-Ws^l H « 1r 'ilSiT^C^- ^iéiP M^>r ' iiiï K-jr ^:> -MU ^^■^\'*ï t #^ .i l^i ^<^ I^J -~^A ^ a: L^^^ LA CELLULE RECUEIL DE CYTOLOGIE ET D'HISTOLOGIE GÉNÉRALE PUBLIE PAR T. B. CARNOY, professeur de biologie cellulaire, G. GILSON, PROFESSEUR dV.MBRYOLOGIE, J. DENYS, PROFESSEUR d'aNATOMIE PATHOLOGIQUE, A l'Université catholic^ue de Louvain. AVEC LA COLLABORATION DE LEURS ÉLÈVES ET DES SAVANTS ÉTRANGERS, TOME VIII !'• FASCICULE. I. La structure des lobes optiques chez l'embryon de poulet, par A. VAN GEHUCHTEN. II. Recherches morphologiques et chimiques sur les grains de pollen, par Ph. BIOURGE. III. Les cellules nerveuses du sympathique chez quelques Mammifères et chez l'Homme, ~ par A. VAN GEHUCHTEN. IV. Le tube digestif des édriophthalmes ; étude anatomique et histologique, par le D' MANILLE IDE. LIERRE LOUVAIN Typ. de JOSKPH VAN IN & O", Aug. PEETERS, Libraire, rue Droite, 48. rue de Namur, 11. 1892 / '/ tf 5 LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES CHEZ L'EMBRYON DE POULET PAR A. VAN GEHUCHTEN PROFESSEUR D'ANATOMIE A l'uNIVERSITÉ DE LOUVAIN. {Mémoire déposé le i'^'^ février 1892.) LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES CHEZ L EMBRYON DE POULET Les auteurs qui ont étudié la structure interne des lobes optiques des oiseaux ont décrit, dans la partie de ces organes où aboutissent les fibres optiques, et que certains d'entre eux désignent sous le nom de toit optique, un nombre considérable de couches plus ou moins distinctes. En effet, <]uand on examine une coupe d'un lobe optique d'oiseau fixé par le bichromate de potassium et coloré par l'hématoxyline, d'après le procédé courant de Weigert, on trouve une succession plus ou moins régulière de zones d'épaisseur variable. Les unes riches en fibres à myéline apparaissent colorées en bleu ; les autres riches en cellules nerveuses présentent des rangées de corpuscules étoiles; enfin, certaines d'entre elles, pauvres à la fois et en fibres myéliniques et en cellules, ont un aspect finement granu- leux sur le fond jaune-brun caractéristique de la substance grise. Stieda(i), dans ses recheixhes sur la structure des lobes optiques des oiseaux, admet dans le toit optique treize couches distinctes, sans compter l'épithélium épendymaire. Bellonci (2), qui s'est servi de la méthode à: l'acide osmique, décrit onze couches y compris la zone épithéliale interne. L'étude des lobes optiques des oiseaux a été reprise par Ramon y Cajal (3) avec la méthode rapide de Golgi, et a conduit à des résultats qui jettent une vive lumière sur la structure interne de ces organes complexes. ^ (1) Stieda : Studien iibcr das centrale Xervensystem der Vogel iind Sâugcthiere \ Zeitschr. f. vviss. Zool , Bd. X!X, i86S. (2) Bellonci : Veber die centrale Endigung des Nervus optieus hei Vertchratcu; Zeitschr, f. wiss. Zool , Bd. 47, 1888, p. 1—46. (31 Ramon y Cajal : Estructura del lobulo optico de las aves y origeii de los iiervios opticos Rcvista trimestrial de hisfologia nortiml y patologia, a"^ 3 et 4, p. 65—78/ i88q. — Sur la fine structure du lobe optique des oiseaux et sur l'origine réelle des nerfs optiques; Intern. Monatschr. f. Anat. u. Phys.. t. VIII. fasc 9 et 10, 1891. 8 A VAN GEHUCHTEN Pedro Ramon(i) a étudié de la même façon les couches optiques des rep- tiles. Un autre mémoire du même auteur se trouve signalé dans les travaux des deux savants espagnols, c'est une étude comparée des centres optiques chez les vertébrés; malheureusement cette étude n'a pas encore été publiée. De sorte que, pour le moment, le travail de Ramon y Cajal est le seul dans lequel on trouve consignés les résultats fournis par la méthode de Golgi dans l'étude de la structure interne des lobes optiques chez les oiseaux. Nous n'ignorons pas l'existence du travail de Fusari(2) sur l'encéphale des téléostéens, ni de celui de Tartuferi (3) sur la structure interne des éminences antérieures des tubercules quadrijumeaux de l'homme. Mais nous voulons nous occuper exclusivement clans ce mémoire des lobes optiques des oiseaux et, plus spécialement encore, de la structure des lobes optiques chez l'embryon de poulet du 18*= au 20- jour d'incubation. Ramon y Cajal admet et décrit dans le toit optique des oiseaux quinze couches distinctes qu'il désigne simplement par des numéros d'ordre en allant de la périphérie au centre, ,, attendu que, dit-il lui-même, dans l'état actuel de nos connaissances, il n'est pas possible d'assigner à chacune de ces couches une désignation née de la disposition anatomique et des fonc- tions spéciales de leurs éléments (4)". L'étude que nous avons faite de la structure du toit optique chez l'em- bryon de poulet nous a donné la conviction que les éléments nerveux, qui forment les différentes couches admises par Ramon y Cajal, ne peuvent avoir dans chacune de ces couches une fonction distincte; physiologique- ment donc ce grand nombre de couches ne saurait se maintenir. Il en est de même au point de vue purement morphologique, car les éléments nerveux d'une même couche n'appartiennent pas tous au même type, pas plus que les éléments de couches différentes n'appartiennent à des types différents. L'admission d'un nombre aussi considérable de couches ne peut que com- pliquer une structure en réalité bien simple et en rendre la description très difhcile; d'autant plus que l'épaisseur du toit optique et des couches qui le constituent varie non seulement dans les diverses régions d'un même lobe (i) Pedro Ramon : El encephalo de los Reptiles-, 24 sept. 1891. (2) FusARi : Untersuchungen uber die fcincrc Anatomie des Ge/iinies dcr Telcoslicr; Intern. Monatschr., B<\ IV, p. 273— 29g, . 1887. — Intorno alla Jina anainmia dell'encephalo dci tclcostei ; Reale Accademia dei Lincei, 1887. (3) Tartuferi : Sitll'anatumia minuta dellc cminen^c bigcmine antcriori dell'iiomo ; Milano, i8S5. (4) Ramon y Cajal : Loc. cit., p. 5 du tiré à part. LA- STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 9 Optique, mais aussi, comme Ramon y Cajal l'a constaté lui-même, dans les lobes optiques de diverses espèces d'oiseaux. 11 nous semble plus simple et plus rationnel de distinguer dans le toit optique des oiseaux trois couches seulement : a) Une couche externe formée principalement par la terminaison des fibres du nerf optique, fig. 13, A; b) Une couche moyenne de substance grise, presque exclusivement constituée de cellules nerveuses, fig. 13, B ; c) Une couche interne de substance blanche où l'on trouve les fibres nerveuses centrales, fig. 13, C. La couche périphérique comprend les sept premières zones de Ramon Y Cajal. Elle a des limites précises : elle s'étend depuis la surface du toit optique jusqu'au niveau où se terminent les dernières ramifications des fibres rétiniennes. Cette couche renferme un grand nombre de cellules nerveuses appartenant à des types très divers, mais elle a un caractère transcendant qui permettra toujours de la reconnaître sur une préparation quelque peu imprégnée par le chromate d'argent : on rencontre dans toute son épaisseur les arborisations terminales des fibres nerveuses qui viennent de la rétine. On pourrait appeler cette couche : la couche des fibres du nerf optique, ou mieux encore la couche des fibres rétiniennes. La couche moyenne de substance grise est nettement limitée du côté de la couche des fibres rétiniennes. Elle est beaucoup plus épaisse que cette dernière et est formée presque exclusivement de cellules nerveuses. Elle correspond aux couches 8 à 1 3 de Ramon y Cajal. Sa limite interne est indiquée par une rangée souvent double de cellules volumineuses, dont les prolongements protoplasmatiques, d'une longueur considérable, s'étendent dans tous les sens à travers la couche moyenne jusque dans les parties internes de la couche superficielle. Cette couche est formée en grande partie de cellules nerveuses dont le prolongerhent C3dindraxil va devenir ou bien une fibre nerveuse de la couche interne, véritable fibre optique centrale, ou bien une fibre nerveuse périphérique allant se terminer dans les couches profondes de la rétine. Ces cellules sont les véritables centres optiques, et constituent la couche des cellules nerveuses optiques. La couche blanche interne forme environ le tiers interne du toit optique. Elle est formée, dans la plus grande partie de sa masse, par des fibres ner- veuses qui ne sont que les prolongements C3dindraxils des cellules nerveuses optiques. Nous appellerons cette couche la couche des fibres optiques. lO A. VAN GEHUCHTEN Cette troisième couche a comme limite interne une rangée de cellules épithéliales qui tapissent la- cavité ventriculaire et constituent Vépithélium épendymaire. L'étude de la structure interne du toit optique comprendra donc la des- cription des éléments qui entrent dans la constitution de ces trois couches. I. COUCHE DES FIBRES RÉTINIENNES. Nous savons par les recherches concordantes de Dogiel (i), Tartu- FERi ('J) et Ramon y Cajal (3), faites les unes par la méthode de Ehrlich au bleu, de méthylène , les autres par la méthode rapide de Golgi , que la plupart des fibres du nerf optique ne sont que les prolongements cylindraxils des cellules nerveuses situées dans la couche ganglionnaire de la rétine. On pourrait donc les appeler ajuste titre des fibres re'tiniciuies, car la rétine renferme leurs cellules d'origine, de la même façon que la muqueuse olfactive renferme les cellules d'origine des fibres olfactives, la muqueuse linguale les cellules d'origine des fibres gustatives et l'organe de CoRTi les cellules nerveuses d'où naissent les fibres auditives. Toutes ces fibres qui président à une sensibilité spéciale prennent donc leur origine en dehors de l'axe cérébro spinal, absolument comme les fibres de la sensibilité générale, qui ont leur centre dans les ganglions rachidiens. Ces fibres nerveuses d'origine périphérique viennent toutes se terminer, d'une façon presque identique, par des arborisations libres dans une partie quelconque de l'axe cérébro-spinal. C'est là un fait qui a été mis en lu- mière par les recherches concordantes de His, Ramon y Cajal, Kôlliker, Pedro Ramon, v. Lenhossek et les nôtres, et qui nous semble définiti- vement acquis à la science. Cette même 'disposition se retrouve chez les animaux inférieurs, ainsi que cela semble résulter de certaines figures qui accompagnent les deux remarquables travaux de Retzius sur le système nerveux des crustacés et des vers (4), et ainsi que cela existe mani- (i) Dogiel : Ceber das Vcrhalten dcr nervosen Elemcnten in der Retina der Ganoiden, Rep- tilien, Viigcl iind Sàugethieie; Anat. Anz , 1888. (2) Tartuferi : 5»//' analomia dclla retina; Intern. Monaiscli. f. Anat und Physiol., pSSy. l3) Ramon y Cajal : Sur la morphologie et les eouncA-ions des éléments de la rétine des oiseaux; Anat. Anz, 1889. n" 4. — Estructiira de la retina de los reptiles y batracios; Pcquenas contribuciones al conocimiento del sislema nerviosa ; 20 aoiit 1891. (4) Retzius : Zur Kenntniss des Nerven^ystans der Crustaceen ; Biolog. Untcrs., Neue Folge, 1, 1, 1890. — Zur Kenntniss des eeniralen Ncrvensysiems der Wiirmer; Biolog. Unters., Neue Folge, II, 1891. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 1 1 festement chez le Luinbvicus, d'après les recherches toutes récentes de V. Lenhossek (1). Pour les fibres rétiniennes le fait n'est pas douteux non plus. Ramon y Cajal l'a prouvé pour les fibres du nerf optique des oiseaux, et son frère Pedro Ramon pour celles qui aboutissent aux corps genouillés des mammi- fères et aux lobes optiques des reptiles, des batraciens et des poissons. Chez l'embryon de poulet, voici comment les choses se passent. Les fibres rétiniennes, après avoir passé par le chiasma des nerfs optiques, arrivent aux lobes optiques; là elles s'écartent les unes des autres et forment autour de chacun des lobes un véritable manteau périphérique de moins en moins épais au fur et à mesure que l'on s'écarte de la ligne médiane, ainsi que Bellonci l'a d'ailleurs montré avec la méthode à l'acide osmique. Ces fibres rétiniennes colorées en noir apparaissent donc à la périphérie du lobe optique, soit en coupe transversale, soit en coupe longitudinale, d'après la direction suivant laquelle le lobe optique a été sectionné, FiG. 1 et 13. Une fois arrivées dans cette zone périphérique, les fibres se recourbent à angle droit sur elles-mêmes et s'enfoncent dans la couche externe du lobe optique, où chacune d'elles va se terminer par une arborisation libre très complexe'. Nous avons réuni dans la partie supérieure de la fig. 1 un grand nombre de ces arborisations terminales, ainsi qu'on les trouve en abondance dans toute imprégnation quelque peu réussie. Comme il ressort claire- ment de l'examen de cette figure, les arborisations terminales des fibres rétiniennes n'occupent pas toutes le même niveau et ne présentent pas non plus les mêmes caractères. On peut distinguer facilement quatre formes d'arborisations, différentes l'une de l'autre et par le niveau où elles se trou- vent et par la direction spéciale qu'affectent les branches terminales. Les plus externes et les plus internes ont les mêmes caractères : elles sont aplaties de dehors en dedans, et les branches qui les constituent ont surtout une tendance à s'épanouir dans le sens horizontal. Les premières se trouvent immédiatement en dessous du manteau périphérique formé par les fibres venant du chiasma. Sur des coupes antéro-postérieures, il n'est pas rare de voir une de ces fibres se recourber, quitter la zone périphérique pour s'engager dans les parties sous-jacentes et s'y terminer soit directement, a, soit après un trajet antéro-postérieur per- (i) V. Lenhossek : Ursprung, Verlauf iind Endigung der sensibeln Nerveii/aseni bei Ltimbricus; Arch. f. mik. Anat , Bd Sg, p. 102— 136. 12 A VAN GEHUCHTEN pendiculaire au premier, b, par un grand nombre de branches horizontales divergentes qui se divisent et se subdivisent à leur tour. Les arborisations profondes se comportent d'une façon identique. La fibre rétinienne, au sortir de la zone périphérique, traverse immédiatement toute l'épaisseur de la couche externe pour s'épanouir dans une vaste arbo- risation horizontale, c\ ou bien, après s'être dégagée de la zone des hbres externes, la fibre rétinienne présente un trajet horizontal d'une longueur variable avant de s'engager dans les couches profondes, d. La zone des fibres nerveuses périphériques, fig. l et i3,fr, est donc double. La plus externe et la plus épaisse est formée de fibres rétiniennes venant directement du chiasma, ces fibres se présentent en section trans- versale sur des coupes verticales et antéro-postérieures. En dessous de cette zone externe on trouve une zone interne, beaucoup moins développée, dont les fibres affectent une direction perpendiculaire à celle des fibres externes : elle est formée uniquement par une partie des fibres externes qui courent dans cette zone, avant de s'enfoncer plus profondément dans le lobe optique, fig. 1. Ces arborisations profondes ont comme caractère particulier de présenter une limite interne nette et précise; les différentes ramifications qui les constituent ne dépassent jamais le plan horizontal séparant la couche des fibres rétiniennes de la couche des cellules nerveuses optiques, fig. 1. Les arborisations comprises entre ces deux rangées extrêmes sont beaucoup plus étroites; mais par contre les branches qui les constituent ont une tendance à prendre la direction verticale. L'épanouissement de ces ramifications terminales se fait surtout dans un plan perpendiculaire à celui qu'affectent les ramifications des arborisations superficielles et pro- fondes. Ce caractère est surtout i)rononcé dans les arborisations de la troisième, rangée. Aussi les corbeilles tenuiuales (Endkôrben), pour nous servir d'un terme employé par Kolliker pour des productions analogues de la couche moléculaire du cervelet, les corbeilles terminales de la troisième rangée, prises dans leur ensemble, ont une forme rectangulaire, fig. 1, e, tandis que celles de la deuxième rangée sont plus ou moins cuboïdes, f. Ces arborisations de la troisième zone se terminent nettement à quelque distance au-dessus des arborisations profondes, de façon à laisser entre elles deux la place pour une rangée de cellules nerveuses. LA STUCTURE DES LOBES OPTIQUES 13 Dans toutes ces arborisations la fibre rétinienne, au moment de se résoudre en bouquet terminal, commence par se bifurquer en deux branches divergentes. Celles-ci se divisent et se subdivisent alors à leur tour, en même temps qu'elles émettent de petites ramilles collatérales. Toutes les branches qui en naissent sont courtes et grêles, elles s'entortillent les unes dans les autres de manière à former par leur ensemble pour chaque arbori- sation un plexus inextricable. Il n'est pas difficile cependant de suivre, sur un bon nombre de préparations, toutes ces divisions et ces subdivisions et de se convaincre aisément que toutes ces branches, quelque nombreuses qu'elles soient, sont indépendantes les unes des autres, indépendantes aussi des ramifications venant des arborisations voisines et qu'elles finissent toutes librement en présentant souvent un petit épaississcment terminal. Les fibres du nerf optique se comportent donc, dans le lobe optique des oiseaux (Ramon y Cajal et Van Gehuchten), des reptiles, des batraciens et des poissons et dans les corps genouillés des mammifères (Pedro Ramon), absolument comme les fibres olfactives des mammifères (Golgi, Ramon Y Cajal, -Van Gehuchten et Martin), des oiseaux et des reptiles (Pedro Ramon) se comportent dans le bulbe olfactif. Leur mode de terminaison présente aussi beaucoup d'analogies avec celui des fibres sensitives de la moelle épinière, avec cette différence qu'elles ne se bifurquent que près de leur terminaison et qu'elles ne présentent pas sur leur trajet de branches collatérales. Le nerf optique ne prend donc pas son origine dans les lobes optiques comme on l'avait toujours cru jusqu'ici; il y trouve plutôt sa terminaison. Sa véritable origine se trouve dans les cellules nerveuses de la couche ganglionnaire de la rétine. Ce mode de terminaison des fibres rétiniennes est une découverte qui appartient tout entière à Ramon y Cajal. Dans un travail paru en 1889, il décrivit pour la première fois les arborisations terminales des fibres optiques chez les oiseaux. A cette époque il ne connaissait que les trois premières rangées d'arborisations; les plus profondes lui avaient échappé. La partie des lobes optiques occupée par ces trois rangées est riche en cellules nerveuses, ainsi que nous le verrons bientôt. Mais, comme pour aucune de celles-ci Ramon y Cajal n'avait pu poursuivre le prolongement cylindraxil jusqu'au delà de la limite des ramifications rétiniennes, le savant espagnol avait proposé de désigner cette partie externe du lobe optique des oiseaux sous le nom de formation rétinienne, par opposition à tout le reste 14 A VAN GEHUCHTEN du toit optique, auquel il réservait la dénomination àefonnatiou cérébrale, parcequ'il est surtout formé de cellules nerveuses dont le prolongement cylindraxil se rend au cerveau. En 1891, le professeur de Barcelone a publié en français son article de 1889 en y ajoutant quelques nouveaux détails. Cette fois il décrit, comme nous venons de le faire, les quatre rangées d'arborisations rétiniennes. Mais comme les arborisations profondes s'épanouissent immédiatement en dessous d'une rangée de cellules nerveuses (6^ couche de Ramon) dont le prolongement cylindraxil peut être poursuivi, au moins pour quelques unes, jusque dans la substance blanche centrale, il semble abandonner la distinction qu'il avait établie entre \di formation rétinienne et \3. formation cérébrale. Nous pensons que la présence, dans la couche externe des lobes op- tiques, de cellules nerveuses envoyant leur prolongement C5dindraxil dans la couche moyenne, et même dans la couche interne, n'est pas un motif suffisant pour abandonner cette distinction à la fois simple et rationnelle. C'est pourquoi nous conservons la dénomination de formation rétinienne, ou mieux de couche des fibres rétiniennes, à toute cette partie des lobes des oiseaux, envahie par les ramifications terminales des fibres du nert optique. Toutes les recherches faites pendant ces dernières années dans le domaine du système nerveux nous ont d'ailleurs appris qu'on ne trouve dans aucun organe une distinction nette en couches indépendantes. Il semble, au contraire, qu'un des caractères dominants de la structure des centres nerveux, c'est précisément cette absence de zones indépendantes, due au mélange intime d'éléments en apparence très disparates. Il en est ainsi pour le cervelet, pour le cerveau et pour le bulbe olfactif, dans les- quels la division en couches distinctes est purement conventionnelle et basée uniquement sur la prédominance d'un élément sur plusieurs autres. Il ne peut en être autrement pour les lobes optiques. - Il est un autre caractère important de la couche externe du toit op- tique : les prolongements protoplasmatiques de toutes les cellules nerveuses de la couche moyenne viennent s'y terminer. Cette couche moyenne, ainsi que nous le verrons bientôt, est presque exclusivement formée de cellules nerveuses de toutes les formes et de toutes les grandeurs. Les unes sont situées immédiatement en dessous des arborisations rétiniennes pro- fondes, FiG. 2, les autres sont éparpillées à tous les niveaux de la couche optique, fig. 1, 3, 7, 10, 11 et 13, les plus internes, grandes et volumineuses, forment la limite de séparation avec la couche des fibres optiques, fig. 13. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 15 Toutes ces cellules sont abondamment pourvues de prolongements proto- plasmatiques richement ramifiés. Les plus épais et les plus importants d'entre eux naissent toujours du côté externe, traversent la couche moyenne en émettant quelques branches collatérales, pour se terminer par des ar- borisations complexes à tous les niveaux de la couche supei^ficielle jusque immédiatement en dessous de la zone des fibres nerveuses périphériques. Cette couche des fibres rétiniennes est donc l'endroit où les éléments nerveux de la rétine rencontrent les éléments nerveux du cerveau moj'en. Les éléments de la rétine y envoient leur prolongement cylindraxil, les éléments des lobes optiques leurs prolongements pi'otoplasmatiqucs. Les deux espèces de prolongements se terminent dans cette zone par des arbo- risations libres qui s'enveloppent l'une l'autre, se mêlent intimement, s'en- lacent par leur ramilles terminales, de façon à établir entre eux des contacts multiples, tout en restant libres et indépendants les uns des autres. C'est ce que montrent en toute évidence un grand nombre de nos figures et notamment les fig. 1, 2. 3 5, 6, 7, 10, 11. 12 et 13. Ce contact est le seul rapport intime qui existe entre les éléments ner- veux de la rétine et ceux du lobe; nous devons en conclure nécessairement que c'est par ce contact seul que les éléments rétiniens influent les éléments optiques. La transmission nerveuse ne se fait donc pas par continuité, mais par contiguïté, aussi bien dans les lobes optiques que dans les autres parties de l'axe cérébro-spinal. De plus, les ramifications terminales des fibres rétiniennes ne viennent nulle part en contact avec le corps des cellules nerveuses de la couche moyenne, ni avec leurs prolongements cylindraxils qui vont devenir les fibres optiques centrales. Ainsi, c'est par leurs prolongements protoplasma- tiques qu'ils reçoivent l'ébranlement nerveux et le transmettent au prolon^ gement cylindraxil. Les prolongements protoplasmatiques doivent donc être de nature nerveuse et ne peuvent en aucune façon avoir exchisivenient pour fonction la nutrition des éléments nerveux. L'ébranlement nerveux venant des cellules ganglionnaires de la ré- tine suit dans les fibres du nerf optique une direction celliilifuge, pour arriver aux éléments du toit optique. Transmis aux ramifications ter- minales des prolongements protoplasmatiques des cellules nerveuses optiques, il suit dans ceux-ci une direction celhtlipête, pour arriver au corps cellulaire et, de là, se réfléchir sur le prolongement cylindraxil, où il suivra de nouveau une direction cellulifuge. Cette disposition anatomique 16 A VAN GEHUCHTEN plaide donc en faveur de l'hypothèse que nous avons émise antérieurement d'une façon quelque peu dabitative (i), à savoir que, dans tout élément nerveux, le prolongement cylindraxil aurait une conduction cellulifuge et servirait à transmettre l'ébranlement d'un élément à un autre; tandis que les prolongements protoplasmatiques présenteraient toujours la con- duction cellulipète, et transmettraient l'ébranlement reçu d'un prolon- gement cylindraxil étranger à la cellule même dont ils dépendent, pour autant que cet ébranlement ne soit pas perçu par le corps cellulaire lui-même. Cette hypothèse a été défendue, d'une façon beaucoup plus affirmative, par Ramon y Cajal, dans un travail exclusivement destiné à élucider la signification physiologique des expansions protoplasmatiques et nerveuses(2). Passant en revue les relations qui existent entre le bulbe olfactif et la muqueuse olfactive, entre la rétine et le lobe optique, entre les éléments nerveux des voies motrices et de toutes les voies centrifuges, le professeur de Barcelone trouve partout la même disposition : les prolongements protoplasmatiques et le corps cellulaire reçoivent l'ébranlement et le transmettent au prolongement cylindraxil; aussi considère-t-il l'arborisation protoplasmatique comme un appareil récepteur du mouvement, et l'arbori- ' sation terminale du prolongement nerveux comme un appareil à' application. Mais il a soin d'ajouter que c'est là une pure hypothèse, qui semble, au moins jusqu'à présent, en accord parfait avec les faits. Cette hypothèse peut s'appliquer aussi aux cellules nerveuses unipolaires des animaux in- férieurs. Ici l'appareil récepteur du mouvement semble réduit au corps cellulaire seul; à moins de considérer comme prolongements protoplasma- tiques les branches collatérales irrégulières qui, dans le voisinage du corps cellulaire, naissent de la grosse tige unique avant qu'elle ne devienne pro- longement cylindraxil. L'examen des nombreuses figures qui accompagnent les deux remarquables mémoires de JIetzius sur le système nerveux central des crustacés et des vers rend cette opinion plus que probable. Les cellules unipolaires des ganglions rachidiens des vertébrés nous semblaient faire, exception à la règle générale, mais cette exception est plus apparente que réelle, ainsi que nous le montrerons plus loin. (i) Van Gehuchten : La structure des centres nerveux, la moelle épinicre et le cervelet; La Cellule, t. VII. fasc i, p. loi, i8qi. (2) Ramon y Cajal ; Significacion fisiologica de las expansioncs protoplasmaticas y nervosas de las celulas de la substancia gris; Revista de Ciencias Medicas de Barcelona, n" 22 et 23, 1891. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 1? La nature nerveuse des prolongements protoplasmatiques ou des dendrites (His) est encore en question. Tandis que Golgi et ses élèves (Martinotti, Sala) leur attribuent exclusivement une fonction nutritive, Ramon y Cajal, nous-méme et Martin, tout en leur reconnaissant cette fonction de nutrition, qu'ils doivent avoir en commun avec toutes les par- ties de l'élément nerveux, nous leur attribuons encore une fonction de conduction ; Kôlliker est porté aussi à admettre cette manière de voir, sans se prononcer cependant d'une façon définitive. Pour Waldeyer(i) la question n'est pas tranchée, il réserve son opinion en attendant de nou- velles recherches. Dans son dernier travail sur les nerfs sensibles du Lumbriciis , V. Lenhossek est tenté de rejeter à la fois les deux hypothèses. L'hypothèse de Golgi lui paraît défectueuse, d'autant plus que dans l'épiderme du lombric il a vu pénétrer un grand nombre d'anses vasculaires, qui s'y en- foncent jusque sous la cuticule. Les cellules nerveuses de l'épiderme étant donc suffisamment baignées par le sérum sanguin, l'existence d'une nutrition par les prolongements périphériques lui semble improbable. Quant à l'hypo- thèse jde la nature nerveuse des dendrites, défendue par Ramon y Cajal et par nous, il est porté à la rejeter aussi, ne voyant pas, dit-il, ~ welcher Vortheil damit verbunden ware, wenn der aufeine bestimmte Zahl von epidermalen Nervenzellen einwirkende Reiz, sich auf dem Wege der Dendriten noch auf eine Anzahl benachbarter Elemente ausdehnen und so die Nerven- fasern eines umfassenderen Gebietes in Erregung versetzen sollte (2) ». v. Lenhossek semble par là être d'avis que, si l'on admet l'hypothèse de Ramon y Cajal et la nôtre, les cellules nerveuses de l'épiderme du Lumbriciis seraient en contact entre elles parles dendrites nés de leur base, et pourraient ainsi se transmettre l'une à l'autre l'excitation périphérique. Tel n'est pas notre manière de voir. Il est bien vrai que Ramon y Cajal admet la pos- sibilité d'une pareille transmission pour certains cas exceptionnels : lorsque, par exemple, des prolongements protoplasmatiques s'accumulent dans des zones où il n'existe pas de fibres nerveuses, comme cela se présenté, d'après Ramon y Cajal (3), dans la couche granuleuse du lobe optique des reptiles et des batraciens. Pedro Ramon (4j partage la manière de voir de son frère. (1) Waldeyer : Ueber einige iieiiere Forschungen im Gcbiete der Aiiatomie des Ceiitralnerven- systems; Sonderabdr. aus der •• Deutschen Medicinischen Wochenschnl't •■ n» 44 et suiv., 1891, (2) V. Lenhossek : Loc. cit., p ii3. (3) Ramon y Cajal : Signification fisiologica... (4) Pedro Ramon ; Loc. cit., p. 12 et 14. 18 A. VAN GEHUCHTEN Un pareil lien entre des éléments nerveux voisins nous semble difficile à admettre. Car, si cette possibilité existe pour certains éléments, alors qu'il n'v a pas de fibres voisines, nous ne voyons pas pourquoi elle n'existerait pas pour tous les éléments nerveux, qu'ils soient ou non en contact avec des prolongements cylindraxils. Et, dans ce cas, comme tous les éléments de la substance grise se touchent et s'entrelacent par leurs dendrites, témoins les cellules des couches moléculaire et granuleuse du cervelet, de la couche corticale du cerveau, les cellules mitrales du bulbe olfactif, les cellules ganglionnaires de la rétine, etc., c'en est fait de l'indé- pendance des routes nerveuses. En effet, la moindre excitation périphérique se transmettrait nécessairement à un grand nombre d'éléments souvent disparates de l'axe cérébro-spinal. Dans son étude >^ sur la structure de l'écorce cérébrale chez quelques mammifères (1), ^ Ramon y Cajal admet aussi comme vraisemblable - pour la communication à petites distances, l'intervention par contacts réciproques des branches protoplasmiques basilaires et latérales de la tige des pyra- mides '-. 11 semble ainsi battre en brèche sa propre hypothèse; car, dans ce cas, les prolongements protoplasmatiques jouiraient aussi de la conduc- tion cellulifuge, et deviendraient des appareils d'application du mouvement, absolument comme le prolongement cylindraxil. Aussi, jusqu'à preuve du contraire, nous admettons, en nous basant sur tous les faits acquis jusqu'ici, que les prolongements protoplasmatiques ont toujours, comme nous l'avons dit plus haut, une conduction cellulipète, c'est-à-dire qu'ils ont toujours pour fonction de transmettre au corps cellu- laire dont ils dépendent l'excitation qui leur arrive. Dans le cas particulier signalé par v. Lenhossek, les dendrites de la base des cellules nerveuses intra-épithéliales n'auraient donc pas pour fonction de relier ces cellules les unes aux autres, mais bien de recueillir les impressions extérieures qui, n'arrivant pas directement au seul prolongement périphérique, leur seraient transmises d'une façon diffuse à travers les cellules épithéliales. On sait que, chez les vertébrés, les terminaisons nerveuses intra-épithéliales des nerfs de la sensibilité générale perçoivent les excitations extérieures à travers une ou plusieurs rangées de cellules cornées de l'épiderme. Les arborisations terminales des fibres rétiniennes et les ramifications protoplasmatiques des cellules nerveuses optiques ne sont pas les seuls (i) La Cellule, t VII, iSgi. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 19 éléments qui entrent dans la constitution de la couche externe. On y trouve encore un grand nombre de cellules, qu'il serait difficile de ranger par zones superposées. Dans les centaines de coupes du lobe optique d'embryon de poulet que nous avons étudiées, il nous a toujours paru que les cellules de la couche externe étaient distribuées sans ordre apparent. En dehors d'une rangée de cellules qui existe, d'une façon constante, immédiatement au- dessus des arborisations rétiniennes profondes (7*^ couche de Ramon y Cajal), et d'une couche granuleuse voisine de la zone des fibres nerveuses périphé- riques (2^ couche de Ramon y Cajali, on trouve des éléments éparpillés dans toute l'épaisseur de la couche des fibres rétiniennes. A l'aide de la méthode de Golgi on constate que la série externe de cel- lules est formée de petits éléments nerveux à corps cellulaire arrondi ou polyédrique, d'où partent quelques branches protoplasmatiques courtes et divergentes, fig. 5, a. Le prolongement cylindraxil est grêle et délicat. Il descend verticalement en bas. Ramon y Cajal n'a pu le poursuivre qu'un peu au delà de sa 6^ couche. Plus heureux que le professeur de Barcelone, nous avons vu, sur un bon nombre de préparations, le prolongement cylindraxil pénétrer dans la couche des cellules nerveuses, et atteindre même quelquefois la couche des fibres optiques centrales. Ce prolongement nerveux est remarquable par les nombreuses petites branches collatérales qui en naissent, et dont plusieurs ont une tendance à retourner dans la couche externe. Nous n'avons cepen- dant jamais vu ce prolongement cylindraxil se continuer avec une fibre optique centrale. Quelquefois aussi le prolongement nerveux, beaucoup plus court, semble se terminer au niveau des premières cellules nerveuses optiques. Ces éléments n'existent pas exclusivement dans la zone granuleuse externe. On les retrouve aussi dans la rangée cellulaire interne, de même que dans toute l'épaisseur de la couche qui nous occupe, ainsi que le montre la FIG. 5, b et c; nous avons rassemblé dans cette figure des éléments pris sur des coupes différentes. Dans la rangée cellulaire interne nous avons trouvé quatre types d'éléments. 1° Le t3'pe cellulaire décrit par Ramon y Cajal. D'un corps cellulaire allongé naît une tige ascendante, qui se ramifie et se termine dans la profon- deur de la couche externe, et un cylindre-axe descendant qui traverse la couche moyenne pour devenir une fibre nerveuse de la couche blanche. 20 A. VAN GEHUCHTEN Sur son trajet ce prolongement nerveux émet quelques branches collatérales. Ces éléments se comportent absolument comme la plupart des cellules ner- veuses de la couche moyenne ; on peut donc aussi les considérer comme de véritables cellules optiques, fig. 5, d. 2= Des petites cellules nerveuses identiques à celles qui forment la zone granuleuse externe, fig. 5, b. 3° Des cellules nerveuses à cylindre-axe court, pourvues de quelques petits prolongements protoplasmatiques et d'un prolongement nerveux descendant; celui-ci entre dans la couche moyenne et s'y termine par des branches horizontales très longues, au niveau de la première rangée de cellules nerveuses optiques. Nous avons représenté quelques-unes de ces cellules dans la fig. 8. 4° Enfin un grand nombre de petites cellules de neuroglie, fig. 5, n. Entre ces deux rangées de cellules on trouve éparpillés des éléments appartenant aussi à des types différents : 1° De petites cellules nerveuses à cylindre-axe descendant, signalées dans les deux rangées cellulaires, fig. 5, c; 2° Des petites cellules nerveuses à cylindre-axe court, analogues à celles décrites dans la zone interne, fig. 8; 3'^ Quelques cellules nerveuses plus volumineuses, à cylindre-axe des- cendant et devenant fibre nerveuse de la couche interne, fig. 5, e; 4° Des éléments de neuroglie, petits et grêles, pauvres en prolonge- ments protoplasmatiques, comme ceux signalés plus haut, ou bien pourvus d'un grand nombre de prolongements très longs et très délicats qui traver- sent toute l'épaisseur de la couche externe, fig. 5; 5° Enfin des éléments nerveux à direction horizontale, bien décrits par Ramon y Cajal. Nous en avons représenté quelques-uns dans la fig. 6 et 10, m. Ces éléments se caractérisent par la longueur considérable de leurs prolongements protoplasmatiques. Sur un grand nombre d'entre eux il nous a été impossible de reconnaître un prolongement cjdindraxil. Dans quelques cas, cependant, ce prolongement apparaît ; il affecte alors une direction horizontale, comme les prolongements protoplasmatiques eux- mêmes. Il nous est impossible de dire où et comment il se termine. Le prolongement nerveux de la cellule a se bifurque à quelque distance des corps cellulaire en une branche ascendante et une branche descendante, mais ici aussi la réduction n'était pas complète. LA STUCTURE DES LOBES OPTIQUES 2 1 Il serait bien difficile de déterminer la fonction des éléments si disparates de la couche externe. Pour les cellules nerveuses dont le pro- longement cylindraxil va devenir une fibre nerveuse centrale, la fonction n'est pas douteuse : ce sont des cellules optiques, aussi bien que la plupart des éléments de la couche moyenne. Pour les cellules à cylindre-axe court, dont les ramifications terminales se trouvent au niveau des cellules de la couche moj-enne, on peut supposer, comme le fait Ramon y Cajal, qu'elles servent à transmettre d'une façon médiate l'ébranlement nerveux amené par les fibres rétiniennes à un grand nombre de cellules optiques. Il en est peut être de même des petites cellules nerveuses à cylindre-axe long. Quant aux cellules volumineuses à direction horizontale, les obser- vations sont encore beaucoup trop incomplètes pour leur attribuer une fonction physiologique quelconc^ue. IL COUCHE MOYENNE OU COUCHE DES CELLULES NERVEUSES OPTIQUES. La couche moyenne du lobe optique, la plus épaisse des trois, est formée presque exclusivement de cellules nerveuses, que l'on peut ranger dans les deux groupes découverts par Golgi : les éléments à cylindre-axe long et les éléments à cylindre-axe court. Les éléments nerveux à cylindre-axe long peuvent se comporter de deux façons différentes : les uns envoient leur prolongement cylindraxil vers la couche interne du lobe, où il va devenir une fibre nerveuse centrale; nous les appellerons, pour faciliter la description, cellules nerveuses optiques à cylindre-axe central. Les autres envoient leur prolongement cylindraxil vers la couche externe du lobe, où il va devenir, au moins clans un grand nombre de cas, une fibre nerveuse de la bandelette optique : ce sont les cellules nerveuses optiques à cylindre-axe périphérique. Les éléments nerveux à cylindre-axe court peuvent aussi être divisés en deux groupes, suivant qu'ils présentent un prolongement cylindraxil descendant et interne ou ascendant et externe. Ces quatres groupes d'éléments nerveux se trouvent en abondance dans toute l'épaisseur de la couche moyenne. Nous allons décrire succinctement leurs caractères différentiels. 22 A VAN GEHUCHTEN A. Cellules nerveuses optiques à cylindre-axe long. a) Cellules nerveuses optiques à cylindre-axe central. Les cellules nerveuses qui rentrent dans ce groupe peuvent appartenir à plusieurs types distincts. 1° Immédiatement en dessous des arborisations rétiniennes profondes de la couche externe, on trouve une zone granuleuse à limites assez nettes, formée principalement de cellules nerveuses à cylindre-axe court, dont nous parlerons plus loin. Cette zone granuleuse a été représentée dans toutes nos figures par deux lignes ponctuées parallèles. Un peu en dessous de cette zone, on trouve, sur des préparations bien imprégnées par le chromate d'argent, une rangée continue et souvent double de cellules volu- mineuses, à corps cellulaire allongé et fusiforme, telles que nous les avons représentées dans la fig. 2. Du côté externe de ces cellules part, le plus souvent, un gros tronc protoplasmatique qui se bifurque bientôt, traverse la zone granuleuse et pénètre dans la couche externe; là il s'étend par deux ou trois grosses bran- ches terminales jusqu'en dessous des fibres nerveuses périphériques. Quel- quefois cette tige externe se résout en un grand nombre de prolongements protoplasmatiques qui se perdent entre les arborisations rétiniennes. Du pôle interne du corps cellulaire et de ses faces latérales s'échappent de nombreuses branches protoplasmatiques longues et grêles , verticales , obliques ou horizontales, qui s'enlacent avec les branches des cellules voisines de manière à former un treillis inextricable. Ce sont ces prolon- gements protoplasmatiques entrecroisés qui donnent un aspect finement granuleux à la zone immédiatement voisine, fig. 2 fg^ couche de Ramon y Cajal), bien plus que les ramifications terminales des cellules nerveuses à cylindre-axe court, fig. 9, et que les collatérales des cylindre-axes descen- dants, comme le pense Ramon y Cajal. Du milieu de ces branches protoplasmatiques, on voit sortir le prolon- gement cylindraxil, né directement du corps cellulaire ou d'un gros tronc protoplasmatique descendant. Ce prolongement nerveux se dirige verticale- ment en bas, traverse toute l'épaisseur de la couche moyenne et arrive dans la couche interne; il se recourbe alors à angle droit sur lui-même pour devenir une fibre nerveuse centrale. Dans son trajet à travers la couche moyenne, il émet un nombre considérable de fines branches collatérales, /. Nous avons compté jusqu'à huit branches sur un même prolongement cylindraxil. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 23 Si l'hypothèse dont nous avons parlé plus haut se confirme, ces cel- lules nerveuses optiques doivent recueillir l'ébranlement nerveux des fibres rétiniennes : soit directement par leurs prolongements périphériques qui viennent en contact avec les fibres du nerf optique, soit indirectement par leur corps cellulaire et par les prolongements nés de la base, grâce à leur contact avec les ramifications du cylindre-axe court des éléments dont nous parlerons plus loin, fig. 9. 2° Dans les zones les plus profondes de la couche moyenne, près de la couche des fibres nerveuses centrales, on trouve deux ou trois rangées de cellules volumineuses, à corps arrondi ou triangulaire et pourvues de deux, trois ou quatre expansions protoplasmatiques longues et épaisses. Celles-ci naissent de la partie externe du corps cellulaire, s'écartent les unes des autres, traversent toute l'épaisseur de la couche moyenne pour se terminer par de fines branches entre les arborisations rétiniennes profondes de la couche externe. Comme Ramon y Cajal l'a fait remarquer déjà, ces branches protoplasmatiques ont des contours réguliers et un aspect moniliforme. Ces expansions sont très longues et très divergentes et elles s'étendent fort loin du corps cellulaire. C'est pourquoi on ne rencontre le plus souvent dans les préparations que des tronçons, qu'on pourrait prendre aisément pour des prolongements cylindraxils, d'autant plus que les branches qui en naissent sont grêles, moniliformes et ressemblant assez bien aux collaté- rales dun cylindre-axe, fig. 12, ppr. Mais, dans des préparations un peu épaisses, il n'est pas difficile de voir que tous ces gros troncs moniliformes ne sont que les branches protoplasmatiques des cellules nerveuses situées à la limite interne de la couche moyenne, où elles forment la iS*^ couche ou la lone ganglioiuiaive de Ramon y Cajal, fig. 13. Du côté interne de ces cellules part un prolongement cylindraxil qui entre directement dans la couche interne, et s'y recourbe pour devenir fibre nerveuse centrale. Pas plus que Ramon y Cajal, nous n'avons vu ce prolon- gement C3dindraxil émettre des branches collatérales. Ces cellules nerveuses n'existent pas exclusivement dans la zone gan- glionnaire; on en trouve aussi quelques-unes dans la moitié interne de la couche moyenne, voire même entre les fibres de la couche interne. Elles ont souvent la forme triangulaire; l'angle interne se continue alors avec le prolongement cylindraxil, tandis que des deux angles latéraux partent deux grosses branches horizontales qui se dirigent en sens contraire, se recourbent insensiblement dans la zone moyenne, qu'elles traversent 24 A VAN GEHUCHTEN pour se terminer dans la couche externe à une distance considérable l'une de l'autre. Ces prolongements externes, avons-nous dit, présentent beaucoup de ressemblance avec des prolongements cylindraxils. Comme ceux-ci, ils ont des contours lisses et nets, ils présentent sur leur trajet et à des distances très rapprochées des épaississements fusiformes ou arrondis, tels qu'on en trouve souvent sur les prolongements cylindraxils, notamment sur les fibres nerveuses de la couche interne. De plus, comme les prolongements cylin- draxils, ils émettent des branches collatérales fines, grêles, longues et mo- niliformes qui finissent par des arborisations libres. Enfin ils se distinguent de ce que l'on est convenu d'appeler prolongements protoplasmatiques par l'absence de branches collatérales courtes et irrégulières. De quelle nature sont ces prolongements périphériques? Ramon y Cajal considère les grosses branches comme des prolonge- ments protoplasmatiques, et les petites collatérales qui en partent comme des cylindres-axes surnuméraires et accessoires. L'existence dans les lobes optiques de cellules nerveuses pourvues d'un grand nombre de prolonge- ments cylindraxils ne serait pas un fait étrange, et ne constituerait nullement un fait isolé ; d'après le professeur de Barcelone, ces cellules existent dans la substance gélatineuse de la moelle épinière(i) et dans les couches les plus externes de l'écorce cérébrale(2). Malgré cela, nous sommes cependant porté à considérer ces grosses branches, aussi bien que les collatérales qui en partent, comme des prolongements protoplasmatiques. Leurs contours lisses et nettement tranchés, les varicosités qui existent sur leur trajet et l'ab- sence de courtes branches collatérales ne sont pas à nos yeux des caractères suffisants pour qu'on leur reconnaisse la nature de prolongements nerveux. Car ces mêmes caractères se retrouvent souvent sur des prolongements dont la nature protoplasmatique n'est pas douteuse, notamment sur les tiges périphériques des cellules nerveuses optiques décrites plus haut, FiG. 2. Quant aux collatérales qui en partent, elles sont, il est vrai, longues et grêles, mais elles ne nous ont jamais présenté le caractère cylindraxil que Ramon y Cajal leur donne dans ses figures. En attendant de nouvelles recherches, nous considérons donc ces pro- longements des cellules internes comme des prolongements protoplasma- tiques d une conformation spéciale, due uniquement, à notre avis, à leur (i) Ramon y Cajal : La sitbslancia gelatinosa de Rolando; Pequenas contribuciones al conoci- miento del sistema nenioso, 20 août, 1892. (2) Ramon y Cajal : La Cellule, t. VII, i8gi. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 25 longueur considérable. Ils se terminent librement entre les ramifications rétiniennes et ont, sans aucun doute, pour fonction de recueillir, dans cette couche externe, l'ébranlement nerveux amené par un grand nombre de fibres rétiniennes, et de le transmettre par voie cellulipète au corps cellulaire dont ils émanent. Il faut, en effet, que nous soyons renseignés, à un moment donné, non seulement sur la nature de l'excitation amenée par quelques fibres rétiniennes voisines, ce qui peut se faire par les cellules nerveuses optiques du i'' et du 3'= tvpe, mais aussi sur la nature de l'excitation qui tombe sur des endroits très écartés de la rétine. Cette fonction pourrait être dévolue, au moins en partie, aux cellules nerveuses internes que nous venons de décrire; en effet leurs ramifications périphériques plongent à la fois dans plusieurs points différents de la couche externe. Ces cellules nerveuses nous paraissent aussi importantes à un autre point de vue. Nous avons parlé plus haut de rh3'pothèse émise par Ramon Y Cajal et par nous, d'après laquelle les prolongements protoplasmatiques auraient une conduction cellulipète et les prolongements cylindraxils une conduction cellulifuge, hypothèse de la polarisation dynamique, comme l'appelle Ramon y Cajal. Cette hypothèse parait se vérifier dans tous les cas connus jusqu'ici. Les cellules des ganglions spinaux nous paraissaient seules faire exception, ainsi que nous l'avons fait remarquer dans un autre travail. Dans ces cellules, en effet, la conduction est cellulipète dans le prolongement périphérique, et celui-ci a toujours été considéré comme un prolongement cylindraxil. La gravité de cette objection n'a pas échappé à Ramon y Cajal; il la discute longuement dans son dernier travail. Pour maintenir Ihypothèse de la polarisation dynamique des éléments nerveux, Ramon y Cajal ne trouve que deux alternatives, entre lesquelles il ne se prononce pas. On" peut considérer les cellules des ganglions rachidiens comme appartenant à un système spécial, dans lequel il y a absence complète de différentiation entre les divers prolongements; les éléments de ce sj^stème possèdent un seul prolongement qui n'est ni un C3'lindre-axe, ni une tige protoplasma- tique; en réalité il remplit les fonctions des deux. Si une branche de cette tige unique se dirige vers une surface sensible, elle représentera l'expansion protoplasmatique; si elle se dirige au contraire vers les centres, elle remplira l'office de prolongement nerveux. Les cellules des ganglions rachidiens seraient alors comparables aux cellules nerveuses des invertébrés, qui sont toutes unipolaires, ainsi que Retzius vient de le démontrer pour les crusta. 26 A VAN GEHUCHTEN ces et les vers, et pour lesquelles la direction du mouvement dans chaque rameau de la tige unique dçpend exclusivement de son point d'application. Mais cette hypothèse nous parait inadmissible. Il existe, il est vrai, des différences morphologiques assez considérables entre les cellules nerveuses des ganglions spinaux et les cellules nerveuses de l'axe cérébro-spinal. Mais il s"en faut qu'elles soient suffisantes pour nous autoriser à considérer avec Ramon y Cajal les cellules des ganglions spinaux comme constituant une espèce nerveuse spéciale (una especie nerviosa aparté). Les recherches récentes de v Lenhossek sur les nerfs sensibles du Lumbviciis le prouvent suffisamment. Ici, en effet, les gan- glions spinaux font absolument défaut; mais les cellules nerveuses de ces ganglions sont éparpillées entre les cellules épithéliales de l'épiderme, et elles présentent les mêmes caractères morphologiques que les cellules sensorielles de la muqueuse olfactive des vertébrés. Et ce qui démontre que ces cellules nerveuses intra-épithéliales du lombric représentent les cellules des ganglions rachidiens des vertébrés, c'est que le prolongement cylindraxil interne, arrivé dans la chaîne ganglionnaire, se bifurque en un rameau ascendant et un rameau descendant qui finissent librement. Les cellules nerveuses des ganglions rachidiens des vertébrés sont donc, comparables aux cellules nerveuses sensorielles de la muqueuse olfactive. Si l'hypothèse de la polarisation dynamique des éléments nerveux ne s'appliquait pas à ces cellules rachidiennes, elle serait fausse. Mais il n'en est pas ainsi. Elle s'applique parfaitement aux cellules bipolaires de la muqueuse olfactive et aux cellules de la rétine. Elle s'applique aussi aux cellules nerveuses intra-épithéliales du lombric. Pour la rendre applicable aux cellules des ganglions spinaux des vertébrés, il suffit de considérer le prolongement périphérique comme un prolongement protoplasmatique ; mais un prolongement protoplasmatique d'une longueur considérable, et qui, précisément à cause de sa grande longueur, s'est entouré d'un manteau protecteur de myéline. Telle est la seconde hypothèse posée par Ramon y Cajal. Les cellules nerveuses de la zone ganglionnaire du toit optique des oiseaux semblent apporter à cette manière de voir un appui considérable. Elles peuvent être considérées comme formant un stade intermédiaire entre une cellule nerveuse ordinaire et la cellule unipolaire ou bipolaire des ganglions rachidiens. Ici, en effet, nous voyons des prolongements manifeste- ment protojjlasmatiques prendre plusieurs des caractères d'un prolongement LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 2? cylindraxil, et cela uniquement parce que ces. prolongements protoplasmati- ques atteignent une longueur considérable. Qui oserait affirmer que, si ces prolongements périphériques devaient s'allonger ei^ore, ils ne prendraient pas tous les caractères d'un prolongement nerveux? C'est ce qui s'est fait peut-être pour le prolongement périphérique des cellules rachidiennes, comme cela a lieu d'ailleurs pour le prolongement cylindraxil de tout élément nerveux; ce prolongement a, en effet, présenté, au commencement de son développement, au moins les cai'actères extérieurs d'un prolongement protoplasmatique. Malgré leurs caractères morphologiques particuliers, ces prolongements ne rentrent pas moins dans le groupe des prolongements protoplasmatiques, si non par leur structure : comme cylindre-axes de fibres nerveuses périphé- riques, ces prolongements primitivement protoplasmatiques ont dû subir une différentiation profonde, du moins par \e\iv fonction, car ils conservent toujours la conduction cellulipète. D'ailleurs, les recherches de Ramon y Cajal et les nôtres sur les gan- glions rachidiens des vertébrés nous ont appris que, pour la plupart des cellules, il existe une différence morphologique entre le prolongement cen- tral et le prolongement périphérique; le premier est très souvent beaucoup plus grêle que le second. Les réductions que nous avons obtenues tout récemment dans le ganglion plexiforme du pneumogastrique chez un chien de trois semaines nous ont montré que là le fait était constant. Les cellules de ce ganglion sont très volumineuses et émettent une tige unique grosse et irrégulière. A une distance variable du corps cellulaire, cette tige ne pré- sente pas une véritable bifurcation, mais abandonne un prolongement interne fin, grêle, à contours nets et lisses, qui rentre dans l'axe cérébro- spinal et qui, morphologiquement, ne peut être que le prolongement cylin- draxil. La tige unique reste grosse et irrégulière, traverse le ganglion plexi- forme et devient le cylindre axe de la fibre périphérique. Ce prolongement a tous les caractères des prolongements périphériques des cellules internes du lobe optique; on peut donc le considérer, même morphologiquement, comme un prolongement protoplasmatique. La division des prolongements d'une cellule nerveuse en protoplasma- tiques et cylindraxils, pour être applicable à un grand nombre de cellules, peut donc, dans certaines circonstances, devenir défectueuse. On doit en chercher la raison dans l'insuffisance de nos connaissances au moment où l'on a établi cette division. Il serait peut-être plus conforme à la réalité 28 A. VAN GEHUCHTEN d'admettre une division nouvelle, basée non sur leur structure, mais sur leur fonction de conduction-. On pourrait alors distinguer les prolongements d'un élément nerveux en prolongements à conditclioii cellulipète et prolon- gements à conduction cellnlifitge (ij. 3° Dans la partie externe de la couche moyenne on trouve encore des éléments nerveux volumineux, à corps cellulaire fusiforme, pourvus de deux prolongements protoplasmatiques partant des pôles de la cellule et d'un prolongement C3dindraxil qui va devenir une fibre nerveuse centrale. Les prolongements protoplasmatiques sont très longs; l'interne, plus grêle, s'étend jusque dans la zone des fibres centrales, tandis que l'externe, plus gros, se termine dans la couche des fibres optiques périphériques. Ces cellules se réduisent avec la plus grande facilité. Ramon y Cajal les a décrites en insistant surtout sur le lieu d'origine du prolongement cylin- draxil. Mais, d'après sa description et les figures qui l'accompagnent, les deux prolongements protoplasmatiques seraient dépourvus de branches collatérales. Il n'en est pas ainsi sur nos préparations. Dans toutes, ces prolongements y sont au contraii'e très nettement ramifiés. Les ramifications de la tige périphérique présentent même une certaine disposition typique : elles sont longues et nombreuses dans le voisinage des cellules nerveuses optiques du r type; elles manquent presque d'une façon constante au niveau de la zone granuleuse externe, pour rede- venir nombreuses dans la couche des fibres rétiniennes; à cet endroit, d'ailleurs, la tige périphérique finit par un grand nombre de branches ter- minales, FiG. 1, 3 et 13. Il est à remarquer que ces ramifications sont surtout développées là où elles peuvent venir en contact avec des ramifications cylindraxiles : les externes avec les arborisitions rétiniennes, les internes avec le cylindre-axe court des éléments nerveux de la zone granuleuse. Souvent aussi ce prolongement périphérique finit par une arborisation ho- rizontale, au niveau même où se terminent les fibres rétiniennes profondes. Le prolongement protoplasmatique interne , souvent double , est riche aussi en ramifications latérales, qui s'entrecroisent avec les collatérales des prolongements cylindraxils des cellules optiques placées plus haut, ainsi qu'avec les ramifications des prolongements nerveux des éléments à cy- lindre-axe court. (i) Nous tenons à faire remarquer que Texpression cclhdifiige (cellulifugal) a été employée pour la première fois par Kùlliker pour indiquer la direction du mouvement nerveux dans le prolongement cylindraxil des cellules radiculaires et des cellules des cordons ; Zur feineren Anatomie des centrale» Nervensyslems : Das Rûckeiimat-k ; Séparât Abd. aus : Zeitschr. f. wiss. Zool., 1890, p. 36. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 29 Le prolongement cylindraxil ne nait pas du corps cellulaire; on le voit constamment partir du prolongement protoplasmatique périphérique, à une distance quelquefois considérable du corps cellulaire. A partir de son origine, il se recourbe sur lui-même, redescend parallèlement à l'élément nerveux dont il provient, traverse la couche moyenne en émettant de nombreuses collatérales et, enfin, devient une fibre nerveuse de la couche blanche interne. Nous avons vu quelquefois ce prolongement cylindraxil prendre d'abord un trajet ascendant, et se recourber seulement sur lui-même dans les parties internes de la couche périphérique, fig. '3,d. Le détail suivant nous a frappé par sa constance : la tige périphérique, aussi longtemps qu'elle n'a pas donné naissance au prolongement cylindraxil, n'émet pas de branches collatérales. 4° Enfin, on trouve encore à tous les niveaux de la couche moyenne des éléments nerveux triangulaires et fusiformes, à direction oblique ou horizontale, pourvus de prolongements protoplasmatiques divergents, qui s'entrelacent par leurs ramifications terminales avec les arborisations réti- niennes et d'un prolongement cjdindraxil, qui deviendra une fibre constitu- tive de la couche interne, fig. l, h, 5, a, 7. Comme les cellules nerveuses de la zone ganglionnaire, elles ont probablement pour fonction de recueillir l'ébranlement nerveux dans des arborisations rétiniennes très éloignées l'une de l'autre. b) Cellules nerveuses optiques à cylindre-axe périphérique. Ces cellules ont été découvertes par Ramon y Cajal. Elles prédominent surtout dans la moite externe de la couche moyenne. Ce sont des élément^ à corps cellulaire petit et fusiforme, duquel part un prolongement périphé- rique long et épais. Ce prolongement traverse la couche moyenne. Tantôt il se termine par une touffe de branches horizontales au niveau des arbori- sations rétiniennes profondes, fig. 11, a ei b ; tantôt il pénètre profondé- ment dans cette couche externe pour finir en dessous des fibres nerveuses périphériques. Seulement, dans ce dernier cas, il émet au niveau de la quatrième zone d'arborisations rétiniennes un grand nombre de collatérales courtes et irrégulières, fig. il, c et d. Quelquefois cependant il traverse cette zone sans donner de collatérales, fig. 11, e. Mais ce qui imprime à ces cellules nerveuses un caractère spécial et leur donne une importance considérable, c'est la façon dont se comporte le 30 A. VAN GEHUCHTEN prolongement cylindraxil. De même que dans les cellules décrites plus haut, le prolongement nerv/îux naît de la tige protoplasmique périphérique sous un angle très aigu, à une distance considérable du corps cellulaire. Mais, au lieu de se recourber sur lui-même pour descendre dans la couche blanche interne, il présente un trajet ascendant et pénètre dans la couche externe qu'il traverse dans toute sa hauteur ; c'est alors seulement qu'il se recourbe à angle droit sur lui-même et devient une fibre constitutive de la zone des fibres rétiniennes, fig. il. Dans ses recherches sur la structure de la rétine des oiseaux, Ramon y Cajal a trouvé des arborisations libres dans la couche des grains internes. Il pense que ces arborisations ne sont autres que les ramifications terminales du prolongement cylindraxil des cellules nerveuses que nous venons de décrire. Cela est fort probable; néanmoins jusqu'ici on n"a pas encore pu pour- suivre directement un de ces prolongements cylindraxils jusque dans les couches de la rétine. La démonstration du fait n'a donc pas été fournie. D'après Ramon y Cajal, ce prolongement nerveux ascendant, arrivé au niveau des arborisations rétiniennes profondes, fournit elle-même une riche arborisation transversale, aplatie et comme frisée, s'étalant dans l'épaisseur de cette couche; les deux cellules qu'il représente dans sa FIG. 2 en sont pourvues. Sur les nombreuses cellules de ce type que nous avons eues sous les yeux, nous n'avons jamais vu cette arborisation colla- térale naître du cylindre-axe, mais toujours du prolongement protoplasma- tique voisin soit comme arborisation collatérale, soit comme arborisation terminale. Le prolongement cylindraxil ne fournit le plus souventàce niveau que quelques rares et courtes branches collatérales. Quelquefois même ce prolongement ne naît de la tige protoplasmatique que dans la couche externe, fig. il,/. Si l'hypothèse se confirme que les prolongements protoplasmatiques forment l'appareil de perception du mouvement et le prolongement cylin- draxil son appareil d'application, nous pouvons conclure au rôle que joue une cellule nerveuse par le simple examen de sa structure morphologique. Pour les cellules qui nous occupent, il est évident que latige protoplasmatique périphérique est la seule importante; n'étant en contact qu'avec les ramifi- cations rétiniennes, elle ne peut transmettre à la cellule nerveuse et à son prolongement cylindraxil que l'ébranlement nerveux amené par les fibres rétiniennes. Les cellules nerveuses à cylindre-axe long et périphérique auraient donc pour principale fonction de renseigner les cellules nerveuses LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 31 de la rétine sur la nature et l'intensité des ébranlements amenés par les fibres rétiniennes. Cependant le prolongement cylindraxil de toutes ces cellules nerveuses ne se comporte pas de la même façon. Pour un grand nombre de cellules il est manifeste qu'il reste tout entier dans le lobe optique; il finit alors par un grand nombre de ramilles terminales, soit au niveau de la première rangée des cellules nerveuses optiques, fig. 10, b, c et /, soit entre les fibres rétiniennes profondes, fig. 10, a et d, soit même immédiatement en dessous des fibres nerveuses périphériques, fig. 10, h. Sur cette même figure, nous avons représenté, en / et /, des ramifications terminales de deux prolongements cylindraxils, dont nous ne connaissons pas les cellules d'origine. Selon toute probabilité, elles proviennent de cellules nerveuses du même type que celles que nous venons de décrire. Ce mode de terminaison du prolongement cylindraxil peut faire sup- poser l'existence, dans la couche externe, de cellules nerveuses dont le prolongement cylindraxil pénétrerait directement dans la couche des fibres nerveuses périphériques; ces cellules seraient ainsi interposées entre les cellules nerveuses optiques à cylindre-axe périphérique et les éléments nerveux de la rétine. De nouvelles recherches sont nécessaires pour élu- cider ce point. D'après Ramon y Cajal, ce sont là les seules cellules nerveuses qui envoient leur prolongement cylindraxil dans la bandelette optique. Ce sont aussi les seuls éléments dont nous avons vu le prolongement nerveux se couder pour entrer dans la zone des fibres nerveuses périphériques. Cepen- dant, en dehors de ces cellules, nous avuns trouvé quelquefois dans la zone granuleuse, voisine des fibres rétiniennes, des cellules nerveuses fusitormes ^ pourvues de prolongements protoplasmatiques se ramifiant dans cette couche externe et d'un prolongement cylindraxil qui, né du pôle interne de la cellule, se recourbe sur lui-même et traverse toute l'épaisseur de la couche externe jusque contre les fibres périphériques. Malheureusement, la réduction n'était pas complète; de sorte que nous ignorons si, oui ou non, ce prolongement va devenir une fibre constitutive de la bandelette optique. Nous avons représenté deux de ces cellules dans la fig. 7, a. Des cellules à cylindre-axe périphérique se remarquent encore au niveau de la première rangée de cellules nerveuses optiques ou immédia- tement en dessous : témoins les cellules ^ et c de la fig. 6. Mais nous n'avons pu poursuivre le prolongement nerveux que jusque vers le milieu 32 A. VAN GEHUCHTEN de la couche externe. Non pas qu'il trouvât là sa terminaison, mais parce qu'il avait été sectionné par le rasoir. Ces cellules nerveuses ont un caractère commun avec les éléments dont le prolongement cylindraxil a été poursuivi par Ramon y Cajal et par nous jusque dans la couche des fibres périphériques : elles sont dépourvues de pi^olongements protoplas- matiques internes, mais riches en prolongements externes qui se ramifient abondamment et se terminent librement dans la couche externe dans la- quelle elles s'enlacent avec les ramifications des fibres rétiniennes. B. Cellules nerveuses à cyiindre-axe court. a) Cellules nerveuses à cylindre-axe court et descendant. Ces cellules existent en abondance dans la zone granuleuse externe de la couche moyenne, zone que nous avons indiquée dans toutes nos figures par deux lignes ponctuées parallèles. D'un corps cellulaire petit et fusiforme partent des branches protoplasmatiques périphériques, qui se terminent dans la couche externe, et un prolongement nerveux central très grêle et très délicat. Celui-ci se dirige en dedans et se termine par un grand nombre de branches longues et grêles, horizontales et verticales, finissant ' librement entre les ramifications protoplasmatiques des cellules nerveuses optiques du i' et du 3^ type. Ces éléments servent probablement à trans- mettre à la fois à un grand nombre de cellules optiques l'ébranlement amené par une fibre rétinienne. Nous avons représenté dans la fig. 9 trois de ces cellules. Elles ont été décrites par Ramon y Cajal comme éléments constitutifs de sa S« couche. Dans cette zone granuleuse, elles se trouvent mêlées à des cellules optiques et à un grand nombre d'éléments neurogliques. Les éléments nerveux à cylindre-axe court et descendant n'existent pas seulement dans la zone granuleuse externe; on en trouve aussi dans la profondeur de la couche moyenne : témoin la cellule e de la fig. 7. b) Cellules nerveuses à cylindre-axe court et ascendant. Nous avons représenté dans la fig. 3 un élément à cylindre-axe court et ascendant, provenant de la partie moyenne de la couche des cellules nerveuses optiques. Comme cette figure le montre, le corps cellulaire est petit et pourvu seulement de trois petites branches protoplasmatiques. Du sommet externe part un prolongement cylindraxil qui se résout en LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 33 un grand nombre de ramilles horizontales et descendantes, se terminant librement entre les ramifications collatérales des cellules nerveuses op- tiques. Ces cellules ressemblent complètement à celles décrites par Golgi, Martinotti et Ramon y Cajal dans la couche corticale grise du cerveau. Des éléments appartenant au même type, mais d'une conformation quelque peu spéciale, ont été représentés dans la fig. 4. Le corps cellulaire présente quelques prolongements protoplasmatiques périphériques et un cylindre-axe qui, arrivé en dessous de la zone granuleuse, se rencourbe, devient horizontal pour se terminer bientôt librement à quelque distance du corps dont il émane. Outre ces éléments nerveux que l'on peut ranger facilement dans l'un ou l'autre des quatre groupes cellulaires que nous venons de décrire, on trouve encore dans la couche moyenne des cellules nerveuses à cylindre- axe long, mais à direction hori:{ontale . Pour la cellule représentée dans la FIG. 10, k, nous avons pu poursuivre le prolongement nerveux sur une longueur considérable. Il conservait toujours sa direction primitive et n'émettait pas de branches collatérales. Ces mêmes cellules ont été vues par Ramon y Cajal; pas plus que lui, nous ne pouvons dire ce qu'il advient de leur prolongement cylindraxil. Plusieurs particularités compliquent notablement la structure de la couche moyenne, ce sont : 1° Les prolongements protoplasmatiques longs et variqueux qui pro- viennent des cellules volumineuses internes. Nous avons représenté dans la partie droite de la fig. 12 quelques-uns de ces prolongements, tels que nous les avons vus dans un grand nombre de nos préparations. 2° Les collatérales qui proviennent des fibres nerveuses de la couche interne se divisent et se subdivisent dans la couche moyenne, pour se ter- miner librement entre les arborisations rétiniennes, fig. 13. Il nous a été impossible de vérifier si ces collatérales proviennent de prolongements cylindraxils des cellules nerveuses optiques de la couche moyenne, ou bien de fibres nerveuses venues d'un endroit inconnu de l'axe cérébro-spinal et se terminant dans les lobes optiques. 3° Les ramifications terminales de fibres nerveuses qui proviennent de la substance blanche interne. Dans la partie gauche de la fig. 12 se trouvent reproduites deux de ces fibres que l'on voit sortir de la couche interne en se coudant à angle droit sur elles-mêmes. Elles pénètrent dans la couche moyenne, où elles subissent des divisions répétées, et se terminent 34 A. VAN GEHUCHTEN enfin par un grand nombre de branches dans les parties profondes de la couche externe. Ces fibres sont, sans aucun doute, les prolongements cylin- draxils de cellules nerveuses dont nous ignorons le lieu d'origine. Elles ont été signalées aussi par Ramon y Cajal et représentées dans sa fig. 4. 4" Enfin quelques éléments de neuroglie à corps cellulaire petit, d'où partent des prolongements longs, grêles et d'un diamètre uniforme, qui se terminent dans la couche externe, fig. 7. III. COUCHES DES FIBRES OPTIQUES CENTRALES. Cette couche a une structure très simple. Elle est formée de fibres nerveuses dont l'origine est double : les unes, les plus nombreuses, ne sont que les prolongements C3'lindraxils des cellules nerveuses optiques que l'on trouve à tous les niveaux de la couche moyenne. Il est facile de s'en con- vaincre sur des préparations quelque peu réussies. Les autres,, en petit nombre, ne naissent pas du lobe optique, mais y trouvent au contraire leur terminaison. Entre ses fibres se trouvent encore quelques cellules nerveuses iden- tiques aux cellules de la zone ganglionnaire de la couche moj'enne. La couche interne est limitée en dedans par une série régulière de cellules épithéliales qui forment l'épithélium épendymaire. Ces cellules présentent un prolongement périphérique qui traverse toute l'épaisseur du lobe optique pour aller se terminer par un épaississement conoïde à la limite externe de la zone des fibres superficielles, fig. 13, p. Ce prolon- gement ne porte que quelques petites branches collatérales irrégulières près du corps cellulaire, et s'infléchit légèrement au moment où il traverse les fibres optiques superficielles, fig. 13. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. De l'étude que nous venons de faire de la structure des lobes optiques de l'embryon de poulet, nous pouvoûs tirer deux séries de conclusions. I. Au point de vue morphologique. On peut distinguer dans le lobe optique de l'embryon de poulet du 18^ au 20« jour d'incubation trois couches, plus ou moins distinctes, qui corres- LA STUCTURE DES LOBES OPTIQUES 35 pondent assez bien aux trois couches que nous avons admises dans le bulbe olfactif des vertébrés ( i). 1° La couche des fibres rétiniennes^ où viennent se terminer par des arborisations libres et à des niveaux différents (ordinairement quatrej, la plupart des fibres nerveuses de la bandelette optique, en même temps que les ramifications terminales des prolongements protoplasmatiques périphé- riques de toutes les cellules nerveuses optiques de la couche moyenne. Entre ces arborisations rétiniennes et ces ramifications protoplasmatiques, on trouve des cellules nerveuses à cylindre-axe descendant. Pour les unes, le cylindre-axe est court et se termine dans les parties superficielles de la couche moyenne; pour les autres, le cylindre-axe est long et se continue quelquefois avec une fibre optique centrale de la couche interne. Outre les cellules de neuroglie, on trouve dans cette couche des cellules volumineuses à direction horizontale, dont nous ignorons la destinée du prolongement cylindraxil. La couche des fibres rétiniennes correspond à la couche des fibrilles olfactives du bulbe olfactif des mammifères, avec cette différence que, dans le lobe olfactif, la rencontre des fibrilles avec les prolongements protoplas- matiques des cellules mitrales se fait dans les glomérules. 2° La concile des cellules nerpeuses optiques, formée essentiellement de cellules qui toutes envoient leurs prolongements protoplasmatiques entre les arborisations rétiniennes de la couche externe. Le prolongement nerveux des cellules à cylindre-axe long se rend, tantôt dans la couche interne, où il va devenir une fibre nerveuse optique centrale; tantôt dans la couche externe où il va devenir une fibre optique périphérique et pénétrer, pro- bablement, jusque dans les couches profondes de la rétine. Les cellules à cylindre-axe interne correspondent aux cellules mitrales du bulbe olfactif; celles à cylindre-axe externe n'y ont pas été signalées jusqu'ici. Les cellules nerveuses à cylindre-axe court appartiennent aussi à deux groupes distincts, suivant que leur prolongement nerveux est périphérique ou central. Des éléments à cylindre-axe court périphérique ont seuls été signalés dans le bulbe olfactif des vertébrés. On ignore la destinée du prolongement cylindraxil des éléments à cylindre-axe horizontal. (i) A. Van Gehuchten et I Martin. Le bulbe olfactif che^ quelques mammifères; La Cellule, t. VII, fasc. 2 i8qi. 36 A. VAN GEHUCHTEN 3° La couche des fibres optiques centrales est formée essentiellement de fibres nerveuses dont l'origine est double. Tantôt elles proviennent des cellules nerveuses optiques delà couche moyenne, comme les fibres nerveuses de la couche interne du bulbe olfactif proviennent des cellules mitrales ; tantôt elles ont une origine inconnue et viennent se terminer dans les deux couches externes. Ramon y Cajal admet aussi l'existence de pareilles fibres dans le bulbe olfactif des mammifères. Dans les recherches que nous avons faites avec Martin nous n'avons pu les retrouver. Cette couche est limitée par l'épithélium épendymaire. 4° Du fait que les fibres du nerf optique se terminent librement dans la couche externe du lobe se dégage une conclusion importante : contrairement à ce qu'on avait toujours cru jusqu'ici, le nerf optique n'a pas son origine dans le lobe optique, mais bien sa terminaison. n. Au point de vue physiologique ou fonctionnel. 1° La transmission de l'ébranlement nerveux des fibres rétiniennes aux cellules nerveuses optiques ne se fait par continuité, mais par contact. 2° Cette transmission a lieu entre les ramifications terminales du prolongement cylindraxil des cellules nerveuses de la rétine et les ramifica- tions protoplasmiques des cellules nerveuses optiques. 3° Les prolongements protoplasmiques des cellules nerveuses optiques participent donc à la fonction de conduction, aussi bien que le prolongement cylindraxil. 4° Les rapports qui existent entre les divers prolongements des élé- ments nerveux des lobes optiques semblent confirmer l'hypothèse que les prolongements protoplasmatiques ont une conduction cellulipète, et le pro- longement cylindraxil une conduction cellulifuge. 5° Au point de vue des rapports qui existent entre les éléments op- tiques et les éléments rétiniens, les cellules de la couche moyenne du lobe peuvent être rangées en deux groupes : a) Dans le premier groupe rentrent toutes les cellules optiques qui n'ont qu'un seul prolongement protoplasmatique périphérique. Elles pré- dominent surtout dans la moitié externe de la couche moyenne. Par ce prolongement unique les cellules ne peuvent recevoir l'ébranlement nerveux que à'un petit nombre de fibres rétiniennes voisines : soit que ces fibres Hanche L yaii'Jehiichietx^_ixd.na.t £ieL. liih..CSeffertyns.sa£A'''^l(k/fan Flanelle II i an -TîhuehireK- ccdiruxi: JL^l ■S Suxrei/ns sua 'JL Gçffin r 'jte^e, sa. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 37 viennent directement en contact avec les ramifications terminales du pro- longement protoplasmatique de la cellule elle-même; soit qu'elles transmet- tent l'ébranlement nerveux à une cellule à cylindre-axe court et, par celle-ci, aux prolongements protoplasmatiques des cellules optiques (prolongements nés de la base des cellules pour les éléments du i'' type, branches collaté- rales émises dans la couche moyenne par la tige protoplasmatique périphé- rique pour les éléments du 3^ type) Chaque cellule nerveuse optique de ce groupe peut donc transmettre au cerveau soit l'excitation amenée par une seule fibre rétinienne, soit l'excitation amenée \)a.r plusieurs fibres rétiniennes, mais seulement par des fibres voisines. b) Dans le second groupe rentrent toutes les cellules nerveuses opti- ques voisines de la couche interne (zone ganglionnaire de Ramon y Cajal) et, en outre, un grand nombre d'éléments nerveux éparpillés dans la couche moyenne. Ces cellules sont pourvues de prolongements protoplasmatiques divergents, se terminant tous dans la couche externe à des distances considérables l'un de l'autre. Chacun de ces éléments vient donc toujours en contact avec un grand nombre de fibres rétiniennes, et qui peuvent être 1res distantes l'une de l'autre. Les éléments du premier groupe peuvent servir à nous renseigner sur la nature de l'excitation produite sur un point limité de la rétine. Ceux du second servent peut-être à nous instruire sur la nature des excitations tom- bées sur des points très éloignés de la rétine; ils nous permettraient ainsi de comparer ces excitations entre elles. 6° L'impression amenée par une seule fibre du nerf optique — venant donc d'une excitation très localisée de la rétine - • peut être transmise aux centres optiques plus élevés soit par une, soit par plusieurs cellules optiques. Par une, quand l'arborisation rétinienne ne vient en contact qu'avec les ramifications terminales d'un seul élément de la couche moyenne. Par plusieurs, quand l'arborisation rétinienne se met en contact avec des pro- longements protoplasmatiques différents ; ou bien quand une fibre rétinienne transmet l'ébranlement nerveux à une ou plusieurs cellules à cylindre-axe court et, par celles-ci, à un nombre considérable de cellules optiques. Les éléments nerveux à cylindre-axe court (cellules sensitives de Golgi) auraient donc dans les lobes pour principale fonction de transmettre à la fois à plusieurs cellules optiques l'ébranlement amené par une seule fibre rétinienne. 38 A. VAN GEHUCHTEN 7° L'excitation transmise au lobe par un nombre considérable de fibres rétiniennes, à la suite d'une excitation très étendue de la rétine, peut être amenée aux centres optiques supérieurs par une double voie : a) Par toutes les cellules nerveuses optiques qui recevront l'ébranle- ment nerveux des fibres rétiniennes avec lesquelles elles sont en contact; cette excitation étendue de la rétine se décomposera donc en un grand nombre d'excitations localisées. b) Par les cellules nerveuses du second groupe, qui amèneront par un seul prolongement cylindraxil au centre optique supérieur la résultante des excitations produites à des points difi"érents de la rétine. 8° Il existe entre la rétine et les centres optiques supérieurs, dans lesquels vont se terminer les prolongements cylindraxils des cellules op- tiques du lobe, une série ininterrompue d'éléments à prolongement nerveux central, se transmettant l'un à l'autre l'excitation périphérique. Voici quels sont les différents anneaux de cette chaîne : Les cônes et bâtonnets de la rétine (Ramon y Cajal). Les cellules- bipolaires de la rétine » Les cellules ganglionnaires de la rétine " (Quelquefois les cellules nerveuses optiques à cylindre-axe court). Les cellules nerveuses optiques. Les centres optiques supérieurs, c'est-à-dire les ganglions optiques du lobe ou, probablement, l'écorce cérébrale dans un endroit encore inconnu. Comme Ramon y Cajal l'a fait remarquer, dans tous ces éléments l'ébranlement nerveux est reçu par les prolongements protoplasmatiques, et transmis par le prolongement cylindraxil. 9° Entre la rétine et les centres optiques supérieurs il existe encore une autre série ininterrompue d'éléments nerveux à prolongement cylin- draxil périphérique, transmettant l'ébranlement nerveux non de la périphérie au centre, mais du centre à la périphérie. Les différents éléments de cette voie centrifuge sont les suivants : a) Les éléments nerveux dont nous ignorons le siège, mais dont le prolongement cylindraxil vient se terminer dans la couche moyenne et dans la couche externe. b) Les éléments nerveux à cylindre-axe court et périphérique de la couche moyenne. c) Probablement les cellules nerveuses de la couche moyenne dont le prolongement cylindraxil devient une fibre nerveuse du nerf optique et va se terminer dans les couches profondes de la rétine. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 39 d) Peut-être des éléments de la couche moyenne dont le prolongement cylindraxil périphérique remonte dans la couche externe, mais n'a pu être poursuivi jusqu'à présent jusque dans le nerf optique. 10° Entre la rétine et les centres optiques il existe donc une double voie, l'une centripète et l'autre centrifuge. 1 1° On peut encore admettre l'existence d'une relation en direction centrifuge entre la rétine et le lobe optique lui-même, mais beaucoup plus courte que celle que nous venons de décrire. Les fibres rétiniennes viennent en effet en contact avec les prolongements protoplasmatiques des éléments nerveux de la couche moyenne à cylindre-axe rétinien. Il serait saus aucun doute prématuré de vouloir attribuer un rôle phy- siologique quelconque à ces voies centrifuges. Il suffit pour le moment de les avoir signalées, et d'avoir appelé l'attention des observateurs sur ces con- nexions multiples qui existent entre la rétine et les centres optiques supérieurs. EXPLICATION DES FIGURES N. B. Poui' rendre nos figures comparables nous les avons dessinées toutes au même grossissement : Zeiss D, 2. Il n'y a d'exception que pour la fig. 12 qui a été considérablement réduite. FIG. 1. Dans cette figure nous avons représenté les arborisations rétiniennes de la couche externe, A, et quelques cellules nerveuses optiques de la couche moyenne, B. fr. Zone des fibres nerveuses périphériques. ■ a et b. .Arborisations superficielles, i''^ rangée. c et d. Arborisations profondes, 4"= rangée. e. Arborisations rectangulaires, 3= rangée. /. Arborisations cuboïdes, 2^ rangée. Les cellules nerveuses optiques sont pourvues d'un prolongement protoplasmatique interne richement ramifié et d'une grosse tige périphérique qui se termine à des niveaux différents de la couche externe, quelquefois par un bouquet horizontal au niveau des arborisations rétiniennes profondes, k. Le prolongement cylindraxil naît de la tige périphérique et traverse la couche moyenne en émettant de nombreuses collatérales, i. h. Cellule nerveuse optique à prolongements protoplasmatiques périphériques divergents. FIG. 2. Cellules nerveuses optiques à cylindre-axe central formant une rangée continue, souvent double, un peu en dedans de la zone granuleuse indiquée, dans nos figures, par deux lignes ponctuées. Le prolongement protoplasmatique périphé- rique se termine dans la couche externe où il arrive en contact avec les arborisa- tions rétiniennes. Les nombreuses branches qui naissent des faces latérales et de la base du corps cellulaire s'entrelacent avec les branches des cellules voisines et avec celles' des cellules optiques de la fig. 1. Le prolongement cylindraxil né de la base émet de nombreuses collatérales, /. FIG. 3. Deux cellules de la couche moyenne : a. Cellule nerveuse optique analogue à celle de la fig. 1 . b. Cellule à cylindre-axe court et périphérique. FIG. 4. Deux éléments nerveux à cylindre-axe court et périphérique de la couche movenne. 42 A VAN GEHUCHTEN FIG. 5 Différents éléments nerveux de la couche externe : a. Petites cellules à cylindre-axe long formant la rangée cellulaire externe. b et c. Cellules analogues de la rangée interne et du milieu de la couche externe. d et e. Cellules optiques de la couche externe. y. Cellules à C3'lindre-axe court de la zone granuleuse de la couche moyenne. h. Petite cellule optique de la même zone. i. Grande cellule optique de la couche moyenne à prolongements protoplas- matiques périphériques nombreux et divergents. 7î. Eléments de neuroglie. FIG. 6. Différents types de cellules horizontales de la couche externe. a. Cellule horizontale dont le prolongement cylindraxil se bifurque en une branche ascendante et une branche descendante à une petite distance du corps cellulaire. b, c, d, e. Cellules horizontales de la couche moyenne. Les cellules b ei c étaient seules pourvues d'un prolongement cylindraxil qui retourne dans la couche externe. FIG. 7. Différents éléments nerveux de la couche moyenne : a. Cellules de la zone granuleuse externe à C3dindre-axe périphérique. b. Grandes cellules optiques horizontales ou obliques pourvues de nombreux prolongements protoplasmatiques périphériques et divergents. c. Cellule horizontale volumineuse à cylindre-axe descendant. d. Cellules optiques analogues à celles de la fig. 1, mais dépourvues de tige protoplasmatique périphérique. Le prolongement cylindraxil remonte jusque dans la couche externe avant de se recourber pour se rendre à la couche des fibres centrales. i. Collatérales des prolongements nerveux. n. Cellules de neuroglie. FIG. 8. Cellules nerveuses à cylindre-axe court descendant de la couche externe. FIG. 9. Cellules nerveuses à cylindre-axe court descendant de la zone granu- leuse de la couche mo5'enne. FIG. 10. Différents types de cellules nerveuses à cylindre-axe long périphérique de la couche moyenne. Dans toutes ces cellules le cylindre-axe se termine dans la couche externe : a. Entre les arborisations rétiniennes profondes. b, c et y. Entre les cellules optiques externes de la couche moyenne. d et e. Au niveau des arborisations moyennes. h et /. Entre les arborisations rétiniennes superficielles. / et j . Ramifications cj'lindraxiles de cellules nerveuses probablement analogues aux cellules voisines. k. Cellule horizontale de la couche moyenne. m. Cellule horizontale de la couche externe. n. Cellule de neuroglie. FIG. 11. Cellules nerveuses à cylindre-axe long et périphérique qui, arrivé dans la zone des fibres superficielles, se coude pour se rendre probablement à la rétine. LA STRUCTURE DES LOBES OPTIQUES 43 FIG. 12. ppi'- Prolongements protoplasmatiques des cellules internes de la' couche moj'enne. pcy. Fibres nerveuses de la couche interne qui traversent la couche moyenne, s'v divisent et s'y subdivisent pour se terminer dans la couche externe. FIG. 13. Coupe antéro-postérieure du lobe optique d'un embryon de poulet du 18= au 20^ jour d'incubation dans laquelle nous avons réuni la plupart des éléments des trois couches. A. Couche externe avec la zone des fibres nerveuses périphériques, fr, les arborisations rétiniennes et les différents éléments nerveux. B. Couche moyenne des cellules optiques. Nous y avons reproduit deux des cellules volumineuses internes avec tous leurs prolongements. C. Couche interne des fibres optiques. Les unes ne sont que les prolongements cylindraxils des cellules nerveuses optiques de la couche moyenne, les autres pro- viennent d'un endroit encore inconnu et viennent se terminer dans le toit optique. En bas et à droite deux tronçons de fibres nerveuses d'où naissent des collatérales ascendantes. Cette couche est nettement limitée par l'épithélium épendymaire, ép. Flanche JU ,-Jl/^^ Jtihvuihlen; a^n^it dtl L;}h . G. Sesereyns. soix ''JI Gojjar' F (jreJe. se- M RECHERCHES MORPHOLOGIQUES ET CHIMIQUES I SUR LES GRAINS DE POLLEN PAR Ph. BIOURGE DOCTEUR EN SCIENCES NATURELLES. (Mémoire déposé le x"^^ mars 1892J. RECHERCHES MORPHOLOGIQUES ET CHIMIQUES SUR LES GRAINS DE POLLEN INTRODUCTION. Lorsque l'idée nous vint d'aborder cette étude, nous étions persuadé, à la lecture du Traité de Botanique de van Tieghem (Paris, 1884), que le sujet était à peu près épuisé. Hélas! la première préparation nous dérouta complètement. Nous eûmes recours aux travaux spéciaux les plus récents. Dans son livre de 1889(1), M. Strasburger retire sa théorie de 1882 (2) concernant le rôle de l'épithélium interne du sac pollinique (Tapetenzelle) dans la formation des membranes des grains de pollen. Les cellules en tapis ne prendraient plus part à cette formation, contrairement à ce qu'il avait sou- tenu tout d'abord, en s' appuyant, semblait-il, sur un grand nombre d'obser- vations précises. D'autre part, dans son Manuel technique d'Anatoniie j'e'gétale (trad. 1886) il énonce sur le pollen des liliacées, etc., des idées absolument contraires à la réalité. En 1887 et 1889, M. Mangin communi- quait à la Société Botanique de France deuJc notes, dans lesquelles nous avons trouvé des idées neuves sur la composition chimique des membranes du pollen mùr et de ses cellules-mères. Quelques essais suffirent pour nous montrer que l'auteur de ces notes faisait faire de ce côté un sérieux progrès à la science. Comme, au surplus, il contredit M. Strasburger sur les points où nous ne pouvions non plus admettre ses idées, nous avons cru qu'il serait bon de vérifier point par (1) Strasburger : Ueber das Wachsthum vegctabilischcr Zellhâute. (2) Strasburger : Ueber den Bau -und das Wachsthum der Zellhâute. 48 PH. BIOURGE point les assertions des deux savants, et d'apporter à la solution des ques- tions en litige notre part d'o,bservation. Les questions discutées reviennent en définitive à l'existence d'une dou- ble paroi complète dans tout pollen : l'exine et l'intine. L'intine, d'après M. Strasburger, n'existerait qu'au niveau des pores dans toute la famille des onagrariées, tandis que dans les liliacées, les amaryllidées, etc., l'enve- loppe unique, cutinisée dans sa plus grande moitié, resterait cellulosique au niveau du sillon : ces deux portions joueraient, la première le rôle de l'exine, la seconde, celui de l'intine. M. Mangin décrit, au contraire, une double membrane dans les deux cas précités et dans beaucoup d'autres encore. Il ne donne malheureuse- ment aucune gravure. Nous espérons qu'il comblera cette lacune dans le mémoire détaillé qu'il annonce dans la note rappelée plus haut. On trouvera dans Hérailm) une bibliographie très bien faite de notre sujet. Il sera aisé de constater que, jusqu'à M. Mangin, aucun ouvrage ne cite d'autres substances dans les membranes que la subérine ou la cutine et la cellulose. Nous compléterons la liste précédente à l'aide de la dissertation inaugurale de M. Aug. Œtker. L'auteur se demande si le pollen pourrait servir de caractère différentiel aux familles végétales. Il mesure et décrit cinq ou six cents espèces de pollen; malheureusement encore, ce travail considérable n'est accompagné d'aucune figure. Au point de vue chimique, nous reconnaissons, avec M. Mangin, quatre groupes de substances fondamentales dans les enveloppes polliniques aux divers stades du développement, à savoir : la subérine ou cutine, la cellulose, les corps pectiques et la callose. Les réactions suivantes carac- térisent ces divers types. Cutine : insolubilité dans l'acide sulfurique concentré, coloration par l'iode en jaune plus ou moins foncé. La potasse caustique, surtout au i/io, la colore en jaune, en orangé ou en rose. Cellulose : solubilité dans la liqueur de Schweitzer, ou dans l'acide sulfurique concentré. Coloration bleue par l'acide phosphorique sirupeux iodé, le bichlorure d'étain (SnCl.2) iodé; l'iode et l'acide sulfurique dilué (1) Hérail : Organes reproducteurs et formation de l'œuf che^ les Phanérogames; Paris, (2I Aug. Œtker : Zeigt der Pollen, etc..' Berlin, 1889. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 49 jusqu'au 2/3 et, enfin, le réactif classique, le chloro-iodure de zinc, ou bien, et de préférence, l'iode suivi du chlorure de zinc. Groupe pectique : coloration nulle par les réactifs iodés de la cellulose; coloration bleu-violacée parle bleu de méthylène neutre ou acétique (1 0/0), orangée par la safranine acétique ou neutre : ces colorations disparaissent par un excès d'acide, par l'alcool, la glycérine; solubilité dans l'oxalate ammonique et, après l'action de l'alcool chlorhydrique, dans tous les sels alcalins; gonflement et solubilité dans l'eau, après l'action prolongée de la potasse diluée (ancienne macération potassique pour la dissociation des tissus végétaux). Callose : insolubilité dans l'eau, l'alcool, l'acide chlorhydrique, le réactif de ScHWEiTZER, même après l'action des acides; coloration nulle ou jaune par les réactifs cellulosiques iodés et faiblement concentrés; solubilité dans la potasse et la soude à 1 0/0, l'acide sulfurique, les chlorures de calcium, d'étain et de zinc concentrés; insolubilité dans l'ammoniaque et dans les carbonates alcalins à froid. Coloration en bleu de ciel par le bleu d'aniline aqueux : ce réactif est très électif; par l'acide rosolique, les azo-benzidines, etc. Ces réactions sont celles du cal des tubes cribreux : ce qui a déterminé M. Mangin à créer le nom de callose. Dans une note subséquente (1), M. Mangin donne une classification des couleurs d'aniline au point de vue de leur électivité pour ces diverses matières. Nous les avons essayées pour la plupart, et nous devons avouer que nous n'avons pas été entièrement satisfait de l'essai. Nous gardons en pratique le bleu de méthylène pour le groupe pecti- que, comme le plus actif et le plus résistant aux agents chimiques, ainsj que le bleu d'aniline pour la callose. Ce dernier par l'action subséquente de dissolvants alcalins ou acides nous a permis de distinguer plusieurs va- riétés de cette substance, que nous aurons l'occasion de signaler. Le con- goroth se fixe sur la cellulose et la callose; l'action d'un dissolvant de la dernière substance met ensuite en évidence tout ce qui est cellulosique. L'éosine soluble dans l'eau, ainsi que la nigrosine ne restent fixées, après lavage soigné, que sur les matières azotées. Les mêmes matières se teignent en vert par le bleu de méthylène. (1) Mangin : Comptes rendus de l'Académie des sciences; Paris, 1889-90. 