PUDOVICULEGRÉ LA BOTANIQUE EN PROVENCE AU XVI‘ SIÈCLE mer PIERRE PENA ET MATHIAS DE LOBEL = NE \ A) 22 4 Mi Ge, } « RS ] PAR À S Se 2° a 4 eu MARSEILLE TYPOGRAPHIE ET LITHOGRAPHIE BARLATIER Rue Venture, 19 1899 LA BOTANIQUE EN PROVENCE AU XVIe SIÈCLE ÉVFDOVIC:LEGRÉ LA BOTANIQUE EN PROVENCE AU XVIe SIÈCLE PIERRE PENA MATHIAS DE LOBEL ’ MARSEILLE TYPOGRAPHIE ET LITHOGRAPHIE BARLATIER Rue Venture, 19 1899 GK Etablie depuis trois cents ans déjà, l'Université de Montpellier faisait encore, au xvit siècle, rayonner sur le Midi de la France un éclat très vif. De nombreux étudiants, dont quelques-uns étaient partis des plus lointaines contrées, accou- raient à Montpellier avec le désir d’être initiés à tous les secrets de la médecine et de la botanique. Un lien étroit unissait les deux sciences. En un temps où la chimie était encore dans les langes, le règne végétal pourvoyait seul à la matière médicale. On accordait aux plantes un crédit à peu près illimité, on leur attribuait des vertus merveilleuses, capables de triompher de omni malo scibili, et c’est presque uniquement à elles que la thérapeutique demandait ses moyens d'action. La Provence est trop rapprochée du Lan- guedoc, elle offrait un champ d'étude d’une trop grande richesse, pour n'être pas souvent tra- versée et visitée par des étudiants de Montpellier. — VI — Et c’est ainsi que quelques-uns d’entre eux, appelés à conquérir plus tard par leurs travaux une brillante renommée, tels Charles de l'Escluse, Mathias de Lobel, les frères Platter, Jean et Gas- pard Bauhin, Léonard Rauwolf et bien d’autres, eurent l’occasion, au début de leur carrière, de venir herboriser en Provence, conduits par les nécessités de leur itinéraire, ou, le plus souvent, attirés par le plaisir que leur promettait la ren- contre, en cet heureux pays, d’une végétation particulièrement intéressante. D'ailleurs la Provence elle-même, quoique ne possédant pas, comme le Languedoc, un vaste foyer intellectuel, eut son rôle dans cette expan- sion du génie humain qui caractérise le xvie siècle ; elle fut, à cette époque, l’objet et le centre d'un remarquable mouvement scientifique, et pour ne prendre des exemples que parmi les Provençaux qui s’'adonnèrent à la res herbaria, grand fut le mérite de botanistes comme Hugues de Solier, médecin établi à Grenoble, mais ori- ginaire de Saignon près d'Apt, auteur de scholies sur Aetius où il a donné, au sujet de la flore pro- vençale, tant et de si curieux détails ; Pierre Pena, né aux environs d'Aix, collaborateur de Mathias de Lobel, et devenu ensuite médecin renommé ; le pharmacien Jacques Raynaudet, de Marseille, botanophile ardent, ami et correspondant de — VI — l'illustre naturaliste suisse Conrad Gesner, de Pierre Pena et de Jean Bauhin, auxquels il com- muniqua beaucoup de plantes spéciales à la Pro- vence. Nous avons patiemment compulsé les volumi- neux in-folio publiés par ceux des phytographes du xvi siècle qui parcoururent la Provence, et nous pourrons, au moyen des renseignements que nous y avons puisés, passer en revue les découvertes qu'ils y firent tour à tour. Ainsi qu'on le verra, ces ouvrages ont, à pro- pos des plantes, donné sur la topographie, la langue, le commerce, l'industrie, l’état social du pays, des détails qui nous ont paru pleins d'intérêt. À un autre point de vue, il nous semble que des recherches rétrospectives comme les nôtres peuvent avoir une utilité : celle de servir de pro- légomène à toute œuvre qui aura pour objet la connaissance des plantes croissant dans une région déterminée. Une Flore de la Provence, par exemple, si elle est composée avec toute l’am- pleur qu'exigerait le sujet, devra contenir l’his- toire complète de chacune des espèces végétales qui peuplent le sol provençal. Un élément essen- tiel d’une telle histoire ne sera-t-il pas l'indication de la découverte qu'a faite de ces diverses plantes le botaniste qui, le premier, a constaté leur — VII — indigénat sur le territoire de la Provence, en a signalé les particularités notables et a décrit les conditions du milieu dans lequel il les a ren- contrées ? Pour inaugurer nos études sur LA BOTANIQUE EN PROVENCE AU XVIC SIÈCLE nous avons choisi l'œuvre collective de Pierre Pena et Mathias de Lobel. Ces deux botanistes s’associèrent et firent paraître un livre devenu et resté célèbre. De tous les ouvrages que le xvie siècle nous a légués, c’est celui où la plus large place a été faite à la flore du Midi de la France. LE STIRPIUM ADVERSARIA Il s’en faut de beaucoup que Tournefort, — qui, dans l’/sagoge de ses Institutiones rei herbariæ, venait de se montrer si bienveillant envers Charles de l'Escluse, — ait témoigné la même complaisance pour Mathias de Lobel (1). «Mathias Lobelius, — dit- il, — Clusio longè fuit inferior, longè minorem in des- cribendis plantis diligentiam adhibuit. » (1) Nous adoptons pour le nom de Lobel la forme que nous voyons employée par le botaniste lui-même sur le frontispice du Stirpium Adversaria et du Plantarum seu Stirpium Historia. Mais la véritable orthographe, que l'on trouve d’ailleurs appli- quée plus d'une fois, nous obligerait à écrire De l'Obel. Le mot Obel, Aubel ou Aubeau était à cette époque un des noms fran- çais du Peuplier-blanc, circonstance que Lobel n’a pas manqué de mentionner en ses Observaliones. En sorte que s’il n’y avait pas quelque puérilité à souligner de tels détails, nous pourrions noter la coïncidence qui attribuait à un botaniste le nom d’un végétal. Il est vrai que Lobel tirait une certaine vanité de ce rap- prochement. Il y a, en tête du recueil formé par la réunion des Adversaria et des Observationes, une page occupée par un grand écusson ovale. Au milieu du champ, entouré d’une élégante guir- lande de fleurs et de fruits, une jeune femme se tient debout entre deux arbres aisément reconnaissables pour des peupliers- blancs, et dont elle embrasse les jeunes troncs de chacune de ses mains. Ce ne sont pas là, en réalité, des armoiries, « des armes parlantes », ainsi qu’on l’a dit. Cet ensemble forme ce que, dans 1 2 9ÈS Mathias de Lobel était Flamand : il naquit à Lille en 1538. Il avait pour père Jean de Lobel, à qui Char- les Plumier donne le titre de jurisconsulte (1). Voici en quels termes le docteur Ferdinand Hoefer, dans son Histoire de La Botanique, a résumé la vie de Lobel : Mathias Lobel, plus connu sous le nom latinisé de Lobe- lius (né à Lille en 1538, mort à Highgate en 1616), étudia la médecine à Montpellier, où il eut, comme de l'Escluse, Rondelet pour maître. Il parcourut, en herborisant, le midi de la France, une partie de l'Italie, le Tyrol, la Suisse et l'Allemagne, et vint s'établir comme médecin d’abord à Anvers, puis à Delft. Vers 1569 il se rendit en Angie- terre (2), accompagna en 1592 lord Zouch dans son ambas- sade près de la cour de Danemark, obtint le titre de bota- nographe du roi Jacques I:r, et passa les dernières années de sa vie aux environs de Londres, auprès de sa fille mariée à Jacques Coël. Plumier a donné, en l'honneur de Lobel, le nom de Lobelia au genre type de la famille des Lobéliacées (3). le langage du temps, on appelait une devise ayant, comme il était de règle, un corps et une äme. Le corps est le dessin que nous venons de décrire, et l'âme, ces deux mots inscrits sur un listel au-dessous de l'image : CANDORE ET SPE. Nous croyons véridique l’ingénieuse explication qu’en a donnée un savant allemand, M. Tylo Irmisch (Botanische Zeilung, 1865). La légende Candore el Spe serait une allusion aux feuilles du Populus alba dont le limbe est vert d’un côté et blanc de l’autre : Candore exprimerait la blancheur de la face inférieure, et Spe, le vert, couleur em- blématique de l’espérance. (1) Charles Plumier, Nova plantarum americanarum genera. — Paris, 1703. (2) Nous établirons que Lobel se rendit en Angleterre pour la première fois, non pas vers 1569, mais en 1566. IL y fit alors un séjour de plusieurs années, mais il ne s'y établit pas définitive- ment. Il revint sur le continent et résida assez longtemps à An- vers où il pratiqua la médecine. Il fut ensuite le médecin du stathouder Guillaume de Nassau, et après la mort du prince d'Orange, il demeura pendant un certain temps au service des Etats généraux de Hollande. (3) Hocfer, Histoire de la Botanique, p. 117. 23272 Mathias de Lobel, alors âgé de vingt-sept ans, vint à Montpellier au printemps de 1565. Il s’inscrivit le 22 mai sur le registre des matricules de l'Ecole de médecine (1). L'usage voulait qu'en prenant son inscription, l'étudiant désignât un des professeurs sous le patro- nage et la direction de qui il se mettait spécialement, qu'il choisissait € pro patre » ou « pro parente », disait la formule (2). Lobel fit choix de Rondelet (3). Des relations affec- tueuses s’établirent aussitôt entre le maitre et le dis- ciple, et s’il faut en croire la Biographie universelle, ce fut à celui-ci que le célèbre professeur, emporté (1) J.-E. et G. Planchon, Rondelet et ses disciples, Appendice (Montpellier, 1866). (2) « Il est d'usage que chaque étudiant en choisisse un pour le consulter plus particulièrement. » (Félix et Thomas Platter à Montpellier, notes de voyage de deux étudiants bâlois. — Mont- pellier, 1892). — Ces mémoires, écrits par deux étudiants du xvre siècle devenus ensuite des médecins fameux, sont pleins de détails extrêmement intéressants. Ils ont été traduits d'allemand en français par un botaniste de grand mérite, notre ami M. Kieffer, ancien directeur du Lycée de la Belie-de-Mai à Marseille. (3) Fils d’un droguiste montpelliérain, Guillaume Rondelet avait eu des débuts particulièrement difficiles. Dès qu’il fut in- vesti, de par un premier diplôme, du droit d'exercer la méde- cine, il vint s'établir à Pertuis, petite ville de Provence. Mais sans doute parce qu’on le trouvait trop jeune, il ne parvint pas à inspirer confiance aux gens du lieu. Il essaya, pour vivre, de donner, toujours à Pertuis, des leçons de grammaire. Il ne réus- sit pas mieux. Il partit alors pour Paris où, grâce à un précep- torat, il put continuer ses études. Il revint en 1537 à Montpellier : il y fut reçu docteur et arriva bientôt, par l'énergie de ses efforts, à une situation brillante. I1 fut nommé en 1545 professeur royal à la Faculté de Médecine, et en 1555 chancelier de l'Université. Sa facon d’enseigner, et de nombreux succès dans la pratique de son art, lui valurent une réputation qui s’étendit au loin. — C’est Rondelet que Rabelais a mis en scène, sous le nom transparent de « nostre maistre Rondibilis », dans le troisième livre de Pantagruel. Rondibilis est le médecin que consulte Panurge pour savoir s’il doit prendre femme. Panurge accepte comme un Dr 9. l'année suivante par une mort prématurée, légua la partie de ses manuscrits relative à la botanique (1). Quelques semaines avant la venue de Lobel, il était arrivé à Montpellier un étudiant originaire de la Pro- vence, lequel, immatriculé le 10 avril 1565, avait pris, lui aussi, Rondelet pour parrain : il se nommait Pierre Pena (2). L'étudiant flamand et l'étudiant provençal se lièrent d'une étroite amitié. Peut-être se connaissaient-ils déjà, pour s'être rencontrés antérieurement, en Italie ou en Provence. Ils avaient l’un et l’autre un goût très vif pour la botanique. Ils herborisèrent ensemble, conseil affirmatif les longues et piquantes dissertations de Ron- dibilis sur le mariage et les diszrâces auxquelles il expose. « Retournons à nos moutons, dist Panurge. Vos paroles, trans- latées de Baragouin en François, veulent dire que je me marie hardiment et que ne me soucie d’estre cocu...» Et la verve endia- blée de Rabelais lui fait terminer d’une façon tout à fait plaisante la consultation donnée par Rondibilis à Panurge. « Puis s’approcha de luy et luy mist en main sans mot dire quatre nobles à la rose, Rondibilis les print très bien, puis luy dist en effroy, comme indigné : « Hé, hé, hé, Monsieur, il ne failloit rien. Grand mercy « toutesfois. De meschantes gens jamais je ne prends rien. Rien « jamais des gens de bien je ne refuse. Je suys tousjours à vostre « commandement, — En poyant, dist Panurge. - Cela s'entend, « respondit Rondibilis. » — Mais ceci n'est, de la part de Rabe- lais, qu'un trait de satire. Rondelet ne fut point un homme d'argent. Les biographes s'accordent à dire qu’il était très géné- reux et qu'il mourut pauvre. — Guillaume Rondelet ne fut pas seulement un médecin clairvoyant, instruit et heureux. Il avait pour l’histoire naturelle de remarquables aptitudes, et parmi les divers ouvrages qu'il a laissés, c’est son traité sur les poissons que la postérité a considéré comme son chef-d'œuvre. Il avait aussi le goût et une connaissance approfondie de la botanique, mais il n'a rien publié sur cette science. (1) Biographie universelle, art. RCNDELET.— Cette circonstance est confirmée par J.-E. Planchon (Rondelet et ses disciples). (2) Nous devons à l'obligeante communication que nous en a faite M. H. Teulié, bibliothécaire de la Faculté de médecine de Montpellier, le texte même de l'inscription prise par Pierre Pena sar le registre des matricules : Petrus Pena Provincialis aseilus fui in numerum studiosorum eZ mirent en commun leurs découvertes, et de leur association naquit l'ouvrage qu'ils signèrent de leurs deux noms et qui fut publié pour la première fois à Londres, en 1571, sous le titre de Stirpium Adversaria nova (1). hujus Academiae sedulù examinatus à D. Griffio doctore peri- tissimo, mihi verd parentem studiorum atque fautorem ascivi D. Rondelletium cui profiteof me omnia jura humanitalis atque universitatis praesliturum. 4 Idus Aprileis 1565. PETRUS PEXA, (Registre des matricules n°7 (1562-1569) f° 19 ve). L'étudiant n'était admis à s'inscrire qu'après avoir subi un examen spécial. Pierre Pena eut pour examinateur le docteur Griffy que MM. Planchon (Rondelet el ses disciples, Appendice) font figurer parmi «les amis intimes de Rondelet », en joignant à son nom l'indication que voici : « Gilbert Griffy, son parrain [de Rondelet] pour les études médicales, longtemps son collègue comme professeur, son père adoptif par l'affection. » — Les ex- pressions «parentem studiorum atque fautorem », employées par Pena quand il fait choix de Rondelet, marquent bien quel était le caractère de ce parrainage. — Nous nous sommes cru autorisé à modifier, par l’adjonction d'une lettre, un des mots qui précé- dent. Le texte porte «parente»; nous supposons que le final aurait dû être surmonté d'un tilde et qu'il faut lire «parentem», Sans notre correction le mot se rapporterait au docteur Griffy. Mais comme il nous a paru de toute évidence que l'intention de Pena était de l'appliquer à Rondelet corrélativement au mot «fautorem)», nous nous sommes permis de transformer l'ablatif en accusatif. — La date inscrite par Pena au-dessus de sa signa- ture, «4 Idus Aprileis 1565», correspond, s’il n’y a pas erreur de notre part, au 10 avril 1565. MM. Planchon avaient donné celle du 4 avril. Notre rectification est sans importance. Mais la vérité a des droits qui doivent être respectés jusque dans les moindres détails. (1) La plus exacte traduction du mot Adversaria serait celle de « Livre-journal », au sens que le Code de commerce donne à cette expression. Dans une épitre-dédicatoire adressée à l'Univer- sité de Montpellier et servant de préface à leur ouvrage, les au- teurs déclarent, en effet, qu'ils ont voulu imiter les négociants, et tenir registre, au jour le jour, de leurs acquisitions botani- ques : « Lubuit quantum uspiam habuissemus et meminisse LE « Un mystère étrange, — ont écrit MM. Planchon, _— couvre la destinée de Pierre Pena. À la fois célè- bre et obscur, son nom paraît en première ligne, associé au nom de Lobei dans l’œuvre collective connue sous le nom de Stirpium Adversaria nova. Mais Lobel lui-même, ni dans la préface, ni dans le contexte du livre, ne jette aucune lumière sur l'his- toire de son collaborateur. Dates de sa naissance, de sa mort, lieu précis de son origine, détails de sa vie intime ou publique, tout cela reste presque lettre close... (1) » Séduit, à notre tour, par l'attrait du mystère, nous allons tenter d'en soulever les voiles. Nous avons assemblé tous les documents épars où le nom de Pierre Pena était mentionné. Puis, avec une attention tenace, nous avons compulsé, interrogé, scruté le texte des Adversaria. Nous espérons que nos efforts n'auront pas été vains. Nos longues investigations potuissemus vulgatiorum et rariorum herbarum deintegro recen- sere, easque inslitorum more, quasi in paginis dati et accepti suis popularibus exadverso aggregare : quod genus commentarii Cicero ADVERSARIA vocat, quia tumultuariè et & re nata eù recens acceptæ debiti portiones potius congerantur quam digerantur, ex quibus postea codices absoluti confiunt. » Comme on le voit, ils rappellent que le mot Adversaria a été employé par Cicéron dans le sens où eux-mêmes l’appliquent. Mais il est très probable que l’idée de prendre ce titre leur fut inspirée par l'exemple de Turnèbe qui avait, quelques années auparavant, intitulé ainsi un de ses livres : « Turnèbe (né en 1512 aux Andelys, mort le 12 juin 1565) nous apprend lui-même, dit la Biographie univer- selle, que détourné, par la douleur dont l’accablaient les malheurs publics, de tout travail suivi, il parcourait sans ordre les autèéurs anciens et écrivait les remarques que lui suggérait cette lecture. C’est ainsi que se forma le grand ouvrage qu'il a intitulé Adversaria ». (1) Rondelet et ses disciples, Appendice. — Si l'œuvre est collec- tive, ainsi que le reconnaissent MM. Planchon, on ne comprend pas comment Lobel aurait pu concevoir l’idée de donner, — dans une préface et un contexte collectifs (où le pluriel est toujours employé), — des détails biographiques au sujet de son collabo- rateur. |. Sd. prie vont nous permettre, non seulement de donner sur l’existence de Pena beaucoup de détails intéressants, mais encore, — si nous ne nous sommes pas fait illu- sion sur le mérite de nos découvertes, — d'établir quel concours important fut donné par le botaniste provençal à l’œuvre dont Lobel semblait, devant la postérité, avoir confisqué pour lui seul tout l’hon- neur. Le lieu de la naissance de Pierre Pena nous est connu. Le célèbre phytographe marseillais à qui Louis XIV conféra le titre de « Botaniste du Roy dans les Isles de l'Amérique », le P. Charles Plumier, - en dédiant à Pena le genre Penœæa, nous apprend, dans une courte notice explicative, qu'il était né à Jouques, petit village du diocèse d’Aix (1). Nous savons par l’historien Gaufridi qu'il était le plus jeune de trois frères issus d’une très ancienne famille de Provence (2). L’ainé, André Pena, fut () Nova plantarum americanarum genera : « Petrus Pena Gallo-Provincialis, in loco vulgd Jouques Aquensis Diæcesis natus ». — La commune de Jouques fait partie actuellement du canton de Peyrolles et de l'arrondissement d’Aix (Bouches-du- Rhône). — Quelques auteurs ont écrit que Pierre Pena était natif de Narbonne, assertion démentie non seulement par le texte de Plumier, mais surtout par cette circonstance que dans son acte d’immatriculation Pena lui-même se disait Provençal. L'expres- sion de « Provincialis », employée par Pena, montre bien qu’il était né dans un lieu obscur. S'il avait vu le jour dans une grande ville, il n’eût pas manqué de l'indiquer, comme le fai- saient toujours les étudiants qui se trouvaient en ce cas, et notamment Lobel qui signait : « Mathias Lobelius Insulanus ». (2) « L’on peut mettre la famille de Pena entre les plus anciennes de Provence, puisqu'elle y est connue depuis plus de 400 ans. Hugues Pena, originaire de Moustiers au Diocèze de Riez, vivoit dés l’an 1264, Il excella dans la Poësie provençale et merita d’être fait Secretaire des Commandemens de Charles Ier Roi de Naples et de Sicile et Comte de Provence ». (L'Etat de la Provence dans sa noblesse, par M. l'abbé R. D. B. [Robert de Briançcon.] — Paris, 1693). 5 qe conseiller au Parlement d’Aix (1). Jean Pena, le second, conquit prématurément une grande renom- mée comme mathèmaticien et astronome, et fut nom- mé professeur au Collège Royal de France, fondé quelques années avant (2). Le troisième, — notre Pierre Pena, — destiné tout d’abord à la carrière des armes, l’abandonna pour se vouer à l'étude de la médecine. Il s’'appliqua avec beaucoup d’ardeur à la botanique, branche si importante alors de l’art de guérir, et c’est ainsi qu'il devint le collaborateur de (1) « André, l'aîné des frères, dit Gaufridi, étudia avec tant d’aplication, qu'aprez avoir apris de luy même les elemens dans sa maison, il parcourut les principales Universitez de France et d'Italie. Il revint plein de merite et d'érudition, tres-versé dans les langues et dans les sciences. Sur le tout tres-profond dans la jurisprudence, qui étoit son objet principal. Ce fonds qu'il s’étoit fait dans l’étude, éclata merveilleusement dans ses diverses fonctions. Le barreau l’'admira quelque temps. Le Siége de Digne qui le vit Lieutenant des Submissions, reconnut quel étoit son bonheur de posséder un homme si rare. Enfin le Parlement qui l'eut pour un de ses membres dans l'office de Conseiller, qu’il exerça durant trente-cinq ans, temoigna quelle étoit l'estime qu'il avoit de luy, par la consideration que lon avoit pour son opinion. Dans les questions de droit il épuisoit si fort les matié- res qu'il ne laissoit rien à ceux qui venoient aprez luy. » (His- toire de Provence, par Messire Jean-François de Gaufridi... Aix, 1694, in-fol.) (2) « Pour Jean, il alla chercher hors de son Païs à porter le plus avant qu'il pourroit ses études. Il s’en alla d’abord à Paris, où il s’atacha à étudier la langue Grecque... Dans peu de mois il fut capable de parler et d'écrire facilement en cette langue. J'ay quelques-unes des lettres qu'il écrivoit à son frère, qui rendent temoignage de cette verité... Il passa de là dans les Mathemathiques. I s'y apliqua de si bonne maniére, que dans peu de temps il fut fait Professeur Royal à Paris, Il traduisit et fit imprimer des traitez d'Euclide et de Theodose Tripolite, qui n'avoient encore point veu le jour. Il fit d'admirables decouver- tes dans l'Optique. Mais une fiévre qui lemporta dans la trente- deuxiéme année de son âge, luy ôta le moyen de porter ses expe- riences plus avant. Perte tres-considerable pour les sçavans, et plus facheuse encore pour la Provence, à qui un si grand homme faisoit tant d'honneur, » (Gaufridi, op. cil.) RE HE Mathias de Lobel. Puis il négligea les travaux scien- tifiques pour s’adonner entièrement à la pratique de la médecine, où l’attendaient d’ailleurs les plus bril- lants succès. Ce changement de profession fut déterminé, chez le jeune Pierre Pena, par une circonstance curieuse que le même historien raconte ainsi : « Je trouve que Jean Pena s’apliqua quelque temps à l'étude de l’Astrologie judiciaire. et qu'il y devint tres-habile. Mais voyant que la profession d’Astro- logue sentoit le charlatan, il se cacha soigneusement à tout le monde. Il ne s’en expliqua qu'à son frére seulement. Entre autres choses il luy fit scavoir qu'il avoit dressé la nativité de Pierre leur frére, qu'il avoit veu que s'il s’'adonnoit à l'étude, les astres Iuy prometoient beaucoup. Sur cette assurance le Con- seiller détourne son jeune frére du metier de la guerre qu'il avoit pris. Il l’envoye à Paris à ses depens. Là, Pierre s'occupe si fort à l'étude, qu'encore qu'il ne commençât qu'aprez l’âge de 20 ans, il s’'avança mer- veilleusement dans les sciences. Son inclination le portant à l'étude de la Medecine, il s’y rendit si habile qu'il devint Medecin secret du Roy Henry IT et mou- rut riche à plus de six cens mille livres et dans une baute reputation (1). » (1) Gaufridi, op. cit., p. 529.— Ecrivain toujours consciencieux, Jean-François de Gaufridi, baron de Trets, et lui-même conseiller au Parlement d'Aix, s’est attaché, en son Histoire de Provence, à ne raconter que des faits appuyés sur des documents certains. I1 possédait, nous venons de le voir par l'extrait contenu dans la note qui précède, les lettres de Jean Pena. « André Pena, con- seiller au Parlement, écrit Robert de Briançon, ne laissa que des filles qui furent mariées dans les maisons de Gaufridi et de Julianis. » (L'Etat de la Provence dans sa noblesse.) Une de ces filles, Françoise Pena, épousa Arnaud de Gaufridi, seigneur de Trets, et fut ainsi l’aïeule de l'historien (Dictionnaire [historique] de la Provence et du Comtat-Venaissin. — Marseille, 1786). Voilà comment celui-ci eut en sa possession les titres et papiers de la famille Pena, et put donner sur les trois frères des détails Voilà donc, en ce qui touche l’histoire personnelle de Pierre Pena, divers faits qui demeurent acquis. Nous sommes renseignés sur sa naissance, ses ori- gines, sa famille, et nous savons quels furent ses débuts. Notons en particulier cette circonstance sur laquelle nous aurons à revenir plus tard : voué d’abord à l’état militaire, qu'il abandonne, il est âgé de plus de vingt ans quand il se tourne vers les sciences ; il consent à suivre la direction nouvelle qui lui est marquée, il part pour Paris, et c’est là qu’il va commencer ses études littéraires et scientifiques. L'historien provençal nous a dit que le frère aîné, devenu une des lumières du Parlement d'Aix, avait dans sa jeunesse voyagé pour s’instruire et fréquenté les universités de France et d'Italie. Il faut tenir pour certain que le conseiller André Pena, si plein de sollicitude pour son jeune frère, lui prescrivit de se conformer à son propre exemple, et, continuant à lui fournir des subsides, lui traça un itinéraire et lui donna le moyen d'entreprendre de longues pérégrinations à travers l'Europe savarite. dont la rigoureuse exactitude ne saurait être mise en doute..— Un autre historien de la Provence, César de Nostradamus, qui fut le contemporain des frères Pena, a fait allusion à leurs succès, à propos d’Hugues Pena, le secrétaire de Charles d'Anjou, « yssu, dit-il, d’une famille encore en pieds, laquelle a de tout tems produit des excellens personnages, jurisconsultes, sena- teurs, medecins de Roys et mathematiciens renommez. » (L'His- loire et Chronique de Provence, p. 231. — Quelques-uns des détails donnés par Gaufridi sur les Pena ont été reproduits par d'Hozier (Armorial de France), à qui MM. Planchon les ont empruntés (Rondelel et ses disciples, Appendice). Et à cette occa- sion nous avons encore à relever une toute petite erreur. Les armoiries de la famille Pena n'étaient pas celles qu'ils ont décrites d’après d'Hozier. Robert de Briançon, dans son Nobi- liaire de Provence, dit expressément : « André Pena, conseiller au Parlement d'Aix, et un des plus sçavans hommes de son tems, portoit : d'azur à une étoile d’or à six rais. » — Tel donc devait être, avec une brisure, le blason du botaniste Pierre Pena. CR TG Les auteurs du Stirpium Adversaria, quand ils racontent leurs faits et gestes, affectent d'employer toujours la première personne du pluriel, et sous cette modalité ils donnent de nombreux détails sur les contrées où ils ont passé et séjourné et sur les personnages marquants avec lesquels ils ont été en rapport. La plupart des biographes de Mathias de Lobel, enclins à faire trop bon marché de la personnalité de Pena et à ne tenir aucun compte de la part que celui- ei a pu prendre à l’œuvre commune, ont voulu attri- buer uniquement à Lobel la rédaction des Adversaria et considérer comme émanant de lui seul les divers actes dont la relation consignée dans le livre fournit de précieux éléments à la biographie. Le procédé est injuste et anti-scientifique. S'il était vrai qu'il füt impossible de démêler, — comme plu- sieurs ont vainement tenté de le faire, — ce qui dans l'ouvrage collectif a été apporté individuellement par chacun des auteurs, il faudrait au moins prendre à la lettre leurs déclarations, et accepter comme accom- plies par l’un et l’autre conjointement les actions racontées au pluriel. Pour un certain nombre des faits relatés, les Adver- saria ont donné des dates précises. C’est ainsi que nous pouvons rapporter à l’inter- valle écoulé entre son départ de Paris et son arrivée à Montpellier une série de longs voyages effectués par Pierre Pena. Dans cet intervalle il visita : les provinces du nord de la France, les Flandres, l'Allemagne, le Tyrol, la Suisse, la Savoie, le Piémont, l'Italie, l'Espagne et le Portugal. Il était à Anvers en 1558 (1). La même année le vit (1) Stirp. Adv., p. 426. — Remarquons que si, à cette date, Ma- thias de Lobel se trouvait aussi à Anvers, comme le texte, à défaut de tout autre source d’information, nous autoriserait à l’admettre, il n'avait alors pas plus de vingt ans, étant né en 1538. — Pierre LTD arriver à Padoue (1), après avoir traversé quelques- unes des contrées dont nous venons de donner l'énumération. L'Italie parait être le pays où, à cette période de sa vie, il a séjourné le plus longtemps. Il profita sans doute des relations que son frère aîné s’y était créées au temps où celui-ci étudiait les lettres et le droit dans les universités italiennes. La botanique resplendissait alors en Italie d’un éclat incomparable. Il y avait pour l’enseigner, dans des universités fameuses, une pléïade de professeurs illustres. Le Gouvernement de Venise avait adjoint à l’université de Padoue un jardin botanique avec lequel rivalisait celui de Pise. L'’active navigation commerciale italienne apportait du Levant des plan- tes inconnues ou rares que des patriciens botano- philes se plaisaient à cultiver, et dans toutes les villes se rencontraient des pharmaciens instruits et pleins de zèle qui possédaient, eux aussi, leurs jardins botaniques et y multipliaient les espèces médicinales. Rome, Florence, Pise, Ferrare, Vérone, Padoue, Venise, Bologne, Gênes, Rivoli, Turin, sont les noms que le Stirpium Adversaria répète le plus souvent. Mais Venise semble avoir été la ville préférée. Chacun des millésimes qui se suivent de 1560 à 1564 se trouve associé au moins une fois à la mention de son nom. La date de 1562 fixe un nouveau séjour à Padoue, et celle de 1563 une excursion à Vérone. À Venise, Pena et Lobel avaient un ami, le phar- macien Albert Martinello, « amicus noster et peritus Pena devait être forcément son aîné. Nous savons, en effet, qu’il avait déjà plus de vingt ans quand il délaissa l’état militaire et se rendit à Paris. Les études qu’il alla commencer dans la grande ville dûrent bien l'y retenir pendant plusieurs années, d'où il suit qu'ayant certainement dépassé en 1558 l’âge de vingt ans, il l'avait dépassé au moins de toute la série d'années passées à Paris. (1) Stirp. Ado., p. 48. AR = pharmacopæus », dont les Adversaria parlent toujours en termes affectueux et flatteurs. En son officine, ornée sur l'enseigne d’une figure d’ange, on se réu- nissait fréquemment pour s'occuper de botanique. Albert avait un frère qui était allé en Syrie, et la bou- tique « ad Angeli symbolum » enfermait beaucoup de plantes et de substances végétales, expédiées d'Alep par Cequin Martinello, et que l'on venait curieuse- ment étudier (1). Tout porte à croire qu'ils se trouvèrent à Venise en même temps qu'un autre ami, venu là pour v poursuivre ses études, et qu'ils affectionnaient parti- culièrement. Cet ami, € singularis fidissimusque ami- cus », était originaire de Lille et se nomimait Valerand Dourez. Il devint plus tard pharmacien à Lyon et pendant toute sa carrière il se montra aussi habile pharmacien que passionné botaniste (2). Ils connurent à Vérone le pharmacien François Calceolari, un des premiers explorateurs du Mont- Baldo; à Ferrare, l’érudit et modeste Louis Anguil- lara, qui venait alors de s’y retirer, abandonnant le jardin de Padoue, dont la direction lui avait été con- fiée au retour de son voyage en Orient et dans les îles de la Méditerranée (3); à Pise, André Césalpin, professeur à l’université de cette ville et l'un des savants qui ont le plus honoré leur pays; à Bologne, siège d’une autre université, le docteur César Odon, (1) Gaspard Bauhin /Pinax theatri botanici) cite, parmi les auteurs dont il a utilisé les travaux, Cequin Martinello et son traité De Amomo et Calamo aromalico (Venise, 16064). (2) Le souvenir de Valerand Dourez demeure attaché au Samolus Valerandi L. — Linné n’a fait que confirmer à cette Primulacée le nom que lui avait donné Jean Bauhin (His{. plant. MREU,,t. LIT, 2€ p., p: 791). (3) Au cours de ses voyages, Louis Anguillara était venu à Marseille et avait herborisé en divers endroits de la Provence. Quelques-unes des observations qu'il y fit sont consignées dans l'ouvrage publié par Giovanni Marinello sous le titre de Semplici dell eccellente M. Luigi Anguillara (Venise, 1561). LS QUES professeur de matière médicale, et le naturaliste Ulysse Aldrovande, qui s’occupait de zoologie plus que de botanique. Le beau jardin botanique de Padoue rendait fort attrayant pour des botanistes le séjour de cette ville. Pena et Lobel entrèrent là en relation avec l'Allemand Melchior Wieland, devenu pour les Italiens Guillandini, et nommé directeur du jardin après la retraite d'Anguillara. Ils se lièrent aussi avec deux autres fervents adeptes de la res herbaria : le docteur Trevisani, dont ils exaltent le savoir, et un gentilhomme, Jacques Cortusi, grand ami de Mathiole, et que la République de Venise devait plus tard donner pour successeur à Guillandin. En leur faisant les honneurs de son propre jardin, où il cul- tivait à grand frais des plantes exotiques, il leur montra le «Satyrion Erythronium » récemment im- porté de Syrie par Cequin Martinello et qui passait pour aphrodisiaque. Et les deux visiteurs eurent, disent-ils, beaucoup de peine à ne pas éclater de rire, quand ils l’entendirent affirmer «se manibus. dun- taxat attrectando totum turgere venereis libidini- bus (1). » Ils ont consigné dans les Adversaria beaucoup d'indications que leur fournirent ces divers savants, qui, généreux presque toujours, se faisaient un plai- sir de leur donner aussi des échantillons ou des graines de plantes rares. En 1564 nous trouvons Pierre Pena à Zurich. Il v est venu en compagnie d'un jeune pharmacien de Marseille et, pendant quatre jours, l'un et l’autre y ont recu l'hospitalité chez le célèbre naturaliste helvétien Conrad Gesner. Celui-ci leur a montré ses collections et leur a offert maints et maints objets. Le fait nous est connu par une lettre que Gesner écrivait le 24 juillet 1564 à son ami Théodore Zwingger, «médecin (1) Stirp. Adp., p. 64 — 40 —- et philosophe » à Bâle. II le remercie de l'envoi d’une «Cantabrica», plante que Zwingger, d’après ce que semblent indiquer les termes de la lettre de remer- ._ ciment, avait reçue du jeune pharmacien marseillais. Et Gesner ajoute : € Ilum unà cum Petro Pena juvene doctissimo domi meæ per dies quatuor retinui et mea omnia ostendi, multa etiam donavi (1). » (1) Epistolarum medicinalium Conradi Gesneri libri III (Zurich, 1577), f° 108 v°. — Le jeune pharmacien marseillais qui accompa- gnait Pena à Zurich se nommait Jacques Raynaud ou Raynaudet. Il est cité plusieurs fois dans le Stirpium Adversaria, et toujours en des termes affectueusement élogieux : « Peramicus juvenis doctus Pharmacopæus Massiliensis, apprimè sedulus et peritus vestigator stirpium, singularis industriæ amicus... » — Quand ils passèrent à Zurich, Pierre Pena et Jacques Raynaudet venaient de Bâle et se rendaient à Venise. C’est du moins ce qui résulte de ce passage d’une lettre que le même Gesner adressait le 30 juin 1564 à Jean Bauhin : « Adolescens ille Massiliensis Pharmacopæus qui Basileæ fuit, nuper cum alio juvene Gallo Venetias profectus est, per quem D. Cortusio seripsi et Vallerando, etc. » Il nous pa- raît certain que « le jeune pharmacien de Marseille » et « l’autre jeune Français » dont il est question dans cette lettre étaient bien Pierre Pena et son compagnon Jacques Raynaudet. — Pendant son séjour en Italie, Pena fit à Conrad Gesner de nombreux envois de plantes. Il lui expédia notamment des échantillons de Papyrus d'Égypte cueillis, avec l'agrément de Césalpin, dans le jardin botanique de Pise. « Niloticam Papyrum, advectam hortique Pi- sani inquilinam factam vidimus, et florentem legimus, benevo- lentia eruditissimi Professoris in Academia Pisana Andreæ Acroariæ Cisalpini ; quo etiam hortante, nonnullos stolones Pa- pyri, et aliarum rariorum plantarum Gesnero misimus. » (Stirp. Adbv., p. 38.) Et un an après la visite que Pena lui fit en 1564, Gesner, écrivant à un jeune homme qui résidait à Montpellier, le chargeait de demander, soit à Pena, soit à Rondelet, des fruits et des graines de Figuier d'Inde : « De indice ficu dicta, quæ folium è folio emittit, cuperem habere fructum et semina paucula. Mompelio accerses à D. Pena vel D. Rondeletio, si aliunde non potes. » Cette lettre, datée de Zurich 29 août 1565, figure la der- nière parmi celles que Gaspard Bauhin édita à la suite d’un opuseule intitulé: De Plantis à Divis Sanclisve nomen haben- tibus (Bâle, 1590). Conrad Gesner mourut à Zurich, victime de la peste, le 13 décembre de cette même année 1565, 2 AD Pena et Lobel se rencontrèrent à Montpellier au printemps de 1565. Combien de temps y séjournèrent-ils ? Ici encore, nous avons des données précises. Ils ont raconté qu'au mois de juin 1566, ils allèrent herboriser près des marécages du Lez, et que sur une vaste étendue, depuis le bois de Grammont jusqu’à ia mer, le sol, sous l’action d’un soleil ardent, s'était couvert d’efflorescences salines (1). Ils quittèrent le Languedoc peu de temps après cette herborisation. La mort inopinée de Rondelet, leur maître et leur protecteur, survenue le 30 juillet 1566, eut-elle une influence sur leur détermination ? Nous l'ignorons, mais à l'automne de 1566, ils sont à la Rochelle, et par conséquent en route pour l'Angleterre. Ils furent reçus à la Rochelle par un ami, le doc- teur Launavy, « eruditissimus doctor Launœus me- dicus ». Is dürent s'y arrêter pendant un certain temps ; les Adversaria enregistrent quatre fois des plantes qu'ils avaient rapportées de là (2). (1) Stirp. Adv., p. 251 : « Genuinam [il s’agit du Cirsium mons- pessulanum] autem plurimam propè pistrinum olivarum et ponè molas farinarias, et pratensibus lacustribusque littoreis à Gram- muntio luco in meridiem devexis, quà maris alluvionibus et so- libus fervidis longè latèque patentes planicies sale niveo opertas pedibus terebamus junio 1566. » (2) Stirp. Adov., p. 358: «[Il s'agit du « Tragos »]… Rupellæ etiam maritimis exire.. nobis amici non vulgatæ fidei retulerunt. Nos tamen aulumno 1566, qui multa illic rara nacli fuimus... » — Ibid, p.430: « [A propos de l'Encens] Rupellæ occidui maris quadriennium fermé est, eùm doctus medicus Launaius nos do- navit. » — Les villes d'Agen, Bordeaux et Saintes, citées en divers passages, tracent indubitablement l'itinéraire suivi au départ de Montpellier. À Saintes les deux voyageurs avaient un ami, un condisciple sans doute, le docteur Lamoureus. — La Normandie est nommée sept fois : c'est aussi en se rendant en Angleterre qu'ils dürent la traverser. — Les Adversaria mentionnent encore les deux villes de Chartres et de Dreux et, à propos de celle-ci, il est fait allusion à la bataille qui y fut livrée en 1562 entre hu- A SATA Quelles sont au juste les raisons qui les décidèrent à émigrer en Angleterre ? Il est vraisemblable d'admettre qu'ayant, dès cette époque, concu l'idée de leur ouvrage botanique, l'ayant même, suivant toute probabilité, en grande partie réalisée, ils résolurent d'aller publier ce livre en Angleterre où, sous le sceptre d'Elisabeth, régnait une paix profonde, tandis que la France était tou- jours sous le coup de la guerre civile (1). Ils comp- taient peut-être obtenir la protection, —— et aussi des guenots et catholiques : «ad Druidum urbeculam, quô loci reli- gionis ergo commissum fuit funeste et cruentum prælium ». (P. 342.) Comme Dreux et Chartres sont peu éloignés de Paris, nous supposons que Pena y était venu seul pendant qu'il était étudiant dans la grande ville. (1) Dans une des préfaces du Sfirpium Adversaria adressée, sous forme d’épître-dédicatoire, aux professeurs de Montpellier, et précisément à l'endroit où ils y parlent de leur départ pour l'Angleterre, ils glissent ce membre de phrase : « verili commu- nem biennio post sequutam naufragam tempestatem... » Bien qu’il soit difficile de savoir exactement à quoi se rapporte cette ligne, elle paraît cependant viser les troubles dont Montpellier était alors menacé. Les deux années du séjour de Pena et Lobel dans cette ville avaient été particulièrement paisibles. L'histo- rien de Montpellier, Charles de Grefcuille, le constate en ces termes : « Le 31 de decembre [1564], c’est à dire le quinziéme jour après son arrivée, le Roi [Charles IX] partit pour Toulouse, Bor- deaux et Bayonne. Nos habitans furent si contens du sejour qu’il avoit fait dans leur ville qu'ils vêcurent tous de bonne-intelli- gence durant les années 1565 et 1566. Chacun exercoit tranquil- lement sa religion... » — Mais cette « bonne-intelligence » n'était qu'apparente. Les troubles éclatèrent avec la dernière violence dès l’année suivante (1567) « où l'on fit courir le bruit à Mont- pellier que le Roi vouloit souscrire au Concile de Trente, et qu'il alloit defendre l'exercice de la nouvelle religion. » Les réformés se rendirent maîtres de la ville et la couvrirent de ruines. L'évêque Guillaume Pelissier, — ce prélat savant et libéral que la botanique intéressait si fort et qui, malgré le dissentiment des croyances, fut l’ami personnel de Rondelet, — eut la douleur de voir démolir par les huguenots son palais épiscopal et la plupart des églises de Montpellier. — C'est sans doute à ces tristes évè- nements, déjà pressentis, que faisait allusion la phrase citée plus haut. 2 side subsides, — d’une reine qu'ils espéraient se rendre favorable. La Réforme avait, plus d’une fois déjà, conquis des âmes de botanistes, témoin le plus illus- tre de tous, Charles de l'Escluse. Rien n'indique d'une manière précise à quelle confession apparte- nait alors Mathias de Lobel. Quant à Pena, il avait sans doute embrassé la foi nouvelle. André, son frère ainé, s'était rallié à la religion réformée, et en 1562, sur l'avis qu'on allait l'arrêter nonobstant son titre de conseiller au Parlement, il avait dû prendre la fuite (1). On ne s’étonnera pas que Pierre ait suivi les errements d’un frère auquel il devait tout (2). Ils abordèrent au rivage britannique vers la fin de l’année 1566. Aucun doute n’est possible : nous avons à cet égard leur propre déclaration. Dans l’épitre, datée du 24 décembre 1570, par laquelle ils font hom- mage des Adversaria à l'Université de Montpellier, ils énoncent qu'en venant chez les Anglais ils ont transporté avec eux toutes les plantes qu'ils avaient antérieurement colligées, et ils ajoutent que dans « l'espace des quatre dernières années » ils ont amassé en Angleterre une grande quantité d'espèces indigènes ou cultivées, ou arrivées des Indes et d'Afrique (3). Pour assurer le succès de leur ouvrage, il fallait bien y donner une large place à la flore (1) Gaufridi, Histoire de Provence, p. 516. (2) On pourrait aisément relever dans les Adversaria divers passages où se manifeste une sourde hostilité contre le catholi- cisme. (3) Ce qui n'empêche pas le professeur Edouard Morren d'é- crire : « Rondelet mourut dès le 20 juillet 1566... L'Obel passa encore deux ou trois ans à Montpellier, exclusivement occupé à explorer la flore et sans doute à rédiger l'ouvrage dont 11 avait conçu le plan.» (Mathias de l'Obel, sa vie el ses œuvres.— Liége, 1875). — La même erreur a été commise par M. Gustave Plan- chon (Malériaux pour la Flore médicale de Montpellier d'après : Lobel, — Montpellier, 1864). « C'est en 1565 que Lobel arrive dans notre université, et {out nous fait supposer qu'il y a passé quelques années. » A7 | fee anglaise. Dans ce but ils parcoururenten tout sens la Grande-Bretagne ; ils paraissent même avoir poussé leurs explorations jusqu’en Irlande. Nous continuons, maintenant que nous voici en Angleterre, à parler des deux amis au pluriel, ainsi que nous l’avons fait pour les voyages d'Italie. Toutes les fois qu'il ne sera pas établi d’une manière positive que l’un des deux collaborateurs n'a pris aucune part personnelle à tel des actes ou des inci- dents relatés dans les Adversaria, il faudra rigoureu- sement admettre que l'acte ou l'incident doit être rapporté à l’un et à l’autre considérés comme ayant agi de concert : ainsi le veut le pluriel employé par le texte (1). (1) Il y a eu, chez la plupart des biographes de Mathias de Lobel, un parti-pris contre lequel nous ne saurions nous élever avec trop de force. Ils ne tiennent aucun compte du pluriel adopté par les Adversaria, ils font abstraction complète de la person- nalité de Pierre Pena, n'envisagent que celle de Lobel, et attri- buent exclusivement à ce dernier tous les faits personnels men- tionnés dans l'ouvrage collectif, C'est ainsi que le professeur Edouard Morren, auteur d’une notice qui résume tous les tra- vaux antérieurs, passe en revue une série de circonstances qu'il reproduit en ne se servant jamais que du singulier, écartant ainsi même la probabilité que Pierre Pena ait pu prendre la moindre part aux incidents rapportés. Il est vrai que cet auteur, — c'est du professeur Edouard Morren que nous parlons, — a procédé avec une légèreté étonnante et semble n'avoir pris du texte des Adversaria qu'une connaissance bien superficielle. Qu'on en juge : A propos du « Solanum tletraphyllum » ou « Herba Paris » (Paris quadrifolia L.), que les rédacteurs du Sfirpium Adversaria regardaient comme un contre-poison efficace, ils rendent compte d'une expérience tentée sur un chien auquel, après lui avoir fait absorber de l’arsenie et du mercure, on sauva la vie en lui administrant de la Parisette en poudre. « Jucundo speclaculo, écrivent-il, meminimus fuisse nobis amicisque nostris Bathoniæ Helvetiorum, dum Thermas illic inviseremus », ce qui, croyons- nous, doit être traduit ainsi : « Nous nous souvenons que ce fut pour nous et nos amis un agréable spectacle, pendant que nous étions à Baden, en Suisse, où nous visitions l'établissement thermal. » Or, voici quelle traduction a donnée de ce passage le professeur Edouard Morren : « Le Paris quadrifolia devient RTE Ce texte seul nous autoriserait donc à décider que Lobel et Pena se rendirent ensemble en Angleterre, y séjournèrent et y herborisèrent ensemble, et prépa- rèrent ensemble l'édition du Stirpium Adversaria. Mais ici nous possédons, pour l’un comme pour l'autre, une preuve extrinsèque de leur présence simultanée en Angleterre. Pour Mathias de Lobel, c'est l'attestation de Char- les de l'Escluse. Dans son Rariorum plantarum histo- ria, il raconte qu'il fit en 1571 le voyage d'Angleterre, et que se trouvant à Bristol avec Lobelius, celui-ci le conduisit à une grotte dite de Saint-Vincent où crois- sait le € Phyllitis » (1). En ce qui concerne Pierre Pena, nous avons le témoignage d'un autre contemporain. Jacques Gohory, que la Biographie universelle qua- lifie de «traducteur, poète, historien et alchimiste », publia à Paris, en 1572, un petit traité sur le tabac. Il y adjoignit un travail sur «la racine mechiocan », et dans cette seconde partie il a fait mention de Pena et des Adversaria (2). l'objet de ses expériences sur des chiens vivants, faites en com- mun avec un de ses amis intimes, le Suisse BATHONE. » ! La seule excuse du traducteur, c'est que pour lui la notoriété de Bathonia Helvetliorum n'était point aussi grande que celle du Pirée! (1) Rar. plant. hist, p. cexiiij : « Anno M. D. LXXI. cüûm Bristolii essem, duxit me ad specum illam Divi Vincentii, undè eruerat, idem Lobelius. » Le Phyllitis que Clusius et Lobel prirent à Bristol était la Fougère qui porte actuellement le nom de Scolopendrium officinale. (2) Le livre de Gohory a pour titre : Instruclion sur l'herbe Petum, dille, en France, lherbe de la royne où medicée ; el sur la racine mechiocan principalement (avec autres simples rares el exquis] exemplaire à manier philo- sophiquement lous autres vegelaux, par J.-G. P. — Paris, Galliot du Pré, 1572. La Bibliothèque Mazarine en possède un exemplaire. M. Alfred Franklin, administrateur de la Bibliothèque, a bien voulu, sur notre demande, nous dire que le passage relatif à Pena se trouve 70 Sans qu'il le dise en termes formels, on voit que Gohory regarde Pena comme le seul auteur de cet ouvrage. Il le félicite d’avoir fort à propos mis en lumière beaucoup de plantes peu ou point connues, et qu'aucun autre auteur n'avait encore décrites. Puis, après l'éloge, le blame. Il lui fait grief de n'avoir pas, chez les Anglais, pris plaisir à divulguer sa qualité de Français, chose que Pena aurait dû faire pour plusieurs raisons : d’abord parce qu'il est originaire de la Narbonaiïse (1), et ensuite parce qu'il a emprunté à deux Francais la matière et le titre de au verso de la page 13 de la seconde partie. Il est écrit en latin et conforme à la citation qu'en a donnée Seguier (Bibliotheca botanica, pars 1) au mot PEXA. Voici le texte de Gohory : « Primum omnium de Pena præfabor...… diligentem enim Scriptorem videri, quippe multas, vulgô ignotas, nec ab aliis ante traditas, eleganter ediderit. At cum Narbona ortus sit, quumque &è Francia stirpium suorum semina et figuras uno Operis ipsius titulum à Ruellio, Turneboque, Francis mutuatus sit, se quoque Francum libenter agnoscere debuisset ; nisi forte invidiam nominis (quæ hodie fœderis ergo nulla est apud Anglos) pertimescat. » (1) C'est l'expression de « Narbona » employée par Gohory qui a fait croire à certains biographes que Pena était né à Narbonne. Le mot latin Narbona a une double signification : il désigne à la fois et la ville même de Narbonne et la Gaule Narbonaise, division administrative des Romains qui engloba les territoires devenus par la suite ceux du Languedoc et de la Provence, Rien n'autorise à décider qu'en se servant du mot Narbona, Gohory n'a pas entendu désigner plus particulièrement la Provence. Seguier, du reste, en tête de l’article consacré à Pena, n'a pas manqué de noter qu'il était originaire de la Provence : «ÆE Pro- vincia oriundus », — Et précisément parce que Pierre Pena était Provençal, le reproche que lui adressait Gohory ne pouvait l'atteindre. La Provence, léguée par son dernier comte au roi de France pour être réunie au royaume « non point comme un accessoire à un principal, mais comme un principal à un autre principal », n'avait pas renoncé à sa situation d'Etat distinct et autonome. Un Provençal de ce temps-là se disait Provençal, et de la meilleure foi du monde ne songeait nullement à se donner pour Français. 99% ni son livre : à Ruel des descriptions et des figures de plantes, à Turnèbe le mot d’Adversaria. Il ajoute que si Pena a dissimulé sa nationalité, c'était peut-être pour ne pas encourir la haine que les Anglais portent au nom français. Mais cette excuse ne vaut rien, puisque présentement il existe une alliance entre l'Angleterre et la France. Nous aurons à revenir plus tard sur les déclarations de Gohory. Pour le moment nous n'avons à insister que sur un point: le séjour de Pena en Angleterre. Le subjonctif présent € pertimescat » prouve bien qu’à l'époque où Gohory compose et fait imprimer son étude sur la racine mechiocan, en 1572, Pena se trouve encore en Angleterre. Et, d'autre part, nous devons admettre qu'il y résidait depuis assez long- temps, car s’il n’y eût fait qu'une courte apparition, la prétendue dissimulation de nationalité qui donne prise aux critiques de Gohory n'aurait eu ni l’occa- sion de se produire, ni surtout le temps d’être remarquée. De tout ce qui précède, il faut done conclure que Pena demeura en Angleterre avec Mathias de Lobel depuis une époque peu éloignée de leur passage à la Rochelle en 1566, jusqu'après l’an- née 1571 où parut le Stirpium Adversaria. Ce livre, dont l’injuste postérité a semblé jusqu'à présent ne faire un titre de gloire que pour le seul Mathias de Lobel, fut publié à Londres, au commen- cement de l’année 1571, chez le libraire Thomas Pur- foot, à l'enseigne de Lucrèce (1). La date inscrite sur le frontispice est celle de 1570: mais le millésime de 1571 est donné à la fin du vo- lume : « Londini 1571 calendis januariis excudebat prelum Thomæ Purfoelii, ad Lucretiæ symbolum » (2). (1) On pourrait se demander ce que venait faire, sur l'enseigne de la librairie Purfoot, la chaste victime du roi Tarquin. (2) Malgré l'autorité qui paraissait due à la déclaration de Purfoot, un auteur anglais cité par le professeur Edouard ra" RE Le titre est ainsi formulé : Stirpium Adversaria nova, perfacilis vestigatio luculentaque accessio ad Priscorum præsertim Dioscoridis et Recentiorum Ma- teriam medicam.…. authoribus Petro Pena et Mathia de Lobel Medicis. Le texte est précédé de deux épitres-dédicatoires servant en quelque sorte de préface à l'ouvrage : l'une s’adressait à la reine Elisabeth d'Angleterre, l’autre aux professeurs de l’Université de Montpellier. Comme l’ensemble de l'ouvrage, ces deux préfaces, où le pluriel ne cesse pas d’être employé, doivent être réputées l’œuvre commune des deux collaborateurs. Des deux pages que remplit l’épitre à la reine, ils consacrent presque en entier la première à un hyper- bolique éloge d'Elisabeth, dont ils exaltent notam- ment « civilem prudentiam, perhumanam affabilita- tem, summam æquitatem (!) ». Ils donnent ensuite quelques détails intéressants sur leur séjour en An- gleterre, où ils ont herborisé tout en pratiquant la Morren, Richard Pulteney (Esquisse historique et biographique des progrès de la Botanique en Angleterre) a prétendu « que le livre [première édition des Adversaria ] a été imprimé à Anvers chez Plantin, et que le titre et le dernier feuillet seuls sortent des presses de Thomas Purfoot à Londres. » Désirant être sûre- ment édifié sur ce point, nous avons pris la liberté d'écrire à M. Max Rooses, conservateur du Museum Plantin-Moretus à Anvers. M. Max Rooses, auteur d'un ouvrage récent intitulé : Christophe Plantin, imprimeur anversois (Anvers, 1897), a bien voulu nous signaler le passage de son livre qui répondait à notre question : « La seconde partie [du Plantarum seu Stirpium Historia], Nova Stirpium Adversaria, par Mathias de Lobel et Pierre Pena, fut imprimée à Londres par Thomas Purfoot en 1571. Plantin acheta 800 exemplaires des Adversaria, au prix de 1200 florins, et les réunit aux Sfirpium Observationes qu'il avait imprimées lui-même. Il paya encore 120 florins pour 250 des 272 figures gravées sur bois qui avaient été employées dans l'ouvrage publié par Purfoot. Ces planches lui parvinrent le 4 mai 1580, de sorte qu'il put encore s’en servir dans l’herbier flamand de De Lobel qu'il publia en 1581 sous le titre de Xruydtboeck. » — 94 == médecine, € ubi dum peregrinando mederemur et medendo peregrinaremur », et de cette facon ils ont pu amasser des simples en quantité. Ils se louent grandement du bon accueil qu'ils ont recu partout, et en particulier chez la noblesse. Ils nomment quel- ques-uns des botanistes anglais avec lesquels ils sont entrés en relation et à qui ils ont communiqué des plantes. Ceux dont ils paraissent faire le plus de cas sont : Guillaume Turner, «€ médecin d'illustre mémoire et auteur d'une Flore anglaise (1) »; le doc- teur Thomas Penny, « botaniste de grande espé- rance (2) » ; Hugues Morgan, pharmacien à Londres, qui cultivait dans son jardin médicinal une multitude de plantes rares (3). Enfin l’épitre se termine par la promesse que font les deux amis de donner bientôt (1) « Guillielmo Turnero claræ memoriæ Medico et herbariæ Anglicæ scriptori. » — Le docteur Turner, médecin du duc de Sommerset et ardent zélateur de la Réforme, avait étudié les sciences naturelles en Italie, en Suisse et en Allemagne. Il est, ainsi que les Adversaria le rappellent, le premier qui ait publié un « Herbier » en anglais. La première partie de son ouvrage intitulé New-Herbal parut à Londres en 1551. Comme Guillaume Turner mourut le 7 juillet 1268, le fait que Pena et Lobel l'avaient connu et s'étaient liés avec lui suffirait à établir, si nous n'avions pas sur ce point leur témoignage formel, qu'ils se trouvaient en Angleterre bien avant 1569. (2) « Penny (Tomas), médecin anglais qui eut quelque célé- brité dans le xvr siècle, dit la Biographie universelle, Voyagea en Suisse, dans le Midi de la France ct de l'Allemagne, et visita l'Angleterre avec un soin particulier. Il mourut en 1589. Gerard l'appelle un second Dioscoride, à cause de la connaissance extraordinaire qu'il avait des plantes. » — Penny fut aussi l'ami de Charles de l'Escluse. (3) Le ministre d'Elisabeth, l'habile maïs artificieux Guillaume Cecil, devenu plus tard Lord Burleigh, avait près de Londres un jardin où il cultivait aussi les plantes rares. Les Adversaria louent en ces termes et le jardin et le ministre (p.422): « Londini in vireto operis et stirpium novitate visendo Cæcilii regni floren- tissimi Angliæ incomparabilis um sapientiæ, tum eruditionis Nestoris. » - 25 - une suite à leur ouvrage, et de la dédier encore à la reine (1). Dans la pensée des auteurs, leur épitre aux profes- seurs de Montpellier, « antiquissimæ el nobilissimcæ Nitiobrigum (2) Academiæ regis professoribus cœte- risque benemerilis præceptoribus Monspelliacis », était la véritable préface de leur Flore. C'est ce qu'indique bien le sous-titre : «operis Adversariorum argumentum et emolumentum. » Cet hommage montrait combien ils avaient été satisfaits de leur stage à l'Université de Montpellier. Ils éprouvent, on le voit à la chaleur de l'expression, un plaisir très vif à évoquer cet heureux temps. (1) « Quod si hæc nostra tenuium homuncionum properata et penè abortiva opella, potius veritati et utilitati quam dignitati rerum consuluit, nihil majus jam suppetit quàam altera hujus operis pars edenda. Eam tuæ item clientelæ simul ac addixe- rimus, pleno voto nos defunctos gaudebimus. » (2) Le mot Nitiobroges, « dont les géographes grecs ont altéré la véritable orthographe en Nitiobriges », est le nom d'une peu- plade gauloise mentionnée par les Commentaires de César dans le passage suivant : «Interim Lucterius Cadurcus in Rutenos missus, eam civitatem Arvernis conciliat. Progressus in Nitio- briges et Gabalos ab utrisque obsides accipit, et magna coacta manu in provinciam Narbonem versus eruptionem facere con- tendit. » Les premières éditions imprimées des Commentaires parurent accompagnées d'un Index composé par Raymond de Marliano, géographe italien du xv® siècle. Cet Index fixait ainsi la situation des Nitiobriges : « Nitiobriges populi inter Celtas, proximi Rhutenis et Gaballis, ac Narbonensibus, Galliæque pro- vinciæ Romanorum in Bituricensi Provincia, et Francorum regno siti Montpeslier hodie à Gallis dictum. » Cette explication fut acceptée par tous les écrivains du xvr° siècle, et notamment par le géographe flamand Abraham Ortell. L'historien provençal - Jules-Raymond de Solier écrivait dans les Antiquilez de la ville de Marseille, à propos des « Nitiobrigiens » : « C'est le pays d'alentour Nismes, Montpellier et Uzez... » — Mais les géogra- . phes modernes sont d'avis que les Nitiobroges occupaient l'Agé- nois, et qu'ils avaient pour capitale Aginnum, actuellement Agen (V. Ernest Desjardins, Géographie historique et administrative d2 La Gaule romaine, t. 11, 11 et 1V, passim). EL ie Venus à Montpellier, disent-ils, après avoir parcouru diverses régions de l'Europe où ils ont eu pour mai- tres les médecins et les philosophes les plus érudits, ils conservent un souvenir très doux d’une ville et d'une contrée pleines d’agréments, de l'affection que leur témoignèrent les étudiants, de la bienveillance des professeurs à leur égard, de la sollicitude que mirent ceux-ci à leur fournir le complément de con- naissances dont ils avaient besoin. Ils disent encore que partout où ils ont passé, ils ont tenu à connaitre, au moyen de leurs propres explorations ou des renseignements qu'ils ont de- mandés, la végétation de l'endroit ; mais quand, arrivés dans la Gaule Narbonaise, ils ont mis à herboriser une ardeur égale, sinon plus grande, ils se sont trouvés en présence d’une flore si riche, qu'aucune autre ne pouvait lui être comparée, pas même celle de l'Italie. Dans tout le territoire que le Rhône traverse et qui s'étend des Alpes de la Ligurie à la partie des Pyrénées voisine de la mer, en ce pays favorisé, où la fertilité du sol s’harmonise avec la douceur du climat, que ses montagnes et ses vallées défendent d’un côté contre la chaleur et abritent de l’autre contre la froidure, quelles délices et quelles richesses offrent au botaniste ces bois, ces prairies, ces bruyères, ces garigues incultes, où foisonnent tant de fleurs ! Et ce dithyrambe se termine par un calembour mythologique, à la gloire de Montpellier : si jamais Apollon et les Muses consentent à aban- donner la source du Permesse et le célèbre mont Pelion, ce ne sera que pour se transporter au mont Pelium (Mont-Pellier). Ils manifestent néanmoins une grande satisfaction de se trouver actuellement «dans ce port tranquille », c'est ainsi qu'ils désignent l'Angleterre. En y venant ils étaient avides, et de constater si les régions du nord /Aquiloniæ plagæ)/ nourrissaient un aussi grand nombre d'espèces que la Narbonaise, et d'étudier LR, DE ni une végétation qui était à peu près inconnue des an- ciens botanistes. Et à cette occasion, ils donnent un renseignement que nous leur avons déjà emprunté : ils confessent qu'ils ont, € au cours des quatre an- nées qui viennent de s’écouler », récolté sur le sol anglais une multitude de plantes, les unes sponta- nées, les autres semées, beaucoup apportées des Deux-Indes ou des pays d'Afrique (1). A la fin de cette longue préface, dont nous n'avons donné qu'une rapide analyse, les auteurs du Stirpium Adversaria tiennent à montrer qu'ils sont non seu- | lement des médecins et des botanistes, mais aussi | des philosophes ; et leur conclusion prend la forme | d’un conseil aux jeunes gens qui vont entrer dans la carrière. «Nous prévenons les débutants qu’en s’adonnant à la botanique, qui est, en l’art de guérir, la partie la plus certaine, la plus utile, la plus attrayante, ils doivent étudier aussi les plus modestes végétaux. Nous leur recommandons de faire ainsi et de se bien persuader que parmi ces richesses divines, il ne peut rien y avoir nulle part de méprisable ou d’indigne de l'être raisonnable pour qui seul Dieu les a créées, (1) Ils répétent, au début du passage que nous résumons ici, qu'en venant en Angleterre ils y ont apporté avec eux les plantes qu'ils avaient soigneusement colligées au moyen de leurs nom- breuses récoltes personnelles, de la pratique des choses et des recherches dues aux professeurs de Montpellier, et principale- ment toutes celles de ces plantes qu'ils supposaient encore iné- dites. « Quare qui jam tum multa lectione, rerum exercitatione et vestra indagine, hasce plantas diligenter convasassemus, præsertim quas nondum in literas missas rebamur, veriti com- munem biennio post sequutam naufragam tempestatem, atque avidi noscendi num plures vestratibus et rariores alerent Aqui- loniæ plagæ, quæ minus videntur notas fuisse antiquis Botanicis, hue in portum tranquillitatis, easdem nosque unà commodüm subduximus : ubi rursum isto quadriennio tam multas conse- quuti sumus, partim hic oriundas, partim satas, etiamque ex utrisque Indiis et Africis invectas. » à M || voulant, comme il est dit dans le livre sacré, que nous soyons guéris par des herbes, non par des paroles, etqu'aucune des œuvres de la sagesse infinie ne demeure inutile (1). » L'épitre-dédicatoire à l'Université de Montpellier porte une date : celle du 24 décembre 1570, « Londini pridie divini Natalitii, 1570. » Elle est suivie d’un /ndex dont le titre fait mention du nom des deux auteurs, et d’une « coppie » du Privilège accordé par le roi de France Charles IX : « Noz chers et bien amés Pierre Pena et Mathias de Lobel Medicins nous ont faict entendre quilz ont deli- beré pour le bien publiq de faire Imprimer ung livre intitulé : Stirpium adversaria nova, perfacilis vesti- gatio et luculenta accessio ad Dioscoridem, etc. Et pour ce quilz craignent qu'aulcun Imprimeur ou Li- braire ne les feist à leur grand prejudice imprimer ou contrefaire en nostre Royaulme et pays de nostre obeis- sance, si sans obtenir de nous permission, ilz les met- toyent en lumiere, Ilz nous ont treshumblement faict supplier et requerir.