à PR 0 : SU. “RARES

x " J Asi L: ANNÉE, 1914 2. MARS-AVRIL

k Journal de l’'Anatomie

et de la Physiologie

Len * normales et pathologiques

1

k MR. de l'Homme et des Animaux

Fondé par CHARLES ROBIN (1864-1885)

CONTINUÉ PAR

GEORGES POUCHET (1885-1894) et MATHIAS DUVAL (1894-1907)

PUBLIÉ PAR MM.

1 É. RETTERER F. TOURNEUX Professeur à la Faculté de médecine

Professeur agrégé à la Faculté de médecine de Toulouse.

de Paris. AVEC LE CONCOURS DE MM. A. BRANCA G. LOISEL A. SOULIE " Professeur agrégé Directeur Professeur à la Faculté de médecine du Laboratoire d'Embryologie générale à la Faculté de médecin: de Toulouse.

à; de Paris. à l'Ecole des Hautes-Études.

SOMMAIRE

RANTHONY. Les conséquences morphologiques de l'absence de Dents chez les Mammifères (Étude de Morphogénie expérimentale) (avec 6 figures)

PO MALE, EN EME a LR RATE gt 0! Éd. RETTERER. De la forme et de l'origine nucléaire des Hématies des D TS Re à à à à Run e 133 A PRENANT. Les Appareils ciliés et leurs dérivés (avec 6 figures) [Suite]. ..... 150 M. DE KERVILY. La membrane basale des bronches chez!l'embryon et le 205

fœtus de l'Homme (Développement et structure) [Suile et fin]. .....,...........

LIBRAIRIE FÉLIX ALCAN 108, Boulevard Saint-Germain, PARIS

Le Journal de l'Anatomie et de la Physiologie paraît tous les deux mois de

CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION ERA

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1 NA QHAQUE LIVRAISON CONTIENT :

i* Des travaux originaux sur les divers sujets que comporte son litre, accompagnés de planches Los lex et en couleurs, et de gra vüres ädds le: texte; 2 Des analyses et comptes rendus de travaux présentés aux Sociétés savantes M et étrangères.

IL À EN OUTRE POUR OBJET :

La tératologie, la chimie organique, l'hygiène, la toæicologie et la médecine légale dans leurs rapports tomie et la physiologie: ss

Les applications de l'anatomie et de la physiologie à la pratique de la médecine, de la chirurgie, et de ob trique.

ne on

Les ouvrages à analyser, et tout ce qui concerne la rédaction, devront être adressés franco à la Lisatn »: ALCAN, 108, boulevard Saint-Germain, Paris (6°).

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Docteur ès lettres, agrégé de philosophie.

1 vob=an-8 2, . . . ... . PR PAM RSS fr LES LIMITES DU VOL MORBID PAR P. JUQUELIER et J. VINCHON Médecin en chef des asiles de la Seine. Interne de la clinique

des maladies mentales et de l'encéphale. | Ve

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Par le D’ Maurice BOIGEY

1 Vol. in-16. 4 Dr She 20 Ne TR ER CS

Î

Les conséquences morphologiques

de l’absence de Dents

chez les Mammifères

Î

(Étude de Morphogénie expérimentale)

Par R. ANTHONY

(PLANCHES IT À V)

Lorsque l’on voudra plus tard apprécier l’œuvre da savant de grande envergure que fut Marey, on devra nécessairement se placer au double point de vue des faits scientifiques qu'il a établis et des méthodes qu'il a créées.

Nul ne songera sans doute à contester qu'il lui aurait largement suffi d'avoir publié ses remarquables études sur la physiologie du système circulatoire et sur ia mécanique des différents modes de locomotion animale pour rester à jamais classique et mériter d’être compté parmi les maitres de la physiologie de son temps.

Mais c'est surtout en considérant les voies d’investigations qu'il a su si largement ouvrir que l’on comprendra la grandeur de son génie : Marey se révélera aux générations futures comme un con- ducteur de pensées.

L'apparition de la méthode chronophotographique qu'il sut rendre si parfaite, la mise au point et l'introduction dans la pratique

_ de la méthode graphique constituent dans l'Histoire des Sciences

biologiques de véritables faits révolutionnaires dont les consé- quences seront à jamais durables et auxquels restera toujours lié le nom de Marey.

1. Voir notre préliminaire. C. R. Acad. Sciences, 1913.

_—

JOURN. DE L’ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. L (MARS-AVRIL).

94 R.-ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

On ne saurait oublier enfin qu'en dépit d’essais plus anciens,

ceux de Fick let de Gudden * notamment, c'est lui qui introduisit

le premier les méthodes d'analyse précises en Morphogénie expé- rimentale : il mérite à ce titre d’être comptè parmi les principaux fondateurs du néolamarckisme moderne.

Les conceptions transformistes de Marey, la facon éminemment originale dont il avait pensé devoir traiter le problème en soumet- tant les doctrines évolutives au contrôle de l'expérience ont été

exposées par lui avec la limpidité qui caractérisait sa manière,

d'abord dans ses cours au Collège de France en 1872 et 1873 qu'il résuma dans la Æevue scientifique *, puis dans son livre la Machine animale *, enfin dans un article des Archives de Physiologie nor- male et pathologique *.

Faisant allusion aux transformations adaplatives, il a résumé

en quelques lignes le programme qu'il eût voulu voir rem-

plir.

Saisir sur le fait, dit-il 6, une de ces transformations, montrer qu’elle se produit toujours d’une certaine manière dans une cir- constance déterminée, telle est la première démonstration à fournir, et, si, etc.

« Il appartient, disait il encore ?, à la jeune génération de déve-

lopper cette branche nouvelle de la science, la morphogénie expé-

rimentale. » Au surplus, il prêchait d'exemple, et sa mémorable expérience

de résection partielle du calcaneum chez le Lapin $ par le fait de

laquelle furent établies, sur des bases définitivement solides, quel- ques-unes des lois fondamentales de la morphologie musculaire,

1. Fick, Über die Ursachen der Knochenformen. Experimental Untersuchung, Gœtlin- gen, 4857; et Neue Untersuchungen über die Ursachen der Knochenformen, Marburg, 1858.

2, Gudden, Recherches expérimentales sur la croissance du crâne, traduction fran- çaise de A. Forel, Paris, 4876.

3. Revue scientifique, mars 1873.

4. Marev, La Machine animale, Paris, 1873.

5. Marey, Des lois de la Morphogénie chez les animaux, Arch. de Physiol. norm. et rt janvier 1889.

6. Marey, La Machine animale, p. 88.

ï. Marey, Arch. de Physiol. norm. et pathol., loc. cit., p. 100.

8. Marey, Recherches sur la morphologie des muscles, C. R. Acad. des Sciences, Paris, 1887.

DE L’ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 95

démontre surabondamment lincroyable fertilité de la méthode qu'il préconisait. ,

On peut regretter que la voix de Marey ait été insuffisamment entendue. À part Joachimsthall!, Demoor*, Duerst*, moi-même et quelques autres, la plupart des biologistes sont malheureusement restés sourds. Qu'il me soit permis de rappeler ici que depuis près de quinze ans, je n'ai laissé échapper, en ce qui me concerne et dans la mesure des moyens dont je dispose, aucune occasion de faire ressortir la valeur de la méthode, les résultats importants aux- quels elle pouvait conduire et de provoquer les tentatives de Mor- phogénie expérimentale. Grâce d’ailleurs aux objurgations réitérées de nombreux biologistes, Edmond Perrier et A. Giard en France notamment, on semble depuis quelques années s'intéresser davan- tage à ce genre de recherches et-comprendre l'importance qu’elles peuvent avoir dans l'étude du problème de l’évolution.

L'étude que je présente aujourd’hui démontrera, je pense, com- bien une expérience d'une grande simplicité tant au point de vue

4. Joachimsthall, Ueber selbsregulat Vorgange an Muskel, Zeülschr. f. Orthopäd. Chirurgie, Bd. IV, Heft. 2, Stuttgart, 1896; et De l'adaptation spontanée des muscles aux changements de leurs fonctions, C. R. Acad. Sc., 20 avril 1896.

2. J. Demoor, La plasticité organique du muscle, de l’os et de l'articulation, Bull. Acad. Roy. de Méd. de Belgique, 25 avril 1903; et Publications de l'Institut Solvay, Travaux du labor. de Physiologie, t. V, fase. 3.

3. U. Duerst, voir notamment : Experimentelle Studien über die Morphogenie des Schädels der Cavicornia, Vierteljahrsschrift der Naturf. Gesellsch. in Zurich, 1903; et Les lois mécaniques dans le développement du crâne des Cavicornes, C. R. Acad. Sc., 3 août 1903. | _ 4. R. Anthony, voir notamment : Introduction à l'étude expérimentale de la Mor- phogénie. Modifications crâniennes consécutives à l'ablation d'un crotaphyte chez le Chien et considérations sur le rôle morphogénétique de ce muscle, Bull. et Mém. Soc. Anthrop., Paris, 5 février 1903. Voir aussi: C. R. Soc. Biologie, 29 nov. 1902; Journal de Physiologie et de Pathologie générale, mars 1903; Bull. Soc. Anthrop., Paris, nov. 1903; C. R. Acad. des Sc., 23 nov. 1903; Bull. Inst. génér. psychol., 190%; C. R. Congrès Ass. franç. Av. Sc., Grenoble, 6 août 190%; Revue des Idées, 45 sept. 1906. ;

5. Les résultats de mes recherches de Morphogénie expérimentale ont déjà été utilisés non seulement au cours de mémoires scientifiques, mais encore dans des traités classiques : Ledouble, Traité des variations des os de la face, Paris, Vigot, 1906; P. Carnot, Les bases de la Kinésithérapie et les lois de la Mécanomorphose, Biblio- thèque de Thérapeutique de A. Gilbert et P. Carnot, Paris, J.-B. Baillière, 1909, par exemple. Ils ont aussi élé contrôlés à maintes reprises, notamment par K. Toldt (Assym. Ausbild. der Schläfenmuskeln bei einem Fuchs infolge einseitiger Kautä- tigkeit, Zoologischer Anzeiger, juillet 4905); et par W. B. Pietkiewiez (R. Anthony et W. B. Pietkiewiez, Nouvelles expériences sur le rôle.du muscle erotaphyle dans la

constitution morphologique du crâne et de la face, C. R. Acad. des Sciences, 15 nov 1909.)

96 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

de sa conception que de sa réalisation peut nous conduire à toucher aux plus importants problèmes qui relèvent de l’action des facteurs primaires sur la morphologie squelettique.

EXPOSÉ DE L'EXPÉRIENCE

En 1910, poursuivant, à la Station physiologique du Collège de France, mes études de Morphogénie expérimentale sur le crâne Fe comme suile à mon expérience de résection d’un muscle crotaphyte chez le Chien t, je pratiquais chez ce même animal l'avulsion

systématique de toutes les dents.

Il est juste de rappeler que cette expérience avait déjà été tentée par Gudden ? chez le Lapin; mais la facon de procéder de l’illustre physiologiste de Munich avait été sensiblement différente de la mienne. Gudden supprimait les dents d'une hémimandibule seu- lement, et, au lieu de les extraire, comme je l'ai fait, au fur et à mesure de leur apparition, il enlevait après incision du maxillaire les germes dentaires dans leur ensemble avant même leur éruption.

Cette méthode présente incontestablement l'avantage de sup-

1. R. Anthony, Loc. cit., Bull. el Mém. Soc. Anthrop., Paris, 1903.

2. B. Gudden, Loc. cil. Le texte (p. 87 et 8S) consacré par cet auteur à lexposé de cette expérience et de ses résultats est assez court pour qu'il me soit possible de le-transcrire tout entier ici. « L’exiraction des dents est une opération assez difficile et assez compliquée. On incise le long de la portion buccale du maxillaire inférieur, on pratique à deux endroits la ligature de la veine faciale, et lon met à nu la portion de l’os qui porte les alvéoles. Cela fait, on enlève au maxillaire inférieur une bande longitudinale large d’un millimètre, ce qui donne accès dans les alvéoles: Les alvéoles ainsi ouvertes, on introduit dans chacune d'elles un instrument fin en forme de cuiller avec lequel on soulève la dent et sa pulpe. Lorsque toutes les dents ont élé extraites on recoud la plaie. Les figures 5 et 6 et les figures 7 et 8 de la planche X repré- sentent les crânes de deux lapins auxquels on avait enlevé les dents molaires de la mâchoire inférieure gauc'e. L’op‘ration n’a du reste pas tout à fait réussi chez le lapin dont le crâne est photographié à la figure 5, et le lapin de la figure 7, chez lequel lopération avait élé très bien faite, a du être lué trop tôt. Si deux dents n'étaient restées au lapin de la figure 5, et si le lapin de la figure 7 avait pu demeurer en vie jusqu'à l’âge adulte, la scoliose aurait très probablement alteint un plus haut degré chez tous les deux. Telle qu'elle est, il faut nour s’assurer de son existence tirer une ligne droite du milieu de la protubérance cecipitale extérieure à la cloison des alvéoles des dents incisives supérieures. Le bord alvéolaire du maxillaire supé- rieur du côté opéré est atrophié; ses alvéoles forment une ligne droite et ses dents sont longues et minces, tandis que le bord älvéolaire du côté non opéré est fortement arqué et porle des dents courtes et robustes. »

DE L’ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 97

primer, presque avant même qu'elle n'ait eu le temps de se mani-

_fester, l'influence morphogénique des organes en cause, mais eile

offre d'autre part l’incontestabte inconvénient, par le délabrement qu'elle nécessite, de troubler en queique sorte la pureté des résultats.

Ajoutons aussi que l'hémicrâne et l'hémimandibule restés intacts peuvent en se développant influencer au cours de la croissance la morphologie de lhémicrâne et de lhémimandibale de l’autre côté; aussi les résultats de Gudden sont-ils tout à fait différents des miens.

Mon expérience fut conduite de la facon suivante :

Dans une portée de chiens qui se trouvait composée d'individus identiques! notamment au point de vue du poids somatique et des dimensions de la tête ainsi que de sa forme, je choisis dès le jour de la naissance deux individus de même sexe; il se trouva que ce furent deux femelles.

J'en conservais un à titre de témoin et praliquais à l'autre, au moyen du davier, l’avulsion systématique des dents des deux mâchoires au fur et à mesure qu'elles émergeaient de la gencive. L'animal fut pour celte opération chloroformé chaque fois, sauf cependant au début.

Toutes les dents de première dentition furent ainsi extraites. Les dents de seconde -dentilion le furent également; mais un jour que

l'animal était chloroformé, sans aucun doute pour la dernière fois, 1l mourut au cours de l’anesthésie ayant probablement absorbé

quelque nourriture dans la matinée à l'insu des personnes pré- posées à sa garde. Il restait en ce moment à extraire les trois dents définitives suivantes dont on commençait à apercevoir les sommets :

Canine gauche. Première prémolaire gauche. Troisième prémolaire droite.

1. On sait que dans une mème porlée de chiens domestiques, en raison du fait des eroisements successifs, les individus peuvent présenter des caractères très différents. Ce fait aurait pu constituer un inconvénient pour l'appréciation des résultats d’une expérience de l'ordre de celle que j'ai entreprise. Dans le cas particulier tous les pelts présectaient les mêmes caractères de race. Un simple coup d’œil jeté sur les planches permet de vérifier cette assertion en ce qui concerne les deux animaux dont les crânes sont représentés.

98 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Le témoin fut comme de juste immédiatement sacrifié et les deux crânes préparés et conservés.

Les animaux étaient à ce moment âgés de six mois environ : le _sphénoïde antérieur et le sphénoïde postérieur n’étaient point encore synostosés (voyez PI. IT, fig. 4 et 2).

J'ajouterais que le chien soumis à l'expérience fut au cours de sa vie exclusivement nourri d'aliments liquides, mais exactement de même nature que ceux de son frère témoin

Il

MODIFICATIONS MORPHOLOGIQUES CRANIENNES CONSÉCUTIVES A L'AVULSION DES DENTS

Il importe de faire remarquer tout d’abord que l'animal soumis à l'expérience se trouvait être, au moment de la mort, comme il l'était au moment de la naissance, sensiblement de même taille et de même poids que le témoin. Un simple coup d'œil jeté sur les figures des planches permet de se rendre compte que si-aucun facteur étranger n'eût été introduit au cours du développement de lun des animaux, les deux crânes eussent très probablement été exactement superposables.

Cette remarque a son importance, car elle établit notre droit d'utiliser, au cours de nos comparaisons et jusqu'à un certain point, les mesures absolues.

J'ai cru nécessaire aussi de cuber les deux crânes pour me rendre compte au préalable des différences de volume que pouvaient pré- senter les deux masses encéphaliques. |

Cette opération a été pratiquée de la facon suivante : chacun des deux crânes ayant été scié exactement suivant sa ligne sagit- tale, chaque hémicrâne a été soigneusement rempli jusqu'à ras bords de gélatine. Le volume de cette gélatine immédiatement après . son durcissement a été ensuite mesuré avec toute l'exactitude possible.

Le résultat obtenu a été le suivant :

Volume de l’encéphale du chien témoin .... 56 cm”. Volume de l’encéphale du chien opéré..,... 53 cm.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 99

Ces deux chiffres sont, comme on le voit, très voisins, et, pour apprécier la différence réelle susceptible d’avoir existé entre Île volume de l’encéphale du chien opéré et celui de l'encéphale du chien témoin, il faut évidemment tenir compte des erreurs possi- bles de technique et d'évaluation. En tous cas, la différence con- statée de 3 cm? peut, si elle correspond comme c’est au surplus possible, à la réalité, être attribuée à une légère infériorité de poids somatique que présentait l'animal opéré par rapport à l'animal témoin, et peut-être aussi à une moindre intensité de fonclionne- ment de ses muscles masticateurs.

Les modifications que présente le crâne du chien opéré par rap- port à celui du chien témoin s’enchainent en quelque sorte les unes les autres. Il m'a paru cependant possible d'essayer de débrouiller cet enchainement, et J'ai cru pouvoir reconnaitre que-si parmi les

modifications survenues, les unes sont en quelque sorte directes, | conséquences immédiates de l'absence des dents, les autres peu- vent être considérées comme indirectes; parmi ces dernières cerlaines même peuvent être regardées comme indirectes au second degré, en ce sens qu'elles paraissent être la conséquence d’autres modifications qui sont elles-mêmes des résultats indirects.

Nous allons essayer d'exposer les conséquences morphologiques de notre expérience.

-

RÉTRÉCISSEMENT DE LA VOUTE PALATINE (PI. IT, fig. 4 et 2).

Il est hors de doute que l’une des conséquences les plus directes el les plus immédiates de l’avulsion des dents supérieures, clef de voûte en quelque sorte d’un grand nombre d’autres modifications, est le rétrécissement général de la voûte palatine.

Ce rétrécissement est exprimé par la différence des dimensions suivantes :

Témoin | Opéré.

Largeur maxima du palais en arrière (um !).....

53 mm. | 43 mm.

4. Les lettres qui accompagnent ainsi l’énoncé des dimensions, des indices ou des angles se rapportent aux tableaux 1, IL et III. Toutes les dimensions sont exprimées en millimètres.

100 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Il ressortirait également de la comparaison de toutes les mesures transversales susceptibles d’être prises à un niveau quelconque de l’'arcade dentaire supérieure.

20 DIMINUTION DE L'ÉPAISSEUR ET DE LA HAUTEUR DES BRANCHES HORIZONTALES DE LA MANDIBULE (PI. I, fig. 4 et 2).

Au défaut de présence des dents inférieures se rattachent directe- ment aussi la diminution d'épaisseur et la diminution de hautêur des branches horizontales de la mandibule, à quelque niveau qu'on ‘. les considère.

Tém oin.| Opéré.

Épaisseur en avant de la carnassière (a) : : Ke Hauteur en avant de la carnassière (b) ; Le sa

RACCOURCISSEMENT ET PLUS GRANDE INCLINAISON DE LA SYMPHYSE MANDIBULAIRE (PI. I, fig. 4 et 2),

Le raccourcissement de la symphyse (g.) (témoin, 25 ; opéré, 19); sa plus grande inclinaison (angle symphysien ! : témoin, 113°; opéré, 159°), semblent être les conséquences directes de la diminu- tion de hauteur des branches horizontales de la mandibule à leur extrémité antérieure.

RÉGRESSION DES MUSCLES MASTICATEURS (CROTAPHYTES ET MASSÉTERS) ET SES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES.

Il semble qu'il puisse être admis sans conteste que, chez un Car- nassier privé de dents et exclusivement nourri d'aliments liquides, les muscles masticateurs (masséters, ptérygoïdiens, crotaphytes) ont un fonctionnement réduit tant au point de vue de la force à déployer qu'à celui de l'amplitude des mouvements à exécuter; ils doivent

1. J'appelle angle symphysien l'angle que fait la direction du bord antérieur de la symphyse maxillaire avec une ligne joignant le point le plus inférieur de cette sym- physe à l’apophyse angulaire.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 101

conséquemment entrer en régression au double point de vue de leur volume et de la longueur de leurs fibres. Cette régression élail en effet évidente dans le cas qui nous occupe. Elle se manifeste en outre par des modifications de la morphologie squelettique dont elle est d’ailleurs la cause :

ax) Rapprochement de l’arcade zygomatique du crâne cérébral (PL I, fig. 4 et 2). Nous avons montré ailleurs ! que l'absence provoquée du muscle crotaphyte entrainait le rapprochement de l’arcade zygomatique du crâne cérébral. Chez notre animal on constate le même fait, conséquence de la diminution du volume transversal de ce muscle, ainsi que du muscle masséter également qui ne peut guère au point de vue morphologique général être séparé du crotaphyte. Il se traduit par les différences suivantes :

Témoin. | Opéré.

Distance de l’arcade zygomatique au { g....| 17,5 15,5 crane mesurée en arrière de l’apo- physe post-orbitaire (x)............ CES Le À 16

8) Atténuation des crêtes pariétales (PI. I, fig. 4 et 2). Elles sont un peu moins marquées, surtout en arrière, chez l'animal opéré que chez le témoin, ce qui tient encore à la diminution d'épaisseur transversale des muscles crotaphytes ?.

y) Atrophie de la branche montante de la mandibule (PI. I, fig. 1 et 2). A l’atrophie des muscles masticateurs (masséter, ptéry- goidien et crotaphyte), on peut aussi attribuer la diminution de volume de la branche montante de la mandibule dans.son ensemble (région de la fosse massétérine, apophyse coronoïde $).

Témoin.| Opéré.

auteur de l’apophyse coronoïde (c)... à ie ie Largeur de l’apophyse coronoïde (d)... a > (i

Notons entre parenthèses que les surfaces d’inserlions du muscle

LR. Anthony, Loc. cit. 25 Ibid. 3. Ibid.

102 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

digastrique sur la branche horizontale sont à peu près identiques “chez les deux animaux, ce qui tendrait à faire admettre que le défaut de présence des dents n’entraîne aucune modification du volume de ce muscle, lequel ne jouerait par conséquent qu'un faible rôle dans les efforts de mastication.

à) l'endance à l'arrondissement des surfaces articulaires t:mporo- maxillaires. L'atrophie des muscles masticateurs entraînant la diminution d'amplitude des mouvements de la mandibule a amené la diminution d'étendue des surfaces articulaires temporo-maxil- laires aussi bien dans le sens de la longueur (antéro-postérieur) que dans le sens de la largeur.

Cette diminution ressort nettement des chiffres suivants :

Témoin. | Opéré. Long. de la surf. temp.-maxillaire sur CRE 10 955 A ET n Mu d....| 140 | 9,5 Larg. de la surf. temp.-maxillaire sur ÉRE à 19204 LUNA LEP RS ER Re CR ÉSSE 19 fi : DRE 6 5,8 Long. du condyle maxill. (e).......... FH 6 3.6 “a : Das 16 14,5 Larg. du condyle maxill. (f).......... RER 15

Longueur >< 109 Largeur

En établissant le rapport on obtient d'autre

part les indices suivants :

Témoin. | Opéré.

Surface crânienne de l’articulation (F).. 4 ss ee ae ... Vas à

Surface mandibulaire de l'articulation (G). à ne s. 9 m—38,65 £ , 21,

De l'examen de ces derniers chiffres il ressort nettement que, du fait de l'avulsion des dents, les surfaces articulaires temporo- maxillaires se sont surtout réduites dans le sens transversal ten- dant à rapprocher leur contour de celui d’une circonférence, puisque les indices sont moins éloignés de 100 chez l’opéré que chez le témoin. Par le fait de cette modification, le condyle mandibulaire tend à s’écarter de la forme qui le caractérise chez les Carnassiers.

e) Diminution d'épaisseur de l'arcade zygomatique (PI. IL, fig. 4 et 2). Partout l’arcade zygomatique est moins épaisse chez

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 103

l'opéré que chez le témoin, et cette particularité me parait s’expli- quer très bien par le fait qu’elle représente en somme une inter- section au milieu de la masse musculaire crotaphyto-massétérine ; la régression de cette masse entraîne son amincissement.

Nous allons voir au paragraphe suivant que la diminution de hauteur de l’arcade zygomatique dans sa région antérieure peut être considérée comme étant partiellement au moins en rapport avec l’atrophie des crotaphytes et des masséters.

Notons enfin que l’inclinaison du plan nuchal en avant, modifi- cation que nous examinerons par la suite, relève aussi, semble-t-il, en parlie et indirectement de la diminution de volume des muscles masticateurs.

MODIFICATIONS DANS LA HAUTEUR DE L'ARCADE ZYGOMATIQUE (Pr Erhes ét 2):

Une diminution de hauteur de l’arcade zygomalique est appré- ciable dans toute la région cette arcade est constituée par l'os malaire, c'est-à-dire en avant. Hauteur de l’arcade zygomatique au niveau du tubercule post-orbitaire (2):

Témoin. Opéré. RSS rene cie ie Hp NET 9 él de er bte 9 1

Hauteur de larcade zygomatique au niveau de sa racine anté- rieure (o”) :

Témoin. Opéré. NS SON EE ER RE PR On 12 TT ne dure MU l# 12

Ce fait parait être en rapport surtout avec l'absence des der- nières molaires et en partie aussi, dans la région postérieure de celte portion malaire, avecla diminution de volume des crotaphytes el des masséters.

En arrière, par contre, c’est-à-dire à partir du point l’arcade est uniquement formée par l’apophyse zygomatique temporale, on constate chez l’animal opéré une légère augmentation de hauteur.

10% R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Témoin. Opéré. QT PASS NES TE 5,8 6,5 AC US CR Era 5,8 6,5

Ce dernier fait, qu’il m'est pour le moment impossible d'expliquer clairement, est à rapprocher de lPabsence de modifications que nous constaterons plus loin dans les parties postéro-inférieures du crâne.

DIMINUTION DES DIMENSIONS TRANSVERSALES DU CRANE (PI. IL, fig. 1 et 2).

Il ressort très nettement de l'examen des chiffres absolus con- tenus dans le tableau I que les dimensions 6, 4°, À, , v, y, 3 sont très inférieures chez l'animal qui fut soumis à l'expérience, à celles qu'on constate chez l'animal témoin.

En ce qui concerne les dimensions susceptibles d’être prises sur la voûte palatine (4 par exemple), ilest hors de doute, comme nous l'avons vu, que la dimension de largeur est la conséquence directe du défaut de présence des dents supérieures.

L’abaissement de la dimension £ (distance des trous sous-orbi-. laires) est le résultat du rétrécissement du palais, et il en est de même de l’abaissement des dimensions v et v (largeurs biptéry- goïdiennes). Le rétrécissement du crâne cérébral, nettement appré- ciable, qu’on examine ce dernier au niveau de sa largeur maxima 0 ou dans la région frontale 6”, pourrait enfin être considéré à mon sens comme une conséquence éloignée de la diminution de largeur de la voûte palatine. Ce rétrécissement du crâne cérébral est d’ail- leurs localisé aux régions antéro-supérieures. En arrière et en bas, il ne se perçoit plus (voir la mesure :). ;

Il convient de même de faire remarquer entlin que la largeur biorbitaire minima +’ est légèrement plus considérable chez l’opéré que chez le témoin. La distance d’une apophvse orbitaire à l’autre x n'à par contre pas variée.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES,. 105

Aucoxceuent pu cnant (PI. I, fig. 1 et 2; PI. IT, fig. 1 et 2; PI. IL, fix. 1 ct 2; voyez également fig. 2).

L'augmentation des dimensions longitudinales ressort nettement de la comparaison des mesures x, fi, y, à, «, (tableau 1).

La première de ces mesures («) exprime l'allongement d'en- semble de tout le crâne osseux. Les mesures 8, y, à, expriment l'allongement particulier du crâne cérébral; les mesures et celui de la face.

On peut considérer que l'encéphale devant nécessairement con- server, et conservant sensiblement en fait son volume absolu (voir plus haut), l'allongement particulier du crâne cérébral compense la diminution de largeur qu'il a subie f.

Quant à l'allongement de la face, elle pourrait tenir aux modifi- cations architectoniques générales qui sont en relation avec l’allon- sement du crâne cérébral.

IL m'a paru très instructif d'analyser les modifications de lon- sueur subies par la base du crâne à la suite de l’avulsion des dents.

Nous considérerons la base du cràne le long de son intersection avec le plan sagittal depuis le basion en arrière jusqu'au point s'articule en avant l'ethmoïde avec le frontal.

Il convient de noter tout d'abord qu'entre les deux points extrêmes considérés, la distance en ligne droite n est chez le témoin de 59,5, alors qu'elle atteint 64,5 chez l’opéré. Cette augmentalion de longueur est une manifestation particulière de l'augmentation générale du crâne osseux dans le sens longitudinal. En suivant les contours de la liyne sinueuse que constitue l'inter- section du plan sagittal avec la base du crâne (4) on trouve chez l'opéré une longueur approximative de 70 alors que chez le témoin celle ligne mesure 65 seulement,

Si l’on subdivise en quatre segments la base du crâne, on oblient dans les deux cas les mesures suivantes :

1. 1 faut plutôt voir dans cette phrase l'énoncé d'un résultat qu’une tentative d'explicalion.

106 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Témoin. } Opéré.

Segment-OCCIDitA le AS nm AE 19,5 21,2 Segment turcique ou sphénoïdien postérieur. ..... 15,5 14 Segment sphénoiïdien antérieur..........,...... 19 23 Some MAR RR. 1... eee ecocrer ee A1 10

Il résulte de ces chiffres : que la portion du plan basal qui varie le moins au point de vue des dimensions longitudinales est la portion turcique, en fait on peut même dire qu'elle ne varie pas; que l'augmentation de longueur se fait surtout en avant de cette région (segment sphénoïdien antérieur); enfin qu’il se produit au

Fig. 1. Schéma destiné à faire comprendre l'allongement de la base du crâne chez le chien privé de dents. 7°., chien témoin; O., chien d'expérience; 0., segment occipital; é., segment turcique; s., segment sphéniodien antérieur; v., segment vomérien.

contraire un raccourcissement dans la portion vomérienne. Étant donné que la direction du segment vomérien se rapproche sensi- . blement de la verticale par rapport au reste du plan de la base, ce raccourcissement paraît devoir être rapproché du surbaissement crânien général que nous étudierons dans le paragraphe suivant.

Le point du crâne qui paraît en quelque sorte immuable et autour duquel se font les modifications serait donc la région turcique.

On ne peut guère s'étonner de voir une telle conclusion se dégager de nos mesures, si l’on se rappelle les données classiques de l’'embryologie concernant le développement de la base du crâne et de Phypophyse.

Le fait que le lobe antérieur de cette dernière n’est à l’origine qu'un diverticule du pharynx primitif permet de s'expliquer comment la région turcique se trouve être en quelque sorte le centre des modifications squelettiques de la tête.

Notons enfin que, si l’on mesure l'angle très ouvert chez le Chien

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 107

que fait le planum avec le clivum, on s'aperçoit que cet angle est plus ouvert encore chez l'opéré que chez le témoin (voyez PI. IIT, fig. 4 et 2). Ce fait est en rapport avec l'allongement et le surbais- sement du crâne, qui traduisent une forme sensiblement moins sphérique de l’encéphale.

La mandibule ne paraît pas avoir subi à la suite de Fævulsion des dents d’allongement sensible.

SURBAISSEMENT DU CRANE (PT. I, fig. 4 et 2; PI. LIL, fig. 1 et 2; voyez également fig. 2).

En comparant les valeurs de la dimension » (hauteur maxima du crâne), on se rend aisément compte que le crâne de l’animal opéré présente des dimensions verticales sensiblement moins élevées que celui de l'animal témoin.

On peut encore l’apprécier en usant d’une méthode analogue à celle employée par Schwalbe pour évaluer la HOCePRANE chez

PT TV SR Re nn Le 2, nt à en a

Fig. 2. Superposition des silhouettes sagittales du chien témoin (trait pointillé) et du chien d'expérience (trait plein) suivant la ligne de base à partir du basion (B). #., tente osseuse du cervelel, Cette figure est destinée à montrer l'allongement et le surbais- sement du crâne, l’inclinaison en avant du plan nuchal, de la tente du cervelet et du plan du trou occipital, ainsi que la fermeture de l'angle palatobasique (cytocéphalie) chez le chien d'expérience. (Extrait des C. R. de l'Académie des Sciences, 1913.)