50 PH. BIOURGE EXPOSE DES RECHERCHES. Monocotylédonées. Amaryllis formosissim a. Examiné dans l'air à un grossissement de 400 diamètres, le pollen de cette espèce est jaune, allongé, brillant aux deux bouts, où il est facile de constater la présence de pores dans le réseau cuti- nisé superficiel. Le pli ou sillon non cutinisé est tantôt rectiligne, tantôt brisé, FiG. 1. Dans l'eau, ou mieux l'iodure de potassium iodé, la forme générale devient celle d'un quartier d'orange, dont les faces planes, en dièdre, sont cutinisées. On remarque sur l'arête un renflement très sensible, auquel correspond un détail interne dont nous parlerons plus loin. Notons dès à présent que le réseau, représenté dans la fig. 2, recouvre le pollen tout entier, sauf aux pores, qui sont d'ailleurs en dehors du sillon. Seulement la membrane basale de l'exine, ou l'exine interne, n'existe ou plutôt n'est cutinisée que sur les deux faces du dièdre. C'est ce que démontre l'emploi des réactifs. En effet, le bleu de méthylène colore en vert les deux faces du dièdre, accusant ainsi la cutine; et en bleu-violacé la membrane protectrice du sillon, ainsi qu'un léger amas situé sous le ren- flement signalé plus haut. La disparition de la teinte bleu-violacée par un lavage à l'acide acétique à 1 0/0 indique la présence de matières pectiques. L'iode suivi du chlorure de zinc produit des effets variés et très in- structifs. Quelques grains éclatent en expulsant leur masse plasmatique, maintenue dans sa forme ovale et colorée en jaune-vert. D'autres se gon- flent lentement du côté du pli; la plupart, d'abord jaunis par l'iode seul, deviennent bruns par le contact du chlorure de zinc, sans subir d'autres changements. Les grains gonflés nous montrent la structure de l'exine. Le mince liséré .extérieur, qui représente en coupe optique le réseau superficiel, et qui se distend et se disloque peu à peu, forme l'exine externe. Immédiatement en dessous se trouve la couche colorée en bleu dans la préparation au bleu de méthylène; elle constitue l'exine interne. Elle est ici incolore. A l'intérieur on aperçoit une masse verdâtre, semblable à celle que nous avons vu expulser par d'autres grains; étudions-la à l'état de RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 51 liberté. En la faisant rouler sous le couvre-objets, nous lui trouvons sur " le dos un orifice rond à contour bleu, par lequel on voit le protoplasme coloré en jaune-brun, fig. 3. Bientôt, sous l'action du chlorure de zinc, le protoplasme retenu en une masse par une metnbrane de Mohl très résistante se gonfle : l'ouverture crève transversalement au grand axe du pollen et l'on a sous les yeux, à côté du plasma jaune, deux calottes sphériques du plus beau bleu et qui représentent l'intine cellulosique. Nous pouvons donc affirmer qu'il y a ici une intine vraie, parfai- tement indépendante de l'exine, et qui est également complète. Nous verrons bientôt que, dans cette espèce, comme dans plusieurs autres, l'intine n'est pas formée exclusivement par cette couche cellulosique. Nous appelons, par analogie, intine interne, cette tunique appliquée immédia- tement sur le protoplasme. Remarquons que c'est la combinaison des teintes jaune du protoplasme et bleue de l'intine qui fait paraître verte, dans le chloro-iodure de zinc, la masse expulsée de l'exine, et que la présence de cette masse dans un grain intact fera paraître celui-ci brun plus ou moins foncé. Nous avons obtenu la coloration bleue de l'intine par l'iode et le chlo- rure stannique h3''draté sirupeux. Nous l'avons eue également avec l'iode et l'acide phosphorique normal (i). L'exine interne, au niveau du sillon ou de la partie non cutinisée, se colore instantanément en bleu et se dissout très rapidement au contact de l'iode et de l'acide sulfurique au 1/2 ; ce qui indique que cette membrane est formée d'un mélange de matières pectiques et de cellulose peu condensée. L'intine interne se colore en bleu sans se dissoudre. Au contact de l'acide sulfurique concentré, tous les grains éclatent; la partie cutinisée de l'exine se colore en orangé; le reste, ainsi que l'intine,- se dissout; le protoplasme prend une belle couleur rose. L'action de l'acide nitrique prolongée pendant un quart d'heure gonfle fortement l'intine. Après ce traitement, si l'on passe à l'acide phosphorique déliquescent iodé, on la voit d'abord se contracter, puis se dilater énergi- quement et enfin se désagi'éger. La potasse caustique à 5o gr. pour 50 d'eau gonfle très lentement les grains et permet d'en étudier parfaitement la structure. Au bout d'un cer- (i) Cristaux en déliquescence ou acide pur et concentré jusqu'à ce qu'il ne se forme plus de va- peur d'eau. Ce dernier dissout plusieurs variétés de cellulose qui résistent au chlorure de zinc. 52 PH. BIOURGE tain temps, la membi-ane non cutinisée se déchire et livre passage au proto- plasme enveloppé de l'intine interne. Celle-ci, après extraction de l'excès du réactif et lavage à l'iodur'e de potassium iodé, se colore en bleu-rouge. L'action de la potasse diluée à lo et à i % est trop rapide pour être instructive, si l'on n'est pas prévenu de la présence possible de la callose. C'était le cas pour nous lorsque nous étudiions cet objet. Nous verrons plus loin qu'il y a lieu de supposer son existence dans l'intine externe, dont nous allons parler. Si l'on étudie le pollen en germination sur le stigmate, on trouve que la majorité des grains germent par un des bouts, que beaucoup le font par un point du pli plus ou moins rapproché de son milieu, et quelques-uns par les deux bouts à la fois. Nous avons figuré trois exemples de germination. La FiG. 5, où la germination est très avancée, montre le boyau pollinique à paroi simple, cellulosique, en continuité avec l'intine interne seulement. L'intine externe plus mince, présente deux ouvertures, l'une dans l'angle dièdre, l'autre traversée par le boyau pollinique. Elle n'est que très peu cellulosique. Dans la fig. 4, la paroi du tube pollinique est double, les deux intincs contribuant à sa formation. Dans la fig. 6, le pointillé est la coupe optique du réseau non cutinisé de l'exine; l'intine extei"ne est restée enfermée dans l'exine. L'emploi du congoroth G. R., en solution aqueuse, est très avantageux pour l'étude de la germination. La couche cellulosique se teint vivement en rouge, et, si l'on acidifie après lavage soigné, la couleur vire au bleu vif; ce qui rend l'observation plus facile encore à travers l'exine jaune-pâle. Iris biflora. L'exine est complète. Le dessin saillant, qui fait son ornement et représente sa couche externe, est formé de tronçons méandri- ques cutinisés. Dans le pli, ces méandres sont remplacés par quelques gros points, abondants surtout au milieu du sillon. Le fonds, représentant la couche interne de l'exine, ne paraît nettement granuleux, au grossissement de 450 diamètres, que dans le pli, là où les gros points font défaut, fig. 8. Nous la verrons mieux représentée dans \Iris Matthioli, où elle est nette- ment réticulée, fig. 10. L'intine, très épaisse sous le pli où elle est capable d'une dilatation énorme, fig. 7, est mince du côté opposé ; ce qui ne l'empêche pas d'y être encore formée de deux couches très distinctes, dont l'intérieure seule est percée d'un pore très petit, fig. 7, p. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 53 Cette intine a des réactions tout à fait dignes de remarque. De cellulose, ■pas la moindre apparence ; tous les réactifs iodés dissolvent cette mem- brane. Ce n'est pas non plus de la callose pure. En effet, elle ne se colore que très faiblement par le bleu d'aniline et ne se dissout pas dans la potasse à i o/o, même après une heure de contact. L'iode seul ne la colore pas ; elle n'est donc pas non plus amyloïde, comme l'opercule des thèques des pézizes, par exemple. D'autre part, elle se dissout dans le chlorure de zinc au bout de quel- ques minutes; l'acide sulfurique au 2/3 et au 1/2, l'acide phosphoiùque sirupeux la désorganisent instantanément. Le bleu de méthylène ne la colore sensiblement qu'à sa limite interne, à cause de la présence d'un peu de matières pectiques; cette coloration ne reparaît pas après l'action de l'oxalate ammonique. L'acide nitrique au 1/10'^ la dissout au bout d'un quart d'heure. Si on arrête à temps son action, les couches concentriques brillantes sont conser- vées, la substance homogène étant dissoute. Le squelette albuminoïde , d'ailleurs faible, est facilement mis en évidence après lavage soit par l'iode très dilué, soit par l'éosine. En résumé, nous voyons que les acides attaquent fortement et dissolvent l'intine de cet iris. Il en est de même pour les Iris Matthioli, germanica, lurida. D'un autre côté, l'ammoniaque et la potasse à 1, 10, 25, 500/0 ne semblent pas l'attaquer. Admettons qu'il s'y trouve un peu de callose et de matières pectiques et azotées. Que peut bien être le reste .^ Iris pseiido-acoriis. Les résultats sont tout autres dans cette espèce. D'abord la coloration au bleu d'aniline est très riche. Elle passe au violet- rosé, mais ne disparait pas lorsqu'on fait agir le chlorure de zinc. Cette insolubilité semblerait indiquer que nous nous trouvons en présence d'une modification polymérique de la callose ordinaire, laquelle est soluble dans ce réactif. Le bleu de méthylène donne également une coloration très riche, qui disparaît par l'action de l'oxalate ammonique; il y a donc des matières pectiques. L'iode seul colore en jaune la limite externe qui commence à se cuti- niser. Après addition de chlorure de zinc, on voit dans presque tous les grains la couche interne, ou intine interne, se colorer fortement en bleu. Lorsqu'elle ne se colore pas, c'est le plus souvent qu'elle se dissout. 8 54 PH. BIOURGE Un fait plus étonnant encore est le suivant : si l'on prend une fleur du faux-acore un peu moins avancée, on arrive au même résultat qu'avec les espèces étudiées plus haut. 'Faudrait-il conclure de là que le pollen de ces espèces, même en pleine déhiscence, n'était pas mùr? ou bien qu'il ne mûrit pas? Une chose certaine, c'est que les avortements de tétrades, fig. 9, en tout ou en partie, sont très fréquents, le travail de formation s'arrètant après l'achèvement de l'exine, ou même de l'intine. Iris germanica. La couche externe de l'intine y pi'ésente une structure évidente. Elle est formée de pointes très courtes, très serrées et iqui, vues de face, donnent l'impression d'un pointillé très fin, fig. 12; tandis que, vues obliquement, elles font naître l'illusion d'une striation radiale de toute l'intine. Pour éviter cette illusion, il faut examiner les grains en coupe équatoriale parfaite. Le réseau superficiel de l'exine externe est formé de lignes granuleuses saillantes. Ces lignes cessent brusquement au niveau du pli. Aloe verrucosa. L'exine est chargée de pointes très petites et peu serrées. Nous n'en dessinons que la partie cutinisée, fig. 13. Le bleu de méthylène révèle par une coloration très intense la présence, au niveau du sillon, d'une quantité considérable de matières pectiques. On constate dans la série des essais microchimiques que l'intine est formée d'une couche pectique, fortement épaissie à ce niveau, et d'une couche cellulosique beau- coup plus forte que dans d'autres espèces, fig. 14. La petite cellule de la figure, très allongée est contournée en arc de cercle. Nous en avons vu qui formaient presque un cercle complet, fig. 14. Le noyau de cette cellule se colore très intensément par le bleu de méthylène acétique. Celui de la grande cellule, placé généralement dans la courbure de la petite, se colore beaucoup moins bien. La fig. 15, représentant une germination dans le suc de la fleur, montre que la couche cellulosique contribue seule à la formation du tube pollinique, à l'encontre de ce qui se passe souvent chez l'amaryllis. Cette figure prise, comme toutes les autres d'ailleurs, à la chambre claire prouve surabondamment l'existence de plusieurs enveloppes indépendantes dans le pollen étudié. Hemerocallis jiava. La disposition générale est la même que dans les espèces précédentes. L'exine, bien cutinisée en dehors du sillon, est réticulée, fig. 16. Les mailles petites et serrées du côté du pli deviennent larges et très saillantes sur les faces et sur le dos, fig. 17. On peut constater de ce côté que le fond, c'est-à-dire l'exine interne, est pointillé et même réticulé. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 55 La couche interne de l'intine est nettement cellulosique; les couches" extérieures sont pectiques. La première membrane des jeunes cellules-mères isolées est insoluble dans la potasse à i o/o, soluble dans le chlorure de zinc. Elle est formée, selon nous, par une variété de callose. La callose véritable, soluble dans la potasse à i o/o, apparaît ensuite. Dans les tétrades la couche la plus interne résiste davantage aux réactifs. Hcnierocallis Sieboldii. Le gaufrage de l'exine, plus saillant, est for- mé de gros tubercules allongés, donnant la sensation d"un réseau brillant, FiG. 18 et 19. La couche interne de l'intine est cellulosique. Les autres couches épaissies sous le pli sont de nature pectique. Le bleu d'aniline n'y révèle pas de callose. Hem erocû lits fiilva. Les fig. 20 et 21 représentent le réseau super- ficiel tel qu'il est au sortir des tétrades. On voit qu'il est nettement constitué ; les mailles, petites vers les bouts et sur un des bords du sillon, sont larges sur le dos et sur l'autre bord du pli. Les jeunes cellules-mères, récemment isolées, présentent dans leur membrane à peu près les mêmes réactions que celle àe Hemerocallis flava. Coloration faible par les bleus d'aniline et de méthylène ; insolubilité dans la potasse à i o/o. De plus, insolubilité dans le chlorure de zinc et affinité pour l'éosine et l'iode, réactions qui semblent indiquer que les matières azotées y sont prédominantes. La callose apparaît, comme toujours, en couches concentriques. Nous savions que cette substance se dissout dans l'acide sulfurique concentré. Nous avons voulu expérimenter jusqu'à quel degré de concentration elle peut supporter l'acide. Aux 1/20, 1/10, 1/7, 1/3, on ne s'aperçoit pas de l'action de l'acide. Au 1/4 la substance gonfle un peu. Au 1/3 les couches concen- triques ne sont plus visibles. Au 1/2 la dissolution est instantanée, même pour la couche externe. Nous avions traité préalablement la préparation par liode. A aucun moment de l'expérience nous n'avons obtenu de colora- tion bleue ou rouge pouvant faire supposer une parenté directe de cette substance avec la cellulose. Si, sans passer par l'iode, on commence par l'acide au 1/4, la callose le supportera jusqu'aux 2/3. La couche externe ne s'y dissoudra même pas, à cause de la présence des matières azotées. I 56 PH. BIOURGE Le stade tétrade mérite une mention spéciale. Le fait que nous allons énoncer est connu dans le règne animal. Il est décrit notamment par M. Carnoy, dans " La Cellule » (i), et il se retrouve dans le règne végétal, par exemple, ça et là dans la division des oogones de Pehetia canaliculata et d'autres algues. Il a été décrit en partie par M. Strasburger dans V Hemerocallis flava (2). Mais, outre que ce dernier semble ne pas l'avoir suffisamment étudié, il lui attribue une portée qu'il ne nous parait pas avoir. C'est aussi l'avis de M. Guignard qui, rapportant cette interpré- tation (3), la qualifie d'hypothèse pouvant plaire à l'esprit, mais n'ayant pas de base solide. Ce fait consiste en ce que la division tétraédrique laisse en dehors des quatre cellules, qui seront les grains de pollen, des portions souvent consi- dérables de protoplasme, avec noyau d'après Strasburger, d^vec ou. sans noyau d'après nos observations. Ces fragments ont ordinairement la forme de tétraèdres à base externe convexe. Leur nombre est très variable. Il est rarement nul : dans ce cas les grains ont la forme de quartiers d'oi^anges parfaits. Quelquefois il n'y en a qu'un ou deux. Le plus souvent il y en a quatre; nous en avons compté jusque six. Les croquis que nous en donnons sont assez clairs pour ne pas demander d'explication. Pour qu'il n'y eût pas de doute possible sur la variabilité de ce nombre, nous avons coloré plusieurs préparations par l'iodé et par le bleu d'aniline neutre, puis dissous la callose par le chlorure de zinc. La membrane géné- rale de la tétrade restant inattaquée, les résidus y flottaient parfaitement isolés des futurs grains de pollen. Cette inégalité, en nombre et en grandeur, des troncatures modifiant la forme normale du pollen, explique pourquoi le type du pollen de cette espèce, et de plusieurs autres aussi sans doute, n'est pas absolument uniforme. Quant à l'interprétation du phénomène, nous disons que l'irrégularité dans le nombre des résidus de division, leur absence assez fréquente et celle plus fréquente encore de noyau dans ces fragments, écartent tout rapprochement avec les globules polaires de l'œuf des animaux, aux- quels M. Strasburger voudrait les comparer. D'ailleurs on devrait les retrouver partout, tout au moins dans les familles où les cellulles-mères (1) Cytodiércse che^ les arthropodes; PI. VI, fig. 2i5, 216; PI. VII, fig. 2S6. (2) Ueber den Theilungsvorgang der Zellkcrn, etc., Bonn, 1882. (3) Annales des sciences naturelles, 1884, t. XVII. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 57 volumineuses permettent une observation facile. Or c'est à peine si dans VHemerocallis flava nous en avons retrouvé quelques rares spécimens. Nous ne prétendons pas que la présence aux pôles de la figure cinétique de l'un ou l'autre bâtonnet aberrant ne puisse déterminer un centre d'attrac- tion, capable de séparer une partie du protoplasme de la cellule. Ce fait a déjà été signalé, mais il est tout à fait exceptionnel et ne peut avoir une signification physiologique générale. Ensuite, nous venons de le dire, la plupart de ces fragments sont dépourvus de noyau. Nous croj^ons que la véritable interprétation de ces phénomènes se trouve dans le mode de formation de la plaque cellulaire. Nous sommes convaincu que les figures et les explications de M. Carnoy s'appliqueraient exactement à notre cas, si l'on y supposait une division tétraédrique, au lieu d'une simple bipartition. Notons que ces corpuscules résiduels ne sont pas destinés à disparaître. Leur membrane réticulée, comme celle du pollen, s'épaissit et se cutinise. Parfois même il s'y forme un sillon; celui que nous représentons, fig. 26, n'en offre pas. La, seconde couche de l'exine se cutinise aussi, sauf dans le pli. Elle est très résistante et supporte l'eau de javelle faible ou concentrée, même après l'action de la potasse à i o/o, fig. 27. L'intine a la même composition que celle des autres hémérocalles; mais pour démontrer l'existence de la couche cellulosique interne, il faut laisser les réactifs prolonger leur action ou, ce qui est plus pratique, expulser le protoplasme de sa tunique par une pression mécanique sur le couvre-objets. Clh'ia nobilis. Le pollen rappelle par sa forme celui de l'amaryllis. Le réseau de l'exine couvre le pollen entier, mais n'est pas cutinise au niveau du pli. Les mailles de ce réseau, fig. 29, b, sont formées de trabé- cules moniliformes, comme dans le Fiinkia dessiné par Sachs (i). Sur l'arête du dièdre on retrouve la bosse de l'amaryllis; mais le pore qu'elle cache est de forme toute différente : c'est uiie espèce de bec dont l'ouverture elliptique est formée par un refoulement de l'intine vers l'intérieur, fig. 30. Dans cette figure, la couche cellulosique interne est seule conservée. Les autres couches sont dissoutes ; celles-ci se colorent vivement par le bleu de méthylène, mais non par le bleu d'aniline. Elles renfermeraient donc beaucoup de substances pectiques et, au lieu de callose, une matière analogue ou identique à celle de l'intine des Iris bijlora, etc., soluble dans le chlorure de zinc. (I) Reproduit par Van Tieghem : Traité de Botanique. 58 PH. BIOURGE Hyacinthiis orieiitalis. La forme du pollen est plus ramassée que dans le Clivia. Les mailles du réseau de l'exine sont de même facture, mais plus larges. Les réactions sont absolument les mêmes. Ici, comme là, l'acide nitrique au i/io<= met en liberté le protoplasme avec lintine tout entière, et au 1/2 dissout les couches extérieures de l'intine. Notre FiG. 31 représente le pollen avant la formation de la couche cellulosique interne, après la dissolution des couches externes de l'intine par l'acide nitrique au i/j. Le protoplasme est fortement gonflé. Tulipa gesneriaiia. La couche interne de l'intine est également cel- lulosique. Nous ne dessinons pas l'exine, fig. 32. Allium ampeloprasiun, AU. Moly. Le bleu de méthylène accuse des matières pectiques abondantes au niveau du pli. L'exine est réticulée; mais le réseau est tellement fin que nous avons dû renoncer à le dessiner. Lilium candidiim. La première membrane des cellules-mères. résiste à l'acide sulfurique concentré. Elle nous paraît constituée de matières pecti- ques associées à des albuminoïdes. La callose qui apparaît ensuite, bien que soluble dans la potasse à 1 0/0 et dans le chlorure de zinc, supporte l'acide nitrique concentré qui la dissout généralement. Elle se dissout éga- lement dans l'acide sulfurique au 1/2. Au stade de la division tétraédrique, nous n'avons pas retrou\'é les résidus divisionnels de VHeiiicrocallis flava. Lilium croceum. Le pollen est gros, à dos arrondi. Le réseau super- ficiel de l'exine est formé de trabécules moniliformes, fig. 33. Les mailles, très larges sur le dos, fig. 34, a, deviennent beaucoup plus petites sur les bords du sillon, et les trabécules y sont souvent dépourvues de granulations, fig. 34, b. Le fonds qui supporte le réseau est finement granuleux. La couche interne de l'intine est cellulosique ; nous n'avons pas étudié la nature des autres couches. Arum maculatum. L'enveloppe externe est constituée par un réseau très délicat et cutinisé. La couche sous-jacente est épaisse, homogène, non cellulosique. Nous ne savons s'il faut la rapporter à l'intine ou à l'exine. L'intine, ou, si l'on veut, la couche interne de l'intine, est mince et de nature cellulosique. Nous avons traité cet objet de plusieurs façons avant d'avoir des résultats satisfaisants. La méthode qui nous a le mieux réussi consiste à écraser les anthères dans l'acide nitrique au i/io^ et à passer, après exa- men suffisant, au chloro-iodure de zinc, fig. 35 et 36. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 59 Acorus calamiis. M. Œtker n'y découvre pas la moindre structure. Cependant, même à sec, il est facile de voir que la surface en est finement pointillée en relief. Ce pointillé devient plus évident dans l'iodure iodé. On constate de plus que le pollen porte un pli analogue à celui des liliacées, etc., et que, sous l'exine, se trouve une membrane relativement très épaisse, FiG. 37, 38. Le chloro-iodure n'est nullement avantageux pour étudier la nature de cette membrane. La potasse à i et à lo o/o l'éclaircit très bien et la colore en un beau jaune serin. Nous serions tenté de dire qu'elle est cutinisée, si elle ne se dissolvait pas dans l'oxalate ammonique, alors que l'eau de javelle ne l'attaque pas. Nous admettons qu'elle est pectique et légèrement cutinisée. Aucun réactif approprié, même après l'eau de javelle et l'acide nitrique au i/io^, n'y a révélé la présence de la cellulose. Eleocharis palustris. Le pollen est cunéiforme. L'exine est mince, très finement chagrinée, fig. 39, b. Sous l'action des réactifs, le contenu est ex- pulsé le plus souvent par une face latérale, quelquefois par la base du coin. Les pores ne préexistent pas : l'exine se désagrège aux endroits indiqués par l'effet du gonflement. Aux trois angles, mais principalement au sommet du coin, se trouvent des amas parfaitement déterminés par M. Mangin, comme étant formés de callose, de matières pectiques et de cellulose, de l'extérieur vers l'intérieur. La réaction au bleu -d'aniline est très nette, et, après l'action de la potasse à i o/o ou du chlorure de zinc, on observe souvent au sommet un vide dû à la disparition de la callose. La cellulose forme une couche continue enveloppant immédiatement le protoplasme. Les matières pectiques peu abondantes sont identifiées par le bleu de méthylène, l'oxalate ammonique et les réactions des autres groupes. S'il est vrai, comme le prétend Hérail, 1. c, que chaque grain de pollen des cypéracées est une tétrade, dont trois cellules ont avorté, la forme excentrique du pollen et l'abondance de la callose au sommet du coin sont faciles à expliquer. Elfving avait constaté que ces trois cellules se résorbent ordinairement et que, si parfois elles se conservent, une fausse cloison les sépare de la cellule fertile. Cela fait supposer que Elfving n'a pas pris le pollen de l'éléocharis au point de départ de son développement, ou que des étapes très importantes lui ont échappé. Jusqu'à preuve du contraire, nous admettrons la théorie de M. Hérail. Dans cette hypothèse, la couche cellulosique est l'intine du grain non avorté; l'exine est commune à la tétrade. 6o PH. BIOURGE Lii{iiIli campestris. Ici les quatre grains, parfaitement développés, sont restés unis définitivement. Chacun est limité dans sa portion libre par une calotte sphérique cutinisée et ouvragée en relief. Les lamelles moyennes nous paraissent aussi cutinisées : elles résistent à l'acide sulfurique con- centré et se colorent en jaune par l'iode, fîg. 40 et 41. L'intine n'a pas la même composition en tous ses points. La partie sous-jacente à la calotte ouvragée se dissout dans la potasse à i o/o et le chlorure de zinc, elle est donc formée de callose; la partie complémentaire est cellulosique. Neottia oi'ûta. Les tétrades sont indépendantes à la maturité. L'exine générale est constituée par deux couches entièrement cutinisées. L'exté- rieure porte un réseau saillant à larges mailles, l'intérieure parait homogène, FIG. 42. Nous ne dirons rien de l'intine, car nous n'avons pu vérifier si une coloration peut y être produite par les réactifs iodés, sans être d'ailleurs masquée par la coloration brune de l'exine. Orchis latifolia. Les téti^ades sont associées en massules protégées par une exine générale. Celle-ci est formée de plaques, correspondant chacune à une tétrade sous-jacente. Le fond est homogène, la surface finement réti- culée, FIG. 43. Chaque tétrade a une exine très mince, se colorant légèrement en jaune par l'iode, de même que les cloisons internes, à la façon des ma- tières azotées ou cutinisées. Le reste des membranes est cellulosique, fig.44. Epipactis latifolia. L'exine générale des massules, quoique cutinisée, est de peu de consistance. Le réseau est lâche et ne repose que sur une mince pellicule. Dans les tétrades la coloration produite par les réactifs cellulosiques est tellement intense, qu'on a peine à croire qu'il y ait dans ces membranes autre chose que de la cellulose. Cependant l'acide sulfurique concentré révèle l'existence d'une lamelle moyenne non cellulosique, fig. 46. II. Dicotylédonées. Magnolia. La forme du pollen adulte est la même que chez les liliacées, les iridées, etc.; on n'y voit qu'un seul sillon. Magnolia obovata. La partie de l'exine opposée au sillon est réticu- lée et fortement cutinisée, fig. 47. Le dessin est au contraire très faible aux abords du pli. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 6l Magnolia sp ? Le pollen, plus gros et plus court que dans l'espèce précédente, présente un dessin moins accentué. Nous le figurons tel qu'il est dans l'acide sulfurique concentré, montrant les deux couches de l'exine, fig. 48. Magnolia tripetala. Le dessin de l'exine, sans être semblable, est aussi fin que dans l'espèce précédente. La forme du pollen est la même. Dans les trois espèces il y a une intine indépendante ; il suffit pour s'en convaincre d'ouvrir les anthères à peu près mûres dans une solution très faible d'iodure iodé, ou bien de faire arriver sur le pollen adulte, recouvert de la lamelle de verre, une goutte d'acide chlorhydrique ou nitrique au 1/2. L'exine se fend au pli : le contenu gonflé la rejette totalement ou à demi. On profite de ces deux accidents pour constater que l'intine existe bien sur tout le pourtour du contenu, et qu'elle est fortement épaissie du côté d» pli. La membrane des cellules-mères ne renferme que peu ou pas de matières pectiques. Par contre, après l'action prolongée du chloro-iodure de zinc ia coloration bleue est assez marquée. Lorsque l'on veut étudier des coupes un peu fines de cet objet, comme celles, par exemple, qui ont servi pour prendre le dessin des couches d'épaississement de la fig. 50, il faut avoir soin de les- débarrasser par l'alcool et l'éther de toute l'huile qu'elles renferment. Les réactifs apprendront alors que les couches in- ternes sont formées de callose pure , soluble dans la potasse à 1 0/0, et la plus externe de callose insoluble dans ce réactif, mais soluble dans le chlorure de zinc. Dans les tétrades, les enveloppes de chaque cellule-fille sont aussi formées de callose pure. Il résulte de différents essais avec la potasse à 1/2 et à 1/3 0/0 que c'est réellement à 1 0/0 que ce réactif dissout la callose ordinaire instantanément. L'acide nitrique pour la dissoudre doit être concentré au-delà de 50 0/0. L'acide chlorhydrique ne la dissout jamais, mais la gonfle fortement, lorsqu'on l'emploie fumant. L'iode ne la colore pas sensiblement. L'acide métaphosphorique ne l'attaque pas (1). (i) Ce véhicule, respectant aussi bien les structures organiques que les couleurs d'aniline, devrait être introduit dans les laboratoires histologiques et cytologiques, comme milieu conservateur et éclair- cissant. Il est assez stable en solution très concentrée. 62 PH. BIOURGE Après la dissolution des membraries callosiques par le chlorure de zinc, il reste à étudier la membrane propre du pollen. Elle est mince, fig. 51, a, très réfringente. Si l'on y fait arriver une goutte d'iode, elle se colore en jaune. Elle n'est donc pas cellulosique. L'acide sulfurique concentré la débarrasse d'une partie de sa substance, qui noircit et est emportée par le courant d'acide. Il reste alors un squelette blanc et brillant qui, vu de face, est réticulé, fig. 51, b. L'iode le colore fortement en jaune; mais la colo- ration cède à un simple lavage. Les sels alcalins : carbonate, oxalate, oléate, phosphate acide, ne l'at- taquent pas. Lavée et soumise à l'action successive des acides concentrés : nitrique, chlorhydrique, sulfurique et de l'eau régale, elle ne se dissout pas davantage. La potasse caustique à i, lo, 25, 50 0/0, n'a sur elle d'autre action que de la colorer en jaune. Cette réaction fait supposer que le réseau est cutinisé, au moins partiellement. Le réactif de Millon ne donne pas de coloration. Nous avons essayé encore, toujours sur la même préparation, les acides ortho- et métaphosphoriques, l'acide formique faible et concentré, l'acide acétique glacial, sans obtenir aucun résultat. A ce moment, et après lavage, une goutte d'eau de javelle dissout instantanément ce squelette ultra-résistant. Ce même réactif, employé de prime abord et concentré (i6° B"j le dissout en une vingtaine de minutes. C'est trop lentement pour des albuminoïdes, et nous croyons pouvoir rap- porter à la présence de la cutine cette résistance aux agents chimiques Ci). Cette première membrane constitue l'exine. En se développant, elle épaissira les trabécules de son réticulum et ses mailles s'élargiront. Pendant ce temps, la membrane des cellules en tapis se dissout. Leurs noyaux continuent à se diviser, en deux d'abord, puis en quatre. Elles ne sont pas encore désagrégées. Lorsque la première couche de l'intine se forme, le noyau entre en division. Un des noyaux se porte vers la paroi opposée au sillon, et une plaque cellulaire en forme de verre de montre achève la logette où il va évoluer. Telle est l'origine de la petite cellule. Nous avons cru voir qu'en se détachant elle donnerait naissance au pore de l'intine, que nous dessinons dans les fig. 52 et 54, et que nous avons décrit dans les liliacées, etc. La couche externe de l'intine est pectique, les deux suivantes ont des (i) Nous avons malheureusement omis d'employer l'acide chromique. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 63 réactions peu nettes. F'inalement, dans les fleurs à peu près épanouies, les anthères du rang extérieur contiennent quelques grains où l'on découvre, bien qu'assez difficilement, une couche interne dénuée de pore et qui est de nature cellulosique. Dans ces deux premières espèces, nous n'avons réussi à obtenir la coloration bleue de la cellulose par les réactifs iodés qu'après le traitement par l'eau de javelle et l'acide nitrique au i/io. Dans la troisième on peut se servir directement de l'iode et du chlorure de zinc, fig. 54,//. Helleborits niger. Toutes les couches des membranes, au stade tétrade, se colorent vivement par le bleu d'aniline, et se dissolvent dans la potasse à 1 o/o. Elles sont donc formées de callose pure. Pœonia arborescens. Au même stade, la couche extérieure des tétra- des est insoluble dans la potasse à i o/o et, après lavage, elle se recolore par le bleu d'aniline. Mahonia aqitifolium. A\i moment de la division tétraédrique, la la- melle moyenne des cellules non isolées est pectique et azotée. Les autres couches se colorent par le bleu d'aniline et se dissolvent dans la potasse à 1 o/o, à l'exception de la plus interne, fig. 55. Sida picta (AbiitHon striatum). Cette jolie malvacée présente un pollen beaucoup plus petit que celui de ses congénères, les Malva et les Althœa. Ses épines sont pyriformes au lieu d'être coniques. Mais ce qui le distingue surtout, c'est qu'il n'a que trois pores, parfois quatre par exception. L'exine est formée de deux couches. Elle présente un caractère com- mun à toutes les malvacées que nous avons étudiées. Dans l'eau de javelle, . plus ou moins concentrée suivant les espèces, l'exine externe avec son réseau et ses pointes se sépare de la couche sous-jacente ou exine interne, se dis- loque et se dissout rapidement. Le plus souvent cette dissolution n'exige que deux minutes. Si l'on arrête d'action du réactif avec de l'eau, il se produit un gonflement excessif; il vaut mieux avoir recours à l'iode ou à l'acide acétique. Dans le cas présent, nous nous servons d'eau de javelle diluée (5° B''). En une demi-minute les pointes sont enlevées, puis le réseau entier se détache. Lavant alors à l'iode, on a toute facilité de dessiner un lambeau du réseau. De larges trous y marquent la place des pointes. Celui que nous 64 PH. BIOURGE figurons présente en outre l'ouverture d'un pore, fig. 56. Nous avons réta- bli les pointes dans le dessin. Les pores présentent souvent deux petites épines courbes, qui les surplombent et semblent vouloir les fermer, FIG. 57, A. La seconde couche de l'exine est aussi cutinisée, mais légèrement. Un anneau réticule plus épais et mieux cutinisé, fig. 57, B/ar, renforce l'ouver- ture des pores. Les onagrariées présentent un détail analogue à la base des papilles porifères de leur pollen. Une autre préparation faite à l'eau de javelle et lavée au bleu de méthylène (ij nous montre que la couche interne de l'exine renferme par- tout des matières pectiques, mais que celles-ci sont accumulées sous l'anneau des pores en forme de lentilles piano-convexes, dont le centre est protégé vers l'extérieur par des granulations également cutinisées. Ces lentilles sont dissoutes instantanément par l'oxalate ammonique; le reste de l'exine interne se décolore. Le bleu d'aniline ne donne aucune coloration ; la callose y fait donc défaut. L'étude de l'intine est moins facile. En prolongeant l'action de l'eau de javelle, nous avons obtenu sa mise en liberté dans quelques grains. Dans ce cas, la réaction de la cellulose y est très faible. L'exine interne étant très élastique, nous n'avons pu la déchirer brusquement par pression. Mais l'acide chlorhydrique au 1/2, puis fumant, en dilatant le contenu, produit une espèce de germination artificielle, et alors, assez souvent, le protoplasme est enfermé dans l'intine devenue libre. La réaction de la cellulose y est généralement facile et la coloration bleue très riche. Parfois pourtant elle ne se colore pas. Nous verrons que celle des Malva et des Althœa ne se colore jamais. Il est à remarquer que le nombre de grains stériles est ici très considé- rable. Toutes les membranes y sont cutinisées, et le contenu réduit à un peu d'huile. Althœa rosca. Les pores sont quasi aussi nombreux que les grandes épines dont le pollen est hérissé. La vue de face qu'en donne Sachs, et qui est reproduite par van Tieghem (2j, est tout à fait exacte. Mais la coupe optique qui accompagne cette figure est absolument erronée. (1) Le bleu de méthylène résiste environ une demi-heure à Teau de javelle à 5° B^' (2) Traité de Botanique, p. 376. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN . 65 En effet, il n'existe pas de couche homogène extérieure au réseau cuti- nisé. De plus, la base des pointes est insérée dans le gaufrage, au lieu d'en être indépendante, comme le figure Sachs. L'exine est formée de deux couches inégalement cutinisées : l'externe se compose du réseau et des pointes ; l'interne est une couche épaisse, homogène et très réfringente, où les réactifs annoncent des matières pectiques, d'autant plus abondantes que l'on considère des parties plus internes. L'acide chromique à 25 0/0 (1) détruit rapidement le gaufrage et attaque ensuite la couche hom.ogène. En sept ou huit minutes, toute l'exine est dissoute. Si, pour arrêter l'action du réactif avant que la seconde couche ne soit détruite, on lave la préparation à l'eau, il se produit un gonflement énorme de cette seconde couche, exactement comme avec l'eau de javelle. L'eau de javelle à 5° B"' exige dix minutes pour enlever le gaufrage de l'exine, l'objet sortant de l'alcool. Le même réactif à 16° B*^ ne demande que deux minutes. On lave rapidement et on étudie l'objet en coupe opti- que. On voit alors que dans la couche interne de l'exine les pores ne sont pas cylindriques, mais coniques et fortement évasés, à tel point que les ouvertures, vues de l'intérieur, ne sont plus séparées que par des lignes fortement colorées par le bleu de méthylène, fig. 58. L'intine, complète, est renflée vis-à-vis de chaque pore en mammelons coniques vers l'extérieur, convexes ou hémisphériques vers l'intérieur, FIG. 60. Ces mammelons sont légèrement cutinisés vers l'extérieur, surtout à leur sommet. On le voit très bien de face quand on parvient à déchirer toute l'exine, ou après la dissolution de cette dernière. Nous avons fait les l'éactions de l'intine, surtout sur VA. officinalis, dont nous dessinons l'exine vue de face dans la fig. 59. Aucun réactif cellulosique ne donne de résultat positif. La limite externe de l'exine^ se colore en jaune, comme la cutine. La substance blanche des mamme- lons de l'intine est de nature pectique. La limite interne insoluble dans l'oxalate et dans la potasse à 10 0/0, après une heure, donne ensuite un semblant de coloration bleue (cellulose?) avec l'iode et le chlorure de zinc. Maha sylvestris. Même disposition générale. La limite cutinisée de l'intine est seulement beaucoup mieux marquée que dans les Althœa. L'eau de javelle à 5° enlève le réseau en une minute et demie, fig. 61. (i) 5 Gr. de CrOj, pur de K, SO4, dans 20 gr. d'eau. I 66 PH. BIOURGE Malva moschata. Même structure et mêmes réactions. Pas de trace de cellulose. Hibiscus syriaca. Les pointes de l'exine sont longues et peu amincies. Elles sont moins nombreuses que dans les précédentes espèces. Il en est de même pour les pores. L'intine se présente de la même manière que plus haut. Remarque. Il nous paraît assez difficile de rapprocher, point par point, les membranes du Sida de celles du pollen des autres malvacées. Cependant, si l'on pouvait démontrer que les granulations cutinisées qui protègent les amas pectiques des pores ne sont pas limitées par l'ouverture de l'exine, mais se continuent sur les amas, en dedans de l'exine interne, on aurait des éléments suffisants pour faire ce rapprochement. La couche cellulosique du Sida serait représentée par la limite interne de l'intine des Malva; les amas pectiques, très distants dans le premier, seraient rappro- chés chez les seconds jusqu'à se toucher à la base; les granulations cu- tinisées des amas pectiques du Sida formeraient, en se réunissant l'une à l'autre, une couche continue analogue à la limite cutinisée de l'intine des Malva; les anneaux réticulés du Sida seraient dans l'exine interne des Malva, homogènes et confondus avec le reste de la membrane. Quant à la couche externe, l'analogie est évidente, comme le montre le schéma de la FiG. 62. Des deux côtés un gaufrage et des pointes reposent sur une couche homogène. La différence est marquée par une épaisseur moindre de celle-ci chez le Sida. Dicentra spectabilis. Examiné dans l'air le pollen est ellipso'idal ; il devient sphérique dans l'eau, fig. 63 et 64. Il porte trois sillons n'attei- gnant aucun des pôles. Le réseau cutinisé superficiel est remplacé clans les sillons par un fin pointillé. Il ne s'y trouve pas de pores préexistants. La couche sous-jacente, non cellulosique, est assez épaisse. Nous ne savons s'il faut la rapporter à l'intine ou à l'exine. La couche mince contiguë au proto- plasme, c'est-à-dire l'intine, est cellulosique, fig. 65. Gaura tvipctala (conservé dans l'alcool). La forme de son pollen, qui est d'ailleurs celle des onagrariées en général, est décrite partout. Nous voudrions cependant faire remarquer, à ce propos, que le corps du grain étant bi-convexe et plus épais que les protubérances porifères (Austritts- papillen), sa surface dcrit s'abaisser considérablement à la base de celles-ci. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 6? En conséquence, il nous paraît- impossible d'obtenir une coupe optique géné- rale de l'objet, sans changer la mise' au point pour les diverses parties du pourtour de l'objet. Cela nous parait expliquer les erreurs" que nous aurons occasion de relever dans les dessins de Strasburger (i). L'exine est formée de deux couches cutinisées. L'externe, mince, re- couvre le pollen entier, sauf au sommet des papilles où elle est percée de pores. Elle porte une ponctuation en relief tellement fine que notre crayon n'a pu en rendre le véritable aspect, fig. 66. L'interne est loin d'être aussi uniforme. Elle est lisse sur les deux faces lenticulaires du pollen. A la base des papilles elle s'épaissit légèrement et devient granuleuse, fig. 67, a. C'est dans cette portion granuleuse que prennent naissance les racines des stries transversales qui constituent l'anneau des papilles, fig. 67, c. Il est très intéressant d'étudier l'orientation de ces stries. Dans l'anneau granuleux, a, se forment des ramuscules saillants, b, orientés vers le pore. Ceux-ci, en se réunissant deux à deux, grossissent et vont bientôt se souder à angle droit à l'une ou l'autre des premières stries transversales, en formant un T. Plus loin, c, les stries transversales se con- tinuent seules. Très saillantes d'abord, elles s'affaissent ensuite vers les bords antérieurs de l'anneau, lequel se soude à la couche externe de l'exine à quelque distance du pore. Quant aux énormes épaississements en anneau figurés par Strasburger, ils n'existent pas. Nous ne savons à quoi attri- buer l'erreur de cet auteur, si ce n'est à l'usage d'un éclaircissant trop énergique ou d'un objectif à ouverture trop étroite. Passons à l'intine. Strasburger, en parlant de VŒnotheva biennis, affir- me que ni sur le pollen entier, ni sur des coupes de pollen mûr, il n'a vu l'intine entourer complètement le corps plasmatique, mais qu'elle s'amincit et s'arrête un peu en dedans de l'anneau d'épaississement. Mangin prétend au contraire qu'elle est complète, et se compose de couches pectiques et cellulosique. Nous sommes d'accord avec ce dernier pour le premier point, à savoir que l'intine est complète. On peut, en effet, en élevant et abaissant succes- sivement la vis micrométrique, suivre cette membrane sur tout le contour du grain de pollen. La chose est encore plus claire dans l'eau de javelle concentrée. Celle-ci dégage au bout de quelque temps presque tous les grains de leur exine; on obtient ainsi la fig. 71 de VŒnothera. D'autre part, le pollen étant dans l'eau, si l'on fait passer sous le couvre-objets une goutte (i) Veber den Ban... etc., 1882. — Ueber das Wachstlium... etc., \i 68 PH. BIOURGE de chloral hydraté à 8 parties pour 5 d'eau, le réactif soutii'e l'eau Le pro- toplasme se contracte, l'intine le suit montrant un double contour évident, parfois nettement détachée die lui. Puis il se produit un nouveau gonflement dû à l'action du réactif sur le contenu. Nous admettons également avec Mangin que l'intine est pectique, bien que ses réactions soient peu franches, et qu'elle se dissolve parfois rapidement dans le chlorure de zinc ou l'acide phosphorique déliquescent. Peut-être notre objet était-il trop peu mûr? Nous n'avons pas obtenu de réaction avec les réactifs iodés de la cellulose, lorsque la membrane ne se dissolvait pas. Nous n'avons pas non plus réussi à dédoubler dans les papilles la partie épaissie de l'intine, comme il est si facile de le faire dans les genres décrits plus loin. La membrane primitive des cellules-mères est fortement azotée, et formée d'un mélange de matières pectiques avec de la cellulose peu con- densée, donnant une coloration bleue violacée et passagère avec le chlo- ro-iodure de zinc. UEpilobium spicatiiin, VŒ)iothera fruticosa-splendens nous ont donné les mêmes résultats à ce stade. Les couches callosiques, solubles dans la potasse à t 0/0, ne se forment pas du côté où la dernière division cellulaire a eu lieu. Aux premiers temps qui suivent la division tétraédrique, la callose occupe les espaces intercellulaires des cellules-filles. La forme de celles-ci est d'abord tétraédrique; les faces tournées vers le centre d'abord planes, se bombent dans la suite. L'exine jeune, même lorsque la seconde couche est formée, est extrêmement sensible à l'eau de javelle, même diluée à 3° B'^. Quelques minutes d'action de ce réactif et une goutte de potasse diluée suffisent à dissoudre entièrement sa couche externe. Si c'est de la cutine, elle diffère fortement du type. On constate la même chose chez V Epilobiuin inoiitauuin. Œnothera biennis. Le pollen, recueilli sur le style desfleurs desséchées, et examiné dans l'eau, se comporte de diverses manières. Beaucoup de grains laissent voiràtraverslacouche externe ratatinée et mince une seconde couche contractée régulièrement, apparemment épaisse, très jaune, étranglée à la base des papilles par un anneau légèrement épaissi et de même couleur. On n'y voit pas l'intine. Les autres se gonflent lentement, éclatent ou laissent échapper leur contenu plasmatique sous la forme d'une traînée vermiculaire. Ceux-ci permettent de constater à un grossissement moyen (450) que la I RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 69 couche externe est chagrinée. Nous avons dessiné, fig. 69, bc, à un grossis- sement de 850 diamètres, après avoir étudié à des grossissements de 1000, 1500 et 2000 fois, l'aspect et la grandeur des granules quand la mise au point est tout à fait superficielle, ainsi que le réseau brillant qui apparaît lorsque l'on met au point la base de ces aspérités. La coupe optique d'une papille, fiq». 69, a, montre une exine externe ouvragée, une exine interne épaissie dans sa partie granuleuse, une intine complète; mince, brillante, non cellulosique, et à l'intérieur un doigt de gant cellulosique, plus épais et se soudant à la précédente couche à son entrée dans le corps du grain. Si l'on traite le pollen par le chloral à 8 parties pour 5 d'eau, il se gonfle. Avec un peu de patience on arrive à trouver des grains où il est aisé de compter quatre couches distinctes dans les papilles, et trois seulement dans le corps du grain. Une autre préparation est traitée par l'eau de javelle à 3° B% puis par la potasse à i 0/0. En quelques instants le pollen prend les aspects repré- sentés dans les fig. 70 et 71. Dans le premier cas, une goutte d'iode colore en jaune' d'or l'exine interne, corrodée jusqu'à l'anneau. Ce dernier est maintenant frangé, et il est facile de voir qu'il n'est guère plus épais que le reste de la même couche. Une couche incolore mince double la précédente et recouvre aussi les papilles. A cet endroit, un doigt de gant coloré en bleu (iode + potasse et eau de javelle), et par conséquent de nature cellulosique, renforce l'intine. La figure suivante, où toute l'exine est dissoute, ne laisse aucun doute à ce sujet. Nous avouons ne pas comprendre comment Stras- BURGER a pu, après s'être servi de l'eau de javelle, ne pas constater ce fait. Il nous reste à expliquer pourquoi nous ne reproduisons pas dans nos figures la couche moyenne à bâtonnets de l'exine, dessinée par ce savant. D'après nos observations, cette couche n'existe pas. En s'aidant d'un bon objectif à immersion, il est aisé de s'assurer que la coupe dessinée par Strasburger n'est pas une coupe optique équatoriale, mais une coupe oblique. Les prétendus bâtonnets sont occasionnés par la vue oblique ou en projection des détails du réseau dessiné en c, fig. 69 ; en coupe équato- riale ils disparaissent totalement. Les fig. 53, 54, 53 et 57 de Strasburger (1) rendent très bien les diverses étapes du développement des papilles. Seulement dans sa fig. 53 il remplace les couches concentriques générales et spéciales des tétrades (1) Ueber das Wachsthiiin, etc. 10 70 PH. BIOURGE par une teinte plate, qui fausse les idées sur l'organisation de ces mem- branes. Au point de vue chimique, ces couches sont formées de callose pure, soluble dans la potasse à i o/o. Cette même substance remplit également les papilles jeunes et les gonfle. Si on la dissout, les papilles se raccourcis- sent et l'étranglement se relâche. Nous ne pouvons malheureusement, à cause du retard de la végétation^ poursuivre le développement ultérieur des grains de pollen. Epilobium montanum. La forme des grains est celle du pollen à'Œnotheva; on n'y trouve pas non plus les stries du Gaiira. Le dessin superficiel de l'exine y est encore plus fin que chez ce dernier. L'intine se double comme dans YŒiiothera d'un doigt de gant cellulosique. Le tube pollinique est formé de deux couches : l'externe, non cellulosique, continue directement l'intine générale; l'interne cellulosique et très mince est le prolongement du chapeau cellulosique, fig. 72. En suivant attentivement les diverses étapes du développement du pollen, on peut découvrir l'origine des filaments qui réunissent les grains et les tétrades. Dans les tétrades récemment formées, toute la callose se dissout dans la potasse à i o/o et le chlorure de zinc, sauf la couche externe. Bientôt la masse de callose qui sépare les grains au centre de la tétrade ne se dissout plus. Cela n'est guère sensible avec la potasse qui agit trop rapi- pement et décolore le bleu d'aniline; il vaut mieux se servir du chlorure de zinc qui dissout la callose même déjà modifiée, et qui conserve la coloration, tout en la faisant virer au violet. Dans l'anthère, la membrane externe et la callose ordinaire se gélifient, mais les grains de pollen restent associés en tétrades, les papilles étant rapprochées deux par deux, fig. 73. Il faut une forte action mécanique pour les dissocier sur le porte-objets, même après la déhiscence des anthères et jusque pendant la germination. Or, après cette dissociation violente, on observe sur la face du grain correspondante au centre de la tétrade, une masse plus ou moins étendue, transparente, ayant tous les caractères de la cutine et portant un ou plusieurs longs filaments, FIG. 74 et 75. Il nous paraît naturel d'admettre que ces filets se forment par étirement de la masse cutino-huileuse à laquelle ils sont attachés. Myrrhis odorata. Le pollen est allongé. La coupe transversale est triangulaire à angles arrondis. La couche externe de l'exine est finement granuleuse et percée de trois pores en forme de co ; l'interne homogène, semble fendue longitudinalement au même niveau, fig, 76-78. Nous n'avons pas étudié l'intine. Le coloration rouge de l'exine par l'acide sulfurique persiste pendant plusieurs mois. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 71 Cornus mas. Le pollen adulte garde presque intacte la forme tétrà- édrique primitive. Les angles de la coupe équatoriale triangulaire sont marqués par des sillons réunis à un des pôles seulement, fig. 79, a-b. Ils sont remplis de callose. Si l'on dissout celle-ci, un pore apparaît vers le milieu des sillons. L'exine est très finement réticulée. Nous n'avons pu constater nettement ce détail qu'à un grossissement de looo diamètres, c. L'intine, qui est très mince, manifeste la présence de la cellulose, quoique difficilement. Cornus alba. Le pollen y est beaucoup plus gros que dans l'espèce précédente. Les sillons largement réunis à un pôle, le sont à peu près à l'autre. L'exine est couverte d'un pointillé en relief sans cachet particulier, FIG. 80-81. L'intine mince manifeste en même temps les réactions des ma- tières pectiques et de la cellulose, mais ces réactions sont peu nettes et peu marquées. Les sillons n'offrent pas de callose, fig. 82. Holtonia palustris. Dans l'air le pollen est ellipso'ïdal, allongé, orné de trois sillons très peu cutinisés et réunis à un seul pôle. La partie cutinisée se compose de trois fuseaux réunis à l'autre extrémité. Ils sont ornés de stries saillantes, plus ou moins parallèles au grand axe du pollen, fig. 83-84. Des granulations et des baguettes huileuses sont intercalées entre ces stries. Dans les sillons ce sont de véritables masses d'huile que l'on peut observer. Ce pollen supporte longtemps l'action de l'eau sans éclater. Il s'y gonfle un peu ; en coupe équatoriale il est triangulaire et à angles mousses. Il supporte également la potasse à 1/2-1/3 0/0. Mais dans la potasse à 1 0/0 tous les grains éclatent brusquement. Le contenu mis en liberté garde la forme triangulaire. Il suffit alors de laver la préparation à l'eau distillée pour que le protoplasme, en se contractant, mette l'intine en évidence. L'iode accen- tue cette contraction et manifeste dans le protoplasme une structure rayon- née très accentuée. La membrane de Mohl est très solide. Le chlorure de zinc ramène l'intine à sa dimension primitive et la colore faiblement en bleu; elle renferme donc de la cellulose. L'acide phosphorique la dissout : ce qui explique qu'on ne trouve pas d'intine lorsqu'on la recherche au moyen de ce réactif précédé de l'iode. Syringa vulgaris. Les trois sillons du pollen ne sont pas réunis. L'exine y est simplement ponctuée comme dans Y Hottonia, mais il est facile d'y constater la présence de pores ronds bien délimités, fig. 86. Le réseau cutinisé est assez saillant. Il est totalement enlevé par l'eau de javelle et le carbonate ammonique suivi de la potasse à 1 0/0. Malheureusement ce 72 PH. BIOURGE procédé attaque aussi l'intine. L'épaissseur de l'exine s'opposant d'autre part à une étude avantageuse en coupe optique, nous n'avons trouvé qu'un moyen pratique d'observation : celui d'écraser le pollen par la pression de l'objectif sur le couvre-objets. L'iode et le chlorure de zinc colorent alors en bleu une couche assez mince, contiguë au protoplasme et qui représente l'intine interne. Une couche plus épaisse enveloppant la première, reste incolore; elle ne renferme pas de cutine. Elle est insoluble dans l'acide sulfurique aux 2/3, et dans la potasse à 10 0/0. Elle se dissout instantanément dans l'oxalate ammonique. Cette seconde couche est l'intine externe, qui est pectique. Sur les grains vidés de leur contenu, on peut prendre de bonnes coupes opti'ques.de l'exine, fig. 87. Plantago média. M. Mangin a trouvé des bouchons de callose aux pores d'un Plantago. Dans l'espèce qui nous occupe, c'est à peine si, sur plusieurs centaines de grains, quelques-uns présentent avec le bleu d'ani- line une coloration bien nette du côté de la ligne faible, et encore est-ce sous la seconde couche de l'exine. Aux pores nous n'avons vu que des gra- nulations que nous considérons plutôt comme cutinisées. Le tégument est formé de trois couches. L'externe, très irrégulièremeut réticulée, à mailles remplies d'une substance réfractaire en saillie, porte d'un côté un sillon irrégulier, de l'autre trois pores à demi-bouchés par les granulations décrites ci-dessus. L'acide sulfurique concentré la colore en jaune, et le protoplasme en rose. La seconde couche nous paraît imperforée. Elle est insoluble dans l'acide sulfurique et se teint en jaune brun par l'iode. Nous la considérons comme une exine interne cutinisée. La troisième membrane, ou l'intine, est mince et faiblement cellulosique, fig. 88-90. Viiica minor. Le pollen y est tantôt simple tantôt à l'état de tétrades. Nous avons malheureusement choisi pour représenter cette forme une té- trade où les quatre cellules sont inégalement développées, fig. 94. Ce n'était pas faute de choix; mais nous n'avions visé qu'à montrer les filaments du réticulum plasmatique passant d'une cellule à l'autre à peu près dans le même plan, ainsi que la continuité parfaite de la couche cellulosique de l'intine. L'exine extrêmement mince porte un dessin formé par de courts filets saillants, fig. 91. Il s'y trouve trois sillons dont deux sont réunis aux deux bouts. Dans l'eau le pollen s'arrondit et se gonfle très fortement; l'exine est presque invisible. Le chloro-iodure de zinc accentue encore le RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 73 gonflement. On constate que l'exine a conservé le caractère cellulosique. Entre elle et l'intine interne, qui est aussi cellulosique, se trouvent plusieurs couches incolores, de nature pectique, et facilement solubles dans l'oxalate ammonique. De grosses taches d'huile avoisinent fréquemment les pores, FIG. 92 et 93. Periploca graeca. Le pollen reste complètement à l'état de tétrades^ celles-ci sont parfois doubles et renferment par conséquent 8 grains. Llexine générale fortement cutinisée paraît entièrement lisse. L'eau de javelle con- centrée, après deux heures d'attaque, y montre, sous un grossissement de 850 fois, un réseau à mailles très petites et très serrées. L'exine spéciale à chaque grain (ou intine?) est aussi fortement imprégnée de cutine. Elle ne donne pas de réaction avec le chloro-iodure de zinc ni avec l'acide phos- phorique iodé. Mais elle se colore en bleu noirâtre sale par l'iode et l'acide sulfurique aux 2/3. Des granulations colorées, qui sont peut-être de nature cellulosique, s'en détachent, fig. 95. Les pores se trouvent deux à deux sur la limite extérieure des cloisons intercel'kilaires. Nous figurons la petite cellule avec sa forte membrane, son noj'au et son nucléole. Hyocyamus niger. Les trois sillons de l'exine ne se réunissent qu'à un pôle. Son réseau cutinisé est extrêmement fin, fig. 96-97. Nicotiana tabacum. Même disposition. Les sillons plus évasés sont pointillés, fig. 98. Digitalis grandijlora. Même disposition. N'ayant pu trouver de réactif pour faire éclater l'exine dans ce groupe, nous n'avons pu en étudier l'intine. Dovouicum... L'intine mise en liberté par l'acide chromique à 25 0/0, prend la forme triangulaire. Elle est insoluble dans la potasse et dans le chlorure de zinc; elle n'est donc pas formée de callose. Elle ne donne pas non plus la réaction de la cellulose. Nous admettons qu'elle est entière- ment pectique, fig. 99. Tussilago officiualis. Mêmes résultats. Blitiim Bonns-Henricus. L'exine réticulée-chagrinée est percée de nombreux pores. Elle rougit fortement par l'acide phosphorique sirupeux. Elle passe au jaune, sans altération, si on la traite ensuite par la potasse 10. 74 PH. BIOURGE concentrée. Nous avons répété cet essai en grand dans un tube à réaction et nous avons obtenu les mêmes résultats, fig. lOO. Biixiis sempervirens. L'exineest formée de deux couches. L'extérieure est cutinisée et présente un réseau fortement saillant, percé de nombreux pores, FIG. 101. L'intérieure non cutinisée renferme des traces de cellulose. L'intine est également formée de deux couches. L'externe de même nature que la précédente semble ne pas être interrompue. L'interne est au con- traire réduite à un réseau formé de bandes anastomosées, de nature cellulo- sique. Il est difficile d'obtenir la réaction cellulosique avec assez de netteté pour permettre de prendre un dessin. On y arrive pourtant en dissolvant l'exine par l'eau de javelle étendue, et lavant à l'acide nitrique au i/io, puis au chloro-iodure de zinc, fig. 104. IIL Gymnospermes. Taxus baccata. L'exine est très finement travaillée. Le pollen éclate dans l'eau : l'intine se gonfle énormément. Elle est formée de nombreuses couches dont la plus interne est cellulosique. La plus externe quoique inso- luble dans la potasse à i o/o, doit être considérée comme callosique, car le bleu de méthylène ne la colore pas. Les couches sous-jacentes sont formées de callose pure. CONCLUSIONS. Les observations précédentes nous permettent d'énoncer les proposi- tions suivantes : I. Morphologie et anatomie du pollen mûr. \° Il y a toujours une intine et une exine dans les grains de pollen. 2° Dans les Dycotylédonées, les grains simples présentent deux types généraux : le type sphérique à pores nombreux et sans sillons (caryo- phyllées, Biixiis, malvacées, convolvulacées, Blitiim, etc.), et le t3^pe ellip- so'ïdal à trois porcs. L'ellipsoïde peut être aplati (onagrariées) ou allongé. Les pores passent de la forme arrondie, saillante ou non, à la forme allongée ou en sillons, et atteignent souvent les pôles. RECHERCHES SUR LES GRAINS DE POLLEN 75 Nous négligeons les formes particulières, telles que celles des borragi- nées, ombellifères, labiées, juglandées. Dans les Monocotjdédonées les grains simples n'ont généralement qu'un sillon. La forme primitive est celle d'un quartier d'orange, qui, par la dessiccation et la formation du pli, passe à celle d'un grain de café ou d'une barquette. Dans les deux groupes on trouve des pollens composés. 3" L'exine se compose parfois d'une seule, le plus souvent de deux couches. L'externe est généralement ouvragée. Lorsque l'interne présente des sculptures, c'est en général autour des pores. Le nombre des pores et des sillons varie d'une espèce à une autre et jusque clans la même espèce. Il y a cependant des analogies dans les pol- lens des familles naturelles: solanées,verbascées,scrophulariées, composées. 4° L'intine est partout complète. Lorsqu'on y trouve des pores, c'est qu'elle se compose de plusieurs couches dont une quelconque est toujours fermée. Nous disons : une couche quelconque, parce que loin d'être simple, elle est très souvent formée de deux ou de toute une série de couches concentriques. Elle présente souvent sous les pores des épaississements de nature diverse. 5° La paroi du tube pollinique est toujours formée par un étirement de l'intine de quelque nature qu'elle soit, contrairement à ce que soutient Strasburger (i). Sa paroi est tantôt simple, tantôt formée de plusieurs couches, suivant la constitution de l'intine. IL Composition chimique des membranes aux divers stades. 1° L'exine ne reste qu'exceptionnellement cellulosique; elle est en gé- néral cutinisée. La couche externe est tantôt plus, tantôt moins résistante que l'interne. La couche interne renferme trèâ souvent des matières pectiques. 2^ L'intine est formée ici de cellulose pure, là de matières pectiques pures, tantôt du mélange des deux. Parfois il s'y ajoute des couches de callose pure ou modifiée, ou bien les trois groupes sont associés en couches séparées ou dans la même couche. La couche externe de l'intine tend à se cutiniser dans les parties où l'exine est faible ou perforée. La couche la plus interne est généralement cellulosique. (i) MatUicI technique d'Aiiatomie végétale. 76 PH. BIOURGE Nous n'avons pas trouvé de cellulose dans plusieurs iris, le melon, les mauves et guimauves, le pas-d'âne, un doronic. Ailleurs, comme chez les onagrariées, les luzules, etc., elle était localisée. Le rôle de l'épithélium interne du sac poUinique est plutôt de nourrir les tétrades par osmose que de former les ornements en relief de l'exine; ceux-ci existent déjà au stade tétraédrique. La callose existe peu souvent sous la forme de couches spéciales. On en trouve aux pores ou dans les sillons : Corylus, Cor mis mas, Œno- t lier a, etc.. 3° La paroi du tube poUinique est généralement cellulosique, au moins dans sa couche interne, si elle est double. La partie externe est sou- vent pectique, parfois cellulosique. 4° La première membrane des cellules-mères est pectique ou pectico- cellulosique. Les couches concentriques générales et spéciales des tétrades sont for- mées de callose pure ou plus ou moins modifiée. I n . Développement. La paroi des cellules-mères s'épaissit par apposition de couches secon- daires, avant la division tétraédrique. Après la division tétraédrique, le même fait se reproduit pour chaque cellule-fille. La couche contiguë à chaque cellule-fille ne fait pas partie de la membrane propre du pollen. L'exine apparaît la première, toujours sous la forme d'un réseau plus ou moins délicat. Les reliefs apparaissent avant la formation de l'intine. La seconde couche de l'exine apparaît souvent pendant le stade tétra- édrique. L'intine apparaît plus tard, et sa couche interne, qui est d'ordinaire cellulosique, se forme souvent peu de temps avant la déhiscence. I EXPLICATION DES PLANCHES. Les mêmes lettres désignent les mêmes objets dans les différentes figures : ee , l'exine externe; ei , l'exine interne; ie , l'intine externe; //', l'intine interne; ;';«, l'intine moyenne. FIG. 1. Amaryllis formosissima. Pollen dans l'air. — Gross. D. 4. FIG. 2. Amaryllis. Réseau superficiel d'un grain de pollen. FIG. 3. Amaryllis. Pollen débarrassé de l'exine et de l'intine externe; p, pore de l'intine. FIG. 4. Amaryllis. Pollen en germination sur le style. Tube à paroi double. FIG. 5. Amaryllis. Germination presque achevée. Tube à paroi simple. FIG. 6. Amaryllis en coupe optique. FIG. 7. Iris biflora. Pollen gonflé. L'exine est déchirée. Les couches de l'in- tine, nombreuses du côlc du pli, sont réduites à deux du côté opposé ; p. pore. — D. 4. FIG. 8. Iris biflora. Exine vue du côté du pli, dans l'air. — D. 4. FIG. 9. Iris biflora. Tétrade stérile. — A. 5. FIG. 10. Iris Matthioli. Exine avec fond réticulé. FIG. 11. Iris Germanica Partie épaisse de l'intine en coupe optique. — G. 5. FIG. 12. Iris Germanica. Intine externe, vue de face. — G. 5. FIG. 13. Aloe verrucosa. Exine déchirée. — G. 3. FIG. 14. Aloe verrucosa. Pollen débarrassé de l'exine, petite cellule contour- née. ■ — D. 4. FIG. 15. Aloe verrucosa. Pollen en germination dans le suc de la fleur, tube pollinique à paroi simple. — D. 2. FIG. 16. Hemerocallis flava. Exine du côté du pli. — D. 4. FIG. 17. Hemerocallis flava. Exine du côté opposé avec fond réticulé, pointillé. — D. 4. FIG. 18. H Sieboldi. Exine externe en coupe optique. FIG. 19. H. Sieboldi. Exine de face. FIG. 20-21. H fulva. Deux grains de pollen sortant des tétrades. — D. 4. FIG. 22-25. H. fulva. Quatre tétrades avec corpuscules résiduels en nombre variable, pr, granulations protoplasmatiques provenant de la division précédente. FIG. 26. H. fulva. Un corpuscule résiduel adulte. FIG. 27. H. fulva. Les deux couches de l'exine en coupe optique dans le chloral à 8; 5-, après KCIO et KO H à i 0/0. 78 PH. BIOURGE FIG. 28-29 a. Clivia nobilis. Exiné de côté et de trois quarts du côté du pli. — D. 4. FIG. 29 b. Réseau grossi.' FIG. 30. Clivia nobilis. Intine avec son pore, p. — D. 4. FIG. 31. Hj-acinthus orientalis. Pollen jeune. Le protoplasme, pr, gonflé a déchiré l'exine. L'infine est dissoute par HNO, au 12. FIG. 32. Tiilipa gesneriaiia. L'exine est enlevée, la couche interne de l'intine est cellulosique. — D. 4. FIG. 33. Lilium croceiim. Réseau superficiel. FIG. 34. Lilium croceiim. Grossi a) sur le dos; b) près du sillon. FIG. 35. Arum maculatum. Réseau de l'exine. FIG. 36. Ar-um maculatum. Coupe optique. FIG. 37. Acorus calamus. Pollen entier avec son sillon. FIG. 38. Acorus calamus. Pollen en coupe optique après l'action de la potasse à 1000 et de l'eau de javelle. — G. 5. FIG. 39. Eleocharis palustris. a) pollen entier avec les amas, g, f, k; b) exine ponctuée. — D. 4. FIG. 40. Lu:^ula campestris dans le chloro-iodure de zinc ; a) calotte sphcrique chagrinée de face et obliquement; b) id. en coupe optique; c) partie lisse de l'exine. FIG. 41. Lu'^ula campestris. Coupe optique à'une tétïnàe ; /;«, lamelles moj'ennes plus ou moins cutinisées ; el, partie lisse de l'exine; eg, sa partie ouvragée; ic, partie cellulosique de l'intine; ig, partie non cellulosique de l'intine. FIG. 42. Neottia ovata. Vue d'une tétrade mûre. FIG. 43. Orcliis latifolia. Exine générale d'une massule vue de face. FIG. 44. Orcliis latijolia. Coupe radiale optique de la périphérie d'une massule. FIG. 45. Epipactis latifolia. Coupe d'une massule. FIG. 46. Epipactis latifolia. Tétrade profonde, isolée et vidée par l'eau de javelle. Toutes les parois sont colorées fortement en bleu par le chloro-iodure de zinc. FIG. 47. Magnolia obovata. Exine du côté opposé au sillon. FIG. 48. Magnolia sp ? Exine du côté du sillon et dans l'acide sulfurique concentré. FIG. 49. Magnolia sp? Coupe d'une anthère très jeune : //, tissus conduc- teurs ; gg, grandes cellules à gomme ; ce, cellules-mères du pollen. FIG. 50. Magnolia sp ? Cellules-mères un peu plus âgées et fortement grossies. F. 4, FIG. 51. Magnolia sp? Première membrane propre du pollen : a) en coupe; b) de face. G. 5. FIG. 52-54. Magnolia sp ? Étapes du développement de l'intine; p, pore de l'intine. FIG. 55. Mahonia aquifolium. Tétrades non isolées. FIG. 56. Sida picta. Exine externe (réseau et pointes), vue de face, p, pore. — G. 5. FIG. 57. Sida picta. A, coupe optique des enveloppes au même niveau. L'exine externe est soulevée à dessein : elle est terminée par des pointes recourbées ; ar. EXPLICATION DES PLANCHES 79 anneau réticulé recouvrant l'amas pectique lenticulaire ; b, granulations cutinisées protégeant la lentille dans l'ouverture du pore. — G. 5. D, projection de l'anneau réticulé ar \ projection des granulations cutinisées, b. — G. 5. FIG. 58. Althœa rosea. Exine interne, vue intérieurement. — D 4. FIG. 59. A. officinalis. Exine externe. — G. 5. FIG. 60. A . officmalis. Coupes optiques des enveloppes montrant l'intine ma- melonnée sur les deux faces. — D. 4. FIG. 61. Malva sylvestris. Coupe optique des membranes. FIG. 62. Schéma montrant les analogies de structure des enveloppes polliniques du Sida [A) et des Althaea [B); im, amas pectiques représentant l'intine mo3-enne. FIG. 63. Dicentra spectabilis. Grain dans l'air. FIG. 64. Dicentra spectabilis. Grain dans l'eau. FIG. 65. Dicentra spectabilis. Grain en coupe. FIG. 66. Gaiira tripetala. Une protubérance porifère du pollen montrant l'aspect de l'exine externe; p, pore. — G. 5. FIG. 67. Gaura tripetala. L'exine externe est enlevée; a, anneau granuleux donnant naissance à des stries saillantes (b) qui vont constituer l'anneau strié trans versalement (e) ; /, interne. — G. 5. FIG. _68. Gaina tripetala. Coupe optique passant par un pore. FIG. 69. Oenothera biennis. A, coupe optique d'une protubérance porifère; ce, exine externe; ei exine interne; ig, intine générale non cellulosique; ip, intine particulière des pores cellulosiques. — L. 2. B, exine externe vue de face, tout à fait superficiellement. C, exine mise au point plus profondément. FIG. 70-71. Oenothera biennis. Grain de pollen après l'action de l'eau de javelle à S'^ B*^ et de la potasse i 0,0. FIG. 72. Epilobium montaniim. Grain en germination. Le boj-au poUinique a une double paroi, l'interne étant le prolongement du chapeau cellulosique. FIG. 73. Epilobium montanum. Tétrade débarrassée des couches gélifiées externes. FIG. 74-75. Deux grains de la même tétrade isolés mécaniquement et montrant les filets glutineux. FIG. 76-77 Myrrhis odorata. Grain en coupe longitudinale et transversale. FIG. 78. Mjrrrhis odorata. Pore vue de face. FIG. 79. Cornus mas , a-b. Deux demi-grains complémentaires ; c, réseau de l'exine. G. oc. comp. 12. FIG. 80-81. Cornus alba. Exine ponctuée; sillons largement réunis à un pôle et atteignant presque l'autre pôle. FIG. 82. Cornus alba. Coupe optique. FIG. 83-84. Hottonia palustris. Deux grains placés inversement pour montrer la disposition des sillons aux deux pôles. FIG. 85. Hottonia palustris. Grain débarrassée de l'exine. Le protoplasme s'échappe de l'intine. 8o PH. BIOURGE FIG. 86. Syringa vulgaris. Exine portant trois sillons percés de pores. FIG. 87. Syringa vulgaris. Coupe optique de l'exine. FIG. 88. Plantago média. Coupe optique. — G. 4. FIG. 89. Plantago média. Exine vue de face. — G. 5. FIG. 90. Plantago média. Le contenu débarrassé de l'exine prend une forme pol3'édrique. — D. 4. FIG. 91. Vinca minor. Pollen simple examiné dans l'air. FIG. 92. Vinca minor. Pollen dans l'eau ; /z, dans l'huile. FIG. 93. Vinca minor. Pollen après l'action du chloro-iodure de zinc. FIG. 94. Vinca minor. Pollen composé en tétrade, couche cellulosique interne, passant d'une cellule à l'autre. FIG. 95. Periploca graeca. Tétrade. FIG. 96. Hyoscyamiis niger. Exine réticulée portant trois sillons réunis à un pôle. DD. 5. FIG. 97. Hyoscyamus niger. Disposition des sillons sur l'autre pôle. FIG. 98. Nicotiana tabacum. Exine réticulée. — G. 5. FIG. 99. Doronicum sp ? L'exine est dissoute par CrO, à 25 0/0. L'intine n'est pas cellulosique. FIG. 100. Blitiini bonus Henricus. Exine. — G. 5. FIG. 101. Buxus sempervirens. Exine externe. — G. 5. FIG. 102. Buxus sempervirens en coupe optique. FIG. 103. Buxus sempervirens. Exine interne et intine en coupe optique. FIG. 104, Buxus sempervirens. Intine interne constituée par un réseau cellu- losique (vue de l'intérieur); ie, intine externe. — D. 4. FIG. 105. Melandrium diurnum. Les pores nombreux de l'exine présentent à leur centre des granulations cutinisées protégeant l'intine. FIG. 106. Polemonium cœruleum. Exine réticulée. FIG. 107. Taxus baccata. Pollen dans l'air. FIG. 108. Taxus baccata. Pollen dans l'eau; e, exine déchirée; ei, couche externe de l'intine ; im, couches moyennes ; ii, couche cellulosique interne de l'intine. I Planche X Jioitï^e. ad.na£ci&l i- -^Uieià se PlancheE Biouir^a ad. natdci F'GieU.&c-. I LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE chez quelques Mammifères et chez l'Homme PAR A. VAN GEHUCHTEN PROFESSEUR d'aNATOMIE A l'uNIVERSITÉ DE LOUVAIN. (Mémoire dépose le 20 avril 1892.) 11 LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE CHEZ QUELQUES MAMMIFÈRES ET CHEZ l'hOMME. KôLLiKER appliqua le premier, en 1889(1), la méthode rapide de Golgi à l'étude de la structure interne des ganglions du S3^stème nerveux sympa- thique. Dans le ganglion cervical supérieur du veau il parvint à mettre en évidence un certain nombre de cellules nerveuses, qui toutes étaient multi- polaires et pourvues de longs prolongements assez épais. Ceux de ces pro- longements qui étaient colorés sur une certaine longueur se ramifiaient une, deux ou trois fois pour finir par des bouts tronqués plus minces. Outre ces prolongements ramifiés, il y en avait d'autres, plus courts ou plus longs, dépourvus de ramifications et qui faisaient l'impression de devoir se continuer avec des fibres nerveuses am)'éliniques. A côté de ces prolongements, réduits en même temps que les cellules nerveuses dont ils dépendaient, Kôlliker trouva encore dans ses coupes de nombreuses fibres ramifiées, courtes et longues qu'il considère aussi comme des prolongements cellulaires. Sur ces fibres il a pu constater en toute évidence " dass auch mehr als Dreitheilun- gen vorkommen und dass die letzten Endigungen eher feiner sind als die marklosen Fasern die in den Praparaten schwarz gefarbt, und bundelweise beisammenliegend in Menge sich fanden. ^ De ces quelques données, que nous avons tenu à reproduire presque textuellement, il semble résulter qu'en se basant sur les résultats fournis par la méthode de Golgi, les cellules nerveuses du ganglion cervical supérieur du veau sont toutes multipolaires et que, parmi leurs prolonge- ments, les uns se ramifient une ou plusieurs fois pour se terminer par des bouts plus minces que les fibres nerveuses, tandis que les autres restent (i) KûLLiKER : Histologischc Mitthcilungcn-, Sitzungs-Ber. d. Phys,- Medic. Gesellsch, zu Wiirz- burg, octobre iSSo, p. iô6 et 167. 84 A. VAN GEHUCHTEN * indivis et semblent se continuer avec des fibres sans myéline. Les cellules nerveuses du sympathique se comporteraient donc comme les cellules ner- veuses du système cérébro-spinal : comme celles-ci elles auraient des prolon- gements ramifiés ou protoplasmatiques et des prolongements cylindraxils. Mais, tandis que dans le système nerveux cérébro-spinal chaque cellule nerveuse n'a le plus souvent qu'un seul prolongement cylindraxil, chaque élément du système nerveux sympathique en aurait toujours plusieurs. Dans un autre ganglion du veau, où les essais d'imprégnation avaient aussi c]uelqiie peu réussi, Kôlliker retrouva encore les deux espèces de prolongements. De plus, les faits semblent prouver, dit-il, " dass viele Ganglienzellen an zwei Enden in kleine Biindel markloser Fasern tibergehen und mit den verastelten Auslâufern anastomosiren. " Au mois d'août 1891 , Ramon y Cajal publia deux notes sur la structure des ganglions du sympathique. Dans la première communication (1) il a pris comme objet d'étude le ganglion cervical supérieur de l'embryon de poulet du i4<^au \8'^ jour d'incubation. II trouve, comme Kôlliker, que toutes les cellules nerveuses sont multipolaires, mais pour lui, dans le plus grand nombre des cas, chaque cellule nerveuse n'a qu'un seul prolongement cylindraxil et plusieurs prolongements protoplasmatiques se terminant librement par une petite nodosité. Pour certaines cellules cependant, pro- bablement les plus volumineuses, il semble incliné à admettre deux, trois ou plus de prolongements cylindraxils, en harmonie avec ce qu'il a décrit dans les villosités intestinales où la plupart des expansions lui paraissent avoir le caractère fonctionnel. Dans la seconde communication, publiée immédiatement après la pre- mière (2), il étudie les ganglions sympathiques d'embryons de pigeon du i4<= au 16^ jour d incubation, et arrive à des résultats tout à fait différents. De ses nouvelles recherches il conclut que les cellules nerveuses du sympa- thique ne possèdent pas d'expansions pi^otoplasmatiques se terminant en pointe, mais que toutes les expansions sont de nature nerveuse ou C3din- draxile. II divise ces prolongements en deux groupes : des prolongements courts qui se terminent probablement par des arborisations libres dans le même ganglion, et des prolongements longs, qui sont en même temps plus gros et destinés à dépasser les limites du ganglion. {i, Ramon y Cajal : Pequenas contribuciones I. Estructwa y conexiones de los ganglios simpaticos. Barcelone, i8gi. (2) Ramon y Cajal : Pequenas contribuciones VI. Algiiiios detallos mas sobre las celiilas simpaticas ; Barcelone, 20 août 1891. LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE 85 Les prolongements longs (ramas largas) sont variables de cellule à cel- lule. Dans les éléments nerveux les plus volumineux, ils se disposent, comme l'a observé Kôlliker, en faisceaux qui vont à la rencontre de faisceaux semblables venant des éléments voisins; ces faisceaux s'entrecroisent d'une façon très compliquée et donnent ainsi naissance à un plexus très irrégulier de fascicules nerveux. Ces expansions, après un trajet d'une longueur variable, entrent ou dans un cordon intermédiaire qui unit deux ganglions, ou dans un nerf s)'mpathique périphérique. Chaque cellule nerveuse peut envoyer plusieurs cylindre-axes ascendants dans le cordon intermédiaire ou commissure longi- tudinale, et quelques cylindre-axes dans les nerfs périphériques. Un même cylindre-axe peut, en se divisant, donner naissance à plusieurs fibres. Dans sa fig. 15, Ramon y Cajal représente différentes cellules nerveuses pourvues de nombreux prolongements cylindraxils, dont plusieurs se bifur- quent encore pour devenir ou des fibres longitudinales ou des fibres péri- phériques. I^es_prolongeineiits courts se poursuivent difficilement. A part quelques branches grossières qui se terminent librement à une petite distance de la cellule d'origine, toutes les autres s'étendent très loin en suivant un trajet flexueux. Les plus fines semblent ne pas sortir du ganglion, et se résoudre en une arborisation variqueuse, large et très étendue. Tous ces prolongements entrecroisés produisent deux plexus : l'un de fibres grosses, formé par les prolongements longs, et l'autre défibres plus fines, ramifiées, variqueuses et flexueuses, formé en partie parles prolonge- ments courts des cellules nerveuses, en partie aussi par les collatérales et les ramifications terminales des fibres commissurales. Cette seconde communication confirme donc quelques faits signalés dans la première et rectifie la première appréciation de Ramon y Cajal en deux points très importants : 1° Les expansions courtes ne se terminent pas en pointe dans le voi- sinage de la cellule d'origine. Cette disposition ne s'observe que sur des cellules incomplètement imprégnées ou, peut-être, peu développées. Comme les expansions longues, les expansions courtes sont de nature cylindraxile et se terminent par des arborisations libres, fines et variqueuses. 2° Toute cellule paraît avoir plusieurs expansions longues, 4, 6 ou plus. Celles de ces expansions qui deviennent des fibres commissurales lon- gitudinales, émettent sur leur trajet des branches collatérales et finissent par des arborisations terminales libres. 86 A. VAN GEHUCHTEN Enfin dans une troisième communication, datée du 25 novembre et publiée le lo décembre 1891 (1), Ramon y Cajal revient sur ses observations antérieures. Il a étudié cette fois les ganglions sympathiques du chat et du chien adultes, et il arrive à des conclusions qui diffèrent encore une fois de celles obtenues précédemment. Les cellules nerveuses sont multipolaires. Elles possèdent deux espèces de prolongements : des prolongements coiiNs et des prolongements longs. Les prolongements courts sont de véritables prolongements protoplasma- tiques. Leur nombre varie de 2 à 20. La plupart se terminent à quelque distance de la cellule d'origine, par des arborisations terminales qui enve- loppent le corps des cellules voisines en formant autour de chaque élément nerveux un nid péricellulaire. Les prolongements longs sont des prolongements cylindraxils. Dans l'immense majorité des cas, chaque cellule nerveuse n'en possède qu';//7 seul, qui.se continue manifestement avec une fibre de Remak. Ces résultats si divergents et si contradictoires , obtenus par un obser- vateur aussi sagace que Ramon y Cajal, prouvent suffisamment toute la difficulté et toute la complexité du problème et justifient amplement de nouvelles recherches. Ces recherches nous les avons entreprises sur le ganglion cervical supérieur du chien adulte, du chien et du chat nouveau-nés et sur le gan- glion cervical supérieur d'un embryon humain de 25 centimètres. Elles nous ont conduit à des résultats qui confirment en partie les faits signalés par KôLLiKER et Ramon y Cajal. Quelques mots d'abord concernant la méthode suivie. Les cellules nerveuses du sympathique s'imprègnent difficilement par le chromate d'argent quand on emploie la méthode ordinaire. C'est là le motif pour lequel les recherches que nous avons faites l'été dernier sur les ganglions sympathiques ne nous ont donné aucun résultat. Pour obtenir à coup sûr des réductions satisfaisantes, il faut avoir recours à la double et même à la triple inipregnciliou recommandée par Ramon y Cajal. C'est là un procédé pour ainsi dire infaillible. Des nombreux ganglions sympathiques de chien et de chat nouveau-nés et adultes que nous avons coupés, pas un seul n'a résisté complètement à la double imprégnation. Les résultats ont été tout aussi favorables pour les ganglions cérébro-spinaux. Grâce à cette (0 Ramon y Cajal : Notas preventivas II. Estructura del gran simpatico de los mami- feros; Extraido de la Gaceta sanitaria del lo de diciembre iSqi. LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE 8? méthode nous avons trouvé, ainsi que nous le décrirons bientôt, que chez les mammifères et chez l'homme, le ganglion de Casser du trijumeau, le ganglion pétreux du glosso-pharyngien et le ganglion plexiforme du pneu- mogastrique sont formés des mêmes éléments nerveux que les ganglions spinaux, à savoir : des cellules unipolaires dont le prolongement unique se bifurque à une distance variable du corps cellulaire pour donner naissance à une fibre centrale et à une fibre périphérique. A ceux de nos collègues, qui seraient désireux de reprendre et de con- trôler nos recherches, nous conseillons d'opérer de la manière suivante : Les ganglions extraits de l'animal tué par le chloroforme sont portés directement dans le mélange osmio-bichromique. Acide osmique i o/o 5 parties. Bichromate de potassium 3 0/0 20 parties. Les ganglions séjournent dans ce mélange pendant trois jours à l'obscu- rité et à la température ambiante. Au bout de trois jours on les lave rapidement à l'eau distillée et on les porte dans une solution de nitrate d'argent à 0,75 o/o(ij. Si le lavage à l'eau distillée a été trop prolongé, il ne se forme plus de précipité apparent. Il nous a toujours semblé qu'un léger précipité était de bonne augure, aussi quand il fait défaut, nous ajoutons au bain d'argent quelques gouttes de la solution osmio-bichromique. Les pièces séjournent dans le bain d'argent à l'obscurité au moins deux jours. Nouveau lavage rapide à l'eau distillée, puis seconde immersion dans la même solution osmio-bichromique qui a servi la première fois et que nous avons conservée. Après trois jours et après un nouveau lavage rapide à l'eau distillée, les pièces retournent dans le bain d'argent où elles peuvent rester à l'obscu- rité pendant un temps variable. Nous les y laissons au moins deux jours. Enrobage rapide à la cello'ïdine, qui peut se faire facilement en une heure de temps. Les coupes ont une épaisseur de 75 {j- à 100 i^. Recueillies dans de l'alcool à 90°, elles passent par la créosote et la térébenthine pour être montées dans la laque de Dammar dissoute dans le xylol. (i) Nous avons cru pendant quelque temps que l'addition de quelques gouttes d'acide formique au bain d'argent favorisait la réduction ; des essais comparatifs nous ont montré que la réduction se fait d'une façon tout aussi régulière en employant la solution pure de nitrate d'argent. 88 A. VAN GEHUCHTEN Le premier fait que l'on constate avec une extrême facilité c'est que, conformément à la description de Kolliker et de Ramon y Cajal et confor- mément aussi à ce qui est généralement accepté par les auteurs, toutes les cellules nerveuses des ganglions sympathiques sontdesceWnlesmiiltipolaires. Ces cellules varient entre elles par leur forme, par leur volume et par le nombre et la disposition des prolongements qui en partent, ainsi que le montrent les figures ci-jointes. Tandis que certains éléments ne sont pourvus que de 4 ou 5 prolongements, on en voit d'autres qui en possèdent lo, 12 et même plus. Dans certaines cellules les prolongements naissent de tout le pourtour du corps cellulaire, chez d'autres, au contraire, presque tous les prolongements partent d'un même côté en formant un gros faisceau de prolongements enchevêtrés. Ces prolongements ont-ils tous la même valeur? C'est là sans doute la question la plus importante à résoudre. Nous avons vu plus haut que Kolliker admet deux espèces d'expansions : des prolongements protoplasmatiques et des prolongements cylindraxils. Ramon Y Cajal a d'abord partagé la manière de voir de Kolliker; puis, après de nouvelles recherches, il a changé d'avis : dans le sympathique d'embryons de poulet et de pigeon il niait l'existence de prolongements protoplasma- tiques et considérait toutes les expansions cellulaires comme de nature cylindraxile. Dans sa troisième communication il abandonne cependant complètement cette opinion, et il revient à l'idée émise par lui dans sa pre- mière note : avec Kolliker il reconnaît aux cellules nerveuses sympathiques des prolongements protoplasmatiques et des prolongements cylindraxils. Cette- manière de voir est aussi la nôtre. Dans toutes nos préparations où la réduction pouvait être considérée comme complète, nous avons tou- jours trouvé aux cellules nerveuses des prolongements courts, se ramifiant et se terminant dans le voisinage du corps cellulaire; et des prolongements longs, que l'on pouvait poursuivre sur une grande étendue, conservant tou- jours leur diamètre primitif sans émettre de branches collatérales. Ce fait nous semble avoir une importance capitale puisqu'il établit une analogie de structure entre les éléments du système nerveux sympathique et les élé- ments du système nerveux cérébro-spinal, analogie de structure qu'on ne pouvait admettre aussi longtemps que l'on croyait que tous les prolonge- ments des cellules sympathiques se continuaient avec des fibres de Remak : - En résumé, dit Ranvier, en traitant des éléments des ganglions sympa- LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE 89 thiques (i), les cellules nerveuses des ganglions sympathiques des mammi- fères sont multipolaires; de leurs pôles partent des fibres de Remak. Toutes les fibres qui en émanent présentent les mêmes caractères, il n'y a donc pas lieu de leur considérer, comme aux cellules des centres, des prolongements protoplasmatiques et un prolongement cylindraxil. r> Cette manière de voir de Ranvier s'explique facilement. En dissociant des ganglions sympathiques fixés par l'acide osmique, le savant histologiste français a obtenu des cellules nerveuses pourvues d'un grand nombre de prolongements présentant tous le caractère cylindraxil. Il en a conclu néces- sairement que tous ces prolongements devaient se continuer avec des fibres nerveuses. Mais en opérant par dissociation, les prolongements cellulaires ne sont pas conservés dans toute leur longueur; on n'en obtient que des tronçons plus ou moins longs comme le montre les figures 380 et 381 du Traité technique d'histologie de Ranvier. Or, comme nous le verrons plus loin, les prolongements protoplasmatiques des cellules sympathiques ont, dans leurs caractères extérieurs, beaucoup d'analogie avec les prolongements cylindraxils, à tel point que, s'ils n'étaient réduits que sur une partie de leur trajet, on ne saurait les distinguer du véritable prolongement cylindraxil. C'est seulement quand ces prolongements sont conservés dans toute leur intégrité qu'on peut se convaincre de ce fait : qu'un seul d'entre eux se con- tinue avec une fibre nerveuse, tandis que tous les autres se ramifient et se terminent librement dans le voisinage de la cellule d'origine. La méthode de GoLGi est la seule jusqu'ici qui permette de faire cette constatation. Nous allons décrire brièvement les caractères particuliers des deux espèces de prolongements. 1° Prolongements longs. Ce sont les véritables prolongements cylin- draxils, ceux qui doivent se continuer avec une fibre nerveuse, soit avec une fibre centrale ou commissurale reliant entre eux deux ganglions, soit avec une fibre périphérique. Nous avons proposé dans un autre travail (2) de leur donner le nom de prolongements à conduction cellulifuge. Kôlliker pense que chaque cellule nerveuse possède plusieurs prolongements cylin- draxils. Ramon y Cajal a été pendant quelque temps indécis. Après avoir admis que la plupart des cellules ne possèdent qu'un seul prolongement nerveux, sans nier toutefois la possibilité pour les cellules volumineuses (i) Ranvier : Traité technique d'histologie; Paris, 18S9, p. ygj. (2) A. Van Gehuchten : La structure des lobes optiques; La Cellule, t. VllI, 1"' fasc , 1892. / 12 90 A. VAN GEHUCHTEN d'en avoir plusieurs, il attribue, dans sa deuxième communication, la na- ture cylindraxile à toutes les expansions. A la fin de son dernier travail, il admet que, dans l'immense majorité des cas, chaque cellule nerveuse ne possède qu'un seul prolongement devenant fibre nerveuse. Nos observations sur le ganglion cervical supérieur du chat nouveau-né, FiG 1 et 4, du chien nouveau-né, fig. 2, du chien adulte et d'un embryon humain, fig. 3, confirment cette dernière opinion. Dans les cellules nerveu- ses les plus complètement réduites nous n'avons jamais trouvé qu'un seul prolongement cylindraxil. Ce prolongement naît le plus souvent directement du corps cellulaire. Quelquefois cependant nous l'avons vu partir d'un pro- longement protoplasmatique, fig. 1 et 2, a. Il a des contours nets et régu- liers, et présente souvent sur son trajet de petits renflements fusiformes. Nous l'avons poursuivi bien des fois sur une longueur considérable, et nous ne l'avons jamais vu émettre de branches collatérales dans le ganglion même où il a sa cellule d'origine. Prolongements courts ou prolongements à conduction probablement cellulipète. Les prolongements courts existent en nombre variable. Ils correspondent, sans aucun doute, aux prolongements protoplasmatiques des cellules nerveuses cérébro-spinales. Ils en diffèrent cependant par certains caractères qui les rapprochent, morphologiquement du moins, des prolon- gements cylindraxils. Quand ils ne sont pas très nombreux et qu'ils atteignent une certaine longueur, ils sont généralement assez épais, présentent des contours nets, réguliers et des épaississements fusiformes, comme les prolongements cylindraxils. Ces caractères sont quelquefois nettement prononcés, et alors, si la réduction a été incomplète et que les prolonge- ments sont colorés sur une partie de leur longueur seulement, ceux-ci se ressemblent entre eux au point qu'il serait impossible de dire lequel de ces prolongements va devenir une fibre nerveuse. Ce sont probablement des cellules dont les prolongements n'avaient été conservés que sur une petite étendue, que Ranvier a obtenues par dissociation et qui lui ont fait émettre l'idée que tous les prolongements allaient se continuer avec des fibres de Remak. Mais quand la réduction est complète, tout doute disparaît ; le véritable prolongement cylindraxil se distingue alors facile- ment des autres. Les plus longs et les plus épais des prolongements protoplasmatiques se bifurquent à une distance variable du corps cellulaire. Cette bifurcation LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE Ql se fait toujours au niveau d'un épaississement triangulaire. Les deux bran-" ches qui en partent sont excessivement grêles par rapport au prolongement dont elles proviennent, elles sont généralement moniliformes, s'écartent brusquement l'une de l'autre et s'insinuent entre les corps des cellules voi- sines pour se terminer librement, soit comme telles, soit après une nouvelle bifurcation. Quelquefois lés deux branches de bifurcation, après s'être éloignées l'une de l'autre, se rapprochent jusqu'à se toucher et circonscrivent ainsi un cercle presque complet dans lequel se trouve englobé le corps d'une cellule voisine. Une pareille disposition se trouve représentée dans les FiG. 1 et 2, FiG. 3, b et fig. 6, a. Ramon y Cajal désigne cette disposition sous le nom de nid pévicelhi- laire. Il la décrit et la figure dans son dernier travail comme un fait fréquent et caractéristique d'un grand nombre de prolongements protoplasmatiques. D'après ce savant, la plupart des prolongements courts se terminent par ces arborisations péricellulaires qui auraient pour fonction d'associer entre elles plusieurs cellules voisines. Dans les nombreuses préparations que nous avons étudiées avec le plus grand soin, nous avons trouvé bien des fois les nids péricellulaires décrits par Ramon y Cajal, mais la fibrille qui, par ses ramifications, entourait ainsi le corps d'une cellule, était le plus souvent indépendante, de sorte qu'il nous était impossible de dire si c'était un prolongement protoplasmatique, un prolongement cylindraxil ou une collatérale d'une fibre nerveuse longitudinale. Nous avons rendu, dans la fig. 6, aussi fidèlement que possible, quel- ques-uns de ces nids péricellulaires. Nous y reviendrons plus loin. Cinq fois seulement nous avons vu un prolongement manifestement protoplas- matique se comporter de la façon décrite plus haut, fig. l,b, 2, b, 3,b et 6, a. Sans vouloir contester la rectitude des faits signalés par le savant espagnoV nous croyons que la chose est moins fréquente qu'il ne le pense. Aussi ne pouvons-nous donner aucune valeur spéciale à une pareille disposition des branches terminales de certains prolongements protoplasmatiques. Nous la considérons simplement comme accidentelle : la bifurcation se faisant au niveau d'un corps cellulaire, les deux branches terminales doivent néces- sairement s'écarter l'une de l'autre, contourner le corps de la cellule pour se terminer dans les espaces intercellulaires. A côté de ces prolongements présentant ainsi une ou deux bifurcations, on en voit d'autres qui se résolvent brusquement en un bouquet de branches terminales longues, grêles et moniliformes, fig. i, 2 et 3, c. Si cette 92 A. VAN GEHUCHTEN division se fait au niveau d'une cellule voisine, les branches s'écarteront nécessairement les unes des autres et pourront donner naissance à un nid péricellulaire. Les cellules nerveuses placées dans les couches les plus externes du ganglion et pourvues de prolongements protoplasmatiques longs ont une grande tendance à envo3'er ces prolongements vers la face libre du ganglion, ainsi que le montre la cellule e de la fig. 2 et surtout la cellule reproduite dans la fig. 4 à un grossissement de 430 diamètres (Zeiss : DD, 4). Il n'est pas inutile de faire remarquer que les couches les plus superficielles du ganglion sont formées de fibres nerveuses longitudinales émettant sur leur trajet des fines collatérales qui s'enfoncent dans le ganglion. Les prolonge- ments protoplasmatiques viennent donc là plus facilement en contact avec les ramifications collatérales et terminales des fibres nerveuses pour perce- voir l'ébranlement nerveux et le transmettre au corps cellulaire et au pro- longement cylindraxil. Mais toutes les cellules nerveuses ne sont pas pourvues de prolonge- ments longs et épais.