TRES FREE a Et é ve US nm 11 } UE 1 l LOU QT À ItA Y { au 1 ", te | \* h 1 (] | » ) pi NPA Va L ALAN DAT | 1 1 | D On À PA À L OR A7 LT N A ( : L | 1% Ta) 9 l ! : \ 1e ? Ï } Mer) f ", h AC hi ù ê) 7 7 à | ML ARR " À 2 1 à ue | le f { : | N Te Le L à Lu ra PER A A7 “a : 1 | ATRATUE \ A : | } : | ANT CE a PRET [Te OT TRUE PARLE act À NAT OP rat | AL ETE | in A ; Ray 0. 18 L | | , à A | . » { | 1" IA ANT T 0 À Ù l l pi J Ÿ (AIR DNA ui, # : "à Û | À tre (À (l 1 LR | £{ LA! { f j \ : N * L + JOURNAL DE PHYSIQUE. JOUA N AL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, D'HISTOIRE NATURELLE EVBOJDNE; Sr AURITS, AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE: PAR J.-C. DELAMÉTHERIE. — JUILLET An 18r6. TOME LXXXIII. À PARIS, Chez Mme Ve COURCIER, Imprimeur - Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n°57. JOURNAL ME BE Y SO U FE; DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. JUILLET AN 1816. PHÉNOMÈNES DE RÉPULSION ET D’ATTRACTION SANS ÉLECTRICITÉ; Par J. P. DÉSSAIGNES. À Mere de frotter tous les jours, pendant cinq ans et à toutes les époques du jour, divers corps soit sur une étoffe de laine, soit dans le mercure, et de les présenter à chaque fois à une aiguille électrométrique très-sensible, m'a fait apercevoir des phénomènes de répulsion et d’attraction auxquels l'électricité ne paroît avoir aucune part, quoiqu’ils soient dépendans de ce même fluide en qui réside le pouvoir électrique. Je m’empresse de les faire connoître, persuadé qu’ils peuvent répandre un nou- veau jour sur la marche du fluide qui produit l'électricité. Premier Fait. Si, dans un temps où la tension du pouvoir électrique est L4 L A ® I modérée, l’on prend un bâton de cire à cacheter, gros comme 6. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMtIÉ un bâton de soufre ordinaire, dont l’une des ‘extrémités soit terminée par une surface nn peu convexe et bien polie, et que l’on touche par cette extrémité la surface du mercure avec dif- férens degrés de force, elle acquiert une électricité positive par un simple contact; par un choc modéré elle est inexcitable et sans électricité; par un choc plus fort elle devient négative. Ce hénomène est constant et peut se reproduire à volonté. Si lon réitère la même expérience dans un temps où la tension du pouvoir électrique est considérable, la cire se trouve bien encore inexcitable et sans électricité par un choc modéré comme ci- dessus ; mais alors elle est animée d’une force répulsive qui fait fuir constamment l’aiguille électrométrique, malgré qu’on la tienne dans la main, ou qu’on la mette en communication avec le réservoir commun. Cet état répulsif est plus où moins fort, suivant le degré de tension naturelle du pouvoir électrique. On peut en augmenter l'intensité en chauffant la cire avant que de la mettre en contact avec le mercure. Aussitôt qu’on a fait naître cette force, elle va toujours en s’affoiblissant, et elle disparoît entièrement au bout d’une ou deux minutes. Deuxième. Fait. Lorsque la tension du pouvoir électrique est bien développée, si l'on enfonce de 135 millimètres de profondeur une tige de verre grosse comme un bâton de soufre et de 216 millimètres de longueur, dans un vase plein de mercure’, et qu'après l'en avoir retirée on la présente à une aiguille électrométrique, celle-ci est plus ou moins fortement attirée par toute la portion de la iige qui-a été: plongée dans le mercure; mais elle est fortement repoussée par celle qui n’a pas été immergée et qui se trouve entre les doigts et la surface du mercure au moment de l'im- mersion: En effet si l’on promène à une petite distance de cette tige et sur toute sa longueur, un brin de fl de soie attaché à un bâton de cire à cacheter, onle voit s’infléchir et se courber sur toute la partie électrisée; mais aussitôt qu’il arrive à la partie vépulsive, il se redresse et se recourbe en sens opposé Jusqu'à ee qu'il ait traversé la zone de répulsion. Si l'on projette sur cette tige un mélange de soufre et de mi- ninm à l’aide d’un soufllet, on voit encore toute la partie élec- irisée se couvrir de soufre où de minium suivant la nature de ET D'HISTOIRE NATURELLE. LÀ son électricité, tandis que la partie répulsivese trouve parfaitement nette et sans poussière d'aucune espèce, quoique la zone du verre la plus voisine des doigts se rougisse toujours légèrement de minium. Lorsque la tension naturelle du pouvoir électrique est déve- loppée, cette force répulsive est considérable, et d’autant plus que la tige est plus grosse et l'immersion plus profonde. On peut la faire naître en tout temps en chauffant la tige, et en la plon- geant immédiatement après dans le mercure. Le mercure n’est pas la seule substance capable de produire cette propriété. On peut également la faire paroître avec un frottoir de laine. Pour cela, il faut envelopper d’un morceau d’étoffe de laine l'extrémité inférieure de la tige en la serrant étroitement dans la main, et la frotter pendant quelque temps. Si alors on l'approche de l'aiguille électrométrique , la partie frottée se trouve entièrement électrique, tandis que ce qui est immé- diatement au-dessus et qui n’a pas subi de frottement, est plus ou moins fortement répulsif. Lorsque la tension du fluide est nulle, ou très-foible, on ne peut produire cet effet par frotte- ment sur laine qu'après avoir chauflé la tige, ou après l'avoir frottée assez long-temps pour qu’elle s’échauffe naturellement. Troisième Fait. Si l’on met auprès du feu un vase plein de mercure, et que, lorsqu'il est chaud à 60 ou 80 cent., on y plonge par inter- valles une grosse tige de verre, elle en sort ordinairement po- sitive dans toute sa longueur aux deux ou trois premières 1m- mersions : en continuant à limmerger elle devient négative en haut, positive en bas, et ces deux électricités sont séparées l’une de l’autre par une espèce de nœud inélectrique. A proportion que la tige s’échauffe et que son fluide se tend, ce nœud devient répulsif, il fait fuir l'aiguille électrométrique : le fil de soie at. taché à un bâton de cire à cacheter en est vivement repoussé; le soufre et le minium lancés sur ce point par le moyen d’un soufflet, en sont également écartés. L’on voit alors le soufre attaché à la partie qui est électrisée positivement , le minium à celle qui l'est négativement, et au milieu d’elles une zone parfaitement lisse et sans aucun atome de poussière. Quand la tension du pouvoir électrique est considérable, cette zone ré- pulsive pénètre et s'étend dans les parties positive et négative, £t y forme des espèces d’arborisations très-curieuses à voir. 8 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE. Quatrième Fait. Lorsque la tension naturelle du pouvoir électrique est forte en été, si l'on plonge dans du mercure chaud à 80 ou 1oce cent. une grosse tige de verre, et qu'après Py avoir laissée jusqu'à ce qu'elle ait acquis la chaleur du mercure, on l’en retire de temps en temps pour examiner son électricité, on la trouve né- gative en haut et fortement répulsive en bas. A mesure que le mercure se refroidit elle est ensuite positive en bas, foiblement répulsive au milieu , et négative en haut. Un peu plus tard elle sort foiblement positive partout, et quelque temps après sans électricité. Souvent en été la tige sort naturellement répulsive par le bas et négative par le haut ; mais cela n’a lieu que lorsqu'il survient un refroidissement subit dans l'atmosphère. Cette force répulsive dure presqu'aussi long-lemps que la tige reste électrique. Le verre ne jouit pas seul de cette propriété ; elle est commune à la cire à cacheter, à l’ambre et au soufre. Il résulte de ces faits que le frottement ou la pression fait naître et développe dans les corps idio-électriques, une force de répulsion qui n'est point due à l'électricité, quoiqu’elle appar- tienne au fluide qui produit l’effet électrique. Cette force est sus- ceptible de se manifester sur deux points différens de la tige: 19 à son extrémité supérieure, ou, plutôt, immédiatement au-dessus de la partie qui a subi le frottement; 2° à son exiré- mité inférieure, ou à cette espèce de nœud qui sépare les deux électricités contraires dont elle est quelquefois pourvue. Le pre- mier est constant et n'exige pour paroître qu'un certain degré de tension dans le fluide. Le second n'a lieu que là où les deux pouvoirs qui se pressent sont en équilibre entre eux, et lorsqu'ils jouissent d’une forte tension. Le premier est le résultat d’un refoulement du fluide qui s’opère à la partie supérieure de la tige, lorsqu'on presse celui de linférieure. Lorsque la pression cesse , le fluide refoulé tend à revenir sur Jui-mêine; il pousse à son tour le fluide inférieur qui lui résiste et le repousse pen- dant quelque temps, en raison de l'attraction qui le retient, ce qui fait naître un mouvement oscillatoire qui dure jusqu'à ce que l'équilibre de tension soit rétabli sur toute la tige. Le second est l’eflet d’un fluide comprimé et qui se détend au moment où cesse la pression. Semblable à tout corps élastique, il vibre jusqu’à ce que sa force répulsive soit en équilibre avec Pattraction. Cinquième ET D'HISTOIRE NATURELLE. ( Cinquième Fait. Ce cinquième fait est encore plus digne d'attention que les précédens. Il offre des phénomènes d'attraction et de répulsion sans frottement et sans excitation préalables. Si l'on présente fréquemment et dans divers temps, à une aiguille électrométrique extrêmement mobile et en communi- cation avec le réservoir commun, un disque de métal qu’on laisse reposer sur le marbre d’une commode, souvent l'aiguille en estattirée, souvent au contraire elle est repoussée, souvent aussi elle reste immobile. Ces mouvemens d'attraction et de répulsion ont lieu indifléremment avec tous les métaux , peu importe qu'ils soient isolés ou non. On les observe encore avec le verre, le soufre , la cire à cacheter, le bois, les pierres, et en général avec tous les corps que je me suis avisé d’éprouver. Ils ne se manifestent ordinairement qu’à la première approche des corps, quelquefois néanmoins aux deux ou trois suivantes; mais on peut les reproduire en laissant reposer pendant quelque temps les corps dans le même lieu où on les a pris. Il est indiflérent que l'aiguille tournante soit d’acier ou de cuivre , d’or ou d'argent. Quelquefois la force attractive se fait sentir à l'aiguille à 27 millimètres de distance ; d’autres fois elle n’exerce son action qu’à un millimètre. La force répulsive à son #1aximum, n'agit ordi- nairement qu’à 8 ou 10 millimètres, et tout au plus à un, lors- qu’elle est à son #7é7éimum. Quand l'aiguille est attirée, elle s’ap- proche du disque métallique par un mouvement retardé; souvent, après s'être approchée à 2 millimètres près du contact, elle est repoussée ; souvent encore elle n’est ni repoussée ni attirée, mais elle reste stationnaire et n'arrive pas au contact, Quand l'aiguille est repoussée, son mouvement est accéléré, et si on la poursuit à proportion qu’elle fuit, elle finit par tourner assez ra- pidement. Lorsque la force répulsive est foible, quelquefois l’ai- guille s’arrête après avoir reculé de 2 à 3 millimètres, et si l’on approche d’elle le disque, elle en est attirée. L'état attractif ou répulsif est plus sensible par la carne du disque de métal que par sa surface. J'ai remarqué que les corps sont répulsifs dans un beau temps sec, et lorsque l'air est bien refroidissant ; qu’ils sont attractifs sous le même ciel, lorsque l'air est moins refroidissant. Dans les jours humides et peu froids ils sont sans vertu, de même que dans les jours secs et chauds de l'été, où les nuits ne sont pas æefroidissantes. Dans les temps secs et froids or les trouve ré- Tome LXX XIII. JUILLET an 1816. E 10 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE pulsifs le matin , attractifs de 8 à 10 heures, sans vertu de midi à 5 ou 6 heures du soir. Au coucher du soleil, ou aussitôt que l'air se refroidit, ils reparoïssent plus ou moins atlractifs : de 10 à 11 heures du soir ils deviennent répulsifs, puis foiblement attractifs et définitivement sans pouvoir. Le lendemain, si le même temps continue, on les voit devenir par les progrès de la chaleur diurne, successivement attractifs, répulsifs, attractifs, et enfin sans pouvoir dans le cours de la journée comme la veille. Lorsque l’air est sec et refroidissant, si, sur le soir, on ex- pose à la croisée et à l’air extérieur, des disques de métal natu- rellement sans pouvoir, et qu’on les présente de temps en temps à l’aiguille électrométrique , elle en est attirée plus ou moins fortement suivant le degré de refroidissement de l'air. Si l’on détermine un courant d’air plus froid en ouvrant la porte de Pappartement , et qu'on les présente de nouveau à l'aiguille tour- nante, elle en est alors repoussée : en faisant cesser le courant d'air, ils redeviennent attractifs. Cet effet a lieu avec tous les corps, mais il est plus prompt et plus sensible avec les métaux, particulièrement avec l’or, le platine, l'argent, le cuivre, le zinc et le fer. Il a également lieu entre une aïguille d’argent et un disque du même métal. Dans les mêmes circonstances de temps, si l’on mouille d'éther la surface polie d’un disque de métal vissé à une tige quelconque, et qu’on le présente à laiguille électrométrique, la surface mouillée reste sans pouvoir tant que l'éther n’est pas évaporé; mais le disque est sensiblement répulsif par l carne et par la surface postérieure qui n’est pas mouillée. Quelque temps après il n'est plus qu’attractif, et bientôt sans pouvoir. Aussitôt que la surface mouillée cesse de l'être, même partiellement, elie devient à son tour par l’endroit see, successivement répulsive, nulle, at= tractive et enfin sans vertu, lorsqu'elle a repris la température de l'air environnant. Dans les Jours chauds ce refroidissement artificiel ne produit presqu'aucun effet sur le métal; daus les jours froids et secs son influence est plus sensible le matin et le soir, que dans le cours de la journée. Dans les jours secs et refroidissans, si, dans la matinée ou sur le soir, on expose au soleil un disque de métal, et que de temps en temps on le présente à Paiguille tournante, on le trouve d’abord plus ou moins répulsif pour celle-ci : bientôt 1l devient attractif, quelque temps après saus pouvoir , el il persévère dans cet état, quelque longue que soit son exposition. Dans les jours chauds ou humides l'élévation de la température ne produit aucun effet sur ce disque métallique. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 11 J'ai dit que lorsque les disques de métal sont nalurellement attractifs ou répulsifs, ils ne manifestent l’une ou l’autre propriété que tout au plus à leurs deux ou trois premières approches de l'aiguille tournante. Dans cette circonstance on peut faire re- naître leur pouvoir par choc, en les frappant, par exemple, par la carne du disque sur un marbre. Si dans un temps froid l’on plonge par la pointe une aiguille à coudre dans du mercure, et qu'on la présente de suite à l’aiguille électrométrique, elle est assez fortement attractive. Si on la plonge avec plus de force, elle se trouve répulsive. Si l’on continue alors à la plonger avec la même force, elle est sans pouvoir. Elle est susceptible d’en reprendre en la laissant pendant quelque temps en repos. Le même phénomène a lieu avec tous les corps terminés en pointe aiguë, tels que le cuivre, le platine, le verre, la plume, la cire à cacheter, le bois, etc. Dans les temps chauds ou humides, l'immersion des corps pointus dans le mercure est sans effet. En résumant les détails de ce dernier fait, l’on peut dire que deux corps mis en présence l’un de l’autre, font naître dans cer- taines circonstances une force, qui tantôt est attractive, tantôt répulsive suivant l'intensité de son développement. Un premier degré de froid la fait paroître, un plus grand degré de froid la fait disparoître ; il en est de mème de la chaleur. Les pressions mécaniques en favorisent le développement. Elle est plus ma- nifeste par les parties angulaires des corps que par celles qui sont arrondies. Elle n’a lieu le plus souvent qu’à la première approche des deux corps ; elle est donc le résultat de la rupture d’un équi- libre qui ne tarde pas à se rétablir. Si tous les corps sont pénétrés d’un fluide dont la force ex- pansive soit en équilibre avec celle de Pattraction qui le retient, 1l me semble que lorsqu'on met deux corps en présence l’un de l'autre, le fluide du corps A doit être attiré par le corps B, et celui du corps B par le corps A. La force expansive des deux fluides doit donc augmenter. Si malgré cet accroissement chaque fluide est encore retenu par l'attraction propre du corps auquel il appartient , équilibre doit subsister, et les forces n’exerceront alors aucune action l’une sur l’autre. Si la force expansive du fluide des deux corps, ou de l’un d’eux seulement, est au con- traire supérieure à l'attraction, le fluide doit s'épandre et venir au devant du corps qui lattire. Dans ce cas, si le fluide est rare au moment de son expansion, il se laissera refouler, et le corps le plus mobile sera attiré : si le fluide est dense, il y aura ré- pulsion, parce qu’alors il s'oppose à son refoulement. . à OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES r j - nri FE FN + " ‘ " s =] «| THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR | BAROMÈTRE MÉTRIQUE. >f la CENTIGRADE. = 7 PR ES É S = "1 Maxsuum. | Minsmunw. |a Mix. Maximum. | Minimum. A TS MIDI.| à leures o Jieures+ © heures. A mill. | heures. mill mill. : il 3. +19,75/à4+m.+410,25| 70,10 à minuit. .....761,66|à 45 m........758,06|760,22| 17,3 2là3s +22,50/à4m. #10,25 +20,75|à 7 m.........761,52/à 65..........750,66 760,76! 17,8 3la3s. +z2r,1ofà 4m. “12,00 + 10,25 à See 761,36/à minuit... ..750,84 760.60 18,5 4la midi. 16,05|à 4m. + 9,50|+10,85|à 9 m...... ...761,86|à 10 À s.......750,2 761,38 18,6 5là 3s. <+191ofà 4m. +10,70 +18,40 à 7 M... 758,569 S........752,26 757,20] 18,3 6là midi. —+13,50|à 4 m. + 6,25] 418,50 ADS... re.» . 790,50 à AM N eee 751,30 754,60 16,6 7là midi. Æ14,90 à 4m. + 7,79] +14,90|à 6 + m....... 756,20|à 9 2s........ 752,14|755,62| 16,5 8laz ss +16,60/à9s. Ærr,oo|+-14,50là 4 m........ 751,002 9 15.:...... 748,20|750,00| 16,1 glà midi. +13,60|à 10 4 5. 8,02|+-15,60 à At ra RE 747,00|à 4 À s....... .744,40 745,42| 15,8 2l1olà 102m—1465à 4m. “+ 6,25|+14,25là9 3 s........ 755,10|à 4m.........740,34|750,10| 15,6 dlrr[à midi. +14,50/à 4 m. “+ 7,50] 14,50 49 Às.........760,72/là 4 m......... 756,16|758;24| 15,4 Alrol33s. “—+18,75|à 4 m. + 6,50] +1,00 à DOS es ce +..762,90[à 15m....... 761,00|762,28| 16,5 Clrglads. bH25,75à4m, “Lro,50|+23,00!à9 m......... 761,9o|à 9#5s........750,78[761,20| 18,0 Blrgh5s. +24,25/à 4m. 13,25| 423,10 AB es. de ..758,94|à 6 5...:...... 755,72/757,82| 10,2 Alrola3s. <20,00à9s. “:2,85415,5095........,.757,44/à 4 m.......,.755,54/756,60| 17,5 M r6là midi. +17,40là4m. “r1,00|+-17,40/à 925s.........759,44là 4m.....,... 758,14|758,64| 17,6 llrsla3s. —H16,50à4m. + 8,00 +15,85 49 à m....... 760,22|à 108.........750,00|759,58| 16,9 Dliëla2s. “+ig,7olà4m. + 7,00] +18,4093s........ 7502 AD See res e 758,08|756,36| 17,6 Slroln12s. +10,25/à 4m. +1225|+18,00|à 10 s........ 761,76|à 4 m........ .759,12,760,38| 17,6 lloola3s. -Hk21,25là4m. =bro,50|+19,50/à g9m....... .:701,96|à 73S........760,44|761,32| 18,1 Hiorlà32s. +2:1olà4gm. 1,75 21,85 à NO S Re E 760,7o|à 8 +5........ 759,961760,20| 18,8 Nicola 3s. hor,solàg m. <+11,25|Æ2t,oo!ù 7 m.........760,54là 9 35....,... 758,58[760,30| 19,0 Ë 29jà 125. +25,00/à4m. —H12,50|+2350l7;m....... HD, 10|A 7. See ce 755,54|757,34| 19,8 Hloglh3s. “16,00 4m. æ+10,75|+15,85/ 9 ES........757,04là 4 m........ 756,16|756,72| 18,5 Sl25lïmidi. oriolä4m. 4 Terrains d'Eau douce. J’avois fait voir dans ma Théorie de la Terre, tome V, pag. 137, que diflérens terrains avoient été formés dans des lacs d'eaux douces. On les distingue par les fossiles d'eaux douces qu’ils contiennent. ' J’ai donné des développemens à cette vérité. Mais J'ai fait voir que des fossiles d’eaux douces contenus dans un terrain, ne prouvent pas toujours qu’il ait été formé dans des eaux douces, parce que des fossiles d’eaux douces sont jour- nellement charriés par des courans dans le sein des mers, et y sont mélangés avec les nouvelles couches qui s'y forment. Des fossiles marins peuvent également se trouver dans des lacs d'eaux douces, parce qu'ils auront été détachés des bassins de ces lacs, lesquels bassins contiennent des fossiles marins. Les fossiles marins se mélangeront avec les nouvelles couches d'eaux douces qui se forment dans ces lacs. Le géologue ne peut donc prononcer si un terrain est de formation d’eaux douces, ou non, que par les circonstances par- ticulières. Des fossiles marins se trouvent même dans des terrains qui sont au-dessus des terrains qui contiennent des fossiles d'eaux douces. Des Substances volcaniques. Les substances volcaniques sont les produits des éjections des volcans. Ces substances sont de différentes natures. J'ai distingué, Laves fontiformes, | Laves pélro-siliceuses, Laves téphriniques, Laves hornblendiques, Laves leucitiques, Laves augitiques. Ces substances volcaniques ont joui d’une fluidité ignée, et ont souvent coulé en grandes masses, qui quelquefois affectent la forme prismatique. Elles ont passé à l’état pierreux en se dévitrifiant. Cette dévitrification est opérée par deux causes : FE 2 A4 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE a Un refroidissement lent; | b Une compression plus ou moins considérable. Les substances volcaniques sont des produits des roches que nous connoissons, et qui ont subi des degrés de chaleur plus ou moins considérables. Les pétro-silex ont formé les laves pétro-siliceuses. Les téphrines , les laves téphriniques. Les hornblendes, les laves hornblendiques. Les leucites, les laves leucitiques. Les augites, les laves augitiques. Les lydiennes, les cornéennes, les schistes argileux, ou thon- schiester... ont produit les laves fontiformes.. .… Des cristaux paroissent se former dans les laves en fusion. Les principes de ces cristaux disséminés dans ces substances coulantes, peuvent se réunir et aflecter une forme cristalline régulière, tels que les leucites, lolivine.... De la Chaleur des Volcans. La chaleur des volcans provient principalement de l’aczion galvanique que les différens strates exercent les uns sur les autres. Cette action produit de grands degrés de chaleur; elle fond ces différentes roches, les met en fusion... Elle enflamme les substances combustibles qui se rencontrent daus ces foyers, tels que Les bois fossiles, Les bitumes, Les pyrites, Les métaux. - L e e L L L L L e æ Enfin celte action galvanique produit les commotions souter- raines , les tremblemens de terre : leur analogie avec les com- motions électriques a été remarquée par tous les observateurs. Des Volcans d’air. Les volcans d'air, ou salces, sont également des effets de Faction galvanique ; ils produisent des phénomènes remarquables, chaleur, détonation, éjections considérables comme les volcans... Ces volcans d'air ne sont pas aussi répandus que les volcans ordinaires, ET D'HISTOIRE NATURELLE, 45 Des Terrains pseudo-volcaniques. Les terrains pseudo-volcaniques sont produits par l’inflam- mation de quelques substances bitumineuses, qui a chauflé les matières dont elles étoient recouvertes. Les produits de ces inflammations ont des rapports si rap- prochés avec les substances volcaniques, qu’on leur a donné le nom de pseudo volcaniques. On trouve dans ces terrains des schistes qui, par l’action du feu, ont pris les caractères des laves fontiformes.... Des Météorolites. Les météoroliles me paroissent des produits de substances ferresires combinées ou mélangées avec l’air inflammable, et élevées'avec lui au haut des airs. Cet air inflammable est en- flammé par uue étincelle électrique; il y a lumière, détona- tion..., et les substances qui étoient vaporisées, se réunissent et tombent sous forme de météorolites. Cette composition indique la manière dont le noyau du globe a pu étre formé, De la Masse des Eaux. Zes eaux couvrent plus de la moitié de la surface du globe. Leur étendue est plus considérable dans l'hémisphère austral que: dans le boréal. La profondeur moyenne des bassins des mers me paroît pouvoir être évaluée à environ 250 toises. Les eaux des mers sont sujettes à différens mouvemens qui ont une gande influence sur les divers phénomènes géologiques. a. Le mouvement des marées produit par l’action du soleil et de la lune. Il est ensuite modifié par différentes causes locales, qui le: font beaucoup varier sur les différentes côtes. b. Des courans d'orient en occident ; c Des courans des régions polaires à l’équateur ; d Des courans des régions équinoxiales vers les régions po- laires ; e Des courans particuliers dépendans de causes locales. Ces divers courans produisent à la surface du globe plusieurs phénomènes intéressans.. 46 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE J'ai considéré les courans généraux des eaux sous deux rap- ports principaux : » Ou avant l'apparition des continens, Ou après l'apparition des continens. Les courans avant l’apparition des continens parcouroient li- brement la surface de la terre, sillonnant les portions des continens qu’elles recouvroient.... Les courans après l’apparilion des continens , furent modifiés par les obstacles que ceux-ci leur opposoient, Ainsi le courant de la mer Atlantique fut arrêlé par la chaîne des Cordilières, et ne put plus arriver dans la mer Pacifique. Ces courans agissoient avec impétuosité contre la portion des coutinens qui étoit découverte. Ils continuoient leur action sur les continens qu’ils recouvroient. Ils transportoient les diflérens corps qui étoient sur leur passage. L'action des courans dans l’hémisphère austral paroît ptoduire des phénomènes particuliers. De la Diminution des Eaux à la surface du Globe. La diminution des eaux à la surface du globe, ou l’abaisse- ment du niveau des eaux des mers, est un phénomène confirmé par un si grand nombre de faits, qu'on ne sauroit le révoquer en doute. Mais elle présente deux difficultés considérables : a Déterminer le lieu où les eaux se retirent; b Déterminer les causes de cette retraite. Maëlle£ supposoit qu'une parlie de ces eaux pouvoit s’évaporer dans les autres globes. D'autres supposent que ces eaux se rendent dans des cavernes de l’intérieur du globe. ‘ Cette dernière hypothèse me paroît plus probable. J’ai supposé a Qu'une partie des eaux qui ont disparu de dessus la surface dela terre, s’est retirée dans des cavernes de l’intérieur du globe. b. Mais les fentes, produites à la surface du globe par son re- froidissement, ont recu une autre partie de ces eaux. Néanmoins je conviens que l'explication de cette diminution des eaux présente encore beaucoup de diflicultés. Quelques géologues supposent que cette diminution des eaux de ‘la surface du globe s’est opérée subitement par quelque grande catastrophe... ET D'HISTOIRE NATURELLE. 47 Je pense au contraire qu’elle s’opère lentement : c’est ce que tous les phénomènes indiquent. Des Differens Systèmes géologiques. L Différens systèmes ont été proposés par les savans pour ex- pliquer les phénomènes de la Géologie. J’en ai distingué trois principaux, fondés sur la nature de la fluidité des substances dont est composé le globe. a. Les uns supposent la fluidité aériforme , tels que ceux de Thaut, d'Anaximène.... 6. Les seconds supposent la liquidité zgnée, tels que ceux des Brames, des Phéniciens..., de Zénon.... c. Les troisièmes supposent la liquidité agueuse , tels que ceux des Egyptiens, des Hindoux..., de Sanchoniaton, de Thaiès.. , J’ai supposé que le noyau du globe avoit été formé de subs- tances à l’état aériforme , comme Thaut.... Que la croûte avoit été formée par des substances qui jouis- soient d’une fluidité aqueuse..., comme Sanchoniaton.... Qu'il n’y avoit que les lavesqui avoient joui d’une fluidité ignée. . Je ne pense pas quela masse du globe ait joui d’une fluidité ignée, Ni de la fluidité aqueuse. " Des Catastrophes. Des cafastrophes sont-elles arrivées au globe terrestre ? Tous les peuples et tous les philosophes ont supposé qu’il étoit arrivé au globe, diflérentes catastrophes générales. Ils supposent deux espèces principales de ces catastrophes: a Les unes par le feu, b Les autres par l’eau. L Aucune de ces catastrophes générales ne me paroît prouvée ; elles n’ont jamais été que des phénomènes particuliers et dé- pendant des causes locales. Mais aucur fait ne me paroît indiquer qu'il y ait eu des caias- trophes générales. Des Cataclysmes. Les anciens supposoient encore que des catastrophes générales du globe étoient arrivées à différentes périodes fixes; ce qu'ils appeloient des cataclysmes, 45 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Mais aucun fait ne prouve l'existence de ces cataclysmes. Ces faits que nous venons de rapporter, prouvent que le plus grand nombre des phénomènes géologiques s’expliquent assez bien d’après mes principes; on en doit conclure que la #héorie de la terre possède au moins autant de faits constatés que les autres branches de la Philosophie naturelle; elle est aussi avancée et peut-être plus qu'aucune d’elles. Les deux faits, dont l’explication paroït la plus difficile, sont, ainsi que nous l’avons dit : a La dissolution dans l’eau des substances minérales, dont la croûte du globe est composée; à La disparition de cette quantité d’eau dont la surface du globe a été couverte. Quant à la première difliculté, nous y avoris déjà répondu. Nous avons supposé que les diverses substances dont le globe est composé, sont à l’état d’oxides : or les oxides purs sont en général très-solubles dans les eaux ; ils n’y deviennent insolubles, ou à peu près insolubles, que quand ils ont contracté des com- binaisons. Quant à la seconde difficulté, nous dirons que la diminution des eaux à la surface du globe est un fait certain : or il ne paroît pas que les eaux aient pu passer en d’autres globes. Elles se sont donc enfouies dans l’intérieur du globe terrestre. B . . . . D [2 D L2 . LI . L] . . LC] D L . e 0 L] 2 . . LL L L Ces Lecons de Géologie doivent être considérées commeu ne suite de mes Zecons de Minéralogie publiées en 1813. Ces deux ouvrages contiennent presque toute ma théorie sur ces objets. Cependant il en est encore quelques parties éparses dans mes autres ouvrages. J’ai réuni dans ces cinq volumes ce qui, d’après les connois- sances actuelles, m'a paru le plus probable sur la connoissance des minéraux, et sur la manière dont le globe a été formé. La Géologie a fait de grands progrès, et chaque jour elle en fait de nouveaux; néanmoins elle a encore beaucoup à acquérir. J'ai consacré à cette étude une partie de ma longue vie... 11 est temps de terminer ces travaux... En voici l’'énumération : 19, Lecons de Minéralogie, 2 vol. in-80, 20, Leçons de Géologie, 3 vol. in-8°. Ces ET D'HISTOIRE NATURELLE. Ces cinq volumes renferment : Mon édition de la Sciagraphie de Bergman. La première édition de la Théorie de la Terre. La seconde édition du même ouvrage. Un Abrégé de Minéralogie dans le Zuffon, édition de Sonini, 0 qui fut mutilé et défiguré, au point que je ne le connois plus. | 30, Considérations sur les Êtres organisés, 3 vol. in-8o, Mes Vues Philosophiques s'y trouvent renfermées. 4°. Principes de la Philosophie naturelle, 2 vol. in-8°. bo, De la Nature des Etres existans, 1 vol. in-8°. 6°. De l'Homme considéré moralement, 2 vol. in &o. 7°. Quelques Mémoires d'économie politique. 8°. Journal de Physique......., 50 vol. in-4°, dont j'ai été l'éditeur. Quant à mon ouvrage sur l'Air pur, le fond de ma doc- trinesubsiste, puisqu'il est avoué que l'air pur n’est pas l'oxigène, ainsi que je l’ai dit; mais il devroit être remanié en entier, vu la multitude des nouveaux faits... , et je n’en ai pas le temps (1). J’aurois desiré pouvoir encore achever quelques autrestravaux... pour terminer mon Cours de Philosophie. Je voudrois particulièrement réunir tout ce que j'ai publié sur les Tables de Probabilité des Connoissances humaines ; elles me paroissent d’un assez grand intérêt pour les progrès de l'esprit humain, pour en faire un ouvrage particulier. J’aurois aussi voulu réunir mes travaux sur l’économie poli- tique; on y verroit la pureté de mes principes pour pouvoir pro- curer à l’homme des grandes sociétés trop populeuses , une sage liberté, également éloignée de l’oppression de la servitude, et des horreurs de l’anarchie..… On me demandoit comment j’avois pu me tenir dans ce juste milieu....: c’est, répondis-je , que je n'ai jamais consulté que mon cœur, sincèrement ami de la vérité et de la justice, sen- timens qui m'ont été inculqués dès l'enfance par les meilleurs des parens.... C’est que sans ambition, je n’ai recherché ni for- tune, ni ce qu'on appelle si faussement les honneurs, les gran- deurs, les dignités, les titres... 49 (1) Tous ces ouvrages se trouvent chez M®° V* Courcier, Tome LXXXIII. JUILLET an 1816, G N 5o JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Je n'ai voulu, comme Socrate... être que moi. . . . . . . . L D é L . . . . . . D D L . . e. CL ° ” Mais le temps, la santé... me manquent pour achever ces travaux... Nous venons d’exposer un grand nombre de faits sur la Cos- mogonie en général, et sur la Géologie en particulier. Nous avons vu une multitude d'opinions des plus beaux génies, qui toutes présentent plus où moins de difficultés et se combattent mutuellement ; elles nous convainquent que nos connoissances ne sont sans doute pas assez avancées pour embrasser le système entier des êtres existans, des grands globes, et de celui de la terre en particulier. L'Histoire naturelle a décrit le plus grand nombre des mi- néraux ; mais il lui en demeure encore à découvrir. Quelque progrès qu’ait fait la Chimie, elle a encore beaucoup de choses qu’elle ne connoît pas. Les notions qu’elle nous fournit sur la nature des terres, des substances métalliques, des acides, des alcalis..., enfin sur tout ce qu'on appelle é/émens et subs- tances simples, sont extrèmement bornées. La manière dont ces substances forment les pierres des terrains primitifs, ne nous est guère plus connue. Leur mode de cristallisation est également caché ; Et cependant ce sont ces données qui peuvent nous faire entre- voir la formation du globe terrestre. La formation des terrains postérieurs à ces primitifs, présente également beaucoup de difficultés. Les observations astronomiques, sur lesquelles nous pouvons compler, ne datent pas de deux mille cinq cents ans : et ce temps est sans doute trop court pour apprécier les irrégularités, ou anomalies, et perturbations que peuvent éprouver dans leurs cours les différens corps célestes. Il n’y a donc que quelques probabilités à offrir à cet égard; et cependant ces perturbations doivent beaucoup influer sur les mouvemens de notre globe et sur les phénomènes géologiques. Ce ne sera, par exemple, que dans la suite des siècles qu’on pourra s'assurer si la durée de son mouvement diurne et de son mouvement annuel est constante; si la diminution de l’obliquité de l'écliptique se tient dans les limites qu’on lui assigne aujour- , ET D'HISTOIRE NATURELLE. 5 d’hui; si réellement il n’a pu y avoir de printemps perpétuel, quoique toute la savante antiquité en ait parlé. Enfin les comètes fourniront des données précieuses. Il fauf les observer pendant une longue suite de siècles, pour savoir s’il n’y en auroit pas quelques-unes qui pussent exercer une ac- tion quelconque sur notre globe ; pour constater si les retours périodiques de quelques autres ne pourroïent pas exercer leurs actions sur le globe à des périodes réglées, et produire ainsi ces CATACLYSMES réguliers, dont les traditions detous les anciens peuples font mention; car cet accord unanime mérite toute l’aliention du philosophe. . . . . . . . . . « . . 0 » . . . = . . . Toutes ces recherches exigent une longue suite de siècles, qui ne sont point à notre disposition. Mais ce que nous pouvons, ce que nous devons faire pour avancer nos connoissances sur la Théorie de la Terre, est de continuer de recueillir des faits, de vérifier ceux qu’on connoiît, de rectifier plusieurs erreurs qui nous sont échappées, de per- fectionner les analyses minérales, d'examiner les modes dont la cristallisation s'opère dans les grandes masses... Toutes ces recherches sont dignes d’occuper l’homme raison- nable, et peuvent exercer le plus vaste génie... Dans l'explication de ces grands phénomènes, il ne faut ex- clure aucune cause particulière; mais on doit toujours chercher les causes générales; et les cas postérieurs ne seront regardés que comme des phénomènes des agens secondaires. En parlant du commencement des choses, je crois nécessaire de rapporter ce que le savant dom Calmet dit dans son Com- mentaire (tome I, pag. 2) de cette expression, creavit Deus. « CREAVIT DEUS, Dieu créa. » Ce terme créer signifie deux choses dans lEcriture : » 1°, Tirer du néant. » 20, Donner la forme à quelque chose. » Tous les Juifs et les Chrétiens le prennent ici dans le » premier sens, et nous n'avons aucun terme qui signifie d’une » manière plus précise la création proprement dite, que l'hébreu » bara et le latin creare. » L’Ecriture et la tradition nous déterminent à le prendre GEz b2 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE » ici pour marquer donner l'être et l'existence aux choses » CTrees, » Quelquefois il signifie seulement produire quelque chose » d’une manière ordinaire , en changeant la disposition, ow » la configuration de ses parties intérieures ou extérieures, » comme dans ce chapitre premier, versets 21 et 27, où il est » dit que Dieu créa les poissons. » Verset 21. CREAVITque Deus cele grandia, et omnem » animam viventem atque motabilem, quam produxerant aquæ » in species suas , et omne volatile secundüm genus suum.... » Verset 27. Masculum et feminam CREAVIT eos , en parlant » de l'homme et de la femme. » ET D'HISTOIRE NATURELLE. 53 RECHERCHES SUR LA NATURE DE LA MATIÈRE HUILEUSE DES CHIMISTES HOLLANDAIS; Par MM. ROBIQUET £T COLIN. Lues à l'Institut le rer avril 1816. Ox se rappelle qu'en 1796 les chimistes hollandais firent la découverte d’un hydrogène beaucoup plus carboné que celui qu'on obtient par la distillation des matières végétales; ils en étudièrent et en décrivirent les propriétés les plus marquées ; ils observèrent que cet hydrogène surchargé de carbone donnoit Jorsqu’on le méloit avec volume égal de gaz muriatique oxi- g'né, un liquide huileux particulier. Cette propriété leur parut si singulière qu’ils s'en servireut pour caractériser leur corps nouveau, et ils lui donnèrent le nom de: gaz oléfianf, nom que l’on a conservé pendant long-temps, et auquel on a subs- ütué depuis peu seulement celui de gaz hydrogène percarboné,. comme étant plus propre à en désigner la nature. Cette décou- verte produisit une grande sensation à cette époque, et tous les chimistes y prirent un vif intérêt, non pas préciséinent par la singularité du résultat qu'elle offroit, mais bien plutôt parce qu'elle confirmoit parfaitement les idées que l’on avoit alors sur la nature des huiles et de l'acide muriatique. On la jugea donc très-propre à donner un nouveau degré de force aux idées déjà reçues depuis l’établissement de la doctrine pneumatique, et on trouva tout nature? que de l'hydrogène et du carbone formassent de l'huile par leur combinaison avec l’oxigène de l'acide muria- tique oxigéné. Mais aujourd'hui que les chimistes considèrent Faeide mariatique oxigéné comme un corps Simple, on ne peut plus donner une exphcation satisfaisante de ce phénomène, si on admet que le corps huileux qu'on obtient par la réaction. b4 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE du chlore et du gaz oléfiant puisse avoir quelqu’analogie de composition avec les huiles ordinaires. En effet, en adoptant l'hypothèse actuelle , on ne peut y supposer d’oxigène, à moins qu'on n’en admette dans la composition du gaz oléfiant, ce qui seroit tout-à-fait contradictoire avec l'opinion des meilleurs chi- mistes et des plus célèbres physiciens, Ces considérations nous ont engagés à faire un nouvel examen : de ce liquide huileux,.et à mieux étudier les différentes circons- tances de sa formation. Nous espérions pouvoir donner une s0- lution complète de tous les phénomènes qui y ont quelques rapports; mais de grandes diflicullés se joignent à ce. genre d'expériences. Quand on agit sur un produit qui admet un cer- tain nombre d’élémens dans sa composition , et que ces élémens peuvent se réunir entre eux dans un autre ordre et dans d’autres proportions, il arrive souvent que les moyens d’analÿse qu’on peut employer ne conduisent qu'à une plus grande complication. En général, l'analyse exacte de plusieurs gaz réunis ou com- binés offre des difhicultés; mais il en est certains d’entre eux qui, par leur analogie de composition ou pàr la similitude des produits qu'ils fournissent, présentent de plus grands obstacles, et ce n’est qu'en employant des considérations particulières et souvent détournées qu’on peut conclure leur existence. Le corps que nous ayons eu à examiner nous a présenté tous ces incon= véniens, et nos résultats n’offrent pas tout le degré d’exactitude que nous eussions desiré leur donner. Cependant nous avons cru que notre travail oHroit assez d'intérêt, dans l’état où il se trouve, pour être publié. Le chlore étant supposé bien connu dans sa nature, et devant êlre regardé comme un corps simple, on peut faire deux hypo- thèses différentes relativement à sa manière d’agir sur le gaz hy- drogène percarboné : ou le corps huileux qu’on obtient est tout formé , et seulement retenu en dissolution dans le gaz oléfiant, et le chlore ne fait que l’en précipiter en contractant avec ce gaz quelque combinaison particulière ; ou bien ce même corps résulteroit de l’union intime du chlore avec le gaz oléfiant lui même ou avec ses élémens. e La première supposition a quelque apparence de probabilité, parce que l’hydrogène percarboné ne s'obtient qu'avec un mé- lange d'alcool et d'acide sulfurique, ou, ce qui revient au même, en distillant les résidus d’éther sulfurique : or on sait que, sur la fin de cette opération, c'est-à-dire, à l’époque où le gaz by: ET D'HISTOIRE NATURÉLLE. 55 -drogène percarboné se dégage, il se produit aussi ce que l’on nomme de l'huile douce du vin. En conséquence notre premier soin a dû être de prendre toutes les précautions convenables pour séparer complètement l'huile douce qui auroit pu être retenue par le gaz oléfiant. Nous allons décrire l'appareil qui nous a servi à préparer ce gaz, et nous indiquerons en méme temps de quelle manière nous avons produit la combinaison de nos dêéux fluides élastiques. Nous avons établi un double appareil pour obtenir simulta- nément le gaz oléfiant et le chlore; le premier de ces deux ap- pareils étoit composé d’abord d’une cornue contenant des résidus d'éther, d’une allonge et d’un matras tubulé : celui-ci plongeoïit dans un mélange de glace et de sel, afin de condenser l’eau et le peu d’éther qui accompagnent ce gaz; de la tubulure du malras partoit un tube de Welter, dont l’autre extrémité plon- geoit dans un flacon rempli aux deux tiers par une dissolution de potasse caustique très-concentrée, et destinée à arrêter l'huile douce et le gaz sulfureux : ce n’étoit qu'après avoir dépouillé le gaz oléfiant de l’eau, de l'huile douce et du gaz sullureux, qu’on le faisoitarriver, au moyen d’un nouveau tube, dans un vaste ballon où se rendoit en même temps le chlore qui se dégageoit du second appareil ; le chlore ne subissoit d'autre purification que son lavage par l’eau. Enfin ce double appareil éloit terminé par un tube plongeant sous une eloche pleine d’eau. Les choses étant ainsi disposées, nous avons mis tous nos soins à diriger chacune des deux opérations de manière à obtenir un dégagement extrêmement lent , très-régulier et tout-à-fait proportionnelde part et d’autre. Lorsque ces deux conditions étoient bien remplies, la combinaison seffectuoit de telle facon que rien ne se dégageoit à l'extrémité de l'appareil, tandis que, dans le cas contraire, on recueilloit une certaine quantité du gaz surabondant, et plus or- dinairement un mélange des deux. On est d’abord long-temps sans remarqueraucun phénomène particulier, parce que le ballon, où se réunissent les deux gaz, contient une très-grande quantité d'air atmosphérique qui fait obstacle à la combinaison qui s’ef- fectue plus tard; mais, à mesure que la proportion de cet air devient moindre, on voit paroître une légère rosée qui se con- dense sur les parois internes du récipient, et dès-lors on ne tarde point à voir ruisseler de toutes parts et en stries fort dé- liées un liquide plus ou moins coloré qui va se réunir à la partie inférieure, et dont la quantité augmente tant aue dure l'opération, 56 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Comme nous avons répété cette expérience un grand nombre de fois, nous avons eu occasion d'observer que le produit qu’on obtient varie suivant que, dans le cours de Popération, l’un ou l’autre des deux gaz se trouve en excès. Si c’est le chlore qui domine, aussitôt qu'on débouche le grand récipient, il se dé- gage des vapeurs abondantes et très-acides, d’une odeur mixte de gaz hydro-chlorique et de chlore : on y distingue aussi , en dernier lieu, quelque chose d’aromatique et comme camphré. Le liquide contenu dans le vase est coloré en jaune verdûtre, répand aussi des fumées suflocantes et très-acides : sa saveur est caustique et acerbe ; tandis qu’au contraire, si on a fait dégager proportionnellement plus d'hydrogène carboné que de chlore , on ne remarque aucune vapeur ; le liquide est incolore, d’une odeur suave et n’a point d’acidité sensible : sa saveur est vive comme celle des huiles essentielles, mais elle n’a rien de désagréable. A près nous être assurés d’un moyen de nous procurer de cette substance en aussi grande quantité que nous le voudrions, nous nous sommes occupés d'étudier les diverses circonstances qui peuvent influer sur sa production. Aussi nous nous sommes as- surés Fe la présence d’une certaine quantité d’air ou d’une por- tion plus ou moins grande d'humidité n’empèchoit pas sa for- mation, et qu’elle n’en avoit pas moins lieu lorsque les gaz étoient parfaitement purs et exempts d’eau. Nous avons vu aussi que les volumes respectifs des deux gaz pouvoient être variés sans qu’ils cessassent de produire de celte matière huileuse ; que cependant elle étoit plus abondante lorsqu'on employoit un volume double de chlore, et que, dans tous les cas, on ne pouvoit parvenir à observer tout le chlore qu'après un temps très-long. Une autre observation que nous croyons à propos de consigner ici pour la constater, c’est l'odeur camphrée que prennent ces mélanges de gaz, surtout pour ceux qui ont été faits avec un excès de chlore; et ce qui nous a paru encore plus remarquable, c’est la propriété dont ils jouissent de donner des ramifications cristallines d’odeur et de saveur camphrée, principalement quand on les expose aux rayons solaires. Mais, ne voulant point nous écarter de notre but principal , qui est de chercher à déterminer la nature de la substance des chimistes hollandais , nous ne ferons qu’indiquer ici ces divers phénomènes, nous proposant d’en traiter plus particulièrement dans un second travail. Dans tous les cas, il faut, pour obtenir un résultat identique, laver cette huile avec une petite quantité d’eau distillée qui enlève ET D'HISTOIRE NATURELLE. 57 enlève {out à-la-foiset l'acide et la matière colorante, s’il en existe. Ce liquide, ainsi obtenu, ne doit plus rougir la teinture de tournesol ; s’il en étoit autrement, un deuxième lavage dans pareille quantité d’eau sufliroit pour enlever jusqu'aux dernières portions d’acide ; c'est dans cet état que les chimistes hollandais l'ont obtenue, parce qu’ils combinoient leurs gaz au-dessus de l’eau : elle a alors une couleur gris de perle. Nous nous sommes assurés qu’elle ne devoit son opacité qu'à une certaine quantité d'humidité dont nous sommes parvenus à la séparer complètement en la rectifiant au bain-marie sur du chlorure de calcium fondu et pulvérisé. . Ce n’est qu'après cette suite d’opérations que nous l'avons jugée dans son plus grand état de pureté, et qu’elle nous a offert les caractères dont nous allons faire mention. Ce liquide huileux est incolore, d'une odeur très-analogue à celle de léther hydro-chlorique, dont il a aussi la saveur sucrée particulière. Sa pesanteur spécifique, déterminée à 7° centigrades, estde 1,2201, celie de l’eau étant prise pour l’unité. Sa force élastique, mesurée à 9°,3 du même thermomètre, est de 62,65 centimètres; et son point d’ébullition, calculé d’après la tension indiquée, a été fixé à 66°,74. Si on la soumet à lébullition à feu nu, on remarque qu’elle se volatilise avec la plus grande facilité, mais qu'elle subit une légère atération : elle ne tarde point à prendre une couleur ambrée, se colore de plus en plus, et laisse enfin ,lors- qu'on pousse l’opération à bout, un léger résidu charbonneux. On voit donc que cette substance est moins volatile et beau- coup plus pesante que l’éther hydro-chlorique, avec lequel elle a d’ailleurs plusieurs points d’analogie. Si on verse une certaine quantité de cette huile éthérée dans une cuiller d’argent légèrement échauflée, et qu’on en approche un corps en ignition , aussitôt elle prend feu et la flamme qu’elle répand est verte ; cette flammeestaccompagnée de fumées épaisses, suffocantes, qui projettent dans l'air une grande quantité. de flocons semblables au noir de fumée. Si on opère cette combus- tion au-dessous d’une cloche légèrement humectée, on voit la malière charbonneuse se déposer sur les parois internes; et en examinant l’eau dont elle est imprégnée, on lui trouve une saveur acide très-prononcée. Le nitrate d’argent mis en contact avec cette humidité se décompose si complètement qu'il se prend en masse : ainsi l’on voit que pendant la combustion il s’est déve- loppé une quantité considérable d'acide hydro-chlorique, et on Tome LXX XIII, JUILLET an 1816. H 28 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE se rappelle sans doute que l’éther hydro-chlorique se comporte absolument de la même manière quand on le soumet à de sem- blables épreuves. Ces premières données suflisoient pour éclairer sur la nature de notre combinaison, et faire voir quele chlore en étoit une des parties constituantes; mais nous desirions de plus connoître dans quel rapport il pouvoit y exister. Nous avons tenté différens moyens d'en faire l'analyse, et, pour nous guider, nous l'avons mis en contact avec les corps que nous supposions capables d’en. opérer la décomposition. Nous n'indiquerons point tous les essais qui n'ont donné aucun résultat satisfaisant, et nous ne citerons que ceux qui nous ont paru présenter quelque intérêt, L'action des alcalis eaustiques est trop lente, surtout à froid , pour qu’on puisse s’en servir comme d’un moyen analytique, Ée qu'on n’est jamais certain d’une décomposition complète, es alcalis ayant la propriété de la dissoudre; et si on emploie la chaleur, une partie passe sans altération. Il y a cependant une chose remarquable dans cette réaction des alcalis, c’est le développement d'acide hydro-chlorique qui se manifeste après quelques jours de contact, sans dégagement de gaz et sans pré- cipitation de carbone, Nous avons observé, dans quelques-unes de ces expériences, qu’il se formoit un peu d'acide carbonique ; mais nous n'avons jamais observé aucun dégagement de fluide élastique. L'ammoniaque liquide présente des phénomènes tout - à - fait analogues aux autres alcalis. Lorsqu'elle est gazeuse, elle n’a point d’aclion sensible à froid sur cette même substance; mais si on les fait rencontrer l’une et l’autre à l’état de fluide élas- tique et à une température élevée, il y a production d'hydros chlorate d’ammoniaque et dégagement d’un gaz inflammable. Le chlore a une action bien marquée : il est absorbé en assez grande proportion par celte liqueur oléagineuse; il lui donne une couleur citrine verdâtre, lui communique une odeur désa- gréable, et alors elle acquiert la propriété de répandre des fumées suffocantes et très-acides ; sa saveur devient caustique et comme métallique ; le lavage à l'eau distillée enlève l'acide et le chlore en excès, et la portion d'huile non décomposée paroît avec toutes ses propriétés : l’eau de lavage contient beaucoup d’acide bydro- chlorique. Cette expérience fait voir que cet acide qui accom= pagne quelquefois la matière huileuse pendant sa formation n’est ET D'HISTOIRE NATURELLE. 5g point dû à une réaction du chlore sur l'hydrogène percarboné , mais bien à une décomposition de la matière huileuse une fois formée. Aussi avons-nous déjà fait remarquer qu’elle n’étoit ni acide ni colorée, si on avoit soin d'entretenir un excès d'hydro- gène percarboné pendant toute la durée de l'opération. Lorsqu'on fait passer la vapeur de ce corps sur de l’oxide de cuivre chauffé au rouge cerise, la décomposition s’en opère avec une grande facilité, et ce seroit un bon moyen d’analyse, sans l'extrême difliculté qu'on éprouve à empêcher qu’il ne passe avec l'acide carbonique une certaine proportion de gaz inflammable, qui est lui-même très-chargé en carbone. On trouve d’ailleurs dans le tube de verre où se fait l’expérience, du cuivre réduit et du chlorure de cuivre. La chaleur seule déterminent la décomposition de notre subs- tance, c’est le moyen auquel nous nous sommes plus particu- lièrement arrêtés comme étant celui qui mène aux résultats les plus simples. Voici de quelle manière nous avons procédé : Un tube de porcelaine étant disposé sur un fourneau, nousavons adapté à l’une de ses extrémités un tube de verre communiquant sous des cloches pleines de mercure, et à l’autre, une très petite cornue contenant deux à trois grammes de substance. Nous avions eu soin d'introduire des fragmens de porcelaine dans le tube pour faciliter la décomposition de la vapeur; tout l’appareil étant bien luté, nous avons chauflé graduellement le tube jusqu’à Vamener au rouge blanc; alors nous avons fait passer un peu de vapeur de l'huile éthérée, et nous en avons réglé l'expansion de telle manière que les bulles de gaz se succédoient dans un intervalle de temps parfaitement égal. Nous faisons remarquer cette manière de procéder parce qu’elle est essentielle au succès de l’opération : un courant trop rapide entraîne une portion de la vapeur sans qu’elle ait subi de dé- composition, et occasionne dans le tube de verre un dépôt de charbon assez considérable pour qu’il puisse s’obstruer si l’on continue; tandis que, si l'opération est bien conduite, tout le charbon se dépose dans le tube de porcelaine. On n’a commencé à recueillir les gaz provenant de la dé- composition par la chaleur que quand on a jugé que tout l’air de l'appareil avoit disparu, et on a eu soin de plus de vider chaque cloche lorsqu'elle étoit au tiers pleine, afin d'être bien sûr qu’il n’y restât point d’air. Ce gaz répandoit des vapeurs dans H 2 6o JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Fatmosphère comme le,gaz hydro-chlorique; il rougissoit le tour- nesol ; 1l précipitoit le nitrate d’argent et brüloit au contact des corps enflammés. Ayant jugé par là qu'il étoit composé d’un gaz inflammable et d'acide hydro-chlorique, nous avons cherché à en déterminer les proportions , et nous avôns obtenu les résultats suivans, en absorbant le gaz hydro-chlorique par l’eau, et prenant la moyenne des expériences faites sur chaque cloche : 2me cloche 100; 3me cloche 100; gme cloche 100; Résidu — 46,895. Résidu— 43,225. Résidu — 40,102. me cloche 100; 6Gme cloche 100; Résidu — 38,436. Résidu — 38,785. On observe que les résidus sont d'autant plus considérables qu'ils sont plus près du commencement de l'expérience, et qu’ils de- viennent sensiblement égaux à partir de la 5me cloche, c’est-à-dire, lorsque les bouchons ont absorbé toute la quantité d’acide hydro- chlorique qu'ils peuvent prendre. Le résidu est un gaz qui brûle avec uue flamme bleuâtre, et donne pour produit de sa com- bustion de l’eau et de Pacide carbonique. Mis en contact avec le potassium, il n’éprouve aucune altération sensible dans son volume, lors même qu’on fait volatiliser ce métal dans une at- mosphère de ce gaz. Si l’on prend la moyenne des analyses de la 5me et de la 6me cloche, qui se correspondent parfaitement , on voit que, sur 100 parues du mélange gazeux fourni par la décomposition de la substance des chimistes hollandais, il y a 61,39 de gaz hydro- chlorique et 38,61 du gaz inflammable dont nous avons parlé. On a pu juger par ce que nous venons de rapporter, combien: il existe d’analogie entre cette huile du gaz oléfiant et l’éther hydro-chlorique : tant de, points de similitude entre ces deux corps devoient nécessairement nous conduire à quelques expé- riences comparatives. La décomposition de l’éther hydro-chlorique par la chaleur avoit élé indiquée comme impraticable, parce qu’il paroissoit extrêmement difficile de se rendre maître de l'expansion d’un liquide aussi volatile, et que la grande quantité de charbon qui se dépose dans les tubes avoit toujours déterminé l’explosion des appareils. Néanmoins nous l’avons tentée, el nous pouvons. dire qu'en ce point elle a réussi au-delà de nos espérances. Voici quel genre de précautions nous y avons apporté : nous avons, ET D'HISTOIRE NATURELLE. Gt comme dans le cas précédent, rempli notre tube de fragmens de porcelaine; cette précaution est indispensable, parce qu'en multipliant les points de contact on propage la chaleur également dans toute la masse du fluide élastique, et qu’il en résulte né- cessairement une décomposition plus complète. Au lieu d’employer une cornue, nous nous sommes servis d’un tube courbé à angle droit et terminé par une petile boule très- mince ; cette boule se trouvoit distante du fourneau d’environ un pied. Comme nous avions plulôt besoin de modérer l’expansion de l’éther que de l’exciter, nous avons placé sous la boule de verre un vase contenant un peu d'eau et de glace. A l’autre extrémité de l'appareil, nous avons adapté un tube de verre portant uue boule à quelque distance de l'issue du tube de porcelaine, et couibé de manière que cette boule pût plonger dans un mé- lange refroidissant. Lorsque le tube de porcelaine a été chauffé au rouge blanc, la chaleur extérieure du fourneau a suffi pour déterminer la vaporisation de l’éther; et lorsque les bulles de gaz se succédoient trop rapidement, nous avions l'attention d'exhausser le vase disposé au-dessous de l'étier, de manière à faire plonger dans l’eau environ un tiers de la houle, ce qui suflisoit pour régler la distillation : un plus grand refroidissement eût produit une prompte absorption. L'opération étant achevée, nous n'avons pu voir aucune portion d’eau dans cette partie du tube qui plongeoïit dans le mélange refroidissant, et les gaz étant examinés, nous avons vu qu'une pelite quantité d’eau y produisoit une absorption d’un tiers en- viron, ou exactement de 36,79 pour 100, absorption due évi- demment au gaz hydro-chlorique. Dans ce même gaz privé d'acide, nous avons introduit soit de la baryte, soit de la potasse en dissolution, sans que nous ayons pu y découvrir la moindre diminution de volume; ainsi, puisque dans cette décomposition nous n'avions obtenu ni eau ni acide carbonique, nous ne pouvions rechercher l’oxigène que dans le gaz résidu. Ce gaz brûle en bleu et donne, pour produit de sa combus- tion, de l’eau et de l'acide carbonique : ce ne peut donc être que de l'hydrogène carboné ou un mélange d'hydrogène carboné et de gaz oxide de carbone; et comme ce gaz contient tout l'oxigène qu'on obtient dans l’éther muriatique, nécessairement Poxide de carbone doit y être en assez grande proportion. Ce- pendant, lorsqu'on le soumet à l’action long-temps prolongée du potassium en vapeur, il ne se produit aucune varialion 6 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 2 is Cas dans le volume, et de plus il ne se forme aucun dépôt charbonneux. Nous avons essayé, par le même moyen, des mélanges de gaz hydrogène carboné et de gaz oxide de carbone en diverses pro- portions, et nous ayons obtenu constamment une absorption égale au volume de ce dernier : on ne sauroit donc attribuer à la présence de l'hydrogène carboné, dans le gaz provenant de l’éther muriatique, la propriété dont il jouit de résister à l’action du potassium. Pour acquérir quelque cerlitude relativement à la présence de l'oxide de carbone dans ce même gaz, nous avons construit un appareil disposé de telle facon, que les produits gazeux de l’éther muriatique décomposé par la chaleur traversoient, en sortant du tube de porcelaine, une petite quantité d’eau distillée, pour s'y dépouiller de leur acide hydro-chlorique. De là, ce gaz se desséchoit en passant sur des fragmens de chlorure de calcium fondu, et venoit ensuite traverser un deuxième tube de porce- laine contenant du proto-chlorure de mercure. On a d’abord fait chauffer le premier tube, et on a procédé, comme nous l'avons dit précédemment, pour déterminer la décomposition de l’éther ; le gaz résultant de cette décomposition se lavoit dans l’eau et traversoit toute l'étendue de l'appareil sans éprouver d’autre altération. Au bout d’une heure environ, on a élevé la température du deuxième tube, celui où se trouvoit le chlorure de mercure. À peine a-t-il atteint le rouge cerise, que le dé- gagement des gaz s’est arrêlé, bien que l’éther continuât toujours de traverser le tube en même quantité, et nous avons même été obligés, pour empêcher l'absorption dans le deuxième tube; de faire vaporiser l’éther beaucoup plus rapidement qu’aupara- vant. L'opération a été menée de la même manière pendant plus de demi-heure sans obtenir une seule bulle de gaz, et le déga- gement n'a recommencé qu’à l’époque où tout le chlorure de mercure a élé chassé, par l'effet de la chaleur, de la portion du tube contenue dans le fourneau. L’eau dans laquelle plongeoit le dernier tube étoit devenue acide, et elle précipitoit fortement par le nitrate d’argent : nous avons trouvé dans le deuxième tube de porcelaine du mercure métallique et un dépôt de charbon. Si nous ne nous abusons pas sur cette expérience, le gaz ré- sidu provenant de l’éther muriatique ne doit contenir que de ET D'HISTOIRE NATURELLE. 63 Yhydrogène carboné, puisqu'il disparoît en entier en passant sur du chlorure de mercure, et qu’on obtient pour tout produit de l'acide hydro-chlorique et du charbon (1) : on ne devroit done point , d’après cela, admettre l’oxigène comme partie constituante de i'éther muriatique, puisqu'on n’en retrouve dans aucun des produits de ces expériences analytiques. Ces considérations nous avoient fait penser que cet éther étoit une combinaison d'hydrogène percarboné et d'acide hydro- chlorique , et nous avons émis publiquement notre manière de voir à cet égard dans une des séances de la Société de Pharmacie. Nous nous croyons d'autant plus fondés à soutenir cette opinion que, suivant les observations de M. Thenard, Le résidu de léther hydro-chlorique ne retient pas sensiblement de matière char- bonneuse, mais contient une très - grande quantité d’eau; or, d’après ce que nous avons appris de M. Gay-Lussac, les élémens de l’alcool sont dans une telle proportion qu'il peut étre consi- déré comme de l’eau, plus du gaz oléfiant. Si donc ce gaz se combine avec l’acide hydro-chlorique, tout le charbon est en- levé, et il ne doit rester que de l’eau, ce qui est conforme à l'expérience. Néanmoins M. Boullay, qui s’est beaucoup oc- cupé des éthers, n'admit point notre facon de penser, la com- battit vivement, et lut, dans la séance suivante, une note tendant à la réfuter et à maintenir celle qu'il avoit émise anciennement, el qui consistoit à considérer l’éther hydro-chlorique comme ure combinaison d'acide hydro-chlorique et d'alcool. [1 publiera sans doute ses observations, et nous ne nous permettrons jusqu'alors aucune objection qui leur soit particulière. Seulement nous le prierons de faire attention à la remarque que nous a fait faire M. Ampère, et qui nous paroit d’un très-grand poids en faveur de notre hypothèse : c’est que la pesanteur du gaz hydro-chlo- rique ajoutée à celle du gaz oléfiant représente précisément celle du gaz éther hydro-chlorique, et que, de plus, la pesanteur du chlore, jointe à celle du gaz oléfiant , donne exactement la den- sité de la vapeur de la substance huileuse, Ces deux combinaisons ne difléreroient donc , d’après cela, que par la proportion d'hy- drogène ; ce qui est entièrement conforme à nos expériences , et ce qui rend compte de la différence de volatilité et de pesanteur qu’on remarque entre l’éther et cette huile. LS () Nous nous sommes assurés qu’il ne se formoit pas d’eau, 64 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE De telles conclusions s’accordent bien peu avec les résultats qu’on obtient par l’analyse eudiométrique, et comme jusqu'à présent nous ne sommes point en mesure de donner une ex- plication satisfaisante de ces diflérences, nous nous bornercns à une simple exposition des faits. Analyse du Gaz hydrogène carboné de l’Éther. 155 parties de ce gaz donnent, par leur combustion, un vo lume d'acide carbonique de 6r,2r parties. Or on a employé, pour faire celte analyse eudiométrique, 183 parties de gaz oxi- gène pur, dont il n’estresté , après la combustion, que 33,33, etc.; il yen a donc eu 149,67 qui ont servi à brûler et le carbone et l'hydrogène du gaz soumis à l'analyse; sur ces 149,67 parties, il y en a eu 61,21 employées à la formation d'autant d’acide carbonique, et par conséquent 88,46 seulement ont transformé en eau le double d'hydrogène, c’està-dire, 176,92 parties de ce dernier. Maintenant, si nous concluons le poids du carbone d’après la quantité d'acide carbonique observée, nous le trouverons égal à 22,2 : d’un autre côté, celui de l’hydrogène et celui du gaz soumis à l'expérience, conclus l’un et l'autre d’après leurs pe- santeurs spécifiques respectives (1), sont pour les 176,92 parties du premier 12,95, et pour les 155 du second 53,14 : retranchant de ce dernier poids la somme de l'hydrogène et du carbone, on a un reste de 17,98, et par conséquent une perte égale. Or cette perte est ordinairement attribuée à de l’eau qui a été formée aux dépens d’une portion d'hydrogène et d’oxigène appartenant au gaz analysé. Ainsi il y auroit dans ce gaz une quantité d’eau de constitution faisant à très-peu près le quart de son poids. Or 17,98 d’eau contiennent 15,89 d’oxigène, et par conséquent 2,09 d'hydrogène; mais 15,89 d’oxigène représentent un poids d’oxide de carbone égal à 27,87, ou, en volume, à 28,80; donc, si les 155 parties en volume du gaz analysé étoient un mélange d’oxide de carbone et d'hydrogène carboné , il y auroit en volume 28,80 d’oxide de carbone, et par conséquent 126,20 d’un hydrogène carboné, contenant un volume d'hydrogène égal à 205,47, et fournissant par sa combustion 6r,21 d’acide carbonique repré- sentant pareil volume de vapeur de carbone. (1) Celle du gaz inflammable dont il est ici question est de 0,34284. Analyse ET D'HISTOIRE NATURELLE. 65 Analyse du Gaz de l'Huile des Chimistes hollandais. Un volume de 157,5 du gaz inflammable obtenu en faisant passer l’huile du gaz oléfiant à travers un tube de porcelaine élevé à la température rouge, a fourni par sa combustion un volume d’acide carbonique de 48,83 parties. Or, sur les 173,76 parties d’oxigène qui ont été mêlées aux 157,5 de gaz pour en opérer l'analyse eudiométrique, il y en a eu 69,83 que la com- bustion n’a point employées ; donc 103,93 parties seulement sont entrées en combinaison pour former de l’eau et de l'acide car- bonique; mais ce dernier en a pris 48,83; donc il n'y en a eu que 55,10 employées à former l’eau aux dépens de l'hydrogène de ce gaz inflammable. 1] résulte de là que le poids du carbone, déduit comme dans la précédente analyse, est de 20,3r pour un volume de 157,5 de gaz inflammable, ou, ce qui revient au même, pour 71,15 en poids de ce même gaz; car sa pesanteur spécifique est de 0,45176. D'autre part, 5,10 d’oxigène ayant brûlé 110,20 d'hy- drogène, il suit que le gaz soumis à l’analyse contient au moins 8,07 d'hydrogène en poids. Retranchant la somme des poids de l'hydrogène et du carbone de celui du gaz, il reste 42,77, re- présentant l’eau formée aux dépens de l’oxigène propre au gaz et d’une quantité d'hydrogène qui lui appartient aussi. Ainsi le gaz inflammable obtenu en décomposant par le feu l'huile des chimistes hollandais contiendroit, comme celui de l'éther hydro-chlorique, une quantité notable d’oxigène. Or, comment admettre qu'un produit résultant de la combinaison du chlore et de l'hydrogène percarboné, dont la nature a été parfaitement étudiée et dont les proportions se trouvent concorder avec les pesanteurs spécifiques; comment, disons-nous, peut-on admettre dans un tel produit une proportion d’oxigène aussi forte, surtout si on remarque que des corps qui en sont aussi avides que le potassium, ne peuvent y démontrer la présence de la moindre portion de ce gaz; et d’ailleurs, s’il en étoit ainsi, il faudroit en conclure que cet oxigène est contenu ou dans le chlore ou dans le gaz oléfiant, puisque ce sont les seuls corps qui concourent à la formation de l'huile des chimistes hoflandais, Nous craindrions de hasarder une opinion à cet égard, et nous nous proposons de poursuivre nos expériences sur ce point in- téressant. Malgré tous les soins que nous avons apportés dans ces ex- Tome ZXXXIII. JUILLET an 1816. T 66 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE périences eudiométriques, cependant nous n’osons y ajouter un grand degré de confiance, en raison de la difficulté qu’on éprouve à déterminer bien exactement la densité d’une petite quantité de gaz. Remarquons néanmoins que ces résultats se rapprochent de ceux obtenus par M. Thenard, qui, en traitant directement l'éther hydro-chlorique dans l’eudiomètre, a été amené à conclure que cet éther contient un poids d'oxigène double de celui de l'hydrogène surabondant à l'acide hydro-chlorique. Quoi qu’il en soit, il n’en est pas moins constant que l'huile du gaz oléfiant est un véritable éther hydro-chlorique, ue diflé- rant de celui que M. Thenard a fait connoître que par le rapport et non par la nature de ses élémens, par une pesanteur plus grande et par une moindre volatilité. Ainsi l'acide hydro-chlo- rique, ou ses élémens, est susceptible d'entrer comme Principe constituant dans deux éthers difiérens, et par conséquent il est encore analogue en ce point à l'acide hydriodique. Nous terminons ce premier Mémoire par appeler l'attention des médecins sur ce nouvel éther : sa moindre volatilité en rend emploi beaucoup plus facile, et nous ne doutons point qu’il ne jouisse de propriétés qui lui soient particulières, et qui le feront . peut-être ranger au nombre des médicamens utiles. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 67 OBSERVATIONS POUR SERVIR A UNE CLASSIFICATION DES ANIMAUX ; Par M. DE BARBANÇOIS, DU DÉPARTEMENT DE L'INDRE. LA division des animaux proposée par M. Delamarck, en deux grandes sections, savoir , les vertébrés et les invertébrés, présente des motifs si bien établis, que je ne crois pas qu’on puisse en adopter une plus parfaite; mais le même assentiment peut-il être donné à leur sous-division en quatorze classes proposée par le même auteur? Ces quatorze classes sont : 1° les mammifères, 20 les oiseaux, 30 les repüles, 4° les poissons, 5° les mollusques, 6° les cirrhi- pèdes, 7° les annelides, 80 les crustacés, 9° les arachnides (ou insectes sans ailes); 10° les insectes (ou insectes ailés); r1° les vers, 120 les radiaires, 13° les polypes, 14° les infusoires (voyez pag. 128, tome I de sa Philosophie Zoologique, imprimée en 1809). Je ne le pense pas, et cependant je crois que cette sous: division, qui d’ailleurs mérite les plus grands éloges à son au- teur, demande pour être adoptée quelques foibles changemens, C’est donc sous ce rapport et dans le desir que J'ai de contribuer de mes foibles moyens aux progrès de la science, que j'ai cru pouvoir me permettre de présenter quelques observations, que Je soumets aux personnes plus éclairées que moi dans cette partie. Première Observation.Je pensequ’il faudroit placer les hommes dans une classe séparée de celle des mammiféres, car il se trouve entre eux et les mammiferes des diflérences extrêmes. D'abord, sous les rapports anatomiques, ils diffèrent des singes, en ce qu'ils ont le trou occipital presque perpendiculaire à la ligne de la base du crâne, et qu'ils ont le cerveau bien plus volumi- 12 68 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE neux, puisqu'ilremplit leur crâne dont l'amplitude est démontrée par un angle facial qui porte depuis 75 degrés d'ouverture jus- qu'à go degrés ou angle droit, n'étant jamais au-dessous de 75 degrés dans les races les moins parfaites; tandis que le crâne de l'orang ne présente pas un angle de plus de 65 degrés. Ils dif. fèrent encore des singes, en ce qu'ils mont pas de sac thiroïdien, et qu'ils possèdent exclusivement à tous les animaux, l'organe de la parole. Ils ont également pour différence marquante, que dans aucun animal et même dans l’orang, les filets nerveux ne sont aussi fins proportionnément à la grosseur des masses nerveuses. Si on les considère ensuite sous les rapports apparens, ils dif- férent des singes, en ce qu'ils peuvent marcher constamment sur les talons et se tenir sur deux pieds; qu'ils ontiles doigts des pieds moins longs et placés auirement, ne pouvant comme les singes employer les pieds aux mémes fonctions que les mains ;. qu'ils ont l'angle facial bien plus ouvert, la mâchoire bien moins proéminente, la peau douce, presque dénuée de poil, excepté sur la tête et aux parties de la génération, n’y ayant d’exceplion à cet égard que pour les mâles, dont le bas de la face seule- ment et quelquefois la poitrine sont chargés de poils. Quant aux rapports intellectuels, la différence est immense ou plutôt incommeusurable : car, seuls parmi les animaux , ils sont susceptibles de connoître les rapports moraux et d’avoir une idée nelle de l'existence, done de la vie et de la mort, du passé, du futur; enfin d'avoir des idées métaphysiques, différence dont les résultats sont-tels, qu'il faudroit pour les placer au rang qu'ils méritent d'occuper parmi les êtres, admettre un quatrième règne dans la nature, sous le nom de règne moral, Deuxième Observation. Je pense qu'il seroit nécessaire de séparer les reptiles en deux classes, l'une qui renfermeroit les reptiles écailleux, et l’autre les reptiles visqueux : car ces replies different plus entre eux, que les insectes sans ailes ne diflèrent des insectes ailés, dont cependant on a reconnu la nécessité de faire deux classes; et d’ailleurs la réunion de ces divers reptiles dans une même classe, me paroit contraire à l’exactitude des méthodes actuelles. Les diflérences extrêmes qui existent entre les reptiles visqueux appelés batraciens et les reptiles écailleux appelés cheloniens, sauriens, ophydiens, consistent en ce que les premiers éprouvent dans leur vie une métamorphose que les autres n’éprouvent pas; ET D'HISTOIRE NATURELLE. G) que les premiers ont au commencement de leur existence, les formes et l’organisation d’un poisson, à tel point, qu’ils possèdent alors des branchies et n'ont point de poumons, ce qui n'a pas lieu dans les autres; d’où il résulte que sous ce seul rapport de l'organe de la respiration, 1l y a plus Ge différence entre les deux classes de reptiles que nous proposons , qu’il n’y en a entre les deux classes d'insectes admises. Les reptiles visqueux pré- sentent tous une peau très différente de celle des écailleux, et ils ont la facullé de vivre des mois entiers dans l’eau, faculté refusée aux autres reptiles; mais c'est surtout sous Je rapport du mode de génération que la différence entre ces deux classes est très grande, car les reptiles visqueux, sous les rapports de la petitesse et de la quantité des œufs et du mode de fécondation, sont bien plus rapprochés des poissons que des autres reptiles. D'après ces diflérences, qui tendent à prouver que les reptiles visqueux tiennent plus aux poissons qu'aux autres replüles, il me semble qu'il est indispensable d’en faire une classe séparée, qu'on pourroit regarder comme l'intermédiaire entre les poissons et les reptiles écailleux , et à laquelle il seroit peut-être plus con- venable de donner le nom de rep'iles poissons que célui de reptiles écailleux ; d’ailleurs cette classe sera mieux désignée eu lui donnant l’un de ces deux noms qui font opposition à celui de reptiles écailleux, que si on lui conservoit, comme quel- ques personnes pourroient le vouloir, le nom de batraciens ,. lequel doit être évilé, non-seulement parce qu’il rappelle un ordre de la classe des reptiles, idée tout-à-fait contraire à celle de classe séparée; mais encore parce que n'ayant été donné aux reptiles visqueux que pour faire opposition aux dénominations afiectées à chacun des trois ordres qui composent les autres rep- tiles, cette opposition d'ordre ne subsiste plus dans la nouvelle division que Je propose. Troisième Observation. Je pense, comme M. Cuvier, qu'il faudroit séparer les sèches de la classe des mollusques et en faire uve classe séparée, sous le nom de céphalopodes qu'il leur a: donné. En effet sous les rapports des systèues nerveux, du nombre des cœurs , et de la tête où se trouve dans les sèches un crâne, un bec et des ÿeux lrès-marquans, il y a une telle différence entre les sèches et les autres mollusques, qu’il est impossible: de ne pas reconnoîlre la nécessité d’en faire deux classes séparées, Quatrième Observation, Je pense qu'il faudroit retrancher la classe des cirrhipèdes et la réunir à la classe des annelides.. #70 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE comme a fait M. Latreille, parce que leur nombre et les diffé- rences qui les distinguent des annelides, ne sont pas assez im- portanus pour nécessiter d’en faire une classe séparée, el que c’est afloiblir la division par classes que d’en multiplier le nombre sans de très-fortes raisons. Cinquième Observation. Je pense qu’il seroit convenable de donner à la classe des insectes ailés, le nom d'ésectes à méta- morphose, parce qu'il y a beaucoup d'insectes de cette classe dont les ailes sont avortées, tandis qu’il n’y en a aucun qui ne subisse une métamorphose. Egalement je pense qu'il faudroit adopter pour la classe des vers, la désignation de vers intérieurs pour ne laisser aucun doute sur le mode d’existence affecté aux animaux de celte classe, et sur les différences marquantes qui les séparent des animaux des autres classes, auxquels jusqu'à ce jour on avoit donné le même nom. Ainsi ces quatre dénominations de reptilés écailleux, de Tep= tiles visqueux, d'insectes à métamorphose, des vers intérieurs F pourront rester affectées aux classes qu'elles concernent , Jusqu'à ce qu'il plaise à un naturaliste en réputation de les changer contre des noms tirés du grec. Si ces changemens étoient admis , on auroit alors seize classes, dont six pour les animaux vertébrés, savoir, les hommes, les mammiferes , les oiseaux , les reptiles écailleux, les reptiles vis- queux etles poissons ; et dix pour les animaux invertébrés, savoir, les céphalopodes, les mollusques, les annelides, les crustacés, les arachnides, les insectes à métamorphose, les vers intérieurs les radiaires, les polypes et les infusoires. Cette première distribution reconnue, je proposerois de par- tager chacune de ces classes en deux sous-classes, mode de di- vision qui me paroît très-intéressant à admettre, non-seulement parce que je le crois fondé en raison pour chaque classe sans exception, mais encore parce que présentant toujours des op- positions à l'esprit des étudians, il favorise de cette manière l'accès de la science. Je pense qu’on peut diviser, comme M. Virey, la classe des hommes en deux sections ou sous-classes, savoir, celle des 7z- telligens et celle des bornés, dont les différences apparentes sont constituées d’abord par la mesure de l’angle facial qui, dans les bornés, ne passe Jamais 80 à 82 degrés au plus, tandis que dans les intelligens il est toujours plus ouvert : ce qui annonce dans 3 ET D'HISTOIRE NATURELLE. "I les premiers un cerveau d’une capacité moindre que celui pos- sédé par les seconds; et ensuile par la peau noire ou noirätre, lorsqu'elle est réunie à un poil court et laineux, ce qui a toujours lieu dans les sous-classes des bornés. On peut d’ailleurs observer que cette sous-classe qui comprend notamment les Hottentots et les Nègres, a bien plus de confor. milé apparente avec les singes, que la sous-classe des intelligens sous les rapports de la proéminence de la mâchoire, de la grandeur de la bouche, de la longueur des bras et des doigts, de l’ab- sence des mollets, et du trou occipital placé moins perpendi- culairement à la ligne de la base du crâne. La classe des mammifères me paroïît présenter une division plus naturelle et plus tranchante en Zerrestres et en marins, que celle en trois sections adoptée jusqu’à ce jour, savoir, les onguiculés, les ongulés ou sabotés, et les mammifères à nageoires, qui ne sont autres que les mammifères marins; car on ne peut admettre entre les onguiculés et les ongulés, autant de différences à beaucoup près, que celles qui existent entre ces deux premières sections et la troisième. La classe des oiseaux a été partagée par M. Lacépède en deux sous-classes, savoir, les oiseaux à jambes garnies de plumes, et les oiseaux à jambes dénuées de plumes, et cette division, sans élre cependant très-marquante, me paroît néanmoins |à meilleure qu'on puisse adopter, La classe des reptiles écailleux présente une division natu- relle et fortement prononcée en deux sous-classes, savoir, les reptiles avec pattes où se trouvent les chéloniens et les sauriens; et les reptiles sans pattes où se trouvent les ophydiens ou serpens. La classedesrepiiles visqueuxse partagenaturellement en deux sous-classes, les visqueux sans queue et les visqueux avec queue, lesquelles joignent à cette différence marquante à. l'extérieur , celle d’avoir des organes différens de respiration ; car les animaux de la première sous-classe ne conservent point de branchies dans leur état parfait , tandis que ceux de la seconde en conservent, tels sont les sa/amandres, les sirènes, les profées qui composent cette sous-classe, La classe des poissons a été partagée par M. Lacépède en deux sous-classes, les osseux et les cartilagineux, et cette di- vision me paroît la meilleure qu’on puisse adopter. La classe des sèches ou des céphalopodes se divise naturel #72 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE lement en deux sous-classes, les sèches portant un sac et les sèches portant une coquille, laquelle comprend les argonautes et les carinaires. La classe des mollusques a été partagée par M. Bosc en deux sous-classes, les céphalés et les acéphalés, et cette division ne laisse rien à desirer. La classe des annelides se divise naturellement en deux sous- classes, les zus et les couverts, laquelle comprend les animaux de cette classe qui ont un fourreau où une coquille, ou qui se placent dans des corps étrangers (tels sont entre autres les cirrhipèdes). La classe des crustacés a été partagée par M. Latreille en deux sous-classes, les entomostracés et les malacostracés, et cette division très-délicate me paroît bien établie. La classe des arachnides a été partagée par M. Delamarck en deux sous-classes, les aztennistes et les palpistes, et je crois celte division la meilleure qu’on puisse adopter. La classe des irsectes ailés ou à métamorphose a été égale= ment partagée par M. Delamarck en deux sous-classes, les broyeurs et les suceurs, et cette division est très-avantageuse à l'étude de cette partie si compliquée de l'Histoire naturelle. La classe des vers intérieurs se partage naturellement en deux sous-classes, selon les organes où ils se placent, ainsi nous la diviserons en 2ers dLES{LILS OU ETS VÉSCETAux. La classe des radiaires se composant, d’après M. Delamarck, deséchinodermes et des radiaires mollasses, se trouve par cette raison partagée naturellement en deux sous-classes, savoir, les échinodermes et les r2alacodermes. La classe des polypes se partage naturellement en deux sous- classes, les polypes libres ou polypes sans polypier, et les aglo- mérés ou polypes à polypier. Enfin la dernière classe, celle des érfusoires sera divisée, d’après M. Delamarck, en deux sous-classes, les appendiculés et les Zissés ou sans appendices. On peut encore partager les animaux en quatre divisions. D'abord la section des vertébrés en deux, savoir, les vertébrés à sang chaud et les vertébrés à sang froid ;-les premiers com- prennent les hommes, les mammifères et les oiseaux; les seconds comprennent aussi trois classes, les reptiles écailleux, les reptiles visqueux ET D'HISTOIRE NATURELLE. 73 visqueux et les poissons; ensuite la section des invertébrés, éga- lement en deux, savoir, les évertébrés à système nerveux vi- sibleetles invertébrés à système nerveux invisible. Les premiers comprennent six classes : les céphalopodes, les mollusques, les annelides, les crustacés, les arachnides et les insectes à méta- morphose. Les seconds comprennent les quatre dernières classes, et par conséquent les vers intérieurs, les radiaires, les polypes et les infusoires. Outre ces divisions, on peut encore reconnoître que les ani- maux nous présentent diflérens degrés d'organisation très-pro- noncés, et lesquels sont affectés successivement à des corps organisés d’une manière plus parfaite et plus compliquée depuis l'infusoire jusqu'à l’homme. M. Delamarck dans sa Philosophie Zoologique, ci-dessus citée, reconnoît six de ces degrés (voyez pag. 277, tome Ier); dans le 1er degré il place les infusoires et les polypes; dans le 2me, les radiaires et les vers; dans le 3me, les insectes et les arach- nides; dans le 4e, les crustacés, les annelides, les cirrhipèdes et les mollusques; dans le 5me, les poissons et les reptiles; dans le 6me, les oiseaux et les mammifères. Je pense que cette division n’est pas suffisante, d’abord parce que les mêmes raisons qui obligent de séparer les hommes de la classe des mammifères, tendent également à faire reconnoître qu'ils possèdent un degré d'organisation bien supérieur à celui des autres mammifères; ensuite il est impossible de comprendre dans le même degré d’organisation les mollusques avec les crus- tacés et les annelides, qui présentent des systèmes nerveux si différens; enfin il y a trop de différence entre l’organisation des polypes qui possèdent un tube digestif , organe essentiel des animaux, et celle des infusoires qui sont privés de cet organe, pour les comprendre dans le même degré. Ainsi ce seroil donc trois degrés de plus à ajouter aux six adoptés par M. Delamarck, d’où il résulteroit que les animaux présentent neuf degrés d’or- ganisation qui sont constitués chacun de la manière suivante. Le rer degré d'organisation animale est constitué par le défaut d'apparence de parties nerveuses et d'organes quelconques, et surtout par la nullité du tube digestif; les animaux de ce degré qui ne comprend que les érfusoires, jouissent seulement de lir- ritabilité, propriété qui constitue l’animalité, et de la faculté de locomotion et de celle de se régénérer d'eux mêmes par fissure, ce qui les fait considérer comme fissipares : on peut les supposer Tome LXXXIII, JUILLET an 1816. K 74 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE formés par une malière gélatineuse qui renfermeroit des points nerveux invisibles; et comme les animaux de ce degré n’ont point de tube digestif, ils sont les seuls qui paroissent vivre à: la manière des plantes, par l’absorption des fluides et des li- quides au milieu desquels ils se trouvent. | Le 2me degré d'organisation est constitué par le défaut ap- parent des organes de circulation, de respiration et de génération et d’aucune partie nerveuse, comme dans le degré précédent , mais aussi par la présence d’un tube digestif; les animaux de ce degré, qui ne comprend que les polypes, jouissent d’une ex- cessive irrilabilité, comme ceux du degré précédent , et de la faculté de se régénérer par bourgeons, ce qui les fait considérer comme gemimipares. On peut les supposer formés par une matière géla- tineuse mieux organisée que celle qui est aflectée à l'existence des animaux du degré précédent, Le 3me degré d'organisation est constitué par les animaux chez lesquels on remarque, outre le tube digestif, des organes trés-évidens, sans pouvoir leur affecter avec assurance aucun em- ploi particulier, soit pour la circulation, la respiration ou la gé- nération; on ne leur voit également aucune apparence de sys- tème nerveux, et cependant il faut leur supposer un système de ce genre qui auroit un point central d’action et de réaction, puis- qu’ils présentent une organisation déjà très-compliquée, et que d’ailleurs la plupart ne peuvent se reproduire par fissures où par bourgeons comme ceux des degrés précédens; leur propagation se fait au moyen de corpuscules oviformes ou gemmules internes qu'ils répandent autour d’eux , ainsi on peut les considérer comme subovipares. Une partie d’entre eux possède un tube digestif complet, c’est-à-dire avec bouche et anus. Les animaux de ce degré, qui comprend les radiaires et les vers intérieurs, pré- sentent donc une organisation bien plus compliquée que celle des animaux compris dans les degrés précédens, et cependant ils n’admetient pas les dispositions symétriques qui servent de base à l’organisation des animaux des degrés suivans. Le 4me degré est constitué par un mode de circulation et de- respiration résultant de l’existence d’un vaisseau dorsal et des trachées ; par la présence d’une tête très-distincte, des pattes. articulées et des sexes séparés ; enfin par l’existence d’un système nerveux très-visible, consistant dans une moëlle nerveuse, longue, noueuse, ou cordon nerveux unique avec des renflemens appelés. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 75 £anglions , auxquels les nerfs aboutissent et dont l’antérieur bilobé a les apparences et fait les fonctions de cerveau. Les animaux de ce degré, qui comprend les arachnides et les Zrsectes à métamorphose, c’est-à-dire tous les izsectes ailes ou non aëlés, sont donc bien mieux organisés que ceux des trois degrés précédens ; leur mode de génération est aussi très- différent, car les sexes s’accouplent et ils se reproduisent par des œufs fécondés : donc ils forment le premier degré de ce nombre immense d'animaux qui sont ovipares. Le 5me degré est constitué par l'existence d’un cœur avec des artères et des veines, et point de vaisseau dorsal, et par celle des branchies au lieu de trachées, lesquels organes de circu- lation et de respiration, très-différens de ceux affectés pour le même objet aux animaux du degré précédent , sont accompagnés d’un système nerveux et d’un mode de reproduction à peu près semblables à ceux des animaux du degré précédent ; de sorte que les différences marquantes entre ces degrés, sont l’effet de celles reconnues dans les systèmes de circulation et derespiration, qui sont bien plus perfectionnés dans ce 5me degré que dans le pré- cédent. Les animaux de ce degré, qui comprend les crustacés et les annelides, sont donc aussi ovipares. Le 6me degré est constitué par l'existence reconnue d’un sys- tème nerveux très-diflérent de celui affecté aux deux degrés pré- cédens : ainsi au lieu d’un seul cordon nerveux avec des renflemens auxquels les nerfs aboutissent, les animaux de ce degré, qui comprend les mollusques et les céphalopodes, possèdent deux ou trois cordons nerveux qui n’ont de renflemens ou ganglions qu’à leurs extrémités, et même dans plusieurs d’entre eux (les céphalopodes) le ganglion antérieur paroît enveloppé d’un crâne cartilagineux. Une très-grande partie des animaux de ce degré présente un système osseux qui, sous le nom de coquille , est tout extérieur, et sous ce rapport, très-diflérent de celui affecté aux animaux des degrés suivans; une partie même des animaux de ce degré (particulièrement les céphalopodes) ont un os in- térieur, Ce degré a aussi pour marque caractéristique et très- singulière, que presque tous les animaux qui le composent ont les sexes réunis , et se trouvent les seuls parmi ceux qui possèdent un système nerveux visible qui soient ainsi organisés; d’ailleurs ils ont à peu près les mêmes systèmes de circulation, de respi- ration et de reproduction par œufs , que les animaux des degrés précédens, et ils sont tous ovipares. K 2 76 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Le me degré est constitué par l'existence reconnue d’une or- ganisation extrêmement différente de celle des animaux des degrés précédens, laquelle ne présente qu’un système nerveux; tandis que celle des animaux de ce degré en présente deux très-diflérens- et séparés même par leurs usages, dont l’un, sous le nom de grand sympathique, et qui seroit mieux désigné par le nom de ganglionique, reste affecté au mouvement des organes 1n- térieurs de l'animal; et l'autre, qu’on peut appeler sezsitif où cérébral, se trouve le résultat d’une masse nerveuse dite cerveau, renfermée dans une boîte osseuse appelée créne, avec un pro- Jongement nerveux également renfermé dans une enveloppe os- seuse appelée vertèbres, et lequel sert au mouvement des organes extérieurs ; les animaux de ce degré possèdent encore un syÿs- tème osseux intérieur, ou squelette auquel viennent se rattacher leurs muscles, et enfin ils ont tous le sang rouge. Dans ce degré, qui comprend les poissons et les reptiles soië visqueux, soit écailleuxæ. dans les classes inférieures des ver- tébrés, le système de respiration commence à se perFctionner: on y voit le passage des branchies aux poumons vésieuleux ;,. mais dans ce degré le système de circulation est encore imparfait, le cœur n’a qu’une ventricule et une partie du sang retourue du cœur dans la circulation sans avoir passé par les poumons, ce qui l'empêchant d'acquérir le degré de chaleur dont il est revêtu dans les animaux des degrés suivans, l’assujettit aux influences de la température de l'atmosphère, ce qui fait renfermer les animaux de ce degré dans la division des vertébrés à sang froid. Dans ces animaux, l’orgamsation nerveuse, quoique très -supé- rieure à celle des degrés précédens, est cependant encore bien inférieure à celle des animaux du degré suivant; car l'es hémi- sphères de leur cerveau, sont tuberculeux, peu plissés et ne remplissent pas la capacité du crâne, et cependant on voit déjà dans ce degré l'action réciproque des deux systèmes nerveux, c’est-à-dire que laction du ganglionique peut être atténuée par celle du système sensitif, ce qui rend ces animaux susceptibles: de connoître la crainte, effet très-important de ce degré d’orga- misation, et qu’on ne remarque pas dans les animaux des degrés précédens qui n’ont qu'un système nerveux, et qui tous par cette’ >aison sont soumis à l'empire absolu de l'instinct. D’ailleursquoique ces animaux aient les deux sexes séparés et une organisation bien plus parfaite que ceux des degrés précédens , ils sont cepen- dant encore presque tous ovipares. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 77 { Le 8me depré est constitué par l’existence d’un système ner- veux sensilif, et d’un système de cireulation plus parfait que dans le degré précédent; dans les animaux de ce degré, qui comprend les oiseaux et les r2ammifères , les hémisphères da cerveau remplissent la capacité du crâne, elles sont plissées et non tuberculeuses , d’où il résulte que ce système sensitif rend les animaux de ce degré bien plus intelligens que ceux du degré précédent , et tellement, que dans plusieurs d’entre eux, et par- ticuliérement dans le singe, le chien et l’éléphant , le système sen- sitif peut dominer accidentellement l’action du ganglionique à un point extraordinaire, et c’est ce qui a lieu toutes les fois que ces animaux éprouvant un chagrintrès-vif,ils ne veulent plus manger; efet qui ne se remarque jamais dans aucun des animaux du degré précédent. Le système de circulation dans les animaux de ce degré, présente aussi un résultat très-diflérent : car leur cœur a deux ventricules et deux oreillettes, et leur saug passe entijè- rement par les poumons avaut de retourner dans la circulation, ce qui lui donne une chaleur indépendante de celle de l’atmo- sphère, et l’élève constamment de 30 à 35 degrés. Le mode de génération est aussi plus parfait dans les animaux de ce degré, car non seulement une grande partie d’entre eux est vivipare, et les femelles allaitent leurs petits, mais encore presque tous les ovipares de ce degré couvent leurs œufs, et parmi eux il y en a beaucoup où le mâle et la femelle ont soin des petits, ce qui ne se voit point dans les animaux du degré précédent. Le gme degré qui est aflecté aux hommes exclusivement, est constitué par l'existence d’un organe particulier, celui de la pa- role, et par celle d'un système nerveux sensilif si supérieur à ce même système dans les degrés précédens, qu’elle rend les hommes susceptibles de s'élever à un degré d'intelligence auquel les autres animaux ne peuvent atteindre. Dans ce degré le sys- tème sensitif ou cérébral peut tellement et si constamment dominer le système des grands sympathiques ou le ganglionique, que cet effet pourroit être regardé comimne un des moyens em- ploy és par l’auteur de la nature, pour donner aux hommes cette acuité qu'on appelle raison, et pour leur faire connoître cet ordre de besoins dont ils sont seuls susceptibles, et qu’on ap- pelle besoins moraux : de même que c’est par la force de ce Système qu'ils peuvent, exclusivement à tous les animaux, s'élever à des idées métaphysiques. D'ailleurs sous les autres rapports les animaux de ce degré sont organisés comme les mammifères , 7ù JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE articulièrement comme les singes, et se reproduisent de Ia même manière. 5 D'après l'exposé de ces différentes divisions, je proposerois le Tableau suivant: Tableau de la Classe proposée. Sections. Divisions. Degrés. Classes. Sous-Classes. ea intelligens. ge. Toni een S :ps t . à sang chaud. Mammifères . ..... Se { SES gme marins. Oise jamb. garn. de pl. vertébrés avec pattes. sans pattes. Lies dénu. de pl. us, écailleux. .. À « û . . avec queue. àsangfroid..{ 7°. 4 Reptiles visqueux.. - ue eue POISSONS ee 35 MORE . cartilagineux. avec coquille. M En eh ee ae sac. gr, Les animaux divisés en céphalés. Mollusques. .... SE . acéphalés. : nus. 4 : Annelides, ..,...... { à systeme pme couverts. nery. visible. CRE EE SNA RE EP ce * |malacostracés. s antennistes. rachnides......... { ë me. il 16es pps Le royeurs. . +ébr Insectes à métamor p.{ 3 invertébr. nse PA.) cuceurs. Vers intérieurs. «... rare me viscéraux. É Dares ae +++e..e.r"*"]malacodermes. à système libres nery, inyisib.) 27°. {Polypes............ per Et 1er, {Infusoires......ssee.] lisses 7 $ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 79 NOUVELLE LITTÉRAIRE. Mémoires pour servir à l'Histoire naturelle des Pyrénées et des pays adjacens; par M. Pulassou, Correspondant de l'ancienne Académie Royale des Sciences de Paris, et de l’Ins- titut national. Omnia incerta ratione, et in naturæ majestate absconditæ,. PLINE. Un vol. in-8°. A Pau, de l’Imprimerie de Vignancourt. À Paris, chez Barrois l'aîné, rue de Savoie, no 13. 1815. Extrait. M. Pulassou avoit publié, il y a bien des années, un ouvrage intitulé : Essai sur la Minéralogie des Monts Pyrénées. Cet ouvrage fut bien accueilli par le monde savant, L'auteur continua ses observations et donna un nouveau Memoire sur les Attérissemens formés des débris des Pyrénées, quil présenta en l'an vir à l’Institut national, qui le jugea digne d’être imprimé parmi ceux des Savans étrangers. Le nouveau volume que nous annoncons, contient tous les dif- férens travaux de l’auteur. Nous le ferons connoître plus en détail. 89 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, etc. RIT DESERT STE EI AI EE TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Phénomènes de répulsion et d'attraction sans électricité; par J. P. Dessaignes. Pag ss Tableau météorologique ; par M. Bouvard. 12 Observations sur le gaz hydrogène carboné appliqué à l'éclairage; par W. Th. Brande. 14 Lecons de géologie données au Collége de France ; par J.-C, Delamétherie. Extraït. 24 Recherches sur la nature de la matière huileuse des chimistes hollandais ; par MM. Robiquet et Colin. 53 Observations pour servir à une classification des ani- maux; par M. de Barbançoïs. 67 Nouvelle littéraire. 79 De l’Imprimerie de M Veuve COURCIER, Imprimeur-Libraire, pour les Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n° 57. JOURNAL D'É DIS EO UE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. AOUT AN 1816. MÉMOIRE Sur les Propriétés optiques du Muriate de Soude, du Fluate de Chaux et du Diamant; Pan DAVID BREWSTER. Extrait des Transactions Philosophiques de la Société royale d’Edimbourg. LU LE 20 NOVEMBRE 161h. Edimbourg , de l’Imprimerie de Nell et Compagnie. 1816. L’ABBÉ Haüy a remarqué il y a long-temps, que la propriété d’une double réfraction n’est possédée par aucun des cristaux dont la forme de la molécule intégrante se distingue par sa sy- métrie, tels que le cube et l’octaèdre régulier. Cette classe de minéraux comprend le fuate de chaux, le muriate de soude, le rubis spinelle, le muriate d’ammoniac, l'alun et le diamant. Tome LXXXIII, AOÛT an 1816. L Le. ë8z JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Quoique M. Haüy n'ait examiné qu’un très-petit nombre de cristaux doués d’une double réfraction, cependant , à l’exception du diamant à qui, dans beaucoup de circonstances, j'ai trouvé cette propriété, son observation a élé confirmée par les expé- riences de Malus, de Biot et les miennes, Aussi considérons- nous {ous les cristaux de cette classe comme n’exercçant pas plus d'action sur la lumière polarisée qu'une masse d’eau. Aucune explication de cette anomalie singulière ne s’étoit of- ferte jusqu’au moment où M. Biot découvrit que tous les cris- tiux doués d’une double réfraction, se divisent en deux classes, dont lune est représentée par le spar calcaire et l’autre par le cristal de roche; M. de Laplace (1) a déjà fait voir dans sa belle Théorie de la Réfraction double, que tous les phénomènes du spar calcaire peuvent s'expliquer en supposant la déviation du rayon extraordinaire produite par une force répulsive, dirigée de l’axe et proportionnée au carré du sinus de l'angle, que le rayon extraordinairement réfracté forme avec l’axe du cristal. M. Biot aperçut de la même manière que les phénomènes de la double réfraction dans le cristal de roche, s’expliquoient par une forceattractive dirigée vers l'axe du cristal, etsuivant la même loi; ce qui le conduisit à supposer que le zuriate de soude et le fluate de chaux, etc., formoient une classe intermédiaire de cri-laux dans lesquels il n’existoit ni force attractive, ni force répulsive, et conséquemiment ni division, ni polarisation du pin- ceau transmis. Les choses en cet état, les philosophes seront sans doute surpris d'apprendre que le zuriate de soude, le fluate de chaux, le diamant, Valun, et probablement tous les autres cristaux de la même classe, ont aujourd'hui la propriété de la double réfrac- lon, mais accompagnée de circonstances d’une espèce particu- lière qui les fait regarder comme une nouvelle classe de cristaux à 1éfraction double. Ce fut sur deux échantillons de spar fluor que je reconnus pour la première fois cette propriété. Deux de ces cristaux sem- Hèné renfermer un certain nombre de cubes de teintes ditié- rentes, ayant leurs faces parallèles au cube externe. Lorsque la lumière polarisée fut transmise par quelques-unes (1) Sur la Loi de la Réfraction extraordinaire dans les cristaux diaphanes. Mémoires de l'Institut. 1809. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 83 de ces faces, elle se dépolarisa distinctement, les axés neutres étant coïncidens avec les côtés, et les axes dépolarisans avec les diagonales des faces carrées; et ce qu'il y avoit de plus re- marquable encore, c’est que dans ces échantillons il se trouvoit des portions de cristal dans lesquelles la lumière polarisée ne su- bissoit aucun changement. Dans ces expériences, la teinte pola- risée par le spar étoit un b/eu du premier ordre, ayant un rouge pâle pour compléter sa couleur. Pour examiner ces teintes avec plus d’exactitude, je combinai le cube de spar fluor avec une lame de sulfate de chaux qui polarisa un bleu brillant du second ordre, ayant un jaune orangé pour sa couleur opposée. Le bleu se changea en un rouge écar- late et quelquefois en un rouge pourpre, et le jaune orange complémentaire en un blanc jaunûtre. Lorsque le cube fut tourné go, le bleu fut changé en un vert jaune pâle, et le complémentaire jaune orange en un pourpre jaunâire. Ce changement de couleur éloit conforme aux lois qui réeu- larisent l’action de tous les cristaux sur la lumière; mais je fus étonné d’observer que lorsque le cube de spar fluor restoit sta- tionnaire, il y en avoit une portion qui rendoit rouge la couleur bleue, et le jaune orange d’un blanc jaunâtre ; tandis qu'une autre portion rendoit verte la couleur bieue, et pourpre le jaune orange. Dans un autre échantillon, j'ai trouvé la même opposition dans les eflets produits par deux portions différentes, séparées par une troisième portion qui n’avoit pas d'action sur la lumière; une partie produisant le même effet que l’autre après avoir tourné go°, et celle-ci le même effet que la première après avoir tourné 90°. Les phénomènes précédens se présentèrent dans tous les échantillons qui avoient une épaisseur très-considérable. Mes expériences sur le muriate de soude furent faites avec de grandes masses de différentes grandeurs, depuis un pouce et demi jusqu’à trois pouces de long. Toutes développèrent les mêmes propriétés que le spar fluor, en dépolarisant les axes coïncidens avec les diagonales des faces carrées et les axes neutres avec leurs côtés. Dans les morceaux les plus larges, la teinte polarisée étoitun beau b/eu avec un jaune pâle pour sa couleur complémentaire : et les portions polarisées à l’opposite, produites par différentes parties de la masse, étoient arrangées en rales parallèles à l’une des diagonales de la face cubique. Les mêmes phénomènes se montrèrent dans de grands morceaux d’alun iransparens. L 2 84 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Dans mes premières expériences sur le diamant, les échan- tillons que j’employai avoient des surfaces tout-à fait inégales ÿ mais je les ai répétées dernièrement avec neuf diamans égaux. Presque tous ces échantillons dépolarisérent la lumière en taches séparées d'une forme diflérente; et les portions dépolarisantes avoient des structures opposées, comme les échantillons de mu- riate de soude et de spar fluor dont j'ai déjà donné la description. Un de ces diamans néanmoins exposé à la lumière polarisée, avoit une cristallisation plus parfaite et présentoit quatre franges. Leurs teintes étoient d’un blanc du premier ordre. Lorsque les franges inférieures d’un plateau de verre cristallisé furent main- tenues parallèlement à celles supérieures, la différence de leurs effets se manifesta; et lorsque les mêmes franges furent placées parallélément à une autre frange, on obtint la masse entière de leurs effets. D'où il suit que la structure qui produit les franges supérieures, est la même que celle d’une classe de cristaux doués d’une réfraction double, et la structure qui produit l’autre frange précitée, la même que celle de l’autre classe. Les expériences précédentes nous portent à conclure que le muriale de soude, le spar fluor et le diamant combinent dans le même échantillon trois structures diflérentes , et forment une nouvelle classe de cristaux doués d’une double réfraction. Dans quelques parties, ils agissent sur la lumière comme cette classe de cristaux dans lesquels la déviation du rayon extraordinaire est supposée produite par une force attractive. Dans d’autres parties , ils agissent sur la lumière comme l’autre classe de cris- taux dans lesquels le rayon extraordinaire dévie de l'axe en vertu d’une force répulsive; et dans les portions intermédiaires, ils pré- sentent cette structure moyenne dans laquelle la lumière n’est pressée n1 par l'attraction ni par la répulsion, et où il n'existe ni polarisation ni division du pinceau transmis, Si les lois qui règlent la cristallisation de ces minéraux eussent été attribuées à une opération continue , il est probable que les cristaux auroient eu pour leur forme primitive un cube parfait ou un octaèdre, sans Jamais donner aucun des phénomènes de la double réfraction. Cependant la plus petite irrégularité dans l'opération de ces lois auroit produit une déviation de la forme primitive par- faite, et conséquemment le cristal aurcit dévié de la classe in- termédiaire dans les classes attractives et répulsives, et ainsi acquis les trois différentes structures que nous leur connoissong aujourd’hui. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 85 Si cette manière d'envisager le sujet est exacte, il s'ensuivra que les formes cubiques et octaèdres sont intermédiaires entre celles qui appartiennent aux classes attractives et répulsives des cristaux doués d’une double réfraction; qu’une déviation de ces formes sur un côté produira la structure de la classe attractive, etune déviation sur l’autre côté, la structure de la classe répulsive; que la force de la double réfraction augmente avec cette dévia- üon; et qu'il existe une structure primitive constante appartenant à chaque minéral, au moyen de laquelle il est facile de recon- noitre cette classe. L'état imparfait de la Cristallographie ne nous permet pas de déterminer quelle est cette structure; mais lorsque cette science aura fait de nouveaux progrès, nous pourrons probablement , d’après les formes cristallines des minéraux, prononcer aflirma. tivement sur le caractère et sur l'intensité de leur force dou- blement réfringente. OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES a CENTIGRADE. = À ER “À Maximum. | Minimum. |4 Mini. Maximum. | Minimum. ne |Aeures © | heures 0 heures. mill. | heures. mill. mill. 1là7 M. +#16,75|à 105. Hi0,25|Æ15,00là 10 s...... ...754,28là 4m... .-.751,50|752,06 2la9s. “+20,25/à 4m. + 8,00|+18,75)à 10X m....., 756,661à Ploit. LÉROPRE 755,50|756,88 3là midi. +18,00|à 4 m. 11,25] 418,00! à 10 À s....... 758,16|à 4 m.........754,90|756,44 4là midi. 419,00 à 4m. + 0,50|+19,00|àg9 m......... 756,96|à 10 +s....... 759,20|797,02 5114+S. Æ#17,9|à 10 s. +10,50|+16,75\à 10 5......... 756,84|à 4m........ 753,44|754,06 6là3s +2225à4m. + 8,25|+21,50là 7 m........757,96[à 10 s......... 755.92|757,56 7là23s. +22,60fà 11 4 s.413,00 +19,75|à 4 m..…......754,560là 1125.......751,94|753,72 Bas. +21,85/à 4m. +11,75|421,00 à9 ERA DOS TAlAITIS eee cer 750,90|752,80 | où 35. +23,00/à 4m. +13,70|+22,00|à 10; m..,... 754,02|à9s..........751,58|753,00 Élrolh3s. “H28,75à4m. <+ir,50|+20,75là midi........ 750,80[à 64 m....... 750,40|750,80 11[à8s. +igoolà 45m,.+12,25|+17,25|à 10 s........753,36[à4 5 m....... 748,92|751,68 Hrolà 105 m+19,00|à4+ m.—+11,50|+16,90|19 +s........,757,14là 44 m.......799,10|709,50 ‘ 13[à midi. #19,00|[à 42 m.-Æ10,75|H19,00o|à 9m,......... 760,46|à 4 ; m....... 759,00|760,25 r4|à 135. 21,50 à42m.—+r10,00| 120,75 à 4 NA SOU 760,06|à 9 s..,.......754,00|758,20 dirslà3s. 19,00|à 10 #s.+13,50|+17,10|à 4 5 m....... 7H200| 411 ERE 751,60|751,70 16/ù 3s. +H17,75/à42s. +Æri2513,45|à 10 4 m......751,821à 35.......... 751,04[751,50 171à3sS. “+18,75/à42m.—+io,25|+15,25/à3s. ...,....751,64là103 s....... 749,70|751,50 18|à 107 m—+16,05|4 4 ? m.+ 9,50|+16,50 ATOS RENE LS 752,12|à4+m........ 790 24|791,72 19|à midi. --24,00|à 4 ? m.+-12,50| + 24,00 A 95S..........753,42\à 4 4m........702,40|702;74 Hloolàa1is. +253,0c|à 44 m.+415,00|+26,50 à TMC ee 70402) A0 SEE eee 750,26|753,06 2rlà nudi. +23,25|à 4 £ m. 414,50 +23,25|à 9 s.......... 756,94|à 4 ; m....... 749,50|7 53,82 A|22là midi. +21,00|à 44 m.+4-12,75| 421,00 à ONE EC 757,80|à 11 + S....... 755,20|797,;72 HI231132s. +19,80|4 44 m. +13,25|4+18,50|à 4 5 m....... 753,20|à 6 15........ 750,72|751,94 dloqa3s. “20,70|à 42 m.+ 0,85|+19,79/à 4% m........ 752,30] 419 See. . ce... 749,76|751,40 ll25la3s. —19,00|à 4 Em.+12,25|+16,25/à9 s.......... 755 22| Alerte 750,10|753,16 H|26/à midi. +16,25|4 42 m.—+12,50 18,25 AID See ce. t700 7A|AAeimer eee 755,94|758,60 Hi2zla3s. +21,25[à4 Em. + 9,40 +20,50|à 9 m......... 760,90|à9 +5s........ 757,94|760,46 B|281à midi, H19,75|à 41 m.12,10 +19,75)à Ame PDD, TOITS ER eceee 751,760|754,04 Hizolà midi. +14,75|à 10$s.10,60 414,75 à 44 m........ 750,28] à 10 #5... ..0: 746,40|749,02 ll3ola 3s H16,50[24kin.+10,00 +15,00/à 85....,..... 748,42|à 4 E m.......746,00|747,97 H|31là9 m. +13,851à8 Lim. +1o,25|+13,50/à 4% m....... 745,56|à 3.4 52... 741,00|742,70 1 Moycennes.+19,77! +11,34|+:8,66| 754,79] 750,55[752,02| 18,3 22 2 D RL. LD SSD DE RECAPITULATION. Millim. Plus grande élévation du mercure. .... 760°90 le 17 Moindreélévation du mercure......... 741,66 le 3x Plus grand degré de chaleur......... +-20°00 le 20 Moindre degré de chaleur........... + 80o le 2 ombre de jours beaux....... 5 de couverts........... 35 depluie... ....…. Dora où 26 demvents-re-mecrectie 3I de gelée..... J6800 60e (°) de tonnerre.......:..0. 2 de brouillard.......... 3 ETOEDIbdesmocasoos Co) OO BE ose deb5oc o Nora. Nous continuerons toujours à exprimer la température au degré du thermomètre cen“|, centièmes de millimètre. Comme les observations faites à midi sont ordinairement celles qu’on} le thermomètre de correction. À la plus grande et à la plus petite élévation du baromètre} conclus de l'ensemble des observations, d’où il sera aisé de déterminer la température moyenneM} çonséquent , son élévation au-dessus du niveau de la mer. La température des caves est égalemenf} | À L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. JUILLET 1816. POINTS VARIATIONS DE LATMOSPHÈRE. LUNAIRES. LE MATIN. A Mini. Pluie. Nuageux. Quelques'éclaircis. Idem | pl. à 9 h. Nuageux. Couvert, pluie. Nuageux. Pluie abondante. Très-nuageux. Pluie abondante. Très-nuageux. Nuageux. Quelques éclaircis. Couvert. Beau ciel. 56 |O. P.Q.à9h37'm. Beau ciel. Idem. Petite pluie à 9 h. Pluie. Couùvert. Pluie abondante, Nuageux, Nuageux. Idem , fine. 62 |S-E. P.L.àoh.31s.| Pluie, Très-nuageux. Idem. Couvert. Id, petite pluie. |Pluie, tonnerre. Pluie, Cou. par intervalles. Couvert. Couvert. Pluie par intervalles. [Nuageux. Couvert, Idem. Pluie abondante. Nuageux. Quelqueséclairce. , br. Couvert , pluie. Id,,pluieà5;h. Couvert. 76| Idem. |Lune apogée. Nuageux. 87 |S Nuageux. Idem. Idem. 83 |S-O. D.Q.ioh5g/m.| Couvert, pluie à 8 h. |Couvert. Pluie. 2 Idem, Couvert. Pluie. Couvert. Nuageux. Trèsnuageuxs Nuageux, éclairs, Idem , brouillard. [Nuageux. Légers nuages à l'hor. Nuag., pluie à 9 h, Idem. Idem. Couvert, Pluië par intervalles. Forteaverse, tonnerr. Couvert, Nuageux. Couvert, pluie à 8 h. Pluie. Nuageux. Pluie fine. Couvert. Nuageux. Pluie fine. Couvert, br. hum. pl. Quelq. gouttes d'eau. Pluie par intervalles. Iderns Idem, Petite pluie. Couvert. Couvert. Idem. Pluie fine. Ta. ; pl. depuis8h. Nuageux. 72| Idem. Pluie abondante... Pluie par intervalles.|Quelqueséclaircis. 95 | Idem. |P.Q.à2h345.| Pluie. Pluie. Pluie par intervalles. y. 70 RÉCAPITULATION. PRE CE NAME NÉ GTI 22e. ETOl Bi étieedius ol © 2 5 76 |S-O. N.L.àr1th18s. 62 Jaem. Lune périgée, Jours dontle vent a soufflé da PDU eg 2" , le 1 129,0925 ; Therm. des caves centigrades: le 16 12°,0025 Eau de pluie tombée dans le cours de ce mois, 96""72 = 3 p. 6 lig. 7 dixièmes. tigrade , et la hauteur du baromètre suivant l'échelle métrique, cest-à-dire en millimètres et emploie généralement dans les déterminations des hauteurs par le baromètre, on a mis à côté et du thermomètre, observés dans le mois, on a substitué le #7aximurm et le minimum moyens, du mois et de l'année, ainsi que la hauteur moyenne du baromètre de l'Observatoire de Paris, et pa£ exprimée en degrés centésimaux , afin de rendre ce Tableau uniforme, T8 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE DES MÉTHODES CLASSIQUES ET NATURELLES APPLIQUÉES A LA GÉOGRAPHIE PHYSIQUE; Par M. TOULOUZAN 5x SAINT-MARTIN. à = Lu DEUXIÈME MÉMOIRE. LA Géographie physique et la Géologie sont deux sciences tellement inséparables et si nécessaires l’une à l’autre, qu’elles ne pourront atteindre leur but, dont elles sont encore si éloignées, qu'’autant qu’elles se préteront leurs moyens et qu’elles confondront leurs opérations. Pour fixer rigoureusement les limites de chaque partie du monde, et pour justifier la Méthode que je me propose d’in- troduire dans une science qui n’en a Jamais eu, je serai donc obligé d'emprunter à la Géologie quelques-uns des faits généraux qu'elle a recueillis et vérifiés, afin de fixer nos idées, s’il est ossible, sur l’état ancien de la surface terrestre, d’examiner Les actions subséquentes qui lui ont donné ses nouvelles formes, et de rassembler toutes les indications, tous les documens qui peuvent m'éclairer sur les divisions que je veux établir. Premier Fait. Les géologues distinguent en général deux sortes de terrains : le prémitif ou primordial qui ne présente aucune trace de corps organisés ; le secondaire, avec toutes ses transi- tions, dans lequel. les débris de ces corps sont plus ou moins abondans. Le premier sert partout au second de base et de sup- port dans les profondeurs de la terre, et le perce ordinairement aux plus hautes sommités du globe. On varie d’opinions sur le genre de formation du terrain primitif, mais on demeure d’ac- cord que le terrain secondaire est une précipitation de matières tenues en dissolution, ou seulement délayées dans les eaux et déposées par elles en strates ou couches horizontales. Les ET D'HISTOIRE NATURELLE. 89 Les conséquences naturelles de ce fait sont : . 4 Que la formation primordiale est différente de la forma- Uon secondaire ; B Que cette différence consiste principalement dans la pré- sence des fossiles et la stratification; caractères propres au terrain secondaire, et étrangers au terrain primordial, ou tout au moins accidentels dans sa formation ; . € Que ces caractères étant les seuls par lesquels nous puis- Sions affirmer avec certitude que le terrain qui les possède est d'une formation aqueuse, il y a une très-grande probabilité que la formation n’est pas aqueuse dans le terrain qui ne les pos- sède pas; D Que le terrain secondaire est postérieur au primordial, puis- qu'il lui est superposé, et que le terrain primordial est pour nous le plus ancien de tous, puisque nous n’en connoissons point d'autres au-dessous ; Æ Que le terrain primordial a par conséquent existé seul pen- dant une certaine époque , et qu’alors il formoit à l'extérieur du globe une surface très-inégale, mais sans solution de conti- nuité à sa base; F Que durant cette époque, le terrain primordial n’étoit pas baigné par les eaux de la mer, puisque nous ne trouvons point sur la croûte extérieure de ce terrain des vestiges de corps or- ganisés, ni rien qui indique la présence et la station des eaux; G Que par conséquent la mer n’existoit pas à cette époque ; et que sa formation , ainsi que celle des terrains qu’elle a déposés; datent d’une époque plus récente. Il faut prévenir les objections qu'on pourroit faire contre ce premier fait et ses conséquences. On pourroit nier la conséquence B, en disant qu’on a trouvé du graphite ou plombagine et même de Panthracite dans le terrain primordial, et, suivant quelques-uns, ces malières carbonées ayant une origine végétale, il s’ensuivroit que ce sont des fossiles. D'un autre côté, on a observé et vérifié que plusieurs grandes masses de roches primordiales sont disposées par couches ou Strates ; ainsi on pourroit dire que les deux caractères essentiels par lesquels on distingue le terrain secondaire du primordial ; conviennent également à tous les deux. Il n'est pas prouvé que le graphite et l’anthracite aient une Tome LXXXIII, AOÛT an 1816. M 90 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE origine végétale. M. Delamétherie et d’autres géologues les re- gardent ,'ainsi que le soufre, le diamant et le phosphore, comme des combustibles minéraux. En admettant cette origine, il. en résulteroit seulement qu’à l’époque où le terrain primordial re- couvroit seul le globe, il y a eu une tendance vers l'existence organique et un commencement de végétation, et que, par des causes que nous ignorons, les premiers végétaux ayant été dé- truits, leurs débris ont formé ces amas de matières carbonées qu'on trouve plutôt calcinées que dissoutes, non pas proprement dans le terrain primordial, mais dans les limites de ce terrain et de celui de transition; limites qui n’ont pas encore élé assez bien déterminées pour qu’on puisse aflirmer que ces prétendus fossiles sont en decà ou en delà. La stratification des roches primordiales n’a été bien constatée que dans le protogine ou granit talqueux. Elle doit donc être atribuée à la présence du tale qui a effectivement une disposition fissile ; et lors même que cette stratification se retrouveroit dans d’autres roches primordiales, on ne seroit pas fondé à dire que tout le terrain ancien a été formé par dépôt, mais seulement que certaines roches par la nature de leur composition et une agrégation particulière de leurs élémens, ont contracté une {ex- ure stratiforme : tels sont, par exemple, les gneis et les schistes; mais c’est moins une stratification qu'ils présentent qu’une dis- position fissile, et les strates au lieu d’être horizontaux sont dans une situation verticale, ou plus ou moins inclinée, manière d’être qui tient tellement à la nature de la roche, qu’elle se retrouve même dans les schistes de nouvelle formation. On objectera contre la conséquence C', qu’une formation peut ètre aqueuse quoiqu’elle ne présente m fossiles, ni stratification ; et on ajoutera que la plupart des cristaux qui entrent dans les roches primordiales, contenant de l’eau de cristallisation, il paroît difficile de révoquer en doute que l’eau n’en ait été le dissolvant. C’est une grande question que celle de la formation du granit et des roches primordiales. Je ne crois pas que la science soit assez avancée pour la résoudre. Je me bornerai à dire que l'eau peut avoir été un des agens de la cristallisation primordiale, mais non le seul agent ; que rien ne prouve que la masse entière du terrain primordial ait été dissoute dans les eaux; que les for- ma{ions ignées peuvent présenter, à s’y méprendre complètement, les mêmes caractères que les formations aqueuses, comme on le ET D'HISTOIRE NATURELLE. JT voit par l’éternelle dispute des vulcaniens et des neptuniens sur les matières trappéennes ou basaltiques qui restent encore indis- tingibles; que l’eau étant un produit de la combustion, il est tout simple qu’elle entre dans une formation ignée; que le ca- lorique étant un agent plus simple, plus universel, beaucoup plus puissant, a dû opérer des formations antérieures à celles de l’eau qui, en sa qualité d’oxide, n’a pu être elle-même qu'un des produits de ces formations du calorique. Les malières du terrain primordial diffèrent essentiellement, par leurs caractères géologiques, de celles du terrain secondaire, et cette différence se laisse même apercevoir dans les roches de même nature qui se trouvent à-la-fois dans les deux terrains. Cette dissemblance prouve donc que le premier n’a pas la même ori- gine que le second, et par conséquent nous pouvons affirmer que sa formation n’est pas aqueuse. . Une autre preuve qui conduit au même résultat négatif, se üre de l’absence des sels, des fossiles, de toutes matières enfin qui annoncent le travail des eaux dela mer : car les produits aci- diféres qu’on trouve dans le terrain primordial, s'ils sont de formation aqueuse, ne peuvent êlre attribués qu’à des eaux douces, et les fossiles carboneux qu’on prétend y avoir trouvés, n'ont rien qui annonce un dépôt océanique, La mer n'a donc pas formé le terrain primordial; et d’ailleurs jusqu'ici on n’a pas donné de raisons satisfaisantes de l'énorme diminution d’une mer qui auroit tenu en dissolution toutes les matières du globe. J’ose même dire qu'aucune des causes physiques qui sont à notre connoissance ne peut expliquer cette diminution. Après avoir ainsi réfuté l'opinion des neptuniens, je vais rap- porter quelques faits qui, en nous mettant sur la voie des for. mations secondaires, nous feront voir que l’eau ne doit pas en être le seul agent. En général on peut remarquer dans le terrain primordial deux sortes de roches : les unes, qu’on peut appeler fé/d-spathiques , parce que le feld-spath en fait la base, et dans lesquelles rentrent tous les granits et granitoïdes, les gneis, les schistes, les por- phyres, les trapps, les serpentines, en un mot toutes les roches primordiales qui ne sont point acidifères; les autres, qu'on peut appeler calcaires, parce que la chaux carbonatée en fait la base, comprennent toutes les roches primordiales acidiferes. Les roches feld-spathiques constituent la masse du terrain pri: . M 2 g2 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE mordia}; elles sont certainement les plus anciennes puisque ce ne sont que des agrégats de différens oxides produits par l’effet im- médiat de la combustion du noyau combustible et oxidable (1). Elles se décomposent facilement à l'air à cause de la potasse qui entre dans le feld-spath et dont l’efllorescence détruit l'agrégation des roches. Cette décomposition conduite à sa fin, donne princi- palement des sables et des argiles. Or le terrain dit de sransilion, qui suit immédiatement le terrain primordial, n'offre que des sables plus où moins grossiers , agglutinés par un ciment argileux, d'où résultent les grès et les grauwackes communs; des débris schistoïdes qui de la grauwacke schisteuse passent à l’ardoise; des fragmens de roches plus ou moins arrondis par le frottement et empâtés dans ce même ciment argileux , ce qui formeles pou- dings, les toadstone, les mandelstein, les trapps Sobhlene Etes ct D'après cet état de choses bien constaté, si l'on fait attention que l’atmosphère a dû être primitivement plus étendue, plus douée d'action dissolvante, plus chargée de vapeurs par suite de la combustion qui venoit de s’opérer et dont l’eau avoit été un des produits ; que les montagnes avoient une élévation beaucoup plus considérable que de nos jours; enfin , que la surface du globe élant à sec, le fluide ambiant l’attaquoit sur tous les points, on verra que la plus ancienne décomposition du terrain primor- dial a été opérée, non par l’eau, mais par Pair, puisqu'elle s’est principalement exercée sur les roches feld-spathiques , et que cette décomposition a causé des éboulemens et des écroulemens suc- cessifs, qui ont considérablement diminué la masse des montagnes. Alors on concevra que ces immenses débris ont dû remplir les creux les plus profonds, s’entasser sur les flancs des montagnes dans la situation plus ou moins inclinée qui résulte d’un ébou- lement, et parfois même affecter la situation verticale lorsqu'une grande masse écroulée se sera redressée par les accidens de sa chute. Telles sont en effet les circonstances de gisement à l’égard des grès rouges et des grauwackes de la Thuringe, des ardoises d'Angers, des poudings de Valorsine, enfin de toutes les forma- tions de transition. Saussure ($ 594) a observé dans toutes les montagnes, que les bancs de grès et de poudings séparent toujours les masses primitives des masses secondaires, et la même obser- vation a été faite par l'Ecole Wernérienne à l'égard des grès et des grauvwackes. ( Brochant, tome II, pag. 588 et suiv.) (1) Forez la nole 1 à la fin de cette partie. . $ ET D'HISTOIRE NATURELLE, gù On peut donc assurer que le terrain de transition est une for- mation aérifère et non aqueuse, provenant de la plus ancienne décomposition du terrain primordial dont la formation est ignée ; décomposition qui a été faite aux dépens surtout des roches feld- spathiques à cause de l’altérabilité de ces roches à l'air. Les roches calcaires sont beaucoup plus rares que les feld- spathiques dans le terrain primordial ; elles sont ordinairement à la superficie de ce terrain, tantôt à la base ou sur les flancs des montagnes , comme les marbres de Paros, de Carrare, des environs du lac de Côme et du lac Majeur ; tantôt encastrées dans les granits ou recouvrant les sommets, comme les marbres gris et fétides des Pyrénées, des Alpes, du Caucase, et la chaux carbonatée magnésifère ou dolomie des montagnes du Tyrol. Cette superposition prouve que les roches calcaires sont d’une date postérieure aux roches feld-spathiques; ce qui doit étre, pans les combinaisons acidifères n’ont pu s’effectuer qu'après es agrégations d’oxides. Il est bon de remarquer que les roches calcaires primitives ne se trouvent que dans les montagnes des contrées tempérées, et dans les régions centrales ; elles manquent absolument dans les montagnes australes et boréales ainsi que sur les rivages océaniques. Cette remarque est essentielle, en ce qu’elle peut donner une raison probable de l'énorme quantité des roches calcaires de nos terrains de dépôt, qui pourroient être formés en grande partie des calcaires primitifs enlevés aux régions australes, comme je le dirai plus bas. Néanmoins 1l faut avouer’ Fe cette énorme quantité ne peut être représentée par le peu e roches calcaires qui se trouve dans le terrain primordial. Mais d’un côté, il faut faire attention que la chaux entre comme élément dans toutes les roches feld-spathiques, et de l’autre, que l’organisation animale a la faculté de transmuter les produits minéraux les uns dans les autres. Cette faculté appartient prin- cipalement aux polypes et aux mollusques; de sorte qu'il ne seroit pas hors de vraisemblance que la quantité supplémentaire, qui ne pourroit pas être représentée par celle du terrain primor- dial, fût le produit de ce travail de l’animalisation. Quoi qu’il en soit, les premiers terrains calcaires ont dû être formés aux dépens de la chaux des roches primordiales, et cela par l’action de l’eau qui en est le dissolvant. Suivant lobser- vation de Dolomieu, les marbres ne sont pas du tout altérables à l'air ; mais nous savons qu’ils n'offrent pas la même résistance à l’eau, M. Menard de la Groye a remarqué dans les montagnes 94 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE calcaires de la Sainte-Baume, que les sommets, qui sont ordi- nairement arrondis, présentent des crénelures disposées en rayons divergens, et s’élargissant à mesure qu'elles s’éloignent du centre; de manière qu’au bas de la montagne ces crénelures deviennent de véritables ravins. C’est un effet produit par les eaux pluviales, et J'ai souvent occasion de l’observer dans toutes les montagnes calcaires de la Provence. Nous pouvons donc dater les commencemens de l'action des eaux, de cette époque qui a suivi immédiatement l’éboulement occasionné par l’action de l'atmosphère. Depuis cette époque la masse liquide augmentant de jour en jour, et s’appropriant l'ac- tion de la masse aériforme, a attaqué les roches calcaires, les a dissoutes pour les déposer ensuite en couches plus ou moins puissantes, plus ou moins compactes, comme on les voit dans tous les terrains postérieurs à celui de transition; terrains qu’elles composent presqu’en entier, et dans lesquels les autres matières ne doivent être considéréesque comme des couches subordonnées. Dans les terrains de transition, les seuls fossiles qu’on trouve sont de l’anthracite, des empreintes de végétaux et de poissons, des trilobites que M. Bronsniart, dans un Mémoire intéressant lu dernièrement à l'Académie des Sciences, a recounus pour être des crustacés, des restes de reptiles qui vivoient dans les rivières, et quelques autres débris qu'on ne sait où classer. Ces fossiles sont fort rares, tous d’espèces inconnues, et l’on a de fortes raisons de croire, comme Je le dirai ailleurs, que ces es- pèces animales vivoient dans les eaux douces. Dans les terrains qui suivent celui de transition, les fossiles deviennent plus nombreux et leurs analogues plus communs à mesure que les formations sont plus récentes. Ces différentes indications combinées avec le fait suivant ; peuvent nous mettre sur la voie des grands changemens opérés à la surface du globe. Deuxième Fait. Toutes les hauteurs de la terre supportent entre les sommets qui les couronnent des plaines plus ou moins étendues; cette disposition se retrouve à toutes les hauteurs. Les intervalles d’une montagne à l’autre ne sont que des bassins originairement creux, puisque le terrain qui les remplit et en étend la surface est plus récent que le terrain primordial. Ces bassins sont séparés les uns des autres par des chaussées que forment les rameaux dispersés des montagnes principales. ET D'HISTOIRE NATURELLE. CE) Les conséquences de ce fait sont précisément les mêmes que celles qui ont servi de base au système de Lamanon, qu’on n’a pas assez apprécié, parce que son auteur n’a pas assez vécu pour le mürir et le développer. Æ. Ilest évident que lorsque le terrain primordial existoit seul, la surface terrestre devoit présenter plus d’aspérités et d’es- carpemens ; les montagnes étoient beaucoup plus élevées, puisque leurs bases n’ont été recouvertes que des débris de leurs sommets ; ces bases formoient des creux et des bassins partout où elles se rencontroient et à différentes hauteurs. B. Les pics de ces hautes montagnes primordiales auront, par leur force attractive et électrique, soutiré de l’air les élémens de l’eau pour les combiner par le frottement et les combiner par la combustion. C. L'eau qui se formoit et couloit se sera amassée d’abord dans les creux supérieurs , tels que le grand désert de Cobi entre la chaîne altaïque et les montagnes du Thibet, la plaine de Quito dans les Cordilières, les glaciers des Alpes.....,et y aura entraîné les matières calcaires dont elle se chargeoït en passant. D. La présence de cette eau aura fait éclore les germes des végétaux et des animaux soit dans les bassins, soit sur leurs bords. Æ. Les éboulemens que provoquoit l’action de l'atmosphère sur les roches feld-spathiques, auront élargi la base des monta- gnes; quelques-uns des premiers lacs auront été entraînés avec les espèces qu'ils nourrissoient, et auront déposé ces fossiles anciens qu'on trouve dans le terrain de transition produit par ces éboulemens. F. D’autres lacs se seront formés par la succession des mêmes effets. sur ce terrain éboulé et à toutes les hauteurs. G. Les espèces organiques auront multiplié dans la même pro- gression que l’eau augmentoit. IT. Les lacs supérieurs grossis par les eaux courantes, auront successivement brisé leurs digues pour se rendre dans les bassins inférieurs, T. L'effet général de toutes ces débacles successives aura été que les eaux auront laissé dans le lit de leurs bassins , où déposé sur leur passage, ce que nous appelons les formations d’eau douce, dont les plus anciennes, comme celles des schistes marno-bitu- mineux de la Thuringe et du Mansfeld, sont antérieures aux 96 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE formations marines, et dont on reconnoît l'importance depuis les travaux de MM. Cuvier et Brongniart sur les terrains d’eau douce des environs de Paris. Æ. Toutes ces eaux, occupant un plus grand espace à mesure qu’elles descendoient plus bas, se seront amassées dans les creux où les grandes pentes se rencontrent et auront formé des médi- terranées. Z. Ces méditerranées faisant aussi effort contre les parois de leurs bassins, auront surmonté les obstacles et se seront réunies en une seule mer ou océan. D. Enfin cet océan, obéissant aux forces attractives qui agissent sur le globe et s'agitant pour se mettre en équilibre, aura à plusieurs reprises inondé les plaines jusqu’à une certaine hauteur, et fini de combler les creux en y déposant les matières prin- cipalement calcaires qu’il tenoit en dissolution et qui constituent les terrains océaniques improprement appelés secondaires (1). Comme mon intention n’est pas de donner une théorie de la terre, je m'arrête à des documens essentiels qui reposent sur des faits incontestables et parfaitement liés dans leurs consé- quences. On trouvera peut-être que je me suis trop étendu sur la Géologie; mais des savans estimables , amis de la vérité, qui m’honorent de leurs bontés et de leurs salutaires avis, m'ont fait des objections auxquelles j'ai dû répondre. D'ailleurs la Géologie, comme Je l’ai dit, est la compagne de la Géographie physique. Gelle-ci se flatteroit envain d’obtenir du succès sans le secours de celle-là ; et toutes deux ont tellement été négligées, que tous les faits qu’elles ont recueillis ont besoin d’être soumis à l'analyse rigoureuse du raisonnement afin de les ramener à leur véritable acception. Les documens que j'ai obtenus sufliront, comme on le verra; pour concevoir la séparation des terres par les eaux, et pour établir d’une manière naturelle, non-seulement les limites des six parties du monde, mais encore celles de toutes les régions de ces mêmes parties, selon que nous étudierons le globe dans l’en- semble ou dans les détails. Je ne n’attacherai dans ce Mémoire qu'aux grandes divisions. Cherchons d’abord les pentes générales et absolues des terres. (1) Poyez la note 1 à la fin de cette partie. Quatre ET D'HISTOIRE NATURELLE. 97 Quatre chaînes de montagnes que j'appelle longitudinales , courent dans le sens des méridiens avec plus ou moins d’incli- naison, 1°. Les Cordilières divisées par l’isthme de Panama en deux chaînes posées bout à bout. — La chaîne du sud a sa plus grande hauteur dans la région tropicale du Capricorne. Vers le sud, elle est parallèle aux méridiens, et après s'être maintenue toujours à une hauteur considérable, elle finit par un escarpement brusque qui doit faire présumer que dans l’origine elle se prolongeoit fort avant pour se perdre dans l'immense plaine du pôle austral. Vers le nord, elle s’abaisse par une pente rapide, mais régulière, Jusqu'à listhme en s'inclinant vers le nord-ouest. — La chaîne du nord a sa plus grande hauteur dans la région tropicale du Cancer, Elle s’abaisse et s'incline vers le nord-ouest jusqu’au détroit de Béring. 2°. La chaîne que j'appelle des Zr#i-Cordilières , parce qu’elle est la répétition de la précédente. Elle est aussi divisée par le détroit de Sincapura en deux chaînes qui ont leur plus grande hauteur dans les régions tropicales, savoir, celle du sud à la Nouvelle-Hollande, et celle du nord dans le Thibet. Tout ce que j'ai dit des Cordilières s'applique également aux Anti-Cordilières, sauf quelques circonstances qui ne font rien à notre objet. Les déchirures de cette chaîne, qui de la Nouvelle-Hollande se con- tinue jusqu’au détroit de Béring, sont postérieures à l'époque où nous nous plaçons. 30. La chaine de l’ÆZléghany ou des Apalaches sur la côte orientale du Nouveau-Continent. Elle est d’une hauteur médiocre, mais d’une nature primordiale, et se fléchit plusieurs fois dans sa longueur. De l'extrémité septentrionale du Labrador elle arrive à la Floride, se joint par les Antilles aux montagnes de la Guiane, borde la côte du Brésil et laisse encore des traces de son ancien prolongement vers le sud. 4°. La chaîne de l’Anti-Alléghany, visà-vis la précédente sur la côte occidentale de l'Ancien-Continent. Elle atteint sur quelques points une plus grandehauteurque l’Alléghany, mais elle offre plus d’interruptions, et en decà de l’équateur elle se courbe vers l’ouest pour serecourber ensuite vers l’est. Elle longe l'Afrique dans le milieu, probablement jusque sous la ligne; elle suit la côte de Sénégambie, s’aflaisse pour reparoître au mont Atlas, se continue avec les mêmes affaissemens par les moniagnes Tome LXXXIII, AOÛT an 1816. N 08 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d'Espagne, de la France, de l’Archipel Britannique et de la Scandinavie jusqu'au cap Nord où elle se termine. Lorsque le globe étoit à sec, il devoit y avoir des vallées profondes sur la ligne où les pentes se rencontrent , et celte ligne peut se concevoir à une distance proportionnelle à la hauteur des sommets. Quand les eaux ont coulé elles ont dû se rendre plus tôt ou plus tard dans ces vallées, et commencer ainsi la di- vision longitudinale des terres. Voyons maintenant comment a dû s’opérer la division rans- versale. Dans le Nouveau-Continent, vers le nord , un. terrain plat, mais exhaussé, s'étend entre le Green-Mountains à l’est et les Stony-Mountains à l’ouest ; montagnes qui sont les extrémités septentrionales de l'Alléghany et des Cordilières. Ce terrain ou plateau, sur lequel posent les lacs nombreux du Canada et du Cbhipiouyans, verse toutes les eaux au nord et au nord-est. — De sa crête méridionale il sort trois grands fleuves , l'Ohio, le Mississipi et le Missouri, qui coulent du nord au sud dans une des vallées longitudinales dont j'ai parlé. Le Mississipi grossi des eaux des deux autres fleuves et de toutes les rivières de la vallée, les dégorge dans le solfe du Mexique qui fut originairement un lac comme tous les autres creux. — Dans la partie du sud, un pla- eau semblable à celui du Canada, mais beaucoup plus exhaussé, s'étend entre les Cordilières de Quito et les montagnes de la Guiane. Ce plateau qui divise les affluens de l’Amazone de ceux de l’Orénoque , a une pente très rapide vers le nord, et dirige les courans d’eau vers le même creux où se jette le Mississipr, à l'exception de l'Orénoque qui se rend dans la vallée de l'At- lantique. — Ce même plateau se prolonge en se rétrécissant jusque dans le Paraguay où il s'élargit de nouveau entre les andes du T'ucuman et les montagnes du Brésil. Par cette disposition du terrain, les eaux de l’Amazone et des rivières du Brésil sont dirigées vers l'Atlantique, tandis que celles de Rio-de-la Plata et du Paraguay sont forcées de couler vers le sud. Dans l’Ancien-Continent on remarque une disposition à peu près semblable, Vers le nord, la grande chaîne de l’Altaï court de l’est à Pouest depuis la côte orientale d'Asie jusqu’aux monts Ourals, et verse toutes les eaux au nord et au nord-est. A l’oc- cident de l'Oural, le plateau de la Russie, couvert de lacs comme celui du Canada, penche vers le nord et le nord-ouest, — De la crête méridionale de ce plateau il sort des fleuves grands \ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 99 et nombreux qui coulent vers le sud et arrivent dans le creux occupé maintenant par la mer Caspienne et la Méditerranée, conjointement avec d'autres fleuves qui ont leur source dans le versant méridional des Alpes et des chaînes voisines. — Dans la partie du sud, une chaîne transversale formée par l’Atlas, les monts Abyssins et le Taurus, aboutit aussi par sa pente septen- trionale au creux de la Méditerranée. — Cette chaîne se con- tinue vers l’est par l’Imaïüis et lesmonts du Thibet jusqu'auxrivages orientaux de l'Asie. Au nord, elle soutient le vaste plateau de Cobi qui s'appuie à l’Altaï; mais au sud elle a une grande pente qui aboutit au grand creux de la mer des Indes. D'après ces dispositions générales, qui seront mieux déve- Joppées dans la suite, la surface terrestre a dû être divisée par le travail des eaux courantes, en six parties; et nous allons voir que cette division résultoit nécessairement de deux sections lon- gitudinales et de quatre sections transversales ordonnées par la direction des montagnes et les pentes du terrain. 19. La chaîne des Cordilières et celle de l’Alléghany s’adossant lune à l'autre et se joignant sur divers points par des plateaux ou des chaînes transversales, n’ont pas offert dans leur écarte- ment une vallée continue; de sorte que les eaux n’ont pu s’a- masser dans cette vallée et en occuper toute la longueur. Mais cet amas s’est formé sans obstacle à la pente occidentale de la proue et à la pente orientale de la seconde; ce qui a isolé e Nouveau-Continent. 29. Les mêmes rapports existant entre les Anti-Cordilières et 'Anti-Alléghany, ces deux chaînes n’ont constitué qu’une seule masse qui est l'Ancien-Continent. 30. La rencontre des pentes du nord et du sud dans le creux de la mer des Antilles, a dû y accumuler les eaux et séparer en deux parties le Nouveau-Continent. 4°. Cette même rencontre des pentes dans le creux de la Méditerranée a opéré aussi la division transversale de F Ancien- Continent. 5°. Au nord l’exhaussement continu du terrain dans toute la ligne circonpolaire, a nécessairement détaché de nos continens les terres arctiques dont , pour cette raison, Je fais une division à part. f : 6°. Enfin au sud les grandes pentes de l'Asie méridionale qui se combinent avec celles de l’Afrique orientale, ont fait des terres situées au sud-est une division particulière, N 3 100 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ces diflérentes séparations ordonnées par la disposition du terrain primordial ou ignifère, et par la rencontre des pentes , n’ont élé qu'ébauchées par les eaux courantes. Les lacs où elles se rendoient durent former pendant quelque temps une ceinture autour des terres sans communiquer les uns-avec les autres. C’est durant cette époque où les lacs inférieurs n’avoient point d’é- coulement, que leurs eaux devinrent salées par le lessivage des terres qui accumuloit les sels dans les bassins. La débacle suc- cessive de ces lacs les ayant joints de proche en proche, l'Océan se forma de leur réunion. Cet Océan, livré à ses propres forces et tendant à prendre son niveau, dut se porter desrégions équa- toriales, où sont les plus grandes hauteurs et par conséquent Jes plus grandes eaux, vers les régions polaires où le terrain se prolonge en pente douce. La masse des terres qui, comme je le ferai voir, couronne le pôle boréal, mit obstacle à lépan- chement des eaux dans cette région, tandis que ces mêmes eaux ne trouvant qu’une immense plaine dans le pôle austral, l’en- vahirent en entier. Mais bientôt le plus fort aplatissement de ce pôle , et peut-être d’autres causes liées aux phénomènes célestes, poussèrent à diflérentes reprises l'Océan austral vers le nord , Jusqu'à ce qu’enfin par ses ravages et ses envahissemens il eut acquis assez d’étendue pour se soutenir partout au même niveau. Dans ces irruptions successives, sur lesquelles j’aurai occasion: de revenir plus particulièrement, l'Océan austral, heurtant de lvont les extrémités des chaînes longitudinales, les aiguisa en pointes vers le sud, emporta toutes les terres basses qui s’éten- doient latéralement , enleva et fondit toutes les masses calcaires des montagnes australes, et alla déposer toutes ces matières, par le reflux que lui firent éprouver les terres arctiques, dans le nord de nos continens où il combla tous les creux et exhaussa le sol par de puissantes formations. En combinant ces différentes données, déduites d'une mul- itude de faits qui ne sauroient ici trouver leur place, lesquelles expliquent les effets qui ont donné aux parties du monde les caractères génériques que je leur ai assignés dans mon premier Mémoire, on demeure convaincu que les six parties du monde sont les sections d’une seule et même surfäce terrestre, opérées par l'accumulation des eaux courantes dans les creux où les pentes géuérales et absolues se rencontroient, et que les îles sont des fragmens de ces sections détachées à une époque postérieure par l'Océan, dont les irruptions successives ont découpé les terres et leur ont donné la dernière configuration. ET D'HISTOIRE NATURELLE. TÔF Or les limites des six parties du monde devront étre fixées aux creux où les pentes se joignent. Le vaste Océan sera donc restreint aux espaces seuls où il n'existe aucune terre et où doivent être ses plus grandes profondeurs. Réduit ainsi à ses plus an- ciennes limites, à celles qui devoient exister avant qu’il eût com- mencé ses ravages, nous nous le représenterons comme un fleuve qui, dans ses nombreuses sinuosités, circule à travers les terres dans des vallées creusées de toute antiquité à la base des mon- tagnes pour recevoir toutes les eaux et les verser par plusieurs embouchures dans l'immense bassin austral. Si nous examinons avec attention la direction des montagnes et les pentes générales du sol; si nous rattachons à chaque partie du monde les îles que des signes évidens nous diront leur avoir appartenu; enfin si nous nous aidons des faits géologiques pour reconnoître l’analogie ou la différence des terrains, il nous sera possible de tracer le lit de ce fleuve Océan, malgré l’agrandis- sement considérable qu’il a acquis. Ce lit, nous le retrouverons assez exactement en tirant des lignes droites entre tous les points saillans des terres, îles ou écueils qui sont les restes subsistans des anciens rivages. Les parties de mer situées hors de ce lit ou en dedans de ces lignes, seront censées appartenir au continent qu'elles baignent et dont elles sont en eflet les anciennes plaines submergées. Ainsi toutes les parties de la surface terrestre, même les plus petites, seront rattachées, d’après une méthode sûre et zaturelle, aux six grandes divisions de cette surface, Re NOTE 1. La distinction fondamentale de l’ancienne Géologie en terrain primitif et secondaire, ne peut plus coïncider avec l’état actuel de la science, En la laissant subsister elle répand du vague dans les définitions et s'oppose à l’exactitude des méthodes classiques. C’est une vérité que reconnoissent même ceux qui par habitude suivent encore ces anciens erremens. Les observations récentes prouvent que-les caractères tirés des fossiles et de la stratification, ne sont ni assez tranchés, ni assez constans pour servir de base à une classification. Ce sont des ca- ractères du second et peul-être du troisième ordre. Toute bonne méthode doit aller du simple au composé, parce que telle est la marche de la nature, 102 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE L'analyse chimique a remonté jusqu'ici à trois classes de corps simples, que nous devons regarder comme les élémens de tous les composés. Ces trois classes sont les fluides impondérables, l’oxigène et les corps combustibles , soit métaux, soit métalloïdes. On peut dé- signer ces trois sortes d'élémens ou d’indécomposés sous les noms de comburans, de véhicule et de combustibles. En effet tous les phénomènes qui donnent lieu à la combinaison de ces élémens et à la série de leurs composés, peuvent se ré- duire.à un seul, celui de la combustion; car les premiers ne peuvent que briler, le second que faire brüler, les troisièmes qu'étre brälés. (Voyez Essai sur l'Hist. de la Nat., tome I, pag. 42 et suiv.) Il résulte de là que les premiers effets qui se sont passés sur le globe, rentrent nécessairement dans les phénomènes de la combustion. En partant du principe que la nature marche du simple au composé, la terre ne doit avoir offert dans les commencemens que les trois sortes de corps simples. D'après les lois de la pesanteur, les bases combustibles devoient former le noyau, l’oxigène la première enveloppe, et les agens ou fluides comburans la seconde enveloppe ou l'atmosphère ex- térieure. Le véhicule, placé entre les bases et les agens, aura néces- sairement provoqué la combustion; le noyau se sera oxidé plus ou moins profondément ; cette croûte oxidée se sera boursoufilée, et par son soulèvement inégal elle aura opéré la formation du terrain primitif. C’est précisément le résultat qu’on obtient en exposant un boulet de fer à l’action de l'atmosphère. La surface oxidée se bour- souffle et forme des rugosités sensibles. Nos montagnes les plus hautes ne sont que des rugosités relativement à la masse entière du globe. Tous les matériaux de ces montagnes ne sont que des oxides mélangés et agrégés conjointement avec les composés qui en dérivent. Ce fait, qu’on soupconnoit par analogie, a élé constaté par la Chimie moderne qui a acquis la certitude que les terres, et par conséquent leurs composés ou agrégats, ne sont que des oxides, Du reste, sans entrer dans de plus grands détails, on connoît ET D'HISTOIRE NATURELLE. 103 quelle innombrable variété d'espèces composées a dû résulter de tant de bases simples diflérentes, attaquées par des agens divers, avec des circonstances que l’inégale coopération du véhicule a variées à l'infini. Cette variété a élé augmentée surtout par les deux causes suivantes : 1° des composés qui se formoient, les uns avolent action sur les autres, et devenant agens après avoir été bases, ils produisoient des sur-composés multiples. 2°. Parmi les bases oxidables, celles qui sont les moins pesantes , les moins métalliques, les plus sujettes à s’altérer parce qu’elles ont plus d'aflinité avec l’oxigène, ont dû être rassemblées à l’extérieur puisqu'elles pèsent moins, et par conséquent subir plus de trans- formations successives. Telles sont principalement les bases des terres et des alcalis qui à elles seules constituent presque toute la masse du terrain primordial. Ce terrain étant ainsi formé par le soulèvement obligé de la croûte oxidée, s’est trouvé seul exposé à l’action de l'atmosphère, composée alors comme elle est aujourd'hui, mais plus surchargée des composés gazeux auxquels avoit donné lieu l’oxidation. Cette action atmosphérique a dû s'exercer principalement , comme nous l’avons dit dans le texte, sur les roches feld-spa- thiques; ce qui a occasionné des éboulemens considérables d’où est provenu le terrain dit de éransition. Ce terrain , que Werner a le premier distingué, et que Saussure avoit très-bien observé , sépare réellement les masses primitives des masses secondaires; et si on écarte le caractère tiré des fos- siles , qui n’est que de second ordre, on trouvera à ce terrain des caractères propres qui empêchent de le confondre avec les deux autres. En suivant la progression des effets, on verra que l’eau a dû être un des produits de cette première combustion ou oxidation qui a donné naissance au terrain primordial, puisque l’eau n’est qu'un oxide d'hydrogène. L’hydrogène qui, suivant la doctrine de Berzelius, n’est lui- même qu’un oxide d’ammonium, n’a dû exister dans l’atmo- sphère qu'après le soulèvement du terrain primordial, puisque lammonium , comme toutes les autres bases combustibles, faisoit partie du noyau oxidable , et que l’aimosphère ne se composoit alors que des seuls fluides comburans. Alors on concevra que lors de sa première production l'eau a dû seulement entrer, comme tous les autres oxides, dans la 104 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE composition du terrain primordial où, en sa qualité d'agent d'un ordre inférieur, elle a pu coopérer au phénomène particulier de la cristallisation, mais dans des proportions subordonnées aux différentes causes agissantes. Postérieurement, lorsque atmosphère travailloit à la formation du terrain de transition, l'eau dut se produire avec abondance par la combustion de l'hydrogène atmosphérique et par sa com- binaison avec l’oxigène. Je dis avec abondance, parce que l’am- monium, base de l'hydrogène, étant une des bases les plus al- térables et dont l’afinité est très-grande pour l'oxigène, a dû être complètement divisé et dissous dans le calorique qui, Payant ainsi transformé en gaz, l’a attiré tout entier dans l'atmosphère, où il devoit être surabondant avant d'entrer dans la composition de l’eau et des autres corps où il est combiné. Cette eau aura ensuite, par son abondance et l’action dont elle est douée, opéré les derniers changemens du globe en posant sur le terrain de transition Îles terrains dits secondaires, après surtout qu’elle aura été réunie par sa liquidité en cette grande masse que nous appelons l Océan. D'après ces considérations , il me semble que la Géologie peut se donner dès à présent pour une méthode naturelle et rigoureusement classique, déduite des faits constans et bien avérés, qui admettra trois classes de terrains rapportés pour leur formation , aux trois grands agens de la nature : le calorique , Vair et l’eau rangés ici dans l’ordre du simple au composé. 10. Le terrain ignifère ou oxidé, dans lequel entrent tous les oxides connus et les combinaisons subséquentes de ces oxides; le tout différemment agrégé et affectant en général la situation verticale qui résulte d’un soulèvement. 20, Le terrain aérifère ou éboulé, dans lequel entrent princi- palement les roches feld-spathiques du terrain ignifère; le tout en débris plus ou moins volumineux, toujours agglutinés par un ciment argileux et affectant en général la situation plus ou moins inclinée qui résulte d’un éboulement. 30, Le terrain aguifère ou déposé, dans lequel entrent prin- cipalement les roches calcaires des deux terrains précédens; le tout en masses plus ou moins compactes et mélangées, séparées ordinairement par des lits de sable et affectant en général la si- tuation horizontale ou stratiforme qui résulte d’un dépôt précipité. Je me suis convaincu que chacun de ces terrains possède des | caractères ET D'HISTOIRE NATURELLE. 105 Caractères constans, parfaitement distincts et propres à les faire net - tement reconnoître. Si ces idées, que j'ai émisespeut-êtreun peu à la hâte, sont jugées avoir cieauenadebient, je pourrai, au retour d’un voyage géologique que je vais entreprendre , les développer et les appliquer aux terrains observés. On verra que les carac- tères du second ordre, comme, par exemple, celui tiré des fossiles, suivent la progression que J'ai établie , et ne contribuent pas peu à éclairer des questions jusqu'ici indécises, On verra que les anomalies de tous ces caractères peuvent être rapportées à des faits connus dérivant des causes générales des trois for- mations. Les terrains d’alluvion et les terrains volcaniques doivent être considérés comme des appartenances des trois ordres de terrains dont je viens de parler. En effet on trouve des formations d’al- luvion et de volcans dans toutes les autres formations; elles les recouvrent, elles en sont recouvertes, elles s’y mêlent au point de ne pouvoir les en distraire. C’est aussi l’avis de M. Menard de la Groye, à qui on peut s’en rapporter sur une matière dont il a fait l’objet constant de ses travaux et de ses observations. Pas de doute que le terrain d’alluvion ne soit du même genre que ceux d’éboulement et de transport; mais nous ignorons les “causes de formation du terrain volcanique. Les expériences dé- licates de M. Cordier ont jeté du jour sur la nature des laves; les observations de M. Menard sont autant de points fixes auxquels on peut rattacher les nouvelles observations ; le rapprochement des faits peut préparer une théorie. Peutêtre la cause des phé- nomènes volcaniques aura-t-elle été soupconnée par M. Dela- métherie qui rapporte ces phénomènes à ceux de la pile : l’idée du moins est heureuse; elle deviendra féconde entre les mains d’un savant dont l’âge et les infirmités physiques ne font qu'ac- croître la vigueur morale. Mais dans l’état actuel de la science, j'ai dû m’abstenir d'aborder une question qui ne peut me fournit des documens pour l’objet que j'ai en vue dans ce Mémoire. PREMIÈRE PARTIE DU MONDE. L'Amérique (x). L'Amérique se rapproche de la figure triangulaire; elle re- présente une sorte de pyramide dégradée dont la base est dans (1) J’oyez la note 1 à la fin de cette partie. Tome LXXXIII. AOÛT an 1816, O Y06 JOURNAL DÈ PHYSIQUE, DE CHIMIE la région du nord, et le sommet dans la région du sud. L'axe de cette pyramide est parallèle au méridien. La chaîne des Cor- dilières peut étre prise pour cet axe dans la partie méridionale, à partir du 18e degré de latitude australe jusqu'aux terres les plus avancées vers le sud. Au nord de ce parallèle, la grande chaîne se courbe en demi-cercle dont la partie convexe est vers l’ouest; mais le sol se soutient toujours à une très-grande hauteur sur la première ligne de la chaîne méridionale, c’est-à-dire entre les 7oc et 75° de longitude ouest, et ce terrain exhaussé va se terminer vers le nord aux caps Chichibacao et de la Vela dans la mer des Caraïbes. Les chaînes des montagnes lorsqu’elles se continuent ainsi sur toute la longueur d’un continent, sont pour ce continent ce que la colonne vertébrale est pour les animaux. Elles sont le terme auquel se rapportent toutes les formes et les dimensions. Elles fournissent des documens certains pour restaurer ces formes al- térées par divers accidens, et pour retrouver les terres qui ont été détachées de la masse continentale. La chaîne des Cordilières ou l'axe de l'Amérique étant parallèle aux méridiens, les côtes orientale et occidentale devoient originairement l'être aussi, et par conséquent la côte du sud suivoit le parallélisme de l’é- quateur, En partant du principe qu'à une certaine époque postérieure à la débacle des lacs , l'Océan du sud a été poussé avee violence vers le nord, nous concevrons comment ses eaux arrêtées et di- visées par le sommet méridional de l’axe, ont donné à l’Amé- xique moderne la figure triangulaire en emportant les angles sud-est et sud-ouest de l’ancienne côte parallélique. Les effets répondent tellement à cette cause et à ces dispositions, qu'on pourroit les démontrer par le calcul avec la même justesse que le clivage des cristaux. Quant à la côte septentrionale , qui n’existoit pas originaire- ment, puisque l'Amérique ne faisoit qu’une seule masse avec la Colombie, elle a dû contracter des formes très-irrégulières par suite des événemens qui ont morcelé ou englouti les anciennes chaussées pour joindre les eaux des lacs à celles de l'Océan. Nous aurons occasion de voir que cette irrégularité se montre dans tous les lieux où la disposition du terrain ordonnoit la formation des lacs. Alin de retrouver les linéamens anciens et naturels, je me place au voisinage de l'équateur et je cherche à fixer les Limites ET D'HISTOIRE NATURELLE, 107 de la partie du sud où les effets ayant été plus r'guliers, sont plus faciles à reconnotie, À lorient, les paintescontinentales actuellement plus avancées, sont le cap de Saint Augustin et le cap Saint-Roch sur la côte du Brésil. Au nord ei au nord-est de ce dernier cap, on trouve les vrais bancs de sable fort étendus qui se lient vers l’orient à des roches et îlots terminés par le rocher Saint-Paul sous le 31e de longitude occidentale environ, et à quarante minutes au nord de l’équateur. A l'occident, aussi sous la ligne équinoxiale, se voient les Galapagos, archipel considérable qui est la dernière ramification des promontoires de la côte. Les îles les plus occidentales de cet archipel, sont la Rodonde sous l'équateur et l’île Wenmans à 1° 20’ de latitude boréale; toutes deux sous le 94° 20° de lon- gitude ouest (1). Ces points de reconnoissance à l’orient et à l'occident de l'Amérique, sont des vestiges de l’ancienne côte, puisqu'ils con- servent encore avec la nouvelle une connexion sensible et incon- testable. Par leur secours, et en suivant les documens tirés du parallélisme, nous devons rétablir les limites naturelles. Uné ligne qui partira du rocher Saint-Paul en allant vers le sud sous le même méridien, ou à très-peu de différence près, passera par les îles de Martinvaz, de la Trinidad , de Saxembourg et plusieurs autres moins remarquables, et ira aboutir à la Thulé australe ou Terre de Sandwich découverte par Cook en 1774 sous le Got parallèle. Une ligne semblable tirée de l'archipel des Galapagos me con- duira aussi au 6o®, précisément aux parages où Drake prétend avoir découvert des terres qui ont retenu son nom. On a des doutes sur cette découverte; mais tant qu'il n’y aura pas de preuves de fait pour attester cette prétendue erreur d'un navigateur jus- tement célèbre, il faudra croire à l'existence de ces terres (2). Dans tous les cas, l’angle sud-est étant positivement fixé à la Thulé australe, celui du sud-ouest le sera nécessairement sous le même parallèle au point d’intersection du méridien des Ga- lapagos; et nous aurons ainsi la figure de l’Ancienne-Amérique ‘ indiquée par le parallélisme actuel de son axe. à (1) Voyez la note 2 à la fin de cette partie. (2) Voyez la note 3 à la fin de cette partie. 0 z 108 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Je dois faire remarquer que la Terre de Sandwik, qui est le point le plus essentiel, se lie étroitement à l’archipel Magella- nique par les groupes de Candlemas, des Clerigos, de la Terre dé la Roche ou Géorgie, de l’Aurora et des Malouines ou Falkland. Cette chaîne d'îles indique par sa position et sa di- rection, qu’elle est l’ancienne ramification sud-est de la Cor- dilière, et qu’elle enfermoit de ce côté les lacs qui s’éloient formés à l'embouchure de Rio de la Plata. On apercoit les traces d’une ramification semblable au sud-ouest par le cap de Horn et l'ile Diego Ramirez , qui est sous le 56° 30° de lati- tude australe, On n'a pas assez fréquenté cette mer pour con- noïître les îles qui peuvent se trouver plus loin vers le sud-ouest. Passons à la partie qui est au nord de l'équateur. 11 est hors de doute que l'Amérique tenoit anciennement à la Colombie par la chaîne des Antilles, comme elle y tient par listhme de Panama, On verra même dans l’article suivant, que l’ancienne côte de la Colombie s’étendoit beaucoup à l’est des Antilles. Les lacs qui occupoient l’espace du milieu commencèrent une Séparation ordonnée par la rencontre des pentes; cette séparation ayant été achevée par la rupture des chaussées , l'Océan fit ensuite ses irruptions, qui produisirent leur eflet accoutumé en donnant à la Colombie des formes aiguës vers le sud. Depuis cette époque PAmérique et la Colombie ont formé deux parties du monde distinctes, et le point de séparation nous est indiqué par les caractères généraux que nous avons dit être invariables et décisifs. Le Mexique et les Antilles s’élargissent vers le nord et se ré- trécissent vers le sud; ils appartiennent done à la Colombie, et alors nous tracerons la limite septentrionale de l'Amérique de la manière suivante. Du rocher Saint-Paul, notre premier point de reconnoissance ,. la ligne passera à l’île de Tabago liée au continent par celle de la Trinité; de Tabago au rocher dit de 1802, situé sous le 73° de longitude ouest et le 13e de latitude nord ; rocher qui se lie au cap Chichibacao par le groupe de Las-Mongas; de ce point le plus septentrional de l’ Amérique à l’isthme; de l’isthme à l'île Malpelo vers le milieu du golfe de Panama ; enfin de Malpelo à l'archipel des Galapagos, notre second point de re- connoissance. Ce système de limites, qu'on peut appeler zaturel, rattache à l'Amérique les îles sous le vent qui en eflet ont une conuexion ET D'HISTOIRE NATURELLE. 109 évidente avec cette partie du monde, et n’en ont au contraire aucune avec les Antilles, quoique par habitude les géographes fassent de ces deux archipels une seule région qu’ils nomment improprement les Zrdes- Occidentales. 1°. Le sol des petites Antilles est tantôt une argile grasse, tantôt un tuf volcanique ; partout il est recouvert d’une forte couche d’humus. Les mornes ou inégalités de ce sol ne sont que des coteaux aplatis à leur partie supérieure, qui ofirent les caractères et les accidens des pays calcaires. La roche primitive ne se montre que dans les lieux les plus bas et sur quelques points du rivage. Les îles sous le vent ne présentent au contraire que des rochers coniques et escarpés, ordinairement quartzeux, entièrement dépouillés, auxquels il a fallu toute la patiente industrie du Batave pour les rendre productifs. 20. Les îles sous le vent forment une chaîne tracée de l'est à l’ouest qui est visiblement l’ancienne côte de l'Amérique , tandis que la chaîne des Antilles a sa di- rection générale du sud au nord, et se lie évidemment à la Colombie. 3°. La grande passe pour entrer dans la mer des Ca- raïbes, est entre la Grenade et Tabago qui appartient, ainsi que la Trinité, aux îles sous le vent et non aux Antilles. Cette pue a plus de quatre-vingts lieues de large. C’est par là que ’Océan a fait sa grande uruption dans la mer des Antilles, comme il est aisé de le voir par le biais de la côte d’ Amérique, depuis le cap Saint-Roch jusqu'à T'abago, et par la configuration intérieure de la mer des Antilles, L'isthmede Panama estunautre sujet de contestation. Quoique cet isthme unisse les deux moitiés du Nouveau-Continent, il offre néanmoins plusieurs signes de séparation : 1° il termine en pointe la Colombie, tandis que de cette pointe même la côte d'Amérique s'étend aussitôt vers lorient; 2° le terrain s’élève plus brusquement du côté du Mexique que de celui de Tierra- Firma; 3° le sol est plus bas à l’isthme qu'aux environs ; s’il a résisté à leflort des eaux, c’est moins par sa hauteur que par sa nature pierreuse; 4° à partir de listhme vers le nord, le terrain est basaltique ou trappéen, et vers le sud il passe au gneis et au schiste ; 5° enfin un isthme, de quelque nature qu'il soit, est toujours un signe de séparation, parce qu'il n'existe que par l'effet des accidens qui ont divisé la surface terrestre. Quant à l’île Malpelo dont je fais un point de reconnoissance , je me fonde sur ce que cette île est placée sur la ligne méri- dienne tirée entre la pointe Mariatto, au golfe de Panama, x10 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE et le cap San-Lorenzzo, ainsi que les autres promontoires de la côte de Guayaquil. Cette ligne a dû être occupée par l’an- cienne côte qui a été creusée par l'Océan, comme les courans l'indiquent encore. Du reste, cette île Malpelo a toujours été regardée comme une dépendance de l'Amérique, et il n’y a aucune raison de lui assigner une autre place. NOTE I. Je fais dessiner en ce moment une grande Carte du monde physique, où toutes les régions de la terre seront distinguées et désignées d’après la nouvelle nomenclature. Elle paroitra à la fin de ces Mémoires. NOTE 2. Sur les cartes de d’Anville et des géographes francais, même les plus modernes, on trouve l'ile Gallego à la même latitude que l'archipel des Galapagos, mais plus à l’ouest sous Île 105€ de longitude occidentale, méridien de Paris. Cette île Gallego est supprimée dans les cartes d’Arrowsmith. C'est sans doute une des îles occidentales de larchipel des Galapagos à laquelle les Espagnols auront assigné une fausse position en la portant trop à l’ouest : car l'île Wenmons, et d’autres îles des Galapagos, n'ont pas été nommées par les Espagnols, mais par les Anglais, parce que les premiers les plaçant plus à Pouest, les seconds ont cru que ce n'étoit pas les mêmes îles, et toujours avides de laisser des monumens de leurs travaux nautiques, ils ont supprimé les noms donnés par les Espagnols et avec eux les îles qu'ils désignoient, tandis qu’il auroit fallu se borner à rectifier les positions. NOTE 3. M. de Fleurieu, dans un Mémoire inséré dans le 3e vol. du Voyage du Capitaine Marchand (Paris, an VI ,4 vol. in-4°), discute avec une rare sagacité tout ce qui est relatif aux terres de Drake, et il conclut que ces terres ne sont autre chose que la côte méridionale et occidentale de la Tierra del Fuego ou Terre du Feu, nommée par Drake, et il conclut que ces terres ne sont autre chose que la côte méridionale et occidentale de la Téerro del Fuego ou Terre du Feu, nommée par Drake les ÿles Elizabékiiges. Je conviens qu’en eflet ces terres sont ET D'HISTOIRE NATURELLE. 111 désignées assez clairement dans les journaux et relations que M. de Fleurieu a cemposées. Mais ces journaux semblent dire aussi : Drake a effectivement vu des terres plus méridionales dont, à la vérité, il est diflicile d’assigner la longitude. M. de Fleurieu prétend que si ces terres existoient, Cook, en 1769, Furneaux, en 1774, et plus récemment La Pérouse les auroient apercues dans leur navigation aux mers Australes. Mais j’observe que sous le Go parallèle il y a plusieurs espaces de mer à l’ouest du cap Horn qui n’ont pas été parcourus par ces navigateurs, et Je ne vois rien qui détruise l'existence de ces terres dans ces parages. Du reste, cette discussion me mèneroit trop loin et ma ligne de limites n’en seroit pas moins naturelle, quand même on adopteroit les conclusions de M. de Fleurieu. DEUXIÈME PARTIE DU MONDE. La Colombie (x). La Colombie présente dans son ensemble ce contraste frappant que j'ai dit être le signe certain auquel on peut reconnoître une partie du monde. Au sud, des excavations, des coupures, des escarpemens, en un mot tous les accidens d’une irruption de Océan; au nord, une côte unie, étendue dans le sens des lati- tudes et déposée tranquillement par les attérissemens successifs des fleuves. Cependant la région du nord-est offre les mêmes dé- sordres que celle du sud, et la formation de la baie d'Hudson paroît due aux mêmes causes que celle de la mer des Antilles. Cette disposition, qui se retrouve aux mêmes latitudes et avec (1) Dansune note de mon précédent Mémoire, j'ai dit qu'après M. Grabert de Hemso , j'avois été le premier à me servir du mot de Colombie pour désigner l'Amérique septentrionale, M. Thiébaut de Berneaud, bibliothécaire de la Ma zarine , réclame avec raison contre cette note, puisque des l’année 1809 il a fait usage de ce nom de Colombie dans sa Bibliothèque des Propriétaires ru- raux , n° de septembre, eten 1810 dans les Annales de M. Malte-Brun , t. XI, pag- 113 : époques même antérieures aux Lecons de Cosmographie de M. Grâ- bert qui n’ont paru qu’en 1813. En restituant à M. Thibaut le mérite d’avoir le’ premier rendu un juste hommage à l’immortel Colomb, il me sera permis de citer ce savant respectable comme une autorité, laquelle, jointe à celle de son illustre ami M. Gräbert, trop peu connu en France , mais plus digne del’être que beaucoup d’autres, doit déterminer à la fin tous les géographes, amis de la justice et de la vérité, à adopter la dénomination qui fait l'objet de cette note ,, etavec elle la division natu elle qu’elle désigne. £12 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les mêmes circonstances à l'extrémité nord-ouest de l'Ancien: Monde, vient de ce que les pentes des deux continens sont di- rigées vers un grand bassin triangulaire divisé en deux par le Groëniand. Ces deux bassins ont dû être occupés par des lacs, potes les pentes s'y rencontrent. Ces lacs, comme partout ail- eurs, ont commencé la séparation. L’Océan poussé ensuite du pôle austral, a brisé contre les rochers du Groënland, et ses flots divisés se sont fait jour de chaque côté de la pointe Farewel, qu'ils ont aiguisée en engloutissant presque tout ce qui restoit encore des anciennes chaussées déchirées par les lacs. Les eaux de lOcéan arrêtées par les terres polaires, sont revenues par les mêmes canaux et, faisant eflort contre les digues de la mer d'Hudson et de la Baltique, elles s’y sont pratiqué plusieurs passages pour faire de ces anciens lacs des bras de lOcéan. Les deux côtes orientale et occidentale de la Colombie sont inclinées de manière qu’elles s’écartent vers le nord et se rap- prochent vers le sud, où la première finit par la presqu’ile de la Floride, et la seconde par l’isthme de Panama; la chaîne des Antilles prolonge la côte orientale jusqu'à la Grenade en diminuant toujours de largeur. Cette chaîne n’est pas à beaucoup près l'ancienne côte. En jetant les yeux sur une mappemonde, on verra que les Antilles se recourbent à l’est de manière que le côté convexe passe sous le méridien de Terre-Neuve. En dedans de ce méridien, la côte actuelle des Etats-Unis rentre en demi-cercle et forme le fond d’un vaste golfe, qui a près de mille lieues d’ouverture sur douze cents de profondeur. Ce golfe, a bien certainement été occupé par des lacs où s’amassoient toutes les eaux de la pente orien- tale des Alléghany , retenues alors à l'ouverture du golfe par une chaussée dont nous devons retrouver des vestiges. Les eaux du fleuve Saint-Laurent et du Mississipi, en séparant de la masse continentale les îles de Terre-Neuve et de Cuba, ont grossi les eaux des lacs. La séparation de ces deux îles est antérieure à Pirruption de l'Océan. Le courant du Mississipi a creusé le sol si profondément, qu’il se fait sentir encore avec une grande violence depuis le canal de Bahama, par où il dé- gorge, jusqu'aux bancs de Terre-Neuve où il se perd. La vitesse de ce courant qui est de quatre à cinq milles par heure, sa largeur moyenne que M. Volney, à qui j’emprunte ces détails, estime de quinze lieues, la couleur, la température, la salure et les autres qualités de ses eaux différentes de celles de l'Océan qu’elles ET D'HISTOIRE NATURELLE. 118 ri traversent, enfin la profondeur beaucoup plus consi- érable de son lit, ne permettent pas de douter que les eaux qui occupoient le creux de la mer des Antilles, ne se soient pra- tiqué une issue dans les lacs du golfe des Etats-Unis bien avant l'irruption de l'Océan. La même chose doit avoir eu lieu pour le fleuve Saint-Laurent qui aboutissoit d’abord dans un lac, lequel s’est à la fin joint aux autres. De ces faits nous pouvons déduire qu'il y avoit une suite non interrompue de lacs communiquant par des canaux, depuis Ja mer des Antilles jusqu’au golfe Saint-Laurent, et probable- ment au delà. La chaussée extérieure du côté de l’orient a sub- sisté et formé l’ancienne côte jusqu’à l’époque où l'Océan a tout brisé pour réunir toutes ces eaux à sa propre masse. Ces documens m’indiquent que l'ancienne côte orientale de la Colombie devoit être aussi avancée vers l’orient que celle de l'Amérique dont elle étoit la prolongation. En eflet j'en retrouve de nombreux vestiges sur une ligne qui commence vers le 7° de latitude nord et le 32e de longitude occidentale , et finit vers le 43 parallèle en s’inclinant vers le nord-ouest jusqu'au 41° de longitude. Elle est tracée par des rocs et écueils assez nombreux qui sont spécifiés sur le tableau qui accompagne ma carte, On ÿ verra qu'indépendamment des écueils dont la po- sition est fixée d’une manière positive, il y en a beaucoup dont la position est douteuse. Ces rocs douteux sont fréquens dans le golfe des Etats-Unis. Arroussmith en indique un grand nombre sur sa carte. En général tout cet espace de mer, à l'exception du creux du bassin où se trouvent encore les Bermudes et d'autres roches, est peu profond, semé d’écueils et de brisans, danges reux pour la navigation et très-variable pour les sondes et les courans. Les fragmens pierreux et les parties terreuses qui ont dû jadis former et cimenter la chaussée ou l’ancienne côte, se retrouvent dans ces bancs de sable qui occupent une si vaste étendue aux environs de Terre-Neuve, où ils ont été amassés par la rencontre et le tournoiement des courans du Mississipi et du fleuve Saint-Laurent. La ligne va s'appuyer vers le nord-ouest, au banc Jacquet le plus oriental de ceux de la Terre-Neuve. De ce banc elle s'incline dans la même direction que la côte jusqu'à la côte extérieure de l'ile de Cumberland , qui sépare en deux détroits l'entrée de la baie d'Hudson. De ces îles, en suivant la même direction, la ligne aboutit au point où l’on suppose que finit la Tome LXXXIII, AOÛT an 1810 1t4 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Colombie , et que je désigne provisoirement sous le nom de: cap Baffin. La position que je lui assigne est celle qui est mar- quée sur les cartes d’Arroussmith. Je discuterai dans l’article suivant, ce qui est relatif au passage du nord-ouest qui sépare la Colombie de l’Ericie. La ligne que je viens de tracer ne peut offrir matière à contestation, puisqu'elle passe sur tous les points saillans de la côte, et qu’elle enferme toutes les terres et iles de la Colombie. Du cap Baflin , la ligne s'incline vers le7xe parallèlejusqu’au cap: Glacé. 11 se pourroit cependant qu’il y eût entre ces deux pro-- montoires des langues de terre plus avancées qu'eux vers le nord, et cela est même probable par analogie avec la côte septentrionale de l'Ancien Continent. En dedans de cette ligne sont comprises les parties de mer vues par Hearne et Macenzie. Elles s’enfoncent jusqu'au 68e parallèle, et il paroît qu’elles sont obstruées d'îles et de sables comme la mer de Sibérie. Du cap Glacé, la ligne court au sud-ouest jusqu'aux deux îles qui sont au milieu du détroit de Béring. Ces îles portent sur la carte d’Arroussmith, les noms d’Lzellin et d’ Okevachi.. Sar une excellente carte russe publiée par ordre du Gouvernement en 1609, que M. Barbié du Bocage, mon illustre maître, a eu. la bonté de me communiquer, ces îles sont au nombre de quatre et portent le nom d’i/es Jfodeffv. Eles sont à égale distance des deux côtes; mais la mer est plus profonde et plus libre de- glaces du côté de l'Asie : ce qui me détermine à les rattacher de préférence à la Colombie, Elles sont un reste de l’ancienne chaussée qui joignoit les deux Mondes. Des îles JHodeffv, en s'inclinant beaucoup vers l’ouest, la ligne va Joindre l'île d’Attou, la plus occidentale de la chaîne des Aleutiennes, qui est un prolongement de la presqu’ile d’Alaska. Cette tigne suit l’inclinaison de la côte d'Asie à laquelle celle de la Colombie devoit nécessairement correspondre. Elle partage obliquement le bassin de Béring , laissant à la Colombie toutes les îles de ce même bassin où elles sont assez nombreuses. La distance de l’île d’Attou au groupe desiles Béring est à peu près double de celle de ce-groupe à la côte d’Asie. Indépendamment de ce motif qui pourroit suflire, la Géologie fournit aussi des faits qui commandent la séparation desiles Aleutiennes et des îles Béring, Dansles premières, les roches sont, eomme à la presqu'ile d’Alaska,. de jaspe jaune à larges bandes vertes et rouges, et le sol est sa- b'onneux et stérile, Dans les secondes, on remarque la même: ET D'HISTOIRE NATURELLE. 115 construction que sur la côte d'Asie; c’est-à-dire des roches gra- nitiques qui deviennent friables à l'extérieur par le contact de l'air, et dont la décomposition couvre le sol d’un mélange de différentes terres très-favorables à la végétation. Cette opposition n'exclut pas un genre de liaison particulier, celui des terrains volcaniques. C’est un signe auquel on ne doit point s'attacher, parce qu'il se reproduit sur tous les points li- mitrophes, quelques différences qu’il y ait entre eux. Les volcans se sont manifestés dans les montagnes coniques et tous les creux où les eaux se sont amassées. La présence de ces eaux est Ja cause déterminante des phénomènes volcaniques; lorsqu'elles se sont retirées, ces phénomènes ont cessé, comme on le voit dans tous les volcans aujourd’hui éteints. Il ne faut donc pas chercher en eux des indications, ni des analogies ; puisque sur tous les rivages des six parties du monde il y a et il doit y avoir des volcans, par cette seule raison qu’il y a des amas d’eau, et que cette seule condition suffit, avec certaines dispositions du ter- rain, pour produire des volcans sur tous les rivages qu’on r’auroit aucun motif de séparer si on s’en tenoit à cette seule analogie. Observons seulement que les volcans sont un moyen accessoire qui a dû faciliter la division des terres opérée par les eaux. Sans les commotions que provoquent les feux souterrains, celte di- vision auroit été plus incomplète et moins irrégulière. C’est pourquoi nous aurons occasion de remarquer que la Malasie qui, occupant un des plus grands réservoirs d’eau, a dû étre aussi un des foyers les plus actifs, a été horriblement déchirée par cette réunion de circonstances. . Il est hors de doute que les îles Aleutiennes, avant l'irrup- tion de l’Océan austral, tenoient au continent de la Colombie. Par conséquent la côte ancienne de ce continent devoit s'étendre partout à la même distance de la côte actuelle dont l’inclinaison est une disposition primitive déterminée par la direction des Cordilières colombiennes, depuis l’isthme de Panama au sud- est jusqu’au mont Saint-Elie au nord-ouest. Si nous suivons cette inclinaison, qui doit en effet servir de règle, nous verrons que deux lignes tirées l’une de l'ile d'Altou à lîle Paxaros, l’autre de l’île Paxaros à celle de Cocas, correspondent exac- tement à la direction du grand axe de la Colombie et de sa principale chaîne de montagnes. L'ile Paxaros, qui est le point du milieu, est située un peu au nord du tropique du Cancer sous le 134° de longitude occidentale. Elle forme le sommet du P z *16 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE triangle , dont la base très-allongée est coaee entre l’ile d’Attou et celle de Cocas. Ce sommet du triangle répond précisément au cap Mendocin, point le plus saillant de la côte convexe de la Nouvelle-Californie, De l'île Cocas, qui est située au 5e de latitude boréale et au 90° de longitude occidentale, la ligne de démarcation passe par l'isthme de Panama, va joindre Âlla-Vela, petite île au sud de Saint-Dominique, revient à la Grenade, et enfin aboutit aux écueils de l'angle sud-est de la Colombie d’où je suis parti. IL »’y a aucune objection à faire contre cette Umite qui sépare, d'une manière nette et exacte, les annexes de la Colombie de celles de l'Amérique. (Za suite au Cahier prochain. ) ËT D'HISTOIRE NATURELLE. 17 SE SAC ED EL PR Se, DE L'ÉTAT ACTUEL DE LA CHIMIE; Par J.-C. DELAMÉTHERIE. Les théories chimiques prennent une direction qui est telle, qu'on ne craint pas de dire que nos plus célèbres professeurs dans cette science, même les plus jeunes, ne sont pas à la hauteur de cette nouvelle doctrine. Je vais essayer de la faire connoître à mes lecteurs ; mais je crois nécessaire de leur rappeler quelques faits. Beccher, Sthal... trouvèrent un grand nombre de beaux faits chimiques épars...; ils essayèrent de les réunir et d’en faire un corps de doctrine. Stahl, particulièrement, fit un système qui fixa l’attention de tous les chimistes. 11 supposa un principe inflammable, auquel il donna le nom de phlogiston, phlogis- tique, inflammable...; ce principe, suivant lui, avoit la plus grande influence dans la plupart des phénomènes. Mais, comme tous les auteurs d’une nouvelle doctrine, il donna trop d’étendue à son opinion, et il ne fit pas altention que son principe inflammable ne pouvoit se développer sans le concours de l’air. Cependant Jean Rey avoit déjà prouvé que Vair étoit nécessaire à la combustion, que les métaux, par exemple le plomb, ne pouvcient perdre leur phlogistique , ou être brülés, ou étre calcinés que par le concours de l'air. Ainsi cent livres de plomb donnoient par la calcination cent dix livres de zninium : ces dix livres , suivant Rey, étoient dues à l'air qui s’étoit combiné... on confirma ces faits, qui le furent également par Hales.. , Enfin la grande découverte des gaz ne permit plus de douter de l’insuflisance de la doetrine de Stabl.. Néanmoins elle fut soutenue jusqu'à ce qu’un chimiste fran- çais, le célèbre Bayen, en démontra l’insuftisance par une ex- perimentum crucis, pour nous servir de l’expression de Bacon. Il mit dans une petite cornue de verre du précipité rouge de mercure pur, ou chaux de mercure (oxide), et l’exposa au feu, 118 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Il vit avec surprise cette chaux pure se revivifier, sans addition du principe inflammable, en mercure coulant, avec un déga- gement considérable de fluide aériforme... 11 en conclut que ce précipité rouge n'étoit pas seulement Île mercure privé de son principe inflammable, de son phlogistique, mais que dans ce nouvel état il étoit combiné avec un fluide aériforme. (Journal de Physique, an 1774.) Priestley, qui répéta cette expérience, reconnut que ce fluide aériforme n'éloit pas de l’air commun, mais un air particulier qui favorisoit la combustion, et auquel il donna le nom d'air déphlogistiqué. Les expériences se multiplièrent.... à Les conclusions de Bayen furent reconnues exactes. ..; mais il étoit seul, et on s’empara de son travail sans parler de lui. On dit que cet air déphlogistiqué étoit le principe de la com. bustion et celui des acides. En conséquence il fut nommé oxy- gine, puis oxigène par Lavoisier ( qui n’a jamais dit que cette expérience appartenoit à Bayen, et son influence fut telle, que personne n’osa prononcer le nom de Bayen). Le principe 1n- flammable de Stahl fut banni de la science... Je fus chargé alors de la rédaction du Journal de Physique. Un ami de la vérité et de la justice, tel que moi, fut choqué de l’injustice commise envers Sthal et mon ami Bayen, comme je l’étois de celle commise envers un autre de mes amis, Romé- de-Lisle. (On me dit que c’étoit Daubenton qui défendoit de prononcer son nom, et de lui rendre ce qui lui appartenoit.) Je revendiquai donc, a Pour l'expérience fondamentale de Bayen, qui prouvoit le concours nécessaire de l’air dans tous les faits où Sthal ne sup- posoit que son phlogistique ; b Je fis voir qu'on commettoit la même injustice envers Stabhl, et que le prétendu oxigène n’étoit point le principe des acides, ni de la combustion; c Je revendiquai également pour Romé-de-Lisle. * J'ai combattu avec courage et constance..., et enfin Za vé- rité a triomphe. On a rendu justice à mes amis Bayen et Romé-de-Lisle..., mais on s’est cruellement vengé contre leur défenseur...; on a -agi avec lui comme on avoit agi avec eux, on s’est également elle e loue lLstle real} 7e ler ET D'HISTOIRE NATURELLE. 116) emparé de ses travaux... Se trouvera-t-il un autre ami de la vérité et de la justice, pour lui faire rendre ce qui lui est dû ? Qu'importe : LA VÉRITÉ TRIOMPHE! Il est aujourd’hui reconnu généralement que le prétendu oxi- gène n’est pas l’oxigène, c’est-à-dire n’est pas le principe des acides, ni celui de la combustion : et toutes les conséquences qu'on avoit tirées de cette hypothèse sont abandonnées... Le mot principe inflammable de Stahl a été remplacé par celui de calorique. Mais on veut aujourd'hui substituer à ces suppositions une nouvelle théorie. On convient avec moi (sans parler de mes travaux) qu'il y a des’acides sans oxigène. On reconnoît que l'hydrogène, ou air inflammable, est le principe de plusieurs acides : ainsi le soufre combiné avec l'air inflammable, ou le gaz hydrogène sulfuré, a toutes les propriétés des acides, Il en faut dire autant de l'acide prussique..…. Le tellure, liode, le chlore... combinés avec Fhydrogène ; présentent des phénomènes analogues. Gay-Lussac pour distinguer les acides qui contiennent de loxigène, de ceux qui contiennent de l'hydrogène, a proposé de donner un ncveau nom à ces dermers , il les appelle Rydracides. : Les acides qui contiennent de l’oxigène sont : L’acide boracique, L’acide fluorique, L'acide nitrique. Les acides qui contiennent de l'hydrogène sont : L’acide hydroïodique, L’acide hydro-cyanique (ou prussique); L’acide hydro-sulfurique (Gay-Lussac, mai, pag. 15), c’est l’acide sulfureux. Mais rapportons les paroles de Gay-Lussac lui-même sur les bydracides. x20 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE A Des Hydracides. « J'ai fait voir, dit Gay-Lussac (Annales de Chimie et de Physique, février 1816, pag. 157), que le chlore, l'iode et le soufre avoient entre eux beaucoup de rapports, et qu’avec l'azote, le phosphore et le carbone, ils formoient une série continue, dans laquelle l’aflinité de chaque corps pour l’oxigène, étoit en raison inverse de son aflinité pour l'hydrogène. En établissant ces rapprochemens, j'ai eu pour objet de montrer que le chlore et l’oxigène ne formoient point une classe séparée, jouissant ex- clusivement de la propriété de former des acides, qu’ils la par- tageoient au contraire avec beaucoup d’autres corps, et que les substances salines, formées par la combinaison du chlore, ou de l’iode avec l’oxigène et les bases, étoient entièrement analogues aux nitrates et aux sulfates. J'ai aussi fait voir que le caractère acide dépend autant de l’arrangement que de l'énergie des mo- lécules élémentaires : et quoique dans la combinaison des subs- tances simples on observe les mêmes phénomènes de saturation , que dans les combinaisons des acides avec les bases, j'ai proposé de réserver le nom d'acides pour les substances composées, jouissant d’ailleurs des propriétés acides. Considérant enfin que l'hydrogène forme des acides très-remarquables avec le chlore, liode et le soufre , j'ai encore proposé le nom HYDRACIDES pour désigner ces combinaisons, au nombre desquelles a été ajouté l'acide hydro-cyanique. » Il donne l’histoire de plusieurs substances qui jouissent ‘des propriélés acides, sans contenir d’oxigène. De l’Acide prussique. Gay-Lussac a fait un grand travail sur cette substance, qui avoit été déjà l'objet des travaux de plusieurs chimistes. 