc fond de mer, devient continent , & ce qui e'toit aup.iravant conrinenr, devient fond de mer. Alors, il n'y auroit plus a. triompher pour rous ceux qui out rapporte' des expe'riences bien conf- tate'es , relaiivement a cet objer, & qui en ont tire les confe'quences naturelles, dans la fuppofition que la Iurface de la terre eft en general invariable. Une diminution abfolue de l'eau , nc peut-elle pas avoir lieu? Les caufes phyfiques femblent auto'rifer cette fuppofition; mais on ne peuc pas " iiffirmer , ians prealablement avoir examine' fur tout le globe de la terre, quelle relarion il y a entre le continent & la mer, ope'ration trts-difticile , pour ne pas dire impoillble. Telle e'toit ma maniere de penfer fur la diminution de l'eau, & fur la variabilite de la Iurface de la terre, lorfque l'ouvrage de Runeberg me tomba entre les mains-, il prouve cette variabilite' par la conftitution interne du globe ; felon lai , les montagnes fonr a la terre ce que les os font au corps humain , elles en affermiffent la maffe par des liens. Dans fon fyftcme , les cre- vafles & les variations en tout fens ont un effet fenfible fur les parties les plus molles & les plus deliees du globe. Il va plus loin , il donne les raifons pour lefquclles on trouve en Suede plus d'atterriffemens que dans les pays me'ridionaux ; felon lui , les fortes gelees sn font la caufe. Void comment il le prouve. La furface de l'eau 8c celle de la terre etant gelees , fe lient fortement enfemble , de forte que la glace qui encroute la terre des rives baffes , peut etre regardeecomme une continuation dc celle qui couvre la mer. Ainfi , pendant la haute mare'e , l'eau pouffant la glace en hauf, fait le plus grand effort fur le milieu , pour lui faire prendre la figure d'un fegment fpherique. La glace fait le mtrae effort pour elever celle qui eft attache'e a la terre , ce qui ne peut arriver qu'autant que la terre gele'e du rivage fe de'- tache de celle qui ne l'eft point : alors , l'eau y pe'netre avec impe'- ruofite', & entraine avec elle une telle quantite de terre, de vafe, dc de'bris de corps marins, qu'clle remplit ce vuide, e'eft ce qui produit les atterriffemens. Plus les hautes mare'es fe fuccedent fre'quemmenr, ( comme dans la Baltique, qaand cl!e eft gelee ) plus les atterriffemens font confide'rables. M. Runeberg croit que ces effets peuvent encore etre produits par d'autres caufes : e'eft ainfi que quand les neiges font fondues au printems , ou par la chaleur du foleil , ou par les pluies ; les torrens que leurs eaux produifent , entrainant des terres, des li- mons , &c. les depofent dans ces ouvertures. Pour donner une ide'e plus exa&e des changemens produits par les glaces fur le continent , M. Runeberg examine combien l'eau fe dilate SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 27 en fe ^elant, 8c il trouvc dans le tuyau d'un barometre dc 1 ^ lignes, que l'cau, a la hauteur de 10 pieds, fe dilate d'un pied lorlqu'elle "cle. Il falloit enfuite connoitre la quantite d'eau qu'abforbent les dif- ferences efpeces de tcrre,cequi eft tres-difficile, 8c ce qui varic beau- coup. M. R. a trouvc que l'argile bouillante c'toit celle qui en abfor- boit le plus ; & que lorlqu'elle en abforboit autant qu'il eft poffible , ellc en contenoit alors quatre fois plus que de terre. Pour favoir fi la terre remplie d'eau occupe plus d'efpace lorfqu'ellc eft gelee , que lorfqu'ellc ne l'cft pas , il humefta une portion d'ar- i»ile, de facon cependant qu'elle ne perdit pas la confiftance , 8c en fit un rouleau , dont il melura la grandeur, la longueur 8c l'c'paineur •> apres avoir expoie cc rouleau pendant fix Keures a la gelee , il trouva qu'il avoit diminue de longueur , de largeur 8c de poids. D'apres ces obfervations , M. R. fait plufleurs raifonnemens qui tendent a prouver les divers changemens arrive's fur la furface de la terre, principalcment la diminution de l'cau. Nous ne le fuivrons pas dans tous fes raifonnemens , nous nous cbntenterons d'en rapporter un des principaux. Lorfque la glace, dit M. R. , s'eft attache'e a toutes les incgalites des pierres, dont une partie eft ious l'cau, Ec Pautre eft au-deflus , clles font e'braftlees 8c meme enlevees pendant que la haute mare'e fait fes efforts. Quand ces pierres fe font ainfi elevees avec la glace a laquelle elles adherent fortement, le fable 8c le limon, pofffe's par l'eau , entrent avec impe'tuofite' dans les cavite's qu'ellcs avoicnt occupe'es; lorfque le dcgel furvient, les pierres en retombant a leur premiere place , (e trouvent plus elevees qu'elles ne l'etoient en l'anne'e pre'ee'dente. Cellcs qui ont fixe' l'attention de M. R. , avoient toutes 5, 6 8c 7 aunes de hauteur 8c de largeur. Tel eft le precis des obfervations, des raifonnemens 8c des prcuves rapporte's de part & d'autre,pour defendre ou combattre l'hypothife de la diminution de l'eau de la mcr ; on petit y ajouter les reflexions de M. Nordenfchold, qui tendent toutes a refuter le fentiment de M. Browallius. M. R. examine ccttaines cavite's fingulieres, qu'on appelle marmitcs de giants , forme'es fur des rochcrs. II obfervc leur poficion , leur elevation au-deflus du niveau de la mer, leur'profondeur & lc terns qu'il a fallu pour que les fable* 8c les graviers entraine's par les eaux de la mer , puffent former ces cavite's. D'apres ces obfer- vations , il decide que la furface de la mer baifle plus d'une aune en 100 ans. On voit ces marmites de gc'ants dans le Kohare-Fiarden , dont on a drefle une carte. Il y en a fix fur un e'cueil ; niais ce qui eft le plus fingulier , e'eft que la moins eleve'e de ces marmites qui fe trouve encore au-deflus de l'eau , a commence a fe former il y a en- viron trente ans-, terns auqucl M. R. vifita cette marmitc, qui a au- jourd'hui une cavite d'un pied de profondeur. La maniere dont cetco Juillet I 77 I , Tome I, D i 2 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , operation s'exe'cute , eft, felon lui, une preuve de l'abaiffement fuc- ceffif du niveau de la mer , 8c de l'e'levation de la terre dans la me me proportion. M. N. foutient encore que la diminution de l'eau doit avoit e'te autrefois bien moins confide'rable qu'elle ne l'eft aujourd'hui , parcc que l'e'tendne de la mer e'tant plus grande &c le continenr plus ref- ferre, il falloit moins d'eau pour la formation 8c la confervation des animaux , des ve'ge'taux 8c des mine'raux. Suppofons avec M.'Browal- lius, ajoute M. N. que ce que la mer empic'te d'un cote' fur la terre, re'ponde exadtement a ce que la terre gagnc de l'autre , 8c que le niveau de la mer ait toujours e'te a la meme hauteur, il en rclulte ne'cefTairement une nouvelle preuve en faveur de la' diminution de l'eau, puifque la quantite' de terre qui eft continuellement emporte'e dans la mer par les fleuves, les pluies , &c. en enleve ne'eeffairemene le fond , & par confequent la furface. Que devient done cctte eau ? M. Nordenichold re'pond qu'elle fert a produire tout ce qui ve'gete fur la terre, qu'elle augmente les montagnes de glaces aupres des poles, 8c qu'il en penetre dans la terre une grande partie. Cette der- niere hypothefe lui devient ne'eeffaire pour expliquer la conftrudtion interne de notre globe, dont voici, felon lui, 1'efquiffe en peu de mots. L'intt'rieur du globe renferme une fubftance atlive & e'laftique, entoutee par la furface de la terre , dont il regarde la bafe comme un fluide pefant, fur lequel la maffe de la terre eft portee avec fes montagnes, fes mers , les lacs, fes cavite's , 8cc. II tire de cette fup- pofition la conlequence fuivante. Les montagnes fotment dans cette maffe fluide 8c pefante des cavites proportionne'es a leur poids ; e'eft ainfi que, fi Ton mele de l'eau dans un vafe rempli a moitie' de mercure, dans lequel on aura mis quelques pierres, le poids de ces pierres diminue a proportion de la quantite' d'eau, ainfi que les ca- vite') qu'elles formoient, & alors,cellcs qui e'toient dans le mercure deviennent plus petites : fi au contraire on fait e'vaporer l'eau, les pierres s'enfoncent plus avant dans le mercure. Cette fuppofition eft iinguliere, &c il eft certain que fi elle e'toit re'alife'e, on expliqueroit facilement les phtnomenes, qui, depuis fi long-tems, occupent les ob- fervateurs. — Quoi qu'il en loit, on ne peut pas conclure pofitivement , meme apres les prcuves rapporte'es pour 8c contre par M. Ferner. C'eft au terns 8c a l'experience a nous fervir de guides. Les preuves tire'es des anciens monumens , quoique fondees fur des fairs, ne por- tent pas avec elle le caractere de Fe'vidence; ainfi nous devons avouer de bonne foi , que nous ignorons les caules & les accidens qui ont donne' lieu a ces variations. Attcndons tous du terns. Les precautions que rAcademie de Stockholm a pnles pour conftater la hauteur du ni- veau de la mer, ferviront peut-etre avant la fin de ce llcele , a de- SUR L'HIST. NATURE LIE ET IES ARTS. 19 cider une queftion fi embrouille'e. II en eft des opinions diffe'rentes, comme de l'acier qui frappc la pierrc , c'eft a fon choc qu'on doit la lumiere qui nous e'claire. E S S A I D'unc nouvclk minfralogie, traduit du Sue'dois & de /'Allemmd , de M. Wcidman, par M. Dreux, fils , Apothiccire de F Hotel Dieu de Paris. — A Paris , 177! , chez DiDOT , jeune , Quai des Auguftins. JL'O CVRAGE que nous annon5ons , eft celui que M. Cronftedr avoir publie' , il y a quclques anne'es, en Sue'dois. M. Weidman le tra- duifit en Allemand ; & c'eft fur la traduction allemande , que M. Dreux vient de le donncr au Public. L'Auteur, dans la Preface, donne la clef de fa me'rhode. Il n'a point e'gard a la forme exte'rieure des corps, mais a leur nature, qu'il examine par des moyens chymiques, qui, d'ailleurs femble appartenir au regne mineral. L'Aureur rejette de fon fyfteme mineralogique , plufieurs fubftances qu'il ne croit pas faites pour y enrrer -, relies font toutes les petrifications, les mine'raux qui ont (ubi quelquc alte'ration confide'rable , & les picrres de roche. Void comme il s'exprime au fujet de ces dernieres. « Faire entrer les picrres de roche dans un lyfteme particulier, ce « feroit audi pen raifonner , que il on vouloir, en boranique, ranger » la glu & aurrcs vege'raux femblablcs, apres les genres & efpices jj d'arbres ou de plantes , du racmc des murailles & des endroits oii » on les trouve, pour en faire des genres & desclafiesa part «. Cetre comparaifon n'eft pas heureufe. M. \V. a auffi reftrcinr la fignification de certains mots-, rel eft celui de Schifte, qui .Ignifie en general unc pierre feuilletee, & qu'on donnoit a des matieres tres - diffe'rentes , comme a du Quart{, a de la Pierre a chaux , a de VArdoife. Cette me'thode, quoique longue , difficile & tres-difpendieufe , a paru pre- ferable a toutes les autres , parce qu'elle eft plus flirt, & que fi elle n'eft pas audi commode pour l'arrangemcnt d'une collection , elle devient tres-utile pour l'avancement de la Ciience. II eft certain que cette maniere de voir produit de grands avantages. « Le regne mineral contient tous les corps qui ont cxifte fous la » fuperficie de notre clobe , foit des la premiere cre'ation , foitqu'ils » aient e'te forme's depuis , lefquels fe competent journellemcnt de » leurs principcs, & naifTcnt fans femences, fans vie, fans circulation » de fluides quelconques >-. L'Auteur divife les mine'raux en quatre claffes, i°. Terres, i" . Bitumes , j°. Sets, 40. Mitaux. Juillet i 7 7 i , Tome I. V 30 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , PREMIERE C L A S S E. PREMIERE Division. Terre calcairc pure &c pulve'rulentc , blanche , rouge , jaune. Tare calcaire folide &c friable ; Craie. Terre calcaire dure ; Pierre a chaux blanche , jaune , blanchatre , coulcur de chair, brune-rougeatre, grile , de diveries couleurs, noire. Pierre a chaux grenue a. gros gains, jaune, rougeatre , blanche; a petits grains, blanche, demi-tranfparente ; en grains fubtils, blanche &C noire, blanche 8c verte. Pierre a chaux ecailleufe , a groffes ecailles, blanches, jaune, rou- geatre, a pecires e'cailles. Spath calcaire rhomboidal, tranfparent, opaque, noir, blanc; jaune; Spath cjui repre'fente les objets limples , Spath qui double les objets, 'Spath calcaire cryftaliie'. Stalactites calcaires. Terre calcaire unie a l'acide vitriolique , Gypfe pe'trifie' , Albdtre blanc, tranfparent & opaque. Gypfe en forme d' e'cailles, Pierre a pldtre , Gypfe fibreux, Gypfe en forme de Spath, Gypfe diaphane, fans couleur jaunatre, demi- tranfparent ; Spath de Boulogne, Gypfe cryftalife, Stalactites gyp- feufes. Terre calcaire unie a l'acide du fel marin. Terre calcaire unie au principe inflammable. Pierre de pore folide ; en parties impalpables , noire, grenue, en forme d'ecailles, Sec. Terre calcaire unie a l'acide vitriolique & au Phlogiftique , Pierre he'patique. Cette derniere re'pand, lorfqu'on la touche , remarque tres- bien notre Auteur, une odcur de foie de fourfre , &C he* fait pas effer- vefccnfe avec les acides ; elle tient le milieu entre la Pierre de pore &c le Gypfe. Terre calcaire melee d'argile, Marne friable, demi-pe'trifie'e; Marne d'Ardoife perrifie'e, ou Tuf. Terre calcaire unie a la terre me'tallique du fer , blanche , pulve'- rulente, obfeure ; petrifie'e, rouge, griie, brune, blanche. Terre calcaire unie au cuivre , pulve'rulente ou friable, bleu de montagne ; petrifie'e , pure, ou Pierre dArminie. Terre gypfiufe unie a la chaux du cuivre , Malachite d'Ordal. M. Cronftedt n'affure pas que toute la Malachite foit compoie'e de meme. Terre calcaire unie a la chaux de plomb, tendre & friable; petri- fie'e en forme d'ecailles , jaunatre, c e noi- se;;? L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS Seconds Division. Terres filiceufes. Cette tcrre eft affez dure pour que Ion puifle en tirer du feu avec l'acier, lorfqu'elle eft pure Elle n entre en fufion , ni par le fecours des fourncaux a venr, ' ni par eclui des foufflets. Apres la calcination, elie ne combe point enpoudre, elle ne fait point d'cffcrvefcencc avec les acides, & die ie fond avec les alkalis. Le Diamant non colore'. Le Diamant rouge, ou Rubis d'un beau rouge , Rubis fpinci dun rouge fence* j Rubis balai ; Rubicdlc , oaVromfi • i-e hap/iir. ° hrU? T"PA*E- Ia ?Wf jaune-pale , plus Jaime, la Tovafe de Mk couleur ,aune, ou 7o/ bla»c> «*- violet, grenu en form Qrcart? cryftalife' Cryfial de roche opaque, blanc, ou couleur d It rouge, ou couleur de cornaline noil , ZJ^W, C' ' Vual?£^ nf"meV--. violet, ^Ajr/, fan's couleur rouV * P ' VCC C fer' aV£C k Cuivre' en for™ ^ chaus ^J/ziolr' pierre * fufi1' Pierre de corne- Opal, blancht, bigarrce, couleur de laic, bleuatre, ail de ck.r Goraff/i« rouge ou Corii«7ff« orientale , brune , iaunatre. ^SSS^t ^ C0UCheS blanCheS & r°US«' ^ -ec des Agathe de couleurs mele'es. Caillou d'Egypte. cran^atc"nrdinakC> °U ***? *'&*' <** -Titre, iau„e, demi- CaiUou de roche ou Vetro-filex. II eft compofe' de parties plus ou Pierres de colonnes , contenant du fer, fans figure de'termine'e , verd. Bafaltes en forme de fpath , d'une belle couleur verte , verd-pale , blanc. Bafaltes rayonne' a fibres paralleles , noir, verd, blanc. Bafaltes cryftalife, noir, verd-obfeur, verd-clair , brun-rougeatre, QUATRIEME DIVISION. Terres argillenfes. Elles durciflc'nt au feu, &c leurs parties font tres-fines. Quelques efpeces fe ramolliffent dans l'eau. Terre de porcelaine ou argille apyre pure, qui ne s'amollit point dans l'eau, plus lie'e 8c plus maigre, en forme de farine maigre &C blanche-, argille mele'e de phlcgiftique, & d'un peu de matieres he'te'- rogtnes, blanche 8c grafle, ou terre a pipe, couleur de perles , grife- bleuatre, gnfe, noire, violette. Argille pe'trifie'e, denfe 8c molle. Craie de Brianfon. Argille denfe 8c folide , ou Steatite blanche 8c verte-claire , verte- obfeure , jaune. Argille folide en parties vifiblcs , ou pierre ferpentine , verte-obfeute, ou pierre nephre'tique , verte-claire ; ferpentine a petits grains, & de diffe'rentes couleurs. Argille melee avec le fer, rouge, pe'trifie'e, ou Craie de Briancon, qui contient dufer; Steatite, conrenant du fer, noire , rouge. Mame pierreufe & groffiere . grife , jausie , blanchatre ; Marne pier- reufe fine, brune-jaunatre. Bol rouge, fin, groffier, plus dur, la craie rouge. Bol pe'trifie, brun, rougeatre , gris. Bel en parries e'cailleufes , ou bleu de corne'e , noire, verdutrc. Tripoli. Argille ordinaire, rouge , rouge-pale, grife, blanche, bleue, di- htable. Argille SUR VHIST. MATURE LIE ET LES ARTS. 53 Argille petrifie'e , grife ou ardoife argilleufe; rouge 5 unie a la chaux ou ardoife marneule. Cinquieme Division. Les Glimmer on Mica. lis font com- pofe's d'e'cailles pliantes, minces & brillances, qui fe briient dans le feu. he Mica pur, en lames paralleles, ou verre de Mofcovie , en petites lames ou argent de chat , en petits epis, en lames entortille'es. Glimener colore', contenant du fer, en lames paralleles, de couleur brune , verdatre , verd-obfcur, entortille', verd-clair, en forme d'cpis; noir , en forme de drufe a ecailles concentrees 8c pcrpendiculaires , 8c en ecailles hexagones horifontales. SlXlEME DIVISION. Fluors mineraux. Ils reflemblentau Spath, & ils donnenr , a une douce chaleur , un eclat phofphorique , qu'il? pcrdent par l'ignirion. Fluor pe'trifie , folide 8c de figure inde'terminee. Fluor fpathique , ou Spath vitreux , blanc, bleu, rouge; en forme cubique, jaune- violet ; en forme fphe'rique polygone, blanc, bleu; en forme octogone. Septieme Division. Les Afbeftes. Lorfqu'ils font purs, ils font abfolument re'fra&aires ; en gros morceaux, ils font flexibles ; leurs furfaces font mattes 8c ine'gales ; ils devicnnent plus caftans art feu; ils ne donnent point d'e'tincetles, lorlqu'on les frappe avec l'acier; ils font inattaquables par les acides. 11 faut comprendre enfcmble YAf- befte 8c Y Amiante. Ajbefte compofe de lames minces , molles 8c paralleles , ou chair 4c montagne , blanche , brune. Ajbefie a lames entortille'es, ou liege dc montagne, blanc, brun, jau- natre. Ajbefte en fibres fines Sc pliantes, ou filajfe de montagne, verte, blanche, ferrugineufe Cvcaflante, verdatre. Ajbefte a fibres rompues & relie'es , ferrugineux , verd-clair. Huitiemh Division. Zeolite. Elle eft plus dure que les Fluors, &. ne donne pourtant pas d'ctincelles, lorfqu'on la frappe avec l'acier. Elle entre en fufion d'elle-meme en fe bourfouftlant, 8c donne un verre blanc 8c e'cumeux. L'acidc vitriolique, verfe fur la Zeolite en poudre, la rend dure, 8c la met en mafte. Zeolite pure 8c blanche, mele'e dc fer & d'argent, bleue. Lapit Lazuli. ZSolitc en forme de Spath , rouge-clair, ou jaune-roux. Zeolite cryftallife'e en cryftaux ronds , pyramidaux & concentre's, jaunes , blancs ; en cryftaux folitaires , prifmatiques , tronque's , blancs ; en cryftaux capillaires, blancs. Neuvieme Division. Les Magnifies ou Manganefe. Elle* Jviluet i 77 1 , Tome I, £ 34 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , avoient e'te' mifes au nombrc des mines de fer; mais M. Cronftedt a appris par fa propre experience qu'on n'en tire aucune fubftance me- tallique , ou tout au plus trois pour cent, de fer, Sc quelquefois un pen d'etain. II penfe que le refte de la maffe eft compote d'une fub- ftance particuliere. Magnejie tendre & friable , noire. Magnejie pe'trifie'e , pure & compofe'e de parties rondes &: concretes , blanche, rouge. Magnejie unie , avec un peu de fer ; noire metallique & brillante , iolide , denfe commc l'acier , rayonne'e en forme de drufes. Magnejie unie , avee un peu de fer & d'e'tain , avec de gros rayons, couleur de fer. S E C O N D E C L A S S E. Les Sels. « Ainfi fe nomment les corps mine'raux qui fe dif- » folvent dans l'eau , en donnant pour lors une faveur, & qui, me- » langes les uns avec les autres , peuvent fe figurer en de nouveaux « corps folides , anguleux Sc a plufieurs faces, quand la quantite d'eau j> qui e'toit ne'eeffaire pour la diffolution , a e'te diminue'e par l'eva- .-> poration .;. On les divife en Sels acides & en Sels alkalis. Premiere Division. Les Sels acides. lis ont une faveur aigre , font corrofifs, font effervefcence avec les alkalis & les terres; ils colorent en rouge les fucs bleus des vegetaux. Acide vitriolique , pur., Acide vitriolique , fature' par les me'teaux; Vitriols , martial ou verd , de cuivre ou bleu; de \inc ou blanc. Vitriol double, martial & cuivreux, compofe de fer & de cuivre, de zinc & de fer , de zinc &c de cuivre , de nickel & de fer. Acide vitriolique , combine avec les terres calcaires, leGypJ'e; avec la terre argilleufe, ies Aluns; avec peu d'argille, VAlun de plume; avec plus d'argille, Mine d'Alun blanche-, avec beaucoup d'argille mar- tiale, contenant aufli du phlogiftique , Mine d'Alun ordinaire : comme clle eft pe'trifie'e, on li nomine Ardoife alumineufe. Acide vitriolique, combine' avec le phlogiftique, les foufres. Acide vitriolique , combine avec les iels alkalis , avec l'alkali mi- neral , fel de Glauber. Acide du fel. Acide du fel , melange avec des terres; avec la terre calcaire, fal- fache , fel Ammoniac fixe. Acide du fel, uni a des fels alkalis; avec l'alkali mine'ral, fel de montagne, gris, blanc, bleu, rouge} en cryftaux, oufelGcmme, fel matin , fel des fontaines. SUR L'HIST. NATZ7RELLE ET LES ARTS. 5 j Acide marin; avec un alkali volatil, fd Ammoniac. Acide marin ; avec le principc inflammable, fuccin. Acid: marin; avec les metaux, avec l'argent , mine cornie. Seconde Division. Sels lixiviels ou Alkalis mine'raux. Alkali du fel marin pur Alkali du fel marin, combine avec la terre calcairc des murailles, Aphronitre Alkali, avec les acides mine'raux, fclneutre$ avec l'acide du fel, fel commun; avec l'acide vitriolique , fel de Glauber. Borax ; e'eft un fel alkali , avec line terre virrefcible Sc Soluble dans l'eau : il fc gonfle au feu, & fe reduit en un verre qui peur fe dif- foudre dans l'eau. Alkali volatil; il fe trouve dans les argilles & dans les fublima- tions de la folfatare en Italic; on ne le trouve pas pur. Alkali volatil, avec l'acide de lei commun, fel Ammoniac natif. Alkali volatil, avec l'argille. TROISIEME C L A S S E. Bitumes. Les Bitumes fe laiffent difloudre dans les huiles, &z non dans l'eau ; ils brulent dans le feu. Ambregris, ambre jaune , fuccin opaque, brun, blanc , noiratre, tranfparent, fans couleur, jaune. Pitrole tres-fluide , ou naphte ; pitrole commun , pitrole tenace comme la poix , pitrole endurci , ou poix de montagns pur , ou af- phalte impur. Le Phlogiftique mineral , uni a l'acide vitriolique , foufre naturel tranfparent, de belle couleur jaune, opaque, blanc 8c gris. Soufre qui a diffous les me'taux , le fer; pyrite, jaune-pile ; denfc ou pierres des Incas , folide, grenue, criftalife'e. Pyrite couleur de foie, denfe, folide grenue. Soufre, avec l'e'tain & le fer, molybdene; en feuillets brillans de couleur de la mine de plomb , folide 8c matte quand on la calTe ; en pctites ccailles & grenue. Soufre, avec le fer &c le cuivre, pyrite cuivreufe Soufre , avec le fer 8c le plomp , galene. Soufre, avec le fer 8c le zinc, la blende avec arfenic; cobolt ; bifmuth; Nickel; or. Soufre, avec l'argent; cuivre; plomb; bifmuth ; mercurej arfenic Phlogiftique uni aux terres •, avec la terre calcaire pure , pierre de pore; avec la terre calcaire & l'acide vitriolique, pierre he'patique. Phlogiftique, avec la terre argilleufc, iSc un peu d'acide vitriolique, charbon de terre denfe. JuniET 1 7 7 1 j Tome I. B? \6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Phlogiftique, avec la terre argilleufe furabondante, ardoife com~ bufiible. Phlogiftique mineral uni aux terres me'talliques, mine charbonneufe? mine combuftible de cuivre ; de fer combuftible &c fine ; de fer , vor latil, folide & tendre. QU A T R I E M E C L A S S E. ~M.iT AV x. « Ce font les corps mineraux qui , eu e'gard » a leur conftitution corporelle , out le plus de pelanteur parmi » tous les corps connus. Une partie d'entre eux eft malle'able ou 33 extenfible fous le marteau ; ils peuvent fe de'compofer en partie , 33 & reprendre enfuite leur premiere forme par Paddition de la ma- 33 tiere inflammable qu'ils avoient perdue dans la de'compofition «. On les divife en malleables ou me'taux entiers , &c en caffants ou demi- me'taux. PREMIERE DrviSION. Me'taux entiers. Or natif en paillettes ou petites lames minces; Or folide ou en pointes & angles folides, en forme de drufes, ou fous forme cryftaline; Or lave', qu'on retire du fable. Or mine'ralife' par le foufre; par le fer, pyrite d'or; par le mercure, cinabre d'or; par le zinc, blende de Schemnitz. Argent natif ou pur •, en petites lames ; en branches & filets grof- fiers; en filets fins, argent capillaire; en forme d'arbes ; en cryftaux. Argent mine'ralife par le foufre & l'arfenic ; mine d 'argent rouge , en lames folides , en lames caffantes Sc e'cailleufes. Argent mine'ralife par l'arfenic fulphure' & par le cuivre , mine d'ar~ gent blanche & grife , de'tache'e on de'eompofee; noir d' argent ou mine de fuie. Argent mine'ralife par l'arfenic fulphure & le fer : e'eft une pyrite arfenicale, qui contient de l'argent, Argent mine'ralife' par Pantimoine fulphure. Argent mine'ralife par le cuivre & Pantimoine fulphure'. Argent mine'ralife par le zinc fulphure, blende noire ; folide & a petites e'cailles. Argent avec le plomb fulphure , galene , avec le plomb & Panti- moine, mine d' argent molle ; avec le fer fulphure', pyrite d' argent. Argent mineralife' par Pacide du fel, mine d'argent cornie, platine del pinto. Etain en forme de chaux , un peu melange de chaux d'arfenic , en gros en petits cryftaux. Etain mele avec la chaux de fer, avec la magnefie, avec le foufre & le fer. SUR VHIST. NATURELLF^ ET LES ARTS. ;7 Plomb en forme de chaux, pur, pe'trifie'; femblable a des filets blancs, dc figure prifmatique , verd-jaunarre. Plomb mele avcc la chaux d'arfenic [path de plomb arfenical. Plomb mineralife par le foufre feul , gahne; folide comme l'acier; rayonne'; cubique. Plomb avec l'argent fulphure, folide comme l'acier, ou en petites c'cailles, en pctits grains, en petits cubes 8c en gros cubes. Plomb avec le fer fulphure' 8c l'argent , en petits grains , ou en cubes de diffe'rcntes groffeurs. Plomb avec l'antimoine fulphure & l'argent, en petits rayons, ou en gros rayons. Cuivre natif, folide, en petits grains. Cuivre fous la forme de chaux; de'tache'; bleu; bleu de montagne , verd, verd de montagne:, rouge, pe'trifie'; mine kepatique cuivreufe , rouge. Cuivre fous la forme de chaux , me'lange' ; avec la chaux , bleu de montagne ; avec le fer , mine de cuivre dicompofee ; avec le gypfe , verd malachite cTOrdal; avec le quartz. Cuivre mineralife' par le foufre feul ; mine de cuivre grife ou vitreufe; folide; fans texture determine'e; en petits cubes. Cuivre mineralife par le fer fulphure', pyrite de cuivre; mine de cuivre cendree ; mine demi-verte , jaunatre , grife , noirarre ; Pyrite grife des Allemands; jaune, rougeatre ou brune, couleur defoie, avec des marques bleues; mine de cuivre azure'e,de cuivre verte, jaunatre, folide & brillante ; folide comme du fer ; en gros grains ; pyrite de cuivre cryftallife'e en cryftaux o&ogones; pyrite de cuivre d'un jaune- pale ; pyrite de couleur de foie ; mine kepatique. Cuivre mineralife par l'arfenic fulphure , & de fer ; mine de cuivre blanche. Cuivre mine'ralife' par l'acide vitriolique ; vitriol bleu. Cuivre mineralife par la fubftance inflammable; mine de cuivre com- bujlible. Fer en forme de chaux , detache' 8c friable , pulverulent ; lave, mine limoneufe de differentes configurations. Fer en forme de chaux perrifie', himatite ou [anguine ; elle a une couleur grife 8c bleuatre ; elle n'eft point attirable par l'aimant; elle eft folide, cubique 8c brillante dans fa caffurc. On en trouve en forme d'e'pis, d'e'cailles, de drufes, cryftallife. Les cryftaux font octogones ou polygones. Sanguine brune, noirarre; himatite noire, folide, rayonne'e, en forme de drufes ou cryftallife'e. Hematite rouge , folide , ou e'caillcufe , en forme de drufes. Hematite jaune , folide ou fibreufe. Juillet I 7 7 i , Tome L }S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Mine de fer calci-forme, melee a des corps mangers avec la terre calcaire ; Mine blanche de fer , avec la terre filiceufe ; finople , avec la tcrre des grenats-, grenats , avec la terre argilleufe; bol, avec la terre du Glimmer , avec la Magnefie. Fer uni avec l'alkali 8c le principe inflammable , bleu de PruJJe na- ture!. Fer uni a une tcrre inconnue , qui fe durcit dans l'eau, pou\olane. Fer en chaux uni a une autre fubftance inconnue, improprement nominee cryfiaux d'e'tain blanc. On trouve ces morccaux ou rougeatre , ou couleur de chair, en forme de fpath, avec une lurface grife, blan- che, ou de couleur de perlc-. Fer diffous & mine'ralife par le foufre feul , 8c tres-abondant , py- rite de fer ; avec moins de foufre , mine de fer noire. Aline de fer magne'tique-, aimant folide, en pctits & en gros grains, en lames groflieres. Mine de fer, brute, qui eft attirable par l'aimant, 8c donne une poudre noire. Elle eft folide comme l'acier •, en petits & en gros grains. Mine de fer brute, qui eft attirable a l'aimant, £c donne une poudre rouge. Elle eft folide; en petits gtains. Emeril, en gros cubes ; Mine fpeculaire , en grands feuillets •, glimmer martial. Fer mine'ralife' par l'arfenic ; par l'arfenic fulphure'; pyrite d'arfenic jaune ; par l'acide vitriolique , vitriol dc fer ■, par une matiere inflam- mable , mine de fer combuftible •, par d'autres me'taux fulphure's , 8c meles d'arfenic. DEUXIEME DIVISION. Dimi-me'taux . lis font au nombre de fept. Mercure natif •, mercurc mineralife' par le foufre , cinare naturel; detache', petrifie, folide, rayonne', en petits cubes ou feuillete' , cryf- talife. Mercure mine'ralife par le foufre & le cuivre enfemble : « II eft » gris , noiratre , vitreux quand on le cafle , 8c fragile. II de'cre'pite » tres-fort dans le feu, 8c montre qu'il contient du cuivre, par fa >» couleur rouge ordinaire dans le verre de Borax. Apres que le Mer- ); cure & le foufre s'en font alle's en fume'e , fi on pouffe ce merac s> verre de Borax plus fort , il devient verd 8c tranfparent ». Bifmuth natif. Bifmutk (bus la forme de chaux , pulverulent & friable. Bifmuth mineralife par le foufre, en gros feuillets ou en petites ccailles. Bifmuth mine'ralife par lc fer fulfure , en grofles e'cailles de figure conique. Zinc , en forme de chaux, pur, pe'trifie, folide, en forme de drufe , melange' avec la terre martiale , a demi-pe'trifie'e , cadmie ou calamine de differentes couleurs •, avec argille martiale ou bol ; avec l'ochre de plomb 8c le fer. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 Zinc mineralife avec le fer fulphure , en forme mt'tallique ; mine de Zinc ; en forme de chaux ; blende , antirnoine natif. Antimoine mineralife par le foufre, avec de gros rayons, de petits rayons, lolide, cryftalife. Antimoine mineralife' par le foufre 8c l'arfenic ; mine d'antimoine rouge , en petirs filers ; en forme d'epis. Antimoine mineralife' par l'argent fulphure', mine en plume ; par I'argent fulphure', le cuivre 8c l'arfenic, par le plomb fulphure'. Arfenic natif; folide , en forme de feuillcts , cobolt teflaci; avec des e'cailles •, friable & poreux. Arfenic fous la forme de chaux, pur 8c fans melange; pe'trifie. Arfenic melc' avec le foufre ; endurci ; jaune , orpiment, rouge , orpi- ment natif. Arfenic mele a la chaux de zinc , dans les cryjiaux d'etain ; avec le foufre 8c l'argent , dans la mine d'argent rouge ; avec la chaux de plomb , dans le fpath de plomb ; avec la chaux de cobolt , dans les fleurs de cobolt. Arfenic mineralife par le foufre 8c le fer, pyrite d'orpiment; par le fimple fer, folide, en gros grains, cryftalife en figure odfogone ou prif marique , arfenic mineralife par le cobolt , par l'argent , par le cuivre, par l'antimoine. Cobolt. fl le trouve dans la terre prefque toufours uni a du fer, en forme de chaux , avec le fer fans arfenic ; friable, ou chaux de co- bolt noire ; pe'trifie , cobolt en forme de fcorie. Cobolt avec la chaux d'arfenic , fluors de cobolt; friable, pe'trifie. Cobolt mineralife avec l'arfenic & lc fer, en forme mt'tallique 5 fo- lide, en petits & gros grains, cryftalife en figure d'arbres , de poly- genes a facettes brillantes , 8c en parries rondes rayonnees. Cobolt avec le fer lulphure, cryftalife' en figure polygone ; folide quand on le cafTe ; en gros grains. Cobolt avec l'arfenic , le foufre &c le fer •, en gros grains ; cryftalife en figure polygone, avec des facettes brillantes. Cobolt avec le nickel uni an foufre, a l'arfenic , 8c au fer. Nickel. « Le Nickel eft un demi-me'tal , r.ouvellement de'eouvert, » & que fon inventeur, M. Cronftedt, a decrit dans les Me'moires » de PAcade'mie des Sciences de Suede en 1751 &: I754. On lui " attribuc les propriete's (uivantes. II eft folide 8c brillant , quand on =' le caffc, 8c paflablcment fixe au feu; mais combine' avec le foufre » 8c l'arfenic , J.ont cette mine furabondc , il eft fi volatil x que pen- » dant le grillage, il fe cryftalife en ramification, fi on le laiffe en » repos. II le change en une chaux verte par la calcination. Cette » ch.mx donne un vcrre brun , rougeitrc , tranfparent , ou de cou- » leur d'hyacinthe , mais il eft auffi difficile a mettre en fufion. II fe Juillet 1771, Tome I. 49 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, j) diflbut par l'eau-fbrte > par l'eau-re'gale Sc 1'efprit-de-fel , quoiqu'uri « peu plus difficilement , par l'acide du vitriol. II colore en verd obfeur i> toures fes diflolutions. Le vitriol qui en re'fulte, prend la meme » couleur, & le colcothar dc ce vitriol devient, par le grillage, comme 3) les precipite's des diffolutions , verd-clair. L'efprit de fel ammoniac » diflbut les pre'eipite's en couleur bleue; mais quand on en fair eva- j> porer la diflolution , & qu'on re'duit le refidu, on n'obtient point 3> dc cuivre, mais un re'gufe de Nickel. Ce demi-me'tal retient long- » terns fes parties inflammables dans le feu , & fe laiflc aile'ment re'- )> duire avec une tres-petite portion de ces memes parties. II demandc « pourtant la chaleur d'incandefcence , avant d'entrer en full on ; ce 3> qui re'uflit encore fort bien , Sc prelqu'avec la meme vitefle que la »> fu/ion du cuivre ou dc l'or ; confequemment , il entrc en fullon plus «> aift'ment que le fer ». On trouve le nickel mele avec de la chaux de fer , & il eft verd. Nickel minerajife par le fer Sc le cobolt fulphure's & arfenicalife's j il a une couleur jaune-rougeatre ; il eft folide, ou en petits grains, on en forme d'e'cailles. Nickel uni a l'acide du vitriol ; il a une belle couleur verte , & il doit fe lixiver de l'ochre du nickel , ou du kupfer nickel de'eompofe'. SUPPLEMENT. Premiere Division Pierres de roche. Elles le divifent en deux efpeces, en pierres de roche compofees , qui font celles dont les parties font tellement unies, qu'on n'appercoit point la matiere qui les aflemble ; Sc en pierres de roche lie'es enfemble , dont la juxta-poii- tion eft moins parfaite, & laiflc voir les matieres qui leur fervent dc lien. Les pierres de roche compofees, comprennent Vophite, pierre limo- neufe, en forme d'e'cailles, ave des drufes de ferpentine; le geflellflein , en parties fe'parees, en parties enveloppe'es ; le murkfiein, avec des orenats apparens; la pierre a aiguifer, de diffe'rentes couleurs , Sc de dif- fe'rentes textures; les grais a bdtir , \tporphyre , le trapp , de diffe- rentes couleurs ; le mandeljlein, jafpe contenant du fer, qui a des drufes de forme elliptique de fpath & de ferpentine ; pierre verte ; granit, vulgairement appelle' pierre de roche, compofe de grains dif- fe'rens pour la grofleur. Les pierres de roche collees enfemble en gros fragmens de pierre, comprenent la breche calcaire , lumachelle , breche de jafpe , pud- ding , breche de diver fes pierres , pierres fablonneufes. Pierres de roche, compofe'es de fragmens de pierre Sc de mine; mines fablonneufes , en gros Sc petits morceaux ; verd de cuivre, avec les cailloux SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 41 cailloux ; galeae , avec la chaux ; les drufes d'ardoife & les coquillages ; galeae, avec le fable de quartz ; verd de montagae , avec le fable; fieurs de cobolt , avec le fable; ochre de fer , avec le fable. Seconds Division. Chaagemeas miniraux , petrifications. Transformation dcs terres dans la forme des ve'ge'taux , dans la forme des animaux ; coquillages diflous & de'compofe's, pe'trifie's dans la forme animale, vege'tale, change's en fpath. Corps change's en cailloux; corps Grangers , change's en argille , ou pene'tre's par des fels miniraux ; animaux ve'ge'taux, change's par le vi- triol martial. Corps Strangers , pe'ne'tre's par des matieres inflammables , par le charbon de terre, par I'afphalte , par le foil f re qui a diflous lc fer, ou par la pyrite. Me'taux en forme de corps e'trangers , argent recouvrant des parties animales; cuivre dans des parties animates, turquoife ; pyrite de cuivre dans des parties animales ; fer dans des corps etrangers ; pyrite de fer qui a pris la figure des corps e'trangers , ou qui s'y trouve melee. Corps e'trangers de'compofe's, terreau , tourbe , terre -animale , terre limine ufe , terre noire. Troisieme Division. Scories animales. Agathe d'Jflande, pierre meuliere du Rhin ; pierre ponce ; fcories perlc'es ; fable ou cindre de fcories. Le fyfteme que nous venous d'expofer, a un avantage re'el fur tous ceux qu'on a donne's jufqu'a ce jour ; parce que l'experience y fere toujours de guide, 8c que les connoiffances qu'elle fournit a l'Ob- fervateur & au Chymifte, font siires, cv ne peuvent jamais varier. Une collection de Mine'ralogie, ainfi difpofe'e , feroit certainemenr bien plus inre'reffante & bien plus inftruiftive , que celles de la plupart des Cabinets d"Hiftoire naturelle, dont les poffeffeurs fe contentcnr fouvent d'une nomenclature froide & fte'rile, ou tout au plus de quel- ques notions fuperficielles. Nous convenons que la maniere de M. Cronftcdt eft peniblc , laborieufe, qu'elle fuppofe beaucoup de lu- mieres & de travail ; mais a quoi fert le plus beau & le plus riche morceau de Mine'ralogie , fi on ne le connoit que par le nom qui lui a e'te afligne, & fi l'on ignore abfolument les principes qui entrent dans fa formation ? On ne peut alors en fentir , ni la beaute' , ni le prix , Sc ainfi il n'a plus qu'un merite de fantaifie. M. Cronftedt, a qui nous rendons toute la juftice qui lui eft due, eft le premier qui ait fait connoitre la Z/olite & le Nickel ; avant lui , on avoit une ide'e fort imparfaite du fpath e'tincelant , ou feld (path : rimpartialite, dont nous faifons profelfion, nous force audi de ■dire que fon ouvrage n'eft pas fans defaut , ce dont il convient lui- meme dans fa Preface , 011 il s'exprime ainfi. « J'ai cache mon nom Juillet i 7 7 I , Tome I. F 42. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, a par des raifons particulieres, afin de corriger cet elTai , quand, par » ma propre experience, ou par les obfervations des amres , je ferai » convaincu de la fauffete' de mes principes acftuels; car je ne me Matte » pas que mon ouvrage me'rite le jugement des gens de Part, & le titre » d'effai me fan vera du blame ». II e'toit prclque impoflible qu'un premier ouvrage dans ce genre rut parfait ; audi, les moyens qu'il employe pour faire connoitre certaines 1 ubftanccs , lont-ils , la plupart du terns, infuffifans pour en de'ter- miner les caracteres. Plufieurs de fes expediences auroient befoin d'etre re'pe'te'es; d'atitres font en trop petit nombre, pourqu'on puiffe en con- clure comme il le fait. « Cela s'appelle ( pour me lervir de ies termes ) , » poufler fcs connoiflances plus vite qu'on ne peut y parvenir par fes " obfervations & fcs recherches». D'ailleurs , dans tout cet effai de Mine'ralogie, il regne dans les mots, & meme dans les chofes , une obfcurite, malhcureufement trop commune aux ouvrages de ce genre, mais qui paroit plus multiplie'e dans celui-ci. Nous nous contenterons d'en donner les deux exemples fuivans. L'un eft tire de la page in, ou,. en parlant des Bafaltes cryftalifes, l'Auteur, Sc apres lui fon Tra- ducteur, s'expriment ainfi. " Bafaltes cryftalife's , ( il en donne les ef- « peces ) rougeatres ; de cette couleur font les Fonts Baptifmaux de » Baflc. Cette pierre eft compofee de deux cryftaux de bafaltes , a fix « pans, qui font croiles l'un fur l'autre ; c'eft pourquoi elle reffemble m a une croix, & elle fe porte a caufe de cela en amulette chez les j) Catholiques, 3c fe nomine en latin Lapis crucifer , pierre de croix ». On ne fait fi l'Auteur & le Tradudeur ont voulu dire que les Catho- liques portent en amulette une pierre aufll grofle que doit l'etre celle des Fonts Baptifmaux de Balle, ou que les Fonts Baptifmaux font faits d'une pierre qui n'exccde guere la grandeur d'une piece de douze fols , comme eft le Lapis crucifer, qu'on porte en amulette. L'autre exemple fe trouve a la page 146, ou l'Auteur, en parlant des Spaths fluors , que Ton diftingue des Spaths calcaires , parce qu'ils ne font pas comme eux effervekence avec les acides, s'exprime ainfi. « Leur durete' furpafl'e celle du Spath calcaire •, car ils ne donnent » point d'e'tincelles fur Pacier. Avec les acides, ils font effervefcence, » ou avant ou apres la chaleur , quoique dans ce dernier cas , on y » ajoute une matiere inflammable , ou de Palkaii » . Inde'pendamment de l'obfcurite des exprelfions , le fond des chofes eft abfolument in- comprthenlible : en effet , fi le Spath fluor fait effervefcence avec les acides , avant la chaleur , il eft dair qu'alors c'eft un Spath calcaire ; s'il fait effervefcence apres la chaleur , il a cela de commun avec les autres matieres du meme ordre , qui font compofe'es d'acide vitriolique Sc de craie. Toutes ces fubftances fe convertiffenr en platre dans le feu , oii fouvent elles perdent une portion de leur acide ; & la craic SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 4j qui fc trouve alors a nud , dcvient en cut de faire effervefcence. A l'e- gard de la matiere inflammable ou de l'alkali ajoute, nous avouons /incerement n'y rien comprendre , & nous fommes perfuade's qu'unc infinite' de tres-habiles Chymiites n'y entendront pas davantage. Quoi qu'il en foit, M. Cronftedt a ouvert une carriere qui me'rite d'etre parcourue, & dans laquclle on peut marcher a grands pas. On doit aulfi favoir gre' a M. Drcux, d'avoir fait connoitre un ouvrage d'une telle importance. L E T T R E De M. Strange , a M. MATY , traiuite de VAnglois , furl'origine d'un Papier naturel, trouve' aux environs de la Viik de Cortone , en Tofcane. Monsieur, Comme la Lettre que j'ai adreiTe'e a M. Coltellini , Secre'taire de 1'Academie de Botanique de Cortone , fur l'origine d'un Papier na- turel, trouve' dans le voifinage de cette Villc, & que vous avez eu la bonte de presenter en mon nom a la Socie'te royale, etoit e'crite dans une langue etrangere, & ttes-peu connue ; je crois devoir vous en envoyer l'extrait fuivant , avec lcs remarques que j'ai faites depuis qu'elle a e'te publie'e. En A out 1763 , quelques terreins bas, de'pendans d'une Ferme fitue'e a quatre mille, & au fud-oueft de Cortone, aptes avoir e'te' inonde's , fe trouverent couverts d'une fubftance tres-femblable a une belle ef- pece de Papier brun. M. Coltellini publia, dans le mois de Septcmbre fuivant, une relation de ce fait, dans une Lettre adreflee a M. Lami, Profcffeur de The'ologie, a Florence. Cette relation furprit lcs Naturaliftcs d'ltalie, & excita leur curio- fite; elle donna lieu a diffc'rentes conjectures. L'opinion la plus gene- rate attribuoit la formation de ce Papier a 1'aggrege' fortuit des fibres de differentes efpeces de plantes Filamenteufes , que les eaux avoicnt reunies & laifTc'es fur la furface du terrein , en fe retirant. Cette fup- pofition parut affez plaufible, puifque les plantes Filamenteufes feules pourroient produire une pareille membrane : ces plantes croiffcnt ordi- nairement (ans culture dans des terreins bas &c matecageux. Mais comme je favois que dans les manufactures de papier des differentes conrrcVs , on varie les degres 8c les me'thodes de mace'ration , felon les qualites- Juillzt I 7 7 I , Tome I. F 1 44 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , diverfes des fibres de differentes plantes ; il me parut tres-difficile de concevoir qu'un papier, d'une texture auill delicate, & audi unie que celui de Cortone, dut fon origine a une caufe fi complique'e & fi eloignee. Pour lever tous les doutes fur ce fujet, & pour parvenir a des con- noiflances plus sures , je crus qu'il etoit ne'ceflaire d'cxaminer les fils de ce papier avec un bon microfcope. Je trouvai , conforme'ment a mes conjectures, qu'ils n'etoient formes que des fibresde l'efpece com- mune de conferva , fans le melange d'aucune autre plante. 11 n'y avoir Tien de plus facile , que de s'afliirer de l'identite du conferva , dont les fibres different par leur ftrudture particuliere de celles de toutes autres plantes terreftres : d'ailleurs, comme ces algues font folitaires dans leur erat naturel, elles n'e'prouvent, dans la preparation, d'autre doinmage que la perte du parenchyme qui les revet ; la ftructure des fibres refte toujours dans une parfaite inte'grite'. Il eft bicn vrai que je n'avois qu'une connoiflance fuperficielle du conferva , avant d'avoir fait la de'eouverte dont je viens de vous parler, parcc que les defcriptions qu'on en trouve dans les livres de bota- nique, ne nous donnent point d'idees e>:a&es de la ftrutfture de cette plante. Dillenius , [ Hift. Mufc. gen. i. ord. i . fp. 1.2.] dans la def- cription qu'il en fait, pre'tend que Plinc s'eft trompe', en lui fuppo- fant une e'paiffeur poreufe , & qu'elle n'a aucune cavite rcmarquable ; ce qui eft ablolument faux , puifquc les fibres du conferva , vues avec un bon microfcope, paroiffent etre e'videmment des tuyaux capillaires fe'pare's, par des cloiions paralleles, a des diftances e'gales. Pline, [Hift. Nat. lib. ij , ch. 8. J n'e'toit done pas dans l'erreur, en donnant au conferva une epaiffeur poreufe , puifque e'eft cette meme porofite' qui le diftingue des autres plantes. Les Botaniftes tirent gene'ralement leurs principaux caracteres de la figure exte'rieure des plantes •, on ne doit done pas etre furpris de l'inexadlitude des defcriptions qu'ils font de celles des plus petites ef- peces; fur-tout, lorfqu'ils ne'gligent l'ufage des loupes, fans lefquelles il eft impofllble d'en acque'rir une exafte & parfaite connoiflance. Cette omiflion a jette Linnaeus , & meme Dillenius dans de grandes erreurs. Le premier, dans la Preface de fon Hiftoria Mufcorum, avoue qu'il a cru ne devoir fe fervir que des verres ordinaires, pour ne pas donner aux plus petites plantes rapporte'es dans fes tables , une figure diffe'rente de celle qu'elles pre'lentent naturellement aux yeux; & il eft tres-evident que les verres dont il s'eft fervi , c'toient d'un effet bien mediocre, puiique , fans parler de beaucoup d'autres erreurs, il n'a pas pu s'afTurer fi la quatrieme & la cinquieme efpece de conferva , a, ou n'a pas de ramifications, quoique cette diftindlion re'elle forme une fuite iepare'e dans le premier ordre. Le caraitere ge'ne'rique que Lin- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 45 naeus donne a cetce plante , eft aflure'ment moins de'fccTrutux que celui de Dillenius , parce qu'il y remarque les tuberculcs que ce dernier a, omifes, & qu'il nomine capil/aireslcs fibres du conferva ; mais comme il ne dir pas expreffJment que ces fibres foient des tuyaux, Sc qu'il ne parle pas des cloifons diftribuees a egales diftances iur la longueur de la plante, je crains fort qu'il n'ait neglige de l'examiner avec une loupe convenable. Peut-etre audi a-t-il adoptc le terme de capillaire, 4'apres le Profeflcur Van-Roycn, qu'il cite. Je fuis d'autant plus poitc a le croire, que dans fes diviiions, & dans les caractercs ipe'eiriques qu'il donne a cctte algue, il eft tombe' dans les memes erreurs que Dillenius, qu'il ftiit, principalement dans la claftc de la Cryptogamit. En negligeant !'u(nge des loupes, les Botaniftcs n'ont pas pu acquerir une exaele connoiflance de la ftruifturc des plus petires efpeces de con- ferva ; on doir done s'attendre a. trouver rcmplies de fautes les def- criptions qu'ils font de ces plantes. Les e'preuves de papier que je vous envoie avec la copie de ma lettre, font : i°. Une epreuve de papier naturel de Cortone. 2°. Un papier artificiel , fait de la fubftance du papier narurel de Cortone, que je prouve etre le conferva commun ; mais comme la plante, par me'pri/e , n'a pas e'te' garde'e aflcz long-tems en macera- tion, le parenchyme qui devoir en etre fepare, & qui y eft refte' en partie, donne au papier une couleur verdarre, &- le rend forrcaffanr. 30. Un papier meilleur & plus fort, a ere' fait de la meme algue a Edimbourg par Sir Alexandre Dich , Baronet. Je me fouviens d'en avoir vu de la meme efpece, mais d'une qualite' infe'rieure, qui avoir etc travaille' a Paris par M. Guettard. 40. J'ai fait, avec l'e'corce de genet, un papier artificiel, apres avoir mis cctte e'eorce en mace'rarion dans de l'eau chaude, 8c l'avoir enfuite preparee a la maniere ordinaire. Je ne me rappelle pas qu'on ait jamais eftaye d'en faire de cette matiere, ni que le genet foit dans la lilfe des plantes filamenteufes , publiee par M. de la Lande. II faut convenir que ces matieres font moins d'ufage que de pure airiofite; mais comme dans le cours de mes recherches , elles ont donne occafion a des remarques fur la Phyn"que & ]a Botanique j'ai cru qu'elles ne paroitroient pas indiffe'rentes aux Savans qui com- polent la Societe Royale. Je louhaiterois beaucoup que ces cfTais en- courageaflent des perlonnes plus habiles Sc plus inftruites que moi a approfondir ces recherches, qui peuvenr conduire a tine exacte e^ entiere connoiflance d'un genre de plantes imparfaitement de'erites jufqu'a pre'ient, Sc peut-etre moins connues qu'aucune de celles de lit Cryptogamie. Je fuis , dec. Juillet I 77 I , Tome L 4,6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , En louant Ie zele de M. Strange pour le progres des arts, nous nous permettons de dire que fa de'couverte n'eft pas neuve ; cepen- dant, de pareils eftais ne font jamais en pure perte. M. Guettard avoit fait de femblables experiences fur le conferva , qui , d'apres ce que dit M. Strange, nous paroit etre le conferva bullofa de lin, ou en fran- cois , la queue de renard. S'il eiit lii l'art du Papetier , publie' par M. de la Lande , il y auroit vu que M. Guettard a traite', fans aucun iucces, la plante appelle'e algue des Vitriers , les corrallo'ides , & le conferva Plinii. Le papier fabrique' avec ces fubftances, n'a pas pu fe lier, il femble que les parties de ces plantes, au lieu d'etre fibreui'es filamenteufes &c heriflees , comme l'exige la formation du papier, loient parenchymateufes , Iifles, vefliculaires Sc arrondies. On a pre- ientc a PAcadcmie des Sciences de Paris, il y a bien des anne'es, une matiere cotoneufe , trouve'e aux environs de Metz , dans le fond d'un e'tang , Sc dont les habitans efpe'roient de grands avantages pour le commerce', mais il fe trouva que ce n'e'toit autre choie que le con- ferva , dont nous venons de parler. En continuant la lecture de l'art du Papetier, M. Strange auroit encore obferve que M. de la Lande, pour connoitre les differentes expe'riences fur les fubftances propres a etre re'duites en papier , ren- voye aux eftais fairs aEtampes, par M. Guettard , 8c dont il eft parle dans le Journal Economique , du mois d'Aoiit 1 7 5 1 , page 102. L E T T R E De M. Jean Moult , au Docleur Perceval , fur une nouvelk manure de preparer le Salep , traduite de I'Anglois. Monsieur, La preparation du falep que je vous pre'fentai, il y a quelque terns, vous parut devoir me'riter l'attention de la Socie'te' royale. Je vous en- voye aujourd'luii la me'thode de pre'parer les racines de Yorchis, com- mun pour en fiire du falep , parfakement femblable a celui qui nous vient de Tiuquie. L'avantage que le public en retirera , me de'dom- niagera amplement de la peine que j'ai prife pour y reuffir. Les racines dont j'ai fait ufage , font celles du fatirion male, ou orchis morn fo- liis maculatis. c. b. p parck. cynoforchis morio mas. Gerard. Orchis mafcula. Lin. fp. pi. On les nomme encore vulgairement tefticules de chien. J'ai fait e'galement diffe'rens eflais fur Yorchis palmata major SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 47 de Gerard. Il ne s'eft pas trouve' moins propre que le fatirion male , pour preparer le fakp. II faur cueillir la plnnte > lorfque fa tige commence a fleurir; alors, la bulbe eft dans route fa groffeur. Pour s'en convaincre , on n'a cju'a la comparer avcc la bulbe d'un orchis montc en graine , on trouvera que cettc derniere eft epuife'e par la fru&ification. Des que la nouvelle racine eft fe'paree de la tigc, on doit la laver dans l'eau, & avec une petite brofle enlever la peau fine qui la rccouvre. Cette operation fcra plus facile encore, fi l'on trempe la bulbe dans dc l'eau chaude, Sc qu'enfuite on la frotte avec un lingc un peu rude. On e'tend ces bulbes ainfi prc'pare'es fur un plateau de fer-blanc •, puis on les place dans un four qui doit etre an degre' de chaleur neceflaire pour cuire le pain. On les y laiflera 6 , 8 ou 10 minutes. Dans cet in- tervalle, elles perdront leur blancheur de lait, Sc acquerront , fans aucune diminution de leur grofleur, une tranfparence pareille a celle de la corne. II faut , des qu'on les a retire'es du four, les mettre dans un lieu ou elles puiflent fecher & durcir; ce qui fe fera en peu de Jours , Sc meme en peu d'heures, en les expofant a un feu mode're'. J'ai effayc l'une Sc l'autre manicre avec un e'gal fucces. L'orchis , dont j'ai parle', croit facilement dans tout ce Royaume. Les terrcins fees , iablonneux , fte'riles, font ceux oil il fe plait , Sc ou il fleurit le plus promptement. Il y a tout lieu d'efpe'rer que le peu d'apprets qu'il Cant pour -tirer toute Tutilite' poftible de cette racine, encouragera la culture d'une plante fi nourriflante, Sc qu'ainfi le fakp, fort cher aujourd'hui , deviendra d'un prix aflcz modicjue pour etre d'un ufage ordinaire. Sa proprie'te' d'e'puiler l'eau eft a celle dc la fine fleur de farine en liaifon de z\ a. i , e'eft-a-dire , qu'une livre de fakp produira le meme eft'et que deux livres Sc demie de fleur de farine ; avec cette difference, que la gele'e de poudre de fakp eft claire &c tranfpa- rente , au lieu que celle Je fleur de farine eft trouble & blanche. Je fuis , &c. On trouve une varie'te de fatirion male, dont les feuilles ne font pas tache'es , ou plutot l'individu a feuilles tache'es , n'eft qu'une varie'te de celui-ci. Nous ofons avancer , d'apres notre propre expe- rience, que les bulbes de toutes les elpeces d'orchis font e'galement propres a faire lefakp, &c qu'en s'y prenant de la meme maniere pour les uns comme pour les autres, on n'y reconnoitra pas la plus legere difference, foit pour le gout, l'odeur, la ttanfparence, &c. Je connois peu de plantes , dont la culture foit plus difficile que celle des orchis. On peut , avec raifon, les appeller des plantes fan- tafques; ils ne fe plaifent que dans certains lieux. On n'eft pas plus avance' , quand on veut fe les procurer par le femis : cepen- Juillet I 7 7 I , Tome I. 4S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, danr, comme le falep fournir une tres - bonne nourriture, & qu'il eft fort cher, il feroit a propos de tenter de nouvelles expe'riences. Prefque tous nos pre's , ainfi que nos collines , font converts de differentes efpeces d'orchis ; leurs premieres feuiilcs commencent a paroitre en Avril, & ils Heuriffent en Mai. Nous ne fommes point du fentiment de M. Jean Moult, qui confeille de cueillir les bulbes, lorfque la feuille s'epanouit. Nous en appellons de nouveau a Pexpe'- rience , & nous difons que les bulbes font plus charnues & plus dures , quand la plante n'a pas encore fleuri ; c'eft-a-dire , quand elle n'a pouffe' que fes feuiilcs. Nous lifons dans les Me'moires de 1' Academic des Sciences, anne'e 1740, que M. Geoffroi propofa a-peu-pres la tneme me'rhode que celle de M. Jean Moult ; mais il paroit qu'on xfoit pre'ferer celle de ce dernier, parce qu'on enleve plus cerraine- ment & plus promptement l'eau de vege'tation que ces bulbes con- tiennent, & qui les fait fouvent moifir & pourrir. Degner a eu tort d'avancer autrefois , apres Dubuiflon , que le falep e'toit le fruit d'un arbre de la famille des nguiers, & qu'on le tranfpor- toit des Indes en Europe, apres l'avoir fait fecher au foleil. Le falep coiite a Paris vingt-fix fols Ponce, & la livre ne reviendroit pas a quinze ou dix-huit fols, fi on prenoit la peine de Py preparer. En vain , diroit-on , que celui qu'on apporte de Turquie eft d'une meilleurc qualite'. Ce langage ne prevaudra pas contre l'expe'rience. Le faUp eft une nourriture tres-bonne, & ttes-propre a reparer les forces e'pui- fe'es. On la confeille aux malades affedlecs de la poitrine, elle adoucit 1'acrete' de la lyrnphe. Elle eft auili recomniandee avec fucces dans la phtyfie, &c dans les diftenteries bilieufes. La fa^on de fe fervir du falep , eft lodqu'il eft re'duit en poudre, de le jetter dans de l'eau bouillante ; il s'y diflout complettement , 8c forme une efpece de gele'e. On peut y ajouter quelque firop , ou quelques aromates, pour lui donner un gout plus agreable. Il feroit trop long de rapporter tous les comes que les Anciens ont de'bites fur les orchis; ce qui y a donne lieu, eft la figure de fes bulbes, qui ont effeclivement quelque reftemblance avec les tefticules. Ccux qui veulent connoitre ces reveries peuvent lire les ouvrages de Pline, de Thc'ophrafte •, mais fur-tout le traite' de Crollius, de fignaturd plan- tarum. Ceft un chef-d'oeuvre d'abfurdite & de ridicule. Pendant long-tems on a fait en France le plus grand cas du falep ; mais, ainfi que les autres me'dicamens , fon cre'dit a e'prouve les re'- yolutions les plus fingulieres : il en eft dans ce pays-ci des reme.les comme des modes, Pun de'truit Pautre. Le garou, la cigu'e , la bel'a- dona ont excite' une efpece d'enthoufiafme , &c de fureur, tk bientot apres on les a oublies. Le falep a efluye le memc fort. Mais comme ou SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 on aime le changement, on commence de'ja a le rcmettrc en vogue; ainfi, en le pre'paranr de la maniere que nous indiquons, la dc'penfe diminuera prodigicufcmcr.t pour ceux qui en feront ufage , & c'ell toujours quelquc chofe. OBSERVATION Faite a la Sociiti Roy ale de Londres , par M. Wa tson , fur une huile que M. Brotvnvigg lui a envoye'e duNord de la Caroline. Messieurs, Notre inftitution a toujours eu pour objet les recherches fur les productions de la nature, qui peuvent etre de quelque utilite' pour le public; 8c vous vous occupez continuellement a encourager les efforts qu'on fait, pour Jtendre 1'ufage des iubftances qui ne font pas encore affez connues. C'eft dans l'intention de fecondcr, autant qu'il eft en moi , des vues audi utiles , que je vous prefente aujourd'hui les coffes d'une plante , & l'huile qu'on expiime de la grainc qu'elles renferment. Elles m'ont e'te' envoye'es pat M. Brownvigg , d'Edenton , pays fitue au Nord de la Caroline; ce font les fruirs d'une plante bien connue & fort cultive'e dans les Colonies du Sud, 8c dans nos Ifles de 1'A- me'rique , ou on leur donne le nom de pois terreftres. Us font ori- ginates d'Afrique, &c en ont e'te appotte's pat les Negres, qui les aiment beaucoup, les mangent cruds 8c cuits , & les cultivent dans les portions de terre que les maittes leur abandonnent pour leur ufage. Cette plante eft extrcmement multiplied , non-feulement dans nos etabliffemens de l'Ame'rique meridionale , mais auffi a Surinam , au Brefil , & au Pe'rou. Plufieurs Botaniftes en ont de'ja fait la defcription. Ray , dans foil liiftoite des plantcs, la noiTHine Arachis Hypogeios Ame'ricanus. C'eft I1 ' Arachidna quadrifolia villofa de Plumier. Hans Sloane , dans fort Hiltoire de la Jamaique, l'appelle Arachidna India: utriufque tetra- phylla. Pilo & Marcgraf en patient fous le nom de Mundubi. Lin- nceus a fait un genre de cette plante , fous le nom d' Arachis hypo- ga>a , dont on n'en connoit encore qu'une efpece. Cette plante, qui tient , a quelques e'gards pour la forme de fes fcuilles, de l'cfpece des trejjles , a la propriere d'entetrer fa femence ; ce qui (c fait de la maniere fuivantc. La fkur de cette plante, des Juillet i 77 i , Tome I. G 5« OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , qu'elle parole , fe courbe vers la terre jufqu'a ce qu'elle y touche. L'extre'mite' de la fleur s'enfonce alors dans la terre a une certaine profondeur , cm elle s'e'tend, & forme la cofle ainfi que les graines qui meuritfent fous terre , d'oii il faut les tirer. Comme cette plante eft originaire des climats chauds , on ne pourroit la cultiver avec fucces en Angletcrre , ni dans nos Colonies Septentrionales. Mais, felon le recit de M. Brownvigg , (es productions , dans les pays chauds , font prodigieufes. Ce qui ajoute encore a fa valeur, e'eft que fa cul- ture n'exige pas un terrein fertile ; des terres fablonneufes fuffifent pour en donner d'abondantes moiflbns. Outre ce que les Negres en cultivent pour leur ufage, quelques Colons en recueillent une quantite confiderable pour la nourriture des cochons & dc la volaille. Cet aliment les engraifle en tres-peu de tems. M. Brownvigg croit etre le premier qui ait eu I'ide'e d'extraire l'huile de ccs pois tcrreftres , &c fe regarde comme l'Auteur de cette de'eouverte. II peut fe faire que cet ufage fe foit perdu au Nord dc la Caroline, lieu de fa re'fidence, & meme ailleurs; mais il eft certain qu'il y a plus de quatre-vingts ans qu'on a fait de cette huile. Hans Sloane en parle dans fon Hiftoire de la Jamai'que; il y dit que cette huile eft aufli bonne que celle d'amande. II eft ne'anmoins probable qu'on n'en a jamais extrait qu'en tres-petite quantite' , & qu'on en a prefque entierement perdu l'ufage aujourd'hui. Ainfi, Ton doit favoir tres-bon gre' a M. Brownvigg, de rappeller une me'ehode qui peut etre d'une tres-grande utilite'. Cette huile fe fait en concaflant d'abord les femences , & en les mettant enfuite a la prefle dans un fac de grofle toile, ainfi qu'on le pratique pour l'huile d'amande , ou pour celle de lin. La meilleure maniere de pre'parer cette huile , eft de la faire fans feu. Si l'on chauffoit les jumelles de la prefle, on auroit, a la ve'rite , une plus grande quantite d'huile ; mais rile perdroit beaucoup de fa bonte , Sc feroit, par confequent, moins propre a etre fervie fur les ta- bles, ou a erre employee dans la Me'decine. Cette huile, qui eft pure , daire & de tres-bon gout, fe confervc fans rancir. Vous en avez une prcuve dans l'eflai qui vous en eft par- venu de la Caroline. Elle a fouffert les chaleurs du dernier Ere, fans qu'on en ait pris aucun foin particulier, elle eft encore parfaitement douce 8c bonne. On peut Pemployer aux memes ufages , que les huiles d'olivc & d'amande. Mais ce que Ton doit fur-tout confide'rer, eft le prix modique au- quel on peut fe procurer cette huile. M. Brownvigg nous apprend que dix gallons ( le gallon contient environ quatre pintes de Paris ) , de ces pois fans etre e'eofles , donncnt un gallon d'huile ; & une plus grande quantite', fi Ton chauffe les jumelles des prefles. Le prix du SUR VHIST. NATURE LIE ET LES ARTS. ?i boiffeau de ces pois, eft d'environ huit fols a la Caroline, & le boiffeau rend an gallon d'huilc. Cc prix n'eft que le quart de celui que coiite en Angleterre, l'huile d'olive de Florence. On tranfporte d'Europe en Amerique unc tres-grande quantitc d'huile d'olive. La nouvelle Angleterre feule , dit M. Broyvnvigg, en tire annuellemcnt vingt mille gallons. La confommation qui s'en fait dans lesdomainesde Sa Majefte', en Ame'riquc , eft prodigieulc. L'huile des pois terrcftres , dont on fe procurcroit facilement la plus grandc quantitc, pourroit Sc devroit fupple'er a cette contamination d'huilc d'olive. Je fuis tres-pcrluade qu'clle foutiendroit parfaitement l'ex- portation dans tous les endroits oil Ton tranfporte l'huile d'olive : ellc deviendroit par-la un article confiderable de commerce. Le marc de ccs pois'terrcftres , quand on en cxtrait l'huile, eft en- core une excellcntc nourriture pour les cochons. Cette courte expoiicion fuftit , je penfe , pour faire fentir combicn il feroit a fouhaiter que le Gouvernement vouliit encourager la cul- ture d'une plante, dont il rc'iulteroit tant d'avantages. Cet objet d'utilite publique , fi confbrme aux vues de la Socie'te royale , eft le motif qui m'a engage' a lui prc'fenter ccs obfervations. Je fuis , &c. Nous aurions donne une defcription plus detaille'e de cette plante, fi nous n'avions pas craint de repe'ter inutilement ce qui en a deja e'te dit par le Chevalier Won-Linnee , par Barrelier , Sc par les Auteurs cite's , auxquels on pourra avoir recours, fi on defire la connoitre plus particulieremcnt. Nous ajouterons fculemenc qu'on peut la cultiver avee fucces dans nos Provinces me'ridionales , puilqu'elle eft cultive'e en pleine terre a Montpellier; mais , a la ve'rite', dans une expofition chaude : on l'y connoit fous la denomination de pifiachier de terre , Sc fon fruit fous celle de pifiaches de terre. II y a long-tems que M. Lemcry avoir annonce' que ces piftaches etoient agre'ables au gout , Sc bonnes i l'eftomac. Observation fur du bled ituyi. M. Duhamel du Monceau , Ci connii par l'e'tendue de fes connoif- fances, Sc fur-rout par fon zele pour le bien public, s'occupe, depuis long-tems des moyens de conferver les grains Sc les farines : il y a quelques annees qu'il propofa l'etuve , comme une methodc aflure'e ; cc qu'il confirme par de nouvclles expediences. II a envoye' a Saint- Domingue un nombrc fuffilant de barils de farines , les uns non etuves , & les autres etuves avant d'etre moulus, enfin , etuves avant Sc aptcs la mouture. Ces deux dernieres preparations ont fejourne long-tems a Saint -Dominguc, Sc une partie a etc' rapportJe a Paris. Le grain ctuvc Juillet I 7 7 I , Tome I. G 2 5z OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , avant & apres la mouture , n'a pas fouffert la plus legere alteration , & il s'eft trouve une grande difference entre la farine de celui-ci, d'avec celle qui n'avoit point ete etuvee. M. Duhamel pre'fente comme un moyen fur , de pre'ferver les futailles des rats 3c de la piquure des in- fectes , de les enduire de craie, on de les peindre a 1'huilc. Manicrc de fixer fur le papier les ailes des Papillons , Sf de les reprejenter au naturel. Nous devons plus de dc'couvertes au hafard , qu'a la fagacite' des hommes. Cette aflertion n'eft point un paradoxe pour celui qui re- monte a l'origine des Arts; mais la perfection ^de ces de'couverres, eft reellement le fruit de Papplication &: des recherches. On peut juger du grand , par le petit. Un Cure de la Province de Breffe appercut un papillon pofe' fur un barometre, re'cemment verni ; il l'attacha a l'inftant avec une e'pingle au barometre, & le laiffa ainfi pendant la nuit. Le lendemain, lorf- qu'il voulut oter l'infecte, il vit que les petites plumes qui recouvrent la furface des ailes, s'e'toient fixees dans le vernis , & coniervoienr leur arrangement Sz leurs couleurs. L'ide'e lui vint de fixer ainfi des ailes de papillon, pour en former fur des feuilles de papier, des col- lections d'Hiftoire naturelle. La chofe reuflit ; mais notre Cure recon* nut bientot que le vernis alte'roit un peu les couleurs du papillon , les jaunifloit, & ne pouvoit fixer celle des gros phalenes , tels que le grand paon , Sec. II chefcha une liqueur plus convenable, &c en com- pofa une, dont voici la recette. Prenez un verre d'eau bien claire, faturez-la de belle gomme arabique ; ajoutez-y enfuite de l'alun bien pur, de la groffeur d'une fe've •. mertez enfin du fel ordinaire, jufqu'a ce que vous vous apperceviez que la gomme n'a plus de brillant , lorfque vous l'appliqucz fur le papier. Vuidez ce melange dans une phiole, oil la poufilere ne puifle pe'netrer ; ayez foin , fur-tout, que cette eau foit bien tranfparente , & qu'elle ne dc'pofe pas. II faut remarquer , qu'en fe fervant du fel tel qu'on le vend a Pa- ris, l'cau prendroit une' couleur jaunatre, qui racheroit le papier. Le fel doit done avoir e'te' purifie avant de l'employer. Le plus blanc , dans ce cas, eft le meilleur. Certe liqueur e'tendue fur un papier qui air de la confiftance , tel que celui de Hollandc, detache les plumes de l'aile An papillon qu'on lui prefente, & la fixe fans l'alte'rer. A l'egard du corps de l'infecte, il faur le comprimer en le piquant. II eft tres-difricile de detacher les plumes des ailes des papillons defle'ehe's, & encore plus rare de re'uffir parfaitement, s'ils lont morts depuis long-tems. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 53 Manure d'op&cr. i°. Prenez une petite feuille de papier d'HoIIande -, pliez-la , Sc paftez fortement le doigt fur le pli; ouvrcz la feuille, &c pofez-la fur une main de papier commun. i°. Vous aurez foin de ne pas alterer les ailes en prenant vos pa- vilions, avec l'cpingle dont vous les piquerez au travers du corcelet } lorfque' vous voudrez ope'rer, prenez le papillon par l'epingle , coupez avec des cifeaux fins les ailes tres-pres du corps , pofez-les fur un pa- pier propre. Si le corps du papillon eft peu volumineux , ce foin devient inutile. 30. Prenez de la liqueur dont nous avons park , avec un pinceau de cheveux a polls courts, humedtez le'gcrement les deux faces oppo- fe'es de la feuille de papier d'Hollande, que vous avez plie'e 8c dc- plice, elle doit etre imbue de la liqueur de chaque cote' oppofe a egale diftance du pli , 8c de l'etendue des ailes ouvertes des papilhns. 4°. Prenez enfuite une des ailes , fans la toucher avec les doigts , mais feulement avec un pinceau legerement trempe dans la meme li- queur , 8c avec lequel vous faifirez la partie de l'aile qui adhe'roit au corps i'placez de cctte maniere une des grandes ailes fur l'endroit que vous venez d'huinecter ; arrangez de meme la feconde, avec l'atten- tion de laifTer entr'elles la diftance proportionnelle du corps; vous poferez de la meme fac,on les deux petites dans leurs pofitions refpec- tives. t 50. Repliez enfuite la feuille fur le pli que vous avez forme, puis appuyez legerement la paume de la main fur la feuille, fans cependant la frapper. 6° Apres avoir mis du papier ordinaire fur la feuille de papier de Hollande , pour empecher qu'elle ne glifle , placez le tout fur une main de papier, preftez alors en tout fens, Pefpace d'une minute ; fervez-vous, fi cela vous eft plus commode, d'un rouleau de bois, mais ne frappez jamais. 70. Ouvrez la feuille, 3c enlcvez avec un canif les parties mem- braneufes des ailes. Si vous avez opere jufte, vous trouverez le deflus & le deflous du papillon , reprefentes dans toute leur ve'rite' & au nature!. 8". 11 faudra enfuite peindre le corps, les antennes , la bouche & les jambes; ce qui eft tres-facile, puifque l'on a le modele fous les yeux. Pour cette derniere operation , vous vous fervirez d'un pin- ceau de cheveux, tres-fin, & vous aurez une petite palette d'ivoire pour faire le melange des couleurs. Voici l'e'nume'ration de celles qui doivent y er.trer. 1°. Terre d'ombre ; 20. La meme calcine'e; 30. Ochre ; Juillet i 77 I , Tome L j 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , 4". Ochre calcine; 50. Mafficor; 6°. Bleu de Prunes; 70. Laque fine; 8°. Vermilion; 90. Encre de la Chine; io°. Blanc de Ce'rufe. Ces couleurs employees feules ou melangees entr'elles , donnenc routes les teintes ne'eeffaires pour exprimer les parties du corps de 1'animal. II eft aife de comprendre que tout le me'rite de l'opc'ration depend de l'adreffe de celui qui opere. Si Ton pre'fere le vernis a la liqueur, il faut choifir le plus blanc , mais on doit toujours craindre qu'il n'altere la couleur des plumes. On ob/edera peut-etre qu'en fuivant cette maniere de proce'der , on ne voir que la partie inte'rieure de la plume, e'eft-a-dire, le cote qui recouvre la partie membraneufe de Paile , & qu'ainfi on n'a pas exadement les couleurs nuance'es des ailes de papillons. Nous re-- pondons que les plumes ont les memes couleurs , la meme vivacite', les memes teintes tant en deflus qu'en deftous. On peut s'en con- vaincre par l'expe'rience fuivante. Quand l'eau gommee au moyen de laquelle vous aurez applique', ainfi que nous l'avons dit, les ailes de papillons, fera parfaitemenr fe'ehe'e , paftez du vernis fur une autre feuille de papier, pofez audi- tor fur ce nouveau papier , la feuille empreinte des plumes de pa- pillons , puis appuyez fortement, Sc laiffez fe'eher le rour. Quand le vernis fera lec, mouillez le papier gomme', l'eau delavera la gomme & le papier, alors Tun & l'autre fe de'tacheront du vernis qui re- tiendra les plumes, parce que l'eau n'a aucune adion fur les re'fines qui le compofent. Elles ne (ont folubles que dans les efprits ardens. Vous pourrez alors jugcr fi la couleur de la plume n'eft pas a l'ex- te'rieur , la meme que du cote' de la membrane : nous le repe'tons , le vernis altere la couleur des plumes. OBSER V A T I O N Sur une nouyelle efpice de Sang-fue, trouve'e fur les Alpes , par M. J. B. M. Dana, Pie'montois. \^_j E T T E fang-fue n'eft point connue du fameux Naturalifte Sue'- dois, & les caraderes diftindifs qu'il afligne aux neuf efpeces de'erites dans fon fyfteme de la nature , ne conviennent aucunement a celle dont parle M. Dana. Nous la nommerons fang-fue alpine. Hirudo alpina. La fang-fue alpine reftemble a la fang-fue ordinaire par fa configu- ration exte'rieure , mais on la diftingue aifement par fa peritcue. Elle n'a pas plus de deux lignes dc longueur dans fon plus grand accroif- SUR L'HIST. NJTURELLE ET LES ARTS. 5 $ fement, rarement plus d'une de largeur , 8c jamais unc d'cpaiiTeur. Ce petit infedre offrc des changemens finguliers dans fern etat pro- grcdif : en effet , lotfque l'infette fe racourcit , il prefente une figure he'mifphe'rique un peu allongee, & une forme tres-allonge'e, lorfqu'il s'e'tend PI. 1. F. 7. 8. 9. Nous donnerons le nom de dos a fa furface fuperieure convexe, celui de ventre a l'inferieure applatie ; nous appelleront bouche ou fucfoir, la partie me me qui fe prefente la premiere , lorfque l'animal avance; 8c queue, quoique fort improprement , celle qui marcheder- rierc. Nous de'fignerons par le mot contraction, le mouvement par lequil l'animal fe raccourcit, & par celui d'exten/ion , Peffort par lequel il s'e'tend & s'allonge. Pi. 1. F. 7. le dos de l'animal non racourci. Id. S. le ventre, Id. 9. Ie dos de l'animal racourci. Ces trois figures fepre'fentent l'animal au naturel , ou fuivant fes difFercntes pofitions. Les figures 10. 11. 12. de la Pi. 1. deljignent les memes parties grof- fies par le Microfcope. Lorfque le corps de cette efpece de fang-fue n'eft pas contracte', il paroit au premier coup d'ocil d'un,noir luifant; mais en l'obfcrvant attentivement , le milieu & la partie la plus e'levee, paroiffent plus noirs que les bords, qui, par gradation, acquierent une couleur gri- satre. On apperi^oit, avec le fecours de la loupe, des poils tres-noirs, fort e'pais au haut du dos, mais en tres-petite quantite fur les bords; ce qui laiffe la partie grifc paroitre plus a de'eouverr. La furface inferieurede fon corps eft applatie, voyqF. 11 &n,Pl. 1, & bcaucoup plus grife que le dos ; une raie plus blanche que routes les autres parties du corps , s'e'rend depuis la bouche jtifqu'aux deux tiers de la longueur, & fe termine par une ve'ficule blanche, qui, pendant le tems de la contraction , eft plus apparente que pendant celui de l'extenfion. Cette raie blanche eft accompagnee, des deux cote's, d'une raie d'un noir obfeur , qui entoure la ve'ficule, & qui forme une petite tache de la meme couleur ; de forte que la raie blanche eft une aire comprifc entre deux lignes droites. Voye\ F. 11. L'extre'mite ante'rieure O, vient du corps de l'animal, coupe a la longueur d'une demi-ligne. Elle refiemble a un cone cxaiftement tron- que, dans l'allongemenr duquel les angles rentrans, formenr des cf- peces de cones. C'eft , a le bien prendre , la leule partie qui me'rite le nom de bouche; elle eft applatie infe'rieurement , & Ton appergoit en cet endroit, avec la lentille, une forte d'elargiflement , qui a la figure d'une demi-lune. Onpeur s'en former l'ide'e, en examinant O, de la fitr. 1 1. o Les bords qui diftinguent la furface applatie de la furface convexe, femblcnt n'avoir par-tour qu'une feulc 2c meme couleur; & lorfque li Juillet i 77 i , Tome I. 5 6 OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , fang-fue marche, a peine peut-on, a l'aide du microfcope , y apper- cevoir les plus le'geres rugofitc's , tandis que l'ceil fuffit pour lcs dif- tinguer dans la fang-fuc ordinaire. La fang-fue alpine avance, comme nous l'avons dit, par un mou- vemenc de contra&ion & d'cxtenfion. Lorfqu'elle fe raccourcit, elle fixe fa partie anterieure, pour en rapprocher l'autre extre'mite'; alors, elle fe comrade tellement , qu'elle prend une figure he'mifpherique oblongue-, lbn corps groffic jufqu'a fa bouche; fa dimenfion verticale 6 tranfverfale augmente fenfiblement , & fon dos paroit plus noir Sc plus luifant : quand elle s'e'tend & qu'elle marche, fa queue eft ap- puye'e, Sc avance fa partie anre'rieure en s'allongeant. On voit , dans cet inftanr, diminuer fa dimenfion verticale & tranfverfale, & fa lon- gueur croitre du double. Dans le terns de ces mouvemens, la partie qui contient (a bouche, ne fe dilate jamais orbiculairement ; mais elle diminue peu-a-peu, & devient grele , de fa^on qu'on ne fauroit af- figner un point de fe'paration entre le col & le refte du corps. La queue offre conftamment le raeme phe'nomene. Ces obfervations ont e'te faites fur plus de trente inditridus de la raeme efpece, Sc les re'ful- tats ont toujours e'te' femblables. II ne refte plus qu'a ajouter quelques experiences, pour mieux connoitre la nature de ces Jang-fues. Je plongcai mon doigt dans la fontaine, continue M. Dana; & ils Juillet 1771, Tonu I. H 5S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mouroient avant la fin du jour. II eft tres-rare d'en voir aller jufqu'au lcndcmain. .Tel eft le genre de mort de ceux qui n'apportent aucun remede. Si les rne'dicamens font adminiftres un peu trop tard,les fymptomes font moins violens, & la douleur moins vivc ; mais il eft forr rare que le nialade en revienne , & jamais il ne fe re'tablit parfaitement. Les Ha- bitaris regardent la gueriion comme certaine, fi, des le commence- ment, on a pris du fel , del'huile Sc de 1' agaric ; c'eft , difent-ikj un ipecifique Stir. \J agaric eft une plante tres-commune dans ces cantons, les payfans le regardent comme une panace'e univerfelle. lis le confervent , le melent avec du poivre , Sc l'adminiftrent indiftin&ement dans toutes les maladies : quelques-uns d'entr'eux vantent beaucoup Pefficacite du fel en pareil cas. lis ne l'emploient ne'anmoins qu'au de'faut de {'agaric & de Yhuile-. lis ont encore remarque , que la leule eau tiede , mele'e avec beaucoup de la it , & donne'e promptement , adouciffoit confide'- rablement le mal, fans neanmoins en detruire les fymptomes audi effi- cacement que V agaric; les malades ne font me me alors parfaitement gue'ris qu'apres quelques mois •, jufqu'a ce terns , ils reftent fans ap- pe'tit, & dans une langueur continuelle; leur ventre enfle, leur vifage devient livide ; enfin , ils font dans l'accablement le plus profond. Comme ces obfervations ont e'te' recueillies avec le plus grand foin , nous avons cru devoir les publier, foit pour faire connoitre aux voya- geurs cet animal dangereux, & leur indiquer en meme-tems fon contre- poifon affure', foit pour en donner une ide'e a ceux qui s'appliquent a 1'e'tude de l'Hiftoire Naturelle. M. Peyrolier , Peintre du Roi de Sar- daigne, eft celui qui a donne les deffins, apres les avoir leves fur les lieux memes. Nous pouvons ajouter aux obfervations fur la fang-fue alpine, celles de M. Bartholin fur la fang-fue ordinaire , rapportces dans le pre- mier volume de la Collection academique des Savans e'trangers. Les Auteurs anciens Sc moderncs conviennent que fi on avaloit une fang- fue, en buvant, ou que fi elle s'attachoit an fond de la gorge, elle occafionneroit de tres-facheufes maladies, & meme la mort, fi on ne faifoit pas perir cet infede , ou fi on ne le tiroit pas de l'endroit ou il s'eft attache'; le meilleur remede feroit de Yhuile priie en boiffon; parce que, bouchant les trachees de Panimal , il periroit promptement, ne pouvant refpirer. Les fang- fues applique'es exterieurement , font dans bien des cas tres-falutaires pour evacuer un fang e'pais 8c grottier. II arrive cepen- dant quelquefois qu'elles laiflent de mauvais ulceres •, elles peuvent auffi caufer la mort par la quantite de lang qu'clles font perdre. Un payfan du Fort de Draxholm en a feit la trifte experience ; pendant qu'il e'toit SUR miST. NATURELLE ET LES ARTS. <;<, pieds nuds dans un marais, a couper dcs brouflailles, des fang- fues ca- che'es dans la vafe , s'attacherent a fes jambes , & lui tircrcnt tant dc fang a Ja fois, qu'a peine eut-on le terns de le porter a la maifon la plus prochaine , ou ll mourut dc foiblefle, 8c cpuifc par l'hc'morragie. Des Infe3es ejfentiellement nuifiblcs a la Vigne. Prefqiie tous les Auteurs qui ont ccrit fur la vigne, ont.jufqu'a pre'lent , neglige d'examiner attcntivement les infedtes deftrudteurs de cette plante. II e'toit pourtant eflenticl de les de'erire parfaitement, 8c d'entrer dans les details les plus c'tendus fur leurs mceurs , ainfi que fur leur facon d'exifter -, puifque ces connoiiTances pre'alables font les feules qui puiftent indiquer les moyens d'arreter les ravages deces ani- maux. II eft vrai que quelques (Enologifte parlent du griboury , de la lifette , du vcr-coquin ; mais outre que ces denominations ne font con- nues que dans certains cantons, elles font trop vagues pour fixer nos ide'es, louvcntmeme, ils confondent ces iniedtes, 8c attribuent aux uni les qualites 8c les mceurs caradteriftiques des autres ; nous croyons done que Ton verra, avec plaifir, quelques obfervations fur ce fujet : nous n'y hafarderons rien qui ne foit conftate' par les expe'tiences les plus multiplic'es. II feroit ridicule de dire, avec certains Naturaliftes, que chaque arbre, que chaque plante a fon infedte particulier, 8c que cet infedte eft le feul qui s'y attache, qui s'y nourrifle & s'y multiplie. La vigne prouve le contraire, & le chine, en fervant d'afyle a plus de cinquante efpeces d'inledtes, decide la queftion. Les ennemis de la vigne font multiplie's , 8c quelquefois elle fuc- combe fous leurs forces re'unies. Ici le vcr-blanc , ou latve du hanneton, ouvre des tranche'es, 8c pe'netre julqu'aux racines, pour les attaquer ic les ronger; la, le hanneton lui-meme eft a peine forti de terre, qu'il devore les feuilles encore tendres ; le griboury coupe les bour- geons; le charanfon roulc les feuilles en fpirales, & caufe leur def- fe'ehement; un autre creufe fa rctraite dans la fubftance meme de la gtappe, d'ou il fait des incurlions fur les Heurs a peine noue'es; fou- venr , il detruit en peu de jours plus de la moitie de la re'colte. II ne fuffit pas de connoitre les ennemis de la vigne, le culrivatcur doit encore les attaquer, 8c les pourfuivre jufques dans leurs derniers re- tranchemens. II eft vrai que cette guerre eft difficile , qu'clle exige des foins; mais les plaintes reite'rees du Vigneron, fes infrudtueufes lamantations , & fa confternation ftupide, ne feront pas cefler le mal, s'il ne travaille a en detruire le principe. Aide-toi , & k del t'aidera , lui dit le naif fabulifte. . Le Hanneton. Scarabmus melo lontha. Lin. fyft. Nat. Edit, n. Juillet I 7 7 I , Tome I. Hi 60 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Scarabceus muticus teftaceus thorace villofo , caudd inflexd , inci furls abdominis albis. Faun. Suec. 591. Roefel. In/, v. 2. t. 1. Scarabceus terreftris. CI. 1. Nous ob/erverons que l'on trouve dans les provinces du D.iuphine & du Lyonnois, une varie'te du hanneton beaucoup plus petite que celui que nous connoiffons, & qui, cependant, a toils /es autres caracleres. On ne peut pas dire, avec quelques pre'tendus Na- ruraliftes , que cette diffe'rcnce dc groffeur viefit de ce que cet infeffe eft en 'ore jeunc , & gu'il n'a pas pris Jon accroiffcment total, parce que perfonne ne doit ignorer que tout in(e<5te, en abandonnant fa chryfalide, /e trouve dans 1'etat de perfection qui lui eft propre , & qu'il ne lui refte qu'a de'velopper les diffe'rentes parties qui lui fervent d'orgahe, & a en faire ufage : ce que nous dilons du hanneton , ne change pas cette loi ge'ne'rale. L'avantage de faire connoitre les me'tamorpliofes du hanneton , e'toit referve' a la patience & au ge'nie obfervateur de M. Roefel. C'eft d'a- prcs l'extrait de fon ouvrage, rapporte' dans les Melanges d'Hiftoire Naturelle , par Mr. A. D. que nous aliens donner quelques details fur cet animal. Quelque connu que foit en Europe le hanneton du mois de Mai, on eft fort peu inftruit de fa propagation, de fa croiffance, de fa me- tamorphofe, & encore moins de fon origine. On a peut-etre rcmar- que qu'cn certaines anne'es , ils ont , pour la plupart, le col couvert d'une plaque rouge, & dans les autres, d'une plaque noir; que quand l'anne'eleur eft favorable, c'eft un grand malheur pour les arbres,comme pour les vignes , dont ils dc'vorent toures les feuilles ; d'oii il s'enfuit que les arbres ainfi de'pouille's , ou pe'riffent totalement , ou ne pouf- fent, l'anne'e fuivante , leurs boutons que fort tard. C'eft principa- lement dans le terns que les arbres ont le plus grand befoin de leurs feuilles, pour faciliter la pouffe de leurs branches, que ces infecftes les attaquent. On fait auffi que les hannetons difparoiffent au bour dedeux mois , foit que ce foit la le termc naturel de leur vie , foit que d'au- tres animaux en abregenr le cours, en les mangeant; mais ce que je ne crois pas qu'on air egalement obferve' , c'eft que ces memes han- netons pondent des ceufs , dont il fe forme des vers, qui, au bout de quatre ans, fe metamorphofent en hannetons. Peu de perlonnes favent auffi que l'on peut predire , s'il y aura dans une anne'e peu ou beau- coup de hannetons, & de quelle couleur feront les plaques de leur col. II y a deux fortes de hannetons qui paroiffent tour-a-tour de deux anne'e l'une, (n'eft-ce pas une /implc varie'te 1'une dePautre, plutot que deux efpeces differentes ? ) quoique , malgre' leur grande reffemblance , on puiffe deja les diftinguer par la couleur de leurs plaques , qui , dans les uns, eft rouge, & noire dans les autres; la pointe recourbe'e qui tcrmine leurs corps , f&urnit encode un caraitere diftindif. Elle eft SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 61 petite & courte dans les hannetons a plaque rouge, 8c plus forte dans ceux qui I'ont noire : parmi ces dernicrs, il y en a qui ont les pieJs de la couleur dc la plaque. Dans l'une 8c dans l'autre forte , il eft aifc de diftingucr les deux fcxes. La houppe feuillete'e qui fe trouve a I'extremite :e leurs antennes, indique un male, quand elle eft lon- gue, 8c une femelle , quand elle eft courte. Cettc houppe eft d'un moindre volume, quand 1c hanneton eft en repos, que quand il vole. 11 la deploye des qu'il fe prepare a s'elever; les antennes font repliecs iur les yeux qui font noirs , & au bas de la bouche. On obferve en- core deux autres antennes petites 8c pointues. Les caches late'rales , triangulaires 8c blanches que Ton remarque au ventre des hannetons du mois de Mai, les diftinguent de toutes autres efpeces. Sous les etuis tranfparens des ailes du hanneton , ainfi que dans tous les autres infecftes volans, font placc'es les trache'es ou petits trous par ou ils refpirent. Ces trous fe trouvent des deux cotes des fegmens , mais ils en ont audi deux autres au bas de la plaque du col , fous les poils touffus , dont le corps du hanneton eft couvert dans cet endroic : quand le hanneton ne vole point, tons ces trous font converts par les e'tuis de fes ailes. Les deux pieds de devanc font diftingues des qiutre autres, non-feulement , en ce qu'ils font plus courts , mais encore par la partie du milieu qu'ils ont plus forte, plus large , & dont , outre cela , le bord eft coupant 8c garni de deux 011 trois pointes; configuration qui met le hanneton en e'tar. de creufer facilement la terre, lors meme qu'elle eft dure. Les quarre autres pieds fe reffemblent parfaitement. A L'excKmire infe'rieure de la partie du milieu qu'ils ont flexible , on appergoit deux piquans fort pointus; &c pres de ces piquans, commence la partie inferieure, £c en memc-tems la plus mince de la patte , qui , dans les fix , eft compolee de quntre ou cinq fegmens, & qui fe termine par deux crochets, dont le hanneton fe fert pour fe tenir fur les furfaces ver- ticales. Enrre les pieds du cote droit 8c ceux du cote gauche , le corps du hanneton eft garni de quantite de poils d'un jaune grisatre; il y en a aufti de femblables, mais de plus courts fur la furfacc de la tete. Avec un mictofcope, on en dtcouvre meme fur la fuperficie des e'tuis des ailes , 8c fur fes pieds, ou, avec lavue feule, Ton n'ap- coit qu'une efpece de poudre. On lait que les hannetons s'accouplent , &A]ue dans le terns de l'accouplement , les deux sexes reftent long-terns attaches l'un i l'autre. La femelle ayant etc fi'conde'e, creufc un trou dans la terre, & s'y enfonce a la profondeur d'un demi-pied. EIIc pond alors des ceufs oblongs , dont la couleur eft d'un jaune-clair : ces ceufs font ranges les uns a cote' des autres , & nc (ont point enveloppe's dans des pilules dc terre, comme quelque-uns fe le font imagine. Apres Juillet I 7 7 I , Tome I. Ci OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , .''ctre de'barraffee de fon fardeau , la fcmelle reflbrt, 8c fe nourrit en- core pendant quelque rems des feuilles d'arbres', apres quoi ellc meurc. On ignore julqu'a prefenr fi les hannetons s'accouplcnt plus d'une fois par an , & fi , par confe'quent , ils font pluficurs pontes ; mau il eft trcs-probable qu'ils n'en font qu'une. Voici comment M. Rocfel s'y eft pris pour obferver leur ponte. Jc ramaflai , continue ce favant Naturalifte , un grand nombre de hannetons , apres qu'ils furent accouples ; je les confervai dans de grands verres, ferme's avec du crepe, & remplis a moitie de terre, couverte d'un gazon verd : quinze jours apres les avoir renferme's, je trouvai deja dans plufieurs de mes verres quelques centaines d'eeufs ; je ne touchai point aux autres , parce que j'avois peur que les ceufs n'en fouffriffenr. , je les portai meme a la cave. A la fin de l'Etc' je fus examiner un de mes verres , 8c au lieu d'y trouver des ceufs, je les vis remplis de petits vers. Commc j'ap- per^us que le gazon que je fuppofai leur fervir de nourriture , e'toit un peu fanne', j'en remis du frais a la place & je les tins en plein air. Mes vers profiterent confide'rablement pendant l'auromne ; a l'entree de l'hiver, je les rcportai a la cave, d'ou je les retirai au commencement du printems. Apres le mois de Mai, terns auquel mes vers avoient deja plus d'un an , ils etoient devenus fi forts , que je me vis oblige' de leur fournir du gazon frais, tous les trois jours, Sc meme bicntot tous les deux. Enfin , il n'y avoit plus moyen de fatisfairc leur appe'tit de cette fa$on ; j'imaginai done de femer des pois, des lentilles, & de la laitue, dans quelques- pots a fleurs, & d'y mettre mes vers, apres que ces femences auroicnr pouffe; car les racines de routes forres de plantes fraiches , leur fervent de nour- riture; afin qu'ils n'en manquaflenr pas, je mis plufieurs plantes dans chaquc pot , j'entretins de cette maniere mes vers jufques bien avant dans la leconde annee ; ils ne differoient point alors de ceux que nos Laboureurs , Jardinicrs & Vignerons appellent vers blancs 8c turcs dans quelques Provinces. PI. i. F. i. Cependant , commc je doutois encore fi mes vers de hannetons etoient en effet des vers blancs, je ramafTai un grand nombre deceux- ci : je clioifis les plus gros que je pus , afin que s'ils avoient a devenir hannetons, ils le deunffent au plus vite; car la lenteur des autres, que je gardois depuis deux ans , commencxHt a m'impatientcr. Je les confervai pourtant audi , afin de favoir par leur metamorphofe a venir , dont j'etois siir, au moment pres , combien de tems Je ver de hanne- ton rampe avant de voler. Mais, malgre mes foins, il en pe'rit beau- coup , & ceux qui me refterenr , paflerent encore la troifieme anne'e fans aucune transformation; feulement, ils devinrcnt beaucoup plus gros •, ccttc epoque eft importante pour nos vers ; car e'eft le tems oii SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ^ 63 les degats qu'ilsfont, font les dIus confiderables ; ils ont a cet age, au moins un pouce & demi de long; voye\ F. 1. Pi. 1. mais comme ils font prefque toujours un peu recoquilles , on ne les croit pas fi lon^s. La couleur dc leur corps eft ordinairement d'un blanc-jaunatre, au travers duquel, cependant, on appercoit dans les rides queique chofe dc gris ; le deflous du corps eft uni , &c le deffus eft rond Sc voiite'; le dernier fegmenc eft plus grand Sc plus gros ; & comme la nourriture & les excremens s'y amaffent, -& fc voient au travers de la peau,il en prend une couleur luifantc d'un gris violet. Tout le corps de ce ver confifte , comme celui des chenilles, en douze fegmens, fans compter la tete : fur la partie voutee du dos , on appercoit a chaque fegment une couple de rides qui doivent lui fervir a s'allonger 6c 3. s'avancer dans la terre -, de chaque cote du corps , par-deffus tous les fegmens , s'e'tend une elpece de languette on de bourrelct , dans le- qnel on appercoit neuf points a miroir; ainii, ce ver refpire l'air par . .neuf trous qui repondent a autant de fegmens. Sous les trois premiers, iont fix pieds d'un jaune-rougeatre, & compofes de quatre ou cinq parties jointes les unes aux autres , done la dernierc eft obtufe, fur- rout dans les pieds de dertiere. Je n'.ii point de'eouvert de crochet a ces pieds , mais j'ai bien obferve' que toutes leurs parties font garnies d'un poil fin de la couleur du pied-, il y a audi de ce poil feme' c.,1 tk la fur tout le corps. A la troifieme annee, la tete de ce ver eft propor- tionne'e a ion corps , ce qui n'arrive pas dans les deux premieres. Sa figure eft un rond applati, &c fa couleur d'un jaune-brun luifant, quel- quefois de la couleur de l'ofier jaune de la vigne ; elle eft munie par- devant d'une pince ou tenaillc d'un brun fonce, obtufe & dentele'e a fes extre'mites. Entre les deux parries qui forment cette tenaille, eft une elpece de levre en demi-cercle; e'eft par le moyen de cette tenaille que notre ver coupe les racines des plantes dont il fuce la fubftance pour fa nourriture. Je n'ai rrouve aucun indice d'yeux dans cette tete; •mais on y appercoit de chaque cote', derriere la tenaille, une antenne compofee de cinq fegmens de la couleur d'un jaune-brun. Quoiqu'il ioit tres-facile de diftinguer les deux sexes dans les hannetons qui fe forment de ces vers,il m'a pourtant ete impolfible d'en de'couvrir la difference dans les vers memes. Ce ver ne fort de la terre que lorf- qu'on Ten tire ; &c des qu'il eft en liberte , il s'y renfonce prompte- ment; il a la vue trop tendre, pour (outenir les rayons du foleil. Comme il eft plein de fucs , e'eft un morceau friand pour les oifeaux. Il change de peau au moins une fois par an. Quand il fent qu'elle lui devient trop ctroite , il crcufe une petite caverne pour pouvoir s'y de'pouiller plus commode'ment. Cette cavite eft dure & ronde, 3c quel- ques Auteurs la comparent a une pilule; e'eft meme parce que ces •vers a hannetons , forment de pareilles pilules , que quelques Phyfi- Jvillet 1771, Tome I. P4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ciens Ieur ont donne le nom de Scarabe'es pilulaires , Scarabcei pilula- rii ; cependant , on n'applique ordinaii'ement ce nom qu'a une (eulc efpece. Apres avoir quitte fa peau , le vcr fore pour chercher fa nour- riture , pendant que la douceur de la faifon le lui permec encore ; car des que la gelec commence a reflerrer la terre , il fe renfonce a une profondeur oil il n'a rien a craindrc du froid , ck oil il refte fans nour- riture, jufqu'a ce que la chaleur du printcms l'attire de nouveau vers la furface. Ce n'eft que fur la fin de la quarrieme anne'e, que fa me'tamor- phofe arrive. Quiconque feroit tente d'en dourer, n'a qu'a fouiller la terre au mois de Mai, il y trouvera, non-feulemenr des hannetons tres-forme's , mais audi des vers a differens degre's de grandeur. Voici comment fe fait la me'tamorphofe : dans l'automne, le ver s'enfoncc en terre, quelquefois a plus d'une brafle de profondeur; il le fait une caverne, qu'il fait rendre fi liffe &c fi unie, par le moyen de (es excretions, & de quelque autre humidite, qu'il peut y rcfter commo- dement, & en fiirete'. Peu de terns apres (a demeure faite, il com- mence a fe raccourcir, a s'epaiffir , a fe gonfler , 8c il quirte avant la fin de l'automne fa derniere peau de ver , pour prendre la forme de chryfalide. Quoique tous les ans il m'en ait peri beaucoup , j'ai pourtant confeive un aflez grand nombre de chryfalides dans un pot-a-fleur. Au commencement, clles paroiffent jaunatres ; mais infen- fiblement elles prennent une couleur tout-a-fait jaune, tirant meme fur le rouge; leur forme & leur configuration exterieure, indiquenc de'ja quelle forte de hannetons y eft contcnue. La tete & la plaque du col font retire'es vers la (uperficie infe'rieure du ventre; les fix pieds , les antennes, les etuis des alles fe laiflent appercevoir tres-diftimfte- ment ; mais les e'tuis couvrent encore prefqu'a moitie' les pieds de derriere. A la partie pofterieure du venrre, on appercoit des points a miroir obfeurs. Au dernier fegment, qui eft en meme-tems le plus petit du corps, on voit une pointe recourbe'e vers le dos, qui fert d'e'tui a celle du hanr.eton. Quand on irrite cette cliryfalidc, on ob- ferve qu'elle a un mouvement lenfible ; aulli peut-elle fe tourner d'elle- meme. Ordinairement elle ne conferve fa forme que jufqu'a la fin de Jan- vier, ou au commencement de Fevrier : e'eft alors qu'elle devient un hakntfyn de couleur blanche & jaunatre, qui, d'abord , n'a que peu de confiftance , & qui ne prend la durete' & la couleur qui lui font propres, qu'au bour de dix a douze jours. Comme ce hanneton ne fort pas de terre avant le tems que la nature lui a fixe , & que par confequent, il eft oblige' d'y paffer deux ou trois mois depuis la for- mation, bien des gens qui en avoient trouve' dans la terre pendant cc tems-la, fe font imagine's que les hannetons, pour fe garantir du froid SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6^ froid de l'hiver, fe cachetic tous lcs ans dans la terre , d'ou ils ref- fottent au rctour du priiucms ; mais il eft: aife' dc les de'tromper, en. leur faifant obferver que les deux fortes ou varie'tes de hannetons pa- roifTent tour-a-tour de deux annees l'une. II eft vrai que (ou vent Ton en trouve avec l'elpece dominance, quelques-uns de l'aucre ; mais ce ne font que les plus tardifs, qui, apparerument , n'ont pas trouvii la temperature proprc pour edore l'annce pre'ee'dentc. Aprcs done que notre iniedce a paflc quaere ans foils cerrc , & la plus grande parcie de ce ccms en tonne de vcr , il fore enfin de la retraite dans le courant du mois dc Mai , plutot ou plus card , felon la douceur ou felon la rigueur de la laifon. On les voic alors, fur- tout les foirs , quitter par milliers leur ancienne demeure. C'eft ce qui fait que pendant tout le mois de Mai, dans les annees oil il y a beaucoup de hannetons, les chemins 8c les fenriers , quelque durcis qu'ils foienc par la fecherefle , fonr cribles de crous. Or, comme il eft certain , d'un cote , que les deux fortes ou varie'te's de hannetons qui paroiflent an mois de Mai , domincne tour-a-tour de deux annees l'une , 8c que de l'autre je me fuis affure , par mes recherches , que ces mettles hannetons ont befoin de quatre ans pour atriver a la forme qui leur eft propre, il s'enfuit que l'on peut pre'- dire l'efpece qui dominera chaque anne'e, 8c de'terrainer fi elle fera nombreuie ou non. II faut remarquer que quand les hannetons font hors de terre, fur- tout s'il y a peu de jours qu'ils en foienc forcis , & qu'il (urvienc line pecice gele'e, ou des pluies froides , il en pe'ric beaucoup alors; 8c comme il n'y a, pour ainfi dire, poinr eu de ponce, le nombre en (era moins confiderable quaere ans apres. L'excreme chaleur leur eft audi pernicieufe que le grand froid. On voic ces infedtes fe renir tranquilles fous les feuilles des vignes, 8c des arbres & ne les quitter que le foir, pour folatrer dans les airs. Tout concourt a attirer le hanneton fur la vigne ; des feuilles en- core tendres leur offrenc une nourriture delicate ; la terre nouvellc- ment icmuc'e 8c travaillce profonde'ment , les invite a y confier leurs ceufs; la fituation des vignes, qui font ordinairement expofees de l'O- rient au Midi , les met a l'abri des vents froids du Nord 8c du Cou- chantv aulli s'y jettent-ils en foule, 8c elle devient la trifte victinic de la voracite' de l'inlecle , & enfuitc dc fa larve. Au hanneton (uccede une efpece de char an fan , que nous nomme- rons le rouleur , ou charanfon de la vigne. CURCULIO BACCHUS. Lin. fyji. Nat. Edit, i %d, Cet infecle lera aife' a reconnoitre, par les carafteres que nous allons aftigner. PI. i. F. z. grandeur & grolTcur narurclle de 1'infeCte. F. 5. Infecle vu avee les ailes dcployees. F. 4. Larve de l'infede. Les antennes (one Juillet I 77 1 , Tome I. I 66 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , coude'es dans le milieu; la partie qui tient a la trompe , eft formes d'une feule articulation, & l'inferieure eft en raafle. La trompe noire, un peu elargie a ion extre'mite ante'ricure , & eft de la longueur du cor- felet. Les e'tnis font durs, de deux pieces , recouvrant le refte du corps , F. 2. 8c renfermant au-deflous deux ailes replie'es , membraneufes 8c tranfparentes , qui font deplie'es, F. 5. La couleur du corfelet Sc des e'tuis des femellcs eft d'un beau verd-rougeatre, 8c tirant un peu iur le rouge; celle du male eft d'une couleur bleue , tirant fur le brun; le deflbus du corps & du corfelet eft noir •, les pattes , au nombre de trois de chaque cote', font toutes compofe'es de trois articulations; celle qui tient au corps , eft la plus courte &c la plus renfle'e , fur-tout pres de fon infercion avec la partie mitoyenne : celle-ci eft ronde , mince 8c allonge'e ; 8c la derniere eft forrnee de quaere articles , termine's par un crochet. La feuille de vigne, F. 5. fert a cet infedte pour de'pofer fes ceufs, ( A. ) qui font clairs , ronds , 8c dont la couleur eft d'un blanc-jau- natrei leur grofteur n'excede pas celle d'une petite tete d'e'pingle. On diftingue plufieurs fegmens fur le ver, F. 4. ou larve qui en provient. Sa longueur eft de fix lignes environ; fon epaifleur d'une ligne; la pcau de fon corps eft blanche 8c liffe , 8c celle qui recouvre la tete eft jaunc. Nous ne favons pas parfaitement quelle eft la maniere d'exifter de ce petit infecle, 8c nous ne rapporterons que ce que nos obfervanons nous en ont appris. Le roukur paroit dans le terns que la vigne com- mence a ponder fes feuilles; il fe nourrit des plus tendres , & caufe alors peu de de'gat. Lorfque le terns de fa ponte, qui fe fait au mois de Juin , eft arrive , il choifit la feuille )a plus faine 8c la mieux nour- rie, pour y de'pofer fes ceufs; alors, il fait des incifions fur le potiole ou queue de fa feuille, F. ^.6. Ces incifions brifent les tuyaux con- du&eurs de la feve ; & la feuille ne recevant plus de nourrirure , fc fane 8c fle'trit : il faut plufieurs jours pour qu'elle e'prouve ce change- ment. Pendant ce cems , le roukur fait la meme operation fur les ner- vures de la feuille , qui eft divifee en cinq lobes , 5c qui a cinq par- ties principales. F. 5. Il pique la nervure du petit lobe exterieur ; il y depofe fes oeufs, qui font recouverts d'une elpece de glutin •, alors, ce lobe fe roule fur lui-meme en forme de fpirale. Nous ne re'pe'te- rons point ici la maniere dont ce roulement s'execute , ni la raifon <]ui le de'termine. L'un 8c l'autre font trop bien explique's dans les ouvrages de MM. de Re'aumur , Guettard , Adanfon , DefTauiure. Des que le premier lobe eft roule', l'infecTre attaque la nervure du fecond, mais en fens contraire; de forte que l'endroit de la divifion du lobe 011 finit la premiere fpirale, eft le principe d'une nouvelle fpirale en fens contraire. II y a done deux lobes , dont la fpirale commence de PL 11- „j j Tome J. .Pay ■&■ 6"6 F 11- rni- F-l- H 1 1 1 1 u7tulfat Jiff* Judlet j 7 7* ■ SUR L'HIST. NJTURELLE ET LES ARTS. 67 droite a gauche, Sc deux de gauche a droite; enfin, la cinquiemc fert de recouvrement a tous les autres ; chaque fpirale renfecme des ceufs; il faut cinq ou fix jours pour que la feuille (bit entiereinent rouleej F. 6. alors, ellc eft parfaitement deflcche'e, Sc refte pendanre. Les ceufs y font en fiirete , & a l'abri de touces les variations de Pair; la pluie meme ne fauroit pe'ne'trer juiqu'a leur retraite, parce qu; chaque fpirale de la feuille joint exactement la partie voifme. L'auf refte huit a dix jours fans e'clore ; & apres ce terns, il en fort un petit ver. F. 4. Ce ver cerne tout autour de lui la feuille defleche'e , dont vraifemblablement il s'alimente , puilqu'on trouve auptes de (a loge beaucoup d' excrement, Sc qu'on n'appercoit encore aucune ouvcrture par ou il ait pu pafTer pour aller chercher fa nourriture. II refte dans cet etat autant de terns qu'il lui en faut pour eclore, puis fe change en chryfalide, d'ou il lort enfin pour former lc charanfon de la vigne. Nous n'avons jamais pu decouvrir quelle etoit, pendant l'hiver , la retraite de cet infecle , Sc nous n'en avons jamais trouve plus tard que dans les premiers jours de novembre. Alors, la vigne comraencant a perdre (es feuilles, il fe retire fous l'ecorce du bois, ou plutot lous les debris de l'ecorce de l'anne'e precedente, parce que, chaque anne'e, la vigne produit une nouvelle e'eorce ; ce tems pafle, il eft impoflible de le retrouver jufqu'au printems fuivant. II nous refte a parler des deux autres infectes, deftructeurs de la vigne i l'un d'eux coupe les bourgeons , Sc l'autre de'truit le raifin , en michant la grappe dans le tems de la fleur. Nous renvoyons leur delcription au cahier fuivant : nous donnerons audi les moyens pour pre'venir les ravages occafionne's par ces infeclcs. Mahode employee h Venife dans la purification des Cryftaux de Tartre , connus fous nom de Cremc de Tartre. Nous fommes redevables a M. Fizes , de la Socie'te' Royale de Mont- pellier, du detail des procedes que Ton fuit dans les fabriques de Cryf- taux de tartre, e'tablics aux environs de cette Ville. Sa diftertation fur la maniere de preparer , de de'purer & de blanchir le chryjlal de tartre, eft inferee dans les Mc'moires de PAcade'mie Royale des Scien- ces, annee 1715. C'eft d'apres cette diftertation, que 1'Auteur du Dktionnaire univerfel du Commerce a redige l'artide cre'me de tartre ; & apres lui, 1'Auteur de l'Abrege de ce Dictionnaire. L'un'&: l'autre ont copic aftez fidelement la dirk-nation de M. Fizes. Nous renvoyons a ces ouvrages ceux qui font curieux de la connoitre; nous nous con- tenterons feulement de rapporter l'operation telle qu'elle fe pratique a Vcniie. Nous avouons, avee plaiiir, que nousdevons cette defcripcion Juiilet I 77 I , Tome I, U 6$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , a M. Defmareft , de l'Acade'mie Royale des Sciences; c'eft fur les lieux mcmcs qu'il 1'a faite, II feroit a fouhaiter que tous ceux qui voiagcnt le fiffent aufli utilement que lui; nos manufactures, en tout genre , auroient bientot acquis la derniere perfection : excellent Pa- triote, bon Obfervateur , habile Phyficien, grand Naruralifte ; que de titres pour rne'riter l'eftime publique ; 8c qui l'obtint jamais plus que lui ! Le tartre , eft le fel effentiel du vin , 8c j'oferois ratmc dire de la vigne •, tous les vins n'en fourniffent pas egalement ; il s'en fe'parc par le de'pot 8c par la cryftallilation, Le tartre blanc eft pre'fe're au tartre rouge, parce qu'il contient moins de parties terreufes; c'eft aux parois des tonncaux qu'on le trouve attache'. Dans cet etat , il n'eft point pur •, il (e trouve mele d'une portion de la pattie colorante ou re'iineufe du vin, & d'une portion fine & atte'nue'e de la lie. C'eft pour le re'duire a un e'tat ilolc 8c pur, qu'on le depouille des matieres qui lui font c'trange'res. Voye^ les manieres de proce'der ufitc'es en France pour cette de'puration 8c ce blanchiflement ; elles font de'crites dans le Me'moire de M. Fizes , dans le Dictionnaire des Arts & des Sciences, dans le grand Di&ionnaire univerfel du Commerce, dans fon Abre'ge' , dans les Pharmacope'es , 8c dans le Dittionnaire de Chymie. C'eft , fur-tout , de ce dernier ouvrage que l'on peut dire , qu'il eft fait par main de maitre. Description des UJienfiles de I'Attelier. Avant d'entrer dans le detail des ope'rations par lefquelles on par- vient a purifier les cryftaux de tartre , 8c a leur donner ce degre de blancheur li recherche pour les diffe'rens ufages auxquels ce lei ve'ge'tal eft propre, il eft neceftaire de prefenter une idee de tous les uften- files qui doivent meubler l'attelier. Une courte defcription facilitera la connoiftance de la manipulation , 8c celle de l'utilite de chaque uf- tenfile. i°. Il faut 25 a 50 cuviers de bois, d'environ 3 pieds de hauteur, fur 4 pieds de diametre, ( Pi. 1. F. 1, J 2n. Douze chaudieres de cuivre, ( F. 1. ) elles ont la forme d'un cone tronque' : l'e'valement de la partic fuperieure eft environ de 5 pieds 8c demi de diametre , & le fond de la chaudiere un peu arrondi eft d'un pied & d'un pied 8c demi. La profondeur totale doit etre de trois pieds & demi. Ces douze chaudieres e'tablies dans un maffif de maconnerie, appuye le long des murs de l'attelier , font place'es fur un meme alli- gnement, a la diftance d'environ deux pieds 8c demi, ou trois pieds 1'une de l'autre. La partie fuperieure eft engage'e dans le mur juiqu'a la moitie' de la hauteur, ( F. 3. ) l'autre moitie infe'rieure eft a nud, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 69 & cxpofe'e a Faction de la flamme. Le foyer eft creule d'environ un pied dans le fol de l'attelier , 8c comme le fond de la chaudiere n'eft eleve' que d'un demi-pied au-dcfliis du meme fol, le foyer a en tout un pied 8c demi de jcu pour y placer le bois ; mais fi Ton compte tout le vuide oil la flamme peut agir, il y a une e'tendue de trois pieds trois pouces ; on voit dans la ( F. 6. ) cette chaudiere , avec le maffif de maconnerie, & l'ouverture totale du foyer. La ligne A. B. indique a- peu-pres la hauteur d'un petit mur pratique en forme de fiege dans 1'intervalle de deux chaudieres; e'eft fur ce mur que fe place le prin- cipal ouvrier, lorfqu'il s'e'tablit pres des deux chaudieres, pour la puri- fication du tartre. 3°. L'e'cumoire eft: une poele allonge'e d'environ un pied 8c demi de longueur , fur huit a neuf pouces de largeur , elle eft: un peu creu- fe'e 8c perce'e de trous , ( F. <; . ) 4°. La pelle de fer n'a rien de particulier , fi ce n'eft que foil ex- tremite n'a que la moitie de la largeur de nos pelles a feu ordinaires. Le manclie qui a une longueur de quatre ou cinq pieds, eft: aufli de fer, 8c en ligne droite, avec Pextre'mite' un peu tranchante. ( F. 6. ) 5°. La terrine eft un vaifleau de grais, dont la forme eft: indirfe'- rente ; elle doit avoir feulement une certaine profondeur 8c une lar- geur aflez conliderable , pour qu'on puifle y battre & fouetter les crufs. On peut ajouter a cela deux ou trois baquets de bois , pour contenir les cendres, &c. 11 faut trois hommes pour conduire un attelier de douze chaudieres. On charge trois de ces chaudieres par jour , & fix ou fept cuviers de bois. Un ouvrier principal dirige tous les travaux : deux aides font occupes ious fes ordres , aux difterentes manipulations moins inte'ref- iantes , auxquellcs il prefide. PROCEDES. ie. On commence par deftccher le tartre brut, & la lie, en les expofant dans des chaudieres de fer, a un feu tres-mode're ; on agite , avec loin, le tout, jufqu'a ce qu'il ne refte plus aucune humidite'; eniuite , on reduit en poudrc le re'fidu de la deification avec une pellc de fer , (ulpendue a l'extre'mite' d'une perche qui plie & qui fait reflort. Cet e'quipage rcflemble aftez a celui avec lequel on pile la foude. 2.°. Tout le tartre broye tres-fin fe diftribue dans les cuviers de bois , & 1'on fe regie pour la quantite' que Ton en met dans chacun de ces vaifteaux, fur celle que l'eau chaude qu'ils peuvent contenir, en diftout ordinairement. 3°. On conferve, avec foin , l'eau qui a fervi aux ope'rations des leflives du tartre , &c qui contient encore en diffolution une petite quan- Juillet 1771 , Tome I. 7o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rite de ce fel. On la fait bouillir dans des chauderons de cuivre, 8c on la verfe route bouillante dans 1c tartre reduir en poudre ; l'eau s'en charge, 8c par certe diffolurion , il s'opere un commencement de pu- rification du (el qui quitte, lorfqu'ils s'unir a l'eau , les marieres erran- geres les plus groffieres qui le mafquoient & lc faturoienr. Ces ma- tieres. torment au fond du cuvier un fe'dimenr, qu'on a foin d'enlever a mefure qu'il fe de'pofe ; on verfe l'eau chaude a diffe'renres reprifes, & l'on agire le tartre brur, pour favoriler fa difTolution 8c fa de'pura- tion. On peur regardcr cette premiere ope'ration , comme une pre- miere purification du tartre. 4°. On laifle repofer la leffive du tartre , 8c a mefure qu'elle fe re- froidir, les cryftaux du fel fe forment 8c s'attachent fur roure l'e'ten- due des parois interieures des cuviers. La liqueur de'pofe pendant trois jours enriers, 8c l'expe'rience a appris qu'apres ce terns, rout le fel que peut donner la liqueur , eft forme' & de'pofe : on foutire l'eau des cuviers , 8c on la mer en' depor dans d'autres , dans lefquels on la garde pour fervir conrinuellement a la meme ope'rarion; on detache avec la pelle de fer les cryftaux de tartre adhe'rans aux parois des cu- viers. Les cryftaux , quoique degage's, comme je l'ai dir, des marieres colorantes les plus groffieres , fonr encore forr noirs. On fe conrente de les reduire en pcrits morceaux avec la meme pelle de fer qui a fervi a les de'tacher : ils fe brifenr facilement , attendu leur peu de ljaifon &c de confiftance , parce que les principes falins font ifoles par les reftes de la partie colorante du via 8c des lies qui y font encore intimement meles. 5°. Lorfqu'on a une fuffifante quantite de tartre , ainli pre'pare, on remplit d'eau pure 8c claire , e'eft-a-dire , d'une eau qui n'a fervi 1 aucune ope'rarion , les chaudieres de cuivre, F. 4, & l'on y met le tartre. On fait fous les chaudieres un feu doux avec de la paille, des rofeaux , ou du petit bois de fagots. A mefure que l'eau contracle un certain degre de chaleur, elle diflout infenfiblement le tartre. Les ouvriers agirent la matiere faline avec un baton ou avec Pe'cumoirc pour favorifer la difTolution 5 mais ils apportent la plus grande atten- tion a bien graduer le feu , parce que le tartre le de'pure bien plus facilemenr par une diffolution lente. Cette ope'ration commence a fix heures du matin , & finit vers les deux lieures apres-midi. Pendant ce terns , on fair du feu a plufieurs reprifes fous les chaudieres , jufqu'a ce que toute la liqueur air contracle un degre de chaleur, tel qu'on puifle a peine le fupporter en y plongeant les doigts. Le principal ouvrier qui dirige cette ope'ration, examine alors la leffive du tartre; 8c lorfqu'il la trouve d'une couleur rouffatre, d'un jaune fonce & bien e'gal , il nc menage plus le feu , & il pouffe a l'ebullition. Comme il mene a la fois trois chaudieres, il obferve d'ctablir des nuances dans SUR VHIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 7.1 lc progres des difFe'rens e'tats , par lcfquels paffe la liqueur de chaquc chaudiere , afin de les pouvoir prendre a tems , en faifant fucceflive- ment fur les leflives les manipulations ne'eeflaires. 6°. Dans les intervalles de ce travail, l'ouvrier principal occupe fes .aides a donner au tartre brut la premiere purification , dont j'ai decrir le detail N°. 3. On a coutume de charger chaquc jour fix ou (cpt cu- viers de bois , pour rournir au travail des trois chaudieres dont j'ai parle. 70. Apres que la leflive des chaudieres a bouilli environ une demi- hcure , on procede a la purification du tartre. Les agens dont on fait ulage pour l'opcrer font fort pcu recherches : des blancs d'eeufs 8c de la cendre non leflivee , qu'on a paflee par un tamis fort fin , pour en fe'parer les charbons & les autres impurete's qui pourroient nuire au fucccs du travail, font les feules fubftances dont on ait befoin. Le principal ouvrier s'e'tablit aupres d'une chaudiere avec un pa- nier d'eeufs, un baquet plcin de cendre , une e'eumoire, F. 5 , une terrine profonde , &: un baquet vuide. II commence par cafler un ceuf, & laifle tomber lc blanc dans la terrine ou il a mis une fuffi- fantequantite d'eau pure. 11 a foin en tranfva(ant le jaune d'une partic de la coque dans l'autre, qu'il n'en tombe point dans la terrine, parce qu'une tres-petite portion de jaune divife'e &c cuite dans la leflive du tartre, communiqueroit une teinte routfacre a. une grande quan- tite de cryftaux. L'ouvrier bat enfuite lc blanc d'eeuf avec un balay, julqu'a ce qu'il foit de'Iaye' &c divife' dans l'eau. Pour-lors, il ajoute une certainc quantite de leflive de tartre bouillante , qu'il tire de la chau- diere, & continue a fouetter le melange, cc qui fait moufler de telle forte que l'e'cume le'gcre remplit toute la terrine. II verfe aufli-tot avec la terrine, cette e'eume iur la leflive toute bouillante, elle s'ctend & le diftribue aflez cgalement fur toute la furface. L'ouvrier ne perd pas un inftant, prend de la cendre lur l'extre'mite de fon ecumoire, qu'il plonge aflez profondemenc dans la liqueur , & qu'il promene de droite a gauche. Une efferverfence fort vivc s'cleve tout-a-coup, & fait naitre de toute part une mafle d'ecume roufratre , qui , en mon- tant, rencontre fur tous les points de fa marche, 1'efpLce de re'feau que la moufle du blanc-d'ceuf forme a la furface, & qui y flotte. Ce rcfeau fe charge de toute la pirtie colorante qui fe trouvc mele'e a 1'e'cume. L'ouvrier l'cnleve avec fon e'eumoire, la met en depot dans lc baquet vuide , reprend une feconde fois de la cendre , la plonge dans la leflive, produit une nouvelle efferverfence, Sc une feconde ecume prefque aufll abondante que la premiere. L'ouvrier l'enleve avec la meme promptitude & la meme attention. II recommence quatorz^ ou quinze fois cette operation du blanc- d'ceuf (ur une meme chaudiere, & a chaque fois , il verfe de la cendre Juillet i 7 7 I , Tome L -i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , dans la leffive a deux reprifes diffe'rentes. La quantite de cendre eft peu confide'rable a chaquc fois; environ une poignee fuffit. On par- vient par ces de'purarions re'ite're'es a enlever toute la panic colorante qui falit les cryftaux de tartre. 8°. II eft aife de (aifir l'cethiologie de cette operation. L'alkali con- tenu dans la cendre , neutralife en partie le fcl de tartre qui eft dif- fous dans la leflive, & qu'il peut atteindre lors de la combinaifon Sc de 1'effervc-fcence qui en eft la fuite. La partie colorante ie trouvant abandonnee a elle-meme, fuit le mouvement de l'effervefcence, monte a. la furface de la Hqueur, & eft alors faifie Sc retenue par le blanc-d'ceuf qui forme exacftement un refeau tendu fur toute la leflive. .T'obferve que le melange d'une petite partie de la leflive dans la lymphe divife'e du blanc-d'ceuf, a pour objet de lui donner une pe- ianteur fpe'eifique plus confide'rable, afin que l'ecumc forme'e du me- lange flotte moins a la furface, & qu'elle pe'netre un peu plus dans la liqueur. Par-la, le refeau eft plus rapproche de la partie colorante qu'il doit faifir. D'ailleuts , l'union plus intime de la leflive avec la lymphe animale, eft un mediun junclionis qui fait que la partie co- lorante s'y attache plus facilement. 9". Apres que toutes ces ope'rations font finies pour une chaudiere , l'ouvrier eteint le feu & pafle a une autre. Le mouvement de l'c'bulli- tion cefle peu-a-peu , & des que la liqueur eft tranquille , une croiite ialine d'une couleur grifatre , & fans aucune forme de cryftaux di(- tinifte, s'e'tend fur toute la furface, & recouvre la liqueur. C'eft peut- ctre cette croiite faline qui a fait donner aux cryftaux de tartre la denomination impropre -de crerr.e de tartre. A meiurc que le re'froi- diflement s'opcre, les cryftaux fe depofent & s'attachent aux parois inte'rieures , & an fond de la chaudiere. Le travail de la cryftallilation fe continue pendant trois jours entiets. io°. Le quatrieme jour on enleve la croute faline qui flotte fur la liqueur, elle eft d'un blanc fale, & on la jette dans les cuviers de bois pour rentrer dans la mafle du tartre brut, & fubir avec lui la premiere purification ; ( N°.' 3. ) on puife enfuite l'eau de la chaudiere juf- qu'aux deux tiers, & on la met en de'pot dans les cuviers de bois, dans lefqucls on la garde avec foin, comme je l'ai de'ja dit, pourlervir a la diflblution du tartre brut & a fa premiere depuration. Puis avec la pelle- ( F. 6. ) on de'tache les cryftanx de tartre qui font d'un beau blanc : on les lave &c on les netoie dans l'eau , ce qui enleve toutes les impurete's legeres qui y font adherentes, &c principalement fur la furface qui tenoit aux parois de la chaudiere. On les prend enfuite avec l'e'cumoire & on les e'tend pour fecher far des clayons d'ofier. On a foin de mettre a part les cryftaux du fond de la chaudiere , parce qu'ils font moins blancs que ceux des parois fuperieures. II arrive STTR VB1ST. NATURELLE ET LES ARTS. 7? arrive nieme quclquefois qu'on eft oblige' d'en rcjetrer une pmie dans h maffe du tartre brut, lorfqu'ils font confiderablement falls pat des reftes de la partie colorante qui ont e'chappe' aux agens de la puri- fication. 1 1". L'ouvrier ptincipal ne petd pas de vue l'e'cume qu'il a mife en depot dans le baquet. A la fin de la journec, une pattie de cette c'cumc s'eft re'duite en liqueur chatgc'e de tartre. On la verfe dans lej cuviers , pour fervir au travail de la premiere purification. Je dois ici faire remarquer que dans les Arts il eft d'une pratique gene'rale de me'nager les liqueurs qui fervent aux ope'rations, tanc qu'elles confervent les principes utiles, &c qu'ellcs ne fubiflent point de ces changemens qui les denaturent. On a vu que l'eau chargec de lei, circuloit dans les cuviers : on n'a pis eu pour but de confetver le fel dont cctte eau eft chargee; mais on fait par experience, qu'elle en eft plus propre a en diftoudre une nouvelle quantite. Les ptocede's fuivis a Vcniie pour de'purer les cryftaux de tartre, compates avec ceux qui font d'ufage en France, pour le meme objet, fourniflent des obfetvations bien fimples, 8c cependant d'une grande con 'c'quence pout les teintures , qui font ici le principal objet; puifque, la confommation de ce fel eft fort bornee en Pharmacie , quoiqu'il foit ne'etffaire pour un grand nombre d'ope'rations de cet Aft. Les Teinturiet s regatdent le tartre comme une (ubftance non-colorante , qui ne fert point a. donncr la coulcur aux e'toffes, mais qui les pre'- pare a la recevoir. II eft ttes-ccrtain que ce tartre plus ou moiiis dc'purc, mieux ou plus mal employe' dans les bains ou bouillons que 1'on fait fubit aux e'toffes, met une grande difference dans la beaute de la teintute. La creme de tartre , pour nous fervir de l'expreftion la plus connue dans les Arts, quoique tres -impropre , eft depure'e a Calviffon & Aniante, pies de Montpellier , avec une efpece de terre favonneufe, reffemblant a de la ctaie qu'on ttouve pres de Merveil : cette terre delayc'e dans l'eau, lui donne une couleur laiteufe & foncee, &c la rend epaiffe. La dofe ordinaire de cette tetre eft de cinq livtes fur chaquc chaudiere. Plus les cryftaux de tartre font neutralife's par les alkalis propre- ment dits , ou par les tettcs abfotbantes , comme celle de Alerveil , qui contient beaucoup de fubftance alkaline, moins ils font propres aux Tcinturiers. C'eft a la pre'fence de 1'acide de'gage' 8c e'pure' qu'eft du Yavivtment plus ou moins marque, de la couleur dans certaines e'toffes. II eft aife' de le prouver par les experiences faites avec la creme de tartre pte'paree de diffe'rentes manieres. Une perfonne qui re'unit a l'efprit le plus jufte , les connoiflances les plus ttendues, 8c que fa modeftie ne me permet pas de nommer, Jvillet 1771, Tome I. JC 74 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , M. P. fit teindre , avec les ptoce'de's ordinaires, de la laine e'catlate, fe fervit d'une creme de tartre parfaite, qu'on lui avoic apporte'e d'Al- Jcmagne , & il obtint une couleur tres - belle & trcs-vive. La meme experience rc'petee avec de la cremc de tartre de Montpellier , la couleur fut moins vive & plus rofe'e (a) que la premiere fois: ce- pendant, toutela preparation avoit ete' patfaitement lemblable, memes vaiffeaux, meme laine, meme cochenille , & coniequemment on ne pouvoit attribuer cette difference qu'a la feule creme de tartre. Celle de Montpellier etoit moins acide au gout , & plus blanche a l'ceil. L'acide plus a nud dans la premiere operation avoit done contribue a Vavivement de la couleur & a fa perfection , & ce meme acide moins a nud , a la bmniture de la laine dans la feconde. Cette confequence exigeoit encore de nouvelles preuves ; car dans les Arts , les raiion- nemens font inutiles, s'ils ne font fondes fur l'expe'rience. Pour fe convaincre, on augmenta un peu la quantite de la diffolution acide mine'rale, (diffolution d'etain dans l'eau re'gale ) qui entroit dans le bain d'ecarlate , & on patvint peu-a-peu a la premiere nuance dont on avoit e'te ecarte par l'ufage de la crime de tartre de Montpellier. Nous invitons les Amateurs & les Attiftcs a repe'ter ces expe'riences. NOUVELLE PRESSE Pour imprimer les etoffes de foie , de laine ; les toiles vulgairement nomme'es Indiennes , les papiers , &c. par le moyen de laquelle on peut donner aux dejjins telle largeur & telle grandeur qu'on defirera. Description de la Presse. Pl. III. 1_, A prejfe monte'e. A. Les coulijjes dans lefquclles roulent les roues qui dirigent la. prejfe dans le haut, & qui la fupportent dans le bas. B. Les montans de la charpente place's aux quatte coins, & qui font e'tayes chacun par un morceau de bois cloue' fortemenr an plancher de l'appartement , afin que la machine entiere ne foit point e'branle'e par le coup que l'ouvrier donne en ferrant fa preffe. C. Les jumelles de la preffe. D. Les planches du dejfin a imprimer , pofe'es fur la table d'une ma- (a) Le mot Rofe , dont fe fervent les Teinturiers, ne re'pond paint a Pidee qu'il prefente. Ce terme annonce techniqucment une couleur plus foncec , tirant fur le violet , & Tidee naturclle du Rofe eft celle d'une couleur plus claire que le cramoifi. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7* nierc fixe; on peut cependant les enlevcr pour leur en fubftituer d'autres. E. Chaffis , auquel on fixe l'c'toffe ou le papier. F. Pieds de la charpente. G. Pieds de la table qui porte le plancher du deffin. U. Traverfes de la table &c de la charpente, & qui fervent a affermir le tout. I. Barrcau pour faire mouvoir la vis de la preffe. K. Traverft de la preffe par ou paflc la boite. L. Plateau ou timpan qui preffe (at l'e'toffe quand on imprime. M. Mortaifes de la traverfe de la preffe, arrctees «n-dci.jrs par des clefs. N. Clefs de la traverfe. O. Vis de la preffe. Pl. VI. Chaque pike de la preffe , vue fipariment. F. i. A. La vis de la preffe route monte'e, avec la bolte , le pivot, la wrenouilliere, le plateau, ou timpan, les pitons, les crochets &c les cordes. B. La tete de la vis , avec l'embrafure ou paffe le barreau. C. Le pivot qui doit etre de fer, &c enrrer quarrement dans la tete de la vis , avec quatrc chevilles de fer. D. Clef Ac fer , paffant dans la boite & dans l'e'chancrure du pivot. E. Pivot termine en ovale a fon extremite inferieure, & ayant la forme pointue d'un ceuf. F. Boite par ou paffe le pivot. II eft arretc par deux clefs de fer , qui ne fervent qu'a le tcnir en refpecl:, & a 1'empecher de vaciller. G. Grenouilliire dans laquelle le bout du pivot doit tourner & preffer. II faut qu'elle foit de fonte , & terminee en pointe comme un ctuf. H. Crochets a vis , attache's a la boite pour aflujettir les cor lages abou- tiffans a I. cc font les pitons places au coin du plateau , ou du timpan. r K. Tete du barreau de fer qui doit entrer quarre'ment dans 1 embralurc de la tete de la vis. L. Manche du barreau. II eft en bois , & de forme ronde. F. II. fumelles ou montans de la preffe , vues en-dedans, garnies de quatre roues de bois de Gayac. On peut fuppleer a ct bois , par uu autre , pourvu qu'il foit auffi dur. A. Mortaife de la traverfe , paffant par les jumelle?. B. Roues de Cayac , place'es dans le corps de la jumelle, pour roulcC Juillet I 7 7 i , Tome I. K i ?6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , horifontalement dans line rainure pratique'e fur le cote de la table. C. Pareilles roues de Gayac , roulant perpendiculairement dans la cou- liffe pratique'e fur la traverfe infe'rieurc de la charpente. F. III. Traverfe de la prejje , foutenue par les jumelles. A. Trou de la boite. B. Trous des tenons a mortaifes. C. La clef. F. IV^ Le timpan ou plateau. A. Trou de la grenouilliere. fi. Pitons a vis, par ou paffent les cordes qui joignent aux crochets a *is, fixe's a la boite. F. V. ChaJJls fur lequel on fixe Vitoffe ou le papier a imprinter. Ce chajfis eft fimple, & garni de crochets, & lorfqu'on n'imprime que de I'e'roffe ; mais (i c'eft du papier que l'on veuille imprimer , il doit etre double; c'eft-a-dire, qu'alors il faut placer le papier entre deux chaffis. A. Crochets de fer , pour fixer & tendre Pe'toffe. B. Vis en bois , pour ferrer le double chaffis , & pour pincer , tendre & retenir le papier. C. Fiches du chajjis, attache'es a la table de la preffe, &: fur fes cote's. F. VI. Ecroue de la vis. A. Le trou de la vis. B. Les mortaifes, a queue d'aronde. C. Les roues de Gayac , place'es dans Pepaifleur du bois, pour gliffei fur la coulifle d'en-haut. A. Les coulijfes. B. coulijfes, vues de profil F. VII. Parties de la traverfe d'en-haut. s. lies de profil. F. VIII. Parties de la traverfe d'en-ias. A. La couliffe. B. La meme , vue de profil. Nota. La vis doit etre a trois pas; les chaffis, foit pour Pe'toffe, (bit pour le papier, doivent etre garnis par derriere avec du parche- Preffe montec i't.iii- Terns l.Tai/e. 7ff. \ i ieces l( areea »f |{ U_^^^J \_ I I II. (pK — " '" I I (- -I 1 Juilht JL7JZ. Suillee. 77* SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 77 min ; lc plateau ou timpan eft recouvert en-deffous avec plufieurs morceaux de draps moelleux & cloue's par le cote'. Les plus grands dejfins imprimes n'ont eu jufqu'A pre'fenr, tout ail plus, que trente pouces de longueur. Ccux qui font imprime's a la main, n'en ont que vingt. Outre cela, dans les e'tofFes imprime'es, on diftingue prcfque toujours le point de reunion d'une planche a Pautre ; ce qui arrive, parce que la planche n'eft pas ajuftee parfaitement, ou parce que l'une des deux donnc une teintc plus ou moins fonce'e. En un mot, quelle qu'en foit la raifon , il eft trcs-rare que cette reunion ne foit pas (enfible. D'ailleurs , on ne peut avoir qu'une repetition continuelle du meme deflln ; ce qui fait un mauvais effet , fur-tout dans les tentures d'appartemens. Nous croyons pouvoir pre'venir ces inconve'niens par la nouvelle prejfe que nous pre'fentons. On peut, par fon moyen , donner a la planche a imprimer routes les proportions que Ton defirera , tant en longueur qu'en largeur. Si l'Artifte a eu foin de faire fon deflin cor- rect, de me'nager les coups de lumiere, 8c de former un bel enfemble; il n'eft rien dans l'art de la pcinture , que 1'e'tofFe imprime'e ne puiffe offrir en (ortant de deflous la prejfe. Les Heurs, le payfage , PArchirecture , peuvent fans peine y etre traitcs. Nous fommes meme perfuade's que l'Artifte habile parviendra a imiter les figures, & a rendre en tsntifle, les morceaux de haute- lifte fi fupe'rieurement exe'eute's aux Gobelins. Nous difons plus; au moyen de prejfe roulante ainfi fur un plan folide, & fur lequel repofe la planche, on pourroit, en perfection- nant ce genre d'imprimerie , peindre des taffetas en plufieurs cou- leurs. Nous avons vu imprimer fur du taffetas une rofe , donr les teintes & les nuances e'toient fondues avec autant d'art & de de'li- cateffe , que fi elle avoit ete peinte a 1'huile fur une roile pre'pare'e. Ce que l'Artifte a execute' en petit, peut Fetre en grand, par lc meme mechanifme. II fcroir encore poffible d'appliquer cette prejfe roulante a l'impri- merie des livres; les ouvriers feroient plus en moins de terns, 8c pat confe'quent , la main-d'eeuvre ne (eroit pas C\ chere ; nous ne ha- lardons point ici une fuppofition gratuite. C'eft a l'Artifte, exempt de pte'juges , a difcuter les inconve'niens & les avantages d'une in- vention dont on pourroit retirer une fi grande utilite. Nous ne nous diffimulons pas les objections qu'on peut faire conrre le projet de la prejfe. Elles fe reduifent a comparer le petit efpace neeffaire pour les preffes ordinaires, avec celui qu'exige la nouvelle, & .1 calculer les de'penfes qu'entraine apres foi la main-d'eeuvre d'une nouvelle machine. Rien de plus facile que de re'pondre a la premiere de ccs objections. Les tapifferies ordinaires ont deux aulnes & ua Juillet 177 i , Tome L 7S OBSERVATIONS STIR LA PHYSIQUE, quart de hauteur : fuppofons meme qu'elles aient 10 a 11 pieds, il nc faudra pour manceuvrer aife'menr qu'un emplacement de 18 pieds de longueur. La largeur fera proportionne'e a celle du deflin qui ne peut jamais exceder 6 pieds. Ainfi, deux pieces rapporte'es l'une 1 1'autre formeront une renture de 10 a n pieds de hauteur & de lar- geur , fuivant qu'on l'exigera. Rien n'empeche d'avoir dans les Ma- nufactures des pieces, que nous nommerons pieces de rapport, &c qui ferviront -a aggrandir, ou a rcfTerrer le deflin. Nous convenons que la feconde objection feroit de la plus grande force, s'il ne s'agifloir que des papiers fimples , dont le principal me'rite eft d'etre d'un prix modique. Mais outre qu'il eft ici queftion des e'toffes plus pre'cieufes , on pcut encore repondre qu'on gagneroir, for le terns, la de'penfe que Ton feroit force de faire pour la gravure de la planche. D'ailleurs, la charpente de la prejfe , une fois etablie, dureroit un tems tres-confiderable, & il ne s'agiroit que d'une pre- miere avance, qu'on auroit bientot rcrrouvee par l'accele'ration de l'impreflion. Ceux qui connoifTent ce genre de travail , verront ail premier coup d'ceil quelle cconomie il y a, & pour le tems, & pour la couleur. Lesetoffes, toiles , papiers en tontiiTe, peuvent aifement fupporter cette depenfe , &fur-teut lestaftetas qu'on a jufqu'a ce jour peinrs a la main. L'utilite' publique eft la feule vue que nous ayons en propofant cette prejfe , & en de'montrant la fimplicite de fon me'ehanidne. La recompenfe la plus flarteuf'e pour nous, feroit qu'un Artifte put en titer quelque avantage. Nous aurions alors la iatisfaction de dire que nos (bins one contribue a perfedttonner une branche de Com- merce. l?-T-I4*A1.iVL"..i,'.T! .Jilt 4^1 DISSERTATION. L'eau la plus pure contient-elle de la terre , & cette eau peut-elle e*tre change'e en terre ? \_j e s queftions ont depuis long-terns e'te difcute'es par les Phyficiens , & quelques-uns, fans confide'rer que ce fait n'etoit encore qu'hypothe- tique , s'en font fervi comme d'une ve'rite' de'montre'e pour e'tablir leur fyfteme fur la diminution des eaux de la Mer, On trouvera dans la DifTertation dc M. Ferner, rapporte'e au commencement de ce pre- mier volume, la preuve de ce que nous avan^ons. Quand le point d'ou l'on part n'eft pas certain , chaque pas entraine vers l'erreur. Les an- ciens Chymiftes, & meme quelques Chymiftes modernes tres-inftruits, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 79 ont adopre' cette hypothefe : tcl a etc le fentiment dc Lavigniere , dc Borrichius, d'Hooc, Henckel, Hierne, Lcidenfroft, E!ler , van Hel- mon j Boyle , Matgraff, tkc. il feroit long & merae trop faftidieux , dc rapporter fe'paretnent l'opinion dc ccs maitres de Tare : nous dirons fculemenr que les uns ont penfe' que l'cau la plus pure contenoit dc la terre; que les autre? ont cru que cette terre e'toit un de fes principes conltituans; que plufieurs ont affure' que l'eau fe convertiffoit infen- fiblement en terre; enfin , que l'humide de'pe'rifTbir, & que notrc pla- nete feroit un jour a (ec. Quelques Chymiftes modernes ont commence par dourer, & le doute eft lc premier point pour connoitre la ve'ricc, & pour empecher qu'on ne foit fubjugue' par l'opinion. M. Boerrhaave , dans fes Ele'mens de Chymie; M. Duhamel , dans ia Phyfique des Arbres ; M. le Roy, dans un Memoire infere dans ceux dc 1' Academic anne'e 1767, re'voqucnt en doute la poflibilite' de ce changement , ou du moins,ils demontrcnt que les experiences faites jufqu'a ce jour, embrouillent la queftion , loin de la decider. 11 e'toit re'ferve a M. La- voificr de rcpandre un nouveau jour fur un point important en Phy- fique & en Chymie. La route que les Chymiftes avoient fuivie jufqu'a ce jour, e'toit, fans contredit , la meilleure , & cependant ils ont ere e'gare's par l'examen meme des refultats obtenus dans leurs difivrens proccdes. Nous clefirerions mettre fous les yeux du Lecteur l'excellente DifTerta- tion de M. Lavoificr, lue a la rentre'e publique de l'Academie des Sciences, lc 14 Novembre 1770, dans laquelle il traite fupe'rieure- ment cette queftion ; mais comme l'Acade'mie conferve ces ouvrages precieux pour les publier dans fes recucils , & que jufqu'a ce terns, ils font depole's dans fes archives , nous rapporterons aujourd'hui les fairs principaux dont nous avons conferve' le fouvenir. Le ftyle clair Sc precis de M. Lavoifier, la maniere narurelle de pre'fenrer fes idees , le grand art de peindre les objets , tout concourt a les graver profonde'- ment dans la memoire. Se hater de pub!ier de relies decouvertes , e'eft faire jouir par avance le Chymifte & le Phyficien ; & fi ce que nous allons rapporter eft infe'rieUr a la Differtation de M. Lavoifier, le Lrcteur nous excufera en faveur du motif. Nous ofons cependant efperer que ce que noiis dirons fuffira pour lui faire abandonner toute probabilite , toute hypothefe , tout fyfteme fur le pretendu change- ment d'eau en terre. La connoiflance d'une verite, eft le premier pas pour en decouvrir unc leconde. M. Sthal, dans un ouvrage intitule' fundamenta chymioe , dit « que » l'eau, par un grand nombre de diftillations re'pe'te'cs, pouvoit etre » portee a un tel degre dc fubtilite', qu'eile pe'ne'troit la iubftance du i> verre ». Cette aflertion rapportee fans preuves de'eifives, ainfi que plufieurs Aout I 77 1 , Tome I. So OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; autres egaleraent hafardees par quelques Chymiftes & Phy fidens, ont engage M. Lavoifier a conftater quel etoit le degre' auquel l'eau pour- roit ctre portee par un certain nombre de diftillations fuccefllves, 8c quels changemens elle e'prouveroit dans ces ope'rations re'ite're'es ; foit pour fon poids, foir pour fes autres qualite's. M. L. V. en refle'chiftant fur cet objet , a e'te heureufement plus loin qu'il ne l'avoit prevu dans le commencement •, (uivons-Ie dans fes differens proce'de's. II a raflemble', avec la plus fcrupuleufe precau- tion , une quantite' (uffifante d'eau de pluie , parce qu'il a penfe que c'e'toit la plus propre pour (es experience?. En effet , ce fluide n'eft qn'une eau diftille'e par la nature; & l'elevation immenfe a laquelle les vapeurs aqueufes iont portees dans 1'athmofphere , eft , fans contre- dit , le moyen le plus sur pour de'poui'iler l'eau de toutes les parties he'te'rogenes qu'elle peut tenir en diflolution. Premier ProcEde:. Cette eau de pluie, foumife a l'e'preure de l'are'ometre, a e'te' trouve'e plus le'gere que l'eau de Seine; mais un peu plus pefante que certe meme eau de Seine diftillee , e'eft-a-dire , d'environ un grain fur le bailin de l'are'ometre de M. L. V. ce qui re'pond a deux cents quarante-deux cents milliemes; d'ou l'onconciud que cctte eau de pluie n'e'toit pas abfolument pure. Second Proced£. Pour conno'itre la quantite de parties he'te'- rogenes que l'eau de pluie tenoit en diflolution , & quelle e'toit la na- ture de ces parties he'te'rogenes, elle a ete' foumife a une diftillation lente dans des vaiflcaux de verre. Le produit a e'te', par livre d'eau, d'un tiers de grain d'une terre le'gere, & prefque indifloluble avec les acides ; l'Auteur y a reconnu quelques veftiges de fel marin. Troisieme PROCEDE. Cette eau de pluie diftille'e, a e'te de nouveau foumife a huit diftillations fucceilives ; & a chaque ope'ra- tion , il fe fe'paroit une petite portion de terre femblable a celle de la premiere diftillation. Le volume d'eau avoit beaucoup diminue par l'e'vaporation qui s'etoit faite par les jointures des vaifleaux ; ce qui a contraint M. L. V. d'interrompre fon proce'de. QUATRIEME ProCede. Cette eau, foumife de nouveau a l'e- pteuve de l'are'ometre, avoit tres-peu, ou , pour ainfi dire, poin; du tout diminue de pefanteur, relativement a la quantite de terre qui en avoit e'te fe'paree par les differentes diftillations ; d'ou l'Auteur con- clud que la terre tenue en diffolution, augmentoit peu, ou meme nul- ment , la pefanteut de l'eau, ou bien , que cette terre n'exiftoit pas dans l'eau, lorfqu'i l'aide de l'are'ometre, il en avoit fixe la pefanteur, ou qu'elle avoit e'te' forme'e pendant l'operation , ou qu'elle n'e'toit feulement que le produit de l'operation. II e'toit cependant de la der- niere importance de determiner a laquelle de ces confluences on dc» voic s'arreter pour decouvrir la ve'rite'. Void la maniere done M» L. V. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 8r s'y ell oris : il a repe'te' les memes experiences dans des vaifTeaux fcelle's hermetiquement , apres avoir exaclement pefe' le vaifTeau 8c l'eau em- ployee; d'oii il devoit refulter qu'on connoitroit aife'ment par la fuite, ii la matiere du feu traverfant les pores du verre, fc combinoit avec l'eau foumifc a la diftillation, 8c en augmentoit le poids, commc il arrivoit an plomb, qui augmenre dc poids par la calcination, an point qu'un quintal de ce metal donne julqu'a cent dix livres de la chaux appellee minium; on fi enfin, e'etoit aux depens de l'eau ou du vafe qu'etoit produite 1'augmentation en terre, & par consequent, on pour- roit de'eider auquel des deux devoit etre attribue'e la diminution. Pour cet effct , M. Lavoifier s'eft fervi d'un alambic nomrac pelican , qui rccohobe fans cefTe la liqueur fur cllc-meme, a mefure que la diftil- lation s'opcre. CiNQUlEME Procede. Le pelican de verre blanc , avec fon bouchon de cryftal, apres avoir e'te' lave' avec l'eau de pluie diftille'e, apres avoir e'te nettoye' 8c feche' avec la derniere exactitude, pefoit une livre dix onces fept gros 8c demi. Le poids de l'eau e'toit de trois livres quatorze onces cinq gros 8c demi. SlXIEME ProCEDE. L'ouverture du pelican a e'te fermee avec un bouchon de cryftal bien ufe' 8c tres-jufte au goulot, recouvert enhiite d'un lut gras, fait avec de l'argille, de Phuile de lin cuite & du fuccin -, le tout recouvert d'une veffie mouillee, 8c afTujettie par plufieurs tours de ficelle. SEPTIEME ProcEDE. Le pelican ainfi garni & prc'pare', fut mis dans un bain de iable, & une lampe remplie d'huile 8c a fix meches, fut place'e fous le bain de fable. Ce feu a e'te continue fans la plus legere interruption pendant cent 8c un jours. La lampe e'toit mouche'e regulierement toutes les douze heures, 8c la chaleur qu'e'prouva conf- tamment l'eau renfermee dans le pelican, fut de 6"o a 70 degre's du thermometre de M. de Reaumur. Cecte ope'ration fut commence'e le 24 Octobre 1768. On n'appercut aucun changement pendant plus de vingt-cinq jours ; mais il commenca a etre fenllble au 10 Dccembre. A cette epoque , des corps extremement fins 8c delies paturent fe mouvoir avec vitefTe, & fuivre une direction conftante 8c circulaire : its s'clevoitnt d'un des cotes du vaifTeau, montoient en ligne droite, pour redefcendre du cote oppofe , 8c ils partoient toujours du cote ou la chaleur du bain de fable e'toit la plus vivc. Les jours fuivans, ces petits corps femblerenc etre augmente's en volume, & non pas en nombre ; peu-a-peu la li- queur devint louche. Dans le courant du mois de Janvier , ces petites lames ou feuillets , commencerent a fe pre'eipiter •, a la fin du mois, on n'en vit plus dans la liqueut •, enfin, en Fe'vrier , le volume de la.terrc raffemblc'e an Aovt 1 771 , Tome I. L Si OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , fond da pelican , parut erre afTez considerable pour donner un re'fulrac de'cifi£ M. Lavoifier e'teignir alors la lampe , laifla refroidir les vaif- feaux , de'coeffa le pelican, enleva fcrupuleufement lc lut gras, & pefa de nouveau ion pelican , fans le dc'boucher. Le poids fut abfolument le meme que celui qu'on avoir de'termine avanc l'operation : ainfi n'y ayant aucune augmentation du poids total, ni de l'eau , ni -ar exemple, que les corps, comme la re'fine, la poix, &c. perdoient eur propri^te d'ifoler, des l'inftant qu'ils avoient ete fondus. lis one encore un autre dc'faut, c'eft qu'on eft oblige de leur donner une certaine epaifTeur , & d'affez grandes dimenfions, lorfqu'ils doivent fervir a ifoler de grands corps. De plus , il arrive que ces efpeces de pains ou gateaux fe deforment pendant l'e'te', & diminuent d'epaif- feur fous les pieds de la perfonne qui monte defTus : iecs , ils (ont fujets a le brifer, & eclatent quelquefois fous les pieds pendant l'hiver , SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. S7 quand le terns eft froid. Ces inconveniens ont de'termine M. dc la Fond a abandonner les gateaux, 8c a leux fubftituet des fupporrs de verre. Les Anglois n'ont pas d'autrcs maniere pout ifokr les corps anekclriques. La machine dont ils fe fervent, n'eft qu'unc planchc porte'e fur quatre colonnes de verre. Lorfque le corps anekclrique n'eft pas d'un trop grand volume, on le place (implement fur un petit plateau de verre ; ft e'eft une barre de fer , un tube de metal , &c. il eft plus finiple de les faire porter par des cordons de foie. Plus les corps font fukeptibles de contra&er la vertu clectrique par le frottement, moins ils (ont propres a tranfmettre celle qu'ils ont recue par communication. C'eft un fait reconnu de tous les Phyfi- ciens , a qui la propofuion inverfe a paru audi e'vidente. Cette pro- pofinon fit de'couvrir par M. Jallabert, quels e'toicnt les globes d'un meilleur ufage. o Outre la ijgetbode indique'e pour communiquer Y ileclriciti a un corps andeclrique , il en eft unc autre fort inge'nieu(e. Selon cette me'thode, on e'lectrife le corps par le moyen d'une phiole charge'e d 'e'leclriciti ', qui eft celle de l'expe'rience de Leyde. C'eft d'apres ce procede , que M. Lemonnier voulur prouver que V ileclriciti fe communiquoit plus fortement a railon des furfaces, qu'a raifon des maflcs. Les papiers publics publicrent avec emprcflement cette de'eouverte, & pludeurs Savans de'eidcrent tout de (uite, que M. l'Abbe' Nollet s'c'toit trompe', en afTurant prc(que le contraire dans un me'moire lu a l'Acade'mie. On jugera par le morceau que nous allons rapporter , de la nia- miere dc voir, & de 1'impartialite de M. S. D.L.F. « Sans actaquer, « dit-il , l'expe'rience de M. Lemonnier , qui me paroit tres-exadfe , » je ne puis m'empechcr de blamer cette le'ge'rete' avec laquelle on pro- » nonce (I hardiment &: fi promptement lur des faits qui me'ritent la » plus fcrupuleufe attention -, Sc que le Phyficien le plus e'claire' eft » oblige de foumettre a plus d'une eprcuve , avant de pouvoir fe de- 11 cidtr. Je conviens , & je le prouverai par la fuite, que M. l'Abbe » Nollet s'eft trompe' plus d'une fois ; mais je fuis perluade' que l'amour » de la ve'rire', & le delir ardenr que ce Phvficicn a toujours fait pa- » roitre pour les progres de la fcience, rcufTent engage' aconvenirde » certains faits qu'il a toujours refutes , s'il les eut vu conftates par « de nouvelles expe'runces, qui re'pandent un nouveau jour fur ces " faits & lur la maniere dont on les explique dans l'opinion contraire >i a la fienne >i. D'apres les faits rapporte's dans la difputc litre'raire entre MM. Le- monnier & Nollet, M. S. D. L. F. conclud de leurs expe'riences , que la majje , ainfi que la furface , contribuent I'une & I' 'autre a augmenter les effets de Vekclricite , tk qu'on ne doit point negliger ces deux moyens, Aout 1771, Tome I. S3 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lodqu'il s'agit de produirc de grands effets : il ajoute que toutes chofes, d'ai'leurs e'gales , il eft plus commode de mettre a profit l'avantage qu'on peur retirer de la furface. Ce chapitre eft un des plus inte'ref- fans. Les Phyftciens profiterent de la de'couverte des attractions 6V. re'pul- fions, pour rendre ce phe'nomene plus inte'reflanr 6V plus fenfible. L'une des experiences les plus curieufes, faites a cet e'gard , eft celle du carillon electrique. Quelques-uns avoient imagine de s'en lervir pour juger de l'intenflte' de la matiere electrique ; mais cette me'thode, quoi- que (ufceptible de perfection, ne paroit ni la plus cxadte , ni la plus avantageule. La feule application qu'on puiffe faire de cette experience , quoique fort inge'nieuie , eft celle qu'en fit, il y a quelques annees , M. de Buffon : il avoit diipofe' le carillon a l'une des fenetres de fori appartement, de fa$on qu'il communiquoit a une verge de ferifole'e, dont'il failoit ufage pour tirer Yelectriciti des nuages •> 6V il jugeoit , par le moyen des timbres, de Yelectriciti que fa barre coatraaoit. Le clavejjin electrique du P. Laborde , eft encore unc des inventions cu- rieules auxquelles le carillon donna lieu. Si les corps le'gers qu'on pre'fente a un corps eleclrife' , font attire's, ils ne le font pas tous e'galemcnt, quoique de mcrae efpece, de meme dimenfion , & de meme poids. La couleur qu'ils-ont, les rend plus ou moins fulceptibles de rimpreflion de la matiere ikclrique ; fait fingu- lier , mais prouve par Pexpt'riencc des rubans. Cependant M. de la Fond n'attribue pas cette difference a la couleur feule, il s'appuie du fentiment de MM. Dufay & Nollet , & dit que la matiere electrique, qui fe porte au globe qu'on frotte , y aborde /bus la forme de rayons , puijqu'elle fait prendre ( l'expe'rience le prouve ) cette direction aux corps le'gers qu'elle rencontre fur fon paffage. La propagation de la matiere electrique excita Pemulation des cu- rieux ; ce fut entre les mains de l'induftrieux M. Gray , qu'elle com- mence a fe manifefter tres-fenfiblement. Il parvint le premier a la tranf- mettre ielon route la longueur d'une corde de liuir cenr quatre-vingt- fix pieds , mefure d'Angleterre. Winkler affure que cette matiere par- court douze mille deux cents foixante-feize pieds en une feconde. MM. Watfon & Lemonnier pre'tendent qu'elle (e meut avec tant de rapidite , qu'il n'eft pas poffible d'alligner le pen de tems employe a parcourir cet efpace. Cette rapiditd a donne lieu a quantite d'hypothefes diffe'rentes. La plus probable eft celle dans laquelle on fuppofe que tous les corps font impre'gne's du fluide electrique , qui fe meut avec la plus grande facilite dans les pores de certains corps. On pent rcgarder le corps fufceptible dVlectricite', comme un canal plus ou moins long , rempli d'un fluide qui ne peut etre poufle par unc extre'mite, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 89 extremite , fans qu'il ne s'echappe aufli-tot , Sc continuellement par l'autre. M. de la Fond rapporte tres an long les experiences propres a de'- celer le feu ikclriquz , & a le faire connoitre : nous nous difpcnferons d'analyfer cette partie; elle exigeroit de trop grands details. Si l'on s'en rapporte au fentiment de M. l'Abbe Nollet, la matiere ikSlrique Sc la matiere du feu ne font qu'une feule Sc meme matiere, produifant les memes effets ; il eft important d'en faire connoitre l'a- nalogie. i°. Elles naiflent Tune Sc l'autre d'un frottement, ou plutot le frot- tement les dc'veloppe. 20. Elles fe communicjuent egalement l'une Sc l'autre a un corps qui n'a point e'te frottc, 5°. De meme que les corps acquierent, par le frottement, une quan- tite de chaleur proportionnee a leur dcniite' Sc a leur elafticire', de meme ceux qui s'eledrifent par le frottement, font d'autant plus ikc- triques , que leurs parties font plus roides &: plus e'laftiques. 4°. Ve'letfricite Sc le feu fe propagent avec beaucoup plus de facilite' dans les me'taux , que dans les autres corps. 50. Le feu ne trouvant point d'obftades , Sc cedant au premier de- gre de mouvement qui l'anime , fe diflipe fans chaleur fenfible , Sc ne produit , tout au plus , que la lumiere : mais quand (on effet eft retarde , & qu'il trouve de l'oppofition, il croit de plus en plus par la force qui continue de Panimcr. L'expc'rience prouve la meme cnofe de 1Y- U6lricit(. 6°. La matiere du feu produifant la lumiere, fe meut plus librement dans un corps denfe , que dans un milieu plus rare. 11 en eft de meme de YdeSlricit^. 7°. Le mouvement de la lumiere fe tranfmet en un inftant a de tres-grandes diftances. II en eft de meme de YdeSlricite. 8°. U/letfricite, comme le feu , n'a jamais plus dc force que dans le grand froid , lorfque Pair eft fee & fort denfe. Quoiquc l'Auteur foit tres-porte a admettre une identite cntre la nature de la matiere deSlriqut , Sc cellc du feu ou de la lumiere , il ne conclut cependant pas avec M. l'Abbe Nollet , qu'il ne peut y avoir de difference entre ces deux matieres ; il fe contente de rapporter plu- fieurs obfervations e'ehappees a la fagacite de M. l'Abbe' Nollet, dont nous citons les principales. i°. Quoique la lumiere fc propage tres-promptcment , il n'en eft pas de meme de la matiere igne'e, Sc de la chaleur qui l'accompagne, ellepenetre tres-lentement les corps. UeleSlricitJ, au contraire, les pe- iictrc tres-rapidement. Aout x 77 1 , Tome I, M 9o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , 2°. II faut un terns affez condde'rable pour diiTiper le feu; un inftant fuffit pour diffipcr Wleilricite'. 3°. La matiere ignee e'chaufFe un corps en le pe'ne'tranr, il n'en eft pas de meme de Ve'U&ricite. 40. Vek£lric!te fe manifefte autour des corps e'lectrife's par une ath- mofphere fenfible : on ne peut pas en dire autant de la matiere igne'e. 5°. Le feu qui s'echappe d'une fubftance embrafee, penetre indii- tincftement tous les corps qui lui font prefentes : Ye'leSlriclie ne pro- duit pas les memes effets. 6°. Ve'leilricite n'eft jamais plus abondante qu'en hiver; &c'eft pre- cife'ment le terns ou la matiere igne'e eft moins repandue dans l'athmoi- phere. 7°. Le feu rare'Se les corps qu'il penetre : il n'en eft pas de meme de 1' 'e'leclricite'. 8°. Le feu penetre aifement toures les graiffes 8c les matieres hui- leufes : il n'en eft pa; de meme de i ileStricite. 9°. La flamme adhere, par fa bafe, au corps enflamme; les petites flammes fpontane'es qui s'elancent des conduiSteurs , y adherent par leurs pointes. Les u'ifterences de la matiere deSlrique , &c de la lumiere, font en- core bien remarquables. i°. Si Ton oppofe le doigt a quelque diftance d'un faifceau de rayons folaires, on ne detournera pas, pour cela, ccs rayons de la direction qu'ils affedtent. Si 1'on foumet a la meme e'preuve des rayons de ma- tiere e'leiirique , on les de'terminera alors a fe He'chir , & a (e porter vers le doigt qu'on !eur prelentera. 2°. La lumiere du (oleil ne penetre point a ttavers les corps opa- ques; la matiere e'lectrique, au contraire , penetre tres-aiie'ment ces fortes de corps, s'ils font andeSiriques. 3°. Les rayons du foleil porte's fur un corps , & qui l'c'chaurFent violemment , ne repandent point autour d'eux une odeur fenfible, tandis que Y e'leclricite' (e fait lentir a une diftance affez confide'rable, ik repand une odeur forte. 4°. La cclle de poiffon , la colle forte, les gommes & quantite d'autres corps , e'tant expofe's aux rayons du foleil dans l'etat de fic- cite , abforbent une grande quantite' de lumiere , &: deviennent en- fuite d'excellens phofphores ; ils ne peuvent cependant pas contrafter la vertu cledrique , par un femblable proce'de. 5°. Le diamant qui brille , lorfqu'il eft frotte , devient fortement eleclrique ; mais fi on le plonge dans l'eau, il conferve enluite fa lu- miere , & perd toute fa vertu ileclrique. D'apres ces observations , l'Auteur paffe a l'examen des aigrettes SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9t ileciriques. Il faut voir dans l'ouvragc mernc lcs details intcreflans & curicux qui lc portent a conchire que la mature ileSlrique , qui s'e'lance (bus la forme il faifoit plus, il leur promettoit une prompte gue'rilon , parce que, difoit-il, il avoit une maniere particuliere , & H lui feul connue d'adminijlrer Vi~ leSlriciie'. Cette anr.once mcrveilleufe produifit deux efFets dans un terns auquel on ne penfoit preiquc plus a Ye'leclricite' me'dicale. Le grand nombre, toujours avide de nouveaute's , accurillit aufli-tot cc (pe'ci- fique , & plufieurs malades fe mircnr entre les mains de l'Efculape e!ec- inc. Quelques fucces ave'res augmenterent la refutation. On ne par- lour 1 7 7 1 , Tome I. 9 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Ioit par-tout que de M. l'Abbe Sans , & il etoit prefque du bon ton d'avoir dcs rhutnatifmes a confier a fes foins. Quelques-uns, cependant, rappellerent les charlataneries de Pi- vati , les mauvais fucces de M. l'Abbe Nollet , aux Invalides , & trai- terent de fables faites a plaifir , tout ce qu'on avoit dit a ce fujet. Les gens fenfe's mepriferent ces declamations outre'es, & ne s'en tinrent qu'a l'expe'rience , qui fembla juftifier les pretentions de M. l'Abbe Sans. On vit des progres dans la gue'rifon de fes malades , dont au- cun , cependant , n'etoit encore entierement gueri , quand M. de la Fond ecrivit fa lettre. Nous louons, avec une veritable fatisfa&ion , le zele de M. l'Abbe' Sans •, nous y applaudirions cependant encore avec plus de plaifir, s'il ne mettoit pas du myftere dans fa maniere d'ope'rer : pourquoi la faire regai'der comme un arcane, lorfque tous les Phyficicns favent qu'il ne peut y avoir aucun fecret dans le pro- cede propre a exciter cette vertu , &c encore moins pour la faire paffer dans le corps humain ? Il ne faut que plus ou moins d'attention , rela- tivement au temperament du fujet , &c aux circonftances. Un vrai Pby- ficien , & un Patriote zelc1, eft comptable au public de fes de'couvertes; nous dirons , meme de fes conjectures, quand elles tendent au bien de l'humanite; telle eft la route fuivie par M. de la Fond, dans une lettre fur MikSiriciti medicale , imprime'e & adrefte'e a M. Caufan de la So- cie'te Royale de Montpellier , qui lui avoit demande les details de la methode de M. Sans , nous rendrons compte de cette lettre dans les cahiers fuivans. LETTRE De M. R**, ancien Capitaine d'Infanterie , a I'Auteur de ce Journal, fur le Mimoire de M. Fe rn e r , premier article de ce volume (a). Monsieur, J'ai lu, avec plaifir, votre Journal ; & la differtation du ce'lebre M. Ferner, fur la diminution de Yeau de la mer , m'a engage' a vous ( a ) Nous prions les perfonnes qui nous ils fe font contente's de pre'ienter des raifonnemens , des hypothe/es, fans annoncer des de'eouvertes fatisfaifantes. Nous fommes redevablcs au ce'lebre M. Dalembert, d'avoir commence a debrouiller ce chaos e'norme. Ces deux objets exigeroicnt que tous les Phyficiens formaffent entr'eux une efpece de ligue pour forcer la nature a leur re've'ler fon fecret. Quant a la troifieme qucftion, M. Ferncr ne la refout pas , il fe contente feuiement de donncr des e'claircifTemens fur ce fujet impor- tant, en rapportant dans fon Me'moire les preuves Sc les raifonnemens des meilleurs Naturaliftes qui ont e'erit pour & contre ce problem". Comme e'eft principalement en Suede que Ton s'eft occupe a favoir fi Yeau. de la mer diminue, ou fi la mer reprend, d'un cote , le terrcin qu'elle cede de l'autre , e'eft principalement d'apres les Me'moires des S'avans de ce Royaume , que M. Ferner eft parti , pour tacher de re- pandre quelque clarte'. " Nos favans Sue'dois, dit M. Ferner, tels que Hierne, de Bromell, » Stobe'e Sc Suedemborg , rapportent des faits qui de'montrent claire- » ment que la terre a augmente, Sc que les cotes de la mer fe font j> eloigne'es » -, mais on ne peut pas conclure de ces faits une diminu- tion generate; ainfi, nous paflerons a d'autres faits, pour en tirer des con(equences plus inftrudives. Celfius, Aftronome ce'lebre, voyageant dans les provinces de Hel- fingeland & de Madclpad, obferva que la Baltique a e'te jadis plus eleve'e , il en fut de plus en plus convaincu par les nouvelles obferva- tions qu'il fit a Balms Sc a Torneo, dans les ports de Fanum Sc de Gibbeftad. M. Von-Linnc'e , d'apres fes voyages dans le Gothland , la Veftro- gothic Sc la Scanie , de'montre que Paugmentation du continent eft la preuve de la diminution de la mer. M. Rudman a donnc lcs memes obfervations, par la decouverte qu'il fit de certains rochers, dont le pied s'elevoit de plus en plus au- deflus du niveau de la mer. M. Dalin, Chancelier de la Cour, ayan: Aout 1 77 1 , Tome I. N 9$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ve'rifie' les obfervations de tant de celebres Phyficiens , fe crut oblige d'adopter leur fyfteme. MM. Lc Baron Harleman , Chydenius &c Hafelquitz , ajouterent en- core aux preuves de tant de Savans , leurs observations particulieres. A certe e'poque, Ton regarda en Suede cette diminution com me une queftion rt%lue, Sc l'on penfa que la mer perdoit annuellement de /on volume, en perdant fucceflivement de (on e'levatijn ; cependant, en 1755 , M. Browallius, Eveque d' Abo, appella de cette efpece de de'- cifion, en attaquant les obiervations de M. Dalin, qui n'e'toient , a proprement parler , que celles de tous les Phyficiens que nous avons cite's : a tant d'ob/ervations , a tant d'expe'riences , a tant de Savans, &nfin , M. Browallius oppola la Genefe, dont le texte nc s'accorde pas avec le fentiment de ces ce'lebres Phyficiens. II oppofe a cclui de Levis-Evan, l'exemple tire' de la fontaine de Sainte Marie, attenant a l'ifthme de Cornavonskire , dans la Province de Vallis. A cette fontaine, dit M. Browallius, des Religieux venoicnt proceffionnelle- ment , Sc de terns immemorial , en prenant le terns de la baffe-mare'e ; ainfi , cette fontaine e'toit alors au meme niveau qu'elle l'efl aujour- d'hui. Queconclure, Monfieur, des obfervations faites pour & contre ? N'en faut-il pas revenir au fyfteme du ce'lebre M. de BufFon , qui avance que la mer perd d'un cote, Sc qu'elle gagne d'un autre; ce qui fotceroit a avouer que le volume d'eau de la mer eft le meme qu'il a toujours ete. Cependant, nos Savans du Nord, pour appuyer leurs fyftemes, franchirent la Baltique, qui n'eft qu'un petit point relative- ment au globe &c a la Mediterranee, qui n'en eft qu'un autre point; ils s'arreterent quelquefois a des cotes de la mer Oce'ane , Sc jamais aux ifles eloigne'es de la mer Atlantique , quoique ce foit feulement fur ces terreins e'earte's que Ton doit interroger la nature , pour con- noitre fes grandes operations-, mais enfin, en fuivant ces Savans dans la Mediterrane'e, qu'il me foit permis de leur dire, que lesifthmes, les diffe'rens continens d£ cette mer, fi fertiles en resolutions, que les ifles de l'Archipel Sc du Levant accrues & diminuees fucceffivement, cmelquefois englouties, quelquefois meme reproduites par l'explofion des volcans , par des fecoufTes & tremblemens de terre, ne devroient point etre l'endroit oil nos Phyficiens devoient chercher des preuves for la folution de ce probleme , la mer gagne -t-elle , ou la mer perd- elle ? Tous les indices que Ton tirera d'un terrcin ayant une bafe anfll variable Sc aufli peu aflure'e, toutes ces preuves, dis-je, feront in- certaines, vagues &c inconfequentes; cependant, la relation du voyage de M. Tournefort eft cite'e par nos Savans Sue'dois, pour prouver que Trabon place le port de Gortine dans l'ifle de Crete, a la meme diftance de cette ville, que M. Tournefort le trouva dans fon voyage ; voila done la mer qui n'a ni gagne ni perdu, fuivant cette relation; q SUR L'fflST. NATURELLE ET LES ARTS. 99 tnais cc raeme voyageur, ainfi que plufieurs autres tres-dignc; de foi , pirlent dans leurs relations de plufieurs veftiges de monumens Grccs, Arabes & Romains, tellcment fubmcrge's aujourd'hui, que Ton ne Ies apperc.oit que lorfque la Mediterrane'e eft limpide & totalcmcnt calme •, il s'enfuit done qu'a Crete , la mer n'a ni gagnc ni perdu , &c que dans les autres parties de la Me'ditcrranee, vifitees par M. Tour- nefort ,Sc par beaucoup d'autres Savans, la mer a gagne', puilque ces edifices aclucllement fubmerge's , ont ete jadis au niveau de la mer; 8c qu'en remontant au terns de leur conftruction , ils dominoient la mer, 8c fon nivcllemenr. M. Ferner cite aufli 1'opinion d'un Phyficien, qui parle de Cadix,, commc d'un port baigne aujourd'hui par les flots , a la meme hauteur qu'il 1'etoit dans lc terns des Romains : cette pofition de Cadix a echappe a l'Aureur , puilque Cadix c'prouve le flux & le reflux le plus regulier, ainfi que Peprouvent les ports de l'Oce'an, qui baigne Cadix, & que dans la Mediterrane'e, Ton nc connoit ni flux ni reflux; e'eft done aulfi mal-a-propos que M. Zendrini , cite par M. Ferner, parle dans fes obfervations faites fur Venile, de haute & de baffe mare'e, a moins qu'il n'entende par haute & baffe mare'e l'etendue des flots de la mer Adriatique, poufTe's, foule's &c re'percutcs avee violence par l'impulfion des courans, de la houle &c des tempetes : en effet , le port de Vcnife etant fituc: dans 1'anfe profonde de la mer Adria- tique , les vents ne fauroient agiter cette mer , fans exciter une ondula- tion tourmente'e , qui , cherchant a diverger fes flots 8c fes lames , & trouvant une re'dftance trop puiffante contre les rocs riverains de lHr talie , de la Dalmatic &: de la Moree , elle eft, dis-je, oblige'e a les pouffer fur les bas-fonds de l'anfe de la mer Adriatique, pres defquels des ifles affemble'es forment un corps de ville appellee Vcnife: ce n'eft done point mare'e que M. Zendrini devroit appeller cette ope'ration de la mer, qui n'eft ni re'guliere, ni certaine, encore moins pe'riodi- que , parce que Ton n'entend par le mot de mare'e , que cette habi- tude qu'a la grandc mer de s'e'lever, a tel inftant, telle heure & tel jour , de tant de pieds , a fe retirer aprcs tant de minutes jufqu'en fon lit, & a former enfin une montagne de vagues, al'heure , a l'inftant nom- me's , dans les deux grandes mare'es des deux e'quinoxes. Plufieurs Phyficiens, cites dans le Me'moire de M. Ferner , trouvent encore des prcuves qui les perfuadent que la Me'diterranc'e a perdu de fon volume, parce qu'elle fe trouve aujourd'hui eloigne'e de diffe'rentes Villes qui e'toient jadis ports de mer: pareilles reflexions n'apportent aucune convi&ion en favcur de leurs opinions, il l'on confidere que ces attcrriffemens font formes par les courans du Po , du Tibre, du Rhone , & de beaucoup d'autres fleuves recus dans la Mediterranee. Aour I 77 i , Tome I. Ni ico OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, C'eft pres de Pcmbouchure de ccs fleuves , que font placees ies Villes de Ravenne , Aigues-Mortes , &c. jadis ports de mer. 11 n'cfl done pas furprenant qu'un tel voifinage ait beaucoup contribue' a Ies eloigner de la mer, 8c qu'il Ies en e'loigne de plus en plus chaque jour. M. Ferner cite encore l'opinion des Phyflciens Suedois & Italiens, puife'e dans l'ouvrage intitule' : Telliamed. M. Maillet ou Telliamecl dit qu'A Carthage 8c a Alexandrie, la mer a bailTe de trois pieds quatre pouces en mille ans •, mais ii M. Maillet avoit fait fes obfervations de» puis le Cap Spartel, jufqu'a l'embouchure du Nil, il auroit trouve fur toute la cote nord-quart-oueft, nord , nord-nord , nord-quart-eft, des Villes 8c des Promontoites Submerges , d'autres afFaiffe's ; il auroit vu que la mer, dans d'autres endroits , s'eft ouvert des couraris, 8c a fait des depots. Si M. Maillet avoit e'erit de nos jours, il auroit vu, a Pepoque du tremblement de terre de Lifbonne, que Mogador, Ville Morefque , fitue'e pres du De'troit de Gibraltar , ne pouvoit recevoir aucune barque considerable , 8c que tout d'un coup,une chaine de ro- chers fermant la barre de ce port , s'e'toit afraifTce ; & que par cet en- gloutiiTement confide'rable , Mogador eft deveuu un port , ou , pour mieux dire, un de'partement de vaifteaux de guerre ayant vingt braffes de profondeur, 8c de bonne tenue, tandis que jadis il n'y en avoit que deux ou trois : pateil phenomene eft arrive fur quelques cotes de la Me'diterrane'e , & a la memc epoque. Voila done des pertes reelles pour la terre, 8c une acquisition de plus pour la mer; ainii, Monfieur , vous voyez qu'apres toutes Ies preuves que Ies Phyficiens Sue'dois one cherche'es dans la Mediterrane'e , ils ne fauroient en produire aucunes afTez convaincantes, pour affirmer que la mer a, perdu, & qu'elle perd & perdra toujours. Celles que ces Savans ont faites dans la Baltique, me paroiffent en- core moins fatisfaifantes , en confide'rant que la Baltique eft une des plus petites mers , 8c que Pon ne fauroit dire , telle chofe fe pafTe dans la Baltique, done elle eft telle dans POce'an. La Baltique, voifine des poles , l'eft pat conlequent des montagnes prefque toujours charge'es de neiges 8c de glagons ; la fonte de ces congelations entraine Ies terres , Ies forets, Ies pierres, 8c meme des rochers d'un volume 8c d'un poids enorme : ces torrens monftrueux paffant des collines ferre'es , dans des plaines laboure'es, entrainent ablolument avee eux tout ce qui fe trouve fur Ieur paffage. On en fait plus d'une fois la malheureufe ex- perience , & principalement le printems dernier a Riga & a Dantzic. Ces montagnes de matiere compacte & volumineufe , enttaine'es fuc- ceffivement a la mer , jointes aux atterriffemens des fteuves de'bouchanr dans la Baltique, font plus que fufKlantes pour charger chaque anne'e cette mer d'une couche de fables : ces fables amonceles doivent , a la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 101 fin, la combler, parce qu'elle regoit continuellemenc dcs couches He terre, 8c qu'elle ne fauroit en rejecter la moindre parcelle, puifqu'elle n'a aucuu debouche propre a cettc expulfion. D'apres ce fimple expofe, il ne fauc point avoir recours au proccde des pierres elevces par les chocs des glaces, fuivant M. Runeberg , pour prouver que la Balcique s'elevera au point , qu'a la fuite des (iecles , il pourroit arriver que l'on n'y navigcra plus qu'en certains endroits. La (urlace de la mer, fuivant les plus grands Phyiiciens, eft line, quant a la reffemblance avec la furface de la terre, e'eft-a-dire, qu'en certains endroits, les plaines font interrompues par des chalnes de montagnes > mais Ton a obferve fur terre que les terreins fe deta- chent fucceflivement des pics , Sc vont fe ranger en couche fur les plaines. Les fonds bas s'elevent de jour en jour par cette ope'ration , en s'enrichiffant aux depens des montagnes. Ainfi les plaines aug- mentent en proportion de l'afFaiffemeiyt des montagnes. D'apres cette ve'rite reconnue, la Baltique e'tant une plaine circonf- crite par de grandes montagnes , doit done naturellement diminuer de volume, fans que Ton puiffe dire, la mer perd : d'ailleurs, la Baltique n'eft qu'un point, fi on la compare a l'Oce'an; ainfi on ne peut , ni on ne doit pas conclure de la mer Baltique , que l'eau des grandes' mers diminue. La Baltique n'ayant qu'un flux Sc reflux communiques par l'Oce'an, il arrive ne'eeffairement que les ope'rations de la mare'e dans cette petite mer, ne font que momentanees, qu'elles ne font actives, re'a&ives, qu'en proportion de l'eloignement de l'Oce'an, fon moteur&(on agent , 8c qu'enfin par ces raifons, l'Oce'an y pouffant fes flots 8c les atterriffemens qui fuivent les courans , la Baltique doit toujours recevoir , fans jamais pouvoir rendre ; d'ou il fuit , qu'a la longue , elle doit fe combler. Vous voyez done, Monfieur, que nos Phyficiens Sue'dois ne doi- vent pas dire, d'apres les expe'riences faites dans la Baltique, la mer perd , parce qu'ils la voient s'eloigner de leurs bords dans certains endroits. C'eft un effet naturel 8c ne'eeffaire , dont on fera convaincu par ce que nous venons de dire. Jc croirois audi , que Meflieurs les Savans du Nord , pour s'affurer fi la mer gagne ou perd, devroient repe'ter leurs expe'riences loin de leurs cotes de l'Ocean , parce que routes les cotes du monde ont des courans, &, par confequent, des atterriffemens, & que la mer, par ces caufes, gagnera d'uncote',& perdra de l'autre. Apres tant d'expe'riences 8c de terns employe's inu- tilement a refoudre cette queftion , me feroit-il pennis de faire celle-ci? L'attraction des vapeurs eft-elle aujourd'hui moindre, ou plus confi- derable qu'autrefois? S'apper(joit-on que les iaifons foient plus ou moins chaudes, plus ou moins pluvieufes ? Y a-t-il eu , dans la haute re- gion , quelque changement qui puiffe troubler 1'ordre phyfique ? Si au- Aout I 77 i , Tome I. io2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cune de ces observation n'eft re'lolue, on pourra , je crois, conclure , fuivant M. de Buffon , que la met eft toujours a fon me me niveau ; que fi elle perd d'un cote, clle gagne de 1' autre. Veut-on enfin, Mon- fieur , s'afTurer de ce fait important : voici le moyen qui me paroit le plus siir. Il feroit ne'eeflaire que MM. les Acade'miciens de Stockholm , de Londres , de Paris , le reuniflent avec ceux des principales Acadc'- micsdel'Europe, pour engager les Souverains de charger leurs Pr-epoies dans les Ifles & Continens desquatre parties du monde, de faire tailler flir les rocs baigne's par la grande mer, des lignes perpendiculaires , fur lcfquels on de'figneroit le Hot ordinaire de la mer par cette mar- que I , le flot de la maree ordinaire par celle-ci Ijl , & enfin , le flot des deux marees des e'quinoxes par cette troifieme. j-" Ces fignes fe- roient furmonte's par une infeription qui fixeroit l'anne'e, le jour, &c. Les perfonnes pre'pofecs par les Souverains, enverroient a leur Cour, chaque anne'e, les obfervations fakes exa&ement ; & de cinq en cinq ans, elles feroicnt envoyees aux diffe'rentes Acade'mies de PEurope : les iiles les plus eloigne'es , les caps les plus faillans , etant les plus propres pour notre proce'de ; on le feroit repe'ter aux Manilles, a Ceyland, a l'llle de France, au cap de Bonne-Efpe'rance , a Sainte-He'lenc , a Gorec , aux Azores, a Finiftere, a Oii-ftint, aux Orcades , en If- lande, au de'troit de Davis, a l'lfle Roy ale de Terre-Neuve , aux Ber- mudes , a la Martinique , a Cayenne, a Surinam , a. l'llle-grande , au cap Home, a l'ifle de Jouan-Fernandes , a l'ifle de Salomon , &c au cap de la Californie , &c. Il me femble , Monfieur, que tous ces points d'obfervations, fuivis exaiSement & pendant long-tems, nous apprendroient enfin ce qu'il faut penfer de la pre'tendue diminution de l'eau de la mer. Toute autre experience feroit faite en pur perte dans les petites mers fujettes a des atte'rriffemens. J'oferois meme dire qu'elles conduiroient plutot a l'er- reur qu'a la de'eouverte de la ve'rite : quoi qu'il en foit , nous fommes portes a conclure que la mer gagne d'un cote' ce qu'elle perd de l'autre, SUR VHIST. NATURE LLE ET LES ARTS. [03 OBSERVATION Sur le Meteore que Von a vu a Paris le 2 7 Juillet 1 7 7 1 , pre'ce'de'e & fuivie de qudques remarques fur les Mete'ores en general , par M. Dubois D. J. JL, e s cffets produits par le feu, font fi diffe'rens & (i varie's, qu'on feroit rente de les attritmer a la meme cau(e, fi on s'en rapportoit aux premieres apparences. Ce Prote'e veur fans ceue nous faire illufion, & s'e'chapper , en prenant une nouvelle forme. Tantot il fe plait a unir des mixtes , tantot a les fe'parer. Ici , il imprime a l'air des fecouffes violentes qui nous effrayent ; la , il nous (atisfait par la douce chalcur qu'il repand dans l'athmofphere. Je le vois dans cet endroit exercer la puiffance fur tout ce qui eft aflez lc'ger pour olx'ir a fon adion ; dans cet autre, il renverfe , brife, de'truit tout ce qui s'oppofe a fa violence. Quelle varie'te' dans les phenomenes auxquels il donne lieu ! C'eft 1111 etre multiplie' a l'infini; il brille , il enflamme , il agit promp- rement, fe communique avec viteffe , frappe les corps julques dans lcurs moindres parties , met en fufion les me'taux , vitrifie, brife, de'- rruit fans enflammer, fait pe'rir des animaux, fans laifler aucune trace de mort bien marque'e : tantot , c'eft un tonnerre affreux , qui, par fes roulemens terribles, jette l'effroi dans le coeur des homines : tantot, c'eft un Meteore enflamme', qui, par fa lumiete eclatante, les eblouit & les e'pouvante. Quoique tous ces effets ne puiffent pas e'videmment s'expliquer par une meme caufe , il eft cepcndant vrai de dire qu'on doit plutot at- tribuer cette prodigieufe varie'te a l'etat different des corps attaque's par le feu. En effet, le principe de rinrlammabilite eft uni dans les corps, en plusoumoins grande quantite, & de diverfes manieres ; ce qui doit neceflairement diverfificr les phenomenes. Si le phlogiftique d'un corps , eft dans l'etat huileux ; & s'il y eft en grande quantite', ce corps eft tres-combuftible ; il brule avec une flamme tres-brillante & tres-lumineufe ; fi au contraire , le phlogiftique de ce corps 11'eft point l'etat huileux ; mais s'il eft abondant ou combine d'une maniere peu intime , ce corps peut etre audi tres-combuftible, & brnler avec flamme ; mais alors cette flamme eft plus le'gere Sc moins lumineufe. Enfin , fi le phlogiftique de ce corps eft fortement combine avec fes principes non combuftibles , il brule difticilemenc , fans flamme fen- lible , & feulement en rougiflant. Aout I 771 , Tome I. io4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , D'apres ccs principes , il eft facile d'expliquer la caufe & la nature des Me'te'ores ignis , pendant li long-tems l'cffroi des efprits fuperftitieux &c foibles. Defcartes e'erivit un des premiers fur cette matiere ; il l'ex- plique & la prefente fous line forme tres-ingenieufe , & Ton feroit tente' d'admettrc fon fyfteme. S'il y a eu dc grandes chaleurs , dit-il , & fi le terns a e'te' fee , il y aura neceffairement dans l'athmofphere une grande quantitc d'exhalaifons tres - fubtiles & tres-difpofe'es a s'enflammer. Alors , quelque petite que foit la nue fupe'rieure , quelque lentement qu'elle defcende, il paroitra ne'eeffairement une flamme le- gere qui fe diffipera a l'inftanr , & Ton aura des eclairs fans tonnerre. S'il n'y a pas dans l'air des exhalaifons propres a s'enflammer, & que la nue iuperieure defcende avec impe'tuolite', il y aura des tonnerres fans e'clairs. Voil.i pour les Me'te'ores igne's de la premiere clafle, je veux dire le tonnerre &; les eclairs. On conviendra fans peine qu'il faut vraiment avoir du ge'nic pour railonner ainfi, prefque lans aucune connoiffance de 1'eledfcricfte. Mais depuis la de'eouverte Sc les progres de cette pro- prie'te des corps , que de conlequences claires & pre'eiies fur une matiere j'ufqu'a preient fi obfeure ! Quelle the'orie lumineufe fur ces phe'no- menes ! Depuis que Ton reconnolt une parfaite analogie entre le fluids e'Uclrique &c la matiere des Me'te'ores igne's, e'eft un paradoxe que de ne pas y reconnoitre les fculs effets d'une grande e'leiftricite. Les Pliyficiens ont eu le bonheur de voir leurs travaux couronne's par un fucces e'clatant ; mais comme on aime a exage'rer , on a ete' j'uf- qu'a attribuer a l'eleclricite la caufe de notre fame & de nos maladies. Les vapeurs d'une jolie fern me n'en e'toient que la fuite, L'e'lecfh'icite eft peut-etre un fil mis dans nos mains par la nature, pour nous con-' duire surement dans le labyrinthe de fes myfteres , tout homme fenfe en conviendra •, ccpendant , il ne faut rien outrer , Sc e'eft ce qu'ont fait ceux qui e'toient peu inftruits fur cette matiere , en attribuant au cerf-volant eledtrique , lance dans les airs par M. le Due de C. , le 17 Juillet , un effet aufli furprenant que le Metiore , obferve' a Paris le racrac jour. Ce Mitiore pre'fenta une lumiere tres-eclatante , fous la ( a) forme d'un globe de feu. II fut appercu a dix heures trente-fix minutes du foir , du cote' de l'oueft-nord-oueft de Paris. II e'toit plus gros & plus brillant que la lune, &c le ciel femblaetre entr'ouvert dans une e(pace de 1^ ou 20 degre's. II prit enfuite la forme d'une larme batavique, laiffant derriere lui une queue tres-longue & tres-large , en forme de lance, crenele'e, blanchatre dans le milieu, jaune fur les bords, & qui paroiflbit jetter des etincelles de couleurs variees. 11 s'avanca du (a) Cell d'apres M. de la Lande, que j'ai rtfdigd la plupart de ces Obfervatious. Files n'en deviennem que plus ime'reflantes. nord-oueft SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ic? nord-oueft au fud-eft, un peu moins rapidement que l'auroit fait unc fufe'c. Le grand eclat n'a dure qu'une fecondc, la lumiere e:toit bleu'itre, iv: la trace que le globe de lumiere laiflbit apres lui , s'ell abaiflee en divers endroits de Paris , de manierc qu'on a cru que ce feu ctoit tombe'. Les uns difoient l'avoir vu tomber a la place Vcndome-, les autre; dans la rue des Bons-Enfans , au Jardin du Roi, dans la cour du Val-de-Grace, dans la riviere a l'eft de Paris, d'autres a PafTy , a Van- vres , fitue ail couchant de Paris; quelques perfonnes, dans cc dernier endroit , ont ete environne'es Sc meme e'blouies par une traine'e de lu- miere, fans en avoir refTenti d'autre incommodite' •, cependant, quel- ques-uns avancent qu'une fern me en a eu les cheveux brulc's, Sc le fait demandc confirmation. II n'en eft pas de meme des dalles dc Berci , elles ont e'te noircies. Ce globe lumineux s'e'panouit a Chaillot , & e'clata du cote de l'Orient, en re'pandant une lumiere blanche, avec nombre d'etincelles femblables a cc qu'on nomme e'toiles dans les feux d'arrifice. Un Curieux obferva ce Me'te'ore a Pafly , Sc eftima que ce feu pou- voit avoir quatre ou cinq pieds de longueur; la couleur e'toit jaunc, Sc fe changeoit en celle d'un rouge aflez vif, a mefure qu'elle ap- prochoic de fon extre'mite termint;e en forme de poire. Ce feu lui parut defcendre jufqu'a la hauteur de fes fenetres , comme s'il eut e'te a la diftance de cinq ou fix pieds ; il s'epanouit alors en maniere de fleur a trois fcuilles , paree des plus belles couleurs de l'arc-en-ciel : la chambre fut remplie d'une lumiere bleue. On vit a Veriailles ce feu defcendre & remonter avec un grand eclat de lumiere. Le meme phe'nomenc a e'te egalement obferve a Cor- beil Sc a Melun. Il paroit meme que le bruit a c'te' plus fort de cc cote , ou Ton pre'tend l'avoir entendu a deux reprifes diffe'rentes : cette repetition ne feroit-elle pas plutot l'effet de quelque echo? Ce Me'te'ore. fe pre'fenta differemment a Senlis ; la lumiere etoit foible Sc fembla prendre naiflar.ee a l'oueft & traverfer a l'eft. On entendit a Paris, environ deux minutes apres le grand e'clat de lumiere , un bruit prefque femblable a celui que produiroit une voiture delcendant rapidement une colline. Ce bruit fe fit entendre pendant quelques fecondes , & meme felon plufieurs, pendant une minute , d'oii Ton feroit potte' a conclure que la detonation s'eft faite a huit on dix, lisues de Paris. Le ciel t;toit ferein depuis trois jours, & la chaleur tres-vive. Le thermometre, divifion dc M. de Reaumur, e'toit monte pendant ce terns a vingt-quatre degre's. Le jour de l'apparition du Me'te'ore., a. une, deux & trois hcures apres-midi , il e'toit monte a vingt-cinq degrcs ; le vent d'eft fouftla toute la journe;e , Sc tourna a l'oueft vers le foir. On apperciit peu de variation dans un barometre place prc^ Aout i 7 7 i , Tome J, O ioon trouve Le gypfiWfifWf*1. ^ Montm»tre , unc p«rr« ,/PJ hiM fn /n«ro« dans les cartiucs av SUR L'HTST. NATURE I LE ET LES ARTS. i i j Chine , le gypfe Jlrie , la fele'nite bien pure & bicn c'dulcorc'e, ont fondu en un verre d'un vcrd-jaunatre tres-tranfparent, Sc qui pcrce les creu- fets; lc fel fedatif a foumi un verre a-peu-prcs fembla'ble. Le Wrrre vitriole a donne une mafic blancluitrc , ftriaole, 5c demi- opaque. La pierre phofphoriquc de Bologne, une qui vienc d'unc Province limitrophe du Royaumc, & qui a 1'afpecb d'une pierre argilleufe par- femee de dendrites ; deux autres , dont l'une a le grain fin comme la pierre a fufil , &c qui fait feu avec l'acier; i'autre eft moins dure &c d'une couleur vcrd fonce'; une qui a peu de durete'; une autre qui refTemble a de la terre argilleufe dure, un fpath rouge fiuillete' , one fourni des verres qui etoient plus ou moins colores, 3c qui tous one attaquc les creufets. Le fable de la rhilre dc Seine, qui fe trouve a diffe'rens endroits, foit lur la chauflee e'leve'e devant la Sa-lpe'triere , foit au Point-du-Jour fur le chemin de Verfailles , foit dans le foffe creufe pour la Gare , foit lc celui qu'on a trouve a une grande profondeur, lorfqu'on a fouillc le puits de 1'Ecole Militaire , tous ccs fables contiennent beaucoup de pierres diffcrentes , 8c fur-tout du fpath; ils fondent tres-facilement , 6c lc fpath qu'on en fe'pare , fournit un tres-beau verre. Le fable de Nancy eft beaucoup moins charge de fpath ; il forme une mafte affez f olide lorfqu'on le met au feu ; le /path qu'il renferme fournit un tres-beau verre. Le glarea de l'lfle aux Cignes fond parfaitement. Une pierre rouge , qui forme de grandes couches parallelcs dans les Montagnes qui bordent !e chemin de Gottingue a Caffel, & qui n'eft prefque que du quarts mele' d'une terre qui paroit etre du fpath ou du gypfe , a parfaitement fondu dans fon fond en un verre tres- tranfparenr. Un granit de Bourgogne a coule en un verre mouchete' de taches d'un brun fonce'. Le granit d'Alencon fond pareillement lorfqu'on l'expofe en nior- ceaux au feu. Une terre rougedtre de Bourgogne , qui paroit etre du debris de granit , coule de meme. Le medulla Saxi , qui a l'afpect favoureux d'une argille lave'e pour en fc'parer la partie la plus groffiere, fait une rres-bonne poterie ; la matiere prc;cipitee la premiere n'eft qu'un fpath qui a fait un verre tres-colore. Les e'preuves rapportees dans le premier Memoire , prouvent la meme chofe. L'albatre gypfeux a pris un peu de cohefion avec le fond du creufet ; il n'a pas fondu, parce que le feu ctoit foible j car il eft abfoiument dc meme nature que lc gypfe. Aovt 1771, Tome I, I' ii4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Un fp ith fufible d'Allemagne tres-blanc, & demi - tranfparcnt , a coulc da bords vers le centre en un verre noir qui paroit conrenir des parties de fer. La mariere du centre eft une poudre grife, qui blanchit dans les acides,& s'y diffout en partie-, lorfqu'on la met dans l'efprit de iel , il s'en exhale line odeur de foie de fouffie. M. Darcec hafarde fur cela une conjecture tres-vraifemblable. II penfe que les eaux fulphurei/Je ihermaks pourroienr bien devoir leur odeur a un fp'-Uh femblable, qui auroit fouffert une de'compofnion par les feux fouterrains. La faujfe imeraude, la faujje imeraude bleudtre, la [aujfe amitifle , ont donne' un vetre qui perce les creufets. Les diffe'rens petrofitcs que M. Darcet n'avoit pas pu examiner dans fes premiers Me'moires, lui ont e'te' envoyes e'tiquetes pour la plupart de la main meme de M. Wallerius ■, favoir la pierre de roche cendrie , la pierre de roche jaundfe , la pierre d°. roche noire , la pierre de r-->che avec des veines d'un gris noir , la pierre de roche vcinee de gris & de jaune , la pierre de roche a grandes veines blanches & griles , la pierre de roche demi-tranfparente , ou agathe de Dannemarck, la pierre de roche d'un transparent rougeatre , la pierre de roche d'un jaune rou- gearre des Pyrenees : toutes ces pierres ont fondu comme les [paths fufihles; mais le verre qui en eft re'fulte, eft toujours un peu opaque, a l'exception de celui des [paths [ufibks , qui eft parfaitement tranf- parent. Le porphire rouge, le porphire verd des anciens , la [erpentine verte qu'on a fouvent pris pour {'ophite de Pline, ont fait un verre noir, un gran.it du Gave, pres de Pau. Le granit rouge, qui fert de bafe a la Statue de Pierre-le-Grand, a fondu en une maffe demi-tranfparente & grife ; tous les granits fon- dent a-peu-pres de meme. Vamiante file' a donne' un verre moins terne en-deffus & comme martial; mais cn-dedans, il eft parfaitement vitrifie & a un peu de tranfparence ; celui qui n'etoit pas file, n'a pas fi bien fondu ; il a/oit eu moins de feu pendant quelques heures. La pierre ponce a fourni un verre brun & tranfparenr. Une pierre noirdtre , venue de l'Auvergne , & qui paroit etre un pro- duit de volcan , a fait un email de couleur de cafe ; le dedans de la caffure eft vitreux. Une pierre d'un gris mouchete' de vert , produite e'galement par les volcans de l'Auvergne, a coule en un verre brun tranlparent. Un morceau de lave de la meme Province , a donne' un verre comme celui des bouteilles communes •, ce verre a un peu perce le creufet. Une pierre de Nieder-Menich , qui paroit avoir fouffert 1'adt.ion du feu , a donne un verre brun , couleur de cafe , terne en-deffus , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. rr; mais bicn fondu , 8c vitrifie' en-dedans; la pierre de volvic prcfente le meme phe'nomene. De routes lcs experiences faites fur des produics de volcans , 8c rapporte'cs dans le premier Mcmoirc, M. Darcct en conclut que le feu des volcans eft inferieur a celui qui cuir la porcelaine , puifque ce dernier fond des matieres que le premier n'avoit pas pu fondre ; on le voir e'galement par les experiences du fecond Mc'moire. Le liege fojfile nettoyc a l'eau bouillante jufqu'a ce qu'il foit devcnu blanc, a un peu durci au feu, mais il n'a point fondu-, le feu, a la ve'rite', a ete foible: la chaux fqffile mifc au feu, a fourni un petit enduit vitrcux , forme par les parcelles qui e'toient en poudre > les morccaux plus gros ont pris une le'gere teinte role, &c nc fe font point fondu s. M. Darcet penfe qu'un feu plus actif l'auroit fait entrer en en fufion , ainfi que le liege fqf/ile. La pierre de Peroufe a fondu 8c attaque les creufets ; fa furface eft d'un noir de fer fonce' : le vrai bafalte d'Egypte,a parfaitement coulc en une mafle opaque, brillante, couleur de cafe', comme le font tous les b a faites. Une elpece de bafalte d'Egypte a parfaitement coule. Le bafalte de la chauflee des Ge'ants, a donne un vcrre noir, mais clair 8c bien fondu. La lave de Saint-Lubery , en Languedoc; une lave verddtre , qui avoir fervi a fairc la hache d'un Sauvagc ; une pierre femblable a celle de Velvic, en Auvcrgne , & a celle de Nieder-Menich; le bafalte de M. Cronftedt , le gabbero d'ltalie , que M. des Marais a retrouve' dans le Limofin, ont tous forme des verres noirs 8c luifans. La terre de la foude , depouille'e de toute partie faline , a fourni un verre d'un brun-jaunatre. Quelques matieres metalliques , foumifes a Pexamen , ont donne les produits fuivans. L'antimoine diaphoritique , tres-lave & tres-pur , a fondu 8c fait un verre d'un beau jaune tranfparent ; une partie de l'antimoine s'eft fix- blime'e. La chaux d'antimoine , tire'e de l'antimoine diflous , par l'acide ni- treux, s'eft volatilife, 8c a fait a la partie fupe'rieureducreufet,un verre jaune tranfparent ; au-de(Tus du milieu du creufet , le verre eft gris de lin ; il n'y a qu'une efpece de fcorie grisatre dans le fond. Le bifmuth difTous par l'acide nirreux, 8c pre'eipite' par 1" alkali fixe , bien edulcore, fait un verre d'un verd fale & tranfparent, qui a un peu rougi le creufet. La chaux de {inc , prcpare'e par la defoliation avec le nitre , s'eft diflipe'e & ne s'eft pas meme attache'e au creufet, elle a feulement laiflc Jans le fond une trace legere de verre brim, Aout 1 7 7 i , Tome I, Pi 1 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le minium a fait un verre jaunc tranfparent tres-fonce, qui a percc le creufet. La chaux de Ion e'tain bien calcine, a fait un vetre jaune ttanfparent, couvcrt d'une pellicule grife , le'ge'rement violette. Une pyrite femblable a la pierre des incas , a coule en un e-mail brun Juifant, tirant fur le noir, couvert d'une croute terne, compofee de lames & d'aiguilles , diverfement figure'es ; cette matiere a pe'netre' le creufet jufqu'en-deflous, &z s'eft infinuee dans fes pores. La platine que M. Darcet a de'montre etre entierement attirable a 1'aimant , s'eft calcinee ; elle a pris un commencement de fufion , & une couleur noire, ce qui fait foup^onner a M. Darcet, que la pla- tine pourroit bien n'etrc que du fer, comme le foupconne M. Margraf. On trouve encore dans le premier Me'moire des experiences faites fur des matieres metalliques. ha. pierre des incas qui eft une pyrite martiale fulphureufe, s'en- flamme & le de'compofe au feu , elle a fourni une matiere noire terne , qui a diffous & perce le creufet. La manganefe a fondu comme les e'cailles de fer •, elle attaque aufli les creufcts. La malachite , elle reftemble a une petite ftalaclite , elle a fondu comme le fquamma ferri. M. Darcet penfe que e'eft du fer pur, & qu'elle ne contient pas de cuivrej au refte , il n'anSrme ccla que pour celle qu'il a eflaye'e. Le lapis lazuli a fondu Sc donne' une maffe vitreufe , d'un verd jau- ratre, ce qui decele complettement la presence du fer dans cette fubf- tance. La terre Sombre, tire'e des montagnes des Cevennes, oil elle fe troure entre les fentes du granit , a fondu comme de la chaux de fer ; cette matiere eft tres-dure a fondre. La chaux d'e'tain pre'pare'e par l'acide nitreux , a fondu fur les bords & dans le fonds en un verre demi-tra: i (parent ; le centre eft en gru- ineaux tres-blancs , la furiace interne du creufet eft convene d'une pel- licule terne & ridee, qui a monte jufqu'au bord, oii elle a fait un cercle de verre tres-jaune & tres-tran(parenr. Apres avoir examine en particulier chacune des fubftances rappor- tees dans les Me'moires de M. Darcet , ce Chymifte compare le re'- fultat du melange de plufieurs d'entr'elles , & il regarde comme faux, a bien des egards , ainfi que l'a fait M. le Comte de Lauragais, le prin- cipe de M. Potr , qui dit que deux matieres tres-difficiles a fondre , comme la craie & le caillou, lorfqu'ellcs font mele'es en une certaine dofe , entrent facilement en fufion ; il en donne les exemples fuivans •dans fon premier Me'moire. Quart\ Sc chjftix iuintis t mefures e'gales , lc melange eft forti du "V SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. iiy feu pcu lie, hpierre a fujil, &c la chaux e'teinte , ont produit le meme effet. M. Datcet n'afTure pas que ce melange foit ftbfolument infufible; mais il le croic de tres-difRcile fuiion. Le talc du kaolin Sc le quart\ , a mefure e'gale , n'ont pas fondu : une le'gere folution d' alkali fixe les a fair fondre. Le [path dur , avec la chaux eteinte , a mefure e'gale, a fait un verre opaque. Le gypfi fin, avec partie egale de chaux de marbre eteinte, a donne un verre opaque. Le gypfe fin, Sc la terre argilleufe , mefures e'gales; la matiere a fondu en un email blanc ; le core qui e'roic expofe' au dard de la flamme, a fait un verre tranfparent. Gypfe fin, trois mefures; kaolin lave, une mefure; la mariere a produit un verre blanc opaque , qui a entraine' le fond du creufer. Le gypfe fin , avec partie e'gale de pierre a fufil , a fait une mafle dure, lie'e &c opaque. Une mefure de craie de Brianc_on , Sc deux de gypfe , ont fait un verre d'un verd clair & tranf parent , qui a p rce le creufer. Pldtre , deux melures ; fpath fufible , une mefure; il en re'fulte un beau verre tranfparent , couleur dYmeraude. Mefures e'gales de gypfe fin , & de fable de Nevers, ont donne un verre demi-tranf parent. Deux mefures de ce'rufe , & une de quart\ , ont fourni un verre d'un jaune opaque, dont le defTus c'toit une fritte jaune Sc poreufe; le minium Sc la ce'rufe ont donne un verre femblable, ce qui a fait voir a M. Darcet que les verres tres-tendres & tres-fufibles , fe de'eompo- foient par un grand feu , puifque les memes matieres ont donne dans un petit fourneau , un tres-bon verre de plomb. Sable de Never?, huit mefures; fpath fufible , une mefure, ont fair un email demi-tranfparent, qui n'attaque pas les creufets. Huit mefures de fpath fufible , Sc deux mefures de craie de Brian- «;on , ont fait un vet re qui n'e'toit pas afTez fondu. Spath fufible , deux mefures ; gypfe fin , rrois mefures , pierre & fufil , une mefure ; il en eft refulte' un verre d'un blanc de lait , qui a rouge le creufer. Gypfe fin, argille pur , fpath dur , de chacun , mefures e'gales, ont donne un email blanc afTez bien lie'. fypfi fin-> fpath tendre, craie de Champagne; la matiere a com- mence a couler , elle etoit un peu fpongieufe , du rcfte , tres-opaquc 5c blanche. Gypfe fin, fpath tendre, de chacun une mefure, craie de Cham- Aout 1771 , Tome J. 1 1 S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , pagnc, deux mefures : il en eft re'fulte' un verre un peu opaque jatl- natre, & pas aflez fondu. Pldtre , argille pure, craie de Champagne, de chacun , mefures egalcs : ce melange a produit un verre aflez blanc , Sc fcmblable a unc forte de cryftal. Gypfe fin, argille pure , caillaux, mefures e'gales ; la matiere a coule en un verre d'un verd clair , tirant fur le jaune , & a rougi le creufer. Gypfe fin , argille pure , pierre a fujil, mefures egales; le melange a coule' , & fait un beau verre tranfparcnt & tirant fur le jaune. M. Darcet conclud , d'apres les expediences rapportees dans fon pre- mier Me'moire, qu'on peut faire de tres-beaux verres,fans y joindre aucun f el ou fondant pre'pare par Part ; que routes les matieres qui entrent en fufion, n'atraqucnt pas egalement les creufets ; que dans les me'langes, la combinaifon peut etre amene'e a un tel point de fa- turation , que les vaifleaux ne foient plus endommages ; ou s'ils le font , ce fera par l'intenfite du feu, aide de la matiere fondue, qui agira par fon mouvement de fluidite'. On trouve dans le fecond Me'moire, les combinaifons fuivanres. Argille blanche pure, 4 gros; quart^ en poudre , pierre a fujil , de chacun 1 gros ; ce melange n'a pas mieux fondu, que fi on avoit traite' fe'pare'ment ces deux matieres. Os de moutons calcines & laves, arretes & icailles de po;ffbns de mer calcinees & lave'es , de chacun un gros; la matiere a contradce adherence avec le creufet , & il s'cn eft fublime une partie , qui Pa enduit d'une le'gere couche dc verre. Pierre a fujil, argille blanche pure , gypfe fin , de chacun mefures t'gales; manganefe , 18 grains : cette matiere eft entree en pleine fu- fion ; mais le verre e'toit tres-colore. Albdtre, quart\, argille blanche pure, de chacun 4 gros; ce melange etoit a moitie vitrifie d'un verre clair jaunatre , comme celui du gypft- Fonde fur fes rravaux , qu'on peut appeller immenfes , M. Darcet penfe qu'il faut, pour que plufieurs matieres mele'es enfemble puiffent fondre , qu'une d'elles foit plus fufible que les autres,& que du mo- ment qu'une mole'cule eft entre'e en fufion , elle donne le branle a tout le refte ; mais que quand toutes font infufiblcs fe'pare'ment , elles le font e'galement dans leur melange. M. Darcet a jette un nouveau jour fur la the'orie & fur la pratique de la vitrification. Il a meritc, a tous egards , la reconnoiflance des Chymiftes, &PHiftoireNaturellelui doit des decouvertes inte'reflantes; en un mot , ces deux Me'moires font faits pour fervir de guide a ceux qui s'appliquent a ce genre de travail : cependant , nous ne regardons SUR L'HTST. NATUFELLE ET LES ARTS. n9 pa? comme exaftement jufte, !a conclufion qu'il a tire'e de l'aiftion du feu des volcans. M. Darcet p?n(e & corclut que ce feu eft mofns t€t\i que eclui qui a cuit la porcelaine dans les fourneaux de M. le Comte de Lauraguais, parce que, fuivant ce ce'lebre Chymifte , ce dernier vitrifie des marieres qui ont rtfifte a l'aifUcfn du premier. Cette con- clufion ne nous paroit pas affez exadte. II eft cerrain que plufieurs marieres jertees par les volcans, ne (ont fouvent qu'effleure'es par Tac- tion de ces fcux fouterrains, tandis que les m ernes , & plufieurs autres font quelquefois parfaitement vitrifie'es; ce qui eft prouve par le yerre de Naples , & par Vagathe noire virreufe d'lflande. Les recherches de M. Darcet fur lc diamant & fur plufieurs pierres prccicufes, font encore de nouveaux garants de cc que lui doivent la Chymie & l'Hiftoire Naturelle. Le premier travail que M. Darcet a fait fur le diamant , eft con- tenu dans (on fecond Memoire ; dans l'intcnrion de re'pe'ter les expc'- riences faites a Florence par les ordres du Grand Due, Sc celles que l'Empercur Francois I. fit faire a Vienne, on (e fervit de deux diamans ttes-brillans , pelant -~ de karar ; chacun fut mis (c'pare'ment dans un creufet de porcelaine, dont Tun e'roit parfaitement clos , Pautre perce de quelques petits trous dans fon couvercle : tous les deux le diifi- perent, comme auroir pu faire la goutte d'eau la plus pure. L'Aca- de'mie des Sciences ayant paru defirer que l'experience hit re'pe'te'e de maniere a conftater irre'vocablement un fait aulfi fingulier, M. Darcet entreprit de nouvelles recherches , qui furent le (ujet d'un trojfieme Me- moire , lu a l'Acade'mie le 19 Aout 1770. II mit d'abord un diamant dans un creufet de porcelaine, dont le couvercle avoit ete' ufe fur les bords memes du creufet , pour qu'il fermar plus jufte -, ce diamant a refte au feu pen lant la cuite de la porcelaine. Le creu'et e'rant rerire' du feu & ouvert, on a vule diamant dillipe, fans avoir laifTc aucune empreinte. Non content de certe experience, M. Darcet renferma le diamanr dans une boite de pate de porcelaine, qu'il coupa en deux he'.nifpheres ; il appliqua le diamant, en preflant un peu fur un des deux he'mi- fphercs, & par-deflus , il colla i'autrc avec de la barbofine ; dc ma- niere qu'il e't it impoifible de reconnoitre en quel fens la boule avoit c'te ouverre. La boule mifc au feu , en fut retite'e parfairemenr faine & en- tiere; ayant ete' cafle'e avec pre'caution , il trouva le diamant, qui eroit de nature r.oiratre & tt es-dur . dans l'e'rat oii il i'avoit mis , & toute la furface inte'rieure de (on lit etoit empteinte d'une efpece de fume'e qui I'avoit noircie. Le diamant avoit perdu fa couleur, & fa furface e'toit terne. La pierre avant e'te repolie , le Lapidaire trouva qu'elle s'c'toit blanchie-, mais qu'cl e n'avoit rien perdu de fon poids, de (on e'clar, ni de fa durete'. Ce meme diamant, mis au feu comme la premiere fois , s'eft volatilife , a l'exception de deux petits fragmens tres-le'gcrs J Aout 177 1 , Tome J. ii^ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , mais aflfez grands pour etre reconnus par le Lapidaire. Un fecond dia- mant, renferme de la mcme facon , a fondu , & a fair line efpece de vcrnis fur une partie de fon lit. Le Lapidaire a eflaye cette 'portion vitrifie'e , qui fe grifoit comme le diamant, & qui avoit plus de du- rete' que ies autres pierres; il a imagine' que ce pouvoit etre un dia- mant du Bre'fil, qui, de meme que routes les pierres venues d'Ame'- rique, a moins de durete', que celles que l'Orient nous fournir. Un quatrieme diamant , e'galement enferme dans une boule de pate de porcelainc, s'eft auffi dillipe', fans taifler ni trace ni fume'e. M. Darcet n'ayapc plus a fa diipolition le fourneau pour la porce- lainc de M. le Comte de Lauraguais , fit les experiences dans un fimple fourneau de coupelle ; il prit trois diamans, Tuii d'i de karat; les deux autres d'T'? & karat chacun ; l'un des deux c'toit plat &: mince. Tous les trois furent places lous la moufie , dans trois petites cou- pelles de porcclaine ; le feu a dure cinq heures, & a luffi pour operer la volatilifation du diamant. M. Darcet a eu occafion , dans cette e'preuve , de voir ce qui le pafToit dans fon ope'ration ; ce qu'il n'a- voit pas encore pu exe'cuter; il tira les coupelles adiffe'rentes repriles , & remarqua que la furface fe terniffoit , & le feuilletoit d'une maniere fenfible ; il put meme, avec le fecours d'une limple loupe, difcerner Tirregularite des couches, devenues apparentes par l'irre'gularite' de l'e'vaporation •, mais il ne vit pas la fume'e dont parle Boyle, & il penfe que cela peut venir de ce que les diamans qu'il a employes, e'toient plus petits que ceux dont Boyle s'etoit fervi. 11 refulte de ces expe'- riences curieufcs , que rous les diamans font volatils par eux-meines a undegre de feu aflfez mediocre, 8c fans le concours del'air, comme on le voit par les diamans renferme's dans les boules de pate de por- celaine ; qu'enfin , un feul diamant, foupijonne' etre cclui du Brefil, a fondu. Le rubis oriental, apres avoir e'te mis au feu, n'a perdu ni fes an- gles, ni fa couleur , d'ou Ton condud qu'il n'a point e'te' amolli, quoique on l'ait affirme' dans les expe'riences faites a Vienne. Apres avoir e'te' 45 minutes au foyer du miroir ardent , le rubis perdit prefcjue toute fa couleur, s'y amollit, devint luifant comme du fuif fondu, & regut l'empreinte d'un cachet •, mais cette pierre refta inalte'rable dans les experiences qu'on fit enfuite a Vienne, oil on la tint dans un fourneau, au feu le plus ardent , pendant trois fois vingt-quatre heures. Une emeraude non taillee a perdu fa tranfparencc 8c une partie de fa Couleur ; elie eftdevenue femblable au verd de montagne , mais ellc n'a pas ete' fondue ; elle blanchit & fondit a Florence , au foyer du miroir ardent. Un faphir oriental a e'te mis au feu, il n'a pas fondu, 2c ne s'eft pas mcme ramolli,mais il a perdu toute la couleur, La, SUR VmST. NJTURELLE ET LES ARTS. m La topa\e n'a perdu au feu, ni fa forme, ni fa couleur , ni fon poli. Le peridot, cctte pierre a coule' comme le verre le plus rufiblc. Vhiacynthe perdit un peu de fa couleur, mais rien de fa tranfpa- rence en ; ayant mis plufieurs au feu , une feule s'eft attachce au fond du creufer, 8c elle y tenoic peu; fa couleur approchoit de celle de la topa\e du Brcfil. V ami thy fie des Indes a perdu toute fa couleur , & eft devenue blanche 8c daire comme le caillou du Rhin, ou d'Alencon , ou tout aurre de la plus belle efpece. L'opale a perdu fon chatoyement , eft devenu femblable a W'mail blanc ; mais, ni fes facetres, ni fes angles n'ont point ete detruits ou arrondis, elle n'a point fouffert de fufion. La topa^e du Brcfil a blanchi au feu, 8c s'eft recouverte d'une pel- licula mince comme une feuille de verre caffant , qui pouvoit etre forme'e par la matiere colorante. La topa\e de Saxe a blanchi comme auroit fait le quartz , & fa furface eft devenue foyeufe. Le grcnat de Boheme a fondu, &c eft devenu noir& terne comme Wcaille de fer. Une pierre qui paroit etre une matrice de grenats , & qu'on dit etre un des mate'riaux primitifs du Ve'mve, mife en morceaux , n'a pas fondu, mais elle reflembloit a une mine martiale ; deux petits fragmens one coule' dans le fond du creufet, comme Vicailk de fer, Vame'thyfie d'Auvergne a blanchi , & eft devenu terne comme le quart{. Un cryfial qui fe trouve dans certain fable du Comte de Marmuros ou Maramaros en Hongrie, (ce cryfial a plus d' eclat que les autres cailloux) a un peu delate par fes angles, mais il n'a laifle voir aucunc apparence de fufion. Un caillou qu'on trouve dans les mines de diamant de Golcondc, 8c qui rcflcmble aux cailloux du Rhin, de Medoc , de Cayenne, a perdu fa tranfparenceA& s'eft brife' comme le quart\. Le caillou de Cayenne a blanchi comme le precedent ■, il eft forti du feu avec une teinte legere de couleur de fleur de pecher , mais elle ne parolt etre qu'accidentelle. Deux cailloux de Medoc , mis au feu , l'un en eft forti tranfparent comme le cryfial Ac roc he , l'autre a blanchi comme le quartos ce qui paroit venir d'une petite difference dans la purete' de ces pierres. Les me'taux 8c demi-me'taux ayant e'te traite's dans des boules de porcelaine comme le diamant, ont pre'fente' les phenomenes fuivans. L'or , un quart de guine'e d'Angleterre , peiant trente-huit grains 8c demi, a ete mis trois fois au feu; il a perdu un demi-grain dc ion poids a la feconde 8c troifieme cuke , mais rien a la premiere. La fe- Aout i 7 7 i , Tome L Q in OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, conde &c la troifieme boule contenoient 1'or qui s'etoit fondu Sc moule dans fon lit ; les deux premieres e'toient enduites d'unc couche de ver- nis ; mais les boules n'avoient ni fences ni gergures. \J argent de coupelk fe calcine, attaque le dedans de la boule, & forme line fritte fpongieufe, d'un-blanc jaunatre ; Y argent eft ttes- diliicilement contenu dans les boules, il s'e'chappe de tous cotes, & fe perd. M. Darcet a tente inutilement de tirer V argent de cette fritte, il n'a pas pu y re'uffir; il penfe qu'il n'en avoit pas une quantite lufti- fante. L'amalgamt £ argent 8c de mercure e'tant mis au feu, le mercure s'eft diftipe, 8c V argent s'eft coupcle, comme decoutumej en frittanc l'inte- rieur de la boule. Le cuivre , un gros trente-un grains, renferme fans air, puifque le cuivre avoit fait fon lit , a forme' une mafle de chaux ou e'caille de cuivre d'un beau rouge : la boule a creve' ; 8c Ce qui a coule', e'toit noiratre comme l'e'caille de fer; il eft refte un noyau moins calcine que le refte ; un autre morceau de cuivre , renferme avec de 1'air , s'eft calcine a un petit grain pres. L'acier s'eft calcine', fondu & fritte avec la porcelaine. L'e'tain fait un verre d'un beau jaune ; il s'eft une fois calcine en une chaux verte dore'e , comme fi elle eut contenu du cuivre , le verre en etoit d'un beau violet. Le plomb a forme' un verre jaune Sc tranfparent. Le Zinc a fait e'clater la boule, & a ete perdu; le peu qu'il en eft refte', e'toit noir dans certains endroits, & jaune dans d'autres. Le Hfmuth a fait un verre d'un violet fale , il n'en eft refte qu'un petit culot ; il s'eft fait une crevafle , par laquelle une grande partie s'eft dillipe'e. Le re'gule d' antimoine s'altere diflScilement ; cependant, a. chaque fois qu'il a e'te traite , une petite portion s'eft calcine'e , &c a fourni un verre d'un beau jaune tres-tranlparent. Le re'gule de cobolt s'eft fondu en partie en un* mafic d'un bleu tres- fonce' , le refte a e'te un culot tres-brillant; le cobolt n'a nullement en- dommage' la pate. Le rlgule d'arfenic a pe'netre' & fondu la pate en une fritte , fem- blable a celle que Yargent a donne'. Le mercure coolant mis dans un trou, qu'il ne remplifloit pas exade- ment , 8c qui fut enfuite bouche avec de la pate , s'eft diffipe' comme de l'eau. Le mercure pre'eipite' pur , 8c mis dans une boule d'une argille tres- tenace , s'eft diffipe de meme ; la platine n'a rien perdu , elle s'eft feulement trouvee Iie'e par des parties de fer qui y e'toient mele'es , & qui ont enduit Pinte'rieur de la boule d'une petite couche de vernis $ SUR L'HTST. NATURELLE ET LES ARTS. 12^ elle eft fortie du feu plus attirable a Vaimant qu'elle nc l'ctoit au- paravant. La matiere perle'c de K'rkringius a forme un vcrre jaunc tranfpa- renr, la houle n'a point e'te' endommagc'e. Les expediences de M. Darcet ne fc bornent pas a. cere /implement curieufes , clles de'montrent toutes que les rne'taux peuvent fe calcincr , & meme la plupart fe changer en verre, fans le concours de l'air,qu'on avoitcru j'ufqu'ici abfolument ncccfTaire pour ope'rer cette calcination ; que ['or eft aufli inattaquable au feu de porcelaine qu'a tous les autres ; que 1' 'argent , quoique metal parfait, eft fort infe'rieur a ['or; que le cuiwe tient le premier rang apres les rne'taux parfaits •, que le mercure jouit de la volatilite des fluides au plus haut degrc •, enfortc qu'on peut dire du travail de M. Darcet , qu'il en eft peu d'aufti confidc- rables &z d'auffi utiles aux progres de la fcience. Nous ajouterons a ce que nous venons de dire fur les cxcellens Me'moires de M. Darcet, une nouvelle experience de M. Macqucr, faite fur le diamant , dans la vue de s'afturer de plus en plus de la proprie'te finguliere que ce corps a de fe volatilifer. Dix-lept per- lonnes tres-inftruites , dans le nombre defquelles etoient MM. Darcet, Buquet , Rouelle , ont etc' pre'fentcs a cette cxpe'rience. La pierre a cte fournie par M. Godefroy. Le diamant foumis a l'aclion du feu pefoit -^ de karat ; il e'toit taille en brillant, & n'avoit aucun defaut, a 1'exception d'un perit ceil jaunatre. Le fourncau qui a fervi a le volatifer ayant e'te chauffe, oa mit une capfule faite d'une argille tres-re'fraclaire au-devant de la moufle, pour qu'elle s'e'ehauffat lentcment & fans fe fendre. Lorfque la mouHe a e'te' rouge , le diamant a e'te place dedans tk tenu de meme quelque tems fur le devant de la mouHe ; apres avoir enfonce la capfule dans le fond de la moufle, on en a ferme l'ouvcrture & on a poufle le feu. Au bout de vingt minutes, M. Macquer &c les te'moins de fon experience ayant vifite le diamant, l'ont trouve' brillant, d'une lumiere commc pholphorique, mais parfaitement entier , & paroif- fant meme avoir pris un peu plus de volume qu'il n'en avoit avant de le mettre au feu. La capfule ayant e'te' repoufle'e au fond de la moufle avec attention & la porte ferme'e , on ouvri-t le fourneau apr£s quarante minutes, & on ne trouva plus aucun veftige de diamant, & pas la moindre fente ni tache a la capfule; en un mot, cette ex- [>erience a reufti comme celle de M. Darcet , elle a meme dure' moins ong-tems que celles qui avoicnt etc' faite par ce celebre Chymiftc. Aour I 77 1 , Tome I. Q 2 124 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , M E T H O D E Facile de faire un Phofphore qui prendra & rendra la lumiere comme la pierre de Boulogne ; avec quelques experiences & observations fur le m?me fujet , par M. Canton. Mimoire traduit de I'Anglois. P R O C £ D E Pour faire le Phosphor e. V_> A L C I N E Z unc certaine quantite' d'ecailles d'huitres ordinaires, en les tenant pendant une demi-heure fur un feu bien foutenu ; lorf- que vos e'cailles feront abfolument reduites en poudrc, vous en fe- parerez la partie la plus pure en les criblant. Vous melerez trois quarts de cette poudre , avec un quart de fieur de foufre ; mettez alors ce me- lange dans un creufet profond d'un pouce & demi ; erriplifTez-le pref- que jufqu'aux bords ; vous le placerez fur le plus grand feu, oil vous le tiendrez rouge au moins pendanr une heure ; apres quoi, vous le laiflerez refroidir. Lorfqu'il fera abfolument froid , vous en tirerez la matiere, que vous couperez, ou que vous briferez; vous en broyerez les parties les plus brillantes, qui, fi votre phofphore eft bien fait, vous rendront une poudre blanche , que vous couvrirez en la de'po- fant dans une bouteille fermee herme'tiquement. Quelques parcelles de ce phofphore , lorlqu'ellcs ont e'te' expofe'es a l'air pendant deux ou trois iecondes , & qu'on les tranfporte fur le champ dans une chambre obfcure , donnent aftez de lumiere pour que l'on puifTe diftinguer les heures a une montre , pourvu que Ton ait ferme' les yeux deux ou trois minutes auparavant, ou que Ton ait pafTe ce terns dans un endroit peu e'claire. On peut audi, par le moyen de ce phofphore , reprefenter parfai- tement les corps celeftes, tels que Saturne & fon anneau , les phafes de la Lune, &c. II faut, pour cela, avoir leurs figures en bois, & les enduire de blancs d'ceufs , que Ton fau-poudrera de phofphore ; pen- dant la nuit, les bluettes qui partem du frottement d'une bouteille eledtrile'e que vous en approcherez , feront le meme effet pour e'clairer vos figures , que la lumiere pendant le jour. Permiere Experience. Apres avoir mis quelques parcelles de ce phofphore dans deux boules de verre fcellees herme'tiquement , je placai 1'une d'elles fur une fenetre expofe'e au fud , afin que les rayons du foleil donnaflcnt direitement fur le phofphore : je l'y laiflai SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 125 depuis le 15 De'cembre 1764, jufqu'au 25 De'cembre 1765 ; jc mis l'au- tre, pendant tout ce tems , dans un endroit oil le jour ne pcnt'ttoit pas. Au bout de cc terme, je les expolai a la lumiere en meme terns, Sc les portai enfuite dans une chambre obicure , ou elles parutent routes deux e'galement brillantes. DEUXIEME Experience. Ayant mis dans une boulede verre une certaine quantite' de cette poudre de phofphore , avec autant d'eau qu'il en falloit pour la faire adhe'rer au verre, de fac^on qu'elle cou- vrit le contour intc'rieur de la boule, qui e'toit fcelle'e herme'rique- ment, je trouvai que le phofphore perdoir, par degre's , fa qualite' de prendre & de rendre la lumiere; mais bien plus promptement en e're qu'en hiver. A la fin de la premiere annee , il ne donnoit pas la moindre lueur, lors racme qu'on le tranlportoit dans l'endroit le plus obfeur, apres l'avoir expofe au plus grand jour. J'obfervai audi qu'il perdoit , par degres, fa blancheur , & qu'il devenoit d'une couleur fort obfeure , iur-tout du cote qui touclioit au verre : quelques parties de phofphore , que l'on avoit fixe'es avec de l'efprit de vin ordinaire a l'entour de l'inte'rieur d'une boule de verre fcellee herme'eiquement , fubirent une le'gere alteration ; d'autres , fixe'es avec de l'sther , ne perdirent rien de leur vertu. Le Docleur l'Emery , dans fon cours de Chymie , pretend que le foleil detruitla pierre dc Boulogne; mais, par la premiere expe'rience il paroit qu'un phofphore de la meme efpece, re'fifta a l'aclion du fo- feil pendant deux moisj & il eft: certain, par la feconde, que l'eau Je de'truifit dans le meme efpace de terns : ainfi, ce que M. l'Emery attribuoit aux rayons du foleil , e'toit tres-probablement I'erlFet de l'ku- midite de Pair. Troisieme EXPERIENCE. Je melai dans une boulede verre hermi;tiquement fermee, un peu de phofphore, avec beaucoup d'efprit de vin ; je mis dans une autre boule , du phofphore avec de Pother. En aqi- tant les boules , les deux fluides devenoient biancs comme du lair ; mais lorfque les boules etoicnt en repos, le phofphore fe pre'eipitoit tres- Eromprement , & laiffoit les deux liqueurs parfaitement claires. Au out de quelques mois, l'efprit de vin avoit contractu une teinte jaune; mais Paethcr e'toit le meme que le premier jour. En remuant les boules pendant qu'elles font expofe'es au jour, tout le fluide contenu dans chacune d'elles , paroitra lumineux, fi vous le portez dans une chambre obfeure. L'sthcr fournit a prefent autant de lumiere que le premier jour-, mais Pefprir de vin en donne un peu moins. Quatrieme Experience. Le phofphore fee d'une des boules dc verre dont j'ai parle' dans ma premiere expe'rience , fut expofe' au jour , en le tenant pendanr une demi-minute fur une fenetre qui don- Aout I 7 7 1 , Tome I. 1 2.6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , noir au nord ; apres quoi, je le gardai dans l'obfcurite pendant deux jours &: demi. Au bout de ce terns, il brilloit, en mettant de l'-eau bouillante dans la boule qui le contenoit. Le lendemain , je l'expofai encore a la lumiere ; & apres l'avoir tenu pendant cjuatre jours & demi dans l'obfcurite , il donna de la lumiere dans l'eau bouillante; mais pas autant que la premiere fois. ClNQUlEME Experience. Je fis prendre de la lumiere dans le meme terns , & au meme degre , au phofphore des deux boules de verre dont j'ai parle dans rha derniere expe'rience , & je ks portai dans une chambre obfeure. Je mis fur le champ l'une des boules dans •un vafe d'eau bouillante •, le phofphore qu'elle contenoit , devint beaucoup plus brillant que celui de l'autre ; mais il perdit fa lueur fi promptement , qu'en moins de dix minutes, il fut abfolument obfeur; J'autre phofphore continua toujours a donner un degre confide'rable de lumiere ; il refta viiible plus de deux heures , & meme alors, la cha- Jeur de la main augmentoit fa lueur. L'Emery & Muskcnbrock pre'tendent que le phofphore prend moins At lumiere quand il eft chaud , que quand il eftfroid, puifque, dans le premier cas , il paroit moins brillant lorfqu'on le porte dans une chambre obfeure; mais cela peut venir, comme on 1'a vu par la der- niere experience, de ce qu'il re'pand plus promprement la lumiere qu'il a recue de la premiere facon , que celle qu'il a recue de la feconde: fii confe'quence, il doit perdre beaucoup plus de lumiere quand il eft chaud , que quand il eft froid , pendant le tems qu'on eft a Je tranf- porter de Pendroit ou il a recu la lumiere, dans un lieu affez obkur, pour qu'on puifte l'y obferver. C'eft, fans doute, aufli pour cette rai- lon , que le phofphore de Boulogne ne femble jamais aufll brillant apres qu'il a e'te illumine', & par confequent, en quelque fotte e'ehauffe par I'adion direde des rayons du foleil , que lorfqu'on l'a feulement expofe' a. un jour ordinaire. SlXiEME Experience. Je laiflai dans l'obfcurite' , pendant <5eux jours , les boules dont je m'e'tois fervi pour la derniere expe'- rience •, apres ce tems, je les mis l'une &c l'autre, au meme inftant , dans un vafe d'eau bouillante, place dans une chambre obfeure. Celle dont la lueur avoir ceffe dans l'eau chaude, ne fut pas viflble ; mais l'autre parut lumineufe pendant un tems confiderable. Lorfque le phofphore a perdu, par la chaleur de l'eau bouillante, autant de lumiere qu'il en a re<;u , il ne donnera plus de lumiere au meme degre de chaleur, a" l'on continue a le laifler dans l'obkurite' ; mais fi on l'expofe a un Jour ordinaire , on pourra re'iterer les expe'- riences avec le meme fucces qu'auparavant. Je 1'ai fouvent eprouve avec le phofphore fee de mes boutcilles de verre, qui ont e'te' lcelle'es SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. n7 hermctiquement pendant quarre ans , fans qu'il en ait foufrcrt le moins du monde, puifqu'il paxoit encore avoir la meme vertu aujourd'hui qu'au premier inftant. Septieme Experience. Faites rougir l'extre'mite d'une barre de fer d'un police en quarre; pofez-la horifontalcment dans une chambre obfcure, & laiffez-l'y refroidir jufqu'a ce qu'elle ne foir plus rouge, ou qu'elle foit a peine vifible : alors , prencz le phofphore fee qui a ere expofe' au jour dans une boule fcellee herme'tiquement , & appro- chez-le le plus pres qu'i! vous fcra poffible du fer , en y faifant tou- cher la boule dans laquelle il eftcontenu. Le phofphore qui , aupara- vant e'toit invifible, commencera a briller au bout de quelques fecon- des, 8c prodiguera fa lumiere avec tant de rapidite, qu'elle fera abfo- lument epuifee en moins d'une minute; apres ce terns, il ne brillera plus par le meme moyen, jufqu'a ce que vous 1'ayez expofe' de nou- veau au jour. La chaleur du fer lui fait rendre au bout de plufieuts jouts, la lumiere qu'il a recue d'une chandelle , ou meme de la lune. Celui qui ne donne plus de lumiere dans l'eau bouillante , brillera encore par la chaleur du fer : cette chaleur agit fi puiflamment, qu'elle fit rendre une tres- forte lumiere a du phofphore qui avoit e'te tenu pendant fix mois dans un endroit obfeur. Le fameux Newton , d'apres plufieurs raifons qu'il donne dans fon optique , conclud que les rayons de la lumiire font caufe's par de fort petites particules lanc/cs des corps brillans , & non par le mouvement propagi dans un MEDIUM FLUIDE. Sans avoir e'gard a Fopinion de ce grand Homme , on a avance' depuis lui , que la lumiere n'e'toit qu'un fluide repoujfant , mis en action par de violentcs vibrations. Or , en fuppofant cette derniere definition jufte, je regarde comme impol- fible de rendre raifon des phe'nomenes de la cinquieme , fixieme & feptieme expe'rience. Un corps qui , lorfque Ccs parties ont ete' agite'es par le meme degre de chaleur , donne de la lumiere , ou n'en donne pas , felon qu'il a e'te expofe , ou non , a la lumiere pendant quel- ques fecondes, fix mois auparavant; ce corps, dis-je, femble indiquer clairement fa fubftance , & les particules de lumiere, une forte attrac- tion, par le moyen de laquelle il conferve, ou roujours, ou du moins fort !ong-tems , ces particules de lumiete. En eftet , la lumiere que le phofphore rerlete quand il eft e'ehauffe a un certain degre', pa- roit etrc caufe'e par des particules e'trangeres , & non par aucune des fiennes propres , puiique cette lumiere diminue, & meme fc diffipe abfolument , avant que le phofphore foit aflez chaud pour briller de lui-meme, ou pour lancer des particules dc lumiere de fon propre corps. Les Adverfaires de la Do&rine Newtonicnne font ici fort embar- rafles, & demandent, pour fe tircr d'affaire, d dans un efpace auilt Aout i 77 i , Tome I. n8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cloigne que l'eft celui qui fepare le foleil d'avec la terre, line par- ticule peut fe mouvoir fans le choquer fouvent contre les autres par- ticules ? Done , felon le fyfteme qu'on leur oppofe, chaque portion de cet efpace doit en contenir des milliers. Mais on refoudra leur dirEculte', en fuppofant qu'il s'e'coule le plus le'ger intervalle poiTible , entre 1'e'mifTion de chaque particule , & l'e- miffion de celle qui la fuit dans la meme direction. Suppoie, par exemple , qu'un point de la furface du foleil lance, dans une feconde , cent cinquante particules ; ce qui eft plus qu'il n'en faut pour donner a l'ceil une lumiere continuelle, fans la moindrc apparence d'interruption , alors les particules , vu leur grande vclo- cite, feront les unes , derriere les autres a plus de 1000 de diftance; & par confequent , il y aura afTez de place pour laiffer pafler , fans qu'elles fe heurtent , celles qui les croifent dans routes les directions poiliblcs. M E M O I R E Sur quelques AZtites Jinguliers , vulgairement nommis Pierres d'Aigle, trouve's dans le Ducki d'Holface en Allemagne , & conserves dans le Cabinet de M. Henri Kan ne-Gjesse , Docleur & Pro- fcjfeur en Me'decine, \_j E S petites pierres que nous rangeons parmi les pierres d'Aigle, font tres-varie'es, quant a la forme inte'rieure ou exte'rieure ; & de-la, cant d'efpeces differentes. Pline, en parlanr des pierres pre'eieufes, fait mention des JEtites ou pierres d'Aigle , &c il afture qu'on trouve ces pierres dans le aid des Aigles, qu'elles font a-peu-pres de la couleur de la queue d'un. Aigle blanc , & que fans elles , les femelles de ces animaux ne pour- roient pondre leurs oeufs. L'e'timologie de ce mot aetite , me paroit afTez facile a trouver. L'on fait en effet que les Grecs appelloient l'Aigle Aitos. Cela fuppole , cetite en derive. Les propriete's pretendues que les anciens lui ont attributes ainfi que fa couleur & l'endroit dans lequel on difoit le trouver, fem- bloient fixer fa denomination. Pline, comme nous l'avons de'ja remarque, aflure que I'atite eft d'un tres-grand fecours a la mere Aigle, qui veut pondre ies oeufs, & qu'elle I'empeche d'avorter. ( Hifloire Nat. Liv. Ill, CHAP X). Mais il en eft plufieurs qui, non-kulemcnt, accordent a cette pierr: la SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. V9 la propriete' done parle Pline, mais qui prctendent encore, qu'atta- chee a la plante du pied, clle hate l'accouchemenc , 8c 1c rend plus facile. On ignore encore ce que Ton doit croire de cct effet mcrveilleux, accorde aux pierres » pres de Leucade , oil eft le Mont Tapius, fitue a la droite de Leu- " cade ». Ces efpeces different entr'elles a raifon de leur fubftance. L'une eft de la claffe des cailloux , l'autre peut etre range'e dans celle des pyrites , 8c l'autre eft compofce de terre calcaire &c friable , 8cc. Mais IT Ton examine leur forme exte'rieure 8c inte'rieure, la diffe- rence eft encore bien mieux marquee ; car tantot elle font blanches ou noires , tantot elles font jaunatres, 8c comme couvertes de rouille. Pline, a la ve'rite', dit que leur couleur tire fur le jaune , 8c qu'on les trouve dans le nid des Aigles ; mais cela ne peut s'appliquer a Vcetite, qu'il appelle prlcieux, 8c qu'il range parmi les pierres pre'- cieufes, a. raifon de fa durete, de fon poli 8c de fon e'clar. Sa figure eft inde'terminee. Vcetite eft quelquefois fphe'rique , quel- quefois hemifpherique, d'autres fois cylindrique, ou conique, & fou- vent il reprefente des corps cntiers d'animaux, ou de ve'ge'taux , ou des parties de ces corps. Tel eft Vcetite dont parle Kundmann , qu'il appelle cetito-colite , 8c qui reffemble parfaitement au membre viril dans fon c'tat d'e're&ion , avec les tefticules. Le Dodeur Leffer nous a laifle une defcription de cet at tie. J'ai dans mon Cabinet d'Hiftoire Naturelle , un cetito ■• trochite , qui, a fa (uperficie, preiente un cercle parfaitement rond. J'en ai un autre d'une maniere pvriteufe avec la forme d'un entrocle , dont la furface inferieurc eft tres-polie, & fur lequel Ton voit des lettres Chaldaiques tres-bien grave'es par la Nature. Nous ne pouvons paffer lous filcnce d'autres cstites pyriteux , trouve's fur les rivages de la mer, avec ceux dont je viens de parler. Leur Aout I 7 7 I , Tome J. R ijo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, figure exterieure eft tres-irreguliere; & an premier abord, elle ne pre'- fente rien que de fort commun. Mais fi 011 penetre dans l'interieur, on trouve un embrion ou noyau. Quand on les ouvre, ils pre'fentent line cavite' affez grande, lifTe Sc polie, qui n'eft pas parfaitement ronde. L'une de ces pierres a fur fa partie interieure la figure d'un Aigle fortant de fon nid , les ailes e'tendues ; l'autre repre'fente une mere Aigle qui couve fes ceufs. Nous en avons une , dans laquelle ont voir la figure de plufieurs petirs Aiglons iortans de leur nid ; fur la furface exte'rieure d'un autre eft repre'fente un Aigle planant dans les airs, tandis que l'inte'rieur repre'fente la figure d'un Aigle perche' fur un arbre ; une tete de Hibou paroit grave'e fur une troifieme, 8c des Aigles voltigeans, font defline's fur fa furface interieure. Chacun de ces embrions eft compofe d'un nombre infini de pierres pre'cieufes , entaffe'es les unes fur les autres, etroitement unies par leurs cote's ; leur eclat frappe les yeux. Nous ne trouvons nulle part la defcription de ces efpeces Seethes. Boyle, dans fon Traite de Porigine & de la vertu des pierres pre'- cieufes, parle de certains ostites tres-pre'eieux dans l'interieur, mais il ne dit pas un mot des figures d' 'Aigles qu'on y rencontre. C'eft pour- quoi nous rangeons ces efpeces Apatites parmi les productions furpre- nantes qu'enfante le Duche d'HoIface. Quant aux autres e(peces d'ectites , on les trouve vuides dans l'inte'- rieur , ou remplis d'une matiere femblable a celle qui les compofe. Cette difference a donne lieu a la diftinction d'tztite male, Scd'cetite femelle. Le male eft celui qui eft vuide a l'interieur, & la femelle eft l'atite rempli d'une matiere quelconque. Nous avons de'ja dit que cet embrion e'toit compofe' d'une matiere femblable a fa matrice •, on lui donne diffe'rens noms relatifs a fa for- mation ; on remarque que Vaztite argilleux contient toujours une ef- pece de caillou , dont 1'odeur approche de celle de la fieur de vio- lette, ce qui lui a me'rite' le nom de pierre violette : les ostites de la clafTe des cailloux renferment un noyau fort dur. Enfin , les cetites pyriteux contiennent de petits cryftaux, qui approchent de la nature, & de la durete des pierres pre'cieufes. Nous n'avons done pas eu tort de conclure que Vcetite , ou pierre (T Aigle, dont parle Pline , en tcrmes trop generaux, qui, felon lui, fe trouve dans le nid des Aigles , & qu'il range cependant parmi les pierres pre'cieufes , doit etre compte' parmi les pyrites. II nous feroit encore facile de demontter que le nom d'estites , ou pierres d' Aigle , ne vient pas de ce qu'on les trouve dans le nid des Aigles , de ce qu'elles fervent SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 131 a la mere Aigle pour pondre fes aufs , ni , E corps de cet animal eft d'une couleur bleue fonce'e ; & quand on l'examine de pres, elle fe change en celle d'un bleu argente. Son corps eft compofe' de deux parties plattes, minces, cartilagino-mem- braneufes. La plus grande eft oblongue , & s'appelle bafe , parce qu'ordinairement elle eft infe'rieure, lorfque l'animal eft dans l'eau. Voyei PI. 1 , P , Q , R , S , Fig. I , z 5 l'autre Q, Z , R , reff^mble affez a un triangle irregulier qui s'attacheroit perpendiculairement a la premiere par fon grand cote D, C, A. Comme cette partie ref- fcmble a une voile tendue , on lui donne le nom de voile , qui femble Aout 1 771 , Tome I. r34 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'autant mieux lui convenir-, qu'une autre efpece du mcrae genre s'.ippelloit voiliere. La bafe de l'animal P , Q , R , S , eft ovale , oblongue , &c tres- obtufe. Sa plus grande longueur eft de deux polices, & fa largeur eft d'un pouce ; fa furface fuperieure convexe , divife'e en deux parries cgales par la voile, qui coincide avec elle fi obliquement , qu'en fai- fant la fection A, C, D, on aura avec la ligne P, C, R, un angle aigu , repre'fentant la plus grande longueur de la bafe. La furface infe'rieure de la meme bafe ( representee toute entierc Fi aflez convaincantes, pour dire qu'on doit en faire un genre fe'pare'. M. Carburi , apres avoir examine' la voiliere , avoit fenti la ne'eef- fite d'en faire un nouveau genre -, ce qui n'a pas empeche que le fa- vant M. Bohadfchi n'ait affure que l'imprcffion faite fur la peau par la voildre , comme par les orties , devoir fuffire pour la placer au rang de ces dernieres, 8c qu'on devoir peu s'embarrafTer de la dirfe'rente ftruc"ture des parties ; ne'anmoins ce lavant ne laiffe pas d'attribuer a la voiliere la meme contexture qu'aux Midufes. Je crois cependant avoir dc'montre' que , ni les caraderes fixe's par M. Linnee , ni la figure cylindrique ou orbiculaire , ni la ftruthire inte'rieure des Medufes, ne peuvent s'appliquer a Varme'niftaire, ni a la voilie're : d'ailleurs, cc qui me porteroit a croire que M. Bohadlchi n'avoit peut-etre pas fous les yeux la meme efpece que M. Carburi a de'erite •, & ce qui acheve dc m'en convaincre, c'eft qu'il affure que le corps de l'animal qu'il examinoir, etoit fi tendre , que l'efprit-de-vin le diflblvoit, & meme le volatilifoit , tandis que Varme'niftaire , examine par M. Carburi & moi, fe deffe'ehoit & fe confetvoit facilement. Outre cela , la voile qui en fait une partie effentiellc , paroir devoir etre une marque ca- rade'tiftique d'un nouveau genre , qui contient deux efpeces. La pre- miere, fera la voiliere , de'erite par Fern. Imperato , Fab. Columna 5c Carburi -, l'autre , diftinguee par l'intc'grite' de fa membrane , fera Var-_ me'niftaire ou la Gattrc. Aout I 77 I , Tome I, S 1 3 S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , La premiere elpece , appellee voiliere , a ete de'crite par Cephalenus , fous Ie nom grec d Arminifiari ; c'eft pourquoi nous nous fommes fervis du mot gene'rique Armlniffiari , pour indiquer ces deux ef- peces. M E D U S E S. Premiere espece de Meduses. Medusa per contraclionem hemifpherica , leyis , tentaculis plurimis , membranes interims 14 punctata , revolutions detegendis. \^j E T T E efpece de midufe , examine'e dans fon lieu natal, a une forme he'milphe'rique, plus ou moins parfaite Sc rougeatre ; ion cote infe'rieur eft applati , & c'eft par-la qu'elle s'attache a la pierre ou au rocher , tandis que l'autre cote eft extremement mobile. Quelle que foit la cauie de fa contracT;ion , elle a toujours la forme parfairement he'milpherique , dans le terns de fa dilatation & de (on extenfion. ( Voye^ pi. 1 , fig. 3,4, 5. ) Elle fe comprime & laiffe entrevoir quelques-unes de fes parties inte'rieures. Nous defignerons ces deux diffe'rens e'tats par les mors de contraction & d'expanfion. ( Voy. Fig. j.) Nous tacherons de decrire cet animal dans fes differentes fltuations , & d'en donner une ide'e par la gravure. Pour qu'on puiffc voir la partie entiere & infe'rieure de cette efpece de me'dufe , il faut la fe'parer du rocher auquel elle eft attache'e. Je n'ai pu ope'rer cette feparation , fans endommager 1' animal , lorfqu'il e'toit en vie. ( Fig. 3. ) Mais , lorfque de'tachant le morceau d^ rocher, j'ai laiffe mourir l'animal dans l'eau douce, &c qu'enfuite j'ai caffe' peu- a-peu cette pierre , j'ai vu diftiniilement la furface infe'rieure dans toute fon e'tendue : elle eft rouge, rres-unie, & a un pouce ou environ de diametre. Certe furface, quoique plate 8c uniforme , eft cependant divife'e par quelques lignes d'un rouge plus fonce, en plufleurs feg- mens triangulaires , dont tous les fommets fe re'uniffent en un meme centre. Dans la partie convexe de l'animal contracle ( Fig- 3 , 4. ) on a pu appercevoir , par l'ouverture du milieu, un grand nombre de dente- lures rouges, qui, formant un cercle , donne enfuite naiffance aux cote's interieurs de l'ouverture-, plus cette ouverture eft grande , plus il eft facile de diftinguer les extre'mite's des petites membranes, le refte de la convcxite eft tres-uni, & d'un rouge vif; il a meme la figure SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i?9 d'un petit globe dc couleur e'carlate , recouvert d'une membrane tres- delic'e, que nous appellcrons cuticule dans la fuite de ce Me'moire. Cette cuticule ell commune aux deux furfaces; mais quand elle eft parvenue a l'ouverture , dont nous avons parle , elle le replie dans I'iiue'rieur, pour en couvrir les parois ; & par le moyen de la fubftance gelatineufe qu'elle y interpofe, elle forme une efpece de tegu- ment mobile qui fe tire & retire comme le pre'puce fur le gland , ce qui nous engage a lui donner le nom de pre'puce. Ce pre'puce conftitue la plus grande partie de l'he'mifphcre , quand l'animal eft contra&c' ; mais dans l'expanfion, il fe replie, de maniere que ia furface inte'rieure & concave, devient convexe. On voit alors qu'il prend naiftancc un peu au-defTous de la moitie' de la hauteur de l'he'- mifphcre. Cette furface interne du pre'puce , fi vous en exceptez les vingt- quatre points gris , qui , e'galement diftans les uns des autres , font e'loignes d'une demi-ligne de fon bord circulaire , cette furface, dis-je, eft luifante , rouge & unie dans toute fon e'tendue. La meme cuticule recouvre d'une maniere lache les points gris ; & fi on les eleve avec une aiguille , ils reffemblent a de petits tubes gris , ferme's & trcs- courts. Le pre'puce replie' , laifle encore a de'eouvert d'autres parties, que nous avons fait repre'fenter (Fig. 6. ) On de'eouvre, apre's cela, un petit he'mifphere concentrique, du meme poli &c de la meme couleur , qui lui fert, en quelque fac,on , de noyau , dans la convexite fupe'rieure duquel on trouve une ouverture correfpondante a la premiere. (Fig. 6 , 1,1.) Ces deux ouvertures, comme nous l'avons rcmarque' , peu- vent etre refterre'es ou dilate'es par l'animal ; mais quelques efforts qu'il faffe , on les appercjoit toujours. La bafe de ce petit hemifphere eft entourre'e d'une efpece de cou- ronne ou de zone (Z, Z, Z, Z, Fig. 6.) d'un rouge plus fonce', 8c de plus d'une ligne d'e'tendue entre la bafe de l'he'milphere & l'ori- ginc du pre'puce. Elle eft forme'e par une ferie de petits mammelons de meme couleur , ou de petites franges applaties , coniques , longues d'une ligne & demie , ayant tout au plus une demi - ligne de largeur a leur bafe , & finiffant pcu-a-peu en une petite pointe tres - mobile & flottante. Dans la contraction , rextremitc' des tentacules regar- dent l'inte'rieur de l'animal ; mais dans l'expanfion , elle eft tournee vers l'exte'rieur , & repreiente une zone radie'e. Voila, a-peu-pres, tout ce qu'on peut obferver fur les diffe'rens mouvemens de l'animal vivanr. Mais fi on veut examiner les parties internes du petit hemifphere, il faut , avec beaucoup d'attention, faire une fedtion dans fa convexite, de telle forte qu'on puifTe enlever les parties coupe'es, & qu'ellcs retiennent une fubftance femblable au prc^- Aout 1771, Tome I. S: Mo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, puce du grand hemiiphere. Ces precautions prifes ( Voye^ Fig. 7 > ou cette feclion eft reprefente'e ; ) on obfervera la coulenr rouge repandue dans toute la furface interne ; li on n'en excepte une ligne blan- chatre,& prefque tendineufe, (O , O, Fig. 7 ) qui prend naiffance a la bafe interne des parties coupe'es , fe dirige vers l'ouvcrture ronde, & fe termine pres de cette ouverture. Outre cela, on de'couvre une conve'xitc irre'guliere, perme'able dans fon mili u, qui conftituoit le noyau du petit hemifphere. Cette convexite eft forme'e par diffe'rens plis , dont cinq rapproches par leur limbe obtus , margine &c circulaire, laiflent un efpace e'toile', qui eft l'ouverture dont nous avons parle'. Cette ouverture, en forme d'e'toile, eft (urmontee par deux autres que nous avons de'crites, 8c qui font dans la meme direction. Elle s'elargit ou fe retre'cit , felon que les plis s'e'loignent ou le rapprochent , & fe termine en un creux large de deux ou trois lignes, & reconvert par des elpeces de valvules ou de levres. Nous avons trouve dans ce creux une matiere cendre'e & muqueule , unie a Peau , dans laquelle on appergoit , pour ainil dire , des vcftiges de diffe'rentes parcelles d'animaux qui lui avoient fervi de nouniture. Quoique j'aie roujours trouve' cette efpece de me'dufe attache'e a un rocher , & que je n'aie pu Ten de'tacher qu'avec beaucoup de peine , l'examen de la ftrudture de les parties me porte a croire qu'elle peur fe tanlporter d'un lieu a un autre, & qu'elle marche quelqucfois. Ne'anmoins, dans le mouvement de contraction qu'elle fait en le fixant fortement fur la bafe , fur-tout lorfqu'on l'irrite violemment , elle fe reflerre de maniere qu'elle n'a plus qu'un tiers de fon diametre Alors, on apper^oit a peine l'ouverture du prepuce, qui devient tres-petite, & quelqucfois meme il en (orr des portions de la fubftance muqueufe, que nous avons dit fe trouver dans le creux , & dont nous avons parle ci-deffus. Un Chat, a qui j'ai pre'fente cet animal, l'a devore' avec avidite', & n'en a point ete incommode. Les Pecheurs Pappellent rejiegcts , ainfi que toutes les autres orties marines. Ce fut au mois d'Aout que je trouvai cette me'dufe dans le creux des rochers, a l'abri des rayons du foleil. Sa rctraite eft un peu e'leve'e au-deffus du niveau de la mer, mais cependant elle eft de terns en tems fubmerge'e par les vagues. Je ne vois pas a quel genre on peut rapporter cette efpece de mi- dlife , a moins qu'on ne veuille la claffer parmi les orties rouges , dont parlent Rondelet & Bellon. Mais elles ne fe reffemblent que par la couleur Sc leur grandeur-, la fituation de leurs tentacules , la ftructure de leurs parties lont tres-differentes. De toutes les efpeces de rn/dufes connues, il n'en eft point qui approche plus de landtrc, lorfqu'elle SUR L'HIST. NATUREI.LE ET LES ARTS. 141 eft en contraction , que celle qui eft de'erite par Theod. Gronovius. ( Act. Hehet. Tom. I V , p. } 8. ) Cependant , avec un peu d'attention , on en faifit facilement la difference. Gronovius remarque que le corps de l'animal qu'il deem, eft d'une fubftance tendre &c tranfparente ; il parle de quaere cotes tranfverfales , d'un grand nombre de tentacules tres-petits , & e'gaux en grandeur, a l'aide defquels l'animal faute obliquement, & avec une viteffe furpre- nante dans l'eau , tenant toujours une partie de fon corps dirige'e en avant. Au contraire, dans l'efpecc dont nous parlons , la couleur eft pourpre , la fubftance eft ferme , & recouverte par une forte cuticule. Enfin , notre animal paroit prive de toute forte de mouvement, puif- •que jamais nous n'avons pu le voir nager •, il refte , apres 1a mort, toujours attache au rocher , & on ne voir plus enfuite les cotes tranf- verfales , dont Gronovius fait mention. Les midlife s , dont Janus-Planchus parle dans fon excellent ouvrage, intitule De minus notis , &c. n'ont aucur.e reffemblance avec celle que nous venons de de'erire. Ne fachant a quelle efpece la rapporter, j'ai envoye' a ce ce'lebre Naturalifte la defcription & le deffin reprefentant l'animal. Son fentiment a confirme le mien , & nous l'avons regarde comme une efpece nouvelle. AUTRE ESPECE DE MEDUSE. Medusa orbiculata, utrinque comprejpi , tentaculis marginalibus plurimis , perpetub nudis. O I l'on rencontre des varie'te's dans quelque efpece forties marines e'eft fur-tout dans celles que les Auteurs appellent cendre'es. En cftet les unes varient du cendre au Wane , les autres au gris, les autres au bleu , cellcs-ci au pourpre, celles-la au verd ; quelques-une memes font tachetees de gris, de pourpre & de verd. Comme routes ces varie'te's ne different que par la couleur, il paroit jufte de n'en point faire d'eipeces a part. Nous allons nous arrerer a une varie'te rare, & du genre de celles qu'on trouve fur les cotes de Nice -, nous l'avons fait defliner d'apres nature, dans la PL 1 , Fig. 8, 9. Le corps de cette midlife repre'iente un cerde applati , ayant 3 fon centre deux lignes d'epaiffeur , un peu plus d'une ligne a fa cir- confe'rence, & un pouce ou environ de diametre. Dans une detes furfaces, on voir cinq plis en cerceaux ( Z, Z, Z Z Fig. 8;, qui fe touchent vers le centre par leurs convexites, & rendent la bouche de la midlife a cinq Rvres. L'une 8c 1'autre extre'- Aout 1 7 7 1 , Tome L i4i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mite eft environne'e de beaucoup de plis femblables, qui, apres p!u- iieurs anfractuofite's , fe portent a la circonfe'rence & s'y continuent ; de forte, que tousces plis raffemble's, forment une feule & memefuper- ficie, Sc raflemblent a Pinteftin lie pres du mefentere. On trouve fous ces cinq plis tin efpace creux, large de deux lignes ou environ. L'autre furface de l'animal (O, O, Fig. 9 , ) eft prefque platte; elle eft recouverte par une membrane blanchatre rayonne'e par de tres-petites lignes divergentes. Si on la brife, il en fort une fubf- nnce gelatineufe d'un roux tirant fur le jaune. Vers les bords compris dans les furfaces que nous venons de de'- crire , & un peu plus du cote' de la premiere , on voir naitre un double rang de pointes , dont la couleur approche du gris-bleu S , S , S , Fig. 8 & 9,) elles ont un pouce de longueur, dirninuent peu-a-peu, cV deviennent moins colore'es : quand l'animal eft en repos, ces pointes font difpofees a-peu-pres comme les necT:aires de la Heur de la paf- fion,ou reffemblent plutot a une fleur radie'e , dont le difque eft blanc, & les rayons cendres. J'ai mis a mace'rer , pendant cinq mois, ces deux efpeces de mtdufes dans Peau fale'e ; &c pendant cet intervalle, je les ai obferve's plufieurs fois au microfcope ; j'y ai remarque' une cuticule couvrant tout leur corps , & elle s'eft conferve'e afTez ferme ; mais elle a feulement con- tracte quelques rides qui fe dirigoient de la circonfe'rence au centre, & e'toient aflez vifibles fur la furface applatie des deux efpeces : ces rides, ces plis, e'toient petits, &c avoient une direction circulaire, du cote' oil- eft place'e la bouche de la mddufe. Je n'ajouterai rien a ce que j'ai avance' des mouvemens de la me- dufe ; je dirai feulement que M. Verani , Medecin , mon ami , & ama- teur zele' de PHiftoire Naturelle, affure que cette efpece nage facile- ment. II en a trouve' aux environs de Ville-Franche en Pie'mont, fur les cotes de Nice , & il m'a affure' qu'elle fe confervoit tres-bien dans Peau de mer. ' Je ne connois aucane ortie qui reflcmble a celles dont je viens de donner la defcription , a moins qu'on ne les rapporte a V ortie cendree de Rondelef, mais, a en juger par la defcription imparfaite qu'il en donne, & la mailiere dont il Pa fait graver, « on ne pourra difcon- » venir qUe la longueur & la fituation des piquans de nos me'dufes , « ne prefentent des differences aflez fcnfibles , pour en fairc des ef- j> peces fe'pare'es ». On rious perrtlettta de faire plufieurs obfervations fur les difFe'rentes efpeces de me'dufes de'erites par M. Dana. Nous avouons , de bonne foi , que nous e'tions fort embarrafle's pour decider fi I'arme'nijiari e'toit vraiment une efpece nouvelle. Nous avons , dans cette incertitude, confulte M. Adanfon, doht les connoiffances fur PHiftoire Naturelle SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 14; lui ont me'rite la reputation dont il jouit. Nous dirons, d'apres le fentiment de ccc Acadeinicien , i°. que Varminiftari dt'crit par M. Dana , eft le meme que celui done Carburi & Columna ont parle, & que le Chevalier Von-Linne'e a place dans la famille des Medufes , fous la denomination de medufa veletta 1 i. Medufa ovalis concentrice Jliata t margins ciliato fupra velo membranaceo. Sift. nat. edit, u, p. 1098. Medufa veletta S. Galera L&fiing. it. 104. On peut encore con.- fulter a cc fujet les Mimoires de PAcade'rnie des Sciences, annee 1732.. On y lira, avee plaifir, la diflertation de M. de la Condaminc, dans laquelle on trouve la defcription d'un petit poijfon nomine vellette par les Provenfaux. Si on examine les figures 3 , 4 , <$ , infe'rees dans la planche 183 du volume de PAcade'rnie, &c qu'on les compare avec celles que nous avons fait graver d'apres les foins de M. Dana, on fera force' de convenir que fon armeniftaire n'eft pas une efpece nouvelle. z°. I.a feconde medufe dont parle M. Dana, medufa coccinea, ne parolt pas difterer de Vurtica rubra de'erue par M. Rondelet Sc par Belon. Tout au plus pourroit-on dire , que cette medufe e'toit encore jeune, & qu'elle n'avoit pas aflez de'veloppe fes caracteres fpecifiques. j°. Nous avouons, avec plaifir, que la troifieme efpece, medufa orbiculata , eft une efpece nouvelle , done nous devons la de'eouverte a M. Dana, de meme que de la fang-fue alpine, dont nous avons parle dans ce volume, (p. 54 , PI. 1 , Fig. 7,8,9,10, 11, iz.)Il auroit ete' a defirer que ce Naturalifte fe flit fervi d'une plus forte loupe; il auroic pu alors de'terminer la forme de la bouche de cette fang-fue, & nous faire connoitre les anneaux dont vraifemblablement le corps de l'animal eft pourvu. M E M O I R E Sur des Vers rendus par les narines. Par M. Won lf AH RT. Kj N vieillard, age de 67 ans, occupe dans une faline pour gagner fa vie, vint me dire dernierement que, depuis huit jours, il etoit tourmente- de violens maux de tete, & que la douleur alloit quelque- fois jufqu'i la rage. Je m'appercus, en 1'examinant, que l'ccil & le cote droit dc la tete, de meme que la bouche Sc la gorge, etoient un peu enfle's. Je lui appliquai en vain les remedes dont on a coutume d u(er dans ces fortes de maladies. Nous de'montrerons, comme l'a deja fait Celfe au fujet des maux de tete, qu'ils proviennent fouvenc d'une caule etrangere. Le fang couloit des narines du vieillard. Trois jours fe pafterent fans qu'on put Farmer j le quatrieme jour,il forric Aout I 77 1 , Tome I. 144 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , . un ver de la naririe gauche : on me le montra; je fis refpirer de l'cf- prit de vin au malade , aulTi-toc je vis fortir dix-huit autres vers de la narine droite. Les douleurs cciTerent, Sc le vieillard fe porta bien. Cependant, je fus curieux de connoitre la nature de ce ver. Sc je l'examinai attentivement. Tous ces vers e'toient blancs, Sc de la grandeur repre'fentee' ( PL 2 , Fig. i. ) Ce font des afcarides oajlrongles. Je les renrermai tous dans un vale de verre garni de terre : ils s'y enfevelirent bientot; Sc peu de Jours apres , ils furenr transformes en une chryfalide , tirant fur le noir , & un peu dure, (Fig. 2.) Un mois apres, il en forth des mcuches , {Fig. 3&4O II ne nous refte plus qu'a rapporter les differentes obfervations de cette nature, Sc a les comparer a la notre. Commenc>ons par celles de Guill. Fabricius : voici comme il s'explique au fujet du fils de fon oncle. » 11 e'toit tourmente, dit-il, par un vio- » lent mal de tete, qui avoit commence' dans la region du mufcle cro- » taphite gauche, avec une petite tumeur cede'mateufe. La douleur » s'e'toit empare'e de route la tete •> mais principalement du cote' gauche. « II refta pendant quelques mois dans cette fituation : enfin , la tu- » meur fut peu-a-peu diffoute, & la douleur fe fixa depuis l'impref- » fion du nez & de 1'os cribleux, jufqu'a la future coronale. Elle ne » ceffa cependant pas fes ravages durant fix mois ; elle augmenta en- ■» fuite, & la fievre furvint, avec un e'te'rnuement confide'rable. L'abf- » ces qui e'toit pres de 1'os cribleux perc,a; il en fortit du pus & un » ver. La douleur de tete, 6c les autres fymptomes, ceilerent aufli-tot ». Nicol. Tulpius raconte un fait a-peu-prcs iemblable. » La iervante » d'un Chirurgien e'toit depuis long-temps attaque'e d'un violent mal ') de tete; les remedes employe's avoient e'te' inutiles; il fortit enfin » de fes narines un ver long d'un demi-doigt , Sc elle fut foulage'e ». Le fameux Langelot e'ervit autrefois a Thorn. Bartolin : « Dans le » terns que j'e'tois en Dithmarfie, un Me'decin me raconta qu'il avoit jj touche' un ver long d'un demi-doigt, forti des narines d'une femme. » Voici comme on s'y e'toit pris pour le fake fortir. Cette femme » reffentoit a la tete, depuis long-tems, les douleurs les plus vives: jj elle ne favoit plus que devenir ; elle couroit comme une folle par- » tout le village; elle vint enfin, a grand cris, implorer le fecours » du Pafteur Neukirchen, qui paflbir pour un habile Medecin. Il lui jj appliqua auffi-tot un remede dont il avoit coutume de faire ufage » pour ces maladies ■, la tete fut violemment fecoue'e •, le vet fortit des " narines, Sc la douleur fut appaife'e ». Samuel-Theodore Qucllmalz, celebre Medecin de Leipfick, raconte une chofe affez femblable : » Dans le village d'lrlenningfleben , pres jj d'une ville de Turinge , une fage-femme , dit-il , etoit tourmentce par SVR L'HTST. NATURELLE ET LES ARTS. 14? » par un mal de tetc, done la violence augmentoit chaque jour, & 3) finit par ctre infupportable. Quelqucs jours aptes , il fe forma dans » la region fupe'rieure du nez , line rumeur inflammatoire , qui aug- j> menta dc jour en jour, & occupa enfin le haut du nez, & une » grande partie du vifage. Le Mcdecin de l'endroit lui appliqua tous j) tes topiques diflolvans ;cependant, la tumeur tendoit a la fuppura- » tion , 8c quand clle parut affez mure , on y fit une incifion , d'ou il » fortit une grande quanticc' de pus & des petirs morceaux oblongs 8c » conglome'res. Commc il s empechoient la fortie du pus, on les exa- » mina attentivement , 8c Ton reconnut que e'etoit des vers, done le j> nombre excedoit celui de cent. La malade recouvra le repos 8c la » tranquillite au(li-t6t apres leur expulfion. La plaiefut fermee ik gue- » rie en cinq jours ». M. Quellmalz de'erit auflila forme du ver. « Sa jj bouche, dit-il , eft grande a proportion de Ion corps; on voit au- u deflus deux filamens qui font comme deux comes 3 fon corps eft » compofe d'anneaux, lui fcrvant d'articles; il eft mou, 8c de couleur » cendre'e un peu fonce'e ». Ces fairs , quoiqu'alTez extraordinaircs , ne font pas comparables a. ceux rapportes dans les collections des Mimoires deVAcade'mie Royale des Sciences de Paris , annies 1708 , p 42 , & 173 5 , p. 34. II y eft fait mention d'une femme age'e de 36 ans , qui, pendant deux annees entieres , refteatit des douleurs affreufes fous le front, aupres du nez: elles furent fuivies d'inlomnies 8c de convulfions terribles ; trois fois, on de'fefpe'ra de fa vie. En vain, depuis quatre ans, on employoit tous les remecles imaginaires ; tout e'toit inutile : on lui confeilla enfin de faire ufage du tabac ; elle en prit , eternua beaucoup , rendit un ver , &c un peu de (ang , 8c fut parfaitement gue'rie. II y eft encore fait men- tion d'un foldat, qui, depuis trois ans, fouffroit de grandes douleurs au cote gauche de la racine du nez; elles avoient de'ja atveint l'ceil,&: la maniere dont il etoit affede , faifoit craindre au malade de le perdre ; il avoit un tintement d'oreilles , e'eft pourquoi il y verfa une goutre d'huile d'amande. Deux jours apres , il reflentit au nez une efpece de picotement , cV une forte envie d'eternuer. Il s'appercur qu'il y avoic dans fes narines un corps e'rranger, il le retira avec fes doigts, 8c vit, avec etonnement, que e'etoit un ver; des l'inftant, les douleurs cef- ferent , 8c il fut gue'ri. Ces obfervations fufhfent, je penfe, pour repandre le plus grand jour fur la mienne; ainfi , jc pafTerai fous filence celles de Kcrkrin- gius, Fernel, de Blegny, Andry, 8cc. II eft done demontre que les vers , ces cruel s ennemis de 1'homme, ne font pas moins dangereux a la tete que dans le refte du corps. Rien de plus vrai que ce que dit Borel , ( Hift. & Obferv. Medico-pyf. Cent. Ill, Obfzrv, 4^. ) L'homme eft le fiege d'un grand nombre d' animalcules , ils Aout 1 7 7 1 , tome 1. T i4<£ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , habitent dans lui , comme dans un autre monde. Pierre-Simon Pallas , Aug. Quirin. Rivin, nous apprennent qu'on trouve des vers fous l'e'- piderme, dans les mamelles , dans la gorge, les paupieres ,les oreilles* le poulmon & la poitrine, les inteftins, le foie, la rate, les reins, dans les differences veines , & jufques dans la moelle des os. Pallas aflure qu'il n'y a dans l'homme aucune parrie qui ne foic infeftee de vers ; il ajoute meme qu'ils font la feule cauie d'un grand nombre de maladies; & qu'en les de'truilant, on nous delivreroit de plufieurs maux ; mais , pour ne pas fortir de notre fujet , il paroit , par les ob- fervations que nous avons rapportees, que les vers feuls font la caufe des douleurs que nous eprouvons aux Jinus frontaux. Car , de meme qu'on a trouve des vers dans l'os d'un loup enrage'; de meme, on en a trouve' dans ceux d'un foldat , dont parle Fernel, mort dans la rage & le defeipoir. Celt pourquoi, il eft de la derniere importance qu'un Me'decin faffe les obfervations les plus fcrupuleufes, afin d'etre plus en e'tat de porter du fecours aux malades. Le terns eft pafle oil, avec deux ou trois mots myftcrieux , on croyoit pouvoir fe delivrer de ces vers : & qui croiroit aujourd'hui que Borel etoit perfuade' que certain Char- latan en venoic a bout, en inclinant, avant le lever du foleil, une tige de Vhyeble, & la mettant fous une pierre , en proferant ces pa- roles : je t'emprifonne , bonne herbe , jufqu'a ce que tu ayes fait tomber les vers que N. a dans la tete ou Voreille. Le bon homme ajoute qu'aufli- tot , quelqu'eloignee que fiit la perfonne malade, les vers fortoient de fa tete : il y a , dit-il , il y a surement , dans ces fortes de cures , quel- que chofe de diabolique , quclque pafle avec le dimon. On voir, par-la, que fouvent il eft tres-difficile aux favans memes de le garantir de la fuperftition cV: des pre'juge's. Une etude approfondie de la nature pent feule nous en defendre. Nous allons maintenant examiner l'origine & la naiflance de notre yer. Nous ne re'pe'terons point ce que d'habiles Naturaliftes ont deja dit de la ge'ne'ration des vers , nous ne fuivrons ni le fyfteme de Coulee , ni celui d'Hartfoecker, &c. Nous n'e'eouterons en tout que la voix de la probabilite', & nous nous ferons gloire de la fuivre. Redius, Leuwenhoeck , Swammerdam , Rai, &c. penfoient que les vers, habitans de notre corps, tiroient leur origine des ceufs des infedtes qui fe trouvent dans l'air que nous refpirons , dans nos ali- mens & dans nos boiffons. Ce fyfteme, etabli fur les obfervations mi- crofcopiques , porte avec lui tous les caraderes de Fevidence, & on ne fauroit y contredire. Les mouches , du genre de celles dont nous parlons , habitent les endroits infedes par des odeurs fortes. Elles y depofent leurs ceufs : de-la, la naiflance des afcarides iur les parties ge'nitales des hommes, des femmes, des chevaux, &c. cette probabilite n'eft pas fans vrai- SUR miST. NATURE LLE ET LES ARTS. i47 femblance , d'oii Krazenftein conclud , que puifque ces mouches habi- toicne tie tels lieux , dies pouvoicnt, fans peine, depofer leurs oeufs dans Yanus ou dans Yuretre. Redius a fait a ce fujet des obfervations tres-importantes. II mit de la chair dans un pot , & il le couvrit avec une e'toffe de foie. L'odcur de chair pourrie attira les mouches ; elles volerent tout autour du pot , & chercherent vainement a y pene'trer : alors , elles depoferent leurs ccufs fur la foie qui le couvroit : dans peu , la chair fut entierement pourrie. Redius l'exairiina attentivement , Sc n'y trouva aucun ver. Reefell a fuivi a-peu-pres la mcrae marche pour re'futer le fyftemc de ceux qui ont ecrit fur la putre'fadtion. Car ce n'eft ni au hafard, ni a la putrefaction, qu'on doit rapporter Porigine des vers; mais aux ceufs de'pofe's par des infecles. Chaque infecte a un lieu marque par la nature, afin que les vers trouvent leur nourriture fitot qu'ils font eclos. Or , il a pu arriver que pendant le lommeil du vieillard done nous parlons dans ce Me'moire, quelque humeur ait de'coule par fes narines ; & qu'en infpirant vivement au moment du re'veil, il ait re- tire cette humeur , 8c porte' avec elle jufques dans les finus frontaux , les ceufs nouvellement depofes, ils y auront eclos & produit des vers. Tous les Anatomiftes favent que la membrane qui fe'pare la gorge des cavites des narines , eft unie aux finus frontaux ; d'ou l'on doit conclure que la douleur a dii augmenter en raifon du nombre & de la groffeur des vers ; & que ces vers e'tant loge's dans le finus frontal droit , PinHammation Ik. la tumeur devoient exifter de ce c6te'-la. Les vers ayant pris de PaccroifTement , & Porifice du finus frontal deve- nant trop petit pour leur laiffer un pafTage libre, ils ont du neceflaire- ment Paggrandir •, Sc ce qui me fait croire que rc'ellement ils Pont ag- grandi , e'eft que je pe'netrois facilement dans les finus avec un aflez grand ftilet. Ce fyfteme, confirme par les obfervations de M. Maloue't, me pa- roit plus probable que celui de Littrius , qui penfe que les ceufs de Pinfedte ont pane de Peftomac dans le fang, & fe font arrete's aux finus frontaux. 11 me femble que mon idee eft plus naturelle. Je ne dis pas pour cela que les vers n'aient pu s'y introduire d'unc autre maniere. Je penfe qu'il eft tres-poffible qu'il s'y en trouve dans Peau que nous buvons, comme plufieurs Savans Pont obfervc'; & entr'autres, le Dodleur Razouri , qui dit qu'une femme bien alte're'e but d'une eau mare'eageufe. Le lendemain, elle eut de violens maux de tete, & une fievre violente. En vain, on employa tous les remedes. Enfin , on lui donna Pe'mctique, & elle ne vomit point ; mais e'ternua , & rendit par les narines 72 vers blancs , femblables .i ceux qu'on ob- iervc dans la tctc des moutons, & que M. de Reaumur a de'erirs. Ces vers peuvent avoir la meme origine. On puife de Peau dans le crcux Aout 1771 , Tome I. T 2 t4* OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , de la main •, on la boit : il peut fe faire qu'on en infpire en meme terns, & que des ceufs d'infeftes s'attachent a la membrane pituitaire. Ceci fuppofe, il eft aife d'imaginer comment ces ceufs ont pu par- venir jufqu'aux finus frontaux de plufieurs manieres difte'rences. On devine raremcnt la vraie caufe dc ces maladies. Les maladcs eux-memes ne favent a quoi les attribuer. Les douleurs font d'abord Reporta- bles ; on les ne'glige dans leurs accroiflemens infenfibles ; elles devien- nent infurpportables apres un mois ou une annee; & alors, on ne s'en rappelle pas l'originc. Il eft cependant facile de conjecturer d'oii peu- vent venir les vers que nous avons de'crits, en confide'rant lcur me'- tamorphofe. Aucun de ceux qui avoient fait des obfervations de la meme nature, n'avoit etc' te'moin de ce changement. RELATION Uune efpke particulUre de CamiUon ; par M. Jacques Parson , traduite de FAnglois. |JARMI les auadrupedes, la clafle des came'le'ons eft une des families les plus inte'reflantes ; aufti cet animal a-t-il excite' l'attention de plu- fieurs Naturaliftes , non-feulement par la ftructure finguliere de fes parties, mais au(li par plufieurs phenomenes curieux & particuliets, relativement a fes efpeces , & qui varient felon les diffe'rentes parties du monde dans lefquclles il vit. Les Auteurs rangent l'efpece du camt'Uon fous le nom ge'ne'rique de Ldcerta , nom qui comprend une grandc varie'te' d'animaux de toutes tailles & proportions; depuis le plus e'norme crocodile, jufqu'au plus perit lefard. Mais, comme le camdeon a fes efpeces variees , & que chacune d'elle a des proprie'te's qui ne lui font point communes avec aucun des animaux de la famille des lacerta , il eft vraiment dans lc cas d'etre regarde' comme un genre particulier. Plufieurs Auteurs , dont on a raffemble les e'crits dans l'cxcellent ouvrage intitule' : Diclionnaire raifonne'e des Animaux, fe font de'ja . fort etendus fur les came'le'ons; ainfi, je ne parlerai que d'une efpece de camiUon, inconnue jufqu'a ce jour. PL x, Fig. 8. J'ai confulte', avec la plus grande exactitude, tous les Auteurs fur la partie de l'Hftoire Naturelle, concernant les animaux, 8c je n'ai trouve' aucune defcrip- tion qui eiit rapport a l'efpece dont je vais parler. Elle differe des autres, fur-tout par la tete , dont la fingularite' m'engagea a l'examiner avec attention : elle eft fort grande, relative- ment au corps de cet animal , & a celui de tous les autres individus SUB UHIST. NATVRELLE^ ET LES ARTS. 149 de la mcme clafTe. On s'en convaincra aifc'mcnt , en le mefurant , depuis l'avancement des deux parties ante'rieures , jufqu'a l'extre'mite pofte'- rieure , ou l'avancement du crane. II y a de 1'un a l'autre , trois pouccs un quart de diftance. L'avancement pofte'rieur s'e'tend fur le col jufqu'a la premiere vertebre de l'e'pine du dos. L'avancement ante- rieur s'eleve de chaque cote fur le trou des narines, dans une direction oblique; lafurfacede fa figure eft couverte de tubercules Sc d'Jcailles, qui, e'rant abfolument defk'che'es , ont perdu leurs protube'rances, ainfi que le luftre qui coloroit certainement les ecailles lorfque l'animal e'toit vivant. La longueur des deux inachoires eft e'gale. Elle s'eft trouve'e de deux polices Sc un quart , depuis l'articulation des gencives, jufqu'a leur ex- ne'mire. Les deux gencives font garnies d'un rang de petites dents poin- tues , routes de la raeme forme , & arrange'es de fagon que lorfque l'animal ferme fa bouche , les dents ne fe rencontrent pas; mais fe placent dans les intervalles alternativement pratique's entr'elles a cha- que machoire pour les recevoir. lis n'ont ni molaires, ni canines. Les orbites font extiemement largcs 8c profonds, de forte que ce camtlion doit avoir eu des ycux fort grands Sc fort arrondis ; car le diametre de chacun d'eux a plus du tiers de toute la longueur de la machoire. • En regardant de tres-pres la peau qui, a pre'fent, eft re'tre'cie , def- fe'ehee , & adhere au fquclette , il paroit qu'elle e'toir cntierement couverte d'ecailles. Lesecailles les plus larges fe trouyent fur une partie de la tete , Sc fur les cote's du col •, les plus e'troites font fous les ina- choires , fous le col , & lur tout le corps. On ne peut pas fe faire une ide'e de la couleur que cet animal avoir lorfqu'il e'toit vivant; mais il y a toute apparence que fa. peau en offroit de tres-belles. Prelque toures les efpeces de lacerta ont cinq doigts a chaque patte. Tous les camitions les ont ; mais ils different entr'eux par la confi- guration diffcrente de ces doigts. Le camiUon, dont je parle, a la rarfe, le metatarfe, & rrois os de chaque doigt , comme ceux de la main d'un homme. Ses doigts font fort longs , & fe terminent par des oneles tres-pointus qui fe recourbent en arriere. Trois des doigts des pattes de devant font interieurs comme notre pouce, les deux autres font exteiieurs ; au lieu que dans les pattes de derriere , il y en a trois d'ex- tericurs, & deux d'inte'rieurs : ces doigts ont entr'eux autant d'efpace, qu'il y en a entre notre pouce & nos autres doigts. J'ai vu un cameleon a tete triangulaire qui avoit les doigts range's dans le meme ordre que celui-ci. Les aurres efpeces ont les cinq doigts de front, & fort courts, comme des moignons; cependant, celui qui a c'te decrit par Pitfield , d'apres la difleCtion faite a l'Academie Royale Aout 1 77 1 , Tome I. t5o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Ac Eondres , a les doigts difpoie's comme les notres , & eft un ca- mzUon a tete triangulaire & a crcte. Le tranchanc vertical de fon epine eft dentele' tout du long , depuis le col jufqu'a Pextre'mite' de la queue, de chaque cote il a un rang de nceuds oil d'avancemens jufqu'a l'articulation de la cuiffe avec l'os qui s'e'leve vers Pe'pine •, mais a l'endroit ou commence la queue , il y a de chaque cote un fecond rang de nceuds , qui continuent tout le long de la queue. Il ne paroit pas qu'il y ait dans la tete d'ouvermre deftine'e a re- cevoir les fons; la bouche tk les trous des narines font les ieules que l'on y voie. On a fait la meme remarque lur celui qui a ere' diffeque' a 1' Academic Bellon s'eft imagine que les trous des narines fervoient an camelion a entendre, comme a refpirer ; de forte, qu'il femble que les ouvertures par lefquelles le Ion ie communique, manquent a plus d'une efpece. Le fquelette de cet animal m'a ete prete par M. Milan , qui a eu la complaifancc de le laiffer aflez long-tems pour que je puiffe en dou- ner la defcription a. la Socie'te Royalc Nous ne favons pas de quel pays il eft, parce que celui qui le poffede, Pa achete , avec d'autres parties d'Hiftoire Naturelle. L E T T R E De M. Muller a M. Buchner, fur la Mouche v/ge'tale de I'Europe. Monsieur, En parcourant le troifieme volume des Ephtmerldes d'Allemagne, que vous avez eu la bonte de m'envoyer, j'ai lu , avec plaifir, une obfervation que vous y avez infe're'e, & qui a pour titre : Falfo credita. mclamorphofis fummi miraculofa infecli cujiifdem Americani. Vous y obfervez tres-bien que fouvent nous regardons comme mi- raculeufes des chofes qui rentrent dans Pordre de la nature, quand on les confidere attentivement. Vous le prouvez , par exemple , de Piniedce que les Naturaliftes Francois appellent mouche ve'ge'tale, Des Obfervateurs peu e'claire's , & amis des fingularite's , ont cru que la tete de cet infede e'toit formee par une plante, & que Ie refte de fon corps e'toit animal ; mais un hotnme accoutume' a e'pier la nature , n'y voit qu'une plante parafite , qui prend naiffance dans Panimal mort , SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 151 & tombe en putrefaction. S'il falloit les en croirc, il y auroit autant de raifon a s'imaginer que l'homme, le bccuf, &c. Tone des animaux vegetans, parce que quelquefois il croit de la mouflc fur leurs cranes. De cette maniere, les fix cens efpeces de fungus, Sec. donneroient un air de vcrite' an fyfteme de la me'tempficofc. Mais, Monfieur, en- tretenons-nous de choies plus ferieules •, abandonnons ces bagatelles a ces hommes , a ces foi-difant Naturaliftes , qui vont chercher la nature bien loin, tandis qu'ilsl'ont a leurs pieds. Si les Europe'ens veu- lent une mouche vigitah , ils n'ont pas befoin de pafler les merss de faire la conquete des Indes ; leur patrie ouvre une libre carriere a leurs obfervations , Sc leur fournit l'occafion d'examiner ce phe'no- mene. Il fe renouvelle fur la clavaria militaris crocea. M. Vaillant a obferve dans le territoire des environs de Paris , ce que MM. Holin Sc Koenig ont vu dans leur patrie , & que j'ai trouve pres de Fridrichfdalem. M. Vaillant eft le premier qui a de'eouvert cette planre ; mais il n'a pas fu que e'e'toit une plante parafite; Sc MM. Holm, Koenig Sc moi , avons apper^u qu'elle prenoit naiflance dans une fubftance animale. On en connoit deux efpeces, l'une eft Europeenne, Sc l'autre Ame- ricaine. Les Danois ont decouvcrt la premiere , &c la feconde eft le fruit des recherches des Europeens en Ame'rique. Lorfqu'on rencontre la clayaria dans la cerre oii elle eft nee, il faut, pour bien faire, nc point l'arracher avec la main; mais enlever dou- cement la terre avec un couteau , de maniere qu'on ne touche point aux racinesj & alors, on a la fatisfadtion de voir le corps d'un infedle, d'oii fortent un ou plufieurs fungus de diffe'rentes grandeurs, de la meme maniere qu'ils font reprclente's PL z , Fig. 5 ; mais en di- minutif. Defcription du Clavaria. La couleur du clavaria eft d'un jaune fafrane, fa longueur de fept pouces , fon diametre de deux lignes, Sc celui de la ftipule d'une ligne & demie , ou environ. Le fommet de la plante eft ecailleux, les e'cailles petites Sc pointues, la ftipule eft mince, courbee Sc radie'e. Je n'ai rencontre qu'unefois une petite varie'te de cette plante, dont le fommet e'toit fpherique , & la ftipule refterre'e. On la trouve aux mois de Septembre & de Novembre fur les gazons, & dans les foffes des bois. La chryfalide fur laquelle cette plante prend naiflance , eft toujours couverte , terme dont fe fervent les Entomologiftes , pour dire qu'il eft tres-difHcile d'appercevoir les parties de l'animal. Les filamens epars, qu'on prendroit pour des racines, ne font autre chofe que des fragmens de la texture de la follicule ou de l'enveloppe. La partie fuperieure dc la chryfalide prouve bien que l'animal eft detruit, Sc que cette def- Aout 1771 , Tome I. 1 5 i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , truttion vient de la fermentation interieure , & de la dilace'ration des parties, occafionne'e par PaccroifTement d'un corps e'tranger. Voila un exemple happant de ce phe'nomene, que Ton pre'tendoit ne pouvoir etre appercju qu'a Saint-Domingue Sc a Cuba ; le voila fous nos yeux , Sc dans notre patrie. Nous ferons quelques obfervations fur la ve'ge'tation de ce fungus. Les habiles Phyficiens ayant de'truit la generation e'quivoque, l'expli- cation de la formation des corps organiques en eft devenue plus dif- ficile, mais en meme-tems plus folide Sc plus agreable. Je crois avoir prouve', Monfieur, dans le Me'moire que j'ai fait imprimer en 1765 , que les fungus portoient avec eux leurs femences. Celtii dont il s'a- git porte fur la fuperficie de fa partie fupe'rieure , la pouffiere fe'mi- nale. On demande comment il vegete, & fi cette efpece de clavaria fe trouve indidtindtement fur tous les corps des animaux, des ve'ge'taux, dans la terre, Sec. ou fi elle ne croit que fur les chryfalides des in- fedles? Les obfervations que j'ai faites, peuvent re'pondre a cette quef- tion. Cette clavaria eft fort rare, Sc n'a e'te appercue que par un petit nombre deBotaniftes; pendant plulieurs anne'esconfacre'es a la recherche des fungus , je ne 1'ai trouve'e que quatre ou cinq fois dans des lieux tres-retire's, & encore n'en ai-je rencontre' que trois ou quatre indi- vidus. J'ai eu beau la rechercher a des reprifes difte'rentes, j'y ai perdu mon terns & mes peines ; ce qui me fait croire que fa femence ne (e de'veloppe point, & que ce n'eft que par hafard qu'elle croit for les chry- falides. Voila , fuivant moi , la caufe de ion extreme rarere'. Je penfe done, Monfieur , que la femence de la clavaria militaris a befoin, pour croitre, du fuc qui fe trouve dans la fubftance des in- fecles morts, &c qu'en vain elle- feroit re'pandue dans la terre fur tout autre animal ou vege'tal. J'avoue que j'appuie mon opinion , fur ce qu'en retirant de terre cette plante , on en trouve toujours la bafe ad- herentc aux de'pouilles d'un infecte ; & j'ofe prefque aflurer que cette obfervation ne le de'mentira jamais. Voici maintenant l'ingenieux fyfteme de mes amis. lis penfent que Pinfctte , tandis qu'il etoit en terre, a mange' la femence du clavaria j qu'il a perdu la vie , parce que cette nourriture lui eft contraire, Sc que fitot apres fa mort, la plante commence a croitre. , M. Hill , dont le fyfteme eft un peu douteux, femble cependant appuyer le mien. II pre'tend que la clavaria ne prend naiflance que parmi les arbrifleaux ; que des qu'elle a commence a croitre, il peut arriver que fa lemence la repande fur la larve ou (ur la nymphe d'une cjgale, & que cette femence venant a fe de'velopper, pre'iente l'image d'une mouche vege'tante. II eft facile de voir que ce fyfteme ne s'accorde avec le mien, qu'en ce qu'il fait venir la plante du luc de la larve, Sc qu'il pre'tend qu'on ne peut la trouver fur d'autres corps que fur des infeftes. Qui Tome J-.J*ay&. -iS3 Flan.l. a0usti77i. amist -Z77-Z-' SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 153 Quoi qu'il en (bit, Monfieur, je vous laifTe lc foin de decider cetce queftion, elle pre'fente au moins une fingularite bien remarquable. Un Savant, demeurant a Lyon, me fie pic'ient, lors de mon pafTage dans cette Ville , de cet infecte adherent a la clavaria , & qu'il nomma rnouche ve'gliale. J'ai penle que vous feriez bien aife de la connoitre. Je fuis , &c. &c. M. de la Tourrette, Secretaire perpe'tuel de l'Acade'mic de Lyon, en conferve une fcmblable dans Ion Cabinet d'Hiftoire Naturelle, tres-curieux & tres-inftructif. On dira, avec raifon, des morceaux pre'eieux , & des collections favantes qu'il renferme : Non forte fed. arte collecla. Cette Devife devroit etre celle de (on Cabinet : c'eil M. de la Tourrette qui a donne' cette rnouche a M. Muller. Explication des Planches. Mouche ve'ge'tale d' Europe. Fig. V. Deux clavaria prenant naiffance dans la fubftance animale. A. Sumrnite' e'cailleufe. B. Stipule. C. Subfiance de Vinfecle. D. Ramification de la texture de la follicule. E. Radicules. Mouche ve'ge'tale iTAmirique. Fig. IV. Clavaria fobolifera prenant naiffance dans le corps de l'in- ie&e. A. Sumrnite' e'cailleufe. B. Stipule. C. Sentence. D. Subfiance de Vinfecle. E. Radicules. DES INSECTES EJfentiellement nuifibles a la vigne, i\| OUS avons parle' ci-devant du hanneton &c du charanfon rou- leur, il nous a refte' a de'erire ce que les (Enologiftes ont entendu ou du entendre par gribouri & vers-coquins. On trouve affez commune'menc fur la vigne deux efpeces de gri~ Aovt 1771, Tome I. Y j 54 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , bouri , principalement dans les Provinces de Bourgogne , de Cham- pagne, du Dauphine, Lyonnois , Beaujolois , &c. Le Gribouri de la vigne , ou Coupk-BOURGEONS , crypto- cephalus niger elytris rubris , Geoff. Hift. deslnfccces, pag. 23}. Le VELOURS VERT, cryptocephalus viridi - auratus fericcus. Geoff. Chryfomela viridis nitida. Lin. aft. Upf. Ces deux efpeces de gribouri doivenr cere claffc'es , fi on fuir la me- thode de M. Geoffroi , dans la famille des cokopteres ou infecres a etuis, durs , recouvrant tout le ventre 8c les tarfes , & dans celle des chryfo- melles , 11 on adopte le fyfteme du Chevalier Von-Linnte. Le gribouri, PI. ?, Fig. 1 , vu en-deffus dans fa grandeur 8c fa groffeur naturelle , Fig. 1 , vu au microfcope , Fig. 3 , forme de fes antennes, Fig. 4, forme de fes partes. La defcription de cet infedte, donne'e par M. Geoffroi, eft de la der- niere exactitude •, ainfi , nous dirons , apres lui , que « la tete du gri- « bouri de la vigne eft noire, renfermee ferns- Ion corfelet noir , lui- « fanr, 8c comme boffu , renfle dans fon milieu; ion ventre eft large » & quane; les etuis qui le recouvrenr font d'un rouge fanguin , &z » converts de plufieurs petirs poils, ainfi que le corfelet-, l'animal en- » deffous eft noir, 8c les pattes font allonge'es, composes de quatre 3) articles ». Cet infecte fort de rerre aux premiers jours du prinrems , e'eft-a- dire, a la fin de Mars. S'il furvient encore des jours froids & nebu- leux , le deffous de l'ecorce de la vigne lui fert de retraire , 8c fi le mauvais terns continue, il rentrc en rerre jufqu'i ce que la chaleur Pin- vitc de nouveau a en forrir. Son accouplenicnr s'exe'eure dans le mois de Mai, il fubfifte pendant plufieurs heures, 8c meme nous avons vu ces infectes refter accouplcs pendant line matinee entiere. Nous avouons ingenuement que nous ignorons l'epoque de la ponte , 8c dans quel endroit lis depofent leurs ceufs. Nous demandons , 8c nous prions d'obferver fi leur larve ne fcroit pas un petit ver grisarre qu'on trouve vers la fin du mois de Juin, fur les firmens 8c lur les feuilles de la vigne-, on la reconnoitra aux caiaifteres fuivans. Cette larve a huit a dix lignes de longueur, une ligne a une ligne 8c demie d'e'- paiffeur , la tete brune , 8c plu< groffs que le corps , le corps ferme par dix anneaux , trois partes arme'es d'un petit croch;r correfpondant de chaque cote aux trois premiers anneaux. Nous avons rente vainement, & a plufieurs epoques diffe'renres , de nounir ces lar ves , elles mouroicnt apre. une capnvite de deux ou trois jours ; cependant, le va(e qui les renfermoit, n'avoir point de couverilc, il e'roir expole au grand air ; 8c, les feuilles j pour les nourrir , e'toient renouvelle'es deux fois par jour. Le gribouri fe ncmrrit , au printems , des premiers bourgeons de la SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. r^ vigne, il les cerne, les ronge, les crcufe a melure qu'ils pouflent; & fi pi u fieurs gribouris s'attachent au meme bourgeon, il eft bientot fe'~ pare' du farment. Quand la vigne a poufle fes farmens, fes feuilles, fes vrilles & fon fruit, cet infedte continue a devorer les feuilles les p'us tendres , &c quelqucfois l'extre'mite de la fleche , & de la vigne ; i! eft connu dans cerraincs Provinces, fous la denomination de coupe-bour- geon ; & dans l'idiome du payfan , fous celle de pique-brots. Lc velours - vert , eft uneefpece de gribouri, diffcrente du coupe- bourgeon , « par la couleur de fon corps , d'un beau vert brillant & « foyeux; fon corps eft plus allonge' que eclui du gribouri ; fon cor- » felct un peu bombe, &c couvert de petits points fepare's les tins des » autres •, les anrennes & les tarfes font noiratres ; les e'tuis couverts de « points qui (e touchent les uns aux autres, ce qui rend I'animal moins » liffc, & fait paroitre fa couleur plus riche ». Nous n'avons pu faire graver cet infe&c, parce que celui que nous confervions deftcche', a c'te brife' par un accident, & il nous a ere' impoftible de le retrouver fur les vignes des environs de Paris, ni fur le faule ou M. Geoffroi affigne fa demeure; mais la figure du gribouri de la vigne, ou coupe- bourgeon, 8c ce que nous venons de dire , font fuffifans pour faire re- connoitte le velours vert. Ces deux infecles ne s'enterrent qu'a la fin de l'automne, pour reparoitre le printems fuivant, & caufer de nou- veaux dcgn.es. La teigne, ou phalene de la vigne. Nous appellerons fa larve ver- coquin , pour nous fervir d'une expreflion deja connue, & fur-tout pour ne pas multiplier les denominations. Le ver-coquin, PL ? „Fig. j , vu dans fa groffeur &c grandeur naturelle , Fig. 6. Le meme vu au microfcope, Fig. 7. La phalene ou papillon , avec fes ailes etendues, & dans fon e'tat naturel , Fig. 8. La meme, examinee au microfcope, avec fes ailes plie'es, Fig. 9. Lettre A, endroit ou la grappe a ere' en- dommage'e. B , partie de la grappe endommagee. C , la grappe dans fa forme naturelle, avec fes fleurs & fes grains. Il eft furprenant qu'un infeifte aufli commun dans les Provinces dont nous avons patle, en traitant des deux efpeces de gribouri nuifi- bles a la vigne , n'ait e'te de'erit par aucun Naturalifte. La forme des antenncs prouve que ce papillon eft un phalena ; l'arrangement de la chryjalide , que e'eft un phalena tortrix. Nous ferions prefque tente's de le regarder , avec le Chevalier Von-Linnee, comme le phalena Forskaleana. Hift. Nat. edit, in-it, p. 818, n°. 304. Phalena tor- trix, alis fuperioribus flavis luteo reticulatis : medio litura fufceffente. Lin. faun. Succ. 1319. Ces deux efpeces nous paroiffent avoir beau- coup de reflemblancc ; nous n'ofons pas cependant dire que ce foient les memes. Le Chevalier Von-Linnee , dit qu'on trouve fur le rofier la phalene ForskaUane , &c nous n'avons jamais vu ailleurs que fur la Aout 1 7 7 1 , Tome I. V 2 i;<5 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , vigne , cclle dont nous parlons. Cette difference d'habitation ne fiifKt cependant pas pour conclure de'finitivement a la negative. M. Adan- fon nomme certe phalene SCUTELLA , dans un ouvrage immenfe Sc complet fur l'Hiftoire Naturelle. Le public l'attend avec autanc d'em- preffement que d'impatience. Le ver-coquin ( Fig. 6. ) vu au microfcope , a la tete noire, Sc moins groffe que le corps ; la partie interieure eft: blanche, & on y diftingue deux petirs yeux noirs. Sa bouche eft arme'e de deux crochets en ci- feaux , dont le mouvement demi-circulairc, eft frequent Sc rapide. Son corps eft d'une couleur rouffe, & il eft compofe de dix anneaux ; on y diftingue des petits points recouverts par quelques poils peu nom- breux , courts & fins. L'extre'mite' de fon corps, ou fon dernier an- neau eft noir , pointu a fon extre'mite' , & termine' par une pointe ou appen'ice tres-deliee. Cet infecte a huit pattes de chaque cote' ; les trois premieres , Sc les plus fortes , font place'es fous les trois premiers anneaux, les quatre fuivantcs fous les anneaux du milieu du corps ; en fin , la huitieme eft fc'pare'e des autres, Sc tient au dernier anneau. Cette phalene eft pourvue de quatre ailes , les deux fupe'rieures plus grandes que les deux infe'rieures, les ailes (uperieures font grifes, mar- quete'es par des taches d'un gris plus fonce ; Sc leur extre'mite' , de meme que les bords exterieurs de l'aile , font colores en jaune. Cette cou- leur approche beaucoup de celle de Yochre. Le corps de ce papillon eft jaune Sc velu , les antennes font filiformes. Nous n'avons jamais trouve la larve de la teigne de la vigne avant le terns de la florailon. Cette larve choifir pour (a retraite , la partie infe'rieure, ou mitoyenne, ou infe'rieure du raj fin. Le premier foin de cet infecte, eft d'intrrcepter en cet endroit A, le mouvement de fluctuation que la (eve e'prouve dans les tuyaux capillaires qui commu- niquent & fe propa^ent du cep au farment, Sc du farment a la grappe, puifque celle-ci n'eft qu'une continuation des deux autres. Le ver- coquin rouge, pour cet effet, avee les deux crochets ou cifeaux dont fa bouche eft pourvue, l'e'corce de la grappe; alors, la partie endom- mage'e fe defleche peu-a-peu, & le ver-coquin e'tend promptement plu- fieurs petits fils femblables a ceux des toiles d'araigne'es; mais tres- blancs & tres-foyeux. Les fleurs, les grains a peine noue's , leurs pe'- duncules, font autant de points fixes pour les attacher. Il parvient de cette maniere, a (e former un logement commode, dans lequel il brave les vents , la pluie Sc les orages. Cet infedle fort de fa cellule des que le foleil eft couche', ou dans la journe'e , quand le cicl eft obfcurci par des nuages •, mais il ne s'e'earte jamais de la partie de la grappe qu'il a endommage'e : les fleurs forment fa nourriture ordi- naire; Sc quand elles font, ou notiees, ou trop de'ffe'che'es , il attaque alors les grains fle'tris, en percent , en dechirant leur ecorce, malgre 04/ust-i7'ZL: SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 157 la refinance qu'elle leur pre'fente. La pulpe du grain eft bientot creufee & de'vore'e, & cctte excavation reffemble a celle que les charanfons pratiquent dans les pois ; avec cetce diffe'rence neanmoins , que 1c charanfon naic dans lc pois meme, qu'il y refte dans l'etat de larve , & qu'il n'en fort enfin , apres avoir crible lYcorce , que qiiand il eft dans un e'tat parfait. Lc yer-coquin demcurc environ douze a quinze jours dans ion e'tat de larve ; pafTe' ce terns , il fe change en chryfalide , reverue d'une efpece de fourreau , dont la texture mince & le'gere, eft compofee d'une bourfe blanchatre, melee fans ordre avec les debris des fleurs & de l'ecorce des grains. L'infecte, apres douze ou quinze jours, en fort dans ion e'tat de perfection d'un papillon, tel que nous Tavons repre'fente', Fig. 1. Que devient ce papillon apres ce terns? Quand & ou de'pofe-t-il (es ceufs? Nous l'ignorons. Nous prions les Ama- teurs de fuivre ces obfervations. Tels font les infectes efTentiellement nuifibles a la vlgne , dont nous avions a parler. Nous h'entrerons dans aucun detail fur les autres ; Penume'ration en feroit longue 8c trcs-faftidieufe, & le degat qu'ils font , n'eft qu'accidentel , ou peu confide'rable. Nous examinerons in- ceffamment , les moyens indique's pour les de'truire , & nous ferons connoitre ceux qui nous ont paru plus siirs. M E T H O D E Tris- facile , & pratiqu/e en Hollande , pour forer les petit s Canons. 1 .'