………. » Le Privilège est donné à « Villiers-Costrez » (2) le 12 décembre 1570. Telles sont les circonstances au milieu desquelles (1) « Tyrones proinde monemus et rogamus, ut rei herbariæ totius Medicatricis certissimæ, utilissimæ, jucundissimæ, etiam minima quæque explorent, persuasumque habeant, in istis Dei divitiis nihil uspiam esse despicabile aut indignum homine phi- losopho, cui uni hæc ille condidit, voluitque, ut est in sacra pagina, nos sanari herbis non verbis, ne sapientiæ suæ opera irrita forent. » Quelle est la page sacrée d'où Pena et Lobel ont extrait ce jeu de mots: « nos sanari herbis, non verbis »? Par l'expression « sacra pagina », ils entendaient sans doute désigner la Bible : le texte auquel ils faisaient allusion ne pouvait être que le verset 12 du chapitre xvi du Livre de la Sagesse. Or, ce texte dit tout le contraire de ce que prétendaient les auteurs de l'épi- tre-dédicatoire : « Etenim neque herba, neque malagma sanavit cos, sed tuus, Domine, sermo qui sanat omnia. » On voit que l'or- thodoxie de nos deux botanistes était suspecte, et décidément ils sentaient le fagot, (2) Villers-Cotterets. RCA GE vint au jour l'ouvrage mémorable qui a fondé la réputation de Mathias de Lobel. Celui-ci, entré par là dans le domaine de la botanique descriptive, y est fidèlement demeuré. Quant à son collaborateur, dès la publication des Adversaria, il s'efface, ne reparait plus, et la littérature botanique n'aura pas à inscrire son nom une seconde fois. Nous allons aborder l'examen d’un problème dont nous avons poursuivi la solution avec une constance, une application et un intérêt quasi passionnés : dans quelle mesure Pierre Pena a-t-il coopéré à l’œuvre que Lobel et lui ont signée ? Mais avant de nous y engager, reprenons la biogra- phie de Pena; suivons-le, autant qu'il nous sera permis de le faire, dans la carrière à laquelle il s’est attaché uniquement, quand il a jugé à propos de renoncer à la botanique. Nous savons déjà par César de Nostradamus qu'il a été « Medecin de Roy » et par Gaufridi « Medecin secret du Roy Henry I » et qu'il est mort « riche à plus de six cens mille livres et dans une haute repu- tation. » Ainsi fut réalisée la promesse que les étoiles avaient faite à son frère le mathématicien. Médecin secret ! Le mot est plaisant. Si Henri HT a voulu réellement laisser ignorer qu'il avait été soi- gné par Pierre Pena, le secret fut bien mal gardé. Que Gaufridi l'ait appris longtemps après, il n'y aurait là rien d'étonnant. À la suite du mariage qui fit entrer une des filles du conseiller André Pena dans la maison de l'historien, celui-ci eut à sa dispo- sition les papiers intimes de la famille Pena; les soins donnés au roi de France avaient pu lui être révélés par une lettre, confidentielle au moment où elle fut écrite, et qui cent ans après ne l'était plus. Mais le secret était depuis longtemps ébruité, puis- que César de Nostradamus, qui fut, lui, contempo- rain de Henri III, en avait eu connaissance. A quelle occasion Pierre Pena fut-il mandé près » _— 30 — de Henri IE, et de quelle maladie eut-il l'honneur et la bonne fortune de guérir le roi de France ? Notre bon et naïf Garidel va nous le dire sans ambages. En son Histoire des plantes qui naissent aux envi- rons d'Aix (1), le disciple et l'ami de Tournefort con- sacre un long article à la Bardane; il énumère et il vante diverses propriétés curatives de cette plante, et il ajoute : «... Elle vuide aussi le sable et chasse le calcul, soulage les gouteux par les mêmes voyes, guerit la verole, s’il faut en croire Jacoz, qui dans les observations communiquées à Rivière, assure que le roi Henri IT fut gueri par nôtre Pierre Pena avec la decoction de cette racine (2). » (1) Aix, 1715, in-fol. (2) Dans l’'Appendice de Rondelet et ses disciples, MM. Planchon disent de Pena : « Où se rendra-t-il en s'éloignant de Montpellier ? Nul indice à cet égard, non plus que sur sa carrière universi- taire. Toutes les probabilités, néanmoins, établissent son identité avec un Pena qualifié de médecin secret de Henri II. » Le pays où se rendit Pierre Pena en quittant Montpellier est, comme on la vu plus haut, parfaitement connu : c'est l'Angleterre. Quant à son identité avec le médecin royal, il y a mieux que «toutes les probabilités » : il y a certitude. MM. Planchon n'avaient pas sous les yeux le passage de Garidel que nous venons de citer, où cet auteur raconte que le roi fut guéri « par NÔTRE Pierre Pena. » Le mot nôtre signifie que le médecin de Henri II était bien le Provencal et le Bolanisle dont, au cours de son Histoire des Plantes, il a déjà eu plusieurs fois l'occasion de prononcer le nom. Et sur ce point l'autorité de Garidel est certaine. Les succès de Pierre Pena avaient flatté les Provençaux, ainsi qu'en témoignent les allusions de l'historien César de Nostradamus : on ne les avait pas oubliés, moins d'un siècle après, au temps où Garidel préparait sa Flore des environs d'Aix. — MM, Planchon, dans le même Appendice, citent le texte de celle des Observalions de Rivière qui relate la guérison de Henri II. Garidel l'a exactement résumée ; il a pourtant omis un détail : c'est que Pena avait appris d'un « certain Turc» le remède ordonné au roi, Rivière tenait le fait de Samuel Formi: | « Formi, dit la Biographie universelle, chirurgien, né à Mont- pellier, entra au service du roi contre la Ligue et assista au siège — 91 — Nous possédons un autre document relatif à la même période et qui explique pourquoi, en cette occurrence, Henri IT choisit Pierre Pena, lorsqu'il fut atteint de l’affection accidentelle dont Garidel nous a dit le nom. La « haute reputation »et la grande fortune constatées par Gaufridi, Pena les avait acquises comme spécialiste, en soignant les syphili- tiques. Il fut le Ricord de son temps. Le Journal de Pierre de l'Estoille contient un passage qui ne laisse aucun doute à cet égard (1). Et c’est là évidemment le motif pour lequel Pena fit infidélité à la botanique. La clientèle l’absorba et il se livra sans partage à une profession qui lui pro- curait tout à la fois renommée et profit. Rien de plus de Paris en 1590. A la paix, il retourna dans sa patrie, où il jouit d’une assez grande réputation qui lui mérita l'honneur qu'on lui fit d'associer ses observations à celles de Rivière, célèbre professeur de la Faculté de médecine de Montpellier. » On voit par là que les antécédents de Samuel Formi lui avaient permis d'être exactement renseigné au sujet des soins donnés à Henri III par Pierre Pena. — Lazare Rivière, né à Montpellier en 1589, fut nommé professeur en 1622 et mourut en 1655. C'est par les soins de Siméon Jacoz, dont Garidel mentionne le nom, que furent publiées les premières éditions des Observations de Rivière. (1) Parmi les morceaux divers dont se compose le Journal des choses memorables advenues durant le règne de Henry III, figure un factum intitulé : « Le Divorce satyrique ou les amours de la reyne Marguerite ». C'est un libelle d'une extrême violence, qui flétrit les déportements de Marguerite de Valois, première femme de Henri IV. Un des amants présumés de la reine, Bajaumont (ou Beaugemont) y est « pourtraicturé » de la façon que voici: « Ce Bajaumont, metz nouveau de cette affamée, idole de son temple, le veau d’or de ses sacrifices, et le plus parfait sot qui soit jamais arrivé dans la Cour, lequel introduit de la main de Madame d’Anglure, instruit par Madame Roland, civilisé par le Moyne, et naguères guery de deux poulains par Penna le Medecin.. » On comprend comment Pierre Pena fut absorbé, gagna beaucoup d'argent, et ne songea plus à la botanique descriptive. FRE — 32 — exact que ce qu'ont écrit sur ce point les frères Plan- chon. Après avoir fait observer qu'il est, au premier abord, difficile de comprendre « comment, dans sa carrière de praticien, le même homme a pu se désin- téresser assez complètement de la botanique pour laisser son ancien collaborateur Lobel s’attribuer presque absolument les fruits de leurs anciennes étu- des », ils ajoutaient avec beaucoup de raison : « La chose s'explique néanmoins... Il suffit de supposer que Pena n'eut pour les plantes qu'un gout passager et de jeunesse, qu'il fut comme étudiant un herbori- sateur ardent, mais que poussé dans la voie de la clientèle, des honneurs et des richesses, il aurait dédaigné presque les fruits de ses premières étu- des (1). » Mais nous cessons d'être d'accord avec eux quand ils disent de Lobel : « Dès lors Lobel, resté seul fidèle à l'amour des plantes, aurait pu sans scrupule s’attri- buer la plus grande part dans les Adversaria. Ceci justifierait Lobel du reproche d'égoïsme et de plagiat intéressé. Riche comme il l'était de son propre fonds (2), peut-on supposer qu'il voulüt dépouiller de sa part de gloire l’ami dont il a placé le nom en tête de leur œuvre commune ? » Une étude sérieuse des pièces du procès a fait nai- tre chez nous une conviction toute différente; et nous croyons, au contraire, qu'après la retraite de Pena, Lobel a manœuvré de facon à rejeter dans l'ombre la personnalité de son collaborateur, et à concentrer sur Son propre nom tout l'honneur que devait rap- porter la publication des Adversaria. Demeuré seul, Mathias de Lobel, qui aura du moins (1) Rondelel el ses disciples, Appendice. (2) Appréciation très contestable, car il serait facile de montrer que de tous les ouvrages auxquels Mathias de Lobel a attaché son nom, le Slirpium Adversaria est le seul qui ait un mérite propre et personnel. 33 — le mérite de ne point abandonner la botanique, se remet au travail, et peu d'années après il est prêt à éditer un nouvel ouvrage auquel il a donné le nom de Stirpium Observationes. L'œuvre nouvelle n'avait absolument rien d’ori- ginal. C’est un simple commentaire ou pour parler avec plus de précision, un complément du Stirpium Adversaria. Une inscription placée au verso du fron- tispice, analyse sommaire du livre, dit bien ce qu'il est : Q Adversariorum Illustrationes, Castigationes, Auctaria, Conjectanea, nominum et opinionum Consen- sus et Harmonia... » Conformément à ce qu’expri- ment le titre et le sous-titre, le texte nouveau se com- pose d'observations destinées à rectifier ou à éclairer sur certains points le travail originaire, et surtout à faire concorder les descriptions des Adversaria avec celles de Dioscoride. En outre, comme dans le pre- mier ouvrage un assez grand nombre d'articles n'étaient pas accompagnés de figures, Lobel publie les dessins qu'il a fait graver depuis lors, ou ceux que son éditeur a empruntés aux volumes antérieurs de Dodoens ou de Clusius. Un biographe à qui, certes, on ne reprochera pas d’avoir montré trop de sévérité pour Mathias de Lobel, apprécie en ces termes le Stirpium Observa- liones : « Les Observationes sont une sorte de complé- ment des Adversaria : les plantes cultivées dans les jardins y occupent une large place. Ils sont édités avec le luxe de gravures habituel dans les ouvrages de Plantin : celles-ci sont au nombre de 1486, assez grandes, mais la plupart avaient déjà servi dans les ouvrages de Dodonée, de l'Escluse et même de Mat- thiole. Chaque figure est accompagnée d’un commen- taire en général peu intéressant et tiré de Galien, de Pline ou d’autres auteurs de l’antiquité.…. ; de nom- breuses notes, le plus souvent inexactes, renvoient le lecteur des Observationes aux Adversaria, ce qui rend l’usage du livre fastidieux. Son mérite réside 3 Le ESS L.. "cp RL nt Pin, : APE EC * x ." + y nu] — 34 — dans les détails, et il ne se distingue par aucune invention transcendante. L'ordre suivi est le même que celui des Adversaria, et il n’est pas amélioré (1). » Le Stirpium Observationes fut imprimé à Anvers, en 1575, par Christophe Plantin, pour paraître en 1576. Et voici en quoi consistèrent ce que nous appelons les manœuvres de Lobel, à Feffet d'accaparer autant que possible à son profit exclusif le mérite d’avoir composé le Sfirpium Adversaria. De l'édition des Adversaria imprimée à Londres en 1570 par Thomas Purfoot, un grand nombre d’exem- plaires étaient restés invendus. Ils furent transmis à Plantin et reliés avec les Observationes fraichement sorties de la presse. Le tout formait ainsi un épais volume. L'ambitieux Lobel eut l’idée d’unir les deux parties, mieux encore que par la reliure, au moyen d'un titre général paraissant couvrir une œuvre homogène et à lui personnelle : et sur le frontispice 1l inscrivit ce titre pompeux : «Plantarum seu Stirpium Historia Matthiæ de Lobel Insulani. » Au-dessous de cette orgueilleuse indication, une ligne imprimée en petits caractères : (cui annexum est Adversariorum volumen », sans aucune mention du nom de Pena : première tentative de Mathias de Lobel pour faire oublier son ex-collaborateur et opérer main-mise sur l’œuvre commune. Le nom de Pierre Pena, il est vrai, est maintenu sur le titre spécial imprimé par Christophe Plantin pour remplacer le frontispice de l'édition anglaise (2), (1) Edouard Morren, Mathias de l'Obel, sa vie el ses œuvres. (2) Ce frontispice, gravé sur cuivre, portait au sommet les armes du royaume d'Angleterre ; au-dessous, le titre de l'ou- vrage, titre dont nous avons reproduit plus haut les premières lignes, avec l'indication du nom des auteurs; puis, occupant à peu près toute la moitié inférieure de la page, une carte géogra- phique finement gravée, représentant l'ensemble de contrées que les Atlas de géographie ont l'habitude de nommer le Monde connu des anciens; enfin, au bas de la page. cette simple ins- rciption : Londini 1570. 39 — que l’on supprime, et être mis au-devant des Adver- saria, désormais réduits au rôle de simple annexe ou appendice. Mais les Adversaria étant reliés à la suite des Observationes, ce titre nouveau se trouvera enfoui au milieu du volume, et fixera bien moins l'attention que le frontispice placé en tête, où rayonne seul le nom de Mathias de Lobel. Et puisque ce frontispice parle d'une annexe, le lecteur bénévole supposera naturellement que si Lobel est l'unique auteur du morceau principal, il l’est aussi de l’appendice. Remarquons en passant que sans la combinaison qui vient d'être exposée, on ne s’expliquerait pas comment, dans ce volume nouveau, les Adversaria pouvaient être placés après les Observationes. Rien n'eût été plus déraisonnable qu'une telle disposition. Les Observationes n'étant que des notes complémen- taires à ajouter et qui renvoyaient aux divers chapi- tres ou articles des Adversaria, devaient, en bonne logique, ne point prendre la tête, et venir simplement à la suite. Mais tout cela ne suffit pas. Même en rejetant les Adversaria à la fin du volume comme un simple appendice, Lobel leur fait subir diverses modifica- tions qui tendent à compléter ce que nous pourrions appeler, — s'il est permis d'employer ici ce néolo- gisme, — son « démarquage ». Nous avons dit qu’un nouveau frontispice avait été imprimé pour les Adversaria par Christophe Plantin. On ne voulait pas que le public connût la supercherie consistant à donner comme édition nouvelle ce qui n'était que l’utilisation du solde inemployé de la pre- mière. Pour cela il fallait bien faire disparaitre le frontispice où se lisait le nom de Purfoot et le rem- placer par un nouveau titre qui portat celui de Plantin (1). (1) Le respect méticuleux que nous avons pour la vérité nous impose le devoir de ne laisser de côté aucun détail, quelque Sur le nouveau frontispice, le nom de Pierre Pena apparait encore, tel qu'il figurait au précédent, c'est- à-dire en première ligne. Il y aurait eu vraiment trop d'impudeur à le supprimer là, ou même à lui enlever sa place. Mais on trouvera d’autres moyens d’éclipser Pena. On commence par supprimer l’épitre-dédicatoire à la reine Elisabeth, œuvre collective des deux auteurs, où ceux-ci parlaient au pluriel, et que nous avons analysée plus haut. Une nouvelle épitre adressée à la même princesse remplace la première. Mais celle-là est bien l'œuvre personnelle de Mathias de Lobel. Il s’y exprime au singulier et il la signe seul; pour qu'on ne s'y mé- prenne pas, ne füt-ce qu'un instant, il veut que sa signature apparaisse tout d’abord, et il inscrit son nom au haut de la page : « Ad Elizabetham serents- simam Anglorum reginam MATHIAS DE LOBEL INSu- LANUS. » (1). minime que soit son importance. Nous devons, en faveur de Christophe Flantin, relever ici cette particularité : au bas du frontispice du Plantarum seu Slirpium Historia, il inscrit son nom en la forme suivante : « Anlverpiæ, ex officina Chrislophori Plantini. » Les mots ex officinà indiquent que le livre, ou tout au moins la partie nouvelle, Observaliones, a été imprimée par lui. Pour les Adversaria, il se sert d'une autre formule; il met tout simplement : «Antverpiæ, apud Christophorum Plantinum ». C'était une façon discrète de ne point s'attribuer injustement le mérite d'avoir imprimé cet ouvrage. (1) La première épitre à la reine portait seulement : « Eliza- bethæ serenissimæ Anglorum reginæ.» La suppression de l'épitre à Elisabeth avait frappé Gaspard Bauhin. En tête de son Pinax thealri bolanici, il publie la liste des ouvrages dont il s'est servi : « Nomina aulhorum quorum opera usi sumus. » Dans une brève analyse (en six demi-lignes) consacrée aux Adversaria, il ne manque pas de noter cette circonstance cet il s'exprime ainsi : « ADVERSARIORUM Opus à Petro Pena et Matthia de Lobel, Londini anno 1579 editum, additis circiter 284 figuris : post modum anno 1576 Antverpiæ& novus titulus præfixus, epistola ad Reginam omiss1 : cui operi Lobelius Observationes suas cum novis figuris junxit. » ARE LA à p f DL V7 ee Quelle nécessité y avait-il d'opérer cette modifica- tion, et de remplacer la dédicace à la reine par une autre dédicace à la même reine ? Le mobile peut-il être douteux ? Et si maintenant Mathias de Lobel veut être seul à faire hommage des Adversaria à Elisabeth, n'est-ce point afin de montrer qu'en réalité il est le seul auteur de ce livre ? Lobel impose un autre changement aux Adversaria. IL ajoute à cette pseudo-deuxième édition treize pages supplémentaires qu'il emploie à décrire, avec figures, un certain nombre de plantes nouvelles: Ce supplément est précédé d'un avis ad lectorem » qui débute ainsi : € Absolutis nostris Stirpium Observa- tionibus, in studiosorum rei herbariæ utilitatem et voluptatem, nonnullarum plantarum descriptiones aut icones suis locis omissarum, ad calcem Adversa- riorum nostrorum, tanquam in Commodiorem locum, annectere lubuit.. » La phrase est conçue de manière à laisser croire que les Adversaria NOSTRA, mis en re- gard des Observationes NOSTRÆ, sont l'œuvre person- nelle de Lobel tout autant que celles-ci ; et en s’arro- geant le droit d'étendre je texte des Adversaria, il fait un acte d'autorité que seul peut se permettre l’au- teur, propriétaire unique et incontesté de son ouvrage. Enfin cette persévérante velléité d’escamotage, — on est quelquefois obligé de se servir, faute d'autre, d’un mot un peu dur, —se manifeste en une der- nière circonstance. A la fin du volume, Lobel imprime une liste générale de toutes les plantes décrites, soit dans les Observationes, soit dans les Adversaria, avec renvoi, suivant le cas, aux pages différemment numérotées de l’une ou de l’autre des deux parties. Le titre de cet index dit expressément que Mathias de Lobel est l'unique auteur tant des Observationes que des Adversaria : & In Stirpium Observationes et Adversaria MATHIÆ DE LOBEL Index COPLOSISSiNus. » FR Te Et le tour est joué ! — Il a réussi : Lobel a conquis devant la postérité ce que les juristes nomment «une possession d'état. » On s’est habitué à le considérer comme le seul auteur des Adversaria. Les généra- tions qui suivront oublieront, ou à peu près, le nom de Pierre Pena, et, dans tous les cas, ne lui tiendront aucun compte de la part qu'il avait pu prendre à l'édification d'un des plus remarquables monuments de la littérature botanique au xvre siècle (1). Une étude patiente et obstinée du texte des Adver- saria a fait naître en nous la conviction qu'il y a lieu de rétablir, sur ce point, les droits de la vérité et de la justice ; et comme un argument décisif en faveur de Pena nous sera fourni par l’épitre de Lobel à Elisabeth, il convient d'examiner au préalable quels sont les faits intéressants à dégager du verbeux fatras de ce document. Ce morceau d’éloquence révèle chez Lobel une vanité qui éclate, le plus naïvement du monde, presque à chaque ligne (2). La première dédicace à Elisabeth d'Angleterre, celle qui ornait les Adversaria de 1571, se terminait par la double promesse que faisaient les auteurs, (1) Les combinaisons usurpatrices dont nous venons d'exposer le détail n'avaient pas, en leur ensemble, échappé à la sagacité de Haller (Bibliotheca botanica, t. 1, p. 352). Après avoir dit qu'il n'est point facile de discerner dans les Adversaria ce qu'y a mis l’un ou l'autre des deux auteurs, € vix enim possis distin- guere quæ Penæ sint, quæ Lobelii », il ajoute en nommant Lobel « qui posterioribus in editionibus omnia sibi vindicavit ». Obligé, par les exigences de son œuvre, d'être bref et de s'abstenir de tout développement, Haller, en une ligne, résumait ainsi, avec une éloquente concision, l'historique des manœuvres de Lobel. L'auteur de la Bibliotheca botanica avait d'ailleurs pressenti, remarquons-le bien, qu'il n'était pas impossible de distinguer les apports faits par chacun des deux collaborateurs. (2) L'orgueil de Mathias de Lobel a frappé même les biogra- phes le plus favorablement disposés pour lui. Le professeur Edouard Morren a dit: « Son caractère personnel, entaché de jactance et d'orgueil, perce trop souvent dans ses écrits, » SR Tu parlant en nom collectif, de donner bientôt une suite à. leur ouvrage, et de renouveler à cette occasion leur hommage à la reine. Cette promesse, Lobel la rappelle ; mais il n’en parle plus qu’au singulier: c’est donc lui seul qui l’a faite, comme c’est lui seul qui la tient. Il déclare avoir été vivement poussé par les prières incessantes (1) de quelques savants hommes de Paris et de la France ; les plus pressantes sollicita- tions lui sont venues de tous les coins de la Belgi- que ; on l’exhortait à préserver de l'oubli, à trans- mettre à la postérité un ouvrage dont l'utilité si grande intéresse l'Etat tout entier. Le passage le plus important de l’épitre est celui où, faisant allusion à un événement sur la nature duquel il ne s'explique pas, mais qu'il impute à «la calamité des temps, funeste à tous ceux qui sont justes et pieux », — il expose qu'il a vu périr un nombre considérable de plantes, colligées par lui avec une extrême ardeur, en vue de les conserver, « lorsqu'il parcourait l'Italie, l'Allemagne, le Lan- guedoc, le Piémont, la Provence et d’autres régions de la France. » S'il s’est remis au travail, c’est parce que plusieurs personnages marquants et érudits, appartenant pour la plupart à la noblesse flamande, non-seulement lui ont fourni beaucoup de plantes cultivées par eux et issues de graines que lui-même leur avait envoyées des endroits précités, mais en outre lui ont procuré une grande quantité d'espèces rares apportées de pays lointains, même de Constantinople et des Deux-Indes. La fin de l’épitre est d’un intérêt assez piquant. Il semble résulter des dernières lignes qu'à la suite du premier hommage à Elisabeth, Lobel avait (1) Le texte dit « importunes, importunis precibus ». = Are compté sur les largesses royales, et que cet espoir a été décu. Il dit, en effet, à la reine que le volume qu'il offre aujourd'hui aurait paru plus tôt, «si les dépenses excessives que ce volume lui a occasionnées ne l’eussent mis en retard, ayant été obligé de faire face tout seul aux frais de la première édition (1). » Il ajoute que si ses travaux avaient été aidés par la munificence de grands rois ou princes, faveur qu'ont obtenue d’autres botanistes, l'ouvrage actuel y aurait gagné et sa valeur serait bien supérieure. Mais au surplus rien ne pourra le décourager. Il continuera de travailler avec un grand zèle et une indicible satisfaction, tant qu'il comprendra que ses écrits et ses élucubrations peuvent être utiles au bien public. Et maintenant revenons à la question Pena : quelle part a-t-il prise à la composition des Adver- saria ? A cette question, le professeur Edouard Morren, tant de son chef qu'au nom des biographes anté- rieurs, répond sans hésitation : « On s'accorde pour reconnaître qu'elle est insi- (1) Si ces détails pécuniaires sont vrais, — et rien n'autorise à penser qu'ils ne le sont pas, — c'est une circonstance à faire va- loir à la décharge de Lobel, en ce qui concerne son attitude à l'égard de Pena. Il se considérait comme seul propriétaire de l'ouvrage primitif, puisque lui seul en avait payé le coût. De là à s'en donner pour le seul auteur, il n'y avait qu'un pas. — Le gouvernement du roi d'Espagne Philippe II se montra plus gé- néreux que celui de la reine d'Angleterre. Les archives du dé- partement du Nord conservent un décret royal, daté de Bruxelles le 13 janvier 1577, par lequel, après « deliberacion de nos chiers et feaulx les gens de nostre Conseil d'Estat par nous commis au gouvernement general de nos pays de pardeça », une subvention de cinquante livres était accordée « en faveur et recompense du present que nostre bien amé Maistre Mathys de Lobel, medecin de nostre ville de Lille, nous a fait d'ung nouveau herbaire par luy nagaires mis en lumiere, » SAT gnifiante. Tel est le sentiment de Sprengel, Trevira- nus, Ernest Meyer, Charles Morren, Planchon, etc. » Un peu plus loin, le même auteur dit encore : « Pour qui a lu les Adversaria, il n'y a pas de doute que le texte entier ne soit de la rédaction de De:lObel : c’est là son style, sa manière, ses pensées habituelles, ses citations, son érudition familière ; partout il cite la Belgique, sa patrie, les amis de son pays, l'Angleterre, les connaissances qu'il a faites, les dons qu'il en a reçus, etc. (1). MM. Planchon ont établi la même démonstration en ce qui concerne la flore méridionale. » Une objection se dresse pourtant devant les parti- sans de ce système : Sile Stirpium Adversarit a été l’œuvre propre et personnelle de Mathias de Lobel, pourquoi a-t-il consenti à y inscrire le nom de Pierre Pena à côté du sien, et avant le sien ? A quoi il est répondu : «€ Si Pena n’a fait que fournir des matériaux, ainsi que le pensent la plupart des biographes, la mention de son nom sur le titre, et cela en première ligne, est, au contraire, une preuve de la délicatesse et du désin- téressement de De l'Obel (2). » En entrant à notre tour dans la lice, nous allons rompre en visière aux tenants de cette opinion. Nos recherches et nos découvertes ont abouti à une conclusion diamétralement opposée. Le Stirpium Adversaria est, dans une très large mesure, l'œuvre de Pierre Pena, et si son nom a figuré le premier sur le frontispice, c’est que vrai- ment il a eu à cette œuvre une part prépondérante. (1) Pourquoi le style, la manière, les pensées habiluelles, les citations, l'érudition familière de Lobel plutôt que de Pena? — Si Pena n'était pas, comme Lobel, né en Belgique, il avait eu pourtant le droit de s’y rendre, de même que Lobel avait eu celui de venir en France; et quant à l'Angleterre, nous avons établi que Pena y était allé en même temps que Lobel. (2) Edouard Morren, 0p. cit. LS AU En Voici comment nous avons procédé : Il nous semblait que c'était dans le texte même qu'il fallait chercher la solution du problème. Quelque mystérieux que parût ce texte, nous avions l'espoir qu'en le serrant de près, nous le contrain- drions bien à livrer son secret. Le pluriel y est sans cesse employé dans le récit des faits : c’est là évidemment le résultat d’une con- vention intervenue entre les deux signataires du livre. Ils ont voulu qu'on supposàt qu'ils avaient prêté à l'œuvre commune un concours égal. Mais il était évident aussi que cette persistance du pluriel ne pouvait pas concorder toujours avec la réalité des choses. Des milliers de faits personnels sont rapportés par les Adversaria. À chaque instant, les auteurs se met- tent personnellement en scène, et racontent ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont vu, ce qu'on leur a dit, ce qu'on leur a montré, etc., etc. Sans doute, en bien des cas, ils ont pu se trouver réunis quand telle circonstance s’est produite, notamment en Italie, en Provence, en Languedoc, en Angleterre, en tout pays où il y a certitude que chacun d'eux est allé. Mais si grande que fût leur intimité, ils n'étaient pas, comme les frères siamois, indissolublement liés l'un à lautre, et maintes fois un seul a pris part à un acte auquel, s’il fallait en croire le pluriel, tous les deux auraient coopéré. En ce qui touche, par exemple, le fait de la rédaction, n'est-il pas certain que les deux auteurs ne tenaient pas simultanément la même plume, et que les divers articles du livre ont été écrits ou par l'un ou par l’autre ? Nous avions donc sur ce point une certitude mora- le. Il s'agissait de savoir si le texte ne nous fournirait pas une preuve matérielle. Cette preuve, nous l'avons obtenue. Avec quelque soin que le rédacteur anonyme ait LL ARE veillé sur lui pour ne se départir jamais du pluriel, même quand il relatait un fait qui lui était exclusi- vement personnel, n’aura-t-il jamais eu de distrac- tion ? —- Justement, dans quatre passages que nous avons relevés, l'écrivain, oubliant son parti-pris et obéissant malgré lui à la force des choses, laisse glis- ser de sa plume un singulier qui était, en ce cas, beaucoup mieux que le pluriel, l'expression de la « vérité vraie » (1). Donc, certitude absolue que c’est l’un ou l’autre qui a tenu la plume, ou, si l’on veut, l’un et l’autre, mais séparément, les deux auteurs s'étant divisé le travail, le premier rédigeant tel chapitre et le second tel autre. Mais comment distinguer un chapitre écrit par Lobel d’un autre que Pena aura rédigé ? Nous nous sommes alors demandé si, en cherchant avec persévérance, nous n’aurions pas la bonne for- tune de découvrir, parmi la multitude de faits ou d'incidents énoncés, quelque circonstance à laquelle il serait bien prouvé que l’un ou l’autre des deux col- laborateurs était personnellement demeuré étranger. _ Ici encore nos recherches ont eu plein succès et (1) Stirp. Adv., p. 154: « [Au sujet du Laurier-rose] Non admo- dum frequens, nisi tepidioribus ad meridiem mareque vergen- tibus fluentorum crepidinibus et littoreis, cujusmodi ad Olbiam Galloprovinciæ, Genuam Lygurum, et Lybornam arcem mari- timam Thusci Tyrrhenive maris. Flores... quos interdum ru- bellos , interdum albos MEMINI tum in hortis italicis, tum in maritimis. » — P. 262: « [ Au sujet du Cabaret] NoN vipEeo quid negocii fuit quænam Asarum esset, quidve à Bacchari distaret dignoscere ». — Ibid. : « [Au sujet de la Soldanelle des Alpes, qui aurait été trouvée sur des montagnes voisines d'Avignon] Celsis Alpibus quæ Inspurgum et Ravispurgum ambiunt, nobis col- lecta.. Aupio quibusdam montibus Avinione non dissitis magna gliscere copia ». — P. 419 : « [Au sujet du « Lycium sive Pyxa- cantha Norbonensium »] Hanc tametsi præ se undique ferat Lycium, tamen non auderemus asserere eandem esse : id tamen AUDEO dicere.… » F+ 2: - HE les Adversaria nous ont livré le fait négatif dont nous avions besoin. On trouve décrites dans les Adversaria un certain nombre de plantes croissant en Espagne. À propos de ces plantes espagnoles, quatre fois le texte emploie la première personne du pluriel : « Nous avons vu en Espagne... (1) » Les deux auteurs avaient-ils fait, ensemble ou chacun de son côté, le voyage d'Espagne ? Au cas où nous aurions la preuve que l’un des deux n'était pas allé dans ce pays, il faudrait nécessairement attri- buer à l’autre la rédaction de tous les passages rela- tüifs à l'Espagne. Î ne nous a pas été difficile d'acquérir la certitude qu'antérieurement au moins à la publication des Adversaria en 1571, Mathias de Lobel n'avait point voyagé en Espagne. C’est donc Pierre Pena qui s’y est rendu, c'est donc lui qui a écrit les divers articles où il est question des plantes VUES dans la péninsule ibérique. (1) Stirp. Adov., p. 5 : « Trilicum : Quod... quibusdam Hyspa- NIÆ, BETICÆ et Norbonæ arvis enatum vipiMus. » — P. 12: « Oryza : Unius duntaxat generis NOBIS vISUM in Provincia Nor- bonensi et HysPanIA, sed maximo proventu in agri Mediolanen- sis depressis. » — P. 19: « Harundo saccharina : HYSPANIGIS, LUSITANIÆ atque améænissinis Olbiæ viretis, quem virentem iNIBI et alibi HABUIMUS, et in Belgio meminimus. » — P. 347 : « Meum : Plurimas sæpissimè vipiMus plantas in Germaniæ, Italiæ, HISPANLEQUE locis alpinis; quin nuper dum hæc medi- taremur vireto peritissimi pharmacopæi Londinensis Johannis Riccii, » — Il y a encore une quinzaine de chapitres au moins où l'Espagne et le Portugal sont mentionnés, mais sous une forme impersonnelle, comme habitat de certaines espèces. — Le témoignage précis et direct se produit une fois de plus dans le passage suivant (p. 109) où il s’agit du « Papaver corniculatum » (Glaucium luleum Scop. et G. corniculatum Curt.) : « Istius autem Papaveris natales sunt squallida maritima, tum ad cali- dos HisPaniÆ, Norbonæ Provinciæ et Genuæ, tum ad frigidos Angliæ et Hiberniæ tractus, ubi flores colore jam luteo, jam phæniceo-purpureo LEGIMUS sæpius. » SL ARS Les biographes de Lobel ne citaient pas l'Espagne parmi les pays qu'il visita au cours de sa carrière. Mais la plupart de ces biographes ayant, à nos yeux, peu d'autorité, leur silence au sujet de l'Espa- gne ne pouvait pas nous suffire. Il nous fallait une preuve certaine que Lobel n'avait pas herborisé dans ce pays. C’est toujours au volume des Adversaria qué nous l'avons demandée, et c'est Lobel lui-même qui nous l’a procurée. On a vu que dans l'épitre qu'il rédige seul, en 1576, pour la reine Elisabeth, en tête de la prétendue nouvelle édition des Adversaria, il énumère les divers territoires qu'il a explorés avant sa venue en AngJle- terre. Cette liste, — qui est, à n’en pas douter, limi- tative, et non point simplement énonciative, — comprend : « l'Italie, l'Allemagne, le Languedoc, le Piémont, la Provence et d’autres régions de la France (1). » Comme Lobel est vaniteux, il se complait à rappeler ses nombreuses pérégrinations et il tire avantage de tous les lieux où il a passé. Il se serait bien gardé d’omettre de sa liste un royaume tel que l'Espagne, qui était alors à l’apo- gée de la puissance, et qu'il eût été fier d'ajouter aux autres pays, s’il avait eu le droit d'en parler de visu. Il est donc établi, au moyen d'une preuve dont la valeur est absolue, puisqu'elle émane de Lobel lui- même, que celui-ci, avant 1570, n'avait jamais foulé le sol de l'Espagne. Le fait est confirmé par un autre document appar- tenant aussi au Plantarum seu Stirpium Historia. Les écrivains du xvr° siècle, même les plus graves, imprimaient volontiers, en tête de leurs ouvrages, les (1) « Ac tametsi horum temporum calamitas, bonis piisque omnibus damnosa, in causa fuerit quôd innumeræ mihi plantæ perierint, quas peregrinata Italia, Germania, Lingua-Gottica, Cisalpina Gallia, Gallo-provincia, cæterisque Franciæ tractibus, summo studio ac sedulitate conservaturus collegeram... » LE, ÂGES compliments en vers latins ou grecs que leur adres- saient des poètes amis. Un compatriote de Lobel, Francois Hemus, de Lille (1), composa une pièce latine où il célébrait, en des vers fort bien tournés, les mérites du botaniste et passait en revue les différentes contrées que celui-ci avait parcourues « d’un pied léger » : Gratia debetur tibi maxima, docte Lobelli, Qui ditas plantis Belgica culta novis : Quas & longinquis sparsim regionibus adfers, Percurrisse levi quas pede dulce fuit ; Antiqui campos Latii, Saturnia regna, Regnaque quæ duplicis verberat unda maris ; Et totam, donat cui Narbo vocabula, terram ; Et quam Francus arat vomere ; quamque vaga Anglorum sedem circumsonat Amphitrite ; Ette, Teutonicis terra habitata viris (2). (1) Voici ce que dit, au sujet du poète Hémus, le Grand Dic- tionnaire historique de Moréri : « Hæmus (François) prêtre de Lille en Flandre, principal du collége de Courtray, étoit poëte latin. Valere André cite de lui les ouvrages suivans : Deux livres d'hymnes, avec un recueil de poësies diverses, à Lille en 1556 in-8°. Autres poësies diverses, entr'autres deux livres d’'eloges funebres et trois de melanges, à Anvers en 1576 in-16. Des scholies sur Virgile, Horace, Ovide, etc. Hæmus cedant aux ravages que les calvinistes faisoient en divers endroits de la France, se retira quelque temps à Arras où Antoine Meyer, son ami, le reçut chez lui. Lorsque Courtray eut été remis en la puissance de son souverain, Hæmus y retourna et y mourut le 17 janvier 1585. (Valere André, Bibliotheca belgica, édition de 1739, t. I, p. 294.) » (2) « Grâces te soient rendues, savant Lobel, pour avoir enri- chi les jardins de la Belgique de plantes nouvelles apportées par toi des contrées lointaines qu'il te fut doux de parcourir d'un pied léger : les champs de l'antique Latium où régna Saturne et les royaumes que deux mers battent de leurs flots [lltalie]; et, d'un bout à l'autre, la terre à qui Narbonne a donné son nom [la Provence et le Languedoc]; et celle où le Franc enfonce la charrue; et la patrie des Anglais, autour de laquelle bruit la flottante Amphitrite ; et toi, terre habitée par les peuples Teutons. » SE L'énumération du poète concorde exactement avec celle de Lobel. Hémus désigne dans ses distiques l'Italie, la Narbonaise (Languedoc et Provence), la France, l'Angleterre (1) et l'Allemagne. Il n’est pas question de l'Espagne. Puisque désormais il est acquis, au moyen d’une démonstration éclatante, que des deux signataires du Stirpium Adversaria un seul, — Pierre Pena, — s'est transporté en Espagne et a décrit les plantes espagnoles, de ce premier fait il se dégage aussitôt une conséquence importante. Dans les articles consacrés à la description de plantes croissant en Espagne, le rédacteur a cité en même temps d’autres pays où il a constaté la pré- sence des mêmes espèces. Puisque ces articles ont été écrits par Pena, nous acquérons la certitude que le botaniste provençal avait visité personnellement les divers lieux dont, en écrivant, il associe les noms au royaume d'Espagne. C’est un résultat décisif en ce qui touche la bio- graphie de Pierre Pena. Nous obtenons ainsi l’indi- cation certaine d’un grand nombre de localités où il est allé. Et lorsque plus haut nous parlions avec quelque détail de son séjour en Italie, nous avions l'autorité des textes dont nous invoquons actuelle- ment le témoignage. Voici le relevé des endroits (états, régions ou villes) qui sont nommés, conjointement avec l'Espa- gne ou le Portugal, dans cette première série d'articles qu'il faut attribuer à Pena seul : Belgique, France, Allemagne, Italie, Lombardie, Toscane, Rome, Venise, Vérone, Milan, Pise, Luc- ques, Gênes, Provence, Hyères, Languedoc, Céven- nes, Angleterre, Londres, Irlande. (1) Lobel n'avait pas nommé l'Angleterre. Il devait s'en dis- penser puisqu'alors il se trouvait lui-même dans le pays et que cette circonstance était bien connue de la reine. Re Une autre conséquence découle de la première : il n'y a plus aucune raison de contester à Pena la pater- nité de tous les passages relatifs aux divers lieux dont nous venons de donner la liste, et où certitude existe qu'il a passé ou séjourné. Sans doute, pour ces articles-là, rien ne prouve que c’est Pena qui en est l’auteur ; mais rien ne prouve non plus qu'ils ont été écrits par Lobel. Et puisqu'il est démontré que c'est Pena qui tenait la plume pour un article où il était question de l'Espagne et de litalie, par exemple, il est au moins permis de supposer que c’est lui qui la tenait encore dans un autre passage mentionnant l'Italie seule. Suivant toute probabilité, une autre série de cha- pitres émane encore de Pena. Ce sont les passages où le rédacteur parle de son séjour à Paris en qualité d'étudiant. Pour Lobel, les biographies n'indiquent pas en quelle ville il fit ses premières études. Quant à Pena, nous rappelons qu'à la suite des révélations sidérales obtenues par le mathématicien -astronome Jean Pena, André, le conseiller, fitabandonner à son jeune frère la carrière militaire pour l'envoyer à ses frais étudier à Paris. Il est donc très probable que les pages où sont mentionnés « NosrRi præceptores Luleliæw, Lutetiani Parisienses præceplores » appar- tiennent à Pena personnellement. On voit combien s'élargit notre horizon. Et ce que nous venons d'exposer suffirait déjà pour restituer à Pena l'honneur d'avoir effectivement collaboré aux Adversaria. Si l'on poursuit à travers le texte une enquête minutieuse, on y relève une foule de petits détails qui, sans amener une certitude pour ainsi dire mathématique, font naître cependant la conviction que cette participation de Pena à l'œuvre commune fut en réalité très grande. Ainsi, nous y voyons souvent employé l'adjectif nostras, nostrates, qui, appliqué aux personnes ou aux choses, signifie : « qui est — ou sont — de notre pays. » Lorsque nous rencontrons une application de ce mot faite aux palmiers d'Hyères, « Palma nostrâs quæ præsertim ad Olbiam Galloprovinciæ frequenter et feliciter enata visitur » ; — aux Pro- vençaux qui donnent au Chêne le nom de Roure, « quam Roure vulqus nosträs vocitat » ; —aux bonnes femmes de la Provence, € nostratibus mulierculis Galloprovinciæ », qui se servent de la Pulicaire pour se délivrer des puces ; — il nous semble bien difficile d'admettre que c'était Lobel qui alors tenait la plume. Un Flamand du xvi: siècle aurait-il été tenté de se dire le compatriote des Provençaux (1)? Parmi les incidents divers et nombreux que rap- portent les Adversaria, il en est qui remontent à une époque très éloignée de celle où le livre est écrit : c'est ce qu'exprime cette formule fréquemment em- ployée : & il y a de longues années, mullis abhinc annis ». Lobel aurait-il pu ainsi faire appel à de si vieux souvenirs lui qui, lors de la publication des Adversaria, n'avait encore que trente-deux ans (2) ? (1) Nous pourrions, toujours à titre d'exemple, citer encore d’autres séries d'articles dont Pena est l’auteur probable. Ainsi tous ceux dans lesquels les Adversaria mettent en scène Conrad Gesner : « Candidissimus Gesnerus, jam plus quàäm octenium abhine, monebat nos... — Apud Gesnerum jamdiu videramus.…. — Quam plantam Gesnerus, cui ostendimus, opinabatur….. » Nous avons vu plus haut que l'illustre naturaliste avait reçu à Zurich la visite de Pierre Pena, à qui, plus tard, il faisait demander des échantillons de plantes. On peut donc admettre, sans crainte de se tromper, que c’est Pena qui a rédigé les divers passages où sont rappelées les relations avec Gesner. (2) Nous avons donné dans une note de la page 11 les raisons qui font supposer que Pena était de plusieurs années plus âgé que Lobel. Le style même des deux écrivains qui ont signé le Stirpium Adversaria pourrait fournir un nouvel argument en faveur de Pena. Autant, chez Clusius, la forme est pure, élé- gante même, autant celle des Adversaria laisse à désirer. Le latin y est de la plus médiocre qualité : les incorrections, les 1 7e da > de + Pr ve : A ES PME à - < SRE. «7 Ja rE. pe | à — 50 — Et l'age mème de Lobel ne fournit-il pas un autre argument en faveur de Pena ? C’est, au point de vue tant de la durée que de l’espace, un champ très vaste que celui où évolue ce que nous appellerons l'action des Adversaria. Il nous faudrait des pages et des pages pour une simple énumération de toutes les 2 circonstances de fait et de lieu qui y sont consignées. à Etant donnés l'immense étendue des territoires par- courus, la lenteur des voyages, les longs séjours dans les principales villes, le temps absorbé par les études, les herborisations et la préparation du livre, « il était matériellement impossible que Lobel, à l'âge de trente-deux ans, fût allé partout, eût fait seul tout ce que les Adversaria exposent. IT faut donc, de toute nécessité, admettre la division du travail entre les deux collaborateurs. 2 : En ce qui concerne plus particulièrement la Pro- ’ solécismes sont fréquents. Une telle négligence avait excité à E un haut degré la colère de Tournefort. Trompé, comme beau- coup d'autres, par les manœuvres de Lobel, il croit que celui-ci a été le rédacteur unique de l'ouvrage, et il ne lui pardonne pas de s'y être montré pitoyable latiniste. Il va, dans son amertume, jusqu'à lui reprocher d'avoir écrit « en un style dur, négligé, déplaisant, et qui dénote évidemment un homme dont la raison est affaiblie, s{ylo duro, incomplo, amaro, qui in virum cerebro- sum quadrare apertè videtur ». — Si, comme nous le croyons fermement, Pierre Pena a pris à la rédaction des Adversaria une part principale, c'est sur lui que doivent refluer les objurgations de Tournefort, Remarquons bien qu'étant demeuré soldat L ae au-delà de sa vingtième année, et pressé alors d'aborder “ l'apprentissage de la médecine, il n'eut pas grand temps à donner aux études littéraires, et s'il ne mania pas mieux la langue ar Cicéron, il avait une excuse. Et c'est là justement une circons- tance qui plaide en faveur de Pena, comme auteur principal des Adversaria. En parcourant les Observaliones, œuvre personnelle de Lobel, nous avons constaté que la latinité y est de bien meilleur aloi. Si donc l'auteur de ce dernier ouvrage l'emportait de beaucoup, comme latiniste, sur son co-signataire de l'œuvre réputée collective, nous devons en conclure que Pena en fut le : rédacteur. Ecrit par Lobel seul, le Stirpium Adversaria n'eût 4 pas donné matière aux critiques acerbes de Tournefort. Bts vence, dont un grand nombre de plantes sont décrites dans l’ouvrage, l’action personnelle de Pena apparait avec évidence. Mathias de Lobel est certainement venu en Pro- vence, ainsi qu'il le déclarait dans son épitre à Elizabeth. S'il n’y a pas séjourné, il a, du moins, tra- versé le pays. Aucun doute n’est possible à cet égard. Il a vu Marseille : sur ce point, nous avons son propre témoignage (1). Il a passé par Hyères : Jean Bauhin l’atteste (2). Mais Lobel n'a pas pu consacrer beaucoup de temps à la Provence. Son séjour à Montpellier n’a pas été bien long. Il y est arrivé au printemps de 1565, il en est parti à l'automne de 1566. Il n’y est donc resté, au plus, qu'un an et demi. Pendant cet intervalle, on a souvent herborisé aux alentours de Montpellier, dans le Languedoc et jusque sur les Cévennes. Quel temps est-il resté pour aller visiter la Provence ? Et cependant la Provence a été soi- gneusement explorée, ainsi qu'en témoignent dans l'ouvrage les nombreuses descriptions de plantes appartenant à des stations provençales. Par qui donc l’a-t-elle été, si ce n’est par Pierre Pena, à une époque antérieure”? Par Pierre Pena qui, étant lui- même Provençal, et passionné alors pour la bota- hique, avait fait dans son pays de longs séjours et de nombreuses excursions. Il y a, comme on le voit, de grandes probabilités pour que toute la partie du volume relative à la (1) Dans les Observationes (p. 429) Lobel raconte qu'étant à Marseille, il envoya en Belgique des graines de € Cuminum Sylvestre » (Hypecoum procumbens L.), et il ajoute qu'une des plantes issues de ces graines fut dessinée et gravée par les soins de Charles de l'Escluse. (2) Jean Bauhin, en son Historia plantarum universalis (t. T, 2e p., p. 34 et t. Il, p. 956) déclare que Mathias de Lobel lui avait apporté d'Hyères des rameaux de Styrax et d’ « Alfhœæa arborescens » (Lavatera Olbia L.). See dre D + …— E Sc r 2 ne A té x é POST PTE de ; ere der Me Le À PA £ £ s 2 k RE: 2 ée = mx . v T7 ‘ ù = KT = 52 — Provence ait été rédigée par Pena, et voilà encore … une longue série de chapitres à porter à son actif. C'était là, au surplus, une opinion qui s'était accré- ditée et transmise chez les botanistes provençaux de la génération suivante ; et un siècle après la dispa= rition de Pena, Garidel écrivait dans sa notice sur Lobel : « L'Obel étoit de l'Isle en Flandres; il navoit eu la connaissance des Plantes de Provence que par le moïen de Pierre Pena Provençal (1). » Nous avons maintenant à invoquer, en faveur des droits de Pena, des documents d’un autre ordre : ce sont les témoignages des contemporains. Dans le monde des écrivains et des botanographes du xvre siècle, plusieurs, paraissant ne pas croire à la collaboration de Lobel, ont regardé Pierre Pena comme lunique auteur du Stirpium Adversaria. | (1) Histoire des plantes qui naissent aux environs d'Aix, Expli- cation des noms des Auteurs Botanistes, p. 1. — Il est très pro- bable que les figures de plantes gravées sur bois pour le Stirpium Adversaria avaient été, en grande partie au moins, dessinées par Pierre Pena. Nous verrons plus loin que, suivant une indication donnée par le texte, le dessin du « Thune ficifera Indorum» (Opuntia Ficus Indica Webb.) fut exécuté à Marseille, d'après nature, dans le jardin du Gouverneur de la ville. Comme tou- jours le rédacteur de l'article s'est servi du pluriel : «€ Hic appinæünmus ». Mais en cette circonstance le crayon, ainsi que la plume, était tenu par un seul des deux collaborateurs. Et c’est sans doute le même crayon qui, pendant le séjour en Provence, a dessiné les autres plantes de la contrée, notamment les Hype- coum pendulum et procumbens. Or Lobel, trouvant défectueuse la figure de l'A. procumbenrs, l'a représenté à nouveau dans le Slirpium Observaliones ; et une note indique que la figure nou- velle est bien celle de la plante déjà décrite dans les Adversaria, récoltée sur le sol aride de la Provence et défigurée par le dessi- nateur : « Eadem est hæc effigies cum corniculata plantula descripla pag. 331 Adversariorum, arido solo Galloprovinciæ cruta, et à piclore depravala. » Assurément Lobel ne se serait pas servi de cette expression dédaigneuse, s'il eût été lui-même l'auteur du dessin. — Remarquons que dans le latin du temps, piclor désignait le dessinateur et non le graveur ; à ce dernier on appliquait le mot sculplor. — 93 — Nousn'’avons pas besoin de faire remarquercombien cétte circonstance est grave. Il n’est pas permis de penser que cette abstraction de la personnalité de Lobel ait été faite à la légère. Certainement ceux qui en décidaient ainsi croyaient savoir à quoi s’en tenir : il était de notoriété pour eux que Pierre Pena, en publiant son recueil, y avait associé Lobel sans que celui-ci eût concouru d’une manière sérieuse à la réalisation de l’œuvre. Nous avons déjà produit un de ces témoignages : celui de Jacques Gohery. Quand, dans le passage que nous avons cité plus haut, Gohory fait allusion aux Adversaria, il n’envi- sage que la personne de Pierre Pena : son langage laisse supposer qu’il ne croit pas à l'existence d'un co-auteur. Il loue Pena d’avoir divulgué dans son livre un grand nombre de plantes encore inédites. Malgré ce compliment initial, on ne peut pas sus- pecter Gohory de trop de complaisance à l'égard de Pena, car aussitôt il formule contre lui des critiques sévères. Il lui reproche d’avoir extrait ses matériaux des travaux de Ruel, pris à Turnèbe le titre d’Adver- saria, et, — chose plus grave, — de ne s'être point prévalu, en Angleterre, de sa qualité de Français. Ce n’est donc pas pour flatter Pena qu'il parle de celui-ci au singulier. S'il le croit seul auteur de l'ouvrage nouvellement publié, c’est qu'il partage sur ce point la croyancé générale. — Notons que l’opuscule de Gohory voit le jour en 1572, alors que la publication encore récente des Adversaria vient d’avoir dans les cercles scientifiques tout son retentissement. Un témoignage non moins significatif, et d'autant plus sérieux qu'il se renouvelle et se répète à tout instant, c’est celui de l’'Historia plantarum generalis, appelée, dans les bibliographies du temps, Historia Lugdunensis. Ces deux gros volumes in-folio, im- primés à Lyon, en 1586, par le libraire Rouillé, sont le plus souvent attribués à Dalechamp (1), bien que le nom du célèbre botaniste, fréquemment cité dans le texte, ne figure pas sur le titre. Dalechamp prit certainement une grande part à la composition de cette Flore : on sait, d’ailleurs, qu'il eut des collabo- rateurs, parmi lesquels Jean Bauhin. L'Historia Lugdunensis reproduit beaucoup d’indi- cations données par les ouvrages antérieurs. Mais pour tous les emprunts faits au Stirpium Adversaria, jamais le nom de Lobel n’est associé à celui de Pena : «inquit Pena, ait Pena, scribit Pena », c’est toujours cette formule qui précède la citation, et ces mots : « Hæc Pena. » qui la terminent. S'il s’agit d’un de ces mille faits que les rédacteurs, s'étant trouvés l’un ou l'autre en action, ont racontés au pluriel, l'Historia rétablit le singulier. En voici un exemple : « [A propos : du « Spina-alba »} Hanc depinæit Pena, quam in horto Patavino vidit, inditante Melchiore Guillandino illic præfecto (2). » Les compilateurs de la Flore imprimée à Lyon joignent volontiers à la désignation d’une espèce le nom du botaniste qui l’a décrite le premier. Si la plante est extraite des Adversaria, c’est le nom seul de Pena qui y est accolé : (€ Helianthes Penæ », « Corruda Penæ », « Coronopus Massiliensium Penæ », ele., ete. I n'y a pas là de parti-pris contre Lobel. Son nom (1) Jacques Dalechamp, né à Caen en 1513, vint en 1545 étudier à Montpellier, « Son inscription à Montpellier comme étudiant est du 1er décembre 1545. » (J.-E, et G. Planchon, Rondelet et ses disciples.) Dalechamp alla en 1552 se fixer à Lyon où il pratiqua la médecine jusqu'à sa mort, survenue en 1588. Charles de l'Escluse le considérait comme l'auteur de l'Historia plantarum generalis : « CI, vir Jacobus Dalechampius (ipsum enim magnæ illius Plantarum Historiæ, quæ proximis his annis Lugduni apud Rovilium expressa est, authorem esse judicio).….. » (Rar. plant. hist., p. 54). (2) Hist. plant. gen., &. I, p. 1463. aussi a souvent l’occasion d'être mentionné ou l'hon- neur d'être adjoint à des noms de plantes ; mais, en ce cas, ce sont des espèces représentées dans l’œuvre dont Lobelest bien l’auteur, le Sfirpium Observationes. D’autres fois les noms de PenaetdeLobelserontréunis, à propos d’une plante portée aux Adversaria et aux Observationes, et au sujet de laquelle les deux ouvrages concordent. S'il y a divergence, l’Historia Lugdunensis oppose nettement les deux auteurs lun à l’autre ; exemples : CLobellius duo alia Hieracia pinæit : prius Sabaudum nominat, Pena montanum. » — (€ Nerium aliud pinæit Lobellius flore albo quale se vidisse ait Pena, {um in hortis Italicis, tum in mari- limis. » — « Hæc Pœonia, inquit Pena..….. His adjun- gitur à Lobellio... » N’avions-nous pas raison de dire qu’il y a là un argument d’une portée considérable ? Pour faire si peu de cas de la mention inscrite au frontispice des Adversaria, pour nier de telle façon que Lobel eût pris la moindre part à la rédaction de ce livre, ne fallait-il pas que les auteurs de l’Historia Lugdunensis fussent bien sûrs de leur fait ? Aux témoignages qui précèdent vient encore s’a- jouter celui de Gaspard Baubhin(1). Lui aussi attribue formellement à Pena la paternité des Adversaria, et son opinion sur ce point est exprimée comme voici : En tête de son Pinax theatri botanict il donne une « Explicatio nominum Authorum citatorum »; il y déclare que l’abréviation A». signifie : € Adversaria PENZ ». Puis sur la même liste, quand l’ordre alpha- bétique amène le nom de (PENA », il y ajoute: (Petrus (1) Gaspard Bauhin, né à Bâle en 1560, mort en 1624 dans la même ville où pendant les dix dernières années de sa vie il occupa une chaire de médecine et de botanique, était venu, au temps de sa jeunesse et à l'exemple de son frère aîné Jean Bauhin, étudier à Montpellier. Il fut immatriculé à l'Université en mai 1579 et pendant son séjour dans le Midi de la France, il herborisa beaucoup en Languedoc et en Provence. _— — ÉTÉ PRS ÉNENE ARE MPAEES rude NU is $ee 2 Pena in Adversariis ». D'un autre côté, relativement à Lobel, il explique que l’abréviation Log. marque : « Lobelius in Observationibus ». Comme le Pinax n’est qu’un catalogue de plantes, avec indication des synonymies, Gaspard Bauhin joint rarement à ses listes des commentaires ou des notes. Si, en quelqu'une de ces notes, l'occasion se présente de citer les Adversaria, il continue d'en dé- signer Pena comme le seul auteur. Ainsi, au sujet de l'Alypum, il fait allusion à un passage où le rédacteur a contesté l'exactitude de la figure donnée par Mat- thiole et pour lui ce rédacteur est Pena; il écrit : « Pena dicit apud Matthiolum picturam corruptam esse. » Cette attitude de Gaspard Bauhin n'est-elle pas décisive ? Aurait-il pris sur lui de rayer ainsi le nom de Lobel des’ Adversaria, s'iln'avait pas eu la certitude qu'il était en droit de le faire”? Pourra-t-on l’accuser de malveillance envers le botaniste flamand ? Mais bien loin d’être animé d'aucun sentiment d'hostilité, il entretenait avec lui les plus amicales relations. Sur la liste, qu'il donne en tête du Pinax, de tous ceux qui lui ont envoyé des plantes ou des graines, «€ nomina eorum qui semina vel plantas communica- runt »,il inscrit Mathias de Lobel, et maintes fois, dans le texte, il indique la nature des dons que ce- lui-ci lui a faits. En commettant une injustice, Gas- pard Bauhin se serait, par surcroit, montré le plus ingrat des hommes. Qui oserait aller jusque là ? Avec de pareilles autorités, nous aurions beau jeu si, prenant à tâche d'amoindrir Lobel, nous voulions proclamer que Pierre Pena seul a composéle Stirpium Adversarta ; et à plus forte raison quand nous nous bornerions à prétendre et à prouver que si les deux signataires y ont coopéré, la part du premier nommé a été prépondérante. C'est là, d'ailleurs, notre conviction personnelle. Nous croyons fermement que Pena,avantsa rencontre = JE avec Lobel, avait déjà conçu le plan de son livre, emavait choisi le titre,arrêté la disposition, assemblé les matériaux, commencé la rédaction. Puis après sa liaison avec le jeune botaniste de Lille il a l'idée de l’associer, tout au moins nominalement,à son entre- prise. Quelle est la raison qui l’y pousse ? À cet égard, nous n'avons que des conjectures. Peut-être l'initiative de la publication l’effraya-t-elle, et n’eut-il pas le courage de se lancer tout seul dans cette grande affaire. Peut-être aussi des raisons pé- cuniaires lui dictèrent-elles sa détermination. Sup- poser que Lobel avait des ressources dont Pena se trouvait alors dénué serait une hypothèse plausible. Souvenons-nous, en effet, que dans la seconde dédi- cace à la reine d'Angleterre, Lobel déclare que c’est lui seul qui a pourvu aux frais de la première édition des Adversaria. Nous ne ferons du reste aucune difficulté pour admettre que Lobel, choisi ou accepté par Pena comme associé bailleur de fonds, a pu fournir à ce- lui-ci, en dehors de l'appui financier, un certain concours botanique. Mais nous demeurerons con- vaincu que dans l’œuvre réputée collective, la contri- bution de Pierre Pena fut de beaucoup la plus im- portante. Pour nous la primauté de Pena résulterait toujours, à défaut d’autres considérations, de cette circonstance que sur le titre des Adver- saria son nom fut inscrit avant celui de Lobel, en dépit de l’ordre alphabétique, qui, au cas d'éga- lité entre les deux collaborateurs, ne lui aurait donné que la seconde place. Nous le demandons à ces bio- graphes, dont la partialité pour Lobel est telle qu'ils réduisent à rien ou presque rien, -— à une simple communication d’herbier,— la coopération de Pena : comment expliquer que Lobel, seul ou principal auteur du livre, ait consenti à s’effacer au profit de son obscur assistant ? Tous s'accordent à reconnaitre E nie que Lobel était orgueilleux: sa vanité, on l’a vu, éclate à chaque ligne dans les passages où il parle de lui. Comment aurait-il pu, avec un tel orgueil, céder le premier rang à Pena, si Pena n'y avait pas eu un droit absolu ? Mais que les amis de Lobel se rassurent ! Nous ne nous prévaudrons pas de nos convictions person- nelles. À nos yeux, il y a dans cette question un fait qui la domine entièrement. Pena et Lobel ont formé une association. En si- gnant tous les deux le Stirpium Adversaria, en adoptant pour leurs récits uninvariable pluriel (sauf les lapsus involontaires dont nous avons tiré argu- ment), en effaçant ainsi toute trace de leurs actes individuels, ils ont montré qu'ils avaient entendu faire œuvre commune et y confondre si bien leurs contributions personnelles qu'on ne pût les discerner. En un mot, ils ont voulu que la loi de l'égalité réglàt leur association. Leur volonté doit être respectée et obéie. Notre discussion n'était pas inspirée par le désir de porter atteinte à la renommée de Mathias de Lobel. Nous voulions seulement que pleine justice fût rendue à Pierre Pena. Nous avions à cœur de protéger sa mémoire contre les attaques de ceux qui l'ont méconnu, l'ont rabaissé au rôle de simple four- nisseur de plantes, ou, — chose pire! — contre le dédain de ceux qui l'ont passé sous silence, ont biffé son nom du frontispice des Adversaria, et se sont toujours exprimés au singulier, comme si cet ouvrage célèbre n'avait eu qu'un seul auteur, le Flamand Mathias de Lobel ! Maintenant que notre démonstration est faite et que notre but est atteint, nous sommes prêt à nous incliner devant les volontés dont le Stirpium Adver- saria contient l'expression. Quel que soit celui des deux auteurs qui ait, en réalité, rédigé l'ouvrage, 3 3 PAPA LT AL Le sr CT * L 3 Ca: + À yo) Le l'imiterons : à notre tour, nous nous servirons du pluriel, et dans les faits que nous aurons à citer, “4 considérant toujours comme collectifs les actes ac- +] # mplis, nous ne séparerons plus Pierre Pena et \ Mathias de Lobel. 1 ES % A L.\té diet 4, us A VAT 0) “ DT Pr : Il HERBORISATIONS EN PROVENCE Done, fidèle désormais à la règle qu'il nous parait juste d'adopter, et — malgré nos raisons de croire que la Provence fut plus particulièrement explorée par le Provençal Pierre Pena — admettant que les deux compagnons l’ont parcourue ensemble, nous allons nous attacher à leurs pas et les suivre dans leurs pérégrinations à travers ce pays. Des indications données par le Stirpium Adversaria il résulte que la Provence fut visitée dans toute son étendue et jusqu'à ses plus extrêmes limites : au Nord, la petite ville de Colmars et les Alpes ; au Sud et à l'Est, le littoral depuis la Camargue jusqu'à Nice, et à l'Ouest Avignon et Orange. Nous ne savons pas au juste quel itinéraire choisi- rent Pena et Lobel pour effectuer ce long parcours. L'ordre, d’ailleurs, n'importe guère,et des hypothèses peuvent le rétablir. Faisons à la ville la plus importante de la Pro- vence l'honneur de la nommer en premier lieu. Supposons que, sortant de Montpellier par le Pila Saint-Gély, les deux amis ont résolu de se rendre d’abord à Marseille, et dirigeons-nous avec eux vers la grande cité commerçante qui, depuis des siècles, tenait son rang parmi les reines de la Méditerranée, DAS AT GRECE € NS Ce QD AG =: : ÉRRe À & Quoiqu'elle occupat alors une superficie bien moins étendue qu'aujourd'hui, Marseille était une ville fameuse, pleine d’attraits et de séductions, où les étrangers affluaient. Un passage des Adversaria nous apprend qu'en venant à Marseille, les étudiants de Montpellier n'avaient pas seulement en vue l'intérêt de leur édu- cation scientifique. Avant tout, c'était pour eux un voyage d'agrément. Les étudiants du xvie siècle ne furent pas, il faut le croire, plus austères que leurs successeurs du xiIx°, et ils recherchaient les distrac- tions. Ils allaient donc à Marseille, en bandes joyeu- ses, pour s'y divertir, «pour y faire la nôce », si cette expression moderne et familière peut ici être de mise. « Düm Monspellio Galloprovinciæ Massileam lusum iremus, Complures commilitones...(1) ». On pouvait d'ailleurs concilier aisément le grave et le doux, le plaisir et la science, et rien n’empêchait de se livrer, le long du chemin, à des observations phytologi- ques. Et c'est ainsi que firent Pierre Pena et Mathias de Lobel. Pour se rendre de Montpellier à Marseille on pas- sait par la Camargue (2). L'itinéraire suivi au départ (1) Stirp. Adv., p. 18. (2) Les curieux Mémoires des frères Platter, traduits par M. Kieffer et dont nous avons, au chapitre précédent, cité un passage, donnent des détails minutieux au sujet des voyages que les étudiants de Montpellier faisaient à Marseille et de l'itiné- raire qu'ils suivaient. Félix Platter écrivait en 1553 : « Treize étudiants allemands s'étaient associés pour faire un voyage à Marseille; j'étais du nombre et je louai une mule. Contzenus, qui avait amené de Strasbourg un joli cheval, était le chef de cette caravane ; les autres allaient pour la plupart à pied. Nous parti- mes de Montpellier le 15 septembre, et le premier jour nous atteignimes Lunel. Le lendemain, 16, nous étions à Saint-Gilles pour diner, et à la nuit tombante nous enträmes à Arles, ville située non loin de l'embouchure du Rhône, qu'il faut traverser pour entrer en ville... La journée du 17 se passa à Arles... Le 18, la troupe dina à Saint-Martin, auberge isolée devant laquelle est une fontaine, et se dirigea ensuite vers Saint-Chamas... » HT ER de Montpellier conduisait d’abord à Lunel, puis à Saint-Gilles. On franchissait là le petit Rhône, et sur la rive gauche de cette branche du fleuve on abor- dait en Camargue. On parcourait toute la partie sep- tentrionale du delta, et, après avoir traversé le grand Rhône, on atteignait Arles. Au-delà d'Arles on ren- contrait la vaste plaine caillouteuse de la Crau, où l’on faisait halte à l'auberge de Saint-Martin, et l’on se dirigeait ensuite soit vers le bourg de Saint- Chamas, soit vers la petite ville de Salon (1). Des diverses plantes qui composent la florule de la Camargue, Pena et Lobel n’ont enregistré qu'une seule : le Suæda fruticosa Forsk., espèce caractéristi- que de cette végétation, et qui, de nos jours, conti- nue à se développer en abondance dans toute la par- tie non défrichée de la grande île rhodanienne. Ils l’appelaient « Chamæpythis vermiculata Sedi effigie », en se demandant si ce n'était pas le « Chamæpythis major » de Dioscoride (2). On pourrait s'étonner que dans leur traversée de la Camargue ils n'aient pas fait des observations plus nombreuses. Mais ils appartenaient, — et de même, sans doute, les «ccommilitones » partis avec eux, — à la catégorie des étudiants privilégiés qui pouvaient se donner le luxe de voyager à cheval. Or, comme le sol de cette belle plaine alluviale est éminemment propice à l'équitation, ils en devaient profiter pour presser l'allure de leurs chevaux, ce qui ne leur per- mettait de noter qu'un petit nombre de plantes, et seulement les plus apparentes (3). (1) Saint-Chamas et Salon, actuellement chefs-lieux de canton de l'arrondissement d'Aix (Bouches-du-Rhône). (2) Stip. Adv., p. 163 : « Fruticat maritimis litoribus atque insulis Angliæ et Zelandiæ, necnon in squalidis campis Arelatem inter et D. Ægidii oppidum, non procul à Rhodani fluentis uber- rimé perennans.