11 lui paroît qu'elle est composée de trois substances, l'azote, l’hydro- gène et le carbone. Suivant Gay-Lussac, Annales de Chimie, août 1815, p. 157, cet acide prussique est composé de volume de vapeur de carbone. volume d'hydrogène. volume d'azote, OCUCRS) Condense ET D'HISTOIRE NATURELLE. E2L Condensé en un seul, ou en poids, de CALDONE M - + + - ete te le A POI ve se 01e CNET ON TT ON T7R Hydrogène. . 2e Meet Et cll 9:00 Porret, chimiste anglais, qui s'est aussi beaucoup occupé de cet acide, donne pour principes de l'acide prussique, Cabo ER ONE 00" 24.0 NPA SNS ETES EN ÉYELOBÉRES Pelle ee à ee e » 0 34.5 Curaudeau avoit dit, Annales de Chimie, XLVI, pag. 148, qu’il existe un radical prussique auquel il donna le nom de prussire : ce radical, en se combinant avec loxigène , formoit le véritable acide prussique, et ses combinaisons étoient les prussiates. Il n’acquiert la propriété neutralisante, ou acide, qu'aux dépens de l’oxigène que lui fournit un oxide métallique, dont le concours est nécessaire pour former, avec les bases sa- lifiables, une combinaison énergique et durable (dit Gay-Lussac, Annales de Chimie et de Physique, an 1815, pag. 141). Gay-Lussac (ibidem, pag. 162) admet également un radical de l'acide prussique, qu’il nomme cyanogène (1), mais son opi- nion diffère de celle de Curaudeau , en ce qu’il croit que ce cyanogène se combine avec l'hydrogène pour former l'acide prussique. L’acide prussique ordinaire recevra , suivant lui, le nom d'a- cide kydro-cyanique. Les prussiates recevront le nom d’Aydro-cyanates. Les combinaisons du cyanogène avec les corps simples , quand il y jouera le même rôle que le chlore dans les chlorures, seront désignées par le nom de cyanures. L’acide prussique est composé, suivant lui, volume de vapeur de carbone. volume d'azote. - volume d'hydrogène, Et point d'oxigène. I 2 = = Le potassium combiné avec cet acide, en dégage la moitié (1) Kowsr, cyanos bleu, yenve , j'engendre. Tome LXXXIII. AOÛT an 1616. Q 122 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de son volume d'hydrogène : il est clair que ce qui se combine avec ce métal, et qu’on devroit désigner par le nom de radical prussique, est un composé de carbone et d’azote dans la pro- portion de x volume de vapeur de carbone. + volume de gaz azote. Ce radical, combiné avec le potassium , constitue un véritable prussique de ce métal. On doit donc considérer l'acide prussique ordinaire comme uu Aydracide. On l’appellera hydro-cyanique, Et les prussiates seront des hydro-cyanates. Le radical de cet acide est le cyarogène. Les combinaisons des corps simples avec le cyanogène seront des cyanures. Mais Porret (Annales de Chimieet de Physique, février 1816, pag. 120) admet deux espèces de prussiates, les simples et les triples, Les prussiates simples sont les sels qui résultent de l'union directe de l'acide prussique avec les alcalis et les autres bases. Ils sont toujours alcalins, et sont incapables de former le bleu de Prusse, quand ils sont ajoutés aux dissolutions de fer. Les prussiates triples de potasse sont neutres; ils sont insolubles dans l'alcool, et forment le bleu de Prusse avec les sels de fer peroxidé,. De l’Acide Chyazique. L'acide chyazique est un acide particulier, ainsi dénommé pat Porret (Annal. de Chèm. et de Phys., Cahier de février 1816, pag. 124), il est formé par les élémens de l'acide prussique avec d’autres substances, Non-seulement, dit-il, l’oxidé de fer, mais encore d’autres substances forment avec les élémens des acides particuliers ayant des propriétés totalement différentes les unes des autres. Le soufre est une de ces substances, et Porret présume que quelques oxides métalliques sont aussi dans ce cas. Porret a donné à cet acide le nom de chyazique. I] fornre ce nom des lettres initiales des mots carbone, hydrogène et azote (élémens de l’acide prussique) auxquelles il ajoute la terimi- nalson que. , ET D'HISTOIRE NATURELLE, 123 De l’Acide Chyazique sulfuré. : Porret, pour obtenir cet acide chyazique sulfuré, faït bouillir Kgérement une dissolution de prussiate de mercure avec du sulfure hydrogéné de potasse. La décomposition est instantanée, et il en résulte un sel neutre dont on peut séparer par plusieurs moyens un acide particulier, composé, d’après l’auteur, d’acide prussique et de soufre. Cet acide contient du soufre, non comme un corps étranger, mais comme un élément. Lorsque le soufre y est acidifié par une cause quelconque, jes autres principes se réunissent sous la forme d’acide prussique: ainsi ces principes avant cette décomposition, formoient un acide chyazique sulfuré. \ Cet acide peut se combiner avec différentes bases, la soude, l’'ammoniaque, la chaux, la magnésie, la barÿte..., les oxides d'argent, de mercure... et forme des chyasates sulfurés. De l Acide Chlorique. H. Davy pense que l’acide connu sous le nom de muriatique, est composé d’un radical quelconque, qu’il appelle chlore. Ce chlore peut se combiner avec l’oxigène, et il forme l’acide chlorique. Ce chlore peut se combiner avec l'hydrogène, et il forme Vacide Aydro-chlorique. Les combinaisons de cet acide font les hydro-chlorates. De l'Acide Iodique. L'iode peut se combiner avec l’oxigène, il forme alors un acide qu’on appelle zodique. L'iode peut également se combiner avec l'hydrogène, et il forme l’acide kydro-iodique. Les combinaisons de cet acide sont les hydriodates. De l’Acide Fluorique. L’acide fluorique est composé d’une base combinée avec loxigène. On avoit donné à cette base le nom de //uore. Q à 124 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Des Phtores. Ampère (Ænnal. de Chim. et de Phys., mai 1816, pag. 24) propose de lui donner le nom de PHTORE, analogue à celui de chlore, de phosphore, d'iode. Phtore, dit-il, dérive de l’ad- jectif grec phtoros @Bopeoc, délétère, qui a la force de ruiner, de détruire , de corrompre. Ge nom lui paroît très-propre à exprimer l'extrême énergie de cette substance, la propriété qu'elle possède exclusivement de détruire tous les vases où l’on veut la renfermer, et l’action si remarquable qu’exerce la combinaison qu’elle forme avec l'hydrogène sur les corps organisés. Cette combinaison avec l'hydrogène sera l'acide kydro-phto- rique; celle que le même corps produit en s’unissant au dore et au siliciun, prendront le nom d’acide ph!oro-borique et d’acide phtoro-silicique : et les sels correspondans ceux d’Lydro- phtorates , phtoro-borates et phtoro-siliciates. Les hydro-phtorates se convertiront en PHTORURES lorsqu'ils: seront privés d’eau. Enfin si l’on vient à découvrir un acide formé de phtore et d'oxigène, ce qui est bien probable, ce sera l'acide phtorique, et les sels où il entrera seront des phiorates. Le phtore dans l’ordre naturel doit être placé entre le clore et l’iode. De l'Acide Boracique ou Borique. L’acide boracique est composé d’une base combinée avec Voxigène. H. Davy a donné cette base le nom de Zoron. Les chimistes francais lui ont donné celui de bore. Ce bore peut se combiner avec différentes substances. Le bore peut peut-être se combiner avec l'hydrogène et former un acide hydro-borique. De l’Eau comme Principe des Corps. L'eau peut entrer en combinaison avec plusieurs substances, et il se forme alors de nouveaux composés. Les hydro-phiorates, par exemple, dit Ampère ( Annal. de Chim., etc., mai 1816, pag. 24),contiennent de l’eau et se con- vertiront en phtorures, lorsqu'ils seront privés d’eau. ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 125 Des différentes Combinaisons de l’Azote et de l’Oxigène. Mais les principes qui composent ces acides peuvent se trouver en diflérentes quantités : ce sont donc de nouveaux composés, Voici des exemples des composés de l’azote et de l'oxigène , suivant Gay-Lussac(Ænnal, de Chim., etc., avril 1816, p. 404): Azote. Oxigène. Oxdedazofe.s M LS CUT 00 bo Éazniireuxe tetes eee TOO 100 Acide pernitreux.. « « « + . 100 150 AeItiernitreuxe Pen ete ee de. 100 200 Acide nitrique. . . + . + + «+ 100 250 Les autres combinaisons présentent des variétés analogues. Nous ne saurions ici les rapporter toutes. D'une nouvelle Nomenclature chimique. Ampère , d’après tous ces faits, a proposé une nouvelle no- menclature chimique(Ænnal. de Chim.,etc., Gahier de mai 1816, pag. 24). Le Phitore. Nous venons de rapporter ce qu’il dit du phfore et de ses combinaisons ( Cahier de mai 1816, pag. 24). Le soufre, dit-il (Cahier de mai 1816, pag. 304), forme, comme l'iode et le chlore, un gaz permanent acide avec l'hy- drogène : les hydro-sulfates présentent la plus grande analogie: avec les hydriodates et les hydro-chlorates. Ils se réduisent en sulfures, comme ceux-ci en iodures et en chlorures , lorsqu'ils sont insolubles, ou qu'après en avoir éva- poré les dissolutions, on en dessèche les résidus à une tempé- rature convenable, propriétés qui rapprochent encore plus l’iode: et le chlore du soufre que l’oxigène. De l’ Acide Oxalique, ou Hydro-Carbonique. L’acide oxalique (dit Ampère, Cahier de mars 1816 , pag. 298) est, suivant Dulong, composé de gaz carbonique et d'hydrogène combinés dans le rapport de deux à un en volume : en consé- quence Dulong le nomme hydro carbonique, conformément à la 226 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE nouvelle nomenciature; cet acide Sunit aux oxides dans une pro portion telle, que le volume d'hydrogène qu’il contient est double de celui de loxigène de loxide : ensorte que, quand celui-ci n'est pas très-diflicile à décomposer, il forme de l’eau, et que le gaz carbonique reste seul combiné avec le métal, comme il arrive au cyanogène, au soufre, au chlore et à l’iode, dans la formation des cyanures, des sulfures, des chlorureset des iodures. Du Gaz Hydrogène per-carboné. La substance huileuse découverte par des chimistes hollandais , et qu'ils nommèrent gaz oléfiant, est appelée aujourd’hui gaz hydrogène per-carboné, parce qu'on le regarde comme de lhy- drogène surchargé de carbone (Ænnal. de Chim., etc. avril 1816, pag. 337). La Silice, ou Acide Silicique. Ampère considère ensuite la silice (Cahier d'avril, pag. 377). La silice, dit-il, est tellement analogue au bore qu'il est im- possible de l'en séparer. Ce qu’on nomme silice, et qui devroit porter le nom d’acide silicique, appartient si évidemment à la classe des acides, que dans plusieurs pierres, ou plutôt dans plusieurs séliciates, la proportion de l’oxigène uni au silicium, est la même que celle de l’oxigène combiné avec le soufre dans les sulfates correspondans : que le feld-spath comparé à l’alun, comme l’a fait voir M. Berzelius, présente non-seulement la même proportion d’oxigène dans l'acide relativement à celui des bases, mais encore le même rapport entre ces bases; la potasse : péennes et les pétrosilex, j'en traiterai immédiatement aps les pâtes lithoïdes, Je n'ai employé que des échantillons dont la localité n'étoit bien connue, les uns provenant des premières collections de Paris, les autres ayant été recueillis par Dolomieu ou en grande parUe par moi-même. J’indiquerai avec soin la localité des échan- tillons examinés, leur synonimie et la sorte de terrain volcanique à laquelle ils ont apoartenu. Pour qu’on ne me soupçonne pas de méprise sous ce dernier point de vue, je distinguerai quatre grandes classes de terrains volcaniques, savoir : 19 Les terrains incontestablement formés par les volcans brûlans ; 2° Les terrains formés incontestablement par des volcanséteints dont les cratères subsistent encore dans leur intégrité; 3° Les terrains volcaniques contestés par un petit nombre de minéralogistes, conservant des traces nombreuses de leur ori« gine, quoiqu'ils se présentent morcelés en lambeaux plus ou moins vastes, et que les cratèrés qui en ont rejeté les matériaux aient été complètement effacés par les érosions diluviennes, ou peut-être par des causes analogues moins anciennes et moins générales ; 4° Les terrains volcaniques contestés par un assez grand nombre de .minéralogistes ; ces derniers difièrent des précédens, soit parce qu'ils n'offrent presque plus de traces évidentes de leur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 1bt trigine, soit parce qu'ils sont recouverts par les plus anciens dépôts marins ou mêlés avec, soit parce qu’en outre ils sont or- dinairement situés loin de tout volcan éteint ou brûlant. Après avoir établi ces distinctions essentielles, je passe aux applications des moyens d'expériences dont j'ai fait l'exposé, CHAPITRE TROISIÈME. Æxamen des Pâtes Lithoïdes qui entrent dans la composition des Courans de Lave de tous les âges. La dénomination générale de pâte lithoïde que j’emploie ici, embrasse les variétés de toute espèce, désignées jusqu’à présent sous les noms de lave basaltique uniforme, basalte, base du pouein base des laves leucitiques, base des laves pétrosiliceuses, orstein volcanique, klingstein, phonolite, feld-spath compacte sonore, domite et base des laves feld-spathiques porphyriques. Parmi les nombreux échantillons de cette classe que J'ai eus à ma disposition, j'ai choisi pour en faire l’objet spécial de mes expériences, ceux qui présentoient des caractères plus tranchés, qui provenoient de localités plusremarquables, et dont le gisement m'étoit mieux connu. Leur désignation, leur examen particulier et les résultats fournis par chacun d’eux, se trouvent consignés dans la Table de mes expériences. J’ai en outre contrôlé les résultats obtenus, en examinant d’une manière moins rigoureuse, mais suflisante, une foule d’autres variétés dont l’énumération seroit superflue; je ne m’avance pas trop en assurant que j'ai ainsi passé en revue plus de deux cents variétés de laves lithoïdes de tous les âges, recueillies en diflérens lieux de la France, de V’Allemagne, de la Suisse, de l’Italie, de l'Espagne , de Syrie, de Ténérifle, d'Amérique et des Indes. J’ai été conduit à un petit nombre de notions simples dont l’analogie s’est soutenue dans tous les échantillons du même genre; je vais en exposer: le résumé général. Toutes les pâtes lithoïdes quelconques, sans distinction d’é- poque, se sont trouvées composées de parties hétérogènes par- faitement discernables, très-distinctes les unes des autres et se’ présentant sous forme de grains à structure cristallisés, diver- sement colorés et entrelacés comme dans le granite ordinaire. Les couleurs font contraster fortement et nettement tous les grains entre eux : ces couleurs sont peu variées, 552 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE On ne voit effectivement que des grains d’un blanc parfait ou légèrement jaunâtres, demi-transparens ou doués d’une trans- parence qui va souvent jusqu’à la limpidité parfaite; des grains d'un vert bouteille, ou d'un vert jaunâtre, ou d'un vert nol- râtre, demitransparens ou quelquefois transparens , et des grains d’un noir parfait et opaques. J'ai trouvé aussi des grains d’un brun clair et foiblement translucides, et en outre des particules excessivement fines d’un brun rougeâtre, mais dans des cas si rares que j'en fais abstrac- tion pour le moment. Les grains blancs forment toujours au moins la moitié des masses et quelquefois les 99 centièmes; les grains verts s'y mon- trent pour un centième jusqu’à près de moitié, et les grains noirs pour un centième jusqu’à plus d’un quinzième. Le diamètre des grains varie d’un dixième à un cinquantième de millimètre; les limites de grosseur dans chaque échan- tillon en particulier, sont plus bornées; par exemple, d’un dixième à un vingüème, d’un vingtième à un trentième; cas les plus ordinaires. La juxtaposition de ces grains paroît parfaite, excepté en un petit nombre de points où ils laissent entre eux des vides irré- guliers, très-difficilement appréciables, et qui supposés réunis, ue m'ont point paru occuper plus d’un soixantième du volume dans les masses qui en zenferment davantage. La présence de ces vides est un peu plus fréquente dans les laves modernes, douées d’une certaine rigidité, que dans les laves de semblable origine, qui sont sraitables au même degré que les laves les plus anciennes; ces dernières ne m'ont point oflert de différences avec les secondes. Les masses lithoïdes dont la cassure est unie et comme si- licée, sont composées de grains très-fins; c’est le contraire dans les masses à cassure inégale et mate, et dans les masses dont la cassure est sensiblement granuleuse; mais cette règle n’est point absolue; on reconnoît en effet que le degré d’adhérence des grains et l’intensité de leur transparence concourent avec leur volume pour produire ces différens aspects. On reconnoît aussi que l’intensité de la couleur des masses ne dépend pas seulement de l’abondance des grains de chaque couleur, mais du degré de transparence de ceux qui sont peu ou ET D'HISTOIRE NATURELLE. 153 ou point colorés. La teinte des grains fortement colorés perce à travers les grains diaphanes. Si on veut se rappeler mes expériences préliminaires sur les minéraux volcaniques cristallisés, on jugera sans doute qu’il m'a été facile d'établir des comparaisons décisives, pour m’assurer de la nature des différentes sortes de grains. Leur ténuité après la pulvérisation, n'a pu être un obstacle, puisqu'elle s'est trouvée trèsmédiocre. J'ai pu commodément les observer isolés, soit sur le porte-objet, soit sur le filet de disthène. J'ai déterminé directement les caractères dépendans de la couleur, de la transparence , de la cassure et de la forme des fragmens. La dureté des masses, l’aridité de leur poussière , l'aigreur des grains confondus sous le pilon, et leur impression sur le tas d'acier, ont fourni des caractères composés et indirects lorsque les masses étoient mélangées; mais ces caractères ont été directs lorsque les masses se sont trouvées formées presqu’en entier de grains de couleur blanche. Dans ce dernier cas, la pesanteur spécifique des masses a été aussi un caractère absolu pour distinguer la nature des grains; caractère qui s’est changé en indication encore très-forte lorsque Jes grains se sont trouvés mêélés en proportion moins inégale. Au chalumeau, les grains ont été l’objet de deux sortes d'é- preuves fournissant aussi des caractères absolus, savoir, le degré de fusibilité, le mode de fusion et l’action réciproque des par- ticules d'espèces différentes. Soumis à l'application des moyens que je viens d'assigner , les grains microscopiques de chaque sorte, examinés très-scru- puleusement, n’ont pas cessé de manifester les mêmes caractères dans les pâtes lithoïdes de tous les âges, et se sont trouvés ap- parteuir aux mêmes éspèces minérales. Les grains blancs, excepté dans un petit nombre de cas que je préciserai tout à l’heure, ont présenté, sans ambiguité, tous les caractères du feld-spath cristallisé. On les trouve dans les proportions suivantes, que je rapporterai maintenant sans distincs tion d'époque, cette distinction devenant inutile. Les pâtes lithoïdes qui, essayées au chalumeau par la méthode ordinaire , fondent en émail noir dont les éclats sont vert bou- teille foncé (par exemple les basaltes noirs ou d’un noir grisâtre), en contiennent 0.45 à o.55. Tome LAXXXIII, AOÛT au 1816. V 154 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Les pâtes lithoïdes qui fondent en verre blanc piqué de vert et qui s’en colorent foiblement à la longue (exemple, les klings- teins et les laves pétro-siliceuses, gris cendré, vert grisâtre, brun grisâtre), en contiennent de 0.70 à 0.90. Enfin les pâtes lithoïdes qui fondent en verre blanc (exemple, les klingsteins, les domites, les laves pétro-siliceuses ou de feld- spath compacte , de couleur blanche ou blanc verdâtre, ou gris de fumée), en contiennent au moins 0.90. Les grains blancs que je n'ai pu rapporter au feld-spath, se sont rencontrés , les uns dans les bases volcaniques renfermant beaucoup de cristaux de péridot , les autres dans celles qui ren- ferment beaucoup de cristaux d’amphigène. J'ai reconnu la nature des premiers, principalement à la pro- priété de se colorer en noir par le feu, et à l’excessive difficulté de leur fusion; ils appartiennent au péridot; je n’ai jamais pu en découvrir plus de 0.20, dans les pâtes lithoïdes où elles figurent en grande quantité; elles y remplacent en partie le feld-spath. Les seconds ont été principalement distingués à leur infusi- bilité presque absolue, et à leur couleur persistant au feu; ils appartiennent à l’amphigène, ils remplacent en très-grande partie le feld spath, et forment quelquefois jusqu'aux 40 centièmes des masses, “) Les grains jaunâtres, verdâtres ou d’un vert noirâtre, fondent un peu moins facilement que le feld spath ; ils ont constamment offert tous les caractères du pyroxène cristallisé ; ils entrent dans les bases indéterminées qui fondent en noir pour 0.35 à 0.45. Dans celles qui fondent en vert bouteille foncé , pour 0.15 à 0.35, pour 0.05 à 0.15; dans celles qui fondent en vert clair et pour- moins de o.o1 dans celles qui donnent des verres blancs. Dans ces deux dernières sortes de pâtes, mais surtout dans celles qui fondent en verre blanc, leur proportion diminue ra-- pidement, parce qu'ils s’y trouvent en partie associés avec des grains de même couleur ou tout à fait bruns, que j'ai reconnu pour de lamphibole, et beaucoup plus rarement par quelques: particules d’un brun clair, qu’il est facile de reconnoître pour du mica. Ces dernitres. particules sont en efet en lames très-minces , demi-transparentes, d’un éclat nacré, fondant plus difficilement que le pyroxène, et donnant un verre brun nojrâtre persistant sans se mêler. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 155 Il n’est pas aussi aisé de distinguer l’amphibole d'avec le py- roxène; voici le tableau des principales différences : les grains amphiboliques sont allongés et tendans à la forme prismatique ; ceux du pyroxène sont arrondis et irréguliers; les uns oflrent des indices de lames et les autres une cassure vitreuse rarement unie; les premières ont un éclat assez foible, excepté suivant le sens des lames ; les seconds sont éclatans ; ceux-ci sont de couleur brune ou vert noirâtre ; ceux-là sont de couleur vert jaunâtre, vert bouteille et rarement vert noirâtre. Enfin sur le filet du disthène les particules d’amphibole fondent avant celles de feld- spath et donnent un émail bran ou un verre d’une couleur vert noirâtre plus ou moins foncée; les particules pyroxéniques, au contraire, sont moins fusibles que celles du feld-spath et donnent un verre de couleur vert bouteille, ou vert jaunâtre plus ou moins clair; par le contact du feld-spath, ces dernières devienneut beaucoup plus fusibles. . La nature des grains noirs opaques m'a embarrassé dans l’o- rigine; leur détermination a donné lieu à un travail particulier dont j'ai déjà parlé, et que j'ai publié il y a quelques années ; J ai démontré qu'ils appartenoient à un nouveau minéral, le fer titané. Leur reconnoissance est plus facile encore que celle des grains feld-spathiques. La vivacité de leur éclat métallique, leur cassure conchoïde parfaite, leur couleur persistante et leur pro- priété magnétique qui permet de les isoler à volonté, en font sûrement reconnoître l'espèce jusque dans les particules les plus déliées. On en découvre depuis 0.05 à 0.15 dans les pâtes li- thoïdes qui fondent en noir, de 0.03 à 0.05 dans celles qui fondent en vert foncé, de 0.02 à 0.03 dans celles qui fondent en vert trés-clair et moins de 0.02 dans celles qui fondent en blanc. Les grains noirs appartiennent quelquefois en partie au fer oligiste. La couleur de la poussière les dénonce facilement ; j'ai constaté anciennement par les épreuves chimiques faites poux rechercher le fer titané, que le cas étoit extrêmement rare. Le barreau aimanté n’enlève pas au reste la totalité des grains noirs opaques, que la pulvérisation a complètement dégagés. Il en reste souvent une foible portion qui peut aller jusqu'à plus de o.or. Les caractères extérieurs de ces derniers ne dif- fèrent pas sensiblement de ceux du fer titané. Tsolés, ils fondent encore plus difficilement en émail noir; mêlés au feld-spath et au pyroxène, ils ne se dissolyent pas; ces propriétés excluant V 3 150 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE le fer chromaté et le grenat noir dit mélanite, je présume qu'on peut les rapporter au ménakanite, qui est une combinaison de: titane et de fer en égale proportion. (Je rappellerai ici que le: fer titané ne contient que 045 de titane.) D'après ces détails, on voit que les associations des différentes espèces de minéraux microscopiques sont très-peu nombreuses et seulement ternaires ou quaternaires. Elles se divisent natu- rellement en deux classes. Dans les unes le feld-spath très-prédo- minant par sa quantité, imprime aux masses les principaux ca- ractères qui lui sont propres; dans toutes les autres, c'est le pyroxène qui prédomine, soit par sa quantité, soit par l’intensité , de sa couleur et les caractères remarquables de fusion qu'il communique constamment aux masses. Les associations de la première classe peuvent se réduire à quatre, savoir : Feld-spath, prédominant avec pyroxène et fer titané. Feld-spath, prédominant avec fer titané et amphibole. Feld-spath, prédominant ayec amphigène et fer titané. Feld-spath, prédominant avec fer titané, mica et amphibole. Les associations de la seconde classe peuvent aussi être ré- duites à quatre, savoir : Pyroxène, feld-spath et fer titané. Pyroxène, feld-spath, fer titané et péridot. Pyroxène, feld-spath, fer titané et amphigène. Pyroxène, feld-spath, fer titané et fer oligiste. Ces dernières notions complètent la reconnoissance des dif, férentes substances minérales qui, sous forme de grains cris- tallins microscopiques , composent les pâtes lithoïdes des courans de Jave de tous les âges. J’ajouterai maintenant, que j'ai originairement épuisé plusieurs hypothèses très-opposées à la véritable composition mécanique, En effet il eût été possible de découvrir une substance géné- ralrice commune et absolument nouvelle ; on auroit pu rencontrer un nombre plus considérable de substances soit nouvelles, soit déjà connues; enfin les mélanges pouvoient être plus variés, et chaque localité volcanique pouvoit avoir les siens ; mais l'ob- servation a facilement fait justice de ces différentes hypothèses. Mes principaux eflorts ont été dirigés vers la recherche de l'amphibole, minéral dont l'existence gratuitement supposée, a s ET D'HISTOIRE NATURELLE. 157 servi jusqu'ici de lien ou de principe à presque toutes les classi- fications ou explications des produits volcaniques. On a vu que le feld-spath étoit vraiment la substance prédominante dans toutes les pâtes lithoïdes, après lui le pyroxène et ensuite le fer titané. L’amphibole microscopique ne se montre que dans les pâtes presqu’entièrement feld-spathiques; sa présence y est toujours dé: noncée par des cristaux amphiboliques disséminés , très-apparens; si ce minéral eût existé en abondance dans les pâtes basaltiques, il seroit bien étonnant qu’on ne Py rencontrât jamais (1) en cris- taux apparens, tandis qu’on y voit figurer constamment des cristaux distincts de pyroxène plus ou moins bien accompagnés de cristaux également remarquables, de péridot , de feld-spath, de fer tilané ou d’amphigène. Ces considérations seroient d’un (1) Pendant le cours de mes voyages , j'ai eu lieu d'examiner un bien grand nombre de couches basaltiques de tous les âges ; deux seulement m'ont pré- senté de l’amphibole en cristaux disséminés , apparens à la vue simple ; je vais en donner l'indication. L’une de ces couches située au sommet du Puy-Corent (en Auvergne), est composée de croûtes basaltiques boursoufflées ou scorifiées, servant de chapeau à une nappe de lave compacte, en partie colonnaire. Ces croûtes renferment un assez grand nombre de fragmens d’amphibole cristallisé, informes , d’un volume communément médiocre et quelquefois gros comme le poing, offrant des surfaces inégales, irrégulières, tantôt lisses et comme polies , tantôt ternes et scorifiées ; ils sont accompagnés de cristaux de pyroxène et de fer titané, rares, petits, d’un volume assez égal et en tout semblables à ceux de mème nature qu’on distingue dans la lave compacte inférieure ; il est à remarquer que de son côte cette lave ne renferme pas d'indice d’amphibole. Le sommet du Cantal (mème contrée) est terminé par un lambeau de couche ba- saltique recouvert presqu’entierement par un gazon épais. Les angles saillans de la roche montrent quelques prismes imparfaits d’amphibole , dispersés avec quelques grains de pyroxène au milieu d’une pâte tantôt dense , tantôt légere- ment boursoufflée. J’ai en outre reconnu la présence de l'amphibole dans plu- sieurs fragmens de roche basaltique , abondans d’ailleurs en cristaux parfaits de pyroxène et de péridot, et gisant au milieu des tufs basaltiques de Thiezac (mème contrée). Enfin je suis parvenu à trouver dans les nombreuses collec tions de Paris, une demi-douzaine d'échantillons basaltiques de localités mal connues , qui offroient avec beaucoup de pyroxène et quelque peu de péridot , des cristaux disséminés d’amphibole. Je ferai remarquer que dansles roches que je viens de citer , ce minéral paroit adventif, à enjuger seulementparsa rareté, son défaut de forme, l'inégalité de son volume, la scorification de ses sur- faces et le boursoufilement de la matière basaltique immédiatement environ- nante. On pourra découvrir de nouvelles raretés géologiques analogues à celles que je viens d'indiquer ; maisil estévident qu’on n’en pourra rien conclure pour la masse immense des terrains basaltiques incontestablement exempts d'amphi- bole. Aussi les conséquences absolues, déduites de mes expériences et de mes nombreuses recherches, subsistent dans leur entier. 158 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE grand poids, dans le cas où on viendroit à supposer que je me suis laissé induire en erreur, dans tout le cours de mes expé- riences, à l'égard du pyroxène et de l’amphibole. Le passage gradué qu’on a observé entre le basalte noir et la lave granitoïde du Meisner et de Saint-Sandoux (en Auvergne), dite mimose, se trouve en harmonie avec mes expériences et leur prête un point d'appui irrécusable. Maintenant on peut avec certitude dire indifféremment que le mimose est un basalte à grains visibles, ou que le basalte est un mimose à grains mi- croscopiques. Mes résultats d'analyse mécanique ne sont pas moins d'accord avec ceux de l'analyse chimique; ils en expliquent les variantes. Les principes constituans, extraits de différentes pâtes lithoïdes bien caractérisées, telles que les basaltes de Hasenberg en Bohème, de 1669 à l'Ethna, et le klingstein de Sanadoire en Auvergne, sont en rapport avec ceux des minéraux microsco- piques composans ; ce rapport se concevant de reste, je ne marrêterai pas à en exposer les termes; je ferai remarquer seu- lement que le titane contenu dans les pâtes lithoïdes, a échappé aux chimistes à raison de sa petite quantité, et qu’il en est probablement de même de la magnésie, dont l'existence en proportion très-foible, est indiquée à priori dans beaucoup de basaltes, par la présence du péridot microscopique. Du reste ; à l’avenir, il sera curieux de vérifier si à l’aide d’une simple reconnoissance mécanique, et considérant l’espèce des minéraux microscopiques composans , leur mélange et la relation des vo- lumes aux poids, on peut à l'avance obtenir, avec une approxi- mation suffisante, l'expression numérique de la composition chimique d’une pâte lithoïde quelconque. Ces considérations auxiliaires fortifient les résultats directs de mes expériences, et leur impriment, je crois, le degré d’évi- dence qu’il est possible d’atteindre dans un semblable sujet. IL faut donc admettre les faits généraux suivans. Les pâtes lithoïdes des courans de lave modernes, celles des courans incontestables antérieurs aux temps historiques, celles des lambeaux de courans dont l’origine est plus ou moins con- testée » sont identiques de contexture intime et de composition mécanique. Toutes sont des granites microscopiques dans lesquels l’unifor< milé du tissu entrelacé n’est interrompue que par de très-petites ET D'HISTOIRE NATURELLE. 159 vacuoles, un peu moins rares dans certaines laves incon(estables que dans toutes les autres. Les minéraux élémentaires de ces granits microscopiques ap- partiennent au petit nombre d’espèces qu’on trouve souvent dis- séminées en cristaux apparens dans les pâtes lithoïdes. Les associations de ces minéraux élémentaires peuvent être géologiquement réduites à huit, qui sont simplement ternaires ou quaternaires, et dans lesquelles deux des substances élémen- taires, le feld-spath et le pyroxène, sont constamment prédomi- nantes , non-seulement par leur abondance, mais encore par Vinfluence des propriétés dont elles sont douées. Enfin ces associations considérées sans le secours du microscope et sans celui de la loupe, redeviennent des masses d'apparence homogène, dont les propriétés composées sont dominées tantôt par les caractères du feld-spath, et tantôt par ceux du pyroxène; les autres minéraux élémentaires, rares ou masqués, n’exercent presqu’aucune influence caractéristique, et les masses ne peuvent plus être minéralogiquement distinguées qu’en deux sortes. Les conséquences immédiates qu’on peut naturellement déduire de ces faits généraux sont tellement fondamentales, que je crois devoir indiquer quelques-unes des plus marquantes, avant de passer à l’exposition de mes expériences sur les autres bases in- déterminées des roches volcaniques. D'abord il est évident qu'on n’a pas été fondé à élever au rang de véritables espèces minéralogiques, plusieurs des pâtes lithoïdes dont je viens de déterminer la nature; d’un autre côté, beaucoup de minéralogistes ont été trop loin, en les rejetant toutes sans descriptions spéciales et préalables dans les classifications pure- ment géologiques. Il paroît naturel de suivre à leur égard le parti qu’on est unanimement convenu de prendre pour les mi- péraux quartzeux ou calcaires mélangés. Elles peuvent donc et elles doivent être rapportées aux variélés compactes des deux minéraux élémentaires dominans, en leur accordant des noms particuliers et surtout des descriptions très-détaillées, à raison de l'importance du rôle qu’elles jouent dans les roches volcaniques. Ainsi les pâtes lithoïdes qui fondent en verre blane permanent , ou en verre blanc piqué de vert ou de noir et se colorant foi- blement à la longue, appartiendront au feld-spath compact, et celles qui donnent un émail noir ou un verre de couleur verte: foncée, appartiendront au pyroxène compact. Je réuuirai les: 160 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE premières sous le nom de /eucostine, suggéré par la grande quantité de grains blancs qu'elles renferment et qu’on y peut aisément distinguer à l’aide d’une bonne loupe et d’une vive lu- mière. Je conserverai au second le nom de basalte qui est en quelque sorte consacré. Désormais la notion minéralogique conventionnelle du basalte deviendra celle-ci : pyroxène compact, mélangé de beaucoup de parties microscopiques de feldspath et de fer titané, auxquelles s'associent quelquefois des particules de péridot, d’amphigène et de fer oligiste. La notion minéralogique conventionnelle de la leucostine sera: feld-spath compact, mêlé d’une petite quantité de fer titané microscopique , auquel s'associent de petites quantités de py- roxène, d’amphibole , de mica, ou d'amphigène. La synonymie du basalte comprendra principalement les laves argilo-ferrugineuses homogènes de Dolomieu , les laves basaltiques uniformes de M. Haüy, de basalte trappéen, le graustein et la lave proprement dite de M. Werner. La synonymie de la leucostine embrassera, les laves pétro- siciliceuses homogènes de Dolomieu , les laves pétro-siciliceuses mniformes et le feld-spath compact sonore de M. Haüy, la do- mite et la lave à base de hornstein de Karsten, le klingstein et la base de plusieurs thonporphyres de M. Werner. Les modifications de la contexture qui tantôt est compacte, tantôt écailleuse et tantôt granulaire, fourniront des sub-divisions faciles à motiver. Les variations de composition mécanique pour- ront être prises subsidiairement en considération, ainsi que les accidens dus au boursoufflement ; mais je reviendrai sur ce sujet ; pour le moment je me contente de l'essentiel, c’est-à-dire de poser les principes. Cette distribution naturelle, tout en détruisant les préjugés conçus à l'égard de la composition des pâtes lithoïdes , a l'avantage de ne pas s'éloigner sensiblement des coupures empiriques déjà établies. Elle concilie même les opinions sous un certain point de vue. En effet les minéralogistes qui ont soutenu que toutes les pâtes lithoïdes étoient des mélanges, avoient raison , et ceux qui ont prétendu qu’on pouvoit les placer dans la méthode minéra- logique, n’avoient pas tort. Eu Si les recherches précédentes peuvent servir à concilier des opinions sous le point de vue minéralogique, elles ne concilient point ET D'HISTOIRE NATURELLE. 161 point les hypothèses géologiques imaginées pour expliquer l’ori- gine, la fluidité, la coagulation lithoïde des courans de lave. Bien loin de là, mes résultats ne satisfont à aucune de ces hy- pothèses, ou, pour m'énoncer avec plus de logique, et comme Je crois être autorisé à le faire, aucune de ces hypothèses ne satisfait à mes résultats, Je n’entrerai à ce sujet dans aucun développement ; mais je reproduirai les conséquences de mes observations sous une autre forme, et j'en déduirai l’expression rigoureuse des conditions qui caractérisent le phénomène de la coagulation des courans de lave ; je dirai qu’ilest démontré quela matière intérieure des courans (ceux d’obsidienne exceplés), se cristallise en entier par le refroidissement, et se change en une infinité de très-petits cristaux ou grains entrelacés solidement, laissant entre eux des vacuoles rares et déliées et appartenant à des espèces minérales bien déterminées. Cette notion, considérée comme loi générale , explique faci- lement beaucoup de cas particuliers non encore résolus ; Je me contenterai d’en produire un exemple remarquable. , On a discuté depuis long-temps, et on discute encore, sur l’origine des cristaux apparens, disséminés dans les pâtes li- thoïdes. Les uns prétendent que la formation de ces cristaux a eu lieu au milieu de la matière incandescente, les autres pensent qu'ils ont été apportés des entrailles de la terre, après avoir résisté au ramollissement ou à la fusion des roches qui leur servoient originairement de matrice (1). D'après mes expériences, ilme semble que la difliculté n existe plus. Un cristal de deux à lrois oo @G) Nous sommes riches en explications des phénomènes volcaniques. Il a été plus facile d'imaginer des hypothèses sur leur nature, que d’étudier , d’a- natomiser et de bien décrire leurs produits. Jusqu’à présent on n’a su voir dans ces produits que des roches diverses, fondues ou remaniées par des causes lo- cales ; à coup sûr c’est trop resserrer le champ des suppositions. Juand à défaut de faits, la science accueille les spéculations hypothetiques , il faut au moins tächer d’épuiser la série de ce qui est possible. C’est d’après cette considération que Dolomieu s’éloit décidé à mettre en avant dans un de ses derniersouvrages, une idée absolument neuve et qui paroît plus féconde que toutes celles qui ont précédé. Cetteidée , que je ne juge pasici, conduiroit à faire supposer que la vols canicité est un phénomène général ; que la matière des laves remplit une grande parie de l’intérieur du globe, si ce n’est la totalité ; qu’elle y a existé de tous les temps , douée de laliquidité pâteuse et de la plus haute incandescence ; et qu elle y éprouve des modifications extrémement lentes dont les tremblemens de terre et les éruptions sont le produit. Tome LXXXIII. AOÛT an 1016. X 162 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE millimètres de longueur, ne se forme pas en vertu d’une autre force d'agrégation, qu'un cristal d’un vingtième ou d’un cin- quantième de millimètre; les dimensions dépendent de la con- ünuilé d'action ; beaucoup de causes peuvent la troubler. Si le refroidissement des courans peut résoudre toute leur masse li- quide en cristaux microscopiques , il y a tout lieu de croire que les gros cristaux qui s’y trouvent disséminés, sont les pre- miers produits de l'agrégation régulière. On pourra s'étonner qu'après avoir démontré que le pyroxène est un des produits formés par la résolution complète de la ma- tière des laves en cristaux, je ne propose pas de changer le nom de ce minéral ; ce nom signifie eflectivement é/ranger au domaine du feu; il a été suggéré à M. Haüy par Dolomieu qui a partagé long-temps la seconde des opinions dont j'ai parlé plus haut, J’estime que l’étymologie pourra être interprétée à l'avenir sous un tout autre point de vue; la dénomination de pyroxène rappellera aux observateurs que les phénomènes volcaniques dif= férent essentiellement de ceux du feu que nous savons produire, et que c’est à tort que l’on a cru jusqu’à présent le contraire ; elle les averlira qu’il faut abandonner désormais tout préjugé de cette espèce , si l’on veut avancer dans l'étude des volcans , et parvenir surtout à déterminer quelles sont les causes inconnues qui, jointes à l’incandescence , donnent la fluidité aux courans de lave, per- meltent aux combinaisons chimiques de s’y former, et favorisent l'agrégation régulière et complète de ces combinaisons, pendant la durée du refroidissement. Après avoir trouvé le mode uniforme qui régit la composition des pâtes minérales, qui font la base des courans lithoïdes de tous les âges et de tous les pays ; après en avoir déduit l'expression de la loi qui préside à la coagulation des laves incandescentes, je eomplelterai Fexamen des laves lithoïdes anciennes et modernes, en démontrant l’inexactitude des rapprochemens dont elles ont été jusqu’à présent l’objet. Une partie des minéralogistes supposent que les laves mo- dernes ne ressemblent point aux laves anciennes, que ces der- nières, au contraire, ont une composition analogue à celle des trapps, des cornéennes et des pétrosilex, et que par conséquent leur origine est semblable. Les autres assurent que les laves anciennes et modernes ne sont rien autre chose que des pétro- silex , des cornéennes et des trapps remaniés par les agens sou- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 163 terrains, et auxquels la coagulation a restitué leur contexture originaire. On voit qu'il y a trois termes dans ces analogies: J'ai prouvé que le premier et le second sont fort différens de ce qu’on les a supposés; je vais prouver qu’on n’a guère mieux connu le troisième terme. (La suite au Cahier prochain.) Re] EXTRAIT dune Lettre de M. Braconnot, Professeur d'Histoire naturelle à Nancy, à J.-C. Delaméthertie. JE vous adresse des observations que j'ai faites sur la belle couleur jaune que fournit le datysca canabina, la canabine, et vous prie de les publier sur-le-champ, afin qu’on ait le temps d’en recueillir les graines... .. . Note du Rédacteur, Ce Cahier étoit imprimé lorsque j'ai reçu ces observas Lous...;elles se trouveront dans le Cahier prochain, 164 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, elc. LS SC US SG | TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER, Mémoire sur les propriétés optiques du muriate de soude, du fluate dechaux et du diamant; par David Brewster. Extrait des Transactions Philosophiques. Pag. Tableau météorologique ; par M. Bouvard. Des Méthodes classiques et naturelles appliquées à la géographie physique; par M. Toulouzan de Saint- Martin. Deutième Mérmotre. \ De l'état actuel de la Chimie ; par J.-C. Delamétherie. Mémoire sur, les substances minérales dites en masse, qui entrent dans. la composition des roches volca- niques de tous les âges; par P. Louis Cordier. EEE a ——————————— De l’Imprimerie de M®° Veuve COURCIER, Imprimeur-Libraire, pour Jes Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n° 57. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. SEPTEMBRE an 1816. SUITE DES MÉTHODES CLASSIQUES ET NATURELLES APPLIQUÉES A LA GÉOGRAPHIE PHYSIQUE; Par M. TOULOUZAN DE SAINT-MARTIN. DEUXIÈME MÉMOIRE. TROISIÈME PARTIE DU MONDE. L'Éricie. IL est à peu près démontré aujourd'hui que la Colombie est séparée du Groenland et des autres terres situées plus au nord, Je dois rapporter, en les abrégeant , les faits qui appuient cette opinion. 1°. Plusieurs navigateurs anglais et danois ont pénétré dans le fond de la baie de Baflin, et ils y ont trouvé parmi les glaces, Tome LXX XIII. SEPTEMBRE an 1816. Y 166 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE des ouvertures qui semblent annoncer des canaux ou passages, Dans tous les cas, il est prouvé que Baflin n’a pas fait le tour de la baie, comme il le disoit, ou que, s'il Pa fait, il a pris pour des terres ce qui n’étoit qu’une ceinture de glaces. 20, Les groenlandais disent qu'à l'occident de leur pays il existe un lac non gelé dont ils ne connoiïssent pas les limites. 30, Le capitaine anglais Cluny prétendoit avoir passé, vers la fin du siècle dernier, de Repulse-Bay, golfe situé au nord- ouest de la baie d'Hudson, dans la mer de Tartarie ou de la côte orientale d'Asie. Il a donné même la direction et les me- sures du détroit qu’il termine à l’ouest par deux caps auxquels il a imposé les noms de Spurrel et de Fowler. Ce fait rap- porté avec toutes ses circonstances dans l’£ncyclopédie métho- dique, art. passage du nord, peut se concilier avec nos con- noissances actuelles, en admettant que Repulse-Bay communique avec les mers d'Hearne et de Mackenzie, et que l’un des caps dont le capitaine anglais a voulu parler, n’est autre que le cap Glace. 4°. On a trouvé sur la côte du Kamtchatka des baleines portant des harpons anglais, hollandais et biscayens, nations qui ne faisoient alors la péche que dans l'Océan atlantique sep- tentrional. 59. On sait, à n’en pouvoir douter, que les peuples du Groen- land et des côtes du Labrador sont de la même race que les Eskimaux retrouvés depuis sur la côte de la Colombie à l’ouest de la baie d'Hudson qu’ils fréquentoient autrefois, soit par Re- ulse-Bay, soit par les canaux qui dounent entrée à la baie de Baftin. Cette fréquentation n'a même cessé qu’à une époque très-moderne , et les mêmes Eskimaux trafiquent aujourd’hui. avec les comptoirs russes de la côte nord-ouest. On peut conserver des doutes sur quelques-uns de ces faits qui ont pas été vérifiés avec assez d’exactitude ; mais le dernier est incontestable, et ses conséquences se concilient avec les dé- couvertes récentes d’Hearne et de Mackenzie. L’objection de ceux qui prétendent que les espaces de mer vus par ces deux voyageurs pourroient n'être que des lacs, est dénuée de fonde: ment. Mackenzie a vu sur le rivage, des squelettes de Baleines et des huttes d’Eskimaux; peuple qui, dit-il, est en possession de-toute la côte septentrionale. En lisant attentivement la relation de Mackenzie , j'ai été ET D'HISTOIRE NATURELLE. 167 surpris que ce voyageur, ordinairement exact et souvent minu- tieux daus ses observations, ait passé si légèrement sur sa plus importante découverte, celle de la mer qui a été le terme de sa course. À peine s'est-il donné le temps de la voir, et il avoit tous les moyens nécessaires pour y naviguer pendant plusieurs Jours. Sa réserve, à cet égard, me fait soupconner qu'il nous a caché une partie de la vérité, par intérêt pour son pays et pou la compagnie du nord-ouest dont il étoit l'agent. Il’ a craint, peut-être avec raison, que si à cette extrémité du monde, il indiquoit une mer libre d'obstacles, les Russes n’y parvinssent en doublant le cap Glacé pour explorer les fourrures de la côte. On sait que ces sortes de restrictions sont des lois pour les peuples marchands. Sans M. de La Pérouse qui, dans l'expédition où il se rendit maître des comptoirs anglais de la baie d'Hudson, exigea du gouverneur Hearne, devenu son prisonnier, que le manuscrit de son voyage seroit publié, nous ignorerions encore ce que les Anglais savent depuis long temps, que le passage du nord-ouest , objet de tant de recherches infructueuses, existe véritablement et sépare la Colombie des terres polaires. Après avoir démontré que ces terres sont détachées du Nou- veau-Continent, rassemblons les preuves de l'existence de ces mêmes terres au nord de l'Ancien-Monde. Je ne puis mieux faire que de rapporter succinctement ce que Saver, traducteur du voyage de Billing , raconte de cette découverte sur la foi de Protodiakonoff, un des compagnons de Lakoff. Ces deux hommes intrépides partirent en mars 1770, de l’em- bouchure de l’Yana, rivière considérable située à l’est de la Lèva, etayant son embouchure dans le même ae Ils faisoient roule sur un zart, ou traîneau tiré par des chiens. Arrivés au Swatoï-Noss, promontoire le plus septentrional de la côte, ils aperçurent un grand troupeau de rennes qui venoit du nord, et ils suivirent les traces que ces animaux avoient laissées sur la glace de la mer Polaire. Ils arrivèrent bientôt à une ile située à 7o werstes (18 lieues) du Swatoï-Noss, puis à une seconde plus septentrionale de cinq lieues. En s’avancant plus loin, la glace se trouva tellement montueuse, que les Voyageurs ne pou vant continuer leur route, retournèrent sur le continent, Le gouvernement ayant accordé à Lakoff le privilége exclusif de recueillir l’ivoire fossile de ces îles, cet aventurier y fit un Ye 168 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE second voyage, en 1775, dans un canot , accompagné de cinq ouvriers. Au-delà des îles il navigua dans une mer très-salée, dont le courant portoit à l’ouest, et il aborda à une côte fort étendue, très-montueuse, couverte de bois apporté par les flots, stérile, mais offrant une immense quantité de dents de mam- mouts et d’autres fossiles, avec beaucoup de traces d'animaux. Cette découverte parut si importante au gouvernement d’Ya- koustn, que l’arpenteur-général Tchwoïnoff fut chargé de l’exa- miner et d’enlever le plan. Le 6 mai 1775, il arriva à la pre- mière île à laquelle il donna 38 lieues environ de longueur et 5 de largeur dans la partie la plus étroite; le milieu est occupé par un grand lac à bords escarpés, mais peu profond; on ne voit que quelques monticules de roches; tout le reste du sol est un mélange de sables et de débris fossiles, la plupart d’animaux gigantesques. La seconde île offre la même composition, mais elle n’a que 15 lieues de long et 5 dans sa plus grande largeur. Elle est couverte d’un lit de mousse très-épais qui repose immédiatement sur la glace. + Le canal qui sépare cette île de la Grande-Terre, peut avoir 25 lieues de large suivant Tchwoïnoff, Cet envoyé ayant abordé la côte, la suivit vers l’est jusqu’à une rivière considérable qu’il nomma Tzarévaya-Réka. I] gravit une haute montagne du sommet de laquelle, par un temps très-celair, il vit le pays s’é- tendre jusqu'où la vue pouvoit porter vers l’est, l’ouest et le nord. Il suivit de nouveau le rivage l’espace de 25 lieues, et trouva sur son chemin trois grandes rivières couiant au sud, remplies de poissons et chariant beaucoup de bois (r). T'el fut le récit de Protodiakonoff, Depuis il ne nous est rien parvenu de plus récent sur cette Grande-Teïre; j'ai seulement appris de quelques officiers russes, qui avoient été en Sibérie et que j'ai connus à Paris, que celte terre étoit très-fréquentée par ceux qui cherchent les dents de mammouts, et que l'opinion générale est que son étendue est très-considérable, et que dans l'intérieur elle doit être boisée et peuplée d'animaux. En effet, ces bois que charient les rivières, ne peuvent provenir que des (1) Voyage de Billing, rédigé par Saver, traduit par Castera, 2 vol. in-8°, avec atlas, tome [, pag. 191 et suiv. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 169 forêts de l’intérieur, et il paroît que le froid n’y est pas excessif, puisque ces mêmes rivières sont très-poissonneuses, D'un autre côté, comme le courant porte avec beaucoup de violence à l’ouest , il est probable que la côte de cette terre s'étend fort loin à l’est; car, dans cette supposition, on concevra que la mer, arrêtée par les terres du nord , est forcée de courir dans le canal. Peut-être même seroit-on fondé à dire que ce courant est celui qui remonte le détroit de Davis et passe dans la mer de Lakoff par les entrées de la baie de Baflin. D’autres faits appuient celte opinion. Toutes les années on voit passer et repasser, tant dans l’Ancien que dans le Nouveau-Continent, des troupeaux d'ours et de rennes. Les Tchouktchis , peuples de l’extrémité nord-est de l'Asie, émigrent avec leurs rennes dans une terre septentrionale vers la fin de l'hiver, pour n’en revenir qu’à la fin de l'été. Les Eskimaux qui fréquentent les compioirs russes de la côte nord-ouest, appellent la mer sur laquelle ils naviguent 2el-Houllaï-Tou, le lac de l'Homme- Blanc; cette dénomination de lac doit faire supposer que la mer dans ces régions polaires, est enfermée par des terres au nord et au sud. Ainsi il y a une très-grande probabilité que la Terre de Lakoff s'étend à l’est jusqu'au Groenland, ou au moins dans le voisinage. Les rapports des Samoiïëdes donnent aussi lieu de penser qu’il existe des terres au nord de leur pays; et le passage des rennes et des ours y est aussi très-fréquent. La Nova- Zemla ou Nouvelle- Zemble, que par différens motifs exposés plus bas, je range dans l'Ericie, s'étend au nord jusqu’au 77° de latitude. A l’ouest d’une ligne tirée entre le Gélania-Noss, qui termine le Nova- Zemla et le Spitzherg, on a découvert plusieurs groupes d'’iles qui semblent lier à-la-fois la Nova-Zemla , le Spitzberg, l’Is- lande et le Groenland. Cet espace de mer est le seul qui ait été fréquenté pour la pêche des baleines et des phoques. Il est naturel de croire que si la navigation s'étendoit au nord-est de la Nova-Zemla, on y découvriroit les terres qui doivent se joindre à laterre de Lakoff. De toutes ces données, on est en droit de conclure qu'il existe un continent boréal séparé des nôtres par un canal obstrué d'îles qui en ont été détachées, et qui par conséquent lui appartiennent ; que cette séparation des îles doit s'être faite à l’époque où l'Océan austral a pénétré dans ce canal, d’où il a été repoussé vers le sud; que ce continent est assez élendu pour former une partie 170 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE du monde; d'autant mieux qu'il a des caractères particuliers et dignes d’être observés avec attention; enfin, que les limites de ce continent doivent étre traeées au point où ses pentes se rencontrent avec celles de la Colombie et de l'Europasie sep- tentrionales. Je pars du cap Farewel qui termine le Groenland au sud par le 60e de latitude et le 45e de longitude occidentale environ. De ce cap en allant vers l'est, la ligne passe par MVestmanna- Eyar, groupe d'îles au sud-ouest de l'Islande. Dans la plupart des géographies, l'Islande est décrite comme annexe de PÉurope. Les distances s'opposent à cette réunion , et la connexion de l’[s- lande avec le Groenland n’est pas douteuse. De l'Islande la ligne va joindre les îles de Jan-Mayen, les îles Bear ou Cherry, et l'ile Hoop au sud-est du Spitzberg, vaste archipel qui du 75° parallèle s'étend Jusqu'au 61° et touche probablement au continent boréal. De l'ile Hoop nous descendons à l’île Kalgonef, et de celle-ci à l’île Dolgoi, toutes deux situées au nord de la côte septen- trionale du gouvernement d’Arkangelsk. Celle de Kalgonef est séparée de cette côte par un canal de trente lieues environ où la mer est libre et profonde. La côte d'Europasie, qui s'étend vis-à-vis cette île, entre le golfe de Tcheskaia et le canal qui conduit à la mer Blanche, a sa direction de l’est à l’ouest, tandis que l'ile Kalgonef a son axe parallèle aux méridiens. L'ile Dolgoi est plus voisine de la côle, mais elle se lie par l'ile Matreief et différens écueils à l’île Waigaich qui est une dépendance de la Nova-Zemla. Les vaisseaux qui font route pour le détroit de Waigatch, passent toujours au sud de l’île Kal- gonef et de l'île Dolgoi. Ces motifs m'ont paru suflisans pour ranger dans l'Ericie, ces îles sur lesquelles nous n’avons que trèspeu de notions, mais qui paroissent avoir appartenu plutôt aux terres de la Nova-Zemla qu’à celles de l'Europasie, De l’île Dolgoi, la ligne va joindre la pointe de l'ile Waigatch dans le détroit de ce nom, au sud de la Nova-Zemla. Ces terres ne sont séparées de l’Ancien-Continent, que par un bras de mer très-étroit; mais il en est de même partout où les parties du Monde se rapprochent ; à Gibraltar, à Malaca, au détroit de Béring, etc. La Nova-Zemla n’est pas un prolongement de la chaîne Ouralienne, puisque cette chaîne baisse sensiblement vers le nord et finit à une grande distance du rivage. La rivière ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 171 Kara qui a sa source dans les dernières ramifications de l'Oural, coule vers le nord surune étendue de plus de quatre-vingts lieues. Toute la côte d'Europasie se prolonge en pente douce vers le nord , tandis que les terres de la Nova-Zemla sont escarpées et aiguës vers le sud. Je reconnois encore dans ces parages que les eaux se sont accumulées dans un creux qui présente les mêmes dispositions que la merdes Antilles , la Méditerranée, ete. ; c’est-à-dire une séparation ordonnée par la rencontre des pentes, cause à laquelle il faut attribuer la formation de la mer Blanche, dont l’ancien lac a été envahi par l'Océan qui a dû , même dans les premiers jours de son invasion, faire communiquer cette mer avec la Baltique. En effet, la Scandinavie fait le pendant du Groenland, comme la mer Baltique fait celui de la baie d'Hudson. Ainsi, bien Icin de rattacher la Nova-Zemla à l'Europasie, il y auroit peut-être des raisons pour joindre la Scandinavie à l'Ericie. Mais je doi: écarter des innovations qui paroîtroient trop hardies et qui seroient difficilement approuvées. De l’île Woigatch, la ligne remonte au nord du cap Seve- rovostochnoi où ii doit se trouver, comme nous l’avons dit plus haut, quelque terre vers le 8ot de latitude, et de ce point elle redescend à la terre de Lako# au 75e. Les îles qui sont entre cette terre et la côte d’Asie doivent rester à celte dernière : leur direction l'indique ; elles sont liées au Swatoï-Noss par des sables et des glaces quine fondent jamais; au contraire, suivant le rapport de Tchwoïnoff que J'ai cité plus haut, le canal qui est entre ces îles et la Terre de Lokoff, a vingt-cinq lieues de large et le courant y est très-fort. La carte d’Arrousmith indique un grand banc de sable dans ce canal; mais la carte russe que j'ai sous les yeux, n’en fait pas mention. En outre, les îles Lakoff sont basses et sablonneuses comme la côte d'Asie, tandis que selon Tchwoïnoff, la terre de Lakoff est montueuse et vraiment continentale (1). Les pentes de cette terre sont inclinées droit au sud, et se rencontrent par conséquent avec celles de la Si- bérie ; de sorte que le canal est le réservoir de toutes les eaux. Je ne chercherai pas à connoître comment et dans quelle ré- gion cette terrede Lakoff se joint au Groenland. Nous manquons de faits à cet égard. Il paroît que le Groenland est bordé au ns (1) Sur la carte russe les îles Lakoff sont nommées , la plus grande, Perwo: et la plus petite, /toroy. 172 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE nord-ouest de plusieurs archipels qui , dans leur ensemble, tracent le contour de la baie de Baffin, en laissant plusieurs passages pour aller de cette baie à la mer de Lakoff. Si, comme on le croit , le Sound de James Lancaster est un de ces passages, nous devons le considérer comme la limite naturelle de la Co- iombie et de l'Ericie. Cependant il seroit possible que Repulse- Bay, golfe de la baie d’Hudson dont les côtes sont peu connues, communiquât par un ou plusieurs canaux avec la mer vue par Hearne et Mackenzie. Ce qui me le feroit croire, c'est que ce dernier voyageur a trouvé dans cette mer les mêmes poissons que dans la baie d'Hudson. Ce fait se concilie très-bien avec le Journal du capitaine Cluny , dont j'ai parlé au commencement de cet article. Néanmoins Je crois devoir me conformer à l’o- pinion d'Arrowsmith, en regardant le sound de Jamee Lancaster comme le canal de séparation, et alors je terminerai l’Ericie de ce côté par le cap situé au nord-est de ce canal, et je l'ap- pellerai le cap Dancaster. ; De ce cap, opposé à celui de Baffin, la ligne viendra rejoindre le cap Farevel qui a été mon point de départ. QUATRIÈME PARTIE DU MONDE. L’Europasie. La division de l'Europe et de l'Asie a été introduite dans on temps où les connoiïssances géographiques étoient à peu près bornées aux pays qui entourent la Méditerranée. Cette mer dut être regardée alors, comme une limite naturelle entre ce qu’on appeloit les £rois parties du Monde. L'autorité des anciens , trop respectée dans les sciences et pas assez dans les arts, le pouvoir de l'habitude qui convertit les usages en lois, enfin la jalouse tyrannie de l’enseignement qui écarte avec soin toute innovation, ont consacré une distinction que rejettent la Géographie-Physique et les sciences naturelles. Au contraire, l’histoire et la politique la commandent ; et il est bon de faire ici une observation. C’est que la suprématie dont l'Europe jouit depuis la prise de Troyÿe, ue tient point, comme on le croit communément, à des causes physiques, mais bien à des causes morales. L'erreur dans laquelle on est à cet égard, a sa source, comme tant d’autres, dans l’'alliage monstrueux et forcé de la Géographie-Physique, fille de la nature, et de la Géographie politique, fille de l’homme (x). (1) Voyez la note 1 à la fin de cette partie. Les ET D'HISTOIRE NATURELLE, 175 Les sciences naturelles ne reconnoissent point d’autres lois que les faits, Chaque fait nouveau donne de nouvelles lumières À mesure que le recueil augmente, l’ordre des matières change en raison des rapports qu'on n’avoit pas encore aperçus, et qui exigent impérieusement des corrections et des réformes. La plupart des géographes conviennent que la route qu’ils suivent est mal tracée; 1ls avouent que la ligne de limites entre l'Europe et l'Asie est de pure convention : car séparer deux contrées qui se touchent sur tous les points dans une étendue de près de mille lieues, les limiter, tantôt par des montagnes et des collines, tantôt par des rivières et des ruisseaux, quelquefois par des lacs, des déserts, des plaines, en un mot, par tout ce qu’on rencontre sur son chemin, c’est aller contre le sens commun et violer toutes les lois de la raison. Cependant on maintient une séparation aussi ridicule par une espèce de respect scho- lastique auquel on n'ose pas déroger. En France, j'ai été le pre- mier, je crois, à ne faire de l'Europe et de l'Asie qu’une seule païtie du monde (*). Quelques géographes allemands m'avoient devancé. Ces exemples n'ont pas été suivis. Peut-être sera1-Je assez heureux, malgré bien des erreurs et des négligences que je n’ai pu éviter dans ces Mémoires, pour qu'on adopte au moins les bases d'une méthode que j'ai. puisée sans prévention dans la nature, unique souree de toute vérité. L’Europasie a une figure très irrégulière qui a de très-grands rapports avec celle de la Colombie. Les caractères spécifiques sont bien marqués. Au nord, les terres s’élargissent et s’abaissent en pente douce; au sud, elles se rapprochent et se terminent par des péninsules en général escarpées. Cependant nous aurons oc- casion de remarquer quelques analogies qu'il sera pourtant facile de ramener à la cause générale, qu’en apparence elles repoussent. Je commence par la limite orientale. Du cap oriental qui marque le détroit de Béring, la ligne va au cap Tchoukotskoi qui termine au nord le golfe d’Anadyr; de ce cap à l’île d'Ao- Sima, au sud de celle de Fatsisio où, suivant M. de Krusenstein qui me sert de guide, les grands du Japon sont envoyés en exil (1) ; d'Ao-Sima à Formose, et de Formose aux îles Rintang (®) Poyez le 1 vol. de l’Essai sur l'Hist. de la Nat. publié chez Arthus- Bertrand en 1815. i (1) Voyez la note 2 la fin de cette partie. Tome LXXXIII. SEPTEMBRE an 1816. Z 174 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE qui sont au sud de Ja presqu'île de Malaca , et qu’on peut con- sidérer comme des ramifications du cap Romania, lequel termine celte presqu'’ile. Cette limite orientale est naturelle jusqu’à Formose. La chaîne d'îles qui court du Kamtchatka à Formose, est évidemment la chaussée encore presque entière des anciens lacs qui, par leur jonction à l'Océan, ont formé les mers d’Okotsk, de Tartarie, du Japon et de la Corée. Mais au sud de Formose cette chaussée se continue par les Bashées, les Philippines, Bornéo et les îles de la Sonde; de sorte qu'il est impossible de douter de l’ancienne jonction des deux parties de la chaussée. Cependant la chaussée méridionale devant, par des motifs que je développerai ailleurs, être comprise dans la Malasie, je marque le canal de séparation entre Formose et les îles Bashées où en ellet est la grande passe pour entrer dans la mer de Chine. Du cap Romania et des îles Rintang, je prends la ligne jus- qu’à la Grande-Sambelong la plus méridionale des îles Nicobar ;: de la Grande-Sambelong à Pena-Moluque la plus avancée des Maldives vers le sud; de Pena-Moluque au cap Fartask sur la côte d'Hadramant en Arabie; de ce cap aux îles Roboaunes dans: le détroit même de Rod-el-Maudes; de ces îles à l’isthme de Suez , à l'ile de Chypre; à la Sardaigne par Candie et la Sicile;: à Calpi au détroit de Gibraltar, enfin aux Acores où finit la limite méridionale. Je dois justifier cette limite dans quelques points sujets à con- testalion. Le détroit de Sincapura qui sépare la presqu’ile de Malacca de l'ile Sumatra, est regardé maintenant comme la limite natu- relle de l'Asie vers le sud. Quoique je me trouve ici d'accord avec tous les géographes, je dois faire remarquer que Sumatra et les autres îles plus au sud, appartiennent à la chaîne des mon- tagnes de l'Asie occidentale, qui par leur moyen se continue jusqu’à la Nouvelle-Hollande. La rupture de cette chaîne est due à un concours de causes qui ont opéré une dislocation plutôt qu'une séparation. Cependant cette séparation a été eflectnée ; elle est même de nature à être exactement déterminée malgré ses ancmalies, et il ne s’agiroit pour eela que de multiplier les angles, ce dont j'ai eru devoir me dispenser pour éviter des dé- tails fastidieux. Nous manquons d’ailleurs de cartes détaillées. On suppléera avec le temps à ce qu'il peut y avoir d'imparfait ET D'HISTOIRE NATURELLE. 175 dans la ligne de limite, depuis Formose jusqu’à la Grande-Sam- belong. Ces deux points de reconnoissance étant invariables, iln”y aura à faire que de légères corrections dans l’espace intermédiaire, c'est-à-dire dans la mer de Chine et le détroit de Malacca, où la quantité d'îles est innombrable et par conséquent le canal de séparation très-sinueux. Les îles Nicobar restent à l’Europasie, et en eflet il ne m’a pas paru qu’elles eussent quelque connexion avec Sumatra. 1°. IE n'y à pas moins de quatre-vingts lieues marines entre la Grande- Sambelong avec Sumatra ; 20 la mer est libre et profonde dans ce canal ; 30 Je sol de Sumatra est montagneux ; les îles Nicobar sont des terres basses et marécageuses; 4° ces îles font partie de la chaîne des Audaman, qui est elle-même un prolongement du cap Naigrais sur la côte du Pégie ; 5° ecufin on doit les con- sidérer comme des attérissemens du grand fleuve d’Ava, dont les sables repoussés par la côte de Sumatra placée vis-à-vis, se sont amassés et s’amassent encore aux îles Nicobar. Tous les golfes de la côte méridionale de l'Asie ont été bien certainement des lacs. Il en a été de même de toute læ mer des Indes, puisque les pentes de trois parties du monde aboutissent dans ce bassin, où celles d'Asie surtout versent d’é- normes courans d’eau. Ces lacs étoient divisés par des chaussées qui couroient de tous les sens. La multitude d'îles, de brisans, de bancs de sables, sont des vestiges encore existans de ces chaus- sées. Parmi tant de points de reconnoissance il est difficile de choisir précisément ceux qui doivent être rangés dans chacune des trois parties du monde penchées vers le même bassin. Je me suis décidé par des analogies, et j'ai fixé le point le plus méridional de l'Europasie à Pena-Moluque, la plus australe des Maldives, parce que d’un côté, cet archipel est évidemment en rapport avec le cap Comorin; et de l’autre, les îles ou écueils plus à l’ouest et au sud m'ont paru se lier à l'Afrique, comme je le dirai en son lieu. La mer Rouge est une vallée de toute ancienneté et de pre- mière formation, comme on le voit par la nature granilique, ou soit primordiale, des montagnes d'Arabie et d'Abyssinie. Ces montagnes sont tellement escarpées, leurs pentes si rapides et si rapprochées, qu'il ne coule du côté de la vallée que des torrens et des ruisseaux. Il n’y a nul doute, d’après celte dis- position, qu'il ne s’est point formé de lacs dans les creux; mais 1 y a lieu de penser que du côté de la Méditerranée la vallée Z 2 176 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE a élé ouverte dans les ‘premiers temps, et qu’elle versoit dans le lac existant alors à l'embouchure du Nil, le peu d’eau qui s’amassoit dans la saison pluvieuse. D'un autre côté, l’espace de la mer qui forme aujourd’hui le détroit de Bab-el-Mandeb, paroît avoir été oceupé par une digue ou chaussée, La largeur totale de ce détroit est au plus de vingt lieues, et ce canal, déjà assez étroit, est encore obstrué par plusieurs îles ; les Frères du côté de l'Afrique, l'ile Mebun au milieu , et les îles Roboaunes ou des Pilotes du côté de l'Arabie; de sorte que la plus grande passe n’a pas cinq lieues de large. La nature de ces îles, leur direction et les diflérens caractères géologiques indiquent qu’elles ont lié l'Arabie à l'Afrique; tandis que l’écartement et l’abaissement des deux chaînes d'Arabie et d'Abyssinie à la partie séptentriunaie, annoncent que l’isthme de Suez, qui d’ailleurs n’est qu'un amas de sables et de coquilles , n'a été formé qu’accidentellement ei à une époque assez récente. .. D’après ces indications on peut conjecturer que les lacs du golfe Persique et du golfe du Bengale, s'étant écoulés vers le sud par des débacles successives, furent contenus par la digue de Bab-el-Mandeb, et se versèrent dans les lacs de la mer des Tndes qui s’épanchérent eux-mêmes dans l'Océan Austral. Cet Océan aÿant énsuite élé reporté vers le nord par l'action centri- fuge, acheva d'engloutir les terres basses, creusa plus profon- dément les golfes du Bengale et de la Perse, brisa la chaussée de Bab-el-Mandeb et s’engouffra dans lamer Rouge. Là ; ses eaux comprinées, acquérant plus de vitesse et de force, ont dû jaillir en quelque sorte dans la Méditerranée , composéealors deplusieurs lacs qui, par cette irruption, se sont convertis en une seule mer. Cette mer a subsisté pendant quelque temps dans cet état, c’est- à-dire à un uiveau plus élevé et égal au moins à celui dela mer Rouge avec laquelle elle communiquoit. La différence actuelle du niveau a élé estimée d'environ trente pieds, par les savans Français de l’expédition d'Egypte. Elle devoit être alors plus considérahle. Cet état de l’ancienne Méditerranée paroît constaté par des faits historiques. Les prêtres d'Egypte disoient à Hérodote qu'il y avoit eu un temps eù la vallée du Nil étoit couverte par les eaux jusqu'au Nome Thébaïque, et qu'elle formoit un vaste golfe d'environ cinq degrés du nord au sud. Divers autres faits de ce genre confirment ce rapport, et il paroît que la fable de l'Atlantide, si elle a quelque fondement, se rattache à cette époque. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 477 Dans un temps plus rapproché de nous, la Méditerranée, ac- crue par la débacle du Pont-Euxin qui, d’après une idée heureuse de M. Barbié du Bocage, peut expliquer le déluge d'Ogygès, et faisant de continuels efforts contre les parois de son bassin, s’est fait jour par les colonnes d'Hercule , dans l'Océan Atlantique. Alors son niveau a baissé, d'autant que l’évaporation lui enlevoit plus qu’elle ne recevoit par les fleuves. Cet abaissement a forcé l'Atlantique de couler à son tour dans la Méditerranée. Le courant trés-fort, né de cette cause bien reconnue, balayant tous les débris des terres, les dirigea vers la mer Rouge, où1l trouva le courant de la mer des Indes. C’est la rencontre de ces deux courans , et le dépôt mutuel des parties terreuses dont les eaux étoient char- gées, qui ont formé le détroit au nord et ont donné naissance à l'isthme de Suez. En eflet cet isthme s’agrandit encore par les mêmes causes, auxquelles il faut joindre les attérissemens du Nil et le mouvement progressif des sables du désert. Ces changemens qu’avoue la Géographie-Physique, sont en outre con- #irmés par le témoignage de plusieurs auteurs anciens, et surtout par celui de Sirabon qui dit, d’après Eratosthènes, que la com- munication du golfe Arabique avec la Méditerranée n'a cessé que lorsque celle-ci a ouvert le détroit de Gadès, et que ce n’a été qu’alors que l’isthme de Suez a paru (1). L'isthme de Suez n’est donc qu’un lien factice entre l’Euro- pasie' et l'Afrique, et il est réellement la limite de ces deux parties du monde. Laligne de démarcation que j'établisentre l'Europe et l'Afrique a besoin aussi d'être justifiée. Du cap Rosat, qui marque à l'orient l'entrée de la Grande- Syrte ou golfe de Sidre, il part un banc de sable qui élève le Fond de la mer sur une ligne qui passe aux îles de Malte, de Gozzo, de Pentellarie, au cap Bon et aux autres promontoires de la côte d'Afrique, allant aboutir aux îles Galita, vis-à-vis la Sardaigne. Ce banc ou cette ligne dont tous les points sont liés, doit être considéré comme l’ancien rivage de l'Afrique, et le golfe de Sidre comme un envahissement de la mer postérieure à l’ivruption de la mer des Indes dans la Méditerranée, Un autre banc règne du côté de l'Europe depuis la côte de Syrie jusqu'à celle d'Espagne. De ce banc qui formoit l’ancien ef Q) Voyez la note 3 à la fin de cette partie. ’ 178 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE rivage, ilreste les îles de Chypre, de Candie, de Sicile, de Sardaigne et les Baléares qui toutes ensemble tracent une ligne parallèle à la précédente. Tous les espaces de mer compris en dedans de cette ligne, ne furent d’abord que des lacs dont on retrouve encore les anciens bassins en comparant les sondes; comme on en juge par les belles cartes en relief de M. Lartigue, ingénieur-géo- graphe de la Marine; cartes qu’on a pu voir au salon d'exposition de 1806, et que ce savant estimable m’a permis de consulter. Le canal compris entre les deux lignes est le point où les pentes de l’Afrique et de l’Europe se rencontrent, de sorte que c’étoit là que les eaux des lacs se dégageoient. L’irruption de la mer Rouge a ant brisé toutes les parties basses de la chaussée d’Europe, réunit, comme je l’ai dit plus haut, tous les lacs en une seule mer qui des rivages d'Europe reflua sur ceux d’Afrique et creusa le golfe de Sidre. Mais cette irruption d’une nature particulière, n'ayant pas été assez puissante pour détruire tous les vestiges des anciens rivages , nous devons considérer les îles de Chypre, de Candie, de Sicile, de Sardaigne comme la limite naturelle de Europe, puisqu'elles sont les restes de l'ancienne Terre. Les plus grandes profondeurs de la Méditerranée sont dans le caual dont je viens de parler. C’est dans ce même canal que le courant venant de l'Atlantique par le détroit de Gibraltar, se fait sentir avec le plus de force. Ainsi toutes les circonstances viennent à Pappui de la ligne de limites que j’établis. Quant aux Acores on sait qu’elles ont une origine volcanique, et que par conséquent elles n’ont aucun rapport avec la côte orientale de la Colombie où il n'existe aucune trace de volcans. Ces îles ont au contraire plusieurs traits d’analogie avec l’Es- pagne. La carte d'Arrowsmith indique d’ailleurs plusieurs roches entre cette péninsule et l'archipel des Acores. Je crois ces motifs suflisans pour rattacher ces îles à l'Europasie, et les meilleurs géographes sont du même avis. Je trace la limite occidentale de l’Europasie par une ligne tirée du sud-ouest au nord-est depuis Florès, la plus occidentale des Açores, jusqu’au cap Nord à l’extrémité de la Scandinavie, en passant par les îles Feroë et quelques rochers situés entre ces îles et les Acores. Signalons ici une anomalie dans les caractères généraux des parties du monde. Toutes les pointes sont tournées vers le nord au lieu de l'être vers le sud. Il est facile d’en trouver la cause. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 179) L'ancienne côte occidentale étoit tracée par ma ligne de limites des Açores au cap Nord, En dedans de cette côte les fleuves du Portugal, de la MEL de l'Angleterre, de l'Allemagne et de toute la pente nord-ouest de l'Europe, se rendoient dans des bassins particuliers. Lorsque l'océan Austral fut soulevé et poussé vers le nord, il fut obligé de rétrograder, ainsi que Je le dis dans la note 3, et dans cette rétrogradation il découpa en pointes vers le nord, la Scandinavie et l'archipel Britannique, en inon- dant tous les terrains bas et toutes les vallées jusqu'aux Alpes. Ces eaux en se retirant s’amassèrent dans tous les lacs de l’em- bouchure des fleuves, transtormèrent tous ces lacs en une seule mer, et séparèrent du continent les hautes terres de l'archipel Britannique, aux bassins même où cette ‘séparation avoit été commencée par la rencontre des pentes. La limite septentrionale de l'Europasie se trace du cap Nord à la pointe de Kolokouskaya située au nord-ouest du golfe de la Petchorr ; de cette pointe au Coisolin-Noss, vis-à-vis l'ile Dolgoi; du Coisolin-Noss au détroit de Waigatch, au cap Leverovosto- chnoi, à l'île Wtoroy la plus septentrionale des îles Lakoff, au cap Schelatskoi, ou mieux, Talatskoi , à l'ile Kalourukz, et enfin au cap Oriental d'où Je suis parti. On voit sur la carte que cette ligne forme alternativement des angles saillans et rentrans dirigés vers le nord; ce qui con. trarie en apparence le principe de Firruption des eaux de l'océan: Austral. Observons d’abord que sur les cartes les pointes sont plus allongées qu’elles ne le sont réellement, à cause de l’aug- mentation croissante des latitudes qu’on est obligé d'admettre dans toutes les cartes réduites pour retrouver les positions. Néan- moins ces pointes existent, et sur plusieurs points la mer a fait de profondes excavations. Cette anomalie du même genre que la précédente , est produite par les mêmes causes, c’est-à-dire le reflux de l'océan Austral. Elle est une preuve de l'existence d’un continent arctique , puisque c’est ce continent qui, mettant obstacle à l’épanchement des eaux venues du sud , a dû les re- porter sur les côtes septentrionales del’ Europasieet de la Colombie, qu'elles ont inondées et où elles ont déposé les terrains secon- daires les plus anciens et les fossiles des régions australes (+). Ce reflux est donc une conséquence de notre principe des ir- (1) Foyez la note 3 à la fin decette partie. 180 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ruptions du sud au nord. Son effet a été de porter et de déposer dans l'hémisphère boréal les terres et les diflérentes matières que l'irruption directe avoit enlevées à l'hémisphère austral. Aussi ne voit-on point dans le nord ces aspérités, ces escarpemens, ces coupures si remarquables dans le sud. Les montagnes septen- trionales Rte sont toutes de seconde formation et d’une hauteur médiocre ; elles finissent loin du rivage, où n’y projettent que de foibles rameaux ; tout le terrain est en pente douce et les bancsde sable savancent fort loin, en comblant, pour ainsidire, tous les golfes et toutes les excavations. Ainsi ces caractères sont opposés à ceux des rivages méridio- naux , et cette diflérence dans les eflets montre assez celle qui a dû exister dans les causes. EE ED RES NOTE 1. J'ai commencé l'impression d’un Traité de Géographie-Poli- tique qui paroîtra l'hiver prochain. On y verra que cette science a besoin de réforme autant, pour le moins, que la Géographie- Physique. Le monde politique ne sauroit être divisé de la même manière que le monde physique, puisque dans celui-ci rien ne change; et que dans celui-là les limites varient sans cesse, en raison des passions des hommes et de la puissance des peuples. Ce ne sera donc que dans lhistoire de l’homme qu’on pourra découvrir les lois de ce mouvement en apparence désordonné, et ces lois ser- viront à établir les divisions politiques d’une mauière fixe dans les principes, quoique variable dans les applications. J’ai observé qu'il y a toujours eu une région de la terre qui a exercé plus ou moins long-temps la suprématie. L'Europe a obéi avant de commander; elle a été barbare lorsque d’autres régions étoient civilisées. Depuis qu’elle s’est placée au premier rang, elle a su s’y maintenir : mais elle peut, elle doit en des- cendre et le céder à d’autres régions qui, par le progrès des lumières , seront tour à tour appelées au pouvoir. Dans tous les temps cette région souveraine, quelle qu’elle soit , peut être considérée comme la grande métropole, et les autres comme de grandes colonies; parce qu’en effet la première exploite les secondes à son seul profit, fait aboutir chez elle toutes les richesses, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 161 richesses, et se constitue le centre de tout le commerce, de toutes les lumières et de tous les mouvemens. Dans l’état actuel du monde politique, l'Europe est la grande métropole et forme la première division. Il y a ensuite deux grandes colonies qu'on peut désigner sous les noms recus d'Zndes Orientales et d’Indes Occidentales. Les limites de ces trois divisions politiques, les seules qu'on doive admettre, sont différentes de celles que tracent les géo- logues. Elles se déduisent des principes historiques, exactement définis, d’où découlent aussi toutes les sous-divisions. Telles sont les idées générales qui font la base de mon Traité de Géographie Politique. J'ai cru devoir en dire un mot pour faire sentir jusqu'à quel point cette science diflère de la Géo- graphie Physique, et combien il est nécessaire de raisonner les méthodes d’enseignement et d’en définir les principes. Suivre une fausse route, par cette seule raison que nos pères l'ont suivie, c’est pardonnable dans des temps d’ignorance : mais c’est arrêter les progrès de la science dans un siècle où tant d’illustres géo- mètres et naturalistes s'efforcent à l’envi d’épurer, de simplifier et d'étendre les moyens d'instruction. NOTE 2. Cette île d’AoSima paroît être la même que l’ile du Sud des cartes de d’Anville, et au sujet de ce père de la Géographie, je remarquerai que pour ce qui concerne l'archipel du Japon, les positions assignées par d’Anville se concilient on ne peut mieux avec celles de la carte de M. de Krusenstern. Au con- traire , dans des cartes plus modernes qui passent pour être plus exactes que celles de d’Anville, on ne trouve point cette île d’AoSima située au sud de Fatsisio, mais au contraire, une .chaîne d'’ilots prétendus volcaniques qui s'étend au nord de Fat- sisio, et ces îles sont désignées sousle nom d’f/es de 1604 et de 1716. M. de Krusenstern n’a point vu d’iles dans ces parages, et on doit les supprimer ainsi qu'une autre chaîne qu’on place au nord de Pena de les Picos et qui n'existe pas. NOTE 3. Foyez Strabon, liv. 1, pag. 38 et 48. € On me permettra de rassembler quelques faits à l'appui de cette irruption de la mer Rouge dans la Méditerranée. Tome LXXXIII. SEPTEMBRE an 1816. Aa 102 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 1°, On peut voir sur toutes les cartes , que les golfeset les baies de la côte d'Europe sont toutes inclinées du sud-est au nord-ouest , comme la mer Rouge, et que la mer Adriatique, le plus poire de ces golfes, est précisément sur la mème ligne d’inclinaison que la mer Rouge dont elle semble être le Le Le Ar 29, Les terres brisées de la mer Egée sont en face du courant qu'on supposeroit venir de la mer Rouge. Suivant la judicieuse remarque de Sonnini ( Voyage en Grèce et en Turquie, tome, pag. 344 et 345), toutes ces terres sont dirigées du sud au nord avec plus ou moins d’inclinaison, excepté les îles de Crête et de Chypre qui ont leur direction de l’est à l’ouest , et qui, par leur étendue et leur position, semblent être les points d'appui de tout l'archipel, 30. M. Menard de la Groye, correspondant de l'Académie des Sciences, qui de tous nos savans est celui à qui la Géologie de l'Italie est la mieux connue, a démontré dans son Cours de l'Athénée de Paris, d'après l'autorité des savans italiens et ses propres observations, que les coquilles fossiles des collines sub- apennines appartiennent à des espèces qui en général habitent la mer des Indes et la mer Rouge. 4°. Il conste d’après lemême savant, que ces formations sub- apennines sont d’une époque assez récente et postérieure à celles des pays au nord des Alpes. M. Raynieri a retrouvé dans le golfe À drialique la plupart de ces espèces fossiles, et M. Brochi pense même que tous les fossiles sub-apennins doivent avoir leurs ana- logues dans la Méditerranée. Css faits et quantité d’autres qu'il seroit trop long de rapporter, ne peuvent s'expliquer que de la maniere suivante. A. Le grand courant débouqué par le détroit de Suez, alors existant, s’est praliqué plusieurs ouvertures dans une massé de terre (l’Atlantide de Platon Resa), dont les îles de Chypre, de Candie, la Sicile, la Sardaigne..., sont des fragmens. B. Une branche de ce courant a passé entre Chypre et Candie pour creuser les golfes de la mer Egée et morceler }’Archipel. C. Une autre branche a passé entre Candie et la Sicile pour creuser le golfe Adriatique. D. La même chose a eu lieu entre la Sicile et la Sardaigne, et à l’ouest de cette dernière île. ÆE. Les coquilles et les débris apportés par ces courans ont ET D'HISTOIRE NATURELLE, 183 été déposés sur toute la pente méridionale des montagnes de la Grèce, des Alpes el des deux côtés de l'Apennin, parce que cette dernière chaine est dans la même direction que la mer Rouge, et par conséquent placée de manière à être baignée par le courant qui a creusé le golfe Adriatique et par celui qui a creusé la mer Tyrrhénienne. F. Enfin cette irruption n'a pas été générale ni très-considé- rable, puisque ses dépôts ne se retrouvent point au nord des Alpes, ni à de grandes hauteurs; elle a dû étre postérieure aux grandes irruptions de l'océan Austral, ce qui s'accorde égale- ment avec les Annales de l'Histoire et les faits géologiques. Dans la supposition que l'océan Atlantique ait ouvert le détroit de Gibraltar, et ait produit les changemens dont nous parlons, aucun de ces faits ne peut s'expliquer. A. Tous les golfes devroient être creusés de l’ouest à l’est. B. Les fossiles n’auroient dû se déposer qu'aux pentes occi- dentales de l’Apennin, à moins que les eaux mn’eussent passé par dessus la chaîne, ce qui est contraire aux observations. . ©. Ces fossiles devroient avoir leurs analogues dans l’Atlan- tique et non dans la mer des Indes. . D. Enfin les faits historiques sont contraires à cette suppo- sition. ; L'’irruption de la mer Rouge dans la Méditerranée me parois- sant ainsi démontrée, il me semble qu’on pourroit, en combinant quelques autres faits, former des conjectures sur l'effet que doit avoir produit la rupture du détroit de Gibraltar sur la côte du Nouveau-Continent située à l’opposite de ce détroit. 1°. La pente orientale des Alleghany et toute la côte des Etats- Unis ont présenté à tous les observateurs les mêmes fossiles ue ceux de l'Italie. M. le baron de Beauvois, de l’Académie de Sciences, à qui l'amour de la science a fait entreprendre de longs et périlleux voyages, a rapporté des Etats-Unis, outre d'immenses richesses botaniques qui l’intéressoient spécialement, quantité de minéraux et de fossiles, qu’il a eu la bonté de me laisser examiner à loisir. Parmi ces fossiles on remarque surtout cette belle coquilleque M. Delamarck a nommée perna maxillata. Cette coquille conserve encore sa nacre; elle se trouve en quantité au bas d’un ravin près de Richemont en Virginie, à une ving- taine de lieues de la mer, dans du sable où sont aussi d’autres Aa 2 104 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE coquilles, entre autres le pecten maximus (ostrea maxime de Linné) dont M. de Beauvois a un très-bel exemplaire. Les mêmes coquilles, avec la même abondance et les mêmes circonstances de gisement , se voient dans le Vicentin et dans plusieurs autres lieux de l'Italie ; et, ce qu'il y a de plus LE c'est qu'on rencontre aussi dans les deux pays des glossopêtres et des restes de lamentins, des mêmes formes et dans les mêmes genres de terrain. 20, M. Volney ( Tableau du climat et du sol des États-Unis d'Amérique, tome I, pag. 46 et suiv.), dit que toute la plaine du côté de l'Atlantique, est un dépôt de sable apporté par l'Océan, Ce dépôt, dans lequel on trouve les fossiles dout j'ai parlé, ne s'étend qu'à une largeur qui varie de dix à trente lieues, Il s'appuie à l’intérieur sur un banc granitique qui n’est proprement qu'un sillon peu élevé, dans lequel cependant on ne trouve aucun. vestige de fossiles et qui est bien certainement primordial. 30. A l'occident des Alleghany, chaîne aussi primordiale, le terrain est tout différent de celui de la côle orientale, Un im- mense banc de calcaire compacte supporte le sol végétal de tout le bassin du Mississipi, et se relève sur le bord des mon- : tagnes longitudinales (les Alleghany à l'est et les Stouÿymoun- tains à l’ouest) qu’il recouvre souvent à une assez grande hauteur, comme le manteau calcaire des Alpes si bien observé et décrit par Dolomieu. D’après le peu que nous savons sur le calcaire mississipien, il paroît qu'il présente absolument les mêmes ca- ractères que le calcaire alpin qui s'étend, comme on sait, dans tout le nord-ouest de la France, et qu’on retrouve dans presque toule l'Allemagne. 4°. Les coquilles de ee calcaire, et même tous les fossiles qu'on trouve à l’ouest de l'Alleghany dans les formations an- ciennes, n’ont pas d’analogue. La même chose se remarque au nord des Alpes et de lAltaï (en Allemagne et en Sibérie); le peu d’analogues qu’on a comparés à ces fossiles ne se trouvent que dans les mers Australes, 5o., En résumé, on peut dire que les terrains au sud des Alpes et à l’est des Alleghanys se ressemblent; et que ces terrains dif- férent essentiellement de ceux qui sont au nord des Alpes et de l’Altaï, ainsi que de ceux qui sont à l’ouest des Allechanys ‘et cela dans les mêmes rapports sur les deux continens. ET D'HISTOIRE NATURELLE, Ï 185 On peut rendre raison de ces faits ainsi qu'il suit : Æ. lrruptions anciennes et successives de tout l’océan Austral divisé en deux grands courans, dont l'un a remonté l'océan Pa- cifique et lautre l'océan Atlantique. Ces deux courans ayant franchi le cercle polaire arctique ont dû être refoulés par les terres du continent boréal, et alors ils ont inondé, par un mou- vement rétrograde, la zone tempérée de nos continens , savoir : jusqu'aux collines sub-altaïques et sub-apennines du nord dans l’Ancien-Monde; et dans le nouveau, tout le bassin du Mississipi. — En effet dans ces deux régions on trouve le même manteau calcaire et des circonstances géologiques à peu près semblables. Dans l’Ancien-Continent , ia chaîne transversale qui court de l’ouest à l’est et qui se compose des Pyrénées, des Alpes, des monts Hæmus ou de Turquie, de l’Imaüs et de PAltaï, paroît avoir été la seule barrière qui ait pu arrêter les flots soulevés de l'Océan, et qui l'ait forcé de déposer les matières apportées des mers Australes. Dans le Nouveau-Continent le même océan dans sa rétrogradation, ne rencontrant point de semblable bar- rière , puisqu'il n’y a d’autre chaîne transversale que le plateau du Canada, qui n’est qu'une plaine exhaussée, a inondé toute la vallée comprise entre les deux chaînes longitudinales, et est arrivé probablement jusqu’à la mer des Antilles; mais content latéralement par les deux chaînes, il ne les a point franchies et a recouvert leurs flancs intérieurs du même manteau qu’on voit au nord des Alpes et de lAltaï. B. Irruptions plus récentes et plus restreintes : 1° de la mer des Indes dans la Méditerranée par la mer Rouge; cette irrup- tion hausse le niveau de la Méditerranée et anonde les collines. sub-alpines du sud où elle dépose les fossiles dont les analogues, comme nous l’avons dit, se retrouvent dans la mer des Indes et dans l’Adriatique; 2° de la Méditerranée dans le golfe des Etats-Unis par le détroit de Gibraltar; le point le plus profond de ce golfe correspond au détroit de Gibraltar, et cette grande échancrure ne peut avoir été produite que par un courant dirigé de l’est à l’ouest; en outre nous avons vu que les fossiles des Etats-Unis et la nature du sol sont les mêmes qu’en Italie, — Ces deux irruptions ont donc été arrêtées, l’une par la chaîne trans- versale des Alpes, l’autre par la chaîne longitudinale de PAlle- gbhany dans lesquelles en effet le cours de la montagne est pri- mordial, et na pas été recouvert par les eaux, puisqu'il n’y a point de fossiles. Au nord des Alpes et à l’onest des Alleghanys.. 586 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les formations océaniques sont immenses et atteignent d'assez grandes hauteurs au pied des montagnes qui ont fait obstacle; mais au sud des Alpes et à l’est de l’Alleghany, elles sont peu considérables et très peu élevées; ce qui, avec la comparaison des fossiles, prouve que les premières de ces formations pro- viennent d’une cause générale et très-ancienne, et les secondes de causes particulières et plus récentes. Ces idées exigent plus de développement; telles qu’elles sont elles me paroissent se concilier assez bien avec les faits recueillis jusqu’à ce jour. (La suite au Cahier prochain.) ET D'HISTOIRE NATURELLE. 