iT il '^. .,i>';/.-'> ■^\ .V,' .''■■•■ ■ A. f '^'\^'\ .^■è,'^ >%^'., •.'l>' ■'•ï V iMINISTÈRE DES COLONIES Inspection générale de l'Agriculture coloniale. L Agriculture pratique des pays chauds BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES DEUXIÈME ANNÉE Juillet 1902 — Juin 1903 LÎBRARY NEW YORK aOTAiNlCAL PARIS Augustin CHALLAMEL, Editeur Rue Jacob, 17 Librairie Maritime et Coloniale. L'AGRICULTURE PRATIQUE DES PAYS CHAUDS BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES DEUXIÈME ANNÉE TABLE DES MATIERES DOCUMENTS OFFICIELS Décrets. Rapport au Président de la République suivi d'un décret et d'arrêtés por- tant création, au Jardin Colonial, d'une École nationale supérieure d'Agriculture coloniale, organisation des cours et nomination des pro- fesseurs i Rapport au Président de la République suivi d'un décret portant institu- tion d'un Conseil technique de l'Agriculture coloniale 6 Rapport au Président de la République suivi d'un décret portant modifi- cation au décret du 18 juillet 1876 relatif à la circulation et à la vente des vanilles à la Guadeloupe 65 Rapport au Président de la République suivi d'un décret réglementant la vente, l'achat et le transport des vanilles à Tahiti 130 Décret relatif aux poivres de l'Indo-Chine admis en France en 1902 394 Arrêtés . Arrêté nommant les membres du Conseil technique de l'Agriculture coloniale 129 Arrêté autorisant les fonctionnaires coloniaux à suivre les cours de l'Ecole Nationale supérieure d'Agriculture coloniale 253 IV TABLE DES MATIÈRES Jardin colonial. Décision du Minisire de la Guerre autorisant les élèves de l'École d'Agri- cullure de Tunis à suivre les cours de lEcole Nationale supérieure d'Agriculture coloniale 253 Nominations et admissions à l'École Nationale d'Agriculture coloniale.. . 381 Afrique occidentale. Primes à l'agriculture au Sénégal 8 Notes sur le service de l'Agriculture au Soudan 9 Notes sur la culture du coton au Sénégal 16 Instruction sur le mode d'envoi des fruits de Guinée 18 Rapport agricole. — Dahomey 19 Circulaire relative à la production de la cire. — Guinée 254 Arrêté interdisant la circulation et la vente des caoutchoucs frelatés. — Guinée 635 Madagascar. Circulaires relatives à la préparation d'herbiers et aux envois de graines destinées à l'étude 39 Circulaires et arrêtés relatifs à la création d'une chambre d'agriculture et de comices agricoles 45 Circulaire relative au transport des plants 54 Rapport sur la production de l'huile de coco 55 Arrêté réglementant la chasse aux bœufs dans la province de Majunga . . 134 Arrêté supprimant, dans la province de Mananjary, l'impôt sur Ips terres et sur les animaux domestiques 256 Arrêté portant organisation de postes de stagiaires à la Direction de l'Agriculture 257 Arrêté portant création d'un poste de stagiaire à Ivolonia 259 Arrêté établissant une taxe sur l'espèce bovine dans les secteurs de Fort- Dauphin, Manambara et Kanomafana 260 Arrêté déclarant le district de Mahanoro contaminé par la maladie vermi- culaire du caféier 261 Arrêté interdisant l'exportation des végétaux hors des territoires où sévit la maladie vermiculaire du café 263 Cessions gratuites de graines de vers à soie par la station d'essai de Nanisana 26.] Avis relatif à l'élevage du mouton 266 Règlement sur le fonctionnement d'un service de cessions de graines et de plants 3°-' TABLE DES MATIERES V Circulaire au sujet de la participation de la Colonie au concours agricole de Paris 383 Encouragements à donner à la culture du cocotier 523 Circulaire au sujet des échantillons végétaux soumis à la Direction de l'Agriculture 527 Arrêté interdisant la chasse aux bœufs dans la province d'Antsirabe .... 636 Circulaire relative aux envois d'échantillons à faire au Jardin colonial . . 637 Arrêté supprimant les droits de sortie à l'exception de ceux qui frappent le bétail 638 Arrêté autorisant la création d'une Société pour l'amélioration des races de chevaux 639 Arrêté promulguant le décret du 19 février 1903 interdisant l'exportation des vaches et génisses 639 Indo-Chine. Organisation des services locaux d'agriculture 56 Arrêtés réglementant l'exploitation des forêts au Tonkin 505 Congo. Arrêté interdisant la chasse aux oiseaux insectivores 133 Arrêté créant une école indigène d'apprentissage agricole à Brazzaville.. 393 Arrêté établissant au Jardin d'essai de Libreville une école agricole indi- ^'>8 gène "^"^ Rapport sur le Jardin d'essai de Brazzaville 633 Guyane. Primes d'encouragement à la culture ^^^ VI TABLE DES MATIERES ÉTUDES ET MEMOIRES Par noms d'auteurs. Berthelot nu Chesnay. — Les plantations dans le Mayumbé, 725. Bertrand-Gabiuel. — Dosage de la caféine, 211. BoTHiER-NuMA. — La ramie, 176. BouiLLOD Lois. — Note sur le palmier à sucre, 217. Cavard. — Note sur le Polygala Butyracea (station de Ditinn), 227. Cazalbon. — Rapport sur la soie soudanaise, 739. Cazard. — La banane aux Canaries, 416. Chalot (C). — Conservation de la faculté germinative des graines de cacaoyer, 487. — Moyen pratique pour détruire les blattes, 503. Charabot (Eug.). — Étude sur les produits odorants dos Colonies, 395. Chardon (R.). — La côte ouest de Madagascar, 472. Defontaine. — Rapport annuel d'un hectare de bananier dans l'Amérique du Sud, 629. — Destruction de la fourmi tamagure, 742. D"" Delacroix. — La maladie vermiculaire des caféiers à la Martinique et à la Guadeloupe, t^Ê — Mode de développement des champi- gnons du noir de banane, 80. — Sur la maladie du coton- nier en Egypte, 135. Deslandes. — Le semis en place du cacaoyer, 627. DuBARD (Marcel) et Viguier (René). — Sur la préparation des herbiers, 609. DuFOUR. — Essai sur la détermination des amidons, 290. Dumas. — Le Bombyx Faidlierbei, 235. Faucheret (Louis). — Pailles et fibres diverses employées à Madagascar dans la chapellerie et la vannerie, 616. Fleutiaux. — Les insectes. Dernières récoltes de MM. Landes et Touin à Saint-Pierre, 111. — Les Slephanoderes du café, 116. — Les calandres du bananier, 117. — Insectes nuisil)les de Mada- gascar, 119. — Insectes récollés à Libreville, 121. — Coléop- tères de Kati (Soudan), 122. — Insectes rapportés des iles Comores, 123. — Les Insectes, 229, 377, 495, 745. Henry (Yves). — Noie sur un colon de l'Asie Mineure, 124. — La (piestion colonnière au Sénégal et au Soudan, 475. — Le colon aux États-Unis, 551 et 703. — Conférence sur les produits de la Guinée, du Soudan et du Sénégal, 604. JoLYET. — Le transport des bois dans les forêts coloniales, 641. JouKKROY o'Abbans (C" de), — La gutta-percha et le caoutchouc en Malaisie, ."■.80. KiEKi-Eii. — Déformation des sarmcnls de In vigne, 494. D*" Laeont. — Les cultures de l'archipel des Comores, 144, 337. TABLE DES MATIÈRES VII Laurent (G.). — Le sultanat d'Anjouan, 453. D"" Loir. — La lutte pratique contre la malaria, 688. D'' Manguy. — L'Agriculture dans la région nord du Soudan et les essais du Jardin de Gao, 302. MiCHÉA (P.). — Le Maté, 427. — La culture des ilex produisant le maté, 431. MiLLiAu (Ernest). — Étude de la graine de rirwingia Oliverii, 223. — Graines grasses de Madagascar, 354. — Huile de bois, 489. NoLLET (C.). — Culture de la ketmie musquée, 126. Perrot (C.) et Lefèvre (G.). — Le Kinkeliba, 67. Perrot (Emile). — Le Ksopo (poison des Sakalaves), 675. Prudhomme. — Notes sur le quinquina [suite), 92. — Le quinquina à Mada- gascar, 198. — Rendement du caféier libéria à Fort-Dau- phin, 624. RiNGELMANN (Max). — Cours de génie rural appliqué aux Colonies. Construc- tions rurales. Ouvrages de défense, 400. — Essais de décortication des riz de Madagascar à la Station d'essai de machines, 697. Serrano (J.-J.). — Cacao Penon, 483. Teissonnier. — Note sur l'Hyptis Spicigera, 492. D'" ViOLLE. — Quelques plantes à latex du Dahomey (extrait de rapport), 436. Sujets traités. Agriculture. — Dans la région nord du Soudan (Jardin de Gao) (Manguy, médecin-major de 2" cl.), 302. Amidons. — Essai sur leur détermination (Dufour), 290. Bananier. — Mode de développement des champignons du noir de banane (D'' Delacroix), 80. — La banane aux Canaries (Cazard), 416. — Rapport annuel d'un hectare de bananier dans l'Amérique du Sud (Defontaine), 629. Bombyx Faidherbei. — (Dumas), 235. Cacao. — Le cacao Penon (J.-J. Serrano), 483. — Conservation de la faculté germinative des graines de cacaoyer (C. Chalot), 487. — Le semis en place du cacaoyer (Deslandes)J 627. Café. — Maladie vermiculaire des caféiers à la Martinique et à la Guadeloupe (D'' Delacroix), 78. — Dosage delà caféine (Gabriel Bertrand), 211. — Café à Madagascar, 365. — Note relative au caféier de Madagas- car, 374. — Rendement du caféier Libéria à Fort-Dauphin (Pru- d'homme), 624. Coton. — Note sur le cpton de l'Asie Mineure (Yves Henry), 124. — Maladie du cotonnier en Egypte (D'' Delacroix), 135. — La question coton- nière au Sénégal et au Soudan (Yves Henry), 475. — Le coton aux États-Unis (Yves Henry), 551 et 703. Cultures. — Dans l'archipel des Comores (D'' Lafont), 144 et 337. vril Table des .matières Cultures légumières. — Cultures lég-umiî'res à Madagascar, 237. — Les légumes el les fruits à Madagascar (circonscription de l'Est), 267 et 443. Génie rural. — Cours de génie rural appliqué aux Colonies (Max Ringelmann), 400. Graines grasses de Madagascar (E. Milliau), 354. Gulta-percha et le caoutchouc en Malaisie (C^" de JoufTroy d'Abbans), 580. Herbiers. — Sur leur préj)aiation (Marcel Dubard et liené Viguier), OO'J. Huile (le bois. — (E. Milliau), 489. Hyplis spicigera. — (Teissonnier), 492. Insectes nuisibles. — (Fleutiaux), 111, H6, 117, 119, 121, 122, 123, 229, 377, 495, 745. — Moyen pratique pour détruire les blattes (C. Chalot), 503. — Destruction de la fourmi Tamagure (Defontaine), 742. Irwingia Oliverii. — Étude de la graine (E. Milliau), 223. Karité. — (Notes relatives au beurre de), 347 et 631. Ketmie musquée. — Sa culture (C. NoUet), 126. Kinkeliba. — (Perrol et Lefèvre), 67. Ksopo. — Poison des Sakalaves (E. Perrol), 675. Madagascar. — La côte ouest (Chardon), 472. Malaria. — La lutte pratique (D'' Loir), 688. Manihot Glaziorii. — Documents relatifs à sa culture, 531. Maté. — Le Maté (Michea), 427. — La culture des ilex produisant le maté (Michea), 431, Pailles et fibres diverses employées à Madagascar dans la chapellerie et la vannerie (L. Faucheret), 616. Palmiers. — Note sur le palmier à sucre (Lois Bouillot), 217, Planlalions dans le Mayumbé (Berthelot du Chesnay), 725, Plantes à latex du Dahomey. — Extrait d'un rapport de M. le D"" Violle, 436. Polygala Butyracea. — Note, station de Ditinn (Cavard), 227. Produits divers de la Guinée, du Soudan et du Sénégal. Conférence (Henry), 604. Produits odorants des Colonies. — Étude (Eug. Charabot), 395. Quinquina. — Notes {suite) (Prudhomme), 92. — Le quinquina à Madagascar (E. Prudhomme), 198. Ramie. — La ramie (Numa Bothier), 176. liiz. — Essais de décortication des riz de Madagascar à la Station d'essai de machines (Hingelmann), 097. Sanseviera. — Sa culture, 214. Soie soudanaise. — Rapport (Cazalbon), 739. Sultanat d'Anjouan (Le). — (G. Laurent), 453. Transport des bois dans les forêts coloniales (Jolyet), 641. Vigne. — Déformation des sarments (Kieffer), 494. Bibliographie, 380. MAÇON, l'HUTAT KKKHES, I.VIPHIMEUHS. 2" ^°»««- JuiUet-Aoùt 1902. N" 7 MINISTÈRE DES COLONIES Inspection générale de l'Agriculture coloniale. L 'Agriculture pratique des pays chauds BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES Paraissant tous les deux mois. Tous documents et toutes communications relatives à la rédaction doivent être adressés à l'Inspection générale de VAgriculture coloniale au Ministère des Colonies. PARIS Augustin CHALLAMEL, Editeuh Rue Jacob, 17 Librairie Maritime et Coloniale. Les abonnements partent du 1" Juillet. ' Prix de l'Année (France, Colonies et tous pays de l'Union postale). — 20 fr. La reproduction complète d'un, article ne peut être faite qu'après autorisation spéciale. Les citations ou reproductions partielles sont autorisées à la condition de mentionner la source de Varticle. PUBLICATIONS DU MINISTÈRE DES COLONIES REVUE COLONIALE Explorations. — Missions. — Travaux historiques et géographiques. — Archives Etudes économiques Un fnsi-iciili' \ paruil tous les deux mois PARIS — Ali.lsti.n GHALLAMEL, Editeur, rue Jacob, M PRÎX DE LWnONNEMENT ANNUEL (Fiance et Colonies) 15 IV, L'Agriculture pratique des Pajs Chauds BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES Un fascicule de S feuilles (frand in-S", paraît lous les deux mois PARIS — Augustin GHALLAMEL, Éditeur, rue Jacob, 17 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : (France et Colonies) 20 fr. Annales d^Hygiène et de Médecine COLONIALES PUni.ICA TION TRIMESTRIELLE PARIS — Octave DOIN, Editeur, place de l'Odéox, 8 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : France et Algérie, 10 fr. — Étranger, 12 fr. Feuille de Renseignements de rOffice Colonial PUBLICATION MENSUELLE COLONISATION : Exploitations agricoles et industrielles, enquêtes économiques, etc. COMMERCE : Renseignements commerciaux et statistiques ; Avis d'adjudications ; Offres et demandes commerciales ; Mouvement des paquebots ; Listes des maisons de commerce, cLc. PARIS — Augustin GHALLAMEL, Editeur, rue Jacoh, 17 ABONNEMENT ANNUEL : France, 5 fr. — Colonies cl Union postale, 6 fr. L7VGRICULÏURE PRATIQUE DES PAYS CHAUDS BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES PARTIE OFFICIELLE RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE Monsieur le Président A mesure que nos Colonies s'organisent, le besoin de développer, dans chacune d'elles, les productions agricoles s'impose d'une façon plus impérieuse. Du développement de leur agriculture peut dépendre, en effet, pour nos possessions d'outre mer une nouvelle et définitive richesse. 11 convient donc de rechercher tous les moyens capables d'assurer les progrès de cette branche de l'activité humaine. Si en France l'organisation de l'enseignement agricole a eu l'influence la plus heureuse sur les progrès réalisés par la culture, il est permis d'espérer que les etl'ets d'un semblable enseignement auront des résultats encore plus marqués sur la prospérité de nos Colonies, car, tandis que notre vieille agriculture métropolitaine s'appuyait sur tout un passé de tradition et de pratique, l'agriculture coloniale, au contraire, est une science neuve, née d'hier, et où les moindres détails doivent être soi- gneusement étudiés. Il importe que les jeunes gens qui veulent porter dans nos Colonies leurs capitaux ou qui seront appelés à occuper des postes dans l'administration agricole possèdent toutes les connaissances techniques nécessaires pour Ballelin du Jardin colonial, 1 2 DOCUMENTS OFFICIELS leur permettre de réussir et de diriger avec compétence les lonctions qui leur seront conliées. J ai pensé qu en se basant sur l'enseignement donné déjà dans les diverses écoles, il suflirait de compléter par un enseignement technique spécial, les notions générales qui y sont enseignées. 11 importe que cet enseignement soit en même temps très technique et très pratique. Cette double nécessité peut être satisfaite en installant l'enseignement au Jardin Colonial. Déjà, en effet, de nombreux stagiaires fréquentent cet établissement en vue d'acquérir les notions techniques qui leur sont indispensables pour leur permettre de réussir au\ Colonies. Les collections de plantes réunies dans les serres, aussi bien que les séries très complètes de matières premières provenant des Colonies, permettront de mettre sous les yeux des élèves tout ce qui peut contribuer à compléter leur instruc- tion pratique. Peu de chose reste à faire pour parachever lorganisation des labora- toires. D'ailleurs leur aménagement pourra être assuré sans grever daucune façon le budget de la métropole, car les Gouverneurs des Colo- nies, que je n'ai pas manqué de consulter sur l'opportunité du développe- ment de cet enseignement, en leur demandant de contribuer par une sub- vention extraordinaire à son organisation, ont tous répondu favorable- ment, mettant à la disposition du département des Colonies les crédits nécessaires jiour l'installation des nouveaux services. Ainsi pourra être réalisé, dans les conditions les plus favorables en même temps qu'en s'inspirant des règles de la plus rigoureuse économie, un enseignement dont on est en droit d'attendre les meilleurs résultats au point de vue du développement de la colonisation agricole. J'ai fait préparer dans ce but le projet de Décret ci-joint que j'ai l'hon- neur de soumettre à votre haute sanction. Albert Decr.\is. DÉCRET Vu le décret du 28 janvier 1899 instituant un Jardin d"l"]ssai Colonial, \'u le décret du 5 mai 1900 portant nioditication du titre du Jardin d'Essai Colonial et déterminant ses attributions, Vu la loi de Finances du 30 décembre 1900, Sur le rapport du Ministre des Colonies, Décrète : , AK-ricLE l'KiiMiEu. — Il cst Créé au Jardin Colonial un enseignement DÉCRET 3 ag^ricole sous le nom de: « Ecole Nationale supérieure d'agriculture Colo- niale. » Art. 2. — La durée de renseignement est d'une année. Cet enseignement est donné par des professeurs titulaires ou chargés de cours nommés par le Ministre des Colonies. Art. 3. — • L'école reçoit deux catégories d'élèves, savoir : 1° Des élèves réguliers ; 2" Des élèves libres. Art. 4. — Ne peuvent être admis comme élèves réguliers que les can- didats titulaires soit du diplôme de l'Institut National agronomique, des Écoles Nationales d'agriculture, de l'École d'horticulture de Versailles, de lEcole d'agriculture coloniale de Tunis, «de l'Ecole coloniale, de ri-lcole centrale des Arts et Manufactures, de l'Ecole de physique et de chimie, soit de la licence ès-sciences naturelles ou ès-sciences physiques. Art. 5. — Les nombre des élèves réguliers à admettre est fixé chaque année par le Ministre des Colonies, après avis du Conseil d'administra- tion du Jardin Colonial. Les admissions sont prononcées par le Ministre sur la proposition du Conseil d'administration. Le programme des cours, l'emploi du temps et les règlements intérieurs seront fixés par arrêté du Ministre des Colonies, sur la proposition du Conseil d'admistration du Jardin Colonial. Art. 6. — Les élèves réguliers subissent : 1° à la fin du l*^"" semestre, 2° à la fin de l'année scolaire, un examen fait par les professeurs et portant sur toutes les matières enseignées pendant le semestre écoulé. Art. 7. — Un diplôme de renseignement supérieur de l'Agriculture coloniale est accordé à tout élève qui aura subi avec succès les épreuves théoriques et pratiques, et aura obtenu la moyenne fixée par l'arrêté ministériel à intervenir. Art. 8. — Tout élève régulier aura à verser des frais d'inscription fixés à 300 fr. pour l'année scolaire, et payables par semestre et d'avance. Art. 9. — Les élèves libres sont admis par autorisation du Ministre et sur avis favorable du Conseil d'administration du Jardin Colonial. Ils devront produire : Un extrait de leur acte de naissance ; Un extrait de casier judiciaire; Un certificat de bonne vie et mœurs. Art. 10. — Les élèves libres seront admis à suivre les cours, les appli- cations, les exercices de laboratoires, les travaux pratiques. Ils auront à verser un droit d'inscription annuel de 300 fr. payable par semestre. Ils pourront être admis dans le cours de l'année scolaire. Dans ce cas, les droits d'inscription seront décomptés par semestre. Art. 11. — Les élèves libres sont soumis aux règlements applicables aux élèves réguliers. 