£ Q U I P A G E dont on fe fert en Hollande dans les foreries des petits canons eft tres-fimple, & peut etre adapre avec avanrage aux ufines de nos manufactures de Tulles & de Saint-Etienne-en Forez. Cet e'quipage paroit principalement deftine a me'nager le nombre des ouvriers qui conduilent la forerie , & a diminuer leur travail. La deicription de cette machine fera connoitre fa fimplicite', PL 4. A. Traverfe de la piece dans laquelle le canon eft amijerti. B. Virole dans laquelle pafte le canon, 8c dans laquelle il paftc exac- tement aflujeui •, elle a trois pouces de largeur. Ces deux pieces font fepare'es de la machine, pour Id rendre plus apparentes. C. Crochet attache a l'extre'mire' de la cor le qui porte le poids D. E. Cheville a pointes recourhtres , ou I'on place le crochet C. F. Couliffes dans lelquelles glifte la travel fe A. G. EncaifTement plein d'eau. H. Moyeux de la roue, dans lequel le fore t eft aflujetti, Aovt 1 77 1 , Tome I. H S OBSERVATIONS, SUR LA PHYSIQUE , Le foret eft fixe en Hollande, comme dans nos manufactures, au mileu de I'axe d'une roue, que fait mouvoir un moulin a vent; l'eau pent egalcmcnr etre iubftitue'e au vent. Le foret tient a l'axe de cette roue par ,1'extre'mite de la tige , qui eft applatie 8c qui s'infinue dans une fente affez profonde. Oa petit l'affujettir de diffe'rentes manieres : celle qui eft employee dans nos manufactures , eft e'galement bonne; il fuffit qu'il (oit affujetti folidement. Le foret 8c le canon font dans une fituation horifontale ; ils font place's a. la furface d'une auge ou encaiftement qui a environ un pied de largcur fur cinq a fix pieds de longueur. Cet encaiftement eft fo- lidement etabli lur de forts madriers, ou fur des pieds engages dans le rut de l'attelier. Le canon eft affujetti dans une virole porte'e par une traverfe de fer, ayant environ cinq pouces de largcur. Les deux extre'mites de cette traverfe ont une retraire d'un pouce 8c demi de longueur, laquelle s'engage & gliffe dans deux couiiftes fixe'es le long des deux bords correfpondans de l'ouverture fupe'rieure de l'auge. Le canon eft place dans la virole , aVec des coins de fer ; & comme la traverfe eft mobile dans les couiiftes; le canon peut avanccr 8c reculer, fuivant qu'il eft ne'eeftaire, ou de l'approcher da foret, ou de degager le foret de la cavite qu'il a forme'e. Les couiiftes font entie- rement conftruites en fer, afin que la traverie y foir plus folidement a chaque point de fa marche, parce qu'elle foutient elle feule l'efTort du foret ; il fupporte toutes les fecouffes que le canon e'prouve pendant le travail de la forerie. Ce travail ne fuffiroit pas ; il a fallu fupple'er a l'effort continuel que fait l'ouvrier dans nos manufactures , pour pouffer le canon contre la pointe da foret, a mefure que le forage s'exe'eute , & pour re'gler fon travail. Voici Pappareil fimple qui remplit fon objet. On a une corde qui paffe dans deux ou trois poulies ; une des deux extre'mite's de la corde porte un poids quelconque •, a Pautre extremite eft un crochet au milieu de la traverfe mobile , fur laquelle eft affu- jetti le canon. L'effort du poids fur la traverfe , fuffit pour tirer le canon contre le foret , 8c pour re'gler fon action : e'eft a l'ouvrier a proportionner le poids a l'effet qu'il doit produire ; un poids de huit a dix livres fuffit ordinairement. II faut obferver que la corde, dans la partie qui eft depuis la tra- verfe jufqu'a la premiere poulie , doit etre difpofe'e le plus horifonta- lement qu'il eft poffible , afin que le tirage foit le plus favorable. En- fuite les autres poulies font difpofe'es de facon a empecher que la corde ne fe rencontre dans la roue , & a faire enforte que le poids ait un jeu affez long, pour agir fur route la longueur de l'auge pendant le forage. L'ouvrier qui veille fur les progres du travail , arrofe le foret 8c le SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 159 canon avec un goupillon qu'il a trempe dans Peau , dont I auge eft pkine. Le lone d'un des deux botds de PcncaifTement, il y a line luite dc che- villes de fer recourbe'es par la pointe. Ces chevilles fervent a y atrachc-r le crochet de la corde, lorfqu'on n'a plus befoin dc 1'efFct du. poids qui eft: fufpendu •, comme lorfqu'il faut retirer le font du canon pour le changer, alors l'ouvrier prend des deux mains le crochet, &c le fixe aJacheville la plus prochaine. Avec le fecours d'une machine audi fimple, un feul ouvrier pent, fans fe gener, conduire deux ou trois foreries de canon, arroier le canon Sc le font a melure qu'ils s'echaufFent , preparer les canons qui doivent etre foumis a Paction du font , pre'parer merae les fonts de rechange. Si on compare adtuellement 'a fimplicire'de cette machine avec celles dont on fe fert dans nos manufactures , on en reconnoitra aulfi-tot la fupcriorite' , & on verra combien elle me'nage le terns, combicn elle adoucit la peine, tk. diminae le nombre des ouvriers, trois objets importans pour une manufacture, dont le premier benefice, & le plus sur, fe prend fur P economic Nous invitons ceux qui (onr trop eloigne's des manufactures de ca- nons pour pouvoir faire cefe comparailon , de lire Particle canon, Sc la manicre de les forer , de'erite avec beaucoup de precision Sc de net- tete' dans le Diclionnaire Encyclope'dique. M E M O I R E De M. E B E RH A RD , Proftjfeur Royal de Prujfe , dans lequel il examine cette loi du mouvement : la fomme des forces , dans les corps elajlijues, eji-elle toujours igale apris le choc ? Lf.S vrais Phvficiens liront, avec plaifir, le me'moire de ce ce'Iebre Profetleiu ; 1< s laits lont examine's favamment , & expofes avec beau- coup de pit'cifion. Ariftote difoit avec railon : Que celui qui ne con- noijjbit p:s le mouvement , ne conno'Jfoit pas la nature : en efFct , fi queluu- pa. tie de Phyjijue me'rire, par preference, Pattention dc l'Ob- itrv.iuur, c'< ft, fan, contredit, celle qui traite du mouvement, puif- quVlR eft la bale de la Phyfique. Nous ne faurions done trop en- CQuraget leg Maitres dc PArt a luivre cette carriere, e'pineufe a la ve'ritc, ni trop louer le zele de ceux qui confacrent leurs veilles Sc leiirs travaux a d.fcuter & a t'claircir cette importance matiere. La nouvelle decouvettc que M. Ebcrhard vient de faire en ce "enre, Septembre 1771, Tome J. 160 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 8c qui avoit e'chappe' a nos plus grands Phyficiens, me'rite toute notrc reconnoiffance. Elle re'pand un nouveau jour (ur la fcience Phyjico- Mathe'matique , 8c elle eft fufceptible d'une multitude d'applications curieufes, inte'refTantes 8c inftruiftives. On la trouvera e'nonce'e dans les trois derniers articles du Me'moirc que nous allons rapporter, fui- vant notre coutume, dans fon entier. Les faits font fi intimement lie's les uns ayec les autres, que les premiers conduifent a 1'intelligencc des fuivans. On reprochera , peut-etre , a l'Auteur d'avoir confacre la plus grande partie de fon ouvrage a une thcorie tres-fouvent rebatue, 8c atftuelle- ment connue de tout le monde. Nous re'pondrons pour lui, qu'on nc peut trop re'pe'ter cV faire connoitre les effets des collisions : d'ailleurs, ces effets iont expofes dans fon Memoire avec une pre'cifion qu'on ne trouve pas commune'ment ailleurs. On auroit, peut-ctre, defire' une defcription plus etendue de la ma- chine dont M. Eberhard s'cft fervi pour les expediences. Tout Phyfi- cien peut aife'ment iupple'er a ce de'faut. Plufieurs Le&eurs s'en plain- dront cependant •, nous les renvoyons aux ouvrages des Auteurs qui out e'crit fur la Phyjique expertmentale. Un Memoire n'eft pas un crake'. Perfonne n'ignore de quelle utilite' eft la the'orie du mouvement ; il n'arrive aucun changement (ur ce globe que par le mouvement; il eft, en un mot, fi univerfellement ne'ceffaire, qu'il n'eft pas e'tonnanc que des hommes du premier me'rite , le loient occupe's a en deter- miner les loix ge'nerales & particulieres. On a vu fucceffivement MM. Defcartes , Borell , Leibnitz , Newton , Bernouilli , Hermann , Polene, de Mairan, s'Gravefande , de Maupertuis , Euler, & tant d'au- tres , confacrer leurs veilles a ce travail important. lis ne fe font pas contente's de faire connoitre les loix ge'ne'rales & particulieres du mou- vement , mais ils en out encore fait ^application a toutes les efpeces de corps durs, mols 8c elaftiques. On doit etre fache' qu'un fucces bril- lant n'ait pas toujours e'ee' le prix de leurs veilles , 8c qu'ils n'aient jamais bien pu e'claircir cette matiere. L'on connoit la fameufe pro- pofition dc Leibnitz, qui embrafa l'Europe favante, & la divila en deux fedtes : l'on connoit auffi la difpute fur les corps durs 8i elaftiques , ou M. Bernouilli , &: d'autres pre'tendoient que les loix du mouve- ment e'toient les memes pour les corps durs & les corps elaftiques , tandis que la plupart des Phyficiens vouloient des loix particulieres pour les corps elaftiques. Ceux qui ont expofe les loix des corps e'laftiques , conviennent tous que ces corps ne perdent jamais tout leur mouvement ; mais qu'apres le choc , la fomme des mouvemens ou des forces eft /gale , quelle que Jbit la majfe. Il fuit de-la, que fi les mattes font egales, la fomme des SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. i6t des vitcffes fera egale apres 1c choc. MM. Wolff, Hamberger, Segnerj s'Gravcfande , Hermann, Kraft, Mufchenbroeck , Bernouilli , de Maupertuis, Kriigcr, lone d'accord fur ce point; je 1'ai moi-memc enf eigne, 8c fouvent j'ai eu occafion de trouver cette loi bien fendee-, mais l'expe'rience m'a appris qu'elle n'e'toit pas generale, & qu'il etoit des cas oil les corps elaftiques reftoient parraitement eu repos aprti le choc. J'ai done cru rendre Service a Ja Pkyfique , en cxpofant ces cas d'excepcions a la regie ge'ne'rale. Je fuppofe, i°. que Ton recoit coutes les loix du motivement , dc'- montre'es dans les Auteurs les plus modernes, fur-tout celle-ci : un corps dur , qui choque un autre corps dur de meme majfe , lui impr'um la moitie de fa vitejje; i°. qu'un corps claftique eft relativement dur , & que les loix ge'njrales du mouvement font les memes pour les corps e'lafti- ques iv les corps durs ; que la difference fpe'eifique de ces deux mobiles ne vient que de la compreflion & de la reftitution des parties ; 30. que le corps elaftique A , venant a choquer avec une viteffe quelconquc le corps elaftiques B, le comprime avec la moitie' de fa force, Sc employe l'autre moitie' pour (e comprimer lui-meme; de maniere que fi la force d'A=6, B fera comprime' avec une force = 3 , 8c A fe comprimera lui-meme avec une force =3 : car fi A comprimoit B avec toutc fa force=6, & qu'il flit comprime' lui-meme avec une force egale, la force de la reftitution feroit= 11, & par confe'quent, le double de la force agente ; ce qui ne peut fe fuppofer. Les loix du choc des corps elaftiques peuvent fe reduire a. deux cas ge'ne'raux : en effet , ou les deux corps font tous les deux en mouve- ment, ou l'un eft en mouvement , tandis que l'autre eft en repos. Dans le premier cas, Ci les corps A & B le meuvent en fens contraire fur une meme lignc , alors les forces font egales , ou ne le (ont point. En un mot, je fuppofe la force du corps A = V, & celle du corps B =: v. D'abord , fi les forces font e'gales , de maniere que V = v , comme les forces oppole'es fe dc'truilent, V & v, fi on les fuppofe durs, fe- ront = o apres le choc ; mais comme A eft un corps c:laftique , il fera comprime' par Paction du corps B, avec une force = |v, 8c fe com- primera lui-meme avec une torce=jV, V;etant = v dans l'hypo- thefe, la force de la compreffion fera = v ; V fe reftituant avec la meme force , repouffera done en fens contraire B, avec une force= v. Mais la meme chofe arrivant au corps B, A , fera repouffe en fens con- traire avec une force = V. Chacun de ces corps prendra done fa di- rection , fans rien pcrdre de fa force. Mais fi les forces font ine'gales , de maniere que V = v + d, il n'en fera pas de meme. Suppofons que ces corps foient durs; apres lechoc, les forces le de'truiront, 8c chacun d'eux fera mis en mouvement avec une force =4 d, felon la direction de la rorce majeure, e'eft-a-dire > Sbptembre 1771, Tome I. X i6i OBSERVATIONS STJR IA PHYSIQUE , du corps A : mais pendant le choc, l'- corps A comprimera le corps B, avcc une force =4 V, & dans le meme terns , ll fera comprime lui- merac avec une force = 4 V; mais le corps B comprimera le corps A avec une force = iV, & fera lui-memc comprime avec une force = 4 v. Commc nous fuppofons ces deux corps parfaitement e'laftiques, cha- cnn d'eux fe reftituera avcc une force egale a cclle de compreilion : c'eft pourcjuoi le corps A fe reftituera avec une force =4 V + 4v> force cju'il communiquera a B : la force du corps B e'toit deja. ^z ^ d , apres le choc, elle fera done = 4 d + 4 V + 4 v. Mais 4 V = 4 v + \d, par la fubftitution, la force du corps B fera = 4^ + 4 v + ±d-\- ^y — d-\- v = V. Mais le corps B fe reftituant avec une force = 4 V +t^> imprimera cette force au corps A , mais dans un fens contraire : c'eft pourquoi la force de A fera = \v + \d + \v — 4 car , ou le corps A eft en repos fur un plan, Sc on pcut le mouvoir hbrement , Sc il eft de meme maiTe que B, ou il eft immobile, fixe' a un plan, & d'une maffe indetermine'e. Dans le premier cas , oil le corps A eft en repos , Sc peut recevoir du mouve- ment , fi on le fuppofe parfaitement dur, que la force de B foi r = v , il communiquera au corps A la moitie de fa force-, & apres le choc, leur vireffe (era = 4 v. Mais dans ce meme terns , Pelafticite de ces deux mobiles fait qu'ils font tous deux comprime's par une force = ±v. A, fe reftituant, agit fur le corps B avec une force = 4'''' Cette action etant contraire Sc e'gale dans le corps B , ces deux forces fe detruiront mutuellement ; Sc apres le choc , la force de B fera == o : mais B fe ref- tituant en prenant fa premiere figure avec une force = 4 v, repouflera A dans la meme direction; Sc ce choc , ajoute au premier, doublera la force de A, qui fera = 4 v + 4 v =z v. Apres, le choc B reftera done en repos, Sc A aura toute la viteftc dont B jouiif -it avant le choc. S'Gravefande , Mufchenbrocck Sc les autres Phyficiens font d'accord fur les loix du mouvement que nous venons d'expofer •, mais leur de'- monftration n'eft pas la meme. Quoi qu'il en foit, elles font vraies, & appuye'es fur l'experience; cependant, aucun de ces Phyficiens n'a donne fur le fecond cas, ou un corps e'laftique en mouvement cheque un autre corps e'laftique immobile; aucun, dis-je , n'a donne', fur ce cas, de de'monftration fatisfailante ; car, ou ils n'en ont pas parle', ou ils l'ont expofe' fous un faux jour. S'Gravefande & Hermann n'en difenr mot. Mulchenbroeck fuppoie, a la vcrite, que le corps en ■mouvement eft e'laftique; mais il confidere commc dur, le corps qui eft immobile ; ce qui lui fait conclure, epi'un corps e'laftique venant i choquer un corps dur immobile , eft reflechi par ce corps dur , avec la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. it; meme force dont il jouiffbit avant le choc : mais ce qui doit arriver dans lc cas oil les deux corps font claftiques , c'eft cc dont il ne parlc pas. De tous les Phyficiens, jc ne voisquelecelebreM.de Maupcrtuis qui fe foit occupe' de cette hypothcfe. II prc'tend qu'un corps elaftique frappant un corps de la meme nature immobile, en eft aufli-tot r-.'Hc'- chi : mais , ne lui en dc'plaife , cette propofition ea contredit une au- tre dc'montre'e, oil Ton foutient , (\\\ apres le choc, les vitejfes font e'galcs dans deux corps e'Lftiques ; car la formule, la vitejfe du corps ttajlique — ~ — - — -_-— » de laquellc il fuit e'videmment , en fuppofant B = » , 8c par confe'quent A &tf = o, que a = —'a, c'eft-a-dire , que la vitefTe fera la meme, mais negativcment , & en direction contraire; cette formule, dis-je , fuppofe une propofition, dont nous demontre- rons la fauffete'. Pour mieux de'termincr ce qui doit arriver dans ce cas, donnons d'abord de l'elafticite au corps immobile A, & regardons le corps B, com me parfaitement dur. Si B fe mene avec une force = v , il em- ployera toute fa force pour choquer le corps immobile A. Cette force ne pouvant fervir a faire mouvoir le corps A , fera conlomme'e toute cntiere pour lui faire changer de figure; B n'en confervera plus, Sc reftera en repos. Apres la compreffion , le corps A reprenant fa pre- miere figure, &fe reftituant avec une egale force, frappera le corps B, auquel il Pimprimera toute entiere, & qu'il fera mouvoir en fens con- traire. Il eft done c'vident qu'un corps dur, choquant un corps elaf- tique immobile, doit en etre rcrle'chi avec une force egale a celle'' qu'il avoit avant le choc : mais comme le corps elaftique emploie la force toute entiere pour re'fie'ehir le corps dur, 8c comme les loix du choc des corps e'laftiques font diffe'rentes , on doit trouver peu de vraifem- blance dans la propofition avance'e par M. de Maupertuis, oil il pre'- tend qu'un corps elaftique doit etre refle'chi par un autre de la meme nature , fi tous deux jouiffent du meme degre d'elafticitc'. Suppofons done A & B claftiques, A immobile, & B en mouvement ; que la force de B foit = v, il ne 1'ciTiploycra pas toute entiere dans le choc pour faire changer A de figure , comme iL arriveroit , fi B c;toit un corps dur; car B e'tant e'laftique , doit etre comprime', 8c changer Iui-riierne de figure dans le choc. Il employera done c:videmment la moitie de fa force pour A, 8c 1'autre moitie' pour lui-meme. Apres le choc , avant la reftitution de la figure de A 8c de B B demeurera e» repos, comme s'il jouifToit d'une parfaite durete'. Mais le corps A prend ia figure avec la meme force qui 1'avoit 'comprime, c'eft-a-dire, = ly; il repouflera le corps B, avec Ia moitie de la force que B pofTe'doit avant le choc. B devroit done etre re'fle'chi en fens contraire avec une Septembre i 7 7 i , Tome I. X: x*4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, force = 4 v : mais dans le meme moment, le corps B fe reftitue en di- rection oppofe'e avec une force z=.\v; mais les directions oppofe'es & e'gales fe de'truifant, il eft evident que la force avec laquelle B devroit etrc re'flechi, fe de'truit ne'ceflairement par. la direction oppofe'e, &C que par conie'quent, la re'flexion ne peut avoir lieu. B rejlera done en repos apres le choc. Dans la Fhyfique , une the'orie lumineufe ne fufEt pas, il faut le fe- cours de l'expe'rience. J'ai done prepare une machine a-peu-pres fem- blab e a celle que de'erivent MM. Nollet 5c s'Gravefande ; e'eft un plan de bois poli, perpendicutaire a l'horifon, fur lequel eft trace un demi- cercle divife par degre's : du centre de ce demi-cercle, fort un bras de bois perpendiculaire au plan , auquel font attaches deux fils de la meme longueur. Ces fils font range's de maniere qu'ils peuvent fuf- pendre deux boules d'ivoire ou de plomb, felon le befoin. Si je prends done deux boules d'ivoire cgales , ( je me fers , pour cette experience, de deux billes) que je les fufpende aux fils, en leur faifant parcourir les degre's du demi-cercle , je m'affurerai facilement par l'experience des loix des corps e'laftiques ; car , jc fuppofe que je laifle tomber l'une & l'autre bilk de la meme hauteur, elles fe choqueront & fe re'fle- chiront avec des forces egales , ce dont je m'affurerai en voyant le nombre de degres que chacune d'elles aura parcouru. Si je laifle tom- ber A de huit degre's, & B de quatre (eulement , A reviendra au quatrieme degre , B, au huicieme, & ils changeront ainfi de vitefTe. Si je laifle A en repos , Sc que je laifle tomber B fur A , d'une certaine hauteur, B demeurcra en repos, & A fe mouvera avec toute la force de B. Si je fixe A contre le plan, de maniere qu'il foit immobile, & qu'enfuite j'eleve B a une certaine hauteur, pour Iui faire choquer A, B demeurera aufli-tot en repos, Sc ne fera point re'fle'chi : mais, au lieu de bilk d'ivoire, je n'ai qu'a prendre une petite boule de plomb que j'e'leverai aufli a une hauteur quelconque, pour la faire retomber fur A , qui eft e'laftique, B fe re'fle'ehira un peu. Notre de'monftration fur les loix du choc des corps e'laftiques, ren- verfe , ce me femble, la thefe de Leibnitz. Ce fameux Phyficien pre'- rendoit en vain que la quantite des forces vives en ge'ne'ral e'toit tou- Jours la meme , puifque les forces motrices fe perdoient non-feulement dans les corps mols , mais meme dans les corps e'laftiques. ^P SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. \CS LETTRjE Be M. Lysons , Midecin de VH6pitalde Glccefier,a M. Nichozls, fur Fe'trange phenomenc de trois e'pingles avalies par une fille, O qu'elle a enfuite rendues par Vipaule , traduitt de I'Anglois. Monsieur, Lor S QUE je vous parlai d'une fille qui avoit avale' trois epin- gles qui lui e'toient enfuite forties par l'e'paule, vous pensatcs qu'un fait de cette nature devoit etre rendu public, & vous me pti.nes de vous en envoyer un detail circonftancie. Je vais le mettre fous vos yeux auffi exac>ement qu'il m'a e'te pofllble de le de'crire. Eleonore Kaylock, agee de 22 ans , Sc d'un tcrape'rament fort Sc ro- bufte , arriva a l'Hopital de Glocefter , le 2 9 Mai 1766 , pour s'y faire guc:iir d'une douleur de cote' , occafionne'e par trois e'pingles qu'elle avoir avale'es neuf mois auparavant. Cette fille fervoit a la cuifine. II lui arriva un jour d'e'cumer un pot au feu , ayant trois e'pingles dans ia bouche. Elle recut une fi grandc quantite de vapeurs , qu'elle fat contrainte d'en avalct. Dans cet inftant, les e'pingles pafserent dans l'afophage , & y fejournerent deux mois , malgre' tous les moyens dont on fc fervit pour les en de'- loger. Cependant, le Chirurgien , par des tentatives re'ite're'cs , par- vint enfin a les en chaffer. Le fejour des e'pingles dans la gorge en irritcrent les parties , & y causercnt une inflammation. Les alimens ne paffoient plus. Ce n'ttoit qu'avec des peines infinies, que la malade prenoit du bouillon. Elle tomba dans un e'tat de foibleffe , qui ne lui permettoit plus de quitter fon lit. Des que les e'pingles eurent abandonne' l'cefophage, 1'inflam- mation fe diflipa. Elle commen^a a manger , & bientot fes forces fe re'tablirent. Elle rentra en fervice ; mais cet e'tat de tranquillite' ne dura pas. Elle fut en proie a de nouvelles fouffrances ; & les douleurs de- venoicnt fi ctuelles, qu'elle tomboit dans de violentes convulsions. Lorfqu'elle entra a l'Hopital de Glocefter , elle fe plaignoit d'une douleur au cote droit, au-deffous des fauffes cotes. Cette douleur s'e'- toit fait fentit des l'inftant que les e'pingles avoient quitte l'cefophage, 8c n'avoit jamais dikontinue ; elle devenoit tres-aigue, quand cette fille fe tournoit fur le cote gauche, 011 qu'elle levoit le bias droit. II fe forma une nouvelle inflammation a la gorge; elle cracha le faogj Septembre i 77 1 , Tome I. 166 OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , tk. elle fut attaque'c d'une toux violcntequi la jettoit dans de frequentes convulfions. Dans cet e'tat de convuliion , le mufcle droit fupe'rieur de Peril droit, e'toit fi fortement affecte, que l'iris difparoiffbit abfolument, la pru- nellc e'tant entierement renverle'e. II en e'toit dc meme de 1'ceil gauche, avec cette difference, qu'il revenoit dans ion e'tat naturel, plufieurs jours avant l'autre. Elle voyoit a peine apres la ceflation de ccs affec- tions fpafmodiques , & ce n'etoit que pcu-a-peu qu'elle recouvroit la Tue ; ce qui e'toit , fans doute , caufe par la grande compreffion du nerf optique. Aucun des autres mufcles ne paroiffoit etre affecle' hors du paroxifme. Tant que les e'pingles fejournerent hors de l'aefophage , le Chirurgien ne favoit comment diriger fes inftrumens, n'ayant aucune indicationcer- taine de l'endroit oii les e'pingles s'e'toient loge'es. Toute la pratique du Me'decin fe re'duifit a des palliatifs , a des (aigne'es , a des remedes anodins & rafraichiffans. Dans le commencement d'Aout, une tumeur douloureufe , de la groffeur du pouce , parut a l'e'paule droite , & difparut apres huit jours, fans venir a fuppuration. Une fcmblable tumeur rcparur a l'epaule gauche. M. Crump, un des Chirurgiens de l'Hopital, donna tous fes foins , pour la faire venir a fuppuration, Sc y re'uffir. Le 20 Aout , il Pouvrit, & il en forth une groffe cuillere'e de pus. II en fortit le lendemain une plus grande quantite, dans la- quellc il trouva une des e'pingles. M. Crump employa alors la fonde pour avoir les deux autres, & il ne put les decouvrir. Le lendemain, les deux autres ipinghs fe trouverent dans la matiere qui e'toit fortic de la tneme plaic. Ccs e'pingles avoient quinze lignes de longueur. La plaie par oii ces e'pingles fortirent , etoit fur la partie fupe'rieure du mufcle fcapulaire. Apres la gue'rifon de cette fille, je comparai foil epaule avec les tables anatomiques de Cowper , fur les mufcles ; & , autant que je puis le deviner, la plaie s' e'toit formee dans la partie charnue du trapefe. Les douleurs de cote, qui avoient e'te continues, cefserent , ainfi que la toux & le crachement de fang , auffi-t6t que les e'pingles ne furent plus dans la plaie. Il feroit fort fatisfaifant de connoitre exaclrement la route que tinrent ces e'pingles dans leur paffage depuis l'cefophage , jufqu'a leur fortie par l'e'paule. La toux & le crachement de fang pourroient faire fup- pofer cju'elles endommagerent le poumon : la douleur fous les fauffes cotes , porteroit encore a penfer que le diaphragme en fut affecte' ; mais leur fortie par l'e'paule fait croire que ces parties n'en furent point blellees , 8c qu'elle traverferent la fubftance de l'cefophage, pour entrer dans les mufcles du col $c de l'epaule ; &: de-la , pafserent dans la partie d'ou elles fortirent. Le premier fymptome rcmarquable , apres que les e'pingles eurent SUR I 'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i67 quitte l'cefophage , fut que la maladc fentit immediatement une dou- leur au cote droit, au-dcflfous des fauffes cotes, & que cette douleur ctoit tres-vive, quand elle fe tournoit fur le cote' gauche, ou qu'ellc levoit le bras droit. Si l'on fuppofe que les {pintles chaffees de l'oefo- phage pene'trerent dans les mulcles qu'on nomme dentek's, rhombciJe & trapife du core droit, ce fymptome dut necefTairement arriver. Car les dentele's e'tant les mulcles de la refpiration , & le denteli luperieur poftc'rieur e'tant attache a la feconde , a la troifieme, a la quarricme, a la cinquieme & a la fixieme cote, & le denteli infe'rieur poftc'rieur e'tant attache' a la dixieme, a la onzieme, ik a Textre'iTiite' de la dou- zieme cote, la douleur au cotif dut etre produite par les efforts conf- tans de la refpiration ; & la foncftion de ces mufcles e'tant d'e'lever les cotes, 5c d'abaifTer le bras, la douleur devoit le faire fentir plus vivcment , lorlque le bras droit etoit leve', parce qu'a'ors les ex- tre'mite's de fes mufcles, attaches aux cotes, le trouvoienr beaucoup plus tendues. En efFet, quoiqu'une plaie puiffc etre fur la partie la plus charnuedumulcle, cependant , 1'irritation qu'elle occafionne, fe porte d'elle-memc, &avec force, dans cetie partie ou eft la plus grande tenfion. Les mufcles rhomhoide & trapefe fe joignent au dentele fuperieur, & fe trouvent tous intimement reunis par la membrane cellulaire. II eft done neceffairc que tous ces mulcles (oienr affeifte's par la refpira- tion. Mais la foncftion des mulcles rhomhoide &c trapefe eft d'abaifTer le bras, ou de le tirer en arriere; il falloit done que la douleur dc cote augmentat audi (ouvent qu'elle levoit le bras droit , ou qu'elle s'appuyoit lur le cote' gauche. Parvenus, comme nous pouvons le fuppofer, a la connoiffance de la vraie caufe de la douleur au cote' fous les fauffes cotes, recherchons celle qui peut avoir donne' lieua la toux : on trouvcra que cette toux vient de la me me caule que celle d'une perfonrie fujette a la pleurefie, avec cette feule difference que dans l'une , la ple'vre & les mufcles in- teicoftaux font affe&e's par une inflammation inte'rieurc , qui gene la refpiration •, 6c dans l'autre, la toux vient de l'irritation caufe'e par un corps e'tranger. Les effets font les memes dans l'une & dans l'autre. La refpiration le trouvant empechee, la nature fait des efforts pour fe debarraffer des obftacles qui la genent. Ces efforts occafionnent une toux qui augmente l'irritation & PinHammation des parties obftine'es , cv l'irritation 6c l'inHammation augmentent a leur tour la violence de la toux. Le poumon , par ces efforts re'eiproques, eft fi violemment agite , qu'il n'eft pas poffible que les vaifTeaux fanguins ne fe rompent ; de-la1 , le crachement dc iang, comne il eft arrive dans le cas prc'fent. Quiconque confidere la communication qu'il y a entre la troifieme paire de nerfs, Vintercojlale , la cardiuque &c les recurrent, avec les Septembre i 7 7 i , Tome I. i£8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , .-lucres nerf qui en dependent, appercevra aifement la caufe du fpafmc fur lesyeux, & de la convulfion gene'rale, comme une fuire ne'cef- faire de l'irriration caufce au nerf intercoftal , fur le cote' droit ; 8c Ton peut obfcrverque, quoique les deux moteurs des yeux foient affecte's , cependant, celui de I'ceil droit eprouve une contraction nioins vio- lence que celui de Foeil gauche. II paroit aflez raifonnable de conclure , d'apres les fymptomes qui fuivirent ce fingulier accident , que les trois e'pingles furent en mtrae terns chafTe'es de l'cefophage dans les mufcles dentele's du cote droit , qui communiquerent imme'diatement une itritation , ou une impul- fion au nerf intercoftal, d'oii provint la douleur au cote'; de-la, les convulfions des yeux & tous les autres fymptomes. Mais quelle qu'ait e'te' la caufe de la douleur au cote, a l'inftant que les e'pingles quit- terent l'cefophage, cette caufe continua d'agir jufqu'a ce que les e'pingles fuffent forties par l'epaule gauche , puifque la douleur au core' ne ceffa qu'apres lcur fortie. L'e'paiffeur des deux mufcles dentele's , du rhomboide 8c du trapefe , peut etre juge'e trop grande pour etre, a la fois, pene'tre'e par trois e'pingles de quinze lignes de longueur. Mais, fi Ton obferve que l'une de ces e'pingles fortit de la plaie avant meme qu'on put de'couvrir avec la fonde les deux autres , on verra qu'il faut croire que cette premiere e'pingle pafTa dans le rhomboide & le trapefe , tandis que les deux autres refterent dans les dentele'es ; qu'elles y fejournerent jufqu'a ce que la premiere eut quitte' la trapefe ; qu'elles prirent enfuite la meme route , 8c for- tirent par la meme iffue. Cette explication d'un fi etrange evenement ne manqueroit pas de vraifemblance, fi les e'pingles fuiTent forties par 1'e'paule droite; e'eft ce qui n'eft pas arrive'. Ceux qui penfent qu'entre tous les nerfs, il y a une communication incime , &c que, dans le corps, la caufe & l'erfct doivenr fe trouvcr dans les cote's oppofe's , foutiendront que les e'pin- gles furent chafTe'es de l'cefophage dans les mufcles du cote gauche. On n'eft point encore d'accord fur cet objet. Pour moi , je n'appercois au- cune raifon qui me determine a croire qu'il ait du fe former fur l'e- paule droite une tumeur exademenr reffemblante a celle qui , fur Fe- paule gauche, a fervi d'iflue aux e'pingles , & que cette tumeur ait du. le difliper, fans venir a fuppuration. Depuis , il eft arrive un cas a-peu-pres femblable. Une petite aiguille s'e'tant engage'e dans le bras gauche d'une femme , fix polices environ au-deffous de l'epaule, paffa de-la dans le cote droit de la poitrine, d'oii elle fut tire'e plufieurs mois apres fa premiere entree dans le corps. Un mois apres l'accidenr , la perfonne fentit au-deffous de I'endroit oil l'aiguille t'toit entree; une douleur qui s'etendit le long du bras. Cette douleur dura trois ou quatre jours, 8c revint enfuite periodiquemenr. Environ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ir, , Environ dix-fept femaiiies avant que l'aiguillc fut retiree, die rcf- fentit, tous Ies matins, des douleurs d'eltomac , f'e trouva mal, &c eut envic de vomir. Ces fymptomes dilcontinuerent deux jours avant l'opc'ration qui lui fut fake pour retirer l'aiguillc. Ce fut alors qu'elle crut que cette aiguille etoit paffee dans le cote' droit de la poitrine. La perfuafion engagea le Chirurgien a y faire line ouverture , & il en retira la racinc aiguille qui, pluiieurs mois avant , lui etoit entree dans le bras gauche. Apres ('operation, cette perfonne n'eprouva plus au- cune douleur. Nous nous permettrons quelques re'flexions fur cette lettre , 6V: nous ne les croyons pas inutiles , quoiqu'on nous reprochera , peut-etre, d'avoir rendu la note aufli longue que le texte. i°. Les faits que nous venons de rapporter, ne peuvent paroitre it ranges qu'a ceux qui ne font pas au courant des progres de l'art, par leur negligence a etudier les ouvrages qui y font defhnes. Le premier volume des Memoires de 1' Acade'mie Royale de Ckirurgie , ren- ferme une diflertation tres-e'tendue fur les corps mangers dans l'oefo- phage , oii l'on voit des obfervations afTcz multiplie'es (ur les cas done il s'agit. On y apprend que les e'pingLes & les aiguilles cheminent or- dinairement fort loin dans les chairs & dans les graiifes , avant que de s'arreter dans une partie, &c de ie procurer exte'rieurement une iflue. La coniequence qu'on tire de cela, pour le bien de l'humanitc', e'eft qu'il convient d'ouvrir a ces corps etrangers un paffage , aulfi-tot qu'on peut les fentir en quelque endroit vers la peau, de crainte qu'ils ne (e portent fur quelques vilctres , &c n'y cauient des de'iordres fa- cheux , & meme la mort. :°. Feu M. Petit , celebre Chirurgien de Paris, a vu une demoi- felle qui avoit ioufFert des accidens primitifs ordinaires , a la iuite des corps etrangers, arretes dans Pcefophage; les tentatives , pour l'en- foncer , furent inutiles , & ne fervirent qu'a le deplacer. Plus d'un an aprts , le corps e'tranger fe fit ientir, proche la jointure des clavi- cules , avec le fternum. M. Petit remarqua , par le toucher , que ce corps etoit fituii de travers ; il fentoit fes deux extre'mite's , l'une du cote droit, & plus pres de la peau; l'autre du cote gauche, & plus profondtment. Le mois luivant, M. Petit ne fentit plus Textiemite qui etoit du cote gauche , & celle qu'il avoit (entie au cote droit s'e'toit il fort approchee de la peau , qu'elle la foulevoit, & formoit par-la une elevation aflez vifible, lorfqu'elle tournoit le col du cote oppofe : trois mois apres, M. Petit trouva que le corps e'tranger s'ctoit avance' dans la graifle , fous la peau qui couvre le moignon de l'epaule •, il fit une petite inciilon avec une lancette , He decouvrit une ipingle qu'il tira. file etoit toute noire, exceptc' la tete oii il y avoit quelques points de verd de gris. Septembrb 1771, Tome I. Y 170 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , M. Petit fit paroitre a cette occafion, dans lc Mercure de France , Novembre 1 j z 1 , une courte Dijfertation , ou il fait voit d'une ma- niere fort fatisfaifante , comment ces corps aigus cheminent dans le tilfu de nos parties , & il rapporte , dans cette Dijfertation, un fait re- marquablc fur le meme iujet. II a trouve dans le cadavre d'une femme qui avoir e'te' jufticiee, une e'pingk an melentere, a trois travers de doigt de l'attache des inteftins : cette e'pingk n'y e'roit , fans doute, parvenue, qu'apres avoir perce' l'inteftin dans l'endroit ou il s'attache au mefenrere. On lir , dans lc meme endroir, des Me'moires de VAcade'mie Roy ale de Chirurgie , que M. Ledran, le pere , a trouve, au milieu du bras d'un homme , une e'pingk qui avoir e'te avalee depuis plufieurs anne'es. M. Ledran, le fils , en a dc'couvert une a. cote d'une des veines du bras , en faifant une faigne'e. Rondelet en a egalement vu une dans un abces au bras, elle etoit toute rouillee. Saviard parle, dans la foixante- feptieme de fcs Observations Chirurgicales , d'une aiguille qu'il a tire'e du mufcle delto'ide. Moinichen rapporte qu'au bout de quatre ans, on tira du mi'ieu de la j.imbe, une aiguille avale'e. Bartholin , Centurie 6 , Hijl. 99, donne une Observation femblable; & Roderius a Caftro, fournit un exemplc plus furprenant. Un enfant de fix ans avala une ai- guille, qui (ortit naturellemcnt par la jambe , plus de dix-huit ans apres. Suivant Blancard , on a trouve une e'pingk dans la propre fubftance de I'uretre, qui y avoir caule' un abces, dont le malade mourut. Par le te'moignage de plufieurs Auteurs rres-eftimes , & a la foi defquels on peut le rapporter, il eft fouvent arrive que des aiguilles & des e'pingles avale'es onr perce la veflie, & y ont fair naitre des pierres, en fer- vant de bafe ou de noyau aux matieres qui fe pctrifienr. 3°. Ces phe'nomenes ne font done pas aulTi e'tranges que le penfe M. Lyfons, & de plus grands details fur les accidens dont il parle, au- roient e'te' tres-nece(Taires. II auroit ete important, par exemple, de /pe'- cifier quelle fut la dure'e du fejour des e'pingles dans l'ceiophage , 6c com- bien de rems la de'glutition fut interrompue , ce qui a diietre tres-long, puilque la foiblefle de la malade devinr fi confide'rable , qu'elle fe vit oblige'e de garder le lit. Cette de'glutition interrompue fut-elle la iuire de la pretence des e'pingles, ou de ['inflammation occafionne'e par elles, ou e'toit-ce l'effet de Pun 8c dc l'autre ? 40. Les e'pingles etant forties de l'inte'rieur des cefophages, il ne ref- toit d'autre parti a prendre que celui d'etre attentif a ce qui pouvoit lurvenir a la malade, pour en tirer des indications favorables. Ces e'ping.'es etoient siirement dans les voies du tiflu cellulaire,& per/onne n'ignore , apres les exemples que nous avons cite's, qu'un corps etran- ger peut en parcourir une grande e'tendue , avant de fe fixer dans une partie determine'e ; ce qui s' execute plus ou moins promptement, fui- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 171 van: la nature du corps e'tranger, la profondeur du lieu qu'il occupe , la laxite plus ou moins grande du tiffu cellulaire, parce que la nature hut des efforts continuels pour fe dcbarrafler de tout ce qui nuir a l'e- conomie animale, & que fouvent elle y parvient fans le fecours de l'art. 50. Nous ne faurions convenir avec M. Lyfons, que ces ipingles ayent traverfe' les mufcles du col &c de Pepaule, pour arrivcr dans le lieu d'ou elles fortirent ; mais bien plutot , commc nous l'avons de'ja fait remarquer, a travers le tiffu cellulaire, deftine a 1'union de ces monies mufcles. Sans employer des raifonnemens hafardes pour cxpli- quer la caufe des doulcurs que la malade fentit au cote droit, au-def- fous des fauffes cotes , & qui devenoient plus vives , quand elle fe tournoit du cote' gauche, ou quand elle levoit le bras droit, ne feroit- il pas plus raifonnable & plus vrailemblable de la rapporter a la ten- fion & a l'irritation des nerfs qui traverfent la partie du tiffu cellu- laire , que les corps etrangers ont parcouru. L'on fait que les nerfs de ■* l'cefophage ont des communications fre'quentes avec le nerf intercoftal, & la huitieme paire , & ceux-ci avec les nerfs intercoftaux. Ainfi, en partant d'apres les connoifTances anatomiques, il eft tres-aife' de con- cevoir, & meme d'expliquer les fymptomes qui fe font manifeftes dans cette maladie. 6°. Pour expliquer la caufe de la toux, & celle du crachement de fang , on a eu recours a une comparaiion qui ne paroit pas applicable au cas prelent. Perfonne n'ignore que le mo.ndre agacement exe'eute' fur les cefophages , ne fiit-ce qu'avec la barbe d'une plume , excite la toux, & meme fouvent le vomiffement. Or, nous favons que la fub- ftance des tuniques qui entrent dans la compofition du canal cefopha- gal eft arrofee de plufieurs ramifications fanguines, qui, ici , comme dans les poumons , peuvent , lors des contractions force'es & contre nature, de la membrane mufculeufe de l'cefophage , fouffrir des dila- ce'rations, & caufer le crachement fanguinolent qui a paru. L'on ob- jedera peut-etre que le crachement de fang venoit du canal trachc'al. Nous ne nous arreterons pas a re'futer cette objection ; mais quand nous l'admettrions , nous dirons toujours que le crachement fanguin n'etoit point caufe par la rupture des vaifTeaux fanguins , place's dans la fubftance du poumon , mais plutot par celle des vaiffeaux qui ar- rofent la partie de la trachee artere avoifinant le lieu ou s'eft paffr'e l'irritation occafionne'e par la prefence des corps etrangers. Quant a la gene de la refpiration , nous croyons devoir l'attribuer a la meme caufe par laquelle l'on a explique les douleurs que la malade e'prou- voit en prenant dift'e'rentes attitudes, e'eft-a-dire, aux nerfs irrites. Nous pourrions encore ajouter plufieurs obfervations fur la manure peu anatomique , dont M. Lyfons s'eft fervi pour expliquer la route SeptemBre 1771, Tome I. Y z 1 7i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fuivie par ces e'pingles , & fur les accidens qu'elles ont occafionne's. Le Left: ur inftruit y fupple'era , & nous eviterons des longueurs tou- jours faftidieufes. MriDECINE v£t£rINAIRE(RS trois volumes, malgre Ieur e'tendue , ne contiennenr aucune inutilite' , & il n'ctoit pas me me podible que l'Auteur rut moins prolixe. Nous pouvons dire, avec certitude que, julqu'a ce jour , il n'a paru aucun ouvrage auffi compiet en ce genre. On voit par-tout l'Ecrivain inftruir, parlant fans pretention, inftruilant fans morgue, rendant avec la (atLfadtion qu'c'prouvent les belles ames , la juftice due aux Auteurs qui l'ont precede'. Les progres & la perfection de l'Art font fon ve'rirab'.e bur. Cet ouvrage pre'cieux eft moins le fruit d'une ima- gination e'chaufFe'e, que d'une pratique e'claire'e , & fonde'e uniquement fur Pexpe'ricnce. L'Auteur peut-il errer avec un tel flambeau .? M. Vitet a des droits allure's a la reconnoiflance publique, pour avoir confacre' neuf anne'es a des reclierches pe'nibles & aflidues ; & ce qui eft encore plus ge'nereux , d'avoir facrifie' vingt mille francs afaire des expediences re'iterees fur les animaux, pour connoirre l'adtion dif- ference des me'dicamens fur les uns ou fur les autres. Un tel exemple eft peu comraun dans le fiecle prelent. Les e'loges que nous donnons a cet Obfervateur inftruit &c definte'refle , font infe'rieurs a Ion ou- vrage. La marche dc toutes les fciences eft de palter du plus connu au moins connu , fans quoi, chaque pas conduit a 1'erreur : en efFer, comment raifonner fur les maladies & fur leurs efpeces, (ur leurs indications & leurs contre-indications, fur la nature des me'dicamens, lur leurs combinailons 8c fur leur maniere d'agir , fi on n'a pas une connoif- fance exadte du fujet fur lequel on opere ? Audi M. Vitet prend pour (a) Le mot ve'termaire n'eft point nouveau. Plufieurs Auteurs anciens l'ont em- ploye. Columel, patlanc de la Me'decine des animaux , Meduina veterinaria. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i7i c'pigraphe de fon premier volume, cct excellent axiome d'Hoffman : Sans L'Anatomie , la Medecine ne pre'fente quJ incertitude & danger. Lcs connoiflances rcunics &combinees, forment l'habile Medecin; la pre- emption , l'ignorance , l'aftule 8c la jaloufie, caracterifent le Charlaran. Lc premier volume dc la Midecine Veterinaire eft diviie' en fept par- ties. M. Viret examine dans la premiere, la conformation exte'rieure du cheval 8c du bceuf. L'exte'rieur du cheval eft divi(e', fuivant la coutume ordinaire, en avant-main, en corps 8c en arribe-main. Nous re (uivrons point notre Auteur dans le detail des parties fepare'es dcs diffe'rentes di virions, elles font trop connues par les gens de cheval, les Mare'chaux , lcs Maquignons , &c. nous dirons feulement, qu'eii dc'crivant chaque partie d'une maniere fimple , courte 8c pre'cife, M. Vitet fait remarquer fes bcautes 8c (es de'fauts, les diffe'rentes de'no- minations auxquelles elles ontdonne' lieu , & le fiegc des maladies qui y furviennent. II termine cette divifion par l'examen des fignes exte'- rieurs , dont Fenfemble annonce un bceuf fort 8c vigoureux. La dcfcription de la ftruclrure des os du cheval 8c du bceuf, forme la fecondc partie, 8c offre une ofteologie complette, dans laquelle on reconnoit, au premier coup d'ceil, toutes les difte'rences qui fe trou- vent entre les os du cheval 8c ceux du bceuf. C'eft une zoolo^ie faite par main de Maitre. La Myologie, l'Angiologie, la Ne'vrologie, &c. e'tudiees fe'pare'ment trainent le degour apres elles par leur fe'cherefle rebutante : il falloit adoucir cette etude, 8c femer des fleurs pour cacher les e'pines; c'eft a quoi M. Vitet s'eft attache', en tracant une route nouvelle, ou du moins peu employe'e. C'eft par l'eftet qu'il a demontrc' la caufe, 8c fucceflivement la caufe par l'effet. » Le bceuf & le cheval, dit-il, au commencement de la troi/iemc » partie , font force's, par leur ftruclure, 8c pour leur confervation , a » fuir lerepos tantquele foleil e'claire la furface de la terre qu'ils ha- » bitent. Pour fatisfaire a ce devoir, etabli par des loix invariables, » la nature leur a donne' des organes qui les tranfportent , avec faci- » lite d'un endroit dans un autre. Ces organes font lcs mulcles, dont » la contraction &: le relichement alternatifs e'cablnTent lc mouve- » ment progrefTif , en failant mouvoir certaines pieces offeufes les unes » fur les autres •-. M. Viret donne les regies du me'chanifme, du mou- vement 8c de la progrelTion, en de'montrant l'artache de chaqus muf, cle, & (on action phyfique-, de forte, que tel ou tel mufcle ne peut fe mouvoir, fans communiquer neceflairement (on action a la partie a laquelle il eft artarhe'-, &: , paflant ainfi du particulier au ment ; e'eft par eux que le cheval &c le bceuf dependent leur vie contre « les embuches & les coups de leurs adverfaires; qu'ils c'vitent les » plantes nuilibles, pour favourer l'herbe falutaire; qu'ils cherchent » a s'accoupler avec l'objet de leur amour; qu'ils diftinguent les corps •> dont ils font environne's; qu'ils s'approchent a la voix de ceux qu'ils » aiment , & qu'ils fuient au bruit de leurs ennemis. c< La longueur & la multitude des poils qui couvrent la furface des » te'gumens, la privation des mains 6c des doigts , 6c la durete de la » peau , e'mouffant Paction des corps exte'rieurs fur les nerfs des te'- » gumens, privent les animaux du fens le plus effentiel, leur empeche » d'acque'rir des idees diftinAes fur la grandeur & la figure des corps, » & les mettent dans PimpolTibilite' de rectifier , par le toucher, les » autres fens, lorfqu'ils font en defaut ; auili voit-on ces animaux -•> fuit a Palpedt d'un objet qui devroit leur etre familier , & » trre e'tonnes du feul bruit que l'agitation des feuilles & le murmure " des eaux produi'ent fur les confins de leurs pacuxages •, incertains » fur la fotme & la qualite d'un corps , ils imploreront quelquefois » le fecours de Pextrcmite' du nez & de la langue; toucher bien im- » parfaii , puilquc (ouvent ils tombent dans l'erreur , au point de prendre » un objet pour un autre, mais en recompenfe , ils font d'une fen- » libilitc extreme a Paction des rayons lumineux & des fons; la plus « foible lumiere les conduit au milieu des chemins les plus efcarpe's Septembre 1771, Tome J. i76 OBSERVATIONS SUR EA PHYSIQUE, » & les plus obfcurs, & le fon le moins penetrant, les re'veille &C » les fait tenir fur leurs gardes ». Si les nerfs ont feul le droit de produire ces phenomenes , quelle eft done leur ftruclrure ? D'ou proviennent - ils ? comment agiffent -ils ? pourquoi e'tablifTent-ils des (enfations diffe'rentes? Eft-il poflible d'en expliquer le phenomene le plus apparent , fans connoitre la ftruclrure du cerveau & des organes de Podorat, du gout , de 1'ouie & de la vue' Pour re'pondre a tous ces points, continue PAuteur, nous de- montrerons le cerveau, les nerfs, les organes de l'odorat , les organes du gout , Poreille & ies fonclrions , Pceil &: fes ufages. C'eft ainfi que M. Vitet entre dans les details des diffe'rentes parties formant la fixieme divifion. Nous invitons a lire attentivement ce qu'il dit fur la lumiere & fur les fons > l'Anatomifte inftruit y dirige Pceil du Phyficien. L'animal fe meut, marche, fes mouvemens s'executent avec fou- pleffe & precifion; l'animal triture les alimens , il les re^oit dans Pef- tomac , les digere apres avoir converti les portions les plus delie'es en fa propre fubftance ; le chyle fe fepare du fang , le fang circule, les fonclrions fuivent les routes prefcrites par la nature , l'animal remplit les fonclrions auxquelles il eft deiline; nous connoiffons fa conforma- tion exte'rieure & inte'rieure , les defeduofites , (es vices & fes beaute's; il ne nous refte plus qu'a examiner par quels moyens il peut & doit fe reproduire : M. Vitet les de'montre dans la feptieme & dernierc partie de fon premier volume. Les parties de la ge'ne'ration du beuf & du cheval , font les pre- mieres foumifes a fes recherches anatomiques , & il paffe enfuite a celle de la jument & de la vache. Tout eft admirable dans ce me'chanifme, tout eft merveilleux dans fon operation ; mais comment s'exe'eute cette ge'neration ? Ce probleme reftera long-tems a refoudre. M. Vitet donne un abre'ge fuccint des diffe'rentes hypothefes e'tablies fur cet objet , & conclud ainfi. c< Pour expliquer le myftere de la ge'ne'ration , il me paroit qu'il eft »> effentiel de favoir comment le fang des arteres fpermatiques peut « fe convertir dans les tefticules , en une liqueur qui jouit feule du » droit de feconder ; car Phumeur des veficules &c des-proftates ne fert , » pour ainfi dire , que de ve'hicule a la f emence des tefticules , qui » fe'journe pendant quelque terns dans la portion la plus evafe'e des » canaux de'fferens. Si la liqueur renferme'e dans les veficules fe'mi- » nales , dans les grandes & petites proftates , fe'eondoit , il s'enfui- » vroit que lc cheval on le bceuf hongre produiroit comme Petalon a ou le taureau, ce qui n'arrive jamais. Il eft vrai que lorfque les u tefticules ne font que froifles, le cheval Sc le boeufs font encore » tourmente's SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 177 » tourmente's de l'envie de s'accouplcr , &: qu'ils le font avcc plaifir; » mais l'introdudtion de la verge dans le vagin, n'eft qu'uu moycn » agre'able , dont la nature s'eft fervi pour facilitcr le tranfport » de la femence du male dans la cavite' de la matrice : ainfi, la liqueur » contenue dans les ve'ficules (c'minalcs, Sc les proftates, en irritant » les parois, peut de'terminer le fang arreriel a paflcr en plus grande » quantite' dans les arteres cavernales, &c le fluide nerveux a couler » plus abondamment dans les nerfs des parties ge'nitales. Audi, la « verge acquiert-elle de la durete & de la tenfion ; les mufcles ifchio- » caverneux 8c bulbo-caverneux fe contractent-ils , & l'humeur des « proftates fort-elle fans etre precede'e d'une liqueur capable de fecon- » der. Tout fe pafle bien mieux chez 1'e'talon 8c le taureau; la liqueur » fe'minale , forme'e 8c prepare'e dans les tefticules , s'accumule dans la » portion la plus evafee des canaux defe'rens , irrite fortement les fibres » nerveufes qui entrent dans la ftruc~ture de leurs parois, 8c engage , par » cette irritaion,la nature a de'terminer le fang avcc plus de ve'locite » dans les parties , a feparer une plus grande quantire d'humeur dans le* » ve'ficules fe'minales Sc les proftates : toujours irritcs par la prefence de » la liqueur fe'minale, ils n'ont befoin que de voir unejumentou une » vache en chaleur, pour former le defir de s'accoupler •, alors, les » mufcles ifchio-caverneux fe contradtent, le fang marche avcc plus » d'impe'tuofite' dans les arteres caverncufes, la verge fort de fon four- » reau, s'allonge ■, le taureau s'approche de la vache, & Fetalon de » la junient.... la femence eft porte'e de la matrice dans les trompes ; y. de-la, jufqu'aux ovaires , ou elle penetre l'ceuf &c le feconde. A peine » l'ceuf a-t-il rec,u la vie , qu'il fe gonfle , rompt les enveloppes de j> l'ovaire, pafle dans une des trompes, qui le tranfmet dans une des » cornes de la matrice, oil il s'adapte pour s'attacher, a mefure qu'il j) croit , a la furface interne des cornes & du corps de la matrice , &C 11 pour en recevoir la nourriture ne'eeflaire a fon developpement, pen- » dant tout le terns qu'il y refte. ». M. Vitet ne fe contente pas d'expliquer le mechanifme de la genera- tion, il lui reftoit encore a conduirele fcetus depuis fon de'veloppement dans la matrice, jufqu'a fon e'tat de perfection; de fon e'tat de perfec- tion, jufqu'a fa fortie; &c de fa fortie, a fon e'tat de perfection , comme poulain ; enfin , comme cheval fort & robufte. Pour cet eftet , il examine quelle eft fa nourriture dans la matrice, quelle eft la partie conftitu- tive du lait qui doit le nourrir ; enfin , quelles pre'eautions il faut prendre pour avoir de belles productions. Cette derniere diflertation termine Ion premier volume ; elle eft inftrucl:ivc & inte'reffante. Nous nc dirons rien du ftyle de cet ouvrage -, on peut en juger par les dif- ferens morceaux que nous en avons rapporte's ; nous continuerons l'a- nalyfe des deux autres volumes, dans les volumes fuivans. Sebtembre 1 7 7 1 , Tome I. Z i78 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , OBSERVATIONS Sur TEkclriciti de la plume d'un Perroquet , par M. Hartmann. J' A I fait, le printems dernier, quelques observations qui avoient echappe', jufqu'a cet inftant, aux recherches des Phyficiens. Quoiqu'au premier coup d'ceil elles ne paroiflent pas bien importantes , je crois ce- pendant qu'il ne peut qu'en relulter un tres-grand avantage pour la the'o- rie de l'eledtricite'. Elles prouvent, ou plutot elles confirment, que tons les corps vivans ont une vertu electrique qui leur eft propre , & que les moyens de la manifefter dans chacun d'eux , nous font inconnus julqu'a pre'fent. J'ai un perroquet blanc , crete', qui a les ailes jaunes en-deflous , la queue & la crete de la meme couleur, de l'efpecc de ceux qu'on appelle ici ( a Hanovre ) kakatu , terme qui exprime aflez bien le fon de fa voix. II ne mange que du pain fee, ne boit point du tout, & paroit n'a^ voir jamais foif. Ces oifeaux obfervent le meme re'gime de vie dans l'lnde, oil ils boivent peu & tres rarement; mais ou ils fe baignent fouvent. lis fuivent cet ufage dans ce pays, quand on a foin de leur donner un vafe plein d'eau. J'avois ne'glige' de le faire pour mon ^er- roquet, &c peut-etre cet oubli , en rendant fon temperament plus fee, a-t-il donne' lieu a mes obfervations. On fait d'ailleurs, que cette efpecc d'oifeau le plait a etre frotte avec les doigts doucement fous les plumes. Pendant la friction, on voit tomber une certaine quantite de pouffiere blanche, qui excite une de'mangeailon fur fa peau, fur-tout lorfque l'oifeau mue. Ces particules vues au microfcope , ont une figure tres-irreguliere, partie platte, partie ronde ou fpherique, & ne font autre chole que les fibres d'une membrane de'lie'e, qui recouvre la peau & les tuyaux des plumes. Pendant que je faifois un jour une femblable friction fous les ailes de mon perroquet, je vis, avec e'tonnement, que mon doigt attiroit les petires plumes, meme avant que j'eufle touche' le corps, & lorf- que je m'en approchois; mais a peine e'tois-je parvenu au corps de l'ani- mal , que ces petites plumes adheroient fortement a mon doigt. J'ele- vai Paile du perroquet ; ma furprife redoubla , en voyant que ces pe- tites plumes fe herifloient, 8c formoient de petits rayons, qui tous tendoient vers mon doigt, comme s'il eut ete electrique. J'abairTai railej elles s'y attacherent fortement , ce qui leva tous mes doutes , & me fit penfer que l'eledlricite' e'toit la feule caufe de ce phe'nomene : ce- pendant, je m'avifai d'elever l'ailc un peu plus haut, de maniere que SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. r7? les plumes ne puflcnt point la toucher; alors, clles (c dilperierent commc autant de rayons divergens qui fcroient partis d'un condudteur elec- trique. Ces phe'nomenes finguliers n'avoient lieu que pour les pctites plumes, lorfqu'elles tenoient au corps, & ne fe faiioient point apper- cevoir dans les grandes. Je vais rapporter maintenant ce que j'ai ob- serve' , lorfque ces plumes e'roient fe'pare'es du corps de l'animal. Dans la meme faifon, j'eus occafion d'arracher quelques-unes de ces petite? plumes a mon Perroquet , dans le terns de fa mue. Mais a peine en avois-je arrache une, qu'il ne m'ctoit plus poffible de la faire pafTer dans une autre main , tanr elle e'toit fortcment atta> hee a la premiere. Des que j'etois parvenu a l'en detacher, cllc ctoit entraine'e vers les doigts de l'autre main, & y adheroit fortement. Lorfque j'eus rjpe'te' plufieurs fois cette expe'rience, il me flit tres-difficile de la jctter, ou de la conferver en quelque endroit ; cependant, avec de la patience, j'en vins a bout; mais, en meme terns, il fe preknta a mes yeux un phe'nomene bien fingulier. Des qu'elle fe trouvoit en 1'air, elle fe de- veloppoit, & fes barbes etoient comme autant de rayons partant d'un meme centre. En approchois-je le doigt ? lcs barbes changcoicnt de fituation, fe replioient , etoient attirces par mon doigt, & s'y atta- choient comme auparavant. Cette expe'rience, re'pe'te'e nombre de fois, me donnoit toujours le meme re'lultat. Je voulus favoir fi une autre plume de'tache'e depuis quelque tems du corps de l'animal, offriroit le meme phe'nomene; j'en pris done une de celles que je conlervois depuis plufieurs jours. Lorique je la pris, elle e'toit flafque , & ne donnoit point la moindre marque d'ac- tivite'. Je la foufrlai en l'air, defirant voir fi le tourbillon de l'athmof- phere n'avoit pas ete la feule caufe de l'expanfion des barbes de l'autre plume. Ce que j'avois pre'vu arriva ; la plume refta dans le meme etat, a cela pres, que ces barbes preffe'es par l'athmofphere, le durcirent un peu ; le tuyau, par fa gravite fpe'eifique, tendoir vers la terre;enfin, elle retomba dans ma main, flalque comme elle en e'toit fortie, & fans donner aucun fignc d'attradtion ; ce qui me fit conclure que ces plumes perdoient , avec le terns, leur vertu e'le&rique. II e'toit naturel que je fiffe enfuite des recherches pour de'couvrir coinbien de tems il falloit pour la leur faire perdre. Je pris deux plumes lemblablcs a la premiere, 8c je re'pe'tai fur elles les memes cxpe'rienccs, en remarquant exaclement le tems que j'y employois. Pour obvier a terns les inconve'niens, & pour empecher que quelque corps voifin ne diminuat leur vertu attractive, je fulpendis Tunc a un fi! de lin , 8c l'autre a un chevcu. Elles refterent dans cet e'tat un certain tems, pen- dant lequel j'approchois de momens a autres mon doigt , pour e'prou- ver fi elles etoient encore tUedtriques. Je rcmarquai que pendant une hcure entiere, les fignes d'ele&ricite etoient toujours les memes; mais Septembre 1771, Tome I. Z 1 180 OBSERVATIONS SUR IA PHYSIQUE, qu'apres ce tems-la, cette vertu de'croifloit fucceflivement , & s'e'va- nouifloit enfin , de maniere a ne pas etre plus fenfible dans ces deux plumes que dans les ancienncs. A ce phe'nomene , j'en ajouterai un autre, qui a beaucoup de rapport aux attractions, Sc aux repulfions electriques. La petite plume que j'avois fufpendue a un cheveu, paroifloit plus ele&rique, en ce qu'elle e'toit attire'e par raon doigt a une plus grande diftance , Sc qu'elle affectoit une figure fort extraordinaire. En effet , quoique je n'ap- prochafte d'elle aucun corps , fes barbes s'e'tendoient en rayons , a-peu- pres femblables a ceux des corps electriques , dont la furface eft cou- verte de petits fils. Les barbes fuperieures fe drefToient avec plus de force, Sc tendoicnt vers le cheveu. Des que j'approchois le doigt ou quelque autre corps de cette plume , les barbes en etoient attitees , & leur parrie fupe'rieure repoufle'e, tendoit de nouveau vers le cheveu, comme il arrive a tout autre corps e'lecfrique. Telles font les expe'riences que j'ai faites avec la plume de mon per- roquet : il eft e'vident que Pelectricite feule peut donner lieu aux phe- nomenes dont je viens de rendre compte. II eiit ete pofllble, dira-t-on , de les multiplier davantage, en examinant le pouvoir de Pelectricite fur la plume. Mais ce qu'il y a de certain , e'eft que fi ellc eft doue'e de cette vertu ele&rique, je ne crois pas qu'elle prefentat par ce moyen de nouveaux phenomenes aux Phyficiens e'ledtrifans : puiiqu'elle a les memes mouvemens , la meme force attractive que les autres corps e'ledtriques , puifqu'elle conierve cette force tant qu'elle demeure atta- ched au corps de Panimal, Sc meme quelque terns apres qu'elle en eft fepare'e, on peut conclure, ce me femble , qu'elle eft en pofleflion , ainfi que toutes les autres plumes , d'une vertu e'lecWque •, cette vertu eft plus fenfible dans les plumes du perroquef, que dans celles des autres oifeaux , parce que celui-ci eft d'une conftitution plus feche Sc plus convenable. L'on remarque cette force attractive dans beaucoup d'autres animaux , Sc l'on n'ignore pas que toute plume acquiert, par Je frottement 3 un certain degre d'elecliricite'. N'eft-ce point a l'clec- tricite' que l'on doit attribuer les etincelles qui font excite'es, lorfque l'on frotte , a contre-iens , le poil des chats ou des chevaux ? L'lmprel- fion que fait la torpille n'a-t-elle pas beaucoup de rapport au phe'no- mene qui a lieu, lorfqu'on augmente les effets de l'e'leclricite' ? I. a vertu c'lectrique, naturelleace poiffon, s'augmente Sc fe nourrit probablement par l'union intime des particules aqueufes avec ion corps. II ne faut done pas s'etonner de ce que ces perroquets n'aiment point l'eau ; l'expe'rience prouve qu'ils meurent , lorfqu'ils en ont bu. Voici , a ce qu'il me paroit , l'explication qu'on pourroit donner de ce phe'nomene. Le perwquet coniervant toujours la quantite d'e'leclricite' qui lui eft propre , ne peut manquer de fe trouver mal, lorfqu'il boit de l'eau , parce qu'alors, il SUR L'HIST. NJTURELLE ET LES ARTS. 1S1 eprouvc, par la combinaifon de ces deux chofes, une commotion, qui a beaucoup de rapport a I'exp&ience de Leyde ; pcut-etre aufli fa vivacite' ordinaire ne diminue-t-elle qu'a proportion que la quantite d'ele&ricite , qui lui eft propre, fetrouve jointe a l'eau. La force e'lcc- trique, fous laquelle nous ne pourrions comprendre ici que la plus fubtile partie de l'arhmo/phere , fe fait apperccvoir dans tous les ani- maux , d'une maniere plus ou moins fenfible. Si elle eft propre aux plumes de tous les oifeaux, on pourroit dire que l'ele&ricitc , qui femble naitre de l'cle'vation &c de 1'abaifTement des ailes , leur eft d'un grand fecours pour voler; car leur corps prend ainfi plus d'etendue, & occupe un plus grand efpace dans l'air. Peut-errc auili cette vertu elecTrique ne fcrr-elle aux plumes fupe'rieures, que pour accelercr leurs vibrations. Ce qui femble confirmcr ma propofition , c'cft la difficulre que les oifeaux e'prouvent pour voler, lorlque leurs plumes infcrieures font mouillees , les iuperieures paroiflent faites pour les defendre de l'humidite. Sans cela , la vertu eleftrique ne pourroit-elle pas fe dif- fiper ? OBSER VA T I O N S Sur la maniire de conferver les viandes fratches dans fhuile d 'olive. Par M. R * * * , ancien Capitaine d'Infanterie. JL)lRE, queVhuile conferve long-terns les corps qu'elle baigne parce que ce rluide e'pais empeche le comae* de l'air exterieur, & que c'eft l'air qui occafionne la putrefaction , c'eft ne dire que ce que chacun fait : cependant, la maniere de proceder a cet e'gard , & l'application que Ton en peut faire, relat vement au bien de I'humanite ,- m'ont paru dignes des experiences les plus repe'tees , & me'riter l'attention la plus Icrupuleufe. Depuis longues anne'es je cherche la caufc du fcorbut , des fiux de Jang, des ficvres ardentes , & de rant d'aurres epide'mies qui faVagent les equipages de nos vaifteaux , en mt-mc terns qu'ils ruinent I'Etac^par une depopulation graduelle. Apres bien des reflexions, j'ai reconnu que deux maux en e'roient le principe : le premier nair de la mal-pro- prete des Matelots , & iur-tout , du mauvais air des entre-ponrs. Les Ma- nns , panares de l'humidite, de la pluie ou des brouillards pendant leurs quarts, fe jettent auffi-tot qu'il eft Hni dans I urs cabanes, fans chan^r de linge n. d'habits, & s'endormcnr, re/pirant l'air le plus fe'tide°& leplus peft.'enticl. Jufqu'a cette heure, l'on n'a trouvc aucuns moyens &MPTEMBR3 I 77 I , Tomt I. TTDNS SUM l r . pour irnoaYeilcr , pendant ks^osrrrr.s. fair dej cr.:re-por.: - csand les labotds , les . . frnr. /ecu. on renrerme k rcaoTais .A .--;.•/. ■■...- ... _:«e necefiarereem des miladies, tits :oyaax Li .. . .- .i.e..." -j io~: or. ■ it4 inconrdhhk oue ks aadb . ■ . ■ . •. - . /eafcAss. Dooner - . a ap- a .-^iaue pits, wi a pea ik choies pre? . xokac k . j.«adotr, . .-.-.:.« rias, ce '.eroi: r^ai:; „-.-.- •. ".--"..•- r : ;• : --; "r . . - . . ■ .". . -.' . ;. . . ... . . . ; . ...... ;r; . - . ::•':;;-;, ;';r::.-'. .-".;: r-."_r :;: ':::• --.":;. . . .:;::.;.:; : . ; - . . La prcr- . . ians nn pot dc . - -ine ea- defecr- .v t . , d'une forme cor - a , _: reinpli tfktale .-':.:-.■--.-. . . ; '. _ .■ ■ . : ■ : _ " r ." _- • .- .-. - - . - - - ■ " " - - - - - • : _: i :::; .. -i.':.; :;:: ;: . . : : : r . _ . . : . S: ;k; c-rc_;; :_: ;: :.:::;; -'-~ r:::::;:.- ::; C:i •:-. La Ktxsix parni fur :=r?; . &c :;-::. It ■ zzoibaae ^n bocal dc -■;::; . .. les niKr; ...uaaasqae poor ia r:;.r.:r;. - . :*rsakr poc * ape is x*v i ios na endnur frais , - .;_ :--;.:;, r_: j_ ::: :r:.; z~. ~ : ~: :.m ;"_: ::::::;.:;:;. .. • .--_:'. _--. :- ..::.: —_--.--.' -V r :r .:..:;;. ru: :-.:>:;: r or;.-;, - -'--- ;. .:.'::;; _" ? : : i_ :. - . . - -"-.::::- '. ■ ^ " . : !_Circr3 :.: . . : - rs : . ;_: :" fiefe ^sdcoe^v . iteo; SUR VmST. WJTURELL c - : ' :■■;. -.■■-■- : -■ - - ■ • • --.:■.: - -. : ; ■ -. ; . - ; iaajtpx, tc ftnagn en ferae 6c psacta fadsoa ca as = (covet tames ks parries oeterogcaei a* boat ; crerr ?^ci» aacra l_:=" : r-- --; - - ----- La qHaarirr Shmik «oartnac caai or jummex wait, a* perdu a. Le fetOM poc ee tcrrc TirrHvfg tar bci£, r*r t= £cciir-=r, a 'ro- de qoarame joors , or tmmMifcmimai faizsi oae les i liVres be bcraf da ptetaia -nk. '.-.-- i it: -- : -. . -1: - , .--.::r: .- ; .-.;: -_? ;:_r: ;; ::i :r.:t : ^; -.-..-. .;:.- : : . I:.i ;.- . - ; ; :-_. ; -' i:-, it. beOe coaleur, & de k plat graade boaai L'lafe de ee bee - - ■ D'lxa en oMtrraboes, Z ek iassc .--■.- mmt Tim pes .-..-. ': - :: ■■-- 1: f-il: ; : .- - - - .'- ,'._-■-. -'--' -.-- — - - -" -"•- :~: -' - : ' - -~i: 'i. -z ;.--; - _ .. -: v ■ - ■ ■ -- '-'-'- ——--.. -. :--. .- -. -..- -._._■ : _ : - -.--. --- -: - - .... auiate* fob le frsk a: aes ob^'crrsboci : £ imJxz zxi ecrea&srr«K 1; :--2_- :i - t- : .": i: _---..:, « : - - :: \- - _--— ■ -._- rsxmcBt tpfi tea pofible 2ar P"""";?. e'efc-g-dge, giekhrif, irdi uV yf;; -- -: -: :--;-:::- z.r.--- -■>■-* -;--: ::-; ;: — ...... -ir.t ; . i - : - - : " :::::--•-;';: . - : - • : \c'-- - i«a33»f«sicl'- (*) Q» ar T-ac ctt nip agcrmrr-arwr-: - 1 84 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fortes &c vernifTe'es inte'rieurement , dans lefquelles on rangeroit les viandcs fraiches lit par lit. Ces jarres, routes de la meme grandeur &c grofleur, fcroient encaiffe'es dans des paniers ou loges , fepare'es par des cloifons j bridees dans les angles; en un mot, on les rangeroit de maniere qu'ellcs n'auroient rien a craindre des difFe'rens mouvemens du vaifleau. L'endroit du navire oii le roulis , le tangage Sc les coups de barre fe font le moins fentir etant aux carlingues, pres du grand mat, ce feroit en ce lieu qu'il faudroit de'pofer Sc fixer les jarres : quant a Vhuile qui reftera apres qu'on en aura retire les viandes, elle fer- vira de pacotille pour les Colonies , ou bien elle fera diftribue'e en ration aux Matelots pour l'accommodage du poiflon frais Sc {ec , le- gumes , &c. Je n'ai point repe'te cette expedience fur d'autres qualites d'huiles ou corps gras ; je ne prevois pas meme avoir le terns de le faire : ainfi, j'invite les amis de l'humanite' a couronner mon travail par de nouvelles obfervations. R E C U E I L Des Mimoires qui ont concouru pour le prix propofi en ij 66 , par la Sociite' Royale d' Agriculture de Limoges , pour I'annie i j 6j, fur cette queftion : Quelle eft la manilre de bruler ou de diftiller les vins la plus avantageufe , relativement a la quantiti & a la qualiti de V eau-de-vie , & a Vipargne des frais , imprimis par ordre de la Socie'te ; vol. in-S°. avec des planches en taille -douce. A Paris, chei Bailly ; & a Lyon , che\ les freres Perijfes. C^_> E Recueil renferme trois Memoires; le premier eft de M. 1'Abbc Rozier •, le fecond, de M. de Vanne , Apothicaire a Befangon ; & le troifieme, de M. Meunier, Inge'nieur des Ponts Sc Chauffe'es d'An- gouleme. On pourroit dire que les Auteurs avoient fait entr'eux uneconven- tion tacite pour traiter feparement tous les objets relatifs a la diftil- lation des vins. M. l'Abbe' Rozier a examine les principes conftituans du vin, les moyens de les rapprocher dans la fermentation tumul- tueufe & infenfible, afin de rendre cette liqueur plus gene'reufe, & par confe'quent, plus riche en efprits ardens; cette the'orie, fonde'e fur l'ex- f>e'rience, forme la premiere partie de fon Memoire : il exprime dans a feconde, comment on peut obtcnir beaucoup d'eau-de-vie a peu de frais SUR MIST. NATURE LIE ET LES ARTS. i8j frais Sc de quantitc luperieure ; nous ne nous pcrmectrons aucun de- tail, aucune reflexion (ur ce Memoire ; il leroit ridicule de nous conftituer jugc dans notrc propre caule. M. de Vanne divife fon Memoire en quatre Chapitres. II examine dans le premier quel'es font les fuhjlances propres J fubir la fermentation fpiritueufe , & la de'finit ainfi : La fermentation eft un mouvement qui s'excite de lui-me'me , a I'aide d'un degri de chaleur & de fluiditi con- venable entre les parties inte'grantcs & conftituanics de certains corps. « Toutcs les maticres ve'ge'tales, dit M. de Vanne, dans la com- n poiuion defquelles il entre une certaine quantitc' d'huile Sc de terre •i (ubtile, rendue parfaitr-ment foluble dans l'eau , par l'intermede d'une » matiere laline, lorfqu'elles (ont etendues dans une certaine quanrite » d'< au pour avoir de la liquidite , ou au moins de la mollefle , qu'elles » fonr expofees a une chaleur depuis quelques degres au-defifus du » terme de la glace , jufqu'a. vingt-cinq Sc au dela , & que la com- » munication avec l'air, ne leur eft pas abfolument intcrdite , e'prouvent » d'elles-mcmes un mouvement de fermentation qui change entiere- » ment la nature & la proportion de leurs principes ; d'oii re'fultent » de nouveaux compotes , luivamles differentes fermentations qu'elles » eprouvent. Ces trois fermentations font la Ipiritueufe , l'aceteufe Sc » la putride ». Le corps muqueux eft la feule fubftance ve'getale fufceptible de la fermentation fpiritueufe. M. de Vanne donne une tres-bonne theorie (ur la maniere dont la fermentation s'e'tablit Sc s'exe'eute, &: il con- firmc cette the'orie par des experiences qu'il a faites fur differens vins , avec des fubftances ve'ge'tales, relies que les coins, les cerifes noirs , les corps farineux , Sec. Le lecond chapitre eft confacre a 1'examen des produits de la fer- mentation fpiritueufe dont on pent tirer quelques avantages. Pour eviter toute confuflon Sc pour marcher avec ordre 8c preciiion , notre Auteur donne l'explication de ce qu'on doit entendre par ces mots effervefcence , Ebullition Sc fermentation, mots que ceux qui ecrivent fans principes , confondent mal-a-propos : ce que dit M. de Vanne leur fervira d'inf- mi&ion. » L'effervefcence eft le mouvement qui s'excite par le mt'lange d'un » acide Sc d'un alkali qui fe combinent enfemble-, il relulte de cette » combinaifon un etre moyen qui ne conferve les proprie'te's oi de •> l'alkali, ni de l'acide. » LVbullition eft un mouvement produit dans l'eau, lorfqu'on I'ex- » po(e a un certain degre' de feu. " La fermentation pre'fente de nouvelles combiuaifons plus fingu- Septembre i 77 i , Tome 2. A a iS6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » lieres & plus parfaites , prece'de'es d'un mouveraent fcmblable a celui » de 1'effervefccnce 8c de l'ebullition, mais qui n'eft produit ni par Ie » melange d'un acide 8c d'un alkali, ni f>ar 1' application du feu. » Un mouvemenc qui s'excite de lui-meme dans un corps homo- « gene produit des de'compofitions & des re'compofitions, d'ou re'fultenc » plufieurs combinnifons nouvelles, 8c non pas une feule comme dans » FefRrvefcence qui ne produit qu'une combinaifon faline ». De la de'funion des corps fermentans , du choc, des decompofitions, des re'compofitions que leurs principes eprouvent, il en re'fulte quatre produits diffe'rens. Le premier eft le corps du vin , compofc' d'une partie fpiritueufe, de beaucoup d'eau, 8c d'un acide appelle tartre du vin; le fecond eft une partie colorante qui lui eft unie, puifqu'elle fe trouve en fi petite quantke' dans les vins blancs; le troifieme eft un tartre qui s'atrachc aux pa-rois des tonncaux ; 8c le quatrieme eft la lie. Toutes ces (ubftances font des produits du corps muqueux, qui n'exiftoient pas avant la fermentation, qui doitetre d'autant plus par- faite 8c acheve'e, qu'ellc fournira plus d'efprit inflammable ou on (epare , a l'aide d'une chale.ur gradue'e, les differens principes 3> d'un corps, en confe'quence de leur diffe'rente volatilite'. » Le vin diftille donne une liqueur inflammable, limpide, blanche, » lcgere, d'une odeur pe'nc'trante & agreable •, elle eft la partie vrai- « ment fpiritueufe du vin. La diftillation ne de'pouille pas d'abord cette _» liqueur de toutes les matieres e'trangeres, dont elle eft charge'e, des « phlegmes, par exemple, defigner le lieu deftine a bruler les vins; l'ouvrier qui dillille eft » appelle Brdleur. ) eft un petit batiment au rez-de-chauflee , compofc » d'une feule piece, a laquelle les uns donnent douze pieds en quart c, » & les autres plus ou moins : il convient qu'elle foit voute'e & cfe- » tachee de tout autre batiment,, par rapport au danger du feu. On » place ordinairement une brulerie dans un des coins d'une bafle- » cour; il fautcependant, qu'elle foit a porte'e des cellicrs dans lefctuels Septembre 1771, Tome L. A a 2 1 88 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , " on conferve Ie vin 8c les eaux-de-vie , afin d'e'viter les tranfports « trop confide'rables : on l'e'tablit , autant qu'on peut , aupres d'un si petit e'tang, d'une mare, d'un puits, d'une fontaine , ou d'un ruif- j) feau ; la fitua'tioh fera des plus heureufes, fi elle eft domine'e par jj un courant affez e'leve pour entrer dans la partie fupe'rieure du « re'frige'rant de l'alambic , 8c s'e'couler enfuite felon fa pente narvt- » relle. Un emplacement a mi-cote eft le feul , en quelque fac,on, qui jj puiffe naturellement procurer cet avantage. II en re'fulte encore un « autre bien ; on place les celliers au premier e'tage , par rapport a U 3> brulerie, quoiqu'ils ne fe trouvent re'ellement qu'au rez-de-chaufTe'e , 33 du cote de la montagne, ce qui donne la facilite' de rouler les ton- J3 neaux de vin jufqu'i un conduit en bois qui traverfe re'paifTeur de 33 la voiite , ou celle d'un des murs late'raux. On vuide par la bonde 3) le tonneau dans le conduit nomme lavalle , 8c le vin coule imme- 33 diatement dans la chaudiere, fans qu'il loit befoin de fe fervir de 33 feaux. Quand le local ne perract pas d'agir ainfi , on enleve le ton- j3 neau avec un cabeftan. Cette methode eft la plus ufite'e >'. L'ufage de tirerlc vin dans des feaux, dans des brocs , pour le trans- porter 8c le vuider dans la cucurbite, eft tres - de'feclueux. On perd , par ce procede', la partie la plus aromatique, 8c beaucoup du principe lpiritueux. Soir pour la confervation du vin , foit pour la perfection de V eau-de-vie , le grand point eft d'empecher I'e'vapotation de fes prin- cipes volatils. Les de'tails que M. Meunier donne fur la conftruction des vaiffeaux diftillatoires , employe's dans la Saintonge 8c dans 1'Angoumois, font tres-e'tenlus, & bien circonftancie's •, 8c les vaiffeaux font repre'fente's exactement par les gravures qui terminent fon Me'moire : c'eft parler tout enfemble aux yeux 8c a l'efprit. L'analyfe ne peut rendre ces de'- tails ; nous renvoyons le Lecteur a l'ouvrage meine : nous en dirons autant de la maniere de remplir les vaiffeaux , d'entretenir 8c de gra- duer le feu , 8c de paffer fucceffivement a de diffe'rentes diftillations. Le prodiut qu'on obtient par la premiere diftillation eft appelle'e<2tf- de-vie brule'e a chjtijfe ftmpk : on brule enfuite a chauffe double, a chauffe triple. C'eft une repe'tition de la premiere ope'ration, foit qu'on recohobe la premiere eau-de-vie fur une nouvelle quantite' de vin , foic qu'on diftille de nouveau la premiere eau-de-vie. La force & la concentration de l'efprit ardent de'pendent de la me- thode qu'on afuivie dans la diftillation ; de forte, que telle eau-de-vie contient plus ou moins d'efprit ardenr. Comment en reconnoitre la quantite'? La de'guftation ne fuffit pas, elle eft incertaine, & vatie, fuivant que les houpes nerveufes du palais de ceux qui goutent Veau- de-vie , font plus ou moins affefte'es ; & il en eft du gout comme de la vuc, chacun a le fien propre, 8c differe effentiellement de celui d'un SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. j.89 autre. II y a trois manieres pour juger de la force de \' eau-de-vie, La de'guftation , dont nous venous parler , Ve'prouvette ou pefe-liqueur , & Y inflammation. M. Meunicr donne la dc/cription d'une nouvclle e'prou- vette plus sure que la de'guftation , 6V plus commode que V inflamma- tion. Cecte derniere eft: tres-inccrtaine , /uivant la inaniere dont on opcre. L'Auteur tcrmine (on Mc'moire par la defcription d'un fourneau pa- raboliquc pour la diftillation des vins. Ce fourneau fera de la plus grande utilite, & de la plus grande economie , fi la lumiere & la flamme fuivent la me me direction en fe propageant. Son fentiment eft: conformc a celui de Boerrhaave , duquel cependant on s'e'earte au- jourd'hui. Ce Me'moire eft rempli de fairs 8c de de'tails; l'Auteur parle en Praticien eclaire, qui ne cherche que la perfection de Part, &c l'u- tilite publique. II annonce de nouveaux travaux en ce genre, le pu- blic les recevra avec empreffemenr. Ce n'eft: que depuis un fiede environ que V eau-de-vie forme en France une branche de commerce tres-confidt'rable : il n'en eft point qui /bit foumi/e a des loix plus dures , a des entraves plus genantes. Nous ne citerons pour preuve que le fait fuivant. Le Marchand qui envoie de Y eau-de-vie dans quelque endroit que ce foit , doit faire fa foumiffion an Bureau des Aydes, de rapporter, dans trois mois, pour tout delai , le certificat de decharge des Commis du lieu de fa deftina- tion , fous peine de payer le prix de la marchandi/e , & le quadruple des droits dus a fa deftination. Ce certificat de decharge a quelque cho(e de fingulier. II doit etre donne' par le Commis du lieu, figne' de lui , & fa qualite /pecifie'e. 11 doit certifier Parrivee de la marchan- dife, le payement des droirs , y faire mention du nom du Buralifte qui a de'livre' la commiffion , du nom de fon bureau, de la dare, du n". Sec. Toutes ces formalirtfs font eflentielles 5 mais ce qu'il y a de plus inconccvable , e'eft: que moi, habitant d'Orle'ans , de Cognac, de Blois, &c. qui ai fait une foumiftlon , il faut que j'affirme la ve- rite au dos du certificat, e'eft-a-dire , que je certifie que celui qui a dclivre' le certificat, que Je n'ai jamais ni vu ni connu, non plus que fa Ggnature , eft cependant bien rcellement commis aux Aydes en tel enlroit, & que e'eft lui qui a figne'. Cet acle paroit fingulier. II y a plus, un proprie'taire a une partie d'eau-de-vie dans fon ma- gafin ; ii (e prefente un Acque'reur qui n'a point d'autre connoiflance a lui donner que fon argent comptant ; je veux vendre & me de'faire de ma denree; je ne puis le faire, parce que traitant avec cet homme inconnu, je ne peux etre afture du certificat de decharge, dont le manque m'expofe a des droits e'normes. Je refte done dans la dure ne- cellitt: de renvoyer l'Acheteur,& fon argent , & de garder ma mar- chandifc. On peut , dans tous les Bureaux, Ze convaincre de ce fair. Septembre 1 7 7 1 , Tome I. 1 9o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, OBSERVATIONS Curieufes fur toutes les parties de la Phyfique , extraites & recueillies des meilkurs Me'moires ; 4 vol. in- 12. de 2. 1 g 1 pages. A Paris , che\ Charles- Antoine Jomhert , pen , rue Dauphine. \_, E S deux premiers volumes de ce Recueil furent imprimes en 17 1 S ; ils renferment des faits tres-inte'reflans, &c le Public les connoic fuf- fifamment , fans que nous en rendions compte. Ce Recueil peur , en gene'ral etre regarde' com me une bibliotheque de Phyfique & d'Hif- toire Naturelle par ceux qui ne veulent pas en faire une etude fuivie; ils y trouveront l'agreable 8c Putile. Cer ouvrage rcffemble a une prairie emaille'e de fleurs, dont !'en(emble frappe agre'ablement la vue; trials donr chaque fleur n'eft pas e'gale en beaute'. On auroit defire' que 1'Auteur eut difcute' les faits qu'il rapporrc ; ce qui auroir mis le Lec- teur plus en e'tat de juger des de'eouvertes nouvellement faites en Phy- fique & en Hifioire Naturflle. On peur dire, avec certitude, qu'elles font immenfes depuis le commencement de ce fiecle. La Chymie, par exemple, en fournit la preuve la plus complette. On doit (avoir bon gre a 1'Auteur du motif qui Fa engage' a former ce Recueil , puifque e'eft principalement pour Pinftrudtion des jeunes gens. II eft bon de multiplier leurs ide'es , de les inftruire, en les amufant. C'eft un grain qu'on confie a une terre legere, a la ve'rire', mais qui germe tot ou tard. II ne faut plus que des occafions pour le developper ; il e'roit done tres- important de ne pas laifter l'Eleve livre' a lui-meme; il falloit di- riger fon jugement par quelques re'flexions, & le mettre en garde contre fa facile croyance pour le merveilleux •, defaut tres-commun a cet age. Un Auteur rapporte un fait , ou comme temoin , ou pour l'avoir entendu raconter ; il eft aife qu'il foir trompe dans les deux cas : les tours de Comus en impofent aux ftupides; les perfonnes inf- truites , n'admirent que fa dexterite'. Les enfans font - ils fufceptibles d'un difcernement fin & de'licat , qui n'eft du qu'a l'expe'rience &c au raifonnement. « Avancjons, dit 1'Auteur dans I'avertiffement du troifieme volume, « amaflons toujours des verites de Matbe'matique & de Phyfique, au I) hafard de ce qui en arrivera; ce n'eft pas ri(quer beaucoup : il eft » cenain qu'elles font puife'es dans un fond d'ou il en eft deja forti » un grand nombre , qui fe font trouve'es inutiles. Nous pouvons prt- » fumer, avec raifon, que tie ce meme fond, nous en retirerons plu- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i9» >» fieurs brillantes, des leur naiflance, 8c d'une utilite fenfible & in- » conteftable. 11 y en aura d'autres qui attendront quelque terns pour » que la meditation, ou un heurcux hafard en de'eouvre l'ufage. II y » en aura qui, prifes fe'pare'ment , leront fte'riles, & ne ceflcront de w l'etre que quand on s'avifera de les rapprocher : eifin , au pis al!er, »> il y en aura qui feront ecernellcment inutiles Le terns viendra, » peut-etre, que l'on joindra en un corps ces membrcs e'pars; & s'ils » font tels qu'on les fouhaite, ils s'aflembleront en quelque forte d'eux- » memes. Plufieurs ve'rite's fe'pare'es, des qu'elles font en grand nombre, » oftrent fi vivement a l'efprit leurs rapports & leur mutuelle de'pen- >y dance, qu'il (emble, qu'apres avoir e'te' de'tache'es , par une efpece de m violence, les unes d'avec les autres , elles cherchent naturellement a v fe re'unir. Multiplions done les experiences, puifqu'on ne pourra pen- m fcr a un fyfteme de Phyjlque , que lorfqu'on aura une Hiftoire Na- » turelle complette ». Telle a ete la marche de l'Auteur dans le troi/ieme volume, rempli d'obfervations piquantes, curieufes ik inftrudives fur la nature du feu, fur les phofphores, fur l'optique, fur l'eau, fur les mine'raux , fur l'Aftronomie, la Chymic, l'Anatomie , fur les fens, fur les os , fur les corps c'trangers tire's du corps humain , fur la Botanique & fur l'Hif- toi:e Naturelle des Animaux. On pourra juger par ce que nous allons rapporter fur la nature du feu , de la manicre dont l'Auteur envifage les objers , & combien il e'toit important d'y ajouter quelques remar- ques, pour empecher que l'Eleve ne fut entraine' vers l'erreur. Cette differtation eft a la premiere page du troilieme volume. « Il y a deux prindpales opinions fur la nature du feu •, la premiere » eft, que routes les particules de mitiere, de quelque nauire qu'elles >■> foient, peuvent fe changer en feu, pourvu (eulement qu'elles puiifent » recevoir afTez de mouvement , ou ecre divile'es en particules aflez i) petites. Ce mouvement eft occafionne, felon Defcartes, par la ma- » tiere du premier element. La (econde opinion eft celle de certains » Philoiophes, qui foutiennent que le feu eft un certain fluide parti- » culier comme l'eau & l'air , qui, de memc que ceux-ci, s'attache a » plufieurs corps, & fourhit quelque chofe a leur compoficion. M. Nieu- " wentyt, qui j'eft declare' pour ce (entiment , apporte plufieurs rai- » fons pourquoi il paroit eroyable que le feu a conferve toujours fa » propre effence ik (a figure, ne ceffant jamais d'etre feu, quoiqu'il » ne brule pas toujours. " La premiere qu'il rapporte, eft celle-ci •, e'eft que toutes les matieres » ne (ont pas combuftibles. D'oii vient que le bois & la tourbe brii- « lent, & que les cendres qui s'en forment , ne (auroient bruler , fi » ce n'eft parce que les particules du feu,quietoient auparavant dans Septmmsre 1771, Tome I. 1 9z OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , » les bois &c dans la tourbe, s'e'chappent en briilant , &c laiflent les « cendres, qui en font prive'es ; ce qui les rend incapables de briiler? ■J En fecond lieu , s'il ne falloit qu'un mouvement tres-rapide pour » re'duire tous les corps en feu , &c s'il ne falloit pas , pour cet effet, » une certaine matiere particuliere , d'oii vient que l'eau dont on » augmente l'agitation en fouffiant , devient plus froide, au lieu de » s'e'chauffer ? Et cependant , Fair eft fi ne'ceflaire au feu , que , fans lui , » il s'eteindroit enticrement. » En troifieme lieu , nous voyons que routes les parties de l'air en » ge'neral, ne font pas propres pour entretenir le feu ou la flamme, » mais qu'il n'y a que cerraines parties qui foient propres a cela •, d'oil » il s'enfuir, felon les apparences , que nous devons nous former une » idee plus limite'e du feu, que celle de ceux qui croient qu'il n'eft » que le mouvement rapide ou vertiqueux de certaines parties. II eft » tres-probable que le feu etant entretenu par certaines parties, eft « compofe d'une efpece particuliire de particuhs , & qu'il eft , par » confe'quent , d'une nature route particulib-e : c'eft ce que M. Nieu- » wentyt prouve par une expedience qu'il a faite avec une chandellc » qu'il entretenoit allume'e dans une bouteille, en y foufllant de Fair. » II remarque que la chandelle ne biailoit qu'environ dix minutes, » lorfque l'air qu'il y fouffloit avoit rcfte quelque terns dans les pou- » mons; au lieu qu'elle bruloit plus longtems, lorfqu'on ne permet- » toit pas a l'air d'aller plus avant que dans la bouche, fans defcendre » dans les poumons; & fouffiant vite , & a plufieurs reprifes, on le » poufToit dans la bouteille , quoique la flamme n'en fur pas fi claire, « que lorfqu'on fe fervoit d'un foufflet , qui foumifloit un air plus » frais, & en plus grande quantite'; d'oil M. Nieuwentyt con il faut ne'eeffairement la meme efpece d'air ; qu'ainfi, l'air en gene'- « ral, eft non-feulement ne'eeflaire pour le feu, mais qu'il y a cer- » taines parties qui font les feules propres a cet ufage ; &c que s'il s> n'eft pas aife de le prouver, il eft du moins tres-probable que le » feu eft aufli une fubftance , ou une matiere particulicre. » En quatrieme lieu , fi l'on peut faire voir , par des experiences, que a ce que l'on de'eouvre en examinant le feu , reftemble beaucoup aux » effets de l'eau & de l'air , par rapport aux matieres que ces deux 5> elemens liquides peuvent diffoudre , cela prouvera encore que les u Philofophes qui approchenr le plus de la ve'rite, font ceux qui fou- « tiennent que le feu eft une matiere particuliere , ou un menftrue , » felon la manie're de s'exprimer des Chymiftes. Ce menjlrue eft ca- u pable de divifer ou fcparer un grand nombre, ou prefque tous les » corps que nous connoiftbns ; il agit de la meme maniere que l'eau SUR VHIST. NATURE TIE ET TES ARTS. 195 » agit fur le fel, & l'eau-forte fur le fer •, de forte, qu'il y a certains « corps qu'on ne pent brulcr qu'en les fondant, ou en agitant Icurs » parties dans la flam me : ainfi, s'il y a beaucoup de particules du feu » dans ccs corps, comme dans le bois , la tourbe, &c. elles aident a » augmenter la Hamrac , lorfqu'ellcs vienncnt a s'e'ehapper, ou a fe » mettte en liberte , dans le terns que la matierc brule, comme le & bois , 6vC. & lorfqu'il n'y en a pas , ou bicn lorfqu'elles ne peuvent » ctrc developpees, la flamme n'augmente point, & ces corps ne font i> que fe fondre & devenir fluides : e'eft ce que nous voyons dans les j> cendres & dans les me'taux fondus au feu, qui ne brulent point, & » qui fe cliangent en verre •, & de racmc que les aucres menftrues ou diffol- »> vans ne peuvent pas difToudre entiercment certains corps , fi ce n'eft » avec beaucoup de terns, le feu en trouvc audi, quoiqu'en petit » nombre, qui peuvent re lifter a fa force pendant tres-long-tems. » Ceux qui fouhaitent voif quclques exemples de ces effets du feu, » n'ont qu'a confulter les cents des Chymiftes ; mais , pour leur en » eviter la peine, nous en rapporterons ici quelques-uns. » Tout le monde fait que, (1 on met du fel de tartre & de l'anti- » moine broye's dans de l'cau tout enfemble , le fel s'attachera avec >> l'antimoine en peu de terns, s'unita, dans ce diflblvant, avec fon j> foufre. Nous trouvons aufli que le fel de tartre s'unit avec le foufrc j> d'antimoine, lorfqu'il eft diffous par le feu , comme il avoit fait au- » paravant en partie dans l'eau. Or, les Chymiftes favent, qu'en choi- » fiflant pour difTolvant, foit du feu, foit de l'cau, il refultera un » melange qui aura les memes proprietes de ce fel 8c de l'antimoine, » & on aura la fatisfachon de voit la meme chofe , en y mettant du » vinaigre dans tous les deux. .. Nous voyons encore que le feu & l'eau produifent les memes ef- » fets dans d'autres ope'rations de Chymie, comrrfe dans les coagula- » tions,que!es Chymiftes appcUent precipitations ; nous en avons un » exemple dans le riguk d'antimoine , qui, etant mele' avec fon foufrc » dans l'antimoine , pat le moyen du (el de tartre , qui s'unit avec ce » meme foufre, s'en fe'pare par le feu, & fe prccipite au fond, de la » meme maniere que 1'acier uni avec le foufrc de couperofe, lorfquc » ce dernier fe diffout dans l'eau. » Outte cela, le cuivre rend la Hamme de couleur bleue ou ver- » datre, de meme que les autres menftrues; &c e'eft fur ce principe " que l'on fe fonde, lorfqu'on vcut faire paroitte differentes couleurs j> dans les feux d'artifice. » En cinquieme lieu , (x jufqu'a prefent on a cru avoir raifonne » jufte, lorfqu'on a dit que l'air eft un Huide particulier , compofe n d'une certaine efpece de particules , uniquemenc a caufe qu'il a du »> reffott , tandis que cettains Philofophes foutiennent que ce n'eft autre Septembre 1 77 1 , Tonic I. B b. 1 94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » chofe qu'un amas de routes fortes de particules, pourquoi les memes » raifons ne fuffiroient-elles pas pour aflurer la meme chofe du feu, « puifque ces parties mifes en mouvement, fe dilatent avec beaucoup » plus de force que celles de Pair? On peur voir dans ce que nous « avons dit fur les meteores, un exemple de la dilatation du feu mele » avec de 1'eau. Mais les mines, les mortiers, les canons Sc les autres » pieces d'arnllerie , nous fourniflent une preuve plus commune de « Pelafticite prodigieufe du feu, 8c de la force qu'il a de fe rare'fier. » Les murailles 8c les boulevards qu'on fait fauter en Pair avec une s> vitefle incroyable, & la ve'locite inconcevable des boulets, nous don- « nent une ide'e aflez jufte de cette force prodigieufe , & de la rare'- « fa&ion du feu; car on (ait a pre'ient que ces eifets , qui paroifTent a » peine croyables a ceux qui ne les ont jamais vus , de'pendent uni- « quement de Pelafticite' de ce fluide. » IP y a la-deflus une experience affez furprenante de M. de Stair. » II dit dans fa Phyfiologie, qu'en faifant une expe'rience fur du plomb 33 rouge dans un recipient de verre , d'oil Pair avoite'te' pompe' avec les 33 rayons du foleil reunis dans un verre ardent, le vaifleau de verre ss dans lequel le plomb rouge e'toit contenu, fe mit en pieces avec 33 un grand bruit. Un homme qui fait que le plomb rouge n'eft que >3 les cendres du plomb ordinaire brule, qui a fouffert long-tems une 33 flamme continuelle ; & en fecond lieu , que les cendres de plomb 3> deviennent plus pefante par Paction de la Hamme , & qu'ainfi , elles fe 33 chargent d'une grande quantite' de particules igne'es qui s'y joignent, 3> puifqu'on retire une plus grande quantite' de plomb rouge qu'on 33 n'avoit mis de plomb commun dans le feu •, un homme , dis-je , qui 3> aura obferve' tout cela , peut-il croire autre chole , finon que les 33 particules igne'es etant excite'es 8c mifes en mouvement par le feu 33 du verre ardent, elles fc dilatent , 8c font calTer le verre? II femble ss que de cette expe'rience, dans lacjuelle il ne reftoit plus d'air dans 33 le re'eipient du vetre, 8c de la premiere qu'on fait avec de Peau, 33 on pourroit infe'rer qu'il n'e'toit pas toujours ne'ecflaire d'appeller a 33 notre fecours la force de Pair qui fe trouve alors dans les mines & les 33 canons, afin de comprendre la force & la rare'facTion prodigieufe » de la poudre a canon allume'e, puifqu-'il femble qu'il faut tout attri- r> buer aux particules du feu. 33 Les expe'rienccs que M. Newton a ajoute'es a fon traite' A'Optiqut , 33 femblent confirmer la meme chofe. II y eft dit , qu'apres qu'il cut tire is un efprit de Phuile de couperofe & du falpetre, 8c qu'il eut verfe'la 33 huitieme partie d'une once de cet efprit fur la moitie' aurant d'huile 33 de Carvi , dans un lieu d'oi} Pair e'toit pompe', le melange prit d'a- 33 bord feu , & rompit en pieces un vaifleau de verre qui le contenoit, 33 & qui avoit fix pouces de largeur, & huh de hauteur. La chofe fe SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. «c>c »> paffa de mcme que fi l'on cut allume dc la poudre a canon. On nc » fauroit, en aucune fa avoit point dans le vaiflcau. II faut done abfolumenc conduce, que » c'eft Ja rarefaction du feu qui en eft la caufe. » En fixieme lieu, il paroit par cc que nous venous de dire fur le „ plomb rouge , qu'on pourroit infe'rer, que de mcme que l'air & l'eau .. s'uniflent & fe Joignent a la matiere qui compofe les plantes & les »> animaux , & aident a la composition de leurs corps, les particules » ignees etant concentre'es , entrent dans la ftrmfture & la compofi- » tion de beaucoup de chofes, fans bruler adtuellement; de merae que j> l'eau peut etre dans les cornes, les os & le bois, fans rendre ces » corps humides. Les Chymiftes qui ont fouvent diftille' de ces fub- » fiances, fans y meler aucun liquide , peuvent nous aflurer qu'il y j» en a beaucoup. « Ceux qui ont vu avec quelle facilite certaines matieres brulent , » & qu'il ne faut que la moindre e'tincelle de feu pour les enflammer » & les confumer prefque dans un inftant, n'infifteront peut-etre pas » fur de nouvelles preuves , pour etre convaincus que le bois, la » tourbe , les os , l'huile &: la poudre a canon , font des matieres » extremement remplies de particules de feu , qui , d'abord qu'elles » font allume'es, agiffent routes, tandis que fans cela, elles reftent en » repos, & ne fe font point agite'es. » Mais pour prouver encore d'une maniere plus e'vidente que le feu » peut contribuer a la formation des corps folides, voici une chofe « que lesNaturaliftes ont obfervee. C'eft que dans le flecle pre'ee'dent , » on de'eouvrit une certaine matiere, a laquelle on donna le nom de i) phofphore : cette matiere paroit exterieurement un corps folide & » dur-, mais fi on la met dans de l'eau chaude, elle prend la forme qu'on » veut , & la retient apres qu'elle eft refrodie. Que cette matiere foit » compoiee de feu , la plus grande partie , pour ne pas dire toute , n c'eft une chofe e'vidente, parce que fi vous la laiffez pluficurs anne'es » dc fuite dans de l'eau froide, elle ne brulera plus ; mais fi on la re- » tire de l'eau, la chaleur de la main fuffit pour la rendre lumineufe » dans un inftant: elle s'enflamme fans bruler; &c fi vous en mettez » un petit morceau fur votre main, elle formera une petite tlamme, »» mais qui ne brule point : mais fi vous augmentez un peu la chaleur « du phofphore , elle deviendra bicntot fenfible ; elle fe convertira en » feu, & elle fe confumera fans qu'il foit poffible de l'e'tcindre, & il » ne reftera qu'un pcu dc liqueur aigre. M. Nieuwentyt a prouve par » experience que la chaleur du foleil Pallume , & que quand on le frotte » un peu fortement fur un morceau de drap , il prend feu : de merae » que lorfqu'on s'en frotte le vifage , il reluit dans l'obfcurite ; & & S£Ptemsre 177 I , Tome I. Bb % 1 9 6 OBSERVA tions sur la phfsiq ue , » on continue a s'en frotter jufqu'a exciter une e.'pece de fueur , Ie »> feu fe met aux cheveux. » Outre ccla, le feu s'unit &: s'incorpore dans plufieurs matiercs. 5> Les expe'riences de M. Boyle le prouvent fuffifamment ; 8c beaucotip « de gens affurevir. que les rayons du foleil ramaflfes avec un verrc « ardent, augmentent le poids de l'antimoine , lorfqu'on l'expofe a » l'endroit de la reunion de ces rayons. j> Si, apres des recherches exactes , on a obferve que le feu, de s> meme que l'eau, l'air 8c la terre , entrent dans li composition de j) tous les animaux 8c des plantes, quelle raiton peut-on alle'guer pour »> regarder les trois derniers comme des corps particuliers, 8c non pas » le premier ? " Nous aj-outerons a. tout ceci une cliofe affez extraordinaire , qui j) eft , qu'il y a certains corps remplis de particules de feu, qui ne fau- » roient fe mettre en action que par le moyen de l'eau. On en a vu j> une trifte expc'rience dcpuis quclques annees dans un four a chaux : » une digue s'e'tant rompue , les eaux s'e'coulerent jufqu'au four , qui jj prit feu , 8c fut entierement confume'. La Chymie fournit quelques w excmples femblables. Ainfi, 1'huile de vitriol, lo'fqu'on y met de jj l'eau froide, rend fi chaud lc verre dans le^uel on fait ce melange, 3> qu'on ne fauroit le tenir dans la main. La meme chofe arrive >3 audi en verfant de l'eau froide fur ce qui refte apres la fublima- 33 tion de la pierre himatite 8c du fel ammoniac j>. Nous dcmandons a pre'fent a l'Eleve qui aura lu attentivement cette Differtation , s'il n'eft pas perfuade, d'aprcs le fentiment de 1'Auteur , que le feu agit de la meme manure que l'eau agit fur le fel , & Feau- forte fur le fer. Cet Eleve ignore les principes de Chymie; il eft done oblige' de croire in verbo magifiri , ou de dourer de tout, ou de fuf- pendre fon jugement, jufqu'a ce que l'experience , unie a la the'orie , lui deflille les yeux. Il eft dem outre que le feu agit comme l'eau fur les fels , mais non pas comme l'eau-forte fur le fer, puifque ces deux dernieres fubftances peuvent fe combiner en un feu! corps, au lieu que le feu ne fait que traverler les matieres qu'il pe'netre. Comment l'Eleve comprendra- t -il ce que 1'Auteur veut dire par ces mot? Nous voyons encore que le feu & l'eau produifent les memes ejfets dans d'autres opirarions de Chymie , comme dans les coagulations que les Chymiflcs appellent p~e'cipitation : nous en avons un exempli dans le re'gule d'antimoine, qui, e'tant meli avec fon foufre dans Fan- timoine , par le moyen du fel de tartre qui s'unit a ce meme fouffre s'en f'pare par le feu , & fe pre'eipite au fond , de la meme manihe que Tacier uni avec le foufre de coupe rofe , lorfque ce de-nier fe dijfout dans Feau, Le commencement de cette phrafe eft obfeur, & le lens inin- > SUR TWIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 tclligifcle ; nous ne favons pa- ce que c'cft que le foufre de couperofe diflous dans I'eau , ni comment Pacier le quitte. Ce que l'Auteur die du plomb rouge, d'apres les experiences de M. Stair, n'eft point du tout conforme aux pnncipes re$us •, le plomb rouge c'rant dans une cornue d'oii on avoit pompc Pair , la cornuc s'eft cafTee : l'Auteur en conclud que la chaux de plomb contient beaucoup de principe igne, qui, en fe dilarant, fait e'clater la cornue. L'Auteur a fans doute oublie qu'un corps combuftible ne brule que parcc que le feu lui enleve line portion de la matiere igne'e qu'il contient; que ce qu'il appelle plornh rouge , vulgairement nomme' minium , eft au plomb, ce que la cendre eft au bois, & qu'il contient 11 peu de matiere igne'e ou phlogiftique, c|u'on eft oblige dc lui en rendre pout le convertir en plomb. Un Phyficien peut-il ignorcr qu'un vaifleau, tel qu'une cornue, dans lequel on a fait un vuide bien exacl:, peuc .caffer par la leule prellion de Pair. L'explication de Pexpericnce de Newton n'eft pas entitlement exacte , puifque ce Phyficien pouvoic avoir pompe' Pair de fon vaifleau, fans oter a Pacide & a l'hile celui qu'ils renferment, & qui fe de'veloppe dans le melange par Paction meme de Pacide (ur Phuile. Ce n'eft pas I'eau elle-mcme qui fit prendre feu au four h chaux , dont parle l'Auteur, ni a Phuile de vitriol, cette ignition n'eft due qu'i la rapidite &: au frottement avec lefquels les molecules d'eau pe'netrent ces deux corps. La chaleur du boulet de ca- non vient moins de celle qu. lui eft communique'e par I'inflamma- tion de la poudre,que du frottement violent qu'il e'prouve en traver- fant Pathmofphere avec une promptitude incroyable, apres avoir e'tc vivement frotte' contre les parois du canon. Nous ferions bien fache's (1 les remarques que nous venons de faire avoicnt porte- a penfer que ce Recueil n'eft pas utile. Nous ofons dire qu'il eft bon , intereflant Sc inftructif ; mais notre but a ete' de prouver qu'on ne devoit jamais presenter aux jeunes gens que des fairs con- firme's par la thcorie & par la pratique, ou du moins, ne leur jamais Conner des ide'es faunes; il vaur micux leur dire naturellemenr , le fait eft tel, ou il paroit tel; mais on en ignore la caufe. Cette maniere de le leur prefenter, aiguife leur imagination, les invite a y re'flechir ; & fi la reflexion ne fert pas pour le moment prefent, elle fervira pour la fuite. Nous rapporterons dans les aucres volumes quelqucs articles bien propres a iatisfairc le Le&eur. SXPTIMBAB 1771, Tome 1. i?8 OBSERVATIONS SUR LA PHTSIQUE , DISSERTATION Su/- les moyens a employer pour ditruire les Infecles , ejfentielkment nuifibles a la vigne. _£> OUS reconnoiflons quatre infe&es eflentiellement nuifibles, dont nous avons parle pre'cedemment, pag. 5 9 & 1 5 3 . La /a/re Ju hanneton s'at- tache aux racines de la vigne ; elle les mache, les rompt, les divife, & caufe fouvent ia perte du cep. Le hanneton de'vore les feuilles, le gri- bouri ou coupe-bourgeon , attaque le bourgeon au commencement de fon e'panouilTement; il lecerne, le fe'pare du farment , & de'truic toute efperance de re'colte, parcc qu'on peut regarder comme fte'riles les farmens que la vigne pouffe fur le vieux bois. Le rouleur ou charanfon de la vigne , attaque les feuilles , non pas comme le hanneton , mai» en les roulant en fpirale. Ces deux infedtes font un tort confide'rable a la vigne. Les feuilles font abfolument ne'ceffaires dans ce moment pour lui aider a poufler des bois forts , vigoureux , & fufceptibles de fupporter une bonne taille I'annce fuivante. D'ailleurs, perfonne n'i- gnore que les feuilles font les poumons des plantes, qu'elles font pen- dant le jour la fondkion d'organe excre'toire , en de'chargeant la vigne , par la tranfpiration, d'un fuc trop abondant ou inutile ; qu'elles font J>endant la nuit des racines ae'riennes, qui , par les petites bouches de eur furface infe'rieure, pompent l'air, l'humidite, & les fucs re'pandus dans l'athmofphere ; que par ce moyen, elles introduifent l'air dans toutes les parties de la plante -, que cet air agit fur la feve a-peu-pres de la meW maniere que l'air que nous refpirons agit fur notre fang ; enfin , qu'elles font un des principaux agens de la cocTion 8c digeftion des fucs, & qu'elles confervent les fleurs & les bourgeons avant leur e'panouilTement. Le quatrieme infedte , plus terrible que tous les autres enfemble, parce qu'il eft plus multiplie', eft le ver-coquin, ou larve de la teigne , ou phaUne de la vigne ; il coupe la grappe , & il vit au mi- lieu de fes fleurs & de fes grains. Plufieurs vignobles confide'rables de Bourgogne ont eprouye cette annee les triftes effets de leurs crochets deftrudteurs. Les (Enologiftes ont confondu les ravages occafionne's par ces in- fedtes , & ils ont attribue a l'un , ce qui e'toit l'ouvrage de l'autre. M. Bidet, dans fon Traiti de la Vigne, donne une lifte fort e'tendue des an imaux nuifibles a cet arbrifleau. « Les chenilles, dans certain »> pays, dit cet Auteur, rongent tellement la feuillc de la vigne, que s» iouv?nt elles Ten de'pouillent entierement ». Nous ne nions point SUR L'HIST. NATURELLE ht LV.S ARTS. 199 » le fait, puifque M. Bidet lc rapporte ; nous difons feulcment , que dans tous les pays de vignobles que nous avons parcourus, nous n'a- vons jamais trouvc' fur la vigne d'autre chenilles ou larves , que celles dont nous avons parle, & les chenilles n'attaquant point les feuilles, a moins que ce ne foit de l'efpece de fphinx , vulgairement norame'e la cochonne , relativement a fa tete, imitant le grouin d'un cochon; cer- tainement cette chenille ne dcpouille pas entitlement la vigne de toutes Ces feuilles. II auroit ete plus inftruc-tif de fpecifier quelles e'toient les chenilles dont il entend parler. Le XLViic chapitrc du premier volume du Traiti de la Vigne, dans lequcl cet Auteur expofe les maladies de la vigne , provenant des accidens occaftonnes par les infe&es & autres betes , donne la preuvc la plus complette de cette confufion des noms & des effets. Nous avoue- rons cependant avee plaifir, que cet ouvrage renferme des details pre'- cieux, des vues utiles pour ceux qui s'adonnent a cette branchc d'a- griculture , & que l'Auteur propofe un tres-bon moyen pour detruirc ces infecles. j> Le foin d'un feul Vigneron, dit-il, ne fufRt pas pour l'ane'antif- » fement de ces animaux : il aura beau leur faire la guerre dans les n vignes qu'il eft oblige de fa$onner , fi les Vignerons des vignes voi- » fines n'operent de meme , parce que dans 1'inftant qu'il en aura tue » cent dans la vigne, il y en rentrera mille des vignes voifines. Il n'y » aura qu'une Loi gene'rale , une Ordonnance de Police , fous peine » d'amende contre les Proprie'taires , qui pourra ranger le Vigneron a » fon devoir i>. Une femblable Ordonnance produiroit furement de bons effets, fi elle etoit mile a execution. Nous en avons une qui prefcrit Ve'chenil- lement des arbres, & cependant les forets, les arbres fruitiers font devore's par les chenilles. L'exemple & la contrainte font les feuls agens fur le Payfan : il compte & regrette le terns employe a une ope'- ration, dont il ne fent pas tout l'avantage , parce qu'il ne reflechit pas que les bourgeons de la vigne , les grappes de (es raifins , feront devore's l'anne'e fuivante par des infecles, dont le nombre aura aug- fnente du centuple. II eft heureux que les grandes fechereftes de l'e'te', ou les rofees froides du printems , (uppleent quelquefois a (a prevovance. On fent bien pourquoi cette Ordonnance eft infruttueufe -, e'eft qu'elle eft trop ge'nerale , & les Pre'pofes pour (on exe'eution, font trop eloi- gne's , ou ne peuvent y vciller par eux-memes. Ce Reglement devroit done commencer par rendre le Seigneur da lieu reiponfible de la non-execution \ celui-ci, fes Juges ; les Tuges, les Syndic ou Confuls de Paroifle ; ces derniers, chaque poffeftcur de fond; & le pofTeffeur de fonds, fes Manouvriers ou Fermiers. Alors, dekendant du grand au petit , on aflureroit la reuflite , parce que chaque Szptem bre 1771, Toms L zoo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , individu. fcroit compris dans l'Ordonnance, &c tous auroient action les uns fur les autres, pour eviter 1'amende. Si le Seigneur du lieu eft rempli de zele pour le bien public , fon zele vaudia rnicux qu'unc Ordonnance. II n'a qu'a agir , & fon exempie fervira de loi, 8c la loi ne deviendra ne'ceffaire que contre ceux qui, par mutinerie , ne concourroient pas au bien general. II eft certain que fi dans un pays de vignoble , on la mettoic iucceffivement en vigueur pendant trois ou quatre ans, on parviendroit a de'truire ces pernicieux infecles. Du principe coactif, pafTons aux moyens d'agir. La Societe Royale d'Agriculture de Rouen a propofe' cette anne'e pour fujet de prix , quels font les moyens de demure le hanneton 8c la larve nomme'e ver blanc. Ce que nous avons dit dans notre premier volume fur la vie & iur la metamorphole dc cet infeele , ne fera peut-etre pas inutile aux concurrens ; ils verront que routes les tentatives pour de'- truire directement fa larve feroient infructueufes, puifqu'il n'eft paspof- fible de reconnoitre furement dans quelle partie du terrein de la vigne elle fait fademeure. Cet animal ne fauroit vivrefur terre, &cil"n'y vient que lorfqu'il y eft entra'ine par les inftrumens dont on fe fert pour la tta- vailler ; bien different en cela de la courtilliere ou taupe grillon , qui, de diftance en diftance , me'nage des ouvertures extericures dans les galeries de fon labyrinthe fouterrein : d'ailleurs , la courtilliere fort la nuit pour refpirer la fraicheur de l'air , & quelquefois pendant le jour dans les terns pluvieux. Ces trous, ces foupiraux indiquent la demeure de cet infeele ; &c tout le monde (ait qu'une goutte d'huile quelconque , mife dans ce trou , & fur laquelle on verfe de 1'ea.u dans toute i'c'- tendue des galeries, contraint Yinfecle a fortir &: a venir expirer dans un e'tat convulfif fur les bords de cette ouverture. L'huile n'eft pas en clle-meme un poiion pour les infecles , mais elle bouche la trache'e par laquelle ils refpirent, & ils pe'riftent par fuffocation. Cette action de l'huile fur les courtillieres corarae fur tous les autres infecles , eft facile a comprendre, puifque 1'orifice de leurs trache'e attere eft placee fur le dos , & l'huile la bouche exaftement. II re'fulte de-la que, ne con- noiffant pas la demeure du ver blanc , cette excellent moyen devient infrudtueux. Ce n'eft qu'en remuant fouvent la terre, qu'on peut de- truire le ver blanc. Depuis le printems jufqu'a la fin de l'automne feulement, on le trouve alors a deux jufqu'a fix ou huit pouces de profondeur , & il s'enionce pendant l'hiver aflez avant dans terre, pour braver les plus fortes gele'es. On voit par ce que nous venons de dire, qu'il eft impoffible d'at- taquer dire<5tement le ver blanc ; il faut done lui livrer la guerre dans fon etat parfait, e'eft-a-dire, dans celui du hanneton; alors, chaque Pro- prietairer»fl"embleraksfemmes & les enfans dc U me'tairie,& vifitera * . fes STIR VmST. NATURE LIE ET LES ARTS. i0i fes vignes. Le hanncton tombera des qu'on fecouera le ccp, on 1c ramaffera , & on le portera hors de la vigne , pour I'ecraler ou pour Ic bailer , ce qui (era plutot fair. Le terns le plus favorable; pour cette expc'dirion , eft pendant la frakheur du matin , ou pendant la groffe c'haleur du midi. On le trouve alors engourdi & tapi fur les fc-uilles. A quoi (crviroient tous les efforts d'un Proprietaire vigilanr, comme le remarque ju.iicieufement M. Bidet, s'il travaillc leal? II faut done que tous fe> voifins & tous les Vignerons d'alentour con- courent a la deftruclion gene'ralc. Ces precautions deviendront peni- bles pendant les premieres annees ; mais elles font le leul Sc unique remade. Le moyen ind;que' par M. Pluche dans le Spectacle de la Nature, Sc apres lui , par plufieurs (Enologiftes , eft infuffifant : « femez des •j feves en plufieurs endroirs de la vigne Sc en bonne quantite', il quit- » tera la vigne pour ce nouveau feuillage , qu'il eft facile de multiplier » en peu de terns. On enleve a propoi ce fcuiliage inutile & l'engc'ance => qui y Ioge, pour bruler le tout au pied de la vigne ». Cet expedient feroit bon fi le hanneton quittoit entierement la vigne pour fe Jetter fur les feves. La preuve du contraire eft acquiie. Nous dirons d'arl- leurs,que la laifon du hanneton eft celle ou la vigne a le plus grand befoin de nourriture, que les fe'ves ont beaucoup de racines cheve- lues, Sc que dans cette circonftance , elles cpuiferoient les fucs nour- riciers deftines a la vigne, Sc qu'elles deviendroient recllement des plantes parafites. M. Pluche n'a jamais exaclement connu la maniire ar aucuns vers , mais feulement par les gue'pes, les f elans , les ferpens , es oifeaux , Sec. Sc surement, ils n'enlevent pas la rccolte: d'ailleurs, en admettant le raifonnement de cet Auteur, il fuivroit que !es grains qui n'auroient point de vers, ne devroient pas pounir; cependant, la pourriture gagne de l'un a l'autre. 11 y a done une autre caufe que celle de ces vers, Sc nous croyons la trouver dans la trop grande aquo- Hte du raifin. II fe deflecheroir plutot lur la plante, que de poutrir, fi la terre etoit feche, Sc fi la chaleur. etoit forte conine clle le fut en 175?, dans les Provinces men iionales de France. La pourriture eft la (uite funefte des pluies trop abondantes , He de rhumidite fuper-; Septembre I 77 i, Tome I. Cc 202 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , flue. Re'pandue dans la terre, cette (urabondance d'eau rend la (eve trop fluide , & lc muqueux doux eft trop divile, d'oil il refulte que le corps muqueux erant lepnre', & nageant , pour ainh dire, dans trop de vehiculc aqueux, tend bientot a la pourriture. Nous croyons avoir furlifamment demontre ce principe dans norre Memoire (ur la fermen- tation des vins. La meme Ordonnance , dont nous avons parle pour la deftructiort du hamuton , doit avoir lieu pour celle du gribouri , du charanfon rou- leur , 8c du ver-caquin. Nous nous fomines (ervi pre'eedemment mal- a-propos,& par inadvertance , du mot de famille, nou. devionsdire: le gribouri eft du gtnre des chryfomelles , fuivant le Chevalier Von- Linne'e ; j'es etuis font durs , ils ne recouvrent que le ventre , & non fes tarfes. Cer infecle eft tres-difficile a de'truire, parce qu'il n'a point de demeure fixe, & qu'il faut le prendre fur le fait. Le charanfon rou~ leur , au contraire , de'pofe fes ccufs dans les fpirales qu'il forme avee la feuille , & le ver-ccquin ne s'e'earte pas de la partie dc la grappe oil il a e'lu fon. domicile. Le gribouri muluiplie heuicufement bcaucoup moins que le rouleurtk que le yer-coquin. La feuille roule'e, & la partie de la grappe attaquces, font tres-vifibles ; & leur couleur brune au milieu d'une verdure agrc'able , frappe auffi-tot la vue. Des femmes, des enfans, les coupcront, les mettront dans des paniers, Sc les em- portcront hors de la vign«. pour les bruler ; on de'eruira, par ce moyen , le genne des races futures. II nefaut pas croire que cette ope'- ration foit penible, laborieufe , & d'exe'eu'ion difficile. Nous le re'pe'- tons, des femmes & des enfans lufKfent, & une fcule perfonne peut, dans un jour, parcourir & vifiter, avec exactitude, plus d'une ouvre'e dc vigne ; mais il faut que cette operation foit faite dans l'efpace de quinze jours au plus, fans quoi,on ne pourroit etre a flu re de la def- truction des a-ufs du charanfon rou.eur , ni de celle de la larve de la phataie de la vigne. Les (Enologiftes propofent encore, comme un moyen tres-avanra- geux , d'enlevcr avec des inftrumens de bois l'ecorce exterieure & feche de la vigne, ayant loin de faire tomber cette e'eorce, ou plutoc les dt'trimens des ancitnnes ecorces, dans des paniers , dans des bac- quets ou dans des linges , tk de les porter ainfi hors de la vigne. II eft demontre' que les intei ftices de ces e'eorces avec les infe'ricures , fervent d'aiyle a ces petits inftcles; ainfi, on ne peut detruire leur habitation, fans les enlever. D'ailleurs, cette operation eft tres-avantageu(e, fur- tout pour la vigne plantee dans un terrein trop gras ou trop humide , parce qu'on la depouille par ce frottement des mouffe% & des lichens qui lui nuilent bcaucoup. On connoit encore plufieurs autres expe'- diens -, mais ils font ou trop longs a exe'euter , ou nop minutieux, ou trop diipendieux. Il faut Amplifier les operations, ians quoi, elles ne SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 203 feroient point admifes par le Payfan ; il ne s'ecarte jamais • Non , je n'ai point vecu jufqu'a ce jour heureux ; >> Non , d'un fommeil trompcur les pavots dangeicui , " Enchainoient dans la mort mon arae appcifantie; »> J'cntre dans ce moment dans les champs de la yie. Septembre 1771 , Tome I. Cc 2 2o4 OBSERVATIONS SUR ZA PHYSIQUE, » Nature, je t'cntends, je m'e'lance vers toi , » Je penfe , je renais, & tout rer.ait pour moi. » Efclave des plaifirs , indignc de mon e:re , i> Ai-je pu (i long-teins de'daigner de connoitre r » D'e'tudier le monde , & jufqu'a fon Auteur , » Elevcr a la fois mon efprit & mon coeur .1 .. II plane au (ein de l'cfpace , voit d'un ceil allure' les aftV-es, les pla- nete; ; il delcend a la furface de la terre , fe plonge dans les abimes, pour s'elever enfuite vers les monragnes , & y conudercr les vc'geraux.- II y a beaucoup d'art dans fa maniere d'expliqucr la generation, des plantes par l'union des etamincs au piftil. •i Sous un foible tiffu , cc piftil enferme , 11 Du fouffle de la vie cft-il done amine" ! « Amour , re'parateur des ages & des mondes , » A-t-il fenti les traits de tes ardeurs fecondes? » Quels charmes offre-t-il a ces filets baifle's, it Dans fon fein entr'ottvert , (i tendrement preffe's? » Loin de* prophanes yeux leur fecrettc influence >> A des etres nouveaux y donne la naiffance , j» Et des voiles de fleurs font le lit nuptial » Ou s'accomplit la loi du lien comugal. » Mais, ou la I. bene favonft les crimes, i) Pourquoi ne nait-il point de fils ilk'gitimes? ji Et que I'lieureux pouvoir fouftrait les ve'ge'taux j> A ces hontcux forfaits , par qui les animaux » Trahillent leur efnece , en trompant la nature, » Sur l'amour innocent en rejette l'injure II n't ft perfonne qui rrapplaudifTe a !a de'lica'efle du pinceau de i'Auteur dans ce tableau iharmant ; les notes dont ce morccau eft ac— cor: pagne, ne (on- pas moins intc:rcfTantcc. » Les vegetal^, dit-il , fe m reproduifent , coinme les animaux, par le concours des dtux (exes. » On noninie 'tamiv.es ou -.filets , Irs rarrie. qui renipliflent les fonc- )i tions du (exe malcul n ; .n app.dle. p ft. Is celles qui (ont fe'eondees, >■> & qui contit-nncnt dans ku (eJn'ies embryons ou la (emenee. Cc i) concours des dtux lexes n'eft pas, daiv les plantes, un vain appa- a) reil ; c' ft le pnntipe de leur fe'conJi.t'. F'an Pinftarhr qu'on p ur » non ra r celui de leur« amours, les itam'tn :■ ie p nchent vers h pft /, » fon ioiumet s'emr'uuve en mime teins ; ii kmble les retevoir dans 5177? L'TTTST. NJTTTREZLE ET LES JKTS. i0 penchent vers la partie remelle; il fuffit , par rapport a un grand » nombre,. que les poulTieres vivifiantes s'arretent fur le piflil , foit j) qu'elles fe de'tachent imme'diatcment des e'tamines , ou qu'elles foicne « emporte'es par le vent. Les plantes croifTant pres les une des autres, }> & les pouftlcres que contiennent les famines e'tant fans cefTe cra- « porte'e par les vents, les plantes, dis-je, font expofe'es a tecevoir 3> fans cede des mole'culcs fe'minale d'une elpLce difFerenre ric la leur: « cependanr, on ne voir croiTe dans u>e prairie, que les memes plantes m qu'on y a toujours remarquecs. II y a done uile loi qui anvre, Ox: qui « empeche le melange des efpeces. On obje&era, peut-ttre, que quel- j> ques Naruialiftes ont obferve' des etres mixtes, qui t'toicnt le re'- » fulrat (fe ce melange. Je reponds que leurs obfervations font, &: trop s> pen certaines , & trop peu nombreufes , pour etre oppefe'es aux faits j> innombiables & journaliers qui atteftcnt le contraire. Au refle , on » peut doutcr, & il eft moins que probable, que les animaux en liberte » engendrent des mu'ets. L'amour n'a d'artraits qu'entre deux etres de j) la nieme efpc.ee. Si les animaux franchifTent que'quefois la barriere x> e'eff. nous qui les y f.rcons, en les retenant en caprivite', en nous » oppofant a leurs pen Hans legitimes , pour les exciter a des feux 3> i" lie ires ». De vjge'taux, I'Auteur devoit nature Iement pafTer aux animaux,. & c\ft ce qu'il fait de la maniere la plus heureufe , les infecks font. les premiers qu'il confidere. » Cetix-Ia , fiers dj leur etrc, & d'un e'cl.tt nouveau, » S'elancent. dans les airs , Certain de leur tombeaut i> Un Dieu , dc fes b.enfaits prodigue fans mcfure,. » Scmble avoir pris philir a former leur parure , >• Comme ri la beaute-, ce don fi preY-ieux, » Ainfi qu'"> nos regards , e'toit chcr a fes ycux. » Leu's armes , leurs combats, leurs travaux , leur gt'nic. » Le courage des uns , des autres 1'induftrie, " Leurs mceuTS, leurs pallions, leurs amours, leurs plaifirs.. » Pourroiem fruls occuper mes titles lo'firs ». Seftembre \-j~i i , Tome I.- ioff OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, « La phipart des infecles, die l'Auteur, naiffent fous-une forme dif- » fe'rente de celles qu'ils ont en ceffant de vivre ; ils patient par un etat » mitoyen , dans lequel ils ne prennent point de nourriture, ne chan- » gent point de place, &c n'ont aucun rapport avec ce qu'ils ont ete, » ni avec ce qu'ils doivent devenir. On dit qu'alors ils font en chry- « falide ou en five, comme on s'exprime quelquefois. Dans leur pre- » inier etat, ils font lourds & pefans , ils ratnpenr, ils lont voraces, » mangent fouvent, & croiffcnt beaucoup en peu de terns ; ils fe » retirent a l'e'cart, & fe cachent , pour paffer a l'e'tat de chry falide ; " ils en fortent fous une forme brillante , pare's des couleurs les plus » vives, enrichis d'ailes qu'ils ont acquifes pendant leur engourJiffe- » ment*, ils font alors vifs , legers , inconftans ; ils prennent peu de " nourriture ; ils ne croiflent plus ; le loin de fe reproduire les occupe » feul ; & ils cedent enfin d'exifter, quand ils y ont farisfait. Ce paf- » fage d'un etat d'engourdiflcment a un etat d'adtivite', d'une condition » vile a une existence brillante, a frappe' les Naturalises de tous les » fiecles ; ils ont en vain cherche a en pe'ne'trer la caufe & a Pexpliquer ; » ils ont memeconfacre' leur erreur, par le mot dontils fe (ont fervis pour » designer ce phenomene; ils l'ont appelle' nu'tamorphofe , rerrne qui » re'pond a leur ide'e; ils croyoient , en effer , que les infecles fubif- 3> foient une veritable me'tamorphofc. Ariftote avoit embrafle cette » opinion. Harve' , le celebre Harve', l'a appuyee de fon autorite' ; il jj comparoit les chryfaUdes aux ceufs des oifeaux ; il penfoit que Vm- » fecle , qui alloit changer de forme, rentroit dans un nouvel oeuf, " qu'il y portoit le germe de fon exigence future ; que ce germe s'y >■> nourriffoit des fucs de l'ceuf qu'il s'afTimiloir. Ce fyfteme etoit inge- » nieux , mais le ge'nie e'gare, s'il n'eft dirige par 1 obfervation : enfin , » parut le patient, l'exa& , le laborieux Swammerdam ; il obferva,& » il vit que les infecles ne fe me'ramorphofoient pas , mais que leurs .! changemens confiftoient a depouiller fucceffivement diverfes enve- j> loppes. Ainfi, le papillon, par exemple, ell rout forme dans la » chenille; mais il y eft foible & cache' fous l'enveloppe de chryfa'ide, )> recouverte elle-meme par la peau dc la chenille : les infecles font dans « leur larve , ou fous leur premiere forme, comme la fl.-ur eft dans » fon germe; elle y eft, mais cache'e , & elle ne paroit .i nos yeux jj qu'apres que les feuillcs qui entouroient le bouton font e'earte'es , » & que le calice qui l'enveloppoit s'eft ouvert ». Le tableau des infecles conduit l'Auteur a celui des oifeaux , & il trace enfuite celui des poifTons &c des polypes. Dans ces v.rs & dans la note qu'il y a jointe, il a fu peindre les habitans des mers , avec des couleurs charmantes, & quoique les Naruraliftes fachent de'ja ce qu'il dit dans fa note, ils la liront avec grand plaifir, tant fon ftyle & fa maniere de voir intc'relTcnt le Lecteur. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. io7 Soit qu'en leur berccau mem.- ils regncnt d'.ige en age, )> Enfans d'unc panic , notes d'un feul ravage ; » Ou que troupeau crranr de climats en climats )> En cortege innombrable i!s egarent leurs pas ; » Soit que le fils naifl'ant s'elancc dans la vie, » En de'cliirant les flancs de fa mere attendrie, » On qu'un pcre attentif, dans fes foins emprcfles , » Aillc au loin fecondcr les germes delailfe's. ;>. « L'hiftoire des poiflons , die l'Autcur, eft jufqu'a prefent fort peu connue ; mais les fairs qu'elle pre'fente, font cuiieux Sc frappans. Un des premiers , eft qu'il fe fait foils les eaux de la mer des emi- grations, comme il s'en fait de la parr des oifeaux dans les airs. Les harengs , les fbrdings, les maquere aux , Sec. viennent an printems des mers du Nord , fur les cotes de la France, de l'Angletcrre, Sec. puis y retournent bien-tot apres. Ils les abandonnent pour veair depofer leurs ceufs dans les mers plus favorobles au frai qu'ils repandenr. Ils nagent en un nombre il prodigicux, qu'ils foulevcnt, a ce qu'on dit, les eaux de la mer, Sc qu'ils fonnent des colonnes de p'ufreurs lieues de long, fur une largeur proportionne'e. Un grand nombre de poiflons, au contraire, ne s'eloigne jamais des lieux- qu'ils one coiuumc de frequenter; Sc les diverfes plages de la mer ont leurs habitans particuliers , comme les divers cantons de la terre ont les leurs. Un autre fait intereflant de l'hiftoire des poiflons, eft la ma- niere dont ils fe multiplient. lis fe reproduilent comme les autres animaux, par le concours des deux {exes; mais ils naiflcnt des dif- ferences manieres qui font propres a tous les autres animaux ; & il eft meme , a cet egard , quelques faits qui leur font particuliers. Le plus grand nombre le multiplie par des ceufs que re'pandent les fe- > melles ; ces ceufs n'ont point ete fe'eondes par i'approche du male Sc > de la femelle. Celle-ci, prefTJe du befoin de de'pofer le fardeau qui » la charge, cherche des lieux remplis de plantes , ou couverts de > rochers poreux, auxquels puiflent adherer \e frai qu'elle va leurcon- > fier. Son male la fuit dans (es courfes; il nage fur fes traces; il ne > la perd point de vue ; il s'approche fouvent d'clle, Sc fcmble l'en- . courager par fes careflcs, paflant Sc repaflant autour d'elle, & s'ap- > prochant au moins du fein auquel il n'a pas de moyens de s'unir : i la femelle depofe enfin fes ceufs, Sc le male re'pand deftlis une li- . queur qui les vivifie. C'eft ainfi que certains infecles achevent dc Septembre i 7 7 i , Tome I. zo8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQVE ; j) fe'conder lcs ceufs qu'ont re'pandu leurs femelles , quoiqu'im long i> embrafTement a;t commence a les fe'conder auparavant. D'autres poif- « fons font vivipares •, leurs petics naifTent tous formes 8c parfaits , » comrac ceux des quadtupedes. De cctte efpcce font, V aiguille de mer, » la baleine 8c tous les ce'tace'es ; mais il en eft qui portent dans lcur fefn m des embrions moitie' ceufs & moitie poifTons. L'embryon n'eft d'a- » bord qu'un o;uf; cet oeuf, e'chauffe' dans les entrailles maternelles, j) parvient bientot a fa maturite : Ie petit en fort ; mais trop foible » encore pour paroitre au jour, & traverfer les mers. L'ceuf, d'ail- » leurs, n'eft pas e'puife'; il adhere a l'embryon par un court pediculc » & continue quelque tems a lui fournir fa nourriture; il tombe enfin, » 8c le poifTon nait tout forme' , comme les petits des vivipares, quoi- » qu'il provienne re'ellement d'un oeuf. Ce genre de produ&ion eft-il » propre a certains poifTons , ou eft-il , au contraire , commun a tous » les vivipares, dans leiquels il ne lui manque que d'etre fenfible, « comme il l'eft dans les poifTons dont nous parlons ? C'eft le fen- » timent de ceux qui croient que tous les animaux proviennent d'un » ceufqui parvient a ion terme , & qui edot dans le fein maternel •> des animaux vivipares. Ce poeme agre'able 8c rempli de de'tails inte'refTans , eft termine par, ces vers: » Nature ! . . . . oui , je le fens , c'eft cette lieureufe e'tude ♦i Qui feule nourrit l'ame , affranchit la raifon » Des fers , des pre'juge's , & de l'op'mion ; 11 Et par qui l'homme enfin , confident de Dieu meme , » Devient digne en effet de fon Ecre fupremc ». On trouve dans cc Me'moire une note fur la porofite du marbre digne d'occuper le Phyficien. Ce n'eft pas fans deffein , ajoute notre Auteur, qu'on atrribue la porofite' au marbre. Les Naturaliftes ne l'ont pas aflez remarque'e ; ils auroient pu en faire un caradtere propre a certe pierre : elle e'roit ce- pendant demonrre'e par l'ufage ou Ton eft de le reindre , ufage rres- ancien en Italic M. Dufay , de l'Academie des Sciences de Paris , s'e- toit occupe de cet art > il a donne' a ce fujet deux Mrmoires a l'Aca- demie, oil il nous apprend que le marbre recoit dans (es pores certaines refines , 8c la cire en f.ifion •, que les huiles , la teinture de tournefrl, & celle de prefque tous les ve'ge'taux , le pe'nerrent facilemenr , 8c a une tres-crande profondeur-, mais cette pe'netrabilite du marbre eft bien plus etendue qu'il ne penfoit; il s'ouvre a un bien phis grand nomtre de matieres, que cet habile Acade'mickn n'en avoit employees. U boit les teintiues a fioid, fans addition a'aucun vehicule, 8c ians qu'on SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 qu'on ait befoin de prendre les pre'cautions qu'il avoic cm neceffa/res. Nous avons vu dans le Cabinet de M. Mauduit, Dodleur de la Facultc' de Me'decine de Paris, de femblables eprcuvcs qui avoient parfaire- mcnt rc'ufli. On trouve dans les Notes de cette jolic Epitre d'excel- lentes remarques fur le regne mineral. OBSER VA T I O N S De M. n' An none , fur les glands de me r f affiles , & principalement fur ceux du territoire de BaJIe. Les glands de mer foffiles , les balanites, les helmintholites , font des coquillages fofliles, vafculeux , glandiformes , multi valves, qui s'attachent fur les coquilles, les pierres , &c. Voyez Cel. J. Gefner. Dijfert. de Petrificator. Differ. & Var. Orig. Fig. 17^2, pag. 22. Trailer. Mineralog. fpec. 40^ , pag. 486, Edit, de Berl. Linn. Syfi. Nat. pag. 196, Edit. Stockholm. Parmi les teftace'es, tels que furent nos fofliles avant les changemens arrives fur le globe , on compte les glands de mer , qui tirent leur nom de leur figure , 6c que Ton nomine encore balanites, du mot grec /3»Aa- >o< , qui fignific gland. Voye\ ti'Argenville , Hift. Nat. tclaircie dans deux de fes principales parties , la Lythologie & la Conchy ologie , &c. Paris, 1742. Mais dans quelle clafle ranger les glands de mer?C'e(k. ce dont les Naturaliftes ne conviennent pas entt'eux. Les uns tels que Rumphius , Bonnani, &c. les placent parmi les univalves ; les autres, tels que Gualterie, &: le Chevalier Von-Linne'e , 8c le plus grand nombre, parmi les multivalves. II y a difrerentcs efpeces de glands marins, de plus grands & de plus petits. Tel eft, par exemple, Balanus major Tulipa* vel Tintinnabuli- formis de Rumphius , T. XLI, a Lang. Method, p. 4, d'Argenville , pi. } o , AA. Le Tulipat formis Striatus feu Mitella Rumph. T. XL VII , M. qu'il de'erit parmi les huitres , p. 158, Lang. I. c. le Verruca Teftu- dinaria de Rumph. T. XL, K. Les plus petits glands de mer repre'- fentent des cones on des figures pyramidales. Tels font ceux de la fe- conde efpece de Rondelet ; Gefner, Hift. Anim. Lib. IV, p. 142, & Nomenclat. Aquatil. Anim. p. 2*5 6. Rumph. pag. 122. D'Argenville , PI. 50 , D. Add. Pi. 22. F. 23. C. Linn. Faun. Suec. p. 385. M. 1 $ 4?. Conf. Fig. Noftr. 1. Comme on n'a encore decouvert que deux e(- peces analogues de ces foffiles , nous ne nous arreterons pas a en faire une enumeration plus exa&e. Scheuchzer pofledoit autrefois trois efpeces du premier genre , qui Septembre I 7 7 I , Tome I. D d no OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, repondoient au Balanus major de Rumphius , p. i 2 i . T. XLI , A. Muf. Diluv. p. ^ i , n". 3 25 , 329 , a. Oryclograph p. 289. On pouvoit audi y rapporter Ie gland de mer pe'trifie' , de la groffeur d'ime noifette, done parte Worm. Muf. p. 90. Scheuchzer confervoit autant d'efpeces du fecond genre , analogues au Balanus minor de Rumphius , p. 122. Muf. p. 5 1 , 11". 327 , 328 , 329 , h. Ory3. I. c. Bayer affure dans fon Oryclograph. Norica , p. 72 , T. VI, fol. 13 , n'en avoir trouve' qu'un de cetre efpece dans tout le territoire de Nuremberg. Mais de quelle efpece eft YHelmintholithus lepadis Balanus mar. dicla , Sec. ? C'eft ce cju'on ne pent clairement de'eider, d'apres Gronovius, dans fon Ind. Supell. Lapid. p. 89, Edit. Alt. Je vais joindre a ces efpeces At glands de mer, celles qui font partie de ma Collection d'HiJIoire Naturdk , Sc qui m'ont engage a rediger ce Memoire. Quant a la figure exterieure , nos glands de mer fojfiles repre'fentent des calices forme's de 4, 5 , 6 , 7 petales, Sc meme davantage. lis de'- croiffent pen- a peu de la bafe a Ieur fommire ; ce qui fait qu'ils ont tous la forme d'un cone tronque , on d'une pyramide. Le nombre <\ts petitcs lames oil petales ( s'il eft permis d'appeller ainfi les divifions du calice du gland de mer) n'eft pas conftamment le meme. On en voit , en effer, qui n'en ont que 4 , d'autres <; , 6 , Sc davanragr. J'imagine cependant qu'il eft facile de les rapporter routes a quatre principal. Voici ce qui me le (ait croire i°. Dans les glands de mer entiers , & qui n'ont rien (ouffert de l'injure des terns, on rcmarque toujours trois lamelles on petales plus larges que les autres , Sc affez e'gales entr'elles. Pour les autres , elles (ont beaucoup plus e'rroites , Sc deux ou trois re'unies forment a peine la l.irgeur des grandes. 20. Chacune de ces grandes lamelles occuoe toujours un anele dn rhomboide ; c'eft ce qui me fait conjecturcr que cctte efpece de gland de mer ne doit avoir que quatre lamelles proprement dires. Les autres n'en font que des divifions plus ou moins grandes, occafionnees par les efforts du poiffon qui habite c; coquillage , dans le terns qu'il de- vient plus gros. Cette conjecture eft appuye'e fur une obfervation que j'ai faite fur un tres-perit gland de mer, dont on ne pouvoit apperce- voir diftinctement les parties , fans le (ecours d'un micro(copc J'ai ob- ferve qu'il n'etoit compofe que de quarre lamelles , dilpofe'es de la maniere que je viens de dire. On m'apporta, dans le tems que j'e'erivis ce Me'moire , une hut'tre foffile , couverte de glands de mer de cette eipece , & parmi lefquels j'en vis qui n'avoient que leurs' quatre la- melles. Outre ces lamelles , Sc les divifions auxquclles elles donnent naif- fance, une grande partie de nos glands de mer a encore ci'autres la- melles partkulieres. Elles fervent ou a joindre deux des lamelles prin- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. m i cipales, auxquclles cllcs adherent, par leur bafe , ou a raffcmbler & licr fortemenr, fans interruption, les lamellcs 8c les divisions qui en fortcnt. Elles (ont hiitcs , fans doute, pour rendre la mai(on dc l'animal plus folide, 8c la garantir des torts cjuc pourroit lui caufcr une cxtcn- lion trop forte. Je pen(e memc que ccs lamelles ne s'attachent & nc s'agglutinent autour des autres , qu'apres l'exrcnfion portce .1 un cer- tain point. Ce qui me fait former ccs conjectures, e'eft qu'on n'en rencontre point autour des calices , dont les lamelles ou pctales font parfaitement unies. Les differens ages des animaux qui habitoient dans, nos glands dt mer , ont certainement donne lieu a leur grandeur varie'e. Le diamctre. de la bafe des plus petits eft d'une ligne, mcfure de Paris , le diamctre de l'ouverture de j, 8c celui de la hauteur de {. Le diamctre ou l'axa tranfverfal de la bafe des plus grands ( car les bafes des grandes efpeces ont la forme elliptique ) eft de 4 lignes, mefure de Paris, quelquefois de 3 fculement. La diagonale de leur ouverture, qui, dans prefque tous, eft rhombo'idale, eft environ de 2 7 , quelquefois fculement de 2. Us ont enfin 1 T ligne de hauteur. Les glands de mer font des coquillages parafites, & ils s'attachent aux bois, aux pierres , 8cc. de forte qu'on trouve les fofliles fixes par leur bafe a des corps marino-tcrrcftrcs. Ceux de Scheuchzer e'toienc fur des be'lemnitcs , des pierres jaunatres, Sec. Bayer trouva les fiens fur des pierres crouteufes , 8c des huitres vulgaires ont fervi dc bafe a ceux que je poflede. Jamais les glands de mer ne font feuls , on les trouve toujours en grand nombre. J'ai des huitres fqffiles qui en portent 12 , d'autres 3 2 ; j'en ai meme une qui, a fa furface, en porte au moins 50, & 24 a fon inte'rieure. II y a cependant, quelques efpeces fur lcfquclles on ne trouve qu'un feui gland de mer: mais il eft facile d'appercevoir fur les ftries circulaires ou ovales des veftiges d'un plus grand nombre detruits par les terns. Si Ton examine attentivement les figures de nos glands de mer fof- Jlles , ou balanites, on les diftinguera facilement des efpeces de'erites pat les Conchyologiftes. Il (era, par exemple , impoflible de les con- fondre avec l'efpece des pholades fojjiles , de'erites fous le nom de bala- nites , par Monti in Commentar. Inftitut. Bononiens , T. II, PI. 2 , p. ^2 cv fuiv. telles qu'on les rencontre dans notre territoire. On les confondra encore moins avec la petrification nominee coacha rhotn- boidisjlnat , que Bellonius range parmi les balanites. Rondelet , Geiner, Nomenclat. Aquatil. Anim. p. 227. Gronovius Ind. Suppellecl. Lapid. ■ 8S , n\ 12 , fe font appercus de fon erreur, & ils les diftinguent .r.ivec la balinite de Pline, Hift. Nat. Lib. XXXVII, c. 10, qui' n'eft autre chofe , comme le die tres-bien Gelner , de Fig. Lapidu fol. 1 28 , que la Pierre Juddique , & d'avee celle de Langius, p. 48 , Septembre 1 7 7 1 , Tome I. D d 2 Hi OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, T. 10, que Ton doit rapporter aux Alcyons. Voyez Mimoires pour fervir a I'HiJloire Nat. des pitriftc. Paris, 1741, PI. XIII, Fig. 68. En un mor, pour pen que Ton faffe attention , on reconnoitra fans peine dans nos foffiles la petite efpece de glands de mer. La matiere de mes balanites eft la meme que celle des huttres fof- fiks , fur lcfquelles elles fe trouvenr, Sc avec lefquelles cllcs ont e'prouve' Jes memes changemens. Leur pefanteut fpe'cifique eft a - peu - pres a celle de 1'cau , comme 2.649 a 1000; & ce qui indique que dans leur texture il y a des particules me'talliques , jointes aux particules mar- ncufes, c'eft que la pefanteur des huttres de mer eft a celle de l'eau, comme 1092 a 1000. ( Voy. Table des pefanteurs fpe'cifiq. des diffe'rens corps dans les ouvrages de MM. Cotes, Mufchcmbroe'ck , Nolle t,) Sc randis que la pierrc la plus pefante, qui n'eft point impre'gnee de matiere me'rallique, eft a la pefanteur fpe'cifique de l'eau , comme 1 i a « , ou comme 2500 a 1000. Or, la pefanteur de nos foffiles furpafle celle-la de beaucoup. II eft done e'vident qu'ils contiennent des par- ticules me'talliques. Mais quelles font ces particules ? C'eft ce que nous examincrons dans un autre terns. On trouve dans deux endroits nos glands de mer foffiles , a Bott- minga Sc a Binninga, deux Villages, dont le premier eft a une heure, & le fecond a une demie-heure de chemin de Bade. Bottminga a des marnieres, d'oii l'on tire ces huttres fojfiies avec une marne bleuatre, dont les gens du pays fe fervent pour fertilifer leurs terres. Un La- boureur me rapporta une fois un amas de ces foffiles , Sc j'y rencon- trai des balanites fur une de ces huttres ; je fus curieux de voir moi- roeme l'endroit ou il l'avoit trouve , & de rechercher fi le territoire de Binninga n'offriroit pas les memes productions. Mes travaux furent couronne's du (ucces, puifqu'on en voir dans la Marne fur le bord d'une petite riviere qui coule entre Binninga Sc Sainte-Marguerite. Les glands de mer fojfiies , que je poftede , font tres-rares. On verra que je ne dis rien de trop , fi Ton veut fe donner la peine de con- fulter les Lithologies les plus exadtes , tel que l'ouvrages intitule' Me- morabilium agri Bafileenjis , &c. La conformite' de nom fera peut- etre croire a quelques perfonnes que ce font les glands de mer ou ba- lanites, deems par les Lithographies. Mais ces Auteurs ont fouvent prodigue' ce nom a des foffiles qui ne le meritoient point; Ton (e le perfuade aife'ment , fi Ton examine la defcription qu'ils en donnent : quelquefois meme ce font des Auteurs fyftematiques , tels que Wal- lerius , &c. qui claffent les foffiles, qu'ils connoiffent (eulement de nom, fans les avoir jamais vus. En effer , de tous les Lithographes , Oridographes , Mufe'ographes que j'ai parcourus, & j'en ai parcouru un grand nombre, il n'y a que Biyer, Scheuchzer Sc Gronovius qui en ayent pofle'de' : ceux qui veulent s'en convaincre davantage , n'ont SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. tij qu'a ccouter le celebre M. d'Argenville; il die p. 395 de fon livre : It dernier fojfde marque" 14 , (pi. 5 ?. ) eft le plus rare de tous , il repri- fente un gland de mer , adherent a une pierre for/ne'e de croutes & de dtffe'rens morceaux ; il a e'te trouve' dans le territoire de Nuremberg , felon Bayer , ( il en park dans fon livre Oryclograph. Noric. p. 1 ; , pi. 6. ) On peut I'appeller Balanita. L'efpece de gland de mer ou balanite , de'erire par M. Annone , eft fort rare. Bayer a ere le premier qui ait parle des glands fqffiles. Si on defire de plus grands details fur cc fujet, on pourra conlulter les excellens ouvrages de MM. Tragioni , Baldaflari, & l'Ori&ographie Piemontoife du celebre Naturalifte M. Allione , Profefleur a Turin. OBSERVATIONS BOTANIQUES. De M. Schlotterbec , de la Sociiti de Bafle , fur les monftres des plantes , dans lefquelles il demontre que dans le Rlgne Animal, & le Regne Ve'ge'tal, la nature fuit la meme marche pour les pro- duire. y O r N T de monftre fans caufe , tout le monde en con vient , &r cette loi n'eft pas change'e pour le regne ve'ge'tal. La nature a mis entre lc regne animal & le ve'ge'tal , une certaine analogic par la maniere dont elle donne naiflance aux monftres ; e'eft ce que perfonne n'a encore demontre; 8c ce qui paroit furprenant : en effet , dans les animaux, la monftruofite nait, ou par la faute de la mere, ou par celle du fujet; dans les ve'getaux , au contraire, la plante mere femble aimer a pro- duire des fingularite's , & n'en eft pas plus malheureuie pour mettre au monde les autres rejettons ; ce qui n'arrive pas toujours apres un accouchement penible & monftrueux. Cependant, l'objet dece Me'moire eft de de'montrer que la nature luit la meme marche pour les monftres animaux 8c ve'getaux. Non-(euleiiient les Naturaliftcs ont toujours ne'glige' de traiter cette queftion, & meme ils ne (ont jamais entres dans de grands details fur la monftruofite des plantes; il eft fait mention dans les Acles Heh/i- tiques d'un Chamcemelum extraordinaire. On connoit le lilium album polyamhos , obferve, il y a quelques anne'es, a Vratiflave. Il portoit a (a fommite un failceau de rleurs rort fingulier , compofe' de 101 lys, qui avoient tons la forme ordinaire. Sa tige e'toit tres-eleve'e , per- il ui'li'e, & paroifToit compo(e'e d'un t;rand nombrc d'autres tiges ; en lorte qu'elle avoit trois doigts de Jiametre. II a e'te aufll parle' d'unc, Septembre 1 77 1 , Tome I. z r 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , tulippe monftrueufe , vue dans les jardins dc quelques Amateurs : fa configuration etoit furprenante ; point d'ordre dans l'arrangement de ies petales , tortus, courbe's , replies 8c marque's de diftance en dif- tance par des ftries verres. On a encore cite' quelques autres monf- truofites vege'tales , mais en tres-petit nombrc. J'en rapporte beaucoup dans ce Me'moire, & toutes d'apres mes obfervations particulieres. Des bayes de genevrier ordinaire (pi. i , fig. i.) formem la pre- miere efpece : on fait qu'elles font naturellement fpheriques, polies, d'un brun tirant fur le bleu fonce' , randis que les quatre grave'es a la fig. i , font bie.n diffe'rentes. La premiere A , eft remarquable par cinq eminences rondes-, la feconde B » eft couverte par quelques ecailles pointues, & reprefente la tete d'une plante cyniracee ; la troifieme C , a quatre protube'rances obtules a leur fommite ; enfin la quatrieme D, eft termine'e par trois petites cornes pointues. La feconde monftruofite (fig. 2.) fe trouve dans une fleur de bal- famine. On fait que cette plante eft de la claffe des fleurs anomahs irre'gulieres , fuivant Tournefort, & de la fyngene'fie monogamie , dans Fingenieux fyfteme fexuel du Chevalier Von-Linne'e ■, que le nombre de fes pe'tales eft inde'termine ; que tantot elle eft blanche, tantot d'un vif incarnat ou couleur de pourpre , & qu'elle a une efpece de capuchon termine' par un e'peron. La fleur de balfamine , de'erite E , F , G , a trois e'perons •> & fur cent autres fleurs de la meme efpece, elle s'eft trouve'e la feule avec cette variete'. Je ne voulus point la cueillir , curieux de favoir fi elle n'en produiroit pas de iemblables; mais mon attente fuc vaine , & la fleur fe deffe'eha. La troifieme fingularite' que j'ai obferve'e, eft fur la fleur blanche du cyanus mofcatus (fig, 5.) Les Botaniftes rangent cette plante parmi les capite'es. Ses fleurs font tantot blanchatres , tantot d'un vif incar- nat; mais cliacune d'elles a (on pe'dicule. Celle que je de'eris (fig. 3.) eft double & unic jufqu'au calice ecailleux H, I, & jufqu'a la tige K, oil elle fe trouve entortille'e. Je laiffai miirir les femences , pour e'prou- ver fi elles ne donncroient pas le printems fuivant des fleurs doubles fur un meme pedicule, & ces femences ne produifirent que des fleurs fimples , ayant chacune leur pe'dicule. Le quatrieme phe'nomene monftrueux fe rencontre dans une prune de damas, gravee ( Fig. IV. ) Ce fruit toujours fans tubercules, eft ter- mine des deux cotes par des cones obtus, &c celui-ci eft remarquable par une protuberance extraordinaire L, qui a lieu des deux cotes. Pour cinquieme monftruofite, une prune du meme genre ( Fig. VII. ) qui eft double M, N, tient a un feul pe'tiole , eft divife'e, &c a deux noyaux. Pour fixieme & feptieme , on voit le fruit du cynobafte , que tout k monde fait etrc ordiiuircment ovale & tres-poli : l'uii. de ces fruirs SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. n< ( Fig. V. ) eft diftinguc- par une profonde incifion line'aire, qui vicnt obliqucir.ent de Pad O , a l'infertion du pcdicule P. E!lc eft verdatre, feuillee, & porte a l'un des cotes de (a fommite' Q, line eminence ronde ; l'autre ( Fig. VI. ) de couleur ordinaire , a pris la forme d'une poire. J'ai obferve' la buitieme lingularire' dans une efpece de pomrne d'une faveur tres-douce; elle n'eft pas ordinairement bien groffe, fa couleur eft d'un jaune pale, legerement ftrie de rouge. Mais celle qui eft re- presentee ( Fig. VIII. ) a trois corps R , S , T , de manicie cju'clle eft coinprimee & applatie, 6V: remarquable par ies trois yeux; elle eft atta- chce a un feu! pe'dicule. La feuille du lilac , ou fyringa cozruha , offre la ncuvieme /Ingula- rite. Les Botaniftcs n'ignorcnt pas qu'elle eft toujours fimple, tk fans de'eoupurc. Celle que Ton voit ( Fig. IX.) eft double, & comrae di- vilce en deux fvuilles differences A, B, qui ic re'uniffenc pres du pe'- tiole C, divergent & s'e'earrene enfuite l'un de l'autre. Le concombre des jardins , dont on fait un fi grand ufage fur nos tables, & que la Me'decine emploie C\ utilement, nous pre'fente la dixiemc monftruofite'. L'on fait qu'il s'e'leve toujours fcul fur un pcdi- cule. Celui que l'on voit ( Fig. X. ) eft double & re'uni D , E : l'un des fruits eft plus coiiii ierable que l'autre, &c ils font tous deux porte's fur le mcrae pe'dicule F. La onzieme obfervation a e'te faite fur une cerife de l'efpcce de cclles que M. Tournefort appelle cerafum fativum , rotundum , rtt- brum , acidum , que Pline nomme cerafum aprorianum , & qui , en SuifTe, prend le nom de Ganeine rothe faure kirfchen , Troll- kirfchen , Trollernen. Quand cette cerife Juit les loix de la nature dans fa formation , elle eft porte'e par un pe'dicule tres-long , & la monf- truofre' ( Fig. XI. ) pre'lente deux cerifes re'unies G, H , fur un meme pcdicule I. On pourroit obje&er avec Taberrnonran & Gafpard Baulrin, que cet accident eft tres-commun; mais il kirHra de re'pondre qu'on doit le regarder comme extraordinaire, firoc que dans une coibeille de cerifes, cucillies lur un petit nombre d'arbres , on en trouve a peine une de cette elpece. De tons les monflres boraniques dont j'ai fait 011 vais faire men- tion, il n'en eft point de plus curieux que celui de deux efpeces d'uil- Uis , culuves dans nos jardins, iur lelqucls j'ai fait ma douzicme & treizieme obkrvarion •, 1'une de ces elj ece pare'e d'un beau rouge, couleur de lang un peu fence, e'toit bigarrcc par des raies blanches, que les Fkunlles nomment Concorde; la couleur de l'autre e'toit vio- lette. II eft conftant que les aillets n'ont qu'un feul calice, & que ce calice ne renferme qu'ine Heur; cependa.t, les individus que je de- cris, Iont tout aucremenr conformes. Le premier preknte une Heur Sebtemb&e 1771, Tome I. 2i«5 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, magnifique , & il a fallu couper fon calice K , ( Fig. XII. ) pour lui pro- curer ce bcl e'panouiffement. Je m'imaginai d'abord qu'il n'y avoir aucune monftruofite' : j'attendis pendanr quelques jours; & dans le rcms que les pe'tales commencoient a le fle'trir , je vis s'elever au milieu de la fleur une protuberance que je pris d'abord pour le recepracle des fe- mences. Je ne tardai pas a appercevoir que c'e'roit une nouvelle fleur qui pouflbit; de forte que je reconnus bientot une fleur M, prete a s'e'panouir dans ce qui m'avoit d'abord paru etre le re'ceptacle des le- niences L. Il fortitdu premier calice & de la pfemiere fleur K, N, N, un fecond calice 8c une feconde fleur L, M, avec cetre difference ce- pendant , que I'epanouiffement dela feconde ne fut pas fi confide'rable , & qu'elle le flctrit en trois jours. L'autre efpece d'czillet (Fig. XVII. ) prefentoit le meme phenomene , avec cette difference neanmoins , que le calice fecondaire O e'toit vifible , & les fleuts Q, Q, & R, R furent aflez belles , Sc vinrent en meme terns : mais ce qui m'e'tonna beau- coup plus, ce fut de voir que la plante dont ils fortoienr, n'avoit ptoduit aucune fleur re'guliere , Sc que les fept ceilkts qu'elle porta , furent rous monftrueux. Le fruit jaune de la pomme (Tumour ou lycoptrficum, que Rai range parmi les bacciferes, Sc Gafp. Bauhin, parmi les folanum pomiflres , me fournit la quatorzieme obfervation. Lorfque ce fruit eft re'gu- lier, il eft exa pores ou les detruit ; de-la, lurvient une tranfpiration arrete'e , & ne pouvanc plus fe retablir, elle produit la pourriture des iucs nourriciers de cette partie ; mais fi la criipation a e'te' trop forte , le defle'ehement fuit auill-tot, 8c !a feuille tombe en poufliere. La brulure arrive commime- ment, ou quand l'eau eft rc'pandue en petires gouttes fur les feuilles , ou quand elle couvre toute la furface •, les feuilles panache'es recon- noifTent a-peu-ptes la meme caufe , 8c ce qui eft afifez remarquable , e'eft que les plantes a feuilles panache'es fe multiplient de femences, Sc que leurs nouveaux individus confervent les panaches. II en eft lou- vent de cette variete' dans les ve'ge'taux , a-peu-pres comire dans cer- taines families d'hommes, dont les peres tranfmettent aux enfans des taches fur le vifage , ou (ur telles autres parties du corps. Une feuille, un fruit, charge's de protube'rances , de gales , ne font pas une monftruofite'. On ne doit pas en rendre la nature refponfable. Les vers , les in(ectes , &c. en font l'origine , & la plante ne pourroit ve'ge'tcr differemment. L'infccfte fouleve l'epiderme de la feuille, du fruit; il depofe fes ceufs dans le paranchymc, & e'eft prefquc toujours dans le terns que la fleur none; de ces ctufs, il nait des vers, ces vers brifent les vaifteaux fe'veux, le fruit continue a croltre ; & comme la fe've s'extravafe, elle produit des vegetations extraordinaires. Cet exemple eft commun fur le fruit du prunelier , dont nous nous fervons pour faire des haies. Ce fruit eft rond, fa peau eft line & polie; mais dts qu'un infedfe l'a pique' pour y loger fa petite tamille , il s'al- longe, s'applatit ■, il prend quelquefois la forme d'une croftc, & varie lingulierement dans (a configuration & dans fa grofTeur. Cette de'fec- tuofitc ou extravafion eft a ce fruit ce que Yexoftofe eft a un os comme dans le rachitis , le fcorbut , &c. Les meurtriflures faites a l'e'corce , produifent fouvent l'exfoliation , & des fingularite extraordinaires. Le Fleurifte fe voit fruftre dans fon attente. La plante qu'il a cul- tivee avec le plus de foin, ne lui donne fouvent que des feuilles. Cette fullomanie abforbe alors la partie de la feve qui devoit former les flcurs & les fruits. II a multiplie les labours , les cngrais; les canaux feretfie Septembre 1771, Tome I. Eei txo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, n'ont etc remplis que d'un fuc grollier, & la fevc ne pouvant fe fub- tilifer & s'artc'nuer, n'a produir que des feuilles. Nous devons les Heurs & les fruits a la ft've la plus purifie'e & la mieux digerce. Nous ne fini- rions pa1; , fi nous voulions rapportcr routes les caufes oppofees aux loix ordinaires de la vegetation; mais le Phyficien ne prendra jamais pour des monftruofites inne'es , ce qui eft ferret d'un accident; & quand il verroit encore fur un meme pied pluheurs fruirs finguliers dans lcur forme, il en recherchera la raifon dans les cauies acciden- telles , & ne recourra jamais aux merveilleux. L e'pi du bled de Tur- qui , donr park M. Schlotterbec , en eft la preuve. Natura nonfaclt Jaltus. P. S. Pa l LAS, Med. Bod. Acad. Coif. & Soc. Reg. Angl. Sodal. Elenckus Zoophytorumfijlensgenerumadumbrationesgeneraliores , & fpecierum cognitarum fuccindas dejeriptiones, cum feledis audorum fynonimis Hagce Comitum , & projlat Franco/, ad Maenum , apud Fr. Varrentrapp. Et fe trouve a Paris , chez Briaflon , rue S. Jacques , in-S. Catalogue des Zoophytes, oh Ion trouve les defcriptions de chacune de tears ej pices , & les fynonimes employ (s par les diffirens Auteurs. Par M. Pa l las , Me'decin , de FAcademie des Curieux de la Nature , & de la Sociiti Roy ale de Londres. JVX . Pallas, connu dans !a Re'publique des Lettres, par un grand nombre d'excellentes Diflerrations fur YHiJloire Naturelle , s'eft allure' , en publianr le livre dont nous allons faire l'analyie, une place diftingue'e parmi les meilleurs Zoologiftes du fiecle ; le voyage qu'il a fait du cote d'Aurach , lui a fourni l'occafion de fe rrouver fre'quem- ment fur les bords de la mer , & d'examiner les corps marins, & les qoophites qui y font en grand nombre. Il concur des-lors le projet de donner un fyfteme fur la famillc des [oophites. Celui que nous an- norxjons , n'eft que l'clquine de ce grand ouvrage. M. Pallas range parmi les ipophues , les lytophites &C qoop/iites du fyfteme de M. Von-Linnee, entre lefquels il remarque rrop de reflem- blance, pour qu'on en doive faire une efpece a part. II y re'unit les coralines , les iponges , & les teign.es de mer. Le fyfteme de M. Pallas eft plaufible, & paroit tres-analogue au grand fyfteme de la nature. En eftct, marquer les nuances infenfibles /'/. / Jame'-l.