HO in 6

l'Homme et qui consiste à calculer le rapport ny à stant la

longueur nasio-iniaque ! et H la longueur de la perpendiculaire abaissée du point le plus élevé du crâne sur la ligne Ni). Cet

1. G. Schwalbe prend comme point de repère antérieur chez l'Homme, non pas le nasion, mais la glabelle.

108 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

indice (D) à chez le témoin la valeur de 95,5 et chez l'opéré celle : de 20,8. | L'aplatissement du crâne chez l'animal opéré semble être en rapport avec son allongement. Mais il me parait en somme bien difficile de préciser les processus mécaniques desquels dépend cette associalion complexe de modi- fications : rétrécissement-allongement-surbaissement crâniens.

ATTÉNUATION DE LA COURBE NASO-FRONTALE (PI. I, fig. À et 2; PI. TTL, fig. 1 ct 2; voyez également fig. 9).

Chez notre chien normal, le profil cranio-facial décrit, depuis un point situé en arrière du nasion jusqu’à l'extrémité antérieure des os nasaux une courbe à concavité supérieure (voir fig. 2).

Si l'on joint l'extrémité antérieure des os nasaux au point le plus éloigné de celte courbe, sur l'os frontal, on en obtient la corde et, en calculant le rapport de cette corde GC à la flèche F, on obtient

Rs F< 100" | | un indice (E) se qui chez nos animaux a les valeurs suivantes : À A ET 216 1 9 ST A SON AN RS AE EE À 49,7 ODÉLÉ RL Er RER A EEE 14,5

IL ressort de ces chiffres une atténuation évidente de la courbe naso-frontale chez l'animal opéré. |

Elle est à la fois, comme on Île conçoit, le résultat de l'allonge- ment et du surbaissement du crâne.

10° INCLINAISON EN AVANT DU PLAN CRANIEN POSTÉRIEUR OU NUCHAL (PI. I, lig. 4 et3; PL IT, fig. 1 et 2; voyez également fig. 2).

On peut désigner par le terme de plan crânien postérieur ou de plan nuchal la surface de forme variable limitée en haut par les crêtes occipito-temporales et qui correspond à l'aire d'insertion des muscles de la nuque. |

Chez le Chien, cet espace a la forme d’un triangle isocèle dont le sommet est l’inion externe et dont les angles latéraux se trouvent situés en avant de la base des apophyses jugulaires. Les côtés sont

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 109

constitués par les crêtes occipito-pariétales et la base par une ligne fictive joignant leurs extrémités divergentes.

Cette surface est sensiblement égale chez nos deux animaux, mais elle diffère par son orientation. Si on pratique de chacan des deux crânes une coupe sagittale et qu'on superpose les deux silhouettes en faisant coïncider les lignes de base à partir du basion, on s'apercoit immédiatement que l'angle (H) que font les directions basio-sphénique et opisthio-iniaque ont une valeur diffé- rente dans les deux cas (fig. 2). Cet angle mesure chez le témoin 80° et chez l’opéré 80° seulement. Autrement dit, le plan nuchal, semblant avoir tourné autour d’un point légèrement situé en dessous du basion, s’est en quelque sorte chez l'animal opéré incliné en avant.

Il est assez malaisé, en se plaçant au point de vue de la méca- nique morphogénique, d'expliquer cette modification qui relève sans doute d'un ensemble de facteurs extrêmement compliqués. Nous nous bornerons aux quelques considérations suivantes :

On assimile, comme l’on sait, chez tous les Mammifères les mouvements de l'articulation occipito-atloïdienne à ceux d’un levier coudé du premier genre, c’est-à-dire interfixe (fig. 8). Le point d'appui serait situé au niveau du sommet de la courbe que décrivent les condyles occipitaux d’avant en arrière; la résistance serait appliquée au centre de gravité de la tête (9) et la puissance à la nuque, elle serait représentée par l'effort de tension des muscles qui s’y insèrent ainsi que par l'élasticité du ligament cer- vical (n). Pour que la tête puisse rester en équilibre sur le rachis, il est indubitablement nécessaire que les moments de ces deux forces par rapport au point F soient égaux.

On peut admettre que, chez notre chien, par le fait de la dispa- rition des dents, des atrophies musculaires et osseuses qui en sont la conséquence, le poids de la tête a dans son ensemble légèrement diminué; on peut admettre aussi que son centre de gravité s’est déplacé én arrière et en haut (g'); la perte de poids porte surtout en effet sur la région antéro-inférieure et l'allongement général subi par le crâne ne paraît pas être assez important pour qu'on puisse en tenir compte à ce point de vue. Le moment de la force

JOURN. DE L'ANAT. ET DE LA PHYSIOL, T. L. 8

ï {

Fe:

Th D

110 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

appliquée en g a donc sensiblement diminué, d’une part par le fait de la diminution de l'intensité même de celte force, d'autre part par le fait du raccourcissement du bras de levier qui lui correspond. Il est donc nécessaire pour que l'équilibre soit rétabli que celui de la force appliquée en n diminue également; s’il n’en élait point ainsi, la tête serait sans cesse sollicitée à basculer en

Los —.., 2

Fig. 3. Schéma destiné à faire comprendre le processus suivant lequel paraît avoir pu se produire l'inclinaison en avant du plan nuchal à la suite de l'ablation des dents chez le chien. g., position très approximative au centre de gravité de la tête chez un chien

normal; g'. la place approximative que ce centre de gravité doit occuper à la suite de l’ablation des dents et de la régression des muscles masticateurs qui en est la consé- quence; r., position du centre d'action supposé des forces de traction exercées par le ligament cervical et les muscles de la nuque chez un chien normal; #'., id. chez un chien dont le crâne a été modifié à la suite de l’ablation des dents.

arrière, c’est-à-dire à se mettre dans le prolongement de la colonne cervicale.

Ce résullat ne peut être obtenu que soit par la diminution d'importance du ligament cervical et la diminution du volume transversal des muscles de la nuque, soit par le raccourcissement du bras de levier; peut-être cette dernière nécessité mécanique est-elle une des causes principales qui déterminent le plan nuchal à s'incliner en avant.

Il y aurait alors en somme une sorte de balancement entre la direction du plan occipital postérieur et le déplacement du centre de gravité du crâne. Peut-être peut-on au surplus admettre qu’il se produit aussi une diminution d'importance du ligament cervical et une diminution du volume transversal des muscles de la nuque. Cette dernière ne peut en tous cas être que très faible, car s’il en était autrement ces muscles deviendraient insuffisants à assurer les mouvements de la tête en arrière (voir fig. 3).

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 111

Quoi qu'il en soit, l’inclinaison en avant du plan nuchal parait être une des principales modifications morphologiques qui se rattachent au surbaissement crânien.

41° REDRESSEMENT DU PLAN DU TROU occipiTAL (PI. IE, fig. À et 2; voyez également fig. 2).

Une conséquence importante de cette modification dans l’orien- tation du plan nuchal est une différence d'orientation aussi du plan du trou occipital. Ce dernier fait avec le plan de la ligne de la base un angle (à) de 195° chez le témoin et de 106° seulement chez opéré. Il est possible que cette modification ait été accompagnée de changements appréciables dans la colonne cervicale; nous n'avons malheureusement pas pu examiner cette dernière, ne l'ayant point conservée.

19 LÉGÈRE EXTENSION DANS LE SENS ANTÉRO-POSTÉRIEUR * DE LA SURFACE OCCIPITO-ATLOÏDIENNE.

J'ai constaté aussi, chez l’animal soumis à l'expérience, un déve- loppement, légèrement plus considérable que chez le témoin, de la surface articulaire de l’occipital avec l’atlas dans le sens antéro- postérieur. Ge fait implique nécessairement une plus grande ampli- tude des mouvements articulaires; elle pourrait être considérée comme étant en rapport avec la plus grande longueur probable que doivent présenter les fibres les plus superficielles des muscles de la nuque à la suite du mouvement de bascule en avant subi par le plan nuchal.

13° REURESSEMENT DE LA TENTE OSSEUSE DU CERVELET (PI. IL, fig. { et 2; voyez également fig. 2).

- Pour situer et préciser par rapport à l’exocräne la direction de la tente osseuse du cervelet, j'ai relié le point qui correspond au niveau du sinus latéral sur la coupe sagittale (pressoir d’Hérophile)

\

VER + CINE RR E 1 ; V i LT 7 di | Lo:

112 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

au point qui correspond à lextériorisation du rebord postérieur de la selle turcique. La ligne ainsi obtenue fait avec le plan de la ligne de base un angle (K) qui chez le témoin mesure 48& et ‘chez l'opéré 52°. Autrement dit, le plan postérieur du cerveau tend à se rapprocher de la verticale chez l’opéré (voyez fig. 2). Cette modi- fication est évidemment la conséquence de toutes celles que nous avons énumérées plus haut (augmentation de longueur et surbaisse- ment de l’encéphale, inclinaison plus grande en avant du plan

nuchal).

14° TENDANCE À LA FERMETURE DE L'ANGLE PALATO-BASIQUE (DÉFLEXION DE LA FACE SUR LE CRANE. CYTOCÉPHALIE). PI. IIT, fig. À et 2; voyez également fig. 2).

L’angle paloto-basique (J) est celui que fait la direction de la voute palatine avec celle de la base du crâne.

Cet angle est plus légèrement rapproché de deux droits chez le témoin, 174, que chez l’opéré, 172. Il semble qu’en raison de son accroissement de longueur la face ait chez l’animal opéré une ten- dance à se défléchir et même à s’incurver en bas à son extrémité, si l’on en juge par la courbe plus accentuée que décrivent les inter-

maxillaires.

15° ÉPAISSEUR GOMPARÉE DES PAROIS ENDOCRANIENNES (PI. IIL, fig. 4 et2).

Le crâne de l'animal opéré présente en certains points des parois plus épaisses que celui du témoin. Dans d’autres régions c’est le contraire qui s’observe. Dans le tableau ci-joint qui indique les épaisseurs au niveau des différents points du plan sagittal le signe + indique la prédominance d'épaisseur et le signe porté dans les deux colonnes l'égalité d'épaisseur en un même point. Les différences sont, sauf en ce qui concerne le niveau des sinus fron-. taux (nasion), très peu accusées, et je n’ai point jugé à propos de les préciser par des chiffres. Au niveau du nasion, l'augmentation de développement des sinus frontaux chez l’opéré paraît être en rapport avec l'effacement de la courbe naso-frontale. Il convient de

DE L’ABSENCE DES DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 113

noter enfin que c’est seulement au niveau de la selle turcique que Pépaisseur est restée semblable. Cette région du crâne s'affirme donc comme immuable en quelque sorte.

Témoin. | Opéré.

Au niveau de la paroi cérébelleuse postérieure

CAC MAS a van ue Us star + Aubreau déPimon-externe.…. 42.1... + OR EG UROTEN OR TER. rnel tte dal s e4 à dos Au niveau du nasion (sinus frontal)............ (6,5) + (9) Au niveau de l'entrée des choanes............ + Au niveau des trous optiques................. MBA Ve CUS DhÉMION.: LES Re ee, + Au niveau dela selle: tufcique:s.f: x 5.1... = Tout le long de l’apophyse basilaire de l’occipital. =

Au niveau des points situés en dehors de la ligne médiane sagit- tale et si l’on en juge par le degré de transparence à la lumière, la paroi crânienne de l'opéré serait peut-être légèrement plus mince que celle du témoin.

RÉSUMÉ.

En résumé les principaux résultats de la disparition des dents, dont la réduction des muscles masticateurs sont la conséquence immédiate, paraissent être les suivants au point de vue de la mor- phologie du crâne osseux :

Une atrophie notable de la mâchoire inférieure dans son ensemble ;

Une réduction et une tendance à l’arrondissement des surfaces articulaires temporo-maxillaires ;

Un rétrécissement général ;

Un allongement général ;

Un aplatissement général ;

Une inclinaison en avant du plan nuchal ainsi qu’un redresse- ment des plans du trou occipital et de la tente osseuse du cervelet ;

Une légère fermeture de l'angle palato-basique.

Il convient de rapprocher ces résultats expérimentaux des récentes observations faites par M. Dechambre ! d’abord, par

1. Dechambre, Société centrale de Médecine vétérinaire, janvier 1912.

LR TN e

114 R, ANTHONY. «7 LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

M. F. Regnault ! ensuite, sur le crâne d’un Toy-terrier (terrier de | race naine), mort à l’âge de treize ans et qui présentait l'absence congénitale de toutes les dents.

Les principaux caractères de ce crâne signalés par M. F. Regnault sont les suivants : |

Os minces, maxillaires supérieurs étroits, voûte palatine large et plane, crâne fortement voûté, ligne d'insertion supérieure des crotaphyles peu marquée, arcades zygomatiques bien développées, : écartées du crâne et fortement concaves en bas; mandibules minces avec fosses massétérines peu marquées, apophyses coronoïdes larges el mousses. |

L'étroitesse des maxillaires supérieurs et des mandibules, l’alté- nuation des surfaces d'insertion des muscles crotaphytes et mas- séters sont à rapprocher des modifications survenues chez notre chien d'expérience. Quant à la plupart des autres caractères, ils me semblent être directement ou indirectement plutôt en rapport avec la petite taille de l'animal qu'avec le fait de l’absence congénitale des dents. La voussure crânienne notamment me paraît devoir être rattachée au grand développement relatif de l’encéphale qui carac- térise, comme l’on sait, dans chaque groupe naturel les formes de taille réduite.

M. F. Regnault termine d’ailleurs la note qu'il a consacrée à l'étude de cette intéressante anomalie par la phrase suivante : « L'aspect de ce crâne est celui d’un chien nain; il offre des ana- logies avec celui du chien havane conservé au Musée Broca. »

III

LA DISPARITION DES DENTS ENVISAGÉE COMME FACTEUR MORPHOGÉNIQUE CRANIEN AU COURS DE LA PHYLOGÉNIE (chez les Edentata et les Effodientia plus particulièrement). |

Ce qui me paraît augmenter singulièrement l'intérêt de l’obser- vation dont il est ici question c’est que le facteur envisagé (dispari-

1. F. Regnault, Crâne de chien avec absence congénitale des dents, Bull. et Mém- Soc. Anthrop., Paris, 16 mai 1912. :

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 115

tion des dents) semble jouer un rôle important dans la constitution crânienne de certains types mammaliens.

En nous basant sur les résultats constatés de notre expérience, nous allons essayer de montrer comment et dans quelle mesure ce facteur morphogénique, dont au surplus nous n’avons pas à rechercher la cause première, peut être regardé comme ayant large- ment contribué à déterminer au cours de la phylogénie la morpho- logie crâänienne caractéristique de ces types.

En dehors des cas l’on observe la disparition des dents en une région déterminée de l’une ou l’autre des mâchoires (Rumi- nants, par exemple, caractérisés par l'absence des incisives supé- rieures), en dehors de ceux aussi devenues très réduites (la plupart des Cétacés cétodontes) elles ne paraissent plus jouer un rôle effectif dans la mastication, en dehors de ceux enfin où, absentes à la mâchoire inférieure, elles sont remplacées à la supé- rieure par des organes spéciaux jouant un rôle physiologique tout différent (fanons des Cétacés mysticètes), on sait qu'un certain nombre de Mammifères présentent une absence complète de ces organes aux deux mâchoires. Dans le groupe des Monotrèmes, l'Échidné, par exemple, est dans ce cas, et il en est de même d’un certain nombre de types que la plupart des classiques réunissent avec d’autres sous le nom d’Édentés, les Fourmiliers et les Pangolins.

Les animaux qu'on groupe habituellement dans les traités de Zoologie sous la dénomination d'Édentés constituent en fait deux catégories bien distinctes de Mammifères présentant seulement en commun une tendance manifeste, parfois complètement réalisée, à la disparition des dents. Ils semblent provenir de souches très différentes, et leurs traits de ressemblance paraissent plutôt actuellement devoir être interprétés comme le résultat de processus de convergence que comme la manifestation d’une adaptation parti- culière dans un seul et même phylum.

Flower, puis Lyddekker d’ailleurs, ont depuis longtemps déjà nettement séparé les Édentés da Nouveau Monde de ceux de l'Ancien, conservant le nom d’Edentata aux premiers seuls et désignant les autres sous la dénomination d'Effodientia.

116 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Les premiers (Edentata du Nouveau Monde) peuvent être natu- rellement subdivisés en deux groupes qui paraissent en somme déjà assez distants Fun de l’autre : les Loricata (Tatous actuels et Glyptodontes fossiles) d’une part, tous munis de dents plus ou moins régressives; les Paresseux (Tardigrades actuels adaptés à l'arboricolisme et Gravigrades fossiles adaptés à la vie terrestre), et les Fourmiliers, d’autre part. |

Tout porte à croire que les animaux de ce dernier groupe (Paresseux et Fourmiliers) aient une origine commune : les formes bradypoïdes encore munies d'organes dentaires déjà manifestement régressifs des couches santacruziennes de Patagonie, bien connues . depuis les études de Scott ! (Hapalopsidæ, par exemple), constituent en effet des types suffisamment archaiques et synthétiques pour pouvoir nous donner une idée approximative du type morpholo- gique que devaient réaliser les ancêtres communs * : des formes terrestres géantes du pleistocène (Megatherium, Scelidotherium, Mylodon, etc.) ; des Bradypes actuels spécialisés dans la suspen- sion arboricole (Gholœæpus, Hemibradypus, Bradypus); des Four- miliers (Myrmecophaga, Tamandua, Cycloturus) enfin, secondaire- ment adaptés à la vie fouisseuse et accessoirement, en ce qui concerne les deux derniers, à la vie dans les arbres.

Si les Bradypes géants du pleistocène et les Bradypes actuels ont conservé la denture ancestrale à peine modifiée dans quelques cas, les Fourmiliers sont, par contre, devenus de véritables édentés au sens propre et grammatical du mot.

Les seconds (Effodientia de l'Ancien Monde) constituent incontes- tablement un groupe plus homogène que les Edentata d'Amérique, et convergent tous vers le type Fourmilier.

En ce qui concerne leur origine, la Paléontologie nous renseigne peu, mais l’on peut remarquer que parmi ces formes actuelles les unes, les Oryctéropes, possèdent encore des dents, alors que d’autres plus spécialisées, les Pangolins, en sont dépourvues tout

4. Scott, Paleontology, Mammalia of the Santa Cruz beds, Rep. of the Princeton University, Exped. to Patagonia, vol. V, 1903. The Mammalian fauna of the Santa Cruz beds of Patagonia, C. R. du Congrès int. Zoologie (Berne), Genève, 1905.

2, Il y a lieu de penser que les ancêtres communs de ces diverses formes devaient être de laille plus réduite que celle des Hapalopsidæ.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 147

comme les Fourmiliers dont ils peuvent d’ailleurs être considérés comme les analogues. Il convient de noter cependant que les Oryc- téropes bien que munis de dents, par le fait de facteurs morpho- séniques actuellement encore difficiles à préciser, et dont examen ne saurait d’ailleurs trouver ici sa place, présentent notamment au point de vue de la forme cränienne générale des ressemblances assez étroites avec les types mammaliens complètement édentés.

Notre plan d'étude va consister à passer en revue quelques- unes { des différences crâniennes que présentent d'une part les formes Bradypoïdes fossiles et actuelles encore munies de dents par rapport aux Fourmiliers, leurs proches parents, qui en sont dépourvus; d'autre part, celles plus atténuées, ainsi qu'il ressort des lignes précédentes, que présentent les Oryctéropes, également dentés par rapport aux Pangolins édentés au sens propre du mot,

Nous allons essayer de démontrer que ces différences sont de même sens que celles dont on apercoit l'ébauche entre notre chien témoin et notre chien opéré, et nous espérons pouvoir ainsi, à la lumière d’une étude expérimentale, contribuer à éclaircir le pro- bième de la morphogénie crânienne chez les Mammifères normale- ment dépourvus de dents.

Il est dans nos comparaisons un facteur important dont il ne faut pas dès l’abord négliger de tenir compte, c'est celui de la taille ou mieux du volume somatique des animaux envisagés. Si nous rangeons très approximativement par ordre de taille décroissante les Mammifères que nous avons particulièrement examinés au cours de cetté étude, à la fois dans le groupe naturel des Brady- poides (Bradypes et Fourmiliers) et dans celui des Effodientia, nous obtenons la sériation suivante :

1. Nous négligerons systématiquement en effet, parmi les caractères particuliers aux formes édentées, ceux sur la morphogénie desquels les résultats de notre expérience n'ont pu nous renseigner. C’est ainsi, par exemple, qu’il ne sera point question ici de l'ouverture de l’angle mandibulaire qui, corrélative sans doute de l'allongement de la iète osseuse, caractérise si nettement, aussi bien chez les Edentata que chez les Efodientia, les formes sans dents lorsqu'on les compare aux formes dentées. Les varlauons de ce caractère sont difficiles à apprécier chez le Chien en raison de la forme même de sa mandibule.

118 R. ANTHONY. —— LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Groupe des Bradypoïdes :

Formes à dents. Formes sans dents. Mylodon. Hapalops. Myrmecophaga. Cholæpus. Tamandua. Cycloturus.

Groupe des Effodientia :

Formes à dents. Formes sans dents.

Orycteropus. Manis.

Or l'on sait que le volume de l’encéphale est, toutes choses égales d’ailleurs, lorsqu'on envisage un groupe homogène de Mammifères, proportionnellement plus développé chez les animaux de petite taille. Il en résulte que le volume cérébral relatif doit être, etest en fait, plus considérable chez le Cycloturus que chez le Tamandua et chez le Tamandua que chez le Myrmecophaga. Il est de même plus considérable aussi chez le Manis que chez l’Oryctérope.

L'encéphale étant donc chez les formes de taille plus petite plus développé que chez celles de taille plus grande par rapport à l'en- semble de la masse du corps, il peut être également considéré comme plus développé aussi par rapport à l’une de ses parties. Le fait que la face est généralement moins prognathe, moins déve- loppée dans son ensemble chez les petits animaux que chez les gros, lorsqu'on envisage un phylum déterminé, résulte, au moins en partie, de l'état de choses qui vient d’être énoncé.

Il en découle des conséquences importantes pour le point de vue qui nous intéresse, et l’on peut estimer qu’un certain nombre de différences morphologiques relatives à l'architecture générale du crâne et imputables à l'absence de dents (l'allongement, par exemple) seront d'autant plus accusées que l’animal privé de ces organes sera plus gros. C’est ce qui existe en fait. Ces différences sont plus neltes, par exemple, chez le Myrmecophaga que chez le Cycloturus.

Il était important de prévenir d'ores et déjà le lecteur d’une cause

DE L' ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 119

d’erreur possible dans l'interprétation des résultats de l'action du facteur primaire envisagé.

Comme nous aurons, au cours de cette élude, l’occasion de rapprocher non seulement les Effodientia des Edentata, mais encore certains autres animaux à dents régressives tels que l'Echidné d’une part et les Cétacés de l’autre à la fois des uns et des autres, il me paraît indispensable aussi d’insister au préalable sur les raisons qui font que les crânes de tous ces animaux, bien qu'ayant subi l’action de facteurs semblables, ne peuvent cependant pas être identiques. Il est de notion banale que les convergences, st étroites soient-elles, ne peuvent jamais aboutir à des identités absolues, et ce fait tient évidemment aux différences préexistantes que présen- laient les matériaux, si l’on peut dire, sur lesquels les agents mor- phogéniques ont eu à exercer leur action. J'ai suffisamment déve- loppé ailleurs cet important point de vue pour pouvoir me borner à l'effleurer ici.

Les résultats de mon expérience ne peuvent évidemment pas expliquer d’une facon complète la morphogénie crânienne des Mammifères sans dents; elle me paraît seulement susceptible de donner une idée approchée de l’enchainement des processus qui ont abouti à différencier ces animaux des types dentés dont ils proviennent.

LES MODIFICATIONS DE LA MANDIBULE CHEZ LES ANIMAUX PRIVÉS DE DENTS (voyez fig. 4 et 5).

Lorsque l’on compare la mâchoire inférieure d’un Hapalops longiceps, par exemple, d’un Mylodon, d’un Megatherium. d’un Bradype arboricole actuel quelconque à celle d’un Tamanoir, d'un Tamandua ou d’un Cycloturus, on se rend nettement compte que chez ces derniers la hauteur et l’épaisseur de la branche horizon- tale de l'os ont considérablement diminué. Le fait est suffisamment évident pour que l’on puisse se dispenser de recourir à des mensu- ralions pour le mettre en lumière.

De même, sur la branche montante, en passant d’un groupe à l’autre, on constate l'effacement des impressions massétérines déjà

120 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

atténuées chez les formes dentées, et, surtout, avec une netteté:

*

remarquable la disparition à peu près totale de l’apophyse coro- noide, cette dernière n'étant encore suffisamment bien indiquée

Fig. 4. Destinée à montrer les modifications subies par la mandibule chez les animaux dépourvus de dents. De haut en bas : Cholæpus, Tamandua, Cycloturus, Echidné, Oryc- térope, Pangolin. À gauche : Myrmecophaga.

que chez les Cycloturus. Ces particularités morphologiques hérédi- tairement fixées au cours des âges paraissent bien être les premières les conséquences directes de l’absence même des dents, les secondes celles de latrophie des muscles masticateurs que l'absence des dents entraine.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 121

Les mêmes caractères se retrouvent à l’état débauche chez le chien opéré lorsqu'on le compare au chien témoin.

Au surplus, les mêmes différences sont constatables entre l’Oryclérope et le Pangolin et l'examen de la figure 4 suffit à l'établir.

En ce qui concerne la symphyse mentonnière, on voit de même qu’elle prend une direction beaucoup plus inclinée en arrière chez les Fourmiliers que chez les Bradypes. Ce fait est également à

Fig. 5. Figure destinée à montrer la régression de l'apophyse coronoïde en raison inverse de la taille chez les Cétacés mysticètes. Suivant l’ordre de grandeur : Balæna mysticetus L. ; Balænoptera musculus (physalus) L.; Balænoptera rostrata Müller. Hémimandibule gauche, face externe. (D'après P. Gervais et Van Beneden : Ostéographie des Cétacés.)

rapprocher de celui que notre étude expérimentale nous a permis de constater.

Par le fait d’une convergence adaptative assez aisée à prévoir, la mandibule de l’Échidné, ainsi que celle des Cétacés mysticètes, présente les mêmes caractères. Parmi es derniers, les Balænidés accusent une régression plus accentuée de l’apophyse coronoïde que les Balænopteridæ. Il est curieux de remarquer que les seconds sont de taille plus petite que les premiers et les dimensions de Papophyse coronoïde sont en rapport inverse de la taille dans la série suivante les animaux sont classés suivant leur volume décroissant :

Balæna mysticetus L. Balænoptera musculus (physalus) L. Balænoptera rostrata Müller.

Ce fait est à rapprocher de celui constaté chez le Cycloturus qui, parmi les Edentata privés de dents, est aussi le plus réduit. On constate également chez les Cétacés cétodontes dont les dents

122 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

paraissent dépourvues de tout rôle dans la mastication !, une atrophie remarquable de l’apophyse coronoïde.

ATROPHIE DES MUSCLES CROTAPHYTES ET MASSÉTERS (PL. IL fig. 3 et 4).

Dans le groupe des Bradypoïdes les formes à dents présentent au crâne un développement sensiblement plus considérable et une vigueur plus accentuée des surfaces d'insertion des muscles crota- phytes que les formes édentées. De même à la mandibule les pre- mières présentent des fosses massétérines plus marquées et des apophvyses. corenoides plus développées que les secondes, ainsi que nous l'avons vu. :

Dans le phylum des Effodientia les mêmes faits sont constatables lorsque l’on compare le Pangolin à lOryetérope.

L'Échidné présente encore les mêmes particularités.

L’atrophie des muscles crotaphytes et masséters ne parail pou-

voir être interprétée que comme la conséquence directé de la.

régression des dents. Outre les modifications que nous venons d'énumérer, elle entraine aussi la régression de larcade zygoma- tique dont nous allons maintenant nous occuper.

LA RÉGRESSION DE L’ARCADE ZYGOWATIQUE (PI. IT, fig. 3 et 4; voyez également fig. 6).

Dans le groupe des Bradypoïdes les animaux encore pourvus de dents sont caractérisés par une tendance à la disparition de l'arcade zygomatique. Cette dernière est, comme l’on sait, chez les Hapa- lopsidæ, les Megatheriidæ, les Mylodontidæ, les Bradypodidæ, interrompue dans sa région moyenne. Nous n'avons point à exa- miner ici les processus suivant lesquels ce caractère a pu s’établir. Cette régression ést encore plus accusée chez les formes dépourvues de dents et plus particulièrement chez le Myrmecophaga et le Cycloturus.

1. Voir notamment ce que j'ai dit à ce sujet : Le laboratoire maritime du Museum d'Histoire naturelle pendant l’année 1907, Ann. des Sc. naturelles, Zoologie, 1908.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES.. 123

Dans le phylum des Effodientia, l'Orycterope, forme dentée, possède une arcade zygomatique complète qui est au contraire largement interrompue chez le Manis dépourvu de dents.

Chez l'Échidné, l'arcade zygomatique est complète mais fili- forme. |

Chez les Cétacés, il n’y a pas en somme d'arcade zygomatique vraie (au sens suivant lequel or peut. le définir chez les Carnassiers, par exemple), puisque le processus jugal du temporal s'articule avec l'apophyse post-orbitaire du frontal ou tend pour le moins à s'unir avec elle, l'os malaire est toujours à l’état de régression.

Cette régression de l'arcade zygomalique chez les formes édentées est à rapprocher de la réduction qu'elle subit chez le Chien à la suite de l’ablation précoce des dents.

Elle est sans aucun doute sous la dépendance de l’atrophie des muscles crotaphytes et masséters.

LES MODIFICATIONS DES SURFACES ARTICULAIRES TEMPORO-MAXILLAIRES.

- Les surfaces articulaires temporo-maxillaires très allongées dans

le sens transversal chez les Bradypes, presque arrondies chez

J'Oryctérope, le sont complètement chez le Pangolin et s’allongent d'avant en arrière chez les Fourmiliers américains.

Le tableau suivant rend bien compte de cette différence et montre une augmentation de l'indice G. chez les formes édentées par rapport à celles encore munies de dents. On remarquera encore que parmi les Fourmiliers américains c'est le Cycloturus qui pré- sente le moindre développement de ce caractère.

{

Edentata !.

Formes à dents. Formes sans dents.

Cholæpus (A. 2353) ...... 41,6 | Myrmecophaga (A. 2357). 192,8 Bradypus (A. 2 349)...... eat Famandua. (A 7762)... :’ 175 Hemibradypus (A. 13710). 100 Cycloturus (A. 7 783)...... 133,3

1. Ces chiffres et les suivants concernent exclusivement la surface mandibulaire gauche. Les numéros entre parenthèses sont ceux des collections d’anatomie comparée du Muséum.

124 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

Effodientia.

Formes à dents. Formes sans dents.

Orycteropus (1913-101).... 81,8 | Manis (1913-98)........... 100

Chez un Échidné (1903-540), l'indice est de 250. Chez les Gétacés, j'ai calculé l'indice G. chez les trois types sui- vanis appartenant respectivement à chacun des PAPER groupes des Odontocètes actuels :

Delphinus delphis LAA012E271) TES RE et 112,0 Mesh todo O0 RP). CNRS RE ERRSRe 200 Roi AMIS TA) LS 240 (approximativement).

Ces comparaisons nous conduisent à des résultats qui sont exac- tement du même ordre que ceux auxquels nous avons abouti au cours de notre étude expérimentale.

L’ARCHITECTURE GÉNÉRALE DU CRANE CHEZ LES FORMES À DENTS ET LES FORMES ÉDENTÉES.

Le rétrécissement, l'allongement, le surbaissement du crâne chez le Tamanoir et le Tamandua sautent en quelque sorte aux yeux, même à première vue, lorsqu'on compare ces animaux aux formes Bradypoïdes munies de dents.

Ces caractères ressortent nettement de l'examen du tableau II, l’on voit les indices A, B et C du Cholæpus dépasser d’une façon sensible ceux du Myrmecophaga et du Tamandua. Le Cycloturus paraît seul faire exception : par la valeur de son indice B il dépasse le Cholœpus. Ge fait en apparence anormal peut peut-être s’expli- quer si l’on tient compte de la petite taille du Fourmilier didactyle qui, de ce fait, doit nécessairement posséder un encéphale propor- tionnellement plus volumineux que le Tamandua et le Cholæpus, plus encore que le Myrmecophaga. L’exception du Gycloturus se manifeste encore lorsque l’on considère les valeurs de l'indice A : il est à ce point de vue plus près du Cholæpus que des deux autres Fourmiliers. Son indice vertical (C.) comparé à celui de ces der- niers est au contraire le plus inférieur. Ce dernier fait tendrait, à

EE

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 125

prouver que l'augmentation de volume cérébral, conséquence de la petite taille, se traduit chez le Gycloturus par une augmentation des dimensions longitudinales et transversales plutôt que par une aug- mentation de hauteur.

Les résultats que fournit l'indice vertical naso-iniaque (D.

(KT) corroborent à peu près ceux dont il vient d'être ques-

tion. Le Cycloturus toutefois dépasse encore sous ce rapport le Cholœpus.

Formes à dents, Formes sans dents. Cholæpus (A. 2 353) ....:, 14,9 | Myrmecophaga (A. 2 354)... 15 Tamandua (A. 12 455)..... 8,7 Cycloturus (A. 12562)..:.. 19,5

En ce qui concerne les Effodientia, il est probable, comme nous l'avons dit, que d’autres facteurs amènent chez l'Oryctérope un allongement crânien disproportionné avec la présence des dents.