4 DOCIMEMS OFFICIELS lu cerLificat d'éludés pourra leur être délivré s'ils ont suivi renseigne- ment pendant tout le cours de l'année scolaire et si, sur leur demande, ils subissent un examen à la fin de l'année scolaire. Us devront dans ce cas faire connaître leur intention de concourir pour l'obtention de ce certificat dès leur entrée à l'Ecole. Aht. 12. — Le Ministre des Colonies est chargé de l'exécution du pré- sent décret, qui sera publié au Jourmd Officiel de la République française et inséré au Bulletin des lois et au Bulletin Officiel du Ministère des Colonies. Fait à Paris, le 29 mars 1902. Emile Loubet. Par le Président de la République, Le Ministre des Colonies. Albert Decrais. ARRETE LE MINISTRE DES COLONIES Vu le décret du 28 janvier 1899 instituant un Jardin d'Essai Colonial, \u le décret du 5 mai 1900 portant modification du titre du Jardin d'Essai Colonial et déterminant ses attributions, Vu la loi de finances du 31 décembre 1900, Vu le décret du 29 mars 1902 instituant au Jardin Colonial un ensei- gnement agricole sous le nom de « Ecole Nationale supérieure d'Agri- culture Coloniale ». Après avis du Conseil d'administration du Jardin Colonial, Arriîte : Article i'henueiî. — L'enseignement donné à l'Ecole Nationale supé- rieure d'agriculture coloniale comporte dix chaires savoir : Agriculture coloniale ; Culture des plantes alimentaires; Botanique coloniale ; Technologie coloniale ; Zootechnie coloniale; Génie rural colonial ; Pathologie végétale ; Hygiène coloniale ; Economie rurale dans ses applications aux Colonies françaises ; Administration coloniale. Art. 2. — L'emploi du temps est réglé ainsi qu'il suit ; ARRÊTÉ Ô Le malin. Arrivée des élèves à 8 h. 1/2. Travaux de culture de 8 h. l/'2 à 10 heures. Cours en amphithéâtre de 10 heures à 1 1 h. 1/2. L'après-midi. Travaux de laboratoires et exercices pratiques de 2 heures à 5 heures. Le jeudi l'après-midi les travaux de laboratoires seront remplacés : 1" Par des excursions, visites d'usines, d'établissements agricoles et horticoles, de pépinières, de concours, d'expositions ; 2° Par une conférence faite par des voyageurs ou des agents de retour des Colonies. Fait à Paris, le 20 mai 1902. Albert Decrais. ARRETE Vu le décret du 28 janvier 1899 instituant un Jardin d'Essai Colonial, Vu le décret du 5 mai 1900 portant modification du titre du Jardin Colonial et déterminant ses attributions. Vu la loi de Finances du 31 décembre 1900, Vu le décret du 29 mars 1902 instituant au Jardin Colonial un ensei- gnement agricole sous le nom de « h'cole Nationale supérieure d'Agri- culture coloniale ». Après avis du Conseil d'administration du Jardin Colonial, Arrête : Article unique. — Sont nommés professeurs à l'École Nationale supé- rieure d'agriculture coloniale. Chaire d'Agriculture coloniale : M. Dybowski, Inspecteur général de l'Agriculture coloniale, Professeur à l'Institut National agronomique, Directeur du Jardin Colonial. Chaire de Culture des plantes alimentaires : M. Chalot, Directeur du Jardin d'Essai de Libreville. Chaire de botanique coloniale : M. Dubard, licencié es sciences, chef du service botanique au Jardin Colonial. Chaire de technologie coloniale : M. Paul Ammann, Ingénieur agronome, chef du service chimique au Jardin Colonial. b DOCUMENTS OFFICIELS Chaire de zoolechnie coloniale : M. Malèvre, Professeur à rinslilut national agronomique. Chaire de Génie rural colonial : M. Max. Ringolmann, Directeur de la Station d'Essai de machines, Professeur à l'Inslilul national agronomique. (Chaire de Pathologie végétale : M. le D' Delacroix, Directeur de la Station de Pathologie végétale, maître de conférences à l'Institut national agronomique. Chaire d'Hygiène coloniale : M. le D"^ Loir, ancien Directeur de l'Institut Pasteur de Tunis. Chaire d'I^conomie rurale appliquée aux Colonies : M. Daniel Zolla, Professeur à l'h^cole Nationale d'Agriculture de Gri- gnon et à l'Ecole des Sciences politiques. Chaire d'Administration coloniale: INI. André You, Sous-Directeur au Ministère des colonies. Professeur à l'hxole coloniale. Fait à Paris, le 20 mai 1902. Albert Decrais. RAPPORT AU PRÉSIDENT DE 1,A Rlh'ini.IQrE FRANf^AISE Monsieur le Président. L'élude des questions agricoles ayant pour nos Colonies une impor- tance chaque jour plus grande, il in 'a semblé qu'il pourrait être utile d'élargir la compétence du Conseil de perfectionnement des .Jardins d'I'^ssai des Colonies, créé par arrêté du 29 janvier 1899, et de le trans- former en un conseil technique de l'Agriculture coloniale. Cette assemblée aurait pour mission de s'occuper de toutes les questions dont la solution pourra contribuer au développement et à la prospérité agricole de nos possessions d'outre mer et que j'aurais intérêt à soumettre à son examen. Le conseil technique, composé de vingt-cinq membres et de deux vice- présidents, représentant les départements de l'Agriculture et de l'Instruc- tion publicpie, se réunirait au moins deux fois l'an sous ma présidence. J'ai fait préparer dans ce but le projet de décret ci-joint que j'ai l'honneur de soumettre à votre haute sanction. Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'hommage de mon pro- fond respect. Le Ministre des Colonies, Albert Decrais. DECRET / DÉCRET LE PRÉSIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE Vu le décret du '28 janvier 1899 instituant un Jardin d"Essai Colonial, Vu l'arrêté du '29 janvier 1899 instituant auprès du Ministre des Colo- nies un conseil de perfectionnement des Jardins d'Essai coloniaux, Vu le décret du 5 mai 1900 portant modification du titre du Jardin d'Essai Golonialet déterminant ses attributions, Vu la loi de finances du 31 décembre 1900. Sur le rapport du Ministre des Colonies, Décrète : Article premier. — Il est institué auprès du Ministre des Colonies aux lieu et place du Conseil de perfectionnement des Jardins d'Essais colo- niaux un Conseil technique de l'Agriculture coloniale. Art. 2. — Ce conseil, présidé par le Ministre des Colonies, comprend : l" Deux vice présidents : L'un désigné par le Ministre des Colonies, après avis du Ministre de l'Agriculture ; l'autre, le Directeur du Muséum d'histoire naturelle. Vingt-cinq membres répartis ainsi qu'il suit : Cinq membres représentant l'administration du Ministère des Colonies ; Cinq membres représentant l'administration du Ministère de l'Agri- culture ; Cinq professeurs du Muséum proposés paf l'assemblée des professeurs de cet établissement ; Dix membres choisis par le Ministre des Colonies. Art. 3. — Le Conseil technique de l'Agriculture coloniale donne un avis sur toutes les questions intéressant l'Agriculture coloniale en France et aux Colonies, qui lui sont soumises par le Ministre, notamment en ce qui concerne : L'enseignement de l'Agriculture coloniale, l'organisation des Stations agronomiques, des missions d'ordre agricole ou économique ; Les mesures capables de développer les cultures dans les Colonies telles que : organisation de Jardins, et Stations d'essai, concours, primes aux plantations ; Les questions d'élevage, d'apiculture, de sériciculture, de la protection des animaux, de la chasse et de la pèche ; Les dispositions relatives à l'aménagement, la conservation et à l'ex- ploitation des forêts, des reboisements ; Les mesures à prendre en vue d'enrayer les épizooties, ainsi que la pro- pagation des maladies des plantes. 8 IJOCIMKMS (UFICIKLS Akt. 1. — Les vice-présidents et les membres du Conseil technique de l'Agriculture coloniale sont nommés pour cinq ans par le Minisire des (Colonies. Le conseil devra se réunir an moins deux fois dans le cours de Tannée. AiiT. 5. — Le Minisire des Colonies est chargé de l'exécution du pré- sent décret qui sera publié au Journal Officiel de la République l'ran- çaise et inséré au Jiiilletin officiel du Ministère des Colonies. Fait à Paris, le 1>H mai lUOi). l']mile LouBET. Par le Président de la République, Le Minislre des Colonies, Albert Decrais. AFRIQUE OCCIDENTALE Journal officiel du Sénégal et Dépendances. DÉCISION porl.iiil nomination d'une Commission à l'effet de procéder à l'examen des demandes de subsides comme primes à Vagricullure. Le Gouverneur général de l'Afrique occidentale française. Ollicier de la Légion d'honneur, Vu l'ordonnance organique du 7 septembre 1840 ; Vu les prévisions budgétaires du service local pour l'exercice 190"2, Décide : Art. l*"". — Une Commission composée de : MM. le Secrétaire général, président ; Landard, trésorier-payeur ; D'Krneville ((jermain),]n'opriétaire, ancien président du Conseil général ; Poyard, conseiller général ; Ducoux, pharmacien major de 2* classe des Colonies; Maroleau, Directeur du Jardin d'Essai de Sor, Est nommée à l'eU'et de procéder à l'examen des demandes de subsides qui seront présentées à l'administration avant le L'"^ juin llMt'2, en vue de la répartition du crédil de 15.000 francs, inscrit au Budget local de l'exercice en cours sous la rubri(|ue : Primes à l'agriculture. Art. 2. — Cette commission est chargée, en outre, de donner son avis sur le mode à adopter à l'avenir pour la répartition des primes à l'agri- culture inscrites annuellement au budget local. NOTES SUR l'agriculture AU SOUDAN 9 Art. 3. — Le Commandant supérieur des troupes et le Secrétaire géné- ral du Gouvernement sont chargés de l'exécution de la présente décision qui sera enreg-istrée et communiquée partout où besoin sera. Saint-Louis, le 29 avril 1902. E. RoUME. Par le Gouverneur général, Le Général, Commandant supérieur des troupes, Par ordre Le Chef d' état-major. Pineau. Le Secrétaire général du Gouvernement du Sénégal. A. Lévèque. NOTES SUR LE SERVICE DE L'AGRICULTURE AU SOUDAN Le service des cultures dans les territoires du Haut-Sénégal, Moyen- Niger est assuré par un ingénieur agronome qui a le titre de Directeur des Stations agronomiques, résidant à Koulikoro, et par trois agents de culture en service à la ferme école de Bandiougoula et aux pépinières de Kayes. Le rôle de Directeur des Stations agronomiques est d'étudier ration- nellement la culture des plantes économiques indigènes ou importées dans la Colonie, de rechercher et de propager les améliorations à appor- ter dans les méthodes employées, d'introduire dans la colonie les végé- taux utiles exotiques qui seraient capables d'y vivre et de répandre ensuite dans l'intérieur du pays les végétaux qui ont réussi dans les Jardins et Champs d'Essai. Dans ce but, le Directeur communique directement avec les Administra- teurs, les Officiers, les Colons qui lui demandent des conseils et leur fait des expéditions de plants et de graines utiles. Je suis heureux, d'ailleurs, de constater ici que, parmi nos fonction- naires et les militaires, M. Vuillet, le Directeur des Stations agrono- miques, a trouvé souvent d'utiles et consciencieux collaboraleure. La première station agronomique du Soudan fut établie à Kati en 1898, sous la direction de M. Jacquey. Sans rappeler ici les intéressants rapports ou notices qui furent rédi- gés à la suite des observations faites par MM. Jacquey et Wiillet dans le 10 DOCl MENTS OFFICIELS jardin de Kati, il n'esl pas sans inlérèl de faire connaître qu'au cours de Tannée 1901 la station agronomique a pu assurer 90 envois de graines, d'arbres fruitiers ou de plantes économiques qui lui étaient demandées par les jardins de Goundam, Kita, Banamba, Dori, Tombouclou. Bobo- Dioulasso, Bougouni, Koutiala, Gao, Bamba, San, Sansanding. Pendant la même période elle expédiait par porteurs dans div^erses directions des caisses renfermant de jeunes plants de manguiers, citron- nier, vigne française, goyavier, pomme- cannelle, ananas, fraisiers, des boutures de manioc doux, de barbadine, de mûrier blanc, des tubercules de choux caraïbe et darrow-root. Colons et fonctionnaires commencèrent à apprécier l'avantage de la création des stations agronomiques au Soudan. Mais bientôt on s'aperçut que le Jardin de Kati devenait insuffisant, et le Directeur, dans un rapport au Délégué du Gouverneur général, faisait remarquer que la station étant située sur le bord dun petit marigot qui ne coule que pendant l'hivernage et les premiers mois de la saison sèche, on y manquait deau pendant toute une partie de l'année. Il ajoutait : « Le marigot est bordé d'une bande de terre argileuse assez riche en humus qui malheureusement est entièrement inondée au moment de l'hivernage. Au delà de cette bande de terre, de chaque côté, le jar- din s'étend sur des pentes argilo-ferrugineuses très peu fertiles et pour l'arrosage desquelles on est obligé d'aller chercher l'eau avec des arro- soirs aux puits situés dans le bas-fond, au bord du marigot, procédé coû- teux qui ne permet pas de faire des cultures de saison sèche, ni de donner aux pépinières l'importance désirable ». Après avoir insisté sur la mauvaise composition du sol, il faisait remar- quer en dernier lieu que les pâturages faisaient absolument défaut et que Kati était absolument impropre à l'élevage des bestiaux. Dans ces conditions, je n'hésitai pas à décider en principe, dans linlé- rêt de la colonie, la création d'une nouvelle station agronomique dans un centre à choisir où se trouveraient réunies de meilleures conditions de réussite. M. Vuillet fut chargé d'étudier et de rechercher l'emplacement du nouvel établissement à créer. L'emplacement fut trouvé dans le Bandiouyonla entre la rive gauche du Niger, et une colline nommée Banbougou à deux kilomètres de Kou- likoro, c'est-à-dire en un point de communications faciles avec les con- trées des rives du Sénégal par le chemin de fer et avec les régions du Niger par le cours du fleuve. Après étude des vents régnants et analyse des terres, il fut décidé qu'on y établirait définitivement une station agronomique et une ferme école. L'emplacement choisi a une superficie d'environ 75 hectares qui com- NOTES SUR l'agriculture AU SOUDAN H prennent approximativement 25 hectares d'excellente terre fertile et facile à travailler, convenant à toutes les cultures. 25 hectares de terre de rizière que l'on peut facilement assainir en les drainant et en les chaulant avec de la chaux faite sur place avec les, coquilles d'huîtres du Niger. 25 hectares de terre sablonneuse qui deviendront aisément des pâtu- rages d'excellente qualité pour nos bestiaux qui trouveront également ample pâture sur la colline qui limite au Nord l'espace choisi. L'établissement se compose des logements des Européens (bureaux, laboratoire, etc..) de la ferme école avec logement des gardiens, des jardiniers, des enfants, les magasins, les étables, les écuries des animaux reproducteurs, etc.. Tous ces établissements sont en construction, à une certaine distance les unes des autres, à 500 mètres en arrière de la petite rivière qui traverse la station, au flanc de la colline de N'Doubougou, loin des émanations et des moustiques des rizières et de la plaine. En dehors des jardiniers et des manœuvres pour les travaux de la terre et des soins à donner aux bestiaux, la ferme école aura pour élèves vingt jeunes gens recrutés parmi les enfants des écoles de la colo- nie, pour l'entretien desquels le budget local prévoit une indemnité jour- nalière de 40 centimes par jour et le plus grand nombre possible d'enfants abandonnés ou réfugiés. Tandis que nous apprendrons aux premiers des méthodes rationnelles de culture qu'ils apporteront au bout de trois ans d'études dans leurs villages d'origine où on comprendra bien vite combien nos procédés sont supé- rieurs à la routine séculaire, nous assurerons en même temps aux seconds des moyens d'existence pour l'avenir en leur donnant un métier utile. Ce sera, je crois, Une bonne pépinière où nous recruterons nos jardiniers pour les potagers et les vergers des postes et où les colons pourront uti- lement se procurer des travailleurs expérimentés. Ainsi comprise, notre ferme école donnera, je l'espère, d'heureux résultats, et peut-être pourrons-nous, de cette façon, propager rapidement l'emploi de la charrue et les principes de fumure, d'émondage, qui, jusqu'à ce jour, sont complètement ignorés de nos indigènes. Les pro- duits agricoles deviendront ainsi de meilleure qualité, et les noirs ne tarderont pas à s'apercevoir que la récolte est annuellement plus abon- dante. Mais l'action de notre station de Koulikoro s'étendra encore davantage. Depuis dix-huit mois, nous n'avons pas cessé de poursuivre avec éner- gie tous les marchands d'esclaves qui venaient « s'approvisionner dans la boucle du Niger de bétail humain qu'ils envoyaient ensuite vers les pays maures et le Maroc ». Nous avons aussi libéré depuis cette époque des milliers d'esclaves 12 DOCUMENTS OFFICIELS auxquels nous avons donné asile dans nos villages de liberté qui se sont ainsi accrus dans de notables proportions. Un village de liberté a donc été créé auprès de la sta'tion de Kouli- koro. A l'arrivée, nous donnons aux nouveaux venus quelques semences de mil et de riz qui nous sont rendues après les premières récoltes et deux chèvres ou brebis par feu. Il nous a semblé que c'était la meilleure façon d'assurer nos protégés contre le vagabondage dans lequel ils seraient sûrement tombés au bout de quelque temps. Le Directeur de la station agronomique aura pour mission de veiller à leurs cultures, les surveillera, leur montrera comment ils doivent pro- céder désormais et, au retour, nous trouverons chez eux une main- d'œuvre nombreuse et à bon marché quand nous aurons à entreprendre quelque grand travail de défrichement ou d'irrigation. C'est là la seule charge que nous leur imposerons pendant leurs premières années d'existence libre : obligation de travailler pour nous (moyennant un léger salaire) quand nous aurons besoin de bras. En leur assurant l'existence matérielle peut-être pourrons-nous aussi leur inculquer le goût de l'amour du travail. Déjà M. Vuillet s'est mis a l'œuvre, secondé par l'Administrateur du cercle de Bamako qui lui prête tout son concours. Les questions délevage ne nous laissent pas non plus indifférents, car nous installons dans la ferme école une jumenterie, une vacherie, une bergerie et porcherie formées avec de beaux spécimens de nos races animales soudanaises, où nous voulons essayer d'améliorer les espèces par la sélection des animaux reproducteurs, par une alimentation et des soins appropriés et peut-être même par des croisements avec de beaux spécimens des races importées. Dans ce but, le Directeur a été autorisé à choisir dans les abondants troupeaux du service local à Ségou les plus beaux animaux qui lui paraîtront utiles pour remplir le but que nous poursuivons, et quatre étalons du Sahel et du Macina ont été envoyés à Koulikoro, Tel est le plan général de l'cruvre que nous poursuivons à cette ferme école. Je dois ajouter qu'à Kayesetà Bafoulabé,la Colonie entretient, sous la direction d'un agent de culture, de vastes pépinières, où non seulement nous trouvons les arbres nécessaires pour planter dans les rues, avenues et places publiques, mais où nous délivrons gratuitement des plants d'arbres fruitiers, d'ombrage ou d'ornement à tous les colons qui nous en font la demande. Peut-être en poursuivant avec méthode cl persévérance le but que nous nous sommes proposés, pourrons-nous arriver à reboiser un peu les NOTES SUR l'agriculture AU SOUDAN l3 environs de nos centres dont les arbres ont été généralement très hâti- vement abattus, lors de notre première occupation, pour faire face aux premiers besoins et pour construire des habitations. Sans parler ici des jardins potag^ers et des vergers qui sont entretenus par les soins de l'Administration qui inscrit à son budget la solde des jardiniers et Tachât des graines potagères, je citerai particulièrement les petits jardins d'essais de Goudam, dans le premier territoire militaire et celui de Sansanding, où le fama Mademla, secondé et guidé par un adjoint des alîaires indigènes, M. Coviaux, a fait de très intéressantes entreprises de cultures raisonnées d'indigo, de tabac et de coton. Je ne terminerai pas la première partie de cette étude sans mentionner qu'à Bobo-Dioulasso, nous