- Pour un grand nombre les expansions sont toutes grêles, les longues aussi bien que les courtes. Elles naissent alors en nom- bre considérable d'une face ou de deux faces opposées du corps cellulaire, s'enchevêtrent les unes dans les autres et produisent un faisceau compact dans lequel il est difficile de suivre chaque prolongement pour son compte, FIG. 1, 2, 3, d q\. 5. Tous ces prolongements présentent sur leur trajet de petites varicosités et se terminent librement en pointe. Quelquefois l'un ou l'autre se bifurque mais alors les deux branches ne s'écartent presque jamais considérablement l'une de l'autre. Aussi ces prolongements ne produisent qu'exceptionnellement des nids péricellulaires. Ce sont probablement des cellules de ce genre que Kôlliker a eues en vue quand il dit - dass viele Ganglienzellen an zwei Enden in kleine Bun- del markloser Fasern ubergehen... « Les cellules nerveuses avec leurs prolongements protoplasmatiques multiples et leur prolongement cylindraxil unique ne sont pas les seuls élé- ments des ganglions qui subissent la réduction par le chromate d'argent. Dans toutes les coupes quelque peu réussies, on trouve encore des faisceaux compacts de fibres nerveuses qui traversent le ganglion en tous sens, et un nombre considérable de fines fibrilles variqueuses qui courent tor- tueusement entre les cellules nerveuses, s'entrecroisent, s'enchevêtrent et produisent dans le ganglion une masse granuleuse comparable au premier aspect à la Punksnb$tan\ décrite par Leydig dans les ganglions nerveux LES CELLULES NERVEUSES DU SYMPATHIQUE 93 des animaux inférieurs. Ces fibrilles variqueuses se comportent de plusieurs façons, FiG. 6. Ou bien elles se terminent librement par une petite nodosité, g; ou bien elles se divisent en deux ou trois petites branches terminales, A; quelquefois elles se bifurquent, tV, les deux branches qui en résultent s'écartent souvent l'une de l'autre et émettent de fines ramilles collatérales qui enveloppent le corps d'une cellule nerveuse en produisant un nid péricellulaire, e. D'autres fois encore elles se plient et se replient sur elles- mêmes de façon à entourer le corps d"un élément voisin d'un véritable plexus de rameaux grêles et variqueux. Ces arborisations terminales res- semblent aux nids péricellulaires décrits et figurés par Ramon y Cajal. Pour le savant espagnol, c'est là le mode de terminaison de la plupart des prolongements protoplasmatiques. Nous pouvons difficilement nous pro- noncer sur la véritable nature de ces fibrilles variqueuses. Il est certain, à nos yeux, qu'un certain nombre d'entre elles ne sont que des prolongements protoplasmatiques de cellules nerveuses; mais ce que nous pouvons assurer en toute certitude, c'est que plusieurs de ces fibrilles sont les branches col- latérales_et même les ramifications terminales de fibres nerveuses longitu- dinales ou commissurales. Cela était certainement le cas pour les fibrilles c, d, e et g de la fig. 6. Nous savons, en effet, par les observations de Ramon y Cajal sur les ganglions thoraciques de l'embryon de poulet, qu'un grand nombre de fibres nerveuses traversent le ganglion et y émettent de nombreuses branches collatérales. Nous avons observé aussi dans quelques ganglions, des fibres nerveu- ses émettant des collatérales. La fig. 7 représente les quelques exemples que nous avons rencontrés jusqu'ici. La fibre nerveuse i émet trois bran- ches collatérales c qui se perdent entre les cellules voisines ; de plus elle se bifurque deux fois et donne naissance à des branches volumineuses, véà— tables fibres nerveuses qu'il nous a été impossible de poursuivre jusqu'à leur terminaison. La fibre 2 donne aussi une collatérale, c. La fibrille 3 est une collatérale provenant d'une fibre coupée transversalement. Les fibres 4 et 5 représentent sans aucun doute les ramifications termi- nales de fibres nerveuses provenant de cellules placées dans un autre ganglion. D'ailleurs les données que nous avons acquises sur les relations qui existent entre les différents ganglions et sur la terminaison des prolonge- ments cylindraxils des cellules nerveuses, sont encore très incomplètes. Ce n'est certes pas le ganglion cervical supérieur des mammifères qui convient pour cette étude. 94 A. VAN GEHUCHTEN CONCLUSIONS. 1° Les éléments nerveux du sympathique sont comparables en tous points aux éléments du système nerveux cérébro spinal. Comme ceux-ci, ils sont pourvus de deux espèces de prolongements : des prolongements courts, protoplasmatiques ou à conduction probablement cellulipète, et des prolongements longs, cylindraxils ou à conduction cellulifuge. 2" Les prolongements protoplasmatiques existent en nombre variable. Le plus souvent ils présentent une ou deux bifurcations avant de se termi- ner entre les cellules voisines. Quelquefois cependant ils restent indivis. Ils se terminent toujours librement. La disposition en nid péricellulairc est accidentelle et n'a pas l'importance que Ramon y Cajal est tenté de lui attribuer. 3° Chaque élément nerveux ne possède qu'un seul prolongement cy- lindraxil se continuant avec une fibre nerveuse. I EXPLICATION DES FIGURES Note. Nous avons réuni dans les figures 1, 2, 3, 6 et 7 des cellules ou des fibres nerveuses prises dans différentes coupes. FIG. 1. Cellules nerveuses du ganglion cervical supérieur du chat nouveau-né. FIG. 2. Cellules nerveuses du ganglion cervical supérieur du chien nouveau-né. FIG. 3. Cellules nerveuses du ganglion cervical supérieur d'un embrN'on humain de 25 centimètres. cy : Prolongement cylindraxil. a : Cellules nerveuses dont le prolongement cylindraxil nait d'un prolongement protoplasmatique. b : Prolongements protoplasmatiques dont les deux branches de bifurcation en- tourent le corps d'une cellule voisine. c : Cellule dont un prolongement protoplasmatique se résout brusquement en une touffe de branches plus grêles. d : Cellules dont les prolongements protoplasmatiques longs et grêles, naissent tout près l'un de l'autre de façon à produire des faisceaux de fibrilles enchevêtrées. e : Cellule nerveuse placée dans les couches externes du ganglion et envoyant ses prolongements protoplasmatiques dans les zoi:ies les plus superficielles. FIG. 4 et 5. Cellules nerveuses du ganglion cervical supérieur du chat nouveau-né, dessinées à la chambre claire au grossissement de Zeiss, D, 4. La ligne ponctuée de la FIG. 4 indique la limite du ganglion. cj- : Prolongement cylindraxil. — Les prolongements protoplasmatiques de la fig. 4 se dirigent tous vers la sur- face du ganglion. FIG. 6. Quelques fibrilles nerveuses prises dans le ganglion cervical supérieur du chien nouveau-né et produisant des nids péricellulaires. a : Cellule nerveuse incomplètement réduite dont un prolongement protoplasma- tique se bifurque et entoure le corps d'une cellule voisine. Les fibrilles c, d, e et g sont certainement ou des branches collatérales ou des branches terminales de fibres nerveuses. Les autres ne sont probablement que des prolongements protoplasmatiques . FIG. 7. Branches collatérales et ramifications terminales de quelques fibres ner- veuses dans le ganglion cervical supérieur du chien nouveau-né. AVan.(ie^achlcrL.cuijuihd^h F QieU, s p LE TUBE DIGESTIF DES ÉORIOPHTHALMES ÉTUDE ANATOMIQUE ET HISTOLOGIQUE PAR le D>^ MANILLE IDE ASSISTANT A l'iNSTITUT CYTOLOGIQUE DE LOUVAIN. (Mémoire déposé le 15 mars 1892). 13 LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES APERÇU HISTORIQUE. Les recherches sur le tube digestif des édriophthalmes n'ont pas fait défaut, du moins les recherches anatomiques. Elles se trouvent malheu- reusement répandues dans de nombreux mémoires portant des titres divers, souvent très généraux. L'histologie, au contraire, n'a fait l'objet d'aucun mémoire spécial et détaille. Depuis que les dissections fines se font dans les laboratoires, on décrit chez ces animaux un œsophage étroit montant vers un estomac dilaté, appelé estomac masticateur, par analogie avec celui des décapodes; puis un intestin moyen rectiligne, recevant à son début les glandes hépatiques, et un intestin postérieur très court (Ramdohr, Treviranus, Rathke, Bruzelius, Brandt). Les détails de ces diverses parties, par leur petitesse et leur complica- tion, ont opposé aux zootomistes de grandes difficultés; aussi les données" que l'on possède à leur sujet sont-elles encore aujourd'hui assez rudimentaires. De plus, les descriptions sommaires des auteurs sont parfois fort diffi- ciles à concilier entre elles, même quand elles portent sur des espèces fort rapprochées. Claus en 1887, après avoir décrit le Taiiais apseudes, se déclare dans l'impossibilité de rapprocher les pièces de l'estomac broyeur de celles qu'on a décrites chez les autres isopodes et chez les amphipodes. Certains auteurs ont cherché à comparer les productions d'un édrioph- thalme donné avec les parties qui leur paraissaient semblables chez d'autres crustacés plus élevés, particulièrement chez les décapodes. Nos recherches lOO MANILLE IDE nous ont permis de constater que plusieurs de ces rapprochements sont erronés. Leur inexactitude provient surtout de l'ignorance dans laquelle on se trouvait au sujet de la valeur relative de ces pièces chez les édriophthal- mes eux-mêmes." Une étude comparée et minutieuse faite dans ce groupe pris à part peut seule établir cette valeur. ■ L'anatomie comparée du système digestif des crustacés en général est encore à faire; et l'étude approfondie de celui des édriophthalmes est un élément nécessaire à cette comparaison générale. Dans ces conditions, l'on comprend qu'il est fort difficile d'exposer en détail la part heureuse ou malheureuse qu'a prise chaque auteur au déve- loppement de nos connaissances sur ce sujet. Néanmoins nous tenterons de donner d'abord un court résumé des principales observations qui ont eu pour objet chacune des parties du système digestif, en nous bornant toutefois aux espèces que nous avons étudiées nous-méme : VOniscus murarius, VAsellus aquaticits, le Gainmarus pulex, Y Idotea Iriciispidata, la Vibila mediterranea, Y Anilocra niediterranea, VIone thoracica et le Gyge branchialis. Si. nous touchons à l'histoire d'espèces voisines, c'est que nous croyons que leur structure est analogue. Ainsi il n'est point douteux que les crevettines et les caprellides se rapprochent énormément du Gaminarus. Intestin antérieur. Les glandes salivaires, dont l'existence a été contestée chez les crustacés (Sièbold et Stannius), ont été signalées comme organes communs à tous les édriophthalmes, d'abord par Huet en 1883, puis par Rosenstadt qui ignorait le travail de l'auteur français. Déjà an- térieurement, tous les meilleurs observateurs les avaient retrouvées dans les espèces qu'ils étudiaient, par exemple : Dohrn, Haller, Braun, Weber, Frenzel, Mayer, Claus. Mais ces glandes, bien qu'elles aient probablement des rapports physiologiques avec la digestion, ne s'ouvrent point cependant dans le tube digestif. Ce sont des glandes cutanées dont nous avons public une étude cytologique il y a peu de mois (i). Œsophage. Les quelques auteurs qui ont décrit l'œsophage ont parlé de sa longueur et de sa direction, et y ont signalé quatre replis longitudinaux dans les principales espèces, Lereboullet pour les cloportides terrestres, Huet dans la Ligia oceanica. (1) Manille Ide : Les glandes cutanées, elc -, La Cellule, T. VU, 1891. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES lOl Leydig s'arrête un instant à l'examen histologique de cette région ; i-1 met en lumière ce fait que la cuticule œsophagienne est portée par une matrice cellulaire et n'est pas elle-même formée de cellules. Sous cette ma- trice (hypoderme), Huet place deux couches musculaires, l'une longitudinale et l'autre transversale. Chez les caprellides, Mayer a mieux connu la mus- culature qui comprend, outre les muscles circulaires, des muscles extrin- sèques reliant l'œsophage à la cuticule dermique. Estomac. C'est ici que l'accord est le plus difficile à établir entre les divers auteurs, qui n'ont d'ailleurs pas étudié les mêmes animaux et cjui n'ont jamais pris la peine d'en faire une étude comparée dans une série d'espèces. Notons d'abord un premier fait. Depuis les plus anciens auteurs jusqu'aux plus récents et aux plus autorisés, comme Claus (i88S), presque tous ont subdivisé l'estomac des crustacés en deux portions : l'antérieure nommée cardiaque et la postérieure nommée pylorique. Pour les décapodes et la plupart des autres classes de crustacés", l'accord est complet à ce sujet (Huxley, Mocquart, Nauck, Albert, Frenzel, Claus); cette subdivision est d'autant plus importante, qu'on attribue à chacune de ces portions des fonctions absolument différentes. Pour les édriophthalmes, il y a quelques auteurs qui ne parlent pas d'une pareille subdivision, tels sont : Lereboullet, Leydig, Weber; toutefois, ils attribuent, eux aussi, à la portion nommée pylorique la fonction valvu- laire qu'on lui accorde ailleurs. De ces deux régions de l'estomac, l'antérieure a toujours été la plus nettement décrite pour chaque espèce séparément, et la multitude de ses dents ou saillies chitineuses lui a fait octroyer le rôle de chambre masticatrice. Au contraire, l'anatomie de la partie postérieure a été constamment négligée, et sa fonction physiologique a été réduite par tous au rôle unique de filtre, d'appareil valvulaire ou sphinctérien. Dohrn avait dit en étudiant VAselliis qu'on n'entrevoyait pas la fonction de la chambre postérieure de l'estomac, " ipàhrend die hiiitere Kammer keiiie prouoncirte Fiinctioii verrdth. ^ IVEilne-Edwards, en parlant du cloporte, avoue que la partie pylorique est ^ fort compliquée et difficile à comprendre. " Claus ne nous mène guère plus loin dans son dernier mémoire sur ce sujet : Bedeittendere Schnnerigkeiten verursacht die Ermiltelung der speciel- 102 MANILLE IDE leven Gestaltitng des Pylorusabschuittcs desscn complicirler, schiper :{ii verstehender Ban aiich den Einsicht in die besondere Fuuction hinderlich ist. Ailleurs encore il parle dû Pydorusabschuitt mit seiner medianen com- plicirtei! Faltenbildung. Nous verrons dans nos conclusions combien les auteurs faisaient fausse route dans leurs suppositions sur la valeur anatomique et physiologique de cette région. Lereboullet décrit l'intestin des isopodes terrestres avec beaucoup de détails. Il a disséqué le tube digestif et l'a ouvert d'un bout à l'autre; nous lui devons la connaissance des grandes lignes de sa structure. Le lecteur pourra retrouver un résumé de ses découvertes dans l'anatomie comparée de Bronn (Bronn's Klassen). Naturellement l'absence de coupes et le manque de grossissements suffisants n'ont pas permis à l'illustre- zoologiste de s'orienter convenablement dans les détails complexes de l'estomac. Il dessine dans l'estomac ouvert de V Annadillo six pièces saillantes ; une supérieure, une inférieure et deux paires de pièces latérales. Ses figures sont loin de donner une idée exacte de la forme, de la structure et surtout de la position relative de ces pièces et du rôle qu'elles doivent jouer. Nous en ferons la critique au cours du travail, et nous verrons alors que c'est au niveau de la portion postérieure de l'estomac que l'auteur s'est égaré dans ses descriptions. En 1855, Leydig en étudiant le Porcellio scaber y décrit comme pièces principales : '^ ein obérer stiletfôrmiger Zahn iind ein paar seitlicher Bogen. Let^tere gehen nach vorii in kiirieren imd làngeren Borsten ans. » En décrivant plus tard l'estomac du Gammarus, il ne parle guère que d'un « System stàrkerer iiiid feinerer Borsten die an gervissen Stellen {ii bedeii- tender Lange ausjvachsen , ananderen :{iifcinen Hôckerspit^en herabsinken.y Les grosses dents près de l'œsophage le frappent spécialement : " mehrere Reihen dickerer Dornen. -^ Mais il ne décrit en détail aucune de ces pièces et n'en donne aucun dessin. Il est à remarquer qu'à la suite du travail de Lereboullet l'homologie entre les pièces stomacales des décapodes et celles des édriophthalmes fut admise par les auteurs classiques (Milne-Edwards). Nous verrons jusqu'à quel point leurs rapprochements étaient acceptables. DoHRN en étudiant l'embryogénie de YAsel/iis aquaticus poursuit le développement de l'estomac jusqu'à un stade avancé. Déjà il voit le com- LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES IO3 mencement de la division de cette cavité en deux parties : 1" antérieure est le -Kaii- itnd Reibmagen ^ et la postérieure est énigmatique. Il ne voit dans la dernière que des - longitudinale Falten -. Dans l'antérieure il existe des - Reibplatten r, contre lesquels des reliefs chargés de dents recourbées viennent émietter les aliments. Nous aurons ultérieurement l'occasion de rapporter les découvertes embryogéniques de Dohrn. ScHôBL décrit chez VHaplophthûlniiis une structure analogue : les Reib- platten, qu'il nomme Planities lierpetolithœf ormes, portent des stries en arc parallèles - bogenformigen parallelen Chitinrippen «. Il ajoute que les Onisciis, Porcellio, Armadillo et Typhlonisciis sont beaucoup plus com- pliqués. Sars étudie avec beaucoup de soin, mais encore par simple dissection, le système digestif de VAselliis et du Gammanis, déjà décrit rapidement par Bruzelius. Ses planches sont ce qu'il y a de mieux dans ce genre. Mais, pas plus que celles de Lereboullet, elles n'établissent avec toute la préci- sion désirée la forme et les rapports des pièces contenues d'ans l'intestin, principalement dans sa portion pylorique. Gamroth, qui s'occupe des gammarides après avoir étudié les cre- vettines, trouve la structure des premiers plus compliquée que celle des dernières. Or, il na vu chez celles-ci que les reliefs dentés qu'il fait servir à l'émiettement des aliments, et un toit chargé de dents et présentant deux " Chitinfalten ", qu'il dessine dans ce que Dohrn appelle la deuxième chambre. Enfin, il représente du côté dorsal deux valvules attachées longi- tudinalement aux côtés de la paroi supérieure. Elles se dirigent l'une vers l'autre sans se toucher et sont encore garnies de dents. Weber, en 1881, ne trouve rien à ajouter aux descriptions de Lere- boullet et de ScHôBL. Huet, en 1883, en décrivant la Ligia, renvoie également sans restriction à Lereboullet. Enfin en 1888, Rosenstadt publie une monographie sans figures de V Aselhis aquaticiis. Voici ce qu'il nous apprend de nouveau : le bord de l'orifice postérieur de l'œsophage porte deux bourrelets latéraux et inférieurs, saillants dans l'estomac et chargés de poils raides. La portion pylorique se relève pendant la mastication stomacale sans avoir d'autre fonction que celle de valvule. Il croit d'ailleurs à l'existence d'un sphincter entre l'estomac et l'intestin moyen. 104 MANILLE IDE Nous parlerons de l'historique des bopyrides dans le cours du mémoire. Il nous resterait à résumer la description de VIdotea, donnée par Rathke en 1833. Mais cette étude, déjà très ancienne, est faite tout entière par simple dissection. Nous épargnerons au lecteur la critique de ses multiples détails, parce que ceux-ci ne nous fourniraient aucun rapprochement utile; Milne-Edwards le dit lui-même. Nous parlerons plus loin d'un mémoire de Weber sur une espèce très voisine : le Glyptonotus sabini ou Idole a sabini. En général, les dessins de tous les auteurs sont pris à l'aide de grossis- sements beaucoup trop faibles. Si le lecteur jetait un coup d'œil sur les dessins de Huxley, Mocquart, Nauck, Frenzel pour les décapodes, et sur ceux des savants qui ont étudié les édriophthalmes, Mayer, Weber, Roux, ainsi que sur les nombreuses planches publiées par Claus sur divers groupes, il s'avouerait probablement aussi impuissant que ce dernier (1) à s'orienter dans ce dédale. Le seul moyen d'y arriver était d'entreprendre une étude minutieuse et suivie de ces organes dans le groupe des édriophthalmes. Nous avons tenté d'aborder cette tâche laborieuse et nos recherches nous ont conduit à la conclusion générale que nous énoncerons dès mainte- nant : Uestomac broyeur des édriophthalmes est construit partout sur le même plan, et, parmi les nombreuses pièces qu'il contient, il y en a qui ont une importance plus grande que d autres au point de vue morphologique. Elles se retrouvent jusque dans certaines formes dégradées, et sont les homo- logues évidents des pièces principales qui s'observent dans d'autres groupes de crustacés, en particulier che{ les décapodes. Intestin moyen. L'intestin moyen de la plupart de ces espèces est, dit-on, rectiligne jusqu'à l'anus. Brandt, Lereboullet et Schnitzler le représentent chez les oniscides avec assez d'exactitude. Ils décrivent aussi, sans pénétrer dans leur structure intime, les reliefs longitudinaux dorsaux, dont on ignore d'ailleurs les fonc- tions (Milne-Edwards, Huet, Weber). Les grandes cellules épithéliales de cette région ont fait l'objet des observations de Carnoy et de Van Bambeke sur les altérations artificielles du noyau. (1) Claus : Eiiie detaillirtere Vcrgleichuitg mit dcn Dccapodcmnagen scheUit, ebenso wie evie solche mit den Magen der Isopoden und Anxphipoden, vorlaûjig nicht mit ausreichender Sicherheit mOglich. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 105 Leydig signale dans quelques grandes cellules de cette portion intes- tinale la présence de quatre noyaux. En 1885, Carnoy dans sa Cytodiérèse dit qu'elles en contiennent souvent deux ou plus, jusqu'à 20 ou 30 dans les Cirolana et qu'ils se forment par sténose (1). Ziegler et Von Rath sont arrivés tout dernièrement à dés résultats semblables. Enfin Huet a étudié le protoplasme de ces cellules avec de forts gros- sissements. Il voit des colonnes chitineuses en palissade traverser perpen- diculairement cette couche épithéliale; mais il ne distingue pas de limites cellulaires dans cette couche. Ces éléments lui paraissent - être en continuité de substance à travers les colonnes en palissade qui les limitent sans les séparer. - En outre, il n'a pas compris les altérations artificielles des noyaux. La musculature de cette portion intestinale a été observée par Lere- boullet et Huet. Les fibres longitudinales et circulaires, dan/leurs figures, se croisent de manière à former des carrés réguliers. Gerst.^cker en déduit l'hypothèse que la régularité des fibres musculaires est en rapport avec la régularité du pavement épithélial. Toutefois Huet signale sans préciser quelques anastomoses obliques entre les travées musculaires parallèles. L'issue des glandes hépatiques avait été placée à la face dorsale de l'intestin moyen par Lereboullet. Mais d'autres auteurs ont reconnu qu'elles s'ouvrent sur la face ventrale. Quant aux glandes hépatiques, elles ont fait l'objet d'études spéciales de la part de Frenzel, Weber, Cattaneo; nous en dirons un mot plus loin. Sphincter ; Rectum. Derrière un sphincter, dont l'existence a été constatée dans toutes les espèces, se trouve un intestin terminal souvent appelé rectum. Lereboullet place encore ici des glandes, comme dans la paroi de l'intestin moyen. Gerst^cker rapporte et admet ce détail. Huet dit ne rien trouver de semblable dans la Ligia, et.'VVEBER, enfin, pense qu'il n'y a aucune raison pour donner le titre de glandes à quelques grandes cellules de l'intestin. Huet signale près de l'anus une diminution dans les dimen- sions des cellules épithéliales et un simple renforcement des couches mus- (i) La Cytodiéicse des Arthropodes; La Cellule, t. I, p 221. Voici comment s'exprime l'auteur : K C'est à l'étranglement du noyau, el nullement à la caryocinèse. que les cellules de l'intestin des isopodes, etc., sont redevables de leur multinucléarité si fréquente, les Cirolana sont des plus remar- quables sous ce rapport. On y rencontre dans presque toutes les cellules de 10 à 3o noyaux parfai- tement constitués, et dont plusieurs souvent subissent en même temps la division directe » 14 106 MANILLE IDE culaires communes à l'intestin. Claus , dans les espèces spéciales qu'il a décrites, trouve au rectum une musculature qui correspond à celle que nous représenterons dans nos espèces. A propos des glandes dorsales annexées à la partie postérieure de l'in- testin moyen des amphipodes, glandes habituellement nommées - tubes de Malpighi y, nous donnerons dans le cours du travail un exposé des recherches embryologiques dont les résultats sont de nature à établir leur véritable valeur morphologique. I OBSERVATIONS PERSONNELLES. Avant daborder la partie descriptive de ce mémoire, nous prions le lecteur de jeter un coup d'œil sur la table des matières, afin de prendre connaissance de notre plan d'étude. Nous tenons aussi à exprimer ici nos remerciments à Messieurs les professeurs Carnoy et Gilson. C'est à eux que nous devons l'idée première de ces recherches, qui ont été poursuivies à l'Institut cj'tologique de Lou- vain avec l'aide constante de leurs précieux conseils. CHAPITRE I. Descriptions anatomiques. A. Oniscus asellus. Les édriophthalmes étant en général des animaux de petite taille, il est absolument impossible d'acquérir une connaissance précise et détaillée de leur structure par la simple dissection au scalpel et aux ciseaux. Sans doute cette méthode ancienne est toujours la première à employer; mais, eût-elle à son service l'habileté la plus consommée, elle est absolument incapable de remplacer la méthode des coupes en série. Il est nécessaire de combiner ces deux moyens. C'est ce que nous avons fait. _ Nous exposerons séparément d'abord les données que nous a fournies la simple dissection, puis les données plus complètes que nous avons retirées de l'étude des coupes. A. Étude des orga)ies disse'qiie's. MODE OPÉRATOIRE. S'il est facile d'extraire l'intestin moyen d'un cloporte pour en étudier les remarquables cellules épithéliales, il est au contraire fort malaisé d'isoler l'intestin antérieur et l'intestin terminal; il est plus difficile encore d'en étudier l'intérieur qui présente des dispositions compliquées. lo8 MANILLE IDE Nous avons procédé généralement comme il suit : l'animal bien séché est placé surun porte-objets par le ventre ou par le dos, suivant l'organe dont on se propose de faire l'étude. Il y est fixé à l'aide d'un peu de paraffine qu'on fait fondre autour de lui et qui, en se figeant, en rive solidement tous les somites au porte-objets. On élève ensuite à une certaine distance de l'animal un mur à l'aide de bâtonnets de paraffine, qu'on fixe également au verre en les touchant d'une tige métallique chauffée, de manière à construire un baquet dans lequel on verse de l'eau, de l'alcool ou d'autres substances, afin d'opérer la dissection sous un liquide. On attaque ensuite le test de chaque somite et de la tète à l'aide d'un scalpel fin et bien aiguisé. Cette opération, comme l'enlèvement des tissus inutiles, est rendue très facile grâce â l'immobilité complète à laquelle toutes les pièces squelettiques se trouvent réduites. Quiconque a tenté de disséquer un édriophthalme a dû éprouver combien il est difficile d'obtenir ce résultat par les moyens de fixation ordinaires. On parvient ainsi à dégager le tube digestif sur toute sa longueur, à sectionner les fibres musculaires qui en relient les extrémités à la paroi du corps et à extirper l'intestin, en y laissant adhérer les organes masticateurs et l'arceau ventral du dernier segment qui porte l'orifice ou plutôt la fente anale. Il est utile d'achever la préparation sur un porte-objets en la travaillant avec deux scalpels très aigus sous le microscope â dissection. Après cela, il reste à ouvrir l'intestin longitudinalement pour en décou- vrir les détails internes. Cette opération, très simple au niveau de l'intestin moyen, devient fort difficile aux extrémités, et même impossible chez les individus de petite taille ; elle est singulièrement facilitée quand l'intestin est à l'état de vacuité. On obtient facilement ce résultat en faisant jeûner les animaux; mais ce dernier traitement exige certaines précautions. En effet, il faut priver l'animal en expérience de toute substance organique ou terreuse qu'il puisse avaler, et cela sans le faire mourir soit par dessèche- ment, soit par épuisement musculaire, soit par asphyxie. Un vase de verre est une fort mauvaise prison pour les cloportes, ils y meurent très vite, même si l'on a soin d'y entretenir l'atmosphère humide qui leur est nécessaire. Ne parvenant pas à fixer leurs pattes aux parois, ils s'agitent sans relâche, se renversent sur le dos et meurent bientôt épuisés par les efforts qu'ils font pour se relever. De plus, si le vase est un peu profond, les gaz de leur respi- ration s'y accumulent et suffisent à les asphyxier. On les conserve facilement LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES lOQ dans un vase en terre cuite poreuse renversé sur une plaque de verre et entouré d'une triple bande de papier à filtrer, qu'on humecte de temps en temps. Après quatre ou cinq jours, l'intestin est complètement vidé, pour- vu qu'on ait soin d'enlever leurs matières fécales, car ils les avalent quand la faim les presse. DESCRIPTION. Comme nous l'avons dit, la dissection est loin de fournir des données complètes et précises sur la structure du système digestif; c'est même à grand'peine que l'on parvient à l'aide des deux méthodes combinées à se former une idée satisfaisante de certains détails internes. Après avoir enlevé avec les précautions indiquées les arceaux dorsaux de tous les somites et de la tête, on peut réussir à détacher le système digestif au complet et à le placer tout entier sur un porte-objets, pour l'exa- miner par sa face dorsale. Une bonne loupe, ou mieux un microscope armé d'un très faible grossissement, permet alors d'y reconnaître les parties que nous allons décrire rapidement, en nous servant des fig. l, 2 et 3. Nous présentons ces figures plutôt comme des dessins explicatifs que comme des reproductions fidèles de l'appareil, tel qu'on l'a sous les yeux en le préparant comme il vient d'être dit. Nous ne parlerons pas de l'armature buccale, qui est généralement fort dérangée sur les pièces obtenues par ce procédé. On les étudie le mieux en fixant la tête seule par sa face supérieure sur un porte-objets avec un peu de paraffine, comme nous l'avons indiqué, et en disséquant les pièces buccales une à une sous l'eau, à l'aide d'un scalpel très fin et d'un microscope à dissection. Ces pièces ont été très bien décrites, et nous nous bornerons à renvoyer le lecteur au travail de Lereboullet. A la région des pièces masticatrices buccales fait suite un tube mince, cylindrique, mais présentant en avant une dilatation infundibuliforme d; c'est Y œsophage. Dans l'axe de la portion cylindrique on remarque sans peine une double ligne brillante, présentant l'aspect d'une cuticule. Nous indiquerons la signi- fication de cette ligne en étudiant nos coupes. Elle se continue en arrière avec la cuticule de la partie suivante Le segment suivant du tube digestif se dilate brusquement, et le pre- mier tronçon de cette partie constitue l'estomac des auteurs ; nous le dési- gnerons dans ces pages sous le nom de poche malaxatrice. 110 MANILLE IDE Cette poche n'est pas très nettement séparée de l'intestin; elle s'en distingue néanmoins par un faible renflement de sa partie médiane et par un léger étranglement de son extrémité postérieure. Les nombreux tronçons de fibres musculaires, qui y restent adhérents, cachent notablement sa forme extérieure et surtout les appareils particuliers que loge sa cavité. A cette partie fait suite un tube droit, long d'un centimètre environ, qui n'est autre que Y intestin nwyeu. Nous comprenons sous la dénomination d'intestin moyen toute la por- tion qui s'étend entre les niveaux A et D de la fig. 1. Cette portion se subdivise en trois parties. La première AB possède un calibre considérable, et sa longueur est proche de. la moitié de la longueur totale de l'intestin moyen. On remarque sur la ligne médiane supérieure une opacité linéaire se terminant en arrière par une surface elliptique à contours nets. Cette bande est bordée de deux lignes claires, longées elles-mêmes par une ligne sombre. Cet aspect, comme le démontrera l'examen des coupes, correspond à une crête interne saillante, bordée de deux gouttières (Lereboullet et Huetj. Le segment suivant BC est moins large, presque régulièrement cylin- drique et rectiligne; il ne présente aucune particularité à l'œil nu. Ces deux premiers tronçons, en général, sont remplis d'aliments for- mant une masse noire ou plus ou moins brunâtre. Quand l'animal a été soumis à l'inanitiation, ils peuvent se montrer parfaitement vides; ils sont alors d'un blanc gris ou jaunâtre. On y distingue à la loupe, et même en certains endroits à l'œil nu, une infinité de taches blanches très petites; elles sont dues aux noyaux des énormes cellules épithéliales qui en tapissent la face interne. Ce sont ces noyaux que Lereboullet appelle des glandes tant dans l'intestin moyen proprement dit, que dans la portion située en arrière du sphincter, s, portion qu'il nomme rectum. Voilà l'origine de l'opinion clas- sique, mais erronée, qui doniîe aux cloportes des glandes rectales. A l'extrémité postérieure de ce segment, on remarque un étranglement, 5, plus ou moins caractérisé et de longueur assez variable. On y distingue aisément une couche musculaire circulaire extrêmement puissante, formée de fibres nombreuses, serrées et très grosses. C'est un véritable sphincter qui sépare le second segment du troisième. On remarque parfois dans son axe une mince colonne de masse alimentaire ou fécale comprimée. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 1 1 1 IvC segment suivant CD est une poche légèrement incurvée en 5. Dans VOniscus vivant cette poche se dirige obliquement vers le bas. Enfin le dernier segment est le rectum ou intestin postérieur. Il est comprimé latéralement et s'ouvre à la surface ventrale non par un orifice circulaire, mais par une fente bordée de deux valves cuticulaires. De nombreuses fibres musculaires, ou du moins leurs tronçons, de- meurent toujours adhérents à la paroi de l'intestin postérieur, comme à celle de l'antérieur. Ce sont des fibres musculaires extrinsèques ; nous les étudierons dans nos coupes. Si l'on ajoute à cela que l'on aperçoit de chaque côté deux longues glandes tubulaires, jaunes, remplies de sphérules graisseuses, presque aussi longues que l'intestin et se glissant sous lui en avant, on possédera toutes les données que l'on peut retirer de l'examen du tube digestif vu par sa face dorsale. Il convient alors de sectionner transversalement l'intestin moyen et de fendre longitudinalement tout le tube sur sa ligne médiane dorsale jusqu'à l'œsophage. On y arrive assez bien en introduisant dans la cavité un scalpel très effilé. On dispose la lame le tranchant vers le haut et en contact avec la paroi que l'on veut couper, et on opère l'incision en appuyant sur ce tranchant une tige de bois très fine. Il faut avoir soin d'opérer au sein d'une grosse goutte d'eau. L'ouverture de la poche malaxatrice est une opération délicate ; on y arrive néanmoins, avec un peu d'exercice. En rejetant à droite et à gauche les lambeaux qui bordent l'incision, on étale complètement la face interne de l'organe. Mais il ne suffit pas de mettre au jour les productions que contient la poche malaxatrice; il faut alors les comprendre, se figurer la forme et la disposition de chacune d'elles. Ce n'est pas chose facile. Aussi nous bor- nerons-nous pour le moment à prier le lecteur, en attendant l'explication des coupes, de jeter un regard sur la fig. 2, qui représente une poche malaxatrice ouverte. Nous allons donner une courte explication de ce dessin. Les parties indiquées S^ et S^ constituent un appareil médian s' élevant du fond de la poche. S. est une saillie médiane, impaire, cono'i'de, terminée en avant par un bout très aigu qui se fond dans la paroi inférieure du sac. En arrière, elle se 1 12 MANILLE IDE termine aussi par une pointe très saillante, détachée et dirigée obliquement vers le haut comme une languette. Sj est une saillie lamellaire qui se répète des deux côtés de la saillie impaire. En avant et en dehors elle se trouve en contact avec la saillie 5,. Celle-ci est latérale et légèrement supérieure, au moins dans sa partie antérieure. Il existe donc sur le fond de la poche malaxatrice deux paires de profonds sillons. Les deux postérieurs appartiennent à l'appareil médian. Ils sont limités en dedans par la face externe de la saillie impaire S^, et en dehors par la face interne de la saillie lamellaire Sj. Les deux autres, situés au-devant et en dehors des sillons postérieurs, sont limités en dedans par la face antéro- externe de la saillie lamellaire 5,, et en dehors par la face interne de la saillie massive S, qui est antérieure et latérale. Disons dès ce moment que le sillon A, compris entre S^ et S,, est limité, sur une partie de sa surface, par des plaques chitineuses épaisses et striées. Le sillon B, qui est d'une forme plus compliquée, est également limité par des plaques cuticulaires épaisses, portant à leur surface des côtes saillantes. La voûte de la poche ne présente aucun détail à signaler pour le moment. Nous ferons l'étude détaillée de toutes les pièces en expliquant les coupes. En attendant, jetons encore un regard sur la fig. 3. Cette figure repré- sente la partie antérieure du tube digestif vu par sa face ventrale. La surface triangulaire S^ correspond à la saillie médiane impaire. Elle se termine en avant par une tige chitineuse aiguë, sur laquelle s'insèrent quatre fibres musculaires en croix de S'-André. Ces fibres par leur ex"trémité ex- terne vont s'attacher, les antérieures à la cuticule dermique, les postérieures à des pièces fixes placées à l'intérieur du corps. En gl se voient les glandes tubulaires dont nous avons déjà parlé, ou les glandes hépatiques des auteurs ; nous les désignerons avec Plateau sous le nom de glandes digestives, ce terme étant plus en harmonie avec leur fonction physiologique. Ces glandes, situées de chaque côté, se réunissent en un seul tube, cgi, qui prend une direction transversale et se jette dans la portion posté- rieure de la poche malaxatrice. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 113 En arrière de l'embouchure de ces canaux glandulaires, on aperçoit un' léger bourrelet transversal, ap ; c'est le fond saillant de l'arrièrè-poche des canaux. Il est inutile que nous nous arrêtions plus longtemps sur les résultats nécessairement incomplets et peu précis que peut fournir cette méthode longue et laborieuse. Nous nous expliquerons plus loin au sujet de la manière dont nous divisons le tube digestif, ainsi que sur les limites que nous attribuons à chacune de ces régions. '&' B. Etude des coupes inicrotomiques. MÉTHODE. Nous avons pris le parti de couper l'animal tout entier, et dans tous les sens. Les sections en série ainsi obtenues montrent l'intestin dans ses rapports naturels avec les autres organes, et assez bien conservé dans sa forme. Au contraire, si l'on extirpe d'abord les organes pour les enrober isolément, outre qu'on risque toujours de les altérer, on n'acquiert aucune donnée certaine sur leur position. De plus, pour ce qui concerne l'intestin antérieur et postérieur, il est certain que les fibres musculaires cjui rattachent ces parties à la paroi du corps concourent puissamment à atténuer les défor- mations et les déplacements que tend à y produire l'action des réactifs fixa- teurs et surtout de l'alcool. Mais cette méthode n'est pas exempte de difficultés. D'abord la cuti- cule dermique calcifiée se coupe difficilement et s'effrite sous le rasoir. D'autre part, si on la décalcifie sans précaution, les bulles d'anhydride carbonique qui se dégagent brisent les tissus ou les refoulent en les altérant profondément. Fixation. Nous avons employé pour la fixation de nos objets les divers réactifs recommandés par nos devanciers. A l'exemple de Claus, nous avons le plus souvent commencé la fixa- tion par un séjour de quelques minutes dans la solution saturée de bichlorure de mercure. Ce liquide, malgré sa neutralité, tout en fixant très bien les tissus sous-jacents décalcifie légèrement, incomplètement peut-être, mais suffisamment pour donner à la cuticule une consistance suffisante. 15 114 MANILLE IDE La solution picro-sulfurique a été employé avec succès pour plusieurs espèces marines. L'alcool faible à 50 ou à 60 degrés nous a donné souvent de bons résultats au point de vue de l'étude anatomique. La pénétration des réactifs est très difficile si l'animal est intact. Son enveloppe cuticulaire le défend de toute part, et il se garde bien d'ouvrir ses cavités naturelles pour y laisser entreries liquides irritants. Nous avons vu des cloportes et des aselles se débattre pendant plusieurs minutes dans la solution saturée de bichlorure. C'est pourquoi nous coupons transversalement VOuiscus en deux mor- ceaux d'un coup de ciseaux, au moment de le laisser tomber dans le fixateur. Pour quelques petites espèces parasites à corps mou, comme le Gyge, nous attendons plutôt sa mort dans le liquide fixateur avant de le sectionner. Nous avons essayé aussi d'injecter le bichlorure dans la cavité péri- viscérale en enfonçant la pointe d'une pipette de verre entre deux segments du corps. L'animal est foudroyé par ce système, et l'on obtient de bons résultats. Pour favoriser la pénétration des liquides et l'enrobage, on serait tenté d'enlever par quelques coups de ciseaux les parties latérales aiguës des métamères, mais en pratique l'effet produit est désastreux. Il faut donc se contenter d'une division transversale de l'animal. On peut donner le coup de ciseaux plus ou moins près de la tète. Si on veut favoriser la fixation de la tête, il est utile de pratiquer la section derrière le premier somite thoracique, mais pas au-delà, de peur de blesser la poche malaxatrice. IJéiirobage à la paraffine ordinaire réussit assez mal. Le collodion ou la photoxyline, d'autre part, ne fournissent que des coupes assez épaisses et ne sont pas favorables à la confection des séries ininterrompues. Heureuse- ment la combinaison de ces deux méthodes, indiquée en 1887 par Kult- scHiTZKY de Charkoff (1), puis par Fabre-Domergue dans son Traité de technique (2), donne d'excellents résultats. Toutefois le procédé de GiLSON, outre sa rapidité incomparable, est encore plus favorable (3). II consiste, comme on sait, à faire bouillir les pièces dans une solution peu concentrée de collodion ou de cellojdine jusqu'à réduction à 1/3 du volume, (1) KuLTScHiTSKY : Zeitschrift fur Mikroskopie, B. IV, 1S87, p. 48. '2) Fabre-Domergue : 'Premiers principes du microscope; Paris, Anselm, 1889. (3j G GiLsoN : La soie et les appareils séricigènes ; La Cellule, t. VI, !"■ fasc, 1890. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 115 à durcir dans une petite quantité de chloroforme à laquelle on ajoute en- ' suite de la paraffine, et qu'on chauffe prudemment jusqu'à évaporation complète du chloroforme. Nous avons consacré à chacune de ces opérations le temps suivant : Mélange d'alcool et d'éther . . . . .15 minutes. Collodion dilué, ébullition ..... 30 « Chloroforme additionné de paraffine et chauffé . 15 « Paraffine débarrassée de chloroforme . . .15 Nous nous sommes assuré que la pénétration d'un Oniscits par le collodion est aussi avancée après une ébullition de 30 minutes qu'après une immersion de 24 heures dans la solution froide. Coloration. Nous avons longtemps essayé la coloration en bloc de nos pièces, espé- rant gagner ainsi un temps précieux après la confection des coupes. Nous avons essayé les meilleurs carmins : carmin aluné ou picro-aluné de Gilson, carmin alcoolique, d'après différentes formules. Nous avons réussi très bien dans certains cas avec ces divers colorants. Mais le plus souvent la péné- tration était insuffisante dans la profondeur de la pièce, alors que les surfaces de section étaient déjà trop colorées-. Aussi, avons-nous fini par abandonner la coloration en bloc pour adopter la coloration des coupes faites et fixées au porte-objets par la méthode de Sch.ellibaum. Ce procédé donne de plus beaux résultats que les meilleurs colorations en bloc. Nous avons appliqué de cette façon les colorants les plus divers. Parmi les colorants connus ordinaires, c'est aux carmins alunés et au carmin alcoolique de Paul Mayer que nous donnons la préférence. Nous nous sommes très bien trouvé de laver les coupes colorées au carmin avec une solution faible d'acide picrique. On enlève ainsi plus complètement la colo- ration que le carmin avait communiquée au protoplasme; de plus la teinte jaune que prend celui-ci est favorable à l'observation des fins détails. Toutefois l'acide picrique, dans cette double coloration, se laisse avan- tageusement remplacer par le bleu carmin dont nous avons signalé les avantages dans notre mémoire sur les glandes des édriophthalmes (1). Après coloration, nous montons la préparation soit dans le baume de Canada, soit dans la solution glycérinée. (i) Manille Ide : Les glandes eiitanécs che^ les édriophthalmes; La Cellule, t. Vil, p. 145, 1891. Il6 MANILLE IDE INTESTIN ANTÉRIEUR. Œsophage. L'œsophage est un tube rectiligne montant obliquement en arrière vers la poche malaxatrice. Les FiG. 4 et 5 en sont des sections longitudinales, montrant nettement le coude qu'il fait avec la direction de toute la partie suivante du système. La lumière de l'œsophage n'est pas régulièrement cylindrique, elle présente des plis saillants, comme on peut le voir dans la fig. 7 qui repré- sente une coupe transversale. La forme et la dimension de ces plis sont assez variables, suivant le degré de contraction dans lequel la tunique musculaire a été saisie par le réactif fixateur. On en trouve toujours cinq : deux inférieurs, pi; deux latéraux, pi, et un supérieur impair, ps. Lereboullet et Huet n'en ont vu que quatre, mais ils n'ont point fait de coupes. Un des replis latéraux est visible en pi, dans la fig. 5 qui est latérale; on voit qu'il ne s'étend pas sur toute la longueur du canal et qu'il se rattache à sa face supérieure. Une série de fibres musculaires s'insèrent sur toute la longueur de l'œsophage, FIG. 7 et 8 (i). Les plus fortes d'entre elles, fig. 8, s'unissent à sa paroi au -niveau des plis latéraux; aussi ces derniers sont-ils beaucoup plus saillants quand les fibres sont à l'état de repos qu'ils ne le sont dans notre figure; dans celle-ci, en effet, les muscles sont i-eprésentés dans un état de contrac- tion assez prononcé. D'autres fibres s'insèrent un peu plus bas que les plis. La direction de tous ces éléments contractiles n'est pas perpendiculaire à l'axe de l'œsophage; nous reviendrons plus loin sur ce détail. Les lèvres postérieures de l'œsophage font une légère saillie dans la poche malaxatrice, et portent en bas sur leur face libre quelques poils très grêles, FIG. 8. Ces derniers sont plus développés dans d'autres espèces. Poche malaxatrice. Nous avons déjà dit que l'étude de cette partie est extrêmement diffi- cile (ScHôBL, DoHRN, Milne-Edwards, Claus). Mais s'il est malaisé à celui qui en fait l'objet d'une étude spéciale de comprendre la forme, la (I) Les FIG. 8 et 9 appartiennent à un jeune individu d'une espèce que nous n'avons pas déter- minée : Oninciis ou Porcellio? ... LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES il? position et les rapports des appareils qu'elle contient, il l'est bien davantage encore d'en donner une idée claire au lecteur sans mettre à sa disposition un grand nombre de pièces disséquées, fraîches ou fixées, et surtout sans lui imposer le travail ardu de l'examen minutieux de ces objets. Nous tenterons de le faire, en priant tout d'abord le lecteur d'examiner successivement dans nos figures la section de chacune des pièces qui font saillie dans cette cavité. Il a été dit à propos de la fig. 2 qu'il existe dans la poche malaxatrice cinq reliefs principaux, visibles sur des pièces disséquées et ouvertes par le dos, et nous leur avons donné les notations S^ , 5, , ^^ . Nous étudierons chacune des pièces isolément dans des coupes faites au niveau des lignes transversales de la fig. 4. Suivons d'abord les pièces latérales, 5, sur les diverses figures où se montre leur section. La fig. 8, qui est une coupe longitudinale oblique de haut en bas par rapport à l'axe du corps, mais parallèle à l'axe de l'œso- phage, montre en 5, la section de la portion antérieure de ces parois. A cet endroit, elles sont très saillantes dans la cavité, et convexes par leur face interne. On remarque à leur niveau, sur la face externe du sac, un enfoncement dont la forme doit varier, comme celle de la face convexe, suivant le degré de contraction des muscles, m, qui s'y insèrent directement, et des nombreuses fibres qui s'attachent aux parties voisines. Comme on le voit, cette pièce est armée de pointes sur son bord interne; elle en porte également sur sa face supérieure, qui est enlevée par le rasoir et n'est pas visible dans cette figure. Quant à sa face inférieure, elle est convexe et porte des côtes chitineuses saillantes ; elle est assez sem- blable à la face supérieure des pièces 5,, visibles dans la fig. 9. On peut se faire une idée plus exacte de la forme des pièces 5,, en le_s suivant dans les fig. il et 12, qui représentent des coupes transversales se succédant d'avant en arrière. Dans la fig. 11 ces deux pièces sont coupées perpendiculairement à leur longueur, et présentent la forme de bourgeons solides, rattachés aux parois du sac. Cette coupe est tout à fait antérieure. Notons qu'elle appartient, comme les suivantes, à VOniscus asellus qui possède des crochets bien plus petits que l'espèce indéterminée qui a fourni les fig. 8 et 9. Elles sont recouvertes par leur cuticule, détachée, il est vrai, du massif cellulaire qui les constitue. Sans aucun doute, pendant la vie, ces cellules 118 MANILLE IDE occupent toute la cavité de ces sacs cuticulaires décollés ; l'espace vide qui les entoure est dû à la rétraction qu'elles ont subie sous l'action du réactif. Il est absolument impossible d'éviter cette contraction ; aussi nous sommes-nous bien gardé de remettre les cellules en place dans nos dessins, de peur de donner au lecteur une idée moins exacte encore de la forme réelle des organes. En effet, nous manquons de base certaine pour opérer ces restaurations. Car ni la forme du tissu rétracté, ni celle de l'enveloppe décollée ne repro- duisent exactement celle de l'organe vivant. Toutefois, nous croyons que la cuticule reflète plus fidèlement l'état de ces organes à frais, les réactifs l'ayant moins rétractée. Remarquons que la face inférieure de ces pièces est tapissée d'une cuti- cule remarquablement épaisse et striée; nous aurons l'occasion d'y revenir, La FiG. 12 représente partiellement une coupe semblable à la fig. 11, mais prise plus en arrière. La saillie 5, s'y présente encore comme un bourgeon latéral,' mais sa forme est bien changée. Sa section montre qu'elle est formée à ce niveau de deux crêtes longi- tudinales. La crête supérieure est tapissée d'une cuticule mince, et son bord libre porte une rangée de dents de plus en plus petites en arrière. L'inférieure, au contraire, porte encore sur sa face inférieure la même plaque épaisse et striée, Pb\ que l'on remarque déjà tout en avant, à l'en- droit où les deux crêtes et la gouttière qu'elles limitent n'existent pas encore. En suivant les coupes postérieures à la fig. 12, nous avons pu constater que la crête supérieure s'efiface bientôt complètement. L'inférieure subit le même sort un peu plus tard, ainsi que le démontre la fig. 13, dans laquelle toute trace de la pièce 5, a disparu. De ces remarques il faut conclure que les pièces latérales et antérieures S^ ont la forme de bourrelets portés par les faces latérales de la poche, renflés et très saillants en avant. Vers l'arrière ils vont en s'atténuant et finissent par disparaître. Leur extrémité antérieure renflée et saillante fait face à l'orifice de l'œsophage; leur bord interne présente une gouttière limitée par deux crêtes (i). (i) Ces deux crêtes sont peu remarquables ici, mais la crête supérieure devient très importante dans la plupart des autres espèces. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES IIQ Vers l'arrière on voit la crête supérieure s'atténuer et disparaître. L'in- férieure, au contraire, comme la face inférieure de la tète terminale, est revêtue d'une plaque chitineuse épaisse et munie de côtes. Soumettons au même examen les pièces latérales moyennes, indi- quées S^. La FiG. 11 nous montre la section transverse des pièces 5^ qui nous occupent, prise très en avant, au niveau indiqué i i dans la riG. 4. Ces lames 5, constituent tout simplement lé plancher de la poche; elles sont parfois plus saillantes, plus convexes, mais sans jamais prendre en ce point la forme de saillies bien détachées. Dans la fig. 2 elles se relèvent notablement, en même temps que la pièce impaire S, surgit. Un sillon profond sépare cette dernière de chacune des lames 5, et la cuticule qui en tapisse les parois s'épaissit déjà, sans atteindre pourtant la grosseur des vraies plaques broyeuses. La hauteur et la direction verticale de ces lames s'accentuent encore dans la coupe suivante, fig. 13, qui est prise à une assez grande distance de la précédente. Mais; en outre, la cuticule qui tapisse la face externe du sillon, c'est-à- dire la face interne de la pièce 5^, présente maintenant un puissant épais- sissement, Pb-p. Au niveau de la fig. 14, les pièces latérales moyennes 5^ présentent à peu près leur maximum de hauteur. Elles sont dépourvues de plaques broyeuses et simplement recouvertes d'une cuticule mince. L'espace qui les sépare de la pièce médiane 5^ s'est élargi considéra- blement. Enfin la fig. 15, prise plus en arrière encore, démontre qu'elles se ter- minent par une extrémité libre, en forme de lobes détachés du plancher et assez rapprochés l'un de l'autre. En résumé, les pièces latérales moyennes S^ ont la forme de lames se détachant lentement de la partie antérieure du plancher de la poche, se relevant ensuite vers l'arrière en devenant très saillantes, de manière à recouvrir partiellement les faces de la saillie impaire 5j. Elles se terminent en arrière par une extrémité libre. Leur face supérieure ou externe porte en avant sur la partie qui fait face à la pièce 5, une forte plaque cuticulaire. Leur face interne porte de même un puissant épaississement cuticulaire dans la partie où cette face regarde à peu près verticalement la saillie im- paire 5,. 120 MANILLE IDE La pièce impaire 5, est vue en coupe sur toute sa longueur danslaFiG. 4. Nous pensons que sa forme y est notablement altérée par l'action con- tractante des réactifs, car la partie antérieure parait être, sur le frais, moins arrondie et moins soulevée. Cette fig. 4 indique bien que l'extrémité anté- rieure de cette saillie s'abaisse jusqu'au niveau du plancher du sac et se trouve recouverte tout en avant par les lames latérales moyennes 5^ réunies. La FIG. 11 la représente ainsi sous forme d'un cul-de-sac coupé transversale- ment, et situé en dessous de la poche. L'existence de ce cul-de-sac est plus claire et plus facile à comprendre chez l'anilocre, fig. 85, S^. Dans la fig. 12 elle se trouve sectionnée transversalement; on y remar- que la cuticule épaisse qui la revêt dans cette portion moyenne. Remarquons cju'elle est ici cachée au fond d'une gouttière profonde, bordée par les lames S,. La fig. 13, prise plus en arrière encore, montre des particularités nou- velles dans la lame cuticulaire. La forme de la pièce, à en juger par l'aspect de cette portion chitineuse, s'est modifiée; ce n'est plus une lame aiguë, c'est une saillie assez- épaisse, à bord assez large et plus ou moins obtus. De plus, sur les faces latérales, la section d'une cavité semi-circulaire se montre à droite et à gauche vis-à-vis de l'épaississement strié de la pièce S„. Cette cavité se voit longitudinalement dans les fig. 2 et 16. Nous en reparlerons dans la partie histologique de cette étude. Enfin les fig. 14 et 15 montrent en Sj la section transversale de l'ex- trémité libre qui se détache vers l'arrière en forme d'éperon, comme on l'a déjà remarqué dans la fig. 2 et 4. On voit donc que la pièce médiane S^ est une saillie pointue à ses deux extrémités. Sa pointe antérieure, recouverte par un pli formé par l'union des deux lames 5,, se perd dans le plancher de la poche. La partie moyenne s'élève du fond d'une gouttière profonde, saillante à l'intérieur et bordée par les lames S^. Enfin, la pointe postérieure est libre en forme d'éperon. Sur les faces latérales, qui regardent obliquement en avant, la cuticule épaisse et solide présente une cavité allongée, à section transversale semi-circulaire. Mais outre les cinq pièces. S,, S^, S., la cavité malaxatrice présente encore d'autres saillies importantes, que nous appellerons la lame rccou- rraute et les lamelles annulaires. Aucun auteur, à notre connaissance, n'a signalé l'existence de ces pièces, à part Lereboullet qui paraît avoir entrevu la lame recouvrante, mais sans en saisir la valeur ni les rapports exacts. Il en fait, et bien à tort, comme LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 121 nous le verrons, une pièce supérieure du système masticateur, une sorte de dent impaire semblable à la dent médiane des décapodes (Milne-Edwards). Les lamelles annulaires sont peu développées chez VOnisciis, mais elles n'auraient pas manqué de fixer l'attention des anatomistes, si leurs méthodes de recherches avaient été moins défectueuses; les coupes seules peuvent en déceler la situation et les rapports. L'étude comparée que nous en avons entreprise dans plusieurs espèces nous a démontré qu'elles ont une valeur morphologique plus importante que ne pouvaient le faire penser les proportions auxquelles on les trouve réduites chez certaines d'entre elles. Elles atteignent parfois dans les espèces aquatiques des dimensions considérables et prennent une forme qui permet de leur attribuer une fonction spéciale et importante. Lame recouvrante. C'est peut-être chez VOnisciis qu'elle atteint son plus grand dévelop- pement. Elle s'observe très bien sur les coupes transversales et sur les coupes longitudinales. Les trois coupes longitudinales reproduites dans les fig. 4, 5 et 6 la montrent en Ir. C'est, comme on voit, une lame mince, étendue horizontalement dans la partie supérieure de la poche malaxatrice. Elle recouvre, environ sur la moitié antérieure de leur longueur, les pièces latérales mo}'ennes S, et la pièce impaire S.^. C'est ce fait qui nous engage à lui donner le nom de lame recouvrante. Les FIG. 13 et 15 indiquent qu'elle sépare la partie la plus élevée de ces trois pièces d'avec l'extrémité antérieure du curieux appareil longi- tudinal que porte la face supérieure de l'intestin mo3"en. Sur les trois fig. 4, 5 et 6, on voit que cette lame est attachée à la paroi supérieure de la poche malaxatrice, en arrière, non loin de l'en- droit où cette poche se soude à la partie la plus avancée de la paroi supérieure de l'intestin moyen. Les coupes transversales nous instruisent de la façon la plus nette sur les rapports qu'affecte cette lame avec les parois latérales du sac. Elle en est toujours bien séparée et ne s'y soude jamais, fig. 13 et 15. L'examen de nos préparations nous indique que ses bords latéraux libres doivent être légèrement convexes. 16 122 MANILLE IDE Il existe donc dans la poche malaxatrice une lame quadrangulaire, ho- rizontale, attachée à la voûte de cette poche par son bord antérieur et, fait qu'il importe de noter, séparant les pièces mobiles S^ et 5, du plancher d'avec la terminaison antérieure de l'appareil longitudinal de l'intestin moyen. Lamelles ûiiiutlaires. Nous savons qu'il est difficile de se représenter exactement la situation et la forme de cette production. Il nous faudrait en rexplicjuant disposer d'un moule, pour que l'œil du lecteur puisse saisir à la fois la forme des lamelles dans les trois dimensions. Il existe dans les Gciminanis, VIdotea et la Vibila une lamelle ana- logue unique, longue et très facile à étudier. Chez VOniscus il y en a deux, peut-être trois, car nous y avons trouvé souvent un pli supplémentaire, mais elle sont très courtes; chez le Gammanis il n'y en a qu'une, cjui est beaucoup plus longue. Contentons-nous d'une description sommaire, en engageant le lecteur à lire dès maintenant' la description de la pièce homologue du Gammanis. La lamelle annulaire constitue un anneau inséré par son bord anté- rieur à la ligne qui sépare la poche malaxatrice de l'intestin moyen. La séparation entre ces deux parties se fait suivant un plan fortement oblique, indiqué AB dans la fig. 4. Les pièces présentent la même obliquité. C'est pourquoi, dans toutes les coupes, on les voit surgir entre l'épithélium à petites cellules de la poche et les grandes cellules de l'intestin, fig. 13 et 15. Jamais ces anneaux ne sont complets ; il existe toujours sur la ligne médiane ventrale une fente longitudinale plus ou moins large. La lamelle annulaire n'est constituée histologiquement que par un repli de l'épithélium; on ne trouve donc dans toute son épaisseur que deux couches de cellules épithé- liales semblables à celles de la poche malaxatrice. Nous avons dit que dans VOniscus il y a trois de ces lamelles annulaires très courtes et qui se recouvrent. Les externes ont une large fente ventrale. Seule la lamelle interne atteint presque la ligne médiane et n'y laisse qu'une fente très faible dont la forme est visible dans la fig. 18. Ces lamelles sont très courtes comme l'indiquent les fig. 4, 5 et 6. Ainsi, les lamelles annu- laires constituent des anneaux incomplets dépendants du bord postérieur de la poche malaxatrice et flottant libremenf dans la partie antérieure, de l'intestin moyen. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 1 23 Appareil moteur. Cet appareil servant au fonctionnement de toutes les parties internes de l'intestin antérieur constitue un système compliqué. Nous n'avons pas l'intention de le décrire en détail; il nous suffira d'en tracer les grandes lignes. CHARPENTE CHITINEUSE. Une foule de muscles fixés d'une part à la cuticule dermique vont s'im- planter d'autre part aux pièces cuticulaires de la paroi intestinale. Mais il existe, en outre, chez le cloporte, tout un système de colonnes chitineuses qui traversent la partie antérieure de la tête et qui servent de point fixe à une série d'autres muscles malaxateurs. L'une des plus fortes a la forme d'une barre horizontale placée transversalement sous la partie antérieure de la poche malaxatrice, fig. il. C'est elle que nous retrouverons encore repré- sentée dans les espèces les plus variées. Elle est immobilisée en cette position par de puissantes travées qui relient ses extrémités sans intermé- diaire, latéralement, en avant et en arrière à la cuticule dermique. D'autres dépendances plus faibles partent en différents sens de ces colonnes principales. Lereboullet en a fait une étude assez détaillée sur les oniscides. Malheureusement, ici encore, la simple dissection ne pouvait lui fournir cjue des données insuffisantes et partiellement erronées. C'est à tort, en effet, qu'il décrit certaines de ces pièces comme étant en continuité directe avec les parties dures qui recouvrent l'épithélium malaxateur. Nous avons toujours trouvé les colonnes chitineuses situées à l'extérieur de l'épithélium intestinal, tandis que les épines et plaques broyeuses sont toujours portées par la surface interne du même épithélium. Il n'existe jamais de continuité entre ces deux espèces de parties dures. Les premières sont fixes et immobiles, les secondes sont mobiles et intraintestinales. Les muscles seuls établissent un lien mobile entre ces deux systèmes. Nous pourrions dès ce moment étudier la nature et l'origine intéressante de cette charpente extérieure. Mais l'examen d'autres espèces d'édrioph- thalmes moins compliquées nous en simplifiera l'exposé; nous en ferons l'étude dans la partie histologique. MUSCLES. La poche malaxatrice est hiunie comme l'œsophage de deux espèces de muscles. Ce sont d'abord les fibres musculaires propres à la paroi in- inale, qui s'attachent par leurs deux extrémités à cette paroi même. 124 MANILLE IDE sans chercher un point d'appui sur des parties étrangères à l'intestin lui- même. Telles sont, par exemple, dans la fig. 13, les fibres qui constituent la forte couche arquée transversale tjui enveloppe le plancher postérieur de la poche malaxatrice. D'autres fibres analogues, mais moins nombreuses, se retrouvent sur toute la surface de la poche. Nous n'insistons pas sur leur description. Pourtant nous devons faire remarquer que c'est à tort que Rosenstadt admet l'existence d'un anneau musculaire qui étranglerait le tube digestif à l'union de l'intestin moyen avec l'intestin antérieur. La seconde espèce de muscles est constituée par les nombreuses fibres musculaires extrinsèques, c'est-à-dire qui relient les pièces de la poche malaxatrice soit à la cuticule dermique, soit à la charpente chitineuse dont nous avons parlé. Ces fibres, comme leurs homologues de l'œsophage, s'attachent toujours aux parois cuticulaires elles-mêmes. Elles passent, d'une part,, entre les cellules de l'épithélium pour s'implanter à la cuticule de la poche, fig. il, et, d'autre part, elles s'insinuent entre les cellules épidermiques pour s'attacher directement à la cuticule externe. Chacune des pièces cuticulaires de la poche malaxatrice possède un système musculaire compliqué qui lui permet les mouvements les plus variés. La pièce 5, présente trois faisceaux au moins, formant des angles plus ou moins ouverts entre eux. Des deux principaux, le premier monte vers la cuticule dorsale de l'animal, en se rapprochant en même temps de la ligne médiane, fig. 11. Le second descend vers la barre chitineuse trans- versale qui passe sous le plancher de la poche à ce niveau même. Le troisième s'insère sous le plancher de la poche; il est plus faible que les deux premiers. La partie antérieure de S,,, qui correspond à la plaque Pb'a, est aussi reliée puissamment à la charpente chitineuse par des muscles courts, mais très épais, fig. il. Mais le plus curieux des appareils musculaires est celui qui met en mouvement la pièce impaire S,. Cette pièce est mue, au moins principale- ment, par les quatre fibres en croix de S*-André, que nous avons déjà signalées, fig. 3. Rappelons qu'elles s'insèrent, les antérieures à la cuticule externe, les postérieures à une branche postéro-latérale de la charpente chitineuse. Elles convergent toutes les quatre vers la pointe antérieure, plus ou moins recourbée en bas, de la cuticule qui revêt la saillie 5,. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 125 En résumé, des muscles puissants font mouvoir chacun des épaississe- ments cuticulaires 5, S^ ou 5j de l'intérieur de la poche malaxatrice. La même chose ne se retrouve pour aucune des lamelles annulaires ou recouvrantes. INTESTIN MOYEN. Nous avons indiqué sa division. Il comprend trois parties ou régions : l'antérieure, la moyenne et la postérieure. De plus, on distingue entre les deux dernières une région intermédiaire, courte, munie d'un sphincter puissant. Il semblerait que cette partie puisse s'étudier suffisamment, du moins au point de vue anatomique, sans l'aide des coupes. En effet, quand il est gonflé d'aliments, il se montre régulièrement cylindrique et ne présente d'autre détail de structure que la bande longitudinale décrite et très nette- ment figurée par Lereboullet. Mais, en réalité, il est impossible de se faire une idée exacte et précise de ce singulier appareil dorsal sans l'étudier en sections transversales. De plus, ainsi que nous l'avons dit, des coupes seules peuvent nous renseigner sur les rapports exacts de l'intestin moyen avec la partie malaxatrice. Enfin il est de toute impossibilité de découvrir par la simple dissection les particularités que les sections nous révèlent à l'embouchure du système des glandes annexes dans le tube alimentaire, particularités qui conduisent, ainsi que nous le verrons, à des remarques ne manquant pas d'importance au point de vue physiologique. Du reste, les coupes nous révèlent encore d'autres détails anatomiques. Mode d'union de l'intestin moyen et de l'intestin antérieur. Nous avons déjà fait remarquer que ces deux parties ne s'unissent pas sur une section régulièrement transversale, mais que la paroi dorsale dé- passe le bord antérieur de la paroi inférieiire. Elle constitue la plus grande partie du plafond de la poche malaxatrice. La FiG. 4 établit très clairement ces rapports étudiés en coupe longi- tudinale. En effet, il n'est pas douteux qu'il ne faille ici regarder comme appartenant à l'intestin moyen toutes les parties recouvertes de cet épithé- lium à grandes cellules, qui sont si caractéristiques. Cela étant admis, le lecteur reconnaîtra facilement celles de nos coupes transversales qui intéressent à la fois la paroi supérieure de l'intestin moyen et le plancher de la poche malaxatrice. Telles sont celles qui sont représen- tées dans les fig. 13 et 15. 126 MANILLE IDE L'absence de l'épithélium intestinal moyen dans les fig. 11 et 12 prouve que la partie supérieure de cette figure est la section d'une portion située en avant du point d'insertion de la lame recouvrante. C'est ce qui explique l'absence de toute trace de lame recouvrante et de lamelles annu- laires dans cette section. L'union de l'intestin moyen avec l'intestin antérieur se fait donc suivant une ligne oblique de haut en bas et d'avant en arrière. La voûte de la poche malaxatrice est en grande partie constituée par la portion empiétante de la paroi supérieure de l'intestin moyen. Bande dorsale. Cet appareil étant très facile à voir est généralement connu de tous ceux qui ont ouvert un intestin de cloporte. Cependant nous n'en trouvons nulle part une description détaillée. Lereboullet ne l'étudié qu'en l'exa- minant par la face interne de l'intestin ouvert. Sa figure est trop petite pour en donner une idée exacte. Étudions sa forme sur des coupes transversales. Partout elle est taillée en queue d'aronde et bordée de deux rainures longitudinales, fig. 21, 22, 23, 24 et 25. Mais sa forme et sa dimension, ainsi que celles des rainures, varient suivant le niveau de la section. En avant, fig. 21, elle est portée par un pédicule assez élevé et pré- sente une largeur médiocre. Les rainures sont profondes, larges, de forme arrondie, et saillantes à la surface externe. Du côté interne, elles sont souvent béantes; d'autres fois leur lèvre externe est appliquée contre le bord externe de la queue d'aronde, mais, dans ce cas même, leur lumière reste ouverte en forme de tube. Plus loin, tout en conservant à peu près la même largeur, elle s'abaisse par l'atténuation de son pédicule. En même temps ses rapports avec les rainures changent et la forme de celles-ci se modifie, fig. 22. Les ailes de la queue d'aronde se trouvent à un certain niveau com- plètement logées dans les rainures qui sont déjà moins saillantes. Plus loin encore, la bande dorsale s'élargit notablement en se surbaissant ; ses bords, à ce niveau, sont encore contenus dans les rainures latérales, fig. 23. Mais bientôt ils se dégagent de ces rainures, qui ne sont plus alors que de LE TUBE DIGESTIF DES éDRIOPHTHALMES 12? simples fentes comprises entre la face supérieure des parties saillantes de' la bande et la paroi normale de l'intestin, fig. 24. En cet endroit, ou un peu au-delà, la bande commence à perdre en largeur. Enfin, à un moment donné, elle s'atténue rapidement dans toutes ses dimensions, fig. 25, et finalement elle n'est plus représentée dans les sec- tions que par deux petites cellules cunéiformes c^ui paraissent enchâssées au sein de l'épithélium, fig. 26. Jetons maintenant un coup d'œil sur la fig. 19. Elle représente la bande dorsale vue par sa face interne, l'intestin ayant été simplement ouvert et étalé sur un porte-objets. La lettre e y indique la portion élargie spatuliforme de la bande; toute la portion de celle-ci qui s'étend entre son extrémité céphalique et le point e constitue la région dans laquelle les bords de la queue sont engagés dans les rainures latérales. Au-delà du point e les rainures disparaissent et la section de l'appareil dorsal prend la forme de la FIG. 24. Nous reviendrons sur tout ceci dans la partie histologique. Notons encore cependant que la paroi inférieure de ce tronçon de l'in- testin moyen présente, en face de la bande longitudinale supérieure, .un épaississement assez fort, fig. 23. GLANDES ANNEXES. Ces glandes sont très développées chez tous les édriophthalmes. Ce sont, chez VOiiiscus, quatre tubes variqueux, jaunâtres, disposés par paires sur les parties latérales de l'intestin moyen, fig. 1. Les deux glandes de chaque paire s'unissent entre elles en donnant naissance à un seul tube très court qui se dirige transversalement vers l'in- testin moyen. Les deux tubes transverses s'ouvrent au point d'union de ce dernier avec la poche malaxatrice, fig. 3. Ces organes sont donc des annexes de la face inférieure de l'intestin moyen. Cependant, à peu de distance de leur embouchure, ils s'écartent de cette face inférieure, gagnent ses faces latérales et, vers l'arrière, ils empiètent même sur sa face supérieure. Nous venons de dire que les tubes très courts formés par l'union des deux canaux glandulaires marchent transversalement l'un vers l'autre pour s'unir sous l'intestin. On les y trouve, en effet, sous la forme d"un canal trans- verse saillant et visible à l'extérieur, fig. 3, cgi. Mais la paroi supérieure de ce canal présente une fente en T qui fait communiquer la lumière avec celle du tube digestif. 128 MANILLE IDE Une coupe horizontale, un peu oblique d'arrière en avant et de haut en bas, nous a mis cette ouverture de communication sous les yeux, dans son ensemble. Nous l'avons reproduite, vue de face, dans la fig. 18. La branche impaire de ce 1 est limitée par les deux lambeaux ter- minaux des lamelles annulaires de la poche malaxatrice. Les bords de ces lambeaux présentent à leur extrémité une échancrure arrondie; aussi la fente impaire s'élargit-elle à son extrémité céphalique, où il existe un petit orifice béant. Les bords de la fente longitudinale sont garnis de poils cuticulaires raides et fins. La branche transversale est bordée en arrière par la lèvre de la paroi inférieure de l'intestin moyen et en avant par le bord transverse des lam- beaux la de la fig. i8. Le canal transverse formé par l'union des canaux git sous cet orifice en T . On le reconnaît facilement dans nos différentes coupes qui le repré- sentent à divers niveaux et en différents sens, fig. 4, 5, 6, 14 et 15. Le liquide sécrété par les glandes peut monter pour sortir sans retard par l'orifice en T, ou- bien descendre en arrière et s'accumuler un peu dans une petite dilatation de la paroi inférieure, que nous nommerons arrière- poche : ap dans les fig. 3, 4, 5. 6, 14 et 15. Ce petit récessus se distingue facilement dans les pièces disséquées, vues par la face ventrale et sur les coupes longitudinales, fig. 3, 4, 5 et 6. Notons que les parois de cette poche portent une assez puissante musculature. Une fois sorti de l'orifice en T, le liquide peut couler soit dans l'intestin moyen, soit dans la poche malaxatrice et, surtout, dans les gouttières comprises entre les lames latérales moyennes S^ et la pièce impaire S^. A voir les niveaux respectifs des parois inférieures de la poche et de l'intestin, on se sent prêt à admettre que le liquide passe plus facilement dans l'estomac que dans l'intestin. L'obturation de cet orifice en T, au-dessus duquel les aliments passent continuellement, paraît effectuée par la branche impaire longitu- dinale, ou éperon saillant de la pièce 5, et par les lobes libres qui terminent en arrière les lames latérales moyennes 5^ ; les piquants qui garnissent les lèvres des pièces la ont peut-être aussi un pareil rôle. Pour la branche transversale, l'obturation est suffisamment assurée par les lambeaux la eux-mêmes, qui s'étendent jusqu'au-dessus de la lèvre de l'intestin moyen. I LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 129 MUSCLES. Nous n"avons pas observé de muscles reliant la région moyenne du tube digestif aux parois du corps. Nous nous bornerons à dire ici que la région antérieure qui nous occupe possède une couche propre de fibres circulaires et longitudinales, plus puissante que toutes les autres parties du système, fig. 20. Nous les étudierons plus loin. Région moyetine. Cette partie est d'une constitution fort simple; c'est un tube à section circulaire, sans repli ou saillie quelconque. Son calibre est moins fort, FIG. 1, que celui de la portion antérieure. Il est aussi beaucoup moins riche en muscles, fig. 20. Les aliments y ont toujours une couleur foncée et y forment une masse plus compacte. Ainsi : un calibre moins fort, l'absence de saillies, la faiblesse de sa paroi, tels sont les caractères anatomiques qui distinguent cette région de la région antérieure. -fci-' Région postérieure. Elle est séparée de la précédente par la courte région du sphincter dont nous parlerons ci-après. Elle ne forme plus un tube droit comme les régions antérieure et moyenne; elle décrit, au contraire, une circonvolution en S bien caractérisée, comme le montre la fig. 1. C'est donc à tort qu'on dit souvent que le tube digestif des édrioph- thalmes est droit, de la bouche à l'anus. Son calibre est variable. Il présente un rétrécissement en avant, à l'en- droit où il se joint au sphincter. Puis il se dilate au point de reprendre à peu près le calibre de la région moyenne; enfin, il se rétrécit assez rapide- ment pour s'unir au rectum. La tunique musculaire de cette courte région est analogue à celle de la région moyenne, tout en étant moins forte et moins régulière qu'elle. On y trouve ordinairement des matières alimentaires ou fécales ac- cumulées. 130 MANILLE IDE SPHINCTER. Cette courte région, indiquée 5 dans la fig. 1, ne se différencie des portions qui lui sont antérieure et postérieure que par la présence d'un puissant anneau de fibres musculaires, par le calibre beaucoup plus faible que donne à sa lumière l'état habituel de contraction de ses fibres, et par les plis longitudinaux que cette même contraction y produit, fig. 27. Nous y avons constaté assez souvent la présence d'une mince colonne de ma- tières alimentaires. Son étude nous occupera un moment dans la partie histologique. Mais remarquons dès maintenant que l'anneau de libres musculaires qui constitue ce sphincter est extérieur à la tunique de fibres longitudinales. La tun'ique circulaire normale se retrouve à sa place en dedans de la tunique longitudinale. Le sphincter constitue par conséquent une muscula- ture nouvelle, spéciale et surajoutée dans cette région aux autres enveloppes du tube digestif. INTESTIN POSTÉRIEUR. Ce dernier segment du canal alimentaire a une forme légèrement ova- laire. Elle se différencie nettement de la portion postérieure de l'intestin moyen par les caractères de son épithélium et par le puissant appareil musculaire qui en relie la paroi à la cuticule dermique. La FIG. 29 donne une très bonne idée de toutes les structures de cette partie; elle représente une coupe horizontale. On y remarque à droite et à gauche toute une série de fibres muscu- laires. Ces fibres s'insèrent obliquement d'avant en arrière et de dehors en dedans sur la paroi du canal. D'autre part, elles s'attachent à la cuticule dermique du dernier somite. Ce sont donc en apparence des fibres dilata- trices ; mais leur contraction tend aussi à tirer leurs points d'attache vers l'avant. Une cuticule assez forte tapisse ici l'épithélium ; elle s'épaissit aux abords de l'orifice anal et se continue directement avec la cuticule dermique. La FIG. 28 représente une coupe transversale du corps de l'animal, entamant un peu obliquement le tube rectal. L'orifice anal est une fente longitudinale bordée par deux portions de la cuticule dermique, qui sont un peu soulevées en forme de valves. i LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 131 AUTRES ESPÈCES. Diverses espèces à'Oniscus, de Porcellio et d'Armadillo nous ont mon- tré la même constitution générale. Les diverses parties du système ne pré- sentent de l'une à l'autre que des différences de détail fort peu importantes. Signalons comme exemple les piquants qui recouvrent le bord supérieur des pièces latérales antérieures 5, de la poche malaxatrice. Ils sont beaucoup plus forts dans certaines espèces que dans d'autres; ils sont faibles chez l'Oiiisciii' aselliis, fig. 10; leur importance est plus grande chez l'espèce indéterminée dont une coupe est représentée dans la fig. 8. D'autres espèces présentent, au contraire, des différences curieuses et méritent d'être étudiées comparativement avec le type Onisciis. Asellus aquaticus. SARa a déjà donné une bonne description de cet animal. Mais pour éta- blir plus clairement les homologies avec VOniscus, nous suivrons dans la description de cette espèce le plan adopté pour le cloporte. La principale différence que l'œsophage présente avec celui de VOniscus, c'est la présence d'une protubérance très saillante à l'union de sa paroi inférieure avec le plancher de la poche malaxatrice, c'est-à-dire à l'endroit où, chez VOniscus, nous avons signalé la présence de quelques piquants, au seuil de la poche. Cette protubérance porte des pointes diri- gées vers l'arrière. La FIG. 49 nous montre les protubérances marginales en section trans- verse. Comme on peut le voir, elles sont très nettement séparées l'une de l'autre sur la ligne médiane où se trouve un sillon profond. Ce sont probablement ces deux protubérances que Rosenstadt nous signale dans V Asellus, sans les dessiner. La poche malaxatrice, sans posséder aucune partie spéciale qui ferait défaut chez VOniscus, est pourtant fort intéressante à cause des différences qu'y présentent les cinq pièces typiques. Nous allons les passer rapidement en revue. Les pièces latérales supérieures 5, sont encore plus nettement bilobées à leur extrémité antérieure. La fig. 50 le prouve. Elle représente une section transverse, mais assez obliquement faite, de façon que la portion l32 MANILLE IDE droite du dessin comprend des parties situées notablement plus en avant que celles de la portion gauche. La pièce située de ce côté n'est pas bilobée; sa partie coupée se détache sous la forme d'un bourgeon fort saillant vers l'avant et libre de tout rap- port avec la paroi. Sa face inférieure porte une plaque cuticulaire, épaisse, et sa face interne est chargée de gros crochets. Il en existe surtout deux rangées verticales de très puissants, comme Sars l'a figuré. Ces crochets correspondent aux poils que porte aussi la face antérieure de la même pièce dans les Oiiisciis. Du côté gauche, la section est postérieure, avons-nous dit. La pièce 5, s'y est brusquement divisée en deux lobes, dont l'un envoie vers l'arrière un bourgeon qui est du reste en continuité directe avec la partie antérieure de la pièce qui porte les gros crochets. Les petits crochets que porte le bord inférieur de ce bourgeon, désignés par S,i, font partie de la série de ces gros crochets antérieurs. La coupe de ce lobe n'est pas rattachée à la paroi, parce que, à ce niveau, le crochet était saillant vers l'arrière. S, s est la branche supérieure qui est devenue très saillante aussi et qui porte une rangée de piquants. Elle est encore visible sur la fig. 51, alors que la crête inférieure ne l'est plus. Les pièces latérales S^ sont très- plates et surbaissées, fig. 50. Elles portent en avant une forte plaque cuticulaire qui se trouve, comme Pb,a chez VOniscits, en opposition avec celle qui couvre la face inférieure de la pièce S,. Mais un examen attentif nous révèle un commencement de modification dans la structure même de ces plaques. Les côtes saillantes, moins nombreuses et moins longues, deviennent sensiblement plus élevées ; leur bord libre qui paraît tranchant se découpe en fines -dentelures, et chaque barre prend ainsi l'aspect d'une scie en miniature. La face interne de 5;,, adjacente à la pièce médiane S^, est munie d'une plaque striée analogue à celle que nous avons décrite pour VOnisciis, FIG. 51, Pb,p. Dans son ensemble, les pièces 5^ paraissent relativement moins élevées que dans VOuiscus. Leurs extrémités postérieures sont aussi détachées en forme de lobes, mais les piquants qu'elles portent sont notablement plus puissants que chez les cloportes. La pièce impaire S^ présente la même disposition générale que dans les oniscides ; sa forme seule y varie un peu. Mais le trait le plus carac- téristique de cette pièce chez Y Aselliis est la présence de nombreux et LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 133 forts piquants chitineux sur sa face dorsale, no. 52. Son éperon terminal lui-même, c'est-à-dire la portion qui se détache du plancher, est couverte de ces piquants. Sa forme est un peu plus massive que l'éperon de l'espèce décrite plus haut. La lame recouvrante existe aussi, mais elle est un peu moins dévelop- pée et plus épaisse sur ses bords. De plus, sa face inférieure porte latéra- lement de petits bouquets de poils cuticulaires délicats : fig. 52. Les lamelles annulaires présentent à peu près les mêmes particularités que chez les oniscides. L'intestin mo3'en est intéressant clans cette espèce, à cause des diffé- rences qu'il présente avec celui de VOiiisciis aselliis. Les figures de Sars ne nous renseignent suffisamment ni sur l'épithélium, ni sur sa muscula- ture. Il n'existe point chez YAselliis deux portions séparables entre la poche malaxatrice et le sphincter. Le calibre de l'intestin, comme celui des cellules en particulier, diminue lentement. Les coupes transversales nous révèlent d'abord les particularités dé la paroi. - La fig. 53, prise dans la partie antérieure de l'intestin moyen, dé- montre qu'il existe sur laligne médiane dorsale non une élévation, comme dans VOnisciis, mais une assez large dépression. C'est une gouttière longitu- dinale qui se rétrécit graduellement pour en arriver aux dimensions assez réduites que représente la fig. 54, prise vers le milieu de l'intestin. Le reste de l'épithélium est ondulé; mais les deux reliefs limitant la gouttière sont les plus accentués. On les trouve souvent beaucoup plus saillants que dans la fig. 53. La ligne médiane ventrale se trouve privée sur une petite largeur de tout pli saillant. Les glandes annexes et le sphincter offrent les mêmes caractères chez VAsellus que chez VOnisciis. Un peu au-delà du sphincter, on voit les cellules épithéliales se réduire, et des fibres musculaires venir relier la paroi intestinale à la cuticule dermique, fig. 55, c'est-à-dire que les caractères particuliers de l'intestin postérieur se dessinent comme chez VOnisciis. Cette portion est droite et présente des plis longitudinaux. Des fibres musculaires nombreuses s'insèrent sur sa paroi, puis elles s'irradient en tous sens, pour s'attacher d'une part sur tout le pourtour de l'intestin et, de l'autre, aussi bien sur la face ventrale que sur la face dorsale du squelette. 134 MANILLE IDE Plus loin elles deviennent latérales. Le tissu compacte qui entoure l'in- testin, FiG. 55 et 56, parait l'analogue du tissu de remplissage qui, chez les insectes, est souvent appelé tissu adipeux. En résumé, YAsellus aqiiaticiis se distingue de VOnisciis aselliis, et sans doute des oniscides en général, par les caractères suivants de son tube digestif. D'une façon générale, les pièces de la cavité malaxatrice se hérissent de poils ou piquants à pointes dirigées vers l'arrière ; c'est là le trait le plus caractéristique. Ainsi : r- deux protubérances hispides, dont la place était simplement indiquée chez VOuiscus par quelques poils, se développent au seuil de la poche malaxatrice ; 2° les pièces latérales supérieures 5, sont très saillantes en avant et leurs poils deviennent des crochets puissants, tandis que Pb'a a changé ses côtes en de vraies petites scies; 3° la pièce médiane acquiert de longs et forts poils chitineux; 4° la lame recouvrante porte .aussi de petites touffes de poils, là où l'Oiiisciis ne présentait que des amas de points plus saillants; 5° l'intestin moyen ne présente pas entre la poche et le sphincter deux portions aussi distinctes que chez VOnisciis aselliis; 6° la bande dorsale de l'intestin mo5'en n'existe pas, ou elle n'est représentée que par des cellules plus volumineuses avec des saillies spéciales. Gainiuariis pulex. Nous faisons l'étude de cet amphipode avant celle de quelques autres isopodes. Nous avons adopté cet ordre pour être à même de suivre pas à pas les modifications que subissent chacune des pièces de VOnisciis aselliis, que nous avons choisi comme type. Sars a étudié le Gammanis pulex comme V Asellus aqiiaticiis, et en a assez bien représenté les détails anatomiques. Toutefois la méthode des coupes nous permet d'en faire une étude plus complète et plus précise. Le système digestif des Gammanis, et des amphipodes, en général, semble au premier abord bien différent de celui des oniscides. Cependant, malgré les particularités importantes qui distinguent leur organisme de celui des isopodes, ils possèdent les mêmes pièces mobiles dans leur poche malaxatrice. Cette conservation dans un groupe aussi différent prouve bien que c'est avec raison que nous considérons les cinq pièces de la poche malaxatrice de LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 135 ÏOiiisciis asellits comme des organes doués d'une importance morpholo- gique fondamentale. Examinons successivement dans les fig. 65 à 76 chacune des parties que nous avons décrites chez l'Onisctis ou chez VAselhts aqiiaticus. La FIG. 67 nous montre en pr les deux protubérances marginales si développées chez VAselhis. Elles portent ici un faisceau de poils raides. Entre elles se montre une large gouttière dont le fond présente non pas un. simple soulèvement, comme chez l'Aselhis, mais une protubérance très sail- lante, chargée elle aussi de poils raides. Les saillies latérales antérieures ou pariétales 5, perdent ici les plaques chitineuses épaisses qui en garnissent les faces inférieures chez l'Onisctis et aussi chez l'Aselliis. En revanche, leur face inférieure s'arme de pointes solides et crochues. Les deux parties de ces pièces s'écartent beaucoup; les supérieures 5,s gagnent la partie la plus élevée de l'organe, où leurs saillies garnies d'une rangée de fortes pointes circonscrivent une petite chambre supérieure. Dans la FIG. 68, les poils de la partie inférieure s'allongent encore. Les parties supérieures S,s s'écartent, mais leurs piquants aussi deviennent plus longs et^constituent alors le plancher de la chambre supérieure. La FIG. 69 montre un grand changement : les saillies inférieures 5,z ont disparu. Les saillies supérieures 5,5 s'écartent davantage, et leurs piquants deviennent encore plus longs, de façon à constituer un plancher à la cavité supérieure. Plus loin vers l'arrière, fig. 70 et 71, on voit les saillies S^s persister longtemps, toujours en s' écartant de plus en plus et portant sur leurs bords des piquants de plus en plus longs. La FIG. 72 montre une des dernières paires de piquants portés par cette pièce; les saillies 5,5 disparaissent près de là. Gamroth a bien représenté ces saillies S^s sur une pièce disséquée vue d'en haut. On les reconnaît aussi très facilement dans les figures que Mayer a données des caprellides et dans celles de Max Weber chez le Glyptonotus. Ce sont toujours ces dents de 5,.s- qui ont le plus attiré l'attention des obser- vateurs. Les pièces 5, n'apparaissent qu'assez loin en arrière. La fig. 69 les montre en section transverse sous la forme des deux lames horizontales marchant l'une vers l'autre et dépassant même la ligne médiane pour s'en- trecroiser plus ou moins. La fig. 65, qui représente une section longitudi- nale médiane, les montre en S.-,; elle n'en présenterait pas trace, si leurs bords ne se recouvraient pas. 136 MANILLE IDE Leurs faces supérieures sont aussi couvertes de poils très forts, obliques en arrière. En avant, sous SJ, on reconnaît également l'existence d'un épais- sissement cuticulaire chargé de côtes courtes, mais très élevées, tranchantes et fortement découpées. Ces espèces de scies, que nous avons vu naître dans VAselliis, ressemblent déjà ici aux peignes décrits dans les décapodes par plusieurs auteurs. Au niveau de la fig. 70, les saillies 5^ présentent déjà une forme plus analogue à celle qu'on leur connaît chez VOnisciis. Elles se dressent et limitent des sillons qui courent le long des faces de la pièce impaire. Leurs faces internes présentent encore à ce niveau une plaque d'épaississement de force médiocre et couverte de poils. Leurs bords supérieurs continuent aussi à en porter quelques-uns. Dans la fig. 71 elles présentent encore une disposition semblable à celle de VOuiscus, mais elles sont bien plus minces. Elles portent sur leurs flancs les plaques cuticulaires et, sur leurs bords, des poils verticaux. Nous les voyons enfin se terminer dans la fig. 72. A ce moment elles ne portent plus qu'un paquet touffu de piquants sur la face qui regarde la lumière du canal intestinal. Il y a lieu de croire que leur portion postériei»re ne forme point une languette libre, comme celle de ÏOiiisciis. - La saillie 5; est des plus faciles à étudier. Apparue au niveau de la FIG. 69, elle se caractérise déjà dans la fig. 70 : elle y porte deux cavités intracuticulaires sur ses faces latérales, et l'on remarque une touffe de poils raides à son sommet. Plus loin, fig. 71, deux nouvelles cavités cuticulaires apparaissent. Dans cette figure les deux cavités supérieures sont spéciales au Ganiinanis, et les inférieures sont homologues à celles de YOiiisciis et de VAseUits. Remarquons que la cuticule qui recouvre ces parties des faces latérales est bien moins puissante que dans VOuiscus. La partie postérieure est détachée du plancher, comme dans YAsel- liis; elle est fort déprimée de haut en bas. Sa face supérieure porte à ce niveau des poils verticaux plus développés qu'en avant, mais qui sont loin d'atteindre les dimensions qu'ils présentent chez l'Asellus. Il existe aussi des poils à sa face postérieure, c'est-à-dire celle qui regarde la fente/'. On remarquera aussi qu'elle ferme bien cette large fente qui sépare les bords de la lamelle annulaire. La lame recouvrante parait faire entièrement défaut dans cette espèce. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 137 Au contraire, la lamelle annulaii^e y prend une telle importance qu'on a de la peine à la reconnaître, et cela d'autant plus qu'elle est rejetée fort en arrière. On la remarque surtout sur la partie postérieure de la voûte de la longue poche malaxatrice. Le point a- de cette voûte indique approximati- vement le niveau où se fait l'union de l'intestin moyen avec l'intestin anté- rieur, et, comme la partie indiquée ds n'est qu'un diverticule en doigt de gant émis par la paroi de l'intestin moyen, et n'appartient nullement à celle de la poche malaxatrice, on voit que chez les Gaminariis la paroi supérieure de l'intestin moyen n'empiète pas sur l'intestin antérieur. L'union de ces deux parties s'opère à peu près sur une section transversale régulière. La lamelle annulaire constitue donc ici un tube en partie horizontal, très saillant vers l'arrière et fendu longitudinalement sur sa ligne médiane inférieure. Leydig, Gamroth et d'autres auteurs considèrent cette lamelle annu- laire du Gammartis comme un prolongement de l'estomac dans l'intestin moyen. Personne n'indique sa signification ni ses rapports. Rappelons du reste, qu'elle a entièrement échappé aux anatomistes qui ont étudié les oniscides. Ils ne pouvaient donc pas chercher son homologue dans ce groupe. Ce fait démontre une fois de plus la nécessité d'étudier les organes comparativement. L'intestin moyen est remarquable par différentes particularités. Rien n'y représente clairement la bande dorsale de VOniscus; mais on y découvre des productions intéressantes : le diverticule supérieur et les deux tubes parallèles. Nous avons déjà appelé l'attention sur le diverticule supérieur, visible en ds dans la fig. 65, qui en montre bien l'embouchure au-dessus de la lamelle annulaire ; nous avons dit que c'est un doigt de gant qui se projette vers l'avant. Les fig. 70, 71 et 72 en font voir la forme aplatie en coupe transversale. Il n'est nullement douteux que cet organe appartienne à l'intestin moyen; les caractères de son épithélium le démontrent suffisamment. Les tubes parallèles tp ont été décrits par Leydig, Siebold, La Valette S' Georges et Spence-Bate; Pekeyaslawzewa et Rosiiskaya en ont fait l'étude embryologique. Nous les représentons en coupe. La fig. 75 contient dans sa partie supérieure leur section transversale. Ils se touchent à peu près, et ils conservent ces rapports sur toute leur longueur. Ils ne sont 18 138 MANILLE IDE pas libres comme les tubes de Malpighi des insectes, dont on a l'habitude de les rapprocher; une enveloppe de tissu conjonctif les relie au contraire solidement entre eux, ainsi qu'à la paroi supérieure de l'intestin, sur laquelle ils sont couchés. Leur embouchure, comme celle des tubes de Malpighi, est reléguée assez loin vers l'arrière. Elle se fait à peu de distance du sphincter. La FiG. 76 montre que leur lumière, qui est partout assez réduite, commu- nique avec celle de l'intestin en un point situé sur sa paroi latérale et un peu supérieure. De ce point, chacun des tubes marche d'abord presque transversalement vers la ligne médiane, mais, aussitôt après leur rencon- tre, ils se courbent et marchent parallèlement vers l'avant. La paroi inférieure du tube digestif ne présente d'autres particularités que celles de l'embouchure du système de glandes annexes ou hépatiques. Cette embouchure est disposée sur le même plan que chez les espèces précédentes, mais elle s'y simplifie un peu. La FIG. 73 indique que le canal transverse s'ouvre tout simplement dans une partie déclive, située à l'union de l'intestin moyen avec l'intestin antérieur et visible en coupe longitudinale sur la fig. 65. Cette partie déclive représente seule l'arrière-poche des Oinsciis. Le liquide peut s'en écouler facilement vers l'intestin moyen, mais son passage vers la poche malaxatrice est aussi rendu très facile par la largeur considé- rable que prend dans sa partie antérieure et inférieure la fente comprise entre les bords de la lamelle annulaire. L'obturation est réalisée par des dispositions simplifiées. La cavité dans laquelle les canaux transversaux déversent leur contenu étant elle- même moins anfractueuse, elle pouvait être moins minutieusement protégée contre l'entrée des parcelles alimentaires. La partie postérieure détachée de la pièce impaire S, joue certaine- ment le rôle principal dans cette obturation. Elle est aplatie, très large et chargée de longs piquants au niveau de la partie élargie de la fente/'; comme nous l'avons déjà fait remarquer, elle s'applique très bien sur les bords des lamelles annulaires la et paraît fermer exactement leur fente. L'épithélium de l'intestin moyen fixe intensément les matières colo- rantes. Nous lui avons donné dans nos figures une teinte foncée qui le différencie, comme dans nos préparations, d'avec l'épithélium de l'intestin antérieur et des tubes parallèles. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 139 Le Sphincter est plus long que chez les oniscides. Au contraire, la troisième portion de l'intestin moyen n'est plus représentée chez le Ganuuariis. L'intestin postérieur s'unit directement à la région du sphincter, fig. 66. Un repli assez marqué, surtout sur la face inférieure, se voit au point d'union. Une ou deux fibres musculaires plus fortes que les autres sont logées dans ce repli. L'intestin terminal est court, plus court même que la région du sphincter. Il est muni comme chez YOniscus de fibres musculaires s'irradiant vers les deux cuticules dermiques, dorsale et ventrale. Voici, en résumé, les traits' caractéristiques du tube digestif du Gammarus. Les protubérances marginales sont bien développées. Comme chez V Ascii lis, les cinq pièces principales de la cavité malaxatrice se couvrent d'appendices cuticulaires, dont certains sont très développés et ont la forme de crochets. Les pièces latérales, 5,, sont divisées en deux crêtes plus distinctes l'une de Tautre que dans d'autres espèces. Les forts piquants de sa crête supérieure forment, en marchant l'une vers l'autre, le plancher d'un com- partiment supérieur de la poche malaxatrice. Nous n'avons trouvé dans les auteurs aucune indication de cette chambre supérieure, dans laquelle les aliments ne pénètrent pas. Ces pièces ne portent pas de plaque d'épaississement cuticulaire à leur partie inférieure. Les faces supérieures de S, ne portent plus de plaques en opposition avec celles de S,, qui fait défaut aussi. Mais ces plaques sont représentées ici par une série de peignes peu nombreux, mais fort saillants, qui sont les homologues des côtes légères de VOnisciis. — La face interne ou inférieure de S.^, au contraire, porte la plaque qui doit faire opposition à celle de la pièce impaire S,, mais elle est relativement mince et porte des poils à sa partie antérieure. La pièce impaire 5^ est constituée comme chez YOniscus, avec ces différences qu'elle présente une partie terminale postérieure plus aplatie, qu'elle porte des poils sur sa face supérieure et que la plaque de ses faces latérales est plus mince et contient deux cavités semi-circulaires au lieu d'une seule. La lame recouvrante n'existe pas. Au contraire, les lamelles annulaires sont très développées, et forment un tube fendu et saillant dans l'intestin. 140 MANILLE IDE L'intestin moyen n'empiète pas par sa paroi supérieure sur le plafond de la poche malaxatrice. Il présente un diverticule dorsal placé sur le toit de la poche malaxa- trice et deux tubes gisant parallèlement sur la partie postérieure. Après avoir fait un coude, ces tubes s'insèrent sur ses faces latérales. L'arrière- poche des glandes annexes n'existe pas; l'obturation de l'embouchure des glandes est due à des dispositions fort simples. Le sphincter est long et s'unit directement à l'intestin postérieur, car la troisième portion de l'intestin moyen fait défaut. L'intestin postérieur diffère peu de celui de VOnisciis. Idotea tricuspidata. (FIG. 77 A 80). Rathke, en 1820, a publié une description de V Idotea, à laquelle les classiques contemporains empruntent encore leurs aperçus. Huet a étudié, en 1883, le tube digestif de V Idotea, sauf la poche malaxatrice. D'après la description de Rathke, il faudrait admettre dans l'intestin antérieur une structure difficile à rapprocher, quant aux détails, de celle que nous avons décrite plus haut (Gerst.ï:cker, Milne-Edwards). Mais ces anciennes observations de l'illustre anatomiste ne s'accordent guère avec les faits que des moyens d'investigation plus parfaits cjue les siens nous ont ^•évélés. Max Weber (1884) a publié une monographie du Glyptonotus ou Idotea sabini. Sa description est assez sommaire quant au tube digestif, et nous ne saurions dire si la pièce médiane supérieure qu'il représente est identique à la pièce particulière que nous décrirons chez V Idotea. Nous allons nous borner à la simple description des pièces de la poche malaxatrice de cette intéressante espèce, en remettant à plus tard les re- marques et rapprochements que l'on peut faire à leur sujet. La FIG. 78 est une coupe à peu près parallèle à l'axe de l'œsophage et, par conséquent, oblique par rapport à l'axe de la poche malaxatrice, car ces deux parties font ensemble un angle obtus. Enjf/-, on reconnaît les protubérances marginales couvertes de poils raides. S^ y conserve sa signification habituelle. Ces pièces sont garnies de poils raides et portent en bas des plaques cuticulaires chargées de très LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES I4I puissants peignes à longs poils. Sur la ligne médiane et la voûte se voit une pièce impaire, psm, qui se rattache à cette paroi dans les coupes précé- dentes. Elle est de forme à peu près triangulaire sur la vue de profil, fig. 77. C'est une pièce supplémentaire qui ne trouve son homologue dans aucune des pièces décrites plus haut. Plus loin, on trouve les pièces laté- rales antérieures S^s, portant des poils et des cuticules. Puis, les pièces latérales moyennes S., qui portent des plaques striées sur leurs faces inté- rieures opposées à S^, mais les plaques cuticulaires de leurs faces supérieures présentent une série de peignes. Enfin, on y trouve aussi la pièce impaire S^ avec des plaques cuticu- laires et des cavités semi-circulaires sur ses faces latérales, comme dans VOuisCUS, FIG. 79. La lame recouvrante existe aussi ; elle est même plus développée que chez les oniscides, fig. 77, 79 et 80. Mais, et c'est là un détail plus curieux, les lamelles annulaires y sont extrêmement développées également et pré- sentent la même forme que chez les Gammanis. En -résumé, VIdotea présente, réunis dans un même individu, les carac- tères des trois espèces décrites plus haut : à savoir VOniscits, VAsellus et le Gammarus. De VOnisciis, il possède les pièces cuirassées de plaques cuticulaires et sans poils de S, et 5,, ainsi que la lame recouvrante. De VAsellus, il a les protubérances marginales, les piquants raides et les peignes des reliefs antérieurs. Enfin, il présente la lamelle annulaire des Gammarus, développée en un tube complet, quoique fendu, tout en possédant la lame recouvrante de l'Onisciis et de VAsellus, laquelle fait défaut chez le Gammarus. En outre, on y observe une pièce supplémentaire, Psm, fig. 77 et 78, saillante à la face supérieure de la poche malaxatrice. Vibila mediterranea. (FIG. 81, 82 et 83). Nous n'avons pas trouvé de description détaillée du tube digestif de cette espèce ; il présente cependant des dispositions très intéressantes, comme on va le voir. L'œsophage possède à peu près la même longueur que celui de VOniscus et du Gammarus. 142 MANILLE IDE La poche malaxatrice contient un appareil simple, et qui paraît repré- senter un stade de dégradation très remarquable. Les reliefs 5, sont à peine représentés par de légères saillies placées, comme dans VAnilocra (voir plus loin), plutôt sur la paroi supérieure que sur la paroi latérale, fig. 81. De plus, ces saillies sont plus longues que larges et présentent à peu près la même épaisseur sur toute la longueur de la poche, fig. 82. Les reliefs 5,5 prennent subitement un grand développement, mais en arrière seulement, là où Sj est déjà détaché du plancher, fig. 83. Les saillies S, et la saillie impaire 5, sont bien développées, et leurs faces en opposition portent des plaques cuticulaires , mais sans cavités intra-cuticulaires, fig. 81. La saillie 5, a ici une forme que nous n'avons pas encore rencontrée. Elle est creusée d'un profond sillon en avant, et les deux parties latérales qui forment ce sillon sont extrêmement développées. En arrière, la saillie Sj se termine par une languette non bifurquée, portant de fortes dents, comme l'extrémité postérieure de S^ et 5,5 à ce même niveau, fig. 83. Il n'y a pas de traces de lamelle recouvrante. La lamelle annulaire est longue. Elle commence en s'insérant au même niveau sur tout le pourtour de l'intestin, derrière les saillies stomacales, et s'avance assez loin en arrière. Les glandes hépatiques s'ouvrent souvent sous la saillie 5,. Les cellules des glandes deviennent graduellement plus petites, à mesure qu'on se rapproche de leur issue dans l'intestin moyen. Tout en conservant des vacuoles dans leur protoplasme, et en absorbant avec la même teinte que les cellules hépatiques les différents colorants, elles sont devenues cylin- driques et relativement petites. Rappelons que la même particularité s'ob- serve aussi chez le Gûnniianis, fig. 73. Mais ce genre de cellules ne s'arrête point à l'issue des glandes. Elles envahissent d'avant en arrière d'abord la paroi inférieure, puis les parois latérales et, enfin, tout le pourtour de l'inte- stin moyen et se répandent ainsi sur la plus grande partie de cet organe. Cette espèce d'envahissement des glandes hépatiques sur l'intestin moyen, signalé déjà par Claus chez les tanaides, constituait, aux yeux de cet auteur, une marque d'origine commune, entodermique pour les deux organes. Néanmoins, il préfère s'en remettre à l'opinion de Bobretzky (1874) quant à l'origine de l'intestin moyen, et laisser en suspens l'explication du fait en question. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 143 Pour nous, qui avons aujourd'hui beaucoup de raisons pour croire aux affirmations très catégoriques de Reinhardt, de Pereyaslewzewa, de RossiiKAYA, de NussBAUM, nous trouvons ce fait très bien en rapport avec l'origine entodermique de l'intestin moyen, ainsi que nous le dirons dans nos i-emarques et nos conclusions. En arrière de l'intestin moyen, immédiatement au-devant du sphincter, il existe des glandes supérieures rudimentaires, analogues à celles du Ga?}iinanis. Ce sont à peine de légers culs-de-sac formés de cellules cylindriques un peu plus hautes que les cellules intestinales. En arrière du sphincter, commence bientôt l'intestin postérieur avec sa musculature extrinsècpie, comme dans les autres espèces. L'accentuation de la subdivision de 5,, la conservation des paires broyeuses de Pb^p et Pi\ (portion pylorique des auteurs), l'absence presque complète de tout autre renforcement cuticulaire, l'envahissement de l'intestin par un genre de cellules semblables aux petites cellules hépa- tiques et l'existence de glandes supérieures rudimentaires, tels sont les traits caractéristiques de la structure de la Vibila (i). Anilocra inediterrauea. (FIG. 84 A 94). Nous n'avons pas trouvé de description spéciale des parties intestinales de l'anilocre. Von Rath (1890) ne parle que de la structure fine du noyau des cellules, qu'il considère comme des glandes buccales. Le parasitisme a profondément modifié le système digestif de ces cu- rieux animaux. Leurs organes malaxateurs font preuve d'une grande simplification dans tous leurs détails. Mais cette simplification ne va pas jusqu'à la disparition complète des cinq pièces que nous regardons comme principales. Toutes sont représentées, ainsi que nous allons le voir en passant nos coupes en revue. (ij Nous avons fait remarquer dans notre mémoire sur les glandes cutanées (La Cellule, t. Vil, 2' fasc.) que cette même espèce est aussi très iniéressante à d'autres points de vue. 144 MANILLE IDE La FiG. 84 est une coupe intéressant l'œsophage. Celui-ci est dune structure fort simple, comme ailleurs; il est muni de fibres musculaires radiaires. L'organe 5,, que l'o'n y voit sous la section de l'œsophage, appar- tient à une évagination antérieure de la poche malaxatrice. On reconnaît sans difficulté, dans la fig. 87, la section transverse de la partie postérieure détachée de Sj. L'analogie est évidente. Les deux bourgeons latéraux Sj représentent les lames latérales mo}^- ennes qui sont, ici, divisées en deux crêtes. La lace inférieure de l'une, et la face supérieure de l'autre portent chacune une plaque d'épaississement cuticulaire, armée de côtes, fig. 91 et 92. Ces plaques représentent les deux plaques que porte la face supérieure en avant et la face inférieure en arrière chez YOiiisciis, Pb^p, Pb^a. La dernière de ces plaques est en opposition avec la plaque de la pièce impaire S^ et l'autre fait face à la plaque qui est portée par une saillie de la voûte. Celle-ci est l'homologue de la pièce latérale antérieure 5, et sa plaque est semblable aux autres et porte des côtes. Dans la fig. 86 qui est antérieure, la pièce impaire 5, se retrouve sous la forme d'une éminence très élevée et qui se dessine sur la tace extérieure de la poche comme une profonde gouttière ouverte en bas. On y voit bien les faces épaissies de ses faces latérales opposées aux pièces S,. Ces der- nières dans cette région ne sont plus divisées en deux crêtes; elles ont une forme régulière et portent leurs plaques sur des faces faisant un angle entre elles. Les pièces antérieures S^ sont plus saillantes et portent une plaque plus épaisse (\). Dans la fig. 85, plus antérieure encore, on n'aura pas de peine à reconnaître en 5, les pièces latérales antérieures Les parties du plancher indiquées S^, dans la même figure ne sont que les portions antérieures des pièces latérales moyennes. Ces deux pièces, si distantes l'une de l'autre dans la figure précédente, se sont donc, à un niveau antérieur, rapprochées et soudées. A ce même niveau, la pièce impaire 5, présente encore la forme d'une éminence, mais cette éminence s'y trouve enfermée dans un récessus du plancher. (i) La position si élevée de ces saillies S^ nous a fait hésiter un moment sur leur véritable signification. Mais ayant eu 1 occasion récemment de couper des Cymothoa, nous avons constaté que cette espèce présente bien un stade intermédiaire entre la Vibila et VAnilocra. Les pièces Sj y sont ideniiques à celles de VAnilucra. mais leur position ne permet pas de douter de leur homologie. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 145 En avant, la saillie impaire qui est la continuation de la pièce médiane ^3 s'atténue encore et disparaît. A ce moment, le récessus prend la forme d'un simple tuyau à section régulière. Les muscles, m, visibles sous le réces- sus, sont les branches postérieures d'un système crucial analogue à celui dont nous avons signalé l'insertion sur l'extrémité antérieure de la pièce impaire chez ÏOniscus, fig. 3 (i). On peut se figurer la genèse du récessus en admettant que la pièce médiane s'est trouvée attirée violemment vers l'avant, sous l'action de mus- cles insérés à son sommet, et qu'en même temps les parties voisines du plancher se sont trouvées entraînées et ont formé cul-de-sac. Les pièces 5, ne sont plus représentées que par de simples épaississe- ments. Nous ne trouvons chez Y Ajiilocra rien d'analogue aux protubérances marginales, aux lamelles annulaires, à la lame recouvrante, ni aux poils et crochets des autres espèces. L'intestin moyen présente com'me trait de structure caractéristique l'ex- istence de nombreuses villosités digitiformes et plus ou moins lamellaires. C'est là un fait assez rare chez les arthropodes, où le système digestif a plutôt une tendance à augmenter sa surface d'absorption et de sécrétion par le moyen d'évaginations de la paroi, qu'à l'aide de bourgeons ou d'invaginations intérieures, du genre de celles qui caractérisent l'intestin des vertébrés. Les glandes annexes sont très volumineuses; disons un mot de leurs rapports avec Tintestin moyen. De chaque côté elles s'unissent en un tube unique qui marche vers l'avant, longitudinalement et non transversalement comme dans les autres espèces décrites. Ces deux canaux sont visibles, fig. 90, en dessous de la coupe d'une lame qui présente les cellules plus plates de la paroi inférieure de l'intestin moyen. Ils présentent une musculature circulaire assez puissante. Les fig. 88 et 89, qui représentent deux sections successives antérieures à la fig. 90, démontrent que ces deux canaux se jettent dans un conduit commun et que ce conduit s'ouvre dans l'intestin par un orifice assez large; celui-ci n'est en définitive qu'une fente comprise entre les pièces latérales moyennes S,, les lamelles annulaires faisant défaut. (i) On peut remarquer dans la fig 11 que la pièce S^ s'engage dijà, chez VOiiiscKS, sous le plancher; il s'y forme un très petit récessus, qui peut sans doute s'accentuer quaud la croix musculaire se contracte. 19 146 MANILLE IDE L'éperon postérieur de la pièce médianeSj ne se continuant pas jusqu'au niveau de l'orifice, l'obturation de ce dernier paraît être assez incomplète. 11 se pourrait que cette obturation se fasse suffisamment par l'afîaissement ou par la contraction des muscles de chaque canal, ou même par l'affaisse- ment des parois du sac commun et des pièces S.^, fig. 88. Nous n'avons pas étudié d'une manière approfondie les portions posté- rieures de l'intestin moyen ni l'intestin postérieur, mais les indications incomplètes que nous possédons nous permettent de croire qu'elles présen- tent peu d'intérêt. U Anilocra est donc remarquable par la simplicité des pièces qui repré; sentent à l'évidence les cinq pièces principales de la poche malaxatrice. La présence de plaques chitineuses épaisses et couvertes de côtes saillantes per- met de rapprocher leur intestin antérieur de celui des oniscides. L'absence de piquants chitineux sur ces pièces distingue l'anilocre de Y Aselliis aqiiaticus. La pièce impaire 5, présente comme particularité de s'enfoncer en forme de crête sous le plancher de la poche malaxatrice, donnant naissance ainsi à un récessus tubulaire qui s'avance jusque sous l'œsophage. L'intestin moyen est remarquable par ses villosités intérieures. Enfin, l'obturation de l'embouchure des glandes annexes paraît très incomplète, ou du moins elle est réalisée par des moyens très élémentaires. Ph ronim a seden tarîa . Cette curieuse espèce a été décrite par Dohrn, Claus, Mayer; la mo- nographie de Claus est la dernière et la plus complète de ces descriptions. Claus nous représente cet animal comme po.ssédant des glandes sali- vaires très développées. En 18S1, ce fait paraissait exceptionnel pour les édriophthalmes. Il décrit un estomac avec ses deux poches dépendantes, qu'il ne croit pas de nature glandulaire; mais il nie l'existence de cellules glandulaires dans tout le tractus intestinal, y compris l'estomac avec ses deux poches. (1) L'absence de glandes hépatiques serait une anomalie si étrange que, malgré l'autorité de Claus, nous avons cru utile de contrôler ses assertions. D'autant plus que Gerst.^cker fait ressortir l'intérêt de ce fait et pense que, chez ces animaux, le développement des glandes salivaires serait connexe de la disparition des glandes digestives. (1) Voir ses textes dans notre résumé terminal. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 147 Les coupes transversales de l'animal entier permettent d'étudier les deux sacs de Claus et leurs rapports avec le tube digestif. Ce sont en effet deux grandes poches placées contre la paroi inférieure de l'estomac, mais leurs dimensions sont telles qu'à un certain moment elles l'enveloppent de toute part et vont se toucher au-dessus de lui. Les deux poches communiciuent entre elles par un large conduit de même nature qu'elles-mêmes. Ce conduit s'ouvre en même temps très largement dans le tube digestif, fig. 93. Cette communication a lieu entre les prolongements postérieurs de deux légères saillies 5, recouvertes d'une cuticule épaisse, plus profondément subdivisées encore que dans les Vibila (comparez fig. 30 de Claus). A partir de ce moment, l'intestin se rétrécit rapidement et prend bientôt un revêtement épithélial à cellules beaucoup plus grandes. Les cellules qui tapissent ces sacs diffèrent complètement de l'épithé- lium du tube digestif. Ce sont des cellules allongées, presque toutes chargées de vacuoles, absolument comme les cellules de la partie antérieure des glan- des hépatiques des Gamniarus et des Vibila, fig. 94. D'ailleurs le contenu des glandes et le sort des aliments achèvent de nous éclairer surlanaturedeces poches. L'un des individus que nous avons coupés avait le tube gorgé d'aliments jusqu'en arrière de la communication avec les poches. Or, ces aliments qui occupaient toute la lumière stomacale s'arrê- taient absolument a l'entrée des poches sans y pénétrer, fig. 93. Celles-ci étaient remplies d'un produit de sécrétion finement granuleux, mélangé d'une assez grande quantité de boules graisseuses. On trouve ce même produit dans toutes les glandes hépatiques. Ces observations ont- été répétées plusieurs fois. Ainsi, les relations de ces poches avec le tube digestif, la nature des cellules qui les tapissent, le produit qu'elles contiennent, la marche dès aliments, tout enfin nous prouve à l'évidence que, si modifiés qu'ils soient, ces organes sacciformes sont bien les hornologues des glandes digestives ou hépatiques. Bopyrides. Les animaux de ce groupe ayant fait le plus souvent l'objet d'études particulières, nous avons jugé convenable de présenter à part un petit aperçu des travaux qui traitent du système digestif de ces formes rétrogrades. La structure du tube digestif des Gyge femelles a été étudiée surtout par CoRNALiA et Panceri. 148 MANILLE IDE Ils y décrivent, à la suite d'un œsophage étroit, une poche dont la paroi présente un grand nombre de papilles qui pendent dans la lumière de la cavité. De cette poche part un tube étroit, rectiligne et se rendant à l'anus. Gerstaecker n'hésite pas à considérer cette poche à papilles comme l'homologue de la première portion de l'intestin moyen des oniscides. Aussi, appelle-t-il la portion étroite rectiligne qui lui fait suite du nom deEnddarm. GiARD et BoNNiER u'out pas fait l'anatomie interne des loue et des Gyge, mais ils ont décrit dans certains entoniscides parasites une poche identique à celle des bopyrides femelles, dont ils déterminent mieux les rapports avec les autres organes. Ainsi, ils indiquent qu'elle est reliée par des fibres musculaires à la cuticule. Les glandes hépatiques se déversent dans le cul-de-sac qui représente seul l'intestin de ces animaux, en arrière de la poche à papilles. CoRNALiA et Panceri avaient trouvé des amas glandulaires à côté de la poche des Gyge; ils s'étaient cru en présence de glandes salivaires. Gerstaecker, Giard et Bonnier croient ce fait discutable. Nous avons examiné deux espèces de bopyrides mâles et femelles : le Gyge branchialts parasite de la cavité branchiale de la Gebia littovalis, et Y loue thoracica qui vit sur la Callianassa siibterranea. La simplicité des or- ganes digestifs s'y caractérise encore plus que dans l'anilocre; cela se con- state surtout dans les particularités de la poche malaxatrice loue thoracica. MALE. Le mâle de cette espèce parait avoir subi dans tous ses organes une rétrogradation plus marquée que la femelle, sur laquelle, comme on sait, il vit en parasite. Chez lui, un œsophage court et très simple conduit dans une poche assez spacieuse qui est l'homologue de la poche malaxatrice. Comme chez les autres types décrits, les parois de cette poche sont reliées par des fibres musculaires à la cuticule dermicjue. Mais dans sa structure intérieure la simplification est poussée bien plus loin que chez l'anilocre, car les cinq pièces principales n'y sont plus recon- naissables avec certitude. Les coupes transversales présentent toutefois de légères saillies sur ses parois ; mais au sujet de leur homologie, l'on ne peut guère qu'émettre des hypothèses. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES I49 Ainsi, on pourrait se demander si le simple épaississement de l'épithé- lium qui, dans la fig. 95, occupe la ligne médiane supérieure représente la dent impaire supérieure de YIdotea, ou bien les pièces latérales antérieures S,, qui se seraient rapprochées au niveau de cette partie, mais qui en arrière s'écarteraient l'une de l'autre. Aucune cuticule ne tapisse la face intérieute de cette cavité. Remarquons que les muscles, vus dans une coupe transversale, sont tous disposés radialement, et doivent par conséquent agir comme dilata- teurs de cette cavité. Ces muscles sont plus nombreux en certains endroits de la poche. L'intestin mo3'en est remarquable. Il est assez développé en diamètre au voisinage de la poche malaxatrice, mais il subit plus loin une réduction qui approche de l'atrophie. La FIG. 96 est une coupe transversale passant à travers la portion anté- rieure de cette partie, au niveau de l'embouchure des glandes annexes. Cette figure a été prise sous un plus fort grossissement que les autres. Ces glandes, quoique simples, sont volumineuses et leurs cavités sont larges. Leur embouchure se fait largement et sans dispositions spéciales à l'union de l'intestin moyen avec l'intestin antérieur. Au delà de leur point d'union, l'intestin moyen devient rapidement très mince, fig. 97; on a de la peine à y reconnaître une lumière. Plus loin, il se réduit à un simple cordon cellulaire tellement mince et si souvent altéré clans les coupes, que sa perméabilité serait fort douteuse si on ne trouvait dans l'intestin plus large des restes incontestables du suc granuleux des glandes annexes. Ces êtres sont donc à tous les points de vue plus dégradés que les anilocres, qui sont des parasites extérieurs jouissant encore de la liberté dans une certaine mesure. Cependant, au point de vue du système digestif, ils le sont moins que les entoniscides chez lesquels, d'après GiÀrd et Bonnier, l'intestin moyen n'est plus qu'un cul-de-sac- sans anus. FEMELLE. La femelle possède une poche malaxatrice plus puissante, remar- quable surtout par ses plis saillants, dans lesquels nous ne chercherons pas à reconnaître' les pièces typiques. Les dimensions de l'organe sont beaucoup plus fortes que chez le mâle. C'est la femelle qui a été générale- ment étudiée chez les parasites. On voit qu'elle diffère notablement du mâle. 150 MANILLE IDE Gyg:e branchialis. Le mâle diffère peu de celui de l'Ioiie. Chez la femelle, la poche malaxatrice est munie d'un grand nombre de plis longitudinaux et de pa- pilles très saillantes (Cornalia). Elle possède aussi une musculature dilata- trice très puissante. GiARD et BoNNiER Ont décrit une disposition semblable chez VEntonis- ciis; mais ils n'attribuent point à cette musculature la même action que nous. REMARQUES. On a pu voir que nous différons d'avis avec Gerst^cker au sujet de la signification de la poche digestive des bopyrides. Pour cet auteur, cette poche représente l'intestin moyen; pour nous, au contraire, c'est l'homo- logue de la poche malaxatrice des édriophthalmes normaux. Nous reviendrons sur ce point. En résumé, les bopyrides ont un tube digestif simplifié, surtout chez le mâle; la poche malaxatrice en constitue la partie la plus spacieuse; elle n'est pas tapissée de cuticule et possède de nombreux muscles dilatateurs; elle porte, surtout chez les femelles, des saillies variées, nombreuses et dans lesquelles on ne reconnaît plus guère les pièces typiques. Les glandes annexes sont volumineuses, mais simples, et leur embou- chure ne présente aucun détail particulier. L'intestin moyen, au contraire, est très réduit et dans un état voisin de l atrophie, surtout chez le mâle. I CHAPITRE II. Descriptions histologiques. Nous exposerons sous ce titre nos observations sur'la structure fine des tissus qui composent le tube digestif. Nous insisterons sur certaines parties et sur certaines espèces plus que sur d'autres, suivant l'intérêt qu'elles présentent. INTESTIN ANTÉRIEUR. L'œsophage et la poche malaxatrice, quelles que soient les particularités anatomiques qu'ils présentent, montrent pourtant la plus grande analogie dans leur'structure histologique. Cette structure, très différente de celle de l'intestin mo3'en, se rapproche remarquablement de celle de l'intestin postérieur. Ce fait se maintient avec une constance parfaite dans toutes les espèces que nous avons étudiées; nous en reparlerons au troisième chapitre, à cause des conséquences qu'il entraine. Un double caractère histologique sépare nettement l'intestin antérieur de l'intestin moyen. D'abord l'épithélium est constitué par une couche simple de petites cellules, plus ou moins cylindriques et bien différentes des cellules gigan- tesque.= de l'intestin moyen. Les coupes représentées dans les fig. 4, 5, etc., où les deux épithéliums s'unissent, sont assez significatives pour que nous n'insistions point davantage. Le passage d'une région épithéliale à l'autre se fait très brusquement. Cependant les coupes longitudinales montrent d'ordinaire trois ou quatre cellules présentant des caractères de ■ transition Le second caractère spécial à l'intestin antérieur est fourni par la musculature. Des muscles nombreux et puissants relient de toutes parts la cuticule œsophagienne à la couche chitineuse épidermique. Ces faisceaux si riches, nous ne les avons jamais retrouvés dans l'intestin moyen; ils 152 MANILLE IDE reparaissent dans l'intestin postérieur. Ainsi un épithélium spécial et une musculature extrinsèque, tels sont les deux caractères que nous retrouvons dans toutes les parties de l'intestin que nous avons nommées intestin antérieur, tant chez VOniscus asellus que chez VAiii/ocra et les deux sexes du Gyge et de VIoiic. Nous savons d'autre part, grâce à l'embryogénie de quelques espèces, que l'ectoderme fournit l'œsophage et la poche malaxatrice, tandis que l'entoderme forme l'intestin moyen avec ses glandes digestives. La cause première de ces différences parait donc due à la différence d'origine em- bryonnaire. Œsophage. Cette portion est constituée partout par une assise de petites cellules, qui forme la couche-matrice d'une cuticule mince, vitrée et dépourvue d'appendices. En dehors de cette première assise, se trouve la tunique musculaire qui est formée de fibres longitudinales et de fibres circulaires, striées toutes deux. Chose remarquable, les fibres circulaires sont ici à l'extérieur des longitudinales. Les premières sont beaucoup plus puissantes que les dernières, surtout aux deux extrémités de l'œsophage, où elles ont une tendance à s'accpiiuler en sphincters. Nous attirons l'attention du lecteur sur cette - disposition des fibres, parce que dans l'intestin moyen cette disposition est renversée : les fibres longitudinales y sont à l'extérieur des circulaires. Toutefois, comme nous l'avons vu, les fibres circulaires du sphincter S, fig. 27, sont externes par rapport à toutes les autres couches musculaires. Serait-ce une règle générale que la couche musculaire la plus puissante soit toujours placée à l'extérieur .de la couche la plus faible? Nous sommes enclin à le penser, en tenant compte de certaines données que nous avons recueillies nous-même ou trouvées dans les travaux variés des auteurs. Les muscles extrinsèques unissent sous diverses obliquités la cuticule œsophagienne à la cuticule dermique d'une part, ou à la charpente chitineuse d'autre part. Ce sont des fibres striées présentant, surtout chez V Asellus, une large gaîne de protoplasme non différentié avec de nombreux noyaux. Ce caractère, qui identifie ces muscles avec les autres muscles du corps, les distingue notablement des fibres de la musculature pi'oprc du tube digestif. Car nous verrons plus loin que le protoplasme de ces dernières, loin de LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 153 former une gaîne complète, est à peine représenté encore par de faibles accumulations isolées de substance granuleuse non différentiée. La striation de ces fibres extrinsèques est fort nette; mais près de leurs extrémités la striation transverse disparaît. Très souvent leurs stries longi- tudinales sont en cet endroit plus fines et moins distinctes et en même temps la fibre prend un aspect brillant et une consistance plus dure et comme tendineuse. Nous montrerons plus loin que c'est là l'origine des tendons, des apodèmes et de la charpente chitineuse de ces animaux et des crustacés en général. La terminaison tendineuse écarte les cellules épithéliales pour s'insérer toujours à la cuticule même; avant d'atteindre cette cuticule, elle se divise parfois en plusieurs branches, ne. 7. Les cellules épithéliales insérées entre les branches fibrillaires sont souvent déformées et beaucoup plus élevées que leurs voisines; les mouvements des tendons les modifient peut-être pendant leur croissance. Poche malaxatrice. Après la description des tissus oesophagiens il n'y aurait rien à ajouter pour la poche malaxatrice, si nous ne voyions pas surgir chez quelques espèces non parasites des dépendances cuticulaires remarquables à bien des points de vue. Cuticule, On peut dire en général qu'elle est mince, vitrée et dépourvue d'épaississements ou d'appendices, partout ailleurs qu'au niveau des divers reliefs de la paroi. Toutefois, parmi ceux ci les lamelles annulaires ne possèdent aucune de ces particularités dans leur cuticule. Nous en aurions dit autant de la lame recouvrante des oniscides, si un examen plus attentif ne nous y avait fait découvrir des rudiments de productions spéciales. Nous avons à signaler trois formes différentes d'appendices cuticulaires, les poils ou dents, les plaques massives et les plaques creuses. Tous les appendices allongés et pointus soit de la finesse d'un cheveu, soit de l'épaisseur massive des dents d ecrevisse, sont des productions du genre de celles que Lubbock (i) range sous l'appellation de « ordinary (i) Sir John Lubeock. The sensés of animal, p. 16. 20 154 MANILLE IDE surface hairs t. Nous n'y avons pas vu de poils innervés que l'on puisse regarder comme des organes du goût. Les dépendances les plus simples que nous connaissions sont les petites pointes alignées et à peine perceptibles que nous présente VOiiisciis à la surface inférieure de sa lame recouvrante, fig. 13 et 15. Chez ÏAselius aqiialicus, ces pointes deviennent déjà des poils raides, mais encore bien délicats, ne. 52. Viennent ensuite les touffes de poils fins et longs, qui se rencontrent chez toutes les espèces en nombre variable. La cuticule ne présente à leur point d'insertion ni perforation, ni aucune particularité de structure; ils paraissent être une dépendance des couches les plus externes de cette membrane. Enfin certains appendices se transforment en solides piquants, d'autres en véritables crochets, qui garnissent alors les reliefs 5,, 5,5 des gammarides et des asellides. Plus ils deviennent massifs et plus la cuticule qui les porte se modifie. Finalement, la cuticule paraît participer tout entière à leur forrhation, et alors le crochet présente en son centre un pertuis communiquant avec le protoplasme de la cellule épithéliale sous-jacente. Les gros crochets des Gammarus présentent même une striation très évidente comme les épaisses cuticules dermiques de ces animaux. Nous ne doutons point que les dents des écrevisses ne soient des productions analogues. Une seconde production cuticulaire est représentée par les plaques depaississement P^,, Pb^a et Pb^p, fig. 6, 11, 12, 13, 50, 51, 52, 70, 71 et autres. Ce sont de véritables meules broyeuses, P^, et Pb^a, qui se font face, et présentent une structure semblable. L'épaisseur de toutes ces plaques varie énormément. Depuis l'épaississement à peine appréciable des anilocres en Pb^a, fig. 88, jusqu'aux massifs que porte la saillie 5;, des Onisciis, nous trouvons toute une échelle de transitions. La surface libre de toutes ces plaques présente toujours des stries sail- lantes, des côtes généralement peu proéminentes, qui servent peut-être comme les rainures des meules à retenir et à broyer plus sûrement les ali- ments. Nous avons admiré les courbes élégantes formées par les côtes des plaques Pb^ et Pb.,, fig. 9. Les côtes des Pb^p sont, au contraire, droites, verticales et parallèles entre elles. Il est intéressant de remarquer que les côtes des Pb, et Pb„a peuvent devenir saillantes et tranchantes à la fois comme des couteaux, ou plutôt LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 155 comme de véritables scies, car leur tranchant est dentelé. Cela se voit déjà chez \ Asellus aqitaticits, principalement à l'extrémité médiane de ces côtes, FIG. 50. Mais, dans le Gaininanis et VIdotea, les dentelures prenant des propor- tions exagérées, chaque côte représente plutôt un vrai peigne à dents obliques. Nul doute que ce ne soit encore là l'origine des peignes dont on parle tant dans les mémoires sur les décapodes. Il n'est pas inutile de s'en souvenir. La pièce moyenne Sj présente dans la paroi de ses- plaques broyeuses une particularité qui mérite d'être signalée à part. Ces plaques Pb^, fig. 13, 16, 51, 70 et 71, sont remarquables non pas à cause de l'épaisseur de la cuticule qui les recouvre, mais à cause de la constitution de celle-ci. En fait de stries de structure, on n'y voit plus que celles qui sont parallèles à la surface et même elles ne sont pas toujours faciles à distinguer; les stries perpendiculaires ne sont pas visibles. Mais elle se font remarquer surtout par la présence d'une volumineuse cavité, généralement lenticulaire, à face plane dirigée vers l'extérieur, fig. 13. On dirait, à la voir, qu'elle est le résultat d'un clivage localisé de la cuticule, produit par le développement plus rapide en ce point d'un certain nombre des minces lamelles qui la composent. Cette cavité se voit dans le schéma, fig. 2. On y remarque qu'elle présente une forme allongée, comme celle de la plaque, fig. 16. 'Vers l'avant, elle s'atténue; vers l'arriére, elle parait cesser brusquement, mais en réalité elle se recourbe vers le bas pour aller se perdre dans le plancher. Chez le Gammanis, cette cuirasse latérale paraît plus faible; sa surface externe, comme celle de la plaque qui lui fait opposition, Pb^p, y reprend des côtes saillantes. En revanche, elle présente une autre particularité :~ une seconde plaque, en tout semblable à la première, quoique plus petite, se voit au-dessus de celle-ci tout près du" sommet de la pièce, fig. 71. Chez la Vibila et la Phrouiina, ces cavités intracuticulairès n'existent pas sur les côtés de 5,, toutes les pièces y présentent la structure ordinaire, fig. 81, 82 et 86. Telles sont les particularités de la cuticule de la poche malaxatrice : poils ou crochets divers, plaques d'épaississement et cavités intracuticu- lairès. L'épithélium-matrice de la cuticule présente un détail à noter. 156 MANILLE IDE L'épaisseur de cette couche épithéliale est très variable. Toutefois, elle reste toujours formée par une assise unique de cellules cylindriques plus ou moins élevées. La hauteur de ces cellules est donc l'unique cause de ces variations d'épaisseur. Or, il est bon de remarquer que cette élévation de l'épithélium coïn- cide toujours avec un épaississement de la cuticule. En effet, les plaques broyeuses des différentes espèces sont portées par des épithéliums d'une hauteur proportionnelle au degré de l'épaisseur de ces plaques. Les cellules qui sont chargées de construire et de supporter ces plaques se distinguent donc de leurs voisines par un accroissement de volume. En même temps ces cellules paraissent plus granuleuses, plus riches en protoplasme, comme on le remarque nettement sous les plaques Pb^ de VAsellus et du Gammavus, fig. 51, 70 et 71. Ainsi, les cuticules épaisses qui paraissent supporter des pressions plus fortes, loin de tasser l'épithélium-matrice, comme on pourrait le supposer à priori, sont au contraire portées par une couche de cellules très hautes. Ce fait n'est pas spécial aux épithéliums que nous étudions ici ; nos observations nous permettent de conclure que c'est là la loi générale pour les cuticules des arthropodes. Mais nulle part, croyons-nous, cette loi ne se montre plus nettement que dans les estomacs broyeurs. Les muscles de la poche malaxatrice ne présentent au point de vue histologique aucun caractère qui les différencie de ceux de l'œsophage. Les muscles extrinsèques qui s'insèrent à la paroi vont jusqu'à la cuticule tantôt en écartant les cellules, tantôt en se divisant en fibrilles et en s'insinuant entre elles. Au niveau des plus grands faisceaux, qui s'insèrent surtout aux extrémités des plaques broyeuses, il n'y a plus moyen souvent de reconnaître l'épithélium sur une étendue notable, FIG. 11. INTESTIN MOYEN. Iv'épithélium de cette portion intestinale est remarquable dans beau- coup d'espèces par la grandeur de ses cellules. Chez les oniscides, elles sont énormes, et leurs noyaux, ainsi que nous l'avons dit, atteignent parfois des dimensions telles qu'il est facile de les distinguer à l'œil nu. Leydig et deux savants belges, Carnoy et Van Bambeke, ont traité spécialement de la structure de ces cellules et de leurs noyaux. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 157 Disons tout de suite au lecteur que nous avons considéré l'étude du noyau comme un chapitre spécial de cytologie, qu'il serait inutile d'aborder dans un mémoire monographique. Oniscus aselliis. C'est dans la région antérieure de l'intestin mo3'en de VOniscus aselliis que les cellules atteignent leur plus grande dimension. Leur disposition est très régulière, fig. 19. Sur la face dorsale qui comprend les plus gros éléments, elles sont dis- posées en séries régulières, longitudinales et parallèles à la bande dorsale. Mais vers l'extrémité de cette bande, ces séries sont interrompues par d'autres séries qui décrivent une courbe autour d'elle pour se continuer régulièrement vers l'arrière (Lereboullet). La fig. 19 donne une très bonne idée de cette curieuse disposition. On y remarque également que les cellules ventrales sont disposées tout aussi régulièrement en séries longitudinales, mais ces séries s'arrêtent contre l'aire formée par les éléments qui rayonnent de l'extrémité de la bande dorsale. Les deux rangées médianes de cellules sont les seules qui passent directement de la portion antérieure jusque dans la portion moyenne. La structure de la bande dorsale doit nous occuper quelques instants. Prions d'abord le lecteur de jeter un regard sur la section de cette bande, qui s'aperçoit dans les fig. 21 à 26. On y remarquera facilement que les deux séries longitudinales de cellules constituent à elles seules la bande saillante, excepté peut-être tout en avant, au niveau de la fig. 21, où les deux rangées longitudinales voisines paraissent contribuer pour une part à former le pédicule de la queue d'aronde. C'est surtout à la forme particulière de ces cellules et à leur grande dimension qu'est due la saillie que fait cette bande Chacune d'elles est plus ou moins taillée en biseau et plus ou moins développée latéralement suivant la région de l'organe que l'on considère. On croirait d'après cela que les cellules au niveau de la bande dorsale de- vraient avoir des dimensions colossales, mais, en général, elles ne sont guère plus volumineuses que les autres, comme on va le voir. Revenons à notre fig. 19. On peut y constater très bien que la bande, ainsi que nous venons de le dire, ne comprend que deux rangées de cellules, même dans la partie la plus large et spatuliforme, indiquée dans cette figure. 158 MANILLE IDE Mais, tandis que ces cellules vues de face ont une forme régulièrement carrée en avant, elles prennent en arrière une forme allongée; elles s'étendent fort loin dans le sens transversal par rapport à l'axe de l'intestin, en se comprimant fortement dans le sens antéro-postérieur. Elles perdent donc dans un sens ce qu'elles gagnent dans l'autre. On se rend très bien compte de leur forme en examinant attentivement la FiG. 23, qui est une coupe de la partie élargie, et la fig. 19. Dans la partie postérieure de cette dernière, on voit que les cellules recouvrent leur forme carrée, sans reprendre pourtant les mêmes dimensions qu'en avant, car tout l'épithélium voisin du bout postérieur de la bande est formé de cellules plus petites. Signalons encore les fig. 25 et 26, qui montrent les dernières cellules de la bande enclavées comme des coins dans la cavité épithéliale. La paroi ventrale de l'intestin présente, avons-nous dit, un épaississe- ment faisant face à la bande dorsale. Nos coupes transversales démontrent qu'il est dû tout simplement à l'accroissement des cellules dans le sens radial du tube intestinal. Elles prennent la forme de prismes, quelquefois très allongés, fig. 31. Leur noyau aussi s'allonge beaucoup dans le même sens. On reconnaît à première vue dans la plupart d'entre elles un proto- plasme granuleux, traversé par des fibrilles très variables en nombre et en dimension, mais assez constamment dirigées de la surface libi^e de l'épithélium à la surface adhérente. Ces fibrilles, parfois très puissantes, sont connues de tous ceux qui depuis Leydig ont eu sous les yeux l'épithélium qui nous occupe. Leurs faisceaux constituent les colonnes en palissades de HuET (ij. Les partisans de la structure exclusivement fibrillaire du protoplasme — par opposition à la structure réticulée, qu'à la suite sur- tout des travaux de Carnoy on lui reconnaît généralement aujourd'hui — ont pu y voir un objet très favorable à leur thèse. Cependant, avec un peu d'attention et à l'aide de bons objectifs, on s'assure aisément que ces grosses fibres ne sont que des portions fortifiées du réticulum général, des séries de trabécules placées bout à bout et fortement épaissies. Elles ne sont nullement isolées du système réticulaire; elles s')' rattachent au contraire (i) HuET : Nouvelles recherches sur les ciistaccs Isopodes; Journal de TAiiat. et de la Pliys., i883. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 159 par de fines fibrilles qui se fixent sur elles. On constate surtout ces liaisons aux endroits les plus minces des coupes colorées très fortement au bleu carmin et montées dans la solution glycérinée ou dans un milieu moins réfringent encore. Il est alors facile de voir les grosses fibres s'épanouir à leurs extrémités en un pinceau de fibrilles qui se perdent dans le réticulum général, et se réunir entre elles sur leur parcours par des trabécules trans- versales ou obliques. D'ailleurs, s'il était démontré que dans certaines cellules fortement différentiées et vieilles, comme celles dont nous traitons, il existe des fibres sans connexions, rien n'empêcherait d'admettre que certaines trabécules brisent leurs liens et s'isolent ; cela se voit même souvent dans d'autres cellules. Mais il nous a paru utile de démontrer que l'un des objets les plus favorables en apparence à la théorie fibrillaire peut au contraire servir à la démonstration de la structure réticulaire de l'élément plastinien. Nos FiG. 31, 32, 34 et 35 donnent une idée de la variété d'aspect et de disposition que présente le réticulum des cellules de l'intestin et surtout sa partie différentiée en fibrilles fasciculées ou pénicillées. D'ordinaire, les plus fortes d'entre ces fibrilles adhèrent fortement à la membrane sur laquelle ils s'implantent. Les dissociateurs ne les arrachent point, ils les brisent et les membranes balayées au pinceau sous un filet d'eau montrent des séries de petites épines, qui ne sont autre chose que la base rompue de ces colonnettes. On reconnaît alors facilement la répar- tition régulière de ces dernières à la surface de la membrane, fig. 34 et 35. Elles sont toujours plus saillantes dans la zone périphérique et, comme elles sont à peu près parallèles de cellule à cellule, elles rendent souvent difficile la distinction de la membrane qui sépare les éléments. C'est surtout en dissociant les cellules qu'on se convainc de l'existeace de cette membrane. On la voit bien aussi sur les coupes tangentielles. Elle est mince et apparaît comme une ligne très délicate. Les grandes cellules épithéliales qui constituent le fond de la gouttière dorsale, rd, fig. 23, sont très riches en colonnes puissantes. Outre le réticulum protoplasmatique avec ses modifications, il nous faut signaler encore la présence assez fréquente de vacuoles près du noyau, FIG. 31. L'épithélium intestinal de V Asellus aquaticiis n'est pas moins intéressant que celui de YOniscus. Nous retrouvons encore ici une symétrie admirable dans la disposition des cellules. Le fond de la gouttière médiane dorsale l6o MANILLE IDE est formée par deux rangées longitudinales toutes spéciales. Larges en avant, elles se rétrécissent énormément en arrière, et correspondent en cela aux cellules de la bande médiane dorsale de VOiiisciis. Mais ici elles ne forment point saillie dans la lumière du canal; au contraire, leurs voisines les surplombent notablement, fig. 53 et 54. En arrière, elles se réduisent à de très petites cellules enclavées entre les cellules ordinaires de l'intestin; ainsi, la coupe 54 de YAselliis rappelle bien la coupe 26 de YOnisciis. Si nous jetons maintenant un coup dœil sur la ligne médiane ventrale, nous y distinguons aussi deux rangées de petites cellules, qui se maintien- nent à peu près égales dans nos deux fig. 53 et 54. Toutes les autres cellules sont saillantes et larges, surtout les plus voi- sines de la ligne médiane dorsale. Elles présentent au fond la même struc- ture protoplasmatique que celles de VOtiiscits ; de fortes fibrilles de proto- plasme les traversent de la même manière. Seulement on trouve presque constamment entre le noyau et la surface libre et bombée de la cellule une énorme boule d'une substance assez homogène. Nous croyons que cette boule correspond aux petites vacuoles de VOniscus et est, en dernière analyse, un produit de sécrétion. Les noyaux de toutes ces cellules sont riches en nucléine et contiennent, en outre, de grands nucléoles. Le voisinage des boules que nous avons signalées déforme souvent les noj'aux. Comme chez VOniscus, la membrane cellulaire du côté de la cavité digestive est délicate, fine et sans plateau strié. Chez YIdotea les cellules sont plates, plus uniformément fibrillaires, et leurs dimensions sont moins fortes que chez les deux espèces déjà signalées. Les Gammarus sont remarquables au point de vue de l'épithélium intestinal. Les fig. 73 et suivantes montrent que les cellules sont petites et de forme prismatique. La hauteur de ces cellules varie beaucoup ; elles sont très hautes dans le diverticule supérieur, plus basses dans le reste de l'intestin, très hautes encore dans les tubes parallèles. Nous avons dit qu'elles absorbent fortement les matières colorantes. L'anilocre présente peu d'intérêt à ce point de vue. Quant aux bopyrides, nous avons fait remarquer la minceur de leur intestin et la petitesse de leurs cellules, fig. 95, 96 et 97. Enfin, rappelons, avant d'abandonner l'épithélium intestinal, le cas LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES l6l de la Tilnlû. Les cellules glandulaires ne s'arrêtent point autour de l'orifice des glandes hépatiques; elles s'avancent au contraire en envahissant en ar- rière la plus grande partie de l'intestin moyen. Ce sont des cellules cylin- driques, plus ou moins élevées et présentant des vacuoles près de leur surface cuticulaire. Plus elles s'éloignent de la face antéro-inférieure de l'intestin, plus elles se modifient, pour établir ainsi toutes les transitions entre les grandes cellules hépatiques et les petites cellules cylindriques de l'intestin. Nous n'entamons point l'étude cytologique fine des glandes annexes, dites - hépatiques r. Ces organes ont fait l'objet d'études spéciales. Weber, Frenzel, Cattaneo, Claus se sont principalement occupés de cet objet. Toutefois, l'accord n'existe point entre les différents observateurs sur bien des ques- tions ; plusieurs points essentiels sont encore à résoudre. Max Weber avait distingué deux espèces de cellules dans l'épithélium sécrétant de ces glandes. Claus, Rosenstadt, Giard et Bonnier, au contraire, n'en admettent qu'une seule espèce. Claus dit : - 50 dass dicselbeu niir Extrême derselben Zellenavt, keinesivegs aber {xpeierlei Arien l'on Zellen be{eichnen. ». Nous inclinons à accepter l'opinion de Weber, qui parait la plus juste. Toutefois, nous n'entendons point entrer dans ce débat. Musculature de l'intestin moyen. Il est impossible d'étudier convenablement la disposition des fibres musculaires sans la débarrasser d'abord de l'épithélium. Nous avons procédé comme il suit pour y arriver, sans jeter le désordre dans les fibres musculaires si délicates. MODE opératoire. Après avoir ouvert l'intestin moyen d'un Oniscus par la face latérale, afin de respecter les intéressants détails des faces ventrales et dorsales, nous l'étendons sur une baguette de verre, en a3''ant soin d'appliquer la musculature contre la baguette, l'épithélium en dehors. Deux ligatures servent à fixer la pièce ainsi étalée. La baguette est alors plongée dans le sérum. Après 24 heures, nous brossons la face externe de la pièce sous un fin jet d'eau avec un pinceau très léger, jusqu'à ce que toutes les cellules épithéliales soient enlevées. Par ce procédé, on peut ensuite fixer, colorer, décolorer autant qu'on le veut, en passant d'un liquide à un autre, sans risquer de déranger les fibres. 21 162 MANILLE IDE Quand on juge toutes les opérations achevées, on coupe les deux fils, et on étale avec soin l'intestin sur le porte-objets. Après bien des essais, nous avons dû abandonner cette méthode pour VAsellus aquaticiis. L'intestin y est trop mince et trop altérable. Nous soumettons donc les Aselhis à un jeûne de deux à trois jours; puis nous leur enlevons l'intestin vide. L'intestin frais est glissé directement sur un porte-objets humide, de manière à l'empêcher de se courber, puis aussitôt nous laissons couler une ou deux gouttes d'acide picrique sur l'objet ainsi étalé. Cette manipulation rapide suffit pour faire apparaître les fins rameaux musculaires sans les déranger le moins du monde. C'est la partie pré-sphinctérienne de l'intestin moyen qui présente le plus d'intérêt à ce point de vue chez l'Oiuscus aselhis. Rappelons que nous y avons distingué deux régions, une antérieure élargie et une postérieure plus mince. DESCRIPTION. L'existence de deux espèces de fibres musculaires, les unes circulaires les autres longitudinales, a été constatée sur toute la longueur de l'intestin par tous les observateurs. Fibres circulaires. Disposition. Un examen superficiel de l'intestin moyen permet de reconnaître que la portion antérieure possède une paroi beaucoup plus musculaire que la région moyenne du tronçon aminci pré-sphinctérien. Ce n'est pas pourtant qu'elle possède un nombre plus grand de fibres circulaires sur un espace donné; mais la largeur de ces éléments y est beau- coup plus considérable. Ils y sont si larges qu'ils se touchent presque en certains endroits. Ils sont, au contraire, fort minces dans la région moyenne, ainsi qu'on le remarque dans la fig. 20 qui reproduit une zone de la tunique musculaire prise à la limite des deux régions. On suit aisément ces fibres sur toute leur longueur en ouvrant l'intestin par une incision latérale et en l'étalant sur un porte-objets. C'est une prépa- ration de ce genre qui a servi de modèle à la fig. 20. Les deux bandes dépourvues de fibres longitudinales qu'on y remarque correspondent l'une à la face ventrale, l'autre à la face dorsale de l'intestin. 1 LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES l63 Remarquons d'abord que l'on n'aperçoit dans ces fibres aucune solution" de continuité. Chaque bande musculaire parcourt donc sans s'interrompre toute la largeur de l'intestin étalé. On peut donc se demander si l'on a devant soi autant d'anneaux com- plets, ouverts par le scalpel, qu'il y a de bandes sectionnées, ou bien une seule spirale ininterrompue qui contournerait tout l'intestin. Les deux hypothèses sont possibles. Dans celle des cercles complets, chaque fibre embryonnaire se serait soudée avec elle-même après avoir contourné l'in- testin. Dans celle de la spirale, au contraire, chacune des fibres se serait unie par un de ses bouts à la fibre précédente, et par l'autre avec la fibre suivante. La solution de cette question présente de grandes difficultés. Cependant nous nous déclarons pour la première hypothèse. Elle parait moins étrange que l'autre, car nous ne sachions pas qu'on ait décrit jusqu'ici un organe tubulaire muni dune spirale musculaire continue. Rapports des fibres entre elles. Les rapports mutuels des fibres circulaires vont nous occuper quelque temps. Nous avons dit que les fibres ne présentent pas de solution de conti- nuité. Il y a plus : dans la région antérieure, on n'observe sur toute leur longueur aucune modification appréciable dans leur structure. Il n'en est plus de même dans la région moyenne. La fig. 20 montre, en effet, que ces fibres portent, au niveau de la ligne médiane ventrale, une dilatation de forme losangique. Le faible grossissement auquel cette figure a été dessinée ne permettait de constater qu'une chose au sujet de ces dilata- tions : c'est qu'elles se touchent latéralement de fibre à fibre. Cependant quelques fibres minces situées à la limite des deux régions présentent des dilatations trop faibles pour se toucher, et certaines en sont même aussi dépourvues que celles de la région antérieure. Mais la fig. 38 nous montre le détail de leur structure. On y reconnaît qu'à leur niveau les fibres ne subissent pas une simple dilatation; elles s'y divisent en un nombre variable de branches. Cette modification correspond sans doute au point de soudure des éléments embryonnaires, que leur disposition soit annulaire ou spiralée. Ainsi donc, dans la région moyenne, les fibres sont unies entre elles par la rencontre et la fusion d'une série de courtes branches formant une espèce de patte d'oie ; tandis que, dans la région antérieure, on n'observe ni l64 MANILLE IDE cette ramification, ni aucune modification déstructure qui indique la limite entre deux cellules musculaires distinctes. Les bras anastomotiques de la patte d'oie ont une structure variable : les uns sont nettement musculaires, les autres, au contraire, perdent ce caractère; ils ne présentent aucune apparence de striation transversale. Mais la striation longitudinale y est très marquée. Il est évident qu'en ces points les fibrilles longitudinales s'épaississent beaucoup, tandis que les transversales se détruisent ou tout au moins s'atté- nuent au point de ne plus être discernables par les moyens ordinaires. En outre, les fibrilles longitudinales paraissent y subir une modification chimi- que : leur aspect, leur raideur, leur résistance aux agents dissolvants, nous permettent de les considérer comme partiellement chitinisés. Ces portions ressemblent fort par leur structure intime et par leur aspect à la partie terminale des fibres du corps qui s'attachent à la cuticule dermique; nous les appellerons donc portions tendineuses des fibres intestinales. Mais, outre ces rapports de bout à bout, les fibres circulaires présentent encore des liens latéraux, des anastomoses réunissant entre elles les diverses bandes circulaires. La fig. 38 montre en effet que certains rameaux de la patte d'oie, au lieu de se souder à l'extrémité musculaire qui lui fait face, S€ déjettent latéralement et se fusionnent avec un bras appartenant à la fibre voisine. Ces moyens d'union ne paraissent pas exister dans la région antérieure. Cependant là, comme dans la région moyenne', les diverses bandes sont reliées les unes aux autres : il y existe une autre espèce de bras anasto- motiques, représentés aussi dans la région moyenne. On pourrait appeler anastomoses terminales les premières, celles qui n'existent que dans la patte d'oie de la région moyenne, et anastomoses latérales celles dont nous allons dire un mot. Ces anastomoses latérales sont en général des cordons, possédant la structure musculaire, comme le corps des fibres elles-mêmes. Leur longueur varie énormément, depuis un diamètre égal à celui des fibres, jusqu'à celui d'un fil si mince qu'il ne peut comprendre qu'une ou deux fibrilles longitu- dinales, bien que les nodules transversaux y demeurent très visibles. Nos FIG. 36 et 37 en font voir de nombreuses variétés. Ces bras d'anastomose latérale ne passent pas toujours d'une fibre donnée à la fibre immédiatement voisine. Ils sont souvent beaucoup plus longs que cela, et relient des fibres assez éloignées entre elles pour être séparées par trois ou quatre bandes musculaires, fig. 36, LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES I65 Les anastomoses latérales sont beaucoup plus nombreuses dans la région antérieure que clans la région moyenne. Elles y sont aussi beaucoup moins puissantes en général ; c'est dans cette région qu'on les trouve réduites à ces minces filaments striés dont nous venons de parler. Fibres longitudinales. La couche de fibres longitudinales est aussi plus puissante dans la région antérieure de l'intestin moyen que dans la région moyenne. Mais ici ce n'est plus le diamètre de chaque élément qui s'accroît, comme c'était le cas pour les fibres circulaires, c'est le nombre des éléments qui devient plus considérable. Ce fait se constate déjà dans la fig. 20. Ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer, à propos de cette même figure, la tunique longitudinale présente une solution de continuité au niveau de la ligne médiane dorsale et de la ligne médiane ventrale. Celui de ces espaces dépourvus de fibres longitudinales, qui présente une forme ovalaire, corres- pond à l'extrémité spatulée de la crête dorsale. Les' fibres longitudinales ne sont pas très longues. Elles se terminent par une extrémité amincie qui se soude à une fibre voisine. Cette portion terminale est souvent tendineuse, fig. 42 et 43. Rapports des fibres entre elles. Les fibres longitudinales présentent, aussi bien que les fibres circulaires, des anastomoses latérales. La structure de ces bras anastomotiques est très variée et souvent fort intéressante. Certains d'entre eux sont de simples cordons minces, d'aspect chitineux, parfois striés et semblables aux terminaisons tendineuses. D'autres, au con- traire, sont formés de protoplasme granuleux, fig. 43. On en voit qui sont entièrement musculaires ou, enfin, qui sont en partie musculaires et en partie protoplasmatiques. Ces derniers présentent des aspects très curieux. Ainsi, dans la fig. 45, un filament, protoplasmatique à ses deux extrémités, devient musculaire dans sa partie moyenne. La fig. 47 en montre un qui est divisé dans sa portion moyenne en une moitié protoplasmatique et une moitié musculaire qui se perd par ses deux extrémités dans un étalement de la moitié protoplasmatique. Le cordon musculaire est en partie séparé du cordon granuleux. Parfois ces bras se bifurquent, d'une façon toujours peu complexe, fig. 43. 166 MANILLE IDE On remarque le plus souvent un noyau entouré de protoplasme aux deux extrémités des bras anastomotiques latéraux, fig. 42, 43, 45, 46, 47. Ces amas de protoplasme sont, avec les bras de même nature, les seuls restes du protoplasme non différentié de la cellule embryonnaire. On sait que les fibres musculaires du corps de la plupart des édriophthalmes, sinon de tous, présentent souvent une gaîne très considérable de protoplasme non différentié; ici la différentiation est plus complète, il n'y a plus que des restes de protoplasme. Rapports des fibres circulaires avec les fibres longitudinales Notre FIG. 41 montre que certains bras partant des fibres longitudi- nales s'unissent aux fibres circulaires. Ce sont en général des bras latéraux, rarement des bras terminaux. Ils présentent, comme les bras latéraux que nous venons de décrire, de nombreuses variétés de structure et de disposition, FIG. 41. Le chiffre 41 dans la fig. 20 indique un endi-oit où s'observaient plusieurs de ces anastosmoses. UAsellus aquaticus n'est pas moins remarquable que YOniscus au point de vue des fibres musculaires de son intestin. La tunique longitudinale y présente aussi les deux solutions de continuité que nous avons signalées dans l'espèce précédente, au niveau des lignes médianes dorsale et ventrale. Mais, contrairement à ce qui existe chez YOniscus, la région moyenne n'est pas moins riche en fibres que l'antérieure. Nous n'avons pas étudié aussi en détail la musculature intestinale des autres espèces. Elle est souvent fort puissante. REMARQUES, 1" Gerst^cker (1) admet que les fibres musculaires, circulaires et longitudinales forment en s' entrecroisant des mailles régulières circonscri- vant la face adhérente des cellules épithéliales. En fait, cette disposition s'observe souvent, surtout dans la région moyenne amincie, mais elle ne constitue pas une règle générale. Il suffit pour s'en assurer de jeter un regard sur la fig. 19, où se manifeste la dispo- sition toute particulière et si régulière des cellules épithéliales. (i) Gerst.'ecker : Bronn's Klassen. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES I67 Les fibres musculaires sont bien loin de suivre les belles lignes courbes sur lesquelles se disposent les cellules au voisinage de l'extrémité spatulée de la bande dorsale. 2'^ Des dispositions semblables à celles que nous avons signalées en étudiant les rapports des fibres musculaires entre elles ont été observées çà et là chez les insectes. Van Gehuchten (i) a signalé diverses variétés de bras anastomotiques chez la larve de la Ptychoptera. Mais nous ne pensons pas qu'on les ait décrites chez les crustacés. Ces rapports directs des fibres d'une même tunique, ou même de tuni- ques diff^érentes, sont fort intéressants. Sans nul doute ils ont une influence considérable sur le fonctionnement de l'organe. Qui sait si de semblables dispositions n'existent pas dans d'autres organes encore : coeurs, vaisseaux, etc., et si elles n'expliquent pas ces phénomènes de transmission de l'onde de contraction que l'on cherchait à expliquer par l'intervention des cellules nerveuses ganglionnaires. REMARQUES ET CONCLUSIONS. Les pages précédentes ne contiennent que l'exposé pur et simple des faits acquis par nos recherches. Il nous reste à comparer ces faits, à en faire la critique, à en tirer des conclusions. C'est ce que nous allons essayer en prenant à part certains points particuliers, pour faire à leur sujet les observations dont nous avons cru bon de débarrasser la partie descriptive de ce mémoire. Nous avons aussi à justifier notre façon de diviser le tube digestif des édriophthalmes normaux et des formes dégradées, ainsi que la termino- logie que nous leur avons appliquée. Ceci nous sera plus facile après avoir jeté un rapide coup d'œil sur la structure de chacune des régions, dans chacune des espèces. l. Comparaison des divers segments du tube digestif. 1° INTESTIN ANTÉRIEUR. Il se divise partout en deux segments : l'œsophage et la poche malaxatrice. (i) Van Gehuchten : Cellules musculaires striées ramifiées et anastomosées; Sonder- Abdruck aus Verhandlungen der Anat Gesellschaft auf der dritten Versammlung in Berlin; io-ï2 Okiober 1889. i68 MANILLE IDE a) L'œsophage. C'est un tube droit, à paroi munie d'une couche musculaire comprenant des fibres circulaires et des fibres longitudinales. Mais il possède partout aussi des fibres externes reliées à la paroi solide du corps. Il est long chez les bopyrides, surtout chez les femelles, puis viennent le Gammaviis, les oiiiscides, VIdotea, l'Asellus, la Vibila, VAnilocra. Partout il est garni d'une cuticule; celle-ci atteint son maximum d'épaisseur dans le groupe parasite des bopyrides. b) La poche vialaxatrice. C'est chez les bopyrides femelles que la poche possède le volume le plus considérable, relativement aux autres parties du tube digestif. La com- paraison à ce point de vue est assez difficile; cependant nous croyons pouvoir grouper nos espèces de la manière suivante : Loue femelle. Gyge femelle. i Oiiiscides. \ Armadillo et L dote a. Aselliis. Gammariis (longue). Vibila. Anilocra. Loue mâle. Gyge mâle. Le tableau suivant établit en détail la comparaison des cinq pièces principales de la poche, au point de vue de leur structure : PLAQUES. I. Oniscus Pbx Porcellio Pb^a Pbip P*3 A rmadillo 2. A njlocra Pbi Pb-za Pbip Pbz 3. Idotea Manque Pboa (peigne) Pb2p Pbz 4- A sel tus Gammarus Manque \ Pb-ia (peigne) Pb.2P (faible) Pbs Vibila Manque Manque Pb^p (faible) Pb3 (faible) 5. Bopyrides Pas de cuticule LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES I69 POILS. 1. Ganinmnis. Poils sur les 5 pièces et sur pr. 2. Aselliis. Poils sur les 5 pièces et sur la lame recouvrante //•, moins développés sur 5,. 3. Idotea. Poils sur S^, S^,pr, et sur la pièce médiane supérieure. 4. Oniscus. ) T^ ., f^ „ ,,. , Poils sur 6,, traces sur pr et sur //•. Force/ho. ) 5. Vibila. Poils sur 5,, et aux extrémités de 5^ et 5" . Anilocre et ( Bopy rides. 1 Poils manquent. CAVITES INTRACUTICULAIRES DE S,. 1. Gûininariis. Deux cavités superposées. 2 Aselhis. Une cavité assez grande. 3. Oniscus. Porcellio. ) Une cavité généralement un peu moins grande. Arinadillo. 4. Aiiilocra. Cavité relativement petite. 5. Vibila. Pas de cavité. Il résulte de ces tableaux que ce sont les Oniscus et leurs proches parents qui sont le mieux fournis en plaques cuticulaires épaisses; vient ensuite V Anilocre, puis Vldotea qui n'en a que deux paires, le Gammariis qui en possède deux aussi, mais plus faibles, les Vibila qui en ont deux très faibles, enfin les bopyrides qui en sont dépourvus. Les espèces terrestres sont donc les plus favorisées sous le rapport des plaques. Les poils, au contraire, et les autres appendices : peignes, etc. sont plus développés chez les espèces aquatiques, si l'on en excepte les parasites, tels que VAnilocra et les bopyrides qui en sont dépourvus. Les cavités intracuticulaires sont plus accentuées chez ceux qui sont riches en poils que chez ceux qui sont mieux armés de plaques. Mais, outre ces cinq pièces, la poche malaxatrice peut en contenir d'autres qui sont moins constantes : la lame recouvrante, la lamelle annu- laire, les protubérances marginales et la dent, ou pièce médiane supérieure de Vldotea. La lame recouvrante paraît être l'apanage des isopodes, bien que certains d'entre eux, l'anilocre par exemple, en soient dépourvus. 22 170 MANILLE IDE Les Onisciis, les Porcellio, les Armadillo, V Asellus en sont munis ; il en est de même de VIdotea. L'anilocre et les bopyrides en manquent. Les gammarides en sont également dépourvus. La lamelle annulaire prend un plus grand développement chez le Gaiii- marus et la Vibila. Parmi les isopodes, VIdotea en possède une qui est presque aussi im- portante que celle du Gaininariis. Chez les oniscides Y Annadillo et V Asellus, elle cesse de faire saillie dans l'intestin moyen. Enfin, chez l'anilocre et les bopyrides, elle fait défaut. Les protubérances marginales sont très développées chez le Gammarits; elles le sont guère moins dans V Asellus, ■ quoique moins bien armées; YIdotea en possède encore d'assez fortes. Chez les oniscides, elles ne sont représentées que par quelques faibles poils. Enfin, elles manquent chez la Vibila, l'anilocre et les bopyrides. Quant à la pièce médiane supérieure, elle n'existe que chez VIdotea. Nous croyons que l'homologie que nous avons signalée entre les diverses pièces de même nom S,, S„_, S^, étudiées dans ces dernières espèces, est assez évidente pour quelle ne soit point contestée. La lamelle annulaire pourrait peut-être donner lieu à quelques doutes. Nous avons considéré comme des organes homologues cette lamelle de VOniscus et le tube saillant dans l'intestin moyen des Gammarus. Cepen- dant on pourrait, à la suite d'une étude incomplète, soutenir que ce tube représente plutôt la lame recouvrante qui se serait particulièrement dévelop- pée et incurvée. "Voici quelques considérations qui nous paraissent appuyer solidement notre manière de voir à ce sujet. La bande /rt représente, disons-nous, la lamelle annulaire de VOniscus. Deux remarques établissent cette homologie. a) Ces formations s'insèrent Tune comme l'autre en haut, au point d'union de l'intestin antérieur avec l'intestin moyen. On pourrait objecter à cela que la lame recouvrante //• s'implante, elle aussi, très près de ce point, et que la bande du Gammarus pourrait bien représenter cette lame énormément développée. b) Mais cette supposition n'est pas soutenable. 'L'a.hànàeàuGammarus descend à droite et à gauche vers le plancher, et ses deux moitiés, après avoir gagné le plancher de la poche malaxatrice, se rapprochent et consti- LE TUBE DIGESTIF IJES EDRIOPHTHALMES I7I tuent, comme chez VOniscus, la fente longitudinale, c'est-à-dire les deux battants de la porte qui forme l'embouchure du système glandulaire. c) L'étude de Vlcîotea achève de confirmer notre interprétation. En effet, nous avons constaté dans cette espèce la coexistence de la lame recou- vrante et d'une lamelle annulaire développée en cylindre fendu, //?, comme chez le Ganvnarus. Il n'est donc pas possible de soutenir que cette dernière représente morphologiquement la lame recouvrante des Oiiisciis. Intérêt spécial de l Idotea. Uldotea est un animal fort intéressant au point de vue de la compa- raison qui nous occupe, à cause du caractère synthétique de sa structure. En ne tenant compte que des espèces que nous avons choisies, V Idotea se place naturellement entre les isopodes et les amphipodes. Il a la lamelle annulaire tubuliforme et rejetée en arrière des isopodes. La suppression des plaques opposables, Pb^ et Pb„_a, la présence des protubérances marginales, le développement des appendices cuticulaires, la forme de sa lamelle annulaire sont des caractères d'amphipodes. Au contraire, la forme ramassée de sa poche malaxatrice, la présence de la lame recouvrante et la forme des plaques broyeuses postérieures sont des caractères d'isopodes. Resterait à déterminer la signification de la pièce médiane, qui surgit sur la face supérieure de la poche malaxatrice à l'entrée de l'œsophage. Nous n'avons jusqu'ici retrouvé cette pièce chez aucun édriophthalme, et nous devons pour le moment la considérer comme spéciale à Y Idotea. Cependant nous dirons un mot à son sujet dans le paragraphe suivant, à propos des décapodes. Comparaison de la poche malaxatrice des édriophthalmes avec celle des décapodes. Milne-Edwards, en se basant sur la description de Lereboullet, a cherché à comparer les pièces mobiles de l'estomac des décapodes avec celles des édriophthalmes. Il pense qu'il faut regarder la pièce supérieure décrite par Lereboullet comme l'homologue de la dent impaire supé- rieure des décapodes, et les pièces latérales comme les homologues de leurs dents latérales. Or, remarquons que Lereboullet, bien qu'ayant entrevu les cinq pièces que nous considérons comme typiques, avait' cependant une idée fort 172 MANILLE IDE défectueuse de leur forme, de leurs rapports, des espaces qui les séparent et, en général, de toute l'organisation de la poche malaxatrice. Rappelons qu'il admet que les pièces chitineuses du squelette externe de cette poche sont des parties des pièces internes, qui auraient ainsi une forme très com- pliquée. Quant à la dent supérieure qu'il signale, elle n'existe pas chez les oniscides; nos recherches l'ont prouvé. On ne peut donc penser à établir l'homologie de la dent supérieure des décapodes en comparant ces animaux à VOniscus seul. Aussi, la manière dont Milne-Edwards cherche à fixer l'homologie des pièces mobiles dans les deux groupes de crustacés, nous a-t-elle semblé, pendant longtemps, inexplicable. Mais, après avoir examiné les dessins de Lekeboullet, nous en sommes venu à penser que le savant de Strasbourg est parvenu à découvrir par la dissection la lame recouvrante, puisqu'elle est le seul appendice médian supérieur. Ce serait donc elle qui, dans la comparaison faite par Milne-Edwards, représenterait la dent supérieure des décapodes. L'étude que nous- avons faite de la lame recouvrante suffirait à renver- ser l'homologie que l'on voudrait établir entre ce simple repli de l'épithé- lium et la dent impaire de l'écrevisse. Mais VIdotea fournit une donnée positive à ce sujet. Dans cette espèce, déjà si remarquable à d'autres points de vue, il apparaît sur la face su- périeure, à l'entrée de l'œsophage, une dent impaire médiane, coexistant avec la lame recouvrante. C'est cette pièce impaire médiane que l'on peut rapprocher de la dent des décapodes. Or, elle n'existe pas chez les oniscides; ce n'est donc pas une des cinq pièces typiques de la poche malaxatrice des édriophthalmes, mais une pièce accessoire qui peut facilement faire défaut dans ce groupe. Cependant, hâtons-nous de le dire, le moment n'est pas encore venu de chercher à établir d'une façon définitive l'homologie de toutes les pièces que contient la poche malaxatrice des crustacés en général. Il faudrait pour cela que l'on eut repris l'étude minutieuse de ces pièces dans tous les groupes, comme nous l'avons fait pour les édriophthalmes. Alors seulement, on pourra distinguer l'essentiel de l'accessoire, le primordial du secondaire. En attendant ces données complètes, nous croyons avec Milne-Edwards qu'il y a lieu de comparer la poche malaxatrice des édriophthalmes à celle des décapodes; mais voici comment nous croyons devoir établir l'homologie de ses diverses pièces. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 173 Avant tout, rappelons que nous attribuons une importance primordiale, dans le groupe des édriophthalmes, aux cinq pièces suivantes : 1° Les deux pièces latérales antérieures 5,. 2° Les deux pièces latérales moyennes 5,. 3° La pièce impaire du plancher S^. Alors, chez les décapodes, les pièces latérales dentées correspondraient à la crête supérieure dentée ou hispide de la pièce latérale antérieure (notre 5,5) des édriophthalmes. Les lamelles latérales du plancher, de consistance assez molle chez l'écrevisse, représenteraient les lames mo3^ennes S^. Enfin, la pièce impaire qui sépare ces deux pièces chez l'écrevisse ne serait autre que la pièce impaire 5, du plancher des édriophthalmes. La dent impaire supérieure des décapodes ne trouve pas son homologue parmi les pièces typiques des édriophthalmes; elle n'est pas représentée chez les oniscides. Mais elle est l'homologue de la pièce moyenne supérieure de Vldotea, pièce accessoire qui coexiste avec la lame recouvrante. La principale différence à signaler entre l'estomac de l'écrevisse et la poche malaxatrice des édriophthalmes, consiste dans l'absence d'opposition directe et manifeste entre les pièces d'un même côté. Chez les édriophthalmes, il y a opposition entre toutes les pièces d'un même côté. Cette opposition est évidente entre S, et la face supérieure et inférieure et 5^; puis entre la face interne de S-, et la face de S, qui appar- tient au même côté du corps. Chez l'écrevisse, il y a opposition entre 5,5 d'un côté et la même pièce de l'autre côté, mais non entre 5, et 5,. Mais, nous le répétons, pour ériger ces conclusions au rang de lois, il faudrait être en possession de données complètes au sujet des autres groupes. Remarque sur la Vibila. La pièce médiane impaire 5, est modifiée chez la Vibila. Elle se sub- divise sur la ligne médiane par une rainure qui, très profonde en avant, s'efface en arrière. L'exagération de cette modification pourrait faire croire à l'absence de S. dans certaines espèces : elle pourrait tout au moins rendre difficile la question de l'homologie. C'est le cas pour la Phronima (voir figure 30 de Claus, 1S79). La Vibila nous présente donc un stade de transition qui nous permet de suivre l'homologie des reliefs très variés du plancher de la poche malaxatrice. 174 MANILLE IDE 2° INTESTIN MOYEN. Cette portion se divise nettement en trois parties chez les oniscides et l'armadille. Chez VAselliis, la partie post-sphinctérienne se réduit déjà à une très courte région précédant le rectum. Enfin, chez le Gammariis, elle n'existe plus du tout, et le rectum confine au sphincter. Chez les bopyrides, nous n'avons pas remarqué de division dans le tube à demiatrophié qui constitue l'intestin moyen. Le sphincter. Nous avons dit que cet organe comprend un puissant anneau de fibres musculaires striées, et que l'on trouve sous lui la tunique de fibres longitudinales et enfin celle des fibres circulaires, comme dans les autres parties de l'intestin. Le sphincter n'est donc pas simplement le produit d'un développement exagéré de la tunique circulaire; c'est un organe nouveau et surajouté. Il ne faudrait cependant pas s'exagérer le caractèi'e spécial de cet anneau extérieur. En effet, la disposition des fibres musculaires dans la tunique viscérale chez les arthropodes ne parait pas soumise à des lois aussi fixes que chez les vertébrés. Tandis que, chez ces derniers, les fibres cir- culaires sont toujours en dedans et les longitudinales en dehors, chez les arthropodes le contraire peut s'observer. Nous trouvons de beaux exemples de cette inversion dans l'important mémoire de Balbiani sur le tube digestif des Cryptops. Dans l'œsophage du Cryptops, contrairement à ce qui se passe chez nos crustacés, il y a inversion des deux tuniques. Il y a plus : dans la même région du corps on voit parfois les fibres longitudinales et circulaires s'enchevêtrer. C'est le cas dans le Cryptops, et ce l'est aussi dans YOnisciis, au voisinage du sphincter et dans le rectum. Ces faits ôtent de la valeur à la distinction nette des deux couches en interne et externe. Par suite, nous ne voudrions pas soutenir que l'anneau musculaire du sphincter doit dériver d'un rudiment mésodermique spécial, plutôt que se former en même temps que la tunique circulaire interne, bien que toutes les apparences plaident en faveur de la première hypothèse. 3" INTESTIN POSTÉRIEUR. Cette partie se retrouve partout, et, comme l'œsophage, elle est reliée à la paroi du corps par des fibres affectant tantôt une disposition en séries bilatérales {Oniscits), tantôt en séries radiales. Elle possède en outre des faisceaux de muscles circulaires qui vont s'attacher par une de leurs extré- mités à la cuticule dermique sur la ligne médiane dorsale, fig. 28. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 175 II. Division du tube digestif en régions Le lecteur a pu remarquer que notre division du tube digestif en régions diffère de celles qu'ont adoptées plusieurs auteurs. Ainsi Lereboullet, Schnitzler, Milne-Edwards et d'autres divisent l'intestin moyen des oniscides en deux régions seulement, et lui assignent comme limite postérieure le sphincter. Gerst^cker et Gegenbaur vont même plus loin; ils appellent déjà rectum ou intestin postérieur la partie moins large qui suit la portion large portant la bande dorsale. Au-delà du sphincter, les auteurs ne distinguent plus qu'une seule partie, le rectum. Enfin Gerst^cker considère le sac dilaté des bopyrides comme l'intes- tin moyen, et le tronçon suivant comme le rectum. Claus et Ziegler croient qu'il faut donner plus d'extension au terme intestin moyen. Nous divisons l'intestin moyen des oniscides en trois parties, dont la dernière'est séparée de la moyenne par le sphincter. Au-delà du sphincter nous distinguons encore, chez les oniscides, deux parties : la région postérieure de l'intestin moyen et le rectum ou intestin postérieur, bien que dans d'autres espèces le sphincter puisse confiner direc- tement au rectum. Enfin nous considérons avec Cornalia, Panceri, Giard et Bonnier le sac dilaté des bopyrides comme l'homologue de la poche malaxatrice, et dans le tronçon suivant nous distinguons encore deux parties : l'intestin moyen étroit et le rectum dilaté. L'accord est donc bien loin d'exister entre les zoologistes au sujet de cette division. Quant à nous, nous pensons que dans une question d'homologie morphologique, comme celle-ci, il faut se baser sur la genèse des organes, sous peine de s'exposer à regarder comme morpnologiquement homologues des parties qui n'ont entre elles qu'une analogie physiologique. Il faudrait donc commencer par distinguer dans le tube digestif les diverses parties qui ont une même origine embryonnaire, à savoir : i) En parties qui dérivent du stomodseum ; 2) Parties qui dérivent du proctodasum; 3) Parties qui dérivent de l'entoderme ou, comme on dit, des cellules vitellines. 176 MANILLE IDE Malheureusement, nous ne possédons pas encore d'une façon bien pré- cise les données embryogéniques nécessaires, la genèse de l'intestin moyen étant encore imparfaitement comprise. Toutefois, en se basant sur les recherches classiques de Bobretzky, de DoHRN et de Nussbaum, on doit admettre les faits suivants. 1" L'œsophage et l'estomac, c'est-à-dire l'intestin antérieur, dérivent du stomodseum, donc de l'ectoderme; 2° Le rectum dérive du proctodœum, c'est-à-dire qu'il est aussi d'ori- gine ectodermique; 3° Quant aux glandes digestives et à l'intestin moyen, ils doivent leur origine à l'entoderme. Ce troisième fait n'est point en harmonie avec les affirmations de Bobretzky et de Nussbaum dans ses premières recherches. Ces auteurs n'admettaient comme entodermique qu'une toute petite portion de l'intestin moyen, celle qui environne l'embouchure des glandes hépatiques ou digestives. L'opinion de Bobretzky était devenue classique et fut admise comme telle jusqu'en ces dernières années (Claus, 1887 pour VOnisciis). Cependant les observations de Bobretzky étaient insuffisantes pour appuyer sa manière de voir. En effet, ce savant fait appel à deux figures. La première représente le stade où deux légères invaginations de l'ectoderme commencent à se former en avant et en arrière. La seconde, universellement reproduite par les auteurs classiques, nous transporte directement à un stade beaucoup trop avancé : tout le tractus intestinal est formé, sauf que le sto- modseum n'est pas encore perforé. Cette figure nous fait connaître le niveau de l'union de l'intestin moyen avec le stomodseum. Mais à quel niveau le proctodseum s'ouvre-t-il dans l'intestin moyen .5* Les figures de Bobretzky ne nous l'enseignent pas. Nussbaum avait confirmé assez laconiquement les vues de Bobretzky. Mais, depuis peu d'années, plusieurs travaux ont combattu l'opinion qui fait de l'intestin moyen desédriophthalmes un dérivé ectodermique. Reinhardt, en 1887, porte spécialement son attention sur la longueur de la portion entodermique de l'intestin moyen, et il affirme que cette por- tion est à un certain moment plus longue que les glandes hépatiques elles- mêmes. Cette délimitation un peu vague fut précisée en partie par les travaux des dames russes Pereyaslawzewa et Rossiiskaya. Ces auteurs ont étudié les amphipodes possédant des tubes, dits ^ de Malpighi «, entre autres le Gammarus. A l'aide de coupes faites à tous les stades du développement, LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 177 elles montrent que les tubes parallèles forment une dépendance de la portion entodennique de l'intestin. NussBAUM aussi affirme aujourd'hui que chez VOuiscus asellus une grande partie de l'intestin moyen est d'origine entodermique. Nous pouvons donc en toute sûreté considérer comme intestin moyen toute la portion qui s'étend depuis les glandes hépatiques jusqu'au sphincter. Mais les données embryologiques nous manquentpour le sphincter et la partie post-sphinctérienne, qui étaient, du reste, assez mal connus jus- qu'ici au point de vue anatomique. En labsence d'indications cmbryogéniques entièrement satisfaisantes, nous avons cherché dans la structure histologique des organes formés des caractères propres à nous révéler leur origine. Nous en avons trouvé qui, sans être absolument probants, nous paraissent pourtant d'une certaine valeur. En étudiant d'abord à ce point de vue l'intestin antérieur, c'est-à-dire la portion que tous les embiyologistes regardent comme dérivant du stomo- dœum et- comme comprenant l'œsophage et l'estomac broyeur ou poche malaxatrice, nous avons remarqué que ce premier segment se différenciait du segment suivant, issu selon toute probabilité de l'entoderme, par deux caractères principaux : 1° L'épithélium de cette portion est tout différent de celui de l'intestin moyen ; 2° Des fibres musculaires en relient les deux sous-régions à la paroi du corps, tandis que l'intestin mo3'en ne présente pas ce caractère. Nous sommes loin de considérer ces deux particularités comme con- stituant le critérium de la délimitation des parties ectodermiques d'avec les parties d'origine entodermique. Nous sommes loin aussi de soutenir d'ailleurs que ces parties se déli- mitent toujours rigoureusement chez l'adulte, sans présenter une zone mixte ou de transition. Mais, à défaut de données embiy^ologiques, nous pensons que ces caractères histologiques peuvent fournir un guide assez sûr. Appliquant donc à la partie postérieure du tube digestif les données fournies par l'étude histologique de l'intestin antérieur dérivant de l'ecto- derme, nous cro)'ons pouvoir assigner, jusqu'à preuve du contraire, une origine proctodseale ou ectodermique à la partie qui : à) présente un épithé- lium différent de celui de l'intestin moyen et semblable à celui de l'intestin antérieur, et b) est reliée à la paroi du corps par des fibres musculaires. 23 178 MANILLE IDE Nous appelons cette partie le rectum ou l'intestin postérieur. Cela étant posé, nous devons comprendre dans l'intestin mo3'en tout ce qui se trouve au-devant de l'intestin postérieur ainsi délimité. L'intestin moyen comprendra donc : Chez YOnisciis, le Porcellio, VAnnadillo : Tout ce qui derrière la poche malaxatrice précède le sphincter, plus le sphincter lui-même et la petite partie post-sphinctérienne qui est dilatée et couverte de cellules semblables à l'épithélium de l'intestin moyen. Chez Y Aselliis : Tout ce qui précède le sphincter, le sphincter lui-même et une partie, plus courte que chez l'Onisciis, qui suit cet anneau musculaire. Chez le Gammanis et la Yibila : Tout ce qui précède le sphincter et le sphincter lui-même auquel le rectum confine directement, la partie post-sphinctérienne étant supprimée totalement. Enfin, chez l'anilocre et les bopyrides, tout ce qui précède la partie dilatée voisine de l'anus. Onpourraitnousfaireuneobjection. La partie post-sphinctérienne paraît être un réservoir d'excréments; elle serait donc un rectum ou tout au moins UB intestin postérieur. Cette objection est d'ordre physiologique, et, comme nous nous plaçons ici au point de vue purement morphologique, elle ne peut rien contre notre manière de voir. Du reste, elle rappelle trop la tendance des anciens zoologistes à vouloir retrouver chez tous les êtres les parties signa- lées par l'anatomie descriptive de riiomme, et à vouloir baser leur termino- logie sur la terminologie empirique de cette ancienne branche de la biologie. En résumé, nous croyons notre division mieux fondée que d'autres au point de vue morphologique. C'est à l'embryologie que nous demandons la solution définitive du problème. Au sujet des bopyrides, nous croyons être dans le vrai en regardant comme l'homologue de la poche malaxatrice la partie la plus dilatée de leur tube digestif, contrairement à Gerstaecker qui veut y voir l'intestin mo3'en, et considère comme un rectum le tube mince qui lui fait suite. En effet, cette poche, comme la poche malaxatrice, en général, est reliée à la paroi du corps par des muscles. En outre, les glandes annexes ou hé- patiques débouchent derrière elle dans une légère dilatation de l'intestin tubulaii-e. Si le sac représentait l'intestin moyen des oniscides, ces glandes devraient déboucher au contraire dans sa par lion antérieure. LE TUBE DIGESTIF DES EDRIOPHTHALMES 179 III. Terminologie. Nous avons fait usage dans ce mémoire de certains termes qui diffèrent de ceux que les auteurs ont appliqués aux diverses parties du tube digestif des édriophthalmes. Ainsi, le deuxième segment de l'intestin antérieur porte dans ces pages le nom de poche malaxatrice. En effet, comme nous le verrons bientôt, nous sommes d'accord avec Plateau pour refusera cette poche, envisagée chez tous les édriophthalmes, le rôle que semblent lui attribuer les dénomina- tions d'estomac, de gésier, d'estomac broyeur ou d'estomac masticateur qui lui ont été attribuées jusqu'ici. Nous ne pouvions donc employer aucune de ces dénominations. Nous avons choisi le terme poche inalaxairice, parce qu'il nous paraît de nature à rappeler une fonction qu'il exerce dans le plus grand nombre des édriophthalmes, et même des crustacés en général. Nou's reviendrons bientôt sur ce point. Nous n'attribuons pas à la dénomination assignée aux diverses pièces de la poche malaxatrice une importance trop grande; leur nomenclature est basée sur leur position, rien de plus. Si leur étude était faite d'une façon complète dans tous les groupes des crustacés, on ferait peut-être bien de chercher des termes simples rappelant la valeur et l'homologie de chacune d'elle. Les termes lamelle annulaire et lame recoiirrante ont été donnés par nous à des productions dont il n'est pas fait mention dans les travaux de nos devanciers. Enfin, nous avons préféré au terme tubes de Alalpighi, celui de tubes parallèles pour désigner les deux canaux qui débouchent dans la partie postérieure de l'intestin moyen des Gammarus, parce qu'il ne préjuge pas la signification morphologique de ces organes. IV. Remarques physiologiques. Exposons rapidement quelques considérations physiologiques qui dé- coulent de nos observations anatomiques, et aussi de quelques expériences entreprises sur les isopodes. l8o MANILLE IDE 1° L'œsophage. La structure de la paroi de ce tube nous force à admettre qu'il est susceptible de mouvements péristaltiques ; on y trouve, en effet, des fibres longitudinales et des fibres circulaires. Nous savons, en outre, qu'il existe dans les oniscides des fibres in- sérées sur la cuticule dermique rigide, et rattachées d'autre part aux parois latérales de l'œsophage. On se demande quelle peut être l'action de ces fibres? Si chacune tire de son côté, il est clair que le diamètre du canal sera agrandi transversalement, tandis que son diamètre vertical sera diminué, et sa lumière pourra se trouver réduite à une simple fente. Il semble donc qu'elles sont plutôt constrictives et adjuvantes des fibres circulaires. Ce ne sont donc pas des fibres dilatatrices, mais bien des éléments qui aident, en la modifiant, l'action des fibres circulaires. Il ne faut pas oublier que leur direction étant oblique en avant et en dehors, elles tirent sur le tube digestif de manière à rapprocher la poche malaxatrice, ou du moins sa partie antérieure, de l'orifice buccal. 