Le crâne de cet animal se comporte à presque tous les points de vue comme celui des formes édentées du Nouveau Monde. Ceci étant donné, on conçoit comment il se fait que l'indice crânien (B.) du Pangolin, animal de taille plus petite que celle de l’Oryctérope, dépasse celui de ce dernier. D'ailleurs l'indice vertical naso-iniaque (D.) donne aussi les résultats suivants :

L’allongement, le rétrécissement et le surbaissement du crâne chez les formes mammaliennes normalement édentées sont à rap- procher des modifications correspondantes dont nous avons con- staté la présence chez un animal soumis expérimentalement aux mêmes conditions.

Nous trouvons également un angle nucho-basique plus fermé chez les formes dépourvues de dents que chez celles qui en possè- dent, et cela aussi bien chez les Edentata du Nouveau Monde que chez les Effodientia de l'Ancien.

Ce fait, difficilement explicable lorsqu'on veut le soumettre à

JOURN. DE L'ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. L. 9

126 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

l'analyse, ressort très nettement de la comparaison des chiffres (H.) en ce qui concerne le Tamandua et le Tamanoir comparés au

\

2

Fig. 6. Arrière-cràne face externe gauche. Ch., Cholæpus; T., Tamandua; C., Cyclo- turus ; My., Myrmecophaga; O., Orycteropus ; M., Manis. Silhouettes décalquées sur des photographies et destinées à montrer l’atrophie de l’arcade zygomatique et l'incli- naison en avant du plan nuchal, à la suite de la régression des dents.

Cholœpus, et le Pangolin comparé à l'Oryctérope. La grande ouverture de l’angle nucho-basique chez le Cycloturus est sans doute en rapport avec le volume relatif beaucoup plus considérable

DE L’ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 127

de l’encéphale de cet animal. On remarque d’ailleurs que, parmi les formes édentées, le Mylodon de très grande taille présente éga-

lement un angle plus ouvert que Le Cholœpus beaucoup plus petit.

Edentata.

Formes à dents, Formes sans dents. Cholæpus (A. 2 353) ...... 100 | Myrmecophaga (A. 2557).. 55° Tamandua (A. 12455)..... 640 CGycloturus (A. 12 562)..... 87°

Effodientia.

Formes à dents. : Formes sans dents.

Orycteropus (1913-101).... 66° Manis (14913-98)........... 60°

L’angle d'inclinaison du trou occipital présente, dans le groupe des Bradypoïdes du moins (chez l’Oryctérope et le Pangolin les différences sont négligeables), les mêmes différences chez les formes édentées par rapport aux formes dentées que chez le chien opéré par rapport au chien témoin.

Formes à dents. Formes sans dents, Cholæpus (A. 2353)...... 41° | Myrmecophaga (A. 2357). 70° Tamandua (A. 12455)..... 620 Cycloturus (A. 12 562)..... 659

La tente osseuse du cervelet se redresse également chez les formes édentées du Nouveau Monde comme elle le fait chez le Chien qui-a subi l’ablation systématique des dents.

Formes à dents. Formes sans dents.

Cholæpus.(À.,2353):...., 65° | Myrmecophaga (A. 12 35

Les différences sont négligeables en ce qui concerne le Manis comparé à l'Orycteropus.

Notons encore que chez les types édentés du groupe des Brady- poides la concavité sous-frontale a totalement disparu et est même remplacée par une convexité marquée qui est la continuation de la convexité crânienne.

Chez les Effodientia, le Manis présente une ligne nasale droite,

128 R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

et on constate seulement chez l’Orycterope un vestige de concavité.

Enfin, chez les formes édentées du Nouveau Monde, on constate un recourbement de la face en bas qu’il convient de rapprocher de la fermeture de l'angle palato-basique consécutive à l’ablation des dents chez le Chien.

CONCLUSIONS

Il ne nous a pas paru utile de pousser plus loin l'analyse.

Nous constatons en résumé que la plupart des caractères essen- tiels du crâne et de la face, qui différencient dans un même groupe mammalien les formes édentées par rapport à celles qui sont munies de dents (Allongement, rétrécissement et surbaissement du crâne. —- Allongement et recourbement de la face vers le bas.

Disparition de la concavité sous-frontale. Atrophie de l’arcade zygomatique. Inclinaison en avant du plan nuchal et de celui du trou occipital. Redressement de la tente osseuse du cervelet.

Diminution d’étendue et effacement des surfaces d'insertion des crotaphytes et des masséters. Arrondissement des surfaces arti- culaires temporo-maxillaires. Réduction de la mâchoire infé- rieure dans son ensemble, sauf dans le sens de la longueur et des apophyses coronoïdes en particulier), $'obtiennent à l’état d’ébau- ches chez un Chien qu’on prive systématiquement de ses dents, à partir du-moment de leur éruption.

I y a donc lieu de penser que ces caractères héréditairement fixés chez les Fourmiliers et les Pangolins, par exemple, et qui possèdent de ce fait une valeur incontestable et incontestée au point de vue de la caractérisation zoologique, sont sous la dépendance du fait précis absence de dents, que c’est, en d’autres termes, l'absence de dents qui les à déterminés, qu'ils constituent, si l’on préfère, des adaptations morphologiques à la condilion que l'absence de dents réalise. Si lPexpérience à laquelle nous nous sommes livrés ne nous permet pas de comprendre dans une mesure suffisante les processus mécaniques suivant lesquels ces caractères ont pu s'établir au cours des âges, s’enchaîner et se conditionner les uns les autres, elle nous permet en tout cas d’entrevoir leur cause déterminante probable.

DE L'ABSENCE DE DENTS CHEZ LES MAMMIFÈRES. 129

Ce n’est évidemment point à un auteur qu'il appartient d’insister sur la portée de ses recherches.

Je crois cependant utile en terminant de faire ressortir la puis- sance des arguments que sont susceptibles de fournir aux théories lamarckiennes les expériences de morphogénie. Les résultats aux- quels je suis parvenu en essayant de jeter quelque lumière sur le problème particulier de la morphogénie crânienne des Édentés me font difficilement concevoir la facon dont on pourrait expliquer les particularités de leur tête osseuse sans faire intervenir les fac- teurs lamarckiens.

Si les expériences de ce genre se multipliaient, les procédés de la morphogénie expérimentale se perfectionneraient sans doute, se préciseraient, et, on pourrait arriver à coordonner un ensemble de résultats. La position des biologistes qui veulent expliquer en dehors de toute action du milieu, les caractères fondamentaux des grands types d'organisation, deviendrait alors de plus en plus difficile à tenir.

Légende des Planches.

PLANCHE I. Fig. 1. Crâne du chien témoin. Norma lateralis gauche. Gr. Nat. Fig. 2. Crâne du chien d'expérience. Norma lateralis gauche. Gr. Nat. PLANCHE Il. Fig. 1. Crâne du chien témoin. Vue inférieure. Gr. Nat. Fig. 2. Crâne du chien d'expérience. Vue inférieure. Gr. Nat. Fig. 3. Crâne de Cycloturus didactylus L. (n° A. 7783). Norma lateralis gauche. Gr. Nat. Fig. 4. Crâne de Tamandua tetradactyla L. (n° A. 12 455). Norma lateralis gauche. Gr. Nat. PLANCHE HIT. Fig. 1. Crâne du chien témoin. Face interne de l’hémicräne droit. Gr. Nat. Fig. 2. Crâne du chien d'expérience. Face interne de l'hémicräne

droit. Gr. Nat. Fig. 3. Crâne d’Orycteropus senegalensis L. (n° 1913-101). Face interne de l'hémicräne droit. Région postérieure. Gr. Nat.

130

R. ANTHONY. LES CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES

TABLEAU I. Mesures comparatives du crâne

chez le chien en expérience et le chien témoin.

el self a & a Ë w EH a a. Longueur basio-incisive.| 108 [415 ||[x. Largeur bizygomatique.| 76,5 8. Longueur basion-nasion.| 70 14 ||u. Largeur maxima du pa- y. Longueur inion-nasion.| 70,5 | 72 lais en arrière. ...... 53 à. Longueur basion sphé- v. Largeur biptérygoïdien- HO LE TES cl dos 36 neenayant.s eee 20 : s. Longueur des osnasaux.| 32 38 ||v'. Largeur biptérygoïdien- &. Longueur du palais....| 59 61 ne en arrière... 14,5 n. Longueur du basion au 3 £, Distance des deux trous point ethmoïdo-frontal sous-orbitaires ...... 31 (en projection).:.:.2. 59,5 | 64,5 lo. Hauteur maxima du n. Longueur du basion au CTANe rer ere 48,5 point ethmoïdo-fron- x. Distance de l’arcade } tal l matique au 5 [hs al (en suivant les zygomatiq d.| 18 CONTRATS). chere 65 70 era TRS | n 1. Longueur du segment eo. Hauteur de l’arcade occipital de la base..| 49,5 | 21,2 zygomatiqueauni-(g.| 9 n 2. Longueur du segment veau du tubercule { d.| 9 turcique de la base... .| 13,5 | 14 post-orbitaire.... n 3. Longueur du segment op". Hauteur de l’arcade \ sphénoïdien antérieur ZYgomatique au ni- Je JA Das ROLE 19 23 veau delextrémité (g.! 5,8 n #. Longueur du segment postérieure de la(d.| 5,8 vomérien de la base.| 141 10 suture temporo- 6. Largeur maxima du maxilaire LS: CTATIC - semer 51 49 |[,". Hauteur de l’arcade 9". Largeur frontale mini- zygomatique auni-{(g.| 13,5 MA ER EC ES RE Een 39,5 | 34 veau de sa racine Û 14 . Largeur au niveau de la inléTienter et os base des apophyses c. Longueur de la sur-). 10 JUGRIAUrER tee. 20 47 47 face Lemporo-(f 10 +. Largeur du niveau des maxillaire.: 7.22: : apophyses orbitaires .| 37 31 ||o. Largeur de la sur-) 19 x. Largeur biorbitaire mi- face temporo- de 19 HE PL Lo Re 22,51-°28 maxilaire 5... à TABLEAU II. Mesures comparatives de la mandibule

chez le chien en expérience et le chien témoin.

de la carnassière. / d. b. Hauteur en avant de (g. la carnassière.... je c. Hauteur de lPapo- (g. physe coronoïde . .

a. Épaisseur en avant

7,5 ||d. Largeur de l’apo- (e. 355 physe coronoïde.. {/ d 9,5 ||e. Longueur du con-(g. 10 ile és Sr eee d.

f. Largeur du condyle.

g.Longueurdela symphyse.

CHIEN EN EXPÉRIENCE

1 =

,

Qc) , 7e 6€T SCT UT EN 77 PDO AGATAS SIT LES #8 SL LL 09 ec RS EE EEE EEE EEE EEE ER -199 NP 9$N98$0 9}U9} PJ 9P UOSIEUILOUT,P 9[8UY ‘M se LI oYLT se RE ON DISPO -DTO TEL 3JSUY rf . AT. EC 09 .E9 OL U 901 gp dresse pq ey 0048 is [81141990 noxy np uejd np UOSBUUTp oSuv | = *“sndo] = -09 91 Z249 3 009 099 oL8 079 066 OL [onb guy sn[q| 08 098 |°°*"""""""estq Ej 9048 [EUonu ued np o[ÉUY H (8LL'V)|(G9LL'V) Gas (Le | #'L6 [D J : ; à serre a tete ieisis : UauË 0 : un oo | sig | £'eer SLT | 8‘c6r | 9‘1r utor| Le | (np ner APPEL 9 Lo) gcc 9‘30 °p as che vir e 27e a se 0/0 pts « Ü = : 9ITPI[IX PU ë Ce EC ae A = -010dU97 91BINOTAIR 998JINS PI 9P O1PUI ‘A (æ) _ CT A REA ES or A[PJUOIJ-OSEU 9qIN09 PJ 9P 991PUL *Y = (566 SV) | Le ie &] “ç C ji 6 6 6 7 ._....s anberut-0 $ - VAS 79 G 67 8 6 L 6 Y1 8 0G G &G 00 <H [UI-OSBU [91JI9A 99IPUI * [ea « CH ç C 6 en ee se os e 0e 0.0 0 0 0 5 ï L, A L'SL 9 69 8 | 6%9 9199 l'AS 8 66 66 001 <6 IB9YJISA 99IPUT 7) : é 7 6) æ) g'e L'eS L'S9 ‘67 ge 6°T | nettes etre TE : OTUbIo 99 - 2 SR CEE 9 G G9 8 GL 001 < 0 TUE IPUI ‘q un % S‘6£ Z'&g +'°9€ 0 ç 7 6 PE tra SDL P10 onb b e É ge ë 6*89 8'8€ 1'a9 8‘0L por >< à * (4107 enbrieudgo 901pur y = = (LOT -E161)|(coser v)|(ecrer v)|(LCE& °v)|(ecee *v)| (aroorox |aonamgaxal | (86-£I6T) | sa ao saunz vna VOOH4O9 | SN4DT | -NOAIVA-190 /) Na HN SINVN -HLIAH0 0949 -NVNVIL —AWUAMN -0OH)9 NOGO'TAN NAIH9 no

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De la forme et de l’origine nucléaire

des Hématies des Mammifères adultes

Par Éd. RETTERER

Le globule rouge ou hématie est l'élément caractéristique du sang des Vertébrés.

Si nous savons que l’hématie des Ovipares et les premières hématies des Mammifères sont des cellules nucléées, des érythro- cyles, nous sommes peu fixés sur la valeur cellulaire des hématies du Mammifère adulte et bien portant, ni même sur la forme et les dimensions de cet élément.

Si l'examen microscopique d’une goutte de sang est l'enfance de l’art, il est au contraire fort malaisé de déterminer les conditions qui permettent d'étudier la forme réelle de lhématie et de savoir si c'est un dérivé cytoplasmique ou nucléaire.

L'examen du sang frais déforme les hématies, éléments des plus vulnérables; le procédé des frottis appliqué aux organes hémato- poiétiques détruit les connexions, altère la forme des éléments, les jette pêle-mêle, exposant l’observateur à les sérier en sens contraire de l’évolution naturelle. L'étude des cellules fixées en place et de leurs connexions naturelles écarte cette cause d'erreur et donne une base histogénétique des plus solides. Les cellules hématiformatives et les hématies ayant subi l'influence des mêmes réactifs fixateurs et colorants?, il est possible de juger des modifications nucléaires et cytoplasmiques, de mesurer au micromètre, au lieu de se borner à des évaluations approximatives.

1. Liquide de Zenker ou Zenker-formol qui conservent l'hémoglobine.

2. Hématoxyline qui est basophile et éosine-orange-aurantia qui teint l’hémoglo- bine.

‘ÉD. RETTERER. FORME DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES. 133

Pour vérifier nos résultats antérieurs, nous avons appliqué cette méthode aux organes suivants ; les résultats nouveaux nous semblent corroborer nos conclusions précédentes! et nous permettent de porter un jugement critique sur les données d’autres observateurs.

= EXPOSÉ DES FAITS.

A. Sur le thymus de jeunes Veaux, nous avons? pu suivre la trans- formation des noyaux cellulaires en hématies. Sur les Veaux de quelques semaines, la couche corticale ou cortex du thymus se

compose d’un réseau de cellules épithéliales, formant un syncy-

tium. En certains points, le corps des cellules a disparu par fonte et il ne reste qu'un noyau lymphocytaire avec une mince bordure cytoplasmique, d’où partent des filaments fort déliés, qui relient encore l'élément aux cellules voisines. Par endroits, on aperçoit déjà au milieu de ces lymphocytes des cellules à noyau pycnotique et le plus souvent excentrique, dont le corps cellulaire commence à se colorer, comme l’hématie adulte (après fixation par le Zenker), par l'éosine-orange; c’est la cellule hémoglobique nucléée qui se transformera en hématie anucléée.

Sur les Veaux âgés de plusieurs mois, il est facile de suivre toutes les phases de cette transformation, surtout à la limite du cortex et du centre médullaire. En effet, à côté de nombreux lymphocytes dont le corps cellulaire n’a qu’un x et qui sont encore reliés entre eux par de fins prolongements protoplasmiques, on voit des lymphocytes de même forme et de même taille, dont le noyau offre des réactions tinctoriales tout autres : les uns possèdent un réli- culum et des granules chromatiques, uniquement hématoxyli- nophiles; les autres n’en présentent plus que de fort rares el commencent à se teindre par l'éosine et l'orange; d’autres, enfin, ne prennent plus l’hématoxyline et leur substance se colore comme celle des hématies contenues dans les vaisseaux sanguins. De par ces faits histogénétiques, nous concluons : les jeunes hématies

4. Voir le Journal de l’Anatomie, 1913, p. 111 et suiv. 2. Voir Retterer et Lelièvre, Hématopoièse dans le thymus, C. R. de la Société de Biologie, mars 1913, p. 445.

134 ÉD. RETTERER. DE LA FORME ET DE L'ORIGINE NUCLÉAIRE

dérivent de noyaux encore munis d'un réticulum et de grains Chro- maliques ; l'hématie s'achève par la dégénérescence hémoglobique de ces grains chromatiques. L'hématie est donc un noyau transformé.

B. Dans les ganglions lymphatiques (sous-maæillaires) du Porc!, l’hématiformation, c'est-à-dire le développement des hématies aux dépens des noyaux du tissu se fait d'après le même processus que chez les autres Mammifères. Outre les hématies qu'on observe dans les sinus du ganglion, on voit les noyaux (qui occupent encore le centre des cellules conjonctives du réticulum) se colorer partiel- lement en orange comme les hématies libres. D'autres noyaux sont complètement hémoglobiques, sauf 4 ou 2 grains d'un demi y qui prennent l’hématoxyline d’une facon aussi intense que les noyaux non modifiés des cellules conjonctives.

On observe tous les termes intermédiaires entre les noyaux chromatiques ou basophiles et les hématies hémoglobiques.

En résumé, ce sont les noyaux des cellules réticulées du ganglion qui ont la taille et la forme des hématies; à mesure que la chroma- tine du noyau devient acidophile (éosinophile et orangeophile), la substance nucléaire se fait hémoglobique. Pendant quelque temps, il y persiste un ou plusieurs grains basophiles de 1 ou 2 u; enfin le noyau hémoglobique devient libre par fonte du corps cellulaire et constitue l'hématie.

L’'hématiformation est surtout facile à observer dans les gan- glions embryonnaires. En raison de la lenteur de la circulation lymphatique, les hématies séjournent longtemps dans le tissu producteur, et y produisent les taches ou îlots rouges découverts par Ranvier. On sait que, pour cet histologiste, la tache rouge serait due à un réseau de capillaires sanguins (angiome simple). Ensuite, le nodule de capillaires sanguins serait pénétré et traversé par les ramifications parties des lymphatiques afférents : l’angiome simple deviendrait l’angiome caverneux. Enfin, la paroi des ramifi- cations lymphatiques se percerait de trous, ou végéterail en se décomposant en fibrilles sous l'influence du courant lymphatique

(cavernisation).

4. Retterer et Lelièvre, C. R. de la Société de Biologie, 7 juin 1913, p. 1226.

a an dt 1 dl D N 2: di"

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 135

En étudiant, après fixation précise et coloration appropriée, les ganglions des embryons de Mouton et de Porc!, nous n'avons jamais apercu de bourgeons émanant des capillaires sanguins. Dans l’ébauche ganglionnaire, les capillaires, les artérioles et les veinules sont très clairsemés sur toute l'étendue du nodule et sont limités par des assises cellulaires consistant en revêtement continu. Les îlots, quoique renfermant des hématies comme eux, s'en distinguent par leurs contours sinueux et l'absence de paroi vasculaire. Ils occupent des espaces creusés dans le tissu réticulé du nodule. Leur développement confirme cette conclusion.

Par l'étude du tissu du nodule on se rend compte du mode de formation et des îlots et des hématies : le tissu réticuié du nodule représente un syncytium de cellules dont chacune est formée par un réticulum hématoxylinophile et par un hyaloplasma remplisssant les mailles du réticulum. L’hyaloplasma commence par se vacuo- liser et disparaît par résorplion; de développement d’un réticulum cellulaire à mailles vides. Ensuite, les filaments du réticulum se désagrègent, pendant que les noyaux de certaines cellules deviennent hémoglobiques. La conversion des noyaux en hématies, la désorganisation du cytoplasma et sa fluidification déterminent ainsi la formation des îlots rouges, creusés pour ainsi dire en plein syncytium. Dans les points ils confinent aux lamelles et aux filaments chromophiles, ceux-ci simulent un revé- tement endothélial. \

En résumé, le nodule de l’ébauche ganglionnaire est un amas de tissu réticulé dont les mailles sont pleines d’hyaloplasma. Par la fonte de l'hyaloplasma, il se développe du tissu réticulé dont les mailles vides constituent les sinus communiquant avec les lymphatiques efférents. Quand les filaments du réticulum se désorganisent eux-mêmes et quand les noyaux deviennent hémoglo- biques, tout le territoire cellulaire correspondant se convertit en ilot rouge dont les hématies sont finalement enlevées par le courant lymphatique. Hémolymphatique, à l’origine, le ganglion devient ganglion gris ordinaire, parce que, avec la naissance, le courant

1. Voir Retterer et Lelièvre, C. R. de La Société de Biologie, 14 juin 1913, p. 1290.

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lymphatique augmentant entraîne les hématies dès leur naissance. Malgré cet aspect différent, le ganglion conserve toujours la même structure et les mêmes fonctions, c’est-à-dire qu'après la régression et la résorption du cytoplasma, les noyaux devenus hémoglobiques passent à l’état d'hématies.

Retenons un autre fait : puisque l’hématie n'est qu'un noyau devenu hémoglobique, elle commence par posséder à l’origine la forme sphérique ou ovalaire du noyau.

G. lots de Langerhans. Dans le pancréas, il existe des forma- tions dans lesquelles l’hématiformation est, dans les conditions expérimentales, d'observation facile. Nous voulons parler de ces « amas ou groupes cellulaires » que Langerhans a découverts dans le pancréas du Lapin, qui ont été décrits successivement sous le nom d'amas intertubulaires, de points folliculaires, de pseudo- follicules, de secondary cell groups et que nous désignerons avec Laguesse sous celui d’ilots de Langerhans. Ges dénominations diverses indiquent suffisamment qu’on est loin d’être d'accord sur leur nature. Les uns les font dériver du mésoderme, les autres de l'épithélium pancréatique ; les uns en font des culs-de-sac glandu- laires qui se seraient épuisés à force d’avoir élaboré du suc pancréatique; d’autres les regardent comme du tissu acineux en voie de mortification. D’autres encore leur attribuent la fonction d'élaborer des produits qui passeraient dans le sang et préside- raient à la glycolyse (centres de sécrétion interne). Pour certains auteurs, ce seraient des organes constants et permanents; pour d’autres, les îlots seraient des formations variables et transitoires : formés aux dépens des cellules des culs-de-sac glandulaires, c'est- a-dire des éléments acineux, ils fonctionneraient quelque temps comme organes de sécrétion interne, puis ils reprendraient la forme de cellules acineuses, se mettraient en rapport avec les conduits excréteurs et retourneraient à l’état de culs-de-sac acineux. Pour quelques pathologistes, les îlots détruiraient les toxines héma- togénèses ou d’origine alimentaire. Enfin il en est qui considèrent les îlots de Langerhans comme les vestiges d’un pancréas ancestral qui se seraient transmis héréditairement aux animaux actuels.

Pour déterminer le développement des îlots de Langerhans, il

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 137

convient de soumettre les animaux à l’abstinence totale ou à une alimentation insuffisante. Le nombre et l'étendue de ces ilots augmentent à mesure que la dénutrition s’accentue!. Sur les coupes sériées, bien fixées et colorées de facon appropriée, il est possible de suivre toutes les phases du développement et de l'évolution de ces formations. L’ébauche de l'îlot est représentée par une ou plusieurs cellules acineuses qui, après avoir perdu à leur périphérie leurs granulations basophiles, prennent une apparence claire. Il se développe ainsi un amas de cellules dont chacune montre une zone périphérique, claire, etune zone périnucléaire, granuleuse et avide encore de colorants basiques. À mesure que l’ilot avance en âge, le cytoplasma perd ses granulations basophiles et son cytoplasma se différencie : en fibrilles anastomoliques que colore faiblement l'hématoxyline ou l’aurantia, el en hyaloplasma qui ne tarde pas à se résorber. C'est la disparition de l’hyaloplasma qui transforme ainsi l’ilot en un amas de tissu réticulé ou alvéolaire. Pendant ces modifications régressives du cytoplasma, on observe des change- ments dans les noyaux : d’abord constitués par un caryoplasma et un réticulum chromatique, les noyaux commencent à montrer une substance qui se colore par l’éosine et l'orange et qui est cloisonnée par le réticulum et les grains chromatiques et basophiles. Plus tard, le réticulum nucléaire disparait lui-même etilne reste que quelques grains chromatiques basophiles. Enfin, à mesure que le cytoplasma se résorbe et que son réticulum se désagrège, les noyaux devien- nent libres et toutes leurs portions chromatiques dégénèrent en hémoglobine. Lorsque ces modifications régressives se sont éten- dues sur tout un territoire cellulaire, celui-ci figure un amas d'hématies développé en plein ilot. Nombre d'auteurs ont signalé ces amas d'hématies, qui semblent appendus aux capillaires sanguins de l'ilot et qui simulent des bourgeons terminés en culs- de-sac. La plupart ont pris ces amas d’hématies pour des globules rouges ou hématies extravasées.

Plusieurs expérimentateurs ont vu les ilots augmenter de nombre et d'étendue sous l'influence du jeûne ; mais renourrissant les ani-

4. Voir Retterer et Lelièvre, Origine et évolution des tlots de Langerhans, C. R. de ia Société de Biologie, 5 juillet 1913, et Ce Journal, 1913, p. 489.

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maux soumis préalablement à l'inanition, ils ont ensuite ramené les îlots à leur étendue, à leurs propoertiens physiologiques. Ils ont expliqué le fait en admettant que les cellules irsulaires étaient redevenues cellules acineuses. De même qu’une cellule conjonctive représente, à notre avis, un élément plus avancé en évolution qu'une cellule épithéliale, de même la cellule insulaire figure, en comparaison de celle-là, un élément plus âgé, incapable de retourner en arrière pour se rajeunir et recommencer le même cycle. Pour nous, l'interprétation des faits est celle qui a été émise, sinon adoptée, par Swale Vincent et Thompson! : les cellules insu- laires, après avoir atteint le terme de leur carrière, dégénèrent et disparaissent. Seulement cette évolution régressive n’est pas inutile à l'organisme : la résorption du cytoplasma produit du plasma san- guin et lymphatique, la transformation et la dégénérescence hémo- globique des noyaux donnent naissance à des hématies qui passent dans le torrent circulatoire. Dans le pancréas, Les cellules acineuses concourent ainsi à la rénovation du sang et, pour le faire, elles passent par les mêmes phases que les cellules épithéliales qui concourent au développement des follicules clos tégumentaires.

Pareille histogenèse, nous l’avons observée dans plusieurs de ces organes; S. v. Schumacher, Cordes, Bacon, Wood ont confirmé les faits pour certains d’entre eux?; enfin Ackerknecht$ a montré que l’'amygdale sublinguale se développe chez le Cheval d’après le même processus.

Toujours ces organes débutent à l’état de formations épithé- liales. Dans les régions les follicules clos tégumentaires acquièrent la taille et la forme d’organes prédominants (amygdales, appendice, bourse de Fabricius), il existe à l'origine des invagi- nations glandulaires analogues à celles du tube digestif en général; mais, comme ces régions ne sécrètent que peu ou point de produits agissant sur les aliments, les cellules épithéliales des invaginations et même du revêtement superficiel ne tardent pas à se transformer en tissu conjonctivo-vasculaire.

1. Internationale Monatschrift für Anatomie u. Physiol., 1907, p. 93. 2. Bulletin d’Olo-rhino-laryngologie, t. XVI., p. 1, 1913. 3. Arch. f. Anatomie. u. Physiol. (Anat. Abtheil), 1913, p. 93.

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DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 139

En soumettant un animal au jeûne en même temps qu'on l’anémie, on supprimera la sécrétion du suc pancréatique; dans ces conditions, nombre de cellules acineuses du pancréas évoluent dans un sens différent et se transforment en éléments sanguins (plasma et hématies).

IT. CRITIQUE.

Il convient, maintenant, de comparer à nos résultats les assertions

des autres histologistes, ainsi que les procédés d'étude.

A. Hématie adulte. Weïidenreich! continue à considérer comme normale la forme convexo-concave des hématies, telles qu'elles se présentent lorsqu'on examine sous le microscope les capillaires du mésentère attiré en dehors de l'abdomen. Il en est de même des hématies humaines examinées dans le sérum dilué. Leur forme est celle d’une cupule ou d’une cloche.

Donc Weïidenreich admet une dépression centrale dans les hématies en forme de cupules; mais il ajoute :

« Retterer a une opinion tout à fait différente de la forme des globules rouges. D’après lui, les hématies seraient, en réalité, des éléments sphériques composés d’une partie colorée en forme de cupule et d’une partie incolore qui, jusqu'ici, dans des préparations de sang frais, aurait échappé à l’investigation des histologistes par suite de son manque de coloration. Tout récemment Schilling se rapproche de l'avis de Retterer, en admettant également une zone à la place de la dépression centrale. Cependant nous ferons remarquer que la production du phénomène de la disposition en piles de monnaie est incompatible avec cette opinion; car dans les piles de monnaie les parties colorées sont directement accolées les unes aux autres sans que l’on puisse constater dans la série entre deux hématies une zone incolore qui, d’après la théorie de Retterer, serait inévitable. Du reste, les auteurs anciens ont déjà signalé à côté des éléments classiques biconcaves la présence d’hématies sphériques dans la circulation et cela même dans les conditions

1. Traité du sang de Gilbert et Weinherg, 1913, p. 83.

140 ÉD. RETTERER. DE LA FORME ET DE L ORIGINE NUCLÉAIRE

normales. Quoique rejetée par Jolly, cette observation est juste pour un certain nombre d'hématies. »

« Les globules sphériques, dit encore Weidenreich (p. 85), ont un diamètre de à u. » Cette proposition que je soutiens depuis plus de dix ans est en contradiction avec l'opinion classique. « Les globules rouges de l'homme adulte, écrit Sabrazès dans le même Traité du sang, 1913, p. 145, sont des petits disques biconcaves de 7 à 8 « de diamètre, de 2 & d'épaisseur. »

Des assertions aussi contradictoires inscrites dans les chapitres différents d'un même traité ne manqueront pas de troubler l'esprit du lecteur. Il faut donc élucider ce point.

Voilà nombre d'années que je m’efforce de déterminer les diverses formes d’'hématies qu’on observe et d'établir leur âge et leurs rela- tions génétiques.

J'ai résumé mes observations dans un livre élémentaire? et reproduit les dessins que j'avais donnés, en 1906. Comme il y a peu de lecteurs qui aient le temps ou la volonté de lire les mémoires originaux, je crois leur rendre service en reproduisant textuellement le passage de ce manuel. « Pour observer la forme et les dimensions réelles des hématies, il faut recevoir le sang cou- lant dans un liquide qui les durcit, ou bien plonger le vaisseau sanguin qui les contient dans un liquide durcissant. Si, après les avoir ainsi fixées dans leur forme, on les examine, on en observe de forme globuleuse, hémisphérique ou lenticulaire (PI. IP). Les hématies globuleuses ou sphériques de l'Homme ont un diamètre de 5u; les hémisphériques sont longues de 5 à 6 uw et épaisses de 3 u à à Lo, les lenticulaires sont longues de 7 à 9 & et épaisses de 24. Les hématies sphériques représentent des globules jeunes; les hémisphériques et les lenticulaires sont des formes âgées ou vieilles.

« L'hématie de l'Homme adulte et bien portant se compose d’une substance rouge et hémoglobique et d’une enveloppe corticale, transparente et anhémoglobique. La portion hémoglobique (PI. IT) affecte la forme d'une cupule ou nacelle : l’écorce anhé-

1. Journal de l'Anatomie, 1906, p. 567, pl. VIIL et 1907, p. 53. 2. Retterer, Anatomie el Physiologie animales, édit., p. 90, 1909.

L 1

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 141

moglobique est une cuticule très mince partout, sauf au niveau de la concavité de la nacelle, elle se renîle en un ménisque anhé- moglobique. »

Plus loin (loc. cit., p. 124), j'ai ajouté, à propos de la destinée du tissu qui constitue les ganglions Iymphatiques : « Les petites cel- lules (du complexus formant ce tissu) subissent la fonte (fig. 103) : en c et c, le noyau, entouré d’un faible corps cellulaire, est déjà libre, mais le corps cellulaire est encore rattaché au cordon folli- culaire par un pédicule protoplasmique. Si ce dernier se résorbe, l'élément devient libre et se transforme en un lymphocyte qui peut être entrainé par le courant lymphatique ct évoluera ultérieure- ment en hémalie. »

Plus loin encore (p. 127), J'ai dit que par l’expérimentation « il est facile d'observer tous les intermédiaires entre les cellules réunies en tissu et les éléments libres de la Ivmphe. On peut suivre, d'heure en heure, la facon dont le Iymphocyte (reste cellu- laire) devient hématie : le noyau seul persiste et sa substance se transforme en hémoglobine. »

C’est avec un sentiment de satisfaction bien légilime que j'ai examiné les dessins de Weidenreich, qui ne semblent être qu'une reproduction des images que j ai données de ces éléments (héma- ties sphériques, hémisphériques et lenticulaires). Bien que, dans le texte, Weidenreich maintienne son opinion antérieure, c’est-à-dire la forme en cloche, il n’y a pas à s’y tromper quand on con- sidère les figures. Les auteurs de livres didactiques auront beau se porter en défenseurs ou en apologistes des clichés ofticiels ou faire des réserves, ils ne sauront faire passer une sphère ou un hémisphère pour un disque. Faut-il, pour qu'en France ils reconnaissent le fait et pour que celte notion passe dans l’ensei- gnement supérieur, qu un livre même français porle une marque étrangère ?