….. » (3) 11 y a certitude que Pena et Lobel vinrent à cheval de Montpellier à Marseille. En arrivant près de Marseille, ils furent LL FEUEES Les deux voyageurs ont peint en touches vigoureu- ses le paysage de la Crau, « Aralatensis planities patentissima, solibus æstivis retorrida, squalida, gla- reosa, lapillis silicibusque constrata (1). » Is tiennent à trouver une étymologie pour ce nom de Crau que la langue du pays donne à la plaine aride : comme leur philologie était encore fort arriérée, ils supposent que Crau vient de craie parce que le terrain est crayeux (2), et ils traduisent le nom provençal par le mot latin Creta (3), auquel ils ajoutent Salonensis, à cause de la tout heureux d'apercevoir en grande quantité l'Hippocrepis uni- siliquosa, plante nouvelle pour eux. Cette Papilionacée avait été nommée, par les Italiens, Sferra-Cavallo, parce qu'on la croyait douée du pouvoir malfaisant de briser les fers des chevaux. Nos deux étudiants étaient, disent-ils, avides d'en faire l'expérience, et ils s'empressèrent de mettre à profit cette bonne occasion. L'expérience fut, comme on pense bien, négative. « Planta etiam leguminosæ familiæ est hæc, cujus siliqua multum mirationis excitavit istis nomenclatoribus qui Sferra-Cavallo, id est soleam equorum refringentem, fabulati sunt. Nam nobis experiundi avidis, magna copia reperta propè Massileam, frustra sæpius factum fuit periculum. » (Stirp. Adov., p. 403.) (1) Stirp. Adv., p. 430. (2) Nous n'avons pas besoin d'insister sur ce point, que l'éty- mologie donnée par Pena et Lobel est purement imaginaire. Les géologues ont établi que la Crau formait autrefois l'estuaire par lequel la Durance, au lieu de se jeter dans le Rhône, portait directement ses eaux à la mer; et les cailloux roulés, dont l'amas en ce lieu intrigua si fort l'antiquité, sont des quartzites de la Vallouise, apportés et déposés par la torrentueuse rivière. Ce qui est tout-à-fait remarquable, c'est de trouver l'origine de la Crau ainsi expliquée, — en un temps où la géologie n'existait pas même de nom,— par un écrivain provençal du xvr siècle, Solery (Jules-Raymond de Solier, né à Pertuis), de qui Honoré Bouche, en sa Chorographie ou Descriplion de Provence, repro- duit ainsi l'opinion : « Solery estime que la rivière de Durance, ou toute entierement, ou en partie, passoit autrefois, à un temps dont on n'a point de memoires, vers le lieu d'Allamanon, près de Salon, et que se dilatant puis après par toute l'etendüe de la Crau, avant que d'entrer dans la mer, elle y laissa toutes les pierres qu'elle entrainoit en son cours. » (3) Cette traduction de la Crau par Creta fit commettre à un SR ville de Salon et parce qu'on dit communément « la Grau de Salon. » Il existe au milieu de cette plaine une petite chapelle autrefois consacrée à saint Martin, et vis-à-vis de laquelle on trouve une petite au- berge (1). Les plantes que Pena et Lobel ont signalées dans la Crau sont les suivantes : L'Asphodèle fistuleux, que Charles de l’Escluse avait aperçu au même endroit et qu'il appelait « As- phodelus minor », tandis que pour eux c’est le « Pha- langium Cretæ Salonensis » (2) ; Le Picnomon Acarna Cass. auquel ils appliquent le nom de « Picnomos Cretæ Salonensis » (3) ; botaniste anglais du xvie siècle, Jean Gerard, une amusante bévue. Il crut qu'il s'agissait de l’île de Crète, et à son tour il traduisit par le mot anglais Candy le Creta Salonensis des Adver- saria (Jean Bauhin, Historia plantarum universalis, t. IT, p. 632). (1) Séirp. Adv., p. 373: « Ædicula media in planitie est olim Divo Martino sacra, prope quam ex adverso minoris diversorii. » — Félix Plater a signalé l'existence d’une fontaine au-devant de l'auberge. — Il paraît qu’au xvie siècle, et encore au xvIr®, ce n'était pas sans peine que le voyageur parvenait à trouver son chemin entre Saint-Martin et Salon. L'ouvrage d’'Honoré Bouche, dont nous avons cité quelques lignes dans une note précédente, disait à ce sujet : « Comme il estoit tres-mal-aisé de marcher asseurement et commodement parmy tant de cailloux, et qu’il arrivoit souvent que les voyageurs s'y egaroient et se four- voyoient etrangement au milieu de cette plaine, où l'on ne pouvoit point decouvrir des vestiges du chemin parmy ces cailloux, depuis le lieu de Saint-Martin jusqu'à la ville de Salon, Gaspar de Laurens, archevesque d'Arles, y a fait de nos jours, à ses despens, un tres-beau et commode chemin, purgé autant qu'on a pü de ces pierres, marqué avec des colonnes milliaires et une croix au milieu pour le soulagement et la consolation des voyageurs, ordonnant que ce chemin seroit desormais sur- nommé la Voye Laurence. » — Le village de Saint-Martin-de-Crau forme actuellement une section de la commune d'Arles (Bouches- du-Rhône). (2) Stirp. Adv., p. 18. — L'Asphodelus fistulosus L. n'a pas cessé d'être très abondant dans toutes les parties encore incultes de la Crau. (3) Stirp. Adv., p. 373, — 66 — Un «Polygonum Hernicriæ foliis et facie», qui nous parait être, à n'en point douter, l’Herniaria incana Lamk. (1); Enfin le Chêne à Kermès, Fe {lex coccifera»,arbuste rampant et buissonnant qui s’étalait, comme il le fait encore, sur une grande partie de la Provence aride, et qui, de plus, au xvi* siècle, jouait dans le pays un rôle économique important. La désignation spécifique Coccifera rappelle que ce Chêne nourrit un insecte parasite, une Cochenille ou Kermès (Coccus Ilicis L.) duquel les teinturiers tiraient la couleur d’écarlate. Les naturalistes du temps lui donnaient le nom de Coccus infectoria ; les Adversaria nous apprennent que le mot provençal dont le peuple se servait était celui de Vermillon (2). Aujourd'hui remplacé par d’autres subtances tine- toriales, et notamment par la Cochenille du Nopal, le Vermillon fut pour la Provence du moyen âge et continuait encore d'être au xvi° siècle l’objet d’un revenu considérable. La récolte du Coccus infectoria était une aubaine pour les populations rurales. Quand arrivait le mois de mai, époque de la cueillette, surtout si l'hiver n'avait pas été pluvieux, des bandes de paysans par- aient de chaque village et se répandaient dans les garigues (3) pour aller à la recherche du Kermès. Ils l’apportaient ensuite sur les marchés voisins et le ra v (1) Stirp. Ado., p. 404: « In fusissima Cretæ Salonensis Gallo- provinciæ planitie, media via inter Aralatem et Solonam ad diversorium D. Martini. » (2) Le mot de la langue romane Vermillon (le provençal moderne écrirait Vermeioun), signifiant vermisseau, attestait l’origine animale du Kermès. (3) L'expression provençale Garrigo a, sous la forme Garigue, passé dans la langue française (V. Littré). — Garrigo est dérivé de Garrie, nom que donnait la langue romane au Quercus cocei- fera (F, Mistral, Le Trésor du Félibrige, dictionnaire provençal- français). vendaient, nous disent nos auteurs, douze et jusqu'à vingt sols la livre : « Hanc legunt mense Maio, annis adèo æstivis, ut totum semestre nihil penitus pluat. Plebecula tunc turmatim et vicatim confluit illuc Coccum lectum, quem Vermilionem voce vernacula vocitat, atque venundat in mercatu singulam libram duodecim et interdum vicenis assibus Gallicis (1). » Les rédacteurs du Stirpium Adversaria n'avaient encore sur les métamorphoses des insectes que des notions bien confuses. Quelle était à leurs yeux la nature du Kermès? Ils ont soin de direque ce n’est ni un fruit ni une semence, non tamen fructus autsemen, mais une excroissance de l’arbuste, excrementum Ilicis, et pour corriger ce que le terme avait de bas, ils y joignent l’épithète de nobile. Comment cette noble excroissance pouvait-elle, à un moment donné, se transformer en bestioles”? Ils ne cherchent pas à se l'expliquer. Mais ils racontent que pour empêcher la liqueur rouge,le «sang » (cruor) du Kermès, de se métamorphoser en vermisseaux ou en petits mouche- rons semblables à ceux qui hument le vin, les teintu- riers l’arrosaient de vinaigre ou de vin blanc. « Infec- tores, qui magnam vim Cocci emunt, non premunt : sed aceto aut albo vino irrorant, ne in vermiculos, aut vinisugas exiles muscas abeat cruor, penè vacuis relictis tunicis. » Le Vermillon n'était pas seulement utilisé par l’in- dustrie de la teinture : il avait aussi une valeur médi- cinale. Nous voyons que les pharmaciens de Mont- (1) Stirp. Adv., p. 430. — L'éminent numismatiste, M. Louis Blancard, correspondant de l'Institut, que nous avons consulté sur la valeur des « Asses Gallici » dont parlent iciles Adversaria, a bien voulu nous répondre : « Il est probable que les « asses » en question étaient les « sols » de l’époque (pièces de douze deniers ou douzains) sur le pied de 22 centimes le gramme d'argent. Le douzain de 1550 aurait équivalu à 16 centimes et le douzain de 1572 à 15 centimes. — Entre les années 1550 et 1572, il n'y à pas eu, à ma connaissance, d'émission de ces monnaies. » mr 0 pellier, d'Aix, de Marseille et d'Arles préparaient, avec du Coccus écrasé, certains médicaments nom- més Alkermès, préconisés contre les maladies du … cœur (1). 4 En arrivant à Marseille, Pierre Pena et Mathias de Lobel allaient y être reçus par un ami. C'étail ce jeune pharmacien, Jacques Raynaudet, qui, en 1564, avait accompagné Pena en Suisse, à Bâle, à Zurich chez Gesner, et ensuite à Venise. 4 Les expressions employées par les Adversaria quand il est question de Iui témoignent de l'affection profonde que les deux collaborateurs, ou tout au … moins Pena, avaient conçue pour Raynaudet, et de … l'estime qu'inspiraient l'étendue de ses connaissances et son ardent amour de la botanique : « Jacobus Raynaudetus, Massiliensis civis, industrius pharma= copæus, stirpium valdè cupidus et peritus, amicus non vulgaris. (2) » (1) Stirp. Adv., p. 431. — Le célèbre botaniste Charles de L l'Escluse, qui était venu étudier à Montpellier plus de dix ans avant Pena et Lobel, mais dont le grand ouvrage, Rariorum Plantarum Historia, ne parut que de longues années après (1691), y a donné sur l'évolution du Coccus Ilicis des détails empruntés au curieux livre de Pierre Quiqueran de Beaujeu, De Laudibus Provinciæ (Paris, 1551). Ayant conquis, par des succès scolaires retentissants, une précoce notoriété, Quiqueran, fils d'un gentilhomme d'Arles, fut nommé par le roi François Ier évêque de Senez : il avait à peine dix-huit ans. Son Eloge de la Provence, œuvre dithyrambique et décousue, offre, sur quelques points relatifs à l'histoire naturelle du pays, des indications qui ne sont pas sans intérêt, Ce panégyrique, écrit en latin, fut traduit en français par F. de Claret, archidiacre d'Arles (Lyon, 1614). On y trouve beaucoup de renseignements au sujet de la à récolte du Kermès : il y est dit notamment « que la plus grande abondance et le meilleur du pays vient plantureusement de la Crau d'Arles, » +” - (2) Dans une note du chapitre précédent, nous avions déjà cité d'autres expressions tout aussi amicales et flatteuses appliquées à Jacques Raynaudet : « Peramicus juvenis doctus pharmaco- pæus, apprimè sedtlus et peritus vestigator stirpium, singula: ris industritæ amicus..….. » — Raynaudet fut en même temps ee | . Fr > : ‘ré r, 4 F 24 -: 10: L'ITITS LT ET. EE Jacques Raynaudet accueillit les voyageurs avec DS amicale allégresse, et leur offrit certainement de les guider dans jeurs herborisations à travers le ter- roir marseillais, que lui-même avait si souvent exploré et qu'il connaissait à merveille. Nos zélés botanistes ne manquèrent pas d'aller herboriser à Mont-Redon, localité que les Adversaria citent sous le nom de Mont-Rond : c'est la forme francisée de l'appellation provençale qui n’a pas cessé d’être donnée à ce quartier. I ya là pour les . botanophiles une station qui était autrefois, suivant l'expression du professeur Derbès, « classique en poupe ». Malgré la déchéance que lui ontinfligée les _ progrès de l’industrie et de la civilisation Ho on peut encore, à l’occasion, y obtenir de Done trouvailles. Quelle ne devait pas être sa richesse au _ xvr siècle, alors que la grande ville, emprisonnée _ dans une ceinture de remparts, ne l'avait pas en- vahie pour en faire, comme aujourd'hui, un de ses _faubourgs ! 4). Les Adversaria mentionnent plusieurs plantes que nous trouvons encore à Mont-Redon ou sur la partie du littoral qui y fait suite. C'est d'abord le « Tragacantha » (Astragalus Tra- l'ami de Jean Bauhin. Celui-ci, dans son Histoire générale des plantes, mentionne fréquemment les espèces qu'il a reçues du pharmacien de Marseille et il parle toujours de ce correspon- dant avec éloges: « Doctus, industrius, insignis pharmaco- __ pæus. » : | (1) TEE La plage de Mont-Redon voit disparaître à vue d'œil la sauvage aridité qui faisait sa richesse : les eaux du Canal [dérivé de la Durance] chassent devant elles les végétaux que recherchaient les botanistes de tous les pays ; de nombreuses constructions auront bientôt couvert la place de cette localité 22 _ naguère classique en Europe. » Alphonse Derbès, professeur de ee botanique à la Faculté des Sciences de Marseille, s'exprimait £ = ainsi, en 1862, dans l’Aperçu dont il orna le Catalogue des plan- . tes qui croissent naturellement dans le département des Bou- | ches-du-Rhône, de Louis Castagne (Marseille, 1862). 2 50" gacantha L.). Cette espèce, dont l'aire géographique est peu étendue, du moins en France, est une de celles qui contribuent à donner à la florule des environs de Marseille une physionomie spéciale. Au xvie siècle, on la rencontrait beaucoup plus près de la ville (1). Avant toute description, Pena et Lobel nous font connaître les deux noms provençaux, très expressifs l’un et l’autre, auxquels les Marseillais avaient re- cours pour désigner l’Adragant : « Barbe-Renard » et « Ramebouc » (2). C'est aussi à Mont-Redon que les futurs auteurs du Stirpium Adversaria découvrent une plante qui les embarrasse fort, et à laquelle ils ne savent pas exac- tement quel nom attribuer. Is se tirent d'affaire en lui appliquant cette phrase : « Plante marseillaise intermédiaire entre la Corne-de-cerf et lOrpin des montagnes, — Coronopi et Sedi montani media planta Massiliensium. » Leur description est accompagnée d’une figure qui permet aisément d'y reconnaitre un Plantain. Mais quoique ce dessin soit défectueux, ainsi que l’a très justement observé Jean Bauhin en son Historia plantarum universalis(3), comme d’autre (1) Stirp. Adv., p. 378: « Galloprovinciæ propè poméœæria Massiliæ in marinis collibus ad Austrum devexis, aliisque finiti- mis locis passim multa. » (2) Pena et Lobel ont soin de traduire en latin ces deux noms provençaux : « id est Vulpina barba et Surculus hireinus ». Quand ils citent un mot provençal, les botanistes du xvie siècle s'efforcent, en le transcrivant, de lui donner une physionomie française, C'est ainsi que de Mount-Redoun ils font Mont-Rond. Les deux appellations provençales de l'Adragant doivent être orthographiées ainsi : Barbo-Reinard et Ramo-Bou. Le premier nom est encore en usage et figure au Dictionnaire provencal- français de Frédéric Mistral, Le second ne s'y trouve pas, sans doute parce qu'il est tombé en désuétude, — Ces indications de noms provençaux données par les Adversaria émanent incontes- tablement de Pierre Pena, lequel, en sa qualité de Provençal, connaissait bien la langue dont l'usage était alors général dans tout le pays. (3) T. III, 2 part., p. 611, Ed QI part Pena et Lobel ont avec précision signalé lhabi- tat de la plante litigieuse : « Collibus et cautibus Massileæ vicinis ad maris allisiones », aucune hési- tation n’est possible, et nous devons voir là le Plan- tago subulata L., toujours abondant aux mêmes lieux (1). Ils trouvèrent dans les mêmes parages deux espè- ces frutescentes qui sont l’une et l’autre caractéristi- ques de la flore méridionale : Passerina T'arton- raira D C. et Globularia Alypum L. Ils appellent la première € Tarton-raire Massilien- sium ».C'est à Mont-Redon mème qu'ils l'aperçoivent etils désignent ainsi la localité : € Circum Massiliam, locis ad mare devexis, præsertimque collem vulgô Mont-Rond vocatum, squalidum, aridum, glareo- sum (2). » Ils décrivent, non sans quelque poésie, le gracieux effet que produit le Tarton-raire avec son (1) Stirp. Adv., p.187. — Gaspard Bauhin conféra au Plantain décrit par les Adversaria le nom d’«Holosteum massiliense », nom que Linné, dans le Species, inscrit comme synonyme de son Plan- tago subulata. — Quand il s’agit de découvrir, sous la phraséologie du xvre siècle, l'identité d’une espèce, nous contrôlons toujours notre détermination personnelle au moyen d’un procédé que nous pourrions appeler la méthode des synonymies successives. Dans son Pinax theatri botanici, Gaspard Bauhin, adoptant lui- même pour chaque espèce une désignation nouvelle, eut soin de faire connaître les divers noms appliqués à la même plante par les phytographes qui l’avaient précédé, Et comme Linné, à son tour, joint presque toujours à la nomenclature binaire, qu'il vient d'établir, l'indication du synonyme bauhinien, il est facile dé connaître le nom que portait chez tel ou tel auteur du xvi* siècle l'espèce linnéenne, sauf erreur commise par Gaspard Bauhin ou par Linné, (le cas se produit quelquefois), dans l’ap- plication des synonymies. (2) Stirp. Adv., p. 160. — Si la plage de Mont-Redon a changé d'aspect depuis le xvre siècle, les sommets rocheux qui la domi- nent (Marsihavèire), brûlés non seulement par le soleil, mais en outre par la fumée corrosive des usines avoisinantes, sont plus que jamais squalidi, aridi, glareosi ! SPA feuillage argenté-soyeux, lota pulchella, et ils nous donnent enfin l’étymologie du mot Tarton-raire. Nous nous étions souvent demandé, avant d'avoir compulsé les Adversaria, quelle pouvait être l’origine de ce singulier nom de plante (1). Pena et Lobel nous apprennent que cet arbuste doit son nom à l'énergie de ses facultés purgatives : € ab exuperanti effreno- que purgandi vi, quænon rard dysenterias fluxusque immoderatos alvi accersit. » Pour bien saisir le rapport existant entre la pro- & priété et le vocable, il faut rapprocher cette phrase D d’un passage de Solerius (2) cité dans l’Historia plan- A tarum universalis de Jean Bauhin. Hugues de Solier Ve s’exprimait de cette manière au sujet de notre Passe- E. rine : «Massilitanis et Beterrensibus (qui Berre et &. Barsegue (3) locum vocant ubique provenit) dicitur HE Tarton-arrayro, id est tardè alvum lubricans. » Et * Bauhin ajoute que Jacques Raynaudet, en lui en- F voyant de Marseille des échantillons de l'arbuste 4: (1) Nous l'avions vainement cherchée dans divers lexiques à provençaux, et en dernier lieu dans le vaste Trésor de Frédérie % Mistral, œuvre qui a montré que l’auteur n'est pas seulement un grand poète, mais aussi un philologue consommé. — Frédéric Mistral s'était contenté de mettre en regard Tartoun-rairo et Trintanello, mot qui dans le Languedoc désigne le Daphne Gnidium. D RO MAR L2 C4 v pe (nf à ARTE £ (2) Le Provençal Hugues de ’Solier, Hugo Solerius, né à Sai- gnon (village qui appartient aujourd'hui au département de Vaucluse), médecin à Grenoble, auteur de Scholies pour les deux premiers livres de la compilation du médecin grec Aetius, tra- duite en latin et publiée par Janus Cornarius (Lyon, 1549 et 1560). Lh VEN. A rod AT Hugues de Solier était l'oncle de Jules-Raymond de Solier, dont > il a été question dans une note précédente. Il avait préparé une 1) Æ traduction latine avec commentaires de l'Histoire des plantes de (En Théophraste. Mais ce travail paraît n'avoir jamais été imprimé. (3) Barsegue est mis ici pour Martegue, la petite ville de Mar- tigues (Bouches-du-Rhône), voisine de Berre et, comme celle-ci, chef-lieu de canton de l'arrondissement d'Aix. t D é [LE ar PTE à rare: * . Kra PA EYE EX purgatif, lui écrivait que les Marseillais le nom- maient T'art-en-rayre «quôod aloum mirificé solval (1) ». Il résulte du rapprochement de ces textes que le Tarton-raire, si violemment laxatif, avait été ainsi nommé par antiphrase. Le mot arrayro (Solerius) ou en-rayre (Raynaudet), signifiant littéralement «en arrière » (2), exprimait, dans le provençal du xvr° siè- cle, l’action d’« aller à la selle » ; et la syllabe initiale “tart se trouve exactement traduite par le {ardè de Solerius, en français « tard ». C'est donc par ironie et contre-vérité que les Provençaux avaient de cette facon désigné la plante qui, au lieu de retarder, pré- cipitait, au contraire, la débâcle que les Adversaria appelaient fluxus immoderatos alvr. La Globulaire Turbith (3) est aussi un purgatif violent, dangereux même. Les auteurs du Stirpium Adversaria nous disent qu’à Montpellier on l'avait, à (1) Hist. plant. univ., t. 1, p. 593. — Charles de l'Escluse, qui rencontra le Tarton-raire en Espagne, l’a décrit sous le nom de Sanamunda, et il fait connaître que cette plante y était employée comme purgatif, principalement par les gens de la campagne : « Istic ab herbariis Sanamunda vocatur, à rusticis ver Mier- dacruz, propter purgandi facultatem, cujus causà rusticis ejus regionis adprimè in usu est. » — Le mot Herbarius, dont se sert ici Clusius et que l’on retrouve fréquemment sous la plume des divers botanographes du temps, s'entendait de tous ceux qui s'adonnaient à la recherche des plantes et, par conséquent, des botanistes en particulier. Un herbier se disait Herbarium, et pour éviter une confusion pouvant résulter de l'emploi des cas de déclinaison communs aux deux substantifs, on ajoutait les mots siccum ou chartaceum. Herborisation se traduisait par Herbalio. (2) Suivant le système orthographique adopté par le Trésor de Frédérie Mistral, ce mot doit actuellement s'écrire à-rèire ou en-rêire. (3) Globularia Alypuin L. — Pena et Lobel l'intitulent : « Aly- pum Montis Ceti Norbonensium ». Quelques ouvrages modernes donnent à cette Globulaire le nom français de « Sené des Pro- Vençaux ». Le he cause de cela, surnommée « Herba terribilis » (1). Ils déclarent l'avoir cueillie cinq ans auparavant (2) à Frontignan, sur la colline de Cette, et à Marseille, « saxosis præruptisque utrobique ad mare et Aus- trum devexis. » En venant à Marseille, ils comptaient bien y voir une plante qu'ils eussent été fort surpris de ne point rencontrer sur le sol marseillais, puisque Dioscoride lui avait conféré le nom de « Seseli Massiliense ». On sait avec quel intérêt passionné les savants du xvi® siècle s’efforçcaient de découvrir les plantes décrites ou mentionnées par les anciens, surtout par Dioscoride dont l'autorité, en tout ce qui se rattachaïit à la matière médicale, était toujours incontestée et immuable. Or, voici comment Dioscoride avait formulé sa diagnose du Seseli Massiliense : « Folia Fœniculi habet, crassiora ; caulem vegetiorem ; umbellam Anethi in qua semen oblongum, angulosum, degus- tanti statim acre ; radix longa est, jucundi odoris. » Des indications à ce point sommaires, ne signalant aucun des caractères essentiels, indispensables pour déterminer une Ombellifère, laissaient le champ ouvert à toutes les suppositions (3). Aussi, les com- (1) Slirp. Adv., p. 159 : « Vocat istam herbam Terribilem vul- gus Norbonensium, ubi impostores valetudinis cauponatores impii atque tribades mulierculæ terribiles, ut vocant, illie moliuntur purgationes, istius terribilis fruticuli foliis, floribus et semine, » (2) « Sexto abhinc anno » ; c'est-à-dire que l’année pendant laquelle ils impriment leur livre est la sixième écoulée depuis qu'ils ont cueilli l'Alypum, soit à Frontignan, soit à Marseille. — Ils seraient donc venus à Marseille dans le courant de l'année 1565. (3) Il était d'autant plus difficile de s'y reconnaître que la des- cription de Dioscoride procédant par voie de comparaison avec le Fenouilet l'Aneth, il fallait au préalable savoir quelles étaient en réalité les plantes à qui l’auteur avait entendu appliquer les noms de « Fœniculum » et d'« Anethum ». Er, | mentateurs de Dioscoride s’en étaient-ils, pourrait-on dire, donné à cœur-joie, et rien de plus étonnant que de voir, dans l’Historia de Jean Bauhin, qui résume les débats, combien diffèrent entre elles les espèces proposées de divers côtés pour être adaptées au nom de Seseli Massiliense. A la plante en laquelle Pena et Lobel avaient cru reconnaitre le type spécifié par Dioscoride au moyen de l’adjectif Massahewrimdy et qu'ils nommèrent: « Seseli Massiliense folio fæœniculi crassiore » (1), Gaspard Bauhin, dans le Pinax theatri botanici, laissa la même désignation, légèrement modifiée : « Seseli Massiliense fœniculi folio quod Dioscoridis censetur. » Et de la phrase de Gaspard Bauhin, Linné a fait un synonyme de son Seseli tortuosum (2). Ce n’est point à Mont-Redon que les rédacteurs du Stirpium Adversaria virent leur « Seseli Massiliense ». Ils le remarquèrent dans la partie du territoire qui s'étend entre les deux villes de Marseille et d'Aix : « Passim et uberè crescit Massiliense Seseli in trac- (1) Stirp. Adv., p. 352. (2) Au milieu des divergences qui se produisirent chez les bota- nistes du xvr° siècle à propos de l'identité du Séséli Massalio- tique de Dioscoride, Charles de l'Escluse se prononca comme Pena et Lobel en faveur de l'Ombellifère que Linné, en dernier lieu, appela Seseli tortuosum et que lui-même avait dénommée « Seseli Massiliense Dioscoridis ». — Bien que nous ayons adopté comme règle de ne rien dire en ce travail des vertus médici- nales, le plus souvent chimériques, attribuées à certaines plan- tes par les anciens auteurs, nous ferons exception pour le Séséli de Marseille. Dioscoride avait affirmé qu'avec la semence ou la racine de cette précieuse espèce, on guérissait la suffocation, la toux invétérée, les refroidissements, l’épilepsie, la colique, la rétention d'urine, les fièvres, et généralement les maux internes de tout genre, « ad omnia interna mala pollent. » Une décoction de Séséli aidait puissamment les femmes en mal d'enfant, et facilitait, au besoin, la parturition des chèvres et des brebis. On voit combien il importait de savoir au juste quelle était la plante à qui le célèbre praticien d'Anarbaze avait octroyé de si mer- veilleuses propriétés. : iciftre” = J . 2 rs MAL EN US w bi Yes | L _ ru £ Lt SET he le 7 Ê - F £ Dr. 4 ‘ - = CRE SQR + 3 SAN EE ; ET: rte "TSF = , 114) — 76 — Ê tibus qui Massilia Aquassextias ducunt. » Ils sont d'avis qu'il n'existe aux alentours de Marseille aucune plante qui puisse cadrer mieux avec la description de Dioscoride (1) ; et ils ajoutent que leur ami Jacques Raynaudet fit le premier parvenir ce Séséli à Valerand Dourez, pharmacien flamand établi à Lyon, ainsi qu'à divers médecins de la même ville qui, l'ayant employé, sur un conseil donné par Rondelet, à la confection de la thériaque, obtinrent ainsi une thériaque parfaite (exquisilam) (2). Outre son Massaliotique, Dioscoride avait distin- gué trois autres espèces de Séséli, auxquelles pour désignation spécifique il avait attaché des adjectifs géographiques : l'Ethiopique, le Péloponésien et le … >. Crétois. « Autant, — écrivent Pena et Lobel, — Dioscoride compte de genres de Séséli, autant nous en avons … récolté en Provence, autour de Marseille, et sur les (1) « Neque quantum illic locorum est Massiliæ cireum lus-. De, af tranti ullam plantam videre est, quæ magis quadret Seseli. » Ils … indiquent en outre qu'ils ont trouvé le Séséli de Marseille de l’autre côté du Rhône, dans les endroits accidentés du terri- toire de Montpellier, et aussi à Rome, sur les bords du chemin qui conduit à Sienne, près du bourg de Montefiascone, célèbre par son vin muscat, et plus connu des buveurs que des étudiants en botanique, « vini optimi muscati commendatione potoribus magis noti quam botanicis studiosis. » (2) Stirp. Adv., p. 352. — En dépit de l'autorité due aux identi- fications faites par Gaspard Baubhin et Linné, nous nous deman- dons si c'est bien le Séséli tortueux qu'il faut regarder comme synonyme du « Seseli Massiliense folio fœniculi crassiore » de Pena et Lobel. Nous inclinerions à opter plutôt pour le Seseli elatum L. dont les caractères peuvent tout aussi bien s’accorder avec la brève description de Dioscoride. Le Séséli tortueux, assez répandu dans les arrondissements d'Aix et d'Arles, est absent de celui de Marseille, Les catalogues de Louis Castagne /Bouches- du-Rhône) et d'Honoré Roux (Provence) ne l'y mentionnent pas: Or il semble que le nom de Massiliense ne pouvait être donné qu'à une espèce croissant dans les environs immédiats de la ville de Marseille, ce qui est le cas du S. elatum. ee ST Te bords de la mer du Languedoc, près de la montagne de Cette, non loin de Montpellier. C’est de là que certains étudiants firent parvenir quelques-unes de ces plantes à Paris, à Anvers et aussi en Italie, où elles n'étaient pas encore connues, même des savants (1). » Devenus sceptiques sur le chapitre des propriétés curatives attribuées jadis à beaucoup de végétaux, nous n'avons point, Dieu merci, à rechercher si les botanistes du xvi° siècle, qui vinrent herboriser en Provence, ne commirent pas d'erreurs en assimilant telle espèce indigène à l’une de celles qu'avait prônées l'antiquité. Notre tâche, encore difficile mais cepen- dant plus simple, se borne à appliquer avec exacti- tude les termes de lanomenclature actuelle aux noms employés par les descripteurs de la Renaissance, que ces noms aient été créés par eux de toutes pièces ou empruntés à Dioscoride. Au moyen de la figure et de la description que les Adversaria ont données de la plante qui représentait aux yeux des deux collaborateurs le « Seseli Æthiopi- cum » de Dioscoride, nous reconnaissons, sans éprou- ver cette fois la moindre hésitation, l'Ombellifère devenue depuis Linné notre Bupleurum fruticosum. « Cette plante, — disent-ils, — croit en abondance sur le penchant des collines de Marseille voisines de la mer, et aussi au pied du mont de Cette, du côté qui tourne vers l'étang. Rien n’est plus agréable à voir, aux mois de juillet et d'août, que ses branches droi- tes, ligneuses, de couleur foncée, rigides, longues de deux ou trois coudées, divisées en plusieurs rameaux, portant des feuilles de consistance épaisse, vertes et luisantes comme celles du lierre, et, à leur extrémité, d’élégantes ombelles de fleurs jaunes comme celles de l’Aneth.. (2) ». (1) Stirp. Adv., p. 280. (2) Stirp. Adv., p. 281. — La plupart des botanistes du xvi° siè- cle partagèrent au sujet du Seseli Æthiopicum l'opinion des — 78 — d 0 Ils affirment en outre que la semence du Buplèvre ligneux est plus odorante et plus efficace que celle du Séséli Massaliotique. Aussi en envoyèrent-ils une grande quantité à leurs amis de Venise et de Lyon pour faire de la thériaque. S'ils ont eu raison d’assimiler le « Seseli Peloponen- se » à la plante que nous continuons, après Linné, de nommer T'hapsia villosa, ils étaient dans le vrai en assurant que c’est encore là une espèce qui appartient au terroir de Marseille (1). Nous pouvons en dire autant du Tordylium maximum L.,si c’est à bon droit qu'ils y ont vu le « Seseli Creticum », que d’ailleurs l’auteur du nom, Dioscoride lui-même, appelait aussi « Tordylion » (2). La banlieue de Marseille leur fournit encore une Ombellifère dont ils firent un « Laserpitium », et pour le distinguer spécifiquement ils ajoutèrent: «é re- gione Massiliæ repertum ».La nomenclature moderne n'a pas distrait cette plante du genre Laserpitium : c'est l'espèce à laquelle Matthiole a imposé le nom, qu'elle porte encore aujourd'hui, de L. Gallicum (3). Adversaria : tel fut notamment l'avis d'Anguillara, de Tabernæ- montanus, de Camerarius, de Dodoens, de Césalpin, des frères Bauhin. I n'y eut d'autres dissidents que Charles de l'Escluse et Matthiole qui prenaient pour le Séséli Ethiopique de Dioscoride l'Ombellifère que Linné appela Laserpilium latifolium. (1) Stirp. Adv. p. 327. — Pour la détermination du « Seseli Peloponense » les divergences furent nombreuses. L'assimilation avec notre Thapsia villosa était admise par Dodoens, Tabernæ- montanus et Dalechamp. Anguillara proposait la plante devenue ensuite Myrrhis odorata Scop. {Scandix odorata L.) ; Matthiole, Molopospermum cicularium DC. (Ligusticum Peloponesiacum L.); Césalpin, Laserpilium Siler L.; Fuchs, Gesner et Camera- rius opinaient pour Peucedanum Cervaria Lap. (Athamanta Cervaria L.) — Ces deux dernières Ombellifères font partie de la florule marseillaise ; mais on ne les trouve que sur les hau- | | | teurs. (2) Stirp. Adv., p. 328. (3) Stirp. Adv.,p. 312. — Tabernæmontanus donnait à cette Ombellifère le nom de « Laserpitium Massilioticum » et Dale- Dans leurs herborisations aux environs de la ville, Pena et Lobel remarquèrent ou crurent remarquer deux espèces de € Phylerea »., La Provence possède effectivement deux Phillyrea: P. media L. et P. an- gustifolia L. Mais 1l nous semble que les deux pré- tendues espèces figurées au Stirpium Adversaria se rapportent l’une etl’autreau Filaria à feuilles étroites. Dans les deux formes représentées, l’une a les feuil- les un peu plus et l’autre un peu moins larges. C’est là une variation sans importance, que l’on observe encore fréquemment. — Nos deux auteurs ont indi- qué avec exactitude l'habitat de leur « Phylerea » : « Viarum marginibus etolivetis Massiliæ vicinis(1)». Enfin la liste des plantes qu'ils récoltèrent aux champ l'avait dédiée à Pierre Pena « Laserpilium Penæ ». — L'article des Adversaria explique qu'à Marseille ce Laser croît dans le voisinage de la mer, « non procul insulis quas videtur vocasse Dioscorides Stæœchades » ; mais que le nom de Sfæchades, donné par Dioscoride aux îles du golfe de Marseille, s'applique maintenant aux îles d'Hyères, éloignées de là par une distance qui exige pour la franchir une journée entière de navigation. Pena et Lobel déclarent d’ailleurs qu'ils ne cueillirent pas eux- mêmes le Laser marseillais. Cette plante leur fut envoyée par l'ami Jacques Raynaudet. Celui-ci l'ayant, en 1566, apportée à Montpellier, elle fut soumise à Rondelet qui décida que c'était bien un Laserpitium et non point un Ferula. (1) Stirp. Adv., p. 420. — Lobel, mécontent sans doute des deux figures insérées au Stirpium Adversaria, a de nouveau re- présenté dans le Sfirpium Observationes les deux espèces de Filaria. L'un de ces dessins ressemble mieux au Phillyrea media. Comme pour l’une et l’autre des figures nouvelles Lobel renvoie au texte des Adversaria, on pourrait admettre qu'en venant à Marseille les deux compagnons avaient en réalité observé nos deux espèces. S'il est d’ailleurs facile de distinguer le P. media du P. angustifolia quand on se trouve en présence de types bien accusés, on rencontre parfois des formes intermédiaires qui rendent embarrassantes les détermi- nations. Mais ce qui démontre avec certitude que les deux ima- ges des Adversaria se réfèrent bien au type du P. angustifolia, c'est que dans le même ouvrage on trouve plus loin le P. media décrit et figuré d’une facon très exacte sous le nom de «Phylerea Arbor Galloprovinciæ, verior Macaleb Serapionis ». 2e PRET NI = LL EUE EE, à Si u >» L se C Re en re alentours de Marseille se clot par deux Légumineuses, dont l’une leurfitle plus grand plaisir, car ils avaient depuis longtemps envie de la connaître, nous avons dit plus haut pour quel motif: c'était le « Ferrum Equinum », Hippocrepis unisiliquosa L.(1).— L'autre qu'ils appellent «Trifolium asphalteum » est notre Psoralea bituminosa L., espèce très répandue dans toute la Provence, « regionibus,-— comme ils le disent justement, — quàäm sole fervidiore lustratis (2) ». Pendant leur séjour à Marseille, ce ne fut pas seu- lement hors de l'enceinte des remparts que Pena et Lobel purent herboriser. Ils eurent aussi l’occasion de faire d’intéressantes observations botaniques dans l’intérieur même de la ville. Il existait au xvr° siècle, le long du bord méridional du Lacydon (3) et sur l'emplacement même qu'oc- cupe aujourd'hui le quai de Rive-Neuve, une série ininterrompue de très beaux jardins. On les voit en- core représentés, au moyen des arabesques employées par les graveurs pour figurer les parterres, sur un des plus anciens plans imprimés de la ville de Mar- seille (4). Pendant longtemps la rive du port ne fut pas bordée d’un quai maconné. Les jardins étaient clos même du côté de la mer, et l’on n'avait laissé (1) Stirp. Adv., p. 403. — Le texte s'exprime ainsi au sujet de l'Hippocrepis : «Planta etiam leguminosæ familiæ est hæc. » Remarquons ici l'emploi, avec l'exacte signification qu'ils ont présentement, de ces mots : « Leguminosæ familiæ ». Bien qu'au xvi siècle les notions de famille, de genre et d'espèce fussent encore trés confuses, on voit déjà surgir chez Pena et Lobel la grande conception des familles naturelles. En d’autres passages de leur livre, cette même idée d'une famille naturelle est rendue par le mot de gens ou gentilitas. (2) Slirp. Adv., p. 380. (3) Nom que portait dans l'antiquité le port de Marseille, ap- pelé aujourd'hui Vieux-Port, depuis la construction du bassin de la Joliette et des ports nouveaux qui font suite à celui-ci. (4) Ce plan sans date porte la mention suivante : « Maretz de- lineavit, Cundier Gener Mareliü sculp. » — Les Rues d'Aix de DT es qu'une étroite lisière entre les murs d'enceinte et la surface d’eau (1). Le terrain sur lequel ces divers jardins furent éta- blis portait le nom de Jardin du Roi parce qu'ayant appartenu aux Comtes de Provence, il avait passé ensuite au domaine royal. Au moyen de baux perpé- tuels ou «acaptes », l'administration royale le con- céda par lots à de grands personnages, devenant acquéreurs avec l'intention d'y faire construire de riches demeures. Un de ces concessionnaires fut Pierre Bon, baron de Méolhon, vaillant marin qui s'était distingué par maints exploits, en qualité de capitaine de galère, et qui plus tard obtint la charge de gouverneur de Mar- seille (2). Le baron de Méolhon fit élever là un hôtel somp- tueux, au sujet duquel l'historien César de Nostrada- mus exprime deux fois une admiration particu- lière (3). | Roux-Alpheran (t. I, p. 327) donnent quelques détails biogra- phiques sur Jacques Maretz et son gendre Louis Cundier, qui étaient d'Aix. (1) D'après les Rues de Marseille, d'Augustin Fabre (t. I, p. 48), « un très petit quai avait été construit à la Rive-Neuve, en 1566, par les ordres de Charles IX. » (2) L’historién César de Nostradamus rapporte, entre autres faits d'armes, que le capitaine Pierre Bon fut blessé dans un combat livré à la flotte anglaise, près de l'ile de Whigt, le 18 juillet 1545. — Grâce à l’obligeance de M. Louis Blancard, archi- viste en chef du département des Bouches-du-Rhône, nous avons eu communication de l’acapte du 19 août 1544 passé en faveur de Pierre Bon. L'acte donne à celui-ci le titre de « baron de Moillon (sic), capitaine de la garde des galères du Roy, gentil- homme de sa maison. » (B. 42, fo 12 vo.) (3) I dit à propos du combat de l’île de Wight : «en autre en- droit fut blessé le capitaine Pierre Bon qui porte en l'escu de ses armes, semé en plusieurs endroits de sa magnifique maison de Marseille, d'or à une bande d'azur compagnée d'une estoile d'or, empoignée d’une patte de lyon de sable...» (Histoire et Chro- nique de Provence, p. 771). Et plus loin, en racontant les événe- 6 LI A9 Lorsque Pierre Pena et Mathias de Lobel vinrent à Marseille, ils furent admis à visiter le superbe jardin qui entourait la résidence du Gouverneur de la ville (1). Si Pierre Bon n'était pas précisément un botaniste, du moins avait-il du goût pour tout ce qui est du res- sort de la res herbaria. D'après ce que rapportent nos deux voyageurs, ilavait créé autour de son hôtel un petit jardin botanique, très probablement pourvu de serres, Où 1l faisait cultiver des plantes exotiques (2). LP ments dont Marseille fut le théâtre sous le duumvirat de Charles Casaulx et Louis d'Aix, il écrit : « Cazaulx et d'Aix firent mettre cinq ou six cens Espagnols, jà portés dans la ville, au logis du Baron de Meolhon, fort ample, somptueux et logeable, à salles, chambres, garde-robes et cabinets enrichis de belles et bien F4 excellentes frises, decorées de l'enseigne des Bons que l'on void sous un tymbre d’or... palais situé sur l'autre cay et rive du ; port. » (p. 1025). — Un autre plan gravé de la ville de Marseille, sans signature ni date, mais qui est manifestement du XVIe siècle et antérieur à celui de Maretz, représente en perspective « la maison du baron de Meollon gouverneur.» On y voit qu'elle était voisine de l'emplacement occupé par les Arsenaux, (« les Arsenals », dit le plan), circonstance qui concorde avec les énon- ciations de l'acte de 1544. Ce plan est conservé à la bibliothèque de Marseille (Dek 43 in fv), 4 (1) D'après Ruffi (Histoire de la ville de Marseille, 2 éd... t Il, p. 274), le baron de Méolhon fut nommé gouverneur de Marseille en 1566 Mais il résulte de quelques explications données par cet historien que Pierre Bon, avant d'avoir le titre de gouverneur, en avait rempli les fonctions ; circonstance que l'on trouve confirmée par une déclaration de César de Nostradamus. Enracon- tant un événement qui remontait à l'année 1562, ce dernier disait : «... ce qui advint du temps que Pierre Bon, Seigneur et Baron de Meolhon, chevalier fort sage et prudent, gouvernoit doucement Marseille, » Et il ajoute aussitôt : « Ce qu'aucun n'a fait depuis. » (p. 796). (2) Voici en quels termes et à deux reprises les Adversaria, au sujet de deux plantes dont nous allons nous occuper, parlent du jardin de Pierre Bon : « Massileæ, superioribus annis, proximè + Novum portum, in Præfecti horto. » (p. 164). — « Massileæ, in amænissimo ad portus litora virelo strenui ducis maritimæ mi- liliæ Petri Boni. » (p. 453). — Le titre de Præfectus répond à : À ; : : dé is F : ' se di he dant, Da à à û he a en on ns RS EE DR te Vi CNE ee os D ef ’ L RE td > À Sr mr. té ét eme pe ah — 83 — Les auteurs du Stirpium Adversaria ont décrit et figuré dans leur ouvrage deux des végétaux exotiques qu'ils trouvèrent là : un Aloës (probablement l’Aloe vulgaris Lamk.) et le Figuier d'Inde (Opuntia Ficus Indica Webb.) (1). La culture de ces deux espèces celui de gouverneur, et l'expression de Dux marilimæ militiæ traduit le « capitaine de la garde des galères du Roy » de l'acapte de 1544. — Pena et Lobel expliquent fort bien que le jardin était situé «ad portûs lilora». Quant aux mots « proximè Novum portum » du premier texte, c’est une allusion à la cons- truction, alors toute récente, du quai de Charles IX, origine du nom de Rive-Neuve que ce côté du port a conservé jusqu'à pré- sent. — Si la date de cette construction, indiquée par Augustin Fabre, est exacte, il faut en conclure que Pena et Lobel vinrent au moins deux fois à Marseille. Ils ont dit (à propos du Globula- ria Alypum) qu'ils s'y trouvaient en 1565. Si réellement le quai a été établi en 1566, nous devons admettre qu'ils y retournérent au cours de cette même année 1566 et à une époque où les tra- vaux du quai venaient d'être terminés, d'où l'expression de Novus portus : le titre de Præfectus donné à Pierre Bon confirme d’ailleurs cette hypothèse. — Rappelons iei qu’il y a dans les Ad- versaria un texte formel que nous avons cité, duquel il résulte que pour l'un, au moins, de leurs voyages à Marseille, les deux amis arrivèrent directement de Montpellier : nous supposons que ce fut en 1566, année dont ils passèrent la majeure partie dans le Languedoc, avant leur départ pour l'Angleterre (à l’au- tomne de 1566). Nous pensons qu'ils avaient dû s'arrêter à Mar- seille l’année précédente, en retournant d'Italie pour se rendre à Montpellier. — Enfin ne perdons pas de vue que Pierre Pena était Provençal et qu'en cette qualité il avait eu des occasions fréquentes de venir à Marseille. L'expérience relative au Sferra Cavallo, faite aux environs de cette ville par les deux collabora- teurs, s’il fallait en croire le pluriel des Adversaria, serait due à Pena seul, d’après l'attestation de l’Historia Lugdunensis, (p. 493) : « Quod calcatu soleas equorum frangat, fabulosum esse Pena asserit, seque ejus rei frustra periculum fecisse, » (1) Is appellent l’Aloës « Aloë » tout court, en ajoutant que cette plante porte en français le nom de « Perroquet ». L'Opun- tia est ainsi désigné : « Indorum Thune Ficifera ». Is disent que cette espèce est originaire des «iles de la mer du Pérou, Hispaniola et autres », qu'elle est cultivée en beaucoup d'en droits d'Espagne, de France et d'Italie; ils ne l'ont vue nulle part produire des fleurs et des fruits si ce n'est à Marseille. « dans le très agréable jardin du chef de la milice maritime. » AN 4 s'est depuis lors répandue dans les régions méridio- nales, mais au xvi° siècle elles étaient d'importation récente et considérées comme des plantes rares et curieuses (1). Ils nous apprennent que le Figuier d'Inde était alors couvert de fleurs et de fruits, que, parmi ceux- ci il y en avait de mûrs, qu'ils en cueillirent et en mangèrent. Ils dessinèrent ensuite la plante d’après nature, sur les lieux mêmes (2). Ces détails nous font supposer qu'ils avaient eu accès auprès du baron de Méolhon, grace aux relations que ses origines per- mettaient à Pena d'entretenir avec l'aristocratie du pays ; et le baron leur avait gracieusement octroyé le droit de se promener dans son « amænissimo vireto », d'y séjourner tant qu'ils voudraient, et de disposer de toutes choses à leur gré (3). (1) C'est de l'Opuntia que Conrad Gesner faisait demanderun spécimen à Pena, pendant que celui-ci se trouvait à Montpellier, comme nous l'avons vu par l'extrait d'une lettre de Gesner reproduite dans une note du chapitre précédent (p. 15). (2) Nous avons exposé dans notre premier chapitre (note 1 de la page 52) les raisons qui permettent de croire que le dessina- teur avait été Pierre Pena. (3) II y avait dans le voisinage de l'hôtel de Méolhon d'autres demeures patriciennes, entourées aussi de beaux jardins. Quand le roi Henri II maria avec le capitaine marseillais Philippe d'Altovitis son ancienne maitresse Renée de Rieux, il donna à celle-ci « pour advancer son mariage, dit Nostradamus, la Ba- ronnie de Castellane avec la maison de Marseille située du costé de Sainct-Victor ». De ce mariage naquit Marseille d'Alto- vitis qui fut célèbre comme poète et devint elle-même la mai- tresse du jeune duc de Guise, gouverneur de la Provence à l'é- poque où la ville de Marseille, longtemps inféodée aux Ligueurs, reconnut enfin l'autorité d'Henri IV, Lorsque, en 1597, l'étudiant Thomas Platter vint de Montpellier à Marseille, il alla visiter la maison et le jardin de la jeune baronne de Castellane, et voici la description qu'il en a donnée : « Après déjeuner je me fis con» duire en bateau, avec quelques Allemands, de l'autre côté du port, à la maison de plaisance de Mme de Castellane, la maitresse du duc de Guise, gouverneur de la province, Nous y vimes un magnifique jardin avec des bordures et des allées sans nombre, | Î 4 | È | | | . Eee A défaut d’autres raisons, ces rapports de Pierre Pena avec la noblesse provençale lui eussent inspiré le désir d'aller à Aix et de faire à son compagnon les honneurs de cette brillante capitale de la Provence oùilavait, sans nul doute, beaucoup de parents et d'amis. Parmi les différentes espèces qui s’offrirent à leur vue au cours de leurs herborisations à travers le terroir d'Aix, ils ont signalé le « Polinm montanum luteum ». C'est le Teucrium aureum Schreb., forme subordonnée du Teucrium Polium L., essentiellement méridionale, et dont les glomérules de fleurs dorées font sur les collines provencçales un si gracieux effet, ainsi qu'ils n’ont pas manqué de le constater: «Propè Aquas Sextias quibusdam superciliis collium et cli- vorum, luteis occurritfloribus,spectatu jucundis (1)». Cette Germandrée est d’ailleurs la seule des plantes de la florule aixoise insérées au Sfirpium Adversaria que les auteurs aient personnellement récoltée. Mais d’autres plantes du même territoire leur furent com- muniquées par Jacques Raynaudet. Au nombre des dons que leur fit le jeune pharma- cien de Marseille, il en est un qui nous révèle un fait bien surprenant. Si, comme il n’est pas permis d’en douter, Raynaudet était un botaniste éminemment consciencieux et digne de foi, il faut admettre que la ainsi qu'une grande serre remplie d’orangers et de citronniers dans des vases ; le jardinier qui nous conduisait, n'ayant pas la clef de la salle d'armes, nous ne pûmes la voir que de l'exté- rieur ; mais nous visitâmes les appartements, qui sont superbes et ornés de belles tapisseries. En bas, dans la cour, avant de sortir, on nous montra une autruche vivante dont je pouvais à peine atteindre la tête avec la main. Nous lui fimes avaler sans difficulté des clous de fer à cheval. Le jardinier nous jura qu'il lui en avait vu avaler beaucoup, ainsi que des clefs, qu'elle n'avait jamais rendues ; preuve évidente qu’elle avait digéré le tout. » (Félix et Thomas Platter à Montpellier, traduct. Kieffer, p. 304.) (1) Sfirp. Adv., p. 207, — . campagne d'Aix possédait, il y a trois cénts ans, une espèce qui depuis lors en a totalement disparu. Ainsi que nous avons déjà eu l’occasion de le rap- peler, les phytographes du xvr° siècle tenaient avant tout à vulgariser, après les avoir découvertes, les plantes que Dioscoride avait recommandées. Dioscoride distinguait deux sortes de Cumin : le Cumin cultivé « Cuminum sativum », et le Cumin sauvage « Cuminum sylvestre ». Sur l'identité du Cuminum sativum on était fixé. On le recevait de la Syrie, de la Cilicie et de la Grèce (1). Mais où pouvait-on se procurer le Cuminum syl- vestre Dioscoridis ? « Deux plantes, disent les Adversaria,— qui crois- sent en abondance dans des endroits pierreux près d'Aix en Provence représentent cette espèce. Le zélé pharmacien marseillais Jacques Raynaud nous en envoya à Montpellier plusieurs pieds, ainsi que de la graine destinée à être semée. De là ce Cumin a été transporté dans quelques jardins d'Italie, où il est rare, peu de gens l'ayant cultivé (2) ». Ces deux plantes, qui répondaïient aussi bien l’une (1) Stirp. Adov., p. 330. — C'est le Cuminum Cyminum de Linné. (2) Stirp. Adv., p. 330 : « Speciem præ se ferunt utriusque Syl- vestris duæ plantæ, quæ locis glareosis propè Aquas Sextias Galloprovinciæ ubertim crescunt : cujus stirpes aliquot et semen serendum nobis Monspellium misit Jacobus Reinaudus industrius Pharmacopœus Massiliensis, et indidem in hortos quosdam Italiæ translatum fuit, ubi rarissimum à paucis colitur ». — Le pharmacien marseillais, ami et correspondant de Pierre Pena, devait s'appeler Raynaud ou Reinaud, ainsi que son nom est écrit dans le paragraphe qui précède. La forme Raynaudet était, selon toute probabilité, un diminutif que l'on employait familièrement par amitié et aussi parce que le pharmacien botaniste était encor jeune. C'est d'ailleurs ce diminutif (Ray- naudelus) qui revient le plus souvent, avec des variations d’or- thographe, sous la plume des rédacteurs soit du Stirpium Ad- versaria, soit de l'Historia plantarum universalis. + Re que l’autre au Cumin sauvage de Dioscoride, le ré- dacteur de cette partie de l'ouvrage cherche à les distinguer, et il consacre à chacune d'elles un article spécial. À l’une il attribue tout simplement le nom de « Cuminum sylvestre Dioscoridis ». Pour l’autre, il allonge ce nom en y ajoutant les mots « alterum sili- quosum ». La plante appelée Cuminum sylvestre sans épithète est décrite et dessinée dans les Adversaria. La des- cription et le dessin sont fidèles. On y reconnait tout de suite l'Ombellifère que Linné a nommée Lagoecia cuminoides (1). Que faut-il conclure de cette circonstance ? Nous inclinons à penser qu'en ce temps-là le Lagoecia cuminoides existait réellement aux environs d'Aix. L'envoi à Montpellier d'échantillons de Lagoecia, fait par Raynaudet à l’un ou à l’autre des auteurs du Stirpium Adversaria, est un point qui ne saurait être mis en doute. Nous avons une confiance absolue en la sincérité de ces écrivains. Nous considérons comme rigou- reusement exacts les détails qu'ils ont rapportés. Toutes les fois qu’il nous a été possible de contrôler personnellement l'exactitude de leurs déclarations, nous avons eu la preuve de leur véracité (2). Il est, par conséquent, certain qu'ils ont reçu à Montpellier des échantillons de Lagoecia envoyés par Jacques Raynaudet, et qu’ils ont décrit et dessiné cette plante d’après nature, au moyen des exemplai- res qui venaient de leur être ainsi adressés. (1) Gaspard Baubhin (Pin., p. 146) a nommé « Cuminum sylvestre capitulis globosis » la plante que les Adversaria appelaient « Cu- nimum sylvestre Dioscoridis » ; et Linné (Sp., p.294) a inscrit l’es- pèce du Pinaæ comme synonyme de son Lagoecia cuminoiïdes. (2) Nous avons pu notamment faire ce contrôle un peu plus haut, au moyen des détails, que nous avons reproduits, relatifs à la ville de Marseille, au quartier de Mont-Redon, au jardin du gouverneur Pierre Bon, etc., etc. Eur de de 4 a x 5 " 4 » 1 LU SRE Raynaudet aurait-il commis une erreur, volontaire ou fortuite, en indiquant faussement comme pris à Aix les pieds et les graines de Lagoecia expédiés par lui à ses amis de Montpellier ? Cela nous paraît inadmissible. On a vu avec quels chaleureux éloges les Adver- saria parlent de Raynaudet. Les auteurs de ce livre, sérieux eux-mêmes ettoujours véridiques, n'auraient pas loué comme ils l’ont fait le pharmacien marseil- lais, si celui-ci eût été sujet à caution. D'autre part, nous ne relevons aucune erreur dans les envois (une vingtaine environ) que fit Jacques Raynaudet soit aux rédacteurs des Adversaria, soit à Jean Baubhin. Toutes les plantes qu'il leur communi- qua sont bien des espèces de la Provence. Peut-on croire qu'ilse soit trompé pour le Lagoecia et que par mégarde, en l’envoyant à Montpellier, il ait déclaré sur ses étiquettes l’avoir récolté à Aix, tandis qu'il l’aurait rapporté ou reçu du Levant ? Nous croyons donc qu'en 1565 le Lagoecia cuminoi- des avait le droit de figurer sur la liste des plantes croissant dans la banlieue d'Aix. Cette espèce vient, à notre avis, fournir un nouvel exemple des modifi- cations que subit, dans le cours des siècles, la végé- tation de tel ou tel pays (1). (1) Dans un opuscule intitulé Des modifications de la flore de Montpellier depuis le XVI: siècle jusqu'à nos jours, le professeur Gustave Planchon a donné la liste d'un certain nombre de plan- tes dont un botaniste propagateur, Amoreux, aurait voulu, par des semis, enrichir les Cévennes du Gard : le Lagæcia cumi- noides y figure. Amoreux croyait done que cette Ombellifère pouvait s'acclimater dans la région montagneuse du midi de la France. Nous pensons, du reste, que la présence du Lagæcia aux alentours de la ville d'Aix ne serait pas plus étonnante que celle de l'Anemone palmata L. Or cette Renonculacée se perpétue au milieu des collines qui entourent la vieille tour de la Queirié, en une station connue d'un certain nombre de bota- nistes, signalée par le Catalogue des plantes de Provence d'Honoré Roux, et où nous-même sommes allé la cueillir, — 89 — Le passage des Adversaria que nous avons cité plus haut indiquait qu'il y avait à Aix deux plantes que l’on-pouvait prendre pour le Cumin sauvage de Dios- coride. La seconde, appelée « Cuminum sylvestre alterum siliquosum », est également décrite et figurée dans l'ouvrage ; et sans qu'aucune hésitation soit possible, on reconnaît l’Hypecoum procumbens L. : cette Papa- véracée continue encore à végéter sur le territoire d'Aix. Le même terroir nourrit aussi l'Hypecoum pendu- lum L. Les Adversaria l'y ont signalé, en accompa- gnant d'une figure la mention qu'ils en ont faite. Aucun nom spécial n’est attribué à ce second Cumi- num sylvestre siliquosum. Le texte se contente de dire qu'il existe dans la même localité, «ïisdem natali- bus », une autre plante siliqueuse ressemblant beau- coup à la première, € perquam similis », et s’en dis- tinguant seulement par des feuilles à divisions plus étroites, «folio tenuiore, angustiore, Seseli Massi- liensis divisurà » (1). Il n’est pas douteux pour nous que le fragment relatif au Cumin sauvage, et en particulier la descrip- tion et le dessin des deux Hypecoum, ne soient l'œu- vre personnelle de Pierre Pena. Et voici nos raisons de le croire : Les deux figures d'Hypecoum procumbens et d’H. pendulum insérées dans les Adversaria sont parfaite- ment dessinées et représentent d'une facon très exacte les deux espèces. Néanmoins lorsque Mathias de Lobel voulut plus tard, au moyen de ses Observationes, amender et compléter le premier ouvrage, il jugea défectueuses ces deux figures qu'il croyait, sans doute, représen- tatives l’une et l’autre d’une espèce unique (2). II dé- (1) Stirp. Adv., p. 331. (2) La distinction faite par les Adversaria des deux espèces mt ne clarait que la plante avait été défigurée par le dessi- nateur, « à pictore depravata ». Et désireux de remplacer les images fautives par une gravure irré- prochable, il raconte que pendant son séjour à Mar- seille il envoya en Belgique des graines de cette plante arrachée au sol aride de la Provence, «arido solo Galloprovinciæ eruta » ; que les semis réussirent et que l’un des échantillons obtenus ainsi fut gravé par les soins de son ami Charles de l’Eseluse. Cette nouvelle figure, imprimée dans les Observationes, reproduit l'Hypecoum procumbens (1). Enfin une dernière plante du terroir d’Aïx, le Tele- phium Imperati L., a pris place dans le Stirpium Adversaria, inscrit sous ce titre : « Helianthes, species rara, figurà leguminosä, floribus aureis » (2). Cet Helianthes provenait encore de Jacques Raynaudet, qui était allé le quérir sur le sommet escarpé de Sainte-Victoire. d'Hypecoum a été sanctionnée par Gaspard Bauhin et Linné. Mais, à notre avis, le premier de ces botanistes a commis une erreur en intervertissant les noms. Linné a nommé Hypecoum pendulum la plante que G. Bauhin appelait « Hypecoi àltera species » et qu'il assimilait au « Cuminum allerum Dioscoridis siliquosum » des Adversaria ; et la désignation d'Hypecoum procumbens a été appliquée par Linné à l'espèce que G. Bau- hin nommait tout simplement « Hypecoum » et qu'il prenait pour l'équivalent du « Cumino siliquoso persimilis » des Adver- saria. C'est le contraire qui devait être fait. Le « Cuminum alterum siliquosum » des Adversaria est pour nous l'Hypecoum procumbens et le « Curmino siliquoso persimilis » l'H. pendulum. (1) Stirp. Obs., p. 429. — Lobel dit expressément que le dessin de Clusius doit remplacer la figure de la page 331 des Adver- saria (c'est celle qui représente l'Hypecoum pendulum) : « Eadem est hæc effigies cum corniculatà plantulà descriptà pag. 331 Adversariorum, arido solo Galloprovinciæ erutà et à pictore depravatà ; cujus semen olim Massilià in Belgium transmisi, ubi feliciter enatam, sculpendam curavit Clusius noster, » (2) Stirp. Ado., p. 405 : « Dono misit nobis hanc noster indus- trius et peritus Pharmacopæus Jacobus Raynaudet quam é jugis arduis montis D, Bonaventuræ, non procul Aquisextiis erue- rat. » Le Telephium Imperati se rencontre çà et là en Pro- A Te , # m0. Lu De D Le mont fameux de la Victoire, qui perpétue à tra- vers les siècles le souvenir du désastre infligé par Marius à l'invasion germanique, reçut, après l’éta- blissement du christianisme, le nom de Sainte- Victoire, qu'il porte encore aujourd'hui. De sainte Victoire le peuple de Provence avait fait sainte Bona- venture (santo Ventüri en provençal), et c’est sous cette forme que les Adversaria font mention de la célèbre montagne (1). Pena et Lobel n’avaient-ils pas été tentés d’en entreprendre l'ascension pendant qu'ils se trouvaient à Aix? Rien dans leur livre ne l'indique. Il est pro- bable que Pena, né dans le pays, l'avait déjà faite. Quant à Lobel, la tradition s'était conservée à Aix qu'il était allé herboriser à Sainte-Victoire. Et lors- que, au siècle suivant, Garidel écrivait son Histoire des plantes qui naissent aux environs d'Aix, il disait à propos du Fustet : «Cet arbrisseau est assez commun en Provence. Lobel doit lavoir vû sur le chemin qui va à la montagne de Santo-Ventüri, de même que vence, mais il n'est point commun, et les auteurs du Séirpium Adversaria ont eu raison de le qualifier de species rara. 11 con- tinue d’ailleurs de croître aux lieux d'où Jacques Raynaudet l'avait rapporté ; nous-même l'avons cueilli près de Vauvenar- gues, au pied de la montagne de Sainte-Victoire. (1) Dans une étude intitulée La Tradition des Saintes-Maries (Marseille, 1874), M. F. Reynaud, archiviste-adjoint des Bouches- du-Rhône, explique ainsi cette transformation de nom : « Après le triomphe tant désiré, un autel fut naturellement élevé à la Victoire sur la montagne qui a conservé son nom (Mons Vicloriæ, Sainte- Victoire). Un culte officiel lui fut rendu ; il se perpétua longtemps après le départ de Marius .. La même montagne vit honorer le dieu du Succès, Boni Eventüs, comme paraît l'indi- quer une inscription citée par Rouchon (Mém. de l'Acad. d'Aix, t. vur, p. 286). De là naquit une autre appellation paienne, tra- vestie encore par les générations chrétiennes en Santo-Ventüri et Sainte-Bonaventure. Ce dernier nom figure dans le dénom- brement donné par la communauté de Vauvenargues en 1635. » — On a vu par le texte des Adversaria qu'il était en usage au xvie siècle. SAS dans le bois de Rians appelé la Guarduelo, et au val- lon du Dragon dans le terroir de Rougnes (1).» Si le texte des Adversaria laisse un doute au sujet du mont Sainte-Victoire, il relate expressément l’as- cension d'une autre montagne célèbre de la Pro- vence : celle de la Sainte-Baume. La Sainte-Baume tire son nom d’une grotte (baumo en provencal) au fond de laquelle, suivant une ancienne tradition, la Magdeleine de l'Evangile, miraculeusement transportée en Provence, serait venue expier les légèretés de sa vie passée et achever ses jours dans les larmes et la prière. Cette grotte s'ouvre, à une grande hauteur, au milieu de la paroi verticale d'une chaine calcaire taillée à pic du côté du Nord, et dont le point culminant atteint presque une altitude de 1200 mètres. Sur le versant septen- trional de la chaine, au-dessous des escarpements, s'étale une superbe forêt que le souvenir de sainte Magdeleine a de tout temps protégée contre la cognée. Le Hêtre, l'If, l'Erable à feuilles d'Obier, le Tilleul, l'Ilex aquifolium y sont les essences dominantes. Sous ces grands arbres et dans les escarpements de la montagne se développe une florule subalpine qui, pour la Provence partout ailleurs chaude et sèche, constitue une précieuse rareté. Aussi depuis le xvre siècle une multitude de botanistes sont venus y herboriser. D'où partirent les deux étudiants de Montpellier, (1) Il ressort de ce passage de Garidel que de son temps on tenait pour certain que Mathias de Lobel était monté à Sainte- Victoire et qu'il avait parcouru dans tous les sens le terroir d'Aix ; Rognes (Bouches-du-Rhône) et Rians (Var) sont deux villages assez éloignés de l'ancienne capitale de la Provence. — L'Histoire des plantes qui naissent aux environs d'Aix fut pu- bliée à Aix en 1715 (il existe quelques exemplaires qui portent la date de 1714). Garidel avait alors 56 ou 57 ans. Comme cet ouvrage était le résultat de longs travaux, entrepris dès sa jeu- nesse, on doit considérer l’auteur comme un botaniste apparte- nant au xvure siècle plutôt qu'au xvrrre, 57 #mfd ro LE AT Le oi DS 77 —— 93 — quand ils se mirent en route pour la Sainte-Baume ? D’Aix peut-être, mais plutôt, croyons-nous, de Mar- seille. Quelques-unes des plantes signalées dans leur Flore semblent marquer leur itinéraire et jalonnent encore la route agreste qu'ils dürent suivre par Aubagne, Gémenos et, tout au long, la vallée de Saint-Pons. C’est dans cette riante vallée, en s’élevant vers les hauteurs que domine, comme une pyramide cyclo- péenne, la masse imposante du Pic de Bretagne (1), qu'ils rencontrèrent d’abord la Ginèsto des Proven- çaux, le Genèêt d'Espagne (Spartium junceum L.). Cet arbuste croit toujours, en grande abondance, au même lieu, et quand en juin, aux premières clartés de l’aube, le voyageur gravit ces pentes, il marche enveloppé d'effluves parfumés dont l'intensité est enivrante (2). C'est au-dessus de la zône des Genèêts, et avant d'atteindre le col qui porte actuellement le nom de Pas de la Brasque, qu'ils cueillirent une Crucifère à laquelle, faute de meilleure désignation, ils appli- quèrent cette périphrase : « Plante provençale inter- médiaire entre la Moutarde et le Tabouret, — Sinapi el Thlaspi media Provincialis planta », et qui ne peut (1) Le Pic de Bretagne (dont l'altitude est de 1043 m.), s’ap- pelle en provençal « Lou Baus de Bartagno » (F. Mistral, Dict. prov.-fr.). Il est mentionné sous le nom de Mons Brilannicus dans une charte de l'an 1001 par laquelle Guillaume, vicomte de Marseille, fit donation des terres du Plan d’Aups à l’abbaye de Saint-Victor. (Publiée par M. Louis Blancard, archiviste en chef des Bouches-du-Rhône, dans les Mémoires de l'Académie de Marseille, 1885-87 : La Charte de donation de Ségalarie.) (2) Les rédacteurs du Stirpium Adversaria désignent ainsi (p. 408) notre Genêt d'Espagne, où ils voient, sans pouvoir SY méprendre, disent-ils, la plante décrite par Dioscoride : « Spar- tium Dioscorideum Hispanicum et Norbonense vimineum majus ». Ils constatent que cette Papilionacée, qu'ils ont trouvée en Pro- vence, vient aussi « Hispaniis et Norbonensibus præsertim maritimis collibus, vel non procul à litoribus ». Jean Bauhin a peint avec complaisance le tableau qu'offrent nos collines quand, OT PERRET E 4 eh DEL AD ? 