2° La poche malaxatrice. Le rôle de cet organe chez les arthropodes en général est une grosse question, qui a fait l'objet des travaux de divers savants dej^uis quelques années. Rappelons que, suivant Plateau, on s'est exagéré, faute d'avoir observé rigoureusement, le rôle d'organe masticateur qui peut lui revenir dans certains crustacés. Ses expériences sur le crabe lui ont démontré d'une façon péremp- toire que le rôle triturant ou masticateur des pièces stomacales est très faible. La même conclusion ressort de ses recherches sur le gésier des insectes et des Cryptops. Les observations de Balbiani sur le Cryptops confirment les vues de Plateau. Weismann, dans un mémoire bien connu sur la larve du Corethra, fournit un nouvel appui à cette manière de voir. Miall et d'autres se rallient à l'opinion de Plateau. On le voit, la réaction a été complète. Après avoir admis, sur de simples apparences, il est vrai, la fonction masticatrice de cet organe, les zoologistes sont portés à lui attribuer avec Plateau une fonction différente : celle d'un simple grillage ou d'un filtre retenant les aliments dans LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES l8l la portion antérieure du tube digestif, au moins pendant quelque temps, tout en permettant aux liquides digestifs élaborés dans l'intestin moyen et ses annexes de remonter dans ce lieu de dépôt et d'y exercer leur action sur les substances avalées. On est donc aujourd'hui enclin à admettre avec le savant de Gand que le prétendu estomac broyeur n'est point un organe broyeur, auxiliaire des pièces de la bouche. Disons cependant que jusqu'ici ni Plateau, ni aucun autre auteur, à notre connaissance, n'a soutenu que Taction triturante des pièces de cette partie de l'intestin est absolument nulle partout, et qu'il n'existe aucune espèce où elle serait au contraire assez importante. Tel est, pensons-nous, l'état actuel de la question. Dans ces conditions, il nous parait utile de consigner ici certaines remar- ques ressortant de nos observations et de nos expériences, et qui sont de nature, peut-être, à jeter quelque lumière sur le rôle de la poche malaxa- trice des édriophthalmes. Selon nous, cet organe a sur les aliments une action mécanique assez importante, quoique de nature et d'intensité variables suivant les espèces. Elle varie suivant la structure de l'organe, suivant la forme, la puis- sance et la disposition des diverses pièces qui arment ses parois, Rappelons que ces pièces peuvent se ranger en deux groupes : les pla- ques cuticulaires épaissies, Pb, et les appendices aigus, poils, piquants ou crocs. Rappelons aussi que les diverses espèces sont plus ou moins bien armées de l'une ou de l'autre de ces pièces. Quel est le rôle des unes et des autres? 1° Rôle des plaques. A notre avis, ce rôle n'est pas douteux. Les plaques compriment entre elles les substances avalées, en les brisant plus ou moins. Voici nos preuves : D'abord, nous trouvons dans les oniscides des appareils tout particu- liers : des plaques rayées de côtes saillantes, mues par des muscles et se iaisant face exactement. Telles sont : la plaque inférieure de la pièce latérale antérieure, 5, et la plaque supérieure ou antérieure de la pièce latérale moyenne, ^j. Ces deux plaques constituent de chaque côté de la poche un couple capa- ble de mordre les aliments au passage, et de les comprimer plus ou moins entre elles, fig. 11. En utilisant la notation donnée dans nos planches à Pb, ces pièces, on désignera ce couple latéral antérieur par la formule _, Pb^a 182 MANILLE IDE Il y a un de ces couples à droite et un semblable à gauche, à l'entrée de la poche. Un second couple du même genre s'observe sur le plancher, de chaque côté de la pièce impaire S^. Il est formé de la plaque Pt>„p qui arme la face interne des pièces 5^ agissant contre celle de la face externe de la pièce médiane S,, qui est située juste en face et qui présente une cavité intracuticulaire. Cette plaque est rugueuse; tandis que la première est sillonnée de raies saillantes et à peu près verticales. La notation de ce couple est Pb„p et Pb^. Ces quatre couples de plaques se faisant face sont mus par des muscles. Nous n'avons malheureusement pas acquis la notion précise des insertions et de la direction de chacun d'eux. De plus, ainsi que nous l'avons dit, si nous possédions ces notions précises, il ne nous serait guère possible de calculer le mouvement qu'imprimerait à chaque pièce la résultante de l'ac- tion combinée de ces diverses et multiples fibres; nous devrions encore savoir quels sont les groupes qui se contractent simultanément et ceux qui agissent successivement. Cependant, le fait de la présence de muscles propres à ces pièces nous permet à lui seul de conclure qu'elles sont animées de mouvements propres. En outre, il en est dont les muscles ont une position indiquant que les plaques agissent l'une sur l'autre par frottement, c'est-à-dire en se déplaçant l'une par rapport à l'autre parallèlement à leur surface; c'est ce dont le lecteur pourra s'assurer en examinant ceux de ces muscles qui sont figurés dans nos planches. Considérons-en quelques exemples. La direction du mouvem.ent delà pièce 5, paraît indiquée par la direction des piquants qu'elle porte et qui semblent destinés à saisir les aliments qui s'engageraient entre ces pièces et à les pousser vers l'intérieur de la poche. La plaque qui arme la face inférieure de cette pièce, fig. 8, subirait donc un mouvement de rotation. Mais si l'on passe à la fig. il, on remarquera que cette même pièce est encore influencée par d'autres muscles, direc- tement ou indirectement. Ainsi, les faisceaux, visibles sur les côtés et rattachant la pièce à l'arc chitineux transversal, paraissent devoir abaisser la pièce et sa plaque Pb vers la plaque Pb^a. Mais, comme ces fibres sont obliques de bas en haut et d'arrière en avant, elles doivent aussi tirer les pièces latérales antérieures 5, vers l'arrière. On voit que le mouvement de la plaque Pb^ se complique déjà, et bien d'autres fibres l'influencent encore. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES I83 D'autre part, la plaque inférieure de ce couple se meut, grâce a des muscles propres, visibles en dessous d'elle dans la fig. 11, qui doivent la tirer dans un sens oblique et plus ou moins longitudinal. Certains muscles supérieurs de la pièce 5., tout en dilatant la poche malaxatrice pourraient bien servira relever 5,, quand l'action des muscles abaisseurs et frotteurs vient à cesser. Et les muscles qui, dans la fig. 11, relient S^ à la barre chitineuse transversale pourraient bien abaisser en même temps ces pièces latérales moyennes. On entrevoit donc la probabilité de mouvements d'éloignement et de rapprochement alternatifs, en même temps que des mouvements de trans- lation pour ces pièces, qui agiraient alors comme une meule sur les particules alimentaires introduites entre elles. On peut faire des remarques semblables au sujet du couple „, . En effet, 5, et par conséquent la plaque Pb^ aussi bien que la plaque Pb ^ est mue, entre autres, par des muscles que nous venons d'indiquer dans la fig. 11. D'un autre côté, la pièce médiane 5, est, sans nul doute, animée tout entière d'un mouvement de translation longitudinale par le curieux appareil musculaire crucial qui s'insère à son sommet, fig. 3. D'autres muscles agissent encore sur elle, et il est certain que ses plaques latérales Pb^ doivent glisser alternativement d'avant en arrière vis-à-vis des plaques Pb^p qui leur font face. Notons aussi que certains muscles longitudinaux, propres à la pièce S^ et visibles dans les fig. 12 et 13, doivent encore avoir pour effet de rappro- cher Sj de Sj, et, par suite, d'appliquer la plaque interne Pb ,p contre Pb_^, Des muscles circulaires entourant la poche &t partiellement représentés dans la fig. 13 concourent au même résultat. Les particules introduites dans le sillon B de la fig. 2 se trouveraient donc encore pressées entre Pb.^p et Pb^ et soumises à une action semblable à celle d'un couple de meules. D'ailleurs nous avons constaté la pénétration des particules entre les plaques. Nous nous demandons en vain quelle pourrait être la signification d'or- ganes disposés et construits comme les pièces de la poche malaxatrice, si ce n'est celle que nous leur attribuons, c'est-à-dire le rôle de pièces agissant l84 MANILLE IDE mécaniquement sur les aliments, le rôle de pièces broyeuses, en un mot. C'est pourcjuDi nous donnons à.leurs plaques cuticulaires le nom de plaques broyeuses et la notation Pb dans nos planches. Il nous reste à rechercher qu'elle est l'intensité de cette action triturante. Est-elle puissante ou faible? Nous avons fait quelques recherches en vue de nous instruire à ce sujet, et nous en sommes arrivé à penser qu'elle est assez faible. Tout d'abord nous avons examiné le contenu de l'intestin moyen des oniscides. On y trouve des débris de toute espèce : grains de sable, algues, tissus végétaux, fragments d'insectes, matières indéterminées. Il est impossible par l'examen de ce chaos de mesurer l'action de la poche malaxatrice. Un jour cependant nous rencontrâmes un Ouisciis asellus dont l'intestin était rempli de particules d'un parenchyme végétal très uniforme, selon toute apparence d'un parenchyme foliaire. Leur couleur brune nous fit penser qu'elles provenaient de quelques feuilles mortes qui traînaient dans le bocal où nos animaux étaient tenus captifs. Toutes ces particules avaient la même forme un peu allongée, et paraissaient être autant de bouchées enlevées par les pièces buccales. Nous tirâmes de ces observations la con- clusion que les pièces de la poche malaxatrice sont incapables d'émietter un parenchyme de feuille sèche, d'en briser les cellules, ou d'en dissocier le tissu. Dans une autre expérience, nous avons recherché, comme Plateau l'a fait pour les blattes, si la poche malaxatrice a une action quelconque sur les grains de fécule. Nous avons choisi la fécule de pomme de terre comme étant celle qui possède les plus gros grains, au moins parmi les fécules ordinaires, et nous eh avons nourri exclusivement des Onisciis asellus maintenus dans une atmosphère oxygénée et humide, comme nous l'avons indiqué au début de ce mémoire. Les animaux avaient été soumis préala- blement à une diète absolue de cinq jours. Absolue, c'est peut-être trop dire; car l'un d'eux, sacrifié le cinquième jour, avait son intestin aussi garni que d'ordinaire, mais son contenu était blanc grisâtre et il se montra au microscope composé exclusivement de grains de silice. C'étaient des grains de sable ramassés un à un contre la paroi du vase de terre qui avait contenu précédemment du sable pur. Ce fait démontre la gloutonnerie avec laquelle ces animaux avalent tout ce qui est avalable quand ils sont poussés par la LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES I85 faim. Les autres individus reçurent de la fécule de pomme de terre. Dès le lendemain, les excréments, tout à fait blancs, étaient entièrement formés de fécule. Nous examinâmes alors comparativement la fécule non mangée et les excréments en les traitant de la même façon par l'iode et une solution glycérinée. Les préparations faites avec les excréments contenaient de la fécule presque pure, mais un grand nombre de grains étaient brisés, un grand nombre d'éclats s'y voyaient à côté de grains inaltérés. Les prépara- tions de fécule non mangée ne contenaient au contraire que des grains intacts. La différence était remarquable. Les pièces de la poche malaxatrice sont donc capables de briser plus ou moins des corps durs, comme des grains de fécule de pomme de terre, etc. En effet, nous ne pensons pas que les grains brisés l'aient été par les pièces buccales, la forme aiguë des pièces devant leur donner peu de prise sur un grain ovoïde de fécule. Du reste, elles avaient laissé passer dans la première expérience des bouchées de parenchyme bien plus volumineuses cjue les grains de fécule. C'est sans doute à leur élasticité que les débris de feuille sèche devaient d'avoir apparemment résisté à l'action broyante de la poche. 2" Rôle des appendices aigus, poils, piquants ou crocs. Ce rôle est évidemment différent de celui des plaques. On peut admettre qu'il est multiple et variable suivant la forme et la disposition des pièces. Les crochets, placés généralement en avant, servent sans doute à saisir les aliments à l'entrée de l'œsophage et à les pousser vers l'arrière, fig. 8. Les poils raides et piquants paraissent dans beaucoup de cas jouer le même rôle, mais on peut leur attribuer aussi la fonction de percer, de remuer, de triturer la masse alimentaire pour y faire pénétrer les liquides" digestifs. Ces notions sur la fonction des plaques et des poils étant posées, on peut, en se basant sur le tableau que nous avons dressé des pièces de la cavité malaxatrice, grouper comme il suit les espèces décrites. Les Oniscits sont principalement broyeurs ; il en est de même des Porcellio et des Armadillo. Ensuite vient V Aselhis qui est un peu plus riche en poils et, peut-être, un peu plus faible en plaques. U Idoiea manque déjà du couple antérieur, Pb^ et Pb^a, et est plus riche en poils. S4 j86 manille IDE Suivent les Gamiiianis, plus riches en poils et ne possédant qu'un couple postérieur, Pt.2P et Pl^p de plaques assez faibles. Enfin VAnilocra et la Vibila sont munis de deux couples paraissant plus faibles encore. Quant aux bopyrides, on sait qu'ils n'ont ni poils, ni plaques, ni même de cuticule. Il résulte de cet aperçu que le deuxième segment de l'intestin antérieur ne fonctionne pas même d'une façon identique chez tous les édriophthalmes. Il n'est uniquement broyeur que chez les Onisciis, les Porccllio, les Armadillo. Chez VAselliis, VIdotea et le Ganiinarus les plaques s'affaiblissent et il surgit des pointes capables seulement de brasser la masse alimentaire, de la remuer, d'y faire pénétrer les liquides digestifs, en un mot de la malaxer avec les sucs venus des glandes. Car le liquide des glandes digestives pénètre dans la poche malaxatrice. Nous avons vu que partout, même chez les Gammarits, la fente médiane limitée par les bords de la lamelle annulaire constitue une issue facile vers l'avant pour les liquides venus de ces glandes. Dans les Onisciis cette pénétration est plus évidente encore, car le fond de la poche malaxatrice y est nettement placé plus bas que l'intestin moyen (i). Remarquons que se sont les gouttières comprises dans les couples postérieurs Pb^p et Pb^ qui se montrent les plus constantes, elles existent encore chez les Gammarus. Or, c'est précisément dans ces gouttières que s'écoule directement le liquide digestif déversé par les glandes. Les aliments subissent donc dans la poche des actions mécaniques diverses qui toutes paraissent avoir pour but de faciliter le contact entre les aliments et les liquides digestifs soit en les broyant plus ou moins, soit en les brassant et les remuant dans des espaces où ces liquides peuvent et doivent arriver. En résumé, plaques et pointes servent à malaxer les aliments plus ou moins énergiquement avec les liquides digestifs, et voilà pourquoi nous avons donné à l'organe qui les contient le nom de poche malaxatrice. (i) Rappelons ici que l'arrière- poche est munie de muscles qui. en se contractant, pourraient bien exprimer vers la poche m ilaxatrice la petite quantité de liquide qui peut s'y accumuler. LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES I87 Que les plaques dites broyeuses, les pointes ou les crochets des édriophthalmes, les dents ou pièces quelconques des décapodes et d'autres crustacés ou insectes aient ou non pour effet de diviser plus ou moins les aliments, elles ont, selon nous, celui d'y faire pénétrer les sucs digestifs en les malaxant avec eux. Cette fonction est commune à tous ces appareils solides internes, et ceux qui paraissent jouer exclusivement le rôle d'un filtre, comme il paraît que c'est le cas chez la larve de Corethra et d'autres arthro- podes, semblent devoir constituer des exceptions. Le terme, poche via/axatrice, parait donc convenir à la généralité des cas, il n'implique qu'une fonction très générale qui doit s'exercer partout où les pièces sont munies de muscles moteurs (i). Il n'exclut nullement, d'ailleurs, les fonctions spéciales du broiement, de la mastication ou d'autres modes de division des aliments qui accompagneraient la malaxation, et pourraient faire attribuer à juste titre à la poche de certains"étres en par- ticulier les dénominations de gésier, d'estomac broyeur ou masticateur, etc. Terminons par quelques observations. 1" On pourrait nous objecter que les plaques cuticulaires ne servent guère, puisque chez l'anilocre, où elles sont bien caractérisées, elles ne peuvent avoir aucune action; en effet, cet animal parasdte se nourrit uniquement des liquides qu'il extrait du corps de son hôte. Nous ne voudrions pas prétendre que ces plaques sont capables de broyer les globules du sang de poisson. Mais il peut se former des caillots dans leur poche malaxatrice et, dès lors, leurs plaques munies de côtes saillantes ont leur raison d'être; elles brisent ces caillots, pour les malaxer avec les sucs digestifs. 2° Nous conservons à la grande dilatation du tube digestif des bopy- rides le nom de poche malaxatrice parce que, ainsi que nous l'avons montré;' '" ce terme exprime les homologies réelles de cet organe. Néanmoins, nous admettons que cette" poche dans ces curieux parasites change de fonction. Sans aucun doute, elle est malaxatrice dans une certaine mesure, puisqu'elle est munie de muscles et de saillies internes, surtout chez les femelles, mais elle sert à d'autres usages. (1) Nous n'oserions pas soutenir que les pièces chitineuses du Cryptops, étudiées par Plateau et Baleiani, aient une action malaxatrice, car ces auteurs ne leur décrivent point de muscles moteurs propres. En tout cas, nous préférons l'adoption pour ces pièces dû terme : appareil valvulaire, proposé par Plateau à la conservation du terme impropre de gésier que Balbuni continue à leur appliquer, tout en admettant qu'elles agissent simplement comme un grillage. l88 MANILLE IDE 1° Il se peut que, même chez les oniscides, l'action de certains muscles sur la paroi de la poche ait pour effet de la dilater, et d'exercer ainsi sur l'œsophage une certaine succion. Mais cette fonction est certainement exagérée à un haut degré chez les bopyrides, où de très nombreux muscles rayonnent de tous les points de la paroi de la poche vers les parties solides voisines. 2^ De plus, la disparition de la cuticule dans la poche malaxatrice de ces parasites indic]ue que \ absorption y est active, et cela d'autant plus que l'intestin moyen est trop réduit pour pouvoir remplir cette fonction avec assez d'activité. La poche malaxatrice des bopyrides mériterait donc la dénomination d'estomac suceur, dans le vrai sens du mot. ;î" L'usage de la lame recouvrante, /r, est assez énigmatique, on ne peut faire à son sujet que des hypothèses. Chez les oniscides et leurs alliés, on peut se demander si elle n'a pas pour fonction de protéger le délicat épithélium médio-intestinal, qui forme la voûte de la poche malaxatrice, contre Faction des pièces de l'appareil du plancher 5^ et .S,. Elle pourrait, en particulier, en agissant de concert avec la lamelle annulaire, empêcher chez ces êtres les pièces 5, de mordre les bords de la bande dorsale saillante. Cette hypothèse assez séduisante serait admise sans difficulté si, au lieu de comparer les espèces, on n'étudiait que YOiiiscus ou un animal voisin. Chez VAsellus, on pourrait même ajouter qu'elle protège la voûte contre l'action des piquants portés par 5,, car elle est pourvue d'une cuticule solide, quoique mince, tandis que la voûte n'en possède pas. Mais quel est son rôle dans VIdotea, où elle coexiste avec la lamelle annulaire et où l'épithélium de la voûte ne parait plus aussi délicat et ne présente rien qui rappelle la lame dorsale? Il y a peut-être là matière à recherches. Le rôle de la lamelle annulaire aussi devrait être étudié comparative- ment chez les isopodes et les amphipodes. 3° Intestin moyen. Il est évident que cette partie, sauf chez les bopyrides, est chargée spécialement de l'absorption. On doit admettre que l'action des liquides digestifs ne fait que com- mencer dans la poche malaxatrice; en effet, les aliments n'y séjournent que LE TUBE DIGESTIF DES ÉDRIOPHTHALMES 1 89 peu de temps, car chez les oniscides elle est plus souvent vide que remplie. C'est donc surtout dans l'intestin moyen que s'opère la dissolution des substances absorbables. Cependant la poche est très souvent remplie chez le Gammanis , mais la présence d'une forte cuticule nous empêche d'y admettre une absorption très active. Chez les oniscides, c'est surtout la portion antérieure de l'intestin moyen qui fonctionne activement, comme le prouve son calibre et la puissance de sa tunique musculaire. Nous n'avons recueilli aucune donnée positive au sujet de la fonction de la bande dorsale. On peut dire sans hérésie que cette production aug- mente la surface d'absorption de l'intestin; nous avons constaté, en effet, que les aliments — au moins la partie la mieux triturée — pénètrent dans les deux rainures qui longent la bande. Si l'on ajoute à cela le voisinage immédiat de cavités où le sang circule, condition éminemment favorable à l'absorption, cette hypothèse devient très plausible. Ce-qui démontre, du reste, que les aliments subissent dans cette partie une absorption très active, c'est qu'on les y trouve manifestement moins aqueux que dans la seconde partie de l'intestin. Max Weber, en signalant une production semblable dans le Glyptono- tiis sabiui, lui attribue aussi un rôle dans l'absorption. Le sphincter a sans doute pour rôle de rendre intermittente l'évacua- tion des matières résiduelles. La portion postérieure est une poche stercorale, bien que son épithé- lium, très semblable à celui des portions antérieures, porte à croire que l'absorption s'y continue encore. Les excréments évacués ont à peu près le volume du contenu de cette poche. C'est bien à tort que Lereboullet soutient que les parois de cette portion sont pourvues de glandes. Ces prétendues glandes, dont il y compte une trentaine, ne sont que les volumineux noyaux des cellules épithéliales. Ses dessins le prouvent sans conteste. 4° Intestin postérieur. Il y a peu de choses à dire sur son fonctionnement. L'action des fibres musculaires se comprend aisément. Les faisceaux représentés dans les figures sous les lettres me paraissent devoir agir comme un sphincter. igo MANILLE IDE En effet, les faisceaux ont leur point d'attache en haut et en bas, près de la ligne médiane ; leur contraction doit donc faire disparaître la courbure de l'arc et étrangler le rectum. Par contre, les nombreuses fibres extrinsèques ne sont que dilatatrices; le rôle des deux couches est donc alternatif et très simple. Le rectum est muni d'un épithélium spécial, identique à celui de l'œsophage; il ne parait donc pas avoir plus que ce dernier le rôle d'organe absorbant. BIBLIOGRAPHIE (Ordre chronologique.) K. Ramdohr : Ueber die Verdauungswerkzeuge der Insekten ; Halle, 1811. G. Treviranus : Vermischte Schriften ; Gcettingen, 1816. H. Rathke : a) Beitrage zur Geschichte der Thiervvelt, Abth. II; Neueste Schriften d. Naturf. Ces. Danzig. Bd. 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B.; Ibid., 1888, n" 4. b) Le développement de la Sunamphitoë valida Cz. et de l'Amphitoë picta Rthk.; Ibid., iSgo, n" i. : Traité d'anatomie comparée pratique, II, Paris, 1889. : The sensés of animais, London, 1889. : Ueber eine eigenartige polycentrische Anordnung des Chromatins; Zool. Anz., XIII, 1890. : Études anatom. et histol. sur le tube digestif des Cryptops; Arch. de Zool. expérim, VIII, n" i, 1890. : Ueber die Organisation der Cypriden; Anz. Kais. Akad. Wiss. Wien, VIII, 1S90. : Glandes cutanées à canaux intracellulaires chez les crustacés édriophthalmes ; La Cellule, VII, 2, 1891. : Die amitotische Kerntheilung bei den Arthropoden; Bio- logisches Centr., XI, n" 24, 1891. EXPLICATION DES PLANCHES LETTRES Signification commune à toutes les figures. cd cuticule dermique. Ir lame recouvrante. m muscles. la lamelle annulaire. me muscles circulaires. V face ventrale ml muscles longitudinaux. d face dorsale. md muscles dilatateurs si glande. P pli. cgi canal transverse des glandes di- ps pli supérieur. gestives P' pli inférieur A fente de la paroi supérieure de cgi. Pl pli latéral. f. fente de la lamelle annulaire la. P'- protulérance marginale. ap arrière-poche- Si ' pièce latérale antérieure. bd bande dorsale. S,s crête supérieure de .S,. rd rainure dorsale. Si> partie inférieure de Si c élargissement de la bande dorsale S, pièce latérale postérieure et point où les rainures cessent S, pièce médiane d'enfermer les ailes de la queue rs^ récessus dans le prolongement an- d'aronde. térieur de S^ Im Intestin moyen. Ph, plaque broyeuse de 5,. S sphincter. Pb,a plaque broyeuse antérieure de S,. ds diverticule supérieur du Gammarus. Pà,p plaque broyeuse postérieure de S,. tp tubes parallèles du Gammarus (tubes PK plaque broyeuse de S^. de Malpigin). c cavité intracuticulaire. oa orifice anal. PLANCHES I, II, III et IV (première partie). ~" O n i s c n s A s e 1 1 it s. FiG. 1 à 48. Les 3 premières figures représentent d'une façon plus ou moins schématique les préparations obtenues par dissection. Toutes les autres figures sont dessinées à la chambre claire avec les objectifs de Zeiss. FIG. 1. Intestin complet, avec les 4 glandes digestives, vu par sa face dor- sale. — Gr. A, 2, réduit de moitié. De A en D setend l'intestin moj'en, les reliefs dorsaux s'y reconnaissent déjà en bd, rd. L'intestin antérieur est représenté ouvert de manière à montrer ses principales saillies. 25. 196 MANILLE IDE FIG. 2. Poche malaxatrice ouverte par sa face dorsale ; on y voit les prin- cipaux reliefs. — Gr. D, 2, réduit de moitié. En A existe le profond sillon vertical qui sépare S^ de S^, et en D un se- cond sillon oblique entre S, et S^. Voir fig. 12 et 13. Les lignes /, donnent en projection l'embouchure des glandes digestives, c'est- à-dire la fente en T représentée dans la fig. 18. FIG. 3. Examen de la poche malaxatrice par sa face ventrale intacte. En avant, on voit surtout les muscles en croix de S<-André qui s'attachent à l'extrémité antérieiu'e des plaques cuticulaires de S.. En arrière, on reconnaît l'embouchure des glandes digestives avec ses annexes ap. — Gr. D, 2, réduit de moitié. FIG. 4 Œsophage, poche malaxatrice et entrée de l'intestin moyen : coupe axiale et verticale. A , 4. Les pièces médianes S, et Ir s'y voient dans leur plus grand diamètre. Les saillies latérales n'y sont point représentées. Les lignes numérotées indiquent les niveaux des coupes transversales correspondant aux figures qui portent le même chiftre. La ligne AB montre le niveau oblique suivant lequel l'intestin moyen s'insère sur la poche malaxatrice. FIG. 5. Coupe parallèle à la précédente, donc en dehors du plan médian. — Gr. A, ^. Un des plis latéraux de l'œsophage est intéressé dans la coupe. Dans la poche malaxatrice, c'est la saillie S^ qui remplace la saillie 5, de la figure précédente. Au niveau de la ligne, 18 la cloison la sépare le canal glandulaire de la poche malaxatrice. Ce lambeau la était absent dans la figure précédente, parce que la coupe étant médiane passait par la fente f^ (fig. 18). En haut, un lambeau de la queue d'aronde, bd. FIG. 6. Coupe parallèle aux précédentes, mais plus latérale encore. L'œsophage n'y est plus compris. Dans la poche malaxatrice on voit les parties latérales de 5j et la cuticule de S,s et SJ. Les cellules sous-cuticulaires, trop rétractées par le réactif, n'ont pas encore été touchées (comp. avec fig. 11). En arrière, nous avons réprésenté la musculature assez forte de l'arrière-poche m. FIG. 7. Coupe transversale de l'œsophage. — Gr. D, 2. On y voit les cinq plis tels qu'ils se retrouvent sur presque toute la longueur de l'œsophage. Remarquons aussi que les muscles longitudinaux se trouvent ici sous les circulaires '; enfin, il existe des muscles extrinsèques à comparer avec ceux de la figure suivante. FIG. 8. Coupe horizontale parallèle à l'axe de l'œsophage. — Gr. A, 4. On y reconnaît bien les rapports des reliefs dentés, 5,, avec l'embouchure de l'œsophage. FIG. 9. Vue de face de la plaque broyeuse, Pb,. — Gr. D, 2. La plaque, Pb^a, qui lui fait opposition, lui est en tout semblable. Chacune de ces stries est de fait une côte saillante et même légèrement tranchante FIG. 10. Vue de face de la cuticule épineuse qui couvre la partie interne de S^. — Gr. D, 2. EXPLICATION DES PLANCHES 197 FIG. 11. Coupe transversale un peu oblique, de la poche malaxatrice, .ni- veau II de la FIG. 4. — Gr. D, i. Région où la pièce S, est le plus saillante. A gauche, 5,5 apparait ; il est peu important dans cette espèce, mais il devient très puissant dans d'autres. Pb^a se trouve sur une saillie, Sj, à peine soulevée. 5, est la coupe d'un cul-de-sac ouvert en arrière et produit par la pièce impaire 5,, quand les muscles en croix de St. André l'attirent vivement en avant. La figure montre encore la puissance et la multiplicité des muscles moteurs des plaques broyeuses. Pb. FIG. 12. Coupe postérieure à la précédente. La paire broyeuse -^7 — y est dans toute sa puissance. 5,5 reste faible. 5, a gagné beaucoup en dimension. — Gr. D, 2. FIG. 13. Coupe plus en arrière encore. — Gr. Z), 2. Ici les paires broyeuses -_£^ — dominent installées sur les prétendus k reliefs pjdo- riques u des auteurs. En haut, au-dessus de //•, apparaît l'épithélium de l'intestin moyen (suivez la ligne i3 dans la fig. 4). Latéralement les lamelles la sont insé- rées entre les deux épithéliums si distincts des deux portions intestinales antérieures et moyennes. FIG. 14. Coupe transversale du plancher de la poche malaxatrice en arrière de la dernière paire broyeuse. Le canal glandulaire avec la transition des cellules sécrétantes, l'arrière-poche ap, la fente de communication /j se remarquent sous les extrémités postérieures de 5, et 5j. — Gr. D, 3. FIG. 15. Coupe transversale de la partie la plus antérieure de l'intestin mo^'en. Z),2. Les extrémités postérieures libres de Ir, S^, S. et la y sont encore représentées. FIG. 16. La plaque Pb^ sous un plus fort grossissement : Z), 4 ; la figure n'en donne qu'une bonne moitié. On reconnaît la face libre plane et finement striée et la face bombée interne avec de fortes côtes plus espacées. FIG. 17. Aspect de la cuticule qui recouvre 5, en dehors des plaques broyeuses. — Gr. D, 4. FIG. 18. Vue de la fente qui fait communiquer les canaux glandulaires avec la lumière intestinale. C'est la coupe indiquée par la ligne 18 dans les fig. 4 et 5. — Gr. D, 2. FIG. 19. Partie de l'intestin moyen située entre les deux lignes 19 de la FIG. 1. — Gr. A, 2. L'intestin a été ouvert par la ligne latérale et étalé de manière à laisser voir à la fois les détails de sa face dorsale en d, et ceux de sa face ventrale en u. Les lignes numérotées donnent le niveau des figures portant le même chiffre. L'espace ovalaire qui, du côté gauche, présente des cellules plus sombres, correspond aux cel- lules centrales élevées du type dessiné dans la fig. 31. FIG. 20. Disposition de la musculature de la même partie de l'intestin moyen. — Gr. A, 2. Ici les muscles circulaires se trouvent sous les longitudinaux. Les places indi- quées par les chiffres désignent les niveaux où se rencontrent surtout les détails contenus dans les figures portant le même numéro. 198 MANILLE IDE N. B. Il a été impossible de rendre " ici les détails cytologiques de la muscu- lature. Les FiG. 36 à 48 suppléent à cette lacune. En superposant les fig. 19 et 20, on reconnaîtra immédiatement : i" que les deux zones privées de muscles longitudinaux correspondent aux lignes médianes dorsales et ventrales; 2" que les fibres ne suivent pas les courbes élégantes de l'épithélium. FIG. 21 à 26. Coupes transversales de l'intestin moyen. Elles montrent les transformations successives que subissent les reliefs de l'épithélium. Les coupes se suivent d'avant en arrière suivant les indications données dans la fig. 19. — Gr. D, i. FIG. 27. Coupe transversale au niveau du sphincter. — Gr. D, i. On reconnaît les trois couches de muscles : d'abord, la forte couche périphé- rique circulaire ; ensuite, une série de muscles longitudinaux sous cette première ; enfin, contre l'épithélium une seconde couche circulaire très faible et incomplète. FIG. 28. Coupe verticale du rectum, au niveau d'un des puissants muscles constricteurs. Oa, orifice anal. — Gr. D, i. FIG. 29. Coupe horizontale du rectum. — Gr. D, i. On y reconnaît les 2 espèces de muscles : les constricteurs, dessinés dans la FIG. 28, et les dilatateurs. FIG. 30. Cellule épithéliale ordinaire de l'intestin moyen. — Gr. D, 4. FIG. 31. Cellules élevées faisant partie de l'épaississement ventral de l'intestin moyen, qui fait face à la spatule de la bande dorsale. Voir fig. 9. — Gr. D, 4. FIG. 32 et 33. Cellules épithéliales. De fortes fibres se sont formées dans le cytoplasme ; un réseau très délicat et régulier se maintient entre ces fibres. — Gr. D, 4. FIG. 34 et 35. Membranes arrachées à des cellules épithéliales. Les points d'attache des travées fibreuses du protoplasme y sont restés adhérents. FIG. 36 à 48. Ces figures sont consacrées à l'étude cytologique des muscles de l'intestin mo}?en. Les fibres circulaires sont toujours placées horizontalement, ex- cepté dans les fig. 37, 40 et 41, où elles sont verticales. La multiplicité et la variété des anastomoses purement musculaires, qu'on trouve dans Ifl portion antérieure de l'intestin mo3'en, se constatent dans les fig. 36 et 37. Les FIG. 38, 39 et 40 montrent comment les fibres se ramifient et se rencon- trent sur la ligne médiane ventrale. Le plus souvent, ces bras anastomotiques de- viennent tendineux. — Gr. D, 4. La FIG. 41 (verticale) présente d'abord une large anastomose protoplasmatîque entre 2 fibres ; mais elle montre surtout quatre anastomoses tendineuses entre fibres perpendiculaires. Un noyau existe encore au point d'attache d'une de ces anasto- moses. — Gr. D, 4. La FIG. 42 montre comment les fibres longitudinales se tiennent entre elles par des extrémités le plus souvent tendineuses. — Gr. D, 4. La FIG. 43 présente en bas une anastomose protoplasmatîque ramifiée, une autre non ramifiée en haut, enfin deux unions tendineuses. La présence de noyaux à tous ces niveaux est remarquable. — Gr. D, 4. EXPLICATION DES PLANCHES 199 La FiG. 44 montre un bras grêle complètement transformé en tissu musculaire; tandis que, dans la fig. 45, la partie médiane seule est différentiée. Il n'y a pas de noyaux aux points d'union. La FIG 46 est plus curieuse encore; le tissu différentié y apparaît sous forme de rubans multiples qui sont plongés en partie dans la masse protoplasmatique in- différente. La FIG. 47 montre sous un fort grossissement un bras anastomotique divisé lon- gitudinalement en une moitié musculaire et une moitié protoplasmatique. — Gr. 1/12 — 4. La FIG. 48 est renversée; elle représente une expansion des muscles circulaires qui, au niveau de la bande dorsale, descend verticalement dans la gouttière formée par cette bande. Comparer fig. 22 et 23. — Gr. 1/12-4. PLANCHE V. A s e 1 1 H s a qii at i c II s . FIG. 49 à 64. Les FIG. 49 à 56 forment une série de coupes transversales de plus en plus postérieures. FIG. 49. Section pratiquée à l'entrée de la poche malaxatrice montrant l'im- portance de p}\ ~ Gr. D, i. FIG. 50. Coupe au niveau de la partie la plus saillante de 5,. On y re- marque des dents plus fortes que celles de VOnisciis; S^s, à gauche, est aussi plus développé. — Gr. D, i. FIG. 51. Niveau de la paire broyeuse p,^ bien développée. S,5 y est encore représenté. — Gr. D, i. FIG. 52. Coupe à peu près homologue à celle de YOniscus, fig. 14, Planche II. 5, y porte de longs poils. — Gr. D, i. FIG. 53. Intestin moyen, partie antérieure coupée transversalement. — Gr. D, 2. La face dorsale est tournée à droite. Les grandes cellules, d, du côté dorsal rappellent la bande dorsale de VOnisciis. v correspond à. la bande ventrale. De grandes vacuoles remplies d'une substance homogène Se voient dans beaucoup de cellules. FIG. 54. Coupe prise vers la partie moyenne de l'intestin moyen. Même orientation et même grossissement que pour la figure précédente. Les cellules de- viennent plus petites ; les bandes v et d sont encore distinctes. Comparer 53 et 54 avec 23 et 25. . FIG. 55 et 56. Partie antérieure du rectum. Les muscles extrinsèques, d'abord nombreux, se localisent en arrière sur les deux faces latérales. Ces parties postérieures de l'intestin sont de toutes parts en contact avec le tissu de reriiplissage. — Gr. A , 4. FIG. 5^7 à 60. Schémas donnant les directions des muscles de l'intestin mo3'en : on suppose le lecteur contemplant, d'en haut, l'animal dans sa position naturelle. Le pointillé indique les faces opposées, inférieures. 200 MANILLE IDE FIG. 57. Couche de fibres circulaires : ces fibres ne sont fiancliement circu- laires qu'en arrière. En avant, elles deviennent obliques et leurs extrémités dorsales forment d'admirables pinceaux. FIG. 58. L'autre couche de fibres, analogue à la couche longitudinale de VOiiisciis. INIais ici les fibres sont toutes obliques, surtout en arrière, et elles se ter- minent en pinceau près des lignes médianes tant ventrale que dorsale. FIG. 59. Les deux couches de la moitié dorsale, vues à la fois. FIG. 60. Les deux coiiches de la moitié ventrale. FIG. 61. Arc chitineux qui passe en dessous de la partie antérieure de la poche malaxatrice; la figure est renversée. — Gr. A, 2. La striation musculaire plus ou moins apparente encore en certains endroits fait très bien entrevoir ici les différents stades de transition entre le muscle et l'apodème. FIG. 62. Portion d'un muscle passant au tendon. Les stries transversales dispa- raissent à droite et les longitudinales s'accentuent; en même temps la gaine non dif- férentiée s'amincit. — Gr. D, 4. FIG. 63. Un tendon avec sa gaine ou une partie d'apodème. — Gr. D, 4. FIG. 64. Terminaisons des muscles dilatateurs du rectum et leurs insertions sur la cuticule de l'épithélium. — Gr. D, 4. PLANCHE VI. G a m m a r ii s p 11 l e x . FIG. 65 à 76. FIG. 65 et 66. Coupes verticales et axiales de l'intestin antérieur et posté- rieur. Les lignes numérotées indiquent le niveau des coupes qui portent le même chiffre. — Gr. A, 2.. A remarquer dans la fig. 65 la brièveté et la direction de l'œsophage, l'ab- sence de la lamelle recouvrante, la longueur de la lamelle annulaire la. FIG. 67 et 76. Coupes transversales de l'intestin. Les lignes de pointillé, pla- cées dans la lumière du canal, indiquent les limites qui en haut ne sont jamais franchies par les aliments. — Gr. D, i. FIG. 67. Les crochets de S^ sont très puissants ; chaque S, en porte deux rangées verticales. FIG. 68. On y constate la grandeur des piquants qui couvrent le plancher de la poche. FIG. 69. Les lambeaux S^, faibles et longs, se croisent sur la ligne médiane; ce fait explique pourquoi la fig. 65 montre à ce niveau deux sections de 5,. S yS porte déjà des dents très notables ; ces dents sont fort obliques, de sorte que notre figure n'en représente qu'une projection sur le plan transversal. Elles sont très nom- breuses, rapprochées les unes des autres et empêchent complètement les aliments d'envahir l'espace situé au-dessus d'eux. FIG. 70. Les plaques broyeuses apparaissent : ds est coupé sous forme d'un canal. Remarquons la présence de poils. EXPLICATION DES PLANCHES 201 FIG. 71, Cette figure montre spécialement la présence de deux plaques broy- euses creuses sur chacune des faces latérales de S^. On y reconnaît aussi que les cellules qui leur servent de soutien sont plus hautes et plus sombres que les autres. FIG. 72. La présence de piquants sur toutes les surfaces saillantes se remarque surtout à ce niveau. FIG. 73. Dans cette figure, comme dans la précédente, on voit que l'embou- chure des glandes est très large. Toutefois la colonne alimentaire n'y pénètre jamais. FIG. 74. Partie antérieure de l'intestin : la lamelle annulaire fendue sur la ligne médiane inférieure forme un second cylindre incomplet. FIG. 75. La face dorsale de l'intestin au niveau des glandes faussement nom- mées tubes de Malpighi. FIG. 76. Embouchure de ces glandes. En comparant cette figure à la fig. 66, on voit que cette embouchure a lieu en avant du sphincter et très loin encore de l'intestin postérieur. PLANCHE IV (seconde partie). I d o t e a tricuspidata. FIG. 77 à 80. FIG. 77. Coupe verticale et a.xiale de l'intestin antérieur. La présence de la pièce médiane supérieure, psm, et la coe.xistence de la et Ir sont les particu- larités de cette figure comparée aux fig. 65 et 4. FIG. 78. Coupe transversale à rapprocher des coupes 11, 50 et 67 pour la pièce médiane supérieure. — Gr. D, i. FIG. 79. Section pratiquée au niveau des saillies inférieures. Présence de Ir. Rapprocher cette figure des figures homologues 13, 52 et 71. — Gr. D, i. FIG. 80. Coupe transversale de la partie antérieure de l'intestin moyen. Pré- sence de Ir et la. Comparer avec les fig. 15 et 74. — Gr. D, i. V i b i l a m e d i t e r r a 11 e a. FIG. 81 à 85. FIG. 81. Coupe transversale de la poche' malaxatrice. Au niveau de la paire broyeuse i^r^ • On remarque le commencement de subdivision qui envahit 5,. — Gr. Z), 2. FIG. 82. Coupe parallèle à la précédente, plus reculée. 5, est déjà isolé et montre bien ainsi son homologie avec les pièces 5, des autres fig. 14, 52 et 72. — Gr. Z), 2. FIG. 83. Coupe plus reculée encore. Ici seulement apparaît 5,s dans toute sa vigueur. S. 3' a pris sa forme non subdivisée des autres espèces. Dans la Vibila, la lamelle annulaire prend son origine fort en arrière ; aussi n'est-elle pas encore entamée dans cette section. — Gr. D, 2. 202 MANILLE IDE PLANCHE VIL A n i l o'c r a mediterranea. FiG. 84 à 92. Les FIG. 84 à 90 sont des coupes transversales de plus en plus postérieures. — Gr. A, 4. FIG. 84. Œsophage près de la poche malaxatrice. Le récessus produit par la traction des muscles de S.^ se reconnaît déjà ici. Comparer avec l'S^ de la fig. H. • — ■ Gr. A, i\... FIG. 85. Poche malaxatrice. Le récessus de S^ est très notable à ce niveau. — Gr. A, 4. FIG. 86. Les cinq saillies essentielles de la poche sont très reconnaissables. ■ — ■ Gr. A, 4. FIG. 87. Cette figure montre que la saillie 5, peut se dédoubler, comme S^ se dédouble dans VIdotea. S^s apparaît très tard et ne porte pas de piquants. FIG. 88. On ne reconnaît plus que S^s. Pour établir sa signification, nous avons poursuivi ce relief d'avant en arrière sur toutes les coupes. En bas, orifice largement ouvert du canal glandulaire. — Gr. A , 4. FIG. 89. Le canal glandulaire, unique en avant, est placé sous la ligne médiane de l'intestin moyen. — Gr. A, 4. FIG. 90. Ce canal se subdivise en arrière et possède à ce niveau une forte musculature. — Gr. A, 4. FIG. 91. Plaque broyeuse, Pb^, vue de face. — Gr. D, 4. FIG. 92. Plaque Pb^p, stries moins serrées. — Gr. D, 4. P h r o n i m a sedentaria. FIG. 93 et 94. FIG. 93. Coupe transversale de la poche malaxatrice au niveau de sa com- munication avec les glandes hépatiques. — Gr. A, i. La ligne de pointillé donne la place qu'occupe la colonne alimentaire. 5, est complètement subdivisé à ce niveau. Plus en avant, S^ présente à peu près la forme de 5, de la fig. 81, Pl. IV. FIG. 94. Aspect des cellules des glandes digestives. — Gr. D, 4. 1 0 n e thoracica mâle. FIG. 95, 96 et 97. FIG. 95. Coupe transversale de la partie la plus dilatée de la poche. Il y a quelques muscles qui paraissent dilatateurs. — Gr. D, 2. FIG. 96. Coupe transversale de l'intestin en communication large avec les glandes digestives. — Gr. D, 2. Fie. 97. Intestin moyen serré entre les glandes. — Gr. D, 4. » TABLE DES MATIÈRES, Aperçu historique Observations personnelles 99 107 CHAP. I. DESCRIPTIONS ANATOMIQUKS. 1» Oniscus Asellits A. Éludé des organes disséqués Mode opératoire DESCRIPTION . Oesophage Poche malaxatrice Intestin moyen Intestin postérieur B. Etude des coupes microtomiqiies Mode opératoire DESCRIPTION . Oesophage Poche malaxatrice lnte.-.tin moyen. Intestin postérieur 2° Autres espèces Asellus aquaiicus . Gammarus pulex Idotea iricuspidata . Vibila mediterranea Anilocra mediterranea Phronima sedentaria Bopyrides . lone thoracica Gyge branchialis CHAP. II. DESCRIPTIONS HISTOLOGIQUES Intestin antérieur . Oesophage. Poche malaxatrice . Intestin moyen Épithélium Muscles Mode opératoire Description 107 107 107 109 109 109 IIO 1 II ii3 1 i'i 116 116 116 125 i3o i3i i3i 134 140 141 146 147 ■48 i5o 131 l52 i53 i56 157 161 161 162 204 Remarques et conclusions .67 1° Comparaison des divers segments du tube digestif .67 Intestin antérieur .... 167 Oesophage 168 Poche malaxatrice 168 Intérêt spécial de l'idotea 171 Comparaison avec les décapodes 171 Remarque sur la Vibila .73 Intestin moyen '74 Le sphincter 174 Intestin postérieur . 174 2° Division du tube digestif en régions 17S 3" Terminologie 179 4" 'T^emargues physiologiques . 179 Oesophage. 180 Poche malaxatrice 180 Intestin moyen 188 Intestin postérieur . 189 Bibliographie 191 Explication des planches . 195 6. 'O ^ / //J r//r). Plaiichr l '. ;ûte' ax nat dti. Phnchell /^.'J6 ùJ ayj. m J8 -^Ui^s^m^^ "<ï2ft^Sie^ '^%# ^^*MiiÉiMi& fy.2o jy. / ^%;k .^ f^p^i. %, /^.// ■''■'M n /'Y J«..w„J„«î'vfS*ïF i'^ iOJj^ J'é t'a 'J'^ 'I ., ' -mff/^vj;'j^x^ û^^Éiii^i^M^'À'^M^^^ ■ •■U.U.^d.^j •,. UJ. piaiiciii- m ^H-Ide aàiiat Ael- r-Gielc «'^ f^7 • yr/i(}/^a_^ /"^f/ru, Planche lîT .'■Lld^s.cuiiiai del. S^-^. Ict C€^^l<'J. Planche IT JllAn.adncit d.A c^ir^v/i>y:^? f.a/U^CcJ . ï'hnchcYL. "-^^MXMSS^ ^^d.lde udiujX cUi ^_Giel9.sS' S^?i//{)rla^ o^ ûria^ c.y^/^e /'„/J/e^^C///'f^^yff^^i^f^ ■ /? BanebeYa. MIcLe, 'Ui rîtf^ (Zet- V.G:.cl^.sa LA CELLULE LA CELLULE RECUEIL DE CYTOLOGIE ET D'HISTOLOGIE GÉNÉRALE PUBLIE PAR T. B. CARNOY, professeur de biologie cellulaire, G. GILSON, PROFESSEUR d'embryologie, J. DENYS, PROFESSEOR d'aNATOMIE PATHOLOGIQUE, A l'Université catholique de Louvain. AVEC LA COLLABORATION DE LEURS ÉLÈVES ET DES SAVANTS ÉTRANGERS, TOME VIII 2^' FASCICULE. I. Contribution à l'étude des ganglions cérébro-spinaux, par A. VAN GEHUCHTEN. II. Nouvelles recherches sur les ganglions cérébro-spinaux, par A. VAN GEHUCHTEN. III. Etude sur la virulence des streptocoques, par le D' H. DE MARBAIX. IV. Etude sur le principe toxique du bacillus lactis aérogénes, par J. DENYS & E. BRION. V. Le statoblaste des phylactolémates (bryozoaires d'eau douce), par le D' P. DEMADE. VI. Contribution à l'étude du pouvoir bactéricide du sang, par A. BASTIN. VII. De l'origine du nerf oculo-moteur commun, par A. VAN GEHUCHTEN. LIERRE LOUVAIN Typ. de JOSEPH VAN IN & C", Aug. PEETERS, Libraire, rue Droite, 48. rue de Namur, 1 1 . i8g2 CONTRIBUTION A L ETUDE DES GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX PAR A. VAN GEHUCHTEN PROFESSEUR d'aNATOMIE A L UNIVERSITÉ DE LOUVAIN (Mémoire envoyé a l'x\cadémie des Sciences de Belgique, le 4 juin 1892.) 26 CONTRIBUTION A L ETUDE DES GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX GANGLIONS SPINAUX. Les cellules nerveuses des ganglions spinaux, découvertes par Ehren- BERG, furent longtemps considérées comme indépendantes des fibres ner- veuses sensitives des racines postérieures. Depuis que Robin, Rudolph Wagner et Bidder (i) trouvèrent, presque en même temps, en 1S47, que les cellules des ganglions spinaux des poissons étaient bipolaires et qu'elles se continuaient avec une fibre nerveuse à chacun de leurs pôles, on s'efforça de retrouver la même struc- ture pour les éléments des ganglions spinaux chez les autres vertébrés. En 1844, KôLLiKER (2) avait signalé l'existence de cellules unipolaires dans les ganglions de la grenouille, mais ce fait fut contesté. De nombreux travaux ont paru depuis cette époque; les uns défendent l'existence de cellules uni- polaires, les autres celles de cellules bipolaires ; d'autres encore admettent que les éléments des ganglions spinaux sont "multipolaires. La façon dont les fibres nerveuses des racines postérieures se comportent au niveau du ganglion varie nécessairement avec l'idée que les différents auteurs se font des cellules nerveuses de ces mêmes ganglions. Les travaux de Schwalbe, Stieda, Ranvier, Axel Key et Retzius établirent bientôt d'une façon irré- futable que les ganglions spinaux des mammifères, des oiseaux, des reptiles et des batraciens sont formés exclusivement de cellules nerveuses unipolaires. (i) Cités d'après Fkeud. (2) KûLLiKER ; Die Selbstmidigkeit und Unabhangigkeit des sympathischen Nervensysiems; Zurich, 1844, p. 2 (cité d'après von Lenhossek). 212 A VAN GEHUCHTEN L'existence de cellules bipolaires chez les poissons, et celle de cellules unipolaires chez les autres vertébrés semblaient établir une différence fonda- mentale entre les ganglions spinaux des poissons et ceux des mammifères, des oiseaux, des reptiles et des batraciens. En 1875, Ranvier (i), en se servant d'une méthode spéciale, l'injection interstitielle d'une solution d'acide osmique à 2 0/0 dans les ganglions spi- naux du lapin, put mettre en pleine lumière un fait de la plus haute impor- tance pour la signification physiologique de ces cellules nerveuses. Il trouva que le prolongement unique de la cellule nerveuse ne devient ni une fibre centrale, ni une fibre périphérique, mais que, dans un grand nombre de cas, il se fusionnait avec une fibre nerveuse de la racine postérieure. ^ Grâce à la méthode que j'ai indiquée, dit Ranvier, j'ai pu voir un tube nerveux mince, à l'une des extrémités duquel se trouvait une cellule nerveuse, se terminer par son autre extrémité à un des tubes de la racine sensitive. Ce dernier poursuit simplement son trajet rectiligne et il reçoit, au niveau d'un étranglement annulaire, la fibre venant de la cellule gan- glionnaire. Dans cet étranglement, qui est commun à trois segments inter- annulaires, la soudure est comi)lète entre les deux tubes nerveux qui présentent dans leurs rapports une disposition en T n. Freud a fait remarquer, à juste titre, que, longtemps avant Ranvier, cette division du prolongement unique des cellules nerveuses avait été ob- servée par Stannius, Rudolphe Wagner, Kuttner et Schramm; mais c'est au savant histologiste français que revient, sans conteste, le mérite d'avoir trouvé cette division, sans connaitre les assertions de ces prédécesseurs, et d'avoir donné un moyen sur et facile pour mettre ces divisions en évidence. Axel KEvet Retzius(2) confirmèrent bientôt le fait signalé par Ranvier. Ils constatèrent en même temps que le cylindre-axe du prolongement unique provenait de la fusion des cylindre-axes des deux autres bras, de telle sorte qu'il ne s'agissait pas seulement d'une fusion du prolongement cellulaire avec une fibre de la racine postérieure, mais d'une bifurcation, d'une divi- sion du prolongement unique donnant naissance à deux cylindre-axes ou à deux fibres nerveuses. Cette division ne se faisait pas toujours en T, mais avait lieu sous des angles variables et ti"ès souvent en Y . (il Ranvier : Des tubes nerveux en T et de leurs relations avec les cellules ganglionnaires ; Comptes rendus de l'Académie des sciences, t. 8i, p. 1274, iSyS. (2) Axel Key et Retzius : Studien in der Anatomie des Nervensystems und des Bindegewebes; Stockholm, 187C. GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX 213 Axel Key et Retzius ne purent établir, pas plus que Ranvier, que cette bifurcation était un fait constant pour toutes les cellules du ganglion spinal. La différence qui semblait séparer les poissons des autres vertébrés tendait donc à disparaître, puisque les cellules des ganglions spinaux du lapin étaient en rapport, en définitive, avec deux fibres nerveuses, absolu- ment comme les cellules bipolaires des poissons. Les recherches de Freud fi) sur les ganglions spinaux du Pctromyion firent disparaître les derniers doutes. En traitant ces ganglions successivement par le chlorure d'or et l'acide chlorhydrique, Freud put constater que la plupart des cellules étaient bipolaires et envoyaient un prolongement vers le centre et un autre vers la périphérie. Quelquefois cependant la cellule n'était pas nettement opposito-polaire, mais les deux prolongements partaient de la cellule à des endroits très rapprochés l'un de l'autre. Freud trouva même quelques cel- lules unipolaires dont le prolongement unique se bifurquait, à quelque distance de la cellule d'origine, en une branche centrale et une branche périphérique. Ces cellules unipolaires sont identiques, d'après lui, à celles décrites chez le lapin par Ranvier, Axel Key et Retzius. Entre les cellules bipolaires et les cellules unipolaires, il existe, dans les ganglions spinaux du Petromy^on, toutes les formes interm.édiaires. Les ganglions spinaux des poissons sont donc comparables à ceux des autres vertébrés; partout on trouve des cellules en relation directe avec une fibre centrale et une fibre périphérique. En i8So parurent deux travaux sur la structure des ganglions spinaux : un travail de Rawitz et un de Retzius. Rawitz ne put voir la division du prolongement unique des cellules nerveuses que dans quelques cas excessivement rares; aussi, n'attribue-t-îHr ce fait qu'une valeur tout à fait secondaire : « Weil man in vielen hundert Untersuchungen, dit-il C-it, drei- oder viermal dichotomische Theilungen angetroffen hat, ist man noch nicht genôthigt anzunehmen, dass dies die Regel sei und in allen anderen Fallen durch personliches Ungeschick das Bild zerstôrt werde. ■» Pour lui, il n'existe, chez les batraciens et les mammifères, que des cellules unipolaires, et la barrière qui sépare les mammifères des poissons reste debout : - Damit (i) Fredd : Ueber Spiiialg.inglicii iOfJ Rûckcnm.Tk des Pct'-Tiiy^on : Sitzu gsber. d. Mathem , wiss. Cl. d. k. Akad. d. Wiss., Wien ; Bd. 78, IIl Abth , pp Si-167, 1S71:) (2] Rawitz ; Ueber den Bail der Spinalganglien \ Archiv i mikrosk. Anat., Bd. iS, p. 290. 1880. 214 A. VAN GEHUCHTEN ist denn die alte Kluft zwischen den Beobachtungen an Torpédo und an Sâugern wieder hergestellt (i) " . Dans un intéressant travail exclusivement consacré à l'étude des gan- glions cérébro-spinaux, Retzius (3) étudie, avec la méthode à l'acide osmi- que, la constitution des ganglions spinaux chez des représentants des diffé- rents groupes de vertébrés. Il trouve des cellules bipolaires chez les poissons, et des cellules unipolaires chez les batraciens, les reptiles, les oiseaux et les mammifères. Ses nombreuses recherches sont résumées à la fin de son mémoire, dans les deux conclusions suivantes : 1° Des bifurcations de fibres à myéline se rencontrent dans les gan- glions spinaux de tous les vertébrés. Ce fait ne paraît pas avoir d'exception. Cette disposition est si commune qu'on peut la regarder comme appartenant à tous les ganglions spinaux. On la retrouve chez tous les vertébrés, depuis les batraciens jusqu'à l'homme. 2° Chez tous les vertébrés (les poissons exceptés) les cellules sont uni- polaires. Le prolongement unique s'entoure de myéline, et, au moins dans beaucoup de cas, il- se divise, à une distance variable du corps cellu- laire, pour donner naissance à deux fibres nerveuses. Son cylindre-axe se bifurque en deux bras, dont chacun va devenir le cylindre-axe d'une fibre nerveuse. Ces deux fibres se comportent d'une façon variable : le plus sou- vent elles s'écartent l'une de l'autre et se dirigent en sens contraire. Il est cependant impossible de dire avec certitude, si l'une de ces fibres va au centre et l'autre à la périphérie; de même qu'il n'est pas possible d'affirmer si le prolongement unique de toutes les cellules nerveuses se comporte de la même façon. Il est certain que, des nombreuses divisions de fibres que l'on trouve dans les ganglions spinaux, une grande partie représente la bifurcation du prolongement unique des cellules unipolaires. Mais il n'est pas encore pos- sible d'admettre cette interprétation pour toutes les divisions, car il n'est pas démontré que les ^ durchziehenden Nervenfasern ~ que Freud décrit chez le Petromyion , n'existent pas chez les autres vertébrés. En 1886, VON Lenhossek (3) a repris l'étude des ganglions spinaux de la grenouille, en poursuivant le même but que celui que Freud avait en (1) Rawitz : Ibid., p. 3oi. (2) Retzius : Uiitersuchiaigcn ûbcr die Nerven^ellcn der ccrebrospinalcn Ganglien und dcr ûbrigcn periplierischen Kopfganglien; Arch. f. Anat. und Phys.. Anatom. Abth., iScSo, pp. 36r) — 3g8. (3j VON Lenhossek : Untersuchungen ûber die Spinalganglicn des Frosches; Arch. f mikr. Ana- tomie, 3d. 26, pp. 370-453, 1886 GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 215 vue chez le Petromyion, celui de savoir " ob namiich auf anatomischer Grundlage jener scheinbar schroffe Unterschied, den die in Rede stehende Nervenzellen der Fische und der ubrigen Wirbeithiere zeigen, sich reduci- ren oder erklâren liesse, ob die schon a priori hochst wahrscheinliche Ana- logie zwischen den Ganglien dieser Thiere durch directe histologische Beo- bachtung nachgewiesen werden kônne (\). r> Il trouve toutes les cellules nerveuses unipolaires. En pratiquant des coupes longitudinales dans des ganglions spinaux fixés par l'acide osmique, il a pu se convaincre, par l'observation directe, d'un fait important admis sans preuve suffisante par Ranvier, et nié d'une façon catégorique par Rawitz : des deux fibres nerveuses qui proviennent de la division du pro- longement unique de chaque cellule nerveuse, l'une se rend à la moelle épinière et l'autre à la périphérie. Des trois troncs nerveux : le prolongement cellulaire, la fibre centrale et la fibre périphérique, l'un est toujours plus faible que les deux autres, ainsi que Retzius l'a déjà constaté. Le mérite de von Lenhossek c'est d'avoir établi que la fibre la plus grêle est toujours la fibre centrale. Les deux autres ont la même épaisseur, ou bien la fibre périphérique est plus grosse que le prolongement cellulaire. En examinant attentivement la façon dont se comportent les cylindre- axes de ces trois troncs nerveux, von Lenhossek confirme les faits signalés par Axel Key et Retzius : le cylindre-axe du prolongement cellulaire est toujours plus épais que celui des fibres qui en proviennent. Au point de bifurcation du prolongement cellulaire, le cylindre-axe se divise en deux branches d'épaisseur inégale qui vont devenir les cylindre-axes des fibres terminales. Un détail important que nous relevons dans le travail de von Lenhossek, c'est que le cylindre-axe de la fibre périphérique semble être la continuation directe de celui du prolongement cellulaire, tandis que le cylindre-axe de la fibre centrale n'apparaît -que comme une branche collaté- rale : - Zunâchts iiberzeugt man sich dass sie (die Axencylinder; sich hin- sichtlich ihrer Dicke sehr stark von einander unterscheiden : der eine der- selben zeichnet sich nâmlich durch eine solche Breite aus, dass derselbe nachgerade die directe Fortsetzung des Auslauferaxencylinders zu bilden scheint, wahrend der andere in der Regel nur den Eindruck eines sich ablôsenden, schwachen Seitenastes macht (2). « fi) Ibidem, p. 377. (2) Loc. cit , p. 434. 216 A. VAN GEHUCHTEN Plusieurs conclusions importantes se dégagent encore du travail de VON Lenhossek ; voici les principales : 1° Toutes les divisions de fibres nerveuses que l'on rencontre dans le ganglion spinal sont des divisions du prolongement unique de cellules uni- polaires, d'accord en cela avec Ranvier et en opposition avec Freud et quelque peu avec Retzius (i). 2° Toutes les cellules nerveuses du ganglion spinal se comportent de la même façon : leur prolongement unique se divise en une fibre centrale et une fibre périphérique (2). 3'^ Il est plus que probable que chez la grenouille, les " durchziehende Fasern " décrites par Freud chez le Petromy^oti n'existent pas; ou bien, si elles existent, elles ne s'y rencontrent qu'en nombre excessivement faible (3). 4° Il n'y a donc pas de différence entre les cellules des ganglions spinaux des poissons et celles des ganglions des autres vertébrés. Les cel- lules nerveuses des vertébrés supérieurs ne sont unipolaires que morpholo- giquement, ph3^siologiquement on peut les considérer comme des éléments bipolaires (4). Cette dernière conclusion de v, Lenhossek est donc la même que celle à laquelle est arrivé Freud à la suite de ses recherches sur les ganglions spinaux du Petromyion. A l'époque où v. Lenhossek publia son travail, les observations si intéressantes de Freud n'avaient pas encore été confir- mées. Retzius, qui avait étudié à cet effet les ganglions spinaux chez la Myxine glutinosa, un autre représentant des cyclostomes, ne put 3' trouver que des cellules unipolaires. Plus heureux que Retzius, Nansen (5) y signale des cellules unipolaires et des cellules bipolaires. Il convient toute- fois d'ajouter qu'en employant la méthode au bleu de méthylène Ret- zius (6) a trouvé, en 1890, dans les ganglions spinaux de la Myxiiie les deux espèces de cellules nerveuses avec toutes les formes intermédiaires. Pendant la même année, 1SS6, parut un travail remarquable de His (7), (ij Loc. cit . pp 437 et 438. (2) Ibid , p. 44) . (3) Ibid., p 442. (4 Ibid , p 443. (5) Nansen : The Striiclui-e and Combination of the Histological Eléments of tlie Central Ner- vous System; Bergens Muséums A:irsberetning, p. i63, iSt6 (6) Retzius : Veber die Ganglien:{eUen der CerebrospinalgangUen und ûber subcutane Gaiiglien- i;ellen bel Myxinc glutinosa; Biolog. Unters , Neue Folge, I, pp. 91—99, Stockholm, 1890. (7) His : Zur Geschichte des menschlichen Rûckcnmarkcs und der Nervenwur^eln; Abhandl. der Mathemat. pbys CI. d. k. Sàchs. Ges. d. Wiss., Bd. XIII, n» VI, pp. 479-514, 1886. GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX 21? dans lequel le professeur de Leipzig apporta la preuve directe de ce fait im- ' portant, entrevu déjà par lui dès 1881, à savoir : que, chez l'embryon humain de quatre à cinq semaines (embryon N), toutes les cellules des ganglions spinaux sont des éléments bipolaires pourvus d'un prolongement dorsal et d'un prolongement ventral. Le prolongement dorsal pénètre dans la moelle épinière comme fibre radiculaire, tandis que le prolongement ventral se réunit aux fibres de la racine antérieure et se termine finalement dans les organes périphériques. Ces cellules bipolaires persistent jusque vers la neuvième semaine fembryon Zw), puis elles se transforment insensiblement en cellules unipo- laires dont le prolongement unique présente la division en T, décrite par Ranvier chez le lapin et retrouvée par Retzius dans les ganglions spinaux de presque tous les vertébrés, les poissons exceptés. Cette découverte importante de His lève donc tout doute sur l'identité morphologique et physiologique des cellules nerveuses des ganglions spi- naux. Chez tous les vertébrés ces cellules nerveuses peuvent être considérées comme de véritables cellules bipolaires. De plus, elle confirme un fait affirmé d'une façon catégorique par v. Lenhossek pour les ganglions spi- naux de la grenouille : c'est que des deux branches de bifurcation, l'une devient une fibre centrale et l'autre une fibre périphérique. En appliquant la méthode de Golgi à l'étude du système nerveux embryonnaire des oiseaux, Ramon y Cajal (1) a confirmé la découverte faite par His chez l'embryon humain. Chez un embiyon de poulet du huitième au douzième jour d'incubation toutes les cellules nerveuses des ganglions spinaux sont encore bipolaires en même temps qu'opposito-polaires. Insen- siblement les deux prolongements se rapprochent et se fusionnent produi- sant un tronc unique. Celui-ci se bifurque alors à une distance variable dé" la cellule d'origine pour donner naissance à un prolongement externe et à un prolongement interne. Les cellules bipolaires se transforment donc ici aussi en cellules uni- polaires. Ramon y Cajal a constaté en même temps ce fait, déjà signalé par VON Lenhossek chez la grenouille, que le prolongement central est très souvent beaucoup plus grêle que le prolongement périphérique. (i) Ramon y Cajal ; Coniribucion al cstiuiio de la estnictura de la medula esyinal; Revista trimcstral de Histologia normal y patologica, n'^^ 3 et 4, p. 90, iSSg. Ï7 2i8 A. VAN GEHUCHTEN Chez des rats nouveau-nés ou âgés seulement de quelques jours, le mcmc savant (i) a pu constater que les cellules des ganglions spinaux sont toutes unipolaires et que leur prolongement unique présente la division en T ou en Y pour donner naissance à un prolongement qui pénètre dans la moelle et à un autre qui se rend dans le nerf périphérique. Ici, comme chez les oiseaux, les deux branches de bifurcation sont iné- gales : le prolongement périphérique est épais tandis que le prolongement central est beaucoup plus grêle. La disproportion entre ces deux branches est parfois si notable que le prolongement central semble nétre qu'une simple branche collatérale du tronc nerveux ganglionnaire. Dans les ganglions spinaux de jeunes rats et de souris blanches nou- veau-nées, nous avons fait également la même constatation (2). Toutes les cellules imprégnées par le chromate d'argent sont unipolaires. Chez toutes, le prolongement unique se bifurque en une fibre centrale et une fibre péri- phérique; de plus, dans le plus grand nombre des cas, la fibre centrale est grêle et peut être considérée comme une simple collatérale du prolongement unique. Des recherches récentes faites sur les ganglions spinaux chez les oiseaux et les mammifères confirment une fois de plus cette manière de voir. -Nous avons reproduit dans la fig. 1, un ganglion spinal d'un embryon de canard au vingtième jour d'incubation. A cet époque, on trouve dans ce ganglion des cellules encore nettement opposito-bipolaires, quelques cel- lules déjà unipolaires et un grand nombre de formes cellulaires intermé- diaires entre ces deux formes extrêmes, où les deux prolongements partent du corps cellulaire à des distances variables l'un de l'autre. Dans toutes ces cellules le prolongement périphérique est large et épais, tandis que le prolongement central est plus grêle. Cette différence est surtout marquée dans les cellules unipolaires : le prolongement péri- phérique y apparaît, le plus souvent, comme la continuation directe du prolongement unique, tandis que le prolongement central s'en détache par un petit épaississement triangulaire, un petit cône à base adhérente, qui se rétrécit lentement et auquel fait suite une fibrille nerveuse assez grêle, d'une couleur de café au lait quelque peu spéciale et qui conserve son individua- tié et son diamètre primitif jusque dans la substance blanche de la moelle. (i) Ramon y Cajal : Pequenas communicaciones anatomicas : I. Sobre la cxisicncia de tcrmi- naciones nerviosas pericelulares eu los gangllos nervioîos raqitidianos ; 20 Dec. 1890. (2) A. Van Gehuchten : La structure des centres nerveux : la moelle épinière et le cervelet; La Cellule, t. VII, i' fasc. 20 avril, 1891. GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 219 Le même fait se retrouve dans les ganglions spinaux de rats et de souris ■ nouveau-nés, ainsi que Ramon y CaJal et nous-mème l'avons déjà signalé, et ainsi que cela se voit clairement encore dans la fig. 2 représentant le ganglion spinal d'une souris blanche nouveau-née. CONCLUSIONS. De ce court aperçu des principales recherches faites sur les ganglions spinaux des vertébrés, nous pouvons donc tirer les conclusions suivantes : 1° Les cellules nerveuses des ganglions spinaux de la plupart des poissons sont opposito-bipolaires. Chaque pôle se continue avec le cylindre- axe d'une fibre nerveuse, dont l'une pénètre dans la moelle, tandis que l'autre se rend à la périphérie. 2" Les cellules nerveuses des ganglions spinaux des autres vertébrés à l'état adulte, sont toutes unipolaires. Leur prolongement unique se bifurque, à une distance variable de la cellule d'origine, en un prolon- gement central et un prolongement périphérique. La démonstration de ce fait a été faite pour les mammifères (Ranvier, Retzius, His, Ramon y Cajal, Van Gehuchtenj, les oiseaux (Retzius, His, Ramon y Cajal, Van Gehuch- ten), les reptiles (Ramon y Cajalj (i; et les batraciens fv. Lenhossek et Cl. Sala; (2). 3° Chez les poissons cyclostomes on trouve dans les ganglions spinaux, à l'état adulte, non seulement des cellules opposito-bipolaires et des cellules unipolaires, mais encore toutes les formes intermédiaires ('Freud, Nansen, Retzius), preuve qu'une cellule bipolaire peut se transformer en cellule unipolaire. 4° Le même fait s'observe chez les embryons des mammifères (His_. et Retzius), des oiseaux (Ramon y Cajal et Van Gehuchten) et des reptiles (Ramon Y Cajal). A un certain moment du- développement embryologique toutes les cellules nerveuses des ganglions spinaux sont opposito-bipolaires comme chez les poissons adultes. Dans le cours du développement la forme de la cellule se modifie et les cellules bipolaires se transforment en cellules unipolaires. 5° La différence morphologique qui existe entre les cellules des gan- glions spinaux des poissons et les cellules des ganglions des autres vertébrés (1) Ramon y Cajal : Pequenas contribuciones al conocimiento del sistema nervioso IV. La medula espinal de los reptiles. 20 août 1891. (2) Cl. Sala : Estniciura de la medula espinal de los batracios; février, i8ri2. 220 A. VAN GEHUCHTEN est donc plus apparente que réelle-. Dans les ganglions des poissons les cellules conservent d'une façon définitive une forme qui n'existe que tempo- rairement chez les vertébrés supérieurs. 6° Les ganglions spinaux ont donc la même signification chez tous les vertébrés : les cellules qui les constituent donnent naissance, d'une façon ou d'une autre, à deux prolongements qui vont devenir cylindre-axes de deux fibres nerveuses. Chez tous les vertébrés, aussi, l'une de ces fibres est cen- trale et l'autre est périphérique. De plus, dans le plus grand nombre des cas, le prolongement central est plus grêle que le prolongement destiné à la périphérie. 7° Les ganglions spinaux des vertébrés doivent donc être considérés comme noyaux d'origine réelle pour la partie sensitive de tous les nerfs spinaux, et cela non seulement pour les fibres périphériques mais aussi pour les fibres centrales. Nous savons, par les recherches de ces cinq der- nières années, que les fibres des racines postérieures des nerfs spinaux pénètrent dans la moelle, s'y bifurquent et que les deux branches de bifur- cation finissent dans la substance grise par des arborisations terminales. Ces fibres trouvent donc, dans la moelle, non pas leur origine, mais leur terminaison. Tous ces faits nous semblent définitivement acquis à la science. Note. Nous faisons abstraction, dans cette étude, des fibres nerveuses qui ne font que traverser le ganglion spinal pour se rendre à la périphérie et qui doivent avoir leur cellule d'origine dans la substance grise de la moelle. Ces fibres nerveuses ont été vues et décrites, en 1879, par Freud dans les ganglions spinaux du Petromyion. Malgré cela, l'existence de ces » durchziehende Fasern « a été souvent contestée. Les recherches de Joseph sur les phénomènes de dégénérescence, observés dans les racines posté- rieures des nerfs périphériques après leur section en dedans et en dehors du ganglion spinal, plaident avantageusement en faveur de l'existence de ces fibres; et nous savons que v. Lenhossek et Ramon y Cajal ont décrit, dans la moelle d'embryons de poulet au quatrième et au cinquième jour d'incubation, des cellules nerveuses situées dans la corne antérieure et dont le prolongement cylindraxil traverse d'avant en arrière toute l'épaisseur de la moelle, entre dans la racine postérieure et a pu être poursuivi jusqu'au- delà du ganglion spinal. Cependant ce point, qui nous semble avoir une grande importance, demande encore de nouvelles recherches. GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 221 II. GANGLIONS CÉRÉBRAUX. Des ganglions nerveux n'existent pas seulement sur le trajet des racines postérieures des nerfs spinaux, on en trouve encore sur un certain nombre de nerfs crâniens. Ces ganglions cérébraux appartiennent-ils au système nerveux sympathique ou au système nerveux cérébro-spinal? Les avis des auteurs sont partagés sur ce point important. L'étude des caractères mor- phologiques des cellules qui les constituent pourra seul lé résoudre. En effet, nous savons, par les recherches récentes, que les cellules des ganglions du sympathique sont des cellules multipolaires pourvues d'un grand nombre de prolongements protoplasmatiques et d'un seul prolongement cylindraxil, tandis que les cellules des ganglions spinaux sont bipolaires ou unipo- laires, et sont toujours pourvues de deux prolongements qui deviennent cylindre-axes de fibres nerveuses. Si quelques-uns des ganglions cérébraux doivent être considérés comme les homologues des ganglions spinaux, ces ganglions ont-ils absolument la même structure que les ganglions qui dé- pendent des nerfs de la moelle épinière? His (i), dans ses considérations morphologiques sur les nerfs crâniens, s'exprime de la façon suivante : " Wie weit sind wir nun berechtigt, am Kopf von sympatischen Gan- glienzu reden? Mit Ausahme des G. Gasseri und des G. acusticum sind der Reihe nach aile Ubrigen als sympathisch bezeichnet worden, die Gg. ciliare, rhinicum, oticum, submaxilare, geniculi, glossopharyngei und vagi So wie die Dinge jetzt liegen, muss meines Erachtens die Aufgabe gestellt werdendie verschiedenenKopfganglien einmal genauaufihre Eigenschaften^ durchzugreifen und Solange bis dies geschehen ist, enthâlt man sich am besten der Anwendung eines seiner ganzen.Natur nach unklares Dégriffés. Ein rein morphologisches Kennzeichen fur sympathischen Kopfganglien giebt es zur Zeit nicht. Ob man z. B. das Ciliargg. und das G. geniculi fiir sympathisch halten will ist vorlâufig eine blosse Glaubenssache. ^ Cet examen détaillé des caractères morphologiques des cellules ner- veuses des différents ganglions cérébraux réclamé par His, afin de pouvoir se prononcer d'une façon définitive sur leur véritable nature, nous l'avons (i) His : Die morphologischn Bctrachtung der Kopfnerven; Archiv f. Aiiat. und Phys , Anat. Abth., p 4i3, 1887. 222 A. VAN GEHUCHTEN entrepris depuis quelque temps déjà chez certains mammifères nouveau- nés. Nous avons obtenu des résultats satisfaisants pour le ganglion de Casser du trijumeau, le ganglion pétreux du glossopharyngien et le ganglion plexiforme du pneumogastrique, ainsi que nous l'avons annoncé ailleurs (ij. Depuis, nous avons obtenu aussi des réductions dans le ganglion spiral de la branche limacéenne du nerf acoustique. Nos recherches sur les autres ganglions n'étant pas encore terminées, nous réservons leur étude pour plus tard. Ganglion de Casser du trijumeau. BiDDER (2) et RuD. Wagner (3) ont signalé l'existence de cellules ner- veusesbipolaires dans le ganglion sémilunaire du trijumeau chez les poissons. Mais, tandis que pour Bidder une petite partie seulement des fibres ner- veuses se mettent en rapport avec une cellule de ce ganglion, Rud. Wagner accepte que toute fibre nerveuse en passant par le ganglion y est interceptée par une cellule nerveuse et qu'il n'existe, dans ce ganglion, ni cellules apo- laires, ni cellules unipolaires, ni " durchstreichende Primitivfasern ". Des cellules bipolaires ont encore été signalées par Langerhans et par Axel Key et Retzius dans le ganglion du trijumeau chez le Petroniyion. Pour les mammifères, Wagner ^4) décrit aussi dans le ganglion de Casser des cellules unipolaires, dont le prolongement unique se divise en deux branches, l'une plus grosse et l'autre plus fine. C'est dans le ganglion sémilunaire, en même temps que dans les gan- glions spinaux du lapin, que Ranvier a fait sa découverte importante des tubes nerveux en T et de leurs relations avec les fibres de la racine sensi- tive. Ce fait fut confirmé immédiatement par Axel Key et Retzius et la figure, qui accompagne leur travail, représente une cellule nerveuse du ganglion de Casser du lapin dont le prolongement unique se bifurque à quelque distance de la cellule d'origine. - Ob nun aile vom Cehirn-Riic- kenmark kommenden Nervenfasern der sensorischen Wurzeln Auslaufer in dieser Weise aufnehmen, kônnen wir cbenso wenig w^ir Ranvier angeben, (1) a. Van Gehuchten ; Les cellules nerveuses du sj-mpatliique che^ quelques mammifères et che^ l'homme; La Cellule, t. VIII, i"' fasc, p 87. 1892. (2) Bidder : Zur Lehre von der Verhàltnisse der GangUenkorper ^u den Nervenfasern, 1847. !3j R. Wagner : Nciie Untersuchungen ûber die Elemente der Nervensubstan:^. 1847. (4J Wagner : Ncurologische Untersuchungen, i854, p. 184. GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 223 disent-ils, uns scheint indessen die nicht sehr grosse Zahl von solchen T. ■ Stellen da gegen zu sprechen (i) '^. Retzius dissocia le ganglion de Casser chez les poissons, les batra- ciens, les reptiles, les oiseaux et les mammifères. Dans ses patientes recherches, il trouva partout des cellules nerveuses du même type que dans les ganglions spinaux : cellules bipolaires chez les poissons, cellules unipo- laires chez les autres vertébrés. Mais il ne parvint pas toujours à mettre en évidence les relations de ces cellules avec les fibres nerveuses. Ni chez les batraciens, ni chez les reptiles, ni chez les oiseaux il n'a vu directement la bifurcation du prolongement unique. De tous les mammifères dont il a étudié le ganglion sémilunaire, le lapin est le seul chez lequel il ait vu une seule fois le prolongement unique se diviser à une certaine distance du corps de la cellule. Partout ailleurs, il n'a trouvé que des cellules uni- polaires; de plus, chez le rat, le chat et le lapin, il a remarqué des bifur- cations de fibres nerveuses indépendantes des cellules. Dans ses recherches embryologiques, His a trouvé que, à un moment déterminé du développement, le ganglion de Casser de l'homme est formé de cellules nerveuses bipolaires, identiques aux cellules des ganglions spinaux. La méthode de Colgi a été appliquée par Kôlliker à l'étude du gan- glion du trijumeau d'un embryon de veau, mais sans donner de résultat. Plus heureux que le savant anatomiste de Wurzbourg, en appliquant la méthode rapide de Colgi, suivant le procédé de la double imprégnation, sur le ganglion de Casser de souris blanches, de rats, de chats et de chiens nouveau-nés, nous avons obtenu des résultats qui ne laissent sub- sister aucun doute sur la véritable nature du ganglion de la cinquième paire. Comme les ganglions spinaux, le ganglion de Casser est formé de cellules nerveuses qui sont toutes unipolaires. Ces cellules occupent surtout les couches périphériques du ganglion. Elles envoient leur prolongement uni- que vers les parties profondes, et, après un trajet tortueux et d'une longueur variable, ce prolongement présente, d'une manière constante, une bifurca- tion en T ou en Y, fig. 3. Des deux branches qui en proviennent, l'une se dirige toujours vers l'axe cérébro-spinal et l'autre vers la périphérie. Dans un grand nombre de cas, la branche centrale est plus grêle que la branche périphérique, fig. 4. Il nous a paru cependant que les cas où les deux branches avaient le même volume étaient dans ce ganglion plus nom- breux que dans les ganglions spinaux. Axel Key et Retzius : Loc cit , p. 3g. 224 ^- '^^^ GEHUCHTEN C'est surtout chez la souris et chez le rat nouveau-nés que les réduc tions sont les plus démonstratives, parce que, au moment de la naissance, toutes les fibres nerveuses du nerf de la cinquième paire y sont encore dépourvues de myéline. Les réductions sont plus difficiles chez le chat et le chien nouveau-nés parce que, chez ces animaux, au moment de la nais- sance, la plupart des fibres ont déjà leur myéline. Cependant le dépôt de chromate d'argent s'obtient encore sur quelques éléments isolés et permet de constater que leurs cellules se comportent comme chez la souris et le rat, FiG. 4, b. Le ganglion de Casser du trijumeau doit donc être considéré comme l'homologue d'un ganglion spinal, et avec His nous devons y voir le noyau d'origine réelle pour les fibres nerveuses sensitives du trijumeau. Ganglion pe'treux du glosso-pharyngien . La plupart des anatomistes décrivent deux ganglions sur le trajet du nerf glosso-pharyngien chez l'homme : un ganglion supérieur, ganglion jugu- laire ou ganglion de Ehrenritter, et un ganglion inférieur, appelé encore ganglion pétreux. Dans la littérature on ne trouve pas d'indications sur la manière d'être des cellules nerveuses qui entrent dans la constitution de ces ganglions. Les avis diffèrent sur le point de savoir si ce sont des ganglions sympathiques ou des ganglions cérébro-spinaux. Rauber considère le ganglion jugulaire comme ganglion radiculaire du nerf de la neuvième paire, et le ganglion pétreux comme un ganglion sym- pathique. Retzius a étudié les deux ganglions chez l'homme et les trouve consti- tués de cellules unipolaires identiques aux cellules des ganglions spinaux. Cependant, il n'a trouvé dans ces ganglions ni des bifurcations de fibres nerveuses, ni la division du prolongement unique de la cellule unipolaire. Nous n'avons pas trouvé dans la littérature, d'indication sur les gan- glions du glosso-pharyngien chez les autres mammifères. Nous ignorons nous-même s'il existe là, comme chez l'homme, d'une façon constante, deux ganglions. En pratiquant des coupes transversales à travers les os de la base du crâne, reliés encore aux vertèbres cervicales supérieures, chez la souris blanche nouveau-née, nous avons trouvé dans nos coupes un ganglion sphérique et peu volumineux appartenant au nerf de la neuvième paire. GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 225 Nous croyons que c'est le ganglion inférieur ou le ganglion pétreux. Dans • ce ganglion le chromate d'argent s'était déposé dans quelques cellules ner- veuses. Celles-ci sont unipolaires, et le prolongement unique, arrivé à une distance variable de la cellule d'origine, se bifurque en une fibre cen- trale et une fibre périphérique. Ici, comme dans les ganglions spinaux, la fibre destinée à l'axe cérébro-spinal est plus grêle que la fibre qui doit se i-endre à la périphérie. His a trouvé que, à un moment déterminé du développement embryolo- gique, le nerf glosso-pharyngien possède chez l'homme deux ganglions et que tous deux sont formés de cellules nerveuses bipolaires, identiques aux cellules du ganglion de Gasser et des ganglions spinaux. C'est donc dans ces ganglions que les fibres nerveuses sensitives du glosso-pharyngien trouvent leurs cellules d'origine, ces ganglions sont donc, pour la partie sensitive de ce nerf, le noyau d'origine réelle. Ganglion plexiforme du pneumogastrique . BiDDER et Wagner ont trouvé des cellules bipolaires dans le gan- glion plexiforme chez les poissons. Retzius aussi a vu des cellules bipo- laires dans le ganglion du nerf vague de tous les poissons qu'il a étudiés. Chez les mammifères, au contraire, il a trouvé des cellules unipolaires avec un prolongement indivis, puis des bifurcations de fibres nerveuses indépendantes des cellules. Les cellules unipolaires du ganglion jugulaire et du ganglion plexiforme du chat appartiennent, d'après lui, au même t3^pe que les cellules des ganglions spinaux : elles sont unipolaires et leur prolongement unique s'entoure d'une gaîne de myéline à quelque distance du corps cellulaire. Dans un css, Retzius a pu poursuivre le prolongement unique d'une cellule du ganglionjugulaire et du ganglion plexiforme jusqu'au point de bifurcatiou; - hier ging unter schneller Umbiegung eine schmale myelinhaltige Nervenfaser ab, wahrend der zweite Theilungsarm seinen Verlauf in der Richtung des Auslaufer selbst fortsetze. Der Axencylinder des Auslâufers theilt sich kurz vor der Teilunejseinschnurunaf in einen brei- teren Zweig fur den grôberen Arm und einen schmaleren fur den feineren « . La même observation a été faite par Retzius chez le chien et chez l'homme; toujours, un des prolongements était plus grêle que l'autre. Avec la méthode rapide de Golgi nous avons obtenu des réductions démonstratives dans le ganglion plexiforme du chat et du chien nouveau- E8 226 A. VAN GEHUCHTEN nés et dans celui d'un embryon humain de vingt-cinq centimètres. Ici, comme dans les autres ganglions décrits déjà, les cellules nerveuses occu- pent principalement les couches périphériques, fig. 5 et 6. Elles sont toutes unipolaires. Leur prolongement unique se dirige vers les parties profondes du ganglion, et, après un trajet d'une longueur variable pour les différentes cellules, il se bifurque en une fibre centrale et une fibre périphérique. Mais, tandis que dans le ganglion du trijumeau les deux branches de bifurcation ont assez souvent le même volume, ici, d'une façon presque constante, un des prolongements est beaucoup plus grêle que l'autre. En orientant bien le ganglion avant d"y pratiquer les coupes, il n'est pas difficile de constater que le prolongement grêle est toujours le prolongement central. Nous avons reproduit dans la fig. 7 quelques cel- lules nerveuses dessinées à la chambre claire au grossissement d'environ 400 diamètres, pour montrer aussi clairement que possible la manière d'être de ces deux prolongements. Comme cette figure l'indique, le prolongement périphérique gros et quelque peu irrégulier, semble être la continuation directe du prolongement cellulaire unique, tandis que le prolongement cen- tral n'apparaît que comme une mince fibrille collatérale. C'est dans le gan- glion plexiforme, où la différence entre les deux branches de bifurcation est si nettement tranchée, que l'on peut se convaincre facilement de ce fait, que c'est le prolongement interne seul qui possède les véritables carac- tères morphologiques d'un prolongement cylindraxil. Le nerf vague ou pneumogastrique est un nerf mixte. Ses fibres mo- trices ont leur cellule d'origine dans la moelle allongée, ses fibres sensitives naissent toutes du ganglion jugulaire et du ganglion plexiforme. Ces faits ont été démontrés par les obervations embryologiques de His et sont con- firmés par nos propres observations, au moins en ce qui concerne le ganglion plexiforme. Avec His nous devons donc considérer ces deux ganglions comme les noyaux d'origine réelle de la partie sensitive du nerf de la dixième paire. Ganglions du nerf acoustique. Les ganglions du nerf acoustique sont plus difficiles à étudier. Nous avons cependant obtenu des réductions complètes pour les cellules bipolaires du ganglion spiral du limaçon, en même temps que pour les fibres ner- veuses qui se terminent dans l'épithélium des taches et dans celui des crêtes acoustiques. C'est en traitant par la méthode rapide de Golgi la GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 22? partie centrale de la base du crâne de souris blanches nouveau-nées ou ■ âgées de quelques jours, dans le but de pratiquer des coupes dans le gan- glion de Gasser in situ, pour mieux distinguer entre le prolongement cen- tral et le prolongement périphérique des cellules nerveuses de ce ganglion, que, par pur hasard, nous avons obtenu des réductions dans le nerf acoustique. Nos préparations montrent en toute évidence que le ganglion spiral du limaçon est formé de cellules nerveuses bipolaires. Le prolongement central de ces cellules bipolaires devient une fibre constitutive du nerf acoustique. Le ^ prolongement périphérique s'engage, au contraire, dans la lame spirale, atteint l'organe de Corti, et s'y termine par des ramifica- tions libres entre les cellules épithéliales. Sur des coupes passant par l'axe même du limaçon cette disposition est nettement visible, fig. 8 et 9. Quand la coupe passe, au contraire, horizontalement par la lame spi- rale elle-même, on voit que la disposition du prolongement périphérique est un peu plus compliquée. Ce prolongement, arrivé à la base de la zone des piliers fPfeilerzone), se bifurque; les deux branches s'écartent l'une de l'autre, se mêlent aux branches des fibres voisines, de telle sorte que toutes ces fibrilles nerveuses entrelacées forment, en dessous de la zone des piliers, un plexus inextricable. De ce plexus partent alors de fines ramilles qui montent verticalement dans la zone des piliers; les unes se terminent par un petit bouton, en dessous de la zone des cellules ciliées (Haarzellenzone), les autres, au contraire, pénétrent jusque dans cette zone et s'y terminent par des ramifications courtes entre les cel- lules. Dans la plupart de nos préparations ces prolongements périphériques étaient séparés de leur cellule d'origine, fig. 10. Quelquefois cependant la coupe passe aussi par le ganglion spiral ; on voit alors nettement que chaque fibrille nerveuse n'est pas le prolongement direct d'une cellule bipolaire, mais que le prolongement périphérique de ces cellules se bifurque souvent à la base de la lame spirale, ou bien émet des branches collatérales qui traversent la lame spirale pour arriver à l'épithélium de l'organe de Corti, fig. 11. Dans l'épithélium des taches acoustiques {Macitlae aciisticaé) et dans celui des crêtes acoustiques {Cristœ acusticœ), nous avons trouvé également des ramifications terminales de fibres nerveuses; malheureusement, nous n'avons pas encore pu poursuivre celles-ci jusqu'à leur cellule d'origine. 228 A VAN GEHUCHTEN Nulle part nous n'avons trouvé une cellule épithéliale en continuité directe avec une fibre nerveuse. Ces résultats incomplets n'étaient pas destinés à être publiés. Nous étions d'avis de faire encore de nouvelles recherches afin de découvrir aussi complètement que possible le mode de terminaison périphérique des fibrilles nerveuses acoustiques. Mais nous avons reçu, il y a quelques jours, par une gracieuse attention de l'auteur, le magnifique volume de Retzius : Biolo- gische Untersuchungen, Neue Folge, III, 1892, dans lequel notre savant collègue de Stockholm a consacré un chapitre à l'étude du mode de termi- naison des fibres du nerf acoustique. Quoique nos observations aient été faites indépendamment de celles de Retzius, nous reconnaissons cependant volontiers au professeur de Stockholm, la pleine priorité des faits qu'il a ob- servés, et nous ne donnons nos observations que comme une simple confir- mation de quelques-uns de ses résultats. Mieux que tout autre, l'auteur des remarquables recherches sur l'appareil auditif des vertébrés {Ueber das Gehororgan der Wirbelthiere, 1884) était à même d'entreprendre, avec la méthode de Golgi, la solution d'un problème aussi difficile. Retzius a étudié les terminaisons du nerf acoustique chez des embryons de poulet à des époques différentes du développement et chez des souris nouveau-nées et âgées de quelques jours. Dans les taches et dans les crêtes acoustiques, il a mis en évidence des fibres nerveuses quelque peu vari- queuses qui pénètrent dans l'épithélium jusque un peu en-dessous de la zone des cellules ciliées (Haarzellen); elles présentent à ce niveau un épais- sement noueux et se divisent en un grand nombre de ramilles qui se ter- mment librement entre les cellules épithéliales. Retzius a poursuivi ces fibres nerveuses à travers la paroi conjonctive jusqu'au niveau des cellules bipolaires, dont ces fibres étaient les prolongements périphériques. Une question plus importante est celle du mode de terminaison des fibres nerveuses dans le limaçon. Ces fibres sont complètement développées chez la souris âgée de huit à dix jours. Voici comment Retzius décrit ces fibres acoustiques après leur passage à travers la lame spirale : « Man sieht dieselben nunmehr nach dem Austritt aus den Lôchern der Habenula perforata sich theilen und einen Ast spiralig nach jeder Seite senden; zuweilen biegt sich jedoch die gange Faser ohne Theilung nur nach einer Seite hin um. 'Von diesen spiralig zwischen den inneren Cortischen Pfeilerzellen nach innen gehenden Fasern, welche indessen gewôhnlich nur GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 229 eine kurze Strecke verlaufen, etwa 4-6 Pfeilerzellen passiren, entspringen , mehrere feine Aesten von denen einige sehr feine nach oben, zu den inneren Haarzellen gehen, um sie zu umstricken; von dem aiisseren Umfang der Fasern gehen etwa 3-6 Aeste ans, welclie in ziemlich gleichen Entfernungen und einander parallel nach aussen hin verlaufen (fig. 5 et 6 de la Pl. xii du livre de Retzius. Tous ces détails sont nettement visibles sur nos FIG. 10 et 11). Dièse Aeste passiren zwischen den Pfeilerzellen durch den Tunnelraum und erreichen die aussere Haarzellenregion. Wâhrend dieser Passage theilen sie sich zuweilen dichotomisch, wonach die beiden Aeste unter spitzem Winkel weiter nach aussen ziehen. Nachdem sie die aussere Pfeilerzellenreihe erreicht haben, biegen sich einige Fasern seitwârts um, theilen sich dichotomisch und bilden unter den Haarzellenreihen ein Ge- flecht von rundlich-ovalen Maschen, deren feine varicôse Faserchen hier und da frei auslaufcn und endigen. Andere Fasern laufen durch die Haar- zellenregion radiirend hinaus (la fibre horizontale à droite de notre fig. lOj, wobei sie sich jedoch in der Regel seitwârts umbiegen und bald, nach innen von der ersten Zellenreihe, eine weite Strecke weiter laufen; bald ziehen sie zwischen der ersten und zweiten Zellenreihe, bald zwischen der zweiten und dritten, bald endlich nach aussen von der dritten, um eine mehr oder weniger weite Strecke zu verlaufen. Hierbei biegen sie in der Regel zuerst einmal zwischen zwei Zellenreihen ein und laufen ein wenig zwischen ihnen, dann biegen sie sich wieder nach aussen hin und passiren die folgende Zellenreihe, um noch eine kurze Strecke zwischen ihr und die nachstfol- genden zu laufen; dann ziehen sie endlich wieder oft nach aussen hin und biegen in den Raum zwischen der zweiten und dritten Zellenreihe ein, wo sie spiralig eine mehr oder weniger weite Strecke ziehen. Zuletzt, nachdem die Fasern eine Anzahl von 20-30 Haarzellen der letzten Reihe in dieser Weise passirt haben, biegen sich ihre verfeinerten varicôsen Enden wieder nachinnenum, verastelen sich ein oder zweimal und umstricken die zunâchst gelegenen Haarzellen. i^ Nous avons tenu à reproduire textuellement cette longue et minutieuse description de Retzius, parce qu'elle s'applique entièrement aux fibres ner- veuses telles que nous les avons reproduites dans nos fig. lO et 11. Entre la description de Retzius et nos figures il n'y a qu'une seule différence, c'est que dans nos réductions nous n'avons pas obtenu la terminaison des fibres spirales qui courent entre les rangées de cellules ciliées. De plus, dans nos préparations les fibres réduites étaient tellement abondantes 230 A. VAN GEHUCHTEN qu'elles formaient plexus, en s'entrélaçant, immédiatement en-dessous de la zone des piliers. Ces fibres nerveuses ainsi décrites par Retzius ne sont que les prolon- gements périphériques des cellules nerveuses du ganglion spiral, situé à la base de la lame spirale. Des observations de Retzius et des notices nous pouvons conclure que les fibres nerveuses de l'organe de Corti ne sont que les prolongements périphériques de cellules nerveuses bipolaires Les cellules ciliées ne sont donc pas des cellules nerveuses et ne peuvent être considérées comme les homologues des cellules bipolaires de la muqueuse olfactive. Les homolo- gues des cellules olfactives sont les cellules bipolaires du ganglion spiral. Et, de même que les fibres du nerf olfactif ont leur origine réelle ou leur cellule d'origine dans la muqueuse olfactive, et leur terminaison dans le bulbe olfactif, de même aussi les fibres du nerf acoustique ont leur origine réelle dans les cellules bipolaires des ganglions périphériques, et leur ter- minaison dans les noyaux acoustiques du tronc cérébral, ainsi que Kolliker l'a démontré au congrès des anatomistes à Munich. 't>' CONCLUSIONS. De cette étude de quelques-uns des ganglions sit ués sur le trajet des nerfs cérébraux, il résulte clairement : 1° Que les ganglions du trijumeau, du glosso-pharyngien et du vague sont comparables en tous points aux ganglions spinaux. On peut leur appli- quer à la lettre toutes les conclusions que nous avons formulées à la fin du premier chapitre. 