avons accordé au commandant du 2*^ terri- toire militaire des crédits spéciaux pour encourager les indigènes de cette région dans laquelle la liane gohine pousse en abondance, à recueillir le latex avec le plus grand soin, leur montrer comment on doit préparer le caoutchouc. Ainsi instruits, connaissant la valeur des lianes qu'ils pos- sèdent sur leurs terrains, il est probable que peu à peu ces noirs nincise- ront que raisonnablement les précieux arbustes, qu'ils cesseront de défri- cher par le feu les terres utiles à leurs cultures et que connaissant la valeur d'un produit proprement et honnêtement préparé sans impureté, ils viendront chaque année apporter leurs récoltes aux comptoirs européens de Bobo-Dioulasso. Mais il y a plus, il faut prévoir l'avenir et dans ce but, nous devons les inci- ter beaucoup .pour essayer le reboisement en lianes à caoutchouc unies à certaines essences d'arbres utiles de la brousse qui leur serviraient de support et leur permettraient un complet développement. Pour arriver à ce résultat chaque année, à l'époque favorable, le Com- mandant du teiTitoire invite les chefs à lui envoyer des jeunes gens qui, pendant une quinzaine de jours, sont initiés aux soins à donner aux plantes caoutchoutifères à la récolte et à la préparation du latex. Les frais qui en résultent sont peu élevés, car ils ne sont guère autres que ceux de la nourriture de ces indigènes pendant leur séjour à Bobo- Dioulasso, soit quinze jours ou trois semaines par an. Je ne doute pas qu'on s'aperçoive bientôt des heureux résultats de cette mesure. — Nous comptons la compléter plus tard, en créant de ce côté un établissement analogue à celui de Koulikoro. La flore, les conditions climatériques du 2*" territoire militaire sont tellement différentes du reste de la colonie que cette création peut-être considérée comme indispensable, elle ne doublera pas, mais complétera au contraire l'œuvre que nous poursuivons au point de vue agricole. Le Délégué du Gouverneur Général clans le Haut Sénégal et Moyen Niger, Pont Y. Kayes, le 9 avril, 1902. ii DOCUMENTS OFFICIELS AU SUJET DE LA STATION AGRONOMIQUE DE KOULIKORO Le Délégué du Gouverneur général dans les lerriloires du Ilaul-Séné- gal el Moijen \iger à M. le Gouverneur général de l'Afrique occidentale française à Sainl-Louis. Monsieur le Gouverneur général, J'ai l'honneur de vous rendre compte ci-après de létal actuel des tra- vaux d'organisation de la station agronomique de Koulikoro, auxquels procède en ce moment M. Vuillet, ingénieur agronome. Cet intéressant établissement qui est destiné à centraliser les essais tentés jusqu'ici simultanément sur divers points de la Colonie, notam- ment à Kati, est situé sur la rive gauche du Niger, à trois kilomètres en aval de Koulikoro et occupe une superficie d'environ 400 hectares. Il doit se diviser en trois sections : 1° Une ferme école ; 2° Un village de culture modèle; 3° Un jardin botanique. Le but de la ferme école est de former sur place des agriculteurs à nos méthodes rationnelles de culture et d'élevage, de favoriser l'introduction de cultures nouvelles et d'améliorer en même temps les cultures indi- gènes déjà existantes. Dans ce but, une éducation pratique y sera donnée, sous la direction de jardiniers déjà instruits, à une vingtaine de jeunes gens provenant des diverses écoles de la Colonie et manifestant des aptitudes particulières pour les travaux du sol. Cette ferme école ne sera donc en réalité qu'un vaste champ d'expériences où seront cultivées : 1° les plantes alimen- taires indigènes (mil, maïs, riz, patate, igname, manioc, etc.), et les arbres fruitiers (orangers, citronniers, bananiers, etc.) ; '2" les plantes industrielles indigènes (cotonniers, indigotiers, arachides, tabac, sorgho sucré, etc, ; li" certaines autres plantes indigènes ou exotiques à usages divers (karité, caïlcédrat, tamarinier, liane gohine, etc.) I^a ferme école s'occupera aussi de l'élevage du bétail et de l'améliora- tion des races autochtones à l'aide de croisements judicieux entre les meilleurs types de chaque espèce. Les races chevaline, bovine, ovine, caprine, etc., pourront fournir de bons échantillons. Celle question de l'élevage se présente sous un aspect particulièrement intéressant dans un pays comme le Soudan où une grande partie de la population (en particulier les Peuhls et les Maures) possède un vif attrait pour tout ce qui touche le bétail. Le village de culture modèle sera formé tout d'abord des jardiniers de la station, de leur famille et des élèves dont il vient d'être parlé. Il rece- NOTES SUR l'agriculture AU SOUDAN 15 vra en outre un certain nombre d'anciens captifs libérés envoyés par les commandants des divers cercles. On s'efforcera de les attacher à la station en leur offrant, dès l'abord, des avantages matériels tels que : habitations, fourniture gratuite d'instruments de travail, de petit bétail et de graines à semence. Ils pourront peu à peu en devenir propriétaires ainsi que de certaines parties du sol cultivées par eux dans des conditions qui seront déterminées ultérieurement lorsque l'expérience aura permis de reconnaître quel système il convient d'appliquer. . Les plus intelligents de ces indigènes pourront être progressivement habitués à l'usage de la charrue et de nos instrumente aratoires auxquels ils donneront certainement la préférence le jour où ils seront convaincus qu'avec moins de peine ils obtiennent des résultats incontestablement supérieurs à ceux que peuvent donner les outils primitifs dont ils se sont servis jusqu'ici. Dans l'avenir, d'autres villages de culture pourront également être établis sur divers points, dans des conditions analogues, et il est permis d'espérer que l'application de ce système métholique de mise en valeur du sol sera d'un bon profit pour la Colonie et pour les indigènes eux- mêmes. Enfin la Station agronomique comprendra un jardin botanique dans lequel seront réunies en pépinières, aussi bien pour l'étude que pour la diffusion, des collections aussi complètes que possible des plantes exis- tant déjà dans le pays ou pouvant y être acclimatées. Tel est dans ses grandes lignes, Monsieur le Gouverneur général, sans parler des jardins secondaires existant déjà à Kayes, Dinguira, Bafoulabé, Kata et Kati, qui devront être conservés, le programme adopté pour l'accomplissement duquel je me permettrai de solliciter votre haute direction. Dès maintenant, sous l'active impulsion de M. Vuillet, secondé par l'administrateur du cercle de Bamako, pour la formation du premier vil- lage de culture, la construction des bâtiments de la Station est en bonne voie d'achèvement. Des étalons ont été expédiés de Nioro. Le cercle de Ségou doit fournir de beaux animaux pris dans les troupeaux provenant de l'impôt. Les pirogues nécessaires aux transports sur le Niger ont été commandées à Djenné. Enfin, d'une manière générale, les administrateurs des différents cercles ont reçu instruction de prêter leur concours à cette œuvre qui intéresse à un si haut point l'avenir économique de nos territoires et pour l'accomplissement de laquelle le budget autonome est prêt à s'impo- ser tous les sacrifices nécessaires. J'ai l'honneur d'être, etc.. Peuvergne. 16 DOCUMENTS OFFICIELS NOTE SUR LA CULTURE DU COTON Dans la plupart des cercles du Haut Sénégal, Moyen Nig-er, le coton croit prcsc[ue spontanément. Il n'y a guère que dans les ter- rains de Textrênie nord que l'on ne trouve point de cotonniers. Les indigènes donnent peu de soins à ces plantations, aussi peut-on dire que la plupart des défauts qui sont reconnus dans nos cotons indigènes (étoiles, boutons, taches d'huile, rouille) sont dus au manque de culture. En général, en etTet, point de labour, point d'arrosage ou d'irri- gation ; la graine est semée dans un coin du village, l'arbuste croît et se développe comme il peut, sans être jamais taillé ou émondé. Cependant, dans quelques cantons habités par les Foulbès, où l'on fume les terres et où l'on remue le sol assez profondément, on peut constater déjà une qualité bien supérieure au point de vue de la longueur de la soie et de l'éclat de la blancheur du coton que dans les cantons bambaras où ces soins ne sont pas pris. Il n'est donc pas douteux, et les expériences faites dans nos jardins le prouvent surabondamment, que lorsqu'on aura persuadé aux indigènes la nécessité de renouveler leurs plants, nous aurons alors un coton bien supérieur. Il faudra leur apprendre encore à faire la sélection des graines pour les semis, à pratiquer le binage et l'écimage, et surtout veiller à ce que la cueillette des capsules soit faite en temps voulu, pour éviter les taches de rouille. En tenant compte de ces recommandations, nos indigènes obtien- dront et livreront au commerce un coton qui sera sûrement prisé et recherché sur les marchés d'Europe. Quoi qu'il en soit, la (jualité obtenue actuellement a pu être ven- due sur les marchés du Havre à raison de 41 fr. oO les 50 kilos. Actuellement, on achète sur place le coton non égrené au prix de 0 fr. 20 en moyenne le kilo, mais il n'est pas douteux que ce prix baissera beaucoup, à mesure que les cultures s'étendront dans la colonie. Les pays ([ui semblent les plus propicc's à cette culture sont les contrées riveraines du Niger et du Bani. Les semences sont faites au mois de juin, dès les premières pluies, et la récolte au mois de janvier suivant. Note ^ur la cuLtuRË du cotoN {'1. Je reproduirai ci-après, à titre de renseig-nement, rappréciation suivante donnée par M. l'Inspecteur général de l'Agriculture sur ce produit : Aspect laineux, toucher rude, couleur homogène, possède des partie blanches peu soyeuses, d'autres fortement beurrées ou rous- sâtres. Rendement : 25 "/o du. poids total. Moyenne générale des fibres : 24 millimètres; maximum : 29. — Courte soie comparable (comme long-ueur seulement) aux sortes indiennes (Broach-Madras). Je classe entre les soies fortes et les soies ordinaires (à côté des Broach et des Weston Madras). Graines : deux types, graines nues et g^raines velues, ces der- nières les plus nombreuses. Tel est actuellement l'état de notre coton soudanais. J'estime que ces résultats peuvent être considérés comme très satisfaisants; mais il faut ol^tenir mieux; il faut songer que dans deux ans bientôt le chemin de fer atteindra le Niger et que l'exploi- tation des produits des rives de ce grand fleuve deviendra facile et aisée. Nous devons nous appliquer pendant ce temps à perfection- ner les qualités existantes. Déjà des essais ont bien été tentés pour l'acclimatement, sur nos sols, des cotons à longue soie de Virginie et de Géorgie, etc. Mais aucune de ces tentatives n'a donné les résultats qu'on pou- vait espérer. Les quelques pieds des espèces importées dépérirent bientôt sous le climat sec de nos pays et ne donnèrent par la suite que de maigres capsules de textile dont la nervosité était bien infé- rieure à celle du coton indigène. C'est ce coton que nous voudrions voir devenir de qualité meil- leure en assurant aux plants des soins appropriés et suivis. Le Délégué du Gouverneur Général clans le Haut Sénégal et Moyen Niger PONTY. Bullelin du Jardin colonial. 18 DOCUMENTS OFFICIELS GUINÉE FRANÇAISE Journal o/jficiel de la Guinée Française. DÉPÊCHE MINISTÉRIELLE parlant instructions sur le mode d'envoi des fruits adressés au Jardin (Jolonial. Minislèrc des Colonies, Lispectioii i;énéralc de rAgricullure coloniale. Paris, le 8 mars 1902. Monsieur le Gouverneur, J'ai l'honneur de vous accuser réception des produits dont vous m'annonciez l'envoi par votre lettre n" 23 du 27 janvier. En outre des produits secs qui sont bien parvenus, cet envoi comprenait trois régimes de bananes et une caisse contenant dix ananas. Les ananas, bien qu'emballés d'une façon un peu sommaire, sont arrivés en parfait état, un seul fruit était pourri. L'envoi de ces fruits suggère les observations suivantes : Les fruits sont très beaux et seraient d'un placement facile dans le com- merce parisien qui pourrait en donner un prix de gros de 3 à 4 francs la pièce rendu à Paris. Cependant seules les variétés à fruits globuleux et lisses du type baronne de Rothschild seraient acceptées par le commerce. La vai'iété Abacaxis dont il a été envoyé des plants par les soins du Jardin Colonial est également très recherchée. Par contre la variété Enville ou pain de sucre ne serait pas facilement vendable. L'emballage devrait être fait avec des soins particuliers qui sont les suivants : Le fruit sera tout d'abord entouré de coton cardé ou, tout au moins, d'une feuille de papier souple, puis les feuilles de la base de la plante qu'il convient de conserver, la plante ayant été coupée parle bas et non à hauteur du fruit, sont relevées de façon d'entourer le fruit et attachées avec un brin de raphia. Enlin le tout est entouré de papier et emballé dans une caisse avec du foin ou des feuilles sèches de maïs ou de bananiers. Pour ce qui est des régimes de bananes il convient de dire tout dabord (|u'ils ont été jugés très beaux. Les fruits sont gros, et il serait préférable de ne pas les voir acquérir un volume j)lus tléveloppé. Cet envoi ne permettra pas de se rendre un compte absolu de la qualité des fruits car ils ont soulfert du froid. Cependant il a été possible de les présenter à la Société nationale d'horticulture de France. Des i^égimes de cette dimension pourraient être vendus à Paris de 8 à 12 francs sui- vant le cours, ce qui donnerait probablement une valeursur place d'envi- ron 2 francs ou 2 fr. jU net. RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 19 Au total, s'il est utile de renouveler ces essais, afin de bien se rendre compte des données de la question, on peut dès maintenant considérre que l'importation sera probablement possible, dans des conditions très favorables pour le producteur. Veuillez agréer, ete. Le Ministre des Colonies. A. Decrais. DAHOMEY RAPPORT AGRICOLE A Porto-Novo, trois champs sont spécialement réservés aux divers essais intéressant l'agriculture des Colonies; chacun d'eux me paraissant destiné à des essais différents, je les décrirai à part. Je ferai suivre ces descriptions des notes nécessaires pour savoir : ce qui a déjà été fait et ce qu'il me paraît logique d'entreprendre, sans préjuger des circonstances nouvelles et inconnues qui pourraient venir transformer le plan d'opérations que je me suis tracé. Il est un fait qui ne peut être oublié; au Dahomey, rien n'a encore été fait au point de vue agricole. Jardin public. — Presque au centre de la ville européenne, en face l'Hôtel du Gouvernement, se trouve un jardin public installé, eh 1895, par M. Chalot, directeur du Jardin d'essai de Libre- ville. Le terrain, d'une superficie de 1 hect. 50, est sillonné d'allées perpendiculaires séparant des carrés et rectangles de 20 à 40 mètres de côtés. La clôture est faite de j)iquets, de divers ficus et de ricin, tous développés et formant haie vive. Comme les surfaces voisines, le sol et le sous-sol sont formés d'une argile rouge provenant de dépôts quaternaires. Afin de modifier les propriétés de trop grande compacité, de forts amendements sous forme de sable siliceux ont été importés et ont changé avantageusement la composition du sol de certains carrés. La caractéristique de tous les terrains des environs de Porto-Novo est leur très grande pauvreté en chaux. Ce jardin public a été lors de sa formation planté d'essences arbustives, dont certaines ont déjà atteint de très fortes dimensions. Des Manihot Glaziovii couvrent le 1/5 de la surface de ce terrain et poussent en masse compacte et vigoureuse ; âgés de 4 ans à peine on ne peut encore donner la note exacte de leur valeur au point de vue de la production du caoutchouc. ^0 bOCUMENTS OFFICIELS Les essais d'incisions tentés ne sont pas d'un bon présage pour l'avenir de cette plante dans la colonie; le latex, quoique très riche, s'écoule en trop faible quantité pour permettre une exploitation de ces arbres. En divers points des boutures de llcus divers avaient été faites ; mais les arbres trop jeunes encore pour sup^iorter les saignées ne nous permettent aucune appréciation. Divers gommiers commencent à laisser exsuder des gommes liaraissant de bonne qualité ; cette année, des tableaux comjiaratifs sur leur production pourront je l'espère être commencés. Cinq carrés sont plantés en caféiers de Libéria très bien caracté- risés par les glandes qui se trouvent à l'intersection des nervures secondaires avec la principale. Ces arbres seraient de très belle venue ; mais confiés depuis plusieurs années à des indigènes incom- pétents, ils étaient lors de mon arrivée aux 3/4 desséchés par le très grand nombre de gourmands qu'on avait laissés se développer. Des Anona rcticiilata poussent eii des points très divers donnant des fruits généralement attaqués par une larve qui les fait se durcir et se décomposer sur la plante avant maturation. Quelques Anona muricata et squamosa poussent assez vigou- reusement, mais donnent peu de fruits. A signaler encore comme arbres fruitiers se trouvant dans ce jar- din : un grand nombre de papaïers [Carica papaya), quelques man- guiers, divers goyaviers, des avocatiers, des cerisiers de la Marti- ni({ue, des bananiers, des ananas de variétés diverses, un arbre à pain, des citrus divers (orangers, mandariniers et citronniers), de très beaux jujubiers. Parmi les autres escences arbustives se trouvant réunies sur cette petite surface : 2 très beaux canneliers, des rocouyers, des bois de campêche, 1 pied d'Adenanthera pavonina, plusieurs sabliers. Grâce aux puits, munis de fortes pompes, installées là par M. Chalot, j'ai pu établir quelques pépinières dès mon arrivée; pépi- nières dont les produits serviront bientôt à remplir les divers jar- dins et parcs qui sont en préparation dans la colonie. Une serre Ward contenant de jeunes plants d'essences diverses m'avait été confiée lors de mon dé})arl du Jardin Colonial. Les plantes sont en général arrivées en 1^)11 état ; le tableau suivant montre les j)lantesqui ont facilement supporté la traversée en même temps que celles qui oui repris en pépinière. RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 21 NOM DES PLANTES Expédiée, en^^ïtlt ^«p"^'» Ananas Abacaxis •; . . 2 2 2 — Charlotte de Rothschild 2 2 2 — Sativa 2 2 2 Achras sapota 2 1 1 Arecha catechu 2 2 2 Cinchona led^^eriana 3 0 0 CofTea arabica. Var. de paddang 3 3 3 Coffea laurina 3 3 2 Gryptostegia i^^randiflora 1 l ] Eryobothrya Japonica 2 2 2 Hematoxylon campechianum ] 1 1 Flacourtia Ramontchii 2 2 1 Erythroxylon coca 2 0 0 Vanilla planifolia 2 2 2 Piper nigrum 4 1 1 Ravenala Madagascariensis 1 1 1 Ficus relig-iosa 1 1 1 Hevea Brasilieusis 1 0 0 Laudolphia Klainii 2 2 2 Castilloa elastica 6 4 3 Marsdenia verrucosa 2 2 1 Laurus camphora 2 2 .2 Cinnamomum Zeylanicum 2 2 2 Myristica Fragrans 2 2 2 Amomum citratum 1 1 0 Theobronia Cacao, var. Soconusco 2 2 1 — — var. Forastero 2 2 0 — — var. Calabacillo 2 2 1 — — var Amelonado 2 2 2 — — var. Criollo 2 2 1 Anona muricata 1 1 1 Mangifera Indica 2 2 0 Thea viridis (graines germées) 5 5 5 Le voyage, on le voit, n'a guère atteint que les Cinchonas, les Erythroxylon, l'Hévea et le 1/3 des Castilloa. Le repiquage que j'ai opéré sous un couvert d'anona reticulata a, comme toujours et malgré les soins pris, été néfaste pour les Cacaoyers, dont la moitié seulement ont repris. Hevea. — Par le même courrier que l'envoi du Jardin Colonial 00 DOCr.'MENTS OFFiriTXS sont arrivés 2o0 Ilevea brasilieiisis. Mis en pépinière dès leur arri- vée, à coté de Tenvoi précédent, ces jeunes hevea ont très bien repris et seront mis en place dans quclejue mois. L'avenir apprendra la valeur de cet arbre pour la production du caoutchouc au Dahomey. Kick.rin afrirami. — Le 10 juillet 1901, .300 Kickxia africana, venant du Lag-os où cette espèce donne paraît-il d'excellent caout- chouc, ni'étaient remis. Placés en pépinière dès leur arrivée, aucun d'eux n a fait défaut à la reprise. Cette jDépinière a été faite sous un demi couvert d'Anona reticulata ; les pieds situés en dehors du cou- vert se développent mieux et plus vigoureusement que les autres. Je dois ici signaler un petit lépidoptère crépusculaire dont la chenille a sérieusement compromis la vie de tous les jeunes Kickxia en pépinière. Une surveillance active de son mode de vie en plein air, l'observation et l'élevag-e en local m'ont permis de recueillir les renseig-nements suivants : Elevage. — Chenilles mises en bocaux le 10 décembre, l"""" bocal. Les chenilles reçoivent des feuilles de Kickxia comme nourriture. 