187 OBSERVATION SUR LES AVANTAGES DU DATISCA CANNABINA DANS L'ART DE LA TEINTURE; Par Hexrr BRACONNOT, Professeur d'Histoire naturelle, Directeur du Jardin des Plantes et Membre de la Société Royale des Sciences, Lettres, Arts et Agriculture de Nancy. LE datisca cannabina, connu aussi sous les noms de datisque ou cannabine, n'a été cultivé jusqu’à présent que dans les jardins botaniques ou paysagers, où il figure par son beau port : mais on ignoroit son utilité en teinture, et c'est sous ce rapport que je le recommande, comme fournissant une couleur jaune ma- gnifiqué qui ne le cède point à celle que fournit la gaude avec laquelle elle a d’ailleurs beaucoup d’analogie, mais qui m'a paru plus vive et aussi solide. Le datisca cannabina est une plante vivace, dioïque et de la famille des orties, qui croît naturellement dans Pile de Candie et dans quelques autres contrées du Levant; son aspect est celui du chanvre; sa racine, qui supporte les froids les plus rigoureux de nos hivers sans en être endommagée, pousse annuellement environ une centaine de tiges fassiculées de 8 à ro lignes de diamètre à la base, elles s'élèvent à la hauteur de plus de 8 pieds (au moins dans l'individu femelle que j'ai mesuré) et forment un très-large buisson; elles sont garnies de feuilles la plupart longues d’un pied, d’un vert jaunâtre; alternes, ailées, avec im- paire à 9,à 11 folioles lancéolées, aiguës, profondément dentées, incisées et glabres. Ses fleurs disposées en grappes et munies de bractées linéaires , naissent dans l’aisselle des feuilles supérieares. La décoction des feuilles de datisca , essayée avec les réactifs, ‘106 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE s’est comportée, à peu de chose près, de la même manière que celle de la gaude. L’acélate de plomb produit dans cette décoction un précipité jaune pâle , formé d’un acide végétal incristallisable , analogue à l'acide malique, et de matière gommeuse et colorante : si dans la liqueur surnageante on verse de la potasse, et qu’ensuite on y ajoute de nouveau de l’acétate de plomb, la liqueur se dé- colore presqu’entièrement, et il se forme un dépôt d’un jaune superbe qui conserve sa vive couleur après avoir été desséché et mis en poudre; si après avoir été bien lavé on le décompose par l'acide sulfurique, on en sépare la matière colorante qui est sèche, transparente comme une gomme, insoluble dans Palcool, ä moins que celui-ci n'ait été trés-afloibli; alors il en dissout une partie, laquelle est semblable à celle qui ne s’est point dis- soute; sa dissolution aqueuse n’est point affectée par l’acétate de plomb, mais le nitrate de mercure y forme un précipité; le sulfate de fer lui communique une couleur brunâtre foncée; l’alun une couleur jaune plus vive et plus intense, mais les acides la rendent plus pâle et les alcalis plus foncée. | Quoique je n’aïie pas en vue de présenter l'analyse de cette plante, je crois devoir signaler une substance assez particulière qui m'a paru se rapprocher un peu de l'inuline; je l’ai obtenue en éva- porant à ‘une douce chaleur une décoction de datisca. En aban- donnant cette liqueur pendant quelque temps, il s'en est séparé une matière cristalline granuliforme, qu'on peut obtenir plus facilement encore ; en délayant de l'extrait de datisca avec de l'eau froide , il s’en sépare un sédiment qu'il ne s’agit plus qu'à traiter par l’eau bouillante qui dissout la matière dont il s’agit et laisse un résidu insoluble dans l’eau bouillante ; à mésure que la liqueur se refroidit, il sy forme une multitude de petits groupes d’un blanc jaunâtre formés de petits cristaux mous et demi-transparens, à peu près comme le sucre de raisin, et fu- sibles à une température un peu supérieure à celle de l’éballition de l’eau. Ces cristaux ne sont pas sensiblement solubles dans l’eau froide. Exposés au feu, ils se boursoufflent , se colorent en répandant une odeur assez désagréable, mais qui m'a paru tenir un peu du caramel, et donnent à la distillation, de l’huile em- pireumatique et un liquide acide. L'alcool froid à 36° n'a aucune action sur cette substance ; mais lorsqu'il est bouillant il la dissout, et à mesure que l'alcool s'évapore , la matière cristallise à sa manière accoutumée. Elle 5e 1 ET D'HISTOIRE NATURELLE. 189 se dissout trés-facilement dans une légère dissolution de potasse ; en y ajoutant un acide, il ne se fait aucun changement au mo- ment-du mélange ; mais bientôt apres la matière dissoute se sépare de Ja liqueur et cristallise en petits grains blancs. Elle se dissout pareillement dans l’eau baryte, tandis que celle-ci précipite abondamment la dissolution d’inuline. L’acide sulfurique concentré, aidé de la chaleur, la dissout sans qu’il se dégage d'acide sulfureux. Cette dissolution est pré- cipitée abondamment par l’ammeniaque et par l’eau, tandis que celle d'inuline ne l'est pas par ce liquide d’après M. Gaultier. L’acide muriatique concentré ne dissout pas sensiblement cette matière, même par le secours de la chaleur. Elle forme avec liode une combinaison jaune soluble dans l’eau froide. Une dis- solution très-chargée de cette matière dans l’eau chaude, n’est nullement affectée par l’infusion de noix de galle : celle-ci ,au con- traire, précipite l'inuline à l’état d’une matière qui paroît légè- rement glutineuse et élastique, comme l’a observé M. Gaultier. J'ai constamment obtenu cette matière en opérant sur une petite quantité .de feuilles de datisca; mais lorsque j'ai voulu évaporer une quantité un peu considérable de décoction de ces feuilles, je n'ai pu recueillir qu'une très-petite quantité de celte malière , probablement parce que les autres principes de la plante en réagissant sur celui-ci à l’aide d’une chaleur long-temps pro- longée, en aura modifié les propriétés. Quoi qu’il en soit , il me paroit , d’aprèsles propriétés chimiques, et la tendance manifeste de cette matière à la cristallisation, qu'elle peut-être considérée comme un des principes immédiats des végétaux. La couleur jaune du datisca s'attache bien au lin, au coton, à la soie, mais surtout à la laine, et on peut lui appliquer les procédés de teinture que l’on suit pour la gaude. J'ai essayé de teindre de la laine non alunée avec de la gaude qui avoit cru dans le même terrain que le datisca : je n’ai obtenu qu'un jaune extrêmement foible, terne et fugace; j'ai répété le mème essai avec la gaude du commerce, et le résultat a été le même, tandis que la décoction de feuilles de datisca bouilli avec de la laine et sans aucune autre préparation, lui a communiqué une jolie couleur serin qui résiste assez bien aux injures de l’air et de la lumière; maïs si la laine a été préa- Jablement alunée selon le procédé ordinaire, alors on obtient la Tome LXXXIII. SEPTEMBRE an 1816. Bb 190 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE plus belle, la plus vive et la plus intense des couleurs, et qui a l’avantage d’être solide (x). Je n'ai fait aucun essai sur l’individu mâle du datisca, ne Payant point à ma disposition : mais j'ai lieu de présumer qu’il est plus riche en couleur que la femelle ; au reste je me suis assuré que l'extrémité fleurie de celle-ci, ne fournissoit pas plus de matière colorante que les feuilles et les jeunes tiges; mais lorsque ces dernières ont pris tout leur développement, elles en produisent infiniment moins, attendu la matière ligneuse qui y prédomine, 11 me paroît que la culture du datisea offrira des avantages considérables sur celle de la gaude : celle-ci est annuelle, ou du moins si on la sème au printemps, ce n’est que l'année suivante qu’on peu la récolter; elle ne s'élève qu'à un pied à un pied et demi dans un terrain médiocre. Le datisca est une des plantes berbacées les plus grandes, les plus rustiques et les plus vivaces que l’on .connoisse, Elle croit dans tous les sols à toutes les ex- positions, n’exige aucun engrais; une fois plantée dans un champ, elle ne réclame plus aucun soin; d’ailleurs l’accroissement ra- pide de ses tiges, la quantité abondante de son feuillage, toutes ces considérations me font présumer qu’elle remplacera avec succès la gaude, dont la culture paroît trés-profitable à ceux qui sen occupent. Puisque les jeunes pousses de datisea contiennent une plus grande quantité de matière colorante que les anciennes, et que: sa croissance est prompte et précoce, il est à présumer qu'on pourra la faucher au moins trois ou quatre fois dans le cours de J'année. On peut propager cette plante par ses graines semées en au- tomue; mais il faut avoir la précaution de les récolter sur les- individus qui se trouvent dans le voisinage des mâles, car au- trement elles resteroient stériles. La multiplication du datisca peut aussi se faire par la sépa- ration de ses racines au printemps, ou en automne quand ses tiges sont flétries. RE RP QG) L’extrait de datisea délayé dans l’eau etbouilli avec la laine alunée , lux communique une couleur jaune aussi éclatante que celle que l’on obtient iramé- diatement avec la décoction de la plante, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 197 T1 paroît que la matière colorante jaune, qui d’ailleurs est fort répandue dans les végétaux, mais le plus souvent sans éclat, se retrouve plus particulièrement et dans un plus grand état de pureté, dans plusieurs plantes de la famille des orties; ainsi la grande ortie, surtout ses racines ont été conseillées pour teindre en jaune , les racines et les tiges de tous les müûriers fournissent une couleur jaune qu’on rencontre plus abondamment dans le morus tinctoria que l’on fait venir de Tabago pour l’usage de la teinture; mais cette couleur paroît fort terne lorsqu'on la compare à celle que fournit le datisca. Bb 2 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES PRGNEN LOUE, PR PIONET ES LHREEE | THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR 5 A r Hd > : CENTER 24 BAROMEÈTRE MÉTRIQUE. Le “| Maximum. | Minimum. |A Minx. Maximun. | Minimum. SN DE u MIDI. 5 heures. à o | heures. o heures. milli | Heures: t mill, ml. 1j midi. Æ+18,20à9£s. +10,25,+18,25là92s....,... 755,7o|à qi me... ...748,121751,72 21à 10 + m-20,50/à 4 1m.<+1o,60|+17,75là midi........ 758,10|à 44 IM...,....757,121758,10 3là3s. +20,10/à 4£m,+ 9,00 +19,60|à 9 m....... .758,62|à 4: m....... 757,561758,60 4{à midi. 422,10 4 lim. Æ10,25|+22,10|à 7 ! m....... 75744|à4 10 + S....... 753,60|755 96 535. +2225/à 09 5 Æ12,85|+2o,1o/à 9s.........1754,72là 5 s. ....... 752,20|753,04 6fà midi, Æ2:.25/à 42 m.—r1,25|21,25à 3 4 ..!,.. 761,02 4 £m..!.... 756,811761,90 7là nudi. +4+22,75/à 04m. +r1,00|+#22,75|à 9m......... 761,60|à 11 + S....... 798,341761,10 da 3s.. +26,10|à 4£m.+11,50|+#25,90|à 7 : m....... 756.46 95..........753,12|755,00 1, o[à midi. +21,00|à 10 s. +13/75|+21,00|à 105......... 756,16|à 45 m....... 759,48|754,42 B|rolà midi, H-20,00|à 45 m,+12,25| +20,00|à 9 1 s....,...768,80là 4 is........ 758,50|760,02 Hirrlais. +20,75|à 45 m.—+ 7,10|+29,60|à 9 m......... 76D:00|21bIS eee 764,42|765,34 Aria nudi. 423,25/à 42 m.—Lro,1o|+23,25là 7 m........764,96|à 11 s...... ...761,44/7C3,50 Hr3là 425. +24,85/[à 4 À m.—Ær2,60| +22,60|à 9m........ 760,76|à 11 5.....1.. 758,001760,16 Nlralà2s. “H27,05/à 4 à m.+14,25|#-26,00|à 4 5 m....... 755,32|à gs... .....751.84|753;00 N|r5|à midi. +-22,6o/à 5m. +14,75|+22,60|à 10 s......... 751,80|à 5 m.........750,72|751,70 Mi16là 3s. “—20,50|à5 m. 13,10 +-19,50/à 9 s.......... TOSD2 ADM eee e 752,40|753,92 17jà 3s. +H18,00/à 5m. +11,50|+16,60/à10 2 m......758,58|à9 s..........756,40[758. 50 HliGlà midi. +16,85/à 5m. 11,50 +16,85/à 9s....., .,.762 96|à 5 m......... 757,94|760,50 Hlrolà 3 s. “+19,50/à5 m. —rr,00|+19,10 à 9 s.......... 764,20|à 5 m......... 763,141764,04 loola midi. +15,35|à 5m. +Lrr,o0|H15,35|à 6 m...... 70e 2 AIO RE ARR 760,92|762,32 Rizrla4s. “+17,75/à5 m. + 9,00|+16,75/à 10 1s....... 764,04|à 5 m........ 761,80|763,50 dI22/à midi. 18,65 5m. + 6,50l18,65|à g m......... FOTO ADS eee ele 762,76|763,42 23/à nudi. 4-18,25/à 5 m. Ær1,50|+16,25|à 9 m........ TO2 40) ABS Eee seb 761,42762,20 241d3s. “bH18,40[à5 m. + 8,50|+17,10/à10 8 s....... 762,82|à 5 m.........762,c0|762,76 5{à midi. H18,5o/à 5m. +12,25|+18,50|à 91m 763,82|à 5 m.........762,82|763,46 B26/à 3s. “+1850/15 m. + 9,00|-H18,00|à 9 m......... 63 00|A16S ects -iele 761,68|762,52 Hlzzia3s. 18 25 5m. + 9,50|+17,25|à 9 m... 7o2/7olal3ise et ---. 761,22|76r,90 NIo8làa 9s, Lro,05à5m. + 8,75|+19,o0!à 9s..,....... 7hSI00| time n-2e 762,14|762,92 Bl2olù 115 m-+22,10|à 52m. + 9,25|+21,50|à 9 m......... 764 4061419 Serre 761,32|763,08 Hi5olà midi. H17,50/à 5 2 m.—+10,50|+-17,50|à 5 Em....... 758,90|à 9 5... .....754,20|757, 14 31 {à midi. Æ14,55/à 9 s. Æri,7514714,75/à 5% m........747,00là 5s....,..... 730,921730,12 | Moyennes + 29,16! +10,91|+4-10,43| RÉCAPITULATION. Millim, Plus grande élévation du mercure. .... 765%%o le xx Moindreélévation du mercure......... 736,92 le 3 Plus grand degré de chaleur......... —o5°05 le 14 Moindre degré de chaleur........... + 710 le 11 Nombre de jours beaux....... II de couverts......... 10 depluie... "4.409. II deivent ee tO- terme 31 deselée EEE. o deHONNETIE 2e 2 de brouillard.......... 9 denerte re -te--e-ct o de grêle....... o Nora. Nous continuerons toujours à exprimer la température au degré du thermomètre cen- centièmes de millimètre. Comme les observations faites à midi sont ordinairement celles qu’on le thermomètre de correction. À ia plus grande et à la plus petite élévation du baromètre conclus de l'ensemble des observations, d’où il sera aisé de déterminer la température moyenne conséquent, sou £lévation au-dessus ély niveau de la mer. La température des caves est également 757,34]758,94| A L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. AOUT 1816. ne POINTS VARIATIONS DE L’'ATMOSPHERE. C . a VENTS. _ a ; LUNAIRES. ia LE MATIN. LE SOIR. 1] 62/0. Très-nuageux. Pluie forte averse. |Nuageux. 2] 76 |[S-0. Couvert. Pluie par intervalles. | Pluie par intervalles, 3| 62/0-S-0. Nuageux. Trèsnuageux. Très-nuageux. 4] 59 [Einf.Osup. Item, brouillard. |Couvert. Pluie abondante. 5| 83 [N-EintS Os Quelques éclarcis. | Pluie. Forte averse à 7 h. 6| 58 |O. Nuageux. Nuageux. Nuageux. 7| 70 |S-0O. Idem, Idern. Beau ciel. à 8| 60| ldem. P.Luh.28/m.| Légers nuag. , lég. br. Légères vapeurs, Petite pluie, écl.etton. | 4 ol 620. Très-nuageux. Nuageux. Couvert. L 1o| 59 |[N-O. Couvert. Très-nuageux. Nuageux. 11! 58 [S-S-O. Lune apogée. [Nuageux , brouillard./ Nuageux. Beau ciel. 12l 62 |[S-0. Beau ciel, browullard.|Légers nuages. Trouble et nuageux. 13| 67| Idem, Nuageux, brouillard.|Très-nuageux. Nuageux, éclairs, 14, 58| dem. Couvert, br. épais. [Nuageux. Couvert, éclairs. 15] 59 | der fort Pluie. Très-nuageux. Beau ciel. 16] 73 |S O. D.Q.à5h7/m.| rès-nuageux, pl. [Forte averse. Pluie par intervalles. 17] 7o |O. Pluie fine. Couvert. Idem. 18] 71 [O-N-O. Couvert. Idem. Couvert. 19] 67 |N-0. Idem. Nuageux. Très-nuageux. 20] 66 |U. idem, pl. à 7 h. |Pluie fine. Pluie fine par interv. 21| 68 |N. Nuageux. Couvert. Très-nuageux. 22] 62| Idem. Frès-nuageux. Idem. Couvert. 23] 53 [N-0. NLaàghir'm.| /@em, léger br. Très-nuageux. Tres-nuagcux, 24] 66 |N-E. Lune périgé. [Quelques éclaircis. Couvert. Beau ciel. 25] 58 | Idem. Lien. Très-nuageux. lier. 26| 61 | . Idem. Très-beau ciel. Idem. Idem. 27| 63| Item. Idem. Nuageux. Idem. 28| 61 |E.-N-E. Idem. Beau ciel, Idem, 29] 58, |N-E. P.Q.àgh52' .|Légers nuages, br. |Légers nuages, Idem. 3o| 74 /|S-U. Couvert, lég. brouil. (Couvert. Pluie à 5h. 31] 94| Idem. Couvert, pluie. Pluie. Pluie tonnerre. Moy. 66 RECAPITULATION. HÉtonorobondii ue INSESPCE CCE Foto D: peste I Jours dontle vent a soufflé du FÈ MALE AT TEN i . SECHE ec doccucadbbo 11 DIRES M TCORESE ô NEO ARE Route 3 le 14° 20,001 Therm. des caves centigrades, € le 16 12°,002 Eau de pluie tombée dans le cours de ce mois, 50""75 = à p. 10 lig. 5 dixièmes.] tigrade , et la hauteur du baromètre suivant l'échelle métrique, c’est-à-dire en millimètres et emploie généralement dans les déterminations des hauteurs par le baromètre, on a mis à côté et du thermomètre, observés dans le mois, on a substitué le rraximurn et le minimum moyens, du mois et de l'année, ainsi que la hauteur moyenne du baromètre de l'Observatoire de Paris, et pat exprimée en degrés centésimaux, afn de rendre ce Tableau uniforme. 194 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE MEMOIRE RELATIF A L'INFLUENCE DE LA TEMPÉRATURE ET DES PRESSIONS MÉCANIQUES Sur l’Intensité du Pouvoir électrique des Métaux, et sur le Changement de Nature de leur Électricité ; Par J. PH. DESSAIGNES. Daxs un précédent Mémoire j'ai fait connoître l'influence de la température et des pressions mécaniques sur l'intensité électrique des corps idio-électriques, et sur le changement de nature de leur électricité : il me reste à faire voir que les mêmes choses ont lieu pour les métaux. J’y procéderai de la même ma- nière, en décrivant d’abord les phénomènes, et en en cherchant les causes par la voie de l'observation et de l'expérience. J’ai soumis à mes recherches les métaux suivans : le platine; l'or, l'argent, le cuivre, le zinc, l'antimoine, le bismuth, le fer, leplombet étain. J'ai fait construire pour cela , un disquebien polz de chacun de ces métaux , semblable à ceux dont on se sert pour l’électromètre à pailles de Volta, et vissé comme eux par le centre à une tige de verre ou de cire à cacheter. Pour constater la na- ture de l'électricité, quand elle est foible, à chaque frottement que je fais subir au métal sur la manche de mon habit, en le tenant par sa tige d'isolement , j’apporte l'électricité qui a été produite sur le disque de cuivre de l’électromètre de Volta, et lorsque l'électricité accumulée est bien sensible par un écart des pailles de 6 à 8 millimètres, je présente à l’électromètre un bâton de cire à cacheter préalablement électrisé. Lorsqu'il ne s’agit que de s’assurer si le métal est électrisé, il est plus expéditif de faire usage d’une aiguille électrométrique très-mabile. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 195 Phénomènes. Premier Phénomène. Si l'on frotte en divers temps sur une étoffe de laine, des disques de métal isolés, on les trouve tantôt inexcitables , tantôt plus ou moin sélectriques. Tous les métaux ne jouissent pas également du pouvoir élec trique , il en est dent le pouvoir se développe avec plus d’inten- sité que celui des autres : ils sont aussi plus prompts à acquérir leur pouvoir et plus tardifs à le perdre. Leur excitabilité élec- trique me paroît être dans l’ordre suivant : le platine , l'or, l’ar- gent, le cuivre, le zinc, l’antimoine, le bismuth, le fer, létain et le plomb. Deuxième Phénomène. L'électricité des métaux est sujette à changer de nature. Tous indistinctement passent de l'état négatif à l’état positif, et du positif au négatif, et ce changement s’o- père souvent dans le jour , quelquefois dans la même minute en continuant le frottement. Les plus variables sous ce rapport, sont : l'or, l'argent, le cuivre et le zinc : viennent ensuite le platine, l’antimoine et le plomb : puis le bismuth, le fer, et en dernier lieu l’étain. Le platine, l'or et l'argent soat le plus ha- bituellement à l’état négatif; le cuivre, le zinc, le bismuth, le fer à l’état positif, l’antimoine et le plomb aussi souvent positifs que négatifs, et l’étain presque toujours négatif. Troisième Phénomène, Toutes les fois que l'électricité veut changer de nature, et que ce changement s’opère graduellement, on remarque qu'elle s’afloiblit de plus en plus sous un même frottement , et qu’elle finit par disparoître entièrement ; le métal reste ensuite inexcitable pendant quelques secondes plus ou moins, malgré que l’on continue à frotter, après quoi il reparoît élec- ‘rique, mais d’une électricité différente de la première, et cette électricité, si l'on continue le frottement, est susceptible de s'ac- croître progressivement de la même manière que lautre s’est affoiblie. Quatrième Phénomène. L'électricité des métaux ne change de nature que lorsque leur pouvoir électrique se développe gra- duellement, ou qu'il s’affoiblit de même. Dans cette double cir- constance, le platine, l'or, l'argent, le cuivre et le zinc se trouvent ordinairement positifs lorsque leur pouvoir est naissant, négatifs lorsqu'il est développé, et positifs lorsqu'il s'afloiblit. L'électricité de l'antimoine, du bismuth et du fer est au con- 196 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE traire négative lorsque le pouvoir est naissant, positive quand il est développé, et de nouveau négative lorsqu'il est trésafloibli. Le plomb et l’étain sont très-foiblement positifs lorsque leur électricité commence à naître, négatifs lorsqu'elle est développée, et de nouveau positifs lorsqu'elle est très-affoiblie. Cinquième Phénomène. Si l'on prend un petit écu bien lisse, qu’on l'attache par la carne à un bâton de cire à cacheter, et qu’en le laissant reposer sur ie marbre d’une commode pendant quelques mois, on le frotte tous les jours alternativement par les deux surfaces sur une étoffe de laine, on le trouve quelquelois positif par l’une des faces et négatif par l’autre. La même chose a lieu avec l'or, le cuivre, le zinc et le plomb. Sixième Phénomène. Lorsqu'un disque de métal se dispose à changer d'électricité, souvent on l’obtient négative par un frot- tement léger, nulle par un frottement un peu plus fort, et posi- tive par un frottement plus considérable; souvent, au contraire, elle est positive par un frottement léger, nulle par un frottement modéré, et négative par un frottement fort, lans la même eir- constance les mêmes changemens ont lieu en frottant alteruative- ment le métal par la carne du disque et par lune de ses faces, ou sur uue étofie de laine rapée et sur une autre toule neuve, ou sur une étoffe de laine noire et sur une autre de laine blanche, ou sur de la laine teinte ou non et sur de la soie. J’ai observé tout cel: particulièrement avec l'or, l'argent, le cuivre, le zinc et le plo ub. Quand le pouvoir est bien développé, l'élec- tricité est constamment la même sous tous ces divers frottemens. Septième Phénomène. Quandie pouvoirélectrique des métaux se développe graduellement, on remarque qu'il est plus lent à se développer et à changer d'état électrique dans un petit disque semblable à une monnoie de cuivre, que dans un grand disque de même métal, tandis que le contraire a lieu lorsque le pouvoir s’afHoiblit. Teis sont les principaux phénomènes qu’offrent les métaux Jorsqu'on éprouve leur électricité dans les différentes saisons de J'année et à diverses époques du jour. Observations. Ces phénomènes paroiïssent dépendre des modifications de l’at- mosphère, particulièrement de la température. C’est du moins ce que l'observation autorise à conclure. Première still ET D'HISTOIRE NATURELLE. 197 . Première Observation. Le pouvoir électrique des métaux est inexcitable dans les temps chauds et humides. Il reste dans cet élat toute la journée et les jours suivans, tant que l'air ne devient pas refroidissant, ou que par le refroidissement de la nuit ,il ne perd de sa température que ce qu’il avoit acquis la veille par la chaleur du jour. Si l'air vient au contraire dans la nuit à se re- froidir très-lentement et par degrés, de manière que le lendemain le thermomètre soit de 4 ou 5° cent. plus bas que la veille à la même heure, on trouve bien encore alors tous les métaux inex- citables le matin; mais à mesure que la température de latmo- sphère s'élève ; On voit peu à peu leur pouvoir renaître et croître en intensité jusqu’à 3 heures après midi ; après quoi il s’afloiblit progressivement, et finit par disparoilre entièrement sur le soir ou pendant la nuit. Ainsi le refroidissement lent et gradué de l'atmosphère ne procure aucune tension au pouvoir électrique des métaux, mais 1l le dispose à en acquérir par les progrès de la chaleur diurne. Deuxième Observation. Si le refroidissement de l’atmosphère a lieu plus ou moins rapidement par un vent de nord, nord-est, ou nord-ouest, ou que sous un ciel calme, un air vif ou piquant succède promptement à un temps doux, de manière à faire baisser dans quelques heures le thermomètre jusqu’à o°, comme cela a lieu dans les nuits de l’aufomne ou du printemps, alors tous les métaux qui étoient inexcitables auparavant, sé trouvent d'autant plus électriques par frottement, que le refroidissement est plus prompt ét plus intense. Cette influence du froid a lieu également dans un temps humide. . Lorsque le pouvoir électrique est ainsi développé par le froid, il est susceptiblede s’accroître par les progrès de la chaleur diurne, pourvu toutefois qu’elle ne s'élève pas au-delà de 15 à 20° cent. Si la chaleur ya dans le jour à 250 ou audessus, il s’affoiblit au contraire de midi à 3 heures, et finit souvent par disparoître entièrement pendant cet intervalle de temps. Il n’est pas rare de voir les métaux conserver en apparence, malgré la chaleur, Jeur intensité électrique ; mais on ne tarde pas à s'apercevoir que leur pouvoir a réellement perdu de sa force; car il suffit alors de leur faire subir un ou deux frottemens forts, pour leur faire perdre la propriété électrique. Troisième Observation. Le refroidissement de l'air après être parvenu dans l’hiver à un certain degré d'intensité, devient sou- Tome LXXXIII. SEPTEMBRE an 1816. Ce 198 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE vent stationnaire et persévère plusieurs jours dans cet état. Dans cette circonstance, lés métaux deviennent de plus en plus moins électriques, et se trouvent bientôt toul-à-fait inexcitables lorsque la température ne s'élève pas sensiblement dans le jour. Dans le cas contraire, ils sont encore inexcitables le maln et le soir, mais dans le cours de la journée ils deviennent plus ou moins électriques, suivant les progrès de la chaleur diurne. Lorsque le pouvoir électrique n’est pas encore éteint par le froid , mais seulement très-affoibli, on remarque que les métaux, quoique un peu électriques par un frottement léger, deviennent inexcitables par un frottement fort. Cela n’a pas lieu quand le pouvoir west pas affoibli. Quatrième Observation. Quelle que soit la force électrique des métaux sous un air sec et refroidissant, leur pouvoir dis- paroît pour toujours lorsque le temps vient à se radoucir rapi- dement et que la chaleur augmente. J’ai vu dans Je, mois de juillet 1812, tous les métaux devenir inexcitables, et rester dans cel état pendant six à sept jours par un temps calme et pur de nord-est, le thermomètre étant le matin à 22° cent., à midi à 25, et l'hygromètre constamment au-dessous de 800. Cinguième Observation. 1°. Les disques de platine, d'or, d'argent, de cuivre et de zinc sont positifs dans les temps les plus doux de F'hiver. Le refroidissement de l'atmosphère les fait passer à l’état négatif. Si le froid continue et devient stationnaire, on les trouve le matin inexcitables ou positifs, et ils déviennent négatifs vers le milieu du jour lorsque la température monte. Sous un froid plus intense et également connu, Je Jes ai vus négatifs le matin, puis positifs à 10 heures, et fortement négatifs de midi à 3 heures lorsque la température de l'air se rehausse ; sur le soir ensuite à mesure que l'air se refroidit, ils repassent successivement par tous les états qu’ils ont parcourus dans le jour , et se retrouvent le lendemain comme ils étoient la veille, Ainsi ces métaux sont négatifs lorsque la tension du pouvoir est forte, et ils deviennent successivement positifs et négatifs lorsque le pouvoir est progressivement affoibli par l'influence du froid. Ils sont donc susceptibles de parcourir trois états électriques bien distincts. En été, dans les temps secs et refroidissans, ils sont toujours négatifs; ils deviennent posisifs lorsque la chaleur afloiblit leur pouvoir. Quelquefois même, la chaleur continuant, ils passent ET D'HISTOIRE NATURELLE. 199 à un second état négatif; mais cela a lieu plus fréquemment pour le zinc, le cuivre et l'argent, que pour le platine et l'or. IL est à remarquer que dans le refroidissement progressif le ts l'or et l’argent sont les premiers à changer d'électricité, e cuivre et le zinc les derniers. C’est le contraire lorsque la température de l’air se rehausse. De petits disques de ces métaux sont également plus tardifs à changer d'électricité que les grands disques par le froid , et plus prompts qu'eux, au contraire, par la chaleur, C’est pour cela qu’en été on voit quelquefois les petits disques de zine, de cuivre et d'argent parcourir successivement quatre états électriques lorsque le pouvoir descend de son plus haut point de développement au plus grand degré d’afloiblis- sement. 2°. L’antimoine, le bismuth et le fer se trouvent au contraire toujours positifs dans les fortes tensions de l'hiver; lorsque le froid plus intense et continu débilite le pouvoir, ils deviennent négatifs, et ils veparoissent positifs quand le temps se radoucit. Dans les jours froids de lété ils sont positifs; ils deviennent négatifs dans les fortes chaleurs de cette saison, particulièrement Jes petits disques. 30. Le plomb et l’étain sont toujours plus ou moins fortement négatifs en hiver à la première impression du froid ; lorsque le froid devient plus intense et continu, ils sont foiblement positifs. En été, ils sont négatifs dans un temps froid et positifs dans les fortes chaleurs. Cela a lieu très-rarement pour l’étain et très- fréquemment pour le plomb. Expériences directes. L'expérience confirme les résultats de l'observation. Premier Fait. Lorsque les métaux sont bien électriques par Vinfluence d’un air froid, si l’on mouille d’éther la surface in- férieure d’un disque, et qu'après l’évaporation on le frotte sur une étoffe de laine, on le trouve beaucoup plus électrique qu’au- paravant. On produit le même effet en lui faisant toucher un instant la surface d’un mercure qu’on a laissé refroidir à l'air extérieur. On peut faire cette expérience avec un disque de platine ou de cuivre. Si les métaux ne sont électriques que par l'influence de la cha- leur diurne, alors le plus léger refroidissement afloiblit toujours Jeur électricité. Ce 2 200 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Lorsque les métaux sont naturellement inexcitables dans un temps chaud, ils deviennent en les refroidissant, plus ou moins électriques, suivant le degré d’élévation de la température moyenne de Pair. S'ils sont inexcitables en hiver par l’eflet d’un froid continu, on a beau les refroidir, ils ne manifestent aucune électricité tant qu’ils restent froids, mais aussitôt qu'ils ont repris la température libre de l'appartement, ils le deviennent et persévèrent ensuite dans cet état toute la journée. Deuxième Fait. Quelle que soit la force de l'électricité des métaux, si on les refroidit avec de l’éther plusieurs fois de suite, ou qu'on les applique par intervalles sur du mercure refroidi artificiellement au moyen d’un mélange frigorifique , ils deviennent d'abord plus électriques par frottement sur laine à la première impression du froid; en continuant à les refroidir, peu à peu leur électricité s’afloiblit, puis elle s'éteint, reparoît et disparoît plus ou moins de fois, et cesse enfin pour toujours de reparoitre. En les laissant revenir à la température libre , ils reprennent ensuite peu à peu leur pouvoir et manifestent les mêmes alternalives d'électricité et d’inexcitabilité, jusqu'à ce qu’ils soient parvenus à leur premier point de départ : il est à remarquer qu'ils sont alors plus électriques qu'avant l'expérience. On peut produire le même effet dans les jours les plus froids de l'hiver, en les exposant pendant quelque temps à l’air exté- rieur, avec l'attention toutefois de conserver au dedans la tige d'isolement. Lorsque la tension du pouvoir électrique est considérable dans un temps sec et froid , il faut un refroidissement de 5 ou 6° cent. pour léteindre, quelquefois même de r2° cent. au-dessous de 09; dans d’autres temps 11 suflit de les refroidir à oc. Troisième Fait. Si l'on conserve le disque métallique dans l'appartement, et que Fon fasse refroidir au-dehors la tige isolante seule jusqu’à o°, le disque métallique vissé à cette tige n'est plus électrique par frottement sur laine , tandis qu'il l’est beaucoup avec une autre tige de même nature non refroidie. Cela a lieu dans les temps les plus secs et avec une tige de cire à cacheter, le métal redevient électrique avec cette même tige, aussitôt que celle-ci a repris la température de l'appartement; le pouvoir élec- tique de la tige isolante exerce donc une action sur celui du disque métallique. Quatrième Fait. x°. Lorsque le platine, l'or , l'argent , le cuivre ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 01 et lezine sont naturellement positifs dans un temps doux d'hiver, si on les refroidit légèrement avec de l’éther ou qu’on leur fasse seulement toucher du mercure froid, ils deviennent à l'instant fortement négatifs par frottement. Lorsque ces métaux sont naturellement négatifs dans un temps sec et refroidissant, si on les refroidit comme ci-dessus, ils n’en deviennent d’abord que plus fortement négatifs, Si on leur fait ensuite toucher du mercure refroidi artificiellement jusqu’à —12° ou — 15° cent., par des contacts très-courts d’abord et par suite plus prolongés, et qu’à chacun de ces contacts on les frotte sur une étofle de laine pour éprouver leur électricité, celle-ci s’affoiblit de plus en plus, puis elle devient successivement nulle, positive, nulle, négative, nulle, positive et définitivement nulle, Si on les laisse alors revenir à la température libre, ils repassent de nouveau par tous les états qu’ils ont parcourus en se refroi- dissant , et se trouvent à la fin plus négatifs qu'avant l'expérieuce. Ces métaux ne sont pas également susceptibles de parcourir dans leur refroidissement ces quatre états électriques. Le cuivre y parvient plus aisément que les autres, il suflit de le laisser sur la fin un quart d'heure en contact avec le mercure froid ; J'ai remarqué qu’il est des temps où l’on ne peut les faire changer qu ou deux fois d'électricité, même le cuivre, tandis que aus d’autres temps ils en changent trois fois sans que l’on soit obligé à un plus grand refroidissement. Souvent dans l’acte du refroidissement quelques-uns de ces changemens échappent à l’observation, parce que le refroidisse- ment se fait par saut où par une progression trop rapide ; mais on les apercoit toujours bien distinetement lorsque les métaux reviennent à la température libre. 2°, L'antimoine, le bismuthet le fer traités de la même ma- nière, deviennent plus fortement positifs à la première impression du froid : un refroidissement plus fort et plus ou moins prolongé les rend successivement inexcitables, négatifs, et ils ne vont pas au-delà; à mesure qu’ils se réchauflent ensuite ils reviennent à leur premier état. 3°. Le plomb et l’étain deviennent plus fortement négatifs à la première impression du froid : un refroidissement plus intense et prolongé les rend inexcitables; il leur faut une plus longue exposition au froid qu'aux précédens pour les rendre positifs. Comme on ne peut les laisser sur le mercure long-temps sans 202 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE courir le risque de les dissoudre, il faut les exposer à l'air ex- térieur lorsqu'il est sec et très-froid, et les ÿ laisser le temps convenable. Tous les métaux peuvent également éprouver ces changemens d'électricité, en les exposant plus ou moius:de temps à l’air ex- térieur dans un temps sec et froid. Quaud on ne veut leur faire subir qu’un seul changement, il suflit souvent de les exposer üun instant à un courant d'air froid. Il est digne de remarque que dans cette circonstance j'ai trouvé plusieurs fois les petits disques d’or, d'argent, de cuivre, de zinc et de plomb négatifs par la surface exposée au courant d’air, et positifs, par celle qui touchoit au bois de la table sur laquelle ils étoient. J'ai produit le mêine effet en ne leur faisant toucher que par l’une de leurs faces, du mercure exposé à l'air extérieur; mais cela n’a lieu que lorsque limpression du froid n’est pas trop vive. Cinquième Fait. Lorsque la tension du pouvoir électrique est forte, si l’on chauffe au soleil, où que lon approche du feu pendant quelques instans, un disque de métal sans tige d’isolement, et qu'après lavoir vissé à une tige non chauflée on le frotte sur de la laine, on le trouve beaucoup plus électrique qu'auparavant. Le même effet a lieu en chauffant la Üige, et en conservant le disque à la température libre. Le disque chaud vissé à une tige de cire à eacheter refroidie jusqu’à oo, estinexcitable aux premiers frottemens, il le devient aussitôt que la chaleur s’est communi- quée à la tige. Cette influence de la chaleur sur le disque ow sur la tige est presque nulle dans toutes les saisons, lorsque le pouvoir électrique est afloibli par un temps doux et humide, Lorsque les métaux sont naturellement inexcitables, on les rend plus ou moins électriques par frottement, en chauffant le disque ou la tige d’isolement. Cette électricité est toujours foible quand l’inexcitabilité des métaux est produite par l’élévation de température de l'atmosphère. Elle est au contraire plus ou moins forte pendant lhiver lorsque l’inexcitabilité est due à un froid vif et continu. Sixième Fait. Quelle que soit intensité électrique des métaux, ils n’acquièrent du pouvoir par la chaleur que jusqu’à un certain degré. En eflet, si l’on continue à les chauffer progressivement et que par intervalles on les frotte sur une étoffe de laine, on voit leur électricité s’afloiblir peu à peu, puis successivement s’éteindre, se ranimer, et enfin disparoître tout-à-fait. En les laissantrefroidir, ils redeviennent ensuite électriques comme auparavant. ÊÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 203 On peut éteindre également leur pouvoir électrique en les frollant vivement avec un polissoir de feutre, ou une élofle de laine qu’on presse fortement sur le disque. En hiver, dans les temps de forte excitabilité, particulièrement sur le soir lorsque le froid redouble d’activité, il est très-ditlicile d’éteindre leur pouvoir par la chaleur ou par la pression. Dans celte circonstance, il m'a fallu chauffer le platine, l'or, l'argent, e cuivre et le zinc jusqu’au-dessous d’un commencement de rougeur, On ne peut alors les frotter sur de la laine que lorsqu'ils sont suflisamment refroidis pour ne pas brûler létotle. Les autres mélaux n'exigent pas une température aussi élevée. En été et dans les temps doux d'hiver, tous n’ont besoin d’être chauflés que jusqu’à 5o ou 60° cent. pour perdre leur pouvoir. On peut encore éteindre le pouvoir électrique des métaux , lorsque sa tension est foible, en ne chauflant jusqu’à un certain degré que la tige de cire à cacheter qui sert à les isoler. Lorsque la tension électrique est considérable, cette tige chauflée jusqu'à un commencement de fusion , ne fait qu’augmenter l'intensité élec- trique. Je n'ai pas fait la même épreuve avec une üge de verre, parce qu’il faut la chauffer beaucoup plus fort, et qu’alors elle n'est plus maniable. Septième Fait. x0. Si l’on chauffe progressivement le platine, or, l'argent, le cuivre et le zinc, lorsqu'ils sont fortement né- gatfs par l'influence d’un air sec et refroidissant, on les fait devenir successivement inexcitables et positifs par frottement sur laine, On produit le même effet en frottant vivement et en pressant de même les disques métalliques avec un polissoir de feutre. IL est plus difficile de Les faire changer d'électricité en hiver qu'en été, el en hiver ils opposent moins de résistance le malin ou dans le cours de la journée que sur le soir. Si après avoir chaufié les métaux et les avoir ainsi rendus positifs, on froite fortement avec un polissoir de feutre, et pendant Jong-temps, leurs disques, et que par intervalles on les passe légèrement sur une étofle de laine pour éprouver leur électricité, on voit celle-ci devenir peu à peu moins positive, puis succes- sivement nulle, négative, nulle et positive. En les abandonnant alors à eux-mêmes et en les éprouvant de temps en temps, ils repassent ensuite par tous les états qu'ils ont parcourus dans la friction, et se retrouvent à la fin négatifs comme avaut l’expé- tience. On ne réussit pas toujours à leur faire parcourir ainsi ces quatre états électriques; souvent on ne peut les faire changer 204 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d'électricité que deux fois : le platine et l'or opposent plus de résistance que les autres. J’ai remarqué qu’en général on ne par- vient à leur faire subir ces quatre changemens en hiver que lorsque le temps commence à se radoucir. 29. L’antimoine , le bismuth et le fer, qui sont naturellement positifs dans un temps sec et refroidissant, deviennent négalifs en les chauffant ou en les frottant, et ils ne vont pas au-delà. On y réussit plus aisément en été qu’en hiver. [1 est cependant un moyen de les faire changer promptement d'électricité en hiver; c'est de faire refroidir le métal jusqu’à © ou au-dessous pendant quelque temps, et de les chauffer ensuite. 3°. Le plomb naturellement négatif dans un temps sec et re- froidissant , devient positif en le chauffant ou en le frottant fort, et il s'arrête là. En traitant de même l’étain , je n’ai pu le rendre inexcitable; cependant je l'ai trouvé naturellement positif dans les jours chauds et humides de l'été. Huitième Fait. Lorsque l'or, l'argent, le cuivre et le zinc sont encore foiblement négatifs en hiver dans un temps qui commence à se radoucir, si l’on fait chaufler progressivement auprès du feu la tige de cire à cacheter qui leur sert d'isolement, et qu’on la visse de temps en temps à l’un de ces métaux, il se trouve positif par frottement, tandis qu’il ne cesse d’être négatif avec une tige de même nature non chauffée, Dans les temps chauds “et humides de l'été, lorsque ces métaux sont encore positifs, ils deviennent négatifs en faisant chaufer la tige au soleil. Conclusion. Tous ces faits, d'accord avec l'observation, me portent à re- garder comme constant, ro qu'un refroidissement lent et gradué ne procure aucune tension au pouvoir électrique des métaux , mais la dispose à en acquérir par les progrès de la chaleur diurne, qu'un refroidissement plus ou moins intense et plus ou moius rapide, fait naître et développe proportionnellement leur pouvoir ; que ces mêmes degrés de froid l’affoiblissent et le font disparoître lorsqu'ils deviennent stationnaires et continus; 20 que le platine, l'or, le cuivre, l'argent, le zinc, le plomb et l’étain sont cons- tamment négatifs par frottement sur laine lorsque leur pouvoir électrique est bien développé, et positifs quand il est afoibli; tandis que l’antimoine , le bismuth et Le fer sont toujours positifs dans le premier cas, et négatifs dans le second ; 2° que lorsque ce ET D'HISTOIRE NATURELLE. 205 ce pouvoir descend graduellement du plus haut point de son développement au plus grand degré de son afloiblissement, ou lorsqu'il remonte de celui-ci au précédent, les cinq premiers métaux, particulièrement leurs petits disques, sont susceptibles de parcourir quatre états électriques, un négatif et un positif forts, un négalif et un positif foibles, tandis que les autres n'en parcourent que deux, avec cette différence entre eux, que l’an- timoine, le bismuth et le fer vont et viennent du positif fort au négatif foible et de celui-ci au précédent, et que le plomb et l’étain descendent au positif foible et ne s’élèvent pas au-delà du négatif foible ; 4° que chaque changement d'électricité qui a lieu lorsqu'on fait varier graduellement les forces de leur pou- voir électrique, est toujours précédé d’un état neutre dans lequel les métaux se trouvent inexcitables pendant plus ou moins de temps, suivant les progrès du développement ou de l’affoiblis- sement de leur pouvoir. On a dû remarquer que l’electricité ne change de nature qu’en faisant varier l'une des forces qui se pressent dans le frottement. Le changement d'électricité est donc le résultat d’un changement de rapport dans les forces qui agissent l’une«sur Pautre dans la production de l'électricité, c’est-à-dire, que celle qui étoit supé- rieure devient inférieure et l'inférieure supérieure. Puisque les cinq premiers métaux sont toujours négatifs par frottement sur laine, quand leur pouvoir électrique est bien dé- veloppé et positif, quand il est un peu afloibli, on doit en con- clure que dans le premier cas le pouvoir électrique de ces mé- taux est supérieur à celui de la laine, et que dans lé second il Jui est inférieur. Ce qui le prouve, c’est qu'à mesure que le pouvoir du métal s’afloiblit, l'électricité devient nulle avant que de changer de nature. Cet équilibre momentané des forces n’annonce t-il pas qu’elles changent de rapport entre elles? L’é- lectricité négative seroit donc le partage du corps qui dans le frottement a le plus de vertu électrique, et la positive, celui du corps qui en a le moins. Il est vrai qu’en afloiblissant davantage le pouvoir électrique de ces métaux, ils sont susceptibles, après avoir paru positifs, de redevenir négatifs par frottement sur la même étoffe, quoique leur pouvoir soit alors dans un plus grand rapport d’infériorité avec celui de la laine. Dans ce cas, l’état négatif seroit le partage du pouvoir le plus foible ; ce qui est contradictoire avec l'énoncé précédent. Il est impossible de lever cette contradiction et de Tome LXXXIII. SEPTEMBRE an 1816. Dd 2c6 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE concilier les faits autrement, qu'en supposant que lorsque dans le frottement l'un des pouvoirs qui se pressent jouit d'une trop grande supériorité de force sur l’autre, il devient, dans l'acte de la pression, inférieur au plus foible par l'excès même de sa force, en ce sens que le pouvoir le plus foible se fortifie en se resserrant sur lui-même, et que le plus fort s’afloiblit en se détendant proportionnellement. Cela doit être ainsi. En effet : it est certain que l'électricité ne change de nature que lorsque les forces changent de rapport entre elles : or si le pouvoir électrique de ces mélaux est plus foible que celui de la laine quand ils sont positifs par frottement, il s’ensuit qu'il lui est supérieur quand ils redeviennent négatifs après avoir affoibli plus fortement leur pouvoir. Ce second chan- gement d’électricité, lorsqu'il s'opère graduellement, n'arrive Jamais qu'après un afloiblissement progressif de la première élec- tricité et un état d’inexcitabilité subséquent dans lequel les forces Sont momentanément en équilibre. Cela n'annonce-t-il pas que le rapport de supériorité de l’une des forces sur l’autre s’affoiblif et tend à devenir inverse? D'ailleurs ce qui prouve que le second état négatif est le résultat d’une supériorité de force que le métal a acquise dans le frottement par l'acte même de la pression, c’est que si on afloiblit son pouvoir dans un plus grand rapport, on le voit devenir successivement inexcitable et positif pour le deuxième fait. Dans cette circonstance le pouvoir de la laine conserve sa supériorité sur celui du métal, malgré l’affoiblisse- ment qu'il éprouve dans l’acte de la pression. L'état positif est donc en définitif le partage du corps dont la puissance est la plus foible au moment de la réaction. Enfin il est constant qu’une tige de verre polie, qu’on refroidit progressivement et que lon frotte par intervalles sur une étoffe de laine, est susceptible de devenir de positive qu’elle étoitauparavant, successivement inexci- table, négative, inexcitable et positive; que la cire à cacheter et le soufre refroidis de même, passent de l’état négatif au po- sitif, or s’il étoit vrai, comme on le pense communément, que l’état négatif fût le propre de la substance qui, dans le frottement de deux corps hétérogènes, a le moins de vertu électrique, com ment concevoir l'état positif que prennent ces trois substances dans leur frottement avec de la laine, lorsque leur pouvoir est parvenu au plus grand degré d’affoiblissement ? I faut donc conclure que dans le frottement de deux corps de différente nature, l’état négatif appartient à celui qui a le ET D'HISTOIRE NATURELLE. 207 plus de pouvoir électrique, ou dont le pouvoir devient le plus fort par le résultat de la pression. Mais comment concevoir que le pouvoir le plus foible puisse devenir le plus fort par le résultat de la pression? On peut con- sidérer les deux pouvoirs qui produisent l’eflet électrique dans leur frottement mutuel, comme deux ressorts qui se pressent et réagissent l’un contre l’autre avec des forces variables. Lorsque les forces sont égales , ils doivent se comprimer et se tendre également l’un l'autre; la réaction étant égale alors de part et d'autre, il y aura équilibre et l’effet électrique ne’ sera point pos Si l'une des deux forces est au contraire inférieure à autre, ils doivent se comprimer et se tendre inégalement; leur réaction étant inégale dans ce cas, il y aura une rupture d’é- quilibre et production d'électricité. Or léléctrioité négative doit dans cette lutte, échoir en partage au corps dont le pouvoir a le plus de réaction; car son fluide en se détendant contre celui du second corps qui se laisse refouler, doit s'approcher trop près du centre d'attraction de*ce second corps, pour qu'une portion de ce fluide ne soit pas retenue par celui-ci au moment de la séparation des deux corps. L'on conçoit maintenant comment en afloiblissant le pouvoir le plus fort, on peut le faire devenir à son tour le plus foible , et rendre ainsi positif dans le frot- tement le corps auquel il appartient. Supposons actuellement que l’on continue à affoiblir le pouvoir du métal, jusqu’à œ que celui de la laine ait une assez grande supériorité sur lui pour pouvoir le comprimer sans être comprimé lui-même, le pouvoir de la laine se trouvant plus près du centre d'attraction du métal, doit en être attiré plus fortement et con- SA PE exercer sur le pouvoir du métal une nouvelle pression à laquelle il est obligé de céder. Or cette action produit un -effet contraire sur les deux puis- sances, un accroissement d'expansion pour la plus forte, el une condensation proportionnelle pour la plus foible. La première doit donc s’afloiblir alors dans le même rapport que la seconde s'accroît, et devenir enfin inférieure à celle-ci dans la réaction. On voit que de cette manière l'électricité négative doit rester en partage au métal, et que c’est à cette supériorité de force qu'il a acquise dans la pression, qu’il le doit. Ü est aisé de con- cevoir après cela comment en afloiblissant encore et dans un plus grand rapport le pouvoir du métal, il peut, malgré l'accrois- Dd 2 208 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE sement de tension qu'il acquiert par la pression et l'expansion que celui de la laine en recoit, rester inférieur à celui-ci dans le frottement, et faire ainsi redevenir positif le métal. » P Je sens que cette manière d’expliquer l’action électrique, doit paroître d'autant plus étrange, qu’elle est opposée à l’idée qu’on s’en est formée jusqu'ici; mais les faits que J'ai décrits sont po- sitifs, et ils me semblent inconciliables entre eux en suivant la théorie reçue. D’ailleurs je ne la considère que comme une facon de voir provisoire, en attendant que de nouveaux faits la con- firment. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 209 oo LEE SUPPLÉMENT Au Mémoire sur la Réduction des degrés du Thermomètre de Mercure en degrés de chaleur réelle; Par Honoré FLAUGERGUES. (JOURNAL DE PHYSIQUE, TOME LXXXII, PAGE 907.) LE mercure de quelque mine qu'il provienne, pourvu qu'il soit pur, est univoque , et il a toujours le même degré de dilata- bilité; mais il n’en est pas de même du verre, dont la qualité et par conséquent la dilatabilité diffèrent suivant la différente pro- portion de la silice, de la soude, du plomb, etc. qui entrent dans sa composition. Or comme la dilatation apparente du mer- cure dans le thermomètre n’est autre chose que la différence entre la dilatation du mercure et celle du verre dans lequel il est renfermé ; il s'ensuit que cette dilatation apparente doit être différente dans presque tous les thermomètres, et qu’à la rigueur il faudroit une Table de réduction particulière pour chacun de ces instrumens; mais si l’on considère que la dilatation apparente dont il s’agit est peu considérable, qne le verre avec lequel on construit les thermomètres est toujours du verre blanc à peu près de la même qualité, et par conséquent ayant à peu près le même degré de dilatabilité, on se convaincra qu’une seule Table de réduction peut suffire, pourvu qu'elle soit calculée sur le rapport moyen de la dilatation apparente du mercure dans le thermo- mètre, en passant de la température de la glace fondante à celle de l’eau bouillante: j'avois choisi pour ce rapport celui de 10000 à 20160 , mais J'ai reconnu qu'il étoit trop fort pour plusieurs thermomètres,,et je crois qu'on doit préférer celui de 10000 à 10196 qui est le rapport moyen entre ceux qui ont été observés par plusieurs physiciens, et avec différentes espèces de verres de thermomètres. 210 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE TABLE des Rapports observés par plusieurs physiciens ; entre les volumes apparens du Mercure dans le Thermomètre à la température de la Glace fondunte et à celle de l'Eau bouillante. Rapp. réduits | Livres dont les rapports précédens ont été ennomb, rond: extraits, Noms des Physiciens. Rapports observés. 11156 à 11336 TO00O Le 61} Pre trans. abreg. VI, à p. 25. Musschembroeck, Cours de Physique exp. t. 2, p. 367, Ÿ 1560. 11552 à 11732 10000 : 10156|Boërhuave, Chem. tom. Let TA NET lg. 5. 11822 à 12002 10000 : 10152] Martine, Dissertations sur la chaleur, pag. 41. 654 à 66+ 10000 ©: 10153lLalande, nouveau Thermom., Paris 1503, p. 2. Notes : HoISE SanRe à 10154 /Campbell, apud Martine, Dissertations sur Ja [10000 à 10158 ‘10000 : me chaleur, page 45. à 10154 10000 : 10154|Recueil de pièces sur les Thermom., pag. 4. 6 à 67 10000 : 10152|Côtes, Trauté de Météorologie, pag. 138. 10000 à 10156 10000 : 10156/Côtes, Mémoire sur la Météorol., t. I, p. 371. S-Murtin|10000 à 10159 45 [10000 : 10159|Esprit des Journaux ;-décemb. 1590, p. 370. Cher. deLorgna.|10000 à 10159527 |10000 : 10159|Dissertat. sur la graduat. du Bar. Véronne, 1765. Beaumé. ...... 5045 à 5r2z 10000 : 10153|Opuscules chimiques, Paris an VI, p. 161. Flaugergues. ...| 125 à 127 10000 : 10160|[Journal de Physique, tom. LXXVIÉ, p- 284. Le rapport moyen entre ces quatre rapports, est celui de 10000 à 10150 avec une fraction extrêmement petite et qu’on pes ] négliger, c’est ce rapport qu’il convient d'employer, puisqu'il re- présente avec plus de probabilité que tout autre, la dilatation apparente du mercure dans le thermomètre ; pour trouver donc, d'après ce rapport, des formules pour réduire les degrés d’un thermomètre donné aux degrés de chaleur réelle, on cherchera , au moyen de ce rapport, le volume du mercure à la température de la glace fondante, exprimé en degrés de ce thermomètre, on divisera la différence 0,0067226922 des logarithmes de 10156 et de 10000, par le nombre de degrés du thermomètre donné, compris entre le point de la glace fondante et le point de l’eau bouillante, et en opérant comme nous avons dit dans le Mémoire sur le Rapport des Dilatations de l’Aiïr avec la Chaleur (1), on trouvera Îles formules suivantes qui seront plus sûres que celles que nous avons données, et dans lesquelles x exprime de même le degré de chaleur réelle correspondant au degré donné y du thermomètre proposé. Formule pour le thermomètre de M. Deluc et pour le ther- (1) Journal de Physique, tome LXXVII, pag. 283. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 21 momèlre octogésimal ordinaire, dans lequel l'intervalle entre le point de la glace fondante et le point de la chaleur de l’eau bouillante (1) est divisé en 8o parties égales. x = [log (5r28,2 Ey)C3,7099549543] (11809,98260966). Le logarithme du coefficient est — 4,0755463267. Formule pour le thermomètre centigrade : æ = [ log (6410,26 Æ y) C5 3,8068754016] (14874,9934055). Le logarithme du coefficient est — 4,1724567726. Formule pour le thermomètre de Fahrenheit (2) : a—=[log(11506,462=Æy)24,0621479067](26774.9875563) 2 52°. Le logarithme du coeflicient est — 4,4277292773. Formule pour le thermomètre de M. Delisle : æ — [3,9829666607 — log (9615,3846 — y)](22315,553404). Le logarithme du coeflicient est — 4,3486076611. Mais comme les Tables sont plus commodes que les formules, je joins.ici pour l’usage des observateurs, deux Tables de réduc- tion calculées suivant Le nouveau rapport de diiatation, celui de 10000 à 10156; l’une pour le thermomètre de M. Deluc, qui pourra aussi servir pour réduire les degrés du thermomètre oc- togésimal ordinaire, et l’autre pour le thermomètre centigrade dans lequel l'intervalle fondamental entre le point de la glace fondante et celui de l’eau bouillante, est divisé en cent parties égales. Ces deux espèces de thermomètres étant les plus usitées en France. a ——_—_—_—]—]——— A" ûî A —————— (1) La hauteur du baromètre étant de 28 pouces , corrigée de l’effet de la capillarité ;.si le baromètre est à cuvette , et réduite à la températurede la glace fondante. (2) Suivant le rapport de 10000 à 10156 le volume du mercure dans le ther- momètre de Fahrenheit et au point o de ce thermomètre , est 1160(°,42 et à la: glace fondante 11538°462. 212 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 2200 NP PDO TABLE de Réduction des degrés de l’'Echelle du Thermomètre de M. Deluc, ou du T'hermomètre octogésimal en degrés éxaux de chaleur. | is Degres | Degres| Degrés Degres| Degrés | Degrés| Dégres | Degres| Degrcs Degres du égaux du égaux du égaux du égaux du égaux Ther. lle chaleur.| her. [de cheleur.| her. [de chaleur. _Ther. de chale eur. Thec. |de chaleur. — 190] — 15°139) + 50] + 500 35 + 2°] + 25° 133| y 75 + 355152 )2] + TE 65e fes = 650094 — 14 | — 14,198 6 6,044 26 26,136 46 46,151 66 66,089 — 19 | — 15,118 7 73000 27 27: 139 47 ig 150 67 67,084 — 12 | — 12,108 5 8,056 28 28,141 45 ÿ, 149 68 63,079 — 11] — 11,098 9 9,062] 29 29,143] 49 49:14] 69 69,073 — 10 | — 10,088 10 10,068 30 30, 145 5o 50, 145 70 70,007 — 9|[— 907 11 11,074 31 31,147 51 Br, 143 mi 7x o6r — 8B|— 6,008 12 12,080 32 32,149 ba 52,141 72 72,055 — 7|— 75059 13 | } 13, 085 33 33,150 53 53,159 73 73,049 — 6|— 6; 050 14 14,92 34 34,151 54 54,130 74 74 104 — 5|— 5 Vofi 15 15,005 35 5,152 55 | 5,133 7 75,036 — { _— free 16 16, 100 36 36,153 56 56, 130 76 76,029 — — 9,024 17 172104 37 37,154 57 57,127 77 | 775022 —,2 | — 2,016 15 18, 108 38 35, 125 58 58,124 78 78,01 — 1|— 1,008 19 19,112 39 39, 155 59 59,120 79 79,008 o 0,000 20 20,110 4° 49,155 6o Go, 116] 80 Bbeods + 1 | + 1,008 21 21,120 41 4v,105 Gr Gi,112 2 2,016 22 22,104 2 da/ 158 G2 6, 108. 3 3,023 23 23, 127 3 43,154 5 63,104 4l Go%ol_ a4| afisol 44 dés] 64 | 64,099 TABLE de Réduction des degres de l'Echelle du T'hermomètre certigrade en degrés ésaux de chaleur. Degrés| Degrés |Degrés| Degrés égaux du égaux Degrés| Degrés |Degrés! Degrés | Degrés| Degrés u _Ther. de chaleur.| Ther. [de chaleur. du égaux du égaux du égaux Ther. [de chaleur.| Ther. [de chaleur.| Ther. [de chaleur. — 20°| — 260182] HE 50| + 5oe 34| + 30°| + THE 300164| + 55°| H + 550190 [+ 800 + 800127 — 19 | — 10,177 6 6,041 31 on 168 56 Fa 194 8r 81,122 — 15 | — 18, 161 7,048 32 322171 57 13 82 82,11 — 19 | — 17,157 ê 8,095 33 33,173 58 ue ne 83 83,11 = +61" 16,141 9 9,061 34 34,156) 59 592101 84 84,108 — 15 | — 15,13r 10 10,068 35 35,178 Go 60, 159 85 85, 102 — 14 | — 14,101 11 11,075 36 36,187 67 61,187 86 86,096 — 1 — 15,111 12 12,001 3 37,183 62 62,18, 8 87,090 — 12 | — 12,101 13 13,086 3 35,186 63 63,183 8 88,055 — 11 | — 11,097 14 14,091 39 39,188 64 64,181 8) 89,079 — 10 | — 10,081 1 15,097 ( no 6. 65,17 90 90,073 OI 70; 072 16 16,103 ? 1,19 66 6, 177 gt 91,006 — 8|— 8,063 17 17,108 2 2,193 6 67,174 2 92,060 — 7 | — 7,054 18 18,114 3 3, 194 6 68, 172 93 03,054! — 61 604 19 19,119) 44 100 69 69,169! 94. 94: 047 — 5|— 5,056 20 20, 124 5 196 70 70, 166 95 95,041 — 4 |— 4,028 21 21,129 6 6,197 71 71,162 96 96,034! — 3 | — 3,021 22 22, 133 7 7,193 72 722159 97 97, 027 2142074 23 23,137 & 48,198 73 73,15! 95 98,019! RU = RCOIET 24, 142 9 9,198] 74 74152] 99 99,010 Q 0,000 25 25,146 5o 50, 198 72 75,148] 100 100, 000 + AIS 1,007 26 26,149 5x 51,198 76 76,144 2 2,014 27 27,153 52 52, 198 7% 775 140 A 3 3,020 28 28,157 53 53, 197 7 55, 136 4 4,027] 29 29,161| 54 54,196] 79 79; 132 MEMOIRE ét ET D'HISTOIRE NATURELLE, LYS ee) MÉMOIRE Sur la Communication de la Structure des Cristaux doués de la double Réfraction au Verre, au Muriate de Soude, au Spar-Fluor et à d’autres Substances, par la compression mécanique et la dilatation ; Par DAVID BREWSTER, De la Société Royale de Londres et d'Edimbourg, contenu dans une Lettre adressée à Sir Josepx BANKS.Extrait des Trans- actions Philosophiques. Lu dans la Séance de la Société Royale , tenue le 29 février 1816. BiX ls RAM Te MONSIEUR, Malgré les nombreuses découvertes récemment faites, relatives à la polarisation de la lumière, et aux phénomènes opliques des corps cristallisés, on n’a cependant pas fait un seul pas pour arriver à la solution du grand problème de la double réfraction. Quelle est la condition mécanique des cristaux qui forment deux images et les polarisent, leurs surfaces étant différentes? quels sont les changemens mécaniques que doivent subir les corps cristallisés Le être susceptibles de ces propriétés remarquables? Telles sont es deux questions auxquelles il est aussi difficile de répondre aujourd'hui, que du temps d'Huygens et de Newton. Dans Les expériences multipliées que J'ai faites pour obtenir Ja solution de ces difficultés, la polarisation de la lumière par la réfraction oblique, fut le seul phénomène qui parut avoir quelque connexion avec cette recherche; mais l'espoir de succès que me donnoit ce fait, se trouva bientôt déçu, et le sujet reprit sa première forme difficile. Cependant une nouvelle suite d’expé- riences m'a mis en état, non-seulement de donner une réponse satisfaisante aux deux questions préeitées, mais encore de com- Tome LXXXIII. SEPTEMBRE an 1816. Ee 274 JOURNAL DE- PHYSIQUE, DE CHIMIE muniquer au verre et à plusieurs autres substances par la simple pression de la main, toutes les propriétés des différentes classes de cristaux doués de la double réfraction. J’exposerai en peu de mots, dans la Lettre suivante, la méthode propre à produire ces eflets, et les conséquences que l’on peut en tirer. SECTION PREMIÈRE. Sur la Communication de la Double Réfraction au Verre, au Muriate de Soude et aux autres Solides durs. Proposition première. Si les bords d’un plateau de verre, qui n’a pas d’action sur la lumière polarisée, sont comprimés ou dilatés par une force: quelconque, ils donneront des axes neutres distincts et dépola- risans, comme tous les cristaux doués de la propriété de la double réfraction, et diviseront la lumière polarisée dans ses couleurs complénrentaires. Les axes neutres sont parallèles et perpendi- culaires à la direction dans laquelle la force est appliquée, et les axes dépolarisans s’y inelinent à angles de 450. Je pris un plateau de verre d'environ un pouce de large sur deux pouces et demi de long, et 0.28 de pouce d’épaisseur. Ayant comprimé ses bords par le moyen d’une vis, je trouvai qu'il polarisoit un blanc du premier ordre dans toute sa largeur. Les axes dépolarisans formoient un angle de 45° avec les bords du plateau. En augmentant la force de compression, il polarisoit une lumière d’un jaune foible du premier ordre, qui graduelle- ment devint orange. J'ai éprouvé une difficulté considérable en appliquant une force de dilatation au verre, jusqu’à ce que J’eusse découvert la méthode: décrite dans la proposition troisième. Proposition deuxième. Lorsqu'un plateau de verre est sous l'influence d’une force: de compression, sa structure est la même que celle d’une classe de cristaux doués de la propriété de la double réfraction qui renferme le spar calcaire, le béryll, etc.; mais lorsqu'elle est sous l'influence d’une force de dilatation , sa structure est la même que celle de l’autre classe de cristaux doués de la propriété ET D'HISTOIRE NATURELLE. DT ‘de la double réfraction qui renferme le sulfate de chaux, le quartz, elc. Un plateau de verre dilaté combiné avec un plateau semblable de verre comp.imé, de maniere que la direction de la force de dilatation coïncidât avec la direction de la force de compression, la différence de leurs effets fut produite ££ vice versé. La vérité de la proposition fut aussi constatée par la combinaison du verre avec des plateaux de sulfate de chaux que je pris pour modèles. Proposition troisième. Un plateau de verre long, ou en forme de filet comprimé par la main, donne dans le même temps les deux structures opposées dans la proposition précédente. Le côté convexe ou dilaté du pla- teau produit une rangée de franges colorées semblables à celles que donne une classe de cristaux doués de la propriété de la double réfraction ; et le côté concave ou comprimé produit une autre rangée de franges semblables à celles produites par l’autre classe. Ces deux rangées de franges sont séparées par une ligne d’un noir foncé où il n’y a ni compression ni dilatation. On peut obtenir ce résultat intéressant avec des plateaux de verre de toute grandeur, pourvu qu’ils n'aient que peu de pouces de longueur ; mais l’expérience se fait beaucoup plus aisément avec un morceau de verre long et étroit. Lorsqu'on emploie un très-petit degré de force pour le comprimer, on aperçoit sur les : 10lorIG , en PES atA no alata, Sephen; Longicaudatus ; q E Tuberculatus, Dorsatus, Imbri- , ET 5 catus; Eymnus; Asperus ; Com- 4 K $19 mersonu ; Maculatus : Plumieri. pinata : Pinnatus. 39.:Æéëlobatus Car Corp: cum P. P. aquilæ formi; Capite ie auti}t *:2crassonon rostrato, appendice simplici an- -R. Aquilæ. Zicèinstrueto; Qculis lateralibus ; Dentibus latisylævibus, polygonis, coalitis, palatinis; P.P.acutis, margine antico convexo, pos- tico concavo; P. V. ut in præcedente; P.S. unmica ad radicem caud. $æpè longissimæ, flageliformis, aculeo serrato armatæ, extre- mitate impennis. Spec. Vulgaris ; Obtusus: Flagellum ; Lobatus; Tome LXXXIII OCTOBRE an 1816. LI 262 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 4°. Dicerobatus aut KR. Cornutæ. 50, ZLeiobatus aut f. Laœves. 6°. Narcobatus aut R. Torpedines. 7e. Rhinobatus aut R. Squali. 80. Pristobatus aut R. Serratæ. Sinensis; Nichofii; Filicaudatus; Hamatus> Ocellatus, Narinari, Forsteri. Car. Corp. cum P, P. ut in præcedente : Capite lato, depresso, non rostrato , appendicibus2 cornuformibus anticè instructo; Oculis la- teralibus; Dentibus lævibus, polygonis , mi- nutissimis, labialibus; cæter. ut in præce- dente. Spec. Mobular, Fabronianus, Giornanus, Mas- sena ? Banksianus, Fimbriatus; Brevicau- datus. Car. Corp. cum P. P. orbiculari : Capite non libero, subrostrato; P. V, sat. magnis, integris, a P. P. mediocribus separatis; P. S. nullâ; Caudä subcrassâ, brevi, aculeo serrato armatà , P. C. ambiente terminatä. Spec. Cruciatus ; Sloani; Britannicus. Car. Corp. cum P. P. orbiculari, anticè sub- emarginato, ad latera sæpiùs crasso ; Capite non libero, non rostrato; P.S. à aut 1 in caud. crassâ, brevi, P.C. obliquâ ,ambiente, terminatä. Spec. Unicolor ; Maculatus ; Unimaculatus ; Variegatus; Galvani; Guttatus; Bicolor ; Timlei; Sinensis, Gronovianus; Dipterygius. Car. Corp. cum caudâ oblongo, anticè de- pre posticè conico, Capite in rostrum iberum , plus minüsve acutum, prolongato; Dentibus minutis, obtusis; P. P. sub-latis à P.V. integris sub-magnis separatis; P. S. 2. in caudâà à corpore vix distinctâ, P. C. obli- quà ambiente terminatä. integra. Columnæ aut Vulgaris; Electricus; Granulatus; Russel- lianus ; Coromandelicus ; Fas- Spec.P.CX itus? bifurcata. Djiddensis; Lævis; Læ- vissimus; Anchylostomus. Car. Corpore cum caudâ ut in secundâ Div. præced.; Capitis rostro verè prolongato et utrinque dentato, Spéc.Antiquorum; Dubius; Guspidatus, Ermar- ” 'R ET D'HISTOIRE NATURELLE. 263 ginalus; Microdon; Pectinatus : Semisagit- talus ; Granulosus, Cirrhatus. IT. Genus aut Fam. _ar. Æ4p. branch. sub lateralibus ; Corpore SQUATINA. depresso ; Capite lato, libero; Ore termi- nali; Dent. acutis; P. P. mediocribus ad radicem ant.emarginatis ; P.W, latis verè déstantibus; P. $S. 2 in caudé non dis- tincté, P.C.ambiente oblig. terminäta. En Opec Angelns III. Genus aut Fam. Car. Apert.branch. lateralibus; Corpore cum SQUALUS. caudé non distincté, conico, P. A. sœpits — énstructo.Capitelibero; Oculis lateralibus. 10. Scyliorhinus. Car. Dent. acutis trifurcatis; Inspiraculis; P. S. 2 in caudâ vere longâ,infernè marginatä, extremitate pinnatâ ; Colore vario. longä, et cæt. Caniculus ; Delaro- chianus; Isabellus; Maculatus; Myops; Breviculus; Cirrbatus, Punctatus, Punctulatus; Africa. nus; Fasciatus; Waddii ? ongissima, et cæt. Ocellatus; Russellianus, Unicolor, Varie- gatus; Tuberculatus, Dentatus, Lambarda ; Indicus; Tigrinus; Barbatus. 20. Echinorhinus. Car. Dentibus pectinatis; Insp.; P, S. 2 in Caudä; P. A. null : C. falciformis ? Spec. Spinosus. 3°, Monopterhinus. Car. Dent. variis : Ge nullis. P. S. unicâ in caudâ aut in dorso; P. A.; Caudä bifurcatä, lobo sup. multüm longiore. Spec.Colombinus; Griseus ; Cinereus; Ciliaris? 4. Galeorhinus. Car. Dent.var.; Insp. parvis; P.S.2,12in dorso, 2% parva; Cauda lata, bifurcata , lobo sup. brevi : Cute sublævi. Spec.Mustelus; Galeus; Hinnulus; Rondeletii ; Ferox ? Platyrhinchus. 5°.Acanthorhinus.Car.Dent.var.; Insp. magnis; P.S. 2, 12 in dorso, 24 magna; P. A. nulla; C.lata, bifurcata, lobo sup. brevi. Cute asperrima. $pec. Acanthias ; Ferdinandinus; Assierii; Spinax : Norwegianus; De aut Ni- 2 Spec.Caud.4, 264 JOURNAL/DE PHYSIQUE, DE CHIMIE censis; Microcephalus ; Centrina ; Squam- mosus; Granulosus ; Cepedianus; Blochia- nus, Co. Heterodontus: Car. Dent. heteroelitis; Insp. nullis; P. S. zut -inpræcedenti; P. A. magna; P. C. feréutin | \præced, Spec. Philippi. 7°. Carcharhinus. Car. Dentibus magnis, triangularibus, sæpius serratis; Insp. nullis; P.S. 2, 1* dorsali; P. A. parva : fossulâ semilunari ad radicem sap. et inf.; P.C. bilobatæ, lobo sup. mul- th longiore et pinnâ speciali terminato. Spec. Gommersonÿ; Lamia; Lividus; Ustus; Heterodon; Verus ; Broussonetn ; Glaucus; Cæruleus ; Megalops ; Heterobranchialis ; Cornubicus ; Monensis? Vulpes. 8°. Cestrorhinus. Car. Dentibus et cæt. ut in præced.; Capite lato , transverso, cum corpore malleiformi. Spec. Zygæna; Tiburo; Caroliniensis ? Pictus. g°. Cetorhinus. Car. Corpore immenso ; Dentibus minutis, .conicis, non serratis; cæt. ut in Carch. Spec. Gunneri; Peregrinus ; Shavianus ; Ho- mianus ? (15) La division de la sous-classe des P. Gnathodontes est établie sur un caractère tout-à-fait extérieur, et par conséquent ‘fort bon; mais il faut convenir que la peau de tous les Crus- todermes, quoïque anomale, n’est pas toujours absolument croû- teuse, et que les écailles dans la seconde tribu sont quelquefois très-pelites: (16) La subdivision que Jj'établis ici d’après l'existence et le nombre des membres, nouvelle jusqu'à un certain point, est facile et importante pour la valeur des termes. Je dois cependant avertir qu'il y.a des, poissons qui sont.apodes ou dipodes par une espèce d’avortement , et que ce-n'est pas d'eux qu'il est question .1c1. , (17) J'ai cru devoir commenter l’ordre des tétrapodes par ceux qui sont abdominaux, c'est-à-dire qui ont les nageoires pelviennes sous le ventre et suspendues dans les chairs, parce qu’il est évident que ce sont ceux qui sont les plus normaux. (18) Ge sous-ordre ; fort peu nombreux, contient des espèces ze RSR ET BEST RE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 265 de poissons qui semblent abdominaux dans la rigueur du terme, ou dans la définition de Linné ; mais qui nele sont réellement pas anatomiquement. (19) Guidé par l'opinion reçue, j'avois admiscomme certain dans mon Mémoire sur cet ordre (Bulletin des Sciences, mois de février 1816), que les organes de la respiration sont placés sur les nageoires de ces animaux, et j'en avois tiré la dénomi- nation qui les distingue. Depuis je me suis assuré, par l’ana- tomie détaillée du Clio et de l'Hyale, qu’il n’en est pas ainsi, et que ces nageoires ne sont pas des organes de respiration; ensorte qu'il faudra changer ce nom , et probablement la place que Jj'assigne ici à cet ordre. (20) Voyez, pour les animaux que je range dans cet ordre et le suivant, l'extrait de deux Mémoires inséré dans les Nos de mars , avril, Juin, juillet 1816, du Bulletin. (21) Cet ordre, établi sur la structure et l'usage de l'organe de la respiration, pourroit bien ne pas être naturel. (22) L'établissement de cet ordre, la séparation des familles et des genres qui le composent, ont été le sujet d’une Lecon spéciale à la Faculté des Sciences, en 1815, immédiatement après le Mémoire de MM. Lesueur et Desmarest sur l’organi- sation des Pyrosomes et des Botrylles, et par conséquent après leur découverte des Mollusques agrégés. (23) Dès l'année 1814, dans mon Cours à la Faculté des Sciences, j’ai annoncé comme résultat de recherches commen- cées, que dans cette classe, la bouche étoit réellement formée des mêmes parties, mais dans des degrés de développement dif- férens , suivant l’usage qu’elles devoient avoir. (24) Sous ce nom j'ai cru devoir placer ici le Crabe des Mol- lusques, que je regarde comme intermédiaire aux Décapodes et aux Octopodes. (25) Cette classe est sans doute mauvaise, puisqu'elle n’a pu être caractérisée d'une manière neite; aussi ne la regardé-je que comme provisoire : peut-être devra-t-elle contenir une partie des animaux que Muller a nommés £ntomostracés ; je crois déjà que l’'Apus doit être placé près des Branchiopodes, (26) Cette sous-classe, dont j'ai fait le sujet d’un travail par- ticulier, contiendra, outre les Lernées et plusieurs genresnouveaux que le docteur Leach et moi avons cru devoir établir , les Calyges, 266 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Cyame, Chevrolle, etc., de manière à passer insensiblement aux Tétracères. (27) Dans cette dernière classe, quoique le corps offre encore une disposition paire et articulée dans les pores latéraux symé- triques qu’on trouve dans la Sangsue et dans plusieurs Vers in- testinaux, il faut cependant convenir que l'absence de toute es- pèce d’appendice et la disposition des organes de la bouche, indiquent une sorte de passage vers les Actinomorphes : aussi forment-ils un type intermédiaire. (28) Sous le nom d’Entozoaires, qui est évidemment mauvais, puisqu'il est tiré d’une circonstance non inhérente à l'objet, et qu’en outre on doit y placer des espèces externes, on confond trèsprobablement des animaux dont la structure est fort diflé- rente : comparez en eflet un Ascaride lombricoïde avec une Ligule. (29) L'organisation de cette subdivision du règne animal ne m'est pas encore suffisamment connue pour que je puisse donner rien de bien certain sur les bases de leur classification ; je pense cependant que les Actinomorphes vrais pourront êlre assez bien conservés comme M. Lamark les a établis, en faisant deux classes distinctes des Méduses et des Polypes que je nomme composés. (30) On voit reparoître ici les deux classes des Sangsues et des Entozoaires, parce que je les regarde comme formant le passage des Entomozoaires, dont ils sont cependant plus rap- prochés, aux Æctinomorphes, dont les Ænnelidaires sont au con- traire plus voisins. Sous cette dernière dénomination je comprends les Sipunculus et genres voisins. (31) Par animaux composés, j'entends des animaux particu- liers vivant sur une partie commune également vivante, avec laquelle chacun est en communication organique. (32) J’ai cru devoir établir ce dernier sousrègne pour des corps organisés évidemment animaux, mais qui n'ont point d'estomac proprement dit. J’y place les Spongiaires, parce que je suis bien persuadé que ces corps organisés n’ont aucun rapport avec les Æ/cyons, et que les ouvertures dont ils sont percés peuvent être considérées comme des espèces d'estomac commençant, etc. Il se pourroit que les animaux qui forment certaines espèces de Madrépores, comme le M. Lactuca, elc., ET D'HISTOIRE NATURELLE. 267 appartinssent à ce groupe; en effet ils ne semblent pas devoir être rayonnés. (33) Sous le nom d’Infusoires, il est indubitable que Muller a confondu des animaux de différens degrés d’organisation; aussi nous ne comprenons ici que ceux qui n'ayant pas une forme paire ou radiaire , ne jouissent d’autres fonctions que de l’ab- sorption et de l’exhalation extérieures. (34) J'ai placé les Corallines pour ainsi dire hors de rang, parce que quelque soin que j'aie mis à les observer vivantes , Je n'ai pu y découvrir aucun signe d’animalité. Il paroît en eflet que M. Brown les réclame pour le règne des corps organisés végétaux. l 208: JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE MÉMOIRE Sur la possibilité de faire vivre des Mollusques fluviatiles dans les Eaux salées, et des Mollusques marins dans les Eaux douces, considérée sous le rapport de la Géologie; Par F.S, BEUDANT. Lu à l’Académie des Sciences, le 13 mai 1816. LORSQU'EN 1808 je trouvai dans les grès de Beauchamps, près de Pierrelaie ( Seine-et-Oise) , la réunion remarquable dans la même couche de coquilles marines et de coquilles fluviatiles, je pensai qu’il 'étoit pas imrpossible-d’imaginer que ces deux sortes de mollusques eussent vécu ensemble dans le même liquide, soit dans l’eau douce, soit dans l’eau salée; mais comme cette sapposition étoit entièrement hypothétique et ne pouvoit être appuyée sur aucune observation, je formai le projet d’une suite d'expériences propres à la vérifier. Mes premiers essais m'ont bientôt suggéré l'idée d’en faire d'un autre genre, dans la vue d'expliquer quelques circons- tances particulières que présentent différentes formations mi- nérales. Ces diverses expériences m'ont occupé pendant plusieurs années, d’abord à Paris, où je n’avois que des mollusques flu- viatiles, puis à Marseille, où j'avois à-la-fois des mollusques flu- viatiles et des mollusques marins. Ce sont les résultats principaux de mes recherches que j'ai l'honneur de soumettre à l'Académie. PREMIÈRE PARTIE. Expériences pour tenter le passage subit des Mollusques d’Eau douce dans des Eaux de nature différente. Vers la fin du mois d'août 1808, je rassemblai chez moi beaucoup de mollusques uviatilesdes environs de Paris, afin de PR AT ne 7 ET D'HISTOIRE NATURELLE. 263 de les avoir à ma disposition pour les différentes expériences que je projetois de faire; je les ai conservés dans des vases où je renouvelois l’eau tous. les jours. J’employois pour les nourri des sucs de plantes -et d'animaux (1). J'ai été conduit à celte pratique, qui peut-être n’est pas la meilleure, par la . remarque que j'avois faite précédemment, que les mollusques aquatiques n’attaquoient pas les plantes avec lesquelles ils se trouvoient; d’où 1l résultoit qu’ils devoient se nourrir des par- ticules animales ou végétales suspendues dans l’eau. J'ai employé le même moyen dans tout le cours des expériences, tant pour les mollusques d’eau douce que pour les mollusques marins. Première Expérience. Ayant placé plusieurs individus des diverses espèces dans un vase particulier, avecune quantité connue d’eau de Seine, je les y laissai pendant quelques instans pour qu’ils pussent se développer à leur gré; puis je versai doucement dans le vase une quantité d’eau égale à celle qui y étoit, tenant en dissolution 8 centièmes de muriate de soude. Le liquide ren- fermoit donc, après le mélange, 4 centièmes de son poids de sel et se troavoit à peu près au degré de salure le plus élevé des eaux marines, si ce n’est que la proportion de sel consistoit presqu’entièrement en muriate de soude (2). Les mollusques soumis à cette expérience se contractèrent subitement dans leurs coquilles, y rentrèrent en peu d'instans autant qu’il fut possible, et n’en sortirent plus. Plusieurs épreuves semblables m'ont toujours présenté le même résultat ; quelquefois cependant, mais rarement , j'ai vu des /ymnées qui, après s'être d’abord contractées, se développoient un peu et cherchoïent à gagner da surface du liquide ; mais elles étoient tellement af- fectées, qu’elles retomboient bientôt et se contractoient de nouveau. Deuxième Expérience. Après avoir laissé ces animaux pendant quelques heures dans l’eau salée, je les ai replongés dans leau douce; mais tous ceux des genres planorbe, lymnée, physe, ancyle (patella lacustris) étoient morts. Les seuls qui résis- EEE EEE (1) Après avoir pilé les plantes et les animaux, j'en exprimois le suc à travers une toile serrée, (2) J'employois le sel gris qu’on vend à Paris; on sait qu’il n’est pas pur et -qu'il renferme toujours une petite quantité des autres sels qui se trouvent dans nos mers. Tome LXXXIII. OCTOBRE an 1816. Mm 270 : JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE térent furent ceux à qui la nature a donné les moyens de fermer leurs coquilles, et qui avoient pu se soustraire ainsi, au moins en grande partie, à l’action du liquide; c’est-à-dire, les mollusques à coquilles operculées et ceux à coquilles bivalves. Cependant en les laissant plusieurs jours de suite dans l’eau salée, ils mou- rurent également. , Troisième Expérience. Dans les deux premières épreuves je navois en vue que de chercher à expliquer la réunion des co- quilles marines et des coquilles fluviatiles dans la même roche. Mais ici je me proposois une recherche d’un autre genre, dans la vue d'expliquer cette absence presque absolue des. coquilles fossiles dans les couches de gypse ; on sait même que les trois ou quatre coquilles trouvées à Montmartre, paroissent plutôt y avoir élé transportées par des eaux affluentes, qu’avoir vécu dans le liquide même sous lequel se déposoit le gypse. J’essayai donc l’action que l’eau chargée autant que possible de sulfate de chaux pouvoit avoir sur les mollusques (1). Je n'avois alors que des /ymnées ; je les retirai doucement de l’eau douce où elles étoient, et je les plongeai subitement dans l’eau séléniteuse. Elles n’en parurent pas d’abord trèsaflectées; elles se promenoient sur les parois du vase et venoient nager, suivant leur Lbabitude, à la surface de l’eau; mais dans l’espace de huit Jours, elles moururent toutes successivement ; j'en trouvois tous les jours quelques-unes au fond du vase, le corps en grande partie sorti de la coquille et très-gonflé. Quatrième Expérience. Dans celle-ci, je me: proposois encore un autre but, On sait que dans les terrains de transition, ik existe des couches de ssl saccaroïde renfermant des pétri- fications. La chaux carbonatée étant dans ces roches à l’état cristallin, on peut présumer que ce dépôt chimique n’a eu lieu que par l’intermède d’un liquide, dont la faculté dissolvante étoit due à un excès d’acide carbonique. On sait aussi qu'il y a beaucoup de calcaires secondaires, compactes et coquilliers, auxquels il est difficile de ne pas assigner une origine chimique, dans laquelle on pourroit encore conjecturer que l'acide car- ———————p—Z—Z—E QG) On sait que l’eau dissout à peu près la 460° partie de son poids de sulfate de chaux. Pour saturer celle que j'employois, je la faisois filtrer à plusieurs REpseE > àlatempérature de 60 à 80°, àtravers de la poussière très-fine de pierre # plâtre. / ET D'HISTOIRE NATURELLE. 271 bonique en excès a eu quelqu’influence. Or on ne sait pas encore positivement si les coquilles renfermées dans ces couches ont vécu dans le liquide même où se formoit le précipité, ou si elles y ont été transportées accidentellement. Je desirai donc connoître l’action que les eaux chargées d’acide carbonique pouvoient produire sur les mollusques. J’ai employé à cet eflet l'eau de salzt qui, comme on sait, renferme beaucoup d'acide carbonique, avec une petite quantité de diflérens car- bonates (des carbonates de chaux, de magnésie, de soude) et de muriate de soude. Les animaux que jy ai plongés en ont été vivement affectés; ils ont été comme suffoqués subitement, et en peu d’instans ils étoient morts. J’ai désiré connoître aussi l'action des eaux mélées d’autres acides minéraux en très-pelite quantité ; les animaux que j'ai soumis à cette épreuve ont eu à peu près le même sort que les précédens; en outre, comme il étoit facile de le prévoir, leurs coquilles furent attaquées et ils se trouvèrent à nu en quelques points. Si Cinquième Expérience. Sans avoir de but aussi direct que dans les expériences que je viens de rapporter, j'ai voulu con- noître aussi l’action de l’eau chargée de sulfate de fer : je fis dissoudre à cet effet 0,02 de ce sel dans l’eau de Seine, et Je la versai sur quelques individus des espèces de mollusques que j'avois récoltés : ils se contractèrent encore dans leurs coquilles et furent fortement affectés, même plus que par l’eau chargée de muriate de soude; tous, sans exception, les bivalves, les univalves operculés comme ceux qui ne létoient pas, moururent en peu d'heures. Sixième Expérience. J'ai aussi employé l’eau saturée d’hy- drogène sulfuré et étendue ensuite de son poids d’eau de Seine. J’ai remarqué que les mollusques y restoient seulement immo- biles, sans se contracter très-fortement dans leurs coquilles, comme cela avoit eu lieu par action des acides et des sels : plusieurs même firent bientôt divers mouvemens. Cependant je n'ai pu en conserver un seul dans cette eau, et ils périrent tous en peu de jours. Ces expériences ne peuvent être considérées que comme des essais préliminaires, dont on pouvoit en partie prévoir les ré- sultats. Je concevois que si des mollusques d’eau douce pouvoient s’habituer à vivre dans des eaux de nature diflérente, ce ne Mm 2 272 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE devoit être que par une transition lente et bien ménagée. D’après cela il falloit reprendre les expériences, et conduire chacune d’elles assez lentement pour pouvoir introduire successivement, et par très-pelites parties, la proportion de sel qu’il étoit né- cessaire d’alteindre. Chaque expériexe demandoit alors plusieurs mois et exigeoit chaque Jour plusieurs heures, soit pour changer les-eaux , soil pour recueillir les observations qui se présenloient. II falloit en outre commencer sur un grand nombre d'individus, pour qu’il en pût survivre quekjues-uns aux accidens de toute espèce que ces épreuves et une multitude de causes indépene dantes pouvoient occasionner. La'saison élant très-avancée, je fus obligé d'attendre au printemps suivant. Le temps m'a manqué pour faire ce que j'aurois desiré; mais j'ai commencé par les expériences qui me paroissoient les plus importantes. DEUXIÈME PARTIE. Expériences pour tenter le passage graduel des Mollusques d’eau douce dans des eaux de nature différente. Au printemps 1809, j’ai commencé, dès le mois d'avril, à ré- colter des mollusques fluviatiles aux environs de Paris; je les conservai provisoirement dans quelques vases avec de l’eau de ‘Seine. Lorsque j’en eus rassemblé un nombre suffisant, je séparai les espèces et je partageai le nombre d'individus de chacune d’elles en deux portions égales, que je mis, chacune, dans un vase particulier. Ayant ainsi deux séries des mêmes espèces, j'en con- servai une comme point de comparaison, dans l’eau de Seine, et je destinai l'autre aux expériences que je me proposois de faire. : Septième Expérience. J'ai d'abord rempli les vases de cette seconde série, d’eau dans laquelle j’avois fait dissoudre un grain de sel par livre, c’est-à-dire environ o,00o1r (ce qui n’étoit pas sensible au nitrate d'argent). J'ai employé de cette eau pendant plusieurs jours, en la renouvelant souvent; j'ai ensuile aug- menté la quantité de sel, d’abord d’un grain tous les deux jours, puis d’un grain tous les jours, et enfin de trois grains par jour. Par toutes ces additions successives, le liquide s’est trouvé, à la fin de septembre, renfermer 0,04 de son poids de sel, com- prenant environ 0,00 de muriate de chaux ,-que j'avois fini par y ajouter peu à peu pour le rapprocher encore plus des eaux marines. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 273 En procédant de cette manière, j'ai complètement habitué la plupart des mollusques de nos eaux douces à vivre dans l'eau salée, où ils ne présentoient plus aucune apparence de malaise ; plusieurs même s’y sont accouplés, mais, à la vérité, dans un temps où le liquide renfermoit beaucoup moins de sel qu'au mois de septembre, É Pour mettre une certaine exactitude dans l'expérience, j'ai noté soigneusement la quantité d’invidus de chaque espèce qui sont morts, d’une part dans l’eau douce, de l’autre, dans l’eau salée; c’est d’après la comparaison des résultats, que j’ai pu juger les diflérences que je vais rapporter. Parmi les mollusques à coquilles univalves, toutes les espèces de l/ymnée et de planorbe, la physe des fontaines, l’ancyle fluviatile , la palüdine porte-plumet, ont vécu parfaitement dans l’eau salée, et il n’en est pas mort sensiblement plus que dans lFeau douce. Sur 400 individus de ces diverses espèces placés dans l’eau douce au 1° mai, il en restoit 184 au 15 octobre, et sur le même nombre de 400 individus placés dans l'eau rendue de plus en plus salée, il en restoit 170 au 15 octobre. Ainsi dans l’eau douce j'ai perdu, dans l’espace de 5 mois el Z, 54 pour 100 des mollusques que j'y conservois, et dans l’eau salée à 0,04, j'ai perdu 57,5 pour 100; la différence ne sauroit être prise en considération. Au contraire, les autres espèces de paludine (helix vivipara, helix tentaculata, Linné), les nérites de la Seine, qui, dans les essais préliminaires dont j’ai rapporté les résultats, avoient le mieux résisté à l'épreuve, ont paru souffrir par le long séjour dans l'eau salée; il en est mort plus que dans l’eau douce; sur 130 individus conservés dans l’eau douce, il en restoit 78 au 15 octobre, et sur le même nombre soumis à l'épreuve de l'eau salée , il en restoit seulement 37; c’est-à-dire, que dans l'eau douce je mai perdu que 40 pour 100, et que dans l’eau salée j'ai perdu 71,54. 7 Les mollusques à coquilles bivalves, les anodontes , les Le lettes et les cyclades, qui avoient résisté aussi aux premuéres épreuves, ont paru souffrir beaucoup dans le éours des expé- riences ; ils étoient bien mointactifs, soit pour ouvrir leurs valves, soit pour se traîner au fond du vase, que dans l’eau douce (x). G) Les vases qui renfermoient les coquilles bivalves étoient très-larges, 274 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Tous les individus que j’avois rassemblés dans l’eau salée sont morts avant que le liquide fût parvenu au degré de salure que Je désirois atteindre. Au contraire, j'en ai conservés tout l'été dans l’eau douce, et j’en avois encore à la fin de l'automne. Il est cependant important de remarquer que ces mêmes es- pèces ont bien vécu dans l’eau chargée de 0,02 de sel. Les Ta- bleaux que j'ai dressés font voir qu'à ce moment il n’en étoit pas mort sensiblement plus que dans l’eau douce. Huitième Expérience. J'ai reporté ensuite dans l’eau douce, subitement et sans aucune transition, une partie des mollusques que j'avois habitués à l’eau salée; ils parurent d’abord y souffrir et se contractèrent en partie dans leurs coquilles ; mais ils s’y habituèrent bientôt, et j'en perdis très-peu. Je les reportai un mois après dans l’eau salée au degré ci-dessus; ils parurent de nouveau souffrir, mais ils s’y habituèrent trèspromptement. Neuvième Expérience. D'après les considérations que j'ai ex- posées dans la troisième expérience sur l'absence presqu’absolue des coquilles fossiles dans les couches de gypse, et d’après le peu d'éclaircissemens que présentoient les résultats que j'avois alors obtenus, j'étois extrêmement curieux de savoir si je pourrois habituer petit à petit les mollusques d'eau douce à vivre dans les eaux chargées de sulfate de chaux, J’ai donc repris l’expé- rience avec toutes les précautions possibles, en étendant d’abord l’eau séléniteuse d’une très-grande quantité d'eau de Seine, puis l’étendant un peu moins, et enfin, après quelque temps, en l’em- ployant aussi saturée que possible. Les animaux ont assez bien vécu dans le commencement de l’expérience, puis il en est mort beaucoup à mesure que l’eau devenoit plus chargée de cette espèce de sel; et enfin le peu qui avoient résisté sont morts lorsque l’eau fut entièrement saturée. J’ai répété cette expérience à trois époques diflérentes, et J'ai obtenu constamment le même résultat. Il paroîtroit aussi assez important de savoir si les mollusques peuvent ou non s’habituer à vivre petit à petit dans l’eau chargée d'acide carbonique et de carbonate de chaux, comme j'avois essayé de le faire subitement dans la quatrième expérience ; mais je n'ai pu encore faire convenablément l’expérience, je me pro- 2. fond étoit couvert de 3 à 4 pouces de sable fin, que jai renouvelé plusieurs ÆQ1S. \ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 275 pose de la suivre aussitôt que je le pourrai, sur les mollusques que je me procurerai aux environs de Paris. Telles sont les expériences que j'ai faites sur les mollusques fluviatiles; je désirois beaucoup en faire d’analogues sur les mol- lusques marins; mais ce ne fut qu’en 1812, époque à laquelle je fus appelé aux fonctions de Professeur de Physique à Mar- seille, que j'ai pu m'occuper de ce nouveau genre de recherches : dès mon arrivée j'ai fait quelques essais; mais la saison étoit trop avancée. TROISIÈME PARTIE. Expériences pour tenter d'habituer les Mollusques marins à vivre dans les eaux douces. Dès le mois de mars 1813, j'ai commencé à rassembler beau- coup d'individus de divers genres de mollusques marins, comme des patelles, des fissurelles, des crépidoles, des galiotides, des sabots, des cerites, des buccins, des rochers, des tellines, des vénus, des huïtres, des peignes, des moules, elc., etc.; je me suis aussi procuré plusieurs espèces de balanes. Je les ai d’abord conservés tous ensemble dans des baquets remplis d’eau de mer (1) avec des plantes marines; j’y mélois également des sucs de plantes et d'animaux. Je me suis ainsi préparé à faire sur les mollusques marins quelques expériences que je vais rapporter. Première Expérience. J'ai d'abord plongé subitement quelques individus de ces divers genres dans l’eau douce; ils se sont con- tractés dans leurs coquilles, et la plupart sont morts en cet état, comme il étoit arrivé aux mollusques fluviatiles plongés dans ns (1) L’eau de mer que j'employois étoit prise en mer par un pêcheur qui me l’apportoit tous les jours en rentrant au port; je la préférois parce qu’elle étoit moins sujette à se corrompre, et qu’en outre elle n’éloit point nfélée d’eau douce. ne On sait combien il est difficile de conserver des animaux marins dans l’eau de mer, parce qu’elle se corrompt tres-facilement : aussi avois-je soin de la renouveler deux fois par jour dans les chaleurs ; je me suis aussi tres-bien trouvé d'employer l’eau de mer filtrée à travers une étamine serrée. [/eau même qui commençoit à se corrompre, pouvoit servir après avoir été dé- barrassée , par ce moyen, des particules animales putréfiées. J’ai employé quelquefois aussi l’eau salée artificiellement, Toutes ces petites précautions nécessaires m'ont pris beaucoup de temps. 276 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Peau salée. Quelques-uns seulement , et plus particulièrement les espèces qui vivent sur les rochers placés hors de l’eau , ont fini par se développer un peu et faire quelques mouvemens; tels sont la pourpre teinturière, quelques sabots, les moules com- munes; mais ils sont morts bientôt après, et leur corps étoit très-gonflé. Deuxième Expérience. Après ce premier essai, j'ai séparé les espèces. J’en possédois 38 qui comprenoient un très-grand nombre d'individus. Je fis deux parts dans chacune de ces es- pèces, et je formai deux séries comme dans l'expérience sur les mollusques d’eau douce. L'une fut conservée constamment dans l'eau de mer; quant à l’autre, j'ai d'abord rempli les vases d’eau de mer très-peu étendue d’eau douce, dont j'ai augmenté la proportion peu à peu; cinq mois après je n'employois plus que de l’eau douce. Au moyen de cette précaution, j'ai eu la satisfaction de voir beaucoup de mollusques qui vivent ordinairement dans nos mers, habiter dans l’eau douce avec des l/ymnées et des planorbes; je les ai tous transportés ensuite dans un bassin du jardin de la maison que j'habitois, et beaucoup y vivoient encore cinq mois après (en avril 1814), à l’instant où J'ai quitté Marseille. Sur les 38 espèces que j'ai soumises à cette expérience, 20 Y ont parfaitement résisté : ce sont les patelles de l'espèce vul- gaire , les sabots, qui tous étoient d’espèces littorales, la pourpre teënturière, les cérites , les colombelles , les arches, les vénus, les bucardes-sourdon, les huftres, les moules et les balanes. Je n'ai pas même perdu une seule roule commune, ni dans l’eau de mer, ni dans l’eau douce. Sur 610 individus de ces 20 espèces que J'avois placés au mois d’avril dans l’eau de mer, il en restoit 4o1 au 15 septembre; et sur le même nombre de 610 individus placés depuis le même temps’ dans l’eau rendue de plus en plus douce, il y en avoit, au 15 septembre, 375 qui vi- voient dans l’eau entièrement douce. Ainsi dans l’eau de mer j'ai perdu 34,26 pour 100 des animaux que j'y conservois , et dans l'eau douce j'ai perdu 36,88. Les 18 autres espèces, qui comprenoient les patelles bonnet de dragon, les fissurelles, les crépidules , les haliotides , les rochers, le buccin ondé, lès cames, les peignes, les limes, les tellines,les donaces, sont toutes mortes pendant l'expérience; il n’y avoit plus que quelques patelles bonnet de dragon et quelques in mn "$t ET D'HISTOIRE NATURELLE. 