B. Cellule hématiformative et formes de transition entre celle-ci et l'hématie. Si, par des saignées méthodiques ou le jeûne, l'on provoque l’anémie, on détermine ! la production d'hématies nucléées

1. Journal de l’Anatomie, 1901, p. 499, fig. XX.

JOURN. DE L'ANAT. ET LE LA PHYSIOL. T. L. 10

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telles qu'on les observe chez les Ovipares, ainsi que la mise en liberté de noyaux dont toute la masse n’a pas encore subi la trans- formation hémoglobique. Les cellules à corps hémoglobique et à novau chromatique sont connues sous le nom de mégaloblastes et de gigantoblastes. Les noyaux qui ont pu subir une transformation hémoglobique partielle sont décrits tantôt sous le nom de nor- moblastes, tantôt sous celui d'hématies polychromatophiles.

En effet, le réticulum nucléaire continuant à fixer les couleurs basiques, alors que le reste du noyau est devenu hémoglobique, lhématie jeune se teint à la fois par les colorants basiques et acides.

La polychromasie et les granulations basophiles témoignent de la jeunesse, de la non-maturité de l’hématie. En faisant abstraction des mégaloblastes et des gigantoblastes, les granulations baso- philes correspondent à des grains chromatiques. Par l'étude des noyaux qui occupent encore le centre des cellules réunies en complexus, on peut suivre toutes les phases de ces transformations et affirmer que non seulement l’hématie est d’origine nucléaire, mais que l'hémoglobinisation débute par le caryoplasma pour s'étendre lentement sur le réticulum, puis sur les grains chroma- tiques. :

Les classiques comprennent ces faits d’autres facons : pour les uns, la polychromasie et les granulations basophiles sont d'ordre dégénératif; pour les autres, ils correspondent à un état jeune, le cytoplasma de la cellule formative n'ayant pas encore eu le temps de devenir acidophile. D'autres enfin voient dans les granulations basophiles de la jeune hématie des débris nucléaires, c’est-à-dire d'origine et de nature caryogènes.

« Tout récemment, dit Weidenreich (loc. cit., p. 90), quelques auteurs ont prêté une grande importance à des produits granuleux et filamenteux qui se produisent dans les hématies surtout après coloration vitale (substantia granulo-filamentosa)... I ne s’agit pas de structure protoplasmique, mais probablement de sécrétion et de précipitation de certaines substances contenues dans l’'endosome ou dans la membrane. »

Dans la figure 19, il représente dans une hématie des grains

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 143

chromatiques qui seraient « un résidu nucléaire en forme de pous- sière de chromatine ».

Sabrazès est sur ce point d’un avis tout autre; voici comment il expérimente, puis explique le développement des hématies poly- chromatophiles et ponctuées :

Sabrazès! a provoqué la formation d'hémalies à poncluations basophiles, en injectant des solutions d’acétate de plomb dans le périloine du cobaye. Les hématies à ponctuations basophiles appa- raissent aussi dans les anémies pernicieuses, l'anémie grave bothriocéphalique, la cachexie cancéreuse, ete. Dans ces états, ces hématies ponctuées témoignent du haut degré de l’anémie; par contre, chez les saturnins, elles apparaissent déjà tandis que lPané- mie commence à peine à se manifester.

Au lieu de considérer ces hématies ponctuées comme des globules dégénérés, Sabrazès y voit l'indice d’une réaction réparatrice qui se trahit tout d’abord par l’augmentation du nombre des hématies polychromatophiles (granuleuses en coloration vitale), dans le saturnisme expérimental et clinique.

« Hématies granuleuses de la coloration vitale {polychromato- philes pour la plupart après fixation), hématies à ponctualions baso- philes ne sont que deux modalités de globules rouges jeunes.

« L'hématie granulo-réticulo-filamenteuse-chromatophile repré- sente un stade physiologique plus régulier, transition rapide à l'état normal, entre l’hématie nucléée et l’hématie adulte orthochroma- tophile. »

La présence dans le torrent circulatoire d'hématies à ponctuations basophiles, conclut Sabrazès, est, chez l'adulte, un stigmate de régé- nération sanguine, inaccoutumée et troublée par l'intoxication.

Quelle est la nature de ces granulations basophiles? On pensait primilivement, à cause de leur basophilie exagérée, à une émana- tion du noyau. Pour Pappenheim, ces granulations avaient la réaction de la parachromatine du noyau et plus encore celle de la basiplastine du cytoplasma des cellules lymphoïdes. Ferrata les rattache plutôt à la parachromatine, c’est-à-dire que les granula- tions seraient d'origine nucléaire.

4. Traité du sang de Gilbert et Weinberg, 1913, p. 153.

144 ÉD. RETTERER. DE LA FORME ET DE L'ORIGINE NUCLÉAIRE

D'autres admettent leur origine cytoplasmique : « Il s'agirait d'une sorte de fusion en corpuscules basophiles de la substance polychromatique de l'hématie. »

Pour Sabrazès (Loc. cit., p. 159), « les hématies à ponctuations basophiles ne sont autres que des dérivés modifiés d’hématies très polychromatophiles et d'apparence granulo-filamenteuse en coloration vitale, ayant : perdu leur aspect réticulé; et acquis au cours de leur évolution, généralement après leur issue de la moelle osseuse, les propriétés morphologiques suivantes : rétrac- tion et condensation en grains plus ou moins fins, plus ou moins con- glomérés (en même temps que leur aspect réticulé s’efface en colo- ration vitale) du coefficient basophile de leur cytoplasme. Il y a une sorte d’agglutination, de fusion, de pycnose en granules, deve- aus de ce chef plus avides de colorants basiques, de la substance primitivement terne et floue, moins basophile, du cytoplasme des hémalies Jeunes, granulo-réticulo-filamenteuses en coloration vitale. »

Au lieu de discuter les assertions contradictoires qui encombrent l’hématologie, au lieu d’obscurcir davantage la question, tenons- nous-en aux faits d'observation etcomparons les dessins des auteurs à ce que nous avons vu nous-mêmes.

De plus, reléguons tout langage apocalyptique et bornons-nous aux mots simples et clairs. |

Si nous nous reportons à la figure 25 de Sabrazès (Loc. cit., p. 147), nous y voyons : des hématies ordinaires; des hématies granulo-réticulo-filamenteuses; des hématies ponctuées, et 4 des lymphocytes. Ces éléments ont été amplitiés 980 fois. Or, l'examen et la mensuration prouvent que le noyau des lymphocytes atteint exactement la taille des hématies ordinaires, ainsi que celle des hématies poncluées el granulo-réticulo-filamenteuses. Le corps cellulaire du lymphocyte forme au noyau un liséré d’un demi & ou d'un y. Admeltre la destruction ou la disparition du noyau de la cellule formatlive pour attribuer à son mince corps cellulaire la faculté de prendre sa place et de produire l'hématie, cela nous semble bien compliqué et fort improbable. Supposer qu'avant de se

résorber ou d’être expulsé, le noyau envoie dans le corps cellulaire

NOT

cn se.

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 145

ses grains chromatiques, c’est, il est vrai, reconnaitre la nature nucléaire des grains chromatiques, mais embrouiller davantage le problème.

La science étant, nous nous plaisons à le répéter, une affaire de méthode, de poids et de mesure, il est nécessaire de comparer les procédés d'étude. Au lieu de recourir à des fixateurs et des colorants spéciaux, nous fixons les Lissus sanguins formateurs et les hématies d'une facon précise et nous les colorons de manière appropriée. C’est sur les éléments dont la figure est fixée que nous procédons à la mensuration et à la détermination de la valeur cytoplasmique et nucléaire, et non point sur des hématies déformées ou en voie de mortificalion. « Quant aux grossissements, ditSchilling-Torgaut, il est inutile de les donner à cause de la variabilité des dimensions des hématies. » Ce n’est point notre avis : le procédé des frottis détruit les connexions, déforme les éléments et les jette pêle- mêle, exposant l'observateur à les sérier en sens contraire de l’évolution naturelle. L'étude des cellules fixées en place et de leurs connexions normales écarte cette cause d'erreur et donne une base histogénétique des plus solides. Les cellules hématiformatives et les hématies ayant subi l'influence des mêmes réactifs fixateurs et colorants, il est possible de juger des modifications nucléaires et cytoplasmiques, de mesurer au micromètre, et non point d’une facon seulement approximative, la taille : du corps cellulaire, du noyau et de l'hématie. Dans ces conditions bien déterminées, il est facile de décider : que chez le Porc, par exemple, c'est le noyau, de 3 à 4 x, qui occupera le centre des cellules réunies en tissu, qui commence à présenter les caractères micro-chimiques de l’hématie hémoglobique. Pendant quelque temps, il montre encore un ou plusieurs grains chromatiques ou basophiles de À ou 2 . Or, on a l'habitude de décrire ce grain chromatique de 4 ou 2 & comme un noyau en voie d'atrophie ou d'expulsion. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les dessins ou les schémas des auteurs pour se convaincre du bien fondé de notre critique : la cellule hématiformative y est repré-

v

1. Folia haematologica, Archiv, t. XIV, p. 2%#, 1912.

146 ÉD. RETTERER. DE LA FORME ET DE L'ORIGINE NUCLÉAIRE

sentée avec des dimensions deux ou trois fois plus considérables que l'hématie définitive. Pour faire concorder leurs descriptions avec leurs dessins, ils invoquent ensuite la résorption ou l'expulsion du noyau et la condensation du cytoplasma. Enfin, ils baptisent, dans leur idiome hiératique, du nom d'érythrocyte un élément qui se caractérise par l'absence de noyau. Graeper, puis Schilling-Torgau (loc. cit.), résultats en ce qni concerne la constitution de l’hématie des Mammifères adultes : croissant hémoglobique et ménisque anhémo-

ont confirmé nos

globique. Schilling-Torgau a donné au ménisque anhémoglobique le nom de Glaskürper. Comme je l'ai déjà dit (loc. cit., 1943, p. 115), cet histologiste s’est laissé éblouir par les nombreuses particularités structurales de l’'hématie adulte; mais, n’osant faire table rase des théories classiques et, négligeant les enseignements de l'histogenèse, il les interprète dans le sens d’une structure très compliquée de cet élément, qui serait l'équivalent d’une cellule entière. Si Schilling-Torgau veut bien se reporter à ses propres dessins, il se convaincra que notre explication répond à la réalité. figure (loc. cit, 1919: pl IL, fie 99 etepl. IN; 99 2eme hémalie de Cobaye représentée par un croissant hémoglobique et un ménisque anhémoglobique avec quelques granulations éparses vers les extrémités du croissant. Dans le deuxième dessin (pl. IV, fig. 9), il représente une cellule hématiformative de la moelle osseuse de Cobaye. Or, le noyau de cette cellule hémati- formative correspond exactement, comme forme et comme tailie, au croissant hémoglobique et au ménisque anhémoglobique de l’'hématie (pl. IE, fig. 2°.

Peu importent l’origine et la signification des granulations infini- ment petites qui peuvest se rencontrer en l’un ou l'autre point de l'hématie. Pour se transformer en hématie, la cellule hématiforma- tive perd son corps cellulaire, pendant que son noyau devient hémo- globique, au moins dans sa portion en forme de croissant.

Les granulations basophiles qu'on observe dans les noyaux en voie de transformation hémoglobique fournissent une autre preuve de l’origine nucléaire des hématies. Ce sont bien des résidus chro- matiques qui n’ont pas encore subi la dégénérescence hémoglo-

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 147

bique. Ces granulations ne sauraient dériver du cytoplasma qui en est privé; leur présence dans une hématie témoigne de la prove- nance nucléaire des hëématies des Mammifères adultes en général et de la jeunesse de l'hématie qui les renferme.

Résumant ces phénomènes histogénétiques, nous dirons : dans les organes hématiformateurs, alors que les noyaux occupent encore le centre des cellules réunies en tissu, une partie de leur substance se colore par l’éosine-orange, tandis qu'une portion de leur réticulnm se teint par l'hématoxyline, avec des épaississe- ments aux points nodaux : la première modification ou plutôt le:

_ premier stade de l'hématie est donc Pétat granulo-filamenteux. A mesure que le réticulum devient hémoglobique, les grains chromatiques hématoxylinophiles, qui se raréfient, figurent des granulations basophiles (hématie ponctuée). Entin, tous les grains basophiles disparaissent, c'est l'hématie définitive.

Par un procédé spécial, Kronberger! est même arrivé, en ce qui concerne toutes les hématies circulantes et normales de l'Homme et des Mammifères, à y mettre en évidence un grain chromatique, Il le considère comme un reste nucléaire, tandis que le corps de l'hémalie représenterait du cytoplasma. À mon avis, un élément, de 5 y à 7 H avec un grain chromatique de 1 y, ne saurait corres- pondre à une cellule; c’est tout uniquement un noyau avec le dernier grain chromatique peu ou point transformé encore.

Le problème semble avoir complètement changé de face depuis qu'on croit avoir découvert dans la cellule des éléments ou orga- _nites qui seraient chargés de toutes les différentiations, de toutes les modifications ou transformations qu'on observe au cours de l'évo- lution cellulaire. Je veux parler des chondriosomes ou plastosomes, des chondriomites et des plastocontes.

F. Meves®? a découvert des filaments ondulés {chondriocontes ou plastocontes) dans le corps cellulaire des hématies embryonnaires de Poulet. Il pense que ce sont ces filaments qui président à léla- boration de l'hémoglobine.

1. Folia haemot.,t. XIII, p. 320. 2. Die rothen Blutkôrperchen der Amphibien, Archiv f. mik. Anat., t. LXXVIT, a

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448 ÉD, RETTERER. DE LA FORME ET DE L'ORIGINE NUCLÉAIRE

Il a retrouvé des images analogues dans les érythroblastes et les jeunes hématies de la moelle osseuse du Gobaye adulte : ce sont des amas de granulations (plastosomes ou plastochondries) qui siègent vers l’un des pôles du noyau et qui se trouvent dans le mince liséré cylopiasmique entourant le noyau. |

En étudiant les jeunes hématies qui ont mêmes dimensions que les noyaux des érythroblastes, Meves constate la disparition du noyau et la jeune hématie se montre parsemée de granulations basophiles (plastosomes). Il en conclut : dans les jeunes hématies, les plastosomes ont survécu à l’évanouissement du noyau!. Les plastosomes seraient ramassés en un groupe épars dans le cyto- plasma (corps cellulaire). Dès que les érythrocytes sont dans le torrent circulatoire, on ne voit plus trace de plastosomes.

H. Schridde? à repris la même étude sur la moelle osseuse du Lapin jeune. Les érythroblastes y constituent des nids de petites cellules. Par la méthode d'Altmann et la coloration à l'azur IT-éosine, Schridde à vu ces éléments (érythroblastes) contenir des

filaments, des bâtonnets et des granulations basophiles. Impossible

par ce procédé de distinguer la structure du noyau. Üne fois que l'hémoglobine s’est développée dans ces éléments, on ne voit plus trace des granulations ni des filaments. Donc, conclut Schridde, ces derniers ont donné naissance à l’hémoglobine, puisqu'on sait que les plastosomes et les plastocontes représentent les éléments précurseurs des parties spécifiques des cellules.

Je serais très heureux d’avoir des éclaircissements sur les points

suivants : comment Meves et Schridde expliquent-ils l’évanauis-

sement du noyau et les changements morphologiques qui président à la transformation et au déplacement d’un corps cellulaire n'ayant qu'un & à peine? En effet, les plastosomes et les plastocontes oCCu- pent à l'origine le corps cellulaire, tandis que l’hémoglobine se trouve répartie dans toute la masse de l'hématie, sauf le ménisque anhémoglobique. Je ne demande pas mieux que de croire à lomnipotence des plastosomes, mais je voudrais connaitre Îles phases successives de leurs élaborations. Or, en étudiant ces divers

1. Die Plastosomen haben den Untergang des Kerns überdauert (loc. cit., p. 495). 2. Ueber die Bildung des Haemoglobins, Anat. Anzeiger, t. XLIL, p. 514, 1912.

El r

2

DES HÉMATIES DES MAMMIFÈRES ADULTES. 149

stades sur les cellules encore réunies en tissu, j'ai toujours vu les transformations se faire dans le noyau en place, et, lorsque le noyau est devenu libre par fonte du cytoplasma, il avait la taille, la forme et la structure d’une hématie.

Dès 1906 (loc. cit. p. TT et suivantes), j'ai énuméré les conditions de milieu qui déterminent le développement des hématies soit nucléées soit anucléées. Les premières apparaissent chez Îles embryons de Mammifères et se produisent la vie durant chez les Ovipares; mais que les Mammifères adultes deviennent anémiques, leur organisme élabore à nouveau des hématies anucléées. Les hémalies nucléées sont des cellules entières à corps cellulaire fai- blement hémoglobique et à noyau demeurant chromatique et capable encore de se diviser par voie mitosique. Malgré les noms pompeux d'érythroblastes primaires, d'hématoblastes, de mégalo- blastes, de gigantoblastes, les hématies nucléées représentent des éléments qui diffèrent essentiellement des cellules-mères des héma- ties anucléées, dites encore érythroblastes secondaires. Ces cellules- mères des hématies anucléées ont un corps cellulaire très réduit ( &) et un noyau de 5 à 6 vw. Pour se transformer en hémalie anucléée, cet élément subit des modifications nucléaires seulement : la chromatine forme des blocs dans le noyau qui, devenu pycno- tique, se charge ensuite d’hémoglobine. C’est bien le noyau lui- mème qui s’est ainsi transformé, car l'hématie anucléée des Mam- mifères continue, comme l’a montré Rudzicka, à présenter les réactions caractéristiques de la nucléine.

Conclusion. L'hématie du Mammifère adalte et bien portant est un noyau transformé. A l'origine, sphérique hémisphérique, lhématie prend plus tard la forme de lentille ou même, en perdant son ménisque anhémoglobique, celle de cloche.

Les appareils ciliés et leurs dérivés

Par A. PRENANT

Professeur à la Faculté de médecine de Paris.

CHAPITRE VI

LE MOUVEMENT CILIAIRE ET FLAGELLAIRE ET SES CAUSES

Ï. CARACTÈRES DU MOUVEMENT CILIO-FLAGELLAIRE.

L'étude des manifestations extérieures du mouvement ciliaire et flagellaire appartient aux physiologistes; il leur revient de décrire les différentes modalités de ce mouvement, de rechercher les con- ditions de milieu nécessaires à sa production et de déterminer les

actions extérieures capables de l’influencer. C'est aussi, comme le

dit très bien Heidenhain, 1911, au physiologiste qu'on doit laisser, aussi bien que la théorie générale de la contraction, le principe même du mouvement ciliaire. Le morphologiste, l'histo-physiolo- giste même doit se borner à se demander si les dispositions structurales qu'il constate dans les cils et dans les fouets peuvent expliquer le mouvement cilio-flagellaire, et comment elles les expliquent, quelle signification physiologique particulière ont les diverses parties constitutives de l'appareil ciliaire ou flagellaire; il peut aussi rechercher quelles formes le mouvement cilio-flagellaire prendra, étant données certaines conditions de structure,

La question des relations qui existent entre la structure et le mouvement des appareils ciliés et des flagelles a préoccupé toute

4. Voir Journal d’Anatomie novembre-décembre 1912, janvier-février 1913, septembre- octobre 1913, novembre-décembre 1913.

- fe, 21

À. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 151

une série d'auteurs et déjà il y a un demi-siècle et plus, Valentin, 1849, Cl. Bernard, 1866, En gelmann, 1868, 1879, 1880.

Avant d'exposer ce que l’on sait et ce que lon a supposé de ces relations entre la morphologie et la physiologie des appareils cilio- flagellaires, 1l paraîtra sans doute indispensable d'indiquer som- mairement les caractères physiologiques essentiels du mouvement de ces appareils.

Les flagelles et les cils, organes de mouvement de la cellule.

Il est classique d'admettre que les cils et les flagelles servent essentiellement d'organes de mouvement, soit qu'ils produisent les déplacements de la cellule ou même de Pindividu pluricellulaire

qui les porte, soit qu’ils déterminent les mouvements du liquide dans lequel baignent les cils et flagelles ou des corps solides avec

lesquels ils sont en contact. Goldschmidt, 1907, a observé sur Mastigella que le flagelle peut servir à la locomotion de la cellule, soit en excrétant une substance agglulinante, soit en s'appliquant contre l'animal à la facon d’une membrane ondulante. Il peut aussi se transformer en un pseudopode, ainsi que de nombreuses obser- vations l'ont établi.

On s’est demandé si la fonction locomotrice des cils et des fla- gelles était leur unique fonction, ou même si elle élait leur rôle principal. L'observation du mouvement des flagelles sur le vivant a suggéré à plusieurs auteurs l’idée que ces appendices étaient aussi, étaient surtout des organes tactiles à laide desquels l'animal explore le milieu ambiant.

Les cils mêmes ont été considérés comme des organes sensoriels de la cellule. Verworn, 1889, se représente le fouet comme un organe sensible et moteur à la fois. Mark, 1892, et v. Graff, 1904, 1908, ont décrit chez certains Turbellariés de longs fouets, à mou- vement intermittent, disséminés parmi les cils; Mark leur à attri-

bué une fonction sensorielle.

Nous verrons plus tard (chap. vir) que certains appareils ciliés, tel que celui des cellules du canal épididymaire des Mammifères, paraissent fonctionner comme organes d’excrétion de la cellule.

152 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

Un certain nombre d'appareils ciliés, qui par leur grand déve- loppement sembleraient devoir être doués d'une grande motilité, sont au contraire très peu mobiles. Telles sont les flammes vibratiles, qui dans le rein des Batraciens s’allongent dans l’axe du canal urinifère postglomérulaire. Ces flammes, d'après Policard, 1910, sont à peine mobiles et se meuvent en tous cas toutes dans le même sens; elles n'acquièrent quelque motilité que lorsqu'elles sont isolées par une dissociation et que leurs mouvements sont rendus libres. Mais, dans les circonstances normales, elles jouent sans doute un rôle excréteur et ont pour effet d'aider à la progres- sion du liquide urinaire, en fonctionnant à la facon d’une mèche d'étoupe.

2 Formes générale et particulières du mouvement cilio-flagellaire.

A. Forme générale. Le mouvement vibratile, des flagelles comme des cils, consiste en des mouvements oscillatoires, alterna- tifs, suivis d’incurvation et de redressement (fig. 80). Ces mouve-

7/4

Fig. 80. Schémas de la forme du battement d'un même cil d'Urostyla grandis, d’après : Verworn. [ et II, deux positions de repos différentes, comme points de départ; A, phase progressive; B, phase régressive du mouvement; 1-5, 1-3, positions succes- sives du cil dans les deux phases.

ments de va-et-vient sont réguliers, périodiques, rythmiques et se font dans des plans constants, parallèles entre eux pour plusieurs cils d’une même cellule et perpendiculaires à la surface de cette cellule. Chaque période oscillatoire se décompose en deux demi- oscillations, de durée inégale, entre lesquelles il n'y à (que peu ou point d'interruption. |

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 153

Si particulier que se manifeste le mouvement vibratile, il y a des formes de mouvement intermédiaire entre l’amiboïsme et la vibra- tilité, de même qu'on peut trouver des passages insensibles entre les cellules à pseudopodes et les cellules à cils. Il existe, ainsi que Gruber, 1885, l’a appris, des pseudopodes qui battent et qui cepen- dant ne se distinguent pas des filipodes qui coulent, tout aussi bien que chez les Héliozoaires on trouve de vrais pseudopodes pourvus comme les cils d’une baguette axiale.

B. Formes particulières du mouvement, Valentin, 1842, puis Erbard, 1910, ont distingué les espèces suivantes de mouvement des cils et des fouets :

Mouvement en crochet (Motus uncinatus);

Mouvement en entonnoir (Motus infundibuliformis) ;

Mouvement oscillatoire ou pendalaire (Motus vacillans) ;

Mouvement ondulatoire (Motus undulatus) ;

Mouvement hélicoïdal (Motus cochleariformis).

Avec Doflein, 1909, et Heidenhain, 1911, il suffit de distinguer trois principales formes de mouvement des cils et des fouets.

Le plus simple est le mouvement oscillatoire ou pendulaire:; c'est le balancement de l’organe, conservant sa rectitude, alternati- vement à droite et à gauche; il s'effectue soit dans un seul plan, soit dans des plans différents. Le cil ou le fouet ne paraît se mou- voir dans ce cas que par sa partie basale. On le constate sur les cils en train de mourir des Vertébrés supérieurs, chez les Fla- sellés, chez les Ciliés holotriches ou hypotriches. Il semble bien que le mouvement en entonnoir qu'on observe chez beaucoup de Schizomycètes et de Flagellés ne soit qu’une variété du mouve- ment pendulaire, s’effecluant selon la génératrice d’un cône, dont le sommet est à l'insertion de l'organe.

; Une seconde forme principale de mouvement vibratile estle mou- vement en crochet. C'est aussi un va-et-vient pendulaire, de redressement et d’abaissement alternatifs, mais avec une importante particularité. C’est que, pendant ce mouvement, le cil ne conserve

‘pas sa reclitude, mais s'infléchit en crochet, à courbe plus ou moins

prononcée, comme un doigt qui se fléchit. - Dans une troisième catégorie de mouvements, les flagelles ou

454 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

les cils, au lieu de demeurer rectilignes ou de s’incurver en arc de cercle, éprouvent des mouvements spiroïdes, soit dans un même sens (mouvement ondulatoire ou sinusoïdal), soit dans tous les plans de l’espace ; dans ce dernier cas, le mouvement devient réellement hélicoïdal (mouvement hélicoïdal). On observe ces formes de mou- vement dans les cils très longs et très fins de beaucoup d'Inverté- brés et pour les queues des spermatozoïdes. Le trajet en hélice, exécuté par l'organe, est à petites ou grandes courbes. La généra- trice du mouvement est tantôt un cône, tantôt presque un cylindre. C’est tantôt la partie distale, tantôt la partie proximale du fouet qui exécute les ondulations les plus fortes. Souvent il n’y a dans le mouvement normal que la partie distale qui se meut, mais de fortes excitations peuvent déterminer le mouvement de la totalité du fouet. Les mouvements des fouets sont généralement de la nature de ceux d’une vis propulsante; l’organe moteur se visse dans le liquide. Situës le plus souvent à l'extrémité antérieure du corps, plus rarement à l'extrémité postérieure, les flagelles poussent le corps en avant. Chez nombre d'espèces, le mouvement des fouets produit une rotation continuelle de tout le corps, rotation caracté- ristique de la motilité des Flagellés. Souvent le corps tout entier du Protozoaire participe aux mouvements hélicoïdaux du fouet; c'est notamment le cas quand le corps est lamelleux, ou quand l'un des bords du corps est développé en une membrane ondulante, contractile ; c'est aussi celui d'espèces telles que les spirilles, dont le corps est cylindrique.

C. Exemples de mouvements. Le mouvement flagellaire a été étudié dans diverses cellules mobiles : les Schizomycètes, les Flagellés, les spermatozoïdes. Le cadre de cet article ne permet pas de traiter in extenso la question de ces mouvements particuliers et de relater dans leurs détails les diverses observations qui ont été faites. Nous nous bornerons à indiquer les règles générales suivant lesquelles ces mouvements s’accomplissent, ainsi que quelques faits particulièrement curieux. |

Le mouvement des Flagellates a éLé analysé par un certain nombre d'auteurs : Nægeli, 1860, Hofmeister, 1867, Klebs, 1833, Migula, 1890, Pfeffer, 1904, pour les zoospores des Champignons et des

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A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 155

Aloues; Bütschli, 1883-87, Plenge, 1899, Jennings, 1897, 1901, Delage et Hérouard, 1896, pour les Flagellates proprement dits; le mouvement des fouels en général a été décrit par Engelmann, 1868, Hensen, 1881, O. Hertwis, 1893.

Par exemple, Nægeli d’une part, Bütschli de l’autre ont établi que le mouvement général d'un Flagellate se décompose en deux mouvements, l’un de propulsion en avant, l’autre de torsion autour de l’axe. La distinction de ces deux mouvements résulte non seule- ment de l'observation d'individus chez lesquels la motilité est dimi- nuée, mais aussi de la construction mathématique des composantes de la force qui agit sur le fouet. Dans un fouet à enroulement dextrogyre (c'est-à-dire la rotalion, vue d’en

arrière, de l'extrémité fixée du fouet, Z LE

se fait dans le sens des aiguilles Fig. 81. Mouvement d’un Flagellate. d’une montre), le moment de force a ot à Mers PA se décompose en deux forces com-

posantes PB et PC; la première détermine la propulsion, la seconde la rotation du corps autour de l'axe (fig. 81, A). La forme hélicoïdale, en pas de vis, du fouet en mouvement est due à des contractions qui, ou bien courent en ligne droite parallèlement à l'axe du fouet, tandis que le fouet lui-même se tord en hélice, ou bien se propagent sur le fouet non tordu suivant une ligne hélicoidale. Dans les deux cas la ligne de contraction a une forme hélicoïdale. Cette ligne se déplace autour du fouet, en faisant bomber successivement tous les points du fouet, qui donne ainsi l'impression de tourner autour de son axe.

Le mouvement du corps, déterminé par le fouet, se décompose naturellement aussi en un déplacement en avant el une rotation autour de l'axe longitudinal.

Delage et Hérouard ont modifié le schéma donné par Bütschli. Ts font remarquer tout d’abord que, à moins d'admettre une articula- tion, qui n'existe pas, entre le fouet et le corps, la rotation du fouet dans un sens déterminé doit entrainer le corps dans le sens opposé.

ï 156 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

D'après eux, le flagelle ne peut tourner, pour la raison précédente. Il n'exécute que des mouvements en entonnoir, suivant la généra- trice du cône, dont la pointe répond au lieu d'insertion du flagelle. Dans ce mouvement infundibuliforme, le fouet tourne successive- ment vers l'axe de l'entonnoir une autre de ses faces (fig. 81, B). Ce mouvement en entonnoir ne produit pas la propulsion, mais seule- ment la rotation du corps. C’est la rotation du corps qui entraîne à son tour la torsion du fouet autour de l'axe et qui détermine par le mouvement en avant. Toutefois Reichert, 1909, prétend que chez les bactéries le fouet dans son mouvement demeure toujours symétrique par rapport à l'axe général du mouvement, tournant toujours vers cet axe les mêmes courbes.

Nægeli et d’autres auteurs ont constaté que le sens de la rotation autour de l'axe longitudinal est constant pour une espèce donnée, que, par exemple, vus d’avant en arrière, les Ulothrix tournent en direction sud-ouest, les anthérozoïdes des Fougères en direction sud-est (c'est en examinant l'individu en arrière, comme on doit le faire, de droite à gauche dans le premier cas, de gauche à droite dans le second); dans d’autres espèces (Gonium) le sens peut être indifférent. D'ailleurs plusieurs observateurs ont noté le renversement dans la rotation.

Le mouvement général est, d'après Nægeli, toujours rectiligne, quand le corps est symétrique et que le milieu est homogène; les écarts dans les mouvements de propulsion el de rotation ne sont dus qu'à l'asymétrie du corps ou à son milieu hétérogène, dans lequel les résistances par frottement sont inégales autour du corps en mouvement.

Chez certains Flagellés, le mouvement a des formes très particu- lières.

Moroff, 1904, a étudié celui de Bodo ovatus ifig. 82). L'animal, couché sur le côté gauche, se déplace en avant par un mouvement pendulaire alternatif à droite et à gauche. Par une oscillation à gauche, de A à A!',le lieu d'insertion du fouet antérieur a prend la position a!; le fouet at s'accroche alors à un corps étranger, et il s’en suit un mouvement à droite de l'animal, qui prend la position A2, Par une nouvelle oscillation à gauche, le point a! devient le

» he, ati à |

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 157

point & et ainsi de suite. Le second fouet ou flagelle-gouvernail est en même temps déplacé et prend les positions successives b, b'. Le mouvement des Schizomycètes (Bactéries, Bacilles, Spiril- les, etc.) a été observé avec le plus grand soin et analysé par divers auteurs, Nægeli, Fuhrmann, 4909, et surtout Reichert, 1909. D'une facon générale il s’accomplit comme chez les Flagellates, et on peut lui appli- quer le schéma de Bütschli, modifié ou non. D’après Reichert, on peut se représenter ainsi le modus faciendi de ce mouvement. À une des extrémilés du fouet prénd naissance une contrac- tion qui tourne d’une part sur le niveau transversal du fouet, qui d'autre part progresse de ce point vers l’extrémité opposée du fouet suivant des lignes lon- gitudinales parallèles à l'axe. De cette Éd ibn facon toutes les parties du fouet sont de Bodo ovatus, d'après Morof. successivement mises en état de con- traction. La forme hélicoïdale du fouet résulte de ce que les zones transversales du fouet sont les unes après les autres atteintes par l'onde de contraction. Le nombre des tours de l'hélice dépend de la longueur absolue des flagelles et de la rapidité avec laquelle les contractions se propagent dans les deux sens, annulairement et en avant. L'hélice est tordue à droite ou à gauche, selon que les contractions commencent à l’une ou à l’autre extré- mité du fouet et selon le sens suivant lequel elles courent dans Île niveau transversal, Les contractions peuvent en effet débuter, chez les Bactéries à fouets polaires, soit à la base, soit à la pointe du fouet; celui-ci a dans le premier cas toujours un enroulement dextrogyre, dans le second cas un enroulement lévogyre. La Jon- gueur du pas de l’hélice dépend de l'importance relative des deux mouvements transversal et longitudinal (Reichert, Fuhrmann). Le pas est d'autant plus court que le mouvement transversal est plus prédominant, c’est le mouvement le plus rapide. Au contraire dans

JOURN. DE L'ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. Le. M |

158 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

les mouvements lents, qui précèdent le repos ou qui accompagnent l'agonie, le pas est très long, par prédominance du mouvement longitudinal. La hauteur des pas n’est d’ailleurs pas toujours la même sur la longueur du flagelle. La génératrice de la forme du fouet et de celle du mouvement peut être soit un cylindre, soit un cône dont la base répond à lextrémité libre du fouet (Fuhrmann).