2^ bocal. Les chenilles reçoivent des feuilles d'Anona reticulata. 3^ bocal. Les chenilles reçoivent des feuilles de vég-étaux très divers. Seules les chenilles ayant reçu des feuilles de Kickxia en nourriture ont vécu; ces larves de lépidoptères n'ont même pas essayé de se nourrir avec les autres aliments qui ont été distribués dans les autres bocaux. Conclure que cette chenille n'est point polyphag-e serait certainement exag-éré ; une question très intéressante pourrait d'ail- leurs se poser, d'où sont venues les premières chenilles? Je n'ai, en ellet, rencontré encore aucun Kickxia dans les environs de Porto-Novo. Les chenilles du l""" bocal après avoir subi deux mues se sont mon- trées à l'état de chrysalides entre le 18 et le 22 décembre. Le 25 du même mois j'obtenais l'insecte parfait. Observations en plein air. — L'atta(pie commence h être visible dès le 5 décembre 1!H)1 ; les chenilles se nourrissent uniquement du parenchyme des feuilles. C'est entre le 18 et le 22 décendur (pie, en dessous des feuilles, sous un replis, il est j)ossible d'apercevoir les chrysalides très g-rossièrement entourées de fils soyeux grossière- rement entremêlés. Les insectes parfaits se monirent entre le 25 et RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 23 le 30 du même mois; à cette époque il est impossible, malg-ré des recherches minutieuses, de trouver une seule chenille. Dès le l*^"" janvier, il est d'ailleurs possible par. une observation attentive de voir à la face inférieure de certaines feuilles de petits points blancs qui à la loupe se montrent un peu ovalaires, ce sont les œufs de notre insecte. L'éclosion se fait en quelques jours, si bien que dès le 5 janvier une nouvelle attaque commence à se produire bien plus dang-ereuse que la première puisque le nombre des che- nilles est incalculablement plus grand. Ayant déjà essayé des pul- vérisations, au jus de tabac mélangé à une faible émulsion de pétrole, sans obtenir de résultat j'ai dès le 7 janvier, ramassé toutes les feuilles attaquées, feuilles qui ont été mises au feu. La vie des jeunes Kickxia, ainsi dépouillés de leurs feuilles, a été sérieusement compromise ; actuellement, et g-râce à des soins spéciaux, de nou- velles pousses commencent à se montrer. Descinption de la chenille. A l'éclosion, non velue et n'a guère qu'uri demi-millimètre de long-. La chenille subit trois mues bien carac- térisées. Adulte, cette chenille atteint 2 centimètres de long, a cinq paires de fausses pattes; d'une coloration jaune paille, cette larve a la tête roug-e brique et porte de chaque côté du dos, longitudinale- ment, deux larg-es bandes brunes. La Chrysalide a une longueur variant de 1 cm. à 1 cm. 1/2, la coloration est jaune paille foncé. Le papillon a le corps de 12 à 1 o mm. de long; 20 à 25 mm. d'en- vergure. Antennes blanches et annelées avec leur base et le dessus delà tête dorés. Le pourtour des ailes supérieures formé d'une bande dorée ti'ès brillante; le corps et le reste des ailes sont d'un blanc velouté, les ailes ont quelques ponctuations dorées. Ce lépidoptère porte une trompe assez développée. Semis de Kickxia. — J'ai pu me procurer quelques graines de Kickxia ; semées le 14 janvier, la sortie s'est -effectuée entre le 6 et le 10 février; les jeunes plants paraissent assez vigoureux. Castilloa elastica. — Pour l'instant le Jardin d'essai de Porto- Novo a 6 pieds de Castilloa qui paraissent vouloir se bien dévelop- per. Il ne sera possible de donner la valeur de ces arbres, comme producteurs de caoutchouc au Dahomey, que dans quelques années. Kola de Guinée. — Le 27 juin sont arrivées à la colonie, 10.000 graines de Kola expédiées de Konakry. Le Kola de Guinée diffère 24 DOCUMENTS OFFICIELS du kola qui se rencontre en assez grande abondance au Dahomey, en ce que : ses graines ont 2 lobes seulement au lieu de 3 ou 4, comme en ont 'les graines de Kola de la colonie. Les graines de kola de Guinée ont une valeur marchande bien supérieure aux autres ; elles seraient plus riches en principe excitant. Des 10.000 graines reçues, 8.000 ont été expédiées dans les postes du haut Dahomey; 2.000 ont été semées au Jardin d'essai de Por- to-Novo. Le semis a été efîectué le 20 juillet sur des lignes distantes de 0 "' 3o et à 0 "' 18, 0 '" 20 sur les lignes, la partie supérieure des graines n'était recouverte (jue de un ou deux centimètres de terre . La levée commence dès le 20 août et se continue jusqu'au 10 septembre, époque à laquelle il est impossible d'observer vm seul vide dans la pépinière, toutes les graines ont levé. Les plants sont maintenant assez beaux pour être mis en place dès le début de la saison des pluies. Mammea americana. — En 3 envois divers, le Jardin Colonial de Nogent-sur-Marne a expédié 46 graines d'abricotiers des Antilles. Les semis se sont ell'ectués dès les graines reçues ; au bout de 2o à 30 jours les graines levaient. Dans leur jeune âge les plants ont été attaqués violemment par un puceron dont j'ai pu me débarrasser par un mélange de jus de tabac, d'eau et de pétrole. Les jeunes arbres sont aujourd'hui très vigoureux et attendent la saison des pluies pour leur mise en place. Goyaviers (Psidiuni). — Le Jardin d'Essai de Porto-Novo possède 2 espèces de goyaviers, très dilFérents comme aspect, mais donnant des fruits semblables comme forme et comme goût ; ce sont de petites goyaves de la g-rosseur d'une poire de Saint-Jean. Peut-être, par une taille raisonnée de ces arbres ([u'on avait laissé végéter à leur guise, arriverai-je à obtenir des fruits un peu plus gros. Le 17 juillet 1901 j'ai mis en pépinière les graines de goyaviers apportées de Nogent-sur-Marne; dès le 4 août les jeunes plants sor- taient de terre. Repiqués en pépinière, le 20 octobre, j'ai actuelle- ment : 7.*) pieds de Psidium guyava et TT) pieds de Psidiuni pomiferum. RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 25 Ananas. — A la prochaine saison des pluies le Jardin d'Essai de Porto-Novo pourra mettre en place : 100 pieds d'Anona reticulata 25 — — muricata 200 — — squamosa Achras sapota. — Les quelques graines qui m'avaient été con- fiées à Nog-ent-sur-Marne ont été semées le 21 juillet, la levée s'est produite vers le 15 septembre pour quatre pieds seulement qui ont été mis en pépinière dès le 20 octobre. Le Jardin d'Essai dont je dirige l'installation n'aura guère que 6 pieds d' Achras sapota à mettre en place cette année. Carica papaya. — Par l'envoi numéroté 247 le Jardin Colonial nous faisait parvenir des graines de 2 variétés de papayers. Le semis fait le 3 septembre a donné une sortie parfaite dès le 15 du même mois ; les jeunes plants s'annonçaient très vigoureux. Ayant dû faire un court séjour à l'hôpital en octobre, la jeune pépinière a été laissée sans arrosage ; à mon retour au jardin la trace même avait disparu. La colonie possède d'ailleurs de très belles variétés de papayes. Citrus. — En dehors des quelques pieds d'orangers et citronniers divers que possède le Jardin public, j'ai pu faire des pépinières par semis. Les jeunes plants seront, dès qu'ils auront atteint une taille sutïisante, grelTés avec les meilleures variétés du pays et les bonnes variétés qu'il sera possible d'importer. Les graines semées le 2 décembre commencent à montrer leur germe le 2 janvier. Grenadier (Punica granatum). — J'ai pu me procurer dans le pays une cinquantaine de boutures, qui ont repris d'une façon satisfaisante. Manguier (Mangifera indica). — Il existe en très grande quantité une variété de manguier se rapprochant énormément de celle con- nue sous le nom de mangue vert. Les indigènes nomment cette espèce écoiiro et mangent son fruit, qui est de la grosseur d'une pomme. Une pépinière de manguiers était déjà constituée lors de mon arrivée ; cette année il sera possible, je l'espère, d'opérer de nom- breux greffages et d'enrichir ainsi la colonie des variétés qu'elle ne possède pas encore. 26 DOCUMENTS OFFICIELS Caroliiica niacroairpn. — Cette Bombacée. dont plusieurs exem- jîlaires se trouvent dans le Jardin public, donne une très grande quantité de fruits possédant chacun T) carpelles à 3 graines de la grosseur d'une noisette. Ces fruits pouvant être de quelque intérêt au point de vue alimentaire seront cette année examinés de près. Cet arbre se reproduit en grande abondance par semis naturel. Ainsi qu'il a été possible d'en juger par ce (pii précède, on voit que déjà les cultures fruitières occupent une large place dans le Jardin. Une commande des diverses variétés de mangues et des essences fruitières qui manquent a été faite au Jardin de Libre- ville. Les arbres producteurs de caoutchouc n'ont aussi cessé de moc- cuper ; cette année des essais de bouturage seront fait sur le Landol- phia Owariensis qu'un de nos amis nous a fait connaître; j "espère aussi pouvoir me procurer des graines, des plants ou des boutures des autres lianes qui poussent dans ces régions. D'après les renseignements qui m'ont été fournis, le Landolphia florida donnerait du très bon caoutchouc et en assez grande quan- tité ; tandis que les Landolphia florida et Scandens ne donneraient que peu de produit, d'une valeur nulle. Les deux pieds de Landolphia Klainii emportés du Jardin de Nogent seront mis en place cette année. Avant de terminer ce chapitre ayant trait aux essences arbus- tives; il est, je crois, d'un certain intérêt de résumer en un tableau la durée de levée des diverses semences de ces arbres. Graines Dates Durée de Espèces arbusiives mise en terre levée la germination Kola acuminata 2() jiiil. l'.Kil '20 ;m>ù{ au 10 sept. 1001 :<0à 50 j. Mammea Amcricana 12 sept. 1901 1- au 12 oci. looi 18à30j. Psiflium, poniiforum et f^uava... IVjuil. 1001 1 août 1901 isj. Anima muricata 21 juill. l'iol 7 août 1901 17 j. Anona icticulala 5 nov. 1901 1" déc. 1001 2.') ,j. Cai-ica pavaya 3 sepl. 1001 15 scj)!. 1001 12 j. Achi-as sapola 21 juil. 1901 S au 16 sept. iOàSGj. Cinnamomuni Zeylanicum 30 net. 19C1 13 nov. 1901 13 j. Castilloa elasliea l"aoùt 1901 2S sept. 1901 39,)". Kick.xia alVieana 1 '. janv. 1992 (i au 10 fëv. 1902 22à2(i,j. Ce petit tableau ne représente certainement pas d'une façon abso- lue le temps nécessaire il la germination des graines énumérées; il représente le temps ({uc ces graines ont mis pour germer au Jardin d'Essai de Porto-Novo. RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 27 Cette remarque me paraît avoir sa valeur puisque des graines de Kickxia ont germé ailleurs en 8 à 10 jours seulement. CULTURES POTAGERES 11 était impossible que cette branche de l'agriculture n'occupe pas une large place dans les essais tentés h Porto-Novo. Avoir de temps à autre quelques légumes frais à mettre sur sa table, est d'un suffisant attrait pour que mon attention se soit portée vers ces cultures. Il est des soins généraux, rendus obligatoires par le climat des tropiques, qui doivent être décrits avant de causer des légumes dont la culture est possible. 1** Installation du potager. — Choisir un emplacement à terrain riche est une des premières conditions (il y a peu de fumiers aux Colonies). On tiendra compte aussi de la nature physique du sol; entre deux emplacements on devra prendre celui qui a une terre franche. Généralement pourtant cette question d'emplacement est uniquement subordonnée au lieu d'habitation; le potager deman- dant une surveillance constante ne peut pas être éloigné de l'habi- tation du colon. 2? Préparation. — Le lieu étant choisi on divisera*le terrain en planches de 1 ™ 20 à 1 •" 50 de largeur, séparés de 0 '" 50. Les planches auront des formes différentes avec la saison où l'on se trouve; planche en cuvette pour la saison sèche, planche en table pour la saison des pluies. 3'' Soins. — Pendant la saison sèche on fera deux copieux arro- sages par jour, on recouvrira les planches par des feuilles de pal- mier ou tout autre abri donnant de l'ombre pendant les heures chaudes. Pendant la saison pluvieuse il sera utile de mettre, toujours à 4 mètre ou 1 "> 50 au dessus des planches, une forte couverture ; sans cette précaution les eaux ne laisseraient aucune jeune plante eu place. Ayant un bon terrain, et tenant compte des quelques renseigne- ments ci-dessus, on pourra obtenir à peu près tous les légumes européens. Les spécimens seront souvent moins beaux mais vien- dront aussi plus vites. 28 DOCUMENTS OFFICIELS Ail. Essayé à deux reprises, pendant la saison des pluies et pendant la saison sèche; cette culture m'a donné des résultats négatifs. Les Ijulbes, mis en terre, g-ermaient très rapidement; les feuilles ne se développaient bientôt j)lus et se détachaient malgré la fraîcheur du sol. Ananas. J'aurais pu mettre Tétude de cette plante aux côtés des essences fruitières. Jusqu'ici cette plante n'a guère été cultivée au Dahomey que pour la consommation immédiate des fruits et se trouve souvent placée dans les potagers. Je connais actuellement au Dahomey trois variétés d'ananas : 1" Variété de la brousse (état sub-spontané ; se rencontre partout) ; 2<* Ananas pain de sucre introduit par M. Paraisot qui l'a importé du Brésil ; .3" Variété donnant une agglomération de fruits plus petite, goût plus acide que les variétés précédents, ne possède pas ou peu de graines. Introduit aussi au Brésil par M. Paraisot. L'œilleton d'ananas ne donne son agglomération de fleurs et de fruits que 18 à 20 mois environ après sa mise en place. La plan- tation des œilletons se fait en place ou en pépinière ; ce dernier procédé permet de ne mettre en place, après 2 ou 3 mois, que les pieds de belle venue; je crois donc devoir le recommander. L'ananas se cultive dans des caféières et des cacaoyères ; dans les jardins maraîchers et jjotagers on s'en sert très utilement pour former des bordures aux planches. Jusqu'à ce jour un seul essai de fermentation de ces fruits a été fait par M. Paraisot ; cet intelligent indigène a obtenu ainsi une li(}ueur alcoolisée d'un goût assez agréable. Pour la bonne conservation on est obligé d'alcooliser le liquide obtenu par simple fermentation ; cette alcoolisation faite avec de l'alcool d'ananas donnera sûrement une boisson alcoolique d'un goût exquis et dont la consommation prendra rapidement une assez grande extension. iiAPPORT Agricole du bAiioMËY 29 Artichaut. Cette composée n'a pas encore donné ici des résultats certains. Des semis opérés en divers points ont bien levé, et les jeunes plantes se développent d'une façon parfaite. Je saurai ce que nous pouvons attendre de cette culture dans quelques mois. Asperge. Quelques plantes d'asperges existent chez divers Européens de Porto-Novo ; leurs produits sont chétifs quoique de bon goût. Un semis opéré en novembre au Jardin d'Essai me permettra de mettre des jeunes griffes en place et de donner bientôt la valeur de cette plante. Aubergine. On trouve dans le pays, cultivées par les indigènes, deux varié- tés d'aubergines correspondant a : 1" L'aubergine violette ronde ; 2° L'aubergine blanche ronde. Des semis faits en mi-novembre, de la variété violette longue hâtive, ont pourtant très bien levé; repiqués en place, en fin décembre, les plants donnent des produits assez abondants depuis le 10 février. Basilic. Cette labiée, dont j'ai fait venir quelques graines, se développe très rapidement et atteint des dimensions à peu près inconnues en France. Betterave. Des essais sur cette plante ont été faits par divers Européens sur des variétés potagères qui se développent très bien. Quelques essais seront cette année tentés sur les variétés fourragères. Carotte. Donne de très beaux produits au Dahomey ; toutes les variétés 30 DOCLMEiM'S OFFICIELS paraissent donner de bons résultais, mais les carottes longues semblent devoir être préférées. J'ai cultivé ou au cultiver : 1" Carotte rouge courte hâtive; 2*> La carotte roug-e demi-courte obtuse, de Guirande ; 3" La carotte rouge longue, de Saint- Valéry ; 4° La carotte rouge longue obtuse sans cœur. On est quelquefois obligé de repiquer à cause du développement hors terre de la racine; on obtient alors beaucoup de carottes si noueuses et fourchues qu'elles ne peuvent être consommées. En 4 mois les racines sont prêtes pour la consommation. Céleri. Je n'ai pu, malgré trois essais divers, obtenir des céleris d'une taille convenable. J'ai eu chaque fois des plantes végétant bien pendant deux ou trois mois, et restant ensuite stationnaires; certains m'aflirment pourtant avoir obtenu de très beaux spécimens de cette ombellifère. La variété essayée est le céleri plein blanc. Cerfeuil. Lève mal et ne donne que de toutes petites plantes qui dispa- raissent rapidement après une ou deux cueillettes de leurs feuilles. Chicorée frisée. C'est une des salades qui m'ont donné les meilleurs résultats ; un peu plus longue à venir que les laitues et la scarole, elle donne des plantes bien plus volumineuses. Le seul inconvénient c'est qu'on ne puisse les faire blanchir comme on le fait en France ; la pourri- ture est là ({ui a bientôt fait de les détruire si on veut les lier. Cette chicorée pousse aussi bien pendant la saison sèche que pen- dant la .saison des pluies, à condition d'arroser coj)ieusement matin et soir. Les deux variétés essayées sont : La chicorée frisée de Rullec ou Beglaise; La chicorée frisée de Meaux. RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 31 Chicorée scarole. Les diverses variétés de chicorée scarole donnent aussi de très bons résultats; elles sont surtout remarquables par la rapidité de leur développement. En six semaines on arrive à pouvoir manger de cette salade. Un inconvénient assez grave est la coriacité qu'ac- quièrent rapidement ies feuilles. Chicorée sauvage. Cette plante se développe ici avec une très grande vigvieur ; il suffit de 4 ou S pieds de cette salade pour suffire à la consommation d'un colon. Choux. La culture des choux pommés, sans donner les mêmes résultats qu'en France, en ce qui concerne le nombre de pommes par 100 pieds, donne une assez gi-ande quantité de pieds normalement développés pour qu'une large place leur soit réservée dans un pota- ger. Parmi les variétés essayées celles que je crois devoir recomman- der sont : Le choux express ; Le choux cœur de bœuf moyen de la Halle ; Le choux de Schweinfûrt (atteint souvent de très fortes dimen- sions). Le chou pain de sucre pas plus que le chou de Brunswick à pied court ne m'ont donné de bons résultats. Des choux de Bruxelles repiqués il y a près de 2 mois paraissent ■vouloir donner bientôt de nombreuses petites pommes. Jusqu'ici personne n'a paraît-il pu obtenir des choux-fleurs ; des essais en cours diront si vraiment il n'est pas possible d'attendre quelque chose de cette crucifère qui donne de si beaux résultats dans le midi de la France et même en Algérie. Concombre. Le concombre se développe très bien à Porto-No vo, mais donne relativement peu de fruits ; malgré le nombre incalculable de fleurs 32 DOCUMENTS Otf ICIELS mules portées par chaque pied : les 4/5 au moins des fleurs femelles coulent ; peut-être l'humidité de Tatiuosphère fait-il éclater les l^rains de pollen avant qu'ils ne soient sur les stig-mates. Les variétés essayées sont : Le concombre blanc de Bonneuil ; Le concombre vert long, maraîcher; Le concombre vert petit, de Paris. ^ Courge. Cette cucurbitacée voit souvent, dans son jeune âg-e, sa vie com- promise par un puceron. On évite les attaques par des pulvérisa- tions fréquentes d'une décoction de tabac mêlée à une faible émul- sion de pétrole. D'après les quelques pieds que nous avons pu voir dans divers potag-ers, le nombre de fruiis produit est très faible. Ces fruits sont d'ailleurs souvent dévorés par des larves d'insectes très divers. De même que pour les melons, je n'ai vu obtenir de bons résultats que lorsque le pied se trouve dans de la bonne terre noire et que les branches portant les fruits rampent sur le sable salé (insecticide) des bords de la mer. Cresson de fontaine. Est cultivé depuis assez long-temps dans la colonie ; la lagune de Porto-Novo en contient plusieurs cultures appartenant à divers , indig-ènes qui fournissent ainsi le marché. É pinard. Malgré des soins spéciaux et une surveillance attentive, il m'a été impossible d'amener à complet développement une seule plante de cette chenopodiacée. Dans les quatre semis tentés, quelques plantes ont à peine levé et ont d'ailleurs rapidement disparu. La variété essayée a été l'épinard monstrueux, de Viroflay. Fraisier. Un semis de fraisiers opéré vers le lo novemljre a fourni des pieds (|ui ont été mis en place vers la fin de décembre. Cette plante paraît se bien vouloir développer; elle fournit un grand nombre de îlAPPfiRT AGRICOLE DU DAtJOMEY 33 stolons. Ce n'est guère que dans quelques mois qu'il sera possible de donner une appréciation sur la productivité de cette rosacée. Haricot. Il existe au Dahomey et en particulier à Porto-Novo plusieurs espèces de phaseolus cultivés par les indigènes. Chargé depuis trop peu de temps du service de culture je n'ai pu encore recueillir sur ces légumineuses des renseignements suffisants. Diverses variétés du Phaseolus vulgaris ont été essayées, celles que je recommanderai particulièrement sont forcément comprises dans les haricots sans parchemin; si on obtient très aisément et rapidement des haricots verts très agréables à consommer il est plus difficile d'obtenir des grains à écosseravec les variétés de hari- cots cultivés en France. Parmi les variétés sans parchemin, celles qui mont donné les meilleurs résultats sont : Le haricot d'Alger noir nain ; Le haricot d'Alger (à rame). Laitue. Adultes aux Colonies, ces plantes atteignent à peine la demi-gros- seur de celles obtenues en France ; il est vrai que la rapidité de venue, pendant la saison des pluies surtout, peut être considérée comme une compensation. Un mois après le semis on a de très beaux plants à repiquer; trois semaines à un mois après le repiquage les laitues doivent être mangées. Les variétés qui m'ont donné les meilleurs résultats sont : La laitue d'Alger; La laitue Cotte à graine blanche ; La laitue merveille des 4 saisons. Melon. Malgré les divers essais de culture de Cucumis melo fait à Porto- Novo, je n'ai pu amener un seul fruit à maturité. Ce mauvais résultat est uni([uement dû aux attaques de très nombreuses larves diverses en même temps qu'aux dégâts causés par les escargots. Bullelin du Jardin colonial. 3 34 DOCUMENTS OFFICIELS Je reprendrai cette année ces essais qui mieux conduits pourront l)eut-ètre donner quelques résultats. Navet. Cette espèce de crucifère donne d'excellents résultats, mais il est indispensable de repi(juer. Les navets obtenus sont certaine- ment aussi beaux que les spécimens recueillis en France. Les variétés qui me paraissent devenir le moins rapidement ligneuses sont : Le navet blanc jjlat bàtif ; Le navet jaune de Montmagny; Le navet des vertus, race Marteau. Oignon. Je ne puis guère causer de cette liliacée qu'au point de vue de la levée des graines qui se fait en 6 ou 8 jours. Le repi({uage ne peut guère s "opérer que 2 mois et même 3 mois après le semis. Les plants que j'ai ainsi repiqués en janvier paraissent de belle venue. Oseille. Donne des produits plus beaux et plus rajîidement qu'en France ; comme on le fait dans la métropole, on peut cultiver cette plante en bordure. Persil. Le persil s'obtient très aisément, mais on doit renouveler le semis au moins tous les six mois. Le persil frisé pousse avec bien moins de facilité que le persil commun. Piment. En deliors des variétés tropicales à fruits petits, allongés et trop forts comme goût, il est très facile d'obtenir les diverses variétés de France. J";ii cultivé le piment gros, carré^ doux, et le piment doux d'Es- j)agne. ftAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY. 35 Poireau. Les semis de poireaux ne lèvent pas toujours d'une façon par- faite; mais cette plante une fois germée se développe bien, et sans obtenir d'aussi beaux spécimens qu'en France, on peut obtenir des sujets assez avantageux. ; Poirée. Cette variété de Beta vulgaris donne très rapidement d'assez belles feuilles avec côtes assez larg-es ; cette plante ne paraît pas vouloir monter en graines. Pois. Ce lég-ume, très cultivé en France, ne me paraît pas devoir être recommandé au Dahomey. La levée s'effectue assez bien, mais peu de fleurs se forment et la majorité coulent; cette floraison dure à peine 8 jours. La production en pois vert mange-tout esta peu près nulle. Pourpier, Cette portulacée est très vigoureuse à l'état naturel et pouisse partout; sa culture peut donc être considérée comme inutile. Radis. Quoique un peu plus compliquée qu'en France cette culture est très simple. Les graines semées germent en 24 ou 36 heures, quel- quefois même en 12 ; on sera généralement obligé de repiquer une huitaine après le semis, dès que les jeunes plantes ont trois bonnes feuilles. Ce n'est guère que 10 à 15 jours après le repiquage qu'il est possible de manger quelques radis. Les variétés qui me paraissent devoir être i-ecommandées ici sont : Le radis rond rose hâtif; Le radis demi-long rose à bout blanc; Le radis demi-long écarlate. Je crois devoir déconseiller les radis longs qui, malgré le repi- quage, ne se développent guère qu'en feuilles. 3Ô bOCLMËNtS OFFtClt;LS Tomate. Sans parler de la A'ariété qui pousse partout ici, dont le fruit ne dépasse pas la grosseur d'une noisette, il est pourtant bon de faire remarquer la dég-énérescence rapide (jui se produit avec les meil- leures variétés importées. Après deux ou trois semis on arrive à obtenir des tomates approximativement de même volume (jue celles produites par les plantes des indig-ènes. Les variétés essavées sont : La tomate perfection ; La tomate rouge grosse hâtive ; La tomate rouge naine hâtive. PLANTES POTAGÈRES COLONIALES Lors de mon départ, il m'avait été remis au Jardin Colonial de Nogent-sur-Marne plusieurs espèces de graines potagères provenant de plantes coloniales. Haricot luné [Phascolus lunatus). Cette papillon acée existait déjà dans la colonie lors de mon arri- vée. Semées le M juillet 1901, les graines levaient le 14; le 2') du même mois je devais mettre les rames. La fructification n'a com- mencé que fin aoiit. Les gousses très parcheminées ne peuvent être consommées, elles contiennent des grains qui seraient un excellent aliment si un grand nombre d'entre eux ne contenaient pas un prin- ci[)e très amer rendant immangeable les ragoûts confectionnés. Les indigènes ne paraissent pas gênés par cet amertume. Ce haricot, (|ui atteint de très grandes dimensions, peut être utilisé comme plante d'ornement à verdure. Pois sabre. Cette légumineuse à gousses et graines énormes peut ainsi cpie la précédente constituer une plante d'ornement ; les grains, outre l'amertume très prononcé, ont un goût très désagréable (jui ne per- met pas la consommation. A Porto-Novo les grains ont été attaqués par un lépidoptère noc- turne du genre tinea. RAPPORT AGRICOLE DU DAHOMEY 37 Dolique bulbeux [Dolichos hulbosus). Cette plante sur laquelle de nouveaux essais seront tentés cette année paraît devoir attirer l'attention. Ses cosses et ses g-rains n'ont pas le goût attrayant des haricots d'Europe, évidemment, mais n'ont aucun mauvais goût. Les renfle- ments de la racine, dont le goût se rapproche de celui du navet, permettront peut-être à cette plante de prendre une place avanta- geuse dans les cultures indigènes, Pet-Sai. Le semis de cette plante opéré le 3 septembre a levé d'une façon parfaite ; malgré les i^ecommandations faites, les jeunes plants sont restés plusieurs jours sans arrosage et se sont desséchés. JARDIN d'p:SSAI Tous les essais de culture dont il vient d'être question ont été effectués dans le Jardin public installé par M. Chalot et dans la partie de terrain entourant le logement qui m'a été cédé. A l'aile droite du gouvernement, sur une superficie de quatre hectares, se trouve le nouveau Jardin d'essai. La saison des pluies étant trop avancée lors de mon arrivée à la colonie, j'ai dû occuper les ouvriers au nivellement du sol sur lequel se trouvaient de nombreuses et profondes excavations. Cette année seulement il sera possible de commencer des plantations dans ce champ, qui sera presque uniquement réservé aux essences arbustives. Le sol est formé d'argile rouge sur laquelle en certains points se trouve accumulé une assez grande quantité d'humus. FERME DU SERVICE LOCAL A ([uatre kilomètres du Porto-Novo européen, se trouve une surface de 200 à 2o0 Ha, dont 100 au moins sont occupés par un petit cours d'eau à très faible pente ressemblant assez à un marais; quarante hectares ont été débroussés il y a plusieurs années lors- qu'on a essayé d'acclimater les races bovines du Haut Dahomey. Le reste de la superficie, soit plus de |00 heçtarese n'est pas limité et 38 DOCUMENTS OFFICIELS n'a jamais été débroussé ; ce sont : mélanfçés à de très nombreux palmiers (Eloeis guineiensis) : des lianes diverses, des iicus très variés, d'assez nombreuses zingibéracées et quelques malvacées qui forment le foviillis impénétrable de cette brousse épaisse. C'est sur les 40 hectares déjà débroussés, il y a près de quatre ans que j'ai fait opérer quelques travaux dont je parlerai plus loin. Voyons pour l'instant s'il est possible d'espérer réussir à acclima- ter les ruminants et les équidés qui se trouvent en assez grande abondance dans le Haut Dahomey. Des essais d'élevage ont été tentés déjà par la colonie avec un insuccès à peu près complet; insuccès qui aurait pu être prévu, étant données les conditions où se sont eifectués ces essais d'acclimatation : Des animaux provenant de l'impôt en nature ont été descendus du nord de la colonie à grandes étapes. Arrivés à moitié fourbus à Porto-Novo, ils n'ont guère eu comme nourriture que les herbes de brousse trop dures pour avoir été dévorées par une récente invasion de sauterelles. En quelques mois tous les bœufs qui n'avaient pas succombé en route ont dû être vendus, ou sont morts : de la dy- senterie, de la fièvre aphteuse, du piétin, et quelques-uns d'acci- dents. Il me paraît qu'un pareil essai d'élevage ne peut être opposé aux essais qui pourront être tentés dans l'avenir. Avant d'avoir des animaux, il m'a paru logique d'avoir des fourrages, des grains pour les nourrir et de l'eau potable à leur faire consommer. C'est pour obéir à cet ordre d'idée que dès mon arrivée j'ai fait récolter une à une toutes les plantes d'herbe de Para (Panicum molle) qui se trouvaient répandues çà et là sur le champ d'élevage ; les tiges, coupées en morceaux de 25 centimètres, ont servi à bouturer une surface de 3 hectares, qui forme aujourd'hui une très belle prairie, dont je me servirai pour augmenter ces champs d'herbe de Para. Dès cette année des cultures de ma'i's et de mil seront établies et fourniront les grains nécessaires au rationnement des belles races bovines et autres importées du Haut Dahomey. Des essais d'ensilages des divers fourrages et des divers tuber- cules coloniaux seront faits à côté des essais pour la conservation des fourrages secs. Un abreuvoir avec fdtres (barils ayant contenu du coltar, remplis à demi de charbon et de sable). C'est en août ou septembre, alors que la saison des pluies sera à peu près finie, que j'espère pouvoir aller chercher des animaux de CIRCULAIRE DU GOUVERNEUR DE MADAGASCAR 39 choix dans le Gourma et sur les bords de l'Ouémé ; j'aurai pour les recevoir : des fourrages, des g-raines, peut-être des tubercules et de l'eau potable. Dans cette colonie, où les moyens de transport et de communi- cation sont encore limités, l'élevage présente un caractère civilisa- teur et une plus grande assurance d<^ tranquillité chez les indigènes. Obtenir des animaux porteurs permettrait de supprimer pom- toute une catégorie d'indigènes le métier abrutissant de hamacaire ou de porteur; on courrait moins de i-isques de voir se soulever certains villages auxquels les réquisitions de porteurs semblent être des mesures vexatoires. La colonie aurait enfin un bénéfice pécunier certain. Porto-Novo, le 22 mars 1902. L Agent de cultuî-e. Léon EsTÈvE. MADACxASCAR CIRCULAIRE DE M. LE GOUVERNEUR GENERAL DE MADAGASCAR à MM. le Directeur du service de sauté, le directeur de Veuseiguemeul , les administrateurs chefs de province et les commandants de cercle, relative à la préparation d'herbiers. Le département vient d'attirer mon attention sur l'intérêt considérable qui s'attache à dresser aussi exactement que possible l'inventaire des richesses produites par les végétaux croissant à l'état spontané dans la Colonie. L'utilisation d'un grand nombre de plantes originaires de Madagascar est déjà connue des Européens, mais il est incontestable que, malgré les recherches et les études faites jusqu'à ce jour, il existe encore dans l'île une très grande quantité de végétaux dont on ne soupçonne pas les appli- cations. Or, comme le fait très justement remarquer M. l'Inspecteur général d'agriculture coloniale, seules, l'étude approfondie et la détermi- nation exacte de ces plantes permettront d'en connaître tous les emplois et d'indiquer avec précision celles sur lesquelles il convient d'attirer l'attention des colons et des Malgaches. De la connaissance exacte de la flore et des produits qu'elle peut don- ner, dépend, en grande partie, le développement du commerce et de 40 DOCUMENTS OFFICIFLS l'a^Ticulture d'un pnys; il importe donc que nous fournissions aux éta- blissements scientiliques de la Métropole qui veulent bien nous aider dans ces recherches tous les éléments d'études qui leur sont nécessaires pour nous faire connaître, de la manière la plus précise, toutes les plantes dont il est possible de tirer parti. La constitution d'herbiers coloniaux présente, sous ce rapport, la plus grande importance ; aussi vous serais-je oblig'é de prier les aj^^ents placés sous vosordresqui, par leurs fonctions, leur situation, leurs ^oûts ou leurs connaissances spéciales, sont à même de faire des herbiers, de s'attacher à réunir des collections, aussi complètes que possible, d'échantillons bota- niques de toutes les plantes spontanées qui leur paraîtront susceptibles d'utilisation pratique. Il y aura lieu de comprendre dans ces collections, qui seront envoyées au Département sous le nom des personnes qui les auront recueillies : 1° Des échantillons de plantes spontanées, utilisées par les indigènes; 2° Des spécimens des vég-étaux encore sans emploi, mais paraissant susceptibles de recevoir des applications pratiques et même des échantil- lons de plantes regardées comme inutilisables, car il existe certainement dans la Colonie des végétaux dont la valeur est complètement inconnue et dont l'étude seule peut nous faire connaître les emplois. Chaque échantillon sera recueilli en double exemplaire, dont l'un devra être directement adressé au Jardin Colonial de Nogent-sur-Marne par la poste, ou sous étiquette tricolore, s'il s'agit d'envoi trop volumineux pour être expédié de cette façon. Le second sera envové au Gouvernement Général pour être remis à M. le Directeur de l'agriculture, qui pourra ainsi mettre à l'étude et con- server dans les archives de son service une collection complète de tous les végétaux économiques de la Colonie. Chaque plante donnera lieu aux envois indiqués ci-après, qui devront être toujours accompagnés d'une liche de renseignements conforme au modèle annexé à la présente circulaire. ]" Double échantillon botanique aussi complet que possible. 2" Double échantillon du produit brut fourni par la plante. '^" Double échantillon du produit préparé. i'M)ouble échantillon de graines fraîches, qui devront être mises à la poste aussitôt après leur récolte, alin (pi'elles soient encore en étal de germer en arrivant à destination. Les. graines destinées à la direction de l'agriculture seront envoyées directement à cette administration aux adresses suivantes, pour (\u"\\ soit possible de les semer dans le plus bref délai possible : 1" à yi. le Dii-ecteur de la Station d'essai de Tamatave, pour toutes les semences recueillies sur les versants Est et Nord-Est ; CIRCULAIRE DU GOUVERNEUR DE MADAGASCAR 41 2° à M. le Directeur de la Station d'essai de Fort-Dauphin, pour toutes les graines récoltées dans le Sud-Ouest et dans le Sud-Est; 3'' à M. le Directeur de la Station d'essai de Majunga, chaque fois qu'il s'agira de semences provenant du versant occidental; 4° à M. le Directeur de la Station d'essai de Nanisana, pour toutes les semences recueillies dans le centre; Wjus trouverez dans la note ci-jointe, préparée par les soins de la direction de l'agriculture, tous les renseignements dont vous pourrez avoir besoin, pour procéder, dans de bonnes conditions, à la récolte des échantillons botaniques et à leur préparation, ainsi que les précautions qu'il convient de prendre pour recueillir de bonnes graines et les faire parvenir en bon état à destination. Vous voudrez bien m'accuser réception de la présente circulaire. Tananarive, le 14 décembre 1901. Le Général commandant en chef du Corps d'occupation et Gouverneur Général de Madagascar et dépendances, Gallieni. INSTRUCTION l'OlR LA RÉCOLTE HT LA PREPARATION DES ÉCHANTU.LONS ET DES GRAINES DESTINEES A l'ÉTUDE Récolte et préparation des échantillons botaniques. — Composition d'un échantillon botanique complet. Il faut naturellement s'efforcer de recueillir des échantillons d'herbiers aussi complets que possible. Un échantillon botanique complet doit comprendre : Des spécimens des fleurs; Des fragments de branches, de rameaux ou de tiges garnis de feuilles; Des fruits; Des graines; Des fragments de racines et des rameaux de toutes les portions de la la plante présentant quelque particularité intéressante (bulbe, rhi- zome, etc.). Il serait utile enfin, quand il s'agit d'un arbre, de joindre à l'envoi un échantillon du bois et un fragment d'écorce. Il est souvent difficile de constituer des échantillons complets; on devra donc se contenter, dans la plupart des cas, de recueillir des frag- ments de branches garnies de feuilles, de fleurs et de fruits, ainsi que des graines. Préparation des échantillons desséchés, — Presque tout le monde 42 DOCUMENTS OFFICIIM-S sait comment on procède à la dessiccation des échantillons d'herbiers. Les pai)iers de toute nature, tels que journaux ou imprimés divers, peuvent très bien être utilisés à cet elFet : les frais occasionnés pour la préparation d'un herbier sont donc à peu près nuls. Les plantes, étalées avec soin, doivent être mises à sécher entre des feuilles de papier de dimensions suffisantes, puis réunies par paquets de '20 à 30 échantillons, séparés les uns des autres par plusieurs lits de jour- naux et soumis entre deux planchettes, au moyen de quelques pierres, à une léf^ère pression. Il est utile, quand il s'ag^it de végétaux à tissus mous et aqueux, de changer les papiers de temps à autre, et détaler, tous les jours, les plantes à l'ombre pendant quelques instants; il est bon, en outre, de mettre les paquets d'échantillons en presse au soleil ou dans un courant d'air pour hâter leur dessiccation. La confection d'herbiers ne présente aucune difficulté dans les pays secs comme le centre et le Sud de Madagascar, mais il est nécessaire de prendre de plus grandes précautions quand il s'agit de préparer des échantillons botaniques dans des contrées pluvieuses et constamment humides, comme le versant Est de lile. Il ne peut manquer d'y avoir avantage, dans ce cas, à adopter la méthode de préparation en usage à Java, à l'Institut agricole de Bui- tenzorg. Préparations des échantillons à Builenzorçj . — On étale les échantil- lons entre des feuilles de papier comme dans le cas précédent, puis on empile les plantes par groupes de 15 à 20 exemplaires, séparées les unes des autres par des lits de 5 à 6 feuilles de papier. Les paquets d'échantillons ainsi préparés sont alors comprimées modé- rément entre des cadres de bambou à claire-voie, serrés par des cordes, puis soumis à une dessiccation rapide, en les maintenant, pendant quelques heures, à iO à 50 centimètres dun feu de charbon de bois. Il suffit, pour mener l'opération à bonne lin, de maintenir le l'eu au point convenable pour ne pas brûler les échantillons et de retourner les paquets de temps à autr^, afin de régulariser la marche de la dessiccation. On achève la préparation à Buitenzorg en plongeant complètement les échantillons, pendant une seconde ou deux, dans une solution alcoolique saturée de bichlorure de mercure. Cette immersion dans un bain con- centré de sublimé corrosif a pour but de mettre les plantes à labri des attaques des insectes. Quelle que soit la méthode employée pour préparer les herbiers, il importe de n'expédier que des échanlillous l)i('n secs et de les emballer entre des feuilles de fort carton, après avoir changé une dernière fois le papier, quand on n'expédie qu un petit nombre d'exemplaires à la fois. CIRCULAIRE DU GOUVERNEUR DE MADAGASCAR 43 Les échantillons botaniques doivent être soigneusement étiquetés. Il est à recommander d'épingler, à côté de chaque spécimen, une fiche de renseignements conforme au modèle ci-annexé. 