277 quelques te/lines au moment où j'ai employé l’eau entièrement douce , et elles sont mortes quelques jours après. ; que Je ferai remarquer qu’au rex juin il n’étoit pas mort, dans , , . l’eau de mer étendue de son poids d’eau douce, un nombre Ë sensiblement plus grand des 18 espèces que je viens de citer, que dans l’eau de mer pure. Troisième Expérience. Ayant appris, par l'analyse de Lavoisier, que les eaux du lac Asphaltique contenoient jusqu’à 0,40 de matières salines (1), et ce lac, d’après les voyageurs, ne ren- fermantaucun corps organisé vivant, j'ai voulu savoir jusqu’à quel degré de salure les animaux marins pourroient vivre. En consé- quence j’ai ajouté du muriate de soude très-impur à l’eau de mer ordinaire, et je me suis convaincu que tous les mollusques marins que J'avois à ma disposition, vivoient, sans paroître nullement incommodés, dans des eaux chargées de 0,31 de matières salines, consistant en muriate de soude avec quelques centièmes de mu- riate de chaux et de muriate de magnésie (2). Mais toutes les fois que j'ai augmenté la proportion de sel, de telle manière que par une légère évaporation à l'air libre il se formoit de petits cristaux à la surface du liquide, les animaux se sont contractés dans leurs coquilles et sont morts. Résumé et Conclusions. Les résultats que j’ai obtenus dans les expériences précédentes se réduisent à six principaux, savoir : 1°. Les mollusques fluviatiles périssent très-promptement lors- qu’on les plonge subitement de l’eau douce dans l’eau salée au degré de nos mers, ou dans des eaux chargées de gaz acide (1) L'analyse de Lavoisier porte : Hause.s te Lab ouo test 55,60 Muriate de chaux et magnésie.............. 38,15 Muriate de soude... CHosentbo 000 capte 6,25 100,00 (2) Le sel que j'employois étoit tres-amer; sa dissolution précipitoit for- tement par l’oxalate de potasse ; mais je ne sais pas précisément la quantité de matieres étrangeres qu’il renfermoit. J’ai ajouté 6 onces 5 gros 30 grains de ce sel par livre d’eau de mer, ce qui , avec la quantité de 5 gros environ que cette eau renferme , porte la proportion totale de sel à 0,31. Tome LXX XIII. OCTOBRE an 1816. Nn 278 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE carbonique, d’acides minéraux en très-petite quantité, ou enfi dans des eaux chargées de 0,02 de sulfate de fer. Les mollusques marins périssent également lorsqu'on les plonge subitement dans J'eau douce. 29. Dans l’espace de très-peu de temps, beaucoup de mol- lusques fluviatiles peuvent être habitués petit à petit à vivre dans Jeau portée au degré de salure ordinaire des mers, et beaucoup de mollusques marins peuvent êlre de même habitués à vivre dans l’eau douce. 30. Certaines espèces de mollusques ne peuvent s’habituer, au moins aussi promptement, à vivre dans des eaux très-diflérentes de celles où elles se trouvent ordinairement. Ainsi les arodontes, les mnollettes et les cyclades n’ont pu vivre dans des eaux qui renferment, comme celles de nos mers, 0,04 de matières sa- lines ; les patelles bonnet de dragon, les fissurelles, les cré- pidulles , les peignes, les limes, etc., n’ont pu vivre dans l’eau douce. 4°. Il existe un degré intermédiaire de salure où tous les mollusques aquatiques, soit marins, soit fluviatiles, peuvent vivre facilement. En eflet toutes les espèces fluviatiles que j'ai sou- mises à l’expérience ont vécu dans l’eau chargée de 0,02 de muriate de soude ; et toutes les espèces marines ont vécu dans l’eau de mer étendue de son poids d’eau douce. bo. Les mollusques fluviatiles, qui d’abord ne paroïissent pas souffrir dans l’eau chargée de sulfate de chaux, ne peuvent-en aucune manière s’habituer à y vivre. Il est assez probable que la même chose a lieu à l’égard des mollusques marins; mais jusqu'ici je n’ai point fait sur eux cette expérience. 6°. Enfin les mollusques marins peuvent vivre dans des eaux beaucoup plus chargées de sel que ne le sont ordinairementles eaux marines; mais ils périssent lorsque le liquide devient sursaturé. Sans doute on pourroit désirer que ces expériences fussent ré- étées et exécutées plus en grand. Cependant il me semble que jy ai soumis un assez grand nombre d’espèces et une quantité assez notable d’individus de chacune d’elles, pour pouvoir pré- senter mes résultats comme ayant déjà un assez grand degré de probabilité. Je dirai plus, c’est qeya opéré avec des vases d’une mé- diocre capacité et en général dans des circonstances qu’on pouvoit juger peu favorables au changement de milieu auquel j'ai réussi ET D'HISTOIRE NATURELLE. 279 à habituer les mollusques marins et fluviatiles, il est infiniment probable quele succès seroit bien plus complet en opérant en grand. Par conséquent dans les transitions de ce genre qu’on peut sup- poser avoir eu lieu dans la nature, les mollusques doivent y avoir beaucoup mieux résisté, trouvant toujours la nourriture qu leur convenoit, et n'éprouvant pas les gènes de toutes es- pèces qui contribuent à les affecter dans nos petits appareils. . Je pourrois ajouter aussi, que quelques-uns des résultats que J'ai obtenus sont avoués par la nature. On sait que plusieurs espèces de cérites et d’huitres (cerithium atrum, cerit. palustre, cerit.muricatum , etc., osér@a parasitica, ostræa plicata ? etc.) vivent à l'embouchure des fleuves , où elles doivent être exposées tantôt à l’eau douce, tantôt à l’eau salée. Les z1oules communes sont aussi dans lemême cas; on en trouve souventengrande quantité à l'embouchure des ruisseaux dans les mers; j'en ai vu sur les côtes de la Méditerranée qui se trouvoient dans l’eau douce assez loin des bords de la mer, et qui ne pouvoient recevoir les eaux éalées que dans les gros temps. J’ai rencontré quelquefois , tant sur les côtes de l'Océan que sur celles de la Méditerranée , des excavalions de rochers remplies d’eau saumâtre, et même d’eau entièrement douce, où vivoient des coquilles littorales, qui sans doute y avoient été transportées dans les hautes marées ou dans les coups de vent. D’après les expériences de Wilke, les eaux de la mer Baltique renferment beaucoup moins de matières salines que celles de l’Océan et de la Méditerranée. La plus grande proportion de sel seroit, suivant cet auteur, de 0,02, et même en certain temps (par le vent d’est) elle ne seroit que de 0,009. Or on sait que la Baltique nourrit à peu près les mêmes espèces d’ani- maux que l'Océan (1); donc si les expériences de Wiilke sont exactes, la nature nous présenteroïit aussi des animaux marins vivant dans des eaux qui renferment ordinairement moitié moins de matières salines que les eaux de l'Océan, et qui quelquefois sont presque douces. Il seroit important de pouvoir citer aussi des coquilles fluvia- (G) On y trouve aussi , dit-on, des poissons d’eau douce , comme des bro- chets. Il seroit bien intéressant de savoir s’il y a des mollusques d’eau douce : on y trouveroit probablement au moins toutes les espèces qui habitent l’embou- chure des fleuves. Nan 2 280 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE tiles vivantes dans les eaux salées; mais malgré les recherches que j'ai faites à cet égard, je n'ai pu m'assurer qu’il en existât réellement; j'ai seulement remarqué quelquefois beaucoup de coquilles vides de ces genres au fond des amas d’eau saumâtre qui se trouvent sur quelques points des côtes basses. Jai vu auprès des salins des Martigues un fossé nouvellement écuré dont le limon renfermoit beaucoup de coquilles des genres lymnées et planorbes (1) ; Veau dont il étoit rempli au moment où Je l'ai vu étoit sensiblement salée; mais il n’y avoit aucune espèce de mollusques vivans. Les observations que je viens de rapporter sur la présence des mollusques marins dans les eaux douces, et sur l’absence des coquilles fluviatiles dans les eaux salées, n’ont rien de plus surprenant que ce qui a lieu à l'égard des poissons. On sait que plusieurs espèces de poissons marins remontent dans les rivières, souvent même assez haut; mais je ne crois pas qu'on ait ob- servé que des espèces d’eau douce se portassent jusque dans les mers, si ce n’est peut-être dans la Baltique, comme on me Pa assuré. J’ai cru remarquer aussi dans le cours des expériences, que les mollusques marins souffroient beaucoup moins dans les eaux douces, que les mollusques fluviatiles dans les eaux char- gées de sel. Il me semble résulter des faits que j'ai rapportés, diverses conséquences d’un autre genre, qui m'ont paru mériter quelque attention. 1°. Puisqu’on a tout lieu de conclure que la même eau, soit douce, soit salée au degré des mers, soit mieux encore, sau- mâtre, peut nourrir à-la-fois des animaux qui vivent habituelle- ment dans nos marais, nos rivières et d’autres qui se trouvent ordinairement dans nos mers, on pourroit présumer qu’il a existé des circonstances semblables dans la nature, et que c’est à elle que nous devons de rencontrer dans une même couche terrestre ES (1) Ilexistoit autrefois entre Bédarides et Courtheson, sur la route d'Orange à Avignon (Vaucluse), un petit lac qui est indiqué sur quelques cartes sous le nom de lac salé, et connu aussi sous ce nom dans le pays. Il étoit des- séché et en partie cultivé lorsque je l’ai visité; la terre noirâtre déposée sur son fond paroît assez peu fertile; elle renferme beaucoup de lymnées et de planorbes; je n’y ai point vu de coquilles bivalves ni de coquilles marines. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 267 des coquilles fluviatiles et des coquilles marines, en admettant, comme tout semble le prouver, que ces coquilles se trouvent au lieu même où elles ont vécu, Il seroit peut être même assez naturel de penser qu'entre un terrain marin et un terrain fluviatile, il existé quelques couches qui forment le passage de l’une à l'autre, et qui ont élé pro- duites par des eaux saumätres où vivoient ensemble des mol- lusques que nous trouvons aujourd’hui, les uns dans nos marais, les autres dans nos mers. Une telle circonstance pourroit avoir eu lieu , par exemple, dans la formation des grès de Beauchamps, qui m'ont conduit aux diverses expériences que J'ai faites. Peut- êire seroit-ce aussi le cas des couches câlcaires et marneuses fétides de Vaucluse, qui renferment des coquilles ressemblantes à des cériles , avec des /ymnées, des planorbes et une espèce de paludine ressemblante à la paludine momie (cyclostoma mumia, Lamark), mais qui en diffère surtout par des stries transversales analogues à celles du cyclostome élégant. Je croirois que ces couches recouvroient immédiatement le calcaire com- pacte du Jura qui, comme on sait, ne renferme pas de cérites, et qu’elles servent de bases à une formation gypseuse semblable à celle de Paris (x). 2°. Si on pouvoit supposer, avec quelques naturalistes, contre toute apparence, que les terrains nommés Zerrains d’eau douce (1) La partie la plus inférieure, celle qui repose immédiatement sur le calcaire compacte , est une couche de calcaire marneux qui semble au premier abord renfermer des Stalactites de couleur brune; mais en examinant de plus près, on remarque que ce sont des coquilles enveloppées de couches con- centriques un peu bitumineuses , et qui semblent occasionnées par la décom- position de la matiere animale. $ On trouve dans cette couche des coquilles univalves souvent très-grosses qui ressemblent à des cérites; d’autres coquilles plus petites qui ressemblent par leur aspect général à une espèce d’auricule que jai vue chez M. Brongniard, et que je soupçonne des canaux d'Egypte. On y trouve aussi des coquilles qui paroissent terrestres et appartenir au genre hélice; elles ont même quelque analogie avec l’hélice des pierres. La couche suivante renferme des lymnées, des planorbes, l’espèce de pa- ludine dont nous ayons parlé, des hélices (elles y sont rares), et des coquilles terriculées moins grosses que celles de la couche inférieure , mais qui, comme elles, ressemblent à des cérites. Une troisième couche renferme moins de cérites , mais beaucoup de petites coquilles du genre lymnée, et peut-être aussi du genre physe, car j’en at vu de tournées à gauche, 282 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ont tous été formés sous les eaux marines, les résultats de nos expériences pourroient expliquer l'absence, d’ailleurs assez sin- gulière, des coquilles bivalves fluviatiles des genres arodonte, mulette et cyclade. En effet nous avons vu que les mollusques qui habitent ces coquilles n’ont pu s'habituer à vivre dans les eaux chargées, comme celles de nos mers, de 0,04 de matières salines. 30. Puisqu'il résulte des expériences plusieurs fois répétées, que les mollusques, au moins ceux d’eau douce, ne peuvent vivre dans des eaux saturées de sulfate de chaux, on pourroit expliquer pourquoi on ne trouve point de coquilles dans la masse gypseuse de Montmartre, et en général dans les gypses anciens ou nouveaux, quoiqu ils soient souvent en couches subordonnées à des terrains coquilliers. 4°. Puisque les mollusques marins peuvent vivre dans les eaux presque saturées de muriate de soude, 1l paroîtroit quel’absence des corps organisés vivans dans le lac Asphaltique, sielle est bien:: Ile, tient à la présence des muriates amers de chaux et de magnésie, et peut-être à celle des matières bitumineuses que Lavoisier n’a point trouvées dans son analyse, sans doute parce qu’elles ne s’y rencontrent que passagèrement dans de certaines circonstances. D'un autre côté, puisque les mollusques marins périssent dans des eaux sursaturées de muriate de soude , il n’est point étonnant qu'on n’en ait point trouvé de dépouilles dans les masses 1m- menses de sel gemme qu’on exploite en plusieurs contrées, 6°. Enfin, si on admet que des mollusques marins et des mol- lusques fluviatiles peuvent vivre dans le même liquide, il semble- roit en résulter que l'habitation dans les eaux douces ou dans les eaux salées ne seroit point une raison pour établir des genres par- ticuliers, à moins qu'on ne puisse trouver des caractères suflisans et constans dans les coquilles, ou mieux encore, dans les ani- maux qui les habitent , lorsqu'elles ne sont point fossiles. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 283 Extrait du Journal tenu pendant les expériences sur les Mollusques d'eau douce, en 1808. mi Pr tem thé Nombre Nombre Nombre des des individus des individus individusiau 15 juillet 1808.jau 15 octob. 1508. È « QUES RE NOMS DES ESPECES dans chaque dans dans JopservATIONS. t vase de de dans P SOUMISES À L'EXPÉRIENCE. | chacune ant EAN des deux) Peau l’eau lée à séries, au lée À 17 mai] douce. douce. [24 de- 1808. 0,02 puis 17 j: Limnæa stagnalis....,........ 30 21 23 16 13 auricularia....,...... 30 1 17 14 11 palustris .... 5o 3 27 22 19 Physa fontinalis.. 5o 28 27 17 21 Planorbis corneus.….. .| 30 22 19 15 13 carinatus............| . 50 34 37 19 16 —— VOrLEX. eee see 50 37 39 26 22 Ancylus lacustris............. 50 39 35 28 25 Paludina vivipara............. 30 2 24 2x ai tentaculata .......... 50 38 35 31 17 ————— obtusa (porte plumet). 60 42 39 2 30 Nerita fluviatilis.............. 50 37 31 26 9 Unio pictorum............... 20 17 13 8 0 depnis28 j. (1). Anodonta Cygnæa............ 15 11 10 7 o —— 31 Cyclas cornæ ..:....4.....4. 40 32 25 18 0 !— 21 (1) C'est-à-dire que le dernier individu est mort depuis 28 jours. 4 204 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Extrait du Journal tenu pendant les ‘expériences sur les Mollusques marins , NOMS DES ESPÈCES SOUMISES À L'EXPÉRIENCE. Patella vulgata Turbo littorens = néritoïdes. ::. Columbella mercatoria. | . ... =———— ruslica, . . » . 44. Cerithium morus. ... | .:,,. Petites cérites de diverseskespèces. Purpura lapillus Arca noæ.. — barbata Venus verrucosa. ;: +, — maculata. . virens. « . 5 Cardium edule. .. .., jOstræa edulis \Mytilus edulis. . l——> barbatms. . , .:. lBalanus balanoïdes. . —- striatus Rte hemisphericus . . .,. Patella nugarica . . Fissurella uncibosa Crepid ula fasciata Halious tuberculata Buccinum undatnm Murex brandaris. . , . . . . .. ramosus ( parvus) . . . . — pileare Telina fragilis j=—— incarnata. . . . . . . .. Donax irus —— rugolus — lrumeculus Chamatlazaus ET ER 2 Lima squamosa . ........ Pecten jacobens —— sanguineus varius. . . Echinus esculentus en 1813. Nombre des individus au 1er juin 1815. l’eau de | due de son poids d’eau douce. mer. 4 22et7p'es 24 Nombre des imdividus au 15 sept. 1813. dans l'eau OPSERVATIONS. l’eau de | douce, mer. | depuis depuis jours. SUITE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 285 SUITE DU MÉMOIRE Sur les Substances minérales dites e7 mnasse, qui entrent dans la composition des Roches volcaniques de tous les âges; Par P. Louis CORDIER (r). CHAPITRE QUATRIÈME. Comparaison des Substances minérales non volcaniques , nommées Pétrosilex, Trapp et Cornéenne,#@vec les Pâtes lithoïdes des courans de lave de tous les âges. JE ne traiterai point des cornéennes, des trapps et des pétro- silex avec le détail que réclamoit l’histoire des recherches dont j'ai rendu compte dans le Chapitre précédent. Je me conten- terai d’esquisser les principaux traits qui font contraster ces trois genres de pierres avec les pâtes lithoïdes. On sait que ces pierres sé trouvent en grandes masses com- pactes dans les terrains primitifs ou intermédiaires, et que plu- sieurs variétés se rencontrent même dans les terrains secondaires. Malgré les recherches nombreuses dont elles ont été l’objet, leur rôle dans la science est encore bien équivoque; elles appar- tiennent à cette grande division du règne minéral qui comprend toutes les substances terreuses qu’on regarde comme composées de particules indiscernables irrégulièrement agrégées ; subs- tances imparfaites à nos yeux, constamment informes, ne montrant qu'une structure confuse, qui se ressemblent beaucoup par l’uni- formité de leur tissu, qui, considérées hors de leur gisement , ne peuvent souvent être distinguées que par les nuances fugitives d’un petit nombre de caractères extérieurs ou empiriques, et dont les définitions spécifiques n’ont communément d’autres fon- QG) AT le commencement de ce Mémoire dans le Cahier du mois d'août, pag. 195. Tome ZXXXIII, OCTOBRE an 1810. Oo 286 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE demens que des assertions plus ou moins hazardées, reposant sur des notions où même des hypothèses géologiques. C'est ainsi qu’on les définit en général comme des produits aqueux; les uns sont, dit-on, des précipilés chimiques durcis; les autres, des précipités mécaniques consolidés; celles-ci ont été déclarées homogènes, celles-là composées de particules hétérogènes ; d’autres enfin participent plus ou moinsde ces différens modes, et forment, à ce qu'on assure, des variétés de passage. Ces manières de voir peuvent être Justes; mais des assertions et des conjectures de ce genre ne peuvent pas suppléer à l’absence fréquente de toute propriété vraiment spécifique. Des opinions ne sont pas des caractères, et on ne doit point s’étonner si les minéralo- gistes ne s'accordent point encore sur la définition et la nomen- clature des nombreuses substances dont je veux parler, sur la manière de les décrire et la place que chacune d’elles doit oc- cuper dans la méthode purement minéralogique. Je n'insiste au reste sur ces coniidérations générales, que parce qu’elles sont plus spécialement applicables aux trois genres de pierres que je vais examiner. En me servant des vieilles dénominations de pétrosilex, de trapp et de cornéenne pour désigner ces pierres, je n’entends aucunement préjuger du parti que les connoissances actuelles permettent de prendre à leur égard ; j’ai voulu seulement me rapprocher du langage employé par Wallerius, Bergmann, Saus- sure et Dolomieu, et remonter ainsi à la source des fausses ana- logies dont les laves anciennes et modernes ont été jusqu’à présent le sujet. Sous la dénomination générique de pétrosilex , je comprends le pétrosilex compact ou terreux de Dolomieu, le palaiopêtre et le feld-spath terreux non volcanique de Saussure, l’eurite de M. d’Aubuisson , le feld-spath compact de M. Werner, les va- riétés de son hornstein qui fondent en verre blanc, et en grande partie la base (haupmasse ) des variétés de son thonporphyr qui renferment des grains de quartz disséminés. Le pétrosilex cons- titue la base d’un grand nombre de porphyres diversement co- lorés. La présence ordinaire du quartz au milieu des autres cris- taux disséminés , l'absence constante de toute cavité bulleuse et de toute concrétion amygdaloïde, en sont les principaux carac- tères empiriques (1). Sa dureté, sa pesanteur spécifique, sa fusion (1) Quelques variétés fort rares de pétrosilex et de trapp offrent la contexlune ET D'HISTOIRE NATURELLE. 287 en verre ou émail blanchâtre, font penser, avec beaucoup de raison, qu’il est composé tan!ô! enentier, tantôt en grande partie, de molécules feld-spathiques. Je range sous la dénomination générique de trapp, le diorite compacte et. la roche argileuse dure de M. Haüy, la base du rphyre rouge antique, le grunstein compacte de M. Werner, É schistes argileux (thonschiefer) durs et en masses non feuil- letées, la pierre de touche ou lydienne, et les variétés du wetz- schieler et du kieselschiefer de M. Werner, qui fondent en verres colorés. Toutes ces substances fondent en verre noir opaque, ou d’un vert foncé, ou d’un vert jaunâtre. Leur principal caractère empirique est de ne contenir jamais aucune cavité bulleuse ni concrétion amygdaloïde. On suppose que les unes sont composées de particules d’amphibole et de feld-spath, et les autres d’argile ferrugineuse mêlée de molécules amphiboliques, feld-spathiques, ou quartzeuses. Enfin je désigne sous la dénomination générique de cornéenne, les schistes argileux tendres de tous les âges, qui sont en masses non feuilletées ou imparfaitement feuilletées, et leurs variétés mixtes avec le schiste amphibolique, le schiste chlorite, la ser- pentine schisteuse, l’ardoise proprement dite, l'argile pyriteuse endurcie et le calcaire argileux compacte, simple ou ferrifère. Je comprends dans celte sÿnonymie une partie des variétés du thon- schiefer, de l’alaunschiefer et du schieferthon de M. Werner, et en général les pierres dites argéleuses , tendres, non feuilletées, moires, grises ou verdâtres, exemptes de la contexture amygda- loïde, souvent pyriteuses et quelquefois mêlées ou accompagnées de matières charbonneuses, qu’on a voulu assimiler aux pâtes lithoïdes des courans de lave anciens et modernes. Un de leurs variolaire, qu’il ne faut pas confondre avec la contexture amygdaloïde. Les varioles sont des nœuds orbiculaires ordinairement petits, d’un égal diamètre dans le même bloc, tantôt compactes et tantôt rayonnés à rayons microsco- piques concentriques , inséparables de la pâte qui les renferme et de même nature , s’en distinguant seulement par des couleurs peu distinctes, assez com- munémentzonaires. Les amandes se présentent avec des formes et des dimen- sions variables dans le même bloc ; souventelles y sont entremélées de cavités bulleuses ; on les voit tantôt pleines et tantôt plus ou moins creuses ; elles adhèrent foiblement à la pâte environnante; elles en diffèrent essentiellement par leur nature et leur couleur; enfin leur composition offre des minéraux d’especes tres-différentes , affectant des structures variées et se groupant quel- quefois en assez grand nombre dans la même géode. Co z 286 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE principaux caractères empiriques communs, est de ne renfermér aucune cavité bulleuse ni concrétion en forme d’amande, et d’être très-rarement porphyriques. On les suppose formées d’ar- gile ferrugineuse, tantôt simple et tantôt plus ou moins mé- langée de molécules amphiboliques , quartzeuses, feld-spathiques, talqueuses, calcaires, de mica, de carbonne, de carbure de fer ou de fer sulfuré. On voit, par ces détails , que j’exclus formellement des trapps et des cornéennes, les pâtes indéterminées de toutes les rochesamyg- daloïdes et boursoufflées, sans excepter même J'ophite antique. Je regarde cette exclusion comme un des résultats les plus utiles de mes expériences. Je la motiverai au chapitre dans lequel je traite des laves lithoïdes altérées, sous la dénomination provisoire de wackes volcaniques de toutes couleurs. Quant au basalte noïr antique, je suis fondé à assurer que ce n'est ni un trapp, ni une lave; j'ai eu occasion de l’étudier en Egypte avec Dolomieu, sur un grand nombre d'échantillons, et mon ami, M. de Roziéres, en a exactement constaté le gisement rès des cataractes du Nil; on doit en faire deux variétés de a syénite, sous les noms de syénite granulaire et syénite compacte. « Du reste, j'ai évidemment compris des substances très-diffé- rentes sous les dénominations génériques de trapp, de cornéenne et de pétrosilex. Maïs je le répète, mon objet n’étoit pas de faire un traité sur ces substances et de les distinguer nettement les unes des autres. Il a dû me suffire de les examiner sous le rapport d’un petit nombre de propriétés très-saillantes, communes aux variétés de chaque genre, et de montrer combien elles dif- férent des laves lithoïdes anciennes et modernes z20n altérées, à s’en tenir aux points de vue essentiels, c’est-à-dire à la com- paraison de la texture intime, de la composition mécanique et des principaux caractères empiriques. Je passe donc à cette com- paraison. Ces trois genres de pierres considérés dans leurs gisemens , se lient intimement aux roches accompagnantes, soit en ad- mettant les mêmes minéraux disséminés sous forme de grains ou cristaux apparens, soit par des passages de composition ou de contexture, soit par les conditions qui caractériseut leur stra- tification. Au contraire, les laves lithoïdes anciennes et les autres couches ET D'HISTOIRE NATURELLE. 289 volcaniques accompagnantes, sont presque toujours évidëmment adventives relativemeut aux terrains qui leur servent de support ou qui par fois leur sont superposés, n'ayant avec eux aucune relation directe de contexture ou de composition, et souvent aucun rapport de stratification (r). oo (1) L’état d’une science est assez exactement caractérisé par la richesse ou la pauvreté de sa terminologie ; est-elle peu avancée , l’abus des expressions génériques non définies ou mal définies , devient presque inévitable ; il influence l'observateur , altère les produits de l'observation , défigure les faits, entraîne la confusion des idées , conduit à des analogies imaginaires, etmène, sans qu’on s’en aperçoive, à l’erreur , quelquefois même à l’absurde. Ajoutons qu’on y tient en général d'autant plus, que c’est un moyen commode peur se passer de précision , pour se dispenser d’études trop difficiles, et pour déguiser avec une apparence satisfaisante la limite bornée et l'insuffisance des connoissances acquises. Lu On ne peut méconnoître les effets de cet abus lorsque, s’armant d’une saine logique, on veut approfondir les bases élémentaires de beaucoup de notions géologiques reçues ou données comme inconstestables ; par exemple, combien de manières d’être différentes ne confond-on pas à l’aide des mots passage et transition? À s’en tenir aux produits volcaniques , nous avons des transitions ou passages sous le point de vue de la composition , du tissu intime, de la con— texture, de la dureté, de la couleur, du boursoufilement , du relâchement des parties , de leur décomposition et de leur désagrégation. Voici comment j'écarte , en beaucoup de cas, l’abusif emploi de ces expres- sions vagues et bannales. Je nomme en général jonction la rencontre d’une couche volcanique avecune couche de même origine ou d’une origine différente. La jonction est distincte lorsque la coupe du plan de rencontre offre une ligne de séparation nettement prononcée ; elle est confuse lorsqu'il y a pénétration entre les matières qui composent les deux faces de rencontre, et qu’il n’est pas possible de discerner où finit l’une et où commence l’autre. De ces pénétrations il résulte des bandes plus ou moins parfaitement mixtes et communément assez minces ; je leur donne le nom d’entre-couches , et je nomme roche d’entre-couche , la roche qui les compose. Ce second cas, au reste , est tres-fréquent et se conçoit faci- lement ; la majeure partie des déjections volcaniques sont ordinairement meubles, et les faces scorifiées inférieures et supérieures des nappes de lave sont susceptibles de le devenir à la longue; il s’établit une foule de jonctions confuses en vertu des différences qui existent entre l’écartement et le volume des parties incohérentes respectivement en contact d’une couche à l’autre , et par suite de l’action continue des eaux filtrantes , du poids des parties libres et de la pression des masses superposées. De là de prétendues transitions très-va riées et quelquefois bizarres. T'elle est celle-ci : Soit une plaine formée de granite à gros grains et superficiellement décom- posé , sur laquelle des graviers , puis des sables de même nature ont été déposés par un cours d’eau. Une éruption volcanique voisine couvre les sables avec des cendres fines et des cendres plus ou moins mélangées de fragmens de scories. Ensuite un courant de lave basaltique s’étend sur le tout. Qu’arrive-t-il ayec le: LU 290 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Les premières se présentent sous forme de masses constam- ment pleines et parfaitement denses, les secondes sous forme de masses plus ou moins criblées de cavités bulleuses de toutes dimensions. temps? la croûte scorifiée inférieure du courant se désagrège , s’affaisse et se lie avec des déjections incohérentes ; celles-ci se tassent et pénètrent dans les sables qui eux-mêmes sont mêlés aux graviers et aux débris granitiques con- fondus ; pour peu que les eaux filtrantes déposent le plus léger ciment calcaire, ou ferrugineux, ou siliceux dans ce système , tout le massif se trouve lié, et dans les idées de beaucoup de minéralogistes , présente alors le prétendu pas- sage du granite au basalte par le gravier , lesable (ou le grès), la cendre durcie, le tuf et la brèche à base de wacke basaltique. La nature a réalisé plus ou moins completement cet exemple en plusieurs endroits de l'Auvergne et des Cévennes, dans lesquels il existe desinatières vol- caniques incontestables. Mais je vais plus loin ; je suppose qu’un pareil système ait été démantelé par une cause quelconque, et qu’il n’en reste que des lam-— beaux; que faudrait-il conclure de la transition prétendue ? que le basalte est de la mème formation que le granite ? Au fait cependant , ces lambeaux seroient le produit de cinq formations distinctes, savoir : celle du granite , sa décom- position , celle du courant d’eau , celle de l’éruption pulvérulente et celle du courant de lave, auxquelles il faudroit ajouter une action postérieure composée elle-même des effets amenés par les filtrations, le tassement , la macération , le dessalement des matières volcaniques et les concrétions infiltrées, On voit qu’une simple analogie tirée de ce qui se passe journellement sous nos yeux , et dégagée de toute hypothèse , rend parfaitement raison des cas assez rares où les roches volcaniques anciennes se lient avec les couches non volca- niques et ne leur paroissent point adventives. Dureste, la superposition à jonction confuse n’existe pas seulement dans les terrains volcaniques et à leur contact avec les autres terrains; on l’observe aussi, quoique très-rarement, à la rencontre respective de ces autres terrains. Malgré la longueur de celte note, je ne résiste pas au desir d’en faire connoître un exemple qui rentre tout-à-fait dans mon sujet et qui est sûrement curieux, puisqu'il offre la plus belle transition possible du granite le plus ancien au cal- - caire coquiller ! Cette prétendue transition se rencontre en Bourgogne ; elle a été découverte et observée pour la première fois à Château-Neuf, près de la Clayette, par M. de Drée; j'accompagnois Dolomieu lorsqu'il en fit la vérification. Les col- lections de Paris en possèdent de beaux échantillons : en voici l'indication som- maire : le granite de Château-Neuf est à tres-gros grains, à peu près des mêmes couleurs et presque aussi beau que le granite de Syène en Egypte. Il étoit superficiellement désagrégé lorsque la matière calcaire a élé déposée par dessus. Non-seulement cette matière a pénétré jusqu’au vif de la roche grani- tique, en s’insinuant à travers ses débris, mais encore elleembrasse des cristaux isolés qui ont été facilement soulevés à une petite distance , à raison de la den= sité du liquide formant le dépôt. La jonction confuse des deux lerrains se fait donc par une roche mixte accidentelle (ou d’entre-banc) de plusieurs déci= mètres d'épaisseur, qui, dans sa partie inférieure, est composée de granite à - ET D'HISTOIRE NATURELLE. 291 Dans les unes on trouve, à la vérité, des grains en cristaux disséminés de feld spath, d’amphibole et quelquefois de mica ; mais ils sont associés a des grains de quartz, de diallage, de tale, de chlorite, de fer oxidulé, de fer sulfuré et de pyrite magnétique, minéraux tout-à-fait étrangers aux terrains volca- niques. On n’y voit jamais ni péridot, ni pyroxène, ni am- phigène , ni fer oligiste , ni fer titané. Davos les autres, la rareté du mica et de l’amphibole, l'ab- sence totale des pyrites et du fer oxidulé, celle si remarquable du quartz , deviennent des caractères négatifs aussi puissans que la présence du fer titané, du fer oligiste, du pyroxène, de l’am- phigène et du péridot associés au feld-spath. Ces différences principales entre les caractères empiriques res- pectifs sont déjà très-marquées; on en trouveroit aussi entre les nuances des caractères extérieurs; mais je dois les passer sous silence pour établir la comparaison vraiment essentielle, celle du tissu intime et de la composition mécanique. On se rappelle que l'apparence des pâtes lithoïdes vues à l'œil nu est une illusion due à la foiblesse de cet organe; qu’elles sont douées d’un tissu grossier, interrompu par des vacuoles, et composées de cristaux ou grains entrelacés, dont le diamètre n'excède guère un vingtième ou un trentième de millimètre ; conditions qui permettent de déterminer l'espèce des minéraux élémentaires; il n’en est pas de même des trapps , des pélrosilex et des cornéennes. Je dois dire ici qu'avant de tenter l’examen microscopique de ces trois genres de substances minérales compactes, je m'étois flatté de ne pas rencontrer plus de difficulté que je n’en avois ciment de chaux carbonatée plus ou moins visible , et dans sa partie supérieure, d’un superbe porphyre calcaire à gros grains de quartz gris et de mica noir, et à grands cristaux de feld-spath d’un rouge de chair tres-éclatant. D’ailleurs le calcaire est d’un blanc grisâtre ou d’un gris de fumée , écailleux à écailles spathiques , et s’approchant de la structure compacte. Il contient des rognons de silex roux (fauerstein), et dans le prolongement de sa formation , qui est tres-étendue , des griphites , des entroques et des astroites. Convenons-en, la découverte de ces circonstances singulières eût été une bonne fortune pour un partisan des idées de transition ; 1l est plus facile en effet de convertir tout gisement anomal en loi générale , que d’en résoudre les conditions spécieuses, et de démontrer comment elles peuvent se classer naturel- lement dans la masse des grands phénomènes déjà connus de tous les géologues. 292 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE trouvé dans l'étude des pâtes lithoïdes volcaniques, mais j’ai été bientôt détrompé; les obstacles que j'ai éprouvés ont eu un premier résultat utile; ils m'ont fait voir que j’attaquois les produits d'un mode de formation bien différent. Je rejette dans la table générale le détail de mes expériences, ainsi que la désignation précise des échantillons que j'ai exa- minés; je me contente d’avertir que, parmi ces échantillons, on verra figurer les trapps et les cornéennes des montagnes de Suède, anciennement cilés par Bergmann et Wallerius; c'est principalement la collection de M. Le Lièvre qui me les a fournis. Je vais exposer maintenant les résullats généraux de mes ob- servations. Le tissu intime des trapps, des cornéennes, des pétrosilex , examiné au microscope, se montre uniforme et sans aucunes vacuoles ; sa finesse est souvent si excessive, qu'on u'apercoit point d’élémens divers, et qu’il conserve l'apparence la plus compacte. Lorsqu'on distingue des particules, on ne sait si ce sont réellement des grains ayant chacun une existence indépen- dante et une structure particulière, ou si ce sont des apparences résultantes de la division de la masse homogène par des fissures, ou, pour mieux dire, par des glaces extrèmement déliées. Du reste, ces grains réels ou apparens sont dix fois ou vingt fois plus petits que les grains des pâtes lithoïdes; ils ont tous la même couleur dans le même échantillon. Ils sont blancs ou foiblement nuancés de la teinte des masses, translucides ou demi - transparens dans les pétrosilex ; translu- cides et blancs jaunâtres dans les trapps noirs, verts ou verts noirâtres ; demi-lransparens et d’un blanc rosé dans le trapp rouge; d’un blanc grisâtre et à peine translucides dans les cor- néennes grises ou verdâtres qui blanchissent au feu; blancs gri- sâtres et opaques dans les cornéennes noires qui conservent leur couleur après avoir été chauffées. L’excessive finesse de ces grains ne permet pas de les isoler sur le filet de disthène : on ne peut déterminer aucun de leurs caractères. Leur facile fusion sur le filet de disthène offre des verres bulleux, blancs pour les pétrosilex; d’un vert jaunâtre pour les trapps; tantôt gris, tantôt d’un vert jaunâtre foncé pour les cornéennes. Dans les produits de fusion, comme dans les pâtes, on voit assez ordinairement des grains noirs, excessivement fins et jamais assez ET D'HISTOIRE NATURELLE. 293 assez abondans pour former la centième partie du volume. Ces grains sont facilement fondus et dissous ; ils communiquent cons- tamment une couleur verte. Supposant qu'ils étoient de nature métallique, j'ai fait des tentatives pour les isoler, en traitant différentes variétés, à l’aide de la porphyrisation et du lavage. J’ai en effet recueilli quelque peu de poudre noire, encore mêlée de matières terreuses , en partie attirable, et donnant l'odeur sul- fureuse par la calcination. Ne pouvant réunir une assez grande quantité de ces parties noires attirables pour y chercher l'oxide de titane, j'ai éprouvé les parties métalliques discernables à la vue ou à la loupe, que renferment beaucoup de trapps et de cornéennes. J’ai étendu ces essais aux grünsteins primitifs ou diorites , et aux roches qui ont de l’analogie avec eux, ou qui les accompagnent ordinairement. J’ai notamment essayé le fer oxidulé octaèdre des roches de Corse, celui des roches de la Val-d’Aoste au Mont-Blanc, et de la Val-Sesia au Mont-Rose , et celui des roches qu’on trouve en différens endroits de la Suède. Cet examen chimique m'a dé- montré qu’il n’existoit de fer titané ni dans les trapps, les cor- néennes et les pétrosilex, ni dans les roches primitives accom- paguantes. Les expériences dont je viens de présenter le résumé prouvent, 10, que si le pétrosilex, qu’on regarde avec raison comme du feld-spath compacte, contient des particules hétérogènes , ces particules échappent par leur ténuité, et n’influent point sur les résultats de fusion; 29, Que le pétrosilex diffère essentiellement des pâtes lithoïdes, leucostiniques où feld-spathiques, soit par l'extrême finesse de son tissu, soit par l'absence des minéraux microscopiques hété- rogènes, qui abondent dans ces sortes de laves; 3°, Que si les trapps et les cornéennes sont des masses com- pactes composées de particules hétérogènes , comme on s’ac- corde à le croire, il nest pas possible, du moïns par les moyens que j'ai mis en usage, de constater directement quels sont les minéraux élémentaires, et notamment si lamphibole est fré- quemment du nombre; 4°. Enfin, que la nature et Ja finesse du tissu intime des trapps et des cornéennes, et l'impossibilité d’assigner leur composition mécanique, ne permettent plus de les confondre avec les pâtes lithoïdes , basaltiques ou pyroxéniques. Tome LXXXIII OCTOBRE an 1616. Pp 294 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ainsi en rapprochant ces résultats de ceux obtenus dans la première partie de mes observations , il demeure constant, non- seulement que les laves lithoïdes contestées sont analogues aux laves lithoïdes modernes, mais encore que les unes et les autres ne ressemblent point aux roches primitives , intermédiaires ou secondaires, auxquelles on a prétendu jusqu’à présent qu'il falloit les assimiler, ou dont on a pensé qu’elles tiroient leur origine. .Je ne puis me dispenser de faire remarquer l'heureuse coïn- cidence de ces conclusions avec celles que Dolomieu a déduites de sa belle observation sur les circonstances qui caractérisent le gisement des matières volcaniques incontestables de l Auvergne et du Vivarais (1). Cette observation, la plus mémorable, la plus importante et surtout la plus avérée de toutes celles qu’on a faites en Géologie depuis trente ans, nous a appris que les matières volcaniques du Vivarais et de l'Auvergne se sont fait Jour à travers une contrée qui est toute granitique, sur une étendue de près de quatre cents myriamètres ( 1600 lieues) carrés. Or Dolomieu en combinant ce grand fait avec l’en- semble des phénomènes produits par les volcans brülans et les tremblemens de terre, a été conduit à cette conséquence, digne d’une entière attention de la part des géologues, savoir, que le siége des feux souterrains résidoit par toute la terre sous les couches primordiales que nous regardons comme les plus an- ciennes ; de mon côté, je prouve directement que les roches anciennes et modernes n'ont point d’analogues, non-seulement parmi Îles roches primordiales, mais encore parmi les roches intermédiaires ou secondaires, notamment celles qui renferment, sous différentes formes et en différentes proportions, des prin- cipes inflammables, sulfureux , métalliques ou bitumineux (2). = (1) Poyezles détails de cette observation, Journal des Mines, n° 41 et 42 ; vol. VIT, pag. 385, et n° 69, vol. XII, pag. 221. (2) De tous les faux rapprochemens auxquels les ressemblances de colora- tion, l’uniformité apparente du tissu, les analogies de certains caracteres ex- térieurs, et surtout la présence ou le voisinage d’un principe inflammable quelconque ont donné lieu, le plus accrédité, c’est celui qui conduit à placer les foyers volcaniques dans les plus grandes profondeurs des terrains houillers. Cette opinion a été facilement combattue par plusieurs minéralogistes. J’ai voulu moi-même contribuer à l’infirmer directement , lorsque j'ai publié dans notre Journal des Mines (n° 156, vol. XX VI, pag. 401) les observations que j'ai faites avec soin dans les houillères embrasées du pays d’Aubin , départe- ment de l'Aveyron, en remplissant dans ce pays mes fonctions d'ingénieur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 295 Ces notions remarquables, sans avoir le même degré de cer- titude, se prêtent un mutuel appui ; elles sont en harmonie avec tout ce que j'ai encore à exposer. Elles tendent sans doute à nous replacer dans une obscurité profonde à l'égard des matières qui servent d’aliment aux éruptions volcaniques ; mais l’aveu de notre iguorance, motivé sur l'existence d’un ordre de faits po- sitifs absolument nouveau , pourra paroître préférable à des ana- logies imaginaires, et à des hypothèses dont la stérilité a été jusqu'ici le moindre inconvémient. CHAPITRE CINQUIÈME. Examen des Pâtes indéterminées qui composent les Scories volcaniques de tous les âges. Je comprends sous le nom de pâtes scorifiées, les matières boursoufflées rouges, brunes , jaunes, grises, verdâtres et noires, nommées scories par presque tous les minéralogistes ; la pierre ponce ou pumite, la lave vitreuse pumicée et la scorie blanche. La plupart des variétés qui composent cette grande seclion pa- roissent inconnues à M. Werner , et n’ont point de place dans sa méthode (1). On ne voit effectivement figurer dans cette du Corps Royal des Mines. Mes expériences sur les pâtes lithoïdes achevent de faire justice de cette opinion. Il faut convenir qu’elle étoit bien peu soute- nable , car elle reposoit implicitement sur des suppositions contraires à deux grandes lois de Physique et de Chimie, celle qui préside à la combustion en gé- néral, et celle que suit la propagation de la chaleur dans les corps non mé- talliques. (1) Telles sont les ponces vertes et blanches des volcans incontestables , comme celles du cratère qui termine le pic de T'énériffe , et les scories de cou- leurs foncées , si belles , si fraiches , si parfaitement filées , cordées, tordues et tourmentées , qui alternent ou qui sont disséminées en tres-grande quantité au milieu des puissans systèmes volcaniques démantelés qui occupent des espaces si étendus en France, en Italie, en Sicile et dans beaucoup d’autres points de la surface de la terre. Parmi les caractéresnombreux et irrécusables qui attestent l’origine de ces im- menses systèmes , il faut noter que les lambeaux de courans lithoïdes qui s’# trouvent inclus sont constamment accompagnés de leurs croûtes scorifiées inférieures et supérieures , tantôt intactes, tantôt foiblement altérées dans leur tissu intime, mais non déformées ; tantôt enfin plus ou moins décomposées et affaissées : ce nouveau caractère est général ; je le signale à l'attention des ob- servateurs. Si on compare , du reste, les tres-petits lambeaux basaltiques de la Saxe à ces grands systemes classiques, on reconnoît que ces lambeaux ne sont qu’un cas tout- Pp 2 296 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE méthode qué la scorie volcanique récente et la pierre ponce des formations trappéennes, qui est censée non volcanique. Considérées sous le point de vue de leur gisement , les pâtes scorifiées appartiennent , soit aux courans de laves de toutes es= pèces , soit/aux déjections incohérentes consolidées ou encore meubles. Les unes enveloppent les courans dans toute leur éten- due ; elles sont le premier produit de la coagulation , et forment une écorce continue qui est souvent très-épaisse à la surface supérieure de la lave, et quelquefois très-mince (ayant moins d'un centimètre, ou six lignes) à la surface inférieure. Les autres se présentent en fragmens plus où moins volumineux, tantôt dispersées dans les tufs et les brèches, lantôt amoncelées en cou- ches coniques et concentriques autour des orifices volcaniques, et tantôt entassées sous forme d'assises ordinaires , plus ou moins meubles, et communément mêlées de cendres. On sait que les laves lithoïdes poreuses ne se conservent pas aussi parfaitément intactes que les laves lithoïdes massives; les pâtes scorifiées sont en général bien plus accessibles que les unes et les autres aux effets de la décomposition. Leur perméabilité les rend facilement altérables. Tantôt elles se résolvent en poudre plus ou moins aride, semblable à la cendre ou thermantide pul- vérulente, tantôt elles se changent en une sorte de wacke par- ticulière ; elles donnent ainsi deux sortes de produits nouveaux, que j'examinerai chacun en son lieu. Malgré cette facile dispo- à-fait particulier dumême genre, que leur isolement , leur trèes-foible étendue , leur très-mince épaisseur, leur composition simple , la destruction de l'écorce scorifiée supérieure du basalte, et la décomposition très-avancée de l’écorce in- férieure , rendent presque anomal. Il faut que M. Werner soit parti de ce cas particulier et de quelques autres cas analogues , lorsqu'il a composé sa for- mation trappéenne stratiforme ( flætz-trapp), car l’on est forcé de reconnoïître que les conditions qu’il en donne sont très -incompletes et très-imparfaites ; lorsqu'on veut en faire l'application aux puissans terrains volcaniques déman- telés, situés loin de l'Allemagne , qui appartiennent à l’époque dont ce célebre minéralogisté a eù intention de caractériser les produits ; il manque vraiment un si grand nombre d’éléméns essentiels à ces conditions , que dès qu’on essaye de les compléter, en ayant égard aux circonstances classiques dont M. Werner n’a pu tenir compte faute de les connoître, on voit, malgré soi, l'hypothèse d’une formation trappéenne stratiforme générale s’évanouir entièrement. Je n’ai pas besoin de faire remarquer que mes expériences sont des élémens encore plus positifs, quoique d’un autre ordre, qui concourent au même but, et qui tendent en outre à infirmer presque aussi complètement l'hypothèse des forma- tions trappéénnes desépoques plus reculées. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 297 silionà s'altérer, on les trouve quelquefois intactes dans les terrains volcaniques les plus anciens. Dolomieu , et plusieurs autres observateurs , ont divisé les pâtes scorifiées colorées en scories pesantes et scories légères, mais sans motiver ces distinctions par des caractères minéralogiques suffisamment tranchés : on verra cependant qu’elles étoient bien fondées. N'ayant trouvé aucune différence de tissu intime et de com- position mécanique entre les pâtes scorifiées intactes apparte- nant aux quatre époques volcaniques que j'ai précédemment définies, je vais rendre compte de mes expériences sans distinc- tion d'âge. Je rappellerai seulement que, devant les considérer exclusivement sous le point de vue minéralogique, j'en ai étudié la’ pâte abstraction faite des formes extérieures, des accidens de boursoufilement, des cristaux apparens disséminés, et des frsôgmens hétérogènes accidentellement enveloppés. Les pâtes scorifiées fondent en général plus facilement que les pâtes lithoïdes analogues; les caractères de fusion, dont je renvoie le détail dans la table, ainsi que celui des autres expé- riences , les caractères de fusion, dis-je, établissent deux genres distincts, savoir : celles qui fondent en verres blancs ou légè- rement colorés, et celles qui fondent en verres de couleur noire ou d'un vert noirâtre, J'ai trouvé d’ailleurs que la composition mécanique s'accordoit avec les caractères extérieurs, pour sub- diviser chaque genre en trois sortes, qui sont, les scories gru- meleuses, les scories pesantes et les scories légères. Les premières ne méritent d’être rangées parmi les pâtes sco- rifiées qu’à raison des aspérités tranchantes de ,leurs surfaces naturelles et de leur porosité ; elles sont remarquables par l'aspect lithoïde de la matière dont elles sont formées; elles tapissent, soit en partie, soit en entier, les surfaces inférieures et supé- rieures des courans lithoïdes modernes. On les retrouve accom- pagnant de même les lambeaux des courans de lave, dans les terrains contestés, partout où elles mont pas cédé à la désagré- gation et à la décomposition. Examinées au microscope, elles paroissent entièrement com- posées de grains ou cristaux, un peu plus fins, maïs aussi dis- tincts et aussi faciles à étudier que ceux des pâtes lithoïdes dont elles forment le revêtement; mais ces grains sont impar- ; 8 faitement entrelacés, échaffaudés en quelque sorte les uns sur 298 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les autres, et isolés en partie par des vacuoles nombreuses. Si on examine leur surface naturelle dans les vacuoles comme dans les cavités bulleuses des masses, on reconnoît qu'ils sont couverts d’un vernis léger, brillant et vitreux; mais cette matière vitreuse, qui paroît ici comme le résidu de la cristallisation pré- cipitée, est en trop petite quantité pour qu’à l'intérieur de la pâte on ne puisse la distinguer d’avec la matière même des grains, entre lesquels on peut présumer qu’elle est interposée. Les grains microscopiques des scories grumeleuses présentent les mêmes minéraux élémentaires, associés dans les mêmes pro- ortions que les pâtes lithoïdes servant de support : tantôt c’est le pyroxène qui domine et tantôt le feld-spath. Dureste, les caractères des scories grumeleuses perdent de leur netteté au point de contact avec la lave lithoïde massive, ou poreuse congénère; on conçoit facilement qu’il existe une foule de masses qui présentent une structure plus ou moins mixte entre les structures lithoïdes et scoriformes parfaites. Les formes tourmentées, tordues et filées, des pâtes scorifiées pesantes, dénoncent les causes perturbatrices qui ont agi pen- dant la coagulation de la matière qui en fait la base. Elles entrent, concurremment avec les scories grumeleuses, dans la composi- tion des revêtemens inférieurs et supérieurs des courans de lave anciens et modernes; quelquefois même elles constituent ces revêtemens en entier. Elles forment en grande partie la masse des déjections incohérentes qui Sante et autour des orifices volcaniques. La pâte qui en fait la base, examinée dans sa cassure, pré- sente un aspect intermédiaire entre l'aspect lithoïde et l’aspect vitreux. Examinée au microscope, cette pâte paroît composée d’une substance vitreuse continue, dans laquelle sont disséminés des grains blancs, verts ounoirs, semblables à ceux des pâtes lithoïdes. Le volume de ces grains varie entre un vingtième et un cin- quantième de millimètre, quelquefois même ils ne figurent que comme des espèces d’ambrions; leur nombre est très-variable; le plus ordinairement ils forment le quart ouj le sixième de la masse; lorsqu'ils abondent, la masse passe à la scorie gru- meleuse; plus ils sont rares, plus la masse prend l’aspect vitreux. Dans les scories rouges, la majeure partie des grains noirs ap. partient au fer oligiste; ils sont accompagnés de particules rougeâtres et brunes, excessivement déliées, qu'il faut également e. — ET D'HISTOIRE NATURELLE. 299 rapporter à ce minéral, soit à cause de leur couleur, soit à cause de la teinte verte qu'ils communiquent par la fusion. Les éclats de la substance vitreuse élémentaire sont translu- cides et foiblement colorés de teintes analogues à celles des masses auxquelles ils appartiennent, c'est-à-dire blanches, d’un blanc jaunâtre, blanc rougeâtre, brun rougeâlre, ou vert noi- râtre. Sur le filet de disthène ils fondent un peu plus facilement que les grains inclus, et présentent d’ailleurs tous les caractères du verre volcanique. Les caractères de fusion ne permettent pas de douter que les élémens prochains du feld -spath et du pyroxène ne dominent dans les parties vitreuses des scories pesantes, en proportions analogues à celles des grains microscopiques de l’une ou l’autre espèce qui s’y trouvent disséminés, Cette induction , à laquelle rien ne répugne d’ailleurs, paroîtra tout-à-fait probable lorsque j'aurai traité des verres volcaniques. Elle est en harmonie avec le mode suivant lequel les scories pesantes se lient avec les masses lithoïdes congénères, partout où elles leur sont en contact; en effet , la liaison s'établit par un passage insensible entre les deux espèces de structure intime. Les pâtes scorifiées légères se trouvent rarement associées aux deux autres sortes dans les revêtemens supérieurs et inférieurs des courans lithoïdes. On les trouve plus communément mêlées en fragmens avec les scories pesantes, dans le voisinage des orifices volcaniques; ou bien elles constituent, sous forme lapillaire , des couches très-étendues. Ce sont elles encore qui composent ex- clusivement l’écorce des courans absolument vitreux, qu’on ob- serve dans un petit nombre de volcans. Elles jouissent plus spé- cialement que les deux autres sortes, de la faculté de se conserver intactes, même dans les terrains volcaniques contestés les plus anciens. Soumises à l'analyse mécanique, elles offrent un tissu uni- forme , dont tous les caractères sont analogues à ceux des verres volcaniques de couleurs correspondantes, préalablement réduites en poudre. On reconnoît notamment , que les scories noires opaques ne présentent cet aspect qu’à raison de leur volume: leurs éclats très-minces sont translucides, tantôt d’un brun Jau- nâtre, tantôt d’un vert bouteille. Les fibres de la scorie blanche, ou pierre ponce, ressemblent à des filamens de verre blanc or- dinaire, droits ou contournés, cannelés ou cylindriques. La ténuité 300 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de ceux qui sont parfaitement soyeux passe souvent un cin- quantième de millimètre. cs Les différentes pâtes de scorie légère renferment des grains noirs de fer titané et des rudimens rares de feld-spath ou de pyroxène, auxquels s'associent l’amphigène et le péridot; par leur présence, ces minéraux sont comme les derniers témoins qui servent à prouver la nature des combinaisons chimiques dont les pâtes scorifiées légères contiennent lesélémens prochains, et quels eussent été les produits dominans de l'agrégation ré- gulière, si elle l’avoit emporté sur l’agrégation vitreuse, La notion minéralogique de chaque sorte de scorie est facile à déduire de ces observations; mais on voit que leur place, dans les méthodes, ne peut être assignée que par convention ,à la suite, soit du pyroxène, soit du feld-spath. Quant à la nomenclalure, je réunis sous le nom de pumite les scories feld-spathiques , c’est-à-dire qui fondent en verre blanc ou légèrement verdâtre, et je conserve le nom de scories proprement dites, aux sortes pyroxéniques, c’est-à-dire qui fondent en verres où émaux noirs, ou d’un vert foncé. Les modifications du tissu et de la com- position mécanique marquent trois subdivisions nalurelles, soit pour Ja scorie, soit pour la pumite : ce sont celles que J'ai employées ci-dessus. Des variétés nombreuses seront aisément désignées, en prenant en considération les accidens de forme et de boursoufflement. Considérées géologiquement, les différentes variétés de scorie et de pumite peuvent être définies comme des produits mixtes de l'agrégation régulière et de l'agrégation vitreuse, ayant agi simultanément pendant le refroidissement de la matière des laves; produits qui, indépendamment d’une substance vitreuse dont la nature est présumée d’après de très-grandes probabilités, renferment des minéraux microscopiques plus ou moins abon- dans , qui appartiennent à des espèces déterminées et de même pature que celles dont les pâtes lithoïdes sont entièrement formées. En d’autres termes, la pâte qui compose la pumite et la scorie est tantôt en granite microscopique criblé d’un grand nombre de vacuoles et mélangé d’un peu de verre, tantôt un porphyre microscopique à base de verre, tantôt un verre ou émail mêlé de cristaux microscopiques assez rares. Ces définitions de la structure intime et de la composition mécañique des différentes variétés de la scorie et de la pumite paroïtront à peine remarquables à raison de leur extrême sim plicité ; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 3ot plicité; mais les applications sont importantes; j'en choisis l'exem- ple suivant à cause de l’intérêt plus général qu’il peut offrir. Les voyageurs qui ont visité les volcans brûlans ont été frappés de la stérilité invincible de certains courans de lave qui datent des temps historiques les plus reculés. 11s se sont étonnés de voir en même temps des courans, pour äinsi dire modernes, parés de la plus riche végétation ; malgré tout ce que ce phénomène a de‘singulier, personne n’en a donné l'explication ; je crois pou- voir la trouver dans la différence qui doit exister entre le tissu intime des croûtes scorifiées superficielles, Je puis citer, à ce sujet, l’état actuel de la surface du superbe courant basaltique de 1705 à Ténériffe; c'est une scorie grumeleuse proprement dite qui compose l'écorce supérieure de ce courant; elle est déjà en partie désagrégée et déeomposée, et la végétation spon- tanée commence à envahir ses débris. On conçoit en eflet, que des masses formées de parties hétérogènes très-fimes, criblées d’an grand nombre de vacuoles, et renfermant en abondance la substance le plus facilement altérable de tous les terrains, c'est-à-dire Je feld-spath, puissent tomber en poudre et se ré- soudre en terre végétale beaucoup plus promptement que des croûtes presque entièrement vitreuses, sur la matière desquelles les agens atmosphériques ont nécessairement peu de prise et peu d'action. CHAPITRE SIXIÈME. Examen des Pâtes indéterminées qui composent les Laves vitreuses de tous les âges. Sous le nom de verres volcaniques, je confonds les laves vi- {reuses de Dolomieu , une grande partie de celles de M. Haüy, les laves vitreuses fontiformes, théphriniques et pétrosiliceuses de M. Delamétherie; l’obsidienne de M. Werner, quelques va- riélés de la base de son pechstein porphyrique, qui ne contient pas de quartz, le perlstein; enfin les obsidiennes rouges smalloïdes, que Depach et moi avons trouvées à Ténériffe. De toutes les bases indéterminées, ce sont les verres volca- niques qui se représentent avec les traits de l'identité la plus parfaite, dans les terrains volcaniques de tous les âges; l'imper- méabilité du tissu intime rend un grand nombre de variétés presque inaltérables. A ne consulter que les préjugés anciens, on devroit croire que Tome LXXXIII. OCTOBRE an 1816. Qq 302 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les laves vitreuses occupent une place très-étendue parmi les? roches volcaniques, mais il n’en est pas ainsi. Elles sont rares, même dans les volcans brûlans. On les trouve plutôt en frag- meus parmi les déjections incohérentes, que composant des cou-; rans entiers. On sait que les plus beaux, gisemens sous,cette der-, nière forme sont à Ténérifle, et qu'ils proviennent des éruptions modernes qui.ont élevé le mamelon du pic. Ce mamelon lui- même est exclusivement composé d’obsidienne porphyrique et de pumite (1). sys 1 On pourra voir, dans la table de mes expériences, que je n’ai point confondu les verres volcaniques avec les substances d’ap- parence vitreuse ou piciforme, désignées sous les noms de 7é- tinite , pechstein ou gæstein: Il paroît, d’après les expériences de M. Sage, que ces substances contiennent de l’eau en très- grande quantité; en outre, elles renferment souvent du quaïtz disséminé en grains très-apparens. On les trouve en un très-pétit nombre de localités, où leur gisement n’a rien d’avéré. Je n’ai pas cru devoir en faire l'objet d’un.examen comparatif. Quelle que soit l’opacité ou la translucidité des verres volca- niques , leur couleur rouge, brune, noire, verte, grise ou blanche, et leur tissu plus ou moims uniforme, ils fondent tous, soit en verre blanc ou légèrement coloré, soit en verre noirâtre foncé, ce qui les partage en deux genres distincts, Les caractères extérieurs, ainsi que l’analyse mécanique , sub- divisent chacun de ces deux genres en trois sortes, savoir: les verres imparfaits , les verres smalloïdes et les verres parfaits. Les premiers, qu'on pourroit aussi bien nommer pâtes li- t1hoïdes imparfaites, à raison de leur aspect demi-vitreux, sou- (1) À cette occasion, je ne puis me dispenser de relever une des plus singu- lières méprises dans lesquelles l’hypothèse des formations trappéennes ait en- trainé une partie des minéralogistes du Nord. Reuss, après avoir supposé avec M. Werner, que presque toutes les poncesontuneorigine dite aqueuse, etque l’ob- sidienne porphyrique est une roche primitive , embarrassé de citer une localité où le gisement de cette prétendue roche primitive füt avéré, s’est decidé à donner comme exemple le pic de Ténériffe. Certes, lorsque Wallerius et Berg mann ont élevé des doutes sur l’origine des roches basaltiques anomales, ils ne prévoyoient guere qu'on pousseroit un jour l’incrédulité systématique jusqu’à méconnoître l’origine des laves qui forment la bordure immédiate des orifices volcaniques encore fumans , et qui en sont les produits les plus incou- testables. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 303 mis au microscope, s’y présentent formés d’une matière vitreuse dans laquelle sont disséminés des rudimens plus où moins com- plets de cristaux , ou grains microscopiques. Ces grains, de mêmes couleurs. et de la même nature que ceux des pâtes lithoïdes , l'amphibole et le fer oligiste exceptés, ont ordinairement le même volume, Ceux qui sont colorés se distinguent très-nettement ; mais il faut de l'attention pour ne pas confondre les autres avec la pâte vitreuse, lorsque celle-ci est réduite en très-petits éclats. - Les verres volcaniques parfaits exposés au microscope, y conservent l’uniformité apparente de leur tissu. On y aperçoit seulement quelques grains très-rares de fer titané; les verres smalloïdes ou piciformes ne différent des premiers que par l’in- tensité de leurs couleurs et de leur opacité; réduits en fragmens très-minces, ils deviennent translucides et affectent des couleurs claires. Les très-petits éclats translucides et incolores qu’on ob- tent en brisant un assez grand nombre de variétés de l’une et l'autre sorte, ne présentent jamais la transparence cristalline des fragmens de feld-spath, et les modifications régulières de leur cassure. Ils fondent un peu plus facilement; du reste, il faut du soin pour ne pas se méprendre au premier aspect. Je ferai remarquer maintenant, que dans les sortes qui fondent en verre blanc ou légèrement verdâtre, on trouve souvent des cristaux apparens à la vue simple, de feld:spath et rarement de mica ; on y rencontre aussi, mais comme accidentellement ; les dütres minéraux volcaniques; c’est au contraire le pyroxène ac- compagné du péridot, qui donnent l'aspect porphyrique aux sortes qui fondent en verre de couleur très-foncée. On conçoit que, d’après la composition mécanique des pâtes vitreuses imparfaites, il doit exister une foule de variétés in- termédiaires , dont le tissu s'approche plus ou moins, soit de la structure tout -à-fait lithoïde, soit de la structure entièrement vitreuse, suivant l'abondance ou la rareté des cristaux micros- copiques disséminés. C’est effectivement ce qu’on verroit dans une collection nombreuse et bien faite de ces produits. La na- ture réunit quelquefois dans le même bloc de lave, ancienne ou moderne, ces trois structures d'apparence si différente, se confondant insensiblement l’une avec l’autre à leurs points de contact, Ce fait important, si commun au contact des pâtes sco- rifiées avec les pâtes lithoïdes, mais qui s’y trouve masqué par les apparences dues à l'abondance des vacuoles microscopiques et à l'extrême boursoufilement, est encore peu connu. J’ai été Qq 2 304 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE assez heureux pour en découvrir deux exemples, aussi remar- quables par l'étendue qu’ils occupent, que par la nature des pâtes composantes, en deux localités des volcans éteints incon- testables, de l’Auvergne et du Vivarais; localités dont je don- nerai la monographie dans un Mémoire particulier. Il y a long-temps que les résultats de l’analyse chimique et de la fusion, la comparaison des pesanteurs spécifiques et l'étude des caractères empiriques, ont porté les minéralogistes à pré- sumer que les pâtes vitreuses qui fondent en verre blanc con- tenoient les élémens prochains du feld-spath ; opinion qui devient tout-à-fait probable d’après mes expériences; mais il y a peu de temps que l’on connoît les pâtes vitreuses fondant en verre noir, C’est à M. Delamétherie et à M. de Drée qu’on en doit les premières annonces; on peut dire que ces dernières sortes aurojent manqué à la série méthodique des pâtes volcaniques; à l'avenir elles joueront un rôle remarquable. En eflet, les deux exemples de passages immédiats dont j'ai annoncé ci-dessus la décou- verte, présentent la transition parfaite du verre noir au ba- salte le plus dense et de l’origine la plus incontestable. On voit, d’après ces données, que les notions minéralogiques et géologiques qu’on doit admettre désormais à l'égard des verres volcaniques, sont analogues à celles qui caractérisent les pâtes scorifiées légères, pesantes et grumeleuses; à la vérité les apparences produites , soit par l’absence ou l’abondance des va- cuoles microscopiques , soit par l'extrême boursoufilement , soit par les formes extérieures des masses, soit par l’opacité ou la transparence de la matière vitreuse, défigurent singulièrement les verres volcaniques dans la scorie et la pumite; mais la com- position mécanique des uns et des autres offre tous. les carac- tères de l'identité. - Les verres volcaniques sont donc ou pyroxéniques, ou feld- spathiques , à la manière des pâtes scorifiées. Ils ne peuvent avoir, dans les méthodes minéralogiques, que des places de con- vention, à la suite, soit du feld-spath, soit du pyroxène. Quant à la nomenclature, je conserve le nom d’obsidienne aux sortes qui fondent en verre blanc ou légèrement coloré, et je donne le nom de gallinace aux sortes pyroxéniques, c’est-à-dire qui fondent en verres ou émaux d’une couleur noire, ou vert noi- râtre foncé. Les distinctions de parfaite, de smalloïde et d’im- parfaite, partageront la gallinace et l’obsidienne chacune en trois subdivisions naturelles. Les variétés principales seront facilement établies d’après les accidens de forme, d’éclat et d’opacité. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 30 Je ferminerai ce que j'avois à dire sur les différens produits de la coagulation de la inatière des laves que j'ai examinées jus- qu'ici, en faisant remarquer que mes résultats jettent un jour tout-à-fait nouveau sur les expériences qu’on a tentées il y à déjà quelques années, en soumettant à la fusion artificielle, et à des refroidissemens gradués, plusieurs substances, soit vol- caniques, soit non volcaniques, douées du tissu compact ou terreux. D’après mes observations, on peut maintenant disserter très- clairement ce qui a manqué aux belles expériences de M, Hall pour en rendre les conséquences absolues. On voit qu’il eût fallu, avant toute chose, que M. Hall eût défini la structure intime et la composition mécanique des substances qu’il a employées, celles des cristallites qu'il a obtenues. Les mêmes lacunes setrouvent dans les expériences ingénieuses tentées par M. de Drée, dans l'intention de prouver que la fu- sion artificielle des trapps et des cornéennes pouvoit produire des laves basaltiques. Voici done comment je crois être autorisé à marquer l’état ac- tuel de cette partie de nos connoissances. On peut bien assurer que certaines substances douées du tissu terreux ou compacte (quelle que soit d’ailleurs leur origine) peuvent, après avoir été artificiellement fondues , se solidifier à la manière des javes in- candescentes, tantôt avec la contexture vitreuse , tantôt avec la contexture lithoïde, et tantôt avec une contexture mixte; mais il reste à démontrer, qu’en cas d'agrégation régulière ou lithoïde, l'art reproduit bien réellement , dans les cristallites obtenues, les minéraux microscopiques dont se composoient , ou sont censées se composer les masses compactes ou terreuses mises en ex- périence. Quant aux laves lithoïdes en particulier, comme leurs minéraux élémentaires sont très-diffléremment fusibles, et souvent presque infusibles , il est évident qu’essayer de les réagréger après la fusion, c’est, à quelques diflérences près, vouloir refaire du granite ordinaire. Je suis bien loin, au reste, d’avoir intention de diminuer, par ces considérations, le mérite des expériences de M. de Drée et de M. Hall. Ces observateurs ont, ainsi que M. Fleurieu de Bellevue, M. Watt, M. Dartigues, M. Fourmi et Spallan- zani, qui ont fait des recherches analogues, ouvert un nouveau champ à la Chimie, en démontrant que son pouvoir pour créer 306 JOURNAL -DE, PHYSIQUE, .DE CHIMIE des minéraux. artificiels (1) par la voie sèche, s’étendoit} atssi aux combinaisons des principes, terreux, ; ils ont enrichi, la science géologique d’une source d’analogies nouvelles, qui,ont aidé à concevoir, jusqu'à un certain point, les différens æflels de la coagulation des laves, bien, qu’on ne fit entrer en con sidération que la simple influence du mode,de refroidissement ; et la notion très-imparfaite de leur natureet de leur.état d’agré- gation. Maintenant que mes expériences définissent rigoureuse: ment, non-seulement ce qu’il s’agissoit d'expliquer, c’est-à-dire l'état d'agrégation, mais encore ce ‘qu’on n’expliquoit, pas faute de s’en être rendu compte, c’est-à-dire la composition méca- nique, on pourra plus facilement chercher à rendre, les, ana- logies plus exactes, en faisant des éxpériences plus directes et combinées de manière à ce que les résultats puissent satisfaire (1) De quelque manière que la Chimie agrege les corps simples.et les com- binaisons diverses qu’elle obtient en décomposant les substances minéralesnatu- relles, les produits solides obtenus seroient plus nettement définis par le nom de minéraux artificiels, que par celui de produits chimiques. Un grand nombre de ces minéraux , que j'appelle donc artificiels , ne peuvent être agrégés sous forme de corps solides que par la voie sèche, c’est-à-dire par la simple sous- traction d’une certaine quantité de chaleur acquise, tels sont les métaux, plusieurs oxides, et beaucoup de sels volatiles. D’autres n’obéissent à l’agré- gation régulière que par la soustraction d’un liquide. interposé, condition à laquelle il faut ajouter , en beaucoup de cas, la soustraction d’une certaine température acquise ; tels sont les sels solubles, Quant aux sels insolubles et aux combinaisons terreuses , on ne les obtient que sous forme de particules in discernables , tantôt pulvérulentes , tantôt foiblement adhérentes , tantôt con- fusément agrégées à l’état de verre où d’émaux. Jusqu’à présent les efforts de la Chimie ont été vains pour donner à ces minéraux artificiels vitreux, friables ou pulvérulens , l’existence de corps régulièrement agrégés , c’est-à-dire pour en faire des cristaux. Elle n’échoue pas moins , lorsqu’après avoir dissous les élémens des substances pierreuses naturelles, elle veut les réagréger sous leur forme première , ou simplement avec leur tissu cristallisé originaire. Son impuissance est d'autant plus remarquable , qu’elle opère facilement la réagré- gaton réguliere d’un grand nombre de minéraux naturels, métalliques, salins ou sulfureux. On ne doit donc pas s’étonner de la grande importance qu’on a attachée à la découverte de plusieurs combinaisons terreuses cristallisées au milieu des produits vitreux des fours à chaux, des verreries el des foyers de forge. M. Fleurieu de Bellevue est le premier et le seul savant qui se soit occupé du soin de déterminer les caractères spécifiques de cette classe encore peu nombreuse de minéraux artificiels. Ses recherches à cé sujet, et les ana— logies qu’il en a déduites, offrent un puissant intérêt, et se trouvent consignées dans un grand Mémoire imprimé au Journal de Physique, 1805 , tome LX , pag. 409. ET D'HISTOIRE. NATURELLE. 307 aux conditions désormais bien connues du phénomène; mais pour-obtenirdertels résultats; "ilfaudra sans‘doute inventer des procédés nouveaux ; il me semble, du moins, qu'il seroit pré- Jiminairement convenable d'étudier et de déterminer avec exactitude la nature et lé rôle, non-seulement des substances volatiles qui s’exhalent pendant le refroidissement des laves, mais encore des matières salines qui se séparent et se concrètent , soit à l’intérieur, soit à l'extérieur des courans, et que les pre- mières eaux filtrantes dérobent si promptement à l’observateur: ces recherches paroïssent, indispensables à beaucoup d’autres égards; le moindre succès qu'on obtiendroit en s’y. livrant auroit d'autant. plus de prix pour la science’, que les difhcultés'à vaincre sont trés-grandes, et que les hommes les plus habiles y ont échoué jusqu'à présent. que RAT n: 5 té (La suite a prochain Cahier.) 3%08 JOURNAL-DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, etc. I e i | - : L ; | u TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS.GCE CAHIER. Suite des Méthodes classiques et naturelles appliquées à la Géographie physique; par M. Toulouzan de Sarnt- Martin. Deuxième Mémotre. Pag. 229 Tableau météorologique ; par M. Bouvard. 242 Prodrome d'une nouvelle distribution systématique du règne animal; par M. H. de Blainville. 244 Mémoire sur la possibilité de faire vivre des mollusques Jfluviatiles dans les eaux salées, et des mollusques marins dans les eaux douces, considérée sous Le rapport de la Géologie; par F. $. Beudant. 268 Suite du Mémoire sur les substances minérales dites en masse, gui entrent dans la composition des roches volcaniques de tous les âges; par P. Louis Cordier. 285 De l'Imprimerie de M®° Veuye COURCIER, Imprimeur. Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Auguitins, n° 57. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. NOVEMBRE AN 1816. MÉMOIRE Sur les nouvelles Propriétés de la Chaleur à mesure qu’elle se développe dans sa propagation le long des morceaux de verre; Par Davi BREWSTER, Des Sociétés Royales de Londres et d'Édimbourg ; DANS UNE LETTRE ADRESSÉE A SIR JOsEPH BANKS. Extrait des Transactions Philosophiques. Lu dans la Séance de la Société Royale, le 11 janvier 1816. EXTRAIT (r). MONSIEUR, Dans deux Mémoires publiés dans les Transactions Philoso- phiques de la Société Royale ; j'ai parlé de l’action de la chaleur sur le verre, qui met celui-ci en état de faire passer un rayon EE (1) Nous n’avons pu faire graver les nombreuses figures qui sont dans le Mémoire de l’auteur. (Note du Rédacteur.) Tome LXX XIII. NOVEMBRE an 1816. Rr 310 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de lumière dans deux pinceaux polarisés à l’opposite, et j'ai démontré qu’un verre qui n’est pas apprêté dans la forme des gouttes du prince Ruppert, possède les axes optiques distincts, et agit sur la lumière comme tous les corps régulièrement cristallisés. Ce sujet a quelquefois fixé de nouveau mon attention, depuis que j'eus découvert que la réflexion de tous les métaux, et la réflexion totale des secondes surfaces des corps transparens, pro- duisoient le même effet que les cristaux cristallisés, en séparant un rayon de lumière polarisée dans ses teintes complémentaires, Ce qui m'a porté à croire que l'existence de deux pinceaux polarisés à l’opposite et la production des couleurs complé- mentaires , étoient des effets concomitans ; en conséquence je me disposai à examiner la vérité de cette supposition dans la cir- constance du verre exposé à la chaleur. Dans mes premières expériences sur ce sujet, je n’avois point observé ces couleurs, attendu que je n’étois pas alors en possession de la manière de les découvrir lorsqu'elles formoient les teintes inférieures de l'échelle de Newton; mais j'ai découvert depuis, une méthode de les rendre visibles dans tous les cas, par les effets qu’elles produisent en modifiant la couleur d’un morceau de:sulfate:de chaux que je pris pour modèle. Les résultats de ces expériences, en même temps qu'ils con- firment la supposition que j'ai faite, m'ont aussi conduit à la découverte de plusieurs phénomènes singuliers, qui constituent une nouvelle branchede Physique ,analogue, dans son caractère général, aux sciences du magnétisme et de l'électricité. Les intéressantes propriétés de Ja lumière et de la chaleur qui sont exposées dans le Mémoire suivant, ainsi que les vues nouvelles qui sy trouvent développées relativement à la structure des corps-cristallisés, fixeront sans doute l'attention du chimiste, du minéralogiste et du naturaliste, en même temps que l’éclat et la variété des phénomènes qu'il embrasse exciteront la cu- riosité de ceux aux yeux de qui les recherches scientifiques ne sont que des objets d'amusement et de conversation. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 311 SECTION PREMIÈRE. Sur les effets transiloires qui se développent pendant la propagation de la Chaleur le long des morceaux de verre, ou durant la communication du verre aux corps environnans. Proposition preinière. « Lorsque la chaleur est propagée le long d’un morceau de » verre, ses progrès sont marqués par la communication d’une » structure cristalline qui change son caractère avec la tempé- » rature, et qui disparoît quand la chaleur est répandue d’une » manière uniforme sur le morceau. » Si on laisse le bord d’un morceau de verre sur une barre de fer rouge placée horizontalement, et qu’un rayon de lumière polarisée dans une surface plane inclinée de 45° à l’horizon passe au travers, la lumière sera dépolarisée à différens degrés dans les différentes parties du verre. Lorsque la température est rendue uniforme, le morceau de verre perd sa propriété de dé- polarisation. Pour prouver qu'une température inégale est né- cessaire au développement de cette structure, j'ai tenu un petit morceau de verre dans des tenailles chauffées au feu, dont les extrémités étoient rondes. Il acquit aussitôt la structure dépo- larisante, qu’il perdit du moment où la chaleur répandue devint uniforme. Je refroidis alors le verre, et le tins une seconde fois dans les mêmes tenailles, beaucoup plus froides qu'auparavant. La structure dépolarisante lui fut de nouveau communiquée comme précédemment. J’obtins le même résultat avec 12 morceaux de verre placés sur une barre de fer rouge. Proposition deuxième. « Lorsqu'un morceau de verre est amené à une température » uniforme beaucoup au-dessus de celle de l'atmosphère, la » communication de sa chaleur à l'air environnant, ou aux » autres corps plus froids que lui, est marquée par la produc- » tion d’une structure cristalline semblable à celle décrite dans » la Proposition précédente. » Je pris trois morceaux de glace épaisse de miroir , que Jj'a- Rr 2 312. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE menai à une température uniforme, en les plongeant dans l’eau bouillante. Dans cet état ils n’exercèrent pas d'action sur la lumière polarisée; mais lorsque leurs bords furent placés sur une masse de fer froid, l'inégalité de la température occasionée par labstraction de leur chaleur, produisit une structure cris- talline sur chacun des bords des morceaux, qui polarisèrent une teinte d'un blanc bleuâtre du premier ordre. A une distance plus éloignée des bords, les morceaux dépolarisèrent une teinte plus basse dans l'échelle de Newton (1). Lorsque les morceaux sont exposés à l'air, le même effet est produit; mais dans un degré moindre, Voyez Proposition quatorzième. Proposition troisième. « Lorsque la chaleur est propagée le long d’un morceau de » verre, ses petites parties se combinent de manière à présenter » des axes dépolarisans neutres et distincts, comme tous les cris- » taux doués de la double réfraction, les axes neutres étant » parallèles et perpendiculaires à la direction dans laquelle la » chaleur est propagée. » Lorsqu'un rayon de lumière polarisée dans une surface plane inclinée de 45° à l'horizon, passe au travers d’un morceau de verre placé sur un morceau de fer rouge horizontalement posé, il est complètement dépolarisé; mais lorsqu'une surface plane d’une polarisation primitive est parallèle ou perpendiculaire à l'horizon, il ne survient aucun changement sur le rayon pola- risé, un effet intermédiaire étant produit dans les positions in- termédiaires, comme dans les corps régulièrement cristallisés. Proposition quatrième. « Lorsque la structure dépolarisante est communiquée au » verre par la chaleur, de la manière ci-dessus décrite, le verre » acquiert la propriété de distribuer la lumière polarisée dans » ses couleurs complémentaires. » L'appareil disposé comme dans la Proposition troisième, la (1) On dit qu’une teinte est plus élevée qu’une autre, lorsqu’elle appartient à un ordre plus élevé, ou qu’elle est à une plus grande distance du noir ou du commencement de l'échelle. Cette explication étoit nécessaire , M. Biot ayant employé ce mot dans le sens opposé. , ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 318 lumière passera à travers le verre, qui doit être analysé par un prisme de spar calcaire, ou par la réflexion à l’angle polarisant ‘un morceau de verre noir, ayant un mouvement de rotalion autour du rayon polarisé. Lorsque la surface plane de réflexion du verre: noir est perpendiculaire à la surface plane de polari- sation primilive, toute la surface du morceau de verre sera couverte de franges belles et hautes en couleur; et lorsque la surface plane fait un mouvement de rotation à g0° de sa posi- tion, la surface de verre sera couverte de franges complémen- taires, les couleurs passant graduellement d’un état à l’autre durant le mouvement de rotation du verre , de la même mamiere que dans les corps cristallisés, La nature et l'intensité de ces teintes sont représentées par les formules suivantes; elles sont les mêmes que celles imaginées par M. Biot pour les corps cristallisés : P — O + E cos’ 2.4, Il = E sm’ 2. Dans ces formules P représente le pinceau ordinaire et I le pinceau extraordinaire ; O est la teinte colorée qui conserve sa polarisation primitive, et sur laquelle le verre cristallisé n’agit pas; E est la teinte complémentaire, qui a perdu sa polarisation primitive par l’action du verre polarisé dans un angle égal à 2.a; et a est l’angle vertical que l'axe du plateau forme avec la surface plane de la polarisation primitive. Proposition cinquième. « Les franges coloriées mentionnées dans la Proposition pré- » cédente, sont composées de six rangées diflérentes, deux ex- » térieures, deux intérieures et deux aux extrémités. Les rangées » extérieures occupent les bords, les rangées intérieures le » milieu, et celles aux extrémités, les extrémités du morceau » de verre; et chaque rangée est séparée de celle adjacente » par une frange d’un noir foncé. » A mesure que les teintes augmentent en nombre, les franges des extrémités subissent des changemens particuliers, dont nous donnerons la description dans la seconde partie de ce Mémoire. Lorsque le morceau de verre s'étend au-delà du fer chaud , les franges des extrémités ne sont pas produites, 314 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Proposition sixième. « Explication du développement successif et de l'extinction » subséquente des franges pendant la propagation de la chaleur » le long du morceau de verre. » Lorsque le morceau de verre est placé sur le fer chaud, une frange ou ondulation d’un blanc pâle paroît à l'instant, et avance graduellement sur le verre, en chassant devant elle une ondulation sombre et indéfinie. À peu près dans le même ins- tant, s'avance du bord supérieur une ondulation semblable, mais d’un blanc plus foible, qui chasse aussi devant elle une pareille ondulation terne et indéfinie. Bientôt après une autre frange blanche délayée se montre vers le centre, en s’avançcant vers les bords. Les ondulations de lumière blanche qui ont leur ori- gine aux bordsdu morceau, et celles qui viennént joindre les ondulations du milieu, condensent les ondulations ternes et in- définies en deux franges noires. Une ondulation d’un jaune foible paroît ensuite, empiétant graduellement sur la blanche; elle est suivie de teintes orange et rouge, qui complètent le premier ordre de couleurs de l'échelle de Newton. Les couleurs du second ordre avancent successivement, et la même chose a lieu à l'égard de tous les ordres supérieurs; en sorte que trois, quatre et quel- quefois même neuf ou dix ordres de couleurs se montrent dis- tinctement. Lorsque la couleur verte du second ordre paroît sur un bord , une ondulation jaune du premier ordre se voit sur l’autre, s’avancant sur le morceau; elle est suivie de teintes orange , rouge, pourpre, etc.; enfin se montrent plusieurs ordres ; auprès, et dans le même temps, une autre ondulation jaune se développe et empiète graduellement des deux côtés sur la frange blanche, mais n'arrive jamais jusqu’aux franges noires, Le jaune devient orange, œillet, pourpre, bleu, vert, etc. ; chacune de ces couleurs s’avance vers les franges noires; mais jamais elle ne couvre entièrement la couleur précédente; de manière que de nouvelles franges quelquefois au nombre de six et de huit, se trouvent ainsi formées entre les espaces noirs. Les franges des extrémités se développent dans le même temps et d’une manière à peu près semblable. A mesure que la chaleur du fer se répand d’une manière plus uniforme sur le morceau de verre, les franges entre celles noires et les bords diminuent rapidement en nombre et s’eflacent ET D'HISTOIRE NATURELLE. 315 aux franges noires, celles qui restent augmentant foujours en grandeur. Le même effet a lieu vers les bords opposés aux pre- miers, mais beaucoup plus lentement ; en sorte qu’il est un mo- ment où les franges entre les bords opposés sont en aussi grand nombre que celles entre un de ces deux bords et les franges noires. Les deux rangées intérieures diminuent et disparoissent de la même manière , la partie placée sur le fer chaud déve- loppant de nouveau toutes ses premières couleurs dans un ordre inverse. On ne voit plus alors que des franges blanches et noires, qui s’effacent graduellement et disparoissent à la fin, lorsque la température du verre devient uniforme, Proposition septième. « Les couleurs des franges, dans toutes les six rangées, montent » dans l’échelle de Newton à mesure qu’elles s’éloignent des » espaces noirs, les franges adjacentes à ces espaces étant com- » posées de couleurs du premier ordre. » La vérité de cette Proposition a pu être sûrement déduite d’une comparaison de ces teintes avec celles comprises dans l'échelle de Newton, ou avec la table des couleurs que j'ai trouvée dans les cercles que développe la topaze lorsqu'elle est exposée à un rayon polarisée. Cependant pour obtenir une preuve plus convaincante, je pris un morceau de sulfate de chaux , qui polarisoit un bleu brillant en premier ordre, et le combinai avec un morceau de verre placé sur un fer chaud. Lorsque l'axe du sulfate de chaux fut parallèle à celui du morceau de verre, le bleu de la seconde frange au-dessous d’une des deux franges noires , devint noir, teinte due à la difléreuce de leurs actions; mais lorsque cet axe étoit à angles droits à l’un des bords, la même frange bleue se changeoïit en un vert jaunâtre, teinte due à la somme de leurs actions. D'où il suit que le bleu dans la seconde frange au-dessous d’une des deux franges noires, est un bleu du second ordre. J’obtins les mêmes ré- sultats en combinant le sulfate de chaux avec les parties du verre qui produisoient les autres rangées de franges. J'obtins une autre preuve de la Proposition de la manière suivante. Je pris deux morceaux de verre épais; après les avoir placés sur unter chaud, comme ci-dessus, J'attendis que toutes les franges eussent disparu , à l'exception de la blanche du premier ordre, Lorsqu'un des morceaux eut été élevé verticalement, de 316 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE C&IMIE manière à ce qua partie d’un des morceaux fût opposée au centre, les deux franges blanches produisirent une teinte noire. Lorsque le même morceau fut abaissé jusqu’au centre de celui opposé à l’axe de l’autre, ia frange blanche au-dessus du premier devint également noire. Cependant elle n’étoit pas aussi noire qu'auparavant, altendu que dans la frange extérieure le blanc est plus brillant que dans celle intérieure. Dans le premier cas, celle supériorité étoit compensée par le refroidissement du verre vers le premier axe, à cause de son élévation au-dessus du fer chaud; au lieu que dans le second cas le refroidissement n’avoit pas aflecté la partie intérieure de cet axe. Au contraire, lorsqu'un des morceaux fut tenu de manière à ce que ses franges fussent à angles droits à celles de l’autre, le blanc des franges extérieures de l’un des deux morceaux combiné avec le blanc des franges extérieures de l’autre, produisoit du noir; le blanc des franges intérieures de l’un des morceaux combiné avec celles de l’autre morceau, produisoit du noir; et le blanc des franges intérieures de l’autre morceau combiné avec le blanc des franges extérieures de l’autre morceau, produisoit un blanc plus brillant. Le résultat de ces combinaisons est de produire une croix noire très-belle et trés-régulière. Lorsque les deux morceaux sont de la même largeur, ils polarisent les mêmes teintes, et leurs franges extérieures aux deux bouts sont de la même grandeur. Lorsqu'il survient un changement dans quelques-unes de ces circonstances, la croix change aussi de forme d’une manière dont il est aisé de s'assurer en examinant les franges séparées ; mais lorsqu'un des morceaux polarise des teintes plus élevées que l’autre, la croix ne paroît plus. Les franges du morceau qui polarise la teinte la plus élevée, sont bandées depuis leur rectitude longitudinale. Les figures présentées à l’intersection des deux morceaux peuvent toujours être déterminées à priori , d'après la connoissance des franges que chaque morceau pro- duit séparément ; de manière que la nature des franges séparées et la valeur du changement opéré dans les teintes , se prédira aisément d’après les figures qui sont présentées à la place de l’in- tersection. Lorque les teintes polarisées par les deux morceaux sont nombreuses et brillantes, les figures intersectionnales sont de Ja plus grande beauté, Proposition ET D'HISTOIRE NATURELLE. 317 Proposition huitième. « Les parties du morceau de verre qui présentent les deux » rangées extérieures de franges ont la mème struclure que celte » classe de cristaux doués de la réfraction double, qui renferme » le sulfate de chaux, le quartz, etc., dans lesquels le rayon ex- » traordinaire est attiré vers l’axe, tandis que les parties de » verre qui donnent les deux rangées intérieures et terminales, » ont la même structure que l’autre classe de cristaux doués » de la double réfraction, qui renferme le spar calcaire, le » béryl, etc., dans lesquels la déviation du rayon extraordi- » naire de l'axe est produite par une force répulsive. Les por- » tions entre celles qui produisent les espaces noirs ont une » structure intermédiaire, comme les portions de muriate de » soude, de. spar fluor et le diamant, privés de la propriété de » la double réfraction. » Pour établir ce singulier résultat, je combinai un morceau de sulfate de chaux qui polarisoit un bleu brillant du second ordre, avec différentes parties de verre qui donnoient les six rangées de franges. Lorsque l'axe du morceau de sulfate de chaux fut parallèle aux franges, le bleu de la seconde frange dans la première rangée extérieure au-dessous de l'espace noir, et le bleu de la seconde frange extérieure au-dessus de l'espace noir supérieur devinrent noirs; mais lorsque l’axe du sulfate de chaux étoit perpendiculaire à la rangée de franges ter- minales inférieures, le bleu des mêmes franges se changeoït en un vert jaunâtre. Au contraire, lorsque l’axe du morceau de sulfate de chaux étoit perpendiculaire à la rangée de franges précitée, le bleu de la seconde frange de la première rangée intérieure au-dessus de l’espace noir, et le bleu de la seconde frange de la seconde rangée intérieure au-dessous du premier espace noir, se changeoient en noir; mais lorsque l'axe du sulfate de chaux étoit parallèle à l’espace noir et aux franges terminales inférieures, le bleu des mêmes franges se chan- geoit en un vert jaunâtre. D'où il suit que l'axe des parties de la glace qui forment les rangées extérieures de franges, est un angle droit à l'axe des parties qui forment les rangées extérieures : la seconde expérience exposée dans la Proposition septième donne le même résultat. Puis done que les mêmes eflets que ceux que nous avons décrits proviennent de la com- binaison de morceaux cristallisés pris dans les deux classes de Tome LZXXXIII NOVEMBRE an 8116. ss 518 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE cristaux doués de la double réfraction, comme l’a prouvé M. Biot, nous pouvons regarder les vérités établies dans cette Proposi- tion comme complètement établies. Coroll. 