1 Le. La CS WE r + PR IN parmi: a C 22 be être, à notre avis, que l’Erysimum australe Gay, toujours fréquent en cet endroit (1). C'est après avoir franchi le col et commencé à descendre vers le Plan d’Aups, — vaste plateau au- dessus duquel on remonte ensuite pour atteindre la forêt, — qu'ils foulèrent l’Achillea tomentosa L. (2), croissant au milieu des touffes serrées du Santolina Chamæcyparissus L. (3). $ C’est enfin après avoir traversé la belle forêt, et en escaladant les rochers que surmonte l'entrée de la grotte, qu'ils aperçurent dans les escarpements abrupts, «€ in præruptis Sancti Specus vocati, ad au mois de juin, elles sont dorées par la floraison du Spartium : « Magnum et jucundum spectaculum præbent viatoribus, quo- niam tam copiosè suis speciosis ac fulgentibus floribus ornantur et vestiuntur colles, ut procul aurei videantur. » (1) Stirp. Adv., p. 72. — La station de cette « Planta Provin- cialis » y est ainsi indiquée : « Non procul Magdalenæ fano et cautibus illis celsissimis famigeratissimis. » Gaspard Bauhin (Pinax, p. 109) a donné à la plante de la Sainte-Baume le nom de « Draba Erysimi flore et siliquis ». Mais Linné, embarrassé pour appliquer cette désignation à l'une des espèces créées par lui, ne l’a pas relevée, et ici la filière des synonymes se trouve interrompue. Nous devons reconnaître que la figure donnée par les Adversaria ne s’identifie pas très bien avec l'Ery- simum australe. Mais la plante représentée appartient au groupe des Siliqueuses et, d’après le texte, ses fleurs sont jaunes. Si ce n’est pas là notre Erysimum, il faut renoncer à découvrir le véritable état-civil de la Crucifère qui, au xvre, siècle végétait dans ces parages. (2) Les Adversaria donnent à diverses espèces d’Achillée le nom générique de « Mililtaris sive Millefolium ». Le premier de ces mots est une allusion aux propriétés vulnéraires de ces plantes, auxquelles les soldats avaient recours pour la guérison des blessures. Les espèces ou « varielates » sont différenciées d'après la couleur des fleurs. L'Achillea tomentosa, trouvée « in montosis, squallidis, editis sed æstuosis, ad Magdalenæ saxeum specum Provinciæ Galliæ », est caractérisée par ses fleurs jaunes, « luteo aspectu micantes umbellæ », et par la pubescence de toute la plante, « cinereo colore et lanugine pubet tota, » (Stirp. Adv,, p. 331.) (3) Pena et Lobel ont admis deux fois, sous des noms — 95 — fanum Magdalenæ », le Seseli montanum L. et le Ge- nista aspalathoides Lamk. (1). A leur descente de la grotte, ils se dirigèrent vers différents, le même Santolina Chamæcyparissus. Is désignent la plante de la Sainte-Baume sous lappellation de « Seriphium Dioscoridis Abrotani fœminæ facie », et plus loin (p. 341) ils étudient dans un chapitre distinct l’« Abrotanum fœmina ». Cette confusion n'avait point échappé à Jean Bauhin (Hist. plant. univ., t. IT, p. 133). Mais Gaspard Bauhin, dans le Pinax, a maintenu la différence. À l’Abrotanum fœmina il a conservé ce nom en y ajoutant les mots : « foliis Leretibus », et c'est la plante dont Linné a fait le Santolina Chamæcyparissus. Quant au Seriphium des Adversaria, Gaspard Bauhin le nomme « Abrota- num fœmina flore majore, foliis villosis et incanis », transformé par Linné en la variété à de son Santolina rosmarinifolia. L'auteur du Species disait de cette dernière espèce : « Habitat in Hispaniä. » Pourtant, Gerard l'inscrit dans le Flora Gallo- Provincialis avec cette mention : « Oritur in rupe Victoriæ, in- que maritimis montibus apricis. » Mais la Flore de France de Grenier et Godron dit avec raison du Santolina rosmarinifolia : « Plante de Provence, suivant Gerard ; n'y a pas été revue. » C'est donc le S. Chamæcyparissus que les auteurs du Sfirpium Adversaria ont trouvé près de la Sainte-Baume. Cette Corymbifère y croît toujours en grande quantité, et, parmi les stations indi- quées au Catalogue des Plantes de Provence d'Honoré Roux, nous lisons : « Plan d’Aups, jusque sur les hauteurs du Saint- Pilon. » — Quelques floristes modernes subdivisent le S. Cha- mœæcyparissus, et y voient deux espèces qui nous paraissent n'avoir qu'une médiocre valeur : S. incana Lamk.et S. squarrosa Willd. Déjà, il y a plus de trois siècles, Lobel (Observ., p. 436) constatait la variabilité du type suivant les conditions du milieu, et il disait du Seriphium des Adversaria : « Successu temporis degenerat : fragrantià, tomento et candore eruitur in Belgii et Angliæ viretis. » (1) L’'Ombellifère en laquelle nous croyons reconnaitre Île Seseli montanum de Linné est appelée « Caucalis Anguillaræ » par les Adversaria, «Caucalis Penæ » par l'Historia Lugdunensis, « Caucalis folio Peucedani » par le Pinax, et « Fœniculum syl- vestré humilius Peucedani folio » par les Instituliones rei her- bariæ. La série des transformations onosmatiques ne descend pas plus loin : notre assimilation n'est donc pas corroborée par la généalogie ininterrompue des synonymies. Mais elle se fonde sur une ressemblance très suffisante entre la figure des Adver- saria et notre Séséli, et sur cette circonstance qu'il ny a dans CL Rs Lu re 3 AAA tua, t- — 96 — En Saint-Maximin (1), et, suivant toute vraisemblance, rissus qu'ils retrouvèrent quandils eurent à traverser une seconde fois le Plan d’Aups : «In Galloprovincia montis celsi Magdalenæ celebris acclivibus quà Sanctum Maximinum spectat oppidum (2). » En continuant à descendre pour gagner la plaine de Saint-Maximin et prendre la route de Brignoles, ils notèrent la présence d’un arbuste épineux qui est très commun dans toute la Provence, et qu'ils eurent occasion de revoir sur d’autres points, l'Ajone à la florule de la Sainte-Baume aucune autre Ombellifére à qui pourraient s'adapter les détails caractéristiques fournis et par cette figure et par le texte. On remarquera, dans l'indication de l'habitat, le mot de fanum employé par les Adversaria : la grotte … où sainte Madeleine fit pénitence avait été de toute ancienneté # convertie en chapelle, et cette affectation ne lui a pas été en-. levée. — A l'appui de notre traduction en Genisla aspalathoides Lamk. du « Spartium aphyllon fruticosum junceis aculeis » de Pena et Lobel, nous avons l'autorité de la Flore de France de Grenier et Godron qui admet la plante des Adversaria parmi les synonymes de l'espèce dont Lamarck est l’auteur. Un cer- tain nombre de botanistes ne considèrent pas comme spécifi- quement distincte du Genista aspalathoides la forme qui a reçu le nom de G. Lobelii DC. S'il y avait lieu de voir là deux espè- ces légitimes, c'est à la plante de la Sainte-Baume que devrait être appliquée la dénomination créée par De Candolle, — Remarquons en passant que le fait par De Candolle de dédier son espèce à Lobel seul était une nouvelle méconnaissance des droits de Pierre Pena. D'après la nouvelle Flore de France de MM. Rouy et Foucaud, le Genista aspalathoides Lamk. « est une plante d'Algérie et de Tunisie qui n'existe ni en France ni en Corse », et il faudrait laisser à celle de la Sainte- Baume le nom de Genista Lobelii DC. sd. v (1) Saint-Maximin, chef-lieu de canton de l'arrondissement de Brignoles (Var), montre avec orgueil la magnifique église ogivale dont Charles IT d'Anjou, comte de Provence, entreprit la cons- truction à la fin du xmr siècle; c'est là que sont conservées les reliques de sainte Magdeleine. (2) Slirp. Adov., p. 336. ‘3 OR 22 petites fleurs (Ulex parviflorus Pourr.), représentant à leurs yeux la € Nepa » de Théophraste (1). Entre Saint-Maximin et Brignoles, le trajet est court. La petite ville de Brignoles s'était fait, par les soins que l’on y donnait à la culture du Prunier, une répu- tation spéciale qui s'étendait fort loin. Les « Prunes de Brignoles » étaient renommées. Elles avaient même «enlevé la palme », suivant l'expression de Pena et Lobel, à la qualité appelée « Prunes de Damas », considérée autrefois comme la plus ex- quise : (« Damascenis omnium olim præstantissimis, Brignolensia hodiè in Galloprovincia palmam præri- puerunt bonitate, salubritate et sapiditate (2). » (1) Stirp. Adv., p. 353 : « Eam nullibi præterquämin Provincia vidimus, locis montosis uberè fruticantem, præsertim propé montium radices qui Magdalenæ celebri Fano et Specui Sancto nuncupato finitimi sunt, via qua Aquassextias itur. » — L'Ajonc est appelé « Nepa » parce qu'il pique comme le scorpion, « Nepa vocatur cognomine ab animalculo caudæ ietu metuendo ». (2) Un fait curieux auquel Jean Bauhin a fait allusion en son Historia plantarum universalis prouve combien, au xvire siécle, ces fruits étaient appréciés, même en haut lieu. Les prunes de Brignoles se trouvèrent mêlées à l'un des plus tragiques épisodes de l'histoire de France. A Blois, quelques instants avant de tomber sous les coups de ses meurtriers, le duc Henri de Guise eut occasion de manger une prune de Brignoles, au milieu de circonstances que l'histoire a conservées. «… Cependant il n'étoit pas encore jour, rapporte le grave De Thou, que ceux qui devoient assister au Conseil y étoient déjà arrivés... Louis de Lorraine cardinal de Guise et l'Archevèque de Lyon ne sy rendirent que quelque temps après. Enfin arriva le duc de Guise qui, à ce qu'on prétend, avoit passé cette nuit-là avec une dame de la Cour qu'il aimoit avec passion, et qui pour cette raison s’étoit levé un peu tard... A peine fut-il entré au Conseil, qu'il se représenta avec frayeur toute la grandeur du péril auquel il étoit exposé... et qu'il reconnut la faute qu'il avoit faite. Il étoit trop tard pour la réparer ; du moins faloit-il cacher sa crainte. Il s'étudia donc à tenir bonne contenance ; mais quel- que effort qu'il pût faire, la frayeur prévalut ; quoiqu'assis le dos tourné vers le feu, il devint tout-à-coup froid comme marbre ; en { +, ant Pe - 7" = FRS A +14 :2 dE À. de: 4 ' PQ Nos deux voyageurs firent aux environs de Brigno- les une découverte intéressante. Ils y rencontrèrent l’'Anagyris fœtida L., arbuste dont Charles de l'Es- cluse avait, quelques années auparavant, trouvé une station tout près d'Arles. Ils ont, dans leur journal de route, indiqué d’une façon précise l'endroit où l'Anagyre s'offrit à leurs regards : ce fut après qu'ils eurent dépassé Brignoles et le Val, sur les bords de la rivière d’Argens. Ils récoltèrent des graines qu'ils envoyèrent en Flandre. Ces graines semées y levèrent et la plante s’y développa, et aussi à Londres dans le jardin du pharmacien Morgan. Aucun doute, disent- ils, ne pouvait naïitre sur l'identité de l'Anagyris. L'odeur fétide qu'elle exhalait leur avait donné une certitude complète (1). Il est à supposer que, décidés à poursuivre leur course vers la Haute-Provence, les deux amis tra- même temps le sang lui sortit du nez en abondance; et ayant demandé un mouchoir, les valets de chambre lui apportèrent aussi à sa prière quelques confitures dont il prit un peu pour se fortifier. Au reste il y eut des gens qui attribuërent moins cette faiblesse du Duc à la peur, qu'à la fatigue et à l'épuisement de la nuit précédente. » — Les confitures dont parle De Thou étaient précisément nos prunes de Brignoles. D'Aubigné, en son Histoire Universelle, dit expressément que « S. Pris lui avoit aporté des prunes de Brignoles, au lieu d’'escorce de citron qu'il avoit demandée » ; et à son tour Palma Cayet (Chronique noven- naire) raconte ainsi l'incident : « M. de Guyse, qui estoit sujeet à un mal de cœur, prit dedans ses chausses une petite boiste d'argent pour y penser trouver quelques raisins et n'y trouvant rien demanda à Sainct-Prix, valet de chambre de Sa Majesté, qu'il lui donast quelques bagatelles du roy. Sainct-Prix lui alla querir quatre prunes de Brignoles desquelles il en mangea une et les trois autres il les mist dans sa dicte boiste.» Le dernier trait rapporté par Cayet montre que grâce à la prune de Brigno- les le Balafré avait repris tout son sang-froid, (A) Stirp. Adv., p. 389 : « Semen lectum Anagyridis eminus etiam fœtentis in erepidinibus Argentei amnis vocati, Briniolam inter et Vallum urbeculas Galloprovinciæ, in Belgio cerevit, etiamque Londini nobis provenit in Morgani vireto : … quin sit vera nulli jam dubium reliquit semen et fœtidissimus odor, » RE LE Hu LR _ versèrent l’Argens et vinrent à Moustiers (1) où ils firent halte. EV A Moustiers, ils signalent le « Carduus Benedictus » (Cnicus benedictus L. Sp. 1'° édit.) (2). Après avoir dit que les « chymistæ » et les « clinici morbi Gallici lini- tores » ont grand soin de cultiver cette plante, ils indiquent qu'elle croit « sur les hautes Alpes de la Provence, près de Moustiers, en un lieu appelé Marignols où, en creusant le sol, on trouve partout des Crystalinæ, des Jrides et d’autres pierres de dif- férentes couleurs (3). » (1) Moustiers-Sainte-Marie, chef-lieu de canton de l'arrondisse- ment de Digne (Basses-Alpes). (2) Le nom de Benedictus avait été donné à cette plante par le populaire : « Benedictum seu felicitatum Carduum plebeius con- _ sensus nuncupavit », sans doute à cause des vertus qu'on attri- - buait au Chardon béni : « Magni usus, — dit Lobel dans les - Observaltiones, — et commendationis ad capitis vertiginosos . dolores et pestiferos morbos. » On le regardait comme souverain contre la syphilis (morbus gallicus). …_ (3) Stirp. Adv., p. 372: « In arduis alpibus Galloprovinciæ …. propè Monsterias Marignols vocatis, ubi undique effodiuntur ee Crystalinæ, Irides, et varii coloris alii lapides, crescit : in summo …_ montis rigidior et aliquantd minor hortensi. » — La chaine sur … le versant occidental de laquelle est situé le domaine de Mari- - gnols (ce nom continue d'être inscrit sur les cartes) est appelée Serre de Montdenier : le point culminant atteint l'altitude de 1750 m. La Carle géologique détaillée (feuille 224, CASTELLANE, _ dressée par M. Zurcher) montre que ce massif appartient en . grande partie au jurassique supérieur, qui se présente là sous le … faciès tithonique. « Les calcaires tithoniques, de texture litho- _ graphique, sont entremêlés de remarquables assises bréchoïdes, - de couleur claire au sommet; ils deviennent gris plus bas et _ contiennent quelques silex ; leurs bancs forment des escarpe- _ ments caractéristiques... Les calcaires blancs sont souvent à peine stratifiés sur leur énorme épaisseur et leurs falaises sont d'un aspect grandiose. » — En lisant le texte des Adversaria, . nous éprouvames un vif désir d'être renseigné au sujet de l'exis- tence, signalée par Pena et Lobel, des pierres brillantes aux- _ quelles ils donnaient les noms de Crystalina et d'Iris, et nous résolûmes d'entreprendre nous-même l'ascension du Serre de e _ Montdenier. Lorsque nous atteignimes la partie de la montagne où se trouve Marignols, nous eûmes le plaisir de voir scintiller 7. nr + 4 A 3 Fe « dd LA ù de LL Pas LS NE PATATE + cs d + HS pas LATE SE PANNE dé + P £: La: 5 c , VAT = + Ju D : — 100 — * Is citent encore à Moustiers l'Amélanchier, qu'ils intitulent: «€ Amelancher Galloprovinciæ montanæ », en déclarant qu'il n'y a pas, dans la région monta- gneuse de la Provence, d’endroit rocailleux où cet arbuste ne se propage. Et en même temps que Mous- | tiers, ils désignent comine stations de cette Pomacée les petites villes de Sisteron et de Digne par les- quelles ils passèrent au cours de ce voyage à travers les Alpes de la Provence (1). Is vantent le fruit de l'Amélanchier, dont le goût sucré était, paraît-il, fort … 4 ES apprécié de la € plebecula » et que la langue populaire … nomimait Amelancho (2) ; les rameaux, flexibles de 3 sur le sol d'admirables cristaux de couleur variée, « varü colo- ris ». C'étaient bien là les gemmes que nos auteurs avaient aper- cues au même endroit, il y a près de trois siècles et demi. Grande fat notre satisfaction d2 resueillir cette nouvelle preuve de leur véracité et de la foi qui leur est due quand ils attestent un fait personnel. — Le savant professeur de géologie à la Fa=« culté des Sciences de Marseille, M. Vasseur, à qui nous nous €M= pressimes de montrer notre trouvaille, y reconnut des cristaux de quartz hy4lin bi-pyramidé, dont plusieurs de couleur grise ou Fe u noirâtre constituent la variété äite quarlz enfum£. D'après Ia carte g‘ologique précitée, le terrain où nous les primes appar-« tient à l'étage néocomien. Ces quartz ne proviennent pas des. couches jurassiques ou critacies qui forment l’ossature de la montagne : originaires du trias, ils furent transportés là par les” eaux. — Relativement au Cnicus benediclus, nos botanistes com- mirent certainement une erreur de détermination. Nous n'avons. pas rencontré cette Carduacée sur le Serre de Montdenier, €t nous étions sûr d'avance que nous ne l'y verrions pas, le Chardon béni étant une plante qui recherche les terres cultivées. D'ail- ? leurs 12 rédacteur de ce chapitre des Adversaria constatait lui même des différences entre la plante des cultures et celle de Ia montagne. Il disait de celle-ci : « In summo montis rigidior Ctn aliquantd minor lortensi. » Nous avons déjà cu l'occasion de faire observer qu'au xvit siècle les phytographes identifiaient * , . . N les végétaux au moyen de certaines ressemblances, mais Sans tenir compte des caractères vraiment essentiels Ce. (1) Stirp. Adv., p. 441 : « Scatent Lac loca aspera prépè Diniam,« Mosterias ct Sisteronem illic urbeculas. » - LA 42 (2) « Çuasi mellea », disent nos auteurs qui cherelkent tou” jours des étymologies à tort et à travers. 0 di TAUPE leur nature, formaient, réunis en faisceau, des balais que l’on employait pour rendre nettes les aires à fouler le blé. Enfin, la dernière localité qu'ils atteignirent, à l'extrémité du territoire provençal et près de la fron- tière, fut Colmars, gracieuse et minuscule place forte construite en travers de la haute vallée du Verdon pour barrer la route à une invasion piémontaise. Ils ont nommé Colmars à propos du Lathyrus tuberosus L. qu'ils y cueillirent (1). Pour quelques espèces alpines, ils se sont contentés de donner comme habitat « les Alpes de la Pro- vence », sans indication plus précise de localité (2). (1) Stirp. Adv., p. 398. — Dans le titre de l’article consacré à la Gesse tubéreuse, ils la nomment « Terræ glandes » et « Pseudoa- pios Germanorum », et ils indiquent, avec un point d'interroga- tion, que c'est peut-être l’ « Astragalus » de Dioscoride. Dans le corps de l’article, ils disent que les Allemands appellent encore cette plante « Raphanus niger », « Suillus Panis » (Pain de pour- ceau) et « Balanus terrestris ». Pour achever de montrer au milieu de quelle logomachie on se débat souvent quand on veut établir l'état-civil de plantes auxquelles les phytographes du xvIe siècle donnaient tant de noms, voici les autres synonymes du ZLathyrus tuberosus, que nous relevons dans le Pinax de Gaspard Bauhin (p. 344) : Apios Trag. Fuchs. Chamæbalanus Dod. Taber. Ornithogalum purpureum Cord. Astragalus Penæ Lugd. Panis porcinus Lonic. Astragalus arvensis Thal. Glandes terrestres Clus. Arachidna Theophrasti Colum. On peut considérer Gaspard Bauhin comme l'auteur de l'ap- pellation moderne. Il avait écrit : « Lathyrus arvensis repens tuberosus. » (2) « In montibus Alpinis Galloprovinciæ, Pedemontii conter- minis. » LE, VO En ANNE LE Te pe it À Mi 7 ee LR F; LE er 2. Pate: 1 ré ES A RE ue 7 Pis 1 a L cs . S" PÉLART" — 102 — Ce sont les suivantes : Thora. Ranunculus Thora L. Bulbosa folliata... (1). Lunaria biennis Mæœnch. Anagyris minus fœlens vel Laburnum (2). Cytisus Laburnum L. Larix. Larix europæa DC. Au sujet de la Renoncule Thora, ils exposent à quel curieux usage elle était alors employée. Quand venait le printemps, les gens du pays exprimaient le suc de la plante, en emplissaient des vessies, ou mieux des cornes de bœuf, et le portaient ensuite sur le marché des villes les plus voisines. Ces provisions de suc vénéneux se vendaient à des chasseurs qui s'en servaient pour empoisonner leurs flèches et faire ainsi aux bêtes de chasse des blessures mor- telles. Les Dauphinoiïs, les Savoyards et les Proven- caux, ajoutent nos auteurs, donnaient à ces traqueurs de bêtes sauvages le nom de Bessiers ou Lobatiers (3). (1) Stirp. Adov., p. 136. (2) Stirp. Adv., p. 388. — Le Cytisus Laburnum L. et Île Cytisus alpinus Mill. sont des espèces affines : à proprement parler, le second n'est, croyons-nous, qu'une forme montagnarde du premier. Il est très possible que ce soit cette forme que Pena et Lobel aient rencontrée dans les Alpes de la Provence, où elle est commune. Cependant, l'indication donnée dans la diagnose relativement aux feuilles : « folia terna, ex pallore viridia » nous fait un devoir de conclure en faveur du type. — Ce Crytise, que les Provençaux nomment Aubour, produit un bois très dur. Le fait n'avait point échappé aux auteurs du Stirpium Adversaria, qui nous disent qu'on l'employait à fabriquer des instruments rustiques : « Fruticat ad arboris proceritatem prædura materia, rusticoque instrumento nata ». Les bergers de la Provence façon- nent encore avec ce bois les colliers (cämbis en provençal) dont on entoure le cou des brebis pour y suspendre les sonnailles. (3) Nous supposons qu'il y a dans le premier de ces mots une faute d'impression et qu'au lieu de Bessiers, il faut lire Bestiers (chasseurs de bêtes). Le mot de Bestié n'est pas dans le Trésor de Frédéric Mistral, On y trouve celui de Loubatié avec la même signification (chasseur de loups). — 103 — En même temps que la Thora on appliquait à pareil usage les Aconits et les Hellébores, toutes plantes que les gens du pays appelaient, à cause de cela, Sagittaires, et les Espagnols, Hierva de los Arba- lestrieros. Mais le venin de la Renoncule était de beaucoup le plus actif (1). Pena et Lobel ont parlé du Mélèze à l’occasion de la manne produite par une exsudation de cet arbre. C'était un médicament que la pharmacopée du xvI° siècle tenait en grande estime. Comment le Larix donnait-il la manne ? De quelle facon la rosée céleste concourait-elle à la formation de cette substance ? Grave problème, à une époque où la physiologie végétale ne fournissait encore sur toutes ces questions aucune lumière. Voici, fidèlement résumée, la théorie que dévelop- paient, à cet égard, les Adversaria. La manne est due à un suc ou fluide vivifiant, lequel, inné chez tout végétal et müûüri par l'effet d’une chaleur propice et féconde, s’exhale pendant le jour à travers les issues cachées de l'écorce et s’évapore dans l'atmosphère sous l’action d’un soleil brûlant; mais lorsqu'il fait nuit, la rosée qui habituellement tombe du ciel, se mêle à cet élément vaporisé, le retient, fermente avec lui ; et en se combinant en- semble ils donnent naissance à une matière qui, par sa nature, tient le milieu entre le miel et le sucre (2). (1) Stirp. Adv., p. 263. — D'après Pena et Lobel, Thora est un nom donné à la plante par les habitants des Alpes qui y ajou- tent quelquefois le génitif « Valdensium » (des Vaudois). Nos deux savants, qui sont d'excellents hellénistes, rattachent le mot Thora au grec Dôdpa « corruptio, nex, venenum auË mors. » (2) Dans le Pinax theatri botanici (p. 496), Gaspard Bauhin acceptait entièrement la théorie des Adversaria et l'exposait en ces termes : « Est autem Manna seu Mel aëreum vapor terræ succosus et optimus, æstatis calore elevatus et in aëre in dulcem liquorem excoctus, noctis frigore coactus, et roris modo supra arborum et fruticum folia decidens ». — 104 — On appelait manne de ‘Briançon, nous apprend le même ouvrage, celle qui provenait des Alpes de la Provence et du Dauphiné. La plus recherchée était apportée de l'Orient sur les marchés de Venise et de Gênes. Pourtant la manne de Briançon n'était point à dédaigner, et la France entière s'en servait, pourvu qu'elle fût blanche, limpide et fraichement récoltée, telle enfin qu'eux-mêmes, tandis qu'ils parcouraient cette partie des Alpes, l’obtinrent en grande quantité en rompant des branches de Mélèze. Cette manne indigène ne le cédait en rien à la manne exotique pour le goût et les propriétés purgatives ; elle avait l'avantage de coùter moins cher et d'être moins sou- vent sophistiquée (1). Parvenu avec les deux voyageurs à la limite extrè- me, en cette direction, du territoire provençal, nous allons maintenant rebrousser chemin et revenir vers la Basse-Provence, dont nous suivrons le littoral dans toute sa longueur depuis Marseille jusqu'à Nice. + Ici encore les étapes du voyage sont indiquées par les Adversaria : Toulon, Hyères, Solliès, les bords de l'Argens, Fréjus, l’Estérel et Nice déterminent liti- néraire. A Toulon, Pena et Lobel signalent deux espèces arborescentes : Le Phillyrea media L., qu'ils appellent « Phylerea Arbor Galloprovinciæ », tout en déclarant qu'un nom préférable serait celui de « Macaleb Serapionts » (2); (1) Stirp. Adv., p. 26. — Outre la manne, disent encore nos auteurs (p. 449), le Mélèze fournissait deux autres produits : un champignon, qu'ils nomment « Agaricum Larignum », et que leur figure du Larix représente croissant sur le tronc de l'arbre; et une résine (Resina Larigna), appelée Lagrimo à Venise, où les marchands l'apportaient et la vendaient sous la fausse indi- cation de Térébenthine. (2) Stirp. Ado., p. 421: « Reperitur in Galloprovineia propè Tholonam, » — Du Phylerea Arbor Galloprovinciæ de Pena et r #7 trs, — 105 — Le Quercus Suber L., qu'ils dûürent apercevoir un peu en-deçà de Toulon (1). — Entre le petit port de Saint-Nazaire et Six-Fours (2) s'élève un coteau où la nature du terrain, calcaire jusque là, change brus- quement et devient siliceuse : on y voit apparaitre les phyllades primaires, si abondantes plus loin dans le massif des Maures ; et quand, parti de Marseille en longeant le littoral, le voyageur arrive à cet endroit, c'est là que les premiers Chènes-Liéges viennent frapper son attention. De tout temps l’industrie humaine a fait de Pécorce de liége des applications nombreuses et variées. Les Adversaria ne mentionnent expressément que les semelles destinées, dans tous les pays, disent-ils, à garnir l’intérieur des chaussures : Cquolibet gentium defertur ad crepidarum soleas suffulciendas. » Ils ne Lobel, Gaspard Bauhin (Pinax, p. 476) avait fait le « Phillyrea latifolia levis », auquel Linné s’est abstenu de donner une tra- duction, ayant considéré comme synonyme de son Phillyrea media le « Phillyrea folio Ligustri » du Pinax, qui doit coïnci- der, selon nous, avec une des deux formes du Phillyrea angusti- folia L. représentées dans les Adversaria. Mais la description et la figure du même ouvrage relatives au « Phylerea » de Toulon ne laissent aucun doute sur l'identité de celui-ci avec le Ph. media L. Telle a été, d'ailleurs, l'opinion de Grenier et Godron ; et en établissant lasynonymie de l'espèce linnéenne, ils ont fait mention de la page 421 des Adversaria (Flore de France, t. 11, p. 454). (1) Stirp. Adv., p. 432. — Le Chêne-Liége est appelé : « Ilex suberifera latifolit glande echinalo », et la station est ainsi notée : « Multa Galloprovinciæ maritimis Tholonæ, Olbiæ, et aliis adjectis ». (2) Saint-Nazaire, en provençal Sant-Nazäri et par contraction Sanäri, porte aujourd'hui le nom de Sanary qui lui a été légale- ment conféré, il y a quelques années, pour épargner à cette gra- cieuse petite ville l'inconvénient d'être confondue avec d'autres Saint-Nazaire. — Le village de Six-Fours, établi sur une des hauteurs qui dominent Toulon, a été à peu près abandonné par ses habitants, lesquels, descendus dans la plaine, y ont formé l'agglomération de Reynier. . < #. Lee et ‘ DL" Cat dopé ee ‘ à RUES bel! ET Line a: — 106 — font qu'une simple allusion aux autres usages en ajoutant aussitôt : «aliaque multa necessaria (1) ». (1) Le De Laudibus Provinciæ de Quiqueran de Beaujeu, que nous avons déjà cité dans une note précédente, donnait sur l’em- ploi du liége de plus amples détails. — Après avoir dit que le tronc du « Liégier » est recouvert « d’une triple écorce », le jeune évêque de Senez ajoutait (nous reproduisons la traduction de l'archidiacre Claret) : « La première estla plus epoisse, appro- priée à boucher, non que les toneaux et les caques, mais toute autre sorte de vase ; servant encores à faire nager sur leau les filez de noz pécheurs, nonobstant le contrepois de plomb y atta- chez. On en fait aussi des ruches à loger les essaims des mou- ches à miel, où ils sont en deffance asseurée contre les morsures de l'hyver et le hàle en été. En somme, elle s’accommode en mil usages. De l’autre, on garnit les mules de chambres et les sou- liers d'hyver. De la troisième, on en fait des écuëlles ou couppes, èsquelles tout ce qu'on sert à boire aux Ectiques leur profite mer- veilleusemant... » — Aucun des usages auxquels on employait le liége au xvie siècle n’a été abandonné ; on l'utilise encore, de nos jours, pour les divers objets énoncés dans le livre de Qui- queran : bouchons, flotteurs pour filets, semelles intérieures pour chaussures d'hiver, ruches d’abeilles. Quelques-unes de ces applications, notamment les bouchons, les flotteurs et les semelles, remontent à la plus haute antiquité, et Pline les avait mentionnées (Hist. nat., XVI, 13). — Quant aux écuelles dont parle Quiqueran, nous avons vu nous-même, dans la partie de la Provence où croît le Quercus Suber, les gens de la campagne continuer à s’en servir. Is obtiennent ces plats ou « couppes » rustiques en détachant les morceaux d'écorce qui recouvrent des nodosités, des excroissances de l'arbre plus ou moins arron- dies ou coniques. La concavité de l'enveloppe subéreuse corres- pondant à la saillie convexe du bois donne le creux de l’écuelle. Mais nous ignorions, avant d'avoir lu Quiqueran, que l'emploi de ces écuelles fût profitable aux « Ectiques ». — Nous ne pen- sons pas qu'il soit nécessaire de relever l'erreur commise par l'auteur, quand il affirme que le liége est formé de trois sortes d'écorce employées l'une plutôt que l'autre, suivant la nature de l'objet à façonner, On sait que le liége constitue un épiderme destiné à protéger l'écorce proprement dite ; il est homogène et ne se divise pas en plusieurs couches. Il y a pourtant quel- que chose de vrai dans les indications de Quiqueran, Quand le liége a été enlevé une première fois, l'arbre en produit un nou- veau auquel il faut sept ou huit ans avant d'atteindre l'épaisseur exigée par l'industrie, La nouvelle couche subéreuse qui se forme — 107 — De Toulon à Hyères la distance n’est pas bien grande. Enserrée alors dans une enceinte de murailles for- tifiées dont les vestiges subsistent, Hyères ne pré- voyait pas encore le sort brillant que lui réservait notre siècle. Ce n’était qu’une toute petite ville, « ur- becula », disent les deux botanistes. Mais ils savaient quelle importance avait eue sous la domination ro- maine l'antique Olbia, et ils ajoutent qu'elle était, en ce temps-là, € aussi opulente qu'illustre, fäm lauta quäm nobilis » (1). Profitèrent-ils de leur séjour à Hyères pour aller visiter les célèbres Iles Stéchades ? Ils ne le disent pas expressément, mais un passage de leur livre le fait supposer. Après avoir expliqué que c’est bien à ces îles qu'appartient le nom de Stæchades donné par Pline et par Dioscoride aux petites iles du golfe de Marseille (2), ils proclament les Iles d'Hyères pour remplacer la première acquiert, relativement aux besoins industriels, des qualités que n'avait pas celle-ci : celle-là seule peut servir à la fabrication des bouchons. L'autre, regardée comme marchandise de rebut, n'est utilisée que pour confec- tionner les flotteurs de filets. — L'opération qui consiste à enle- ver pour la première fois à un Chêne-Liége son épiderme s’ap- pelle en provençal desmascla, littéralement « émasculer », la langue populaire qualifiant de mascle (mâle) ce premier épider- me dont l’arbre doit être préalablement dépouillé pour devenir producteur de bon liége. (1) Stirp. Adov., p. 184. (2) Certains auteurs anciens paraissent en effet avoir confondu les unes et les autres. M. Ernest Desjardins (Géographie de la Gaule romaine), après avoir rapproché les divers textes relatifs aux Stæchades, formule ainsi ses conclusions : «Il résulte de tous ces textes comparés entre eux : 1° qu'il y avait deux groupes de Stœchades, les grandes et les petites; 2 que les petites étaient près de Marseille, et les grandes en face d'Hyères ; 3° que les petites étaient au nombre de deux et les grandes au nombre de trois; 4° que les deux petites correspondaient aux îles rocheuses de Ratonneau et de Pomègues, dans la rade de Mar- seille, et les trois grandes à Porquerolles, Port-Cros et à l’île du Levant, dans la rade d'Hyères. » — Quelle était l'origine du Æ “ ARR +1 Me : > AVES TE 2" es * RÉ Sac * REX: + À È ’ - eur 2 j F, au .— Fe È . . à D L ar, È F,d ur, PS FETES L — s Ce +. . r 108 F2 «illustres nourricières des plantes les plus rares, “PA nobiles rarissimarum stirpium alumnæ Stæchades in- sulæ.» Ne semble-t-il pas qu'ayant de ces ilesune telle opinion, d'ailleurs parfaitement justifiée, ils ne devaient pas laisser échapper Foccasion qui s'offrait d'y herboriser ? En tout cas la plupart des plantes qu'ils ont citées à Hyères croissent aussi bien dans les îles que sur la terre ferme. A. A Hyères ils retrouvent le Chêne-Liége. Ils yadmi- rent les Palmiers qui abondent, s'y développent … avec grand succès mais n’y mürissent pas leurs dattes (1), et les Orangers «si bien acclimatés aux brises du rivage maritime qu’ils ne ressemblent plus en aucune facon à des arbres introduits et qu'ils for- ment des bois étendus, charmants à voir avec leur < | verdure persistante et leurs fruits continuellement renouvelés (2). » D. Deux des nombreuses espèces frutescentes de la région attirent particulièrement leur attention : le Laurier-rose, dont ils relatent ainsi la synonymie: « Nerion Oleander, Laurus Rosea, Rhododendrum purpureum el album », et dont ils marquent avec pré- cision l'habitat sur le bord des cours d’eau «fluen- torum crepidinibus et littoreis » (3); et l'«Althea à CE M TE nom des Stœchades ? « Elles tiraient leur nom, dit encore M. Desjardins, de l’ordre même dans lequel elles étaient rangées (5:0*405, rangée, Pline III, x1 (v) 3) ou, selon Dioscoride, qui les nomme Slichades, elles l'empruntaient à une herbe qu'il décrit comme assez semblable au thym et qu'il appelle Sticha (Dioscor. 21 III, 31). C'est une espèce de lavande, Lavandula Slæckhas. » ; (1) Stirp. Adv., p. 451 : « Permultæ sunt Palmæ species. Nos- trâäs quæ Norbonæ et Lyguriæ maritimis, et præsertim ad Olbiam Galloprovinciæ frequenter et fæliciter enata visitur, fructum non maturat. » dl (2) Stirp. Adv., p. 425 : « Olbiæ Galloprovinciæ adeù familiaris d in afflatu oræ& maritimæ, ut sempervirentium lucorum am®œ- nitate et pomorum fœtura perenni, neutiquam inquilina - videatur, » (3) Stirp. Ado., p. 154. # SO: * 400 | + 1e É LE ", + pee FT, x FR — 109 — D Olbiæ in Galloprovincia », devenu de par | Æinné le Lavatera Olbia et qu'ils Aout peut-être _ rapporté de l’île de Portcros où cet arbuste épanouit en abondance ses grandes fleurs mauves d’un effet —_ si décoratif (1). Ils signalent de nouveau la Santoline Petit-Cyprès, . qu'ils ont déjà rencontrée sur les monts de la Sainte- _ Baume. Ils expriment éloquemment le grand plaisir _ que leur a causé plus d’une fois, disent-ils, la vue du _«Stæchas» (Lavandula Stæchas L.) au temps où …_ «nous parcourümes des pieds et des yeux (pedibus - et oculis lustravimus) les collines rocailleuses du _ Languedoc et de la Provence, empourprées par cette £ Lavande, et aussi par l’Aspic, le Romarin, le Thym Es vet la D icite (2) ». …_ Enfin la liste des plantes spontanées trouvées à e E. se clot par deux Corymbifères qui sont, dans _ la nomenclature contemporaine, Cota tinctoria Gay 4 _ (Anthemis tinctoria L.) et Anacyclus radiatus Lois. “ (Anthemis valentina L.) Ils imposent aux deux es- A _ pèces le nom générique de Buphthalmum, mot grec 4 dont ils donnent la traduction latine, Oculus Bovis. . La première est pour eux le « Buphihalmum Millefolii | fobio, Chrysanthemi flore » et la seconde « Buphthal- Mmum alterum folio et facie Cotulæ fœtidæ ». Is ajou- + ir (1) Slirp. Adv., p. 294. — Pena et Lobel disent que cultivée à —_ Londres dans le jardin de leur ami le pharmacien Morgan, cette …— belle Malvacée avait dégénéré : « Semen in Morgani hortis Lon- dini satum hac æstate plantam ipsam peperit minus incanam aut hirsutam, minusque speciosam. » _ (2) Stirp. Adv., p. 184. — Ils rappellent que cette plante a : ou Son nom aux Iles Stæœchades, situées «non ex adverso . Massileæ, ut perperam ex Dioscoride persuasum est (bidui nam- . que itinere et litore indidem absunt), sed è regione Olbiæ, à qua ctiamnum hodiè Insulæ Stæchades nomen retinent, non Massi- leæ, dicuntur namque Hyeres Insulæ ». Is ont en outre cons- taté que cette Lavande est tellement abondante qu'on s’en sert dans le pays pour chauffer les fours, « etiam clibanis calfacien- Û _ dis satis suppetat. » + dr E:. — 110 — tent qu'ils ont pris celle-ci au milieu des bois d'orangers (1). Ils nous apprennent qu’en ce temps-là on cultivait à Hyères la Canne à sucre. Ils la nomment « Harundo saccharina indica » ou « Saccharatus Calamus ». — « Originaire de l'Inde, écrivent-ils, elle a d’abord été introduite en Asie-Mineure, à Rhodes, à Chypre, et en divers autres lieux. Elle est aujourd'hui cultivée dans beaucoup de pays d'Europe riverains de la Méditerranée ou de l'Océan : tels l'Espagne, le Por- tugal et les délicieux jardins d'Hyères, en Provence, non loinet vis-à-vis des îles Stéchades, amænissimis Olbiæ in Galloprovinciæ virelis, non procul et ex ad- verso Stæchadibus insulis. » Ils nous donnent à cette occasion quelques détails sur le sucre, « luxe et délices aussi bien de la cuisine que de la pharmacie, delicias lautitiasque tum cu- linæ, tum pharmacariæ. » Mais ce n’est plus l'Inde qui fournit le meilleur. « Aujourd’hui, le sucre des Canaries et de Madère est préférable à tous les autres pour le goût et la blancheur parfaite. Néanmoins, celui de l'Inde, d'Alexandrie et des autres marchés africains, importé à Gênes, à Marseille et à Venise, peut défier par sa blancheur marmoréenne le suere des Canaries : ce dernier l'emporte par son extrême douceur (2). » Au nombre des plantes agricoles dont le Stirpium Adversaria s'est occupé figure le Chanvre, à propos duquel le rédacteur du chapitre y relatif raconte un (A) Stirp. Adv., p.343. — Les titres des articles consacrés à chacune de ces deux plantes portent, l'un le mot de Buphthalin, l'autre celui de Buphihalinum, au lieu de Buphthalmum. Ce sont là manifestement des fautes d'impression qui se trouvent d'ailleurs corrigées et sur lune des listes de noms que les auteurs du Stirpium Adversaria ont l'habitude d'insérer en tête. d'un certain groupement de chapitres, et aussi dans l'?ndex final. (2) Stirp. Adv., p. 19, — Il y avait à Venise des raffineries de sucre dont les procédés sont décrits par les Adversaria. — 111 — évènement funeste qui s'était passé, à Hyères même, "peu de temps auparavant. Après avoir exposé les utiles services que procure le Chanvre (1) et comment on doit le traiter pour le rendre textile, il ajoute que l’eau dans laquelle on le fait tremper devient vénéneuse et cause inévitable- ment la perte de ceux qui en boivent. (On eut beau leur administrer en toute hâte des contrepoisons, rien ne put soustraire à la mort le marquis d'Elbeuf, frère des Guise, sa femme et plusieurs gentilshom- mes de leur suite. Ils avaient commis l’imprudence, passant près d'Hyères, un jour qu'il faisait très chaud, de boire à une fontaine qui paraissait limpide, mais qui recevait par des conduits souterrains l’eau d'une mare où l’on avait mis du chanvre à rouir(2).» (1) Notamment l'emploi de la graine pour nourrir les volatiles de basse-cour et les petits oiseaux de volière, tels que chardon- nerets et linottes, chez lesquels cette nourriture, après avoir tout d’abord assuré leur fécondité, finit par développer un em- bonpoint excessif : « Multum alimoniæ suggerit gallinis cortali- busque ; sed hyeme fœcundiores, postea steriles et quasi pingue- dinis mole obrutas reddit. Aviculis etiam cibus est, ac tantum saginæ adfert, ut aut enecet, aut cantillandi adimat alacritatem et facultatem, ut carduellis, linottis. » (2) Stirp. Adv., p. 226. — Avec leur manie de latiniser même les noms propres, souvent les écrivains du xvi: siècle embarras- sent fort les traducteurs. Du personnage qualifié par les Adver- saria « Marquisiüi Arboü fratris Guisiorum » le bon Garidel avait fait le Marquis d'Arboy : « Lobel et Pena nous assurent, après la funeste expérience qu'en firent à Yères le Marquis d'Arboy, frère de Messieurs de Guise, son Epouse, et beaucoup de Seigneurs de sa suite, que l’eau dans laquelle on fait macérer le Chanvre, ce que nos Provençaux appellent Naya, est un mortel poison pour les hommes et pour les animaux qui en boivent, contre lequel il n'y a point de remède. » — Plus récemment, le professeur Gus- tave Planchon (Matériaux pour la flore médicale de Montpellier) a traduit par « marquis d'Artois ». — Il s’agit en réalité de René de Lorraine, marquis d’Elbeuf. Frère du duc François de Guise, il avait concouru à la défense de Metz et à la prise de Calais. Il fut pourvu de la charge de Général des Galères de France : en cette qualité il avait sa résidence à Marseille. D'après le Père Anselme (Histoire générale et chronologique de la Maison de — 112 — Continuant à marcher dans la direction de Nice, après être sortis d'Hyères, Pena et Lobel s’arrêtèrent au bourg de Solarium (1). Et ils eurent là l’occasion de faire une de ces découvertes qui remplissent de joie l'âme d’un botanophile. Sur une colline des environs de Solliès, ils décou- vrirent l'Aliboufier (S{yrax officinale L.), arbre dont la Matière médicale faisait alors grand cas, en con- sidération de la résine qu'il fournit et que l’on em- ployait sous le nom de slyrax ou storax. Voici en quels termes ils ont raconté leur intéres- sante trouvaille : « Le Styrax semble avoir été ainsi nommé à cause de la résine liquide qu'il laisse exsuder goutte à goutte (stiriatim) (2). C'est dans cette partie de la Provence qui s'étend des Saintes-Maries de la Mer à France), il mourut en 1566, âgé de trente ans. Ruffi (Histoire de Marseille) fait remonter sa mort à l'année1564.C'est évidemment Ruffi qui donne la date exacte. Le marquis d'Elbeuf et ses com- pagnons périrent dans le courant de l'été, disent les Adversaria. Or, pendant l'été de 1566, Pena et Lobel étaient à Montpellier sur le point de se mettre en route pour l'Angleterre ; dans l'inter- valle qui s'écoula entre leur départ et la publication de leur ouvrage, ils séjournèrenten Angleterre et ne revirent pas la Pro- vence. Ils avaient passé par Hyères très probablement en 1565, et l'événement qu'ils racontent s'était produit l'année d'avant. (1) L'ancien bourg de Solarium s'est subdivisé en trois agglo- mérations qui portent toutes les trois le nom de Solliès, mais qui forment, quoique rapprochées, des communes distinctes : : Solliès-Ville, Sollièés-Pont et Solliès-Toucas. Elles appartiennent à l'arrondissement de Toulon ; Solliès-Pont, station de la ligne du chemin de fer de Marseille à Nice, est en même temps chef- lieu de canton. — Nous pensons que la colline décrite par les Adversaria, « collis lætissimus et opertus frequenti Styrace », est celle que surmonte actuellement la chapelle Notre-Dame. Le flanc de cette colline est, en effet, couvert d'Aliboufiers, de la base au sommet. k (2) Pure fantaisie philologique, encore inspirée par la manie, chez les écrivains du xvre siècle, de trouver quand même des éty- mologies ingénieuses, Est-il besoin de faire observer que le mot - grec Yxpai ne pouvait pas dériver de l'adverbe latin stiriatim ? ré ENT Fréjus qu'on le rencontre en plus grande quantité. Il existe, en effet, près du bourg de Solliès, une riante colline où le Styrax abonde. Nul n’en connaissait l’existence en cet endroit lorsque nous-mêmes, étant jeunes encore, fûmes les premiers à l’y découvrir. Nous le montràmes à beaucoup de pharmaciens et d'étudiants, ainsi qu'aux professeurs de Montpellier. Nous le reconnümes pour l'avoir vu autrefois à Ve- nise dans le jardin des Franciscains (1). » L'Aliboufier s’est perpétué à l'endroit où les deux condisciples le trouvèrent il y a plus de trois siècles ; c'est en Provence la seule station connue (2). Jean Bauhin dit bien, dans son Historia plantarum univer- salis, qu’il possédait des rameaux de Styrax que Ma- thias de Lobel lui avait apportés d'Hyères (3). Mais cette ville étant assez rapprochée de Solliès, Lobel (1) Stirp. Adv., p. 429 : «Quod ex hac emanaret liquor, ac veluti stiriatim extillaret, Styrax dicta videtur. Ejus feracissimus ille tractus Galloprovinciæ, qui à trium Mariæ Sororum fano antiquissimo, ad Forum Julium usque porrigitur : est namque propè oppidum Solarium collis lætissimus et opertus frequenti Styrace, nullidum illie cognita, quam primi nos juvenique multis tum pharmacopæis et studiosis, tum Monspessuli Professoribus ostendimus : nam jamdiu videramus Venetiis in Franciscanorum horto. » (2) Cette station commence dans l'arrondissement de Toulon et se prolonge dans celui de Brignoles. Elle est fort étendue. Nous en avons personnellement vérifié les limites et nous avons cons- taté qu’elle occupe une surface à peu près carrée qui a plus de dix kilomètres de côté. Ce vaste parallélogramme englobe le terri- toire de plusieurs communes qui sont, outre les trois Solliès nommés plus haut, la Farlède, Belgencier, Signes, Méounes et la Roquebrussane. Le même périmètre enferme aussi la belle forêt domaniale de Montrieux et la Chartreuse de ce nom dont l'établissement remonte au xu° siècle. — Le Styrax abonde dans la forêt de Montrieux. (3) Hist. plant. univ., t. 1, 2 p., p. 34 : « Styracis arboris ramos primüm habui à Lobelio, qui ex Hiere attulerat ». — Certains biographes de Peirese ont voulu attribuer au célèbre conseiller au Parlement d'Aix le mérite d'avoir introduit et acclimaté en Provence le Styrax officinal. Or, le Sfirpium Adver- 8 rs hrs re a pue sans doute regardait comme pris à Hyères les échan- tillons qu'il avait distribués à ses amis. Le chapitre des Adversaria relatif au Styrax ajou- tait que l’Aliboufier, quoique très abondant à Solliès, n'y produisait pas de résine : Qinibi tametsi tanta copia est, nihil tamen liquoris effluit. » C'était là une erreur. Il fut un temps où les moines de Montrieux prenaient grand soin de recueillir le storax. Et dans le courant du siècle suivant Garidel, étant allé à Mon- trieux où il reçut l'hospitalité chez les Chartreux, écrivait au sujet du Styrax officinal : « On tire par incision de l'écorce de cet arbre une résine liquide, fort odorante, en assez grande quantité. Les Char- treux la ferment dans des petites bouteilles, ou pots de verre, dont ils font part à leurs amis. J’en ai reçu plusieurs que j'ai donnés à des personnes curieu- ses (1). » Nos deux voyageurs eurent de nouveau à traverser l’'Argens. Ils l'avaient passé une première fois, non loin de sa source, entrele Val et Moustiers, quand ils faisaient route vers les Alpes. Ils le franchirent cette fois près de son embouchure, avant d'atteindre Fréjus. La vieille cité romaine de Fréjus, bâtie au pied des collines de l'Estérel, est nommée dans le chapitre du Styrax. Elle y est indiquée comme située à l’une des extrémités de la Provence, par opposition avec le village des Saintes-Maries, occupant vers le couchant l’autre extrémité. Mais aucune plante n'y est particu- lièrement signalée. saria avait paru depuis dix ans quand Peirese vint au monde (1580). Le passage dont nous venons de donner le texte établit d'une façon péremptoire que l'Aliboufier est pour la Provence une espèce indigène et non point importée, (V. Alfred Reynier, Peirese el le Slyrax, et Ludovic Legré, L'Indigénat en Provence du Slyrax officinal, dans la Revue Horticole des Bouches -du- Rhône, février et mars 1897.) (1) Histoire des plantes qui naissent aux environs d'Aix, p. 450, — 115 — Le Stirpium Adversaria n’a d’ailleurs cité les bords de l’Argens et l'Estérel que pour y mentionner la Nepa de Théophraste, déjà remarquée à la base du massif de la Sainte-Baume (1). Enfin nos infatigables botanistes arrivent à Nice. Ils y notent la présence du Caroubier, qu'ils dési- gnent au moyen d’une appellation trilingue : (Kez2+t4 Siliqua Carobe ». En marge ils ajoutent le nom de « Carobia vulgo Provincialium ». Carobia est la tra- duclion du mot provençal Carobi que les Provençaux appliquent encore aujourd’hui aux gousses du Cera- tonia Siliqua. Ils constatent aussi qu'à Nice et sur toute la côte ligurienne ces fruits servent de nourri- ture aux enfants et même aux pourceaux; et ils estiment que c’est la Caroube qu'a voulu désigner l’évangile selon saint Luc, dans le chapitre où est (1) Stirp. Adv., p. 353 : « Locis saxeis et aridis, et Sterellæi montis declivibus ac propter argenteum amnem, Argens vulgo Galloprovinciæ dictum, multa ». — Pena et Lobel ont certaine- ment commis une erreur en signalant la présence de l'Ajonc dans l’Estérel. Cette Papilionacée exige un terrain calcaire ou dolomitique et le massif de l'Estérel est formé de roches érup- tives. Perreymond, en ses Plantes phanérogames qui croissent aux environs de Fréjus, a exclu l'Ulex de sa liste, et Hanry (Catalogue des plantes vasculaires du Var) ne l'a cité que dans des localités où le sol est calcaire. A son tour M. Emile Burnat, dans sa belle Flore des Alpes Maritimes, dit de l'Ulex euro- pœus Smith et de l'U. parviflorus Pourret : « Croissent dans le département du Var mais n'ont jamais été rencontrés dans les Alpes maritimes. C'est par une confusion qui leur est arrivée à plusieurs reprises que Grenier et Godron (comme H. Roux, Cat. Prov., p. 110) ont cité l’île Sainte-Marguerite (Lerins, Alp.-ma- ritim.) au lieu de Sainte-Marguerite près de Toulon où se ren- contre la seconde de ces espèces ». Les deux botanistes du xvi® siècle ont peut-être, en cette circonstance, donné le nom de Nepa au Calycotome spinosa Link. Pourtant, en appliquant le contrôle des synonymies consécutives, ont voit que le « Nepa Theophrasti » des Adversaria aboutit bien à l'Ulex. Mais si au xvie siècle, on donnait quelquefois deux noms à la même plante, il arrivait encore plus souvent que l'on confondait deux espèces sous le même nom. es OL. AE ES OR Se 2 HE ip 7 , y "4 7. LES 2 Le à PU «€ me EE + 1 - LA 2 gr rt / LL. re 4 = LT PA * Pi de : | SET: : "t-- ps + + Peu — 116 — contée la parabole de l'Enfant prodigue: CET cupiebat implere ventrem suum de siliquis quas porci mandu- cabant. » (1). Les environs de Nice leur fournirent trois autres espèces : Heliochryson. Tanacetum annuum L. Chamæpythis prima Diosco- ridis. Cressa cretica L. Hippoglossum. Ruscus Hippoglossum L. (2). (1) Stirp. Adv., p. 414. — La Flore des Alpes Maritimes, de M. Emile Burnat, s'exprime ainsi au sujet du Ceratonia : « Le Caroubier peut être observé dans de nombreuses localités, sur- tout près des rives de la mer, entre les environs d'Albenga et le golfe de la Napoule. — La question de l'origine du Ceratonia Siliqua a été très discutée. Alphonse de Candolle qui en a résumé les principaux éléments admet que cette plante était spontanée « à l'orient de la Méditerranée, probablement sur la côte méridionale d'Anatolie et de Syrie, peut-être aussi en Cyrénaïque » ; que sa culture a commencé depuis les temps historiques par les Grecs dans leur pays et en Italie, plus tard par les Arabes qui l'ont propagée jusque dans le Maroc et l'Espagne. L'illustre botaniste considère les Caroubiers non cultivés dans les pays méditerranéens autres que l'Orient, comme une race subspontanée moins productive, et non pas comme la souche de la forme comestible... A. de Candolle dit encore que lonna pas trouvé le Caroubier fossile. Sur ce dernier point on pourra cependant, semble-t-il, contredire l'opinion de l'éminent auteur. Ch. Martins ainsi que G. de Saporta disent que le C. Siliqua est le dernier représentant d'une tribu tropicale de Légu- mineuses longtemps variée et puissante en Provence, laquelle aurait survécu à l'époque glaciaire dans le midi de la France, mais seulement dans quelques localités privilégiées. » — Le Catalogue des plantes de Provence, d'Honoré Roux, contient, sous la mention du Ceratonia Siliqua, l'indication suivante : « II en existait un pied à Château-Gombert [banlieue de Marseille}, vers l'entrée du vallon du Nègre, qui portait des fruits ; il fut gelé pendant l'hiver et maintenant il forme un énorme buisson », (2) Stirp. Adv., p. 164, 283 et 332, — La Flore analylique du département des Alpes-Marilimes, d'Ardoino, constate que ces trois espèces croissent encore aux environs deNice, mais qu'elles y sont assez rares, Les auteurs du Stirpium Adversaria disent que le Tarnacelum se trouve aussi en d'autres endroits de la Provence: TITI Nous ne devons pas nous éloigner du littoral de la Provence, et plus particulièrement de la région com- prise entre Hyères et Nice, sans dire un mot du Cha- mœærops humilis L. Les Adversaria, qui l'appellent « Chameæriphes », en font mention aussitôt après avoir parlé des Palmiers d'Hyères et déclarent qu'il est «très connu » dans les contrées maritimes de l'Espagne, de la Provence et de l'Italie, « notissimæ sunt Hispaniæ, Galloprovinciæ et Italiæ maritimis.» Par le mot notissimæ Pena et Lobel veulent-ils dire que le Palmiste croit spontanément en ces divers pays (1) ou qu'il y est importé comme matière indus- trielle et substance alimentaire? Ils ajoutent en effet «Niceæ ad Thyrrenum mare, Genuæ Lygusticæ, et in Gallopro- vincia asperis, macilentis convallibus, et desertis incultis, fruti- cat ». C’est sur la foi de Linné, que nous avons accepté la Tanaisie annuelle pour équivalent de 1 « Heliochryson ». Linné donne en effet comme synonyme de son Tanaceltum annuum V « Elichy- sum foliis Abrotani » de Gaspard Baubhin, que l’auteur du Pinax, de son côté, identifiait avec l'Heliochryson de Pena et Lobel. Nous éprouvons néanmoins quelques scrupules. La description des Adversaria, très laconique comme toujours, n'est point éclairée par une figure, et sans Linné nous eussions été fort embarrassé pour adapter à cet Heliochryson l'un des termes de la nomenclature moderne. Pourtant, malgré toute l'autorité du Species, ce détail que nous relevons dans la diagnose des Adver- saria : « exili et lignosa radice », et le mot « frulical » employé dans l'indication d'habitat que nous avons transcrite ci-dessus, ne sont-ils pas de nature à susciter un doute au sujet d'une assimilation de l'Heliochryson avec ie Tanacelum annuum ? (1) Le Chamærops humilis s’accommode assez bien du climat de la Provence, mais aujourd'hui on ne l'y trouve pas à l’état spontané. 11 croît naturellement «sur les collines incultes de la Barbarie, de l'Espagne et de la Sicile. » (Hoefer, Dict. de bot.). Nous-même l'avons vu très abondant en certains endroits de la Sardaigne. — Si l'on pouvait induire du texte des Adversaria qu'au xvre siècle le « Chamæriphes » était indigène dans la Pro- vence méridionale, ce serait un fait extrêmement intéressant à retenir pour l'étude des changements apportés par les siècles à la constitution de la flore provençale. Gaston de Saporta (Le monde des plantes avant l'apparition de l'homme) disait du Chamærops humilis : «le dernier des palmiers européens, celui “ RAT — 118 — que ce végétal est utilisé tant pour faire des balais qu'à cause de sa moelle, « gulæ blandimentum » spé- cialement recommandé par les anciens. «Le stipe qui est fistuleux se renfle au-dessus de la racine et Le. dans cette protubérance est contenue la moelle. » Ils # l'ont goûtée et lui ont trouvé une agréable saveur de 4 carde ou d’artichaut (1). È Si, en partant de Nice, les deux condisciples avaient jugé à propos de se transporter en Italie, nous n’au- rions pas à les y suivre (2). Pour achever en leur > compagnie le parcours entier de la Provence, il ne nous reste plus qu’à remonter avec eux du côté Nord- # , C4 La È Ouest, vers une autre des extrémités du pays, et & nous arrêter, comme ils le firent, à Avignon d'abord, È puis à Orange. æe Quoique dévolus au Saint-Siége, la cité d'Avignon £, et son territoire n'en étaient pas moins regardés 4 de tous qui s’est le plus attardé sur notre sol avant de le quit- à ter ». Le Palmiste s’attardait-il encore sur le littoral de la Pro- É- vence en 1565 ? Il est fâcheux qu'à ce sujet le Stirpium Adver- saria ne se soit pas servi d’une formule plus précise et plus claire. 1 Nous sommes cependant porté à croire que Pena et Lobel + virent ce Palmier végétant aux environs de Nice. S'il eût été ori- ne ginaire d'un pays autre que ceux que nos auteurs ont nommés, + J ceux-ci n'auraient pas manqué de l'indiquer. Les détails qu'ils £ nous donnent sur la production de la moëlle semblent bien avoir | été notés de visu; et, d'autre part, peut-on admettre que les rs Provençaux de ce temps-là fissent à grands frais venir le Cha- £: mærops des pays d'outre-mer pour en fabriquer de modestes balais, ou même pour en extraire la moëlle ? Lys (1) Stirp. Ado., p. 451. (2) Is font mention de la ville de Gênes en deux des passages où Nice est nommée, et ils citent aussi d'autres localités de la Rivière, telles que Savone et La Spezzia, Nous supposons qu'ils passèrent par là en venant d'Italie, Mais comme nous n'avons pas de données positives au sujet de l’ordre dans lequel ils effectuérent certains de leurs voyages, l'itinéraire hypothétique que nous avons adopté pour la Provence nous permettait d'at- teindre le but proposé, qui était de passer en revue toutes les plantes signalées par les Adversaria dans les diverses régions provençales. — 119 — comme faisant toujours partie de la Provence. L'évé- que de Senez, Pierre Quiqueran de Beaujeu, dont nous avons, à deux reprises, cité en note le De Lau- dibus Provinciæ, déterminait ainsi les limites de la | terre provençale : «€ Nôtre pays est borné du costé du Levant par la rivière du Var; du Midy, par la mer Méditerranée; du Couchant, par le Rône; du Nort, par la cité d'Oranges. — Quant au pays d'Avignon et à la ville mêmes, très belle et très opulente, nous la reputons de Provence : tant parce qu’elle est con- tiguë à notre terre et n'a d’autres limites que les nôtres, que pour le peu de temps qu’elle fut demam- brée de nôtre pays et acquise à l'autorité et patri- moine des Papes (1). » De la florule avignonnaise, Pena et Lobel ne relè- vent qu'une seule plante, qui assurément n'est point rare : Echinops Ritro L. Ils remarquent le bel effet que produit, avec ses capitules sphériques et azurés, cet Echinops, « spectatu jucundissimus » (2). Ils attribuent bien à cette même florule une autre espèce, la Soldanelle des Alpes, — à laquelle Ile nom actuel est déjà appliqué, sauf une légère modification « Soldanella montana ». Maïs ils n’en parlent que par oui-dire. Ici, et très exceptionnellement, le rédacteur du chapitre s'exprime au singulier. «J'ai entendu dire que sur certaines montagnes peu éloignées (1) La Provence louée par feu Messire P. de Quiqueran de Beaujeu, gentilhome d'Arles, Evêque de Senes, divisée en trois livres traduitz du latin par Mr. F. de Claret, Docteur ez droitz, Archidiacre de la Ste Eglise d'Arles. — À Lyon, pour Rob. Reynaud, libraire d'Arles, 1614. (2) Stirp. Adv., p. 368. — Cette Carduacée, qu'ils appellent tout simplement « Ritro » ou « Rutro Theophrasti », nous fournit un nouvel exemple de la confusion qui régnait alors, — nous pourrions dire déjà, — dans la terminologie. D’après la synony- mie que donnent les Adversaria, Fuchs avait nommé la même plante « Crocodylion », Gesner « Echinopus » ou « Carduus echi- natus », Cordus « Sphærocephalus », Dodoens « Spina peregrina ». — Devine, si tu peux, et choisis, si tu l’oses! dance (1).» Nous ne voyons guère, dans le voisinage d'Avignon, que le Mont-Ventoux qui aurait pu donner asile au Soldanella alpina L. Mais nous ne croyons pas que cette Primulacée y ait jamais été observée (2). Ils signalent dans le terroir d'Avignon la présence du Mürier (3) dont ils décrivent très exactement les (1) Stirp. Adv., p. 262 : « Audio quibusdam montibus, Avinione non dissitis, magna gliscere copia. » A remarquer l'emploi de l'indicatif présent : « Audio, j'entends dire...» Cette formule justifie le titre d’Adversaria donné à l'ouvrage : ce sont des Notes, rédigées séante tenante, au jour le jour, et dont la série forme un Journal. Ce même indicatif nous a fourni un argu- ment dans la question, examinée au chapitre précédent, des droits de Pierre Pena comme co-auteur du Sfirpium Adversaria. (2) La plus récente publication relative à la florule du Mont- Ventoux (Notes sur la flore phanérogamique des environs de Carpentras, du Ventoux et des Monts de Vaucluse, par M. Rouis, inspecteur adjoint des Forêts, Avignon, 1895) ne mentionne pas la Soldanelle. Nous-même ne l'avons point aperçue quand nous sommes allé herboriser sur la célèbre montagne. (3) Dans un ouvrage récent et d'un très haut intérêt (La Sociélé provencale à la fin du moyen âge), M. Charles de Ribbe a rappelé que l'existence du Mürier sur les territoires de la Provence et du Languedoc remontait fort loin : « Dans le haut moyen âge, lorsque les seigneurs provençaux tenaient leurs plaids en personne, c'était sur un perron ombragé d'un pin ou d'un orme qu'ils donnaient leurs audiences. Avec l'orme on rencontre mentionné le müûrier, morerius. À en croire les livres d'agriculture, cet arbre n'aurait été introduit en Provence que vers la fin du xve siècle: et, d' après un historien qui a précisé la date, le roi René, pour apprendre aux Provençaux à le cultiver, aurait appelé des gens de Sicile, où, depuis le x siècle, il s'était multiplié, ainsi qu'en Calabre (Ch.-F. Bouche, Essai sur l'his- loire de Provence, 1785, t. I, p. 423). Le fait est qu'il était connu dans notre Midi dès le x1v° siècle. Le 9 février 1355, à Toulon, le Conseil de ville se réunit à l'ombre d'un müûrier, sur un banc de pierre. (Octave Teissier, Nolice sur les Archives de Toulon, p. 115.) M. Germain l'a trouvé, une cinquantaine d'années aupa- ravant, en 1303, dans une commune du Languedoc; le 15 janvier de cette année, un Conseil général des habitants s'assemble sous AL D: 4 . ’ Ce sat © “+ T += Td É # ! FES 4 ëF > > 13 ns ra ki LE ME Æ" Su: 7 à ë x Faure 4. Le -7 Li s » EEE ve - Û LAS Etre, d'Avignon, la Soldanelle croit en grande abon- ; P: A [k 7 È LV 2 née ? nu, d a z + “ SITE deux espèces : Morus nigra L. et M. alba L. Hs appli- quent eux-mêmes à la seconde ce nom de € Morus alba ». Hs insistent sur la différence que l’on trouve entre les mûres de l’une et de l’autre. Les fruits du Morus nigra, quand ils commencent à muürir, sont écarlates, plus tard, à complète maturité, comme sanguinolents et alors délicieux à manger, (mora maturescentia coccinis conflata primüm acinulis, matura cruentatis, et suavissima in deliciis », tandis que ceux du Mürier blanc, de couleur pâle, sont insi- pides et bons à provoquer la nausée plutôt qu'à ser- vir de nourriture, (mora mult insipidiora, candida nitent, ad nauseam potits quàam alendum nata ». A propos des müriers, ils constatent un fait parti- culièrement intéressant : c'est que dans le pays d'Avignon, ces arbres étaient plantés pour être affectés à l'éducation du ver à soie : € panguntur ad solertis vermis serici pastionem (1) ». Entre Avignon et Orange, à quatre lieues de la pre- mière de ces villes, Pena et son ami rencontrèrent en grande quantité le Fustet (Rhus Cotinus L.): cet arbuste est pour eux le « Coccigria » de Théophraste et le « Cotinus » de Pline. Ils l'avaient déjà vu aux environs de Vérone et à Venise, où on l’apportait des montagnes de l’Istrie pour être livré à l'industrie des corroyeurs (2). Enfin, sur le territoire d'Orange, au bord des champs cultivés ou en friche, etle long des chemins, ils aperçurent la Jusquiame blanche, qui était déjà en possession de son nom «€ Hyoscyamus albus ». Ils rapportent que cette Solanée se retrouvait aussi dans un mürier, selon la coutume, lisons-nous dans le procès-verbal de la délibération : « Subtus quodam arbore vocato Morier, ubi solitum est universitatem et homines dicti loci, more solito congregari. » (A. Germain, Le Consulat de Cournonterral, 1855.) (1) Stirp. Adv., p. 442. (2) Stirp. Adv., p. 413. A | le voisinage du Rhône inférieur, et jusqu'à son embouchure (1). Ici se termine la série des plantes de Provence au sujet desquelles les auteurs du Sfirpium Adversaria ont fait connaitre une localité précise. Pour un plus grand nombre d'espèces, ils déclarent simplement qu'ils les ont trouvées en Provence, sans autre indi- cation géographique, mais presque toujours ils four- nissent sur la nature de l'habitat des détails exacts. Nous allons en donner la liste, en conférant les noms du xvre siècle avec les dénominations admises actuel- lement dans nos Flores. A quelles difficultés est soumise une semblable traduction, nos lecteurs doivent aisément le deviner. Parfois même il est impossible de déchiffer les diagnoses anciennes. Tournefort a vigoureusement tancé Mathias de Lobel à propos de l'insuffisance de ses descriptions, trop sommaires, incomplètes, et par là même obscures. « Toutes les fois, dit-il, qu'elles ne sont pas accompagnées de figures, c’est L 4 n re + ” n nl u +, , = à à s Les l A F7» sh L'(5hà Este à : # É Ç : 1 à du d dé : . d é RE ns de NE à Ah 0 nt pe à LES ee Ne ES He à peine si on peutles comprendre, ubi icones desunt, LA vix sanè potest intelligi (2) ». Le reproche ainsi for- ; (a mulé atteint du même coup Pierre Pena. Il est cer- | Ya ain que les deux auteurs n’ont pas, en toute circons- #) tance, justifié la prétention qu'ils étalaient dans le sous-titre de leur ouvrage, avec ces deux mots : : 21 « Perfacilis Vestigatio ». | ee Il suffirait néanmoins pour les excuser de rappeler ; # | Le (1) Stirp. Adov., p. 107 : « In Norbona ad Aurantiam sive Au- | = / raicum et inferius cis transque Rhodani ostia variis satorum et L vervactorum secüs vias marginibus spontè adolescit. » (2) Inst. rei herb., Isagoge. — Nous avons tout lieu de croire que les figures insérées dans les Adversaria furent dessinées par Pierre Pena, Ces figures sont généralement exactes et reprodui- sent avec fidélité le faciès de la plante, Mais comme on ne faisait alors nul cas des détails d'analyse, les dessins de Pena ne sont d'aucun secours quand il s’agit d'une plante qui ne pourrait être déterminée que par dissection des organes floraux. tel ER - quels étaient alors les errements de la phytographie qui, dans les descriptions, donnait sur l’état de la racine d’amples détails, la plupart oiseux, et n’atta- chait aucune importance à la conformation des organes essentiels de la fleur ! D'ailleurs les sévérités de Tournefort, — si justes qu'à certains égards elles fussent, — ne doivent pas à nos yeux amoindrir, sous d’autres rapports, le mérite des Adversaria. Quand on a, comme nous l'avons fait, longuement étudié ce livre, il serait injuste de ne point rendre hommage aux qualités d’observateurs et à la cons- cience dont ses auteurs ont fait preuve. Dans l'indi- cation qu'ils ont donnée des conditions phytostati- ques relatives aux plantes du midi de la France, nous n'avons pas eu à relever contre eux une seule erreur grave. Aussi avons-nous pu très exactement disposer par catégories, suivant l'énoncé de ces conditions, la liste des plantes de Provence pour lesquelles aucune localité plus spéciale n’était marquée. Commençons par les piantes qui ont besoin, quoi- que spontanées, d’un sol que la main de l’homme amende et ameublit (1). Dans les moissons, in segetibus, propter messes, en d’autres lieux cultivés, in satis, in arvis, les Adver- saria signalent : Melampyrum perpusillum lu- Ceratocephalus falcatus leum. Pers. Glastum sive Isatis sylvestris. Isatis tinctoria L. Cicer orobeum. Ervum Ervilia L. (1) Lorsque, à propos des plantes dont l'énumération va sui- vre, les Adversaria feront connaître quelque particularité inté- ressante, nous aurons soin d'en donner communication à nos lecteurs au moyen d’une note. PE CIN EP PTE CI se > ITALIE se CEE En À Ro Re | F2 CAE OP) PEER + 5 : Co "à # CA | ” és LEE 3 er Spina solstitialis, Aurioles Provincialibus (1). Centaurea solstitialis L. Elatine Dioscoridis (2). Linaria spuria Mill. Hyacinthus comosus Diosco- ridis. Muscari comosum Mill. Ægylops. Ægylops ovata L. Phœænix, Lalinis Hordeum murinum. Lolium perenne L. Lolium et temulentum Triti- cum (3). — temulentum L, Dans les vignes (vinela) : Ischæmon vulgare. Panicum sanguinale L, (1) Stirp. Adv., p. 372. — Plante signalée, en termes énergiques, | comme malfaisante pour les agriculteurs de la Provence : « In Galloprovincia tanta feracitate luxuriat, ut segetum incremento non parum officiat, et messorum manus pedesque sæpissimê cruore et vulnusculis afficiat. » Elle rendait pourtant quelque service : on en formait des fagots avec lesquels on bouchait les issues qui se produisent parfois dans l'enceinte des haies : « Solstitio exacto, quum maximè exaruerunt, tunc enim sepes harum aggeribus soliti sunt armare coloni. » — Les Provençaux se servent toujours, pour désigner cette Centaurée, du nom a d'Auriolo, usité au xvie siècle. "1 (2) Stirp. Adov., p. 197. — Cet « Elatine », auquel les Adversaria donnent pour synonyme la « Veronica » de Fuchsius, y est recom- mandé comme remède souverain pour la guérison des ulcères. Un lépreux venait d'être condamné par plusieurs médecins très savants, réunis en consultation, à perdre le nez, et déjà des chirurgiens exercés avaient reçu d'eux l'ordre d'exécuter la sen … tence et d'opérer l'amputation. Grâce à un modeste et chétif bar= bier, misellus barbilonsor, qui connaissait les vertus de la Linaire et conseilla au patient d'en essayer en lotions et en tisane > celui-ci put échapper au bistouri. 