1° Récolle el préparation tV échantillons qui ne peuvent être desséchés. Il arrive souvent que certaines plantes produisent des fruits, des racines, des fleurs, des tiges ou même des feuilles qu'il est absolument impossible de soumettre à la dessiccation ; c'est le cas, par exemple, de la plupart des fruits comestibles et de la grande majorité des plantes qui croissent dans la brousse antandroy ou mahafaly. Il est nécessaire, dans ce cas, d'avoir recours à un autre procédé de conservation. La meilleure méthode à conseiller consiste dans l'emploi d'une solution aqueuse de formol à 5 «/o, dans laquelle on immerge l'échantillon à conserver. On peut employer dans le même but de l'alcool, mais ce liquide a sou- vent l'inconvénient de décolorer ou de noircir les échantillons. 2° Récolte et emballage d'échantillons divers. Il peut fréquemment arriver aussi qu'il soit intéressant de joindre à des graines ou à une plante séchée un échantillon des produits qu'il est possible d'en tirer, soit parce que cette matière reçoit déjà quelques applications locales, soit parce qu'on présume qu'elle est susceptible d'être utilement employée. Il sera nécessaire, dans ces deux cas, de recueillir des échantillons assez volumineux pour permettre d'en faire apprécier la valeur commer- ciale aussi exactement que possible, ou pour pouvoir rechercher plus aisément les usages auxquels il peut se prêter. Il importera, en outre, en procédant à l'emballage, d'avoir soin de pla- cer les produits de cette nature dans des caisses à part et d'éviler de les mettre en contact avec des graines dont ils pourraient parfois altérer la faculté germinative. 3" Récolle et préparation des envois de graines. V Une condition essentielle pour avoir de bonnes graines susceptibles de supporter un bon voyage de quelques semaines et d'arriver à destina- tion en état de germer est de procéder à la récolte au moment de la matu- rité complète. On doit choisir, autant que possible, des semences extraites de fruits encore fixés aux plantes et récemment arrivés à maturation plutôt que de vieilles graines ramassées par terre ou provenant de fruits déjà anciens. 2° Les graines à aspect sec et à téguments résistants, comme celles d'un grand nombre de légumineuses, n'exigent, en général, aucun embal- lage spécial. Il suffit, en effet, si elles sont entourées de pulpe et incom- 44 DOCUMENTS OFFICIELS plètement si'ches, de les laver avec soin immédialemeiit après la récolte pour les débarrasser des matières étrangères adhérentes, et de les faire sécher graduellement en évitant de les exposer au soleil, puis de les emballer dans un sachet de fort papier ou de les mettre dans une boîte, s'il s"agit d\in envoi important, 3° Il importe, au contraire, de prendre de grandes précautions lorsqu'il s'agit des graines à aspect charnu composées de tissus mous ou peu durs, ou renfermant des matières grasses loUos que celles de thé, de cacaoyer, de jacquier, etc. Les semences de celte catégorie sont ordinairement susceptibles d'alté- ration rapide et l'on n'arrive à les faire voyager pendant quelques temps en bon état qu'à la condition de prendre les précautions suivantes : I. — Débarrasser les graines des tnatières adhérentes (pulpe, etc.) en les passant rapidement à l'eau et en les frottant doucement entre les mains. II. — P'aire sécher les semences à l'ombre pendant quelques heures. III. — Les emballer dans une petite boîte de carton, de bois ou de métal bien fermée (boîte de conserves à couvercle par exemple, boîtes à allumettes et boîtes analogues à celles qui servent à l'expédition des bijoux, etc.) en mélange avec une forte proportion de sable lin ou de ter- reau légèrement humide. On arrive ainsi à prolonger dans une large mesure la durée de leur faculté germinative. IV. — Les expédier immédiatement par la poste. Remarque générale relative aux envois de graines. Il suffira, dans la majorité des cas, de faire des envois ne comprenant pas plus de 50 à 100 graines. Il est important enfin de recommander d'étiqueter et de numéroter chaque paquet ou chaque boîte avec le plus grand soin et de joindre à chaque envoi une fiche de renseignements conforme au modèle ci-joint, qui devra porter le même numéro d'ordre (pie l'échantillon auquel elle se rapporte. 1" Jiécolle cl emballage des bulbes., rhizomes., etc. Il n'est pas inutile de rappeler ici, en terminant, que les bulbes, tuber- cules ou rhizomes, ainsi que les orchidées et les plantes dites grasses, peuvent généralement supporter des transports exigeant plusieurs semaines, simplement emballés dans des caisses après les avoir entourés d'un peu de paille ou de mousse sèche. Il est à recommander de se servir, dans ce cas, de caisses à claire-voie, garnies intérieurement d'un grillage métallique, afin d'éviler (pie leur contenu ne soit détérioré par les rou- geurs pendant la traversée. ClHCULAlHE DU GOLVEKNËLR DE MADAGASCAR 45 MADAGASCAR ET DÉPENDANCES Collection (/] Circulaire du i i décembre 190 1 FICHE DE REIfSEIGNEMEIîTS Echanlillon{2) Provenance exacte (3) Emploi Renseignements divers. Signature CIRCULAIRE à MM. le Directeur de Ingriculture, les Adminislrateurs chefs de pro- vince et Commandants de cercle, au sujet de la, création d'une chambre d'agriculture et de comices agricoles. Messieurs J'ai [)Li constater, au cours de mon dernier voyage autour de l'île, l'importance CToissante prise par l'ag-riculture dans les régions côtières. Les enquêtes et les études faites, depuis cinq ans, nous prouvent, d'ail- leurs, que Madagascar est appelé à prendre un grand essor agricole. On a, quelquefois, au début de l'occupation de l'Ile, comparé à tort toute la Colonie à un immense jardin capable de se prêter, en même temps, à l'exploitation des plantes franchement tropicales et aux cultures tempérées, grâce aux différences climatériques, qui caractérisent si nette- ment les principales régions de Madagascar. Les résultats obtenus nous permettent d'apprécier, aujourd'hui, d'une manière plus exacte, la valeur agricole de la Grande île, et de définir, d'une façon plus précise, les régions où nos compatriotes ont le plus de chances de réussir. L'imerina et le Betsileo, qui conservent toute leur importance sous le rapport des cultures entreprises par les Malgaches, passent au dernier rang comme centres de colonisation agricole pour les Européens au profit des régions côtières, vers lesquelles nous devons porter la plus grande partie de nos efforts, pour assurer la réussite des entreprises de culture. 46 DOCUMENTS OFFICIELS Le remarquable travail de MM. Miintz et Rousseaux sur la valeur agri- cole des terres de la Colonie, les indications l'ournies par MM. les Chefs de circonscriptions administratives, plus particulièrement les tournées d'inspection de M. Prudhomme, directeur de l'agriculture, et de ses adjoints, les études, les enquêtes et les expériences exécutées dans les stations d'essais, ne permettent pas de concevoir le moindre doute à cet égard; aussi, est-il de notre devoir d'engager les nouveaux émigrants voulant se livrer à l'agriculture à se fixer de préférence sur les cotes et de leur faire connaître la valeur exacte des hauts plateaux, où, sauf sur quelques points malheureusement rares et trop peu étendus, le planteur européen n'a pas la moindre chance de réussir. Les exploitations sont déjà nombreuses dans les régions côtières et, principalement, sur le versant est, dont le climat convient à l'exploita- tion des principales cultures tropicales ; plusieurs importantes entreprises d'élevage et des exploitations forestières sont établies sur divers points de la Colonie. C'est pour rapprocher les intérêts des planteurs, éleveurs et exploitants forestiers, établir entre eux un lien étroit, leur permettre de déterminer, par un travail commun, et de faire connaître plus nette- ment encore que par le passé, leurs besoins et leur desiderata que j'ai décidé, par un arrêté en date de ce jour, de créer des comices agricoles et une chambre d'agriculture dont le siège est fixé à Tamatave. La chambre d'agriculture et les comices sont appelés à s'occuper uni- quement des questions intéressant directement l'agriculture, les forêts et l'élevage. Ces assemblées émettront, à ce titre, des vœux ou donneront leur avis sur les points énumérés dans l'arrêté précité; elles serviront, en même temps, d'offices de renseignements et permettront de fournir des indications plus précises à ceux de nos compatriotes qui s'adressent à nous, pour être renseignés sur les productions de la Colonie, sur la poss- bilité d'y écouler certains articles ou certaines denrées, sur les conditions d'installation des entreprises agricoles, d'élevage ou forestières, etc. Cette création permettra ainsi au Gouvernement Général de se tenir plus aisément en relations avec tous les agriculteurs, éleveurs et concessionnaires fores- tiers ; elle permettra, en outre, en faisant appel aux connaissances et à i'expérience des membres de la chambre d'agriculture et des comices, en provoquant des enquêtes sur les sujets qu'il peut y avoir intérêt à appro- fondir, de mieux connaître les ressources de la Colonie et d'activer, dans une large mesure, les travaux et les recherches confiés à la direction de l'agriculture, au service vétérinaire et au service forestier. MM. le Directeur de l'agriculture, le Chef du service vétérinaire, le Chef du service des forêts, les Administrateurs chefs de province et les commandants de cercle voudront bien, dans ce but, me faire connaître, en temps utile, les points sur lesquels il y aurait lieu d'attirer l'attention CIRCULAIRE DU GOUVERNEUR DE MADAGASCAR 47 des comices et de la chambre d'agriculture et les enquêtes qu'il pourrait y avoir avantage à confier à ces assemblées. J'arrêterai, au commence- ment de chaque année, d'après les propositions que vous voudrez bien me faire dans cet ordre d'idées, un programme détaillé de toutes les ques- tions, recherches et enquêtes qu'il y aura lieu de leur confier. La réunion initiale des comices devant avoir lieu dans le courant du mois de juillet 1902, la première liste d'inscription sera close à la date du premier mai prochain. Vous voudrez donc bien, pour qu'il ne se pro- duise aucun retard, prendre vos dispositions pour que les listes prescrites par l'article 4 de l'arrêté organique du 26 février 1902 me soient trans- mises, dans les premiers jours du mois de mai, avec vos propositions pour la nomination du président et des assesseurs de chaque comice. Tananarive, le 16 février 1902. Le Général commandant en chef du Corps d'occupation et Gouverneur Général de Madagascar et Dépendances, Gallieni. ARRETE portant création et organisation d'une chambre d'agriculture et de comices agricoles. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et dépendances. Vu les décrets des 1 1 décembre 1895 et 30 juillet 1897 ; Vu l'arrêté du 7 novembre 1896, créant des chambres consultatives françaises à Madagascar; Considérant le développement de l'agriculture à Madagascar et l'intérêt primordial qu'elle présente au point de vue de la situation économique de la Colonie; Considérant qu'il y a intérêt à faciliter aux agriculteurs les moyens de faire parvenir au gouvernement local leurs vœux et de lui soumettre leur avis sur toutes les questions intéressant l'agriculture; Le conseil d'administration entendu, Arrête : TITRE I Comices agricoles. Art. I". — Un comice agricole est créé : 1° A Tamatave, pour la province de Tamatave; 2° A Majunga, pour la province de Majunga; 48 DOCUMENTS OFFICIELS 3^ A Tananarive, pour les provinces de Tananarive, Tananarive-ville, Manjakaiidriana, Aukazobe, Miariiiarivo et Betafo ; i" A Fianarantsoa, pour les provinces du Belsileo et d'Ambositra; 5° Au chel-lieu de toutes les province ou districts indépendants, autres que ceux indiqués ci-dessus, pourvu que le nombre des planteurs ou éle- veurs remplissant les conditions spécillées à Fart. 2 ne soit pas inférieur à huit. Akt. "2. — Ne pourront l'aire partie d'un comice que les citoyens français majeurs et jouissant de leurs droits civils, propriétaires, concessionnaires, fermiers, régisseurs de biens ruraux ou chefs d'usines mettant en (cuvre des produits agricoles directement tirés du sol, ayant leur propriété ou leur usine dans la circonscription du comice. Les planteurs ou chefs d'industrie agricole ayant dans la Colonie plusieurs exploitations ou usines pourront faire partie du comice fonctionnant dans chacune des circonscriptions où sont situés ces établissements. Art. 3. — Dans toute circonscription ne comprenant pas un nombre suflisant de planteurs pour former un comice, les personnes remplissant les conditions prévues par l'art. 2 pourront être, sur leur demande, admises à faire partie du comice agricole le plus voisin. Art. 4. — Toute personne se proposant de faire partie d'un comice devra se faire inscrire sur une liste déposée en permanence, à cet elfet, chez le chef de la circonscription administrative, après avoir justifié des conditions spécifiées aux art. 2 et 3. Avant le F"^ décembre de chaque année, les chefs de circonscription adresseront au Gouverneur général les noms des personnes inscrites, ainsi que les justifications produites par elles. L inscription ne sera définitive qu'après notification de sa ratification par le Gouverneur général et restera valable, tant que lintéressé rem- plira les conditions prévues aux articles 2 et 3. Cette notification devra être faite, avant le 31 janvier, par la voie du Journal officiel. Art. 5. — • Le bureau de chaque comice sera composé d'un président et de deux assesseurs nommés par arrêté du Gouverneur Général. La durée du mandat du bureau est fixée à trois ans. Toutefois, le président peut être remplacé par l'un des assesseurs à l'expiration de la période d'une année. Le bureau sera renouvelable par tiers. A l'expiration de la première et de la seconde année, le sort désignera, dans chaque comice, celui des membres au remplacement duquel il devra être procédé. Les titulaires sortants ne pourront plus faire partie du bureau pendant la période de trois années qui suivra l'expiration de leur mandat. Un fonctionnaire spécialement désigné à cet elFet remplira les fonctions de secrétaire-archiviste. CIRCULAIRE DU GOL'VERîVEUR DE MADAGASCAR 49 Art, 6. — Dès Touverture de leur première session, les comices établi- ront le programme de leurs travaux et rédigeront un règlement d'ordre intérieur destiné à assurer la régularité de leurs réunions ultérieures. Ce règlement sera soumis à l'approbation du Gouverneur général. Art. 7. — Les comices se réuniront au moins une fois tous les trois mois, aux jour et heure indiqués par les présidents, après entente avec les chefs de circonscription; les séances se tiendront dans les locaux mis à la disposition des comices par les soins de l'administration. Chaque fois que le président le jugera nécessaire, des réunions extraor- dinaires pourront avoir lieu, après que le chef de la circonscription aura été avisé, au moins trois jours à l'avance. Art. 8. — Les comices agricoles s'occuperont exclusivement des ques- tions intéressant l'agriculture. Ils seront appelés à donner leur avis ou à émettre des vœux sur les points suivants : 1° Encouragements à lagriciilture. 2° Mesures de protection à prendre : a) Contre l'introduction des insectes, animaux malfaisants et maladies s'attaquant aux plantes ou animaux domestiques ou aux troupeaux. h) Pour la destruction des insectes et animaux malfaisants ou en cas d'épidémie contagieuse des troupeaux. c) Eu faveur des oiseaux utiles à l'agriculture. 3" Expériences et recherches à entreprendre dans l'intérêt de l'agri- culture. 4" Introduction des cultures ou procédés de culture susceptibles de produire des résultats dans la Colonie. 5" Conservation des essences susceptibles d'être utilisées. 6" Réglementation forestière. 7'' Questions d'élevage. 8'^ Crédit agricole. 9" Travaux d'irrigation et de drainage. 