2° Que le ganglion spiral du nerf acoustique est comparable aussi à un ganglion spinal. Mais les cellules nerveuses du ganglion spiral ont con- servé, d'une façon permanente, la forme de cellules bipolaires, forme qu'elles ne possèdent que temporairement dans les autres ganglions cérébro- spinaux des vertébrés des poissons exceptés). EXPLICATION DES FIGURES FIG. 1. Ganglion spinal d'un embiyon de canard au vingtième jour d'incu- bation; rac. post. : racine postérieure; rac. ant. : racine antérieure; n. pér. : nerf périphérique. FIG. 2. Ganglion spinal d'une souris blanche nouveau-née; l'ac post. : racine postérieiue ; n. pér. : nerf périphérique. FIG. 3. Ganglion de Gasser d'une souris blanche nouveau-née; c : centre; p : périphérie. FIG. 4 A. Cellules du ganglion de Gasser d'une souris blanche nouveau-née. FIG. 4 B. Cellules du ganglion de Gasser d'un chien nouveau-né. FIG. 5. Ganglion plexiforme d'un chien nouveau-né; c : centre; p : périphérie. FIG. 6. Ganglion plexiforme d'un chat nouveau-né; c : centre; p : périphérie. FIG. .7. Cellules nerveuses du ganglion plexiforme d'un chat nouveau-né. FIG. 8 A. Coupe du limaçon d'une souris blanche âgée de quelques jours. FIG. 8 B. Cellules bipolaires du ganglion spiral d'une souris blanche âgée de quelques jours. FIG. 9. Même coupe que celle de la fig. 8 A, FIG. 10. Coupe horizontale de la lame spirale d'une souris blanche âgée de lo jours, montrant les prolongements périphériques des cellules bipolaires du gan- glion spiral. FIG. 11. Coupe horizontale de la lame spirale d'une souris blanche âgée de lo jours, avec quelques cellules bipolaires. ■'^^n<^&huctitezi^.a^n£U.à£i S . ^iCie, 5C. NOUVELLES RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX PAR A. VAN GEHUCHTEN PROFESSEUR d'aNATOMIE A L UNIVERSITÉ DE LOUVAIN {Mémoire déposé le i août 1892.) 29 NOUVELLES RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX Dans notre dernier travail sur les ganglions cérébro-spinaux (i), un examen assez complet des principaux travaux publiés sur ce sujet et quelques observations personnelles nous ont permis de conclure que les ganglions spinaux des vertébrés sont, en réalité, formés d'éléments nerveux identiques. La différence morphologique qui sépare les cellules bipolaires des poissons des cellules unipolaires des autres vertébrés est plus ap- parente que réelle. Les ganglions spinaux de tous les vertébrés sont formés primitivement de cellules bipolaires. Cette forme se maintient d'une façon définitive chez les poissons, tandis qu'elle n'existe que temporairement chez les autres vertébrés. Chez ceux-ci, les cellules bi- _ polaires se transforment en cellules unipolaires par le rapprochement des deux pôles et par la fusion, sur une étendue plus ou moins consi- dérable, des deux prolongements primitivement indépendants. Les cel- lules bipolaires ne constituent donc qu'un stade d'évolution des cellules unipolaires. Des deux prolongements que possède toute cellule d'un ganglion spinal, le plus gros devient le cylindre-axe d'une fibre nerveuse périphé- rique ; l'autre, généralement plus grêle, entre dans la racine postérieure. (i) A. Van Gehuchten : Contribution à l'étude des ganglions cérébro-spinaux ; Bulletins de l'Académie des Sciences de Belgique, août, 1892. — Voir aussi : La Cellule, t. VIII, 21: fascicule, 1892. î36 A VAN GEHUCHTEN pénètre dans la substance blanche "du cordon postérieur, s'y bifurcjuc en une branche ascendante et une branche descendante, et celles-ci, de même que leurs collatérales, vont' se terminer librement dans la substance grise. Parmi les nombreux ganglions situés sur le trajet des nerfs cérébraux, nous avons étudié spécialement le ganglion de Casser du trijumeau, le ganglion pétreux du glosso-pharyngien, le ganglion plexiforme du pneumo- gastrique et le ganglion spiral de la branche limacéenne du nerf acoustique. Nous avons démontré, à l'aide des réductions obtenues par la méthode rapide de Golgi, que tous ces ganglions sont comparables aux ganglions spinaux : comme ceux-ci, ils sont formés d' éléments nerveux, unipolaires ou bipolaires, pourvus de deux prolongements dont l'un est destiné à se terminer dans l'axe cérébro-spinal, tandis que l'autre se rend à la périphérie. Depuis que ce travail a été envoyé à l'Académie des sciences de Bel- gique, le 4 juin 1892, nous avons continué nos recherches sur la structure des différentes parties de l'axe cérébro-spinal. Nous nous sommes occupé d'une façon toute spéciale de la structure si compliquée de la moelle allongée et delà protubérance' annulaire. Ces recherches sont loin d'être terminées. Nous avons cependant obtenu des résultats assez complets sur la manière de se comporter des nerfs périphériques sensitifs à leur entrée dans le tronc cérébral, et sur les cellules radiculaires ou les noyaux d'origine réelle des nerfs moteurs. Nous allons les résumer en quelques mots. Conformément aux observations de Kôlliker, nous avons trouvé que les cylindre-axes des fibres nerveuses motrices des différents nerfs crâniens ne sont que les prolongements cylindraxils de cellules nerveuses radiculaires situées dans le tronc cérébral. Pour la plupart des nerfs crâniens le prolon- gement cylindraxil se rend directement de la cellule d'origine dans le nerf périphérique. Les réductions que nous avons obtenues jusqu'ici étaient quelque peu incomplètes. Elles nous ont cependant permis de vérifier ce fait, chez des embryons de canard et des embryons de poulet, pour les cel- lules radiculaires de l'hypoglosse, du spinal, du pneumo-gastrique, du glosso-pharyngien, du facial, de l'oculo-moteur externe et du trijumeau. Chez le canard et le poulet, les cellules radiculaires du facial sont situées en avant et en dehors des cellules radiculaires des fibres nerveuses de la sixième paire. Leur prolongement cylindraxil se dirige d'abord vers le plancher du quatrième ventricule, puis se recourbe sur lui-même pour atteindre l'origine apparente; mais dans ce trajet il reste toujours en dehors du noyau d'origine du nerf de la sixième paire, et n'affecte pas avec ce der- nier les rapports intimes qu'il présente chez l'homme. RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 237 Nous n'avons pas encore obtenu la réduction des cellules radiculaires- du pathétique. Par contre, chez des embryons de canard du dix-septième jour d'incubation, nous avons trouvé une disposition spéciale pour les pro- longements cylindraxils des cellules radiculaires du nerf oculo-moteur com- mun. Ces cellules radiculaires, très volumineuses, sont situées entre l'aque- duc de Sylvius et le faisceau longitudinal postérieur. Le prolongement cylindraxil, né du corps cellulaire ou bien de la base d"un des prolongements protoplasmatiques, se dirige en avant. Pour un certain nombre de cellules radiculaires il se rend directement dans le nerf périphérique du même côté, conformément à la disposition générale des autres nerfs moteurs. Il y a cependant un grand nombre de cellules radiculaires dont le prolongement cylindraxil se comporte d'une façon spéciale. Au lieu de se rendre dans le nerf périphérique du même côté du corps, ces prolongements passent la ligne médiane, s'entrecroisent avec ceux venant des cellules radiculaires du côté opposé et se rendent alors dans le nerf périphérique. Il existe donc, chez le canard, un entrecroisement partiel pour les fibres ne.rveuses qui proviennent des noyaux d'origine réelle des nerfs de la troisième paire, c'est-à-dire un entrecroisement partiel pour les prolonge- ments cylindraxils des neuromes moteurs périphériques. Nous avons constaté, sur ces mêmes coupes, que les fibres du faisceau longitudinal postérieur émettent, au niveau du noyau d'origine du nerf oculo-moteur commun, un grand nombre de collatérales; celles-ci viennent se terminer par des arborisations libres entre les prolongements protoplas- matiques des cellules radiculaires du nerf de la troisième paire. Pour les nerfs crâniens sensibles nous pouvons confirmer le fait signalé déjà par Kôlliker et Held : un grand nombre des fibres nerveuses qui les constituent se bifurquent à leur entréedans le tronc cérébral et se compor-- tent ainsi comme les fibres des racines postérieures des nerfs spinaux. Nous publierons bientôt en détail tous ces résullats avec des figures à l'appui. Dans le cours de ces recherches, nous avons obtenu également de su- perbes réductions sur un certain nombre de ganglions cérébro-spinaux, et nous y avons trouvé quelques particularités nouvelles qui méritent d'être signalées. La liste des travaux publiés sur les ganglions, spinaux était, dans notre dernier travail, quelque peu incomplète. Nous avons oublié de signaler un article de Ranvier paru en 1882, un article de Kôlliker et un autre de Retzius, et nous n'avions pas du tout connaissance' des travaux de Arndt, 238 A VAN GEHUCHTEN de Stiénon et de Hans Daae. Afin de compléter la partie bibliographique de notre travail nous donnerpns une courte analyse de ces publications. Enfin, une étude comparéedes cellules bipolaires des différents éléments nerveux sensitifs nous éclairera, croyons-nous, sur la véritable signification physiologique du prolongement périphérique des cellules des ganglions cé- rébro-spinaux. Tels sont les trois points qui feront l'objet de ce travail. RuD. Arndt (i) a étudié les cellules nerveuses des ganglions spinaux, du ganglion de Gasser et du ganglion plexiforme dans les différentes classes de vertébrés. Il admet que partout ces cellules sont bipolaires; plusieurs d'entre elles seraient même multipolaires. ^^Die ausgesprochenste Bipolaritat spinaler Ganglienkôrper die fur die Fische von R. Wagner und Bidder schon lângst erwiesen, halte ich somit fur aile Thierclassen als ausgemacht. Ich halte es fiir beinahe ebenso unzweifelhaft dass auch etliche dieser Ganglienkôrper multipolar sind (2) r. Il ne veut pas se prononcer sur la question de savoir si des cellules unipolaires existent ou n'existent pas, mais, pour lui, le plus grand nombre des cellules unipolaires que l'on ob- tient par dissociation sont des productions artificielles. Les deux prolongements qui proviennent des cellules nerveuses des ganglions cérébro-spinaux naissent en des points très rapprochés. Le plus souvent, ils ont tous les deux la direction périphérique. Quelquefois aussi ils se dirigent en sens contraire. Il pense cependant que les deux prolongements vont toujours à la périphérie, et que les cellules bipolaires doivent ainsi être considérées comme des appareils destinés aux réflexes (Reflexapparate). Comme les cellules unipolaires n'ont qu'un seul prolonge- ment, il croit que ce prolongement se termine librement dans le ganglion, par suite d'un développement anormal. Il admet aussi l'existence de cellules apolaires, mais également comme le résultat d'un développement anormal. Stiénon (3) a recherché la structure des ganglions spinaux chez les mammifères, les oiseaux, les reptiles et les batraciens. Partout il a trouvé, par dissociation, des cellules unipolaires et des divisions de fibres nerveuses (1) RuD. Arndt : Uiilcrsuchungen ïiber die Ganglienkôrper der Spinalganglien ; Arch f. mikr. Anat , Bd ii, pp 140-168, 1875. (2) Arndt . Loc cit , p. 148. (3) Stiénon : Recherches sur la structure des ganglions .-•■pinaux clicj les vertèbres supérieurs; Annales de rUniversité de Bruxelles, t. i, pp. 147-163, 1880. RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CÉRÉBRO-SPINAUX 239 grosses et fines. Deux fois chez la grenouille et une fois chez le chien, il a vu le prolongement unique se bifurquer; cette division de fibre présentait tous les caractères des fibres en T, vues par lui dans tous les ganglions étudiés. En examinant les cellules pourvues d'un prolongement unique, il a pu se convaincre '^ que beaucoup d'entr'eux ne sont que des produits arti- ficiels : ils proviennent de la rupture de la fibre divisée au niveau de sa bifurcation ; lorsqu'on est prévenu de la division possible de ces filaments, il n'est pas difficile d'en retrouver les vestiges dans un grand nombre de prolongements simples, jt De ces recherches il semble donc résulter que la bifurcation du pro- longement unique se faisait, aux yeux de Stiénon, plus souvent qu'on ne l'admettait jusqu'alors. Cependant, malgré tous ses efforts pour ré- soudre le problème, Stiénon arrive à une seule conclusion certaine, à savoir : - des fibres bifurquées peuvent être en rapport avec des cellules nerveuses •^•, mais il n'est pas encore - en mesure de décider si cette dis- position est la règle, si tous les prolongements des cellules présentent la forme en-.T ". Pour arriver à une conclusion plus décisive, il a fait, chez la grenouille et chez le chien, la numération des fibres nerveuses d'un nerf spinal. Il a compté séparément en dedans du ganglion les fibres des racines sensitives et motrices, puis, en dehors du ganglion, les fibres du nerf mixte. Conformément aux résultats obtenus déjà par Holl, il a trouvé que le nombre des fibres nerveuses est le même en dedans et en dehors du ganglion. Il en conclut, à juste titre, que le nombre des fibres nerveuses n'augmente pas dans la racine sensitive après son passage dans le gan- glion. Et, comme la section des racines sensitives entre le ganglion et la moelle épinière ne lui donne pas des fibres en dégénérescence dans le nerf- périphérique, il en conclut, jusqu'à preuve du contraire, « qu'en réalité toutes les fibres contractent les mêmes rapports avec les cellules des ganglions ^. Dans son article publié en 1882, Ranvier (i) abandonne l'hypothèse émise par lui en 1875, à savoir que plusieurs cellules ganglionnaires étaient branchées sur le prolongement afférent d'un tube en T, hypothèse à laquelle - il était arrivé en constatant que les tubes nerveux qui se dégagent des cellules ganglionnaires ont en général un diamètre inférieur à celui des (i) Ranvier : 5j(!- te g-^Hg/îOHS cere'iro-s^'îHjîM-; Comptes rendus de Paris, t rp, pp. ii65-ii68, 1882. 240 A. VAN GEHUCHTEN branches du tube en T „. En fixant les ganglions par le bichromate d'am- moniaque ou le liquide de Millier, et en colorant les coupes par le picro- carmin, il a pu constater que, dans les tubes en T qu'ils forment, les cylindre-axes se rencontrent sous des angles variables. Le cylindre-axe de la branche effércnte possède en général un diamètre supérieur à celui des deux autres, comme s'il résultait de leur fusion. Le fait de la bifurcation du prolongement unique, relevé d'abord par Axel Key et Retzius, et sur lequel Retzius surtout avait insisté d'une façon spéciale, se trouve donc confirmé, en 1882, par Stiénon et par Ranvier. Hans Daae (1) a étudié, en 1888, sous la direction de Flemming, les cellules des ganglions spinaux du cheval et est arrivé à des résultats qui sont tout à fait en désaccord avec tout ce qui a été publié sur les éléments des ganglions spinaux. D'après les observations de Hans Daae, les cellules des ganglions spinaux du cheval sont unipolaires, mais en ce sens seulement qu'elles se trouvent en relation avec une seule grosse fibre nerveuse. Pour quelques éléments, cette fibre nerveuse est simple et se continue directement avec la cellule d'origine : c'est là une véritable cellule unij^olaire, telle qu'elle a été décrite jusqu'ici par presque tous les auteurs. Mais, pour le plus grand nombre des éléments, la disposition est plus compliquée. Le prolongement unique, en se rendant vers la cellule d'origine, se divise en plusieurs fibres myéliniques fines et contournées, dont le nombre varie de deux à sept. Ces fibres contournées en peloton forment ce qu'il appelle le Faserknàuel. De ces fibres enroulées partent alors un nombre variable de fibres terminales, qui perdent leur gaîne de myéline et qui vont se continuer avec le corps cellulaire. Il donne à ces fibres myéliniques plus grêles le nom de fibres d'origine : Urspnmgsfasern. Si ces fibres d'origine ne sont qu'au nombre de deux, la cellule est bipolaire. Si ce nombre est plus considérable la cellule est multipolaire. Mais que la cellule soit bipolaire ou multipolaire, les fibres d'origine finissent par se réunir ensemble et par produire un tronc unique qui va alors présenter la division en T. Ces observations de Hans Daae se trouvent entièrement isolées dans la littérature. On doit, semble-t-il, les accueillir avec quelque défiance, car l'auteur avoue lui-même qu'il lui a été impossible de voir la rela- tion directe et intime qui existe entre ces prolongements multiples et (1) Hans Daae : Zur Kenntniss der Spinalgatjglien:^ellen beim Sâugethiere ; Arch f. mikr. Anat., Ed. 3i, pp. 223-235, 188S. RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 24I le corps de la cellule, r Dièse Zusammenhange mit der Zelle, dit-il, sind- nun freilich theilsdurchdie Faserknâuel selbst, theils durch die dichtkernige Kapsel sehr oft mehr oder weniger verdeckt, sodass man nur selten mit einiger Sicherheit auf ihre Anzahl schliessen kann. Doch habe ich in einer Anzahl von Fallen bestimmt gesehen, dass zwei, drei bis vier Fasern der intracapsularen Verzweigung unter plôtzlichem Abbrechen der Markscheide unmittelbar an der Peripherie der Ganglienzelle authoren. Die feineren Verhaltnisse des Zusammenhanges dieser Fasern mit der Zellsubstanz lassen sich bei der benutzten Méthode nicht ermitteln, weil dabei sowohl der Axencylinder als der Zellkôrper zu blass erscheinen ^. D'ailleurs, en examinant les figures qui accompagnent le travail de Hans Daae, il n'est pas possible de dire s'il existe quelque relation immédiate entre les fibres nerveuses et les cellules qu'il représente. La figure lo, par exemple, signalée par Daae comme devant prouver la continuation directe des fibres nerveuses avec la cellule d'origine, ne prouve rien, car cette cellule ne possède qu'un seul prolongement. Dans une communication préliminaire publiée dans l'Anatomischer Anzeiger, Kolliker(i) résume en quelques mots les résultats de ses recher- ches sur la structure interne de la moelle allongée. Pour les nerfs crâniens sensitifs, il admet avec His que les fibres qui les constituent ont leur origine en dehors de l'axe cérébro-spinal dans les ganglions situés sur le trajet de ces nerfs, et que ces fibres sensitives trouvent plutôt dans le tronc cérébral leur terminaison. Nos recherches sur les ganglions cérébraux ont pleine- ment justifié ce résultat pour la partie sensitive du trijumeau, du glosso- pharyngien et du vague, et pour tous les éléments de la huitième paire des nerfs crâniens. Retzius (2) a été le premier à confirmer, chez un embryon de chat,- à l'aide de la méthode de Golgi, l'existence des cellules bipolaires décou- vertes par His chez l'embryon humain. II Les cellules nerveuses qui entrent dans la constitution des ganglions spinaux sont extrêmement variables de volume. D'après les mensurations de KÔLLIKER,. leur diamètre varie de 29 à 60 i'-. (i) KÔLLIKER : 'Der /eiiiere Bail des vcrlângcrtcn ^lark-cs. Eine vorlâufige Mittcilung ; Anato- mischer Anzeiger, Jahrg. VI, pp. 427-431, 1891. (2 Retzius : Ziir Keniitniss der Epcndym^eUcn der Centralorgane; Verhandl. des biologischea Vereins in Stockholm, iNiji, pp. io3-ii6. 30 242 A. VAN GEHUCHTEN Des mensurations faites par Hélène Koneff(i), il résulte que, dans les ganglions spinaux du renard, la largeur des cellules oscille entre 32 et 100 i^-, et leur longueur entre 43 et' 104 1^ ; chez le bœuf la largeur des cellules varie de 57 à 122 |A, et la longueur de 57 à 144 i-^. Cette différence de volume s'ob- serve aussi dans les cellules colorées en noir par le chromate d'argent. Nous avons reproduit, dans les fig. 1 et 2, deux ganglions spinaux de souris blanche nouveau-née; on y voit clairement que, si la plupart des cel. Iules nerveuses ont un volume peu variable, il en existe cependant quelques- unes qui sont beaucoup plus petites que les autres : témoins les cellules a. Ces éléments grêles sont pourvus d'un prolongement unique, très fin et très délicat, qui se comporte comme le prolongement unique des autres cellules du ganglion : après un trajet d'une longueur variable, il se bifurque en donnant naissance à un prolongement central et à un prolongement périphérique. Le prolongement externe des cellules des ganglions spinaux devient le cylindre-axe d'une fibre périphérique ; il se rend soit dans la branche ven- trale, soit dans la branche dorsale du nerf spinal. Telle est la disposition ordinaire. Une fois, cependant, chez un embryon de canard au dix-septième jour d'incubation, nous avons vu une fibre d'un ganglion spinal se bifurquer .au point de division du nerf spinal, et envoyer un cylindre-axe dans la branche ventrale et un autre dans la branche dorsale. Nous avons repro- duit cette fibre bifurquée dans la fig. 3 a. Malheureusement la cellule d'origine n'était pas réduite. Nous croyons cependant que cette fibre repré- sente le prolongement externe d'une cellule bipolaire. Nous avons fait ressortir, dans notre dernier travail, que, des deux branches qui proviennent du prolongement unique, la branche destinée à l'axe cérébro-spinal est, dans l'immense majorité des cas, beaucoup plus grêle que la branche périphérique. Ce fait ne constitue cependant pas une règle absolue pour les cellules des ganglions spinaux. Plus d'une fois, nous avons trouvé les deux branches de bifurcation d'égale épaisseur, fig. 4 A, ainsi que cela s'observe aussi dans certains ganglions cérébraux (2). Il y a plus : dans quelques cas rares, la branche centrale nous a paru plus épaisse que la branche périphérique, fig. 4 B. Comme, dans toutes nos coupes, le ganglion spinal était maintenu en relation avec la moelle épinière, il nous (i) Hélène Koneff : Beitrâge ^iir Kenntniss der Nervcn:;cl!en in dcn perip/wren Ganglien ; Bem, 188G. (2) A. Van Gehuchten ; Contribution à l'ctude des ganglions cérébro-spinaux; Bulletins de l'Académe des Sciences de Belgique, août, 1892. — La Cellule, t. VIII, 2" fascicule, 1892. RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 243 était facile de distinguer entre le prolongement central et le prolongement périphérique. Chez l'embryon de poulet et chez l'embryon de canard, les cellules sont nettement opposito-bipolaires jusque vers le douzième jour d'incubation. Chez l'adulte, au contraire, elles sont toutes unipolaires. C'est à partir du douzième jour d'incubation, que commence la transformation des cellules opposito-bipolaires en cellules gémino-polaires, par le rapprochement insensible des deux prolongements primitifs, puis en cellules unipolaires, par la fusion, sur une certaine étendue, de ces deux prolongements en un prolongement unique. Nous avons représenté dans la fig. 5 quelques- uns des stades par lesquels passent les cellules opposito-bipolaires pendant leur transformation en cellules unipolaires; ils indiquent claire- ment la marche du processus. Ces cellules proviennent d'un ganglion spinal d'un embryon de canard au dix-septième jour d'incubation. La même transformation s'opère dans des ganglions du trijumeau, du glosso-pharyn- gien et du pneumogastrique chez les oiseaux et chez les mamnifères. La FIG. 6 représente quelques-uns des stades de cette transformation dans le ganglion de Gasser d'un embryon de canard au treizième jour d'incuba- tion. Sur les cellules de la fig. 7, qui proviennent du ganglion de Gasser d'un embryon de cobaye, on voit comment le prolongement unique, d'abord court et épais, s'allonge insensiblement, en même temps qu'il se rétrécit et qu'il devient un peu tortueux. Outre les cellules nerveuses bipolaires ou unipolaires et les fibres nerveuses qui en proviennent, Ramon y Cajal signale encore, dans le gan- glion spinal, l'existence de fibres d'origine sympathique, venant se ter- miner par des nids péricellulaires autour du corps des cellules nerveuses. Dans les nombreuses préparations de ganglions spinaux et de ganglions cérébraux que nous avons étudiées, et dans lesquelles la réduction nous semblait avoir réussi à merveille, nous n'avons jamais eu la bonne fortune de voir les nids péricellulaires signalés par Ramon y Cajal. Sur plusieurs d'entre elles, la chaîne ganglionnaire du sympathique était réduite en même temps que les ganglions spinaux, et plus d'une fois nous avons pu poursuivre les fibres nerveuses du sympathique jusque dans le ganglion spinal; mais, arrivées là, ces fibres se recourbaient sur elles-mêmes et quittaient le gan- glion pour entrer soit dans la branche ventrale, soit dans la branche dorsale du nerf périphérique, ainsi que nous l'avons représenté dans la fig. 2, symp. Loin de nous cependant la pensée de mettre en doute l'exactitude des 80. 244 ^- ^^^ GEHUCHTEN observations de Ramon y Cajal. Tous ceux qui ont travaillé avec la méthode de GoLGi savent, aussi bien que nous, combien les résultats qu'elle donne sont inconstants. Nous voulons simplement constater la non réussite de nos recherches sur ce point en particulier, convaincu d'ailleurs qu'avec la mé- thode de GoLGi, plus encore qu'avec n'importe quelle autre méthode, un résultat négatif ne peut avoir aucune valeur. Pour le ganglion de Gasser du t-rijumeau, nous avons obtenu des réductions démonstratives chez un embryon de cobaj'e, fig. 8, et chez un embryon de canard au dix-septième jour d'incubation, fig. 9 et 10. La coupe représentée dans la fig. 9 est intéressante sous plusieurs rapports. Elle passe par la protubérance annulaire en même temps que par les ganglions des deux nerfs trijumeaux. Pour ne pas compliquer la figure, nous n'avons représenté que les parties qui intéressent le nerf de la cinquième paire. A gauche, le ganglion de Casser seul a été sectionné, ses cellules présentent toutes les formes intermédiaires entre une cellule opposito-bipolaire et une cellule unipolaire. Le prolongement périphérique de chaque cellule nerveuse entre comme élément constitutif dans une des branches du nerf périphérique, tandis que le prolongement central prend part à la constitution de la racine sensitive et entre dans la protubérance annulaire. Là, un grand nombre de ces fibres se bifur- quent en donnant naissance à une branche ascendante et à une branche descendante. Ces branches ascendantes et descendantes vont constituer dans l'axe cérébro-spinal ce qu'on a toujours appelé jusqu'ici racine descendante et racine ascendante du nerf de la cinquième paire, ainsi que Kôlliker et Held (i) l'ont déjà signalé. Toutes les fibres nerveuses de la portion sensitive du trijumeau né présentent pas cependant cette bifurcation à leur entrée dans le tronc céré- bral; un grand nombre d'entre elles se recourbent toutes entières en bas et entrent dans la constitution de la racine ascendante ; celle-ci devient ainsi unevéritable racine descendu}} te. Au moment où ces fibres sô recourbent elles émettent des branches collatérales qui finissent par des ramifications termi- nales dans la substance grise voisine. Nous avons représenté quelques-unes de ces fibres dans la fig. lO, rac. se)}s.. (i) Held : Die Endigungswcisc der sansiblen Nerven im Gehirn; Archiv f. Anat und Phys , An it Abih , pp. 33- Sg, 1892. RECHERCHES SUR LES GANGLIQNS CEREBRO-SPINAUX 245 A droite sur la fig. 9, les éléments nerveux du ganglion de Casser sont réduits également. On y voit de plus la racine antérieure ou motrice du nerf trijumeau, rac, mot.. Les fibres qui forment cette racine motrice ne sont que les prolongements cylindraxils de cellules nerveuses situées dans le tronc cérébral. Ces cellules radiculaires de la partie motrice du trijumeau sont des cellules multipolaires, pourvues d'un grand nombre de prolonge- ments protoplasmatiques qui se ramifient principalement dans les parties profondes de l'axe cérébro-spinal, ainsi que lé montre la fig. 10, rac. mot.. Le prolongement cylindraxil, né du corps cellulaire ou de la base d'un de ses prolongements protoplasmatiques, sort du tronc cérébral et va devenir le cylindre-axe d'une fibre nerveuse motrice périphérique. Nous n'avons jamais vu ce prolongement cylindraxil émettre des branches collatérales avant sa sortie du tronc cérébral. Quant au nerf acoustique, nous avons pu poursuivre jusqu'aux cellu- les bipolaires dont elles proviennent, les fibres nerveuses qui se termi- nent dans l'épithélium des taches et des crêtes acoustiques, chez l'em- bryon de canard au vingtième jour d'incubation et chez des embryons de cobaye. Nous avons représenté dans la fig. 11 quelques-unes des ramifica- tions terminales du prolongement péiiphérique de ces cellules bipolaires. III. Un point qui, dans la structure des éléments nerveux des ganglions cérébro-spinaux, nous semble mériter une attention spéciale c'est le fait, sur lequel nous avons d'ailleurs insisté plus d'une fois, que le prolongement interne ou central des cellules des différents ganglions est, dans l'immense majorité des cas, plus grêle que le prolongement périphérique, tellement- que, bien souvent, le prolongement central apparaît comme une simple branche collatérale du prolongement unique. Ce fait, relevé pour la première fois, en i886, par v. Lenhossek sur les ganglions spî*naux de la grenouille, a été constaté depuis sur les éléments nerveux des ganglions spinaux des vertébrés supérieurs (Ramon y Cajal et Van Gehuchten) et de quelques ganglions cérébraux chez les oiseaux et les mammifères (Van Gehuchten). Mais la difi"érence qui existe entre le prolongement central et le prolongement périphérique ne consiste pas seulement dans une différence de volume; elle est, à nos yeux, beaucoup plus profonde et beaucoup plus importante. Ainsi que nous l'avons déjà 246 A. VAN GEHUCHTEN signalé pour le ganglion plexiforme du pneumogastrique chez le chien(i), et ainsi que cela se retrouve dans tout ganglion cérébro-spinal, le prolon- gement périphérique n'est' le plus souvent, que la continuation directe du prolongement unique. Le prolongement central, au contraire, possède des caractères particuliers. Comparé au prolongement nerveux d'une cellule nerveuse à cylindre-axe long de n'importe quelle partie de l'axe cérébro- spinal, il présente seul les caractères particuliers de ce dernier. De sorte que, si des deux branches de bifurcation une seule devait être de nature cylindraxile, morphologiquement ce prolongement cylindraxil ne pourrait être que le prolongement central. Ce fait a acquis une importance spéciale depuis que Ramon y Cajal (2) a émis l'idée que le prolongement périphérique des cellules qui entrent dans la constitution des ganglions spinaux est de nature protoplasmatique. C'est en comparant les cellules bipolaires des ganglions spinaux de l'embryon de poulet aux cellules bipolaires de la muqueuse olfactive que Ramon y Cajal a proposé cette hypothèse. Les cellules bipolaires olfac- tives ont un prolongement périphérique et un prolongement central. Tous ceux qui ont étudié les cellules olfactives avec la méthode de Golgi sont unanimes pour reconnaître la nature protoplasmatique au prolongement externe et la nature cylindraxile au prolongement central (Gastri et Castronovo, Ramon y Cajal, Van Gehuchten, Martin, v. Brunn, Retzius). Si les cellules des ganglions spinaux sont les homologues des cellules bipolaires de la muqueuse olfactive, leur prolongement périphérique peut aussi être considéré comme un prolongement protoplasmatique. En signalant, en 1891, cette idée ingénieuse de Ramon y Cajal, nous avons fait ressortir la grande importance qu'elle pourrait avoir pour établir une distinction sinon morphologique, au moins fonctionnelle entre les pro- longements protoplasmatiques et le prolongement cylindraxil. " Les prolon- gements protoplasmatiques, disions-nous (3), serviraient à la conduction cellulipète et le prolongement cylindi'axil à la conduction ce/lu lifiige «, — " Mais, avons-nous ajouté, pour admettre cette hypothèse il faudrait modifier complètement l'idée que nous avons d'un prolongement protoplasmatique et admettre que ce prolongement peut devenir le cylindre-axe d'une fibre (i) Van Gehuchten : La structure des lobes optiques chej l'embryon de pouk't ; La Cellule, t. VIII, i' fasc, 1892. (2) Ramon y Cajal : Concxion gênerai de los elementos nerviosos; La medicina practica, n" 88, Octobre, 1S89. (3) Van Gehuchten : La structure des centres nerveux : la moelle épini'ere et le cervelet; La Cellule, t. VII, I' fascicule, 20 avril, 1801 • RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 247 nerveuse, ce qui nous paraît difficile «. Nous étions convaincu à cette épo-- époque qu'un prolongement cylindraxil seul pouvait s'entourer d'une gaîne de myéline et devenir le cylindre-axe d'un nerf périphérique. Depuis lors, de nouvelles observations sont venues apporter un appui considérable à l'hypothèse de Ramon y Cajal. Tout d'abord, von Lenhos- SEK(i) a découvert ce fait important que, chez le lombric, les cellules qui correspondent aux cellules spinales des vertébrés se trouvent éparpillées entre les cellules épithéliales de l'épiderme. Ce sont des cellules bipolaires, identiques aux cellules olfactives des vertébrés, dont le prolongement périphérique de nature protoplasmatique s'étend jusqu'à la surface libre de la peau et dont le prolongement interne cylindraxil se termine librement dans la chaîne ganglionnaire. Retzius (2), dans ses belles recherches sur le système nerveux des lombricinés a confirmé pleinement l'importante découverte de von Lenhossek. Nous-méme(3), en étudiant la structure des lobes optiques chez l'em- bryon du poulet du dix-huitième au vingtième jour d'incubation, nous avons appelé l'attention sur les cellules nerveuses volumineuses de la zone gan- glionnaire. Ces cellules sont pourvues d'un prolongement interne cylindraxil et d'un grand nombre de prolongements protoplasmatiqnes périphériques qui traversent toute l'épaisseur du toit optique, pour se terminer par des arborisations libres dans la couche des fibres rétiniennes. Or, ces prolonge- ments protoplasmatiqnes prennent presque tous les caractères morpholo- giques d'un prolongement cylindraxil. Ils seraient tout à fait comparables au prolongement périphérique des cellules rachidiennes, s'ils s'entouraient comme ce dernier d'une gaîne de myéline. A ces raisons, que nous avons déjà fait valoir dans un autre travail, nous pouvons encore ajouter les considérations suivantes : — Les recherches récentes de Retzius (4) et les nôtres (5) sur les fibres du nerf auditif nous ont fait connaître un stade en quelque sorte intermédiaire (1) Lenhossek : Urspriing. Verlan/ un d Endigung der sensibebi Nen'enfasern bci Lumbriciis , Arch. f. mikr. Anat.. Bd. 3g, pp. i02-i36, i8q2, (2) Retzius : 1)js Nervensrstcm der Lumbrkinen ; Biologische Untersuchungen Neue Folge; III, pp. i-iG, 1892. (3) Van Glhuchten : La structure des lobes optiques che^ l'embryon de poulet; La Cellule, t. VIII, i"' fascicule, \' février, 1892. (4) Retzius ; Die Endigungsweise der Gehornerven ; Biologische Untersuchungen. Neuc Folge, 111, pp. 2g-36. 1S92. (5) Van Gehuchten : Contribution à Vétude des ganglions cérébro-spinaux; Bulletins de l'Aca- démie des Sciences de Belgique, août, 1S92. - La Cellule, t VIII. 2'' fascicule, 1892. 248 A VAN GEHUCHTEN entre les cellules olfactives et les cellules spinales. Dans le ganglion spiral du limaçon de rembr3'on de poulet, de la souris blanche et du cobaye, nous avons trouvé des cellules bipolaires identiques aux cellules de la muqueuse olfactive et aux cellules bipolaires des ganglions cérébro-spinaux. Ces cellu- les sont pourvues de deux prolongements. L'un, central et cylindraxil, se termine dans l'axe cérébro-spinal ; l'autre, périphérique, est intermédiaire pour sa longueur entre celui de la cellule olfactive et celui d'une cellule des ganglions cérébro-spinaux, et finit par des ramifications libres et souvent répétées entre les cellules ciliées de l'organe de Corti. Pour mieux saisir l'analogie, rappelons-nous que les cellules des gan- glions spinaux des vertébrés sont, au fond, de véritables cellules bipolaires. Les cellules bipolaires olfactives et auditives représentent donc, en quelque sorte, un stade primitif des cellules spinales. Enfin, ajoutons ce que nous avons fait ressortir plus haut : dans un grand nombre de cas, le prolongement interne des cellules des ganglions cérébro-spinaux possède à un degré plus accentué que le prolongement périphérique les caractères du prolongement cylindraxil, et tout doute sera levé, nous semble-t-il, sur la véritable signification du prolongement périphérique. Aussi, nous sommes-nous rallié à l'hypothèse de Ramon y Cajal; nous considérons le prolongement périphérique des cellules nerveuses des ganglions cérébro-spinaux des vertébrés comme un prolongement proto- plasmatique qui, à cause de son immense longueur, a pris les caractères morphologiques d'un prolongement cylindraxil et qui, de plus, s'est entouré d'une gaine protectrice de myéline. Ainsi que nous l'avons fait remarquer au dernier Congrès des anato. mistes à Vienne, cette façon de considérer les cellules nerveuses des ganglions cérébro-spinaux fait rentrer dans le même type tous les éléments nerveux sensitifs périphériques. Il n'existe pas, bien qu'on l'ait cru pendant longtemps, différents .modes de terminaisons nerveuses sensitives périphéri- ques : les uns par des ramifications libres et les autres par des cellules spéciales. Tous les éléments nerveux sensitifs périphériques se comportent d'une façon identique, tous se réduisent à des cellules bipolaires pourvues d'un prolongement central et d'un prolongement périphérique. La seule et unicjuc différence que ces neuromes (Waldeyer) sensitifs présentent entre eux réside dans la place qu'occupe la cellule de l'élément nerveux. Pour l'olfaction, le corps de l'élément nerveux se trouve dans la mu- queuse olfactive elle-même. D'après les recherches de Fusari et de Panasci, RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 24g les éléments nerveux gustatifs ont leur cellule dans les bulbes gustatifs. ' En ce qui concerne l'appareil auditif, au contraire, l'élément bipolaire se rencontre plus profondément dans le ganglion spiral. Enfin, quant aux nerfs qui président à la sensibilité ordinaire, l'élément bipolaire est situé dans un ganglion cérébro-spinal. Tous ces éléments sensitifs sont pourvus d'un prolongement périphérique plus ou moins long qui se termine librement dans un épithélium périphérique. Dans les cellules olfactives et les cellules gustatives, il est court et indivis ; il devient plus long et ramifié dans les cellules auditives; enfin, il atteint sa plus grande longueur et étend ses ramifications terminales sur une étendue plus considérable dans les éléments qui président à la sensibilité générale. Ce prolongement périphérique peut être considéré sinon morphologiquement, au moins fonctionnellement, comme un prolongement protoplasmatiquc. Tous les éléments nerveux sensitifs sont aussi pourvus d'un prolongement central qui, partout, repré- sente le véritable prolongement cylindraxil et se comporte d'une façon identique : il se termine librement dans l'axe cérébro-spinal. Ainsi, les éléments nerveux sensitifs, ou neuromes sensitifs périphéri- ques, quels qu'ils soient, envoient vers la périphérie un prolongement pro- toplasmatiquc. Celui-ci est destiné à recueillir les impressions du dehors et à les transmettre à la cellule dont il provient. Ce prolongement périphé- rique possède donc la conduction cellulipcte. Arrivé à la cellule d'origine, l'ébranlement nerveux passe dans le prolongement central ou cylindraxil, pour être ensuite transmis à de nouveaux éléments nerveux situés dans l'axe cérébro-spinal. Le prolongement cylindraxil possède donc la conduction cellulifiige. Ainsi se trouve vérifiée l'hypothèse que nous avons été le pre- mier à émettre d'une façon quelque peu dubitative, et qui a été défendue énergiquement par Ramon y Cajal sous le nom de théorie de la polarisa- tion dynamique des éléments nerveux. D'après cette théorie, les prolonge- ments protoplasmatiques forment des appareils de perception, et les prolon- gements cylindraxils des appareils d'application de l'ébranlement nerveux. Nous savons depuis longtemps que, si l'on sépare une fibre nerveuse de sa cellule d'origine, cette fibre dégénère à son bout périphérique. De ce fait on a conclu que la cellule d'origine d'une fibre nerveuse constitue pour cette dernière son centre de nutrition, son centre trophique. Cette dé- générescence du bout périphérique s'observe aussi bien pour le prolonge- ment périphérique que pour le prolongement central des cellules des gan- glions cérébro-spinaux. Si le prolongement périphérique doit être considéré 2j^0 A. VAN GEHUCHTEN comme un prolongement protoplasmatiquc, il faut en conclure que la cel- lule d'origine n'est pas seulement un centre de nutrition pour le prolonge- ment cylindraxil, mais quelle constitue aussi un centre trophique pour tous les prolongements protoplasmatiques. His a montré, depuis longtemps, que la cellule d'un élément nerveux est le centre génétique pour tous les prolongements qui en dépendent. Tant qu'elle reste sphérique, la jeune cellule nerveuse est apte à se multi- plier ; elle constitue alors une cellule germinative, Keimielle (Hisj. Elle modifie bientôt ses contours extérieurs ; en s'allongeant d'un côté, elle de- vient pyriforme. A partir de ce moment, elle n'est plus apte à se multiplier; elle devient un neiiroblaste (His). La partie effilée de ce neuroblaste va s'al- longer encore et devenir le prolongement cylindraxil. En même temps que ce prolongement se forme, on voit la surface de la cellule devenir irrégu- lière et comme épineuse. Chaque épine est le commencement d'un prolon- gement protoplasmatiquc. Cette genèse du prolongement cydindraxil et des prolongements proto- plasmatiques, poursuivie par His dans l'embryon humain, a été constatée par Ramon y Cajal, à l'aide de la méthode de Golgi, dans les éléments nerveux de l'embryon du poulet. La cellule nerveuse constitue aussi fonctionnellement la partie princi- pale de tout élément nerveux. Ainsi se trouve vérifiée cette loi établie par His, en i888 : toute cellule nerveuse constitue, pour toutes les parties de l'élément nerveux correspon- dant, le centre génétique, nutritif et fonctionnel. CONCLUSION. Toute fibre nerveuse sensitive périphérique possède son origine réelle, c'est-à-dire sa cellule d'origine, en dehors de l'axe cérébro-spinal. Cette cel- lule d'origine avec les prolongements qui en dépendent forme un neurome sensitif périphérique. Celui-ci envoie ses prolongements protoplasmatiques vers la périphérie et son prolongement cylindraxil vers les centres nerveux. Contrairement à ce qu'on avait cru jusqu'ici, l'élément nerveux sensitif trouve dans l'axe cérébro-spinal non pas son origine, mais sa terminaison. Nous montrerons bientôt que les éléments nerveux moteurs ou neu- romes moteurs périphériques présentent une disposition inverse. Le neu- rome moteur a sa cellule dans la substance grise de l'axe cérébro spinal, il RECHERCHES SUR LES GANGLIONS CEREBRO-SPINAUX 251 envoie ses prolongements protoplasnriatiques dans les centres nerveux eux- mêmes, où ils doivent recueillir l'ébranlement nerveux, tandis que son pro- longement cylindraxil se termine dans les organes périphériques. Dans les neuromes sensitifs et dans les neuromes moteurs, les prolon- gements protoplasmatiques ont la conduction cellulipète, et le prolongement cylindraxil la conduction cellulifuge. APPENDICE. Ce travail livré déjà à l'impression, quand parut, dans le numéro du 23 juillet de VAnatomischer Anieiger, un article de v. Lenhossek (i), sur les ganglions spinaux et la moelle épinière chez les embryons de Pristiurus. v. Lenhossek a trouvé dans ces ganglions des cellules opposito-bipo- laires, des cellules unipolaires ainsi que les formes intermédiaires. Ces ob- servations sur un sélacien, ajoutées à celles de Freud, Nansen et Retzius sur deux représentants de cyclostomes, prouvent que la forme opposito- bipolaire n^xiste pas, d'une façon constante, dans les ganglions de tous les poissons. Dans un ganglion de Pristiurus, v. Lenhossek croit avoir observé une cellule avec trois prolongements : l'un destiné au centre, et les deux autres a la périphérie. De ces deux derniers, l'un pénétrait dans la branche ventrale, l'autre dans la branche dorsale du nerf périphérique. Cette observation, toute isolée qu'elle soit, confirme donc pleinement celle que nous avons faite chez un embryon de canard, fig. 3, a; mais, ici, c'est le prolongement externe d'une cellule bipolaire qui se bifurque en une branche ventrale et une branche dorsale. Dans les cellules des mêmes ganglions spinaux de Pristiurus, le prolon- gement périphérique naît de la cellule bipolaire par un petit bout conique, tandis que le prolongement central naît brusquement de la face convexe du corps cellulaire. Si on ajoute à cela, dit v. Lenhossek, le fait que le pro- longement périphérique est sinon d'une façon constante, au moins très souvent, plus gros que le prolongement central, on arrive à la conclusion que le prolongement périphérique doit être considéré comme le prolonge- ment principal. - Wahrend der peripherische Fortsatz stets einen kegelfôr- (1) V. Lenhossek : Beobachtungen an den Spinalganglien iiiij dem Rûckenmark von 'Pristiurus- Embvyonen; Anatomischer Anzeiger, Jahrg- VII, n"''' 16 u. 17, pp. 5ig-53g, 23 juillet, 1892. 252 A. VAN GEHUCHTEN migen Ansatz an die Zelle zeigt, entspringt der centrale mitunter ganz unermittelt von dessen Konvexitât. Wenn schon hierdurch der Eindruck hervorgerufen wird, das der Hauptauslaufer der Zelle der peripherische sei, so wird derselbe noch befestigt durch den Umstand das dieser, wenn auch nicht konstant, so doch oft den centralen an Kaliber iibertrifft (ij. « En désignant le prolongement périphérique du nom de prolongement principal, si v. Lenhossek a exclusivement en vue de faire ressortir que ce prolongement est plus gros que le prolongement central, nous souscri- vons volontiers à sa conclusion. Dans ce cas, les cellules des ganglions spi- naux de Pristiurus possèdent la disposition typique que nous avons reconnue plus haut comme appartenant à tout élément nerveux sensitif périphérique. Si, au contraire, v. Lenhossek est d'avis que le prolongement périphé- rique doit être considéré comme le véritable prolongement cylindraxil, il se trouve en opposition avec la conclusion à laquelle nous a conduit l'étude comparée des différents neuromes sensitifs périphériques. Ainsi que nous l'avons montré plus haut, les deux prolongements des cellules des ganglions cérébro-spinaux sont, à les considérer isolément et superficiellemejnt, de véritables prolongements cylindraxils, puisque chacun d'eux devient le cylindre-axe d'une fibre nerveuse. Mais, si l'on compare les cellules des ganglions cérébro-spinaux aux autres neuromes sensitifs : aux cellules bipolaires du ganglion spiral, aux cellules olfactives, aux cellules gustatives et même aux cellules bipolaires sensitives de l'épiderme du lombric, on ne saurait méconnaître que toutes ces cellules bipolaires sont constituées d'après un même type fondamental, qu'elles sont toutes des éléments homologues. On peut en conclure que les différentes parties qui les constituent sont également homologues, et qu'elles ont la même signification morphologique et physiologique dans les différents éléments nerveux. La division des prolongements d'un élément nerveux en prolongements protoplasmatiques et cylindraxil ne saurait donc se maintenir, puisque, dans certaines circonstances, un prolongement protoplasmatique peut prendre les caractères d'un prolongement nerveux. C'est pour ce motif que nous avons proposé d'établir une nouvelle division, basée sur le sens suivant lequel se fait la transmission de l'ébranlement nerveux, et de distinguer entre prolongements à conduction cellulipcte et prolongements à conduction cellulifuge. (1) V. Lenhossek : Ibid.. p. 522 EXPLICATION DES FIGURES FIG, 1 et 2. Ganglion spinal d'une souris blanche nouveau-née : rac. post , racine postérieure; rac. ant., racine antérieure; n. pér., nerf périphérique ; a, petite cellule unipolaire. FIG. 3. Ganglion spinal d'un embryon de canard au dix-septième jour d'incu- bation. La fibre a, arrivée dans le nerf périphérique, se bifurque en une branche ventrale et une branche dorsale; elle représente, sans aucun doute, le prolongement périphérique d'une cellule unipolaire. FIG. 4 A. Cellule unipolaire d'un ganglion spinal de souris blanche nouveau- née, dont le prolongement unique se bifurque en deux branches d'égale épaisseur. FIG. 4 B. Cellule analogue : le prolongement central est plus gros que le pro- longement périphérique. FIG. 5. Cellules opposito-bipolaires et unipolaires, ainsi que leurs formes inter- médiaires, provenant d'un ganglion spinal d'un embryon de canard au dix-septième j our d'incubation. FIG. 6. Cellules opposito-bipolaires et cellules unipolaires, ainsi que quelques formes intermédiaires (gemino-polaires) d'un ganglion de Gasser du canard au treizième jour d'incubation. FIG. 7. Différents stades de cellules unipolaires provenant de cellules bipo- laires d'un ganglion de Gasser d'un embryon de cobaye. FIG. 8. Ganglion de Gasser d'un embryon de cobaye presque à terme. FIG. 9. Coupe transversale de la protubérance annulaire d'un embryon de canard au dix-septième jour d'incubation, passant par les deux ganglions de Gasser. FIG. 10. Racine sensitive et racine motrice du nerf trijumeau d'un embryon de canard au dix-septième jour d'incubation. Les fibres de la racine sensitive, à leur entrée dans le tronc cérébral, se recourbent en bas, après avoir émis une fine branche collatérale. FIG. H. Terminaisons nerveuses libres dans la tache acoustique d'un embryon de cobaye presque à terme. 31 -Alé.uQehlu^hcen.,a.U 2ia.h de V. !Vy E M O 1 R E AGRÉÉ AU CONCOURS POUR LES BOURSES DE VOYAGE DU GOUVERNEMENT. 189: ÉTUDE SUR LA VIRULENCE DES STREPTOCOQUES PAR le D' H. DE MARBAIX ASSISTANT AU LABORATOIRE DE BACTÉRIOLOGIE ET A LA CLINIQUE INTERNE. Travail du laboratoire d'anatomie pathologique ET DE PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE DE l'uNIVERSITÉ DE LOUVAIN. Déposé au ministère^ de l'Intérieur et de F Instruction publique, le 30 juin 1892. R2 ÉTUDE SUR LA VIRULENCE DES STREPTOCOQUES CHAPITRE I. HISTORIQUE. IL n'y a pas de microbes sur la classification desquels il existe autant de divergence que les streptocoques pathogènes. Si nous ne tenons compte que des plus importants, c'est-à-dire de ceux qu'on trouve dans l'érysipèle, dans les affections puerpérales, dans les complications chirurgicales, dans certaines endocardites, pneumonies, etc., nous constatons que l'on est loin d'être d'accord sur la question de savoir s'il faut admettre une espèce unique ou plusieurs espèces distinctes. Les hésitations à ce sujet se font déjà jour dans les premiers travaux qui ont trait à ces organismes ; et, si l'on est généralement d'avis que ceux que l'on observe dans les infections chirur- gicales et puerpérales constituent une seule et même espèce, le streptoco- que pyogène, on est bien loin d'être d'accord sur les rapports qui existent entre ce dernier et le streptocoque de l'érysipèle. Fehleisen(i ), qui le premier cultiva le streptocoque de l'érysipèle, veut qu'on le distingue du streptocoque pyogène pour les trois motifs suivants :^ 1° Le streptocoque de l'érysipèle a une action spécifique aboutissant à la production d'une dermatite aiguë; 2° les microbes restent confinés dans les vaisseaux lymphatiques et ne pénètrent ni dans les vaisseaux sanguins ni dans les organes internes; 3=' inoculés à l'homme, ils ne donnent jamais de phlegmon. Les streptocoques pyogènes, au contraire, produisent, d'après le même auteur, des affections très diverses, à caractère suppuratif bien accentué; ils peuvent envahir le réseau vasculaire sanguin et se généraliser à toute l'économie. Inoculés à l'espèce humaine, ils ne produisent jamais l'érysipèle, mais seulement une rougeur insignifiante. {!) Fehleisen : jEtiologie des Eiysipels, i883. 258 H. DE MARBAIX RosENBACH (1) est, commc Fehleisen, partisan de cette distinction, mais il la fonde surtout sur le caractère des cultures. Le Streptococcus c-rysipelûtis donne des colonies un peu plus vigoureuses, et ses cultures en strie sur agar incliné ressemblent à une feuille de fougère; tandis que celles du streptocoque pyogène rappellent une feuille d'acacia. HoFFA (2) trouve également des différences entre les deux organismes. Comme Rosenbach, il admet que le streptocoque de l'érysipèle pousse plus énergiquement, et que les cultures en strie rappellent plutôt une feuille de fougère; enfin, il admet un autre caractère : les stries fournies par le strep- tococjue pyogène présenteraient au centre une zone brune. Les inocula- tions que HoFFA fit avec un streptocoque pyogène, i^etiré d'un abcès du sein, le confirmèrent dans son opinion. Cet organisme, inoculé à des oreilles de lapin, ne lui donna pas de vrais érj^sipèles. Voilà donc, d'après Hoffa, la distinction légitimée non seulement par les caractères des cultures, mais aussi par l'action pathogène des organismes, le streptocoque pyogène étant incapable de produire la dermatite spécifique. Disons de suite que Passet ne put adopter cette manière de voir. Cet auteur (3), dans son étude sur les suppurations, fut amené à faire une comparaison attentive entre les streptocoques isolés de diverses affections chirurgicales suppuratives et le streptocoque de l'érysipèle mis à sa dispo- sition par Fehleisen lui-même. Il cultiva parallèlement les deux organismes sur les divers milieux usuels; il fit plus, il prépara des milieux exactement composés comme ceux de Rosenbach, à l'effet de faire ressortir les carac- tères signalés par cet auteur. Cependant il ne put constater entre les divers organismes aucune différence; celle, entre autres, signalée par Rosenbach et qui a trait à la comparaison avec des feuilles de fougère et d'acacia, fit complètement défaut. II put néanmoins constater des différences, mais elles s'observaient dans des cultures de provenance identique et dépendaient de causes accidentelles, telles que l'âge, le mode d'ensemencement. Les inoculations qu'il fit aux oreilles de lapin avec le streptocoque pyogène donnèrent des érysipèles typiques sans une goutte de pus, et, fait remar- quable, des érysipèles caractérisés par une rougeur plus vive et une éclosion plus rapide que ceux provoqués par le streptocoque de Fehleisen. (i) Rosenbach : Die Microorganixmen der Wundinfcldionskrankhcitcn des Mcnxchen, 1884. (2) Hoffa : Fortschritte der Medicin, 1886. (3) Passet : Untersucimngen ûber die ^tiologiu der eiterigen Phlegmime des Mensclien, i885. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 259 Les streptocoques pyogènes de Passet seraient donc plus spécifiques de " l'érythème que les streptocoques de l'érysipèle. Depuis les travaux de Passet, les distinctions fondées sur l'aspect des cultures sur milieux solides ne furent plus invoquées, de sorte que l'on peut considérer cette question comme tranchée : ces milieux ne permettent pas de séparer les deux organismes. Nous avons vu plus haut qu'un des motifs invoqués par Fehleisen pour faire de son streptocoque une espèce à part était son mode de réparti- tion dans les tissus. Le Streptococcus erysipelatis occuperait exclusivement les vaisseaux lymphatiques. Cette distribution spéciale est également admise par Hajek(!). D'après cet auteur, le streptocoque de rér3?sipèle reste confiné dans le système lymphatique, tandis que le streptocoque pyogène est plus unifor- mément répandu dans les tissus ; ce dernier présenterait même une ten- dance à se grouper autour des vaisseaux sanguins, à pénétrer à travers leurs parois et même à faire irruption dans leur intérieur. En outre, d'après Hajek, les manifestations macroscopiques de l'inoculation des deux orga- nismes présenteraient des caractères particuliers : la dermatite produite par l'organisme de Fehleisen est caractérisée par de la rougeur sans gonflement, sans suppuration à l'endroit d'inoculation; tandis que celle provoquée par les chaînettes pyogènes est accompagnée d'un gonflement notable et de suppuration à l'endroit d'inoculation. Il n'est pas sans intérêt de faire remarquer en faveur des unicistes, que les partisans de la distinction ne sont nullement d'accord sur les caractères différentiels. Rosenbach et Hoffa les placent dans l'aspect des cultures, mais ils sont en contradiction péremptoire sur ce point avec un autre sé- paratiste, avec Hajek, qui trouve que les cultures sont identiques. Bien plus, en lisant attentivement les expériences des séparatistes, on arrive à la conviction que les résultats ne sont pas si opposés à l'identification des deux espèces. Ainsi Hoffa prétend que le streptocoque pyogène est impuissant à déterminer l'érysipèle chez le lapin ; or, dans sa première expérience, il produit chez cet animal, après 24 heures, une rougeur qui s'étend jusqu'à la base de l'oreille, sans qu'il y ait formation d'abcès. C'est bien là, il nous semble, l'effet de l'inoculation du Streptococcus erysipelatis. (i) Hajek : Centralbl. f. Bacteriol , t I, p. 235. 260 H. DE MARBAIX D'après Hajek, le streptocoque de l'érysipèle produirait de la rougeur sans gonflement, tandis que le streptocoque p3^ogène donnerait de la rou- geur avec gonflement. Or, si on lit attentivement la description de l'auteur, on trouve que ce caractère n'est pas constant, il ne s'observe que dans la plupart des cas, " meistens » pour employer le terme de l'auteur. Dans quelques cas le Streptococciis erysipelaiis produit de la rougeur avec gonfle- ment, tandis que le streptocoque p)'0gène provoque de la rougeur sans gonflement. Ainsi, d'après les séparatistes eux-mêmes, les diff'érences tirées de l'action pathogène manquent de netteté et de constance. Aussi des voix nombreuses s'élevèrent bientôt en faveur de l'identité. Dans la séance même où Hajek fit part de ses travaux, il rencontra un contradicteur résolu en von Eiselsberg, qui s'était livré de son côté à une étude appro- fondie des deux organismes, et n'avait pu trouver aucune marque distinctive ni dans l'aspect des cultures, ni dans l'action pathogène. L'opposition aux partisans de la dualité devait s'étendre. D'après Fehleisen, le streptocoque de l'érysipèle présente les deux caractères sui- vants : il ne produit pas d'abcès et il est incapable de quitter les lympha- tiques de la peau pour se répandre dans le système sanguin et clans les organes internes. Ces deux assertions furent également combattues. HoFFA(i) isola du pus d'un abcès, formé sous un érysipèle typique, un streptocoque ayant tous les caractères de celui de Fehleisen. Ce dernier peut donc produire des poches purulentes. BuMM (2j obtint un résultat analogue avec le pus d'un abcès du sein, qui s'était également développé sous un érysipèle de cette région. Enfin, MeirowitschO) en inoculant sous la peau de lapins des cultures d'érysipèle produisit des abcès ; en injectant les mêmes microbes dans les articulations ou dans le péritoine, il donna lieu à des inflammations purulentes. Il est donc bien démontré qu'à l'occasion le streptocoque de Fehleisen est pyogène, et la distinction que l'auteur a voulu établir ne peut se maintenir. Il en est de même de celle qu'il a fondée sur la localisation de son streptocoque dans les lymphatiques de la peau. D'après Fehleisen, les lymphatiques cutanés constitueraient le domaine propre du streptocoque érysipélateux ; il n'envahirait ni le sang, ni les viscères profonds. Cette dernière assertion devait également trouver de nombreux contradicteurs. (i) HOFFA : Fortschriite der Medicin, iSS6. Ni" 3. (2) BuMM ; Arch. f. Gynœkologie, B. XXVU, i886. (3) Meirowitsch : Jahresb. de Baumg , t IV. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 201 DE Simone (i) observe un cas typique d'érysipèle, suivi de pyémie; il compare entre elles les cultures obtenues avec les chaînettes de la sérosité des vésicules et celles fournies par les organes internes et les abcès métastatiques, et les trouve identiques. Il compare ensuite ces deux sortes de cultures à des streptocoques authentiques d'érysipèle, et constate de nou- veau l'absence de tout caractère différentiel. Il conclut de son observation que le streptocoque de Térysipèle n'est pas nécessairement confiné à la peau, mais qu'il peut se répandre dans l'économie. VON NooRDEN (2) étudia un cas d'érysipèle de la face, compliqué de rougeur et de gonflement du poignet et suivi d'issue mortelle. Le sang des divers organes, le pus de la gaine des extenseurs de la main droite donnèrent un seul et même organisme, qu'il fut impossible de distinguer du streptoco- que de Fehleisen et de streptocoques pyogènes provenant d'autres sources. GuARNiERi (3) arriva à la même conclusion dans un cas de broncho- pneumonie consécutive à une rougeole. Il ti^ouva comme agent de l'affection pulmonaire des chaînettes identiques, aussi bien dans les cultures que dans l'expérimentation sur animaux, à celles de l'érysipèle. Leber et Wagenmann, Escherich et Fischer, Hartman, Benuce et Meirowitsch firent des observations semblables. Ces quatre derniers auteurs purent de plus constater au microscope la présence de chaînettes dans le système vasculaire. Toutes ces observations sont de nature à détruire l'idée que le strep- tocoque de l'érysipèle est un organisme confiné dans le système lympha- tique, et tendent à faire tomber la dernière barrière que Fehleisen et Hajek avaient élevée entre les deux streptocoques. En France, nous notons également de nombreux partisans de l'unité : WiDAL (4), Doyen (5), Arloing (6), Bouchard (7), Mosny {8), Charrin. Enfin, les idées des unicistes reçurent une nouvelle impulsion avec l'introduction en bactériologie de la notion deda variabilité de la virulence. Plusieurs séparatistes avaient invoqué, pour légitimer leur manière de voir. (1) DE Simone : Referai dans le Jahresber. de Baumg., t. III, 18S7. (2) VAN NooROEN : Mûnchener raedic. Wochenschr., 1887. (3) GuARNiERi ; Centralbl. f. Bakt. t , IV, p. 76. (4! WiDAL ; Thèse de Paris. 1S89. (5) Do-i-EN : Trav. de méd., 1889. (61 Arloing : Leçons sur la tuberculose, 1892. (7) Bouchard : Cours de pathologie générale, 80. (8) Mosny : Thèse de Paris, 1891. 262 H. DE MARBAIX l'absence d'action sur les animaux; Ainsi, Hoffa n'a3'ant pas réussi à re- produire avec son streptocoque l'érysipèle chez les lapins, avait conclu à la spécificité d'action du streptocoque érysipélateux. De même, Pawlowsky n'ayant pas vu ses inoculations suivies de suppuration, avait conclu que le streptocoque de Fehleisen était incapable de produire du pus et différait ainsi essentiellement du streptocoque pyogène. Il est probable que les in- succès de Hoffa et de Pawlowsky doivent être attribués à un défaut de virulence de leurs cultures. C'est l'opinion de plusieurs auteurs, entre autres de Baumgarten, et dans ces dernières années cette opinion a trouvé de l'appui dans l'expérimentation. Fr.enkel(i) avait déjà cru remarquer, en opérant avec un streptocoque provenant d'une péritonite, que la virulence augmentait par des passages à travers les animaux. BuMM (2) injecte à des lapins l' exsudât de la péritonite des accouchées; tantôt il obtient une mort rapide, une vraie scepticémie, tantôt la mort est retardée et survient avec toutes les lésions de la péritonite. TizzoNi et MiRCOLi (3) constatent que les cultures perdent leur viru- lence après un certain temps. Ils distinguent des streptocoques qui pro- duisent chez les lapins une infection générale et d'autres qui produisent . seulement une réaction locale. Arloing (4) remarque également que la virulence du microbe s'exalte quand celui-ci passe par l'organisme du lapin. Il constate en outre que la virulence des cultures varie considérablement d'après la composition des milieux et suivant que les cultures se trouvent en présence ou àl'abri de l'air. Nous devons pourtant dire que dans ce concert presque unanime, il se fit encore entendre des voix discordantes. Ainsi Pawlowsky (5J se déclare contre l'identité, en se basant sur les motifs invoqués par Hajek, et fournit à ce dernier l'occasion de renouveler ses déclarations et de maintenir ses affirmations premières. En résumé, jusque dans ces derniers temps, l'avantage semblait rester du côté des unicistes, lorsque deux travaux importants vinrent tout remettre en question. (1) Ke.enkel : Deutsch. medic. Woch . 1884. p. 210. (2) BuMM : Archiv fur Gynsek., t. 34, 1889 (3) TizzONi et MiRcoLi : Jahresbericlit de Baumgarten, t. IV. (4I Pawlowsky : Jahresb. de Baumg , T IV, p. 38 (5| Arloing : Leçons sur la tuberculose. 1893. l VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 203 D'après von Lingelsheim (i;, l'auteur de l'un de ces travaux, la distinc- tion doit être maintenue ; il appuie son assertion sur les résultats de l'expé- rimentation sur les animaux. Le streptocoque pyogène est pathogène pour le lapin et la souris, le streptocoque de l'érysipèle est seulement pathogène pour le lapin. Cette distinction est maintenue et même accentuée par KuRTH (2), qui non seulement veut qu'on sépare spécifiquement le strepto- coque érysipélateux du streptocoque pyogène, mais encore considère ce der- nier, non pas comme une espèce, mais comme un groupe d'espèces. Il en décrit une, le Streptococciis coiiglomeratiis, particulière à certaines complica- tions de la scarlatine. Il l'appelle de ce nom parce que dans le bouillon le développement se fait sous forme de grumeaux très cohérents, composés d'un enchevêtrement de chainettes serrées; tandis que le streptocoque pyogène et celui de l'érj^sipèle fournissent des flocons se désagrégeant facilement. A côté de ces deux espèces adoptées jusqu'à présent par certains auteurs, Kurth en admet par conséquent une troisième : le streptocoque congloméré. Comme cet exposé le fait voir, la question des rapports entre les di- vers streptocoques est loin d'être résolue. Les premiers travaux tendent à admettre deux espèces distinctes : le streptocoque pyogène et le streptoco- que de l'érysipèle. Puis vient une période pendant laquelle prévaut l'opinion de ceux qui admettent l'identité de ces deux organismes. Enfin deux travaux considérables et tout récents, ceux de von Lingelsheiim et de Kurth, ont pour but de faire triompher les idées anciennes. Ils conduisent à la consti- tution de trois espèces : le streptocoque pyogène, le streptocoque de l'éry- sipèle et le streptocoque congloméré. D'après Kurth, ce nombre n'est pas définitif; au fur et à mesure que l'étude de ces organismes deviendra plus complète, il sera nécessaire de créer de nouvelles espèces. Nous ne pouvons embrasser l'opinion' de ces auteurs, nous croyons en effet qu'il n'y a pas lieu de distinguer deux ou plusieurs espèces de streptocoques. L'erreur des séparatistes provient surtout, d'après nous, de ce qu'ils n'ont ,pas tenu compte de ces deux faits que nous établirons dans la suite : (1) VON Lingelsheim : ExperimcntcUe Untersuchinigcn ûln^r morphologistiie und pcithogcne Eigcn- scha/ten verschiedenen Streptokokken; Zeitschrift f. Hygiène, i8qi. (2) Kurth : Ueber Unterscheidung der Streptokokken iind Vorkommen dcrsclbcn, etc. ; Arb. aus dem kais. Gesundheitsamte in Berlin, B. \'n. 1891. .13 264 "■ ^^ MARBAIX 1° La virulence d'un streptocoque donné varie considérablement d'après son origine. 2° Le degré primitif de virulence est soumis à des oscillations consi- dérables, soit en plus, soit en moins. Nous commençons par l'étude du premier point. CHAPITRE II. LES STREPTOCOQUES, AGISSANT COMME AGENTS PATHOGÈNES CHEZ L'HOMME, ONT-ILS TOUJOURS LA MÊME VIRULENCE? Avant de donner les résultats de nos expériences, nous devons dire quelques mots de la méthode suivie. Les auteurs ne paraissent pas avoir été suffisamment pénétrés de la nécessité de se servir de cultures développées dans des conditions identiques. Comme certaines observations semblent l'établir, leur virulence est variable d'après la manière dont elles ont été obtenues. Les travaux d'ARLOiNG, signalés plus haut, sont très instructifs à ce sujet, et nous avons eu plus d'une fois l'occasion de nous convaincre de l'exactitude de ses observations. Aussi, pour obtenir des résultats compa- rables, est-il absolument nécessaire de faire les ensemencements sur un milieu de composition identique et de se servir de cultures de même âge. Comme milieu de culture nous avons employé un agar composé comme il suit : Agar 1 o/o. Peptone 1,5 0/0. Extrait de viande . . 0,5 0/0. Comme on le voit, ce milieu n'est pas sucré. Nous avons exclu le sucre parce que certains faits que nous avons observés nous faisaient craindre d'agir défavorablement sur la virulence des streptocoques ; en effet, ce corps détermine la formation d'acides qui modifient la réaction du milieu. Après avoir neutralisé l'agar, nous l'additionnons d'une solution de soude caustique normale, 5 ce. par litre, proportion indiquée par VON LiNGELSHEiM commc très favorable pour le développement des streptocoques. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 205 Après inoculation, les tubes étaient portés à la couveuse et y séjour- naient de 12 à 18 heures. Un séjour de 24 heures, et surtout de 48 heures, nous a paru dans quelques cas atténuer l'action pathogène des microbes, et nous sommes persuadé qu'un séjour prolongé à la couveuse exerce dans ce sens une action considérable. En observant ces règles, nous avons obtenu des cultures tout à fait comparables. Nous avons choisi comme sujet d'expérience le lapin et, pour fixer la virulence de nos cultures, nous avons mis en œuvre deux procédés. 1" L'inoculation à l'oreille en vue de produire l'érysipèle; 2"=' L'injection dans les cavités séreuses, surtout dans la plèvre. Nous allons exposer successivement les résultats que nous ont donnés ces deux genres de recherches. i" Inoculations à l'oreille chez le lapin en vue de produire l'érysipèle. Pour faire ces inoculations, nous pratiquons sous la peau de la surface externe de l'oreille du lapin une petite pochette, dans laquelle nous intro- duisons l'anse d'un fil de platine, promenée à la surface de l'agar et chargée d'organismes. Cette opération est exécutée chaque fois sur les deux oreilles. Nous avons eu soin de pratiquer des pochettes de même grandeur et d'intro- duire autant que possible la même quantité de microbes. En opérant ainsi, on est bien loin d'obtenir toujours de l'érysipèle; dans beaucoup de cas, il ne se déclare pas, et les cultures sont alors déclarées peu ou pas virulentes ; dans d'autres cas, il survient une dermatite, mais ici il faut distinguer d'après l'âge de l'animal. Nos recherches nous permettent de formuler la loi suivante : plus le lapin est jeune, plus il est disposé à contracter l'érysipèle, de sorte qu'avec une même culture on peut obtenir des résultats positifs ou négatifs, suivant qu'on s'adresse à des animaux jeunes ou à des animaux âgés. Non seule- ment l'âge influe considérablement sur la réaction locale, mais encore sur la réaction générale : chez les animaux jeunes il survient très facilement une infection générale qui les tue au bout de peu de temps, tandis que chez les animaux âgés les troubles généraux font défaut et la guérison constitue la règle. L'âgeestunfacteur très important; cependant les auteui-s nous semblent n'en avoir tenu aucun compte. Cette omission est peut-être pour beaucoup dans les résultats contradictoires qu'ils ont obtenus. Il importe donc, si l'on veut avoir des résultats comparables, de se servir d'animaux de même taille. 266 H. DE MARBAIX Un nombre considérable d'expériences, dont nous ne rapportons qu'une partie, nous a permis d'établir une espèce d'échelle de virulence en nous basant sur les faits suivants : 1^'' degré : Uinoculation est inefficace^ quel que soit l'âge de l'animal. 2^ - L'inoculation es/ /'Os/Z/rt' seulement chez les jeunes animaux. 3e » Uinoculation est positive chez les animaux de tout âge. Quand l'inoculation réussit, on peut encore distinguer des nuances dans la virulence, en s'appuyant sur les caractères suivants : a) La constance d'action. Les microbes les plus virulents produisent l'érysipèle fatalement. Quand ils sont plus faibles dans leur action, ils ne le produisent que dans un certain nombre de cas. b) L'époque d'apparition de l'érysipèle. Quand le microbe est très virulent, l'érythème existe déjà bien développé après 12 heures. Quand il est très atténué, il ne se déclare qu'après 2, 3 et même parfois après 4 ou 5 jours. c) L'extension que prend l inflammation. L'organisme a-til une viru- lence forte ou moyenne, l'inflammation gagne rapidement toute l'oreille. La virulence est-elle faible, l'inflammation n'occupe qu'une partie de l'oreille et même peut rester confinée aux parties avoisinant la pochette. d) Quand la virulence est très élevée, la mort survient rapidement, parfois après une vingtaine d'heures. Si la virulence est faible, elle survient après quelques jours. La cause de ces morts tardives nous est inconnue. Elles surviennent parfois quand les microbes ont disparu du corps. Dans F appréciation du degré de virulence, nous dei'ons donc tenir compte de l'âge de l'animal, de la constance de la maladie, de la rapidité de son apparition, de l'extension qu'elle prend et des effets qu'elle exerce sur la santé générale. Nous avons pratiqué nos inoculations avec des streptocoques de diverses origines. Donnons d'abord en quelques mots l'histoire des diverses affections dans lesquelles nous avons isolé nos organismes (i). L Streptocoque d'endocardite. Femme âgée de 30 ans, atteinte trois mois avant son entrée à l'hôpital d'un rhumatisme articulaire aigu, ayant laissé comme résidu une affection cardiaque. A son entrée, la malade pré- sente tous les symptômes de l'asystolie la plus grave : dyspnée intense, œdème des membres inférieurs, etc. La matité du cœur est augmentée, souffle systolique à la pointe. La femme meurt quelques heures après son (1) L'ordre donné ici sera suivi durant tous le cours de notre travail. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 207 entrée à l'hôpital. Son état de grossesse avancé nécessite l'opération césa- rienne. Nous en profitons pour extraire le cœur qui se présente avec toutes les lésions de l'endocardite aiguë. Avec les dépôts trouvés sur la valvule mitrale, nous faisons des ensemencements qui nous donnent le strepto- coque à l'état de pureté (i). II. Streptocoque isolé dune plaie, compliquée d'érysipèle. Les cultures sont isolées du pus d'un ancien trajet fistuleux, qui, après un raclage, a été le point de départ d'un érysipèle s' étendant à toute la jambe. Le pus a été prélevé en pleine efflorescence de l'érythème. III. Streptocoque de cystite. Streptocoque isolé des urines d'un malade atteint de cystite. Les urines renfermaient exclusivement des chaînettes. IV. Streptocoque d'infection puerpérale. Pelvipéritonite. Jeune femme de 30 ans; accouchée n semaines avant son entrée à l'hôpital. Depuis l'accouchement, la femme se plaint de douleurs dans le bas ventre, présente des sueurs nocturnes; fièvre oscillant autour de 38°. Ventre assez déve- loppé; dans le bas-ventre une matité. Une ponction faite à ce niveau ramène un liquide séro-purulent. Les ensemencements faits avec ce liquide ont donné le streptocoque à l'état de pureté. V. Streptocoque de scarlatine. Streptocoque isolé du pus retiré d'un abcès péri-articulaire, survenu dans le cours d'une scarlatine (2). VI. Streptocoque d'empyâme. Streptocoque cultivé à l'état de pureté avec le pus d'une pleurésie datant de 6 mois. _ VIL Streptocoque de diphtérie. Streptocoque isolé dans un cas très bénin de diphtérie, suivi de guérison rapide." VIII. Streptocoque d'une résection. Streptocoque provenant d'une banale plaie en suppuration, pratiquée pour une résection du coude. (1) Tous les ensemencements, nous le répétons, ont été faits sur agar non sucré, incliné Les tubes restaient 18 heures à la couveuse. (2j Nous devons ce pus à l'obligeance de M"' le D^ Lemière, chef du laboratoire des cliniques à la faculté libre de Lille. Nous le prions de recevoir nos vifs remercîments 268 H. DE MARBAÎX Les résultats obtenus par l'inoculation de ces différents streptocoques sont consignés dans les tableaux suivants : STREPTOCOQUE I. (Endocardite.) NUMÉRO POIDS d'ordre DE l'animal ACTION LOCALE ACTION GENERALE OBSERVATIONS Lapin i 3 20 gr. éiysipèle double après 24 heures mort après 3 jours A l'examen microsco- pique on trouve des diplocoques dans le sang. Les cultures four- nissent des streptoco- ques en pureté Lapin 2 320 gr. id. id. id. Lapin 3 480 gr. id. mort après 2 jours id. Lapin 4 480 gr. id. id. id. Lapin 5 750 gr. érysipèle unilatéral mort après g jours id. En résumé, nos inoculations chez les quatre premiers animaux ont produit en moins de 24 heures un ér3^sipèle double, intense, avec mort sur- venant après 3 ou ;>, jours. Le cinquième animal ne nous a donné qu'un érysipèle unilatéral avec mort après g jours. Ce résultat est dû sans aucun doute à la différence d'âge. STREPTOCOQUE IL Plaie compliquée d' érysipèle. NUMÉRO POIDS d'ordre DE l'animal action locale ACTION GENERALE OBSERVATIONS Lapin 6 200 gr. érysipèle unilatéral après 24 heures mort après 2 jours Lapin 7 200 gr. id. id. Lapin 8 200 gr. après 24 heures érysipèle intense à une oreille ; à l'autre oreille réaction locale id. exsudât transparent dans les deux plèvres, renfermant énormément de microbes. Cultures pures de streptocoques Lapin 9 200 gr. id. id. id. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 269 En résumé, les quatre animaux inoculés avec le streptocoque II (pro- venant d'une plaie avec érysipèlej succombent après deux jours et présentent après 24 heures un érysipèle intense unilatéral. L'action de ce microbe est à peu près aussi intense que celle de l'endocardite, qui donne des érysipèles doubles. Les microbes qui suivent sont moins virulents. STREPTOCOQUES III à V. NUMÉRO d'ordre POIDS DE l'animal MICROBE inoculé action LOCALE action GÉNÉRALE Lapin 10 200 gr. Str. in, c_vstite après 4 jours érysipèle unilatéral envahissant toute l'oreille mort après 4 jours Lapin 11 200 gr. Str. in, cystite id. id. Lapin 12 200 gr. Str. IV, inf. puerpérale après 2 jours érysipèle unilatéral envahissant une par- tie de l'oreille mort après 5 jours Lapin i3 200 gr. Str. IV, inf. puerpérale id. mort après 7 jours Lapin 14 200 gr. Str. V, scarlatine réaction localisée au point d'inoculation reste vivant Lapin i5 200 gr. Str. V, scarlatine id. id. Au lieu d'un érysipèle hâtif, intense, rapidement mortel comme pour nos deux premiers streptocoques, les streptocoques de la cystite et de la fièvre puerpérale donnent des érysipèles unilatéraux, survenant tardivement avec mort éloignée. Le dernier microbe du tableau, celui de la scarlatine, ne donne qu'un petit nodule d'épaississement avec un peu de rougeur. Cette réaction, malgré son peu d'intensité, doit être attribuée au microbe, car le traumatisme, non suivi d'inoculation, ne produit pas d'induration; nous nous en sommes assuré plus d'une fois. 270 H. DE MARBAIX Les microbes suivants ne donnent plus même lieu à la réaction locale. STREPTOCOQUES VI à VIII. NUMÉRO d'ordre POIDS DE l'animal STREPTOCOQUE INOCULÉ ACTION LOCALE ACTION GÉNÉRALE Lapin i6 200 gr. Str. VI, empyème pas de réaction locale vivant après i5 jours Lapin 17 25o gr. id. id. id. Lapin 18 5oo gr. id. id. id. Lapin ig 5oo gr. id. id. id. Lapin 20 200 gr. Str. VII, diphtérie id. vivant après g jours Lapin 21 200 gr. id. id. id. Lapin 22 25o gr. Str. VIII, résection id. id. Lapin 23 25o gr. id. id. id. Chez aucun de ces animaux, l'inoculation n'est suivie d'érysipèle, il ne se produit pas même une réaction locale au niveau du point d'inoculation. Si nous récapitulons les effets de l'inoculation aux oreilles, nous trouvons : 1° Notre streptocoque d endocardite produit en moins de 24 heures, chei les lapins de moins de 500 gr., un érysipèle double, entraînant la mort après 2 à 3 jours. Toutes les inoculations sont positives. 2" Notre streptocoque II (plaie compliquée dérysipèle) ne donne lieu qu'à un érysipèle sur deux inoculations. Celles-ci sont donc positives dans la moitié des cas seulement. La mort survient après un temps asseï court {deux jours). 3° Nos streptocoques de cystite, dinfection puerpérale, et de scarlatine sont moins virulents. U inflammation est unilatérale, souvent limitée à une partie de l'oreille et se déclare tardivement après 2 à 4. jours. L'animal reste en vie ou succombe tardivement. 4° Nos streptocoques dempyème, de diphtérie et de plaie suppurante n'ont guère d'action. Ils ne produisent ni réaction locale, ni la mort de l'ani- mal. Ils occupent au point de vue de la virulence l'échelon le plus bas. Voyons à présent si les injections dans les cavités séreuses nous per- mettent de grouper nos streptocoques de la même façon. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 2?! 2" Injections dans les cavités séreuses. Pour déterminer la virulence de nos différents streptocoques, nous avons aussi pratiqué des injections dans les cavités séreuses, péritoine et plèvre, de préférence dans cette dernière. Nous injections habituelle- ment des cultures sur agar incliné, non sucré, dont nous avons donné la formule plus haut. Nous avons employé moins souvent des cultures dans du bouillon, préparé en faisant macérer 500 gr. de viande dans un litre d'eau. Après avoir séparé par expression le liquide, nous le faisions bouillir, nous filtrions, nous ajoutions 1/2 0/0 de sel et 1 0/0 de peptone, et, après neutra- lisation, nous additionnions 5 ce. de solution de soude caustique normale. Le séjour à la couveuse était de 12 à 18 heures. Pour nos expériences nous prenions des lapins d'un poids moyen de 500 gr. ; la quantité injectée ordinairement était soit 1 tube d'agar, soit 1 à 2 ce. de bouillon. Ici encore, nous avons eu des effets différents suivant les streptocoques injectés. Certains d'entre eux ont déterminé la mort au bout de peu de temps. D'autres n'ont pas même produit de troubles appréciables de la santé. Les premiers sont précisément ceux qui nous ont donné de l'érysipèle, les seconds, ceux dont l'inoculation à l'oreille du lapin est restée sans effet. Donnons quelques exemples. Le streptocoque de Tendocardite, le streptocoque II, provenant d'une plaie, point de départ d'érysipèle, et celui de la cystite ont amené rapidement la mort. ENDOCARDITE. A un lapin de 500 gr. nous injectons dans le péritoine 2 ce. de bouillon. L'animal meurt 12 heures après l'opération. Le péritoine présente de nombreux flocons jaunâtres et, dans l' exsudât qu'il renferme, le microscope décèle une vraie culture de microbes. L'ensemencement sur- agar donne des streptocoques à l'état de pureté. STREPTOCOQUES IL A un lapin de 400 gr. nous injectons dans la plèvre 2 ce. de bouillon. L'animal meurt après 14 heures en présentant les signes d'une inflammation séro-fibrineuse intense. Au microscope, on constate énormément de microbes. Les cultures donnent des streptocoques à l'état de pureté. CYSTITE. A un lapin de 400 gr. nous injectons dans la plèvre des colonies qui se sont développées sur un tube d'agar incliné. L'animal meurt 12 heures après l'injection. A l'autopsie on constate dans la plèvre un exsu- dât, qui a donné des cultures pures de streptocoque. 34 112 H. DE MARBAIX Le streptocoque de la scarlatine établit une espèce de transition entre les trois organismes et ceux dont les injections restent sans effet. SCARLATINE. Dc dcux lapius de 400 grammes inoculés dans la plèvre, chacun avec un tube d'agar, l'un survit, l'autre meurt 7 jours après l'inocula- tion. A l'autopsie on constate des restes d'inflammation ancienne. Au mi- croscope on trouve dans l'exsudat des diplocoques et de courtes chaînettes. Tous nos autres streptocoques, injectés dans la plèvre ou le péritoine, non seulement ne déterminent pas la mort, mais n'altèrent pas sensiblement la santé de nos animaux. Nous en tuâmes un certain nombre quelques jours après l'inoculation et nous pûmes constater l'absence de toute inflammation. Les ensemencements sur agar restèrent stériles. La concordance entre les injections dans les séreuses et les résultats fournis par l'inoculation aux oreilles est telle que nous ne pouvons résister au désir de condenser les résultats dans un tableau unique, permettant de les embrasser d'un seul coup d'œil. ORIGINE DES CULTURES INOCULATION AUX OREILLES INJECTION DANS LES SEREUSES I Endocardite II Plaie, point de départ d'un érysipèle III Cystite IV Infection puerpérale V Scarlatine VI Ernp3'ème VII Diphtérie VIII Résection érysipèle constant, hàtif érysipèle inconstant, hâtif érysipèle inconstant, tardif érj^sipèle inconstant, tardif, et partiel pas d'érysipèle ; simple réaction locale pas d'effet id. id. infection et mort rapide id. id. ne produit pas d'effets effet inconstant ne produit pas d'effets id. id. Ce tableau montre très clairement que l'ordre de virulence est presque identique suivant que l'on recourt à l'un ou à l'autre mode d'inoculation. Il n'y a qu'une exception : notre streptocoque de la fièvre puerpérale paraît plus actif quand il est introduit sous la peau, tandis que celui de la scarla- tine semble produire plus d'effets dans les séreuses. Mais la différence VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 273 est faible et sans importance. On comprend du reste facilement que quand les microbes sont de virulence mo3'enne, les résultats soient tantôt positifs, tantôt négatifs. Une remarque, qui nous parait très intéressante au point de vue clinique, est la suivante ; si nous comparons la virulence de nos strepto- coques avec la maladie à laquelle ils ont donné naissance chez l'homme, nous trouvons, du moins généralement, que plus cette dernière est grave, plus le microbe est pathogène. Dans la série d'affections dont nous avons isolé les streptocoques, il y en a une mortelle, c'est l'endocardite; aussi elle nous fournit un streptocoque dont la puissance pathogène dépasse de loin celle de nos autres microbes. Viennent ensuite les affections de gravité moyenne : cystite, plaie point de départ d'érysipèle, une fièvre puerpérale, un abcès survenu dans le cours d'une scarlatine, un vieil empyème, un cas bénin de diphtérie, et enfin une banale plaie en suppuration. Nous nous croyons donc autorisé à énoncer la loi suivante : Plus F in- fection chei riiomme est grai'e, plus le microbe est vintlent. Il est entendu néanmoins que nous n'avons nulle intention d'enlever toute importance à la réceptivité du sujet même. Mais, à part cette restriction, il est évident que la virulence du microbe doit jouer dans la maladie un rôle des plus considé- rables. Nous ne croyons pas que l'on ait jamais démontré d'une façon aussi frappante cette inégale virulence pour une même espèce microbienne. Cette différence de virulence nous fournira plus tard un argument pré- cieux pour discuter l'identité du streptocoque érysipélateux avec le strepto- coque pyogène. CHAPITRE III. LA VIRULENCE D'UN STREPTOCOQUE DÉTERMINÉ EST-ELLE SUSCEPTIBLE DE VARIATION ? § I. Acquisition de la virulence. Nous venons de voir que la virulence des streptocoques varie considé- rablement d un cas à l'autre. Tantôt ils produisent la mort au bout de quelques heures, tantôt ils sont si peu pathogènes que les cultures injectées aux mêmes doses sont incapables de rendre les animaux malades. 274 ^- °^ MARBAIX Est-il possible d'exalter la virulence d'un de ces microbes atténués et de lui donner la puissance pathogène de ceux de l'endocardite, de la cystite, etc.? Cette exaltation de virulence est facile, quand les organismes jouissent déjà d'un certain degré d'activité, et on arrive à ce résultat par des passages successifs à travers une série d'animaux. Mais encore est-il nécessaire que ce microbe ait assez de virulence pour pouvoir prendre pied une première fois dans l'économie. Car, si au lieu de s'y implanter, il suc- combe rapidement, il devient impossible d'obtenir des cultures et partant de faire des inoculations ultérieures. C'est bien le cas de nos streptocoques peu virulents, tels que ceux de l'infection puerpérale, de l'empyème, de la diphtérie et de la résection. Injectés à doses notables aux animaux, ils ne produisent pas la mort; bien plus ils ne provoquent pas de troubles notables de la santé et, quand on tue l'animal peu de temps après l'injec- tion, les cultures faites avec les différentes humeurs restent stériles. La difficulté consiste donc à trouver un moyen de permettre à un organisme très atténué de prendre une première fois pied dans le corps de l'animal. Ce moyen nous fut fourni par l'emploi de la bile ( i). Ce liquide exerce sur les tissus une action caustique, les altère, diminue leur résistance vitale, crée un ^ lociis minoris resistentiœ y et permet ainsi à ces organismes, autrement impuissants, de se propager. Si la dose de bile injectée n'est pas trop forte, ses effets se bornent à des altérations microscopiques qui guérissent sans aucun phénomène inflam- matoire. Nous nous en sommes assuré par des expériences de contrôle nombreuses. Pour combiner l'action de la bile avec celle de nos cultures, nous opérons comme il suit. Dans un tube d'agar incliné nous introduisons quel- ques divisions de seringue de Pravaz d'eau stérilisée et nous détachons les colonies au moyen d'un fil de platine. A l'émulsion ainsi obtenue, on ajoute une certaine quantité de bile dans la proportion de 0,1 ce. pour \^)(> gr. de poids d'animal. En général, notre émulsion finale renfermait autant d'eau que de bile, en sorte que cette dernière était diluée de moitié. La suspen- (i) L'idée d'employer la bile nous a été inspirée par le travail de L Laruelle. sur les péri- tonites par perforation intestinale {La Cellule, t. V, 1889). Le bacille commun de l'intestin, injecté dans le péritoine, ne produit pas de réaction locale; au contraire, injecté conjointement avec de la bile, il donne lieu à la péritonite. Nous avons atteint le même résultat en employant l'acide lactique. Nous injections i goutte d'acide lactique avant d'inoculer les cultures. Il est probable qu'on obtien- drait le même résultat avec beaucoup d'autres substances altérantes. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 2 75 sion est injectée dans la plèvre avec des précautions aseptiques rigoureuses. • Comme liquide stérilisateur, nous nous sommes servi d'eau saturée de chloroforme ou d'une solution d'acide phénique à 5 0/0, soit isolément, soit successivement. Avec ces liquides nous stérilisions la seringue, les godets, etc. Les instruments et ustensiles étaient ensuite soigneusement lavés à Teau stérilisée pour enlever les dernières traces d'antiseptique. Nous avons suivi les mêmes règles en procédant aux autopsies et en ensemençant les tubes qui doivent servir aux passages ultérieurs. Grâce à ces précautions, nous n'avons eu que très exceptionnellement des colonies étrangères, et nous ne pensons pas nous tromper en les consi- dérant comme provenant des animaux eux-mêmes. Ce qui nous confirme dans notre opinion, c'est que ces impuretés, du reste toujours clair-semées, étaient constituées souvent par le bacille commun de l'intestin. Or on sait par les travaux de Wurtz et Herman (Arch. de méd. expér., 1891.) et d'autres que ce bacille se rencontre fréquemment dans les organes après la mort. Nous avons du reste multiplié les précautions. C'est ainsi que pendant tout un temps nous avons cessé de travailler avec des espèces virulentes, et que nous avons été faire nos expériences dans des places en dehors du laboratoire, afin d'échapper même à l'action des poussières qui auraient pu tomber sur nos instruments. Afin de nous assurer que l'eau chloroformée était un moyen suffisant de stérilisation, nous en avons plus d'une fois dans le cours de nos opéra- tions ensemencé de petites quantités sur des tubes d'agar incliné. Ceux-ci sont toujours restés stériles, alors même que nous introduisions à dessein dans le liquide une culture de streptocoques vivants. Nous avons du reste des faits qui nous prouvent que nous avons parfaitement réussi 4 écarter tout mélange de nos streptocoques. 1° Certains de nos streptocoques se distinguaient des autres par des caractères particuliers, inhérents à la variété; ainsi les uns présentaient des tours de spires assez lâches, d'autres formaient des tours de spire très serrés, d'autres encore constituaient de longues chaînettes droites, peu entrelacées. Or, ces caractères se sont conservés tels quels pendant toute la durée de nos passages. 2° Comme nous le verrons plus loin, tous nos streptocoques ne pré- sentent pas les mêmes aspects dans les bouillons. 11 y en a qui les troublent d'une façon diffuse; d'autres, se déposant au fond sous forme de flocons, 276 H. DE MARBAIX leur laissent leur limpidité initiale. Si nous avions infecté nos cultures les unes par les autres, ces caractères auraient dû disparaître. Or, nous avons vu ceux-ci se perpétuer de génération en génération sans modification. En recourant à la bile, nous avons réussi à produire des inflammations avec des streptocoques qui autrement disparaissaient rapidement dans le corps de l'animal, sans donner naissance soit à des troubles locaux, soit à des troubles généraux. Lors du premier passage on constate en général que l'animal est peu malade; très souvent même sa santé n'est pas troublée, mais si on le tue après quelque temps ^24 heures, p. ex.), on trouve une inflammation' séreuse ou séro-fibrineuse modérée. La plèvre renferme plu- sieurs centimètres cubes d' exsudât transparent; la surface des poumons présente des dépôts de fibrine, le poumon lui-même est parfois un peu atélectasié. Si on examine l'exsudat au microscope, on n'y trouve que peu de microbes, au point qu'il faut parfois chei"cher longtemps avant d'en trouver quelques-uns. Un certain nombre sont gonflés, en involution, et prennent mal les matières colorantes; ce qui prouve bien que, malgré les altérations locales, ils ont la vie bien difficile dans le corps de l'animal. Les cultures faites avec cet exsudât ne fournissent qu'un petit nombre de colonies. Mais au fur et à mesure que les passages se multiplient, les symptômes locaux et généraux deviennent plus graves. Le lapin devient profondément malade et meurt à une époque de plus en plus rapprochée du moment de l'inoculation. Dans l'exsudat les microbes se montrent de plus en plus abondants et finissent par y former une véritable culture. Les ensemencements sur agar donnent lieu non plus à quelques colonies isolées, mais à un nombre considérable de colonies, serrées les unes contre les autres. Quant au nombre de passages nécessaires pour obtenir cette exaltation, il varie d'une espèce à une autre. Quelquefois un seul suffit, parfois il en faut plusieurs. Nous pouvons dire pourtant que le maximum de virulence est atteint d'autant plus tôt que les microbes se montraient plus virulents au début. Pour ne pas fatiguer le lecteur, nous avons relégué à la fin de ce travail page 292 et suiv., quelques-unes de nos expériences à ce sujet. Nous nous contenterons ici de donner les résultats. Occupons-nous d'abord de la faculté de produire Térysipèle (i). Repre- nons nos divers streptocoques et voyons comment ils se comportent. (1) Pour toutes ces expériences, les lapins employés avaient un poids moyen de 200 grammes. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 277 Infection puerpérale. Avant tout passsage, ce streptocoque donne à deux lapins un érysipèle tardif ('après 2 jours), incomplet et unilatéral (comme nous l'avons vu plus haut, chap. IL), et tue l'un animal après 0 jours, l'autre après 7 jours. Après le quatrième passage, il donne un érysipèle précoce (après 1 jour 1, unilatéral, complet et tue l'animal après 3 jours. Après le cinquième passage, il donne à un lapin de 300 grammes un ér3'sipèle double après 36 heures, et le tue après 2 jours. En un mot, il a acquis sensiblement la virulence de notre streptocoque de l'endocardite (voir page 267). Scarlatine. Le streptocoque de la scarlatine, avant tout passage, ne détermine qu'une réaction locale, l'un des lapins meurt après 3 jours, l'autre reste en vie. Après un second passage, le lapin inoculé gagne un ér3^sipèle léger et meurt deux jours après l'inoculation; ici encore le gain est très marqué. Empyènie. Avant tout passage, il ne donne pas d'érysipèle. Après un second passage, il donne un érysipèle double, intense, sur- venant après 18 heures et amenant, chez un premier lapin, la mort après 2 jours; à un second lapin, il donne un ér3'sipèle incomplet et tue l'animal après 7 jours. Chez un troisièiTie, érysipèle unilatéral après 2 jours, mort après 4 jours. Après un troisième passage, il produit, chez deux lapins, un ér3'sipèle double après 1 jour et amène la mort après deux jours. C'est exactement la virulence du streptocoque de l'endocardite. Diphtérie. Avant tout passage, 2 lapins inoculés restent en vie, sans réaction aux oreilles. Après le troisième passage, de deux lapins inoculés l'un meurt après 4, l'autre après 5 jours. Après le sixième passage, 2 lapins inoculés meurent tous deux après 3 jours; l'un d'eux présente une réaction locale, circonscrite, très nette. 