24 (3) Stirp. Ado., p. 10 : « Dementiæ affinem tenebricosam verti- ginem, temulentiamque efficit. Quo quidem maleficio vel infimæ plebeculæ notum,et invisum plus satis est, præsertim Gallo- provinciæ, Norbonæ, et passim in reliqua Gallia, ubi yvrayge, : quasi chriosa vel inebrians vocatur. » | zR- — 125 — Au milieu des prairies, in pralis : Narcissus poelicus medio- croceus purpureus (1). Narcissus poeticus L. — medioluteus (2). — Tazetta L. Dans les vergers d’oliviers, tn olivelis, inter oliveta : Phyteuma Norbonensium(3). Reseda Phyteuma L. Anlirrhinum, vulgo Caput Canis et Caput Viluli. Antirrhinum majus L. va moschata Monspellii, Anthyllis Chamæpyloides. Ajuga Iva Schreb. Au voisinage des cultures, dans les terrains en friche et les lieux incultes, in vervactis, in incultis ; sur le bord des champs ou des chemins, squalidis agrorum marginibus, ad margines aridos satorum, juxlà olivetorum margines, in viarum marginibus ; le long des haies, juxtà sepes ; au pied des murailles et parmi les décombres, circà urbium mœænia, propter oppidorum rudera : Vilis vinifera sylvestris spon- laneave, Œnanthe, La- brusca. Vitis vinifera L. Rhus Obsoniorum et Coria- riorum (4). Rhus coriaria L. (1) Stirp. Adv., p. 50 : « Narbonensia Galloque Provinciæ prata liliaceo stellarum candore ornans, Februario et Martio. » (2) Stirp. Adv., p. 51 : « Galloprovincia, ubi etiam sunt Gra- mini detrimento, Donas flores quos corollis innectunt, vocitat. » Quelles étaient les couronnes auxquelles on entrelaçait les Nar- cisses ? Peut-être, comme aujourd'hui encore, des couronnes funéraires. — Le mot dono est toujours usité (on dit aussi courbo-dono), mais actuellement les Provençaux l'appliquent plutôt au Narcisse des poètes. (3) Stirp. Adv., p. 320 : « Quasi foret ad amorem serendamque prolem apta, Phyteuma vocata fuit. » (4) Stirp. Adv., p. 412. — L'écorce et les feuilles du Sumac ser- AR TE CE Et) cel de Moses " Fe PR ASS DC — 126 — Pyracantha (1). Cotoneaster Pyracantha Spach. Z. Cucumer Elaterii sylvestris (2) Ecballium Elaterium Rich. Caltha poetarum (3). Calendula arvensis L. vaient à tanner les peaux : «cortex autem et folia alutariis ad pelles densandas conquisitus, undè Coriarius dictus. » Les cuisi- niers en employaient les fruits comme condiment : « Aciduli autem racemi olim, et etiamnum hodiè, ad condimenta, multus in culinis usus : eoque Culinarius sive Obsonarius vocabatur. » — En français cet arbuste s'appelait Roux. (1) Stirp. Adv., p. 438.— 11 y est dit du Pyracantha: « Estetin Galloprovincia et Italia arbuscula sepibus non ita frequens.…. » La plupart des floristes modernes considèrent le Buisson-ardent comme simplement subspontané. Dans son Catalogue des Plantes de Provence, Honoré Roux disait de cet arbuste : « Çà et là dans les haies, mais rare et subspontané », indication d'habitat qu'ont reproduite les auteurs de la Flore de la France, MM. Gaston Bonnier et G. de Layens: « Midi, rare et subspontané. » Nos observations personnelles nous autoriseraient à croire qu'en réalité le Cotoneaster Pyracantha est bien spontané, et d’ailleurs la géologie démontre qu'il est autochtone dans le Midi de la France, Mais c'est indubitablement une espèce en voie d'émi- gration et qui tend à disparaître du sol de la Provence où jadis cette Pomacée fut commune. « Comment ne pas remarquer, écrivait Gaston de Saporta, la rareté relative et les allures dis- persées du Cotoneaster Pyracantha ou Buisson-ardent qui, lors du quaternaire ancien, remontait jusqu'au centre de l'Europe, puisqu'on l'observe dans le tuf de Cannstadt aussi bien que dans ceux d'Italie et du midi de la France ? » (Bulletin de la So- ciété botanique et horticole de Provence, 1879.) (2) Stirp. Adv., p. 288. — Déjà, au xvi: siècle, les enfants s a- musaient, comme ils le font encore de nos jours, à éclabousser a leurs camarades en appliquant à ce jeu Ja propriété qu'a le fruit, quand il se détache du pédoncule à la ma- turité, de projeter violemment au dehors les graines et le li- quide mucilagineux qu'il contient. Pena et Lobel disent en effet de cette Cucurbitacée : « Sponté importunoque admodum proventu oritur circà urbium mœænia, areas, et stabulorum fimeta, in Italia, et Narbonensi Provincialique Gallia, ubi vel puerulis notissimus, qui fructum turgentem vixdum tactum digitis ludibundi in faciem invicem elidunt, semine succoque peramaro et viroso os oculosque perfundunt. » (3) Stirp. Adv., p. 237. — Le Calendula arvensis était employé cm4 Te — -smht ous % us ae ee Dens leonis Monspelliensium Asphodelivel Leucacanthæ bulbillis (1) Thrincia tuberosa DC. Convolvulus minimus Spicæ folius. Convolvulus Cantabrica L. Psyllium Pulicaris Herba(2). Plantago Psyllium L. Casia poetica. Osyris alba L. comme plante alimentaire. Cuit, il servait à relever les sauces : « in cibum etiam cedit et jusculis inditur, gustu et odore non ingrato »; cru, les femmes le mêlaient volontiers à la salade : « acetariis etiam miscent multam mulierculæ. » (1) Stirp. Adv., p. 83: « Hujus facilis proventus in Hetruriæ, Galloprovinciæ et Norbonæ marginibus satorum et pratorum Junio et Julio... » — Pena et Lobel reprochent à Matthiole d’a- voir fait passer le Dens leonis, sous le nom de Cichorium Cons- tantinopolitanum, pour originaire du Levant, alors que cette plante est commune à Sienne même, patrie du susdit Matthiole, ainsi que dans la Toscane, la Ligurie, la Provence et le Langue- doc. Et à cette occasion les rédacteurs du Sfirpium Adversaria nous font connaître un curieux détail : c’est qu'il y avait alors à Marseille et à Montpellier des botanistes peu scrupuleux qui envoyèrent soit à Matthiole, soit à beaucoup d’autres phytogra- phes contemporains, des plantes indigènes qu'ils prétendaient avoir reçues d'Afrique, de Syrie et de Constantinople. Puisque la plante décrite par le commentateur de Dioscoride était iden- | tique à celle qui est répandue partout, pourquoi l'indiquer com- me croissant de préférence à Constantinople plutôt qu'à Mar- seille et à Montpellier, « quam Massileæ, aut Monspellii, undè scimus tum Commentatori, tum aliis non paucis scriptoribus hodiernis missas et obtrusas plerasque plantas pro Aphricis, Sy- riacis et Constantinopolitanis ? » Pense-t-il que les gens instruits admireront davantage son Cichorium parce qu'il le tiendra de l'ambassadeur d'Allemagne à Constantinople, et n'est-il pas hu- miliant pour un homme qui s’est tant appliqué à la botanique de ne pas reconnaître un Cichorium de son propre pays, et de s'en rapporter à un diplomate plus occupé des devoirs de sa charge qu'habile à distinguer les diverses espèces de Seris ? — C'est ainsi que les deux auteurs ne laissent échapper aucune occasion de gourmander Matthiole. (2) Stirp. Adv., p. 186: « Norbonensia et Galloprovinciæ ver- vacta proscisaque arva operit et insternit. » — Les Adversaria enregistrent le nom vulgaire d « Herbe à puces » dont les mots Psyllium et Pulicaris Herba sont la traduction. vhs RC CANAL LÉ) à %s RER 2e 2 0 : ini tr > RS Mr à HAE 03 AE Re CESR ROME DER AE TE LU à 2 : " 2 ;: CH rrsr- TRE | … LA 27 RNCS: 7. À", Es \ ds — 198 Hyacinthus comosus minor (1) Muscari racemosum DC. Ægylops (2). Ægylops ovata L, Voici maintenant les plantes qui peuplent les ga- rigues si étendues en Provence, landes arides et rocailleuses où domine et que caractérise le Quercus coccifera (3), lieux auxquels nos auteurs appliquent | ces expressions : in collibus macilentioribus, ruderosis, saxeis, — in sterilibus et ericetis, — in tractibus squal- lidis, clivosis, glareosis. Cistus mas. Cistus albidus L. — _fœæmina. — salvifolius L. — Ledon. — monspeliensis L. (1) Stirp. Adv., p. 49. — Le peuple de Provence, comparant à de petits barils les fleurs de ce Muscari, l'appelait Barrelet : « Vulgus Provincialium Barreletz vocat, quasi lagenulas. » Le mot, encore en usage et désignant toujours la même espèce, se prononce et doit s'écrire Barralet. — Les botanistes qui appar- tiennent à l’école analytique pourraient nous reprocher de n'avoir pas donné pour synonyme à l'Hyacinthus comosus minor des Adversaria le Muscari neglectum Guss. au lieu du M. race- mosum. La forme neglectum, qui est, en effet, très répandue en Provence, n'a pas, à nos yeux, la valeur d’une bonne espèce. (2) Nous avons déjà fait figurer l'Ægylops sur la première de nos listes : plantes des terrains cultivés. Nous l'inscrivons enco- re sur celle-ci parce que les Adversaria, après lui avoir assigné pour habitat les champs ensemencés de froment ou d'orge, ajoutent que cette Graminée vient aussi, comme l’enseignait Dioscoride, « æstuosis et glareosis marginibus. » (3) Nous avons donné ci-dessus (note 3 de la page 66) l'étymo= logie du mot garigue. — L'état de garigue qui, dans la partie | méridionale de la Provence et du Languedoc, s'étend sur une si vaste superficie, est le résultat d'un pâturage abusif. Ces lan des, où il n'y a que des broussailles, pourraient être couvertes de superbes forêts de pins. Le pin d'Alep se développe, et même avec rapidité, sur les terrains les plus arides, les plus rocailleux, sur les collines les moins pourvues d'humus, mais à la condi- ÿ tion de n'être point livré, quand il sort de terre, à la dent impi- toyable des moutons et des chèvres. * Lenliscus, Terebinthus Len- tiscifolia minor (1). Pistacia Lentiscus L. (1) Les auteurs du Stirpium Adversaria avaient parfaitement distingué nos deux espèces de Pislacia : Lentisque et Térébin- the. Ils nommaient la première « Lentiscus » et la seconde « Terebinthus ». Quoiqu'ils n'eussent pas, sur les notions de genre et d'espèce des idées bien nettes, ils attribuaient proba- blement au Lentisque et au Térébinthe un rang équivalant à celui qui pour nous constitue le genre. Le Lentiscus est devenu le Pistacia Lentiscus de Linné. Pour le Terebinthus, ils le subdi- visérent en deux espèces (species). Ils donnèrent à l’une deux noms : « Terebinthus major latifolit Narbonensis » et « Tere- binthus major Pistachiæ folio » : ces deux noms doivent certai- nement être appliqués à notre Pistacia Terebinthus L. Ils appe- lèrent l’autre espèce « Terebinthus minor Lentiscifolia » : nous y voyons tout simplement le Lentisque auquel après avoir, sous le titre de Lentiscus, consacré un chapitre spécial, ils reviennent dans le chapitre suivant, intitulé Terebinthus et portant en marge les mots de « Terebinthi latifoliæ species ». Nous sommes donc ici en présence d’un double emploi, ce qui résulte : 1° de la figure gravée où ils ont mis en regard une feuille du vrai Térébinthe et une feuille de leur Terebinthus Lentiscifolia minor : cette seconde feuille est manifestement celle d'un Len- tisque; 2 de ce fait, énoncé dans le texte, que le Terebinthus Lentiscifolia a les feuilles persistantes, caractère, comme on sait, du Pistacia Lentiscus : « Hujus autem sempervirentis et perpe- tuifoliæ », disent-ils de cette prétendue seconde espèce de Térébinthe. — Dans le Pinax (p. 400), Gaspard Baubhin fit du Terebinthus major latifolia.des Adversaria le synonyme de son « Terebinthus peregrina fructu majore Pistaciis simili, eduli », que Linné assimila à une espèce créée par lui sous le nom de Pistacia narbonensis. Mais cette création du Species a été consi- dérée comme le résultat d'une erreur. Grenier et Godron (Flore de France) ont inscrit le Pistacia narbonensis L. parmi les synonymes du P.vera L. Dans la Flore de Montpellier, Loret et Barrandon ont écrit : « Le P. narbonensis L. (ex parte), indiqué autrefois au bois de Valène, près de Montpellier, n’est qu'une forme à larges feuilles du P. Terebinthus L. ; et ce nom doit être exclu de notre Flore. » La récente Flore de France de MM. Rouy et Foucaud, qui énumère un si grand nombre de « formes » et de variétés, n’a point enregistré le Pistacia narbo- nensis L. Cependant nous trouvons dans le Catalogue des plan- Les de Provence d'Honoré Roux, au mot Pistacia vera L., l'indi- cation suivante : « Il existe à Puits-de-Paul, près de Saint-Loup 9 PR RS RE RE SR DR ET Éà MISE : RENE CURE RS à 17, £ es: à É ARS — 130 — Cylisus allera minor et fre-- quenlior (1). Cytisus sessilifolius L. Doryenium Monspellien- Doryenium suffruticosum sium. Vill. Faba minor sylvestris Vicia Narbonensis L. Aster Iltalorum luteum fru- licosum. Inula spiræifolia L. Chrysocome aureave coma, Stæchas citrina noslràs, sive luteus Amaranthus. Helichrysum Stæchas L. Arbulus sive Unedo, d'Ar- boux (2). Arbutus Unedo L. Calamintha altera, Diosco- ridi Nepela. Calamintha Nepeta L. Rosmarinum coronarium (3). Rosmarinus officinalis L. # (banlieue de Marseille), un pied de cette espèce, à l'état sauvage, dont les fruits sont intermédiaires entre le type cultivé et le … Térébinthe : c'est, sous cette forme, le P. narbonensis L. (pro parte)... » — Les Adversaria ne mentionnent expressément en Provence que le Lentisque : « Lentisei feracissima universa Nor- bonensis ora maritima, quæ ad Taurinorum juga, quæque ad montes Pyrenæos protenditur » ; et ils disent du Terebinthus Lentiscifolia minor (qui est encore le Lentisque) : « Hujus autem sempervirentis et perpetuifoliæ nullus collis aut devexus paulô apricior Norbonæ aut Galloprovinciæ non feracissimus, » — Ils nous font connaître le nom provençal du Lentisque, Res- lincle : et nous apprenons qu'avec le bois de cet arbuste on faconnait des cure-dents pour « post epulas dentes emundari.» 2 (1) Stirp. Adv., p. 388 : « Notior et frequentior mult, quæ Italiæ, Galloprovinciæ, squallidis saxeisque collibus inter cocei- 4 feras Ilices et majores Ericas viret, florumque amænissima fæœ- tura oculos caprasque pascit, æstatis initio. » Paître en même temps les yeux et les chèvres ! I1 y a là une association de mots dont la singularité méritait d’être notée. Te (2) Stirp. Adv., p. 424 : « Æstate numerosa fraga edit, coccineo hilaris purpuræ aspectu micantia. » Pena et Lobel font allu- sion à l'avis que Dioscoride formulait ainsi au sujet de l’arbouse: « Esu acerosus, stomacho adversatur : eapitis dolorem movet. » — Le mot « d’'Arboux » est le nom provençal de l’Arbousier : on doit écrire Arbous. S, (3) Stirp. Ado., p. 184 : « Universi tractus collesque aridi, saxei et steriles, cum Norbonensis, tüm etiam Galloprovinciæ, coro- nario Rosmarino ornantur, ubi ubertim gliseit, et totam hyemem # Ce Re Sud 5 a tm he 4 0 æ +. mot qi 1 à — 151 — Polium Lavendæ folio, Fœ- mina Recentiorum. Teucrium montanum L. Thymelæa grani Gnidit. Daphne Gnidium L. Hypocistus (1). Cytinus Hypocistis L, Sabina baccala (2). Juniperus phœænicea L. Parmi les plantes qui recherchent l'ombre des vallons et des lieux boisés, nous trouvons cités in lœælioribus Galloprovinciæ convallibus, in sylvosis : Ligustrum Dioscoridis nos- trs. Ligustrum vulgare L. Platiphyllon Characias Ma- thioli. Euphorbia Characias L. De celles qui se plaisent au voisinage des eaux, deux seulement sont mentionnées : Doria Norbonensium (3). Senecio Doria L. vernat, floresque ex pallido cæruleos alit. Tanta suppetit copia colonis, ut etiam clibanis calfaciendis, focoque domi alendo suc- cendatur. » (1) Stirp. Adv., p. 418 : « Caudici ad radicem Ledi adnascitur Hypocistus, frequens Galloprovinciæ et Norbonæ. » (2) Après avoir, dans leur Flore de France, décrit les feuilles du Juniperus phæœnicea « étroitement imbriquées sur quatre ou six rangs, appliquées, ovales », Grenier et Godron ajoutent : « Nous avons décrit les feuilles habituelles de cette plante, mais accidentellement on observe quelquefois, sur les jeunes rameaux, des feuilles plus allongées, demi-étalées, brièvement cuspidées. qui rappellent la forme des feuilles des genévriers de la section précédente (Juniperus communis, J, Oxycedrus). » Ce phénomène de végétation n’avait point échappé aux excellents observateurs que furent les auteurs du Stirpium Adversaria : « Interdüm in Galloprovincia folia ima sunt Juniperi, superiora Cupressi minus aspera et pungentia. » (Stirp. Advw., p. 447.) (3) Stirp. Adv., p. 124.— Comment expliquait-on le nom donné à ce Sénecon ? Certains botanistes, disaient Pena et Lobel, croient que c'est une plante exotique, apportée de loin par l'amiral André Doria et dédiée à celui qui l'introduisit. Mais nos deux floristes combattaient cette assertion par la raison qu'ils avaient vu la plante croître spontanément en Provence et en Languedoc, avec J, + € a Coniza minima sive Pulica- ria (1). Pulicaria vulgaris Gærtn. le « Limonium », dans les eaux dont le courant n'est pas trop rapide : « Neutiquam Doriæ duci triremium classis Gallicæ et Imperatoriæ præfecto, quasi exoticæ hujus repertæ laudem verè asserunt Herbarii quidam : cüm hæc sit Galloprovinciæ et Norbonæ amnibus non admodum rapidis et iisdem etiam natalibus oriunda quibus Limonium.» — Pour eux le mot Doria doit s'écrire Dorea, c'est-à-dire Aurea, qualificatif justifié par les fleurs jaunes-dorées de cette belle espèce. — N'omettons pas de remarquer qu'ils rappellent à cette occasion le rôle joué par André Doria, qui commanda tour à tour les escadres fran- çaises et celles des Impériaux. Le fait est historique et nous montre une fois de plus que créance est due aux moindres cir- constances consignées dans les Adversaria. Le Gênois Doria, sorte de condottiere maritime, après s'être mis au service du roi François Ier, l'abandonna brusquement, et d'une facon peu loyale, pour devenir l’homme de Charles-Quint. « André Doria, dit l'historien provençal Bouche, avoit esté premierement à la solde du Roy de France avec ses galères ; et en ce temps-là il se tenoit ordinairement aux mers de Provence, faisant sans cesse la guerre aux Espagnols sur mer et en toute sorte de rencontres et avec tant d’addresse, de bonheur et d'ardeur qu'on le voyoit tous les jours revenir aux ports de Provence chargé de quelque dépouille des Espagnols que le seul nom de Doria faisoit trembler... En 1528 André Doria, quittant le party de France, embrassa celui d'Espagne. » (1) Dans le passage consacré à la « Coniza minima sive Puli- caria » (p. 145) les Adversaria n’ont pas désigné spécialement la Provence. L'indication d'habitat porte : « Ubivis Galliæ, Germa- niæ et Angliæ locis lacustribus et humentibus arvis multa.» Con- formément à la règle que nous avons adoptée, cette énonciation générale ne nous eût point suffi pour inscrire la Pulicaire sur nos listes, où nous n'admettons que les espèces attribuées à la Provence nominativement. Mais la Pulicaria est mentionnée comme plante de Provence dans le chapitre relatif à la « Coniza minor vera» (Cupularia graveolens G. G.). Objurgant encore Matthiole, coupable d'avoir mal à propos appelé « Baccharis » la Coniza minor, le rédacteur de ce passage des Adversaria déclare que « jamais l'autorité du botaniste de Sienne ne persuadera aux bonnes femmes de la Provence que pour engluer et détruire les puces, elles devraient faire des balais avec la Baccharis plutôt qu'avec la Pulicaire, commune dans le pays. » — Nous avions déjà cité ce texte dans la première partie de notre travail, en dé- fendant les droits de Pierre Pena, CAE te ang et; rs re — 133 — Xyris sive Iris agria Theo- phrasti, Spalula fœtida vulgo (1). Iris fœtidissima L. Nous avons dressé une liste spéciale des plantes que Pena et Lobel considéraient comme maritimes. Mais il ne faut pas prendre ce mot au sens plus précis où nous l’employons aujourd'hui. 1n marilimis, in ora maritima, in Galloprovincia marilima, secüs mari- timas vias sont des expressions desquelles il résulte que les espèces suivantes s’'accommodent d’un voisi- nage plus ou moins rapproché de la mer : Clematis altera, urens, vulgi Flammula (2). Clematis Flammula L, Papaver corniculalum. Glaucium luteum Scop. Vitis vinifera sylvestris… Vitis vinifera L. Lentiscus. Pistacia Lentiscus L. Myrtus minor (3). Myrtus communis L. Arbutus sive Unedo. Arbutus Unedo L. . Thymelæa grani Gnidii. Daphne Gnidium L. (1) Stirp. Adv., p. 32. — La station cest ainsi déterminée : « Galloprovinciæ et Angliæ, ubi quàam uberrima, propè uda prata et littoreos maris aggeres. » (2) Stirp. Adov., p. 276. — Il s'agit ici, très probablement, de la variété maritima G. G. Ce sont les détails suivants qui nous le font supposer : «Norbonæ et Galloprovinciæ spontè et in pratis maritimis humi sparsa, tenera et humilis visitur. » — On nour- rissait alors les pourceaux avec la Clématite,desséchée ou fraiche. Ces animaux n'en éprouvaient aucun malaise : les paysannes croyaient même avoir trouvé là un excellent moyen de les en- graisser. (3) Stirp. Adov., p. 419: « Baccis post vindemias saginantur aves, tamque suaves edendo fiunt, ut integras, non exenteratas esitent, eoque proverbio feratur, stercus earum præstare carnibus, in Galloprovincia maritima, ubi siccaneus collis nullus cui arrideat paulà placidior aura, ubi non multa vernet hæc myrtus.» Ce passage nous permet une fois de plus de faire remarquer combien fut exact, chez les auteurs du Sfirpium Adversaria, esprit d'ob- servation. Il est très vrai que dans la France méridionale divers oiseaux, les grives notamment, se nourrissent, après les ven- 2 (HER Comme plante véritablement littorale, littoribus et arenosis Galloprovinciæ frequens, nous relevons uni- quement : Juncus Cyperoides marili- mus. Cyperus schænoides Griseb. Aux plantes alpines que le Stirpium Adversaria déclarait indigènes dans les Alpes de la Provence, et dont nous avons donné plus haut l'énumération, il y a lieu d'ajouter quelques espèces montagnardes pour lesquelles l'habitat n'est indiqué que par ces mots : Cin monlibus, in montibus udis, in montibus Galloprovinciæ celsis », mais qui certainement furent trouvées dans les mêmes régions : Fumaria lulea montana (1). Corydalis lutea DC. Valeriana sylvestris. Valeriana officinalis L. danges, des baies du Myrte. C'est même ce genre de nourriture qui a donné aux merles de Corse une réputation méritée. — A noter encore cette observation culinaire, que les oiseaux susdits sont mis à la broche sans être vidés. Le proverbe auquel les Adversaria font allusion n'a pas cessé d'avoir cours en Provence. (1) Stirp. Adv., p. 338 : « Paucis locis obvia, nec nisi calidio- rum regionum montibus Illyriæ, Dalmatiæ, Hetruriæ, Narbonæ et Galloprovinciæ, » — Dans nos très nombreuses herborisations à travers la Provence, nous n'avons jamais rencontré le Cory- dalis lulea et le Calalogue des plantes de Provence d’Honoré Roux ne l’a point enregistré. On le trouve en Dauphiné : M. le docteur Saint-Lager, dans son Catalogue des plantes vasculaires du bassin du Rhône, et dans la huitième édition de la Flore de l'abbé Carriot, signale plusieurs stations appartenant à cette province. Il faut donc admettre qu'au cours de leurs pérégrina- tions Pena et Lobel franchirent la limite séparative de la Pro- vence et du Dauphiné, sans savoir au juste où passait la ligne divisoire ; ou bien encore qu'ils virent le Fumaria lutea dans quelque coin reculé du territoire provençal où, depuis lors, aucun botaniste ne sera venu herboriser. — L'un des ouvrages mentionnés ci-dessus donne pour synonyme au Corydalis lutea DC. le Fumaria lulea de « Pena et Lobel ». Nous sommes heu- reux de voir que M. le docteur Saint-Lager n'est pas au nombre st _ . Lu < 1 1} — 135 — Solidago Sarracenica (1). Senecio Saracenicus L. Aster montanus hirsulus (2). Inula montana L. Asarina aut Hederula saxa- tilis (3). Antirrhinum Asarina L. Oxalis sativa Franca rotun- difolia repens. Rumex scutatus L. Asarum Baccaris. Asarum europæum L. Buxus. Buxus sempervirens L. des auteurs qui suppriment la personnalité de Pierre Pena et regardent Mathias de Lobel comme le seul auteur du Stirpium Adversaria. En diverses occasions, il a rendu justice à Pena, et notamment dans un travail récent, Grandeur el décadence du Nard (Paris, 1897). (1) Stirp. Adv., p. 125. — L'’épithète de Sarracenica (Sarra- sine) accolée au nom de cette plante est ainsi expliquée : « quôd Turcæ et Sarraceni opinionem magnæ peritiæ, in medicamentis vulnerariis præsertim, essent apud Europæos assequuti. » (2) Stirp. Adv., p. 147-148. — Voici, en son entier, la désigna- tion attribuée à cet « Aster » et formant l'intitulé du chapitre : « Aster montanus duplex prægrandi Helenii flore ». Le texte, qui est accompagné d’un dessin représentant, à côté l’une de l’autre, deux Corymbifères un peu différentes, débute ainsi : « Merentur etiam Asteris nomen plantæ illæ duæ quæ non nisi rar in montibus Allobrogum et Galloprovinciæ celsis florem unicum luculentæ magnitudinis ostentant. » Le qualificatif hirsutus, imprimé en marge, etles mots « Alter folio et caule hirsutis », inscrits en tête d’un paragraphe spécial, s'appliquent à l’une de ces deux plantes. C’est justement l’Asler montanus hirsutus, transformé par Gaspard Bauhin en « Aster atticus luteus mon- tanus villosus magno flore », qui est devenu l’Inula montana de Linné. De l’Aster montanus sans autre épithète, G. Bauhin avait fait l’« Aster montanus luteo magno flore », que Linné n'a point admis comme synonyme de l'une des espèces établies par lui. Peut-être a-t-il pensé que l'Aster montanus faisait double emploi avec l’Aster montanus hirsutus : nous nous demandons s'il ne faudrait pas voir dans le premier l’Inula helenioides DC. — L'Inula montana L. descend jusque sur les collines peu élevées mais rocailleuses de la Basse-Provence. (3) Stirp. Adv., p. 262 : «Asarinam verd rar nisi locis montosis et saxeis vidimus, in Galloprovinciæ, Delphinatûs et Norbonæ montosis. » — Même observation que ci-dessus pour le Corydalis lutea : absence d'habitat provençal actuellement connu. — Un fait curieux est pourtant à noter. Il y a présentement (1898) au — 136 — *:' c Pour un très petit nombre de plantes, aucune con- dition de stat n’est signalée; il n’y a pas d'autre indi- cation que celles-ci : © In Galloprovincia plurima, nolissima, vulgatissima » : Umbilici Cotyledon. Umbilicus pendulinus DC. Ferula et Ferulago. Ferula Ferulago L, Origanum Onitis Gallopro- Origanum vulgare L. et sa vinciæ majus el minus. variété prismalticum. Oxyarceulis sive Juniperus acula (1). Juniperus Oxycedrus L. I n'y a pas, croyons-nous, témérité de notre part à croire que nous n'avons point commis d'erreur rela- tivemeni à l'identité des plantes dont nous venons de reproduire les noms anciens en regard de ceux qu'elles portent présentement. I en est quelques-unes au sujet desquelles il ne nous à pas été possible de nous prononcer. Nous avons cependant certitude pour le genre, chez Jardin botanique de Marseille deux pieds d'Antirrhinum Asarina qui végètent depuis plusieurs années, sans y avoir été inten- tionnellement semés, à l'extérieur du mur d’une serre, dans les interstices de la maçonnerie. (1) Stirp. Adv., p. 448. — Le texte fait connaître le nom pro- vençal de lOxycèdre, Cade ; il parle en même temps de l'huile que l’on extrayait par combustion du bois fraîchement coupé de cet arbuste : « Vulgatissima est etiam in Galloprovincia Junipe- rus major hæc, inibi Cade vocata : … spirat suaveolentiam li- gnum, funditque liquorem quem oleum de Cade vocant. » Mais les Adversaria ne disent pas à quel usage était employée l'dli de cade, L'Hisloria plantarum generalis, attribuée à Dalechamp, rapporte (Et. 1, p.39) que l'extraction de cette huile s’opérait surtout à Marseille où les bergers et les paysans s'en servaient pour guérir de la gale les chiens et les brebis et se débarrasser eux-mêmes des punaises : « Ex Oxycedri lignis ossulatim conci- sis, toto Massiliensi tractu pastores et rustici picis liquidæ genus, nigrum videlicet ac fœtidum liquorem oleosum eliciunt, quem sua lingua corrupto Cedri vocabulo Huille de Cade nomi- nant, ad scabiem canum et pecorum, ac cimices necandos præs- lantissimum, sed odoris plané abominandi. » : + — 137 — celles qui suivent : l'indication que nous donnons de l'espèce estprobablementexacte, mais demeure hypo- thétique : Sous la rubrique «Medicæ tres in semine varietates», les Adversaria donnent la figure de trois types de Me- dicago qui, d’après leurs fruits, nous paraissent être : Medicago scutellata All. — pentacyela DC. = denticulata Willd. (1). Sous le nom de « Serpentina », avec celte mention d'habitat : « Provenit in montibus Galloprovinciæ », nous croyons reconnaitre le Plantago carinata Schrad. plutôt que le P. serpentina Vill. (2). Nous pensons que l'appellation de «€ Limonium parvum Norbonense Oleæfolium », croissant en abon- (1) Stirp. Adv., p. 383 : — L'auteur de ce passage, probable- ment Pena, donne le nom provençal de la Luzerne, « quam vul- gus in Galloprovincia vocat Lauserdo. » (2) Stirp. Adv., p. 187. — Pour y voir le Plantago serpentina Vill., nous aurions eu l'autorité de Magnol et celle de Grenier et Godron. Les auteurs de la Flore de France inscrivent parmi les synonymes du Plantain de Villars le € Coronopus Serpentina » de Magnol (Botanicum Monspeliense, p.79) que ce botaniste dé- clarait identique à l’ « Holosteum strictissimo folio minus » du Pinax ; et Gaspard Baubhin assimilait son Holosleum au Serpen- tina de Pena et Lobel. Mais Linné ne partagea point l’opinion de Magnol. De l’Holosteum strictissimo folio il fit son Plantago subulata, ne considérant que comme simple variété de cette espèce l’« Holosleum » du même Gaspard Bauhin. Linné a commis là une erreur certaine. Les deux Holosteum du Pinax se rappor- tent à deux espèces différentes, et c’est seulement le second qui doit, sans le moindre doute, s'adapter au Plantago subulata. Nous reviendrons du reste sur cette question, quand nous au- rons à nous occuper des plantes du Languedoc. — La descrip- tion qu'ont fournie les Adversaria de leur « Serpentlina », beau- coup trop brève, ne permettait pas de rien décider. Lobel la compléta dans les Observationes par une gravure qui représente à nos yeux, non point le Plantago serpentina Vill., mais bien le P. carinata Schrad (forme genuina G. G.). — 138 — dance «inter salebrosa littora et rupes montis Ceti, et alibi Norbonæ et Galloprovinciæ saxosis », désigne notre Statice virgata Willd. (1). Une Graminée ainsi dénommée : « Fislula vel Syringa et Scriptoria » est certainement un Arundo. « Eadem cum Donace Harundine hæc est », dit le texte (2). Cette plante dont les tiges ont l'épaisseur du pouce ou de l'index et qui atteignent une hauteur de huit à dix pieds, vient, est-il ajouté, « in Gallo- provinciæ et Corsicæ udis et pinguibus propè urbes locis ». Les enfants s’en servent en écrivant pour tracer les jambages des lettres majuscules, € pueris quæsiti calami ad majuscula characterum crura deli- nianda. » Il s’agit, à notre avis, ou d’une forme plus grêle de l’'Arundo Donax, ou peut-être de l'A. Pliniana Turr. Enfin pour deux autres plantes le genre même reste indéchiffrable ; c’est à peine si l’on peut reconnaitre la famille. Ce sont deux Papilionacées appelées, l’une « Polygala nostra » et l’autre « Astragali persimilis palmaris pusilla planta » (3). Malgré tous nos efforts et, pour la seconde, le secours d'une gravure qui accompagne le texte, il nous est impossible de fixer leur identité. Les descriptions, par trop incomplètes, sont indubitablement de celles qui avaient allumé les colères de Tournefort. Outre les plantes spontanées dont nous venons de faire le relevé, le Stirpium Adversaria cite quelques- uns des végétaux que cultivaient au xvi siècle les agriculteurs ou les jardiniers provençaux. On multipliait, dans les champs et les jardins, les plantations de Roseau, que le livre nomme « Donax (1) Stirp. Adv., p. 123. (2) Stirp. Adv., p. 27. (3) Slip. Adv., p. 179 et 404, — Pour la première, l'habitat est ainsi indiqué : « In Galloprovinciæ pascuis montosis » et pour la seconde : « In collibus quibusdam Galloprovinciæ ». — 139 — sativa nosträs ». — «Les paysans, dit-il, emploient à façonner les quenouilles dont les femmes se ser- vent pour filer, ainsi que des treillis pour les fenê- tres ; ils le courbent pour construire des berceaux (1) et d’autres ornements de jardin; ils le fichent en terre comme échalas pour soutenir les vignes (2) ». Comme plantes alimentaires, nous trouvons men- tionnées trois céréales : le Froment, l’'Orge et l'Epeau- tre « Speltha vel Speautra ». Le Riz « Oriza » était, parait-il, l'objet, en Pro- vence, d’une culture étendue : € Nobis visa in Longo- bardicis et Hetruscis campis latissimis uliginosis, atque in Provincia Galla (3) ». La Provence est nommée avec les diverses con- trées où, « pour les délices du palais, in gulæ deli- tiis », müùrit le Melon « Melo vulgi, sive Cucumis antiquorum, Dioscoridis Melopepo ». — « Le Melon a la chair jaune, le parfum et la saveur du miel ou du sucre. On cultive aussi une variété à chair blanche, dont le goût est exquis. On mange les melons avec du pain et un peu de sel en juillet et août, esitantur cum pauco sale et pane Julio et Augusto (4). » Les Adversaria nous apprennent encore qu'on don- nait place, dans la plupart des jardins d'Italie, de Provence, de Languedoc et d'Espagne, à une Solanée qui était alors en grande faveur et que l’on obtenait de graines apportées de l’île de Crète ou des Cycla- des. C’est la Mandragore « Mandragoras mas » que (1) Destinés à être recouverts par des plantes grimpantes. (2) Stirp. Adv., p. 27: « Non parum frequens hæc hortis et satis Galloprovinciæ et Norbonæ, ubi colos ad nendum et clatras fenestris Rustici mulierculis factitant, flectuntque ad fornices topiarias, aliaque viretorum ornamenta, adque fulciendas vites humi depangunt. » (3) Stirp. Adv., p. 12. — Dans le même chapitre il est dit, toujours à propos du Riz : « Unius duntaxat generis nobis visum in Provincia Norbonensi et Hyspania. » (4) Stirp. Adv., p. 285. — 140 — deux particularités avaient rendue célèbre au moyen-àâge. On croyait apercevoir forme humaine en certaines dispositions de la racine, et l’on attri- buait à la plante des propriétés aphrodisiaques et magiques. Aussi l’appelait-on « Circæa » en souvenir de la magicienne Circé qui, la première, aurait dé- couvert ces propriétés (1). On semait aussi dans les jardins d'agrément, mais surtout dans les jardins monastiques, une Graminée exotique qui portait alors les noms de « Lithosper- mum Plinianum sive majus, Lachryma Job seu Christi ». C’est, dans la nomenclature actuelle, le Coix Lachryma L. « Avant, écrit le rédacteur de la notice, que les couvents de la Provence et du Lan- guedoc eussent été détruits par la fureur des guerres intestines, les moines avaient grand soin de cultiver cette plante, à cause de la dureté de ses graines, qu'ils perçaient et qu'ils enfilaient pour en faire des chapelets (2) ». Nous avons volontairement exclu des listes qui précèdent les divers arbres que le Stirpium Adver- saria a signalés comme croissant en Provence, soit à l’état spontané, soit introduits. Nous avons mieux aimé les grouper dans une énumération spéciale. Ces arbres sont: Le Pistachier., — L'auteur du paragraphe relatif à cet arbre l'identifie avec le « Terebinthus Indica » de Théophraste et le « Pistachia » de Dioscoride. Il constate sa ressemblance avec le Térébinthe. Il pré- tend que dans les jardins de la Provence, où on le sème, ses fruits ne parviennent pas à maturité (3). (1) Stirp. Adov., p. 106. (2) Stirp. Ado., p. 16 : « Galloprovinciæ et Norbonensia vireta, præsertim Cœnobiorum, nondum intestinis bellis efferventibus eversa, hanc plantam sedulà colere solita erant, seminis lapidei causa : quo trajecto filo preculas funditabant et supputabant, » (3) Stirp. Ado., p. 413. É & « — 141 — Cette allégation est inexacte. Les Pistaches, en Pro- vence, mürissent parfaitement ; L'Amandier, «€ Amygdalus », dont les plantations occupent en Provence de vastes surfaces : Qin Gallo- provincia..… Consitæ sunt planities patentissimæ Amygdalo arbore (1) » : Le Tamarix Gallica L., « Thamariscus Norbo- nensis », qui croit Q in riguis et maritimis Gallopro- vinciæ (2) » ; L'Olivier, « Olea » : « Hujus lucos perennes den- sissimos et amcænissimos alunt apricæ tepidiores convalles Hispaniæ, Galloprovinciæ et Norbonæ (3) »; Les deux Müriers (Morus nigra L., M. Alba L.) dont Pena et Lobel avaient déjà noté la présence sur le territoire d'Avignon, mais en ajoutant aussi- tôt : «et in [Galloprovinciæ] plerisque locis » ; Le Figuier, ainsi préconisé : (Est magno subsidio fructus Ficus Hispaniæ, Italiæ et Galloprovinciæ, ubi sylvulas verna et autumnali fœtura biferæ Ficus perelegantes videas » ; la figue est toujours déli- cieuse, dit encore le texte, de quelque facon qu'elle soit mangée, fraiche ou desséchée au soleil (4) ; Le Chêne-Rouvre, mentionné brièvement, mais avec l'indication de son nom provençal : €...quam hodiè Robur vel Roure vulgus nostràs vocitat (5) » ; (1) Stirp. Adv., p. 423. (2) Stirp. Adv., p. 447. (3) Stirp. Adv., p. 422. (4) Stirp. Adv., p. 442. — Déja, au xvie siécle les figues sèches étaient pour la Provence l'objet d'un commerce impor- tant. Le botaniste allemand Eberwein, plus connu sous le nom de Valerius Cordus, écrivait en ses Annolaliones in Dioscoridis libros (Strasbourg, 1561) que les figues sèches de Provence arri- vaient jusqu'en Allemagne dans de petits cabas de forme conique en sparterie, in minulis et turbinalis sparleis corbibus ; et il ajoutait que les plus estimées étaient les figues Marseillaises : « hæ parvæ quidem sunt, sed suavitate præstantes, Marsilische feigen dictæ. » (5) Stirp. Adv., p. 432. — 142 — Le Chène-Vert « /lex arbor aut arborea », dont on constate la fréquence aussi bien en Provence qu’en Languedoc : « sylvæ quædam in Galloprovincia et Norbona, quantæ quantæ sunt, Iliceta sunt (1) » ; Le Pin d'Alep (Pinus Halepensis Müll.) et le Pin maritime (P. Pinaster Soland), compris l’un et l’autre sous cette rubrique « Pinus sylvestris et varietates » et désignés par ce membre de phrase : « duæ [varie- tates] in Lyguriæ, Galloprovinciæ et Norbonensis ora maritima passim sylvescunt (2). » Il nous reste, maintenant, à dresser une dernière liste. C’est celle des plantes de Provence pour lesquelles le mérite de les avoir trouvées et signalées doit être attribué à Lobel seul. Nous avons exposé plus haut comment Mathias de Lobel, possédé du désir de faire figurer son nom seul en tête d’un grand ouvrage de botanique descriptive, réunit, à ce qui restait de la première édition des Adversaria, un travail personnel qu'il intitula Obser- valiones, et donna à cet ensemble le titre commun de Plantarum seu Stirpium Historia. (1) Stirp. Adov., p. 431. — Nous aurions pu, à la rigueur, inscrire sur notre liste d'arbres le Quercus coccifera et aussi l'Arbutus Unedo, le Juniperus Oxycedrus et le J. phœænicea. Quoique, très généralement, ces végétaux ne dépassent pas, en Provence, la hauteur moyenne d'un buisson, on rencontre pourtant certains pieds qui acquièrent la taille d'un arbre. Il en est ainsi, notam- ment du Juniperus phænicea. La Flore francaise de Grenier et Godron disait de cette espèce : « Est un arbre dans la Camar- gue et y forme de véritables forêts. » Le fait a été confirmé par notre ami le professeur Ch. Flahault. Il a vu en Camargue des Genévriers de Phénicie qui « y atteignent de six à huit mètres de hauteur, et quelques-uns dépassent deux mètres de circonfé- rence », (Observalions sur l'exhaussement actuel du Delta du Rhône, Société Languedocienne de Géographie, t. xvir.) (2) Stirp. Ado., p. 449. — Pour le Pin Pignon « Pinus vulga- lissima », les Adversaria ont indiqué seulement une station lan- guedocienne, les environs d'Aigues-Mortes, — 143 — “Il est permis de supposer que pour les Observa- tiones Lobel utilisa des notes et des dessins laissés par Pierre Pena, quand celui-ci prit le parti de renoncer à la botanique. Mais les Observationes étant signées de Lobel seul, il faut bien, en définitive, considérer cette partie du volume comme son œuvre personnelle. Voici donc le relevé de quelques espèces que les Adversaria ne mentionnaient pas, tout au moins comme espèces appartenant à la flore provençale : Lychnis sylvestris incana cauliculis striatis, Papaver spumeum quorumdam (1). Silene inflata Sm. — — hirta (2). — quinquevulnera L. Erica Alexandrina Italo- rum (3). Passerina hirsuta L. Dans le Stirpium Observationes, Mathias de Lobel étudie avec soin les diverses espèces de Bruyère, genre de plante auquel les Adversaria avaient à peine accordé quelques lignes: « Multd plures Ericæ quàm priscis memoratæ varietates, — écrit Lobel, — præsertim in Gallia Narbonensi.… Distant quippe fruticis proceritate, folio Myricæ, Juniperi aut Lari- eis, et floris colore, non modà in Gallia Narbonensi, Galloprovincia, Italia... (4) » (1) Stirp. Obs., p. 182 : « Nusquam, nisi in Gallo-Provinciæ et Italiæ campestribus vinetis à me reperta ». — La figure donnée par Lobel laisse fort à désirer comme exactitude. Mais notre traduction de Papaver spumeum en Silene inflala (Cucubalus Behen L.) a pour elle l'autorité des synonymies adoptées par le Pinax et le Species. (2) Stirp. Obs., p. 181 : « Areis, segetibusque Gallo-Provinciæ et Narbonensis agro gaudet, » — Beaucoup de floristes modernes regardent le Silene quinquevulnera de Linné comme une simple variété du S. Gallica du même auteur. (3) Stirp. Obs., p. 623 : « In Galloprovincia maritimis potissi- müm ejus facilis proventus. » (4) Stirp. Obs., p. 620. = DRE Ce texte dit expressément que la Provence possède plusieurs espèces (varietates) de Bruyère.Mais lorsque ensuite Lobel passe en revue les différentes espèces dont il donne des figures généralement ressem- blantes, il ne signale plus, pour quelques-unes de ces espèces, que des localités languedociennes. En disant néanmoins qu'on trouve en Provence plusieurs Bruyères, les Observationes ont par là même désigné sûrement les espèces suivantes : Erica juniperifolia densé fru- licans Narbonensis. Erica multiflora L. — major flore albo. — arborea L. — scoparia flosculis her- baceis. — scoparia L. Mathias de Lobel a, de plus, signalé la présence, dans les montagnes de la Provence, du Pin sylvestre. Il le nomme « Pinaster » et lui donne pour synonyme le « Pinus sylvestris montana » de Théophraste (1). A propos de l’Hypecoum procumbens, l'auteur du Stirpium Observationes, nous avons vu plus haut, raconte qu'autrefois il a expédié de Marseille en Flandre des graines de cette plante. Ces graines, semées dans le pays, y produisirent de beaux sujets, ce qui permit à Charles de l'Escluse de faire graver un dessin de l’'Hypecoum: «cujus semen olim Massilia in Belgium transmisi, ubi feliciter enatam sculpen- dam curavit Clusius noster (2) ». (1) Stirp. Obs., p. 632 : « Montibus Galloprovinciæ, Liguriæ, | Alpinis et Pyrentæis gaudet.» — Il faudrait, nous en convenons, une certaine bonne volonté pour reconnaître le Pin sylvestre à la description que Lobel a rédigée, en trois lignes obscures, pour son « Pinaster ». Mais ici encore nous avons le témoignage de Gaspard Bauhin. En constituant, dans le Pinax, l'espèce qu'il a nommée « Pinus sylvestris », — espèce et dénomination accep- tées et conservées par Linné,— il inscrivait parmi les synony- mes de ce Pin le « Pinus sylvestris montana » de Théophraste et le « Pinasler » de Lobel. (2) Stirp. Obs., p. 429. Cr: — 145 — . Lobel parle de Marseille une seconde fois au sujet d'une Gorgone qu’il nomme « Antipathes sive Coral- lium nigrum Dioscoridis » et que l’on trouve, dit-il, à Marseille parmi les Coraux : « Massiliæ inter Corallia occurrit. » Il ajoute que la figure qu'il donne de cet Antipathes a été dessinée d’après un rameau prove- nant «des pêcheries de Marseille, à Massiliensium piscationibus (1) ». Il résulte, d’ailleurs, d’une déclaration formelle de Lobel, qu'il avait herborisé en Provence. Il l’affir- mait dans son épitre à la reine Elisabeth et il disait de son « Lychnis sylvestris incana » : € In Gallopro- vinciæ et Italiæ campestribus et vinetis à me reperta.» (1) Stirp. Obs., p. 650.— Notre ami A.-F. Marion, professeur de zoologie à la Faculté des Sciences de Marseille, à qui nous avons demandé s'il lui serait possible de nous dire ce que représente en réalité la figure donnée par les Observationes de cet « Anti- pathes », nous a répondu qu'il y voyait un axe dénudé de Gor- gone, sans doute Gorgonia verrucosa Pallas.— Sous le titre de Corallinæ Antipathis facie varietates, Lobel a figuré (loco cit.) en l'appelant « Corallina alba » ce même Gorgonia verrucosa en état de parfaite intégrité, et aussi le Leptogorgia viminalis L. « Corallina rubens ». L'habitat qu'il indique porte : « Narbonæ et Galloprovinciæ mediterraneis littoribus ». 10 III HERBORISATIONS EN LANGUEDOC Lorsque nous commençcämes les recherches qui devaient nous permettre de mener à bien cette étude, nous avions tout d’abord l'intention de les restrein- dre, comme l'indiquait notre titre « La Botanique en Provence», aux faits intéressants pour la flore pro- vençale seulement. Mais nous n'avons pas tardé à comprendre que les deux flores, celle de la Provence et celle du Lan- guedoc, ayant entre elles une affinité très étroite, ce serait donner à notre œuvre un utile complément que de relever, dans les écrits des botanistes du xvie siècle qui séjournèrent à Montpellier, et d’ad- joindre au travail entrepris, toutes les particularités relatives au Languedoc. Il est hors de doute que pour beaucoup d'espèces attribuées au Languedoc, Pierre Pena et Mathias de Lobel les avaient vues aussi en Provence, — et réci- proquement. En bien des cas, comme ils avaient déjà, pour telle plante, signalé une station dans l'un des deux pays, ils se dispensèrent d'en noter une autre dans la province limitrophe. Le grand nombre de plantes citées par eux comme appartenant au Languedoc démontre que, pendant leur séjour à Montpellier, — voulant mettre à profit le temps relativement court qu'ils y devaient passer, — ils déployèrent une très grande activité. LE “à A ELg Fr Eu L'extrème richesse, l’étonnante variété de la flore méridionale les avaient enthousiasmés. Et nos lec- teurs se rappellent avec quelle chaleur ils s’expri- maient à ce sujet dans leur dédicace des Adversaria aux professeurs de l'Université. Ils visitèrent d'abord les alentours de la ville de Montpellier. Puis ils élargirent le cercle de leurs in- vestigations, parcoururent tout le pays environnant dans un rayon de plusieurs lieues, atteignirent même les Cévennes et montèrent, plus d’une fois sans doute, jusqu'au sommet de l'Espérou et de l’'Aigoual. Pour un certain nombre des plantes du Langue- doc, les auteurs du Stirpium Adversaria eitent avec précision les localités où ils les ont rencontrées. D'après les indications données, on voit que le périmètre qu'ils ont exploré en rayonnant autour de Montpellier est circonscrit par une ligne qui, du côté de l'Est, partirait d'Aigues-Mortes, et, remontant vers le Nord, passerait par Saint-Gilles, Marsillar- gues, Lunel, Sommières, Ganges, le Vigan, les Cé- vennes, pour redescendre à l'Ouest vers Béziers et Agde. Ajoutons d’ailleurs qu'ils ne s’en tinrent pas uni- quement à ce territoire, si étendu fût-il. Ils en fran- chirent les limites pour se rendre soit à Agen, soit à Mende, soit à Nimes, et de là certainement à Avi- gnon ; ils herborisèrent aux environs de ces diffé- rentes villes, comme nous avons déjà vu qu'ils le firent autour de la cité pontificale. Souvent les étudiants se groupaient pour aller ensemble herboriser dans la banlieue de Montpellier. C'étaient alors de véritables parties de plaisir, nos auteurs le disent expressément : «Studiosi ludibundi prodeuntes, nos commilitonesque nostri.. (1). » Mais, tout en folätrant, la bande joyeuse ne perdait (1) Stirp. Adv., p. 74. SES V7 fee pas de vue la botanique. Chaque étudiant avait son herbier qu'il était jaloux d'enrichir. Et nous appre- nons qu'une station de (Panax Heraclium Herculea », située entre Frontignan et Montpellier, avait été à peu près détruite, à raison de l’avidité avec laquelle les étudiants s'étaient jetés sur cette plante pour en emplir leurs cartables, «studiosorum accursu, qui avidè istam plantam in chartis servabant, delita illic ferè fuit (1).» Quelquefois les professeurs, tels que Rondelet ou son gendre Assatius (2), se mêlaient aux étudiants, dirigeaient eux-mêmes les herborisations, et ensei- gnaient à leurs élèves le nom et les propriétés des plantes encore inconnues de ceux-ci. Il arrivait même que le savant évêque de Maguelone et de Montpellier, Guillaume Pelissier, zélé botanophile, se joignait aux herborisants et mettait à leur service sa vaste érudition, toutes les fois qu'il s'agissait de décider si telle plante était bien celle que Dioscoride avait entendue (3). Les rédacteurs du Stirpium (1) Stirp. Adv., p. 312. (2) Jacques Salomon de Bonail d’Assas (c'est ce dernier nom qui, traduit en latin, est devenu Assatius) avait épousé Cathe- rine, l’ainée des filles de Guillaume Rondelet. Immatriculé comme étudiant le 31 octobre 1548, il fut recu docteur le 17 mai 1557. (J.-E. et G. Planchon, Rondelet et ses disciples, Appendice.) Jacques d’Assas devint professeur et il paraît s'être adonné particulièrement à la botanique. Les Adversaria citent plusieurs fois son nom, et toujours avec éloge : « Assatius, præceptor exer- citatissimus et de medica materia bene meritus...» Le même ouvrage fait mention de la terre, prædium Domini Assali, où ce professeur ne manquait pas de conduire ses élèves. On allait aussi herboriser aux alentours de la maison de campagne appar- tenant à Rondelet, et qui a continué jusqu'à ce jour à être appelée le Mas de Rondelet.— C'est évidemment à ces herbori- sations collectives que fait allusion la phrase suivante (p. 174): « Rondelletius et Assatius, doctissimi præceptores, et in Acade- mia simplicium indagatores, quibus frequens assentiebatur au- ditorum corona...» (3) Guillaume Pelissier était profondément versé dans la con- JU LA LE PS Pri | — 150 — Adversaria racontent que c’est le docteur d’Assas qui leur a montré le « Lycopsis » et le « Panax Hera- clium », et qu'ils doivent à Rondelet et à Pelissier la connaissance du « Polemonium » et de la « Cassia poetica ». Pena et Lobel ont procédé à l’égard des plantes languedociennes comme ils avaient fait au sujet de celles de la Provence. Très souvent ils se sont bornés à dire qu'ils les ont vues ou cueillies en Languedoc, sans autre indication de lieu, mais en signalant néanmoins, et presque toujours avec exactitude, la nature du milieu. Pour d’autres, au contraire, ils ont noté d’une facon précise la station topogra- phique. Nous avons inscrit les unes et les autres sur deux listes distinctes, comme précédemment pour la Pro- vence : dans la première seront énumérées les plan- tes dont l'habitat en telle ou telle localité est expres- naissance des littératures anciennes et doué de remarquables aptitudes intellectuelles. Il avait débuté par la diplomatie. François I: lui confia diverses missions, et, entre autres, celle de négocier avec le pape Clément VII, venu à Marseille, les con- ditions du mariage projeté entre le futur Henri II et Catherine de Médicis, nièce du pontife. Pelissier avait été nommé évêque de Maguelone. Mais comme cette ville, autrefois détruite par Charles Martel, ne s'était pas relevée de sa ruine, et, devenue déserte, ne contenait d’intact que sa vieille cathédrale, il obtint, après de laborieuses négociations, que le siége épiscopal fût transféré à Montpellier. Quand la Réforme s’étendit en Langue- doc, l'évêque fut dénoncé comme suspect d'avoir favorisé les progrès de l'hérésie. Le Parlement de Toulouse le fit aussitôt incarcérer et procéda contre lui à une rigoureuse information. Mais l'accusé put justifier de son orthodoxie; son dénonciateur fut alors condamné à mort et eut la tête tranchée. Le prélat devait être plus tard en butte à de nouvelles tribulations. Vers la fin de sa vie il eut la douleur de voir sa cathédrale de Mont- pellier prise d'assaut par les Huguenots et en partie renversée. — Guillaume Pelissier s'intéressait vivement à la botanique. C'est lui qui le premier a signalé le Teucrium Scordium L. et la Linaire qu'en souvenir de lui De Candolle a nommée Linaria Pelisseriana. — 151 — sément désigné ; la seconde comprendra toutes les espèces attribuées simplement au Languedoc, « Nor- bona (1), Linguagottia. » Et nous donnerons ces deux listes en les subdivisant d’après des circonstances particulières que nous ferons connaître au fur et à mesure. Ainsi que nous y autorisent les règles de la mé- thode, nous supposons que les deux amis ont com- mencé par explorer le terroir de Montpellier. Ils n’avaient pas beaucoup de chemin à faire hors des murs pour trouver matière à herborisation. On rencontrait, à une faible distance de la ville, une campagne connue sous le nom de € Rus Boutoneti », parce qu’elle appartenait, sans nul doute, à un pro- priétaire qui se nommait Boutonet (2). La campagne de Boutonet était pour les étudiants de Montpellier un but de promenade vers lequel Pena et Lobel se dirigeaient fréquemment en compagnie de leurs ca- marades. A propos de l’une des plantes que l’on y pouvait cueillir, ils écrivent : (Nos commilitonesque nostri toties videbamus et eruebamus, quoties Mons- pelii Botonetum versüs et Castrum novum (3) pro- deambulatum ibamus (4). » Ils mentionnent plusieurs (1) On a déjà vu par quelques citations précédentes que le mot Narbona, qui désigne la province de Languedoc, est écrit Nor- bona dans les Adversaria. C’est là une leçon vicieuse et rien ne justifie cette orthographe. La seule explication qu’on en pourrait donner serait celle-ci : les typographes anglais qui composèrent le livre avaient cru voir sur le manuscrit « Norbona », et les auteurs, en corrigeant les épreuves, négligèrent de relever cette faute d'impression, n’attachant, comme c'était l'habitude au xvI° siècle, aucune importance à l'orthographe des noms propres. Les noms de personnages ou de localités sont, en effet, dans les Adversaria, presque toujours écrits avec des variations d’ortho- graphe. (2) La ville de Montpellier s'étant fort agrandie depuis le xvIe siècle, le Rus Boutoneti est devenu un de ses faubourgs, tout en conservant le nom de Boutonet. (3) Castelnau-le-Lez. (4) Stirp. Adv., p. 265. — 152 — fois cette campagne. Ils y signalent en premier lieu la présence d'un grand arbre, « miræ et spectandæ pro- ceritalis »; c'est le « Lotus Arbor », notre Micocoulier (Celtis Australis L.), dont le fruit sucré, disent-ils, re- cherché par les enfants, peut, sans être astringent, combattre avec succès la dysenterie, « fructus suavis esui, vulg pueris expetitus, dulcis namque, neque astringens est, et tamen dysenteriæ prodest (1). » La campagne de Boutonet fournissait en outre aux botanistes les plantes suivantes : Capnos Fumaria minor (2). Fumaria spicata L. Natrix Pliniü Herbariorum. Ononis Natrix L. Faba minor sylvestris. Vicia Narbonensis L. Herba turca, Herniaria mul- tigrana Serpilli facie. Herniaria glabra L. Aster Italorum luteum fru- ticosum (3). Inula spiræifolia L. Holostium Monspelliense. Plantago albicans L. Aristolochia Polyrhizon sive Pistolochia Plinii. Aristolochia Pistolochia L. En cet heureux temps la potence ne désarmait pas ; le gibet se dressait en permanence pour l'épouvante- ment des malfaiteurs. Les étudiants n’éprouvaient aucune répugnance à venir herboriser dans le voisi- nage des fourches patibulaires de Montpellier, propè (1) Stirp. Adv., p. 459. — Le Micocoulier n’est point rare en Provence. On en trouve notamment des pieds séculaires, épan- dant leur ombre autour des vieux mas de la Crau. Le nom provençal de cet arbre est Falabreguié, et celui du fruit Fala- brego. C'est dans le Mas di Falabrego que Frédéric Mistral a fait naître Mireille, Miréio, l'immortelle héroïne du poème qui porte ce titre. (2) Stirp. Adv., p. 338: « Monspellii rure propinquo Boutonet nuncupato, aliisque aridis glareosis visitur. » (3) Dans les Observaltiones (p. 189), Mathias de Lobel a inséré un erratum pour restituer à cette plante le genre masculin : « Aster luteus fruticosus ». CT 7 4 — 153 — je + Patibulum, ad ripas devexas (1) Patibuli Monspelliaci. Les Adversaria parlent cinq fois de ce lieu funèbre, où l’on trouvait : Chrysanthemis Erica mini- ma (2). Cistus incanus L. Cyanus minimus viliculis sparteis striatis (3). Centaurea fruticosa L. (1) Les mots ripas devexas traduisent ici le provençal ribo. _ Cette expression s'applique à des lisières de terrain en talus gazonné, que l'on trouve souvent sur le bord des champs cultivés, où ils marquent la limite. — Au xvr: siècle, les exécu- tions étaient fréquentes à Montpellier et les étudiants ne laissaient guère échapper les occasions d’y assister. Les Mémoires des frères Platter contiennent à ce sujet des relations empreintes du plus émouvant réalisme. (2) Notre traduction de «Chrysanthemis Erica » en Cistus inca- nus est justifiée par les autorités suivantes: Le Pinax de Gaspard _ Bauhin (p. 466) donnait au Chrysanthemis des Adversaria le nom D: de « Chamæcistus foliis Thymi incanis ». Linné a fait du nom de _ G. Bauhin le synonyme de son Cistus pilosus, duquel il disait : « Habitat Monspelii. » Grenier et Godron (Flore de France, t. 1, p. 162), identifient le Cistus pilosus de Linné avec le Cistus inca- nus du même auteur. Mutel (Flore française, t. 1, p.108), énonçait ainsi l'habitat du Cistus incanus L. : « Collines pierreuses du . Midi... Narbonne, Nice. » Mais au sujet du même Ciste, Grenier | et Godron ont écrit : « Cette plante a été indiquée à Narbonne ; cette station est bien douteuse. » La Flore de Montpellier, de Loret et Barrandon, ne mentionne pas le Cistus incanus. — Nous ne pouvons que nous référer aux réflexions formulées plus haut à propos du Lagoecia cuminoides. Nous avons constaté _ chez les rédacteurs du Stirpium Adversaria une exactitude et _ une conscience telles que nous admettrions difficilement l'hypo- - thèse d’une erreur grave de leur part. Dans un laps de près de trois siècles et demi, la flore du Midi de la France a subi d'iné- + vitables modifications, et certaines espèces peuvent avoir disparu, : ce qui, au xvre siècle, végétaient encore en Provence et en Lan- _ guedoc. ee - (3) Comme le Cistus incanus L., le Centaurea fruticosa ne se . retrouve plus dans le Languedoc. Notre détermination est : pourtant exacte, confirmée qu'elle est par le contrôle des syno- _ nymies successives. Le « Cyanus minimus » des Adversaria est CS Êr — 154 — Sideritis Monspeliaca Scor- dioides. Sideritis scordioides L. Euphorbia Chameæsyce. Euphorbia Chamæsyce L. Phyllon Thelygonon sive Mercurialis tomentosa L. Fœæminiparum. (mâle). Phyllon Mas seu Arrheno- — — gonum Mariparum (1). (femelle). Les autres localités plus ou moins voisines de Montpellier, dont l'ouvrage de Pena et Lobel cite les noms latinisés, sont celles-ci : au-dessus de la ville, en se dirigeant vers le Nord, Castelnau, Celleneuve, la forêt de Valène, le bois de Grammont, le mont Saint-Loup ; au-dessous, c’est-à-dire au Sud et vers la mer, Aigues-Mortes, Pérols, Lattes, Villeneuve, Maguelone, Frontignan et la colline de Cette (2). devenu tour à tour le « Cyanus repens » des Icones de Lobel, le « Cyanus repens angustifolius » de Gaspard Baubhin, le « Jacea frutescens, plantaginis folio » de Tournefort, et enfin le Centau- rea fruticosa de Linné, qui a cité comme synonymes les déno- minations successivement créées par Lobel, G. Bauhin et Tour- nefort. — Dans un travail (thèse de doctorat) intitulé : Des modifications de la flore de Montpellier depuis le xvi® siècle jusqu'à nos jours (Paris, 1864), M. G. Planchon n’a parlé ni du Cistus incanus ni du Centaurea fruticosa. (1) Dans le passage consacré au Mercurialis tomentosa le Stirpium Adversaria (p. 9) appelle « colline de la pendaison, collis suspendii », le lieu où les fourches avaient été établies. L'ha- bitat de cette Mercuriale est ainsi décrit : « Monspellii, secüs vias et ad collem squallidum et glareosum suspendii paulèque ulte- ris, cis Pontem Castri novi, aliisque quàm plurimis loeis frequentissima. » — En distinguant par les mots de mas et fæmina deux plantes qui leur semblaient appartenir au même genre, les anciens botanistes n’attachaient pas à ces mots une idée de sexualité relative aux fonctions de reproduction, dont le phénomène leur était inconnu. Pour le Mercurialis tomentosa, espèce dioïque, il est à remarquer que nos auteurs déclarent femelle la plante mâle, et réciproquement. (2) Toutes ces localités dépendent actuellement de l'arrondisse- ment de Montpellier, à l'exception d'Aigues-Mortes qui appar- tient au département du Gard.