Les mouvements des spermatozoïdes ont été l’objet d’études détaillées de la part notamment de Hensen,1881. Il a surtout envisagé les mouvements du flagelle caudal dans les spermatozoïdes pourvus d'une membrane ondulante. Il à construit la direction des forces qui se produisent dans les contractions du flagelle et qui agissent pour pousser le corps en avant. Pour Panalyse de ce mouvement et de ces forces, il est renvoyé à l’article même de Hensen.

Roth, 1904, a comparé le mouvement des spermatozoïdes à la nage d'une anguille, qui contracte et relâche alternativement sa musculature latérale, chaque phase de contraction se déplacant le long du corps d'avant en arrière. À une phase droite fait suite une phase gauche ; les phases successives sont équidistantes. Chacune des régions successivement actives est incurvée; le côté concave de la courbe est contracté, le côté convexe est en état de relâchement. La tête du spermatozoïde suit une voie qui est décomposable en une sinusoïdale et en une spirale. On peut se représenter l’ensemble du mouvement en tracant sur une bande de papier une ligne si- nusoïdale et en enroulant la bande autour d’un crayon.

Le mouvement des spermatozoïdes des Oiseaux et particulière- ment des Oiseaux chanteurs est un mouvement de propulsion avec rotation très rapide du corps autour de son axe (v. La Valette Saint-George, 1872, v. Brunn, 1884, Ballowitz, 1888). La contrac- tion du flagelle caudal offre, d'après Ballowitz, cette particularité qu’elie s'accompagne d'une rapide oscillation, de plus grande am- plitude pour la partie moyenne de la queue, si bien que sur le spermatozoide en mouvement la queue parait avoir en vibrant un contour fusiforme. La tête se déplace d’un mouvement isochrone avec l’oscillation de la queue. La rotation du spermatozoïde autour de son axe est purement passive; elle est due à la résistance que le milieu oppose à la marche en avant du spermalozoïde, en raison

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 159

de la forme en vis de la tête. Même chezle Coq la tête décrit encore un demi-tour de spire, qui suffit à conserver au mouvement la rotation autour de l'axe.

Caractères généraux du mouvement cilio-flagellaire*.

A. Fréquence et rapidité du mouvement. Le mouvement des organes ciliaires et flagellaires s'effectue avec une rapidité plus ou moins grande, les battements sont plus ou moins fréquents. Le rythme des mouvements ciliaires est donc très variable.

Les tentacules des Acinètes, qu'on peut considérer comme des organes flagellaires, ont des mouvements très irréguliers et très lents. Ceux du tentacule ou fouet rubané des Noctiluques s’effec- tuent aussi avec une grande lenteur (Vignal, 1878). Pour ce qui est des fouets des Flagellates, Prowazek, 1960, a évalué la fréquence de leurs mouvements; les battements sont de 14 à la minute chez Oikomonas, de 29 chez Polytoma, de 67 chez Euglena, de 78 pour le grand fouet de Monas et de 94 fois pour le petit fouet.

Chez les Métazoaires, Bidder, 1896, estime à 10 et à 15-20 au maximum le nombre des battements par seconde, pour le flagelle des Éponges (Leucandra, Sycon). Engelmann, 1868, Martins, 1884, ont évalué à 12 en moyenne le nombre des vibrations des cils dans le pharynx de la Grenouille.

L'amplitude du mouvement, c'est-à-dire l'étendue du déplace- ment accompli par le cil ou le fouet varie dans des limites assez larges. Elle est, d’après Engelmann, de 90° au maximum. On ne peut, bien entendu, apprécier de cette facon que les mouvements simples, pendulaires ou en hamecon, mais non des mouvements spiroïdes (Pütter). Dans l’excursion totale du cil, il y a à distinguer la flexion et l'extension, qui ne se font pas avec la même rapidité. Pour la plupart des Vertébrés et Invertébrés, la première demi- oscillation (mouvement en arrière) est la plus lente, la seconde demi-oscillation (retour à l'état de repos) est la plus rapide (rythme trocaique) (Engelmann); d’après Kraft, 1890, la flexion,

4. Je laisserai de côté la question de l’action mécanique des cils et flagelles et de la mesure de leur travail utile.

1460 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

environ cinq fois plus rapide que l'extension, n’exigerait pour se produire qu'un sixième du temps total du battement. Chez les Cténophores, le rythme du mouvement est, d’après Engelmann, en général inverse (rythme iambique). D’ailleurs on peut voir sur les cils vibraliles des Moules se modifier soudain le rythme des deux demi-vibrations; de même chez les Infusoires et autres organismes unicellulaires (Valentin, Engelmann, Verworn et autres).

La rapidité du mouvement est le trajet ou la surface totale que le cil ou le fouet décrit dans l'unité de temps; elle est par conséquent le produit de la fréquence des battements par l’amplitude du mou- vement (Engelmann, 1879).

B. Métachronisme des mouvements ciliaires. « Les cils battent non seulement avec la même fréquence de vibrations oscillatoires (rythme) et avec la même amplitude d'oscillation, mais ils battent encore ensemble dans la même direction et toujours dans le même ordre de succession » (Verworn, 1889, 1901). Si parfaite est la coordination des mouvements des cils d’une même cellule que deux Infusoires récemment formés par scissiparité continuent à exécuter des mouvements parfaitement concordants et synchrones, tant qu'un pont de protoplasma les réunit encore.

Les mouvements des cils ne sont pas en réalité synchrones, mais mélachrones. C'est-à-dire que la position dans laquelle se trouve un cil à un moment donné a déjà été atteinte par le cil pré- cédent et ne le sera qu'ensuite par le cil suivant. De même les dif- férentes membranelles d’un Infusoire cilié ou bien les palettes nata- toires des Cténophores présentent des mouvements métachrones. Mais à l'intérieur d'une même membranelle, d'une même palette, les battements des cils composants sont synchrones.

Des perturbations dans le métachronisme des battements des cils peuvent être observées dans certaines circonstances. Verworn, 1889, a vu se produire l’arrêt subit des battements, qui reprennent ensuite; il a observé aussi qu’en incisant la pellicule des Infusoires, ou en supprimant une rame natatoire d’un Cténophore, on détruit le mélachronisme. Engelmann, 1868, avait constaté sur lépithé- lium des branchies de Mollusques que les battements peuvent s’épuiser dans plusieurs rangées de cellules, reprendre sur d’autres,

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 161

qui cessent de battre ensuite et dont les mouvements reparaissent plus tard. Pütter, 1904, a observé, chez les Infusoires ciliés (Spi- rostomum, Paramæcium), que les membranelles peuvent battre par groupes indépendants les uns des autres (fig.83,B).Dans cette figure, on constate qu'il y à trois groupes de membranelles se comportant différemment au point de vue de leur vibration. Dans l’un, celui du milieu, les membranelles sont toutes inclinées vers la gauche. Dans l'autre, celui de droite, elles sont inclinées en sens opposé, c'est- à-dire qu'elles se trouvent dans une phase différente de la vibra- tion. Dans le troisième, celui de gauche, les rames sont verticales et immobiles. Le mouvement que représente cette figure est aty- pique, non seulement parce que des groupes de rames vibrent indépendamment ou même demeurent immobiles; mais il l'est encore, parce que les rames de chacun de ces groupes, au lieu de battre les unes après les autres et de se trouver par conséquent en des phases vibratoires successives, au lieu de présenter un métachronisme typique, ont des batlements absolument syn- chrones.

C. Sens du mouvement. Les cils et les flagelles battent en général dans un sens déterminé. On peut s’en convaincre en exa- minant la surface interne d’un certain nombre de muqueuses vibra- tiles, pour lesquelles la direction du mouvement est toujours la même, dans les conditions physiologiques. C’est ce qui a autorisé à attribuer aux mouvements vibratiles de ces muqueuses des actions de transfert, d’un caractère utilitaire, qu’elles n’ont cependant pas toujours. Dans la muqueuse des voies aériennes, le mouvement ciliaire est dirigé vers l’extérieur, favorisant ainsi, suppose-t-on, l'élimination des poussières nuisibles ou tout au moins inertes qui s’y trouvent. Dans la muqueuse tubaire, le mouvement des cils pousserait l’ovule vers l’orifice utérin de la trompe et assurerait son cheminement jusqu’au point l’ovule se fixera dans l’utérus. Les cils des cônes efférents de l’épididyme et même, pensait-on, ceux du canal épididymaire (avant qu'on sût que ces derniers étaient dépourvus de vibratilité et avaient un rôle purement sécréteur) aideraient à la progression des spermatozoïdes dans les voies excrétrices du testicule. Les cils dont se garnit temporairement le

162 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

péritoine des Amphibiens femelles orienteraient leurs mouvements de façon à conduire vers l'orifice de la trompe les œufs tombés dans la cavité générale, etc. Chez les Rotifères et les Infusoires, le mou- 4 vement des bordures vibratiles adorales se fait en forme de spirale ou de cercle, de manière à déterminer un tourbillon dirigé vers l’ouverture buccale. |

Le sens du mouvement que produit l'appareil vibratile, apprécié par exemple par le déplacement de particules dans le liquide

|

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Fig. 83. Schémas de mouvements ciliaires atypiques chez les Infusoires, d'après Putter. 4

A, mouvement incoordonné des cils; B, mouvements non métachrones des membranelles,

ambiant, est constant, sauf, comme on le verra ci-dessous, dans les cas il s’intervertit. Il est parallèle au plan de vibration des cils. Il se fait dans une direction opposée à celle du mouvement de flexion, ainsi qu'on l’observe sur les spirales adorales des Ciliés et sur les rames nataloires des Cténophores. Mais le sens du mou- vement ondulatoire du liquide peut être aussi, comme sur les bran- chies des Bivalves, perpendiculaire au plan de vibration.

D'une étude méthodique du mouvement vibratile chez divers Infusoires ciliés (Spirostomum, Paramæcium), Pütter, 1904, a con clu que les cils peuvent exécuter des mouvements dont le sens est différent. Ces mouvements en effet d'abord peuvent être soit coor- donnés, soit incoordonnés quant à la direction (fig. 83, A). Ensuite * ils se font indifféremment en avant ou en arrière. Il en est de même pour les membranelles qui peuvent effectuer des mouvements coor- donnés et régulièrement métachrones, ou bien incoordonnés (fig. 83, B). Le sens de leur mouvement est également indifférent. Il faut enfin ajouter que les battements des cils du corps et ceux des mem-

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A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 163

branelles de la région adorale peuvent être indépendants et être dirigés en sens opposé.

Un phénomène qui mérite d'être noté est le renversement du sens du mouvement des cils, qui se mettraient à battre dans une direction opposée. Verworn, 1889, surtout l’a observé nettement chez les Infusoires ciliés; il y est bien connu. Le phénomène est plus rare dans les cellules des Métazoaires, sur les rames des Cténophores, sur les branchies des Acéphales et ailleurs, il a été constaté par Purkinje et Valentin dès 1835, par Valentin, 1849, Engelmann, 1868, 1879, 1898, Miklucho-Maclay, 1868, Hieckel, 1872, Minot, 1876, Jijma, 1884, Kleinenberg, 1886, F. E. Schulz, 1891, Roux, 1895, Parker, 1896, 1905, Vignon, 1901, Torrey, 1904. Par exemple, les cils des Planaires se meuvent dans les directions les plus diverses; les Éponges peuvent renver- ser le mouvement de leurs cils; il en est de même pour les ten- tacules des Anémones de mer (Vignon, Parker, Torrey); c’est à un renversement du mouvement des cils que W. Roux attribue le renversement aussi du sens de rotation chez l'embryon de Gre- nouille. Parker a constaté que certaines substances excitatives, comme le jus de crabe, produisent le renversement des cils du péristome d’une Actinie (Wetridium). D’après le même auteur la réversibilité et l'irréversibilité des cils supposent une structure différente. Les cils irréversibles auraient une structure asymé- trique ; la substance élastique étant axiale, la substance contractile serait périphérique mais unilatérale. Dans les cils réversibles, la substance contractile serait disposée des deux côtés de l'axe, et de plus chimiquement différente d’un côté et de l’autre, si bien que l’une des faces serait activée par l’eau de mer pure, l’autre par l’eau additionnée de jus de crabe.

Le mouvement des spermatozoïdes peut être aussi renversé. Ce mouvement s'effectue d'ordinaire par des ondulations de la mem- brane qui courent d'avant en arrière; la tête située en avant est poussée par la queue. Mais les spermatozoïdes peuvent se mouvoir, la queue en avant, ainsi que Perty, 1852, l'avait déjà reconnu pour divers microorganismes, en qualifiant de diastrophie cette anomalie du mouvement.

464 A. PXAENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

Le sens du mouvement est influencé par la présence de corps solides voisins des cellules mobiles. Celles-ci sont, en un mot, sujettes au thigmotactisme. Dewitz, 1903, a montré que les sper- matozoïdes se dirigent vers les corps étrangers, pénétrant dans les canaux tels que ceux des semences de lin, de l'enveloppe gélati- neuse de l’œuf de Grenouille; c’est par celte excitation de contact, par ce thigmotactisme que peut s'expliquer la pénétration du sper- matozoïde dans l'œuf,

D'autre part, les cellules flagellées sont douées de ce tactisme par- ticulier, qu'on à appelé rhéotactisme, qui les oriente contre le courant par lequel ils tendraient à être entraînés. C'est ainsi que, d’après les observations de Roth, 1893, 1904, et d'Adolphi, 1905, faites sur les animaux et vérifiées par ce dernier chez l'Homme, les spermatozoïdes luttent contre le courant liquide qu’on détermine en plaçant sur le bord du couvre-objet un lambeau de papier buvard, et tournent leurs têtes du côté du courant. De la sorte s’explique que le courant du liquide de l’oviducte, loin de nuire à la progression des spermatozoïdes vers l'œuf, la favorise au con- traire (Roth). Bugnion et Popoff, 1905, ont rendu compte par ce phénoméne de rhéotactisme de lalignement des spermatozoïdes, qu'ils ont constaté dans les pavillons séminaux du Lombric.

D. Autonomie du mouvement. L'autonomie du mouvement des cellules vibratiles est un fait bien connu. Isolée du reste du corps, une cellule vibratile se comporte comme un Protiste flagellé ou cilié, comme un spermatozoïde, et ses cils continuent à vibrer pendant fort longtemps si la cellule est conservée dans de la lymphe, dans une solution physiologique de sel marin, ou dans tout autre milieu convenable. C’est ce qu'après d'anciens auteurs (Valentin, Külliker, Engelmann, CI. Bernard), chacun a pu constater et ce que Fabre-Domergue, 1888, Albertoni, 1891, Schumacher, 1901, Kôülsch, 1902, et Erhard, 1910, ont particulièrement confirmé. Le mouvement vibratile, dans des conditions favorables, peut persister pendant plusieurs Jours, se conservant ainsi après la disparition de toutes les autres fonctions et survivant à l'individu un temps plus ou moins long, trente heures après la mort pour la muqueuse des fosses nasales de l'Homme et jusqu’à 25 jours chez la Tortue.

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 165

Il était intéressant de rechercher si la présence de la cellule est nécessaire pour la conservation du mouvement vibratile, et dans le cas de l’affirmative, quelle est la partie indispensable.

On ne peut nier que la cellule soit le substratum nécessaire du mouvement vibratile. Engelmann et les auteurs classiques (Ranvier, 1880, Renaut, 1897) admettent que les cils séparés de la cellule perdent rapidement leur motilité. Cependant Ankermann (cité par Engelmann, 1898) a constaté que les queues isolées ou des frag- ments de queue de spermatozoïdes exécutent pendant longtemps encore des mouvements énergiques. Mais, d’une facon générale, on peut affirmer, avec Engelmann, que la stimulation des cils en mouvement a son origine dans la cellule. Il en donne les raisons suivantes. Le mouvement des cils et des fouets commence toujours dans le point le plus proche de la cellule, et se propage de jus- qu'à la pointe de l’organe. Les vibrations des cils portés par une même cellule sont toujours isochrones, même lorsque les cils des cellules voisines battent avec un rythme différent. Dans beaucoup de cas, l'excitation se transmet comme une onde à travers l’épithé- lium ou le long du protoplasma cellulaire, par exemple dans la spirale adorale des Ciliés.

Engelmann considère les cils comme n'étant que peu ou point automatiques. Ils sont excités par le protoplasma cellulaire, comme les fibrilles musculaires le sont par le nerf ou le sarcoplasme. Comme dans les excitations automatiques du cœur ou de l'intestin, la production de l'excitation motrice dans le corps cellulaire peut venir du dehors, c’est-à-dire des fibres nerveuses ou des cellules voisines. L'activité vibratile peut être non seulement augmentée, mais encore affaiblie ou arrêtée par des excitations « nerveuses », ce dont on a des exemples dans les organes vibrants des Rotateurs etdes Vorticelles, et aussi chez les autres Ciliés, les Mastigophores, mais non dans les cellules vibratiles des Vertébrés. « La durée, la forme, le rythme, la force et le mode du mouvement peuvent alors être variés avec autant de délicatesse que s’il s'agissait du mouve- ment d'un muscle volontaire. »

On sait d’autre part que le long d’une muqueuse l'excitation peut se propager en ondes comparables à la péristaltique du cœur, de

166 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

l'intestin, pourvu que les cellules vibratiles non altérées demeurent en contact. L'onde peut encore courir le long d'un ilot limité de cellules épithéliales isolées. Il ne peut être question d’une incita- tion mécanique due à la vibration da cil voisin, et il s’agit bien d'une excitation cheminant dans les cellules. Car des cellules immo- biles n’interrompent pas et peuvent conduire l’excitation (Kraft). L'onde excitatrice peut se propager transversalement au sens de l'excitation. Enfin la conduction de l'excitation de cellule à cellnle s'arrête quand le contact cellulaire est devenu moins intime, sans cependant que l’action mécanique de cil à cil ait cessé, car les cils continuent à battre; chaque cellule travaille alors avec son rythme spécial, un peu plus lent qu'auparavant; elle devient capable de produire elle-même son excitation automatique que masquait auparavant le stimulus qu'elle recevait de la cellule voisine.

Ainsi donc, d’après Engelmann, le mouvement vibratile est sti- mulé par l'excitation nécessaire fournie par la cellule. C'est la cel- lule, ce n’est pas le cil vibratile, qui est autonome et dont le mouve- vement est automatique.

Il faut alors se poser la seconde question. Quelle est, dans la cellule, la partie, quel est l'organe cellulaire, duquel les cils vibra- tiles recoivent l'incitation nécessaire et dont l'intégrité est indis- pensable à la conservation du mouvement? Ce ne semble pas être le noyau. Car Engelmann, 1868, Nussbaum, Gruber, Balbiani, Peter, 1898, Erhard, 1910, par leurs expériences de mérotomie, ont cons- taté que des fragments anucléés de cellules vibratiles continuent à battre, et que par conséquent la présence du noyau n’est pas néces- saire au mouvement vibratile. Pour ce qui est de l'influence du cytoplasme, Nussbaum, 1877, et Bonnet, 1877, avaient supposé que le mouvement ciliaire est sous l'influence du corps cellulaire, des courants plasmiques qui s’y accomplissent. Mais Verworn, 1891, Külsch, 1902, Pütter, 1903, ont montré que, malgré la désagrégation granuleuse du cytoplasme, le mouvement vibratile continue et ne cesse que quand la désagrégation a atteint les cils eux-mêmes. En outre Peter, Kurt Schmidt, 1881, Kôlsch, Erhard, ont observé que la quantité de protoplasma qui demeure adhérente à l’appareil vibratile est sans influence sur l'intensité du mouvement. Kôlsch

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 167

a fourni la preuve de la non-participation du cytoplasme au mou- vement vibratile, en constatant que les cils continuent à battre, si l’on n’isole avec eux que le plateau sur lequel ils reposent. Doflein, 1911, a vu de même que des fragments de pellicule ciliée battent. De ces faits on peut conclure avec Erhard, et comme déjà Peter l'avait fait, que le protoplasma proprement dit ne peut pas être le centre cinétique pour le mouvement vibralile.

Il résulte des observations de cellules vibratiles isolées et de fragments de ces cellules que, ni le noyau ni le cytoplasme n'étant nécessaires pour le maintien du fonctionnement des cils, le centre cinétique de leur mouvement doit être contenu dans l'appareil vibratile même. Nous aurons à déterminer, plus loin, quelle partie de cet appareil peut être considérée comme le moteur des cils.

E. Physiologie irritative de la cellule vibratile . Les irritations qui agissent sur la cellule vibratile produisent sur elle les mêmes effets que sur la substance vivante en général; elles se traduisent par des excilations ou par des paralysies ou arrêts du mouvement ciliaire.

Tous les points de la cellule vibratile sont-ils indifférents pour la réception des irritations, ou bien y a-t-il des points de prédilec- tion? Selon Pfeffer, 1881-1885, le fouet est directement excilable par contact, et pour Verworn, 1899, il est un organe sensible et moteur à la fois. Mais pour Roesle, 1909, les réactions des Ciliés aux excitations mécaniques et électriques ne sont que les consé- quences d’une irritation indirecte des organes moteurs ciliés, partie de points déterminés de la surface du corps; ce ne sont donc que des mouvements réflexes; leur point de départ est, dans la la région du péristome, l'orifice buccal lui-même. De facon analogue ce n’est pas, chez l’Euglène, le fouet qui, d'après Engelmann, 1898, est sensible à la lumière, mais le protoplasma incolore situé au devant du stigma. On sait que le contact d'un corps immobilise non seulement, chez un Infusoire cilié, les cils qui ont été touchés, mais encore le revêtement cilié total; c'est ce que Jennings, 1897, et Pütter, 1900, ont constaté chez les Paramécies.

1. Ce paragraphe est rédigé presque entièrement d’après Engelmann, 1898 et Pütter, 1903.

168 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

Pütter conclut que les deux modes de réaction, direct et réflexe, peuvent exister.

Excitants mécaniques. Les cils sont sensibles aux influences mécaniques. Engelmann, 1879, croyait que la suractivité du mouve-

ment, que produit le pinceautage sur une muqueuse pharyngienne:.

de Grenouille, était due à ce que les cils débarrassés du mucus qui les engluait se meuvent plus librement. Mais Kraft, 1890, par le pincéeautage, a pu rétablir dans un épithélium le mouvement qui en avait disparu jusqu’à dix et douze fois de suite; au bout de trente à quarante heures, quand le mouvement s'était arrêté, un coup de pinceau à rebrousse-poil le faisait réappa- raitre.

Les cellules épithéliales des animaux supérieurs (Mollusques et Vertébrés) sont excitables mécaniquement par le choc ou la pres- sion, même quand l'excitation mécanique est transmise par les cils, et elles peuvent alors transmettre cette excitation à leurs propres cils et, par contact, aux cellules voisines (Steinbach, cité par Engelmann, 1898, Grützner, 1882, Verworn, Kraft). Cette propriété est encore plus marquée chez les Cténophores (Verworn et autres). Elle a été constatée aussi chez les Protistes; Verworn, 1889, a observé qu'un court ébranlement sur le porte-objet fait battre activement le fouet de Peranema et change l'orientation du mouvement de l’animal, qu'il active les mouvements des cils d’une Paramécie, que la moindre secousse provoque l'agitation d'un Pleuronema. Les corps étrangers qui tombent sur une muqueuse à cils vibratiles mettent sans doute en mouvement, par action méca- nique, l’activité épithéliale et favorisent par conséquent l’élimina- tion de ces corps (Grützner).

Au contraire, Schwalbe, 1869, a constaté, sur FAscidie Pero- phora, que les cils des branchies arrêtaient leurs battements à la moindre secousse imprimée à l'animal. Vignon, 1901, a répété cette observation sur les cils du velum de lAplysie. Dans les expé- riences de Jennings, 1897, et de Pütter, 1900, sur les Ciliés, les cils sont rigidifiés par le contact avec le support ou le corps étran- ger; c’est bien une action thigmotactique excitatrice et non le résultat de l'obstacle apporté au mouvement par le corps étranger;

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A, PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 169

car des cils peuvent battre quoique fixés par leur extrémité à un corps solide (Pütter).

Regnard, 1891, a vu les cils ne cesser leurs battements que sous une pression de 300-400 atmosphères.

Excitants thermiques. CI. Bernard a montré qu'il y a pour les mouvements vibratiles de l’œsophage de Grenouille une tempéra- ture optima. L'optimum de température est admis par tous les auteurs qui se sont occupés de cette question. Il varie selon qu’il s'agit d'un animal à température constante ou variable. Il s’abaisse ou s'élève aussi suivant que la température du milieu vivent les animaux est basse ou haute; la limite inférieure est au-dessous de zéro pour les espèces des mers polaires, la limite supérieure au- dessus de 50° pour les Rotifères qui habitent des sources chaudes. D’après lesétudes de Mendelssohn, 19092, sur les Infusoires, il yaurait même deux optimums thermiques. Entre les limites supérieure et inférieure, d'une facon générale, la chaleur stimule le mouvement et le froid le ralentit. Les modifications thermiques consistentsurtout dans un changement de la fréquence des vibrations (expériences de Calliburcès rapportées par CI. Bernard), dans la rapidité de trans- mission plus ou moins grande de l'excitation; elles influent moins - sur la forme et le rythme du mouvement.

L'arrêt provoqué par un échauffement incompatible avec la vie (rigidité thermique, tétanos thermique des auteurs) survient après une rapide diminution de Pamplitude, tandis que la fréquence peut demeurer la même ou même être plus grande. L'arrêt des cils se produit en position de repos chez les Vertébrés, en état de contrac- ture chez les Infusoires (Verworn).

La rigidité par le froid survient dans des phases inverses. Les maxima thermiques peuvent être extrêmement bas. Les cils des Infusoires ciliés résistent à une température de d’après Spallan- zani ; ceux des branchies de l'Anodonte à une température de (Roth); les mouvements des spermatozoïdes de Taureau peuvent reprendre après congélation (Aigner, 1900), ceux des spermatozoïdes de l'Homme résistent à un refroidissement de —19° (Mantegazza, cité par Engelmann); le mouvement des cils du pharynx de Grenouille ne serait même pas aboli par une température de —90 (Pictet, 1893).

170 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

Excitants électriques. Kistiakowsky, 1865, a déjà constaté que les courants galvanique et d'induction produisent l’accélération du mouvement et l'accroissement de l'effet utile. Engelmann, 1898, a analysé les conditions dans lesquelles le courant détermine soit une accélération, soit un arrêt du mouvement vibratile; ces condi- tions dépendent de l’état de la membrane vibratile, aussi bien que du courant. L'excitation produite par le courant est d’abord suivie d'une courte période de latence. La tétanisation détermine, a dose égale, des actions bien plus intenses que les excitations isolées. Les courants induits de rupture agissent plus que les cou- rants de fermeture. Il est probable que la loi de l'excitation polaire s'applique aux cellules épithéliales vibratiles. Ludloff, 1895, a vu, chez les Paramécies, que le courant électrique influence l'activité vibratile en sens inverse à l’anode et à la cathode; à la cathode, c'est une expansion, à l’anode une contraction des cils. Mais, d’après Wallengren, 1909, il ne s’agit pas de phénomènes de réaction différente vis-à-vis du courant galvanique. L'observation montre, dit Engelmann, que les effets de l'électricité, comme ceux de la chaleur, consistent beaucoup plus en changement de la fré- quence (pour aller jusqu'au tétanos) et de l’amplitude, qu’en modi- fications du rythme et de la forme. Les cils eux-mêmes paraissent être peu sensibles à l’excitation électrique directe. Ces cils et les queues des spermatozoïdes ne répondent pas à l'excitation élec- trique comme le muscle, c'est-à-dire par une secousse unique, mais bien par un accroissement ou un arrêt de leur activité auto- matique. Cependant les grands cils latéraux des branchies de Bivalves, après une excitation d'induction, se couchent tous dans le même sens et restent tétanisés et contracturés dans cette posi- tion.

E'xcitants lumineux. L'action de la lumière sur les fouets et les cils paraïîtrait être prouvée par le phototactisme des Flagellés et des Ciliés. Mais, selon Engelmann, c'est indirectement que les cils et fouets sont influencés par la lumière; c’est par l'intermédiaire des corps chlorophylliens qui peuvent exister chez les Ciliés ou de la tache pigmentaire des Flagellates.

Excitants chimiques. L'étude des actions chimiques sur le

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 171

mouvement vibratile a donné lieu à de nombreuses recherches et a abouti à des résultats en partie contradictoires:

CI. Bernard, 1866, a constaté que l’épithélium continue à vibrer dans le vide, dans l’azote et l'acide carbonique. Sharpey, 1835-36, avait auparavant affirmé que les mouvements vibratiles persistent dans l’eau bouillie. Kühne, 1866, par contre, les vit s'arrêter dans une atmosphère d'hydrogène ou surchargée d’acide carbonique et soutint que la présence de l'oxygène est nécessaire au mouvement vibratile comme aux autres manifestations vitales, et que le mou- vement aboli par l'hydrogène se rétablit avec une petite quantité d'oxygène. Engelmann, 1868, montra qu'il dépend de la pression partielle de l'oxygène. Nagaï, 1905, prétend que l'épithélium vibratile possède, comme le système nerveux central ou périphé- rique, des réserves d'oxygène qui permettent la continuation du mouvement, et que comme pour le système nerveux les narcotiques agissent en empêchant la prise d'oxygène; en accordant des réserves oxygénées aux cellules vibratiles, il explique les résultats contradictoires qui précèdent.

Ici se placent les expériences d'Engelmann, 1861, et de CI. Ber- nard, 1866, sur l’action des anesthésiques et narcotiques (alcool, éther, chloroforme, nitrite d’amyle). À faible dose ils accélèrent le mouvement, à forte dose ils l’annihilent (Engelmann). D'après CI. Bernard, les anesthésiques (éther) arrêtent les mouvements vibratiles, qui ne sont que suspendus et peuvent reprendre dès qu'on soulève la cloche sous laquelle les vapeurs anesthésiques s'étaient dégagées ; ils se comportent ainsi autrement que les poi- sons (opium, curare, strychnine) qui abolissent irréparablement le mouvement. L'action des alcools comprend, d’après Breyer, trois périodes, de dépression, d’excitation, de paralysie. Nagaï a vu l'alcool et l’éther produire une excitation suivie de paralysie. Albertoni, 1891, a noté l'influence paralysante de la cocaïne. Les corps halogènes, l’iode surtout, produisent l'arrêt des cils et la désorganisation cellulaire (Weïinland, 1894). Jacobson, 1901, a constaté l’action toxique des substances fluorescentes, action que la lumière accroît. L’immunité complète des cils vibratiles à l'égard de la plu part des poisons avait au contraire été soutenue par CI. Bernard.

172 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

L'action des acides même les plus dilués sur le mouvement des cils et des flagelles, sur celui des zoospermes, est bien connue: ce mouvement est aboli en milieu acide.

Par contre on dit habituellement que de faibles proportions d’alcalis excitentle mouvement vibratile (Virchow, 1854, etd’autres); l'influence favorisante des solutions alcalines sur la mobilité des spermatozoïdes est d'observation courante.

Cependant il est plus exact de reconnaître, avec Engelmann, que l'action des acides, comme celle des alcalis, est une question d'optimum. À dose faible, les uns et les autres peuvent produire une excitation ; à dose plus forte ils déterminent l'arrêt du mou- vement.

Il y a en somme des substances favorisantes et d’autres empé- chantes, ainsi qu'il ressort de l'étude qu'a faite Engelmann, 1868, de l’action de nombreux corps chimiques. Weïinland, 1894, a montré que, pour les composés halogènes, les acides inorganiques et organiques, l'effet produit dépendait de la grandeur du poids moléculaire et augmentait avec celui-ci.

Excitants osmotiques. Les excitants osmotiques, l'eau notam- ment, produisent d’abord sur les cils épithéliaux, sur les sperma- tozoïdes de la Grenouille des phénomènes d’excitation, qui les paralysent en les gonflant. Si l’on accoutume les cils lentement à l’eau, leur irritabilité est augmentée (Wallengren, 1902); les Para- mécies « affamées de sel » réagissent mieux aux Courants électri- ques. Les observations de Massart, 1889, et de Rothert, 1901, sur l’osmotactisme ont montré la véritable nature de ces actions.

Interférences d'actions irritatives. Il peut y avoir interférence d'actions de nature diverse s’exercant sur les cils. D'après Jennings, 1897, le thigmotactisme, l’immobilisation par contact, affaiblit fortement l'excitation électrique, qui n’agit plus qu'à la fermeture du courant. Chez les Paramécies, une température de 37° annihile le thigmotactisme. Pütter, 1900, a recueilli toutes les observations d'interférences d'actions irritatives sur les cils et en a ajouté un certain nombre de nouvelles.

Er tr pi È

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 173

IT. THÉORIES DU MOUVEMENT VIBRATILE ET SIGNIFICATION PHYSIOLOGIQUE DES PARTIES CONSTITUANTES DES APPAREILS CILIÉS ET FLAGELLÉS.