-Paae'. Xi pi n. SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. m qui fe'parent les ve'getaux des animaux , identifier prefque ces deux rcgnes, c'eft fuivre adroitemenc la marche de la nature, & ne la quitter jamais Le Dodteur Allemand taclie dc le prouver dans une Differtation fur la nature intermediaire des {oophitcs , qu'il a placee a la tete de (on Livre. II commence par dire que la divii'on des trois rcgnes eft arbitraire, & ne git que dans l'imagination. II penfe qu'il y a autant de diftance de telle brute a telle autre efpece de brute, que des brutes elles-memes aux corps organiques. Divifcr les corps orga- niques en animaux Sc en ve'ge'taux , ce n'eft pas fuivre, felon lui, la marche de la nature, puifque les ve'ge'taux forment la dernicre claffe des corps organife's. Quoique les plantes paroiffent tres-diftinguees des animaux , elles leur lont cependant unies par les \oophites ; l'Auteur le prouve dans un examen phyfiologique qu'il fait de YanimalSc de la plante. Quant aux ^oophites , les Anciens n'ont rien ftatuc fur leur nature, Sc la plupart d'entr'eux ont range' les coraux Sc les autres corps de cette efpece parmi les picrres ; quclques-uns aufTi leur ont affigne une place dans le regne ve'ge'tal. On a, de nos jours, re- nouvelle ce fyfteme, Sc on a claffe avec les mouffes , les coralincs , les fertularia, Sec. Sc avec \esfucus, les alcyonia , les efchara , les penna- tula , Sec. M. Marfilli fe figura appercevoir des fieurs dans ces pctits animaux, il pub'ia fa pretendue decouverte , 8c fon opinion devint pre'dominante pour quelque terns-, cependant, il fe trouva des-lors des Naturalises en garde contre les prejuge's Sc l'opinion reijue ; ils connurenr, aide's par l'analyfe chymique , qu'elle etoit la veritable formation des %oo- phites i ils comparerent ce que Rumphius Sc Lhuidius avoient ditfurce fujet. M. Peyfionel apper^ut le premier, en 1717} des animaux dans les madrepores , les mi lie pores ; ce Phyftcien avan$a que la partic la plus vifible n'e'toit que leurs coquilles ou demeures. Cette afTertion refta enievelie pendant plus de 10 ans. Enfin, M. de Reaumur , frappe de la decouverte des polypes , par M. Trembley , reffufcita, en 17*9 , l'opinion de M. Peyfionel; elle fut enhi'te confirme'e par MM. deJuf- fieu, LoeHing , Sec. Sc Ellilius joignit aux madrepores la fertularia , Sc le corps de meme nature. Quoiqu'on ait determine la place des ■{oophites dans Ic regne ani- mal, il y a cependant dtux opinions diffe'renres fur leur nature. Les ans, comme MM. PeyfTonel , de Re'aumur, Donati , Ellilius , Sec. pre'- tendent que e'efl un ajfemblage de coqudles qui appartiennent aux perils animaux du genre des midufes & des polypes; les autres, & c'eft le fen- timent du Chevalier Von-Linne'e , de Baiter ,& de M. Palla? , difent que les ^oophites font des animaux vegetans , qui croiffent fous la forme d une plante , & paroiffent en avoir les propric'te's ; en un mot, que ce font des plantes anime'es, qui ne font point compofe'es de V ajfemblage des Septembre 1771, Tome I. 221 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cellules de ces petits animaux , & que les refies des zoophites que nous avons dans nos cabinets , en font fiufement les de'pouilles & le fquelette. M. Pallas demontre enfuite l'analogie des zoophiles avec les ve'ge- taux, & celle de tous les corps entr'eux. II fait voir que la nature ne va point par fauts ; mais que les eipeces fe divifent en genres , les genres en ordres , les ordres en claffes , ike. Sc qu'il eft impollible d'admettre la gradation de MM. Bradley Sc Bonnet. La nature, dit ce Do<5teur, n'admet point cette ie'rie , elle s'enveloppe dans une elpece de filet, ou flutot e'eft un arbre qui poufle en raeme tems deux troncs de fa racine, animal Sc le vegetal. Le premier paffe des animaux mous aux poijfons, laiffe la branche laterale des infecles , pour aller aux amphibies , & pouffant une autre branche laterale des oifeaux , il parvient aux qua- druples . Dans ce catalogue raifonne des \oophites , M. Pallas commence par donner la de'finition gene'rique, Sc une ide'e de Phiftoire de chaque genre, il cxpole les eipeces diffe'rentes, auxquelles il afligne un nom ; il ajoute les (ynonimes qu'il a raflfemble's avec beaucoup de foin : il pafle enfuite a. une dclcription plus ample, dans Iaquelle il fait connoitre le lieu natal de chaque [oophite , & il y joint quelques notes. On doit favoir gre' a. cet habile Medecin de fon travail; on voir qu'il ne l'a entrepris que pour le bien de la chofe; le ze'le' Phyficien s'y fait con- noitre, & obfervateur modefte , il a foin de marquer avec une e'toile les cfpeces qu'il n'a pas vues lui-meme. Le premier genre des ^oophites eft Vhydra de M. Von-Linnee , ou le polypus de M. de Reaumur , dont M. Trembley a donne une def- cription tres-exade. C eft un animal ve'ge'tant, errant; la tige Jimpk nue , moelleufe , molle , J'e contracle; elle eft liniaire , couronnie de franges foyeufes , en maniire de petites perles ; fes branches latirales font tres- penchies. M. Pallas prouve que la fubftance de cet animal eft excave'e par la nourriture qu'elle rec^oit de tous cotes. 11 a obferve quelquefois que les polypes font des oeufs dans l'automne, renfermant l'embryon d"un polype , & cet embryon doit refter en cet e'tat pendant tout l'hi- ver. L'animal que M. Rcefel de'erit, & que M. Von-Linne'e appelle chaos proteus , approche beaucoup de Vhydra. Quant au brachionos que le celebre Naturalifte Suedois clafle dans le genre de Vhydra , M. Pallas pretend qu'il n'y a aucun rapport entr'eux. Le fecond genre eft Vefchara , que M. Von-Linnee appelle fluftra. C'eft un animal ve'ge'tant ; fa tige eft membraneufe , un peu pierreufe , formie de Vajfemblage de plufieurs cellules ; elle a des efpices de perles fur fes bords ; les cellules fonce'es , de'eouvrent le polype ne dans le fond , couronni de franges, & ajfe\ femblable a I'hydra. M. Pallas range parmi les efchara, la pierre d'e'ponge de nos atteliers, Sc lui donne le aora de fpongifte. M. Von-Linne'e la nomme cellepore. SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 213 Le troifieme genre eft la ctllularia. C'ejl un animal ve'ge'tant , ref- femblant ajft{ bien a une plante ; fa t'ge nue eft compofie de cellules ftriies , elle eft rameufe , fouvent articule'e , quelquefois lapidefcente , fir raiiie par de petits tubes. Des fleurs vives paroiffent fortir de chaque cellule. On ne diftingue pas bien les ovaires. Ce genre comprend lcs coralines celliferes d'Ellifius, ou les fertularia a ovaires non[diftingue's & cache's entre Us articulations de M. Von-Linne'e. M. Pallas pre'tend que les corpufcules qu'on remarque dans les cellularia, & qu'EMi- /ius a pris pour de petites ne'rites , nc font autre chofe que des bulles aflez femblables a la tete d'un oifcau , & relatives a celles qu'on ob- ferve dans la ctllularia avicularia. La tubularia formanr le quatrieme genre, eft un animal ve'ge'tant 3 qui a des racines ; fa tige tubuleufe , cornie , trh-fimple ou rameufe , fixit , montre a fon extre'mite un animal dont la tete eft he'rijfe'e' de pi- quans , & qui a des cEufs. M. Pallas rapporte a la tubulaire, V hydra campanulata de Von-Linnee , le polype a pannache de Trembley , & le polypus pennaceo-criftatus de Rcefel. Le brachionite, qui forme le cinquiemc genre, comprend les pfeudo- polypes de Rcefel , que Von-Linne'e place parmi les hydra. C'eftun animal tres-petit,fimple, errant, fouvent compofi, ve'ge'tant, pidunculi , couronni d'une fange qui fe contracle , fubriniforme , ondulante , & fouvent ci- lice. L'Auteur rapporte a ce genre le polypus floralis d'eau-douce de Schoeffer , la fabella ringens de Von-Linne'e , Yanimatcula rotatoria de Baker , la fertularia polypina de Von-Linne'e , & fon ifis anaf- tatica. La fertularia eft le fixieme genre. C'ft un animal ve'ge'tant en ma- nilre de plante. Sa tige eft tubulie , d'une fubftance corneufe , entoure'e de petits calices, jettant des efphes de fleurs ae fubftance animale po- lyp'formes. Les ovaires & les veficules comiennent les grands polypes germinifires. C'eft, pour ainfi dire, le fquelette d'un animal, puifque les parties molles font renfermees dans des e'tuis durs & corne's. En effct, la moelle qui fe continue dans toute la longueur de la ri<*e, eft de'eidi'ment vive, puifqu'elle pouffe a travers les petits calices, des efpetes de tetes affez reftemblantes aux hydra. De ce genre font la fertularia fruticans , Sc la fertularia gorgonia , efpeces tres-rares, dont la derniere eft nouvelle ; elles font lcs interme'diaires des genres des fctularia & des gorgonia. Le feptieme genre, la gorgonia comprend les litophytes , les litoxyles & les ciatophytes des Auteurs. Leur fubftance eft corneufe , & ces infesftes font recouverts d'une perite lame cortkale. Boerhaave les dif- tingue des c&atophytes , & leur donne le nom de titanoce'ratophytes. II l'alligne fur-tout aux gorgonia privees de leur enveloppe, & aux an- tiph^tes nuds. M. Pallas parle id en homme inftruit fur la maniere Septejmbre 1 7 7 1 , Tome J. 2Z4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de croltre , & fur la ftrudhire des gorgonia , qui eft evidemment orga- nique. Leur vegetation dans la mer eft prodigieufe ; quelquefois leurs tiges & leurs rameaux font tres eleve's. En gene'ral la gorgonia eft tin animal ve'ge'tant; fa tige eft d'une fubftance corneufe , ftrie'e , attenue'e , applatie a la bafe , recouverte d'une e'corce calcaire , molle , celluleufe & poreufe , & elk parte des polypes femblables a des fleurs a fleurons.. Le corail noir qui vient de l'Oce'an Indien fe rapporte a la gorgonia , Sc c'eft la gorgonia antipathis de Von-Linne'e : en effet, le favalia de la Mediterranee, que l'on confond avec le corail noir, eft un grand tronc poli , fans rameau , d'oii de'rive la gorgonia ventolina de V. L. L'ant'phates formant le huitieme genre, contient diffe'rentes efpeces , que les Naturaliftes avoient , jufqu'a prefent , rapportecs aux gorgonia. Cependant, malgre certaine rcflemblance entre Vantipathes Sc la gor- gonia , Yantiphates en differe par fon hifpidite' ligneufe & par fon ccorce , qui n'eft pas calcaire ; mais ge'latineule , Sc dont quelquefois font depourvues les efpeces que nous avons dans nos cabinets. L'an- tiphates eft un animal ve'ge'tant ; fa tige eft corneufe, rude & attinuie cxtirieurement , applatie a la bafe , recouverte d'une e'corce g/latineufe , portant des polypes a fleurs & armis de piquans ; les ovaires & les calices de fubftance corneufe qui fe trouvent fur la tige , font le'gere- ment arrondis en maniere de toupie. Le neuvieme genre, I'ifis, renfcrme les corps que Ton nomine co- rallodendres ; favoir, le corail rouge, (ifes dichotoma de Von-Linne'e ) le corail rofe , le corail ocrace Sc Yhippuris ftixea. Voici la definition de ce genre , felon le Docleur Pallas : i'ifts , die— il , eft un animal ve'ge'- tant , en maniere de plante : fa tige eft pierreufe , poreufe , forme'e par de petits vafes longitudinaux , fouvent articulie , recouverte d'une e'corce molle , & parfemie d 'ine'galite's en maniere de canaux , renfermant des ovaires , d'oii fortent des polypes a fleurons & a piquans. On juge par cette defcription , que les ifis ont la plus grande analogie avec les gor- gonia , Sc que toute la difference vient de la fubftance inte'rieure qui eft pierreufe. La fubftance de l'ecorce eft vafculeufe Sc poreufe , elle ren- ferme de petites cellules correfpondantes aux mammelons exte'rieurs , d'oii fortent ces animaux-fleurs. M. Marfilli a obferve' le premier que les branches du corail tendoient toujours vers la terrc. Les rcjettons qui fe trouvent au fond de la mer , fur des coquillages Sc des pierres, n'ont pu croitre dans cet e'tat •, il eft done probable que ce renverfe- ment de branches n'eft pas une loi fans exception. M. Marfilli affure encore que jamais les coraux ne font de couleur laiteufe, quel'art feul peut la leur donner;& M. Pallas a vu des branches de corail blanches, & de couleur de chair : cependant, il n'ofe aflurer que cette couleur (bit naturelle. Le dixieme genre eft le millepon : c'eft un animal ve'ge'tant ; fa tige SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. iz$ eft Ic'ghement folide , rameufe , a pores cylindriques , perper.dicuL:ires a I'axe ; il porte des polypes tres-minces, femblables a des tubes. Une texture plus fence, une fubftance compole'e de pores cylindriques , ec perpcndiculaires a l'axe de la tige; voila les caractcres diftinctifs du millepore , qui empechent de le confondre avee Vefchara ; cependant , comme l'analogie entrc Vefchara , VifisSc lc millepore, eft fortgrande, & que les madrepores reffemblent beaucoup. aux alcyones, M. Pallas n'a pas voulu feparer , comme M. Von-Linnee, les litophites , de l'ordre des ^oophites. Ce Dodteur n'a pu decouvrir de pores (ur le millepore calcaire , ( le corailblanc dAngleterre ). II s'imagine que, tandis qu'il eft encore dans la frier, il eft recouvert par le pcriofte de Panimal. II y en a en (i grr.ndc quantite' dans la Province de Cornoiiaille , que les habitans s'en fervent pour engraifTer leurs terres •> Sc cependanr, on n'y re- marque rien de femblable. M. Pallas, decrit, a cette occaiion, la fa- mcuie incruftation qui fe rrouve dans un lac dc la peninfule de Voor- nan , aupres du village de Rakania. Le onzieme genre , le madrepore eft un animal tantut jimple , tantut ve'ge'tant ; fa tige eft fort foment femblable a celle d'une plante , corn- pofe'e de petites cellules , terminie a fon extrimiti ou furface , par des itoiles lamelleufes ftrie'es polypiferes. Parmi les madrepores , les uns iont tres-fimples , les autres enchaine's , conglomere's , d'autres com- pofes , coupe's par moitie' , vegetans , ou anomales ; en un mot , d'un madrepore a un autre madrepore , il y a prefque toujours une e'norme difference. Le tubipore , qui fait le douzieme genre, eft un animal compofi anomalc ; fa tige eft forme'e de pet its tubes para lie les diftingue's , & les tubes articules communiquent a I'orifice par un petit fyphon e'toile'. On n'a encore de'eouvert qu'une efpece de tubipore ; on ignore de quel genre font ces pctits animaux , qu'on peut vrailemblablement ranger avec les \oophites. Des Pilotes ont dit a l'Auteur que le tubi- pore eft rempli de vers, qui fortent entierement des petits tubes, Sc s'y cachent aufTi-tot qu'ils appercjoivent un de leurs ennemis. Ce qui lui fait conje&urer que peut-etre ces petits animaux n'habitent quM l'extre'mite' des petits tubes , auxquels ils font attaches par un nerf fort large, qui leur permet d'en fortir. Valcyon fait le treizieme genre. C'eft un animal ve'ge'tant ; fa tige. eft fixe , continue , cartilagineufe , poreufe a P inter ieur ; fon e'eorce eft dure , parfemde d'ine'galites etoiKes , papillaires , portant des polypes ovipares , radiis , armis de piquans cilUs. Les alcyons font de'ja beau- coup moins fufceptibles dc lenfibilite' , leur vegetation commence a etre imparfaite; cependant, d'apres l'analyfe chymique, on doit en- core les daflfer parmi les zoophytes. Vient enfuite le genre du pennatula. C'eft un animal ve'ge'tant; fa Septembre i 7 7 i , Tome 1. F f 2z£ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , tige n'eft point fixe , elle eft coriace , foutenue quelquefois par tin offelet , multiforme , & faijant voir en partie des polypes armSs de pointes , fur VextSrieur defquels on voit de petits calices , & des ovaires. La diffe- rence du pennatula , & des autrcs \oophites , vienr de ce qu'il ne fe fixe pas , & qu'il nage dans la mer, a l'aide de fa tige recouverte d'une e/pece de cuir mufculeux , on qu'il s'enfonce dans le limon pour y vivre. Le rachis , qui eft une autre partie des pennatula , eft parenchy- mateux & immobile; on y decouvre des polypes. M, Pallas rapporte a ce genre i'ijis encrinus de Von-Linnee. Le quinzieme & dernier genre des ^oophites eft V Sponge ; e'eft un animal ambigu , qui crolt dans un {tat d'engourdijfement ; fa tige eft divife'e en plufieurs parties , tijfue de fibres , recouvertes d'une matiire gSlatineufe ; elle a a fa furface des efpeces de petites cellules. Les e'pon- ges ont une forte de vie fenfitive ; les Anciens Si. les Modernes s'ac- cordent fur ce point. M. Peyffonel a dit que les Sponges eroient l'ou- vrage des vers qui les habitoient ; d'autres ont pre'tendu le contraire. Mais les dernieres obfervations d'Ellifius 8c de Solander , ne nous laiftent plus lieu de douter que les Sponges ne foient des {oophites. On ne de'eouvre cependant aucun figne de vie dans ¥ Sponge fluviatile , quoique la mouffe blanche, qui y eft attache'e , lui donne une odeur poifTonneufe. M Pallas ajoute en forme A' appendix , trois genres e'quivoques , le tani i , affez femblable aux vermes inteftini de Von-Linne'e, quoiqu'il le place parmi les \oophites ; le volvox , qui, peut-etre, ainfi que toute la famille des animalcules a tuyaux , appartient aux brachyonos ; & les corallines, qui (emblent devoir plutot figurer parmi les vSgStaux , que parmi les {oophites. La nature du tcenia eft encore inconnue; ce- pendant , M. Pallas foupc,onne qu'on peut le ranger parmi les zoophiles. Les organes dont il eft pourvu , & qui prennent fuccefllvement de l'accroirTcment , pour s'affoiblir enluite dans la meme progreflion , don- nent lieu a la conclufion de M. Pallas. Au rcfte, tout ce que ce Doc- teut e'claire' ic permet de dire lur l'origine & la texture du taenia , eft - cres-inte'reflant , & fixera certainement 1' attention des Naturaliftes. Quant aux corallines l'odeur ve'getalc qu'elles re'pandent , lorlqu'on les bmle , lui fait penfer que ce (ont de vrais vege'taux. En effet, elles ne donnent aucun figne de vie dans la mer ; elles n'ont aucune incruftation polypeufe ou muqueule ; & leurs pores font fi etroits, qu'ils ne peuvent loget les polypes. L'ouvrage de M. Pallas , dont nous parlons, n'eft que TefqiiifTe d'un autre plus considerable. Sa manieie d'e'erire eft daire, pre'eife, impar- tiale. Nous Uu devons de nouveaux melanges ^oologiques , dont nous ferons l'analyfe dans le volume fuivanu SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. PARALLELE De la nourriture des plumes , & de edit des dents ; par M. RostAn . I , e S dents font les plus folides & Ies p!us blancs de tous les os. Le commun des homines a trente-deux dents, huit incifives, quatre ca- nines, & vingt molaires. Elles ne font d'abord qu'une efpece de glaire, elles prennent enfuite de la confiftance, & s'endurciflent peu-a-peu. II en eft a-peu-pres de meme des plumes des oifeaux. Elles font trcs- tendres dans leur naiflance;& la nature toujours prevoyante, les tienc alors renfermees dans un fourreau cartilagineux ; mais le terns leur donne bientot par degrc's , la durete dont on fait cju'elles jouiflent- Les dents des enfans qui font encore dans le fein de leurs meres, font recouvertes par une petite membrane, & enchafTe'es par le bout dans un trou, que les Anatomiftcs appellent alveole. Sans cette precau- tion , elles feroient infailliblemcnt detruites. Les plumes des oifeaux tiennent audi par un bout dans la peau , & le refte eft expofe a l'air. Les dents, lors de leur accroiflement, ont un grand trou a leurs racines, pour donner un libre paffage aux vaifleaux fanguins nourri- cierj. Le tuyau des plumes , dans le terns de leur naiftance , eft perce' d'un trou par le bout, par lequel paflent les vaifleaux languins, & vont s'etendre fur la fuperficie du corps qu'on appelle larron ; il remplit la cavite' de la plume , 2c il porte la nourriture a routes fes parties. Par la fuite , on voit dilparoitre les trous qui font au bout inte'- rieur de la racine des dents, ainfi que les vaifleaux fanguins nourri- ciers ; e'eft apparemment ce qui fait que les dents ne croiflent plus. Le grand trou , place a la partie inte'ricure de la plume , fe ferme peu- a-peu , & Ton n'y voit plus de vaifleaux fanguins ; e'eft pourquoi , le larrcn renferme dans le tuyau de la plume devient fee, 8c la plume ne crolt pas davantage. Les dents de l'homme font creufes jufques vers la moitie', afin que les vaifleaux fanguins s'y puiflent loger, & y porter la nourriture ; le refte de la dent eft folide. II arrive la meme chole aux plumes des oifeaux. Leurs tuyaux font vuides , non-feulement afin que les plumes foient plus legeres & p'us pliantes , mais encore afin que cette cavite foit le magafin de leur nourriture : le refte de la plume eft rempli. Mais , dira-t-on peut-etre , il refte toujours dans le tuyau de la Septembre 1771, Tome I. Ff 1 **8 OBSERVATIONS SUE. LA PHYSIQUE, plume un gros corps fee , que j'ai nomine larron , & qui porte la nourriture a touce la plume , dans le tems de Ton accroiffemenr. La difpiritc n\*it pas fi confi le'rable qu'on fe 1'imagine, car les vaif- feaux fanguins cntrans dans l'ince'rieur des dents ie deffechent & y reftent ; ils deviennent, a la ve'rite, tres-petits ; tnais il n'en eft pas moins vrai qu'ils y exiftent. De plus , caflez un mcrceau d'une dent , il ne revient plus ; loriqu'on coupe les plumes, ce qui eft coupe ne re- vient jamais. Les dents des enfans font entierement cache'es dans leurs alveoles pendant quelque tems, elles paroiftent enfuite. Lorfque les oifeaux font e'clos , ils font tous rouges ; quelques jours apres , les plumes percent la peau , & elles fe font voir. Lorfque les dents des enfans percent, etles Ieur caufent plufieurs maladies, comme la fievre, le cours de ventre, les convulfions, Sc quelquefois la morr. Nous ne voyons pas que les plumes naiffantes des oifeaux leur cau- fent des maladies, parce que leur peau etant fort molles , les plumes la percent ailement; mais lorfqu'ils muent,ils font tres-malades, & quelquefois ils meurent, parce qu'alors leur peau eft fort dure, & les plumes ne pcuvent la percer qu'avec beaucoup de difficultc'. Quelquefois les dents tombent fans etre gate'es, comme cela arrive aux enfans a Page de fix, huit Sc jufqu'a dix ans; elles tombent d'elles- memes Sc fans douleur, parce que leurs alveoles trop elargis, ne font plus capablcs de retenir la dent ; Sc e'eft par la mime raifon que les plumes tombent aux oifeaux. Les dents de l'homme (e touchent, & font pofe'es les unes a cote' des ■autres , afin qu'elles s'affermifTent mutuellement , & qu'il y en ait beau- coup fur une meme ligne. II ne faut que jetter les yeux fur 1'aile d'un oifeau , pour y voir le meme arrangement. La fuperficie cxterieure des dents eft un e'mail poli, folide , & cou- leur de perle; fa fubftance inte'rieure eft pareille, & moins folide que l'exte'rieure. C'eft pourquoi, lorfque l'acrete' de la lymphe ou les par- ticules falines des alimens ont un peu corrode' Pe'mail de la dent , audi- tor l'inte'tieur eft gate. On voit des dents n'etre percees que d'un fort petit trou noir, tandis que l'inte'rieur eft creux 8c pourri : cela vient de ce que la lymphe e'tant entre'e par ce petit trou noir, & ayant ren- contre' une matiere plus poreufe Sc moins dure , agit fur clle avec beau- coup de force. II arrive une carie fingulicre a ceux qui fe frottent les dents avec des liqueurs trop pe'ne'trantes, par exemple, avec l'efprit de fel ; leurs dents, quoique carie'es, font blanches Sc tranfparentes. L'acide de la liqueur les a entierement percees , Sc fi on les examine au microf- cope , on appercevra bientot un grand nombre de trous qui livrent SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2.19 paflage a la lumiere. Gettc carie dure rarcment plus de huit jours. Les dents dcviennent noires, les perirs nous s't'largiftent , donnent paffage a la lymplie & a la partie falinc des alimens , la texture des dents ft rompt entierement , Sc clles nc tardent pas a devenir opaques. Ainfi, rien n'eft fi pernicieux pour guerir les maux de dents, que l'ufage des liqeurs fortes, Sc en particulier l'cfpit de fel, celui del'eau- forte, de l'clprit de cochlearia, du jus de citron, du vinaigre, de l'ef- fenfe de girojfle, de la racine de pirethre , Sec. II eft vrai que l'efprit de cochlearia appaife les maux de dents, Sc les conferve meme pen- dant quelque terns; mais il elargit fi confiderablcment les alveoles, Sc dilate tellement les gencives , que toutes les dents fur lefquelles on en a mis , tombent inrailliblemenr. On doit eviter aufll foigneufement de les blanchir avec des poudres trop dures, elles ufent peu-a-peit l'e'mail, Sc caufent bientot la pourriture. La fumigation de romarin , de la fauge, des rofes , du maftic , du papier, de Yeau chaude, du cafe , & particulierement des nids de guepes , m'ont loulage', Sc meme gue'ri pour long-terns. J'ai conleille le meme remede a nombre de perfon- ne.s,& elles en ont ete loulagees : elles avoient foin de fe frotter tous les foirs les dents avec un opiate, compole d'e'eorces d'oranges douces bru- lees Sc pilees , enfuite tamilees , que l'on mele exaclcment avec du miel vierge , jufqu'a confiftance d'onguent. Cet opiate a la propriete' dc nourrir les gencives ; elle rend les dents d'un blanc eblouiffant, Sc les preserve de la carie. On ne doit fe laver la bouche que le matin, Sc fe bicn gargarifer. Un long ulage apprendra le cas que Ton doit faire de ce remede. Nous ajouterons a cet ingenieux parallelc , des remarques fur la den- tition •, elles nous paroifient trop inftru&ives pour les pafler fous filence : nous devons ces decouvertes a M. Difdier , Profeffeur d'Anatomie a Paris. 1! eft forti de fon amphithe'atre des fujets qui font aujourd'hui l'ornement de la Chirurgie de la Capitale Sc de la Province. I.eur re'- putation augmente celle du Maitre. Aucun Auteur , avant cet habile Anatomifte , n'avoit parle du double ou triple germe des dents. Nous lui fommes redevables de cette decouverte. Nous allons expofer la manicre fimple Sc judicieufe employe'e par cet Auteur pour expliquer la dentition, Sc nous terminerons cet article par un fait bien /mea- lier, & unique en fon genre. " II eft certain que le ptincipe ou germe des dents eft forme' dans » les alveoles , en meme terns que toutes les autres parties de Pembryon « le font chacune dans leur (uuation naturelle Sc proportionne'e, <3c que « par fucceffion de terns, ce germe fe developpe peu-a-pcu , & comrae » par gradation. Lotfque le developpement eft devenu affez fenfible » pour pouvoir l'oblerver , nous remarquons alors trois fubftanccs » tres-faciles a diftinguer dans la dent; favoir, une fubftance comme Septembp.e i 7 7 1 , Tome I. z3o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , » folliculeufe , en maniere de membrane blanche ; une fubftance plus » iolide , qui eft la partie ofteule •. une fubftance comme mucilagineufe , » qui eft, a proprement parler,la fubftance bulbeule de la. dent. Ces trois j> fubftances renferme'es dans l'alveole & fous les gencives , fe per- il fettionnent peu-a-peu , & fe difpofenc a fordr dans un tems a-peu- » pres determine, c'eft-a-dire , le plus fouvent au feptieme &c au hui- » tieme mois apres la naiffanc'e •, cependanc , quelquefois plutot , & » quelquefois plus card. Les dents qui paroiffent les premieres , font » ordinairement les dents incifives de la machoire fupe'rieure; er.fuiteles » dentaincifivesdelamachoireinferieure. Celles-ci fortent les premieres, » non-feulement parce qu'elles font les plus neceiTaires ; mais encore » parce que leur configuration tranchanie les dilpoie a pouvoir plus » aifement & plus promptement divifer & vaincre les obftacles qui » pourroient s'oppoler a Leur fortie. Apres les dents incifives , les ca- » nines fortent les premieres -, cependant , il arrive quelquefois que les » premieres .molaires precedent leur fortie : enfin celles qui vienncnt » les dernieres , font affez ordinairement les molaires , & iouvent leur n fortie eft accompagnee d'accidens tres-facheux. » Lorfque les vingt premieres dents, favoir, dix a la machoire fu- » petieure, dix a la machoire inferieure', font forties, les autres dents »> molaires , fitue'es plus en arrie're fur les parties laterales de la bouche, » viennent plus lentement, mais (uccefllvement, 2c en proportion de » l'augmentation de Pe'tendue des machoires : car dans le bas-age, les i) machoires n'ayant pas toute leur longueur, les alve'oles ne font pas « encore devcloppees , quoique cependant elles contiennent le germe » de toutes les dents dont elles doivent etre orne'es dans la fuite. » II (urvient a l'age de fept ou huit ans , quelquefois plutot ou plus » tard , un changement , ou , pouc mieux dire , un renouvellemcnt des » dents; ne'anmoins, le changement ne fe fait pas ordinairement de » toutes les dents : ce font les incifives qui changent d'abord , en/uite » les canines; & apres celles-ci , les premieres molaires. Mais j'ai ob- j. ferve que dans nombre d'enfans , les autres molaires ne changeoient » pas ; cependant Ton ne peut rien e'tablir de conftant ni dc pofitif a j> ce fujet. » Aux environs de vingt a vingt-cinq ans , plutot ou plus tard , pa- „ roiffent les dernieres dents molaires, auxquelles on donne le nom » de dents de fagejfe , &c alors le nombre des dents eft de trente a j> trente-deux. il Il paroit furprenant que lorfque dans Padulte, on a e'te oblige' de » faire l'extradcion d'une ou de plufieurs dents, de nouvelles dents » viennent remplacer le vuide que la perte des premieres avoit laiffe » cependant, rien n'eft plus certain, & l'expe'rience journaliere nou » en fbumit la conviction. Je puis , avec la plus exadte verite' , me SUR VHIST. NATURE LIE ET LES ARTS. i;r » eiter pour cxemple. Je me fuis fait tirer fuccefllvement fcpt a huit » dents carie'es, a l'age de trente ans Sc plus, & j'ai eu la fatisfa&ion » de les voir fi parfaitement remplacees par d'autres dents abfolumenc « femblables, qu'il ne m'eft refte aucun vuide de la privation des pre- » mieres. J'ai connu plufieurs perfonnes dans le meme cas , ce qui m'a » porte' a faire quclques observations a ce (ujet. J'ai choifi des m,i- » choires tres-evafees •, j'en ai lime' les lames extericures pour parvenir » jufqu'au centre de leur epaiffeur , Sc j'ai vu dans plufieurs , des dents » complettement forme'es qui y etoient contenues , Sc qui fe talon- » noient , pour ainfi dire, les unes Sc, les aurres •, enforte que la racine » de celle qui e'toit hors de 1'alvcole, Sc dans fa Situation naturelle , )> portoit fur le corps de celle qui y e'toit encore renfermee, Sc la ra- » cine de celle-ci furle corps d'une troifieme ». Nous en avons fait graver la figure d'apres la piece ofteufe que M. Difdier a eu la bonte de nous preter. On peut voir ces dents d'attente , pi. i , fig. 1,2, lettres A , B. « Le nombre de ces dents, continue M. Difdier, renfer- » mecs dans l'e'paifleur de la machoire inferieure , n'eft pas conftant; « j'en ai quelquefois trouve jufqu'a trois ; mais plus ordinairement j) deux , Sc quelquefois une feule. 3> Ce qui m'a paru encore plus extraordinaire , e'eft qu'ayant fait » les memes perquifitions dans re'paiffeur des os maxillaires , j'y ai » e'galement rencontre' des dents tres-folides , contenues dans les a\r » ve'oles , contre le corps defquelles portoient les racines, des dents » qui etoient dans leur fituation ordinaire, e'eft-a-dire , hors des gen- » cives & des alveoles. Je ne doute point que ces dents, ainfi cache'es 11 & enclave'es , ne fulTent des d-nts d'attente, deftine'es a remplacer les » premieres, dans le cas oii le fujet en auroit ete prive'. II eft vrai que » ces dernieres dents etoient mokis longues Sc moins exaitement con- » figure'es que celles que j'ai obfervees dans la machoire inferieure «. Nous ne penfons pas qu'aucun Anatomifte ait jufqu'a ce jour donne des remarques aufli pofitives. Si on a vu, eft-il dit dans le Diclionnaire Encyclopedique , au mot dent, des gens faire des dents jufqu'a trois fois, e'eft qu'ils avoient dans les alveoles trois couches de l'humeur vif- queufe •, ce qui n'arrive prefque jamais. Cet exemple eft bien plus commun que ne penfe l'Auteur de cet article ; il vaut mieux dire qu'on ne l'avoit pas encore afTez examine. Nous ne nous permettrons aucune difculfion a ce lujer, nos homes font trop circonferites ; paeons au detail d'un fait fingulier. Cell affez demontrer 1'analogie du germe des dents & des plumes, ainfi que celle de leur fortie. La nature paroit quelquefois raire des ecarts. L'obfervation fuivantc nous en fournit un exemple bien frappant. Une jeune Demoilelle de- meurant i Paris, rue Saint Honore, 6c a&uellement Penlionnaire chez les Dames Orphelines de l'Enfant-Jefus , rue des Poftes, fut attaque'e, Septembre 1 7 7 1 , Tome I. i5i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, a l'age de fept ans , d'une douleur fourde & profonde, qu'elle de'fi- gnoit dans le point de la machoire infe'rieure, qui repondoit a la ra- cine de la dent canine gauche , ( i ) PI. i , Fig. z , B , C Comme cette douleur augmentoic tous les jours , on eut recours a un Chirurgien qui la rapporta a la carie foupconne'e etre furvenue a cette dent: mais ayant bien examine' , Sc la trouvant faine , il fut fort embarrafle pour de'terminer la caufe de cette maladie. Neanmoins , comme la douleur devenoit de jour en jour plus cruelle, & qu'il furvint un gonflement inflammatoire a la partie de'figne'e , qu'il parut que la machoire infe'- rieure e'toit tumefiee, on-mit en ufage les cataplafmes anodins qui acce'- lererent la formation d'un abfces. Cet abfces fut ouvert, &on y trouva un pus blanc , fans odeur , 8c bien conditionne. L'ouverture permit un examen plus parfait & plus immediat de la maladie. La machoire infcrieure fe trouva gonfle'e &: de'nuee de fon pe'riofte, dans l'etendue d'un demi-travers de doigt , ce qui fit craindre la carie , qui , cepen- dant, ne furvint pas. La plaie fut panfe'e me'thodiquement . & huit jours aprcs l'ouverture, I'on appercut dans le milieu de la machoire in- ferieure Sc dans le point le plus iaillant du gonflement re'pondant a la racine de la dent canine , un petit corps iaillant tres-dur & tres- blanc , qui exce'doit le rebord infe'rieur du corps de l'os. Ce corps c'tranger s'allongeant de plus en plus , Ton vit qu'il e'toit forme' par la dent canine, qui auroit du remplacer celle qui exiftoit fupe'rieure- ment , mais dont la fltuation e'toit inverfe a celle qu'elle auroit du natu- rellement avoir, de maniere que les deux racines de ces dents fe tou- choient l'une Sc l'autre par leur pointe. Des qu'il fut pofliblc de faifir cette dent, on en fit l'extraclrion, & on en tira ainfi une dent canine, qui , au lieu d'avoir la racine en bas &c fon corps en haut , avoit pris une direction entierement oppole'e. Nous croyons ce fait fans exemple , aucun Auteur que nous fachions n'en fait mention. OBSERVATIONS Sur le Notopide. Par M. Emmanuel Weiss , traduites de FAllemand, J\_ v A N T de rapporter les obfervations de M. Weiff, 'il eft ne'cef- faire de faire connoitre cet infedle fingulier. Les naturaliftes inftruits, trouveront cette defcription inutile, relativement a eux; mais tous (a) Cette dent a i;te tranfpofee a droite par le Gravcur , en layant fon deflin. CCUX SUR UHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 135 ceux qui Iifent cet ouvrage, ne font pas Naruraliftes. Nou; e'vitcrons le rcprochc qu'on nous a de'ja fait de fuppofer lc Leclcur trop inftruit , & de ne pas donncr les renfeignemens ucceffaires. M. Geoffroi a place cet inledtc dans la daffc de ceux dont les etuis font durs 8c couvrent tout le ventre; Ieur tarfes ont cinq articles a toutes les pattes ( Voyei pi. 1. fig. 3 ) ; les antennes en manierc de fcie, fe logent dans une longue rainure creufe'e cn-defTous de la tetc, & meme Hu corfclet. Le corfelet forme le fecond caracftere des riife&es de cette clafle. II entre commc par reffort dans une cavite' pratique'e dans la partie iuperieure du deflbus du ventre. Cet infeite eft vulgai- rement appelle taupin. M. Geoffroi 8c Pilluftre Chevalier Von-Linne'e, lui ont conlerve le nom latin d'elater, mot qui carafterife fa pio- prie'te finguliere a fauter. Quelques Auteurs rappcllent encore noto- pide. M. Von-Linnee comprend trente-huit cfpeces lous le genre d'elnter; ces efpeces varient dans leur grandeur & leur couleur. Celle des uns eft rouge, jaune, chamarree; celle des autres eft brune, noire, &c. Dans ceux-ci , le. corps &c les e'tuis iont charges de poil ; &; dans ceux- la , ils font lifTes. Le corps du taupin dont nous parlons, a environs cinq ou fix lignes de longueur, fur une ligne & demie de largeur. Les etuis &c le corfelet font a-peu-pres de la meme couleur, e'eft-a-dire , bruns , cependant, celle du corfelet eft plus fonce'e , & tire lur lc noir. Le corfelet forme en longueur le tiers du corps. Les etuis examines a une loupe me'dio- crement forte , paroiflent canele's , 8c les canelures forme'es par de petits points. Le corps de l'animal confidere' en-deffous, eft diviie en trois parties: la premiere comprend la tete 8c le corfelet, la feconde lc thorax ou la poitrine. La couleur noire tirant (ur le brun, eft la meme dans ces deux parties. La pofterieure ou abdomen eft brune , tirant fur le rouge cuivreux •, on y diftingue, vers les bords exterieurs, quatre petites lignes, & une cinquieme traverfant Ion extre'mite' inferieurc d'un bout a l'autre. Cet infedte a quatre ailes , dont deux forme'es par des e'tuis durs 8c corneux , 8c les deux inferieures font membraneufes , & plus tongues que les etuis. Quand cet animal vole , fon corps eft prefque perpendiculaire. Si on ajoute ces caradteres particuliers aux caraclxres cialTiques que nous avons rapportes d'apres M. Geoffroi . il (era trcs-aile' de reconnoitre le taupin dont nous parlons, reprefente < pi. 1. fig. 3.) vu au microfcope. Le notopede , dit M. Weiff, merite Tattention de I'Obfervareur , 8c le me'chanilme qu'il emploie pour executer fes fauts, celle du Phyficien. La nature l'a pourvu fur le devant de fon corfelet , d'un piolonge- ment tcailleux fig. 4, tenant au corfelet B, a-peu-pres comme le pommeau tient a une lelle. Ce prolongement eft dirige contre le ventre, ou il s'emboite Sc oil il s'encnaffe comme dans une efpece de couliffc. Septembre 1771, Tome I. G g 234 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , C , Lorfque l'animal eft couche & qu'il veut fauter , il avance , en fe pliant en avant, ce prolongement fur le bout e'leve' de cette coulifTe marquee C , jufqu'a. ce que le point C , touche le point D , alors , dans cette fituation,il ferre avec force fes deux pattes l'une contre Pautrei & continuant de fe plier fur C, centre du mouvement , le bout de 1* rete K, doit arriver en I , & le pofte'rieur G, en K. II fuit de-la, que le renflement H, doit glider par-deflus la hauteur C, pour re- romber & s'enchafTer dans la coulifTe B , avec un rebondifTemenr egal a la force employe'e. Cell ainfique lc taupin ou notoptde fait une im- pulfion de fon dos contre la terre, impulfion qui le fait rebondir en Pair. Il fera aife de fe convaincre de cette percuffion, fi on tient d'une main le corfelet de l'animal, & de 1'autre la partie pofterieure. Alors, quand on pouflera doucement le prolongement contre la coulifTe, on obligera ces parties a s'emboiter par le flechifTement du corps, & on fentira une re'fiftance, qui, une fois furmontee, fera accelerer Pem- boirement. Ce mouvement s'execute far un efpace affez petit , dortt la mefure eft une porrion de cercle , Sc dont le point E, fait le centre. L'economie de la ftruCture de l'animal ne lui permet pas un plus grand mouve- ment j &: fans nous arreter aux loix prelcrites par la nature , nous Toyons clairement que la percufllon fupplee au defaut d'un mouve- ment plus e'tendu. La fig. 5. donne une ide'e de l'avantage de cette percufllon. Le ba- ron L , prefle avec force, fur la (uperficie raboteuie, I, K , felon la direction M, N , & mis felon I , K, frappe chaque eminence O, U, Z, en fe de'gagtant fucceffivement de deflus celle qui precede, avec un re- bondiflement proportionne a la force, Sc la predion de la main X. II eft aife' de concevoir que cette main armee du baton , n'exe'eutera ja- mais avec la meme force & la meme viteffe , & fans le fecours de ces appuis , ce mouvement dans un auffi petit eipace , qu'apres avoir frappe a chaque e'minence, Sc apres s'etre dc'gage'e de celle qui lui fervoic d'appui. C'eft done le relachement de ces appuis qui contribue a cette percufllon : fort pris pour exemple Pele'vation U , fig. $. Cette ele'va- tion rcprefente la hauteur, & le bout du baton, le renflement, qui, en gliflanr, fe degage de la meme facon. Le faut de Y Hater re'fuke de ce mouvement, Sc s'exe'eute ainfi. Le corps O, fig. 6, couche dans toute fa longueur fur terre, & fuppofe avoir une atticulation en P , ne fauroit changer avec la meme promp- titude de mouvement, fa figure en celle de P, Q, R , fans agir contre ion plan de pofition au point P,& en vertu de la rtfadion de celui-ci, il fera contraint de s'elever au-deflus de terre, a une hauteur propor- tionnee i la force qu'il lui aura imprimee. C'eft-la (a maniere de fauter , Sc elle eft certainement tres-diffe'rente de celle qu'on imagineroit, fi on SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ijj fe propofoit de faire (autcr artificiellement un corps femblable a celui de la fig. 6. L'idee la plus naturelle feroit plutot commc dans la. Jig. 7 , ou les extremities A & C lieurtcnt avee impctuoiite contre les points A , V ; Sc dans ce moment , le corps rcbondit Sc fe portc en 1'air : le point B, pendant cet effort, s'e'leve en D, Sc le centre de gravite O, refte immobile; tout lc corps eft corarae (ufpendu en l'air jufqu'au moment de la percufllon des extre'mite's A & C , contre les points A & V. , On pourroit ainfi imaginer le jeu de ces parties ; mais la nature toujours fe'eonde en reflources, paroit ne s'ecarter des regies ordinaire* dans l'execurion de fes defleins, que pour fimplifier davantage les ref- forts qu'ellc met en mouvement. Au refte , il eft aife de concevoir que le notope'de ne faute pas de la rnaniere que nous venons de le fup- poler , puilqu'e'tant fur le point de fe bander, il eft couche' de toute is. longueur fur le dos , non pas comme dans la fig. 7 , oil A , B , C repre'fenre fa fituation au moment 011 il fe difpofe a fe bander , 8c A, D, V, celle qu'il acquiert apres s'etre de'bande' : d'ailleurs , felon la fig. 6, il eft meme oblige en fe de'bandant , d'e'lever fon centre de gravite', par exemple, jufqu'en O, pendant qu'a la fig. 7, celui-ci refte immobile dans l'air, julqu'a l'impuliion des deux bouts A & C , contre A , V. Pour juger (ainement de la marche de la nature, il faut juger par comparaifon ; l'un fert de preuve a l'autre : pour cet effet, examinons la difference qui fe trouve entre la rnaniere de fauter des fauterelles , avec celle du notopede. La fauterelk n'a pas befoin du fecours de la percuffion , a caufe du grand jeu de (es jambes , qui permet racce'le'- ration ne'eeffaire dans leur mouvement ; & certe acceleration revienc plutot a un mouvement de projection, qu'a celui de percufllon. La fau- terelk parcourt une lignedroite en fautant, produite par deux portions de cerde, dont l'une a pour centre la bafle du pied fixe en terre, Sc pour rayon la longueur du pied , & l'autre pour centre la jointute entrc le pied & la cuiffe, 8c pour rayon la longueur de cette cuifte. La ligne que le centre de gravite de fon corps parcourt pendant I'extenfion , eft d'une longueur confide'rable , en comparaifon de la petite portion de celle qui fait le mouvement rle'chifleur du notoptde ; d'oii il luit que la petcuflion e'toit neceflaire a ce dernier , pour fupple'er a la petiteffa du jeu de ces parties. L'expetience nous a appris que le notopede e'tant couche fur fon dos, employoit fon faut pour fe remettre fur fes pieds, parce qu'il lui feroit impoffible de fe retourner fans cette heureufe faculte que- la na- ture lui a accorde'e. On pourroit demander pourquoi la nature , qui tend toujours a (es fins par la voie la plus fimple, n'a-t-elle pas domic' au notope'de le pouvoir de fe redrefler fur le ventre comme aux autre* Septembre 1 7 7 1 , Tom-. I. Ggi ^6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , infedtes, en frappant la terre avec leurs partes? II feroit aife de former quelques conjectures; s'y livrer, feroit une erreur; il vaut mieux attendre du hafard & de l'experience , ce que nous ne faurions deviner qu'imparfaitement. Diions, pene'tre's d'admiration pour les ouvrages du Cre'ateur : O Jeh^va , quam ampla funt opera tua ! Quam fapienter ea fecifti I Quam plena eft terra pojfejjione tua ! M E M O I R E Sur la fabrication & les ufages des toiles fans lifiires. Par M. Bris- SOn , lnfpecleur des Manufactures du Lyonnois , Forei & Beau- jollois. I , E nom de toiles fans lifiires , eft donne' ici a des toiles fabrique'es en double , Si. de fac_on qu'elles forment une forte de fourreau , ' ou fac , fans couture late'rale. Elles le fabriquent fut un me'tier ordinaire de toiles fimples •, mais l'armure eft compofe'e de quatre liftes , quarre carquerons , & quatre marches. Chaque lifte eft attache'e par fon lifleron d'en-haut a une corde qui , pafTant fur une poulie , revient a un carqueron tire en contre-bas par une marche. Par fon lifferon d'en - bas , chaque lifte tient a une corde attachee a une marche par fon autre bout. Chacune des quarre inarches doir faire elever une liile, & baiffer les trois autres, ou en e'lever trois, & baiffer Pautre. Le premier fil de la chaine, fous la main droite du TiiTerand , eft pafle dans la premiere liffe , a prendre du cote de l'enfouple; le fecond fil dans la troifieme liffe, le troifieme fil dans la (econde liffe , & le quatrieme fil dans la quatrieme liffe qui eft la plus pres du peigne. Par cette diftriliution , la chaine eft partagee en deux jeux , dont chacun fait alternativement fa toile; le premier, en levant tous les fils fur Ielquels il ne doit pas operer ; le fecond, en baifTant tous ceux fur lefqucls il n'a point non plus a ope'rer. Ric-n n'eft change' dans le mouvement ordinaire de !a navette que J'on lance dans l'ouvetture de chaine qui (e forme, tantot par l'abaif- fement, tantot par le hauffement des trois quarts de tous les his, fig. u Tout de'tail (ur cela feroit moins clair que les figures jointes ici avec leurs explications, pi. y.\fig. i & 2.. On ne connoit pas adtuellement une utilite bien re'elle a retirer de l'objet d'induftrie que Ton vient d'expoler; mais les divers befoins des Tome I. page 236, Plnnche III. Fi gure i1 / — / / / / / / Baiflent fuivant les indications donnees par Jes diagonales. Levent fuivant les indications donnees par les diagonales. ** 2 4 3 1 indiquent 1'ordre de la foule des marches. Tome I. page a. 3 6 , Planche III. Armure d'un Metier propre afabriquer les Toiles fans lilieres. Les lignes perpendiculaires repre'fentent lcs marches. Les chiffres qui font au bas , indiquent l'ordre des mouvemens Explication 1 des pieds de l'Ouvrier. F'f IT! \ ^cs °luatre premieres lignes tranfverfales , repre'fentent les lifles abaiffees. Les quatre fecondes lignes tranfveriales , repre'fentent lcs lifles c'lcve'es ; c'elt la contre-partie. Tableau dujeu des fils de chaine dans huit dents du Peigne. On juge aife'ment que la repetition s'en fait dans toutt la largeur. .. Figure Xs'. 6'. 8*. " I...1 1. ..a 1 ...a 1. ..a 1. ..a 1 ...a 1. ..a /o 0 0 /° 0 0 /o 0 0 /° 0 0 // /o / / /o // /o // /° °/ 0 0 0/ 0 0 0/ 0 0 0/ 0 0 // 0/ // °/ // = / // 0/ qu'elle fait lever. Ainli, dans la i,e dent, la ire marche fait baiffer le icr fil, & lever le 2J , cettc largeur feroit, fans doute, une nouveaute. En imaginant tous les ufages poflibles , il faut foumettre fcs con- jectures a ce que les loix de la Statique permettent d'adoptcr. Une chainetrop forte fatigue prodigieufemenr l'ouvrier. II peut fufKre a un eflfai , a un travail peu continue'; mais,dans la ptatique , on fe borne la, & la de'eouverte pre'tendne utile, perit en naiffant. Dans le poids de la chaine, on comprend la tendon & les frottemens des fils, qu'il eft tres-important de calculer. Enfin, on ne peut trop exhorter ceux qui voudroient faire des eflais en ce genre, a ne les eftimer qu'a leur jufte valeut. Les Grecs , les Romains & les Juifs , avoient des tuniques fans cou- tures. Le (entiment le plus ge'ne'ral eft qu'elles etoient (ans manches. II eft aife' de concevoir qu'en percent deux trous a volonte dans un morceau de nos toiles, on aura une de ces runiques. Dom Calmet, dans (on Commentaire fur la Bible, ( verf. 40- du iSc chap, de l'Exod. 1 dit, felon Platon : les tuniques des Pretres de- voient etre fans coutures, & on ne devoit pas y employer plus d'un mois de touyrage d'une femme. Il cite le douzieme livre des loix de Platon. Cette citation n'eft pas tout- a- fait exacte ; car on y lit feulement : Textura opus offeratur non majus quhm quod ab una muliere intra unius menfis fpatium confici pqffit. ( Pag. 956. du fecond vol. in-fol. de la traduction de Platon, par Serranus ). NOUVEAU CORROY Pour faire des piices eTeau des boffins fans maponnerie. JNJoUS fommes redevables de cette me'thode a M. d'AmHournai. II iiiihtde lenommer, pour que le Le&eur foit aflure de re'uflir, en fuivant les renfeignemens qu'il lui donne. Bon Patriote , Citoycn tele, Agronome inftruit, 1'utilite' publique eft le but 011 tendent tous fes travaux. -* Septemsre 1 7 7 1 , Tome J. 138 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, <• Vous me demandez, Monficur, dit-il dans une de fes Lettres » e'crites a M. P. fori ami, s'il feroit poflible de former des pieces d'eau » fans avoir recours au be'ton ou a la magonnerie ; je puis vous re- » pondre affirmativement depuis que j'ai vu pleine d'eau, ma piece de ».cent crente pieds de longueur, fur quatre-vingt dix-huit delargeur, a &c fur cinq de profondeur. Pour exe'cuter le bajjin que vous projettez , a il faut que l'Ouvrier ait la plus fcrupuleufe attention a exe'cuter ce » que je vais lui prcfcrire ; car il n'y a point de milieu entrel'ouvrage » bien ou mal fait. La faifon la plus favorable eft la fin d'Avril , auffi- » tot apres les gelees, & avant les chaleurs, ce qui eft relatifau Pays. » Vous me parlcz , Monficur, d'un bajfin de douze pieds de dia- » metre ce n'eft qu'un jeu , & en moins d'une femaine , il fera parfait » & plein d'eau, fi vous en ave's a diipofition ; mais ce corroy doit » etre appuye' fur un glacis , dont la pente foit le double" de fa hau~ j> teur, pour foutenir le terrein qui avoifine la piece d'eau. Il faut » favoir fi cela vous convient, finon, il faudra batir fur le fond cor- » royi un petit mur de magonnerie, qui laifle entre lui & la made de « terre , un intetvalle d'un pied ; & c'eft dans cet intervalle qu'on « foulera le corroy. Le glacis coutera bien moins , il fera aufli folide , » & pour le moins aufli agre'able a la vue. Suppofons done notre » bajjin ou piece d'eau , coupe en glacis , &c la terre bien folide &: » rendue telle a force de la battre , il faut avoir de Targile jaune, dont j> on forme un bajjin , dans lequel on e'teint de la chaux nouvellement » fortie du four. Le lendemain , cette chaux eft en confiftance de fro- « mage a la creme. C'eft alors qu'on en prend une brouette'e contrc » quatre d'argille, & on en fait un mortier e'pais a force de battre & » de corroyer , parce qu'il eft eflcntiel qu'on n'y mette point d'eau. » Si lorfqu'on de'ehire un morceau de ce mortier, on n'y voit plus » de veines de chaux , le corroy eft bon , finon , il faut rebattre encore. » On en fabrique ainfi pendant deux jours pour un mois d'avance ; »> alors, la moitie des Ouvriers continuent a en preparer, tandis que » les autres , les mains garnies de grofles toiles , fe mettent a paitrir » ce corroy comme du pain , & le mettent en boules grofles comme la j> tete d'un homme. On apporte ces boules aupres de la piece d'eau. » Un homme fort & adroit y defcend ; un Manoeuvre lui jette une » boule qu'il regoit dans fes mains , & il la lance avec force & de » toute fa hauteur contre terre au centre ou a-peu-pres du baflin; » puis il en lance une autre, & ainfi de fuite , jufqu'a ce que tour le 3. fond du bajjin foit couvert de ces boules, qui routes mordent Tunc » fur l'autre. Le lanceur marche a mefure qu'il avance fur les der- » nieres qu'il a lancees , ce qui commence a lier le tout. Quand le » fond eft fait , on couvre le glacis de la meme maniere , en torn- » menc,ant en bas , & montant jufqu'aux bords. Il faut s' arranger pour SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 239 » que l'ouvrage ne languifle pas , & il ne faut attendre ni apres la » chaux, l'argillc , le courroy ou les boiilcs. A la fin de la journcc, » Si avant de quitter l'ouvrage, on arrole lcgerement le dernier rang » de boules jette'es , de peur qu'elles ne fechent aflez pour ne plus » pouvoir fe Her avec celles qu'on lanceroit le lendemain. » A mefure qu'une partie de l'ouvrage prend confiftance, il faut » la frapper le'gerement avec un battoir de bois d'un pied en quarie , » & de cinq pouces d'e'paifleur , dans lequel on a emmanche diago- » nalement un baton de quatre pieds, afin que Ton puifle s'en fervir » fans fe baifler. On frotte , dans des cendres , la partie qui frappe, » pour empecher que le corroy ne s'y attache : a mefure que le corroy » durcit , on frappe plus fort , jufqu'a ce que Ton foit oblige' de Par- ti rofer doucement, pour permettre de le battre encore. » Quand il commence I poudrer fous le battoir, il faut prendre des » truelles de fer, avec lelquelles, au moyen d'un arrofement le'ger, » on le foule Si on l'unit comme du ciment : enfin, avec un gros pin. » ceau, on l'enduit d'huile de lin , & on le polit avec les truelles. Cet » enduit d'huile doit etre re'pt'te' trois fois , toujours foulant le; petites » gerfures qui paroifTent vouloir s'y former. Le corroy devient plus » dur que du mortier mele avec du pLitre , Si tout le vafe fonne 3) comme une cloche. En cet c'tat , il faut le couvrir de gazon d'un j) pouce d'epaiifeur, Si y amener Veau qu'il gardera comme un plat de » porcelaine. » Ce corroy ne crainr 'a gelee que dans les portions qui ne font pas j> couvertes d'eau. II faut done avoir grand loin de couvrir, en hiver, « ces portions avec de la paille , des fougeres , du fumier, & autres r> pre'lervatifs contre la gile'e. Avec de paieils foins , il durera tant » qu'on voudra. Sa propriete fupe'rieure a la glaife eft de durcir fous »> Veau ; de forte, qu'il n'tft pas ntceftaire de paver le fond. Veau fe » maintient claire : lc poiftbn y vit, ponrvu qu'on attende deux mois, » apres l'eau introduite , pour y en mettre , Si il ne fent jamais la » vale ». Toute chaux n'eft pas e'gale en bonte'. La bonte' eft relative a la nature de la pierre, & a la maniere de la calciner. La pierre purement calcaiie , feroit , fans contredit , la meilleure. On reconnoirra (a plus ou moins grande purete , en verlant par-deflus un acide quclconque. La dure'e & la violence de 1'erfervelcence indiqueront fa purete'. Nous conleillons de choifir par prcfe'rence , dans les carrieres de pierres a chaux, ou pierres calcaires, les couches difpofees de l'Ovient au Midi, &c fur tout, celles qui approchent de la furface. Le grain, dans celles- ci , eft plus ferre, plus compact , plus dur, que dans les couches du centre de la montagne. Les pierres coquillieres font excellentes, Si Tabondance des coquilles augmente leur bonte'. Biles donnent une chau* Septembre 1771, Tome I. %f» OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , iiiperieure a celle que Ton obtienc de certains cailloux route's par les rivieres. Leur chaux vauc beaucoup mieux , fur-tout pour les ouvrages exterieurs, pour recrepir les murs, &cc. Tous les marbres quelconques font propres a faire de la chaux , parce qu'ils font compofes, pour la majeure partie, des detrimens de fubftances animales. Si on defire des e'claircifTemens fur Part de fairc de la chaux, on pcut confulter le Diclionnaire Ency clop edi que , aux mots chaux, ch.aufourn.ur. Ceux qui voudront connoitre fes proprie'te's chymiques, liront 1'excellent Mi- moire de M. Brandt , infe're dans ceux de l'Acade'mie Royale de Suede, anne'e 1749. Nous dirons feulement , pour fervir de regie dans la pra- tique , qu'on connoitra quand la chaux fera cuite comme elle doit l'etre , fi la pierrc eft devenue d'un tiers plus legere , apres la calcina- tion, qu'auparavant, fi elle eft fonore quand on la frappe, fi elle bouillonne immediatement apres avoir etc' arrofe'e •, 8c on l'aura d'au- tant meilleure, que les pierres qu'on aura calcine'es feront dures. Nous dirons encore que le feu doit etre pouffe' fans intermiilion pendant la calcination , lans quoi , la fourne'e entiere feroit perdue : ce (croit en vain qu'on y ajouteroit du bois ou du charbon de terre. La pierre reftc- roit a demi-calcinee. EXPERIENCES CURIEUSES, Faites par M. Duhanel , fur la vegetation. O I vous mettez , die ce favant Naturalifte, une caiffe dans une ferre chaude, & qu'il y ait un cep de vigne dont le pied foit plante' hors de la ferre ; la partie interieure contenuc dans la caiffe & dans la ferre , Te'ge'tera pendant l'hiver, 8c la partie exte'rieure ne ve'ge'tera pas. On place re'ciproquement la caiffe exte'rieurement •> Sc fi on introduit une partie du cep dans la ferre, la partie introduire ve'ge'tera, & celle qui reftera a l'exterieur, ne donnera aucun caradlere de ve'ge'tation. M. le Chevalier Muftel a repe'te ces expe'riences Sc il les a c'tendues. Le refultat a e'te' le ratme fur des pommiers &c fur des rofiers. Un rofier, entr'autres, a e'te gele a l'exte'rieur, tandis que les branches ye'ge'toient parfaitement dans I'inte'rieur de la ferre. On eft en droit de demander , d'ou les plantes foumifes a ces expe'riences , tiroient- elles la feve qui fourniffoit a la vege'tation ' Ce qu'il y a de fingulier dans ces experiences, e'eft que la terre de la caiffe & la tige du rofier etoient gelees ; il ne pouvoit done pas y avoir une circulation ou une fluctuation de la feve, la terre ne pou- vant plus rien fournir, cependant, le rofier a donne' des fkurs, & le pommicr SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 141 pommier a donne' des fruits noue's. Ces experiences prouvenc done qu'il n'y a pas de circulation dans les vegetaux, & que les plantes tirent leur nourriturc de 1'air. On obferve, a cet e'gard, que les chenilles fe gelcnt complcttement fans en pe'rir. II eft neanmoins certain que toute circulation eft arrete'e. Quand on les fait de'gelcr doucement , elles reprennent le mouvement. Ne pourroit-on pas dire, d'apres cette obfervation , que les Voya- geurs qu'on a trouve's gele's dans les pays froids, n'e'toient par morts , mais feulement engourdis comme les chenilles ? M E M O I R E Sur la Vifion , lu a la Sociili Roy ah de Gottingue. Par M. Mayer , de la m(me Sociite , & Membre de plujieurs Academies $ Europe. 1 , E nom de M. Mayer , place' a latere d'une Diflertation phyfiquc, eft tin garant de la pre'eifion & de PexadUtudc. Le zele de cet habi'e Ob- fervateur ne fe ralentit point-, il nous enrichit chaque jour du fruit de fes travaux ; tout ce qui exifte, fixe fon attention. La Phyfique Sc FAftronomie lui font redevables de beaucoup de de'eouvcrtes. Nous croyons que le Public lira avec plaifir le fentirnent de ce Phyficien fur la vifion. Les Mathe'matiques , dit M. Mayer, repandent le plus grand jour fuc une de'monftration , elles peuvent (eules lui imprimer le caraftere de l'e'vidence. Ces eloges font dus aux Mathe'matiques pures; mais leur application n'a pas la meme force, fi on les applique aux objets adluel- lemenc exiftans. En effer , il arrive fouvent que par leur moyen , nous de'eouvrons des erreurs dans une the'orie, fans pouvoir en de'rerminer pre'eife'ment le nombre. Nous voyons que nous nous fommes trona- pe's ; mais nous pouvons dire , tout au plus , nos erreurs font dans relle Sc telle partic de la de'monftration. Nous apprenons meme quelquefois, a nos depens , que nous n'en avons pas la moindre connoiffance. C'eft alors un myftere fi cache pour nous,qu'il eft impofllble dedireni oil, ni dans quelle partie de l'ope'ration nous avons fait des fautes , ni quelles elles font, Nous ne ferions pas dans ce cas-la, ft une etude ap- profondie , fi des foins aflldus nous familiarifoient avec cette feience des erreurs , elle devroit meme fervir de lien aux Mathe'matiques thcoriques & pratiques , qui different entr'elles lors meme qu'ellej femblent s'unir davantage. Des exemples rendront cette propofirion plus claire. Les Mathe'maticiens ont coutume de confiderer dans les Octobre 1 7 7 I , Tome I. H h i4i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, parties Mathe'matiques, qu'ils appellent pur?s , le point fans longueur, largcur ni profondeur ; la ligne , comme longueur fans e'paiffeur ni largeur; l'angle , comme une inclination de ces lignes ; ils regardent lc terns comme coulant egalement depuis tin terns donr.e, qu'ils ap- pellent punclum temporis , a un autre terme qui lui eft compare, comme fi ce n'e'toit rien , par rapport a l'efpace de terns qu'ils contiennent. C'cft fort bien ; maisquandil s'agit d'appliquer aux Sciences pratiques ccs pro- positions purement abftraites, il n'en eft pas de meme. Les points font longs, larges & profonds ; les lignes font longucs & larges , par con- sequent les angles ne font plus forme's que par d'autres angles. Ce que Ton regardoit comme un point de tems indivifible , dcvient un efpace fenfible, qui ne pcut s'ecouler fans un tems donne'. Il v a une ft grande difference entre les quantite's the'oriques oil mathematiques , & les pratiques ou phyfiques , que tres-fouvent un bon Mathe'maticien , qui ne s'eft occupe' que de la the'orie , s'e'carte plus du vrai qu'un Praticien expe'- rimente'. Je ne pretends pas pour cela oter aux Mathe'matiques pures ou abftraites leur certitude &c leur evidence, j'en fuis convaincu plus que perfonne ; je dis feullemcnt qu'on n'cft pas encore parvenu a en faire une application convenable a la pratique , parce qu'on n'a pas de'couvert la fcience des erreurs, qui, feule , peut les unir. II s'agit done de bien connoitre la diftance de la verite' a nous , & de nous rapprocher d'elle , en eloignant les obftacles , &c perfe&ionnant nos organes & nos fens. Je n'entrcprends point d'expofer cette fcience dans ce Me'moire , jc n'en aurois ni le tems, ni la capacite; je veux leulement prouver, par un cxcmple , ce que j'ai avance' &c ce que je de velopperai. Je choifis les erreurs que l'on commet ordinairement en Mathe'matiques & en Aftronomie , pour la mefure de ['angle. J'en ai de'ja parle dans line defcription d'un inftrument goniome'trique , oil j'ai de'montre que nos yeux nous trompoient autant que lc pcu d'exa&itude des inftru- mens. Les obfervations microfcopiques, faites dans ce fiecle, prouvent affez qu'il eft des objets fi petits, que l'ceil le plus pergant ne peut les appercevoir. Notre vifion a done des limites ; 8c des qu'un corps, ou par fa petiteffe, ou par fa diftance trop confiderable , vient a les paffer, nous ne pouvons plus le voir, ou , pour me fervir des termes de l'art, il eft un angle de vifion fous lequel l'objet pre'fente' a l'ceil , ne lui paroit ni trop, ni trop peu diftincl:, mais cependant un peu confus. Pour qu'un objet foit vifible, fes rayons doivent former un angle plus confide'rable ; 5c fitot que cet angle eft trop petit, l'objet eft invifible. Nous appellerons cet angle terme de la vifion ; &c l'expe'rience feule peut nous apprendre quelle doit etre fa grandeur ; mais tout concourt T.l.Xufz. PI. I. Ft,/ j • Fioa% &j3% Fl-> -J- Fw fi Ita 0 Fw7 \ Fio 8 HWWHJ L • i Wn 1^*1 77* SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 14$ a angmciitcr 011 a diminuer ce tcrme. La lumicrc plus ou moins forte , la figure Sc la coulcur de Tobjet, le fond fur lequel on le voir, la bonne ou mauvaife conftitution de Tceil,& la plus krupuleufe atten- tion fur toutes ces circonftances eft done abfolument ne'eeffaire? Mes premieres expe'riences ont e'te faites a l'ombre dans unechambrc, dont les fenetres etoient ouvertes, & a l'abri des rayons du foleil qui en eclairoient les environs. Les objets foumis a mes obiervations etoient defline's avec de l'encre de la Chine, fur un papier tres-blanc. i°. Un ceil myope, arme d'unc lentille convenable, diftinguoit en- core affez bien a 1 o pieds le point noir (Jig. 1 , pi. 1. ) Ce point a 1 de ligne de diametre : il e'toit a peine apper^u a la diftance de 1 2 pieds , Si. a 1 3 il devenoit invifible 1. 20. Un meme point, mais dont le diametre ctoit — -A-4- de ligne, fe voyoit a la diftance de 14 pieds j, ne fe voyoit prefque pas a celle dc 17 , & n'etoit point appercu a celle de 1 S , (fig, 1 , pi. 1 . ) 30. Un autre point de -^ de ligne de diametre (Jig. 3 . ) e'toit vu a la diftance de 24^ pieds, fe diftinguoit a peine a celle de 16 , &c de- venoit invifible, quand on Teloignoit un peu davantage. Si nous fuppolons done la diftance de Tail , qui Tempeche d'apper- cevoir , dans la premiere experience, comme 11; dans la feconde, comme 17; & dans la troifie'me, comme 16; alors , en divifant ces diftanccs par les diametres des points, les quotiens feront refpeclive- ment /. 7/7. L_ j CLARTE. Terme de vision Dil premier genre. 1 Terme de vision Ou fecond genre. II II 11 h I. O. JO. I- 0. I 4- O. 38. r. i6\ 1 0. 43. T. 27. 1 16. 0. 47. I. 3;. 1 0. yi. I. 43. 1 5~ 0. y4. I. 49. 1 4y- 0. y2. x. 55. 1 67. 1. 0. 2. 0. 8?. 1. 2. 2. y. 1 100. 1. 4. 2. 0. 1 11. 1. 6. 2. 13. 1 M4- 1. 8. 2. 17. 1 169. 1. 10. 2. 21. 7&T. 1. 12. 2. 2y. 1 1. 14. 2. 28. 1 ly*. 1. iy. 2. 31. I 18^ 1. 17. 2. 34. I 3H. 1. 18. 2. 37. I 3&7. i. 20. 2. 40. I 4co- 1, 21. 2. 43. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 145 tir que cela doit cere. Le grand jour frappe les yeux qui fupportent avec peine fon e'dat par la contraction force'e de la paupicrc ; il ne faut done plus s'e'tonner s'il ne contnbue pas , ou s'il n'aide pas a mieux diftinguer les objets. Ccla eft fi vrai, que fi on trace quelques figures fur un papier blanc , fi on expofe ce papier blanc au foleil , & qu'on le regarde fixement pendant quelques inftans, ce papier pa- roitra comme une ombre de couleur noiratre. La difference dans les diftances Sc dans le terme de vifion paroit bien plus grande , lorfqu'on examine les objets a un jour encore plus foible; par exemple, a la lumiere d'une bougie : cependant, cettc difference n'eft pas audi difproportionne'e qu'on fe Timagineroit : on verra , en effet, par ce qui fuit , que les diftances (bus lelquelles 1'cei! confidere un objet foiblement e'claire' , & auxquelles l'objet commence a devenir contus , font en railon de 1 a 2 , ou de 1 a 5 environ, e'eft-a-dire, il un objet e'claire d'une certaine fagem ne fe diftingue plus a 9 pieds de diftance, ce meme objet pourra etre vu a 4 pieds , quoiqu'il ne regoive que la 1 E quatrieme volume que nous annoncons, eft pour le moins audi intercflant que le troifieme, dont nous avons parle dans le Jour- nal precedent. 11 renferme fix divisions pour la partie phyfique : la premiere comprend des diflercations fur la pefmteur, l'e'lafticite, la predion de l'air , foit qu'on le confidtre comme effentiel a la vie des animaux , a la ve'ge'tation des plantes , & a la fermentation de quel- ques fubftances. Cette divifion eft termine'e par l'examen de la caufe dc la pefanteur de l'air, fuivant le fyfteme de M. Huygens, 8c par les expe'riences du P. Merlenne. L'Auteur examine dans la feconde , l'origine 8c l'utilite' des vents, & il la termine par la delcription del'ane'mometre ou machine pour pefer le vent , d'apres celle qu'inventa le favant Eveque d' ' Avranches , M. Huet. La caufe des trcmblemens de terre , les phe'nomenes finguliers qui en re'lultent, les cavernes, les volcans, leur utilite font de'montres dans Octobrb 1 11 1 , Tome I, I i 2?o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , la troificme divifioii , & la formation du tonnerre &c de fes efFets dans la quatrieme. La formation de la glace, la force de l'eau , l'origine des fontaines, des eaux thermales, leur action fur le corps humain , les eaux pe'tri- fiantes, 1'examen des fontaines fujettes au flux & au reflux, les mou- vemens divers des eaux de la mer, la caufe de leur (alure, &c. forment la cinquieme & fixicme divifion. Des obfervations fur PAftronomie, la Chymie , la Botanique &c PAnatomie , termincnt la partie Dhy- /ique. La partie confacre'e a PHiftoire Naturelle eft remplie de de'tails agre'a- bles compris dans quatre divifions gene'rales. L'Auteur de'crit dans la premiere quelques animaux particuliers , dccouverts au Cap de Bonne- efperance, & fur Plfthme de PAmerique. 11 examine dans la feconde en quoi confifte le mouvement des ailcs des oileaux pour voler , de quel ufage eft leur queue, ce qui forme leur centre de pefanteur, 6c comment s'execute le mouvement de leurs mufcles, de leurs ailes &c. On lira avec plaifir les obfervations de PAuteur fur les organes de Pouie & de l'odorat de certains animaux. Comment les poiffons fe (outiennent-ils dans l'eau , comment nagent- ils ? ces deux queftions font difcute'es au commencement de la troi- fleme divifion, & elle eft termine'e par des relations fur la peche des marfouins*, des vaches marines-, par des oblervations fur la bahine , fur le requin , la bonnite ou poijjbn volant ; fur les poiffons d'or &c d'argent , fur les perks de la baye de Panama, &furun monftre marin, pris en vie (ur la cote de Bretagne. Des de'tails tres-inte'reflans fur les infecfes, forment la derniere divifion , & terminent ce volume de 500 pages. II n'eft pas poflible de faire Panalyfe de cet ouvragc. Les ob/'ets y font trop multiplies, & n'ont pas affez de liaifon les uns avec les autres. Nous nous contenterons d'indiquer les principaux (ujets traite's par PAu- teur. Un article pris a Pouverture du livre luffira pour connoitre la touche de PEcrivain. OBSER VA T I O N S Sur Feau de la mer, & fur Feau douce qu'on embarque dans les vaijfeaux , pag. 201. « X O U T E S les mers , dit Pline , livre fecond de fon Hijlnire Natu- :> re lie , chap. 98 , fe de'ehargent aux nleines-lunes de leurs ordures » & de leurs lalctes : quelques-unes le font encore en de certains terns STTR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. zji »> marques. Vers Melline & Milazzo dans I'ifle de Sicile, la mcr rc- » jctte fur le rivage des matures aflez femblables a du fumier ; ce qui »> a donne' lieu aux Poctcs de dire que e'etoit - la l'etable des brcufs .. du foleil. A ces reimrques (car il ne faut ricn ometrre ) Ariltote w en ajoute unc nonvelle, e'eft que dans les lieux maritimes , pcrfonnc >» nc meurt que dujufmt. On a fair, fur-tout , ccttc obfervation fur les » cotes des Gaules , mais clle nc regarde que les homines & point i) les autres animaux. Ce paffage de Pline meriteroir un bon com- » mentaire, fair de la main de quelque habile Phyficien. Voici ce qu'en » penfe M. D. Commiflairc de la Marine, de l'Acade'mie Royale des » Sciences. » i°. Il eft certain , dit-il , que la mer en montane , porre & enrraine » avec elle une infinite' de matieres qu'elle laiffe en defcendant fur les « greves & les rivages. Ces matieres font principalement des plantes »> molles, des coquillages, des poiftons, du bois pourri, des cadavrcs; » enfin, d'autres corps ii cxrraordinaires , qu'apres les avoir examine's » avec foin , i'ienore s'il faur les mcttre au nombre des plantes oil » des animaux. Ce iont toutes ces matieres qui , en le iecompolant » tk fe pourrilTant , rendent l'eau de la mer exrremement vilqueufc , » d'une oduolite' amere , infupportable au gout : ce (ont elles encore » qui rendenr (es bords fi gliffans , qu'on ne peut en approcher ni » s'y foutenir que tres- difncilemenr. Dans les pleines tk. nouvelles >» lunes, oil la mer monte plus haut, & avec plus de vitefTe que dans » les autres terns , elle entraine aufli une plus grande quanrite de ces » matieres. On ne peur concevoir combien eft defagreable & mal >■> faine l'odeur qu'elles repandenr , & qui dure fouvenr d'une maree » a l'autre. C'eft-la, fans doute , ce qui a donne' lieu a la fable de j) placer en Sicile, fur le bord de la mer , l'etable des boeufs du foleil. » Les anciens aimoient a parler des effers de la nature d'une maniere » myfte'rieufe 6c alle'gorique •, ils ne philofophoienr point fimplemenr. j> i°. Sur ce que je viens de dire, on concevra fans peine que l'eau » de la mer, prife a 40 & 50 lieues des cotes, doit etre fort diffe'- » rente de celle qu'on puile a la vue de ces memes cores. La premiere » efl: plus claire, plus nette , plus legere de pres d'un dix-leprieme. » La feconde eft roure impre'gnee de matieres errangeres, qui la » rendenr plus trouble , & d'une amertume , d'un gout que rien ne » peur corriger. J'ai fair fur cela des experiences , qui, a force d'etre ;> repetees, me paroiftent sures & deciffves. « 30. Beaucoup de perionnes ont tente de deftaler l'eau de la mer; » mais ce n'etoit point la le principal objet de leur rravail. Ils doivenr » chercher a la depouiller de fon amertume , d'une certaine huile grof- » fiere qui (ouleve & irrite l'eftomac ; mais certe derniere ope'ration j> me paroit prelque impoflible; du moins, on n'y a pas reudl jufqu'i Octosrm 177 i , Tome I. Hz if* t OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, " pre'fent (a). II s'e'tablit en Angleterre, fous Charles II, une eom- " pagnie de Phyficiens , a la tete de laquelle e'toient les fieurs Fitzge- » raid 8c Oglcrhorpe. Cette compagnie promettoit des chofes extta- " ordinaires , comme dedonner, pour moins de cent ecus, une ma- « chine a defTaler l'eau de la mer •, de compofer cette machine avec » tant d'art, qu'elle n'auroit que 33 pouces de diametre •, enfin, de " preparer certains ingrediens avec lcfquels on pourroit diftiller, en » fnbins de 14 heures , jufqu'a 360 pintes d'eau douce. Le projet de » cette compagnie parut alors en Francois, avec l'approbation du fa- » meux M. Boyle , 8c du Docteur King , Pre'fident du College des » Medecins de Londres. Mais toutes ces promeftes n'eurent aucun « fucces •, & a peine les Angiois s'en fouviennent-ils aujourd'hui , eux « qui n'e'pargnent rien pour alTurer 8c perie&ionner la marine. » 40. Depuis cette tentative, il s'eft prelente en France un grand « nomhre de curieux , qui ont propoie' des machines pour rendre » douce l'eau de la mer. J'ai e'te chatge, dit M. D., d'examiner plu- j> fieurs de ces machines , 8c quoique je fufle convaincu qu'elles ne « pouvoienr etre d'aucune utilite, j'ai tache cependant de procurer 3; aux Iiiventeurs des recompenfes proportionnees a leur bonne vo- » lon'e'. M. Colbert difoit (enfe'ment qu'il falloit payer avec ufure » toutes les nouvcaute's , toutes les dc'couvertes qu'on apportoit. Une « f ule qui reuflit, ajoutoit-il , en re'compenfe vingt qui paroiffent » chime'riques, qui frfnt inutiles. » 50. Quelque dilTalec que foit l'eau de la mer, il eft impoftible jj d'cn boire, a caufe de fon amertume 8c de fa vifcofite. Ce font-li » deux de'fauts efTentiels, dont on devroit chercher a la de'pouiller , « fans quoi , on ne la rendra jamais faine ni potable. Madame Dacicr j> cite un choliafte d'Ariftophane, qui affure que les Grecs jettoient » une certaine dofe d'eau de mer dans leurs vins, pour les conferver. » On fait encore quelque chofe de femblable dans les pays du Nord, « oil l'on ne cherche qu'a rendre les de'bauches 8c plus longuesSc plus » violentes : c'eft un aveu que fait le Chevalier de Terlon , qui a e'te :» fi long-terns AmbalTadeur en Suede. J'ai oui dire que des hydro- » piques avoient e'te' gue'ris dans des campagnes de long cours, en bu- rn vant de l'eau de la mer, fans aucune autre preparation ; mais fi « ces cures font effectives 8c ve'ritables , on y doit admirer ce je ne » fais quoi , dont parle Hyppocrate , & qui met a bout quelquefois » toute la fcience des Medecins. « 6°. Aptes pluficurs cffais que j'ai faits en divers terns , j'ai trouve j> une maniere de defTaler l'eau de la mer; c'eft de ptendre de la cire » vierge , 8c d'en compofer des gobelets en forme dc culs de lampes. ( a ) L'Auteur ne connoiflbit pas l'expifrience dc M. Poiflonier. SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 25$ » On remplit enfuire ces gobelets d'cau de mer , qui, en dix-huit » hcures, ou environ, pafle route an travel's. Cctte eau, qui perd » ainfi une partie de ion amcrtume, perd enfin tout fon fel; mais la » cire s'en charge Sc s'en imprcgne tellement , qu'il faut la deflaler » elle-meme pour s'en fervir enfuire. Ce (ecret, comme on voit, » ne peut etre d'aucun ufage dans les vaifleaux , je ne le rapporte ici » que comme une fimple curiofire. Saint Bafile, dans fes Home'Iies jj fur l'ouvrage des fix jours , rapporte un fecret dont on fe fervoir « de fon terns. Quand des gens de mer, dit-il , le trouvenr jcttes dans » quelque ille delerte, ou il n'y a point de fource ni de fontaine, voila j> a quoi ils ont recours. lis remplifTent une chaudiere d'eau de mer , j> & la mettent fur un grand feu ; quand cette eau commence a bouil- j> lir, ils en recoivent la vapeur dans des e'ponges qu'ils tiennent au- j> deflus de fa furface •, les e'ponges e'tant bien imbibe'es, on les prefle » dans une feconde chaudiere, qui eft route pre'pare'e; & lorfqu'elle » fe trouve remplie, on la met fur le feu : on retire la vapeur d^- cette » feconde chaudiere avec de nouvelles e'ponges, qu'on va porter dans jj une troifieme, Sc de-la dans une quatrieme , Sc puis dans une jj cinquieme ; apres quoi , l'eau fe trouve parfaitement deflalee, & on » en peut boire fans crainte. Ce palTage de Saint Bafile renfermeun « cflai de Chymie grofliere, Sc telle qu'un befoin preffanr avoir pu j> l'apprendre aux hommes, mais ce qu'on en peut recueillir, contre » le fentiment de Cafaubon , de Voflius & de Menage, e'eft que les » Grecs & les Romains n'avoient point l'ufage des alambics : ils ont j> e'te invente's par les Arabcs, aulli-bien que les autres vaifleaux Sc jj inftrumens donr on fe fert dans les laboratoires , cv le Roi Gc'bert 3> eft le plus ancien Auteur qui en parle. » 70. Tout le monde (ait que l'eau 'once qu'on embarque dans les » vaifleaux pour le fervice des Officii:. & des e'quipages, s'altere Sc » fe corrompt trois Sc quarre fois de fui , & qu'il s'y engendre une j> infinite' de vers ; mais on ignore peut-c e une chofe rapportee dans » les Tranfaclions philofophiques d'Anglttrre; e'eft que pendant les » voyages de long cours, l'eau douce qui eft garde'eplus d'un an dans » des barriques , acquiert une qualite Ipiritueufe Sc inflammable, a- j> peu-pres comme l'eau-de-vie. J'ai long-tems doute de cette obfer- « vation , mais en ayant raifonne avec beaucoup de Navigateurs, Je j> m'en fuis a la fin convaincu par moi-meme, & j'ai remarque' qu'en » de'bouchant, avec precipitation, ces fortes de barriques, & appro- j> chant une lumiere fort pres de la bonde, l'eau prenoit feu aufli-tot. )> La rai(on de cet e'venement m'a long-tems embarrafle; mais confi- » de'rant depuis , que dans un voyage d'un an , l'eau douce fe cor- >j rompt a diverles repriles . &: qu'il y nait a chaque fois une infinite » d'inlcctes, jc me luis imagine que ces infectes , en fe de'truifant, Octobre i 77 i , Tome I. 1^4 OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , )> laifToient une matiere huileufe & inflammable , qui furnage l'eau de » la meme manure que quand on fait la peche de la fardine fur les j) cotes de Bretagne, oti celle du hareng fur les cotes de Normandie, » ou celle du thon fur les cotes de Provence; toute la mer file alors » comme de l'huile , & pour pm qu'on la frappe avec un aviron, » elle paroit toute en feu; ce qui ne vient que de la grande quantite » de ces (ones de poifTons, dont la mer eft alors couverte, & dont >> plufieurs meurent, & fe pourrifTent dans l'eau. Les Fontainiers re- » marquent que quand il leur creve un tuyau, iur-tout de ceux qui » font dans les lieux fouterreins, il en' (ort quelquefois une flamme « rapide, qui a beaucoup d'ardeur & d'e'clar. J'ai lu diffe'rentes ob- j) lervations fur ce fujet dans les anciens Journaux des Savans , fur- j) tout dans celui du iye Septembre 168^, ou Ton donne l'extrait )> d'une lettre de feu M. Bernouilli , ProfefTeur de Mathematiques a*. » Bafle. j) 8°. Au refte, cette eau douce devenue ainfi fpiritueufe & inflam- u mable, eft plus legere que toute autre eau, & elle a un gout parti- » culier. M. Boyle avoit foin d'en faire prendre , quand il arrivoit a » Londres quelques vaiffeaux des grandes Indes , & il la confcrvoit >■> precieufement. A fon de'faut , il ne buvoit que de l'eau diftille'e, » comme font en Italie la plupart des perlonnes qui fe piquent de » bon gout , & de delicateffe. J'ai connu a Breft un Mcfdeein tres- » experimente , qui fuivoit Pexemple de M. Boyle , & qui faifoit voir, « par une fante' floriffante, qu'il s'en trouvoit parfaitement bien. )> 90. Le dernier article qui me refte a examiner du pafTage de » Pline , regarde ce qu'il a emprunte d'Ariftote. Ce Philofophe croyoit i> que iur toutes les cotes, dans tous les Ports de mer, perfonne ne » mouroit que de jufant , ou pendant le reflux. Cette opinion, qui , » dans le fond, ne paroit avoir aucun fondement reel, s'eft pourrant « conferve'e depuis le terns d'Ariftote, jufqu'a nos jours. On n'entend j> dire autre chofe, dans tous les lieux maritimes, finon que les ma- il lades n'ont rien a craindre , tant que la mer monte -, mais qu'ils 3) doivent tout apprehender, lorfqu'elle defcend. Les cinq ou fix heures 33 que dure le reflux, deviennent pour eux un tems critique, un pe'ril 33 continue. Les Me'decins qui pratiquent dans les Villes maritimes de 33 France , ceux qui ont e'crit en Angleterre & en Hollande , ont as adopte' la meme penfe'e , apparemment fur des apparences confufes 33 & peu detaille'es. Le P. Hardouin avoue que l'obtervation d'Ariftote 33 & de Pline, eft regue ge'ne'ralement •, il cite meme quelques Auteurs 33 comme garans de cette obiervation. Pour moi , qui ai demeure plu- 33 fieurs anne'es dans un Port de mer , j'ai cru qu'elle me'ritoit d'etre ,3 bien foigneufement examinee, nefut-ce que pour deprevenir lcpeuple « d'une opinion ancienne &c autorile'e, ou pour l'y confirmer. Dans SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 j » cette vue , j'ai prie' , en divers terns, les Rcligieux dc la Charite', » qui ont foin de l'Hopital de la Marine , a Breft , de marquer avee » exactitude, le moment precis ou mouroient les malades qui leur i> c'toient confies. J'ai hi tout le regiftre qu'ils en ont renu pendant » les annees 172.7, >7*S , 8c les fix premiers mois de 172.9. Il paroit ). par ce regiftre qu'il eft mort de fiot deux homines de plus que de ). jufant ; ce qui renverfe de fond en comble toute l'obfervation d'A- 11 nftote. Non content des rcmarqucs qui ont etc faites a Breft, j'ai i> encore prie' un des Medecins du Roi d'en faire de pareilles a Poche- )) fort, dans l'Hopital de la JVjarir.e ; 8c elles fe font parfaitement ac- » corde'es avec les miennes. J'aurois pu en refter la ; mais j'ai voulu » encore poufter plus loin ma curiofite , & on a fait, a ma priere, » dans les hopitaux de Quimper, de Saint-Paul de Le'on , & de Saint- r. Malo , des observations exadres , qui prouvent que les malades y u meurent egalement de flat 8c de jufant. ). Voila une crreur qui s'eft confervee depuis le terns d'Ariftotc juf- » qu'au notre , & qui meritoit bien d'etre relevee. Plufieurs l'auioient j> pu faire comme moi , s'ils s'en etoient aviie's, 8c fi la foule ne les » avoir point entraines prefque malgre cux. Les chofes e'rablics une » fois, s'etabliflent toujours de plus en plus, parce perfonne n'ofe j! re'clamer contre; la pofleflion augmentc leurs droits, 8c la crcdu- » lite' fait leur mcrite «. II auroit e'te' a defirer que l'Auteur eiit difcute les fairs qu'il rap- porte , & qu'il cut fuivi la meme marche que dans celui-ci, au moins pour ceux fufccptibles de dikuflion. II ne futfit pas de citer un Au- teur, d'expoler fon fentiment, il faut encore pcfer ce qu'il dit, exa- miner fi l'experiencc le prouve ou le dement •, alors , on voit s'll s'eft trompe' ; & relever (es erreurs , vaut une inftrucfion. Un filencc con- tinuel devient une approbation tacitc, & nous ne penfons pas que l'Auteur de ce Recucil approuvc ge'ncralemcnt tout ce qu'il avance d'apres les Auteurs memes dans cct article fur la falure de la mer, & fur les cfFcts de l'cau qu'on embarque. Cette compilation eft amu- fante, fingulierc, piquante; les morccaux dont ellc eft compofe'e, ont tous quelque me'ritc ; mais font-ils tous egalement vrais, &: fonde's fur ^experience ? C'eft ce dont nous fommes tres-e'loigne's d'etre les garants. Ce Recucil eft deftine' pour l'inftruttion des jeunesgens; il lalloit done, nous ne ccfTerons de le repetcr , les mettre en garde contre les apparences fouvent trop Ipccicufes, ou en ajoutant des no- tes , ou en difcutant les fairs. OctosrE 1771, Tome I. zjtf OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , L' A R T De former les jardins modernes , ou I' Art des jardins Anglois, tradult de V Anglois , i vol. in-8°. de 440 pag. A Paris , che\ Jombert , plre , rue Dauphine. JVl. SIR THOMA5 WHAT ELY, ancien Secretaire de la Tre'forerie, publia a Londres en 1770 cet ouvrage, nouveau en fon genre. Nous devons fav,.ir gre au Traducteur de nous avoir fait con- noitre un livre inte'refiant , (ur-tour dans un tems ou l'anglomanie fair en France des progrts rapides. Nous lui devons un difcours pre'limi- naire bien fait , des notes juftes & eftentielles pour l'intelligence du texte , une defcripiion des ddlicieux jardins de Milord Temple, a la- quelle il en a joint le plan. n ennui naquit un jour de V uniformiti. On peut expliquer cette pen- fee a l'imprcflion que nous e'prouvons a la vue de nos jardins ; une fymmetrie monotone y regnede route part; toujours des lignes droites, des alle'es a perte de vue, des bofquets manUris , fi nous pouvons nous exprimer ainfi, le feuillage des arbres foumis aux cifeaux; en un mot, la nature force'e, eft le cara&ere Acs jardins Francois. Nous ne la voyons dans nos jardins que comme une vieille coquette, qui doit fon faux e'clat aux frais immenfes d'une toilette raffine'e. Nous convenons que le premier coup d'ceil eft flatteur; mais le fecond eft plus tranquille , Sc au troifieme l'illufion ceffe , Part paroit, & le charme s'e'vanouit. Cette penfe'e eft fi vraie, qu'on s'ennuie bientot dans les jardins artiftement fymme'trife's ; les Proprie'taires mimes pre- ferent la promenade des champs a celle de leur pare ; ils y de'eou- vrent une agre'able fimplicite, une variete charmante, un beau de- fordre , des beautes toujours nouvelles ; enfin, la nature qu'ils ont cxile'e de leurs poffeffions. On demande s'il y a des regies invariables pour la compofition d'un jardin ou d'un pare ; nous pouvons re'pondre affirmativement , & eta- blir pour premiere 8c unique regie, que 1'art doit tellement etre maf- que', que Ton croie appercevoir la fimple nature, & quelquefois fes prc'tendues bifarreries. Lenotre , le celebre Lenotre , porta dans le fiecle dernier l'ordre fymme'triquea fon dernier pe'riode; le jardin des Thuilleries eft un chef- d'eeuvre en ce genre. Prefque tous les jardins d'Europe furent enfuitc caique's d'apres fes vues & fes deffeins. On s'accoutuma a croire, par ^ fucceffion SUR MIST. NATURELLE ET LES ARTS. iS7 fucccflion de terns , que cctre (ymmc'trie etoit eftentielle. L'Aurcur du Difcours pre'liminaire fait a ce fujet une reflexion bicn judicicufe. t€ II » eft arrive en ce genre ( des jardins) une chofe afTez ordinaire aux » arts en ge'ne'ral, e'eft que la reputation extraordinaire d'un horn me » de ge'nie en a retarde les progres , par le pre'juge ou Ton ell qu'ii » a atteint la perfection; aulli M. le Blond, dans ion Traite, Sc tons » les autresqui onte'erit fur la the'orie du jardinage, fe font-ils fonde's » fur les principes de Lenotre. lis ne pre(entent jamais que desli^nes » droites, des figures regulieres, des plans de niveau. On (e doutoit » fi pcu qu'il put cxifter quelqu'autre maniere de compofer les jardins , » que des Auteurs eftime's dilent, en parlant de la maniere chinoife, » qu'il n'eft gueres poffible qu'elle foit jamais adopte'e en Europe. ». Si nous en cherchions la caufe , nous ne concluerions pas Pimpof- flbilirc en raifon de la dirficulte extreme d'imiter ces chef-d'eeuvres dc l'art, quoiqu'ils paroiftent naturels, mais de notre gout aflervi aux formes fymme'triques , Sc diame'tralemcnt oppofe' au leur. Nous voulons tout voir du premier coup d'ceil , Sc nous de'daignons les details. Kent, au commencement de ce fiecle , produifit en Angleterre une rc'volution fubite dans l'arr des jardins , & Ion coup d'eflai dans la com- pofuion des bofquets d'Esher, de'eida le genie de la Nation. II pei- gnit la nature a un Peuple qui la connoit Sc qui Paime ; & ce Peuple , appre'eiateur du vrai , recur avec tranfport un genre fi analogue a fon caractere, ennemi de l'uniformite. Nous avouerons cependanc, a la gloire de la Nation Francoife, que Kent avoir e'te'devance par Dufreni. Les jardins quece dernier compofa au Fauxbourg Saint-Antoine, dans l'endroit appelle' le Moulin , & dans un autre nomme le Chemin-creux, ont decide cette queftion. Elle n'eft plus proble'matique que pour ceux qui (e piquent d'anglomanie. Dufreni prefenta a Louis XIV deux plans difrerens pour Verfaillcs ; ils ne furent point accepte's , a caufe de la dt'penfe que demandoit l'exe'cution. Le Tradudteur de'montre dans fon difcours prcliminaire, un ve'ri- ritable commencement d'analogie entre les jardins Anglois actuels, & ceux des Chinois. On s'en convaincra par la lecture d'un article en- tier pris dans l'Hiftoire du Japan, par le P. Duhalde, Sc par une lettre du Frere Attiret , Jefuite Sc Peintre de PEmpereur de la Chine. Ces deux extraits rempliftent la moiric du Difcours. La nature toujours iimple •, dit M. Whately , n'emploie que quatre materiaux dans la compofition de fes fcenes , le terrein , les bois , les eaux Sc les rochers. La culture plus etudie'e de la nature a introduit une cinquieme cfpece , les bdtimens , deftine's a fervir de retraite commode aux homines. Chacune de ces elpeces admet des varietes dans la figure , les dimenfions, la couleur Sc la lituation : tout payfage en eft compote uniquement, Sc les beautes dependent de l'application de ces varietes Octosrs i 7 7 i , Tome J. K k i?8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'Auteur pafTe enfuitc a l'examen du terrein. La furface d'un rerrein eft ou convexe, ou concave, ou plane; c'eft-a-dire , qu'il forme ou des eminences, ou des enfoncemens , ou des plaines unies. C'eft dans la combinaifon de ces rrois formes que font renferme'es toutes les ir- re'gularite's dont un terrein eft fufceptible , & fa beaute depend des degres Sc des proportions de leur melange. Nous ne fuivrons point l'Auteur dans le de'tail de ces differentes formes. Ce qu'il dit du rap- port des parties avec le tout, eft un peu me'taphyfique, comme le re- marque le Tradudleur ; nous pourrions ajouter , un peu obfcur. On en fera bien de'dommage par ce qu'il dit des arbres Sc des arbrifleaux, & de l'effet fingulicr re'fultant de leur placement Sc de leur melange : on y trouvera des ide'es agreables fur la forme des maftifs , fur l'inte'rieur des bocages, & fur les vues pittorefques que pre'fentent fouvent des arbres ifole's. L'Auteur palfe enfuite a l'examen des eaux. Quoique les eaux ne foient pas d'une neceftite indifpenfable dans une belle compofition ; cependant, elles s'offrcnt fi fouvent, Sc jettcnt tant d'e'dat dans une fcene , qu'on regrette toujours d'en etre prive' ; elles font en cffet l'ame du payfage, elles l'embelliftent, & lui donnent la vie. Elles s'accommodent a toutes les fituations, Sc for men t la partie la plus dclicieufe d'une retraite. Elles fixent l'attention dans l'eloigne- ment , invitent a s'approcher, Sc charment lorfqu'on eft pies : elles donnent, pour ainfi dire, du coloris a line expofition ouverte ; elles adouciflent l'horreur d'un de'lert, Sc enrichiflent le point de vuc le plus varie & le plus fourni. Pour la forme, le ftyle & Petcndue, elles s'e'- galent aux plus grandes compofitions , Sc defcendent julqu'aux plus petites : en s'e'tendant majeftueufement , elles prcfcntent une furface calme & unie, qui fied fi bien a la tranquillite' d'une fcene pailible ; en ie pre'cipitant avec fracas dans leur cours irregulier, elles ajoutent au brillant & a la vivacite' d'une fituation gaie , & au merveilleux d'une fcene pittorefque. Telle eft la varie'tedes carai5teres que les eaux peu vent recevoir : il eft difficile de former un plan ou elles ne puiffcnt entrer , & d'imaginer un effet auquel elles ne donnent plus de force. Un e'tang, dont les eaux font profondes , obfcures , 8c ccuvertes d'un ombrage fombre qu'elles' reflechifTenr , eft un lieu propre a la me'lancolie : telle eft audi une riviere qui coule entre des bords aftreux , dont le mouve- ment eft aufti lent que fa couleur eft terne, Sc qui n'offre au-deffus de fes eaux mortes Sc pefantes, qu'un e'pais nuage que l'art ni les rayons du loleil ne peuvent diiTiper. Le doux murmure , le gazouillement a peine fenfible d'un ruiffeau tranfparent & peu profond , impofe filence, eft un des charmes de la folitude , Sc plonge dans la reverie. Un cou- rant mu avec plus de vitefte, qui fe joue contre de petits. obftacles fur un fond labloneux Sc brillant, fait entendre un petit bruit en roulant parmi des cailloux , & il re'pand la gaiete dans tous fes environs. Plus SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i min , une courfe en general , & plus particulit'rement un terrcin deftinc a tine «ourfe » dc chcval. L'Auteur emend par Ic mot Ridiny , une route deitinee a des exercices »> plus vits que celui d'une ftmplc promenade : elle a beaucoup plus d'etendue qu'un « pare ; de forte , quVtant uniqucment deftinee a l'arnufemcnt , on ne peut la par- » courir qu'a clieval ». Octobre I 7 7 I , Tome I. %6x OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lant des offers pirtorefques que produifenc certains fujets, dir : Un vieux if place dans un cimetihe , feroit un coup de pinceau utile. Le Francois eft rrop gai pour aimer a conrcmpler des objets propres a faire naitre des reflexions fe'rieufes, &C a plonger dans line trifte re- verie. Nous imirerons certainement un jour les fuperbes jardins de Stowe ; mais nous ne penfons pas qu'on les copie aflez fervilement pour y admettre des cimetieres. A tout prendre, dit le Tradudteur a ce fujer , la gaiere franche du peuple Francois, quoique mele'e de beaucoup de legcrete, vaut encore mieux que la trifte profondeur angloile. Pour que le Lefteur puifle avoir une ide'e plus complette de l'excel- lent ouvrage de M. \Thately , nous donnerons dans un aurre article , la deicription enriere des jardins de Stowe. Elle renferme route la theo- rie de l'Auteur , mile en pratique. m£decine v£t£rinaire. Par M' Vitet , Docleur & Profejfeur en Me'decine. A Paris, che{ Bailly, quai des Augujiins ; & a Lyon , chei les f re res P&ifes. J^\ O U S avons rendu compte dans un article du mois de Septembre dernier, de la maniere dont cet Auteur expofe les de'rails anatomiques du cheval , du bceuf & de la brebis. Nous avons dit que la me'thode etoit claire , precife & mile a la porre'e de l'homme le moins e'claire. Nous tiendrons le meme langage relativement au fecond volume, dans lequel il fait connoitre les differentes maladies auxquelles ces animatix font fujets. M. Vitet s'attache a donner de l'ordre a fes Ecrirs, parce que la methode eft abfolumcnt neceffaire dans tout objet dont les par- ties font multiplie'es & compliquees. Une me'thode eft le fil d'Arianne, qui conduir avec fe'curite' rAuteur & le Lecteur dans les voies embrouil- le'es du labyrinthe; & fans fon fecours , tout eft en de'fordre & con- fufion. M. Vitet divife les maladies du cheval , du bceuf & de la brebis en fix clafles ge'nerales. Ces clafles font fubdivifees par ordre, par genres Sc par efpeces. La claffe premiere comprend les maladies fuperficielles, c'eft-a-dire , celles dont les fymptomes eflentiels fe montrent a la fur- face du corps de i'animal; la fcconde comprend les differentes efpeces de fievres •, la troifleme , les diffe'renres maladies inflammaroires in- ternes de la tete , de la poitrine, des inteftins , &c. la quatricme, les maladies fpafmodiques generates ou particuliercs ; la cinquieme les foi- blefles d'oii naiiTent la perte de la vue, celle de l'ouie, de l'odorat, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. it} les paralyfies, les affections foporeufes; 8c la fixieme enfin , comprend les maladies d'e'vacuation , commc le pyali(mc,la mention des ma- rieres excrementielles , ou des humeurs re'cre'mentiticlles, les flux d'u- rine, &c. II paroit , au premier coup d'ceil , que plufieurs maladies rangces dans une claffe , rentrent dans la claflc fuivante, 8c ainfi tour-a-tour. L'Auteur a pre'vu cette objection , &y a rc'pondu, en difant : " La plu- » part de ces clafles appartiennent, il eft vrai , a d'autres claffes, » comme , par exemple, l'ordre des maladies inflammaroires fuperfi- v cielles , a la clafTe des maladies inflammatoires internes, &cc. mais j; on n'a pas hefire de s'e'carter de cette me'tliode, pour rapprocher » la plus grande partie des ope'rations que le Marcchal peut executer » fur le cheval, le bceuf & la brebis-, pour lui pre'fenter le caractcre >> effentiel de chaque maladie fuperficielle ; enfin, pour re'unir toutes » les maladies exterieures , qui font celles qui attaquent le plus com- » mune'ment les bcftiaux «. Le motif de M. Vitet eft bon , & meme louable ; mais l'Auteur au- roit atteint le ve'ritable but, s'il eiit evite cette efpecc de rcfluement Le debit immenfe de cet ouvrage, nous fait efperer que, dans une feconde e'dition , M. Vitet fera quelques legers changemens, non au fond qui eft excellent, mais a I'arrangement me'thodique. Le Public ne doit pas attendre de nous des details fuivis fur chaque efpece de maladie. La forme d'un Journal ne fauroit les admettre. Nous nous contentons de rapporter deux maladies, dont les fymptomes font bien connus pour mettre le Leclreur a. meme de juger de quelle manic-re les autres maladies font traite'es : nous ofons dire que le refte de 1'ouvragc eft ecru avec la meme fimplicite', la meme candeur, que l'Auteur ne veut que le bien , & que fa modeftie ne lui a pas permis de rapporter une mulritu.'c d'experiences qu'il a tente'es dans Pcfpace de neuf ans; il fe contente d'«n donner le re'fultat en peu de mots. Petite-vfrole des Moutons , vulgairement nomme'e claveau , claveMe , clav in , Le clavin fe manifefte par des bourons enflammes , qui s'e'levent fur les te'gumens , particulierement fur les parties de'nue'es de laine, relies que le ventre, l'interieur des cuiffes & des e'paules, le nez, les ma- mclles & le defTous de la queue. L'e'ruption eft retardte ou acce'lere'e, felon la temperature de l'air, la force, l'age Sc le temperamenr de l'a- nimalj ordinairement elle eft complette le quatrieme ou ciiiquieme jour: les boutons font de plufieurs formes & de difterentes couleurs, tantot ronds,tantot oblongs : ils commencent tous par etre rouges j Octobre i 7 7 i , Tome I. i6a observations sur la physique , ils blanchiffenr, deviennent mous , fuppurent , fe deffechent , & for- nient une croiite noire, qui tombe d'clle raerae. Le clnvin, maladie particuliere aux moutons, fe communique facile- ment; c'eft pourquoi le Berger doit etre attencif aux fymptomej qui rannoncenr , afin de feparer fur le champ le mouton infecte , du trou- peau. Le degout 8c la trifteffe , fignes avant-coureurs de ce mal , (one toujours proportionne's au degre de la maladie : plus les moutons doivent etre gravement attaque's , moins ils mangent : des qu'ils font atteints du clavin, ils ceffent de ruminer , leurs yeux font charges, enfle's 8c larmoyansv foil vent les deux paupieres fe collent l'une a 1'autre; quel- quefois ils reftcnt en place, ramaffes dans le moindre volume, ab- forbe's , la tete penchee vers la terre , la queue entre les jambes , les parties pofterieures rapproche'es des ante'rieures •, ils font oppreffe's , les flancs leur battent •, s'ils gue'riffent, leur laine tombe aux places oii il y a eu e'ruption ; leur dejections font a - peu - pres les memes qu'en fame. Lorfque les brebis viennent a etre attaque'es du clavin, elles font fujettes a avorter-, alors, le danger eft eminent , les boutons petits 8c peu nombreux. On a obferve que le fcetus des brebis mortes de la clayelie, n'avoit aucune marque exte'rieure de ce mal •, qu'une brebis une fois infedte'e de la clavelee , n'en eft plus attaque'e : que trois be'liers forts ont refte, pendant le cours de la maladie, au milieu des brebis malades , fans en reffentir aucun effet; 8c qu'aucun des agneaux qui naiffent des brebis infede'es, meme tettant leur mere , n'en eft attaque'. Les memes Obfervateurs ont conftamment trouve' les poumons des brebis mortes de la clavelee , enflamme's , couverts d'hydatides , d'un pourpre noir , parfeme's de taches livides; en paflant le doigt fur la face exterieure de ce vifcere, ils reconnoiffoient diftindement des pe- tits tubercules ou boutons; le foie e'toit parfeme d'hydatides, 8c la veine-porte remplie de douves. Un troupeau commence-t-il a Itre infefte du clavin , il faut promp- tement fe'parer les moutons malades des fains, les mettre dans une ttable propre, ae're'e 8c e'loigne'e des autres e'eurics : li la chaleur eft confiderable, on les fera parquer jour & nuit pres d'un bois, a l'abri du folcil, ou on les tiendra fous un hangar vafte 8c bien difpofe'j on les y parfumera deux fois par jour avec du vinaigre 8c de l'encens ; on leur tirera de la veine jugulaire, des les premiers jours de la ma- ladie ii elle eft conHuente 8c maligne , deux onccs de fang ; on leur fera boire, une fois par jour, de l'eau blanche un peu fale'e; on ne leur donnera pour nourriture qu'une tres-petite quantite' de fon hu- mcfie avec de l'eau faturee de fel marin. Si l'eruprion eft benigne, on n'employera aucun remede ; mais fi 1'inflammation eft trop vive , on re'ite'rera la faigne'e , on leur fera prendre deux fois par jour une drag me SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. i6% dragme de nitre, incorpore' avec fuffifante quantite dc miel pour un bol , & on les abreuvera une fois Ie matin , une fois le foir , avcc lc petit laic , ou le fuc de laitue, ou l'eau blanche, tenant en folution une dragme de nitre fur trois livres de fluide. L'e'ruption tarde-t-elle a paroitre, ou les boutons font-ils en partic rentres ? On propofe de leur donner , une fois le jour , un bol de la groffeur d'une noifette , compofe' de parties egales d'ajja foztida , 8c dc baies de laurier , re'duites en poudre, & de les nourrir avec du foin , du fon Sc de Pavoine, dans laquelle on melera chaque jour une cuilleree de foufre par bete. Je pre'fe'rerai , dans ce cas , le bol fuivant : prenez de la racine de gentiane , deux dragmes , de la fuie de chemine'e, une dragme; du miel , quantite fuffifante pour un bol •, j'interdirai au malade toute forte de nourriture , Sc je ne lui permettrai pour boirfon que de l'eau blanche , plus ou moins fature'e de fel marin , & un peu de (on hu- ine<5te' d'eau lature'e de (el marin. Lodque le froid ell rigoureux , rafTemblez les moutons infecles dans une e'curie propre , & dont l'air peut etre facilemcnt renouveilc; parfumez-Ies avec de l'infulion de feuilles de fauge dans du vinaigre; ajoutez chaque jour, au fon qu'on leur donne pour nourriture , demi- dragme de racine de gentiane , excepte que l'lnHammation foit vive , ou la petite-ve'role bien be'nigne. Les velicatoires mis fur les parties charnues, Sc de'nuees de laine, peuvent etablir une heureufe de'rivation , quoique certains Auteurs aient avance' qu'ils n'avoient produit aucune evacuation (enable , mal- gre' leur application pendant quinze jours confe'cutifs. Le feton avec Yelle'bore places au bas du poitrail, ell d'un avantage plus e'vident , & mieux obterve'. Lorfque le clavin commence a inFecler un troupeau, pratiquez un feton avcc le fil de crin a chaque brebis, quelque bien portante qu'elle foit. Si la matiere purulente, qui s'e'coule par le feton , ne garantit pas tous les moutons du clavin, au moins ne (cront-ils pas expole's a un danger aufli e'vident. I. ESPECE. Petite-ve'role be'nigne & difcrette. Clavele'e be'nigne. Les yeux , la fituation de la tete & des oreilles annoncent peu de trifteflfe : 1'animal mange , la rumination fubfifte , l'eruption eft complette •, le quatrieme jour , les boutons font diftindls les uns des autres •, ils reftent durs , rouges pendant quatre ou cinq jours; enfuite, ils blan- chiftent, deviennent mous, fe deflechent tk forment une croute noire, qui tombe quelque terns aprcs d'elle-meme -, la tete eft un peu enfle'e , elle devient pcfante , les paupicres fe gonflent, & les boutons fe jettent particulicrement (ur lc ncz , les joues Sc les yeux memes ; une fuppuration prompte Sc abondanre , dctruit fouvent ces derniers or- ganes , quoique la clavele'e foit be'nigne. Octobre I 77 I , Tome J. L 1 166 OBSERVATIONS SUR LA PHFSIQUE , Cctte efpece de petite-ve'role fe communique autant par le contact immcdiat de l'animal infecte', que par l'air charge du virus variolique. Qu'un troupeau malade rencontre un troupeau fain, fans fe toucher, la contagion a lieu ; & il arrive quelquefois que la petite-ve'role , de be'nigne qu'elle eft dans le premier troupeau, devient maligne & con- fluente dans le fecond. Le premier remede, & le plus eflentiel , eft de placer les moutons malades fous un hangar , ou de les faire parquer en plcin champ , avec l'attention de leur e'pargner les mauvaifes impreflions de la pluie & du foleil; leur nourriture fera modique , line livre de fon humecte' d'une petite quantite' d'eau ; pourboiffon, deux livres & demie d'eau blan- che , oil l'on aura mis en folution une dragme de fel marin. Quel- ques Praticiens recommandent , pendant tout le cours de la maladie , de donner a difcre'tion du foin & de l'avoine avec du fon, dans lef- quels il faut meler des fleurs de foufre en poudre , a la dole de dcmi- once par jour; ou du nitre , ou du fel marin, a la dole de deux drag- mes : ils regardent ces medicamens comme tres-utiles, pour favoriier l'e'iuption, calmer l'inflammation, & poufTer par les urines line partie du virus variolique. Si les brebis pouffoient la retenue jufqu'a ne manger que le foin & l'avoine ne'ccffaires pour le foutien des forces vitales, je ferois d'avis de leur donner des alimens a difcrerion ; mais comme elles ne con- fultcnt que leur gourmandife, elles prennent toujours trop de nourri- ture; il vaut done mieux qu'ellcs fouffrent d'inanirion , que de reple- tion ; e'eft pourquoi, on fe contentera, dans la clavelie be'nigne, de donner par jour, a chaque mouton , une livre de fon mouille' , &c de leur faire boire, une fois le jour, de l'eau blanche un pcu (ale'e. Lorfque l'e'ruption eft rentrce ou (upprime'e par Paction d'un air trop froid , ou par une autre caufe , telles que la pluie, l'impreflion de l'eau fraiche, les mauvaiies qualites de l'air, des alimens & des re- medes ; lorfque les boutons font petits, blanchatres, pointus, vari- queux , pen nombreux ; lorfque la tete devient pefante, & que l'ani- mal perd l'appc'tit, il faut adminiftrer , a chaque mouton , un bol com- pofe de quinze grains de racine de gentiane , d'une dragme de nitre, & de deux dragmes d'extrait de genihre , Sc ajouter .i l'eau blanche deftine'e pour boiflon , une plus grande quantite de fel. C'eft vraifemblablcment pour re'pondre a cette indication , que Haftfer conleille de (eparer les brebis malades du refte du troupeau , de les renfermer dans une e'eurie exactement fermee , de donner a chaque brebis malade un grain de civette , mis en folution dans une cuillere'e d'eau-de-vie , ou cinq gouttes d'huile de fuie de chemine'e , ou fix a fept gouttes d'alkali volatil , ou une dragme de the'riaque ; enfuite, de ferrer les brebis les lines contre les autres , pour les faire £ SUR L'HTST. NATURELLE ET LES ARTS. i6~ (net , fans leur donner ce jour-la aucune nourriture avanr trois hemes aprcs-midi ; Sc quand la petite-ve'role n'eft pas abondante , d'ouvn'r les boutons avec une e'pingle, Sc de les pteffer pour en faire fortir le us ; alors , ils fechent d'eux-memes. Tant que les brebis font ma- ades , il prefcrit une bonne nourriture , Sc a chacune une demi - poigm'c de /el , Sc point d'eau : il rapporte qu'en etc le meilleur remede eft dc leur frotter le matin avant de fortir, Sc le foir apres etre rentre'es, les jambes , les yeux, les oreilles Sc le muleau avec la decoction fuivante : prencz des feuilles d'aune , cueil!ies le printems , une poigne'e ; de la bierre, deux livres Sc demie : faites cuire jufqu'a confiftance vifqueufe ; paffez, confervez la colature , oii l'on trempera des vergettcs ou un pinceau, pour en frotter l'animal affectc' : il recommande, en autonme, la livhhe , 8c la racine d'eupatoire femelle bitatdc , en poudrc, deux fois par femaine, a la dofe d'un plein chapeau pour ctnt brebis, melees avec trois fois autant de fel : pendant tout le cours de ce trairement , il vcut qu'on les mene paitre dans des champs fees, &C dans des en- droits ou il croit de la btuyere , les faifant rcntrer des que le froid commence a le faire fentir ; car, il eft pre'ferable de tenir les brebis chaudement dans leurs ecuties , plutot que de les expofer au moindre froid , toujours prejudiciable aux brebis attaque'es de cctte maladie. Lorlque le vent du Nord (buffle avec force, & porte avec lui la neigc , &C produit la glace , les Bergers doivent tenir chaudement les brebis maladcs , dans des e'euries vaftes , propres , & dont le plancher foit cleve; les e'earter un peu les lines des autres , pour les empechcr de (uer , Sc renouveller de terns en terns Pair de Pecurie ; inais au prin- tems, en ete & en autonme , ces pre'eautions font inudles; il fufnt de les mettre a l'abri de la pluie Sc du foleil. II. EsPECE. Petite-ve'rok confluente. Clavelce maligne. Aufll-tot que les moutons font atteints de la clavelce maligne , ils perdent l'ap- pe'titj ils ceffent de manger; ils iont alte're's, ils ne ruminenr plus, leurs yeux font enfle's , larmoyans, obfeurs -, louvent les deux paupieres fe collent l'une Sc l'autre •, la tete enfle confide'rablement ; ils jettent par les naleaux une morve e'paiffe , tenace, le plus fouvent blanche, rarement jaunc ; reruption eft pour l'ordinaire fi confide'rable , que le corps eft couvert de boutons enrlammes , lerre's & nombreux , parti- culierement les joues , le nez , les yeux, la face interne des epaules & des cuiffes : lorfqu'on touche l'animal, il paroit reftentir une douleur aigue •, fi on le faifit pat lecou, il entre , pour ainli dire, en convul- fion; fi on l'arrete par la laine du dos , il tombe , & ne le rcleve qu'avec peine ; les forces lui manquent pour luivrc le troupeau ; il s'abat , & rcfte fur la place , ramafle dans le moindre volume pofllble ; enluitc , il lui furvient une grande difficukc de refpircr , avec batte- ment de fiancs confide'rable , l'haleine eft d'unc puantcur inluppor- Octobre i 77 i , Tome L LI i i6S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , table ; lcs boutons deviennent violets , s'amortiffent fans fuppurer , &c noirciffent : ordinairement l'animal mcurt des le troifieme ou qua- trieme jour de l'e'ruption ; s'il paffe le cinquieme ou fixieme jour , il faut efpe'rer la gue'rifon , qui eft rarement parfaite avant quinze jours ou un mois, fouvent deux mois apres l'eruption. Corriger les mauvaifes qualites du virus variolique , favorifer foil e'coulement hors du corps , empecher ou diminuer (on a&ion fur les parties effentielles a la vie; voila quelles font les indications a rem- plir : pour cela, tirez premierement deux onces de fang de la veine ju^ulaire » parfumez l'ecurie ou font les malades avec une infufion compofe'e de feuilles de fauge , & de parties egales d'eau-de-vie & de vinaigre; fervez-vous de l'eau blanche pour nourriture & pour boif- fon ; fi vous pouvez avoir du petit lait , donnez-en une livre & demie par jour, en y ajoutant un peu de fel marin : c'eft une erreur de croire qu'il ne faut donner aux brebis ni alimens, ni remedes fous forme li- quide : foir & matin, faites prendre une verrc'e d'eau blanche, fature'e de nitre, ou bien adminiftrez le bol , fi eftime pour combattre les ma- ladies inflammatoires des brebis ; favoir, parties egales de nitre Sc de fuie de cheminee, incorpore'es avec fuffifante quantite' de miel. Des le commencement de la maladie , appliquez fur la face interne de l'une ou de Paucre cuiffe , deux larges veficatoires , compolcs de trois parties de mouchcs cantharides, d'une partie de moutarde, & de deux parties de levain ; afin d'en faciliter l'eftet , rafez la face interne des cuiffes ; changez les veficatoires toutes les douze heures, ou fau- pou-'rez-les avec les mouches cantharides, julqu'a ce que la (uppura- tion s'e'tabliffe ; alors , panfez l'ulcere avec l'onguent (uppuracif, ou avec le digeftif. Le feton avec la racine KdUbore , faupoudre de mou- ches cantharides , ou oint d'onguent de Icarabe'es , eft encore plus effentiel que les veficatoires, acaufe de la promptitude de fon adtion, & de la fuppuration plus abondante qu'il produit. Les fudorifiques , les purgaxifs , & les alcxipharmarques les plus vante's , tels que l'or- •vie'tan, la the'riaque , 1' ' alkali-volatil , font a rejettcr ; ils troublent les efforts de )a nature, ils de'rangent la codion du virus, & ils s'oppofent a une crile heureufe. Mais pour e'viter les funeftes effets de la petite-ve'role maligne, ne pourroit-on pas infe'rer dans une plaie fake aux tcgumens qui couvrent les cuiffes & le poitrail , la matiere purulente que renfeument les bou- tons de la clavelce benigne , lorfqu'ils blanchiflent ? Les avantages de cette inoculation feroient evidemment de'montre's , fi la plus grande partie des moutons etoit attaque'e du clavin ; fi un mouton attaque'de la claveltfe be'nigne, n'avoit jamais communique a d'autres moutons une clavelce confluente ; fi dans le meme tems on n'avoit jamais vu la cla- ydiz benigmc , Ik la chiydie maligne , attaquer les moutons du meme SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x69 troupeau; s'il e'toit prouve', d'une manicre indubitable, que la brebis n'eprouve cette maladie qu'une fois dans (a vie; li les brebis inoculces jouiflent d'une fante aulli parfaite qu'avanc l'inoculation ; s'il e'toit portable de pre'vcnir la plupart des accidens facheux dc la clavek'e . en pre'parant les animaux par un regime 8c une boiffon , en innocu- lant au printems ou en automne, en ne choiiifTant, pour cette ope'- ration, que les moutons jeunes, vigoureux 8c fains; les brebis qui ont mis bas, ou cefle d'allaiter, 8cc. Comrac aucun de ces faits n'eft prouve', il eft permis de croire que l'inoculation porteroit plus de prejudice que d'avantage , d'aurant plus , que la plupart des troupeaux, habitans des montagnes, font rarement infe&e's de la clavek'e; qu'un troupeau attaque de la clavek'e difcrette, a fouvent communique' la clavek'e conrluente a un autre troupeau ; que des Bergers inftruits m'ont allure' avoir vu des brebis attaquees deux fois en Teur vie de la clavek'e ; qu'a la feconde fois , ellcs en periftoient ; qu'une brebis ino- cule'e eft moins faine qu'auparavant. Jettez les yeux fur une brebis attaque'e de la clavek'e la plus benigne, a-t-elle jamais, apres fa "ue'- rifon, la vigueur de la brebis inta&e? Enfin, qu'il n'eft pas pofllble de trouver des moyens pour preparer la brebis a recevoir le virus, & a en e'prouver le moins de mal polTiblc. Le meilleur moyen , 11 on peut le nommer ainfi, feroit au plus de faifir l'inftant oil la brebis fe porte le mieux. MORVE DES CHEVAUX. Cell un e'coulement par les nazeaux, d'une humeur virulente & contagieufe, avec tume'factions d'une ou de plufieurs glandes maxil- laires, lans fievre &c fans perte d'appetit. Le cheval , le mulet 8c l'ane font les feuls animaux expofe's a cette maladie. Les premiers jours que le cheval eft attaque' de la morve, il rend par l'un des nalcaux, rarement par les deux, une humeur limpide ou muqueufe; du cote oii 1' e'coulement fe fait, il fe trouve une glande dure, tume'fiee, doue'e de peu de fenhbilite', fitue'e entre les branches de la machoire pofte'rieure, & deux glandes, une dc chaque cote' de la face interne des branches, lorfque l'animal jette par les deux nafeaux ; enluite la matiere qui s'e'coule des narines , change de couleur, de- vient d'un blanc jaunatre ; le volume 8c la durete' de la glande s'ac- croiftent , l'humeur morveufe prend une couleur verdatre; elle tombe au iond de l'eau , 8c la vifcoiite augmente : depuis le commencement de la maladie, julqu'a ce degre d'accroiflcment , le cheval ne toufte point; il ne paroit pas trifte; il boit 8c mange comme de coutume. Lorfque les matieres purulentes qui fortent des nafeaux commencent a prendre un mauvais caractere, le malade perd de fa gaiete' 8c de Octosre I 7 7 i , Tome J. i7o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , fon appetit •, fa marche eft pelante; il porte la tete bane; il a l'ceil trifte, on voit la tunique interne des nafeaux plus on moins ulce're'e ; bientot les deux narines jettent une humeur purulente, fanieule, de coulcur d'un jaunc noiratre , quelquefois fanguinolente ; les jambes fe tume'fient , les poils tombent pour peu qu'on les tire ; la maigreur s'accroit, la foibleffe augmente , &; l'animal meurt. Le cours de eette maladie n'a rien de fixe -, le cheval morveux peut vivre un an, deux ans, Sc meme trois ans; quelquefois il meurt all b,out de fix mois, & meme avant ce tems , fuivant l'a<5tivite' du virus morveux, l'age Sc Pefpece du fujet, le pays qu'il habite, les exercices qu'il fait, & fa nourriture. Faires habiter un cheval fain avec un cheval morveux au dernier degre , il fera plutot attaque' de la morve; Sc ce virus fera des pro- gres plus rapides, que s'il avoir pris la morve d'un cheval attaque depuis peu de cette maladie: d'un autre cote', le virus morveux a di- vers degre's d'adtivite, qui ne de'pendent pas toujours du tems de la maladie. Les jeunes chevaux font plus expofes a prendre la morve que les vieux ; Sc les progres font bcaucoup plus rapides chez les pre- miers, a caufe de la grande fenfibilite , Sc de la dc'licateffe des organes que la morve affedte. Lorfque le virus morveux attaque les mulets, il fait des ravages confiderables , Sc fe communique avec promptitude ; Pane en eft plus difficilement afrette ; mais lorlqu'il eft morveux, il en eft plutot la vittime. L'e'te eft la (aifon ou le virus morveux eft le plus contagieux, Sc ou il agit avec bcaucoup plus d'aftivite' •, c'cft pourquoi, dans les pays chauds , la morve ie communique fi facilement, & prend un accroiffe- ment fi prompt; c'eft pourquoi, elle eft plus contagieufe dans les e'curies chaudes , ou il fe trouve un grand nombre de chevaux raffem- ble's , que dans les champs & dans les e'curies peu nombreufes & bien ae're'es. Les chevaux maigres Sc exerces aux travaux , meme les plus pc'nibles, font moins fujets a etre infefte's, que les chevaux oififs & gras. La nourriture abondante en plantes Sc en femences mucilagincules , fa- vorife encore la contagion de ce virus: mais il n'eft point de pays, de faifon , de noutriture, d'c'xercice, d'age, Sc de tempe'rament, qui mettent le cheval bien portant a l'abri de la morve , lorlqu'il habite quelque tems avec un cheval morveux dans la meme e'curie. Si cette maladie le communique , n'afreclre-t-elle le cheval fain que par com- munication immediate avec le cheval morveux? Tous les Mare'chaux ne s'accordent point iur cet objet ; les uns penfent qu'un cheval fain peut etre affeCte de la morve , fans toucher immediatement ou me'dia- tement au cheval morveux ; les autres foutiennent le contraire ; les pre- miers fe croient fonde's iur leurs propres oblcrvations } ils ont eleve' SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. z7i ties poulains dans des e'curies 8c des paturages , ou ces animaux font devenus morveux , fans avoir eu aucnne communication avcc des che- vaux infc&e's : mais un Mare'chal , un valet d't'curie , n'ont-ils pas pu lcur apportcr le mal , apres avoit touche des chcvaux morveux ? Le pcu d'attention que la plupart des Mare'chaux ont dc fe laver, dc fe parfumer & de fe changer d'habit, apres qu'ils ont panfe des chevaux morveux, doit vous engager a adopter ce nouveau fentiment. II fuftit qu'un hommc, un chien &c autres animaux, touchent un cheval mor- veux, pour communicjuer la morve a des chevaux fains. L'air feul eft fouvent capable de tranfmettre la morve jufqu'a une certaine diftancc ; on pourroit en citer pluficurs exemplcs frappans : pour lors, eft-ce li fa- live, les vaifTeaux abforbans des te'gumens, ou des bronches pulmo- naires, ou de la membrane pituitaire, qui tranfmet le virus morveux dans le torrent de la circulation, pour enfuite le dc'poferfur la mem- brane pituitaire & les bronches pulmonaires ? Ou le virus morveux, par le moyen de l'air, va-t-il affecter imme'diatement la membrane pituitaire 8c les bronches pulmonaires? II y a lieu dc croire, d'apres une infinite d'experiences , que le virus morveux ne fe communique qu'en touchant immediatement la membrane pituitaire 8c les bronches pulmonaires , en buvant ou en mangeant , ou par le moyen de l'air charge de mole'cules morveufes. Introduifez de la morve dans line plaie faite aux tegumens d'un cheval bien portant, le cheval ne deviendra pas morveux; ft le cheval prend la morve en mangeant des plantes infec- te'es de l'humeur morveufe, cela n'eft pas furprenant, a caufe dela com- munication immediate de Parriere-bouche avec le nez. Mais ne pre'- fentez point d'alimens imbibe's du virus morveux •, tcncz l'orifice exte'- rieur de chaque nafeau du cheval fain, oint d'huile eflentielle de te're'- benthine , Panimal ne ptendra point la morve, quoiqii'i! habite avec un cheval morveux au dernier degre. Cette derniere expe'rience repe- te'e fur deux chevaux , me paroit abfolument de'cider la queftion. II en eft une autre aufli cfTentielle a re'foudre, c'eft de favoir ou re'fide le virus morveux. Les uns ne reconnoifTent pour ve'ritable fie^e de cette maladie, que la membrane pituitaire-, les autres, les poumons ; & certains, la membrane pituitaire, &c les poumons : tous appuvent leur fentimeir fur Pouverture des chevaux morveux. Les premiers fou- tiennent que fi Pouverture des chevaux fe fvifoit lorfque ces animaux commencent a etre attaque's dela morve, on auroit vu, d'une ma- niere cvidente , que la membrane pituitaire e'- oit la feule partie du corps affede'e du virus morveux, & que l'aitcration des poumons e'toit un efret de Pulceration de la membrane pituitaire ; les feconds rc- prochent aux premiers, de n'avoir.pas Examine avec aftez d'attention l'et.it des bronches, 8c la qualite du mucus qu'cllcs renferment chez les chevaux affedes de la morve depuis peu de jours j ils aflurent que Octobre 1771, Tome I. i7% OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , fouvent on trouve les poumons ulce're's , on les bronches contenant une humeur blanchatre , tandis que la furface interne des finus & des cornes du nez n'eft que le'gerement enflamme'e , fans etre ulce're'e? enfin, les troificmes aflurent que jamais ils n'ont ouvert un cheval morveux au premier, au fecond & au dernier degre', fans lui avoir trouve la membrane pituitaire, & les poumons plus ou moins affec- tes ; en confequence , ils ont conclu que le virus morveux affectoic autant la membrane pituitaire que Its poumons. Je me rangerois volontiers du parti de ces derniers •, au moins jufqu'a pre'fent Pouver- ture des chevaux morveux ne m'a pas de'montre le contraire. Ceux qui n'admettent le fiege de la morve que dans La membrane pituitaire, regardent cette maladie comme un vice local , ou plutoc comme un ulcere particulier & facile a gue'rir, fi on peut y appliquer des me'dicamens de'terfifs ; les injections par les nafeaux ne pouvant parvenir dans les finus & les cornets du nez, ils ont imagine de pra- tiquer le trepan avec une grofle vrille fur les parties de la tete , qui repondent aux finus du nez , de maniere que l'ouverture faite par la vrille , ne permette que le paflage d'une canule , capable de tranfmettre le fluide contenu dans une (eringue : avant que d'en venir a ce rre'pan , ils faignent le cheval morveux, ils lui adminiftrent des lavemens rafrai- chiflans , ils retranchent le foin , & ne font manger que du (on chaud dans un fac , qu'ils attachent a la tete du malade : lor(que l'ulcere de la membrane pituitaire eft bien confirme', ils pratiquent le trepan du cote' oil l'animal jette , & inje&ent par cette ouverture artificielle une de'coclion faite avec la racine de gentiane & les fommite's de petite cen- taury : quand l'ccoulement change de couleur , & devient blanc , epais , & d'une louable confiftance , ils injedlent de l'eau d'orge mielle'e 5 enfin , pour deffe'cher Sc terminer la guerifon , ils font paffer l'eau de chaux leconde; ils font, malgre ce remede, un grand ulage des fumigations aromatiques. Pour cet efFet , ils ont fait conftruire une boite , dans laquelle les fubftances aromatiques fe brulent , & donnent en meme terns leur vapeur par le moyen d'un long tuyau adapte a la boite; la vapeur ainfi ramade'e, penetre facilement dans les nafeaux du malade ; e'eft en fuivant cette me'thode , qu'ils nous certifient avoir gue'ri un grand nombre de chevaux morveux ; mais l'experience n'a pas re'pondu a nos efperances ; a peine avons-nous calme' pour quelque tems les fymptomes de la morve, encore nous fommes - nous appenjus qu'on devoir attribuer cet efFet aux parfums aromatiques ; car auifi-tot qu'on les cefibit , les fymptomes devenoient plus graves. Les partifans du fiege de la morve dans les poumons ont employe tous les remedes capables de de'terger les ulceres qui attaquent cet or- gane : les baumes , tels que la tirebenlhine , le beaume de Copahu , le keaume du Perou, pris interieurcment , ont retarde' pour quelque tems les SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17} les progrcs de la morve; l'cau de chaux miellce, continuce pendant plufieurs femaines, a produit, a peudechofe prcs, le memceffet. Parmi ccs Mare'chaux , il s'en trouve qui prerendent avoir gucri des chevaux morveux, par !c feul ufage dc l'eau miellce, lorlque la morve etoit a fon premier degre'. L'expcricnce n'a point confirmc cctte vertu fpe- cifique, quoiqu'on ait favorife' Tillage interieur de l'cau mielle'c , par les fre'quentes injections d'eau de chaux feconde miellce. Quant aux Mare'chaux .qui reconnoiftent pour fiege de la maladie, la membrane pituitaire &; les poumons, ils fe font attaches autant aux remedes intetnes qu'aux externes ; les uns font prendre unc fois par jour an cheval morveux une once dYlkiops antimonial , pre'paratioa compofee dc deux patties d'antimoine crud , & d'une partic du mer- cure, triture's enfemble a froid , ou mele's lorlque Wintirnoine crud eft enfufion; ils prelcrivent en me me terns tous les jours une bralTJe de pervenche hache'e & mele'e avec du ion; ils purgent le malade tons les huit jours ; s'il n'e'prouve pas du foulagement au bout de quelques femaines, ils pratiquent trois trous de tre'pan, afin de pouvoir mieux injeifter dans les nafeaux l'infufion dc racine de gentiane , ou l'eau de chaux miellce, & ils ont loin de faire l'extirpation dela glande maxil- laite ou lymphatique tumefie'e. Je connois des Marcchaux qui n'ont obtenu aucun (ucccs de cctte mcthode, quclque exactitude qu'ils avent porte a cxccutcr tout ce qui eft ne'eeffaire pour la faire rcuflir. Pluficurs limpiriques emploient les preparations mcrcurielles, fur-tout \ecinabre ou la panacte mercurielle , mele'e avec le double de Ion poids de foufre , Sc incorporee avec luffifante quantitc de miel ; mais le fucces n'a ja- mais courronne leurs promeMes j ainfi, il ne faut plus s'attacher a trouver dans le mercure &c V antimoine le vrai fpecifique de la morve. De tous les moyens qu'on vient d'indiquer , il n'en exifte pas un feul de fpecifique pour dampter le virus morveux : on peut bien avoir gucri un oil deux chevaux par une de ces me'thodes ; mais fon fucces 11'ePt point conftant ; elles demandent beaucoup de terns, &deviennent tres-difpendieufes. Toujours gue'rir le cheval morveux , excepte eclui qui eft affefte du dernier degre de la morve ; obtenir une prompte gucrifon, & donner un traitement peu difpendieux ; voila les a van- tages que doit procurer le vrai fpecifique de la morve. Le feul medi- cament qui m'a paru foulagcr fenfiblement le cheval morveux, eft la vapeur de Yorpiment : je ne faurois trop vous inviter a eprouver ce remede fur les chevaux morveux , en le faifant e'vaporer dans une elpice de petit fourneau, quife termineroit par un ou deux tuyaux.donc l'extrcmite feroit dirigee vers le nafeau d'ou la morve decouie. Tencz- vous en garde contre la vapeur de Vorpiment; elle eft extremement nuilible a 1'homme, tandis qu'ellc ne fatigue point le cheval. Favorifez la dcterfion de l'ulcc-re qui attaque la membrane pituitaire, en in- Octobre I 77 I , Tome I. M m 274 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, jectant dans les nafeaux de l'eau feconde de cliaux, edulcore'e de miel ; en fai'anr prendre beaucoup de foufre & de tiribenthine , (bus forme de bol ; en adminiftrant des lavemc-ns compofes de tiribenthine &c de foufre , en folution dans des jaunes d'ecufs ; frottez avec un onguent compofe de fuie de chemine'e & d'aloes, la partie inferieure du nez , pour qu'il n'entraine pas avec la langue la morve qui en decoule. Si cctte me'- thode ne rc'uffir pas, effayez d'autres fubftances mine'rales on ve'ge'tales : quoique le mercure , Yantimoine & leurs preparations, connues des Chymiftes modernes , ne produifent aucun efret avantageux-, que le cuivre & fes preparations foient dange'reufes-, que le fer & fes prepa- rations ne foulagent pas, peut etre que le \mc , le bismuth , le cobolt , detain, ['argent, Yarfenic . combines avec d'autres fubftances mine'rales, fourniront des compofitions utiles, peut etre que le fpe'eifique de la morve exifte dans une preparation mercurielleou antimoniale, inconnue jufqu'a prefent; peut etre que le regne vege'tal contient ce fpe'eifique rant de'nre. C'eft aux Marechaux zeles pour leur e'tat a faire des ten- tatives. Tout bien confidere', il me femble que pour detruire le virus mor- veux , il faudroit que routes les Nations s'accordaftent en meme terns a de'truire rous les chevaux morveux , ou (eulement foupconne's tels ; il fuffiroir qu'ils fuffent le'ge'rement glandes, quand meme l'e'coulement feroit muqueux & peu abondant, pour les faire ailbmmer & enterrer profonde'ment, fans permettre de les e'eorcher. Ce projet fcra toujours de difficile exe'eution, a caufe des moyens que les Proprie'taires des chevaux morveux prendroient pour eluder l'arret de mort. II ne refte done qu'une refource pour preserver les chevaux menace's de la morve: pour cet effet, frottez d'huile efTentielle de tMbenthine , une fois le matin, autant le foir, les orifices exterieurs du nafeau ; par- fumez l'e'curie avec parties e'gales d'encens & de fouffre; faires prendre tous les jours a l'ammal deux ou trois onces de fleur de foufre, que vous melcrcz avec du Ion. C'eft en (uivant une telle methodc , fi fimple & (I peu coiiteufe, que j'ai pre'ferve de la morve deux chevaux qui habitoient avec un cheval morveux au dernier desire , dans une ecurie etroite , bafle , ae're'e : dans les anne'es &C dans les e'euries oil vous foup^onnez des chevaux morveux, rien ne vous empeche de mettre en prarique ces moyens. Je ne lais quel cas on doit faire de ces fameux elecluaires anti-mor- veux , dont les Auteurs fe re'fervent le fecret, vraiiemblablement pout* tirer du Public la re'eompenfe qu'ils ont attachee a leur pre'tendue dJ- couverte; mais le temoignage de ces Empiriques doit toujours etre fufpect ; l'inte'ret qui les guide, peut quelquefois les forcer a voiler le menfonge. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i-^ ANALYSE Du Me moire far les argilles de M. B e au m e , fur cette quejlion propofie par FAcade'mie de Bordeaux : Quels font les principes qui conflituent I'argille , les changemens naturels quelle iprouve , & quels feroient les moyens de la fertilifer ? 1_,'A C A D £ M I E a remis ce fujet a un nouveau concours, Sc M. Beaume a publie' fa Diflertation, ians attendre (a decifion. Nous defirons vivement, fans ofer l'efpc'rer , qu'il paroifle un meilleur Me- moire fur ce fujet; ce feroit multiplier nos connoiffances, rendre un fervice eflentiel a l'agriculture , 5c reculer les bornes de la Chymie. Nous fommes redevables a cet excellent Phyficien de plufieurs dt'cou- vertes cutieufes Sc importantes. Sa Diflertation fur le cobolt &' le bleu de PrufTe , fufHt elle feule pour fixer fa re'putation. Nous faifons avec plaifir l'analyfe de cet ouvrage, 8c nous voudrions toujours en pre'- fenter au Public d'aufli parfaits : cependant , It quelquefois nous ne iommes pas de l'avis de I'Auteur, c'eft moins pour combattre (es opi- nions, que pour propofer nos doutes. Ce que nous dirons ne iauroic diminuer le me'rite de cette Diflertation , elle eft: au-deffus de toutc critique. M. Beaume' n'entreprend pas de fixer l'origine des argilles, on ne peut etablir que des fyftemes, des hypotheles fur fa formation, & on doit en dire autant de tous les autres corps naturels. L'Auteur fe con- tente, avec raifon, d'acquerir , par la voie de Texperience, des con- noiflances fur leur nature. Les argilles font de routes les maticres terreufes les plus communes & les plus abondantes ; elles fe trouvent par-tout Sc en tres-grande quantite' ; elles forment le fond de la vegetation : M. Beaume pretend meme qu'il n'y a que cette efpece de terre qui entre vtaiment dans la compolition des vege'taux & des animaux , toutes les autres cfpeces de terre ne fervant qu'a divifcr les argilles Sc a diminuer leur compacire', Les argilles lont des lubftances ondtueufes , douces au toucher, qui frappent la langue ; elles forment une pate avec 1'eau ; elles prennent dc la rettaite en fechant , 8c par Taction du feu •, elles peuvent acquerir aflcz de durete pour faire feu avec l'acier : telles font leurs proprie'te's generales. Les trois queftions propofe'es par TAcade'mie de Bordeaux, forment la divifion naturelle du Mc'moire de M. Beaume'. Pour re'pondre a U Octobre i 77 i , Tome J. Mm 2. i76 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, premiere queftion, les arg'.lles , die l'Auteur, font une terre vitrifiable, de la nature du fable , prodigieufement divife'e 8c unie a de l'acide vitriolique, avec exces considerable de talc. Les argilles contiennent prefque toutes un fable tres-fin , de meme nature & non combine'. II y a des varie'tes tres-nombreufes , dues , ou a la couleur , ou a la pro- portion de l'acide vitriolique. A Montereau-fur-Yonne , on en trouve une entierement noire : elle doit cette couleur a des matieres phlogif- tiques vc'ge'rales 8c animates; une verte dans les environs de Reims, qui contient du cuivre. 