— Il est inutile de rappeler qu'au — 155 — Nous allons donner encore séparément, comme . nous venons de le faire pour les deux stations de Boutonet et des Fourches, la florule spéciale de Grammont, de Valène et du Saint-Loup. Quant aux plantes appartenant aux autres localités énumérées plus haut, nous les grouperons, non point d’après leur distribution topographique, mais suivant les . conditions phystostatiques auxquelles leur nature _ les soumettait. _ temps de Pena et Lobel la ville de Cette n'existait pas encore : on sait qu'elle n’a été fondée que plus d'un siècle après. Au . pied de la colline de Cette, qu’on appelait aussi le promontoire . ou le cap de Sète, on ne voyait alors que des cabanes de pé- . cheurs. Les Adversaria (p. 345) désignent ainsi la station de . l'Anthemis maritima : «Ad Ceti montis radices, non procul - piscatorum attegiis. » Voici comment, trente ans après, Thomas _ Platter décrivait la localité: «... Après avoir tout visité en détail, nous nous dirigeàmes sur le pie de Sète en traversant - l'étang en droite ligne, dans une sorte de bateau appelé barque, … et aussitôt arrivés à terre, nous nous mîmes à gravir la monta- . gne, qui s'appelle Cap de Sète, en latin Caput Ceti ou Mons . Setius. On y rencontre des quantités prodigieuses de romarin, de thym, de lavande, d’arbousier, espèce d'arbre donnant des à fruits semblables à de grosses fraises, et d’autres belles plantes - rares du Languedoc, en particulier, l'Alypum montis Ceti, fleur . bleue qui ne se trouve que là.» (Félix et Thomas Platter à Mont- pellier, trad. Kieffer.) — La petite ville de Frontignan était déjà . en possession de la renommée que lui a value son vin muscat. \ Les Adversaria (p. 274) indiquaient en ces termes la station de _ V'« Helxine Cissampelos » (Convolvulus althæoïdes L.) : « Inter . vineta Muschatelina maritimasque sepes, propé segetes ad Fron- … tignanam Norbonæ. » — Le même ouvrage parle aussi, et à deux . reprises, d'une grotte située entre Frontignan et Montpellier, au … Moïisinage de laquelle les étudiants allaient quérir l’Jris chameæiris À etl'Ophrys lutea, « secûs specum illam sesquimiliare Monspellio - dissitam... quæ redeunti Frontignanæ Monspellium læva est, » Nous House à l’obligeance de notre ami le professeur Ch. Fla- _hault la note que voici relative à l’état actuel de cette grotte: « La ._ grotte de la Madeleine est comprise aujourd'hui dans un pare clos. C’est la localité classique de l'Aceras longibracteala ; nous y allons encore herboriser souvent. La grotte elle-même est insi- Snifiante, un petit bassin avec de l’eau est au fond. » — 156 — Le bois de Grammont, lucus Gramuntius, sylvula Gramuntia (1), demeuré célèbre jusqu'à nos jours parmi les nombreuses générations de botanistes qui depuis le xvi° siècle n’ont pas cessé d'explorer les environs de Montpellier, occupait alors une surface bien plus étendue qu'aujourd'hui (2). (1) On trouve aussi dans les Adversaria la forme Garamun- tius lucus. Charles de l'Escluse (Rariorum Plantarum Historia) et Magnol (Botanicum Monspeliense) écrivaient Aigremont. — Il y avait là, au xvre siècle, un couvent, cœnobium, mentionné plusieurs fois par les botanistes du temps.Ce couvent était occupé par des moines d’un ordre particulier auquel Charles de Gre- feuille, l'historien de Montpellier, donne simplement le nom de Religieux d'Aigremont. — Félix Platter, en 1553, consignait dans ses Mémoires les détails suivants au sujet du bois de Grammont: « Le 25 juillet, nous allâmes herboriser à Grammont. C'est un petit couvent non loin de la ville et au milieu d'un taillis de Chènes-verts, de Cisti Ledi, etc. Ils s’y trouve beaucoup de la- pins sauvages, que personne n’a le droit de chasser, excepté les moines du couvent, qui sont peu nombreux et pauvres. Contre le mur du couvent est adossé un tombeau, surmonté d'une toiture, avec un écusson sculpté portant deux clefs. On disait que c'était le tombeau du chevalier Pierre, comte de Provence, qui avait enlevé Maguelone du royaume de Naples, comme il est relaté dans l'Histoire de Maguelone. » — Lorsque, vers la fin du siècle, le jeune frère de Félix Platter vint à son tour à Mont- pellier, les moines avaient disparu : « Le lendemain 25 juin [1596], — écrivait Thomas Platter, — nous allâmes à Grammont. Il y'avait là jadis une église et un couvent; aujourd'hui, c’est une ferme entourée de garrigues, où l'on trouve beaucoup de lapins sauvages dont la chair est exquise à cause des plantes aromatiques qui leur servent de nourriture. L'église est encore debout mais sans ornements, et sert à remiser les instruments de labour. A côté se trouve l'habitation du fermier ou bayle, qui élève beaucoup de moutons. Nous y bûmes un coup, puis nous herborisämes un instant dans ces garrigues qui abondent en S{æœchas, en Cistes et autres plantes de cette sorte. » (2) « Le bois de Grammont, entamé par la culture, a reculé de près de deux kilomètres », écrivaient en 1866 les frères Plan- chon (Rondelet et ses disciples, Appendice) ; et dans une notice rédigée en vue de la session extraordinaire que la Société bota- nique de France devait tenir à Montpellier en mai 1893, le pro- fesseur Ch. Flahault s'exprimait ainsi : « Le bois de Grammont ou forêt d'Aigremont, suivant la dénomination de Magnol, cou- — 157 — …Les deux botanographes qui ont signé le Stirpium Adversaria récoltèrent dans le bois de Grammont : _ Thlaspi parvum Hieracifo- lium sive Lunaria lutea Monspelliensium et Leu- - coium luteum marinum. Biscutella Iævigata L. q Spartium Dioscorideum His- _ panicum et Norbonense vi- __ mineum majus. Spartium junceum L. _ [Lupinus] segetum sylvestre _ floribus luteis. Lupinus luteus L. — flore purpureo. — varius L. (1). _ … vrait autrefois un territoire assez étendu ; la nature du sol formé . de cailloux siliceux roulés, d'origine glaciaire, le rend particu- lièrement propre à la culture de la vigne. Aussi ne reste-t-il plus, . sur l'emplacement de la forêt, que quelques témoins de l’ancien _ état de choses (bois de Doscares, de Flaugergues, de la Moure, . etc.) On y trouve encore la plupart des plantes que Boissier de Sauvages envoyait à Linné et qui excitaient l'enthousiasme du savant suédois : € Gramunlium, locus mirabilis plantarum monspeliensis. On trouve encore, au milieu des vignes qui ont … remplacé l’ancienne forêt, une mare depuis longtemps célèbre _ parmi les botanistes. » (1) Ces deux Lupins sont un nouvel exemple des modifications - que le temps fait subir aux éléments de toute flore régionale. M. G. Planchon (Des modifications de la flore de Montpellier de- - puis le xvre siècle...) dit du Lupinus varius L. : « Clusius (Hist., » cexxVIN) l'avait observé au delà du Lez; Lobel l'indique dans … les cultures autour du bois de Grammont (Adv., 396). Magnol l’a - souvent trouvé entre le pont de Castelnau et Grammont, dans … les champs ensemencés (Bot., 167). Gouan le cite à Grammont …— (Hort., 362), mais il fait observer (Herb., note de l'introduction, - vin) qu'il tend à disparaître. On ne le trouve plus dans la ré- … gion. » Cette disparition était déjà constatée par Grenier et Go- _dron (Flore de France, 1, 508): « Nous n'avons aucun échantil- … Jon de cette plante recueilli sur le sol de France. » — Quant au les cultures autour de Montpellier et par Gouan à Valène, ne s'y . trouve plus depuis longtemps. Les récoltes de M. Vidal, qui a _ rencontré cette espèce plusieurs fois sur l'Espinouse, nous auto- . risent seules à la mentionner dans la Flore de l'Hérault. » De 16 Lotus trifolia pratensis sili- quosa. Oxytriphyllum alterum Scri- bonii. Œnanthe vulgaris. Peucedanum Fœniculum por- cinum. Bupleurum alterum latifo- lia, Auricula Leporis. Coniza minor vera. Cirsium. Pulmonaria Gallorum flore Hieracii. Polemonium sium. Anchusa minor seu Alcibia- dion vel Onochiles. Heliotropium minus repens. Pulegium angustifolium sive cervinum Monspelliensium Monspellien- Prunella Symphytum pe- trœum. Bellis cœrulea, Globularia Monspelliensium. Testiculus vulpinus luteus totus. Le mont ou pic Saint- moins célèbre pour les botanistes herborisants que le bois de Grammont. Cette célébrité lui était déjà : acquise au xvi siècle. « In sylvosis non procul celebri monte Lupi vocato », tels sont les termes employés dans les Adversaria pour désigner lastation (1) Une des Listes de plantes phanérogames dressées pour pré- parer les herborisations de la Société botanique de France, en - 1893, à Montpellier, comprenait, parmi les espèces à cueillir dans le bois de Grammont, le Hieracium Jaubertianum Timbal et Lo- ret, que M. Arvet-Touvet (Les Hicracium des Alpes françaises) considère comme une simple variété (pilosissimum) du H. præcox. PR SL SANS » 3 Tetragonolobus Roth. siliquosus Lotus hirsutus L. Spiræa Filipendula L. Peucedanum officinale L. Bupleurum rigidum L. Cupularia graveolens G. G. Cirsium Monspessulanum AI. Hieracium præcox Schultz Bip. (1). Jasminum fruticans L. Alkanna tinctoria Tausch. Heliotropium supinum L. Preslia cervina Fresen. Brunella vulgaris Mœnch. Globularia vulgaris L. Ophrys lutea Ca. Loup n'est pas demeuré P — 159 — _ de la belle Pivoine voyageuse qui fait encore, au _ premier printemps, l’ornement des pentes septen- trionales du Saint-Loup. Voiciles plantes que l’œuvre de Pena et Lobel signalait soit sur les flancs de la montagne, soit au pied, où s'étend la plaine de Saint- Martin-de-Londres (1) : Ranunculus pumilus grami- neis foliis. Ranunculus gramineus L. (2). (1) La notice rédigée en 1893 par M. le professeur Ch. Flahault pour les membres de la Société botanique de France décrit ainsi cette localité : « Saint-Martin-de-Londres occupe le bord occiden- tal d’un lac éocène qui avait pour rivages, vers le Nord et l'Est, les récifs néocomiens avec la haute falaise de l’'Hortus comme point dominant, vers l'Ouest et le Sud les calcaires compacts du jurassique brusquement relevés au Sud-Est pour former le Pic Saint-Loup (633n). Les dépôts tertiaires qui occupent le fond de ce lac sont formés de calcaires marneux et d’argiles peu per- méables ; d'abondantes sources y déversent leurs eaux ; mais le lac à rompu l’une de ses digues naturelles ; toutes les eaux du bassin se frayent un passage à travers une haute chaîne de col- lines jurassiques ; réunies sous le nom de ruisseau de Lamalou, elles vont se jeter dans l'Hérault... Le lac éocène constitue au- jourd’hui la plaine de Saint-Martin-de-Londres. Elevée de 200 m. environ au-dessus du niveau de la mer, abritée du côté du Midi par le Pic Saint-Loup, la plaine de Saint-Martin doit être étudiée à part. Son sol est froid, la végétation y est plus tardive que dans la plaine méditerranéenne. » — Henri Loret, dans l’Intro- duction de la Flore de Montpellier, reproche à Boissier de Sau- vages d’avoir induit Linné en erreur sur l'importance, soit de la forêt de Grammont, soit du Pie Saint-Loup. « C'est Sauvages sur- tout qu'il faut rendre responsable des exagérations de Linné et de plusieurs auteurs relativement à Montpellier et à sa flore. C'est ainsi que la petite mare et le bois de Grammont étaient devenus pour la plupart des botanistes un lac et une forêt d’une richesse incomparable. Le Pic Saint-Loup, dont l'altitude ne dé- passe pas 633 mètres, est qualifié par Linné de montagne élevée, dans ses Amænitates, et à propos de son Gypsophila aggregata il dit que cette plante habite le mont Saint-Loup en France: «Habi- tat in monte Lupi Galliæ. » — On voit, en tous cas, par le texte des Adversaria, que si la célébrité du Pic Saint-Loup a été exa- gérée, comme le prétend Loret, l’exagération date de loin. (2) Les Adversaria (p. 299) nous apprennent qu'il y avait à — 160 — Pœonia fœæmina (1). Pæonia peregrina Mill. Thlaspi alterum minus um- bellalum. Iberis pinnata Gouan. Campanula lulea linifolia. Linum campanulatum L. Seseli Peloponense (2). Thapsia villosa L. Carduncellus montis Lupi(3). Carduncellus Monspellien- sium All. La forêt de Valène, Valena sylva, « tribus à Monspellio leucis » (4), donnait abri aux espèces dont suit la liste : Saint-Martin-de-Londres une auberge publique, près de laquelle croissait le Ranunculus gramineus : « Norbonæ pratensibus ponè publicum diversorium montis Lupi et in arduis Mindeni Ruthe- norum [Mende et Rodez] pascuis nobis repertus. » — Aux Obser- valiones (p.383) Lobel a fait mention du « Pumilus Ranunculus foliis gramineis » uniquement pour introduire une légère modi- dification au texte des Adversaria : « Lege Narbonensis Galliæ pratensibus, quatuor à Monspellio leucis, ne quis cum D. Dodo- næo urbem Narbonam putet. » Cette petite note est en réalité une épigramme décochée à Dodoens. Si celui-ci avait eu sur la géographie du Languedoc des notions moins rudimentaires, il aurait su que le mot Narbona, employé ici dans les Adversaria, ne pouvait pas, comme il le croyait, s'appliquer à la ville de Narbonne, éloignée du mont Saint-Loup par une distance bien supérieure à quatre lieues. — Le village de Saint-Martin-de- Londres est actuellement un chef-lieu de canton appartenant à l'arrondissement de Montpellier. (1) Au cours de la session extraordinaire tenue par la Société botanique de France à Montpellier, en mai 1893, nous avons eu le plaisir de récolter le Pœonia peregrina à l'endroit où Pena et Lobel le trouvèrent au xvi® siècle. Mais la plante était alors dé- fleurie et les fruits commençaient à mûrir leur graines. (2) On trouvait le Thapsia, disent les Adversaria (p. 327), près de la maison du curé, «ad montem Lupi et juxtà ædes Sacrifi- culi. » (3) Les rédacteurs du Stirpium Adversaria ont bien soin d'ex- pliquer (p. 374) que le Carduncellus venait au sommet du Saint- Loup, mais sur le versant méridional : «ad montis Lupi ima, meridiem versüs. » (4) « La forêt de Valène s'étend à l'Ouest du Pic Saint-Loup sur le territoire des communes de Viols-le-Fort, Murles, Vaillau- quès, Comballiaux : elle comprend plusieurs milliers d'hectares — 161 — _ Terebinthus major Pistachiæ _ folio (1). Pistacia Terebinthus L, _ Colutea Scorpioides. Coronilla Emerus L, Mespilus Aronia (2). Cratægus Ruscinonensis Grenier et Blanc, Sorbus torminalis. Sorbus torminalis L. Laurus Tynnus. Viburnum Tinus L. Ritro seu Rutro Theophrasti Echinops sphærocepha- (altera). lus L. Anchusa lignosior angustifo- Lithospermum frutico- lia (3). sum L. et se rattache directement aux forêts de Montarnaud et de Pué- chabon. Ce sont aujourd'hui des taillis de Chênes-verts. » (Note _ de M. le professeur Ch. Flahault.) __ (1) Nous avons donné, dans une note du précédent chapitre _ (p. 129), au sujet du Térébinthe, des détails auxquels, si be- soin est, nous renvoyons le lecteur. — On sait que dans les pays . chauds le Térébinthe laisse échapper par les fentes de son écorce __ une résine qui porte le nom de férébenthine. Les auteurs du _ Stirpium Adversaria rapportent que maintes fois, ayant fait eux- mêmes avec un couteau des incisions aux Térébinthes de la forêt _ de Valëne, ils en virent découler en assez grande abondance une _ térébenthine très limpide : « ferro vulnusculis factis in Valena sylva Monspelliensium, sæpiüs nobis non paucam Terebinthinam extillarunt lucidam. » Dans la figure fort ressemblante qu'ils ont donnée du Térébinthe, ils ont montré les excroissances en forme de follicules que fait surgir sur les rameaux de cet arbre la pi- - qûre d’un Aphidien (du genre Pemphigus) ; une de ces pseudo- _ gousses est représentée avec une section d’où sortent, en prenant . leur vol, les insectes qui s’y sont développés. Ce détail du dessin . est particulièrement signalé au lecteur par une légende margi- . nale portant : « Volucellæ sive Culices è folliculo. » - (2) Pour la traduction du « Mespilus Aronia » en Cralægus _ Ruscinonensis nous adoptons l'avis d'Henri Loret (Flore de _ Montpellier, 1'° éd., Appendice, t. II, p. 810). … (3) Stirp. Ado., p. 248 : « Marginibus agri Frontignani et Va- Icriæ Sylvæ hæc interdum occurrit. » — Les écrivains du xvi° _ siècle semblaient prendre plaisir à varier l'orthographe des noms 11 — 162 — Nous revenons maintenant aux autres localités énumérées plus haut et situées dans le voisinage, plus ou moins rapproché, de la ville de Montpellier. Ainsi que nous l'avons proposé, nous associerons en divers groupes, établis d’après les exigences de leur végétation, les nombreuses plantes cueillies par Pena et Lobel dans ces diverses localités, et nous adopte- rons encore l’ordre déjà suivi pour la flore de la Pro- vence. Voici donc, en premier lieu, les plantes qui recher- chent, par nécessité ou simplement par préférence, un terrain que le labour ameublit périodiquement, moissons ou vignobles, sata, vineta : Anemone minor Coriandri folio (1). Papaver hybridum L. Natrix Plinii Herbariorum. Ononis Natrix L. (2). Scorpioides Cratevæ Tele- phium (3). Coronilla Scorpioides Koch. Phu minimum (4). Centranthus Calcitrapa Du- fresne. Jacea major lutea (5). Centaurea collina L. — incana altera Cyani Xeranthemum inapertum aut Jaceæ capitulis (6). Willd. (1) Stirp., Adv., p. 113 : « In vinetis ac vervactis, præsertim juxtà prædium præceptoris et harum seduli vestigatoris D. As- satii. » (2) Nous avions déjà fait figurer l'Ononis Natrix dans la florule de Boutonet. Nous l'insérons de nouveau ici parce que les Ad- versaria (p. 378) ont attribué à cette Papilionacée deux stations différentes : « Inter segetes et crepidines cultorum Monspellii fre- quens » ; et: « Via Boutonnet ad Novum Castrum ». (3) Slirp. Adv., p. 168 : « Monspelliensibus cüm satis, tüm vinetis, Latrensis portæ admodüm familiaris. » (4) Stirp. Adv., p. 319 : « Interdum montosis locis saxorum commissuris, interdum in segetibus, ut propè Monspellium, ado- lescit. » (5) Slirp. Adv., p. 234 : « In segetibus Monspelliacis. » (6) Stirp. Adv., p. 235 : « In Linguagotiæ vinetis et cis Cellæ novæ Monspelliacæ pontem. » — 163 — Condrilla viminea viscosa vinearum (1). Chondrilla juncea L. Centaureum luteum (2). Chlora perfoliata L. Anguina Dracuntia (3). Arum Dracunculus L. Phalaris (4). Phalaris Canariensis L. (1) Stirp. Adv., p. 84: «...agri Linguagottici est quædam Con- drilla visu pulcherrima. Plurima Junio et Julio floret cis pon- tem Castrinovi à Monspellio vix sesquimiliare, » (2) Stirp. Adv., p. 173 : « Propè Rondeletii et Assatii prædia, multa Monspellii.. inter segetes. » (3) L’Arum Dracunculus ne se retrouve plus aux alentours.de Montpellier. La Flore de Loret et Barrandon inscrit cette plante parmi les « Espèces à exclure ». Déjà au temps de Magnol elle devenait rare. D’après le Botanicum Monspelliense, il était diffi- cile de la trouver : « jam difficile admodum foret sive in satis, sive in incultis reperire, et quidem factus hortensis. » Les Adversa- ria (p. 261) désignaient ainsi la station de cet Arum : « Non procul mæniis Monspelliacis inter segetes, Gladiolos et Hyacin- thos (Muscari) læta exit, alibique in pinguibus arvis. » Dans un autre passage, le texte affirmait que la plante était bien sponta- née à Montpellier : « quam cuncti horti norunt, et ager Mons- pelliensis spontè dat. » Gouan l’indiquait encore « comme spon- tanée au Boulidou, près de Pérols, et à Mireval (Herb., 140 et 147), après avoir dit dans son Hortus : « Non occurrit hodié in agro Monspessulano. » — Depuis lors on ne l’a plus trouvé dans nos environs. » (G. Planchon, Des modifications de la flore de Montpellier...) (4) La station indiquée dans les Adversaria (p. 16) pour le Phalaris est celle-ci: « Norbonensi agro, via ad Magalonem, propè segetes, ad pontem. » Cette Graminée était-elle là subspon- tanée ou cultivée ? Le texte ne le dit pas. Dans tous les cas, la graine de Phalaris était importée, « en grande quantité », des îles Canaries, nous disent Pena et Lobel, par des marchands qui la vendaient pour la nourriture des oiseaux au doux ramage, originaires des mêmes îles : « Institores Canariis Philomelis plusquam saccharatas et mellifluas cantilenas modulantibus alendis venum asportant seminis magnam vim.» L'Historia Lugdunensis confirme les détails donnés par les Adversaria et ajoute que les expéditions du « Frumentum Canariense » arri- vaient dans le port de Marseille. Il paraît qu'à cette époque un grand nombre de gens se livraient à l'éducation du serin des Canaries, puisque la graine longue faisait ainsi l'objet d'un im- portant commerce. EP TOUTES La ville de Montpellier était alors entourée de plantations d'oliviers. On affectait à ce genre de cul- ture la plupart des coteaux secs environnants. Les espèces que Pena et Lobel déclarent avoir trouvées dans les olivettes du Languedoc sont donc de celles qui se contentent, comme l'Olivier lui-même, d'un sol plus ou moins dépourvu d'humidité. C’est d’ail- leurs ce que nos deux étudiants ont très justement exprimé quand ils ont décrit en ces termes l'habitat d'une des plantes qui suivent : « Locis aridis et colli- bus saxosis ut sunt oliveta circum Monspellium et ad Castrum novum » : Phyteuma Norbonensium. Reseda Phyteuma L. Tribulus terrestris. Tribulus terrestris L. Rhus Obsoniorum et Coria- riorum. | Rhus coriaria L. Mezereon Arabum, Chame- læa tricoccos (1). Cneorum tricoccum L. Scorpioides repens Bupleuri folio. Scorpiurus subvillosa L. Aster minor Norbonensium Tripoli flore. Aster acris L. Arthemisia tertia Dioscori- dis Leptophyllon Artemisia campestris L. Acanthus sylvestris (2). Acanthus mollis L. (1) Stirp. Adv., p. 157 : « In olivetis cultis propè Frontigna- nam Norbonæ uberè fruticat... ; nec quidem in Galloprovineia, ubi tamen nascitur, multo prodit proventu. » — Les Adversaria n'ont signalé que par cette phrase incidente la présence du Cneo- rum tricoccum sur le territoire provençal. Il est parfaitement exact que cette plante est beaucoup plus rare en Provence qu'en Languedoc. (2) Les Adversaria (p. 365) disent formellement que l'Acanthe était spontané à Montpellier : « … nusquam tamen eam nisi satu enatam vidimus, præterquäm inter oliveta Monspelliensibus mœæniis proxima, et exeunti ex Ægidia porta, inter fontem et rivulum, propè murum, ubi pharmacopæi colligere solebant. » Cest encore là une des espèces qui ont disparu du Languedoc, « Du temps de Lobel, dit le professeur G. Planchon op. cit., cette — 165 — Holostium Monspelliense (1). Plantago albicans L. Nous passons maintenant aux terrains incultes : champs en friche, bords des chemins, garigues. C’est de toutes nos subdivisions celle qui nous four- nira la plus longue liste, la région sèche étant, dans le Midi de la France, de beaucoup la plus étendue : Anemone minor Coriandri folio (2). Papaver hybridum L. Thlaspi Norbonense Centum- culi angusti folio, Alysson Italorum (3). Alyssum maritimum Lamk. — allerum minus cly- peatum (4). Clypeola Jonthlaspi L. plante était introduite dans quelques champs plantés d'oliviers, près des remparts de Montpellier et aussi à la Pile Saint-Gilles où les pharmaciens allaient la cueillir (Lob., Adv., 365). Magnol se borne à dire qu'au xvr: siècle, elle avait été naturalisée par le moyen des jardins (Bot., 3), sans signaler son plus ou moins d'extension. Gouan (Herb. 209) la donne comme perdue, après l'avoir indiquée à Salaison. En somme, elle parait s'être mainte- nue dans la même localité depuis le xvir® siècle jusque dans la seconde moitié du xvirr. » (1) Déjà cité parmi les plantes de Boutonet ; mais les Adver- saria (p. 18) lui assignent une autre station : (€ In Monspellien- sibus aridis olivetis. » (2) Nous l’avions déjà inscrit dans la série des terres cultivées des environs de Montpellier. Mais les Adversaria, en le signalant aux alentours de la maison de campagne du professeur d'Assas, ont donné pour ce Pavot une double indication de stat : «In vinetis ac vervactis. » — D'après les recherches faites par les frères Planchon (Rondelet et ses disciples), «le Mas dit de Pas- tourel, aujourd’hui [1866] Lalande », situé sur la rive gauche du Lez, serait l'ancienne maison de campagne d’Assatius. (3) Stirp. Adv., p. 75: « Propè Monspel. Novum Castr. cis La- num amnem, aridisque viarum crepidinibus. » (4) Stirp. Adv., p. 74 : « Nec uspiam nobis istud visum, nisi in agro Norbonensi Monspelliensique, locis squallidis, sabulosis, propè pusillas Anchusas. » = BE Muscipula altera flore mus- coso (1). Silene Otites Sm. Geranium pagrotôse (2). Erodium malacoides Willd. Peganion Norbonensium sive Rutula angustifolia (3). Ruta montana Clus. Vulgo Monspelliensium Bourgespine, perpetuo vi- rens (4). Rhamnus Alaternus L. Genista Spartium spinosum majus (5). Genista Scorpius DC. Lagopus altera angustifo- lia (6). Trifolium angustifolium L. Dorycenium Monspelliensium. Doryenium suffruticosum Vill. (7). (1) Stirp. Adv., p. 120 : « Regia via qua Monspellio Frontigna- nam itur. » (2) Stirp. Adv., p. 297: « Ad Monspellii mœnia, porta Ægidia, et via qua ad aram dirutumque fanum itur, in colle amænis- simo, nec non via qua itur Monspellio Besiers, 3. aut 4. ab urbe lapide. » (3) Les Adversaria (p. 190) appliquent à cette Rue, par une annotation en marge, le synonyme de « Ruta sylvestris ». La « Ruta hortensis », qui lui est opposée, aurait des propriétés beaucoup moins énergiques, et nos auteurs insistent sur les dangereux effets que peut produire la première de ces deux es- pèces : « Agresti autem Rutæ vires vegetiores, et odor vehemen- tior multo, adeoque virosus et afflatu periculosus est : inter- dum enim vaporem ipsa planta intuentis vultui afflat, aut tan- gentis manui inurit, qua si faciem attigeris, erisypelas aut scabiem excitabis. » (4) Stirp. Adv., p. 421 : « Frontignanæ Linguagotiæ Iliceta istam arbusculam frequentem pariunt. » (5) Stirp. Adv., p. 409 : « Frequentissima in sterilibus et eri- cetis, in Provincia item Norbonensi... Monspellii ad Lanum, in saxosis collibus. » (6) Stirp. Adv., p. 384 : « Alteram Lagopum angustifoliam voca- bamus juxtà agrorum et viarum margines Sellenovæ Monspellii enatam, in Delphinatu, et non procul Rhodani ponte S. Spiritus dicto. » (7) Stirp. Adv., p. 389 : « Saxosis sterilibus ad Frontignanam et maritima Norbonæ oritur, » LA * + » È La ; 4 5 CULUTENTUE EC RS Mc : gt Es — 167 — Securidaca minor, Astraga- lus Monspelliensium (1). Astragalus hamosus L. Glycyrrhiza siliquosa (2). Glyeyrrhiza glabra L. Asphalteum. Psoralea bituminosa L. Sferra Cavallo, Ferrum equi- num (3). Hippocrepis unisiliquosa L, Polygonum montanum mini- mum niveum el seri- cium (4). Paronychia nivea DC, (1) Stirp. Adv., p. 402 : «Norbonæ, Frontignanæque aridis, gla- reosis, maritimis » — C’est au moyen d’une note marginale que les auteurs du Sfirpium Adversaria ont ajouté, comme syno- nyme à leur Securidaca minor, le nom d'Astragalus Monspellien- sium. Jean Bauhin leur a reproché, en son Historia plantarum universalis (t. II, p. 338), d'avoir commis une confusion : « Eo- dem errore lapsi sunt Lob. et Pena qui non animadverterunt Securidacam minorem diversam esse ab Astragalo Monspelien- sium. » J. Bauhin fait ici allusion à l’Astragale que lui-même a nommé Astragalus Monspessulanus, dénomination conservée par Linné. Il n'y a d’ailleurs aucun doute que par l'expression de Securidaca minor, Pena et Lobel n'aient entendu désigner l’Astragalus hamosus. La figure que Lobel a insérée dans les Observationes (pour compléter le chapitre des Adversaria, où il n’y en avait pas), représente très exactement l’Astragale à hame- çon. Nous avons en outre, à cet égard, l'autorité de Gaspard Baubhin et de Linné. — Charles de l'Escluse (Rariorum planta- rum Historia) avait imposé au même Astragalus hamosus le nom d'A, Monspelliacus. (2) Stirp. Adv., p. 405 : « Non paucis Galliæ Norbonensis locis multum spontè oritur, etiam propè Latera oppidum, » — A son tour Magnol écrivait : « Frequentior multô reperitur cirecà pagum Vic, undè quotannis radices copiosè deferuntur. » — La Flore de Montpellier de Loret et Barrandon constate que la station de Lattes a été détruite, mais en indique une autre : « Bords des fossés entre Mireval et Frontignan. » (3) Le texte (p. 403) décrit ainsi la station languedocienne de l'Hippocrepis : « viaquæ ad prædium Rondellettii mareque ducit, ad dexteram, propé rusculum, in squallidis dumetis et margini- bus.» — Jean Bauhin,en son Histoire universelle des plantes (t.II, p. 347) explique ainsi le nom de Sferra-Cavallo : « Italis Sferra- Cavallo sic appellatur, quod equis calceos ferreos calcata extra- hat. » Nous renvoyons nos lecteurs à ce que nous avons dit sur ce point dans le chapitre précédent (note 3 de la page 63.) (4) Stirp. Adv., p. 180 : « In arvo cui subest specus Fronti- -LAGR ES Ferula et Ferulago (1). Ferula nodiflora L. var. Monspeliensis G. G. Panax Heraclium Herculea, sive Heraclia fronde Pas- tinacæ (2). Opoponax Chironium Koch, gnanensis concameratio et fornices hæc non ità à Chamæiride dissita. » — Cette grotte est celle de la Madeleine, dont il a été question un peu plus haut. Le Paronychia nivea s'est perpétué en cet endroit. (V. Flore de Montpellier, de Loret et Barrandon). (1) Stirp. Adv., p. 348 : « Plurima et procera in Galloprovincia et Narbonensi Gallia, præsertim illis rupibus præruptisque saxis propè subterraneas cryptas, via qua Monspellio Frontignanam itur ad rectam : itidem in celsis squallidisque saxorum sinubus qui soles æstivos et fervidos exceptos totum fermè fovent diem, propè oppidulum Rochæve Castrum vocatum, qua ad austrum vergit. » — Les cavités que décrit le texte dans le premier membre de phrase sont situées à l'endroit appelé aujourd'hui Cros de Miège. Nous ignorons où se trouvait la localité men- tionnée à la dernière ligne sous le nom de Rochæ Castrum. — « Le Cros, Creux ou Trou de Miège est le résultat d’un effon- drement local dans les roches calcaires compactes crétaciques. Il est situé au pied des collines de la Gardiole, à 12 kilomètres à l'Ouest de Montpellier, au Nord de la ligne de Montpellier à Cette. » (Note du professeur Flahault).— La variété Monspeliensis du Ferula nodiflora continue à végéter au lieu marqué par les Adversaria. L'indication d'habitat donnée par la Flore de France de Grenier et Godron porte : « La var. $ au Creux-de-Miège et à Mireval près de Montpellier » et celle de la Flore de Mont- pellier de Loret et Barrandon : « La Gardiole, au Trou de Miège, où Lobel l’a signalé. » (2) Stirp. Adv., p. 312 : « Crevit suaptè sponte in illo saxoso colle, qui Frontignana redeunti Monspellium ad lævam est, propè aut ponè Sacellum dirutum, ut nos monuit Doctor et Professor Monspeliensis Assatius. » C'est l'espèce dont l’avidité des étu- diants avait à peu près détruit la station — Au sujet de cette es- pèce, la plus grande confusion règne dans la synonymie. Du « Panax Heraclium Herculea » des Adversaria, Gaspard Bauhin (Pin., p. 157) fit le « Panax sphondyli folio, sive Heracleum », adopté par Linné comme synonyme de son Heracleum Panaces. Mais ici il y avait erreur flagrante de la part de G. Bauhin. Il attribuait des fleurs blanches à son Panax, prétendu synonyme de celui des Adversaria : or, les Adversaria déclarent expressé- ment que le Panax Heraclium Herculea a les fleurs jaunes. Le même G. Bauhin (Pin., p. 156) avait appelé « Panax pastinacæ NS 2 Seseli Massiliense (1). Seseli tortuosum L. — Æthiopicum (2). Bupleurum fruticosum L. Laurus Tynnus (3). Viburnum Tinus L. Phu minimum. Centranthus Calcitrapa Duf, Stæchas citrina altera (4). Phagnalon sordidum DC. Baccharis Monspelliensium. Inula Conyza DC. Coniza major vera (5). Cupularia viscosa G. G. folio » (transformé par Linné en Laserpitium Chironium) la plante désignée par les Adversaria sous le nom de « Panax altera recen- tior Olusatri aut Pastinacæ folio ». — Linné, de son côté, a par- ticipé à la confusion en créant une autre espèce, Pastinaca Opo- ponax (Panax Costinum du Pinax), laquelle est identique à son Laserpitium Chironium. Magnol (Bot., p. 197) assimile au Panax des Adversaria le Panax Costinum de G. Bauhin, qui aboutit, on vient de le voir, à notre Chironium Opoponax Koch. Le pro- fesseur G. Planchon a suivi l'opinion de Magnol. « Nous avons porté sur notre liste, dit-il, le Chironium Opoponax... L'espèce avait presque été détruite du temps de Lobel, dans la localité de Mireval, vis-à-vis l’'ermitage de Saint-Basile, par les nombreux étudiants qui allaient l’y cueillir. Nous l'avons retrouvée, mon frère et moi, dans ce même endroit, il y a quelques années à peine. » (Matériaux pour la flore médicale de Montpellier et des Cévennes d'après Lobel. — Montpellier, 1868). — A notre tour nous avons accepté le Chironium Opoponax comme équivalent du Panax Heraclium Herculea, la description des Adversaria paraissant bien se rapporter à l'espèce actuellement inscrite dans nos Flores sous le nom qu’en dernier lieu Koch lui a donné. (1) Stirp. Adv., p. 352 : « Passim et uberè crescit Massiliense Seseli illis in tractibus qui Massilia Aquassextias ducunt, trans- que Rhodanum in Monspellii agri asperis. » — Voir ce que nous avons dit du Seseli Massiliense dans le deuxième chapitre, p. 74 et suiv. (2) Stirp. Adv., p. 280 : « Collegimus in Galloprovincia Massiliæ circum, atque propè Ceti montem ora Norbonensis maris, non procul Monspellio. » (3) Déjà porté sur la liste de la forêt de Valène. Nous l'insé- rons encore ici, à cause de cette mention additionnelle : « ..… et plerisque locis Ceti montis inter cocciferas Ilices. » (4) Stirp. Adv., p. 208 : « Nemausii et Monspellii.. in rimosis ruderibus et mœniis urbium victitat. » — On voit combien sont toujours exactes les observations de nos auteurs. (5) Stirp. Adv., p. 145: « In arvorum marginibus Lunellæ, Massilarges Monspellii. » —— 170 — Cyanus peramarus (1). Centaurea amara L. Jacea pumilla (2). — pullata L. Chamæleon non aculeatus Theophrasti seu Carduus pinus Monspelliensium (3). Leuzea conifera DC. Stæchas citrina allera ino- dora (4). Stæhelina dubia L,. Coris Monspelliaca (5). Coris Monspeliensis L. Phylerea minor (6). Phillyrea angustifolia L. Helxine Cissampelos. Convolvulus althæoides L: Origanum Onitis. Origanum vulgare L. Stachys (7). Stachys germanica L. Verbascum sylvestre salvite- nuifolium Norbonensium. Phlomis Lychnitis L. (8). Polium maritimum monta- num (9). Teucrium Polium L. (1) Stirp. Adv., p. 236 : «Ad Sellam novam et alibi agri Monspelliaci. » (2) Stirp. Adv., p. 235 : « Rarius occurrit hæc, et ferè Norbo- nensium est : marginibus satorum ad Pontem Monspellio mil- liare dissitum, via qua Frontignanam itur, obvia eodem in arvo ubi studiosi solebant phallarides colligere. » (3) Stirp. Adv., p. 367 : « Monspellio finitimis locis glareosis inter Cystos et cocciferas Ilices.. visu pulcherrimum. Hune sæpius plusculi studiosi commilitones inibi copiosum collegi- mus. » (4) Stirp. Adv., p. 204 : « Rarius hæc multd occurrit Ilicetis cocciferis Sommières inter et Monspellium, tota pulchella. » (5) Stirp. Adv., p. 174 : « Koptç, aut potius x0pn, virgo puel- lave dici potuit, quia tota pulchella et perquàm hilaris vultu hæc nostra.. quam nusquam nisi Monspellii et Frontignanæ ad radices Ceti, et propè Magalonem reperimus, » (6) Stirp. Adv., p. 420 : « Monspellii collibus glareosis. » (7) Stirp. Adv., p. 228 : « Hæc passim sponte in Norbonæ aspe- ris, non procul Peraus et Magalona occurrit. » (8) Stirp. Adv., p. 24 : « Frequentissima plerisque omnibus agri Norbonensis collibus glareosis, Monspellio vicinis.» — Le texte déclare ensuite que cette plante paraît être le Phlomos Lychnitis de Dioscoride, très propre (à cause de son fomentum) à fournir des mèches pour les lampes, d'où ce nom de Lychnitis. (9) Stirp. Adv., p. 206 : « Devexis collibus et arenosis litoribus, cujus modi ad Ceti montis insulam et Magalonam Norbonensis Galliæ, » A tit à PRES: a ; AVE A THIVE " Ce {x LA f a . AE id + à TE LA ES dose ? É ; L: à 1r4 — 171 — Dentaria vel Dentillaria Rondelletii (1). Plumbago europæa L. Alypum montis Ceti Norbo- nensium, Herba terribilis vulgo. Globularia Alypum L. Camphorata Monspellien- Camphorosma Monspeliaca sium (2). 17 Casia poetica Monspellien- sium (3). Osyris alba L. Coccus infectoria seu Ilex coccifera. Quercus coccifera. L. Sabina baccata (4). Juniperus phœænicea L. Hyacinthus autumnalis (5). Scilla autumnalis L. Iris perpusilla saxatilis, acaulis fermé (6). Iris Chamæiris Bert. (1) Stirp. Adv., p. 136 : « Fruticat ea passim in Monspelliaco agro propè sepes et sata. » — Les étudiants de Montpellier avaient appelé cette plante Dentelaire de Rondelet parce quele célèbre professeur l’employait contre le mal aux dents : « Den- tillariam, aut potius Dentariam vulgus studiosorum putabat vocatam à Rondelletio qui, ut Pyrethris aut similibus urentibus utebatur, ad rabidum dentium eruciatum placandum. » (2) Stirp. Adv., p. 174 : « Propè Monspellium, inter Pontem Juvenalem dictum et Portam Latrensem. » (3) Stirp. Adv., p. 184: « Floret Junio, semen rubet Augusto, ad ripas Lani propè pontem Castri novi, et alibi passim in Galloprovincia juxtà sepes et olivetorum margines. » — Les rédacteurs du Sfirpium Adversaria écrivent indifféremment Casia ou Cassia. (4) Stirp. Adv., p. 447 : « Calidioribus Lyguriæ gaudet, monto- sisque et Norbonæ Ceto monte. » (5) Stirp. Adv., p. 48 : « Plurimus Lutetiæ Parisiorum, Nor- bonæ ad Aquas Marianas, et ad Cellam novam Monspellii visus nobis glareosis asperis, Autumno ineunte, non Vere. » (6) Stip. Adv., p. 32 : « Plurima oritur in agro Norbonensi, locis aridis et saxosis, secüs specum illam sesquimiliare Mons- pellio dissitam, via qua Frontignanam itur, in cujus cautibus etrupium commissuris frequens adolescit propè Ferulam. » — Déjà au xvre siècle le nom de Chamæiris avait été appliqué à la plante dont il s’agit ici. Nous venons de voir qu'en indiquant pour station du Paronychia nivea le voisinage de la grotte de la Madeleine, le Stirpium Adversaria ajoutait qu'on trouvait là cette espèce, non loin du Chamæiris. — 172 — Voici à présent, et par opposition, les plantes aux- quelles il faut de l'ombre, de la fraicheur, de l’humi- dité, le voisinage des eaux courantes ; telles sont, no- tamment, celles que les botanophiles allaient cueillir sur les rives de la gracieuse rivière qui arrose le ter- ritoire de Montpellier, le Lez, Lanus amnis, très sou- vent cité par les Adversaria : Helleboraster /{maximus). Helleborus fœtidus L. Thlaspi parvum Hieracii- folium (1). Biscutella lævigata L. Androsemum allerum to- mentosum (2). Hypericum tomentosum L. Rhus myrtifolia Monspellien- sium. Coriaria myrtifolia L. Lotus sylvestris Dioscoridis. Lotus corniculatus L. Colutea Scorpioides (3). Coronilla Emerus L. Œnanthe vulgaris (4). Spiræa Filipendula L. Carduus bulbosus Monspel- liensium (5). Cirsium bulbosum DC. Cirsium (6). — Monspessulanum AI. (1) Déjà inscrit sur la liste du bois de Grammont. Mais l'indi- cation d'habitat porte aussi (p. 74) : « In prata Monspelliensia secüs Lanum amnem. » (2) Pour l’Hypericum tomentosum, les auteurs du Stirpium Adversaria, observateurs excellents et précis, disent que cette espèce recherche les lieux humides mais exposés au soleil, ce qui est parfaitement exact (p. 173) : « In agri Monspelliaci locis udis et substilliis, sed fervidioribus solibus exustis. » (3) Déjà noté dans la florule de la forêt de Valène, Mais le texte ajoutait (p. 405) : « Propé fluminis crepidines cis Lanum. » (4) Avec la station du bois de Grammont, déjà citée, le texte (p. 325) marquait : « Monspellii propè pontem Cellenovæ, Maga- lonæ inter Narcissos... » (5) Stirp. Adv., p. 371 : « Locis udis et pratensibus Mons- pellium cireum Carduus hie oritur frequens, inter Narcissos et Aristolochias. » (6) Mème observation que pour la Filipendule ; à l'indication de Grammont les Adversaria ont ajouté (p. 251) : « In locis vadosis Lani amnis Monspelliaci. » — 173 — Anchusa lutea (1). Onosma echioides L, Circæa Monspelliensium (2). Solanum Dulcamara L. Aristolochia rotunda (3). Aristolochia rotunda L. — longa (4). = longa L. Tithymalus Cyparissias (5). Euphorbia Cyparissias L. Leuconarcissolirion praten- se vernum (6). Leucoium æstivum L. Adianthum sive Capillus Ve- Adianthum Capillus-Vene- neris verumm (7). RIS Le Polygonon fœmina semine vidua (8). Equisetum palustre L. Les plages maritimes et le bord des vastes étangs salés qui se succèdent sur le littoral de la Méditerra- née, à quelques lieues au sud de Montpellier, depuis Aigues-Mortes jusqu'au-delà de Cette, offraient aux botanistes une flore maritime dont l'attrait les ame- (1) Stirp. Adv., p. 248 : « Ad Aquas Marianas umbroso et pingui solo. » — La Flore de Loret et Barrandon signale l'Onos- ma echioides en diverses localités du département de l'Hérault, et notamment à Pérols. (2) Stirp. Adv., p. 104 : « Secüs sepes, viasque uliginosas luxuriat et Monspellii etiam in ruderibus, maceriis et macillentis portæ Latensis. » (3) Stirp. Adv., p. 265 : « Propè rudera cœnobiorum, via quæ Frontignanam ducit... — In pratis ad oppidum Villæ novæ. » (4) Ibid. : « Inibi [versus Castrum novuml] locis pratensibus et udis... — In pratis ad oppidum Villæ novæ, ut vix discernere queas [Rotundam et Longam|]. » (5) Stirp. Adv., p. 151 : « Crepidines sabulosæ fluminum et vicini colles fræquentius hunc alunt, uti sunt Ligeris ad Aure- liam, Bituriges Galliæ, et Norbonæ Lani, non procul Monspel- lio. » (6) Stirp. Adv., p. 52 : «In pratis vel germinosis depressis atque lacunosis scrobibus, non procul Monspellio et Magalona ad Lateranum dirutum castrum plurimus floret. » (7) Stirp. Adv , p. 361 : «.. Rupium, fontium et puteorum labris vel asperginibus Monspellii Namausiique. » (8) Stirp. Adv., p. 354 : « Uliginosas convalles et, quas rivuli interluunt, crepidines sectatur in herbidis udis, ad Cellam Novam Monspellio exeuntibus occurrit. » — 174 — nait souvent en ces parages. Nous donnons ci-après la liste de celles des plantes de la région maritime que les Adversaria ont citées avec indication de loca- lités précises, telles que Maguelone, Pérols, Lattes, Aigues-Mortes /Aquæ Marianæ/, etc. : Cakile Serapionis, vulgô Eruca marina. Cakile maritima Scop. Linum marinum luteum. Linum maritimum L. Anthyllis marina incana (1). Polycarpon alsinæfolium DC. Empetrum seu Fœniculum marinum. Crithmum maritimum L. Eryngium marinum. Eryngium maritimum L. Rubia marina Norbonen- sium. Crucianella maritima L. Cotula sive Parthenium ma- rnum MINIMUM. Anthemis maritima L. Gnaphalium marinum, Coto- naria vulgi (2). Diotis candidissima Desf. (1) Grenier et Godron et beaucoup d’autres floristes considè- rent le Polycarpon alsinæfolium de De Candolle comme une simple variété (f. alsinoides, variété des sables maritimes), du P. tetraphyllum. (2) Les Adversaria (p. 201) formulent en ces termes l'indica- tion d'habitat du Diotis : « Universo littore et sabuletis à Marianis Aquis ad Ceti montis radices et lacum plurima, alibi haud temerè occurrit Norbonæ, » Le rédacteur du chapitre, très probablement Pierre Pena, ajoute qu'il n'a point observé cette plante sur le littoral de l’Adriatique. Il raconte que c’est lui- même qui l’a fait connaître en premier lieu aux botanistes de Venise, ensuite à Bellicoco et à Calceolari, pharmaciens à Véro- ne. Plus tard, à Padoue, montrant son herbier à Cortusi, il s'aperçut que tous ses échantillons de Diolis candidissima, d'Aristolochia Pistolochia et d'Euphorbia serrata en avaient dis- paru, ainsi que des fleurs d’Opuntia : « In Adriaticis littoribus non vidimus, e£ nonnullas plantas primüm ostendimus Vene- tis, et Veronensibus Bellicoco et Calceolario. Cortusio verd Pata- vii chartaceum Herbarium spectandum cùm dedissemus, hujus cum Polyrhizi Aristolochia, Tithymallo serrato, floribus Opon- tiæ, plantulam nobis periisse animadvertimus. » Rappelons que — 175 — . Condrilla pusilla marina lu- tea bulbosa (1). Crepis bulbosa Cass. Scammonium Monspelliense. Cynanchum Monspeliacum L. (2). des fleurs d'Opuntia avaient été cueillies à Marseille dans le jar- din du gouverneur de la ville. Il résulte donc de ce récit que l’auteur du texte avait déjà herborisé dans le Midi de la France quand il se rendit à Venise ; et c’est justement cette circons- tance qui nous autorise à croire que ce passage a été écrit par Pierre Pena. — Le même rédacteur dit encore, à propos du Diotis, qu'il en employait les ramuscules cotonneux en guise de mèche pour sa lampe : « Sæpius usi sumus surculis pro elich- niis, qui vividè alunt flammam, olei quippe cæterique pinguis liquoris potrix est. »— On sait que Jacques Cortusi, dont il est question plus haut, fut pour Mathiole un zélé fournisseur de plantes. Pena, ennemi déclaré de Mathiole, semble, dans le mé- me chapitre, se réjouir de l'impossibilité où il se trouva d'offrir à Cortusi, en beaux échantillons, les plantes susindiquées. Cor- tusi n'eût pas manqué de transmettre ces échantillons à Mathiole. Faute de les avoir eus, Mathiole, disentles Adversaria, n’a pu dans ses derniers commentaires ni décrire, ni représen- ter les fleurs et les fruits de ces mêmes plantes, ni indiquer leur habitat : « Quo lubentius persuasi fuimus, propterea quia neque descripsit [Mathiolus] in pestremis commentariis, neque quæ- nam et undè orienda foret monuit, nec flores apposuit pictor, quia illi nostræ flos semenque tune defuit. » (1) Stirp. Adv., p. 83: «In Italia doctiorum nullus se vidisse nos monuit, neque vidimus ipsi alio loco quam secüs insulam et lacustres tractus Montis Cœti Narbonæ ad piscatorum attegias.» — Ce texte confirme ce que vient de nous révéler le fait énoncé dans la note précédente : à savoir que le rédacteur du Stirpium Adversaria, en se dirigeant vers l'Italie, y porta des plantes an- térieurement récoltées par lui en Languedoc, En effet les savants italiens n'auraient pas pu lui affirmer qu'ils n'avaient jamais vu chez eux le Crepis bulbosa, si le voyageur qui les interrogeait ne leur eût au préalable montré ses échantillons provenant du Midi de la France. — Lorsque Mathias de Lobel vint en 1565 à Montpellier pour y passer un peu plus d’un an, entre son séjour en Italie et son départ pour l'Angleterre, on peut considérer comme certain, vu son âge, qu'il venait pour la première fois en Languedoc. Pierre Pena, au contraire, étant plus âgé et né en Provence, avait, sans nul doute, déjà herborisé dans la région avant de se rendre en Italie. (2) « Communis Pharmacopæorum consensus Scammonium — 176 — Scordium Trixago palustris. Teucrium Scordium L. (1). Polygonum marinum mazxi- mum. Polygonum maritimum L, Racemosa Equiseti facie planta (2). Ephedra distachya L. Iris marilima Norbonensis. Iris spuria L. (3). Pancralium marinum (4). Pancratium maritimum L. Alwreézxovpos Theophrasli, Cauda vulpis Monspellien- sium. Lagurus ovatus L. etiam facit illam Marinam volubilem, copiosissimam toto illo li- tore et sabulato, ab usque Rhodani ostio ad Aquas Marianas et Sinum Agathensem. » (1) « Par sa forte odeur alliacée et ses propriétés alexitères,— disent les Adversaria (p. 210) — le Scordium avait été de tout temps célèbre. Mais depuis des siècles on ne savait plus à quelle plante appliquer ce nom, quand, il y a vingt ans à peine, son identité fut révélée aux professeurs de l'Université et aux phar- maciens de Montpellier par l’évêque de cette ville, Guillaume Pelissier, ami et compagnon du professeur Rondelet, et son émule dans la science des poissons et des plantes. Un jour où pour se récréer ils se promenaient ensemble aux environs de Montpellier, dans des champs herbeux et voisins de la mer, ils sentirent une odeur d'ail; ayant aussitôt arraché, pour l'examiner de plus près, la plante qui exhalait cette odeur, ils reconnurent le Scordium. » (2) Le rédacteur de ce chapitre des Adversaria (p. 355) déclare avoir mangé avec grand plaisir les fruits de l'Ephédra, que les pêcheurs et les matelots et aussi les étudiants de Montpellier appelaient du nom provençal de Rasin de mar, I y en avait, dit- il, si grande abondance qu'on aurait pu en charger des chariots. — La station de cette plante est ainsi énoncée : « in siticulosis arenis oræ maritimæ ad Ceti promontorii Agathensis sinus radi- ces, et finitimis aggeribus arenosis, inter mare et stagnum Late- rensem, tres quatuorve leucas Monspellio distantem. » (3) Stirp. Adv., p. 31 : « Riguis herbidis cis lacum ab oppido Frontignana ex adverso montis Ceti multa, » (4) Les Adversaria(p.57)racontent que des pêcheurs et des pira- tes qui, pressés par la faim et croyant avoir affaire à des oignons, mangérent des bulbes de Pancratium, furent pris de nausées, bien qu'ils eussent mangé ces bulbes avec du sel et du pain, A à re wi $ 4 — 17/1 — Outre les endroits que nous venons de passer en revue, Pena et Lobel, dans les comptes-rendus de leurs herborisations en Languedoc, ont nommé d’autres localités appartenant au territoire de la même province ; ce sont : Lunel et Marsillargues, qui font partie de l'arrondissement de Montpellier ; et, dans le département du Gard, Saint-Gilles, Sommiè- res, Nîmes et le pont du Gard. On trouvait à Lunel et à Marsillargues le « Coniza major vera » (Cupularia viscosa G. G.) et en abon- dance l’ « Heliotropium vulgare » (Crozophor«a tincto- ria Juss.) Cette plante, appelée Tornesol dans la langue populaire, était une source de profits impor- tants pour les paysans du lieu, qui la cueillaient et la vendaient aux teinturiers et à certains chirurgiens (1). On s’en servait pour colorer divers médicaments, L’ « Heliotropium minus repens » (Heliotropium su- pinum L.) s’étalait sur les terrains marécageux situés entre Lunel et Saint-Gilles (2) ; et le « Sfœchas citrina altera inodora » (Stæhelina dubia L.), dans les gari- gues qui se prolongeaient entre Sommières et Mont- pellier (3). De la florule du terroir de Nîmes, les Adversaria n'ont enregistré que les plantes suivantes : Stæchas citrina altera. Phagnalon sordidum DC. Abrotanum fœmina. Santolina Chamæcyparissus L. Botrys. Chenopodium Botrys L. Camphorala Monspellien - Camphorosma Monspeliaca sium . L. (1) Stirp. Adv., p. 101: « Magno quæstu colligunt rustici Lu= nellæ, Massillarges aliisque Norbonæ tractibus olivetorum, ubi plurima maturaque Septembri sunt, quæ distrahunt infectoribus et chirurgis nonnullis. » (2) « Lunellam inter et D, Egidium, quibusdam paludosis scrobibus. » (3) « Occurrit ilicetis cocciferis Sommieres inter et Monspel- lium.….. » 12 — 178 — Puasillum Fontilapathum. Potamogeton crispus L. Adianthum sive Capillus Ve- Adianthum Capillus-Vene- neris. ris L, A Nimes, Pena et Lobel n’ont pas manqué d’admi- rer le superbe Amphithéâtre romain qui fait la gloire de la cité ; et comme le botaniste n'oublie jamais qu'il est botaniste, ils ont herborisé dans les ruines du vénérable monument, Nemausensis Amphitheatri auqustæ antiquitatis in hiulcis parietibus ; et c’est dans les fentes des murs, per vetustatem in rimas agentibus, qu'ils ont cueilli le Camphorosma. Le célèbre aqueduc connu sous le nom de Pont du Gard n’a pas excité chez eux un moindre intérêt. Ils l'ont vu en se rendant d'Avignon à Nîmes, à gauche de la route, et ils l’ont décrit dans cette phrase pom- peuse, à propos de l’« Aster Italorum » (Inula spiræi- folia L.) qu'ils ont retrouvé au milieu des ruines : «inter augustæ antiquitatis romanæque munificen- tiæ rudera ruinosaque triplicis fornicis pontis Garri vocati eximia monumenta. » Toujours animés d’un beau zèle pour la botanique et malgré les difficultés que présentaient alors des expéditions de ce genre, Pierre Pena et Mathias de Lobel, pendant leur séjour à Montpellier, allèrent maintes fois herboriser dans les Cévennes, comme d'autres étudiants, du reste, et notamment Charles de l'Escluse, l'avaient fait avant eux. Ils poussèrent leurs courses jusqu'aux montagnes de la Lozère. Les noms de Sevenæ (les Cévennes), Veganium, montes Veganii(Le Vigan),Mindenum,Mindenimontes(Mende) reviennent fréquemment dans leur Flore. Ils dépei- gnent l’aspérité de ces régions par des expressions telles que celles-ci : in celsissimis montium jugis Nor- bonensis Sevenæ : in arduis el nivosis Veganiis culmi- nibus ; in verlicibus edilissimis Mindent. Ils nomment souvent deux des sommets de la chaine : l'Espérou et l'Aigoual.— Ils transforment en LS — - « Esperon » le premier de ces vocables, et dans leur manie d’affubler d’une forme latine tous les noms propres, ils le traduisent par « Mont de l'Eperon, Mons Calcaris », calcar en latin signifiant éperon, ainsi qu'ils ont soin de le faire remarquer (1). — L'Aigoual avait reçu des gens du pays le nom d’Ort de Diéu (2) qu’il conserve encore. Cette appellation de la langue romane (en français Jardin de Dieu) était justifiée par les belles pelouses, si riches en plantes alpines, qui s’étendaient près du sommet, sur le ver- sant méridional de la montagne. Pour les deux lati- nistes des Adversaria, qui aimaient à varier les expressions, le Jardin de Dieu devint tour à tour Hortus Dei, Dei Viridarium, Dei Paradisus (3). (1) Stirp. Adv., p. 347, [Station du Meum Athamanticum!] : « In celsissimis montium jugis Sevenæ, præsertim loco cui nomen gallicè L’Esperon, id est Calcar latinè. » — Le col de l'Espérou, à 4 k. S. O. de l'Observatoire de l’Aigoual, « permet de franchir la ligne de partage des eaux par 1227 m. d'altitude. Au col même se trouve le hameau de l'Espérou, misérable assemblage de masures en pierres brutes, adossé au serre de Favatel, qui l’abrite contre le vent du N. — Le nom vient d’espère (attente ou repos), désignation assez fréquente dans la région pour le sommet des très longues côtes. » (Dictionnaire géogra- phique et administratif de la France et de ses colonies, publié sous la direction de Paul Joanne.) (2) Il faut prononcer Dieou. (3) Voici comment est racontée dans les Mémoires des frères Platter une herborisation faite en ces mêmes parages, vers la fin du xvr° siècle, par trois étudiants de Montpellier, devenus plus tard des botanistes renommés : « Le 14 juillet [1596], nous quit- tâmes Montpellier, Jean-Henri Scherler, Reneaume, aujourd'hui médecin de la ville de Blois, et moi, pour aller herboriser dans les Sevennes. Cette contrée qu'on nomme aussi le haut pays du Languedoc, est montagneuse... et s'étend jusqu'à Mende, confi- nant, d'un côté, l'Auvergne, et, de l’autre, le Bas-Languedoc. On l’appelle Sevennes, comme qui dirait les Sept-Veines, parce qu'on y trouve les sept métaux... — Le 16 juillet, après déjeuner, nous nous dirigeàmes vers le Vigan.. Nous primes là tous les ren- seignements sur les chemins menant à l'Hort-de-Diou... Beaucoup de vieillards nous dissuadaient de notre projet, en nous repré- sentant la hauteur et les dangers de la montagne, où l'on ne — 180 — Il existait alors, entre l'Espérou et l'Ort de Diéu, «inter Dei Viridarium et Calcaris montes », un cou- vent, cœnobium, qui avait été fondé au commence- ment du xr° siècle, sous l'invocation de Notre-Dame de Bon-Présage, Bonum Augurium, pour servir d'hospice et donner asile aux pèlerins ou aux voya- geurs exposés à se perdre dans les neiges en traver- sant la montagne pendant l'hiver (1). pourrait se procurer aucune nourriture. Sans nous laisser effrayer, nous primes un guide du pays, qui nous assura que les troupeaux de chèvres et de vaches étaient revenus des Alpes depuis quelques jours et retournés à l’'Hort, où les pâtres nous donneraient de quoi manger. Nous nous mimes donc en route, au nom du Seigneur, et toujours en montant, nous arrivames le soir au hameau dit de l'Esperou, c'est-à-dire de l'Eperon, comme pour avertir qu'il faut donner un bon coup d'éperon pour attein- dre la cime... — Le lendemain, 17 juillet, nous continuàmes notre excursion, cueillant en chemin une grande quantité de plantes que j'envoyai plus tard à Bâle. Enfin, à midi nous arrivä- mes au sommet, occupé par un immense pâturage couvert de belles plantes toutes en fleurs, qui répandaient un parfum délicieux. C'est ce plateau, grand comme le Petit-Bàle, qu'on appelle particulièrement l'Hortus Dei, quoique d’autres étendent ce nom à toute la montagne. De ce point, peu éloigné de Mende, la vues'étend au loin sur toutes les Sevennes, auxquelles nos monts du Valais sont seuls comparables, et jusqu'aux montagnes de l'Auvergne. Tout en mangeant un morceau, arrosé, comme boisson, par de la neige qu'on trouvait encore en certains endroits, nous ne pouvions nous lasser d'admirer ce panorama... — Notre récolte de plantes achevée, nous regagnàmes, sans nous presser, notre gîte de la nuit... Il était fort tard quand nous atteignimes l'Esperou, que nous avions quitté le matin. » (Félix et Thomas Platter à Montpetlier, traduction Kieffer, p. 210.) — Le Scherler (ou Cherler) dont il est question dans ce passage, est celui qui devint le gendre de Jean Baubhin, fut professeur à Nimes, et collabora à l'Historia plantarum universalis entreprise par son beau-père. — Quant à l'autre compagnon, c'était Paul Reneaume (ou Reneaulme), médecin à Blois, auteur d'un ouvrage estimé qui fut publié à Paris, en 1611, sous le titre de Specimen historiæ plantarum. (1) Dictionnaire géographique el administratif de la France (Paul Joanne). — L'ancien monastère est actuellement une ferme, la ferme de Bonheur, nom qui serait une altération, ainsi que — 181 — C'est là que Pena et Lobel trouvaient un gîte et recevaient l'hospitalité, quand ils venaient herbo- riser dans cette partie des Cévennes. Le couvent était alors occupé par des religieux ou chanoines auxquels on donnait le nom de Canonici Lignipedes parce qu'ils portaient des sandales de bois ou peut-être des sabots. Il se faisait, entre ces moines et nos deux botanis- tes, échange de bons offices. La montagne, à cette époque, était entièrement boisée et fort giboyeuse (1). Les Canonici Lignipedes, grands chasseurs, vena- lionis callentissimi, avaient eu, en battant le pays, l’occasion de découvrir l’Aconit Napel, dont ils firent connaître la station à leurs hôtes : ceux-ci en appor- tèrent à Montpellier quantité de pieds pour être cul- tivés dans les jardins (2).— Un autre jour où les deux amis étaient encore venus demander l'hospitalité au les formes Bonahur ou Banahu, du Bonum Augurium primitif. La chapelle du couvent, assez bien conservée, a été transformée en bergerie. Bonheur est la localité classique de l'Arabis Cebennensis. (1) L'existence des forêts qui, au xvi: siècle, couvraient toutes ces montagnes, est attestée par les expressions dont se servent les Adversaria dans les indications d'habitat des plantes céve- noles : « in sylvosis Sevennæ, in umbrosis saltibus Calcaris mon- tis, à devexis Horti Dei nemoribus...» Comme en tant d’autres lieux, ces bois ont été détruits par le pâturage. Voici de quelle facon le Dictionnaire Paul Joanne décrit l'état actuel du plateau de l'Espérou : « Le paysage est une morne et triste solitude : des mamelons arrondis sans caractère, des vallons monotones à fond plat, de maigres herbages entrecoupés par des bouquets de hêtres rabougris et tordus par le vent. Ce sont là les derniers et misérables restes des forêts qui couvraient encore la région à la fin du xvrre siècle, et qui étaient assez épaisses pour qu’on pût y chasser le chevreuil, le cerf, le sanglier et même l'ours (acte du 10 mars 1654, par lequel le baron d'Hierles reconnait les droits de chasse d’Aulas). Aujourd'hui c'est le désert dans le climat de la Scandinavie. Le vent fait rage sur le plateau dépouillé, les tourmentes de neige le balaient pendant six mois et le rendent inhabitable. » (2) Stirp. Adv., p. 302. — Ils ajoutent que quelques-unes de ces "= monastère, ils eurent à soigner un des chanoines qui souffrait d’une dysurie. Ils lui firent prendre une décoction de racines d'Arnica montana et de Meum athamanticum, et le malade en ressentit aussitôt un notable soulagement (1). Le relevé des plantes que Pena et Lobel rappor- tèrent de ces montagnes fournit la liste suivante : Pulsatilla an Anemone syl- vestris. Aconitum Batrachoïides. Ranunculus pumilus grami- neis foliis. Napellus verus cœruleus (2). Pœonia fœmina. Capnos altera fabacea ra- dice (3). Anemone alpina L. Ranunculus aconitifolius L. — gramineus L. Aconitum Napellus L. Pæonia peregrina Mill. Corydalis fabacea Pers. plantes d'Aconit vécurent longtemps dans le jardin du pharma- cien Hermet, situé près de la porte Saint-Gilles : « … hujus copiam in hortos Monspelliacos transtulimus : vixit diù in Hermeti Pharmacopæi viridario ad Ægidiam portam. » (1) Stirp. Adv.. p. 133 : « Tune temporis cm Cœnobium forte esset nobis hospitium in illis desitis locis, cuidam è Lignipe- dum Canonicorum dyssurià laboranti, et nostrum opem obnixé poscenti, potiunculam ex hujus [Nardus Celtica] Meique radi- cum decocto parandam jussimus, urinæque copiam elicuimus. » (2) M. Gustave Planchon (Flore médicale de Montpellier et des Cévennes d'après Lobel) a constaté que l'Aconit Napel n'existe plus à l'endroit où les Adversaria l'avaient signalé. « Lobel, dit- il (le professeur G. Planchon est au nombre des botanistes qui suppriment Pena), Lobel mentionne l'Aconit Napel dans les bois de l’'Hort de Diou, au sommet des Cévennes, où les moines de l'abbaye de Banahu le lui avaient indiqué... La plante ne se retrouve plus dans la localité classique des Cévennes; elle n'est abondante que dans les montagnes de la Lozère, et n'existe, un peu plus près de nous, que dans les bois de Concoule, sur les confins du département du Gard.» — I] n'est pas étonnant que l'Aconit ne se rencontre plus dans la localité indiquée par les Adversaria. Le funeste déboisement qui s'y est produit a dû apporter bien d'autres changements à l'état de la végétation sous-jacente. (3) Stirp. Ado., p. 339 : « Meminimus etiam in Veganiis hortis ed RS — 183 — - Viola Matronalis. Alabastriles nemoralis, al- pina Herbariorum, Coral- loides Cordi. Sedum petræum montanum. Ocimoides repens flore Sapo- nari®. Androsemum excellentiüs dictum seu magnum. Genista graminea montana. Cytisus (1). Terræ glandes, sive Pseu- doapios Germanorum. Lagopus maximus. Pentaphyllum aliud album et purpureum. — Alpinum pe- tosum et minimum. Chamæmespilum, arbuscula frutexve Alpinus folio Mali. Aria. Cotyledon minus Sedi folio el montanum. Nardus montana. Cacalia. Nardus celtica altera (2). Achillea montana. Hesperis matronalis L. Dentaria digitata Lamk. Draba aizoides L, Saponaria ocymoides L. Androsæmum officinale All. Genista sagittalis L. Cytisus triflorus L'Hér.: Lathyrus tuberosus L, Trifolium rubens L. Potentilla alba L. recta L, Alchemilla alpina L. Cotoneaster vulgaris Lindl. Sorbus Aria Crantz. Sempervivum arachnoi- deum L. Valeriana tuberosa L. Adenostyles alpina Bluff. et Fing. Arnica montana L. Senecio adonidifolius Lois. Dei nos eruisse. » La Flore de France de MM. Rouy et Foucaud marque parmi les localités où croît cette plante: « Garp: les pentes de l’Aigoual (B. Martin). » Le Corydalis fabacea n’est point mentionné dans le Catalogue des plantes de Provence d'Honoré Roux. Nous l’avons rencontré, — postérieurement à la publication de cet ouvrage, — au sommet et sur le versant sep- tentrional de la montagne de Lure (Basses-Alpes). (1) Le texte (p. 388) donne pour station du Cytise à trois fleurs les environs mêmes du Vigan, ad radices montis Calearis propè Veganium. (2) « L'Arnica montana est très abondaïit dans les vallons voi- sins de Bonheur. » (Note du professeur Ch. Flahault.) — 184 — Gnaphalium montanum. Antennaria dioica Gærtn. Arclion montanum. Lappa major Gærtn, Rapuntium majus Alopecori comoso flore. Phyteuma spicatum L,. Vaccinium nigrum. Vaccinium Myrtillus L. — rubrum. — Vitis Idæa L, Asarina. Antirrhinum Asarina L. Linaria purpurea (1). Anarrhinum bellidifolium Desf. Œnanthe sive Filipendula altera montana. Pedicularis tuberosa L. Calamintha montana præs- Calamintha grandiflora tantior. Mœnch. Fagus. Fagus sylvatica L. Caslanea. Castanea vulgaris Lamk. Lilionarcissus Norbonensis luteus montanus, Tulipæ species. Tulipa Celsiana DC. Polygonatum minus. Polygonatum verticillatum AI. Lunaria racemosa. Botrychium Lunaria Sw. Holostium alterum. Asplenium septentrionale SW. Adianthum sive Capillus Ve- Adianthum Capillus Veneris neris verum (2). L. (1) Stirp. Adv., p. 176 : « Ad Veganii Norbonensis montium radices in castanetis sylvis inventam, in Flandriam amicis serendam mullis abhinc annis miseramus.» Voilà encore un texte qui vient confirmer l'hypothèse d'un séjour de Pena en Languedoc, antérieur à celui de 1565-66. Le rédacteur de ce cha- pitre des Adversaria, écrivant en 1570 et voulant rappeler les herborisations de 1565 ou 1566, ne se serait pas servi de cette expression : « mullis abhinc annis, il y a un grand nombre d'années ». — La circonstance que des graines d'Anarrhinum furent par lui envoyées en Flandre pour y être semées n'impli- que pas nécessairement que l'auteur du chapitre soit Mathias de Lobel., De même que celui-ci était, un beau jour, venu en Pro- vence et en Languedoc et s'y était fait des amis, Pierre Pena avait bien pu, dans sa première jeunesse, aller en Flandre et y nouer des relations durables avec les botanophiles du pays. (2) Parmi les plantes notées dans les Adversaria comme fai- sant partie de la florule des Cévennes, il en est quelques-unes : — 185 — Nous venons d’épuiser toutes les séries de plantes languedociennes auxquelles les Adversaria ont assi- gné des stations topographiques particulières. Nous allons maintenant, en suivant le même ordre que précédemment, aborder une deuxième catégo- rie : celle des plantes données comme croissant en Languedoc (1), sans aucune autre désignation de localité, mais presque toujours avec indication exacte de la nature du milieu où elles végètent. Les plantes de cette catégorie auxquelles il faut un terrain livré à la culture sont : Adonis recentiorum aut Ado- nium Poelarum, species Anemone, non Eranthemi. Melanthium sive Nigella syl- vestris allera. Anemone Norbonensis major corniculata. Arabis sive Draba. Isatis sylvestris Ocimastri Adonis autumnalis L. (2). Nigella damascena L. Rœmeria hybrida DC. Lepidium Draba L. Vaccaria parvifiora Mœnch caliculo. Cicer Orobeum (4). (3). Ervum Ervilia L. dont il ne nous a pas été possible de traduire le nom avec cer- titude. Nous y reviendrons quand nous examinerons la série des espèces critiques. (1) Le Languedoc est ordinairement désigné par les expres- sions de Norbona, Gallia Norbonensis, ager Norbonensis (il faut lire Narbona, Narbonensis). Nous avons vu apparaître aussi cette singulière traduction latine du mot « Languedoc » : Linguagottia, ager Linguagotticus, tractus Linguagottici. — Pour la région de Montpellier, les Adversaria emploient quelquefois le terme Niliobriges, au sujet duquel nous nous sommes expliqué dans une note du premier chapitre (p. 25). (2) Une note en marge du texte des Adversaria (p. 114) donne pour synonyme à l’« Adonis recentiorum » l'«Eranthemum » de Dodoens et renvoie à la figure insérée par ce botaniste, laquelle représente très exactement notre Adonis autumnalis. (3) Saponaria Vaccaria L. (4) Les Adversaria ont donné le nom provençal de cette Légu- mineuse, Ere. Ce nom est encore en usage. On doit écrire Erre. … bb Lathyris angustiore grami- neo folio. Lathyrus sativus L. Scorpioides leguminosa. Ornithopus compressus L. Portulaca sylvestris. Portulaca oleracea L, Seseli Creticum, Tordylion. Tordyliurm maximum L,. (1). Elatine Dioscoridis. Linaria spuria Mill. Aristolochia Clematitis. Aristolochia Clematitis L. Hyacinthus comosus (2). Muscari comosum Mill. Gladiolus (3). Gladiolus segetum Gawl. Ischæmon vulgare. Panicum sanguinale L. Lolium, Triticum temulen- tum. Lolium temulentum L. Plantes plus ou moins xérophiles qui se canton- nent volontiers sur les lisières des champs, au bord des chemins, dans les friches et les garigues : Raphanus sylvestris, Lepi- dium Æginetæ (4). Lepidium latifolium L. Irio seu Erysimum Diosco- ridis (5). Sisymbrium officinale Scop. (1) Le texte dit (p. 328) : « Passim in segetibus Norbonæ secüs- que vias. » (2) P. 49 : « Norbonæ abundé in satis et viarum marginibus. » (3) A propos des Glayeuls, les Adversaria (p. 47) constatent que les cultivateurs, en sarclant leurs champs, avaient coutume, pour se débarrasser des mauvaises herbes qu'ils arrachaient, de les jeter sur les chemins ou les sentiers bordant leur pro- priété : « Arva et sata Norbonensia vero Gladiolo scatent eoque cum Draba vulsa surculatores in proximam viam aut tramitem projiciunt. » — C'est une habitude qui ne s'est point perdue. (4) Les auteurs du Sfirpium Adversaria (p. 135) donnent le nom français de cette plante, Passerage, qu'ils expliquent de cette façon : « Notum est istud regionibus calidis et frigidis, ut Norbonæ, Belgio et Angliæ, ad declivia riparum fruticare solitum, plebeculæque Raphanus sylvestris et Passerage vocatum, id est, extrema rabies, propter fervorem igneum qui etiam testatur hanc legitimum Lepidium. » (5) Rondelet se servait de cette plante pour rendre la voix aux chanteurs devenus aphones : « Phonascos memini, tum juvenes, tum ætatis provectæ, quibus fermé jam amissa voce et spiritu, — 187 — Cistus mas. Cistus albidus L. — fœmina. — salvifolius L, — Ledon (1). — Monspeliensis L. Papaver spumeum vulgo, Ocimastrum alterum. Silene inflata Sm. Muscipula sive Viscaria. — Muscipula L. Hypericum (2). Hypericum perforatum L. Vilis vinifera sylvestris spon- taneave, Œnanthe Labrus- ca. Vitis vinifera L. Lentiscus, Terebinthus Len- tiscifolia minor (3). Pistacia Lentiscus L. Ochrus sylvestris sive Ervi- lia. Lathyrus Ochrus DC. Cucumer Elaterii. Ecballium Elaterium Rich. Fœniculum sive Marathrum. Fœniculum vulgare Gærtn. Bupleurum. Bupleurum falcatum L. Periclymenon, Officinis Ca- prifolium, Matersylva, Li- lium inter spinas, Volu- crum majus. Lonicera implexa Ait. limpida sonoraque vox pauculis diebus restituta fuit, unius Ery- simi et opera eximii præceptoris Rondelletii, qui primus usum monuit. » (p.69). — Le rédacteur de ce chapitre y laisse encore une fois échapper le singulier : « memini », (1) Le texte (p. 418) dit de ces trois espèces de Ciste : « Impor- tuno penè proventu in collibus macilentioribus exustis lascivit. » (2) Les Adversaria (p. 172) exaltent les propriétés vulnéraires du Millepertuis, et disent qu'à Montpellier on préparait chaque année avec cette plante une huile appelée dans la langue popu- Jaire Oli de Trescalan : on l’employait pour la guérison des bles- sures, (3) Stirp. Adv., p. 411-412.— Pour les raisons que nous avons exposées dans une note du chapitre précédent (p. 129), nous réunissons les deux noms de Lentiscus et de Terebinthus Lentis- cifolia minor, et nous les appliquons tous les deux au Lentis- que.