10" Moyens de transport et voies de communication. Ils sont spécialement chargés de la statistique agricole de leurs cir- conscriptions respectives, de l'étude des conditions de placement et d'exportation des produits agricoles, de l'étude des améliorations à appor- ter aux relations entre les producteurs et les consommateurs et de l'établis- sement de comptes de culture, c'est-à-dire de la recherche du prix de revient des diverses denrées agricoles produites dans la Colonie. Ils sont chargés, en outre, de préparer la participation des colons et planteurs aux expositions agricoles locales, au concours général agricole de Paris, aux expositions annuelles de la Société nationale d'horticulture de France, ainsi qu'aux musées commerciaux ou agricoles, et sont appe- lés, d'une manière générale, à collaborer à l'installation de toutes les lîiillelin du Jardin colonial. '» 50 DOCUMENTS OFFICIELS expositions, des musées et concours agricoles, industriels ou commer- ciaux organisés par la Colonie, Ils feront procéder, enfin, quand il y aura lieu, par un ou plusieurs de leurs membres désignés à cet elfel, à toutes les enquêtes, recherches techniques et expériences agricoles qu'ils jugeront nécessaires. Art. 9. — Toutes les communications et observations relatives aux questions énumérées dans le précédent article seront transmises aux comices agricoles. Les comices agricoles adresseront à la chambre d agriculture les procès- verbaux de leurs séances et tous les documents ou renseignements se rapportant à leurs travaux ou à leurs recherches. AuT. iO. — Il est formellement interdit aux comices de mettre en déli- bération ou de s'occuper de toute matière qui n'aurait pas exclusivement pour objet les intérêts agricoles de la Colonie. Toute infraction à cette règle pourra entraîner la dissolution du comice, prononcée par arrêté du Gouverneur général. Art. 11. — Les chefs de province ou leurs délégués, le directeur de l'agriculture et le chef du service vétérinaire ou leurs délégués, dans les localités où fonctionnent les comices, ont entrée aux séances de ces assemblées et peuvent y prendre la parole, chaque fois qu'ils le jugeront opportun. Art. 12. — Une somme de 200 francs pour frais de première installa- tion (achats de livres et de registres) et une subvention annuelle de lôO francs pour frais de bureau et dabonnement à diverses publications seront allouées à chaque comice. Dispositions transitoires. Art. 13. — La première liste d'inscription sera close à la date du pre- mier mai iy02 et la première réunion des comices aura lieu, au jilus tard, dans le courant de la première quinzaine du mois de juillet 1902. TITRK II Chambre d'agriculture. Art. 1 i. — 11 est créé à Madagascar une chambre d'agriculture, ayant son siège à Tamatave ; elle se réunira, pour la première fois, dans le courant du mois de septembre 1902. AnT. 15. — La chambre d'agriculture est composée des présidents de chatpie comice et pourra s'adjoindre six membres élus par elle pour trois ans parmi les j)ersoiines figurant sur les listes d'inscription des comices. CIRCULAIRE DU GOUVERNEUR DE MADAGASCAR 51 arrêtées conformément aux dispositions des articles 4 et 13. Ce choix devra être ratifié par le Gouverneur général. Art. 16. — Dès sa première réunion, la chambre d'agriculture, prési- dée par son doyen d'âge, procédera tout d'abord à la formation de son bureau, puis à l'élection des 6 membres prévus à l'art. 15. Art. 17. — Le bureau de la chamDre d'agriculture se compose d'un président, de deux vice-présidents et d'un secrétaire, élus à la majorité absolue des suffrages. La durée du mandat du bureau ainsi constitué, dont la composition devra être approuvée par le Gouverneur général, est fixée à trois ans. Les fonctions du président sont annuelles, mais il pourra être réélu indéfiniment. Les titulaires sortants ne pourront être réélus qu'après une période de trois ans, à partir du jour où a expiré leur mandat. Art. 18. — Dans sa première séance, la chambre d'agriculture, après avoir constitué son bureau définitif, rédigera un règlement intérieur déterminant les pouvoirs disciplinaires du bureau à l'égard des membres de l'assemblée et le programme de ses travaux. Ce règlement sera soumis à l'approbation du Gouverneur général. Art. 19. — La chambre d'agriculture aura une session annuelle obliga- toire, dont la durée ne pourra excéder vingt jours consécutifs. L'époque de la session sera fixée, chaque année, par le Gouverneur général, sur la proposition du président de la chambre. Les frais de voyage de tous les membres de la chambre se rendant aux sessions ordinaires ou extraordinaires [transport par terre et par mer] seront à la charge du budget local. Art. 20. — • La chambre d'agriculture pourra également se réunir en session extraordinaire, sur la convocation de son président ou sur la demande, faite par écrit, de dix au moins de ses membres et après l'assen- timent du Gouverneur général, à qui devront être soumis les motifs de la réunion projetée. Art. 21. — Les délibérations de la chambre d'agriculture sont prises à la majorité absolue des suffrages exprimés. En cas de partage, la voix du président est prépondérante ; mais l'assemblée ne pourra valablement fonctionner que si la moitié au moins des membres sont présents à la séance. Le président d'un comice qui ne pourra assister à une réunion de la chambre devra se faire suppléer par un de ses assesseurs et, en cas d'em- pêchement, par un autre membre du comice désigné par le bureau. Art. 22. — Le Gouverneur général, le directeur de l'agriculture et le chef du service vétérinaire ou leurs délégués auront toujours le droit d'assister aux séances et seront entendus chaque fois qu'ils le jugeront opportun. 52 DOCUMENTS OFFICIELS Art. 23. — La chambre d'agriculture peut convoquer en séance et entendre les personnes qu'il lui paraîtrait utile de consulter. Art. 24. — Elle servira d'intermédiaire entre l'administration supé- rieure et les comices. Son président recevra la correspondance des comices et leur fera toutes les communications nécessaires. Art. 25. — La chambre d'agriculture est chargée de centraliser et d'étudier les desiderata, les avis et les travaux des comices. Elle est appelée à présenter des vœux au Gouvernement général et à donner à l'administration de la Colonie les avis ou renseignements qui pourraient lui être demandés sur toutes les questions énumérées à l'article 8. 11 lui est absolument interdit de mettre en délibération toute question étrangère aux intérêts agricoles de la Colonie. Toute infrac- tion à cette règle pourra entraîner la dissolution de la chambre, qui sera prononcée par arrêté du Gouverneur général. Art. 26. — Elle tiendra un registre de ses délibérations et sera chargée de la rédaction d'un rapport annuel, dans lequel seront consignés les pro- cès-verbaux de ses séances, le résumé des travaux de tous les comices et tous les faits, observations et renseignements pouvant intéresser l'admi- nistration. Ce rapport sera publié aux frais de la Colonie. Art. 27. — La chambre d'agriculture est tenue de donner communica- tion de toutes les pièces et documents dont elle est en possession et qui lui sont demandés par l'administration. Art. 28. — Le président de la chambre d'agriculture et les présidents des comices agricoles jouiront de la franchise postale pour correspondre entre eux et avec le Gouverneur général. Art. 29. — Un secrétaire-archiviste désigné par l'administration et résidant à Tamatave sera mis en permanence à la disposition de la chambre d'agriculture. Cet agent correspondra avec le président et assu- rera la correspondance conformément aux instructions qui lui seront données par ce dernier. Art. 30. — Les ressources de la chambre d'agriculture se compose- ront d'une allocation de première installation de 2.500 francs pour achat d'ouvrages de bibliothèque et de registres et d'une subvention annuelle de 3.000 francs. Art. 31. — L'état des dépenses à engager par la chambre d'agriculture sera établi, chaque année, au moment de la session ordinaire, et soumis à l'approbation du Gouverneur général. Cet état comprendra une somme de 600 francs pour frais de bureau, les frais d'abonnement aux périodiques reçus par la chambre et le détail de toutes les autres dépenses à prévoir. Art. 32. — La comptabilité sera tenue par un membre du bureau dési- CIRCULAIRE DU GOUVERNEUR DE MADAGASCAR 53 gné par la chambre. Le secrétaire-archiviste remplira les fonctions de trésorier. Toutes les pièces comptables seront signées par le secrétaire-archiviste et contresignées par le président ou par l'un des viee-présidents, en cas d'empêchement. Art. 33. — Le compte général sera rendu, tous les ans, au cours de la session ordinaire, et soumis au visa du Gouverneur général en conseil d'administration. Art. 34. — Une salle de délibération et une pièce pouvant servir au classement des archives et à l'installation de la bibliothèque seront mises, à Tamatave, à la disposition de la chambre d'agriculture. Art. 35. — MM. le Secrétaire général, le Directeur de l'agriculture, le Chef du service vétérinaire, le Chef du service des postes et des télé- graphes, les Administrateurs chefs de province et de district autonome, ainsi que les Commandants de territoire et de cercle sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive, le 26 février 1902. Gallieni. Vu : Le Directeur du Contrôle financier^ FiLLON. Par le Gouverneur général : Le Secrétaire général Lépreux. ARRETE fixant les indemnités de route et de séjour allouées aux membres de la chambre d agriculture. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et dépendances, Vu les décrets des 1 l décembre 1895 et 30 juillet 1S97; Vu l'arrêté du 26 février 1902, créant des comices agricoles et une chambre d'agriculture; Vu le décret du 3 juillet 1897, Arrête : Art. 1". — Les membres de la chambre d'agriculture sont classés, au point de vue de la concession des indemnités de route et de séjour et des passages, dans la V catégorie B du tableau annexé au décret du 3 juillet 1897. 54 DOCUMENTS OFFICIELS Art. 2. — MM. le Secrétaire général et le Trésorier-Payeur sont char- gés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive, le 26 février 1902. Gallieni. Vu : Le Directeur du Contrôle financier^ FiLLON. Par le Gouverneur général : Le Secrétaire général Lépreux. Journal officiel de Madagascar et Dépendances. CIRCULAIRE à MM. les Administrateurs chefs de province ou de district et à MM. les Commandants de cercle au sujet du transport des plants demandés au service de r Agriculture. Messieurs, Les demandes de plants adressées par les chefs de circonscriptions administratives au service de l'agriculture deviennent de plus en plus fré- quentes à mesure que les jardins d'essais créés dans les provinces et dans les cercles se multiplient et prennent plus d'importance. Malgré le désir de satisfaire entièrement à toutes les commandes qu'ils reçoivent, les agents des stations agronomiques se voient souvent obligés de refuser la cession de plantes économiques d'introduction récente faute de caisses leur permettant de faire des emballages suflisamment soignés pour assu- rer le transport dans de bonnes conditions. Il est donc indispensable que les bourjanes que vous envoyez pour prendre livraison des plants commandés aux Stations d'essais soient tou- jours munis décaisses appropriées à cet usage. Je vous engage à adopter le modèle de serre ward préconisé par la direction de l'agriculture. Les deux petits châssis, munis chacun do trous vitrés de 0'"10 0'" 18 se fixent sur les côtés au moyen de deux vis. La partie supérieure de la serre couvre les bords des châssis. l'ne caisse de ce genre peut contenir de vingt à vingt-deux jeunes plantes et ne pèse pas plus de 22 à 25 kilogrammes lorsqu'elle est pleine. Elle a donc l'avantage de représenter exactement la charge d'un hourjane. Il y aurait intérêt, surtout pour les centres éloignés des stations agrono- miques à faire construire un nombre de serres ward proportionné à l'importance des commandes adressées périodiquement au service de l'agriculture. HUILE DE COCO A MADAGASCAR S5 L'emploi des serres portatives se recommande particulièrement lorsque les plantes délicates doivent voyager pendant plusieurs jours, ou lorsque le transport doit être effectué par mer. Tananarive, le 10 mars 1902. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur c/énérai de Madagascar et Dépendances, Gallieni. PRODUCTION DE L'HUILE DE COCOS A MADAGASCAR Monsieur le Ministre. Par dépêche n" 5268, du 8 mars dernier, vous avez bien voulu me faire connaître que le commerce français cherchait à importer directement en vue de la fabrication des savons lins, des huiles de cocos de belle qua- lité, et vous m'avez demandé si la production de ces huiles de Madagascar serait suffisante pour répondre aux demandes des industriels français. J'ai l'honneur de vous rendre compte de l'impossibilité dans laquelle se trouve acluellement la Colonie de satisfaire aux besoins du commerce de la Métropole. La seule fabrique de savons qui existe dans la Grande Ile est en effet obligée d'importer des noix des Seychelles, car le nombre des cocotiers en plein rapport est encore restreint à Madagascar. Je dois ajouter que cet état de choses est appelé à se modifier complè- tement dans un avenir prochain. L'attention des planteurs a été attirée à plusieurs reprises sur les avantages que présenterait pour eux la création de cocoteries dans les terrains des régions côtières où la qualité du sol ne permet pas toujours d'espérer de l'exploitation des cultures riches (vanille, cacao, etc.), des résultats suffisamment rémunérateurs. L'administation de son côté n'est pas restée inactive. La cocoterie créée à Vohldotra près de Taniatave a pour but de déterminer les meilleures espèces de cocotiers à cultiver dans la Colonie et de fournir des semences aux colons et aux indigènes. Cet établissement fonctionne dans des con- ditions satisfaisantes, mais ne pourra pas commencer avant cinq ou six ans à distribuer des noix de semence. Dans le même ordre d'idées, je viens de décider la création de cocote- ries de village dans le territoire sakalave. Dans chaque village ou groupe de villages des terrains domaniaux seront choisis sur lesquels les habi- tants feront chaque année des plantations de cocotiers dont l'importance sera proportionée à la fertilité du sol et au chiffre de la population. Le 56 DOrrArENTS OFFiriF.I^S cocotier ne commençant à produire que la septième année, pendant six ans. la Colonie fournira gratuitement les noix de semence. A partir de 1908, les villaf,-es seront tenus de planter une certaine pro- portion des noix récoltées dont le nombre ira en diminuant au fur et à mesure que celui des arbres en plein rapport auf>mentera. A partir de la même époque une légère taxe sera établie sur les plantations en rapport pour permettre à la Colonie de récupérer les avances qu'elle aura faites. Des primes pourront être accordées aux villages qui se seront fait remar- quer par les soins donnés à leurs pépinières. J'attends les meilleurs résultats de cette organisation, et j'espère. Mon- sieur le Ministre, que, grâce aux eiforts combinés de l'Administration et des particuliers, Madagascar pourra dans quelques années satisfaire aux demandes de l'industrie métropolitaine et ail'ranchir le commerce fran- çais de l'intermédiaire des maisons de commission étrangères, Veuillez agréer. Monsieur le Ministre, riiommage de mon respectueux dévouement. Gallieni, INDO-CHINE CONSEIL SUPÉRIEUR DE l'iNDO-CHINE ORGANISATION DES SERVICES LOCAUX D'AGRICULTURE Bapporf (lu Directeur deV Agriculture et du Commerce de Vlndç-Chine. Par arrêtés des 30 avril 1897, 1'' mars et 10 mai 1899, vous avez créé successivement au Tonkin, en Cochinchine et en Annam, des directions locales d'agriculture, et par arrêté du 27 septembre 1898, un service d'Agriculture au Cambodge. Ces institutions ont pour objet la recherche des moyens de développer la prospérité des divers pays de l'Indo-Chine, l'introduction de cultures nouvelles et l'étude des perfectionnements à apporter aux procédés de cul- ture actuellement eu usage. Fidèles à cette mission, elles ont, depuis leur fondation, rempli leur rôle avec un zèle et un dévouement dont je me plais à témoigner comme j'ai déjà eu l'honneur de le faire à la dernière session du (Conseil supé- rieur, réuni à Hué. A celte même réunion, M. le Président de la Chambre d'agricullure du Tonkin a présenté une note au sujet du rattachement, qu'il propose, des directions locales d'agriculture à la Direction de l'Agriculture et du Com- SERVICES LOCAUX d'aGRICULTURE EN INDO-CHINE 57 merce de l'Indo-Chine, ainsi que des modifications budgétaires et admi- nistratives que ce rattachement entraînerait avec lui. Vous avez décidé, à cette époque, de faire mettre cette question à létude, et c'est le résultat de cette étude, en ce qui me concerne, que j'ai l'honneur de soumettre à votre examen ; les propositions qu'elle me semble comporter sont consignées dans le projet d'arrêté ci-joint. A la Direction de l'Agriculture et du Commerce, dont les attributions sont définies par le décret du 7 février 1901, est assigné, aux termes de ce décret, le rôle d'un organe régulateur des efforts et des travaux des directions locales et centralisateur des résultats obtenus. Le décret n'indique pas les voies et moyens d'exercice de ce rôle et il ne prévoit pas, notamment, le rattachement des directions locales à la Direction de l'Agriculture et du Commerce. Ce rattachement complet : budget, personnel et attributions, tel qu'il est proposé par M. le Président de la Chambre d'Agriculture de Hanoï, n'étant pas prévu au décret organique, serait donc une double dérogation au texte de ce décret et aux dispositions des arrêtés organiques des direc- tions locales d'agriculture. Il a paru, de plus, que le rôle du service général de l'Agriculture et du Commerce comportait moins la charge des détails d'administration des services locaux que la direction et la coordination de leurs travaux, dans un but de profit, non pas restreint au pays titulaire du service local, mais étendu à toute l'Indo-Chine. De fait, les choses se sont passées de la sorte, pendant les dernières années, dans un grand nombre de circonstances, les directions d'agriculture de Cochinchine, du Tonkin, de l'Annam, ainsi que le service du Cambodge, se sont prêtés, par l'intermédiaire et sur la demande de la Direction de l'Agriculture et du Commerce, concours et aides empressés et dévoués. Les produits des jardins botaniques et des jardins d'essais sont l'objet d'échanges multiples ; les planteurs français de l'Indo-Chine trouvent par notre intermédiaire, sans distinction de limites administratives, et dans la limite du possible, les produits qu'ils sollicitent et qui leur parviennent de la Direction de Cochinchine ou de l'Annam, si celle du Tonkin, par exemple, en est dépourvue. Le concours mutuel est donc assuré, grâce à l'esprit hautement éclairé des chefs d'administration locale et au dévouement des Chefs des services locaux d'Agriculture. Dans ces conditions, il ne paraît pas indispensable de rattacher les services locaux à la Direction générale dans le sens proposé par M. le Président de la Chambre d'agriculture de Hanoï. J'estime, toutefois, qu'il y aurait intérêt réciproque à resserrer davantage, et par l'autorité d'un texte d'arrêté, les liens qui doivent unir ces divers organes dans la pour- suite d'un but commun. 58 DOCUMENTS OFFICIELS Quel que soil le jeu de leur i'onclionnement budgélaire ou atiministra- til\ il me semble que l'unité d'une direction technique ])our Texécution de leur programme de colonisation peut seule se porter garante de l'esprit de suite qui doit présider à leurs travaux et de la coordination de ces tra- vaux qui doit éviter la dispersion de leurs efforts, et les onéreux et trop souvent stériles recommencements. Le principe de cette unité est inscrit au titre 1®' du projet darrêlé. Le litre II détermine la composition et le recrutement du personnel des directions locales d'agriculture et des services annexes. Le cadre de ce personnel n'a jamais été l'objet d'une réglementation précise. Il en résulte que le personnel européen n'a pas de classement défini et qu'il se trouve dans une situation incertaine, inférieure à l'importance grandissante de ses fonctions, et inférieure également à la situation qui est faite aux fontionnaires des autres services de la Colonie. L'établissement d'un cadre régulier rend également possible le judicieux recrutement du personnel, et permet équitablement, d'exiger de lui une somme de connaissances et delforts proportionnés au but à atteindre. Le cadre actuel comprend le personnel européen et les soldes suivants (Exercice 1902) : ^ COCHINCHINE | TONKIN 1 • ANNAM 1 CAMBODGE || — ■ ^^ ^1 — — " ^--^ — O 1 c Z Solde 'o < j: ■ s o Z Solde (n 'S ■f. 9 o < 0) z Solde u ■f ■J. 4. < S c 0 z Solde "S 'S. © francs franc? Directeur 1 12.000 2.400 1 12.000 2. 100 1 12.000 2. iOO 1 — — — Chef (le service. . . . 1 G. 500 1.500 Ins])ecteur. . . 1 10.000 1.000 1 -.000 1 . t<00 1 û . 000 l.SOO Directeur de laboratoire. ] 0.000 — 1 S. 000 — — — A{jents de cul- — ture ' •-) i . 000 — 1 5.000 — 1 1 . 