11 y en a d'autres qui font rouges, jaunes, bleues, grifes , blanches, &c. 8c melees. Ces differentes coulcurs font dues a des matieres ve'getales, animales 8c me'talliques , qui y font coi> tenues dans un etat de divifion confide'rable. Prefque toutes les argilles colore'es contiennent des pyrites qui al- terent leur piirete-, on les en feparc quand on veut faire de la bonne poterie. A Pegard de la proportion d'acide vitriolique, toutes celles qui font colore'es , en renferment beaucoup plus que celles qui font blanches. On trouve des terres blanches prefque de'pourvues de lianr ; elles ne fe diflolvent point dans les acides , 8c ne contiennent point d'acide vitriolique. Ces terres fervent de bales aux argilles, auxquelles elles font ce que la craic eft au platre. Les argilles colorees blanchiflent bientot au feu, 8c elles reprennent enfuite d'autres couleurs. Les argilles contenant des matieres metal- liques, entrent facilement en fufion ; 8c celles qui font exemptes de ces de'fauts, font prc'fc're'es pour la fabrication de la porcelainc. M. Beaume a remarque que les argilles blanches avoient moins de liant que les bleues, les noires & les grifes. II en attribue la caufe au mica qui les altere Le liant des argilles eft du a. l'extreme divifron de leurs parties. Cette divifibilite' les rend propres a rouler les unes fur les autres, & leur e'tat lalin facilite leur diffblution dans l'eau. II faut remarquer qu'tlles n'ont plus cc liant , quand on leur a enleve' leur acide. Les argilles cxpoiees al'adiondu feufe durciftent routes, & prennent beaucoup de retraite. La diminution de volume eft due a la dillipa- tion de l'humidite, que M. Beaume dit tenit fi fortement a VargiL'e, qu'un niorccau d'argille pele tout rouge, 8c tenu au feu pendant deux heures , s'eft trouve confide'rablement diminue' de poids. Ne pourroit- on pas attribuer cette diminution a la difiipation des parties propres de Yargille produite par l'a&ion du feu ? La feconde raifon de dimi- nution de poids 8c de volume , e'eft que la fufion met les parties de la terre en e'tat de fe rapprocher plus intimement. L'Auteur tegarde l'acide vitriolique dans Vargille, comme principe de fa fu/ibilite, & de (on endurciflement. La pre'fence de l'acide vitrio- lique dans les argilles, eft prouve'e par la proprie'te qu'elles ont de decompofer le nitre & le lei marin , 8c encore mieux par le tartre SUR MIST. NATURELLE ET LES ARTS. 277 vitriole,& Ic fel de Glauber, qu'on retire du rc'fidu de la diftillarion. M. Beaume' le prouve encore par lc foufre qu'il a forme avcc Vargille. L'odeur d'acide fulphureux volatil s'exhalant du four oil 1'on cuit les briques &c les tuilcs , en eft une nouvelle indication ■, mais cette odeur n'eft due qu'a une trcs-petite quantitc d'acide vitriolique, puifque M. Beaume, apres avoir pile des briques, & avoir ver'c' par-deffusde 1'eau diftille'e & froide, l'cau a acquis une faveur femblable a cellc des eaux des puits de Paris, apres un quart-d'hcure d'infufion : cette eau filtre'e precipite en jaunele turbith mine'ral. Ce ce'lebre Phyfiden pen- fant qu'on pourroit lui objecfter que ce pre'cipite' n'eft du qu'a l'cfflo- refcence des pyrites contenues dans Vargille, y re'pond par une expe'- rience que nous ne regardons pas comme affez concluante. II pulve'rifa ik broya fix onces de porcelaine des Indes ; il les mela avec une once de nitre tres-pur, & le melange foumis a la diftillation, donna un acidc nitreux bien fumant. M. Beaume' a flu re que la porcelaine qu'il a employee, ne contenoit point du tout de pyrites ; e'etoit done a l'acide vitriolique qu'e'toit due la decompofition du nitre ? Ne pourroir- 011 pas dire a l'Auteur, i°. que le nitre fe decompofe par le feul inter- mede du (able; i°. que l'acide vitriolique doit ecre dans une quantitc' infiniment moindre dans une argille qui a e'prouve' un feu de vitrifica- tion, que dans des briques qui n'ont e'te que fortement fe'che'es par le feu; 50. que la decompofition du nitre paroir plus probabiement due a une efpece de double affinite, par laquelle l'acide nitreux , follicite d'une part par l'action du feu a quitter fa bafe alkaline, y eft deter- mine de 1'autre part par l'abandon que l'alkali fixe en fait pour fe porter fur la terre vitrifiable, lur laquelle il a de l'arJtion comme fon- dant. L'alkali fixe qui de'compofc tous les fels neutres a bafe ter- reule, ne peut decompofer Vargille, a moins qu'elle ne foit cntiere- ment diiToute dans l'eau. M. Beauire n'a pu obrenir du tartrc vitriole' apres avoir fait bouillir enfemblc, pendant douze heures, deux livres d'argille,^ & autant d'alkali fixe; mais il a reulTi en commeneant par faire difloudre entierement Vargille dans l'eau. L'Auteur remarque ici une analogie qui lui paroit tres-grande entrc Vargille & le fel (edatif. « Toutcs ccs proprie'tes de Vargille font com- » munes au fel fedatif : cette clpece de fel eft neutre, comme le font » les argilles; il fait fonction d'acide , il decompofe le nitre & le fel » marin , comme le font les argilles. II eft inde'compofable par la vio- » lence du feu, par l'alkali fixe , de mjme que les argilles ; il eft com- « pofe de terre argilleufc , & d'un acide comme le font les argilles; » il en .lift re ccpendant par d'autres propriete's , comme d'etre infi- » niment plus lalin , plus dilfoluble dans l'eau, & inde'compofable « par l'alkali fixe, au lieu que les argilles lc font, lorfqu'elles font en- « rierement difloutes dans l'eau. Ces obfervations me confirment dans Octobre 1771, Tome I. i7« OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » l'ide'e ou j'etois , que le fel fe'datif eft un fel vitriolique , a bafe de » terre vitrifiable (a), fe'pare des arghles par le moyen des graiftes , » & dans lequel entre aufll une cerraine quantite' de l'acide de la graifle , » mais de'pouille'e de route matiere phlogiftique , furabondante a l'ef- « knee faline ». Telle eft l'opinion de M. Beaume' fur la nature du fel fe'datif , fi peu connue jufqu'a ce jour, malgre les recherches de plufieurs tres-bons Chymiftes. Nous defirerions, pour l'avancement de la fcience, que cette queftion fut plus difcute'e , plus approfondie , &c etaye'e par des expediences de'eifives. L'argille eft une vraie matiere faline; mais elle en a les proprie'te's dans un degre' moins e'minent que les autres fels a bale terreufe, a caufe de (on exces de terre. Elle eft m£me la feule qui ail la propriere d'admettre dans fa composition toutes fortes de dofes de (a terre , fans que celle de l'acide varie. L'argille diftoute dans l'eau diftille'e , a donne' a M. B. de petits cryftaux afTez femblables au mica, &c 1'eau de fa diffolution avoit la laveur fade & dure des eaux de puits de Paris. Les argilles bien colore'es ont donne' de plus beaux cryftaux, parceque, fuivant notre Auteur , elles font plus dans l'e'tat falin en raifon de la plus grande quantite' d'acide vitriolique qu'elles contiennent. II refte toujours dans ces diffolutions d'acide une petite portion de fable tres-fin , abfolument indiffoluble , parce qu'il n'eft point uni a l'acide vitriolique. Si on verfe dans ces diffolutions un alkali fixe, il fe fait un pre'eipite' terreux fort blanc. Cette terre fe'- che'e 8c lave'e s'eft trouve'e abfolument femblable a celle de I'alun , Sc M. B. la nomme terre argilleule. L'alun eft un fel vitriolique a bafe vitrifiable , compofe' de parties t'gales de terre argilleufe & d'acide vitriolique. Ce fel eft avec exces d'acide; il fe diftbut dans l'cau , il eft vrai , quoique, a tous ces e'gards, il differe de l'argille. L'Auteur cependant reconnoit avec elle une fimilitude parfaite. La terre pre'eipitee de l'alun par l'alkali fixe, lave'e & fe'ehee , a toutes les proprie'te's de l'argille pre'pare'e de cette ma- nicres : elle pe'tille au feu ; elle a du liant , prend le poli fi on la frotte avec la lame d'un couteau , re'fifte a Taction du feu , fe gerfe en fe fe'ehant , &: ne fe fond point en verre , quand on la mele avec un poids e'gal de craie. M. B. a fait bouillir dans l'eau quatre onces de terre d'alun, & deux onces d'alun ordinaire. Cet alun fature' de fa terre, n'avoit plus de faveur ftyptique, & il a cryftallife' comme l'argille; d'ou l'Auteur conclud que l'alun & l'argille font tous deux des fels qui ont la meme bafe &c le meme acide; mais l'alun avec ( a ) Le fel ftdatif eft un fel vitriolique , a bafe de terre vitrifiable. Pourquoi cft-il ^cgage par l'acide vitriolique, l'acide uitreux, & l'acide marin de l'alkali auquel il eft uni dans le bora* 1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 279 exces d'acide , He Pautrc avec exces de bafe, puifque fi on ajoutc a Yargilk l'acide qui lui manque, on en fait de Tallin; & fi on facure l'acide de l'alun avec li terre argilleufe, on en fait une argille. Cette identite de Yargilk Sc de l'alun eft prouvce pat des experiences tres- concluantes, & elles meritent une attention particulate de la part du Lecteur. Nous fommes fache's que les borncs circonferites d'un Joutnal ne nous petmettcnt pas de les rapporter; nous renvoyons X l'ouvrage meme. Les argilles fe diftolvent encore dans l'acide nitreux avec beaucoup plus de peine que dans l'acide vitfioliquc. Cette diflolution ne four- nit point de cryftaux, mais feulement un magma d'une faveur ftyp- tique Sc alumincufe. L'acide marin verle' fur les argilles, pre'fente les memes phe'nomenes Sc les manes refultats. Les acides vc'getaux, par exemple, 1c vinaigte diftille, mis en digeftion fur {'argille , n'onc fourni, par 1' evaporation Sc par la precipitation , qu'une petite quan- tite' de terre calcairc. De toutes les tetres precipitees de ces diffolutions par l'alkali fixe, cellcs qui ont ete retite'es des difTolutions d'argille dans l'acide vitriolique & l'acide marin, ont e'te les feules qui ont patu a M. Beaume' etre de la natute de l'alun. Celles qu'il a retire'es des diflolutions cYargilk dans l'acide nitteux Sc le vinaigre, c'toient prefque purement calcaires. II ne reftoit plus i notre Auteur qu'i ptouver que la terre de Yargilk etoit une tctre vittifiable. II a eftaye inutilement de difloudre des tetres & des pierres vitrifiables dans les acides mine'raux : pour cet effet, il a eu recours a la liqueur des cail- loux : il en precipita la terre vittifiable par l'alkali fixe, & l'obtint dans un degre de divifion extreme. Cette tettc fut mife dans un ma- ms, oil elle dige'ra dans l'acide vitriolique; la tetre fut difloute , & la combinaifon a donne de tres - beaux cryftaux d'alun. Les acides nitreux Sc matins ont prelente avec cette tetre les memes phe'no- menes qu'avcc la terre de l'alun. De plulieurs experiences faites fur cet alun artificiel, comme elles l'avoient e'te fur le veritable akin, & par les relultats qu'il en a obtenus , M. Beaume conclud que la tetre de l'alun eft une vraie tetre vittifiable. Nous continucrons dans la fuite l'analyfe de cette cxcellcnte dilfertation. Octobre 1771, Tome I. 280 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, OBSERVATIONS Sur une fubfiance de couleur bleue , trouve'e en EcoJJe , dans un fond de tourbe moujfeujfe. Par M. Silvestre Douglas. _L A fubftance de couleur bleue que je vous pre'fenre,& fur laquelle je vais vous faire parr de mes obfervations, fut fouille'e par hafard pen- danr l'c'te de 1 7 <; 9 •, elle devoir entrer dans quelques autres matieres pre'pare'es pour marner un rerrein que je poftede au nord de l'Ecofle > a environ douze milles d'Aberdien. Je n'ai trouve' la description de cette fubftance dans aucun Natura- lifte. Kenrman dit pourtant un mot d'une terre bleue, qu'il appclle ccErukium Patavinum , & qui a une reflemblance bien remarquable avec la fubftance que j'ai examinee ; c'eft qu'en fortant de terre elle eft blanche, 6c qu'elle ne devient bleu, qu'apres avoir e'te expofe'e a Pair pendant un certain terns. Trc's-probablemenr Yocchra friabilis de M.d'Acofta, paroit avoir beaucoup de rapports avec notrc fubftance, s'il nous avoir donne' des de'tails plus particularife's fur la fagon dont on le trouve, & fur 1'afpecT: qu'ii a lorfque l'air n'a pas encore agi fur lui. M. Cronftedt , dans ion dernier fyfteme Mine'ralogique , parle d'une fubftance bleue, qu'il dit, autant que je puis me rappeller, fe trouver dans quelque endroit de la Prune. La defcription qu'il en donne eft fort courte; &c comme je n'ai pas fon ouvrage fous les yeux , je ne puis en conclure rien de certain. L'endroit d'oii j'ai tire la miennc eft d'une nature mare'cageufe, & dans le coin d'un lit de tourbe que l'on avoir cntie'remenr e'puifc'. Im- me'diatement apres le gazon , eft un lir de tourbe ordinaire d'envi- ron un pied de profondeur. On trouve enfuite la fubftance elle-meme mele'e de veines irregulieres de matiere tourbeufe : elle a auffi un pied de profondeur. Tant que cette fubftance eft ainfi humide, & prive'e d'air, elle confervc une couleur blanche , Sc une confiftancc graifleufe , a-peu-pres comme la terre que l'on pre'pare pour le cimenr. Toutes les eaux des environs font, en quelque forte, impregne'es de fer. Quand on expofe certe fubftance a l'air, elle prend , a proportion qu'elle feche, une couleur bleue, tandis que la matiere tourbeufe qui y eft mele'e conferve toujours le meme afpecT: qu'auparavant. La mafTe que forme ce melange eft d'une rexrure friable, & fe brifc facilement, pour peu qu'on en ferre les parties entre fes doigts •, alors , la partie bleue, en la preflant le'gerement, fe diflout en une poulliere fine Sc impalpable j elle n'a prelquc aucune iaveur fenlible j le peu qu'on y en SUA VHTST. NATURELLE ET LES ARTS. *$| en trouve approchc dc celle du (oufre. Pendant qu'on la fouillc i elle rend line odeur fulphureufe aflez forte; & fi Ton brulc du papier qui y ait e'te' attache pendant quclques inftans , il donne une flamrae fein- blable .i celle du (oufre. L'e'lutriation eft le fcul moyen de feparer ccrte fubftancc de la ma- rie-re noire avec laquelle elle fait corps. Pour cer effet , on la met dan* de l'eau que l'on agite pendant quclque terns •, on la Iaifte en(uite re- pofer, 8c bientot apres Ton trouve au fond la partie noire. On retire la bleue en verfant l'eau avec laquelle elle s'eft melee, mais dor ( le le fe'pare promptement en fc precipitant ail fond. Il ne paroit pas' poflible dc delunir entitlement la matiere bleue de la matiere tour- beufe ; car apres environ vingt lotions dirF.'rcntes , j'y rctrouvois en- core des raies noires, lorfque je l'avois laifiee aflez repofer, pour qu'cllc le raftemblat au fond du vafe. Quclque chofe que j'aie fait, jc n'ai pas micux re'ufli a oter tout le bleu de la partie noire. Si l'on ajoute un peu d'eau a beaucoup de cette terre , l'eau acquiert line efpece de tenacite; elle devient aufli d'une couleur jaunatre en la laiflant pendant un jour ou deux fejourner en petite quantite fur la furface de cette terre. Voila les principaux fairs qui fe rapportent a l'Hiftoire Naturelle de cette fubftance, 8c les proprie'tevs que tout le monde peut y de'eou- vrir fans avoir recours aux procedes chymiques. Je vais a pre'ient rapporter les expe'riences que j'ai faites fur elle , dans le defTein de m'af- furer plus particulierement de fa nature. Pour favoir fi elle contenoit des parties qui fuflent folubles dans l'eau, je fis filtrer une grande quantite de l'eau qui m'avoit fervi a en feparer la matiere tourbeufe ; & je la laiflai enfuite e'vaporer dans un bain-marie ; mais apres l'evaporation , je ne trouvai au fond du vaif- feau qu'un peu de terre , que probablement l'eau contenoit en elle- meme. A une portion aflez confide'rable de cette poudre bleue, j'ajoutai un peu d'acide vitriolique pris dans la premiere boutique. Ce melange occafionna une effervefcence aflez forte pendant quelque tems. La lur- face fut couverte d'e'eume , bientot le tout prit une couleur d'un brun fonce'; la folution que j'obtins apres la filtration , fut une liqueur brune Sc tranfparente. II refta dans le filtre beaucoup de fe'diment , mais qui , je crois, n'etoit que des parties de la matiere tourbeufe, qui n'avoic pas etc exactement de'funie ; car en repetant plufieurs fois l'experience fur la poudre bleue , je vis qu'elle etoit foluble a proportion que la partie tourbeufe en etoit plus ou moins exactement feparec. Lorfqu'en- fuite je mis de l'acide vitriolique dans la matiere noire , quoiqu'elle devint brune, il me parut que la diflolution que j'obtenois n'etoit qu'en proportion de la quantite de bleu qui y adhcroit, Octobre i 7 7 i , Tome I. N a iti OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'acide nitreux ajoute a la poudre bleue , produifit a-peu-pres Ies memes efFets; fi ce n'eft: que la couleur de la folution filtre'c hit d'un brun plus clair. L'alkali vegetal fixe en fit audi difloudre une partie confide'rable; mais je ne puis pas dire fi la diflolution fut totale ou non. La folution produifit une liqueur brunc & opaque, qui ne devint tranfparente qu'apres avoir parte deux fois par le filtre. Cependant, elle repola pen- dant plufieurs jours fans depofer le moindre icdimenr. J'ajoutai a ma poudre une petite quantite' d'alkali volatil , qui fem- bla en difloudre une partie , & qui rendit le refte d'un verd obfcur. Je joignis a la folution opere'e par l'acide vitriolique un pcu d'al- kali vege'tal , il s'enfuivit une cfkrvefcence , & il s'eleva une efpe'ce de caille' le'ger, d'une couleur verte 8c bleue, mais qui fe pre'cipita bientor, &c devint abfolument blanc. J'obtins avec l'acide nitreux un pre'cipite' femblable, excepte' feule- ment qu'il ne fe porta pas d'abord a la Surface, ainfi que le pre'ce'dcnt. En ajoutant de l'acide vitriolique a la folution faite avec l'alkali ve'ge'tal fixe , j'eus un pre'cipite d'un brun rougeatre. Je melai a quantite' egale de la poudre bleue & de la matiere noire , & apres les avoir mifes dans un creufct, je les tins pendant plufieurs hemes fur un feu tres-ardent. Lorfque je retirai ce melange du creufet, je trouvai qu'il avoir forme une maflc fpongieufe, dont la partie in- fe'rieure etoit reve'tue d'une c route , fur laquelle j'appercus quelque chofe qui avoir une apparence me'rallique. Je re'duifis cetre mane en poudre, & j'en feparai, en la lavant, les parties les plus legeres, apres quoi j'approchai l'aimant de ce qui reftoit , fans cependant le fairc toucher. Malgre cela il en attira forrement plufieurs particules. Je melai avec un peu d'alkali fixe, une partie du pre'cipite' blanc produit par l'acide vitriolique. Je mis enfuite le tout fur un morceau de charbon , fur lequel je dirigeai, par le moyen d'un foufflet, la flammc d'une chandelle. Apres l'avoir ainfi tenu rouge pendant environ une heure , j'y app'iquai l'aimant : mais il n'attira a lui aucune des parties de la poudre. La quantite' de matiere que Ton peut foumttre a cet examen, n'excede pas le poids de quelques grains. A un peu de pre'cipire blanc j'ajoutai une infufion de the', qui le fit devenir d'un bleu approchant de fa couleur naturelle, mais pas tout-a-fait fi fonce. Je verfai dans une autre portion du meme prccipite, une infufion de noix de galle, & je les battis enfemble. La liqueur prit une cou- leur d'un bleu tres - fonce, & la poudre qui reftoit an fond du vafe re^ut la meme teinte. Cette tcinte n'avoit pas le brillant de notre poudre delaye'e dans l'eau , fans avoir fubi aucune e'preuve ; mais elle e'toit telle qu'on devoit Fattendre dc Ion melange avec l'infufion de noix SUR L'HIST. NATURELT.E ET LES ARTS. 183 dc galle. Pour m'affurer li l'acide vitrioliquc n'avoit aucune pare i cct effet, je mis un pen de la meme infufion de noix dc galle fur la fubftance bleue pure. Apres les avoir agitecs eniemble pendant quelques inftans, la couleur qu'ellcs produifirent fut abfolument la memo. Une partie de la folution brune que j'avois obtenue par le moyen de l'acide vitriolique, fut de'layee dans de l'eau jufqu'a ce qu'elle devint trcs-pale; j'y vetfai alors quelques gouttes d'infufion de noix de galle, qui, fur le champ, la rendircnt noire. Un morceau de fubftance bleue expofe' a environ un pied du feu , devint d'une couleur verdatre. Les expe'riences pre'ee'dentes comparces avec l'Hiftoire Naturellc dc cette finguliere production , (emblent jcttcr quclque jour fur la nature & fur les parties qui la compofent. On fait qu'une des proprie'te's re- connues aux aftringents vc'getaux, eft d'affecter la couleur du fcr, lorf- qu'ilslont mele's avec de l'acide vitrioliquc, en forme de vitriol verd , ou avec le fcr lui meme. Je crois qu'ils ne produilent cet effet avec aucun autre metal. La couleur qu'ils prennent avec le fer & avec 1c vitriol, n'eft pas exa&ement la meme, elle tire en effet fur le noir ; mais elle prend prefque tomes les nuances qui font entre le noir & le bleu, il me femble que les aftringents donnent un noir fonce avec le vitriol, & un bleu pourpre avec lc fer lui-meme , comme on peut en faire l'epreuve en verfant quelques gouttes de the fur la lame d'un couteau. Or, nous avons vu qu'en melant a la poudre bleue diffoute dans l'a- cide vitrioliquc un aftringent ve'getal , il prenoit avec elle une couleur noire, 8c lendoit le bleu naturel au pre'eipite' blanc produit par P.icide. Nous avons audi trouve qu'elle contenoit re'ellement du fer , puifque quelques-unes de les parties calcine'es ont e'te' attire'es par la pierre d'aimant : la quantite qu'il nous etoic podiblc de foumettre a. ['expe- rience faite fur les charbons, n'e'toit pas fuffilantc pour de'eider qu'il n'y avoit pas de fer; il eft done tres-prodable que le fer,&quelque aftringent vegetal , font les principaux ingrediens de cette fubftance , & lui donnent la couleut qu'elle a. L'endroit dans lequel on l'a trou- ve'e, favorife encore cette conjecture. Premierement , routes les eaux voilines font impregne'es de fer; & dans prefque toutes les tourbes mouffeufes , il y a des debris de chene , arbre dont le bois & Pecorce font d'une nature tres-aftringente & ftyptique. Je ne pretends pas que ce foit la fes leules ingre'diens. Jc crois que la le'gerete de cette fubftance prouve que le fer y entre en tres-petite quantite. L'odeur qu'elle exhale lorfqu'on la fouille, & la flamme qu'elle donne en briilant , femble indiquer la pre'fence du foufre. Ce- pendant , il ne peut y etre qu'en fort petite quantite', puilqu'clle fe diflout prefque totalement dans les acides qui n'ont point de prile fu,r Octobre i 7 7 i , Tome I. N n 1 284 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le foufre. Je fuppofe que le fer & la terre font ce qui domine dans le precipite produit par lcs acides. Apres avoir degage, autant qu'il m'c'toit poffible . la poudre bleue de la matiere noire, j'ai fait fur elle plufieurs effais, pour voir fi Ton pourroit s'en fervir dans la peinture. On en hroya dans un mortier dc verre avec de l'huile de noix-, mais lorfqu'ellc fut abfolument melc'e , fa couleur devint noire; ainfi , il paroit qu'il ne fcroit pas facile d'en titer partie pour les coulcurs a l'huile : mais comme cette terre con- ferve tout fon e'clat dans l'eau gomme'e, & qu'e'tant compofe'e de parties tres-de'liees , elle fe diflout fort aifement dans l'eau; elle feroit utile, comme couleur de de'trempe , s'il etoit pofllble de fe la procurer en affez grande quantite' , pour qu'elle fut a bon marche. Je penfe qu'on en trouveroit dans prelque routes les tourbes, parce qu'elles con- tiennent la plus grande partie des matieres qui la compofent. II y a environ deux ou trois ans qu'un de mes amis m'en envoya un mor- ceau qu'il avoir trouve' dans des tourbes de fa terre , qui n'eft eloigne'e de la mienne que de cinq ou fix mille Je fais audi que M. d'Acofta poflede plufieurs e'chantillons de terre bleue qu'il a regus de differentes parties de l'Angleterre. Celle que M. Houfsloane lui a apportee d'lr- lande, paroit etre !a meme; & il (emble, par cequ'en difent KlM. Kent- mann & Cronftedt , qu'on en trouve aufli dans plufieurs parties du continent. D'apres routes ces obfervations , je crois pouvoir conclure qu'il feroit facile de le procurer cette terre en affez grande quantite , pour que la couleur qu'on en tireroit flit a fort bon marche, fur-tout, puifque la nature femblc prendre fur elle de la pre'parer prefqu'entierement. Il eft dommage que cette couleur ne re'fifte pas davantage a l'adtion des alkalis, & fur-tout de l'alkali volatil , dont l'athmofphcre des Villes , ainfi que celui de tous les endroits chauds, eft fortement im- pregne. Cependant, je n'y ai jamais rcmarque' de changement , apres l'avoir laiffe pendant long-tems expole a l'air, ou meme a la chaleur d'une chambrc dans laquelle il y avoir continuehement du feu. M O Y E N Facile pour prendre Vempreinte d'une feuille & d'une fleur, tire' des Manufcrits de M. Pingeron. J[ R E N E Z line feuille de papier la plus mince que vous pouvez trouver, que vous enduirez avec de l'huile dc lin ou d'olive , felon ■votre commodite. Laiflez cette feuille ainfi imbibe'e d'huile pendant SUR L'fflST. NATURE LIE ET LES ARTS. 285 quatre ou cinq jours , au bour deiquels vous la paffcrez fur la fume'e d'un Hambcau, jufqu'a ce qu'elle en foit toute noircie. Placcz fur cc papier les feuilles dont vous defirerez lc contour, & mcrtez par-deflus une feuille de papier blanc d'une certaine force. Cetre operation etant faite , frottez avec l'anneau d'une clef bien poli , la feuille dc papier blanc, jufqu'a ce que vous pre'fumiez que les feuilles reelles ioient bien empreintcs de la couleur noire : tranfportez ces dernieres entrc deux feuilles de papier blanc , dont vous frotterez avec une clef, ou polif- foir de verre , celle qui eft au-deftus. Les feuilles, dont vous defirez 1'empreinte , fe trouveront calque'es tres - diftinctement fur les deux feuilles •, leur couleur (era d'autant plus conftante, qu'elle eft a l'huile. Les jeunes perfonnes qui s'amufent de la broderie, pourront fc faire des dentins charmans , fans favoir dellincr : (1 elles font ufage de ce moyen, elles rangeront les feuilles noircies fuivant la dilpo/ition du deffin qu'elles voudront faire, & les pafteront enfuite avec une clef. Cette dilpolirion e'tant ainfi calquee , elle la piqueront pour la multi- plier autant de fois qu'elles defireront, par le fecours du pouce. On arrete enluite ce deflin avec une plume. Comme la couleur blanche fatigue beaucoup la vue, il ne faut faire les deflins pour la broderie que lur du papier jatine , & remplir le milieu du fujet avec la couleur vertc , qui fe tire du verd de veflie. Ces precautions, qui ne font rien , ou prefque rien en elles-memes, font tres-avantageufes pour la confervation dc la vue de celles qui brodent. DISSERTATION Sur I'ergot, ou bled cornu ; par M. Beguillet , Avocat en Park- ment , premier Notaire des Etats de Bourgogne , des Academies de Caen , de Met\ , des Socie'te's Roy ales d' Agriculture de Lyon , d' Or- leans , Limoges , Brives , &c. Che\ Frantin , Irnprimcur du Roi , & Dijon. JV1 . A ME LOT, Intendant de Bourgogne, dont le zele & la vigi- lance s'e'tendent lur tout cequi inte'tefTe l'humanite, a fait impiimer 6\: diftribuer gratuiteincnt cette Difflrtation dans fa Ge'ne'ralite , de in erne que celle de M. Maret , Secretaire perpc'tuel de l'Acade'mic de Dijon; cette dcrniere fort de (uppk'ment a celle de M. Beguillet , & indique les temedes ncctflaites pour duruire la maladie occalionnee par l'ulage du bled ergote. Octobre 1771, Tome I, iS6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Nous rendrons compte, dans la fuite , de l'ouvrage de M. Marer, & de celui de M. Vetillard, fur le raemc fujet, publie' par le Bureau de la Socie'te' Royale d'Agriculture du Mans. Le bled ergote , cm bled cornu , vulgairement nomine e'brun , en Bour- gogne, eft reconnu pour etre un poifon tres-actir, dont les fuites lone terribles. M. Geoffroy s'cxplique ainli dans fa matiere nie'dicale. Le feigle ergote' produir dans le pain, quand il s'y rencontre en certaine quantire, un effet des plus funeftes. Ceux qui en mangent, font atta- que's d'une maladie approchante de celle qu'on appelloit autrefois mal de Saint Antoine. Ce bled porte , dans tout le corps , une maniere de gangrene feche, qui ic manifefte d'abord aux extremite's, fur-tout, aux pieds. Les membres fe corrompent par degre' , ils deviennent li- vides , noirs , d'une odeur inlupportable -, ils ie de'tachent meme des jointures, a-peu-pres comme fi on quittoit une jambe de bois , & tombent l'un aprc-s l'autrei enforte, qu'il ne refte quelquefois que le tronc qui furvit encore quelque terns a la perte des extremite's. Il y a en cette annee , en Bourgogne 5 beaucoup de feigle ergote ; & comme le feigle eft la principale nourriture des pauvres , il eft in- tereflant de connoitre la cau(e qui occafionne les maladies. C'eft au Naturalifte a la de'terminer, & au Me'decin a travailler fur (a de'eou- verte, pour le bien de I'humanite. La caufe & les eifets une fois de'- montre's, on eft, pour ainfi dire, aflure du remede. Nous devons des rcmercimens a M. Beguillet &c a M. Maret, leurs obfervations font marque'es au fceau du patriotifme. M. Beguillet commence fa Diflertation par une penfe de Pline, qui ne nous paroit pas entierement jufte. Il dit : C'eft quand on voit les » poifons mele's aux alimens , que Ton peut douter ft la nature eft » plutot une maratre cruelle, qu'une tendrc mere pour les hommes, i) auxquels elle fait payer fi cher fes bienfaits ». Les alimens que la nature nous donne u gratuitement , fortent de fes mains dans un e'tat de perfection ; & fi quelquefois ils font alte're's ou change's en poifon , on ne doit attribuer ces de'fectuofite's qu'a. des caufes fecondes , a des accidens ou elle n'a aucune part. Jugeons nous fans impartialite, &: nous verrons, par exemple, qu'en femant nos feigles dans des terreins fees , en les femant un peu clairs , nous ne les aurons prefque jamais trgote's. Le proverbe ancien , rapporte par l'Auteur, confinne ce que nous dHons. Les Fromens femeras en la terre boucufe , Les Seigles logeras en la terre poudreufe. Ces principes annoncent que le feigle eft une plante feche de fa na- ture, & qu'il lui faut peu d'humidite , 3c qu'elle lui eft nuifible. SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 287 « Le feigle , qui eft le grain le plus eftimd , apres le froment , en a » les niemes caradteres , fi ce n'eft que foil e'pi eft plus plat,& toujours >i barbu. La balle qui cnveloppe le grain , eft garnie fur fes cotes dc » perits filets roides & tres-pointus , de meme que tout le long de » l'arrete qui termine le calice : fon grain eft plus foible, plus bum , >i plus petit, plus nud, tenant moins a l'axe dentele de l'e'pi , & la » plante plus haute, plus grelc & plus hative que celle du froment, » montant en e'pis un mois plutot ; d'oii il luit qu'il y a beaucoup d'in- » conveniens a femer en tndteil, parce que le feigle qui fe ddtachc » fort aifdment de fa balle eft mur , & tombe de l'e'pi , lorfque le v froment avec lequel il eft meld eft encore verd. Le feigle vaut » mieux dans les pays froids, que dans les pays chauds, ou les terres j) humides. En Suede, en Prune, 6c dans plufieurs pays du Nord , » on ne connoit prefque que le feigle : en Italic, an contraire, on » ne le cultivc que vers les Alpes. Quand l'annee eft feche ou froide, « on a des ieigles en abondance. Le feigle ddgdnere, lorfqu'i] eft 3> feme' dans des terres humides, ou lorfque le champ eft ombrage' par 3) quelque bois ou colliness. D'apres ces notions gdndrales , l'Auteur pafte a la description dc Vergot. Les grains ergotts lortent confiderablement de leur enveloppe, & s'allongent beaucoup plus dans l'e'pi que les autres grains. lis en fortent droits Si recoquille's , en maniere de corne noire, a-peu-pres comme l'ergot d'un coq , d'ou leur vient leur denomination d'ergots. II y en a qui ont treize a quatorze lignes de long fur une ligne de large , d'autres ne font guere plus longs que le grain : ils varient beaucoup dans leur longueur ; il y en a quelquefois qui ont deux pouces dc long. Le nombre des ergots fur un meme dpi eft inddtermine ; il eft plus commundment depuis un jufqu'a cinq, & l'Auteur en a trouve jufqu'a neuf dans le meme dpi. Les grains ergotls font noirs au-dehors , & fournis dans Pintdrieur d'une lubftance farineufe aftez blanche. Cette farine blanche , dit M. Duhamel, eft recouverte d'une farine roufle ou brune, qui, quoi- qu'elle ait une certaine confiftance, peut s'dcrafer facilement entre les doitgt. M. B. regarde la corne de Vergot plutot comme une fubf- tance fongueufe & aftez dure, que comme cartilagineufe, du moins quand elle eft defTcchde; car dans les commencemens , clle eft mollafte & vitqueufe. La furface de fes grains eft raboteule, & laiffe quelque- fois appercevoir des cavitds & des fentes qui fe prolongent d'un bout a l'autre : ces fentes ne lui paroiftent point occafionndes par des infedtes ; elles font plutot produites par le deftechement tres-lubit de cette excroif- fance. Vergot tient moins a l'axe dentele de l'e'pi, que les bons grains; ct qu'il eft aifd de verifier, parce que les grains d'un meme e'pi ne fe trouvent jamais attaquds de Vergot tout a la fois. La caufe qui rend Octosre I 7 7 I , Tome I. 28 S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , V ergot moins adherent a l'e'pi que Ies bons grains, vient de ce qu'il n'a point de germe , & par consequent point de filamens qui l'atta- chent a 1'axe. l.'ergot n'a point de mauvais gout; cependant, en Ie machanr, il laifle fur la langue quelque chofe de piquant : d'autrcs lui trouvent le gout de la dreche. L'Auteur a vu plufieurs de ces grains ergotds entiere- ment couverts d'une liqueur vitqueufe, ayant la couleur, la confif- tance & la faveur du miel. Ne feroit-ce point le deffechement de cette liqueur vifqueufe fur la fubftancc farineufe de Yergot qui forme la croute noire qui la couvre? M. B. Ie croit ainfi : il en a mange quel- ques grains, dont le gout approchoit de celui de la noifette, Sc a eprouve peu-a-peu une inflammation brulante dans la gorge. La fen- f ation etoit la raeme que celle que l'on reflent quand on mache l'ecorce du garou ou bois gentih Plufieurs perfonnes, continue l'Auteur, ont attribue la caufe de Yergot a certaines bruines du mois de Mai, accompagne'es & fuivies de rayons ardens du foleil : tel e'toit le fentiment de M. Fagon , pre- mier Me'decin du Roi, qui s'exprime ainfi : « La plupart des grains » de feiglefe defendent des bruines par leurs barbes; mais quand cette » humidite maligne pe'netre jufqu'aux grains , elle pourrit la peau « qui les couvre , la noircit , & altere la fubftance du grain raeme, »> lafeve qui s'y porte n'e'tant plus reflerre'e par la peau dans fes bornes » ordinaires, y arrive en plus grande abondance ; & en s'amaffanc 5) irregulierement , forme une e(pece de monltre , qui , d'ailleurs, eft » nuifible, puifqu'il eft compofe d'un melange de cette feve fuperrlue » avec une humidite' vilqueufe », M. Adanfon , dans fes refultats des experiences les plus modernes fur 1'organilation des plantes , obferve que Yergot etant plus com mini dans les annees humides & de terns couvert, cela fait foupconner qu'il a la raeme caufe premiere que le givre , qui couvre la lurface fupe'- rieure des feuilles •, que le givre n'attaquant que les plantes dans les lieux bas & toujours couverts de vapeurs humides, paroit venir d'un de'faut de tranfpiration qui , en obftruant les vaiffeaux des feuilles , y fait accumuler la (eve repandue d'abord a la furface exte'rieure , oil elle refte fans s'e'vaporer, faute de fe'ehereffe, ou d'etre expofe'e a Tac- tion du foleil. M. Tillet, dans une diflertation coutonne'e a Bordeaux, combat ce fentiment. Comment, dit-il, les brouillards qui produifent Yergot dans le (eigle , ne produifent-ils jamais cette maladie dans Porge, dans l'avoine , ni meme dans une quantite' de froment fans barbe, oil Ton ne voir jamais dYergot. (a) D'ailleurs, les brouillards couvrant une ^■-— — - ( a ) M. Beguillet afBrme en avoir trouve dans les fromens venus le long de la riviere. eertaine SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i39 certaine partie du terrein, devroicnt produire un effet affez general} & (ouvcnt un c'pi eft ergot/, fans que Ion voifin le (oit. M. Tillet loupcjonne que Vergot eft produit par la piquure d'un infette, qui fait des grains de feigle une efpece de galle ou excroiflance, dont le com- mencement fe manifefte par le fuincement de la liqueur concenue dans 1c grain alre're'. Apres avoir fait connoirre les differentes opinions des Auteurs, M. Beguillet s'explique ainfi : J'obferverai que Rai , dans fon Hif- toire des Plantes , regardoit de'ja avant M. Tiller , l'excroiffance du feigle comme l'erfet de la piquure d'un iniedte. M. Tiflot , dans fon Avis au Peuple , artribue V ergot a la meme cau(e. Pour moi, J'ai peine a admettre , avec M. Tillet, la piquure d'un infecte, comme la caufe piemierede tout le de'fordre qui arrive aux grains ergote's. En fuppofanr, comme on n'cn peut douter apres ce favant Phyficicn, que Ton trouve quelquefois des chenilles dans V ergot , & meme, iT l'on veut, dans tous les grains ergote's, il refteroit toujours lieu de douter, fi e'eft la (ubftance de Vergot, ou la liqueur mielleuie qui l'entoure, qui ont attire l'infette, ou fi e'eft l'infedte qui a produit Vergot. Lorlque Vergot commence vers le terns de la fecondation , le grain n'eft pas encore forme', puilque perfonne n'ignore que le gernie ne commence a croitre qu'apres la fleur paffee : d'ailleurs, il eft ga- ranti par la balle coriacce , qui fert de calice a la fleur, & qui ferme l'approche aux papillons qui pourroient venir depofer leurs oeufs iur le germe meme, comme il faudroit le fuppoier dans le fyfteme de la piquure du grain. On pourroit retorquer les argumens de M. Tillet contre lui-meme, fi Vergot etoit produit par une piquure d'infede, pourquoi Vergot feroit-il plus commun dans les terres humides que dans les lieux fees & ae'res ; dans le creux des fillons , que fur le dos e'leve de ces memes fillons; dans les terns humides & couvetts de la flo- raifon , que lorfqu'il fait chaud & lee , quand les feigles paflent fleur? Pourquoi le feigle, le gramen aquaticum fluituans y leroient-ils plus fujets que les autres gramens ? Pourquoi , dans Un champ feme de feigle 7 les petits e'pis, qui font fous les autres , qui fleuriflent & mu- riflent plus tard , font-ils les plus ergote's? Pourquoi y a-t-il moins tfergot dans les champs feme's clair , dans les champs bien ae'res, bien laboures , bien farcle's , que dans ceux ou la quantity des mauvaifes herbes cntretient plus d'humidite' furies plantes environnantes ? Enfin, ( & cette railon eft pe'remptoire ) pourquoi n'y auroit-il jamais de germe dans Vergot ? Eft-ce que l'infecle qui pique le grain , commen- ceroit toujours par coniommcr le germe , lans en laifler jamais dans l'ergor. L'Auteur conclud , avec raifon , qu'on doit attnbuer Vergot au de'faut de fecondation , occafionnee par l'lmmidite' Ik les vapeurs qui em- Octosre i 7 7 I , Tome I. O o z9o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pechent l'effet des parties fexuelles , &c l'emiffion de la pouffiere fe'- condantc. Cctte Diflertation eft cerminc'e par nn de'cail tres-fuccint du fenti- ment des diffe'rens Auteurs, fur Je traicement de la cruelle maladie occafionne'e par le bled ergoti ; mais corame nous rendrons compte , dans la fuite, des Dijfertations de MM. Maret & Vctillard , nous ne parlerons point de ce que l'Auteur dit a ce iujet. Ce leroit une repe'- tition. M. Beguillet nous fait efpe'rer que 1'an prochain il fe livrera a de .nouvelles obfervations , qu'il fuivra exa&ement la progreflion du feigle, des qu'il commencera a epier , qu'il en fera avorter les germes par la fouftra<5tion des etamines. Nous devons a cet Auteur une excellente Diftertation latine fur les principes de la ve'ge'tacion , une (Enologie imprimce chez Defay, qui contient des recherches tres-curieufes fur la partie hiftorique de la vigne. Nous attendons avec impatience fon Traite' de la Mouture e'eonomique , qui s'imprime attuellement a Paris, par ordre du Roi. C'eft un ouvrage tres-coniide'rable. Nous nc faurions trop inviter l'auteur a fuivre une carriere auiU inftructive pour le public , qu'elle eft glorieufe pour lui. P. S. Pa l LAS, Medicinal Doctoris Mifcellanea Zoologica,quibus nova? imprimis atque obfeutx animalium fpecies defcribuntur & obfervationibus konibufque illuftrantur. Melanges ^oologiques de M. Pa L l A S , Docleur en Me'decine , qui contiennent la description de quelques animaux pea connus ; ouvrage enrichi de details inti- rejfans , & de planches en taille-douce. A Franc fort , fur le Mein, chei Fr. Warrentrapp ; & fe trouve a Paris , cht\ Briaffon , Li- braire, rue S. Jacques , r vol. in-40. de zz^. pag. r, n vain ferions-nous ardens a l'etude de l'Hiftoire Naturelle ; en vain, voudrions-nous en e'rendre les bornes , fi nous ne cherchons pas a detruire les abus qui le multiplient tous les jours. Nos biblio- jhcques,par exemple, fourmillent d'ouvrages fur l'Hiftoire Naturelle, parmi lcfquels on en trouvcroit a peine un qui offrit des oblervations -nouvelles. Ce n'eft qu'un amas de compilations informes , de fauna , de flora , fort inutiles, de fyftemes fmguliers, &c. tk il faut pafter, a ■corriger les fautes des Auteurs , un tems precieux qu'on pourroit em- ployer a quelque obfervation intereftante. Telle eft la reflexion judi- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i de terre, folanum efculentum. . . . Cet animal rumine. ... 11 paroit » que e'eft Vantilope que Bofman dit avoir trouve' dans la Guinee, & !> que les Negres appellent le petit roi des cerfs ». Quoi qu'il en foit, M. Pallas divife les antilopes en curvi-cornes , lyricornes , recli-cornes , contorti-cornes 8c fpiri-cornes. Parmi les curvi-cornes , les uns ont leurs comes qui fe recourbent vers le front, & les autres en ont qui fc recourbent fur le dos. De cette efpece font Vantilope leucophcta , Octobre 1771, Tome I. O o 2 29 1 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Vantilope rupicapra , Vantilope dama de Pline, ou le nanguer , V anti- lope reverfa , ou le nagor , 8c Vantilope tragocancelus. Les liry-cornes one leurs cornes doucement recourbees en deux, fous la forme d'une lyre antique. De cette efjpece lont Vantilope fa'iga , Vantilope doras , ou le faeinan de M. de Buffon , Vantilope gaytlle , Van- tilope kevel, Vanti'ope corine , Vantilope bufelaphus , ou le bubale. M. Pallas ne reconnoic que deux efpeces bien diftinctes dans les recli-cornes ; fc,avoir , Vantilope be\oartica , ou le pafan , 8c Vantilope grimme. Les contorti-cornes ont leurs cornes fingulierement contournees; de cette efpece eft Vantilope fcripta (guib. de M. de Buffon) 8c Van- tilope oryx ( Condous de M. de Buffon )• Les fpiri-cornes ont leurs cornes roule'es en fpirales, & font Van- tilope Jlrepficeros ( condoma de M. de Buffon , ) Vantilope cervica- pra, {ant Hope de M. de B. ) M. Pallas donne la defcription anato- mique de ces diffe'rentes elpeces Vantilope , 8c il paffe enfuite a celle du fanglier d'Ethiopie, dont aucun Auteur n'avoit parte avant lui. II eft plus grand que le pore des Indes. Sa tete eft monftrueufe; fa hure eft grande , large, un pen abaiffee , 8c de confiftance cartilagineufe ; fon nez eft mobile, coupe' obliquement, la gueule extremement petite. II n'a point de dents de devant; des gencives convexes 8c dures lui en tiennent lieu : fes defenfes a la machoirc fupe'rieure ont plus d'un pouffe d'epaiffeur, font recourbees; les inferieures font droites, plus cvafees 8c plus petites. Ses yeux, fitue's au haut de la tete, font fort petits, 8c plus pres des oreilles que dans le fanglier ordinaire. II a les oreilles mediocremenr grandes , un peu aigues , 8c munies inte'rieu- rement de poils blancs; il a des foies en petite quantite, & qui font repandues en faiiceaux fur fon corps ; les pieds reffemblent a ceux de notre fanglier; fa queue n'a guere que quelques lignes d'e'paiffeur. On lit apres cetre defcription , celle du cavia capenfis. M. Klein a le premier diftingue le genre des cavia, 8c M. Briffon , dit notre Au- teur , les a mal nomme's, en les appellant cuniculus. La denomination de M. Klein eft plus fimple 8c plus convenable. On trouvc dans Von- Linne't deux efpeces de cavia, qu'il a place, a l'exemple de Rai, dans le genre des rats. II n'en compte qu'un dans celui des lihres. Cepen- dant les cavia font tres-diffe'rens de ces deux families. Toutcs les efpeces de cavia ont, il eft vrai, quelque convenance avec les lihres; leur groffeur & la forme de leur tronc eft a-peu-pres femblable; mais les cuiffes pofterieures lont beaucoup moins longues ; la tete & les oreilles n'ont aucun rapport, 8c femblent tenir le milieu entre celles des porcs-e'pis 8c des rats. Les cavia ont la gueule 8c les dents du porc-ipi ; leurs pieds de devant fonr quadrifulces ; ceux de derriere tridaclyles , quelquefeis SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. i9} penta-daclyles , mais plus raremenr, ils n'ont prcfque point de queue. On ne remarque point de clavicules dans leur fquelette, & en cela ils different des loirs. Ils out une petite tete applatie, des oreilles rondes & nues , un poil roide & long, mais poli. Leur cri imite quel- quefois celui d'un petit coc hon ; ils marchent avec moins d'aoilite que les lievres. Le terns de leur porte'e eft court, 8c la mere met bas une famille nombreufe. L'Ame'rique eft l'afyle ordinaire des cavia ; e'eft dans cetre nouvelle partie du monde qu'on trouve les diffe'rentes efpeces; la plus com- mune 8c la plus connue de toutes, eft celle qui s'eft reproduite en Europe, cavia cobaya , on le cochon des Indes de M. de Buffbn. Les agouti ont encore beaucoup de reffemblance avee les cavia , aufTi bien que le cabiai & le paca. M. Pallas entre dans un de'tail trcs-e'tcndii fur le cavia du Cap. La description en eft bien faite , 8c nous pen- fons que les mefures donnees font exadtes. Cet article eft termine' par l'expofition anatomique de l'animal. La chauve-fouris eft le fujet de la quatrieme obfervation. « La nature » dit notre Auteur , a defigne le genre des chauve-fouris par des carac- » teres bien marque's; 8c je ne vois pas pourquoi M. Briilbn fait deux » genres des pt&opes 8c des chauve-fouris. Le nombre des dents a feul « pu occafionner cette divifion; mais il varie fi fouvent dans les » chauve-fouris , qu'il faudroit en laire quatre ou cinq aenres dif- « ferens, iii on y faifoit attention . . .. Si Ton vouloit abfolumcnt di- » vifer les chauve-fouris en diffe'rens genres, la prefence ou 1'abfence 3> de la queue pourroit fournir cettc divifion : en effet , quelques- jj uns dc ces animaux ont une queue , Sc d'autres en font Drive's. » Cette difference eft beaucoup plus fenfible ». M. Pallas donne enfuite une delcription tres-circonftancie'e de routes les parties de la chauve-fouris , 8c parte a celle de Ye'cureuil volant. Les Zoologiftes n'en connoiffent julqu'a prefent qu'unc efpece ; celui que M. Pallas de'erit eft prefque nouveau , ou du moins en eft-il tres- rarement fait mention dans les Auteurs. Cela n'eft pas e'tonnant ; on ne le trouve que dans les Ifles de l'Oce'an Indien , ou font alle's peu d'Obfervateurs. Valentyn , dont les recits font fouvent un peu douteux, qui d'autrefois cependant a de l'exactitude , nous a laifle quelque chofe fur cet e'cureuil. Son obfervation, quoique va^ue, 8c peu ioigne'e, fait reconnoitre l'animal, 8c en la lit avec Satisfaction. » A Gilolo, dit-il , aupres de Dodingo , on rencontre des civettes i> volanres: elles ont, comme les chauve- fouris , (obfervation inexadte) a des ailcs etenducs depuis les pieds de devant jufqu'aux poftjrieures « dont elles fe fervent pour voler d'arbre en arbre : elles ont une tres- r. longue queue comme les finges ( cercopitheci). Lorfqu'elles font en » repos , leurs ailes ne paroiffent point : elles font tres-fauvages le trcs- Octobre i 77 i , Tome J. 29^ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , » rimides. La coulcur de leur cere eft roufle , coupt'e par des taches » cendre'cs, & Ieurs ailes font revetues de poils en-dehors ; voila ce » qui les diftinguc dcs chauve-fouris (bonne observation ). Elles ont » des dents aigues, avec lefquelles elles fe creufent facilement line « demeure dans une nuit. II eft enfuite parle' de notre icureuil dans VHiftoire gen/rale des Voyages, ( t. xv. liv. 4. §. 9. p. 51.) oil il eft reprefente dans une gravure. L'Auteur rapporte que les habitans des Ifles Philippines ap- pellent cet animal taquant; qu'il eft de la grandeur d'un liivre , de la couleur'd'un renard , Sc que la diftance d'un faut a l'autre , excede trente palmes de longueur. Ce n'eft que dans ces deux ouvrages qu'on trouve des notions fur cet animal ; cependant M. Allemand en a donne une petite defcrip- tion dans un vol. in-8°. publie' a Leyde fur les quadruples. M. Pallas ne pre'iente la fienne qu'apres l'avoir ve'rifie'e lur trois individus de cette elpece , qu'il a fu fe procurer. « Ue'cureuil volant eft gros comme un petit lapin. Sa rete eft plus « ronde & plus grofte que celle de Xicureu.il ordinaire ; il a une mouf- » tache roide & noire; les dents d'un icureuil , & jaunes en devant; » les oreilles petites , nues & aigues ; fes pieds de devant font tetra- » daclyles. & fes pieds de derriere pentadaclyles. La membrane qui » s'e'tend entre {es pieds, occupe les pieds de devant jufqu'au carpe , » fe reflerre vers les hypocondres , & ne retient que les cuiffes des » pieds de derriere. Sa queue eft ronde , beaucoup plus longue que )> ion corps , 8c tres-velue. Le poil qui le couvre en-deftus eft roide , jj & celui de fa queue eft doux & laineux, auffi bien que celtii qui » eft en-deflbus : la couleur , au moins dans deux femelles que j'ai » vues , tire fur le marron ferrugineux tres-fonce , parfeme' de raches » noiratres, Mais un male que j'ai vu dans le cabinet d'un Curieux , « n'avoit pas la meme couleur ; fon corps etoit noir en-deflus , ta- >! chete de blanc ; les cote's de fa tete etoient marron , tirant fur le » roux : fa queue e'toit noire, & le poil de fes cotes d'un blanc fale j » mais il devenoit plus eclatant vers le milieu de fon corps ». M. P. de'montre dans l'artide fuivant, contre le fentiment de la plupart des Naturaliftes , que les myrmecophagos & les didelphis fe trouvent ailleurs qu'en Ame'rique , qu'on en a rapporte' des ifles Mo- luques , du cap de Bonne - Efperance , Sec. 8c ce dont il donne de tres-bonnes preuves. La defcription de la grue criarde ( a ) fuit cette importante Differ- tation. « Les grues tiennent le milieu entre les herons & les outardes. . .. ( a ) Nous avons rendu lc mot crepitans par criarde , il faudroit peut-etre micux dire pcteufc , pour imiter le fon qu'elle produit. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 29$ » J'ai etc a meme d'en examiner plufieurs , 8c fur-tout une d'Amc'- » rique, appellc'e pfophia par Barrerlle & le Chevalier Von-Linnee.. .. » Cet oifeau criard eft fort peu connu. . . Des de'tails fur fes mceurs 8c » fon genre de vie, feront tres - agre'ables. . . II eft a-peu-pres dc la i> grandeur du numenius arquata , un peu plus gros 8c plus court ; il i> a tout l'air d'une grue , a cela pres, que toutes les proportions de » fon corps font beaucoup plus petites que dans les grues ordinaiies ; » fon bee beaucoup plus court que celui d'une grue , eft preique fern- » blable a celui d'une outarde : fes pieds robuftes , e'leve's, nuds juf- » qu'aux cuifles , 8c titradaByles : I'onglet de derricrc plus court que » les autres, eft un peu e'leve de terre. .. Les plumes de fa tete font » lanugineufes, & cclles de fon cou en forme d'e'cailles •, il eft de cou- » leur noiratre 8c fombre : fon bee d'un jaune drain fur le noir, ou » plutot d'un verd fale , l'iris de fes yeux brun-jaunatrc. . . . J'ai vu » de ces efpeces de grues dans le pare du Prince d'Aurach.... Elles » e'toient tres-familieres & tres-prive'es.. . elles mangeoient du pain. » mis en morceaux , de la viande & des petits poiftons : leur cri eft » fort remarquable, elles ne le pouffoient pas en tout terns, lors meme » qu'on les y excitoit. Quelqucfois elles rendoient un fonrauque&inter- « rompu, (fcherek, fcfierei) 8c elles re'pondoient inte'rieurement par » un bruit fourd, & femblable au roucoulement d'un pigeon » Tels font les quadrupedes 8c volatils que M. Pallas confidere dans fes Milanges \oologiques ; fes defcriptions font bien fakes-, il parle en Obfervateur : la decence, l'honnetete' relpirent dans fes critiques: en un mot , il a faifi la vraie me'thode pour e'erire 1'hiftoire des animaux inconnus , ou qui le font fort peu. On trouve le meme ordre, le meme efprit de de'tail dans la partie de fon volume , oil il decrit quelques vers &c quelques infedes. Nous en rendrons compte dans la fuice. L E T T R E Sur un Nain monftrueux , txiflant acluellement dans la Ville de Lubni , en Ruffie , envoy e'e par M. D. a M. le Comte d e * * * Monsieur, Vous voyez que je ne neglige point de vous faire part des obfer- vations fur l'Hiftoire Naturelle , dignes de piquer votre curiofite'. Celle-ci (era fans doute de votre gout. Il s'agit d'un nouveau Bc'be, Octosre I 77 I , Tome I. \ 1 9 6 OBSERVATIONS SUR LA^ PHYSlQ UE , habirant de Lubni en Ruflie. II s'eft lui-meme deem en fa langue, on a traduitcette delcription pour en faire le&ure a l'Acade'mie de Berlin, & vous la trouvez dans cctte lectre: Pierre-Danilow Berclchny eft le noin de ce nain. II eft fils d'un Cofaque Podpornoghrchik, du Regiment de Lubni. Ses pere & mere, freres & fceurs , font de ftature ordinaire ; mais pour lui , parvenu a Page de trcnte ans, il n'a qu'une arching & un werfchoc. ou vingt- neuf pouces ttois quarts, mefure d'Angleterre , Yarchine contenant vingt-huit de ces pouces , & e'tant diviiees en feize werfchocs. Ce nain n'a point de bras , ies e'paules fe tetminent en petits moignons de chair : fa tete eft fi e'troitement liee a fes e'paules, qu'il eft difficile de mettre un doigt entre deux. Cependant, il n'eft pas laid a voir; au contraire , pour fon age, il a un air aftez revenant. 11 porte une grande mouftache qui lui va prefque jufqu'aux oreilles. II ne lui manque rien du cote' de l'efprit , du jugement & de la memoire. Il a la poitrinc applatie , 8c les jambes audi courbes que fi on les avoir retourne'es. II n'a pas de jointures aux genoux •■, les os font continus aux deux jambes jufqu'aux talons ; les gras de jambes font prefque entierement efface's , & n'ont aucune proportion avec 1? refte de fon corps , qui a Pair male. A chaque pied , il n'a que quatre orteils , y compris le pouce', & tous quatre recourbe's , dont deux feuls font mobiles. II marche fort vite ; mais quand il tombe , n'ayant point de jointures aux ge- noux, il ne fauroit fe relever. II e'erir fort couramment du pied gau- che , & fon carattere eft des plus lifibles, tant en Ruffe qu'en Latin. II fait des deffins a la plume auffi beaux que des gtavutes; il chante, il joue aux cartes , aux e'ehecs ; il fume , & remplit lui-meme fa pipe. II tricote des bas, & fe fait pour cela lui-meme des aiguilles de bois. II fe de'botte ; il mange du pied gauche : en un mot , il exe'eute une foule de chofes incroyables. Il te'moigne un grand defir de s'inftruire, & apprend avec beaucoup de facilite; auffi le Colonel , a qui il appat- tient , eft-il foigneux de cultiver ces heureufes difpofitions , & de fournir tous les fecours qui peuvent faciliter (es progres. Parmi les variations de la natute dans la formation de notre indi- vidu, il n'en eft peut-etre pas de plus finguliere & de plus tranchante, que celle dont le nain de Lubni nous offre l'exemple. J'efpere cepen- dant, Monfieur, vous entretenir une autre fois d'un nain raonftrueux , affez femblable a celui-ci, que l'lmpe'rarrice de Ruflie fait elever a I'Academie des Atts, &c qui n'a que quinze ans. Je fuis en attendant , Monfieur , &c. Berlin , ce i o Juillet ijji. HISTOIRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 197 HISTOIRE Du fyfle'me Tymphatique dans les oifeaux. Par M. Guiliaume Hew son , ProfeJJeur d' 'Anatomic ; on Lettre adrejfe'e a M. Guil- lavme Hunter, Docleur , Me'decin de la Societi Roy ale , tra- duitc de I'Anglois. Monsieur, J'A I eu le bonheur de dc'couvrir Sc de fuivre le fyfteme lymphs- tique des oifeaux. Apres avoir fait un grand nombre d'experiences dans cette vue , je mc hafarde de vous en offrir l'hiftoire (uivante. Je me Matte que ccttc dtcouverte iera regardce comrac tres-avantageufe a la Phyhologie. On avoit fuppofe qu'il n'y avoit pas de fyftcme lymphatique dans les oifeaux , Sc que dans cette efpcce d'animaux Yahforption etoitcon- duite par les branches des veines communes. Les Phyfiologiftes etoient entraines a fuivre cette opinion, en obiervant , que quoique les vaif- feaux lact.es Sc les glandes mefcnte'riques fufTent aifcment apper^us , meme dans les plus petits quadrupedes, ccpcndant les Anatomiftes les plus exafts n'avoient encore pu trouver dans aucun oifeau la moin- drc apparence de ces vaifleaux ou de ces glandes. La difhcu!te de de- couvrir ces vaifleaux lacles dans les oifeaux, etoit , fans doute , prin- cipalcment due a la tranfparence ou au defaut de coulturs dans le fluide qu'ils contienncnt. On trouve facilement les vaifleaux ladles dans les quadrupedes, parcc qu'ils font pleins d'un chyle trcs-opaque Sc blanc; au lieu que dans les oifeaux, le chyle eft aufli tranfparent , & de la meme couleur que les vaifleaux memes. Le defaut dc glandes me'lenteriques eft une autre caule qui nous a prives pendant fi long-tcms dc la connoiflance de ces vaifleaux. On peut dans les oifeaux, commc dans les quadrupedes , divifer ce lyftcme en branches ; (avoir , en lactees & en lymphatiques , & en leur tronc, ou conduit thorachique. En effet , a parler rigoureufemenr , dans les oifeaux les 1 site's lont les lymphatiques des inteftins, Sc les autres lymphatiques (emblablcs conduilent une lymphe tranlparente ; & au lieu d'un conduit thorachique , il y en a deux , dont un fe rend dans chaque veine jugulaire. Ceftdans ccscirconftanccs , qu'ilparoit que les oifeaux different des quadrupedes , autant que j'en ai pu j'uger par Octobre i 7 7 I , Tome 1. P p a98 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la diffection d'une oit , qui eft Voifeau que j'ai choifi, comrae le plug propre a faire ces recherches. Avant de parler de ces chofes , je vais d'abord donner la defcription de ce que j'ai vu , relatif a ces vaifleaux dans cet oifeau ; 8c pour mieux faire comprendre cette defcription, j'y ajouterai une figure du meme fujet , dans lequel ces vaifleaux ont ete remplis de mercure. Les lade's paflent des inteftins fur les vaifleaux me'fente'riques. Ceux du duodenum A, pi. I. fig. 9. paflent a cote du pancreas E, & pro- bablement regoivent fes lymphatiques ; enfuite , ils vont (ur l'artere cceliaque , dont le me'fenre'rique fupe'rieur eft une branche. Pendant qu'ils font (ur cette artcre, les lymphatiques du foie viennent fe joindre a eux B ; la, ils forment un re'feau, qui environne l'artere cceliaque C, C-, en cet endroit, ils regoivent un lymphatique du gefier D ; & un peu plus loin , un autre de la partie la plus bafle ou glandulaire de I'oefophage E. Quand ils font parvenus a la racine de l'artere cceliaque, ils font joints par les lymphatiques des caplules des reins; 8c aupres de cette merne partie, les lades des autres petits inteftins les joignent auffi ; ces derniers vaifleaux accompagnent l'artere infe'rieure du rne'fentere. Les derniers vaifleaux lade's, dont il vient d'etre parle' , avant de joindre ceux du duodenum , regoivcnt du recfum un lymphatique qui court avec les vaifleaux fanguins de ce boyau. Dans ces lymphatiques, paroiflent entrer quelques petites branches des rognons , lefquelles venant de ces glandes fur le rne'fentere du reclum , s'ouvrent dans fes lymphatiques. II eft probable qu'a la racine de l'artere cceliaque, les lymphatiques des extre'mite's les plus bafles joignent ceux des inteftins. Je n'ai pa encore (uivi leurs terminaifons, quoique je les aie vues tres- diftindement dans les vaifleaux fanguins de la cuifle; &c dans un fujet , que j'injc&ai , quelques vaifleaux e'toient 'remplis d'une maniere oppoie'e au cours des lymphatiques , dont le re'(eau eft tout pres dc la racine de l'artere cce'iaque; ces vaifleaux couroient derriere la veine cave, & de cote' & d'autre de l'aorte, pres de I'origine des arreres crurales ; & je pre'fume qu'ils e'toient les troncs de ces branches que j'avois vues dans la cuifle. A la racine de l'artere cceliaque, & fur la partie contigue de l'aorte, fe forme un re'feau des lactes & des lymphatiques, que nous avons dt'erits ci-deflus. Ce re'feau confifte en trois ou quatre branches tranfverfales , qui font une communication entre celles qui font late'rales. Dans le fujet cTaprcs lequel j'ai trace la figure, il y en avoir quatre. De ce re'feau fortent les deux conduits thorachiques G, G, dont Tun s'e'tend de chaque cote de Pe'pine, &c court fur les poulmons obliquement un pen au-d«fliis de la veine jugulaire, oii il (e divife L & N ; non pas en effet dans Tangle, entre la jugulaire 8c la fous-daviere, comrae dans le SUR L'HTST. NATURELLE ET LES ARTS. 199 corps humain , mais en dedans la vcine jugulaire , tour pres & a I'op- pofite de cet angle. Le conduit thorachique du cote gauche , eft joint par un large lymphatique H, qui court fur lcefophage, & peur erre iuivi aufll loin que la partie la plus bade ou glanduleufe de ce canal. II femble fortir de cet endroit , ou du gofier. Les lymphatiques du col (& probablement ceux des ailes ) fe joignent aux conduits thora- chiques , juftement ,dans l'endroit oil ils s'ouvrent dans les veines ju- gulaires. Les lymphatiques du col confident ge'ne'ralement (a) en deux branches tres-larges de chaque cote du col , qui accompagnent les vaifTeaux fan- guins. Ces deu:-: branches fe joignent pres de la partie infe'rieure du col, & le tronc eft en gc'neral petit, s'il n'eft pas plus petit que cha- cune des branches. Ce tronc court atrache' a la veine jugulaire I , I-; il le jette dedans , &c alors il s'ouvre en une glande lymphatique K , K. Du cote' oppofe a cette glande , fort un lymphatique , qui verfe la lymphe dans la veine jugulaire ; du cote gauche, la totalite de ce lym- phatique , joint le conduit thorachique du meme cote L ; mais a droite , une partie de ce lymphatique cntre dans la veine jugulaire, un peu au-defTus de Tangle M, tandis qu'une autre joint le conduit thora- chique, & forme avec lui un tronc commun , qui s'ouvre en dedans de la veine jugulaire, un peu au-deflous de Tangle que fait cette veine avec la fous-clavie're N. II eft neceflaire d'ajouter a cette defcription , que quoiqu'elle ait etc faite d'apres un feul fujet , cependant je n'ai rien vu de different dans trois autrcs de la meme efpece, que j'ai examines avec la plus grande atten- tion. J'ai particulieremenc obferve' le nombrc des conduits thorachi- ques, loup^onnant qu'il c'toit pofTible que les deux que j'avois vus dans ce fujet , ne fufTent feulement qu'une variete, qui eft une circonftance qui , commc nous Tavons dit , s'etoit rencontre'e meme dans le corps humain : mais dans les trois autres que j'ai aufli injecles tres-hcureu- fement, j'ai toujours trouve' deux conduits; e'eft pourquoi, je fuis tres-porte a croire que c'eftleur nombre conftant. J'ai de meme fcru- puleufement examine' les vaifTeaux qui viennent de la glande au cote droit : j'ai obferve que dans les deux feuls fujets , dans lefquels les lymphatiques du col e'toient proprement remplis, une de Icurs parties s'ouvroit immediatement dans la veine , & que Tautre joignoit le conduit thorachique de ce cote, pendant que du cote gauche, le vail- ieau qui (ortoit de la glande, joignoit entieremenr, le conduit thora- chique. Dans les quatre fujets, j'ai evidemment vu que les conduits thorachiques s'ouvrent au dedans des vcincs jugulaires. (a) Nous devons dire id , pour rendre juftice a 1'ingcnieux M. Hunter, que e'eft lui qui a decourert, il y a quelques aiuices , ces lymphatiques dans le col des uifc4ux. Octobre 1 7 7 1 , Tome I. Fp 1 joo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Le fyfteme lymphatique dans les oifeaux differe tout-a-fait du me me fyfteme dans les quadrupedes dans les points fuivans ; i°. dans le chyle qui eft tranfparent & fans couleur •, 2°. en ce qu'il n'y a point la de glandes lymphatiques vifibles , ni dans le cours des lacles, ni dans celui des lymphatiques de Yahdomen , ni proche des conduits tho- rachiques; 50. dans les diverfes parties de ce fyfteme dans les oifeaux qui lont plus frequcmment amplifie's ou variqueux, que dans les qua- drupedes. Ceci paroit particulierement etre la caufe des vaiffeaux qui conftituent le refeau a la racine de l'artere cceliaque dans le fujet dont on a donne' la figure. Les ladtes font louvent amplifie's en quel- ques endroits i il en eft de meme des conduits thorachiques; & les lymph.itiques de chaque cote du col font commune'ment plus larges, pris enlemble, que leur tronc , qui s'ouvre au dedans de la glande lymphatique. Dans un fujet oil au lieu de deux lymphatiques du cote gauche, j'en trouvai un feul , ce vaifTeau etoit de la grofTcur d'une plume de corneille; tandis que fa partie la plus baffe, qui entroit dans la glande, etoit plus petite. Telle eft l'hiftoire dont j'avois a parler : je demanderai maintenanr qu'il me foit permis d'oblerver que, comme le pretendu defaut de ce fyfteme clans les oifeaux avoit e'te confidere comme un fort argument en faveur de Yahforption par les veines communes, maintenant que nous avons reconnu 1'exiftence de ce fyfteme , cette the'orie doit etre tres-affoiblie. J'ajouterai pareillement que Yahforption lembie etre conduite dans les oifeaux , comme dans les quadrupedes, par ce fyfteme, Si en eft du moins la principale caufe : en effet, je fuis porte a le croire fans re'ferve; car les argumens que Ton emploie en faveur de Yahforption par les veines communes , ne me paroiflent pas auffi folides que les raifons que l'on petit apporter pour la combattre. II eft vrai que l'opinion contraire ell adopte'e par les plus favans & les plus exactes Phyfiologiftes de ce fiecle , qui, en traitant ce fu- jet, s'cxpriment de la maniere fuivante : « ce qui eft une preuve tres- » foite en faveur de Yahfo-ption par les veines communes, c'eft que, » ni les oifeaux , ni les animaux amphibies, ni les poijfons qui ont le » fang froid , n'ont aucun, le fyfteme laifte' ou lymphatique. La nature » oblcrve ordinairement une exatite analogie dans fes ouvrages, 8c » fait ufage des memes organes pour faire les memes fonclions. Or, » nous devons admetrre Yahforption dans les veines me'fente'riques n dans tous les animaux , excepte les quadrupedes & la haleine , (i dans 31 ces animaux il n'y a point d'autre voic par laquelle le chile puiffc » aller dans le fang : & fi ces veines abforbent le chile dans les oi~ » feaux & dans les animaux amphibies, il eft tres-probabic qu'elles " i'abfoibent de meme dans les quadrupedes, dans lelquels tiles exiftenr 1 egalement ». Mais l'cxiftence de ce fyfteme dans les oifeaux, n'eft SUR MIST. NATURELLE ET LES ARTS. 501 pas le feul faitqu'on puifle rapporter pour de'truire l'ancienne opinion; car j'ai vu tres-diftinctcment line partie de ce fyfteme dans un dcs ampkib:es,li tortue {a}. Je ne faurois de'terminer a pre'fent lequcl des deux fera trouve' dans les poijfbns. Depuis que j'ai de'eouvert ce fyfteme dans les oifeaux 8c dans la tortue , j'ai fait quelques recher- ches, il eft vrai , pour le trouver dans les poijfons ; mais jufqu'a pre'- fent , c'a ere fans fucces. Je penfc cependant, qu'il eft probable qu'ils ne font pas fans de tels vaifleaux , lorfque je confidere que les lym- phatiques iont fi gene'raux , qu'on les trouve dans les quadrupedes, dans les oifeaux &c dans les animaux amphibies. De plus, la confi- de'ration de l'e'tendue de ce fyfteme dans tant de clafles d'animaux, me porte a fuivre l'opinion trcs-probable que vous avanc;ates , il y a quelque terns , lorfque vous publiates votre de'eouverte fur l'ufage de ces vaifteaux , favoir , « Que les lymphatiques font les J'euls ab- » forbans [b ) ». Je vais maintenant rapporter la me'thode felon laquelle on peut de'- montrer ces vaifleaux en faveur de ceux qui voudront poufler plus loin cette recherche. La voici : apres avoir choifi une oie jeune & fort maigre , & l'avoir attachee fur une table , ouvrez Ynbdomen , tandis qu'elle eft encore vivante , & faites pafler une ligature tout autour des vaifleaux melenteriques, aufli pres qu'il fera poihble de la racine du me'fentere. Les lacle's commenceront a paroitre, pen de minutes apres que cela fera fait , particulierement fi Yoifeau a bien mange' trois on quaere heures avant cette experience. Les lymphatiques du col pour- ront etre montres de la meme maniere , e'eft-a-dire, en faifant une ligatured la veine jugulaire , dans la partie la plus infe'rieure du col ; & pour etre certains que les lymphatiques voifins (ont renferme's dans cette ligature, nous aurons foin de ne pas faire pafler l'aiguille trop pres de ce vaifleau. Pour les inje&er, il faut les ouvrir dans line partie convenable , 8c fixer dedans un tube bien net. Pour la plus grande iatisfadtion de ceux qui jugeront cet e'erit digne de leur attention, j'ai prepare deux oifewx dont les fyftemes lym- phatiques font pleins de mercure , pour les comparer avec la figure : (a ) La panic de ce fyfteme que je vis dans la tortue, e'toit les lade's. Je les ai rcmpls dc mercure amain que la racine du me'fentere, ou ils formoient un re'feau conlideVablc , dans Icquel entroit un \n(Xi de la raie , je ne pus pas les fuivre plus avant, ayant tinf le meTentere dehors de 1'animal, avant que j'eufle penfe a obferver ces vaitTeaux , parce que dans ce tems-la je ne m'occupois pas encore de ces recherches. Dans cet animal , les laites ont cela de commun avec ceux que j'ai ci-deflus de'erits dans les oifeaux , en ce qu'ils n'ont aucunes glandcs mefcnteViqucs. Cette circonftance & une autre obfervation que j'ai faite , me portent a croirc que lout le fyfteme dans cet animal s'accordcra trcs-exaclcmcnt avec celui que j'ai dixouvert dans les oifeaux. J'ai decouvert ces vailTeaux il y a long-tems , pendant l'liiver de 1 763 a 1764. (b) Voye\ les Commcntaires de M. Hunter, chap. V. Octobre J 7 7 1 > Tome I. joi OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , ilsont etc vus par plufieurs Membres de la Socie'te Royale, qui m'ont honore de leur pre'fence, tandis que les fujets etoient frais ; & qui onr enfuite e'te' fatisraits , comrae j'ofe m'en Hatter, de l'exaifre figure que j'en ai trace'e. M. Hewion prie qu'on lui permette d'ajouter , que depuis qu'il a remis entre les mains du Secretaire de la Socie'te Royale cet ecrit fur le (yfteme lymphatique dans les oifeaux, il a de'couvert le meme fyf- teme dans l?s poiffbns ; il a eu le bonheur de ie procurer une tonue dont il a de'couvert Sc figure le iyfteme lymphatique. Nous rendrons compte dans les volumes fuivans du fyfteme Iympha- tiques des amphibies Sc des poiffbns ; ces de'couvertes font neuves , bien detaillees , tres-precifes , elles interefferont furement les Natu- raliftes. AVANTAGE E C O N O M I Q U E Du pepin de raifin. J/1^ O U S ne faifons aucun ufage du pepin de raifin ; confondu avec le marc, il eft deftine a fervir d'engrais a la vigne; Sc s'il eft enterte affez profonde'ment pour lui empecher de germer , on le retrouve l'annee fuivante , & meme deux ans apres dans fon etat naturel, & propre a la ve'getation. La facilite que nous avons de marcoter les vignes, de les multiplier par des chapons , a fans doute empeche' de faire des obfervations fur cette graine. Nous dirons cependant qu'un particulier en a feme' avec beaucoup de foin, & qu'enfin il eft par- venu a fe procurer des vignes , dont les differentes efpeces ou varie'te's de raifins ont e'te' inconnues jufqu'a ce jour, & font trcs - propres a faire du vin. Cette experience donne une furieuie atteinte a l'opinion de certains (Enologiftes, qui affirment d'un ton de'cide' que le pepin ne >roduit qu'un raifin fauvage & entierement inutile pour faire du vin. Is appuyent leur fentiment pat I'infpedion d'une vigne fauvage , dont les haies & les buiflbns font furcharges, fur-tout dans les provinces un peu me'ridionales. Cette vigne fauvage eft une efpece vraiment dif- tindle de celle de la vigne cultive'e, dont les varie'tes ont e'te' muhiplie'es a 1'infini par la culture, les engrais, la nature du tetrein, &c. Le hetre eft «n vrai chataignier , & le chataignier un ve'ritable hetre , & pour nous expliquer plus clairement , ce font deux efpeces du meme genre. Nous leur demandons , le fruit du hetre peut-il etre employe aux memes ufages economiques que eclui du chataignier ? la reponfe eft la meme pout le fruit de la vigne fauvage Si de la vigne cultivee. Nous avons vu dans le Beaujolois Sc le Lyonnois, !', S17R L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 303 des vignes provenues du pepin de raifin , & dont le vin eft parfait. Un proprie'taire nous a aflure que ce vin poufloit beaucoup moins piomptement que les autres a la fermentation puttide. Nous nouj iommes pcrmis cette petite digreffion, afin d'engager les Obfcrvateurs & les Vigncrons a faire de nouvclles temarques a ce fujet, & a tenter quelques expediences. Les fucces pafles leur en promettent de certains pour l'avenir. Methode ufilie en Italie , pour faire Ihuile de pepin de raifin. On doit preferer, fi on a le choix , le pepin de raifin rouge ou noir, a celui des raifins blancs. It faut feparer avec foin les pepin de routes autres parties du marc de vendange , ce qui Ce fait par le moyen de l'eau. On jette le marc dans des baquets furfifamment remplis J'eau. On remue le tout pendant quelque terns avec les mains & les bras. On retire & Ton jette le marc qui furnage ; les pepins reftent au fond , & on peut les changer d'eau pour les laver ; e'eft ainfl, a-peu-pres, que Ton opere en petit , pour fe'parer la grainc du murier de la pulpe de la mure. Le marc qu'on a enle've , 11 e perd pas la proprie'te qu'il a de fervir de nourriture aux pigeons pendant l'hiver. II faut enluite faire fe'eher les pepins a l'ombre ou au foleil le plus promptement qu'il ell pollible : lorlqu'ils font parfaitement fees , on les paffe par un crible ; on les fait bien broyer fous la meule a fro- ment , & Ton re'pete une feconde fois l'ope'ration avec la meule en pied, comme pour le chanvre, le collar , Sec. Les pepins ctant bien triture's, on les met dans une ou plufieurs chaudieres, avec un peu d'eau, dans la proportion de deux pintes dans un demi-boiffeau-, on mele le tout avec (oin ; on place les chaudieres fur le feu; on continue de rcmuer la matiere avec une grande fpa- tule de bois, julqu'a ce qu'elle foit futfilamment cuite ; ce qui fe cort- noit, lorfque la (urface devient brillante comme de l'argent. On s'en aflure encore en prenant une poignee de la matiere; on ouvre & on ferine la main; fi la pate n'eft plus liee , 8c qu'elle fe divife d'ellc- meme en petitcs parties, lacoCtion eft a fon point. On retire alorslcs chaudieres du feu; on vcrfe ce qu'elles contiennent fur le preffoir & on exprime l'huile, qui, bientot, furnage l'eau. La qualite' de cette huile n'eft pas comparable a celle que foumiflenr les olives &c les noix- neanmoins les paylans du Parme'lan en mangent quelquefois; a Por- dinaire, ils s'en fervent pour la lampe ; & en brulanr, elle ne repand cucuneodeur. On l'emploie encore utilement dans le meme pays pour l'apprct des peaux de veau. II feroit tres-avantageaux d'introduire en France cette me'thode, cependant en y faifant beaucoup de correction : les grinds pays dc Octobre I 7 7 i , Tome I. 504 OBSERVATIONS SUR LA PHI'S TQUE , Vignoble* corarac la Bourgogne, le Beaujolois , le Dauphine, y trou- veroic un avantage red. M. de Mont-Rognon , Chanoine du Cha- pirre Royal de Savigny , pres de Lyon , s'etoit occupe' , il y quelques anne'es, a retirer 1'huilc du pepin; il eut la bohte de nous communi- cjuer ion travail & fes re'fulrats ; l'huile qu'il obrint , avoit contracts line odcur d'huile de noix, parce qu'elle avoit ete extraite fur un mou- lin deftine a cette derniere. Dep'Jis ce terns, nous avons fait quel- ques tentatives a ce fujet ; & en les publiant, nous mettrons fur la route ceux qui vondront les perfedtionncr. Premiere Experience. J'ai pris des pepins, apres avoir fait cgrainer le raifin , & avant qu'il eut (ubi la fermentation tumultueufe dans la cave, & j'ai extrait a froid l'huile qu'il renfermoit •, elle avoit un gout acerbe. Surpris de cette particularite', je penfai, apres un miir cxamen , que ce gout pouvoit lui etre communique' par une eipece de furpeau herbace'e, qui rccouvre le pepin (arillus) a-peu-pres comme le pe'riofte recouvre les os. Cette iurpeau a un gout apre , auftere, acerbe. Plus le raijtn approche du comple'ment de fa maturite, moins cette peau eft herbace'e ; clle eft exa&ement colle lur le pepin dans la maturite du raifin. SECONDS Experience. J'ai ouvert une certaine quantite de pe- pins; leur furpeau & Pamande qu'ils renfermoient , ont e'te' fe'verement k'pare's; cette ecorce coriace'e ou ligneuie du pepin frais, mife a la prefte m'a donne quelque gouttes d'une liqueur d'un gout moins aprc que celui de la iurpeau fraiche, & pas une feule goutte d'huile. Nous penfons que cette ecorce contient une fubftance refineufe; l'efprit-de- vin a femble' la de'montrer ; nous invitons a repe'ter cette expe'rience. TROISIEME EXPERIENCE. L'amande du pepin , goute'e fe'pare'- rrient, eft plus douce que celle de la noifette , &c on ne peut lui afli- gner aucun goiit dominant. Quatrieme EXPERIENCE. L'huile obtcnuc a froid du pepin re- convert de fa peau , e'toit tres-dojce , cependant mele'e d'aftriclrion. Son depot a ete confiderable apres quelques jours, & e'toit acre. ClNQUlEME EXPERIENCE. Nous avons pris des pepins apres que le vin a e'te' tire' de la cuve ; c'eft-a-dirc , apres qu'il a eu fermente' avec lui : nous avons re'pete les experiences precedentes, & l'huile a ete' plus douce : cependant le de'pot a e'te le meme, moins acre que le pre'eedent. SlXlEME Experience. Nous avons pris des pepins, dont le marc, apres avoir fermente', 8c dont on avoit extrait le vin , qui avoient eprouve une feconde fermentation dans le petit vin , e'eft-a-dire, dans le marc etendu dans l'eau , & foumis a une nouvclle fermentation. L'huile extraite de ces pepins e'toit plus douce que les deux autres. Ces diffe'rentes fermentations n'avoient point alcere' l'amande du pepin. II SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. )o$ II relulte des experiences , i "• que le pepin 8c fa furpeau fe dcpouil- lent en trcs-grande panic de leur aprete 8c de leur acrete' pendant la fermentation. Tout le rnonde en lent l'cethiologie, fans !a rapporter, fur-tout, fi ces e'corces contiennent une refine, comme je le pre'fume. 2°. Que ce feroit tin tres-grand avantage de fupprimer le pepin, autant qu'il feroit poflible, avant de mettre le raifin dans la cuve; le vin en feroit bien plus dc'licat. Ce confeil fera peu fuivi dans les pays, fur-tout, oil on defire plus la quantite que la qualite; jc ne le propofe done qu'aux amateurs. Nous confeillons de prendre les pepins de raijins , apres cette fe- conde fermentation, de les laver exaciement, de les fcparer de tout corps e'tranger; en un mot, de fe conformer au proce'de' fuivi en Italie, de faire e'erafer le pepin, 8c de le mettre tout de fuire au pref- foir , fans le faire travailler par le feu. L'huile qu'on obtiendra fera douce, agre'able, & de bon gout, & ptopre a etre employe'e dans les cuifines. Apres cette premiere expreflion , on jettera le marc dans des chaudieres, il fera delaye, divife' avec un peu d'eau , & enfuite foumis a Paction du feu , comme il a ete' dit. Cette huile aura un gout fort, &C fera trcs-bonne a briiler. La premiere huile, que nous nommons huile vierge , vaut infiniment mieux , & a tous egards, que l'huile d'o- live, telle qu'on la vend a Paris, a quinze &r a dix-huit fols. Toutes ces huiles forment un de'pot confiderable ; il faut les fous- tircr , fouvent comme les autres huiles , parce que la partie tcrreufe 8c mucilagineufe precipite'e, re'agit lur clle de la m£me maniere que la lie fur le vin , 8c elle devient une des ptincipales caufes de leur gout fort. Quand on bride cette huile, la damme eft vive , belle 8c claire; elle eft plus nette que cellc de l'huile de noix. Plus, l'huile de pepin eft vieille , moins clle donne de fume'e ; objet effentiel pour les fa- briques des e'toffes de foie. Les Fabriquans font chaque jour la trifte expe'rience des mauvais effets de la fume'e des huiles de navette 8c de colfat. Ces huiles donnent une fumce tenace, epaifle, qui fe raflemble en maniere de grumeaux , 8c tache les e'toffes en retombant. Nous donnerons quelque jour des moyens d'enlever cette tenacire dans la fume'e de ces huiles, en de'truifant une partie de leurs principes, fans nuire a la qualite, ni diminuer la quantite' de l'huile a btuler. L'huile de pepin ne fe figc qu'au plus grand froid ; &c unie avec un alkali , elle forme promptcment un ties-beau 8c tres-bon favon. Nous confervons depuis cinq ans, dans diffcrentcs bouteilles , une ccrtaine quantite de cette huile. Celle qui n'a point ete fe'paree de fa lie, a un gout fort 8c acre; elle eft moins claire que l'autre , 8c clle donne plus de fume'e -, l'autre, au contraire , eft claire, nette, & a beaucoup moins de gout & d'odeur. Octobre ill i , Tome I. Q q 3o XLVII. Et fur une autre face : Quatenus nobis denegatur diu vivere , ReUnquamus aliquii Quo not vixijfe teflemur. Cette colonne eft appergue de prefque tons les points du jardin , dont elle eft un des objets les plus remarquablcs. Inde'pendamment des payfagcs & champs du cote du pare , clle domine dans les jardins, line belle peloufe, qui fe termine de chaque cote par des bois, & vient (e perdre dans un profond vallon , au-dela duquel eft le fuperbe temple de la Concorde; a gauche , on voir le temple Gothique, la gran le arcale vers Buckingsham, 8c au-dela un agreable payfage. Ach v.z de parcourir la terraffe jufqu'a cette grande demi-lune qui la termine , & qui n'eft orne'e que de quelques grouppes d'arbres plante's fans or Ire : j'excepte toujotirs ceux qui regnent le long du mur & du fofle d'enceinte , dans tout le circuit des jardins. M. Whatcly a dtja obferve que e'e'toient la prefque les leules traces de fymme'trie, qui euffent e'te conferve'es a Stowe. La terraffe du nord eft ennere rient borde'e de bofquets & de bocages perccs tres-irregulierement. En ge'ne'ral , les arbres &c les arbrifleaux toujours verds, tels que les cypres, les ifs, les fabines, les thuya, les lauriers de toute efpece, les houx , les magnolia, &c. regnent princi- palement le long des bordurcs dans toutes les plantations de Stowe ; & les arbres, qui le de'pouillent de leur verdure, rempliftent l'interieur des bois, quoiqu'ils foient mele's d'arbres toujouts verds. Le commen- cement des bofquets de la terraffe du nord eft orne d'un pavilion octo- gone ouvert , orne de quatre termes en-dehors , & de quatre tetes de tellers en-dedans , avec une voute, qui fe termine en pointe. On l'ap- pelle le Temple de la Poefie Paftorale. A que'qucs pas du pavilion , vers Tangle de la terraffe , eft une ftatue repre'fentant la Poe'jie Paftorak; elle tient dans fa main une toile deroule'e, fur laquelle on lit ces mots pajlorum carmine canto. En fe promenant le long de la terraffe , on a pour perfpedtive d'im- menfes peloules couvertes de betes iauvages , & de toutes fortes de troupeaux, des champs, des villages, de vaftesforets perce'es d'alle'es a perte de vue, 2c l'obe'lifque de Wolfe. Qiiand vous etes parvenu au bout de la terraffe, vous etes arrete' par une porte de fer, qui ne s'eleve qu'a la hauteur de Palle'e : tournez a gauche, & percez quelques grouppes d'arbres, vous ferez agre'able- ment frappe de Tafpedt du batiment & des vignes. Le plus fuperbe SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 517 de ces jardins 5 c'eft lc temple Grec, dont la forme re&angulairc porte environ quatrc-vingt-huit pieds de longueur, fur cinquante-deux de largeur. II eft d'ordre ionique, Sc conftruit exadtement fur le modele du temple de Minerve a Athenes ; on monte par quinze marches, foils un fuperbe periftile de vingt-huit colonnes, qui regnent tout autour du temple , & dont le plafond eft fculpte en petits quarre's or- nes de rofes. Le fronton pre'fente en demi-relief les quatre parties du monde , qui apportent a la Grande-Bretagne les principals produc- tions qui les caracteriienr. C'eft l'ouvrage d'un habile iculpteur, ap- pelle Sehecmaker, dont les Anglois ont quantite'de beaux morceaux. Le lommet du fronton eft orne de trois ftatues plus grandes que le naturel , & celui du fronton oppofe en a autanc. Sur la frife du por- tique, on a grave cctte infeription : Concordia & Victories; fur le mur de face , aux deux cote's de la porte , qui eft peinte en bleu Sc en or , font deux grands medallions , fur l'un defquels font e'erits ces mots : Concordia foederatorum, &c fur 1'autrc : Concordia civium. Sur la porte, on a grave' ce paffage de Valere Maxime : Quo tempore Jalus eoru/n in ultimas anguflias deducla , nullum ambitioni locum re- linquebat. L'inte'rieur du temple eft d'une grande fimplicite. On y voit qua- torze niches vuides, inde'pendamment d'une autre niche oil eft place'e line ftatue, avec cette infeription : Libertas publica , & au-defTous de laquclle ou lit cet autre paffage de Valere Maxime : Candidis autem animis yoluptatem pra?buerint in confpicuo pofita , qua cuiqut magni- fica mcritb contigerunt. Au-defTus de ces niches, font autant de me'daillons, oil font repre'- fente'es , en bas-relief les conquetes des Anglois fur les Francois. Le temple Grec eft admirablement bien fitue', 8c domine tine magni- fique perfpective , prefqu'entierement compofee de bois Sc de peloufes. La vue (e portc imme'diatement fur un profond vallon de travcrfe entierement couvert de gazon , dont les cote's ont depuis deux cens cinquante , jufqu'a deux cens quatre-vingt pieds de talud. Au-dela du vallon, la fecne (e divile en trois ouvertures , qui, en parrant du temple , forment comme trois rayons divergens. Cellcqui eft a gauche, eft une clariere aftez etroite, au bout de laquelle on apper^oit l'obe'- liiquc qui eft dans le pare. Celle de la droite confifte en un beau rapis vcrd , termine' par la colonne Cobham. Enfin , la divifion du milieu, qui eft, fans comparaifon , la plus fuperbe, pre'fente, dans toute fa longueur , un large Sc profond vallon, marque par de pctites monticules & de legers enroncemens , & dont les bords fupeneurs fonc couronne's de beaux mafllfs, d'oii fe de'tachent quelques grouppes d'ar- bres julques dans le fond. Le long de ces bois ont etc places quel- ques grouppes de ftatues de plomb blanchi , dont les plus beaux fonc Novembre 1771, Tome I, jiS OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , ceux d'Herculc & Antee, 8c de Cain 8c Abel, morceaux pleins de vigueur. Ce rerrein couvcrt de gazon, 8c ces bois oil l'on diftingue toutes les nuance du verd; ces batimens, ces ftatues , tous ces objets places a une jufte diftance , compofent un point de vue qui e'tonne 8c attache le fpeclateur. Vous ne pourrez quitter ce batiment , oil regne tant de gout 8c de {implicit? , qu'aprcs en avoir fait le tour, plus d'une fois. Si de-la vous traverfez le vallon a droite, & enfuite la premiere alle'c qui fe pre'lente, vous de'couvtcz un e'difice fitue entre deux beaux tapis de verdure , & de vaftes bofquets •, e'eft le Temple des Dames. Vous entrez de plein pied (ous trois rangs d'acrades qui fe croifent quarre'menr , & forment neuf voutes a fix coupes , dont les points d'interfetlion font marques par une rofe. Le pave eft compofe' de petits cailloux, 8c vane' par des defleins de pierres planes 8c hcxa- goncs. Un efcalier affez joli , conduit a un fallon , dont les murs font orne's de peintures de Sleter; elles repre'fentent plufieurs Dames oc- cupies, les unes a des ouvrages d'aiguille, les autres a peindre ou a iouer des inftrumens. Ce fallon eft encore de'eore' de huit colonnes, & quatre pilaftres d'ordre ionique, & de marbre veine' rouge & blanc. Ce batiment a pour perfpeftive, d'un cote', le magnifique tapis verd ou vallon triangulaire , avec tousles objets qui l'accompagnent , tels que la riviere, le pont , le temple gothique, & le temple de I'Amitie'; 8c de l'autre cote' , une belle peloule de niveau, la colonne de Cob- ham, & la colonne roftrale. Defccndez le vallon au midi , en cotoyant le bois a droite, ju'qu'a ce que vous trouviez a la 'econde allee de tra^erfe, un petit cote.au rapide : defcendez ce coteau , 8c vous ne trouverez plus en vous pro- menant le long des trois pieces d eau qui (e fuccedent julqu'a la riviere, 8c rempliftent le fond d'un grand vallon, qu'une alternative de'licicu/c de bocages lombres , de pieces de gazon , 8c de petits lieux de repos. Le premier objet qui (e pre'fente au bas du coteau , 8c au milieu d'un ombrage e'pais, eft une Jolie g-otte , dont la furface cxte'rieure eft couverte de petits fdex, 8c de plaques de porcelame. L'interieur eft divile' en trois compartimens , dont les murs lont incrufte's de filex 8c de coquillages. La voute du milieu eft orne'e de glaces , dont la forme repre'fence un foleil. Les murs des deux autres divifions font aulfi couverts dc glaces , com me des chemine'es ; mais le plus bel ornement de cette grotte , eft une admirable ftatue de marbre , qu'on dit etre de Ve'nus, quoique fon air modefte annonce le contraire. Elle eft reprelente'e toute nue, de grandeur plus qu'humaine, a demi penchee, un genou en terre, portant une main fur fon fein , & jet- tant de r.auore une legere draperie, qui ne la couvreque tres-foible- ment. Ce morceau eft d'une grande ve'rite , 8c fur-tout d'un moelleux SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 319 que le cifcau attrape difficilement. Iramediatement derriere lagrotte, le terrcin s'clcve a pic, Sc il eft entierement couvert d'arbrifteaux, de lierres & de ronces. A la diftance de trois ou quatre pas de 1'entree dc la grotte , font placees deux jolies rotondes , l'une doriquc , l'autre ionique, coni- pofe'es chacune de fix colonnes , qui foutiennent une coupole. Les colonnes ioniques font torfes. Ces rotondes font entierement incruf- tees de petites pierres a fufil & de nacres. Lcur centre offre des grouppcs de quatre enfans qui fe tiennent par la main. M. Whately a remar- que que ces batimens e'toient (upcrHus dans une fcene aufll foiitaire. Tournez a gauche , en vous ecartant un peu du bord de l'eau , gagnez le bois, & vous trouverez un petit batiment fort fimplc , ap- pelle Cod-batte , ou les bains froids. Il contient un rc'fervoir plein d'une eau courante, dcftioe aux bains : il n'eft orne que de quelques me- daillons, ou font des tetes d'Empereurs Romams. Entre les deux rotondes, commence la premiere piece d'eau, ap- pellee la riviere des Au'nes, parce que cette efpece d'arbres abonde fur fes bords : elle coutient une petite ifle remplie d'arbrifteaux. Les eaux fe degorgent dans la feconde piece d'eau, fous un pont de ro- cailles couvert de lierres & d'aurres plantes rampantes, & forment plufieurs jolies cafcades. Sur le bord de cette piece d'eau, a cote du pont, e'toit autrefois un petit pavilion Chinois. En partant du pont de rocailles , fuivez le bord du canal a de forte , que cet ouvrage ren- ferme une excellente matiere me'dicale, & une bonne Pharmacopee. II feroit trop long de rapporter cc que l'auteur dit de chaque claffe en par- ticulier. Le lecleur verra avcc plaifir fes refiexions fur les medicamens en ge'ne'ral. Elles font plus que fuftifantes pour faire juger du refte de l'ouvrage. L'hiftoire des medicamens, dit M. Vitet, leurs effets fenfibles fur le corps du bceuf, du cheval 8c du mouton , les cas oil ils font indi- que's & contr'indiques , leurs dofes , & la maniere de les adminiftrer, font des objets de trop grande confequence , pour ne pas les e'tudier avec toute l'exadlitude pofllble. Les anciens, bien loin de nous avoir fraye une route facile dans ce genre d'e'tude , femblent l'avoir rendue plus fcabreufe. Ont-ils leulement oblerve que les remedes employe's pour le corps humain , ne font pas toujours utiles aux beitiaux ; Sc que la plupart des ve'ge'taux , dont les Me'decins retirent de fi grands avan- tages dans leurs pratiques , ne produifent (ouvent aucun effet fenfible fur le bceuf, le cheval Sc la brebis ? N'ont-ils pas imite' fervilement les Praticiens vulgaires , qui entaffent dans une formule , un grand nombre de medicamens qu'ils n'ont jamais e'prouve's feuls, Sc dont , par confe'quent, ils ne connoiffent pas les effets ? L'ignorance Sc l'in- te'ret (outiennent encore trop cctte pernicieufe me'thode, pour efpe'rer de la de'truire ; il faut en impoler au public aveugle, fans quoi , cet empyrique fourbe Sc ineptc paroitroit tel qu'il eft, & ie rendroit in- digne de la confiance de quelques tetes penlantes ; car , pour le peuple, il fe plait dans fon erreur , & cherit ceux qui le rrompent. Depuis Vegece , jufqu'a nos jours , quels progres ces Mare'chaux ont-ils faits dans la connoiffance des medicamens ? Conjectures , fables, obferva- tions douteufes , experiences mal faites , doles erronntes , indications mal faifies ; voila quel a c'te Sc quel eft encore l'e'tat de la matiere me- dicale. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. Jji 11 a done rallu, pour s'ouvrir unc nouvellc carriere, experimenter fur les beftiaux fains , comme iur les malades, les medicamens Ies plus ce'Iebre's par les aurcurs fnodqrne-Sj choillr ceux qui out paru etrc dc la plus grande cfficacice', les diftribuer par clafles felon leurs diffe'- rentes vertus , ranker les efpeces de chaque claife felon les regnes, en commencjant par le regnc vegetal , pour terminer par le r£gnc mine'i al ; en fin , difpoler les plantes, les animaux & les mine'raux, de manicre que I'ordre des vegecaux commence par les efpeces le: plus ioibles en vertu , 8c fe terminent graduellemenr par les efpeces les plus fortcr. Mais avant d'expofer les differcntes clafles de medicamens , il eft eflentiel de faire voir combicn la Cliymie moderne a avance les bornes de la matiere me'dicale , de retracer les avantages que la Me'decine Vdterinaire doit retirer d'un petit nombre de medicamens e'prouve's avec fucces lur lc bceuf, Ic cheval & la brebis ; de montrer I'inucilite de la plupart des preparations pharmaccutiques, & de donncr la ma- niere de confervcr les medicamens , de les preparer 8c de les admi- niltrer (ans alte'rer leurs vertus. En jettant les yeux (ur les e'erits des anciens 8c des modernes, il femble que les Chymiftes n'ont travaille a la decompofition des trois regnes , que pour trouver des fpecifiques contre les maladies dont l'hommc 8c les animaux, qui vivent fous fa dependance, font fans ceffe tourmentcs. Quel bonheur pour la locic:te' , fi l'expe'rience avoir confirme' leurs promeffes ! lis out bien de;couvcrt des objets intereflans pour les arts; mais pour les progres de la matiere me'dicale, ils font encore a nous de:montrer fi les mixtes 8c les compofe's retires des ve- ge:taux & des animaux, pat l'analyle chymique, out (ervi a de'tcr- miner les vertus des medicamens de ces deux regnes. Depuis Para- celle, julqu'a M. Rouelle, n'a-t-on pas vu des artiftes rerirer des ve'ge'- taux diverfes (ubftances ignore'es des anciens, fans cependant jetter une lumiere vive fur les vertus des medicamens. Les premiers Chymiftes ramafloient les plantes dans le terns de leur maturite ; ils en cxprimoient le fuc , 8c lc meloient avec des acides ou avec des alkalis. Si le fuc de ces plantes faifoit effervefcence avec les acides, & teignoit en verd le firop violat, ils concluoicnt que les plantes c'toient alkalines, ou contenoient un fel urincux ; au con- trairc, fi dies faiioient effervefcence avec les alkalis, & teignoient en rouge le firop violat, ils affirmoient qu'elles jouilToicnt d'une qualite acidc. Ils implotoient encore le fecours de la iaveur & de la fermen- tation. La faveur leur failoit reconnoitre des medicamens aufteres, acides, fale's , acres, amers , doux 8c infipid.es. La fermentation leur donnoit des produits ordinairemer.t alkalins , quand clle etoit pouflJc jufqn'a (on dernier pcriode ; quclquefois des produits acides, qui font le lecond degre de la fermentation, rarcment dc fpiritueux, parce qu'ils Nofembre i 7 7 i , 1'ome I. Tt2 3 3 1 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , nt prenoient pas afTez de precautions pour faifir l'inftant de la fer- mentation ou le vin fe forme. D'autres Chymiftes, peu fatisfaits de cette analyfe, eurent recours au feu : une cornue a. moitie remplie d'un ve'ge'tal aromatique ou inodore, & expofe'e a un feu gradue, leur donna , i°. une eau doue'e d'odeur 8c de favcur, fi la plante etoit aro- matique ; au contraire , prive'e de ces deux qualite's , fi elle etoit ino- dore; 2°. une eau charge'e d'une petite quantite d'huile effentielle em- pyreumatique ; 30. une huile d'une couleur jaune , & d'une odeur forte; 40. une liqueur acide, & une huile d'une couleur fonce'e, d'une odeur empyreumatique ,& d'une faveur acre-, 50. une huile noiratre , d'une faveur cauftique , & d'une odeur fetide ; 6°. pour re'fidu , un charbon qui , e'tant brule , fournit de la terre , 8c un peu d'alkali fixe. Cette analyfe parut moins e'clairer les Praticiens que la precedente, puifque de tous les ve'ge'taux , ils retiroient , a peu de chole pres, les memes principes. 11 n'y eut que l'eau aromatique , ou la premiere eau tire'e de la plante inodore , qui paffa pour jouir des principales vertus du ve'ge'tal. Des que les Chymiftes s'appercurent que le grand feu meloit & de'compofoit les mixtes & les compofe's du ve'ge'tal, ils en- treprirent d'attaquer les plantes avec diverfes menftrues. L'eau fut la premiere menftrue qu'ils mirent en ufage : pour obtenir tous les prin- cipes des vege'taux lolubles dans ce tiuide , & les fe'parer les uns des autres, ils firent macerer a une douce chaleur chaque elpece de plante dans une quantite d'eau proportionne'e a la qualite de la plante; en- fuite, ils firent cvaporer a un feu lent l'eau (ature'e des principes de la plante; par ce moyen , ils retirerent les fels eficntiels , le corps muqueux , l'extrait , le corps favonneux, les molecules aromatiques, la partie colorante de certains ve'getaux 3c le corps fucre. Perfuade's que l'efprir-de-vin n'alte'roit pas plus les plantes que l'eau , ils les cxpoferent a Paction de ce fluide, qui s'empara de la refine, de l'huile efientielle , du fel effentiel volatil, & du principc aromatique; alors, ils s'empreflerent d'adminiftrer aux malades chacune de ces iubftanccs, efpe'rant y rencontrer plus d'adlivite'que dans la plante; mais les fucces ne repondirent pas a. leurs efpe'rances. Parmi ces Chymiftes, il s'en trouva qui tacherent de perfectionner l'analyfe des vegetaux par le feu , en les diftillant a une chaleur graduee & incapable de les alte- rer ; au moyen degre' de chaleur de l'eau bouillante, l'eau de la ve'ge'- tation plus ou moins fature'e de parties aromatiques, s'e'leva de la plante odorante; & au degre de chaleur de l'eau bouillante , vint l'huile effentielle : mais au-deftus de ce degre' de chaleur , les mixtes ik les compofe's du ve'ge'tal fe decompolerent , &c fournirent les memes pro- duits que les vege'taux foumis a l'analyfe par la violence du feu. Qu'eft-il re'fulte pour la pratique de ces differentes analyfes des ve'ge'- taux ? A-t-oxi dccouvert des fpe'cifiques pour dc'truire le farcin, la SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 53 5 morve, &c. ? A-t-on fepare des plantes cauftiques la partic racdicamcn- rcufe de la fubftance nuifible? vous enleverez bien de la racine d'elle- bore 8c des mouches cantharides, par le moyen de l'efprit-de-vin, unc ■fubftance foluble dans cc Huide ; mais fercz-vous aftez pre'venu en faveur de l'analyfe , pour croire que toute l'efficacite' de ccs mcdica- mens confifte dans la parrie foluble que l'efprit-de-vin extrait, 8c quc cetre partie foluble dans l'e(prit-de-vin eft abiolument rc'fineufe? Si cela e'toit , la portion de l'elleborc & des mouches cantharides info- lubles dans l'efprit-de-vin , devroit ne jouir d'aucune verru ; cepen- dant l'cllcbore 8c les mouches cantharides font encore de violens cauf- tiques. Les qualite's d'un medicament confident done , pour l'ordi- naire, dans des parties infenfibles 8c folubles , dans les menftrues aqueuies & fpiritueufes ; ces parties ne lont done ni gommeufes ni refineufes ; mais d'une qualitc' inconnue, a caufe du de'faut de menf- trues ne'eeffaires pour les faifir , fans attaquer d'autres fubftances; car nommcr gomme tout ce que l'eau extrait d'un vcgc'tal , & refine les /ubftances que l'efprit-de-vin de'gagc d'une plante , e'eft fe mettre dans le cas de ne jamais de'couvrir les principes des fubftances me'dicamen- reufes , 8c s'expofer a donner des remedes violens pour des me'dica- mens doux : ne penfez pas non plus quc l'eau diftille d'une plante aromatique , poffede les qualite's de l'infufion , oil un fuc cxprime de la merae plante ; que l'extrait d'un ve'getal , de confiftance e'paifte on folide, 8c conferve depuis quelque terns, ne differe pas de fa decoc- tion ou de fon infufion, tk que le fel effentiel d'ofeille reffemble an fuc d'olcille. En faifant voir le peu d'avantage que la matiere me'dicale a retire de la Chymie pour la connoiffance de la vertu des plantes , je ne pre'- tends pas conclure qu'elle ne lui a e'te d'aucun fecours. Sans la Chy- mie, comment aurions-nous pu jouir de tous les produits de la fer- mentation? Comment les refines & les gommes fe purifieroient-elles? Comment feroit-il poflible d'obtenir des huilcs effentielles, des fcls eflentiels volatils , 8c des liqueurs faturees de mole'cules aromatiques ? Comment les me'dicamens infolubles par les humeurs des beftiaux devien- droicnt-ils folubles ? Comment faurions-nous faire paffer la plus grande quantite' de mole'cules me'dicamenteufes d'une plante dans un ve'hi- cule? 11 eft vrai quc cette partie de la matiere me'dicale eft dans fon enfance : la facile decompofition des mixtes & des compofe's du ve'oe'- tal, lera toujours un obftadc difficile a furmonter pour obtenir cet effet. II paroit que les fubftances mine'rales n'offrent pas les memes dif- ficulte's , 8c que de leur decompofition ou de leur melange, il en a quelqucfois refulte' des remedes d'une grande efficacite'. Le melange des acides mineraux avec les lubftances calcaires, gyp- Novembre 1 7 7 1 , Tome I. 334 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , feufes ou alkalines, a forme des fels neutres, en partie plus nuifibles qu'utiles; il en eft: cependant qui nous de'dommagent de I'inutilite' des autres; pat exemple, le tartre vicriole', l'alun, le nitre, 8c fur-tout le fel maris. Le foufre purifie eft de ces fubftances que l'art ne pcut rendre plus avantageux qu'il ne l'eft ; l'arfenic , de quelque maniere qu'il ait e'te traite' , n'a jamais trouve' place parmi les medicamens internes; le cobalt, le bifmuth , le zinc, malgre' les efforts des Chy- miftes modernes, n'ont foiirni aucune fubftance lalutaire auxanimaux; l'antimoine eft done le feitl des demi-me'taux dont ils aicnt retire quel- ques avantages •, plus ou moins prive de phlogiftique par la calcina- tion ou la dc'tonation du nitre, il fournit des compofe's, dont les vertus font connues de tous les Marechaux. Le mercure combine avec diverfes matieres a donne' une infinite de produits , dont l'obfervation Sc l'experience n'ont pas confirme' fur le becuf , le cheval Sc la brebis , les eftets celc'bres par les Ma- re'ehaux. Je fuis meme perluade' , qu'il auroit mieux valu,pourle bien de la Me'decine Vfoerinaire , que les fels neutres n'euffent jamais ere' de'eouverts; car les Marechaux , peu rebute's des mauvais effets de ces preparations , ne ceffent de les adminiftrer pour routes les ma- ladies rebelles aux traitemens ordinaires. De l'etain, on n'a retire' aucune preparation utile; du fer on a obtenu des remedes qui nc demanderoient qu'une main habile pout les rendre celebres. Du cuivre , il eft ford le vitriol bleu & le ver- dct; duplombje fel de faturne ; de l'argent , la pierre infernale; encore cette dernicre preparation eft-elle trop di/pendieufe. Le petit nombre de remedes que fournit le regne mineral , ne doit point decourager ceux qui travaillent a enrichir la Matiere medicale, au contraire , il y a lieu d'elpe'rer qu'un heureux melange de fubf- tances me'talliques avec d'autres matieres , pourra former des fpe'ei- fiques contre les maladies les plus opiniatres. Quand le Chymifte ne nous offriroit qu'un tres- petit nombte de medicamens tire's des trois rcgnes, pourvu que leurs effets &: leurs dofes fuffent bien conflates par de bonnes obfervations , il rendroit a l'Art Ve'terinaire un grand fervice: par-la, il de'voileroit ces empi- riques qui croient avoir des reffources infinies pour le traitement des maladies , parce qu'ils ont la me'moire furcharge'e d'un grand nombre de me'dicamens , dont ils connoiffent a peine les vfais noms, & qu'ils donnent fouvent au hafard , pour occuper l'efpace d'une formule qu'ils fe font propofc' de remplir. Ne feroient -ils pas plus inftruits fur la connoiflance des me'dicamens , s'lls avoient employe' tout leur tems a en eprouver un tres -petit nombre iiir les animaux fains comme fur les beftiaux malades? Quarante ou cinquante plan- res , connues par leuts effets , ne font ellcs pas preferables a fept 0(i SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 555 huit ccns plantes done a peine on fait le carac"ccre effcntiel , les lieux ou ellcs croiffenr, le terns ou elles fleuriffent , leur dure'e & la ma- niere dc les eulciver? Jettcz un coup d'ceil fur l'hiftoire des me'dica- mens ; les ecrivains qui ont fuccede a Diolcondc , n'ont certaine- ment rien ajoute aux vertus des vc'ge'taux enoncees dans cet Auteur. lis ont retranche ce qui repugnoit a la vraifemblance , aux theories du terns, Sc au gout du fiecle ou ils vivoient; lis ont feulement fur- charge la Matiere me'dicale des plantes exotiques , & ils le font co- pie's les uns apres les autres , fans avoir e'prouve les vertus qu'ils ont tranferites. Eh! comment les auroient-ils e'prouvces , puifqu'ils ne fe font jamais mis dans l'heureufe neceflite' de prefcrire un feul medicament pour une affection particuliere ? En effet , quel cas pcut- on faire d'une obfervation de pratique fonde'e fur l'adminiftration des remedes les plus complique'es ? Que je faffe prendre a un cheval une once d'aloes luccotrin , cv autant de feuilles de fe'ne , 1'animal fera purge'. Mais lequcl des deux medicamens a agi Sc produit les bons effets de la purgations ? Je n'en fais rien •, par conlequent me voila dans l'impofibilite de rien e'tablir de certain fur les effets par- ticuliers de chacun de ces remedes; cela feroit-il bien plus lenfible, fi je donnois au bceuf, pour le faire fuer, un breuvage compole' de theriaque , dc fuie de cheminee Sc de vin? La the'riaque contient en- viron cent medicamens de diffe'rentes vertus; la fuie de cheminee n'agit point comme la theriaque , & le vin comme la fuie de che- mine'e : comment done decouvrir les me'dicameus qui ont le plus ex- cite' fa lueur ? II faudroit pour cela les avoir adminiftrcs chacun en particulier , avant que de les meler ; encore le me'lange devroit fe faire par gradation : deux plantes, en apparence de meme vertu , peuvent agir differemment lorfqu'elles font melees ; ainfi , nouvelles expe'rienccs, nouvclles oblervations. Mais quel eft l'homme qui ofc fe flatter, dans l'efpacc de vingt ou trente annees de pratique, de determiner d'une maniere exade les vertus de toutes les plantes qui croiffent dans fon pays? Autoit-il rccours au Botanifte plus inf- truit fur le caractcre des plantes que fur leurs vertus? Au Chymifte, plus occupc' a feparer les principes des vegetaux , & a reconnoitre leurs qualites , qua les effayer iur les animaux ? Se contentera-t-il de les adminiftrer feules une fois ou deux fur le fujet malade ? Le nombre des plantes eft trop confide'rable , &c il eft fi difficile de rencontrer Jorlqu'on eft a porte'e de faire des expe'riences , toutes les elpcces de maladies , dont les beftiaux peuvent-etre affectcs ! S'en tiendra-t-il aux obferv.uions des homines celebres fur les effets Sc les vertus de certains me'dicamens? On a vu fi fouvent l'expe'riencc faire e'clipfer les louanges qu'ils en avoicnt donne'es , qu'on ne doit jamais s'en rapporter qu'a foi - meme , fur-tout quand il s'agit d'un fpe'eifique Novembre 1 7 7 1 , Tome I. ?3« OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pour une maladie qui rcfifte a tous les remedes connus. II fain done bien de l'amour pour la ve'rite , des moyens , de la conftance & du jugemenc , pour affigner avec juftefle &c certitude les effets d'mi me- dicament 8c les vertus. O vous qui entreprenez l'examen particulier des medicamens , at- tachez-vous a les choifir dans toute leur purete' ; adminiftrcz plu- lieurs fois le racrae medicament a differens lujets de la meme efpece; augmentez la dofe du me'dicament par gradation , juiqu'a ce que vous vous apperceviez qu'il produiie des eftets fenfibles •, ayez tou- jours egard a Page , au temperament, & a l'elpece du fujet , .i l'air, au pays, aux exercices, a la nourriture 8c a la faifon. Les animaux , tain qu'ils font jeunes , e'tant plus dclicats 8c plus fenfibles que les adultes , eprouvenr de la part des remedes une irritation plus gran- de ; auffi la dole des medicamens doit etre relative a l'age , 8c augmen- ter a mefure que les animaux approchent de l'etat adulte 8c de 'la vieilleffe. Les me'dicamens agiffent avec plus de force iur les ani- maux vifs , impetueux & coleres , que chez les animaux laches & infenfibles. La varie'te' de l'age 8c du tempe'ramment n'a jamais catt- le des differences auffi confide'rables dans les effets fenfibles des re- medes que la diverfne des efpeces d'animaux ; puifqu'il fe trouve des medicamens qui purgent le cheval , & ne produifent aucun effec fur la brebis •, d'autres qui excitent le cours des urines du bceuf , 8c qui font iuer le cheval; quclques-uns qui rafraichiflent le bceuf & le cheval , 8c purgent la brebis. Cell done une erreur de croire qu'il fuffit d'augmenter la dofe d'un me'dicament , en railon de la grandeur & de la force de l'animal , de quelqu'efpece qu'il foit , pour obtenir le meme effet. Cependant, je ne condus pas que tous les me'dicamens agiffent d'une maniere differente fur chaque efpece d'animal. II en eft; un grand nombre , dont Paction (e re'duit a etre la meme , comme il eft une infinite' de plantes qui fervent de nourriture indifferemmem a tons les beftiaux; tandis que plufieurs font mortelles aux uns, nui- fibles aux autres, & falutaires a certains. Plus l'air fe trouve fee & pefant, plus Paction d'un medicament eft: prompte ; au contraire , lorfque l'air eft humide, leger, Paction du remede eft lente : ainfi le vent du nord facilite les effets des me'di- camens , & le vent du midi les retarde. Qu^un bceuf, habitant des bois & des montagnes , ou l'air eft: pur 8c les alimens de bonne qua- lite', vienne a tomber malade , il fera plus difficile a purger , qu'un bceuf tenu dans une e'eurie exactement ferme'e , & nourri de bon foin : mais il e'prouvera plus d'irritation d'un me'dicament qui paffe dans les fecondes voies. Si un cheval vit dans un climat tempe're , il fera moins fenfible a Paction des remedes, que celui qui habite un pays ehnud ; les beftiaux qui paturent da,ns des tcrreins mare'eageux , ou qui font SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ?57 loiit renferme's dans des e'curics infc&e'es par le long fejour dcs urines & de- la fiente, rc'fiftent plus a l'adtion des remedes, que ceux qui parcourent les prairies des montagnes, 8c prennenr leur repos dans des ecuries propres 8c bien aire'es. Les medicamens produifent des etfets plus prompts 8c plus confide'rables fur les animaux laches , foi- bles, delicars, 8c adonne's a la molleffc, que fur les animaux libres, vigourcux 8c accounting's, des leur enfance, a faire de violens exer- cices. Pendanc les rigueurs de l'hiver, les remedes demandent d'etre prefcrits a une dofe plus forte qu'au milieu de l'e'te'; & dans le prin- tems , ils agiflent plus foiblement qu'en automne. Qu'il feroit a fouhaiter que les Praticiens fe fuflent plus occupe's a e'prouver fur les beftiaux trente ou quarante des medicamens qui paflenr pour les plus aclifs , qu'.i chercher la maniere dont les medi- camens agiflent fur les fluides 8c les folides des animaux : vous auriez une matiere medicale courte, mais certaine , au lieu d'hypothefes ou de fyftemes, fonde's fur des experiences tres-vagues. Si vous etes curieux d'apprendre combicn ces experiences font incapables d'en im- poler a ceux qui re'flechiffent ; prenez d'un cote' du fang re'eemment tire' d'un cheval, que vous mettrcz avec du fuc de feuilles d'ofeille; d'un autre cote, verfez quelqucs gouttes d'efprit de nitre fur une autre portion du meme fang. Laiffez repofer ces deux melanges dans des vafes de meme figure , 8c expofe's a un egal degrc de chaleur ; vous obtiendrez, a peu de cliofe prcs,dc femblables effets. Deduirez-vous deli que l'acide nitreux agit fur les fluides 8c fur les folides , corarae le fuc d'ofeille > Prenez de l'infufion de racine d'ange'lique , que vous verferez fur du fang de bceuf ; melez avec une egale quantite' du meme 4&ng > de la decoction de racine d'ellebore blanc j au bour de douze heurcs , ces deux melanges vous ofFriront les m ernes re'fultats. Direz- vous que l'infufion d'ange'lique agit fur le fang , comme la decoc- tion cc racine d'ellebore ? Si vous concevez l'impoffibilitc ou l'on eft de condure de ces expediences , la maniere d'agir des medicamens, vous vous perfuadercz facilcment que les mole'cules me'dicamenteufes, mues avec le fang dans des vaifleaux doue's d'un mouvement, & d'une chaleur fcnfiblc, agiflent autrement que fur du fang en repos 8c foumis a l'adlion de l'air. Ceux qui fe font imagine's de remedicr a cet incon- venient par l'injeclioii d'un remede dans les veines de l'animal vivant, ne fe font pas moins c'gare's. L'introduiftion d'un fluide etranger dans les vaifleaux languins augmente leur diamttre, gene la circulation , produit des mouvemens linguliers dans les organes vitaux , £c fait mourir , en peu de terns, l'animal au milieu des convulfions les plus tcrriblcs •, le mouvement du fang retarde' , les violents efforts des . organes vitaux, pour chaffer le liquide furabondant , font autant d'obf- tables qui s'oppofent a l'adlion des molecules me'dicamenteufes fur le Noi'embre I 7 7 I , Tome I. V v 33 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQVE , fang , ou qui le font agir d'une autre maniere , 8c qui mettent Ie Pra- ticien dans lc cas de ne pouvoir rien ftatuer de certain fur de pareilles experiences: d'ailleurs, lesqualite's du fang ne varient-elles point chez tous les animaux de la me me efpece ; & le meme animal n'a-t-il pas le fang plus on moins fluide & colore' dans divers terns de la journee ? Tant qu'on ne prendra pas d'autre route pour decouvrir la maniere d'agir des remedes lur le corps de l'animal, on ne parviendra jamais au but qu'on fe propofe. Si les moyens vous manquent, tenez-vous- en done a obferver les effets , les vertus , 8c les dofes de chaque re- mede ; par-la, vous aurez I'avantage de voir difliper ces melanges in- formes de me'dicamens que le Mare'chal conduit par l'interet, l'igno- rance 8c le droit qu'il s'eft arrogc' de tromper les fots , a enfante's, & foutient contre les efforts redouble's du Praticien inftruit 8c de'iin- te'reffe'. En vain les elecfuaires , les confections, les conferves, les opiates, les fyrops, les baumes, les linimens, les charges , les pommades, les onguens, les emplatres feroient a I'abri de toutes infultes dans les Pharmacies des Empyriques ; il faut que le Praticien e'claire eleve la voix contre ces compositions abfurdes, 8c fe fafTe honneur d'en pu- blier les mauvaifes qualite's. N'e'coutez point les difcouts frivoles de ceux qui affurent d'un ton grave qu'on eft audi certain des effets d'une preparation compofte d'une infinite de drogues , que d'un feul medi- cament; parce que l'un & 1' autre tendent a la meme fin , e'eft-a-dire, a purger ou a faire uriner, ou a exciter la fueur, &c. lis vont bien plus loin lorfqu'ils parlent des e'ledhiaires fi fameux nar leur antiquite' ; ils n'ont e'te' compoie's , difent-ils , que pour corriger Taction trop vio- lente de certaines drogues fimples , pour augmenter la vertu de plu- iieurs autres , pour unir par le melange & le mouvement inteftin, toutes les vertus des me'dicamens en une feule , pour conferver plus long-terns les me'dicamens dans leur inte'grite' ; enfin, pour les mettre en e'tat d'etre pris avec plus de promptitude 8c de facilite. II faut bien etre aflervi fous le joug des pre'juge's , ou tenir opi- niatrement a l'antiquite, pour pre'tendre que les molecules me'dica- menteufes fe corrigent mutuellement en melant quarante a cinquante me'dicamens d'une Jqualite' oppofe'e, d'une vertu 8c d'une force infe'- rieure; pour cela connoit-on les principes qui compofent chaque fuh- ftance ? A-t-on expe'rimente' qu'en melant deux drogues , elles fe de'- compofent mutuellement pour fe combiner de maniere qu'il n'en re'fulte qu'un feul corps? Penfe-t-on qu'il en eft du melange d'une plante cauftique avec une plante mucilagineufe, comme de celui d'une acide concentre avec un alkali fixe ; 8c que d'envelopper d'une fub- ftance huileufe ou muqueufe, les parties fubtiles d'un me'dicament, e'eft le corriger ? Ce feroit faire trop peu de cas 4'uu Marechal , que SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 559 de lui fuppofer des idc'es fi eloignees de la faine Chymie & de la bonne pratique. II y a meme dcs Mare'chaux, qui, fans cere inities dans les connoiflanccs pharmaceutiques 8c chymiques , rougiroient de fc fervir des elecluaires, des confections, des opiates 8c des fyrops qui ont fubi un commencement de fermentation, malgre le te'moignage de cer- tains artiftes qui leur affurent que la fermentation en eft le corretftif , & qu'elle unit tomes les vertus des me'dicamens en une feule. Mais je demande a ces perfonnes intereffees a avoir tant de veneration pour les remedes des anciens, qui leur a appris le jufte degre de fermenta- tion dont les e'le&uaires doivent jouir pour avoir telle vertu ? Sont- ils maitres de graduer la fermentation de cet affemblage confus de drogues de diffe'rentes qualites ? De ce qu'une multitude de plantcs decompofees dans les organes des premieres voies, donne une li- queur nutritive , nominee chyle; de ce que le fuc exprime de plufieurs fruits e'tant foumis a la fermentation, fournit du vin ; de ce que plu- fieurs plantes entaffees produifent, par le moyen de la fermentation putride, de l'alkali volatil, doit-il s'enfuivre que le produit de la fermentation qui s'opcre dans les elecluaires , foit toujours le meme ? Les baumes moins accredited chez les Mare'chaux que les eledfuaires, a caule de la cherte de l'efprit-de-vin, des refines, des huiles efTen- tielles & des plantes aromatiques qui en font la bafe , doivent etre rejette's de la pratique par rapport a la multitude des molecules me- dicamenteufes de differente nature qu'ils contiennent. Quand meme Pe(prit-de-vin ne s'empareroit que des huiles effentielles, des re'fines, 8c des mole'cules aromatiques; les diverfes qualite's des refines, des huiles efTentielles, & des mole'cules aromatiques rendroient toujours les effets des baumes incerrains : line des qualite;s qui augmente le plus leur me'rite , e'eft qu'ils pattern pour fe conferver des annees endures fans fouifrir aucune de'eompofition. Cependant , par le moyen de I'odorat & du gout, on peut juger que leur odeur Sc leur faveur change (eufihlement au bout de cinq ou fix mois; 8c fouvent on voit fur les parois du vafc qui les contient , des fubftances comme hetc- rogenes qu'ils de'pofenr. Les linimens, le*; charges, les pommades, les onguens 8c les em- platres, out Ieurs panegyriftes, ainfi que les eleinte de lie. Nous avons commence' nos expediences , difent-ils , d.ms eur rapport, par la de'guftation , plurot pour fatisfaire a l'ufage, que pour en tircr aucune confequence fur la nature de ces vins ; ils nous ont paru fort agreables , n'ayant ni gout d'event, hi faveur f'ueree ni amertume. Les vins memes qui e'toient en vuidange depuis quelques jours , n'etoient point infc;rieurs en qualite' aux pre'ct:den,s : les vins ap- pelle's chauds , nous ont paru beaucoup plus vigoureux que les autres, a raifon du fpiritueux qu'ils contiennent ; tant de bonnes qualites rc'unies etoicnt bien capable de nous de'terminer a porter un ju"emenr. favorable fur leur nature; mais perfuade's qu'il n'y a pas de moyens plus propres a induire en erreur que la de'guftation , puifque fuivant les differences qui fe trouvent dans l'organe du gout , relativemcnc aux difterentes affections de l'ame, les uns prennent avec plaifir ce que les autres rejettent avec beaucoup de repugnance , nous avons eu recours a l'analyfc chymique, comme la leule capable de de'couvrir la nature des principes qui compofent le vin ; & nous y fommes par- venus en fuivant les deux routes que la Chymie nous ouvre, celle de la fynthefe, 8c ccllc de l'analyfe, Nous avons d'abord foumis ces vins a Taction d'un re'actif connu fous le nom de foie de foufre. Lorfque le vin eft pur, le foufre, an moyen de facide contenu dans ce vin , doit fe leparer d'avee Tal- ka'.i fixe auquel il eft uni , & fe pre'eipiter fous la forme d'unc poudre blanche. Si, au contraire, lc vin tient en diftolution quel- que fubftancc metallique, le precipice eft de couleur noire, comme NorEMSRE 1771, Tonic I. ?4t OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, on peut s'en convaincre en lithargirant du vin, 8c y appliquant du foie de foufre. Cette experience re'pe'te'e fur les foixante-deux pieces de vins qui nous ont ete remifes , a donne les memes refultats, c'eft- a-dire que le pre'cipite a ere blanc, mais d'un blanc un peu terne, a caufe de la partie colorante du vin qui doit ne'ceffairement en obf- curcir la blancheur , vu l'alteration qu'elle e'prouve elle-meme dans le moment que l'alkali fixe abandonne le foufre, pour s'unir au tartre. Les vins appelles chauds, ont donne un pre'cipite plus fonce', parcc qu'ils font plus hauts en couleur. D'apres ces experiences , on eft en droit de conclure que ces vins ne contiennent rien de me'tallique, 3c par confe'quent , rien de nuifible en ce genre a la fame. Mais ces moyens ne nous ayant pas para fuffifans pour demontrer l'exiftence des fubftances me'talliques que Ton a employe' plufieurs fois pour enlever au vin fon acerbe , nous avons eu recours a d'autres expe'- riences, done on verra plus bas le de'tail. Cherchant enfuite a connoitre la nature de la partie colorante de ces vins, 8c le genre d'alte'ration dont elle e'toit fulceptible par les reacfifs , nous leur avons applique de Phuile de tartre par de'faillance. La partie colorante, quand elle eft due aux raifins, fe de'truit a mefure qu'elle fe combine avec l'alkali qu'on lui pre'fente , 8c il en refulte line couleur verdatre , obfeure , qui fe retablit lorfqu'on verfe deflus un acide, qui, formant alors une nouvelle combinaifon avec l'alkali, brife la premiere. Il faut cependant obferver que la couleur ne reparoit jamais avec la meme intenfite; parce que dans ces differens mouve- mens de combinaifons , il arrive neceflairement une deftrudtion d'une portion du corps qui eft foumis. Tous les refultats ont ete' les memes, & ils n'ont difrere' qu'en railon du plus ou du moins d'intenfite dans la couleur de ces vins. Les liqueurs colorees avec le caflis , la merile , ou avec les bois de teinte, prefentent des effets tout diffe'rens. Nous n'avons appergu dans ces expe'riences aucun pre'cipite qui annoncat que ces vins euffent e'te debarraffes d'un acide furabondant par l'application d'une terre abforbante. Voila ce que les reaclifs nous ont appris ; mais ces agens n'etant pas fuffifans pour donner une ide'e bien jufte de la combinaifon du vin , & n'etant pas affez de'monftra- tifs pour faire porter un jugement certain fur fa nature , nous nous fommes mis en devoir de fe'parer toutes les parties qui compofent levin, pour les examiner les unes apres les autres, pour voir fi elles lui appartenoient eflentiellement , 8c Ci elles y e'toient en des propor- tions convenables. Nous avons a cet effet foumis a la diftillation huit onces de chacun des vins chauds ; nous en avons retire une once de liqueur fanscouleur rranfparente, ayant l'odeurd'e(prit-de-vin phlegma- tique. Pour nous affurer de fa nature, nous avons vainement elfaye de 1'enflaminer en y appliquant une bougie allume'e i cette liqueur SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 543 n'a pu prendre feu que quand elle a ere chauffee dans unc cuiller d'argent, & il s'en eft confomme a-peu-pres la moirie'. La caufe d'une fi grande diminution vient de ce que le feu a non- feulement fait difliper la partie fpiritueufc, & en meme terns unc rrcs- grande quantite de phlegmc. La meme expe'riencc a e'te faite fur une once de liqueur retire'e chacune des vins ordinaires; les effers en ont etc beaucoup plus foi- bles; la flamme produite par cette liqueur, a e'te' infiniment moins forte, & a dure fenfiblement moins long -terns: encore falloit-il a chaque inftant prcfentcr a cette liqueur tres-chaude un papier en- flamme' , pour entretenir fa de'rlagration. Comme dans toutes ces experiences il y avoir une diminution fen- fible de liqueur , & qu'il e'toit impoffible, par cette voic, d'appre'eier Ja quantite de fpiritueux qu'elle contenoit , cette expe'rience fur l'in- flammabilite a e'te faite de la maniere fuivante. On a pris une once de la liqueur tire'e du via chaud , fous le n°. 2 j apres l'avoir mife dans une phiole a medecine, on l'a expofe'e a la flamme d'une bougie; auffi-tot que l'ebullition a commence, la li- queur s'eft enflamme'e , &c la flamme a dure pendant fix minutes fans avoir befoin d'etre ranime'e ; elle a brule' encore pendant une autre minute , en lui prefentant de tems a autre un papier enflamme. La flamme e'tant ceffe'e , on a pefe' la liqueur , & il s'eft trouve fix gros Sc demi de refidu. La meme expe'rience repe'te'e fur unc autre once de liqueur rerire'e du vin ordinaire, fous le nn. ^3, la vapeur s'eft en- flamme'e & a dure' l'efpace de quatre minutes, le re'iidu a e'te' de fepc gros huit grains. La difference que Ton obferve dans les re'fidus & dans la dure'e de la flamme, trouve fa caufe dans la nature des vins foumis a. Pexpe'rience ; les vins appelle's chauds , contenant plus de fpiritueux, doivent ne'eeflairement donner par la diftillatlon plus de liqueur inflammable, que les vins de none climat , qui ne font pas a beaucoup pres auffi actifs. II ne feroit done pas jufte de conclure d'apres ce fait , que ces vins ont e'te fortifie's avec de 1'eau -de - vie. Cette conle'quence feroit d'autant moins jufte, que Ton voit fouvent dans la meme Province des vins plus genereux les uns que les autres, a raifon de l'expofition & du terrein ; a plus forte raifon, les vins des pays me'ridionaux dcivent-ils contenir plus de parties fpiritueu- fes , puilque la nature du fol &c le climat font infiniment plus chauds que les notres. La liqueur qui s'eft trouvee dans la cucurbite , apres que l'efprit en a etc fc'pare, avoit une odeur & un gout vapide , e'toit d'une belle coulcur rouge, & faifok effervefcence avec les alkalis; elle ae difteroit point de celle qui fe trouve apres la diftillarion des vins les plus francs ; on l'a fait tvaporer au bain-marie jufqu'a confiftancc dc Novexbrm 1 7 7 1 , Tome I. 544 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, miel ; en cec e'rat , elle a donne' des criftaux qui e'coient de vrai rar- tre , efpece de fel effentiel contenu dans le vin de raifins. Cec extrak droit fort acerbe , & ne laifloit point dans la bouche de faveur fu- cre'e, comme cela feroit arrive'e fi le vin avoit e'te allonge avec quel- ques liqueurs lucre'es , comme cidre , poiri , hydrornel , milafft, &cc. Le feu ayant ete continue fous cet extrait, & l'e'vaporation mene'e a ficcite, on a obtenu un extrait fee , fort rouge , qui, expofe' a l'a&ion de l'efprit de vin, a laifle diffoudre la partie colorante rouge qu'il contenoit ; la matiere reftante etoit une poudre d'un role tres- pale , qui e'toit de veritable tartre , debarraffe de prefque toute la partie colorante du vin. Le vin appelle chaud , nous a donne' les memes re'fultats, avec cette diffe'rence que l'extrait etoit d'un rouge beaucoup plus fonce. Pour nous aflurer fi ces experiences nous montroient clairement les parties conftituantes de ces vins , nous avons pris pour objet de comparaifon des vins de bonne qualite', & dont nous etions furs ; nous avons obtenu les memes refultats avec les variations feulement que doivent apporter dans les produits, le climat, le terrein , 1'anne, l'age & l'efpece de la vigne. Pour connokre fi les vins faifis contenoient du poire , efpece de liqueur que l'on loupconne etre employee par les Marchands de vins pour corriger l'acidite' des vins de bas aloi , nous avons particulie- rement porte notre attention de ce c6te-la. Toutes ces expe'riences ne nous ont rien fait appercevoir qui approchat de la nature de cette liqueur. Nous avons meme fait plufieurs pieces de comparailon en mettant du poire en diffe'rentes proportions avec du vin pur. Nous avons traite ces vins me'lange's de la meme maniere que les prece'- dens , St nous avons obtenu par l'evaporation une liqueur tartreufe, a la ve'rite', mais dont l'acidite' corrigee par la faveur lucree du poire, laiflbit dans la bouche un gout mixte de lucre & d'acide. Cet extraic jette fur des charbons ardens , laiflbit exhaler une odeur de lucre brule'. Les vins faifis que nous avons examines de la meme maniere, n'ontrien prefente de femblable, ainfique les prece'dentes experiences le demontrent. Quoique l'odeur du tartre fe fit fenfiblement reconnoitre dans les experiences , oil nous avons expofe les extraits du vin au degre fu- pe'rieur de l'eau bouillante •, cependant , pour nous affurer davantage de fon exiftence , nous avons cru devoir le foumettre a. d'autres exper riences encore plus fiires. Pour y parvenir , nous avons raflemble le tartre que nous avoient fourni vingt pintes de vin , nous l'avons fepare de fa partie colo- rante par l'efprit-de-vin •, & apres l'avoir diffous dans l'eau , & filtre', juous en avons obtenu de tres-beaux criftaux de tartre, Cette expe- rience SUR VHIST. NATURELLE ET LED ARTS. J4f ricnce nous a tneme appris que ces vins font a-pcu-pres tons audi abondans en tartrc , par la comparaifon que nous avons faite du produit des vingt pintes , avec cclui qu'ont fourni quclques - unes traite'es fepare'ment, & de la meme manicre. Nous avons mis ces cryftaux dans une cornue de verre ; & par un feu gradue, nous en avons obtenu des produits femblables a ceux que nous a fournis une parcille quantite de cryftaux de tartre du commerce, mife en diftillation dans une autre cornue de verre. Toutes ces experiences concourcnt a piouver que les vins en quef- rion font tres- francs, puifqu'ils donnent les memes re'fultats que des vins de la purete defqucls on e'toit certain. Cette maniere d'analyfer a paru la plus fure pour nous conduire a la connoiflance de la ve'rite' , & nous mettre en etat de porter un jugement folide & e'quitable. Les quantites de fpiritucux , de liqueur aqucufe , de tartre &c de parties colorantes examine'es a la balance, s'etant trouvees a-peu-pres en memes proportions dans les vins ordinaires faifis, que dans ceux de comparaifon de la purete defquels nous e'tions furs, les vins faifis font done irreprochables du cote dc l'alte'ration , & de la mixtion qu'on y foupgonne. II refte a rendre compte des expe'riences faites pour reconnoitre fi ces vins contenoicnt des fubftances me'talliques , telles que le plomb, 1'e'tain , &c. qu'on auroit pu y introduire. Bien convaincus que le foie de foufre n'eft pas un agent fuffifant pour en faire reconnoitre ni l'efpece , ni la quantite , nous avons fuivi une route plus fare , en procedant de la maniere fuivante. Nous avons pris une portion de l'extrait que nous avons obtenu de chaque boutcille de vin, nous l'avons re'duit en charbon dans une cuiller de fer , pour aider la fufion de ce charbon refractairc ; nous l'avons mele avec fon poids egal d'alkali fixe, & nous l'avons mis dans un creufet de figure conique •, ayant enfuite ajoute' par-deffus un travers de doigt de f el marin de'erepite', nous l'avons pouffe a un feu capable de le faire entrer en fonte; nous l'y avons laide pendant un demi-quart d'heure; apres quoi , le creufet retire du feu & rcfroidi , nous y avons trouve une maffe noire tres-lie'e, qui, caffe'e & examine'e a la loupe , n'a rien pre'fente' dc me'talliquc. Get eflai eft le feul propre a faire de'couvrir l'exiftence d'un metal dans le vin ; les chaux me'tal- liques qu'on y auroit introduites , recouvrent, dans cecte ope'ration, 1'e'tat de me'tallicite' , par le phlogiftique qu'on leur rcftitue ; &c commc le metal ne peut £tre emporte par la force du feu , attendu que le creufet eft ferine & liitte , il eft dair que fi petite qu'en loit la dole, on doit la trouver au fond du creufet , fi elle eft en affez grande quan- tite pour faire un tout fuffifamment pefant , ou cparfe dans la maffe , s'il n'y en a que des atomes. Novembre Jill, Tome J, X X 34» OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Comnie la diflolution de la litarge ou autres chaux metalliques ne fe fair pas avec promptitude par l'acidc du vin , 8c cju'alors une piece rfe vin, dans laquelle on auroit introduit de la litarge depuis peu de terns, pourroit peut-etre ne rien fournir par l'analyle que nous venons d'expofer , nous avons cru qu'il etoit prudent 8c efTentiel d'analyfer les lies de ces vins , parce qu'il lercit poflible que dans ce cas elles con- tinflcnt toute la litarge qui feroit pre'cipite'e par fon proprc pojds. Dans cette vue , nous nous fommes fait remertre deux tonncaux que nous avons fait vuider en notre prefence jufqu'a la lie exclufivement; nous les avons pris indifFe'remment parmi tous les autres : l'un e'toit (ous le n°. 38 , & contenoit du vin d'ordinaire •, l'autre fous le n°. 1 , 8c contcnoit du vin chaud. A;ires avoir fait evaporerces lies fe'pare'ment , nous les avons re'duites en charbon -, & les ayant traite'es avec les m ernes precautions , nous n'y avons pas trouve' le moindre atome de fubf- tance me'tallique. Ces vins font done encore irreprochables a cet e'gard , & ne peuvent par conie'quent occafionner les accidens funeftes qui re'- fultent, par exemple, du plomb ou de fes preparations prifes inte- rieuremenr. Cette analyfe peut fervir aux particuliers qui voudronf s'aflurer ti les vins qu'ils achetent font francs. Son utilite a engage' i la publier. SECONDE PARTIE Du Memoirs de M. Beau me. jlVl . Beaum£ fe propofe dans la feconde partie de fon Me'moire, d'examiner quelles font les alterations naturellement produites dans les argilles , & d'une maniere fuccellive. II les confidere fous trois points de vue ; 1 °. les changemens qu'elles eprouvent par le terns , fans prefque changer de forme ; i°. ceux que le terns leur occafionne en leur don- nant de nouvelles formes , & produifant de nouveaux corps dans lef- quels on ne reconnoit plus les proprie'te's argilleules ; 30. les change- mens qu'elles e'prouvent en paflant dans la combinaifon ve'ge'tale , 6c fucceflivement dans les animaux. Le terns agit fur les argilles , en combinant enfemble plufieurs fub- ftances qu'elles renferment , comme les matieres me'talliques , le phlogif- tique •, &c par la fucceflion de terns, elles fe trouvent contenir du foufre, de Tallin, des vitriols, & des pyrites. La formation des matieres me'- talliques, du vitriol & des pyrites, n'a rien d'e'tonnant , fi , comme le penfe M. Macquer , les terres argilkufes font tres - voifines de la me'tallifation , 8c capables de former des me'taux par leur combinaifoa SUR L'HIST. NATURE LIE FT Z2TS ARTS. 547 avec ie phlogiftiquc. M. Beaumc' pretend cependant que la lubftancc des argilles n'eft nullcmciu altc'ree par lc melange de ces matieres, qu'il regarde conime e'trangeres a lcur nature. II s'attache fur-tout a prouver la prc'fence du phlogiftiquc dans les argilles. II dir, pour le prouver , que fi on diftille les argilles a la cornuc , elles fournillcnt une liqueur aqucufe empyreumatique; il attribue a ce principc la cou- leur dont on ne peut dcpouiller les argilles que par une calcination long-tems continuee, quand on veut les avoir dans leur plus granJe blanchcur ; ce principe (e combinant avec l'acide vitriolique , forme le foufre, qui fc combine enfuice avec les matieres me'talliques qu'ii met dans l'etat des pyrites, qui, clles-meme , en le decompofant , forment 1'alun , les vitriols & les felcnites. Par ces alterations, Yargille perd fa couleur, Sc nc conferve que celles des matieres me'talliques qu'ellc contient. Lc terns continuant d'agir fur les argilles , elles perdent de leur finefTe 8c de lcur liant ; elles deviennent moins douces au toucher, forment des matieres terreufes, fableufes, des micas plus ou moins colore's, fui- vant la quantite du phlogiftiquc &: de matiere me'tallique qu'elles con- tiennent lors de ces tranfmutarions. M. Beaumc' croit qu'elles par- viennent enfin a former les talcs, les amiantes, les craics de Briangon, fubftances qui ne contiennent plus aucun veftige d'acide vitriolique •> &C e'eft le fecond changement qu'il remarquc. Comme la chaux vive , l'eau de chaux & les terres calcaircs decom- pofent l'alun & tous les fels a bale tcrreufe vitrifiable , il en refulte cjue la chaux &c la craie qu'on repand fur un terrcin argilleux, doit former du gypfe avec l'acide vitriolique , & de'gager la terre vitrifiable ; & e'eft encore un changement que peuvent c'prouver les argilles. Le troifieme changement qu'e'prouvent les argilles , eft celui qui leur arrive en pafTant dans la vegetation, pour etre enfuite animalilecs par leur tranfport dans lc corps des animaux qui fe nourriflent de ve'ge- taux. M. Beaume' pre'tend, a ce fujet, que les argilles forment feules le fond de la vegetation Si de la constitution animate. Toutes les terres cultive'es ne font qu'un melange d'argille, de terre calcaire, de fable, de gravier , de la terre provenant de la deftruc- tion des ve'getaux Sc des animaux. M. Beaume a retire toutes ces fubf- tances par l'analyfe de plufieurs terres labourables. On ne voit pas d'abord fi elles font toutes neceflaires a la ve'ge'tation , ou s'il n'y en a qu'une feule efpece. Dans ce cas , quelle eft cette efpece, & a quoi fervent les autres ? M. Beaume penfc nc pouvoir refoudre ces que(- rions, qu'en examinant les vege'taux eux-m£mes. Pour ccla, il prend les cendres de diffe'rentes plantes , les leflive bien exadement , Sc les fe- pare de meme de route matiere charbonneufe , par le moyen du tamis. Tous les acides mineraux 8c vege'taux ont diflous ces terres avec Novembre i 7 7 i , Tome I. X x i 34» OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , cffervefcence; leurs diftblutions filtrees etoient un peu co!ore'es', mifcs a e'vaporer a l'air libre , elles ont fourni les produirs fuivans. Celles qui avoient etc diffoutes par l'acide vitriolique , ont donne de Tallin mele de plufieurs cryftaux de fele'nite-, mais cette fe'le'nite etoit un pen diffe'rente de celle qui eft forme'e par une terre calcaire pure. Celles qui avoient etc diffoutes par l'acide nitreux , ont forme' des crvftaux fort aftringens , mele's dans une matiere mucilagineule : ce me'lange e'toit furnage par une liqueur contenant du nitre a bafe ter- reufe calcaire. Avec l'acide marin , elles ont fourni des cryftaux fort aftringens,' comme quand on unit la terre de 1 alun avec cet acide : il eft pareil- lement refte une liqueur qui etoit du fel marin a bafe terreufe. De ces expediences , M. Beaume conclut que la terre argilleufe eft celle qui fait partie des vegetaux ; mais que dans ce nouvel e'tat , ellc fouffre des alte'ranons conftlerables. En fe coinbinant avec les prin- cipes aqurux & huileux , elle fe rapprochc de la nature des terres cal- caires, puiique par la combinaifon avec l'acide du vinaigre, elle forme des cryftaux a-peu-pres femblables a ceux qu'on obtient de la combi- naifon des terres calcaires avec ce racrae acide ve'ge'tal ; mais elle eft encore fort eloigne'e d'etre une terre calcaire parfaite , puifque, apres fa calcination , elle n'a pu (e convertir en chaux vive. Cette terre argilleufe, en pafTant du ve'getal dans le corps animal, e'prouve encore d'autrcs alterations; elle s'y convertit en mucilage, en fe combinant rres - intimement avec Thuile, Teau & le fel, qui, avec cette terre , forment les parties folides des animaux. Cette ma- tiere mucilagin' u(e eft fi forrement combine'e, que la putrefaction, meme la plus longue , ne peut la de'truire complettement : des os trcs- fecs, crible's de rrous , & fans aucune confiftance, ont encore fourni a la diftillation une p<*rite portion d'eau , de fel volatil & d'huile. Le la- vage dans Teau ne difTout pas complettement la matiere ge'latineufe des os-, car la corne, apres une tres-longue 8c tres-forte ebullition , a encore fourni a M. Beaume' un peu de produits huileux & falins. La difTolution dans les acides, & la calcination, font les deux moyens les plus propres a obtenir ccrte terre dans Ion e'tat de purete'. La cal- cination , fur-tout, la rend moins diftoluble dans les acides •, & il paroir, dit M. Beaume, que Taction du feu la ramene de plus en plus a fon csractere a'gilknx , qui eft celui de fon origine. Celle qui a e'te ft'pan'e par le moyen des acides, paroir parriciper davantag? des ca- racteres de la terre calcaire; fe'paree des acides, elle s'y diffout de nouveau avec effcrvefcence ; mais elle ne fait point de chaux vive par ila calcination. Toutes ces terres calcine'es, ou non calcinees, ont forme' avec IV SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 349 cide vitriolique des cryftaux d'alun nick's d'un pcu de fe'lcnite , done la bafe n'a jamais pu fe convertir en chnux vive. De toutes ces expediences, M. Beaume' conclut que la terre des oj n'eft plus une terre argilleufe aufli bien cara&e'rife'e qu'elle l'c'toit dans les ve'gc'taux; qu'elle a quelque caraiftere analogue aux rerres calcaires, quoique rres - e'loigne'e encore de la nature de ce genre de terre, 8c qu'elle tient, en quelque forte , le milieu entre les terres argilleufes 8c les terres cal aires proprement dites. Les differentes e'laborations fubies, en s'afllmilant au corps animal, 1'ont tellement combine'e avec le prin- cipe aqueux & avec le principe huileux ou phlogifrique , qu'elle tend a devenir calcaire; car M. Beaume' penfe que ce qui diftingue parti- culieremenr les terres calcaires des autrcs terres, ne vient que de l'eau & du phlogiftique qui devienncnt principes conftituans de ce genre de terre. Les argilks 8c les terres calcaires melees enfemble entrent en fufion , & fe converrifTent en verre : ce phe'nomene a e'te' annonce' par M. Pott, jourd'hui , les animaux mous font en trop grand nombre & trop » pen connus » Le Chevalier Von-Linne'e, par exemple, a fait trois genres fem- 3> blables, des aphrodites, des nereides & des ferpula. Il y a beaucoup 33 d'aflinite' entre ces trois efpeces d' 'animaux mous; mais le Naturalille 3> Suedois a pfice' la dernicre parmi les teftace'es , a caule d'un tube 33 calcaire qu'elle porte. . . La delcription que nous allons donner de » ces trois animaux en particulier , fera voir que la nature ne les a 33 pas re'unis, comme les Naturaliftes le pre'tcndent. » En comparant les differentes efpeces A' aphrodites , on le convaincra 3j facilemenr qu'elles forment un genre tres-diftincl:. Il en fera de meme 33 des nereides, parmi lefquelles Von-Linne'e avoit range de vraies 33 aphrodites , & qui feront auiTi diftinguees des ferpula. 33 Toutes les aphrodites , ainfi que la plupart des animaux mous, 33 ont le corps long , divife en fegmens tranfverfaux & reffemblant 33 en cela aux infecfes. La figure de cc corps eft un pcu quadrangu- 33 lake , obtufe aux deux extre'mite's, un peu plus e'troite vers l'exrre'- 33 mite pofterieure , ou fe rencontre Yanus. Leur bouche paroic a l'ex- 33 tre'mite anterieure , lous la forme d'une ouverture large, tres-ride'e , 33 qui le tcrmine par une efpece de fac , re'ceptacle de la nourriture. 3u Cette bouche eft environne'e de nombre de franges ou antennes plus 33 ou moins longues. SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. » Lcs aphrodites ont quatre fe'ries de petits pieds, compofes chacuu »j d'un faifceau de poils & de foies.... chacun , outre cela, eft armc ■) il'uuc efpece de frange charnue; outre ces picds , clles portent lur » Icur dos une multitude de petitcs ouies placees aupres des failccaux » de poils lur chaque fegment. Le nombre des parties exte'ricures eft >> toujours a-peu-pres le meme dans tomes les aphrodites. Ccpendant , » la nature fe de'mentiroit , fi elle n'exceptoit pas quelques efpeces « de la regie gc'ne'rale. Elle ote aux unes les faifceaux de poils, aux » autres lcs franges ; elle ne donne a cclles-ci que des commencc- » mens d'ouies •, a cel!es-la , des e'cailles fur le dos. La figure & la pro- )> portion n'eft pas la meme dans toutes lcs efpeces. Celles-ci l'ont » tres-reflcrree &c ovale; celles-la l'ont, au contraire, tres-longue. .. . ••> Lcs aphrodites font crrantes dans la mer, ne chcrchent point de » retraite, &c ne font point de petits tuyaux conime les nereides ; » mais dies fe nourriflent au fond de la mer des fucus qui s'y ren- » contrent. On n'a encore rien de certain fur la maniere dont elles fe j; propagent. On fait ccpendant qu'clles ont deux (exes , tandis que » lcs niriides & les ferpu la font hermaphrodites". M. Pallas divife lcs aphrodites en aphrodita aculeata; aphrodita fquammata; aphrodita lepidota ; aphrodita cirrhofa ; aphrodita flava ; aphrodita carunculata ; aphrodita rojlrata , & aphrodita complanata. II donne la defcription de l'exte'rieiir de routes ces efpeces, & y ajoute leur anatomic. II palfe enfuite aux nereides, qu'il divife en deux genres; les nereides errantes , & les niriides tubicoles. Les nereides errantes nagent ou rampent parmi les fucus & les autres plantcs marines. Elles s'attachenc aufh quelquefois aux rochers, fe cachent dans lc fond de la mer, ou dans les bois pourris qu'on y jcttc. Les nereides tubicoles ont beaucoup de rapport avec les ferpula. Elles font caclie'es dans une efpece de petit tube qu'elles forment de diffcrentes matie'res. « En general , les neWides ont le corps mince, fouvent tres-long, » line'aire , devenant plus petit vers la tete , qui eft orriee de franges , » divife en plufieurs fegmens ou anneaux , & on remarque a, chaque » fegmenc une efpece de pied. Les hirtmes pcuvent , comme les " lombrics de terre , s'e'tendrc, fe comracler , le glifTer facilemcnt » dans les femes lcs plus etroites. Elles different de certaines aphro- » dites , en ce que la nature les a payees d'ouies ». On divife les nereides tubicoles en ni, (ides cylindriques , 8c en niriides applaties. L'Auteur entre dans de grands details lur ces deux elpcccs. II viem enfin a la derniere clalte d\inimaux mous , aux J'erpula. « Les ferpula , vers tubulicoles , vers marins , ou , comme on >:' ' i) ordinairemcnt , vers £ tuyaux , font de petits animaux attaches i. Novembre I 7 7 i , Tome I. Y ) <~ X J 5* OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , '■■ an tube ou etui fouvent tcftace, long, &c qui diminue peu-a-peu fe vers l'extremite' pofte'rieure a laquelle on ne voit aucune ouverture. » lis ont qiielque reflemblance avec les niriides tubicohs Von- >> Linnee a range' parmi les ferpula des animaux a. tuyaux, qui n'en « me'ritoient pas le nom.... Je voudrois qu'il ne flit accorde' qu'aux 3) animaux vivans dans un tube fouvent teftace , qu'ils ne quittent » jamais. Jc disuntube teftace' , parce qu'il fe rencontre dans nos mers « une vraie ferpula , qui habite dans un tuyau fait avec de petits « grains de fable. « La ferpula que nous voulons ici de'crire , eft la ferpula gigantea. » On la rencontre fre'quemmenr dans les Ifles des Caribous. Sa forme 35 & la couleur de fes ouies , qui reflemblent a. des fleurs doubles, lui 3> ont fait donner le nom At fleurs animales par les habitansdu pays... » II eft conftant que notre ferpula fe trouve parmi les coraux , Sc j; que fes couleurs font tres-variees. II y en a de rouges, de blanches, is de jaunes , de violettes. ' Leurs tubes font toujours attache's aux 33 rochers ou aux coraux qui les ont vu naltre », M. Pallas, apres une defcription exadte de la ferpula gigantea, donne celle du lumbricus achiurus. Les details intereffans qu'il fe permet fur ce ver , ne lainent rien a defirer pour connoitre fa nature. On n'eft pas moins fatisfait quand on a lu ce qu'il dit d'une efpece d'ortie marine , appelle'e aclinia doliolum. Succede une Differtation tres-inte- reftante fur la tcenia hydatigena. L'Auteur rapporte tout ce que les .Anciens & les Modernes ont e'crit fur cette efpece de tania , &c donne enfuite fes propres obfervations. II s'entretient des pennatula , qu'il divife en pennatula gnomorium & en pennatula phallo'ides , des anomia qu'il divife en anomia rubra, & en anomia difculus. On lit apres ces defcriptions , celles de trois efpeces d'infectes. Le premier eft la cigale globulifere. Sa ftruclrure eft admirable. Son corps eft tres - petit & d'une couleur noire, fes pieds jaunatres, fes ailcs de couleur de verre blanc , fa tete eft petite &c de figure conique ; rextre'mite ante'rieure s'allonge , fe gro(fit,& fait voir une epine tres- longue heriffe'e de poils , qui fe recourbe fur le dos de Panimal. Elle a quatre pieds , qui ont chacun uh globule fpherique & heriffe'. Deux de fes pieds fe dirigent vers les cotes, &c deux en dehors. Les globules attache's a ceux de derriere ne font point couverts de poils ; mais ceux de devant ont une efpece d'c'pine he'riffee de poils. Toutes ces parties font noires & d'une fubftance corne'e ; les poils feulement qui recouvrent les globules , font blanchatres. Le fecond infecle de'crit par M. Pallas, eft Varcarus marinus , ou le polygonope. « Son bee a une bafe fort epaifle , diminuant peu-a- j' peu, & fon extremite' eft cylindrique , obtufe Sc percee : fon corps :> eft divife en quatre fegmens , auxquels font attache's les pieds de SUA L'lllST. NATURELLE ET LF.S ARTS. 357 *> l'animal. Les trois premiers fe tcrminent en forme de petit cylindre, r> & font marque's par trois tubcrcules aigus , un au milieu , & l'autre »> achaqucbout du cylindre. Le fegmenr pofte'rieur a aufli trois tuber- » cules , un tronc divife en deux , & fait voir cntre les pieds de ■>■> dcrriere une efpece deftylet cylindriquc , & tronque. Le polygonope » ahuit pieds, ceux dederriere font un peu plus petits que les autres; » mais tous font noueux , & ont fept articles.... Il a a fon cou deux *> petites antennes beaucoup plus minces que fes pieds, mais cro- i) chues comme eux , & compofees d'autant d'articlcs. Barter croir » avec raifon , que la privation de ces antennes eft la marque diftinc- r> tive du fexe. Je ne vois cependant pas pourquoi il rcproche a « Von-Linne'e d'avoir range' parmi les onifcus le pediculus ceti. L'in- i> fedte dont nous donnons la defcription , differe beaucoup des onifcus •, )i le nombre des pieds n'eft pas le meme ; & cela feul empecheroic » de le confondre. Mais il n'en eft pas de meme du pediculus ceti. » II a le meme nombre de pieds & la meme ftrudture que i'onifcus » anomalus , dont Barter lui-meme a donne la defcription. » M. Brunnich a diftingue' le polygonope de tous les autres apteres, » & lui a donne' le nom de pyenogone. Pour moi , je penfe qu'on » doit le ranger parmi les acarus , puifque , outre huit pieds, & des » antennes dont il eft pourvu, il reflemble parfaitement d'ailleurs » aux acarus. II me paroit audi , & cela eft tres-vraifemblable , que « le poligonope vir dans la mer. Cependant. beaucoup de pecheurs » que j'ai interroge's , m'ont affure' ne pas le connoitre. On le trouve » fouvent mort iur les bords de la mer, parmi les autres debris ». Le troifieme infe&e, dont M. Pallas fait mention , eft V onifcus can- criforme. Cc genre fe divife en plufieurs efpeces : I'onifcus pulex , I'onifcus locufta , 1 'onifcus gammarellus , I'onifcus yolutator, I'onifcus chelipes , I'onifcus conglobator. L'onifcus pulex ( Cancer pulex Lin. Kermis cancriformis. Frifeb. Squilla Rcefel ) eft un peu applati, & a les quatre pieds dc devant en forme de pinces. On le trouve dans lamer, dans les fleuves & les lacs d'eau douce, oil il pe'netre dans les fentes qu'il rencontre ; il aime aftez la lumiere. L'Aureur n'en a jamais vu en plus grand nombre que dans le tuf d'une caverne voifine de Rockanje. 11 a remarque' qu'on en trouvoit frequemment fur les bords de la mer, aux mois de Juin ou de Juillet. Lorfqu'ils font vivans , leur couleur eft d'un blanc- cendre & pale; ils deviennent rouges, quand on les met dans l'efprit- mais crop metaphy- i,6o ion raif lique pour un Naturalifte. Je ne puis cependant m'empecher de rap- porter une des experiences faites en conle'quence de la de'eouverte , iavoir, que les animalcules ie formoient en diffe'rentes infufions, quoique la liqueur flit au plus grand degre de chaleur. Le is; Mai 1768, Ie thermometre de Farenheit etant a 70 degre's, je fis bouillir une patate ou pomme de terre dans de l'eau qui venoit d'etre puife'e a la riviere, jufqu'a ce qu'elle fit rcduite en une confiftance farineule. J'en mis une partie avec une egale proportion de la liqueur rentes fibreufes , d'ou il s'eleve des tiges creufes qui fupportent des petits vaiifeaux .1 graines d'une figure ovale oblongue , qui out chacune un trou au haut. J'en voyois aiftiriciemcnc forcir une quantite de petites graines globuteufes , avec une force elaf- lique , & qui s'agitoient dans l'eau ,'comme fi clles euffent iti anime'es. £n continuant de les examiner avec attention , je decouvriu que l'eau corrompuc qui les euvironnoit etoit pleine de tres-petks animalcules , & que ces petites creatures commencoient a attaquer la fubftance du mufor pour fe nourrir , comme je 1'ai ci- devant obferve dans 1 experience, fur la plus grande efpece de champignon. Ce nou-r veau mouvement continua a leur donner l'appareacc de vie pendant «ruelque terns ; mais bientot apres , plufieurs s'elcverent fur la fiurfa.ee de l'eau , & y refterent fans mouvement ; enfuite , une grande quantitd montaat , ils s'unirent enfcmhlc en petites rnaflcs minces , & flotterent au bord de l'eau , y reliant tout-a-fait immobile* pendant le terns de l'obfervation. Comme cctte decouverte avoit eclairci bien des doutes qui m'e'toient relic's , d'aprts la lecture dc la favante dillertation de M. Needliam, je mis dans le meme verre plu- ileurs autrcs mouches mortes ; & par ce moyen , cette efpece de mucor fut multiplre'e. en fi grande abondance , qu'elle me donna occafion de reptfter fouvent la meme expe- rience , a ma pleine fatisfactioo. ' Enfin , j'ai vu tres-fouvent & tres-diftin&cment ces petits corps coralloides joints , que M. Needham appelle chapelets & colliers dc perles. Ils paroiffent non-feulcment fur une infufion de froment ecrafe , lorfqu'il fe corrompt , mais fur la plus grande partie des autres corps qui jettent une lie gluante, & qui font en etat de corruption. Ils ne font done c'videmment autre cliofe que le mucor le plus commun , dont les fe- inences flottcnt par-tout dans Pair ; & ces corps , dans cet etat , leur fourniflent un foj prcpre & naturel pour y croitre. Ici ellcs envQient vers le bas leurs racines tranf- parentes , en forme de rameaux , dans l'humidite fur laquelle ellcs flottcnt , & de la partie fuperieure de 1'ecume leurs brandies coralloides s'elevent pleines de femences , comme des petits arbrjlfeaux. Lorfqu'on met une petite quantite de ces branches & de ces femences dans une goutte dc la meme eau corrompue , fur laquelle 1'ecume flotte , plufieurs millions dc petits animalcules , dont elles abondent , fe jettent delfus pour s'en nourrir , & les tourne;ii de cote & d'autre avec des mouvemens yarie's , comme dans l'experience fur les champignons ordinaires ; une feule femence , ou deux , ou trois jointcs enfemblc ctant exaclemcnt conformes a la defcription de M. Needham, mais eVidemment fans aucun mouvement qui leur foit naturel , & ne font par confequent point anime'es. Je fuis aflure que les obfervations de M. Needham font convaincu , il y a long- terns , que ce font des vegetaux ; quant a moi , j'avoue que je n'ai jamais vu un foo- fhice etendre fes branches , & provenir dc l'eau. Je crois avoir deja eclairci ce point , en faifant voir IVufurditc de la Corallina Hrreftris du Doctcur 1' Alias. Tranfac. fhilof. Vol. LVI'I. p. 415. bouillantc SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. a«?i bouillantc dans un vaifTeau de verre de forme cylindriquc, contenanr environ un dcmi-fepcicr , & il fut convert fur le champ bicn exac- rement avec un couvcrcle de verre; jc coupai en mime terns par tranclies une patate crue , & j'en mis a-pcu-pres la meme quantite dansun vaifTeau de verre de la meme forme, avec la meme proportion d'eau froide de riviere; il fut egalement couvert avec un couvcrcle de verre , & les deux vaifTeaux furent places Tun pres de l'autre. Le i<5 Mai, e'eft -a-dire , vingt - quatre heurcs apres , j'examinai une petite gouttc de chacune avec le premier verre du microfcope de Wilfon , dont la diftance du foyer eft de la £ partie d'un pouce; Cv a ma grande furprife , ellcs etoient routes deux pleines d'animal- cules, d'une forme droite, tres-diftindte , qui fe mouvoient ca 8c la, avec une grande v'uefTe •, de forte qu'il paroifToit y avoir dans cliaque goutte plus de particules de vie animale que ve'getale. J'ai re'pe'te' plufieurs fois cette experience , & je l'ai toujours vu rcuflir , a proportion de la chaleur de ['air environnant ; de forte que , meme en hiver, fi les liqueurs font tenucs dans un degre de chaleur convenablc , 1'experience rculTira dans deux ou trois jours. M. Nee.lham , dans fes experiences, appelle ces animalcules ani- maux fpermatiques, Tranf. Philof. XLV. pag. 644 & 666. Ceux que j'ai obferves font infiniment plus petits que les vcritables animaux (per- matiques , & d'une forme tres - diffe'rente. Tout obfervateur exacl: & qui aura la curiofue' de les comparer, fera bienror convaincu de certe ve'rite'; & je fuis perfuade qu'il verra qu'ils n'ont. aucun rapport a cette furprenante partie de la nature. Quoique plufieurs Philofophes de reputation foient du meme fentiment que M. Needham , je fuis ne'anmoins perfuade que toutes les fois qu'on voudra re'peter cette experience, qu'on la fuivra exadement, on verra qu'ils ont c;tc: tres- prompts dans leurs conclufions. Je ne ferai point mention a prefent de plufieurs autres obfervations curieufes, afin de pafTer a l'explication d'un avis que je recus au mois de Janvier dernier , de M. de SaufTure , de Geneve , pendant fon fqour en ceite Ville , dans lequel il dit qu'il avoit decouverc depuis peu , parmi ces animaux infufoires , fi nous pouvons nous exprimcr ainfi, une efpece qui fe partageoit en deux parties egalcs Sc en travcrs , pendant leur accroiflement. J'avois fouvent apper■ /;./.