— En herborisant dans les collines arides du Languedoc, les étudiants de Montpellier, disent les Adversaria, afin d'échapper au tourment de la soif, avaient la précaution de tenir dans la bouche une feuille de Lentisque : « Studiosis saltus et colles ari- dos Norbonæ peragrantibus, inserta in os folia non modo suavi- ter spirabant, sed etiam sitim arcebant et fauces humidas tere- TRE Scabiosa montana calidarum regionum. Militaris sive flore luleo. Ageratum, Eupalorium offi- cinis. Chrysocome aureave coma, Stæchas citrina nosträs. Caltha poelarum. Sesamoides parva Dioscori- dis (1). Dens leonis Monspelliensium. Lactuca agrestis, Scariolæ hortensis folio. Scolymos Theophrasti seu Eringium luteum Monspel- liensium. Arbutus Unedo. Erica major Norbonensium Chamæpyteos folio. Pervinca major (2). Millefolium Cephalaria leucantha Schr. Achillea tomentosa L. Ageratum L. Helichrysum Stæœchas. Calendula arvensis L. Catananche cærulea L. Thrincia tuberosa DC. Lactuca virosa L. Scolymus hispanicus L. Arbutus Unedo L. Erica multiflora L,. Vinca major L. bantur.» — Nous avons déjà dit que le bois de Lentisque servait à confectionner des cure-dents (dentiscalpia), que l'or recherchaït à raison de leurs qualités hygiéniques : caromatia et moderata astrictione et calefactione dentes gengivasque perpurgant, robo- rant et mulcent. » La fabrication de ces cure-dents était une industrie que pratiquaient à Gênes les malheureux forçats con- damnés à ramer sur les galères de la République : « eorum multæ myriades parantur à miseris mancipiis qui in triremibus Lygurum sub nervo vitam degunt. » A remarquer avec quelle sombre énergie cette phrase peint la misérable existence des galé- riens, qui vivaient enchainés à leur banc, et, lorsqu'ils ne ra- maient pas avec assez d'ardeur, étaient frappés à coups redoublés par des garde-chiourme armés d'un nerf de bœuf. — Le bois de Lentisque fournissait aussi un baume de qualité inférieure que l'on appelait Pseudo-xylobalsamum et qui se vendait à bas prix : « Pseudo-xylobalsami hujus magna copia pauco ære parari po- test ex Italia et Gallia Norbonensi. » (1) P. 237 : « In Italia Longobarda non infrequentior quäm Norbonensi agro plurima squallidis collibus, et etiam herbidis ad Lanum. » (2) P, 282 : « Norbonæ umbrosis, etiam apricis et æstuosis, » — 189 — Vincetoxicum officinale Mœænch. Asclepias Vicetoxicum. Convoloulus minimus Spicæ- Jolius. Convolvulus Cantabrica L. Epithymbra, Cassita Plinit. Cuscuta europæa L. Epithymum. — epithymum L. Cynoglossum. Cynoglossum pictum Ait. Heliotropium majus. Rula Canina. Heliotropium europæum L. Scrophularia canina L. Antirrhinum. Antirrhinum majus L. Stæchas. Lavandula Stæœchas L. Thymum. Thymus vulgaris L. Salureia Thymbra. Satureia montana L. Calamintha altera foliis ma- culosis, odore gravi Pule- gü, Nepela Dioscoridis. Calamintha Nepeta Link. Clinopodium aut Lectipes. — Acinos Clair. Sideritis sive Ferruminatrix. Galeopsis Tetrahit L. (1). Ajuga vel Chamæpythis mas Dioscoridis. Ajuga Chamæpitys Schreb. Iva moschata Monspellien- sium. — Iva Schreb. Psyllium, Pulicaris Herba. Plantago Psyllium L. — Plinianum fort majus, radice perenni. — Atriplex pusilla olida hirci- Cynops L. na, Vulvaria vocata (2). Thymelæa grani Gnidii. Hypocistus. Heliotropium vulgare. Chenopodium Vulvaria L. Daphne Gnidium L. Cytinus Hypocistis L. Crozophora tinctoria Juss. (1) Les noms de Sideritis où Ferruminatrix, mots qui expri- ment l’action d'opérer une soudure, avaient été appliqués à diverses plantes que l’on croyait douées du pouvoir de cicatriser les blessures.— La figure de Galeopsis insérée dans les Adversa- ria laisse à désirer, ainsi que Jean Bauhin l’a justement observé (Hist. plant. univ., t. III, 2 p., p. 425). (2) Voici comment les Adversaria (p. 97) justifient le nom donné à cette Salsolacée nauséabonde : « Hanc notissimam fecit odor et fermé infamem : odoratu namque hireus teterque spi- ritus oplet nares, quo imbuti quæruntur permulti se meretri- cum impuros loculos subodoratos esse, planèque referre odorem — 190 — Urtica sylvestris asperior. Urtica dioica L. Coccus infectoria seu Ilex coccifera. Quereus coccifera L. Ornithogalum candidum. Ornithogalum umbellatum 1 Hyacinthus comosus minor. Muscari neglectum Guss (1). Asphodelus albus sive Has- tula regia. Asphodelus cerasifer Gay. Aphyllanthos Monspellien- Aphyllanthes Monspelien- sium. sis L. Smilax aspera. Smilax aspera L. Panicum sylvestre. Panicum Crus-galli L. Gramen pratense minimum. Poa trivialis L. Ægylops. Ægylops ovata L. Nous avons exclu de la liste qui précède l'Euphor- bia Characias L. « Tithymalus Platyphyllos, Chara- cias nuperorum », dont l'habitat est ainsi marqué dans les Adversaria (p. 152) : € In Norbonæ sylvosis et fluentum ripis. » Mais cet Euphorbe s’'accommode fort bien des garigues et autres lieux secs. Même observation pour l’Asteriscus spinosus G. G. « Aster seu Stella attica Monspelliensium », que le texte (p. 147) représente comme recherchant les endroits hu- mides, « propè pratorum margines et fluenta perfa- illum virosum quem prostitutæ libidinis scorta ex impura collu- vie congesta spirant. Indè vulgo futuariam dictitant : atque autumant hac illitas vestium muliebrium plicas canes sagire, atque arrecto veretro Veneris æstu actos illas amplexos cupere inire, præsertim in templis ubi tetrius odor spirat, et minus ventis difflatur ». Une note marginale ajoute : « Atriplicem caninam quidem dixerunt, qui eam ex urina canum enasei arbi- trantur, » — Il semble qu'après tous ces détails, d'un réalisme si peu ragoûtant, l’auteur du chapitre n'avait pas besoin de con- clure par cette recommandation : « Hæc tota cibis abdicanda, ». (1) « Excessivement commun autour de Montpellier, où nous n'avons jamais rencontré le Muscari racemosum. » (Godron, Quelques noles sur la Flore de Montpellier, — Besançon, 1854). Voir ce que nous avons dit, relativement à ce Muscari, au cha- pitre précédent (note 1 de la page 128). — 191 — miliare », tandis qu'en réalité cette Corymbifère hante plutôt les terrains arides. Le Silaus pratensis Bess. « Seseli pralense Monspel- liensium », indiqué Qin pratis », est effectivement une espèce à laquelle il faut le sol humide des prairies. Pour demeurer fidèle au plan que nous avons adopté, nous donnons une liste spéciale des plantes de la région maritime dont la station n’est détermi- née dans les Adversaria que par des expressions générales : in Mediterraneis Norbonæ littoribus, ad Norbonica littora, in maritimis sabuletis Norbone, in pratis maritimis. Il est probable cependant que les espèces énumérées ci-après furent trouvées, par nos zélés explorateurs du Languedoc, en compagnie de celles qui ont figuré sur notre première liste de plan- tes littorales : Clematis altera, urens, vulgi Clematis Flammula L, var. Flammula (1). maritima G. G. Papaver corniculatum (2). Glaucium luteum Scop. — corniculatum Curt. Leucoium maritimum minus. Malcomia littorea R. Br. : — — majus. Matthiola sinuata R. Br. Anthyllis marina Norbo- nensium altera. Frankenia pulverulenta L. Linum marinum luteum. Linum maritimum L. Medica marina. Medicago marina L. Pastinaca marina. Echinophora spinosa L. Tripolium littoreum. Aster Tripolium L. . (1) Voir au chapitre précédent la note 2 de la page 133, — Ainsi que les Adversaria le font remarquer, Flammula était un nom populaire donné à cette Clématite à cause de son action révulsive : « Flammula plebi sic vocata, quia non secüs ac flam- meus fervor, cuti adpressa, vesicas, crustas, ulceraque inurat, ». (2) Stirp. Adov., p. 109 : « Istius Papaveris natales sunt squallida maritima, cujuslibet oræ sive Oceani sive Mediterranei, tum ad calidos Hispaniæ, Norbonæ, Provinciæ et Genuæ, tum ad frigidos Angliæ et Hiberniæ tractus : ubi flores colore jam luteo, jam phœæniceo-purpureo legimus sæpius. » — 192 — Senecio Jacobæa marina, Cineraria (1). Soldanella Brassica marina. Plantago marina. Limonium (2). Atriplex marina repens, lu- tea et xerampelina. Salicornia sive Kali genicu- lalum vermiculatum. Kali minus, Blanchette Nor- bonensium. — magnum vel Sode. Peplis. Tithymalus Parallius. Iris mariltima Norbonensis. Testiculus odoratus. Juncus cyperoides mariti- mus. Androsaces Cotyledon mari- Senecio Cineraria DC. Convolvulus Soldanella L. Plantago maritima L. Statice Limonium L. Atriplex laciniata L. Salicornia fruticosa L. Suæda maritima Dumort. Salsola Soda L. Euphorbia Peplis L. — Paralias L. Iris spuria L. Spiranthes autumnalis Rich. Cyperus schænoides Griseb. Acetabularia Mediterranea - num. Lamouroux. In Norbonæ montosis locis umbrosisque silvis et udis, in riguis monlibus, prata montosa sont les for- mules qui désignent les hauteurs humides et boisées ou les pelouses des montagnes, égayées par la flo- ‘aison des plantes suivantes : (1) Bien que l'on doive considérer les rochers du bord de la mer comme l'habitat préféré de la Cinéraire maritime et qu'elle soit très répandue sur le littoral du Languedoc et de la Provence, cette plante remonte quelquefois très haut dans l’intérieur des terres, Les divers botanistes qui se sont occupés de la flore méri- dionale l'ont signalée dans les Bouches-du-Rhône aux alentours de la vieille cité des Baux près d'Arles ; à la Fontaine de Vau- cluse, dans le vallon de la Nesque au pied du Mont-Ventoux, aux environs d’'Apt (Vaucluse) ; à Gonfaron, au Luce, à Draguignan (Var) ; à Digne (Basses-Alpes), etc. (2) Sur le littoral de la Provence et du Languedoc le S{atice Limonium {ypique est généralement remplacé par une forme dérivée à laquelle, si on veut l’élever au rang d'espèce, on doit donner le nom de S{atice serolina Rchb. — 193 — Hepaticum Trifolium sive Trinitatis. Hepatica triloba Chaix. Fumaria lutea montana. Corydalis lutea DC. Cyclamen folio Hederæ (1). Cyclamen repandum Sm. et Sibth. Asarina. Antirrhinum Asarina L. Pedicularis Alectorolophos. Pedicularis sylvatica L. Cratægonon. Melampyrum pratense L. Hyacinthus germanicus lili- florus. Scilla bifolia L. Allium ursinum latifolium sive Moly Hippocraticum. Allium ursinum L. Narcissus lotus luteus mon- Narcissus Pseudo-Narcis- tanus Theophrasti. sus L. Pour quelques plantes, dont le nombre, du reste, est peu élevé, les auteurs du Sfirpium Adversaria se sont contentés de les attribuer au Languedoc, sans autre indication relative à la nature du stat. Ce sont, pour la plupart, des espèces très répandues dans le Midi, et par conséquent faciles à trouver : Thlaspi Græcum. Alyssum calycinum L. Genistella aculeata (2). Genista germanica L. (1) Quelques-uns des caractères énoncés dans la description des Adversaria (p. 264) concordent bien avec ceux du Cyclamen repandum Sm. et Sibth. C’est vraisemblablement la même plante que Magnol a indiquée aux Capouladoux et aux Cambret- tes. Pourtant l’auteur du Botanicum Monspeliense donnait à son Cyclamen le nom de Byzantinum créé par Clusius et transformé ensuite par Gaspard Bauhin en « Cyclamen radice castaneæ magnitudinis », tandis que le Pinax considérait comme une espèce différente le « Cyclamen hederæ folio » des Adversaria, auquel il conservait le même nom. Le Cyclamen de Magnol fut - retrouvé par Dunal dans les mêmes localités. Voir au sujet de _ cette plante la note d'Henri Loret dans l’Appendice de la Flore de Montpellier. (2) Quelques-unes des espèces qui figurent sur la présente liste n’ont été attribuées par les Adversaria au Languedoc que d'une façon tout-à-fait indirecte. Ainsi, pour le « Genistella aculeata », le texte (p. 409) s'exprime ainsi : « Hac penè carere videtur adhuc 13 7: Ve Lathyris Norbonensis latiore folio. Lathyrus latifolius L. Umbilici Cotyledon. Umbilicus pendulinus DC. Peristeron sive Columbaria. Scabiosa Columbaria L. (1). Ritro seu Rutro Theophrasti. Echinops Ritro L. Scolymos sylvestris sive Cha- mœæleontha Monspellien- sium. Cynara Cardunculus L. Attractilis (floribus luteis). Kentrophyllum lanatum DC. Carduus Benedictus. Cnicus benedictus L. Lycopsis (2). Echium italicum L. Herba venti. Phlomis Herba-venti L. Tithymalus Helioscopius, So- lisequius, Portulacifolius. Euphorbia helioscopia L.(3) _- serralus Monspel- liensium. — serrata L. Mercurialis mas et fæœmina. Mercurialis annua L. Voilà complète, dans l’ensemble des subdivisions où nous l’avons distribuée, la liste des plantes spon- tanées de la flore du Languedoc, sur l'identité desquelles il nous a été possible de nous former une opinion certaine. Plusieurs noms sont demeurés Italia et Norbonensis. » Dire que cette plante manque presque au Languedoc, c'est affirmer qu'on l'y trouve rarement, mais que pourtant elle y est. — Notre traduction de Genistella aculeata en Genista germanica s'appuie sur la double autorité du Pinax et du Species. (1) Pour cette Scabieuse, les Adversaria (p. 231) avaient donné une simple indication topographique : « Propè Monspellii ad Ægidiam portam. » — Nous considérons le Scabiosa Gramuntia L. comme une simple variété du S. Columbaria. (2) Sans indiquer la nature du terrain où végète l'Echium itali- cum, le texte (p. 249) se bornait à dire : « Non procul à littoribus Frontignanæ. » (3) Stirp. Adv., p. 150 : « Norbonæ, ubi maturuerit plenè, adeù spiritu vapido turget [semen|], uti soli relictum, quasi se mota- ret, exiliat mediumque crepet, pueris raro spectaculo est. » — Le mot Solisequius traduit le nom français vulgaire que les Adversaria indiquent ainsi : « Reveille matin suivant le Soleil.» — 195 — intraduisibles. Pour quelques-uns, on peut hasarder des hypothèses. Il en est qui ne permettent aucune supposition. Nous allons énumérer ces espèces litigieuses. Mais en faisant d'avance remarquer combien le nombre en est restreint comparativement au chiffre de toutes celles qui ont pu être exactement déterminées, nous rendrons un juste hommage à la fidélité et à la conscience dont ont fait preuve les descripteurs des Adversaria. Les voici dans l’ordre où l’ouvrage nous les offre : Gramen marinum harundinaceum maximum. — « Norbonæ littoreis vadis quà undæ æstusque æquo- ris illiduntur, præsertim ad Aquas Marianas et Peraus, proximè piscatorum attegias, gramen istud etiam Harundinis æmulum, plurimum reperitur » (p. 4). — Par le mot Harundo les auteurs du Stirpium Adversaria entendaient notre Phragmites communis Trin. Quelle est la Graminée des bords de la mer dont la taille égale celle du Phragmites ? Nous ne voyons que l’Erianthus Ravennæ P. Beauv. (Saccha- rum Ravenæ L. Syst. — Andropogon Ravenæ L. Sp.) qui puisse répondre au signalement. La Flore de Loret et Barrandon constate d’ailleurs que l’Erian- thus occupe encore divers points du littoral langue- docien (1). (1) Il n’est pas surprenant de trouver, surtout en matière de Graminées, une grande confusion dans la nomenclature ancienne. Magnol avait identifié le « Gramen harundinaceum marinum maximum » de Pena et Lobel avec le « Gramen arundinaceum spicâ multiplici » du Pinax, assimilation que G. Bauhin lui- même n'avait point faite. Mais l’auteur du Botanicum monspe- liense n’avait vu de la plante des Adversaria que la racine et les feuilles : « Radices crassissimas, sed spicam nondum videre contigit. » D'autre part, sous le nom que nous venons de citer, Gaspard Bauhin confondait assurément deux espèces, ce qui résulte de l’annotation dont il fait suivre l'énoncé de son Gramen arundinaceum spicàä multiplici : « Variat ratione loci : — 196 — Arundo papyracea. — Plante hydrophile, croissant dans les eaux paresseuses du Lez, (in Lani torpen- tibus acquis non procul Monspellio » (1). Les habitants en employaient les feuilles à façonner des ustensiles de frottage (tergestia), appelés « matta » dans la langue du pays. Au Pinax, Gaspard Bauhin n’a pas relevé le nom d’Arundo papyracea et Magnol ne dit rien de la plante du Lez. Nardus Gangitis spuria Nor bone. En éCriv ant les quatre mots de ce titre, les rédacteurs du Stirpiunt Adversaria aux Saumaises futurs préparaient des tortures ! » Gangitis (ou Gangelis) est un Far géographique que les Romains avaient tiré du mot Ganges, nom latin du grand fleuve de l'Inde. Or, il y a justement dans le Languedoc, non loin de Montpellier et au pied même des Cévennes, une petite ville portant le nom de Ganges : les étudiants y passaient quand ils allaient herboriser à l’Aigoual. L’adjectif Gangitis était donc susceptible de s'appliquer à tout ce qui provenait du bourg languedocien (2). Jacques Utenhove, originaire de Gand et condis- ciple à Montpellier de Pena et de Lobel (3), rapporta d'une herborisation à l'Ort de Diéu des échantillons d'une plante gazonnante, qu'à son retour il fit voir Rondelet ainsi qu'aux futurs auteurs des Adversaria. nam quod in arenosis, spicà est crassiore; quod in montosis, spicà est tenuiore. » — D'après la synonymie établie par Linné pour son Andropogon Ravenæ, notre Erianthus concorderait avec le « Gramen arundinaceum ramosum plumosum album » du Pinax. (1) Stirp. Adv., p. 40. (2) Ganges est actuellement un chef-lieu de canton du dépar- tement de l'Hérault, arrondissement de Montpellier. (3) Les Adversaria nous apprennent que Jacques Utenhove appartenait à la noblesse flamande, et qu'il était fervent bota- niste, très instruit d'ailleurs en tout ce qui touchait à la méde- cine, — 197 — On aimait beaucoup, au xvr° siècle, les rapproche- ments et même les jeux de mots littéraires. Le nom de Ganges, d’où revenait Utenhove, éveilla l’idée que sa trouvaille pouvait avoir quelque affinité avec le Nard des bords du Gange, appelé par Dioscoride Nardus Gangitis, et tout aussitôt on créa pour la plante de l’Aigoual le nom de € Nardus Gangitis spu- ria Narbonensis. » Une description de ce prétendu Nard fut insérée dans les Adversaria ; elle y est accompagnée d’une figure incomplète, représentant une série de faisceaux de feuilles enveloppés d’une gaine basilaire et dépourvus de toute inflorescence. . Que le nom de Gangitis ait été, en la circonstance, appliqué par allusion à la localité languedocienne, cela ne nous semble pas douteux. Le chapitre men- tionne deux fois, au commencement et à la fin, cette «urbecula » : « Il existe dans la province de Languedoc, à sept milles environ de la petite ville de Ganges, une montagne élevée et fort belle, qui abonde en plantes remarquables : aussi l’a-t-on nommée l'hort de Diou, ce qui, en langue vulgaire, signifie jardin de Dieu. » Puis, après une description de la plante : « Nul ne s’étonnera que nous ayons fait mention de la petite ville de Ganges, nam nullum occurrebat oppidulum, nullusve insignior et propior locus isto, quem alluunt duo amnes suavissimi, quorum alter est sabulo, micis balucibusque aureis mixtus, undè etiam aurum colligunt (1). » à Et le chapitre se termine par cette constatation quelque peu naïve : « Par quel hasard la ville de Ganges a-t-elle reçu ce nom, en réalité on n'en sait rien, mais on sait bien qu'elle n’est point indienne. » (1) Stirp. Adv:, p. 43. — Les deux cours d'eau dont il est ici question sont l'Hérault et la Vis ou la Sumêne. L'un d'eux continue-t-il à rouler des paillettes d'or? C'est un point sur lequel nous n'avons pas pu être renseigné. — 198 — Un grand nombre de floristes ont, à différentes époques, éprouvé le désir de savoir quelle était la plante que Jacques Utenhove avait rapportée de l’Aigoual. € Ya-t-il une plante, — écrivait Duval-Jouve en 1863, — sur laquelle il y ait eu plus d'opinions diverses ? — Murray la qualifie « obscura » et incline à en faire une variété du Nardus aristata. — Smith la regarde comme une espèce du genre Rottbællia. — Willdenow se range à l’opinion de Smith, en ajou- tant que la synonymie du Species se rapporte au Festuca spadicea.. — Lamarck et Poiret l’identifient avec le Nardus scorpioides Lamk., plante d'Amérique. — Rœmer et Schultes la conservent comme espèce propre, Monerma Gangitis, tout en lui donnant pour synonyme le Nardus scorpioides Lamk.— Kunth la rapporte au Clenium americanum Spreng. qu'il iden- tifie avec le Campuloa monostachya Rœm. et Sch. et le Monerma Gangilis des mêmes. — Steudel est du même avis, ainsi que Richter... — Enfin Trinius en fait le Rottbællia monandra (1). » Dans le travail dont nous venons de citer un pas- sage, Duval-Jouve ne ratifiait aucune de ces détermi- nations variées. Pour lui, le prétendu Nardus de l'Aigoual repré- sentait le Triglochin palustre. Son opinion avait pour fondements : 1° Cette circonstance « que De Lobel (2) et G. Bau- hin, au lieu de comprendre leur Nardus Gangitis (1) Bulletin de la Société botanique de France, 1863. (2) On s'étonne de voir un homme tel que Duval-Jouve, dont la conscience et la précision étaient ordinairement si grandes, s'enrôler dans la phalange des botanistes qui supprimaient Pierre Pena ; et même, au sujet des Adversaria, ne donner pour toute indication bibliographique que celle-ci : « Le titre complet est: Dilucidæ simplicium medicamentorum explicationes et stir- pium adversaria nova, auct. E. [sic] Pena et M. de Lobel. Lon- dini, 1605 », au lieu de citer l'édition de 1571 ou 1576. — 199 — “spuria Norbonæ parmi leurs Graminées, le placent entre les Cyperus et les Juncus » (1) ; 2° L’indication de stat donnée en termes précis par les Adversaria : « Sur le versant qui regarde le midi ou la mer Méditerranée, cette plante surgit en grande quantité aux endroits humides et couverts de mousse, muscidis et udis tractibus. » — Or, un botaniste des plus consciencieux, le docteur Diomède Tueskiewiez, médecin polonais établi au Vigan, avait écrit à Duval-Jouve : « Après avoir étudié le texte de De Lobel, je suis convaincu que son Nardus Gan- gitis spuria Norbonæ est le Triglochin palustre qui croît abondamment à l’Hort de Diou dans les endroits humides... L’Hort de Diou est un vallon placé près du sommet et sur le versant méridional de l’Aigoual, à 1500 m. d'altitude. » 3° Certains caractères spécifiés dans la diagnose des Adversaria et se rapportant exactement au Tri- glochin palustre. La note de Duval-Jouve paraissait avoir donné une solution définitive et inébranlable à la question du Nardus Gangitis languedocien. Mais le docteur Saint- Lager a publié en dernier lieu un mémoire dans lequel, contredisant l'assimilation avecle Triglochin, il opine en faveur du Festuca spadicea (2). Les arguments de M. le docteur Saint-Lager ne (1) Ce premier argument n'offrait qu'une valeur très relative.— Pourtant si, au xvie siècle, les termes de famille, de genre et d'espèce n'avaient encore qu'une signification mal définie, il est certain que sous l'impulsion de ce besoin d'ordre qui est inné chez l’homme, les phytographes, obéissant à une tendance en quelque sorte inconsciente et obscure, cherchaient déjà à grou- per les types végétaux d’après leurs affinités naturelles ; et l’on voit dans les Adversaria, rangées à la suite les unes des autres, des séries de plantes appartenant réellement à la même famille. (2) Grandeur et décadence du Nard, par le docteur Saint- Lager. — Paris, 1897, — 200 — nous ont point convaincu ; et nous croyons ferme- ment que l'avis de Duval-Jouve doit prévaloir (1). Juncus marilimus duplex. — « Duplex » signifie qu'il existait deux espèces de « Juncus maritimus » - CHujus acuti duæ apud rura Norbonensia maritima differentiæ, multd proceriores nec ternis cubitis in- feriores. » Le mot acuti nous autorise à croire qu'il y avait parmi ces deux espèces celle qui conserve actuellement le nom de Juncus acutus L.— La moelle de ces Joncs, que l’on utilisait comme mèches de lampes, avait un emploi encor plus singulier. Les bateleurs et montreurs de marionnettes se servaient de cette matière pour fabriquer de petites colombes qui pouvaient se balancer dans l'espace en parfait équilibre et semblaient voler : « horum medulla cir- culatorum neuroplastorumque jocosis ingeniis et ludibriis apta materia : & qua columbulas commenti- (1) Le docteur Saint-Lager appuie uniquement son argumenta- tionsurla figure des Adversaria qui ne représente,nous l'avons dit, que des échantillons tronqués et privés de leur inflorescence. Mais Jacques Utenhove avait rapporté de l'Aigoual et commu- niqué à son professeur et à ses condisciples des spécimens bien entiers, que Pena et Lobel ont fidèlement décrits. L'érudit bota- nographe lyonnais semble n'attacher aucune autorité à la des- cription, pourtant si détaillée, que ceux-ci ont donnée dans le texte. Il y a là des caractères qui ne peuvent en aucune façon convenir au Festuca spadicea, notamment ces détails relatifs à la tige : « chaume grêle, luisant, jonciforme, ressemblant assez à l'Elpha [Stipa tenacissima L.], haut d'une coudée, portant du milieu au sommet de petites siliques herbacées ou calycules sem- blables à ceux du Cotylédon [Umbilicus pendulinus D C]. » S'il est impossible d'adapter cette description au Festuca spadicea, elle concorde parfaitement avec le Triglochin palustre. — Ajou- tons encore que le docteur Saint-Lager reproche à Duval-Jouve, «ordinairement si perspicace », d’avoir accordé « plus d'impor- tance qu'il ne convenait à l'indication : in muscidis et udis trac- libus. » Or nos lecteurs savent maintenant autant que nous combien sont généralement véridiques les énonciations de stat insérées dans les Adversaria. — 201 — tias volitantes atque aëre sese librantes meminimus conflatas (1). » Dendroides, sive arboreus Myrthifolius (2). — Les Adversaria avaient exactement discerné en Langue- doc diverses espèces d'Euphorbe, que nous avons insérées sur nos listes. Celle à laquelle ils ont donné le nom de « Dendroides », et dont l'habitat est indi- qué : «secüs fluenta Norbonæ », devint pour Gas- pard Bauhin le € Tithymalus myrtifolius arboreus », transformé ensuite par le Species en Euphorbia den- droides. Maïs il y a là une erreur ou de G. Bauhin ou de Linné. Il est certain que l'E. dendroides L., plante des îles d'Hyères, ne se trouve point en Languedoc. Superba recentiorum anonymos. — Le nom de « Su- perba recentiorum » désignait certainement un Œiüllet (3). Après s'être occupé d’une « varietas » par- ticulière à l'Allemagne et à l'Italie, le rédacteur du Stirpium Adversaria accordait quatre lignes, sans accompagnement de gravure, à une plante dont il ne disait pas le nom : « In agri Norbonensis montosis plantula.est non inelegans, quæ hüc referenda vide- tur.…. (4) ». La description fort brève qui venait en- suite n’était pas de nature à jeter aucune lumière sur l'identité de cette espèce. Dans les Observationes, et sous le nom de « Chondrilla rara purpurante flore, (1) Stirp. Adv., p. 44. (2) Stirp. Adv., p. 152. (3) Dù Superba recentiorum type, pour lequel les Adversaria nindiquaient pas de localité particulière, Gaspard Bauhin avait fait le «Caryophyllus flore lenuissimo dissecto ». Magnol, repro- duisant la dénomination du Pinax, assignait pour station à ce Caryophyllus le pied du mont Saint-Loup: «in herbidis et steri- libus locis circà montem Lupi reperitur.» Tournefort, adoptant à son tour lé nom créé par G. Bauhin, donnait comme syno- nyme le « Betonica coronaria lenuissimè dissecta » de Jean Bauhin, et le nom français populaire de Mignardise. C'était donc le Dianthus superbus L., ou peut-être le D. monspessulanus L. (4) Stirp. Adv., p. 189. — 202 — semine nitido deciduo », Mathias de Lobel a représen- té, au moyen d’une figure fidèlement dessinée, un pied du Crupina vulgaris Cass. (1), plante à laquelle il attribue la station suivante : « Agri Norbonensis collibus non procul à Lupo monte plantula non ine- legans exit, quæ Chondrillis referenda videtur (2) ». En même temps une note marginale déclare qu'il faut considérer comme nul et non avenu et suppri- mer du texte des Adversaria le passage relatif à la plante anonyme dont il était question après le Super- ba recentiorum : « Hæc anonymos in Advers. des- cripta et depravata p. 189 proximè Superbam Recen- tiorum, delenda. » — Le parfait dédain qu'avec le mot « depravata » Lobel témoigne pour la description des Adversaria montre que ce chapitre était l’œuvre personnelle de Pierre Pena. Celui-ci, sans doute, avait eu l'intention de décrire le Crupina. Mais son collaborateur, trouvant ensuite la description trop obscure, y suppléait à l’aide d’une figure et propo- sait de biffer tout simplement le texte primitif. Caryophyllus marinus omnium minimus(3).— Après avoir décrit sous ce nom une plante croissant en Angleterre et en Flandre, dans la zone maritime, et qui nous paraît être l’Armeria maritima Willd., les Adversaria ajoutent que l’on trouve aux Cévennes, dans les vallons de l'Espérou, et par conséquent à une grande distance de la mer, une plante sembla- ble, mais dont chaque pied émet plusieurs hampes et des feuilles de dimension quadruple : les autres parties de la plante sont aussi plus grandes. — II nous semble infiniment probable que ces détails se rapportent à l’Armeria plantaginea Willd. (1) Le nom de Crupina est donné comme synonyme par Lobel lui-même, qui le fait dériver du verbe allemand Cruppen, « de- torto vocabulo à Cruppen, hoc est repere, quia semen manu contrectatum se subducit ac prorepit ». (2) Stirp. Obs., p. 116. (3) Stirp. Adv., p. 189. — 203 — Jacea capitulis spinosis. — Plante indiquée comme spontanée à Celleneuve et dans les vignes voisines de Montpellier. « Florem edit purpureum, — dit le texte, — interdum album, in squammoso et spinulis horri- do capitulo, Calcitrapæ haud absimili (1).» Jean Bauhin et Magnol l'ont tous les deux enregistrée, en la nommant «Jacea cum spinosis capitulis purpurea tenuifolia. » — Il y a peut-être double emploi avec le « Carduus stellatus seu Calcitrapa» décrit dans un autre passage des Adversaria et qui désigne certaine- ment notre Centaurea Calcitrapa L. Verbascum maximum odoratum Meridionalium , Thapsus barbatus (2). — Magnol fait du Thapsus bar- batus des Adversaria un synonyme du « Verbascum vulgare flore luteo magno folio maximo» de Jean Bauhin et du « Verbascum mas latifolium luteum » du Pinax, lequel est devenu le Verbascum Thapsus de Linné. Magnol ajoute ensuite, mais en s’abstenant de tout commentaire : « Addunt Adversaria Verbascum maximum odoratum Meridionalium, florum suavi odore, et lineolis rubris à vulgari solummodo dis- tinctum, quod in campestribus agri Narbonæ occur- rere dicunt (3). » Cynoglossum pusillum Norbonense (4). — Nous supposons que par ce nom les Adversaria ont voulu désigner le Cynoglossum cheirifolium L. Mais le dé- faut de précision dans les termes de la diagnose empêche d’avoir une certitude. — L'habitat est ainsi exprimé : « præsertim aridis et sabulosis Lingua- gotticis ». Arisarum Norbonense. — Sous le nom d’ «Arisarum Veronensium » les auteurs du Stirpium Adversaria (1) Stirp. Adv., p. 234. (2) Stirp. Adv., p. 242. (3) Bot. Monsp., p. 274. (4) Stirp. Adv., p. 250. — 204 — ont très exactement décrit et figuré l'Arum Arisarum L., dont le pharmacien véronais François Calceolari leur avait donné de nombreux échantillons et qu'ils trouvèrent ensuite près de Lucques. Puis ils racon- tent qu'à Montpellier un petit homme appelé Etienne Barral, leur grand ami, botaniste passionné, con- naissant à fond la flore du Languedoc et pour cette raison surnommé le Dioscoride de Montpellier, les conduisit un jour sur le bord d’un ruisseau situé tout près du couvent des Cordeliers et leur montra un endroit où il prétendait avoir arraché la racine et les feuilles d’un Arisarum semblable à celui de Vé- rone. Ils revinrent là plusieurs fois, désireux de voir s'épanouir l'inflorescence de la plante, qui fut tou- jours arrêtée dans son développement par les ardeurs d’un soleil trop précoce (1). — Magnol (Bot., p. 27) déclare que sur la foi des Adversaria il vint pendant longtemps explorer les abords du monastère des Pères de l'Observance, mais il n’aperçut jamais l’Ari- sarum en cet endroit, bien que lui-même l’eût déjà rencontré sur la Gardiole, en allant vers l’ermitage de Saint-Basile. — Le professeur Gustave Plan- chon (2) et à leur tour Loretet Barrandon (3) attestent que l’Arum Arisarum, comme l’Arum Dracunculus, a complètement disparu des environs de Montpellier. Viola purpurea, varietas. — I] s'agit ici d’une es- pèce de Violette, croissant aussi bien, dit le texte, (1) Stirp. Adv., p. 260: « Homuncio quidam Stephanus Ba- rallius vocatus, nobis perfamiliaris, propter summam stirpium Norbonensium peritiam, in qua consenuerat, et nomen in Aca- demia indeptus erat Dioscoridis Monspelliensis, non semel duxit nos ad rivulum quemdam ponè cœnobium Funecinctorum, ubi in salicetis et herbidis udis eruebat radices hujus... eoque cunc- ta plantula aded arida ut frustrà sæpius cupierimus flores et fructum videre, maturius marcescentes præ solibus fervidis. » (2) Des modifications de la flore de Montpellier depuis le xvr* siècle. (3) Flore de Montpellier. — 205 — … dans les forêts des pays froids que sur les hauteurs des régions méridionales, telles que les Cévennes ou les autres montagnes du Languedoc. Quoique brève, la description des Adversaria est précise (1) ; elle est de plus corroborée par une figure des Observationes, publiée sous le nom de « Viola Martia surrectis cau- liculis», avec renvoi à l’article inséré dans le premier des deux ouvrages. — Nous sommes évidemment en présence d’une des sous-espèces à grañde taille qui dépendent du Viola canina L. : V. elatior Fries, ou mieux, nous semble-t-il, V. Jordani Hanry. Lotus sylvestris Dioscoridis. — Cette plante que le texte appelle aussi € Lotus erratica » avait pour sta- tion les bords du Lez, « secs Lanii amnis Monspel- liaci pontem et crepidines (2). » — Déjà Gaspard Bauhin n'avait pas su auquel des Lotus par lui éta- blis il devait appliquer comme synonyme le nom des Adversaria. — Magnol a imité ce silence prudent. Cistus Ledon latifolium (3). — L'article auquel le rédacteur de cette partie des Adversaria a donné pour titre le nom de « Cistus Ledon latifolium » est accompagné d'une figure qui, d’après le Pinax, ne concorderait pas avec la description, d’ailleurs très sommaire, contenue dans le texte. Pour G. Bauhin, le Ledon latifolium de la description doit être con- sidéré comme un synonyme de son « Cistus ladani- (1) Stirp. Adv., p. 266 : « Ramosos cauliculos emittit, sesqui- palmares, teneros, et ex intervallis folia oblongiora, altiüs ser- rata ; siliquasque in tres fissuras dehiscentes, longiores ; flores concolores, inodoros. » (2) Stirp. Adv., p. 385. (3) Stirp. Adv., p. 418. — L'habitat du Cistus Ledon latifolium est ainsi indiqué : « Multa lascivit quopiam in monte celsissimo agri sterilis Savenæ, cui nomen S. Columbæ. » Les recherches que nous avons faites, et pour lesquelles M. le professeur Fla- hault a bien voulu nous aider, ne nous ont pas permis de décou- vrir quel est le haut sommet des Cévennes qui portait, au xvIe siècle, le nom de Sainte-Colombe. LI M fera Monspelliensium » dont Linné a fait le Cistus monspeliensis. Quant à l’image, elle représenterait le « Cistus ledon folio myrti ». Mais il ne nous est pas possible de savoir au juste quelle est la plante que l’auteur du Pinax entendait sous ce nom. Ni Magnol ni Linné n’ont fait mention de cette espèce, et il nous serait difficile d'écrire un nom exact sous la figure dessinée dans les Adversaria : on peut y voir quelque ressemblance avec un Helianthème, Helianthemum italicum Pers. ou H. marifolium DC. Lycium, sive Pyxacantha Norbonensium (1). — Cette espèce, que Jean Bauhin (Hist. plant. univ., t. I, 2 p., p. 58) a identifiée avec son « Lycium Gallicum » est manifestement un Nerprun épineux : Rhamnus infectoria L., Rh. saxatilis L., ou Rh. Villarsit Jord. — J.Bauhin disait des baies de ce Lycium : (Lugduni adferuntur nomine Grani tinctorii, Graine à teindre. » Et il indiquait ainsi la station de cet arbuste : « Nas- citur in asperis et saxosis circà Avenionem et Car- pentoracten. » Au sujet de l'habitat, le texte des Ad- versaria porte seulement : «Est in Provinciæ Norbonæ plerisque locis arbuscula.… » Nous pensons qu’il y a là une petite faute d'impression : la conjonctive et a été omise entre les mots Provinciæ et Norbonæ. Quand nos auteurs veulent parler uniquement du Languedoc, ils disent Norbona, sans y adjoindre le mot Provincia. Nous croyons donc que Provinciæ s'applique ici à la Provence, où d’ailleurs les Ner- pruns abondent. Salix humilis, repens (2). — Les botanistes qui sa- vent combien il est difficile, aujourd'hui encore, de déterminer certains Saules, comprendront sans peine qu'il ne soit pas possible de découvrir quelle est l'espèce que les Adversaria nommaient ainsi. (1) Slirp. Adv., p. 419. (2) Stirp. Adv., p. 423. — 207 — Pena et Lobel avaient rencontré ce Saule dans les Cévennes. Paliurus alter peregrinus (1). — Cette désignation vise, à n’en pas douter, un des Rhamnus épineux que nous avons cités plus haut. Jean Bauhin rapprochait aussi ce Paliurus de son Lycium Gallicum. Mais comme le texte des Adversaria, insuffisant lui-même, est accompagné d’une figure dont l'exactitude laisse fort à désirer, il n’est pas permis de se prononcer au sujet de l'espèce. Rhamnus secundus Monspelliensium (2).— Ici encore insuffisance de la description et de l’image. — Dans les Observationes, Lobel déclare que le « Rhamnus secundus Dioscoridis Monspelliensibus dictus » est en réalité celui que Charles de l'Escluse appelle « Rham- nus primus Dioscoridis ». Gaspard Bauhin (Pin. p. 477) en fait le « Rhamnus spinis oblongis flore can- dicante », nom que Linné n’a point accueilli dans sa synonymie. — Il s’agit toujours de l’un de nos Nerpruns. Enfin parmi les plantes critiques, il en est deux dont les auteurs du Stirpium Adversaria ont parlé sans avoir pu eux-mêmes en constater de visu la présence dans le Languedoc : Narcissus luteus Aphricanus. — Le rédacteur de ce passage des Adversaria raconte qu'un chirurgien- barbier des galères de Gênes lui avait montré, pro- venant de la région d'Afrique comprise entre Alger, Bône et Carthage, une plante « ressemblant au Nar- cisse des poètes, mais avec des fleurs plus petites, entièrement jaunes, à odeur faible, et des feuilles plus grêles et plus consistantes ». Ces divers caractères sont bien ceux de notre petit Narcissus juncifolius (1) Stirp. Adv., p. 437. (2) Stirp. Adv., p. 438. — 208 — Req.— L'article des Adversaria ajoutait que ce même Narcisse avait été trouvé sur le territoire d'Agde (1). Narcissus purpurocæruleus. — « Des amis d’une sincérité douteuse nous affirmaient avoir cueilli sur les bords du Lez, non loin de Montpellier, des Nar- cisses dont les fleurs étaient entièrement violettes : à maintes reprises, nous les cherchàmes longtemps à l'endroit indiqué et dans les prairies circonvoisines ; nous en demandämes des nouvelles, soit aux étu- diants qui herborisaient, soit à nos professeurs ; mais ce fut en vain (frustrà venati sumus) (2) ». Pour achever tout ce qui concerne la flore sponta- née du Languedoc telle qu'elle est décrite par les Adversaria, et avant de passer à l'examen des plantes cultivées, nous ferons connaitre ou nous rappellerons quelques particularités relatives à l'utilité que l'in- dustrie ou l'économie domestique tiraient de certains végétaux croissant naturellement dans le pays (3). Nous avons déjà vu que les ménagères pour- voyaient leurs lampes de mèches avec des brindilles de Phlomis Lychnitis ou de Diotis candidissima et la moelle de quelques jones de grande taille. Le Lin maritime leur fournissait, aussi bien que le Linum usitatissimum, des fibres susceptibles d'être filées. Les Adversaria disent expressément à propos du «€ Linum marinum luleum » : « Cortice ad nendum commodo (4). » (1) et (2) Stirp. Adov., p. 51. (3) Comme, au xvre siècle, on étudiait la botanique surtout en vue de son utilité pratique, afin de mettre à profit les proprié- tés thérapeutiques dont on gratifiait si libéralement alors la plupart des espèces végétales, Pena et Lobel ne manquent pas de désigner pour chacune d'elles les maux qu'elle était en pou- voir de guérir. Nous ne les avons pas suivis sur ce terrain. Notre étude devant rester œuvre de botanique pure, nous croyons inutile de mentionner des vertus médicinales qui, presque tou- jours chimériques, n'ont pas résisté à l’injure du temps. (4) Stirp. Adv., p. 177. F0 — » Nous savons en outre que le bois de Lentisque se débitait en cure-dents, et que des incisions faites au tronc et aux branches du Térébinthe, on recueillait la térébenthine. À une époque où la chimie industrielle n'avait pas encore découvert l’art de fabriquer la soude, cette substance était fournie par diverses Salsolacées des genres Suæwda, Salsola et Salicornia. Les Adversaria nous apprennent que c'était princi- palement le € Kali magnum » (Salsola Kali L.) et le « Kali minus » (Suæda maritima Dumort.) qui don- naient la soude employée à la fabrication du verre. Ces deux espèces sont indigènes sur le littoral mé- diterranéen, en Languedoc autant qu'en Provence. Mais à cause de leur grande utilité, on en étendait le développement au moyen de la culture, et de vastes surfaces, au voisinage de la mer, en étaient couvertes (1). Le procédé d'extraction de la soude, décrit par l’ouvrage, était fort simple. Après dessiccation des plantes, on les entassait dans une fosse creusée à cet effet. On avait soin d’entrecroiser leurs tiges pour mieux assurer la circulation de la flamme. La soude s’obtenait par la combustion. D'abord liquide, elle se coagulait au fond de la fosse et formait des pains de dimension plus ou moins volumineuse et de cou- leur noirâtre ou cendrée (2). — La soude, ainsi (1) Le Stirpium Adversaria dit de la première de ces deux es- pèces, p. 170 : « Hæc species et notior in maritimis Galliæ Norbo- nensis, ubi tum spontè, tum sata, campos maritimos frequentia caulium rubentium operit purpura. » Et de la seconde /ibid.] : « Eosdem ad usus colligunt maritimi coloni Narbonenses, iis- dem natalibus, foliis.. nec ita rubentibus, sed ex pallido viren- tibus, undè Blanchette, quasi Kali album vocatum. » (2) Stirp. Adv., p. 169 : «... copia, per initia Autumni acerva- tim super scrobe, cui ligna insunt decussatim instructa, ut accensa meta herbæ Kali dum uritur et liquatur, inque fundum scrobis defluat, cogaturque in glebam aut saxum pulli nigricantis vel cinerei coloris. » 14 — 210 — extraite, et livrée ensuite aux navires qui la trans- portaient en Italie et jusque dans le nord de l'Europe, procurait d'importants profits aux cultivateurs de la région littorale (1). Les paysans languedociens tiraient également bénéfice de deux autres plantes recherchées par l’in- dustrie de la teinture. L'une était celle qui portait dans la langue populaire le nom de Tornesol (Crozo- phora tinctoria Juss.), et dont nous avons déjà parlé à propos de Lunel et de Marsillargues. L'autre, appelée par les botanistes du temps « Anchusa minor, Alcibiadion ou Onochyles », est la Borraginée que les Flores actuelles dénomment Alkanna tinctoria Tausch (Lithospermum tinctorium L. Sp. ed. 1). Nous voyons que les pharmaciens faisaient le commerce de l’Alkanna. Ceux de Montpellier, chez lesquels on l’'apportait tout d’abord, l’expédiaient à leurs con- frères lyonnais, et ces derniers le faisaient vendre à une foire spéciale qui se tenait à Lyon toutes les années (2). (1) Ibid. : «.. vocant Kali vel Sode, ad vitrum conflandum in Italiam inque Septentrionem ex Gallia Norbonensi et Aquita- nia, deferunt. » — Les Provençaux riverains de la côte méditer- ranéenne prenaient une part très active à cette production de la soude. «Ceux d'Arles, écrivait l’auteur de La Provence louée, ensemancent leurs terres d’une certaine engeance d'herbe vul- gaire, très propre à fabriquer toute sorte de verre. Ils l’appellent Soude. Cette herbe est enlevée au commancemant du mois d'Aoust, pendant lequel on la met seicher sur des aiz. » Puis, à la suite de l’exposé qu'il faisait du procédé d'extraction, il ajou- tait : Ç Une seule plante de Soude rend ordinairement vint et parfois trente livres de cette paste, dont les cent (faisant le quin- tal) vaut un écu d'or... Nous voyons de tous côtez aborder des Marchands, non de la France seule, mais d'Espaigne et d'Italie pour l'acheter. » (Traduclion du De Laudibus Provinciæ de Quiqueran de Beaujeu, par F. Claret Archidiacre d'Arles.) (2) Stirp. Adv., p. 248: « Copiosissima in Nitiobrigum agro, undè Pharmacopæi Monspellienses et Lugdunenses Lugdunum ad nundinas quotannis accersunt, » — 211 — .__ — Nous avons exposé dans le chapitre relatif à la Provence toute l'importance qu'avait pour le pays la récolte annuelle de la Cochenille du Chêne-nain. Le Languedoc, ou du moins la contrée située assez près du littoral pour être appelée maritime, participait aussi aux profits que procuraient la recherche et la vente du Coccus infectoria : « Frontignanæ, — dit le texte, — Norbonæque maritimis hanc legunt mense Maio (1). » Un certain nombre de plantes sauvages offraient des ressources à l’art du cuisinier. De même que les Provençaux, les Languedociens appréciaient le Souci des champs, que l’on faisait cuire dans les sauces ou que l’on mangeait cru en salade (2). Sur les côtes maritimes, les racines de l’Echino- phora spinosa fournissaient un aliment au menu peuple (3). Le Cynara Cardunculus se trouve encore aujour- d'hui à l’état spontané en Languedoc (4). Il y était abondant au xvr° siècle (5). Mais, à cette époque, on (1) Stirp. Adv., p. 430. (2) Stirp. Adv., p. 237. (3) Stirp. Adv., p. 317 : « Erutas hujus radices in maritimis sabuletis Norbonæ inter Eryngia, dum esitat plebecula illic, Pastinacam marinam vocat. » (4) Loret et Barrandon, Flore de Montpellier. (5) Stirp. Adv., p. 366 : « Scolymos syluestris, sive Chamcæ- leontha Monspelliensium : .. Norbonensi agro plurimus. » — Gaspard Bauhin, dans son Pinax, a commis une erreur au sujet de cette espèce. Les auteurs des Adversaria ont traité de la Carde immédiatement après l’article consacré à l'Artichaut qu'ils appellent « Scolymos seu Cynara » en ajoutant à l'intitulé comme synonyme « Gallis Artichaut. » La Carde est par eux nommée : dans le titre, tel que nous venons de le transcrire, « Scolymos sylvestris, sive Chamæleontha Monspelliensium », et dans le texte : « Carduus sylvestris coagulatorius ». G. Bauhin a inscrit au Pinax le Scolymos sylvestris Adv. parmi les synonymes de l'espèce à laquelle il a donné le nom de « Cynara sylvestris latifolia », nom dont Linné, à son tour, a fait un synonyme de SR n'avait pas eu l’idée d'utiliser comme substance ali- mentaire les tiges, les pétioles et le rachis des feuilles de cette Carduacée. Sur ce point, le texte des Adver- saria est précis. Les paysans se servaient des fleurs (capitules), Cantequäm in pappos abeant», pour faire cailler le lait, mais ils n’en faisaient pas autre usage, quoique la plante n'ait pas mauvais goût, «nulli usui alio illic servit, tametsi non insuavis gustu ». Disons à cette occasion que la culture de l’Artichaut, prati- quée en Italie, n'avait pas, semble-t-il, encore passé les Alpes. Le texte nous apprend que les paysans italiens, « comme font les ànes des têtes de chardon, uti aselli », se nourrissaient des capitules d’artichaut avant qu'ils eussent fleuri, Cnondum in flores erum- pentibus » ; et il ajoute que développés et rendus tendres par la culture, ces capitules pouvaient de- venir une friandise même pour les gourmets (1). Les Adversaria (p. 361) nous disent enfin que l'Adianthum Capillus-Veneris, « plante qui ne se ren- contre que rarement en France, en Allemagne, en Belgique et même en Italie », était vendu à Lyon, à ’aris, à Anvers et sur d’autres marchés célèbres où les parfumeurs (seplasiarit) le payaient fort cher et l'employaient à faire le sirop de capillaire, « ad Ca- pilli-Veneris syrupi dictüi apparatum ». Mais les par- fumeurs de Montpellier avaient, pour la confection de ce sirop, une renommée qui s'étendait au loin, et son Cynara Scolymus. Comme d'après le texte et la figure nous avons la certitude que sous le nom de Scolymos sylvestris les Adversaria ont bien décrit la Carde, G. Bauhin aurait dû placer ce nom avec les synonymes de son « Cinara spinosa cujus pedi- culi esitantur » que Linné a transformé en Cynara Cardunculus. — Remarquons, à l'occasion du nom donné à la Carde par lau- teur du Pinax, que c'est dans l'intervalle écoulé entre la publica- tion du Slirpium Adversaria et celle du Pinax que le Cynara Cardunculus à pris rang au nombre des végétaux comestibles. (1) Stirp. Adov., p. 365 : « Cultu aded adolescunt et tenerescunt caules et coni, ut gulonibus etiam tragemata minimè spernanda fiant, » — 213 — - leur clientèle comprenait les gens les plus riches de d France et même les personnages de la cour : € Galliæ ditiores et aulici sibi curant non rard Monspellii con- ficiendum indèque adferendum. » Les auteurs du Stirpium Adversaria n'ont accordé ni grande attention ni large place aux plantes culti- vées à cette époque par les Languedociens. A propos du Blé, ils ont signalé un procédé de cul- ture que l’on employait dans les montagnes du Haut- Languedoc. Il s’agit de semailles qui s’effectuaient au moment où l'hiver prenait fin. Le blé que l’on semait ainsi, appelé snravto, chez les Grecs, se nommait en France, nous disent-ils, « Bled de Mars », et en Lan- guedoc « Tremes, quasi Tremestre » (trimestrium ou trimense triticum, blé ne demeurant en terre que l’espace de trois mois) (1). Parmi les céréales cultivées en Languedoc ils font mention du Millet (Panicum miliaceum L.) qu'ils appellent « Milium vulgare ». Is rapportent qu'à Venise et dans le Tyrol, le Millet réduit en farine pro- curait au bas peuple un aliment de qualité très infé- rieure, et à cette occasion ils nomment la polenta. Il semble résulter de leurs explications que dans le Languedoc le Millet n’était semé que pour servir de nourriture aux petits oiseaux élevés en cage ou en volière, canaris, linottes et « quercereaux » (2). Le Cresson Alénois (Lepidium sativum L.) auquel les Adversaria donnent le nom de « Nasturlium hor- tense » s'appelait en Languedoc Nasitort € id est nares torquens, ab effectu » (3). On le mangeait en salade € in acetariis usus plurimus » (4). (1) Le mot français Trémois a manifestement la même étymo- logie. Le provençal actuel dit Tremiso. Tremis est la forme du Rouergue (F. Mistral, Dict. prov.-fr.). (2) Stirp. Adv., p. 13. (3) Le mot provençal Nasilort n'est point tombé en désuétude. On emploie aussi la forme contractée Nastou. (4) Stirp. Adv., p. 72 et Stirp. Obs., p. 107. — On faisait entrer — 214 — Une autre Crucifère comestible, la Roquette (Eruca saliva Lamk.), était aussi fort prisée. Déjà nos au- teurs lui donnaient ce nom d°’ «€ ÆEruca sativa» que Lamarck a rétabli (1). Mais ils distinguaient deux variétés, proclamées l’une et l’autre « cibis gratiores et nobiliores ». La première était appelée « Major Hispanica » ; la seconde € Gentilis », « quia in condi- mentis lautior, vel ad Venerem vegetior (2) ». Le Câprier était alors, dans la partie méridionale de la province, l'objet d’une culture étendue : « Fru- ticat ruri in ora Thyrrenici maris, Norbonensi et Hispanica Capparis uberi proventu ». Le condiment que nous fournit encore cet arbrisseau était déjà usité au xvre siècle. On mettait à confire dans de la saumure ou du vinaigre (muria aut aceto) les boutons que l’on cueillait autant que possible sans leur laisser le temps de grossir ; car les délicats de l’époque, aussi bien que ceux d'aujourd'hui, recherchaient de préférence les câpres de petite taille et « les payaient au marché six fois plus cher que les grosses ». En aussi dans les salades le Cresson de fontaine (Nasturtium offici- nale R. Br.) que les Adversaria appellent « Cratevæ Sion Eru- cœfolium », mais en indiquant qu'on le nommait plus commu- nément « Nasturlium aquaticum ». On mangeait beaucoup de cresson, principalement pendant le Carême : « plebecula in qua- drageno Veris jejunio multum hujus in acetariis vorat, » — La loi de l’abstinence quadragésimale était alors rigoureusement observée, et le bras séculier obligeait à s'y soumettre même les étudiants non catholiques (V. les Mémoires des frères Platter). (1) Linné l'avait nommée Brassica Eruca. (2) Stirp. Adv., p.68. — A propos de la Roquette, qu'un frère d'origine espagnole avait, disent-ils, introduite dans le jardin du couvent de Maguelone, ils racontent une histoire égrillarde qui se serait passée de leur temps, à les en croire presque sous leurs yeux, et dont les religieux de ce monastère auraient été les héros. On voit à cette occasion qu'ils se délectent à médire des moines ; ils accumulent, comme à plaisir, les termes désobli- geants, et faisant allusion à l'embonpoint de quelques-uns, ils ne craignent pas d'appliquer à l'ensemble de la communauté cette expression méprisante : « monachorum saginata caterva » ! — 215 — . quoi les gourmets avaient tort, s’il faut en croire nos deux botanistes-médecins : pour la santé, disent-ils, les grosses câpres valent mieux. Mais ils ont beau en donner les raisons, ils n'espèrent pas réagir contre cette aberration de l’art culinaire : « Culinæ error est minores majoribus præferre. Sed hic consuetus ino- levit mos ». Et ils citent en l’'approuvant le mot du philosophe : Rien n'est plus nuisible à la santé qu'un bon cuisinier : Qut scitè dicebat philosophus, nihil magis adversatur valetudini aut medico quàm bonus coquus (1) ». Nous avons encore à mentionner, au nombre des plantes alimentaires que l’on multipliait volontiers, le Chervi (Sium Sisarum L.). Les Adversaria l'appe- laient « Sisarum », indiquaient son nom français de « Cervys » et disaient de cette Ombellifère : « Vulgd frequens Norbonensi agro vescendi causa alitur (2). » Le Roseau et le Melon, au sujet desquels nous som- mes entrés dans quelques détails au chapitre relatif à la Provence, étaient cultivés aussi par les gens du Languedoc (3). Des nombreuses plantes étrangères, dont les ama- teurs d’horticulture et surtout les pharmaciens (1) Stirp. Adv., p. 281. — Bien que pour le Câprier il ne soit question que de la Toscane, du Languedoc et de l'Espagne, il n’est pas douteux que Pena et Lobel le rencontrèrent également dans la Provence méridionale, où il n'a pas cessé d'être cultivé et où il est aussi subspontané. (2) Stirp. Adv., p. 317. — « Il est étonnant que l’on ait aban- donné la culture du chervi, plante qu’on soupçonne originaire des Indes, connue depuis très longtemps pour les propriétés ali- mentaires de ses racines : on les servait sur les tables les plus recherchées, comme un mets très délicat. Pline nous apprend que l’empereur Tibère, durant son séjour en Allemagne, trouva les racines du chervi si délicieuses, qu'il en exigea chaque année une certaine quantité en forme de tribut. » (F. Hoeffer, Diction- naire de botanique.) (3) V. plus haut, p. 138 et 139. — 216 — emplissaient leurs jardins, les Adversaria n'ont nommé que les suivantes : Panicum cœruleum Indi- cum (1). Lilhospermum Plinianum sive majus, Lachryma Job seu Christi (2). Scilla sive Cæpa marina (3). Cardiaca Melica sive Moluca Syriaca (4). Moluca asperior (5). Herba Sancta sive Nicotiana Gallorum. Alysson (6). Cnicus Carthamus (7). Pennisetum typhoideum Rich. Coix Lachryma L. Urgina Scilla Steinh. Moluccella lævis L. — spinosa L. Nicotiana Tabacum L. Marrubium Alysson L. Carthamus tinctorius L. Caput gallinaceum Belga- r'um. Onobrychis sativa Lamk. (1) Semé par les auteurs du Sfirpium Adversaria en divers jar- dins de Montpellier de graines à eux envoyées par Jean de Bran- cion, gentilhomme botanophile, de Malines. (Stirp. Adv., p. 15). (2) Cultivé aussi dans les jardins de la Provence, surtout par les moines qui en faisaient des chapelets (V. ci-dessus, p. 140 et la note). — D'après Charles de l'Escluse (Rar. plant. hist.), les Espagnols nommaient cette Graminée Lagrima de Moysen, et les Languedociens Larmes de nostre Dame, « quia ejus semina la- chrymarum ex oculis procedentium formam quodammodo æmu- lantur. ». (3) Stirp. Adv., p. 57 : « Sata et perbellè adulta fuit Mons- pelii in horto Jacob Farges pharmacopæi. » (4-5) Stirp. Adv., p. 221. — Ces deux espèces de Moluccella avaient été, dix ans auparavant, expédiées de Syrie à Venise par Cequin Martinello. Pena et Lobel en obtinrent des graines qu’ils envoyérent d'abord à leurs amis d'Anvers ; plus tard ils semè- rent eux-mêmes ces plantes à Montpellier, puis à Londres. (6) Stirp. Adv., p. 255 : « In Belgio vidimus, in Italia dono ha- buimus, Monspelliique satam et enatam gustavimus. » (7) Slirp. Adv., p. 374: « Massilarges quatuor à Monspellio leucis coliltur à pharmacopæis. » — 217 — Pruna Maura, Myxa Ægi- .nelæ, Sebasten officina- rum (1). Cordia Myxa L. Nous venons de faire figurer sur cette liste une Solanée américaine, d'introduction alors récente, et dont on ne pouvait, en ce temps-là, prévoir l’éton- nante fortune : c’est le Tabac. Les Adversaria disent que semée € in calidioribus tractibus Aquitaniæ et Linguagottiæ », la plante s’y développait parfaite- ment, produisant des fleurs et des graines. Ils en donnent une description détaillée et un dessin d’une fidélité irréprochable. L'usage que fait actuellement du Tabac l'univers entier était, au xvie siècle, limité aux équipages des navires et aux voyageurs qui allaient dans le Nouveau-Monde. Notre texte le cons- tate expressément : (Vous voyez, dit-il, la plupart des navigateurs qui retournent de là porter de petits entonnoirs façconnés avec de la feuille de palmier ou de roseau ; ils y introduisent des feuilles roulées ou hachées menu de cette plante préalablement dessé- chée ; ils y mettent le feu, puis ouvrant la bouche toute grande, ils aspirent la fumée par le bout op- posé qu'ils sucent. Ils affirment que c’est là un moyen d’apaiser la faim et la soif, de restaurer les forces, d’égayer l'esprit et d’engourdir le cerveau dans une agréable ivresse. Ils ajoutent que cette fumée favorise l’éjection d’une grande quantité de pituite (2). » Pena (1) Stirp. Adv., p. 437 : « Nostra ætate in Monspelliensis agri urbecula vernaculè Massilarges nominata, quidam amieus aluit. » (2) Stirp. Adv., p. 252 : « Videas enim naucleros plerosque -omnes qui isthinc rediunt gestare pusilla infundibula ex folio palmæ aut storea confecta, quorum lateri extremo inserta sunt convoluta folia et comminuta siccata hujus plantæ: istud illi accendunt igne, atque hianti ore quantum plurimüm possunt, inspirando fumum sugunt, undè sibi famem sitimque sedari, vires instaurari, spiritus exhilarari asserunt : sopirique jucunda ebrietate cerebrum dictitant : incredibilem pituitæ copiam ple- rumque educi. » — 218 — et Lobel avaient trop le goût de l’expérimentation pour n'être pas tentés d'éprouver sur eux-mêmes les effets du Tabac : «quod ipsi dum hauriremus, ex- perti sumus ». La figure que les Adversaria ont insérée d’une plante entière de Nicotiane représente en même temps une de ces pipes ancestrales auxquelles le livre donnait le nom d’entonnoirs (infundibula). Cest un tube de feuilles de palmier enroulées en spirale, très long, presque droit, terminé au sommet par un évasement qui constituait le fourneau. Le fumeur s'en servait en le tenant dans la position verticale, et pour cela il fallait que lui-même renver- sât la tête en arrière : la posture était manifestement incommode (1). Le Sainfoin, porté sur la même liste sous le nom de « Caput gallinaceum Belgarum » a été, suivant toute vraisemblance, introduit en Languedoc par les auteurs du Sfirpium Adversaria. Ils racontent, en effet, qu'ils le semèrent eux-mêmes à Montpellier au moyen de graines qui leur avaient été envoyées pour la première fois par Pierre Coldenberg, pharmacien à Anvers. En leur faisant cet envoi, Coldenberg leur avait expliqué que la plante était spontanée dans la Hollande et la Zélande, « in Hollandiæ et Zelandiæ aggeribus et littoreis adversum maris alluviones et procursus erectis repagulis (2). » — Pena et Lobel se plaisaient d’ailleurs à ces essais d’acclimation, à raison desquels ils prenaient pour champs d’expé- rience, nous disent-ils, les jardins de leurs amis (3). (1) Le dessin de cette pipe primitive est accompagné d'une légende marginale ainsi conçue : « Nicotiana inserta infundibulo ex quo hauriunt fumum Indi et naucleri. » (2) Stirp. Adv., p. 402. (3) Les auteurs du Sfirpium Adversaria avaient semé en 1565 dans le jardin du docteur Laurent Joubert, « professeur royal », une Malvacée exotique — c'est l'expression même dont ils se ser- vent: « Exolica Malvacea » ; quelques-uns, disent-ils, croyaient — 219 — -_ Comme nous l'avons déjà fait pour la Provence, nous donnons à part le tableau des espèces arbores- centes, spontanées ou non, dont il est question dans les Adversaria à propos du Languedoc. Les arbres y mentionnés sont : Le Tilleul (Tilia platyphylla Scop.). - - Pena et Lobel, qui le nomment « Tilia fœmina », constatent qu'il est plus rare en Italie et en Languedoc que dans les régions froides du Nord de l'Europe, Alle- magne, Belgique, France (1) ; Le «Zizipha candida Monspelliensium » (Melia Azedarach L.) (2) ; Le Jujubier, auquel le texte donne le nom de « Ju- jube » : l'habitat est ainsi indiqué: «in aridis el glareosis strigosis Norbonæ, arboris alicubi, alibi duntaxat fruticis magnitudinem assequitur (3) » ; Le Gainier (Cercis Siliquastrum L.). — Déjà connu que c'était le « Bamia Eben ». — Eux-mêmes avaient vu, long- temps auparavant, cette plante cultivée à Vérone. Les graines qu'ils semèrent à Montpellier venaient d'Alexandrie ou de Bey- routh. Elles germèérent, la plante se développa. Mais cette année-là l’hiver fut précoce. La Malvacée (probablement un Hi- biscus) n’eut pas le temps de donner des fleurs avant d'être tuée par le froid. (Stirp. Adv., p. 295.) — Ils semèrent aussi dans le même jardin une prétendue « Ptarmica », qui, lorsqu'elle se fut développée, leur parut identique au « Thlaspi Candiæ » (Iberis umbellata L.). (Ibid., p. 217.) (1) Stirp. Adv., p. 440. (2) Stirp. Adv., p. 416 : « Venetiis et Norbonæ frequens, » — Les moines employaient les noyaux de l’Azédarach à faire des chapelets : « Ex nucleis precatorios globulos Monachi conficiunt, hinc arbor de Gli patre nostro, Italis : Gallis ver, arbor sancta dicitur. » (G. Bauhin, Pinax, p. 415.) (3) Stirp. Adv., p. 437. — Dans les Observationes (p. 397) Lobel a représenté deux rameaux de Jujubier, avec fleurs et fruits. Au mot Jujube il ajoute le génitif Arabum. Il indique en même temps que Jujubier est le nom français de cet arbre, et Guin- doulier le nom que lui donnent les habitants du Languedoc : à cette occasion il forge l’adverbe « Linguagotticè ». — 9ù — sous le nom d’Arbre de Judée « Arbor Jude sive Cercis Theophrasti » ; «in collibus amœænis Norbonæ (1) » ; Le Tamarix gallica : L'Olivier (2) ; Le Figuier ; Le Micocoulier (Celtis australis L.) signalé, sous le nom de « Lotus arbor », près de Boutonet : Le Hêtre et le Châtaignier abondants dans les Cé- vennes ; Le Chène-vert, si répandu en beaucoup de localités (1) Stirp. Adov., p. 4H. (2) Les Adversaria (p. 25) décrivent en ces termes, sous le titre « d'Elæomeli », un produit d’exsudation de l'Olivier : « Bien que l'Olivier, dans toutes ses parties, — écorce, souche, fruit, — soit amer et déplaisant, nous savons cependant par expérience qu'il distille une manne ressemblant tout-à-fait au miel, non seulement par sa couleur et son goût, mais aussi par son incor- ruptibilité. Nous en conservons quelques onces recueillies en partie par le professeur Rondelet depuis douze ans, en partie par nous-mêmes il y a cinq ans. Etienne Barral, surnommé le Dioscoride de Montpellier, nous conduisit auprès de certains arbres dont les troncs et les jeunes rameaux récelaient en abon- dance, ainsi qu'il nous en avait avertis, cette substance précieuse et inattendue. En effet, au moyen d'incisions à l'écorce pra- tiquées avec un couteau, nous en recueillimes une quantité suffisante et pour l'étudier nous-mêmes et pour en faire part à nos amis. On ne trouve ce miel que vers le temps où l'olive, commençant à changer de couleur, est près d'atteindre la ma- turité, c'est-à-dire aux approches de l'hiver, dans les derniers jours de novembre. Les gens de la campagne nous dirent qu'un jour ou deux avant ou après la fête de sainte Catherine [25 no- vembre], ils avaient vu arriver en foule des enfants et des men- diants, attirés par la production de la manne. Il en coulait aussi quelque peu près des vignes voisines de la chapelle des Corde- liers Franciscains, sur le chemin qui conduit à la porte de Lat- tes, et l’on rapportait qu'à Lunel on en obtenait une plus grande quantité de gros trones d'oliviers récemment coupés : tout d'abord plus fluide que le miel, la liqueur, sans doute sous le refroidis- sement de la température, devenait plus épaisse et prenait l'ap- parence de la manne plutôt que du miel, par la saveur et la consistance : tel fut l'avis de tous nos condisciples qui en goû- tèrent, parmi lesquels Jacques Utenhove gentilhomme de Gand et médecin de beaucoup de mérite ». … “du Languedoc, et notamment dans le bois de Gram- mont ; Le Pin d'Alep et le Pin Maritime, compris sous la rubrique « Pinus sylvestris et varietates » ; 2 Le Pin Pignon « Pinus vulgalissima », spontané aux environs d'Aigues-Mortes, « ad Aquas Marianas spontè nata » (1); L'If (Taxus baccata L.) dont les Adversaria ne font qu’une mention incidente, sous le nom de « Taxus Norbonica » pour rappeler que lantiquité croyait dangereuse l’ombre même de cet arbre (2). Nous avons maintenant, pour achever notre tâche, à examiner quelles sont, en ce qui concerne la flore du Languedoc, les contributions personnelles de Ma- thias de Lobel. Quelque importante qu'ait été la part prise par (1) Stirp. Adv., p. 449. — Le texte constate que l’amande four- nie par le Pin Pignon est comestible ; on la vendait dans les officines sous le nom de Pinea : « nucleis compactis, esculentis, babitioribus, quos officinæ vocant Pineas. » — Dans un autre passage (p. 23), les Adversaria nous apprennent que les phar- maciens de Montpellier employaient ces amandes à faire, avec du sucre, des dragées ou pastilles appelées Pignolats. L'objet et le nom sont toujours en usage dans le Languedoc. (G. Planchon, Flore médicale de Montpellier d'après Lobel.) (2) Stirp. Adv., p. 54 : « ... Sie Taxus Norbonica et Hispanica deleteria sola umbra prodit antiquitas. » — Dans la première moitié du xvi® siècle, Jean Ruel croyait encore que l'ombre seule des Ifs du Languedoc était mortelle : «In Italia et Narbo- nensi provincia baccas si gallinacei edunt nigrescunt, homines verû resolutione alvi periclitantur. Narbonensi vis tanta, ut si qui sedeant sub ea somnumve capiant, lædantur, sæpè ver et extinguantur. » (De Natura stirpium libri tres, Joanne Ruellio authore, Paris, 1536, p. 340.) — Vers la fin de leur volume (p. 450), Pena et Lobel ont reparlé du Taxus; ils déclarent qu'en Angleterre, où cet arbre est extrêmement répandu, surtout dans les cimetières et au-devant des temples, son ombrage n'a jamais été funeste à personne, et que les enfants et les pourceaux mangent ses baies impunément. ; — 222 — Pierre Pena à la rédaction des Adversaria et aux her- borisations préliminaires dont ce livre contient les procès-verbaux, Mathias de Lobel a certainement, lui aussi, beaucoup herborisé pendant son séjour à Montpellier. Le lien d'amitié qui se forma entre le botaniste provençal et l'étudiant lillois, le projet déjà conçu, sans doute, d’attacher leurs deux noms à un ouvrage de longue haleine, permettent de suppo- ser que durant cette période de leur vie Pena et Lobel vécurent dans une étroite intimité et furent en quel- que sorte inséparables. Dans le Sfirpium Observationes, Mathias de Lobel a consigné un assez grand nombre de détails autobio- graphiques. Il y rappelle à maintes reprises les pro- menades qu'il a faites aux environs de Montpellier. Il cite à son tour la plupart des localités énumérées dans les Adversaria : Boutonet, Castelnau, les bords du Lez, Lattes, Maguelone, Frontignan, la colline de Cette, le bois de Grammont, la forêt de Valène, le mont Saint-Loup, les Cévennes (1)... En parlant de lui il se sert le plus souvent de la première personne (1) En ce qui a trait aux excursions de Mathias de Lobel dans les Cévennes, nous avons, outre son propre témoignage, celui de son vieil ami Etienne Barral, dont il a été question deux fois à propos de l’Arisarum et de l'Elæomeli. — Lorsque, au mois de juillet 1596, Thomas Platter, alors étudiant à Montpellier, partit pour les Cévennes avec Cherler et Reneaume, il passa par Saint- Bauzile. « Nous y causämes, dit-il, avec un vieux médecin qui s'était longtemps occupé de botanique et avait servi de guide bien des années auparavant au célèbre Lobel dans ses courses à l'Hort-de-Dioù ; aussi l'appelait-on simplement le Dioscore. Son herbier, qu'il nous montra, renfermait surtout des simples qu'on vend aux apothicaires, comme l'angélique, la gentiane, etc. Cet homme avait certainement plus de quatre-vingts ans. » (Félix el Thomas Plaller à Montpellier, traduction Kieffer, p. 280.) — Le mot Dioscore, abréviation ou déformation de Diosco- ride, désigne avec la dernière évidence Etienne Barral que ses contemporains avaient surnommé, comme on l'a vu, le Dioscori- de de Montpellier, — 223 — … Mihi primus ostendit Assatius.. » Voici la liste des espèces pour lesquelles la pri- mauté revient aux Observationes, tout au moins au point de vue d’une station signalée dans le Lan- guedoc : | Thlaspi fruticosum spino- sum Narbonense (1). Alyssum spinosum L,. Cistus annuus folio Ledi (2). Helianthemum ledifolium Willd. Lychnis sylvestris hirla mi- nima (3). Silene quinquevulnera L. Passerina Linaricæ folio. Linum strictum L. Linum sylvestre floribus albis (4). + — salsoloides Lamk. (1) Stirp. Obs., p. 109: « Hoc non nisi sterilibus cautibus rupi- busve propë Namausum et Monspellium fruticat. » — A remar- quer que dans les Observationes Lobel écrit Narb.