11 suit de cette Proposition qu'un seul morceau de verre cristallisé par la propagation de la chaleur, et exposé à un rayon polarisé, donne la même variété de phénomènes que tous les cristaux dans le règne minéral. Nous avons déjà vu qu’il possède la structure de toutes les trois classes de cristaux doués de la double réfraction; mais les eristaux individuels qui composent ces classes sont distingués les uns des autres par la grandeur de leurs forces polarisantes, et la même variété se fait voir dans les forces polarisautes du verre, dont les parties adja- centes aux franges terminales inférieures ont la structure douée de la plus grande force polarisante, et les parties adjacentes aux deux espaces noirs, la structure douée de la moindre force polarisante. Proposition neuvième. « Lorsque la température de la source de la chaleur reste » la même, l'épaisseur du verre, soit qu’on emploie un ou plu- » sieurs morceaux qui polarisent quelque couleur particulière » sous une incidence perpendiculaire, est proportionnée à l'é- » paisseur de morceaux minces qui ne sont pas eristallisés, et » qui réfléchiroient la même couleur dans le phénomène des » cercles coloriés. » M. Biot a démontré, avec beaucoup d'esprit, que lépaisseur du sulfate de chaux, du cristal de roche et du spar calcaire qui polarisent une couleur particulière, est proportionnée à l’é- paisseur des morceaux non cristallisés qui réfléchissent cette cou= leur. C'étoit un motif de croire que la même loi régleroit les phénomènes que le verre échauflé présente. Je pris plusieurs morceaux de verre de diverse épaisseur, depuis le verre d'Allemagne le plus mince, d’environ + de pouce d'épaisseur, jusqu’à ? de pouce, et les ayant placés tous sur un morceau de fer rouge, je trouvai que le nombre d'ordres de couleurs qui se développèrent approchoit beaucoup de Pépaisseur du verre. Néanmoins, comme ces morceaux n’avoient pas la même composition chimique, j'employai plusieurs morceaux de glace de miroir taillés dans la même pièce; j'en plaçai un sur le fer rouge, et signalai la teinte particulière qu’il polarisa dans le premier ordre de l’échelle de Newton. ET D'HISTOIRE NATURELLE, : ërÿ Après avoir placé tous les morceaux en même temps sur le fer chaud, je les pris les uns après les autres et les joignis au premier. Les teintes qui furent ainsi produites montèrent dans l’ordre des couleurs à mesure que le nombre des morceaux augmentoit, et furent toujours comme si elles eussent appartenu à une épaisseur prise dans la proportion au nombre existant dans la troisième colonne de l'échelle de Newton. Par exemple , lorsqu'un morceau polarisoit au centre un jaune du premier ordre, deux morceaux donnoient un indigo du se- cond ordre, trois un rouge du second ordre, quatre un vert du troisième ordre, cinq un rouge bleuâtre du troisième ordre, et six un vert jaunâtre du quatrième ordre. Maintenant les nombres représentant ces teintes dans l'échelle de Newton, sont à peu près 4, 8, 12, 16, 20, 24, et ceux de lépaisseur correspondante sont 1,2, 3, 4, 5, 6. Je fis beaucoup d’autres expériences qui toutes eurent le même résultat. Proposition dixième. « Si un certain nombre de morceaux de verre de la même forme » et de la même composition chimique, mais de différentes épais- » seurs, sont placéssur un fer chaud ; si ensuite deux ou plusieurs » morceaux sont combinés symétriquement, c’est-à-dire avec » leurs bords inférieurs coïncidens, la couleur polarisée. dans » une partie quelconque sera la même que celle qui auroit été » polarisée par un seul morceau ayant une épaisseur égale à la » somme de l'épaisseur des morceaux ; mais si les morceaux » sont placés transversalement, ou avec leurs bords inférieurs à » anglesdroitslun de l’autre, la couleur polarisée vers ces parties » du verre qui sont situées de la même manière eu égard aux » espaces noirs, est la même que celle qui äuroit été polarisée » par un seul morceau, dont l'épaisseur est égale à la différence » de l’épaisseur de deux morceaux transversaux, ou systèmes » de morceaux. » - Je pris deux morceaux de glace de miroir de différente épais- seur, mais à peu près de la même couleur; après les avoir coupés en morceaux rectangulaires égaux, je trouvai que trois de lun avoient la même épaisseur que cinq de l’autre. Ces deux morceaux furent placés sur le fer chaud, et une parcelle donna les mêmes teintes que l’autre dans les franges extérieure et intérieure. Ss z 320 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Pour prouver la seconde partie de Ja Proposition , je pris trois parcelles, une de deux morceaux, une autre de quatre et une troisième de six; tous avoient été taillés dans le même miroir. Je plaçai ces différentes parcelles sur le fer chaud, et lorsque les couleurs furent parfaitement développées, je maintins le système de quatre morceaux dans une position transversale au système de six morceaux. Une large frange de lumière bleue du second ordre parut à l'intersection des lignes du centre. La même couleur fut polarisée par le système de deux morceaux, dont l'épaisseur réunie étoit égale à la différence de l'épaisseur des parcelles transversales, 7oyez la Proposition quinzième. Proposition onzième. « Le nombre et la forme des morceaux restant les mêmes, » ‘les teintes qui sont polarisées à la ligne centrale et aux bords » supérieurs ét inférieurs montent dans l'échelle de Newton , à » mesure que la température de la source de la chaleur aug- » mente. » Je pris un morceau épais de glace de miroir de 6,9 pouces de long sur 2,27 pouces de haut et 0,163 pouces d’épais- seur, et l’ayant placé sur un fer chaud qui paroissoit rouge, je trouvai qu'il polarisoit le vert du second ordre dans la pre- mière rangée extérieure des franges, et la plus grande partie du blanc du premier ordre dans la seconde rangée extérieure des franges. Lorsque la chaleur eut perdu de son intensité, le même morceau polarisa le vert du troisième ordre dans Ja première rangée extérieure des franges. Lorsque 15 morceaux de glace de miroir furent placés au haut d’un vase d’étain rempli d’eau , à une température de r90° Fahr., ils polarisèrent un vert du second ordre : l’épaisseur réunie de ces morceaux étoit d’un pouce et %. Lorsque la chaleur de ma main eut été communiquée à 1x morceaux de verre d'Allemagne, ils polarisèrent le bleu du pre- mier ordre, et donnèrent distinctement les deux espaces noirs : la température de la chambre, pendant ces expériences, étoit de 64°. Un morceau de verre d'Allemagne d'environ 0,28 de pouce d'épaisseur, donna les espaces noirs et les franges d’un blanc bleuâtre par la seule chaleur de la main. Les résultats précédens ne sont ni en assez grand nombre, ni assez exacts pour me mettre en état de-déterminer le rapport ET D'HISTOIRE NATURELLE. 921 existant entre l'épaisseur correspondante à la teinte la plus élevée et la température de la source de la chaleur. Cependant Je fais dans ce moment travailler à un appareil au moyen duquel 11 me sera facile de constater ce rapport, en obtenant différentes températures de l'huile échauflée ou du mercure. Voyez Section deuxième, Proposition douzième. « Le nombre et la forme des morceaux de verre et la tempéra- » ture de la source de la chaleur restant les mêmes, la grandeur » des franges de la première rangée extérieure est soumise à » la loi de la décroissance de la température dans la partie du » verre qui les produit. L'ordre le plus élevé des couleurs est » toujours développé à l'endroit où la températuré est au #7axt- » 7num, et les teintes descendent dans l'échelle à mesure que » la température diminue. » Il ne m'a pas été possible de déterminer exactement le rap- port entre l'épaisseur correspondante aux teintes polarisées à différentes distances de la source de la chaleur et la tempé- rature du verre aux mêmes points; mais en prenant la loi la plus probable du décroissement de la température, et en la com- parant avec la grandeur des franges, il y a tout lieu de croire que l'épaisseur est à peu près dans la proportion de la tem- pérature. Les teintes polarisées à différentes parties du morceau de verre seront représentées par quelques lignes courbes qui coupent axe vers les points neutres. Elles arrivent à leur 72aximum aux deux extrémités où elles ont le même caractère , et aussi à l’espace noir supérieur où elles ont un caractère différent, et elles disparoissent aux points correspondant aux espaces noirs. Proposition treizième. « Le bord supérieur du morceau qui polarise la teinte la plus » élevée dans la seconde rangée extérieure de franges n’a pas » recu une accession sensible de chaleur, et les parties centrales » du morceau qui forment les deux rangées intérieures de franges » n’exhibent point une variation de température jointe aux cou- » leurs qu’elles polarisent. Lorsque le nombre et la forme des » morceaux dé verre et la température de la source de la chaleur » restent les mêmes, la grandeur de ces trois rangées de franges 322 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE » est soumise à la loi du décroissement de température à la » partie du verre qui produit la première rangée extérieure. » On verra, d’après ie expériences présentées dans une Propo- silion subséquente, que la structure dépolarisante est commu- niquée au bord supérieur du morceau de verre, lors même qu'il a2, 4, 5, 6 et 7 pouces de haut. Dans quelques-uns de ces cas, le bord de verre a la même températtre que l'air ambiant, quoique la chaleur nécessaire pour produire la même frange à la partie inférieure du morceau, soit beaucoup plus grande que celle de l’eau bouillante. ù En répandant sur la surface du morceau un petit filet d’huile de maïs, qui se liquéfie à un léger degré de chaleur, Je fus à même de vérifier qu’il n’y avoit pas une variation particulière de température unie aux teintes qui furent polarisées par les trois rangées de franges mentionnées dans la Proposition. Dans tous les cas, le nombre de franges dans ces rangées augmentoit et diminuoit avec le nombre dans la première rangée extérieure. Leur largeur varioit aussi avec la largeur des franges de la première rangée extérieure, et conséquemment étoit sou- mise à la loi du décroissement de température dans cette partie du verre, Scholie. La vérité contenue dans la Proposition précédente sera sans doute regardée par les philosophes comme un des faits les plus extraordinaires qui se rencontre dans la Physique. La production d’une structure cristalline dans la partie du verre adjacente au fer chaud, quoiqu’une propriété intéressante de la chaleur rayon- nante, n’est, sous aucun rappoït, contraire aux notions reçues. Mais la communication de la même structure au bord éloigné du verre, où la chaleur n’est pas sensible, et où les forces cor- pusculaires qui unissent les parcelles ne sont point affoiblies par une approximation quelconque de fluidité, et l'existence d’une structure opposée au milieu du verre, se développant d’elle-même Sur les deux côtés d’une ligne centrale, sont des résultats aux- quels nous ne trouvons rien d’analogue que dans les phénomènes embarrassans de la polarité électrique et magnétique. Proposition quatorzième. « Lorsqu'un morceau de verre chauflé uniformément, et ayant » une température considérablement au-dessus de celle de Fl'at- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 53 ». mosphère, recoit en refroidissant une structure cristalline, » ainsi qu'il est décrit dans la deuxième Proposition, les parties » qui produisent les quatre rangées de franges ont chacune » une structure opposée à celle qu’elles avoient lorsque le mor- » ceau étoit cristallisé par l’introduction de la chaleur extérieure ; » c’est à-dire que les parties de verre qui donnent les deux rangées » extérieures de franges ont la même structure que la classe » de cristaux doués de la double réfraction, dans lesquels le » rayon extraordinaire est repoussé de l'axe; et les parties qui » forment les deux rangées intérieures de franges ont la même » structure que la classe dans laquelle le rayon extraordinaire » est attiré vers l'axe. » Je pris 12 morceaux de glace de miroir , que je chauffai uni- formément , en plaçant successivement leurs côtés et leurs bords sur une barre de fer chaud. A près m'être assuré , en les exposant à ‘un rayon polarisé, qu'ils n’avoient pas d’action sur la lumière, je les plaçai avec leurs bords sur un fer froid, de manière qu'ils présentassent les franges blanches des quatre différentes rangées. Lorsque l’axe d’un morceau de sulfate de chaux, qui polarisoit uu bleu du second ordre , fut placé à angles droits à la direction des franges, le blancdes deux rangées extérieures se changea en un rouge brunâtre, et le blanc des deux rangées intérieures en un vert elair. Ce changement eut lieu lorsque l’axe du sulfate de chaux étoit incident à la divection des franges. Lorsque les quatre franges blaüches furent produites, en plaçant le verre sur un fer chaud, tous ces phénomènes furent les contraire ; la teinte verte se montra au lieu du rouge brunâtre, et le rouge brunâtre au lieu du vert. J’obtins le même résultat en combinant des morceaux de verre cristallisé de ces deux manières diflérentes. Pour obtenir une température encore plus uniforme, je pris une parcelle de 15 morceaux de verre d'Allemagne, que je sus- pendis dans un vase d'eau bouillante, à quelque distance du fond. Aussitôt qu’ils eurent acquis la température de l’eau, je les enlevai et les plaçai avec leurs bords surun fer froid. Lesespaces noirs, ainsi que les franges, parurent immédiatement, et une teinte jaune se montra au milieu des franges intérieures. Les franges intérieures avoient les mêmes propriétés que les franges extérieures décrites dans la Proposition huitième, e£ vice versé. Cette expérience fut souvent répétée avec le même résultat. Nous appellerons séries inusitées de franges, les franges pro duites de cette manière, par opposition aux séries usilées, où 324 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE à celles produites en placant le verre froid sur un fer chaud. Je fus alors curieux d'observer les phénomènes qui se pré- senteroient en conduisant la série inusitée de franges sur une parcelle de morceaux déjà douée de la série usitée. Pour l’ef- fectuer, je placai la parcelle de 15 morceaux de veire précitée, avec leurs bords, au fond d’un vase rempli d’eau bouillante. Le fond du vase étant très-chaud , communiqua à la parcelle de morceaux la série usuelle de franges, à peu près comme une barre de fer rouge. Lorsque la parcelle fut enlevée et placée sur un fer froid, on aperçut distinctement la série usitée de franges; mais au bout de quelques secondes elle disparut par degrés, et fut remplacée par la série inusitée, qui s’avancoit des bords, et étoit occasionnée par le refroidissement des mor- ceaux. La lutte entre les franges qui s'avancoient et celles qui se retiroient, offroit quelque chose de curieux. Avant que la série usitée de franges eût disparu, les franges extérieures de- vinrent plus larges, tandis que celles du milieu diminuoient par degrés. Les deux espaces noirs se montrérent au milieu du morceau, formant un espace obscur, large et indéfini, et l’on apercut la série nouvelle, ou inusitée, s’avancçant des bords du verre. Dans ce moment parurent au milieu du morceau deux espaces blancs et deux autres extérieurs; mais un des espaces blancs du milieu disparut bientôt, et la série inusitée se déve- loppa promptement. Si les morceaux de verre qui exhibent les franges usitées sont enlevés du fer chaud etyqu'on les mette refroidir à l'air, les franges s’évanouiront par degrés, comme nous l'avons décrit dans la Proposition sixième. Mais aussitôt qu’elles disparoissent, ou peu de temps auparavant, les rangées opposées commencent à s’'ayancer sur le morceau , de la manière ci-dessus décrite, Proposition quinzième, « Lorsque les franges semblables des séries usitées et inusitées » sont combinées avec symétrie, la teinte polarisée est celle qui » est due à la diflérence de l'épaisseur; mais lorsqu’elles sont » combinées transversalement , la teinte est celle qui est due à la » somme de l'épaisseur des morceaux. Lorsque des franges dis- » semblables des deux séries sont combinées avec symétrie, la » teinte polarisée est celle qui est due à la somme de Pépaisseur ; » mais lorsqu'elles sont combinées transversalement, la teinte » polarisée est celle quiest due à la différence de l'épaisseur qui » les produit. La ET D'HISTOIRE NATURELLE. 328 La vérité précédente fut établie par la combinaison de 15 morceaux de verre d'Allemagne qui avoient subi la chaleur de l’eau bouillante, avec celles produites par un morceau de verre placé sur un fer chaud. Scholre. Les phénomènes décrits dans cette Proposition sont les mêmes que ceux produits en croisant les morceaux des deux classes de cristaux doués de la double réfraction : les premiers sont néan- moins beaucoup plus beaux que les derniers. Proposition seizième. « Pour exposer les effets produits sur les franges en variant » la hauteur des morceaux de verre. » Pour observer les changemens occasionnés par l'accroissement de la hauteur des morceaux, j’employai des morceaux de verre dont la hauteur varioit depuis 0,18 d’un pouce jusqu’à 8 pouces. Lorsque la hauteur est très-petite et pas au-dessus de 2 pouces, les espaces noirs occupent à peu près une position à égale dis- tance des lignes terminales inférieures et supérieures. Les franges sont donc très-petites, en raison de ce qu’elles doivent toujours diminuer avec la hauteur; mais elles sont d’un brillant remar- quable , et offrent la plus grande beauté dans leur développement. Comme les morceaux élevés se brisent toujours lorsque la teinte est arrivée à son #2axireum, je fus obligé d'employer des morceaux de verre de vitre commun; mais à cause de sa cou- leur d’un vert foncé, il me fut impossible d'examiner les phé- nomènes avec beaucoup de satisfaction. Quand on fait usage de parcelles de ces larges morceaux, il faut s’en servir avec la plus grande précaution, car on est presque sûr d'en voir quel- ques-uns se briser durant l'expérience. Proposition dix-septième. « Explication de l'effet produit sur les franges en variant la » forme des morceaux de verre. » Proposition dix-huitième. « Explication des effets produits sur les franges par une solu- » tion de continuité dans le verre. » Tome LXXXIII. NOVEMBRE an 1816. Tt 326 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Si la seconde rangée extérieure et les deux rangées intérieures de franges sont occasionnées par la communication actuelle de la chaleur aux parties du verre qui les produisent, il y a tout lieu de croire qu’elles ne seroient pas affectées par une solution de continuité quelconque dans le verre qui n’arrête pas les progrès de la chaleur. A cet effet, je rompris par le milieu un morceau de verre, et ayant obtenu une fracture nette, je plaçai le mor- ceau d’en haut sur celui plus bas. Ce morceau composé fut mis sur un fer chaud; mais il n'y eut pas d'effet produit sur le morceau supérieur, les franges se développant d’elles-mêmes. Lorsque la chaleur fut presqu'uniformément répandue, on vit paroître de foibles traces de franges blanches. J'obtins le même résultat lorsque les deux morceaux furent joints par l'interpo- sition de l'eau, du beaume de Canada ou de la résine, Je pris, dans cette circonstance, un morceau de verre inter- rompu par une fente ou félure qui s'étendoit un peu dans le morceau. Lorsque la chaleur eut été communiquée à son bord inférieur, on aperçut les franges comme si la félure n’eût pas existé, et la lumière blanche poiarisée parut condensée comme un fluide s’élançant autour du point du milieu. Cependant la félure s’étendit subitement; le morceau supérieur du verre se détacha avec violence de celui inférieur, et une frange noire se montra à l'instant au-dessous du nouveau bord, comme si la pAe supérieure du verre n'eût jamais été en contact avec a partie inférieure. Dans une antre expérience, suivie du même résultat, la structure cristalline au-dessus de la félure disparut, quoique les deux morceaux de verre restassent encore adhérens. La félure placée verticalement , le même effet eut lieu, comme si les deux morceaux avoient été séparés, et je n’y aperçus aucun changement après qu’ils eurent été collés avec du beaume de Canada. ‘ Au lieu de fêlures je substituai des rainures profondes qui tra- versoient le verre. Je placai sur le fer chaud un morceau épais qui avoit une rainure horizontale s'étendant de l’un à l’autre bord. Les franges blanches parurent imparfaitement au-dessus de la rainure, et au-dessous de celle-ci une ondulation noirâtre indéfinie, comme si quelque fluide avoit été obstrué dans, son passage à travers un caual étroit. Il est assez probable que cette ondulation noirâtre fut occasionnée par la combinaison de deux franges blanches de différentes rangées : le morceau ayant éclaté dans la direction de la rainure, ne m'a pas permis de pousser plus loin l'examen de ces phénomènes. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 327 Je pris ensuite un morceau de-verre qui avoit un diamant taillé dans le milieu, où parurent les franges blanches intérieures. Ayant cassé ce morceau en deux, une frange noire s’éleva à l'instant, et le morceau déploya toutes les rangées intérieures de franges sans recevoir aucun supplément de chaleur. J’essayai alors de joindre les deux surfaces séparées, en les plaçant l'une sur l’autre; mais je ne pus pas parvenir à les faire agir sur la lumière comme un simple morceau. Cependant la mélhode suivante me mit à même de surmonter la difficulté et d’obtenir quelques nouveaux résultats. Je pris un morceau de verre d'Allemagne huilé, d'environ 0,4z d'épaisseur sur 0,5 de large; après y avoir fait une entaille avec une lime, je l’appliquai à un fer chaud, qui produisit à l'instant une félure. Toute la lumière incidente fut interceptée par la réflexion totale qui fut produite. Au bout d’une heure cette fêlure commença à disparoître, et dans le courant d’une journée je la trouvai aussi complètement fermée que si elle n'avoit jamais existé. La félure étoit souvent reproduite par un fer chaud, et se fermoit régulièrement , excepté lorsque l'effet expansif de la chaleur séparoit les surfaces à une trop grande distance. Queiquefois elle se fermoit au bout de quelques se- condes , et quelquefois j'étois obligé d'employer une légère pression mécanique pour opérer la réunion. Lorsque la félure étoit ouverte, je mis le verre sur un fer chaud, et il produisit promptement des franges; maislorsqu’elle étoit fermée, et le verre placé sur le fer chaud, elle donna difiérentes rangées de franges, comme sil ne s’y fût pas trouvée de solution de continuité. Maintenant il est clair que ces deux morceaux, quoique pa- roissant se toucher, ne sont pas physiquement en contact l’un avec l’autre, ou dans le même état où ils étoient avant la fêlure. Si l’on fait plusieurs autres entailles au verre avec une lime, il se cassera toujours à l’endroit de la félure; ce qui prouve que la force de cohésion a été afloiblie, et que les surfaces, quoique opticalement en-contact, sont physiquement à une certaine dis- tance l’une de l’autre. La cristallisation du solide, comme sil étoit continu, forme une belle analogie avec ce fait intéressant du magnétisme, dans lequel deux barres pressées ensemble à Jeurs extrémités , peuvent être magnétisées comme si elles n’avoient formées qu’une seule barre, et donneront un point neutre à l'endroit de leur jonction. A 2 328 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Proposition dix-neuvième. « Lorsque la chaleur est propagée du centre d’un morcean » de verre dansles lignes radieuses, toutes les franges, ainsi que » les espaces noirs, forment des cercles concentriques, et quatre » espaces noirs radieux à angles droits l’un de l’autre, divergent » du centre dans des directions parallèles et perpendicu!aires » à la surface plane de la polarisation primitive. » Je pris un large morceau de verre et j’appliquai à son centre une boule de fer chaud. Les quatre lignes radieuses noires pa- rurent distinctement divergentes l'une de l’autre à angles droits; mais les deux espaces noirs concentriques se développèrent in- distinctement. Je voulois ensuite percer un trou au centre du morceau, et y mettre une boule rougie au feu; mais ayant dé- couvert une méthode bien meilleure d'obtenir des franges cir- culaires, dont je parlerai dans la Section suivante, je ne poussai pas plus loin l’expérience renfermée dans cette Proposition. Supposons huit morceaux de verre égaux placés sur des barres octogones de fer chaud, les espaces noirs et les franges auront aussi une forme octogone, indépendamment des effets qui ont lieu aux extrémités des morceaux. Maintenant, si la lumière po- larisée dans une surface plane inclinée de 45° à l'horizon, est transmise à travers ce système de morceaux, on verra distinc- tement les franges dans quatre morceaux, parce que leurs axes dépolarisans sont tous coïncidens avec la surface Hge de pola- risation primitive; mais on ne verra pas de franges dans les quatre autres morceaux, attendu que leurs axes dépolarisans sont inclinés de 45° à la surface plane de polarisation. Si ce système de morceaux tourne maintenant autour du centre, chacun d'eux donnera ses franges en venant dans la position des quatre pre- miers morceaux. Ces franges disparoîtront graduellement durant le mouvement des derniers morceaux, ou elles cesseront d’être visibles. Supposons maintenant le fer chaud appliqué au centre d’un morceau circulaire de verre, les espaces noirs auront sensible- ment une forme circulaire; et comme l’axe neutre de chaque morceau élémentaire, dans lequel nous pouvons supposer le mor- ceau de verre divisé, est dirigé vers l'axe du centre, les posi- tions obscures seront encore les bords du morceau, et consé- quemment on y verra une croix noireayant ses branches inclinées ET D'HISTOIRE NATURELLE. 329 à 450 de l'horizon. Cette croix restera dans la même position durant la rotation du morceau vers son cenlre, chaque morceau élémentaire perdant sa force dépolarisante lorsqu'il vient dans les lignes aux bords extérieurs et du centre. Proposition vingtième. « Lorsque la chaleur provient de deux sources différentes en » contact avec les bords opposés d’un morceau de verre, les dif- » férentes rangées de franges conservent le même caractère, » l'unique effet de la chaleur additionnelle étant de polariser » les teintes plus élevées dans les diflérentes rangées de franges. » Je plaçai 52 morceaux de verre de vitre sur un fer chaud, et lorsque les différentes rangées de franges furent distinctement visibles, je tins une autre barre de fer chaud en contact avec leurs bords supérieurs, et j’observai que les teintes plus élevées se polarisèrent dans toutes les quatre rangées de franges. Cepen- dant plusieurs morceaux éclatèrent avec une grande violence, de manière qu’il me fut impossible de voir les phénomènes qui eurent lieu lorsque la diffusion de la chaleur devint plus uniforme. Proposition vingt-unième. « Lorsque la chaleur est propagée à travers le spar calcaire, » le cristal de roche, la topaze, le béryl, l'agate et les autres » minéraux doués de la propriété de la double réfraction, aucun » changement optique n’a lieu dans leur structure. » La plus grande chaleur que j'aie pu appliquer aux cristaux doués de la double réfraction, ne produisit aucun changement, soit dans leur action sur la lumière, soit lorsque la chaleur fut propagée dans la direction de leurs axes neutres ou de leurs axes dépolarisans. Ces cristaux paroissent être dans l’état de barres d’acier saturées de magnétisme, qui ne peuvent pas ac- quérir aucune imprégnation additionnelle : étant déjà dens un état de cristallisation parfaite, ils ne sont pas susceptibles de recevoir de la chaleur aucune addition à leur structure cristalline. Proposition vingt-deuxième. « Lorsque la chaleur est propagée à travers le muriate de » soude, le spar fluor , l’obsidienne, la semi-opale, et d’autres nu- 330 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE » néraux qui n'ont pas la propriété de la double réfraction, ils » donnent les mêmes phénomènes que le verre échaufté, » Une masse de muriate de soude placée sur un fer chaud donna un jaune du premier ordre dans les franges externes et internes. Le spar fluor fut très-légèrement affecté ; la semi-opale éprouva un changement plus grand ; et l’obsidienne développa les franges aussi aisément que le verre. Un morceau d’obsidienne singulièrement transparent, et d'environ + de pouce d'épaisseur, possédoit naturellement les franges produites par la chaleur; il doit donc avoir élé formé par une fusion ignée. Cet échantillon, que je tiens de M. Sirwright, avoit été taillé dans une masse ronde , et conservoit ses contours originels : il étoit probablement de la première variété décrite par sir George Mackensie (+). La résine, la gomme copal, la corne, l’'ambre, l’écaille de tortue, le ligament durci de la chama gigantea (2) , et diverses autres substances, tant du règne animal que du régne végétal, recoivent une nouvelle structure pendant la propagation de la chaleur. (1) Sir George Mackensie a observé qu’il y a ‘deux variétés tres-distinctes d’obsidienne , une desquelles transmet la lumière lorsqu'elle est taillée en lames minces , et néanmoins elle paroît rarement être d’üne transparence uniforme. Cette variété à une température beaucoup au-dessous de celle qui peut être excitée pare un feu ordinaire à l’aide du souflle, É | gonfle et se change en pierre ponce par le développement d’un gaz fluide , que sir George Mackensie et et le docteur John Davy ont tenté inutilement de recueillir. Durant l’expé- rience , l’odeur d’acide nitrique étoit tres-sensible. L'autre variété est plus dense , d’un noir plus foncé , et rarement transparente aux bords des fragmens minces. Elle ne s’enfle pas par l’application de la chaleur; plus intense que celle qui change l’autre variété en pierre ponce. A cet égard, un habile ana- lyseur rendroit un service essentiel à la Minéralogie, en examinant les deux variétés, et en comparant l'analyse de la pierre ponce avec celle provenant de la première variété. (2) Je dois cette curieuse substance au docteur Francis Buchanan , de la So- ciété Royale ; elle est dure et transparente, et d’une aussi belle couleur que J’ambre. (La suite au Cahier prochain.) ET D'HISTOIRE NATURELLE. 33 RECHERCHES SUR LA RESPIRATION DES PLANTES EXPOSÉES A LA LUMIÈRE DU SOLEIL; Par M. RUHLAND. M.DE SAUSSURE, dans son excellent Ouvrage sur la respiration des Plantes, a trouvé que la plupart des plantes exposées dans Pobscurité au gaz oxigène pur, en absorbent une partie et forment en même temps un volume d'acide carbonique moindre que celui du gaz oxigène absorbé, tandis que quelques autres plantes, surtout de la classe des plantes grasses, diminuent leur atmosphère de gaz oxigène, sans exhaler une quantité notable d'acide carbonique, du moius pendant les premiers jours de l'expérience. Lorsque de cette manière les plantes se sont saturées de gaz oxigène, et qu’on les expose à la lumière du soleil, elles rendent lé gaz qu'elles avoient inspiré, et on trouve que la quantité de gaz qu’elles exhalent dans ce cas là, est peu différente de celle qu’elles avoient inspirée à l'obscurité. Si l'atmosphère qui entoure les plantes pendant la nuit, au lieu de consister en gaz oxigène ou en air atmosphérique, est du gaz azotepur, les plantes rendues à l'influence du soleil exhalent un volume d’air qui égale à peine leur propre volume, tandis que d’autres plantes, quiavoient passé la nuit dans un air. respirable, en exhaloient les £e de leur volume; aussi les branches qui éloient exposées à ces expériences mouroient en peu de jours, tandis que les dernières se conservoient pendant Pier mois. De sorte que toutes les observations s’accordoient à prouver que l’'exhalation de gaz oxigène par les plantes exposées au soleil, est dans un rapport intime avec l’inspuation de ce gaz pendant la nuit, et qu'une de ces actions est l’opposée de autre. En se tenant à ces résultats, on s’attendra que M. de Saussure se sera arrêté à la conclusion, que tout le gaz oxigène que les 332 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE pee vertes des plantes exhalent lorsqu'elles sont exposées à a lumière du soleil, ne provient nullement de la décomposi- tion de l'acide carbonique, mais plutôt de l'absorption de ce même gaz que ces plantes avoient effectuée pendant la nuit; mais d’autres expériences, dans lesquelles les plantes se trouvoient en contact avec l'air atmosphérique mêlé avec de l'acide car- bonique, donnoient des résultats plus favorables à la théorie ancienne. Lorsque ce célèbre chimiste enfermoit des plantes dans des ballons remplis d’air atmosphérique et de -= d'acide carbonique, et qu’il les exposoit à la lumière, elles tirent disparoître une plus ou moins grande partie d'acide carbonique, et elles for- mèérent, au lieu de cet acide, une quantité d'oxigène, qui se monta, dans la plupart des expériences, au £ du volume de l'acide carbonique absorbé. Il paroît donc qu'une partie de l’acide car- bonique a été décomposée, tandis qu’une autre partie en a élé absorbée, puisque la quantité du gaz oxigène exhalé n'égale pas, comme cela devoit être, la quantité de l'acide carbonique disparu, et c’est aussi réellement le sentiment de M. de Saussure; mais ce fait s'explique tout aussi bien par la supposition que tout lacide carbonique disparu est seulement absorbé par les plantes et retenu dans leurs vases, et que le gaz oxigène, au lieu de provenir de la décomposition de lacide carbonique, s’est plutôt déjà trouvé dans les feuilles avant qu’elles aient été ex- posées à l'expérience; et cette explication a d'autant plus de vraisemblance, qu’elle est entièrement d'accord avec les autres expériences de M. deSaussure, où les plantes se trouvoient dans du gaz oxigène ou dans de l'air atmosphérique sans mélange d’acide carbonique. Si des corps inorganiques éprouvent des changemens chimiques apparens ou véritables lorsqu'ils sont mis en rapport avec des corps organiques, et qu’on est en état de les expliquer sans avoir recours à l’hypothèse de la décomposition de ces premiers par ces derniers, on fera sans doute toujours mieux de se tenir à cette explication, surtout si ces corps forment des combinai- sons très-intimes, telles que l'acide carbonique; car l’expérience ne nous fournit point d'exemples que les corps organiques soient en état de décomposer des corps du règne minéral, à moins qu'ils n'agissent sur eux pendant un long espace dé temps, tandis que, dans ce cas là, les feuilles donnent de l'air presque aussitôt qu’elles sont exposées à l'influence du soleil, où par conséquent celte ET D'HISTOIRE NATURELLE. 333 cette décomposition de l'acide carbonique devoit déjà avoir lieu, et avec une rapidité comme nous aurions bien de la peine à l'eHectuer dans nos fourneaux, moyennant une chaleur violente, D'un autre côté, on n’a pas le droit, puisque le mucilage, l’a- midon et autres parties des corps organiques contiennent du carbone, de conclure que ce carbone même, en état pur, tel qu'il se trouve dans l'acide carbonique, soit tout aussi bien propre à servir de nourriture aux plantes, comme on prétend que le carbone se sépare dans le parenchyme des feuilles du gaz oxigène de l'acide carbonique, pour se joindre à la subs- tance de la plante, en formant ainsi une partie de sa nourriture. S'il est donc bien prouvé que dans une atmosphère qui contient une plus ou moins grande quantité d’acide carbonique, la même plante donne plus de gaz oxigène que dans une autre qui en est dépourvu, cela ne prouve autre chose, sinon que la pré- sence de lacide carbonique est favorable et avantageuse à la végétation ; et cette manière de regarder ce phénomène gagne encore plus de vraisemblance par les propres observations de M. de Saussure, d’après lesquelles ce même acide carbonique, qui favorise la production du gaz oxigène par les feuilles présentées à l'influence de la lumière du soleil, en effectue tout le con- traire à l'obscurité, où il augmente l'absorption du gaz oxigène; expériences que j'ai répétées avec le même succès sur plusieurs sortes de plantes. Et si l’on vouloit former une objection de ce que le carbone est augmenté dans des plantes qui ont végété daus une atmosphère qui contient de l’acide carbonique, on ré- pondroit, avec la même raison, que si l'acide carbonique est généralement favorable à la végétation, il favorise peut-être aussi ce changement intérieur dans les élémens de la plante, au moyen duquel elle est mise en état de donner, à l’analyse, plus de carbone; aussi ignorons-nous entièrement, en analysant une plante, si le carbone que nous en retirons s’y est déjà trouvé en nature, ou s'il y étoit sous forme d’acide carbonique, et que la réduction n’est due qu’à l'analyse à laquelle ja plante a été soumise. Heureusement il ya encore des expériences qui promet{toient de devenir d’un grand poids pour l’une ou l’autre manière d’envisager cette action remarquable de la végétation; car si d’autres acides, ajoutés en différentes proportions à l'atmosphère des plantes, les mettoient aussi en état de donner un air oxigéné, on ne pourroit plus attribuer à la décomposition de l'acide carbonique Tome LXXXIII NOVEMBRE an 1616. Vy 334 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d ce qui se trouvoit alors étre une propriété générale des acides. Or, M. Senebier a réellement déjà soumis à l’expérience plu- sieurs acides des règnes minéral et végétal; mais il est d'autant plus à plaindre, que les chimistes qui sont venus après lui se sont Jaissé détourner de cet examen par les résultats négatifs qu'il a obtenus; que les observations suivantes feront voir que, si M. Senebier n'a pas réussi, cela doit être seulement attribué à la circonstance que la quantité de l'acide qu'il avoit mélé à l'eau dans laquelle se trouvoient ces feuilles, a été de beau- Coup frop grande, de sorte qu'il les a fait souffrir; aussi dit-il ul-même que les feuilles soumises à l'expérience avoient jauni et avoient été trouvées gâtées. Comme on ne pouvoit guère employer ces acides sous forme gazeuse, J'ai plongé les feuilles dans des verres cylindriques remplis d’eau et fermés avec du mercure. Chaque fois j'ai soi- Sneusement choisi les feuilles ou branchesqui devoient êtresoumises à Pexamen, et j'ai rejété toutes celles qui avoient les moindres taches et qui paroissoient très-différentes en âge et en grandeur... Leur volume étoit la moitié de celui de l’eau, et pour toutes les expériences comparatives, j'ai pris la même quantité en poids. Dans les cas, qu’il n’est pas indiqué exprès, le poids de la liqueur mêlée à l’eau a fait = de celle-ci. Aussitôt que le soleil quitta l'endroit où les feuilies étoient placées, on les a examinées pour voir si elles n’avoient point souflert; ensuite on a lavé l'air restant. avec de l’eau de chaux, et analysé le reste avec le sulfure de potasse. Des feuilles de sambucus nigra, exposées de cette manière: au soleil pendant 5 heures, donnoient :. Le 24 août. Dans de l’eau de fontaine, 6 pouces cubes, qui laissoient en restesdansilendiometres-h 4 Ac SPENCER Dans la même eau, mêlée avec del’acide sullurique, 7?" 0,69 mêlée avec de l'acide muriatique, 23 0,30 méléeavec de l'acide nitrique, 22 0,30 Le 26 août. Des feuilles de sambucus. Eau de fontaine , 3 £ pouces cubes. . . , . . . . . . . 0,34 avec de l'acide muriatique, 15 + pouces. 0,20 avec de l'ammoniaque, point de gaz. ET D'HISTOIRE NATURELLE. Le 27 août. Des feuilles de sambucus. Eau de fontaine, 2$-pouces. . ….. 1.14 + . 1, avec de l'alcool, 1 + pouce... . . . . . avec de l’acide munatique , 13 + pouces.. avec de l’acide nitrique , 12 > pouces. . avec de l’atide muriatique (a l'obscurité, point de gaz). Panidelchate TE pouce: LU ee due il Let re Le 1° septembre. Des feuilles de sambucus. aude fontaine, 4 2 pouces. 4252 2 ... - . à #55 d'acide muriatique oxigéné, 4 $ pouces... . . . . . 3655 d'acide muriatique oxigéné, 31 pouces.. . . . . . Le même acide exposé au soleil en proportion de = et 5, sans feuilles, ne donna point de gaz. Eau de fontaine saturée d’acide carbonique à la tempéra- ture de 120 R., 4 + pouces, . . . : avec de l'acide muriatique , 23 pouces. , avec une solution de carbonate de po- tasse, point de gaz. Le 3 septembre. Des feuilles de sembucus. Lau de fontaine, 5!£pouces.. :", MAMA EL MSA saturée d'acide carbonique à la tempéra- ture de 10° R., ro pouces. . . . . . La même eau saturée d’acide carbonique et mélée avec la moitié d’eau distillée, 22 pouces. . . . avec à d’eau distillée, 24 pouces.. . . . . (En diminuant encore la proportion de l’acide carbo- nique , la quantité de l'air en général, et celle du gaz oxigène qui entroit dans sonmélange, alloient aussi en diminuant.) Eau de fontaine avec de l'acide muriatique, 26 pouces.. avec de l’acide acétique , 24; pouces. . . Vv 2 0,77 0,79 0,46 0,40 0,35 0,29 0,4 o,6£ 0,55 0,23 0,49 0,52 0,24 0,2z o,2t O,21 386 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Le 5 septembre. Des feuilles de sambucus. Eau de fontaine, 5 # pouces. , seit een ecoles Le, ; O5DO avec 3 gros de muriale d’ammon., 62 po. 0,49 —————d'acétate de potasse, 3+po. 0,70 denitrate de polasse, 11 po. 0,45 —————de muriate de soude, 4% po. 0,64 —————desurtartrate de potasse, 10 po. 0,44 Le 6 septembre. Des feuilles de sambucus. Eau de fontaine, 5 pouces. . . . « . . meurs 043 avec 5. d'acide muriatique,17 pouces. 0,30 avec 3 d'acide muriatique, 23 pouces. 0,22 avec 6 grains d’une dissolution d’alcali de potasse, point de gaz. Le 10 septembre. Des feuilles de sambucus. Eau de chaux, point de gaz. avec de l’acide muriatique, 5 pouces.. . . 0,30 Eau de fontaine qui avoit bouilli pendant 2 h., 1 : pouce. .« o,b6 La même eau avec de l'acide muriatique, 7 pouces... . . 0,30 Le 20 septembre. Des feuilles de sambucus. Eau de chaux , quelques bulles, en trop petite quantité pour‘ se prêter à l'analyse. La même eau avec de l’acide murialique, b pouces. . . 0,57 Eau de fontaine qui avoit bouilli pendant 2 h., 1 ! pouce.. 0,76 La même eau-bouilli avec de l’acide muüriatique, 4 pouces. 0,34 Dans toutes ces expériences, qui sont beaucoup plus nom- breuses que je ne les donne ici, et que j'ai étendues avec le a. Dans toutes ces expériences il est de la plus grande influence à la quantité du gaz que les feuilles exhaïent , si le ciel est plus ou moins serein : de pelits chan- gemens ne laissent pas d’être sensibles. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 337 même succès à plusieurs familles de plantes, les feuilles ont seulement souffert dans de l’eau avec l’acide sulfurique , où elles ont un peu jauni, et moins encore dans l’eau avec l’acétate de potasse. On voit donc que plusieurs autres corps acides jouissent de la même propriété que l’acide carbonique relativement à Ja for- mation du gaz oxigène par les feuilles; mais dans la plupart des cas indiqués , il n’est guère possible d'expliquer leur action par une décomposition qu'elles dussent éprouver dans le parenchyme des feuilles; du moins il seroit contre toute vraisemblance de maintenir une telle opinion pour l'acide muriatique, l'acide tar- tarique du surtartrate de potasse, etc, Il paroît donc étre aussi contre l’analogie, de soutenir désormais, pour l’acide carbonique, üne décomposition chimique , pour expliquer un phénomène qui se trouve ne lui être point particulier , et qu'il partage peut-être avec tous les corps acides; de sorte que l’action de l'acide car- bonique rentre ici dans une classe de phénomènes dont elle ne se distingue en aucune manière, et pars avec d'autant plus de raison, qu'il n'existe pas, que je sache , une seule expérience propre à décider en faveur de la décomposition de l’acide carbonique, et qui se prête tout aussi bien à une autre explication. Jecite encore ici quelques antres observations très-intéressantes de M. de Saussure, qui me paroissent fournir de nouvelles preuves que l’action de l'acide carbonique sur les plantes doit être re- gardée sous un point de vue plus général. Il dit que les fleurs exposées au soleil. ne remplacent point l'acide carbonique de leur atmosphère ambiant par du gaz oxigène, mais par du gaz azote. Or, si l'on est obligé dans ce cas là de convenir que ce gaz azote, exhalé au soleil, sorte de l’intérieur de la plante, comme il ne forme pas un élément de l'acide carbonique, quoique l’ex- piration de ce gaz se trouve dans un rapport intime à la quantité de l'acide carbonique de l'atmosphère qui entoure ces fleurs, il est encore contre toute analogie d’avoir recours à la décom- position de cet acide, dans le cas qu’il favorise l'expiration du gaz oxigène au lieu du gaz azote, par la seule raison que le gaz oxigène forme un élément de l’acide carbonique. Le /y#rhum salicaria fournit un autre exemple, qui, d'après M. de Saussure , végétant dans du gaz azote, produit de l’acide carbonique ; cet acide ne peut avoir d’autre source d’où il soit sorti, que l’in- térieur de la plante. Mais pourquoi veut-on alors changer de théorie, aussitôt que la plante se trouve dans le gaz oxigène, 338 JOURNAL BE PHYSIQUE, DE CHIMIE tandis que le fait s'explique tout aussi bien eg suivant l'anaz logie du gaz azote, d’après laquelle le gaz oxigène a été absorbé, tandis qu'en même temps l'acide carbonique, séjournant dans le parenchyme des feuilles ou des fleurs, s’exhale ? Peut-être que l'explication suivante s'approche plus près des faits que J'ai donnés; les acides et quelques sels surtout, à ce qu’il me semble, ceux de la classe des rafraîchissans, sont favo- rables à la respiration des plantes; elles augmentent par consé- quent, à l'obscurité, l'inspiration du gaz oxigène, comme on le sait, d’après M. de Saussure, pour l'acide carbonique mêlé à l’at- mosphère de la plante; et au soleil elles en animent l’expiration, la plante absorbant l’acide ou le sel ambiant, et rendant en TÉ< compense le gaz oxigène qu’elle avoit absorbé dans la nuit. On peut regarder, dans l’acte de la respiration , la plante comme une base oxidable qui absorbe dans la nuit à-la-fois l'acide êt le gaz oxigène, et qui, exposée ensuite à l'influence désoxigé- nante du soleil, est obligée de quitter le gaz oxigène absorbé, qui, secondé de son élasticité, lui. échappe, tandis qu’en ré- compense la plante inspire l’acide qui se trouve en contact avecelle. En tout cas, il paroît que rien n’est plus équivoque que la théorie d’après laquelle la quantité énorme du gaz oxigène qui se consume journellement est regardée être compensée par l'action de la végétation; du moins ce ne sera qu'avec beaucoup de défiance qu'on pourra adopter un système qui non- seu- lement paroît être dénué de preuves décisives, mais qui se trouve ‘aussi en opposition avec un grand nombre de faits chimiques. ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 339 SUITE DU SUPPLÉMENT Au Mémoire sur la réduction des degrés du Thermomètre de Mercure en degrés de chaleur réelle; PAR Hoxoré FLAUGERGUES. LA réduction des degrés indiqués par le thermomètre en degrés équidiflérentiels de chaleur, est non- seulement nécessaire pour rectifier les observations météorologiques faites avec cet ins- trument, mais entre autres usages, elle fournit le moyen de calculer des Tables pour réduire la réfraction moyenne en ré- fraction vraie, plus exactes que celles qui ont été publiées par divers astronomes, et qui sont toutes fondées sur lopinion er- ronée que les degrés du thermomètre sont proportionnels à la: chaleur. D’après les lois de la réfraction, la réfraction astronomique est proportionnelle à la densité de l'air; cette vérité est d’ailleurs prouvée par les belles expériences de M. Hauxbée (1). La ré- fraction doit donc varier avec cette densité, ce qui exige une Table de correction de la réfraction moyenne, pour la réduire: à la réfraction vraie, suivant les diflérens états de l'atmosphère. La densité de l'air augmente avec la pression de l’atmosphère;. elle diminue à mesure que l’air se raréfie par la chaleur: ces deux états de l'air nous sont indiqués par le baromètre et le thermomètre; la réfraction est donc directement comme lélé- vation du mercure dans le baromètre, et inversement comme l'ascension de ce fluide dans le thermomètre (sauf les modifica- QG) Expériences phys. mécan. de M. Hauxbée, trad. par M. Bremand, tome Ï, pag. 108 et suiv. Hauxbée avoit été précédé dans cette recherche par A: Lowthorp, et il ne fitmême que répéter les expériences de ce dernier, avec uu appareil moins compliqué. -340 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE tions nécessaires); et la formule de réduction de la réfraction moyenne à la réfraction vraie doit avoir été composée de deux facteurs relatifs aux indications de ces deux instrumens ; il seroit peut-être nécessaire d’un troisième facteur relatif à l’effet, sur la réfraction astronomique , de la vapeur de l'eau, qui se trouve toujours répandue en plus ou moins grande quantité dans l’at- mosphère, et qui est indiquée par l’hygromètre; mais cet eflet est encore trop peu connu, et l’'hygromètre est un instrument trop imparfait pour pouvoir établir quelque chose de bien certain sur ce sujet : je me bornerai donc à ce qui concerne le baro- mètre et le thermomètre. à Du Facteur barométrique. L'air se comprimant dans le rapport des poids dont il est chargé, suivant la fameuse expérience de Mariotte (1), sa densité augruente dans le même rapport, et par conséquent aussi la réfraction, c’est-à-dire directement comme les hauteurs du mer- cure dans le baromètre. Mais pour que les hauteurs du mercure dans le baromètre représentent exactement les pressions qu'éprouve la couche infé- rieure de l'atmosphère où cet instrument est placé, il faut que le mercure soit toujours à la même température, car ce n’est qu'à cette condition que les poids des colonnes de mercure seront proportionnels à la hauteur de cescolonnes. Plusieurs phy2 siciens , à commencer par M. Amontons, ont fait des expériences pour déterminer la variation de longueur qu’éprouve la colonne de mercure dans le baromètre, par le seul effet du changement de température ; mais celles de M. Deluc me paroïssent préfé. rables à toutes les autres, parce que ses expériences ont été faites sur le baromètre même monté sur une planche de sapin, comme le sont ordinairement ces instrumens, et que l'effet de la chaleur sur la monture, quoique peu sensible, doit néces- sairement entrer pour quelque chose dans l’évaluation de la cor- rection de la hauteur du mercure dans le baromètre, déterminée au moyen d'une échelle fixée sur cette monture, et qui participe à ses variations. ei (1) Œuvres de M. Mariotte, de l’Académie des Sciences , tome I, pag. 154 €t Suiv. M. Deluc ET D'HISTOIRE NATURELLE. 34T M. Deluc a trouvé (r) que, par une augmentation de chaleur capable de faire monter le thermomètre de la température de la glace pilée (fondante) jusqu’à celle de l’eau bouillante, une colonne de mercure de 27 pouces augmenteroit précisément de 6 lignes ou de Æ; cette quantité divisée par 80, donne = partie pour la dilatation d’une colonne de mercure à la tempé- rature de la glace fondante, et pour un degré du thermomètre de M. Deluc. Cette quantité exige quelques réductions; premièrement, la dilatation observée par M. Deluc est relative au degré de chaleur de l’eau bouillante sous une pression de 27 pouces de mercure, degré de chaleur que ce célèbre physicien avoit choisi pour le terme supérieur de l'échelle de son thermomètre, et aujourd’hui on prend plus communément, pour ce terme supérieur, la chaleur de l’eau bouillante sous une pression de 28 pouces. De plus, M. Deluc suppose que cette hauteur de 27 pouces est prise lorsque la température du mercure dans le baromètre est égale à zéro de son thermomètre particulier; pour la correction de Veffet de la chaleur sur les hauteurs du baromètre, on a + 109 du thermomètre ordinaire; et actuellement qu’on préfère de réduire la température du mercure dans le baromètre à la tem- pérature fixe de la glace fondante, on suppose aussi que la colonne de mercure de 28 pouces, sous la pression de laquelle on détermine la chaleur de l’eau bouillante, est également à la température de la glace fondante. D’après les expériences citées, une colonne de mercure de la longueur de 28 pouces, à la température de la glace fondante, augmente, en passant de cette température à celle de + 10°, de 2 . 287% —0lt,778; c’est-à-dire qu'à cette température la longueur de cette colonne est de 330/4:-,778, ou de 5,388 seizièmes de ligne. Actuellement, si, d’après la règle découverte par M. Deluc (2), on multiplie 37314276, logarithme de 5388, par?, et qu’on retranche du produit 10387, on aura 800,84 pour la chaleur de eau bouillante sous cette pression 336,778; faisant ensuite cette proportion, 800 : 6e: : : 80°,84 : 6/*°,063, ce dernier terme (:) Recherches sur les Modifications de l'Atmosphère , édit. in-12, tomelIl, pag. 19 et Suiv. (2) Recherches sur les Modifications de l’Atmosphère ; par J. A. Deluc, tome IV, pag. 141. Tome LXXXIII NOVEMBRE an 1816. Xx 342 > JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE » exprimera l'allongement que recoit une colonne de mercure de 27 pouces de longueur, en passant de la température de la glace fondante à la température de l’eau bouillante , sous cette pression de 336'*-,778 ; le rapport de cet allongement à la Lee 6,0 324 ? ss RRREE Dent pour un degré du thermomètre ordinaire, par 0 1 324,80 — Zo75sni gueur primitive de la colonne sera donc exprimé par Soit B la hauteur d’une colonne de mercure dans le baro- mètre à la température de la glace fondante, et 2 la hauteur de la même colonne à la température de Z degrés au-dessus du zéro [l’une et l’autre exprimées en lignes et corrigées de l’eflet de la capillarité (1)], on aura, d’après ce qui précède, B + L 427,11 BP: nn — à QG) L'effet de la capillarité est, comme on sait, d’abaisser le mercure du arometre; on doit donc augmenter les hauteurs observées de la valeur de cet abaissement relatif au diamètre du tube du baromètre dont on se sert, si on veut que les observations que l’on fait soient comparables à celles des autres observateurs. M. Cavendish a donné (Philosophical Transactions’, ann. 1776 ;- vol. LXVI, pag. 586) une T'able fondée sur des expériences irès-exacles de M. Cavendish père, sur la pression du mercure dans les tuyaux de verre d’un peut diamètre ; cette Table est en décimales du pouce anglais; les termes en sont trop éloignés et les différences trop inégales. J’ai réduit la partie la plus usuelle de cette Table aux mesures françaises, et j'ai interpelé quelques termes , ce que je pouvois faire avec d’autant plus d’exactitude, que les se condes différences étoient sensiblement égales entre elles : je publie iei cette Table pour l’usage des observateurs du baromètre. | Diamètre Débpressions Diamètre Dépressions ) Différences. des du Différences. tubés. mercure. : die» dig- 4 0,735 ee 0,77 HQE EU 0,045 0,869 02087 ge | CE 0,056 1,029 > = HE bbLLS Le 9 2 2 © bb RL 5j né ET D'HISTOIRE NATURELLE, 343 b t.b D'où l'on tire B — — _ =D — ——— 4275,11 + , ou (en Ac nr £ 4275,11 faisant £ négatif pour le cas où le thermomètre est au-dessous du zéro) — AT. AM ) Den = exacte pour réduire à la température de la glace fondante une hauteur à du baromètre observée à + degrés du thermometre, Donc la formule générale et t.b : : est Zn ette forme est celle dont je fais usage pour la correction de mes observations du baromètre, et d’après Jaquelle Jai calculé des Tables fort commodes pour cette ré- duction. Aux hauteurs du baromètre, ainsi réduites à une même tem- pérature, sont proportionnelles les pressions, les densités de l’air, et par conséquent aussi les réfractions, en supposant que Ja température de l'atmosphère ne varie pas; par conséquent si on prend pour l'unité de la densité de l'air, l’état de ce fluide orsque sa température est celle de la glace fondante et qu'il est chargé d’une colonne de mercure de 28 pouces ou 336 lignes de hauteur, et qu’on prenne pour réfraction moyenne celle qui a lieu dans cet état de l'atmosphère, la réfraction vraie, lorsque Ja hauteur du baromètre sera — D, la température du mercure de cet instrument —£ et celle de l'atmosphère — o, sera à La réfraction moyenne comme 4 = RAD a est à 336; donc le \/ Se 2275 ; ITS facteur barométrique de la formule de réduction de la réfraction t D ( TT 4275,11 HR) 336 4 A Du Facteur thermométrique. moyenne à la réfraction vraie, est L'air, sous la même pression, se dilate proportionnellement à la chaleur, c’est-à-dire qu’à des augmentations égales dechaleur, correspondent des accroissemens égaux du volume de l’air: j'ai prouvé cette vérité, admise par tous les physiciens, par une longue suite d'expériences dont ont trouve les résultats dans le Journal de Physique (x), et par une autre suite d'expériences faites avec (2) Tome LXXVIT, pag. 275 et suiv. Xx 2 344 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE un appareil plus parfait, et dont les résultats sont également rapportés dans le même ouvrage (1). Il résulte de plus de ces expériences, que le volume de l’air à la lempérature de la glace fondante et sous une pression de 28 pouces, étant pris pour l'unité , ce volume se dilate de 0,37168, suivant la première suite, et de o,37174 suivant la seconde suite d'expériences, en passant de la température de la glace fondante à celle de l’eau bouillante, sous une pression de 28 pouces de mercure à la température de lglace fondante ; ces résultats ne diffèrent pas beaucoup de ceux qu'ont obtenus les célèbres phy- siciens MM. Lambert, Gbarles, Gay-Lussac et Dalton. Mais dans toutes mes expériences j'avois employé de l'air extrêmement desséché par un long séjour dans des vaisseaux fermés , et contenant une quantité de chaux vive et de potasse suffisante pour en absorber l'humidité; cet air, ainsi desséché, n’est pas l’air atmosphérique où se fait la réfraction astrono- mique, et qui contient toujours plus où moins d’eau en vapeurs; cette vapeur, d’après les expériences de M. Dalton, ne change pas la loi que suit l'air dans sa dilatation par la chaleur; mais elle peut influer beaucoup sur le rapport de son volume dans Jes deux températures; je fis cette réflexion lorsque je faisois mes dernières expériences sur la dilatabilité de l’air, et désirant déjà que mon travail pût servir à perfectionner les Tables de corrections de réfractions moyennes, je cherchai, au moyen dèexpériences faites avec le même appareil, et sur de l'air at- mosphérique pris pendant la nuit au balcon de mon observatoire, le ciel serein, le vent au nord-est et sec, qui sont les circonstances" qui ont le plus souvent lieu lors des observations astronomiques, la dilatation de cet air en passant de la température de la glace fondante à celle de l’eau bouillante, sous une pression de 28: pouces. Voici les résultats de ces expériences : Expériences. | Rapports des volumes. || Experiences.| Rapports des volumes. : 1,40030 1 : 1,41030 : I1,41204 I : 1,41183 : 1,42220 £ 1 : 1,40170 : 1,41108 1 : 1,41763 : 1,40050 1 : 1,406060 (1) Journal de Physique , tome LXXXII, pag. 402 et suiv. ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 345 Ce qui donne pour résultat moyen le rapport 1 : 1,410089, qu'on peut prendre sans erreur sensible pour celui de 1 : 1,411; par conséquent la dilatation de l'air pour un degré de chaleur 2 D r 0,411 . réelle est exprimée par _ — 0,0051375, et si on a un nombre æ de degrés équidiflérentiels de chaleur, on aura x (0,0051375) our l'augmentation du volume de l'air, depuis la températurede a glace fondante jusqu’à celle de x degrés équidiflérentiels : cette quantité devient négative lorsque x est au-dessous du zéro; en sorte que. dans ces deux cas, le volume de l'air à cette tem- pérature sera exprimé par 1 Æ x (0,0051375). Si on nomme z le degré du thermomètre octogésimal qui correspond au degré x équidiflérentiel, et qu’on substitue pour æ sa valeur en £, d’après la formule donnée dans le Mémoire, on aura pour le volume de Pair l'expression 1 Æ [log (128,2 2) CL 3,7099650] (11899,98261) (0,0051375), ou, en réduisant, 1 E [log (128,2 Æ 7?) © 3,7099650] (6r,13616). La densité de l'air est inversement comme son volume, et par conséquent la réfraction est aussi inversement comme ce volume: donc si om prend toujours pour la réfraction moyenne, celle qui a lieu lorsque la température de l'air est la même que celle de la glace fondante, et sous la pression de 28 pouces, le rapport de la réfraction moyenne à la réfraction vraie sera: le même que celui de 1 Æ [log (5128,2 Æ 2) CO 3,7099650] (61,13516) à 1; par conséquent le facteur thermométrique pour réduire la ré- action moyenne à la réfraction vraie, est exprimé par 1 1 Æ [log (b128,2 Æ +) & 5,7099650] (61,13616) Multipliant les facteurs barométique et thermométrique l’un par l’autre, on aura enfin, toutes réductions faites , pour le fac- teur par lequel il faut multiplier la réfraction moyenne pour la réduire à la réfraction vraie, t Due) 1e 356 + [ log (b128,2 Æ +) © 5,709g650] (20b41,74976)" 346 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Avec une Table de réduction des degrés du thermomètre octogésimal en degrés équidifférentiels de chaleur, telle que celle que nous avons donnée dans le Mémoire, l'usage de la formule pour réduire la réfraction moyenne à la réfraction vraie devient beaucoup plus simple; car, d’après ce qui a été dit plus haut, si om nomme @ le degré de l’échelle équidifférentielle qui répond au degré £ du thermomètre octogésimal, le facteur thermométrique se réduit à 1 4 nn Gic061878) °C Pat conséquent le facteur com- posé à DU een MU LA ne 4275,11 + ) 356 +4 (1,7262) C'est d’après ces formules que j'ai calculé une Table des facteurs pour multiplier la réfraction moyenne et la changer en réfraction vraié, et une Table des logarithmes de ces mêmes facteurs de degré en degré, depuis — 16° du thermomètre octogésimal jusqu’à + 32°, et de deux lignes en deux lignes depuis 26 pouces jusqu’à 30 pouces de hauteur du baromètre, que je me propose de faire imprimer pour l’usage des astronomes. Nous terminerons ce Mémoire par les deux remarques suis vantes : 1°. pour faire la réduction exacte de l’eflet de la tem- pérature sur la colonne d’un baromètre à cüvette, il faut aug- menter la longueur de la colonne de mercure au-dessus de la ligne prise pour la ligne de niveau de la profondeur du mercure au- dessous de cette ligne jusqu’au fond de la cuvette; car cette partie du mercure se dilate comme le reste, et soulève la co- Jonne de mercure qui est au-dessus de son niveau, d’une quantité égale à sa dilatation, et vice versé ; ainsi, si la profondeur du mercure de la cuvette est d’un pouce, comme dans mon baro- mètre, et que la hauteur de la colonne soit de 28 pouces, on, calculera la réduction comme si cette colonne avoit 29 pouces de longueur, etc.; c’est pour cette raison que j'ai calculé ma Table de réduction des fractions moyennes jusqu’à la hauteur de 30 pouces du mercure dans le baromètre, quoique le mercure n'y atteigne jamais cette hauteur. 2°. Pour connoître plus exactement, à ce qu’on prétend, la température du mercure dans le baromètre, on place à côté un thermomètre, qu’on enfonce à moitié dans la planche sur laquelle est fixé le baromètre ; je pense qu’on rempliroit beaucoup mieux cet objet, et d’une manière plus sûre, en isolant le tube ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 347 du baromètre, de manière qu’il soit de tout côté en contact avec l'air; alors la’ température du mercure du baromètre sera nécessairement la même que celle de l'air ambiant, qui est in- diquée par le thermomètre d'observation isolé et suspendu tout proche du baromètre, Pour cela, il faut ouvrir dans la planche du baromètre une rainure à jour , qui, depuis la cuvette jus- qu'à 26 pouces au-dessus, aura deux pouces et demi ou trois pousses de largeur, et depuis 26 pouces jusqu’à 29 pouces, une argeur de deux lignes seulement de plus que le diamètre du tube, afin de ne pas trop éloigner l'échelle de l’extrémité de la colonne de mercure qui doit y être rapportée; le tube sera fixé par le haut sur la planche du baromètre, par le bas il reposera sur le fond de la cuvette (en ayant soin de recourber le bout inférieur du tube pour ne pas gêner le passage du mercure), et il sera maintenu dans le milieu, si on veut, par un lien de fl de fer ou de cuivre, dont les deux bouts seront fixés sur la planche de chaque côté; on peut encore isoler la cuvette en échancrant la planche tout au tour à un pouce de distance; de cette manière la cuvette sera isolée et ne touchera à la monture que par le fond. Cette construction , que je propose pour le ba- romètre en général, devient comme nécessaire lorsqu'on se sert de cet instrument pour réduire les fractions moyennes en frac- tions vraies; car les Tables calculées pour cette réduction, sup- posent nécessairement que la température du mercure dans le baromètre est*la même que celle de l'air indiquée par le ther- momètre suspendu dans lobservatoire. Si on emploie un baro- mètre monté à la manière ordinaire, avec son fhermomètre de correction, il faudra, après avoir corrigé la hauteur observée d’après la température indiquée par le thermomètre de correction, réduire cette hauteur à ce qu’elle auroit été si la température du mercure eût élé la même que celle indiquée par le thermo- mètre d'observation, puisque ce n’est qu'avec cette dernière hautear qu’on peut entrer dans la Table; mais c’est un travail inutile, qui peut devenir une occasion d'erreur, et qu’on évite par la construction que je propose. 30. La formule que nous avons donnée pour corriger l'effet de la chaleur sur la colonne de mercure du baromètre, est celle qui convient (ainsi que nous en avons averti) à ceux de ces instrumens qui sont montés sur des planches de sapin , dans lesquelles l'effet de la chaleur suivant la direction de forces, est insensible ; si la monture du baromètre est d’une autre ma- 348 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE tière, il faut employer d’autres formules, parce que l'effet apparent de la chaleur sur la colonne de mercure est égal seulement à la différence entre la dilatation de cette colonne et la dilatation de la partie (de longueur égale) de la monture qui lui correspond, puisque, par l’eflet de cette dilatation de la monture, l'échelle du baromètre séloigne de la ligne prise pour celle du niveau dans le même sens que s'élève la colonne de mercure; par exemple, si la monture du baromètre est de laiton ou cuivre jaune, puisque nous avons trouvé précédemment, d’après les expériences de M. Deluc, qu’une colonne de mercure de 27 pouces de longueur à la température de glace fondante, s’allonge de 6"*,063, en passant à la température de l’eau bouillante, on aura la proportion 257%:: 6lë:063 : : 1 : 0,018713, dont le dernier terme exprime l'allongement d’une colonne de mercure en passant de la tampérature de la glace fondante à celle de Jeau bouillante, la longueur de cette colonne à la première température étant prise pour l'unité. Suivant les expériences de M. Smeaton(Philos. Trans., 1768 , pag. 325), l'allongement du laiton ou cuivre jaune est, dans ce même cas, exprimé par 0,001933. Retranchant cet allonge. ment du laiton de l'allongement du mercure, il restera 0,016780 pour l'allongement apparent de la colonne de mercure du ba- romètre relativement à son échelle, lorsqu'il est fixé sur une monture de cuivre jaune; faisant ensuite la proportion. ..... 1: 1,016780 : : 330's- : 3416,038, la différence b'*:,638 des deux derniers termes exprimera la dilatation apparente de la colonne de mercure en la rapportant à l'échelle; divisant cette quantité par 26880, produit de 336 par 8o et réduisant, on aura HE: pour l'allongement correspondant à un degré du there momètre octogésimal; et par conséquent la formule pour corriger l'effet de la chaleur sur le baromètre monté sur une planche de cuivre jaune, est == CEE on trouvera des formules semblables pour des montures d'autres matières, dont on con- noîtra le rapport de la dilatabilité. Si l’échelle est collée ou gravée sur le tube du baromètre, ‘comme l'allongement du verre, en passant de la température de la glace fondante à celle de l’eau bouillante, est, d’après les expériences de MM. Smeaton et Deluc (Trans. Philos., 1768, pag. 325; Journal de Physique, tome XVIII, pag. 389), ex- primé par 0,000833 ; si on retranche cet allongement de lallon- gement mt ET D'HISTOIRE NATURELLE. 349 &ement d’une colonne de mercure dans les mêmes circonstances, on aura 0,017880 pour l'allongement apparent de cette colonne rapportée à l'échelle appliquée au tube; par conséquent. .... I ! 1,017680 : : 330!s- : 34218008 ; l'excès du dernier terme sur le troisième est de 6/#-,008 ; divisant par 26880, et réduisant, 1 4474, mule de correction dans ce cas là. on aura — , et par équent = En our la for- TO OL En nt 77 ETS Observation de l’Éclipse de Soleil du 19 novembre 1816, au matin, faite à l'Observatoire de Viviers. Commencement à. . . . . 8 23° 24"temps moyen. JET NE PRE PE ES CPV ESTÉE | Cette observation, qui est très-exacte, a été faite ayec une lunette achromatique, qui amplifioit environ go fois Je diamètre apparent des objets. | Tome LXXXIII. NOVEMBRE an 1816. Yy BAT E MOMÈTRE EXTÉRIEUR OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAÎTES «| THER B D É s PAS TES AN PIE AROMETRE METRIQUE. à RQ ) #1 Maximus. | Minimum. |A Mint. Maximum. | Minimum. Æ - | Muni. lieurese C] heuress o heures. ill. | heures. ill i 1la3s. +16,00 à 6% m, 10,00 +#15,00 dtylme-neee 757,92/à 5 + se...... Me Met 2là 38. —+-18,60|À 6 + m.+1475 +18,50 AO E rer M57,08|2 5 35.14... 754,00/756,50 3|à ro = m418,10 à 98. 11,79] #17,05/a 9 5... ..... 759,60|à 6 4 m....... 756,80|758 72 4{à midi. +-19,60[à 6 4m. + 7:75|+19,60fà 9 s.......... 799,76 |à 6 + m....... 798,24|750,72 s\ù3s. +20, 10/1 63m. 7,00|+19,50 9 m......... 759,48 |à 9 s..........758,10 799,92 6à3s. +21,19/à 6£m.+11,50|421,00|à 10 3 m......757,94|à 9S..........750,04|757,52 7la 11m. +2r,5olà 6% m.—+13,25| 21,00 | midi. .......757,36|à64 m....... .756,50|757,36 Blh midi. #19,25/à 10 s. —13,50|+419,25/à midi... ...761,00|à 67 m....... 759:36|761,00 A| ga 31s. +20,50|à 6 + m.+10,50 19,05 à 10 4 m...... 760,62|à 55... .....760,00|760,40 S\ro à 35. +18,75|à 6 + m. +-10,75 + 18,00 à9 2 S........702,00 à 63 m.......760,50|761,36 Dlrrla3s. +17,25 à9 S. —Hi0,75|+14,75/4 9 s..,.......760,72|à 38.......%.,759,54|760,12 B\rolà midi. + 16,00 à 6% m.+12,50| +16,00 À 103 m..... .762,50|à 61 m....... 761,501762,48 Al1313s. +15,83/à 5 am. 8,50[+14,50|à 9 m.........70%,70|a 6 3s........ 761322 1762,32 Mlrala3s. “H14,75/à 62m. + 6,00!-12,50/à 10 s........ 764,60|à 64 m........762,08|763;70 15à 3s. +15,10/à 6m. + 5,26|H#14,29/à 105 m...... FODA0D|A LISE LEE 762,88|764,94 N|16/à 3s. b+1425 à 6 2m. 4,75|415,20|à Mere 761,38|à 10 s......... 757,40|759,80 dira sis. + 10,75 à6+ m.—+ 3,50 412,50 ADM... 756,20|à 5% s........755,26|756,12 18/à nudi. 413,60 à6 im.+ 5,00|+13,50|à 10 s........ 756,70|à 3 5......:..795,70| 755,82 1923. “+-12,05 à GE m. + 4,50[+11,90|à 10 3 m...... 76o,66|à 10 5... ..... 758,32,760,58 20/à 10 m, 410,60 àlos. + 6,50|+ 7,75/a 6 j m....... 752.68|à 10 S......... 750,60|751,84 21/à midi. Hro,10[à 64m,+ 4,25| 10,104 10S......... TOI AMIE JS... 749.62|750,32 22|à midi. H10,60| 6 m.+ 3,75|++10,60|à 10 s......... 756,10|à 6 5 m....... 799,08|754,76 23[à midi. 11,00 62m. 1,75|-+11,00!à 9s....., .,.760 96|à 6 + m.....… .758,80|760,74 24345. + 9,5o/à 10 s. + 0,75] + 8,75|à 8 m..... --7D0 ATOS... 753,50|757,50 25à3s. Æ+1325 À 5£m.— 5,79] 11,10 AO AS oDane 7OIAO| AS Ses .-748,10|749,60 26|à midi. +11p75|à 5 £m.+ 7:79|4-11,75/à gm......... 752,02/à 10 S.........750,04|752;48 Hl27la3s. xprimée en degrés centésimaux, afin de rendre ce Tableau uniforme. 3b2z JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE SUITE DU MÉMOIRE Sur les Substances minérales dites e2 rasse, qui entrent dans la composition des Roches volcaniques de tous les âges; Par P. Louis CORDIER. CHAPITRE SEPTIÈME. Examen des Cendres volcaniques ou thermantides pulvérulentes de 1ous les âges. LES substances pulvérulentes que je désigne sous le nom de cendres volcaniques, ont été ainsi nommées par la plupart des minéralogistes; M. Haüy en fait une variété de ses therman- tides; M. Werner réduit le nom de cendres volcaniques aux produits pulvérulens des éruptions historiques, ignorant proba- blement qu’il existe des matières identiquement semblables, soit dans les couches formées par les volcans éteints inconteslables, soit dans les grands systèmes classiques de terrains volcaniques démantelés; ce célèbre minéralogiste n’a donné aucune place à ces matières dans sa nomenclature et sa méthode. Les cendres volcaniques composent, avec les sables, les graviers et les fragmens variés fournis par les projections incohérentes,. plus de la moitié des produits rejetés par les éruptions. Tantôt elles se trouvent disséminées dans les amas ou lits formés de ces: fragmens, de ces graviers et de ces sables; tantôt elles com: posent exclusivement des couches très-étendues. Je range aussi parmi les cendres, les matières pulvéruleñtes qu’on observe très- souvent mélangées avec les croûtes scorifiées grumeleuses des courans lithoïdes, Je ne saurois décider si ces dernières matières pulvérulentes sont contemporaines à la coagulation des courans, et si elles ont été produites par l'effet d’un extrême boursoufile- ment de la lave composante, ou bien si elles sont un premier résultat de la désagrégationlentedes croûtes scorifiées , comme cela paroît au reste probable en beaucoup de cas. Ge que j'ai reconnu, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 353 c'est que leur aridité jointe aux autres caractères, ne permetpas de les distinguer des cendres de projection. De tous les produits rejetés par les volcans, cesont lescendres qui recoivent les plus promptesaltérations ; on en a de beaux exemples dans les fouilles de Pompeïi et d'Herculanum; malgré cette fa- cilité à s’altérer, onles retrouve quelquefois intactes jusque dans les terrains volcaniques contestés très-anciens; je ne traiterai ici que de celles dont la parfaite conservatioh n’est pas douteuse. Elles sont aussi curieuses à examiner au microscope que faciles à définir. On reconnoît sans peine qu’elles sont formées de par- ticules hétérogènes très-distinctes, et que les nuances si variées de leurs caracières extérieurs, proviennent des analogies que ces particules peuvent avoir avec les substances élémentaires qui entrent dans la composition des pâtes lithoïdes, vitreuses- ou scorifiées; elles en contiennent en eflet tous les principes désagrégés ou réduits en poudre ; mais il s’en faut de beaucoup que les mélanges soient infinis : non-seulement ces mélanges pa- roissent constans dans une même couche, mais ils se reproduisent fréquemment dans des couches différentes. Quels que soient, aw reste, le mode d'association, la localité et l’âge des couches, l'identité des substances minérales élémentaires qu'on trouve dans les unes comme dans les autres, est si frappante, que je n’en rapporterai qu'un petit nombre d’exemples dans la Table géné- rale de mes expériences. Pour faire l’analyse rigoureuse et complète des cendres vol- caniques , il est indispensable de lotir préalablement les parti- cules composantes, suivant l’ordre des volumes, à l’aide de lavages. On recounoît, au moyen de cette opération, que la ma- jeure partie des grains composans ont une grosseur variable entre un trentième et un cinquantième de millimètre; la grosseur peut s'élever à plus d’un dixième de millimètre, ou diminuer jusqu’au-delà d’un centième. Ces variations permettent de déter- miner plus facilement la nature des substances minérales élémen- taires. Les espèces les plus abondantes sont, le feld-spath, le pyroxène; la gallinace (ou verre pyroxénique) et l’obsidienne (ou verre feld-spathique), ensuite le péridot, lamphigène, et très-rarement le mica et l’amphibole. Le fer titané s’y rencontre constamment avec ses propriétés extrêmement saillantes. En: outre, parmi les grains les moins fins, on observe des fragmens: entiers, soit de pâtes scoriñiées, soit de pâtes lithoïdes. Si on étudie les caractères extérieurs des principaux mélanges ; 354 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE on les voit s’accorder avec les résultats de l'analyse mécani: que, c’est-à-dire avec la prédominance des quatre espèces de substances composantes que j'ai nommées les premières. Quant au caractère essentiel , celui qui se tire de la fusion , on ne peut l’apprécier convenablement que de la manière suivante. Il faut d’abord purger la cendre des parties attirables, la porphyriser, en fixer la poussière, soit sur le filet de disthène ou sur le chars bon , et puis déterminer les propriétés du bouton vitreux obtenu au premier coup de feu, Ainsi essayées, les cendres se partagent en deux genres très-distincts, celles qui fondent en verre blanc rarement piqué de points verts, et celles qui fondent en verres ou émaux de couleur noire, ou d’un vert noirâtre plus ou moins foncé. Chacun de ces deux genres se subdivise naturellement en trois sortes, suivant que le mélange abonde, soit en cristaux microscopiques, soit en parties vitreuses, ou bien qu’il en renferme des quantités à peu pres égales. D'après ces données, les cendres volcaniques peuvent être minéralogiquement définies , savoir : les unes comme du feld- spath pulvérulent, ou du verre feld-spatique en poudre, mêlé d’une très-petite quantité de particules hétérogènes déterminées ; les autres, comme du pyroxène pulvérulent, ou du verre pyroxé- nique en poudre, mélangé d’une très-grande quantité de parti- cules hétérogènes connues. Ce n’est donc que par convention qu'on peut leur assigner une place dans la méthode, La déno- mination de thermantide pulvérulente tenant à des considérations géologiques, étrangères au nouveau point de vue sous lequel j'estime que les cendres doivent être envisagées désormais , je crois qu'il est convenable de la réserver à des applications plus conformes à son étymologie; en conséquence je donne le nom de cinérile à la cendre pyroxénique , et celui de spodite à la cendre feld-spathique. Je partage la spodite et la cinérite en trois subdivisions fondées sur la composition mécanique, et qui sont pour chacune, la vitreuse, la semi-vitreuse et la cristallifère : les couleurs serviront à établir les variétés principales. Sous le rapport de la définition géologique, les cinérites et les spodites doivent être regardées comme des sables mICrosCo- piques hétérogènes, formés des mêmes espèces de minéraux élémentaires que les pâtes lithoïdes, vitreuses ou scorifiées, et présentant des associalions à peu près semblables, au milieu desquelles les caractères de fusion indiquent assez nettement la prédominance des parties feld-spathiques ou pyroxéniques. Du a ET D'HISTOIRE NATÜRELLÉ. 355 reste, je n’ai pas besoin d’insister pour faire sentir qu’il doit exister un assez grand nombre de sous-variétés intermédiaires, soit entre les diflérentes variétés de spodite et de cinérite, soit entre ces mêmes variétés et les sables des déjections incohé- rentes. J’avois pensé que je trouverois les débris des roches traversées par les éruptions , plus abondamment répandus dans les matières pulvérulentes que dans les autres produits des projections in- cohérentes; mais j'ai eu lieu de reconnoître que je m'étois trompé, et ceci est remarquable relativement à la question des percées volcaniques. Cette partie accessoire de mes recherches avoit un second but. En certaines localités, on trouve des frag- mens projelés, qui, sous le rapport de la composition et de la contexlure, n'ont d’analogues rigoureusement correspondans dans aucun terrain, mais qui se rapprochent tantôt des roches pri- mitives graniliques, tantôt des roches volcaniques granitoides ou porphyriques. Ces fragmens accidentels sont en grande partie composés de minéraux volcaniques ; mais de plus, on y observe, ainsi que dans les sables formés de leurs débris, plusieurs subs- tances particulières en petits cristaux souvent entiers. On re- marque encore dans les fissures et les boursoufflures de certaines laves lithoïdes, différentes substances cristallisées particulières, qui paroissent contemporaines à la coagulation , à raison de ce qu'elles s'étendent à quelque distance dans l’intérieur de la pâte; parmi tous ces minéraux accidentels, les uns sont connus depuis long- temps, parce qu'ils ont un volume assez notable; les autres, beaucoup plus rares, ont été successivement trouvés ou décrits par MM. Fleuriau de Bellevue (1), Thompson, l'abbé Gismondi , QG) M. Fleuriau de Bellevue , dans un Mémoire imprime il y a seize ans aw Journal de Physique, tome LI, a développe des recherches très-délicates et très-heureuses, faites par lui sur plusieurs de ces minéraux ainsi que sur la gangue de ceux qu’on trouve à Capo di Bove, dans les États romains. Cette gangue, d’après mes résultats, se trouve au nombre des pâtes lithoïdes de composition anomale ; mais cette circonstance n’ôle rien au mérite des pro— babilités générales que M. Fleuriau de Bellevue a déduites de son examen. En effet , cet habile observateur a soutenu que les cristaux apparens à la vue simple dans les produits volcaniques , devoient être le premier résultat de la coagula- tion; qu’il étoit indispensable d’examiner les très-pelits cristaux disséminés dans b aucoup de roches nommées vaguement cornéenne , basalte et svacke, lesquelles comprennent, suivant lui , tantôt des agrégés , tantôt des mélanges dans toutes sortes de combinaisons ; et qu’on ne parviendroit à bien classer 306 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Néergaard , Grasset, Mouteiro et Nose; ces derniers, quoique d’un très-petit volume, sont encore apparens à la vue simple, et n'ont guère moins d’un millimètre de longueur; on leur donne communément (ainsi qu’à beaucoup d’autres cristaux d’un petit volume étrangers aux volcans) l’épithète de micros- copiques ; mais celte épithète ne sauroit plus leur appartenir, puisque leurs diamètres sont au moins vingt ou trente fois plus considérables que ceux des cristaux élémentaires des pâtes lithoïdes. Du reste, je n’ai trouvé aucune trace de ces minéraux accidentels dans les variétés de cendres que j'ai examinées. J'estime qu’en général ils doivent y étre aussi excessivement rares que dans les pâtes lithoïdes elles-mêmes. . Je ne tirerai aucune conséquence de la corrélation remar- quable qui existe entre la composition mécanique des cendres et celle des produits lithoïdes, vitreux et scorifiés de tous les âges, pour essayer d'expliquer la manière dont elles se forment. Ce problème reste à résoudre : les données m’en paroissent ex- trêmement compliquées, et encore trop imparfaitement connues. Mes résultats prouvent seulement que la presque totalité des cendres de chaque éruption se forme incontestablement aux dépens de la lave incandescente arrivant des entrailles de la terre, et que les couches volcaniques ou non volcaniques tra- versées, n’en fournissent qu’une très-foible portion; mais dans leur production , quelle part doit-on attribuer à l’excessive in- candescence, à la vaporisation, à l’extrême boursoufflement, au refroidissement plus ou moins précipité et à la trituration? C'est ce qu’il sera bien difficile de déterminer d’une manière satisfaisante, Je me contente d’avoir défini ce qu'il y.a de plus ositif dans les formations volcaniques pulvérulentes, c’est-à-dire 1É élémens minéralogiques dont elles sont composées. Jusqu'ici j'ai traité des substances volcaniques dites ez masse ; enles prenant telles qu’ellesse présentent dans les terrains detous les âges, lorsqu'elles n’ont subi aucune altération. Je vais passer en revue celles de ces substances que le temps, aidé de divers agens, a modifiées dans leur texture intime et leur composition mécanique : cet examen , qui sera rapide, exige que je développe quelques considérations préliminaires. ces roches , qu’autant qu’on observeroit séparément chaque partie de celles qui se présentent à l’état d’agrégation cristalline. - « CHAPITRE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 357 CHAPITRE HUITIÈME. Considérations préliminaires à l’examen des Tufs et des WVackes volcaniques de toute espèce. À peine les matières volcaniques de notre âge sont-elles reje- îées, qu’elles commencent à éprouver des altérations plus ou moins générales. Ges altérations sont très-sensibles dans les pro- duits des plus anciennes éruptions dont l’histoire ait conservé le souvenir; leur intensitéfaugmente, soit dans les produits des volcans brülans antérieurs aux temps historiques, soit dans les produits des volcans éteints incontestables. On les voit plus fré- quentes et plus avancées dans les grands systèmes de terrains volcaniques démantelés dont l’origine est foiblement contestée; elles sont souvent complètes et ont en quelque sorte atteint leur limite dans les terrains volcaniques extrêmement anciens, dont un assez grand nombre de minéralogistes méconnoissent l’origine. Les causes prineipales de ces altérations sont faciles à imaginer, dans des masses aussi perméables que les couches volcaniques. C'est le lessivage des substances salines dont elles pouvaient être pénétrées ou recouvertes après la coagulation ; c’est leur macéra- tion générale par les abondantes filtrations qui les abreuvent continuellement ; c’est la circulation de toutes les molécules chi- miques mises en liberté par suite des différentes actions aux- quelles elles sont soumises; c'est le tassement, la décomposition et la conglomération opérés par les matières infiltrées, pour les couches pulvérulentes ; c’est la désagrégation, la décomposition, la pression souvent énorme des masses supérieures, et le remplis- sage des boursoufflures et des vacuoles microscopiques, par un grand nombre de substances infiltrées et concrétionnées, pour toutes les pâtes scorifiées ou poreuses, et même pour une par- tie des couches lithoïdes ou vitreuses qui jouissent du tissu le plus serré. Des causes analogues agissent avec plus d'énergie sans doute sur les matières volcaniques ensevelies dans les eaux de la mer, soit de temps immémorial, soit par les volcans brülans qui en sont voisins, soit par le petit nombre de volcans brülans sous- marins que nous connoissons, et peut-être aussi par ceux que nous ne connoissons pas. Mais à ces causes il faut ajouter la présence et l’action des substances dissoutes ou suspendues dans Tome LXXXIII. NOVEMBRE an 18616. Zz 358 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les eaux salées, suivant leur profondeur, et l’excessive pression que la masse de ces eaux doit exercer dans tous les sens, en vertu des lois de l’hydrostatique; pression capable de vaincre, en. beaucoup de cas, les obstacles opposés par la porosité la plus déliée, Les effets de ces causes réunies ne peuvent être que présumés; mais ces présomptions, rapprochées des conditions qui caractérisent l’état actuel des plus anciens lambeaux volcaniques qu'on frouve épars à la surface des continens, se montrent en harmonie avec les altérérations singulières qu’on y observe et les circonstances accessoires de leur gis Ces lambeaux, tantôt antérieurs , tantôt intercalés et tantôt superposés , soit aux terrains intermédiaires, soit aux terrains secondaires, soit aux terrains tertiaires , ont, à tous égards, suivi le sort de ces terrains (1) : par exemple, on les voit quelquefois participer aux dérangemens de stratilication; du moins c’est ce qu’on doit raisonnablement supposer, lorsque les couches qui les composent se présentent avec des inclinaisons trop rapides pour qu'on puisse les croire originaires. Mais en outre, depuis que ces lambeaux subsistent, d’autres actions très-générales se sont exercées dans les terrains adjacens; c’est ainsi que les couches argileuses de plusieurs époques se sont consolidées ; que les grès, les pouddingues et les brèches de toute espèce ont été cimentés par des sucs pierreux interposés; que les dépouilles des corps marins renfermés dans les pierres calcaires ont été remplacées par du cawbonate de chaux spathique, du silex ou des pyrites, qui en ont pris les formes; qu’une foule de débris de végétaux enfouis, ont été déformés par la pression, chimiquement déna- turés et quelquefois même remplacés par différentes substances minérales; qu’une infinité de fissures et de fentes plus ou moins considérables ont été ressoudées par des infiltrations générale- ment calcaires ou quartzeuses; enfin que toutes les couches de la croûte du globe qu’on peut supposer avoir été formées ou QG) Le mot volcan est encore une de ces expressions génériques bannales dont on a singulierement abusé par suite de la pauvreté du langage géologique. Il a été un temps où tout lambeau volcanique éloit appelé volcan ; on consi- déroit comme un édifice complet d’éruption, le témoin presque méconnois— sable de la ruine de l'édifice. On cherchoit des cratères là où le mobile appareil de la volcanicité a été démantelé, souvent même effacé presqu’en entier , par les grandes révolutions diluviennes auxquelles il faut attribuer la création des terrains intermédiaires , secondaires ettertiaires , ou tout au moins ledessin des formes actuelles que présente le relief des continens. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 359 déposées par les eaux de la mer, ont été si complètement dessa- lées (1), du moins en apparence, que personne n’a encore eu la pensée d’y rechercher les dernières traces du muriate de soude et du muriate de magnésie. D’après cette esquisse des causes qui ont pu agir sur les plus anciens lambeaux volcaniques et les terrains adjacens, on pour- roit croire que ces lambeaux doivent présenter des résultats d’al- tération très-différens de ceux qu’on observe dans les matières volcaniques beaucoup plus récentes; mais il n’en est point ainsi, surtout quant à la composition mécanique et au tissu intime. C’est l'intensité des effets qui varie plutôt que leur nature. Par exemple, les plus anciennes matières volcaniques contiennent en général des concrétions infiltrées plus abondantes, et les in- fluences du tassement et de l’affaissement s’y montrent beaucoup plus fréquentes et beaucoup plus considérables. Rien de plus variable, au reste, que la marche et la combinaison des altérations de tout genre, non-seulement dans les formations volcaniques des différens âges, mais encore dans les systèmes d’une même époque, mais dans chaque système en particulier. Souvent dans le même système on voit des produits plus ou moins fortement attaqués, plus ou moins diversement altérés, recou- vrir des couches parfaitement intactes, ou bien alterner avec elles. C’est ainsi que des tufs endurcis reposent sur des lits de scories lapillaires incohérentes, que des laves leucostiniques gra- nulaires sont changées en wacke grise, tandis que leurs croûtes scorifiées vitreuses conservent jusqu’à leurs formés originaires, et que sous des wackes brunes amygdaloïdes , on observe des nappes basaltiques poreuses aussi fraîches et aussi peu traitables que si elles étoient coulées depuis un petit nombre de siècles. (1) On ne trouve que de l’eau douce, quelque part que l’on creuse dans les parties solides de l’écorce du globe. La nature des principes dissous dans les eaux saumâtres des grandes plaines sablonneuses de l’Asie et de l'Afrique, n’est pas encore bien connue ; on sait seulement que les lagunes et les lacs sa- lifères tiennent en dissolution des substances ires-varices. Parmi les sources minérales salines ou gazeuses , celles dans lesquelles le muriate de soude do- mine , sont les plus rares et contiennent en même temps des principes va- riables tout-à-fait étrangers à la salure uniformément composée des eaux de la mer. D’un autre côté , la nature et le mélange des ingrédiens dissous, soit dans les eaux de la mer, soit dans les sources minérales , soit dans les lacs et les lagunes, contrastent avec la composition des roches de muriate de soude natif, qui entrent dans la constitution de plusieurs parties des continens. Zz 2 360 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE Mais de toutes les causes d’altération, c’est la décomposition qui travaille avec le plus d'énergie à défigurer et à dénaturer les parties soumises à son influence. Cette espèce de maladie des minéraux, si je puis m’exprimer ainsi, na exercé et n'exerce nulle part autant de ravages que dans les terrains volcaniques, parce que son action destructive ne trouve nulle part autant de prise. Fissures, boursoufflures et vacuoles microscopiques innom- brables dans les masses denses ; interstices multipliés à l'infini entre les masses palvérulentes, les sables, les graviers et les frag- mens des déjections incohérentes; alternances désordonnées des couches meubles avec les couches solides : telles sont les condi- tions qui caractérisent une extrême facilité d'accès, une per- méabilité excessive qu’on chercheroit en vain dans tous les autres terrains. Aussi la décomposition n’attaque pas seulement les laves pulvérulentes, les pâtes scorifiées et les pâtes lithoïdes poreuses ou massives; elle pénètre encore les pâtes vitreuses presque ho- mogènes, et quel que soit le volume des cristaux apparens à la vue simple, qui, disséminés dans cesdiférentes bases, leur donnent l'aspect porphyroïde, elle les détruit sans peine. Parmi ses effets les plus remarquables, je me contenterai de citer le feld-spath se résolvant en kaolin, le pyroxène en argile verte ou jaunâtre, le péridot en argile jaune, brune ou rougeätre (r), l'amphi- gène en argile blanche, la pumite légère en terre blanche, la scorie légère en terre jaunâtre, brune ou d’un beau rouge, et la gallinace parfaite en terre savonneuse d’an gris verdâtre. A jou- tons que ces träbsmutations s’opèrent de la manière la plus ca- pricieuse : tantôt ce sont les cristaux qui s’altèrent, et tantôt la pâte qui les enveloppe; dans la même masse, les cristaux d’une espèce se conservent dans leurintégrité, lorsque ceux des espèces dif- férentes sont détruits depuis long-temps ; enfin la même substance cède ou résiste indifféremment, dans des circonstances qu’on pourroit eroire analogues. — (1) M. Faujas de Saint-Fond est le premier minéralogiste qui ait remarqué et décrit cette transformation du péridot; elle a échappé à de Saussure, qui en a examiné le prodnit sous le nom de limbilite,. prenant ce produit pour une espèce minérale particulière , de formation contemporaine à celle de la lave enveloppante. MM. Brard et Laîné ont constaté, dans le Brisgaw même, que la Lmbilite de de Saussure n’étoit qu’un péridot parfaitement décompose ; j'ai eu occasion de me convaincre de l’exactitude de leur opmion; mais je conserve le nom de limbilite, parce que je pense qu’il faut donner des noms particuliers aux résidus de la décomposition chimique des minéraux; résidus qu’on ne doit pas confondre avec les résultats de la simple désagrégation. ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 36r L’exposé que je viens de tracer est déduit d’un grand nombre d'observations indépendantes de mes expériences; il suflirait presque, pour faire concevoir à priori la nature du tissu intime ét la composition élémentaire des pâtes indéterminées que j'ai encore à examiner. Ces pâtes offrent souvent un aspect très-différent de celui de leurs types originaires : les apparences spécieuses des caractères extérieurs les rapprochent alors beaucoup des cornéennes, des trapps et des pétrosilex : certaines variétés prennent même des ressemblances tout-à-fait séduisantes. Mais ces apparences spécieuses, que l'examen comparatif de la composition mécanique et du tissu intime détruira facilement, céderoient à la seule comparaison des caractères empiriques res- pectifs; toutes les différences de ce genre que j'ai établies au quatrième Chapitre peuvent être reproduites ici. Je vais les for- üfier, en rapportant de nouveaux élémens de contraste; élémens qui appartiennent aussi à une grande partie des roches volca- niques non altérées. Les roches volcaniques ne contiennent pas de filons métalli- fères semblables à ceux qu’on exploite dans les autres terrains (x); les très-petits amas ou plutôt les traces métalliques qu'on y trouve fort accidentellement et fort rarement, présentent des substances minéralisées, associées ou gissantes d’une manière toute particulière. Ces roches elles-mêmes forment très-souvent des filons dans toute sorte de terrains. La structure et les aceïdens singuliers de ces filons, dénoncent un remplissage d’un seul jet, une ex- trême liquidité préalable, et l’influence de pressions violentes exercées en vertu des lois qui président à l'équilibre des fluides. Il est prouvé, par les recherches de M. Fleuriau de Bellevue , que la plus grande partie des pâtes volcaniques jouissent de la pro- priété de faire gelée avec l'acide nitrique afloibli (2). D’apres quelques essais, je puis ajouter que l'intensité de ce caractère () Les roches volcaniques extrémement anciennes ayant participé à toutes les modifications éprouvées par plusieurs sortes de terrains à filons métalliferes, dont elles sont contemporaines, il est évident qu’elles peuvent aussi contenir de ces filons ; mais le cas est rare et constitue une exception de peu d’im- portance, du moment que l’on considere le sol volcanique sous un point de vue tout-à-fait général. (2) Mémoire précédemment cité, Journal de Physiq., 1805, t. LX, p. 409. 362 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE tout-à-fait neuf et précieux, m'a paru proportionnelle à l’alté= ration du tissu intime et des particules élémentaires. Enfin il me semble que l’analogie des substances concrétion- nées par infiltration dans les couches volcaniques de tous les âges et de tous les pays, constitue un dernier caractère empi- rique remarquable. Ces substances composent , en quelque sorte, une minéralogie à part; on ne reconnoit parmi elles qu’un petit nombre d’espèces appartenant aux autres terrains. Toutes ces considérations générales exposées, il me reste à faire mention du soin que j'ai mis à compléter, avant d’entre- prendre les expériences dont je vais rendre compte, les termes de comparaison expliqués au second Chapitre de ce Mémoire, A cet effet J'ai déterminé les caractères des diflérens produits fournis par la décomposition particulière, soit des pâtes vitreuses, soit des minéraux élémentaires qu'on voit figurer en cristaux apparens à la vue simple, au milieu des matières volcaniques de tous les âges. Je renvoie le détail de ces déterminations à læ Table générale des expériences; je dirai seulement que la pu- mite légère et le feld-spath sont moins fusibles à l’état terreux ; au contraire, la fusibilité augmente dans les autres minéraux décomposés. ’ CHAPITRE NEUVIÈME. Examen des Pâtes indéterminées qui servent de base aux Tufs volcaniques de tous les âges. Les substances que je vais examiner comprennent les diffé- rentes bases d’un aspect mat et terreux, blanches, grises, d’un gris verdâtre, d’un gris jaunâtre, d’un brun sombre ou d’un rouge vif, qui entrent dans la composition des roches qu’on appelle généralement z4fs volcaniques, brèches volcaniques. Je range par conquent ici la thermantide tripoléenne de M. Haüy, la base du trass, celle du pépérino , le prétendu tripoli volca- nique , les pouzzolanes parfaitement terreuses, les cendres décom- posées de certains minéralogistes, la base du tuf volcanique et du tuf basaltique de M. Werner, la moya de M. de Humboldt, enfin l’argile volcanique grossière ou endurcie. Les pâtes tufeuses offrent un grand nombre de variétés en- core peu connues, surtout dans les écoles du nord de l’Europe, Elles se montrent avec les traits de l'identité la plus parfaite, dans les terrains volcaniques des différens âges. Leur gisement ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 363 présente des conditions analogues à celles qui caractérisent le gisement des cendres volcaniques. Tantôt elles constituent des amas ou des couches uniformes et sans mélange; tantôt et plus souvent elles contiennent des fragmens de toutes sortes, de toutes grosseurs et en toutes proportions, ce qui leur donne une structure de brèche plus ou moins prononcée. On se rappellera que, sous le point de vue que je considère, il faut faire abstrac- tion de ces fragmens. On croiroit difficilement , à voir l'aspect mat et terreux des bases tufeuses, qu’elles puissent être douées d’une texture intime très-distincte et d’une composition mécanique très-apparente. C’est cependant ainsi qu’elles se présentent lorsqu'on les soumet au microscope, en fragmens très-minces. Quel que soit le degré de leur consistance, on les prendroit, au premier apercu, pour des laves lithoïdes parfaites, dont les grains élémentaires contras- teroient entre eux par des teintes plus tranchées que de coutume. Mais en les examinant plus attentivement , on reconnoît bientôt qu’elles offrent une mie plus lâche; que le volume des grains mi- croscopiques est communément très-inégal , et qu’ils ne sont point entrelacés ; que parmi ces grains, les uns sont durs, translucides ow demi-transparens, tantôt cristallisés et tantôt vitreux, tandis que les autres sont tendres, réduits à l’état terreux, parfaitement opaques, et se distinguent par des teintes très-prononcées. En gé- néral ,opacité de ces derniers permet que chaque particule élé- mentaire figure nettement dans les masses et s’y présente cons- tamment avec sa couleur propre ; ce qui n'arrive pas dans les pâtes lithoïdes non altérées, à raison de ce que les grains blancs transparens ou translucides laissent passer la couleur des grains colorés qui se trouvent placés par-dessous. Les pâtes tufeuses sont, ou /riables, ou‘consistantes, ou en- durcies ; dans les premières, les particules élémentaires ne se tiennent qu’en vertu d’une adhérence extrêmement foible, pro- duite par le simple tassement; dans les secondes, la cohésion dépend tout-à-la-fois du tassement et de la présence d’une petite quantité de matière interposée; dans les troisièmes, il existe un: principe d’adhérence plus abondant , qui ne lie pas seulement les grains élémentaires les uns avec les autres, mais qui pénètre à Fintérieur de ceux de ces grains dont aspect est terreux, et leur restitue une dureté que la décomposition leur avoit d’abord en- levée. Une autre condition essentielle se combine aux précédentes, c’est la dureté propre à chacune des substances minérales infil- 364 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE trées qui. jouent le rôle de ciment ; en effet, la présence d'une petite quantité de ciment très-dur suffit quelquefois pour donner une extrême tenacité à certaines masses. On isole facilement, à l’aide de la pulvérisation, les grains élé- mentaires des pâtes tufeuses friables. Quant aux pâtes consistantes ou endurcies, il faut commencer par chercher à détruire le prin- cipe étranger qui s'y trouve interposé. ner c’est une matière calcaire, ce qui arrive souvent, on réussit facilement à l’enle- ver, à l’aide de l'acide acéteux ou de l'acide nitrique très-affoibli, Dans les autres cas, qui sont plus rares, J'ai trouvé qu’il valloit mieux renoncer à enlever le principe de cohésion et'se contenter d’une précision moins grande; en conséquence, on pousse de suite la pulvérisation au degré convenable. De quelque manière que l’on commence l'opération, on re- connoît qu'une partie plus ou moins considérable des grains mi- croscopiques qui figuroient entiers dans les masses, se résolvent £n parcelles terreuses excessivement fines et susceptibles de se délayer dans l’eau. Il faut conséquemment lotir le tout à l’aide du lavage, afin d’observer les susbtances élémentaires dans l’ordre des volumes. ; Les grains ou cristaux microscopiques qui se conservent en- tiers, sont communément d’un volume inférieur à un trentième de millimètre, mais on en trouve de bien moins fins. Les plus aisés à reconnoître sont ceux de fer titané, qui paroissent €omme Indestructibles au milieu des altérations de tout genre ; on re- trouve dans les autres les différens minéraux volcaniques qui composent les cinérites et les spodites ; les plus abondantes sont donc le feld-spath et le pyroxène; viennent ensuite les verres pyroxéniques (gallinace ou scorie), les verres te (pu- mite ou obsidieine) et le péridot, quelquefois l'amphigène , êt trés-rarement le mica. Les résidus terreux des lotions se composent de parcelles im palpables confondues, lesquelles ne forment souvent pas la bui- tüème ou la dixième partie des masses mises en expérience; quelquefois cependant elles en constituent plus du quart. Elles sont presque opaques, tantôt blanches et tantôt foib ement CO= Jorées en jaune, en vert, en brun ou en rouge ; elleS s'étendent au lieu de croquer sous le pilon. On ne peut pas rigoureusement déterminer leur nature ; mais les caractères de fusion constatés avant le lavage, et les autres circonstances accessoires, sufhisent pour ET D'AISTOIRE NATURELLE. 365 pour faire croire qu’elles proviennent de la décomposition d’une partie des minéraux microscopiques élémentaires. Je n'ai trouvé aucun procédé propre à déterminer diréctement ‘quelles sont les. substances minérales infiltrées autres que l’ar- ragonite et la chaux carbonatée ordinaire, qui donnent de la ‘consistance ou de la dureté aux bases tufeuses; diflérens carac- tères empiriques indiquent tantôt le fer hydraté, tantôt difié- rentes zéolites, tantôt la silice hydratée. J’estime qu’en général on ne se tromperoiït guère en concluant la nature du principe ou des principes de cohésion dominans dans un tuf quelconque, d’après l'espèce des minéraux concrétionnés qui occupent les boursoufllures des fragmens disséminés au milieu de la pâte. Au reste, l’insuflisance de mes recherches à ce sujet, me laisse peu de regrets; en étudiant les pâtes si nombreuses qui ren- ferment de la chaux carbonatée microscopique, j'ai pu me con- vaincre que cette substance y forme des cloisons presque toujours imperceptibles, et que très-ccommunément la somme des espaces qu’elle remplit ne s'élève pas à la centième partie du volume des masses; je n’ai pas eu lieu de présumer que les autres substances interposées puissent jouer un rôle plus important. Ces données générales posées , je dois insister sur les trois exceplions suivantes : Pour me conformer au préjugé d’après lequel on désigne assez vulgairement les brèches volcaniques comme des produits d’éruptions boueuses, j'ai cherché s’il existoit entre les pâtes tufeuses , des différences de tissu intime et de composition mé- canique propres à caractériser deux ou plusieurs modes de formations distincts. Voici la seule différence que j'ai pu re- connoître : dans quelques-unes de ces pâtes, la majeure partie: des particules terreuses au lieu de figurer comme des grains entiers ayant une existence indépendante, se montrent mélées et confondues. Je reviendrai sur cette disposition particulière qu’on expliqueroit à la rigueur, en supposant un tassement pos- térieur à la décomposition. Le tuf boueux moderne produit par une éruption du Ton- guragua en 1797, et rapporté d'Amérique sous le nom de #0yæ par M. de Humboldt, n’a point d'analogue parmi les matières tufeuses desautres pays. C’est un composé d’humus et de minéraux volcaniques réduits en un sable dont les grains sont de toutes dimensions, c’est-à-dire en partie grossiers, en partie micros- copiques. Tome LXXXIII. NOVEMBRE an 1816. Aaa 366 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Enfin ce que j’ai dit de la proportion des substances hété- rogènes infiltrées au milieu des différentes bases tufeuses dures ou consislantes, ne peut point s'appliquer à celles de ces bases qu'on peut nommer mixtes ou bigènes. Celles-ci, qui sont fort rares, se rencontrent à la jonction des couches volcaniques anciennes avec les couches calcaires. Elles renferment du car- bonate de chaux compact, en toutes proportions; quelques-unes en tiennent plus de la moitié de leur volume (1). Si nous revenons maintenant aux pâtes tufeuses considérées en général , je ferai remarquer que les deux modifications prin- cipales de la composition mécanique sont assez nettement in- diquées par le caractère qui se tire de la fusion. En effet, une partie donne assez difficilement un verre blanc ou légèrement coloré, l’autre partie fond avec facilité en verre ou émail noir, ou d’un vert foncé. D’après ces résultats, voici comment il faut concevoir l’exis- tence minéralogique des pâtes tufeuses. Parmi celles qui fondent en verre blanc où légèrement co- loré, les unes peuvent étre définies comme feld-spath granulaire en partie décomposé et mêlé d’une petite quantité de particules étrangères connues : je les nomme zrassoite; les autres doivent ètre envisagées comme verre feld-spathique (pumite ou obsi- dienne) granulaire en partie décomposé et mélangé d’une petite Et de particules hétérogènes déterminées : je les nomme alloite. : Parmi celles qui donnent un verre ou un émail fortement coloré en noir ou vert noirâtre, lesunes peuvent être considérées A ———_—_—_—_—]—— —————_— ——_— ‘ (1) Lorsqu'on rencontre des coquilles dans les couches des terrains vol— caniques démantelés, c’est ordinairement aux tufs mixtes ou bigenes qu’elles appartiennent ; beaucoup de minéralogistes se sont étonnés de la présence de ces coquilles; je m’étonne, au contraire , qu’elles n’y soient pas plus abon— damment répandues. Il doit s’en trouver bien davantage dans les tufs mo- dernes simples ou bigènes qui se forment journellement au pied des volcans brülans dont les bases sont baignées par la mer. Ajoutons que les courans modernes du Vésuve, de l’Etna et des îles Canaries, qui sont arrivés jusqu’à la mer et se sont avancés dans ses eaux, reposent à leur extrémité sur des détrilus mixtes très-coquilliers , et présentent en outre des dépouilles de corps marins logées entre les fissures de la lave et les cavités des croûtes scorifiées. inférieures et supérieures ; les terrains volcaniques sous-marins formés depuis les temps historiques aux Açores et dans l’Archipel grec, doivent renfermer un bien plus grand nombre de ces dépouilles. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 367 comme pyroxène granulaire en partie décomposé et mêlé d’une très-grande quantité de particules hétérogènes connues, que læ décomposition a également attaquées : je les appelle zufaite ; les autres pourront être regardées comme verre pyroxénique (gal- linace ou scorie) granulaire en partie décomposé et mélangé d’une très-grande quantité de particules étrangères déterminées, sur lesquelles la décomposition a aussi produit ses effets : je leur donne le nom de pépérite. La pépérite , la tufaïie, l'alloite et la frassoïte se partageront chacune, à raison des degrés de solidité, en trois subdivisions principales, savoir : la friable, la consistante et l’endurcie : les accidens de coloration serviront à établir les variétés prin- -Cipales. À l’aide des définitions précédentes, les pâtes tufeuses pourront donc obtenir désormais des places de convention dans la mé- thode purement minéralogique, et se trouver décrites à la suite, soit du pyroxène, soit du feld-spath. On conçoit du reste, sans que j'aie besoin de m’appesantir à ce sujet , que ces masses sont trop compliquées poar qu’il n'existe pas un grand nombre de variétés mixtes entre les quatre divisions que Je viens d'établir. Ajoutons maintenant qué sous le point de vue géologique, la trassoïte, l’alloïte, la tufaïte et la pépérite doivent être dé- finies comme grès microscopiques composés de particules mi- nérales hétérogènes, les unes dures, les autres tendres et ter- reuses, et liées entre elles, soit par le tassement, soit par l’interposition de différentes substances disséminées sous forme. de ciment presque toujours imperceptible ; particules analogues d’ailleurs à celles qui constituent les différentes variétés de cinérite et de spodite, Dans le cours des recherches précédentes, je n’ai pas omis de comparer certains tufs feld-spathiques avec les tripolis du commerce et celui du Ménat en Auvergne; les différences sont bien tranchées : je ne dois pas négliger d’en donner ici l’indi- cation. Le tripoli de Ménat n’est rien autre chose que le sque- Lette siliceux d’une argile schisteuse (schiefer thon) vitriolisée par la décomposition spontanée des pyrites accompagnantes. La localité de Ménat m'’étant connue, je puis assurer qu’il n’y existe aucune matière volcanique ancienne ou moderne, et que c’est à tort que plusieurs minéralogistes ont supposé le contraire, Aaa 2 368 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE L’argile schisteuse intacte s’y présente en couches régulières ; sa couleur est d’un gris verdâtre et son grain très-fin ; elle ren- ferme de nombreux tubercules de pyrite radiée et des empreintes de poissons extrêmement rares. Les tripolis du commerce que J'ai pu me procurer, m'ont également montré les caractères d'un squelette siliceux formé aux dépens de schistes argileux, auxquels l’action lente d’un acide auroit enlevé tous les prin- cipes chimiques susceptibles de donner des sels solubles; mais je ne saurois dire si leur production doit être attribuée à la décomposition des pyrites accompagnantes, ou aux vapeurs sul- fureuses d’un terrain houiller incendié, ou bien à la macérafion corrosive opérée par une eau minérale quelconque. J’ai vainement cherché, dans les ouvrages des auteurs de minéralogie les plus recommandables, la définition rigoureuse de ce qu'ils entendent par une éruption boueuse ; cette expres- sion me paroît susceptible d’être rangée parmi celles qu’on devroit bannir de la science, comme énoncant des notions inexactes, vagues, ou trop hypothétiques ; elle consacre en effet un préjugé bien mal fondé, si on a voulu dire que la matière des pâtes tufeuses anciennes a pu être apportée des foyers volcaniques, toute délayée, ou toute dissoute dans un liquide, et qu’elle a été vomie et cristallisée à la manière des laves ; à coup sûr une sémblable hypothèse n’a pu être conclue d’après le rôle que l’eau joue dans les volcans modernes. Nous savons que les foyers volca- niques en repos exhalent continuellement des vapeurs aqueuses accompagnées de matières très-hélérogènes également en vapeurs ; mais ces matières n'ont aucun rapport avec les grains ou cristaux élémentaires des pâtes tufeuses. Nous savons encore que certaines éruptions historiques ont rejeté des masses d’eau liquide qui se sont épanchées en torrens ; mais il faut considérer que ces épanchemens sont extrêmement rares et accompagnés de cir- constances (r) qui permettent de les regarder comme des acci- dentels dans la série des phénomènes essentiellement volcaniques ;. LT (1) Ces épanchemens ne produisent ordinairement que de l’eau douce ; el a été celui de 1755 à l’Etna; tels sent ceux de la Cordiliere des Andes en Amérique, Ces derniers contiennent quelquefois une multitude infinie de pois-— sons. M, de Humbeldt, à qui on doit cette curieuse observation , pense que les lacs souterrains dans lesquels vivent ces animaux, sont à une tres-grande éié- vation au-dessus du niveau de la mer. On trouve les mêmes espèces dans les ruisseaux qui coulentau pied descratères, Journ. de Phys., 1805 ,t. LX , p.243. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 369 on ne doit pas perdre de vue surtout, que leur volume a été ‘communément peu considérable, en ne supposant même aucune exagération dans les récits qui en ont transmis le souvenir. Roulant au reste sur des pentes rapides, tantôt composées de détritus incohérens, tantôt recouvertes d’un humus meuble, pro- fond et riche en principes végétaux, il est tout simple que les torrens. volcaniques se chargent jusqu’à saturation mécanique de toutes ces matières et les étendent au pied des montagnes, sous forme de fragmens amoncelés, de graviers, de sables et de boues fétides. Les prodigieuses averses qui accompagnent quelquefois les éruptions ordinaires, produisent des eflets ana- logues ; mais les caractères de ces alluvions locales, de ces en« vasemens accidentels, diffèrent beaucoup de ceux que présentent là composition spéciale, la structure uniforme, la stratification si particulière et la puissance si bien réglée des assises decendre, de tufs et de brèches qu'on voit s’étendre presque indéfiniment dans les grands systèmes volcaniques de tous les âges. D'où on peut dire que si l’eau a eu quelque part à l’étendage des matières incohérentes qui ont servi de base à certaines couches très-anciennes de brèches et de tufs volcaniques, il en a fallu un volume hors de toute proportion avec celui que nous ont offert les érosions produites par les éruptions aqueuses observées jus- qu'à présent. Ces considérations sommaires rapprochées des résultats de mes expériences, excluent, ce mesemble, complètementl’hypothèsedes éruptions boueuses. Il faut doncadmettre en principe, que les parti- cules élémentaires des pâtes tufeuses anciennes ont été originaire- ment formées par la voie sèche comme celles des pâtes modernes, et qu'elles sont sorties des orifices volcaniques de la même ma- nière, c’est-à-dire à l’état de déjections pulvérulentes. Mais après leur sortie, a-t-il pu se faire que , dans certains cas, elles- aient été recues ou déplacées par les eaux des grandes inonda- tions qui ont anciennement couvert les continens? c’est ce que je n’entreprendrai pas de discuter. La solution de cette ques- tion est indifférente pour mes résultats; en cas d’afiirmative, il s’ensuivroit seulement qu'il faudroit compter une cause de plus parmi celles qui ont concouru à la formation si compliquée des pâtes tufeuses en général; et les puissans effets des tremblemens de terre, considérés comme principaux agens de tassement, n’en subsisteroient pas moins. 379 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE CHAPITRE DIXIÈME. Lxamen des Pâtes indéterminées qui composent les Wackes volcaniques de toutes couleurs , massives ou poreuses. . Sous la rubrique de wackes de toutes couleurs, je comprends ici momentanément toutes les bases indéterminées qui proviennent de l’altération des pâtes lithoïdes, vitreuses ou scorifiées quel-. conques ; je confonds par conséquent dans cette grande Section, les laves argilo-ferrugineuses décomposées de Dolomieu, la .cor- néenne volcanique et le basalte décomposé de de Saussure, la plupart des trapps de M. Faujas de Saint-Fond, tous les trapps et toutes les cornéennes amygdaloïdes, y compris même l’ophite antique, les scories amygdaloïdes, une partie des thermantides, cimentaires de M. Haüy, la plus grande partie des wackes de, M. Werner, comme aussi la plupart des variétés de son thon-, porphyre qui ne contiennent pas de quartz, les laves feld-spa-, thiques compactes et pétrosiliceuses décomposées de Dolomieu, la phonolite décomposée de M. Daubuisson, la domite décom- posée, les pierres ponces décomposées, enfin les argiles volca- niques rudes et grossières. Avant de rendre compte de l'examen de ces nombreuses substances, je dois rappeler que parmi les produits incontestables des volcans brûlans, on ne trouve guère changées en pâte de wacke que certaines croûtes scorifiées, grumeleuses ou pesantes placées au-dessous et au-dessus des courans lithoïdes, et un assez bon nombre de fragmens de lave lithoïde, ou de scories de toutes sortes qui se trouvent dispersés dans les cendres et les tufs. Les mêmes altérations sont plus fréquentes dans les pro- duits incontestables des volcans éteins; mais elles y attaquent rarement les laves lithoïdes poreuses, et plus rarement encore les javes compactes et les laves vitreuses. Au contraire, dans le sol volcanique le plus ancien, et dont l’origine est fortement contestée, il n’y a communément que les masses extrêmement denses qui aient été préservées d’un commencement d’altération. Du reste, entre les pâtes volcaniques intactes de tous les âges et les pâtes de wackes congénères, il existe une foule de variétés intermédiairesqui , tout en attestant l'identité d’origine, sufhroient pour faire préjuger avec une assez grande exactitude, le tissu intime et la composition mécanique dont chaque sorte de wacke est effectivement douée, ET D'HISTOIRE NATURELLE. - 37t .… Considérées en grand, les pâtes de wacke se distinguent em- piriquement des pâtes de tuf par leur porosité, par leur con- texture souvent porphyrique ou amygdaloïde, par les conditions de leur stratification, et par l’absencce de tout fragment hé- térogène disséminé ; mais celles produites par l’affaissement des scories grumeleuses ou pesantes peuvent souvent donner lieu à des méprises. On en trouvera des exemples dans la Table générale de mes expériences. Exposées au microscope , en fragmens très-minces, leur aspect ne diffère pas de celui des bases tufeuses, si ce n’est peut-être par le volume un peu plus gros et plus égal des particules élé- mentaires. D'ailleurs leur texture granitique est très-distincte et leur composition mécanique très-apparente. L’opacité d’une partie des grains microscopiques et le relâchement de leur adhé- rence, font ressortir les teintes blanches, jaunâtres, verdâtres, rougeâtres ou noires, propres à chaque espèce. Lorsque les grains sont peu fins, il ne faut pas même emprunter le secours de la loupe pour reconnoître la contexture granitique des masses; c'est ce qu'on observe très-bien, par exemple, lorsqu'on exa- mine à une vive lumière l'écorce décomposée qui revêt souvent la surface des blocs de lave lithoïde qui ont été long-temps ex- posés à l’action de l'air. Le degré de consistance des différentes pâtes de wacke est en rapport avec l'état de leur texture intime; il en résulte que quelle que soit leur composition-mécanique , ces pâtes peuvent être divisées en wackes solides , wackes friables et »vackes en- durcies. Dans les wackes solides, l’adhérence des grains ou cristaux élé- mentaires est foiblement relâchée; on observe souvent entre eux des vacuoles ou des boursoufflures microscopiques ; ils conservent la dureté et les autres caractères propres à chacune des espèces minérales auxquelles ils appartiennent : un petit nombre seule- ment tendent à passer à l’état terreux. Dans les wackes friables, au contraire, les vacuoles et les boursoufflures microscopiques ne sont presque plus sensibles; un grand nombre de grains ou cristaux élémentaires sont à l’état terreux ; leur proportion varie du dixième au quart des masses ; aussi ne les examine-t-on convenablement qu’à l’aide de lotions préalables. Les wackes endurcies sont les plus rares; on n’y trouve poiné 372 JOURNAL DE PHYSIQUE, D£ CHIMIE « des vacuoles ; certaines variétés offrent seulement quelques bour“ souflures microscopiques. Il faut renoncer à les étudier aveë une précision rigoureuse, lorsque leur dureté est occasionnés É une substance infiltrée autre que la chaux carbonatée; mais orsqu’elles sont cimentées par l’interposition de cette dernière substance, ce qui est le cas le plus ordinaire, on enlève pré- liminairement Ja matière calcaire, et on lotit le résidu pulvé- rulent par des lavages. On trouve alors que la plupart des grains microscopiques qui figuroient entiers dans la pâte endurcie, se réduisent plus ou moins complètement en particules terreuses impalpables. Les grains ou cristaux microscopiques qui persistent dans leur intégrité au milieu de toutes les wackes, sont facilement dé- terminées , et présentent les mêmes espèces de minéraux élé- mentaires que toutes les autres pâtes volcaniques précédemment examinées. Le fer titané s'y reproduit constamment, et paroît résister à tous les genres d’altéralion; sa présence fournit un ca- ractère d’une haute importance. Les minéraux prédominaus sont le feld-spath et le pyroxène; on trouve plus rarement le pé- ridot et l’amphigène; le mica et l’amphibole sont excessivement rares, et ne se rencontrent que dans les pâtes complètement feld-spathiques. Dans les pâtes de wacke scoriformes, c’est communément le verré pyroxénique (scorie ou gallinace) ou bien le verre feld-spathique ( pumite ou obsidienne) qui dominent; ces substances vitreuses se montrent entrecoupées d’une foule de gercures déliées, et figurent ainsi comme des grains très-irré> guliers et de toutes dimensions; leur nature deviendroit bien difficile. à reconnoître, si on n’étoit pas mis sur Ja voie par la considération des boursoufilures microscopiques qu’elles ren- ferment; buursoufflures qu’on ne peut pas confondre avec des vacuoles , car la forme des vacuoles est toujours irrégulière. Il n’est pas possible de déterminer aussi nettement la nature des grains terreux. Il faut étudier leurs caractères avant de pul: vériser et de laver, car le résidu des lotions ne fournit que des poudres impalpables, diverserment colorées, et dont les parcelles confondues s’étendent au lieu de croquer sous le pilon. Avee du soin on parvient à isoler assez complètement les grains ter- reux. En rapprochant les caractères qu'ils présentent des cir- constances accessoires de leur existence, on est conduit à re- connoître qu’ils appartiennent aux mêmes espèces minérales que les grains ou cristaux microscopiques durs et intacts qui font partie ET D'HISTOIRE NATURELLE. 373 partie des mêmes masses; c’est ainsi qu’il n’est pas difficile de retrouver le kaolin dans la plupart des grains élémentaires terreux de couleur blanche, le pyroxène décomposé dans ceux d’un vert pâle, et la limbilite ou péridot décomposé dans ceux d’un vert jaunâtre, d’un brun jaunâtre, ou d’un rouge très-foncé (1). Du reste, les formules d'association des grains élémentaires de toute espèce (abstraction faite de leur état de conservation) ne diffèrent pas de celles qui expriment la composition méea- nique des bases lithoïdes, scorifiées ou vitreuses, dont les dife férentes pâtes de wacke sont congénères. Aussi, d’après Îles conditions de leur fusion, ces pâtes se divisent-elles en deux grandes classes, celles qui donnent un verre blanc ou très-lé- gèrement coloré, et celles qui fondent en un verre ou émail noir, ou d’un vert noirâtre foncé. Lorsque ce n’est pas la chaux carbonatée qui endurcit les pâtes de wacke, on peut présumer, en se fondant sur une réu- nion de considérations empiriques très-puissantes, et que les minéralogistes exercés trouveront facilement sans que j’en fasse ici le détail, on peut présumer, dis-je, que cette fonction est remplie par des substances trés-variées, à la tête desquelles il faut placer les différentes espèces de zéolites, les hydrates de fer et de silice, le quartz ou la calcédoine ; ces dernières substances sont efectivement celles qui se montrent le plus fréquemment con- crétionnées ou cristallisées dans les boursoufilures apparentes à la vue simple, non-seulement des pâtes de wacke en général, mais encore de toutes les autres bases volcaniques non altérées. L’abondance des principes minéraux infiltrés, la dureté propre à chacun d’eux, déterminent en grande partie le degré de con- sistance des pâtes de wacke endurcies. En effet, leur fonction ne se borne pas à remplir les vacuoles microscopiques de ces pâtes, ils pénètrent au milieu -des grains élémentaires réduits à l’état terreux, et cimentent ainsi très-intimement les masses les plus altérées. Du reste, la présence de ceux qu’on ne peut en- lever, du moins par les moyens dont j'ai essayé de faire usage, (1) Je range ici avec la limbilite d’un rouge brun, une substance qui joint quelquefois à cette couleur un éclat un peu métalloïde , et qui est assez com- mune parmi les grains microscopiques terreux des wackes pyroxéniques amyg- daloïdes. Le parti que j'ai pris à l'égard de cette substance, me laisse des doutes que j'espere lever de manière ou d’autre , avant la publication de la J'able générale de mes expériences. Tome LZXXXIII. NOVEMBRE an 18616, Bbb 374 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ne sauroit influer sensiblement sur les résultats d'analyse mé- canique. En eflet, d’après différentes considérations, et surtout d'après le rôle que joue la chaux carbonatée, j'estime que l’es- pace total occupé par ces principes dans les masses qui en con- tiennent le plus, est toujours fort au-dessus de la soixantième partie du volume. Les pâtes de wacke scoriformes peuvent en contenir davantage, mais c’est un cas assez rare. On voit , par ces observations, que quoique les pâtes de wacke soient des corps extrêmement compliqués, leur définition mi- néralogique n’en est pas moins facile à construire. Parmi celles qui fondent en verre blanc ou très-foiblement coloré, les unes doivent être considérées comme feld-spath granulaire à grains microscopiques , décomposé en partie, mêlé de particules hété- rogènes connues, et parsemé de vacuoles plus où moins rares : je les nomme /éphrine ; les autres peuvent êlre envisagées comme verre feld-spathique (pumite ou obsidienne) entrecoupé d’une infinité de fissures microscopiques, décomposé en partie, plus ou moins parsemé de boursoufilures extrêmement petites, et mé- langé d’une quantité plus ou moins considérable de cristaux intacts ou altérés, soit feld-spathiques, soit hétérogènes déter- terminés : je les nomme asclérine. Parmi les pâtes de wacke qui fondent en verre ou émail noir, ou d’un vert noirâtre, les unes pourront être regardées comme pyroxène granulaire à grains microscopiques, décomposé en partie, mélangé d'une quan- tité considérable de particules étrangères déterminées (feld-spath, fer titané, péridot, etc.) également attaquées par la décompo- sition, et parsemé de vacuoles plus ou moins rares : je leur con- serve le nom de w»acke proprement dite; les autres pourront être définies comme verre pyroxénique (scorie ou gallinace) entrecoupé d’une infinité de gercures microscopiques, décomposé en partie, plus ou moins parsemé de boursoufflures extrémement petites, et mêlé d’une quantité plus ou moins considérable de particules intactes ou altérées, soit pyroxéniques, soit hétérogènes. connues : Je les appelle pozzolite. D’après ces formules de convention, mais dont les bases sont rigoureuses, la pozzolite, la wacke, la téphrine (1), Pasclérine (i) Le nom de téphrine a déjà été employé par M. Delamétherie , par M. Brongniart et par moi-même dans une acception un peu différente, qui, d’après mes expériences, me paroît devoir être rectifiée. En effet, nous avons confondu les leucostines grises altérées avec une partie de celles qui ne le sont pas et avec Les vrais basaltes d’un gris très-clair. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 375 pourront désormais être placées et décrites dans les méthodes minéralogiques , à la suite, soit du pyroxène, soit du feld-spath, Les degrés de consistance fourniront, pour chacune des divisions que je viens d'établir, trois subdivisions, savoir: celles de s0- dide, de friable et d’endurcie : les accidens de forme et de coloration serviront à motiver les variétés principales de chaque subdivision. Considérées géologiquement, les pâtes de wacke de toute espèce sont ou des granites microscopiques avec vacuoles plus ou moins rares, ou des porphyroïdes microscopiques avec bour- soufllures aussi plus ou moins rares, dont les parties élémentaires sont les unes dures et les autres tendres et terreuses; parties qui d'ailleurs dépendent ou dérivent d’espèces minérales identique- ment analogues à celles qui constituent les pâtes lithoïdes, sco- rifiées ou vitreuses qui n’ont subi aucune altération. En d'autres termes, l’asclérine est congénère des pumites et des obsidiennes, Ja téphrine des leucostines (r), la wacke proprement dite des basaltes, et la pozzolite des scories et des gallinaces, Je ferai maintenant observer que les laves amygdaloïdes à base de vwacke proprement dite, dont l’origine a été le plus fortement contestée, sont celles qui m'ont en général offert les caractères les plus prononcés à l’analyse mécanique: je citerai les toadstones d’Angleterre, les variolites du Drac dans les Alpes du Dauphiné, et les belles amygdaloïdes d'O- berstein dans le Palatinat. J'ai en outre découvert dans beaucoup de ces pâtes de wacke proprement dite, des cristaux de py- roxène nombreux et apparens à la vue simple , qu’on avoit pris, soit pour de l’amphibole, soit pour de la terre verte, ou bien auxquels on n’avoit pas fait attention , parce qu’ils sont amorphes de première origine, ou déformés par suite de leur décom- position. À J'ai vainement cherché l'amphibole dans la presque totalité des pâtes dont je viens de traiter dans ce Chapitre; ce minéral ne s’est présenté que dans quelques variétés de téphrine, où son ——————————————————————_——_————, (1) Le nom de leucostine a été fait il y a quelques années par M. Delamé- therie, pour désigner la base du porphyre rouge antique. Il m'a paru que ce nom , d’après son étymologie, conviendroit mieux aux pâtes lithoides abon— dant en cristaux microscopiques de feld-spath. En effet, j'ai trouvé que les grains élémentaires de la base du porphyre rouge, sont tous de couleur rosée ow d’un rouge brun tres-claur. Bbb 2 376 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE rôle est si restreint, qu’on pourroit l’y regarder comme acci- dentel, manière de voir qui ne seroit cependant point exacte. Au reste, M. Faujas de Saint-Fond avoit reconnu depuis long- temps, que les pâtes minérales qu'il appelle 4rapps (1) ne con- üennent pas d’amphibole. Or les trapps de M. Faujas comprennent entre autres substances, les bases auxquelles je donne ici le nom de wacke proprement dite. À la rigueur, tant qu’on ne connoîtra pas le gisement de l'ophite antique, ce porphyre ne devroit figurer que par appen- dice dans la classification des roches. Cependant j'ai cru qu’il ne seroit pas inulile d’en examiner la pâte. On sait que de Saussure avoit fait de cette pâte une espèce minérale particu- lière sous le nom d’ophibase; je ny ai trouvé qu'une wacke proprement dite , à grains fins, endurcie par de la calcédoine. Il m'a élé impossible d'y découvrir la moindre trace d’amphi- bole. La présence du pyroxène microscopique dans cette pâte se trouve confirmée par un caractère empirique essentiel, que je dois signaler aux minéralogistes, et qui consiste en ce que certaines variétés extrêmement rares, renferment , indépendam- ment des cristaux apparens de feld-spath, d’autres cristaux éga- lement très-apparens à la vue simple , qui sont composés de py- roxène translucide et du plus beau vert. Cette dernière observation me ramène naturellement à rap- . peler ici un des résultats les plus généraux de mes recherches, savoir, que parmi les préjugés qui ont retardé les progrès de la Géologie, il n’en est pas de plus mal fondé que celui d’après lequel on a supposé jusqu’à présent, que dans presque toutes les substances minérales compactes volcaniques ou non volca- niques qui jouent-un cerlain rôle dans la composition des. mon- tagnes, la couleur verte ou noire étoit donnée par l’amphibole disséminée en particules indiscernables, CHAPITRE ONZIÈME. Résumé général. Je récapitulerai maintenant les principaux résultats du sys- tème d'expériences et d'observations donf J'ai rendu compte dans le cours de ce Mémoire. (1) Histoire naturelle des Roches de trapp, Paris, 1815. ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 377 * On voit que la totalité des substances minérales dites en masse, qui servent de bases aux roches volcaniques de tous les âges et de tous les pays, et dont la nature.étoit restée jusqu’à présent en problème, tant sous le rapport minéralogique que sous le point de vue géologique, se trouvent rigoureusement définies à l’aide d'un nouveau mode d’analyse, d’une sorte d’Anatomie comparée ; Que le tissu homogène et uniforme, soit compact, soit vi- treux, soit terreux, dont ces substances semblent douées lors- qu'on les examine à la vue simple, n’est, à l’exception de certains cas déterminés extrémement rares, qu’une fausse ap- parence ; Quelles sont presque toutes mécaniquement composées de cris- taux microscopiques , appartenant à un très-petit nombre d’es- pèces minérales connues, auxquelles se mêlent, dans certains cas détermigés, des matières vitreuses plus ou moins abondantes ; ue les cristaux microscopiques élémentaires appartiennent au feld-spath , au pyroxène, au péridot, au fer titané, moins souvent à l’amphigène et fort rarement au mica, à l’amphibole ou au fer oligiste; | Que, d’après des probabilités très-grandes, les matières vi- treuses élémentaires , alors même qu’elles ne sont point mélangées de cristaux microscopiques, ce qui est extrêmement rare, ren- ferment les principes prochains des pâtes complètement lithoïdes, principes agrégés alors sous forme de particules tout-à-fait indis- cernables, et réduits peut-être au volume moléculaire ; Que dans une partie des substances volcaniques dites ez masse, les cristaux microscopiques élémentaires et les matières vi- treuses, lorsqu'elles en contiennent, se trouvent souvent dans un état de décomposition plus ou moins avancé; Que parmi ces substances, dont les élémens sont plus ou moins attaqués par la décomposition, certaines doivent leur consistance à des matières étrangères, interposées en particules presque toujours indiscernables; Que quel que soit l’état de conservation ou d’altération des substances volcaniques dites ez masse, les minéraux élémen- taires ne forment communément que des associations ternaires ou quaternaires, au milieu desquelles tantôt le feld-spath et tantôt le pyroxène prédominent constamment, non-seulement par leur 378 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE abondance, mais encore par l’influence des caractères qui leur sont propres; Que cette constante prédominance , combinée aux autres conditions que présente la composition mécanique, et aux ca- ractères extérieurs qui en résultent, permet de diviser métho- diquement les substances volcaniques dites e7 masse, à l'aide de coupures naturelles assez nettement circonscrites, et même à la rigueur, de leur assigner des places de convention dans la méthode minéralogique; dé Qu'on peut partager ces substances en seize £ypes principaux, susceptibles de produire quarante-huit sous {ypes, au moyen de subdivisions assez exactement motivées, et pouvant , à l’aide de considérations très-plausibles, être rapportés au feld-spath ou pyroxèue comme modifications spécifiques plus ou moins im- parfaites : types qui, à raison de l'importance du rôle qu'ils jouent dans la constitution de l'écorce du globe, doigent être l'objet de descriptions détaillées et d’une nomenclature parti- culière, comme s'ils étoient réellement simples et homogènes, mais qu'on ne peut, dans aucun cas, considérer comme de vé- ritables espèces ; Que de quelque manière qu’on dispose ou qu'on multiplie les sabdivisions à établir entre ces types, il restera toujours entre ceux de même espèce ou d’espèce différente, un assez grand nombre de variétés mixtes pour attester qu’ils sont res- pectivement congénères; Que les analogies que l’on a cru exister entre quelques-uns de ces types et les substances élémentaires des roches primor- diales , intermédiaires ou secondaires, à base de pétrosilex, de trapp et de cornéenne, ne soutiennent pas un examen rigoureux et ne sont pas fondées : en d’autres termes, que ces trapps n’ont point d’analogues dans les terrains dont la formation est unanimement regardée, par les géologues, comme absolument étrangère aux volcans; Que les différences qu’on a remarquées entre certaines va- riétés de laves modernes et certaines laves anciennes de même uature, n’ont d'autre fondement que-de très-légères modifi- cations de contexture intime , tenant d’une part à l'abondance, et de l’autre à la rareté, ou même à l'absence (en cas de rem- plissage complet par infiltration) des vacuoles existantes entre js cristaux microscopiques élémentaires ; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 379 Que, proportion gardée des différences qui tiennent à l’ancien. neté relative, les différens types se présentent avec les traits de l’identité la plus parfaite dans les roches volcaniques de tous les pays comme dans celles de tous les âges ; Que le sol volcanique considéré dans son ensemble et sous le point de vue le plus général, offre une composition toute particulière , et une constitution qu’on ne retrouve point dans les autres terrains; Que parmi les causes dont ce sol est le produit, il faut surtout remarquer la loi qui préside à la coagulation de la matière in- candescente des éruptions, et qui presque toujours résout com- plètement cette matière en une immensité de cristaux micros- copiques ; Enfin, que si la Chimie et la Minéralogie ont été si long- temps mueltes sur la véritable nature des substances dites ez masse, qui constituent le fond de toutes les couches volcani- ques, c’est que l’une et l'autre, s’arrêtant à la simplicité appa- rente de ces substances, prenoient les caractères composés des différens mélanges pour des propriétés spécifiques essentielles’; on ne pouvoit résoudre la difliculté qu’en employant des pro- cédés pour ainsi dire moyens entre les leurs, ceux de l'analyse mécanique. Il faut convenir que si ces résultats tendent à placer les mi- néralogistes et les géologues dans un nouvel ordre d'idées, en leur montrant dans le sol volcanique un monde minéralogique, S'il est permis de s'exprimer ainsi, dont tous les individus ont une existence propre et un rôle presque indépendant, il tenoit à bien peu de chose que cette connoïssance ne nous fût jamais acquise : un degré de ténuité de plus daus le volume des indi- Vide, et le problème de la composision des terrains formés par les volcans de tous les âges, pouvoit rester complètement msoluble, Je termine en présentant le Tableau de la nouvelle distri bution méthodique que je propose pour l’ensemble des substances - volcaniques dites e7 masse. J'espère que la synonymie que j'y ai jointe pourra suffire, en attendant que je publie les descriptions minéralogiques des différens types et sous-types (1). (1) Je nomme types ce qu’on pourra,appeler 770dification principale d’une des deux espèces prédominantes , dans la méthode de M. Haüy, et ce- 380 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE DISTRIBUTION MÉTHODIQUE DES SUBSTANCES VOLCANIQUES DITES EN MASSE. ; SECTION I. Substances Feld-Spathiques : dans lesquelles les particules du feld-spath sont très-prédominantes. À) NON ALTÉRÉES. FHNPENT Composées exclusivement de Cristaux microscopiques entre- lacés, d'un égal volume, adhérens par leur simple juxta- position, offrantentre eux des vacuoles plus ou moins rares. LEUCOSTINE, Sous-Types. a) Leucostine compacte. Synon. Lave lithoïde pétrosiliceuse, feld- spath compact sonore, klings- tein , phonolite, hornstein vol- canique. Db)—————<écailleuse. ———Sorte nouvelle danslaquelle beau- coup de cristaux de feld-spath sont plats et posés dans le même sens; graustein de M. Werner ? C)—————granulaire. ——— Domite, base d'une partie des thonporphyresde l Auvergne et probablement de Hongrie; base d’une partie des porphyres trap- péens de M. de Hagholdi: qu'on doit nommer espèces dans la méthode de M. Werner; ce célèbre mi< néralogiste ne donnant pas à la dénomination d'espèce. l’acception rigoureuse et philosophique que nous lui donnons d’après M. Haüy et Dolomieu. Les sous-types seront des sous-espèces de M. Werner et des variétés principales de M. Hauy. TYPE ET D'HISTOIRE NATURELLE, 361 “EYPR'EMTS Composées de Verre boursoufflé, presque toujours mélangé de Cristaux microscopiques plus ou moins abondans. PUMITE. Sous-Types. a) Pumite grumeleuse, $yz. Sorte nouvelle ayant l'aspect lithoïde. d) pesante. —— Pierre ponce* pesante de Spallanzani . et de Dolomieu. c) — légère. Pierre ponce ordinaire, lave vitreuse pumicée de M. Haüy. TMPETIT: Composées de Verre massif, presque toujours mélangé de Cristaux microscopiques plus ou moins abondans. OBSIDIENNE. Sous-Types. a) Obsidienne parfaite. Syz.Obsidienne , lave vitreuse uni- forme, verre feld-spathique. D) ————— smalloïde. —— Lave vitreuse opaque ou pici- forme, pechstein volcanique , perlstein. ©) ————— imparfaite. —— Sorte nouvelle ayant un aspect mixte entre les aspects vitreux et lithoïde, HOYPEAMIINVE Composées de Cristaux et de Graëns vitreux microscopiques nor adhérens. SPODITE. Sous-Types. a) Spodite cristallifère. Sy. Cendres volcaniques blanches. D) ——— semi-vitreuse, —— Cendres ponceuses. c) ——— vitreuse. —— Cendres ponceuses, Tome LXX XIII, NOVEMBRE au 1816. Cce 382 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE B) ALTÉRÉES. MYAPI ENV Composées de Grains vitreux, souvent entremélés de Cristaux, les uns et les autres microscopiques, d’un volume frès-inégal, non entrelacés, en partie terreux, très-foiblement adhérens ou cèmentés impcrceptiblement par des substances étrangères (spodite vitreuse et semi-vitreuse altérée). ALLOÏTE. Sous-Types. ae) Alloïte friable. à Une partie des tufs blanes où d’un | blanc jaunâtre, des tufs ponceux, ë) — consistante.; Sy. 4 du prétendu tripoli volcanique, des thermantides tripoléennes ; c) — endurcie. cendres ponceuses agglutinées. TYPE VI Composées de Cristaux souvent entremélés de Grains vitreux, les uns et les autres microscopiques, d'un volume très-inégal, non entrelacés, en partie terreux , très-foiblement adhérens ou cimentés imperceptiblement par des substances étrangères (spodite cristallifère altérée). TRASSOÎTE. Sous-Types. - Tufs d’un gris cendré, trass; une partie des tufs blancs ou d’un blanc jaunâtre, du prétendu tri- poli volcanique, et des therman- tidestripoléennes; cendres blan- ches agglutinées, TPE NV IT Composées exclusivement de Cristaux mäicroscopiques , d’un égal volume , entrelacés , enpartie terreux, admettant parfois des vacuoles plus ou moins rares, adhérens par la simple juxta-posilion, ou cimentés imperceptiblement par des subs- tances étrangères (leucostine altérée). a) Trassoïte friable. D) ———— consistante.} Syn. c) endureie. 2 TÉPHRINE. Sous-Types.. a) Téphrine solide. Sÿ#, Lave feld-spathique ou pétrosiliceuse dé- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 383 composée, klingstein décomposé, hornstein volcanique décomposé , base du thonporphyre en partie. 2) Téphrine friable. Syn. Domite décomposée, lave feld-spathi- que décomposée, base du thonpor- phyre et du porphyre trappéen en partie. C) ———— endurcie. —— Base des laves amygdaloïdes feld-spa- thiques, base du thonporphyre et du porphyre trappéen en partie. TANIP OVER Cormposées de Verre massif ou boursoufflé, entrecoupé de gercures très-déliées, presque toujours mélangé de Cris- Zaux microscopiques plus ou moëns abondans, en partie terreux ainsi que les Cristaux , consistant par simple juxta- position, ou cèmenté imperceptiblement par des substances étrangères (obsidienne et pumite altérées). ASCLÉRINE. Sous-Types. a) Asclérine solide. Syn. Poncepesantedécomposée,obsidienne imparfaite décomposée. D) ———— friable. —— Pierre ponce décomposée, obsidienne décomposée. c) endurcie. Pierre ponce faisant effervescence, ou pénétrée de fer hydraté. SECTION II. Substances pyroxéniques : dans lesquelles les particules du Pyroxène sont prédonunantes. A) NON ALTÉRÉES. BMP E:.x ; Composées exclusivement de Cristaux microscopiques entre- lacés, d'un égal volume, adhérens par leur simple juxta- position, laissant entre eux des vacuoles plus ou moins rares. BASALTE. Sous-Types. a) Basalte compact. $yr. Lave lithoïde basaltique uniforme, Ccc 2 304 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE lave argilo-ferrugineuse; basalte trap- péen, lave compacte de M. Werner. 2) Basalte écailleux. $yr. Lave basaltique écailleuse de Dolo- mieu ; sorte dans laquelle la plupart des cristaux de feld-spath sont plats et posés dans le même sens. Lave basaltique graveleuse de M. Fau- jas de Saint- Fond; graustein de M. Werner? TYPE QTT- C) ——— granulaire. Composées de Verre boursoufflé, presque toujours mélangé de Cristaux microscopiques plus ou moins abondans. SCORIE. Sous-Types. a) Scorie grumeleuse. $yz. Sorte nouvelle ayant l'aspect lithoïde, confondue avec les scories pesantes; lave poreuse de M. Werner? pesante. —— Lave scorifiée uniforme, scorie pe- sante de Dolomieu, lave poreuse de M. Werner. c)——— légère. —— Lavescorifiée uniforme, lapillaire, ou en masse, thermantides cimentaires de M. Haüy, scorie de M. Werner, scorie légère de Dolomieu. B— TYPE TIT. Composées de Verre massif, presque toujours mélangé de Cristaux microscopiques plus ou moins abondans. GAELINACE. Sous-Types. a) Gallinace parfaite. Syz. Sorte nouvelle, obsidienne fondant en verre noir de.M. de Drée, verre à base de lave fontiformede M. De- lamétherie. D) ———— smalloïde. —— Sorte nouvelle, tantôt noire, tantôt d’un rouge sombre. €) ———— imparfaite. —— Sorte nouvelle formant le passage au basalte compact. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 385 TYPE IV. Composées de Crisiaux et de Grains vitreux microscopiques non adhérens. CINÉRITE. Sous-Types. a) Cinérite cristallifére. Sy. Cendres volcaniques ordinaires. D) ———- semi-vitreuse. —— Cendres volcaniques ordinaires. €) — - vitreuse. —— Cendres volcaniques rouges, ou d’un gris noirâtre. B) ALTÉRÉES. RVIP/E SV: Composées de Grains vitreux , souvent entremélés de Crès- taux, les uns et les autres microscopiques, d’un volume très-inégal, non entrelacés, en partie terreux, très-foible- ment adhérens, ou cimentés imperceptiblement par des sub- stances étrangères (cinérite vitreuse et semi-vitreuse altérées). PÉPÉRITE. Sous-T'ypes. a) Pépérite friable. Tufs volcaniques d’un rouge vif, d’un rouge brun, d’un brun foncé, b) ———- consistante.* Syr.4 d'un vert grisâtre très - foncé ; pouzzolane terreuse friable en c) — - endurcie. partie; base de quelques pépérino.. RVIPIE SANTE Composées de Cristaux, souvent entremélés de Grains vitreux, les uns et les autres microscopiques , d’un volume très-inégal , non entrelacés, en partie terreux, très-foiblement adhérens, ou cimentés imperceptiblement par des substances étrangères (cinérite cristallifère altérée),. TUFAÏÎTE. Sous-Types. a) Tufaïte friable. Tufs volcaniques ordinaires; base de la plupart des pépérino ; pouz- zolane terreuse friable en partie; D) ——— consistante, ; Sy. { tufs volcaniques et trappéens de M. Werner ; moya de M.de Hum- < boldt par appendice à la tufaïte €) ——— endurcie, friable. 386 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE TYPE. VIL Composées exclusivement de Cristaux microscopiques d’urs égal volume , entrelacés , en partie terreux , admettant parfois des vacuoles plus ou moëns rares, adhérens par la simple juxta position, ou cimentés imperceptiblement par des sub- stances étrangères (basalte altéré). WACKE. Sous-Types. Lave basaltique décomposée , wacke de M. Werner en grande parte, trapp et cornéenne amygdaloïde, a) Wacke solide. NES TN INA argile endurcie amygdaloïde ; base ch endurcie de l'ophite antique par appendice à Fe : la wacke endurcie. TYPE VIIL Composées de Verre massif ou boursoufflé, entrecoupé de ger- cures très-déliées, presque toujours mélangé de Cristaux microscopiques plus ou moins abondans, en partie terreux ainsi que les Crèstaux, consistant par simple juxta-position , ou imperceptiblement cèmenté pur des substances étrangères (scorie ou gallinace altérées). POZZOLITE. Sous-Types. a) Pozzolite solide. Scories décomposées, pouzzolanes : lapillaires, thermantides cimen- ———— friable. HSE Re 2) Maple ES en partie, base des scories c) ———— endurcie. amygdaloïdes, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 387 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Mémoire sur les nouvelles propriétés de la chaleur à mesure qu'elle se développe dans sa propagation le long des morceaux de verre; par David Brewster. Pag. 309 Recherches sur la resprration des plantes exposées à la lumière du soleil; par M. Ruhland. 35x Suite du Supplément au Mémoire sur la réduction des degrés du thermomètre de mercure en degrés de cha- leur réelle; par Honoré Flaugergues. 339 Tableau météorologique ; par M. Bouvard. 350 Suire du Mémorre sur les substances minérales dites en masse, qui entrent dans la composition des roches volcaniques de tous les âges; par P. Louis Cordier. 952: 388 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, ec: A MM. les Souscripteurs DUÜU JOURNAL DE PHYSIQUE. M. à Vous êtes averti que votre Abonnement expire avec le Cahier de décembre. Le prix de la Sous- cription est toujours, pour Paris, de 27 fr. par an, et de 15 fr. pour six mois; A Et pour les Départemens, 33 fr. par an, et 18 fr: pour six mois. On s’abonne à Paris, chez Madame veuve Courcier, Imprimeur-Libraire, quai des Augustins, n° 57, 11 faut affranchir les lettres et l'envoi de l'argent. De l’Imprimerie de M"° Veuve COURCIER, Imprimeur. Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n° 57. JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. K N Sr 7 « L A 2 à PA À s Ya DÉCEMBRE An 1816. SUITE DU MÉMOIRE Sur les nouvelles Propriétés de la Chaleur à mesure qu’elle se développe dans sa propagation le long des morceaux de verre; Par Davip BREWSTER, Des Sociétés Royales de Londres et d'Édimbourg. SECTION DEUXIÈME. Sur les Effets permanens produits sur le Verre par la communication de sa Chaleur aux corps environnans. Les phénomènes décrits dans la Section précédente sont de Ja nature la plus éphémère. Chaque frange est dans un état de changement perpétuel. Une couleur succède aussitôt à une autre; et après que la chaleur a rapidement développé toutes les dif- férentes teintes dues à son intensité, elles repassent à travers les mêmes couleurs qu’elles ont montrées dans leur formation, Tome LXX XIII. DÉCEMBRE an 1816, Ddd 390 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE et disparoïissent entièrement après un déclin lent et graduel. C’est sous ce rapport seulement, que les phénomènes du verre cristallisé différent des corps régulièrement organisés qui com- posent les trois règnes de la nature. Le beau développement de couleurs qui caractérise l’action des morceaux cristallins sur la lumière polarisée, est permanent sous tous les rapports. Le même minéral possède une structure invariable, et il ne faut que de la patience pour découvrir les phénomènes qu’il présente, et obtenir une connoissance exacte du caractère et de l'intensité de son action. Au contraire, les franges colorées du verre échauflé ne sont pas susceptibles d’une mesure correcte. Où chaque chose est dans un état de changement, il est impossible de saisir un caractère fixe; et loin deles mesurer, il est souvent difficile d'observer leurs variations. Heureusement néanmoins, J'ai été tiré de cette perplexité par la découverte d’une méthode de fixer le verre dans un état de cristallisation, et de lui donner un caractère permanent , comme aux minéraux les plus parfaits. Le détail de cette méthode, ainsi que des résultats que j'en ai obtenus, formeront le sujet de cette Section. Proposition vingt-troisième. « Lorsqu'un morceau de verre amené à une chaleur rouge est refroidi à l’air ou placé avec un de ses bords sur une » barre de fer froid, les différentes rangées de franges décrites » dans la Section première se développent pendant le refroi- » dissement ; et elles ont le même caractère que celles qui sont » produites en placant le verre froid sur un fer chaud. Lorsque » le refroidissement est complet, la structure que donnent les » franges devient permanente, et les couleurs ainsi fixées ont » le même brillant qu’elles déploient durant leur formation. » Lorsqu'un morceau rougi au feu est exposé à un rayon pola- risé, il ne présente d’abord aucune action sur.la lumière ;. les teintes s’avancent lentement des bords, et au bout de 12 à 15 minutes le verre est refroidi et la cristallisation complète. J’ai formé de cette manière différens morceaux de verre qui possèdent une structure permanente, et donnent les phénomènes décrits dans la Proposition; mais n’ayant point obtenu une série complète des différentes hauteurs et épaisseurs, je n’ai point pris de mesures exactes des franges. Les résultats suivans de quatre différens morceaux de verre ET D'HISTOIRE NATURELLE. 391 donneront quelque idée de la nature des teintes qui se déve- loppent. Tous lés morceaux furent poussés à une chaleur rouge, de manière à ne rien perdre de leur forme. On les fit refroidir en plaçant leurs bords inférieurs sur le fer, à la même tempé- rature que l’air environnant. Nombres dans Épaisseur Maximum de Teinte la Table de des Ja teinte au bord au Newton corres- plateaux. inférieur. milieu. pondans à la teinte au maxim. NE 1.1125 pou. [Commencem. du|Bleu du 1°° ord. 8.7 bleu du 2° ord. 2 0.2000 Vert du 3° ord. |Commencem. du 16.2 bleu du 2° ord. 3 0.2833 Vert du 4° ord. |Commencem. du 22.7 poupre du 1° j ordre. 4 0.4375 A peu près la fin OEillet du 2° ord. 35.5 l du rouge du 5°] ordre. En comparant les nombres dans la cinquième colonne, qui sont les millionièmes parties d'un pouce, avec ceux de la deuxième colonne, on trouvera que le facteur constant par lequel nous devons multiplier Pépaisseur d’un morceau de verre quelconque, à l’eflet d'obtenir l’épaisseur du morceau qui donneroit par la réflexion une teinte semblable à la teinte au 7zaximum, est à peu près —5s- d Une circonstance curieuse, c’est que les franges permanentes ont précisément le même caractère que les transitions qui sont produites en plaçant les morceaux de verre sur un fer chaud, tandis que les franges transitoires développées durant le refroi- dissement des morceaux de verre, ont un caractère opposé. La température limitante à laquelle les premières sont changées dans les dernières , est probablement celle à laquelle la structure permanente est communiquée. Lorsque les morceaux de verre sont plus refroidis à un bord Ddd 2 392 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE qu'à un autre, les franges sont moins distinctes, et les teintes plus basses au bord qui se refroidit moins rapidement. La dif- férence devient plus sensible à mesure que la hauteur des mor- ceaux augmente. Lorsque les morceaux de verre sont épais et exposés à une chaleur considérable, ils perdent.souvent leur poli, et présentent à leur surface, lorsqu'on l’examine au microscope, un tissu fibreux délicat. Ce tissu consiste quelquefois en rainures qui donnent, par la réflexion, les images colorées que donne la mère: perle. IL donne aussi la même propriété à la cire. Proposition vingt-quatrième. « Lorsqu'un morceau de verre cristallisé de la manière décrite » dans la Proposition précédente, est incliné vers ie rayon polarisé » dans une surface plane perpendiculaire à la direction des franges, » les teintes centrales montent dans l'échelle des couleurs comme » si le morceau avoit augmenté en épaisseur ; mais lorsqu'il est » incliné dans une surface plane parallèle à la direction des franges, » la teinte centrale descend dans léchelle comme si le inorceau » étoit devenu plus mince. Lorsque la surface d’inclinaison forme » un angle de 45° avec ces surfaces planes , aucun changement » m'est produit dans les teintes. » Je pris un morceau de verre cristallisé, qui polarisoit une large mais foible teinte de jaune. Lorsqu'il fut incliné dans une surface plane perpendiculaire à la direction des franges, la teinte qu'il polarisoit devint d’un jaune d'oiange foncé; mais lorsqu'il fut incliné dans une surface plane à angles droits à la première, la teinte devint d’un bleu pâle. J’oblins le même résultat lorsque les couleurs appartenoïent aux ordres plus élevés dans l'échelle. L'effet de l’inclinaison peut se voir beaucoup plus avantageu- sement lorsque deux morceaux qui polarisent la même teinte, sont placés transversalement de manière à former une croix. En inclinant un des morceaux, l’autre est nécessairement in- cliné dans une surface plus opposée, de manière que les teintes de l’une montent, lorsque celles de l’autre descendent dans l’é- chelle des couleurs. La conséquence de cette circonstance est une séparation dans. le milieu de la croix, qui produit deux franges noires courbées, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 395 ayant la même apparence que celle que l’on obtient en croisant deux morceaux qui polarisent différentes teintes. Proposition vingl-cinquième. « Si un morceau de verre cristallisé est coupé en deux par >» un diamant, chacune des parties séparées donnera les pro- » priétés d'un morceau entier cristallisé. La portion du morceau » séparé qui avoit auparavant la structure de la classe attrac- » tive de cristaux doués de la double réfraction, a alors la struc- » ture de la classe répulsive. Une autre portion, qui avoit sa » structure attractive, a maintenant une structure intermédiaire » semblable à celle du muriate de soude, etc. Il en est de » même des autres parties du cristal. » Lorsque le morceau est coupé perpendiculairement aux franges, il en résulte un effet analogue. Les franges terminales paroissent à l’instant à de nouvelles extrémités. J’obtins un semblable ré- sultat, quoique beaucoup moins attendu, en brisant un large morceau dans lequel la cristallisation étoit extrêmement irrégu- lière, polarisant cà et là une portion de lumière blanche. Le morceau avoit une petite félure; et lorsqu'il fut brisé en trois morceaux, principalement le long d'une ligne à peu près pa- rallèle à son bord, chaque morceau fut régulièrement cristallisé, ayant les deux espaces noirs avec leurs franges accompagnantes de lumière blanche. Les mêmes eflets sont produits lorsque le morceau est coupé en morceaux par une roue fendante, ou que sa forme est altérée par le frottement. Les expériences précédentes ne sont pas faciles, attendu qu’il est très-diflicile de couper cette espèce de verre avec un dia- mant, En effet, communément il tombe en morceaux aussitôt qu’on l'a rayé, et lorsque cet inconvénient n’a pas lieu, les morceaux se séparent de leur ensemble peu de temps après qu'on y a appliqué le diamant. Scholie. La vérité contenue dans la Proposition précédente est ana- logue à l’expérience si vantée dans le magnétisme, où la plus petite portion détachée de l’extrémité d’une pierre d’aimant , devient elle-même un élément complet possédant les pôles dis- 394 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CH8MIE tincts du nord et du sud. L’exhibition des mêmes phénomènes dans le verre .transitoirement cristallisé durant la propagation de la chaleur, ainsi qu’il est décrit dans la Proposition treizième, pourroit être supposée provenir de quelque nouvelle propriété de la chaleur, qui la rend capable d’agir sur le bord éloigné du verre sans aucune indication sensible de sa présence. Cette opinion néanmoins cesse jusqu’à un certain point d’être fondée, d'après les résultats obtenus avec le verre cristallisé d’une ma- nière permanente, et qui a une température uniforme. Une portion du verre passe avec la plus grande facilité d’une struc- ture cristalline à la structure opposée, et d’un degré de cristal- lisation à un autre, suivant sa position relativement au bord du morceau; et là il ne peut pas y avoir d'équilibre entre les forces par lesquelles ce changement se produit, à moins que le morceau ne développe les différentes rangées de franges qui ont été décrites. Cette polarité optique est produite par la chaleur, comme la polarité électrique est développée dans la tourmaline’ et d’autres minéraux par le même agent; et l’on peut, avec d’autant plus de raison, attribuer la production des phénomènes optiques à l'action d’un fluide particulier, que c’est le moyen d’expliquer les phénomènes de l'électricité et du magnétisme par l'opération des fluides magnétique et électrique. Le fluide optique, comme nous pouvons le nommer, peut être supposé résider dans tous les corps quelconques dans son état naturel. Dans un état de combinaison , il est composé de deux fluides susceptibles d’être décomposés et d’être fixés dans des parties particulières d’un corps par l’agence de différentes causes. Ce seroit perdre son temps que d’exposer les nombreuses et frappantes analogies qui existent entre plusieurs des résultats contenus|dans cette Proposi- tion, et quelques-uns desplusintéressans phénomènes del’électricité et du magnétisme. Nous en désignerons quelques-uns dans la démonstration d’une Proposition subséquente. Proposition vingt-sixième. « Lorsqu'un morceau de verre rectangulaire est amené à une » chaleur rouge et ensuite exposé au refroidissement, ainsi que » nous l'avons ci-devant dit, il acquerra une structure per- » manente, de manière à présenter les franges coloriées lorsque » la lumière polarisée est transmise à travers quelques-unes ET D'HISTOIRE NATURELLE. 395 des faces parallèles qui la bornent; chaque morceau rectan- gulaire étant considéré comme un solide contenu par six! sur- faces planes parallèles. Les axes dépolarisans sont distinctement développés dans toutes ces directions, et forment des angles de 459 avec les sections communes des surfaces planes. » Les franges décrites dans la Proposition sont extrêmement petites dans des morceaux de verre d’une épaisseur ordinaire. Elles sont composées du même nombre de rangées, et ont le même caractère et les mêmes propriétés que celles que l’on voit à travers les surfaces larges des morceaux, et leur teinte au maximum est généralement plus basse, quoique quelquefois plus élevée que la teinte dans son maximum des franges larges pro- duites par de larges surfaces. D’ordinaire elles sont parfaitement régulières, même lorsque la forme des franges larges oflre le plus haut degré d’irrégularité. Dans un morceau de verre qui avoit différentes largeurs, et qui polarisoit un jaune foible du premier ordre dans ses franges du centre, et un bleu brillant du second ordre dans les franges extérieures, les teintes du centre, vues à travers ses bords, varioient avec la largeur du morceau d’un jaune foible du premier ordre à un bleu foncé du second ordre. Pour examiner avec plus de soin les franges formées en trans- mettant la lumière polarisée à travers les différentes faces d’un morceau de verre, je cristallisai un parallélipipède brut de verre d'Allemagne, d’environ trois pieds de long sur un pouce et demi d’épais; je le taillai proprement et le polis sur une pierre de lapidaire. A travers ses deux surfaces les plus larges, on apercevoit les franges. La teinte au maximum des franges du centre est le commencement du vert du second ordre, et celle des franges extérieures, un vert du troisième ordre. Dans les franges vues à travers les bords du morceau, la teinte au maximum de la rangée intérieure est un jaune du second ordre, et celle de la rangée extérieure, un vert du troisième ordre. Les franges vues à travers les extrémités du morceau de verre sont très- curieuses. J’ai un autre parallélipipède de verre de roche de 4,3 pouces sur 1 pouce de large et 1 d’épais, qui fut cristallisé étant sous la forme d’un cylindre, et prit ensuite celle d'un parallélipipède. Il donna les mêmes phénomènes que le précédent, qu'il égaloit dans le beau développement des ordres nombreux de couleurs. Les magnifiques figures produites en croisant ces deux morceaux, surpassent en éclat tous les phé- nomènes optiques que j'ai vus. » » » » p] 396 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Dans ces échantillons, ainsi que dans plusieurs autres de verre épais cristallisé, la teinte au maximum diminuoit toujours par je frottement et le polissage. Les descriptions suivantes de quatre échantillons de verre cris- tallisé, indiqueront les effets produits par le changement de forme du morceau. N° r. Un des plus curieux échantillons de verre cristallisé que j'aie obtenu, c’est un parallélipipède d’environ 0,38 de pouce de large et d’épais sur r,11 pouce de long. Il dépolarise un jaune foible du premier ordre dans la frange du centre, lorsque la lumière polarisée est transmise à travers les faces du parallé- lipipède; mais lorsque la lumière est transmise le long de l’axe du parallélipipède, et lorsque les lignes des deux extrémités sont parallèles ou perpendiculaires à la surface plane de la polari- sation primitive, les deux images formées par le spar calcaire donnent les formes dont suit la description. La première con- siste en une croix noire environnée de belles franges courbées en sens contraire. Elle a des taches d’un vert brillant du troi- sième ordre avec un petit jaune du même ordre. Leur centre donne une forme remarquable par sa symétrie. Les taches co- loriées sont d’un œillet brillant avec une tache blene dans leur milieu. N°2. Unautre morceau de verre de forme carrée, de 0,3 pouces d'épais. Il produisit la croix du centre et donna aux angles toutes les teintes au-dessus du bleu du second ordre arrangées en cercles, avec le bleu ou la teinte au 2aximum au centre. N° 3. Un troisième morceau , d’un quart de pouce d'épaisseur, produisit le même effet, les teintes angulaires s'élevant dans ce cas au Jaune du second ordre. N° 4. Un quatrième morceau, de 1,2 pouce d'épaisseur, pro- duisit des franges d’une courbure contraire, telles que celles du n° 1; mais s’élevant à l’œillet du quatrième ordre. Les franges latérales et des extrémités sont produites par les nos 2, 3, 4, lorsqu'elles sont tournées vers le 450 : leurs franges complémentaires sont d’une beauté parfaite. Lorsque le n° 2 est combiné avec le n° 3, ils produisent des franges d’une courbure contraire comme le n° 1. La nature et l'origine de toutes ces franges sont expliquées dans la Proposition subséquente. Proposition ET D'HISTOIRE NATURELLE. 397 Proposition vingt-septième. « Si un morceau rectangulaire de verre cristallisé qui présente » les franges à travers ses bords, est incliné au rayon polarisé » dans une surface plane perpendiculaire à la direction des » franges, la teinte centrale descendra dans l'échelle comme si » le morceau avoit augmenté en hauteur; mais lorsqu'il est in- » cliné dans une surface plane paralléle à la direction des franges, » la teinte montera dans l'échelle comme si le morceau avoit » diminué en hauteur. » Le résultat contenu dans cette Proposition fut établi d'après les mêmes expériences décrites dans la Proposition vingt-qua- trième; les franges vues à travers les bords du morceau, étant employées au lieu de celles vues à travers ses surfaces larges : les effets d’inclinaison dans ces deux cas, sont directement opposés. Proposition vingt-huilième. « La régularité dans la cristallisation d’un morceau de verre, » d'accord avec une de ses dimensions, n’est point dérangée par » une irrégularité de sa cristallisation dans une autre direction. » Si un morceau de verre est cristallisé depuis son centre, comme dans la Proposition dix-neuvième, ou bien si une cristallisation confuse a lieu par le refroidissement à différentes places, de manière qu’on ne puisse pas voir de franges distinctes lorsque la lumière polarisée est transmise à travers les franges larges du morceau, les franges, vues à travers ses bords, seront par- faitement développées, et posséderont les mêmes propriétés que sitout Je morceau avoit élé régulièrement cristallisé. Proposition vingt-neuvièrne. « Aux extrémités de chaque morcean de verre cristallisé il » existe quatre portions à la limite entre les franges terminales » et latérales, qui ont une structure diflérente du reste du mor- » ceau. Ces portions ont leurs axes inclinés vers les axes des » autres parties du verre. Deux de ces axes ont la même direc- » tion, et sont dans une direction opposée aux deux autres. » Lorsqu'un morceau de verre cristallisé est opposé à un rayon polarisé, de manière que sa longueur dans la direction des franges latérales et centrales se trouve parallèle ou perpendiculaire à lasurface plane de polarisation primitive, il donnera l'apparence Tome LXXXIII DÉCEMBRE an 1816 Eee 398 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d’un morceau dont toutes les franges latérales, centrales et ter- minales ont disparu. Cependant on distinguera à deux extré- mités quatre taches lumineuses donnant des teintes qui, en gé- néral, varient du blanc du premier ordre à l’œillet du second ordre, et qui quelquefois surpassent la teinte au r2aximum des franges centrales, et quelquefois tombent au-dessous, Pour exa- miner la nature de ces teintes, je pris un morceau de verre qui, lorsqu'il fut dans la position précitée, polarisa sur deux points un bleu du second ordre. Je combinai ensuite avec ce morceau un autre de sulfale de chaux, qui polarisa la même teinte, et qui avoit son axe incliné de 45° vers la surface plane de polarisation primitive. Les teintes résultantes à deux des angles éloient noires, ce qu'il faut attribuer à la difé- rence de leurs actions, tandis que la teinte résultante aux deux autres angles éloit verte, ce qui est dû à la somme de leurs actions. J’obtins le même résultat lorsque je combinai avec le morceau ci-dessus la partie centrale d’un autre morceau cris- tallisé qui avoit la direction de ses franges inclinée de 45e à la surface plane de polarisation primitive. Lorsque l’axe du morceau de sulfate de chaux fut tourné autourde 99°, ou lorsque la teinte bleue fut enlevée des franges latérales d’un. morceau de verre cristallisé, ayant la direction de ses franges in- clinée de 45° à la surface plane de polarisation primitive, un. effet opposé fut produit ; c’est-à-dire que la teinte résultante des deux premières portions étoit noire et celle des deux autres verte. Dans deux morceaux cristallisés d’une forme carrée, qui pré- sentoient les rangées latérales et terminales, mais non celles du centre, les quatre portions ci-dessus avoient la structure décrite dans la Proposition. Lorsqu'un morceau de verre cristallisé est taillé à travers le centre, soit avec un diamant, soit avec une meule de lapidaire, de nouvelles franges s'élèvent aux nouvelles extrémités du morceau. Le Les franges décrites dans cette Proposition peuvent s'appeler franges diagonales. Proposition trentième. « Dans tous les phénomènes qui ont été décrits jusqu'ici, les » résultats sont précisément les mêmes, soit que l’on expose au »-rayon polarisé la face antérieure ou postérieure du morceau »v de verre; mais dans les quatre portions précitées, les teintes La ET D'HISTOIRE NATURELLE. ° 399 » changent de caractères selon que l’une ou l'autre recoit la pre- » mière la lumière polarisée. » Si le morceau a sa surface inférieure exposée à la lumière polarisée, les deux premières portions, combinées avec le sulfate de chaux, donnent une teinte due à la différence de leur action, el les deux dernières une teinte due à la somme de leur action. Mais lorsque la surface supérieure est exposée, les deux dernières portions en combinaison avec le sulfate de chaux, donnent une teinte due à la différence de leur action, et les deux premières une teinte due à la différence de leur somme. Cet intéressant phénomène provient des axes de cristaux élé- mentaires qui subissent un changement angulaire de position montant à 90°, en tournant l’autre côté du morceau au rayon polarisé, comme nous l’expliqueront plus particulièrement dans la Proposition subséquente. Proposition trente-unième. « Si un verre cristallisé est placé avec symétrie au-dessus des » points du milieu, soit avec les deux faces antérieures, soit » avec les deux faces postérieures coïncidentes, ou avec une » des faces antérieures coïncidente avec une des faces posté- » rieures, etc.; dans toutes ces positions les quatre portions pré- » citées monteront dans l'échelle de couleurs, ce qui est l’effet » de la somme de l'épaisseur des morceaux de verre. » La vérité contenue dans cette Proposition a été établie par une expérience directe, quoique pouvant être déduite des Pro- positions précédentes. Proposition trente-deuxième. « Lorsque les axes neutres d’un verre cristallisé sont paral- » lèles ou perpendiculaires à la surface plane de polarisation » primitive, les rangées extérieures et intérieures des franges » disparoissent , si le rayon polarisé est perpendiculairement 1n- » cident sur le verre; mais si le verre est incliné vers le rayon » incident, quatre rangées de franges se développent. Elles sont » séparées les unes des autres par trois espaces noirs, et les » franges de chaque côté de la Fee centrale ont le même ca- » ractère. » k Lorsque les franges latérales et centrales eurent disparu, les quatre franges verticales parurent seules à une incidence verti« Eee 2 400 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE cale; mais en inclinant le verre vers le rayon incident dans la direction de sa longueur, trois espaces noirs se développèrent graduellement. L’un d’eux passe à travers le centre du verre, et entre les espaces noirs sont quatre rangées de franges. En examinant ces franges avec un morceau de sulfate de chaux, et avec des verres cristallisés, je trouvai que les deux premières rangées de franges avoient le même caractère que les deux pre- mières franges diagonales, tandis que les deux dernières rangées avoient le même carartère que les deux dernières franges dia- gouales. Dans un verre où la teinte au z7aximum de la frange intérieure étoit un jaune foible du premier ordre, les deux pre- mières rangées de franges consistoient en un bleu du premier ordre; et dans un'autre verre, où Ja teinte au z2aximum de la frange étoit un jaune foible du second ordre, les franges du milieu étoient d’un vert du second ordre. Proposition trente-troisième. « Lorsqu'un verre cristallisé est placé sur un fer rouge, le » nombre de ses franges augmente. Ces franges additionnelles » sont les mêmes que celles qui auroient été produites par la ». combinaison d’un verre cristallisé avec un verre non cristallisé » de la même forme et de la même épaisseur, et soumis à la » même température que le verre cristallisé. Elles disparaissent » lorsque le verre refroidit; mais les franges permanentes ne » sont point altérées, à moins que la chaleur n’ait une forte »_ intensité, auquel cas elles éprouvent une petite diminution. » Les résultats décrits dans la Proposition furent obtenus en placant des verres cristallisés sur des barres de fer de différentes températures. Le verre fut tenu éloigné de la chaleur du fer rouge, lorsque son effet étoit combiné avec celui d’un verre non cristallisé. L'état du verre cristallisé a beaucoup d’analogie avec celui d’une barre d’acier non saturée de magnétisme, Il est sus- ceptible de recevoir, par la chaleur, un degré de cristallisation plus élevé. Proposition trente-quatrième. « Lorsqu'un verre cristallisé d’une manière permanente est » amené à une température uniforme dans l'eau bouillante ou » l'huile bouillante, et qu’ensuite on le laisse refroidir à l'air, » les teintes descendent dans l'échelle dans la proportion où la » température est employée ; mais elles reprennent leur première ET D'HISTOIRE NATURELLE. 407 ». intensité lorsque le verre acquiert la température de l'air en- » vironnant. » Cette diminution des teintes provient de la production de la série passagère et zzusitée de franges décrite dans la Proposition quatorzième , laquelle étant d’un caractère opposé aux franges permanentes, les oblige nécessairement à descendre dans l’é- chelle, Cet effet est précisément le même que si le verre cris- tallisé d’une manière permanente, refroidi, eût été combiné avec un verre chaud de la même épaisseur, cristallisé par le refroi- dissement d’une manière opposée et passagère. Proposition 1rente-cinquième. « Lorsque le centre d’un verre amené à une chaleur rouge » est mis sur le haut d’un petit cylindre de fer placé vertica- » lement, il acquiert en se refroidissant une structure qui donne » des espaces noirs et des franges d’une forme circulaire avec > une croix noire, » Dans un échantillon de verre cristallisé de cette manière, les espaces noirs et la croix noire furent très-distinctement déve- loppés; une teinte jaune du premier ordre parut entre les espaces noirs. Lorsque la lumière polarisée est réfléchie de ce verre à l'angle polarisant, les phénomènes précédens se développent avec la plus grande beauté. Les petites franges mentionnées dans la Proposition vingt-sixième se voient aussi en regardant à travers les bords du verre, et ne sont point affectées par la cristallisa- tion circulaire. Proposition trente-sixième. -« Lorsqu'un cylindre de verre est amené à une chaleur rouge » et refroidi à l'air, il acquiert une cristallisation permanente » dans laquelle les principales sections de tous les cristaux élé- » mentaires sont dirigées vers l’axe du cylindre. » Dans cette expérience, où les phénomènes se développent en transmettant la lumière polarisée le long d’un cylindre de cette espèce, d'environ 2 pouces + de long sur # de pouce de diamètre, où distingue l’image principale et celle complémentaire. La croix noire au lieu d’avoir ses bras inclinés dé 450 à l’horizon, les a: parallèles et perpendiculaires à lhorizon , attendu que la Jumière transmise à travers le cylindre a été polarisée dans la surface plane de l'horizon. Les espaces lumineux entre les bras de Ja croix contiennent environ dix magniques anneaux 402 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de lumière coloriée. L'image complémentaire est marquée par quatre taches noires correspondantes aux quatre portions lumineuses autour de la partie centrale de la croix, et la partie extérieure a quatre secteurs noirs correspondans avec ceux de l'autre image. Elle est formée de petites arches concentriques d’une couleur sombre, avec des franges de teintes de diflérentes couleurs. Pour voir ce phénomène dans toute sa beauté, il est nécessaire que le rayon polarisé soit exactement parallèle à l’axe du cylindre, car la plus légère déviation détruit complètement la régularité de la figure. La structure cristalline qui donne la croix rectangulaire noire, peut être imitée en formant un cercle avec diflérens secteurs de spar calcaire, dont les sections principales sont dirigées vers un axe commun. Ayant eu occasion de donner à un tube de verre une certaine forme, je fus surpris d’observer qu’en transmettant la lumière polarisée le long de son axe, et en lanalÿysant avec le spar calcaire, il se dépolarisoit en huit endroits. Lorsque les lignes des deux extrémités étoient parallèles ou perpendiculaires à la surface plane de la polarisation primitive, les teintes éloient du premier ordre de l'échelle de Newton. L'autre image formée par le spar calcaire offroit des taches noires correspondantes aux taches blanches de la première. Pour découvrir l’origine de ces ouvertures dépolarisantes , j'enlevai un autre morceau du même tube, et je polis les ex- trémités du petit cylindre sans rien lui ôter de la circonférence cylindrique. Exposé à la lumière polarisée, il offrit une croix noire qui séparoit quatre secteurs lumineux, et un espace noir circulaire d’un noir plus foncé vers quatre points. Si nous sup- posons maintenant six portions enlevées , il restera quelque chose de semblable à huit ouvertures lumineuses. Cependant ce n’est pas là la cause de ce phénomène. Les quatre ouvertures de chaque côté du centre sont les quatre franges diagonales qui agissent comme si elles étoient séparées au centre, la commu- mication étant à peu près coupée. Dans ce cas, la cristallisation cylindrique fut changée en cristallisation rectangulaire, en chan- eant la forme du verre, Lorsque la lumière polarisée fut transmise à travers les côtés plats du verre, quatre taches blanches furent dépolarisées; toutes ces taches ont la même teinte d’un blanc bleuâtre, mais deux ont leurs axes à angles droits aux deux autres. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 403 Les phénomènes précédens, qui se trouvent expliqués dans la Proposition dix-neuvième, nous donnent une explication com- plète de ceux produits par l'huile de maïs, dont nous avons présenté la description dans un précédent Mémoire. Les sec- teurs obscurs et lumineux sont d'ordinaire produits par les groupes circulaires de cristaux qui ont leurs axes dirigés vers le même * centre, et l’image pa doit être occasionnée par les cris- taux dont la forme approche de celle d’une sphère. Cette es- pèce de groupe circulaire se voit actuellement dans uneespèce particulière d’adipocire, dont J'ai parlé dans le Mémoire précité. Les axes des cristaux d’adipocire ne sont pas dirigés vers le même centre, c’est pourquoi ils ne donnent pas les mêmes phé- nomènes que l'huile de maïs. Scholie. Les résultats contenus dans la Proposilion donnent l'explica- tion Ja plus satisfaisante des propriétés optiques des gouttes du prince Ruppert, décrites dans un premier Mémoire. Les fentes qu'elles présentent en lignes convergentes à l’axe de la goutte, et en lignes concentriques avec la surface extérieure, sont des conséquences nécessaires de la cristallisation radieuse expliquée dans la Proposition, et peuvent être regardées comme une dé- monstration oculaire de sa vérité. Proposition trente-septième. « Lorsqu'un verre est régulièrement cristallisé, chaque rangée » de franges latérales qu’il présente est accompagnée d’une autre » rangée d’une espèce opposée, et les forces qui produisent ces » franges ne sont point en équilibre, à moins que deux rangées » de franges d’un caractère ne soient opposées aux deux rangées » de franges du caractère opposé. » La vérité de cette Proposition est démontrée par toutes les expériences précédentes. Nous établirons quelques exceptions dans la Scholie. Scholie: Le résultat annoncé dans la Proposition nous conduit natu- rellement à faire voir l’analogie frappante qui existe entre les phénomènes du verre cristallisé et ceux du magnétisme. Pour éviter des expressions amphibologiques, je considérerai la partie 404 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE du verre qui polarise la teinte la plus élevée dans une rangée de franges, comme un pôle nord, et la partie qui poôlarise la teinte la plus élevée dans la rangée opposée, comme un pôle sud. 1. Lorsque la chaleur est propagée le long d’un morceau de verre, ou lorsque le verre est cristallisé d’une manière perma- nente par le refroidissement, et qu’il donne des franges, ses pôles seront disposés de manière à présenter une section de verre à travers les franges. Les pôles nord sont placés aux deux ex- trémités, et le pôle sud au milieu. Dans le même verre existent encore deux points neutres correspondans aux espaces nos, où une espèce de polarité passe dans l'autre. Get arrangement des pôles est précisément le même que celui de l'aiguille aimantée qui a recu sa polarité en plaçant le pôle nord d’un aimant sur son centre, et en l’attirant plusieurs fois vers une extrémité sans retourner en arrière, et ensuite autant de fois vers l’autre ex- trémité. La nature indéfinie des pôles et des franges, lorsque le verre est élevé, ainsi que nous l'avons décrit dans les Propo- sitions seizième et dix-septième, et lorsque la chaleur avance d’un bord du verre, est parfaitement analogue à la polarité indéfinie communiquée à une barre d'acier, en appliquant le pôle d’un aimant à l’une de ses extrémités. La même polarité répandue est acquise par le verre échauflé, lorsqu'un de ses bords se re. froidit beaucoup plus vite que l’autre. De même donc qu'on ne peut pas donner à l'acier deux pôles distincts en appliquant l'aimant à l’une de ses extrémités, de même aussi une polarité distincte ne peut pas être communiquée au verre, soit en le chauffant, soit en le refroidissant seul à un de ses bords, si ce n'est lorsque l'élévation du verre se trouve extrèmement petite. 2. Lorsqu'un verre échauflé est refroidi à l'acier, et qu’il pro- duit les franges passagères décrites dans la Proposition quator- zième, les pôles sont arrangés de manière que les deux extré- mités sont les pôles sud, et que le pôle nord se trouve au milieu; les points neutres sont à une égale distance des deux extrémités. Cet arrangement des pôles est exactement l'inverse du précédent, et le même que celui qui a Lieu dans l'aiguille aimantée de Îa manière ci-dessus décrite, mais avec le pôle nord au lieu du pôle sud. 3. Dans un verre où les structures précédentes sont combinées, on apercoit trois espaces noirs dont deux ont la même structure que celle qui produit la rangée intérieure dans des morceaux de pie 2 ET D'HISTOIRE NATURELLE. 405 de verre cristallisé. Les pôles sont conséquemment arrangés de la même manière que l’aimant avec les pôles consécutifs. 