Théories générales du mouvement vibratile.

Les théories explicatives du mouvement vibratile des cils et des fouets ont pris trois formes principales. En premier lieu Nussbaum a songé à expliquer ce mouvement sans faire aucunement inter- venir la structure même de l’appareil vibratile. En second lieu Heidenhain a émis récemment une théorie qui repose bien sur la structure des cils et des flagelles, mais sur une conception hypothé- tique de cette structure, bien plus sur une conception générale de la constitution de tous les organes contractiles. Contrairement à cette vue générale, en troisième lieu, toute une série de théories cher-

chent dans la structure constante et réelle de l'appareil ciliaire et flagellaire la raison d'être du mouvement cilio-flagellaire et de ses diverses modalités; selon qu'on a fait jouer un rôle prépondérant à telle ou telle structure, à telle ou telle partie constitutive de l'ap- pareil cilié ou flagellé, la théorie a pris telle ou telle autre forme particulière.

Nussbaum, 1877, paraît à lui seul représenter la première opinion. Il observa sur les cellules vibratiles mais dépourvues de racines de Æaja clavata, que « la hauteur de la cellule décroit et croit de facon isochrone avec les battements des cils correspon- dants; la cellule se contracte ». Il en conclut que le mouvement des cils est à un va-et-vient du protoplasma cellulaire. Dans les cellules à racines ciliaires très développées, telles que celles de l'intestin d'Anodonte, ces racines sont les prolongements directs des cils, il en est de même: racines et cils sont des formations élas- tiques que mettent en mouvement les déplacements du plasma cel- lulaire.

Heidenhain, 1911, part de la théorie des inotagmes, due à Engelmann. D’après cette théorie, non seulement les muscles, mais encore les cils et les fouets et même les pseudopodes sont constitués par des inotagmes, c’est-à-dire par de petites particules

JOURN. DE L’ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. L 12

474 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

disposées parallèlement à un axe de structure. Ges inotagmes sont des formations allongées qui lors de leur contraction tendent à devenir sphériques et se raccourcissent, grâce au gonflement dont elles sont alors le siège. A la notion des inotagmes Heidenhain substitue celle, plus générale, des protomères, c'est-à-dire des particules élémentaires dont se compose toute matière vivante. qu’elle se produise et sous quelque forme que ce soit, « la contrac- tilité, dit-il, est une fonction dimensionnelle qui suppose une métastructure orientée selon les dimensions de l’espace ». Ici, avec les cils et les fouets, il s’agit bien d’une métastructure, attestée par la solidité, la forme linéaire géométrique, la décomposition fibrillaire de ces formations.

Heidenhain transporte sa théorie sur le terrain de la compa- raison des cils et des fouets avec les axopodes des Héliozoaires et des Radiolaires et avec les tentacules des Acinètes, déjà faite par Pütter, Gurwitsch et Schuberg. Mais tandis que ces auteurs veulent retrouver dans les deux groupes d’organites cellulaires une même structure, consistant dans la différenciation de deux substances, l’une axiale plus ferme, l'autre corticale plus molle et contractile, et tandis que cette structure particulière leur apparait comme la substance nécessaire du mouvement cilio-flagellaire, Heidenhain ne considère pas comme indispensable la différencia- tion axile des pseudopodes et des cils, et croit que l'explication du mouvement de ces appendices doit être cherchée dans une orga- nisation générale. Il a été conduit à cette opinion par l'observation des mouvements exécutés par les pseudopodes chez divers Rhizo- podes. Chez Dactylosphærium, chez Difflugia, il se forme, aux dépens de pseudopodes informes et pâteux, des pseudopodes con- sistants, raides et linéaires, brillants et comme cristallins dès leur émission. Ils ne se peuvent former que par l’arrangement monaxial subit des protomères, arrangement qui correspond à un état d’équi- libre relativement stable.

La conclusion générale de Heidenhain sur le principe même de la causalité organique du mouvement cilio-flagellaire est la disposi- tion monaxiale dés protomères, dans les cils et les fouets aussi bien que dans les pseudopodes linéaires et dans les tentacules.

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A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 175

C'est une structure de fibrillaire du muscle et du scopique qui permet la pro- pagation régulière des plus petites ondes de contrac- tion.

Mais Heidenhain ne se borne pas à expliquer par sa théorie le principe même du mouvement et prétend encore rendre compte de ses diverses modalités. Pütter, Gur- witsch et Schuberg, avaient en effet refusé d'attribuer les mouvements si variés des cils et des fouets à une structure univoque et à la contractilité d’un appareil fibrillaire. La variété du mouvement des cils et des flagelles, Heidenhain la rapporte à la variation du mouvement dans les ondes de contraction. Outre que la fréquence et le rythme des ondes diffèrent beau- coup d’un cas à l’autre, le mouvement des ondes con- tractiles peut se faire sui- vant plusieurs modalités. Dans une première moda- lité, les ondes qui courent le long d’un organe linéaire

même ordre que la structure méta-

nerf. C’est cette structure métamicro- | À

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DS ; D) RS 1% y JL y C L D ‘ig. 84. Schémas explicatifs de la théorie de M. Heidenhain pour le mouvement des cils et des fouets. A et A‘ mouvement pendulaire

simple ; B et B', mouvement en crochet (mouve- ment habituel des cils); C et C', mouvement en cravache (mouvement des flagelles); D et D', mouvement hélicoïdal (mouvement des flagelles). Dans toutes les figures les traits noirs épaissis indiquent la situation et la forme de propaga- tion des ondes de contraction.

n'atteignent pas toutes nécessairement la coupe transversale de l'or- gane, mais courent unilatéralement. Une deuxième sorte de mouve-

176 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

ment est due à la différence de longueur absolue des ondes de con- traction; les effets seront différents selon que l'onde atteindra en même temps de plus grandes ou de plus courtes longueurs de l’élé- ment de structure; des ondes courtes et énergiques produisent de fortes inflexions, des ondes longues et plus molles des courbures plus douces. Enfin la longueur parcourue par l'onde sera variable et produira une troisième modalité : longue, l'onde, pourra atteindre l'extrémité libre de l’organite mobile; courte, elle s'épuisera avant d'avoir parcouru cet organite dans toute son étendue. Sur ces bases, Heidenhain construit un certain nombre de schémas repré- sentant le trajet de l'onde de contraction, qui illustrent les diverses formes du mouvement ciliaire et flagellaire : le mouvement de pendule rectiligne; le mouvement de pendule curviligne, que pré- sentent les cils proprement dits ; le mouvement spiroide de cravache qu'exécutent dans un seul plan certains flagelles; le mouvement hélicoïdal ou de pas de vis qu'accomplissent la plupart des flagelles (fig. 84).

Dans le troisième groupe de théories, les auteurs, se bornant à considérer la constitution des appareils ciliaires et flagellaires sans chercher à les comparer aux autres organes contractiles du mouvement, ont voulu que leur constitution même, particulière et compliquée, suffise à l’explication de leur fonctionnement. Ils ont considéré l’appareil ciliaire ou flagellaire comme un ensemble d'organes dont le rôle physiologique pourrait être différent, les uns actifs, les autres passifs, tous concourant à assurer le fonction- nement de l’appareil. Ils se sont ainsi posé séparément pour chacun de ces organes : par exemple, cil, corpuscule basal et racine ciliaire, ou bien flagelle, blépharoplaste et rhizoplaste, la question de leur fonction générale.

Par conséquent l'exposé des théories de ce groupe équivaut à la question de la signification physiologique des diverses parties de l'appareil ciliaire ou flagellaire, dont la signification morphologique

nous est d'autre part connue.

A PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 177

2 Signification physiologique des corpuscules basaux el blépharoplastes.

À. Les corpuscules basaux et blépharoplastes, centres moteurs. Les partisans de l’homologie, génétique aussi bien que morpholo- gique, des corpuscules basaux et des blépharoplastes avec les centrosomes, ont été naturellement conduits à admettre très généralement aussi l’analogie fonctionnelle en plus de l'homologie. Nous savons que le blépharoplaste a été considéré par la plupart des Protistologues comme un centrosome détourné de sa fonction directrice de la mitose cellulaire, de sa fonction de centre cinétique interne, et adapté au rôle de centre cinétique externe du flagelle cellulaire. On à vu aussi que les corpuscules basaux des cils sont, dans la théorie de Henneguy-Lenhossèk, des dérivés des corpus- cules centraux, qui sont demeurés des centres cinétiques, mais avec un changement de fonction qui les a affectés à l'appareil ciliaire. Henneguy, 1898, v. Lenhossèk, 1898, Graf, 1897, d’une facon indépendante, ont considéré, avec d'importantes variantes qui cependant peuvent être négligées ici, le corpuscule basal (ou même le bulbe) du cil, « middle piece » de Graf, comme un ganglion central minuscule, comme un centre moteur de chaque cil. De même que le cœur, dit même Lenhossèk en substance, ne cesse pas de battre une fois séparé du tronc, grâce à son système de ganglions propres, de même les cils continuent à vibrer, détachés de la cellule, parce qu'ils ont emporté avec eux leur centre d'im- pulsion, le corpuscule central devenu corpuscule basal.

Cette hypothèse, on a voulu la vérifier par l'expérience, élablis- sant si l'interprétation morphologique des corpuscules basaux pouvait être aussi acceptée au point de vue physiologique. Renou- velant d'une facon méthodique et suivie quelques essais faits sépa- rément par Nussbaum, 1887, Engelmann, 1880, Verworn, 1891, Peter, 1898, montre que les corpuscules basaux sont bien les centres moteurs de l'appareil vibratile. Il a pratiqué pour cela la mérotomie des cellules vibratiles de l'intestin d'Anodonte. Il a vu alors que, dans des segments de cellule, privés de noyau ou dégagés

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du protoplasma, l’appareil vibratile continue à se mouvoir, et il a aussi montré (comme on l’a vu plus haut) que ni le noyau ni le protoplasma n’ont d'influence sur le mouvement des cils. Le moteur siège donc dans l'appareil vibratile lui-même. Il ne réside pas dans les cils mêmes; car, isolés, ces cils cessent de battre. Les racines des cils ne sont pas davantage l’organe moteur, parce que dans les appareils vibratiles dont les racines ont été endommagées, le mou- vement vibratile continue, suivant les observations de Peter, con- firmées par Erhard. Mais, si les cils ont été détachés du plateau qui les porte et par conséquent séparés des corpuscules basaux, leurs battements s'arrêtent (Kübhne, 1866, Engelmanr, 1868, 1879, Simroth, 1876, Verworn, 1891, Peter et d’autres). Les sperma- tozoides perdent leur motilité, quand il leur manque le Wittelstück, contenant le corpuscule central. En comprimant des Paramécies, Külsch, 1902, a vu certains alvéoles proéminer, et la pellicule qui les recouvre se détacher avec les cils et les corpusculss basaux; les cils continuaient à vibrer. De tous ces faits on a conclu très généra- lement, à la suite de Peter (Fürst, 1900, Nils Holmgren, 1902, Kôülsch, 1902), que le moteur dans le mouvement ciliaire réside dans les corpuscules basaux, de même que les corpuscules centraux sont le centre cinétique de la cellule. L’équivalence physiologique des corpuscules centraux et des corpuscules basaux parut ainsi prouvée expérimentalement.

D'autres histologistes, tout en repoussant la comparaison des corpuscules basaux et des corpuscules centraux ou ne l'acceptant tout au moins qu'au point de vue physiologique, ont admis cepen- dant que les corpuscules basaux fonctionnent comme centre pour le mouvement des cils et sont de véritables blépharoplastes. Studnicka, 1899, fait valoir d’abord les résultats des expériences de Peter, et en outre l'inégalité de développement des blépharo- plastes ou corpuseules basaux selon l’activité du mouvement vibra- tile. Très développés dans les cellules vibratiles, ces blépharoplastes sont très réduits dans les éléments dont les cils sont immobiles, tels que les cellules intestinales de l’Ascaris.

La théorie de Peter, après avoir joui d’un certain crédit, a été peu à peu de plus en plus vivement combattue. Des réserves ont

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A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 179

été faites sur la portée des opérations de mérotomie pratiquées par Peter, et sur la légitimité de ses conclusions. D'une facon générale l’idée du corpuscule basal, centre moteur du mouvement vibratile, a été critiquée. Erhard notamment lui a fait un certain nombre d'objections. Il a observé qu’en faisant agir la chaleur sur les cellules vibratiles jusqu’à détruire complètement le plateau basal, les mouvements des cils, loin de cesser, sont encore même activés. La motilité des spermatozoïdes n’est pas détruite, selon Meves, par l’absence du Mittelstück. Vignon, Erhard objectent que beaucoup de cellules vibratiles ne possèdent pas de corpus- cules basaux; malgré des observations très précises, Maïer, 1903, n à pas réussi à en déceler sur un certain nombre de Protozoaires. Par contre, dans de nombreuses cellules ciliées mais non vibratiles, on a montré l'existence de corpuscules basaux. Il en est ainsi pour les cellules à pointe (Shftchenzellen) des yeux de Mollusques et d'Arthropodes (Hesse, 1900, 1901), pour les cellules à bouquet de poils (Æaarbüschelzellen) du canal épidymaire des Mammifères (d’après certains auteurs tout au moins, voir chap. vi), pour les cellules à bordure en brosse et à plateau strié (voir chap. vu). Toutefois Erhard, comparant les cellules vibratiles aux cellules à bordure en brosse et à plateau strié, conclut que, s’il existe des corpuscules basaux dans les unes et dans les autres, l'identité de nature de ces corpuscules n’est pas encore établie pour les deux catégories de cellules, et Joseph, 1902, combat l'assimilation des cellules à plateau strié intestinales avec les cellules vibratiles.

D'ailleurs, les résultats expérimentaux, tels que ceux de Kôlsch, 1902, rapportés plus haut, ont été interprétés dans un sens contraire à l'hypothèse des corpuscules basaux considérés comme centres cinétiques.

B. Les corpuscules basaux et blépharoplastes, organes de soutien. A côté de l'interprétation, d’après laquelle les corpuscules basaux sont des centres cinétiques pour le mouvement vibratile, on en a émis une autre, qui ne leur reconnait qu'un rôle secondaire tel qu'un rôle de soutien.

Cette opinion, exprimé par Kunstler, 1882, Frenzel, 1886, Plenge, 1899, Meisenheimer, 1899, Eismond, 1900, Studnicka, 1901, a été

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renouvelée par Maier, 1903, Schuberg, 1905, Kupelwieser, 1906, Erbard, 1910, Kolaïev, 1910, et d’autres.

Pour Eismond, le moteur des cils n’est pas le corpuscule basal, mais le protoplasma lui-même. L'auteur compare les corpuscules basaux aux pièces qui servent de base aux rayons de nageoire des Poissons ou bien à celles qui supportent les cirrhes buccaux de l’'Amphioxus. Pour lui, les corpuscules basaux, aussi bien d’ailleurs que les pièces radiculaires, ne sont que des organes de soutien de l'appareil cilié.

Maier s'appuie, pour dénier aux corpuscules basaux leur rôle cinétique, sur ce que ces corpuscules ne manquent pas, ainsi qu'on le verra plus loin, aux appareils ciliés immobiles, bordures en brosse et plateaux striés.

D'après Kupelwieser, les corpuscules basaux fonctionnent comme organes de soutien et de résistance, comme articulations des cils. L'auteur appuie son opinion sur les faits suivants, observés dans les larves Cyphonautes. Le cil proprement dit est toujours coudé sur la racine ciliaire, à l'endroit du corpuscule basal. Les corpus- cules basaux manquent aux cellules uni- et biciliaires des mêmes ani- maux; les cils à cause de leur faible excursion n'ont pas besoin d’une telle articulation. Les corpuscules sont situés à la base profonde de l’épaisse crusta et y sont même implantés; cette situation est favo- rable à l’idée de leur rôle de soutien. L'expression de condyle que Dangeard, 1908, a employée pour le blépharoplaste de Polytoma témoigne d'une interprétation semblable.

En faveur du rôle de soutien dévolu aux corpuscules basaux Kolatev fait valoir les relations qu'affectent entre eux les corpus- cules. Non seulement en effet ils sont disposés en rangées à la surface de la cellule; mais, comme Heidenhain, 1899, l’a observé sur des cellules hépatiques d’Æelix pomatia et Luther, 1904, dans les cellules ectodermiques de Rhabdocoela, et comme lui-même le retrouve chez l'Anodonte, les corpuscules basaux d’une même rangée ou même ceux d'une même surface cellulaire sont reliés entre eux par des tractus plasmiques plus colorables, et rattachés aussi par des tractus analogues à la paroi cellulaire. Il en résulte, à la surface de la cellule, un réseau dont les corpuscules basaux

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occupent les points nodaux. Gelte disposition rappelle celle que Schuberg a signalée chez les Ciliés, des vues de face de la cel- lule montrent les corps basaux situés au milieu de champs qua- drangulaires de la pellicule et rattachés les uns aux autres par des fibrilles ; une disposition analogue a été décrite chez lOpaline par Tônniges, 1898.

Erhard a émis sur cette question une théorie physiologique très particulière, qui est en harmonie avec sa conception de la structure de l’appareil ciliaire. Rappelons d’abord que pour lui l'appareil ciliaire dans son ensemble se compose de deux sortes de sub- stances : l’une, plus solide et dépourvue de contractilité, est une substance de soutien; l’autre, plus molle et contractile, est seule active. La première forme le filament axile et le corpuscule basal qui n’est qu'un nodule épaissi de ce filament axile. La seconde constitue une gaine au filament axile du cil, s’épaissit à la base d'implantation du cil en un corps arrondi qui se confond avec le plateau cellulaire, ou, dans le cas ce plateau se décompose en bâtonnets distincts, avec chacun de ces bâtonnets. Cest, d’après Erhard, cette seconde substance, et c’est particulière- ment le corps épaissi qu’elle forme à la base du cil, qui est active dans le mouvement vibratile. Erhard donne à l'appui de son opi- nion et contre l’activité cinétique du corpuscule basal un certain nombre de raisons. Il a pu constater dans le typhlosolis et les branchies de l’Anodonte, ainsi que dans le conduit hépatique d’Helix, l'immobilité absolue du corpuscule basal ; c’est seulement au-dessus de ce corpuscule et au point le cil se dégage du pla- teau que la vibration devient sensible. Le corps épaissi, qui apparait comme une sorte d’anneau, n'est pas nettement délimité et se confond avec le plateau cellulaire dont il se distingue par son aspect plus sombre. En examinant un appareil vibratile en activité, on constate que la bosselure déterminée à la base du cil par la présence de ce corps paraît alternativement à gauche et à droite, se déplaçant dans le même sens que l’inclinaison du cil. On voit alors ce corps devenir plus sombre au niveau de la partie renflée. L'obscurcissement est à ce que dans la partie renflée les alvéoles de la substance constitutive du plateau, au lieu de s'orienter régu-

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lièrement dans le même sens vertical, se disposent irrégulièrement, par suite de l’inflexion même du cil et du bombement du corps qui en occupe la base. Or on sait que la lumière traverse moins facile- ment des parties irrégulièrement structurées et orientées que celles dont l’arrangement est dispersé.

D'après Erhard, le filament axile et le corpuscule basal, qui n'en est que la portion inférieure épaissie, sont rigides et immo- biles. Ils sont les organes de soutien, permettant aux cils de résister aux très fortes pressions dont Engelmann, 1868, a mesuré la valeur. Au contraire, la gaine du cil, le plateau (ou l'un de ses bâtonnets constitutifs dans les cellules à bâtonnet), et enfin le corps renfié situé à la base de la gaine du cil, unis en un tout continu et formés de la même substance, sont les parties actives dans le mouvement vibratile. Ce qui prouve le rôle secon- daire du filament axile et de son corpuscule basal, c'est le batte- ment de pseudopodes dépourvus d’axe et de corpuscule basilaire, celui de cils sans corpuscules basaux (Gruber, 1885). C'est aussi l'absence de n'importe quelle connexion visible d’un corpuscule basal à un autre, connexion pouvant servir pour la transmission de l'excitation; une semblable connexion n’a été indiquée que par Schuberg, 1905, chez les Ciliés. C’est encore le fait que les appa- reils vibratiles les plus compliqués décrits par Frenzel, 1886, ne manifestent pas un mouvement différent de celui des appareils plus simples. Comme autre preuve de son opinion, Erhard fait encore valoir que, d'après Engelmann, 1868, une forte accélération des battements se produit, due plutôt à l’exaltation du métabolisme qu’à l'amélioration des conditions mécaniques, à la suite d'actions qui n'influencent pas sensiblement les corpuscules basaux, mais modifient le protoplasma. Enfin, l’auteur écarte l’objection qu'on pourrait Lirer du fait que voici : les battements des cils semblables à des pseudopodes et dépourvus de corpuscules basaux sont lents ; les battements sont très rapides au contraire dans les cellules pour- vues de plateaux et de corpuscules basaux, surtout lorsque, comme dans les expériences d’'Erhard, le protoplasma et le plateau ont été gonflés. Il semble donc que ja présence de corpuscules basaux et la moindre densité du plasma soient des conditions favorisantes

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* du fonctionnement des cils vibratiles. Erhard explique comment l'absence des corpuscules basaux est, faute de point fixe pour lat- tache des cils, une cause de ralentissement du mouvement; il y est suppléé par la production d’un état de gel dans le cytoplasma, en des points successivement différents du corps cellulaire. L'ac- célération de mouvement dans des cellules gonflées s'explique par le plus rapide déplacement des molécules plasmiques (confor- mément aux études d'Engelmann, 1868, et de Rossbach, 1874), et par la fixité plus grande que la surface portant les cils doit à l'augmentation de la tension superficielle.

En conclusion, Erhard assigne comme point excitable du cil son point d'implantation sur la surface cellulaire, différencié ou non en un plateau. Le filament axile et le corpuscule basal ne servent que d'organes de renforcement et de soutien et ne sont pas les moteurs du cil.

Une troisième interprétation physiologique a été proposée par Gurwitsch, 1904, pour lequel le corpuscule basal n’est ni un centre cinétique, ni un appareil de soutien, mais un corps de réserve contenant la substance destinée à réparer l'usure des cils.

Nous croyons prématuré de conclure sur la signification physiolo- gique des corpuscules basaux. Mais du rapport à peu près constant qui s observe entre le développement de ces corpuscules et les dimensions ainsi que l'activité fonctionnelle des cils, il ressort avec évidence que les corpuscules basaux jouent dans le fonction- nement de l’appareil vibratile un rôle, quel qu'il soit, des plus importants.

Signification physiologique des racines ciliaires.

Diverses interprétations ont été proposées pour le rôle des racines ciliaires dans le mouvement vibratile. On les a tour à tour considérées comme des appareils trophiques, comme des organes contractiles, comme des fibrilles nerveuses, comme des organes de soutien.

À. Les racines ciliaires, appareils trophiques. Friedreich,

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1858, 1859, qui croyait que les racines ciliaires étaient creuses, a? émis l’idée qu’elles fonctionnaient comme tubes capillaires, ser- vant à tracer aux courants plasmiques un système de voies fixes qui les conduisait à la surface de la cellule. Pour Engelmann, 1880, elles servent à la nutrition des cils. Il leur refuse la contractilité, parce qu'il n’a pu déterminer-par divers agents (courants d'induc- tion, chaleur, excitants chimiques) leur contraction, pas plus que celle d’ailleurs du protoplasma cellulaire, du noyau, des corpus- cules basaux. Il écarte l’idée de fibrilles nerveuses, que lui avait sugoérée l'observation des cils des Stylonychies; car les propriétés physiques et chimiques des racines ciliaires et des fibrilles ner- veuses sont tout à fait différentes. Quant à en faire des organes de soutien, leur trop faible consistance ne le permet pas, et elles se détachent trop facilement des cils. C’est donc à la nutrition de ceux ci qu'elles doivent servir, peut-être aussi à leur accroissement ou même à leur régénération. Une idée analogue a été émise par Verworn, 1891, pour qui les racines sont des voies nutritives, permettant un échange de substances entre les cils d’une part, les parties profondes de la cellule et surtout le noyau d’autre part. Kolaëev, 1910, sans refuser aux racines un rôle de soutien, les regarde comme servant à la nutrition des cils. Polowzow, 1904, dans l'intestin de l'Anodonte et du Lombric, affecte les racines cillaires à l'excrétion cellulaire. Contre l'idée de la fonction nutri- tive des racines, Pütter, 1903, fait valoir que si parfois ces racines semblent contracter des rapports avec le noyau, ce rapport fait défaut dans d’autres cas (observations de Hoffmann, 1899, sur Allolobophora fœtida les racines sont éloignées du noyau, bien que celui-ci soit superficiel; observations de Vignon, 1901, qui trouve chez l’Anodonte des racines divergentes s’écartant du noyau; observation de K.-C. Schneider, 1902, qui dans divers objets voit les racines s'étendre de l’une à l’autre base de la cel- lule sans contracter de relation avec le noyau).

B. Les racines ciliaires, organes contractiles. Stuart, 1867, qui a étudié les cellules vibratiles dans le velum des larves d'Eolidiens, regarde comme contractiles les racines ciliaires ou du moins les fibrilles cytoplasmiques qui les représentent certainement, et il

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attribue à leur contractilité les déplacements verticaux du noyau, ainsi que les mouvements des cils. Simroth, 1876, chez le Stentor, admet que, par une contraction analogue à celle des muscles, les racines produisent le va-et-vient des cils. Ganle, 1881, sans se pro- noncer nettement d’ailleurs sur le rôle des racines ciliaires, les a vues striées transversalement dans les branchies d’Aricia fœtida et pour cette raison incline à penser qu'elles ont un rôle moteur. A. Graf, 1897, étudiant l'organe excréteur dans l'intestin des Hirudinées, a été amené à se représenter la racine ciliaire (basal piece) comme un organe contractile et moteur du cil, et le corpus- cule basal (middle piece) comme un ganglion nerveux minuscule. Benda, 1899, 1901, pour lequel, on le sait, les racines ciliaires représentent des mitochondries, leur attribue les propriétés géné- rales qu’il reconnait à ces organites cellulaires; considérant que les mitochondries donnent naissance à des organes moteurs de la cellule, il dota les racines ciliaires de la propriété de contractilité. C’est également en les faisant rentrer dans une catégorie générale de formations cellulaires et en les rangeant parmi les organes du protoplasma supérieur, que Prenant, 1898-1899, émit l’idée résu- mée dans la proposition suivante : « Le cil est mobile; le corpus- cule basal est moteur; la racine prépare chimiquement le mouve- ment. » Les racines-ciliaires ne sont donc, d’après cette opinion, ni exclusivement trophiques, ni exclusivement contractiles et fonc- tionnelles; elles jouent un rôle tropho-fonctionnel. En faveur de celte interprétation, je ferai valoir les relations que con- tractent, dans les cellules à membranelles des Métazoaires (bran- chies des Lamellibranches et des Tuniciers, tentacules des Bryo- zoäires) les racines ciliaires puissamment développées avec des produits de sécrétion en forme de boules et analogues aux sarco- somes des éléments musculaires (voir chap. vu).

C. Les racines ciliaires, fibres nerveuses. Eimer, 1877, bien qu'il -ait reconnu que, sur les cellules vibratiles ordinaires, les racines ciliaires ne se distinguent en rien des trabécules de la trame cytoplasmique, observa dans les cellules flagellées de Cyanea et d’Aurelia qu'elles se continuent avec une fibre nerveuse; il fut donc le premier à défendre implicitement l’idée de la nature ner-

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veuse des racines. Apathy, 1887-88, 1897, que nous savons s'être fait une opinion très particulière de la disposition de l'appareil cilié, représente entre autres les cils et les racines ciliaires en dis- cordance ; à côté du prolongement que le cil envoie dans l'épaisseur du plateau, se trouve un fin granule sombre, duquel part une fibrille aboutissant à un second granule; de ce dernier se détache enfin la racine ciliaire. Ces granules, le filament qui les réunit et la racine ciliaire seraient la terminaison de fibrilles nerveuses pri- milives, caractérisées par leur coloration intensive dans la méthode alors employée par Apathy. Metalnikow, 1900, a retrouvé aussi

l'alternance des cils avec les racines ciliaires et avec les granules

sur lesquels elles se terminent; il a vu ces racines s'étendre jus- qu'à la base de la cellule, et a cru même les trouver en connexion avec les nerfs afférents; aussi se rallie-t-il à l'opinion d’Apathy. De la même facon, Boeke, 1913, observe que, dans les cellules sen- sorielles de l’infundibulum cérébral et du sac vasculaire de l'Am- phioxus et des Poissons osseux, la touffe ciliaire sensorielle que porte ces cellules se prolonge dans le corps cellulaire par des racines, qui se continuent elles-mêmes par une fibre nerveuse aboutissant au pied eïfilé de la cellule; aussi ces racines ne sont-elles pour lui que l'épanouissement terminal de la fibre nerveuse.

D. Les racines ciliaires, organes de soutien: Un rôle de sou- tien à été attribué aux racines ciliaires par une série d'auteurs : Nussbaum, 1877, Heidenhain, 1899, Eismond, 1900, Vignon, 1900, 1902, K. C. Schneider, 1902, Maier, 1903, Pütter, 1903, et aussi par Kupelwieser, 1906, par Erhard, 1910 et par Kolatev. Plusieurs d’entre eux ont rattaché les racines ciliaires au système des fibrilles de soutien ou tonofbrilles de Ja cellule, dont elles ne seraient que des fibres renforcées et régularisées (Heidenhain, Vignon, Schnei- der:).

C’est à tort qu'on a attribué à Nussbaum d’avoir soutenu l'un des premiers l'idée de la contractilité des racines ciliaires. En réalité il a fait de ces racines de simples prolongements élastiques des cils. Il avait en effet constaté que, pendant Le fonctionnement de l'appareil cilié, les cellules du rein des Sélaciens éprouvent des mouvements de contraction et d'expansion isochrones du battement

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des cils. Il en conclut que les cils, qui sont purement passifs, vibrent uniquement sous l'influence des mouvements de va-et-vient du plasma cellulaire. Les racines ciliaires ne seraient que des fila- ments élastiques le long desquels le protoplasma se déplacerait en formant des cordons satellites de ces filaments.

Heidenhain, qui a étudié non pas de vraies cellules vibratiles, mais les éléments épithéliaux de l'intestin de la Grenouille, y a trouvé un système (rès différencié de fibrilles, de la nature des tonofibrilles. [l admet que ces tonofibrilles ne sont autres que des racines ciliaires; car il les compare aux racines des cils des con- duits hépatiques et de l'intestin d’Helix. Les racines seraient donc des fibres destinées à servir de soutien, dans des cellules qui ont à supporter des pressions.

De même, pour Vignon, les racines ne constituent pas un organe moteur. Ge ne sont même pas des organes de soutien diffé- renciés, ce ne sont que des portions du réticulum cytoplasmique régularisées dans le sens vertical.

D'après Eismond, il faut voir dans les racines ciliaires des dis- positifs servant à fixer les cils, et comparables à l'appareil squelet- tique d’une nageoire impaire. La présence de ces racines ne doit pas être cependant considérée comme physiologiquement indis- pensable au mouvement de l'appareil vibratile; elle est seulement en rapport avec l’activité plus grande de cet appareil, et les racines peuvent manquer dans les celluies dont le mouvement vibratile est faible, être au contraire très développées les cils sont puis- sants, comme le sont les cirrhes saltatoires des Infusoires hypo- triches.

Maier s’est rallié à cette opinion, en se fondant sur l’observation des membranelles et des cirrhes chez les Infusoires ciliés, et sur la comparaison de ces formations avec les appareils vibratiles des «a cellules de coin » (£ckzellen) des branchies chez l'Anodonte. Dans ces dernières, chaque cil composant de l’appareil vibratile s’insère sur un corpuscule basal et se prolonge au delà de ce cor- puscule par une racine ciliaire; les racines d’une même rangée de cils convergent et se confondent en une fibrille basale. Cette der- nière ést l’homologue des lamelles basales du Stentor et d’autres

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Ciliés ainsi que des organes rudimentaires des cirrhes. Or il n'ya pas de doute que ces lamelles basales et ces organes radiculaires sont des organes de soutien. Par conséquent la même fonction doit être attribuée à la fibrille basale et aux fibres radiculaires des Métazoaires, qui leur sont homologues.

Pütter fait valoir, à l’appui du rôle de soutien attribuable aux racines ciliaires, que, d'après les observations de Hæcker, 1897, sur les larves de Polychètes, les cellules allongent d'autant plus leur corps cellulaire que les cils qu'elles portent battent plus éner- giquement, afin sans doute, dit Hæcker, de faire de la place à de longues racines.

L'opinion de Kupelwieser est très particulière. D’après cet auteur, les racines ont la fonction de « baguettes directrices ». Il à vu en effet les racines ciliaires s’enfoncer, réunies en une fibre princi- pale, jusqu'au pied de la cellule et se mettre en contact avec un faisceau de fibrilles nerveuses. Il n’a pu décider si les fibrilles nerveuses entourent la fibre radiculaire, si elles s’y insèrent et se prolongent par elle. Aussi admet-il que les racines ne continuent pas directement les fibrilles nerveuses, ne sont pas conductrices, mais sont simplement des tiges directrices, qui orientent les fibrilles nerveuses selon des voies déterminées qui les conduisent aux cils.