….. et non plus Norbona, Norbonensis. (2) Stirp. Obs., p. 552 : «Narbonensis Ledi annui rara species via quæ ducit Monspellio ad præceptoris Rondelletii prædium vulgô Terral, inter Sferracavallo et Cristas gallinaceas herbulas fruti- cat.» — Les Adversaria avaient déjà noté la présence en cet endroit de l’'Hippocrepis (Sferra-Cavallo). Les Observationes y signalent le Rhinanthus minor Ehrh. « Crista gallinacea». (3) Stirp. Obs., p. 183 : « Aridis, saxosis collibus Narbonæ. » — Avant le « Lychnis Sylvestris kirla minima », Lobel, dans les Observationes, avait déjà enregistré un « Lychnis sylvestris hirla », duquel il disait : « Areis segetibusque Galloprovinciæ et Narbo- nensis agri gaudet. » De ces deux prétendues espèces différentes Gaspard Bauhin a fait deux « Lychnis sylvestris lanuginosa », l’un « major » et l’autre « minor ». Nous sommes convaincu qu'il ne s’agit en réalité que d’une seule espèce, Silene quinquevul- nera L. (considéré aujourd’hui comme synonyme de S$. gallica L.) (4) Le « Linum sylvestre floribus albis » des Observaliones est devenu dans le Pinax (p. 214) un des synonymes du « Linum sylvestre angustifolium flore magno » de G. Bauhin, que Linné ensuite a identifié avec son Linum tenuifolium. Mais d’après les énonciations mêmes tant du Pinax que du Species, il est mani- feste que G. Bauhin et Linné ont confondu plusieurs espèces. A Li TEE - Lotus asperior frulicosa sive Argyrolobium Linnæanum Narbonensis incana. Walp. Rubiæ maxime varietas (1). Rubia peregrina L. Linosyris nuperorum (2). Linosyris vulgaris DC. Millefolium luteum (3). Achillea tomentosa L. Hieracium Narbonense fal- cata siliqua (4). Rhagadiolus stellatus DC. Scorzonera, Viperaria (5). Scorzonera hispanica L. Asclepias altera flore nigro. Vincetoxicum nigrum Mœænch. (6). Gentiana major. Gentiana lutea L. Anchusa lutea minima (7). Lithospermum apulum Vahl. notre avis, les mots « floribus albis » de Lobel ne peuvent s’appli- quer qu'au Linum salsoloides Lamk., sous-espèce du ZLinum suffruticosum L. La figure insérée dans les Observationes, sans être d’une exécution parfaite, suffit néanmoins à confirmer notre traduction. — L'habitat du « Linum floribus albis » est ainsi indiqué (Stirp. Obs., p. 226) : « Via qua Monspellio Frontigna- nam itur, Linguagottiæ agrorum strigosis marginibus et çau- tibus nonnunquam obvium ». (1) Stirp. Obs., p. 463 : « Monspellium circà in olivetis, senti- cetis et vipretis. » Le « Rubia maxima » type était Rubia tincto- rum, qui déjà portait aussi ce nom. (2) Stirp. Obs., p. 223 : « Hanc in collibus Narbonensis Galliæ non procul à mari erutam memini ; quà ad Balnea propè Fron- tignianum itur. » (3) Stirp. Obs., p. 431 : «In agro Namausensi plurimum. » (4) Stirp. Obs., p. 121 : « Notissimum Monspelliensibus istud : ubi inter segeteset in agrorum marginibus Boutonneto finitimis luxuriat, » (5) Stirp. Obs., p. 298 : « Mihi primus ostendit præceptor Assa- tius cis lacum & regione montis Ceti. » (6) Stirp. Obs., p. 356 : « In agri Monspelliensis collibus Fron- tignanæ vicinis, » (7) Stirp. Obs., p. 312: « Hanc Monspelliensis ager dat, sed rariüs multô. Floribus luteis in pusillis pediculis in se convolutis caudam scorpionis aliquantum æmulantibus ; cujusmodi scitè meminit fidus testis doctus et.industrius pharmacopæus Fran- ciscus Penninus Antverpianus. » — Il semble résulter de ce passage que le pharmacien François Pennin d'Anvers s'était trouvé à Montpellier en même temps que Lobel et qu'ils avaient herborisé ensemble, — 225 — “Asarina sterilis Sevenæ (1). Antirrhinum Asarina L. Crista gallinacea. Rhinanthus minor Ehrh. Serpillum Narbonense (2). Thymus Serpyllum L. var. confertus G. G. Melissophylon Fuchsi. Melittis Melissophyllum L. Amygdaloides. Euphorbia amygdaloides L. Juniperus major Monspel- liensis. Juniperus Oxycedrus L. Helleborus albus (3). Veratrum album L. (1) Stirp. Obs., p. 329 : « Rupibus et cautibus Veganio conter- minis. » (2) Stirp. Obs., p. 230-231.— La dénomination conférée par les Observaliones à cette plante porte en son entier: « Narbonense Serpillum folis et facie perpusillis angustifolii Thymi nostratis.» L'article «Serpillum » des Adversaria, auquel renvoient les Obser- vationes, n'indiquait aucun habitat spécial. Lobel qui, dans sa note complémentaire, ajoute au mot Serpillum l'épithète de Nar- bonense, cite comme station : «in ericetis Egidii pagi, vulgù S. Gilles, agri Monpelliensis. » G. Bauhin (Pin., p. 220) a fait du Serpolet de Lobel le « Serpyllum folio Thymi», dans lequel Linné a vu son Thymus Zuygis. Il y a donc une erreur, puisque le Thymus Zygis L. ne se trouve point en Languedoc. Il s’agit ici du Thymus Serpyllum L. var. { confertus G. G. (Thymus ner- vosus Gay.) « La var. y, dit la Flore de France, est confondue par plusieurs auteurs avec le Th. Zygis L.; mais la plante lin- néenne qui croît en Espagne, en Italie, en Sicile, en Algérie, s'en distingue nettement par sa tige plus grosse, etc. » — Ce Serpolet avait été trouvé à Saint-Gilles par François Pennin, pharmacien à Anvers, dont nous avons cité le nom dans une note précédente : il était, nous dit Lobel, « fide dignus, stirpium materiæque me- dicæ gnarus, ut siquis alius. » (3) L'Ellébore blanc, ainsi que la grande Gentiane jaune, avait été décrit dans les Adversaria, mais sans indication spéciale de station languedocienne. Le chapitre relatif à la Gentiane consta- tait que les deux espèces croissent très souvent pêle-mêle et se ressemblent tellement par leurs feuilles qu'il est facile de pren- dre l’une pour l’autre. Et à cette occasion le rédacteur du cha- pitre raconte un fait dont il fut personnellement la victime. Ayant, au temps de sa jeunesse, entendu dire que pour com- battre la fatigue et recouvrer l'appétit, c’est chose excellente que de mettre à infuser dans du vin de la racine de Gentiane, il voulut, un jour qu'il était fatigué, recourir à ce réconfortant. Malheureusement, trompé par la ressemblance des feuilles, il 15 — 226 — Colchicum minus (1). Colchicumarenarium Wald. et Kit. Ornithogalum spicatum Monspelliensium flore Ornithogalum Narbonense lacteo. L. Corruda Narbonica (2). Asparagus acutifolius L, Croci sylvestris montani va- rietates (3). Crocus vernus All. Gramen Canarium allerum. Cynodon Dactylon Pers. (4). prit de la racine de veratrum et faillit en mourir. Ce récit est fait au pluriel, et rien dans le texte n'indique quel est celui des deux collaborateurs dont la vie fut ainsi mise en péril. — Tous ceux qui ont herborisé en montagne savent, en effet, que les deux plantes se rencontrent fréquemment dans le voisinage l’une de l’autre, et quand elles sont dépourvues de leur inflorescence, il faut une certaine attention pour ne les pas confondre. (1) Stirp. Ob., p. 72 : « Hujus minorem speciem olim latissi- mis pratensibus pascuis ad montis Lupi Narbonensis radices, ad diversorium publicum, via qua Gangem urbeculam itur, collegi- mus. » (2) L'Asparagus acutifolius avait été exactement décrit et représenté par les Adversaria (p. 353) sous le nom de « Corruda », mais sans indication d'habitat spécial. Dans les Observationes (p. 459) Lobel, le mentionnant incidemment, l'appelle « Corruda Narbonica » et lui confère ainsi droit de cité en Languedoc. (3) Stirp. Obs., p. 69 : « In Calcaris, vulgd L’Esperon, algido Norbonensis Galliæ præcelso monte, Septembri mense, paseuis propé tuguriola et lares rusticas, inter Meum, Gentianas et Helleboros, florentem album unà cum purpureo sylvestri Croco me vidisse memini. » — Le mot de varietas avait au xvr siècle la signification que nous attachons à celui d'espèce. Les différen- ces de couleur étaient toujours considérées comme des caractè- res spécifiques sérieux, et les nuances variées que revêt le Crocus vernus faisaient croire à Lobel qu'il y avait à l'Espérou plusieurs varietates. C'est à propos du Crocus, et dans le passage cité plus haut, que les Observationes signalent l'existence aux Cévennes de la grande Gentiane jaune et de l'Ellébore blanc (Veratrum album L.). (4) 11 y a certitude (résultant soit du texte, soit de la figure, p. 12) que le « Gramen Canarium allerum » de Lobel est bien notre Cynodon Dactylon Pers., « appelé Chiendent par les Fran- çais », dit-il. Puis, après avoir inscrit en marge le titre Varielas, il ajoute : « Narbonæ maritimis radieum effigiatura et parilitas …Gramen panniculosum Pha- larioides, Amourettes vul- Eragrostis megastachya gô (1). Link. Mathias de Lobel a donné le dessin d’une Asclé- piadée qu’il considérait comme une « varietas » du « Scammonium Monspelliense » des Adversaria(Cynan- chum monspeliacum L.). Il dit de cette plante : CE littoreis Adriatici et Mediterranei maris in hortis nostris alitur (2). » La «Scammoni Monspeliaci va- rietas » de Lobel est devenue pour G. Bauhin (Pin., p. 294) : « Scammoniæ Monsp. affinis foliis acutio- ribus ». Linné a pris la dénomination bauhinienne pour synonyme de son Cynanchum acutum, espèce au sujet de laquelle la Flore de Loret et Barrandon s'exprime ainsi (p. 434): « Peut-être le Cynanchum acutum de Linné n'est-il pas celui des auteurs fran- çais, mais, en tout cas, la plante de notre plage à laquelle on donne ce nom ne diffère point spécifi- quement du C. monspeliacum, et nous ne pouvons distinguer chez nous qu’une seule espèce (3). » Parmi les plantes languedociennes mentionnées pour la première fois dans les Observationes, nous trouvons une Synanthérée, « Jacea montana Narbo- nensis », que Lobel affirme avoir découverte lui-même près de Castelnau : « Cautibus et collibus Castri novi conterminis Monspelliensis agri à me reperta (4). » Il adeù appropinquat arundini vallatoriæ, ut eandem dixeris. » Il nous est impossible de comprendre quelle est l'espèce que les Observationes désignent par ces mots. Arundo Vallatoria était le nom de notre Phragmites communis. (1) Stirp. Obs., p. 10 : « Pulchellum gramen Amoureltes, quasi — amatorium, ob venustatem dicitur... Narbonensi agro nonnus- È quam occurrit. » *% (2) Stirp. Obs., p. 341. £ (3) Pour Grenier et Godron le C. monspeliacum est une simple variété du C. acutum. (4) Stirp. Obs., p. 293-294. ne de en donne la figure. Mais nile dessin ni la description ne nous ont permis de reconnaitre quelle est l'espèce représentée. Moins heureux que Gaspard Bauhin, — qui savait, lui, à quoi s’en tenir à cet égard, puisqu'il avait changé le nom de la plante en « Jacea montana incana odora », — Magnol, auquel nous avons re- couru, nous a répondu en toute franchise : « Quid sit, me ignorare fateor (1). » Lobel a commis une autre erreur au sujet d’une Corymbifère qu'il nomme « Buphthalmum tenuifo- lium Narbonense » et qui croit, dit-il, « strigosis Gal- loprovinciæ et Narbonensis Galliæ (2). » Mais ici l'erreur est relevée par Gaspard Bauhin lui-même. Elle consiste, de la part de Lobel, à n'avoir pas fait concorder la description du texte avec l’image qui y est jointe. D’après le texte, le « Buphthalmum tenui- folium Narbonense » des Observationes doit se con- fondre avec le « Buphthalmum alterum folio et facie Colulæ fœtidæ » des Adversaria, qui est présentement l’Anacyclus radiatus Lois. (Anthemis valentina L.) (3). — Quant à la figure, elle représente le « Chrysanthe- mum Valentinum » de Clusius (Anacyclus valentinus L.) plante qui, à notre connaissance, n’a encore été rencontrée en France que dans les Pyrénées. Outre les diverses plantes que nous venons de passer en revue et dont plusieurs étaient inédites, Mathias de Lobel en a repris un assez grand nombre déja mentionnées aux Adversaria. I a pourvu d'une figure la plupart de celles qui n'avaient pas été gra- vées dans le premier ouvrage. Pour quelques-unes il a signalé des localités nouvelles. Il a précisé le sens etla portée de certains chapitres trop sommaires (1) Bot. Monsp., p. 137. (2) Stirp. Obs., p. 446. (3) Les Adversaria avaient signalé l'Anacyclus radialus à Hyères dans les bois d'orangers. D'après les Observaliones il fut trouvé en Languedoc par François Pennin et Valerand Dourez. — 229 — objet tout un groupe d'espèces (1). Sous le nom de « Serpentina » les Adversaria avaient décrit, sans en donner la figure, un Plantain croissant en Provence. Lobel a inséré dans les Observaliones une gravure représentant ce même Serpentina. Nous avons exposé au chapitre précédent les raisons qui nous ont déterminé à y voir, non point le Plantago serpentina Vill., mais bien le P. carinata Schrad. (2). En regard même du dessin se rapportant par un renvoi précis au Serpentina des Adversaria, l'auteur des Observationes a placé un autre Plantain, de petite taille, originaire des Cévennes, auquel il donne le nom de « Serpentina omnium minima ». Il accompa- gne l’image de la courte notice que voici : « Minima nullatenus distat superioribus, præterquam exilitate; cauliculis enim vix unciam et sesquiunciam æquat. In celsis montium jugis sterilis Savenæ in Gallia Narbonensi copiosè provenit (3). » Linné est tombé dans une erreur grossière relative- ment à ce Plantain. Au « Serpentina omnium minima» de Lobel, Gaspard Bauhin substitue la dénomination de « Holosteum strictissimo folio minus » ; Linné en a fait son Plantago subulata, sans prendre garde qu'un (1) Il est arrivé quelquefois à Mathias de Lobel d'insérer aux Observationes, sous un nom nouveau, une plante déjà décrite et représentée dans les Adversaria. Nous avons, en pareil cas, le droit de supposer que le premier article, dont Lobel semblait ainsi avoir perdu le souvenir, était, avec tant d'autres, l'œuvre personnelle de Pierre Pena. Nous citerons, comme exemple de double emploi, le Frankenia pulverulenta, qui figurait dans l'ouvrage collectif sous le nom d’Anthyllis marina Norbonensium altera et que Lobel a reproduit dans les Observationes en l'ap- pelant Anthyllis Valentina. Cette circonstance avait été relevée par G. Bauhin. Il disait dans son Pinax (p. 282) de l'Anthyllis marina alltera des Adversaria : « Huic similis aut eadem, An- thyllis Valentina Lob. » (2) Voir ci-dessus, p. 137. (3) Stirp. Obs., p. 240. — 230 — Plantain dont Lobel plaçait l'habitat dans les Cé- vennes ne pouvait pas être identique au Plantago qui croît, suivant les propres termes du Species même : Qin maritimis Mediterranei arenosis ». Avec d'autant plus de raison que le type destiné à devenir le Plan- tago subulata L. avait été décrit dans les Adversaria sous le nom de « Coronopi et Sedi montani media planta Massiliensium » transformé par le Pinax en « Holosteum massiliense » (1). Pour nous, les deux Plantains présentés par Lobel sous le nom de Serpentina appartiennent l’un et l'autre au Plantago carinata Schrad. Le plus grand est la forme genuina ; le € minima » est la variété 8 depauperata de Grenier et Godron (2). Beaucoup trop bref et entièrement dépourvu de précision, le passage des Adversaria relatif à la Bruyère permettait à peine d'y constater une allu- sion, pour le Languedoc, à l’Erica multiflora (3). (1) Ce qui aggrave la faute de Linné, c’est qu'en donnant pour synonyme à son Plantago subulata le « Holosteum strictissimo folio minus » de G. Bauhin, il cite lui-même, parmi les autres synonymes de sa propre espèce, le « Serpentina omnium mini- ma » de Lobel. (2) La Flore de France constate que le Plantago carinata est très répandu dans les Cévennes. L’indication d'habitat porte : « Chaîne des Cévennes, Mende, l'Esperou, Hort-Diou, le Born, le Vigan, Alais, la Grand' Combe, Anduze, Saint-Ambroix, ete. » (3) 11 résulte cependant d'une énonciation de l'Index, rédigé par Pena et Lobel pour les Adversaria, que dans le paragraphe relatif à l'Erica ils avaient en vue deux espèces du Languedoc : « Erica major Norbonensis » et « Erica minor juniperifolia »; assertion confirmée par l'Index copiosissimus que Lobel a dressé ensuite pour les Adversaria et les Observationes réunis. — Les auteurs du Sfirpium Adversaria, cherchant à y grouper les espèces de la manière qui leur paraissait la plus rationnelle, avaient établi de grandes divisions portant un titre d'ensemble, ce que l’on appellerait aujourd'hui livre premier, livre deuxième. Le dernier est consacré aux végétaux arborescents ou frutes- cents. Mais il semble qu'arrivés à ce point de leur tâche, les rédacteurs éprouvaient une grande hâte d'en finir. Aussi les — 231 — ‘. Lobel a eu le mérite de faire sur ce chapitre un _ peu plus de lumière. Parmi les espèces de Bruyère qu'il a attribuées à la flore du Languedoc, il a nette- ment distingué : Erica juniperifolia densé fruticans Narbonensis (1). Erica multiflora L. — major floribus pur- purantibus (2). — arborea L. — scoparia flosculis Rerbaceis (3). — scoparia L. Mais il n’a pu jusqu’au bout échapper à des confu- sions. Après les trois espèces qui viennent d’être citées et dont la traduction est couverte par la double autorité du Pinax et du Species, il en a établi deux autres qu'il a nommées « Erica major flore albo» et « Erica . major floribus herbaceis purpurantibus ». Ce ne sont, à coup sûr, que de simples variations de quelqu’une notices qui composent ce dernier livre sont encore plus som- maires et plus écourtées que les autres. Ils en ont conscience, et dans l'intitulé du livre final ils ont inséré, ce qu'ils n'avaient pas fait pour les précédents, ces deux mots : « concisæ recen- tiones ». (1) Stirp. Obs., p. 620, — L’habitat indiqué est celui-ci : «aridis et squallidis, Narbonensi agro ». (2) Stirp. Obs., p. 622. — L’Erica major floribus purpurantibus » des Observationes, devenu successivement, avec G. Bauhin « Erica maxima alba », et avec Linné « Erica arborea », était considéré par Lobel comme une simple « varietas » de son « Erica major flore albo », dont nous allons parler ci-après. 11 donnait pour station à l’une et à l’autre la forêt de Valène et les pentes infé- rieures du mont Saint-Loup : « Calidarum regionum indigena plerisque proveniens collibus Vallenæ sylvæ Monspelliensium et ad radices montis Lupi, quarto à Monspellio miliari, ubi huma- _nam proceritatem ut plurimum assequitur ». (3) Stirp. Obs., p. 622 : « Grammontio luco, ericetis et plerisque locis inçultis. » LTD 2 — des trois espèces précédentes, très probablement de l'Érica arborea (1). Sous le nom de «Juncus marinus gramineus foliis Schænanthi » les Adversaria avaient mentionné une plante abondante, disaient-ils, sur les bords de l'Adriatique et que l’on trouvait quelquefois aussi sur le littoral de la Méditerranée. Lobel expose que ce Juncus, qu'il appelle « Pseudochænanthum », fut trouvé par François Pennin, d'Anvers, près d’Aigues- Mortes, « ponè Aquas Marianas sive Aquas Mortuas, vernaculè Aiguesmortes, via qua itur Pescaire », et il en donne le dessin (2). G. Bauhin a traduit le nom des Adversaria et celui des Observationes en « Gramen Alopecuros major spicà longiore ». Mais la filière des dénominations s’est arrêtée là et ne s’est point con- tinuée dans le Species. Magnol avait bien, dans son Botanicum, reproduit le nom du Pinax et celui des Observationes, mais il s'était contenté de dire : «In littore Mediterraneo Monspeliensis agri ponè Aquas marianas collectum testatur Lob.» La figure insérée dans les Observationes représente une Graminée et non point un Jonc. Mais pour la déterminer nous éprouvons le même embarras que Linné. Nous avons, au cours de notre premier chapitre, exposé en détail les manœuvres auxquelles eut recours l’ambitieux Mathias de Lobel, dans le but de faire croire aux contemporains et à la postérité qu'il était le seul auteur d’une Histoire des Plantes. En réduisant les Adversaria à n'être plus qu'une simple annexe de son Plantarum seu Stirpium Historia, il y ajoutait un Appendix de huit feuillets, dont quatorze pages sont remplies par des figures de plantes et quelques courtes notes. (1) Pour la première de ces deux fausses espèces les stations indiquées sont, comme on l'a vu un peu plus haut, la forêt de Valène et le mont Saint-Loup; pour la seconde, c'est le bois de Grammont. (2) Stirp. Obs., p. 43. — 233 — La dernière de ces figures nouvelles représente, sous le nom d’ € Alga marina », le Posidonia Caulini Kœnig (Zostera oceanica L.). Elle est accompagnée d’un texte qui contient cette indication : « Toto tractu mediterraneo ad Aquas Marianas, Adriatici et Occidui maris universi penè littoribus nihil vilius et frequentius fluctuante Alga. » Pierre Pena étant demeuré étranger à l'addition de ces huit feuillets, c’est à l'actif de Mathias de Lobel qu'il faut inscrire la mention du Posidonia sur les côtes du Languedoc. Enfin, dans les Observationes Lobel a parlé du même littoral à propos de deux Cœlentérés qu'il a représentés, les prenant pour des végétaux, et dont il avait aussi noté la présence sur les rivages de la Provence : Gorgonia verrucosa Pallas et Leplogorgia viminalis L. (1). Nous voici parvenu au terme de l'étude entreprise dans le but de montrer quelle fut la part de Mathias de Lobel et de son zélé collaborateur Pierre Pena à l’œuvre des botanistes qui, au xvr° siècle, commencé- rent à observer et à décrire notre flore méridionale. Ceux de nos lecteurs pour qui la végétation du Midi de la France est chose familière auront vu avec quelle conscience et quelle vérité les auteurs du Stir- pium Adversaria en ont reproduit le tableau et de quelles remarquables qualités d’observateurs ils ont fait preuve. Quelque arriérés que nous paraissent avoir été, en certains points, ces botanographes d'il y a trois siècles, ils méritent néanmoins d'échapper à l'oubli. Nous leur devons beaucoup. Ils ont contribué à dégager la science des liens de la scholastique; ils (1) Stirp. Obs., p. 650, Liu NÉE ont inauguré le règne de l'observation directe des phénomènes de la nature, et par là ils ont ouvert au progrès les voies qui nous ont conduits à tant et de si belles conquêtes. Et lors même que des esprits trop positifs estime- raient qu'un travail comme le nôtre est dépourvu d'un intérêt pratique suffisant, il nous resterait tou- jours une grande satisfaction : celle d’avoir, en rap- pelant leurs travaux, fait acte de justice et rempli un devoir de reconnaissance envers les hommes qui furent, il y a plus de trois cents ans, nos vaillants précurseurs. NOTE COMPLÉMENTAIRE FLORE DE LA PROVENCE Une indication donnée de façon indirecte par le Stir- pium Adversaria (p. 377) nous aurait permis de faire figu- rer le Térébinthe et le Lentisque dans la florule des envi- rons de Marseille. Après les détails que nous avons repro- duits au sujet de l’Astragalus Tragacantha, Pena et Lobel déclaraient qu’à Marseille on ne faisait aucun usage de cette plante, « illic planta nullius usus. » Puis ils disaient qu'ils avaient chargé un ami (probablement Jacques Raynaudet) d’inciser les racines de l'Adragant et, si de la gomme en découlait, de la leur garder. Et ils ajoutaient aussitôt : « Sic nos in Terebintho, Lentisco, énibi lacry- mas compereramus, quamvis exigua quantitate. » Nos botanistes, ou l’un des deux, avaient donc procédé à Mar- seille comme dans la forêt de Valène, et par des incisions à des troncs de Térébinthe et de Lentisque, obtenu quel- ques larmes de résine. Il est question de Marseille dans un chapitre que les Adversaria (p. 408) consacrent à une plante ainsi dénom- mée : « Spartium vulgô Elpho, Hispanica juncea, nautica, vulgi Funispartion ». C’est le Sparte (Stipa tenacissima L.). (1) Malgré le soin avec lequel nos diverses listes de plantes ont été collationnées, il s’en est échappé pendant l'impression plu- sieurs noms que nous avions le devoir d'y rétablir. Nous profi- tons de cette occasion pour ajouter quelques détails nouveaux à ceux que nous avons donnés au sujet de certaines espèces intéressantes. op -— + L'appellation vulgaire « Elpho » procède de l'arabe Alfa (en provençal Aufo). De temps immémorial cette Grami- née, qui est indigène en Espagne et dans le nord de > l'Afrique, a été fort recherchée comme matière de l’indus- z trie spéciale que, par dérivation du mot sparte, on a nom- mée la sparterie : fabrication de paniers ou cabas (appelés coufin en Provence, du grec zd2:v<), de nattes, de câbles pour les navires, etc. L’Alfa arrivait en grande quantité dans le port de Marseille, ainsi que dans ceux de Gênes et d'Anvers : « ingenti copia devehi solita Antverpiam, Massileam Genuamque, ad corbes, stragula, atque trire- mium naviumque rudentes peraccommoda. » PT PREMIER ER NI VTE £ A l'appui de ce que nous avons dit (p. 87 et 88) relative- * ment à l'existence sur le sol provençal, au xvre siècle, du È Lagæcia cuminoides, nous pouvons invoquer un grave témoignage : c'est celui de Hugues de Solier. Dans Îles Scholies qu'il adjoignit au texte de la compilation médi- cale d’Aetius, il annotaiït ainsi l’article Kuu{voy : « Aliud Æthiopicum, nobis ignotum. Aliud his regionibus nas- 2 cens, quod officinis nomen servat : Gallis et Delphinatibus | du commin, nostris cumin, Italis cimino appellatur. » La S plante à laquelle Solier donne le nom spécifique Æfhio- picum est le Cuminum Cyminum de Linné. Par les mots « nobis ignotum » il exprimait que cette plante n'était point indigène. Quant à l’autre espèce, « his regionibus , nascens », bien que Solerius n’en donne aucune descrip- F tion, nous y voyons le Lagæcia. À quelle autre plante, « naissant dans ce pays », les Provençaux auraïient-ils pu appliquer le nom de cumin et les Italiens celui de cimino ? {(V. notre étude sur Hugues de Solier dans la Revue hor- ticole des Bouches-du-Rhône, 1898.) Lorsque nous avons fait mention de Moustiers (Basses- Alpes) parmi les localités de la Haute-Provence qui ont été nommées dans les Adversaria, nous avons omis de rappeler que les ancètres de Pierre Pena étaient origi- naires de cette petite ville. (V. ce qui a été dit p. 7 et 10 au sujet de Hugues Pena, poète provençal et secrétaire de Charles Ier, comte de Provence.) Il y a tout lieu de croire que d’autres descendants de ce mème Hugues continuè- - rent d’habiter Moustiers, et que Pierre Pena, demeuré en - relation avec eux, eut par là des occasions fréquentes # * de revoir son pays d’origine et d'y résider. Ainsi s’expli- … querait la connaissance minutieuse qu'il paraît avoir eue . du territoire de Moustiers : le domaine rural deMarignols, dont il a parlé et près duquel il trouva les per de “ quartz hyalin, était peut-être une possession de sa fa- _ mille. Voilà donc une raison sérieuse de supposer qu'il a -— été l'unique rédacteur des articles où il est question de —._ diverses villes de la Haute-Provence : Moustiers, Sis- teron, Digne, Colmars. Quoique nous ayons dù, pour les —_ raisons que nous avons exposées à la fin de notre pre- mier chapitre, considérer hypothétiquement comme ac- - compli par les deux signataires du Sfirpium Adversaria … le parcours entier de la Provence, nous ne pensons pas … que Pierre Pena ait eu Mathias de Lobel pour compagnon - de route quand il se rendit à Moustiers. : Nous devons ajouter à la florule des environs de Nice - l'Allium Ampeloprasum L. Le texte (p. 58) dit du « Scoro- —. doprason sive Alliporum » : « In clivosis vinetis et incultis — ericetis Lygurum Nicæque Sabaudiæ spontè natum me- minimus.» Les Adversaria (p. 193) donnaient le nom d° « Afsine _ Myosotis » à la Caryophyllée qui est devenue le Cerastium … vulgatum L. La présence de cette espèce sur le territoire provençal est ainsi constatée : «Rarior hæc, nisi Italiæ Galloqueprovinciæ herbidis marginibus et campestribus.» 2 Une phrase que nous avons traduite (p. 109) du cha- … pitre relatif au Lavandula Stæchas cite plusieurs Labiées ……. qui, dans les garigues de la Provence, font cortège à cette . Lavande. Il y a donc lieu d’adjoindre à la liste des plan- tes provençales xérophiles mentionnées par les Adver- - saria : Lavandula vera DC., L. latifolia Vill., Thymus vul- D | garis L., Satureia montana L. Nous y avions inscrit seule- _ ment le Rosmarinus officinalis L. — 238 — En portant, sur la liste que nous avons donnée p. 133, le « Papaver corniculatum », nous aurions dû inscrire en regard de ces deux mots, non-seulement le Glaucium lu- teum Scop., mais aussi le G. corniculatum Curt. — Sous l'intitulé de Papaver corniculatum le rédacteur du chapi- tre a manifestement compris les deux espèces : il déclare, en effet, qu'il a cueilli des fleurs jaunes et des fleurs rou- ges ou purpurines : « Istius Papaveris natales sunt squal- lida maritima.. ad calidos Hispaniæ, Norbonæ, Provinciæ et Genuæ... ubi flores colore jam luteo, jam phœæniceo- purpureo legimus sæpius. » (Stirp. Adv., p. 109.) Pena et Lobel ont décrit et figuré (ibid., p.180), sous le nom de « Polygonum alterum pusillo vermiculato Serpilli foliolo », le Frankenia lœvis L. Ils n'avaient point eux- mêmes récolté cette plante. Ils la reçurent de leur ami le pharmacien marseillais Jacques Raynaudet. L’habitat in- diqué était celui-ci : « Collibus maritimis Galloprovinciæ.» Nous avons admis sur notre seconde liste de plantes maritimes du Languedoc (p.191) un certain nombre d’es- pèces qui n'ont été attribuées par les Adversaria à cette province qu’au moyen de formules très générales telles que celles-ci : « plante que l’on trouve partout sur les rivages de la Méditerranée, maritimis Medilerraneis nus- quäm non obvia ;.. très abondante à n'importe quel en- droit de la région maritime méditerranéenne, frequentis- sima ad quaslibet maritima oras Mediterranei maris. » Ces formules et autres semblables s'appliquent nécessaire- ment au littoral de la Provence, aussi bien qu'à celui du Languedoc. Il est donc juste d'inscrire sur la liste des espèces maritimes provençales : Medicago marina L., Senecio Cineraria DC., Convolvulus Soldanella L., Atriplex laciniata L., Salicornia fruticosa L., Euphorbia Paralias L. Nous avons (p. 135) traduit par /nula montana L. V'« As- ter montanus hirsulus » décrit et figuré aux Adversaria, p. 148, et nous avons donné en note les raisons qui justifient cette traduction. Par le mot duplex inséré dans l'intitulé — 239 — = du chapitre, par une seconde figure juxtaposée à la pre- mière et aussi par une mention dans le texte, le rédacteur de la notice a voulu désigner deux espèces différentes quoique affines. Nous proposions, mais en hésitant un peu, de rapporter le second de ces « Aster montanus » à l’Inula helenioides DC. Le docteur Saint-Lager (Etude des fleurs, 8 édition) y a vu l’Znula hirta L. Cette interpréta- tion est plausible et nous n'avons pas à y contredire ; mais, comme la nôtre, elle demeure hypothétique. « Condrilla Coronopi aut Cyani tenuifolia lutea vinea- rum » est le titre d’une très courte notice ayant pour objet une plante dont l'habitat est ainsi indiqué : « Sponte tota æstate calidiorum regionum vinetis et olivetis glareosis obvia est. » (Stirp. Adv., p. 84.) Dans le tableau synopti- que qui précède le groupe de plantes auquel les auteurs de l'ouvrage ont réuni leur prétendue Chondrille, ils l'ont nommée : « Condrilla Syriaca etiamque in Norbonensi et Galloprovinciis obvia Cyani aut Erucæ sylvestris divi- surâ. » Malgré ce luxe de dénominations, le laconisme du texte et l’absence de figure gravée ne nous ont pas permis de déterminer cette espèce. Gaspard Bauhin éprouva certainement le même embarras, puisqu'il ne l’a point inscrite parmi les synonymes de son Pinax. Il ne nous reste donc qu’à porter la susdite « Condrilla » sur la liste des plantes de Provence que nous avons déclarées intra- duisibles, FLORE pu LANGUEDOC Nous avons à rétablir sur la liste des plantes croissant dans les lieux secs, aux environs de Montpellier, le Bague- naudier (Colutea arborescens 1.) Le Stirpium Adversaria (p. 406) ne lui donne pas d'autre nom que celui de « Colu- tea », en ajoutant seulement que les Français l'appellent Baguenaudier. La station indiquée est celle même où les étudiants allaient cueillir l’Zris chamæiris, c’est-à-dire les — 240 — rochers où s'ouvre la grotte de la Madeleine, entre Fron- tignan et Montpellier : « Augusto siliquam maturat, ubi spontaneus arbustus est, in Linguagotiæ iisdem saxosis sterilibus ad Frontignanam quibus Chamæiridem oriri monebamus. » Sur celle des listes des alentours de Montpellier où nous avons groupé les espèces quise plaisent aux endroits frais, nous devons ajouter le Lithospermum purpuro- cœæruleum L. Les Adversaria (p. 193) le nomment « Lithos- permum majus » et constatent qu'il n’est point rare : « Monspellii propter Sellæ novæ pontem et declivibus saxosis, umbrosis, sylvosis, spontè multum. » A propos du Meum athamanticum nous avions négligé de faire connaitre le nom, reproduit par les Adversaria, que le dialecte languedocien donnait à cette Ombellifère: «In celsissimis montium jugis sterilis Sevenæ, monticolis Cestre nuncupatur vernaculo nomine. » D’après le The- saurus de Frédéric Mistral, la forme actuelle du mot lan- guedocien est Cistro, Cisto. Nous avons mentionné (p. 218-219) deux plantes que les auteurs du Stirpium Adversaria déclaraient avoir semées eux-mêmes dans le jardin du professeur Laurent Joubert. Ils ont raconté qu'ils cultivèrent en ce même jardin une troisième espèce dont ils parlent à la fin d’un chapitre intitulé « Panax Asclepium Ferulæ facie. » (Stirp. Adv., p. 300). Ils ne décrivent ni ne représentent par une gravure ce Panax Asclepium ; ils se contentent de dire qu'il diffère peu du « Ferula ». Puis, après de nouvelles objurgations à Mathiole, ils ajoutent que leur ami Valerand, de Lille, pharmacien à Lyon, revenant de cette région de llyrie que l'on appelle présentement « Histria », apporta de nombreux échantillons d'une plante qui ressemblait beau- coup au Panax Asclepium et qu'ils semèrent à Montpellier dans le jardin du docteur Joubert. — Gaspard Bauhin (Pin., p. 158) a inscrit le Panax Asclepium parmi les synonymes de l'espèce qu'il a nommée « Libanotis ferulæ 2 — 241 — folio et semine » et dont Linné a fait le Ferula nodiflora. _ Avec Magnol et Loret et Barrandon nous avons admis que le Ferula nodiflora L., qui croît encore à l'endroit précisé _par les Adversaria, y était désigné par le mot Ferula, nom de l’une des.deux plantes visées, — Dioscoride et Pline les avaient aussi accouplées, — dans l’article qui porte pour titre : « Ferula el Ferulago ». S'il n'y a pas eu erreur dans l'assimilation que G Baubhin et Linné ont faite du Panax Asclepium Ferulæ facie, et s’il faut y voir réellement le . Ferula nodiflora L., cette espèce serait une de celles que _ Pena et Lobel, croyant avoir affaire à des types difré- rents, ont pourvues de deux noms. La série de plantes qui forme la contribution person- nelle de Mathias de Lobel à la flore du Languedoc doit être accrue des deux espèces suivantes : Trollius europæus L. Anthyllis vulneraria L. Lobel donne à la première le nom de « Ranunculus montanus alpinus glomeralus » et lui assigne pour habitat les montagnes de la Lozère : « Ostensis vallis, Mindinen- sium, Averniæ, Germaniæ et Helvetiorum montium amans et sectatrix. » (Stirp. Obs., p. 384.) C’est de par G. Bauhin et Linné que nous traduisons en Anthyllis vulneraria L. Y « Anthyllis leguminosa Belga- rum » de Lobel (Zbid., p. 530). Mais nous devons déclarer que le dessin qu’a donné de son Anthyllis l'auteur des Observationes ne se prêterait guère à cette traduction. 16 D Aetius : vi, 72, 236. D Aix (Louis d’) : 82. - Aldrovande (Ulysse) : 14. Altovitis (Marseille d’) : 84. _ Altovitis (Philippe d') : 84. _ Amoreux : 88. André (Valère) : 46. … Anglure (Me d') : 31. -_ Anguillara (Louis): 13, 78. … Anselme (le P.) : 111. _ Ardoino : 116. - Arvet-Touvet: 158. INDEX DES NOMS DE BOTANISTES, HISTORIENS ET PERSONNAGES DIVERS MENTIONNÉS DANS CE VOLUME (!) Bauhin (Gaspard) : vi, 13, 96,:59200 11; 175::78;: 87; 90, 94, 95, 101, 103, 105, DÉS 19 ST 14153: 154, 167-169, 193, 195, 196, 196; 201, 205,207, 2H "212, 219, 223, 225, 227-232, 239- 241. Bauhin (Jean): vi, vu, 13, 15;,:51, 54, 65,69,70/#75;-76, 18,88, 93, 95, 97; 113, 167, 180, 189, 201, 203, 206, 207. Bellicoco (André) : 174. _ Assas (Jacques-Salomon de - Bonail d’), Assatius: 149, » 162, 163, 165, 168, 223, 224. ‘Aubigné (d') : 98. Blancard (Louis) : 67,81, 93. Boissier de Sauvages : 157, 159. Bonnier (Gaston) et de Layens : 126. Bouche (Ch.-F.) : 120. Bouche (Honoré) :64,65, 132. … Bajaumont : 31. - Barral (Etienne), Stephanus D Barralius : 204, 220, 222. (1) Nous avons exclu de cet Index les noms de Pierre Pena et Ma- —… thias de Lobel, qui reviennent presque à chaque page, et ceux des bo- …_ tanistes cités (le plus souvent en abrégé) à la suite et comme auteurs _ des dénominations spécifiques modernes des plantes. 4 — 244 — Brancion (Jean de) : 216. Burnat (Emile) : 115, 116. Calceolari (François) : 15, 174, 175, 204. Camerarius : 78. Candolle (Alphonse de) : 116. Candolle (Augustin-Pyra- mus de) : 96, 150, 174. Carriot (l'abbé) : 134. Casaulx (Charles) : 82. Castagne (Louis) : 69, 76. Catherine de Médicis : Cayet (Palma) : 98. Cecil (Guillaume), Lord Bur- leigh : 24. Césalpin (André) : 13, 15, 78. Charles Ier : 7, 10, 236. Charles IT : 96. Charles IX : 17, 28, 81, 83. Charles-Martel : 150. Charles-Quint : 132. 150. Cherler (Jean-Henri) : 179, 180, 222. Cicéron : 6. Claret (François de) : 68, 106, :19, 210: Clément VIT: 150. Coël (Jacques) : 2. Coldenberg (Pierre) : 218. Cordus, V. Eberwein. Cornarius (Janus) : 72. Corlusi (Jacques) : 14, LA 215: Cundier (Louis) : 80, 81. 19, Dalechamp (Jacques), Dale- champius : 54, 78, 136. Derbès (Alphonse) : 69. Desjardins (Ernest) : 25, 107, 108. Dioscoride : 33, 74-79, 86- 89, 101, 107-109, 130, 140, 170, 197, 241. Dodoens (Rembert), Dodo- nœus : 33, 78, 119, 160, 185. Doria (André) : 131, 132. Dourez (Valerand) : 13, 15, 76, 228, 240. Dunal : 193. Duval-Jouve : 198-200. Eberwein, Valerius Cordus : 19,141: Elbeuf {René de Lorraine, marquis d°) : 111, 112. Elisabeth d'Angleterre : 23, 36-38, 41, 51, 145. Escluse (Charles de l), Clu- sius : Vi, 1, 2 1920 49, 51, 54, 65, 68, 73, 15,78; 90, 98, 144, 156, 157, 167, 178, 207, 216, 228. Estoille (Pierre de l') : 31. Euclide : 8. 17, Fabre (Augustin) : 81, 83. Farges (Jacques) : 216. Flahault (Ch.): 142, 155, 156, 159, 161, 168, 183, 205. Formi (Samuel) : 30, 31. François Ier: 132, 150, Franklin (Alfred) : 20. Fuchs (Léonard), Fuchsius : 78, 119, 124. Galien : 33. * Garidel : 30, 31, 52, 91, 92, D 114. - Gaufridi (Arnaud de) : 9. . Gaufridi(Jean-Francois de): D207-9, 18, 29, 31. Gerard (Jean) : 65, _ Gerard (Louis) : 95. … Germain (A.) : 120, 121. BGesner (Conrad) : vrr, 14, MU 15, 49-68, 78, 84, 119. _ Godron : 19%. - Gohory (Jacques) : 20-22, 53. BeGouan: 157, 163, 165. . Grefeuille (Charles de): 17, 20 156. . Grenier et Godron : 95, 96, 105, 115, 129, 131, 137, 142, Me 143, 157,168, 174, 227, 230. . Griffy (Gilbert), Griffius : 5. - Guise (le cardinal de) : 97. Guise (le duc Charles de) : 84. Guise (le duc François de) : De 111. . Guise (le duc Henri de) : 97, DE :.98. _ Haller : 38. Hanry : 115. — Hémus (François) : 46, 47. . Henri II : 150. . Henri IT: 9, 29-31, 84. Henri IV : 84. . Hermet : 182. …_ Hierles (le baron d') : 181. . Hoefer (Ferdinand) : 2, 117, De 215. 2 Hozier (d’) : 10. — 245 — Jacoz (Siméon) : : 31. Jacques Ier : 2. Joanne (Paul) : 179, 181. Joubert (Laurent) : 218, 240. Jules César : 25. Kieffer : 3, 62, 85, 155, 180, 229, Koch : 169. Kunth : 198. Lamarck : 96, 198, 214. Lamoureus : 16. Launay, Launœus, naius : 16. Laurens (Gaspard de) : 65. Legré (Ludovic) : 114. Linné (Charles) : 71, 75 -78, 87, 90, 94, 95, 117, 129, 135, 137, 144, 155, 157,159, 167- 169, 201, 206, 207, 211-214, 223, 227, 229, 230, 241. Littré : 66. Lobel (Jean de) : 2. Loret (Henri) : 159, 161, 193. Loret et Barrandon : 129, 153, 157, 163, 167, 168, 173, 195, 204, 211, 227, 241. Lucterius Cadurceus : 25. Lau- Magnol : 137, 156, 157, 165, 165, 167, 193, 201, 203-206, 228, 232, 241. Maretz (Jacques) : 80-82. Marguerite de Valois : 31. Marinello (Jean) : 13. Marion (A.-F.) : 145. Marius : 91. — 246 — Marliano (Raymond de): 25. Martin (B.) : 183. Martinello (Albert) : 12, 13. Martinello (Cequin) : 13, 14, 216. Martins (Ch.) : 116. Matthiole : 33, 78, 127, 132, 175. Méolhon (Pierre Bon, baron de) : 81-84, 87. Meyer (Ernest) : 40. Mistral (Frédéric) : 66, 70, 19, 99,102; 1527 213; 240: Morgan (Hugues) : 24, 98, 109. Moréri : 46. Morren (Charles) : 40. Morren (Edouard) : 18, 19, 34, 38, 40, 41. Moyne (le) : 31. Murray : 198. Mutel : 153. Nassau (Guillaume de) : 2. Nathorst : 157. Nostradamus (César de) : 10, 29-31, 81, 82, 84. Odon (César) : 13. Ortell (Abraham) : 25. Peirese (Fabri de) : 113, 114. Pelissier (Guillaume) : 17, 149, 150, 176. Pena (André) : 7,8, 18. Pena (Françoise) : 9. Pena (Hugues) : 7, 237, 10, 236, Pena (Jean) : 8, 9, 48. Pennin (François) : 224, 225, 228, 232. Penny (Thomas) : 24. Perreymond : 115. Philippe IF, 40. Planchon (Gustave) : 3, 5, 6, 10, 18, 30-32, 41, 54, 88, 149, 154, 156, 157, 163-165, 169, 182, 204, 221. Planchon (J.-E.) : 3-6, 10; 30-32, 41, 54, 149, 156, 165. Plantin (Christophe) : 23, 33- 36. Platter (Félix) : vi, 3, 62, 65, 153, 155, 156, 179,214, 222: Platter (Thomas) : vi, 3, 84, 153, 155, 156, 179, 214, 222. Pline : 33, 107, 108, 121, 215, 241. Plumier (le P. Charles): 2, 7. Poiret : 198. Pulteney (Richard) : 23. Purfoot (Thomas) : 22, 23,34. Quiqueran de Beaujeu (Pier- re) : 68, 106, 119, 210. Rabelais : 3, 4. Rauwolf (Léonard) : vr. Raynaudet (Jacques) : vr, 15, 68, 69, 73, 79, 85-88, 90, 91,235, 238. René (le roi) : 120. Reneaume (Paul) : 179, 180, 222, Reynaud (F.) : 91. Reynier (Alfred) : 115. _Ribbe (Charles de) : 120. Richter : 198. Ricord : 31. _ Rieux (Renée de) : 84. Rivière (Lazare) : 30, 31. Robert de Brianson : 7,9, 10. __Rœmer : 198. Roland (Mme) : 31. . Rondelet (Catherine) : 149. . Rondelet (Guillaume) : 3-5, D 15-18, 79, 149, 150, 163, D 167, 171, 176, 186, 187, 196, D 220, 295. Rooses (Max) : 23. . Rouchon : 91. _ Rouillé, Rovilius : 53, 54. _ Rouis (E.) : 120. . Roux (Honoré) : 76, 88, 95, | 115, 116, 126, 129, 134, 183. _ Roux-Alpheran : 81. _ Rouy et Foucaud : 96, 129, D 153. … Ruel (Jean) : 21, 22, 53, 121. _ Ruffi (Louis - Antoine de) : 0, 112. _ Saint-Lager : 134, 199, 200, De 259. … Saint-Prix : 98. . Saporta (Gaston de) : 116, D 117, 126. _ Schultes : 198. _ Seguier : 21. . Smith : 198. _ Solier (Hugues de), Solerius: D vi, 72, 73, 256. — 247 — Solier (Jules-Raymond de), Soléry : 25, 64. Sprengel : 41. Steudel : 198. Tabernæmontanus : 78. Teissier (Octave) : 120. Teulié (H.) : 4. Théodose Tripolite : 8. Fhéophraste : 72, 97,115, 121, 140, 144. Thou (Jacques-Auguste de) : 97, 98: Tibère : 215. Tournefort : 1, 50, 122, 123, 138, 154, 201. Treviranus : 41. Trevisani : 14. Trinius : 198. Tueskiewicz (Diomède): 199. Turnèbe : 6, 21, 22,53: Turner (Guillaume) : 24. Tylo Irmisch : 2. Utenhove (Jacques) : 196- 198, 200, 220. Vasseur : 100. Vidal : 157. NilArs ia Wieland (Melchior), Guillan- dinus : 14, 54. Willdenow : 198. Zouch (Lord) : 2. Zurcher : 99. Zwinger (Théodore) : 14, 15. [INDEX DES NOMS GÉOGRAPHIQUES (1) _ Agde, 148, 176, 208. Aubagne, 93. - Agen, 16, 25, 148. Aulas, 181. Aigsoual (|), 148, 178-180, Avignon, 43,61, 118-121, 141, 183, 196, 198-200, 230. 178, 206. Aigues-Mortes, 142, 154, 171, é 173, 174, 176,221, 232, 233. Baden, 19. DAix, vi, 7, 8, 10, 30, 68, 76, Bâle, 15, 55, 68, 180. 80, 81, 85, 88-93, 97, 113, Baux (les), 192. 169. Bayonne, 17. Alais, 230. Belgencier, 113. Albenga, 116. Berre, 72. Alep. 12 Beyrouth, 219. Alexandrie, 110, 219. Béziers, 148, 166. Alger, 207. Blois, 97, 179, 180. Andelys (les), 6. Bo'ogne, 12, 13. Anduze, 230. Bône, 207. Anvers, 2, 11, 23, 34, 36, 77, Bonheur, Bonahur, Banahu, 216,215, 224,,225,232;236. 181-183. 2 D ADé, vr, 192. Bordeaux, 16, 17. …. Argens (l'), 98, 99, 104, 114, Born (le), 230. CES. Boulidou (le), 163. Arles, 62, 63, 65, 66, 68, 76, Boutonet, 151, 152, 155, 162, 119, 192, 210. 165, 220, 222, 224. (1) Nous n'avons admis dans cet Index que les noms de localités spé- ciales, villes, bourgs, montagnes, cours d'eau, ete. II nous à paru inutile d'y introduire les noms généraux, tels que ceux des royaumes ou des provinces. — 250 — Bretagne (le pic de), 93. Briançon, 104. Brignoles, 96-98, 113. Bristol, 20. Caen, 54. Calais, 111: Camargue (la), 61, 63, 142. Cambrettes (les), 193. Canaries (les iles), 110. Cannstadt, 126. Capouladoux (les), 193. Carpentras, 120, 206. Carthage, 207. Castellane, 84, 99. Castelnau-le-Lez, 151, 154, 157, 162-165, 173, 222, 227. Celleneuve, 154, 162, 166, 170-173, 203, 205, 240. Cette (colline de), Mons Ce- lius, 73, 74, 71, 138, 154, dm 155, 169-171, 174-176, 224. Cévennes (les), 47, 51, 88, 148, 178-182, 184, 202, 220, 222, 226, 229, 230. Chartres, 16, 17. Châäteau-Gombert, 116. Chypre, 110. Colmars, 61, 101, 237. Comballiaux, 160. Concoule (bois de), 182. Constantinople, 39, 127. Cournonterral, 121. Courtrai, 46. Crau (la), 63-66, 68, 152. Cros-de-Miége, 168. 299. Delft, 2. Digne, 8, 192, 237. Doscares (bois de), 157. Dragon (vallon du), 92. Draguignan, 192. Dreux, 16, 17. Durance (la), 64, 69, 100. Espérou (l), 148, 178-180, 202, 226, 230. Espinouse (l), 157. Estérel (1), 104, 114,115. Farlède (la), 113. Ferrare, 12, 13. Flaugergues (bois de), 157. Florence, 12. Fréjus, 104, 113, 114, 117, 118. Frontignan, 74, 149, 154, 155, 161, 166-168, 170, 173, 194, 211, 222, 224, 239. Gand, 196, 220. Gange (le), 196, 197. Ganges, 148, 196, 197, 226. Gardiole (la), 168, 204. Gémenos, 93. Gênes, 12, 43, 47, 110, 117, 118, 188, 191, 207, 236, 238. Gonfaron, 192. Grammont(bois de), 154, 156, 157,:221$ 222 26 Grand'Combe (la), 230, Grenoble, vir, 72. Hérault (1), 159, 197. Highgate, 2. Hortus (1), 159. 107-114, 117, 298. 110, 201. : Inspurgum (?), 43. 4 Jouques, 7. _ Lamanon, 64. D 222. _ Levant (ile du), 107. Livourne, 43. Loire (la), 173. 109, 216. Luc (le), 192. Lucques, 47, 204. D 291. 210, 212. 168, 171, 239. Madère, 110. 170, 172-174, 214, 222. _ Malines, 216. _ Marignols, 99, 237. 4 > Hyères, 43, 49, 51, 100, 105, - Hyères (les îles d’), 79, 107- D Lattes, 154, 167, 174, 176, De Lez: (le), 16, 165, 166, 172, 173, 196, 205, 208, 222. Lille, 2, 40, 46, 52, 57, 240. Londres, 2, 22-94, 34, 47, 98. _ Lunel, 63, 148, 169, 177, 210. Lure (montagne de), 183. D. Lyon, 13, 53, 54, 72, 76, 78, Madeleine (grotte de la), 155, __ Maguelone, 149, 150,154, 163, Marseille; vi, 3, 13:15, 51, 52, 61-64, 68-72, 74, 76-85, = re 87, 90, 93,104, 107, 109-1 La 127, 144, 145, 150, 163, 169, 119. 2907 29: Marsillargues, 148, 169, 177, 210, 216, 217. Martigues, 72. Maures (chaine des), 105. Mende, 148, 160, 178, 179, 230, 241. Méounes, 113. Metz, 111. Milan, 47. Mireval, 163, 167-169. Montarnaud, 161. Montefiascone, 76. Montpellier, v, 2-5, 15-18, 23, 25-28, 30, 31, 51, 54, 55, 61- 63, 68, 73, 76, 77, 79, 83-88, 112, 113, 127, 129, 147-151, 153-156, 158, 160, 162-166, 168-173, 175-179, 181, 182, 185, 187, 190, 194, 196, 203, 204, 208, 210, 212, 213, 216, 218-224, 227, 239, 240. Montredon, 69-71, 75, 87. Montrieux, 113, 114. Moure (bois de la), 157. Moustiers, 17, 99, 100, 114, 230, 231. Murles, 160. Napoule (la), 116. Narbonne, 21, 25, 46, 153, 160. Nesque (la), 192. Nice, 61, 104, 112, 115-118, los 247 : =: 00 A7 Orange, 61, 118, 119; 121, 122, Orléans, 173. Padoue, 12-14, 174. Paris, 8-10, 12, 20, 31, 39, 48, 77, 180. Pérols, 154, 163, 173, 174. Pertuis, 3, 64. Pescaire, 232. Pise, 1219519 47; Plan-d’Aups (le), 93-96. Pomègues (île de), 107. Pont-du-Gard, 177-178. Pont-Saint-Esprit, 166. Porquerolles (ile de), 107. Port-Cros (ile de), 107. Port-Juvénal, 171. Puéchabon, 161. Puits-de-Paul, 129. Ralonneau (île de), 107. Ravispurgum (?), 43. Revnier, 105. Rhodes, 110. Rhône (le), 63, 64, 119, 122. Rians, 92. Riez, 7. Rivoli, 12. Rochelle (la), 16, 22. Rodez, 160. Rognes, 92. tome, 12, 47, 76. Roquebrussane (la), 113. Salgnon, VI, 72. Saint-Ambroix, 230. Saint-Basile (ermitage de), 169, 204. Saint-Bausile, 222. Saint-Chamas, 62, 63. Saint-Gilles, 62, 63, 148, 177, 225. Saint-Loup (Marseille), 129. Saint-Loup (le mont), 154, 155, 158-160, 201, 202, 222, 220; 231, 252: Saint-Martin-de-Crau, 62,63, 65, 66. Saint-Martin - de - Londres, 159, 160. Saint-Maximin, 96, 97. Saint-Nazaire, 105. Saint-Pons, 93. Saint-Vincent 20. Sainte-Baume (la), 92, 94-96, 101, 115. Sainte-Colombe, 205. Sainte-Marguerite (ile de), 145; Sainte-Marguerite (Toulon), la: Sainte-Victoire (le mont de), 90, 91. Saintes, 16. Saintes - Maries - de - la-Mer (les), 112-114. Salaison, 165. Salon, 63, 65, 66. Sanarv, 105. Savone, 118, Senez, 68. Serre de 100, (grotte de), Montdenier, 99, | 22 0DA ES . Sienne, 76, 127, 132. 155, 157, 160, 161, 169, 172, ; Signes, 113. 222; 231, 232, 239, … Sisteron, 100, 237. Vallouise (la), 64. . Six-Fours, 105. Var (le), 119. - Solliès-Pont, 112-114. Vaucluse, 120, 192. — Solliès-Toucas, 112-114. Venise, 12-15, 47, 68, 78,104, - Solliès-Ville, 112-114. 110: 119 421;:174;179, 218; Sommières, 148, 170, 177. 216, 219. … Spezzia (la), 118. Ventoux (le mont), 120, 192. Stéchades, V. Iles d'Hyères. Verdon (le), 101. … Strasbourg, 62. Vérone, 12, 13, 47, 121, 174, _ Sumène (la), 197. 204, 219. | Vic, 167. » Toulon, 104, 105, 107, 120. Vigan (le), 148, 178, 179, 182: 1 Toulouse, 17, 50. 184, 199, 295, 230. HeTrets, 9. Villeneuve, 154, 173. 2 Turin, 12. Villers-Cotterets, 28. À Viols-le-Fort, 160. D Uzès, 25. Vis (la), 197. Vaillauquès, 160. Wight (ile de), 81. … Val (le), 98, 114. - Valène (forêt de), 129, 154, Zurich, 14, 15, 49, 68. Acanthus mollis L., 164. Acer opulifolium Vill., 92. Aceras longibracteata Rchb., 3 155. _ Acetabularia mediterranea La- mouroux, 192. Achillea Ageratum L., 188. — tomentosa L., 94, 188, JDA Aconitum Napellus L., 181, 182. Adenostyles alpina Blufi. et Fing., 183. ._ Adianthum Capillus -Veneris PU0L., 173, 178, 184, 212. Adonis autumpnalis L., 185 _ Ægylops ovata L.,124, 128, 190. Ajuga Chamæpithys Schreb., 189. Iva Schreb., 125, 189. Alchemilla alpina L., 183. Alkanna tinctoria Tausch, 158, he. 210, _ Allium ampeloprasum L., 237. + ursinum L., 193. _ Aloe vulgaris Lamk., 83. _ Alyssum calicinum L., 193. maritimum Lamk., 169. spinosum L., 223. INDEX ALPHABÉTIQUE DES NOMS BOTANIQUES MODERNES DES ESPÈCES CITÉES DANS L'OUVRAGE Amelanchier vulgaris Mæœnch, 100. Amygdalus communis L., 141. Anacyclus radiatus Lois., 109, 228. valentinus L., Anagyris fœtida L., 98. Anarrbhinum bellidifolium Desf. 184. Andropogon Ravenæ L., 195. Androsæmum officinale All. 183. Anemone alpina L.,182. Antennaria dioica Gærtn., 184. Anthemis maritima L., 155,174. valentina L., 228. Anthyllis vulneraria L., 241. Antirrhinum Asarina L., 135, 184, 193, 225. 228. di _ majus L., 125, 189. Aphyllanthes monspeliensis L:,. 190; Arabis cebennensis DC., 181. Arbutus Unedo L., 130, 135, 142, 188. Argyrolobium Valp., 224. Aristolochia Clematitis L., 186. Linnæanum 5956 2 Aristolochia longa L., 175. Pistolochia L., 152, 174. rotunda L., 173. Armcria maritima Willd,, 202. plantaginea Willd., Arnica montana L., 182, 183. Artemisia campestris L., 164. Arum Arisarum L. 204. — .DracunCulus: L.; 204. Arundo Donax L., 138, 215. Pliniana Turr., 138. Asarum europæum L., 43, 135. Asparagus acutifolius L., 54, 226. Asphodelus cerasifer Gay, 190. fistulosus L., 65. Asplenium septentrionale Sw., 184. Aster acris L., 164. Tripolium L., 191. Asteriscus spinosus G. G., 190. Astragalus hamosus L., 167. monspessulanus L., 167. Tragacantha L., 69, 165, 239. tr Atriplex laciniata L., 192, 258. Biscutella lævigata L., 157, 172. Botrychium Lunaria SWw., 184. Brunella vulgaris Mœnch, 158. Bupleurum falcatum L., 187. fruticosum L., 77, 169, rigiduim L., 158. Buxus sempervirens L., 135. Cakile marilima Scop., 174, Calamintha Acinos Clairv., 189. grandiflora Mœnch, 184. = Nepeta L., 130, 189. Calendula arvensis L., 126, 188, EL: Camphorosma monspeliaca L., EP Mr A Campuloa monostachya Rœm. etiSch., 198: Cannabis sativa L., 110 Capparis spinosa L., 214. Carduncellus Monspeliensium AIl., 160. Carthamus tinctorius L., 216. Castanea vulgaris Lamk., 184, 220. Catananche cærulea L., 188. Celtis australis L., 152, 220. Centaurea amara L., 170. Calcitrapa L., 203. collina L., 162. fruticosa L., 153-154. pullata L., 170. = solstitialis L., 124. Centranthus Calcitrapa Dufr., 162, 169. Cephalaria leucantha Schreb., 188. Cerastium vulgatum L., 237. Ceratocephalus falcatus Pers., 123. Ceratonia Siliqua L., 115, 116. Cercis Siliquastrum L., 219. Chamærops humilis L., 117. Chenopodium Botrys L., 177. Vulvaria L., 189. Chlora perfoliata L., 163: Chondrilla juncea L., 163. Cirsium bulbosum DC., 172. monspessulanum AI, 16, 158, 172. L Gistus albidus L., 128, 187. incanus L., 153, 154. monspeliensis L., 128, 187, 206. salviæfolius L., 128, 187. . Clematis Flammula L.,133, 191. Clypeola Jonthlaspi L., 165. Cneorum tricoccum L., 164, _Cnicus benedictus L., 99, 194. Coix Lacryma L., 140, 216. Colchicum arenarium Wald.et E Rit.;296. Colutea arborescens L., 239. Convolvulus althæoides L.,155, 170. cantabrica L., 127 Soldanella L., 192, 238. Cordia Myxa L., 217. Coriaria myrtifolia L., 172 Coris monspeliensis L., 170. Coronilla Emerus L., 161, 172. — scorpioides Koch., 162. Corydalis fabacea Pers., 182, 183. lutea DC., 134, 193. Cota tinctoria Gay, 109. Cotoneaster Pyracantha Spach, 126. vulgaris — Lind!., 183. Cratægus Ruscinonensis Gren. et Blanc, 161. Crepis bulbosa Cass., 175. Cressa cretica L., 116. Crithmum maritimum L., 174. Crocus vernus All., 226. Crozophora tinctoria 177; 189, 210. Crucianella maritima L., 174. Crupina vulgaris Cass., 202. Juss., Ctenium americanum Spreng., Cucumis Melo L., 139, 215. Cuminum Cyminum L.,81, 236, Cupularia graveolens, G, G., 1922 198. — viscosa G: G:., 109, 177. À Cuscuta epithymum L., 189. curopæa L., 189. Cyclamen repandum Sm. Sibth., 193. Cynanchum acutum L., monspeliacum L., et 297. EPA 175.227; Cynara Cardunculus L., 194, ait: Scolymus L., 211. Cynodon Dactylon Pers., 226. Cynoglossum cheirifolium Ait., 205. pictum Ait., Cyperus Papyrus L., 15. schœnoides Griseb., 134,. 192. Cytinus Hypocistis L., 131, 184. Cytisus alpinus Mill, 102. Laburnum L., 102. sessilifolius L., 130. trifiorus L'Hér., 183. 189. Daphne Gnidium L., 131, 133, 189. Dentaria digitata Lamk., 185. Dianthus monspessulanus L., 201. superbus L., 201. Diotis candidissima Desf., 174, 175, 208. Doryenium suffruticosum Vill., 130, 166. Draba aizoides L , 185. 17 Ecballium Elaterium Rich, Fœniculum vulgare Gærtner, 126, 187. 187. Echinophora spinosa L., 191, Frankenia lævis L., 238. 211. = pulverulenta L., 191, Echinops Ritro L., 119, 194. 229, — sphærocephalus L., Fumaria spicata L., 152. 161. Echium italicum L., 150, 194. Galeopsis Tetrahit L., 189. Ephedra distachwa L., 16, 176. Genista aspalathoides Lamk., Equisetum palustre L., 173. 96. Eragrostis megastachya Link., — germanica L., 193, 194. 22; — Lobelii DC., 96. Erianthus Ravennæ P. Beauv., — sagittalis L., 183. 195. — Scorpius DC., 166. Erica arborea L., 144, 231, 232. Gentiana lutea L., 224-296. — multiflora L., 144, 188, Gladiolus segetum Gawl., 186. 230, 231, 232. Glaucium corniculatum Curt., — scoparia L., 144, 231. 44, 191, 238. Erodium malacoides Willd,, — luteum Scop., 44, 166. 133, 191, 238. Eruca sativa Lamk., 214, Globularia Alypum L., 73, 155, Ervum Ervilia L., 123, 185. 171. Eryngium maritimum L., 174. —= vulgaris L., 158. Erysimum australe Gay, 94. Glyeyrrhiza glabra L., 167. Euphorbia amygdaloides L., Gypsophila aggregata L., 159. 225. e Chamæsyce L.,154. Helianthemum italicum Pers., — CHATACIASUES ASS 206. 190. — ledifolium Willd., — dendroides L., 201. 223. — helioscopia L., 194. ee marifolium DC. — Paralias: ‘L:, ‘192, “206: 238. Helichrysum Stæœchas L., 124. — Peplis L., 192. Heliotropium europæum L., — serrata L., 154, 194. 189. supinum L., 158, 177. Fagus sylvatica L., 92, 184, 220. Helleborus fœtidus L., 172. Ferula Ferulago L., 136. Hepatica triloba Chaix, 193. nodiflora, L., 168, 241. Herniaria glabra L., 152. Festuca spadicea L., 198-200, _— incana Lamk., 66. Ficus Carica L., 141, 220. Hesperis matronalis L., 183. HieraciumJaubertianum Timb. À et Loret, 158. præcox Sch.-Bip., t 158. - Hippocrepis unisiliquosa L., 64, 80, 83, 167, 223. Hordeum vulgare L., 139. Hyosecyamus albus L., 121. Hypecoum pendulum L., 52, 89. procumbens L., 51, 52, 89, 144. Hypericum perforatum L., 187. tomentosum L., 172. Iberis pinnata Gouan, 160. umbellata L., 219. Ilex Aquifolium L., 92. Inula Conyza DC., 169. helenioides DC., 135. hirta L., 239. montana L., 135, 238. spiræifolia L., 130, 152, 178. Iris Chamæiris Bert., 155, 171, 239. — fœtidissima L., 133. . — spuria L., 176, 192. Isatis tinctoria L., 123. Jasminumfruticans L., 150, 158. Juncus acutus L., 200. Juniperus communis L., 131. Oxycedrus L., 131, 136, 142, 225. phænicea L., 131, 142, 171. ae Lagæcia cuminoides L., 87, 153, 236. Lagurus ovatus L., 176. Lappa major Gærtn., 30, 184. Larix europæa DC., 102-104. Laserpitium gallicum L., 78. Siler L., 78. Lathyrus latifolius L. Ochrus DC., 187. sativus L., 186. tuberosus L., 101, 183. Lavandula latifolia Vill., 237. Stæchas L., 108,109, 189. vera DC., 237. Lavatera Olbia L., 51, 108, 109. Lepidium Draba L., 185. latifolium L., 186. sativum L., 213. Leucoium æstivum L., 173. Leuzea conifera DC., 170. Ligustrum vulgare L., 131. Linaria Pelisseriana DC., 150. spuria Mill., 124, 186. Linosyris vulgaris DC., 224. Linum campanulatum L., 160. maritimum L., 174, 191, 208. salsoloides Lamk., 223, 224. strictum L., 223. suffruticosum L., 224. tenuifolium L., 225. usitatissimum L., 208. Lithospermum apulum Valh., 224. fruticosum 161. L., Kentrophyllum lanatum DC. 194. purpuro-Ccæru- leum L., 240. tinctorium L., Lactuca virosa L., 188. — 260 — Lolium perenne L., 124. — temulentum L., 186. Lonicera implexa Ait., 187. Lotus corniculatus L., 172. hirsutus L., 158. Lunaria biennis Mœnch, 102. Lupinus luteus L., 157. VAMUS-E., 197. 124, Malcolmia littorea R. Br., 191. Mandragora officinarum L., 139. Marrubium Alysson L., 216. Matthiola sinuata R. Br., 191. Medicago denticulata Willd., Lo7. Marina, 191290. — pentacyela DC., 137. scutellata AIl., 137. Melampyrum pratense L., 195. Melia Azedarach L., 219. Melittis Melissophyllum L., 225. Mercurialis annua L., 194. tomentosa L., 154. Meum athamanticum Jacq., 44, 182, 240. Molopospermum DC 78: Moluccella lævis L., 216. spinosa L., 216. Monerma Gangitis Rœim. et Sch., 198. Morus alba L , 120, 141. — nigra L . 120, 141. Muscari comosum Mill, 180. neglectum Guss., 190. racemosum DC., 128, cicutarium 124, 190. Myrrhis odorata Scop., 78. Myrtus communis L., 133. Narcissus juncifolius Req., 207. poeticus L., 125. Pseudo-NarcissusL., 193. Tazetta 5425: Nardus aristata L., 198. scorpioides Lamk., 198. Nasturtium officinale R. Br., 214. Nerium Oleander L., 43, 108. Nicotiana Tabacum L., 20, 216- 218. Nigella damascena L., 185. Olea europæa L., 141, 229. Onobrychis sativa Lamk., 216, 218. Ononis Natrix L., 152, 162. Onosma echioides L., 173. Ophrys lutea Cav., 155. Opoponax Chironium 149, 150, 168, 169. Opuntia Ficus indica Webb., 15, 52, 83, 84, 174. Origanum vulgare L., 136, 170. Ornithogalum narbonense L , Koch, 226. — umbellatum L., 190. Ornithopus compressus L., 186. Oryza sativa L., 4, 139. Osyris alba L , 127, 150, 171. Pæonia peregrina 159, 160, 182, Pancratium maritimum 176 Panicum Crus-galli L., 190. miliaceum L., 213. — sanguinale L., 124, 186. Mill , 55, Lay + Papaver 165. Paris quadrifolia L., 19. -Paronychia nivea DC., 167,168, 171. Passerina hirsuta L., 143. Tarton-raira DC., hybridum L., 162, ÉL:72" Pedicularis sylvatica L , 193. | tuberosa L., 184. Pennisetumtyphoideum Rich., 216. Peucedanum Cervaria Lap.,78. officinale L., 158. Phagnalon sordidum DC., 169, 170 Phalaris canariensis L., 163. Phillyrea angustifolia L., 79, 170. media L., 79, 104. Phlomis Herba-venti L., 194. Eychnitis L., 170. Phœænix dactylifera L., 49, 108. Phragmites communis Trin., 195,227. Phyteuma spicatum L., 181. Picnomon Acarna Cass , 65. Pinus Halepensis Mill., 128, 142, 221: Pinaster Soland, 142, 221. Pinea L:, 142, 221. sylvestris L., 144. Pistacia Lentiscus L., 129, 133, 187, 209, 235. narbonensis L , 129, 130. Terebinthus L., 161, 209, 235. vera L., 129, 140. Plantago albicans L., 152, 165. carinata Schrad., 137, 229, 230. 129, Plantago Cynops L., 189. maritima L., 192. Psyllium L., 127, 189. .serpentina Vill., 137, 229: — subulata L., 54, 229, 230. Plumbago europæa L., 171. Poa trivialis L., 190. Polycarpon alsinæfolium DC., 174. tetraphyllum 70, 174. Polygonatum verticillatum All., 184. Polygonum maritimum L., 176. Populus alba L., 1, 2. Portulaca oleracea L., 185. Posidonia Caulini Kœnig, 233. Potamogeton crispus L., 178. Potentilla alba I, 183. rectaL;1e. Preslia cervina Fresen., 158. Prunus domestica L., 97. Psoralea bituminosa L.,80, 167. Pulicaria vulgaris Gærtner, 49, 127: Le Quercus coccifera L., 66, 142, AE TLOD AIT Ilex L., 142, 220. Robur L.. 49, 141. Suber L.,105, 106, 108. aconitifolius L., 182. gramineus L., 159, 160, 182. Thora1:,102;103: Reseda Phyteuma L., 125, 164. Rhagadiolus stellatus DC., 224. Rhamnus Alaternus L., 166. Ranunculus Rhamnus infectoria L., 206. —- saxatilis L., 206. Villarsii Jord., 206. Rhinanthus minor Ehrh., 223, 229. Rhus Coriaria L., 125, 164. Cotinus L., 91, 121. Rœmeria hybrida DC., 185. Rosmarinus officinalis L., 130, PE GE Rotthbœællia monandra Trin., 198. Rubia peregrina L., 224. — tinctorum L., 224. Rumex scutatus L., 135. Ruscus Hippoglossum L., 116. Ruta montana Clus., 166. Saccharum officinarum L., 44, 110. — Ravenæ L., 195. Salicornia fruticosa L., 192, 238. Salsola Kali L., 209. Soda le, 192. Samolus Valerandi L., 13. Santolina Chamæcyparissus L., 94, 96, 177. — incana Lamk., 95. rosmarinifolia L., 95. — squarrosa Willd.,95. Saponaria ocymoides L, 183. Naccaria 1,185; Satureia montana L., 189, 237. Scabiosa Columbaria L., 194. gramuntia L., 194. le Scilla autumnalis L., — bifolia L., 193. Scolopendrium officinale Sm., 20. Scolymus hispanicus L., 188. P. + ta Scorpiurus subvillosa L., 164. Scrophularia canina L., 189. Sempervivum arachnoideum L,, 183: Senecio adonidifolius Lois., 183. Cineraria DC., 192, 238. Doria L., 131. — saracenicus L., 135. Seseli elatum L., 76. montanum L., 95. — tortuosum L., 74, 169. Sideritis scordioides L., 154. Silaus pratensis Bess., 191. Silene gallica L., 143, 223. — _inflata Sm., 143, 145, 187. — muscipula L., 187. — Otites Sm , 219. quinquevulnera L., 143- 223. Sisymbrium officinale Scop., 186. Sium Sisarum L., 215. Smilax aspera L., 190. Solanum Dulcamara L., 173. Soldanella alpina L., 43, 119. Sorbus Aria Crantz, 183. — torminalis L., 161. Spartium junceum L., 93, 157. Spiræa Filipendula L., 158, 172. Spiranthes autumnalis Rich., 192. Stachys germanica L., 170. Stæhelina dubia L., 170, 177. Statice Limonium L., 138. serotina Rchb., 192. virgata Willd., 138. Stipa tenacissima L., 200, 235. Styrax officinale L., 51, 112-114. Suæda fruticosa Forsk., 63. — maritima Dumort., 192, 209, Tamarix gallica L., 141. Tanacetum annuum L., 116. Taxus baccata L., 92, 220. Telephium Imperati L., 54, 90. Tetragonolobus siliquosus Roth., 158. Teucrium aureum Schreb., 85. montanum L., 131. Polium L., 85, 170. Scordium L., 150, 176. Thapsia villosa L., 78, 160. _ Thrincia tuberosa DC., 127, 188. _Thymus nervosus Gay, 225. Serpyllum L., 225. vulgaris L., 189, 237. Zygis L., 225. Tilia platyphylla Scop., 92, 219. Tordylium maximum L., 78, 186. Tribulus terrestris L., 164. Trifolium angustifolium L., 166. rubens L., 183. Triglochin palustre L., 196-200. Triticum Spelta L., 139. vulgare Vill., 44, 139, 213. Trollius europæus L., 241. Tulipa Celsiana DC., 184. Ulex parviflorus Pourr., 96, 97, 115. — 26. Umbilicus 136, 200. Urgina Scilla Steinh., 216. Urtica dioica L., 190. pendulinus DC, Vaccaria parvifiora Mœnch,185. Vaccinium Myrtillus L., 184. Vitis idæa L., 184. Valeriana officinalis L., 134. tuberosa L., 183. Veratrum album L., 225, 225. Verbascum Thapsus L., 203. Viburnum Tinus L., 161, 169. Vicia narbonensis L., 130, 152. Vinca major L., 188. Vincetoxicum nigrum Mœænch, 220. officinale Mœnch, 189. Viola canina L., 205. elatior Fries, 205. Jordani Hanry, 205. Vitis vinifera L., 125. Xeranthemum inapertum Willd., 162. Zizyphus vulgaris Lamk., 219. Zostera oceanica L., 233. A ————— — ———— ———_—_————_— rt Marseille. — Typ. et Lith. BarLaTiER, rue Venture, 19, BINDING SECT. SEP 081969 QK Legré, Ludovic 21 La botanique en Provence au F8L3 XVIe siècle BioMed PLEASE DO NOT REMOVE CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY es : CETTE etre Le de tete monte ° : DEEP RES nr tint niet ie El Bt 8 me ed 44 nn his LP Nr RETENU + ag 00 Literie Rates: las die Si + Hip get pence topthnne, ciheter ss A ? #4 k Tee pe ) ; ét HE tr Pet hi RICE TE RL ARC LEE : … CNET Nr » } us RE cp $ Ar ENTRE ME r + s! \ 4. MAMMA À gr our = vi OU H à HE HU En tn! TE if Le he but Dany te reetete vai de: ose Et or no pt és re it soit 4poh ee téfiag'e de AC A MAESIFTAT iy tt ul fige " Sete 1 pur ré à tt | DER LE lééuré ni | Ur MOpr 4 tres nt Fes : HEAR] 14 CORRE":