278 H. DE MARBAIX Résection . Avant tout passage, de 2 lapins inoculés l'un reste en vie, l'autre meurt après 6 jours. Après le troisième passage, un lapin inoculé meurt après 4 jours. Après le quatrième passage, un lapin inoculé meurt après 3 jours. Comme on peut le voir, nous n'avons pas fait, pour le streptocoque de la diphtérie et celui de la résection, assez de passages pour qu'ils devien- nent aptes à produire l'érysipèle. Mais nous avons cependant un indice de l'augmentation de leur virulence, à savoir : la durée de la survie après l'inoculation. En résumé, en faisant passer nos streptocoques par le corps des lapins, nous les rendons tous, sans exception, plus actifs. Cette augmentation d'activité se manifeste par la mort, qui surinent de plus en plus tôt, et par l'apparition à l'oreille d'une réaction locale ou d un véritable érysipèle. Quand le nombre des passages est suffisant, la dermatite se produit aussi fatalement, aussi rapidement et avec autant d'intensité qu'avec le streptocoque de [en- docardite. Le streptocoque de la fièvre puerpérale et celui de l'empyème en sont de beaux exemples. Avant tout passage, leur virulence était bien inférieure à celle de l'endocardite, mais après un nombre plus ou moins considérable de passages, ils développent une réaction au moins aussi intense que ce microbe lui-même. Voyons à présent si nous parvenons à donner par des passages succes- sifs aux streptocoques peu virulents assez de puissance pour que, injectés dans les séreuses, ils tuent les lapins sans l'aide de la bile. Infection puerpérale. Notre streptocoque puerpéral, avant tout passage, injecté à un lapin de 600 gr., à la dose de 1 tube, ne produit aucun effet appréciable. Celui-ci tué après 3 jours en pleine santé, n'offre dans la plèvre rien d'anormal. Les cultures restent stériles. Après le troisième passage, un tube d'agar injecté dans la plèvre, tue un lapin de 700 gr. après 48 heures. La plèvre ne présente pas d'inflam- mation, mais elle fourmille de coques et de chaînettes et les cultures don nent des streptocoques à l'état de pureté. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 279 Après le quatrième passage, un quart de tube et trois quarts de tube . d'agar tuent 2 lapins de 300 grammes. Le premier meurt après 2 jours, le second après 20 heures. Dans la plèvre il n'y a guère d'inflammation, mais au microscope on trouve une vraie culture de coques et de chaînettes. Scarlatine. Avant tout passage, t tube tue un lapin de 300 grammes après 8 jours; à l'autopsie on constate les signes d'une inflammation ancienne; au mi- croscope on observe des chaînettes. Les ensemencements donnent des streptocoques purs. Après un second passage, un lapin de même poids reçoit une demi-dose. Il meurt après 20 heures. Pas de signes d'inflammation de la plèvre. Les en- semencements avec la sérosité de la plèvre et le sang donnent des strep- tocoques à l'état de pureté. Empyèine. Avant tout passage, 2 ce. de bouillon injectés dans le péritoine d'un lapin de 500 gr. sont sans action. Après le second passage, 2 ce. de bouillon injectés dans le péritoine d'un lapin de 600 gr. le tuent après 24 heures. Rien d'anormal macrosco- piquement; au microscope, quantité de coques et de diplocoques. Culture : streptocoques purs. Résection. Avant tout passage, un tube injecté à un lapin de 600 gr. ne lui cause aucun trouble. Après quatre passages, un quart de tube injecté dans la plèvre d'un lapin de 250 gr. le tue en 2 1/2 jours; pas d'inflammation. Cultures : streptocoques purs. Trois quarts de tube, donnés à un lapin de 350 gr. déterminent la mort après 4 jours. Diphtérie. Avant tout passage, un tube injecté à un lapin de 500 gr. ne lui cause aucun trouble; l'animal reste vivant. Après six passages, un quart de tube est injecté à un lapin de 200 gr.; l'animal vit encore après 4 jours. Trois quarts de tube injectés à un lapin de 300 gr. le tuent après 4 jours. 35 28o H. DE MARBAIX Tous ces résultats concordent admirablement bien avec ceux fournis par les inoculations à l'oreille. Avant tout passage, siii- 5 de nos streptocoques de virulence moyenne ou faible, un seul, celui de la scarlatine, tue après injection dans une cavité séreuse, sans aide de bile. Après passage, nous arrivons à conférer cette propriété à tous. % II. Récupération de la virulence. Parmi les microbes que nous avons étudiés, celui de l'endocardite occupe l'échelon le plus élevé. Il semble même jouir de la plénitude de l'action pathogène. Il ne peut pas, naturellement, être question de le rendre plus virulent. Mais ayant voulu nous remettre à l'étude de ce microbe après l'avoir abandonné pendant trois semaines, nous constatâmes qu'il avait perdu sa virulence, et que du degré le plus élevé, il était tombé au dernier échelon. Ce changement est en rapport avec ce que l'on sait déjà de la régression de la virulence des cultures du streptocoque. ' Nous nous sommes demandé si, en le faisant passer par des lapins, nous ne pourrions pas lui rendre toute sa virulence et nous avons réussi au delà de toutes nos espérances. Le tableau détaillé de ce passage se trouve à la fin de ce travail, page 298 et suiv.. Nous attirons particulièrement l'attention sur lui, parce que, pendant toute la série des passages, nous avons fait simultanément des inoculations d'agar à agar, sans passer par le lapin. Les résultats obtenus prouvent que l'exaltation du virus est due non pas aux passages à travers les cultures, mais bien aux passages à travers l'animal. Les tableaux pourront être consultés avec fruit dans leurs détails. Nous nous bornons à transcrire ici les résultats obtenus par les passages successifs de notre streptocoque de l'endocardite atténué. Inoculations aux oreilles de lapin. Avant tout passage. Lapin de 5oo gr. meurt après 8 jours sans érysipèle. » i5o » » i3 )) » i5o )> » i3 )) » 600 » ne présente aucun trouble, reste vivant. Ainsi notre microbe, qui était si virulent, ne parvient plus même à donner de l'érysipèle à de très petits lapins. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 281 Après le deuxième passage, le streptocoque tue deux lapins de 200 gr. sans érysipèle, l'un après huit jours, l'autre après 13 jours. Après le troisième passage, les résultats sont différents. Inoculé à un lapin, il donne un érysipèle à une oreille après 2 jours, à l'autre oreille après 3 jours. L'animal meurt après 3 jours. Après le quatrième passage, il donne un érysipèle double après 2 jours. La mort survient après 4 jours. Après le cinquième passage, il donne à deux lapins un érysipèle double, intense, après 12 heures. Mort après 3 jours. Après le sixième passage, il donne à deux lapins un érysipèle double, après 24 heures. Mort après 2 jours. Ainsi, au fur et à mesure que les passages se multiplient et deviennent plus nombreux, la mort se produit plus tôt. Résumons en deux tableaux les résultats obtenus après les divers passages. L Avant tout passage, la mort survient après S et i3 jours (4 lap.). Après le 2^ passage » 8 et 1 3 « 2 x » 3e )) » 3 » I 1) )) 4'î )) » 4 » 2 )i )) 5<= » » 3 )' 2 11 1) 6<= » » 2 » 2 1) IL Avant tout passage, pas d'éiysipèle (4 lap.). Après le 2^ passage » » 3^ » érysipèle tardif. I) 4"^ I) » » 5"= » érj-sipèle intense après 12 heures. I) 6« » » )) 24 » Injections dans les séreuses. Voyons ce que font les injections sans bile. Avant tout passage, un demi-tube injecté à un lapin de 400 gr. n'a pas d'effet appréciable. L'animal est tué après 24 heures; plèvre normale. Les cultures donnent 2 à 3 colonies. Après le septième passage, un tube injecté à un lapin de 1200 gr. le tue après 24 heures. A l'autopsie, nous trouvons une inflammation séro- fibrineuse, et dans le dépôt beaucoup de chaînettes. 282 H. DE MARBAIX Après le huitième passage, un tube injecté à un lapin de 500 gr., déterminer la mort après 24. heures avec les mêmes lésions anatomiques. Les résultats que nous ont donnés les passages successifs de notre streptocoque de l'endocardite atténué, constituent une confirmation écla- tante de la valeur de notre double échelle de virulence : L'inoculation à l'oreille du lapin. L'injection dans une cavité séreuse. En effet, au moment où les animaux commencent à réagir à l'un de ces modes d'infection, ils se montrent également sensibles à l'autre. Toutes ces expériences nous apprennent que non seulement la viru- lence des streptocoques varie considérablement suivant leur provenance, mais encore que la virulence d'une seule espèce est capable d'osciller dans des limites très larges. Des microbes peu virulents peuvent acquérir dans des circonstances convenables une virulence considérable, et d'un autre côté ceux qui possèdent cette virulence au plus haut degré peuvent la perdre entièrement. Mais cette perte n'est pas définitive; car sous l'in- fluence de causes convenables ils peuvent récupérer leur puissance mor- bide première. Il nous semble inutile d'insister sur la valeur de ces faits au point de vue de la clinique. La connaissance de cette instabilité est très importante pour juger des rapports qui existent entre les divers streptocoques, entre le streptocoque pyogène et le streptocoque de l'érysipèle. Nous y reviendrons plus loin. CHAPITRE IV. LES STREPTOCOQUES, QUI PEUPLENT NORMALEMENT CERTAINES DE NOS MUQEUSES, SONT-ILS VIRULENTS OU PEUVENT-ILS LE DEVENIR? Des recherches nombreuses ont établi que le streptocoque pyogène se rencontre à l'état normal sur beaucoup de nos muqueuses : muqueuses de la bouche, du pharynx, du larynx, de l'urèthre, etc. D'après nos recherches personnelles, ces organismes sout surtout abondants dans la bouche. Si l'on nettoie une anse de fil de platine chargée de salive dans plusieurs tubes d'agar, la plupart des colonies qui se développent sont des colonies de strep- tocoques, et il n'est même pas rare de les obtenir presque à l'état de pureté. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 283 Ces Streptocoques sont-ils virulents, et, dans la négative, peuvent-ils' le devenir? Pour le décider, nous avons fait des cultures avec la salive de divers individus jouissant d'une bonne santé. Tantôt nous prenions pour point de départ de nos cultures une colonie bien isolée, tantôt, quand la culture primitive était suffisamment pure, nous récoltions un certain nombre de colonies à la fois, afin d'augmenter les chances de renconter les variétés pathogènes. Disons de suite que les streptocoques de la bouche sont en général peu ou pas virulents. Les inoculations aux oreilles de lapin nous ont donné les résultats suivants : Salive A. Inoculation à 5 petits lapins de 200 gr. Aucune manifesta- tion pathologique soit générale, soit locale. Salive B. Inoculation à 5 petits lapins du même poids. Même ab- sence de phénomènes morbides. Salive C. Inoculation à 2 lapins de 200 gr.; également sans effet. Salive D. Même inoculation, même insuccès. L'inoculation est donc restée sans effet chez 14 lapins; si nous tenons compte de l'âge des animaux, très favorable au développement de la mala- die, nous devons conclure que la majorité des streptocoques qui habitent la bouche est formée d'individus doués d'un faible pouvoir pathogène, si pouvoir il y a. Les injections pratiquées sans bile dans les séreuses confirment cette manière de voir. Premier exemple : 6 ce. de bouillon d'une culture, salive B, sont injectés à un lapin de 1600 gr. Les conséquences sont absolument négatives. Le lapin est tué après 24 heures; on ne. peut découvrir à l'autopsie au- cune altération. Cultures stériles. Deuxième exemple : 4,5 ce. de bouillon, salive D, sont inoculés à un animal de 1200 gr. L'insuccès est le même; pas le moindre trouble de la santé, pas la moindre lésion péritonéale. Cultures stériles. Nous devons pourtant dire que nous obtînmes une fois des cultures douées d'une certaine virulence. Sur 6 petits lapins inoculés aux deux oreilles, 2 présentèrent un érysipèle tardif et unilatéral et moururent après une semaine. La salive, qui avait fourni les cultures, provenait d'une 284 "• -^^ MARBAIX personne présentant fréquemment des angines. Il est possible qu'il y ait ici un lien entre la virulence des streptocoques et les inflammations répétées des amygdales. Du reste, plusieurs travaux ont déjà établi que l'on rencon- tre normalement dans la bouche des streptocoques plus ou moins virulents, mais, d'après nos recherches, nous pouvons affirmer qu'ils constituent une exception. En général, le microbe à chaînettes de la cavité buccale est peu virulent, tout en ne pouvant par le caractère de ses cultures être distingué des variétés pathogènes. Est-il possible de conférer à ces organismes bénins des propriétés pa- thogènes? Oui, mais il est incontestable que la transformation s'opère beau- coup plus difficilement qu'avec les streptocoques provenant d'affections peu graves. Si l'on injecte ces derniers avec de la bile, on obtient des colonies dès le premier passage ; elles sont à la vérité rares, mais elles ne font pas défaut. Au contraire, les streptocoques de la bouche injectés dans les mêmes conditions, c'est-à-dire avec de la bile, disparaissent d'ordinaire rapide- ment et les tubes d'agar restent vierges. Aussi, faut-il quelquefois recom- mencer le premier passage plusieurs fois avant d'obtenir quelques rares colonies, qui seront le point de départ des injections ultérieures. Exemple (i). Avec une culture de streptocoques de la bouche, nous essayons un premier passage le 12 mai. Nous injectons 2/3 et 3/4 de tube, avec des doses convenables de bile, à 2 lapins. Nous les tuons après 24 heures, et nous ne constatons aucune lésion. Les ensemencements restent stériles. Nous répétons l'opération le 15 mai, le 18 mai, en augmentant les doses et en donnant jusqu'à 4 tubes, mais sans plus de succès. C'est seulement le 23 mai, qu'un de nos lapins, tué du reste sans trouble appréciable de la santé, nous fournit des cultures peu abondantes de streptocoques. Pour réussir, nous avons injecté à ce lapin une première fois 3 1/2 tubes. Le lendemain à midi 2 nouveaux tubes, et un troisième à 1 heure. L'animal fut tué 4 heures après la dernière injection. Il présentait un exsudât avec de rares organismes. Avec les cultures obtenues, nous pratiquons chez 2 lapins le second passage (t et 2 tubes par lapin), et nous obtenons des cultures qui nous permettent de procéder au troisième passage. Après celui-ci, nous obtenons chez 2 petits lapins un érysipèle tardif, et, api'ès le quatrième passage, un érysipèle après 24 heures. (1) Le tableau détaillé se trouve page 3oo. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 3^5 Notre streptocoque était donc devenu bien virulent. Ajoutons qu'il' était également devenu capable de tuer les souris à bref délai. Les expériences précédentes peuvent se résumer il comme suit : Les streptocoques de la bouche normale se distinguent de ceux que l'on recueille dans les infections bénignes, en ce que, mis dans les mêmes conditions favorables, ils parviennent plus difficilement à prendre racine dans l'écono- mie animale, s'il est permis de s'exprimer ainsi. Mais une fois qu'ils ont réussi à prendre pied, ils sont capables de montrer les divers échelons de la virulence. CHAPITRE V. LES DERNIERS TRAVAUX EN FAVEUR DE LA NON IDENTITÉ DES STREPTOCOQUES SONT-ILS DE NATURE A ENTRAINER LA CONVICTION ? A la fin de notre historique, nous avons signalé l'apparition récente de deux travaux considérables sur les rapports des streptocoques entre eux. Tous les deux sont sortis d'un laboratoire des plus considérés, l'Institut d'hygiène de Berlin, et sont également importants, tant par le nombre d'or- ganismes étudiés, que par celui des expériences exécutées. Tous deux sont nettement séparatistes. L'un est l'œuvre de von Lingelsheim(i). Cet auteur croit avoir trouvé dans les cultures sur bouillon un mo3'en de diviser les streptocoques en deux groupes, nettement caractérisés. Le premier comprend les organismes qui produisent dans le bouillon un trouble diffus; la culture, examinée au microscope, se montre com- posée de chaînettes courtes. Von Lingelsheim leur donne le nom de Streptococcus brevis. Le second groupe comprend les organismes qui laissent au bouillon sa transparence et s'accumulent au fond du tube sous la forme de flocons. La culture étudiée au microscope se compose de longs filaments. Les streptocoques, qui fournissent ce mode de développement forment le groupe des Streptococcus longus. (i) VON Lingelsheim : Expcrimentelle Untcrsuchungen ûber morphologische culturrelle und patliogenc Eigetischaften verscltiedener Streptokokkcn ; Zeitschr. f. Hyg., 1891. 286 H. DE MARBAIX Ces deux groupes se distinguent non seulement par les caractères de leur culture dans le bouillon, mais aussi par leur action sur les animaux. Les streptocoques courts n'exercent aucune action pathogène; les strepto- coques longs sont virulents, et, suivant qu'ils tuent uniquement les lapins ou à la fois les lapins et les souris, l'auteur les subdivise en deux nouvelles catégories. La première comprend le Streptococcus erysipelatis, la seconde le Streptococcus pyogenes. Enfin, à côté du Streptococcus pyogenes, il distingue encore une forme : le Streptococcus mun'septicus, caractérisé par une virulence toute spéciale pour la souris. Il obtint ainsi le tableau suivant : Streptocoques non pathogènes pathogènes Streptococcus brevis Streptococcus longus pathogène pour pathogène la souris et le lapin pour le lapin seul a) Streptococcus pyo- Streptococcus erysi- genes pelatis b) Streptococcus mu- riscpticus Nous ne pouvons pas admettre cette classification, car elle repose sur des caractères inconstants, comme nons allons le démontrer. Un des deux caractères invoqués par von Lingelsheim consiste dans la puissance pathogène. Or, comme nous l'avons vu dans le cours de ce mémoire, rien n'est plus rnobile que la virulence des streptocoques. D'une part, les plus actifs, par exemple celui de l'endocardite, peuvent perdre totalement leur pouvoir morbifique; d'autre part, par des passages succes- sifs à travers les animaux, on peut conférer à des variétés peu ou pas actives, une puissance pathogène intense. C'est là un fait capital et dont il est absolument nécessaire de tenir compte dans une classification des streptocoques. Or, cette variabilité a été négligée complètement par VON Lingelsheim, bien que des travaux antérieurs au sien ussent dû attirer son attention sur ce point. L'inspection seule du tableau des organismes étudiés par lui suffit pour donner la conviction que ses Streptococcus brevis ne sont que des streptocoques atténués. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 28? Voici ce tableau : i" Culture d'érysipèle de la collection de l'Institut d'h3-giène. ; 2° Culture de streptocoque pyogène de la même source. 3" Idem. 4° Souris inoculée avec de la salive humaine. Origine \ 5° Exsudât pleurétique d'un cobaye, des streptocoques / 6" Membrane diphtéritique. longs 1 7° Idem. 8° Idem. 9" Idem. 10° Phlegmon de la cuisse. Il" Érysipèle de la face. I" Salive d'un homme sain. 2" Une vieille culture de streptocoque sur sérum. 3" » diphtérie. 4° » infectée avec le bacille pyocyanique. Origine des streptocoques courts Dans le premier groupe nous avons exclusivement soit des cultures con- servées dans de bonnes conditions par un repiquage souvent répété, soit des cultures obtenues par l'ensemencement de produits pathologiques frais. Il n'est donc pas étonnant, vu leur origine, que ces organismes soient doués de propriétés pathogènes plus ou moins intenses. Dans le second groupe, formé d'organismes de quatre origines diffé- rentes, nous trouvons en premier lieu un streptocoque dérivant de la salive d'un homme sain. Or, nous l'avons vu plus haut, les chaînettes de la bouche sont, pour la plupart du moins, dépourvues d'activité pathogène notable, mais tout inoffensives qu'elles soient, elles ont des dispositions à acquérir de la virulence, nous l'avons également démontré. Les trois autres organismes de ce groupe proviennent de vieilles cultures. Or, il résulte de nos recherches que les streptocoques les plus virulents, notre streptocoque de l'endocardite par exemple, peuvent perdre toute virulence. Il nous semble que von Lingelsheim aurait dû au moins examiner par des passages successifs si ses vieilles cultures étaient réellement rebelles à toute virulence. Il est probable que s'il eût étudié ce point, il se serait convaincu de la haute contingence de ce caractère. Nous concluons que la présence ou l'absence de virulence, invoquée par von Lingelsheim, ne peut servir de base à une classification. von Lingelsheim est-il plus heureux quand il affirme qu'il y a une relation constante entre le pouvoir pathogène et la longueur 36 288 H. DE MARBAIX des chaînettes? Aucunement, à preuve les modes de développement que nous ont donnés, dans le bouillon, les différentes variétés étudiées par nous. Le plus virulent de tous nos streptocoques, celui de l'endocardite, trouble le bouillon d'une façon diffuse, et à Texamen microscopique, il montre des chaînettes courtes, voire même des diplocoques. Un autre, également virulent, notre streptocoque de la fièvre puerpé- rale, produit lui aussi un trouble diffus. Voilà donc deux streptocoques pathogènes échappant à la loi formulée par VON LiNGELSHEIM. Quant à nos autres organismes de provenance pathologique, nous devons reconnaître qu'ils se développent dans le bouillon de von Lingels- HEiM comme cet auteur le décrit, c'est-à-dire, qu'ils forment des flocons blancs au sein d'un liquide parfaitement limpide. Sur huit streptocoques étudiés par nous, six se présentent de cette façon, mais les deux exceptions sont suffisantes pour enlever au caractère sa valeur. Enfin le mode de développement dans le bouillon de nos espèces non pathologènes et provenant de bouches saines ne ratifie pas davantage la loi de VON LiNGELSHEIM. D'après ce dernier, on devrait s'attendre à un trouble diffus des cultures, or nous avons obtenu constamment, sans aucune excep- tion, un développement absolument identique à celui de nos six espèces d'origine pathologiques donnant des flocons. Nous avons répété plusieurs fois nos cultures avec le même résultat; elles se sont reproduites avec leurs caractères propres, non seulement dans le bouillon composé exactement d'après la formule de von Lingelsheim, mais aussi dans le bouillon sucré et dans le bouillon légèrement gélatinisé par une ébuUition prolongée de la viande. Enfin, nous avons pu nous convaincre que le mode de végétation dans le bouillon reste invariable, alors que la virulence se modifie. Pour l'établir, nous avons ensemencé en même temps, dans du bouillon identique, les streptocoques que nous avons soumis à des passages, et cela doublement : en premier lieu, le streptocoque qui n'avait pas passé; en second lieu, le streptocoque à virulence exaltée par plusieurs passages. Le développement pour chaque variété a été absolument le même. Ainsi, le streptocoque de l'endocardite, non virulent, trouble le bouillon de la même façon que le virulent. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 289 Nos obsevpations démontrent ainsi que la virulence et le mode de développement ne sont pas ne'cessairement liés T un à l'autre; ces caractères sont contingents, accidentels, variables; ils ne peuvent par conséquent pas servir de base à une classification. Il y aurait du reste encore plus d'une critique à formuler sur le travail de VON LiNGELSHEiM. Aiusi, il introduit dans le groupe qui tue à la fois les lapins et les souris, une sous-division, contenant le Strepiococcus pyogenes proprement dit et le Streptococcus murisepticus. Cette distinction est fondée uniquement sur une différence de virulence pour la souris : le Streptococcus murisepticus tue cet animal à dose plus faible que le Strepto- coccus pyogenes. Nous avons déjà vu le peu de valeur qu'il faut attacher à un degré plus ou moins élevé de virulence. Mais, même en faisant abstraction de cette considération, les résultats de von Lingelsheim sont loin de concorder avec ceux obtenus par d'autres auteurs. Ainsi, d'après ce bactériologiste, le streptocoque de l'érysipèle serait sans action sur les souris; Hartmann, au contraire, voit succomber toutes les siennes. Or, dans des expériences de ce genre, les résultats positifs l'emportent sur les négatifs, von Lingelsheim exagère du reste beaucoup l'importance de l'inoculation à la souris; si nous devions le suivre, tous nos streptocoques provenant de produits patholo- giques seraient des murisepticus, et il faudrait supprimer les pyogenes proprement dits. Le tableau suivant en est une preuve. Il expose les résultats obtenus par l'inoculation de plusieurs sortes de nos strepto- coques, aussi bien avant tout passage qu'après l'exaltation de la virulence. Chaque sorte, atténuée ou virulente, a été inoculée à deux souris, une grande et une petite. L'inoculation a été faite dans une petite poche prati- quée au-dessus de la queue. AVANT PASSAGE Infection puerpérale Scarlatine Diphtérie Resection Érysipèle grande souris petite souris grande souris petite souris grande souris petite souris grande souris petite souris grande souris petite souris mort après 4 jours » 5 » mort après 2 jours 1) 3 » reste vivante mort après 3 jours reste en vie en vie après 3 jours reste en vie mort après 3 jours APRÈS PASSAGE DANS LE LAPIN mort après i jour » 4 rt mort après i jour » 2 » en vie après 3 jours sort inconnu. reste en vie mort après 3 jours reste en vie mort après 3 jours 2go H. DE MARBAIX Les cultures, faites avec les souris mortes, nous ont chaque fois donné un développement de streptocoques. Ce tableau montre que nos streptocoques, même peu virulents, tuent les souris après l'inoculation de petites quantités. Leur virulence pour ces animaux n'est donc pas signe d'un grand pouvoir pathogène, comme von LiNGELSHEiM Ic vcut. Il Suffit du Tcstc de jeter un regard sur le tableau, pour voir que cette virulence est également sujette à varier, et que, par le passage à travers les souris, elle s'exalte manifestement. Nous nous permettons de conclure que le travail de von Lingelsheim liapporte aucun appui sérieux à l'hypothèse des separalistes. Examinons à présent le second travail dont il a été question au début de ce chapitre. Il est dû à Kurth (\). L'auteur est encore plus séparatiste que VON Lingelsheim. Il attache, comme cet auteur, une importance con- sidérable au développement dans le bouillon, et, parmi les streptocoques qui s'accumulent au fond, laissant au liquide sa transparence, il propose d'introduire la division suivante : les uns forment un dépôt floconneux, léger, facile à désagréger; les autres un dépôt dense, lourd, compact. Ces derniers constitueraient une espèce distincte, à laquelle l'auteur donne le nom de Streptococcus conglouieratus. Le Streptococcus conglouieratus se caractérise, outre sa croissance dans le bouillon : 1° Par l'aspect microscopique des cultures. Les tours de spires sont tellement serrés, que la colonie ressemble à une zooglée de staphylocoques; 2° Par une virulence considérable pour la souris; 3° Par la durée sa de vie dans le bouillon ; elle est très courte (10 à 20 j.). 4° Par le minimum de température nécessaire à son développement, et qui dépasse de plusieurs degrés le minimum nécessaire aux streptocoques qui produisent dans le bouillon les dépôts floconneux légers. Tous ces caractères paraissent bien précaires. L'auteur convient lui- même fp. 405) qu'il y a des intermédiaires entre les dépôts légers, faciles à désagréger, et les dépôts compacts. La distinction n'est donc pas nette. La virulence spéciale pour les souris ne nous semble pas plus décisive. Des cinq cultures différentes de Streptococcus conglonieratus étudiées par (i) Kurth : Ucbcr Untcrscheidung dcr Streptokokhen; Arbeiten aus àem kais- Gesundheitsamte in Berlin, B. VII, iSqi. VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 29 1 l'auteur, il y en a une qui produit la mort presque fatalement 2 ou 3 jours après l'inoculation. C'est la plus virulente, mais sa virulence, il doit en con- venir, est inférieure à celle de notre streptocoque de l'endocardite qui tuait les souris après un jour. Deux autres cultures de Kurth font périr presque sûrement les souris entre le troisième et le cinquième jour, la quatrième tue environ la moitié des animaux après le même laps de temps, et enfin, la cinquième est sans action aucune! Il nous est difficile, dans ces con- ditions, de trouver chez le Streptococcus conglomeratus un pouvoir spécial sur les souris. Nos cultures nous ont paru tout aussi actives, bien qu'elles ne fussent pas du type coiiglo)neratus. Enfin, nous ne pouvons attacher aucune importance au troisième et au quatrième caractère. Quelques degrés de plus ou de moins nécessaire à la végétation, quelques jours de plus ou de moins de survie n'ont guère d'importance par eux-mêmes. Plus la bactériologie fait des progrès, plus le microbe se montre variable, même dans des caractères qui paraissaient au premier abord fondamentaux; il peut perdre des propriétés, il peut en acquérir d'autres, et pourtant toujours rester le même. Ce qui manque au travail de Kurth commeàceluide von Lingelsheim, ce sont les passages à travers les animaux. Peut-être cet auteur aurait-il con- staté alors que les caractères, invoqués par lui, sont susceptibles de change- ments et ne peuvent servir à une classification rationnelle. Aussi, nous n'avons aucune crainte de répéter ce que nous disions plus haut, que /;/ le travail de von Lingelsheim, )ii celui de Kurth, ne peuvent servir de base pour diviser les streptocoques en plusieurs espèces distinctes. CONCLUSIONS GÉNÉRALES. 1° La virulence des streptocoques varie considérablement d'après la maladie dont ils proviennent. 2° D'une manière générale, plus la maladie est grave, plus le strepto- coque est virulent. 3° La virulence se laisse très bien mesurer : a) Par l'inoculation à l'oreille du lapin. Il faut tenir compte du nom- bre de succès, de la rapidité avec laquelle la dermatite se déclare, de la rapidité avec laquelle la mort survient. b) Par l'inoculation dans les séreuses. Les microbes virulents amènent la mort par leurs propres forces, sans l'aide de liquides irritants. 292 H. DE MARBAIX 4° La virulence d'un seul et même streptocoque est sujette à varier. Elle s'exalte par le passage à travers le lapin; elle diminue et s'éteint dans les cultures non repiquées. 5° Un streptocoque déterminé acquiert d'autant plus vite un haut degré de virulence, qu'il est déjà plus virulent par lui-même. 6° Pour permettre aux variétés non virulentes d'acquérir des propriétés pathogènes, on peut les associer à des liquides irritants, tels que la bile. Ils parviennent alors à s'implanter dans l'économie. 7° Les streptocoques que l'on trouve dans la bouche sont habituelle- ment peu virulents. On peut exalter leur pouvoir pathogène par le passage à travers les animaux. 8' La virulence n'est pas liée à un mode spécial de développement dans le bouillon. 9' Les travaux de von Lingelsheim et de Kurth sur la classification des streptocoques manquent de base, parce qu'ils n'ont pas tenu compte de la variation de la virulence. En terminant nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de présenter nos meilleurs remerciments à Monsieur le professeur J. Denys, qui a bien voulu mettre son laboratoire à notre disposition. C'est grâce à ses bons conseils et sa haute expérience scientifique que nous avons pu mener ce travail à bonne fin. I I I VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 293 FIEVRE PUERPERALE. PASSAGES (l). INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE ir Pass. Lap. 240 gr. érysip. incom- plet d'une oreille après 2 jours mort le 5^ j . Lap. 200 gr. éiysip. incom- plet d'une oreille après 2 jours mort le 3= j . Lap. 600 gr. une trace, rien d'anormal tué après 3 jours cuit, négatives Lap. 600 gr. un tube, rien d'anormal tué après 3 jours cuit, négatives Lap. 600 gr. une trace 4- 0,4b., mort après 19 h. forte inflam. beaucoup de microbes Lap. 600 gr. un tube 4- 0,4 b., mort après 14 h. forte inflam. beaucoup de microbes 2= Pass. Lap. 400 gr. 1/4 de tube 4-0,3 b., mort après 12 h. inflammation beaucoup de microbes 3e Pass. ' Lap. 460 gr. une trace de cuit. 4- 0,3 b. mort après 3 1/2 j., infl., beaucoup de microbes Lap. 450 gr. i;'4 de tube 4- 0,3 b., mort après 1411. pas d'inflam. locale, infect. générale 4^ Pass. Lap. 700 gr. I tube mort après 48 h., pas d'in- flam. pleurale infect, génér. Lap. 700 gr. I t. 4- 0,4 b. mort après 2 j. pas d'inflam. beaucoup de microbes 5'= Pass. Lap. 200 gr. érysipèle uni- latéral le 3e jour mort le 3e jour Lap. 340 gr. 1/2 1. 4- 0,2 b. mort après 12 h., inflam. beaucoup de microbes Lap. 1200 gr. I i/2t.4-o,6b. mort après 4 j., inflam. beaucoup de microbes 6e Pass. Lap. 3oo gr. éiysipèle uni- latér. après 20 h , double après 26 h. mortapr. 48 h. Lap. 38o gr. i;'4 de tube mort après 2 j . , microbes partout Lap. 3oo gr. 3 ;4 de tube mort après 20 h., microb. partout (I) Abréviations : un tube = tube d'agar, b, = bile.. 294 H. DE MARBAIX RESECTION. PASSAGES. INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE !■■ Pass. Lap. 175 gr. pas d'érysipèle reste vivant Lap. 175 gr. pas d'érysipèle meurt après 6 jours Lap. 600 gr. I tube reste vivant Lap. 600 gr. I t. 4- 0,5 b. peu malade ^î/e'après2ih. infl. séro-fibr. rarissimes microbes au microsc. colonies rares dans les tubes Lap. 600 gr. I t. 4- 0,4 b. reste vivant 2« Pass. Lap. 400 gr. 3 t. 4. 0,3 b. meurt après 14 11., inflam. séreuse, au micr. culture d'organismes colon, serrées dans les cuit. Lap. 400 gr. 3 t. 4- 0,3 b. meurt après 14 h., inflam. séreuse, au micr. culture d'organismes colon, serrées dans les cuit. 3e Pass. Lap. 600 gr. 3 t. + 0,4 b. meurt après 4 h., pas d'inflam., mi- cr. abondants Lap. 600 gr. 3 t. 4- 0,4 b. meurt après 14 h., inflam. séro-fibr. 4^ Pass. Lap. i5o gr. pas d'érysip. mort après 4 jours Lap. 700 gr. I t. 4- 0,4 b. meurt après 8 h., inflam. séro-fibrin. beaucoup de chaînettes Lap. 600 gr. I t. 4- 0,4 b. meurt après 24 h., inflam. séreuse beaucoup de microbes 5e Pass. Lap. 200 gr. mort après 3 jours sans érysipèle Lap. 25o gr. 1/4 de tube mort après 1/2 jour, pas d'inflam. beaucoup de micr. dans la sérosité pleur. Lap. 35q gr. 34 de tube mort après 4 jours infect, génér. I VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 295 DIPHTERIE. PASSAGES. INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE Il- Pass. Lap. 175 gr. pas de suites Lap. 175 gr. pas de suites Lap. 600 gr. I tube pas de suites Lap. 600 gr. I t. +0,5 b. un peu malade tué après 2411. rares colon, dans les cuit. 2= Pass. Lap. 3oo gr. 5 t. -h 0,3 b. mort après 9 h., inflam. microbes rares 3<^ Pass. Lap. 200 gr. inoculation sans résultat local, mort après 4 jours Lap. 200 gr. inoculation sans résultat local, mort après 5 jours Lap. 55o gr. 6 t. -f 0,4 b. mort après i5 h., inflam. rares microbes Lap. 55o gr. 3 t. + 0,4 b. mort après 17 h., inflam. rares microbes 4e Pass. Lap. goo gr. I t. -f 0,4 b. mort après 18 h., inflam. séro-fibrin. rares microbes Lap. 900 gr. I t. + 0,4 b. mort après 3 j., inflam. séro-fibrin. beaucoup de microbes 5e Pass. ■ Lap. 540 gr. I t. -f 0,4 b. mort après 12 h., inflam. beaucoup de microbes Lap. 55o gr. I t. + 0,5 b. mort après 12 h., inflam. beaucoup de microbes 6e Pass. Lap. 200 gr. réact. locale mort après 3 jours Lap. 25o gr. réact. locale mort après 3 jours Lap. 3oo gr. 3/4 tube mort après 4 jours infection générale Lap. 200 gr. 1/4 tube vivant après 4 jours 37 296 H. DE MARBAIX SCARLATINE, PASSAGES. INOCULATION INOCULATION AUX OREILLES DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE V Pass. Lap. 200 gr. un peu de réact. locale meurt après 3 jours Lap. 200 gr. un peu de réact. locale Lap. 35o gr. I tube mort après 7 j., inflam. en régression microbes Lap. 35o gr. 0,5 b.^ reste vivant Lap. 45o gr. I t. + 0,3 b. trouvé mort après 20 h. pas d'inflam. Lap. 35o gr. o,5b. + o,3b. trouvé mort après 20 h. inflammation modérée microbes 2'^ Pass. Lap. 400 gr. trace de cuit. + o,3b. mort après 5o h. inflam. légère peu de micr. Lap. 400 gr. I t. + 0,3 b. morts après i5 h. inflammation assez bien de microbes 3= Pass. Lap. 290 gr. après 24 h. érysipèle léger à une oreille, meurt après 2 jours Lap. 3oo gr. I tube mort après 20 h., infect. générale Lap. 1000 gr. 1/2 t. -|- 0,4 b. tué après 48 h., infl. séreuse microbes Lap. 1000 gr. 1/2 t. + 0,4 b. mort après 5o h. infl. séreuse VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 297 E M P Y E M E . PASSAGES. INOCULATION INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION SANS BILE DANS LA PLÈVRE AVEC BILE Lap. io3o gr. I t. + 10 b. mort après Lap. 800 gr. I t. + 6 b. mort après Lap. 700 gr. 22 h., inflam. 18 h., inflam. Lap. 3oo gr. Lap. 25o gr. 2 ce. bouillon Lap. 5oo gr. séro-fibrin. séro-fibrin . !■■ Pass. pas d'éiysip. pas derysip. dans I tube plèvre forte forte reste vivant reste vivant le péritoine reste vivant reste vivant au microsc. assez de microbes colonies espacées au microsc. assez de microbes colonies espacées Lap. 200 gr. érysipr double 2= Pass. intense après 18 h. mort après 2 jours Lap. 400 gr. érysip. après 4 jours à I or. Lap. 35o gr. érysip. à 1/2 oreille Lap. 600 gr. 2 ce. bouillon meurt après 22 h. au microsc. mort 7 jours diplocoques cuit, strept. pur mort après 4 jours Lap. 200 gr. Lap. 200 gr. érysip. double érysip. double 3= Pass. après 24 h. mort après 2 jours après 24 h. mort après 2 jours 298 H. DE MARBAIX ENDOCARDITE. PASSAGES. Réapparition de la virulence. INOCULATION INOCULATION INOCULATION AUX OREILLES DANS LA PLÈVRE S.ANS BILE DANS LA PLÈVRE AVEC BILE Lap. 400 gr. Lap. 400 gr. Il- Pass. Lap. 5oo gr. pas d'érysipèle mort après 10 jours Lap. 600 gr. pas d'érysipèle vivant 1/4 tube tué bien por- tant apr. 26 h. plèvre norm. il pousse 2-3 colonies 1/2 1. +o,5b. .égèr. malade tué apr. 24 h. inflam., rares microbes colon, isolées Lap. 400 gr. 1/2 1. +o,5b. comme à côté Lap. 35o gr. 2« Pass. Lap. 200 gr. mort sans érysipèle après i3 jours Lap. 200 gr. mort sans érysipèle après i3 jours 2 t. + 0,5 b. tué après i5 h., très malade rares micr. rares colonies I t. -f 0,2 b. 2 t. + 0,4 b. Petit lapin Petit lapin mort après mort après S-: Pass. mort sans érysipèle mort sans érysipèle i5 h., inflam. pleurét. i5 h., inflam. pleurét. après 18 jours après i3 jours beaucoup de microbes beaucoup de microbes Lap. 540 gr. • Lap. 600 gr. Lap. 1600 gr. après 2 jours i/3t. -fo,2b. 2/3 t. + 0,4 b. érysipèle mort après mort après 41= Pass. unilat., après 3 jours double mort après 3 jours 1 i3 1/2 h. forte inflam. énormément de microbes i3 1/2 h. forte inflam. 1 énormément de microbes Lap. 3oo gr. Lap. i5oo gr. 5': Pass. Lap. 5oo gr. après 2 jours érysipèle double I 3 t. -(- 0,2 b. mort après 14 h. forte inflam. 2/3 t. + 0,5 b. mort après 14 h. forte inflam. culture culture de microbes de microbes VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 299 EN DOCARDITE. PASSAGES. Réapparition de la virulence. (Suite.) INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE 6<= Pass. Petit lapin érysipèle in- tense, double après 12 h. mort après 3 jours Petit lapin érysipèle in- tense, double après 12 h. mort après 3 jours Lap. 45o gr. i/4t. 4- 0,2 b. tué après i5 h., inflam. beaucoup de microbes Lap. 450 gr. 2/3 t. -1-0,4 b. tué après i5 h., inflam. beaucoup de microbes 7e Pass. Lap. 200 gr. érysipèle double, inten- se après 24 h. mort après 2 jours Lap. 200 gr. érysipèle double, inten- se après 24 h. mort après 2 jours Lap. 5oo gr. 2/3 t. -f- 0,4 b. mort après 12 h., inflam. beaucoup de microbes 8e Pass. Lap. 1200 gr. I tube tué après 24 h., inflam. séro-fibrin. beaucoup de microbes Lap. 1450 gr. 1/4 t. +o,6b. mort après 14 h., porte inflam. beaucoup de microbes - g^ Pass. Lap. 5oo gr. I tube mort après 26 h., inflam. séro-fibrin. légère Lap. 5oo gr. i/iot.-4-o,4b. mort après 19 h., inflam. énormément de microbes Lap. 1200 gr. 2/l0t.-|-0,-7f+1- trouvé mort après 4 jours inflam . énormément de microbes 300 H. DE MARBAIX PASSAGES AVEC UN STREPTOCOQUE DE LA BOUCHE. (Page 284.) INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE !■■ Pass. Les inoculations à plusieurs lapins ne pro- duisent pas derj'sipèle Les inoculations à plusieurs lapins ne pro- duisent pas d'érysipèle Lap. 400 gr. 1/2 tube aucune suite cultures négatives Lap. petit 2/3 t. + 0,2 b. aucune suite tué après 24 h. , cultures stériles Lapin moyen 2/3 t. 4- 0,4 b. aucune suite tué après 2411., cultures stériles !■■ Pass. (bis) 12 mai Lap. 5oo gr. r t. + OA b. aucune suite tué bien portant après 24 h., cultures stériles Lap. 5oo gr. 2 t. -|- 0,2 b. aucune suite tué bien portant après 24 h., cultures stériles i"' Pass. (ter) i5 mai Lap. 5oo gr. I t. + 0,4 b. aucune suite tué bien portant après 22 h., cultures stériles Lap. 400 gr. 2 t. + 0,3 b. aucune suite tué bien portant après 22 h., cultures stériles If Pass. (quater) 17 mai Lap. i5oo gr. 4 t. + 0,8 b. tué après 23 h., cultures stériles Lap. 35o gr. 2 t. -f 0,4 b. tué après 23 h. cultures stériles i' Pass. (quinter) 23 mai Lap. 3oo gr. ii/3t.-l-o,4b. tué après 4 h. bien portant cultures stériles Lap. 5oo gr. 3 1/4 1. +0,4 b. le lendemain 2 t. à midi I t. à 4 h. tué à 8 1/2 rares microbes cuit, fertiles VIRULENCE DES STREPTOCOQUES 301 Suite de la page précédente. INOCULATION AUX OREILLES INOCULATION DANS LA PLÈVRE SANS BILE INOCULATION DANS LA PLÈVRE AVEC BILE 2e Pass. Lap. 600 gr. I t. + 0,4 b. mort entre 4 et 16 heures beaucoup de microbes au microscope Lap. 700 gr. 2 t. 4- 0,4 b. tué après 20 h. beaucoup de microbes au microscope 3« Pass. Un lapin meurt avec des streptocoques dans le sang après 24 h. Lapin gagne success. un érysipèle aux 2 oreilles mort après 3 j. Lap. 800 gr. I t. -|- 0,4 b. mort après g h., inflam. séro-fibrin. beaucoup de microbes cultures pures de streptoc. Lap. 800 gr. 2 t. + 0,4 b. mort avant 24 h., inflam. séro-fibrin. énormément de chaînettes cultures pures de streptoc. 4« Pass. Inocul. à un lapin, érysip. double le lendemain, mort après I jour Inocul. à un lapin, érysip. double le lendemain, mort après I jour Lap. 2000 gr. 2 t. + 0,6 b. tué après 9 h., inflam. streptocoques dans l'exsudat Lap. 1000 gr. I t. -f 0,4 b. tué après g h., inflam. streptocoques dans l'exsudat j ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE DU BÀCILLUS LÂCTIS ÀEROGENES (Bacillus pyogenes d'Albarran et Halle) PAR J. DENYS & E. BRION PROFESSEUR d'aNATOMIE PATHOLOGIQUE ÉTUDIANT EN MÉDECINE A l'université de louvain. [Mémoire déposé le 15 octobre 1892.) Travail du laboratoire d'anatgmie pathologique et de pathologie expérimentale de louvain. 38 I I ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE DU BACILLUS LACTIS AEROGENES (Bacillus pyogenes d'Albarran et Halle) Le Bacillus lactis acrogenes fut décrit par Th. Escherich (0, qui le trouva presqu'à l'état de pureté dans les selles des enfants élevés au sein. L'année passée, A. Morelle démontra que ce bacille joue un rôle important, le plus important même dans les infections urinaires, où il avait été décrit antérieurement par Albarran et Halle (2) sous un nom spécial celui de bactérie pyogène. L'un de nous confirma ce fait dans une publica tion postérieure (3). Le bacille aérogène constitue un organisme des plus intéressants, aussi bien par le rôle qu'il joue en dehors de nous que par son action pathogène Les travaux d'EscHERicH (4), de Baginsky (5), de Scruel (6), de M. Ide(7) de Nencki et de ses élèves ont fait connaître plusieurs particularités de la vie de ce microbe, surtout son action fermentative sur le glucose, mais il n'a pas encore été étudié au point de vue des poisons qu'il élabore. Le présent mémoire a pour but d'étendre nos connaissances à ce sujet. (i) Th. Escherich : Die Darmbakterien des Sauglings; Stuttgart, iS86. (2 Albarran et Halle : Sur une bactérie pyogène et sur son rôle dans Tinfection urinaire; Acad. de méd. de Paris, ]888. (3i J. Denys : Etude sur les infections urinaires; Bulletin de l'Acad. de médec, 1802. (4/ Escherich : Op cit. (5) Baginsky : Zur Biologie der normalen Milchkothbacterien ; Zeitschrift f. phys. Chem., B. XII, 1SS8. (6, V. Scruel : Contribution à l'étude de la fermentation du bacille commun de l'intestin; La Cellule, t. VII, 1891. (7) Man. Ide : Anaérobiose du bacille commun de l'intestin et de quelques autres bactéries; La Cellule, t. VII, i8ni. 3o6 J- DENYS & E. BRION Nous avons choisi, pour point de départ de nos rechcrclies, un bacille aérogène isolé dans un cas de cystite, et que nous avons conservé en culture sur gélatine pendant toute la durée de nos expériences. Pour celles-ci, nous nous sommes exclusivement servis de cultures sur pommes de terre. Elles présentent deux avantages : i" Elles forment un enduit assez épais, qui se laisse facilement enlever par le grattage et que l'on peut peser exactement et délayer en proportion voulue dans différents liquides. 2° Elles fournissent un matériel d'expérience pur, libre de peptone, de sucre et d'autres substances entrant dans la composition des bouillons et des gélatines. Les pommes de terre, après ensemencement, restaient exposées pen- dant deux à quatre jours à la température de la couveuse, puis pendant deux à trois jours à la température de la chambre. Au bout de ce temps, la culture forme un enduit jaune-brun pâle, d'une odeur spéciale, très carac- téristique. La masse bacillaire est pesée, délayée dans la proportion de 10 o/o, soit dans l'eau distillée, soit dans l'eau salée physiologique, et addi- tionnée d'éther ou de chloroforme dans le but de tuer les microbes. Nous aurions pu détruire leur vitalité par le chauffage, mais les travaux sur la nature des poisons microbiens dénotent chez ceux-ci une sensibilité telle à l'action de la chaleur, que nous avons exclu ce procédé, sauf quand il se trouvait spécialement indique. Comme Salkowsky l'a démontré, le chloroforme et l'éther sont des antiseptiques énergiques; plus d'une fois nous eûmes l'occasion de constater que, mêlés à des cultures dans la proportion à laquelle ils se dissolvent dans l'eau, ils font périr instan- tanément tous les microbes. Les spores seules échappent à leur action, mais comme le bacille aérogène n'en produit pas, le fait est sans importance pour nous. L'addition de chloroforme ou d'éther permet de conserver les émulsions pendant des mois, sans qu'elles perdent de leur toxicité. Avant de les employer, il faut chasser l'antiseptique. Grâce à la haute volatilité de ces produits, l'opération se fait facilement, soit par un simple courant d'air, soit par un chauffage à une température peu élevée (3o°, 40°, 500). Comme animal d'expérience, nous avons choisi le lapin, et nous avons presque toujours pratiqué nos injections dans la cavité péritonéale, au moyen d'une canule de Pravaz â pointe émoussée. ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 307 EFFET DE LA TOXINE SUR LE LAPIN. I. Effet des fortes doses. Injectons dans le péritoine d'un lapin de i kilogr. un centimètre cube d'une suspension à lo o/o. Presque immédiatement après l'opération, l'animal présente quelques phénomènes d'excitation. Il est agité, dresse les oreilles qui s'injectent, s'élance en avant ; très souvent, il se couche en long sur le ventre en proie à une certaine dyspnée, les pattes postérieures en extension, la tète et les oreilles relevées. Ces symptômes se dissipent après quelques minutes et font place à de l'abattement. L'animal ne quitte plus sa place, il se tient immobile. Très souvent, il prend une position caractéristique, il se ramasse en boule, les pattes postérieures sur la même ligne que les antérieures; il se tient dans cette position pendant des heures, refusant toute nourriture, dans une apathie complète, la tète inclinée, les yeux à demi-fermés, la respiration dyspnéique. Si la dose cause rapidement la mort, des signes de paralysie se décla- rent au bout de quelques heures. Le premier indice est généralement fourni par la tète, qui s'abaisse peu à peu et graduellement, tantôt restant sur la ligne médiane, tantôt déviant soit à droite, soit à gauche. Finalement, l'extrémité du museau touche le sol et la tète repose directement à terre. En même temps, la parésie envahit les quatre membres; ceux-ci deviennent incapables de soutenir le corps et glissent de côté. L'animal s'affaisse et finit par tomber sur le flanc. Déjà au commencement de l'intoxication, nous avons signalé l'apathie — profonde succédant à l'excitation. Quand la paralysie est bien marquée, le sensorium parait complètement éteint; il se déclare un coma profond, les pupilles ne réagissent plus, une respiration espacée et faible trahit seule la vie, et la mort survient après un refroidissement considérable. Dans un certain nombre de cas, la mort arrive tranquillement, insen- siblement, sans phénomène d'excitation; mais dans la plupart des autres, il survient des convulsions généralisées, se répétant plus ou moins fréquem- ment et plus ou moins violentes. Quand les accès sont bien marqués, l'animal est jeté sur le flanc, la tète se porte fortement en arrière, les mâ- choires se serrent, la colonne vertébrale se recourbe en arrière, la queue se 3o8 J. DENYS & E. BRION redresse, les membres se raidissent ou sont animés de mouvements rapides, imitant le galopement. Un cri aigu annonce quelquefois le début. Ces accès durent de quelques secondes à une demi-minute et plus ; quelquefois ils sont rares, d'autres fois ils se répètent lo, 20, 30 fois en une heure. Dans les intervalles, les muscles sont complétements relâchés, ou maintenus en contraction légère, de sorte que le corps est plus ou moins recourbé en arrière. Les convulsions ressemblent, à s'y méprendre, à celles produites par la strychnine, à tel point qu'un observateur non prévenu les croirait dé- terminées par cet alcaloïde. Une circonstance augmente la ressemblance. Comme les convulsions strychniques, les convulsions dues au bacille aérogène sont provoquées par les excitations des sens ; on peut en déterminer l'ex- plosion en manipulant Tanimal, en le touchant, en le soulevant, en frap- pant sur la table, etc. Ces symptômes indiquent que le poison a une action énergique sur les centres nerveux. Après un stade d' excitation extrêmement court, il produit la paralysie de l'axe cérébro-spinal, paralysie accompagnée ou non de tétanos. Outre ces phénomènes nerveux, on constate souvent de la diarrhée. C'est un fait déjà signalé par Escherich. La diarrhée est quelquefois légère, d'autres fois très intense, au point de vider, pour ainsi dire, l'animal. Quant à la marche de la température, nous avons déjà signalé ce fait qu'avant la mort la température anale .s'abaisse de plusieurs degrés : il y a une véritable période algide. Le lapin se prêtant peu aux expériences d'hy- perthermie, nons n'avons pas étudié les oscillations de la température au stade antérieur; mais, chez les chiens, les injections de bacille aérogène, même à petites doses, pi-oduisent de la fièvre. A l'autopsie, le péritoine ne présente rien d'anormal. Dans la muqueuse de l'estomac, de l'intestin grêle et du gros intestin, il y a d'habitude des ecchymoses tantôt rares, tantôt plus nombreuses. Elles siègent surtout dans les cœcums. Les intestins sont plus ou moins distendus, la muqueuse est pâle ou modérément injectée; les plaques de Peyer sont congestionnées, mais pas sensiblement gonflées. En somme, les altérations du côté du tube digestif se réduisent à de la congestion et à des ecchymoses, encore ne sont-elles pas constantes. Quant aux autres appareils, on n'y remarque rien de spécial. ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 309 Tels sont les phénomènes que l'on observe avec les doses assez fortes pour tuer les lapins en moins de 24 heures. IL Effets des doses moyennes. Si la quantité injectée est trop faible pour amener aussi rapidement la mort, l'immobilité et l'apathie peuvent se prolonger pendant deux jours, trois jours même, avant que la paralysie et le coma ne se déclarent. On peut observer alors également les accès de tétanos décrits plus haut, mais, ici encore, ils sont inconstants; le lapin meurt quelquefois, en effet, sans le moindre symptôme d'excitation motrice. La production ou l'absence des accès n'est pas liée à une variation dans la composition des bacilles, car une même suspension provoque le tétanos chez tel lapin, tandis qu'elle fait périr tel autre sans aucune manifestation convulsive. Quelquefois la maladie ne suit pas une mai"che régulièrement progres- sive; le 2™e jour, le S"'^ jour, le 4"^^ jour après l'injection, un mieux se dé- clare, l'appétit renaît, mais l'amaigrissement persiste et la mort survient dans un vrai marasme, avec ou sans stade tétanique final. Elle peut arriver ■ ainsi huit jours et même davantage après l'injection, sans que les meilleurs soins parviennent à l'écarter. Le phénomène le plus frappant de cet empoisonnement lent est l'amai- grissement. Peu marqué quand la mort survient dans les 24 heures, il prend après 2 ou 3 jours, des proportions considérables et tout-à-fait dispropor- tionnées avec celui de l'inanition pure. Il n'est pas douteux que le poison du bacille aérogène exerce chez le lapin une influence puissante sur la dés- assimilation. Quant à la dose nécessaire pour produire la mort, elle ne peut pas être fixée d'une façon absolument sûre; il faut tenir compte de l'état des animaux, les uns succombant après l'administration d'une quantité qui rend les autres simplement malades, même à poids égal. On peut pourtant considérer comme dose presque sûrement mortelle o, 13 ce. de l'émulsion à 10 0/0 pour 100 gr. de lapin, ce qui équivaut à 0,013 gi". de la masse bacillaire, mais nous avons vu des animaux succomber à des doses bien inférieures, par exemple à l'injection de 0,05 ce. de l'émulsion à 10 0/0 pour loo gr. de lapin. Par contre, il y en a, de rares il est vrai, qui résistent à la dose double et triple de celle considérée comme devant les faire périr presque infailliblement. 310 J. DENYS & E. BRION SOLUBILITE DU POISON DANS LEAU. La première question. que nous avons entrepris de résoudre est celle de la solubilité des principes toxiques du bacille aérogène dans l'eau. Comme on le sait, beaucoup d'espèces microbiennes cèdent à ce dissolvant une partie de leurs poisons; c'est le point que nous avons tenu à vérifier en premier lieu, surtout en vue d'expériences qui trouveront leur place plus loin. Nous l'avons déjà dit, nous avons fait nos émulsions tantôt dans l'eau distillée, tantôt dans l'eau salée physiologique, sans que l'un de ces liquides se soit montré plus avantageux que l'autre. Pour les obtenir exempts de microbes, nous avons eu recours à deux procédés : 1° Nous avons filtré l'émulsion à travers la bougie de Chamberland ou la bougie de Nordtmeyer fij. 2° Nous avons recueilli la couche transparente, libre de cadavres mi- crobiens, qui se forme peu à peu à la partie supérieure de l'émulsion, quand on laisse à celle-ci le temps de se déposer. Par ce dernier procédé, on est stir que le poison ne sera pas affaibli par rétention dans la substance du filtre, comme certaines observations doivent le faire craindre. Malheureusement ce procédé est très lent, car les bacilles se déposent avec une lenteur extrême, et il faut attendre plusieurs semaines au moins avant de pouvoir recueillir une petite quantité de liquide. Les expériences comparatives que nous avons instituées ne laissent pas apercevoir de différence considérable entre les solutions obtenues par filtrage et celles obtenues par dépôt. Ces dernières paraissent pourtant un peu plus énergiques, comme le tableau suivant l'établit. I TABLEAU I. Émulsion à lo o/o, vieille de 38 jours. DOSE APPROXI- POIDS INITIAL DOSE ABSOLUE MATIVE POUR 100 GR. DE LAPIN EFFET POIDS FINAL ( 680 1,3 ce. 0,2 Mort après 4 jours 56o Solutio filtrée 700 2,8 ce. 0,4 Simplement malade 65o 720 4,5 ce. 0,6 Mort après 4 1/2 j. 540 720 6 ce. 0,8 Mort après 3 j. 53o tion nue épôt 480 460 1 ce. 2 ce. 0,2 0,4 Mort après 3 12 j. Mort après i 1/2 j. 36o 370 Solu obte par c 480 5oo 3 ce. 4 ce. 0,6 0,8 Mort après 3 1/2 j. Mort après 3 1/2 j. 420 400 (i) H. NoRDTMEVER : Ucber Wasserfiltration durch Filter aus gebrannter Infusorieiierde; Zeitschrift fur Hyg., B. X, iSyi. ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 311 Ce tableau nous apprend deux choses : 1° La solution obtenue par dépôt a une action supérieure à celle ob- tenue par filtration. D'un côté, il y a quatre morts; de l'autre, trois. En outre, la première tue plus rapidement que la seconde. La différence n'est néanmoins pas considérable et l'on peut conclure que la bougie ne retient que peu de poison. 2° Si l'on compare ces résultats avec ceux fournis par l'injection de l'émulsion elle-même, on constate qu'ils sont sensiblement inférieurs. La dose d'émulsion, qu'on peut dire fatalement mortelle, est de 0,13 ce. pour 100 gr. de lapin, et elle tue presque toujours en moins de 24 heures, souvent après 12 heures, quelquefois après moins d'heures encore. Or, l'expérience précédente nous donne une guérison sur huit injections; de plus, aucun lapin ne meurt pendant les premières 24 heures, mais ils ont une survie de 1 1/2 à 4 1/2 jours. On obtient pourtant quelquefois des solutions plus actives. L'expé- rience suivante en est une preuve. TABLEAU IL Émulsion ancienne à 5 0/0. Injection de la couche transparente supérieure. DOSE APPROXI- POIDS DOSE ABSOLUE MATIVE POUR ICO GR. DE LAPIN EFFET 5oo gr. I ce. 0,16 Trouvé mort le lendemain matin 640 gr. 2 ce. 0,32 Meurt avec des convulsions après 24 heures 1040 gr. 7 ce. 0,6 Trouvé mort le lendemain matin Ce liquide se montre notablement plus actif que le précédent : même à doses plus faibles, il détermine la mort dans les 24 heures; ses effets ne sont guère inférieurs à ceux fournis par l'éinulsion aux mêmes doses. C'est le liquide le plus toxique que nous ayons eu en mains ; et le fait est d'autant plus remarquable qu'il provient d'une émulsion moitié moins forte que celles dont nous nous servions habituellement, 5 0/0 au lieu de 10 0/0. Le poison ne serait-il soluble qu'en petite proportion et l'eau des deux émulsions s'en chargerait-elle en proportions égales? Nous l'ignorons. .«m 312 J. DENYS & E. BRION Quant à la diffusion du poison dans l'eau, nous croyons qu'elle se fait très rapidement. Nous n'avons pas d'expériences précises sur les solutions datant de quelques jours, mais une solution obtenue en abandonnant les bacilles à eux-mêmes pendant 13 jours nous a donné des résultats positifs : 2 ce. injectés à un animal de 5S0 gr. (dose pour 100 gr. de lapin : 0,34) l'ont tué en moins de deux jours avec des accès tétaniques francs, qu'on pouvait produire à volonté par les manipulations, et une dose double a amené la mort chez un second lapin du même poids en 30 heures. Il est probable que le poison commence à diffuser dans le liquide dès que le mélange est fait. Si nous faisons abstraction des cas de toxicité extraordinaire, nous pouvons dire que deux ou trois centimètres cubes de solution, obtenue soit par filtrage, soit par dépôt, équivallent approximativement à un centi- mètre cube d'e'mulsion. Quant aux phénomènes d'intoxication, ils sont les mêmes. Nous nous sommes assurés par quelques expériences que le sérum et l'eau tenant en dissolution les sels du sérum dans les proportions physio- logiques sont également des dissolvants de la substance toxique du bacille aérogène. C'est un résultat auquel on devait s'attendre. ACTION DE LA CHALEUR. Une des premières épreuves auxquelles on soumet les cultures pour étudier la nature de leurs produits toxiques, est l'action de la chaleur. Ce sont les résultats fournis par elle que nous allons exposer à présent. Commençons par une expérience dans laquelle nous faisons agir sur huit lapins 1° une émulsion de microbes vivants; 2° une émulsion chauffée pendant 20 minutes à 60°, 3" une émulsion chauffée pendant le même temps à ioo°. Nous disposons ainsi les expériences afin de pouvoir comparer entre elles une culture absolument intacte, une culture tuée, mais dont les pro- duits toxiques, éventuellement les ferments, ont été épargnés autant que possible par la chaleur, et une culture soumise à une température très préjudiciable à la plupart des toxines connues. Les trois émulsions ont été faites avec la même masse bacillaire. ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 313 TABLEAU III. Injection à midi. Nous rappelons que la dose presque fatalement mortelle pour 100 gr. de lapin est de 0,13 ce. de l'émulsion à 100/0. DOSE APPROXI- POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE MATIVE POUR 100 GR. DE LAPIN RÉSULTATS Bacilles vivants 1 600 6S0 0,5 ce. I ce. o,oS o,i5 Guérison Mort pendant la nuit Bacilles chauffes , 600 0,5 ce. 0,08 Guérison à 60" pendant 860 I ce. 0,11 Mort pendant la nuit 20 minutes 660 2 ce. o,3o Mort pendant la nuit Bacilles chauffés 58o 0,5 ce. 0,08 Mort pendant la nuit à 100" pendant 58o I ce. 0,16 Moi-t après deux jours 20 minutes 680 2 ce. 0,29 Mort pendant la nuit Ce tableau est aussi démonstratif qu'instructif. Contrairement à toute attente, il nous montre que le chauffage à 60% et surtout le chauffage à too" n'ont exercé aucune action sur la toxicité des cultures. Il y a même un cer- tain avantage, avantage purement accidentel sans doute, pour les cultures maintenues à la température de 100°. Ce résultat nous a engagé à recommencer l'expérience pour la tempe- rature de 100°. TABLEAU IV. Injection à 11 heures. Emulsion à 10 0/0, chloroformisée. DOSE APPROXI- POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE MATIVE POUR 100 GR. DE LAPIN RÉSULTATS Émulsion 1 non chauffée | 700 640 5oo 0,5 ce. 1 ce. 2 ce. 0,07 o,i5 0,40 Mort après 24 heures Mort après 20 heures Mort dans la nuit Emulsion 56o I ce. 0,18 Mort après 22 heures chauffée à 100° < 420 2 ce. 0,47 Mort pendant la nuit pendant i5 min. 540 4 ce. 0,74 Mort pendant la nuit [ 800 1,5 ce. 0,18 Mort pendant la 2"^^ nuit Émulsion | 490 I ce. 0,20 Mort après 3o heures chauffée à 100" pendant 45 min. j 58o 2 ce. 0,34 Guéri apr. plusieurs jours - de maladie \ 400 3 ce. 0,75 Mort pendant la nuit 314 J. DENYS & E. BRION Pris dans leur ensemble, ces résultats ne sont guère inférieurs à ceux du tableau précédent. Les. animaux injectés avec l'émulsion chauffée pen- dant 13 minutes succombent aussi rapidement que ceux cjui reçoivent l'é- mulsion non chauffée. Parmi ceux qui sont injectés avec celle maintenue à 100° pendant 45 minutes, il y en a un (]ui survit, après avoir vu son poids descendre de 5S0 gr. à 520 en moins de deux jours de temps. Un autre périt pendant la 2"^^ nuit qui suit l'injection, et un troisième, après 30 heures. Le dernier seul meurt dans les 24 heures, tandis que les six premiers lapins du tableau (culture non chauffée et culture chauffée pendant 15 minutes) succombent tous dans ce temps. Si une température de 100° pendant 1 5 minutes est restée sans effet , il n'en est pas de même de celle prolongée pendant 45 minutes, celle-ci a affaibli la toxine manifes- tement. Qu arrive t-il quand la température de loc est continuée pendant trois heures? TABLEAU V. Injection à midi. DOSE APPROXI- POIDS DOSE MATIVE ?OUR RÉSULTATS DU LAPIN ABSOLUE 100 GR. DE LAPIN ■ 800 0,5 ce 0,06 Guère malade Eniulsion < 740 I ce. o,i3 Mort pendant la nuit non chaunce j ( 800 2 ce. 0,25 Mort pendant la nuit Émulsion | 740 I ce. o,i3 Guérison apr. indisposition goo 2,25 ce. 0,25 Mort pendant la nuit chaunee a loo" s pendant 3 h. | 680 4 ce. 0,60 Mort après 20 heures ' 720 6 ce. Q,80 Mort après g heures Pour bien juger ce tableau, il faut comparer entre eux les deux lapins qui ont reçu o, 13 d'émulsion et les deux qui en ont reçu 0,23. Des premiers, celui auquel on a donné l'émulsion non chauffée meurt, l'autre n'est que malade. Le chauffage ici encore a été nuisible à l'action toxique; mais, malgré sa longue durée, il n'empêche pas une dose double de produire la mort dans le même temps que chez le lapin témoin. Enfin, un chauffage de 6 heures n'est pas encore apte à détruire com- plètement le poison. ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 315 TABLEAU VI. Injection à 5 heures du soir. DOSE APPROXI- POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE MATIVE POUR 100 GR. DE LAPIN RÉSULTATS Émiilsion \ non chauffée / 56o 56o 720 0,5 ce. 1 ce. 2 ce. 0,08 0,16 0,27 Mort après ig heures Mort après 14 heures Mort pendant la nuit Émulsion ; 600 0,5 ce. 0,08 Guère malade chauffée à loo^ 660 I ce. o,i5 Guère malade pendant 6 h. 540 2 ce. 0,37 Mort après 22 heures 5/ nous résumons ces expériences, nous trouvons que la toxine du bacille aérogène supporte très bien, sans affaiblissement sensible, une tem- pérature de 100° pendant 15 et 20 minutes; elle s'affaiblit, pas considérable- ment, il est vrai, mais d'une façon déjà nette, quand cette température est prolongée pendant 45 minutes et 3 heures. Quand elle est maintenue pendant 6 heures, le poison a perdu asse^ de son activité pour qu'il soit nécessaire de quadrupler la dose, afin d'obtenir le même effet qu'avec r émulsion non chauffée. Cette remarquable résistance du poison nous a engagés à étudier l'effet de températures plus élevées encore et voici ce que nous avons obtenu. TABLEAU VII. Injection à 10 1/2 heures Émulsion chauffée pendant 20, 40 et 60 _ minutes à 120'' dans l'autoclave. DOSE APPROXI- POIDS DU LAPIN DUREE DU CHAUFFAGE DOSE ABSOLUE MATIVE POUR 100 GR. DE LAPIN RÉSULTATS Lap. I. i25o I ce. 0,08 Mort pendant la nuit Lap. II. 1270 20 min. I ce. id. Perte de poids de i3o gr. Guérison Lap. III. 1220 40 min. I ce. id. Perte de poids de 270 gr. So7-t inconnu Lap. IV. I200 60 min. I ce. id. Mort après 26 heures 316 J- DENYS & E. BRION Le résultat de l'expérience nous montre que le poison oppose égale- ment une résistance considérable à la température de 1 20^; mais pour bien en juger, il est nécessaire die se rappeler que la dose de o,oS pour 100 gr. de lapin est une dose qui est loin d'être sûrement mortelle. Nous avons fixé celle-ci à 0,13. Il n'est donc pas étonnant que le lapin II ait survécu, bien qu'ayant été malade, à preuve la perte de poids. Le lapin III a maigri de 270 gr., mais son sort ultérieur nous est inconnu. Quant au lapin IV, il a succombé après un temps assez court à une dose non fatalement mortelle, maintenue pendant une heure à 1 20°. Ce fait suffit à lui seul pour établir la fixité de la toxine vis-à-vis des hautes températures. Pour être exact, il faut pourtant reconnaître que la température de 120°, comme celle de loo", n'est pas indifférente pour le poison. Ce serait forcer l'interprétation du dernier tableau que de vouloir le méconnaître. NATURE DU POISON. Le poison du bacille aérogène présente, comme nous venons de le voir, une fixité remarquable vis-à-vis de la chaleur. Tandis que la toxicité des cultures d'autres espèces étudiées dans ces derniers temps se trouve affai- blie dans des proportions considérables par une courte ébullition, et même annihilée, celle de cet organisme n'éprouve par la même opération aucune diminution sensible. D'où vient cette différence? Est-elle produite par la nature spéciale du poison, et ce dernier, au lieu d'être une substance albu- mino'ïde, un ferment, serait-il peut-être de nature alcaloïdique, une pto- màine? C'est ce que nous nous proposons de résoudre. Nous avons commencé par soumettre 5 gr. de culture, mis en suspen- sion dans 45 ce. d'eau, à la méthode de Brieger pour l'extraction des pto- ma'ïnes. La suspension, additionnée de 1 ce. d'acide chlorhydrique, fut laissée pendant un jour à la couveuse, afin de faciliter l'extraction. Après réduction de l'acidité à un minimum au moyen du carbonate de sodium, le tout fut évaporé au bain-marie. Pendant cette opération, nous maintenons, par l'addition de petites quantités de carbonate, l'acidité à un degré aussi bas que possible. Le résidu, de consistance sirupeuse, fut repris par 50 ce, d'alcool et trituré soigneusement. La solution alcoolique fut séparée par filtrage et précipitée par une solution alcoolique de sublimé en excès. Ce- lui-ci, comme on le sait, entraîne, avec quelques autres substances, les ptomaïnes sous forme de sels doubles. Or, il ne se produisit qu'une faible ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 317 opalescence. Après quelque temps, le rare précipité qui s'était formé, fut' séparé par filtration, traité à l'eau bouillante et filtré à chaud. Le filtrat, décomposé par H^S jusqu'à précipitation complète du mercure et qui devait renfermer les ptomaïnes, fut injecté en totalité à un lapin de 600 gr. qui n'en fut pas même incommodé. Ce résultat nous parait très instructif, surtout si l'on songe que l'ex- traction a porté sur 5 gr. de' culture, quantité suffisante pour tuer sûrement une bonne soixantaine de lapins du poids de 600 gr. Les cultures du bacille aérogène sur pomme de terre ne fournissent donc pas de ptomaïnes par la méthode de Brieger. On pourrait nous objecter que les dérivés alcaloidiques de cet orga- nisme sont très instables et détruits par l'une ou l'autre des manipulations par lesquelles ils ont dû passer, mais nous pouvons écarter cette crainte pour les motifs suivants : 1° La macération dans l'acide chlorhydrique pendant 24 heures, n'en- lève pas aux cultures leur toxicité, comme des injections faites après neu- tralisation nous l'ont démontré. 2° Le courant d'acide sullhydrique n'est pas plus délétère. Pour l'éta- blir, nous avons soumis deux portions de suspension bacillaire à un courant de cet acide, l'une pendant un quart d'heure, l'autre pendant trois quarts d'heure, sans qu'il en résultât une diminution de leur pouvoir toxique. Il ne reste plus qu'à soupçonner l'alcool, mais son contact ne peut être incriminé davantage, comme nous le verrons bientôt. La méthode de Brieger pour la recherche des ptomaïnes ne nous a donné que des résultats négatifs. Malgré le peu d'espoir de réussir par une autre voie, nous avons eu recours également à la méthode de Gautier (1), mais nous nous sommes assurés dès les premières opérations, par l'injectiorr; aux lapins, que le poison était resté en totalité avec les bacilles et qu'il n'y en avait pas trace dans le liquide qui aurait dû le contenir. Aussi, avons- nous renoncé à poursuivre l'extraction. Enfin, pour avoir tous nos apaisements, nous avons utilisé la solubi- lité des ptomaïnes, soit à l'état libre, soit à l'état de sels, dans les meilleurs dissolvants des alcalo'ides, et nous avons traité des masses bacillaires par l'alcool, l'éther et le chloroforme, soit comme telles, soit après acidification légère au moyen de l'acide chlorhydrique ou acétique. (1) A. Gautier : Cours de chimie, t. III, Paris, 1892, 3i8 J DENYS & E. BRION i'''^ Expcricuce : 5 gi"- de bacilles en suspension dans 45 ce. d'eau aci- difiée légèrement par l'acide acétique sont agités à plusieurs reprises avec des portions d'éther. L'opération dure 45 minutes. Nous obtenons en tout par décantation 1 10 ce. d'éther, que nous évaporons. Le résidu, y compris quelques globules de graisse, est injecté dans le péritoine d'un lapin de 760 gr., qui n'en subit pas le moindre inconvénient. La même masse bacil- laire fut reprise par le chlorolorme, et le résidu de la solution chlorofor- mique injecté à un lapin du même poids. L'animal éprouva une diminution passagère de l'appétit, diminution qui disparut le lendemain. Enfin, la même masse fut épuisée par l'alcool et le résidu de l'évaporation introduit dans le péritoine d'un troisième lapin, sans aucune conséquence. Rappelons que les 5 gr. de bacilles suffisaient pour tuer sûrement cinquante lapins de même taille. 2""^ Expérience : 3 gr. de culture lurent épuisés successivement : 1° par 57 ce. d'alcool ordinaire pendant 7 jours. 2° par 57 ce. n » -f 7 ce. HCl - -, « ' 3° par 57 ce. d'éther léger, acide ^ r? » 4'^ par 57 ce. de chloroforme -^ 10 y Les liquides furent chaque fois éloignés par décantage, opération très aisée vu la facilité avec laquelle les bacilles se déposent dans ces milieux. La réaction légèrement acide de la solution éthérée provenait d'un résidu d'acide ehlorhydrique de la solution alcoolique. Chacune des solu- tions fut évaporée sur le bain-marie, la solution alcoolique étant ramenée au fur et à mesure de sa concentration à une réaction acide très faible par l'addition de carbonate de sodium. Chaque résidu fut injecté en totalité à des lapins de 4S0 à 11 00 gr. Tous demeurèrent en vie; trois ne présentèrent aucun trouble, le quatrième, celui qui reçut le résidu alcoolique, présenta une courte indisposition. Fait remarquable, les bacilles, après avoir subi ces quatre extractions, possédaient encore une grande toxicité. Après les avoir mis en suspension dans 27 ce. d'eau, de façon à avoir la solution type à 10 0/0, nous injectâmes 2 ce. dans le péritoine d'un lapin de 860 gr. Il mourut le surlendemain, après avoir présenté pendantplusieurs heures un étattétanique très prononcé. En résumé, ni la méthode de Brieger, ni celle de Gautier, ///' l'extrac- tion au moyen des meilleurs dissolvants des alcaloïdes et de leurs sels ne permettent de retirer du bacille aérogcne ses produits toxiques. Devant ces résultats, nous dûmes abandonner définitivement l'hypo- ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 3I9 thèse que la toxine était de nature alcaloïdique, hypothèse qui nous avait • été suggérée par sa remarquable résistance à la chaleur ; à partir de ce moment, nous imprimâmes à nos i"echerches une autre direction. Les travaux de Brieger et pRâNKEL, de Roux et Yersin et d'autres ont montré que les produits toxiques des bactéries étaient formés de corps se rattachant par leurs propriétés aux substances albuminoïdes, et plus particulièrement aux ferments. Une de ces propriétés consiste dans la précipitation de leur solution aqueuse par l'alcool. Comme nous l'avons vu plus haut, la toxine du bacille aérogène est soluble dans l'eau. Qu'arrive-t-il si l'on verse de l'alcool dans cette solution? On voit immédiatement se produire une opalescence légère, qui n'augmente plus dès que l'on a ajouté trois à quatre volumes d'alcool fort. Si l'on sépare par filtration le faible précipité qui se dépose au bout de quelque temps et qu'on l'injecte aux lapins, ceux-ci succombent avec la symptomatologie ordinaire. Exemple : 1 1 ce. d'une solution obtenue par filtrage sont précipités avec quatre foisleur volume d'alcool. Le précipité est redissous, sans résidu, dans 1 1 ce. d'eau, et de cette solution nous injectons à un lapin de 770 gr., tou- jours dans le péritoine, 4,5 ce. L'animal mourut pendant la nuit. Quant à la solution alcoolique, elle fut évaporée au bain-marie, et le résidu, injecté à un lapin beaucoup plus petit, de 480 gr., fut sans conséquence pour celui-ci. La toxine est précipitée de ses solutions aqueuses par l alcool. Voilà déjà un caractère qui la rapproche des toxalbumines. Un autre caractère de ces dernières est de ne pas être dialysables. La toxine du bacille aérogène est également dénuée de cette propriété. 'Voici une expérience qui le démontre. Expérience de dialyse. Une suspension de bacilles à 10 0/0, après s'être déposée et avoir été décantée une première fois, fut additionnée d'une quan- tité d'eau égale à celle enlevée : et, après un nouveau temps de repos, elle fournit la solution qui servit à l'expérience. Une partie de cette solution fut conservée comme témoin, une autre fut soumise à la dialyse en présence d'une considérable quantité d'eau. La surface du dialysateur fut choisie assez grande pour que la couche intérieure n'eût que deux à trois millimètres d'épaisseur. Le liquide à dialyser fut chloroformé et recouvert de façon à rendre l'évaporation et, par conséquent, la concentration impossible. Après 48 heures de dialyse, la solution fut injectée, concurremment avec la solution témoin et à doses proportionnelles à des lapins. 40 320 J. DENYS & E. BRION TABLEAU VIII. SOLUTION NON DIALY ÉE SOLUTION DIALYSÉE POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE DOSE POUR 100 GR. RÉSULTATS POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE DOSE POUR 100 GR. RÉSULTATS 800 gr. 4 ce. 0,25 Pas malade^ 800 gr. 2 ce. 0,25 Indisposition légère 760 gr. 2,9 ce. o,38 Indisposition légère 720 gr. 2,8 ce. 0,38 A peine indisposé 400 gr. 4 ce. 1,00 Indisposition légère 420 gr. 4 ce. 1,00 Malade Malgré le retour de l'appétit, l'amaigris- sement continue Mort après 9 jours 35o gr. 7 ce. 1,90 Bien malade Mort après 11 j. 3 60 gr. 7 ce. 1,90 Bien malade Trouvé mort après 28 heures 5oo gr. 12 ce. 2,40 Trouvé mort le lendemain 35o gr. 8,6 ce. 2,40 Bien malade Trouvé mort après 28 heures L'expérience est décisive. Bien que la solution soit faible clans ses effets, ce qui tient probablement à ce qu'elle constitue une deuxième extrac- tion, ce tableau nous apprend que la toxine soumise à la dialyse n'a pas perdu de sa puissance. Nous devrions même conclure à une recrudescence de force, puisqu'elle nous donne trois morts contre deux, si nous ne savions qu'il faut tenir compte de la réceptivité individuelle. En même temps que cette expérience, nous en avons fait une autre, une expérience témoin, dans laquelle nous avons soumis à la dialyse une solution de 1 0/0 de sel marin; après 24 heures, la majeure partie du chlorure de sodium avait passé; après 48 heures, le nitrate d'argent n'en révélait plus à l'intérieur du dialysateur. La toxine du bacille aérogène ne jouit pas de la propriété de dialyser; c'est une substance colloïde; par ce second caractère également elle se place parmi les toxalbumines. Un troisième caractère des toxalbumines est d'être entraînées facile- ment par les précipités qui se forment dans son sein. Voyons comment se comporte notre toxine. ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 321 Dans 25 ce. de filtrat, obtenu par la bougie, nous dissolvons 4 grammes de phosphate de sodium que nous précipitons par du chlorure de calcium, de façon à laisser un peu de phosphate sodique en solution. Le précipité fut recueilli sur un filtre de papier et exprimé. Nous en prélevâmes une portion grosse comme une noisette, que nous injectâmes à un lapin de 1330 gr., après lavoir délayée dans 5 ce. d'eau. Le lendemain matin, le lapin présentait tous les symptômes de l'empoisonnement : apathie, posi- tion en boule, diarrhée, etc. Le soir, il était couché sur le flanc, paralysé des membres et présentant des accès tétaniques très caractérisés. Il mourut pendant la nuit. Le précipité de phosphate renfermait donc des quantités notables de poison. Quant à la solution, elle n'en renfermait plus que des traces. En effet, 15 ce. de cette solution, correspondant à 9 ce. de la solution primitive de 25 ce, furent injectés à un lapin de 1410. Cette dose, sûrement mortelle avant la précipitation, causa passagèrement la perte de l'appétit et de la vivacité, mais après 24 heures, l'état normal reparut. La toxine du bacille aérogène est entraînée par le précipité de phos- phate calciqite, troisième caractère qui la range parmi les toxalbumines. ACTION DES SUCS GASTRIQUES ET PANCRÉATIQUES SUR LA TOXINE. Tout récemment Gamaleïa a fait des recherches pour prouver que les toxalbumines sont des nucléoalbumines. Il fonde son assertion sur l'action exercée par le suc pancréatique sur le poison de la diphtérie;celui-ci est détruit. Ces recherches nous ont engagés à étudier d'une manière spéciale l'action des sucs digestifs sur le poison du bacille aérogène, et en les exécu- tant, nous avons eu pour but non seulement d'examiner la manière dont se comportait notre toxine, mais aussi d'élucider son sort dans le tube digestif, où elle doit se rencontrer certainement en dehors des bacilles, c'est-à-dire en solution dans le chyle. Nous commençons par exposer nos expériences faites avec le suc gas- trique. La digestion gastrique nécessitant l'intervention de l'acide chlorhy- drique, nous avons voulu rechercher en premier lieu, si cet acide exerçait par lui-même quelque action sur la toxine. Dans ce but, nous fîmes digérer à la couveuse une suspension à 10 0/0 de bacilles en présence de 1 et de 2 0/00 d'acide chlorhydrique. Voici les résultats. J. DENYS & E. BRION TABLEAU IX. POIDS DU DOSE DOSE ACIDE LAPIN .■ABSOLUE POUR 100 GR. CHLORHY- DRIQUE RÉSULTATS 1 720 gr. I ce. o,i3 I o'oo Mort pendant la nuit \ 620 gr. I ce. 0,16 2 0 00 Gravement malade dès le 2 JOUIS ' surlendemain ; de couveuse ; meurt la quatrième nuit après l'injection 720 gr. I ce. o,i3 Trouvé mort le 3"^'^ jour 4 jours 450 gr. 0,8 ce. 0,17 Dès le lendemain, de couveuse V gravement indisposé; trouvé mort le S"": jour Comme un coup d'œil jeté sur la colonne delà dose relative le démontre, le i^"" et le 3™^ lapin ont reçu précisément la dose considérée comme sûre- ment mortelle, le 2"^^ et le 4""^ une dose un peu plus forte. On devait donc s'attendre à les voir périr tous les quatre, c'est ce qui est effectivement arrivé. Ceux qui ont reçu la suspension exposée pendant deux jours à l'acide chlor- hydrique meurent, l'un pendant le premier jour, l'autre pendant le qua- trième; ceux qui ont reçu la même suspension après 4 jours de contact, succombent tous les deux pendant le troisième jour. L'expérience démontre clairement que les bacilles supportent pendant un temps considérable la présence de l'acide chlorhydrique dans la proportion nécessaire pour une bonne digestion gastrique. Que se produit-il si l'on met les bacilles en présence des deux facteurs de la digestion stomacale : l'acide chlorhydrique et la pepsine? La pepsine, employée par nous, provenait d'une extraction d'estomac de porc par la glycérine. Notre extrait était cloué de propriétés digestives énergiques; au moment de remplo3rer, nous avons constaté qu'un centimètre cube de solution glycérique, additionnée de 10 ce. d'eau et d'une goutte d'acide chlorhydrique, dissolvait, au bain-marie, en 5 minutes de temps, la presque totalité d'une pelote de fibrine du volume d'un gros pois. Après 10 minutes, il ne restait plus que des traces de cette derjiière. Quant à l'action du ferment pepsinique sur les animaux, nous n'avons pas à nous en occuper; en effet, si on l'injecte à dose triple de celle employée pour la digestion, il n'occasionnait pas le moindre trouble. ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 323 TABLEAU X. Suspension mise à digérer à la température du corps dans la propor- tion suivante : suspension bacillaire, 9 ce; extrait glycér. d'estomac de porc, 1 ce; acide chlorhydrique, i goutte. Évaporation empêchée par la fermeture du vase. Dose injectée à tous les lapins, 0,10 pour 100 grammes, c'est-à-dire une dose inférieure à la dose sûrement mortelle (0,13). POIDS DURÉE DU LAPIN DE LA DIGESTION RÉSULTATS 760 Pas de digestion Gravement malade Perte de poids de 80 gr. après 3 jours 660 3o minutes de digestion Mort après 3 jours 620 I 1/2 heures » Malade Perte de poids de 70 gr. après 4 jours 520 2 1/2 heures » Trouvé mort après 4 jours Perte de poids de 120 gr. Les résultats sont panachés. Mais si l'on se rappelle que la dose choisie ne produit pas régulièrement la mort, ils deviennent très instructifs. Le témoin survit, il en est de même du troisième lapin (digestion de 90 mi- nutes), mais le deuxième et le quatrième succombent. Ce dernier résultat surtout est intéressant : un suc gastrique qui dissout rapidement une quan- tité notable de fibrine en quelques minutes, ne mqntre pas d'action sur les bacilles après deux heures et demie de contact. L'expérience suivante, quoique faite avec une suspension assez faible dans son action, est tout aussi concluante. TABLEAU XL Même suc gastrique, dans les mêmes proportions que précédemment. Poids des lapins 400 gr., quantité injectée 1 ce. DUREE DE LA DIGESTION RESULTATS Pas de digestion 3o minutes de digestion 1 heure de digestion 2 heures de digestion 5 heures de digestion Gravement malade Giiérison. » Mort après 2 jours Guérison Mort après i jour Mort après 5 jours 324 J DENYS & E. BRION Dans les deux expériences précédentes, il est question de la digestion d'une cinulsion; dans la suivante de celle d'une solution, obtenue par dépôt et dont tous les bacilles sont éliminés. TABLEAU XII. Digestion pendant 2_|. heures à la couveuse. POIDS DOSE DOSE DU LAPIN ABSOLUE POUR 100 GR. RÉSULTATS Solution comme telle 700 2,5 ce. 0,35 Mort après 5 heures Solution acidifiée par i5oo 5 ce. 0,33 Mort pendant la nuit II ce. Solution -\- acide chloi'h3'dnque 1080 3,75 ce 0,34 Mort après 8 heures 4- pepsine ^ Cette expérience portant sur une solution est très intéressante. Ici, tout le poison étant dissous, les facteurs de la digestion stomacale devaient immédiatement le rencontrer. Malgré cela, le poison est resté intact. Nous -pouvons conclure que le suc gastrique n'exerce pas d'effet des- tructif appréciable sur la toxine du bacille aérogène. Arrivons à la digestion pancréatique. Le ferment nous a été fourni par un pancréas de porc, trituré finement et extrait par la glycérine pen- dant plusieurs jours. Après filtration, la solution glycérique fut précipitée par l'alcool et le précipité redissous dans l'eau chloroformée. C'est cette dernière qui nous servit pour nos expériences dans la proportion de 1 pour 9 d'émulsion. Mêlée dans la même proportion à de l'eau carbonatée à t 0/0, elle dissolvait une pelote de fibrine en peu de minutes. Dans la crainte que le carbonate de sodium, indispensable pour obtenir une action énergique de la trypsine, n'exerçât par lui-même une action fâcheuse sur la toxine, nous avons arrangé nos expériences de façon à pouvoir injecter parallèlement une émulsion simplement carbonatée, et une émulsion renfermant les deux facteurs de la digestion. Comme les tableaux suivants le prouvent, la trypsine n'exerce pas plus d'action que la pepsine. ETUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 3'^5 TABLEAU XIII. POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE DOSE POUR lOO i i GR. DUREE DE LA DIGESTION RESULTATS Témoin (Émulsion pure) Émulsion simplement additionnée de carbonate de sodium (i oo) Émulsion -1- I o'o de carbonate -|- trypsine 5oo 56o 53o 540 420 490 56o 660 620 540 660 2 ce. 2 ce. 2,9 ce. 1,5 ce. 2 ce. 2,5 ce. 2,2 ce. 2 ce. 0,40 0,34 0,37 o,S3 0,35 0,40 0,34 0,38 0,35 0,37 o,3o 1/2 heure I » 2 )) 8 1) 25 » 1/2 » I )) 2 1) 8 » 25 )) Mort après 2 heures Trouvé mort après 5 1/2 h. Trouvé moi-t après 5 h. Trouvé mort après 6 h. Trouvé mort le lendemain. L'injection avait été faite à 6 heures du soir Trouvé mort le lendemain Trouvé mort après 3 h. Trouvé Wior^ après 4 h. Trouvé mort le lendemain matin. L'injection avait été faite à 6 heures du soir Trouvé mort après 5 h. Cette expérience se passe de longs commentaires; ni le carbonate, ni le carbonate associé à la trypsine, même après des contacts prolongés, n'ont pas d'action nette sur le pouvoir toxique. Voici une seconde expérience du même genre fournissant le même résultat. TABLEAU XIV. POIDS DOSE DOSE DUREE DU LAPIN ABSOLUE POUR 100 GR. DE LA DIGESTION RESULTATS Émulsion II40 1060 1 ce. 2 ce. 0,08 0,18 Trouvé mort après 9 h. Trouvé mort pure le lendemain matin / ' |io5o 2 ce. 0,19 I 1/2 heure l II 20 2 ec. 0,17 2 1/2 » Trouvé mort après 6 h. Émulsion 1160 2 ce. 0,17 9 » Mort pendant la nuit. + carbonate \ Injection à 7 heures du soir -(- ferment. j 960 I ce. 0,10 23 » Trouvé mort après 2 j. 85o 2 ce. 0,23 23 » Trouvé mort \ le lendemain matin 326 J. DENYS & E. BRION Cette expérience confirme pleinement la précédente, mais elle est plus intéressante au point de vue suivant. L'émulsion digérait une petite pelote de fibrine en lo minutes au début de la digestion; après les 23 heures de couveuse, elle mettait 30 minutes pour parfaire le même travail. Si cette expérience nous apprend que la liqueur digestive s'était affaiblie, elle nous enseigne par contre que le ferment était resté actif pendant toute la durée de la digestion. La toxine a donc été soumise pendant 23 heures à l'action de la trypsine. Nous finissons par deux expériences dans lesquelles nous avons soumis à la digestion pancréatique non plus les bacilles, mais une solution de toxine. TABLEAU XV. Durée de la digestion : 5 heures. POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE DOSE POUR lOp GR. RÉSULTATS Solution seule 600 840 5 ce. 10 ce. o,83 1,19 Mort dans la nuit Malade Solution-f car- 680 5 ce. 0,73 Mort dans la nuit bonate 780 10 ce. 1,28 Mort dans la nuit Solution -|-carbo- 770 5 ce. 0,64 ' Mort après 2 jours nate+trypsine 1020 10 ce. 0,98 Mort après 3 jours TABLEAU XVL Durée de la digestion : 24 heures. POIDS DU LAPIN DOSE ABSOLUE DOSE POUR 100 GR. RÉSULTATS Solution 720 5 ce. 0,57 Mort après 5 heures Solution + car- bonate 740 5 ce. 0,67 Mort dans la nuit Solution +carbo- nate+trypsine 740 5 ce. 0,69 Mort dans la nuit ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 2-1 Nous pouvons sûrement conclure de toutes ces expériences que les sucs gastrique et pancréatique n'exercent aucune action manifeste sur la toxine du bacille aérogène, même après la durée énorme de 24 heures de digestion. En ne considérant que certains résultats isolés, on pourrait être porté à admettre que la digestion est nuisible, mais les faits défavorables sont compensés par d'autres. Les irrégularités s'expliquent, si l'on considère que bien souvent la dose choisie était inférieure à la dose sûrement mortelle. Cependant, en admettant même que la toxine soumise à la digestion se soit trouvée un peu moins souvent meurtrière ou un peu plus paresseuse, il ne nous semble guère licite d'en conclure que son affaiblissement est la conséquence d'un travail digestif. Un des caractères des ferments digestifs est de produire des modifications rapides et profondes; c'est avec ce caractère que nous apparait l'action des sucs gastrique et pancréatique sur la fibrine; au bout de quelques minutes celle-ci est non seulement dissoute, mais passe par toute une série de transformations. Nous assistons là à une véritable action de ferment. Mais un affaiblissement léger, une destruction à peine perceptible, surtout de produits en dissolution, ne nous sembleraient pas pouvoir être rapportés à un travail de cette nature. Nous préférons y \-oir l'effet de causes étrangères à la digestion. Cette interprétation n'a du reste rien de forcé; nous voj'ons une foule de principes s'affaiblir sans qu'ils soient soumis à une action, digestive. Pour en trouver des exemples, il n'est pas nécessaire d'aller bien loin. Dans Pexpérience relatée au tableau XIV, nous avons recherché deux fois le pouvoir digestif de notre émulsion : une pre- mière fois immédiatement après le mélange, et une seconde fois après 23 heures. La première fois, la fibrine fut dissoute en 10 minutes, la seconde fois après 30 minutes. Dira-t-on que la trypsine s'est affaiblie parce qu'elle a été digérée? Certainement non. De même, nous considérons l'affaiblissement léger de notre toxine, si affaiblissement il y a, comme produit par des causes indéterminées, mais indépendantes de la digestion. Les notions fournies par ces expériences sont intéressantes au point de vue clinique. Nous portons, à n'en point douter, dans notre intestin une certaine quantité de toxine libre, soit celle du bacille aérogène, soit celle si rapprochée, sinon identique, du bacille commun de l'intestin. Nous n'en éprouvons pourtant pas la moindre incommodité. Pourquoi? Est-ce parce que la toxine est détruite par les ferments digestifs, comme les expériences de Gamaleïa auraient pu le faire supposer? Nos recherches ne légitiment pas cette interprétation; il faut chercher au contraire le maintien de l'état de santé dans lequel nous vivons dans l'intervention d'autres facteurs. Nous 41 328 J. DENYS & E. BRION reviendrons sur cette question dans' un prochain travail, qui est presque achevé. Contentons-nous de faire remarquer que la présence dans le tube digestif de substances toxiques d'origine microbienne et réfractaires à la di- gestion est de nature à appuyer par des faits la théorie de l'auto-infection. ACTION DE L'OXYGENE ET DE LA LUMIÈRE. Diverses toxines, étudiées jusqu'à présent, se sont montrées extrême- ment sensibles à ces deux facteurs. C'est ce qui nous a engagés à examiner leur action sur le poison du bacille aérogène. Action de l'oxygène. Une solution de toxine, obtenue par dépôt, fut divisée en deux portions, et l'une des deux fut soumise à un courant d'air pendant 36 heures. Pour exclure l'action de la lumière, l'opération fut faite dans un endroit obscur. Les résultats de l'opération sont consignés dans le tableau suivant. TABLEAU XVII. POIDS DU LAPIN DOSE RÉSULTATS ( 5oo I ce. Mort après 21 jours Portion témoin •; 5 00 5oo 2 3 ce. ce. Mort Mort id. après 36 heures ( goo 7 ce. Mort après 3 jours / 760 1,5 ce. Mort après 4 heui-es Portion soumise j 600 2,4 ce. Malade pendant i jour à un courant d'air) 5 60 3,3 ce. Malade pendant 2 jours 1, 600 5 ce. Mort après 2 3/4 heures L'expérience montre que la toxine n'est pas détruite par l'oxygène, du moins à la température de la chambre. Si l'on combine l'action de ce ga^ avec celle de la lumière solaire, l'èniulsion ne perd pas davantage sa toxicité. Comme exemple, citons l'expérience suivante : Une certaine quantité d'émulsion fut versée dans un matras à fond large, de façon à ce que la couche n'avait pas plus de 1 à 2 millimètres d'épaisseur. Le matras fut bouché avec un tampon d'ouate, et le tout fut exposé aux rayons directs du soleil. La minceur de la couche de liquide et la perméabilité du bouchon laissaient à l'air une liberté d'action suffisante. Après 15 jours d'exposition. ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 329 la toxicité de cette émulsion fut comparée à la même émulsion maintenue à' r obscurité dans un flacon hermétiquement fermée. Deux lapins de 700 gr. environ furent injectés avec un et deux centimètres cubes de la première, et deux autres, du même poids, avec la même quantité de la seconde. Les quatre animaux moururent pendant la nuit. L'insolation prolongée était donc restée sans effet. Toutes ces expériences permettent-elles de préciser davantage la nature chimique de la toxine du bacille aérogène? Elle n'est certainement pas de nature alcaloïdique. De grandes masses, traitées par les diverses méthodes appropriées, ne nous ont fourni que des substances inofifensives, ou tout au plus capables d'indisposer passagè- rement le lapin. Encore, devait-on les administrer à dose extraordinairement élevée pour produire ce trouble éphémère. Nous pouvons donc affirmer que les ptomaïnes n'interviennent pas dans les phénomènes que nous avons observés. Faut-il classer notre toxine parmi les substances albuminoïdes et en faire une toxaibumine? Son insolubilité dans lalcool, sa nature colloïdale nous font incliner vers cette interprétation, mais nous devons pourtant reconnaître que cette opinion est difficilement conciliable avec sa résistance à la chaleur et à la digestion. Que penser de l'opinion de Gamaleïa, qui, comme nous l'avons vu, range les toxines parmi les nucléines? Cet observateur, dans une note parue dans le courant de l'année (1), essaie de préciser la nature chimique des poisons microbiens en faisant agir sur eux différents ferments. Comme objet d'étude, il choisit le poison diphtéritique, et il le soumet à l'action du suc gastrique et à celle diL suc pancréatique. Il trouve que la pepsine exerce une action destructive énergique sur cette toxine. Vingt-quatre heures de contact suffisent pour priver les liquides filtrés les plus virulents de leur toxicité si caractéristique. Le liquide pepsine pouvait être injecté aux cobayes, sans amener leur mort, à des doses cinquante fois plus grandes que celles qui, sans pepsine, tuaient les animaux en vingt-quatre heures. La trypsine agit comme la pepsine, avec cette différence que son action est plus courte, le poison étant détruit en quelques heures. Les cultures de diphtérie, soumises à la digestion, ne deviennent pour- (11 N. Gaualeïa : De l'action des ferments solubles sur le poison diphtéritique; Comptes rendus de la société de biologie, iSq2. 