Erhard a institué sur le mouvement vibratile des expériences très précises dont il fait servir les résultats pour la signification des racines ciliaires. Il est parti d'observations faites par Goldsch-

midt, 1907, sur les rapports entre le fonctionnement et la forme du :

flagelle chez Mastigella vitrea; ce flagelle est long et mince, ou bien court et trapu; le second état s’observe chez les individus qui se meuvent le plus activement. Erhard a recherché si aussi le raccourcissement des cils avait pour rôle d'augmenter leur effet mécanique, c'est-à-dire si des cils plus courts battent, conformé- ment aux lois du pendule, avec plus de rapidité et développent par conséquent une plus grande force. C’est ce qui doit se produire quand la résistance à vaincre est augmentée, en placant les cellules ciliées dans un milieu plus épais tel que la solution de gomme de cerisier. De nombreuses mensurations de cils, pratiquées sur les cellules du typhlosolis de l’'Anodonte, sur les cellules du pharynx

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de la Grenouille, sur des Frontonia et des Stentor, qui avaient été placées dans la solution gommeuse, il résulte que les cils éprouvent dans cette condition un raccourcissement notable. En comparant les résultats obtenus avec des cellules à racines ciliaires puissantes (cellules étroites de l'intestin d’Anodonte), avec des cellules à racines peu développées (cellules larges de l'intestin d'Anodonte), avec des cellules dépourvues de racines (pharynx de Grenouilles), on s'aperçoit que dans les premières le raccourcissement des cils est beaucoup plus marqué, et qu'il est nul dans les secondes et dans les dernières. Il s'ensuit que les racines produisent ce raccourcissement. Par analogie avec ce qui se passe chez Mastigella, il est clair que l'allongement et le raccourcissement des cils sont produits iei aussi par-la projection et par le retrait des fibres radiculaires. Comme le filament axile du cil et la fibre radicu- laire qui le prolonge sont de nature élastique, et que c’est le plasma qui les entoure qui est contractile, il ne peut s'agir, dans le cas du fouet de Mastigella aussi bien que des cils, que d’une projection ou d’un retrait du filament élastique et pas de contrac- tions proprement dites. Les racines ciliaires ne sont donc pas: contractiles, mais élastiques.

À lappui de son opinion, EÉrhard ajoute la preuve tirée de la présence ou de l'absence des racines suivant les cas. Il prétend que les racines se trouvent de préférence dans les cellules particulière- ment exposées, et dans celles dont la surface est en contact avec des liquides de viscosité variable, et il donne toute une série de localités des cellules qui d'habitude ne contiennent pas de racines en peuvent présenter quand la condition de plus grande viscosité du milieu est réalisée.

IL fait la critique des diverses opinions émises sur le rôle physio- logique des racines en prenant chaque auteur à partie. Il cherche à réfuter la principale objection qu'on pourrait faire à sa théorie, en lui opposant le fait constaté par Heidenhain, 1899, du raccour- cissement des bâtonnets du plateau intestinal de la larve de Sala- mandre, cependant dépourvus de racines. L'absence ou le faible développement des racines dans des cellules dont les cils battent très énergiquement, leur présence au contraire dans des cellules

JOURN. DE L’ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. L. 13

190 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS.

dont les cils sont immobilisés ont fait douter qu’elles jouent un rôle important quelconque, particulièrement qu'elles fonctionnent comme organes contractiles ou de soutien. Les puissantes rames nataloires des Cténophores, qui produisent un travail mécanique énorme, puisqu'elles sont les seuls organes locomoteurs, ne pos- sèdent que des racines insignifiantes que Schneider, 1902, a découvertes. Les cils des branchies de Sabelle, d’après Rabl- Rückhardt, 1868, qui sont vraiment géants, sont dépourvus de racines. Dans un grand nombre de cellules ciliées, telles que celles de lœsophage de Triton, dont le mouvement est cependant très actif, l’existence des racines ciliaires est très problématique.

Il est donc probable que la présence des racines ciliaires est conditionnée par divers facteurs, qui nous échappent en partie, et qu'il est sans doute trop simpliste de leur reconnattre une fonction exclusive de contraction ou de soutien.

4 Signification physiologique des cils et des flagelles.

A. Les cils et les flagelles, passifs dans le mouvement. Deux opinions diamétralement opposées peuvent être soutenues et l'ont été sur la signification physiologique et sur la nature du mouve- ment des flagelles et des cils. Il n’y a en effet, comme le remarque Gurwitsch, 1904, que deux facons d'expliquer le mouvement vibratile. Les cils et les fouets étant en général des organites à symétrie radiaire régulière, on ne peut admettre que l’une ou l’autre des deux hypothèses suivantes. Ou bien ces appendices sont pure- ment passifs mus par une cause extérieure, agissant unilatérale- ment, qui est d’ailleurs tout à fait imaginaire, ou bien par un moteur propre siégeant dans la cellule elle-même. Ou bien ils sont actifs, et leur constitution doit rendre compte de leur activité.

La première opinion a été défendue catégoriquement par Peter, 1898, et les autres partisans de la fonction centromotrice du corpuscule basal, par Vignon, 1901, par exemple, ainsi que par Benda, 1901. Elle a été soutenue aussi, plus ou moins explicite- ment, par Claparède, 1875, Bonnet, 1877, Kraft, 1890, qui se sont représenté de facon variée la passivité du cil. Pour Peter, le

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 191

corpuscule basal est le centre moteur du cil, ainsi qu'il a été expliqué plus haut (p.177); il représente pour Vignon une sorte de centre réflexe intermédiaire entre le protoplasma cellulaire et le cil. D'après Benda, les cils se comportent passivement, parce qu’ils sont formés d’une substance simplement élastique et dépourvue de contractilité, et toute l’activité appartient aux racines ciliaires dont il admet, ainsi qu’on l’a vu (p. 185), la nature contractile ; les cils sont mus et ne se meuvent pas.

Claparède reconnait implicitement aux cils la passivité dans le mouvement vibratile, puisque dans les branchies d’Aricia fœtida il fait intervenir des muscles pour les mouvoir. Bonnet a vu, sur les branchies de Mytilus edulis, le protoplasma cellulaire changer de forme et s'employer ainsi aux battements des longues soies de Pépithélium. D'après Kraft, on observe sur des lambeaux épithé- liaux de la muqueuse pharyngienne de la Grenouille un mouve- ment de va-et-vient, de soulèvement et d’abaissement de tout l'épithélium, comparable à une onde musculaire de contraction.

Pütter, 1903, et Gurwitsch, 1904, ont rejeté les explications du mouvement vibratile, qui, déniant toute activité propre aux cils, placent en dehors d’eux et spécialement dans les corpusculés basaux et les racines ciliaires le primum movens de la vibration. Pour eux, la cause du mouvement réside dans les cils et les flagelles, et dans la structure propre de ces organes.

B. Les cils et Les flagelles, organes actifs de mouvement. Le mouvement, sans structure spéciale du cil et du flagelle. Ta plupart des auteurs ont reconnu aux cils et aux fouets une activité propre. Les observations de Fabre-Domergue, 1888, Verworn, 1890, Bütschli, 1892, 1902, Fischer, 1894, Kôülsch, 1902, Prowazek, 1904, Doflein, 1911, et d’autres ont établi que des fouets et des cils détachés de la cellule qui les porte peuvent continuer à battre. Ils renferment donc en eux-mêmes les causes de leur motilité.

De toutes les explications proposées, celle de Verworn, 1891 et 1901, est la plus simple, parce qu'elle ne fait intervenir aucune structure spéciale du cil ou du fouet pour expliquer le mouvement vibratile. D’après ses observations sur les rames nataloires des Cténophores, les choses se passeraient de la façon suivante. L'une

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des faces du cil représente la partie active, qui prend l'initiative du mouvement et dont la contraction forme la première phase du battement. L'autre face, distendue par la contraction de la première, n'entre en jeu que dans la seconde phase ou phase d'expansion, pour ramener, par son élasticité propre, le cil à la situation de repos.

Déja Ranvier, 1880, bien qu'il n'ait observé aucun détail de structure du cil, dit cependant que le raisonnement conduit à attribuer au bord des cils, qui s’'infléchit lors de l’incurvation, une constitution différente de celle du bord opposé.

20 Le mouvement, fonction d'une structure spéciale. a) Struc-

ture tubulaire. Deux structures différentes ont été invoquées, qui ont servi de base à deux conceptions différentes aussi de l’activité des cils et des flagelles. R |

Pour Schäfer, 1891, 1904, 1905, le cil est une expansion creuse de la cellule, recouverte par une mince membrane élastique; dans ce tube circule un hyaloplasma très fluide, qui est refoulé et aspiré rythmiquement par les variations de la tension du cyloplasme ; de le battement du cil. L'expansion ciliaire est tantôt droite, tantôt courbe; dans le second cas, on comprend très facilement l'inflexion du cil'pendant la vibration; elle se comprend aussi dans le premier cas, si l’on admet qu'un côté de la gaine du cil est moins extensible que l’autre. Si la ligne de moindre résistance est une spirale, on a les mouvements en tire-bouchon que présentent certains cils. L'auteur rend sa théorie saisissante par d'ingénieux modèles en toile mince caoutchoutée, disposés en tubes droits ou spiralés. Si l’on attache ces tubes élastiques sur des tubes de verre rigides plongés dans un liquide et qu'on adapte à la base de ces derniers une poire en caoutchouc, en pressant sur la poire, on réalise avec les tubes droits les mouvements des cils et avec les

tubes en spirale ceux des flagelles. On ne peut pas dire que dans cette théorie la constitution du cil suffise à l'explication de son mouve- ment et en soit la cause; mais elle en est une condition favorisante et produit en tout cas la forme du mouvement. La théorie de Schäfer est surtout fondée sur l'observation des tentacules d'Acinètes, qui

sont creux, et sur des constatations de Seligo, 1886, qui aurait

trouvé les fouets de divers Flagellés limités par une cuticule résis-

A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS DÉRIVÉS. 193

tante enfermant un axe plus mou. Williams, 1907, reconnait que cette théorie s'applique bien aux tentacules des Acinétiens, qui bien qu'homologues des cils sont creux et invaginables et dont l’axe est remplacé par un fluide ; admettant avec Schäfer que le cil soit creux comme le tentacwe des Suceurs, que la paroi du tube soit moins élastique d'un côté que de l’autre, et qu'un liquide soit poussé dans le tube avec force, on peut expliquer la courbure et le battement du cil. Mais il reproche avec raison à la théorie de Schäfer de ne pas expliquer que les flagelles des Protozoaires (et les cils) puis- sent battre, séparés de la cellule. Pütter, 1903, a fait observer d'autre part (et d’ailleurs Schäfer a reconnu lui-même) que cette théorie, qui s'applique bien aux tentacules des Acinètes, convient mal aux els ; car la structure de ces organes est inverse ; dans les tentacules axe est creux ou tout au moins rempli d’une substance plus fluide et l'écorce est résistante; au contraire dans les cils l'axe est solide et la couche corticale plus molle.

b) Structure axiale. Le plus grand nombre des théories dont nous avons à nous occuper sont fondées sur l'existence d’une autre structure, maintes fois et dûment constatée, très généralement répandue et à laquelle il faut par conséquent attacher une tres grande importance. Leydig, Engelmann, Ballowitz, Heidenhain, Bütschli, Fischer, Duboscq, Koltzoff, Pütter, Gurwitsch, Prowazek, Schuberg, Doflein, Erhard, Williams et d’autres encore ont admis qu'il y a des causes communes au mouvement des axopodes, des fouets, de la queue des spermatozoïdes et des cils et que ces çauses résident dans une structure essentiellement semblable de toutes ces formations. Il s’agit de la différenciation de ces orga- niles en deux parties, en un filament axile et en une zone cor- ticale.

Or c’est tantôt l’une, tantôt l’autre de ces deux parties constitu- tives qui a eu la prépondérance dans l'esprit des théoriciens du mouvement ciliaire et flagellaire. De deux catégories principales d'opinions.

Pour un premier groupe d'auteurs, le filament axial est actif el contractile ; la zone corticale est élastique et se comporte passi- vement.

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Cette manière de voir a été tout d’abord celle d'Engelmann, 1880. Elle se rattache à la grande conception de l’illustre physiologiste sur la constitution des organes contractiles en général. Pour lui, la contractilité est liée à la structure fibrillaire et à la biréfringence de la substance vivante. La structure fibrillaire et la biréfringence sont elles-mêmes la manifestation de la constitution intime et Mmélamicroscopique de la substance contractile par des particules alignées ou inotagmes. Les cils et les flagelles et même les pseudo- podes, qui sont des organes contractiles, offrent une structure fibrillaire, jouissent de la biréfringence et sont composés d’ino- tagmes.

Dans les pseudopodes de beaucoup d'Héliozoaires et de certains Radiolaires il y a un filament axial ou axopode qui est l’élément contractile. Il en est de même dans les flagelles et dans les cils.

Ballowitz, 1889, 1897, etc., dans une série de travaux (voir chap. 11) a étendu cette notion aux spermatozoïdes animaux en montrant que dans l'organe moteur, dans la queue du sperma- tozoïde, il existe toujours un filament contractile spécifique, tantôt axial, tantôt marginal, que caractérise sa constitution fibrillaire, sa facile décomposition en fibrilles distinctes. Ballowitz.' 1897, s’est notamment élevé contre l'opinion de Niessing, 1896, qui, dans le spermatozoïde des Mammifères, prétend que la fibrille axile du Mittelstück est élastique et que c’est la gaine spirale qui est con- tractile.

Heidenhain, 1899, a accepté cette conception, qu'il a généralisée à la facon d'Engelmann et qu’il a transportée récemment (1911), ainsi qu'on l’a vu, dans le domaine de l'hypothèse et sur le terrain de la structure métamicroscopique. Mais Gurwitsch, 1904, s’est élevé contre l'assimilation des cils à des fibrilles musculaires et a considéré comme inadmissible la théorie d'Engelmann.

Duboscq, 1907, après avoir exposé et discuté les diverses théories explicatives du mouvement cilio-flagellaire, les rejette et se rattache à la théorie d'Engelmann, dont ses observations sur les spermatozoïdes vermiformes de la Paludine lui permettent d'ap- précier l’exactitude. En plaçant ces spermatozoïdes dans une solution hypotonique formée de sel marin, il a observé que les

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spermies se gonflent et deviennent sphéroïdes. On voit alors le filament axial, qu'on sait parcourir toute l’étendue du sperma- tozoide, de la tête à la base des flagelles, se mouvoir à l'intérieur du cytoplasme « comme ferait un vermicule parasite qui cherche- rait à sortir de la cellule-hôte ». Le mouvement est produit par des ondes de contraction, qui partent du voisinage du noyau, aug- mentent puis diminuent d'intensité et arrivent affaiblies aux corpus- cules distaux situés à la base des flagelles. On ne suit pas ces ondes dans les flagelles externes, qui cependant se mettent à battre au moment de leur arrivée. De cette observation, Duboscq conclut à la contractilité du filament axile. Erhard, 1910, qui a répété l’expé- rience de Duboscq, a attaqué sa conclusion. Il explique le résultat en admettant que la transformation sphérique de la cellule à infléchi le filament axial qui est élastique, et que la contraction du protoplasma produite par la plasmolyse a déterminé le mouvement serpentiforme du filament.

À ce premier groupe d'opinions, d’après lesquelles l'organe de mouvement est constitué par une tige axile contractile et par une écorce protoplasmique inerte, on peut rattacher les observations que Champy, 1913, a faites tout récemment sur un organe qui, il est vrai, n’est pas mobile, sur la tête du spermatozoïde des Batra- ciens. [l y a montré, chez toutes les espèces étudiées, la présence d'une baguette céphalique axile, tendue entre lacrosome et le flagelle caudal.

Cette baguette n’est apparente le plus souvent que pendant la spermiogenèse et cesse d'être perceptible dans la spermie adulte. C'est à elle qu'il convient d'attribuer la torsion de la téte du sper- matozoïde, qui s’observe chez toutes les espèces alors même que dans le spermatozoïde adulte elle cesse d’être apparente. Elle se comporte à la facon d’une tigelle plus résistante dont l'allongement produit la torsion, suivie de celle de la tête et du protoplasma qui l'entoure. La substance nucléaire de la tête et le protoplasma qui l'enveloppe se conduisent donc comme une matiére plus molle. Dans les spermatides altérées au cours de leur évolution et dégénéres- centes, la torsion de la tête est exagérée sans doute par diminulion de la compacité et par suite de la résistance du noyau et de l'écorce

196 A. PRENANT. LES APPAREILS CILIÉS ET LEURS : DÉRIVÉS.

protoplasmique, à l'intérieur desquels le bâtonnet axial s’allonge alors en se tordant en une hélice à pas serrés.

Un second groupe d'opinions accorde au contraire l’activité à la zone corticale plus molle et plus fluide, qui serait seule contrac- tile; le filament axile, plus consistant, de nature élastique, jouerait le rôle de soutien et serait l’'antagoniste de la zone corticale.

Cette manière de voir a été celle de Leydig, 1885, pour lequel la fibre axiale est rigide, élastique, le cytoplasme enveloppant est seul contraclile ; les phénomènes de contraction des cils et des flagelles sont dus aux variations de la tension superficielle. Elle a été sou- tenue avec quelques variantes par Bütschli, 1892, 1902, Ray Lankester, 1897, Plenge, 1899, Pütter, 1903, Gurwitsch, 1904, Prowazek, 1904, Hartmann, 1905, Schuberg, 1905, Koltzoff, 1906, Awerinzew, 1907, Goldschmidt, 1907, Williams, 1907, Doflein, 1909, Erhard, 1910. Ils ont reconnu dans la généralité des organes de la cellule affectés à la motilité (axopodes, fouets, queues des spermatozoïdes, tentacules d’Acinètes, cils) une même structure fondamentale, un soutien élastique et une substance contractile plus molle. |

Pütter et Gurwitsch ont en effet posé en principe que le mouve- ment des cils doit s'expliquer sans faire appel à aucune structure particulière de ces organites et en invoquant seulement une structure générale. Autrement, il faudrait supposer que le moindre changement apporté dans ce mouvement doit reposer sur un chan- sement de structure et admettre pour les modes si variés du mou- vement vibratile des dispositions structurales tout aussi chan- geantes (Gurwitsch). En second lieu, d’après Gurwitsch, l'extrême fréquence du battement oblige d’avoir recours à une cause agissant de facon continue et non périodique. La structure axiale, la pré- sence d'un axe élastique et d’une écorce contractile, rendent compte de la fréquence des battements; car le temps et le nombre des oscillations d’un corps élastique sont fonction de la grandeur et de la forme de ce corps.

Bütschli, Prowazek, Gurwitsch ont fait observer que la dispo-

sition de l'enveloppe plasmatique plus molle et par conséquent l’orientalion des mouvements de contraction qui peuvent sy

ve

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accomplir pouvaient rendre compte de la direction et de la forme du mouvement vibratile. Si cette enveloppe est symétriquement disposée et si la contraction protoplasmique s'y fait en direction rectiligne, le mouvement s'effectuera dans un seul plan et sera pendulaire; la disposition spiralée de l'enveloppe explique au contraire le mouvement hélicoïdal des fouels.

Pütter a fait remarquer que la situa- lion de choix pour la substance con- traclile était la périphérie de l'organe ; aussi pour lui la baguette axiale des cils et le filament axile de la queue des sper- matozoïdes sont-ils des fibres de soutien et non des fibrilles contractiles. La plu- part des auteurs précités ont expliqué le mouvement des flagelles et des cils

par des changements de tension super-

ficielle produits dans la couche plasma- tique de l'écorce, autrement dit par a ÿ

des contractions de l'écorce fluide Iut- Fig. 85. Schéma du mouvement

c ; S vibratlile, par courants proto-

tant contre la résistance de l’axe élas- plasmiques se produisant dans

la couche superficielle. a, mou-

tique. vement pendulaire; b, mouve- ment spiral, Dans l’axe du cil,

Daprésiles vues. de Bütschiiet de Gur- voit la tige-de ‘soutien. Les witsch, 1904, étendues par Hartmann et D Prowazek, 1907, aux Flagellates, on peut, partant de la structure axiale des fouets et des cils, ramener leur mou- vement à un mouvement amiboïde qui serait à des changements de tension superficielle dans la couche protoplasmique da fouet et du cil. Il en résulterait des courants protoplasmiques dans la couche corlicale du cil et du fouet (fig. 85). Gette couche est seule active; le filament élastique axile en est l’antagonisie et maintient dans de certaines limites le mouvement désordonné de la couche superficielle. Quant au blépharoplaste, il aurait pour rôle, ainsi que le suggère la présence fréquente d'une vacuole près de lui, de déter- miner par l’échange de substances qui s'y passe les changements de tension superficielle qui affectent la couche plasmique du fouet.

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L’explication du mouvement vibratile, développée par Prenant, Bouin et Maillard, 1904, ressemble aux précédentes en ce qu’elle rapproche ce mouvement du mouvement amiboïde et qu'eileexplique l'un et l’autre par des changements survenus dans la tension superticielle du protoplasma, déterminés eux-mêmes par des changements du liquide ambiant. Mais elle en diffère en ce qu'elle ne tient aucun compte de la structure interne des flagelles et des cils, que l’on pourrait considérer comme passifs dans le mouve- ment. Si le liquide baignant les deux faces du flagellum, est-il expliqué (p. 250), n’a pas la même composition, la tension superfi- cielle sera plus forte d’un côté du flagellum que de l’autre, et l'organe s’incurvera, tournant sa concavité du côté des plus petites tensions. Un instant après, par suite des échanges matériels de la cellule, la différence des tensions peut changer de sens, et le flagellum va s’incurver de l’autre côté. L’alternance des battements d'un même organe vibratile, le métachronisme des cils d'une même cellule s'expliquent par la périodicité des échanges et par suite des modifications superficielles.

IL est nécessaire de passer en revue les principales dispositions structurales observées, qui permettent le mécanisme fonctionnel en question.

Il faut d’abord remarquer que, d’après Williams, 1907, l'axe des cils n’est pas toujours élastique et ferme, qu'il peut être liquide et qu'il n’est solide que dans les cils les plus différenciés. Pour les cils des Infusoires, Schuberg a vu que chez les Paramæcium, Frontonia, Stentor, Cyclidium, ils se composent de deux parties, l'une proxi- male, l’autre distale; la première est formée d'une baguette axiale et d’une gaine protoplasmique ; la seconde est un Ændstück, réduite par conséquent à la partie librement saillante et nue de la baguette axiale. On à vu déjà le schéma qu'a donné Erhard de la constitulion de l’appareil cilié. Chaque organite de cet appareil se compose, d’après lui, d’un axe élastique et rigide, qui forme la racine ciliaire, le corpuscule basal et qui se prolonge dans le cil proprement dit; en second lieu, d’une substance plasmique, de laquelle font partie l'enveloppe du cil, le plateau cellulaire, et qui seule est contraclile.

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Quant aux fouets, ils sont aussi composés d’une tige élastique axiale et d'une écorce plus molle; dans celle-ci peuvent se diffé- rencier en nombre variable, chez les Trypanosomes par exemple, des fibrilles contractiles ou myonèmes {voir chap. n). Les Spiro- chètes eux-mêmes paraissent être des organismes réduits au fouet, comprenant une baguette axile et une écorce plasmique; la partie saillante et hbre de la baguette axile constitue le fouet proprement dit du Spirochète (Doflein) (voir chap. n).

Koltzotf, 1909, a publié sur la structure des spermies de très importantes recherches, dont le résultat essentiel est la présence chez toutes les espèces étudiées d’un squelette, céphalique et caudal, du spermatozoïde (voir chap. n).

Le fonctionnement de tous les appareils de mouvement est expliqué en général par Doflein, 1909, de la facon suivante. Ce qu'il y a, dit-il, de commun à toutes les formes de mouvement aussi bien amiboïde que flagellaire ou ciliaire, c’est la lutte du proto- plasma actif et contractile contre une formation solide et élastique, qui tend à revenir à l’état de repos quand elle en a été écartée. Ces organites solides et élastiques sont d’autant plus développés que le corps est plus mou; ils peuvent manquer quand les enveloppes du corps cellulaire sont assez solides pour que les organelles mobiles y trouvent leur soutien. C'est ainsi que Doflein cite l'exemple de Mastigamæba vitrea, dont le fouet non seulement est ancré dans le noyau, mais recoit de la part de nombreuses fibrilles radiculaires un solide appui. Cependant chez cette espèce le noyau avec l’appa- reil flagellaire qui lui est attaché se déplace incessamment dans le plasma amiboïde de l'animal.

Pärmi les auteurs qui ont défendu celte théorie, les uns tout à fait exclusifs, tel Erhard, ont réduit le mécanisme des mouvements à l’antagonisme du soutien élastique et du plasma contractile.

D’autres, comme Doflein, moins exclusivement, n'ont pas rejeté le rôle possible du noyau, du blépharoplaste et des corpuscules basaux comme réservoir d'énergie pour le mouvement.

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La membrane basale des bronches chez l’embryon et le fœtus de l’Homme

(Développement et Structure)

Par le D' Michel de KERVILY

Préparateur d'histologie à la Faculté de médecine de Paris. Chef de laborat. adj. à la Clinique d'Obstétrique et de Gynécologie Tarnier.

(Travail du laboratoire d’histologie de la Faculté de médecine de Paris.)

(Suite el fin 1.)

IT. INTRODUCTION.

- Dans un travail précédent? j'ai observé sur mes préparations de fœtus humain du quatrième mois et plus âgés que les cellules épi- théliales de certaines bronches reposent sur des fibres élastiques (p. 36). J'ai représenté ce fait (fig. 32) pour montrer que l’on peut trouver une continuité entre les fibres élastiques qui traversent les nodules cartilagineux des bronches et les fibres élastiqnes sous- épithéliales.

Pour déterminer l'origine de ces fibres élastiques qui entrent dans la constitution de la membrane basale, leur date d'apparition et leur rapport avec les éléments voisins, j’ai examiné, dans la col- lection que j'ai rassemblée au laboratoire de la Clinique Obstétri- cale Tarnier, des préparations de la série d’embryons et de fœtus

1. Voir le numéro de janvier-février 1914.

2. Michel de Kervily, Les fibres élastiques du cartilage des bronches chez le fœtus humain. Journal de l’Anat. et de la Physiol., Paris, 1910, p. 1. Sur les variétés de structure du cartilage élastique des bronches chez l'Homme, C. R. Soc. de Biologie, 20 juin 1908.

JOURN. DE L'ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. L. 4

206 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

humains et J'ai suivi le développement progressif chez les sujets de plus en plus grands. ;

Un embryon ayant 0 em. 08 dans sa plus grande longueur et tout à fait frais ne présente pas un degré suffisant de développement pour être ulile dans cette étude. Plusieurs embryons de taille inter- médiaire jusqu'à 0 em., 8 sont soil lrop petits, soil monstrueux, soit plus ou moins macérés. Mais à partir de ce stade un grand nombre de sujets sont parfaitement frais.

Mon matériel est constitué en somme de 20 embryons humains

ayant moins de 6 cm. du vertex au coceyx ; 22 fœtus ayant de 6 à 20 cm. du vertex au coccyx et un grand nombre de fœtus plus développés.

Les colorations principales que j'ai utilisées pour mes prépara- tions sont :

Fuchsine-résorcine, perchlorure de fer (Weigert) ;

Hématoxyline, fuchsine picriquée (Van Gieson) ;

Hématoxyline, éosine, vert lumière (Prenant);

Hématoxyline, fuchsine, bleu d’aniline (Mallory, méthode modifiée par Masson),

Certains détails sont mieux visibles lorsque la préparation est colorée soit par le Weigert seul, soit par le Weigert Gies on sans hématoxyline, soit par le Weigert puis le Masson sans héma- toxyline.

Le développement du poumon chez un embryon de 0 cm. 8 et 4 cm. est à l'un des stades de ce que l’on a appelé la période glan- dulaire. L'arbre respiratoire est en effet constitué de tubes ramifiés se terminant en cul-de-sac. Ces tubes se distribuent dans un tissu mésodermique abondant et bien vascularise.

Les tubes bronchiques paraissent ronds en coupe transversale et ont environ 130 uw de diamètre mesuré à partir de la base des cellules épithéliales?, avec une lumière large de 66 pu.

1. Masson, Comptes rendus de la Soc. anatomique, 1912. Coloration par l'hémato- xyline au fer, puis fuschine acide à 1 p. 1000 dans eau dist., puis ac. phosphomolyb- dique à 1 p. 100 dans eau dist., puis ac. phosphomolybdique et bleu d’aniline à 1 p.100 dans eau dist., puis alcool à 90°, etc.

2, Tous les diamètres des bronches indiqués plus loin sont aussi mesurés de la base des cellules épithéliales.

CHEZ L’EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME. 207

La couche épithéliale qui revêt les tubes est formée de cellules hautes et prismatiques ayant 21 & de haut et 5 à 7 y de largeur. Les parois latérales des cellules sont presque rectilignes, quelquefois un peu déprimées par les noyaux. Le pied de la cellule forme une saillie arrondie, et la ligne qui le limite présente sur la coupe la forme d’un arc à petit centre de courbure, de sorte que la couche épithéliale de la bronche se présente limitée par une ligne sinueuse formée par ces petits arcs mis bout à bout.

Le noyau occupe en général le tiers moyen de la hauteur de la cellule ; il a une forme irrégulièrement ovalaire, allongé suivant le grand axe de la cellule; souvent ses extrémités sont aplaties et il prend alors la forme d’un barillet. Il occupe souvent presque toute la largeur de la cellule; il a une longueur de 8 w et une largeur de 6 LL.

La cellule épithéliale des bronches se présente sur les prépara- tions entourée d’une ligne limitante très nette que l’on peut appeler membrane cellulaire. Cette membrane est un peu plus épaisse à la base de la cellule que latéralement, mais ici et les réactifs colo- rants montrent qu’elle est de même nature.

Me Gill!, qui a étudié de petits embryons de porc (4 à 8 mm.), dit que dans le canal alimentaire et dans le tractus respiratoire on voit partout bien distinctement une membrane basale entre l’endo- derme et le mésenchyme; aux plus jeunes stades de développe- ment, cette membrane est formée par une condensation protoplas- mique du bord extérieur des cellules épithéliales, puis elle apparaît bientôt renforcée par places par le réticulum protoplasmique du mésenchyme qui l'entoure.

De cette facon, la membrane basale aurait une origine épithé- liale, puis elle deviendrait bientôt de nature épithéliale et mésen- chymateuse.

Sur les figures Mc Gill représente ce stade (PI. VIL fig. 1, 2 et 3 b) la ligne qui borde les cellules extérieurement et appelée membrane basale, ne se distingue en rien de celle qui sépare laté-

4. Caroline Me Gill, The histogenesis of smooth muscle in the alimentary canal and respiratory tract of the Pig. Internal. Monatsschrift f. Anat. und Physiol., Bd. XXIV, 1908, p. 235.

208 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

ralement les cellules épithéliales les unes des autres, et en est net- tement la continuation. À mon avis, il n’est pas justifié de donner le nom de membrane basale à cette ligne qui n’est qu’une simple membrane cellulaire épithéliale.

IIT. CELLULES SOUS-ÉPITHÉLIALES.

Pendant les premiers stades de développement du poumon, le tissu de soutien, au milieu duquel se trouvent les tubes épithéliaux bronchiques, reste très abondant. Aïnsi chez un embryon de 1 cm. on trouve souvent un tube séparé du tube voisin par une distance de plus de 45 w; chez un embryon ayant 3 cm. 5 du vertex au coccyx, cette distance dépasse quelquefois 100 x.

Les cellules du mésenchyme, quelquefois même déjà à une grande distance du tube épithélial, sont ordonnées autour de la bronche; elles ont un noyau allongé, ainsi que leur protoplasme, parallèle- ment à la surface de la bronche. Elles prennent ainsi une disposi- tion concentrique, de sorte qu’on voit une couche circulaire autour de la bronche lorsque cette dernière est vue en coupe transversale.

Les cellules mésenchymateuses qui se trouvent les plus voisines de l’épithélium, et que nous appellerons plus simplement les cel- lules sous-épithéliales, s'appliquent contre le pied des cellules épi- théliales. Lorsque le tube bronchique est coupé en travers, les cel- lules sous-épithéliales se trouvent le plus souvent coupées en long (Ho).

Dans le poumon des embryons ayant 1, 2, 3 et 4 cm. de longueur du vertex au coccyx, on voit facilement ces cellules à différents stades de développement; on trouve souvent des stades jeunes auprès du cul-de-sac ampullaire terminal.

Quelques-unes de ces cellules sous-épithéliales ont un noyau rond, mais le plus souvent il est ovalaire; quelquefois il est allongé en fuseau à extrémités mousses. Quelquefois deux noyaux sont accolés et on trouve parfois des figures de caryokinèse comme dans les cellules mésodermiques plus éloignées de l'épithélium (fig. 2).

OR

CHEZ L'EMBRYON ET LE FOTUS DE L'HOMME. 209

Les noyaux de cellules voisines peuvent donc être très rapprochés l’un de l’autre dans un protoplasma commun. Puis les cellules s'allongent et les noyaux deviennent éloignés l’un de l’autre de toute la longueur des deux prolongements protoplasmiques anas- tomosés, qui peuvent atteindre chacun 10 ou 45 w. Get allonge- ment se fait parallèlement à la surface de la couche épithéliale. Les cellules sous-épithéliales, ayant alors un noyau de 9 » de long sur 3 uw de large, s'appliquent contre la ligne sinueuse formée par la membrane cellulaire du pied des cellules épithéliales, et s'y appliquent souvent si étroitement que le noyau sous-épithélial prend une forme en croissant à extrémités un peu arrondies, la surface concave du noyau épousant la convexité de la membrane cellulaire épithéliale.