•. , , /,.,..: «./ 4. >i$ Dig, S. 4 fli.7 8 . a- Fig .1 1 '/./■ /.' i //,/. ». I B 11 I B J I ri s* (Dull #1 //./-y^ ■ •/ tfatb j^vr • SlfR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3*3 cane ucfcjuelles eft garnie de petices nagcoires, au moycn dcfquelles ccc animal icmblablc aux autres animaux des inhifions, peut nagcr ilc cote 6v d'autre avee une grande ce'lerite'. J'ai vu dc la meme manicre la plupart dc ces petits animaux, qui fe meuvent fi vice que nous ne pourrions en donner l'cxplication , /ans (uppoler une grande provifion d'clpccc, qui ell reellcment vraie, mais on ne fauroit voir ces animaux, jufqu'.i ce qu'ils s'aftbiblilTenc faute d'eau •, alors, fi nous y apporcons de l'accention , nous pouvons les de'couvrir dairetnent avec de bons vcrres (a). Je vais maintenant parler d'une finguliere ptopriete' decouverte dan : le chenevis, qui eft de produire un (el indiffoluble, quand il a e'ec infufd pendant quelquc terns dans I'eau; 5c cornnac le chenevis eft rcconnu pour un remede efticace dans plufieurs cas particuliers , ces experiences demanderoient d'exaiStes recherches par les Profeffeurs de Medecinc, qui peuvent les raire tourner a l'avantage de l'humanire. Premiere Experience. Le 15 Fevrier dernier, je mis dans une phiole une demi-onze dc chenevis, dans environ deux onzes d'eau rraichc de riviere, que je couvris exactement avec du papier, pour empecher la poufliere d'y entrer: le vingc-cinq Mars, il e'toit entiere- nient corrompu , $c avoir jetre a la lurface de l'eau , une e'eume vifqueufe. Pendant ce terns, le thermometre de Farcnhc-ir , fuc dans la maifon depuis 44 j'ufqu'a 5 1 degres. J'examinai cctte e'eume avec un microfcope ordinaire d'environ un poucc de foyer , Sc je de'eouvris qu'elle e'toit remplie de fels de figure re'guliere, qui fe rangeoienr a la fnrface; quelques-uns e'toient quarre's Sc d'autres oblong?. Appliquant un peu de cette e'eume fur un petit morceau de verrc, je le placai dans le microfcope de Wilfbn , me fervant de ion quatrieme vcrre, & il me fir voir des cryftaiix reprelentes dans la figure y ; ( ..' ) J'ai derniucment trouvt!, par put hafard , une m.'thode dc fairc paroitrc ivis- dimnctement leurs nagcoires, fur-tout , cclles de la plus grande efpece de ces animal- cules , qui font communs a la plupart des infufions ve'gctales , comme dans la tere- trclld : cette cfpccc a le corps oblong , avec une cavitc ou rainure a un bout ; en ap- pliquant alors une petite tigc du geranium ^onalt dc Linncus , fraichement an... fur une gouue de I'eau dans laquellc ces animalcules nagent , nous verrons qu'ils fcront engourdis dans un inftant, fe rcilcrram cux-numes en une figure ovale oblon- gue, avec leurs nagcoires c'tendues , qui reflemblent a des foics dc cochon , raueees tout autour dc leur corps. Les nagcoires font longues d'environ la moitic du diamctre ilti milieu de leur corps. Avant d' avoir de'eouvert art expedient, j'efiayai de les faire mourir par differences efpcVcs dc fels & d'efprits ; mais quoiqu'ils fulfent detruits par ce moycn , leurs nagcoires fc contractoicnt tcllement , qu'a la fin je ne pouvois plus les diftin^ucr. Enfuite , rcltant dans cct ourdiflement pendant deux ou trois minutes, fi on leur applique one gouue d'eau ci.iire , ils reprenneBt leur figure , & it tout auffi-i6t , alors il n'eft plus facile de diftingucr la forme de leurs nag< Pour cc qui conccrnc les dilfcrens cuts de ces animaux, ] 'oytofig. C.a,b, c.d, VI. 6. NQvembrb i 77 1 , Tomt T. Z21 3*4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , mais eomme l'agitation dc I'ecume avoir obfcurci la figure pre'cife de ces fels , j'y appliquai un pinceau de poils , trempe dans de l'eau propre de riviere, 8c je les feparai du mucilage qui les barbouilloit; cependant, malgre cerre addirion d'eau , leurs figures n'etoient point du rout detruites ou fondues; mais leurs contours e'toient beaucoup plus cxactement determines ou marques. Les millions de petits ani- maux qui nageoient deffus & tout autour de ces fels , n'en e'toient auctinement affe&es. M. Needham obferve que le lei detruit ces ani- maux ; cela eft tres-vrai , a ce que je crois , avec l'efpece ordinaire de (el ; ce qui rend la nature de celui-ci encore plus iinguliere. De plus , j'obfervai que les cryftaux qui paroiflfoient les premiers , augmen- toient en volume, 8c commencoient a changer de figure-, par exemple, plufieurs cryftaux , vers la fin d'Avril , avoienr , parmi les autres, la forme de ceux de la fig. 8. Environ le 5 de Mai, pluiieurs d'entr'eux paroiffoienr comme dans la fig. 9 , & vers la fin de Mai , environ le 10, plufieurs d'entr'eux avoient la figure de ceux qui font repre'- fente's dans la fig. 10. Ces changemens de figure paroiflfoient en meme terns dans la plupart. Je communiquai cette de'couverte a quelques perfonnes inftruires, qui m'objeclerent que ces lels pouvoient etre dus a des fubftances contenues dans l'eau dont je me fervois , qui , jointes a l'huile du che- nevis , devoient produire cette apparence. Il eft aife de detruire cette objection par l'experience fuivante. Seconde Experience. J'obtins de mon ami M. P. Woulfe, Membre de la Socie'te' Royale , qu'il me fournit de l'eau foigneufe- mcnt diftille'e plufieurs fois de luite, 8c je me procurai en meme- tcms du chenevis de difte'rehs endroits de la Ville. Le 30 d'Avril, je mis une once de chenevis dans environ quarre onces de cette eau diftillee dans un vaifleau de verre cylindrique, ferme exactement par un couvercle de verre; le iz Mai, j'examinai I'ecume , & la trouvai plus rraniparente, mais remplie de ces cryftaux de fels, tels qu'on les voit en la fig. 11. Une parrie du premier chenevis mife dans la meme eau , produifit beaucoup de fel ; mais dont les figures etoient moins re'gulieres , e'tant caflees vers leurs exrremite's fur la fin de leur cryftallifation , je ne lais par quels moyens, voye[ fig. 1 3. Cependant il y avoit dans cette infufion beaucoup de fel de la figure du fe'minal original. Troisieme Experience. J'erois de'termine' a voir quel effet produiroit fur le chenevis en infufion, l'eau crue de pompe, tire'e de la mailon appellee Gray's-Inn , apres un mois de tems fee : J'ctois particulicrement perfuade', d'apres l'expei'ience , que cette eau conte- noit une grande portion de terre calcaire. En confe'quence , le 9 Mai je mis une once de ce meme chenevis, avec le dernier dont je m'etoiy SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 3^ poitrvu , dans quatre onces de cctte cau de pompc ; Sc le 17 Mai, j'appercus lcs cryftaux qui, ayant ere mis dans Ic microfcopc, & vus avec It- meme verre, donnerent la forme reprefente'e par la fig. 14. Les cryftaux de cette infufion paroifloient plus grands & plus unis, & ils diffe'roient un pcu en figure; mais en cxaminant le muci- lage qui refte eiure les graines au fond du verre , jc trouvai un nombre iafini de cryftaux de la meme figure, avec ceux que j'avois appellcs cryftaux fe'minaux, qui fc trouvoient p.ireillcmenr dans le mu- cilage de l'infufion dans l'eau rraiche de riviere, & parmi les "raines en l'infufion dans l'eau diftille'e. J'obferverai en outre que la terra calcaire Houoit en abondance parmi l'c'cume de l'eau de pompe, audi- tor que la putrefaction n'e'toit pas avance'e, phe'nomene qui ne paroif- foit pas a la furtacc de l'eau diftille'e, Sc qu'on voyoit a peine dans l'eau de riviere. Les grains du fel produit dans ccs experiences e'toient environ de la grofi'eur du plus menu fel, forme' de la chaleurfeule du fokil , Sc d'une couleur p.de-jaunarrc, lorfqu'ils e'toient (ecs. J'ai trouve' depuis la meme efpece de cryftaux dans unc infufion de femence de lin dans l'eau fraiche de riviere, & dans du froment qui a ere' infufe en eau bouillante : mais il y en avoit moins & ils ne paroilToient pas fitot dans la femenfe de lin que dans celle de chanvre -, & l'expc'ricnce du froment dans de l'eau bouillante ne re'uflit pas toujours. J'ai pareillement trouve des fels affez femblables a ceux du che- ncvis ; dans les infufions de diffcrentes graines & legumes des Indes orienrales, comme des lupins, haricots, veftes, millet, ble de Guine'e & le fefamum ; mais les derniers produilent une plus grande quantite de fel & en moins de terns qu'aucun autre. Les fels de ces ditfe'rentes (ubftances etoient de plus indifTolubles en verfant par difTus de l'eau nette; mais en laifTant corrompre les infulions pendant quelques femaines de plus, ils prenoient par degres des figures irrc'gulieres Sc difparoifToienr. Je dois done contlure par cctte queftion : ne font-ce pas lcs parties huiltufes des vege'taux cryf- tallilc'cs, qui flottent dans l'e'cume, a la furface de l'infulion ? Explication des figures. Les cinq efpeces d'animaux appercues dans les infufions apparte- tians au genre du volvox de Von-Linne'e, font ici reprefentes dans leurs deux etats, lavoir , dans leur e'tat de perfection & dans l'erar de divifion. J'y ai ajoute' les noms triviaux pour diftinguer les efpeces. L-' .//.;. '• reprefente le volvox ovale dans fa figure nature^le tit ▼OK C & B : A exprimc la manicre done il forme deux animaux eft NorEMBRE 1 7 7 1 , Tome I. ;<5<5 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fe (e'parant par le milieu : celui-ci fe trouve dans l'inruflon de chenevis j mais il fe trouve encore dans d'autres infuiions de ve'ge'taux, particu- lierement dans celles des (emenfes de the'. La fig. 2 , eft le volvox torquilla ou le cou de travcr% A ; il eft re- pre'fente' dans (on e'tat de divifion , B eft fa figure naturelle ; ce!ui-ci eft commun dans la plupart des infufions des vegetaux, de meroe que le fuivant. La. Jig. 5. repre'fente le volvox volutans ou le rouleur; en A, l'a- nimal eft fe'pare' & devient deux etres diftincts , chacun nageant a part & fe pourvoyant de fa nourriture r celui-ci eft fouvent la proie d'une autre efpece de ce genre , parriculierement lorfqu'il eft afroibli par fa fe'paration , n'e'tant pas alors fi actif pendant quelque tems juf- qu'a ce qu'il fe re'tabliffe. C , 1'animal paroit etre bleffe' d'un cote ; a cette impreffion en fuccede un peu apres line autre oppofe'e ; comme B, qui occafionne bientot une divifion-, en D, il eft vu de cote, 8c en E , on le voit de front dans fa figure naturelle. La fig. 4 , eft le volvox onifcus ou cloporte. A , eft fa figure natu- relle, comme il paroit plein de poils , tant a la tete qu'a la queue; avec ceux de la tete il tourne l'eau en rond pour y attirer fa proie ; ies pieds, qui font nombreux, font tres-vifibles , fur-tout confide're's de cote , comme en A , en B , on le voit qui commence a fe divifer , & en C , les animaux font tout prets a fe feparer ; dans cet etat , comme s'ils fouffroient un mal extraordinaire, ils nagent en rond, & de cote & d'autre, avec une viteffe e'tonnante , s'agitant violemment, jufqu'a ce qu'ils foient fe'pare's. Celui-ci fiit trouve dans une infufion de dit- f'e'rentes efpeces de branches de pin. La. fig. 5 , eft le volvox terebrella , le forct. Cet animal eft un des plus grands de cette efpece, &: il eft bien vifible a l'oeil nu. II fe meut en ligne droite avec viteffe , s'agitant lui-meme en rond quand il nage, comme pour s'ouvrir fon chemin. A, B, font deux figures narureiles de cet animal. C , fait voir la maniere dont il fe divife. Quand ils font fe'pare's, 1'animal infe'rieur fe roule tres - iourdement en avant , jufqu'a ce qu'il arrive a la concavite' de la partie fupe'deure. D , re- pre'fente une partie de cet animal couche, engourdie par le moyen au fuc de geranium \onale , avec les nageoires e'tendues. Cet animal fe trouve dans plufieurs infufions , particulieremcnt dans cellc des herbes gramine'es. ■ La fig. 6 , repre'fente le volvox vorax 011 le glouton. Cet animal fe trouve dans une infufion de pin de Tartarie ; il vane beaucoup (a, forme, contra&ant & e'tendant (on mufeau , & fe rournant de cote & d'autre, felon difFe'rentes directions, comme en A , B , C , D , E. Il ouvre ion mufeau en-defTous de rextremite , quand il faille fa proie, Ces animaux moins actifs, qui ont e'te les derniers divifes 3 comme SUR UHIST. NATURELLE ET LES ARTS. ,fe ceux de la fig. 2. A , & de la fig. a, A, lui fervent d'aliraent, quand lis fe trouvenr fur fon chemin. II les avale dans un inftant , comme il eft repre'fenre dans la fig. 6. H, & I en F , il eft pret a fe divifer & en G U eft divife'-, alors la partie de derriere de cet animal divife',' a acquis un groin ou bee, pour fe procurer fa nourriture , Sc devient bientot un etre diftinft de la partie ante'rieurc. ,,L.a %• 7- exprime la figure des fels dans le chencvis, apres un mois dinfuhon, du 25 de Fe'vrier au 25 de Mars, dans de l'eau fraiche de riviere. La fig. S. fait voir de quelle maniere paroifloient ces fels environ un mois apres, au 25 d'Avril. Fig. 9. Ces figures rcprefentent ceux qui parurent le 9 de Mai, ou dix jours apres. Fig. 10. Environ le 20 de Mai, ils offrirent la figure des pierres precieufes. * Fig. 1 1. J'avois donne a cette efpece le nom de fel fiminal, parcc quon le voir dans la plupart des infufions naiftant en difte'rens terns, ik faifant voir fa figure, quand il paroit diftin&emenr. La fig. ,z repre'fente les fels de chenevis dans l'eau diftille'e, qui avoit ete infufe du 30 d'Avril au 1 2 de Mai. La fig. 15. montre la forme des fels, quand la putrefaction avoit commence a fe'parer leurs parties en lames, dans l'eau diftille'e. Fig. 14. Ce font les figures des fels de chenevis infufe en eau cruc de pompe, environ pendant douze jours, du 5 au 17 de Mai. DESCRIPTION De la verveine cTAmeriquc. VETTE p'ante n'a encore ete' de'erire par aucun Auteur : elle a etc demontre'e cette anne'e au jardin du Roi , foils la denomination de verbenna Americana tubo floris longiffimo. M. Lemonier en a recu la graine, il y a environ trois ans de l'Ameriquc Septentrionale , dans des terres de miclos. 11 en a fait un genre particulier, fous le nom d obhtia verbenalacaea. La Botanique Frangoife doit beaucoup a M. Oblet , & il a enrichi le jardin des plantes d'une quantite de femences precieufes , qu'il a rapportees de Cayenne & de l'lfle de France. Ce Botanifte zele & lavant nous a fait connoitre les deux efpeces de ijnnia p.mci &z multi flora ; il etoit juftc de donner fon nom a une plante auffi interefTante que celle que nous allons dtcrirc. Nor Emmie j 7 7 1 , Tome I. ,,8 OBSERVATIONS ^.ffX™&„ !•„„„- Defiription. ji^i T f- p'0»:jr»c e, ™«.. «= pel. pons f- Le calice eft veid , ovale , auonec , dmfent a eur fom- courts, marque par cinq fortes "^""^ ^J '" ■ ltes algUes, & I"" dan,S k qS22SS u"S« called On appJU a. leurcouleur eft plus roncee que li„e'aire , cependant bas du calLce une petite teuille ^°^ P nqpoince-, die eft recou- un peu plus large a fa bafe : &. ^ inee J^ fcm& Le calice verte fur (es cotes par des po.ls trc, corns ^^ ^ u eft adherent a la «geS d «££« "g ndant j ^ ^.^ graiae, & la feuille florale fubfi ^*» *™^£ , dont deux plus ° FRUCTIFICATION. Cette fleu quatre tanu, „ ^._ randes 6, deu*; lus courtes , Is ^ f^nferm,es ^ le tube, fice du tube/^x, 1« d«: ** P m trois s demi-circulaueS , iuperieures , & un peu au-deffus des deux ^a, ^ 1 ^ cylmdriquedans route a \??&W>mV Yj^£ la ^roP,Teur augment? gu'aire, marque de trois fortes ne vmes dont . ^^^ t mefure q-'eUes appxochen, du^lg^ Ce nj «U^ ^ eft f°UP/Va rr"«pSCU P r f n"n7u« petite colonne pteufee par S. C« S du? a la reunion de quatre femences renfu- me'es au fond du calice. demie de longueur , & Les femences font brunes ont une ^^^o^- vu a la une denn-Hgne de larger ^ fHi*?-^ La partie fup/rkure de loupe, .1 paroit m^"Vl,^^re a la figure 5'uoe d/nt inc.five. > * SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. j que l'on ouvrc enfuite pour y jecter un peu d'eau, &C eteindrc les particules dc chaux fans aucun melange. Cctre demi-manne c'tant eteinte, on en eteint encore une autre, que Ton entalTc avec la premiere, & ainfi de Ante, jufqu'.i ce qu'il y en air une quantite fufnlante, pour entrctenir i'ouvrier pendant un jour, &c meme plus; on pent laifTer repofer ce tas audi long -terns qu'on veut pendant I'ece , fans aucun danger, & meme la cendre'e fe bonific, pourvu qu'ellc foit a 1'ombre : il n'en eft pas de meme en hiyer; loin de fe bonifier, clle fe gate. La cendre'e ainfi eteinte, on en remplit une auge de deux pieds en quarrc julqu'aux deux tiers on environ ; les bords font e'leve's de neuf polices , afin que la cendre'e ne s'e'ehappe pas en la battant : la quantite qu'on y peut mettre, eft d'environ une brouettee , jauge de Lille, ou , fans s'arretcr a la brouettee , une demi-manne , qui eft un pcu plus petite. La quantite de cendre'e qu'on met dans l'auge a cliaque reprife , fe nomine batte'e. II eft ne'eeflaire d'ecrafer la cendre'e jufqu'a ce qu'elle fafle une pate unie & douce an toucher , par la feule force du frottement , &: fans y mettre que le pcu d'eau qu'il y faut pour l'eteindre. Pour faciliter le travail de I'ouvrier, on place l'auge contre un mur , dans lequel on enfonce le bout d'une perche, dont l'extrc'mitc oppoft'e view rendrc fur le milieu de l'auge ; l'on congoit que fi fituation doit etrc horizontale •, les manceuvres l'appellent regit. On fufpend au bout de cette perche une efpece de demoifelle , que les ouvriers nomment batte , avec laquelle on pile la cendree ; cette demoifelle eft de fer ou de bois arme' de fer , &c a trois pieds de hauteur fur deux polices & demi a trois polices de diametre -, clle en a moins lorfqn'elle eft de fer ; fa forme eft un cone lurmonte' d'un anneau immobile , par oil Ton paffe une corde , par le moyen de laquelle la demoifelle eft (ufpendue au bout dc la perche qui fait le relTort , comme celles dont fe fervent les Tourneurs : ainft le manceuvre n'a d'autre peine que d'appuyer la demoifelle fur le morticr, &c de la conduire , la perche ayant, par fon elafticite, une force fmlifante pour l'enlcver par un mouvement contraire au fien: i! eft aife de fentir par cette manctiivre , que l'auge doit etre faite d'une pierre dure 8c capable de refifter a la chute & aux coups reiteres de la demoifelle. On choifit pour cet effet a Lille , un grcs que Ton trouve aupris ( a ) La m.innc M une rncfurc d'ofier ; les Ouvriers rjppcllcnt mande , miis im- proprement. Voyc^ ci-aprcs les dimenfions Jcs mefures. Novembre X 7 7 I , Tome I, A a a i 37* OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , d'Arras , en tirant du cote de Douai , &c qui eft la meilleure picric qu'on emploie dans cette capitale de la Flandre frangoife , qui n'a dans fes environs qu'une pierre de craie tendre &: blanchatre. L'ouvrier a foin de ramafler de terns en terns le mortier avec une pelle au milieu de Pauge, dont le tour ne peut £tre que de bois; roais dont le fond doit neceflairement etre de pierre; il continue de piler chaque batte'e pendant une demi-heure ou environ , apres quoi il la retire de l'auge , & en fait un tas : comme l'ouvrier a onze heures de travail, hors les repas, il y a environ vingt batte'es dans un jour d'e'te. II ne fufKt pas de battre ce ciment une premiere fois , on doit laifler repofer le tas jufqu'a ce qu'il ait atteint le dernier point de fe'cherefTe, qui permet encore de rebattre la cendre'e fans y mettre d'eau , & au-dela duquel elle deviendroit ii dure, qu'elle feroit une made intraitable & abfolument inutile. L'ufage feul peut apprc-ndre quand il eft tems de recommencer a battre un tas de cendre'e; comme cette matiere eft tres-fujette aux influences de l'air , on doit fe re'gler fur la tempe'rature du fioid tk du chaud ; e'eft beaucoup que d'attendre trois jours dans les grandes chaleurs ; & dans une grande humidite, ce n'eft pas trop de fix. L'on ne rifque jamais rien de battre la cendree auffi fouvent & audi long-terns qu'on le veut, fut-ce pendant une anne'e ; car , plus elle eft broyee & battue , mieux elle vaut : il y a cependant des bomes a ce travail. En effet , a force de battre la cendre , on la rc'fout en une pate qui devient toujours plus liquide; & fi Ton continuoit trop long - tems de fuite , elle le deviendroit au point de perdre un forte de confiftance qui lui eft ne'eeffaire pour etre battue ; e'eft pourquoi Ton reftreint le broyement de chaque batte'e a une demi-heure, apres lequel tems on la laiffe repofer deux ou trois jours; alors,on la rcprend pour la lemtttre au meme e'tat qu'elle etoit quand l'ouvrier l'avoit quittce. Toutes les fois qu'on rebat la cendre'e, Peconomie veut qu'on lc fade toujours a propos , e'eft-a-dire , qu'on attende le moment qui pre'eede imme'diatement celui ou il commenceroit a etre trop tard de le faire; avec ces intervalles, il fuffit de rebattre dix fois la cendre'e, pour qu'elle acquiert un degre de bonte', dont on doit fe contenter; au lieu qu'en la rebattant coup fur coup, on recommencera plus de vingt fois , fans qu'elle foit meilleure que fi on ne Petit battue que dix fois , mais dans les tems convenables; & par ce moyen, les frais de main-d'eeuvre , qui font les plus confiderables , fe trouveroient double's en pure perte. La cendree e'tant ainfi pre'paree par un broyement repe'te dix foi<, SUR VHIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 373 ou davantage , s'il furvient un embarras qui empeche de l'cmployer, on ne doit pas difcontiimcr de la rebattre tous les trois jours , plus ou moins, (don les failons , fans quoi clle fe durciroit, & ne feroit propre , comme on l'a die, a aucun ufage. En prenant ces melures , un tas de cendre'e pent fc conferver des anne'es entieres; mais on fent qu'alors l'cxcellcnce du mortier feroit trop achetee , par la de'penle & la fujetion de le rebattre: cependant, il pent y avoir des cas ou cette de'penfc eft encore pre'ferable a la perte d'un tas de cendre'e , dont la preparation a deja coute bcaucoup de frais: il faut en pareille circonftance le depofer dans un fouterrein ou dans un endroit inacceflible aux rayons du (oleil & a la chaleur: l'humidite qui y regne ,s'infinue a travers les pores du mortier, Sc I'entrcticnt dans (on e'tat de pate molle qu'il conlerve une fois plus long-tems que s'il e'toit dans un lieu tec : on eft par coniequent oblige de rebattre la cendre'e moitie moins fouvent, ce qui diminuc les frais dans la meme proportion. L'exccs du froid tk du chaud eft e'galemenr nuifible •, on reme'die aux grandes chaleurs en couvrant l'ouvrage d'une couche de terre glaife, de paillaflbns & de planches, & en oppofant aux rayons du foleil uneepaifleur qu'ils ne puifTent pene'trer;il y a moins de remede pour la gele'e, qui de'tache la cendrie , lorlqu'elle la failit avant qu'elle ait pu (e'eher : une /aifon tempe'ree ou meme humide , eft celle qui convient le mieux ; & fi la cendre'e a le terns de fe'eher fans etre atteinte de la gelec ni d'une chaleur exceffive , elle devient inalterable a 1'une comme a Pautre, & le rems qui de'truit tout, ne fait qu'aucrmcnter fa folidite ; en forte qu'il eft beaucoup plus aile' de pulve'riler les pierres & les briques , que de la pulverifer elle-meme. La cendre'e pourroit etre employe'e a tous les ufages auxquels on cmploie le mortier de (able & de cliaux , fi on vouloit en faire la depenfe ; car elle rc(ifte a trois cle'mens, auxquels rien ne peur re/ifter, !e feu , l'air & l'eau ; mais clle a (ur-tout une proprie'te' merveillcufe contre ce dernier : quelques minutes, apres qu'elle a ere appliqiu'e, lui luffifent pour faire corps avec la pierre, apres quoi il n'y a nul inconvenient de hither les caux contre l'ouvrage , pourvu qu'elles dorment comme dans un baflin, & que ce ne (oit pas line riviere dont le cours flit aflez rapide pour la de'grader. Dans ce dernier cas , Ton doit avoir la precaution de retenir les caux un jour , ou (eukment quelques heures; & (i cela ne fe pent pas, il convient d'enduire l'ouvrage d'une couche de glaife, que Ton defend ei.corc avec des pla> dies contre l'effort de l'eau. Unemuraille ainfi conftruite, durerapluiiturs fiecles au milieu d'une riviere, lans qu'il (oit a craindre que fa violence, quelque grandc qu'elle (ou, la fade crouler , ni meme qu'elle Pendommage : clle NovejxBre 1111, Tom'. I. 374 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , aura done toute la (olidite qu'on peut defirer , mais les eaux pourront filtrcr aii travels •, & li l'ouvrage eft deftine a les retenir,il faut batir felon la methode fuivante. MANIERE DE CITERNER A LILLE. Dimenfions des Briques. j~l UIT pouces de long, quaere pouces de large , deux pouces d'e'- paifleur. Plan , eft la furface d'une brique confide're'e fur fa longueur &c fa largeur. Champ , eft la furface d'une brique confidere'e fur fon e'paifleur. On pofe une brique fur fon plan, en forte qu'elle prefente en dehors, non pas le bout , mais le cote fur toute fa longueur; cette brique, ainfi pofe'e , commence a donner quatre pouces d'e'paifTeur a la mu- raille. On platre, e'eft-a-dire, qu'on applique contrc le champ de la brique line couche de cendree de fix lignes d'e'paifteur , la brique e'tant fur fon plan ; il eft e'vident que cette couche doit avoir une fituation horifonta'e. Derriere cette premiere brique , on en pofe une feconde fur fon champ , qui fait une e'paiffeur de deux pouces , & qui en donne par confequcnt moitie moins a la muraille que la brique pofe'e fur fon plan. On continue ainfi rang par rang, de telle forte qu'une brique (ok toujours pofee de facon qu'elle coupe , autant qu'il eft poffible, le joinr qui fe trouve entre deux autres briques. On lie routes ces briques par une couche de cendree, e'paifTe de fix lignes plus ou moins, felon la forme re'guliere ou irreguliere qu'elles portent , e'tant abfolument neceffaire qu'elles foient toutes place'cs bien horifontalement. On pre'tend qu'avec une muraille circulaire d'une pareille conftruc- tion , Ton pourroir faire un puits a fee au milieu d'un e'tang, &: meme du fleuve le plus rapide. Manihe de faire le Taffetas d'Angleterre. M. Duhamel a publie' dernierement un traite' fur les colics, dans lequel U dit , en parlant de la colle de po'jjbn , fabriquL;c en Ruflie , qu'elle fert a faire le taffetas d'Angleterre. Voici la me'thode qu'il en SUR MIST. NATURELLE ET LES ARTS. ?75 donne : tcndez fur un petit chaffis un morceau de taffetas noir Sc clair, pafTcz deflus avee une broffe fine plufieurs couches de colle de poijfon , qu'on a fait fondre dans de l'eau-de-vie ; melez avec la colle f>our la dcrniere couclie, un peu de beaume de Commandeur, ce qui li donncra line odeur agreable. OBSERVATIONS Sur les effets de la neige , relativement a la vue. 1 , A grande quantite' de neige qui eft tombe'e cette annee aux environs de Hambourg , ayant offert pendant tres-long-tems une perfpedfive d'une blancheur e'tonnante , elle a afloibli Porgane de la vue • Sc lorfqu'au commencement du printemps , les rayons du foleil ont acquis plus deforce, il eft furvenu des inflammations aux yeux. M. .Steller Me'decin Oculifte, a employe' un moyen bien fimple pour gue'rirces maux d'yeux , devenus tres-communs Sc tres-dangereux. On prend le blanc dun ceuf, dans lequel on met du camphre & du fucre; on bat le tout dans une affiette, jufqu'a ce qu'il ecume on mouflTe, comme de la crcme fouettee ; on en fait enfuite un cataplafme que l'on ap- plique (ur l'ceil malade, Sc Ton eft gue'ri en tres-peu de terns. M. Steller affure que ce remede fimple , aife' 8c peu dilpcndieux , guerit la rou^eur & l'inflammation des yeux, de quelque caufe qu'elles proviennent. Manilre de connoitre Ji un chien eft mort enrage'. Il y a eu cette anne'e dans TEledforat d'Hanovre , une grande quantite de chiens enrage's. Quelqucs Chirurgiens voulant s'a'Turer fi leurs morlures e'toient venimeufes , Sc a quel degre clles pouvoient Tetre, ont employe la mt'thode enleigne'e par M. Perit, Chirurgien de Paris, lis ont pris un morceau de viande cuite, qu'ils ont fortement frotte'e a la gorge, aux dents Sc aux machoires du chien rue, en obfervant la pre'eaution de ne laiffer tomber aucune goutre de fang fur la viande •, ils ont enfuite prt'fentc' la viande a des chiens fains. Lorfque le chien tuc' avoit ete' enrage , Sc que fa morfure e'toit venimeufe , Familial lain s'eft enfui , en hurlant , fans vouloir toucher a la viande; dan 1c cas contraire , le chien fain a mange' la viande avee fon avi- ditc ordinaire. Novembre I 77 I , Tome I. >j76 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , EXPERIENCES Pour chercher les caufes des changemens qui furviennent & la couleur du firop violat , par le melange de diffe'rentes fubjlances. Par M. I'e Cornte de SaluceS. .L'lLLUSTRE M. NEUMANN a donne un Me'moire , dans le quatrieme volume des mifcellarua Berolinenjia , fur le peu de con- fiance qu'on doit avoir aux changemens de couleurs qui arrivent au Jirop violat, par le me'lange de quelque fubftance. On fait que la couleur verte fert a carafte'rifer les fubftances alka- lines , que la rouge denote la pre'fence d'un acide ; 8c que les fels qui re'fultent de la combinaifon exa£te de ces principes , & plus ge'nerale- ment que les fels parfaitement neutres , n'apportent aucune alte'ration a la couleur bleue des ve'getaux 5 ce font la des maximes gene'ralement revues; cependant, quoique ces axiomes ayent e'te' depuis fort long- tems adopte's, ce Savant demontre qu'ils etoient fujets a un grand nombre d'exceptions , & qu'on n'etoit pas en droit de conclure de ces changemens, que la fubftance employee Hit acide ou alkaline, ou enfin neutrej lorfqu'il ne furvenoic aucune alte'ration 4 la couleur na- turelle du Jirop. Ce n'eft point une ampliation de ces exceptions qu'il fe propofe, mais 1'exam.en de ces changemens , & celui des caufes de ces memes exceptions. Je diftribuerai mes obfervations , dit M. L. C. D. S. felon 1'ordre qui me parpit le plus naturel , favoir, celui que tiennent les acides , & je chercherai enfuite a. deduire les confe'quences qui en refultent, i°, Le Jirop violat mele avec l'huile de vitriol , prend une cou- leur rouge tres-belle & plus ou nioins fonce'e, a mefure que la quantite d'eau dans laquelle on e'tend le Jirop eft plus ou moins grande. i°. II n'en eft pas de meme, fi on met l'huile de vitriol fur le Jirop, fans le delayer dans une quantite d'eau confiderable •, quantite qui doit etre fixe'e par Pefpece de diftolurion qui fe fait fans qu'il ne fe pre'eipite plus rien apres qu'on l'a laiffe repofer ; car alors le Jirop fe convertit en charbon. 3^. Toutes les fois que la quantite d'eau excede le point de fani- ration, s'il eft permis de me fervir de cette expreilion, la couleur fe change en vcrd dans la diffolutiou du Jirop. j~a, Je ne paderai dorenavant que des diflolucions fature'es ; i'aver- rjrai SUE. L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 377 tirai toutcs les fois que cectc circonftance aura etc alteree , ' & jc Icfc nommerai liqueurs. 5". Lc rartre vitriolc femble au commencement , ne diininuer qu'un peu l'intcndte de la coulcur blcue ; clle fe change ne'anmoins apros un certain terns en une couleur verte aflez belle ; les fleurs dc vio- lctte ni lc papier bleu ne fourfrcnt aucun changement. 6°. Le foie de foufrc, ou pour parler plus exactcment , du foufre &: dc l' alkali fixe mele's a cettc liqueur, au moyen de l'agitation , lui font prendre une couleur jaune dore'e tres-belle {a). 7°. Le fel volatil fe diflout en tres-petite quantite dans la liqueur, elle (e change cependant en un verd aflez clair , apres quelque terns. 8°. Le fel de Glauber fe diflout en trcs-grande quantite' dans la li- queur , & lui faire prendre aufli-tot une ties-belle couleur verte. 9°. L'alun fc diflout de meme en tres-grande quantite, &: produit une coulcur violette, qui dilparoit cnluite, Sc fe change en un verd falc : les fleurs de violette Sc lc papier bleu changent audi en rouge; il fe fait, au reftc , un pre'eipite' confiderable dans le commencement, qui lemblc cependant diminuer par la fuite. io°. L'alun de plume artificiel ie diflout encore en plus grande quantite, Sc fait prendre une tres-belle couleur de cerife a la liqueur, aux rleurs de violette Sc au papier bleu. ii°. Le vitriol verd communiqua a la liqueur une couleur verd d'olive, il parut changer foiblcment en rouge les rleurs de violette; Sc le papier bleu prit une teinte d'un gris rougeatre. Il y eut aulli dans ce me'Iange un precipite' confiderable (b). 1 1°. Le vitriol de cuivre paroit produire dans le terns meme de- la diflolution un peu de changement , Sc la liqueur prend a la fuite une belle couleur verte, de meme que les fleurs de violette qui fe chargent d'unc nuance tout-a-fait fcmblablc a cclle du verd , Sc le papier bleu au contrairc femble relever un peu la couleur naturelle. 1 50. L'huile de tartre commence par communiqucr une couleur jaune a la liqueur, qui fe change enfuite en verd a mefure que la quantite du firop eft plus grande; cette couleur cependant nc fe foutient pas, ( a ) Toutcs les fois que jc nc parlcrai pas des fleurs de violette , & du papier bleu , e'eft parce que je n'y aurai rcmarquc aucune .'Iteration fenfible. (A) Dans lc dome que lc vitriol verd que j'avois employs' n'eiit fouffert une efpece de de'compofition , j'y ajoutai un peu d'acide vitriolique, ee qui produifit, en effet, une efpece de eonflcinent qui ne rcllembloit pas mal a un mouvement de fermentation ; pour m'aflurer neanmoins qu'il ne fe trouvoit pas une furabondance d'acide , jc pro- jettai , par intervalle, de petites quantite^ de limailie dc fer, jtifqu'a cc qu'il ne parut plus de mouvement. Cette liqueur prit une coulcur brtmc tres-ronccc , qui ctoit a- pcu-pies la meme que cellc qu'on obtieut en mcttant de 1'cau avee lc cliarbon qui reTulte de la combinaifon de l'acidc vitriolique & du lirop , §. 2. de meme que le papier bleu j les fleurs dc violette, au contrairc, devinrent d'un trcs-bcau rouge. DicEMBRB I 7 7 I , Tome I. B b b 378 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , 8c redevient jaune-orange'. Les fleurs de violette de'veloppcnt un bien plus beau verd, qui fe change de mime en jaune a mefure que l'hu- midite' s'e'vaporc , 8c qui paroit d'un blanc fale , lorlque les fleurs font leches. 1 4°. Le fel de tartre fe diflbut en tres-grande quantite', communique d'abord une belle couleur verte a la liqueur, & paroit la parrager en deux parties, dont la fupe'rieure eft: un coagulum blanc, 8c l'infc- rieure eft une eipece de pre'cipite' verd tres-fonce; apres quelque terns, cependant , cette liqueur prend une couleur jaune orange'e. i 5°. La chaux vive change cette liqueur en un verd tres-clair, apres avoir pane par le jaune, comme celle qui eft; mele'e a l'huilc de tartre §. 1 3 , 8c jaunit de raeme enfuite. 16°. La chaux lave'e change la liqueur dans le moment du melange en verd clair qui pafle enfuite au jaunatre. 17°. Les os calcine's changent la liqueur en verd clair, 8c cette couleur s'y foutienr. Je crois devoir faire remarquer que le fel de tartre, la chaux vive, la chaux lave'e , les os calcines & le fel volatil de fel ammoniac pro- duifent un mouvement dans la liqueur qui reflemble beaucoup a un mouvement de fermentation. 1 8°. Le fel volatil fait prendre une couleur verte a la liqueur qui fe change enfuire en jaune orange'. 1 90. L'efprit volatil de fel ammoniac change aurfi-tot en verd un peu jaunatre, cette liqueur qui ne fe foutient pas & qui pafle au jaune, &c. & en un tres-beau verd, les fleurs de violette ; mais ce changement eft encore plus prompt avec l'eau de luce ; cette couleur ne'anmoins fe change auffi en jaune. io°. L'huile de vitriol combine'e avec l'huile , &: etendue enfuite dans l'eau, procura une tres-belle couleur a la liqueur , 8c changea les fleurs de violette en tres-beau rouge. ii°. Si l'eau forte que Ton mele avec la liqueur en queftion , eft: en trop grande quantite', elle ne prend pas une belle couleur rouge, encore eft-ce plutot un jaune dore', qu'un veritable rouge qu'on peut lui faire prendre, quel que foit le rapport de ces fubftances entr'elles. II en eft de meme en cmployant le firop tout pur 3 le papier bleu prend un rouge de brique , de meme que les fleurs de violette, dont la couleur cependanr differe de quelques nuances. Ce rouge, quoi qu'il en foit , n'eft jamais beau 8c pafle d'abord au jaune cicron , comme la liqueur repofe'e qui contient l'alkali fixe. 2.10. Le falpetre fe diflbut en grande quantite' dans la liqueur 8c lui faire prendre une couleur verte. 2 30. L'acide marin fait prendre une tres-belle couleur rouge pon- ceau a la liqueur , qui eft plus foncee , quand cet acide eft en petite SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 379 quantitc' ; lorfqu'on en mele au iirop lans etre delaye'e , il fe manifeftc line tres-belle couleur de rubis, rcflemblant paifaitement a du vin. 14.0. Le fel marin ne fe difiout p.is en auffi grandc quantite dans cettc liqueur que le falpetrc ; il lui taic prendre line couleur vertc fonce'e. 250. Le fel ammoniac fait changer en verd bleu cette liqueur. 16°. La limaille de fer fembie aulli taire prendre une couleur vertc fonce'e a cette liqueur. 270. La pierre a cauterre fait prendre dans l'inftant du melange une belle couleur verte , &c elle fe change enfuite en jaune. 2S0. La fubftance faline, dont j'ai parle dans le Memoire prece'dent, §. 69 , paroit n'avoir produit aucun changement fur la couleur du iirop dans le moment du melange •, mais elle eft dans la fuite devenue de la couleur des eaux croupiffantes. 2 9°. Le fel de faturne a fait prendre une couleur verte a la liqueur en queftion, & il s'eft fait une feparation en forme de precipite des parties extractives , qui n'avoient rien foufFert dans l'intenfite' de la couleur. 300. La creme de tartre n'a auffi produit aucune alte'ration dans le rems du melange; mais elle lui a fait prendre une belle couleur de vin. 31°. Le precipite' blanc a converti la liqueur en bleu pale & en- fuite en verd clair. 3 1°. Le turbith minc'ral a change le firop en verd. Je dois avertir , quoique la choie foit fort naturelle , que ni Tune ni l'autre de ces fubftances ne s'eft pas difToute dans la liqueur. 5 5°. U11 fel fele'niteux , charge de beaucoup de matiere phlogif- tique,cV par confe'quent , tres-difToluble dans l'eau , a change cette liqueur en verd , la couleur ne s'eft pas foutenue , & elle a paffe au jaune orange, & a donne tin precipite tres-abondanr. 340. La pierre a platre qui n'eft, comme Ton fait, qu'une fele'nite calcaire naturelle n'a point change cette couleur au moment que je l'y ai mife ; elle parut cependant en avoir altere' la nuance dans la fuite. 35". Le platre cependant m'a paru y avoir occafionnc quelque chan- gement dans l'inftant du melange , qui devint de plus en plus fenfible dans la fuite; fa couleur c;toit d'un verd jaunatre. 3 6". Le colcotar a fait prendre dans le moment du melange , une couleur rouge a la liqueur, & lorfqu'il fe fut enticrement precipite, elle devint d'un trcs-beau jaune dore. 37". La noix de galle lui a communique une couleur brune, oli- vatre, qui s'eft foutenue, 8i qui ne diffe'roit pas de celle qui refultc d'un melange, de cette diflolution, avec un peu d'huile gralTe iv beaii' Di-cembre I 77 I , Tome I. Bbb 1 3 So OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, coup d'acide vitriolique ; elle reffembloit tres-bien audi a celle dont j'ai rendu compte dans la note du §. i r. 3 8°. La liqueur de'layce dans autant d'eau qu'il lui en fall Lit pour paffer de la couleur bleue a la verte , eft repartee au bleu par un peu de favon que j'y ai fait diffbudre. 39°. Du fel de glauber, du falperre & du fel marin diflous fuccefll- vemcnt dans cette liqueur, &c meles enfuite avec de l'elprir urineux, l'ont fait changer tout de fuite en verd clair, elle repafifa au bleu par I'addirion du favon diflous, & il s'eft coagule dans ce melange, comme il e'toit affez naturel de le pre'fumer , fi quelqu'un des fels n'avoit pas e'te' a bafe d'alkali fixe ; ce qui me fait conjedhirer que Telprit volatil contenoit apparemment encore un peu d'acide marin. 400. Je melai une petite quantite de liqueur rendue rouge par I'a- cide vitriolique, avec une grande quantite de celle qui e'toit d'un jaune clair par le me'lange de l'huile de tartre, & je vis qu'au moment du point de (aturation , le me'lange commenca a verdir, & fe fonga con- tinuellement , fans jamais perdre de fa couleur , comme faifoit l'huile de tartre, malgre que je Ten euffe charge'e. 410. Sans entrer dans une recapitulation me'thodique des faits dont j'ai rendu compte, il paroit qu'on peut conclure que la couleur rouge prouve tout au moins une (urabondance d'acide dans la fubftance melee a la diftolution du firop. Pour ce qui eft de la couleur verte, jc me crois bien fonde a dire , d'apres le cclebre M. Neumann , qu'elle eft une preuve tres-equivoque de la prefence d'un alkali, & qu'elle eft meme fauffe , c'eft-a-dire, qu'elle prouve la pre'fence d'une lubf- tance neutre tres-difloluble, lorfque cette couleur fe foutient-, car ft la fubftance qu'on a mele'e eft un alkali fixe ou ( a ) volatil, ou enfin fi ce principe y domine , la liqueur doit prendre une couleur jaune, qui fera plus ou moins fonce'e, a mcfure que ce principe s'y trou- vera en plus ou moins grande quantite'. 420. J'ai e'galement lieu de penfer que la couleur bleue ne pafte au verd par Pinterpohtion des parties (alines qui fe font diffoutes dans la liqueur , que parce que les parties blanches du mucilage fe trouvent plus divife'es entr'elles (b) puifque du moment que ces parties fe rap- ( a) En effet , nous avons fait obferver qu'une diftolution rendue rouge par I'ad- dition d'un acide , commencoit a fe changer en verd , avant d'avoir atteint le point de faturation ; lorfqu'on la meloit a une diftolution du meme firop rendu jaune par l'aclion d'un alkali fixe , & que cette couleur continuoit a fe foncer a mcfure que la quantite' de liqueur jaune e'toit plus grande. II fuit de-la qu'il n'eft pas necejfaire que le fel foit parj'aitement neutre ; mais je dois faire remarquer que fi Vexces de fa- turation depend de V alkali fixe , la couleur ne fe foutient pas , 6' pajfe au jaune. (l>) Je crois que ce n'eft pas par d'autres raifons que dans celles de 1'interpofitiou produiee par la diftolution des fubftances falines , qu'on doit chercher le changemeut SUR MIST. NATURE LLE ET LES ARTS:. 381 prochcnt , 011 qu'on y en introduit de nouvelles, commc cela arrive par le. melange du favon, la couleur bleuc (c mamfefte & fe foucienc tanc que le nouveau coagulum (c fouticnt lui-meme par pedes Hoc- cons dans la liqueur. 4j°. Si la fubftance faline, outre I'interpofidon de fes parties dans celles du lirop diflbut, a encore action fur ces memes pities , il en refulte la couleur jaune ou la couleur rouge , (uivant que ccttc ac~Hon eft plus ou moins vivc , de maniere que (a) la couleur jaune de la couleur bleuc en vcrte , puifque les fels ou les maticrcs qui ne font pas ou qui font du moins trcs-pcu diflolubles dans l'eau , & qui , d'ailleurs , par la fineile de leurs panics , ne peuvent fe foutcnir dans la liqueur , n'y produifent aucun changement • & qu'au contrairc, plus les fels font dilfolublcs , ou plus les maticrcs font reduites en des parties affez dc'liees pour etre foutcnues, plus le cliangemcnt eft prompt & conlide'rable. C'eft aufli cc qui paroit cxaclemcnt prouve par le rctour au bleu au inoyen du favon • car cettc fubftance ne pre'fente pas une diffolution parfaite dans l'eau , & clle n'y eft que mifcible ; d'ou il fuit naturellement Topacitc des parties aqueufes , qui , ne tenant point de lirop en diilolution , c'toient auparavant diapliancs , & faifoient paroitre la couleur verte. Nous pouvons done de'duire de-la , que la denfite du milieu produit feule ce c!ian»C" ment. {a) L 'action des acides & des alkalis fur les parties extractives dont eft compofd 1c lirop , eft li diffcrente , qu'on peat , avec fondement , avanccr que I'une eft tout-a- fait oppofe'e a I'autre; il me paroit cependant qu'cll ne dim-re que par Tactivitc avec laquelle elle fe fait ; mais ce feroit une queftion qui meneroit trop loin , & je mc borncrai a faire obferver que Taction de 1'alkali fixe conlifte en ce qu'elle difpofe les parties extractives a la fermentation putride. En eftet , en furchargcant d'alkali fixe une diffolution de firop dans l'eau , il fe dcveloppe, apres quelques lieures, une puif- fantc odcur d'efprit urineux , qui diminue cependant enfui e par de nouvelles additions d'alkali fixe , & prend alors l'odeur & la couleur memc de l'urine qui commence a fe putrcficr. Or , commc la putrefaction nc fait que defunir , par une efpece d'exten- f;on , les parties des fubftances qui en font capables , je crois etre bicn fonde a penfer que c'eft de la rarefaction des parties qui conftitucnt la couleur vcrte , qu'on doit re- puter le cliangemcnt de cette couleur en jaune. Les acides , au contrairc , loin de dif- pofcr les maticres a la fermentation putride, font faits pour en empecher 1'cfFet commc cela eft connu de tout le monde ; & j'ai lieu de croire que c'eft en racornif- •fant les molecules colorantes , qu'ils produifent les cliangemcns des couleurs , dc ma- niere que ces parties prefentent A: plus grands interfaces entr'elles , pendant qu'elles font reduites a un plus petit volume pour les nuances de la couleur rouge , & qu'elles le font en plus petit poffible pour le noir le plus foncc. II me paroit qu'on ne pout mieux comparer cette action des acides & des alkalis qu'a ce que Ton voit arriver aux fubftances , tant animales qnc vc'getales , cxpnfe'es a Taction immediate du feu, ou bien a celle de cet agent modifie'e par Tintermedc dc Teau ; dans le premier cas , ces fubftances foufFrent une contraction plus ou moins grandc . a mcfure que Taction eft plus ou moins vive ; & au contraire , dans le fecond tiles s'e'f ndent & fe rareficnt. Cette d frc'rcncc cependant ne paroit produite , que parce que dans ces acides , Tac- tion tant trop vive , attiquc d'abord la furfacc Aes fubftances , & fe porte , par une fucu'llioii rapide , fur les partic; intcrieures, au lieu que dans les alkalis, cette action eft plus unilorme , & s'etend en mime terns fur toutcs les parties de la fubftance Decembre i 7 7 i , Tome I. 381 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , ne feroit que la dilatation des patties, qui du bleu, ont pafle au verd, & le rouge une plus grande attenuation de ces parties. Le noir entin ne fauroit etre que la dcftruction , ou, pour parler plus exactement , la diviiion mechanique la plus forte poffible. 44°. Cette divifion ne me paroit etre produite que par 1'atte'nuation qui arrive au phlogiftique. Je fuis parvenu a faire du bleu par une furabondance de cette matiere , avec une diffolution de vitriol verd, que j'avois fait long-tems bouillir pour en feparer la terre ferrugi- neufe, & cela au moyen d'une grande quantite d'une forte de'eocrron de noix de galle, dans la diffolution en queftion. Ce me'lange , aprcs avoir pafle par la couleur noire de difrcrentes nuances, Sc par le violet, devinc bleu de Roi , lorfqu'il eat ere parfaitement deffe'che'. Je dois cependant avertir que M. Rouelle avoir deja fait une pareille pre- paration, commc je l'ai vue rapportee depuis par M. l'Abbe' Menon , dans fon fecond Me'moire fur le bleu de Prude , infe're dans les Me'- raoires de Mathematique & de Phyfique, pre'fente's a l'Acade'mie Royale des Sciences, par divers Savans ; torn, premier, pag. 580. 450. Nous de'duirons enfin de ce Memoire, que pour que la couleur bleue fe change en verd , il n'eft pas ne'eeflaire que la fe'cule colorante foit atte'nuee , & qu'il fuffit qu'il fe fafle une interpofition des parties d'une fubftance blanche ou jaune, qui donnent de l'opacite aux in- terftices du milieu interpofe entre les mole'cules colorantes. 4<5°. Qu'il n'en eft cependant pas de meme de la couleur jaunc; car elle eft, fans contredit, le refultat d'une dilatation qui fe fait dans ces parties, de maniere que leur denfire fe trouve diminue'e. Que la rouge depend d'une plus grande divifion des parties de celles-ci , & que la noire n'eft, pour ainfi dire, qu'une divifion fi intime , qu'on peut la nommer du nom de deftruclion. 47°. Tout ce me'chanifme cependant ne fait fon jeu qu'en vertu de l'action que les fubftances ont (ur le phlogiftique. 480. Lorfqu'un corps eft re'duit en charbon, ce n'eft pas qu'on en ait enleve le phlogiftique , je croirai plus volontiers qu'on n'a fait qu'en changer la distribution •, les corps blancs me paroiffent etre ceux qui en font les plus de'pourvus , ou du moins, qui n'en retiennent que la quantite qui leur eft ne'eeffaire pour avoir les proprie'te's com- munes aux corps ; d'oii il refulte aulli une plus grande difficulte pour les en priver. Ce qu'il y a de tres-pofitif , e'eft que la chaux & le fel de potaffe, de meme que le fel de tartre, deviennent bleus e'tant cal- cines ( au moins a vafe clos ) avec des matieres qui contiennent beau- coup de phlogiftique. M. le Comte de Saluces promet de plus grands details fur les verites dont il ne donne ici qu'une ide'e. Le public les attend avec impatience. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 383 DISSERTATION De M. Jean Ek , fur la nature de la rofe'e. tj vJue l'ean forme dcs vapeurs , que fous cettc forme elle s'e'Ieve en l'air, e'eft un fait de'montre' par les obfervations journaliercs. Les pctites goutres d'eau fepatees en des gouttcs plus petites, & ainfi devenues tres -le'geres, fe difperfent dans l'atmofphere , 8c bicntot ellcs ne font plus (enfibles a notre vue. II eft conftant que les corps iolides, tels que les vege'taux, les animaux & la terre elle-memc renferment dcs particules aqueufes , dans line plus ou moins grande quantitc, o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , de ces grands hommes ne paroit pas aflcz inte'reflee par des decou- vcrtes de cette efpece , pour reprochcr a l'Hiftorien de ¥iU3ricit£ une omiflion 30. Si on fait chaufFer la tourmaline dans dans un e'tat non elec- fa trique , & qu'on la laiffe refroidir , fans toucher a aucun de fes cote's , ;j A fera pofitif, 8c B negatif, pendant tout le terns de I'accroifFe- »j men;, & de la diminution de la chaleur. n 40. L'un SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 395 » 4°* L'un & Pautre cote de la tourmaline deviendront pofitifs , par » le frottement , & tous les deux pcuvent etre rendus tels en memc •> terns ». La dixicme fedtion revient encore fur une queftion de'ja agite'e pre'- ce'demrnent , fur la rcftemblancc du tonnerre a YiHeclricirf. M. Prieftley y parle des expediences de M. Dalibard, en France; MM. Delor , Dcmafeas,Ie Monnier,ont audi quclque part a fon fouvenir. MM. Can- ton & Wilfon, les compatriotcs, quoiquc beaucoup plus ce'lebres , n'ont rien fait de comparable en ce genre, de 1'aveu de PHiftorien, aux travaux du Pere Beccaria. II rend ne'anmoins juftice enfuite a Pin- genieux M. de Romas, & il rapporte aflez complettement les belles experiences qu'il fit a Paide d'un cerf-volant , conftruit avec beau- coup d'art. Des obfervations fur Pe'tat general de Ye'kclricite' dans Pathmofphere, & des eftais pour expliquer, par Ye'kclricite , quelques-uns des phe- nomenes les plus extraordinaires fur la terre & dans les cieux, rem- plifTent les deux fedHons fuivantes , apres leiquelles on lit avec plailir un excellent Memoire de M. l'Abbe Nollct fur les effets du tonnerre, compare's a ceux de Ydeclricite'. Ce memoire ajoute a l'ouvrage de PHiftorien, ne de'pare point fon Hiftoire, & fait connoitrc avec plus de pre'cifion les travaux des Phyficicns Francois en ce genre. La treizieme fedtion contient des obfervations importantes fur l'u- fage des condudteurs de metal. La fuivante, qui traite de Ye'kclricite' medicale, me'riteroit d'etre plus developpee. Un melange d'experiences & de decouvertes remplit la quinzieme & derniere fedtion, & ellc termine la premiere partie decette Hiftoire. La feconde partie contient une fuite de propofitions qui compren- ncnt, dit PHiftorien, toutes les proprietes gc'nerales de Ye'leclricite'. La troifieme traite des theories de 1' 'electricitl ', dont il donne le dc'veloppement fuccint dans trois pctites fedtions , & elles terminenc le fecond volume. Le troifieme volume comprend cinq parties, divife'es en plufieurs fedlions. 11 eft peu important de s'arreter aux quatre premieres fedtions. La rinquieme traite de la conftrudtion des machines e'ledtriques , qu'il eft impoffible de de'railler dans cet extrait. Le Ledleur en lira la defcription dans l'ouvrage memc; il trouvera de quoi (atisfaire plei- ncment fa curiofite'. Il eft bon cependant de le prevenir fur une note du Tiadudteur , page 91, dans laquelle il deprile une efpece de ma- chine cledtrique , qu'on ne fauroit trop connoitre, & trop multiplier, Cette machine, perfeclionne'e en Angletcrre , par lesfoins de Ramlden , a paru preferable aux meilleures machines cleCtriques, faites avec des Decembre i 7 7 i , Tome I. D d d ?94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , globes ou dcs cylindres creux : voici en peu de mots ce qui engage les Phyficiens a lui donner la pre'fe'rence. Elle re'uilit en tout terns. On lui a vu produire les plus grands effets l'hiver dernier pendant le de'gel , lorfque l'athmofpherc e'toit prodigicufement charge d'humidite'. Elle eft beaucoup plus limple 8c plus facile a manier que toute autre, 8c on n'eft jamais expofe aux terribles effets d'une de'tonnation imprevue de la part d'un globe ou d'un cylindre. II eft probable que le Tradu&eur de M. Prieftley n'a pas bien examine ces fortes de machines. On en voit deux tres-belles dans le cabinet de M. le Due de P. 8c une dans celui de M. Sigaud de la Fond; ce Phyficien l'a perfectionne'e , & l'a adopte'e par preference, a une tres-grande machine a globe , dont la roue avoit cinq pieds de diametre •, cependant les effets en e'toient moins fenfibles que dans celle-ci. M. de la Fond la fait voir aux Amateurs , 8c meme il fe plait a donner les renfeignemens ne'eeffaires a ceux qui veulent en faire conftruire de pareilles. La fixieme partie comprend des maximes pour l'utilite des jeunes Electriciens. L'Auteur defcend ici dans des details fouvenr minutieux; niais on ne doit rien negliger en pareille matiere. Les deux fuivantes mettent fous les yeux une forte d'expe'riences amufantes. II eft fait mention dans la huitieme de nouvelles expe'riences faites en 1766. La cinquieme eft affez curieufe. La feptieme me'rite d'etre lue avec atten- tion par ceux qui feront curieux d'augmenter les produits ordinaires de Yckclricite. Cette derniere partie contient quantite de fairs impor- tans qui me'ritent d'etre examine's avec foin. Cet ouvrage, en ge'ne'ral , eft intereffant ; plus de methode, moins de partialite', plus de clarte , fur-tout, dans l'expofition de quelques faits, plus de details dans la defcription de certaines machines, 8c un ft vie un peu plus foigne, en feroient un excellent ouvrage, 8c le plus important peut-etre qu'on eut fur cette matiere , qui , tot ou tard , conduira a des decouvertes importantes, foit pour la Chymie, foit pour l'Economie animale , & pour l'Agriculture. II auroit e'te a fouhaiter que le Tradii(5teur eiit mis plus d'amenite dans fes notes. Plufieurs expreffions trop fortes ne feront pas du gout du Lecteur. II eft fi aife de telever les erreurs avec honnetete, qu'on tft furpris que cette voie n'ait pas e'te' prefe'i'e'e. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 395 DISSERTATION Sur ks argilks , par M. B E AU M i. Troijiime analyfe. i^J*UELQUES perfonnes nous reprochent dc faire des analyfes longues Sc de'taille'es. Si l'ouvrage eft bon Sc utile , dies ne fauroicnc 1'etre trop ; s'il eft mauvais , elles font fuperflus ; il eft impoftible de contenter tout lc monde. Les uns nc vculent que la quinteftencc d'un ouvrage & qu'en quatre pages on ait relume un volume mane in-q?.; d'autres difent , que chaque jour, elles font trompees en achetant un Livre fur l'exrrait qui a e'te fait dans les Journaux, parce qu'il n'eft pas poflible qu'en peu de mots on en releve les beautes oules de'fauts. Quel partie prendre dans cette perplexite' ? Faire pour le mieux. Quand l'ouvrage le me'ritera , l'analyle fera ample & bien de'taille'e: celle d'un mauvais livre eft bientot faite , & meme il ne vaut pas les frais d'une critique. II n'en eft pas ainfi de la Diflcrtation de M. Beaumc , & le Public l'aura jugee par les deux extraits infe'rc's dans ce volume, pag. 175 Sc 346. On ne pouvoit pas porter plus loin la den onftration fur la nature de Vargille , puifque PAuteur l'a de'com- pofe'e &c recompofe'e ; de'couverte importante , dont la Chymie lui eft redcvable. II refte a examiner avec l'Auteur s'il a des moycns de fertililer les argilks. Tous les terreins font l'objet des recherches de l'Agriculture , & il eft important qu'il en connoifte les proprietes. L'Auteur n'examine pas la nature de tous ces differens terreins ; il fe borne a trois efpeces ieulement , comme ayant un rapport plus direct avec la nature des argilks. Ces efpeces de terres font celles que les cultivateurs ont appellees Terres froidcs, Terres brulantes , Terres franches. Les terres froides font celles qui retiennent l'eau des pluies, elles ne font pas plus froides que les autrcs ; leur proprie'te leur a fait donner cette denomination ; il eft vrai qu'elle tiennent les plantes dans un trop grand e'tat d'humidite. Les terres brulantes font les fables, les graviers. Us pe'chent par un dcfaut contraire, c'eft-i-dire , ils lont trop facilement traverfe's par leseaux, ou laiffent proraptement evaporer I'humidite. Les plantes y c'prouvent trop de fechereffe. La terre franche , que les Laboureurs nomment encore Terreau , eft la meilleure de routes les terres labourables : c'cft un compofe' des deux autres. Imbibee d'eau & pe'trie avec elle , clle a un certain liant , & fa couleur eft otdinairement d'un jaune noiratre. Il nc faut Decembre i 7 7 1 , Tome I. Dddi 39« OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , pas confondre cette terre avec lc Terreau des Jardiniers > c'eft un debris de vc'ge'taux , excellent a la ve'ritc' , pour fertilifer les terres, mais trop difpendieux & en trop petite quantite , pour en faire un grand ulage dans les champs. Les terres fortes font des terres franches , elles contiennent une plus grande quantite d'argille , elles font moins meubles & s'agglu- tinent en mottes. Ces terres font tres - propres a la ve'ge'tation , fi on leur donne les foins qu'elles exigent pour l'e'coulement des eaux. Telles font les terres que M. B. fe propofe d'examiner commc c'tant les plus communes. On fent bien que ces trois efpeces de terre font modifiees fingulierement par plus on moins de me'lange de fable, ou par plus ou moins d'argilk pure. C'eft a PAgriculteur a les rcn- dre fertiles par des moyens convenables , en leur faiiant acque'rir Jes proprietes qu'elles n'ont pas. Ces moyens font le melange , les engrais & le labour. Uargille , quoique la feule matiere terreufe propre a la ve'geta- tion , ne fcroit pas fertile fi elle e'toit leule Sc pure. Les fables purs, & les terreins cre'taces ne le feroient e'galement pas , s'ils n'e'toient unis a la terre argilleufe. Une graine feme'e dans Yargilk pure y germe j mais elle n'y prend aucun accroiffement , parce que la con- iiftance ferme , tenace & compare de cette terre , s'oppofe a l'exten- fion des racines. Les terreins fortement argilleux , fe reduifent a leur furface , par Taction des pluies, en une pate ferine qui, retenant l'eau , l'empeche de parvenir jufqu'aux racines , & fait pourrir les tiges. La paille ou les autres engrais de cette nature , previennent ces inconve'niens, en rompant l'aggregation des molecules de cette terre, & donnant , par confequent, un libre paftage a l'eau. Si, au con- traire , les terreins lont trop mai^res, trop meubles, les pluies leffi- vent les engrais , entrainent leurs fels au-defTous des racines, privent les plantes des fucs favonneux , Sc extracfHfs de ces fumiers , & n'hu- medlent point aflez leurs racines. Les plantes font done expole'es a ctre defftche'es par l'ardeur du foleil. De ces deux efpeces de terrein , les terres argilleufes font les meilleures quand elles font amande'es ; mais avant d'indiquer les amandemens convenables , M. B. examine la nature & la compofi- tion d'un terrein aclruellement labourable & fertile. Cet inge'nieux Chymifte, prit une certaine quantite' de terre des environs de Paris: il la fit fe'eher a l'air pour la priver de fon humidite', & il en lefliva une pattie , oblervant de faire couler avec l'eau la portion la plus fine de cette terre. II refta fix onces de matieres grollieres , e'e'toit du gravier mele de fragmens , de briques Sc de pierres calcaires. Apres ayoir defleche la terre fine , feparee par le lavage , il la mit SVR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ,97 digerer dans du vinaigre, & elle fournit par It- melange d'un alkali fixe, une terre calcaire, qui pcfoit quatre onccs; les fix onccs reftantes e'toicnt de I'argille pure. M. Beaume a examine par un autre proce'de lc tcrrein appclle maigre •, il y a trouve que chaque terre contenoit quatre onces A'ar- gille , fix onces de gravier , & fix onces de terre calcairc. Les diffe- rentes qualites vege'tatives d'un terrein font dues a ces differences proportions ■, il faut cependant avoir egard au climat & a l'expofition. II refulce de ces experiences , que pour rendre fertile un terrein argilleux ou froid , il faut y re'pandre du fable, du gravier ou de la craie , afin de diminuer l'opacice de I'argille. Il faut ajouter de la marne, desvuidanges tire'es des mares pratiquees dans les terres ar"il- Ieufes , de I'argille meme dans les terreins nommes brulans. Il re'fulre, par ce qui vient d'etre dit, que toutes ces additions ont e'te' impro- prement appelle'es engrais. La quantite des engrais qu'il faut donner a un terrein argilleux , dc'pend de 1'e'paifTeur 8c de la tenacite' des argilles. Le labour eft le moyen le plus proprc a meler les deux terres. La fertilite de'pend de leur melange. Il faut, dans un terrein argilleux , renouveller chaque anne'e 1'en- grais , en ajoutant des matieres maigres , jufqu'a ce que le terrein ait acquis une e'levation de fix a huit pouces , en fuppofant que le ter- rein argilleux n'ait lui-meme qu'un pied d'epaifteur : car s'il avoir une profondeur beaucoup plus confide'rable , 8c telle que le labour ne put pe'netrer jufqu'a la derniere couche d'argille , il faudroit alors mettre une bien plus grande quantite' de matieres maigres, & former, en un mot , un fol artificiel d'un pied d'e'paifTeur. De toutes les matieres maigres , la craie 8c la chaux font les meilleures , parce qu'elles s'unifTcnt plus intimement a I'argille. M. B. propofe encore de bruler la furface d'un terrein argilleux, me'thode pratique'e dans plufieurs Provinces. L'argille brule'e perd fon opacite, 8c les cendres font tres-propres a alle'ger cette terre. Dans un terrein cre'tace , fableux, on mele utilement I'argille , ]a marne , la terre a four. Ces pre'eautions ne fuffifent pas; ces terres ont encore befoin d'etre fume'es. Les Cultivateurs ont de'figne (ous le nom de chaud 8c de froid diffe'rentes fortes de fumicrs, 8c ces denominations (ont improprey. Peut-etre auront-ils appelle chaud le fumier de cheval , parce qu'en efFet, quand on le met en terre, il s'echauffe , fume; effet qu'on n'obferve pas dans le fumier de bceuf 8c de vache : mais il eft aife de (entir que l'un ne rechauffe pas plu les terres que l'autre , & que cette thaleur n'eft due qu'au plus cu au moins d'humidite', qui , fuivant fa qualite , favorife la fermentation , ou l'empeche de le pro- Decembre i 7 7 i , Tome I. ;93 OBSERVATIONS SUR LA PHFSIQUE , duire. D'ailleurs , quand cecte fermentation eft devenue putride, le fumier dc cheval n'a plus aucune chaleur ; il en eft ainfi de routes les matieres animales & vege'tales, elles ne donnent pas le moindre figne de chaleur dans la putrefaction , Sc la putrefaction n'eft due qu'a la perte de leur air furabondant. Les differences de ces fumiers font done dues au plus ou au moins d'humidite. Les Cultivateurs appellent chaud le fumier de mouton qui eft plus fee que les autres : re'pandu fur un terrein argilleux , il doit en diminuer l'humidite , Sc en laifTer moins , puifqu'il en contenoit moins lui-meme. Cette hu- midite eft apparemment ce que les Agriculteurs ont appclle' froid. La feule qualite' par laquelle on doive diftinguer le fumier , eft que, fous le meme volume , il contienne une plus grande quantite' de matiere propre a la ve'ge'tation. Cette matiere peut etre mieux pre'- pare'e dans un fumier que dans un autre ; il peut contenir une ma- tiere faline extractive, favonneufe, en plus grande quantite, & dans un etat plus analogue aux plantes. Ces diverfes qualite's Sc proprie'te's font beaucoup mieux concentre'es dans le fumier de mouton , Sc il paroit le plus propre a cet ufage. Les effets re'lultans de l'union du fumier avec les terres argilleufes font, i°. de rendre les terres plus le'geres , plus faciles a etre pene- tre'es par l'air Sc par l'eau. i°. De fournir au terrein une matiere extractive , favonneufe, & une terre ve'ge'tale tres-attenue'e. Les ma- tieres animales contiennent les memes principes & fervent e'galement de fumier. La cendre leffive'e ou non leflive'e, fertilife e'galement les argilles. Plufieurs Agriculteurs ont penfe' , Sc meme e'erit que ce bon effet e'toit du aux fels qu'elle contenoit; de-la, ils ont tire' la confequence fuivante : re'pendei une certaine quantite de fel fur vos terres ; mais Pexpe'rience a de'montre qu'ils ne produifent aucun effet que lorfqu'ils font meles aux huiles fous la forme favonneufe. La matiere fe'caie humaine eft un fort bon engrais ; elle exige cependant d'etre re'pandue fur la terre avant les femailles , parce qu'elle contient des fels acres qui corroderoient les femences ; au lieu qu'en prenant cette pre'eaution , les pluics les leffivent , & ne laiflent a la furface de la terre qu'une terre tres-divife'e , Sc en tout analogue a celle du fumier, L'eau , l'air , la chaleur font des agens puiffans & actifs dans la ve'getation. L'eau charrie les fucs v^getatifs dans les conduits des plantes & leur donne de la folidite'. L'air s'abforbe par les feuilles de la plante , Sc s'afllmile avec (es propres parties , comme l'a tres- bien de'montre M. Hales, dans fa Statique des ve'getaux. L'air fait le quart du poids du bois gayac. Plus les bois font durs Sc com- pares , plus ils contiennent d'air. La chaleur contribue e'galement a la ye'ge'tation comme principe de fluidite' Sc de mouvement dans la nature, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 399 Tclles font les resources que la connoifTance chymique des argilks a fournies a M. Beaume pour les fertililer. II falloit en fairc l'appli- cation , c'eft-a-dire, unir cette inge'nieufe theoric a une pratique afluree. Ce travail demanderoit plufieurs anne'es de nouvelles obfer- vations , & des dc'tails un peu e'tcndus fur cet objet important auroient excedc les bornes trop etroites d'un Me'moire, & telles qu'elles avoicnt c'te prefcrites par l'Acade'mie de Bordeaux. M. B. regrette dc ne pou- voir fe livrer a de nouvelles expediences. L'Academie de Bordeaux a propofe' pour l'anne'e 1772 le meme fujet. Sera-t-il mieux rempli qu'il ne l'a e'te' par M. Beaume'? Le Public le defire avec ardeur; mais il n'ofe l'cfpe'rer. INTRODUCTION A Ntude des Corps Naturels , tire's du Regne Mineral, par Monfuur Buquet , Docleur-Re'gent de la Faculti de Me'decine de Paris; z vol. in- 1 2. avec des planches en taille-douce. Che\ Hiriffant , Li- bra ire , rue S. Jacques, a Paris. V^Jn dcfiroit depuis long-terns en France un bon livre e'le'mentaire fur PHiftoire Naturelle , de'montre'e par l'analyfe chymique, & qui fut, pour ainfi dire, le livre de la Nation, penie & rcdige' a fa ma- miere. M. B. vient de donner la premiere partie de cet important ouvragc , & fe propofe de publier iucceflivement la de(cription du regne ve'ge'tal & du regne animal. Pline favoit tout ce qu'il e'toit permis de favoir de ion terns, & nous trouvons dans les ouvrages de ce grand homme, Panalyle de plus de deux mille volumes, qui mal- heurculement ne font point parvenus jufqu'a nous. Cet Auteur de'- crit la nature avec route fa pompe & fon harmonie •> fon ftyle eft e'le'- gant &: nombreux, fa philolophic, ia belle ame, la quantite' immenfe des faits qu'il nous prefente , rendent la lecture de fon hiftoire inf- tru&ive, agreable & tres-intereflante. C'eft un champ immenie , dans lcquel plulieurs Auteurs modernes vont glaner, & donnent enfui.e pour des nouveautes , des de'couvertes tres-ancicnnes. Pline eft , fans contredit, un des plus grands gcnies de l'antiquite, 8c on doit, a tous e'gards, le regarder comme le pere dc PHiftoire Naturelle. C'eft dom- mage qu'il ait tnele a la fcience, les erreurs & les (uperftkions de (on /icclc. bi l'H ftjirc Naturelle, la Phyllque, laChymiefe perfeftionncnt , comme on peut &c on doit 1'efpercc , ceux qui e'criront apres nous, quand quclques fiecles fc ieront ecoule's , auront pcut-etrc de grands Decembre 177 i , Tome I. 4oo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, reproches a nous faire. On doit dire d'Elien 8c d'Ariftote, & de tous les Auteurs anciens , ce que Ton die dc Pline •, cependant ils ont ere nos guides •, nous leur devons de la reconnoiffance. Le Chevalier Von-Linnee & Wallerius ont e'tudie' l'Hiftoire Natu- relle avec zele, avec opiniatrete' ; leurs ouvrages font devenus nos livtes e'le'mentaires, malgre la profondeur obfeure qu'on reproche a ce dernier. M. Von-Linne'e, dans ion Syftema natures, a jette' fur toute la nature le coup d'oeil du grand Maitre; il l'embraffe, en quel- que forte, toute entiere, par la nomenclature la plus complette qu'on ait encore publie'e ; fes defcriptions courtes 8c feches , fa matche bruf- que 8c rapide, ne plaifent pas a ceux qui veulent etre amuf^s en s'inftruifant. Ce grand homme fuit rimpe'tuofite' de fon ge'nie ; & celui qui ne fe livre pas abfolumcnt a fa maniere de voir, n'eft plus en etat de le fuivre. Ses ouvrages ont fouvent fait le defefpoir de quelques Etudians , & fur-tout de ceux qui ne regardent l'Hiftoire Naturelle que comme un amufement. Wallerius, au contraire, a trop multiplie' les efpeces 8c les defcriptions. On peut Iui reprocher beau- coup d'obfeurite , & quelques faits de'eidement reconnus pour faux. Il e'toit done important d'avoir un ouvrage dans lequel l'Auteur prit un parti moyen entre la fe'ehereffe qui rebute & l'obfcurite qui effraie; tel eft le cara&ere de la defcription du regne mine'ral, pu- blie'e par M. Buquet. L'objet effentiel qui le diftingue des autres ou- vrages en ce genre, eft la neceffite bien fentie de joindre a l'e'tude de l'Hiftoire Naturelle, les connoiffances qu'elle retire de la chymie : en effet, comment de'voiler les fecrets de la nature qui fe plait, en quelque forte , a fe jouer de notre ceil par des reffemblances parfaites dans des fubftances tres-differentes; & a quoi fert le plus beau morceau d'Hif- toire Naturelle, fi on ne connoit que fa nomenclature, & qu'on ignore qu'elles font les fubftances qui entrent dans fa compofition ? On vetra dans la preface les raifons qui ont determine l'Auteur a reunir ces deux objets. Cette preface eft fuivie d'une eflai fur l'ana- lyfe chymique , auffi complet qu'adroitement rapproche. C'eft un pre'eis tres-clair de la theorie de cette fcience. Un tableau ge'ne'ral du re'gne mineral termine cet ouvrage. L'Auteur rend fes penfe'es avec clarte & pre'cifion , & il ne fe flatte pas de tout expliquer. II y a un me- rite re'el a donner des elemens qui font , en gene'ral , dans routes les Sciences , la partie la plus feche 8c la plus ingrate. Les Savans y trouveront le germe d'un livre fufceptible d'augmentation. 11 fournira a ceux qui ne veulent e'tudier l'Hiftoire Naturelle que par amufemenr, des moyens faciles de faire des progres. M. Buquet re'unit la theorie A la pratique dans fes de'mcnftrations d'Hiftoire Naturelle. On don- ;iera un detail exaft de cet Ouvrage dans la fuite. LETTRE SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 40. L E T T R E De M. Heivson , Dimonjlrateur d' Anatomic, <5 M. Guillaume Hunter , fur les Vaijfeaux lymphatiques dans les poijfons , tra- duite de I'Anglois. 1. N parlant des Vaijfeaux lymphatiqu.es dc la tortue , (on en a rendu comptc dans l'article precedent,) je n'ai pas fait mention de la 111a- niere dont je me fuis fervi pour les decouvrir 8c pour les de'monuer. C'efl que je n'ai cprouve aucune dirHcu'te pour reuffir , parce que dans cet animal, le mefentere extant tres-mince 8c tranfparent, & les vaijfeaux lade's aflez larges , ils font plus aife's a dc'couvrir que dans tout autre animal: d'ou il eft: arrive que j'ai appercu ces vaijfeaux dans la tortue, long -terns avant de les avoir de'eouverts dans les oifeaux & les poijfons , meme par hafard & fans les chercher. Depuis que j'ai ccrit la lettre pre'ee'dente , j'ai appris que M. Jean Hunter a dit en paflant, dans une defcription qu'il fait du crocodile, que ce poijfon avoit des lade's. M. Monro, d'Edimbourg, a vu aufli ces vaijfeaux dans une tortue, il y a environ quatre ans. Commc it n'y a rien dc plus naturcl a ceux qui entreprennent les memes re- cherches, que de s'approprier Phonneur de la decouvcrte, quand meme on en devroit recueillir peu de fruit, je faifis cette occafion dc rendre juftice a. ces MelTieurs , 8c d'affurcr que j'ai vu ces vaijfeaux autant que je puis me le rappeller, en Septcmbre ou en Octobre de Panne'c 176; , long-tcms avant que ces Meflicurs les aient appergus. Mais quoiqu'il foit aflez facile dc diftinguer ces vaijfeaux dans la tortue , il s'en faut de beaucoup que cela foit aufli ai(e' dans les oifeaux ou dans les poijfons , ce que Mefllcurs de la focie'te Royale croiront volontiers, quand ils feront attention aux recherches aflidues des plus grands Ana- tomiftes de ce fiecle, fans avoir pu les dc'couvrir. Je puis ajouter que j'ai trouve' plus de difficulte a dc'couvrir ces vaijfeaux dans les oifeaux que dans les poijfons , quoique depuis que je les ai de'eouverts dans ces derniers, je les trouve plus facilcment que dans les oifeaux ou les quadrupedes. Apres les avoir vus dans les oifeaux 8c dans un des am- plifies , j'etois fort curicux de favoir fi les poijfons ctoient pourvus dc ces vaijfeaux , ce que j'ai tentc de decouvrir de la meme maniere que je Pai fait dans les oifeaux, e'eft-a-dire , en liant lc mefentere des poijfons vivans; & pour arriver a ce but, je me luis fouvent tranf- portc fur les marches , ou j'en ai examine pluficurs petits. Dc-Ia j'ai Dzcembre I 7 7 i , Tome 1, E c c 402 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, etc a Brighthelmftone , ou j'ai ttouve le king/ion, oil Ie poijfon moine , qui eft une efpece de fhate. Ce poijfon e'tant pafTablement gros , Sc ayant le me'fentete affez maigre , paroifloic propre a faite mon expe- rience. J'en ai ouvert deux, & je les ai mis dans de l'eau de mer apres leur avoir lie le me'lentere : je n'ai pas pu obferver de ladles , ni fur les inteftins , ni fur le me'fentete , cjuoique l'un d'eux air ve'cu nne heure apres cette operarion. J'ai fre'quemment examine' les intef- tias Sc le me'lentere de la fhate commune Sc de la morue Sc j'ai enfin ete affez heureux pour de'couvrir les ladle's, Sc infinuer un cube dans un de ces vaifleaux du mc'fantere de ces deux poijfon* : apres avoir in- jedte' ce tube , j'ai trouve ou e'roient place's les gros vaifleaux : des-lors , il n'y avoir plus de difficult?' de fuivre le fyfteme entier. Je les ai de'eouverts depuis dans plufieurs/?o//7o/25, Sc la defcription de ccux du melius les fera connoitre.Jecommencerai par de'erireunede fes branches, laquelle e'tant couche'e fur la furface, doit neceflairement etre de'taille'e avant que les autres parries s'expofent a la vuc. Le poijfon e'tant couche' fur fon dos pendant que je faifoit cette defcription, j'appelie parties fupe'rieures, celles qui font plus prcs de la tete , 6c infe'rieures celles qui font voifines de la queue; celles du cote' du dos, les pofte'rieures , 8c celles du ventre , les ante'rieures. Sur le ventre du poijfon , pre'eifement au milieu de la ligne blanche , s'e'tend un vaijfau lymphatique qui monte depuis l'anus. Ce lympha- tique apparticnt non-feulement aux parois du ventre, mais audi aux nageoires place'es defTous l'anus. II monte vers la tete , parte entre les deux nageoires jugulaires ; & e'tant arrive au-dela, il regoit leurs lymphatiques; il pafte enfuite fut les fimphifes des deux os qui foment le thorax, ou il s'ouvre dans un re'feau des lymphatiques fort gros, lequel eft couche' tout pres du pe'ricarde, eV entoure prefque tout-a-fait le cceur. Ce re'feau, outre fa parrie fitue'e derriere le coeur, a un lym- phatique fort gros de chaque cote, qui s'e'tend en arriere fur Pos du thotax : e'tant arrive au milieu de cet os , il envoie un gros rameau du dedans, pour fe joindre au conduit tliorachique. Apres avoir de'- tache ces branches, il eft joint par les lymphatiques des nageoires pedtorales, Sc peu apres par un lymphatique qui s'e'tend fur le cote du poijfon. Le vaiffeau que nous venons de de'etire, confifte en un tronc qui s'e'tend fur le cote'. Vis-a-vis de ce tronc , forrent des bran- ches de chaque cote' , imme'diatement fous la peau ; de forte que cela caufe un coup d'ail fort agre'able. Outre ces branches, il y en a en- core d'autres fitue'es plus profonde'ment , Sc qui accompagnent les cotes. Quand les vaifleaux ci-deffus de'erits ont joint le gros lympha- tique , celui-ci regoit lui-meme des lymphatiques des extte'mite's pofte'- rieures des ouies ; 8c s'e'tant avance jufqu'a l'orbite , il regoit encore des vaijfeaux lymphatiques de cette cavite : mais ces vaifleaux n'appar- SUR MIST. NATURELLE ET lES ARTS. 40} tiernent pas feulcmcnc a Porbite, car l\,n deux vunt Ju ncz , tk l'autre de la partic fupe'rieurc de la bouche. Un pen au-deffous , paretic un. autre re'leau forme en partie des vaiffeaux done il vienc d'etre quel- cion, & du conduit tliorachicjue. Cc re'leau ell tre.-corr.pliquc : quelr ques-uns de fes vaiffeaux lone couches de chaque cue des niuicles qaj appartiennene aux ouies; Si de leur partie interic are, par un vai'feau qui joint la veine jugulaire, & termine tout le fyfteme tyinphatique. be gros ,'ymphatique , dont j'ai fait mention ci-devant, qui eft cou:lu: (ur l'os du thorax , a aulTI un rameau qui va a la partie iupe'rieure des reins, &c rec;^it quelques Iymphatiques de cet organe. Les lactes s'e- tendent de cha]ue cote des arteres rpeieat-erjques , & s'anall > m trequemment a.i travers de ces vaiffeaux. Le rclervoir d.i'i , teqtieJ lis entrent eft cris -large eo proportion, 8s confide a fa partie fuperjeuxe en deux b'ancher , dont Uiie eft couchee eptre le duodenum :Sc l'e c >- mac , &i s'e'tend un peu lur le fUfiereas, rccevant les lytnphetiqati da foit, du pancreas , deux de la partie infeii.-ure de l'eftomac , & les lake's de la plus grande partie !e^ inteftins grele.. L'autre bianche du refer* voir regoit fes Iymphatiques du reSltm , 8f les licle, de la phis grande partie des inteftins greies. Le rciervcir forme' par ces deux branches, eft place (ur le cotc: droit de la partie luperieure de l'eftomac , ( ou de la partie infe'rieure de l'cefophage ) & le joint par quelques Iympha- tiques qui vienncnt de cet endroit, & par quelques vaiffeaux qui partent de l'ouie& de la ve'ficule du fiel , laquclle, dans ce poiffon, eft adht'rente au re'iervoir. Le conduit thorachique prend ion origine au re'iervoir , & eft place' a la droite de l'cefophage , d'cii il rec,oit des Iym- phatiques ; &c montant environ d'un demi-poucc, il fe diviie en deux branches ou conduits, dont 1'un paffe ious l'celophage a gauche, &c l'autre montant direrTternent a droite, pafte au-dela de la partie fupc'- rieure du rein, d'oii il recoit quelques petitesbranches; $C peu apres, il eft joint par un rameau qui fort du gros lymphatique , place' fur l'os du thorax , comme je l'ai de'ja dit. II envoie auili pres de cet endroit un rameau qui joint le conduit du cote' oppole', & qui eft rencontre un peu plus haut par ces gros Iymphatiques , formant le refeau derriere le cceur, dont il a ete fait mention ci-defTus. Ces vaiffeaux que je viens de de'erire, re$oivent les Iymphatiques de la partie ante'rieure ou fupe'rieure des ouies, & des fauces du gofier. Apres que ces vaif- ieaux ont joint le conduit thorachique , celui-ci fe communique avec le releau pres de Porbite oil fa lymphe eft mele'e avec celles des Iym- phatiques qui viennent de la pattie poftt'rieure des ouies , des na^eoires (uperieures , du ventre, &c. Enfuite , de cc rc'feau , fort un vaiffeau qui joint la veinc jugulaire un peu au-deffous de Porbite. Ce vaiffeau que je nommerai la terminal fon de tout le fyfteme , eft tres-pctit , proportion gardee avec le re'feau d'ou il prend Ion origine ; &: on peuc Decembre I 7 7 1 , Tome I. E e e 2 404 OBSERVATIONS SU$. LA PHYSIQUE, dire qu'en cet endroit les lymphatiques excedent de beaucoup en gran- deur les vaifleaux fanguins. Le conduit thorachique du cote gauche ayant pane' (bus Pcefophage du core droit , s'e'tend de l'inte'rieur de la veine-cave du cote' gauche, regoit un rameau de fon femblable de l'autrc cote' , & joint les gros lymphatiques qui font place's a gauche du pe'ricarde, 8c une partie de ceux qui font couche's derriere le coeur ; 8c apres s'etre joint aux lymphatiques qui viennent des ouies , des nageoites (uperieures 8c des core's du poijfon, il forme un re'feau d'oii fort un vaifleaii pour en- rrer dans la veine jugulaire de ce cote'. En un mor, les lymphatiques de la gauche correspondent exaftemenr a ceux de la droite que nous avons de'crits ci-devant. Outre ces vaiffeaux , il y a encore une partie du fyfteme lymphatique , firue'e plus profondement entre les origines des p'-ocejjus de l'e'pine du dos. Cette partie confifte dans un gros tronc, qui prend (on origine a la partie inferieure du poijfon , pres de la queue; & en monranr, rec;oit des branches, des nageoires dor- fales & des parties adjacentes du corps ; elle monre rout pres de la rere, & envoie un rameau a chaque conduit thorachique, pres de l'endroir oil ils partent de leur tronc commun. Cette defcnption , quoique faite fur un merlus , correfpond affez exadtemenr , a ce que je crois, a la distribution de ces vaifleaux dans la morue 8c le merlan , &c peut-etre rous les autres poijjbns de la meme efpece. A cette defcription , j'ajouterai ce que j'ai obferve de plus remar- quable au fujet du fyfteme lymphatique dans les poijfons. i°. II fa ut remarquer que ces vaifleaux n'ont pas de glandes lym- phatiques, felon que j'ai pu enrrevoir dans tout leur trajef, en cela ils reflemblenr a la torfe; mais ils differenr de ceux des oifeaux qui onr des glanles lymphatiques dans tous les vaifleaux du col. i°. Dans les poijjbns, les vaifleaux n'ont point de valvules; ainfi, c'eft une chofe aflez aife'e d'y injeifler une liqueur dans un lens con- rraire a la lymphe. La premiere fois que je fis cette remarque, je m'imaginai qu'en injedtanr avec foin ces vaifleaux , j'aurois pu dt'cou- vrir fi le cerveau , les yeux 8c d'autres parties, dont les vaijfeaux lym- phatiques n'ont jamais e'te vus dans aucun animal, font pourvus de pareils vaifleaux. Je ne fuis pas en etat a prefent de decider cette queftion; mais je fuis rres-re'folu de m'y appliquer. 3°. On remarque dans la morue , 8c je crois dans la pluparr des autres poijjbns , un tres-beau re'feau, forme' par des vaifleaux entre la runique mufculaire 8c villeufe des inteftins (a). On peut remplir ces re'feaux par les ladle's fur le me'fenrere fans la moindre force ; fi le mercure eft injedte dans ce re'feau , d'un cote il couvre l'inteftin, pare* ( a ) J'ai vu ce re'feau dans 1c turbot , la morue , &c. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4oj que les communications font fort nombreufes dans ce re'feau ; fi l'in- tcftin ell tourne', 8c qu'on preffe le mercure, on le pouffe facilement dans les petits vaifTcaux des villis de la tunique interne. De ces vaif- fcaux, on peut forcer le mercure dans la cavite' de l'inteftin; mais on ne peut pas diftinguer fi elle a une valvulve ou non a fon commen- cement. Dans cette circonftance , il y a une analogie tres-foite entre les poijfons 8c la tortue ; mais il eft plus clair que dans les po'JJbns nous ne pourrons pas etre trompes au (ujet du refcau qui eft enrre les runiques mufculaires 8c internes ; car, dans ces dernieres, il eft com- pofe de vaifTcaux cylindricjues & nullement cellulaires , comme dans celui de la tortue, 8c par confequent il n'a point du tout l'air d'une extravafion. Dans les poijfons, les vaiffeaux fur la tunique interne font plus gros que ceux des tortues. 4°. Ce fyfteme lymphatique s'accorde avec celui de la tortue , en ce qu'il a un rc'fervoir tres-grand , un re'feau de gros vaiffeaux pres de fa terminailon dans les vaiffeaux fanguins, 8c de plus, un vaiffeau qui va du re'feau dans la veine , 8c qui eft petit a proportion de la gran- deur du re'feau •, de forte que la lymphc doit refter quelque terns dans ces endroits, avant d'etre verfee dans la maffe du fang. J'ai auffi oblerve' quelque chofe de femblable dans les oifeaux , leurs vaijfeaux lymphatiques etant elargis en diffe'rens endroits. Pour ce qui concerne la maniere de de'couvrir ces vaiffeaux dans un poijjbn, on pourroit aifement croire que quand nous favons oil eft place' le refervoir, ou quelques-unes des plus groffes parties du fyf- teme lymphatique , il n'eft plus difficile de la trouver; mais les runi- ques de ces vaiffeaux font fi minces 8c fi tranfparentes , qu'il eft affez difficile de les diftinguer. Le moyen le plus court de les de'couvrir, eft de chercher un des vaiffeaux couche tout pres de la peau , par exemple, celui qui monte immediatement fur le milku du ventre du merlus , d? la mo- rue, 8cc. Ce vaiffeau eft affez aife a apprcevoir; car il devient affez gros quand il paffe entre les deux nageoires jugulaires. On peut injec- ter tous les vaiffeaux lymphatiques , en introduifant un tube dans ce vaiffeau. Ces gros vaiffeaux font fi faciles a voir, que je n'ai pas juge a propos d'ajouter une figure du fyfteme lymphatique dans un poiffon; il (eroit meme prelqu'impoffib'e d'exprimer routes ces par- ties dans une figure, eu egard aux nombreufes communications de ces vaiffeaux pres de leur terminaifon dans les veincs communes. J'ai prcfente a la Societe' Royale un merlus avec (es vaiffeaux, rant lym- phatiques, que fanguins, inje&e's de diffe'rentes couleurs, pour etre compare' avec la defcription que j'en ai donne'e. J'cfpere meme que ceux qui feront ciuieux de pouffer ces recherches plus loin, pourronc »/>;e£ler tous les vaiffeaux, en faifant attention a cc que j'ai dit ci- Decmmbre i 7 7 i , Tome J. 4o. j.„$. V! i • ./ Via 3. /, Fu /.'. Q , ,-,/SV- , / ■^T"-" ~i;~i~i~TH * VV7J.W77 - . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. phofe : il eft hermaphrodite, ovipare. Ceux du corps huinain, qui lui rtlTcmblcnt en partie, (one cependanc vivipares, felon les obfer- vations du D. Zamponi de Cartoceto. Lc vet de terre ticnt aufii de la nature du polype; fes parties de- coupecs fe retabliflent en peu de jours dans une terre d'unc humiditc convenable. Les chenil'es &c faufles chenilles font des infedes afTez difrerens des vers de terre , tant par rapport a la forme de leurs corps , qu'a la iacpn de ramper. Les diveries transformations qu'elles ont a fubir, fervent a les diftinguer-, audi, dans leur e'tat rampant, les unes 8c les autre? renferment deja les premiers rudimens de l'infedc aile , qui en doir provenir un jour. La demarche des chenilles eft plus de'gage'e que celle des vers de terre; les unes Sc les autres ne l'extcutent cependant pas avee la meme vitefle -, mais la plupart fe meuvent de la maniere fuivante. Elles commencenc a retirer Sc recourber un peu leur extre'mite' pof- te'rieure , en formant une petite bofTc en haut,c\: en (errant les deux ou trois derniers anneaux par-deffous A (fig. V.). Par ce moyen, la dcrniere paire de jambes fait un pas, fe cramponne ; 8c ce renrlemenc fe coule par un mouvement ondulatoire le long du corps jufqu'a la tete ; de forte que chaque paire de jambes , foit membraneufes , foit e'cailleufes , trouve le moyen, lorfque le renflement parte par-deflus, a pouvoir s'avanccr 8c fe cramponner a une nouvelle diftance : enfin , la tete peut fe porter en avant, en relachant fes anneaux conti^us, Sc ferres a leur tour A, ( fig. VI. ). Voila le pas accompli. Cette facon de ramper, qui paroit la plus fimple, eft commune a la plu- part des chenilles : nous en verrons cependant dont le mouvement progrcifif eft tres-differcnt. On trouve un grand nombre de chenilles, dont la demarche eft aflez finguliere. Comme elles fcmblent mcfurer le terrein qu'elles parcourent. M. de Re'aumur les a nomme'es che- nilles arpenteufes. II ieroit inutile de vouloir les de'erire apres ce fa- meux Naturalifte; cependant, il eft bon de donner l'eftentiel de cette defcription. Elles font de la cinquieme Sc fixieme claiTe de M. de Re'aumur, leurs anneaux ne peuvent fe contradcr & fe dilater comme ceux des autres chenilles; elles manquent de quelques jambes interme'diaires , ce qui les oblige a faire de (1 grands pas, qu'elles fourniroient un probleme aflez curieux en hiftoire naturelle , (avoir : quel eft F animal dont la longueur des pas ne depend point de celle des jambes ? ce que Ton comprendra de la maniere fuivante. Suppolons une de ces chenilles ctendue (fig. VII. & XI. )s elle commenccra a retirer fa partie pofterieurc vers l'antcrieure , en ap- prochant (es deux jambes intermediaires D, (fig. 8.) jufqu'aux der- Decembre 1771, Tome I. F f f 4io OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , nieres e'cailleufes E , ce qu'elle ne peut faire fans rehaufler d'abord la partie deftirue'e des jambes A , B , C , en arc , 8c enfin en forme de boucle (fig, S. 8c 10.) Elle fe fixe & fe cramponne fur fes deux jambes de derriere & les intermediaires , afTez fortement pour pou- voir relever & e'tendre fon corps , & pofer enfuite la partie ante'- rieure a une nouvelle diftance, pour accomplir le pas , qui eft tou- jours de la longueur de cette partie intermediate , compofee de cinq anneaux de fuite , deftitue's de jambes. On s'appercjoit aife'ment de 1'avantage qu'auroit cette chenille fur la precedente a parcourir la meme carriere, qu'elle franchiroit des obftacles capables de detourner l'autre. Au refte la privation de jambes intermediaires & l'immobilite de ces anneaux compenfent bien cet avantage. Cependant,il le fatisfait aux conditions de l'enigme propofe , puifque ces jambes lui fervent pour fe cramponner, 8c le refte de fon corps fait l'office de jambes. Les fig. IX, X & XI, marquent une efpece d'arpenteufe qui portc le nom d'arpenteufe en baton , a caufe de fa couleur , de fa roideur & dc fon corps effile. On voit par (es boucles rehauflees que la longueur de (es pas excede encore celle des autres. Des chenilles , paftons a des animaux dont la de'marche de'pend d'un plus grand nombre d'organes. Tels font les efcargots 8c les limaces, dont les genres 8c les efpeces font extremement multipliers , & qui , felon Swammerdam , ont le cara&ere d'hermaphrodites ovipares. Si Ton en croit ce Savant, le mouvement des mufcles qui fervent a la progreffion des efcargots & des limaces , fe fait jufqu'a vingt fois plus vite que celui de tout le corps. Cette aflertion paroit tres-hafarde'e. En erfet , le plan fur lequel rampe Y efc argot , fert de bafe afTez fixe pour ne pas ce'der aux impreftions des mufcles qui tiennent lieu de pieds a l'animal. Ainfi chaque mufcle glifTeroit fur le plande la 44 par- tie entiere de fon mouvement , puifque la vingtieme feroit feule employe'e a faire avancer le corps. Dela, un mouvement inutile qui de'mentiroit la perfection des ouvrages de la nature. Mais ce qui paroit induire dans cette erreur , c'eft la prompte tranfmiflion de mouvement d'un mufcle a l'autre , que fait cet animal , en les con- rra&ant fucceflivement le long du ventre de derriere en avanr, non vingt fois , mais environ cinq a fix fois plus vite que la progreffion de fon corps. Cette tranfmiffion fcra vinble a travers d'une glace, fur laquelle on fera ramper Yefcargot , (fig. XII). Elle reprefente afTez bien l'ondulation de l'eau agite'e par le vent. Un autre exemple fervira a l'eclaircir. Sous les pierres , fous la moufTe & au fond des chenes creux, on trouve fouvent une efpece de ver dur , de figure cylindriquc , compofe d'anneaux luifans 2c de couleur brune. Ce ver eft du genre des SUR L'HTST. NATURELLE ET LES ARTS. 411 fcolopendres , dont la progreflion fc fait par Ic memo mechanifme que celle de Yefcargot. II y a cette difference, qu'au lieu de mufcles, il fait agir fucccflivement un grand nombre dc jambes. Cet animal rendra la tranfmifllon du mouvement plus intelligible. La. fig: XIII fait voir d'un cote par les chiff'res I. 2. 3. 4. t; . cellos de fes jambes qui font actuellement employees , & qui agifTent comme le plan de position. Toutcs les autres font relevecs. Un inftant apres ellcs fuivront ces mcraes jambes du cote' de la tote , £c poferont a terre , trtndis que les dernicrcs de chaque divifion (e rcleveront. Ainli d'un moment a l'autre ce font toujours d'autrcs jambes qui agiilent depuis la queue jufqu'a la tetc , ce qui forme des efpeces d'ondu- lations. Le nombre des pelotons ( il y en a cinq dans \*fig- ) varie fouvent dans un meme animal, felon les difficultcs qu'il rencontre, & aux- quelles il conforme l'arrangement &c 1'ordre des pieds. J'ai e'te te'moin de cette augmentation &c diminution lorfque l'animal montoit ou defcendoit. Ces efpeces d'ondulations fe coulent le long du corps bcaucoup plus rapidement que l'animal nc marche. Mais il nc s'enfuit pas que la vitefle des pieds (urpaffe celle de tout le corps. En offer, chaque pied appuyant lur le plan , tranlporte le corps a la meme diitance- qu'il agit. II en eft atnfi des mufclcs de Yefcargot. La nature (cmble d'abord avoir etc trop liberale en accordant des pieds a l'infecce dont nous parlons. Cependant.ee grand nombre lui eft tres-ne'eeffaire , on n'en lauroit douter , quoiqu'il nc foit pas exacle- ment le meme dans tous ccux de la meme elpecc, puifqu'il s'en trouve qui ont 160, d'autres 171, d'autrcs jufqu'a 184 de ces pieds. Une des premieres raifons de cette multitude de pieds , e'eft le mouvement uniforme & non interrompu que le corps obtient par ce moyen , attendu qu'une partie des pieds agit pendant que les autres font leve's. Mais pourquoi cette unirormite eft-elle ntccflaire? II n'eft gutres permis de re'pondre a cette qucftion , l'analogie feule fournit quelquc vraifemblance. La progreifion dc Yefcargot fe fait, comme j'ai de'ja dit, par un me- chaniime a-peu-pres femblable, & acquiert par-la un mouvement audi uniforme que la fcolopendre. La difference , e'eft qu'il fe fert dc rnuf- cles au lieu de pieds, &z qu'il rampe plus Icntement. Cette de'marche uniforme, fcmble favorifer la de'licatcffe de fes cornes , dans le cas d'un obftacle qui fe prefenteroit en chemin. Je n'ai pu appercevoir , il eft vrai, une parcille fenfibilite dans les antennes dc la fcolopendre ; ncanmoins, j'imagine que la progreflion uniforme lui a ete accordcc par la meme raifon qu'a Yefcargot. Ce fage mechanifmc pourroit, fans doute , s'appliquer a des chofes d'ufage , fur-tout, a des machines oi Decembre i 7 7 i , Tome I. F 1 1 1 4ii OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un certain nombre de leviers doivent confpircr au meme mouvement. Une galere , dont les rames agiffcnt pour l'ordinaire dans Ie meme inftant, feroit peut-etre plus de chemin, ou du moins feroit conduire avec plus de surere', dans le cas de quelque choc impre'vu, fi Ton pou- voit, fans nouvelle difficulte, faire agir fes rames par quelque ordre fucceffif , qui , en fupprimant les reprifes & les fecouffes , tendroit a l'uniformite. On trouveroit dans les animaux, & fur-tout dans les infectes aqua- tiques, une fource intariftable de principes utiles pour perfe&ionner la navigation. Quelle variete' infinie de figures, de pofitions , mouve- mens & directions, forces & vitefles, &c. Voici , par exemple, un vermifleau aquatique , qui, par fa de'marche finguliere, fe diftingue abfolument de tous les autres. II a fix lignes de longueur, le lieu de fon repos eft ordinairement au bord de l'eau, oil il ie tient recourbe par le milieu , & rcplie en fiphon , de facon que les deux moities de fa longueur fe trouvent paralleles l'une a l'autre , & toujours couche'es ; enforte , que fes deux extre'mite's , la tete & la queue, foient dans l'eau, & le refte hors de l'eau. Si l'efpece de cet amphibie, & fa fituation, font extraordinaires, fa demarche ne l'eft pas moins. Soit pour avancer , foit pour reculer , il ne change point la pofition replie'e de fon corps-, les deux parties A , B, ( fig. XIV.) ne font que s'allonger & fe raccourcir alternativement , l'une aux de'pens de l'autre; car, pour avancer du cote D, il com- mencera par retirer la partie A; enforte, que fon extremite fe trouve vis-a-vis la ligne C, & enfuite de meme la partie B, pour le fecond pas, & ain fi en continuant de chaque moitie tour-a-tour. Cette fa^on d'avancer du cote recourbe' , fait aftez comprendre comme il doit re- enter, & que ce fera en commengant par la partie la plus courteB, en portant la rete en F. Je lui ai vu faire Pun & l'autre mouvement, dans un vafe d'eau, aux parois duquel il s'eft trouve applique'. Les deux extre'mite's etant dans l'eau, je fis un peu indiner le vafe, pour faire avancer l'eau au-deftus de fa tete & de fa queue , il chtrcha aufll-tot a s'echapper de cette inondation. Je le vis s'eloigner, en avangant du cote recourbe , jufqu'i ce qu'il fe retrouva au bord de l'eau , dans la fituation pre'eedente. J'inclinai le vafe en fens oppofe'-, & comme il etoit a fee , il ne manqua pas de gagner, en reculant, le bord de l'eau. J'ai appergu la meme chofe routes les fois que l'expe'rience a ete' re'- petee. La pofition de ce ver , a l'e'gard de l'eau, &c fon mouvement pro- greflif , font deux particularites, qui, jufqu'ici , ne fe rrouve nulle part dans Phiftoire des infedes -, il eft cependant facile d'obierver l'une &: Paurre , puifqu'on peut les appercevoir (ans loupe. Des ycux auxquels rien n'e'ehappoient y ont pourvu , & m'inftruifent amplement. M. de SUR L'MTST. NATURELLE ET LES ARTS. 41 j Reaumur, ce guide des Obfervateurs , en a parle fort au long dans un Memoire donne' a l'Acade'mie Royale des Sciences en 17 14. Lc Le&eur curieux y trouvera de quoi fe fatisfaire.il me (ufhra de citer ce qui a rapport au mouvement progreiTir. « Une propricte linguliere , die M. de Reaumur, que notre ver a « cependant de commun avec quelques autres infedtes aquatiques, eft >> d'avoir les jambes placees fur le dos , dcfquelles il a cinq paires; » les deux premieres paires, plus grofTts que les autres, fe trouvenr. » entre la tete Sc le recourbement fur la partie A ; les trois autres >> paires, a la partie B , entre la courbure & la queue; (a progreflion , » en avant, fe fait vers D, (fig. IV. ) Sc fuit la partie coude'e ; Sc au » contraire, vers E, il recule ; au(Ti fes jambes (ont-elles indinjes " vers E, e'eft-a-dire , du cote' de la tete Sc de la queue •, de forte, >> qu'en portant les jambes en arriere , ou vers le recourbement , il fe » poufTera par leur moyen , & marchera diredfement •, mais s'il veut » aller a reculons, ou faire aller fa tete Sc fa queue les premieres, fes » jambes ne fauroient lui fervir, il n'a pour fe mouvoir dans ce fens » que fon mouvement vermiculaire ; aufll fe meut-il de la forte plus » rarement & plus difficilement. Outre les mouvemens , dont nous » venons de parler , ce ver en peut encore exe'euter deux autres, par » le moyen de fes jambes 5 il peut fe mouvoir de cote' , parce qu'elles » ne font pas feulement mobiles de devant en arriere, elles le font » aufli de gauche a droite , & de droite a. gauche-, il fait quelquefois » ufage de ces deux mouvemens, lorfqu'il veut aller dans des endroits j> peu e'loignes de celui ou il eft. II fe meut parallelement a {es deu.x » parties plie'es , e'eft-a-dire , du cote de A 6c de B ; au refte , lorf- » qu'il eft en pleine eau, il s'e'tend , &c nage en fe pliant a differentes « reprifes ». Nous ne ferons touches des merveilles de la nature, qu'a mefure que nous en (aifirons, & les differences d'une part, & les reffemblances de l'autre. Nous choifirons pour deux objets de comparaifon , la che- nille arpenteufe , Sc celle que nous venons de quitter. L'une &: l'autre one leur demarche affez diftingue'e des autres reptiles, par les anneaux- immobiles , ou incapables de contraction Sc de dilatation. L'une e^; l'autre le redoublent pour approcher les deux extrcmite's en marchant; l'une & l'autre enfin , font agir alternativement chaque moitie' du corps. Mais remarquons que tout cela s'cxe'eute d'une maniere bien diffe- rente. La premiere commence par rehaufler fur un plan vertical une grande portion de fon corps, la derniere le replie par un plan hori- zontal. La premiere releve, Sc fufpend en l'air Ion centre de gravite bien Decembre i 7 7 i , Tome I. 414 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , e'loigne du point d'appui ; la derniere refte appuye'e de toutes part?. Uarpenteufe fe courbc & fc redrefle tour-a-tour , l'autre garde tou- jours fon paralle'lifme i l'une tournc le ventre en-dedans, l'autre les deux monies d'un meme cote. La chenille furmonteroit a grands pas des difKcultes qui feroient re- broufler l'autre ; celle-la fait le guide ordinaire de tous les animaux ; cellc-ci , par un contrafte inoui , dirige en avant la partie la plus eloi- gned de fes yeux. Uarpenteufe enfin , laifle couler le long de fa route une efpece de fil , capable de la faire iortir d'un labyrinthe -, l'autre ne laifle que des traces humides , &c. Ces diffe'renccs , qui (autent aux yeux, ne font pas toujours les plus im porta ntes. Venous maintenant a des animaux qui , dans leur de'- marche , ufent de precautions inconnues a d'autres , & dont les traces vifibles de'celent le paflage. Uagaric du chene nous fournit une efpece de ver , qui s'arrete a cha- que pas pour fe preparer un chemin convenable, par une humeur vifqueufe qu'il jette par la bouche , en allongeant la pattie ante'rieure, afin qu'il ne fe blefle point , & que le chemin foit uni & doux. Les truffes pourries en entretiennent un autre, qui, non content de fe frayer un chemin commode , le revet encore d'un gluten, pour marcher mieux a fon aife ; e'eft ce dont il vient a bout-par le moyen d'un tuyau cylindrique d'une matiere tranfparcntc , qu'il forme lui- itierae, Ce tuyau s'allonge a chaque pas, s'clargit lorlque le ver rentre en dedans, fe releve quand il rebroufle chemin. L'utilite de cette li- queur fuperflue en apparence, va peut etre jufqu'au befoin pour cec animal. L'Hiftoire Naturelle nous offre a chaque inftant des exemples en ce genre. Les depouilles, les excremens , les habitations abandon- ne'es, & plufieurs autres ouvrages d'infedes, fervent fucceffivement a d'autres petits animaux. Qu'il feroit heureux pour nous de de'eou- vrir 1'enchainement de tant de phenomenes, qui femblent d'abord n'etre dus qu'au hafard. Que nous favons peu de choie , en compa- raifon de ce que nous pourrions favoir! Revenons a notre fujet -, & apres avoir examine' le mouvement pro- (rreflif de quelques infeftes , confide'rons-en d'autres , dont l'exte'rieur poli & gliffant , leur a fait retrancher des membres neceflaires a d'autres. Si Ton parvient a empecher le frottem'ent d'une machine, elle en fcra d'autant plus fimple , & d'autant plus parfaite. Par ce moyen , on augmentera beaucoup les forces motrices, parce qu'elles n'auront plus d'obftades a furmonter. La nature nous offre un exemple de ce me'chanifme dans un ver qui ne nous eft que trop connu. Ce ver tenebrio atra , oblonga , elitris Jlriis novem kvibus. Geoff. Hifi. Inf. t. i. p. 549. Tenebrio molitor SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4r? alatus , nigcr totus , femoribus antic is crajfioribus , Linn. Syji. Njt. edit. 11. pag. 674. fe plait dans la fatine , 8c il n'a d'autrcs jambes que lcs fix e'cailleufes fur le devant. II paroit au premier afpe pores done leur (uperficie eft recouvertc. Tel eft Ie fucus a veflie , fucus veficolus , Lin. de rncme que le fucus AcmcM , fucus ferratus, Lin. que M. de Reaumur a regarde comme une varie'te. Lc Chevalier Von-Linnee en a fait deux efpeces fe'pare'es, parce qu'elles font fouvent roule'es en fpirale en tout ou en partie. Cette fpiralecft (implement accidentelle & ne lufHt pas pour conftituer deux efpeces. Ces deux fucus , ainfi que le filiforme de Hudfon , ont c'tc: parfai- tement de'erits par M. de Reaumur ; on appercoit a I'extremite de leurs tiges un amas de petites feuilles , dans lefquelles les parties de la fructification (ont renferme'es ; on diftinguc encore (ur la majeure partie de la plante, bcaucoup de petites aigrettes que quelques Bota- niftes ont regarde'es comme des (leurs males. o Tel eft encore a-peu-pres le caracTxre du fucus allonge , fucus elongatus , Lin. que Hudfon appelle fucus line'aire. Les ve'ficules dont il eft abondamment pourvu , (ont niche'es ca tk la dans la (ubftance de la plante. Schlofler a remarquc' le premier foil cotyledon fait en rondaclic. Tels font enfin le fucus a (iliques , fucus fdiquofus , Lin. & le fu- cus garni de nceuds , fucus nodofus , Lin. Le premier eft diviie' en deux parties -, tous les deux ont une petite tige & portent fur quel- ques feuilles des ve'ficules (eminales. Le fucus a feuilles Sabrotanum , de'erit par Lobel , & qui eft peut- etre eclui que le Chevalier Von-Linne'e a appelle concatenatus , ap- proche beaucoup des deux precedens. Celui-ci eft remarquable par Ion tronc ligneux, garni de tubercules , & par des efpeces de longs pe'dunculcs garnis de ve'licules allonge'es. Les fucus nutans acinarius Sc twbinatus , ont encore beaucoup d'aftinite' , mais leurs tiges font differentes. Il fcroit trop long de faire ici ['enumeration particuliere de la for- me & de la fructification de toutes les variete's des fucus; plufieurs ne font forme's que par une feuille membraneufe & veineufe , dont la fruftification varie fingulieremcnr , comme le fucus fanguin & cilic d'Hudlon ; d'autrc* (ont feulement membraneux & fans veines. Tel eft Vagara de Rumphe, le fucus criipe & cilie' d'Hudlon, & fan fucus digite' que le Chevalier Von-Linnee appelle ulva lacIuca.Qu.cl~ qucs-uns font effentiellcment diftingue's des autres par leurs racines, par exemple, le fucus fucre & palm; de Lin. &c. La fructification enfin de quelques autres , comme du fucus corneux ik recourbe d'Hudfon , eft forme'e en globules avec ou fans neduncules. La plante Decsmbre i 7 7 i , Tome I. G g g 4i 8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, marine qu'on m'a rapporte'e de la Me'diterrane'e , differe confide'ra- blement des autres fucus , foit par la forme , foit par la configura- tion de fes parties. La defcription que je vais en donner la fera par- faitement reconnoitre. 11 leroit a fouhaiter qu'un Botanifte zele' s'attachat fpe'cialement a faire mieux connoitre ces fortes de plantes. Lcs fucus meritent certai- nement un ouvrage particulier. Sans Dillenius on ne connoitroit peut- etre lcs moufTes que rres-imparfaitement , & ce qu'on a dit des algues en general eft tres -incompler , ce champ n'a pas encore c'te' affez de- fine he' , il ne demande que du travail & des yeux accoutume's a bien obferver. Cet ouvrage feroit plus utile que 1c nombre prodigieux de volumes publie's chaque jour fur la Botanique , qui n'apprennent rien , & (ont pour la plupart des compilations tres-mal faites. On peut appliquer a leurs Auteurs ce qui avoir e'te dit d'un homme de Lettres, il compiloit , il compiloit. Les titres qu'ils donnent a leurs compilations, ne fauroient en impofer au Public. Defcription d'un fucus anomale , Tl. i. fig. i^. Sa tige filiforme s'eleve a la hauteur d'un pied & demi , & fa groffeur n'excede pas celle d'un fil •, elle eft divife'e en petites branches dans route fa longueur. Ses rameaux infe'rieurs font courts & lan- guiffans , ceux du milieu de la tige ont a-peu-pres deux pieds & demi de longueur, & ceux de la partie fuperieure vont en diminuant. La (ubftance de la tige & des branches eft forte , flexible , de cou- leur grife , & rirant fur le jaune quand elle eft deffeche'e, mais ellc eft blanchatre a l'extre'mite des rameaux. La fructification eft dif- pofe'e le long des branches , & divifee en rrois parties. Ces divifions font droites , & reflemblent a 1'enthere de'liee de Yhypnum qui fe termine par le has en un plumaffeau d'un riffu lache , flottant, tirant fur le vcrd , compoie de filamens tres-minces , femblables a ceux du conferva. On ne trouve plus du plumaffeaux dans les branches infe'rieures , elles font fans force ni vigueur ; enfin cette plante a de tres -petites capfules aux extrc'mites des branches & au haut des tiges. La figure 15 , PL 2, reprefentc unc partie d'une branche vue dans fon e'tat naturel. Tel eft le dernier article des Melanges zoologiques de M. Pallas; les gravures dont il a enrichi font ouvrage , font correcles & aftez bonnes. SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 419 T R A I T E Abre'gi des plantes ufuelles de Saint- Domingt/e , par M. Pouppe DeSportes , Medecin da Roi , Correfpondant de I' 'Academic Roy ale des Sciences de Paris. Cher le Jay , Libraire , rue Saint Jacques , a Paris. C _> E Traite forme un volume in-\x de 453 pages; il eft pre'ee'de de deux autres volumes du meme format, con(acrcs a dc'criie les maladies auxquellcs font /ujcts les habirans de ce'te Ifle. La 15 .ta- nique a ete pendant le fc'jour de l'Auteur en Ame'rique , fon prin- cipal dclaftement ; e'etoit reunir l'utilea I'agrcabie. II ne donne point cctte collection comme line hiftoire complctce de ton les vegctaux de cette Ifle 3 &: il ne parle que de ceux dont I'utilite eft reconnue, foit pour la Medecine, loit pour les ufages de la vie, 011 pom les Arts & les Metiers. Malgre cela, cet ouvrage a ion merite, & Pemporte fur ces /tortus qui ne renferment qu'une nomenclature froi.ie , ftJrilc,& charge'e des phrafes , dont les dirre'rens Auteurs fe iont fervis pour caractcrifer les plantes. Si un Auteur donne Yhortus, ou le flora d'une Province, & qu'il luive , par exemple , le fyfteme fexuel du Chevalier Von-Linne'e, il luftit de citer le nom trivial dont il s'eft fervi 3 Sc ceux qui voudront de plus grands details , n'auront qu'a conlultcr le Syjlema nature , edit, in-i 2. ou fon Species plantarum ; alors , ces kortus volu- mineux n'exce'deront pas en groflcur cclle de nos Almanachs, & ils leront rcduits a leur jufte valeur , puifque ce ne font que de fimples catalogues. M. Deiportes claffe les plantes mcdicinales, a peu de chofe pies, comme M. Chomel , & il en fpecifie les vertus les mieux reconnues. Le bois puant, par exemple, cajfia foetida foliis haftatis , erecla fdi- qna, fujiformi , eft un reinede efficace pour les vapeur^. M. du Pas, Medecin aLeogane, l'a donne' avec le plus grand iucces. On le pre- pare pour la boiflbn de la memc maniere que le cafe. A ces delcriptions , iuccede une Pharmacoprc Amcricainc, fous le titrc de Formules neceffaires dans Us maladies qui attaquent les habi- tans de Saint-Domingue. Cliaque climat a fes maladies particu'icres : les premiers Europeans que la curioiite ou l'avidite des richeffei tranf- portercnt dans l'Amerique , en furent les viclimcs. Elles leur eroicr.t inconnues; ils furent done forces de recourir an naturel du pays, ec de deuiandcr des fecours a ceux qu'ils venoient rcduire a 1'elclavagc ; Decembre 1771, Tome I. Ggg 1 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, chaque habitant avoit fes reccttes particulieres , 8c fouvent c'c'roit un afiemblage monftrucux- , & des compofirions ridicules. M. Defportes s'eft attache a debrouiller ce chaos, 8c a introduit l'ulage de quelques medicamens d'Europe : ce n'cft pas, dir-il , qu'on ne put s'en tenir aux fecours que le climat fournit, fi lcs Europe-ens imitoient la vie frugale & cranquille des Sauvages ; mais leurs de're'glemens, 1'abon- dance 8c la diverfire des alimens 8c des liqueurs produifenr des mala- dies fi compliquees , 8c d'un caractere fi different , qu'on eft quelque- fois oblige' de mettre en ufage des remedes e'trangers, c'eft-a-dire , des compofirions galeniques ou chymiques , donr l'Auteur confeille de ne fe fervir que tres-raremenr , 8c avec beaucoup de circonlpedtion , eu egard a la grande difpofition mrlammatoire, donr le foie ou quelques aurres vilcercs de fa dependancc font prefque roujours menace's dans les climars de la Zone Torride. Le hafard Sc l'obfervation ont fair connoitre la qualite de plufieurs fubftances tres-utiles en Me'decine. L'Auteur en rapporre un exemple connu dans le pavs dont il parlc. Quelques arbres de quinquina e'roient tombes dans un e'tang, ou ils pourriffoienr. Perfonne ne pouvoir boire de cetre eau , a caufe de la grande amerrume qu'elle avoir contratte'e. Quelqu'un cependant des habirans circonvoifins , arraque' d'une fievrc violenre , & preffe par la foif, en bur, 8c eur le bonheur d'etre de'- Iivre de la fievre, & de la foif. Il indiqua aux aurres le remede que Pexpe'rience lui avoir fair connoirre. Ils s'en fervirenr audi utilement. Cet e've'nemenr rait en reputation une eau degoutante, donr perlonne ne vouloir boire auparavanr. L'herbe qu'on emploie a la Marrinique, conrre la morfure des (erpens , 8c appelle'e , par rapport a fes effets merveilleux, herbe a ferpent , n'a e'te connue que par l'obfervation que quelqu'un a fait de 1'inflrincTt de la couleuvre , qui, bleffee dans le combar qu'elle livre au ferpenr , cherche cette plante, s'en frotre, 8c en avale la (ubftance. La Pharmacope'e de M. Defportes eft e'crite en latin 8c en francois, ce qui rend cet ouvrage intelligible pour routes les Nations. Le catalogue des plantes vient apres. Les planres y fonr de'fignees par leurs noms frangois & caraibes, 8c paries phrafes du Chevalier Von- Linne'e. Ce caralogue commence par les plantes medicinales, & en com- preni environ deux cenrs. Les plantes vencneufes fonr range'es apres les me'dicinales. On rrouve enluire celles qui font regardees dans le pays comme leur anciidore ou conrrcpoifon. Les plantes nourriffantes lont diftribuees relarivement a leurs parties utiles a cet ulage , comme les ta- cines , les femences, 8cc. II fuit le ineme ordre pour les fruirs , & rermine cetre enumeration par un detail fuccint des liqueurs qu'on en retire. Les ph>nte>> propres aux teintures ou aux manufactures, forment un ttoilieme catalogue , & le quatrieme eft deftine a faire I'e'nume- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 411 ration dcs bois proprcs a la charpente , ou pour fairc des rr.eubles. L'Autcur lcs diftinguc en bois incorruptiblcs , en bois mom; les pre- miers fe confervent long-tems en tetre ; tels font les acajoux , l'a- coma , 1c balatas , lc bois a petites feuilles , de fredoclie , de fa- vanne , &c. Les bois gommeux & aromariques forment un catalogue fe'pare. Les feconds , appelle's hois mous , doivent etre mis a couvert du (oleil 8c de la pluie fi on vcut les conlerver. Les plantes enfin qui fervent a former des liens, remplifTent le dernier article du cata- logue en general. De ces divisions naiflent la clarte' & la pre'eifion; le Leifteur trouve fans peine l'objet qu'il defire connoitre. Un mc'moire fur une iource d'eau chaude trouve'e dans 1'ifle de Saint- Domingue, au quartier de Mirabais, 8c deux dinertations fur le fucre terminent ce volume. Cette eau eft mediocrement chaude, 8c con- tient un foufre volatil , qui le dilfipe a mefure que l'eau rcfroidit. Alors , cette eau n'eft pas plus ape'ritive que les eaux limples. La fource jette de la fume'e le matin en plus ou moins grande abondance, felon que l'air eft plus ou moins frais. Cette eau eft plus chaude dans des terns que dans d'autrcs. On ne lui trouve d'autre gout delagre'able, en la buvant, que celui qu'on e'prouve en buvant de l'eau chaude. Ccs eaux rendent la peau douce quand on y a demeure' quelque terns, & elles excitent chez certaines perfonnes des tranlpirations tres-abon- dantes. Les animaux de toutes efpeces recherchent ces eaux avec beaucoup d'empreftement. Les boeufs 8c les chevaux viennent de tres-loin s'y abreuver, & ils attendent que ceux q-.ii font venus les premiers leur cedent la place. Plufieurs traverfent la riviere 8c ne veulent boire que dans cette fource. La diflertation fur lc fucre eft bien faite. L'Auteur fait connoitre de quelle nature etoit le fucre des anciens. 11 parle e fuite de la ma- niere dont on le prepare a Saint-Domingue , de ion utilite dans les ufages ordinaires de la vie, dans la Medecine , & enfin des effets dan- gereux qu'il produit fur ceux qui en mangent ttop. M. Defportes avoir fait deffiner toutes les machines employees dans I'lfle ; il avoit fair meme exe'euter, (ous fes yeux , des tnodeles en petit, pour les fou- mettre au jugement de Meffieurs de l'Acadcmie Royale des Sciences. II y a apparence que quelques curieux s'en (cront empare's apres fa mort, 8c on en regrette la perte. On a cependant les deflins des machines qui fervent au (ucre, au cafe, au coton, a l'indico ; ces deffins (ont ttes-bien lave's. Cet ouvrage p'aira par lcs defcriptions qu'il renferme , 8c par 1'heureufc application des me'dicamens tires du regne vegetal , aux befoins multiplies des habitans de I'lfle. Decembre llli, Tome I. 4--i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L E T T R E De M. Leonard Caseneuve , Maitre Mcnuifier a Nancy, Willi 1 /'.-ci,' J^7 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 41 j Cert: aux Artiftes, Sc aux Artiftes praticiens , a decider du me'rite de cet inftrumenr. II eft fimplc 8c paroit bien imagine ; il (eroit a fou- haiter pour l'utilite' publique que ceux qui inventcnt ou perfeclionncnt imitaflent Pexcmple de M. Cafeneuve ; cet ouvragc e'tant deftine a faire connoitre les objets nouveaux, leurs productions feronr favorablement recues & promptement publie'es. Il ne nous eft pas poflible de decider en quoi le compas de M. Caieneuve differe de celui de M. l'AUemand, Mechanicien de Commerci en Lorraine; il faudroic l'avoir vii pour juger. M E M O I R E Hiftorique , abrige fur la Me'chanique , oil il s'agit fur-tout du concert Me'chanique du Jieur Richard. V^'EST au terns & a la ne'eeflire que la Me'chanique doit fa perfec- tion -, elle a pour objet de fupple'er au nombre 8c a la force des hommes. II eft a croire , par exemple , qu'on ne parvint pas a fou- lever des mafles bien pelantes, ni a conftruire des edifices confide'- rables avant l'invention du levier. On ignore l'inventeur d'un inftru- nient fi utile; mais on fait qu'Architas de'eouvrit la poulie 8c la vis. Archimede imagina la vis fans fin, la vis incline'e, & fut, dit - on l'inventeur de plus de quarante machines difrerentes. il faifoit fur-tout grand cas des leviers; avec leur combinaifon 8c un point d'appui , il repondoit de fourever la terre. Cet homme rare eut dans l'antiquite' quelques fuccefteurs , mais il n'eut point de rivaux. Ce ne fut que dans lc feizicme fiecle que la Me'chanique parut faire de nouveau progres. Simon Stevin en rap- pella les vrais principes, 8c fit quelques innovations heureufes dans la pratique; il inventa entr'autres machines des chariots a voiles qui rouloient avec beaucoup de viteffe. Galilee, Defcartes , le Pere Se'- baftien Tiuchet, diffe'rens autres Mechaniciens , rant francois qu'e'rran- gers, (e diftinguerent par leurs productions dans ce genre, foit the'o- riqucs , loit pratiques. On parle encore de la machine qu'inventa Perrault , pour exhauffer les deux pierres immenfes qui forrfient le fronton du vieux Louvre. D'.puis, Leibnitz mit au jour le fyfteme des forces vives & morres combattu par feu M. de Meyran. Defaguilliers , ne' a la Rochelle &: re- tire en Angleterre, fit ulage de la Me'chanique , pour expliquer la force des animaux. MM. de Maupertuis, Dalembcrt, Clairaut , ont Decemsre I 7 7 i , Tome I. 4i+ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ecrit avec le plus grand fucces fur quelque-unes des parries les plus diftingue'es 8c les plus delicates de cetre fcience. De nos jours audi, on a /implific' les machines anciennes, on en a imagine de nouvelles. On fait le nieces des pendules inve.nte'es par M. le Roy de I'Academie des Sciences, pour de'terminer la longitude en mer. Cette pendule paroit avoir un avantage marque' lur cf He de M. HerrifTan, adoptee 8c recompense par les Anglois M. de Buffon a cree de nouveau le miroir ardent invente' par Ar- chimede , mais dont le lecret e'toit perdu depuis plus de vingt fie- cles : ce nouveau miroir eft concave 8c compofe de plufieurs miroi'rs planes. II fond le plomb & J'e'tain a cent quaranre pieds de dif- tance, & met le feu au bois a un plus grand eloigncment. Nous devons a M. d'Anteaume la premiere lunette acromatique, imaginee 8c conftruite en France. On lui doit aufll Pinvention u'une nouvelle bouflole bien fupe'rieure a celle qui eft aujoud'hui en ufage. M. Saverien , Inge'nieur de la Marine, a invente' un nouvel inf- trument a re'flettion & a lunettes pour obferver les aftres fur mer. C'e'toit la premiere fois qu'on avoir pu re'unir ces deux qualire's dans un pareil inftrument. C'eft ce memc M. Saverien a qui nous devons plufieurs ouvrages accueillis 8c eftime's fur les Sciences & la Phi- tofophie. Nos Mechaniciens ont e'galement eflayc: de luter avec la nature , tantot en imitant fes productions anime'es , tantot en fupple'ant auK pertes qu'elles peuvent avoir faites. On connoit les heureux fucces de MM. Laurent & Richard dans cette demiere teutavive. M, Ri- chard n'a pas moins re'uffi dans l'autre: mais il eft naturel de parler d'abord de M. de Vaucanftbn , ce'lebre depuis long-terns par fes inge'nieux automates , & par d'autres machines aufll utiles que celles- la font agreables. M. Richard a heureufement innove' en marchant malgre lui fur les traces d'un prede'cefTeur ; il a rc'uni ce que M. de VaucanfTon s'etoit contente d'ilolcr. Ces automates forment un concert de voix & d'inftrumens , auquel fe mele le chant de quelques oifeaux , e'ga- lement factices , &c les fons d'un orgue qui joue de lui-meme. Cet enfemblc merveilleux produit l'eronnemcnt &c Tadmiration. Les Adleurs a figure humaine font au nombre de cinq : favoir une jeune per- lonne qui chanre & qui s'accompagne elle-meme fur le claveflin ; un jeune homme qui joue du violon •, une figure d'Abbe' qui joue de la bafle; un Berger qui joue difFerens airs fur fa flute; enfin un petit penie place derriere le pupirre , qui bat la mefure 8c tourne le feuillet lorfqu'il eft ne'eeflaire, & qui , par diffe'rens fignes, paroit applaudir jSc encourager les Muflciens. Le naturel des attitudes 8c du jeu de ces / SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 42 j ces divers perfonnages , fbrmeroir a lui fcul , un fpectacle digne d'cloge & d'atrention. C'eft de quoi Ics Amareurs ont pu fe con- vaincre par eux-memes l'ece dernier , dans une des Sallcs de la Bi- bliothcque du Roi. M A N I E R E De preparer le Charbon miniral , autrement appelle Houille , pour h fubftituer au Charbon de bois dans les travaux me'tallurgiques , mife en ufage dans les mines de Saint- Bel, fur les documens de feu M. Jars , de P 'Academic Roy ale des Sciences ; pratique"* , perfec- tionnie & dkrite par M. Gabriel Jars , fon frere, inte'rejfe auxiites mines. JL'UTILIT^ des Houilles ou Charbon de terre , eft depuis long- tems reconnue en France, & rend pre'cicuies les carrieres de ce mi- neral qu'elle poflede. On l'emploie dans les forges ; & on le lubftitue avec avantage dans plufieurs cas au charbon fair avec le bois , dont il importe d'autant plus de diminuer la confommation , qu'on fe plaint avec raifon , que la quantite en diminue fenfiblement dans le Royaume, cv que les forets fe detruifent par les coupes , fans etre remplace'es par des plantations equivalentes. II feroit done a defirer pour l'Etat , que dans tous les lieux a porte'e de fe pourvoir de charbon de terre , on s'habituat a s'en fervic a 1'exemple de la ville de Lyon, dans laquelle depuis un certain nombre d'annees le peuple l'emploie ( com me a Saint - Etienne & a Saint- Chamond ) a tous les ufages domeftiques , ce qui produit une e'pargnc pour le confommateur , & un bene'fice pour le Royaume. A pkis forte raifon eft-il d'une grande importance qu'on puifte Ic fubftituer au charbon de bois dans le traitement des mines qui en exige une ft grande quantite'; mais il prefente plufieurs inconveniens. Le charbon fofiile, tel qu'on le tire de la carriere, nuit finguliere- nient aux operations me'tallurgiques, Sc le plus fachcux de fes de'fauts eft de dctruire une grande quantite' de metal dans les fontes. Les Anglois qui ont des mines, beaucoup de charbon de terre &: pcu de bois , paroiftent avoir ete les premiers a faire des tentatives pour obvier a ces inconve'niens : j'ai vu dans un manufcrit lur l'art d'cxploiter les mines de charbon , que les premiers eflais faits a ce Decembre 1 7 7 1 , Tome I, H h l» 4i 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fujet en Angleterre remontent a des dates tres-ancicnnes; & Swedem- borg, tres-habile Mine'ralogifte, en parle aufll , mais comme d'un arc, qui, de fon terns, n'avoit pas e'te porte' a fa perfection. L'induftrie des Anglois furmonta dans la luite les difficulte's , & parvint par des ope'rations aflez fimples au but defire ; c'eft-a-dirc , a otcr au charbon mine'ral fes qualite's nuifibles a la fonte des me- taux •, les Anglois reconnurent bientot tous les avantages de cette decouverte , mais ils faifoient un myftere de leurs proce'de's , & la France a peine inftruite de leurs lucces , n'en partageoit point le be- nefice , lorfque feu M. Jars, de l'Academie Royale des Sciences, Sc Aflocie de celle de Lyon, fut envoye en l'anne'e 1765 par le Mi- niftere en Angleterre , pour y faire des obfervations fur divers objets relatifs a l'avancement dti Commerce & des Arts. Un des premiers fur lefquels cet Acade'micien crut devoir jetter les yeux , comme l'un des plus importans, fut la maniere de preparer le charbon de terre pour Pemployer utilement dans les operations metallurgiques •, il fit a ce fujet toutes les recherches poflibles; il me fit part de fes conjectures & des moyens qu'il imaginoit pour imitcr le proce'de' des Anglois- Un voyage que nous fimes bientot apres dans le Nord , fufpendit les expe'riences que je me propofai de faire fur cet objet dans les mines de Saint-Bel : au retour de mon voyage, je ne tardai pas a m'en occuper. Le (ucces de mes premiers etfais m'encouragea : je continuai les tentatives , j'eus bientot la fatisfa&ion de voir que mes travaux n'e'toient pas infrudtueux ; & dans l'efpe'- rance de les rendre plus utiles encore, je me fais un devoir de les foumettre au jugement du Public , qui en aflurera le fucces. Toute cfpece de charbon follile nuit aux fontes des me'taux , quoique dans diffe'rens degre's , fuivant fes diverfes qualites : le but qu'on doit le propofer, eft de demure les principes nuifibles qu'il renferme , & de conferver ceux qui font utiles a la fonte. Sans vouloir entrer dans une analyle profonde de ce mine'ral, on fcait en gene'ral qu'il eft, comme tousles bitumes, compo(e'de parties huileufes & acides. Dans ces acides, on diftingue un acide fulfureux , a qui, je crois , Ton peut attribuer les de'chets qu'on e'prouve lorf- qu'on l'emploie dans la fonte des me'taux : le foufre 8c les acides de'gage's par Taction du feu dans la fufion , attaquent , rongenr & de'truifent les parties metalliques qu'ils renconrrent ; voila les enne- mis que l'on doit chercher a de'truire ; mais la difficulte de Tope'- ration confifte a attaquer ce principe rongeur, en (ontervant la plus grande quantite poftible des parties huileufes , phlogiftiques & inflam- mables , qui (cules operent la fufion & qui lui font unies. C'eft a quoi tend le proce'de' dont je vais donner la methode ; on peut Tappeller le dtfoufrage: apres l'operation, le charbon mineral SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4:7 n'cft plus a l'ceil qu'une maticre ftchc , fpongicufe, d'un gris noir qui a perdu de fon poids 8c acquis du volume, deux obfervations qui paroilTent inte'reffantes ; je remarqucrai encore qu'clle s'allume plus difhcilement que le charbon crud , niais que fa chaleur eft ptus vivc & plus durable. Le charbon mineral ainfi prepare, fe nommc coaks , & fe prononee coks ; les Anglois s'en fervent avee avanrage pour fondre differens minerals; les Orfevrcs l'emploient pour fondre les me'taux fins; on en brule aulli dans les poe'les & les grilles des appartcmens. Le procede' , au moyeri- duquel le charbtm de terre devienr coaks , eft facile en apparence, il ne s'agit que de faire brider la houilk , comme 011 brule le bois pour faire du charbon ; mais il exige unc pratique bien entendue & beauccup de precaution , foit dans la conftruction des charbonnieres , foit dans la conduite du feu, fans quoi Ton n'obtient que des coaks imparfaits & incapables d'etre em- ploye's utilement; ce qu'il eft aile de reconnoitre par la feule inf- peciion, & par le de'ehet que doit faire telle ou telle quantite de char- bon , apres des e'preuves faites avec exactitude, ainfi qu'on en pent juger par celle des houilks des mines de Rive-de-Gier , dont il eft fait mention dans le proces- verbal ci-apres. Pour re'uffir a obtenir de bon coaks , il eft de la plus grande im- portance, cV meme il eft indilpenfable d'avoir une bonne quantite de charbon qui foit exempt de pierre ou roche, c'efl-a-dirc, tel que celui de Rive-de-Gier, de'nomme charbon de Marechal; e'eft le feul dans les mines qui loit bon pour les forges , & pour l'ufage auquel nous le deftinons ; car l'autre efpece appellee charbon pe'trat , qui ne fere ordinairement que pour la grille, comme tenant plus long-tcms au feu, eft mele'e de beaucoup de pierres qui lui donnent de la pefan- teur; le premier, au contraire, eft tres-le'ger , luifant 8c friable; en un mot , tel qu'il doit etre pour s'en fervir avec avantage. La benne (a) du charbon pe'trat, pefe brut 290*- a 500*- La benne du charbon de forge, idem 270-*- a 280*- La benne des coaks, idem 170*- a 180*- Lorfqu'on s'eft affure' de cette qualite de charbon , les ouvriers Charbonniers ne doivent point encore en ncgliger le choix ; ils doivent en fe'parer la roche que Ton rencontre quelquefois dans les gros morceaux : on fait le choix en les caffant. Pour defoufrer la houille avec profir, il eft reconnu que les morceaux ^ ( a ) Nom de la mefure du charbon de terre en Fores , & dans les mines da Lyonnois. Decembre i 77 i , Tome I. H hh 1 4i 8 OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , doivent etre re'duits a la grofleur de trois a quatre polices cubes, arm que le feu puiffc agir 8c pene'trer dans leur inte'rieur. Apres avoir forme' un plan horizontal fur le terrein, on arrange ce charbon, morceau par morceau; on en compofe une charbonniere d'une forme a-peu-pres femblable a celle que l'on donne pour faire' du charbon de bois, 8c de la concenue d'environ cinquante a foixante quintaux , quantice' fuffifante pour obtenir de bon coaks •, car j'ai ob- ferve' , apres diverfes epreuves , qu'en les faifant plus fortes , il en refte beaucoup , apres l'operation que le feu n'a pe'netre qu'en partie , & d'autres oil il n'a pas toucMe. II en arrive autant, fi l'on donne aux charbonnieTes trop d'ele'va- tion , quoique dans le meme diametre ; l'inconve'nient eft encore plus grand , fi , comme je l'ai e'prouve , on place le charbon indifferem- ment 8c de routes grofleurs. Une charbonniere conftruite de la maniere que je viens d'indiquer, peut & doit avoir dix, douze, & jufqu'a quinze pieds de diametre, 8c deux pieds a deux pieds 8c demi au plus de hauteur dans le centre. Au fommet de la charbonniere, on laifle une ouverture d'environ fix a huit pouces de profondeur , deftine'e a recevoir le feu que Ton y introduit avec quelques charbons allume's, lorfque la charbonniere eft acheve'e , alors , on la recouvre , & l'on peut s'y prendre de di- verfes manieres. Une des meilleures, & la plus prompte , eft d'employer de la paille Sc de la terre franche qui ne foit pas trop feche ; on recouvre toute la furface de la charbonniere avec cette paille, que Ton met affez ferre'e pour que l'e'paiffeur d'un bon pouce de terre que l'on met par-defTus, & pas davantage, ne tombe pas entre les charbons, ce qui nuiroit a Taction du feu. Au de'faut de paille , on peut y fupple'er par des feuilles feches , mais on n'eft pas roujours dans le cas de s'en procurer; j'ai fait eflayer aulh de recouvrir avec des gazons ou mottes , mais il n'en refulta pas un bon efFet. Une autre methode qui , attendu la cherte & la rarete de la paille, eft mife en pratique aujourd'hui aux mines de Rive-de-Gier , par les Ouvriers que les inte'refles aux mines de cuivre y emploient a cette ope'ration , avec un fucces que j'ai e'prouve', eft celle de recouvrir les charbonnicres avec le menu charbon : cela le fair comme il fuir. rearrangement de la charbonniere e'tant acheve', on en recouvre la partie infe'rieure, depuis le fol du terrein, jufqu'a la hauteur d'environ un pied, avec du menu charbon crud , tel qu'il vient de la carriere , 8c des de'blais qui fe font dans le choix du gros charbon 5 le reftant de la furface eft recouvert avec les dechets de coaks, qui font en tres- petits morceaux. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 419 Par cette methode , on n'a pas bcfoin , comme par les autres, de pratiquer des trous autour de la circonfe'rence , pour l'evaporation de la fumee ; les interftices qui fe trouvent entre ces menus coaks , y fupple'ent, & font le meme effet ; le feu agit e'galement par-rour. Lorfque la charbonniere eft recouvcrte jufqu'au fommet , i'Ouvricr apporte , comme il a e'te' dit , quelques charbons allumes, qu'il jette dans l'ouverture, & acheve d'en remplir la capacite avec d'autres charbons-, quand il juge que le feu a pris, & que la charbonniere commence a fumer , il en recouvre le fommet , & conduit l'ope'ration comme celle du charbon de bois , ayant foin d'empecher que le feu ne pafte par aucun endroit, pour que le charbon ne fe confume pas , & ainfi du refte, jufqu'a ce qu'il ne fume plus, ou du moins, que la fume'e en forte claire ; figne conftant de la fin du de'feufrage : pour route cette manoeuvre , l'experiences des Ouvricrs eft tres-neceffaire. Une telle charbonniere tient le feu quaere jours , & plufieurs heures de moins , fi Ton a recouvert avec de la paille & de la terre ; lorf- qu'il ne fume plus, on recouvre le tout avec la poufliere, pour e'touffer le feu, & on le laiffe ainfi pendant douze ou quinze heures : aprcs ce tems , on retire les coaks , partie par partic , a l'aide des rareaux de fer , en feparant le menu qui fert a couvrir d'autres charbon- nieres. Lorfque les coaks font refroidis , on les ferme dans un magafin bien (ec ; s'il s'y trouve quelques morceaux de charbons qui ne foient pas bien de'loufre's, on les met a part pour les faire paffer dans une nouvelle charbonniere ; on en a de cette maniere plufieurs en feu , dont la manoeuvre fe fuccede. Trois Ouvriers ayant un emplacement affez grand , peuvent pre- parer dans une femaine trois cents cinquante, jufqu'a quatre cents quintaux de coaks. II eft effentiel de b;en de'pouiller le charbon mineral de la roche Sc des pierres qui peuvent y etre melees; car il eft arrive', foit par de- faut d'expe'rience des Ouvriers, foit par leur ne'gligcnce, que plufieurs charbonnieres n'ont produit que des coaks imparfaits, qui, dans la fonte ont occafionne beaucoup d'embarras *, d'ou j'ai conclu que les acides deftructeurs n'avoient pas e'te iufriiamment de'truits, & que Yon n'en avoit pas fepare les pierres qui ne fondoicnt point 8c s'accumu- loient dans Pinte'rieur du fourncau. J'en ai la prcuve dans l'effai que j'ai fait de la houille de Sainte-Foi- l'Argentiere ,. a trois lieues de Saint-Bel, qui a pre'fentc' les memes inconveniens au bout de quelques heures de fonte, puifqu'clle eft unie a une grande quantite d'une efpece de febiftes tres-re'fra fans quoi , il feroit de'ehire' par les battages. On laifte quelques jours en tas les chdtaignes , apres qu'elles ont e'te de'pouille'es de leur peau ; apres quoi , on les remet dans le (ac ; on les bat, en retournant de tems en tems le fac : enfin, on les vanne, on les trie, & on met a part celles qui font marchandes. Com me il tombe une certaine quantite' de chdtaignes dans la pouf- fiere, forme'e du debris de lVcorce exterieure & de la pellicule, on a foin de les en retirer. Cette poufliere fe nomme brifat. Ce brifat fert a engraifter les beftiaux , parce qu'outre la pellicule , il contient des morceaux de la (ubftance des chdtaignes. Une claie ou batifle, tell qu'on l'a de'erite, eft tres-propre a P edu- cation des vers a /oie , qu'on place fur la grille , lorlqu'ils font fortis de la rroifieme mue , ou meme de la (econde. En faifanc un feu conve- nablc par deffus , on parvient a donner a tour linte'rieur du batiment. une chaleur qui va julqu'au dix-huitieme & vingdeme degre's du ther- mometre de M. de Reaumur. DicEMSRE I 7 7 1 , Tome I, 4+o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , O B S E R VA T I O N S. Nous avons cm devoir placer ici tin abre'ge' des principals mani- pulations, qui (ont en ulage dans les Cevennes, pour la preparation des chataignes leches , parce que la connoiffance de ces manipula- tions ,& leur introduction, peuvent etre d'une tres-grande utilite dans plufieurs de nos Provinces. Quoiqu'on ait l'habitude de faire lecher certaines parties de cha- taignes dans les principaux Domaines du Limofin, cependant il manque a cette pratique tant de circonftances efTentielles , qu'on n'en tire pas tout le parti qu'on auroit lieu d'en attendre , li cette operation e'toit conduite avec plus d'intelligence. Toutc la pratique du Limofin fe reduit a e'tendre fur une claie fort grofliere des chataignes , Sc a les fecher, fans autre precaution, en les expolant a Taction de la fume'e; enfin , a les garder , lorlqu'elles (ont a-peu-pres leches, avec leur e'eorces & leur pellicule. Les chataignes ainfi garde'es, acquierent une couleur noir>re, Sc deviennent mollafles loriqu'on les fait cuire, &: enfin la plupart ont un gout de fume'e Sc d'empyreume tres-marque' , au lieu que les cha- taignes pre'parees fuivant les proce'de's ufites dans les Cevennes , fe con- fervent tres-jaunes, tres-fermes •, Sc apres qu'on les a fait cuire, elles ont un petit gout fucre alTez agre'able. La railon de cette difference dans les re'fultats du lechoir eft lenhble , fi l'on fait attention a I'ime perfection de la pratique Limoufine , Sc qu'on la compare avec les details de la me'thode des Cevennes. Lorfque les chataignes ont feche par Taction de la fume'e, elles ont recu dans leur e'eorce tous les principes que la fume'e entraine. Quel- ques-uns de ces principes font des f els qui pe'netrent entierement cette e'eorce , Sc meme , par progres , la fubftance farineule de la chdtaigne : comme quelques-uns de ces fels attirent l'humidite de Tair, en con- lequence de cet effet, les chataignes deviennent mollafles , perdent leur fermete' , & enfin acquierent le gout de fume'e Sc d'empyreume , qui" le communique de Te'corce a la fubftance farineule. Un autre de'lavantage , qui vient a la luite de ceux-ci , e'eft qu'une grande partie des chataignes ie'ehees , fe gate Sc (e pourrit dans le Li- mofin, & il n'eft pas poffible de les conlerver apres un certain terns. Au moyen de la me'thode plus re'rlt'chie des Cevennes, on e'vite tous ces inconveniens : en depouillant les chataignes de leur e'eorce Sc de leur pellicule, incontinent apres qu'clles font tirees du le'choir, on pre'vient la communication des principes de la fume'e, qui le font artache's a l'e'corce ; ils ne peuvent s'infinuer dans la fubftance fari- peufc 5 aulli conierve-t-ellc une couleur jaune, & une fermete' inaite'- rable. SUR L'llIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4.4 r rablc. Dans cet c'tat de parfaitc dedication , les chdtaigncs pcuvent - en ce genre. II feroit curieux & important de favoir comment ces con- noilfances ont pafle d'un Etat dans un autre, quels y ont etc leurs pro- griis & Ies caules de la chute des Manufactures : il eft certain que dans les (iccles , meme les plus barbares , il y a toujours eu des Na- tions qui fe font diftingue'es en ce genre. L'e'tablifiement des Manufactures d'etoffes de laine , fonde'es fur les nombreux troupeaux eleves dans le pays meme, etoit fur le point d; rendre la Nation Efpagnole unc des plus puiflantes de l'Europe, avanc les de'eouvertes de Chiftophe Colomb , quoiqu'ellc eut fticccftivement fubi l'oppreftion des Carthaginois , des Romains, des Goths, des Maures, &c. Les trc'fors du Nouveau Monde n'ont fervi qu'a 1'ap- fauvrir;eneffet,M. Uftariz demontre que depuis 1495 , jufqu'a 1724 Efpagne a fait venir de l'Amerique 5000 millions de piaftres d'or ou d'argent ; & que malgre la fecondite' dc ion terrein , la majeure partie de ces tre'fors , pour ne pas dire la maffe enticre, eft fortie d'Efpagne , en payement des ouvrages tires des Manufactures Etrangere^. L'exportation des Manufactures d'e'toftes de laine e'toit peu con/I- derable avant le neuvieme fiecle, malgre la ce'lebrite acquife par quel- ques-unes. La confommation s'en faifoit dans le pays meme. Vers l'an 810 , Charlemagne releva la fplendeur des Manufactures dc France par de nouveaux e'tabliftemens, a Lyon, a Aries, a Tours; bientoc apres, force' de traverfer les Alpes , pour le rendre en Italie, il en forma de nouvelles a Rome , a Ravenne. Les premieres fe font main- tenues , & ont e'te' preique e'ehangees en Manufactures d'e'toftes de foie 1 a peine fe fouvient-on, en ItaUe , des foins & des encourafremens accorde's par PEmpereur. Les villes du Royaume de Bourgogne, fur-tout celles de Brabant 8c de Flandre, gouterent un repos, dont ne jouirent pas celles dc France & d'Iralie. Comme les Arts aiment la tranquillite, les Manufactures de Flandre attiroient de'ja les regards en 960; leur plus haut de; 3 , change le nom de Depute en cclui de Confeiller j & peu-a-peu ces Depure's devinrent des Ofrlciers, des Juges Royaux , dont les fondtions e'toient d'examiner Sc de prononcer d'apres les Loix, fur les altercations fur- venues pour les troupeaux ambulans , Sc fur tous les faits qui y avoient quelque rapporr. Ces Officiers formerent un Confeil , qu'on appelle encore Confejo de Mefia. On eft porte a penfer que ce Confeil avoir alors beaucoup d' auto- rite , puifque Leonore, Reine Douairic-re de Portugal, fit en 1499 propofer a ces Bergers, par fon Ambaffadeur , de paffer les limires du Portugal , Sc de venir faire paitre leurs troupeaux fur le territoire de fon Royaume, ou elle leur pronicrtoit les fecours les plus affure's. Les Berbers, ou plutot le Confeil accepta les propofitions de 1' Ambaffadeur, & depuis ce jour, les brebis Efpagnoles paffent en Portugal dans un certain tems de l'anne'e , moyenant une le'gere re'tribution. II eft de'tendu aux Bergers d'y tondre les brebis, Sc de les vendre hors de l'Eipagne. L'autorite royale vint a l'appui du de'eret du Confeil des Bergers. Le Roi Ferdinand Sc la Reine Ifabelle ordonnerent en 1500, qu'un Confeil du Rci pre'fideroit a ces affemble'es. Les brebis a laine fine font 1'objet fpe'eial des Ipix Sc des privileges publies fous le litre de Leges y Privilegios del Confejo de la Mefta. Les paturages deftine's a cette race privile'gie'e de brebis, font differens fuivant les faifons de l'annee. Elles paffent l'hivcr dans les plaines baffes des Provinces me'ridionales de l'Efpagne, comme l'Eltramadure, l'Andaloufie, la Nouvelle Caftille, ou dans celles du Portugal, &: on les conduit en e'te fur les hauteurs Sc les montagnes de la viejlle C*f- iille & du Royaume de Leon, Ces SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 449 Ces troupeaux ambulans ont une liberie plcine & cntiere pour pa- turcr fur les cndroits par oil ils patient, Tans payer la plus le'gcre re- devance. Les poffefTeurs du terrein nc peuvent s'y oppofcr. Lcb champs labourre's, les prairies, les vignes, les jardins pot3gers memes doivent leur ctre livres ; les feuls terreins ferme's par des murs font exempts. Comme ces tranlmigrarions fe font au commencement & a la fin de l'hiver, les troupeaux caufent peu de dommage. La bonne race de brebis a la laine fine e'toit beaucoup diminue'e avant l'ave'nement de Philippe IV au tronc d'Efpagne : ce Monarque n'oublia rien pour raugmentcr , & pour encourager les proprie'taires a la mul- tiplier, I! publia a cet effet , en 163 5 , un Edit Real Pragmatica dont je vais rapporter les articles inte'reffans. i°. Pour prcvenir les de'fordres , aflurer l'abondance des parurages & les avoir a un prix mode're' , il fcra fait un cadaftre gene'ral dans tout le Royaume, dans lequel on fpe'eifiera l'etendue Sc les bornes de chaque paturage particulier. z°. II fera defendu d'enclore, oil de la- bourer oil cultiver aucun endroit fans une permifiion fpe'eiale, qui ne fera accordee qu'en cas de ne'ceflite', & apres un mur examen. 