4. Sur environ cent morceaux de verre cristallisé, je n’en ai trouvé qu’un qui donna seulement deux rangées de franges. Un morceau , en se refroidissant , fut intersecté par une fente qui occupoit toute sa longueur. Les parties en restoient si fortement adhérentes, qu’elles ne se séparèrent pas lorsque je les pris dans la main. En l’exposant à un rayon polarisé, il donna deux franges blanches séparées par un espace noir. Les deux franges avoient des caractères opposés, en sorte que les pôles se trouvèrent ar- rangés comme dans un aimant parfait. Cet état des pôles cepen- dant, n’a lieu que dans le cas où le verre est dans une situation violente; car lorsque le verre se brise en deux morceaux à l'endroit de la fente, les franges disparoissent, et le verre ne conserve plus rien de son premier état de cristallisation. L'autre portion n’agit pas sur la lumière polarisée, soit avant, soit après la séparation. La pression de cette portion n’a donc pas donné à l’autre morceau de verre la faculté de sortir de l’état de contrainte auquel il étoit assujéti. Proposition trente-huitième. « Explication de l’origine et de la forme des différentes rangées » de franges décrites dans la Proposition précédente. » « 1. Sur les franges produites par des morceaux rectan- » gulaires. » Il n’est pas facile de préciser de quelle manière les différentes rangées de franges opposées sont produites pendant la chaleur et le refroidissement du verre; mais il est clair, d’après les expériences précédentes, que lorsquun morceau de verre est cristallisé d’une manière passagère ou permanente , tous les cris- taux élémentaires dont il est composé tournent un de leurs axes neutres dans Ja direction du courant de la chaleur. Les axes principaux des cristaux qui forment les franges extérieures sont parallèles à deux des angles et perpendiculaires aux deux autres. : « 2, Sur les franges produites par des morceaux de verre D» Calrres, » Si la largeur d’un morceau de verre est égale à sa longueur, les quatre portions diagonales se rapprochent, et c’est pour cela que lorsque les franges latérales et terminales sont développées, Tome LXXXIII, DÉCEMBRE an 1816. Fff 406 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE la partie centrale devient noire à mesure que les franges. cen- trales disparoissent. Lorsque la ligne du milieu est parallèle ou perpendiculaire à la surface plane de la polarisation primitive, les franges diagonales se montrent étant toujours séparées les unes des autres par un espace noir qui forme la croix. Cette croix noire est un accompagnement nécessaire des franges dia- gonales; car il suit du raisonnement établi dans la Section pre- mière de celte Proposition, que tous les cristaux situés dans les lignes centrales ont leurs axes nentres dans les directions des quatre angles; aussi cessentils de dépolariser la lumière inci- dente lorsque les franges diagonales ont atteint leur dernier degré de perfection. « 3. Sur les franges produites par des morceaux de verre cy- » Jindriqües. » e Comme la chaleur dans un cylindre échauflé est très-abon- damment radiante en lignes perpendiculaires à sa surface, c’est- à-dire en lignes dirigées vers son axe, il en résulte que l’axe de tous les cristaux. élémentaires sera dirigé vers l’axe du cylindre. L’uniformité et la radiation dans toutes les parties du cylindre, produiront une uniformité de structure qui développera des teintes. semblables à des distances semblables de l'axe, et elle donnera ainsi des franges concentriques avec la circonférence cylindrique. Lorsque la section du verre est un polygone à plusieurs côtés, la forme de ses franges peut aisément être déduite des prin- cipes qui ont déjà été établis. Lorsque la section est un triangle, on n’aperçoit aucune figure régulière. Si le triangle est équila- téral, les lignes qui coupent l'angle en deux, ainsi que celles perpendiculaires aux côtés, sont inclinées les unes vers lesautres de 120°; en sorte que les axes des cristaux ne sont pas symé- triquement rapportés aux axes rectangulaires des. parcelles de lumière. Lorsque le verre ést une sphère, les axes sont tous dirigés vers son centre. Proposition trente-neuvième. « Pour constater la condition probablement mécanique des » parties du verre qui produisent les différentes rangées de » franges, » Je ne me suis pas cruautorisé à déduire, des résultats pré- cédens, la condition mécanique des parties du verre qui pro- duisent les différentes rangées de: couleurs. Il est évident que ET D'HISTOIRE NAPURBLLE, 407 dans le cas d’un morceau de verre rouge de chaleur, refroidi à l'air, il y a une densité variable qui diminue de tous les bords en dedans; mais dans la propagation de la chaleur le long d’un morceau de verre froid, il ny a pas d’argument qui prouve di- rectement qu'une semblable augmentation de densité existe vers quelques-uns des bords, excepté vers celui adjacent à la source de la chaleur. Cependant une ressemblance dans les conditions mécaniques de deux morceaux peut étre sûrement déduite de la ressemblance parfaite de leurs propriétés optiques. La partie centrale des morceaux cristallisés qui produit des franges d’un caractère opposé, est dans un état de dilatation décroissante de la ligne centrale à chacune des franges noires (1). Cette induc- tion west point fondée sur une expérience directe quelconque; mais elle est appuyée sur une suite d'expériences nouvelles, que J'aurai bientôt l'honneur de soumettre à la Société Royale; ex- périences qu’on peut regarder presque comme une démonstra- tion. Ces expériences furent faites en changeant l’état mécanique des parallélipipèdes de gelées animales, et par l’endurcissement graduel, et par l’application de pressions variables; et j'ai, de cette manière, obtenu des résultats analogues à ceux décrits dans le Mémoire précédent. Dans tous ces cas, la compression de gelée produisit une rangée de franges d’une structure opposée à celles occasionnées par l'expansion, et chaque compression fut accompagnée d’une dilatation correspondante. On trouvera, de la même manière, qu'il existe dans tous les corps cristallisés une variation de densité relative à leurs axes, et annexée à leur pola- rité, qui explique aisément les franges de formes différentes dé- veloppées par les différens cristaux du règne minéral (2). (1) L’apparence de la fracture du verre à travers les franges, soit qu’il soit transitoirement cristallisé ou d’une maniere permanente, est vraiment instructive. Elle a toujours le même aspect, et indique pleinement les dif férens états mécaniques des différentes parties du verre. C’est pour cette raison qu’il n’est pas possible de couper le verre cristallisé avec un fer chaud, comme le verre d’une densité uniforme , et c’est dans célte circonstance qu’on peut diviser le verre. (2) Depuis que j'ai écrit ce Mémoire, j'ai découvert que le verre, ainsi ge toutes les autres substances qui n’ont pas la propriété d’une double ré- raction , est susceptible de la recevoir par une pression mécanique; et qu'une force comprimante produit toujours la structure qui donne les franges exté— rieures dans le verre cristallisé, tandis qu’une force dilatante produit la struc= ture qui développe les franges intérieures. Nous sommes donc fondés à conclure que les parties du milieu sont dans un état de dilatation, et les FFF 2 408 JOURNAL DEV PHYSIQUE, DE CHIMIE . Proposition quarantième. « La chaleur rayonnante n’est point susceptible de réfraction ; » elle est également incapable de pénétrer le verre comme les » rayons de lumière. » La propagation de la chaleur rayonnante le long du verre peut être rendue sensible à l'œil par les méthodes décrites dans la première Section de ce Mémoire. Elle savante du bord échauflé du morceau de verre, en le cristallisant durant son pas- sage, et en produisant des changemens dans les parties du mor- ceau de verre où elle n’existe pas dans un état sensible. Si la chaleur rayonnante est recue sur une lentille convexe, le même effet est produit. Au lieu d’être tendue comme la lumière vers les surfaces convexes, elle s’ayvance , quel que soit l'angle d'incidence, en lignes perpendiculaires à la surface, en cris- tallisant le verre dans ses progrès; et aussitôt qu’elle a atteint la seconde surface, elle se décharge de nouvaau, comme si elle provenoit d’une nouvelle source de chaleur. Cette expérience, selon moi, est une démonstration oculaire de la première partie de la Proposition. Le docteur Herschel, dans ses célèbres recherches sur les pro- priétés de la chaleur invisible, a déduit le résultat absolument opposé de plusieurs expériences; mais indépendamment de l’exi- guité des effets qu’il a observés, il est évident que le thermo- mètre placé dans le foyer de sa lentille recevoit sa chaleur par la radiation de la lentille elle-même. On peut également dé- montrer qu'une lentille convexe qui radie la chaleur à une tem- pérature uniforme, produira un plus grand effet sur un thermo- mètre placé dans son axe, que sur un autre dont la position est diflérente. D’après la forme de la lentille, les bords sont tou- jours les parties les plus froides, attendu qu'ils poussent leur chaleur vers l'anneau de métal dans lequel ils sont placés; et c’est pour cette raison que la décharge de la chaleur doit être très-abondante dans la direction de l'axe (1). P. a ———————————— — ————— ”—————————————————— parties extérieures dans un état de compression. Par une application parti culière des forces comprimantes, je suis même parvenu à obtenir des teintes üniformes , comme celles produites par des morceaux de sulfate de chaux d’une épaisseur égale. () La circonstance du verre se refroidissant très-promptement vers ses bords ET D'HISTOIRE NATURELLE. 409 L'impuissance dans laquelle se trouve la chaleur de passer à travers du verre, peut êlre considérée comme une suite de son refus de céder à la force réfractive; car il n’est guère pos- sible de concevoir une parcelle de matière rayonnante qui pénètre librement un corps solide sans éprouver quelque changement dans sa vélocité et dans sa direction. Les ingénieuses expériences de M. Prevost de Genève, et celles plus récentes de M. Delaroche, ont été regardées comme établissant la perméabilité du verre à la chaleur rayonnante. M. Prevost employoit des écrans mobiles de verre, qu'il renouveloit continuellement , pour que le résultat qu'il obtenoit ne püût pas être attribué à la chaleur de l'écran; mais telle est la rapidité avec laquelle la chaleur se propage à travers un mince morceau de verre, qu'il est extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, d'observer l’état du ther- momèêtre avant qu'il ait été affecté par la radiation secondaire de l'écran. La méthode employée par M. Delaroche, d'observer la différence de leflet, lorsqu'un écran de verre noirci et un autre transparent se succèdent à l'effet d'intercepter la chaleur radiante, est sujette à erreur. La chaleur rayonnante trouva bien plutôt un passage à travers l'écran transparent; conséquemment la diflérence de l’eflet étoit due nou à la chaleur transmise, mais à la chaleur radiante de la surface antérieure. La vérité contenue dans la cinquième Pro- position de M. Delaroche, est presque une démonstration de la fausseté de toutes celles qui la précèdent. Il trouve qu’un mor- ceau de verre épais, quoique autant ou plus perméable à la lumière qu'un verre mince de mauvaise qualité, laissoit passer une beaucoup plus petite quantité de chaleur radiante, S'il eût employé des morceaux très-épais du flint glass le plus pur, ou circonstance qui peut être prouvée en l’exposant à un rayon polarisé, nous pernmiet de rendre raison d’un faitanomal qu’on n’avoit pas pu expliquer jusqu'ici, et qui a été observé par Euler le jeune, c’est que la longueur du foyer d’une lentille se raccourcit lorsque la température augmente. Cette observation ayant toujours été faite lorsque la lentille étoit froide , la densité, et par con- séquent la puissance réfractive, a augmenté vers la circonférence de la len= üille; donc la longueur de son foyer a diminué. L’aberration sphérique des lentilles ne peut-elle pas être diminuée et même corrigée, en leur donnant une densité différente de celle de leur centre ? J’ai trois morceaux de verre de cette espece , dont deux cristallisés et un non cristallisé, et tous trois exactement taillés sûr le: même moule; mais je n'ai pas encore pu examiner leurs propriétés optiques. 419 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE des masses épaisses de fluide doué du pouvoir de transmettre la lumière en abondance, il auroit trouvé qu'une seule parcelle de chaleur wétoit pas capable de passer directement à travers des m1edig transparens. Proposition quarante-urièrne. « Pour construire un thermomètre chromatique pour me- » surer les différences de température au-dessous de celle du » verre fluide, par les effets optiques qu’elles produisent. » Les différences de température ont déjà été mesurées par les expansions et les contractions qu’elles produisent dans les corps solides, fluides ou gazeux; et tous les divers instrumens thermo- métriques qui ont été construits, ne différent les uns des autres que dans la méthode par laquelle les effets mécaniques sont rendus visibles. Les expériences renfermées dans la première Section de ce Mémoire nous offrent un principe absolument neuf pour la construction d’un thermomètre. Nous y avons vu que les teintes polarisées par un morceau de verre augmentent avec la température qui les produit; et c’est pour cette raison qu'on se sert de ces teintes comme d’une mesure de tempéra- ture , après s’être assuré qu’elles correspondent à plusieurs points dans l'échelle thermométrique. J’ai construit un instrument de cette espèce, dont voici la description. Une série de 20 morceaux de verre de 3,2 pouces de long sur 1,2 pouce de large, et qui réunis donnent 5,4 pouces d’épaisseur. Un vase de métal dont le fond est formé d’une mince lame d’étain ou de plomb, ou de tout autre métal susceptible d’être versé en fusion sur les bords supérieurs des morceaux de verre, de manière à les toucher de toutes parts. On peut obtenir ce contact parfait pour les températures plus élevées, en pressant le fond du vase de métal jusqu’à ce qu’il touche les bords du verre dans tous les points. Lorsqu'on verse un fluide chaud dans un vase, sa chaleur se communique à l'instant aux bords des morceaux de verre, et lorsqu'on les expose à un rayon polarisé, subséquemment analysé par la réflexion d’un corps transparent, ils donnent des franges colorées. Maintenant chaque teinte, dans l’échelle des couleurs, a une valeur numérique correspondante, qui devient uue mesure exacte de la fémpérature du fluide. Au lieu de verser le fluide dans le vase, nous pouvons enlever ET D'HISTOIRE NATURELLE. 411 celui-ci et plonger les morceaux de verre dans le fluide. Il faut ensuite les en retirer promptement et les suspendre dans une position où ils soient convenablement exposés à la lumière po- larisée. La teinte au z1aximum qu'ils développent vers le centre en se refroidissant, est une mesure de température qu’ils ont acquise dans le fluide. Pour avoir quelqu'idée de la nature de l'échelle, j'ai fait les expériences suivantes : la chaleur de ma main appliquée aux bords de 20 morceaux de verre, produisit aussitôt les franges avec les espaces noirs. Avec 12 morceaux j'ai produit le jaune du premier ordre, et lorsque je n’employai qu’un seul morceau, on distinguoit très-bien les espaces noirs et les franges d’un blanc bleuâtre, Une température d’environ 80°, celle du verre étant de 60°, appliquée à 20 morceaux, polarisa dans la frange du centre un Jaune du premier ordre , qui correspond à une feinte dont la valeur est 4 dans l’échelle des couleurs. De là un mor- ceau qui auroit produit une teinte correspondante à #— 0,20 de Péchelle. 9 : Lorsqu'un des morceaux fut placé sur une barre de fer rouge visible au, jour, il polarisa dans la frange centrale le-ccommen: cs du vert du second ordre, qui correspond à 9,835 dans échelle. Maintenant la différence de température répondant à 0,20, étoit 800 — 60° — 200. De là nous avons 1 0,200 : 9,35 — 209 : go90°, la différence de la température du fer et du verre. La tempé- rature du fer est: donc 935°+4- 60° — g95e, Si nous supposons les teintes marquées d’une manière si in- - définie que l'œil ne puisse observer que les unités de l'échelle des couleurs, dans ce cas même nous aurons une échelle de 187 pour mesurer la température de 935° — 20° — 915°; échelle dont chacune des divisions est à peu près égale à 4°,9. Cependant les teintes sont beaucoup plus définies que nous ne l'avons supposé; car dans le second ordre de couleurs, dans jequel on peut toujours faire les observations , les huit différentes teintes ont les mesures suivantes : Teintes. Valeurs. Mioletsy SSH Sc QUES AIM 20 Ladigosns SAME MENU LUN 26,6 412 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Teintes. Valeurs. BEA LRO TE PES T0 Co Vértses, MP PORTE LT MMIC ro Jaune MEN EN PEN NE RME io Oratipes pe 20 rep et QTe NERO Rouge brillant: 7.000 TIRE Écanlate. bebe) dd are 11267 Maintenant la diflérence des valeurs pour le violet et l’écar- late est 5,47, correspondant à sept couleurs différentes. De là, dans la supposition que l’œil puisse distinguer parfaitement ces couleurs séparées, l'exactitude de l’échelle est augmentée en raison de 5,47 à 7, c’est-à-dire de 187 à 239, ce qui donne 30,83 pour la valeur de chaque unité. Néanmoins, il est tout-à-fait évident que nous pouvons dis- tinguer au moins trois points dans le développement de chaque couleur ; et même si l’œil sans aucun secours ne pouvoit pas parve- nir à faire cette distinction , il peut la faire à une bien plus grande étendue, en croisant la frange avec un morceau cristallisé qui servira de modèle, et en observant le degré de courbure pro- duit dans les franges. Ce modèle peut être taillé en forme de coin, de manière à présenter la variation de ses teintes dans le plus petit degré. Dans un coin de cette espèce, de deux pouces de long et taillé dans un parallélipipède cristallisé, de maniere à avoir un angle de 8°, la teinte la plus élevée est entre le 2/euw et le blanc de premier ordre correspondant à environ 2,20, et la teinte la plus basse est entre le noir et le bleu correspondant à peu près à 8°. Nous avons donc une échelle d'à peu près deux A pouces pour mesurer une variation dans la teinte montant à 2,20 — 0,80 — 1,40. En formant des coins de verre cristallisé de cette maniere, nous sommes à même d'observer les gradations par lesquelles les teintes passent l’une dans l’autre, et de faire plusieurs expé- riences: sur les ordres de couleurs, ce qui autrement eût été impraticable. La sensibilité de l'instrument dont nous parlons dépend de plusieurs autres causes : 1°. de l’intensité du pinceau polarisé ; 20. de la transparence du verre; 3°. enfin de l'éloignement de toutes réflexions internes à la jonction des morceaux. Dans l'instrument, avec les 20 morceaux précités, le verre a une tein- ture verte, et la lumière polarisée ne souffre pas moins de 40 réflexions ET D'HISTOIRE NATURELLE. 413 réflexions avant d'arriver à l’œil. Pour éloigner ces inconvéniens, la lumière doit être polarisée par la réflexion de plusieurs mor- ceaux de verre les plus minces et les moins colorés qu’on peut se procurer; en sorte que chaque morceau puisse polariser et réfléchir la lumière transmise à travers le morceau immédiate - ment au-dessus. J’ai obtenu, de cette manière, une lumière aussi brillante que celle que l’argent réfléchit. Les réflexions internes peuvent être écartées en interposant un filet d’huile entre chaque morceau, de manière à soulever la partie du morceau où l'on doit examiner la teinte. Si l’instrument est bien construit, et en prenant toutes ces précautions, je ne crains pas de dire qu’il marquera distincte- ment une différence de température égale à r° du thermomètre de Fahrenheit (r). Je ne puis terminer ce Mémoire sans témoigner ma recon- noissance au R. docteur Milner de Cambridge, qui m'a fait passer, de la manière la plus obligeante, une grande quantité de morceaux de verre épais qu’il m'auroit été impossible de me procurer ailleurs. J’ai pu obtenir par ce moyen plusieurs nou- veaux résultats, et perfectionner beaucoup d'expériences qui étoient restées imparfaites (2). J’ai l’honneur d’être, etc. Davin BREVWSTER. (:) Ce thermomètre a des avantages qui lui sont propres. En effet, il nous met à même de mesurer l’intensité de la chaleur produite par le frottement de l’une des deux substances quelconques. Lorsque le verre est une de ces substances , la manière de se servir de cet instrument est toute simple. Lors- qu’on emploie l’autre substance , il faut la fixer, sans la cimenter, au bord inférieur d’un ou de plusieurs morceaux de verre, de maniere que sa surface frottante puisse être aussi pres qu’il est possible du bord du verre. (2) C’est là un résultat pratique des expériences précédentes qui mérite une notice particulière. Tous les objets de verre , tant ceux destinés à la science que ceux employés au service domestique , devroient être examinés avec soin par la lumière polarisante , avant de les acheter. Une irrégularité dans l’action de peindre en apprèt, ou bien quelques-unes de ces imperfections analogues à ce que les ouvriers appellent épingles dans les morceaux d’acier, seroient rendues visibles à l’œil par leur action sur la lumiere. Les endroits marques de ces imperfections sont ceux où le verre casse presque toujours lorsqu'il est inégalement échauffé , ou lorsqu'il reçoit le plus léger coup. Ce seroit aussi un avantage pour ceux qui taillent le verre , de pouvoir le soumettre à cet exa- men avant d’entreprendre de le frotter et de le polir. Tome LXXXIII. DÉCEMBRE an 1816. Ggg #14 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE … Nofa. Depuis que j'ai adressé ce Mémoire à sir Joseph Banks, J'ai appris que M, Seebeck a rendu compte, dans un Journal allemand du mois de décembre 1814, de quelques expériences semblables à celles renfermées dans la Section deuxième de ce Mémoire, Comme, autant que je puis le croire, il mexiste en Angleterre qu’un seul exemplaire de ce Journal, qui est entre les mains du docteur Thomson, il m'a été impossible de me le poser à l'effet de comparer les résultats de M. Seebeck avec es miens. Je sais cependant qu’il a découvert le fait, qu’un mor- ceau de verre rougi au feu acquiert souvent en se refroidissant la structure dépolarisante, et que les teintes dépendent de la mañière dont on refroidit le verre. Ce résultat, néanmoins , n’a aucune analogie avec les nouvelles propriétés de la chaleur ex- posées dans la première Section du Mémoire précédent, et n’an- ticipe pas sur le développement des phénomènes contenus dans la seconde. La découverte de la nouvelle propriété de la chaleur fut faite par moi au commencement de 1814, et j'en rendis: compte à la Société Royale le 19 mai 1814. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 415 RECHERCHES SUR L'ACTION GALVANIQUE; Par J. P. DESSAIGNES. J’Ar fait voir, dans deux Mémoires imprimés dans les Cahiers d'octobre et décembre 1811 du Journal de Physique , que la pile de Volta perd sa vertu électrique lorsqu'elle est totalement plongée pendant quelque temps dans un milieu dont la température est à + 1000 cent., et qu'elle ne fonctionne pas tant qu’elle y reste; landis que son intensité devient quatre fois plus forte qu'elle n’est naturellement , lorsqu'on ne soumet à cette haute tem- pérature que la moitié de la pile, et qu’on laisse l’autre moitié à l’air libre. On obtient encore le premier résultat en la plon- geant entièrement dans un milieu refroidissant à — 160 cent., et le second en ne soumettant à ce degré de froid que la moitié de la pile. J’ai fait voir, de plus, que quand deux métaux ho- mogènes servant d’armature à une grenouille convenablement préparée , sont d’inégale température entre eux, leur contact est aussi puissant, pour exciterles contractions musculaires, que celui des métaux hétérogènes. Je vais faire connoître quelques nouveaux faits qui tendent à confirmer ces résultats, et à donner quel- ques vues sur la nature de l’action galvanique. Premier Fait. Faites chauffer de l’eau dans un vase de cuivre sur un fourneau : plongez-y un disque double, cuivre et zinc, muni de deux fils de fer, dont l’un communique au cuivre et l’autre au zinc, et que l’un et l’autre s'élèvent ensuite verticalement hors de l’eau à 20 millimètres au-dessus de sa surface. Une grenouille préparée, que vous tiendrez par les pieds, d’une main, tandis que de l’autre vous toucherez à un des fils de fer, éprouvera des contractions à chaque fois que vous ferez toucher ses nerfs au second fil Geg 2 Le 4:06 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de fer; et à proportion que l’eau s’échauffera, elles seront même plus fortes et plus promptes; mais aussitôt que l'eau entrera en ébullition, vous les verrez s’afloiblir rapidement, et elles ces- seront entièrement d’avoir lieu, lorsque l'appareil aura acquis partout le degré de température de Feau bouillante. Si au lieu de toucher un des fils de fer avec un doigt, on prend alors une üge de métal, et que l'on touche avee celle-cr le: même fil dé fer, les contractions se manifestent de nouveau; mais on ne tarde pas à les faire disparoître en plongeant la tige dans Veau bouillante, jusqu’à ce qu’elle ait acquis ce degré de chaleur. Les contractions reparoissent dès l'instant même qu’on retire le vase du fourneau, ou seulement en laissant tomber le feu. Deuxième Fait. Remplissez une jatte de verre d’un mélange frigorifique com posé de neige et de sel : enfoncez-y deux cuillers, l’une d’ar- gent, l’autre de zinc, en contact entre elles par leur creux et séparées l’une de l’autre par leur manche, et ne laissez à dé- couvert que l'extrémité de ces manches. Les choses ainsi dis- posées, si vous touchez avec l’index d’une main le bout de la: cuiller d'argent, et que tenant de l’autre main par les pieds une grenouille fraîchement préparée, vous mettiez par intervalles les nerfs en contact avec la cuiller d’étain, vous obtiendrez d’abord de vives contractions : mais à mesure que le refroidissement fera des progrès, vous les verrez s’afloiblir de plus en plus, et bientôt après disparoître entièrement. On peut alors les faire repa- roître en chauflant un peu le bout de la cuiller d'argent à la flamme d’une chandelle ; mais elles disparoissent de nouveau lorsque la chaleur s’est dissipée, et il faut chaufler une seconde fois, si l’on veut les faire renaître. On ne réveille point le: pouvoir excilant en chauffant ainsi la cuiller d’étain. Il y a plus; lorsqu'on a chauflé l'argent et que les contractions ont reparu , il suffit de chauffer la cuiller d'étain immédiatement après pour les faire disparoître. Lorsque le pouvoir excitant des métaux est éteint par le froid ,. il persévère dans cet état tant que le refroidissement reste au même degré. Dans le cas contraire, il se ranime peu à peu, et la grenouille y éprouve des contractions de plus en plus fortes, à mesure que les cuillers se réchauffent. Pour réussir dans cette expérience, il faut que le nerf touche la cuiller échauffée, et les’ pieds celle qui ne l’est pas : on n'obtient rien dans la position inverse. MS NS ee en tendeur. lee CS SON ET D'HISTOIRE NATURELLE. 417 Troisième Fait. 19. Si l’on met une pièce d'argent sous tn disque de zinc, que l’on place sur le zinc les nerfs d’une grenouille préparée, tandis que ses pieds reposent sur une autre pièce d’argent, et que l’on établisse ensuite une communication entre l’armature ‘des pieds et le zinc des nerfs, on n'aura, comme l’on sait, aucune contraction, parce que le zinc se trouvant placé entre argent et argent, est alors soumis à deux actions contraires et égales. Cependant on peut en obtenir avec cette même dispo- sition des métaux, en chauffant l'argent sur lequel repose le zinc, ou l'extrémité du fil d'argent qui touche süpérieurement au zinc. On peut encore en produire sans chauffer l'argent, en refroidissant la surface supérieure du zinc avec une goutte d’éther. Une inégalité de température entre les deux corps d’argent qui touchent le zinc, ou entre la surface supérieure du zinc et l'extrémité du fil qui la touche, suffit done pour rompre l’équi- libredes forces qui subsiste dans cette disposition des métaux. 20, Personne n'ignore que l’on excite de fortes contractions dans les muscles d’unegrenouille préparée, dont les pieds plongent dans une tasse et les nerfs dans une seconde tasse, l’une et l'autre pleines d’eau, lorsqu'on touche l’eau des vases d’un côté avec Fextréinité d’un fil d'argent, de l’autre avec un disque de Zinc en contact avec l’autre extrémité du fil. Hé bien, si l’on chauffe le zinc jusqu'à un certain point et qu’on réitère les contacts, les contractions n’ont plus lieu , et elles ne reparoïssent que lorsque le zinc n’est plus chaud. J'ai remarqué qu’en le chauffant trop fort, il suscite des contractions aux premiers contacts; mais lorsqu'il ést moins chaud , il devient inexcitable, et il ne reprend son pouvoir que lorsqu'il est à peu près froid. Au lieu de chauffer le zinc, on produit le même effet en re- froidissant l’argent jusqu’à un certain point. On voit que l’on peut contre-balancer l’action impulsive de Fargent sur le zinc en donnant à celui-ci quelques degrés de température de plus, ou, ce qui revient au même, en baissant de quelques degrés celle de l'argent. Quatrième Fair. Les nerfs d’une grenouille étant sur du zinc et les pieds sur une cuiller d’argent, si l’on touche ces deux armatures avec 418 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE un fil d'argent jusqu'à ce que l’animal fatigué ne donne plus de contractions au contact, on les suscite de nouveau en cho- quant le zinc avec le bout de l’arc conducteur. Quand le choc n’est plus eflicace, on les fait reparoître en grattant fortement le zinc avec le bout du fil. Quand cette action déchirante n’y fait plus rien, on en produit encore en chauffant le bout de l'arc conducteur qui touche au zinc. J’avois laissé toute une nuit sur ma table de dissection la tête et les viscères d’une grenouille tenant ensemble. Le lende- main je mets sur les viscères une cuiller d’argent et une tige de zinc à la moëlle allongée du cerveau, et j'établis ensuite une communication des deux armatures avec un fil d'argent : cette têle est restée immobile sous toute sorte de contacts. J’ai chauflé alors la cuiller; à l'instant même les contractions se sont manifestées, et elles ont cessé d'avoir lieu lorsque la cuiller a été froide. L'opposition des températures de deux métaux hétérogènes produit donc sur les organes musculaires une action plus puis- sante que celle de leur hétérogénéité. Cinquième Fait. Au lieu de mettre les nerfs d’une grenouille sur le zinc et les pieds sur l'argent, comme on le fait ordinairement, j'ai essayé de placer, au contraire, les nerfs sur l’argent et les pieds sur le zinc, pour voir si l’excitation auroïit également lieu de cette manière. J'ai remarqué que lorsque l'animal est bien ex- citable , il donne d’abord deux contractions, l’une au moment où l’arc conducteur touche l’armature zinc des pieds, et l’autre lorsqu'on le soulève pour faire cesser le contact : quand l’ex- citabilité commence à s’afloiblir, on n’en obtient plus au confact, mais bien à la séparation ; quelque temps après elles n’ont plus lieu ni au contact ni à la séparation, tandis que si on remet le zinc sous les nerfs et l'argent sous les pieds, on en suscite de très-vives et long-temps après qu’elles ont cessé d’avoir lieu avec la première disposition des armatures. L’excitation galvanique s'opère donc avec moins d’obstacles_ lorsque l’action impulsive va Le pieds aux nerfs que lorsque sa direction est dans un sens contraire. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 419 Sixième Fair. J’avois fait observer en 1817, que si l’on touche avec les deux bouts d’un arc conducteur d’argent l’eau de deux vases dans Jun desquels plongent les nerfs d’une grenouille préparée et ses pieds dans l’autre, on n’obtient aucunes contractions lorsque l’are jouit partout de la même température, tandis qu’elles ont lieu avec ce même arc lorsque l’un des bouts est chaud et l’autre froid. On produit le même effet en plongeant le doigt d’une main dans l’un des vases, et dans le second une tige métal- lique chaude, que l’on tient de Pautre main. Je dois ajouter que si l’on chauffe au même degré les deux bouts du fil d’ar- gent, et qu'on les plonge de nouveau dans les deux vases, la grenouille n’éprouve plus alors de contractions. On peut néan- moins en obtenir en plongeant l’un des bouts avant l’autre ; mais alors il s'établit une inégalité de température entre les deux extrémités. Septième Fais. Faites reposer une cuiller d’argent par son creux sur un mé-+ lange frigorifique de sel et de glace pilée, et son manche sur les bords du vase de verre qui contient le mélange : vous ob- tiendrez des contractions à chaque fois que vous ferez toucher aux nerfs d’une grenouille préparée le haut de la cuiller et à ses pieds le bas; et vous n'aurez rien en faisant les contacts en sens inverse. Etablissez, dans un mélange frigorifique pareil au premier, un fil d'argent plié en demi-cercle, de mamière qu’il n’ait que ses deux extrémités hors de ce milieu. Si, tenant d’une main par les pieds une grenouille préparée, vous approchez les nerfs de lune des extrémités du fil, en même temps que vous tou- chez avec un doigt de l'autre main l’autre extrémité de ce fil, vous n’aurez aucune contraction. Chauffez alors l’un des bouts de l’arc avec la flamme d’une chandelle, et reformez la chaîne comme précédemment, la grenouille à l’instant éprouvera une vive contraction à chaque contact, et elle ne cessera de s’agiter que lorsque la partie de l’arc chauffée aura repris la température du milieu. Il faut toujours que le nerf touche le bout chaud et les pieds le bout froid : on n'obtient rien dans le sens contraire. 420 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Huitième Fait. Si l’on prend d’une main par les pieds une grenouille pré- parée, que lon fasse toucher ensuite les nerfs à un doigt de l’autre main, l'animal reste immobile et insensible à tous les contacts. Si l’on plonge alors ce doigt de la main libre dans un mélange frigorifique, et que lorsqu'il est refroidi on lap- proche de nouveau des nerfs, on obtient de vives contractions, et l’on ne cesse d’en produire ainsi que lorsque l'animal fatigué refuse de répondre à l'excitation des métaux hétérogènes. Les deux mains mouillées d’eau salée n’ont aucun pouvoir excitant lorsqu'elles sont également chaudes ou également froides. Si l’on plonge les nerfs de la grenouille dans un vase plein d'eau salée froide, et les pieds dans un autre plein d’eau salée chaude, qu’on touche ensuite l’eau des deux vases avec un doigt de chaque main, on excite à chaque contact une vive contraction. Neuvième Fait. J’avois fréquemment constaté, d’après M. de Humboldt , qu'une grenouille préparée, ayant pour armatures deux supports d’ar- gent, éprouve quelquefois des contractions lorsqu'on les met en contact, malgré qu’elles soient parfaitement homogènes. Il en est de même lorsqu'en la tenant par le bassin, on fait toucher à-la*fois les nerfs et les pieds à la surface de mercure ou à celle de l’eau. J’avois encore observé, d’après le même auteur, que les contractions ont également lieu en faisant toucher aux nerfs les muscles de l’une des cuisses de l'animal; mais je m'étois en même temps aperçu que ces expériences réussissoient mieux dans un temps froid que dans un temps chaud, avec de fortes grenouilles qu'avec les petites. J’ai pensé alors que cela pouvoit dépendre de ce que les muscles dépouillés éprouvent un plus grand refroidissement que les nerfs par suite de l’évaporation de leur principe humide, et que si cela étoit, les contractions pro- duites dans ces circonstances devoient être l’eflet de l'opposition des températures de ces deux sortes d'organes. Pour m'en assurer, j'ai mis les pieds et les nerfs d’une grenouille préparée sur deux cuillers d'argent, et de suite j'ai complété le circuit avec un fil d'argent : aux premiers contacts il ne s’est produit aucune contraction; mais quelque temps après j'en ai obtenu à chaque fois que je formois la chaîne. J’ai versé alors quelques ET D'HISTOIRE NATURELLE. 42 quelques gouttes d’éther dans le creux de la cuiller, support des nerfs : à l'instant même les contractions ont cessé, et elles ont reparu en Ôôtant l’éther. Dixième Fait. Prenez par les nerfs une grenouille préparée et bien excitable: faites toucher ses pieds à un mélange frigorifique sans former chaîne : au moment même du contact vous verrez tous les flé- chisseurs se contracter, les cuisses s'élever latéralement sur le bassin et les jambes se replier sous les cuisses. A cette flexion subite succède bientôt une vive extension, laquelleest suivie d’une flexion nouvelle et celle-ci d’une seconde extension. Lorsque ces mouvemens sont calmés, on peut les reproduire en mettant de nouveau les pieds sur la glace ; mais en continuant à les refroidir, il survient à la fin un frémissement, un froncement progressif dans les muscles, puis une extension spasmodique de tous les membres, et une régidité générale des fibres. C’est un véri- table tétanos , que l’on fait disparoître en chauffant un instant la grenouillé dans la main ; mais alors la contractilité est tellement affoiblie, qu’elle est insensible à l’action des métaux hétérogènes. Il ne se produit aucune contraction en faisant toucher, sans former la chaîne, les nerfs au mélange frigorifique. IL est remar- quable que l’on n’obtienne rien en plongeant les pieds dans l’eau chaude : je n'ai eu des contractions que lorsqu’en enfoncant les cuisses dans l’eau chaude, les nerfs ont eu touché à cette eau. Onzième Fait. Je me suis avisé de toucher, avec le bout d’un fii d’argent refroidi à o° à peu près, la moëlle allongée de la tête d’une grenouille récemment séparée du tronc, et restant unie aux membres thoraciques. A la première impression du froid il s’est produit des mouvemens convulsifs dans tous les organes; la tête s'est levée sur sa base; les yeux ont roulé dans leurs or- bites, et les pattes se sont roidies. Tous Jes extenseurs étoient dans une contraction permanente. J'ai retiré alors le fil d'ar- gent, et après quelque temps de repos j'ai touché de nouveau la moëlle avec le fil d'argent chaud à + 40° cent. ou 50 cent. environ. Dans cette circonstance, la tête, au lieu de se roidir comme auparavant, s’est affermie par degrés sur sa base; tous Tome LXX XIII, DÉCEMBRE an 1816. Hbh 422 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les extenseurs.et les fléchisseurs ont pris de la tonicité; les:yeux: sont devenus vifs; les membres thorachiques se sont dressés et ont exécuté des mouvemens de progression, qui ont transporté la tète d’un bout de la table où elle étoit à L'autre bout. Frappé de ce phénomène, j'ai voulu voir sil en seroit de même en touchant de la même manière la moëlle épinière dont les nerfs se distribuent aux extrémités inférieures, Aussitôt que l'argent chaud a eu touché la moëlle, j'ai vu les muscles se raffermir, puis les fléchisseurs se contractant seuls, les jambes se sont repliées sous les cuisses, celles-ci se sont éle.‘es de cha- que côté du bassin, et le tronc s’est dressé sur le bassin dan: l'attitude naturelle à Ja grenouille lorsqu'elle est accioupie et prête à sauter. J’ai touché alors la moëlle avec un fil d'argent froid : cela a produit la contraction des extenseurs, et l'animal s’est allongé sur la table, J’ai observé que lorsque le fil d'argent est trop chaud , il ne se produit point de contractions des fléchisseurs, mais seulement des extenseurs, de même qu’avec le fil froid. Il est bien remar- quable qu'un certain degré de chaleur produise sur les nerfs un effet contraire à celui du froid. Douzième Fait. On peut produire des contractions musculaires par une action purement mécanique. Prenez une grenouille préparée fraîchement : tenez-la par les pieds et faites toucher le tronçon vertébral qui pend aux nerfs à une tige de verre au bord d’une table, à un livre, à du linge, à la manche de votre habit, en un mot à un corps quelconque qui ne fasse point de chaîne, vous aurez à chaque contact une contraction. Lorsque le simple contact ne produit rien , il faut choquer le tronçon contre un corps. J’ai vu quelquefois l'animal, après un choc violent, se contracter plusieurs fois de suite par des flexions et des extensions alternatives. Ces contractions n’ont pas lieu en tenant les nerfs dans la main et en choquant les pieds à leur tour. Treizième Fait. Voici un fait assez singulier : lorsqu'une grenouille préparée et munie d’armatures zinc sous les nerfs et cuiller d’argent sous les pieds, est fatiguée par suite des excitations fréquentes qu’elle ET D'HISTOIRE NATURELLE. 423 a subies, et qu’elle ne donne plus que de foibles contractions avec un arc conducteur trés-légèrement chauflé par un bout, si on laisse en permanence de contact l'arc conducteur avec les armatures, le bout chaud étant du côté de la cuiller, et que quelque temps après on lève le bout qui touche à la cuiller pour l'y apporter de nouveau , en faisant toucher les mêmes points qui se touchoiïent auparavant, il n’y a plus de contractions, et l'on ne sauroit en avoir tant que ce sont les mêmes points qui se touchent. On en obtient au contraire en mettant en contact, soit le point déjà touché du fil avee une partie de la cuiller autre que celle qui a été touchée, soit le point déjà touché de la cuiller avec une autre partie du fil que celle qui a été touchée. Ce qu'il y a de plus étonnant, c'est que quand les deux nou- veaux points ont été quelque temps en permanence de contact, si on les sépare pour les rapprocher de nouveau, ils ne pro- duisent plus de contractions; mais on en obtient alors en les reportant respectivement sur le premier point que chacun d’eux avoit antérieurement touché, Quatorzième Fait. M. de Humboldt s’est le premier aperçu que deux armatures, dont l’une a touché du zinc, ont la propriété d’exciter des contractions dans une grenouille formant chaîre avec elles. Cette expérience curieuse demandoit à être variée pour découvrir la cause du phénomène : je l'ai fait de la manière suivante. Faites baigner les pieds et les nerfs d’une grenouille préparée dans deux vases remplis d’eau : touchez ensuite l’eau des deux vases avec les deux bouts d’un fil d'argent , il n’y aura aucune contraction à chaque contact. Etablissez alors un disque d’argent sur un disque de zinc; et avec une des extrémités du fil, ne touchez que la surface supérieure du disque d’argent , puis re- plongez les deux bouts de ce fil dans l’eau des deux vases, vous obtiendrez à l'instant même une forte contraction, que vous pourrez renouveler plusieurs fois de suite en réitérant l'immer- sion du fil dans les vases. Cette propriété reparoît au bout de quelque temps ; mais on peut la faire disparoître en touchant une seconde fois le disque d'argent avec un des bouts du fil. Lorsque le disque d'argent n’est pas en contact avec le zinc, on a beau le toucher avec le fil, il ne lui communique aucune vertu : il en est de même lorsque le zinc est entre deux disques Hhh 2 424 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d'argent, et qu’on touche l’un des deux avec un des bouts du fil. Ce fil n'acquiert encore aucune propriété , lorsque le zinc étant en contact avec un seul disque d'argent , on touche celui-ci avec les deux bouts du fil à-la-fois, Je dois prévenir que pour bien réussir dans cette expérience, il faut avoir soin de toucher toujours l’eau du vase où plongent les nerfs avec l’extrémité de l’are qui a été en contact avec le disque d’argent reposant sur zinc. RÉSUMÉ. 10, On voit, par les deux premiers Faits que j'ai exposés, qu'en soumettant la pile de Volta, ou l’un de ses élémens , à un degré de froid intense ou à une température élevée, on leur fait perdre également leur pouvoir électromoteur. S'il est difficile de se rendre raison de cette action de la température, il ne l’est pas moins de concevoir comment deux causes aussi op-- posées que la chaleur et le froid produisent le même résultat. Il me semble pourtant que si l'électricité qui se produit au con- tact de deux métaux hétérogènes est l’eflet d’une puissance im- pulsive qui pousse d'un métal éans l'autre, on peut annuler son action de deux manières différentes : 1°. en imprimant à cette force une direction contraire; 2°. em faisant naître une force de résistance qui lui soit égale. Or, le froid paroît pro- duire le premier effet, en procurant au fluide impondérable des deux corps en contact, une expansion progressive qui le fait rayonner du dedans au dehors : la chaleur exerçant au contraire une pression de dehors en dedans, doit opérer le second; car le fluide des deux corps n'étant pas de même densité, leur ressort doit s’'accroître sous une même pression dans un rapport inverse à leur densité, et parvenir ainsi progressivement à un équilibre de tension. Si cela est ainsi, l’on peut , d’après cette hypothèse, concevoir aisément comment, dans le troisième Fait,onaugmente le pouvoir électromoteur des deux métaux en chauflant Target, ou sans chauffer l’argent, en refroidissant le zinc : comment, au contraire, on détruit ce pouvoir en chauffant le zinc jusqu’à un certain point, ou en refroidissant de même l'argent; et comment on le fait reparoître en chauffant trop fort le zinc, ou en refroidissant outre mesure l’argent. Pour mettre en équilibre deux puissances inégales, l’on sent qu’il ne faut accroître la plus foible que de ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 425 l'excès de la plus forte, ou n'ôter à celle-ci que ce qu'elle a de trop. Puisqu'on augmente le pouvoir électromoteur en chauflant largent, et qu’on le détruit au contraire en chauffant le zinc jusqu'à un certain point, il suit de là que la force impulsive de l'argent sur le zinc est supérieure à celle du zinc sur lar- gent. Or, l’argent qui est mis en contact sur le zinc se trouve électrisé négativement, lorsqu’en le tenant isolé on le sépare du second métal. L'état négatif est donc ici le partage de la puis- sance la plus forte, et le positif celui de la plus foible. Cela ne peut pas être autrement, si l’on y fait attention; le fluide de l'argent repousse celui du zinc; par cette action il s'approche du centre d’attraction du second corps; celui-ci doit donc en relenir une portion au moment de la séparation des deux métaux. 2°. Le cinquième Fait nous présente un phénomène assez cu- rieux, qui est que si lon met l’armature argent sous les nerfs, celle du zinc sous les pieds, et qu’en appuyant un des bouts de l’arc excitateur sur largent, on touche avec l’autre le zinc, on a d'abord deux contractions, l’une en fermant la chaine et l’autre en louvrant; puis rien en la fermant, mais seulement en l’ouvrant; enfin rien d'aucune manière, tandis qu’elles con- tinuent long-temps après d’avoir lieu lorsque zinc est sous les nerfs et argent sous les pieds. Cela ne prouve-t-il pas que la grenouille n’est pas ici seu- lement un électroscope, mais encore un appareil sAnee , qui ne répond bien à l’action des métaux que lorsqu'elle se fait dans le sens selon lequel il exerce lui-même naturellement son action. Or, dans l'état naturel ce sont les nerfs qui poussent dans les museles et non les muscles dans les nerfs; en mettant le zinc du côté des muscles et l'argent du côté des nerfs, l’argent pousse dans le zinc au moment du contact, le zinc pousse dans les muscles, ceux-ci dans les nerfs, et il se fait une contraction; mais celte force impulsive venant à cesser lorsqu'on rompt la chaîne, les nerfs prévalent, ils poussent dans les muscles et il se fait une nouvelle contraction qui rétablit l'équilibre. Il est aisé de voir après cela, pourquoi , lorsque l’excitabilité est afloiblie, on n'obtient plus de contractions de cette manière, tandis que de l’autre on en obtient long-temps après. Il faut une plus forte impulsion pour agir sur les nerfs par les muscles, que pour agir sur les muscles par les nerfs. 420 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 3°. Les Faits 6, 7, 8, 9, 10, 11 et 12 nous fournissent di- vers exemples de contraction par la seule opposition des tempé- ratures de deux métaux homogènes formant chaîne, ou des deux mains seulement, ou des muscles et des nerfs se touchant direc- tement. Il y a plus; on voit la température exciter des con- tractions sans chaîne, et en agissant seulement sur l’une des ex- trémités de l'arc animal. Un choc produit le même effet lorsqu'il s'exerce sur les nerfs. Il n’est pas possible, dans toutes ces circonstances, de sup- poser que l’action musculaire est l’effet d’un courant électrique, qui se dirige des nerfs dans les muscles ou des muscles dans les nerfs. 11 est évident que les contractions sont produites ici par une simple pression du côté des nerfs, ou par une forte ex- pansion du côté des muscles; et qu'elles ont lieu plus facilement et plus long-temps, lorsque la pression qui s'exerce du côté des nerfs est en même temps secondée par une expansion du côté des muscles. Tout me porte à croire qu'il en est de même dans le contact de deux métaux hétérogènes. En effet, on remarque qu'ils ne donnent aucun signe d'électricité tant qü'ils sont en contact, et que l’un et l’autre ne deviennent électriques qu’au moment de leur séparation. Tant que ce contact subsiste , il ne peut donc ÿ avoir dans les métaux qu'une disposition prochaine à l’état électrique, c’est-à-dire pression du fluide dans lun et raréfaction correspondante dans l'autre. Il est bien singulier qu'une douce chaleur appliquée aux nerfs, ou lattouchement prompt des pieds à un corps froid, ne mette en jeu que les fléchisseurs, tandis qu'un plus fort degré de chaleur, ou un froid quelconque appliqués aux nerfs, de même que tout autre excitation faite avec chaîne ou sans chaîne, ne produise les contractions que dans les extenseurs. Y auroit - il un degré d’excitation propre à chacune de ces deux substances musculaires ? 4°. On aura sans doute été frappé de voir, dans le treizième Fait, les deux points métalliques qui opèrent le contact perdre, par la continuité de leur attouchement, la propriété d’exciter l’un par l'autre, et chacun d’eux la reprendre lorsqu'ils touchent un nouveau point métallique de même corps. Ce phénomène ne nous donne-t-il pas l’idée de la manière dont nos sens s’é- moussent par la continuité d’une même impression; et ne peut- on pas concevoir par là comment une partie du cerveau peut ET D'HISTOIRE NATURELLE. 427 recevoir un changement , acquérir une disposition, une habitude enfin, sans que le restant de cet organe y participe? 5°. On a dû remarquer, dans le quatorzième Fait, qu'un fil d'argent prend passagèrement la propriété d'exciter rien qu'en faisant toucher une de ses extrémités à un disque d'argent en contact avec du zinc. Cette propriété ne peut être que le ré- sultat d’un état particulier que le disque d'argent acquiert lors- qu'il est sur du zinc, et qu'il communique au fil qui le touche. Or, quand le disque d'argent est sur le zinc, son fluide est dans un état de condensation à sa surface inférieure et de ra- réfaction à la supérieure; cette même disposition du fluide doit donc avoir lieu dans le fil d'argent au moment où il touche le disque par un de ses bouts. Il est vrai que cette propriété sub- siste dans le fil quelque temps après le contact, même sans isolement, et qu’il est étonnant que l'équilibre ne se rétablisse pas aussitôt que le contact a cessé; mais c’est un fait, et un fait constant. Cela ne prouveroit-il pas que toutes les molé- cules du fluide d’un corps sont entre elles en équilibre de tension, et que lorsque cet équilibre vient à être rompu par une cause quelconque, l'attraction en retarde le rétablissement ? Ce fait est analogue à celui qu'avoient déjà fait connoître MM. Gautherot, Erman et Ritter, qui est que si l’on met en contact les deux bouts d’un fil métallique avec les deux pôles d'une pile de Volta, et qu'on l'en retire un instant après, il possède pendant quelque temps la propriété de donner des sa- veurs à la langue, de décomposer l’eau, de faire, en un mot, les fonctions d’une pile, quoiqu'il ne soit plus sous l'influence de l'appareil électromoteur. On peut donc dire que le fluide de ce fil est alors polarisé, puisque , comme la pile, il a un pôle positif et un pôle négatif. C’est sans doute en vertu d’un état semblable, que le refroidissement de l'atmosphère procure au fluide de tous les corps, que des disques mélalliques non isolés, qu’on approche d’une aiguille électrométrique en communication avec le réservoir, ont la propriété, tantôt de l'attirer, tantôt de la repousser, suivant l'intensité du froid , ainsi que je l’ai observé. Ne seroit-ce pas aussi à cette polarité temporaire que seroit due Pirritabilité qui subsiste dans les fibres musculaires quelque temps après la mort violente de l'animal ? 428 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE MÉMOIRE SUR LA SODALITE DU VÉSUVE; Par M. zx Comte STANISLAS DUNIN BORKOVWSKI. PRÉSENTÉ A L’ACADÉMIE LE 28 OCTOBRE. M. EkEBERG a le premier analysé un minéral du Groenland qui contient 25 parties de soude. M. Thomson a répété cette analyse, il y a ajouté la description minéralogique de ce minéral, et il l’a fait connoître, dans un beau Mémoire, comme une nouvelle espèce , sous le nom de la sodalite. On ne connoïssoit pas jusqu’à présent d’autres localités de la sodalite. J’ai été assez heureux pour la retrouver sur la pente du Vésuve appelée Fosso Grande, que l’on peut regarder à juste titre comme le grand répertoire des richesses volcaniques du Vésuve. Il paroît que la sodalite doit son origine aux anciennes éruptions qui ont fourni à la Minéralogie la néphéline, la meyonite et l’idocrase; mais elle n’est pas, à beaucoup près, aussi commune que ces espèces ; et c’est à cette raison qu'il faut attribuer qu’elle ma pas été remarquée par les savans observateurs qui ont parcouru cette célèbre contrée. Malgré beaucoup de recherches, je n’ai pu trouver qu'un échantillon sur place. Un autre m'a élé donné ensuite par le guide Salvatore : c’est sur ces deux échantillons que les observations suivantes ont été faites. Caractères extérieurs. La sodalite du Vésuve est d’un gris blanchâtre; elle se trouve en grains arrondis et cristallisés, sous la forme d’un prisme à six faces, et terminé par un pointement à trois faces placées alter- nativement sur trois bords latéraux. Les cristaux paroissent être de différente grandeur, et j'en possède un qui a un pouce de longueur. La surface des cristaux est lisse un peu irisée. A l'extérieur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 429 A l'extérieur elle est éclatante d’un éclat gras. À l’intérieur d’un éclat vitreux. ù La cassure en travers est parfaitement conchoïde , en longueur elle est lamelleuse, mais il est difficile de déterminer le clivage. Elle est demi-diaphane; ses fragmens sont indéterminés à bords aigus. Elle est demi-dure, cédant facilement à la lime et très-facile à casser; sa pesanteur spécifique est de 2,89. Caractères chimiques. Les fragmens de la sodalite du Vésuve, mis dans l'acide ni- trique, ne perdent pas leur éclat tant qu'ils y sont plongés ; mais retirés de la liqueur , ils se couvrent bientôt d’une légère couche blanche. Mise en poudre dans l’acidemuriatique ou hydro: clorique, elle forme une gelée. Au chalumeau elle se fond sans addition, mais difficilement. Gisement. La sodalite se trouve dans une gangue calcareo-talqueuse , AC- compagnée du pyroxène, d’une pierre ponce verte, et d’une substance cristallisée en petites tables à six faces, que M. Werner appelle l’eisspath. L'ensemble des caractères minéralogiques que je viens d'ex- poser me présentoit, à la vérité, une substance inconnue; mais ces caractères étoient loin de m'éclairer sur sa véritable nature. La Cristallographie ne pouvoit non plus servir pour la déter- mination de cette espèce; car la forme des cristaux étant un prisme à six faces terminées par une pyramide à trois faces, dont les angles formoient 120 degrés , elle se réduisoit à la forme primitive du dodécaëdre rhomboïdal. Or cette forme pri- mitive, commune à plusieurs espèces différentes, cessoit par cela même d'être distinctive. Il falloit donc avoir recours à la Chimie, et le résultat de mon analyse a complètement répondu à mon attente. Analyse chimique. A. 25 décigrammes de sodalite en petits fragmens ont élé chauffés dans un creuset de platine au rouge cerise pendant une demi- Tome LXX XIII, DÉCEMBRE an 1816. li 430 JOURNAL UE PHYSIQUE, DE CHIMIE heure, sans rien perdre de leur poids, seulement ils ont pris un aspect laiteux ; les morceaux qui touchoïent aux parois du creu- set ont éprouvé une légère fusion. B. 19. 4 grammes de sodalite réduits en pondre trés-fine ont été mis dans 10 grammes d'acide hydro-clorique étendu de 5 parties d’eau distillée. La pierre a été attaquée en grande partie à froid. Par une légère ébullition, la dissolution s’est prise en une gelée jaune très- forte, que j'ai ramassée avec beaucoup de précaution sur une cap- sule de porcelaine, et j'ai fait évaporer le tout à siccité. Vers la fin de l'opération, on a eu soin de remuer continuellement la gelée pour que l’évaporation se fît également et doucement. Lorsque la matière a été réduite en poudre, elle a été délayée dans l’eau, et le résidu lavé jusqu’à ce que le lavage ne fit au- cun précipité avec le nitrate d'argent. Chauflé au rouge, il pesoit encore chaud 17,25 décigrammes. Le filtre avoit augmenté de poids de 0,25 décigrammes ; ce qui fait le poids total du résidu 17,50 décigrammes. Pour me convaincre que ce résidu blanc étoit de la silice , je l’ai chauflé pendant une demi-heure avec 5 grammes de po- tasse caustique dans un creuset d'argent. Le mélange a pris une fonte liquide; le creuset ayant été retiré du feu, j'ai versé sur la matière encore chaude de l’eau distillée ; lorsque la matière a été entièrement délayée, on a versé l'acide hydro-chlorique, qui en a opéré la dissolution complète. Cette dissolution a été éva- porée à siccité. La silice obtenue, lavée et chauffée au rouge, pesoit 17 décigrammes. La perte de 0,50 décigrammes tient à ce qu’on n’a pas pesé le filtre, car la liqueur du lavage m’étoit troublée ni par lammoniaque pure, ni par le carbonate d’am- mouiaque. 2°, La liqueur acide d’où la silice avoit été séparée, a été précipitée par l’ammoniaque pure; on a obtenu une matière vo- lumineuse très-blanche, qui a été filtrée sur-le-champ. Après Yavoir lavée, on l’a fait bouillir encore humide dans la potasse caustique ; toute la matière a été dissoute, il n’est resté qu’un très-petit dépôt brun, qu’on a séparé par le filtre. Ta liqueur alcaline a été neutralisée par le muriate d’ammoniaque, ce qui a formé un précipité abondant, lequel, lavé et chauffé au ET D'HISTOIRE NATURELLE. 431 rouge, pesoit 6,75 décigrammes ; il avoit toutes les propriétés de l’alumine. 39. J'ai versé du carbonate d’ammoniaque dans la liqueur d’où Palumine avoit été séparée. Le lendemain j'ai trouvé un récipité qui ayant été lavé et rougi, pesoit 2,75 décigrammes ; e résidu dissous dans lacide sulfurique a été évaporé à siccité et traité par l’eau froide, qui a dissous le tout. Cette dissolution, rapprochée par la chaleur, a été exposée à une cristallisation spontanée. Comme elle refusoit de cristalliser, et qu’elle min- diquoit pas au goût la présence du sulfate de magnésie, on a ajouté à cette dissolution du sulfate de potasse, lequel a formé de lalun. Le précipité obtenu par le carbonate d’ammoniaque est donc de lalumine, qu’il faut ajouter à la somme obtenue par l'expérience précédente. 4°. Comme il y avoit une matière attachée au bâton d’où on a séparé les 2,75 décigrammes d’alumine, jai versé, pour l'obtenir, de l'acide hydro-clorique, et J'ai vu se détacher de petites paillettes brillantes, qui, réunies sur le filtre et séchées, ressembloient tellement à l'acide borique, que j'ai cru un mo- ment avoir obtenu cet acide; mais je me suis bientôt convaincu que cette substance étoit de la silice, qui ; dans cet état de di- vision extrême, prenoit cette apparence cristalline et cet aspect brillant ; elle pesoit 0,25 décigrammes. 50, Le dépôt brun qui pesoit 0,25, de l'expérience deuxième, a élé traité par l'acide sulfurique, qui a dissous le fer sans at- taquer la ke. Le fer précipité de la dissolution par l’ammo- niaque pesoit 0,05 décigrammes. Le métal.est en si petite quan- tité, que Je crois qu’il appartient plutôt à la pierre ponce verte qu'à la sodalite. Les 0,20 décigrammes non attaqués par l'acide sulfurique avoient les caractères de.la silice. 60. La silice, l'alumine et le fer obtenus ne représentant pas le poids de la pierre analysée, il ‘falloit rechercher dans la liqueur d’où on avoit séparé les terres, le carbonate d’'ammoniaque ,:les autres parties constituantes de la sodalite. En conséquence on a rapproché la liqueur, et après avoir ajouté de l’acide sulfurique pour chasser l'acide hydro-clorique et convertir le tout en sul- fate, on l’a évaporée à siccité, puis on a chauflé au rouge pour chasser le sulfate d'ammoniaque et l'excès d’acide sulfurique. La matière obtenue pesoit 22,50 décigrammes. Elle a été dis- soute dans l’eau, rapprochée par la chaleur et exposée à léva- Bi 2 432 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE poration; on a vu quelques petits cristaux en aiguilles de sulfate de chaux se déposer; mais leur quantité étoit si petite, qu’on ne pouvoit pas l’évaluer. La liqueur avoit cristallisé confusément en petits cristaux; et comme elle précipitoit la dissolution de platine, j'ai cru d’abord que toute la matière étoit du sulfate de potasse; mais lorsque j’ai redissous les cristaux, la liqueur a fourni, par l'évaporation spontanée, des prismes à six faces, qui efHleurissoient en totalité à l'air, avoient le goût frais et ne pré- cipitoient pas le platine. Ils avoient donc tous les caractères du sulfate de soude; et comme le sulfate de soude obtenu par la calcination pesoit 22,50 décigrammes, il contient 11 décigrammes de soude pure. Le précipité obtenu par la dissolution de platine à une petite quantité de potasse qui est mélée avec la soude. La pierre analysée est donc composée, sur 40 parties, de Sie NOMME NE 720 5 Alamines sean ue Te Eat HET RSA NON ET Re NET ENT O0) Soude mêlée d’un peu de potasse. . . 11,00 Décte etat telle ere MAR ON oO Trace de chaux, ; 49 Et sur 100 parties, Silice MADONNA MS MIO ANnenne Ne AMONT Soude avec un peu de potasse.. . . 27,50 HF'enNene US AN EMEA SANS MEN NT ONZ Perte. MMM SIRMAEMENI MES 6 100 La grande quantité de soude que j'ai obtenue de l'analyse im’a fait aussitôt soupconner que la substance analysée étoit une sodalite; et ce soupcon s'est converti en pleine conviction, lorsque j'ai comparé mon analyse à celles de MM, Ekeberg et Thomson. Voici le Tableau de leurs résultats : ET D'HISTOIRE NATURELLE. 433 M. Ekeberg. M. Thomson. SHices, ai 0e 156 38,52 Alterine. 003 27.48 DOUBS 1 te FM APT 23,50 Acide muriatique.. 6,75 3 Oxide de fer M ON 2b Der. 1 HA LEE ETr Chaux 00 0 0270 Sale matière. . . 2 Perte 00e "Tr f 100 100 Ces analyses ne diffèrent de la mienneque parce que j'ai trouvé xn peu de potasse mêlée à la soude. La perte de 3,76 que j'ai dans mon analyse, pourroit parfaitement être représentée par les 3 parties d'acide hydro-clorique que M. Thomson a trouvées dans la sodalite, et que je ne pouvois voir, m'étant servi, pour mon analyse, de cet acide. Les caractères extérieurs de la sodalite du Groenland ne diffèrent pas non plus essentiellement de ceux que j'ai observés dans la sodalite du Vésuve; car le prisme à six faces terminé par un pointement à trois faces de 120°, n’est qu’une forme allongée du dodécaèdre rhomboïdal que M. le comte Bournon a reconnue pour forme primitive de la sodalite. Quant à la propriété de faire une gelée avec les acides, elle ma pas été remarquée par M. Thomson, mais elle a été reconnue par M. Haüy. Maintenant que l'existence de la sodalite au Vésuve est prou- vée, il sera aisé de la distinguer par les caractères minéralogiques des autres espèces qui se rencontrent sur la même montagne. La substance avec laquelle on pourroit le plus facilement confondre la sodalite, quand elle se trouve en grains ou en masse, c’est l’'amphigène ; mais on la reconnoîtra en ce qu’elle forme avec les acides une gelée, qu’elle est fusible et moins dure que l’amphigène. Vues géologiques. La découverte de la sodalite au Vésuve est encore d’un intérêt particulier pour la Géologie ; depuis les nombreuses découvertes qu’on a faites au Vésuve, il me paroît évident que les substances qui sy trouvent sont un produit du feu : car il m'est impossible de concevoir que des espèces tellement différentes que la né- 434 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE phéline, la meyonite, l’idocrase, l’amphigène, le pyroxène, le grenat, l’amphibole, le spinelle et autres se trouvent réunies toutes formées au fond du cratère comme dans un magasin pour être rejetées par le volcan. La sodalite du Vésuve porte surtout le caractère de la fusion; car elle est entourée, dans l'échantillon que je possède, de la pierre ponce , qui estreconnue pour le produit du feu. La sodalite du Groenland, au contraire, se trouve dans les terrains primitifs, accompagnée de roches feld-spathiques, et ne laisse aucun doute sur son origine neptu- nienne. Voilà donc deux substances qui se trouvent aux deux extrémités opposées de l'Europe, formées par deux voies opposées, et qui cependant, et par leur composition, et par les caractères minéralogiques, sont identiques et forment la même espèce. II suit de là qu'il est impossible en Géologie de prouver la for- mation volcanique ou neptunienne d’une espèce par la seule ins- pection des caractères extérieurs ; car ils sont communs aux deux voies de formation, et qu'il faut, pour parvenir à des résultats satisfaisans sur la formation des roches, étudier leurs rapports géologiques. C’est ainsi que la nature elle-même semble avoir tracé les grandes limites qui séparent la Géologie de la Miné- ralogie. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 435 OBSERVATIONS SUR LES GÉOPHAGES DES ANTILLES; Par L’Artve-pe-Came MOREAU DE JONNÉS, Chevalier de Saint-Louis et de la Légion-d'Honneur, Membre Correspondant de la Société Médicale d'Emulation de Paris, etc. ON savoit déjà, par les relations de plusieurs missionnaires, qu'il existoit, parmi les habitans des diverses contrées de la zone torride, le goût bizarre de l'habitude de manger de la terre; mais ce sont les détails intéressans que M. le baron de Humboldt a donnés sur les Ottomaquas de l’Orénoque, et M. de Leschenault sur les Javanais, qui ont éveillé l’attention des observateurs sur ce sujet, et qui attireront sur lui désormais celle des voyageurs que l’amour des sciences n'aura point abandonnés loin de leur patrie, et sous le ciel brûlant des tropiques. Cette singulière dépravation se retrouve dans toutes les îles de l'Archipel des Antilles. Un long séjour dans celles de la Mar- tinique et de la Guadeloupe m'en a offert des exemples tellement multipliés, que je crois pouvoir assurer que cette appétence est indépendante de tout besoin journalier d’alimens, et qu’elle est produite par des causes pathologiques , générales et permanentes: Les individus dans lesquels elle se manifeste, sont presque uniquement des nègres libres ou esclaves, et des gens de cou leur de diverses nuances. Elle se montre rarement parmi les blancs; dans le cas où ils en sont atteints, elle paroît leffet d’altéralions de l’économie animale résultant de maladies anté- rieures; la grossesse et l'absence de la menstruation la produisent quelquefois dans les femmes de la même caste; mais on ne peut douter qu'elle n’ait alors pour causes les perturbations que ces circonstances font éprouver à leur constitution, et dont les eflets font naître en Europe des goûts analogues. 436 JOURNAL DE PHŸSIQUE, DE CHIMIE Dans les individus provenant d’origine africaine, le désir et l'habitude de manger de la terre ne paroissent point être, comme dans les blancs, l'effet d’une maladie, mais au contraire en être la cause immédiate, Cette diflérence provient sans doute de celle du régime au- quel les uns et les autres sont soumis. Une nourriture plus suc- culente et surtout l'usage des liqueurs alcoolisées, ont vraisem- blablement l’avantage de prévenir dans les blancs les affections gastriques d’où résulte cette étrange appétence, et ils n’y sont exposés que lorsqu'un état de détresse, dont on voit aux Antilles peu d'exemples, impose un autre régime à quelques - uns d’entre eux. Dans les ‘originaires d'Afrique, l'usage de poissons secs et d’alimens tirés presque sans exception du régime végétal, semble favoriser la disposition physiologique produite par le climat; ce qui peut porter à le croire, c’est que partout où l’on a ob- servé le goût bizarre de manger de la terre, on a trouvé que ceux qui l'ont contracté, sont soumis à un régime d’où sont exclues presque entièrement les substances animales et les li- queurs spiritueuses. Si l’on rapproche cette observation de celle du gisement des contrées habitées par des individus ou des peuplades adonnés à ce goût singulier, et qui toutes sont situées sous la zone tor- ride, on est porté à en conclure que les forces vitales appelées sans césse du centre à la périphérie par les vives excitations d’une température ardente, laissent le système viscéral dans une sorte d'inertie, d’où résultent des altérations qui sont vraisemblablement les causes de cette appétence dépravée. Quoi qu'il en soit du fondement de cette conjecture, dont la vérité ne pourra être démontrée que par l'observation lumi- neuse de quelques-uns des médecins éclaisés dont s’honore au- jourd’hui l’art de guérir, on peut au moins tracer ici avec exactitude les effets de ces causes encore obscures et douteuses, Les dispositions pathologiques qu’on peut présumer exister avant la naissance du désir ardent de manger de la terre, ont toujours échappé à mon observation. Il falloit sans doute, pour les saisir, une étude plus suivie, et surtout un coup-d’æil plus exercé. Cependant plusieurs faits positifs m'ont donné lieu de croire que ce goût se développoit particulièrement parmi les individus dont la constitution est éminemment lymphatique, la fibre ET D'HISTOIRE NATURELLE. 437 fibre lâche, le corps mal ou foiblement animalisé, lesprit paresseux , et les facultés généralement inertes. Dans ceux qui n’avoient pas contracté cette manie depuis long-temps, et que J'ai examinés avec quelque soin, je n'ai remarqué aucun symp- tôme d'affection gastrique; mais dans un grand nombrt d’autres qui s’y livroient depuis un laps de temps assez considérable , on trouvoit réunis les caractères des maladies viscérales et in- testinales : leur peau était sèche, aride, d’un aspect terreux ;, et d’une teinte jaune qui se combinoit d’une manière plus ou moins apparente avec la couleur naturelle du tissu dermoïde : le regard étoit languissant, la respiration diflicile, haleine sou- vent infecte, les extrémités grêles et amaigries, le pouls inter- mittent, le ventre balonné et par fois douloureux; l'habitude du corps étoit celle de la souffrance, et il y avoit une paresse et une difliculté extrêmes dans toute espèce de mouvemens. Dans cet état, ces malheureux conservent continuellement la pensée et le désir insatiable de se livrer à l'étrange manie qu'ils savent pourtant devoir encore empirer leur situation; ils en sont sans cesse occupés, et ne songent, quand l'habitude a pris un certain degré de force, qu'aux moyens de tromper la surveillance qu’on exerce sur eux. Cette surveillance les oblige souvent à satisfaire leur penchant avec la première terre qui se trouve sous leur main, et dont ils mangent de grandes quantités. Cependant je me suis assuré qu’ils n'en agissent ainsi que par la nécessité qui les prive de la faculté du choix, ou bien par un défaut de discernement ou de connoïissance dont les enfans et les jeunes gens présentent d’autant plus souvent l’exemple, que cette dépravation funeste étant considérée comme un crime, ses détails sont enveloppés de mystère. Quoique j'aie vu, il y a seulement six ou sept mois, saisir sur une jeune Mestive de douze ans, des plâtras de carbonate de chaux dont elle avoit déjà dévoré une partie, des recherèhes multipliées m'ont convaincu que les individus attaqués de cette manie ne mangent point de toute espèce de terre indiflé- remment. Celle qui est l'objet de lear goût particulier, dans les deux îles de la Martinique et de la Guadeloupe, est une terre com- posée d'argile, de silice et de magnésie, dans des proportions pen variables ; elle est plus ou moins fortement colorée par de ’oxide de fer; ses caractères spécifiques sont en raison de la Tome LXXXIII. DÉCEMBRE an 1816. Kkk 438 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE quantité relative de ses élémens ; en général, elle happe à la langue, rougit au feu, jette une odeur d’alumine, se pétrit aisément avec l’eau, se fend par l'effet de la dessication, paroît onctueuse à l'œil et au toucher, à la manière des stéatites, et présente, selon l’abondance de ses parties ferrugineuses , des nuances de rouge ochracé, plus ou moins intense. Cette terre provient de la décomposition des laves porphy- roïdes éructées, par les anciens volcans des Antilles, en cou- rans dont la longueur est quelquefois de cinq à six mille toises, et l'élévation de deux à six cents. Ces laves sont à base argileuse ; elles contiennent des py- roxènes , de l’amphibole, des micas hexagones, et de gros feld- spaths blancs et amorphes, qui constituent la plus grande partie de leur masse, La terre magnésienne contenue dans les micas devenant libre par la décomposition des laves, forme, par son mélange avec l'argile , une terre stéatiteuse qui est savonneuse et grasse, surtout quand elle est humectée, Cescaractères n’ont point échappéaux ha- bitans des Antilles; ils ont appelé m0orne-savon tout rehef dont la surface est formée de cette terre ; et ce nom signale au voya- geur, principalement dans la saison des pluies, des chemins dont la pente rapide est glissante et dangereuse. Le caractère d’onctuosité qui distingue cette espèce d’argile stéatiteuse, diminue sans doute son goût terreux et aride; on conçoit du moins que cela doit être, quoique cette différence , qui est perceptible au toucher, ne m'ait pas paru l'être ainsi au goût. L’onctuosité qui semble, à quelques égards, rapprocher cette terre des substances végétales et animales, a peut-être contribué: à rendre moins grand l'éloignement naturel qu’on devoit avoir à faire un aliment d’une matière privée d’ailleurs de toutes les: qualités nécessaires pour le devenir. Il est très-remarquable que cette argile stéatiteuse est ana- logue, sinon entièrement semblable, à la terre sigillée de Lemnos, si fameuse dans l'antiquité. Elle est, comme elle, d'origine volcanique, et n’auroit probablement pas d'effets plus funestes que les siens sur l'économie animale, si ceux qui s’en servent aux Antilles n'en mangeoient des quantités considérables. L’es- tomac une fois habitué à cette espèce de lest, ne peut plus s’en passer sans éprouver des contractions douloureuses qui rappellent le même appétit ; la présence fréquente, ou même presque con- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 433 tinuelle, d’une terre absorbante dans les intestins, épuise les sucs gastriques, nuit d’abord aux digestions, les rend bientôt impossibles, et amène rapidement, sous un climat dont la tem- pérature est brûlante, des maladies dyssentériques presque tou- Jours incurables et promptement mortelles. L'usage médicinal des bols sigillés prouve que c’est l’abus ou seulement la continuation prolongée de l’usage de cette terre qui devient nuisible ; et la consommation qu’en font les origi- naires d'Afrique ne pouvant étre attribuée au besoin d’alimens dans des îles où la fertilité de la terre et l'abondance des co- mestibles donnent à l'homme une subsistance assurée et facile, il ne seroit peut-être pas dénué de vraisemblance de supposer que cette appétence est une sorte d’instinct naturel qui entraîne vers l’usage d’une substance absorbante, des hommes affligés de toutes les incommodités résultant d’un tempérament pitui- teux, dévelopé par un climat extrêmement humide. Cette considération donne lieu de penser qu’on combattroit avantageusement un penchant dont l’excès est à-la-fois inévitable et funeste, en introduisant parmi les améliorations qu’indiquent la politique et l'humanité, dans le régime intérieur des nègres esclaves de nos Colonies occidentales, l’usage habituel d’une boisson spiritueuse mêlée avec l’eau. Le tafia, dont les guildi- veries sont aussi nombreuses que les grands ateliers de sucreries, offre un moyen local, approprié, facile et infiniment peu dis- pendieux. Plusieurs colons ont commencé à en faire distribuer à leurs nègres, comme ration journalière, une certaine quantité, dont le mélange avec de l’eau se fait en leur présence. On croit que cet usage seroit très-avantageux, surtout dans les contrées humides et marécageuses, comme la Guyanne et plu- sieurs parties de la Martinique et de la Guadeloupe. II seroit à désirer qu'il se répandit et qu’il fût établi généralement. Il auroit pour efet immédiat, dans des individus doués d’une cons- titution excessivement lymphatique, de ramener périodiquement vers l’épigastre les forces vitales rendues sans cesse divergentes ar les excitations qu’exerce le climat sur l’organe cutané. Jointe à l'exécution de diverses mesures qui font le sujet des méditations d’un homme d’état dont le caractère et la sagesse rappellent l’illustre Francklin, cette amélioration auroit sans doute l’heureux effet de prévenir une perversion de goût, qui, chaque année, ajoute à la perte irréparable que font nos colonies d’un nombre considérable de leurs cultivateurs. Kkk 2 449 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE NOTE ADDITIONNELLE, Par MM. BRESCHET ET Hirpoz. CLOQUET. LE Mémoire de M. Moreau de Jonnès nous offre l’obser- vation remarquable d’une dépravation de l’appétit, consistant en un goût décidé pour une substance tout-à-fait impropre à servir à la nourriture des individus qui en chargent leur es- tomac. Cette espèce de raladie paroît bien plus fréquente dans les contrées équatoriales que dans les régions du Nord, et cela . peut tenir à ce que le besoin d’alimens réels se fait sentir avec beaucoup moins d'énergie sous la zone torride que dans les pays froids ou tempérés. Nous croyons cependant que souvent aussi l’action de manger de la terre n’est point du tout décidé par un goût particulier, mais bien véritablement par la faim, par un besoin impérieux. Nous connoissons maintenant plusieurs peuples très-éloignés les uns des autres qui se lestent l'estomac, qu'on nous passe cette expression, avec de la terre pure. Ils trompent ainsi Jeur faim pour quelque temps; du moins M. de la Billardière raconte que les habitans de la Nouvelle-Calédonie n'ont que celte espèce d’aliment pendant certains temps de disette. Lorsque l’Orénoque est débordé, que les eaux sont trop hautes pour qu’on puisse pêcher des tortues, ce qui dure en- viron trois mois, la nation des Otomagues est réduite à se nourrir presque exclusivement d’une espèce de glaise. M. de Humboldt, à qui on doit la connoïissance de ce fait, assure que chaque individu en consomme à peu près sept hectogrammes (une livre et demie) dans la journée, sans y rien méler absolument , ni graisse de crocodille, ni substance végétale. La seule prépara- tion qu’on lui fasse subir , consiste à la faire légèrement griller et à l’humecter ensuite. M. Golbery dit quelque chose d’analogue au sujet des nègres des iles de os Idolos, à l'embouchure du Sénégal. Ils mêlent à leur riz une substance minérale qui semble leur tenir lieu de beurre. Au rapport de Brown, les erocodiles de l'Amérique méridio- nale avalent également des petites pierres ou des morceaux de bois, lorsque les lacs qu’ils habitent ordinairement sont dessé- chés , et qu’ils manquent de nourriture. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 441 Non loin de Krasnoiarsk, sur le fleuve Yenissey, et dans quelques montagnes des environs du fleuve Amour, on trouve une matière que les Russes appellent kamennoïé maslo, c'est- à-dire beurre de roche. Les élans et les chevreuils en sont sin- gulièrement friands; et le voyageur Patrin nous apprend que les chasseurs l’emploient comme appât pour s'emparer de ces animaux. Nous sommes conduits à tirer de ces différens faits une con- clusion générale assez curieuse : c’est que presque constamment les terres ou pierres qui peuvent servir à l’espèce d'usage dont nous parlons, soit pour distendre l'estomac et tromper la faim, soit pour satisfaire un goût déréglé, sont onctueuses au toucher, grasses, homogènes, et contiennent beaucoup de magnésie ou d’alumine. Ainsi, à la Martinique et à la Guadeloupe, M. Moreau de Jonnès a reconnu que c’étoit une terre analogue à la stéatite, et formée par la décomposition des laves porphyroïdes des an- ciens volcans de ces îles, qui étoit surtout recherchée par les nègres. M. Vauquelin a analysé celle de la Nouvelle-Calédonie, et y a reconnu 0,37 de magnésie, 0,36 de silice, 0,17 d’oxide de fer. C’est une stéatile verte, friable et tendre. La terre des îles de /o& Idolos est aussi une vraie stéatite, mais blanche, molle et onctueuse. M. Golbery en a mangé sans dégoût et sans en être incommodé. Le beurre de roche forme des stalactites dans les cavités des montagnes dont nous avons parlé. C’est un mélange d’argile, de sulfate d'alumine , de sulfate de fer, et d’une petite quantité de pétrole, Enfis, l’un de nous a mangé, après s’être laissé gagner par la faim, environ cinq onces d’un tale laminaire, d’un vert ar- genté, très-flexible, et qu’on trouve dans les montagnes du Tyrol en abondance. Son appétit a été satisfait sans aucune espèce d’inconvénient. Ajoutons encore ici, que la plupart des variétés des terres bolaires, sigillées, etc., qui ont été si souvent et si long-temps préconisées dans la thérapeuthique, et qu’on donnoit à l’inté- rieur pour une foule de maladies, rentrent dans la même classe; * mais 1l est plus que probable que les propriétés médicales dont elles peuvent jouir tiennent au fer qu’elles renferment. OBSERVATIONS METÉOROLOGIQUES FAITES « | THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR 5 Ù s o SR T CLR BAROMETRE METRIQUE. > 2 PT — —, = # # | Maximum. | Mivrmum. |aMinr. Maximum. | Minimum. A |" MIDI.| à ES ne 5 HE Fe ê 25 D à heures. AE eh mill, mil. ° 1|à midi. ,25|à 7 m. F LI2D| AIO Se eee tt 16|à midi... ....,74 29 2là midi. 411,35/à7 m. + 5,25 +1,35 "à TNT Rene ne Ét6)Ébbeo cs 6 17424 pee ne 3là midi. + 12,75 à 105. + 7,79|+12,75|à 10 s.. ...... 749,40là 7 m......... 746,88 748.40 12,4 4h3s. + 9,gojà 7m. + 7,00|[+ 9,00/à 9s...:.,,.,.701,16|à 7 m........ 749,50|749,80| 11,7 5\à 35. +11,50/à7+ m.+ 6,25|+10,35)à midi. ....,..753,88|à 9s.........,751,00 758.88 11,4 6|à 10 ;m4+11,00|à 105. + 7,00] 10,00 à 10 s...... ...748,90|à 7 : m....... 744,62 744,94 11,9 7là 11m. + 8,75|à 9 s. H 2,25}+ 8,75 75m.......747,50l135s.......... 743,08|743,16| 11,5 8à3s.. + 5,507 +m.— 0,25|+ 4,35là midi... .....748,32|à 9 s.......... 747,62|748,42| 9,5 9 à midi. —-10,75|à 10 5 s.+ 5,60 +10,75|à 9 m......... 7939,68|à 10 £ m......738,20 738,84 10,5 1oà103m+ 7,50l49%s. + o,10|+ 6,85|à 10 ; m...... 7190 | Aimer re 740,16|745,84| 9,9 na 35s. + 3,50[à74m.+ 0,25|+ 2,75 32 s........ 758,00|à 7 Em....... 753,50|757,26| 9, lu 35. + 6,85 75m.+ 5,25 + 8,10 AO Sete 755,60là7+m......., 743,00|746,08| 9; dlrsha3s +1250à75m.+ 8,50| 11,859 s.......,... 758,10|à 717 m....... 757,10|757,60| 9, Al 14 à midi. +1165|à 10 LS. 4,75|+11,85|à 7 : m....... 755,66|à 10 + s.......740,84|754,48| 11,4 15là midi. + 4,35|à 10 À s.+ o,oo|+ 4,35là 105 m......749,28|à 65.......... 746,46|746,54| 9,7 1l16là3s. + 475la7Lm. — 0,254 4,25là9s..,....... 756,32 | 47 2m... 753,14|754,00| 9,2 Hlrslà3s. + 4,75la1os. — o,1o|+ 4,25là 105......... 762,00|à 7 ? m....... 760,08|761,14| 6,9 18là 3s. + 4,10|à71m.— 0,25|+ 3,752 7+m.......… 760,38|à 9 s....... ...755,80|759,16| 7,1 19/3s. + 7,852 72 m.+ 3,75 7,75là9s.......... 760,50|à 71m....... 756,20|757,72| 7,8 20\à midi. Æ+ 875à09s. + 3,75|4+ 8,75/a 10 5 m......763,24|à 6 + m.....:.. 762,34|763,00| 8,3 21/à midi. + 4,60[à 101s.— 0,50|+ 4,60là7+m........761,66|à 10+s.......756,20|760,20| 7,6 1I22là midi. + 0,85laà91s. — 3,00|+ 0,85|à 7 +m....... 753,12|à 95 s........750,04|752,00| 6,1 231à3s. — 2,1o|à71m.— 6,40 — 3,40[à9s5..........752,62|à 72 m.......740,64|750,70| 4,0 24là3s. — 0,75[à71m.— 6,75|— 1,50 9 Ÿ s...,....758,80|à 73 m........ 755,50|756,92| 4,5 25là3s. — 1,10|à8 1m.— 7,10|— 2,009 s......... 760,64|à 7 + m....... 759,22/760,18| 4,9 26|à 105s. + 2,50|à 75 m.—+ 0,25|+ 2,25|à 10 s... ..... 762,50|à 3 5.......... 760,66|761,14| 431 27là3s. + 4,85[à 75m. 2,50 4,6o|à 9 s.........770,40|à 7 im..... .-757,20|768,44| 4, 28là 102 mm 2,50|à 1oÈs.—+ o,50|Æ+ 2,40/à 10 ; m...... 771,06|à 35..:.......770,30|770,66| 4, 29|19$ s. + 1,25[à7+m.— 0,75 — 0,25|à 104 m......771,00|à 3S.......... 769,76|770,60| 4,0 3ol13s. + 51095. + 1,50 4,85[à 9s.......... 772,82] à 7 + m....... 771,14|771,92| 6,3 Moyennes.+ 6,29! + 1,75|+ 5,85] 756,56| 753,21[754,82] 8,9 RÉCAPITULATION. Millim. Plus grande élévation du mercure. .... 77262 le 30 Moindreélévation du mercure......... 738,20 le 9 Plus grand degré de chaleur......... +12°75 le 3 Moindre degré de chaleur........... — 7,10 le 25 Nombre de jours beaux....... 6 de couverts......... SoNEYi depluie............... 15 dervent---e----c-cerc 30 de gelée.............. 14 de tonnerre......... NE de brouillard.......... 29 deneige............. Nr el Nora. Nous continuerons toujours à exprimer la température au degré du thermomètre cen: centièmes de millimètre, Comme les observations faites à midi sont ordinairement celles qu’on!| le thermomètre de correction. À la plus grande et à la plus petite élévation du baromètre conclus de l'ensemble des observations, d’où il sera aisé de déterminer la température moyenne conséquent, son élévation au-dessus du niveau de la mer.La température des caves est également A L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. NOVEMBRE 1816. S|Hye. POINTS VARIATIONS DE L'ATMOSPHÈRE. a VENTS. D LUNAIRES. LE SOIR. LE MATIN. 1] 10215. Lune apogée. | Pluie, brouillard. Pluie abond. par int. [Nuageux. 2] 65 | Idem. Très-nuageux, br. |Couvert. Pluie dans la nuit. 3] 82| dem. Couvert, lég. brouil.| Zdem , léger br. Pluie abondante. 4| 9o|[E. Brouil.ép. ethum. |PZuie. Idem. 5| 66 |5. P.L.ägh.26/m.| Nuageux, brouillard.| Couvert. Couvert. 6| gr |S-0. Pluie, brouillard ép. | Pluie, lég. brouill. Nuageux. , 7| 66 |0. Couvert, brouillard. |Couvert, brouillard. [Quelq. gouttes d’eau. |# 8] 811$. Nuageux, brouillard.| Zaem. Couvert. Ë 9! &2 |S O. fort. Couvert, brouillard. | Pluie ab. de 9 h à 10 4.|Beau ciel, éc. au N.O. 10| &o|U. Nuageux. Couvert, brouillard. |Pzuie, 11] 67 |O. fort. 1d., br. neig. av. le j.|Beau ciel. Pluie , neige. 12] 66 läem. |D.Q.azh1o's.| Pluie, Kg. browllard.| Paie. Pluie par intervalles. 19] 92 /|0. Pluiefine, brouillard,| Couvert. Couvert. 14| 77 |O-N-O. Pluie abondante , br. [Nuageux. Pluie. 15] 76| idem. Couvert, lég. brouill.|Cou.,ec.,t.f.av.degr.|Nuageux. 16| 81 |N-0. Nuageux, broullard.| Nuageux. Grésil, à 1 +h.couv. 17| &1| dem. Lune périgée. | dem. laem Grésil , beau ciel ap. 18| 83 |[S-O. Couvert, lég. brouill.| Frès-nuageux. Pluie fine. 19] 86 |O-S-O. N.L.uroha7/m| Nuageux,lég. brouil.| Pluie. Nuageux. 2o| ëg|S. Brouill. epaiset hum. | l'iès-nuageux, br. Idem. 21| 82 /|E-S-E. Beau ciel, glace , br. |Très-nuageux. Beau ciel. 22] 76 |N-E. Couvert, browllard. [Nuageux. Idem. 23] 73| Idem. Beau ciel, brouillard.| dem. N'iageux. 24] 50| Idem. Idem. Beau ciel, brouillard.| Beau ciel, 29] 73 |S-E. idem. Idem. Couvert. 26| 89 |S. P.Q.à5h15s, Couvert, brouillard. (Couvert, brouillard. | Pluie. 27| 73 |N-O. Brouill, ep. et hum. Lier, bromi, épais. |Brouill. ép. et hum, 28| 92 |S-E. Idem. Idem, et hum. ldem. 29] 92 Idem. Lune apogée. Jaem. Idem. Idem. 30| ü6 NE. Nuageux, brouillard.|Nuageux. Idem. , LI Moy. 61 RECAPITULATION. Nec cena io NE Fee z 1DsderohéchcE CARE Jours dont le vent a soufflé du SE FE Ge FETE : SO MPG DOS 3 Q} Here Goboeoné 8 NSOPP 7" eRe Et 3 le 1*° 120,001 Therm. des caves | centigrades: le 16 12°,092 Eau de pluie tombée dans le cours de ce mois, 41""70 = 1 p. 6 lig. 5 dixièmes. tigrade , et la hauteur du baromètre suivant l'échelle métrique, c’est-à-dire en millimètres et emploie généralement dans les déterminations des hauteurs par le baromèire, on a mis à côté et du thermomètre, observés dans le mois, on a substitué le rraxinun et le mérimum moyess, du mois et de l'année, ainsi que la hauteur moyenne du baromètre de l'Observatoire de Paris, ct pas exprimée en degrés centésimaux , afin de rendre ce Tableau uniforme, 444 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE RECHERCHES SUR L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE, #rc.; Par M. SCHUBLER, Professeur de Physique et de Chimie agricole dans l’Institut de Hofwyl, etc. EXTRAIT. L’ÉLECTRICITÉ de l'air atmosphérique étoit assez générale- ment reconnue; mais il falloit en constater les divers phéno- mèênes; c'est ce qu'a fait M. Schubler. Ses observations ont été faites dans les vallées de l'Allemagne méridionale. Il a vu que, 1°* Dans les jours sereins et calmes l'électricité est toujours positive. 2°. Elle est à son #7inimum peu de temps avant le lever du soleil ; elle se manifeste lentement lorsque cet astre se lève ; elle s'accroît ensuite rapidement, 3°. Elle atteint ordinairement son premier #2aximum quelques heures après, ce qui, au mois de mai, arrive à huit heures du malin. 4°. Elle commence à descendre souvent au bout de quinze minutes: 5°. Vers deux heures de l'après midi, elle se trouve d’ordi- naire bien foible, et près de son second 7ninimum, où elle arrive vers les quatre à cinq heures. 6°. Une heure avant le coucher du soleil, l'électricité atmos- phérique reprend de l'accroissement, et elle atteint son second maximum une heure ou deux après le coucher de cet astre. Ces mouvemens périodiques de l'électricité atmosphérique paroissent, à l’auteur, déposer en faveur de l’existence d’un changement chimique de notre atmosphère ; eflet également pé- riodique ET D'HISTOIRE NATURELLE. 445 riodique et opéré par l’action réciproque de la chaleur, de la lumière, de l'air et de l’eau, dont nos sens n’apercoivent que les résultats dans les brouillards, la pluie, les orages... L’évaporation a encore une grande influence sur l'électricité atmosphérique. Le rapport du minimum au maximum de cette électricité est plus que double dans les mois d’été comparés à ceux d'hiver. Les brouillards ont ordinairement une électricité proportion- nelle à leur abondance ; elle est à son plus haut degré en hiver et dans les jours les plus froids. La pluie, la neige, le grésil... ont toujours une électricité qui est plus forte que celle de l'atmosphère dans un état calme. Cette électricité n’est pas toujours positive; elle alterne avec la négative de la manière la plus variée. Les pluies sans électricité sont rares. L'analogie des variations qui accompagnent la pluie, la neige avec celle des orages est évidente. La différence paroît consister dans cette circonstance particulière, savoir, que dans les orages il se fait des explosions réelles entre des nuages plus fortement chargés d’électricités opposées, tandis que dans les pluies et neiges ordinaires, il n’y a que l’une ou l’autre des électricités qui prédomine; ou si toutes les deux existent à-la-fois, elles se transmettent sans secousse marquée à la terre. La neige tombante est toujours accompagnée d'électricité, mais qui est plus souvent positive que négalive. Sur trente ob- servations , elle a été vingt-quatre fois positive et six fois seule- ment négative. La cause de cette plus grande fréquence d'électricité positive dans la neige, peut être attribuée en partie à ce que les couches inférieures de l'air ont ordinairement, et surtout pen- dant les brouillards, une électricité positive beaucoup plus forte que dans l'été. Quant aux éfoiles tombantes , dit l’auteur, elles paroissent seulement pendant un temps bien serein, une électricité positive forte, et plus fréquemment quand l'air se rafraîchit beaucoup; circonstance où très-souvent le second #7aximum électrique, celui qui suit le coucher du soleil, se montre également avec plus de force. Tome LXXXIII. DÉCEMBRE an 1816, LI 446 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE NOUVELLES LITTÉRAIRES. Connaissance des Teïns, ou des Mouvemnens célestes , à l'usage des Astronomes et des Navigateurs, pour l'an 1819, publiée par le Bureau des Longitudes. Un vol. in-80. A Paris, chez Mme Ve Courcier, Imprimeur- Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Au- gustins, n° 57. An 1816. Ce volume est le cent quarante et unième d’une éphéméride qui n'a jamais souflert d'interruption; mais qui en diflérens temps a reçu, dans sa composition et dans son format, différentes modifications. Cet Ouvrage est également utile aux Astronomes et aux Na- vigateurs. On trouve dans ce volume la mesure d’un arc du méridien aux Indes, entre les latitudes de 8° 9138” 59"’et 10° 59! 48" 93!" nôrd, ou continuation de l'arc commencé en 1804, qui se terminoit à 140 6’ 19” de latitude nord, par M. le Lieutenant-Colonel W. Lambton.1l trouve, par un milieu, le rapport des axes de la terre . ? S La 1 : 1.0030423 , et l’applatissement ——: Il se proposoit d'ajouter la mesure de deux nouveaux degrés, qui a dû être terminée en mars 1815. Annuaire présenté au Roi par le Bureau des Longitudes, pour Yan 18r7. A Paris, Chez Mme Ve Courcier, Imprimeur-Libraire, quai des Augustins, n° 57. Le Bureau des Longitudes est chargé , par l’article 1x de son règlement, de rédiger chaque année un Annuaire, qui est un extrait de ce que la Connaissance des Tems contient de plus utile au public. C’est l'Ouvrage que nous annoncons. M. de Leonhard vient de publier un Discours sur l'état actuel de la Minéralogie, qu’il a lu à la séance publique de l'Aca- démie de Munich, le 12 octobre 1816. Cet Ouvrage présente un ET D'HISTOIRE NATURELLE. 447 Tableau brillant de la Géologie et de la Minéralogie dans toute son étendue. Les notes dont l’Auteur a enrichi le texte ajoutent encore au mérite de cet Ouvrage, et le rendent indispensable pour quiconque veut être au courant de la Littérature et des découvertes minéralogiques. Monographie du Trigonocéphale des Antilles, ou grande V'ipère fer de lance de la Martinique , lue à l'Académie Royale des Sciences le à août 1816. Par Alexandre Moreau de Jonnès, Chevalier de Saint-Louis et de la Légion-d'Honneur, Aide-de-Camp du Comte Carré de Saint-Cyr, etc. Une brochure in-80. Cette vipère est très-dangereuse aux Antilles. L’Auteur réunit aux talens militaires l'amour de la science. LI 2 448 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ERRATA Pour le Mémoire de M. Cordier, sur les Substances volca- niques dites en masse. Pag. 137, lig. 37, au lieu de exactement, lisez assez exactement 140 , 141, id. , za bn 142, 145, id. , 107, 158, 162, 286, 289, 291, äd., 294; ëd., 300, id., äd., id., 305, 378, 364 , 37; 10, 22, 30, OL, 8 et 9, intermédiaires primitifs, /isez inter- médiaires et primitifs dans le temps, /isez il y a quelques années mimose, /isez dolérite après Werner nettez un point. il admet, lisez il adopte mais, /2sez et sa méthode , /isez la méthode même métal, /isez même minéral aussi, lisez ainsi mimose, Lisez dolérite il y a tout lieu de, lisez il est à haup masse, lisez haupt masse avec une apparence satisfaisante , lisez à l’aide de formes spécieuses en cristaux, /sez ou cristaux dans la masse, Zisez dans la série résidoit, /ësez réside roches, Zésez laves scoriesproprement dites , lisez scorie proprement dite en granite, lisez un granite à base de verre, lisez à base de verre boursoufflé assezrares, lisez assezrareset rempli de cavités très-déliées disserter, lisez discerner ces trapps, lisez ces types deM. W erner., lésez de M. Werner? ET D'HISTOIRE NATURELLE. 449 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Suite du Mémoire sur les nouvelles propriétés de la chaleur à mesure qu'elle se développe dans sa propa- gation le long des morceaux de verre; par David Brewster. Pag. 389 Recherches sur l'action galvanique; parJ. P.Dessaignes. 415 Mémotre sur la sodalite du Vésuve ; par M. le comte Szanilas Dunin Borkowskr. 428 Observations sur les géophages des Antilles; par l'aide- de-camp Moreau de Jonnès. 435 Tableau météorologique ; par M. Bouvard. 442 Recherches sur l'électricité atmosphérique, etc,; par. M. Schubler. Extrait. 4 44% Nouvelles littéraires. 446 459 JOURNAL DE, PHYSIQUE, DE CHIMIE TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. HISTOIRE NATURELLE. Observations pour servir à une classification des ani- maux, par M. de Barbançois. Pag. Des Méthodes classiques et naturelles appliquées à la Géographie physique; par M. Toulouzan de Saint- Martin. Deuxième Mémoire. Suite. Suite. Mémoire sur les substances minérales dites en masse, qui entrent dans la composition des roches volcani- ques de tous les âges; par P. Louis Cordier. Suite. Suite. Observation sur les avantages du datisca cannabina dans l'art de la teinture; par Henri Braconnot. Prodrome d'une nouvelle distribution systématique du règne animal; par M. H. de Blaïnville. Mémoire sur la possibilité de faire vivre des mollusques Jluviatiles dans les eaux salées, et des mollusques marins dans les eaux douces, considérée sous Le rapport de la Géologie; par F. S. Beudant. PHYSIQUE. Phénomènes de répulsion et d'attraction sans électricité; par J. P. Dessaignes. 67 88 165 229 135 285 352 268 ot 7 ET D'HISTOIRE NATURELLE. Observations météorologiques faites à l'Observatoire royal de Paris, par M. Bouvard. Juin. Pag. Jurller. Août. Septembre, * Octobre. Novembre. Lecons de géologie données au Collége de France; par J.-C. Delamétherie. Extraft. Mémorre sur les propriétés optiques du muriate de soude, du fluate dechaux et du diamant; par David Brewster. Extrait des Transactions Philosophiques. Mémoire relatif à l'influence de la température des pressions mécaniques sur l'intensité du pouvoir élec- trique, et sur le changement et la nature de leur électricité; par J. P. Dessaignes. Supplément au Mémotre sur la réduction des degrés du thermomètre de mercure en degrés de chaleur réelle; par Honoré Flaugergues. Suite. Mémoire sur la communication de la structure des cris- taux doués de la double réfraction au verre, au mu- rlate de soude , au spar fluor, aux autres substances, par la compression mécanique et la dilatation ; par David Brewster. Des taches du Soleil. Mémoire sur les nouvelles propriétés de la chaleur à mesure qu'elle se développe dans sa propagation le long des morceaux de verre ; par David Brewster. Suite. s Recherches sur l'action galvanique; par J. P. Des- saignes. Recherches sur l'électricité atmosphérique , etc. D par M. Schulber. Extrait. 45% 12 86 192 242 350 482 24 &r 213 227 L 45Z JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, elc. CHIMIE. Observations sur le gaz hydrogène carboné pour servir à l'éclairage; par W. Th. Brande. Pag. 14 Recherches sur la nature de la matière huileuse des chimistes hollandais ; par MM. Robiquet et Colin. 32 De l'état actuel de la Chimie ; par J.-C. Delamétherie. 117 Recherches sur la respiration des plantes exposées à la lumière du soleil ; par M. Ruhland. 331 Mémoïre sur la sodalite du Wésuve; par M. le comte Scanislas Dunin Borkowskr. 428 Observations sur les géophages des Antilles; par l'aide- de-camp Moreau de Jonnèés. 435 oo De l’Imprimerie de M"° Veuve COURCIER, Imprimeur-Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n° 57. RRQ A RAR ER SSL. a PRES Lee = DCR ER RER 2 ne