Certaines cellules sous-épithéliales apparaissent sur les prépara- tions avec un prolongement simple à chaque extrémité du noyau; ce prolongement allant s’anastomoser avec un prolongement sem- blable venant d’une cellule sous-épithéliale voisine. D'autres cellules ont de chaque côté opposé longitudinal un prolongement bifide. Tandis que l’un forme un revêtement protoplasmique sur la membrane cellulaire de l'épithélium, l’autre va s’anastomoser avec l’un des prolongements protoplasmiques d’une cellule sous- épithéliale bifide voisine, ou parfois avec un prolongement proto- plasmique émanant d'une cellule mésenchymateuse plus éloignée de l’épithélium (fig. 3, 4, 5).

Chaque cellule sous-épithéliale entre toujours en contact avec plusieurs cellules épithéliales.

Je n’ai jamais constaté, comme on pouvait du reste s’y attendre, de rapport génétique entre ces cellules sous-épithéliales et Les cel- lules épithéliales des bronches, et, par conséquent, tout ce qui sera formé par les cellules sous-épithéliales sera d’origine mésenchyma- teuse.

IV. FORMATION DE LA LAME COLLAGÈNE DE LA MEMBRANE BASALE.

Sur les préparations d’un embryon de 4 em. du vertex au coccyx (embryon provenant d'un avortement provoqué quarante-six jours

210 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

après le rapport sexuel, et fixé à l’état frais, très vraisemblablement vivant, dans le bichlorure de mercure), les réactifs colorants du collagène (bleu d’aniline, fuchsine de Van Gieson) montrent qu'il existe une bande mince de collagène immédiatement sous l’épithé- lium d'un grand nombre de tubes bronchiques intra-pulmonaires. On peut considérer l'apparition de ce collagène sous-épithélial comme étant le premier stade de la différenciation de la membrane : basale.

Dans ies régions du tube bronchique il n’y a pas de membrane collagène, la base des cellules épithéliales repose directement sur le protoplasme des cellules mésenchymateuses sous-épithéliales.

Dans les régions intermédiaires, la ligne sous-épithéliale de collagène se présente avec des interruptions (fig. 7). C'est surtout au début de-la dilatation ampullaire que l’on peut voir ces petites portions discontinues de membrane basale collagène, et ces portions se trouvent toujours en regard des noyaux des cellules sous-épithé- liales sans aucun rapport d'ordination avec les cellules épithéliales des bronches. Dans ces régions, lorsque la cellule sous-épithéliale possède un noyau suffisamment éloigné de l’épithélium (2 à 4), on peut voir que le collagène se trouve fortement coloré dans cette couche de protoplasme de la cellule mésenchymateuse qui s'applique contre la membrane cellulaire épithéliale, tandis que la teinte caractéristique s’atténue à mesure qu’on examine le protoplasme de Ja cellule mésenchymateuse en s’éloignant de l’épithélium (fig. 9). Lorsque le noyau de la cellule sous-épithéliale se trouve tout près de la base des cellules épithéliales, la lame collagène apparaît comme un ectoplasme différencié de la cellule sous-épithé- liale (fig. 8).

Il n'y a pas trace de collagène dans le protoplasme de cellules épithéliales même tout près de la base de ces cellules, et les cellules épithéliales ne présentent au voisinage de l'apparition de collagène aucun aspect fonctionnel particulier.

Chez l'embryon de O0 cm. 8 on voit aussi ce que je viens de décrire chez l'embryon de 1 cm. Il faut noter cependant que chez l'embryon de 0 cm. 8 on ne voit de collagène dans le poumon que dans la membrane basale si l’on excepte la paroi des gros vaisseaux.

CHEZ L’EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME. 241

Chez l'embryon de 1 em. on voit de légères traces de collagène dans le mésenchyme sous l’épithélium de la plèvre.

Chez des embryons d’un stade de développement plus avancé (2 cm. 6 du vertex au coccyx et 3 cm. 1 de longueur totale) il existe toujours une membrane collagène très nette autour des tubes bron- chiques; au niveau des dilatations ampullaires elle ne se trouve qu'à leur partie iniliale. On voit aussi apparaître du collagène dans les prolongements des cellules du mésenchyme et dans les prolon- sements de la face profonde des cellules épithéliales de la plèvre. Mais le collagène est bien mieux apparent, plus colorable et plus épais dans la membrane basale des bronches. Là, il est aussi plus solide, comme on peut s’en assurer chez les embryons présentant un certain degré de macération. Ainsi, chez un embryon un peu macéré et ayant 3 cm. 2 du vertex au coccyx on ne voit plus de collagène dans le mésenchyme pulmonaire, on n'en voit que des traces sous la plèvre, tandis que le collagène de la membrane basale des bronches est resté bien colorable.

; Or CI: 0 | ; are Chez l'embryon de Fee) provenant d’une opération pour gros-

sesse tubaire et mis vivant dans le liquide fixateur on voit non seu- lement une membrane basale collagène très nette, mais aussi une grande quantité de collagène dans le mésenchyme du poumon.

Nous voyons ainsi que la membrane basale se forme autour des bronches, avant qu'il y ait des fibres conjonctives; par conséquent, a ce stade de début, la membrane basale n’est pas constituée de fibres conjonctives accolées, mais est constituée par une membrane de nature collagène formée aux dépens d’une portion du proto- plasme de cellules mésenchymateuses sous-épithéliales.

Chez des embryons plus grands, ayant 5, 6, 7 em. et plus de long on observe facilement qu'environ dans la moitié distale de la dila- lation ampullaire les cellules épithéliales reposent sur une lame excessivement fine et qui ne présente pas les réactions du collagène. Arrivée à la moitié proximale de la dilatation, la basale acquiert progressivement les réactions du collagène et devient un peu plus épaisse (fig. 6).

212 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

V. FORMATION DES FIBRES ÉLASTIQUES DE LA MEMBRANE BASALE.

Lorsqu'on colore les préparations de poumon par un réactif de l'élastine (fuchsine de Weigert) on voit, même à un faible grossis- sement, qu'il existe chez l'embryon autour des bronches relativement grosses une teinte caractéristique qui se fixe sur une membrane mince sous l’épithélium.

Ce fait a été déjà noté par Linser, que j'ai cité plus haut, mais chez des embryons beaucoup plus grands. Du reste cet auteur n’a constaté chez ses embryons de la seconde moitié du troisième mois que la présence d’une membrane homogène, sans structure. Il est probable que les détails histologiques ont été altérés, soit par suite d’une fixation insuffisante, soit parce que les pièces de cet auteur ne présentaient pas un parfait état de fraicheur, comme Linser le dit lui-même.

En effet, chez des embryons de la septième à la dixième semaine, quelques-uns fixés vivants ou quelques minutes après la mort, j'ai observé à un grossissement fort que cette teinte, pâle il est vrai, se fixe plus fortement sur des fibrilles qui se trouvent dans le proto- plasme des cellules sous-épithéliales.

Chez l'embryon de 4 cm. ces fibrilles préélastiqnes ne se teintent que très faiblement par la fuchsine de Weigert et se trouvent dans un protoplasme déjà plus ou moins imprégné de collagène (fig. 9). Sur les coupes transversales des cellules sous-épithéliales on voit ces fibrilles coupées aussi transversalement. Elles appa- raissent au nombre de 3 à 7 environ par cellule, éloignées les unes des autres par une distance de 0 & 5 à 1 x. Elles sont dans le protoplasme quelquefois tout autour du noyau, mais plus souvent sur ses parties latérales et surtout dans la région qui regarde l’épi- thélium. Elles sont souvent appliquées contre la membrane cellu- lulaire épithéliale.

0

Chez l'embryon ayant _— les fibres élastiques sont très bien

colorables dans les gros vaisseaux du poumon. Partout ailleurs dans le poumon elles sont très peu colorables par la fuchsine de

CHEZ L'EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME. 213

Weigert. Autour des petites bronches on ne voit aucun élémerit ayant de l'affinité pour ce colorant. Autour des bronches un peu plus grosses, on voit, même à un grossissement faible, qu'il existe juste sous l’épithélium une mince zone teintée par le Weigert,. Autour des bronches encore plus grosses cette zone est un peu plus épaisse : elle est plus foncée auprès de l’épithélium et va en se dégradant à mesure qu'on s'éloigne de lépithélium. Autour d’une bronche ayant 130 & de diamètre cette zone teintée par le Weigert a environ 15 u.

À un grossissement fort on voit, comme chez l'embryon de 1 cm. que nous venons de citer, que cet aspect est à la présence de fibrilles préélastiques qui se colorent d'une facon d'autant plus intense qu'on les examine chez des embryons plus grands. Mais ici on observe ces fibrilles intra-protoplasmiques non seulement dans les cellules sous-épithéliales, mais aussi dans les cellules mésen- chymateuses qui se trouvent dans les couches sous-jacentes de la paroi d’une grosse branche. Il y a ainsi formation d’une deuxième, puis troisième, etc., couche élastique. La différenciation commence toujours dans les cellules sous-épithéliales, et dans un grand nombre de bronches de petit diamètre, elle ne s’est faite que là. Lorsque la différenciation s'étend aux deux ou trois couches de cellules mésen- chymateuses sous-jacentes, c’est cependant dans les cellules sous- épithéliales que les fibrilles préélastiques sont encore le plus colo- rables.

Sous l'influence de causes variées : action des réactifs, légère macération ou traumatisme d'une préparation encore fraiche, on observe quelquefois dans les préparations quelques dissociations accidentelles. On peut noter dans ces cas que la membrane basale des bronches chez l'embryon se détache très facilement de l’épi- thélium qu'elle supporte. On voit alors que la membrane cellulaire à la base des cellules épithéliales reste intacte, ce qui est en faveur de l’idée que les cellules épithéliales à l’état normal sont appliquées simplement contre la membrane basale et n’offrent avec elle que des rapports de contiguité.

D’autre part, lorsque la membrane se détache accidentellement du mésenchyme, ce sont les minces prolongements protoplasmiques

214 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

réunissant les cellules sous-épithéliales aux cellules mésenchyma- teuses sous-jacentes qui cèdent, de sorte que le plus souvent la membrane basale se détache alors en entraînant les cellules sous- épithéliales qui y restent intimement accolées par leur protoplasme et même par leur noyau. Dans le cas contraire, on voit des déchi- rures dans le protoplasme des cellules sous-épithéliales au niveau de la région qui doit être en rapport avec la membrane basale. b cm1 0 Cm:.26 la membrane basale s’est détachée de l’épithélium et s’est étalée sur une certaine étendue, j'ai pu voir avec une grande neltelé qu’elle se présente sous forme de lamelle collagène parcourue de fibrilles préélastiques fines et parallèles (fig. 12).

La fibrille a moins de 1 y d'épaisseur, l’espace entre deux fibrilles est un peu plus large que l'épaisseur d’une fibrille. Lorsque les fibrilles sont coupées en travers, elles présentent l'aspect de

Sur une de ces préparations provenant d’un embryon de

grains placés dans l’intérieur de la membrane collagène.

Les fibrilles qui auparavant n'étaient que très faiblement colo- rables par la fuchsine de Weigert dans la membrane basale, deviennent très bien colorables chez l'embryon de —— Les fibrilles qui sont alors vérilablement élastiques ne se trouvent cependant qu'’autour de quelques bronches, celles dont le diamètre atteint 89 p à 110 & par exemple. Là, par conséquent, la membrane basale est une membrane collagène contenant des fibrilles élas- tiques. Sur les coupes transversales ou légèrement obliques des tubes bronchiques on voit après coloration par le Weigert que les fibres élastiques sont placées comme une palissade sous les

cellules épithéliales (fig. 11).

6 cm. es Chez un fœtus plus grand, avant eu ES du troisième mois, on

voil après coloration par le Weigert qu'il existe autour de beaucoup de bronches des fibres élastiques nettement colorables, presque aussi nettement que dans la paroi des gros vaisseaux moyens intra- pulmonaires et des vaisseaux du hile. Ces fibres élastiques ne se trouvent pas cependant dans toutes les bronches et ne sont pas dans toutes les bronches colorables électivement avec la même intensité.

CHEZ L'EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME. 245

A ce stade, les fibres élastiques, sur une couche ou sur plusieurs, sont très nettement colorables par le Weigert, non seulement dans les gros tubes bronchiques, mais aussi dans la plupart des tubes assez pelits, c'est-à-dire dont la diamètre a une soixantaine de y. On peut noter, pour préciser, qu'il n’existe ordinairement pas encore de fibres élastiques dans les bronches ayant 90 w de dia- mètre et 15 w de lumière. Quelquefois, mais rarement, on voit cependant des fibres élastiques dans les bronches ayant 40 w de diamètre el 32 w de lumiere.

Les bronches ayant moins de 58 & de diamètre et 24 uw de lumière n'ont qu'une seule couche nettement colorable par le Weigert et très rarement deux dans certaines régions seulement.

Dans la paroi des bronches ayant 65 w de diamètre et 30 w de lumière il existe déjà des fibres élastiques faiblement colorables par le Weigert.

La couche élastique est déjà plus épaisse, très nettement colo- rable par le Weigert et très régulière dans la paroi d'une bronche ayant 115 u de diamètre et 42 de lumière.

En dehors de la couche élastique sous-épithéliale, on voit d’autres fibres élastiques plus faiblement colorées et qui semblent être des ramifications qui partent de la couche sous-épithéliale. Ces nou- velles fibres, formant les couches élastiques secondaires, sont plus irrégulièrement disposées que celles des cellules sous-épithéliales (fig. 13). Sur une coupe passant parallèlement au plan sur lequel repose la base des cellules épithéliales, on voit que les fibres élas- tiques forment un réseau à mailles très allongées et peu larges. Les fibres élastiques sont anastomosées comme les cellules mésenchy- mateuses elles se sont développées. On voit aussi la formation d’une deuxième, lroisième et quatrième couche élastique qui se dis- posent sous les cellules épithéliales des bronches extra-pulmonaires et sous celles des plus grosses bronches intra-pulmonaires.

À un stade plus avancé, les fibres élastiques des bronches sont

CINE PI ONT.

pas dans la paroi d’une bronche ayant 56 u de diamètre et 19 x de lumière. Dans la paroi d’une bronche sans nodule cartilagineux,

plus abondantes. Cependant, chez l'embryon de iln'yena

216 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

et ayant 128 & de diamètre et 77 w de lumière l'épaisseur de la couche élastique bien colorable par le Weigert atteint 5 & et un peu plus par endroits. Plus loin, on apercoit encore quelques fibrilles pré-élastiques, à peine teintées par le Weigert.

Nous voyons ainsi que dans un poumon humain, si l’on met à part la paroi de gros vaisseaux, la première apparition de fibres élastiques, comme la première apparition du collagène, se fait dans la membrane basale des tubes bronchiques. Les fibres élastiques apparaissent plus tardivement que le collagène, et, si chez l'embryon de 4 cm. on distingue déjà quelques fibrilles pré-élastiques, ce n’est

que chez un fætus de ir que les fibres deviennent véritable-

ment élastiques, c'est-à-dire nettement colorables par la fuchsine de Weigert.

VI. CELLULES ET FIBRILLES CONJONCTIVES REMPLAÇANT LA MEMBRANE BASALE.

La membrane basale ne garde pas toujours dans toutes les bronches du fœtus cette constitution que nous venons de décrire dans les Jeunes stades. ;

En effet, dans les bronches assez grosses des fœtus plus grands, la substance collagène de la membrane s’épaissit auprès de l’épi- thélium et les fibres élastiques se trouvent repoussées plus en dehors.

Puis on voit apparaître des fibrilles collagènes entre la couche élastique et l’épithélium. Cette disposition est bien nette par 9 cm. 2 1 cm. 180 & de diamètre et 120 y de lumière.

De cette façon, il n’y a plus de véritable membrane basale dans certaines bronches, car les cellules épithéliales reposent sur celte couche de fibrilles collagènes.

Parmi ces fibrilles on trouve souvent des cellules à noyaux très allongés. Ces cellules qui proviennent soit de la division des anciennes cellules sous-épithéliales, soit de cellules migratrices ne sont plus

exemple chez un fœtus de dans la paroi d’une bronche ayant

CHEZ L'EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME 247

disposées avec la régularité qu'on voit sous la membrane basale à des stades plus jeunes. Jamais la couche élastique sous-épithéliale n’a formé une paroi continue et infranchissable ; elle a toujours été constituée de fibrilles.

Lorsqu'on examine les fœtus plus âgés, on trouve que la couche sous-épithéliale présente dans sa structure plusieurs variétés qui ont un certain rapport avec le calibre de la bronche. Cependant ce rapport n’est pas tout à fait rigoureux.

Voici quelques observations à ce sujet :

11 cm.

Fœtus de 16 cm.5:

Les dilatations ampullaires et les petites

bronches (50 à 70 & de diamètre) n’ont pas de paroi élastique et l’épithélium repose sur des cellules fusiformes.

Les bronches plus grosses (15 et 110 x de diamètre) ont une membrane basale collagène-élastique.

Dans les bronches encore plus grosses (145 w de diamètre) la couche élastique est souvent éloignée des cellules épithéliales par une cellule constituée d’un noyau arrondi et d’un protoplasma très clair et peu abondant.

Dans la bronche extra-pulmonaire et dans les premières bronches qui proviennent de sa division, les cellules épithéliales ne reposent que par endroits sur des fibres élastiques, mais le plus souvent sur des éléments conjonctifs. La couche élastique est écartée souvent d’une dizaine de w de l’épithélium par des fibres conjonctives et des cellules conjonctives.

A1 cm. 4 16 cm.

20 & de lumière, tandis que le tube bronchique qui lui fait suite a 43 LU de diamètre et 45 w de lumière. Toutes les bronches attei-

gnant au moins 100 & de diamètre ont des fibres élastiques dans leur paroi.

Fœtus de . L’ampoule terminale a 60 & de diamètre et

Dans les bronches ayant un diamètre inférieur on trouve des variations. Remarquons d’abord que les fibres élastiques sont plus développées, et se développent aussi plus tôt au niveau de l’éperon qui sépare deux bronches provenant d’une division. Il n'y en à qu'à ce niveau qui soient nettement colorables par le Weigert dans une

D

(4 L éd T4 » + [a u 4 (RS on \ AL K a PA \ KP tir vor ji ! y (l Ü ni

218 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

bronche se bifurquant et ayant 50 » de diamètre et 95 de lumière. Cest la plus petite bronche l’on trouve une paroi élas- | tique sous-épithéliale. Il existe aussi des fibres élastiques sous-épi- théliales dans des bronches ayant 68, 76 vw, etc., de diamètre. Cependant il n’y a pas de fibres élastiques dans la paroi de certaines

bronches ayant 68, 72 u et même 94 y de diamètre.

[ci encore, comme chez les fœtus plus petits, on voit dans 166 | bronches assez grosses que les cellules épithéliales sont parfois séparées de la couche élastique par du collagène et des cellules conjonctives.

Dans la paroi des grosses bronches dont la muqueuse est plissée, dont l’épithélium est stratifié et qui ont des nodules cartilagineux on ne voit plus de couche élastique sous-épithéliale. Les fibres élastiques sont abondantes, mais assez loin de l'épithélium, elles se disposent surtout dans les saillies entre les renfoncements de la muqueuse. Par places cependant, on peut voir quelques fibres élas- tiques sous-épithéliales, mais elles forment une couche discontinue, : qui parfois se perd, sans délimitation nette, dans la couche élas- tique profonde du chorion.

La direction des fibres élastiques sous-épithéliales est variable : lantôt circulaire, tantôt longitudinale par rapport à la direction de la bronche. En général, dans les petites bronches, les fibres élastiques sont circulaires.

L'épaisseur de la couche élastique sous-épithéliale est variable. Dans la paroi de certaines bronches elle n’est constituée en certains endroits que par une ou deux couches de fibres. en d'autres endroits il y a une dizaine de fibres.

Cette couche élastique examinée sur des bronches coupées trans- versalement n’est pas toujours continue; elle peut manquer en certains points.

Il n’y à pas non plus de rapport direct entre le calibre de la bronche et l'épaisseur de la couche élastique.

Ainsi, en examinant la coupe transversale de deux bronches de second ordre, extra-pulmonaires du poumon gauche, on voit chez ce fœtus, que la couche élastique sous-épithéliale manque absolu- ment en certaines régions, et que les fibres élastiques les plus

T—

- CHEZ L’EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME. 219

proches ne se trouvent qu'à 8 à 15 y de la base des cellules épithé- liales; en d’autres régions au contraire, au même niveau de la coupe de la bronche, les fibres élastiques sont presque au contact de la base des cellules épithéliales et forment parfois une couche épaisse de 5 à 10 fibres et plus.

14 cm. ? MER Chez un fœtus de Sen none voit pas de fibres élastiques

sous l’épithélium des bronches ayant 39 et 42 y de diamètre. _ On voit très neltement les fibres élastiques dans la basale des bronches ayant un diamètre de 45, 50, 70, 120 et 190 v.

Par conséquent on voil des fibres élastiques dans la basale des bronches d’un plus petit diamètre que chez des fœtus plus jeunes.

Dans les grosses bronches ayant plus de 100 u les fibres élas- tiques sont par places séparées de l'épithélium par des cellules conjonciives.

Pour les fœtus plus grands, je me bornerai à noter quelques par- ticularités.

L Fœtus de . Le mésenchyme occupe une surface plus

réduite par rapport aux tubes bronchiques que chez les fœtus plus jeunes, à cause de la végétation plus abondante des tubes bron- chiques, et un grand nombre de ces derniers ont un épithélium qui repose sur des cellules fusiformes anastomosées et leurs prolonge- ments qui ne se colorent pas par le Weigert.

rs Les alvéoles apparaissent et le contour des 28cm. _. |

ramifications de l’arbre aérien devient sinueux. Ces alvéoles nou- vellement formées n’ont pas de fibres élastiques basales.

DEC 931 cm.

des bronches assez grosses, tandis qu'il n’en existe pas sous l'épi- thélium des alvéoles.

Nourrisson à terme. A la naissance, longueur : 50 cm., poids 3.160 gr. À vécu trente-quatre jours. Une bronche en coupe trans- versale ayant un diamètre de 2,300 mm. présente la structure sui- vante :

Fæœtus de

Fœtus de . 1 existe des fibres élastiques dans la basale

Epithélium stratifié ayant 60 w de hauteur;

220 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES

Couche conjonctive de 6 x d'épaisseur;

Couche de fibres élastiques, plus épaisse que la précédente, ayant 15 & environ; par places, elle est encore plus épaisse ;

Muscles lisses avec fibres élastiques et conjonctives :

Nodules cartilagineux, etc.

Dans une bronche plus petite, ayant 75 w de diamètre par exemple, on trouve la même disposition, mais les différentes couches sont moins épaisses, surtout la couche élastique.

VIT. FORMATION DE MYOFIBRILLES DANS LES CELLULES QUI ONT DÉJA

FORMÉ UNE LAME COLLAGÈNE ET DES FIBRILLES ÉLASTIQUES.

Certaines cellules sous-épithéliales ne se bornent pas à former de la substance collagène et des fibrilles élastiques : elles diffé- rencient ensuite une partie de leur protoplasme en myofibrilles et deviennent des cellules musculaires lisses (fig. 14 et 15).

Ces myofibrilles sont plus épaisses que les fibrilles élastiques. Elles se colorent fortement par l’hématoxyline ferrique. On les voit au nombre de 7 à 40 dans le protoplasme de la cellule sous-épithé- liale dont le noyau allongé se trouve entouré d’un faisceau de fibrilles presque parallèles, légèrement ondulées.

Toutes les cellules sous-épithéliales ne se transforment assuré- ment pas en cellules musculaires; on ne voit cette transformation qu’assez loin de l’ampoule terminale, dans la paroi de bronches qui sont assez importantes.

SCT

Co on ne voit les fibrilles

Chez un embryon humain de;

musculaires immédiatement sous : basale qu’autour des bronches

qui atteignent au moins 130 à 140 y de diamètre.

Nous retrouvons donc dans les cellules sous-épithéliales les phé- nomènes d'histogénèse des muscles lisses qui ont été décrits par Me Gill! chez des embryons de Porc. Cet auteur a observé que dans le protoplasma de certaines cellules on voit souvent à la fois

1. Caroline Mc Gill, The histogenesis of smooth muscle in the alimentary canal and

respiratory tract of the Pig. Internat. Monatsschrift für Anat. und LUE Bd. XXIV, 1908, p. 235.

bn | ns

CHEZ L'EMBRYON ET LE FOETUS DE L'HOMME. 221

se différencier côte à côte des myofibrilles et des fibres collagènes, et que des fibres élastiques apparaissent dans le protoplasma exté- rieur des cellules musculaires ou dans celui des cellules dun tissu connectif interstitiel.

Du reste, on admet aujourd'hui que les fibres musculaires lisses qui dérivent du mésoderme proviennent de cellules qui sont d’abord anastomosées, puis qui se transforment en fibres lisses. La partie périphérique du cytoplasma inutilisée à l'édification des myofibrilles serait l'origine de celte gangue collagène on élastique au sein de laquelle paraissent coulées les fibres-cellulest.

Dans la paroi des bronches du fœtus il est facile d'observer que souvent la fibre musculaire se trouve en contact immédiat de la membrane basale. Ce fait s'explique lorsqu'on a suivi tes différents stades de développement des cellules sous-épithéliales qui donnent naissance aux éléments de la membrane basale et à des myofibrilles.

Nous retrouvons donc en somme dans la formation de la mem- brane basale des bronches une application particulière de la loi qui préside à l'histogenèse des éléments collagènes, élastiques et même musculaires.

VIII. Conciusion.

1. La membrane basale des tubes bronchiques chez l'embryon bumain est formée par les cellules mésenchymateuses les plus voisines de l'épithélium (par les cellules sous-épithéliales) et on ne voit aucune participation des cellules épithéliales.

Chez un embryon de 0 cm. 8 l’épithélium des ramifications bron- chiques ne repose pas partout sur une véritable membrane basale différenciée. Dans les petites bronches et dans les dilatations ampullaires il repose directement sur le protoplasme des cellules sous-épithéliales qui peut se condenser sans présenter les réactions du collagène. Cet état persiste longtemps au niveau de la moitié distale de la dilatation terminale des tubes bronchiques et on le voit chez des fœtus ayant plus de 17 cm. de longueur totale. La membrane basale est alors protoplasmique.

1. A. Branca, Précis d'Histologie, édit., Paris, 1910, p. 139.

JOURN. DE L'ANAT. ET DE LA PHYSIOL. T. L. 15

tu)

La première différenciation d’une véritahle membrane basale est due à la formation d'une lame collagène qui se fait aux dépens de la partie du protoplasma des cellules sous-épithéliales qui est au contact cle la base des cellules épithéliales. On voit déjà cette lame collagène dans la paroi de certaines bronches d’un embryon de 0 em. 8. Il est vraisemblable qu'on peut la voir aussi chez des embryons plus petits. Ainsi, la membrane basale est collagène.

D CM-25 5-0 cm1

© à ———— | el br sale Fe Lens membrane basale

Chez les embryons de

collagène est parcourue par des fibrilles préélastiques très fines et.

parallèles. Ces fibrilles se sont formées dans les cellules sous- épithéliales, et elles deviennent véritablement élastiques chez l’em-

SiCM. : 7 cm. £

Dans les pe assez grosses des fœtus plus grands il n'y a plus de véritable membrane basale, car l’épithélium repose sur des

bryon de &———°. La membrane basale est alors collagène-élastique.

fibrilles conjonctives parmi lesquelles se trouvent quelques cellules conjonctives, et la couche élastique est alors repoussée en dehors.

2. La première apparition de la substanee collagène dans le - poumon humain (si l'on excepte la paroi des gros vaisseaux) se fait dans la membrane basale des bronches, et il n’y a de collagène que dans le mésenchyme pulmonaire chez un embryon de 0 cm. 8

Chez l'embryon de 1 cm. on voit apparaître de légères traces de collasène dans le mésenchyme sous l’épithélium de la plèvre. Ce n’est que chez des embryons plus grands qu'on voit du collagène en

d’autres régions du mésenchyme pulmonaire et le collagène n’est

bien développé dans tout le mésenchyme que chez l'embryon plus 2 em: 6 CUITE |

La première apparition de fibres élastiques dans le poumon humain (si l'on excepte la paroi des gros vaisseaux) se fait aussi dans la membrane basale des bronches, et il n’y en a que dans

5 cm. 6 CLS

On voit apparaitre les Fu préélastiques déjà chez l'embryon de 1 cm. dans le protoplasme des cellules sous-épithéliales des tubes bronchiques.

srand que

le poumon chez un embryon de =

22 M. DE KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES PRONOHES | #

- CHEZ L'EMBRYON ET LE FOŒTUS DE L'HOMME. 77.22%

Les cellules sous-épithéliales qui ont déjà formé une lame colla- gène et des fibrilles élastiques constituant la membrane basale, peuvent encore former des myofbrilles.

Les fibres élastiques présentent plusieurs modes de développe- ment; nous en avons observé trois.

Dans le cartilage des bronches elles se développent aux dépens d'élastoblastes chez le fœtus, et aux dépens de granulations élabo- rées par les cellules cartilagineuses pendant la vie extra-utérine. Dans la membrane basale des bronches du fœtus, les fibres élas- liques se développent aux dépens du protoplasma des cellules mésenchymateuses sous-épithéliales, chacune de ces cellules for-

mant un groupes de fibres élastiques. Juin 1913.

Explication des Figures.

: 3 cm. 5 : FiG. 1. Fœtus humain de on de Colorat. hématoxyline ferrique- éosine. Obj. 1/12, oc. 1. Zeiss. Vue d'ensemble d’un tube bron-

chique ayant pour diamètres 125 pr et 100 x. Les cellules mésenchyma- teuses sous-épithéliales s’allongent parallèlement à la surface de la bronche et s’appliquent contre la base des cellules épithéliales. Au pôle supérieur de la figure une cellule sous-épithéliale est en caryokinèse. Fi. 2. Même fœtus. Même colorat. Obj. 1/2, oc. 3. Zeiss. Bronche . de 100 & de diamètre et 27 1 de lumière. Caryokinèse des cellules . sous-épithéliales. Ainsi que sur plusieurs figures suivantes, la base seule des cellules épithéliales de la bronche est représentée. F1G. 3, et 5. Méme fœtus. Cellules sous-épithéliales présentant 2 variétés de prolongements protoplasmiques : les uns s’appliquent contre la base des cellules-épithéliales, les autres vont s’anastomoser avec les prolongements des cellules mésenchymateuses situées plus * loin de l’épithélium. GAS | 6Ccm, 9 de 40 à de diamètre et 25 1: de lumière, au rétrécissement auprès : d’une dilatation ampullaire. La cellule sous-épithéliale du côté de la

F1G. 6. Fœtus de Colorat. Van Gieson-Weigert. Bronche

dilatation ampullaire droite) présente des prolongements sans col- lagène. L'un de ces prolongements s’anastomose avec un prolonge- ment d’une autre cellule sous-épithéliale qui possède du collagène.

FiG. 7. Embryon de 1 cm. Colorat. Van Gieson. Partie initiale d’une dilatation ampullaire qui se trouve à gauche. Le collagène apparaît dans la membrane base au niveau des noyaux des cellules sous-épithé liales, coupées ici transversalement.

4 el CN PRO RER | pe " < k ESA, ss f 5 ? 224 M. DE-KERVILY. LA MEMBRANE BASALE DES BRONCHES. | à cm. 1 À É Fic. 8. Fœtus, de En de Colorat. Van Gieson-Weigert. Coupe

(ansearsale d'une bronche de 105 x de diamètre et 43 1 de lumière.

Le collagène de la membrane basale se présente sous forme d’une lame formée dans la partie du protoplasme des cellules sous-épithé- liales qui regarde l’épithélium. La cellule de droite est coupée obli-

. quement et l’on voit des fibres élastiques dans la partie de la lame

collagène qui appartient à cette cellule.

Fc. 9. Embryon de 1 cm. Coloration Van Gieson-Weigert. Bronche de 136 x de diamètre et 77 x de lumière. Substance collagène et fibres préélastiques (coupées transversalement) dans les cellules sous-épithéliales.

F1G. 10. Fœtus de PE sin.

CRE A Colorat. Weigert. Bronche de 70 x de

diamètre et 30 x de lumière. Fibres élastiques coupées en travers

dans les cellules sous-épithéliales au contact du noyau. Les groupes de fibres formées par chacunedes cellules sous-épithéliales sont séparés. 6 cm.

FiG. 41. Fœtus de 5——.. Colorat. Weigerl. Bronche ayant

8 cm. 6 65 H de diamètre et 25 1 de lumière. Fibres élastiques (coupées en travers), dans la membrane basale et DATE une palissade sous les cellules épithéliales.

Fic. 12. Fœtus de ee . Colorat. Van Gieson-Weigert. Membrane

basale vue sur une coupe dissociée. La lame collagène est parcourue par les fibrilles préélastiques fines et parallèles. Le noyau et le pro- toplasma non différencié d’une cellule sous-épithéliale sont restés adhé- rents à la membrane basale.

4 cm. 6 | FIG. 13. Fœtus de 6: Colorat. Weigert. Bronche ayant

110 x de diamètre et 60 x de lumière. Après la formation de la couche élastique de la membrane basale, il se forme une deuxième, troisième, etc., couche de fibres élastiques (ici coupées transversale-

ment) dans le mésenchyme plus éloigné de l’épithélium.

FiG. 14. Fœtus de ; 2 TS Rae Colorat. hématoxyline ferrique-éosine.

Formation de nn dans les cellules sous-épithéliales (coupe

transversale). FiG. 15. Méme fœtus. Même colorat. Formation de myofibrilles.

dans les cellules sous-épithéliales (coupes longitudinale et oblique).

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