30. La plantation de nouvelles vignes fera profcrite comme nuifible a l'agri- culturc, & principalement aux troupeaux. 40. Si un Berger fe plaint que le proprietaire d'un champ veut lui vendre trop cher le paturage, le poflefTeur Sc le Berger nommeront chacun un Depute pour re'gler le prix; fi ces Arbitres ne s'accordent pas, un troifieme fera nomme pat lc Tribunal le plus prochain, pourvu cependant que le paturage dont il s'agit, ne loit pas fous la Jurifdiclion de ce Tribunal. Cet Edit abolit plufieurs redevances paye'es auparavant pour les trou- peaux , lorfqu'on les conduifoit d'un pays dans un autre. II de'fendit aux Bcrgers de ce'der leurs pretentions aux paturages qui leur apparte- noicnt par l'ufage incontefte d'unc faifon , parce que le paturage n'efl: point a eux, mais aux troupeaux. Perfonne ne pouvoit enche'rir fur un bail, ni le poflcfTeur affermer fon terrein par la voie de l'enchere. II etoit dttendu a celui qui n'avoit point de troupeaux de prendre des paturages a bail •, &: s'il en avoit , de ne contradter que pour l'etendue dont il avoit rcellement befoin. Les communes ne pouvoient etre af- ferme'es fous quelque pretexte que ce fat. Si un proprie'taire ne payoit pas fes dettes , les creanciers n'avoicnt le droit de faire faifir que le nombre des brebis excedant celui de 100, &c ce nombre devoir tou- jours iui rcfter. Lepofleffeur d'un fonds ne peut le vendre ni 1'alicner, fans ce'der en meme rems le troupcau , & il n'eft en droit de renvoycr fon Fermier que quand il s'cfl procure un nombre fufEfant de brebis. Pour prcvenir qu'on ne hauflat lc prix des paturages, il fut fixe,& defendu de l'augmcnrer. Le droit de demander la fixation du paturage n'appartcnoit qu'aux pofTcflcurs des troupeaux, & les champs dJpen- Janvier 1772, Tome J. X- 1 1 4<;e OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , dans du Domaine de la Couronne furent foumis comme les autres a. la meme taxe. Les troupeaux ont en Efpagne la liberte , durant leur marche d'un pays a un autre , de fe re'pandre a leur gre (ur les champs incultes , &c dans les champs cultive's lelongdes chemins par oii ils paffent > les proprie'raires doivent laifler une efpace de 90 varas , faifant environ. |ii elks excederoient les bornes d'un me'moire. Du choix des raifins. » II n'eft aucune Provinc'e de Prance, da:ns laquelle on puiflTe compter un auffi grand nombre d'eipeces de raifins qu'en Provence. Nous venons de voir qu'il y avoir abus dans le choix du terrein; le meme abus eft encore plus criant dans celui des raifins. Ce melange moni- trueux ne laiffe aucun gout decide au vin; cette mixtion mal enten- due lui 6te tomes les qualite's , & ne lui en donne aucune. Elle eft meme de'cide'ment mauvaile, parce que l'un eft mur , pafle &: fouvent pourri avant que l'autre ait acquis une veritable maturite; cependant , toutes les efpeces de raifins indiftindtement font mele'es dans la cuve. Quel vin peut-on en attendre? Ne feroit-il pas plus avantageux que les vignes ne contingent que les plans de raifins reconnus les meil- leurs , meme en facrifiant la quantite a. la qualite? Cette prc'tendue perte fe retrouvera facilement par ['augmentation de la vente de ces detniers , 8c, fur-tout, par le produit iupe'rieur de ceux deftine's a etre convertis en eau-de-vie. Le nombre de plans qu'il convient de choifir, ne doit pasT exceder cinq ou fix, 8c c'eft encore beaucoup. Sur ces fix , deux doivent dominer &c faire la moitie ; & ce feroit encore mieux, fi on ne confervoit que deux efpeces de raifins blancs recon- nues les meilleures. II y a quelques Provinces en France oil on arra- che rigoureufement les ceps de raifin blanc. L'Auteur fait connoitre les efpeces de raifin cultivces en Provence, dont le de'tail feroit ennuyeux. II de'montre que (ur dix-huit efpeces de raifins blancs , il n'y en a que trois qui conviennent au pays , 8c cinq parmi les raifins rouges. Le morvequi , connu dans les differens can- tons de Provence fous le nom de teouiller , de manoufquen , debrun- fourcat 8c de pinneau en Bourgogne, d'auverna a Orle'ans, de morillon aux environs de Paris , de bourguignon en Beaujolois , 8cc. eft de tous les raifins cultives en Ptovence , celui qui y donne le meilleur vin. II eft e'galement le plus renomme dans toutes les Pro- vinces Septentrionales. 11 refulte de-la qu'on doit tranfporter les plants de vignes du Nord au Midi , 8c non du Midi au Nord , (uivant la pre'judiciable coutume de Provence. La preuve en eft , que les efpeces de bons raifins ne donnent du vin de qualite dans les Provinces Septentrionales a la Provence , que lorfque les chaleurs ont ete' vives 8c fourenues pendant l'ete & l'automne ; alors, les raifins y acquierent une maturite complette. Ces raifins tranfporte's d'une Province Sep- tentrionale, muriront done plus facilement dans une Province Me'ri- SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 4(rr dionale, puifqu'il y fait plus chand , 8c le vin en fera meilleur. Les Provencaux doivcnt done renvoyer en Efpagne, en Grece & a Maroc les clpeces qu'ils en out fait venit , pour les fupple'er pat des plans tires du Nord. Jean-Michel Schofulan dit dans une Differtation , done l'objet eft l'examen des diffcrens vins de l'Eutope, confideres com me aliment : In Hifpanid maxime laudatur vinum Alicante, vinum Tinto. Habetur pratereh vinum Petri Simonis, quod en fc it maximl ad urbcm Quadalcazar : nomen habit a plantatore , qui ex Germanid ante 200 annos vites deduxit & tranfplantavit , ut hinc virtus poli & fucci hujus in progenerandd diverfitate vinorum elucefcat. Tous les Chymiftes modetnes reconnoiflent que le corps muqiieux eft la feule fubftance fermentefcible, comme elle eft la feule qui foit nourriffante. Elle exifte dans les vege'taux , & on la connoit ious le nom de gomme 8c de mucilage. Plus le corps muqueux eft doux, cha- cun fuivant Ion principe, plus le vin qu'on en obticnt eft parfait, 8c plus il ieconferve. Tel eft le vin d'Efpagne, 8cc. II faut done rendrc doux les vins qui ne le font pas, foit par art, foit en n'employant que les taifins dans leiquels on reconnoit la meilleure qualitc de muqueux doux, parce que chaque raifin contient un muqueux different. L'Au- teur fait connoltrc les diffe'rentes claffes de muqueux, 8c conclut que le muqueux fade eft fujet a pourrir ; le muqueux acide paffe moins promptement a la putridite que le premier; cependant, qu'il y par- vient facilement •, que le muqueux apre produit un vin fujet a la pouffe & al'acidite; enfin, que le muqueux doux eft le feul fufceptiblc de la bonne fermentation fpiritueufe. On fera connoitre la fuite de cct ouvrace dans ce volume. M E M O I R E Sur la differente dijfolubiliti des fels neutres dans I'efprit-de -vin, contenant des observations particuliires fur plufieurs de ces fels. Par M. Macquer , de VAcademie Royak des Sciences. y^, E Me'moire ptiblie' dans la Collection Acade'mique de Turin, n'eft point afTez connu en France , 8c fur-tout dans les Provinces ; nous croyons rendre tervice au public en le mettant fous fes yeux. Son importance, les vues neuves, les oblervations judicicuies qu'il ren- ferme, en 'out un ouvrage ele'mentaire en ce genre & de la plus grande utilite. 11 lufKt de nommet M. Macquer, pour annoncer le plaifir qu'on doit gotiter en le liiant. Janvier 1772, Tome 1. 4cic vendu par N. Giberc , aulli Jouaillier de cette Ville. (£) On entend par diamant de nature, un d amant trouble, glaceux, ou, fi I'on Teut, noueux, dont on ne pent jamais trouver le fil, & d'une fi exceiTive durete, qu'on a la plus jrrandc peine a les tailler, & qu'on ne le peut jamais avec ayantage ; mais leur extreme durete fait qu'on les met en poudre pour tailler les autres. SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 483 On fit fee her lc tout a petit feu; on platj.i le creufet foils la moufle , dans lc fourneau de re'verbere , a quatre heures quarantc minutes apres-midi. D'tin autre cote', on rflit les trois diamans n°. 1 , nn. 1 & n". 3 , dans trois pctites caplules faites de pate dc porccla'.ne, fans couvercle, & marquees chacune du n°. dc Ion diamant. On les echauffa d'abord foiblement , cV: petit a petit, fousunc moufle particuliere ; apres quoi , on les porta ious la grande moufle, qui etoit de'ja fort echauffe'e, & on les placa a cote du petit creulet ci-deflus, a quatre heures quarante-trois minutes. On obferva ces trois diamans a de'eouvert , &. a des intervalles de terns affez courts, pour voir ce qui leur arriveroit pendant l'opera- tion , afin de n'omettre aucune des circonftances importantes dont on va tranferire ici le detail. A cinq heures quatre minutes les diamans font deja rouges. Leur couleur eft matte : elle fe diftingue cependant de cellc des coupelles, en ce qu'elle eft un pcu plus blanche. A cinq heures onze minutes tout eft encore au meme e'tat , a l'excep- tion que les diamans font un peu plus rouges. A cinq heures dix-huit minutes, le diamant n°. 1 commence a prendre un ton de couleur plus relplendiffant. A cinq heures vingt-huit minutes, le diamant n". 1 devient de plus en plus refplendiffant ; les autres font toujours d'un rouge aflez terne, un peu plus brillant neanmoins que celui des capfules. A cinq heures trente-fept minutes , le diamant n°. z eft toujours tres-refplcndiffant, &c Ton juge unanimement qu'il eft diminue de volume ; les deux amies diamans n°. 1 & n°. 5 commencent eux- memes a etre reiplendiflans , lur-tout le diamant n°. 1. A cinq heures quarante-cinq minutes, les trois diamans font tres- refplcndifTans ■, le diamant n°. 2 l'eft plus que les deux autres, dk le diamant n° 1 , plus que le diamant n° 3. A cinq heures cinquante-cinq minutes, on ouvre le fourneau : les diamans n°. 1 & n°. 3 font tres-refplendiffans ', on annonce que le diamant n°. 1 eft entierement evaporc; on retire la capfule dans la- quelle il avoit e'tc place, lans la pencher ni la renverfer, & Ton s'ap- pcrcoit qu'il refte encore un petit veftige de ce diamant de forme obloncrue irregulkrc, &: lans facettes , "ros comme environ la fixieme partie de la tete d'un camion. On l'apperijoit a la vue 5 mais pour le bien diftinguer, il taut le iecours d'ur.e loupe un peu forte. Autour de ce petit morceau , qui eft d'une tranfparence un peu laiteufe , on remarque de petits grains de matiere fort fins & arrondi. : mais comme ils font colores, on juge qu'il eft plus probable qu'ils out Janvier 1772, Tome L iS5 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ece detaches du haut de la mouHe , 8c qu'ils ne provienncnt pas da diamant. A fix heures pre'eifes , on retire le diamant de nature , n°. 3 , & Ton voit qu'il eft tres - fenfiblement diminue. On n'y obferve plus de facetrcs taille'es i Al a neanmoins conferve' a-peu-pres fa figure. Sa furface eft ine'gale, raboteufe & comme grumelee, le diamant n'a plus une tranfparence parfaite, mais clle eft un peu laiteufe : en total, il a i'apparence d'un petit morceau de cryftal de Madagafcar. Ce diamant , avant l'ope'ration , pefoit cinq grains fort poids dc karat. Apres l'ope'ration il pefoit un peu moins de deux grains , & il avoit done diminue' de plus de trois grains. A fix heures vingt minutes on retira le diamant, n°. 1 , appartenant a M. le Due de Brancas. Il fe trouve beaucoup diminue', on y apper- coit ne'anmoins encore des facettes, & fur-tout une ele'vation pointue prefqu'a fon milieu. Du refte, fa tranfparence eft moins laiteufe que telle du diamant de nature n°. 3 , Sc fa furface eft aftez lifTe. Autour du diamant on remarque un aftez grand nombre de petits grains de fable fin 8c blanc, 8c a-peu'-pves tranf parents mais furement, ils ne paftent pas en totalite' un vimgtieme de grain. Ce diamant de M. le Due de Brancas peloit, comme on a vu avant l'ope'ration, cinq grains 8c un quart de grain, poids de karat. II a ete repe'fe' apres, 8c Ton n'a plus retrouve qu'un demi- grain egale- ment poids de karat : il s'en etoit done evapore quatre grains trois quarts de grain. Il s'eft eleve'une grande queftion entre les Speclateurs, favoir Ci les fragmens lableux qui fe trouvoient dans les capfules, etoient des por- tions de diamant ou des particules de fable datache'es de la mourle. Pour de'eider cette queftion , on a fait les experiences fuivantes. On a remis la porrioncule qui reftoit du diamant n°. 1 , avec les grains de matiere qui l'environnoient fous la moufle , chacun fe'pare'- ment dans une capfule particuliere. On a remis egalement les cap- fules dans lefquelles avoient cte' place's les diamans , n°. 1. & n°. 3, avec les grains de matiere qui s'y trouvoient , & l'on a continue de pouflfer le feu jufqu'a fept heures rrente-cinq minutes. On a retire alors les capfules , 8c Ton n'a plus trouye' de veftige de diamant dans la premiere. Mais les fragmens fableux fe font rc- Trouve's dans toutes les trois. II paroiffbit meme y avoir quelques- uns de plus en raifon d'une nouvelle portion qui etoit encore tombe'e du haut de la moufle. A fept heures quinze minutes, le feu ayant toujours e'te continue avec la meme force: on juge qu'il eft terns de retircr le diamant, yi°, 4, appartenant a M. le Blanc. On met le cienfet hors de la mourle 3 SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 487 be on le laiffc refroidir de lui-memc. En le vuidant , tout le charbon fe trouve avoir c'te confume, & il ne refte plus qu'une efpece de chaux blanche. On la brifc, on la re'duit meme en poudrc fans trouvcr la moindre apparence dc diamant ; on reconnoit (eulement le cteux dans lequel il a ete loge; l'cmpreinte du diamant y e'toit encore marquee. A (cpt heurcs trciue minutes, on retira un faphir & un rubis qui avoient ete mis a quatre heures quarante-trois minutes fous la meme moufle, & qui avoient c'prouve comme les diarnans , toute la viulence du feu. lis etoient encore lains & entiers. Un poinc.on dont on appuya la pointe fur le rubis ne fit connoitre aucun ramolliflement dans cette pierre, dont la couleur, no'n plus que cellc du faphir, n'avoit foufrerc aucune alteration. Le lendemain fatnedi 17 Aout , on a examine', par le lavage, la craie dans laquelle le diamant n°. 4 , appartenant a M. le Blanc , avoir, ete renfermev il ne s'y eft rien trouve que quelques grains de matiere, qui etant vus au microfcopc, ont ete reconnus pour etre un fable tres-fin qui (e rencontre toujours dans la craie. Apres le lavage, on a mis dans de l'eau forte toute la craie fe'paree par l'eau , Sc elle s'y eft totalement diflbute. On a fair cette eflai , afin de de'montrer que le diamant le volatilife re'ellcment , & que cette evaporation fe fait a la furface , Sc d'une manierc irre'guliere , felon le plus ou le moins de coherence des parties , de meme que cela s'ob- ferve dans un morceau de glace qu'on expofe a l'air libre par un tems bien ferein & tres-froid. On n'a proce'dc a ce lavage que pour prevenir les objections qu'on pourroit faire. D'ailleurs, on avoir propofe la veille de le faire en public, & on ne l'a diftere , que parce qu'il ie faiioit tard , Si que cette precau- a ete regardee comme peu ne'eeffaire. II eft bon d'oblervet que les petites capfules ou coupelles marque'es l'une n°. 1 , ou avoit etc' mis le diamant de M. le Due de Brancas, & l'autre n°. 9 , oil on avoit place le rubis, etoient de meme poids avant d'aller au feu, &c qu'elles ie (ont trouvees egalement de meme poids apres l'operation, ce qui prouve que le diamant ne s'eft pas imbibe dans la pate de la coupelle comme on l'avoit pre'tendu. Le la- vage meme qu'on a fait apres coup de la craie dont M. le Blanc avoit cnveloppe (on diamant , de'montre encore le peu de fondement de cette imbibition. Tellesonteteles experiences de Meflicurs Darcet & Rouelle. La ma- nierc dontces deuxexcellens Chymiftes onr varie'ees experience;, ajeure beaucoup a Thiftoire de cette pierre. 11 fuffit de comparer les pi'oce'des de l'Empercur Si du Grand Due de Tolcane , avec les leurs, pour s'en eonvaincrc. Ces experiences ont ete faites en prcience des temoinj Janvier 1772, Tom: I. 4S8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qui ont figne. Charles, Marggrave de Baden; Caroline, Marggrave de Baden ; N. P. de Hcfle , Charles Henri , Prince hereditaire de Baden. Hauteforr de Mailly, Marquife de Ne'elle ; Lowendal, Comteffe de Brancas; la Comteffe Diane de Polignac; Coffe, Marquiie de Pons; L. de Fontaine Dupin ; le Due de Brancas ; le Due de Chaulnes •, le Due de Nivemois; le Marquis de Mora; le Comrc d'Hautefort; le Due de Villa Hermofa; le Due de Caylus; le Chevalier de Sagramofo; le Chevalier de Lorenzy ■, de Valliere; le Marquis d'Ufle ; l'Abbe de Vogue' ; l'Abbe Niccoli ; Dorigny ; de Fouchy ; de Juflieu ; Perronet ; Poultier de la Salle; Tillet; Macquer ; Lavoifier; Leroy l'ainej Leroy de l'Acade'mie des Siences ; Leroy : l'Abbe Arnaud ; Diderot ; Majault ; Payen ; Suard ; Roux ; de l'Epine :_Naigeon; l'Abbe Gruel, le Veil- lard"; Mitouart; de Machy; la CafTaigne; Brim; Charpentier; Cordier Jouaillier ; Camay Diamantaire ; Chauffrey Jouaillier. Je certifie avoir e'te pre'fent a I 'experience ci-dejfus , excepte a Panalyfe (le la pate ok itoient renfermi mon diamant. Signe le Blanc. Nota. Nous avons deja dit que le lavage de la pate dans laquelle on avoit renferme' le diamant n°, 4, de M. le Blanc, n'avoit e'tc fait que le lendemain matin 17 Aout. Ainfi , MM. P. Darcet & Rouelle, ne pre'tendent point que les lignatures doivent avoir rapport a cette partie de l'expericnce, qui, quoique moins publique, doit cependant me'riter la meme confiance & la meme authenticite , puifqu'elle l'au- roit eue la veille,fi le terns eiic permis de la faire en public. Les deux diamans , figure's fur la planche 1. font tels qu'ils ont e'te defline's, vus au microfcope. Le n°. 1 , appartenant a M. le Due de Brancas, eft eclui des deux qui eft le plus petit. L'autre eft le n°. 3 ; ils font figure's tels qu'on le.s a retires du feu avant qu'ils fe fuflenc entierement volatilifes. Ces deux reftcs de diamant ont c'te' touche's fur la roue par M. Camay , Diamantaire tres-connu de Paris , & a il af- fure que ces deux pierres n'avoient rien perdu au feu de leur durete', dc qu'a cet e'gard ils etoient l'un & l'autre comme auparavant. On invite les Amateurs a lire le fecond Memoire de M. Darcer, dans lequel il parje des expediences multiplie'es qu'il a faites fur un affez grand nombre de diamans, & fur plufieurs pierres pre'eieufes, Sc on verra la diffe'rence qui fe trouve entre les fiennes Sc celles de Vienne & de Florence. M. Macquer a repc;te les expe'riences de M. Darcet, dans la vue de s'aflurer de plus en plus de la proprie'te finguliere que les diamans ont de fe volatilifer. Le fucces le plus decide a re'pondu a fon attente. Voyezceque nous en avons dit pag. 108 dansun article du Mois d'Aout, jinnee 1771/ OBSERVATIONS T.J..2 4.08. ('.-.< Figures sont reduiteJtpour /<■ Formal ta. proportion J.- »8 a 70 yu'eHej ontparu avoir irit Microscope SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 48? OBSERVATIONS Du Docleur Sebastien Albrectif , fur les faujfes rofes dcs Saules. WUEI eft Fhomme de bon fens qui auroit jamais ofe' croire que des jeux & dcs varie'te's de la nature dans les plantes , ou dcs effets produits par dcs iniectes , feroient , pour le vulgaire , d'un pre'fage de bonne ou de mauvaifc fortune , fi les pre'juges 8c la fuperftition n'e'toient audi anciens que le monde? II (croit important de faire le tableau general de nos erreurs ; l'entreprife feroit longue 8c humi- liante pour l'homme , qui fe croit le Rci de la terre. II ne faut qu'un infecte, qu'un accident, pour faire de'raifonner ce Roi orgueilleux •, il veut tout comprendre, tout favoir, tout expli- quer ; & fi l'objet de fon examen furpafTe les bornes e'troites de la fphcre de fon genie, il aime micux recourir au merveillcux , 8c ad- mettte du furnaturel dans les chofes les plus fimples , plutot que d'avouer fon ignorance. L'amour-propre 8c la vanite ont e'te , fans doute , la fource des erreurs. M. Aibrectif fait connoitre un prc'jugc bien iingulier, 8c jufqu'oii peut aller l'extravagance de l'imagination. Parmi rimmenfc quantite' d'etres que la nature produit dans le regne animal 8c ve'ge'tal , quelques-uns s'e'eartent , ou paroiflent s'e'- cartcr, des loix qu'elle leur a preterites; ce qui a fait dite a. Lucrece : Multaqut turn tellus ctiam portenta crcare Conata eft , mird facie , membrifque coarta. Ces fortes de corps font appellcs monftres; 8c de-la, le peuple grof- fier s'eft imagine qu'ils pre'fageoient des evenemens finiitres ; 8c com me jls font rates , il les a place's au rang des prodiges. OJlenta , portenta , monft'a , prodigia vocantur , quia aLquid qftendunt , portendunt , monf- trant & prcedicant. Cic. de Naturd Deorum. Pour remonter a la caufe de ces monftruofite's, il faut confide'rer que la femencc forme les rudimens d'une nouvelle plante , 8c que chaque bourgeon fert a fon de'veloppemcnt ; qu'il eft lui-meme un individu parfait, fi on le fe'pate du ttonc pour lui faire prendre ra- cine ou le greffer. Les autres ont plufieurs cfpeces de bourgeons, les uns {implement a fleurs, comme dans les plantes a chitons, 8c les auttes a fruits fepare's de ceux a. fieurs. La plus grandc partie porce des bourgeons a fleurs 8c a fruits rcunis, & tous ont des boutons \ Janvier 1772, Tome I, QT} +9° OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , feuilles : c'eft en confiJe'rant ces diffJrens boutons, que l'on trouvera la caule de certaines monftruofites •, par exemple, des fiiuffes rofes des failles. Nous appellors faujjes rofes des faules , ces aflemblages de feuilles di(pofe'es circulairement & tres-pres les lines des autres. Leur arrangement, il eft: vrai, reflemble.afTez a celui des pe'tales de la roj'e. En quoi cet accident eft-il done capable d'effrayer 1'bomme ? II devoit, tout an plus, exciter fon admiration, ik l'engager a en rechercher la caufe phyfique. Le terns de la floraifon de chaque plante eft marque' par la Nature; la chaleur de l'arhmofphere l'indique, & les ve'ge'taux le fuiventconf- tamment, lorfqu'aucune caufe particuliere ne s'oppofe aux loix de la ve'ge'tation. Suppofons done que l'arbre que nous cxaminons foic au commencement de la vegetation, e'eft-a-dire , que les bourgeons le de'veloppent pcu-a-peu, que les feuilles fortent , que les jeunes ra-> meaux pouffent pour former des branches nouvelles , toutes ces parties ne font que les prolongemens du premier bourgeon de'vcloppe' ; s'il furvient alors une gele'e , un terns orageux , ou racme ft les rigueurs de 1'hiver ont endommage le bourgeon, il n'eft plus etonnant de voir la feve s'ouvrir ufie nouvelle carriere, s'exrravafer , former des fin- gul.uite's , puifqu'elle nc coule plus dans les canaux que la Nature lui deftinoit, attendu qu'ils ont e'te' ou detruits , ou vivement alteres par des coups, des meurtrifTure<;, Les rayons du foleil raflcmbles entre deux nuages, y ayant confiderablement augmente' en chaleur, futtifent pour produire ces anomalies dans les plantes. Enfin, plus les cauies fe multiplieront, plus les efFets le feront auili. On voit fouvent dans le printems fucce'der l'intempe'rie a la douce chaleur qu'on reflent alots , d'ou il fuit que les ve'ge'taux encore ten- dres , & dont les parties n'ont pas acquis aflez de conhftance , font fortement affeclx's de ce changement inattendu. La feve mile en mouve- ment par la chaleur, fe porte avec force jufqu'aux (ommites des bran- ches ; mais le froid ayant contracts les petits vaifleaux , elle s'e'paiflit , s'obftrue dans les canaux, & les canaux fe racomifTent : de-la, les' bourgeons & les petires feuilles ne peuvent acque'rir la longueur con- venable ; ils reftent rapproche's, & confufe'ment place's dans un meme lieu, formant des cercles contigus ; en un mot, les feuilles de la bale de chaque bourgeon ont poufle , & le refte du bourgeon a e'te de'truir. Comme les bourgeons font range's circulairement , ou prelque circu- laircment autour des tiges, on fent bien que la tige ne s'allongeant pas , les feuilles refteront difpofe'es comme celles des fleurs de rofe. Les infe&es peuvent etre la caufe de ces monflruofite's : chaque plante, chaque arbre a fon infede particulier, 8c certains fervent de nourriture & d'aiyle a plufieurs. Chaque infecle a fa manicre de de'- pofer fes aufs, & jamais ils ne les confient au hafard. On dirok meme SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 1 t[ac tous leurs foins ne tendent qu'a fe rcproduire Sc a fe multiplier. Les uns , avec le lecours de Ieur vrille ou aiguillon, piquent les bou- tons a fruits ou a. feuilles ; d'autres ne s'attachent qu'aux fruits deja forme's, & encore tendres ; ceux-ci s'attachent a l'e'corce dc I'arbre ; ceux-laa fes feuilles, &c. Quelques-uns contraigncnt les feuilles a fe teplier en (pirales (ur clles-memes, foit en rongeant les nervurcs dc la feuilles, ou en y depofant une humeur acre qui les corrode; quelques autres fixent des refcaux dc fil dans les difrerentes parties de la fcuille ; 6c en les reflerrant, la contraignent a fe replier de la manicrc la plus avantageufe, pour que leur ponte foit en surete' , & coramoJcmenc logee : ces inlecfes font la caufe la plus ordinaire des configurations, fouvent monftrueutcs , qu'on trouve (ur les ve'ge'taux. On a lieu de prefumer que les rofes des failles de'pendent de cettc caufe, fur-tout quand on voit unc meurtrifTure ou cavire qui loge un ver ; mais an de'raut de cctte indication, il faut alors recourir a des changemens rapides du chaud au froid furvenus dans l'athmofphjrc ; il re'iulte de ces obfervations que ces rofes doivent ctre rarcs , parce que les changemens dont nous parlons ne font pas fre'quens, ou parce qu'ils font pcu fcnfiblcs, ou enfin parce qu'ils ne fe font pas fentir dans le moment que la plantc eft encore tendre, On ne trouve jamais ces rofes qii'a la fommite' des branches , ou a la partie late'rale du tronc. II eft aife de juger dc la caufe dans l'un Sc 1'autre cas : e'eft une branche qui s'eft rabougrie , Sc dont la partie li- gncufe ne pouvant s'allonger , les bourgeons fe font e'panouis, &: one donne leurs feuilles. Leur difpofition a forme une rofe ; en un mot, on n'en trouve jamais que dans les endroits ou auparavant il y avoir iin bouton. C'eft a tort qu'on nommefleurcct affemblage de feuilles, pui (qu'elles n'en ont aucun caradfere. On n'y diftingue ni calice , ni corolle, ni pe'tales , ni aucunes des parties necelfaiies a la fructification •, parties qu'on trouve ncccflairement dans toutes les fleurs; Sc (1 on ne les voic pas dans les planres cryptogames , on eft sur au moins qu'elles y exiftenr. D'ailleurs, on connoit les fleurs Sc les fruits du faule, Sc ils en different totalemenr, M. Lehman dit avoir vu de telles rofes cotonneufes a leur bale : ce coton indiquoit ou des ceufs, ou un ver qui y e'toient niche's. La coulcur de ces fleurs pre'tendues,eft la meme que celle des feuilles de faule ; fi elles en different, c'eft par une couleur plus ou moins foncee, plus ou moins jaunatre ; Sc cette coulcur meme , prouve que la plante a foufFcrt d'une manicre quelconquc. Ces rofes ont engage certains Botaniftes a regarder I'arbre qui les produiloit comirje une efpiice particuliere. Rai , Botaniftc Anglcis, releve leur crreur, Sc demontre qu'elles ne conftituent point un: cf- pecc, mais une variete locale, & un accident. Le faule tft fort fiiiej J4HVIER 1772/ Tome I. O .1 q * 49i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , a ces e'carts, fes branches font cjuelquefois rccourbe'es en forme de croffe ; Sigilmond Graffius y a trouve des efpeces de grappes, dec. Un Payfan qui , fouvent, a conferve avee plus de foin les pre'juges & les fuperftitions que fon pere lui a laiffes , que fon propre heritage, ne voit jamais fans fre'mir ces efpeces de rofes; eHes lont pour lui un presage certain de malheur; il aura beau travailler fon champ, (a re'- colte fera infructueufe, & rarcment eft-elle bonne, parce qu'il ne'glige Je travail : alors,la prediftion s'accomplit. Combien d'hommes qui fe croient des etres penfants, me'riteroient etre mis au rang du grodier Laboureur : qu'ont de commun ces rofes avec la paix & la guerre ? cependant , on croit dans que'ques cantons d'Allemagne, qu'elles l'an- noncent infailliblement. Laiflons au Peuple fon errr-ur ; il s'y plait; il veut meme etre trompe', & ne foyons pas furpris de fes raifonnemens extravagans ; ils tiennent a fon ignorance & a Ion pen de reflexion'j mais on doit l'etre, que des homines qui fe difent Botaniftes, aient ofe' avancer 8c foutenir que cet aflemblage de feuilles e'toient de veri- tables fleurs de rofes; un ulage effentiel que nous retirons de la Phy- fique, dit M. le Sage , eft de nous garantir de la fupcrftuion, & de nous faire voir la vanke des pre'iages & des prognoftics. HISTOIRE Des Charanfons , avec des moyens pour les ditruire , & empZcher leurs de'gdts dans le bled. I , a Socie'te' Royale d' Agriculture de Limoges propofa en 176S ce fujet au concours. Le prix fut adjuge' au Me'moire de M. Joyeufe l'aine'r & VacceJJit donne a ceux de M. le Fuel, Cure de Jammericourt , dans le Vexin , & de M. Antoine-Jofeph Lottinger, Do&eur en Me'decine, & Penfionnaire de la ville de Sarbourg. Cette Socie'te' a eu la bonte de nous communiquer ces trois Memoires , dont nous allons en former un feul , & prendre ce qui fera important dans chacun ■, il en rc'fultera une inftrudion complette. L'ob/et eft ii inte'rtfTant , que nous n'ou- blierons auciin detail. Il feroit a defirer que les Acade'mies 8c les So- cie'te's d'Agriculture fuiviflent l'exemple de celle de Limoges; nous nc ne'gligerons rien pour re'pondre a leur attente. La peine 8c le travail eoiitent peu , lor(qu'on n'a en vue que le bien public. Defcription du Charanfon. Le genre des charanfons, curculiones eft tres-nombreux3 ce font des infe&es cole'opteres, ou a etuis, dont les antennes en maffe lont cou- T.J..T. +j3. Plancfie 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 493 decs dans le milieu , Sc pofe'cs fur une longue trompe. Nous ne par- lerons dans cc Memoire que du charanfon , connu fous le nom de charanfon brun du bled. Curculio rufoteflactus oblongus , thorace dy- trorum fere longitudine , Lin. Faun. Suec. n°. 462. Curculio granarius. Sift. Nat. fcarabceus fordtde obfcurl fulyus , probofcide longd , deorfum. arcuata. Rai. Inf. p. S8. On le nomme dans quelques Provinces ca- kndre ou calende, cojjbn ou cojfan, gon, chatepeltufe. La longueur du charanfon du bled eft d'une ligne Sc demie, Sc fa largcur eft d'une demi-ligne. Voye\ pi. 1. fig. 1 . Panimal grofli par Je microfcopc. Sa couleur varie fuivant fes diffe'rens ages , Sc nieme fuivant les pays, e'eft-a-dire, que les teintes font plus ou moins fon- ce'es. An moment de fa premiere transformation , il eft de couleut de paille; d'un brun clair quand il abandonne le lieu de fa naiflance Sc d'un brun plus fonce' dans un age plus avance'. Sa tcte A , eft parfeme'e de points peu apparens ; on y obferve deux yeux B ; elle reffemble a une trompe e'gale en groffeur dans route fa longueur, & ronde depuis la racine jufqu'a (on extre'mite' C- cette trompe eft compofe'e de pluficurs anneaux , par le moyen defquels elle s'allonge, le raccourcit, fe porte en fens differens, & fe replie fur clle-meme; deux ferres noircs, ou machoires , font place'es a fon extre- mitJ. L'inlecie introduit cette trompe dans les grains pour en tirer fa (ubftance nourriciere. On diftingue au-deffous &c an milieu de cette trompe une efpece de dard tres-fin tk pointu, dont il fe fert proba- blement pour percer les grains, plutot que de l'extre'mitc' obtufe de fa trompe. Cette obfervation eft de hi. le Fuel. Des deux cotes de cette trompe fortent deux cornes, ou antennes C, fort fines , un peu plus longues qu'elle, fe terminant par une pe- ti:e grofteur applatie, dont la forme refTemble a une croffe ou une houlette. Ces anrennes fuivent la direction de la trompe, Sc fe portent comme elles en differens fens & a la meme hauteur. Le corps parok fe'pare (ur le dos en deux parties, done I'une du cote de la tete eft plus courte, &: l'autre vers lederriere eft plus lonent contre les murs. Si des obftacles s'oppofent a leur fuite, ils fe Liillent tomber & fe pre'eipitent fans apprehender les effets de la chute, a caulc de la durete'de leur enveloppe. lis reftent quelque terns Janvier 1772, Tome I. Rrr 498 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , immobiles , les pattes e'tendues ; & une on deux minutes apres , ils re- commcncent leur m.irche. Ce n'eft pas pour aller chei'cher un abri au haut des murs qu'on les voit fuir , mais pour abandonner des lieux oii ils ne font point tranquilles. Ce petit animal n'oublie aucune rufe pour conferver fes jours; des qu'on le touche , il replie fa trompe, fes pattes; le ramaffant fur lui-meme, il occupe le moins d'elpace pofJIble pour fe fouftraire a. la vue, ou bien il contrefait le mort. Cet amour pour la tranquillite eft peut-etre la raifon pour laquellc ils cherchent fans ceffe l'obfcurite' ; peut-etre aufli , qu'e'tant accou- tume's a titer leur nourriture du fond d'un grain, & y ayant pafTc toute lcur enfance, leurs yeux font trop foibles pour fupportcr la clarte du jour. Prefque tous les infeclres ont le merae penchant pour les te'- nebres. On ne trouve jamais les charanfons fur un monceau de bled , mais toujours a une certaine profondeur; fi on place des charanfons dans un vaifleau tranfparent , on les voit faire des efforts conti- nuels pour en fortir ; mais li on le remplit a moitie' de grains de bled , ils gagnent aufli-tot le centre; fi au contraire , on les p ace dans des vaiffeaux opaques, ils reftent tranquilles & ne bougent point. Ces animaux craignent fingulierement le froid, au!li avons-nous vu que leur ponte ceffoit des que la chaleur n'e'toit pas le matin au moins a huitdegre's; St que fuivant le degre de chaleur, les ceufs reftoient moins de tems a e'clore, le ver a (e changer en ciiryfalidc, & le cha- ranfon a devenir infedeparfait. Ces animaux reftent engourdis pen- dant tout l'hiver & ils (e tiennent tapi;, raffemble's & ians bouger. On les trouve loge'i dans les femes des murs, dans les gcrfures des bois du plancher; en un mot, dans tous les coins oil ils lont dans l'obf- curite, ce qui alfure leurs repos. Si on les contraint de marcher, 'ils le font (i pelamment, qu'a peine peuvent-ils mettre un pied Tun de- vant l'autre; mais fi le froid eft rigoureux , ils reftent engourdis, & le grand froid en fait perir beaucoup, principalement les vieilles fe- melles. Lorfqu'on approche les charanfons du feu , on voit peu-a-peu leurs membres fe degourdir, & l'animal prendre bientot la fuite. Cet infe<5te a befoin pour vivre de refpirer un air libre; (i on en renferme un certain nombre dans des vaiffeaux lutte's , il pe'rir dans peu, foit par la corruption de l'air qui les environne St qui n'eft pas renouvelle, foit par celle des alimens qui moififfent & pourriffent a raifon de la grande humidite' qui tranfpire du corps de ces animaux. Ils periffent par l'infedtion feule qui refulte de la corruption de ces fubftances; non pas parce qu'ils font prives d'alimens, puifque l'hiver ils ne mangent point , mais parce que l'air a perdu fon elafticite'& fon reffort. Les charanfons commencent a paroitre en Provence des le mois d'Avril, cjuand la liqueur renferme'e dans le thermomettre eft au neu- SUR L'HIST. NJTURELLE ET LES ARTS. 499 vieme degre , alors , ils mangcnt avec aviditc & fans relaohe comrac s'ils regrettoient lc tcms perdu. Ccc acliarnement prouve leurs bc- foins, des-lors, Sc pendant Pete, la pkipart ne peut refter huit jours fans nourriture , pluficurs mcme metirent dc faim en beaucoup moins de terns ; &: fi on les lailTc plus d'un mois fans leur donncr a manger , ils pi'rilTcnt tous. On n'obferve pas cette mcme voracite dans les Pro- vinces Septcntrionales dc France , du moins M. le Fuel nc le penfe pas ainfi. On trouvc ordinaircment les charanfons dans les tas de bled. Ce n'eft pas qu'ils faffent de ce grain leur nourriture unique; ils s'acco- inodent egalcmcnt, 8c peut-ctre mcme par prc'fe'rence , de pluficurs autres fubftanccs moins dures, puifqu'ils ont de la peine a mordre aux grains de bled, lors ratine qu'ils n'ont point d'autres alimens a leur porte'e, & leurs efforts nc vont pas fouvent a en tirer la nour- riture dont ils ont befoin; de forte, que fouvent contraints a le quitter, ils fuient quand ils le pcuvent. On ne trouve plus alors que les foibles 3c les languiftans abandonnc's par leurs camarades. 11 eft de'montre que les charanfons mis avec du bled, dit M. Joyeufe y n'y reftcnt pomr' lorfqu'ils ont la liberie de s'e'ehapper. Ne feroit-ce pas plutot parcc qu'on a trouble leur tranquillite, 8c qu'on les a effarouc lie's, fi nous pouvons nous cxprimer ainfi ? Le bled n'eft pas la nourriture naturelle du charanfon , quand il eft infedtes parfait , il ne s'en accommode que quand il ne pcut faire au- trement : ainfi, lorfqu'il femble rcchercher le bled de prcfe'rence a toute autre fubftance , e'eft pour y depofer (es ccufs. Ce grain, par fa fcrmete' , fa petitefTe 3c fa configuration , eft peut-ctre la fubftance la plus convenable pour la confervation des petits , depuis la ponte jufqu'i la mcramorphofc. II offrc un abri afiure' aux jeuncs vers, une nour- riture a leur portec, &: un retranchement contre les intemperics dc l'air, &lcs injures qu'ils recevroient du dehors. Les vers qui doivent mitre de ces ceufs, font de nature a ne pouvoir prefque pas tamper; ils mourroicnr de faim , s'ils n'c'toient pas environncs de leur nourri- ture. La Nature a fagement guide' ces infectes dans le choix des fub- ftances propres a reccvoir leurs pontes , & le bled eft celle qui leur convient le mieux -, fon t;corce dure fert dc toit a leur logement, fa .nee inte'rieure eft tendre & lacilemcnt divife'e par les ferres e'cail- leufes dont la bouche du petit vcr eft munie; ainfi, a mefure qu'il groflit , il agrandit fon logement , & les debris forment fa nourriture. On ne penfe pas que les charanfons aicnt beloin dc boire, mcme pendant le terns qu'ils mangent avec la plus grande avidicc , Sc on ne les voit point rechercher 1'cau. L'luimiditc' fcule,dont Pair eft eh.- leur fuftit, malgrc cela leur tranfpiration eft fi abondante, que du bled 011 telle autre fubftance rcnfcrniec dans un vale avec des cliaran* Janvier 1772, Tome I. II r r 2 5oo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , fons fe moifit, pourric & devient prefque en bouilliev toure la furface interieure du vale eft reconvene de petites mole'cules d'eau. Le manege du charanfon , pour fortir de fa prifou , eft intcrefTant ; il aggrandit avec les ferres de la trompe le trou preique imperceptible par oii la mere l'a dt:pofe, fous la forme d'un ceuf, dans le grain de bled. II le perce horilontalement, & travaille avec une viteffe & une a£H- vire' furprenante ; a chaque coup de dent , il de'tache une portion de farine, la pouffe en-dehors, & effaie aulTi-t6t s'il pourra fortir du grain : 1'ouverture fa trouvant trop petite, il recommence fes travaux, meme avec plus de vigueur ■, on diroit que le terns lui dure de quitter la maifon dans laquelle il a rc$u le jour; enfin, par Un dernier effort, il fort tout-a-fait. Un charanfon , depuis le moment cju'il a e'te pondu , jufqu'a ce qu'il foit en e'tat de fortir du grain, conlomme pour fa fubftance la moitie d'un grain de bled. Ces iniecl:es font tres-attentifs a ne pas faire leur ponte dans des grains d'un volume trop confide'rable , crainte que leurs petits, en s'enfoncant trop dans le cceur du grain, n'aient beau- 'coup de peine a en lortir apres leur me'tamorphole : de-la vient qu'ils choififfent le bled par preference; d'ailleurs, fa fubftance eft plus tendre que celle des legumes, Ion enveloppe moins difficile a percer, & ion volume proportionne' en quelque facjon a la grandeur & a la figure de leur corps. On voit rarement un grain de bled contenir plus d'un charanfon; &c quand il y en a deux , il faut qu'il y ait eu dans le tas plus de charanjbns que de grains de bled : ce n'eft que dans la der- niere extre'mite qu'ils pondent ainfi. Les jeunes vers une fois e'clos , ont attention de s'enfoncer dans le cccur du grain , en rongeant toujours devant eux. Jamais on n'en rrouve pres de l'orifice du trou ou ils ont e'te pondus ; lorfqu'on vienc a les de'couvrir dans leurs loges , on a peine a imaginer comment ils ont pu y pene'trer, parce que les derrieres 8c les avenues de la loge font, toujours exa&ement remplis par les excremens qu'ils laiffent apres eux: ils ne different prefque point en couleur & en condftame de la iubftance meme du grain. Ces excre'mens font de petits corps jaunes cylindriques , long d'un ou deux points & de la groffeur d'un cheveu. Les vers, par cette precaution, font entierement a l'abri des injures de l'air, & ils ne rifque pas d'etre bleffes dans les mouvemens que l'on fait fubir au bled. • Les charanfons reftent dans les tas de bled tout le terns que durent les chaleurs •, mais des que les matine'es fraiches d'automne commencent a fe faire fentir , on voit ces iniectes jeunes & vieux abandonner lc bled, chercher une retraite affure'e dans les gerfures des bois, les crevaffes des murs, fous les tapifTeries, dans les lits, dans les chemine'es , &c. Si dans certains jours un peu chauds de Novembre & de De'cembre E S Tome I. Jaw. 1772 , page 501- A N SON S. :\ ,Tcms que !c Bl rr lortie des grams. Nomirs de jours. trc avee a 4 gr. J4^jour Du 17 J' Du 17 ..:'.b. f I 9 IS 4 DuI7J , lS ' Duij?J,lal ? Du 10 '. Dui4 3 au 17 Du 14 . Du 14 3 Du prcr I. des Du 9 A Du 7 A I. des 11 Ch. Autre avec 16 gr. I Acut---Ii 1 J ) lit ) sir I Septemu. 4 1 1 L f 'J If Ch. Autre avec 30 gr. Cha> Jnillet— 18 JI ' Juillet - -18 Aout — 1 x 3 f "Juillet --14 17 >9 II l4 Juilkt-- -14 encore (busies grains 5c 1 vers. Juillet - .Aout — J 'Aout- --: kScptemb. Oftob.--i7 I II Novcinb.! j I 1^(9 Mai 1 I /Aout — 1 3 f 11 u 16 1- lS 14 18 Scptcmb.l $ If >9 10 II 16 Octobrc-14 (7 IO 9 I-f9 Mai 1 If '3 Total. H Char. 1811 Char '1 AiiLE D' EXPERIENCES Fa i t es su r la Multiplication des Cu a ran s o n s. Tome I. fanv. xyji , page yoi. .Terns que !c Died a relic avee ks Chaianfons NomArt dejou " Date des j fDu 19 au JO Mai i-fS. I four iDu u au n Septcmbrd Du iq au 10 dudit. l Du 9 an ii Septembre. 3 Da jo Mai au z Juin. iJen. Du i an f Juin. 4 Du lo an 14. T Du f au io. 6 Du 6 an 12. 7 Du c su 11. Du 6 an 14. Du 10 au 19. Du 10 au 10. Du 11 au 11. 17 11 *3 24 idem. 26 idem, idem. 2-7 28 19 3° 31 53 flours Du 11 au 18 Juillet. I des deux vieux Cliaianfons mort. Du 14 Ju Ikt au piemier Aout. Du 17 Juillct au j Aout. Du 17 Juillet au 6 Aout. Du 17 Juillet au 7 Aout. Du 7 au 30 Aoiit. Du 23 Juin au 17 Juillet. I. des deux vieux Chaianfons mort. Htm. Du 11 Juin au 17 Juiilet. Du tj Juin an lo Juillet. I. des deux vie in Cliaranfons mort. Du j au 31 Aout. 1. des deux vietix Charanfons moit. JdLm. Du 20 Jiiin au 17 Juillet. Du 14 Juin au 1 1 Juillet, &: du 1 9 Juin au 17 Juillet. Du 14 Juin au 13 Juillet. Du 14 Juin au 14 Juillet. Du premier au 31 Aoiit. 1. des deux vieux Cbaranfonsmort. Du 9 Aoiit au 9 Septembre. Du 7 Aout au 9 Septembre. I. des deux vieux Charar.fonsmort. SUR MIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 50 r on en trcUivc encore fur le bled , ce lera a coup siir de nouveaux lies, &c on les reconnoitraa Icur couleur. II s y pendent ordinaircment , faifis par 1c [Void, avant qu'ils aient eu le terns on la force de gagner un afyle plus chaud. Quand on decouvre (ur le bled cjuantite' de farine repandue de toute part , il faut moins l'attribuer aux vicux populateurs qu'aux ckaranfons nouvellement fords de leur premiere demeure. Au printems, lorlque la lailon commence a s'adoucir, ils quittent leur retraite , fe promenent dans le bailment, courent fur les Iks; & leur morfure, comme le die M. Duhamcl, eft plus incommode que la piquure des puces-, ils ne tardent guere a abandonner ces demeures , pour alkr fe jetter fur les monceaux de grains , afin d'y de'pofcr leurs ocufs. Le plus grand dommagc caufe par ces infeiftes , eft depuis la ponte des ceurs, julqu'a ce que le charanfon lone du grain; & il vient moins de leur voracitc pour fe nourrir , que du degat fait par Panimal pour forrir de la prifon, ce qui eft prouve par la quantite de farine alors repandue (ur le monceau de bled. Telles font en general les oblervations faites par les Auteur.s des trois Me'moires, confirme'es par des expe'riences bicn fuivies Sc bien de'taillees. 11 auroit ete trop long, &c meme faftidieux, de les rapporter. Nous nous fommes contente's d'en faire connoitre le rclultat, Sc nous indiquerons dans la fuite les moyens d'ane'antir ces infe&es deftru&eurs. HISTOIRE De dijfe'rentes efpices d'oifeaux , appelle's Pinguins, par M. Thomas Pennant , Ecuyer, Membre de la Socie'te' Roy ale; traduite de VAnglois. X INGUINS. Les caraderes des oifeaux de ce genre font d'avoir les ailes tres-petites, Sc couvertes par de fimple canons; quatre doigts a chaque pied, dont trois ante'rieurs garnis d'une membrane ; le pof- te'ricur eft de'tache & nud. 1. Le Pinguin Patagon. Grandeur. La longueur de la peau remplie , que nous avons me- furee , etoit de quatre pieds trois pouces ; la mafle du corps paroifloir plus grofle que celle d'un eigne. Le bee long de quatre pouces & demi, mince, droit, execpte' le bout dc la mandibule luperieure , qui eft un peu courbe, noir; chaque Janvier 1772, Tome, I. $01 OBSERVATIONS SUP, LA PHYSIQUE, con's de la bafc eft couvert de petites plumes molles, brunes; les cotes de la niandibule infe'rieure comprimes, d'une coulcur orangee vers la bale, Sc l'extremite noiratre. II n'y a point de narines. La langue longue de deux pouces trois lignes , fingulierement arme'e de fortes pointes tres-aigues , tourne'es en arriere. Lc plumage. Aucun oileau n'en a de femblable, les plumes font couchees les unes fur les autres avec la compacite des ecailles de poiffon , leur texture n'eft pas moins extraordinaire : les tiges font larges Sc tres-minces -, la tete , la gorge &; la partie pofte'rieure du col font d'un brun fonce ; de 'chaque cote' de la tete, au milieu de la partie anterieure du col, s'c'tendent deux lignes d'un jaune brillant ; larges en haut, e'troites par le bas,& ellesfe joignent au milieu de leur lon- gueur; de-la, la meme couleur s'e'tend vers la poitrine en s'affoiblif- fant jufqu'a fe perdre d.ms un beau blanc , qui eft la coulcur de tout le deffous du corps, mais ces deux couleurs font fe'pare'es par une li^ne brune •, tout le dos eft d'une coulcur cendre'e fonce'e , tirant prefque fur le noir, mais le bout de chaque plume eft marque d'une tache d'un bleu de mer ; celles qui font vers la jondtion des ailes font plus e'tendues &: plus pales que les autres. Les ailes fontextremementcourtes a proportion dela grandeur del'oi- feau , ellcs pendent & reffemblent moins a des ailes qu'a des nageoires, dont elles font les foniftions ; elles n'ont que quatorze pouces de lon- gueur ; elles font d'un brun tirant fur le noir du cote exte'rieur, Sc couvertes de plumes, qui ont l'air d'ecailles, on plutot, avec des plumes dont les tiges font fi larges Sc fi plates , qu'on les prendroit pour des e'cailles de poiflbn; celles de la partie fuperieure de l'aile ne font com- pole'es que de tiges, Sc les plus longuesfont garnies de quelques barbes tres-petites. La queue eft compofee de trente plumes brunes , ou plutot de tiges minces, qui reflemblent a des cotes de baleine fendues, dont le cote fupe'rieur eft plat , & l'infe'rieur concave ; les petites barbes ne font point unies enfemble, elles reffemblent a des foies de cochon. Les jambes & les pieds. Leur grandeur depuis les genoux jufqu'a l'extremitc des ongles eft de fix pouces , couverte d'ecailles noires pentagonales ; le plus grand doigt a a peine un pouce de long; Sc les autres font fi extraordinairement courts , qu'ils font bien voir la ne'eeffite' de la force de la queue , qui femblc avoir e'te conftruite pour fervir de fupporr a l'oifeau , lorfqu'il fe tient droit, de la meme maniere que le grimperau, loriqu'il s'accroche aux troncs des atbres; il y a entre les doigts une forte membrane faite en demi-lune, qui s'e'tend meme jufques fur une partie des ongles ; l'ongle' du milieu a environ un pouce de longueur, le tranchant interieur eft; tres-aigu 8c niince 5 le doigt interieur eft petit Sc place fort haut. SUR L'lllST. NATURE LIE ET LES ARTS. 505 Lapeau eft cxtrcmcment rude & epaifle, cc qui joint a la connexion dc; plumes, conferve tres-bien cet animal dans I'e'lemeni 0,1 il a cou- tume de vivrc. l///?o/rf. LeCapirainc Mac-Bride apporta cet oiieau des Iflcs Falkland, a la hauteur du de'troit de Magellan; nous croyons que cette clpece n'a pas encore etc dc'critc, car les Auteurs nous rcprtlentent commc beaucoup plus petits lcs oifeaux dont ils ont traite (ous le meme nom : quelques-uns les comparcnt au canard pour la groflcur ; mats aucim n'a dit qu'ils hi (Tent plus grands que l'oie ; d'ailleurs, lcs couleurs dc cette efpccc (out trop frappantes, pour qu'on en eut pas parlc, (i tile avoir deja etc de'couvcrte. Le Capitaine Mac-Bride a eu la bonte de nous avertir que cette efpecc e'toit fort rare , quoiqu'il en vit une multitude d'une plus pe- ri cc elpccc avec lefquels cet oiieau s'accordoit tres-bien pour la manicre de vivrc. Puilque l'Hiftoire Naturelle de chaque elpece eft la meme, nous rapporterons en general les ufages e'conomiques &c indiqucj par les Auteurs qui en ont traite'. On convienr que ces oifeaux habitent feulemcnt les plages me'ri- dionales, puiique, julqu'a pre'fent, Ton n'a pas de connoiffance qu'il s'en trouvc ailleurs que fur les cotes de cette partie de l'Amc'rique, dcpuis le port Dciire, julqu'au de'troir de Magellan: Frezier dit qu'il s'en trouve (ur la cote occidenrale, a la hauteur de la Conception. II paroit qu'ils font inconnus en Ah'ique , excepte aux environs d'une petite ifle proche du Cap de Bonne-Elpe'rance , laquelle prend (on nom dc cclui de ces oileaux. On en a trouve une prodigieufe quantite' a terre, dans la faifon de leur accouplemcnt ; car, dans un autre rems, ils y vont rarement •, ils crculcnt dcs terriers, comme font les lapins, & ils minent nrcfque entierement les Iflcs qu'ils frJquentent ; de (ortc qu'il eft difhcile de marcher fans romber dans leurs troux , & on en trouve fouvcnt trois 011 quatre qui nichenr enfcmblc dans le meme crou. On dit que leurs ecufs font beaucoup plus petits que ceux d'oie, & qu'ils commenccnt a pondre (ur la fin de Septembre, ou au com- mencement d'Octobre. Quand ils (ont a terre , ils fe tienncnt dans une attitude tout-a-fait droitc , ce qui les a fait comparer par quelques-uns a des pygme'es, & par d'autres a des cnfans avec dcs bavettes blanches. Lorfque cet oiieau eft a terre, il eft extrcmement lourd & pefanr , a cau(e de la fituation de (es jambes placces tout-a-fait en arrierc ; ces oileaux ne (ont point farouches , & on peut les conduire comme un troupeau de brebis-, quand ils (ont preflcs , ils cherchent un abri , ou dans leurs trous, ou dans la mer , qui paroit cue leur element le plus nature!. Janvier 1772, Tome 1. 504 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Ils font d'une acftivite' e'tonnante dans l'eau , & nagent avec beau- coup de vigueur , s'aidant de leurs ailes, qui leur fervent de nageoiref. Lcur nourriture ordinaire eft le poifton; cependant, ils mangent audi del'hcrbe a la maniere des oies. M. Richard Hawkins a obferve , que dans une ifle qu'ils fre'quentent a la hauteur de celle des Patagons, il y a une petite valle'e couverre d'herbes, dans laquelle ils ne creufent jamais de terrier, com me s'ils avoient l'intention de la referver pour leur pat u rage. Leur chair eft fort grafle ,8c a un gout de poi/Ton a-peu-pres commc celle de nos plongcons de mer : comme ces oifeaux ont beaucoup de fang, il faut leur couper la tete aufli-tot qu'ils (ont tue's , afin qu'il piaffe s'e'couler •, il eft meine abfolument ne'eeflaire de les e'eor- chcr ; car, fans ces precautions , leur chair eft a peine mangeable. Quand elle eft iale'e, elle devient une bonne nourriture, ainfi que l'ont fouvent expe'rimente les Navigateurs , & en particulier Richard Hawkins ; jl en conferva de cette maniere feize muids •, cette nourriture dura plus de deux mois, & fut mange'e en guile de bceuf. Ces oifeaux, 8c les veaux matins, paroiiTent avoir e'te donne's en quantite fur ces rivages deferts, comme une reflburce dans l'extre'mite pour les voyageurs re'duits a la derniere ne'ceilite'. Le nom propre de ces oifeaux eft pinguin (propter pinguedinem; Clul. expt. i oi ) a caule de leur grailte , & par corruption penguin ; de forte que quelques-uns imaginant que e'eft un ancicn mot Gallois, qui fignifie tete blanche , con^urent 1'efpe'rance de fuivre comme a la pifte la colonie Bretonne, que Ton dit avoir pafTe en Ame'rique, fous les aulpices de Madoc Guineth , fils de Owen Guineth , l'an 1170; mais comme les deux efpeces d'oifcaux qui fre'quentent cette cote ont la tete noire , il faut renoncer a toute l'elpe'rance que donne cette hypothefe de retrouver la race cambriane dans le Nouveau Monde. Nous avons donne a cette efpece le furnom de patagon , non- feulement parce qu'elle fe trouve fur cette cote, mais a caufe qu'elle furpaffe autant en groffeur les efpeces ordinaires , que les hommes de cette Ifle lurpafTent les autres hommes en grandeur , felon les relations. M. Pennant de'erit enfuite deux autres efpeces de pinguins , dont pluiieurs Auteurs nous ont de'ja parle : la premiere eft Anfer Ma- gellanicus de Clul. Exot. 1 o 1 . Diomedea demerfa , Linn. Syft. Nat. 114.. Black footed penguin, edit. 94, le manchot de M, BrilTon ; il eft de la groflcur d'une oie. Le troiheme eft celui qu'Edw 49 appelle /implement the penguin, le PhcEton demerfus de Linn. Syft. 219. M. Briflon le nomme le Corfou Calaracles , 8c le dit de la grolTeur du canard mufque'. Ceux qui SUR L'HIST. NATURE LLE ET LES ARTS. ^o> qui de/ircront les connoitrc , n'auront qu'a confultcr ces ouvrag.s. M. BriiTon parlc encore d'un autre cfpece de pinguin , qu'il ap- pelle manchot tachete, & qu'il dit fe trouver an Cap de Bonnc-Ef- pcrancc. M. Mauduic en a en unc troifieme efpecc , dirrerant de toutcs les autrcs, en ce qu'ellc portoit fur la tete unc luippe de plumes longues Sc ctroites, done les anterieuxes e'toient grifes,& celles qui formoient le derricre de la huppe, c'toient jauncs. Cct oifeau lui avoic cte donne commc venanr des Indes Orienrales. L'efpece d'oileau dont parle M. Pennant, n'eft point audi rare qu'il l'annoncc ; il y en a eu ptufieurs rapportcs par I'cguigage de M. de Bougainville, dont un eft actucllcmcnt au Cabinet du Roi; un autre, appartcnant a M. l'Abbe' de Crillon •, un troifieme au Prince de Naffau, cv' un quatricme faifant partie de la collection de M. Mauduit. On pourroit ajoutcr aux observations de M. Pennant, que le pied de cet oileau eft tres-gros , & paroit conrorme difFe'remment de celui des autrcs oifeaux; il n'a ere obferve que fur un fujet defleche; mais dans lequel la peau amincie & applique'e fur les os, permcrtoit de diftinguer a travers foil tiftu entrc l'os de fa jambe tk. les phalanges des doigts , des os particuliers , dont l'aflemblagc formoit un veritable tarfTc. Le calcaneum en occupoit (eul la plus grande partie , & pa- roiftoit s'articuler avec deux olTelcts interme'diaires entre lui & la phalange des autres oifeaux. D'ou il refulte un pied qui fe rapproche davantage de la conformation de ceux des quadrupedes , & memo de celui de l'homme. Cette oblervation meriteroit que quelque curieux facrifiat le pied d'un de ces oifeaux, pour qu'on put le ramollir 6c "examiner. II paroit que fi Ton vouloit fuivre le fyfteme de M. BriiTon , il faudroit faire du pinguin patagon & de celui dont nous avons parle, qui avoit une huppe fur la tete , un genre particulier. Quoique ces deux oifeaux fe rapprochent du genre qu'il appelle manchot , par la conformite des a'iles, ils en different par celle du bee. En effet , les manchots ontla mandibule fupcricure crochue, & un peu plus longue que l'inferieure, qui eft coupe'e ii angle droit a Ion extre'mite', tandis que les oifeaux dont nous parlous, ont les deux mandibulcs e'gales, & le bee droit & pointu , fur-tout le pinguin huppe'. Nous obferverons enfin, qu'il neraut pas confondre, &Ics oifeaux dont nous venons de parlcr , &c les manchots de M. Briffon , avec les oifeaux auxquels les voyageurs donnent orJ.inairement le nom de pinguins. Ces derniers ont des plumes conformccs comme celles des autres oifeaux , des ailes courtes , a la verite , mais garnies de vraies plumes ; la jambe affez longue , eft conforme'e comme celle de tons les oifeaux d'eau; au lieu que )c pinguin patagon , celui qui eft huppe, les manchots de M. Briffon, fcmblent plutoc avoir des e'cailles ij .^ Jauvier 1772, Tome I. S s s t,o6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, des plumes •, ils ont des ailes exceffivement courccs, abiolument inu- tiles pour le vol , membraneufes , couvertcs d'efpeces d'e'cailles , la jambe tres-courte , le pied plus fort,& diffe'remment conforme' que celui des autres oifeaux. Les pinguins de la plupart des voyageurs auxquels M. Briffon en a laifle le nom , habitent les mersduNord, & l'on en trouve meme une petite eipece fur les cotes d'Angleterre & de France, une efpece plus groflfe iur le banc de Terre-Neuve, & vers l'Ame'rique Septentrionale , tandis que les manchots & les oifeaux congeneres femblenr appartenir aux mers me'ridionales de l'Amerique , ou a celles qui baignent le Cap de Bonne-Efpe'rance. DISTRIBUTION Des Prix de VEcole Gratuite de Dejfin. JVlESSIEURS les Pre'fidens , Directeurs & Adminiltrateurs de VEcole Roy ale gratuite de Dejfin, e'tablie a Paris par Lettres-Patentes le 20 Oclobre I767 , en faveur de quinze cens Eleves deftines aux Arts me'chaniques , firent le 16 du mois dernier la diftribution des prix a la maniere accoutumee , dans ie Chateau des Tuilleries. M. Bachelier ouvrit la fe'ance par ce difcours adrefTe' a Meflieurs les Eleves. Messieurs, Dans ce jour folemnel , confacre par la bienfaifance d'un Roi,l'a- mour de fes fujets , & dans un lieu qui nous retrace fa prefence au- gufte , vous voyez honorer , encourager , prote'ger vos travaux , 8c couronner vos fucces, par des re'compenfes que vous allez recevoir aux yeux de la Nation. Qu'un triomplie fi eclatant n'enfle point votre amour - propre ! Songez qu'on ne vous l'accorde que pour exciter en vous une noble emulation , qui , vous elevant au-defTus de vous-memes , faffe un jour de vous des hommes utiles a la patrie. Les faveurs dont on vous comble aujourd'hui ne peuvent qu'exciter dans vos coeurs les fentimcns de la plus vive reconnoiflance. Les bons offices de M. le Marquis de Champcenet , Gouverneur de ce Chateau, ne doivent jamais fortir de votre me'moire. Son gout pour les talens vous conferve l'avantage de recevoir dans ce Palais, des prix qui doivent encourager vos e'tudes ; diftindtion d'autant plus flatteufe , qu'elle manifcfte la protection finguliere, dont Sa Majefte veut bien honorer cet etabliflement. SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. ^o7 Le Magitrat (a) dont le zclc & I'arFe&ion vous font fi chers , vient accompagne La force des difTolvans depend de l'homoge'ne'ite qu'ils ont avec les corps a difToudre. Les expediences deja rapporte'es , confirment cette affertion. Toutes les parties de l'efprit-de-vin font analogues a celles de la re'fine , quoique les premieres foient plus fubtiles. Les analyfes de'montrent que les fels font compofe's d'eau , 8c d'une terre fubtile ; & e'eft la raifon pour laquelle l'eau a fur eux une action immediate: mais plus ils font furcompofe's , e'eft-a-dire , plus ils different du fel primitif , plus ils font difhciles a difloudre. Les fels s'uniffent encore a la terre , puifque plufieurs corps folides font dus a des combinaiions faline;. L'huile eft diflbute par l'efprit-dc-vin , parce que ces parties font analogues a celles de l'huile. L'eau fimple, cependant, ne pro- duit pas le meme effet , quoiqu'il s'en trouve une certaine quantite dans l'huile, mais mafquee par le principe inflammable ; de-la vient que la menftrue des huiles & des fels diflout le favon , a caufe de fa composition mixtc, 8c forme'e par l'une 8c par l'autre, &c. 8cc. Le fyfteme fonde fur la multiplicite' des expediences les plus claires, re fera pas adopte par tous les Phyficiens-, ils objeiftcront qu'il y a plulieurs genres de difTolutions , dont il n'eft pas poffible de donner SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. n>i la railon pliy iicjuc , (oit parce qu'on ne connoit pas les parties du dilTolvant & du corps a dilToudrc, (oit parcc que les caufcs mccha- niqucs font quclqucfois aflez efhcaces pour cmpcchcr de diftinguer la cattle phyfiquc ; (oit crtfin, que les principes & les parties contlirutivcs des corps ctant inconnus, on s'en fert nial-a-propos , pour expliqucr les diflolutions Sc les precipitations. Ces objections fuppokroient que la Chymie eft faufle dans toutcs ces ope'rations , puilque cet Art nc s'occupe qit'a decouvrir les melanges Sc les principes des corps : il feroit inutile de les rcftirer. D'autrcs objeiteront l'inutilite' de la thc'orie de l'attradion , parce qu'on ne petit determiner la quantitc' proprc i chaque corps : c'eft reconnoitre la vcrite de notre theorie , avec (cm imperfection. Il (eroit fans doute a defirer que la Chymie determin.lt exaclemcnt la quantitc des parties conftituantes des corps: peut-etre la poflerite plus heurcule, parviendra a de telles de'couvertes. En atten- dant, on peut tirer de cette theorie des confcquenccs utiles pour la pratique , Sc pour ceux qui fe livrent a l'etude de la nature : en effer, connoifTant par la Chymie certaines parties qui compofent les corps, nous voyons l'analogic qu'elles ont cntr'elles-, par-la, nous pouvons expliquer 1'union des parties de chaque corps; mieux entendre la compolition Sc la decompofition de ces memes corps, Sc plufieurs autres phe'nomenes , que l'ignorance attribue a des caules ccculrcs ; enfin , cettc theorie nous conduira comme par la main , a la de'eouvcrte des fecrcts de la nature. Ptiiflent des Chymiftcs , des Phyficiens , pleins de zele, fe livrer entierement a cette e'tude ! La carriere n'a , pour ainfi dire, pas encore etc parcouruc. La couronne attend peut-etre lc pre- mier qui o(era entrer en lice. Les corps analogues entr'eux , ont les memes qualite's , & les memes effets derivent des memes caufes. La fimilitude conftfte dans la con- formite des qualite's ; & la nature conduite par des loix invariablcs , conlcrve toujours l'efpece Sc (es proprietes. Ainfi , quoiquc les cir- con (lances ne permettent pas d'examiner routes les efpeces renferme'es dans tel ou tel genre , des que celles que nous avons exami- ne'es produifent les memes phenomenes, nous pouvons infe'rer que celles que nous n'avons pas examine'es, Sc qui ont le meme genre commun , ont les memes propric:re's. Or , il n'eft: point d'effet (ans cauie : le meme eftet peut avoir la meme caufe, ou etre le re'lultat de plufieurs; mais comme les loix de la nature, Sc par confe'quent les caules efficientes ne changent point, & qu'il n'v en a aucune de fuperfluc, on ne peut pas douter que lc meme effct ne provienne de la meme caufe. De ce que des corps font (cmblables quand ils.onr les memes qua- lite's; qu'ayant les memes qualite's, ils ont la meme eflence materiel!;.- , Fevrier 1772, Tome J. X x x 2. sy- OBSERVATIONS SUR LA PHISIQUE , il s'enfuit que des corps compoles par les memes parties, font fem- blables. II eft tres-probable que la force attractive des corps vient de leurs principes. Nous avons fait voir que l'union des diffolvans Sc des corps a difloudre , eft un eftec de Pattra&ion de ceux-la vers ceux-ci, Sc que la force des diiTolvans, confifte dans leur analogie avec les corps a dilToudre. Nous concluons de-la, que puifque les corps leir.blables out les memes qualites, que les memes efTets de'pendrnt des memes caufes, la force d'attraiftion confifte dans la reftemblance des principes. Nous venons d'expofer la loi gene'rale de Pattradtion & fa nature, qui n'eft autre chofe que cctte fympathie que le Cre'ateur a ecabiie, non-feulement entre les etres inanime's, & parmi les homines, com- munement exprimee par ces mors : le femblable fe re'unit cl fon fem- blabk. C'eft-l.i le principe de l'ordrc merveilleux qui regne dans l'U- nivers. Voyons adtuellemcnt fi les exemples d'attraftion que nous avons cites , font etablis fur ces principes. Quoiqu'il y en ait plufieurs rrcs-difficiles a expliquer, commencons par Pexamen de ceux qui ont quelques rapports avec ceux de la pre- miere efpece. Il n'eft pas e'tonnant que Phuile de vitriol, qui eft un corps fa'in, attire i'eau avec avidite, parce qu'il en a les proprie'tes. Le naphte , foit naturel ou artificiel , renferme une huile tres-de'.'ic'e & inflammable; e'eft la raifon de la facilite avec laquelle il prend feu. Les acides s'uniftent avec les alkalis vers la fin de l'effervefcence, parce qu'ils font falins Sc compofe's de parties analogues. L'eiprit de nitre bien concentre, enflamme les huiles eflentielles , parce que ces huiles contiennent beaucoup de principes inflammables ou phlogil- tiques, Sc que lui-meme en contient beaucoup. Le mercure attire les me'taux , a caitfe du principe mctallique de fa terre. Ainfi, plus ce principe fe trouve dans les metaux , plus ils font attires par lc mercure. Quelque probable que foit ce fentiment , i' n'eft pas adopte' par tous les Phyficiens, parce qu'ils ne connoiffenr ni la nature des corps, ni la qualite' des parties qui les compolent. II feroit ne'eeftaire que tout Phyficien tut Chymifte. Audi, les uns, comme Friend, font confifter l'attradtion dans les diffe'rentes qualire's des pores ; plufieurs ont mieux aime l'attribuer a quelques phenomenes dcl'air,a l'affaif- fement & a la preflion dc cet element. Tels ont e're' Sturme , Fabry , Defcartes , le Pere Mallebranche, M. Bernouilli , &c. Verulam Sc quelques autres au contadt de deux corps difparates ; d'autres a la gravite de la matiere; d'autres enfin, admettent Pattraftion ; mais ils la regardent aufli abftraire que les autres proprie'te's ge'nerales des corps. L'attradtion n'eft pas la meme entre tous les corps; ve'rite conf- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. f$; tatee par I'cxpe'rience, 8c qui pcut fe deduire dc la the'orie que nous e'tabliftbns. La Chymie demontre que les corps n'ont pas tous la mcme analogie, la mcme conformire de parties; done l'attraclion dependant de cette analogie, doit varier comme elle. L'attraCtion doit varier encore, en railon de la foliditc des corps, & de leur iurfacc plus 6u moins polie. L'attraction eft une loi gc'neralc qui affeCte rous les corps ; ceci eft fonde lur une propofition de'montre'e en Chymie. Les Corps ont tous les memes principes primitifs ; tk par-la mcme, une force d'attraction diffe'rente, fuivant les differens melanges de ces principes; enfin, l'union des parties conftitutives des corps, leurs productions, leurs def- trudtions, qui n'auroient pas lieu (ans Interaction , en font une preuve convaincante. Une ieule chofe peut empecher la ge'ncralite' de certe propoficion ; e'eft ciu'il n'eft pas affez demontre s'il exifte dans la nature une force re'pulfive, ou une modification dans les corps, en vertu de laquelle deux corps s'eloignent d'eux-memes l'un de l'autre , inde'pendamment de toute caufe impulfive ; je ne nie pas l'exiftence de cette force; mais il y a plufieurs cas ou Ton pre'tend qu'ellc (e trouve, tandis que e'eft la torce d'attraction qui a change de direction & d'objer. Cependant, comme des expediences en demontrent la re'alite', il me refte (eulemenr a prouver que la force re'pulfive ne limite pas la force attractive. En effet , les exemples alle'gue's en faveur de la force re'pulfive, (uppofenr. uniqucment que les corps fe repoufTent les uns & les autres , s'ils font hors de la portee de l'attradtion. Le mercure , par exemple, exerce fa force re'pulfive fur le verrc qui lc renferme; mais fi on le prtfle fur cc meme verre , il s'y attache. Les huiles & l'alkali du vin repouftent l'eau ; mais une longue agitation les allie avec elle. Les poles de l'ai- mant fe repouftent; mais fi on les rapproche, ils s'attirent l'un l'autre ; ce qui fait voir que les corps memes qui fe repouftent, cxercent on eprouvent la force attractive, lorfqu'ils (ont dans la (phere de l'attrac- tion. La force repulfive n'empeche done pas la generalite' de l'attradtion. Quand j'ai attrihue' 1'attraCtion a la fimilitude des parties dont les corps font compofes, je me fuis renferme dans les bornes de la pro- babilite'. Nous ne connoiftons pas aflez parfaitement la nature, les qua- lites &c les principes des corps, pour afturer que la matiere n'en ren- ferme pas d' autres. Je ne me charge pas non plus de demontrer que L'elafticite, la force d'inertie, la gravite' & les autres modifications gc'nerales , proviennent de ces principes connus. Les corps peuvent renfermer quelqu'autrc proprie'te inconnue qui contribue a leur force attractive. Les principes que nous venons d'etablir , fondes fur 1'ex- perience, favorilent tellement le lyfteme de l'attradtion , qu'on ne peut dilconvenir que notre theorie ne loit tres-probable. FErniER 1772, Tome I. ^54 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Monfieur Hiortzeberg a raifon de dire que ce qu'il aVance n'a d'autre me'rite que la probabilite'. Il femble fe propofer de donner dans ce Me'moire quelques regies generates , pour expliquer les effets de 1'attradf.ion avec laquelle il paroit confondre la proprie'te que les Chymiftes ont nomme affinite. II eft encore bien loin d'avoir e'clairci la queftion ; il auroit fallu e'tablir quelles font les regies de I'attra&ion, quclles font celles de l'affinite', & en quoi elles different les unes des autres. On fait , jnfqu'a prefent , que les corps graves s'attirent en raifon de leur denfite, & que les menftrues s'uniffent aux fubftances qu'elles diflolvent en raifon d'une certaine homoge'ne'ite dans leurs principes. La loi des pre'cipitations qu'il ne de'finit pas clairement , ne prouve pas mieux en faveur de fon opinion. On peut dire fur ces deux queftions : fiat lux. Cependant , les ide'es de M. Hiortzeberg me- ritent d'etre fuivies. SECONDE PART IE Du Difcours de M. AlstHOEMER , prononce devant VAcadimie Roy ale de Stockholm. Quelle eft la raifon phyftque de la produclion de la laine fine des brebis , & par quels rnoyens surs , cette finejje peut fie maintenir dans les pays du Nord. 1 , A ftnefle Sc la longueur des poils, font des variations qui nc s'e'tendent pas a tous les animaux d'une metne efpece. Ceux des brebis , des chevres , des chiens , des chats & des lapins , varient beaucoup -, mais on trouve toujours un tres-grand nombre d'animaux , dont le poil eft gros & court ; & ce nombre furpafle de beaucoup celui des betes a laine fine. J'ai examine quelle pouvoit etre la caufe de ces variations : font- clles dues a la chaleur , au froid , a la fe'cherefte, a l'humidite, a la propriete' du terroir , a la qualite' de l'eau , de la nourriture, &c. ? circonftanccs particulieres de'pendantes du climat. J'en ai vainement cherche' la raifon. Cependant, il me paroit probable qu'on pourroit trouver quelque eclairciflement, fi l'on fait attention a 1'accouplement des animaux. Cette conj'edtute m'a paru aftcz bien fonde'e ; & les autres me paroiflent 1'etre moins. En vain , les Phyficiens les plus habiles fe font-ils occupe's a jetter quelque jour fur la propagation des betes: tout eft encore couvert des te'nebres de l'obfcurite; & M. de Buffon ne re'pand pas plus de lumiere fur cet objet, que Leuwenhoeck. L'Anatomie , aidee des meilleurs microfcopes , y travaille fans fucces | SUR L'HTST. NATURE LIE ET LES ARTS. ;;; la nature nous fait ratcment confidence de la maniere dont cllc opere fes merveilles. Parmi les premiers germes ou ceufs des animaux, ceux des oifeaux e'tant les plus grands, devroient, par cette raifon, nous conduire a quelqties decouvertes •, mais ils contiennent des parties fi menues, fi dcliees, fi enveloppe'es , que l'ceil le plus pe'ne'trant Sc le plus attentif ne fauroit les definir. Les plantes, a plufieurs e'gards, font plus imparfaites que les ani- maux : cependant , nous voyons , non-(eulement a de'couvert leurs par- ties de ge'neration , mais encore elles font fe'conde'es fous nos yeux , Sc portent des fruits qu'clles foumettent a notre examen. Cette maniere d'operer de la nature, donne aux Obfervateurs de fes loix , l'agrc'ablc cfpe'rance de pouvoir, par l'infpe<5tion de la propagation vilible des plantes , de'couvrir quelque chofe de ce qui fe cache chez les animaux. On fait que tout ce qui exifte, foit pat rapport a leur difference, foit a caufe de leurs caracleres, a e're' range en ordre, claffes , genres, & cfpeces. Chaque etre a recu la faculte de ptoduire ce qui lui reflemble; & par cette regie invariable, on n'attend point des pigeons, des oeufs de vautour ; Sc du cirron , des femences de bouleau. An milieu ne'an- moins de cette marche conftante de la nature, on n'appergoit pas une cgale uniformite -, elle fe diverfifie , elle eft riche Sc variee dans fes ouvrages; Sc nous voyons fans ceffe que chaque individu, dans le rcgne animal , comme dans le ve'ge'tal, differe de la caufe productrice, tant en gtandeur, qu'en couleur Sc en forme. Si nous nous arretons a ces variations des plantes de la theme ef- pece, nous trouverons bientot que cette difference ne vient point de 1'inHuence du dimat, de' la qualite'du terroir, du changemement de cul- ture. Si telle en etoit la ve'ritable caufe , elles reviendroient i lYtat ptimitif,en les remettant dans leur premiere fituation, en les cultivant comme auparavant ; mais nous avons des exemples du contraire. Nous voyons que la plante fi connue, le peloria, Sc fi exactement de'erite par M. de Von-Linnt;e, refte invariable dans chaque terroir : on allure auffi que les doubles pions Sc la double narcijfc ne font pas fujets a devenir fimples , quelque foit le fol ou on les con fie. La raifon pour laquelle les rejettons different tant des plantes qui les ont produits, a done d'autres caufes que celles qui viennent d'etre indiquees. Je ne puis les expliquet claitement fans entrer , Mgrs. Sc Mrs*, dans quelque detail iur la qualite naturellc des plantes. Un Membre de cette Academic, & qui lui fait infiniment honneur, M. de Von-Linnec, a trouve dans toutes les plantes deux fortes de parties cflentilles : la moelle , medulla , Sc I'ecorce , cortex. Nous ve- rifions journcllemcnt 1'admirablc decouvcrte de I'origine de la femence par la moelle, & de la noum'cure des plantes par IV'corce. Ainfi, !e piftil tire Ion origine de la moelle , ^c les etamines titcnt la leur de Fep'rier 1772, Tome I. 5 3 dont jamais on ne vie la pareille, fi cc n'eft dans Pe'chantillon qui fut envoye d'Autriche a M. Jean Bauhin , qui la caradfce'rifa du nom dc bouil'on-blanc a feuilles ctroites, verbafcum angufiifolium ramofum jlore aureo crajjipri. Lorfquc !e taupinambour, hclLmthus tuberofus , fe'eonda le grand tourncfol annuel, ou foleil, helianthus annuus , il en provint un tourncfol dont les feuilles inte'rieures font en forme de cceur, marque'es de trois ncrvures , &: les fupe'ricures ovales, helianthus multiflorus. Le treftlc des pre's, trifoliurn pratenfe , uni all treffle ram- pant, trifolium repens , donna Pexiftence au faux trcfflc , trifoliurn hybridurn. Je cefTc de m'arreter plus long-tems a ces obiervations. De quelque vcritc qu'clles foicnt revetues, elles (out fi (urprenantes , qu'on nourroit m'accufer dc conter des fables ridicules. Les plantes des dift'erentes efpeces peuvent non-feulemenr fe fe'eonder les unes Sc les autres , mais elles peuvent encore perperuer leurs qua- lites he'reditaires par plufieurs ge'ne'rations. L'expericnce fuivante en eft la preuve ; prcuve audi ccrtainc qu'ave're'e. La barbe dc bouc , tra- gopogon pratenfe, Sc lc falfifix, tragopogon porrifolium, ayant cm en- icmble, produihrent des re jettons, dont ceux dc chaque efpece etoient (cmblables a ces plantes a deux sexes. M. de Von-Linnee (oupoudra la fleur de l'une de la pouffiere fecondante de I'autre , pollen ; ce qui pro- cura des leniences mures, qui furent femces en 1759 : il en (ortit line planre qui, (uivant les principes que nous avons de'erits, refTembloit aux deux elpeces qui l'avoient fait naitre. Les leniences du faux pied d'alouette, delphinium hybridurn , pouffent tous les ans, Sc donnent des leniences, (ans (aire voir de variations. Le faux forbier , forbus hy- brida, de Gotland, produit le droulicr, crategus aria, Sc le (orbicr fauvage, forbus aucuparia , (e multiplie annuellement dans cette Ifle dc la Baltique , Sc aucun Payfan ne le trompe a cet arbre. Tout ceci nous prouve que non-ieulement des variations exiftent chaque annce, mais qu'clles conlervent audi la qualitc une fois acquile. A l'e'gard du poil des plantes, dies le pcrdent promptement dans Peau & a Pombre : elles deviennent plus velues a melure qu'ellcs font expolc'es au foufle des vents, fur les hauteurs Sc dans les plaines. On pcut oblcrver encore que dans ce point, elles refTemblent aux males qui les firent naitre 5 ce qui eft facile a voir par la verveine a quatre examines, verbena tetranda, le chardon a feuilles decoupecs, dipfacus laciniatus , la fauffc ve'ronique, veronica fpuria , Sec. Les plantes produites par des plantes fans velure, fe conlervent ne'anmoins pendant plulieurs generations audi velues que leurs peres. Quoiqu'il n'entre point dans mon fujet de di'cuter d'une maniere fi etendue fur les plantes, je remarquerai pourtant encore que celles qui (ont produites par les melanges que nous avons oblervcs, con- Fbvrier 1772, Tome I. Y y y 5 $8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fervent les qualire's de lc-urs meres : qu'elles peuvent , comme elles , fer vir de nourriture aux memes infedfes, a qui la nature a affigne la de- meure fur ces plantes. Elles fupportent un degre de changement par la difference du climat, la fituation du territoirc; changemens que ne peuvent fouffrir les efpeces dont elles font e'mane'es. Retournons mainteiant aux animaux. Apres une courte compa- raifon, nous trouverons combien ils reffemblent aux plantes. Les animaux forme's par l'accouplement de deux efpeces diffe'rcntes, reffemblent aux arbres & aux arbuftes, 8c on ne peut les en diftinguer fans peine. L'arbre a fa racine, fon tronc , fa fleur 8c fori fruit; c'eft ce que montrcnt auffi les animaux-plantes, ^oophita. Le bois dans le tronc des arbres, eft compose de pluficurs couches durcs ; le tronc des animaux-plantes eft ablolument femblable. Chaque bouton , chaque jointure d'lin arbre a vie en foi-meme; fa propagation fe fait par eux autant que par le fruit; les animaux-plantes font de ratme : la dif- ference qu'on pourroit trouver dans cette comparaifon, eft que les fleurs de ces demiers donnent des fignes de fenlation , & out un mouvement fpontane' : mais n'obferve-t-on pas ce phenomene dans les fenfitives, minofce , 8c d'autres encore qui s'ouvrent 8c fc refer- raent fuivant leur defir ? II paroit done affez naturel de regarder comme une memefamille, les animaux 8c les fieurs compofees. Cet article meriteroit des reflexions plus etendues que celles que je vais donner. Les animaux ont befoin de nourriture; les plantes l'ont e'galement: les animaux fubfiftenr par un fuc qui circule dans leurs veines d'une maniere merveilleufe; il en eft de meme des plantes; c'eft ce qui a fait dire, avec raifon , des uns & des autres , qu'ils naiffent , croiflent , vieilliffent , dcvier.nent malades 8c meurenr. La propagation eft une de leurs proprietes qui regarde le plus le fujet que je traite : je vais done en patler d'une facon plus e'tendue. Je paffe ce qui concerne leur faculte de pouffer des bourgeons, gern- matio , parce qu'elle n'a lieu que chez les plantes & les animaux compofe's : d'ailleurs, la doctrine des sexes des plantes a e'te' fi bien e'claircie pat les Botaniftes de ce flede, & fur-tout par notre ce'lebre M. \ on-Linnee, qu'il n'y a pas lieu d'en douter, &qu'il ne refte prelque plus rien a de'erire. Les animaux, fuivant ce que nous avons dir , reffemblent done aux planres, par rapport a leur propagation. Leurs sexes font diftingue's en males 8c femelles : les parties de la gene'ration font le meme fervice chez les uns comme chez les autres, quoicju'elles different par la figure, la pofition & le nom. L'e'tamine de la fleur re'pond au penis des ani- maux ; le fligma de la plante , a la vulve des animaux ; le refervoir des femences , pericarpium, chez les plantes, a la matrice des ani- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ?;9 minx : les fcmences re'pondcnt aux ceufs , £>: les jcunes plantes, aux petits dcs animaux. Nous nVtendrons pas plus avant la comparaifon de ccs parties: a peine y jettons-nous un coup d'ceil chez les animaux, tandis que dans les plantes, nous les voyons, goutons, Teutons & per- cevons par tous nos fens. L'accouplement eft la meme diofe chez les animaux, que la fruc- tification chcz les plantes; la groffeffe des femelles repond aux fruits verds des plantes •, la naiflance dcs petits des animaux , a la maturity des fruits iSc aux leniences qui fe repandent. En parlant de la tnaniere dont les plantes fe frucrifienc , nous avons deja remarque qu'clles ne produifent que ce qui leur reffemble. L'experience journalicre nous prouve qu'il en eft de meme des animaux, lorlque les peres & meres font de meme ordre, genre & cfpccc. Les betes carnacieres engendrenc leurs femblables; la poule prcduit des poulcts , 8c l'efcargot ne donne point l'exiftcnce aux vers a foie. Dans tous les terns, on a fait des efforts infinis pour ranger les animaux comme les plantes, en claffes , families, genres 8c efpeces. La description en ac'tctrop pcu exacte , pour diftinguerdansl'ancienne Zoologie quels lout eiitre les genres 8c efpeces que nous connoifion; •iffuellemcnt , ceux qui ont exilte des le commencement, ou ceux qui font furvenus depuis : recherche utile, 8c qui menteroit toute l'attcn- tion poflible. Le fyfteme fi ingenieux & fi vraifemblable que M. de Von-Linne'e a propofe' comme line hypothefe au (ujet des plantes, ne pourroit-il point audi s'appliqucr aux animaux ? Ce famcux Naturalifte imagine que chez les plantes, les families, genres courts, lon^s Sc he'- rille's. On luivit la meme mcthode pour les chiens , les ours, les Fevrier 1772, Torm I. ftl OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, chars, les beftiaux , les moutons, les chevres, lcs chevaux, Ies poules, les oies, les pigeons, &c. Nulle part, on ne trouva rant a fairc pour arranger cctte claffilication rrop e'tendue, que parmi les animaux do- meftiques : je ne parle point de mille forces de pommes, de poires , -de tulioes , d'hyacinthes & aurres plantes , dont on multiplia les •efpcces en un nombre aufli grand que nous comptons de variete's; varieres cependant inte'refTantcs , Sc qui meriteroient la peine d'une recherche un peu plus particuliere fur leur origine. Tous les individus chez les animaux comme chez les plantes qui one line meme conformation , 8c la faculte de produire leurs femblables , ont e'te ranges dans une elpece a part ; on n'en a pas fait de meme des variete's qui ont pu exifter par la difference de climac, de nour- riture& de culture. Jefouhaiterois al'occafion de la generation -hybride , dont j'ai parle , qu'on diftinguatc-xacTrement les deux principales varie'te's qui fe trouvent parmi les plantes & les animaux : i°. cellc qui confe- ferve dans plufieurs generations lemblables a leur origine , pour la grandeur , la couleur , l'odeur , le gout , Phabillement , malgre le changement de climat , de nourriture & de culture ; 20. celle qui differe , & varie d'apres ces cho(es. Un feul homme ne iuffit pas pour cette recherche; on pourroit cependant la commencer , puiiqu'il en re'fulteroit un avantage reel pour la vie commune. Mais je ne dois pas trop m'e'loigner de mon fujet ; ceux qui ont lu les expe'riences de M. de Reaumur, favent que les lapins fe font accouples plufieurs fois avec des poules : ceux qui ont fait attention a la relation de cc meme Naruralifte, ont du voir qu'il exifte en France dans les Pro- vinces de Daaphine' , d'Auvergne & de Provence , une race mele'e , audi remarquable que connuc fous le nom de Jumars , produite par l'ac- couplement d'un taureau avec une aneflTe , ou d'un taureau avec une jument. Ceux qui ont lu ce que M. Shaw rapporte , n'ignorent pas au'il fubfilte un autre melange extraordinaire, provenant de l'union d'un ane avec une vache; elpecequi fe trouve dans la Barbarie , dans lcs environs d'Alger , fous le nom de cumrah , & dont on it fert dans ces Pays avec un grand avantage. II eft a remarquer que cette race n'a qu'une corne au pied comme le pere , &c non pas deux comme la iruie : enfin , ceux qui ont vu les finges tenter a cet egard tout ce qu'il y a eu de convenablc ou non , ne peuvent douter que les animaux les plus femblables , quoique de genres differens , n'aient pu s'accoupler enrre eux. II me paroit done tre-s-vraifemblable que yiverra ichneumon , ourat de Pharaon, a pris fon origine primitive del'Animal azibet comme mere , & du chat comme pere : que le cervus capreolus a peut-etre e'te la mere , & capra cervicapra le pere du premier camioloparde ou giraffe. phaiion aterus la Paille, la mere, & diomedea demerfa le manchot , 1c pere du phaeton demerfus le Gorffou ; la Pintade, numlda meleangris, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 545 le pere, & phaftanus colchicus , le Phaifan de Colchiquc , la mere du phi'.fuinus argus ; exoccctus volitans, lc pere, 6c gafterofteus duclor , la mere de gafterofteus volitans. Je ne park point des infeCt.es & des vers dont les melanges ont fans doute c'tt les memes. Les animaux da meme genre ont pu fe meler enfemble plus facik- ment que les autres. Tour le monde fait que les mulets proviennent de raccouplcment de l'ane avec la Jument : les anciens ont connu cette efpece ; & Mosk nomine pour premier inventeur de cette race, Irana, de la familk d'Efau. C'cft lui qui trouv.i les mulcts au defert , quand il paifToit les anes de Tfibhon ion pere, Je ne veux pas e'tablir tin fy ft erne fur la peau noire 8c les cheveu:: naturellement f riles des Negres ; mais j'ai peine a croire qu'ils aient e're' ainfi. Quelle eft done leur origine ? Je ne me permets point de titet une conlcquence de la juftefTe de cette reflexion. II n'eft pas ab- furdc de rcgarder le finge inaus , coir.me un enfant dafylvanus, du cote' maternel , 8c de cynocephalus, du cote' paternel ; muftela lutreola , la loutre de Finlande , un enfant de loutre ordinaire, & de muftela hurls : muftela gulo, lamarthe , muftela putorius , comme enfans de pere &mere. II en eft peur-etre de meme du grand nombre d'e'eureuils , fc iuri , d'Ame'- rique , de nos e'lans, ccrfs, rennes 8c daims. Le corbeau a couronne , paroit ctrc un fils du corbeau &c de la corneilk : le piver moyen , un rils du grand & du pctir piver; anfer cygno'ides , 1'oie de Mofcovie , un de cygne 8c de l'oie. Le coq debois de Canada, tetrao canadenfis , un enfanr de celui de Suede, urogallus , & du coq dc bruyere, tetnx. J'obmets d'autres cxemples. Les animaux qui ne font que des varie'te's d'une meme efpece , fe melent plus commodemem : nous en trouvons la preuve parmi les chiens dont M. dc Buffon a fait , avee tant de loin , l'atbre ge'nc'aloeique. On doit remarquer que les animaux fauvages font moins iujets a chan- ger que les animaux domeftiques. L'inclination plus forte de ces der- niers a le meler , derive pcut-etre des loins qu'on prend d'eux , & qui font caufe qu'ils n'ont aucun egard aux faifons , lorfqu'ils jouiffentde leut liberte naturelle; au lieu que les animaux fauvages ont leur terns de rut, hors duquel ils ne s'accouplent point. Vous tiouverez , Mgrs. &c Mrs , parce que je viens de rapporter, qu'un melange aufli multiplie' a un afTez bon fondement, & qu'il (e pratique probabkment encore aujourd'hui. Je vais effayer ir.ainienanr , s'il eft polllble.de montrer par des experience certaines , de quelle maniere un fcmblable melange opere fur la race fuivante, & fur-tout, jufqu'a quel point clle nous foutnit les moyens de maintenir l'elpece des moutons a laine fine dans nos pays du Nord. 11 eft un fait, & p.rfonnc ne le conrcfte , que route race tienr & du pere 8c de la mere. II me iemble que je trouve chez ks animaux Fefrier 1772, Tome J. 544 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la meme chofe que chez lcs plantes. Que les enfans refTemblent ,i la mere paries nerfs, Sc les parries inte'rieures •, mais au pere, a l'exte'- rieur, Sc principalement par la furface Sc les poils. Les poulets venus de l'accouplement de la poule& du lapin, dont parleM. de Reaumur, avoit , au rapport de M. de Von-Linne'e , des poils comme le pere, Sc non des plumes comme la mere. Une eipece de coq de bruyere, nominee en Suede, rakel-hanem , provient, fans doute , de la poule debois, tetrao urogallus , Sc du coq de bruyer , tetrao tetrix. II reffemble par l'exterieur , la figure , les plumes & la couleur , plus au pere qu'a la mere : on peut en juger par le Me'moire de M. ,G. A. Rulhentchold , infe're' dans ceux de l'Aca- de'mie Royale des Sciences de Stockholm. Lorfque la femelle du ferin de Canarie, tringilla Canaria, fut accuple'e avec le chardonneret , les petits reffcmbloient au pere en grandeur , en couleur Sc en force, non- iculcment au commencement , mais encore dans la feconde ge'nera- tion. Au contraire, lorfque le chardonneret femelle fut uni au fefin de Canarie male , on reconnut de meme la reffemblance des petits a lent pere , conformement aux experiences faites par feu M. Van- Alk'en. Que la laine fine des moutons Efpngnols , Anglois & Allemands, foit tranfmife fur la race qui provient des brebis Suedoifes a laine groffe , uniquement par le moyen de ces beliers a laine fine; e'eft unc chofe fi conune en Suede par des experiences de plufieurs anne'es , qu'il eft peu de payfans qui n'en foient inftruits. Cette qualite' de be- liers n'eft pas une de'eouverte nouvelle ; e'eft une ve'rite dont on a tire avantage depuis qu'on a appris a eftimer la laine fine Sc blanche. Varron , Columelle , Palladius , Virgile , Sc plufieurs autres qui one ecrit fur les brebis , nous ont tranfmis cette connoiflanee. Un cultivateur en Angleterre, nomine Guillaume Story , avoit en ij<$ 6c 1759 un belier de trois ans, qui peloit 398 livres d'Angle- terre , Sc qui fut vendu a M. Bancks de Harlvorth , 14 guinees. Les agneaux qui naquirenc des brebis couvertes par ce be'lier , reffembloient (1 fort au pere , qu'on payoit au poffeffeur de cet animal , une demi- guine'e pour chaque brebis qu'il lui failoit couvrir. Robert Gil/on , Ecuyer , poffede encore un belier de la meme race , qu'on a paye' de meme en 1766 & l'anne'e fuivante, une guine'e entiere pour chaque accouplement. En tondant un agneau venu du premier de ces beliers, M* Bancks de Dimfdale , frere de M. Bancks de Harlworth , en tira 11 livres Angloifes de laine fine. Ces expediences audi certaines qu'at- tefte'es , prouvent que ce changement chez les animaux , provient du foin qu'on en prend , d'une abondance de nourriture , & qu'il peut ctre tranimis par le pere. Outre l'ufage generalement re^u de fe procurer de bons males lor/qu'on I SUR LHIST. NATURE LIE ET LES ARTS. Jtf Iorfqu'on vcut ameliorer quclque race de be'cail , moycn que les tcins ont demon t re' etrc le plus fur, je puis encore citer un autre exc;n- Jile pour prcuvc de cetce verite. Tous les ans , dans les Annonccs & es Gazettes Angloifcs , on propofe a loucr des e talons vaillans & beaux pour couvrir les jumens. On demandc jufqu'a dix guinees 8c mcrac plus, pour chaque remellequi fera convert;; prix exorbitant, fans doute. Feroit-on cette depenfc, fil'on ne (avoit, par experience, que Pexcellente race qui en provient, rcmbourfera au-dela les avancesquc Ton a faites pour le la procurer ? La race des chevies d'Angora qui donne le poil pre'eieux , dont on fait le camelot de Bruxelle, ne tranfmet pas feulcinent (a toiion blan- che 8c frife'e , lorfque le male 8c la femelle iont de meme efpece •> mais elle la tranlmet auffi , lorfque le bouc eft de la bonne race, quoique la chevre n'en foit pas. Ce fait a etc' prouvc' il y a vingt-fept ans , par l'experience que feu mon pere en a faite , & dont le detail le trouve dans les Me'moires de cette Academic : expedience confirmee journellement par ceux qui poifedent cette race admirable. Quoique les Turcs des environs d'Angora ignorent que la confervation de cette efpece , de'pend ptincipalemcnt des beliers, ils choififlent neanmoins ceux d'entre les chevreaux qui ont le poil le plus fin ; 8c les autres font mis hors d'etat de procre'er, leur femblable. Cette coutum'e an-* cienne , 8c qui le pratique encore dans ces pays , a , fans doute, ete' in- troduite par des gens qui en favoient la neceffke. Sans ces lages pre'- cautions , je fuis pcruiade que cette belle race le feroit de'ja e'teinte. Tout le monde fait que loriqu'une aneffe eft couverte par un eta- Ion , les mulcts qui en proviennenr, reffemblcnt plus auperequ'.ila mere par les oreilles, le crin , la queue , la couleur 8c le port. Au contraire , loriqu'une jument eft couverte par un arte , l'efpece qui en fort , tient du male par les longues oreilles , unc queue de vachc tres- courte, par une couleur louvent grife, & line croix noire (ur le dos. Il feroit cres-poffible que cette race mele'e , partus hybridus , engendrat , fi on trouvoit la vraie manicrede les foigner , &c qui convint a leur natu- rel. On a lieu de prc'fumer que les Anciens ont eu une efpece fem- blable. On peut ainli, par tout ce que je viens de dire, reconnoitre les autres animaux domcltiques par le pere : par exemplc , lorlqu'on a plufieurs fottes de taureaux , les veaux font bientot reconnoitre ce- lui qui les fit naitre , par le port 8c la couleur. Il en eft ainfi des chiens 8c des poulets d'une meme couve'e ; mais, fi l'un des males manque de vigueur 8c de force , alors la reffemblance de la mere Pemporte ordinairemenr. On trouve fouvent dans unc Contree entiere,dcs animaux domel- tiques qui le relfemblent pour la plupart , foit en couleur, foir en quclques auttcs marques exterieures. Jc crois devoir en chcrcher la Fevrier 1772, Tonic 1. Zu 54:tc'- rieure, les organes de l'individu qui ne lont point encore de'veloppes. Je fais cependant une exception a l'opinion que je viens d'avancer, Si le male, pendant l'accouplement , fe trouve moins vaillant & vi- FErRJER 1772, Tome I, Z z z z E 54,3 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , goureux que la fcmelle , quoique capable de dormer la vie ait gentie , il n'efl pas en e'tat de changer le de'vcloppemenr des organes qui de- voient naturellemenr fe conformer a fon impreffion, & recevoir fon empreince. Que chaque Obiervateur examine ce principe, qu'il l'ap- lique aux families qu'il connoit, aux beftiaux, aux planets, a toute a nature, il trouvera rarement le contraire de ce que je dis; mais il verra un grand nombre d'exemples qui donnent a. mes conjectures une probabilite prefque certaine. II s'e'Ieve ici une nouvelle queftion. Comment les parties du foetus fe de'veloppent-elles ? jufqu'a quel point s'e'tend l'influence d'un pere vaillant ? Le commencement fe fait dans un filence ou nos fens ne lauroient ob/erver les ope'rations : cependant , nous voyons dans les plantes que la moe'lle ne peut croitre fans l'ecorce , & l'e'corce fans la moe'lle. II faut qu'il en loit de meme chez les animaux. Le moe'l- leux , e'eft-a-dire, le cerveau, la mobile de 1'cpine du dos , & les nerfs, ne lauroient croitre fans les fibres elles font cependant couvertes d'unc SUR rmST. NATURE LIE ET LES ARTS. 551 neigc e'rcrnelle. M. Brown a remarquc de meme, que les moutons a laine fine ne fe trouvenc pas bien dans la chaleur de la Jamaique. He- fiode , au contraire, pre'tendoit jadis qu'il ne falloit pas que lc vent du nord pe'netrat la toifon des moutons, Cependant , nous voyons dans les Aifles du Confeil Royal dc Commerce , une notice tres- agreablc, qui prouve que les brebis d'Efpagne fe font tres-bien trouve'es dans la Bothnie oricntale Sc occidental, c'eft-a-dire , dans les Pro- vinces les plus fe ptentrionalcs de la Suede. II n'y a rien qui paroifTe au Public d'une plus grande influence pour la finefle de la laine, que la nourriture & les paturages : rien n'a prouve qu'on puifle leur attribuer cette propriete'. Je ne nie pas qu'ils ne contribuent beaucoup a la grandeur, a la force, a l'embonpoint, a la fante , au lait, & a d'autres fcmblables qualites des moutons. C'efl: par-la que les Brebis de Barbarie, de Hongrie, de Flandres, du Texel , Sc de Lincoln-Shire, audi - bicn que les races que poflede M. Bancks en Angleterre, ckdontnous avons parle', font plus grandes que toutes les autres. Le paturage Sc la nourriture caufent le meme effet fur tous les animaux quelconques. Ceil d'aprcs cela , que le Holftein, le Danemarckcv Shane produifent des chevaux tres-grands; tandis que par la raifon contraire , ceux des Indes orientales , & ccux de l'lfle d'Orland, dans la Baltique , ne font prefque pas plus grands que les le'vriers. Une nourriture abondante rend un animal fort-, les plantes aromatiques rendent la chair excellente, Sc le bon paturage rend le lait gras. Mais il s'agit ici d'une toifon fine, qui vaut mieux que tout autre profit qu'on tire des moutons ; Sc aucune experience n'a prouve' qu'elle foit produite par la nature du paturage. Parmi tous nos animaux domeftiques, il n'y en a point qui fe con- tentent d'un paturage fi maigre que les moutons : on fait meme qu'ils fe trouvent mal , Sc deviennent malades dans de gras paturages. lis peuvent y etre engraifles ; mais ils ne s'en trouvent pas bien a la Tongue j e'eft pourquoi Virgile donne ce confeil : Fuge pabula lata. La race la plus fine d'Efpagne, d'Angleterre , audi bien que le camclus pucos, a laine fine, dans le Pe'rou , cherchent, pour la plu- part, leur meilleurc nourriture fur les hauteurs peu fertiles; Sc dans ces pays du Nord , il n'en manque point a nos moutons Mais que la frugalite de nourriture n'ait point opere' de changement dans leur figure , e'eft ce qu'on peut juger , par l'ope'ration die la nature, dans d'autres cas. Les experiences de MM. Van-Hellmont , de Boyle, de Haller, de Bonnet, de MargrafF, Sc de pluficurs autres nouveaux Phyficiens, nous prouvent que des plantes nourries de l'eau la plus pure, fe de'- Fevrier 1772, Tome I. 5 5 J, OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , veloppciu de meme qu'elles le feroient par les Cues de la terre. Elles confervent leur resemblance avec leurs pere & mere ; & femblablcs aux animaux domeftiques , elles deviennent plus grandes par une nour- riturc plus abondante. On trouve fur des arbres greffes, combien pea la nourriture etrangere eft capable de changer leur figure, leur gout, leur odcur &: leur couleur. Un arbre poirier, greffe fur le cormier , forbus aucuparia , porte des poires qui ne reflemblcnt, point aux cormes. Combien d'animaux vivent de la meme forte de nourriture, fans, pour cela, s'en reftembler davantage ! Le renard , le loup 8c le chien, devroient vivre de chair crue; mais on leur donne maintenant les memes alimens qu'aux homines , & ils n'en rcftent pas moins dans les clafles oil la nature les a places. L'ivraie ne fe transforme point en e'pis , malgre qu'il croit dans la meme terre ; & Fhypothefe de la tranimutation de l'avoine en bled eft de'ja fi renverfe'e , qu'on ne pourroit plus la re'tablir. Tavernier, & un Auteur anonyme , pre'tendent que la finefle de la laine vient de ce que les moutons paillcnt en plein air. II eft vrai que les troupeaux d'Efpagne n'enrrenc fous des toits qu'une fois Tan , pour e:re tondus. Aa contraire , les plus fins d'Angleterre, Sc ceux d'Eyderftadt , font fouvent renfermes dans des maifons oil on les noun ic pendant l'hiver. Les chambres e'chauiFees ne changent point le poil des dogues d'Angleterre, qui font tenus dans la chaleur la plus de'licate, Dans la plupart des pays, tant chauds que froids, les moutons paiffent toujours en plein air , de meme qu'en Efpagne : la laine , par ce moyen , ne fubit pourtant aucun changement. Dilons- lc •, d'une race a laine grofte, il ne viendra jamais qu'une laine groiTe : e'eft en vain qu'on s'efforce de la rendre fine, quelquc chole qu'on puiffe employer. On croit encore que la finefle de la laine depend de l'exercice con- tinuel que prennent les moutons en marchant d'un endroit a un autre. Cette opinion eft contraire a l'expe'rience. Plufieurs troupeaux en E(- varrne, font ambulans comme ceux a laine la plus fine; mais une grandc partie d'eux , rclativement a la beaute de la touon , font moins bons que les autres, & ils ne peuvent etre ame'liore's que par des be'- liers a laine fine : audi , chaque poflefleur de troupeaux en Efpagne qui veut fe pourvoir d'une race choifie, eft-il attentif a fe procurer des males de la bonne efpece. Aupres de Bayonne , & fur les Pyre'- ne'es , il y a encore de grands troupeaux a laine aflez grofle, qu'on lhene paitre, tantot plus haut,tantot plus bas, fur ces montagnes, fans que leur toifon s'ame'liore. Les rennes de Labon fe tranf- noitent en e'te' fiir les plus hautes montagnes , tout comme les troupeaux d'Efpagne, & leur poil n'en devient pas plus fin. Les moucons d'Angleterre, & ceux d'Eyderftad , qui approchem le plus de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 55; de I.i fincfle des brebis d'Elpagnc, paifTent durant Pete entier dans lc meme endroit, Sc ne pcrdenc pas, pour cela , leur toifon fine. II eft vxai que les troupcaux en Efpagne qui reftent toujours dans le meme lieu, one tous une laine plus groffe que les troupeaux ambulans ; mais j'ai vu auffi moi-meme qu'on les foigne avec moins d'attcntion •, qu'on ne fe foucie pas de leur procurer des be'Iiers a laine plus fine pour les couvrir, & qu'on les nourrit louvent plus pour la cuifine , que pour la fabrique. Au refte , on a l'occafion de s'af- furer que le tranfporr d'un climat plus chaud a un aurre plus froid, ne change point la laine, fi on regarde nos chevres d'Angora, &c les chats a poils longs Sc fins, que nion pere fit venir de la Natolie dans ce Royaume. Je crois qu'il en eft de meme dans le changement d'un pays froid a un autre plus chaud. Le fcl eft d'une grande utilite pour les moutons : il excite l'appctit; il e'ehauffe le corps dans les terns froids Sc pluvieux, fur-tout en au- tomne Sc au printems ; il eft le prefervatif le plus sur qu'on con- noifle contre les vers dans le foie , Sc l'hydropifie qui en derive. Le fel eft done par confe'quent prefqu'indifpenfablement neceflaire dans une bonne bergerie ; mais fi ion effet s'c'tend plus loin, s'il contribuc a la fineffe de la laine, e'eft un fait qui demande a etre eclairci par des expe'riences. Par ce que je viens de dire , vous vous appercevez fans doute , Mgrs. & Mrs. , combien on a peu de raifon d'attribuer la finefte de la laine des brebis au climat ou a la chaleur , a la difference du paturagc ou de la nourriture, au plein air dans lcquel elles paiflent, au grand exercice des longues marches, & enfin au (el qu'elles mangent. Quoi- que je ne doute point que ces chofes n'opcrent plus ou moins (ur le bon ctat des moutons , je ne puis cependant leur attribuer la forma- tion organique des poils dont M. Haller, M. Wiltfooft, Sc plufieurs autres , ont donne' de bons e'clairciffemens. II ne m'eft pas pofllble non plus de trouver pourquoi la laine feroit plutot changee par ces cir- conftances, que les parties organiques &: plus nobles des autres ani- maux, chez lefqucls les caules dont il s'agit, ne produifent aucun changement. Certains animaux n'exiftent naturellement qu'a poils longs, torarae le loup, le renard , le caftor , le grand Sc le petit Chameau, le ca- pricorne, les moutons, fur-tout ceux de Sardaigne , &: ceux qui paiflent fur les Pyrenees, prcs r!e Bayonne; lc bcruf d'Ame'rique, bos bifon, le chien-lou?, lc matin, le dogue, les chiens de Sybe- rie , d'lflande , d'Efpagne & de Malthe. Les poils ne font pas non plus de la meme qualite' fur le corps de ranimal. Dans differens endroits, ils font ine"gaux en finefle & en longueur; e'eft ce qui fait qu'on diftingue , cntre cheveux dc ccce, Fei-rier. 1772, Toms J. A a a a ^4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , barbe, les petits poils de la furface du corps, &: les crins. Les ant- maux , pour la plupart, tels que le caftor, l'ours, &c. ont des poils plus courts Sc plus fins entre les longs, de meme que les oifeaux ont des plumes de diffe'rentes grandeurs. Si nouscomparons la laine avec les onglcs , les cornes de pieds, les plumes, les e'cailles, les e'perons, qui, a certains egards , ont tant de ref- Icmblance avec la laine , nous trouvcronsqueitout cela eft difpofe' d'apies les ordres , genres Sc efpeces d'animaux qui font fur la terre, excepte chez les monftres. Par cette marche conftante dc la nature , on ne voit point de griffes aux homines, d'ongles aux chats , de cornes aux pieds des animaux-carnaciers, de plumes aux brebis, de laine aux oi- leaux , ni de bois de cerf au bceuf. Quand on conduiroir ces diffe'rentes fortes d'animaux dans tous les climats, Sc qu'on donneroit a une efpece la meme nouriture qu'.i Pautre , jamais il n'en refulteroit rien de femblable. De ces rc'rlexions fi e'tendues; on me permettra, peut-etre , de tirer cette confe'quence : que la fineffe de la laine des moutons depend princi- pakment de la race qui la produit ; que le plus certain ,Ji ce n'eft Punique moyen de I'obtenir & de la conferver , eft I'ac couple ment des brebis avec de Ions & vaillans be'liers. Parmila meme'efpece d'animaux, il y en a quelques-uns qui ont 1c poil long , & d'autres qui l'ont court : quelques-uns qui ont une laine groffe, & d'autres qui l'ont fine. II fcroit utile autant que cr.rieux , de (avoir d'ou la premiere varie'te' de moutons a laine fine , tire fon origine. La pcau velue d'Efaii , des Pygme'es , de Yedfon , & dc quel- ques autres Nations , montre que cette qualite' ne peut etre prove- nue de lacre'ation. Si la race des chevre d'Angora , ou celle des brebis d'Efpagne , pouvoit etre regardee comme la plus ancienne , ou que quel- que autre lorte d'animaux a longs poils nous aient ete connus , qui eufTcnt pu s'accoupler facilemement avec ceux a poils courts , l'e'nigirie leroit bientot expliquee : mais je ne trouve aucune trace d'un pareil melange. Je ne veux pas nier cependant, qu'il ne puiffe exifter de ces animaux a poils longs & fins , qui , par ce melange , ont pu donner Pet re a une femblable race parmi les brebis & les chevres ; mais ces animaux font encore inconnus aux Naturaliftes , & a moi : je vais dene cher- cher a rendre probable un autre moyen par lequel cette belle race a pu naturelkmenr prendre naiffance. Les poils font plante's fur la pcau du foetus, du moins chez les beltiaux, les chevres & les moutons avant qu'ils voient le jour. Aucune expe- rience n'a montre que les poils foient venus en plus grande quantite e'epuis la naiffance de ces animaux par la nourriture , par le climat, quoiqu'ils aient pu changer pour la molleffe, la longueur & la couleur. SUR ZHIST. NATURELLE ET LES ARTS. f{f Peut-ctrc , la quantitc de poils , eft-elle !a caulc de leur longueur & de leur fineffe , de meme que les arbres & les plantes avec lekpicls ils- ont bcaucoup de refTemblance , deviennent plus minces & phis bongs , lorlqu'ils le trouvent tres-pres les uns des autrcs On voic que toures les brebis a lainc fine , ont le poil plus fer're que eelui moucons ordinaires , & que celui des chevres d' Angora devient plus gros d'anne'e en amice, parce que la furface de leur corps augmente, &: que le nombre des poils reliant roujours le meme , chacun d'eux trouve plus de place pour devenir fort & epais. En fuppofant qu'un gros belier fe foit accouplc'avec une petite bre- bis ; que la race qui en eft provenue ait ete moins grandc que le ptre, (oit a caufe de la nature de la mere, (oit a cauie de la rrfaigreur des paturages , on pent comprendre par-la , comment le nombre de poils qu'avoit le mile, fe foient trouve's plus ferre's (ur l'enfant, d'oii on a pu obtenir une race a poils plus preflcs , & par confe'quent, audi plus long & plus fine. Les varic'tcs font des productions du terns , 8c la grandeur vient d'une nourrirure convenablc & abondance. Lorlque les annimaux d'une meme elpece, egare's par les betes carnacieres , ou par les homines, auronr rrouve des paturages de qualites differences , il en aura relulte une di- minution dans leur grandeur, une augmentation dans leur petiteflc. Qu'une troupe d'une efpece forte ait trouve un paturage maigre, e'.lc fera devenue plus petite: qu'une autre troupe , au contraire , de petite taille , ait rencontre un paturage plus gras , elle fera devenue plus grande. Ces animaux s'e'tant joints enfuite, loit parquelque accident, ioit dans les lieux ou ils feront venus boire, foit enfin par d'autres circonftances , (e feront mcle's enfemble , les plus grands ont pu ai!c;- „ ment s'accoupler avec les plus petits, & donner naifiance a une race nouvelle & a laine plus fine. Ma conjecture femble ctre confimje par les moutons a laine fine d'Angleterre , qui y font les plus petits ; par les moutons fins d'Elpagne , qui tous font audi beaucoup moins gros que ccux d'Afrique & de Sardaigne. M. de Halle rapporte une expe- rience aftez remarquable , concernant la race provenue de grands be- liers de Flandres, & des pcrites btebis de France, race qui ne furpafta pas les meres en grandeur •, mais qui porta le double autant de lainc , & d'une plus grande fineffe , quoique fur le meme piturage. Mais je ne dois pas m'arreter trop long-tcms a de fimples conjectu- res ; il peur-etre indifferent d'oii la race fine tire fa premiere originc. 11 eft bon qu'elle le trouve fur la terre : il eft encore mieux qu'elle lubiilte en Europe ; Sc ce qui eft heurcux pour nous, e'eft qu'elle ioit venue en Suede. Dans la latisfaction que j'en reffens , il ne me rcfte plus qu'a iivii- Fbprier 1772 , Tome I. A a a a i S$6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE -t quer la maniere dont on en doit prendre loin par rapport a fon bon e'tat , fa multiplication & fa perfection. Ariftote enfeignoit de fon terns , que les moutons pourvus d'une laine abondante, fupportent mieux le froid que les autres : nous pou- vons ve'rifier par l'expe'rience de plufiieurs annees , qu'ils ne fouffrent point du froid du nord : je n'en puis dormer de preuves plus agre'a- bles , qu'en obfervant d'apres des ipe'cifications exactes, que les trou- peaux a laine fine en Suede, montoient en 1764, a 88955 moutons de la meilleure qualite' , fans compter 2 5 3 84 , un peu moins bons , pro- yenus de melange. Ce ne feroit point m'e'loigner de mon fujet que d'entrer dans un de'tail circonftancie' fur la maniere dont la race de brebis a laine fine devroit etre foigne'e dans ce pays-ci •> mais je craindrois d'abufer de la patience de mon celebre Auditoire , que je n'ai peut-etre de'ja que trop fatigue'e. II faut done remettreaune autre occafion, ceque le terns ne permet pas de de'velopper entiercment. Je ne puis cepen- dant interrompre tout-a-coup mon difcours , (ans avoir ajoute' quel- ques obfervations courtes & de'tache'es , pour e'daircir quelques points capitaux fur 1'important fujet que je traite. Quelque laine fine qu'ait une brebis qui engendre , cllc ne pour- roit pourtant communiquer cette qualite aux agneaux qu'elle produit , a moins que le belier qui la couvre , foit plus foible qu'elle ; mais alors, il arrive que toute la race eft degene're'e. Un bon 8c vaillant male , au contraire , inrlue, comme je l'ai deja remarque, de la maniere la plus efficace fur route l'efpece. Cette influence meme a e'te' fi fenfible , Ci notoire aux economes attentifs de tous les terns , qu'ils ont regarde le choix du be'lier , comme le point principal de l'art du Berger. Je ne trouve prelque point d'Amateur de bergerie depuis Virgile a notre Boye de Suede , qui n'ait attache' le plus grand prix aux be'liers qui couvrent. Les anciens Efpagnols donnoient un talent, e'eft-a-dire , environ 1000 rixdales pour un excellent belier a couvrir ; & aujour- d'hui en Efpagne meme , quoique la race a laine fine y foit la plus abondante , on paie encore un de ces animaux 100 ducat, chofe dontj'ai e'te' temoin oculaire. Si on favoit par expe'rience quele climat & la nourriture puiflent ope'rerle meme cfret pour la finefle de la lai- ne, qu'auroit-on befoin de depenfer un argent fi confide'rable pour fe la procurer? Celui qui peut avoir un bon be'lier dans le voifinage , e'pargne la peine & le rifque auxquels on s'expofe ordinairement , lorfqu'on les fait venir de loin. S'il peut encore fe pourvoir d'une brebris de la meil- leure qualite', il n'en eft que plus affure qu'elle ne gate point la race. Cependant , je confeille d'avoir toujours plus e'gard au pere qu'a la SUR VHIST. NATURE LLE ET LES ARTS. 557 mere. Ni l'un ni 1'autrc ne doic etre accouple qu'au troifieme automne : le be'lier ne doit pas couvrir plus de quinze brebis , mais plutot un nombre moins fort , afin qu'il ne foit point fatigue'. Dans le terns dc l'accouplement , il faut aufll qu'il foit mieux nourri qu'auparavant , & enfin , ne laiffcr couvrir que jufqu'au fixieme automne : la brebis ne portera que fept ans ; car la race eft aftoiblie par de vieilles meres qui font des agneaux. Onne doit conferver , pour l'accouplement ,aucunagneau, foit male, foit femelle, s'ils ne font tres-fains, bien difpos , blancs , fans taches, & ayant de la laine fine ; s'ils n'ont pas toutes ces qualite's , il vaut mieux les tuer ou les vendre. II faut fur-tout ob/crver que le be'lier doit toujours furpafler en force la brebis qu'il couvre. Des bergers quiontde l'expe'rience , tant ceux d'Efpagne, que ceux des autres pays, affurent que fi on trair le lair des brebis , la laine devient plus groffe •, du moins eft-il certain que les agneaux en fouf- frent ; c'eft pourquoi cela doit erre abfolument defendu. II vaut mieux laiffer un agneau tetter deux brebis , en cas qu'un agneau meure par hafard. Il y a meme quelques Proprie'taires en Efpagne qui font fi foi- gneux de fe procurer une race forte , que pour cet effet , ils tuent quelques agneaux , afin que les autres , fur-tout les jeunes beliers , puiffent tetter deux brebis. II faut, autant qu'il eft poffible, changer de paturage, parce que les moutons ne mangent pas tout ce qui fe pre'fente, & qu'ils choi- fiftent ce qui convient mieux a leur nature. Il fuit de-la, qu'il faut , en hiver, leur donner plus que ce qu'ils mangent; & ce qu'ils laiftent, le donner a d'autres beftiaux. Les moutons, audi bien que d'autres animaux , pre'ferenr certaines herbes > & s'ils paflent a d'autres fortes , ils ne le font pas impunement. Plus l'eau qu'ils boivent eft pure , mieux on previent les maladies auxquelles ils font fujets par une eau impure ou ftagnante , qui leur donne les vers du foie, comme plufieurs efpeces defang-fues qu'ils avalent ordinairement avec la rofee. C'eft pourquoi des e'conomes prudens ne menent jamais paitre leurs troupeaux , lorfque la terre eft couverte de rofee ; mais ils attendent jufqu'i ce que l'herbe foit fe'che'e , & que les fang-fues foient rentre'es dans la terre. Nous avons actuellement des remedes contre les maladies de mou- tons les plus mortclles ; le foufre, pour l'ufage interne, 8c le tabac pour l'externe, font ce qu'il y a dc mieux pour guerir la galle. Le iel eft bon contre leur hydropifie, & l'huile de Ruflie , contre la petite ve'role ik autres maladies. Leurs petites incommodite's pcuvent etre evite'es, pour la plupart , lorfqu'on les foigne attend vemenr , meme la gallc & l'hydropifle. La toifon ferre'e Si, touffue, rend les moutons fenfibles au chaud & Fevrier 1772, Toms I. j 5 S _ OBSERVATIONS SVR LA PHYSIQUE , a l'air enfcrme; c'eft pourquoi , ils doivent etre laiffes en plein air , autant qu'il eft pofllble, & il faut les gatder des ecables crop bouche'es. On fie doir point leitr e'pargner le fel par les raifons que j'ai de'ja npporte'es : il leur eft inutile, fur-tout les foirs d'automne & de printems, lorfque les piturages font mouillc's, & que Pair eft humide, ce qui les tourmente plus que le froid fee. C'eftun ancien ulage de laver les moutons; mais, a mon avis, cer ufage eft plus a blamcr qu'i louei". Ces animaux ont une averfion naturelle pour l'eau , & elle fe manifefte tant qu'ils font libres de fuivre leur inclination. Ils ne cherchent point les rivieres & les e'tangs : on ne les voit point s'y plonger, n'y s'eflayer a nager. Outre cela , le gras qui fc trouve dans la laine , facilite plus qu'il n'empeche fa puri- fication , lorfquon la veut travailler. Par cemoyen , on doit done e'viter la peine aufli bien quele rifque , en nelavant point lesbrebis. D'aillcurs, de quelque maniere qu'on le faffe , il eft indifpenfable de laver la laine de nouveau lorfqu'elle eft a la fabrique. On ne doit tondre les brebis qu'une fois par an , en partie pour avoir une laine plus longue, en partie pour ne point de'garnir leur peau en biver. 11 faut couper un peu leur longue queue dans notre Pays comme en Efpagne , afin que les moutons ne ialiffent point par elle la laine de leurs cuiffes. 11 eft utile d'obferver l'ordre en tout ; & par confe'quent auffi , en e'tabliffant une bonne bergerie, on doit avoir des beliers a couvrir des brebis, & des agneaux dans une certaine poportion de chaque age , afin de ne manquer jamais ni de be'liers , ni de brebis ne'eeffaires pour la propagation. On doit les cboifir de bonne qualite'. On a dii obferver dans ce qui pre'eede, que le propric'taire doit donner les plus grands loins au choix des beliers & des brebis del- tines a 1'accouplement ; enforte qu'aucun de ces animaux ne foit ma- lade, ou foible, ou languiflant , ou a laine grofliere , parce qu'ils tranfmettroient ces de'fauts aux agneaux qui en proviendroient, & e'eft ainfi que fe de'pravent les meilleures bergeries. Ces pre'eautions font ordinairement hors de la porte'e du pauvre payfan, qui ne peut nourrir pendant Phiver plus de vingt a trente brebis. II doit done conferver beaucoup d'agneaux males, afin de choifir dans le terns , les plus vaillans, & ceux dont la laine (era la plus fine. Il feroit a fouhaiter que les habitans d'une meme paroiffe miffent en commun tous leurs troupeaux , afin de n'en faire qu'un feul. IJ en re'fulreroit moins de de'penfes pour chaque particulier , & le trou- peau feroit mieux foigne; alors, il feroit confie a un ou a plufieurs Mergers habiles, & le bien refultant pour chaque particulier, tourneroic entierement a l'avantage public. II eft inutile de s'appefantir pour de'montrer les avantages refukans SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. jy9 de Paugmeiuation des moutons a laine fine. Les profits immenfes que 1'Angletarre retire de fcs troupeaux, fuffifent pour nous encourager, & pour prouver combien il nous feroit facile de conferver dans nos climats , ces races prccicufcs , qui en dc'viendroient la richefTe la mieux afhirce. Je termine ce difcours, Mgrs. & Mrs., par cette reflexion. Une partie de la laine fine produite dansnotre pays, a e'te employee' a divers ufages decontamination. Cette laine Suedoife a prefque egalc en bcaute & en bonte celle d'Elpagne , qui a e'te vendue les anne'es dernieres dans nos Manufactures. L'une Sc l'autre ont etc examinees & eftime'es par nos Iufpcdteurs. il a refulte de lears proccs - verbaux , que la laine Suedoife a fourni prefque la moitie de la laine fine, employc'e dans nos Manufactures; d'ou il faut conclure que par les precautions deja prifes, & par cclles qu'il convienr de prendre encore, la Suede fera dans peu de terns en e'tat de fe paffer des laines d'Efpagne & d'Angle- terre, & raeme de faire un.objet d'exportation de la laine fine du pays. Un fi grand bien* un fi pre'eieux avantage pour la Nation, depend de la protection que le Gouvernement accordera aux bergeries, & des foins que les particuliers en prendront. II ne faut que deux chofes pour faire fleurir lc Commerce d'un Etat : Liberie & Protection. SUITE DU MEMOIRE De M. Macquer, de F Academic Roy ale des Sciences, fur la diffolubiliti des Sels neutres dans FEfprit - de - Vin , contenant des obfervations particulilres fur plujleurs de ces Sels. Nitre de Mars. J 'a I fait difloudre peu -a- peu de la limaille de fer, non rouillee , dans de l'acide nitreux tres-pur; il m'a etc impoffible de faturer cet acide au point dc ne plus rougir le papier bleu ; la difTolution s'efl epuifJe confide'rablcment ; j'y ai ajoute de l'eau & de la nouvelle limaille; le tout s'eft mis en une efpece de pate; & malgrc' ccla, la difTolution e'toit encore fort acidc; elle e'toit dc couleur rouffe , rou- geatre ; je l'ai fait e'vaporer a ficcite; il s'eft exhale' pendant cette eva- poration beaucoup de vapeurs acides d'une odeur tres-pe'netrante. Le refidu fee e'toit de couleur brune -, je l'ai traite avec de Pcfprit-de-vin -, ce diflolvant a pris defTus , a l'aide d'une chaleur moderee , une cou- leur rouge de briqucs afTez fonce'; mais l'ayant porte' jufqu'a 1'ebul- Fevrier 1772, Tome I. <,6o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , lition , il a perdu prefque toute la couleur, en de'pofant un fe'diment confide'rable. Cet efprit-de-vin , filtre & evapore jufqu'a ficcite', n'a laifle que quaere grains de matiere acide , d'un jaune de faffran rres- fonce' ; ce fel martial a eu beaucoup de peine a fe defle'eher entiere- ment , & etoit fi de'liquefcent, qu'il s'eft humedte', e'tant merae encore chaud. La flamme de cet efprit-de-vin e'toit d'abord comme a l'ordi- naire ; mais quand il y en a eu environ un tiers de brule', elle eft de- venqe rouge & pe'tillante , & a dure de la forte jufqu'a la fin : il eft refte dans la capfulc un enduit rouge-brun affez confiderable, & un. peu de liqueur fort acerbe & fort acide. II faut remarquer fur cette expedience , que l'efprit-de-vin difToudroit vrSifemblablement une beaucoup plus grande quantite de ce nitre martial , fans le fecours d'aucune humidite, fi Ton pouvoit le defle'eher entierement, fans 16- parer prefque tout l'acide nitreux d'avec le fer ; mais cet acide tienr, li peu a ce me'tal , que je crois que cela n'eft pas poflible. Sel marin martial. J'ai fait diffoudre peu-a-peu de la limaille de fer bien nette dans de bon acide marin; la diflblution s'eft tres-bien faite , fans que le fer fe changeat en (afran de Mars, &c fans s'epaiflir. II eft a remarquer an fujer de cette diflblution , que les vapeurs qui s'en e'levent , ont une odeur de'fagre'able , pe'ne'trante , & fort diffe'rente de celle de l'acide marin pur : elles font audi fort inflammables , & font une explolion violente quand on les allume dans un vaifleau clos. J'ai fourni une grande quantite de limaille a cette diflblution , meme apres qu'il n'y avoir plus d'effervefcence 5 mais, malgre' tout cela, elle rougifloit tou- jours un peu le papier bleu : je l'ai fait e'vaporer , il s'eft forme deflus une pellicule faline luifante, & un peu chatoyante. L'ayant laifle re- froidir , quand elle a e'te' a ce point, elle s'eft toute congelee en cryf- taux fondus, dont je n'ai pu diftinguer la figure, meme a la loupe. Ayam continue l'e'vaporation au bain de fable jufqu'a ficcite , la def- ficcation a eu beaucoup de peine a fe faire ; il a fallu une journee entiere pour cela : fur la fin , ce fel avoir une odeur tout-a-fait fem- blable a celle du vitriol de Mars , lorfqu'on le defleche. Ce meme fel marin martial avoir une couleur de rouille aflez claire & affez vive, lorfqu'il n'etoit que me'diocrement chauffe; mais cette couleur deve- noit beaucoup plus rouge & plus brune, lorfqu'il Petoit davantage. L'efprit-de-vin a pris par l'ebullition fur ce fel , une couleur de rouille un peu trouble & un peu changeante, par l'oppofition 011 l'interpo- fition de la lumiere. Ayant foumis cette diflblution a l'e'vaporation, il a fallu beaucoup de terns pour defle'eher entierement le refidu ; il pefoit un demi-gtos , ou 36 grains; il etoit d'une couleur jaune- brunc ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. fffi brunc; j'humedtois a l'air , mais lcntcmcnt •, il lui a fallu fcpt ou huit jours pour fe rcfoudre tocalcment en liqueur. La damme de cct efprit- de-vin c'toit afTez blanche &i aflez brillante -, a mefure que la defla- gration avaneoir , elle devenoit plus lumineufe & plus blanche; elle e'toit accompagnee , fur la fin, de beaucoup de petites e'tincciles blau- ches & brillantes corarae des e'coiles d'artifice. II eft refte', apres cette combuftion, un re'fidu jaunc-brun afTez confide'rable , d'une faveur niartiale ftyprique. L'efprit-de-vin diflout done ?f- de fon poids de j'el mar in martial. Vitriol de Cuivre. Le vitriol de cuivre defTcche' parfaitement, eft devenu prefque blanc j l'efpric-de-vin que j'ai fait bouillir defTus, n'a pris aucune couleur ; le meme elprit-de-vin n'a laifle aucun rclidu par fon entiere evapo- ration : il a brule comme de l'efprit-de-vin pur, Sc n'a pareillemc-nc laifle' aucun re'fidu apres fa deflagration; ce qui prouve que Pefpric-de- vin nc dillout point le vitriol de cuivre. Nitre a bafe de cuivre. J'ai fait diflbudre du cuivre rouge tres-pur dans de l'acide nitretix, audi tres-pur ; la diflolution s'eft faite d'elle-meme tres-rapidement, Apres qu'elle a e'te entierement fature'e de cuivre, elle avoir line cou- leur de cuivre tirant fur le verd celadon : elle e'toit trouble'c par une chaux de cuivre de meme couleur; mais infiniment plus pale que la liqueur , & prefquc blanche. J'ai fait evaporer cette diffolution au bain de fable; il s'eft forme defTus une pellicule de cryftaux confus ; l'ayant alors laifle refroidir , elle s'eft coagule'e toute entiere en une mafle de petits cryftaux fi contus, qu'il m'a etc impoifiblc d'en dif- cerner la figure, meme a l'aide d'une bonne loupe; ces cryftaux fe font enfuite humedtes &C re'fous totalcnent en liqueur en fort peu de tems, J'ai remis cette liqueur en evaporation; la pellicule s'eft refor- me'e de nouveau; &: par le refroidifTeraent, toute la mafle s'eft encore coagule'e; ayant entreptis de la defTc'cher enfuite entierement, elle s'eft liquefiee a la premiere impreflion de la chaleur; mais comme elle reftoit toujours dans cet etat , j'ai augmenre le feu; alors, quoiqu'a la relerve de la pellicule de la furface, ce fel demeurat toujours liquide , il a commence a en fortir beaucoup de vapeurs d'acide nitrcux , tris- pene'trantes ; ces vapeurs m'ont fait connoitre que cette liquidite' que j'attribuai a de l'eau furabondante de ce meme fel , Sc que ce ne feroit qu'en lui enlcvant fon acide par Taction du feu , en le de'compol.inr , en un mot, totalement , que je pourroj; l'a.nener fur le feu a Pct.it de foliditc ftche ; l'ayant done retire dc defTus, le feu, il s'eft figc luc Fi.rs.iER 1112 , Tome I. B b b b $6z OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le champ en une matiere tres-dure, & fort avide de l'humidite dc Fair. J'ai pulverife promptement ce fel -, & apres l'avoir mis encore chaud dans un matras, j'ai verfe par-deflus, la quantite ordinaire d'el- prit-de-vin. Je l'ai laifle agir a froid pendant deux jours : dans cet efpace de terns, il a pris une couleur bleue de faphir affez foncee, Sc il eft refte' au fond du matras, une efpece de chaux de cuivre d'un verd-bleu pale. Par l'e'bullition , cette couleur n'a point pris plus d'in- renfite'-, j'ai done nitre la liqueur, elle a pane' tres-claire eV du plus beau de laphir; il eft refte' fur le filtre beaucoup de chaux de cuivre de couleur de verd-de-gris fort pale. Cette diflolution , apres fon entiere e'vaporation , a laifle' 48 grains de nitre a bafe de cuivre. La flamme de cet efprit-de-vin etoit d'abord comme a l'ordinaire ; mais elle eft bjentot devenue beaucoup plus blanche, plus lumineufe &d'un verd tres-beau. Cette flamme etoit accompagne'e d'une quantite' affez confide'rable de fume'e fuligineufe noirciflante. II s'eft forme autour de la liqueur enflammee, un bourlet de matiere verte, qui s'eft noirci en partie par la chaleur, & qui a pris un caractere charbonneux, audi s'eft elle allume'e; elle bruloit en rougiffant comme un charbon ; il eft refte', apres la flamme ceflee d'elle-meme , une quantite' aflez con- fide'rable de fel bleu en liqueur. L'efprit-de-vin a diflbut, comme on voit , dans cette expedience -^\ de fon poids de nitre a bafe de cuivre. Sel mar in a bafe de Cuivre. J'ai pris, pour eompofer ce fel marin a bafe de cuivre, du fil de cuivre rouge tres-pur; je l'ai mis dans l'acide marin aflez diftille par 1'acide vitriolique pur a la maniere de Glauber ; la furface de cuivre s'eft ternie promptement, mais fans qu'il parut aucun figne de dif- folution ; il a fallu le fecours du bain de fable pour, faire agir l'acide lur ce metal ; alors , les lignes ordinaires aux diflolutions des me'taux par les acides ont paru; mais je fus e'tonne de voir que la liqueur, .1 mefure que la diflolution fe faifoit, au lieu de prendre une couleur verte , comme je m'y attendois, prenoit, au contraire, une couleur de cafe, qui devenoit de plus en plus brune & fonce'e. Lorfque la diflolution a e'te' a-peu-pres au point de faturation , elle etoit un peu e'paifle ; elle rougifloit encore fenfiblement le papier bleu, quoique d'ailleurs l'acide ne parut plus du tout agir fur le cuivre qui reftoit. J'ai verfe cette diflolution dans une capfule pour l'evaporer ; & ayant rince le matras avec de l'eau , j'ai vu aufli, avec furprife, que le peu de diflolution brune qui reftoit dans le matras, eft devenu d'un tres- beau verd tirant fur le bleu aufli-tot qu'elle a e'te' e'tendue dans l'eau, & cette couleur s'eft communique'e au refte de la diflolution dans la- quelle j'avois mele cette -rincure. Par l'e'vaporation, elle s'eft re'duitc SUB. L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 56; prefque toute en cryftaux de couleur verte 8c figure's en aiguilles. I.e peu de liqueur qui baignoit ces cryftaux, e'toit rcdcvcnue fauvc brun par l'evaporation •, enfin , lorfque tout a e'te' e'vapore jufqu'a flccite', lc verd des cryftaux a difparu , & tout e'toit abfolumcnt brun: j'ai mis cc fel tout chaud dans mon cfprit-de-vin ; ce diflblvant a pns prefqu'aufll-tot un verd tres-fonce', & a diflout bcaucoup de ce fel, fans le fecours d'autre chaleur que celle de ['air , qui , a la ve'rite , e'toit tres-grandece jour-la, & de 18 a 29 dcgre's (c'e'toit le 16 Aoiit); l'cfprit-de-vin charge de ce fel , a fourni , apres fort peu d'evaporation , beaucoup de cryftaux du plus beau verd -, ils etoient aiguille's 8c comme foyeux -, par la dedication, ils ont perdu tout leut verd, 8c font dc- venus abfolumcnt bruns. lis pefoient 48 grains, apres avoir ete bien defle'che's. La fiamme de l'cfprit-de-vin charge de ce fel, e'toit du plus beau verd ; on y appercevoit cependant des efpeces de fulgurations blanches 8c rouges; il eft refte apres la combuftion beaucoup de fel, dont une partie etoit verte & l'autre brune. Les changemens de couleur qui arrivent a ce fel, fuivant la quantite' d'eau plus ou moins grande , a laquelle il eft uni , ont quclque chofe de fingulier 8c de remarquable ; lorfqu'il eft fee ou qu'il tie contient que tres-peu d'eau, il eft d'un jaune fauve fonce brun; a mefure qu'on y ajoutc de l'eau , il devient fuccefllvement verd d'olives , beau verd de prc's plein & fonce, verd bleuatre; 8c enfin, lorfqu'il eft e'tendu dans beaucoup d'eau, il eft entierement bleu, mais clair; il repaffe enfuite fucceflivement par routes ces memes couleurs , jufqu'a redevenir tout brun , a mefure qu'on fait e'vaporer l'eau qui le dent diflout. Ces phe'nomenes m'ont fait foupconner que ce fel de couleurs fi diffcrentes, lorfqu'il eft plus ou moins fee , pourroit etre la matiere d'une forre d'encre de fympathie. J'en ai fait 1'efTai ; ayant trace' des caraifteres fur du papier blanc, avec fa difTolution etendue dans beaucoup d'eau, laquelle eft, comme je lai dit, d'un bleu-pale; ces caradteres , apres qu'ils fe furent fe'ehe's fimplement a I'air, etoient invifibles, a caufe du peu d'intenfite' de la couleur ; mais les ayant chauffes, j'ai vu aulli-tot paroitre re'eriture d'un jaune vif tres-beau. Cette couleur, qui n'eft qu'une teinte affoiblie du fauve brun qu'a le fel en malle , lorlqu'il eft parfaitement defle'che , m'a rappelle que M. Baume, trcs-habile Chy- mifte de cette Ville, avoit public des iyj? > dans les coins de Chymie que nous failons cnlemble, une encre de fympathie, dont les effets font tons femblables a ceux dont je parle actuellement ; 8c comme la bafe de l'cnctede M. Baume eft de cuivre, de memeque dans celle-ci, quoique le proccde qu'il a donnc pour la faire foit different , jc ne douce nul- lement que ces deux encres fympathiques ne foient effentiellement de meme elpece, & je reconnois avec plaiflr que M. Baume' foit le premier qui ait obferve cette forte d'encre 5 8c qui en ait parle'. Cfl Fevrier 1772, Tome I, B b b b i ^4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Chymifte convenoit , en annoncant cette encre, qu'elle n'avoit pas Ja proprie'te' de redevenir invisible par la fimple exposition a l'air , audi parfaitement que Pencre fympathique de Cobalt, & s'eft ton- Jours propofe de lui donner cette qualite; mais des recherches d'une plus grande importance l'en ont empeche' jufqu'a pre'fent : celle done je viens de parler avoit auffi le mime de'faut; mais apres les obfer- vations que j'avois faites fur les changemens de couleur du fel de cuivre, & fur la caufe procliaine de ces changemens, il m'etoit facile de donner a cette encre, la proprie'te defire'e ; on a vu que la difference des couleurs du fel mar in cuivreux de'pend uniquement de la quantite d'eau, plus ou moins grande, a laquelle elle eft unie; fi done, lorlqu'il paroit en jaune par la defllcation parfaite fur le papier , il ne dif- paroit point enfuite entierement par l'expofition a l'air , cela ne petit venir que de ce qu'il n'attire pas aflez promptement 8c affez efficace- ment l'humidite' de l'air; & en effet , ce fel, quoique deliquefcent, n'eft pas, a beaucoup pres, du nombre de ceux qui pofledent cette qualire au plus haut point. Il ne s'agifToit done , pour donner a l'encre en queftion, la proprie'te de difparoitre entierement, que de la rendre plus avide de l'humidite' de l'air , que ne 1'eft naturellement le fel marin cuivreux-, & e'eft a quoi je fuis parvenu facilement, en melant dans la diflblution un autre fel exempt de toute couleur, qui ne petit le decompofer, 8c qui eft infiniment plus deliquefcent; il y en a afliire- ment plufieurs qui peuventetre employe's pour cela avec fucces; j'avois fous la main le fel marin a bafe de craie , qui m'avoit fervi dans mes experiences pre'eedentes; j'en ai mele' dans la diffolution de iel marin Cuivreux a-peu-pres autant qu'elle pouvoit contenir de ce dernier fel ; j'y ai ajoute un peu d'exces d'acide marin , & de l'eau , eniorte que le tout avoit une couleur d'aigue-marine aflez belle; 8c ayant fait l'e'preuve de cette encre, j'ai trouve qu'elle difparoiflbit preiqu'aufli- t6t que celle de Cobalt: je rappelle au refte ici, que l'acide marin qui m'a fervi pour ma diflblution de cuivre , avoit e'te diftille par l'acide ■vitriolique libre, parce qu'il n'eft pas impoflible qu'un peu de ce der- nier acide , mele avec le premier, ne contribue aux effets dont j'ai parle ; j'avertis audi ceux qui voudroient ve'rifier cette encre, que e'eft le fel marin a bafe de craie , auquel j'ai donne la pre'fe'rence lur les autres fels marins a bafe calcaire, parce qu'il m'a paru, par des expe- riences faites ante'rieurement fur les combinaifons de l'acide marin avec diffe'rentes terres calcaires, que les fels qui en refultoient, n'e'- toient pas tous egalement deliquefcens , 2c que celui-ci l'e'toit beau- coup plus que la plupatt des autres. Je n'attache aucune pre'tention a cette efpece d'encrede fympathie, non-feulement parce que je n'en fuis pas le premier Obfervateur, mais encore , parce que ce n'eft li qu'un de ces petits faits curieux qui fe SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. jtff pre'fentent comnie d'eux-memes aux Chymiftcs dans Ieurs rechcrches, & auxquels on ne doit donner qu'un moment ("attention , quand on n'a pas intention d'en de'velopper la thc'orie; je ne me (nis pcut-erre que ttop arrete a celui-ci , c'cft pourquoi je me hate de revenir a mon objet principal. Les expe'riences dont j'ai rendu compte dans ce Me'moire, quoique de'ja nombreufes , ne le font cependant point encore afTez , a beaucoup pres , pour en tirer des confe'quences , & une thcorie ge'ne'rale; elles font entrevoir, a la ve'rite, que les fels neutres font d'autaut plus dif. iolubles dans l'cfprit-de-vin , que leur acide eft moins fortemcnt uni a leur bafe , & qu'a cet egard , ils iuivent par rapport a l'cfprit-de-vin , a-peu-pres la memc regie que par rapport i l'eau ; mais la laturation plus on moins parfaire de l'acide des lels n'eft certainement point l'uni- que caufe de leur different degre de diflolubilite dans l'efprit-de-vin ; car il y en a qui fe difTolvent en plus grande quantite' dans ce menf- true que dans l'eau meme. Le principe phlogiftique ou inflammable , in- flae probablement beaucoup dans les effets de ces diflolubilice's : mais , je le re'pete , nous n'avons point encore aflez de faits connus fur ces- objets , pour en de'velopper la theorie ge'ne'rale. Je m'abftjcns done , pour le prelent, detoute {peculation a cet c'gard , & je me borne a. quelques reflexions particulieres fur les experiences dont j'ai rendu compte. En raflemblant, fous un meme point de vue , tous les fels vitrioliques que j'ai examines, il fe trouve qu'il n'y en a aucun que l'efprit-dc-vin ait diflout , ou du moins dont il ait diftbut une quantite fenfible •, &: le fel de Glauber , eft le (eul qui ait apporte quelque changement a la flammc. Si cette indiflolubilite fe ioutient dans les autres fels vitrioli- ques qui me reftent a examiner , clle fera une nouvelle preuve de la iupe'riorite dc'ja reconnuc de l'acide vitriolique fur les autres acides, .: raifon de la plus grande {implicite, & de la grande force avec laquelle il eft capable d'adherer a routes les lubfta'ces fufceptibles d'liriion avec les acides •, audi , ai-je deja fait oblerver ailleurs que dans la clalTe des fels vitrioliques , nous n'en connoiflons encore aucun qui ne foit crvftal- lilablc , ou dont la qualite deliquekente annonce une connexion foible de l'acide avec fa bafe. Comme aucun de mes fels vitrioliques ne s'eft trouve' fenfiblement difloluble dans l'elorit-de-vin , il n'eft point c'tonnant qu'ils n'aient occalionne aucun changement a la rlamme de cet efprit ; mais on pourroit etre luipris que je n'aie obferve' aucune couleur verte a la rlamme de celui que j'avois fait bouillir fur le vitriol de cuivre ; ran- dis que M. Bourdelin dit, dans Ion Me'moire fur le fel fe'datif, imprime dans les Me'moires de l'Academie des Sciences de Tarit , pour I'anne'e I75S » qu'ayunt fait bruler de l'efprit-dc-vin fur du virriol de cuivre, il a obferve un: belle couleur verte dans fa flammc. Il eft tres-certairi Fevrier 1772, To/m I. 5S6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cependant , que la contradiction qui fc crouve entrc nos deux expc'- riences n'eft qu'apparcnte , 8i qu'elles font exadrement vraies l'une & Pautre. M. Bourdelin avoit pour but dans le Memoirc que je viens dc citer , non d'examiner 1c degre dc difference diffolubilite' des fels dans Pefprit-de-vin ; mais de reconnoitre s'il s'en trouveroit quelqu'au- tre qui cut la propriece' de communiquer une couleut verte a fa Ham - me. II n'e'toit pas ne'ceffaire que ce favant Chymifte prit,comme inoi , la precaution de priver ces fels de leur eau de cryftallifation , avant de les foumettrc a Paction de Pe(prit-de-vin. Aufli, ne dit-il point qu'il eiit defTe'che' le vitriol de cuivre, fur -1'equel il a fait fon expe'rience , & Pon ne doit point douter que ce ne foit Peau de cryftalliiation de ce fel , qui Pait rendu rriifeible a Pefprit-de-vin , en quantite' fuffifante pour vcrdir la flamme , d'autant plus qu'il eft prouve' par plufieurs des expe'- rienccs dont j'ai rendu compte , qu'il ne faut qu'une quantite' de fel infiniment petite, pour changer confide'rablement la flam me decette liqueur. Ces differences de'montrent bien au refte , combien il e'toic neceffaire que je priffe la precaution de priver mes fels de toutehumi- dite' furabondante , pour en reconnoitre au jufte le degre de diffolu- bilite. Si, apres cela, nous jettons aufli un coup d'ceil ge'ne'ral fur les fels nitreux, nous verrons que tous ceux que j'ai foumis a l'expe'ricnce , fc font comportes , a Pegard de l'efprit-de-vin , differemment des fels vitrioliques. On fait que Pacide nitreux tient , en ge'ne'ral , infiniment moins que Pacide vitriolique , aux differentes fubftances qui peuvent former des fels neutres avec ces acides. II eft de'montre aufli en Chy- mie , que ce meme acide renferme le principe inflammable dans fa composition -, or , il eft tres-probable que ce font-la les deux caufes principales de la diffolubilite des fels dans Peiprit-de-vin : aufli re'iulte- t-il des experiences que j'ai rapportees , que prefque tous les fels nitreux font diffolubles dans Pelprit-de-vin , & la plupart meme en quantite' affez confide'rable ; il y a cependant deux de ces fels qui font une forte d'exception. Le premier , e'eft le nitre de mercure , dont l'ef- prit-de-vin n'a pas diffbut une quantite fenfible; & le fecond , e'eft le nitre de mars, dont le menftrue n'a diffbut que fort peu,quoique ce dernier fel foit tres-de'liquefcent , &: paroiffe , par cette qualitc', de- voir etre un des plus diffolubles. Je n'ajoute rien , pour le present, a ce que j'ai dit aux articles de ces fels ; ce font des effsts dont la caufe demande a etre recherche'e par un plus grand nombre d'experiences -, mais il eft bon de remarquer encore au iujet de nos fels nitreux, qu'il n'y en a aucun qui n'ait alte're' fenfiblement la flamme de Pelprit-de- vin •, ce qui indique toujours une grande difpofition de leur part a s'unir a ce diffolvant en tout ou en partie. An rcfte, ccttc alte'ration de la flamme de l'cfprit par les fels neu-^ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. j*7 tres , eft encore un objet important , qui me'rite b.aucoup d'attenrion , &c dont il paroit qu'on pourra retirer autant de connoiffances nouvelles fur la nature des fels, que de leur dilTolubilite ratine 3 mais il demande aulli une nombreufe fuite d'expe'riences &: d'obfervations. Nous entre- voyons feulement par cellcs qui font de'ja faites , que la flamrne de l'efprit-de-vin peut recevoir trois fortes d'altetations de la part des fels. La premiere, e'eftde devenir plusjaune, plus rouge, plus grandc & plus de'cre'pitante : la feconde, e'eft d'etre plus blanche, plus lu- mineufe , & en meme terns plus 011 moins fuligineufe; Sc la rroificme, e'eft de contra&er quelque couleur particuliere , comme par cxemple , la couleur verte , que lui donnent les fels a bafe de cuivre. Je foup- conne que la premiere de ces qualite's a lieu, lorfque e'eft le fel neutre entier , 8c comme fel neutre qui agit dans cette flamme ; que la feconde eft produite particulierement par l'acide des fels , lequel donne a l'ef- prit-de-vin, uncaraitere plus ou moins approchant de celui de Tether, & que la troifieme eft due principalement a la bafe ou a la fubftancc qui eft unie a l'acide des fels ; mais tout ceci a befoin d'une plus grandc fuite d'expe'riences pour etre eclairci. Enfin , les phenomenes des fels neutres contenant l'acide marin , re'unis fous un meme point de vue, nous font connoitre que ces fels fe font diflous , pour la plupart , dans l'efprit-de-vin , & ont caufe de 1'alte'ration a fa flamme : ainfi , a cet egard, l'acide marin paroit diffe'rer de l'acide vitriolique , a-peu-pres comme l'acide nitreux ; mais il eft bien remarquable que le compofe' de mercure Sc d'acides marin, foit infiniment plus diffoluble dans l'efprit-de-vin , que les fels re'fultant de l'union de cette fubftance metallique avec les autres acides;& que ce meme compofe , ( le fublime corrofif ) fe diftolve en plus grandc quantite dans l'efprit-de-vin , que dans Teau meme. L'acide decefel , ni meme la maniere particuliere dont il eft uni au mercure , ne pa- roiflent pas les feules caufes de cette finguliere dilTolubilite ; je foup- ^onne que la nature de cette fubftancc metallique , tres-abondante en principes inflammables , & qui eft peut-etre meme celle de routes qui en contient le plus , influe pour beaucoup dans les phe'nomenes de fa diflo- Uibilitc ; mais e'eft encore la un objet qui demande des recherches &c des experiences ulte'rieures. Je finis par une derniereremarque fur la nature dela flamme del'efprit- de-vin , traite' avec les fels contenant l'acide marin. Je fais done obfervcr que de tous ceux de ces fels que j'ai examines jufqu'apre'fent, le fel marin martial eft le feul qui ait donne a cette flamme la couleur blanche, & un caraclere rapproche' de celui de la flamme de Tether. Je ne doute point que parmi ceux qui rcft:nt a examiner , il ne s'en trouve plu- fieurs autres qui produiient le meme effet ; mais en attendant, on peut FirRiER 1772, Tome I. 5 (53 OBSERVAT 9 'A T..A PHYSIQUE, toujours en infe're", qix u uri .Jes me'taux qui peuvent com- muniquer un caradire pa-rticulii i l'aei le marin , par la quantite abon- dante de principes inflammables qu'il lui tranfmer. SUITE DU ME MOIRE Sur la meilleure manure de faire & de gouverner les Vins de Provence , /bit pour I'ufage , foit pour leur faire pajfer les mers. CHAPITRE III. Du terns le plus convenable pour venianger. JL E terns le plus convenable pour vendanger eft fixe' par i'infpeftion dclagrappe: principe inconreftable. Si elle eft verte, diffe'rez de quel- ques jours, & donnez le tems a la chaleur & a la maturite de lui faire acquerir une couleur brune , ou meme de la lecher , pour ainfi dire. {a) Les anne'es 1755 & 1761 ont confirme cette ve'rice'; la raifoti la demontreroit meme fans Pexpe'rience. Tant que la grappe eft verte, e'eft iih figne qu'une (eve encore trop abondanre, 8c pas aflcz e'labore'c, fe porte du cep au raifin. II eft alors trop aqueux , pas affez fucre', & il ne fe change en veritable muqueux doux , que quand les filieres par oii pafte la (eve , ont ete plus aftreintes , plus refferre'es , 8c ne laif- lient monter qu'une quantite plus petite & plus attenue'e. (b) Il arrive de-la. , que la (eve fe portant moins abondam'ment , la chaleur ditfipe la partie (urabondante de Peau de ve'ge'tation dans les raihns , pre'pare ( a ) On laifTe faner le raifin fur le cep , pour faire le vin mufcat de Rivefaltes. On fuit cette methode dans les Ides de Candie , de Chypre , en Efpagne , &c. Dans quelqu s endroits , on ote la majeure partie des feuillcs du cep quand le raifin approche de fa parfaite maturite. Ces feuillcs pompent pendant la nuit , par les petites bouches de leur furfacc inferieure, les fucs & 1'huinidite repan lus dans 1'atbmofphere , & font, pendant le jour, la fonction d'organes excre'toires ; ainfi, en fupprimant ces feuilles , la meme quantite de seve ne fe communique plus aux raifins. II arrive de-la , qu'ils laiffent cfvaporer l'eau furabondante de la vege'tation , & acquerent plus de mu- queux doux. ( b ) Les vins d'Arbois , de Chateau-Chalons en Frauche-Comte , font de tous les vins de France , ccux qui approchent le plus en qualite , ceux d'ltalie , e'eft-a- dire , les bons vins liquoreux. On n'y vendange qu'a Noel , ou du inoins apres que l.a gelte a fait tomber les feuilles. plus SUR VHIST. NATURE LIE ET LBS ARTS. j le raifin pourrit plutot que de mun'r , & la grappe telle verte, & trcs-vcrte. II convient alors de choilir le point le plus complet dc ma- tin ite, relativcn-.enr a la faifon ; ce qui ne change en rien lc principe que je visas d'etablir. Ne feroit-il pas pofliblc de trouvcr un expedient capable d'empecher la pourriture ? Je n'olc l'afftrmcr , n'en ayant pas fait ['experience •, ce- pendant , je pourrai , fans temcritc , ctablir pour principe que les pluic; frequences d'automne , que l'athmofphere abondamment chargee de va- peurs humides , que la terre rfnprcgnee d'eau , communiquent aux raifins une (eve trop rluide & furabondantc ; que la chaleur ne for mane pas aflez de muqueux doux dans les grains , ou le dclavant trop , Sc meme le noyant , le difpole promptement a la pourriture: cc qui eft prouve'. i°. La vigne tranlpire bcaucoup moins quand il plcut, & prefque point li la pluie eft troide. Sa forte tranfpiration ne recommence fou- vent qu'apres douze heures de beau foleil, & quelqucfois apres deux jours, i". L'eau qui auroit e'te tranipirce , &: qui devient a. charge , a reflue dans le raifin, aind que la vapeur humide que les feuillesab- forbent pendant la nuitj tout cela concourt a augmenter fon aquofite , ckalarcndre fuperflue & nuifiblc. 