330 J- DENYS & E. BRION tant pas inoffensives. Les animauxqui en reçoivent de fortes doses succom- bent encore, mais sans présenter l'empoisonnement aigu, caractérisé par l'œdème au point d'inoculation, par l'hyperhémie des capsules surrénales et de l'intestin grêle, par la pleurésie séreuse ; ils maigrissent, deviennent cachectiques et finissent par périr des suites d'un empoisonnement chronique. Voici comment Gamaleïa interprète la modification que la digestion, soit gastrique, soit pancréatique imprime à la toxine. Le poison diphté- ritique est une substance albuminoïde, et pour ce motif il est attaqué par les ferments protéolytiques : la pepsine et la tr3'psine. On doit admettre qu'il constitue une nucléine composée, ou, autrement dit, une nucléoalbumine. C'est lui qui produit les symptômes caractéristiques de l'empoisonnement diphtéritique. Sous l'action des ferments digestifs, il subit un dédoublement donnant naissance à une nucléine, qui est le poison cachectisant. Ces expériences de Gamaleïa, tout intéressantes qu'elles soient, ne nous semblent pas prouver l'existence chez les microbes d'un premier poison, une nucléoalbumine, donnant par décomposition, un second poison, une nucléine. Elles seraient décisives, si cet auteur avait pu opérer sur une substance chimiquement pure ; il aurait bien fallu alors considérer le deuxième poison comme dérivant du premier. Mais rien ne prouve que dans les cultures filtrées de diphtérie il n'y a pas originairement deux poisons : un poison produisant les symptômes propres à la maladie et détruit par la digestion, et un autre déterminant la cachexie et réfractaire aux ferments. C'est une supposition aussi légitime que celle adoptée par Gamaleïa; elle rend tout aussi bien raison des faits ; la toxine spécifique, à action rapide, étant détruite, la toxine cachectisante a l'occasion et le temps de manifester ses effets propres. Dans ces dernières années, les toxines de divers microbes sont devenues l'objet de recherches systématiques; les mieux étudiées sont la toxine de la diphtérie, celle du tétanos et celle du choléra. Comme la toxine du bacille aérogène s'écarte notablement de ces dernières par ses propriétés, nous pensons qu'un parallèle entre cet organisme et ceux que nous venons d'énumérer est tout indiqué. Action de la chaleur. Les poisons de la diphtérie, du tétanos et du choléra sont très sensibles à la chaleur. Roux et Yersin (i) ont établi que celui de la diphtérie subit un il) Roux et Yersin : Contribution à letuJe de la diphtérie; Ann. de l'Inst. Pasteur, 1889. ÉTUDE SUR LE PRINCIPE TOXIQUE 331 affaiblissement notable quand on le chauffe pendant deux heures à 58°. Une température de 100° lui enlève rapidement toute son action spécifique. L'action délétère de la chaleur fut confirmée par Brieger et Fr^enkel (1). Faber (2) a vu que le poison diphtéritique devient inerte quand il est exposé pendant 5 minutes à 65°. Cette instabilité vis-à-vis de la chaleur fut confirmée par Tizzoni et Cattani, par Vaillard et ViNCENTetpar Kitasato, Gamaleïa (3) a trouvé que les cultures du choléra perdent toute leur action diarrhéique quand on les chauffe au-delà de 60". Même les tempé- ratures plus basses de 50% 4:)" et 43°, agissant longtemps, décomposent le principe diarrhéique. Le poison du bacille aérogène présente au contraire une résistance extraordinaire à la chaleur (voir p. 312 et suiv.). Des températures de 120°, prolongées pendant 60 minutes, n'ont pas d'action manifeste sur sa toxicité. Les lapins, injectés avec les bacilles ainsi traités, meurent aussi rapidement et avec les mêmes symptômes que ceux qui reçoivent les bacilles simplement tués par le chloroforme ou l'éther. Influence de la lumière. Vaillard et Vincent (4) ont démontré que la toxine du tétanos est détruite par l'insolation. D'après Kitasato, elle est décomposée après une exposition de 15 à iS heures. Après avoir été exposé pendant des mois, plusieurs heures par jour, aux rayons du soleil, notre bacille n'éprouve aucun affaiblissement dans ses effets (voir p. 328 et suiv.). Action de l'oxygène. D'après Hueppe, la toxine du choléra serait rapidement décomposée par l'oxygène de l'air; l'expérience, exposée p. 328, démontre qu'un courant d'air agissant pendant 24 heures n'exerce sur le poison de l'aérogéne aucune action appréciable. Sucs digestifs. D'après Gamaleïa, la pepsine détruit en 24 heures lè^ poison diphtéritique ; la trypsine fait la même chose en quelques heures. La toxine de notre bacille résiste au moins' pendant 48 heures, c'est-à-dire pendant un temps double. Telles sont les nombreuses différences qui séparent notre organisme de ceux étudiés antérieurement. On peut les résumer en disant que la toxine de laérogène présente aux divers agents destructifs : chaleur, lumière, oxygène, sucs digestifs une résistance incomparablement plus forte. (1) Brieger et C. Fr.ïnkel : Untersuchungen uber Bakteriengifte ; Berl. klin. Wochenschr , 1890. (2) Faeer : Die Pathogenese des Tetanus; Berl. klin. Wochenschr., i8go. (3) Gamaleïa : Recherches expérimentales sur les poisons du choléra; Arch. de méd. expérim., 1892. (4) Vaillard et Vincent : Le poison tétanique; C. R. de la société de Biologie, 1890. 41. 332 J. DENYS & E. BRION On sait du resté depuis longtemps que certains produits microbiens conservent leur action pathogène, après avoir subi l'ébullition et même après avoir été exposés à des températures de 120". Les produits pyrétogènes semblent particulièrement jouir de cette propriété. Il suffit de citer, parmi les mieux connus, la tuberculine. Il y a plus; certains travaux ont démontré que si, par la chaleur ou par quelque autre moyen violent, on enlève aux cultures de diphtérie et de choléra leur toxine spécifique, ces cultures ne deviennent pas inoffensives, mais conservent un pouvoir toxique se distinguant du pouvoir antérieur par une action plus faible et des mani- festations différentes. Notre toxine serait-elle analogue à ce second poison; le poison primaire nous aurait-il échappé? Nous nous sommes posé cette question. Nous croyons pouvoir y répondre en affirmant que rien ne justifie l'existence d'un poison instable dans les cultures du bacille aérogène, et cela pour deux motifs : 1° Nos cultures ont été stérilisées non pas par la chaleur, mais au moyen du chloroforme ou de l'éther. Or ces agents sont sans action sur les ferments, à tel titre qu'on les em- ploie pour empêcher la putréfaction de s'établir dans les digestions. 2° Nous avons inoculé un certain nombre de lapins avec des émul- sions de cultures vivantes, et nous n'avons aperçu entre l'action de ces dernières et celles des mêmes cultures stérilisées par le chloro- foi^me aucune différence justifiant l'adoption de deux poisons différents. Les symptômes de Tintoxication sont les mêmes; des deux côtés, la paralysie de l'axe cérébro-spinal domine la scène; des deux côtés, on observe des symptômes d'excitation plus ou moins prononcés, et il peut se déclarer une diarrhée plus ou moins abondante. La rapidité avec laquelle la mort survient constitue la seule différence manifeste, mais nous croyons que cette différence s'explique tout naturellement par la nature particulière de ces deux émulsions. L'une ne renferme que des organismes morts, la dose de poison introduite est définitive et ne va plus en augmentant; l'autre contient les organismes vivants; ceux-ci continuent à vivre, à assimiler, à désassimiler et, par con- séquent, à jeter continuellement une nouvelle quantité de toxine dans la circulation. Il n'est donc pas étonnant que les animaux empoisonnés avec les bacilles vivants succombent plus rapidement, surtout si l'on songe à la grande facilité de reproduction du bacille aérogène. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES (BRYOZOAIRES DEAU DOUCE) ETUDIE CHEZ L'ALCYONELLA FUNGOSA ET LA CRISTATELLA MUCEDO PAR le Docteur P. DEMADE {Mémoire déposé le i"^ juillet 1891.) 42 i A Monsieur le Professeur J. B. C A R N O Y EN TOUTE RECONNAISSANCE f LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES (bryozoaires d'eau douce) étudié chez l'Alcyonella fungosa et la Cristatella mucedo (i) BUT ET DIVISION DE CE xMEMOIRE Depuis la découverte faite par Trembley, en 1743, du polype à panache {Lophopus cristallinus), c'est-à-dire depuis près de cent cinquante ans, les bryozoaires n'ont cessé d'être pour les naturalistes un sujet de travaux et de discussions. Une bibliographie complète des bryozoaires contiendrait le nom de tous les zoologistes et la nomenclature de tous les recueils de zoologie depuis un siècle et demi. Ce travail de classement, tout intéressant qu'il soit pour l'histoire de cette partie des sciences naturelles, n'entre pas dans le cadre forcément restreint de cette étude. Un mémoire, comme celui que nous présentons, ne saurait avoir dès" prétentions à quelque grande découverte zoologique; il élucide un point obscur et contesté, répond à une question; rien de plus. Nous avons choisi comme sujet d'étude le Statoblaste de deux bryozoaires d'eau douce, que l'on rencontre assez communément en Belgique : l'Alcyonella fungosa; la Cristatella mucedo. (1) Ce mémoire a été déposé à la rédaction le i"' juillet i8gi. Pour des raisons indépendantes de la volonté de l'auteur, l'impression a dû en être retardée jusqu'à ce jour. (Note de la Rédaction.) 338 P. DEMADE La reproduction chez les br5'ozoaires a été le point de départ de travaux multiples, et les naturalistes sont encore arrêtés aujourd'hui vis-à-vis de la reproduction polymorphe de ces intéressants molluscoïdes . Nous avons eu la bonne fortune de pouvoir suivre, chez les deux espèces prémentionnées, l'évolution du statoblaste depuis son premier jour jusqu'à son entier développement; notre attention a été particu- lièrement attirée sur les deux points tant controversés du statoblaste : a) La membrane. La membrane dont l'origine d'après tous les observateurs, et Max Verworn encore en 1887, devait être attribuée à une sécrétion, et qui n'est d'après nous, — nous le prouverons — malgré ses modifi- cations et ses détails infinis, que le résultat d'une transformation, d'une différentiation cellulaire que nous appellerons chitinisation; b) La masse statoblastiqiie. La masse statoblastique [Bildungsmasse des auteurs allemands) est dune structure si simple, si typique, que nous ne nous expliquons pas les idées erronées qui régnent encore à son sujet. Nous avons simplifié le problème autant qu'il nous a été possible de le faire, en le réduisant à une question de structure et de com- position cellulaires. C'est le résultat de ces recherches, fruit d'un travail lent et con- sciencieux, que nous consignons dans cette étude. APERÇU HISTORIQUE I. Etudes sur l'œuf et le statoblaste (Alcyonella fungosa-Cristatella mucedo). A. Le statoblaste est seul connu, il est pris pour l'œuf véritable. Nous exposons ici, sous le titre d'aperçu historique, le résultat des études faites jusqu'à ce jour sur l'objet que nous nous proposons d'étudier, nous réservant de discuter plus tard et plus en détail, s'il y a lieu, les travaux de nos devanciers. C'est Trembley, en 1743, qui découvre le premier polype bryo- zoaire : le Lophopus cristallinus. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES 339 Onze ans plus tard, en 1754, Rôsel, en examinant des Lemna- dans l'eau, aperçoit une nouvelle espèce de polype qu'il dénomme kleiiie Vederbusch Polypen et dont il donne une description et un dessin dans ses -^ Insecten Belustigungen, ^ Nuremberg 1754. C'est à ce polype de Rôsel que Cuvier donne le nom de Cristatella initcedo. UAlcyonella fungosa, cependant le plus abondant de tous les brj^ozoaires d'eau douce, ne fait son apparition dans la science qu'en 1768, dans un travail de Pallas. Il est appelé par ce zoologiste Tubiilaria fungosa, et définitivement classé par Lamark sous le nom (X Alcyonella fungosa. Trembley reconnaît, dans les animaux qu'il a découverts, des rejetons et des œufs. Rôsel figure des corps ronds, entourés d'un bourrelet armé de crochets, qu'il n'hésite pas à prendre pour des œufs. Pallas rencontre des corps analogues, mais sans crochets, chez les alcyonelles. " Laceratis massis copiose in aquam, écrit Pallas, enatant granula depressa, ovalia, duriuscula, opaca, fusco-nigra. ^ En 1837, TuRPiN et Gervais, chacun pour leur compte, repren- nent l'étude des bryozoaires fluviatiles, et particulièrement de la Cris- tatella. On trouve dans les mémoires publiés par ces deux zoologistes, la description minutieuse de ces » œufs - cornés, qui devaient encore si longtemps intriguer les naturalistes. TuRPiN, en janvier 1837, les décrit ainsi : y Je vis que ces corps n étaient orbiculaires et qu'ils représentaient une petite sphère déprimée r> ou aplatie, dont la surface était mamelonnée et légèrement incrustée y de matière calcaire. Un cercle extérieur, plus transparent et jaunâtre, y entourait un disque central, de couleur brune ou lie de vin : ces » deux couleurs d'intensités différentes, prouvaient que ces corps étaient " vésiculaires, que le cercle extérieur ma,rquait l'épaisseur de là coque ■r> OU de la vésicule, et le disque plus opaque, la capacité remplie d'une y substance. Du pourtour rayonnaient encore seize épines de longueur ■5 variable, tubuleuses, jaunes, et terminées le plus souvent par des " crochets en forme d'hameçon, de patte d'ancre, de grappin... C'était y> un œuf. « Cette description se rapporte évidemment non à l'œuf, mais au statoblaste de la Cristatella. A peu près à la même époque, en mars 1837, Gervais résumait ainsi toutes les connaissances de son temps à ce sujet : 340 P- DEMADE « Les œufs se composent de trois parties distinctes : « r Une vésicule discoïde et circulaire, renfermant dans son « intérieur un li(juide corftposé de globules; r 2° Une sorte d'anneau à demi transparent, au lieu d'être rous- r sàtre, et enveloppant le pourtour du disque dont je viens de parler; :- 3° Du point de contact de cet anneau et du corps disciforme » sur l'une des faces partaient des crochets, l'autre face présentait aussi r' des appendices en crochets, mais ils étaient moins allongés. V On doit considérer le liquide contenu dans la partie discoïde, ?> comme le vitellus, puisque c'est lui qui fournit les éléments qui y> servent au développement du fœtus.... Si le bourrelet peut être com- V paré à quelque partie de l'œuf de la plupart des autres animaux, « c'est probablement de l'albumen qu'il est l'analogue. « B. L'œuf véritable est connu; il est pris pour le premier stade du statoblaste. Avec P. J. Van Beneden et Dumortier, la question entre dans une phase nouvelle. Jusqu'alors les naturalistes s'étaient contentés de décrire, avec plus ou moins d'exactitude, ce qu'ils avaient sous les yeux. Ces deux observateurs, et particulièrement le premier, étudièrent de plus près les bryozoaires fluviatiles. « Les œufs, écrit Van Beneden dans " son étude sur VAlcyonella (1842), pages 56, 60 et 61, sont de deux n sortes : les uns sont pourvus d'une membrane cornée, solide, et r, d'un bourrelet. L'autre sorte a le même volume, mais au lieu de n coque et de bourrelet, la surface du corps est hérissée de cils, à » l'aide desquels il nage librement; ce sont, à proprement parler, des r> embryons nus. r, Nous croyons, contrairement à Max Vervvorn (Beitrage zur Kennt- niss der Siisswasserbryozoen; Zeits. fur wissens. Zoologie, Band xlvi, 1. Heft), que c'est à Van Beneden (1842) et non à Allman (1B56), qu'il faut attribuer la découverte de l'œuf véritable du bryozoaire(i). Il suffit de jeter un coup d'œil sur la planche V, Alcyonella fungosa, du mémoire de 1842, pour se convaincre que ce zoologiste a eu sous les yeux les véritables œufs, sans toutefois leur assigner dans la reproduction leur place exacte. Pour Van Beneden, l'œuf fécondé (i) Nous avons dessiné quelques-uns de ces œufs chez VAlcyonella. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 34 1 est le premier stade, l'origine du statoblaste; tandis que, en réalité, l'œuf • fécondé est l'origine de l'embryon cilié, et que le statoblaste, nous le dirons bientôt, nait d'une cellule spéciale du funicule sans phéno- mène de fécondation, et n'a aucune relation avec l'œuf. C. Une distinction nette s'établit entre l œuf fécondé et le statoblaste. C'est à dater de cette époque que les naturalistes et, cette fois, Allman le premier (1856), établissent nettement la différence entre l'œuf et le statoblaste et cherchent à déterminer par des études plus appro- fondies la nature elle-même du statoblaste. 'i Pour Allman, les statoblastes ne sont qu'une forme particulière de bourgeon et ne doivent en aucune façon être confondus avec les œufs de reproduction. Ils se produisent dans le funicule et s'y développent comme des bourgeons -. Nitsche est du même avis. On trouve les mêmes idées dans Gegenbaur : " chez tous les phy- lactolémates se développent dans la paroi du corps, à l'endroit où naissent les œufs, .des statoblastes, corps de nature spécifique consistant dans un agrégat de cellules qui se détachent comme les œufs, deviennent libres et représentent des bourgeons. -^ Au congrès des naturalistes allemands, en 1886, Kr^epelin, parlant de la phylogénie et de l'ontogénie des bryozoaires, défend les idées émises par Nitsche en 1856 au sujet de cette nature-bourgeon. Carl Vogt et Emile YuNG, dans leur - Traité d'anatomie comparée », • s'écartent des idées d'ALLMAN et de Nitsche. " Nous avons vu, disent ces auteurs, les statoblastes apparaître comme des intumescences aplaties des funicules, recouvertes par l'épi- thélium. C'est évidemment une accumulation protoplasmatique, unT peu nuageuse, mais non pas cellulaire, comme dit Allman ". (Edit. française, 1888.J Enfin, en i888, parait un nouveau mémoire sur cette question tant dis- cutée. Pour son auteur, Max Verworn, ^ les statoblastes doivent être con- sidérés comme des œufs d'hiver parthénogénétiques en opposition avec les œufs fécondés -. C'est la seule conclusion de ce travail dont nous voulions parler en ce moment. Nous reviendrons encore sur ce mémoire qui prête en plus d'un endroit le flanc à la critique. 43 342 P. DEMADE II. Connaissances sur la membrane. A. On a vu plus hau.t, p. 339, par les descriptions de Pallas, Turpin et Gervais l'idée que les premiers naturalistes se faisaient des enveloppes de ces „ œufs ", qu'ils n'étaient pas éloignés de prendre pour des graines et que Gervais prit d'abord pour telles. Résumons ces différentes descriptions en ce qui concerne la membrane. Ce sont des grains assez durs, opaques, bruns, noirs — pour Pallas. Leur surface est mamelonnée, et légèrement incrustée de matière calcaire. Un cercle extérieur, plus transparent et jaunâtre, entoure un disque central de couleur brune ou lie de vin. La surface de la coque offre un réticule mamelonné ■ — pour Turpin. Gervais est plus complet et mérite d'être cité. On a lu quelques-unes de ses conclusions plus haut, p. 339. " La coque, dit Gervais, est sa membrane propre, et si l'on veut, r< l'épaississement de sa membrane vitelline. Quant au bourrelet, c'est » une production adventive. Si le bourrelet peut être comparé à quelque » partie de l'œuf de la plupart des autres animaux, c'est probablement y de l'albumen qu'il est l'analogue. Il est blanchâtre quand on l'examine " à un faible grossissement, et quand on le voit à de plus fortes len- y> tilles et par réfraction, il apparaît de même composé d'une substance » aréolée, dont les mailles peuvent être assez bien comparées, pour « l'aspect, à celles des dentelles connues sous le nom de tulle. Le " disque proprement dit, ou la coque, est de nature cornée, circulaire « OU' elliptique. Sa surface extérieure est rugueuse et colorée en roux r> foncé. » Seuls les crochets sont bien décrits par ces auteurs. B. Nous n'avons rien à ajouter à la description de la membrane donnée plus haut, p. 340, par "Van Beneden. Disons cependant que les dessins du savant naturaliste sont d'une exactitude plus minutieuse que ses descriptions, comme on peut s'en convaincre en jetant les yeux sur les planches du mémoire déjà cité, et particulièrement sur la planche V, figure 15, Alcyonella. On reconnaît notamment dans la membrane plusieurs rangées d'alvéoles, pour parler le langage du même zoologiste. G. Nous reproduisons ici dans leur intégrité les conclusions de Nitsche. Elles renferment sur la nature et la formation des enveloppes statoblastiques des données en absolu désaccord avec les nôtres. Nous les réfuterons au cours de ce mémoire. Les voici : LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 343 I. Le statoblaste se forme du funicule, par bourgeonnement, au- dessous de sa couche épithéliale. II. Il se différencie de bonne heure en deux moitiés, dont l'une, la moitié cystogénique, entoure en partie l'autre, la masse de forma- tion (Bildimgsmasse). III. L'enveloppe chitineuse du statoblaste mùr se forme à l'in- térieur de la moitié cystogénique comme une sécrétion de la couche cellulaire externe de cette dernière. L'çnveloppe chitineuse est au début une simple couche reposant sur la Bildimgsmasse; elle finit cependant par entourer celle-ci. IV. Les cellules de l'anneau flotteur ne sont pas des cellules vé- ritables, mais simplement une sécrétion ce Uni if orme. Max Verworn, le dernier auteur qui, à notre connaissance, ait traité cette question chez la cristatelle, s'étend assez longuement sur la formation de la capsule chitineuse de l'anneau flotteur et de la couronne des crochets. Voici comment il représente le processus de chitinisation : - C'est d'abord une mince lamelle de chitine qui, par - accumulation de nouvelles masses, s'accroit de plus en plus en - épaisseur. ^ En somme, ce travail n'apporte aucune lumière nouvelle. Nous aurons l'occasion de parler plusieurs fois, dans notre mémoire, des idées de Max Verworn. III. Connaissances sur la masse centrale (Bildungsmasse). A. Pendant toute une période, le statoblaste est considéré comme un œuf véritable, et tous les auteurs sont d'accord pour attribuer à ce corps, entouré d'une coque chitineuse, la constitution habituelle du vitellus. Turpin a écrasé un de ces œufs sur le porte-objets et décrit ainsi ce qui se présente sous ses yeux ; ■^ On voyait la coque rompue et la liqueur albumineuse blanche T et composée, comme l'albumine de tous les œufs, d'une base d'eau - et d'un grand nombre de globules variables en grosseur, couler et - se répandre sur le porte-objets, v - On doit considérer, proclame Gervais, le liquide contenu dans - la partie discoïde comme le vitellus, puisque c'est lui qui fournit les ^ éléments qui servent au développement du fœtus. „ B. Les descriptions et les figures de Van Beneden se rapportent à l'œuf. Cet auteur s'exprime au sujet du vitellus comme Turpin et Gervais. 344 P. DEMADE C. Allman, Nitsche, Gegenbaur, qui voient dans le statoblaste un simple bourgeon, considèrent la masse centrale comme un agrégat de cellules; mais il est • évident que ces cellules, ils ne les ont pas vues, car les figures de ces auteurs sont en contradiction manifeste avec leurs affirmations. Nitsche dessine des cellules dans de très jeunes statoblastes ; mais à peine le statoblaste a-t-il grandi, qu'on voit, sur ses planches, les cellules disparaître pour être remplacées par un pointillé dans lequel il est impossible de distinguer quelque chose qui ait l'aspect d'une cellule. Du reste, Nitsche, a si peu convaincu ses lecteurs que ses idées sont aussitôt abandonnées. La structure si remarquable cependant du statoblaste est niée par VoGT et Yung, qui ne voient dans la Bildiingsmasse -^ que quel- " ques accumulations nuageuses de protoplasme, ne possédant aucune " nature cellulaire, - comme le prétendait Allman. Le mémoire de Max Verworn, 1888, loin de faire' la lumière sur cette question, y ajoute une obscurité en plus. On sait que pour cet auteur le statoblaste est un œuf parthéno- génétique. Or voici, d'après Max Verworn, la r, série des changements remarquables '• qui se passeraient, suivant lui, dans cet œuf. ^ L'œuf parthénogénétique contient un grand nombre de noyaux qui n ont commencé de bonne heure à se tasser en groupes confus, placés 5! lâchement les uns sous les autres. 5» 1° Les noyaux se groupent. - 2° Ils perdent leurs nucléoles. r: 30 Quelques noyaux seulement ont conservé leurs nucléoles au ■» sein de la Bildiingsmasse. y 40 Ces noyaux, privés de nucléoles, sont devenus plus réfrin- r, gents et sont groupés en amas sphériques, séparés par des espaces » plus clairs (1). " (i) Texte de Verworn, 1888 : Die Kerne haben schon etwas frûher begonnen sich zu undeutlichen Gruppen zu lagern , welche locker unter einander zusammenhangen Nun tritt die Erscheinung ein, dass die Kerne allmahlich ihr KernkOrperchen verlieren und etwas stârlier lichtbrechend werden, so dass man wahrend der nftchsten Entwiclilungsstufen zwischen zahlreichen Kernen ohne Nucleolus nur noch wenige Kerne mit solchem antrifft (fig. 45). — (P. 125-126.) Die Kerne, welche sàmmtlich ihre Kernltorperchen verloren und stàrkeres LichtbrechungsvermOgen bekommen haben, ordnen sich zu rundlichen, lappenfôrmigen Territorien an, welche durch hellere Zwischenràume von einander getrennt sind (Fig. 46 und 47). LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES 345 Nous nous garderons bien d'ajouter un commentaire au sujet de ces r changements remarquables-. Cette succession de phénomènes est assurément inconnue jusqu'à ce jour en cytologie. Tel est, exposé dans ses données essentielles, l'état du problème. Nous n'avons pas cru trop téméraire d'essayer de le résoudre et tout au moins d'établir positivement les deux points suivants : 1° Comment se forme la membrane du statoblaste. 3° Comment est constituée la masse centrale ou Bildiingsinasse. CHOIX DE L'OBJET ET MÉTHODES. Choix de l'objet. On a vu à la première page de ce mémoire pourquoi nous avons choisi de préférence VAlcyonella fungosa et la Cristatella niiicedo; ces espèces se rencontrent en Belgique et nous les avions sous la main. Méthodes. Les méthodes employées par nous sont les méthodes courantes, devenues pour ainsi dire vulgaires dans les laboratoires. Nous en reparlerons en plusieurs endroits de notre mémoire, chaque fois que nous le jugerons nécessaire. Nous renvoyons pour le reste aux traités spéciaux sur cette matière. I OBSERVx\TIONS PERSONNELLES. CHAPITRE PREMIER. La Membrane. La membrane du statoblaste est des plus compliquées, et ce à raison de la nature elle-même de l'objet qu'elle est destinée à entourer. Le statoblaste ne doit se développer qu'au printemps; il passe l'hiver flottant au-dessus de l'eau parmi les débris et les détritus de tout genre. Sa conservation réclame une coque suffisamment solide pour résister aux agents de destruction, un bourrelet assez léger pour lui permettre de se maintenir à la surface de l'eau, et, dans certaines conditions, des crochets qui l'empêchent d'être entraîné par les courants. On rencontre effectivement chez les bryozoaires d'eau douce deux et parfois trois de ces appareils : 1° Un appareil de protection ou coque. 2° Un appareil flotteur ou bourrelet. 3° Un appareil ou système de crochets. UAlcyonella ne possède que les deux premiers de ces appareils; la Cristatella les possède tous. Nous aurons à examiner successivement la formation et la con- stitution de ces appareils chez \ Alcyonella d'abord, chez la Cristatella ensuite. Disons aussitôt que, quelle que soit la diversité ou la variété de ces complications, elles peuvent en définitive se ramener à deux phénomènes bien simples : 1° Une multiplication cellulaire; 2° Une modification spéciale ou différentiation de la cellule : la chitinisation. 348 P- DEMADE LA MEMBRANE CHEZ l'AlCYONELLA FIINGOSA. Le statoblaste naît de la puUulation d'une cellule unique , située sous la première assise cellulaire du funicule. Il apparaît, à l'origine et avant toute formation de membrane, comme un groupement ovalaire et compact de petites cellules très distinctes, son grand axe étant di- risé suivant le grand axe du cordon funiculaire. Une seule assise de cellules funiculaires lui constitue une gaine, une sorte d'épithélium protecteur mais indépendant, car il est possible, avec un peu d'habi- leté, d'isoler le statoblaste du funicule qui le contient et le recouvre, FIG. 1, Pl. I. Le premier phénomène qui ,se passe dans le statoblaste, et on peut le remarquer de bonne heure, consiste dans la division de sa masse cellulaire en deux parties : La première, située à l'un des pôles de l'œuf, externe par rapport au grand axe du funicule, est invariablement constituée à cette époque d'une calotte de deux assises de cellules polygonales, rectangulaires, parallèles les unes aux autres, et perpendiculaires au plus grand dia- mètre du statoblaste. Ce double feuillet, Pl. I, fig. 2, forme une calotte à la seconde partie. Celle-ci est située sous la première, et composée de cellules disposées sans ordination précise et sans rapport avec les axes du statoblaste lui-même, Pl. I, fig. 2,Bl. La première partie, couche cystogène ou couches cystogéniques des auteurs, en se développant constituera la membrane et toutes ses dépen- dances. C'est la seule dont nous ayons à nous occuper pour le moment. La seconde, la masse centrale ou la Bildiingsinasse, est destinée à être entourée et protégée par la première; nous étudierons son développement dans le second chapitre de ce travail. A. Etude de la membrane d'après les coupes. § L Appareil de protection du statoblaste on coque. La calotte composée de ses deux feuillets cellulaires, l'un externe, l'autre interne (dans nos figures l'un supérieur, l'autre inférieur^, ne tarde pas à s'étendre de proche en proche au-dessus de la Bildungsmasse. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES 349 A. Jusqu'à en couvrir à peu près le tiers. A ce stade on commence à apercevoir l'inégal développement des deux feuillets : Le feuillet inférieur ou interne demeure plus mince, les cellules plus petites, la division y est moins active. Un phénomène inverse se passe dans le feuillet supérieur ou externe, Pl. I, FIG. 3, 4. C'est un point sur lequel nous appelons dès maintenant l'attention, et dont nous exposerons l'importance en parlant du sort ultérieur des deux feuillets qui contribuent à la formation de la membrane. C'est encore à ce stade du développement, Pl. I, fig. 3, 4, que com- mence à se dessiner, à la limite où les deux feuillets de la calotte membra- nogène ou cystogénique se touchent, un filet mince, réfringent, d'une teinte plus foncée que tout ce qui l'environne. C'est la membrane de chitine, rudiment de la coque chitineuse, qui apparaît. Cette membrane chitineuse, en apparence unique, mais en réalité dou- ble, est formée par l'accolement de deux membranules chitineuses contempo- raines, dont Yune appartient à la base des cellules du feuillet supérieur, et Vautre au plateau supérieur des cellules du feuillet inférieur, Pl. I, fig. 3,ch. Sur des coupes de statoblastes plus âgés que celui de la Pl. I, FIG. 3, 4, 5, cette double membranule ne se distingue plus. Cette distinction n'est reconnaissable que grâce à un artifice de fixation. Nous ne l'avons jamais rencontrée à l'état frais sur les statoblastes jeunes et vivants. On comprend du reste aisément que, les agents fixateurs agissanten même temps sur des tissus à éléments variables et n'opérant jamais sans coagulation, il se produise une rétraction plus ou moins notable et capable, en tout cas, de séparer l'une de l'autre deux membranules, dont la force d'adhérence ne peut être que minime à cette époque. B. Le développement de la calotte cellulaire au-dessus de la Bildungs- masse et le développement de la membrane -aux dépens des deux feuillets de cette même calotte marchent de pair. La couche cellulaire, que nous avons vu recouvrir un tiers du statoblaste, ne tarde pas, à la suite de l'incessante multiplication cellulaire qui se fait sur tout le pourtour de ses bords, à s'étendre sur la moitié et même les deux tiers de la circonférence du statoblaste, Pl. I, fig. 4. Ce stade, que nous considérerons comme le deuxième de l'évolution de la coque, afin de mettre plus d'ordre dans cette description, ce stade, disons-nous, mérite d'attirer tout spécialement l'attention de l'observateur, Pl. I, FIG. 4. 44 350 P. DEMADE La calotte cellulaire, au moment de dépasser la seconde moitié de la Bildiingsmasse, qu'elle doit recouvrir à peu près exactement à l'équateur, s'épaissit d'abord et puis sfe recourbe brusquement vers le bas, de façon à former un angle aigu ouvert en dedans, saillant en bec en dehors. Le statoblaste prend dès ce moment la forme générale qu'il conservera désormais sans grandes modifications, celle d'une lentille biconvexe, oblon- gue, ovalaire et fortement aplatie aux deux pôles, Pl. I, fig. 5, 6. Le fait primordial, Pl. I, fig. 3, 4, 5, c'est l'épaississement progressif de la membrane chitineuse qui doit servir de coque de protection au stato- blaste, et qui se forme principalement aux dépens du feuillet inférieur de la couche cystogénique, lequel feuillet finit même par disparaître en totalité. On peut suivre les différentes étapes du processus dans la Pl. I, FIG. 3, 4, 5. Dans la Pl. I, fig. 3, les deux membranules chitineuses, ch, ne sont pas encore fusionnées assez intimement entre elles, pour que la rétraction qui suit l'action des réactifs fixateurs ne puisse les séparer l'une de l'autre et délimiter ce qui, dans la coque, appartient à chacune des deux rangées. Ici les cellules de la couche inférieure, loin de tendre à s'effacer ou à se fondre dans le processus de chitinisation, se multiplient en divers endroits. Tout autre est l'aspect du statoblaste voisin, Pl. I, fig. 4. Les deux membranules, ch, sont fondues en une seule membrane de chitine, sur laquelle les réactifs ne peuvent rien. La membrane de ce fait a plus que doublé d'épaisseur. Les modifications ne sont pas moins profondes dans les couches cellulaires elles-mêmes. Tandis que les cellules du feuillet supérieur externe se sont agrandies et multipliées, les cellules du feuillet inférieur ont diminué de volume; les membranes cellulaires qui les sépa- raient se sont fondues, apparemment, leur enchylème est devenu moins gra- nuleux, la teneur de leurs noyaux en nucléine a diminué, comme le prouve le peu d'intensité de leur coloration par le carmin, l'hématoxyline, le vert de méthyle ; enfin, çà et là, l'organisation cellulaire est devenue méconnais- sable, il reste à peine pour l'indiquer quelques noyaux déformés qui ne tarderont pas à disparaître à leur tour. On remarquera, Pl. I, fig. 5, que la couche inférieure utilisée à former la coque chitineuse n'existe plus. On n'en retrouve de traces qu'à la partie inférieure du statoblaste, précisément à l'endroit où la coque est en voie de formation. La couche supérieure est éloignée de la coque chitineuse : c'est l'effet du fixateur coagulant. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES 351 Nous profitons de la circonstance pour faire remarquer que nous avons voulu donner des images de coupes réelles et non des schémas de coupes. Nous pensons que l'exposition et la relation exactes des faits sont plus profi- tables à la science que l'interprétation la plus savante qu'on en puisse pro- duire. Les explications doivent se plier aux faits et non forcer ceux-ci à se plier devant elles. C. Il nous reste à suivre l'achèvement de la coque protectrice du statoblaste. Les nombreuses coupes que nous avons faites et qui ont passé sous nos yeux, aussi bien que l'examen des œufs entiers et vivants, nous permettent d'affirmer que cet achèvement li' est point soumis à une règle fixe, et qu'il existe sous ce rapport une variabilité assez grande. Dans la moitié au moins des statoblastes que nous avons étudiés, la coque membraneuse formée aux dépens des deux feuillets cystogéniques entourait incomplètement le statoblaste : il demeurait à la partie inférieure une lacune de forme circulaire ou ovalaire, dont la supei^ficie variable allait de i/S à 1/12 et moins encore de la surface totale du statoblaste. La forme de cette ouverture, comme du reste nous avons pu nous en assurer par des coupes, prouvait manifestement un arrêt de développement circulaire de la membrane. Donc, en certains cas, assez nombreux, puisqu'ils nous ont paru intervenir pour une moitié dans les statoblastes observés, la calotte cystogénique ne recouvre pas complètement la Bildungsmasse. Le statoblaste ne pouvant, sous peine de périr, se passer d'une enveloppe de protection solide, comment l'appareil protecteur se complète-t-il ? Il est facile de le prévoir. Il n'y a pour pénétrer jusqu'au cœur de la masse du statoblaste, Bildungsmasse , que deux barrières, le funicule d'abord, simple couche épithéliale, ensuite les premières cellules de la Bildungsmasse elle-même. Or, ce sont précisément ces deux ordres de cellules, l'un ou l'autre, parfois les deux, qui suppléent à l'absence de coque protectrice en se laissant entreprendre par le processus de chitinisation, sur lequel nous reviendrons plus loin en détail. La chitinisation dans ces circonstances peut se produire : a) Aux dépens du funicule. b) Aux dépens des cellules les plus externes de la Bildungsmasse. c) Aux dépens des deux ordres d'éléments : funicule et Bildungsmasse. a) Dans le premier cas, chitinisation aux dépens du funicule, la couche funiculaire péristatoblastique, composée partout et toujours d'une seule rangée de petites cellules aplaties, présente, à l'endroit où la calotte 35^ P. DEMADE cystogénique a cessé de se développer, une activité cellulaire qu'on pourrait appeler compensatrice. Ses cellules se multiplient au point de constituer deux ou trois rangées de cellules nouvelles, Pl. I, fig. 3, 4, 5. C'est aux dépens de ces assises cellulaires que se constituera une mem- brane destinée à pourvoir à la solution de continuité de la coque principale. b) Dans le deuxième cas, chitinisation aux dépens des cellules les plus externes de la Bildnngsmasse, à l'endroit où la coque fait défaut, les membra- nes des cellules statoblastiques subissent l'évolution chitineuseet constituent ainsi une barrière protectrice. La couche funiculaire reste ce qu'elle était. Nous verrons plus loin qu'il y a, au sein de la masse centrale elle-même, une tendance des membranes à se chitiniser et même un commencement de chitinisation, qui n'est pas un des moindres éléments de résistance du statoblaste vis-à-vis des agents extérieurs. C) Le troisième cas n'est que la réunion des deux premiers. Il s'ex- plique de lui-même, nous ne nous y arrêtons pas. La nature pour arriver à ses fins use à peu près indifféremment de l'un ou l'autre de ces procédés. Le deuxième nous a paru le plus fréquent. Tel est le mode de formation de la coque ou membrane protectrice du statoblaste. On peut le résumer ainsi : La membrane chilineuse de l appareil de protection se forme aux dépens des deux feuillets cystogéniques; du feuillet externe supérieur pour une part minime (la plus externe des deux membranules primitives), du feuillet interne inférieur pour la totalité . A défaut de ces feuillets, mais toujours sur un point limité du statoblaste, la membrane-coque se forme ou aux dépôts du fini- cule, ou aux dépens de la Bildnngsmasse, ou aux dépens des deux à la fois. Le mécanisme intime de cette chitinisation sera étudié plus loin. Il est le même pour tous les appareils. ^ IL Appareil flotteur, bourrelet à air, anneau flotteur, disque flotteur. Cet appareil, ainsi que son nom l'indique, permet au statoblaste, grâce à un abaissement de son quotient spécifique, de surnager à la surface de l'eau. Il consiste essentiellement en une zone de cellules remplies d'air, à membranes cellulaires chitinisées. Cette zone ou bande de cellules fait corps avec la coque chitineuse de protection, elle entoure circulairement le stato- blaste et le recouvre à peu près de moitié, le maximum de son expansion correspondant assez exactement à l'équateur du statoblaste. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES 353 L'appareil flotteur se forme exclusivement aux dépens du feuillet externe de la calotte. Bien que les auteurs se soient généralement mépris au sujet de l'hystogénèse du flotteur, au point d'en faire des alvéoles (Van Beneden, p. 15), une sécrétion celluliforme (Max Verworn, p. 16), leurs planches sont assez exactes sur ce point. Aussi on ne s'étonnera point que nous ne donnions du flotteur qu'une description écourtée. Les naturalistes ont bien vu et bien dessiné le flotteur, ils l'ont très mal interprété : nous reviendrons sur leurs explications. Les coupes dont nous avons donné le dessin, Pl. I, FiG. 4, 5, montrent les premiers stades de ce développement, L. Nous tenons à faire remarquer que toutes les cellules de l'anneau flotteur sont de vraies cellules avec membrane, protoplasme et noyau, et non des » sécrétions celluliformes ■'. La FIG. 6, Pl. I, est très instructive. Elle donne l'image d'une coupe perpendiculaire au statoblaste et passant par son centre. Le rasoir du mi- crotome a enlevé toutes les parties non encore atteintes par la chitinisation, l'épithélium du funicule et tout ce qui restait de la couche cystogénique externe, dont on peut voir encore les traces sur la coque aux deux pôles du statoblaste. On a devant les yeux une section absolument nette de la membrane de protection et de l'anneau flotteur. La chitinisation a envahi toutes les cellules de l'anneau, les membranes cellulaires épaissies apparaissent très nettement, l'enchylème granuleux des FIG. 3, 4, 5, Pl. I, est devenu moins abondant, les noyaux seuls ont con- servé leur caractère primitif. Disons ici que la vitalité du noyau même au sein d'une cellule envahie se maintient longtemps : les noyaux disparaissent en tout dernier lieu. L'anneau flotteur n'ofifre pas les mêmes dimensions sur tous ses points : il est plus épais dans le plan équatorial et s'en va diminuant vers les pôles? En résumé, F anneau flotteur se forme exclusivement aux dépens du feuillet cystogénique externe. B. Etude de la membrane d'après les statoblastes entiers. Rien, en cette partie de notre étude, ne déconcerte autant l'observateur que la diversité d'aspect des statoblastes et nous croyons, pour en avoir examiné quelques milliers, qu'on n'en pourrait rencontrer deux dont les images soient exactement superposables. C'est par centaines qu'il aurait fallu relever les figures, s'il était entré dans nos intentions d'examiner toutes ces variétés, au fond peu importantes. 354 P DEMADE Disons que non seulement un statoblaste varie d'aspect suivant son âge et la section optique qu'on examine, mais que les statoblastes de la même espèce, de \ Alcyoïrclla fiiugosa par exemple, varient suivant la co- lonie, le milieu, l'époque de l'année. Ainsi telle colonie d'Alcyonella aura des statoblastes quelque peu dissemblables d'une colonie vivant à dix mètres de la première, il y aura quelque différence entre les statoblastes d'un ruisseau et ceux d'un étang. La plus grande variabilité se produit aussi sans aucun doute d'après l'époque de l'année. Le statoblaste, dont l'évolu- tion aura commencé en juin, par exemple, pour se continuer sans secousse jusqu'en novembre, ne sera pas absolument identique à celui dont la chitinisation, commencée en octobre, aura marché brusquement au travers des variations parfois considérables de la température. Ces considérations étaient nécessaires pour tous ceux de nos lecteurs qui se sont occupés de cet objet et que cette diversité aurait pu déconcerter. Notre FiG. 10, Pl. I, représente un statoblaste type dans son plein épanouissement. C'est le statoblaste achevé tel qu'on le rencontre en automne, libéré de .son enveloppe funiculaire, par petits groupes dans les colonies ou par masses quelquefois tellement considérables à la surface des étangs que l'eau en prend une teinte roussâtre. Il y a pour s'orienter dans cette étude, un point de repère qu'il est aisé de reconnaître, parce qu'il ne manque jamais, c'est la mem- brane de protection ou la coque chitineuse, co. L'anneau flotteur peut ne pas exister, nous en avons vu des exemples; la coque existe tou- jours. Pl. I, FIG. 7, 8, 9, 10, 11, 14, coque = co. Il suffit de mettre au point la section équatorialc du statoblaste pour reconnaître immédia- tement la coupe optique de la coque. Comme c'est à l'équateur de l'œuf que la coque acquiert sa plus forte épaisseur, c'est là qu'il faut aller la chercher. La membrane protectrice débute d'ordinaire dans la zone équato- rialc, aux deux extrémités du grand axe du statoblaste, sous forme de deux demi-cercles s'avançant à la rencontre l'un de l'autre, Pl. I, FIG. 8, Jiini, m'in'. C'est d'abord un filet mince d'une réfringence et d'une teinte spéciales, et d'autant plus mince qu'on s'éloigne davantage de l'axe horizontal du statoblaste, Pl. I, fig. 8. On remarquera que son épaisseur ou sa minceur sont en relation directe avec l'épaisseur ou la minceur du feuillet cystogénique interne qui lui donne naissance. Ce filet mince et presque indélimitable à l'origine s'épaissit de plus LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 355 en plus par 1" envahissement chitineux de la couche dont nous venons • de parler, au point de constituer, en coupe optique équatoriale, un cercle ou un ovale complet à double contour, Pl. I, fig. 9. A ce moment, le feuillet interne a complètement disparu. Si au lieu d'examiner le statoblaste en coupe équatoriale, nous mettons au point une coupe tangentielle à sa surface, l'aspect variera d'après le stade de développement, et l'on obtiendra les fig. 7, 11, 12, 13 et 10, Pl. I. La fig. 7, Pl. I, rend exactement compte des dif- férents aspects dont est susceptible la surface du statoblaste. La zone épithéliale externe est destinée à disparaître, c'est l'assise funiculaire. Quant aux cellules A, ou cellules superficielles de l'anneau flot- teur, elles vont se chitiniser, il ne restera d'elles que des mem- branes considérablement épaissies; leur protoplasme et leur noyau disparaîtront, tout sera absorbé par la membrane. Ce seront des cel- lules mortes destinées à ne contenir que de l'air. Les noyaux, nous l'avons dit, disparaissent très tard. La fig il, Pl. I, donne un stade plus avancé. La zone limitée par l'anneau flotteur (il en existe une semblable à la partie inférieure du statoblaste) ne pourrait mieux se désigner que sous le nom de calotte polaire. Les deux calottes po- laires constituées par toute la partie du feuillet cystogénique externe, qui n'aura pas servi à la formation de la coque ni du flotteur, se chitiniseront et serviront à renforcer la coque. Leur chitinisation s'o- père par un processus un peu différent du premier : la cellule se transforme tout entière et en bloc, et c'est à peine s'il demeurera pour attester l'origine cellulaire, une sorte de réseau dessiné par la membrane primaire, sur laquelle la cellule ne se dessine que par un point, une lumière : tout ce qui reste de la cavité cellulaire après la chitinisation. Le relief de cette membrane ainsi constituée se présentera finale- ment comme dans les fig. 12, 13, Pl. L Sur la fig. 13, Pl. I, est encore adhérent un lambeau d'épithélium funiculaire. On n'aura plus de difficulté à présent à se rendre compte de notre fig. 10, Pl. I, montrant un statoblaste achevé débarrassé de l'épithélium funiculaire. 356 P- DEMADE En résumé : Le feuillet cystogénique interne a disparu. A sa place est une coque chitineuse, en coupe optique : co, dans les figures. Le feuillet cystogénique externe a donné naissance : a) Pour une très faible partie à la coque. b) A l'anneau flotteur, cellules à membranes chitinisées, dont le pro- toplasme et le noyau se sont résolus et qui ne contiennent que de l'air. c) Aux deux calottes polaires, couches de cellules chitinisées con- tinuant l'anneau flotteur sur les pôles du statoblaste. II. LA MEMBRANE CHEZ LA CrISTATELLA MUCEDO. La membrane du statoblaste dans cette nouvelle espèce de bryozoaire est, peut-on dire, aussi compliquée qu'elle peut l'être. Elle se compose des trois appareils que nous avons décrits en parlant de la membrane en général, page 347. 1° Un appareil de protection ou coque. 2° Un appareil flotteur ou bourrelet. 3° Un système de crochets. A ne considérer que les deux premiers de ces appareils chez la Cristatella, les seuls qui existent chez VAlcyonella, on ne trouve pas de diff"érence fondamentale entre les membranes de l'une et l'autre espèce. La description que nous avons donnée de la formation de la coque et du bourrelet chez VAlcyonella peut s'appliquer dans ses grandes lignes à la coque et au bourrelet de la Cristatella niucedo. Aussi serons-nous très sobre de détails dans cette nouvelle étude. Nous ne mentionnerons que les points qui diffèrent entre ces deux espèces, et qui nous paraissent mériter d'être mis en lumière, nous bornant pour le reste, à renvoyer le lecteur à ce que nous avons dit de Y Alcyonella fungosa. Seul l'appareil ou système de crochets de la Cristatella, sans analogue dans l'espèce précédente, réclamera une étude et un examen approfondis. L'origine du statoblaste, la division de sa masse en deux parties, les couches cystogéniques et la masse centrale sont les mêmes dans les deux espèces Cristatella et Alcyonella LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLEMATES 357 Nous n'avons à nous occuper pour l'instant que des couches cys- togéniques. Ce sont celles qui donnent naissance à la membrane : coque, flotteur et crochets. Nous suivrons dans cette étude, pour la facilité de la description, l'ordre que nous avons adopté pour l'étude de la membrane de Y Alcyoïiella. A. Étude de la membrane d'après les coupes. § I. Appareil de protection du staioblaste oit coque. A. Si nous suivons avec attention le développement et l'extension des deux couches cystogéniques au-dessus de la Bi/duugsmasse , nous remarquons aussitôt : \" Que le développement des couches est plus considérable dans cette espèce. Les feuillets externe et interne subissent ici le même développement ; les cellules de la couche inférieure ne diffèrent en rien de celles de la couche supérieure : même forme, égale multipli- cité des noyaux, puissance de multiplication semblable, fig. 1, 2, Pl. II. 2" Que la rapidité d'extension des couches au-dessus de la masse statoblastique, vues en coupe, est moindre que chez VAlcyonella. Les feuillets cellulaires sont plus robustes, mais s'étendent moins vite. L'explication de ce fait n'est pas difficile à trouver : le statoblaste de VAlcyonella est plus petit et il est ovale; le statoblaste de la Cristatella est plus grand, il est absolument circulaire, de la forme d'une lentille qui serait constituée par deux verres de montre. La surface à recouvrir est ici plus étendue, et il est tout naturel, qu'étudié sur des coupes, le développement des feuillets paraisse considérable, quoique l'extension à la surface soit moindre. Il en serait autrement, si l'on étudiait l'œuf dans son entier. Il n'y a aucune trace de mem- brane ou coque chitineuse, alors que déjà la calotte cystogénique recouvre un tiers du statoblaste, fig. 1, 2, Pl. IL B. La chitinisation ne débute dans les feuillets que lorsqu'ils ont recouvert la moitié au moins du statoblaste. Elle s'établit d'emblée dans les couches cystogéniques par l'apparition d'une membrane de chitine, appartenant à la fois (comme chez l'alcyonelle) à la base des cellules du feuillet supérieur externe et au plateau supérieur des cellules 45 358 P. DEMADE du feuillet inférieur. Cette membrane est séparable, au début et sous l'action des réactifs, en deux membranules. La coque doit dont son origine aux deux feuillets, sans qu'on puisse dire aussi exactement que pour l'alcyonelle la part précise qui revient au feuillet externe. Quant au développement ultérieur de la coque, il se produit à la fois, nous le verrons, aux dépens de l'un et l'autre feuillet, du feuillet cystogénique externe pour une part assez notable, du feuillet cystogénique inférieur pour la totalité de celui-ci. Un fait domine toute la foi^mation de la coque : l'antago- nisme qui existe entre la multiplication des cellules d'une part, et la chitinisation des cellules de l'autre. Plus la multiplication est abon- dante, moins la chitinisation est rapide, et c'est certainement à l'abon- dance de la pullulation cellulaire dans les deux feuillets cystogéniques qu'il faut attribuer, chez la Cristatella , l'extrême lenteur mise par la chitinisation à s'établir d'abord, à s'achever ensuite. Nous avons dessiné, fig. 3, 4, 5, 6, Pl. II, les statoblastes qui nous ont paru les plus remarquables pour l'étude de la formation de l'appareil de protection ou coque. Nous ne recommencerons pas au sujet de la Cristatella les des- criptions suffisamment explicatives que nous avons données pour Y Al- cyonella ; nous nous bornerons à faire remarquer ce qui est nouveau : a) La participation d'une partie notable du feuillet cystogénique externe à la formation de la coque. b) La disparition tardive du feuillet cystogénique interne par chiti- nisation au profit de la coque. Premier point. Le feuillet cystogénique externe participe pour une part notable à la formation de la coque. Les cellules de la couche externe se continuent sans interruption avec la coque chitineuse, sans ligne de démarcation aucune, fig. 4, 5, 6, Pl.II. La FIG. 6, Pl. II, qui a été dessinée avec le soin le plus scrupuleux, est particulièrement instructive ; nous y reviendrons plusieurs fois dans ce travail. La base des cellules constituant le feuillet externe se présente comme confondue insensiblement avec la coque en voie de développement, au point qu'il est impossible de dire où se termine l'assise cellulaire, où commence la coque chitineuse. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 359 La FiG. 17, Pl. II, représente quelques cellules prises à cet endroit et vues à un fort grossissement. Autre fait encore dont la signification ne nous semble pas douteuse. Les réactifs fixateurs coagulants que nous avons employés, pas plus que l'action du rasoir du microtome, ne parviennent pour ainsi dire jamais à séparer le feuillet externe de la coque membraneuse, fig. 5, Pl. II. Ce fait serait inexplicable sans la participation de ce feuillet à la formation de la coque, sans leur union intime. Ce qui le prouve du reste encore, c'est que cette adhésion ne se pro- duit pas chez VAlcyouella, où la coque se sépare avec la plus grande facilité du feuillet externe. Il y a plus. L'adhésion entre le feuillet externe et la coque est plus puissante que les adhérences qui unissent entre elles, pour la formation de la coque, les différentes assises du feuillet cystogénique interne avec cette même coque. La fig. 5, Pl. II, le prouve à toute évidence, et nous avons rencontré ces faits des centaines de fois. Deuxième point. Le feuillet cystogénique interne disparaît tardi- vement. Il suffira d'un simple coup d'œil sur nos fig. 4 5, 6, Pl. II, pour se convaincre de ce fait, dont nous avons donné l'explication plus haut, lorsque nous avons signalé l'antagonisme entre la multiplication et la chitini- sation des cellules. La disparition est même si lente, que nous avons cru longtemps qu'elle demeurait toujours incomplète et qu'il restait le plus souvent au-dessus de la Bildiingsmasse une zone de cellules non chitinisées, ou, en d'autres mots, que ce que nous avions vu fig. 4, 6, Pl. II, et surtout FIG. 5, Pl. II, sur le statoblaste en évolution, se voyait également sur le statoblaste adulte et achevé. Les coupes, que nous avons pratiquées dans les statoblastes complètement formés, ne nous ont jamais montré de trace ~ du feuillet cystogénique interne. Il se chitinise lentement, mais complè- tement. B. L'achèvemeiA de la coque protectrice chez la Cristatella se fait d'une façon absolument régulière. La calotte cystogénique à deux feuil- lets finit par entourer de tous côtés le statoblaste, et la membrane chi- tineuse, constituée aux dépens de ces deux feuillets, forme une enve- loppe continue, qui encapsule le statoblaste tout entier. L'épithélium, qui forme une gaine au statoblaste, peut se multiplier ici comme chez VAlcyonella, mais nous cro3^ons, à de rares exceptions près, qu'il ne 36o P- DEMADE forme jamais corps, ni ne se chitinise jamais avec le statoblaste, pour cette raison que les crochets, ainsi que nous le dirons plus loin, tendent en divers points à écarter le rrtanteau funiculaire du statoblaste. Nous résumons ainsi la formation de la coque ou membrane protectrice du statoblaste de la Cristatella : La coque-membrane se forme aux dépens des deux feuillets cystogé- niques : du feuillet externe pour une grande part, du feuillet interne pour la totalité. La multiplication des cellules dans ces couches est abondante, la chitinisation est lente, mais complète, au moins pour le feuillet interne. § II. Appareil flotteur, bourrelet, anneau. Ce que nous avons dit du rôle, de la formation et de la constitution de cet appareil chez V Alcyonella est applicable chez la Cristatella, et nous n'avons plus à y revenir. L'anneau se forme encore ici aux dépens du feuillet externe exclusive- ment ; il consiste en un assemblage de cellules à membranes chitinisées, remplies d'air, et permettant au statoblaste de flotter à la surface de l'eau. Nous devons cependant insister sur certaines différences assez notables qui existent entre le flotteur de V Alcyonella et celui de la Cristatella. Que le lecteur veuille bien jeter les yeux sur nos fig. 5, 6, 7, Pl. II. Nous signalons à son attention les points suivants : Situation de l'anneau. Importance par rapport à l'ensemble de la membrane du statoblaste en général. Enfin sa constitution elle-même. 1° Situation de l anneau. Il suffit d'un examen très superficiel des fig. 5 6, 7. Pl. II, pour se rendre compte de la situation de l'anneau flotteur par rapport au stato- blaste. Nous avons fait remarquer plus haut que le statoblaste avait une forme correspondant à deux verres de montre soudés par leurs bords. La comparaison n'est exacte qu'avec ces restrictions : que le verre de montre supérieur soit plus plat, moins bombé, et d'un rayon de circonférence beaucoup plus considérable que l'inférieur. Cette correction admise, nous ferons remarquer que l'anneau flotteur, si l'on considère son centre, B, A, FIG. 7, Pl. Il, entoure le statoblaste circulairement, non pas suivant un LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 301 plan passant par l'équateur de l'œuf et le coupant exactement en deux ■ moitiés, mais suivant un plan sensiblement supérieur à celui-ci (i). 23 Importance du flotteur par rapport à l'ensemble de la membrane. La place occupée par l'anneau flotteur dans l'ensemble de la mem- brane est deux ou trois fois plus importante dans cette espèce de bryozoaire que dans la précédente. Il faut vraisemblablement attribuer le volume considérable du flotteur à la présence d'un nouvel appareil : le système de crochets dont le poids est venu augmenter la densité spécifique du stato- blaste, anneau flotteur pris à part. 3" Sa constitution. Nous venons de dire l'importance de l'anneau flotteur. Cette impor- tance entraîne avec elle des modifications de constitution. L'appareil flotteur a augmenté de volume et de poids; ses attaches à la coque devront être plus résistantes. C'est ainsi que la coque se continue dans l'anneau flotteur, l'un faisant corps avec l'autre, par des prolongements qui ne sont autres que des membranes de cellules du flotteur, chitinisées à un haut degré, et que nous ne pouvons mieux comparer, quant à l'aspect, qu'à des branchages, fig. 5, 6, 7, Pl. IL Cette comparaison paraîtra plus saisissante et plus juste, quand nous étudierons l'œuf dans son entier. Elle est déjà remarquable sur des coupes, fig. 6, Pl. IL Ce branchage s'étend sans interruption, par 'des ramifications de plus en plus fines à partir de la coque, à toutes les membranes des cellules du flotteur, et fait de celui-ci un tout parfaitement continu et résistant. Faisons remarquer toutefois que si l'anneau flotteur est solidement^ attaché à la coque et en parfaite continuité avec elle, sur un point au moins, il ne l'est pas également sur tous. Divers cas peuvent m.ème se présenter : a) Nous avons vu le flotteur ne se rattacher au statoblaste que par un point, en coupe verticale; ce qui constitue un simple cercle ou une série de points en coupe horizontale. b) Le plus ordinairement l'anneau flotteur faisait corps avec la coque sur une large bande, la moitié au moins de la hauteur de l'anneau, fig. 7, (i) Ce que nous nommons, par convention, partie supérieure de l'œuf, l'est en réalité, elle apparaît à la surface de l'eau; la partie inférieure au contraire plonge dans l'eau. 362 P DEMADE Pl. II, B à. C, en coupe verticale. L'autre "moitié, la moitié inférieure de l'anneau flotteur, A àB, fig. 7, Pl. II, en coupe verticale, demeurait libre d'adhérence avec la coque sxir tout le pourtour du statoblaste. Ce cas nous a semblé habituel; nous en donnons la raison en parlant de la formation du système de crochets. c) Dans des cas assez nombreux, l'anneau adhérait sur tous les points de son pourtour à la coque; qu'on s'imagine, dans la fig. 7, Pl. II, qu'il se passe en B-A ce qui s'est fait en BC. C'est du reste la règle chez VAlcyonella. Il nous resterait une remarque à faire sur la façon dont les cellules se comportent dans l'anneau flotteur; nous préférons renvoyer le lecteur à l'article de la chitinisation, où cette remarque trouvera mieux sa place. § III. Appareil on système de crochets. L'appareil à crochets est un appareil nouveau. Il n'existe rien de sem- blable chez VAlcyonella fungosa. Aussi lui devons-nous dans cette étude une place à part. Les crochets naissent tous sur la coque protectrice avec laquelle ils -font corps; ils se développent aux dépens de bourgeons cellulaires pleins, appartenant au feuillet cystogénique externe et en continuité avec lui. Ce sont en somme des appendices chitineux, constitués, comme toutes les pro- ductions chitineuses du statoblaste, par un processus toujours le même, et que nous étudierons bientôt. Cette étude n'est pas aussi aisée que celle des autres appareils à cause de plusieurs difficultés matérielles tenant à l'objet lui-même, et l'on est étrangement déçu lorsqu'on passe de l'examen des figures données par les auteurs à l'examen des objets qu'zVs ont schématisés. La formation d'un cro- chet ne s'étudie bien que sur des coupes, parce que c'est le seul moyen de saisir son rapport avec la coque protectrice; or, malgré le grand nombre de crochets (15 à 20 et plus), il est rare d'en rencontrer d'intacts dans les prépa- rations microscopiques. La chitinisation du crochet est rapide; celui-ci est d'ordinaire très long, sinueux, tordu et ne s'étalant que bien rarement dans un seul plan : toutes raisons qui le rendent cassant dans les coupes et empêchent de l'étudier autrement que par pièce et morceau, en réunissant des éléments épars dans une série de préparations. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 303 Le crochet inférieur, représenté dans la fig. 7, Pl. II, est peut-être le . seul que nous ayons rencontré intact, et ce sur plusieurs centaines de coupes. Tous ceux qui ont l'habitude des préparations histologiques compren- dront l'opportunité de ces remarques. Le système des crochets donne au statoblaste de la Cvistatella son caractère particulier (ij. Il y a sur la coque protectrice deux zones électives pour la formation des crochets, l'une supérieure, l'autre inférieure. Ces zones peuvent se figurer par deux bandes circulaires complètes, situées aux limites de l'an- neau flotteur, et dont on voit la coupe perpendiculaire, fig. 7, Pl. II, 3 et 2, et FIG. 10, Pl. II, i et 3- En n'importe quel point de cette bande, sur la coque, peut naître un crochet. Autour de ce point se développe un bourgeon cellulaire plein, à l'intérieur duquel le crochet chitineux se forme rapidement, fig. 8, bour- geons F et W; en coupe fig. 11 A, 11 B, 12 C, 12 D, Pl. II. Ce bourgeon appartient toujours et manifestement au feuillet cystogé- ni que externe, fig. 8, V,W, Pl. II. Quelque soit le rapport sous lequel on examine les crochets eux- mêmes, on leur trouve une extrême variabilité : une seule chose, peut-on dire, ne se modifie pas, les zones de formation. Les crochets du cercle inférieur sont habituellement plus développés que ceux du cercle supérieur; l'inférieur peut même en être pourvu, et l'autre ne pas en porter. Ils peuvent être rudimentaires, mais ils man- quent rarement. Le volume des crochets, leur longueur, la façon de se terminer, leur nombre varient incessamment. Quelques-uns sont très courts, FIG. 9, 10, Pl. II, d'autres très longs, fig. 7, Pl. II; certains se terminent en ancre à deux, trois, quatre et souvent même cinq divisions, en forme d'hameçon, de grappin. On en compte en moyenne de 15 à 20, parfois 25 et même plus. N'oublions pas de faire remarquer que le développement d'un crochet est capable d'influencer son voisinage. x\insi : 1) On voit le crochet gêné dans son expansion par l'anneau flotteur repousser celui-ci et le séparer de la coque dans sa moitié inférieure; (1) TuRPiN s'écrie à ce sujet en pailant de la découverte de cet « œuf» ; « A quel animal appartenait cet œuf? Quelle pouvait être la malheureuse mère condamnée à contenir et surtout à pondre des œufs aussi horriblement hérissés de crochets? » (Loc. cit , p. 6.5; voir Bibliographie.) 364 P DEMADE 2) Le funicule est éloigné du statoblaste par un mécanisme analogue, que l'on peut comparer, quant à l'effet, à l'action d'une main fermée qu'on aurait entourée d'un tissu de mousseline et dont on étendrait insensiblement les doigts. Cette comparaison fera comprendre mieux que de longs détails comment la couche funiculaire s'éloigne du statoblaste. Résumons brièvement tout ce que nous avons dit de la membrane du statoblaste chez la Cristatella. Le feuillet cystogéniqite externe donne : le système des crochets, l'anneau flotteur, une partie de la coque. Le feuillet cystogéiiique interne donne : le reste de la coque. B. Etude de la membrane d'après les statoblastes entiers. Nous pourrions répéter ici les observations préliminaires faites pour l'étude de la membrane dans le statoblaste de V Alcyonella fungosa, car la variabilité est la même chez la Cristatella; nous renvoyons à ce que nous en avons dit plus haut, p. 353. Dans la Cristatella, comme dans V Alcyonella, il y a un point de repère : la coque. Nous avons dessiné, Pl. II, fig. 13, 14 et 10, les statoblastes qui nous ont paru les plus intéressants. Nous avons noté, fig. 10, Pl. II, la coque par le chiffre 2 et pour plus de clarté nous comparerons cette figure avec la coupe 7, Pl. II. Nous prions nos lecteurs de se souvenir de ce détail. Commençons par examiner le statoblaste en un point représenté, fig. 7, Pl. II, par 1, et fig. 10, Pl. II, par un cercle 2. Qu'avons-nous devant les yeux? 1) Une section optique de la coque en forme de cercle; de cette coque partent : 2) De distance en distance des prolongements chitineux robustes, en forme de branchages. Il en a été parlé plus haut, p. 363. Ce sont ces branches s'irradiant tout autour de la coque et placées à une certaine distance les unes des autres qui dessinent la ligne ondulée, 2', fig. 10, Pl. II. Au-delà de la ligne ondulée, accentuée à dessein dans notre planche, se continue la partie du flotteur dépourvue de branches avec ses membranes fortement épaissies, mais composées de cellules faiblement chitinisées, comme dans le statoblaste de Y Alcyonella où les branches n'existent pas. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 305 3) Dans le même plan, mais beaucoup plus extérieurement, on voit en section optique l'épithélium funiculaire, f, qui enveloppe le statoblaste tout entier, et que les crochets ont repoussé. 4) Souvent l'une ou l'autre anse formée par les courbures des crochets. En agissant sur la vis du microscope, de façon à amener dans le champ une coupe optique située plus profondément, le cercle inférieur des cro- chets apparaîtra, Pl. II, FiG. 7-2, 10-3; nous avons dessiné le cercle sans dessiner les crochets pour ne pas charger inutilement la figure. Les deux cercles, il est à peine nécessaire de le dire, ne se montrent jamais sur un même plan. Du point de départ primitif, élevons la lentille au lieu de l'abaisser; nous avons sous les yeux le cercle et la rangée supérieure des crochets, FIG. 10-1, Pl. il On voit très fréquemment autour des crochets une zone cellulaire mince. C'est tout ce qui reste des cellules qui ont servi à leur formation, fig. 9 et 10, Pl. IL Disons en passant que leur chitinisation complète est rare. Ce sont probablement ces débris de cellules sur les crochets, qui ont fait dire aux anciens auteurs qu'on rencontrait des poils sur ces derniers. Élevons la vis et examinons une coupe tangentielle au statoblaste. Ce que nous avons appelé plus haut, p. 355, calotte polaire, plateau polaii^e, c'est-à-dire la partie du feuillet cystogénique externe, non utilisée pour la coque et le flotteur et limitée par le cercle des crochets, cette partie-là est sous nos 3'eux. Les cellules de cette sorte de calotte ont eu le sort de toutes les cellules des couches cystogéniques, à cette différence près que la chitinisation des cellules les, plus externes est incomplète et limitée. La surface du statoblaste de la Cristatella mérite de ce chef une mention spéciale; tangentiellement, la surface présente l'aspect réticulé de la fig. 15~ Pl. Il, avec des points d'épaississement à tous les angles du réseau. Ces points ne sont autres que la section optique de parties de membranes plus épaisses en certains endroits de la cellule. En coupe, fig. 7, Pl. II, on aperçoit la section des membranes et une sorte de culot cellulaire à la place de chaque cellule. La cellule n'a pas été entièrement chitinisée ; la partie échappée au processus a été dé- truite. Ainsi s'expliquent les filaments qu'on aperçoit et qui représentent les sections des membranes, fig. 7 et 16, Pl. IL Tel est le statoblaste étudié dans son entier. En comparant la des- cription que nous venons de faire à notre étude de la membrane d'après 46 366 P DEMADE les coupes, il sera facile de se faire une idée de la membrane statoblastique à tous les degrés de son développement. Nous laissons ce soin au lecteur. Les descriptions que nous pourrions donner de la membrane à chaque période de son évolution ne seraient, sous une forme légèrement différente, que des répétitions de ce que nous avons déjà dit. CONCLUSION ET CRITIQUE DE l'Étude de la. membrane. La conclusion de l'étude que nous venons de faire de la membrane est aisée à formuler, et le lecteur l'aura déjà formulée lui-même. La membrane de chitine n'est pas un produit de sécrétion; elle est organisée. Nous nous attacherons dans les lignes qui vont suivre à achever de mettre en lumière ce résultat de notre étude ; nous y insisterons d'autant plus que nous sommes obligé de nous inscrire en faux contre une conclu- sion qui a pour elle l'unanimité de nos devanciers en cette matière. Car, suivant eux, la membrane de chitine est un sïm-ç^e produit de sécrétion. Que le lecteur veuille bien placer devant lui les planches qui accom- pagnent cette étude. La chitinisation, remarquera-t-il aussitôt, débute par les membranes cellulaires sous la forme d'un très mince liséré d'une réfrin- gence particulière; la membrane de la cellule est atteinte très diversement, en totalité ou en partie, par le processus, mais c'est la couche la plus externe de la cellule qui est atteinte la première ; le processus s'accentuant davantage, on voit la membrane s'épaissir encore par voie centripète. Le phénomène est d'ordre absolument cellulaire; il se passe dans chaque cellule pour son propre compte; toute cellule se fournit à elle-même les éléments de sa chitinisation. Morphologiquement, la chitinisation est une modification, une trans- formation de la cellule elle-même, une différentiation cellulaire en un mot. La chitinisation, si compliquée qu'elle paraisse à première vue, est un processus simple, toujours le même quant au fond, et sa complication plus apparente que réelle s'explique par la complication de la celulle elle-même. En effet, les divers éléments cellulaires peuvent être atteints très inégale- ment par le phénornène de la chitinisation. De là des différences et des variétés. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 307 A. La cellule peut se chitiniser en masse : membrane, protoplasme et" noyau; elle n'est plus alors qu'un bloc de chitine. La coque de V Alcyonella et de la Cristatella est, pour la plus grande partie, nous l'avons vu, le résultat d'une chitinisation de ce genre de toutes les cellules de la couche cystogénique interne ou inférieure. Il en est de même des crochets de la Cristatella inucedo. B. La cellule peut se chitiniser en partie. C'est le cas pour les cellules de l'anneau flotteur, tant chez Y Alcyonella que chez la Cristatella; les membranes cellulaires se chitinisent seules. Nous en verrons un nouvel exemple plus loin en parlant des cellules de la Bildungsniasse. Dans ce cas, tout ce qui n'est pas atteint par la chitinisation : proto- plasme, noyau et même portion de membrane, se résout et disparait. Dans le flotteur, la cellule est constituée par une membrane solide, rien de plus; elle renferme de l'air. Lorsqu'une seule partie de la cellule se chitinise, c'est toujours la mem- brane, en totalité ou en partie; la partie non atteinte se détruit. La mem- brane cellulaire est toujours la partie atteinte la première par le processus. La chitinisation, dùt-elle devenir complète, ne débute jamais par toute la cellule à la fois, même dans le cas de chitinisation en masse; elle se produit à l'une ou l'autre extrémité de la cellule, gagnant successivement de proche en proche toute la cellule. Étudiée au sein de la cellule elle-même, la chitinisation peut donc se définir ainsi : Une difïérentiation débutant toujours par la membrane, pouvant même se borner à celle-ci, et consistant essentiellement dans le dépôt successif, au gein de la cellule elle-même et à la partie interne de la membrane cellulaire, de couches formées aux dépens du protoplasme cel- lulaire et se superposant les unes aux autres, jusqu'à envahir la cellule en partie ou en totalité, Pl. II, fig. 17. On peut juger par ce que nous venons de dire de la chitinisation, com- bien étaient téméraires les assertions de ceux qui voyaient dans les forma- tions chitineuses du statoblaste des produits de sécrétion. Aucun fait ne laisse place à l'hypothèse d'une sécrétion. La chitinisation s'opère sur place, res- pecte le plus souvent jusqu'à la forme cellulaire: nulle apparence d'excrétion. Quant aux phénomènes chim.iques de la chitinisation, nous n'y insistons pas. Ils ne sont pas de notre compétence, et ils sont loin d'ailleurs d'être complètement élucidés par les spécialistes. Nous nous bornerons donc à reproduire les quelques données suivantes. 368 P- DEMADE La formule de la chitine est très discutée. Pour Ledderhose, c'est CisH^jN^Oij. SuNDwiK quadruple cette formule. Pour HoppE-SEYLER (i), dont le nom fait autorité, il est probable que la chitine se représente par CjHj^NOj ou un multiple. C'est, dit-il, un pro- duit de substitution de la cellulose ou d'un autre hydrate de carbone de la formule CgHiuOs- D'après Schmiedeberg (2), la chitine serait probablement une combi- naison de l'acide acétyl-acétique et de la glycosamine, ce qui concorderait avec l'opinion de Ledderhose, pour lequel la chitine en absorbants molécules d'eau se décomposerait en 2 molécules de glycosamine et 3 molécules d'acide acétique. Toutefois Schmiedeberg propose l'équation suivante pour représen- ter cette réaction, équation qui diffère légèrement de celle de Ledderhose C„H3oN,0„ + 4H,0 = 2 (QH„NO,) -h 3 (QH.O,). glycosamine ac. acétique L'auteur rapproche ensuite la formule de la chitine de cellede la chon- droïtine, et montre ainsi que la glycosamine établit le passage qui conduit de la chitine des animaux inférieurs au cartilage des organismes supérieurs. Tous sont donc d'accord pour reconnaître que le principal produit de scission de la chitine est une ou plusieurs glycosamines. Quoi qu'il en soit, la chitine est un composé très peu azoté. Elle est absolument réfractaire à la plupart des réactifs habituels que nous employons dans les laboratoires d'histologie, et dans les conditions où nous les employons. CHAPITRE SECOND La Masse s tat o b I ast iq u e. Nous avons terminé la première partie de ce travail, et non la moins importante de notre mémoire : YEtiide de la membrane du statoblaste. Nous abordons maintenant le deuxième chapitre : V Etude de la masse sta- toblastique, appelée encore et très exactement par les auteurs allemands Bildungsmasse (masse de formation), ce nom ne préjugeant rien sur sa nature véritable. (1) Physiologische Chemie; Berlin, 1877. {2) Schmiedeberg : Ucbcr d. chcin. Zusammeusct^iiiig des Knorpets; Arch, f. experim, Pathol. und Pharm., t. XXVIII, iSqi. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 369 I. DÉFINITION. La masse statoblastique, ou Bildungsmasse, est cette partie du statoblaste entourée par la coque chitineuse et destinée à donner naissance à l'être nouveau : le bryozoaire. Nous confondons désormais dans cette partie de notre étude les deux espèces de bryozoaires, VAlcyouclla et la Cristatella ; leurs masses stato- blastiques diffèrent très peu entre elles. II. Constitution. La Bildungsmasse est formée d'un grand nom- bre de cellules, offrant dans la suite de- leur développement une grande analogie avec un parenchyme végétal. Une constitution aussi peu compliquée semble ne réclamer qu'une étude très courte; il y a peu d'objets d'un examen aussi facile. Les dessins que nous avons reproduits dans nos Pl. I et II, même en l'absence de toute description, paraissent suffisamment explicatifs. C'est notre avis, et nous espérons le faire partager par tous ceux qui examineront attentive- ment nos planches. Malgré cela, nous croyons devoir insister d'une façon toute particulière sur cette constitution, parce quelle a été réi'oquée eu doute ou plutôt niée par tous les auteurs qui ont étudié le statoblaste avant nous. III. Examen. Nous nous sommes adressé pour cette partie de notre étude aux procédés suivants : i) Examen du statoblaste entier et intact dans l'eau, le sérum artifi- ciel, les solutions glycérinées faibles, le plus souvent aidé par l'action de réactifs colorants et électifs du noyau : vert de méthyle, carmin, hématoxy- line. Cette méthode ne convient qu'aux statoblastes très jeunes. 2) Le procédé de dissociation. On dilacère le statoblaste dans les mêmes milieux que ci-dessus, à l'aide de très fines aiguilles. Ce procédé nous a été d'un grand secours, principalement pour les statoblastes à coque dure. Grâce à lui, il nous a été possible d'isoler çà et là quelques cellules entières et de les étudier dans leurs détails. 3j Les coupes. L'objet est fixé par les solutions mercuriques ou chromiques usuelles, et enrobé à la paraffine. La coloration se fait avant ou après l'enrobage. C'est sur des coupes obtenues par cette méthode que nous avons fait réagir les réactifs les plus divers : matières colorantes acides et basiques, solutions pepsiniques, etc. Ce mode d'investigation, malgré les soins minu- tieux et pour ainsi dire infinis qu'il exige, nous a donné d'excellents résultats. Nous reparlerons entre autres de l'action du réactif de Millon et des liquides digestifs sur des préparations de ce genre. 370 P- DEMADE IV. Résultats. A l'aide des méthodes que nous venons d'énumérer, nous avons pu nous convaincre que la masse statoblastique était tout sim- plement constituée de cellules, cellules que nous avons pu suivre et dessiner pendant toute l'évolution du statoblaste, depuis sa formation par puUulation d'une cellule unique du cordon funiculaire jusqu'à son achèvement complet. Aussi, avons-nous constamment rencontré au sein de la masse statoblastique la structure cellulaire caractérisée par ses trois éléments : la membrane, le noyau, le protoplasme. Nous étudierons successivement ces trois éléments : Dans un statoblaste jeune ; Dans le statoblaste au cours de son développement ; Dans le statoblaste à maturité. A. Le statoblaste jeune. Il est à peu près impossible de méconnaître la structure cellulaire du statoblaste jeune, et les observateurs sont assez d'accord pour la lui reconnaître. En effet, les trois éléments s'y recon- naissent avec la plus lumineuse évidence. La membrane cellulaire est mince et nette, elle entoure chaque cellule. Le noyau, très riche en nucléine, se colore intensément par les réactifs de la nucléine : vert de méthyle, carmin et hématoxyline. Le protoplasme se montre très abondant, finement granuleux, sans enclaves ni vacuoles, Pl. I, fig. 1, 2; Pl. II, fig. l, 2, 3. B. Le statoblaste au cours de son déi>eloppement. Les différentes transformations qui se passent au sein des cellules ne tardent pas à modi- fier ce faciès caractéristique, sur la nature duquel il est impossible de se méprendre. La membrane cellulaire subit peut-être les modifications les moins apparentes à cette période, et c'est probablement à cette particularité qu'elle doit d'avoir été méconnue par les observateurs; car, si la membrane ne se modifie guère, le reste de la cellule change beaucoup, le protoplasme notam- ment; la membrane reste mince et peut échapper à l'examen. Le noyau subit également une transformation qui n'est pas de nature à le faire ressortir davantage, et rend sa recherche plus difficile. Générale- ment, tout l'élément nucléinien se tasse en un nucléole-novau, identique- ment comme le fait se passe dans certains œufs, différentes algues, plusieurs infusoires, etc. Ce nucléole petit, bien que brillant, et perdu, pour ainsi dire, au sein de la cellule dans un noyau pâle, peut bien échapper à l'ob- servateur non prévenu. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 371 Le protoplasme change complètement d'aspect. Les fines granulations, ■ dont nous parlions plus haut, font place à des enclaves albuminoïdes qui vont grossissant à mesure qne le statoblaste se développe, et finissent par remplir et gonfler tellement les cellules qu'on ne distingue les détails cellu- laires qu'avec beaucoup de peine, Pl. I, fig. 3, 4, 5, Pl. II, 5, 6. C. Le statoblaste à maturité. L'aspect du protoplasme, son change- ment si complet font que le statoblaste à maturité apparait, nous parlons de la Bildiiugsmasse, comme un entassement d'enclaves albuminoïdes. Il faut pour se convaincre de sa véritable structure : a) ou bien avoir suivi pas à pas le développement des cellules ; b) ou bien se livrer à un examen des plus attentifs du tissu qu'on a sous les yeux. Cette double méthode d'observation, aidée seulement par l'emploi des colorants électifs du noyau, a toujours suffi pour nous faire reconnaître à toute évidence que nous étions en présence d'un tissu. Nous nous serions même borné à ces procédés si simples d'investigation, si nous n'avions eu devant nous les affirmations contradictoires des auteurs cités plus haut. Nous-avons donc contrôlé nos premières observations, désirant avant toute chose que la véritable structure de la Bildungsmasse ne fut pas seulement évidente pour nous, mais encore et surtout pour tous ceux qui nous liront. Nous dirons donc, au risque d'encourir le reproche de prolixité, com- ment nous avons acquis tous nos apaisements à ce sujet. Puisque la Bildungsmasse n'est pas une cellule unique, mais un tissu, il s'agit d'y montrer les cellules avec tous leurs éléments. i) La membrane. La membrane des cellules de la Bildungsmasse possède, quoique à un faible degré, comme toutes les cellules du statoblaste, la faculté de se chitiniser. Cette chitinisation, ou tout au moins ce com- mencement de chitinisation de la membrane-, lui donne vis-à-vis des agents mécaniques et des réactifs une résistance considérable. C'est en nous basant sur cette propriété de la membrane que nous sommes parvenu à la mettre en entière évidence. a) La dissociation permet d'isoler les cellules les unes des autres, ce qui serait totalement impossible sans l'existence d'une membrane propre à chaque cellule et, ajoutons-le, d'une membrane puissante. b) Grâce à l'action des liquides digestifs sur les coupes, solution glycérinée chlorhydrique, solution pepsinique d'estomac de porc, agissant 37^ P. DEMADE pendant plusieurs jours à la température moyenne de 38°, nous avons pu débarrasser complètement les cellules de leur contenu. Il ne restait que les membranes que nous avons pu colorer par l'iode en solution dans KIo et encore par l'hématoxyline. c) Enfin nous avons fait agir sur des coupes le réactif de Millon. Le protoplasme coloré en rose s'est coagulé au centre de la cellule et les membranes ont apparu très nettement. ■j) Le noyau. Le noyau est l'élément le plus difficile à distinguer au milieu du protoplasme gonflé par les enclaves. .11 est rare qu'avec un peu d'habitude on ne puisse le découvrir dans les cellules dissociées. 11 occupe habituellement la périphérie de la cellule. Avec l'aide des colorants, on peut le révéler même sur des statoblastes entiers. Nous nous sommes servi avec succès pour l'observer dans les cellules, où il ne nous apparaissait pas immédiatement, de l'artifice suivant. On in- troduit entre le couvre-objets et le porte-objets une goutte de matière colo- rante, on écrase avec précaution les cellules en appuyant avec l'extrémité d'un instrument quelconque sur le couvre-objets; les cellules crèvent, s'im- bibent mieux de la matière colorante; on lave pour enlever l'excès du réactif et le noyau apparaît seul coloré. 3) Le protoplasme. Nous avons à peine besoin d'en parler. Nous avons dit à propos de la membrane comment il se comportait vis-à-vis du réactif de Millon. Cette réaction n'a jamais manqué de se produire et de nous faire distinguer le protoplasme de la membrane. V. Conclusion. Critique. De l'étude de la Bildiingsmasse , nous concluons que la masse statoblastiquc est un tissu. Il y a loin, comme on le voit, de notre conclusion à celle des naturalistes qui ont écrit sur ce sujet. Allmann, Nitsche, Gegenbaur parlent bien d'un agrégat de cellules, mais le pointillé, qui dans leurs planches occupe toute l'étendue du statoblaste, n'est rien moins que démonstratif. TuRPiN et Gervais considéraient la Bildungsmasse comme une cellule unique à contenu vitellin. Pour 'VoGT et Yung, i888, la Bildungsniasse est encore de la même nature y C'est évidemment, écrivent ces auteurs, une accumulation proto- r> plasmatique un peu nuageuse, mais non pas cellulaire ftextuelj. *» T. I, p. 683 de l'édition française. LE STATOBLASTE DES PHYLACTOLÉMATES 373 Max Verworn, 1887, ne pouvant nier l'évidence, dessine certaines . membranes, sans en parler cependant. Il fait des cellules de la Bildiings- masse - des amas de noyaux qui ont perdu leurs nucléoles «. Max Verworn n'a pas même vu les noyaux; ce qu'il prend pour des noyaux t privés de leurs nucléoles, « ce sont tout bonnement les enclaves. Nous ne pouvons terminer cette étude sans insister sur les planches qui accompagnent les travaux de Nitsche et Verworn sur les bryozoaires. NiTSCHE a étudié YAlcyonella, Verworn la Cristatella; nous avons étudié les deux espèces. De l'observation comparée des planches de Nitsche, de Verworn et des nôtres résultent des conclusions assez inat- tendues. Nitsche (Alcyonella) affirme au début de son étude, que le statoblaste est un bourgeon. La Bildungsmasse devrait donc être considérée par lui comme un tissu. Il commence par dessiner des cellules dans la Bildungs- masse, fig. 34 et 38. Mais, sans doute, il ne tarde pas à ne plus retrouver dans la masse centrale la structure cellulaire, car ses fig. 40 et 42 n'indiquent plus de traces de cellules, mais un amas nuageux de protoplasme semé de points. On nous permettra de dire que jamais, dans YAlcyonella, les cellules ne sont plus nettement visibles et délimitables que dans les derniers stades du développement; or c'est précisément dans ces stades que Nitsche méconnaît la structure cellulaire de la Bildungsmasse. Verworn [Cristatella) est aux antipodes de Nitsche. On ne trouve pas de trace de configuration cellulaire dans les fig. 42 et 43, mais il dessine un simili-tissu dans ses fig. 47 et 48. Et l'on peut faire ici une remarque inverse de celle que nous faisions ci-dessus au sujet des figures de Nitsche. Chez la Cristatella — nous ne disons pas YAlcyonella, — dans les premiers stades du développement, dans le moment où chez la Cristatella la nature_. du tissu est si évidente, Verworn ne voit pas de traces de membranes cel- lulaires, il ne dessine qu'un amas de noyaux. Au contraire, à l'époque où il est le plus difficile de reconnaître cette structure, Verworn la représente, mais toute différente de ce qu'elle est en réalité; il lui prête cette signifi- cation singulière : « ce sont, dit-il, des groupements de ^ noyaux privés de nucléoles. « Nous avons dû nous inscrire en faux et contre l'assertion de Nitsche, et contre celle de Verworn. La structure cellulaire de la Bildungsmasse n'est pas seulement évidente au début (Nitsche), ou à la fin (Verworn); le stato- 47 374 P- DEMADE blaste est un tissu. Depuis sa formation, tant chez Y Alcyonella que chez la Cristatella, aux dépens d'une cellule du funicule, jusqu'à son complet déve- loppement, toujours, dans- tous les statoblastes et à toutes les périodes, on reconnaît indiscutablement et avec la dernière évidence un tissu constitué de cellules avec leurs trois éléments : membrane, protoplasme, noyau. CONCLUSIONS GÉNÉRALES Nous nous étions posé en commençant ce mémoire ces deux questions : Comment se forme la membrane du statoblaste? Comment se constitue la masse centrale ou Bildiingsmasse ? A la première de ces questions, il avait été répondu que la membrane était un simple produit de sécrétion. Nous avons prouvé que la membrane était organisée, composée de cellules qui subissent une différentiation cellulaire. A la seconde de ces questions, il avait été répondu très diverse- ment. Nous avons montré qu'aucune des réponses données n'était sati sfai santé, et nous avons prouvé que la masse centrale était non une cellule, mais un tissu, et ce à toutes les périodes de son développement. BIBLIOGRAPHIE I Trembley : Mémoire pour servir à l'histoire des Polypes d'eau douce; Leide, 1744. A. J. Rosel von Rosenhof : Insecten Belustigungen ; Nuremberg, 1754. Cui'ier : Tableau élémentaire; Paris, an VII. Pallas : Descriptio Tubulariœ fungosœ; Nov. commet. Acad. Se. imp. Petrop., t. XII, 1768. Lamarck : Histoire naturelle des animaux sans vertèbres; Paris, i8i5. Turpin : Étude microscopique de la Cristatella mucedo; An- nales des Se. natur., seconde série, t. VII, Paris, 1837. Gervais : Recherche sur les Polypes d'eau douce des genres Plumatella, Cristatella et Paludicella; Ann. des Se. naturelles, seconde série, t. VII. Synonymie des divers polypes à panache et description de la Crista- tella. 1837. Histoire naturelle des Polypes composés d'eau douce ; Nouveaux mémoires de l'Académie royale des Se. et belles-lettres de Bruxelles, t. XXI, 1842; II<: partie, i852. Van Beneden : Recherches sur les Bryozoaires fluviatiles de Belgique; Mémoires de l'Académie royale de Belgique, t. XXI, 1847. G. J. Allman : A monography of the fresch water polyzoa; London, 1847. Nitsche : Beitrage zur Anatomie und Entwicklungsgeschichte der Phylactolâmen Siisswasserbryozoen, insbezondere von Alcyonella fungosa; Berlin. Archiv fiir Anatomie und Physiologie, 1868. C. Clans : Zoologie; Paris, 1884. Gegenbaur : Précis d'Anatomie comparée; Paris, i885. Van Beneden et Dumortier 376 DEMADE Krœpelin : Ueber die Ph^iogenie und Ontogenie der Sûsswasser- biyozoen; Versammlung deutscher Naturforscher und . ^rzte zu Berlin, Sektion fiir Zoologie; Biologisches Centralblatt, 1886- 1887. Hoppe-Seyler : Physiologische Chemie; Berlin, 1877. Cari Vogt et Emile Yiing : Traité d'Anatomie comparée pratique ; Paris, t. I, 1888. Max Veni'orn : Beitriige zur Kenntniss der Siisswasserbryozoen ; Zeit- schrift fiir wissenschaftliche Zoologie, Band XLVI, i, 1888. O. Schmiedeberg : Ueber die chemische Zusammensetzung des Knorpels; Arch. f. exper. Path. u. Pharm., XXVIII, 5-6, 1891. l EXPLICATION DES PLANCHES Tous les dessins ont été exécutés par nous à la chambre claire, au micros- cope de Zeiss, à la hauteur de la table. PLANCHE I. Alcyonella fungosa. FIG. 1. Funicule avec statoblaste sti; st2 loge d'un statoblaste enlevé; f fu- nicule (Gr. : 1/18 X 2). FIG. 2. Statoblaste jeune ; A, feuillet cystogénique supérieur externe; B, feuillet cystogénique inférieur interne ; B/, masse centrale (Gr. : im. aq. apoc. X 4)- FIG, 3. Statoblaste dans lequel la couche cystogène double est en voie de développement; ch, chitine en deux lamelles (Gr. : apoc. à sec X 4)- FIG. 4. Statoblaste peu avancé. La couche cystogénique entoure les 2/3 du statoblaste. En L, flotteur (Gr. : im. aq. IV i X 2). FIG. 5. Statoblaste à coque très avancée, incomplète encore en bas. La couche cj-stogène inférieur interne, B, n'existe plus ; A subsiste seul. En L, flotteur (Gr. : DD X i)- Dans ces 5 premières figures, f indique l'épithélium funiculaire. FIG. 6. Statoblaste presque achevé. Ce dessin ne donne que la coque co et le bourrelet L; sur la coque traces de cellules (Gr. : DD X 2). FIG. 7. Statoblaste en formation. Membrane dessinée tangentiellement à la surface; p, calotte polaire; A, couche cystogène externe (Gr. : ap. im. hom. X 4)- - FIG. 8. Statoblaste jeune. Formation de la membrane protectrice. Les deux demi-cercles mm et w'm'. BL, Bildiitigsmasse avec ses cellules (Gr. : DD X i, DD X 4)- FIG. 9. Statoblaste très avancé. Section optique équatoriale. Coque formée (Gr. : DD X i). FIG. 10. Statoblaste entier. P, calotte polaire, co, coque (Gr. : D X i)- FIG. 11. Statoblaste en cours de développement; co, coque. FIG. 12. La coque vue d'en haut tangentiellement (Gr. : CC X i)- FIG. 13. Fragment de la membrane ; Ep, lambeau d'épithélium (Gr. : apoc. imm. aq X 2 ord.). FIG. 14. Fragment de la membrane; co, coque formée; A, rangée de cellules ou feuillet cystogène externe; /, funicule (Gr. : DD X 4)- FIG. 15, 16, 17. Œufs véritables de l'Alcjronella : n, noyau; n\ nucléole nu- cléinien (Gr. : ap. im. aq. X 4- Gr. : DD X 4). 378 P. DEMADE PLANCHE II. , Cristatella mucedo. FIG. 1. Statoblaste jeune;/, funicule; A, couche cystogène supérieur; B, infé- rieur; Bl, Bildungsmasse (Gr. : DD X 4)- FIG. 2. Id. Stade plus avancé; multiplication des noyaux dans la zone cysto- génique (Gr. : DD X 2). FIG. 3. Statoblaste avancé; coupe oblique; pas de chitinisation (DD X i)- FIG. 4. Formation delà coque, co, avec ses noyaux encore visibles (Gr. : DD X i)- FIG. 5. Statoblaste en plein développement ; coque en formation. Le feuillet cysto- gène inférieur existe encore en partie; B, anneau se forme; R, branchage (Gr. : CC X 2). FIG. 6. Évolution de la coque aux dépens des deux feuillets, F, flotteur, avec branchage, R, en pleine formation (Gr. : D X i)- FIG. 7. Statoblaste; coupe de la membrane; coque, flotteur et crochets. De A en B, points suivant lesquels le flotteur est séparé de la coque. De B en C, points suivant lesquels le flotteur est adhérent à la coque. I, Branchage équatorial; 2, cercle inférieur de crochet; 3, supérieur; en F, crochet entier (Gr. : D X 2). FIG. 8. Début de la formation des crochets, en V, W, bourgeons (Gr. : D X 2). FIG. 9. Crochets; s, s', s", épines rudimentaires (Gr. : D X 4)- FIG. 10. Statoblaste vu tangentiellement. I, Rang supérieur des crochets; 2, cercle des branchages; 3, rangée inférieure des crochets; /', ligne ondulée des branchages; cli, chitine; ep, épithélium; /, funi- cule (Gr. : AA X 4). FIG. 11, 12. Coupes de crochets à divers stades; A, B, C, D, montrant les cellules qui servent à leur formation (Gr. : D X 4) ; <^hr, chitine; ep, cellules épi- théliales. • FIG. 13. Même légende que fig. 10 (Gr. : A A X 4)- FIG. 14. Surface d'un œuf mûr dessiné à un endroit sans branchages (Gr. : D % i). FIG. 15. Fragment de membrane d'un statoblaste âgé, montrant les points d'épaississement des membranes cellulaires (Gr. : DD X 4)- FIG. 16. Coupe de la membrane oblique; une partie de chaque cellule s'est chitinisée, le reste s'est détruit; on voit les lambeaux de membrane cellulaire (Gr. : DX 4)- FIG. 17. Un fragment de la couche C3'stogénique (fig. 6, Pl. II) grossie (Gr. : apoc. imm. homog. X 4). pour montrer le processus de chitinisation au sein de la cellule; ch, membrane cellulaire en voie de chitinisation. FIG. 18 Fragment des couches diverses du statoblaste au début de la chi- tinisation; (Gr. : apoc. imm. aq. X 4);/j cellules du funicule; A, cellule de la couche externe; ch, chitine; B, cellules de la couche interne; Bl, Bildungsmasse. FIG. 19. Quelques cellules de la Bildungsmasse d'un statoblaste; en, enclaves. FIG. 20. Quelques cellules de la Bildungsmasse jeune. CC X 4> rnèmes lettres que FIG. 18. TABLE DES MATIERES \ But et division du mémoire 337 Aperçu historique. 338 Statcblaste . 338 Membrane. 342 Masse centrale 343 Choix de l'objet. Méthodes . 345 CHAPITRE I . — LA MEMBRANE. ALCYONELLA FlINGOSA 348 Etude d'après coupes 348 Appareil protecteur . 348 Appareil flotteur 352 Étude du statoblaste entier . 353 Cristatella raucEDO 356 Etude d'après coupes 357 Appareil protecteur . 357 Appareil flotteur . 36o Système de crochets. 362 Étude du statoblaste entier . 364 Conclusion et critique 366 CHAPITRE II. — L A MASSE STATOBLASTIQUE. Définition . 369 Constitution 369 Examen 370 Résultats . 370 Conclusion. — Critique 372 Conclusions générales 374 Bibliographie 375 Explication des planches . 377 Planche T ^^^^?zai ■Orii-€7^ 'c' i.zAn.. ■" M.^i ► " t» > ,, r «1 %1 ■;^V->)f ■ ,;. #_ ■^..^■'^. -^^