30. Plus les parties conftituantes des corps doux font rapprochees , moins clles font (ufceptibles de fermen- tation, & par conlcqucnt de pourriture. ( Les drops bien fairs en font la preuve la p!us complette. ) 40. Le raifin ne pourrit , dans ces cir- conftances , que quand il commence a miirir, & fur-tout quand il ap- prochede (a maturice , e'eft-a-dire, quand fon acide eft enveloppe par le muqueux doux. (Le raifin ne pourrit jamais c'tant vert. Je crois pouvoir dire , d'apres ces raifonnemens , que le meme expedient done j'ai patio dans la note , dela page precedence , (eroit urilcment employe dans cette circonftance. En effet,en (upprimant tin nombre proportionne de feuil- lcs , la (eve montera moins impe'tueuiement. La verite de ce principe eft (1 reconnuc dc tons les Phyficiens, que je ne prendrai pas la peine dela de'montrer : ainfi, quand la (eve fcra moins abondante, le muqueux doux le pre'parera & lc developpera lentement ; il (era mieux forme , moins delave , moins noye, & (e con(ervera mieux. Je conviens que ft la pluie continue , le vin aura pen de qualitc ; mais la pourriture du r.iilm ne I'alterera pas; Cv le raifin pourri , meme apres avoir ere defTeche par lc foleil , nuit a la qualitc 8i a la quantite. Je ne donne cet expe'dient que coramc conjectural, mais ayant tous les degres de probabilite (b). (a) Je travaillois a cc Mc'moire en 1769. J'ai fait pluficurs experiences en IJJO & en 1771 : clles ont rcpondu a mon attcnte & confirms mes idecs. Elks ferrironf a un nouvean Mc'moire, parcc qu'cllcs oftrctu des rcluhats [r£s-int&ciians. pEtrRjER 1772, Tome J. Cccc 570 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le choix du jour fixe pour la vendange ne doit pas etre indifFe'renr. J'ai vu en 1769 , du raifin cueilli les 7 , 8 & 9 Odobre, refter dant la cuve jufqu'au 1 9 , fans que la moindre fermentation le rut mani- fefte'e. ( Le meme phe'nomene arriva en 1740 , ) parce que pendant les jours indiques, le thermomerre , divifion de M. de Reaumur, avoit e'te le matin a un degre' & demi au-de(Tous de o , & qu'il s'e'toit main- tenu pendant la journe'e feulement a deux dcgre's au-deflus de o. Les raifins des vignes voilines , vendanges le r la parite' eft parfaire. Elle conferve jufqu'a fon entiere ficcitc un goiit acide & aufterc,& ne perd jamais ce dernier. Il arrive de-la que fermentant avec le mour , elle lui communique fes mauvaifes qualitJs , (ans lui en faire gagner aucune. Un vin dont le raifin a etc degrappe , eft plus delicat qu'un vin dont le raifin ne Ta pas e'tc •, e'eft un fait. Le vin du preftoir dc la troi- fieme Sc de la quarrieme coupe lent la grappe; il eft, par confequen:, apre , dur & auftere. La grappe inrlue done fur la qualice du vin ? C'eft encore une pcrte pour la quantite , puilqu'on ne pcut pas reu'rer par l'cft'et du prtflbir , tout le vin qu'elle s'eft appropric. 11 eft de'montre Fevrier 1772, I'ome 1. 574 OBSERVATIONS SUR LA PHISIQUE, que cesgrappes, ainfi que les pellicules dcs raifins , one ama-fle com me une e'eumoire , la plus grande panic des fleurs de vin, & qu'elles en ont peu perdu par la predion ; Sc le Gas, (a) qui eft niche dans ces matieres fpongieufes , a la proprie'te de former de l'efprit ardent avec les Indies qui abondent dansees fubftanccs. On s'appereoit fur-tout, du mauvais effet de la grappc fur lc vin, dans les anne'es froides Sc hu- mides , parce qu'elle eft plus aqueufe , plus herbace'e , Sc par confe- quent,plus acerbe. II me paroit quequandon n'auroit pas pourgaranc l'expe'rience la plus authentique , ce raifonnemenc feul prouveroit la ne'ceilire' d'e'grapper le raifin. II refte encore trois objets efTentiels a remarquer : i°. que la cuve foit remplie le meme jour , ou au plus tard le lendemain •, i°. qu'elle foit place'e dans un ccllier , & non en plein air , ou dans une cave ; 3°. plus la cuve fera grande Sc remplie , plus la fermentation fera vive , forte, Sc mieux elle fe complettera. La chaleur du climat de la Pro- vence mcridionale, excite ordinairement la fermentation des le premier jour , fur-tout fi le raifin a ete cueilli a l'ardeur du foleil -, ainfi , en dtfferant plufieurs jours a remplir une cuve, ou ne la rempliflant que par intervalles, l'agitation frequence que (ubira la maffe de la liqueur fermentante , nuira a la fermentation. D'ailleurs , il eft impoffible que la vendange qu'on y jette , ait le meme degre' de chaleur que cclle qui eft dans la cuve; ce qui retarde la fermentation-, & fi elle e'toit plus chaude, la fermentation recevroit une impulfion trop forte, qui en de'rangeroit la continuite'. 11 s'eleve au-defTus de la liqueur , pendant que la fermentation s'execute , une quantitd d'ecume , nominee Heur de vin , qui forme promptement une croute e'paifle , contre laquelle le gas , lors de fa formation , fe reverbere comme contre une voute •, $c trouvant peu d'ifTue pour s'e'ehapper , il fejourne plus long-tems dans la liqueur , Sc s'y unit plus abondamment avec les huiles , a mefure qu'elles fe forment ; d'oii il refulte plus de principes pour le vin. Ainfi , quand on jette en plufieurs jours diffe'rens , la vendange dans la cuve , on altere la continuite' de la fermentation, on la de'range dans cette ope'- ration , on rompt cette croute ne'cefTaire , on donne plus d'iflue au gas ; enfin , on diminue la qualite du vin. Si une cuve n'eft pas renferme'e dans un cellier , & qu'elle foit expo- fe'e a l'air , la fermentation fera trouble'e par l'air froid de la nuit , (a) Les Chymiftcs ont donne' ce nom aux parties volatiles invilibles , qni dmanent d'elles-memes de certains corps, qu'on nc petit retenir que tres-difficilement , & en- core ne font-elles point pures. La plupart des Gas, fur-tout ceux qui affc&cne violemment le genre nerveux , ne paroiifent etre que du phlogiftique pur , ou pref? que pur , qui fe degage dcs corp» , fans etrc dans l'etat d'ignitioa. SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 575 Sc par lcs variations de 1'athmofpere. Le foleil attirera unc plusgrande partie de l'air furabondant Sc du phlogiftique ( a ) ; Sc quand cela ne feroit pas, il pre'cipitcroit trop la fermemarion , Sc la fraichcurde la nuit la ralcntiroit irop. La nature, pour comp'.etter foil ouvrage, demande a n'etre point troublee dans fes travaux : il faut done eloigner routes les caufes contraires a fa continuite. Placer une cuve dans une cave, e'eft pre'eife'ment choifir le plus de'lavanrageux de tous les empla- cemens : i°. la fraicheur de la cave nuit a la fermentation : i°. legas, cette vapeur mortclle, repandu dans la cave, empeche d'y cntrer, dans la crainte d'y perdre la vie : 30. on ne peut faifir le moment pre'fixe de tirer le vin de la cuve , puilqu'il faut attendre que le gas le foit dillipe'. La confervation du vin de'pend de ce moment que j'appellerai unique ; ce qui fera demontre dans la fuite. Plus la vendange fermente en grande mafTe , plus la fermentation eft rapide Sc tumultueufc , avec lifflement; mieux elle eft maintenuc telle jufqu'a la fin , & plus le vin gagne pour la qualite'. Comparez un vin fait dans tin tonneau de fix anne'es on mefure quelconque, qui aura fervi de cuve avec celui qui aura fermente' en grande made, routes les autres circonftances etant egales , vous y trouverez une difference frappante ; elle feroit plus frappante encore , fi la petite cuve etoic placee dans une cave. II y a encore des moyens tres-efficaces pour perfectionner la fermen- tation. Si le Proprietaire fe refufe mal-a-propos d'e'grapper le raifin % il faut au moins le faire fouler exadtement quand on le met dans la cuve. Il en re'fulte deux avantages ; 1 °. la vendange nage dans un plus grand fluide , & la fluidite' donne le premier branle a la fermentation : i°. la re'fine colorante qui adhere inte'rieurement a la pellicule du raifin , fe trouve plus a de'eouvert que fi le grain de raifin eut refte attache a fa grappe. Elle eft , par-la , plus facilement diftbute a mefure que fc forme l'elprit-de-vin (r>) par la fermentation , Sc par confe'quent levin eft mieux colore'. Un moyen des meilleurs Sc des plus efficaces pour per- fectionner la fermentation , eft de couvrirla cuve. Ce couvercle lert a (a) Je dirai avec M. Macquer, qu'il eft plus aife de connoitre le phlogiftique cm principe inflammable , que de Ic dc'finir. Voici en quoi il differe du feu i\i~ menuire : I". quand il s'unit a un corps, il ne lui communique ni chaleur ni lu- miere ; 1°. il ne change rien a fern t'tat de folidite' ou de fluidite; enforte qu'un corps folide ne devient point fluide, & vice verfa; il rend feulement les corps folidcs , auxquels il fe joint , plus difpofe's a entrer en fufion par l'aftion du feu ordinaire ; 3". on peut le tranfportcr d'un corps auquel il eft joint dans un autre , dans la com- polition iluqu 1 il cntrc & demeurc fixe. (4) Les refines ne font pas folubles dans 1'eau ; mais feulement dans les efprits ard ns. La partie colorante de la pellicule eft relincufe; le vin ne doit done fa cou- Icur rouge , qu'a la diflblution e"tendue de cette refine qui s'cxecutc a mefure que la fermentation crec l'efprit ardent. Fe^rier 1772, Tome I. 5 7 6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, retenir le gas , au moins en partie ; & ce gas eft efltntiel pour dciunir les principes du raifin , & pour le changer en vin. Ce n'eft point une nouveaute de fpeculation , comme tant d'aurres imagine'es dans le fond d'un cabinet ; mais un fait de pratique , fonde iur I'expe'rience , & done de plus en plus je reconnois Ic iucces. Le fentiment de Sthaal eft que les vapeurs qui (e perdent pendant la fermentation , diminuent beau- coup la partie ipiritueufe de la liqueur. Quand la cuve eft couverte , les efprits qui s'elevent pendant la fermentation, nc pouvant s'echap- per qu'en petite quantite , fe melent & fe recombinent de nouveau avec la liqueur fermentante , d'ou il re'kilte neceffairement plus de parties fpiritueufes dans cette liqueur. Appliquons aux deux extremes ce que nous venons de dire,c'eft- a-dire, aux qualites de mo lit oppofe'es. Dans les mauvais cantons, de mime que dans, les annees froides & pluvieules, le moiit eft trop aqucux , Sc n'eft pas fuffilamment charge de muqueux doux : dans les bons cantons, & dans les anne'es chaudes, le moiit peut etre trop doux, trop fyrupeux. Il convicnt , dans le premier cas, d'ajouter, outre le moiit bouillant dont j'ai parle , du moiit cuit, re'duit an tiers par 1'ebullirjcm , ou meme en confiltance de firop : cependant, ce moiit cuit , malgre la plus grande evaporation d'une partie de fon eau fura- bondante , peut encore conierver quelques nuances de fon premier Ctat ; I'aufterite a par exemple, l'.iprete', & meme une efpece d'acidite', forceroient alors de recourir a un autre genre de muqueux doux. Tons fes corps e'minemment doux & fucre's , doivent etre exadtement dclaye's dans le moiit avant qu'il fermentc, & re'pandus c'galement dans la cuve. Le vin qu'on retirera du prefloir & de la cuve , doit etre mele dans le tonneau, parce que ce dernier ne participe pas egalement du cor- reclif que 1' autre. Que Ton compare un vin produit par un moiit dc mauvaife qualite, mais miellc, avec du vin Icmblable qui ne l'aura pas etc , on jugera alors de l'utilite du moyen que je propofe. On concoit bien que ce corredlif eft plus ou moins neceffaire, fouvent inutile, &c meme nuifible , fuivant les annees, les cantons, &c. Il faut prendre garde que le mi el foit dans un e'tat naturel, e'eft a-dire, point frelate, point allonge', par exemple, avec de la farine , pour en augmenter le volume ; ce qui arrive louvent. Cette farine fermen- tant avec lui , le conduit promptement a l'acidite' ; &c de-la, a la pu- tre'facflion. On dira peut-etre que cette fubftance doit communiquer au vin fa faveur mielleufe & de'lagre'able. On re'pond, i°. que l'aloes 8c la co- loquinte perdent leur amertume en fermentant ; 1°. que la fermenta- tion du vin eft bien plus vive , plus rapide , que celle qui fait l'hy- dromel; ce qui de'nature davantage fon aggregation mixtive , parce qu'on travaille une plus granie maffe de mate'riaux , parce que le moiit , HUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. j77 mout , irn'mc mielle , eft plus delay e, moins fyrupcux que l'c.iu miel- Ic'e, qui donne I'hydromel , ( ellc doit foutenir un teuf J parcc que le railin donne plus d'air que lc miel ; ce qui agire , cchauffc, 8c attenuc davantage lcs parties intcgrantes de la matiere, pirce que le vjhicule, dans I'hydromel, eft Peau •, tandis que dans 1'operation pre- feme , e'eft un compofe de fubftances qui out chacune leur gout par- ticulier, & que d'aillcurs , le miel ne fait ici qu'une tre^-pctite quan- tity , compare'e avec la mafic totale. D'aillcurs , il eft de'montre que les feules fubftances muqueufes , douces & fucre'es , font capables de fournir de l'efprit ardent par la fermentation : on ajoute done au moiit de mauvaile qualite, celle qui lui manquoit , & qu'il auroit acquile , fi la maturitc eut etc complette : l'art ne fait done ici que fupplcer ou aider a la nature. Les mouts des bons vignobles , fur-tout, des provinces me'ridio- nales, pechent ordinairement par le de'faut contraire; e'eft-a-dire , qu'ils iont trop doux , trop (yrupcux dans les anne'es chaudes &: feches. 11 eft done ne'eeffaire de leur faire acquerir de la fiuidite, afin que l'afrinite puifle exerccr fes loix par la fermentation. Pour y parvenir , le mout doit cere mis a fermenter dans une athmofphcrc chaude, &non dans une cave ; il faut lui ajouter un levain qui lui imprime le pre- mier mouvement fermentatif. Les fleurs, ou mere du vin , produiront infailliblcment cet eftet, puUqu'elles contiennent en elles-memes, &c a un tres-haut degrc, la vertu fermentefcible vincufe. Mais fi lc mout eft ablolument trop (yrupeux , il convient de le rendre plus fiuide par "addition de l'eau commune. La circonftance qui exige un pareil expe'- dient, eft tres-rare. Ce fcroit alors, le cas de vendanger a la rofe'e , au brouil'ard ou a la pluie , ou d'ajouter un peu d'eau fur le mout i ce qui exige beaucoup de prudence. C H A P I T R E V. Du terns auquel on doit tirtr le Vin de la cure , & des moyens d'en connoitre le point prefixe. I , A liqueur fermentante perd le nom de mout, Sc recoit eclui de vin, de I'inftant que la fcrmentarion eft complette. Les principes du mout font changes , combines , furcompoies ; e*: il s'en forme de nouveau. Ce n'eft plus un fiuide fade au gout , qui colle lcs levres l'une contrc l'autrc ; raais une liqueur vjneufe, forte, fpiritueufe , aftectant agrca- blcment les houpprs nerveules du palais ; en un mor, c'elt du vin. Lc grand art de le faire, confifte en partie a faifir I'inftant prefixe dc cette heureulc tranfmucation. F£i-'sier 1772, Tome 1, D d d d 57S OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, S'il n'a pas affez fermente, fa refine n'eft pas affez difloute , fa cou- leur eft peii folide, fes principes ne font pas affez iltetes Sc defunis ; c'eft line liqueur dans laquelle le phlogiftique n'eft pas affez concentre'-, en un mot, c'eft un vin qui file dans la fuite ( a) , & eft (ujet a pouflfer. Si, au contraire, il a trop fermente, uue partie de fon phlogiftique, & de fon air effentiel , s'eft e'vapore'e ; Sc tous deux, cependant , en etoient la bafe Sc le foutien ; aufll, ce vin aigrit, pourrit Sc moifit facilemenr. Confultons done la nature , pour trouver ce terme moyen Sc ne'eeffaire, apres avoir parcouru les routes fuivies jufqu'a ce jour. I! eft de fait que quand le mout n'a pas encore fubi tous les pro- gres neceffaires au comple'ment de la fermentation tumultueufe , fa couleur eft louche, fauffe , trouble, peu vineufe. On diftingue meme en mertant ce mout dans un verre , comme des efpeces de filamens qui y nagent. Ce font des parties mucilaginrufes que la fermentation n'a pas encore affez de'truites, Sc qui annoncent que le mout n'eft pas encore change en vin. Quelques perfonnes le font filtrer par du papier gris; Sc fi elles n'appercoivent plus fur la furface une efpece d'e'eume circulaircment rangee contre les parois du verre , elles jugent alors que levin eft fait. Cette epreuve eft fujette a 1'erreur. N'tft-il pas vrai que plus la cuve fera grande & bien remplie, plus la maffe de la vendange prefTcra avec force la liqueur qui s'ecoule par le trou fait avec une vrille, a la bafe de la cuve? Ce poids la contraint a fortir avec violence, ce qui la fait bouillonner Sc fe rendre en e'eume dans le verre; ajoutez a cela, que la fermentation a de'gage une partie de l'air content! dans les raifins-, que cet air eft combine' dans la li- queur fermentante; que (a partie mucilagineufe l'cnveloppe, pour ainfi dire •, que les pores du papier gris ne font pas affez ferre's , pour em- pecher une partie du mucilage d'y paffer ; que cette partie du muci- lage laiffe e'ehapper l'air par un refte de fermentation dans le verre ; que cet air qui s'e'ehappe , retenu a la furperficie , Sc raffemble' en (a) Les vins de Bourgogne & de Beaujollois font fujets a cette maladie. On la nomine encore huiler , parce qu'on diroit, quand on vcrfe ce vin, qu'il coule comme de Pliuile. Une nouvelle fermentation qui recombine la lie , la dillipe fouvent. II fuffit meme quelquefois de fortir les tonneaux de la cave , & de les expofer a l'air libre pendant deux ou trois jours ; ce qui augmente les niouvemens de la fermentation in- fcnlible. Si le vin eft en botiteille , on le remet , en ajoutant par-deflus une ou deux gouttcs de jus de citron , ou de telle autre fubftance acide ; alors , la partie huileufe s'attachant, par fon acidite1, a emoufler les pointes des acides , & formnnt enfuite une fubftance nioyenne , le vin reprend fa Iympidite'. Ce fait prouvc clairement que le vin qui file n'a pas alTez fermente ; & que fa robe , ou couleur vineufe , eft cliange'e en une couleur tirant plus ou moins fur le jaune : c'eft a caufe que fa portion re'li- neufe s'eft precipite'e. Je conviens qu'une fermentation plus foutenue, auroit fait perdre a ces vins une partie de leur parrum , & de leur delicateiTe. C'eft un mal compenfc par un b)!en, & qui ne peut etre approuve que pour des vins aufli fins & aufli pre'eieux. SUR L'HIST. NJTURELLE ET LES ARTS. j-9 bullcs , (c diflipc diflicilcmcnt a caule du mucilage qui lc rctient 3 &c. 11 hut etrc fin connoifTtur pour fe guider par cet indice. D'autres pcrfonnes, fans confide'rer cette ecu me , n'envifagent cjuc la couleur de la liqueur •, Sc cctte fa^on de voir eft abufive. La pel- licule du raifin, dans les annecs cliaudes & seches, a bcaucoup plus de refine colorante, ou du moins, cllc eft: plus colore'e, & elle s'c'tend davantage > fur-rout, fi on a vendangt: avee le foleil ; ainfi, le mour pent deja etre tres-colore, fans qu'il foit change cu.nplettement en vin. Des obfervations re'ite'rc'es pendant une longue fuite d'anne'es, m'ont demontre que quand le mouc n'eft pas fuffifamment change' en vin , cv' que quand on en tire dans un verre, on appercoit fur la furface, en la regardant horifontalement , on appercoit, dis-je, dans I'e'paifieur d'une a deux lignes, une liqueur moins mucilagineufe , moins colore'e que celle de deflous : l'inferieure approche de la couleur de fang de bceuf, plus ou moins fonce'e, fuivant les cantons, les efpeces de raifin , la faifon , &c. Sc la fupe'rieure , eft de couleur de gris-de-lin , meme aflez claire. Ces differences nc font plus fenfibles quand le vin eft fait. Tous les principes font exaiftement mele's par les e'branlemens rapides & les chocs multiplies que la fermentation a fait fubir a la liqueur. Si Ton confidere perpendiculairement le vin dans le verre, avant qu'il foit fait, la liqueur du fond parolt communiquer fa cou- leur a celle de la furface , ou plutot on ne diftingue qu'une feule Sc meme couleur. Les vafes les plus proprcs pour cette experience, font les verres a pied, dont la forme eft celle d'un cone tres-evafe par le haut , Sc trcs-e'troit a fa ba(e : le verte le plus uni eft le meilleur. Une autre preuve plus aife'e a faifir cv plus fenfible aux yeux les moins attentifs , les moins faits pour obferver , e'eft 1'affaifTement de la vendange dans la cuvc. Quelle eft la caufe de' fon elevation Sc de foil affiiffement ? Celt ce qu'il eft important d'examiner. La made des raifins en fermentation , e'prouvediffcrentescombinaifons. Ces cora- binaifons font l'effetd'un mouvement inteftin , qui a imprime' un degre de chaleur plus ou moins vehement. L'eau agitee par fon mouvement de Huiditc , s'eft de'barraflee d'une partic du mucilage qui l'envclop- poit. Elle a divife, triturc; ce mucilage , en a de'gage l'huile a mefure qu'elle fe formoit par la fermentation. Ces deux fubftances re'unifTant leurs efforts , ont entraine avec elles les autres parties grollieres ; elles les ont brifces & attc'nue'es en tous fens, de forte que tout eft dans 1'agi tat ion , tout eft confondu. L'air contenu dans les raifins , ou en difTolution dansle fiuide , s'unit au gas , avec lcquel il a bcaucoup d'affinite' ; Lis abandon- nent les cellules qui les renfinr.oicnt , en bnfant leurs parois par la di- latation. L'un Sc l'autre cherchent a s'echapper; mais la re'fifhnce qu'op- pofe la made de la vendange, oblige les bullcs d'air a fe rjunir,a fe grollir par leur reunion-, alors , plus fortes , plus aCtives , plus e'lalti- Fevrier 1772, Tome I, Dddd i 580 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , ques , eltes fe diftendent , occupent un efpace plus confide'rable , font la fon&ion de levier, elevent peu-a-peu la vendange , & la foutien- nent dans cet e'tat, jufqu'a ce que les efforts de la fermentation dimi- nuent, 8c qu'une partie de cet air & du gas fe foit diflipe'e. Comme la furface de la vendange ne prcTente pas autant de reliftance que la maffe eruiere, les bulles d'air ia pe'netrent aife'mcnt par leur foupleffe & par leur forme fphe'rique •, elles s'echappent en partie avec force 8c tumulte , 8c ferment ce bouillonnement , ce fifflement qui annoncent la vigueur de la fermentation. Celles qui trouvent leur iffue entre les parois de la cuve &c de la vendange , laiffent, en fe diflipant , le muci- lage qui les retenoit ; &c ce mucilage forme 1'ecume qui refte contre les douves de la cuve. Si on attend une heure ou deux , ( fuivant la nature de la liqueur fermentante ) on connoitra par la diminution du bruit & du fiffle- ment, que la fermentation eft moins tumultucufe : fi on perfifte a la laifTer dans la cuve, il fe formera de nouvelles combinaifons , de nou- velles diflblutions ; la vendange fera encore fouleve'e, mais non pas auffi haut que la premiere fois ; l'e'levation 8c I'abaifTement feront fuc- ceflifs , & iront toujours en diminuant , jufqu'a ce que la fermentation tumultueufe paffe a l'infenfible. On diftingue aifement les gradations de raffaiflement par 1'ecume qui refte colle'e contre les parois de la cuve. Remarquons ici, pour n'etre pas oblige d'y revenir , que la fer- mentation qui fe continue dans les tonneaux , n'eft qu'une fuite de la fermentation tumultueufe de la cuve ; & les raifons pour expliquer comment la liqueur poufTe la lie a la furface des tonneaux, font lea meraes que celles qui expliquent l'elevation de la vendange dans la cuve. L'expe'rience la plus conftante a demontre' qu'un vin qui n'aura pas e'tc' tire' aufli-tot que le premier affaiffement auracommence'a etre fenfi- ble •, que ce vin , dis-je , aura perdu beaucoup d'air 8c de phologifti- que ; que plus on attendra , plus il fera mat , plus la grappe & le pepin lui auront communique leur aufte'rite , 8c moins cette liqueur fera agre'a- ble , vineufe, remplie d'efprit ardent ; & moins elle fe conlervera , &c moins elle fupporrera le tranfport. Le vin , dans les anne'es chaudes & feches, doittantfoit peu moins cuver , parce qu'il (e colore de plus en plus dans le tonneau, acaufe de laquantite'de raifine colorante du raifin. II s'y de'colorc aucontraire, dans les anne'es froides & pluvieufes ; il doir done fermenter un peu p'us long-tems pour mieux difloudre la rc'fine, par l'acfion de l'efprit-de-vin fur elle. C'eft au Proprie'taire qui connoit laporte'e de fon vin , a me'nager avec prudence ce plus ou moins. Une lieure ou deux , en partant des extremes , fuflifent pour les vins fins ; & cinq ou fix pour les vins communs. En fuivant la meme regie , on pour- roit, dans lefecond cas, ajouter dans le tonneau des pellicules du raifin SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 581 quia ete prcfTe, &l'efprix ardent trouveroit dequoi fairc de nouvelles diflolutions. II arrivcroit, fans cettc precaution , comme li a une tcinture d'une dragme tforcanette , on ajoutoit quatreonces d'eiprit-dc-vin fans addition d'autre orcanette; la premiere teinrurepcrdroirdc fon in ten fite' ; e'eft effe&ivement ce qui fe pafTe dans le tonncau , a proportion que fe forme de plus en plus l'efprit ardent. Nos etreurs font fouvent inftrudtives , & elles font quelquefois le pre- mier pas qui conduit a la verite. La fermentation , me difois-je a moi- meme, ne peut etre fans mouvement, fans chocs multiplied & ve'he- mens : ces chocs, ces ebranlemens ne peuvent etre fans chaleur ; ainfi , un thermometre plonge' dans la liqueur fermentante , me fera connoi- trelc point prefixe de tirer le vin, parce que tant que la fermentation augmentcra, la liqueur montera dans le thermometre; & il eft certain que la vendange ne s'affaifTe dans la cuve, que patce que la fermenta- tion diminue ; & ainfi la chaleur diminuant a proportion, j'aurai , par le moyen de mon thermometre , un guide certain, qui fixera le point que Je defire. Ce raifonnement me parut fpe'eieux ; mais il hit bien- tot dementi par l'expe'rience. On ne rapportera point ici les expediences fakes a" ce fujet •, on fe contente d'en donner le re'fultat : i°. la chaleur du jour de la ven- dange influebeaucoup fur la fermentation , puifque deux cuve'es ven- dange'es dans un terns oii l'air e'toit plus ou moins chaud , une a rcfte a comple'ter fa fermentation vingt-quatre heures de plus que 1'autre : 20. les commencemens de la fermentation ont ete tres-lents les pre- miers jours, Si fa marche a ete' enfuite de plus en plus rapide , a mefure qu'elle s'approchoit de fa perfection •, 50. la fermentation n'a commence a etre fenfible que lorlque la chaleur de la vendange, dans la cuve a e'te' au dixieme degre : obfervation re'pe'te'e , & la meme pour le re'- fultat, furies cuve'es vendange'es les 7, S , 9 Oclrobre pendant la^elee, quoiqu'eile ne commeric.at a etre fenfible que le 19 ; 40. lorfque la fer- mentation tumultueule eft a (on comple'ment , la chaleur n'au^mente prclque plus, & fe maintient dans le meme e'tat ; 50. cette meme cha- leur le conferve pendant le terns que l'on tire le vin de la cuve ; 6°. la vendange s'affaifTe quand la fermentarion eft a fon plus haut deour e'tablir des travaux en grand ;il faut encore connoitre quels font es me'taux dont le culot ell compofe, parce que fouvent une mine pa- roit tres-pauvre; mais elle eft reellcment tres-richc, lorlqu'clle con- tient des me'taux precieux ; alors , il faut proceder a l'aftinage. Pour cela , ou prend line coupelle faite avec des cendres bien leflivees , ou mieux encore avec des os calcines & re'duits en poudre : on allume le fourneau de coupelle par fa partie fupe'rieure •, 6c lorfque la moufle commence a rougir, on y place les coupelles, pour qu'elles fechent 6c s'c'chaufFent. Quand elles font rouges , on met dedans le petit culot metallique, qu'onaeu foin de reduire en une lame mince, afin qu'il fondc plus facilement. On ferme Pouverture de la moufle avec quel- ques charbons pour augmenter la chaleur, & faire fondre plus rapi- dement le meral : ce qui s'appelle donner chaud. Lorlque le me'tal eft fondu , cv qu'il eft rouge , on voit s'elcver au-deftus de la coupelle une vaptur qui monte vers le haut de la mouHe : fi la vapeur s'eleve fort haut fans le conden(er,la coupelle a trop de chaleur ; on ore alors les charbons qui ferment la moufle ; e'eft ce qu'on appelle donner froid. Lor/qu'au contraire la vapeur paroit epaifle, & qu'elle s'eleve pen au- deftus du me'tal , on ferme exactement la moufle avec des charbons allu- mes : aufli-tot que la coupelle eft prcte a finir , on voit fe former des points brillans a la (urface du me'tal en fufion -, enfin , le metal fe dt;- couvre entierement ; e'eft ce qu'on nomine l'c'clair. On laifte enfuire la coupelle refroidir inknfiblement , parce que lorfque le rcfroidifle- ment eft trop fubit, il arrive un accident appelle c:cartement. Lorfque tout eft exaclement rcfroidi , on pele a la balance d'eft.ii : li on foup- c,onne queleculotcontienne de l'or , on procede alors au depart, fonde lur la proprie're' que plulieurs diffolvans out d'attaqucr l'argeut fans toucher a l'or. On diftingue trois lortes de dt:parts qui different les uns des autres par la nature des matieres qu'on emploie pour les faire. Le plus ordinairement on fe lert d'eau-forte. On y met le compofe metallique apres l'avoir re'duit en lames, Cv roulo fous la forme d'un FirRiER 1772, Tome I. 590 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, petit cornet; l'eau-forte diflout l'argent & laifTe pur l'or qu'on retire 8c qu'on lave dans l'eau bouillante, pour lui enlever l'acide qui lui eft refte adherent. II eft a remarquer que pour que ce de'part fe fafle , il faut que la proportion d'argcnt excede celle de l'or , a-pcu-pres des trois quarts. On connoir cette proportion d'alliage au moyen des touchaux , qui font de petitesbarres d'argent alliees d'or : on les e'prouve fur la pierre de touche. C'eft un bafalte noir , fur lequel les metaux frotte's laiflent une trace, dont on pent reconnoitre la nature a Paide des acides : ft c'eft de l'or , l'eau re'gale feule peut l'enlever : lorfqu'au con- traire ce (ont d'autres metaux , l'eau-forte furlit pour les faire difpa- roitre. En examinant done les traces des diffe'rens rouchaux ,& leur comparant celles du petit lingot dont on vein faire le depart , on rcconnoit a-peu-pres la proportion de fon alliage. S'il n'eft pas tel qu'on le-delire, on le fond avec une quantire d'argent plus confide'ra- ble, de maniere que l'on ne faffe au plus que la quatrieme partie de la maffe ; c'eft ce qu'on nomme l'inquart : il n'y a pas d'inconvenient qu'il y ait un peu plus d'argent; il n'en coute qu'un peu plus d'eau- forte pour le difloudre. Le fecond depart fe fait a l'aide de l'acide marin , re'duit en vapeur, & dans l'e'tat de la plus grande concentration : on le nomme, acaufe de cela , de'part concentre'. On Pemploie lorfque l'or fe trouve uni a l'argent en trop grande proportion. On prend , pour faire le de'part concentre' , quarre parties de briques pile'es , une de vitriol verd cal- cine' au rouge , 8c une de fel marin de'cre'pite : on en forme une pate avec de l'eau; cette pate eft appellee cement royal, parce qu'elle (ert au de'part de l'or, qu'on nomme le roi des metaux. On met l'cpaifleur d'un travers de doigt de ce cement dans le fond d'un creufet; & par- deiTus, on pole une lame tres-mince de l'alliage d'or & d'argent : on couvre la lame d'une feconde couche de ce cement , fur laquelle on peut mettre line autre lame, & ainfi de fuite ; obfervant toutefois que la derniere lame de me'tal foit couverte de cement : on ferme le creufet , de fon couvercle bien lutte' , puis on le fait rougir foiblement , 8c on l'entretient a ce degre' de chaleur pendant vingt-quatre heures ; apres quoi , on le laiffe refroidir , 8c on retire les lames de me'ral : on les lave avec le plus grand foin dans l'eau bouillante, & elles fe trouvent ctre de l'or pur, Dans cette ope'ration , l'acide du vitriol verd vola- tilile par le feu, de'compofe le iel marin , s'unit a fa bafe, & en de'gage l'acide qui diffout l'argent. Le troifieme depart , fe nomme de'part fee , parce qu'il fe fait en fon- dant l'alliage avec des matieres qui peuvent s'unir a l'argent de pre'- ference , 8c en debarraffer l'or : c'eft le foufre qu'on emploie commu- ne'ment a cet ufage. On grenaille l'argent tenant or ; on le mele avec du, foufre dans un creufet qu'on fait chauffer lentement, pour que lc SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 591 foufre penecre lc metal : on poufle enfuite a la fontc , &c on coule la roatiere dans un cone de fercliaufie& graiffc. II arrive quelqucfois , des la premiere fufion, que l'or ne contra&e point d'union avec le foufre, fe (epare , c\: forme un petit culot au-de'Tous dc l'argent lulhire ; quel- qucfois auffi, lorfque l'or eft en trop petite quantite; il fe trouvc enticrcment mafque par l'argent. II eft alors neccfTaire dc refonjrc 1'alliage , en ajoutant line certaine quantite de limaille defer , quiabforbe 1'exces du foufre : la macicre statu bien fondue & coulee dans le cone de fer , l'or fe raffemble en un culoc qui occupe le fond du cone ; Sc quoique aprcs plulicurs fulion ainli repe're'es , on ne trouve plus d'or, on continue ne'anmoins de fondre la mafTc reftantc, avec addicion de nouveau fer , qui , s'emparanc toujours du foufre , finit par en debar- rafler l'argent. On peut feparer l'or de l'argent par la voie feche, en n'employant que l'argent ; ilfaut feulemcnten ajouter une quantite' fuffi- fance pour abforber couc le foufre ; ce qui ne fe fait qu'a 1'aide de plulicurs fufions repe'te'es, comme dans 1' operation , par le fer. L'argent fulfure', fe'pare' de Tor , peut cere enfuice purine, en Pexpolant au feu, dans un creufet , pour briiler le (oufre, 8c fondre le metal en une maffe. Quelques precautions qu'on air priles pour fe'parer l'or de l'argent, il refte coujours uni .1 une grande quancite' de ce metal , qui, a mefure que le foufre eft ou brule' oil abforbe par le fer , rencre dans cous fes droits, & s'unita l'or par la fufion; auffi eft-il tres-ne'eeffaire dc faire fucceder au de'parr fee, le dc'parc par l'eau-forte. On ne pratique gucre le de'parr j par la voie feche, dans les Laboratoires oil on ne fair des eftais qu'en petit, parce qu'il n'eft d'ufage que pour leparer uncquantue' d'or infiniment petite , re'pandue dans une malle d'argenc conddera- ble , &: qu'on ne pourroic diffoudte qu'en cmployanc beaucoup d'eau- forte. L'antimoine ofFre encore u;i moyen de feparer l'or d'avec les autres metaux ; e'eft une (orte de depart fee qui ne diftere prefque en pen du depart precedent , fait par le foufre. L'antimoine contientune partic dcmi-me'tallique , & du foufre a-peu-pres a parties e'gales : on en jette deux parties reduic.es en poudre, fur une d'or qu'on a fait fondre dans un crcufcc ; 6c lorfque le melange eft en parfaice fufion , on le verfe dans un cone de fer chaufTe & graifle'. La maticre (e fe'pare ea deux , & prefente dans le fond du cone l'or uni a la parcie demi- mecallique de l'antimoine; & au-dcfTus, (e trouvent les aucres me'taux unis an foufre. Comme cer or ne peut pas cere purine exadtemenr par une premiere fulion , on lc fond une feconde & une croilieme fois avec de nouvel ancimoine. Aprcs coutcs ccs fufions , Tor n'eft plus alliequ'a la partie demi -metallique dc l'antimoine : pour Pen de'pouiller, on met la malTc dans un creufet , qu'on laic mc'diocrcmcnr rougir ; .1 ce degie dechaletir, le demi-metal , qui eft volatil , lc dillipc en fleurs, cv Fir ri Eii 1772, Tome I. 59* OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , laifle 1'or au fond du creufer. II faut obferver, ccpendant, que vers la fin , cet or fe trouvant en une aflez grande quantite , il mafque le demi-me'tal au point que le feu ne peuc plus le volatifer. Pour ache- ver d'en dc'pouiller l'or , on jette un peu de nitre dans le creufet ■, ce fel calcine le demi-me'tal -, l'or le trouve parfaitement put-, Sc lotlqu'il n'eft pas tout-.i-fait affez duiitile , on le fond avec un peu de nitre & de borax : l'antimoine de Hongrie eft le meilleur pour cctteope'ration. Telle eft la maniere dont M. Bucquec fait connoitre les procede's , pour eflayer les mines , &c pour en faire le depart : il examine enfuite dans cette efpece de preambule a l'e'tude des me'taux , comment le fait le triage , le bocardage , le lavage , le grillage , la fonte des mines , Sc donne enfin la deicription des diffe'rens fourneaux employe's dans les grands Laboratoires des mines. Le triage fert a fc'parer les morceaux {implement pietreux des motceaux charge's du mine'ral : par le bocar- dage , on pulveriie ces dcrniers; par le lavage , on enleve les parties terreu(es& pierreufes, Sc le mineral refte prefquepur; par le grillage, ont fait t;vaporer , a l'air libre , le plus qu'il eft poflible , le ioufre on Parfenic qui fervoient de mine'ralilateur ; par la fonte enfin , on reduic le mine'ral a Petat de metal > &c cette fonte s'execute par le moyen. des fourneaux. Dans la fuite de ce Volume , M. B. fait connoitre les me'taux Sc dcmi me'taux. On y verra avec plaifir la dcfcription de quelques fels mine'raux qu'il a decou verts. E L E M E N S De Mineralogie Docimajlique , par M. Sage, de F Academic Roy ale des Sciences ; i vol. in-$°, A Paris , che^ de Lormel, Libraire, rue du Foin. JL, A dodlrine expofe'e dans ces e'lemens , n'e'tant pas encore connue& avouee des Chymiftes, il nous a paru ne'eeffaire de la de'velopper ; a Cet effet, nous nous attacherons, autant qu'il (era poflible, a la marche de l'Auteur , & nous emprunterons meme fes expreflions. Ainli, d'apres ce plan, nous commencerons a parler des aflertions que l'Auteut met pn avant , comme autant de principes; nous y joindrons les preuves fur lcfquelles il les e'tablit ; Sc enfin , nous en fuivrons 1'application aux diffe'rens objers de la mineralogie , qu'il a clafle's & decrits dans cet ou- trage. Pour ne pas interrompre la liailon & la correlpondance de toutes Jes parties de ce corps de dodtrine , on fupprimera, quant a pre'fent , tPVKSS 3 SUR VHIST. NATURE LIE ET LES ARTS. 595 toutes reflexions, & on abandonnera le jugement de cet ouvrage aux Cliymiftes &c aux Naturalises inftruits. M. Sage s'occupe d'abord des proprictes des cinq acides mineraux, qui font, I'acide vitt iolique , l'acide iulfureux , l'acide nitreux , I'acide marin & l'acide phofphoriquc : il parle cgalement de l'alkali fixe, de l'alkali volatil mineral, & des (els neutres. Les Chymiftes , d'apres Stalh , avoient pre'fume' que l'acide vitrio- lique e'toit la bale de tous les autres , qui n'etoient que le relultat des dif- fe'rentes modifications que cet acidc ele'mentaire recevoit par le phlo- giftique. M. Sage admet cette Iiypothefe trcs-vraifemblable, qu'il pre- tend prouver par des faits pofitils : ce dont on va juger. Acide nitreux. « Lorfque l'acide vitriolique ( dit M. Sage ) fe combine avec le ») phlogiftiquc qui fe degage des corps qui commencent a palTer a la » putrefaction, il devient acidc nitreux: la decompofition dupl.itreeft » une preuve de cette alte'ration. L'acide vitriolique qui entre comme » partie conftituante de ce lei , s'altere en s'unifTant au principe de » 1'odeur qui (e de'gage des corps qui commencent a palter a fa pu- » trefaclion. Je dis le principe de 1'odeur qui fe degage des corps qui j> commencent a palTer a la putrefaction; car lorfque l'alkali volatil fe i> decompofe, le principe de 1'odeur qui s'en degage, en s'unifTant avec » l'acide vitriolique, forme l'acide marin >>. Telle eft la maniere dont M. Sage expofe les alTertions de fa doc- ttine. L'acide marin eft done le produit de I'acide vitriolique, avec Ic principe de 1'odeur qui fe de'gage de l'alkali volatil qui fe de'eompofe. Voici I'experience que M. Sage rapporte pour e'tablir ce principe. n Si on laifTe expole'e a l'air dans un bocal de verre , une dilfolu- » tion de cuivre, fake par l'alkali volatil, degage' du fel ammoniac » par l'alkali fixe , dans le laps de trois ou quatre mois, la diflolution » (e de'eompole, le principe de 1'odeur de l'alkali volatil le de'gage, & » entre en combinailon avec l'acide vitriolique re'pandu dans l'air , & il » le fait palTer a I'erat d'acide marin. La matiere graffe de l'alkali » volatil s'unit avec le cuivre, &: forme un le! infoluble dans l'eau , j> qui eft une vraie malachite. L'acide marin qui s'eft forme par l'acide » vitriolique repandu dans l'air, Sc du principe de 1'odeur de l'alkali » volatil, s'unit a l'alkali fixe qui lervoit de bale a l'alkali volatil, j> & fe trouve au fond du bocal lous la forme de tres-beaux cryftaux « cubiques. .. L'acide marin fert a mine'ralifer la plupart des lubftances 11 » liques, Fevrier 1772, Tome I. F f f f 554 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Acide phofphorique. » L'acide phofphorique eft l'acide matin , altere' par la circulation « dans le corps des animaux carnivores : cet acide eft tres-abondanr » dans le regne mineral. II fe trouve dans le borax, le fpath calcaire, H le fpath fufible, &c le bafalte». Nous verrons par la fuite les fairs fur lefquels l'Auteur appuie cette opinion. <* Lorfque l'acide pholphorique eft uni a une fubftance quelconque, » il n'en peut etre degage' par aucun des autrcs acides. tc fel fe'datif, » le fpath fulible en font des preuves ; mais lorfqu'on mele un fel » phofphorique terreux avec un fel qui a pour bafe un 'alkali, l'acide » phofphorique s'en empare , Sc quitte la terre abforbante ; alors , il « le forme de nouvelles combinaifons falines » : le mortier en eft un exemple. Nous ne pouvons nous refufer a rapporter ici en entier cet exemple , quoiqu'il fuppofe la connoiflance de ce qui luivra , nous le rappellcrons pour lors. « Le mortier fe fait ordinairement avec de la chaux , du fable Sc de » l'eau : la chaux eft un fel phofphorique terreux , avec exces de terre » abforbante : le quartz eft un (el neutre , rorme d'acide vitriolique , « &d'alkali fixe. L'acide phofphorique de la chaux, par le moyen de » l'eau , s'unit a l'alkali du quarrz , & forme du bafalte : l'acide vitrio- » lique du quartz s'unit a la terre abforbante de la terre calcaire , Sc » forme du gypfe > les deux fels cryftallifant rapidement Sc confufe'- » ment, produifent des maftes tres-folides , inalterables par l'eau. j> Quoique l'acide phofphorique foit le plus pefant des acides, ce 3i n'eft cependant point celui qui eft le plus cauftique ; pour le de- » venir, il faut qu'il foit combine' avec le phlogiftique : il eft dans » cet e'tat dans le phofphore , la pierre a cautere , & l'alkali volatil. » Les fels alkalis font cffentiellement compofe's d'un acide analogue » a. l'acide phofphorique, &c de terre abforbante : ces lels font avec » exces de terre. => L'alkali du fel marin ne differe que par une petite portion de >i maticre huileufe , femblable a celle qui le trouve dans les caux » meres : cette matiere y eft combine'e avec l'alkali fixe du tartre ; »j Pexperience iuivante le demontre » J'ai mele' , die M. Sage , deux livres d'alkali fixe , diflout dans )> fix livres d'eau , avec une livre d'eau mere du tartre vitriole'. J'ai » enluite-fait e'vaporer ce me'lange jufqu'a redutlion de moitie' : par » le refroidiffement, il s'eft depofe' des cryftaux d'alkalis (emblablcs a. » ceux de foude , qui, apres avoir e'te' latures d'acide vitriolique, » ont produit du fel de Glauber. » L'alkali volatil ne differe de l'alkali fixe de la foude, que parce SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 595 » qu'il contienc Line plus grandc quantiie dc matiere huilcufc, & qu'il » eft uni a du phlogiftique au.qucl il doit foil odcur &c fes proprie'tcs ». M. Sage cite 1'expc'riencc que nous avons rapporte'e a Particle de l'acidc marin, pour appuyer ccs opinions. « Tons les (els- neutres contiennent outre l'eau de cryftallifation , » l'acidc & la fubftance qui fervent a les ncutralifer , une matiere >■■ graffe ou huileufe , qui fc trouvc dans les eaux meres : elle cntre » en plus grandc" quantite dans les fels neutres mincraux, que dans » les (els artificiels •, e'eft a elle qu'ils doivent leur inlolubilite'. Les » Ijpaths calcaires & fufibles , les mines fpathiqucs, qui font des fels » forme's par' l'acidc niarin, & des fubftances me'talliques, en font des excmplcs Ceci nous conduit naturellement au derail de tous les fels neutres, dont M. S. indique les principes. Le nombre de ces fels eft trcs- c'tendu. « Toutes les lubftances qu'on nomms terres & pierres, re'fultent « des combinaifans de l'acide vitrioliquc, ou de l'acide pholphorique » avee la terre ablorbante, ou avec un alkali fixe, dont les proprie'te's m approchent dc celles du tartre. » L'acide pholphotique , combine avec la terre ablorbante , forme » un fel neutre, connu fous le nom de fpath fufible. » Lorlque ce (el eft avec un execs de terre ablorbante , il en re'fulte la » terrc calcaire : (1 la terre ablorbante, qui fe trouve en exces dans la » terre calcaire , a e'te faturee d'acide vitrioliquc , il en re'fulte lc kaolin , » l'argille,Ia pierre ollaire, l'amianre,&c. On voit que ces fubftances )> font compoie'es de deux acides difterens; de l'acide phofphorique , » & de l'acide vitriolique, combine's exactement l'un & l'autre avec « la terre abforbante, (ans exces de rerre abforbante. " L'acide vitriolique, combine avec un alkali fixe, femblable \ celui » du tartre, forme le quartz : ce fel neutre, que le feu n'altere point, » eft tres-promptement dccompole' par l'acide phofphorique, qui fert » de bafe i la terre calcaire >>. Voyez ci-devant 1'exemple du mortier : « enfin , l'acide phofphorique, uni a l'alkali du quartz, forme lc » bafalte ". Suivons a preient le dc'tail des expediences & des obfervations expo- fees par M. Sage, pour erablir cettc doctrine audi neuve que curicule. Pierre calcaire. M. Sage commence par indiquer l'origine de la pierre calcaire, qu'il croit un produit decoquillcs. « Les animaux qui les habitdient, » ajoute-t-il , font tous des animaux carnivores, compclcs d'un lei « ammoniac phofphorique, d'une matiere huilcufc, c\: (i'une terre Fetrier 1772, Tome I. I7 1 1 i 2 ^6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » abforbante. Dans le tems de la putrefaction de ces fubftances ani- » males, l'alkali volatil fe degage , 8c l'acide fe combine avec une « partie de la terre abforbante. 11 en refulte un fel avec execs de « terre. » Outre cela , la terre calcaire contient une matiere graffe , cjui la » rend infoluble dans l'eau , 8c propre a reduire les chaux de plomb " & de bifmuth >'. M. Sage entre enfuite dans des de'tails d'hiftoire naturelle , dont nous ne nous occuperons pas , quant a. pre'ient , ne nous atrachant uniquement qu'a fa marche docimaltique. " II faut que la pierre calcaire, ajoute-t-il , ait e'prouve l'aition du »> feu, pour etre fufceptible de cryftallifation. Le feu lui enleve une « partie de fa matiere graffe, 8c la rend foluble dans l'eau. Lcrfqueles j; pierres calcaires font effervefcence avec les acides , il n'y a que la » portion de terre abforbante qui entre comme partie conftituante de » la pierre calcaire , qui fe combine avec les acides. Le fel phofpho- » rique qui s'y trouve, n'e'prouve poinr d'alte'ration. j' Si on calcine la pierre calcaire, l'acide pholphorique qu'elle con- » tient , s'unit au phlogiftique, 8c forme une efpece de phofphore , « qui , en fe combinant avec une partie de la terre abforbante de la » terre calcaire, forme un foie de ioufre tres-avide de Phumidite , Sc » qui re'pand une odeur fe'tide, e'tant expofe' a l'air. » Les propriete's phofphoriques dont jouiflent la plupart des pierres » calcaires, apres leur calcination, font dues a cette eipece de phof- » phore ». Apres avoir de'erit les phe'nomenes connus de la chaux 8c de l'eau de chaux, M. Sage continue l'expofition de fa doftrine. « On peut, » dit-il, feparer par le moyen de la pierre calcaire calcine'e, l'acide » phofphorique qu'elle contient ; on combine alors une terre abfor- » bante : par la calcination, elle n'eft plus propre a produire de la » chaux. La leflive du me'lange de l'alkali fixe &c de la chaux vive , » tient en diffolution un fel neutre, produit par l'acide pholphorique » de la chaux & l'alkali fixe. Si on le rapproche par l'e'vaporation, j) on obtient un fel neutre, d'un gris verdatre , qu'on nomine pierre " a cautere. Ce fel eft tres-deliquefcent , tres-cauftique, tres-fufible : il » ne peut etre de'eompote par les acides mine'raux. » Si on expofe au feu , dans un creufet , de la pierre a cautere , » elle fe liquefie, fe bourfouftle 8c fe fond: alors, elle re'pand une »' odeur tres-fe'tide. Si l'on tient cette matiere long-tems en fufion , » l'acide pholphorique fe dillipej il ne refte plus au fond du creufet, » que l'alkali fixe tres-blanc ». La chaux e'teinte a encore une propriere' trcs - finguliere , fuivant M. Sage; e'eft de decompofer le quartz. On en a vu l'cethiologie dans l'exemple du mortier cite ci-deffus. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 59- Telle eft la marche docimaftique de l'Auteur , pour etablir que la chaux eft un (el compofe' de l'acide pholphorique , ik d'une terre abfor- banre avec exces de terre. Nous n'avons ni altere , ni affoibli ks preuves. D'apres ce mcme plan, nous allons parcourir lcs aurres fels neutres naturels. i°. I.es fpaths fufibles font, corame nous I'avons vu , unc combinaifon exacle d'acide pholphorique & de terre abforbantc : « c'eft a cet acide qu'on doit attribuer la fufibilitc avec des alkalis ik « des fables, ainfi que leur pcfantcur. » Les fpaths fufibles nc font point effcrvefcence avec les acides; ils » deviennent pholphoriques par la calcination •, ils repandenr unc » odeur de foie de foufre dc'compofe. Cctte odeur devient plus forte , » (\ on verfe deffus un acide ». Done, les fpaths fufibles font unc combinaifon exadte de l'acide phofphorique avec une terre ab/orbante. 20. Le kaolin, l'argille , la pierre ollaire, font une terre calcairc, faturee d'acide vitriolique. Pourle prouver, M. Sage cmploie un moyen fort de'monftratif en Chymie, c'eft de faire le kaolin. II pretend avoir forme un kaolin « en faturant -l'acide vitriolique avec la terre cal- « caire: plus cette terre eft pure, plus le kaolin eft beau : aprcs que » le kaolin artificiel eft lave 8c fe'che, il eft d'une divifion furprenantc , » &C d'une blancheur e'datante : cependant, il diftere du kaolin na- « turel j). M. Sage n'a pas cru devoir nous inftruire de ces differences apparentes ; elles font peu importances , fans doute. « Si on diftille le kaolin avec l'acide vitriolique, il paffe en premier » un peu d'acide fulfureux, enfuite de l'acide vitriolique. Le re'fidu » de la diftillation lefllve, produit l'alun. Les deux tiers du kaolin « paffent a l'e'tat d'alun , au lieu que l'argille ne fournit que trois D huitiemes ». Enfin , le kaolin, ainfi que l'argille, fervent a de'eompofer le nitre dans les vaiffeaux fermes. De tous ces faits , il rcfulte , felon M. Sace que les argilles Sc le kaolin font des fels provenans de la combinaifon de l'acide phofphorique avec la terre calcaire. 3". Lc quartz eft une lubftance dont les principes paroiffoient dif- ficiles a determiner : mais l'Auteur eft parvenu a nous eclairer fur cette fubftance naturelle, en obiervant fa de'eompoiuion dans le mor- ticr , comme on l'a remarque' ci-devant. A cette premiere vue , M. Sa^e en ajoute une autre-, c'eft la cryftallilation du quartz fi parfaitcment (emblable i celle du tartre vitriole' : enfin, il en completce 1'ide'e, en le comparant &c lc combinant avec le (path fufible. « Le quartz n'a « pomt la pefanteur du fpath fufible; ce qui annonce que dans ce fcl » ncutre, l'acide qui y eft contenu , eft tres - different de celui du » fpath fufible; le quartz expo(e au feu, n'y eprouve point d'alte'ra- » tion. Le fpath fufible s'y de'eompole , c>; devient phofphorique ; Fevrier I 7-72 , Tome I. 593 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » enfin , fi Ton expofe au feu tin melange de ces deux fels, il fc » fond tres-aife'mcnr , quoiqu'ils fuffent infofibles fepare'ment. Dans » cette operation, l'acide pholphorique du fapth fufible s'unit a l'ef- » pece d'alkali qui fen de bale au quartz, & il fe forme un (el fu- » fible ». On doit aifc'ment juger,apres ce que nous venons de dire, des preuves employees dans cet ouvrage. 4°. La ze'olite eft une pierre que M. Cronftedr, Mine'ralogifte Sue'- dois, a fait connoitre. 11 a decouvert le premier qu'elle ne faifoit point d'efFervefcence avec les acides ; mais qu'ils la diffolvoient, & la reduifoient en une gelee tranfparente. M. Sage a trouve dans (es efTais , « que le verre qui re'fulte parties egales de quartz & de chaux , » pe'ne'tre' paries acides, fechangeoit en gele'e, com me la ze'olite ». Il conclut de-la que la zeolite eft compofee dc terre calcaire & de quartz. « La ze'olite, diftille'e avec l'acide vitriolique, a donne' de l'acide » fulfureux , enfuite de l'acide vitriolique ; & le reiidu a produit du » vitriol martial, & un peu d'alun *>. M. Sage range le lapis parmi les zeolites, parce qu'il produit de rneme une gele'e avec les acides. « En le diftillant avec huit parties » de (el ammoniac, il a donne une odeur de foie de foufre decompofe'; » enfuite , il s'en fublime du fel ammoniac d'une belle couleur j'aune, j) & le refidu t'toit grisfitre». Telles font les experiences que l'Au- teur cite fur ces pierres fingulieres. Je ne parle pas ici du fer, qui eft le principe de la couleur bleue du lapis , parce que cette couleur eft e'trangere a la bafe. ^n. Il ne nous rcfte plus que le bafalte,ce fel fingulier, qui eft com- pofe' d'acide phofphorique , &: d'un alkali femblable a celui du quartz. Je ne fuivrai pas ici l'Auteur dans la defctiption des macles, des pierres de croix, des fchorls,& des pierres acolonncs de la chauffe'e des ge'ants en Iflande & d'Auvergne. Ce font les efTais chymiques qui doivcnt occuper -, il faut venit au detail de ces experiences. « Les bafaltes fondent au feu : ils peuvent fervir d'intermedes pour >: de'eompofer le nitre. Les acides ne font point effervefcence avec le « bafalte. L'acide vitriolique en degage des vapeurs femblables , par :j leur odeur , a celles du fer attaque par les memes acides. Elles en "different en ce qu'elles ne font point inflammable's. » Si Ton diftille avec l'acide vitriolique le bafalte, le re'fidu eft gris : » leflive & e'vapore, il donne du vitriol martial ; enfin, j'ai fublime', >j dit M. Sage, de ces diffe'rentes efpeces de bafaltes, avec huit parties » de fel ammoniac ; il s'eft colore en jaune , & les parois du recipient » etoient enduits de fel ammoniac, colore' en verd clair, mele de « lilas : ces couleurs font dues a la petite portion de cobalt , que le » bafalte contient quelquefois ». Telles font les expe'tiences fur lefquelles M. Sage s'appuie pour SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 599 admettre dans le bafalte , Ies principes qu'il annonce comme parties conftituantes de ce fel ; e'eft-a-dire , Tacide phofphorique , & l'alkali fixe du quarrz. Quelques Naturaliftes avoient cru, d'apres un grand nombre d'ob- fervarions , Sc aflez fuivies , que le bafalte , celui de Tefpecc douzieme que M. Sage appelle pierre a colonncs , etoit un produit de volcan : mais M. Sage decide « que e'eft une cryftallilation particuliere, a la- » quelle le feu n'a pas eu de part : les pyrites cuivreufes , Sc la terre » martiale jaune que contienncnt les bafaltes de Saint Sandou en Au- » vergne, le demonrrent. La pyrite cuivreufe le decompofe , en tproii- » vant Taction du feu, Sc la terre martiale y devient rouge ». Ces experiences (onc-elles capablcs de detruire des obfervations tres-varie'es Sc trcs-multiplic'es. « Toutes les pierres pre'eieufes font de meme nature que le bafalte : ii elles n'en different, que parce qu'elles contiennent beaucoup moins » de terre me'tallique ». Le diamant lui-meme, cette pierre qui s'e'va- pore an feu, eft aulli un bafalte. M. Sage rapporte ces expediences fur cettc pierre precieufe. « Le » diamant, dir-il, que j'ai expofe' au feu, a re'pandu des vapeurs » acres, accompagne'es d'une lumierc diftincSte, qui formoit une aureole » autour de lui pendant ce terns ; il a change' de forme, Si peu apres » il a difparu » . On fera peut-etre furpris que Pccthiologie ,de ces efFcts que les bons Chymiftes le font contenre' de bien conftater {a), rentre dans les principes de M. Sage : voici comment il les explique. " Le diamant » e'tant compofe' d'acide phofphorique, Sc d'un alkali fixe, femblable » a cclui du quartz , cet acide s'uniifant avec le phlogiftique , forme » du phofphore , qui fe dc'compole aife'menc par le moyen du feu. » L'alkali fixe, qui fervoit de bafe au diamant, eft enleve dans le » terns de la deflagration du phoiphore ». Nous nous borncrons a cette courte analyfe dc l'ouvrage de M. Sage; les aflcrtions Sc les preuves rapporte'es, fufrilent pour donner une ide'e de fa methode docitnaftique, Sc de fes vues. II nous refteroit a tracer la fuite de la nomenclature, a parler de fon travail fur les mines , qui forme la troifieme partie dc fon ouvrage : mais comme les experiences qui fervent de fondement a la diftribution de ces lubftanccs naturelles , ont etc publiees pat M. Sage, Sc qu'elles font con nues du Public , nous croyons devoir nous borner a ce que nous avons dJt des pierres Sc des terres, pour faire connoiire cet ouvrage e'le- inenrairc. Nous y ajouterons feulement quelques reflexions dans la fuite. (a) Voycz cc qui a dte die a cc fujet dins Tartidc d: Janvier l~~- , pag. 479, & dans cclui d'Aoiit 1771 , pag. 108. Fevrier 1772, Tome I. Coo OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , SUITE DES MEMOIRES Sur Us Charanfons , couronnis par la Societi Roy ale d 'Agriculture de Limoges. I A-T-IL des proce'de's surs pour exterminer les infe&es deftructeurs done on a fait connoitre la vie & les mceurs dans la premiere partie de ce volume, page 171 1 Les papiers publics ont publie' depuis Iong- tems des recettes fans nombre , & leur multiplicite decele leur pen de valeur. II en eft de ces recettes , a-peu-pres comme celles pour certains nuux ; elles ne (ont utiles qu'a ceux qui les annoncent , & les font valoir. L'inte'ret perfonnel a plus de part a ces pre'tendues de'eouvertes , que le bien de I'humanite : cependant , on ne doit pas , pour cela , les ne'gli- ger entierement ; quelques-unes paroiffent conformes a la the'orie , & les autres peuvent etre confirme'es par l'experience; ces dernieres fonr les plus sures. C'eft a celles-la que nous nous attacherons, en raffemblant fous un memc point de vue , ce qui a e'te' dit dans les Me'moires de M. Joyeufel'aine, de M. Lefuel , Cure de Jamericour, & de M. Joleph Lottin charme d'avoir trouve' l'occafion de te'moigner a l'Acade'mie de Mar- »» fcille ion efcime , & combien il fait cas des Profeffeurs qui la com- « pofent ». Fevriek 177a, Tome I. Hhhh 1 tfii OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ■ ■ i E co l e gratuite de Peinture , Sculpture & Ge'ome'trie de Lyon. ±^j N l'anne'e 1752. , quelques Amateurs ctes Arts avoient forme le detain d'e'tablir une Ecole de Peinture, de Sculpture &: de Ge'ometrie- pratique a Lyon. Une Ville audi celebre par (es riches manufactures, une fabrique d'etoffes de goiir manquoit de D?(Tinateurs & n'avoit point de reflource pour en former. M. l'Abbe Lacroix, Vicaire-ge'- ne'ral , que fon gout pour les belles-lertres & pour les Arts a toujours diftingue', fe 'mit a la tete de ce projet ; il 1'adrriTa au Manure des Finances qui confulta le Corps de Ville. Celui-ci crut devoir prendre l'avis des principaux Fabriquans d'e'tofTes de foie. lis ne virent d'abord, dans l'e'tabliffement propole', qu'une foule d'e'mules & de concurrens qui alloient bientot fourmiller; ils craignirent de voir avec les talens, les fecrets, meme leur fabrique pafler a l'etranger, fi on mulriplioic a un certain point le nombre des Deflinateurs. Ces objections , quoique frivoles , arreterent la main bienfaifante qui auroit concouru vo'ontiers a former cct utile ctabliffement. On hit bientot que les Fabriquans d'e'toffes qui l'auroit da folliciter eux-memes , s'y e'toient oppofes. Cet e'tabliflement fut retarde' jufqu'a. ce que l'ad- miniftration de la Province fiir, confie'e a M. Benin, qui, de l'lnten- dance de Perpignan, fut nomme a celle de Lyon en 1756. Ce Magiftrat fut bientot entoure de tout ce que la Ville avoit de bons Citoyens. C'eft rhommage libre qu'on rend a la vertu, qui l'obtient fans l'exiger. On ne tarda pas a lui parler de l'Ecole gratuite, des demarches qu'on avoit faites pour l'etablir, & de la petirefte des objections qui avoit arrete' l'cxe'cution du projet. On re'folut dans la petite focie'te d'Ama- teurs que M. Bertin avoit forme'e chez lui , d'adrefler a M. le Conrroleur- Gene'ral un nouveau plan pour obtenir les fonds ne'ecflaires a l'e'tablif- fement ; mais M. Bertin propofa d'efTayer le gout du public, avant d'importuner cc Miniftre. II fera bien plus facile d'obtenir des fonds pour un e'tabliflement tout forme', que pour un e'tabliffement a faire. Voila , dit-il, en jettant cinq louis d'or fur la table, le premier fonds de l'Ecole de dcftin. En un momenr,le fonds de l'Ecole fut de 60 louis. MM. Frontier & Nonotte, Peintres de 1'Acade'mie Royale de Peinture & de Sculpture de Paris, M. Perache , Sculpteur, s'engagerent de donner grauiirement leurs lecons aux Eleves. II ne s'agifloit plus que de trouver un logement convenable & fpacieux, & de le pourvoir des meubles ne'eeflaires a fa deftination. En moins de huit jours tout fut e'tabli •, & l'Ecole ouverte, recait deja trente Eleves. On longea bientot a ouvrir une Ecole de Geome'trie. Le Commerce preta, pour cet effet , fa fale d'aflemblee a la loge des Changes, & SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 613 cette Ecole hit audi frcquentce que cellc de Deffin. Au milieu de fes fucces , l'Ecole Sc la Societe d'Amatcurs firent une perte tres-grave. M. Bertin fut appelle a la Lieutenance-geiic'rale de la Police de Paris. On cfpera, pendant quclqucs j >urs, que !a demande qu'il fit au Roi, de rcfter a Lyon, feroit e'coute'e ; mais (a rc'iiftance fut vaine, il ralluc obe'ir. M. Bettin , Lieuteneiiant-Gene'ral de Police, envoya toujours fa contribution pour le foutient de l'Ecole de Lyon , 6c il y entretint unecorrclpondance fuivie avec la Societe. Nommc Controleur-Ge'ne'ral des Finances, a la fin de Novembre 1759, au milieu du cahos im- menfe qui l'environnoit, il apperc,ut encore de loin fa fille bien-aimee. Elle avoit befoin de fecours; il lui procura ifioo livrcs fur la caiffe du droit des e'toffes e'trangeres, deltinees aux encouragemens des Arts. La Socie'tc anime'e par ce bienfait , augmenta le Prix qu'elle e'toit en ufage de diftribuer. Elle en rendit compte a M. Bertin en 1761 , en lui cnvoyant la lilte des Eleves qui s'etoient diftingue's, & les mefures qu'elle avoit prifes pour les encourager de plus en plus. M. Bertin fit porter en 1761, l'encouragement pour l'Ecole dc Lyon a 3000 livres; mais les fonds deftine's a cette gratification, commencerent a tarir en 1764, par une raifon trop utile au com- merce de la ville de Lyon, pour tie pas la rappeller ici. M. Bertin, occupe pendant fon miniftere de tout ce qui pouvoit favorifer les manufactures, fit fairc un etat de comparaifon des e'toffes de foie etrangere Sc de celles de France. La qualite' des unes & des autres fut examine'e ; & il fut e'tabli par le rc'fultat de cette comparaifon, que les etoffes e'trangeres, relies que les velours, les damas , les taffetas & plufieurs autres e'toffes, revenoient encore a meilleur marche que les etoffes de France , malgre les droits que les premiers payoient a leur entre'e dans le Royaume. Le prix des foies en Italie, & le bas prix de la main-d'ceuvre des e'toffes qui fe fibriquent pour la plupart a la campagne, etoit la caufc de Pine'galite ; il fut arretc que, pour c'tablir le niveau, on augmeiueroit d'un quart en fus, le droit fur les etoffes venant de 1'etxanger ; ce qui fut ordonne par un Arret du 1 5 Mai i7<5o,quiconticnt plufieurs aurresdifpofitions, dontle commerce a reffenti les hcureux effets. Celui qu'il devoit produire fur les e'toffes e'trangeres & qu'il produifit, fut une diminution tres-confide'rable dans l'importation des etoffes de foie etrangcres. Les Fabricans de Lyon encourages, firent des damas Sc des velours, qu'ils e'tablirent .1 plus bas prix que ceux de Genes. On ceffa peu-a-peu de tirer dc ceux-ci; & par confequent, le produit du droit fur les etoffes de foie e'tran- geres , diminua conlidcrablement, & au point qu'en 1766, il a Jte totalement infuffilant pour la gratification de 1 Ecole de Deffin de Lyon. M. Bertin, Secretaire d'Etat de la Province, n'ayant pas moins a cucur FsrRiER 1772, Tome I. 6i4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le foutien de 1'EcoIe gratuite de Deflin , a repre'fente la neceflite de venir a Con fecours par quelqu'autre moycn : &c il fir remettre a M. le Controleur-Ge'ne'ral au mois de Mai 1767, un projet d'arret pour faire ordonner le paiement de 3000 livres de gratification, fur la caifle des Octrois municipaux de la ville de Lyon. L'adminiftration de cette Ecole & Ces Reglemens , ont fetvi dc modele a celle de Paris. Il en eft forti d'excellens Defllnateurs pour la Fabrique ; Sc M. Boiflleux s'eft fait une brillante reputation dans la Peinture. Ecole gratuite de Dcjfin a Paris. 1 , E terns de la guerre ne pouvoit etre propice a l'e'tablifleinent des Ecoles gratuites de Deflin , d'Archite&ure &c de Ge'ome'trie dans la Capitale. M. Bertin vit pafler le terns de fon miniftere au Control; gene'ral des Finances, fans pouvoir s'occuper de cette utile objet : mais a peine eut-il ete fait Secre'taire d'Etat, qa'il fongca a donner une fuite a fes ide'es, pour 1' e'tablifTement d'une Ecole gratuite de Deflin a Paris. M. Bachelier, de l'Academie Royale de Peinture, lui parut propre par fes talens & fa bonne volonte, a e'te mis a la tete de cet etabliffement. M. Bachelier fit un Me'moire que M. Bertin envoya a M. le Lieutenant- Generalde Police, le premier O&obre 1764: ce Magiftrat y re'pondit !e 8 du meme mois , & il ne parut arrete' , que par les fecours qui fe- roient ne'cefiaires pour former cet e'tablifTement. Le choix des inoyens a occupe M. Bachelier, pendant plufieurs mois; & la fin de l'anne'e 1765 e'toit de'ja arrivee avant d'etre fixe pre'cife'ment fur aucun. Il en re'moigna fa peine par fes lettres du 31 Novcmbre 1765 , & 21 Fe- vrier 1766, a M. Bertin, qui en e'crivit a M. le Comte de S. Flo- rentin & a M. le Prevot des Marchands a Paris. Mais les moyens qui avoient e'te propofes a l'Hotel-de- Ville , n'ayant pu etre agrees , malgre la bonne volonte de M. Bignon , Pre'vot des Marchands, & le zele de M. L'Empereur , premier Echevin , qui firent plufieurs demandes a ce fujet , M. le Lieutenant-Ge'neral de Police fit demander a. M. Bercin un nouveau Memoire, ou les avantages de cet e'tablifTement feroient pre'fente's d'une part, & oil les fucces de Lyon fetoient conftate's de 1'autre , afin de de'terrniner le Miniftere a autorifer celle qui feroit forme'e fous fes aufpices. M. Bertin fit faire ce Me'moire, & le remit a M. de Sartine , le 17 Mai 1766, avec tous les details concernant 1'Ecole de Deflin , e'tablie a Lyon en ij%S. II fut arrete que 1'e'tablif- fement auroit lieu , & il ne fut plus queftion que du choix d'une falle , 011 Ton pourroit donner les lec,ons. M. Bachelier avoit jette les yeux fur un emplacement , de'pendant de TEglife S. Thomas du Louvre : mais une ne'gociation continued SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6i5 pendant pluficurs mois avec le Chapitre dc cette Eglife, n'aboutic qu'a un refus, & a une deliberation prife par les Chanoines, de donner la preference de l'emplacement a un Menuifier , pour en faire un Chantier. M. Bachelier fit obferver dans fa lettre, que ce refus c'toit d'autant plus de'place de la part du Chapitre, qu'il venoit de recevoir 150000 livres, pour la re'eonftrudtion de fon Eglife. On prit enfin le parti de choifir la Chapelle abandonne'e du College d'Antun , rue S. Andre-des-Arcs, pour y placer l'Ecole; & les fouf- criptions furent ouvertes le 6 Juin ij66, par des affiches, oii tous les parens furent invite's d'envoyer a M. Bachelier le nom , l'age , la demeure , 8c la profeflion de ceux qui voudroient profiter de l'inf- rrudtion des Ecoles gratuites : en moins de quinze jours, 800 per- fonnes furent inferites. M. le Lieutenant-General de Police donna, le 20 Juillet fuivant , un Re'glement pour etre obferve dans cette Ecole, qui indique l'ordre & la diftribution du travail dans les diffe- rences parties de la Ge'ome'trie-pratique , de l'Architeclure , de la Fi- gure, des Animaux , des Fleurs 8c de l'Ornement. ( Voyez ce que nous en avons dit, pag. 506 8c fuivantes). D'aprcs ce qu'on vient de lire fur l'e'tablifTement des diffe'rentes Ecoles gratuites de Deflln, il fe pre'fente naturellement un probleme un peu humiliant pour 1'humanite' en ge'ne'ral. Pourquoi une ame honnete a-t-elle tant de peine a faire re'uflir un objet dont l'utilite eft vifiblement reconnue ? pourquoi le commun des hommes s'oppofe ou fe refufe-t-il a ce qui eft avantageux pour Jui-memc ? 8c pourquoi , enfin , quand l'operation eft commencee , change-t-il fes oppoficions en enthoufiafnie pour la chofe? CONSTRUCTION Des Po'iles i la maniirc des RuJJes, des Sue'dois, &c. 1 , A ne'eeflite eft la mere de l'induftrie ; & plus nous multiplions nos befoins , plus l'efprit humain travaille pour les fatisfaire : les uns font une fuite du luxe, les autres tiennent a notre conftitution &c au pays que nous habitons. Heureux celui qui fait les reduire dans des bornes etroites! Les befoins auxquels on accorde plus qu'ils ne demandent , font naitre les degouts , la fatie'te'; & tout ce que la cupidite defire avec paflion , eft un befoin. Le grand art, pour le faire fervir a notre bonheur, eft de laifter toujours quelque chofe a defirer. Les beloins, dont le rapport eft direct: a notre fante , a notre confervation , font les feuls , a proprement parler ; Its autres tiennent plus a l'opinion FAvrier 1772, Tome I, 616 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qu'a la realite : l'induftrie 8c la cupidite viennent au fecours de tons* deux. La premiere invente , 8c cherche a diminuer les frais ; la feconde orne , decore, cmbellit, 8c tient au luxe. Les poe'les font en Suede, en Ruflie, & dans les Contre'es feptentrionales , d'une ne'eeflue indif- penfable ; ils fervent a conferver la chaleur. Une cheminee a trop d'e'vafement ; 8c fi on n'a pas l'attention continuelle d'ajouter du bois, la chaleur eft peu fenfible, parce qu'elle (uit le courant d'air , 8c fe dif- fipe avec la fume'e. Le poe'le, au contraire, la concentre plus long- terns ; (es parois exte'ricures 8c celles des tuyaux e'tant tres-minces , elles communiquent plus aile'ment la chaleur; de forte qu'un poe'le, avec une petite quanrire' de bois, echauffe beaucoup plus un appar- tement, que ne feroit le feu "d'une chemine'e avec fix on huit fois autanc de bois. Ce n'e'toit point aflfez pour ces habit ins d'un climat rigou- reux , d'avoir trouvd les, moyens les plus fimples d'entretenir , dans leurs maifons, une chaleur douce, 8c de tromper, pour ainfi dire, la nature, il falloit encore le faire avec la plus grande e'eonornie. Les poe'les dont nous donnons ici la conftrudtion , & leurs diffe- Jentes coupes ■, rempliffent parfaitement cet objet , 8c ineme ils long fulceptibles de toute efpece d'ornemens. Plus on donne de furface a un poe'le conftruit de cctte maniere, plus on augmente de chaleur. Ainli , on ne fera plus furpris de voir cette efpece de chemine'e occu- per toute la hauteur d'un appartement, fa largeur & fa profondeur ^tre proportionne'es a fa hauteur. La planche i , fig. i , reprclente un poele vu en dee; Jig. 2, la coupe inte'rieure; & Jig. 3 , le trace ou bafe du poe'le. A , Jig. 1 , eft la porte par laquelle on introduit le bois &c on met le feu-, B, Jig. %, place dans laquelle on arrange le bois, ou le foyer proprement dit, le'pare du cendrier D par une grille; E, cavite' formant un repos de chaleur, & fervant de pa'ffage a la fume'e; F, repos de chaleur fans paflage pour la fume'e, & lans com- munication avec les cavite's infe'rieures; e'eft dans le plateau fupe'- rieur du poe'le que cette cavite' eft me'nagee. Les Jig. 3 repre'lentenc la bale du poele , fon plan , 8c les endroits deftine's a en tirer les cendres G ; cette partie eft ferme'e par une porte fer : il y a encore une petite porte H a l'autre extre'mire' du cendrier; celle-la fert prin- cipalement a entretenir le courant d'air ne'eefiaire pour 'faire briiler le bois, & la porte G n'eft ouverte que lorfqu'on y met le feu pour augmenter le courant d'air, ou pour en tirer les cendres. On comprendra plus aife'ment la conftruftion de ce poe'le, & la route que fuit la fume'e, en confide'rant la planche feconde. La Jig. 4 repre'fente la coupe du poele charge de bois H , & le courant de Ja fume'e I; des plateaux de t61e , de fonte ou de terre cuire, formenc le toit ou fe'paration de chaque cavite K. Ces feparations iont pro- {ongees un peu plus loin que les trois quarts de la cavite , 8c fong jiputenues T.J J>. &6. /'/.,. 12. _- . i &■■*' 1 1 . r I i ID) ft '> 1 ■ i"1 1 i^rw n ii , 1 rrr l ill Fio.HL. G J ^ ^ ^* ScAc//i' i/f 6 ' rwJs /.' jy . /;/ l'ombre . parut noire comme a l'ordinaire. Une bougie , allumee fut place'e a cote', £c de maniere , qu'il fe forma deux ombres : on remarquoit une tres- ^rande noirccur au point de coincidence de ces deux ombres. La partie de l'ombre qui ne dependoit que du clair de lune , e'toit pale •> le rede de l'ombre, qui le terminoit aux rayons de la bougie, paroiffoit parfaitement bleu. ie. Exp. Si on confidere de loin une fume'e qui fe re'pand dans Pair, & qui foit bien e'claire'e des rayons du foleil , elle paroitra bleuarrc. 3C. EXP. Si vous faites paffer par uh petit trou un rayon de lumiere dans une chambre oblcure & pleine de fume'e, cette fume'e, fi elle n'eft pas trop e'paifTe , aura la meme couleur que celle de l'expe'rience pre'ce'dente. ac. Exp. Funccius dit que le charbon enveloppe dans un linge tres- fin , paroit bleu. II pre'tend encore que la meme couleur a lieu , fi on mele du charbon pile avec un peu de craie; ou fi apres avoir re'duit le charbon en poudre, on le fait paffer a travers un linge, ou un pa- pier perce de petits trous , & qu'on pre'cipite quelque peu de cette pouffiere fur un papier blanc. J'ai repete cette expe'rience fans fucces, quoique j'aie examine' cette poudre a diffe'rentes diftances, 8c apres l'avoir aucmente'e avec de la craie. La couleur bleue des veines du corps humain , eft due a la tranlparence & a la reflexion de la lumiere par la furface externe. En effet, ce fang contenu & renferme dans les veines , tire fur le noir •, & e'eft du melange de cette efpece de noirceur avec les rayons de la lumiere , qui eft un corps blanc , que re'fulte cette couleur bleue. 5e. Exp. J'ai fait tomber une goutte d'encre fur du papier blanc; j'ai jette fur cette goutte d'encre tant foit peu de craie : quand, d'une certaine diftance , on regardoit cette mixtion , Sc quand le papier n'etoit pas expofe a une tres-grande lumiere , cette mixtion paroiffoit bleue : on doit cependant avouer que cette couleur n'etoit pas fi dif- tinde que dans la premiere expe'rience. II refulte de ces experiences, qu'un certain melange de lumiere avec du noir , peut affe&er Pceil de la meme maniere que le fait un rayon bleu; ainfi, on voit h pofteriori que la couleur bleu du ciel , peut £tre l'effet de la lumiere re'fle'ehie par les parties c'lementaires de Pair , ou par des vapeurs qui s'y ttouvent re'pandues. Une infinite' d'exemples demontre que l'application d'un phenomene, fonde'e fur une hypotheie ou une probabilite, ne porte pas le caractere de l'evidence, jufqu'i SUR L'HIST. NJTURELLE ET LES ARTS. 6"i$ ce que l'e'xpe'rience l'ai prouvee d'une manic-re de'cifive. II s'agit done a pre'fent de difcuter fi la couleur bleue depend reellemcnt de ce uie'- lange. La couleur bleue dt lair ne vient pas du me'lange de la lumilre ayet Tombre. Premiere Preuve. J\ OU S avons dit un peu plus haut que la couleur bleue peut avoir lieu, fi la made de la lumiere qui eft blanche, eft tellement diminuee que fa force fe rrouvc la meme que celle d'un rayon bleu ; en effer la fenlation fera la meme que celle qui fera produite par la lumiere bleue. II fuir de-la, que la mafle de la lumiere fe trouvant augmenre'e de nouveau, fa force le fera pareillement , ainfi que fon action /ur la re'tine & la fenfation qui en eft la fuite ; il en refultera une couleur plus ou moins vive, felon l'augmentation ou la diminution de cecte force. Si la lumiere bleue provenant de ce me'lange, eft diminuee en mafTe, on aura une couleur violette; & dans le cas contraire, le verd , ou le jaune, ou le pourpre & meme un vrai rouge: d'apres cela, nous raifonnons ainfi. Toute couleur qui provien: du me'lancre de la lumiere avec 1'ombre, doit changer en une aurre couleur, t\ Ja mafle de la lumiere change, ou (i la quantite d'ombre augmentc. Or la couleur de l'air eft toujours bleue & demeure conftamment la meme, malgre les variations de la quantite de lumiere dans l'arhmof- phere ; done, la couleur bleue de l'air ne vient point du melange de la lumiere avec Tombre. On pourroit objeiES melanges renferment des Me'moires inte'reffans, marques ail fecau de la i'aine Phyfique. Le premier eft fur l'ele'vation & la fuf- penfion de l'eau dans l'air & fur la rofe'e. Nous en avons donne' une le^cre analyfe, en publiant page jS^ de ce volume, la difTertation de M. Jean Ekfur la nature de la rofe'e ; le fecond , cil un Memoire fur l'ufage des eaux de Balaruc •, le troifieme & le quatrieme , fur la virion, relativement aux diftances desobjets ; le cinquieme & le fixieme, fur les fievres aigue's ; le fepticme contient des re'Hexions Si des ob- fervations fur le fcorbut, le huitieme traite des eaux fulfureufes ; le neuvieme enfin , eft un precis fur les eaux mine'rales. Plufieurs de as Me'moires ont e'te' infe're's dans les volumes de 1'Acade'mie Royale des Sciences, 6V les autres ont e'te' honores de Ion approbation. Le pre'eis fur les eaux mine-tales a e'te imprime' en latin fous ce tirre: De Aqua- rum mineralium naturd & ufu , propofitiones. Ces difte'rens Me'moires me'riteroient chacun une analyfe 8c des e'loges •, mais nous nous con- tcnterons de faire connoitre ce dernier comme d'une utilite' plus e'ten- due. Les eaux minerales font tres-communes en France; & il n'eft peut-et re aucune de nos Province qui n'en renferme plufieurs. Si ellesfont ignorees , ce n'eft pas la fame de la nature ; mais du pen d'expe- riences & du peu de lumieres de la plupart des Praticieus dans les campagnes. II fcroit a fouhaiter que le Gouvernement fit publier das inftructions relatives a cet objet , & les fit diftribuer gratuitement dans tputes les Provinces; on verroit bientot nos eaux therma!:s mieux analyfe'es , mieux connues, & enfin, jouir de la refutation qu'elles me'ritent. II en eft de ces eaux, dans l'efprit de certaines gens , comme des pe'lerinages ; plus ils font e'loigne's , plus d'effcts fall SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. cm i ils font reputes procurer. II lerojt bicn difficile de vaincre les pre'juges. Peu de perfonnes one des idecs claires 8c ncttes fur la nature &c fur les principes de ces eaux. Plulieurs ont attribue aux unes les principes des autres , &c quelqucs-uns les ont confondus. Tons ces ecarts lont les iuitcs ordinaires de l'ignorancc : il faut etrc affermt dans la theorie , avant de 3*)- 45. On doit auffi fa voir , que dans le re'fidu des eaux minerales evapore'es ju(qu'a ficcite, ou prelqu'a ficcite , il peut fe trouver , (oit um terre abforbante, foit du fel marin , (oit un (el marin de'liqucf- cent, ( § 58 ) qui, faifant effervefcence. , lert de preuve de la preience d'un veritable (el alkali dans ce re'fidu. 46. Pour eviter de pareilles erreurs , on doit premierement diffoudre le re'fidu dans de l'eau froide , & filtre'e. La terre abforbante , s'il y en a , eft retenue fur le filrre. 47. Si cette difTolution filtree , concentree par evaporation , ou meme reduite a ficcite, fait encore effervefcence avec l'acide vitriolique , cette effervefcence peut e'galement de'pendre , foit de Paction de cette acide fur un fel alkali pur, foit de Paction du meme acide fur un (el marin a bafe alkaline ou a bafe terreufe. Dans le fecond cas , la vapeur qu'excite cette effervefcenfe , frappe vivemenc les narines , eft evident ment de l'efprit de fel ; & ce refidu ne fait point effervefcence , lorfqu'on y verfe un acide vegetal ou de Pefpric de fel. Si , au contraire , l'acide SUR L'HTST. NylTURELLE ET LES ARTS. 6i7 vitriolique, verfe furcc rc'fidu, y excite line effcrvefcence , parce qu'ellc y trouve un (el alkali, cette eftervdeence ne donne point de vapcurs d'efprit de fcl ; & d'ailleurs , elle a lieu cgalcment lorfqu'on n'emploic que les acides vc'gctaux 8c l'elprit de (el. 48. Lorfqu'une can mineral e contient en meme terns du fel alkali £c d'autres (els, celui-la cryftallile le dernier. 49. Une eau mine'rale ne peut contenir en mcrae terns un alkali fixe (§41 , 41 ) & Ic fcl marin dcliquefcent (§ 58), puifque cclui ci feroit nc'ceflairemeiit de'compolc par le premier : la the'orie, oil plutot l'exnc'- rience nous met en droit d'afTurer pareillement que le fel d'Epfom (§36) ne peut fe trouver dans la rnetne eau mine'rale avec cet alkali -, ce qui donne lieu de ioupconner quelque erreur dans Panalyfe des eaux de Bourbon , par M. Boulduc , qui a cru trouver dans ces eaux , du fcl alkali fixe mineral & du fel d'Epfom. 50. Rien de plus ordinaire dans l'analyfe des eaux minc'rales, qucd'y trouver une terre ablorbante. 51. Ce produit eft tres-aife a reconnoitre. Les terres abforbantes refu(ent de fe difToudre dans l'eau pure , & font effervefcence avec les acides. ■5 1. Dans l'evaporation lente & gradue'e , les eaux mine'ralcs qui en contiennent, cette tcrre fe montre la premiere lous la forme d'ecail- les legcrcs , qui naiffcnt a la furface de l'eau , 8c fe pre'eipitent fucceffi- vcmenr. 53. Si Ton emploie de l'eau chaude pour difToudre le rc'fidu d'une eau minerale e'vapore'e a ficcite', on doit obferver avec Springsfeld , que par l'intcrmede des (els neutres , cette eau fe charge d'une partie confi- de'rable de la terre ablorbante , (uppofcz qu'il y en ait dans ce rc'fidu. 54. La terre ablorbante qu'on trouve dans les eaux minc'rales eft de deux efpeces (§13)5 l'une eft calcaire , 1'autre eft de l'efpece de la magnc'fie 55. La premiere fe fait avec 1'acide vitriolique , la fele'nite ( § 5$ )} la feconde combinee avec !e meme acide , donne le fel d'Epfom. 56. La felcnite qu'on trouve dans nombre d'eaux mine'ralcs, eft done un (el neutre, forme par Punion de 1'acide vitriolique avec une terre calcaire. 57. Cette compofition de la fele'nite, fe de'monrre, i° en produt- fant le meme fel par la combinaifon des deux lubftances que nous venons de nommer ; 1". en faifant du foufre artificiel avec la fe'le'nite, & un Hux te'duc-tif , expofe a un feu de reverberre dans un creufct bien fcrme; $°. en traitant de meme la felcnite avec le fel de tartre ; fai- fant cn(uite difloudre 8c cryfhllifcr , on obtient, par cepioce'de', un acide vittiole. 5S. la felcnite eft une des lubftances qu'on trouve le plus fouvent Ma rs 1772, Tome I. *38 bBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE; dans les eaux minerales. Ce fel n'eft foluble qu'a grancie eau. II fe fond difficilement dans la bouche, craque fous la dent, n'a aucun gout. A cc feul examen , on le ptendroit aife'ment pour une eipece de calc. Dans l'e'vaporation des eaux minerales , c'eft une des fubftances qui fe ma- nifeftent les premieres. Elle vient apres la terre abforbante , lorfqu'il y en a. Dans cette evaporation , elle cryftallife en aiguilles , qui , fe- che'es, paroiffent foyeuies & brillantes : au moyen d'une e'vaporation infenfible & fans feu , elle fe forme en cryftaux plus gros. C9. Dans l'analyfe des eaux mine'rales, on trouve (ouvent du fel marin a bafe terreufe. La terre alkaline qui forme cette bafe , eft de la nature de la magne'fie. 60. Ce n'eft que par une e'vaporation forte , qu'on petit parvenir a fecher ce fel neutre, qui refufe de cryftallifer, & qui attire puif- famment I'humidite de l'air ; & par conle'quent , l'evaporation ne le de'montre dans les eaux oil il fe trouve , qu'apres que tous les autres fels ont cryftallife. 61. L'huile de tartre, par de'faillance , en pre'eipite la terre alka- line (§ 58), & fait avec l'acide du fel marin, un fel marin re'ge- ne're, autrement dit, le fcl febrifuge de Sylvius. 6z. On eft fonde' a croire que fa faveur extremement vive 8c pi- quante (§ Jj) , l'effervefcence qu'y excite l'acide vitriolique ( § 44 ) & fa deliquefcence (§ j<)), l'ont fouvent fait prendre pour un lei alkali. 63. A en juger fur les effets de ce fel fur 1'organe du gout, on eft porte' a croire qu'il y a beaucoup de part aux propriete's des eaux qui en contiennent; & qu'employe dans nos ordonnances , foit feul, foit combine avec d'autres fels neutres, il pourroit £cre utile dans plu- ficurs cas. 64. Ne feroit-ce pas a l'aflbciation de ce fel neutre de'liquefcent (§ 158), qu'on devroit attribuer la petitefle de ces cryftaux, 8c la grande deliquefcence de certains fels d'epfom qu'on rencontre quel- quefois dans nos Pharmacies? 6j. Quelques eaux mine'rales contiennent du fel de Glauber : on le leconnoit par fon amerrume, par la figure de fes cryftaux, & par fes autres proprie'te's, qui font detaillees dans tous nos livres de Chymie. 66. S'il y a de l'alun dans une eau mine'rale , ce qui eft extreme- ment rare (§ 16), on le reconnoit a fa faveur ftyptiquc. L'huile de tartre pai defaillancc, en pre'eipite une terre alkaline particuliere , & fait, avec l'acide de l'alun , un tartre vitriole'. 67* Lorfque j'ai dit (§ 17) que quelques eaux minerales falines contenoieM du bitume ou petrole, je n'ai point eu intention de parler de ce pe'trole qui , comme celui de Gabian , aupres de Be'ziers , nage f, la furface de l'une des fourccs d'eau mine'rale qu'on y trouyei inais SUR L'HIST. NATURE LIE ET LES ARTS. on a effaye' ailleurs cette mcthode (il e'toit alors en Egypte); mais » je ne doute point qu'clle n'cut le meme fucccs , la nature c'tanc » par-tour la meme, & ne variant jamais : j'ai eprouvc ce moyen, & ?> je re'ponds de la reuffite » . Si on veut avoir un vin potable dans l'anne'e, il faut le foutirer en Janvier, Fevrier 8c Mars. Cette manipulation demande quelques dc'- tails : on diroit qu'on a pris a tache d'introduirc dans chaque opera- tion propre a pcrfectionner le vin, les" abus les plus grolllers. Des particuliers , & le nombre en eft tres-grand, font un trou dans le bas du tonneau , ou en cnlevtnt le bouchon •, il s laiflent coulcr Ie vin da.ns des vaifleaux de'eouverts , & le mcttcnt enfuite dans d'autres tonneaux, qui reftenr. debouches jufqu'a ce qu'ils foicnt pleins. Il n'eft pas pof- fible d'imagincr line plus mauvaiie me'thode ; ou travaillez le vin ainfi qu'il l'cxige, ou iaift" z le livrc a lui-meme ; il gagncra au change. Celui qui vouJra fourirer fo;» vin , fe fcrvira d'une pompe avec 011 fans fouftlct (cllcs font trop connucs pour les de'erire; ; il bouchera avec du vieux linge ou de la filaffe , l'ouverture par ou la pompe aura ere' introduite, & la pompe (era fixee, pour que ces ebranlemens n'agitent point la lie : on approchera enfuite le tonneau qui doit ctre rempli : on v introduira la canelle de la pompe, & on bouchera le viiKie qu'elle ne remplit pas : on pompera & on (outirera le vin fans dilcominuer •, je reponds que fi on travaille ainfi, le vin ne fera point trouble, laifTera trcs-peu echapper de principes volatils; objet effentiel. C;lui qui fera jaJoux de n'avoir que du vin patfait, doit mettre de cote les cinq ou fix premieres &C dernieres pintes de vin qui fbrtitont. Le vin qui approche le plus de la lie, eft iujet a aigrtr, parte qu'il contient bcaucoup de tartre & de lie qui ne font pas precipite's, & le vin de la lurface eft foible, Sc d'une qualite bien inft'rieure a celui du centre j ce qui eft aife a ve'rifier. Ceux qui defireront que leur via puiffc fe conferver long-tems, ou qui le deftinent a paftcr la mer, le murceront ou fouffrcront; Mars 1772, Toms I. B4« OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, favoir, en Janvier, 8c lorfqu'ils le fourireront en Mars. Je dis qu'il faut mutter on fb'iffrer en Mars (ces mots font fynonymes ); arretons- nous un moment fur ces deux objets. » L'ope'ration de murter , eft indilpenlablc pour les vins trop aqueux 8c de petite qualite, principalement pour ceux qui aigriflcnt tk pouffent promptement. Elle convient en ge'ne'ral a toute forte de vins . excepte'a ceux qui font vifqueux , firupeux , qui, par confe'quent, ont befoind'une fermentation plus active. La vapeur du foufre enflamme', ote 1'elafticite a Pair furabondant ; ce qui fufpend la fermentation , & ce qui revient a peu-pres au meme, que (i on mettoit une liqueur fermenrante dans le vuide. Cet air , par fa facilite aetre condenfe, rare'fie' , felon les degre's de la chalcur de Pathmofphere , y contribue fingulieren;ent. Plufieurs perfonnes ont penfe que cette vapeur agiffoit comme acide ; mais fi Ton rcfle'chit fur ce phenomene , il fera bien prouve' que les acides n'arretent point la fermentation , & qu'ils la conduifent bien plus promptement a l'ace'teufe. La vapeur du loufre n'agit que fur Pair fur- abondant a la mixrion du vin , dont elle de'truit Pelafticite' , faifant dans cet air une difTolution plus e'tendue du phlogiftique que cette vapeur contient tres-abondamment. J'ai , en fun^mt ce principe , & pour con- noitre jufqu'i quel point un vin peut etre mutte' , conferve prefque toute fa douceur pendant une anne'e entiere , en re'pe'tanc tous les quinze jours cette ope'ration , & en tenant le tonneau exadtement plein. On placoit , pour cet eftet , la meche allume'e fur le boid du bondon , & en fouflloit avec un chalumeau fur la vapeur, afin qu'elle entrat plus aife'ment : le tonneau e'toit aufll-t6t apres exaclrement bouche &C rempli, le Iendemain feulement , par le moyen d'un petit entonnoir adapte' a un trou pres du bondon. II eft ne'ceflairc de remarquer que le tonneau fut place au(Ti-t6t qu'il fut rempli , dans un fouterrein tres- ptofond , 8c dans lequel on fentoit a peine les variations de Pair. On objectera peut-etre que cette operation decolore les vins rouges; qu'elle leur communique un gout & une odeur de foufre , Sec. Je re'- ponds , i°. que la raifon qui engage a mutter les vins blancs, eft la meme pour les vins rouges. i°. Qu'il eft vrai que la vapeur du foufre de'truit certaines couleurs ve'ge'tales ; mais e'eft feulement lorfqu'elle agit imme'diatement fur elles. Hoffman & plufieurs Auteurs pre'tendent que cette ope'ration colore les vins rouge. 30. Que cette vapeur ne leur communique aucun mauvais gout, a moins qu'on ne laiffe tomber dans le vin quelques gouttes de foufre enflamme , oil une partie de la toile qui lui fervoit de fupport ; dans ce dernier cas , le vin contracleroit, outre le gout de foufre , celui d'empireume. 40. Je mutte depuis dix ans des vins rouges 8c blancs , & je n'ai jamais rcconnu le gout de fouffre. On peut re'peter l'expe'rience , fi on en doute. II eft impoffible qu'en muttant le vin de la maniere indique'e, dene pas SUR VHIST. NATURELLE ET LES ARTS. alors,ils en trouveront la ve'ritable cattfe. Apres I'examcn de ces details , paflons aux ge'ne'talite's , parce qu'il n'eft point de regie fans exception. Si l'anne'e a e'te' feche & tres- chatide, le vin des bons cantons des Provinces me'iidionales fera vif- queux , fyrupeux •, e'eft pourrjuoi Je confeille de le laiffer dans le cellier pendant tout 1'hiver, pourvu^qu'il n'y gele pas. Si la cuve eft fonce'e , qu'clle ferve de jonneau ou de foudre , le vin gagnera beaucoup en. qualite'. La fermenta ion y fera p'us forte, les principes plus de'lunis , mieux combine's, &c le vin plutot rendu a fa liquidity convenable. Si, malgre' cette pre'eaution , le vin eft encore irop doux apres 1'hiver, il convient de le laiffer plus long-tems dans le cellier fans le fourirer. Si le vin a de la qualite, & qu'il ne foit pas vifqueux, on le foutirera dans le terns & de la maniere indiquee. Si, aucontraire, l'anne'e a. cte froide & pluvieufe , fi le raifin , au tems de la vendange, a e'te trop rempli de Peau de la ve'ge'tation , qu'il n'ait pas acquis une maturite convenable; fi le vin eft de petite qualite, & qu'on craigne pour fa dure'e, il faut , i°. l'encaver, des que la fermentation tumultueufc aura ceffe dans le tonneau ; 20. que la cave dans laquelle on l'cnfer- mera , ait les qualites dont nous parlerons dans le Chapitre fuivant ; 30. remplir exaftement le tonneau tous les mois; 40. mutter le vin tous les deux mois, 8c principalement a Papproche des chaleurs du printems. On fent bien qu'il n'eft pas poffible d'afligner au jufte les precautions pour chaque nuance de vin-, e'eft au proprie'taire qui re'fle'- chira fur ces ge'ne'ralite's , a prendre le milieu qu'il jugera le plus con- forme a la nature de (on vin. CHAPITRE VIII. De I 'action de Fair fur le Vin , des qualitis qui conflituent une lonne cave , & des moyens d'y perfedionner le Vin , meme avec Iconomie. JL'AIR a trois propricte's , qui, re'unies, ne peuvent caracte'rifer que lui feul •, favoir, la fluidire', la pefanteur & 1'elafticite'. 11 s'infinue par fa fluidire', pe'netre , rraverle les corps, fans jamais la perdre. Il gravife par fa pefanteur fur tous les corps, & en re'unit les parties. II cede, pat fon e'lafticite', a 1'impreffion des autres corps, en dimi- nuant fon volume , & le re'tablit enfuite dans la meme forme , & fou- vent occupe une plus grande e'tendue. C'eft par cette force elaftique, qu'il s'inlinue dans les corps , y portant avec lui cette facilite fpeciale SVR TWIST. NATURE LIE ET LES JETS. 6$i qu'il a a fe dilater. De-la , naificnt ccs ofcillarions perpauellcs dans les parties du corps auquel il (c mele, parce que fon dftgre dc cha- leur, (a gravite, la den lite, ainfi que (on e'lafticite & foil cxpanfion, ne rcftenc Jamais les memes pendant l'efpace d'une ou deux minutes de iuite. II fe fait done dans tous les corps une vibration , unc contrac- tion perpe'cuelle. Ainfi, par excmple , des coups de tonnerre redou- bles, font fouvent tourner les vins foibles, parce qu'ils occafionnenc, dans Tathmolphere , des fecouffes violences, qui agicenc la liqueur, recombinent la lie , & finillent de delunir le pcu de principes qu'ils contenoient. Sans recourir a ces phe'nomenes, jetcons un coup d'ceil fur les cher- mometres place's fucccflivemenr dans des caves de differences profon- deurs. Moins la cave fera profonde,ou bien , plus elle aura de com- munication avec l'air exte'rieur, plus I'air y agira libremenr, & plus les variations de la liqueur feronc fenfibles, foit dans le thermometre, foic dans le baromecre. Le vin renferme dans le conneau, y cprouvc le meme changemenr. Le froid fait defcendre la liqueur dans le ther- mometre; le froid concentre le vin dans le tonneau; tous deux, alors, occupent moins d'clpace. La chaleur, en dilatanc la liqueur dans le thermometre, lui fait occuper une plus grande etendue; le vin eprouve dans le tonneau un mouvement refpedtif. Que le vent du nocd rcgne, le vin eftclair; que celui du midi lui fuccede , le vin devicne plus on moins trouble, fuivanc fa dure'e & fa violence. Ces variarions ne peuvenx etre que les fuites de Taction de l'air (ur le vin. L'impreflion la plus avantageuie pour toute liqueur durant la fer- mentation infcnfible, eft , en gc'iwral , celle du froid tempe'ie', parce qu'elle diminue ce mouvement fermentatif , en concentrant fes prin- cipes. II me paroit que Ci le raifin muriffoit en meme rems que les cerifes, il feroit tres-difficile de conferver le vin ; les chaleurs de l'e'te donneroient trop d'adtivite' a la fermentation tumu!tueufe , & peut-ctre l'infenfible ne feroit-elle que momentane'e, & paffcroit tres-promptemenc aux fermentations acides & putrides. Les feules caves parfaites pre'- viendroient ce defordrc. La chaleur tend, au contraire , a feparer les principes du vin, a les de'funir. Le feul moyen de fouftraire, en grande parrie, le vin aux olcillations & variations continuclles de l'air, eft de le placer dans des caves qui y leront le moins expofe'es , & par confe'quent, dans les plus profondes. La meilleure , fans contredit, feroit celle oil on n'appercevroit aucun changement de chaleur ou de froid , & ou la liqueur du thermometre fe maintirndroir toujours an •legre 10 de temperature , comme dans les caves de l'Obiervatoire de Paris. C'eft pre'ciie'mentle degre de chaleur le plus convenable & le plus propre pour perfettionner la fermentation infcnfible, (ur-touc h la liqueur n'eft pas trop expofee aux ofcillations de l'air. L'expc'rience Mars 1772, Tome I. N n a a 1 65i OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la plus generale prouve ces fairs; & cctte raerae experience nous a mbnrreque-1* premiers fignes de la fermentation tumultueufe, n'or.t commence' a etre (enfibles, que quand la chaleur a e'te a ce degre. Ce que je viens de dire de l'a&ion dc l'air fur le vin , prouve la nt'cedite dans laquelle chaque particul'ier fe trouve de travailler a le procurer la meiileure cave poffible. Cefi la cave qui fait le vin, dir lc proverbe; & il eft juftc , malgre (a ge'neralite'. La cave, il eft vrai , ne donnera pas une qualite' fuperieure a un vin plar & foible; mais que ce vin loir place dans deux caves difte'rentes , dont l'une ait la qua- lite' que je vais indiquer, & que l'autre loit une cave ordinaire , on jugcra alors de la preference qu'on doit donner a la premiere, par ^augmentation de bonte du vin qu'elle contiendra, comparee au de- peYiffe'ment de l'autre. Pour qu'une cave loit bonne, il faut qu'elle ne foit pas i°. place'e pies d'un chemin, d'une rue, frequences par des voitures, on pres de Partelier d'trn charpentier, d'un forgeron , 8cc. Les fecouffes re'ite'- rees que les tonneaux eprouvent, ne permertant jamais a la liqueur de s'tclaircir, la tienncnt dans une agitation continuelle , qui , augmen- ta'it la fermentation inlenfible , accelerent la de'eompofition par une reco -nbinailon perpctuclle de la lie dans le vin. i°. Plus une cave fera profonde, p'us lc vin s'y perfectionnera , parce qu'il fera nioins fujet aux oicilla ions Sc aux variations de l'air. 30. La voute ne fau- roit etre trop e'leve'e, l'air y fera moins meurtriet". 40. Les jours ou foupiraux doivent etre places du core du nord , & eloignes des murs ou de tels autres objets capables de re'verbe'rer la chaleur du foleil : il conviendroit meme que ces foupiraux fuftent fermes par des abat- jour. 5". El le ne (auroit etre trop seche. Tout le monde fait qu'une cave liumide gate le vin , & abime les tonneaux. Si les murs ne font pas affez (ecs , il faut les enduire de ciment , pte'pare avec du tuf 5c des briques pilees. Si le fol de la cave eft humide , il faut le recou- vrir d'un demi-pied de craie , ou avec des cendres du chirbon de terre, ou avec les fcories de ce charbon bru!e. En un mot , une cave audi seche que pourroit I'etre un grenier, feroit une cave parfaite, fl la ficcite e'toit unie aux autres qualite's requifes. " C'eft dans de pareilles caves qu'on doit de'fcendre le vin un peu avant le<; premieres thaleurs du printems , afin de maintenir la fer- menrarion infcnfible avec autant de foin , qu'on en a pris dans le com- mencement pour la rendre tumultueufe. Ceci ne doit point avoir lieu pour les vins doux , vifqueux & fyrip^ux, puifqtt'ils exigent expref- le'ment que leur douceur & leur vifcofire' foient o'e'truites par la cha- leur qui augmentera la fermentation. C'eft au proprie'taire artentif a faifir le point oii ils doivent etre encaves : le fixer, ce feroit les en- trainer a 1'crreur. J'en dis autant pour les vins foibles & plats , qui SUR L'HJST. NATURELLE ET LES ARTS. », & s'unit i une grande quantite d'uir. Voycz St.it. des Vcg. ou il eft ait, que l'action dcs acides doit Mars 1 7 7 2 , 1 vine L Sj6 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, etre attribute en grande partie a l'air qu'ils contiennenr. Voyez le Mercure du mois d'Avril 1755 , ou il ell die que les acides font des efprits aeriens,un air enveloppe' ,un air condenfe. M. Hales avoitobferve que dans les corps qu'il analyioit pour connoitre laquantite d'air qu'ils contenoient, quelques-uns en abiorboient au lieu d'en rendre. II y com- prenoit audi, mais impropremenc, les fubftances qui , com me les vapeurs du foufre & du phofphore , detruifent Pe'lafticire de l'air ; ce qui a Papparence d'une abforption. L'examen de ces difFc'rens phenomenes , m'a naturcllemcnt conduit a penfer que le vin aigri pouvoit tirer fen acidite, mcins de la diffo- lution qu'il fe fait alors de Ion tattre, quoiqu'il loit un fel acide qui y contribuc , que de l'air qu'il abfoiboit & combinoit avec lui : 1' expe- rience a pleinement juftifie cette theorie. J'ai adapte a une bouteille a moirie' pleine de vin la machine de Hales, pour mefurer l'air qui fort d'une fubftance , ou qui y entre : cette machine e'toit diipolee avec les nouvelles corrections, e'eft-a-dire, garnie d'une cloche , d'un thermomctre , & d'une jauge d'air. Cet appareil fut tenu dans un lieu chaud dc 18 a 20 degre's. II s'eleva de l'air de la bouteille, par Pagication que j'avois donne'e a cette bouteille , & l'eau delcendit dans la cloche. Pen de jours apres , il s'eft abforbe' : enfin, au bout de quinze jours, il s'etoit abiorbe neuf polices d'air, & le vin e'toit aigre. On peut , par un proce'de plus facile , connoitre quand le vin ai- grira dans le tonneau, en adaptant an haut de ce tonneau ttes-plein , un tuyau cimentt;, & garni a fon fommet d'une vefTie huile'e , flexible & pleine d'air. On s'afTurera , en la comprimanr de tems-en-tems de bas en haut , fi elle contient de l'air oil s'il a e'te' abforbe'. On peut aifc'ment imaginer d'autres moyens pour s'afTurer quand le vin perd de Pair, 011 quand il en abforbe ; & Pexpcrience prouvera toujours que lorf- qu'il en abforbe, il eft fur le point cTaigrir. Lorlque Pair commence a s'ablorbcr , on ne diftingue encore an goiit aucune acidite. Cette experience eft done bien plus sure que le gout, &: meme que le ther- mometrc , qui feroit plonge' dans la liqueur pour annoncer , par Paug- mentation de chaleur, Paugmentation de la fermentation. La pouffe des vins provient de l'alteration qu'ils eprouvent en per- dant , outre Pair furabondant c'laftique qui leur eft fuperficiellement com- bine, & qui contribue a leur donner le gout vineux, une grande partie de celui qui eft combine' dans la liqueur 011 dans les mixtes dont elle eft formee , par une fuite nt'eeflaire de la fermentation e'ta- blie & continue'e dans un muqueux, oil le doux ne domine pas ; ce qui ne de'nature pas les vins, les rend plats, foibles, & de mau- vais goiit. Le figne qui indique cette alteration, eft lorfqu'un tonneau tres- bien bouche & plein, perd du vin par les plus pctites ouvertures ; par exernple j SUR L'lIIST. UATURELLE ET LES ARTS. 6-^7 exemplc, par un petit trou de vtillc, fait dans fa partie infdrieure; cc qui annonce qu'il fe tiouve aflez d'air dans la liqueur pour la prcfTer, comme fcroit 1'air exre'rieuf qui auroit communication par le bondon : car , fans l'exiftence de cet air claftique dans la liqueur, on lent bien que l'air arhmofphe'rique eft plus que furfifant pour foutenir le vin dans le tonncau. La mime veffie dont j'ai parlc pour les vins aigrc, , erant adaptec vuide au haut des tonncaux, annoncera, en (e rcmplit- fant, que l'air abandonne la liqueur. Ce vin eft perdu pour peu que lc vafe qui le conticnt foit mal bouche', foit agite', oil lente la chaleur. Les feuls moyens pour prevenirces inconvenient, font, comme je l'ai die t d'ajouter du moiit, ou du muqueux doux , au vin qui travaillc , de le mutter , de le tenir dans des caves profondes , & dans lefquelles les ofcillations con'tinuclles de l'air ieront peu fcnfibles. On voir conftamment que le tonneau renfermarit du vin qui tend a l'acidite, eft (ec; que le fable qui couvre le bondon eft e'galemenc ice. Le tonncau d'un vin pret a pouflcr eft roujours mouillt, convert J'une efpece de moi/iiTure ; la liqueur paroit fainter par les jointures des douves ; le fable place fur le bondon , forme une efpece de pate limoneu(e & de couleur vineufe. Un homme accoutume'a parcourir les celliers, Sc qui fait obferver, ie trompe rarement iur les alterations du vin , par la (eule infpection des tonneaux, Ce n'eft point en pratiquant leparc'ment quelques-uns des prin- cipes que j'ai etablis , qu'on parviendra a le procurer un vin capable de fe conlerver & d'etre tranfporte au-dela des mers, ce ne fera que dans I'application de tous en gc'ne'ral, & fuivant les circonftances : employez tous les moyens capables de proairer a vos raifins la plus grande maturire' ; & par conlc'quent , beaucoup de muqueux doux : rendez , des Ie commencement, la fermentation tres - tumultueule ; iaififfez tous ceux que la narure cV que Part prelentent, pour me'nagcr la fermentation inlenlible; laiffez e'ehapper le moins d'air (urabondant 3c le moins de phlogiftique , & vous obtiendrez alors un vin bon pour la fante , pour etre conlerve', pour etre tranfporte'. On a fupprime, pour e'viter les longueurs, ce qui e'toit uniquement relatif aux abus (ur la manicre de (aire Sc de conlerver le vin en Provence. On s'eft contentc; de raftcmbler les pre'eeptes utiles pour tons les pays vignobles du Royaume. Mars 1772 , Tome 1. Oooo 65$ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, PRINCIPES PHYSIQUES, Dans kfquels la nature confulte'e par des experiences nouvelles , decide Ies quejiions qui partageoient tous les Pkyjiciens modernes , par le R. P. Bertier, de I'Oratoire, Correfpondant de F Academic Royale des Sciences de Paris , Mernbre de la Socie'te Roy ale de Londres ; tome 4. A Paris, de I'Imprimerie Royale. 'UOIQUE l'attraction Nowtonienne femble avoir cxpulfe'des Ecoles & desUniverfite's Pimpulfion Carte'fienne , il eft encore des Phyficiens qui font, pour de'fendre celle-ci , des efforts d'autant plus louables , cju'ils font plus definte'reffe's. Entre ceux-la, le R. P. Bertier s'eft tou- jours diftingue; & il rentre aujourd'hui dans la racrae carriere avec la vigueur des plus jeunes Athletes. Dans ceIVc. volume deles Princi- pes pkyjiques , il combat ^attraction par les raifonnemens 8c les expe'- rienccs. Il nous avertit de 1'impartialite' avec laquelle il fit en 1763 , Li fondtion d'Avocat ge'ne'ral ; &c rapportant les raiions & les expe'- riences pour ou contre l'attraction , il laiffa a l'Acade'mie & aux Sa- vans , le jugement en derniere inftance. Un procede aufli definterefle devoit faire efpc'rer que l'elcge qui en fut fait par l'Acade'mie , dans fon Volume de l'anne'e 1764., fermeroit la bouche aux de'fen- fcurs ou aux ennemis de l'attraction : mais le contraire eft arrive'; l'Auteur a vu les deux partis s'elever contre lui en particulier, & lui reprocher ( le croira-t-on ? ) fon impartialite'. Quoique le P. Bertier nous afture que le raetne fentiment le guide aujourd'hui ; il paroit cependant pencher du cote' de l'impulhon , & croit y avoir ete' amene par la force de Pe'vidence. Il commence par etablir avec exactitude 1'e'tat dela queftion , en diftinguant l'attraction & le vuide mathe'matique , de l'attraction & du vuide phyfique. Au- tant les premiers exigent d'abftractions & d'abfence de matiere pour etre conc.us ; autant les derniers demandent de fiuide pour ope'rer cette attraction , que l'on pourroit , fi l'on vouloit , appeller impiilfion , avec le R. P. Bertier, & qu'il attribue a Newton lui-mcme ; failant cclorre l'autre de ['imagination de fes difciples. Le R. P. Bertier rapporte ici l'expe'rience faite fur les Alpes , par M. Coultaud , dans laquelle, de deux pendules place'es l'une au fom- met , l'autre au pied d'une montagne , celle du fommet qui auroitdu. retarder, a caulc de la diminution de pefanteur, a cependant avance'. SUR L'niST. NATURELLE ET LES -ARTS, j plus varices dans le fpath calcaire que dans aucun autre , Tans qu'on fache » en donner une raifon. On n'oie la chercher dans les fels ou jamais per- » fonne ne pourra prouver leur prefence : au contraire , on ell toujours » porte d'imaginer que beaucoup de corps mineraux ont du prendre par » accident line figure anguleule a leur furface. Au refte , l'exa&e obfer- 55 vation de ces figures iert davantage a fatisfaire la curiofite qu'a prouver as l'utilite. 55 II eft terns d'entrer a&uellement dans le detail du travail deM. de Lifle, & de faire connoitre aflez fuccintenient la maniere dont il eft exe'eutc. L'Auteur, a la tete de chaque grande divifion de cet ouvrage, place des principes ge'ne'raux , dont l'objet eft de faire connoitre les diffe'rens corps dont il va s'occuper , (bit d'apres les refultats chymiques, foit d'apres les obfervations que les Naturalises lui ont fournis. M. de Lifle donne dans la premiere partie , un catalogue raifonne & tres-e'tendu des fels. II indique plufieurs fels dont la forme ni la cryftal- lifation ne font pas connues , mais il a voulu presenter le de'nombrement le plus complet , afin d'y rendre les Le&eurs plus attentifs par la fuite. La feconde partie renferme les cryftaux pierreux : l'Auteur divife cette nombreufe fuite en plufieurs lections , qui comprennent les cryftaux fpa- diiques, les cryftsux gypfeux, les cryftaux micaces, les cryftaux quartzeux ou cryftaux de roche, les cryftaux gemmes, les criftaux bafiltiques & les cryftaux de ze'olites. Nous ne fuivrons pas M. de Lifle dans la longue enumeration des fpaths calcaires ni des felenites ou cryftaux gypfeux dont les formes font tres-varie'es A la tete de chaque fedtion , il particularife les gc'ne'ralites , & en fait des applications a difterens individus qui y figurent. Ainfi, par exemple, a la tete de la feclion des cryftaux quartzeux , il difcute fort favamment les differentes explications qu'on a donne'es de la formation du cryftal de roche , & il rapporte a cette occafion les reflexions de Strabon ; nous croyons faire plaifir a nos Lecfeurs de les tranferire ici en entier, parce qu'elles font fort fines & tres-intereffantes. 55 L'accroiffement du cryftal fe fait par juxtapofition , & non par intuf- 35 fufception. La nouvelle matiae du cryftal ne s'applique point indifte- 35 remment a toutes les faces du ciyftal, mais feulement aux plans extremes 33 (ou des pyramides), enforte que, i°. les plans intermediaires , ( ou 33 du prifme ) ne font autre chofe que la fomme des bafes des plans 33 extremes, & de plus que ces plans intermediaires font tantot plus longs, 33 tantot plus courts , & quelquefois manquent abfolument dans differens 35 cryftaux. %" '. Que les plans intermediaires font prefque toujours fillonne's 33 d'une le'gere canelure, & que les plans extremes portent des marques j> d'une matiere qui leur a ete appliquc'e. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 617 n La matiere cryftalline ne s'applique pas toujours en meme quantite' , u ni dans le meme terns aux plans extremes : dc-Ia, il arrive i°. que l'axc »> de deux pyramides oppole'es , ne fait pas toujours une ligne droite avec » l'axe de la colonne hexagone qui (Spare ces pyramides. z". Que les » plans extremes font rarement egaux entr'eux , d'ou s'enfuit l'ine'"alitc » des plans intermediates. 3". Que les plans extremes ne font pas toujours » triangulaires , ni les plans intermcdiaires conftamment quadrangulaires. « 40. Que louvent Tangle lolide extreme ainfi que les angles folides inter- » mediaires fe divifent chacun en pludeurs angles folides. » La couche de matiere cryftalline ne couvre pas toujours le plan » dans fon entier , quelquefois ellc manque ou vers les angles , on vers » les cotes, ou au milieu du plan. De-la, il arrive, i°. que ce qu'on » appelle communement le meme plan , a en effet fes parties dans difKrens » plans. 2U. Que quelques-unes de fes parties font concaves ou convexes « au lieu d'etre planes. 30. Que les plans interme'diaires prcfentent des » incgalites femblables aux marches d'un efcalier. » La matiere cryftalline applique'e aux diffe'rens plans , s'e'tend &c fe » durcit infenfiblement par la prellion du fluide exterieur fur ces memes r> plans. De-la, il arrive, i". que le cryftal a d'aurant plus de poli que la » matiere nouvelle , applique'e a fes difterentes faces, a etc' plus de terns » a fe durcir, & qu'au contraire, il refte plein d'inegalites , ii la matiere « appliquee s'eft durcie trop promptement, & avant que le Huide ambiant » l'ait iufrifamment etendue. 1°. Qu'on peut reconnoitre la facon dont « la matiere cryftalline s'eft appliquee au cryftal , lorfque la coagulation » a ete prompte ; la iurface du cryftal eft feme'e de petits tubcrcules , fem- »> blables aux grains de petite ve'role , ou bien aux petites gouttes rondes » que forme une mbftance huileufe , fur la furface d'un fluide aqueux. Au » contraire , fi la coagulation a ete un peu moins prompte , ces incVab'tes » ont quelquefois la forme de petites pyramides a bale triangulaire. La » trace tortucufe de la matiere cryftalline , indique l'endroit ou cette ma- il tiere s'appliquoi: , lorfqu'elle c'toit dans l'e'tat de fluidite , la direction » dans laquelle elle s'appliquoit, & l'ordre obferve dans cette application. » Audi, le cryftal de roche prefente-t-il toujours quelqu'ine'galitc, & l'on » a beau vantcr la perfeftion de fon poli , jc n'en ai jamais vu un feul j> morceau qui fur naturellement aufll vif que le cryftal cafle. 30. Que routes » fortes de corps folides s'engagent dans la fubftance meme du cryftal, « comme dans une efpece de pate glutineufe , lorfqu'ils rencontrenr le » cryftal avant que la (urface ait pris une confiftance ferine. 40. Que l'on ji voir, quelquefois cetre matiere comme de'bordee , fe rcpandre iur les »> plans voifins. J°. Que la matiere nouvelle venanr a sV-cendre fur les » cavites forme'es par les lacuncs des couches pre'eedentes , les couvre » quelquefois de plufieurs couches nouvelles , & y renferme une partie » du fluide exte'rieur , qui eft , ou de Pair feul , ou de Fair avee de l'eau. Mars 1772, Tome I. 6i% OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » Le fluide cxte'rieur tire la matiere cryftalline de la fubftance des lits » pierreux; enforte , i°. que des rochers de differente nature , ay ant des » emanations difFerentes , doivent produire des cryftaux de djfferentes )> couleurs; 2°. que de plufieurs cryftaux, formes dans le meme lieu, ce » font tantot les premiers forme's , & tantot les derniers qui font les plus » obfcurs ; & que les parties qui ont plus anciennement acquis la durete , » font quelquefois plus obfcures que celles qui Pont acquife enfuite. j> Le mouvement par lequel la nouvelle matiere cryftalline eft dirige'e » vers les faces du cryftal deja forme, n'eft pas produit par une caufe » aenerale , qui refide dans le fluide environnant ; mais il eft different >> dans chaque cryftal , d'oti Pon peut conclure que ce mouvement depend 3> d'un fluide fubtil , qui emane du cryftal de'ja forme; & de-la , on congoit » i°. comment, dans un meme lieu, la matiere cryftalline s'applique » aux faces du cryftal , diverfement fituees , refpeftivement a Phorifon ; » 2°. comment, differens cryftaux prennent diffe'rentes figures dans un » meme fluide. Je laiffe a decider h le fluide fubtil , dont je viens de « parler , ce fluide propre du cryftal , eft le meme que celui qui opere )> la refraction de la lumiere , ou fi ce font deux fluides. Le fluide de » Paimant qui arrange en filets longs & continus , la limaille de fer qui » fe trouve dans la fphere de fon aftivite, & dont Peftet n'eft point arrete » ni affoibli par un papier interpofe , peut donner une idee de ce fluide , » propre a chaque cryftal.... Quoi qu'll en foit , on doit diftinguer deux » mouvemens divers, qui influent fur Paccroiffement du cryftal; Pun, qui » determine la molecule cryftalline a s'appliquer a tel point de Paiguille » du cryftal , plutot qu'a tout autre point , mouvement que j'attribue a » Paction du fluide penetrant ; Pautre , qui applanit la matiere cryftalline ji nouvellement appliquee aux difFerentes faces du cryftal , & que j'at- >i tribue a la preflion du fluide environnant. Le premier eft analogue a )i Padtion direcfe de Paimant fur la limaille d'acier quil difpofe en filets » ronds dc continus ; le fecond eft analogue au mouvement de Pair » qui enleve a quelques-uns de ces filets , des particules qu'il rend a j) d'autres filets. Je ferois porte a regarder cette action du fluide ambiant, » comme la caufe du parallelifme , conftamment obferve , entre les faces » oppofees du cryftal & de tous les autres corps qui ont une forme regu- 3> lierement anguleufe. 3> M. de Lifle parle des cryftaux pyriteux dans la troifieme partie. II donne d'abord une idee generale de la pyrite , & en diftingue les varie'te's d'apres Henkel , par la nature des principes conftitutifs , par la proportion des fubftances qui les compofent , par leurs figures , par leurs couleurs. De ces confiderations , il paffe aux phenomenes de la cryftallifation. Enfin , il termine fon travail par les cryftaux me'talliques , &c fuit toujours la meme marche dans leur expolltion. Jl n'eft pas pofllble d'entrer dans un plus long de'tail pour faire con» SUR L'HTST. NATURE LIE ET LES ARTS. 67* noitreun Ouvragede cettc nature, dont Ics objcts font fi varies & fi muf- tiplie's. Nous devons nous bonier a donner a nos Lecleurs le re'fultac de l'impreflion que cette lecture nous a faice. Par-tout, M. de Lifle dc'crit la forme des cryftaux avec un foin fcrupuleux , indique les endroits oil on les trouve communement , les Autcurs qui en ont park' avant lui , cite leur phrafe latine , concilie avec beaucoup d'intelligence & de fagacitc les contradictions qui fe trouvent entre eux, 8c finit par donner une ide'e nette 8c limple de tous les individus , a mefure qu'il les range dans l'ordrc qu'il a juge convenable d'adopter. II ne neglige pas meme ce qui con- cerne la nature des matieres qui entrent dans leur compofltion , & ce que des examens chymiques bien fairs , nous en ont appris , 8c c'eft par-la qu'il re&ifie tout ce que fa marche gencrale peut avoir d'inexad pour s'etre attache a celle du ce'lebre Naturalifte Suedois. Dans l'exe'cution d'un plan audi vafte 8c aufli etendu , l'Auteur rait preuve d'une erudition mi- neralogique , peu commune , & toujours inftruttive. On peut confultcr, par exemple , l'article du diamant , ce qui concerne les cryftaux bafal- tiques & les cryftaux quartzeux , pour fe convaincre du merite de fort travail. II eft aife de voir que cet Ouvrage eft le Catalogue raifonne , le plus complet qu'on ait publie fur la matiere des cryftaux. Nous nous lommcs permis quelques obfervations fur des points ou il nous a paru que l'Auteur adoptoit des principes peu juftes, mais ces principes ne tiennent que d'une maniere alfez indiredte au fond du travail de M. de Rome' de Lifle , & ces petites erreurs peuvent fubiifter , dans un auffi bon Livre , fans nuire a la re'puration qu'il me'rite. Now E lles efpeecs eTOifeaux qui n'ont pas encore iti dicrites. X_'oiSEAU reprefente' a la Planche premiere , eft connu a Cayenne foiB le nom de petit Paon des Rofes : il n'a cependant aucun rapport avec le paon , ni par fa forme, ni par les couleurs de fon plumage 5 peut-etrc en a-t-il quelqu'un par la maniere de fourenir fi queue. On ne peut le rapporter a aucun des genres de'erits par le Chevalier Von-Linnee &pirM. Briffon; mais eclui dont il approchc le plus , eft le genre du Rafle. II n'en diftere que par fon bee qui n'eft pas deprime iur les cotes comme il l'eft dins les rafles : d'ailleurs , il en a les caradteres 8c la forme. II frequente , comme quelques - uns d'entr'eux, les prairies, & il fuit le cours des ruilfeaux. II faut avouer cependant , qu'il en difjere encore, enceque fa qucuj eft longue , bien fournie; an lieu que ccllcs des rafles eft courtc , peu tournie de plumes , ramaflee 8c de'primec fur les cotes. On pourroic dcTigner cgf oileau par la phraie fuivante. Mars 1772, Tom'. I. 5So OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, « Avis americana ex terris meridionalibus Ralli congener, capile nigro , tccnid fupra oculos alhicante ; gutture & colli parte fuperiore antici albicantibus , collo poflici & ad latent tamiis anguftis alternis , fufcis & nigris, dorfo nigro tran fverfim fufco fignatis , uropyrgio alhi- cante nigro tranfverjim & undulatirn ftriato , caudd & aliis concoloribusy fufco , nigro , fufufeo albo variegatis , colli parte anticd inferiore 6" peclore fub albicantibus nigro confperfis , abdomine fqualide alhicante , abdominis laterihus albi fqualidi nigro tranfverjim undulatis , rojiri recti , ampli parte fuperiore nigrd , inferiore cornea ; pedibus longioribus fub carneis ad medietatem eorum plumis deftitutis. » Cet oifeau a feize pouces depuis le bout du bee jufqu'a Pextre'mite du doigt du milieu ; fon pied a deux pouces depuis l'extrcmite du grand doigt jufqu'a celle du doig: de derriere ; fa jambe , deux pouces fepc lignes ; la partie des cuifles degarnie de plumes, nn pouce; fon bee depuis Pori- gine des plumes jufqu'a 1'extremite , un pouce & demi ; 8c jufqu'a la Cdrnmiflure des mandibules , deux pouces ; la tete eft grofTe , le col long & grele , les yeux grands , les ailes amples , la queue longue. La tete eft noire^ en-deflus , fur les cote's & par derriere jufqu'un peu au-deffous de 1'origine du col ; les yeux dont nous ne connoiffons pas la couleur , font traverfe's en-deflus d'une ligne etroite d'un blanc fale; line ligne de meme couleur , mais un peu plus large, s'e'tend fur les joues depuis la commiflure des mandibules jufqu'a l'endroit oii la couleur noire finit en arriere ; au-deffous de cette ligne , on en voir une noire plus e'troite ; le deflous du bee Sc le haut du col en devant, font d'un blanc fale; le col dans toute fa longueur en arriere & fur les cote's , eft raye' de bandes e'troites , alternativement noires & fauves ; la couleur du devant du col & la poitrine , eft d'un blanc roufleatre , parfeme de taches noires & ob- lontnies ; le ventre & le deflous de la queue font d'un blanc fale; les cotes du ventre font fauves , ondes par des lignes noires ; le dos eft noiF , traverfe de bandes brunes qui coupent les plumes en travers a leur ori- gine , 8c vers leur extremite qui eft noire ; chaque bande eft double 8c traverfe'e dans fon milieu par une raie noire. La partie de l'aile qui repond au poignet , eft couverte de plumes noires & marquees dans leur milieu , d'une large tache d'un blanc fale ; les plumes du fouet de l'aile font de couleur d'ochre , pidees de brun; la pre- miere des grandes plumes de l'aile eft noire jufqu'a fes deux tiers.; il y a une tache maron au milieu du noir; cette plume eft enfuite traveriee d'une tache blanchatre , picte'e de brun; il y a au-deflous une bande noire, puis une blanche & une noire enfuite; les deux fecondes plumes de l'aile font remarquables par deux larges taches blanches ; les trois fuivantes le font par une large bande de couleur d'ochre, & par une autre bande maron, qui eft au-deflus ; les plumes qui viennent enfuite fe font diftinguer par de larges bandes d'un beau noir, II faudrait de'enre chaque grande plume de * l'aile T jamber fans trop de peine par-deffus les brides , dont nous parlerons , & qui font appuyees fur les rives fuperieures de ces tables pofe'es de champ, afin qu'ils puiftcnt enjamber, dis-je , des le commencement de la bauchle; e'eft ainfi que fe nomme en terme de Part ce que nous avons ci-devant nomine maffe de terre , comme on nomme banches monties ou e'tahlies , ce que nous avons appelle moule , jufqu'a prefent. Les banches , done , f (a) Les fize-fruits, Je ue reponds pas que ce mot foit celui de 1'Ouvrier ; mais il revient au memc. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6S7 font des tables unies 8c planes , quant a la furface qui doit toucher a la terre pilc'e 8c barree de fortes barres fixe'es par clous fur la face oppofe'e. Les lanijonniers s'efpacent de deux pieds 8c demi, mefures de milieu a milieu ; en confequence de cttte determination , les barres doivent toujours etre appliquees (ur le milieu des parties des banches qui re'pon- dent aux intervalles qui feparent les lanc^onniers , en forte que les banches de huit pieds en ont trois , dont une au milieu 8c une a un pied fix pouces de chaque extre'mite' , melurant de fon milieu a la rive , il n'eft pas hors de propos de fortifier cette rive par une bande de fer d'un pouce ou un peu plus de largeur , 8c d'tine ligne ou deux d'e'paifTeur , replie'e fur les deux rives en crampon , & fixe'e par clous , en vue d'obvier aux fentes qui pourroient s'y (aire. Les ais qui condiment les banches font epais d'un pouce, 8c jointe's a rainures 6k languettes ; les barres ont aflez de neuf lignes d'epaifleur & de cinq pouces de largeur. Pour manier plus commodement les banches , on les munit d'un pont de fer a pattes fixees par clous fur le haut de la barre la plus pres de l'ex- tre'mitc , & forme en poigne'e , c'eft ce que l'ouvrier nomine manette. Ces banches appuyees par leur rive infe'rieure fur les lan^onniers & letcnues a dos par les aiguilles , ne re'fifteroient pas a l'effort de la terre obeilTant au pifon , fi les aiguilles n'etoient maintenues dans le haut par les brides. Les brides F ne font autres chofes qu'un bout de baton coupe de lon- gueur jufte de gros-de-mur , 8c pole en etrefillon entre l'une 8c l'autre banches, au plus haut, tandis qu'une corde einbrafTe par-deflus ces memes banches, mais touchant a leur tives fuperieiires, les deux tetes d'aicuilles, 8c tend fans cefTe avec force a les rapprocher. Ces ccrdes font ordinai- rement billees. Outre les deux banches qui maintiennent la banche'e en-dedans 8c en- dehors , il faut encore pour former les angles en retour , (bit d'e'qtierre , foit de faufle equerre, une petite table large autant que le gros-de-mur eft long, memre felon i'angle du retour , & haute comme les banches, c'eft ce que l'ouvrier entend par le mot clofoir. Le clofoir eft une rable de meme nature 'que les banches., & dont les joints font couches deraeme Be maintenus pr barres montanres ; on lui en donne deux ordinairemcnt aftez voifincs des rives , fans cependant en rapprocher d'un pouce. On fent que le meme clofoir ne fauroit que f>ar hafard fervir en deux endroits diffcrens , fans etre retouche dans fa areeur. Pour fixer le clofoir en fon lieu , on emploie un lancwnnier &: les deux aiguilles traverfecs chacunc en delTous du lanconnier par une broche , a l'effet que ces aiguilles fufpendues pir leur bride, fufpendent -le :Lmcon- •nier qui , fans ccla n'auroit attain appui, ccaut a dc'faut du mur. Ma us 1772, Tome I. cTS8 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , Nous avons decrit les principals pieces de l'atcelier propre an Macon- Pifeur ; paflons a I'outil dont il arme fa main pour pifer. Le Pifon H eft compofe de la mafle 8c du manche. Le manche n'eft autre choie qu'un baton comtne celui d'un balai ; la made eft tire'e d'un morceau de quelque bois dur , long de 8 a o, pouces , equarri fur 3 pouces d'epaifleur , & 4 & demi ou cinq de largeur forme enfuite en [>yramide tronquee , ayant pour plan de terminaifon un parallelogramme , ong de trois pouces ou de deux & demi , & large d'un pouce feule- ment, par le de'lardemenc pratique avec e'galite fur chaque face, a com- mencer a rien dans le milieu de la longueur rotale de la made. L'autre bout, e'eft-a-dire , celui qui rec,oic le manche, eft audi tailie en pyramide femblable ; mais tronque une fois plus pres de Ion oaigine qui fe trouve au quart de la longueur totale. Au milieu du plan de terminaifon de ce- lui-ci , eft place le trou qui regoit le manche ; il faut lui dormer au moins un pouce de diametre, & trois a quatre pouces de profondeur, faifant enforce que l'axe de ce cylindre creux foic parcie de celui de la mafle. Cet outil emmanche, doic avoir au moins quaere pieds de hauccur ; l'Ou- vrier le cienc a deux mains par le haur du manche , & en ufe comme d'un pilon , portant f es coups entre fes pieds , &c un peu en avant ; il frappe des flancs de la mafle dans cercaines circonftances. Tous les angles de cecce mafle (one abbatus. Le Manoeuvre qui fere le Pifeur , e'eft-a-dire qui lui porte de la terre a mefure qu'elle s'emploie, a le deflus de la tete muni d'un couflinet I & ule des corbeilles K d'ofier a deux anfes , contenanc environ un pied cube de terre meuble qu'il porce fur la tece en montant par une echelle, ou partie fur fa tete & partie fur fes e'paules , a l'aide du fac ordinaire. Le Pifeur prend la corbeille par les deux anfes qu'elle lui prefence, &en diftribue la terre dans la partie de la banche'e ou il fe trouve & dans les voifines, de force qu'il y en aic la meme e'paifleur par-tout ou il en met cecce fois ; il rend la corbeille au Manoeuvre qui va la remplir de nouveau pour la lui rapporcer bien-tot. Le Pifeur, pendant l'abfence du Manoeuvre, pile le plus egalemenc qu'il peuc , touce la terre nouvellemenr apporce'e , d'abord dans l'encrebride qu'il occupoic quand il 1'a recue , & enfuice dans les voifins ou il fe cranfporce, en enjambant par-deflus les brides. Mais reprenons l'ouvrage de plus loin, e'eft-a-dire, des l'arrafemenc du foubaflement en ma^onnerie ; touc ce qui prece'de cecce ope'racion n'a rien d'apparcenanc plus parcicuherement a l'art du Macon-Pifeur, qu'a celui du Ma^on en general. En arrafanc le foubaflemenc, e'eft-a-dire, des quaere a cinq pouces en deflous du niveau ou il doic ecre cermine , on doic menager de crence en trence pouces de pecices cranchees , L & M , de quaere grands pouces de profondeur , a compeer de l'arrafemenc reel , & de trois pouces quelq jues li<;nes SUR V HIST. NATURE I.LE ET LES ARTS. lignes de largcur , travcrfant de niveau & d'cqucrrc d'une face a i'auu'e , pour recevoir les lanconniers (a), 8c obferver que la tranchee la phis voiilne de l'angle d'oii Ton (e propole dc partir ("car il faut toujours com- mences par un angle en retour ) doit n'en ctre eloignee qu'autant que k; permct Ic cloioir dont la face interne doit re'pondre a plomb fur la face en retour , 8c la commcncer par rapport au pile; or , quand ricn ne force a faire autremcnt , & que les aiguilles ont trois pouces d'c'pail- f.ur, coinine 1c lanconnier, ccttc face du clofoir concourt avec celles de Tune ex de 1'autce aiguille & du lanconnier qui regarde l'autre bout de la banche'e, & fl les aiguilles n'ont que deux pouces d'epaifteur, cettc rneme face du cloioir eft de iix lignes moins eloignee du bout dont il s'agit que celle des aiguilles , ce qui revient au mane, par rapport au placement de cette face, puifqu'elie ne cefle pas pour cela de re'pondre a la meme face du lanconnier, enlortc que toute Te'pailTeur des aiguilles & du lanconnier eft hors d'appui ; mais les trente pouces fe comptent du milieu de cettc e'paifleirr, e'eft-a-dire , d'un police & demi par de-la l'a-plomb de la face en retour : il faut done prendre pour point de depart un point en-dehors du retour, diftant de la face de ce meme retour, d'un pouce 8c demi; ou ce qui revient au meme, ne compter pour premier intervalle, des la lignc du retour , que vingt-huit pouces 8c demi. Si Tangle eft aigu ou obtus, le clofoir eft oblique, par rapport aux ban- dies ; en ce cas , il faut melurer les vingt-liuit pouces 8c demi du pre- mier intervalle , en parcant du point du biais du retour le plus eloigne de l'autre bout de la banchee , lequel point eft fur la rive du dedans du mur, fi l'angle eft obtus ; & lur celle du dehors, s'il eft aigu. On lent que ii Ton propole d'elever le pile d'une dixaine de banchees 1'une lur l'autre , il faut dormer vingt pouces de gros-de-mur , des l'ar- ralcmcnt du foubaftement & quelques lignes de plus, des la premiere re- coupe en lortant de terre ; dans ce cas, les aiguilles maintenues par leurs coins , a vingt-deux pouces 1'une de 1'autre, ne (ont diftantes qu'autant qu'il le faut, vu que les bandies prennent chacune un poucc par leur epaifleur. On s'appliquera done a pofer bien a plomb les aiguilles interieurcs, s'il s'agit d'un mur de pourtcur d'habitation , 6v a poler les exterieurs-murs, au moyen des fats-fruits , de maniere qu'elks rentrc-nt en dedans, a rai- fon de deux lignes par pied dc leur hauteur ; a poler les bandies de ma- niere que le cloioir (oit exadement lur la ligne de retour, & en obferver (a) Pour rettvafr les lanconniers , on feut bicn q le fi Ton fc contentoit de poler les lanconniers fur la laubflfleinenc , il s'en manqiieroit dc irois pouces ( leur epaifTeui > que les baoches ne couchaffent a la fur/afle du foub.ilVemeiu ; & que (i Ton donne quatvc pouces de profondeur aux tranchees , e'eft a 1'efFct que la banche rc- couvre suTei la came du ibubaflcmcnt , pour que tout paflagc fo"t intcrdit a la terrq & aux moraines. Mars 1772, Toim I. S s s s 69o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE , le fruit ; enfin, a pofer les brides avec jufteffe & folidite. On life des coins lous les lanconniers pour les mettre de niveau Ik de hauteur. Pour empccher la terre de s'echapper par le bas entre la banche & la corne du foubaffement , on fbrmera tout au long de leur jonction , un cordon de mortier de chaux & fable, corroye, ferre; c'eft ce que POuvrier entend par le mot moraine. Les moraines marquent les joints des banche'es, tant les couches que les montans : on en diipoie quelquefois de couches, dans les angles de retour , de iix pouces en fix pouces de hauteur, pour figurer autant d'affifes de pierres de taille. Les moraines montantes ne fe font que demi-truellees a demi- truelle'es , a mefure que le pile' s'eleve. II ne refte plus , les moraines du bas e'tant forme'es , qu'a e'tendre fuc- ceflivement les lits de terre , les uns bout a bout , les autres fur ces pre- miers, & de la meme maniere, fans jamais leur donner plus de trois doigts d'epaiifeur en terre-meuble , obfervant d'avancer d'abord Pouvrage, fi c'eft la premiere banche'e d'un cours , dans le premier entre-bride , ( celui du clofoir) & fi c'eft toute autre banchee d'un cours de'ja commence dans celui qui contient le bout de la banche'e precedence , d'y avancer , dis-je , plus que dans le fecond , 8c dans celui-ci plus que dans le troifieme, pour me'nager toujours un ferme appui a Pechelle du porteur de terre qui doit toujcurs aboutir a la portee du Pifcur , & qui ne manqueroit pas de de- ranger les banches , fi elles s'appuyoient dans un lieu oil elles n'auroient que leur roideur , ou la re'fiftance des aiguilles a oppofer a (a pouffee ; on ti quelqu'obftacle s'oppofe a cette pratique , on aura loin de dilpofer de Pautre cote des banches , un contre-vent folide & jufte. On obfervera de plus , de ne jamais admertre de nouvelle terre dans la banche'e , que celle qu'on y aura recue , n'ait ete' (ufhfamment pifee , c'eft- a-dire , qu'elle ne Pair e'te au point qu'un coup de pifon marque a peine le lieu iur lequel il tombe. La banche'e, pour Pordinaire, n'a point de clofoir a Pun de (es bouts, il n'y eft utile que lorfque ce bout termine un trumeau , ou forme un jambage de baie, ( je dis , ce bout, ou quelque partie voifme, car la longueur de la banche'e s'accorde rarement avec le befoin ) dans tout autre cas, le clofoir feroit plus nuiiible qu'utile, vu que s'il etoit a plomb, il fcudroit couper une partie de Pouvrage qu'il auroit termine pour former k banchee iuivante , & que s'il etoit oblique, comme l'exige la bonne forme d'une banche'e qui doit ie lier avec une banchee fuivante , le Pifeur ne manoeuvreroit qu'a grande peine, & tres-imparfaitement ; je dis, comme fiexige la bonne forme, &c. En effet , tout joint d'a-bout des banche'es, doit erre, autant que rien ne s'y oppofe , oblique en raifon de deux pieds & demi fur la hauteur des banchees , qui eft aufli de deux pieds & demi s'inclinant du cote' qu'on a commence Pouvrage , a l'effet que ces joints ae fe dementent pas orl la Peut arrofer avec un arrofoir a, grille & la bten meler., Si SUR VlilST. NATURELLE ET LES ARTS. 697 Si elle s'attache ail pilon , cllc eft trop charge'e d'eau ; on doit en cc eas la mcler avec fufhfance qiuntite de fcmblable tcrrc plus seche. Si quelque grande pluie a mouillc route la tcrrc qu'on pouvoit employer, il vaut mieux lulpcndre l'ouvrage que de le concinuer avec de la terre trop molle. On pcut hire la fofle de maniere qu'il y ait toujours quelqu'endroit (qc , fi les autres font trop mouillc's. II eft des cerreia pifer de la plus excellence qualite qui, neanmoins, font fort graveleufes ; il iuflbr d'en otcr les plus gros cailloux : l'abondance de gravier eft plutot un furcroit de qualite dans one bonne tcrre , qu'un dctaut ; mais ellc diminue la force d'une tefre mediocre. Si Ton a peu de bonne terre, &: qu'on puirte y fupple'er par de la terrc me'diocrc , il vaut mieux ne les point meler, que de n'en faire qu'une qua- lite' un peu meilleure que la mediocre. Mais il faut employer la bonne pure dans les cours infc:rieurs de banchees , 8c cachet de la diftribuer egale- ment dans couc 1c bas duj pourcour de I'edifice , par la raifon que , non- feulemenc la charge s'y fait plus violemment fentir ; mais encore , parcc que les eaux pluviales y arceignenc plus abondammenc que dans les parties plus elevees. Explication de la Blanche troifdme. A. XACE fupJrieure d'un Lanconnicr. Sur la meme ligne eft une de fes faces d'about. B. Face laterale d'une aiguille. Sur la meme ligne cftcelle de fes faces d'about qui porte le tenon. C. L'une des grandes faces d'un coin ; a cote' eft celle d'e'paiffeur, & en-deflbut, cclle qui forme la tete. D. Face triangulaire d'un fixe-fruit ; a cote" , fa face d'e'paifleur , & au-deflbus, ccllc de la tete. E. Les bandies. F. Les brides. G. Le Claufoir. H. Le pifon ; & fur la meme ligne, fa face iufe'ricure. I. Le coulfmet que le Manoeuvre attache fur fa tete pour porter la terre au Pifeur. K. Corbcille d'ofier , dans laquelle le Manoeuvre porte la terre. L. Tranche'e deftine'e a un Lan^onnier, & pratiquee fur le foubaflement de maconnerie. M. Scmblable tranche'e, pratique'e dans le pifti nouvellcmcnt fait; les autres ne pa- roilTent plus que comme des trous quarre's. On voit dans la Figme, l'effet des moraines, & la maniere dont les banchees d 'an- gles fe croifent. \$f Mars 1772, Tome 1. Ttt* 69$ TABLE DES ARTICLES Conteni/s dans le premier Volume de V Introduction aux Obfervations fur la Phyfique , fur I'Hiftoire Naturelle & les Arts. hi nibii ! immirniiniiM mimijinn ii"th PHYSIQUE. jvji emoire fur la couleurdel'air, par M. Eberhard, pag.6i8 Dijfertation fur la caufe de ['attraction des Corps, par M. Hiotze- berg , Profejfeur de Philofophie , a Up fell , ^ij Obferyation fur le AL'te'ore que I' on a vu a Paris le ly Juillet 1771 > precedie & fuivie de quelques remarques fur les Mitt'ores en general , par M. Dubois D. J. 103 Me'moire de M. Eberhard , Profejfeur P_0yal de PruJJe , dans lequel il examine cette loi du mouvement : la fomme des forces , dans les corps ilafliques , eft-elle toil] ours e'gale , apres le choc? 150 Me'moire fur la Vifion , lu a la Socie'te Roy ale de Gottingue. Par M. Mayer, 241 Dijfertation de M. Jean Ek , fur la nature de la rofe'e , 383 Description du Barometre de Ramsden , 509 Dijfertation lue a VAcaddmie Royale des Sciences de Stockolm , par M. Ferner, Confeiller au College de la Chance lie rie , & Pro- fejfeur de Mathematiques , fur la diminution de 1'eau de la mer , E MO 1 re fur des Vers rendus par les narines. Par Monfieur IVOHLFAHRT , page 143 Lettre de M. Lvsons , Miiecin de VHopitalde Glocefter, a Monfieur Nicholls , fur Vitrange phenomene de trois iping'cs avalies par une file , & quelle a enfuite rendues par Ve'paule , traduite de VAn- glois, 161 Parallele de la nourriture* des plumes, & de celle des dents; par M. Rostan , 128 Lettre Jur un Nain monftrueux , exiflant acluellement dans la Ville de Lubni , en Rujfte , envoy e'e par M. D. j Preparation des chdtaignes , pour les dipouiller de leur peau intirieure , par le moyen du diboiradour , mife, en pratique dans le Limoufin , 5IZ Recueil des Me'moires qui ont concouru pour le prix propofi , en i7r>6% par la Socie'te' Royale d' Agriculture de Limoges , pour Fannie 1767 , fur cette queftion : Quelle eft la maniire de bruler ou diftdkr les vins , la plus avantageufe , relativement a la quantiti & a la qualite de l'eau-de-vie , & d Fipargne des frais , imprimis par Fordre de la Socii.i, 184. Mem- ire fur la meil'eure maniire de faire & de gouverner les vins de Provence , foit pour I 'ufage , foit pour leur faire paffer les mers ; qui a remporti le prix , au jugenunt de I'Acadimie de Marfeille , en Fannie 1770 , 4^5 Suite de la merne analyfe , 644 Des infecles ejfaitiellement nuifibles a la vigne , tj des moyens de les detruire , 1 ^ i Suite de cette differtation , 108 Avar, age iconomique du pepin de raifin , 302. Moycn pour connoitre les vins frelatis , 340 Mars 1772, Tome L 7oi TABLE ■■ *: -a Aji'u ■_■■_.■ "MPK HISTOIRE NATURELLE. L /Etude de la Nature: Epitre a Madame ***, Piece qui a con- cou.ru pour le prix de CAcade'mie Franfoife , eniyji , par M. M***, page 203 Ex trait du Voyage de M. Bancks , renfermant plufieurs obferva- tions d'Hifioire Naturelle , ^^. Effai d'une nouvclle Mine'ralogie , traduit du Sue'dois & de VAllemand , de M. Weidman , par M. Dreux , fits , Apothicaire de I'Hvtel- Dieu de Paris. A Paris , che\ Didot , jeune, Quai des Augufiins , 29 Obferyations fur une fubftance de couleur bleue , trouve'e en Ecoffe , dans un fond de tourbe mouffeufe. Par M. Silvestre Douglas , 280 Introduction a Ve'tude des Corps Naturels , tires du Regne Mineral, par M. BucquEt , Docleur - Regent de la Faculti de Medecine de Paris, 399 Suite de la menu analyfe, 473 Suite , idem , 582 Memoir e fur quelques AZtites finguliers , vulgairement nomme'es Pierres d'Aigle , trouves dans le Duche d'Holfice , en Allemagne , & con- feree's dans le Cabinet de M.'Henri Kanne-Giesse , Docleur & ProfiJJeur en Medecine, 128 Obfervations de M. n' Annqne , fur les glands de mer fojfdes , & principalement fur ceux du territoire de Bafle , ;oa Obfervations fur des coquilles trouvies au Pe'rou , 43^ Precis de l' effai de Cryjlallograpliie , par M- Rome de Lisle , 6yi Hijloire de differentes e (pices d'oifeaux, appelUs Pinguins , par Monfieur Thomas Pennant , Ecuyer , Membre de la Socie'te Royale ; traduite de VAng'ois, 501 Defcription de plufieurs oifeaux qui nYtpient pas connus , 6jy Lettre de M. Muller a M. Buchner, fur la Mouche ye'ge'tale de r Europe , 150 Relation d'une efpice particuliere de Came'le'on ; par M, Jacques Parson , traduite de PAnglois , J49 Obfervations fur le Notopide. Par M. Emmanuel JVeiss, tra- duites de I'Allemand, 232 Obfervations traduites de VAnglois, fur des fubfiances vfgetales in- fufe'es , dans lefquelles on appercoit la formation de petit s animaux , & dans lefquelles on a de'eouvert un fel indijfolublc. Par M. Ellis , de la Socie'te' Royale , 359 DES ARTICLES. 705 Me'moire fur le mouvement progrejjif de quelques reptiles , par Monfieur Weiss , de la SociM de Bafle , 406 Hiftoire des Charanfons , avec des moyens pour les de'truire , & em- pe'cher leurs de'gdts .dans le bled , . 492 Suite du me'me Me'moire , 600 Obfervation fur une efpece de Sang-fue , trouvie fur les Alpes , par M. J. B. Dana , Pie'montois , 54 Dijfertation fur les differences que prefentent certains animaux marins t connus fous la denomination d'ome marine. Par M- J. P. Dana , Pie'montois , 133 Prem'dre efpice de Midufe , par le meme , 138 Autre efpice de Medufe , 141 Catalogue des Zoophiles , oil Von trouve les defcriptions de chacune de leurs efpices , & les fynonimes employe's par les diffe'rens Auteurs. Par M. P alias , Me'decin de la Socie'te Royale de Londres, 220 Suite de la me'me analyfe , 290 Suite, idem, 354 Suite , idem , 411? Lettre de M. St RANGE , a M. Maty , traduite de VAnglois , fur Vorigine (Tun Papier naturel , trouve aux environs de Cortone , en To/cane , 43 Obfervations Eotaniques de M. Schlotterbeg , de la Socie'te' de Bajle , fur les monfires des plantes , dans lefquelles il dimontre que dans le Eigne animal , & le lUgne ve'ge'tal, la nature fuit la meme marche pour les produire , 213 Defcription de la verveine d'Ame'rique , 367 Abre'gi des plantes ufuelles de Saint-Domingue , par M. Pouppe Desportes , Me'decin du Roi , Correfpondant de I'Acadlmic Royale des Sciences de Paris , 419 Obfervations du Docleur SEBASTIEN Albrectif , fur les faujfes rofes des S aides , 485 ARTS E'T METIERS. fSovvEAU- Corroy pour faire des pieces a"eau, des bajfins , fans maconnerie , 237 Proce'de de la cendre'e de Tournai,par M. CARREY , 370 ManUre de citerner a Lille , 374 L'art du Macon Pifeur, par M. Goiffon , 6Sz Maniere de preparer le charbon mineral , autrement appelle Houille , pour le fubflituer au charbon dtbois dans les travaux metallurgiques , Mars 1772, Tome I. 704 TABLE, Sec. mife en- ufage dans les mines de Saint-Bel , fur les documens de M. Jars , 425 Procide pour fa ire des Eriques de charbon de terre , pour b ruler dans leifoyers domejliques. Par M. Carrey , 433 Conjlruclion des Po'eles a la maniere des Rujfes & des Sue'dois , 61 y Nouvelle PreJ/i , pour imprinter les e'tojf'es de foie , de hiine ; les toiles vulgairement nomme'es Indiennes , les papiers , &c. par le moyen de laquelle on ptut donnir aux dzjfins telle largeur & telle grandeur qu'on defirera , 74 Me'moire fur la fabrication & fur I'ufage des toiles fans lifi&res. Par M. Brissojy , Infpecleur des Manufactures du Lyonnois, Fore\ & Beaujollois , 256 Perfection de la teinture des foies noires a Lyon , 508 Procedi pour tirer de la foie blanche, a I 'imitation de celle de Nanquin ; par M. Poivre , Commijfaire Ordonnateur de la Marine , a Vlfle de Bourbon , 5 I