000 1 1 . 000 — i :5 500 — 5 3.000 — •J 3.;)()()| 1 3.()0(ll — • i 2.7001 Jardiniers sur- veillants. .. . 1 2 . r)02 1 5.500 — • Commis 1 f) . 000 — 3.500 Chimistes 1 1 3.000 1 .SOO — 1 i . 000 Professeur à l'Ecole d"a- f;riculture de Hué y 1 1 1 ■l . 000 1. iOO fr. d'indenniité de vivi-es à six agents et 50 piastres par umis à deu.\ agents au Lang-bian, SERVICES LOCAUX d' AGRICULTURE EN INDO-CHINE 59 On voit, par Tinspection de ce tableau, qu'à part la solde et les acces- soires de solde de trois directeurs, aucune règle ne fixe les grades et les soldes du personnel sous leurs ordres. Cet état de choses prête à double critique : aucune raison d'ordre technique ou de nécessité de -qualité d'agent n'explique la différence de traitement appliquée aux agents de cul- ture des divers pays de l'Indo-Chine ; ae plus, en l'absence d'un cadre régulier, les agents de culture se trouvent entrer dans le service avec une solde, il faut bien le dire, faible par rapport aux connaissances qu'on doit exiger d'eux, sans avoir la perspective de pouvoir améliorer beaucoup leur situation par un avancement régulier comme il a lieu dans les autres services. Ils obtiennent ainsi très vite leur « bâton de maréchal « et le besoin d'émulation qui est un facteur important pour avoir des agents de qualité avançant dans le cadre, ne se fait plus longtemps sentir. Il est d'ailleurs juste de ne pas élever une barrière infranchissable au milieu du cadre d'un service comme celui-ci, où la valeur des connaissances pratiques doit entrer fortement en ligne de compte. Pour le recrutement des agents de culture, des sous-inspecteurs et du personnel des laboratoires de chimie, le projet d'arrêté prévoit des garan- ties qui me semblent réelles, étant donné le développement auquel atteint aujourd'hui l'enseignement professionnel dans les établissements métropolitains de l'h^lat. Pour le recrutement du personnel dirigeant, placé à la tête du service, il m'a paru préférable de ne pas le lier au texte d'une disposition d'arrêté qui ne pourrait forcément pas déterminer toutes les compétences aux- quelles il pourrait y avoir avantage, pour le service, à confier des fonc- tions directrices. Par contre, le projet d'arrêté prévoit un cadre spécial d'agents auxquels on demande surtout des connaissances pratiques : les jardiniers. Les chefs de service sont d'accord pour reconnaître l'utilité de ces pra- ticiens, non pas en vue du service d'ornementation qui, soit dit incidem- ment, pourrait être mis à la charge des municipalités, mais pour toutes les opérations de jardinage et de multiplication des plantes économiques que les agents de culture ne suffisent généralement pas à assurer. Enfin, le projet d'arrêté prévoit le cadre d'un personnel indigène, dont le recrutement et l'avancement en grade se trouvent aussi fixés. Ces auxiliaires, parmi lesquels d'aucuns ont déjà de longues années de service, deviennent précieux par les connaissances techniques qu'ils ont acquises au bout de ce laps de temps et, s'il est utile de les attacher au service par la perspective d'un avancement mérité, il est juste de le leur assurer par une commission régulière et stable. En ce qui concerne les soldes des différents grades du cadre européen, 60 DOCUMENTS OFFICIELS elles correspondent à celles des f;rades équivalenls dans des administra- tions locales semblables (Instruction publique, cadastre, secrétariat du Gouvernement en Cochinchine). L'application des dispositions transitoires, prévues au titre III du pro- jet d'arrêté, n'atteint que deux fonctionnaires au point de vue de leur titre (inspecteur) auquel correspond, au tableau de classement, une solde plus élevée que celle qui leur est allouée actuellement. Au surplus, ces dispositions transitoires dispensent les budj;ets locaux de toute charge complémentaire qui résulterait, autrement, de l'applica- tion de l'arrêté. Hanoï, le 28 février 1902. Le Directeur de iAgriciiltiire et du Commerce de Vlndo-Ch'ine. G. Gapus. Arrêté du 28 février 1902, PORTANT organisation DES SERVICES LOCAUX d'aGRIGULTURE DE l'iNDO-CHINE Le Gouverneur Général de l'Indo-Ghine, Vu le décret du 21 avril 1891 ; Vu les arrêtés des 30 avril 1897, l^'' mars 1899, 10 mai 1898, créant des directions d'Agriculture au Tonkin, en Cochinchine et en Annam, et l'arrêté du 27 septembre 1898, instituant un service d'Agriculture au Cambodge ; Vu l'arrêté du 17 février 1900, rendant exécutoire l'ordonnance du roi d'Annam du 26 octobre 1898, créant à Hué une Kcole d'Agriculture; Vu les arrêtés des 80 octobre et 1'^'' décembre I89(i, créant en Indo- Chine un emploi d'inspecteur d'Agriculture et en fixant les attributions; \n l'arrêté du 1'''" mars 1899, rattachant le laboratoire d'analyse de Sai- gon aux services de l'Agriculture de la Cochinchine ; Vu l'arrêté du 20 septembre 1899, créant un laboratoire à Hanoï et rat- tachant ce laboratoire aux services de l'agriculture du Tonkin ; Vu le décret du 7 février 1901, portant organisation d'une Direction de l'Agriculture et du Commerce de l'Indo-Chine ; Vu l'arrêté du 13 février 1899, fixant les attributions des services géné- raux et locaux de l'Indo-Chine et les rapports de ces services entre eux ; Vu le décret du 3 juillet 1897, sur les indemnités de route etde séjour, et les frais de passage du personnel colonial ; Sur la proposition du directeur de l'.Vgriculture et du Commerce de l'Indo-Chine et lavis conforme du Directeur dos Alfaires civiles, Le Conseil Supérieur de llndo-Chine entendu. SERVICES LOCAUX d' AGRICULTURE EN INDO-CIIINE 61 Arrête : TITRE PREMIER Organisation et fonctionnement des directions locales d'agriculture et des services annexes. Article premier. — Les Directions locales crAgriculture et les services annexes des divers pays de l'Indo-Ghine sont placés sous Tautorité des Résidents supérieurs et du Lieutenant-Gouverneur, conformément aux dispositions des articles 5 et 6 de l'arrêté du 13 février 1899. Elles dépendent du Directeur de TAg-riculture et du Commerce pour toutes les questions d'ordre technique relatives à l'amélioration et à l'extension des cultures existantes, à l'introduction de cultures nouvelles et, d'une manière générale, au développement agricole de l'Indo-Ghine. Art. 2. — Les jardins d'essai, les plantations et les champs d'expé_ riences sont dirigés par les Directeurs d'Agriculture, Ghefs de services locaux, sous le contrôle du directeur de l'Agriculture et du Gommerce. Art. 3. — Les Directeurs d'Agriculture, Ghefs de services locaux, adresseront au Lieutenant-Gouverneur ou au Résident supérieur et au Directeur de l'Agriculture et du Gommerce, un rapport trimestriel sur la marche de leur service, ainsi qu'un rapport spécial semestriel et d'ensemble sur les résultats obtenus dans les jardins d'essai et sur les plantations et champs d'expériences. Art. 4. — Les laboratoires d'analyses chimiques agricoles et indus- trielles relèvent du Directeur de l'Agriculture et du Gommerce de l'Indo-Ghine pour toutes les questions d'ordre technique ou scientifique. Les Directeurs de ces laboratoires adresseront, par l'intermédiaire des Directeurs locaux d'Agriculture, s'ils sont placés sous leur autorité, un rapport semestriel sur les travaux effectués dans leur service, à la fois au Résident supérieur ou au Lieutenant-Gouverneur et au Directeur de l'Agriculture et du Gommerce. Art. 5. — Ges travaux, notes, rapports et communications des Direc- teurs de l'agriculture et des Directeurs des laboratoires, feront l'objet, s'il y a lieu, d'une publication au Bulletin Economique de rindo-Chine. titre II Composition et recrutement du personnel. Art. 6. — Le personnel des services locaux d'agriculture de l'Indo-Ghine comprend un cadre européen et un cadre indigène. Art. 7. — Le cadre du personnel européen est fixé par un arrêté du Gouverneur Général, pris sur la proposition des Ghefs d'administration locale intéressés et l'avis du Directeur de l'Agriculture et du Gommerce de l'Indo-Ghine. 62 DOCUMENTS OFFICIEL Il comprend les grades suivants : A. — Directeur d'agriculture de V^ classe ; Directeur d'agriculture de 2® classe ; Inspecteur d'agriculture ; Sous-inspecteur d'agriculture ; Agent principal de culture ; Agent de culture de P" classe ; Agent de culture de 2" classe; Agent de culture de S'' classe ; Agent auxiliaire de culture. B. — Directeur de laboratoire d'analyses ; Chimiste, chef de laboratoire d'analyses ; Préparateur de chimie. C. — Jardinier chef ; Jardinier ; Aide-Jardinier. Art. 8. — La solde et le classement des agents des services locaux d'agriculture de l'Indo-Chine sont fixés conformément aux indications du tableau annexé au présent arrêté. Art. 9. — En dehors de ce cadre, peuvent être nommés agents tempo- raire, à solde mensuelle, les candidats qui sont âgés de moins de vingt ans ou qui ne justilieraient pas d'un titre ou diplôme leur donnant droit à un emploi du cadre permanent. Art. 10. — Le personnel européen des services locaux d'agriculture est nommé par arrêté du Gouverneur Général de l'Indo-Chine, sur la propo- sition du Lieutenant-Gouverneur ou du Résident supérieur, le Directeur de l'Agriculture et du Commerce consulté. Les agents temporaires sont nommés par décision du Lieutenant-Gouver- neur ou du Résident supérieur. Art. 11. — Les agents de culture européens sont recrutés parmi les élèves diplômés des l<>coles pratiques d'agriculture ou de l'Ecole d'horti- culture de Villepreux. Ils devront justifier de deux années, au moins, de pratique agricole dans les établissements privés ou publics de France ou de l'étranger, ou dune année de présence au Jardin Colonial. Ils peuvent être recrutés également parmi les agriculteurs et horticul- teurs de profession, justifiant de la connaissance et de la pratique éclairée des cultures tropicales. Aut. 12. — Les candidats aux emplois d'agent de culture doivent en outre justifier :. SERVICES LOCAUX d'aGRICL'LTURE EN INDO-CHINE 63 1" Qu'ils sont Français ou naturalisés Français ; 2° Qu'ils ont satisfait à la loi sur le recrutement de l'armée; 3° Qu'ils ont les aptitudes physiques nécessaires pour servir en Indo- Chine. Art. 13. — Les nominations dans le cadre européen des agents de cul- ture ont lieu exclusivement à l'emploi d'agent auxiliaire. Pour les agents de culture, les avancements à la classe supérieure, dans chaque grade, ont lieu au choix, après un an, au moins, de service efTec- tif dans l'emploi d'agent de 3" classe, et après dix-huit mois, au moins, de service etfectif dans la classe immédiatement inférieure, pour les grades d'agents de culture de 2" classe et de l'"*^ classe et d'agent principal. Art. 14. — Les sous-inspecteurs sont choisis : 1" Parmi les élèves diplômés de l'histitut National agronomique ou des Ecoles nationales d'agriculture de France ou de l'Ecole d'agriculture coloniale de Tunis, ayant accompli une mission d'études d'une année, au moins, dans les colonies tropicales, ou ayant fait un séjour d'une année au Jardin Colonial ; 2° Parmi les agents principaux de culture du cadre de l'Indo-Chine. Art. 15. — Les Chimistes, Directeurs ou Chefs de laboratoires sont choisis parmi les élèves diplômés de l'Institut National agronomique, des Ecoles nationales d'Agriculture, de l'Ecole centrale, de l'Ecole de phy- sique et de chimie ou les licenciés es sciences. Art. 16. — Les Directeurs locaux et les Inspecteurs d'Agriculture sont choisis par le Gouverneur Général, sur la proposition du Lieutenant Gou- verneur ou des Résidents supérieurs et l'avis conforme du Directeur de l'Agriculture et du Commerce de l'Indo-Chine. Art. 17. — Les peines disciplinaires qui peuvent être prononcées contre les fonctionnaires et agents des directions locales d'agriculture et des ser- vices annexes sont les suivantes : 1° La réprimande ; 2° Le blâme avec inscription au dossier ; 3° La suspension de fonctions comportant retenue de solde ; 4° La rétrogradation ; 5° La révocation. Art. 18. — La réprimande, le blâme avec inscription au dossier et la suspension des fonctions sont inlligés par le Lieutenant Gouverneur ou le Résident supérieur. La rétrogradation et la révocation sont prononcées par le Gouverneur Général, sur la proposition du Lieutenant Gouverneur ou du Résident supérieur, après avis d'un conseil d'enquête. .Art. 19. — Le cadre des agents de culture indigènes comprend les grades et soldes qui suivent : 64 DOCUMENTS OFFICIELS Agent principal de l""^ classe, à la solde annuelle de. 2"' Agent titulaire de f" — '2e Agent auxiliaire de f® — 2*" — 3« — . 600 piastres. . 480 — . :i60 — . i>88 — .216 — , . 180 — . 144 — AuT. 20. — Les agents de culture indigènes sont nommés par arrêté du Chef de l'administration locale et recrutés de préférence dans le personnel journalier des jardins botaniques, champs d'essai et d'expérience et des Directions d'agriculture locales. Art. 21. — Les avancements au grade ou à la classe supérieure ont lieu, au choix, après deux ans, au moins, de service dans le grade ou la classe immédiatement inférieure. DISPOSITIONS TRANSITOIRES Les agents des services locaux d'agriculture actuellement en service sont répartis par décision du Gouverneur Général, dans les classes et grades prévus au tableau n" 1 annexé au présent arrêté. Mais ils recevront leur solde actuelle jusqu'au jour où, par voie d'avancement, la solde prévue pour leur grade et classe dans le cadre général leur sera accordée. Tableau fixant les grades el traitements du personnel des Directions locales d'ayri- ciillure el des services annexes. SOLDE CLASSEMENT oint (le vue (le.* frais de route, (le séjour à l'Inipital, GRADES ET CLASSES d'Europe Coloniale ilo-; indemnités de séjour des passaj,^es et (les voyages a 1 étranger Flancs Francs Dircdriiis (ragiiiiilliire de i" classe id 2-^ — 7 . 500 (i . 000 15.000 1 2 . 000 '■ ■ Catégorie B. Inspcclcui's d'agriculture 5 . 000 10.000 2' Sous-iiis])ecleurs d'ajiricullurt'. . . :>, . 500 7.000 Catt'gnrie. Aj^'i-uts ])i'inci])au.\ de cullui'c. . . . 3.000 ()()00 Aj;cnts de cuUiu-e de 1'^" classe. . . 2 . 500 5.000 id. 2" classe. . . . 2.250 1.500 i .000 3" (.alcgiiric. 1(1. 3" c-lasse. . . . 2.000 Aj;enls de culture au.xiliaires 1 . 750 3.500 1 !'■ (.alegorie. .lardinicrs chefs 2 . 500 5.000 3- ("atégorie. .lardiniers ■ . . . . 2 . 000 1.500 1.000 3.000 1 1 ■i'' (catégorie. Aide-jai'diniers Dirccli'iirs de laboniloirc d'analyses ("liiuiistcs, chefs de hiboratoirc. . . 5 . 000 1 . 000 10.(1(10 1 x.ooo 2'' Calégoi'ie. (>liiuiisLes 2 . 000 1 . 500 1.000 3 . 000 3'' Catégorie. Catégoi'ic. Pi'éparateurs de cliiniie RAPPORT 65 Art. :23. — Sont et demeurent abrogées toutes les dispositions anté- rieures contraires à celles du présent arrêté. Art. 24. — Le Directeur des Affaires civiles de, l'Indo-Chine, le Lieu- tenant-Gouverneur de la Gochinchine, les Résidents supérieurs au Tonkin, en Annam, au (jambodge et au Laos et le Directeur de TAgriculture et du Commerce de l'Indo-Chine sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Hanoï, le 28 février 1902. Signé : Paul Doumer. RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA REPUBLIQUE Suivi d'un décret portant modification au décret du iS Juillet 18 76 relatif à la circulation et à la vente des vanilles à la Guadeloupe. Paris, le 3 juin 1902. Monsieur le Président, La circulation de la vente des gousses de vanille verte et des lianes de vanille est réglementée à la Guadeloupe par un décret du 16 juillet 1876, qui comporte, en cas d'infraction aux prescriptions qu'il édicté, des peines pouvant s'élever à trois mois d'emprisonnement et 500 francs d'amende sans jamais descendre au-dessous de cinq jours de prison et 25 francs d'amende. Ce texte ne prévoit pas en effet l'admission de circonstances atténuantes. Il a paru au Gouverneur de la Guadeloupe que cette sévérité est exces- sive et que, sans affaiblir l'efficacité de la réglementation, il serait possible d'en atténuer la rigueur en ajoutant à l'article 3 du décret du 6 juillet 1876 un paragraphe autorisant l'application de l'article 463 du Code pénal. Je ne vois aucun inconvénient à donner suite à cette proposition et j'ai fait préparer dans ce but le projet de décret ci-joint qui a reçu l'adhésion du Conseil d'État. J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien le revêtir de votre signa- ture. Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'hommage de mon profond respect. Le Ministre des Colonies^ Albert Decrais. Bulletin du Jardin colonial. 5 66 DOCUMENTS OFFICIELS DÉCRET Le Présidenl de la République française, Sur le Rapport du Minisire des Colonies, Yu le Sénatus Consulte du 3 mai 1854 sur Torganisation des Colonies, ^'u le décret du 18 juillet 1876 réglementant la circulation et la vente de la vanille verte à la Guadeloupe, Au la loi du 8 janvier 1877 portant application du Code pénal métro- politain aux colonies des Antilles et de la Réunion, Le Conseil d'Etat entendu, Décrète : Akticlk l'uiiMiEH. — L'article 3 du décret du 18 juillet 1876 est com- plété ainsi qu'il suit : « L'article 463 du Code pénal est applicable aux infractions susvisées. » Art. 2. — Le Ministre des Colonies est chargé de l'exécution du pré- sent décret qui sera publié au Journal Officiel de la République fran- çaise et au Bulletin officiel du Ministère des Colonies. Fait à Paris, le 3 juin 1902. Emile Loubet. Par le Président de la République, Le Ministre des Colonies, Albert Decrais. ÉTUDES ET MÉMOIRES LE KINKELIBA En 1889, le R. P. Raimbault, missionnaire apostolique, envoyait à M. Heckel une assez grande quantité de feuilles d'une plante arborescente de l'Afrique occidentale, qu'il lui signalait comme ayant à sa connaissance donné, en décoction, les meilleurs résul- tats curatifs dans les cas de fièvre bilieuse hématurique. Ce végétal, qui était désigné en langue Soso sous le nom de Kinkélihah, fut étudié par MM. Heckel et Schlagdeînhalffen '. L'analyse ne semble pas avoir donné de résultats bien probants, en ce qui concerne la présence d'un principe réellement actif. L'un de ces savants a pu isoler des feuilles un tannin et constater la présence d'azotate de potassium; ce qui en ferait un tonique et un diurétique. Sur l'examen de ses échantillons incomplets, et sans donner de description scientifique, M. Heckel crut devoir attribuer à la plante qui fournit le Kinkéliba un nom nouveau, et il l'appela le Conibre- tuni Raimhaulti, qui, dit-il, se rapproche du Cornhrefuni glutino- surn Guillot et Perrott. Depuis cette époque, quelques notes publiées de-ci de-là rappor- tèrent le Kinkéliba à diverses espèces de Combretuni. C'est ainsi qu'en 189.0, un article anonyme du << Public opinion- » n'hésite pas à le désigner sous le nom de Conihretum glutinosum. Engler^, en 1896, étudiant la provenance de cette drogue, l'identifie au C. altum Guill. et Perrott., qui, lui-même, ne serait autre que le C. micranthum Don. Plus récemment encore, dans sa superbe Monographie des plantes africaines '% le savant botaniste de Berlin confirme sa manière de voir précédente, en rapportant de nouveau le Kinkéliba au C micranthum, dont il sépare, cette fois, comme espèce particulière,, le C. altum Perrott., en y rattachant seulement le C. altum DC. 1. Heckel et Sckladextrauffen, Rêp. de Pharin. Paris, 1891, 3" série, III, 24G. 2. Public Opinion, n° du 9 août 1895. 3. ExoLEH, Notizhl. d. Koniyl. bol. Gart. iindMus. zû Berlin, 1896, n" -i, p. 151. 4. A. ExGLER et L. Diels, in Monog. ufrikan Pfl. Fani. and Gotl. Leipzig-, 1890,. pp. 17-19. 68 ÉTUt)i:S ET MKMOIKE^ Il n'était donc pas inutile de revenir sur cette question. Des matériaux abondants avaient été mis à notre disposition dune part par le Jardin Colonial de Nof^ent-sur-Marne, d'autre part par notre excellent ami A. Ciievaijki;. dont })ersonne n'oublie l'intéres- sante mission au Soudan, et qui, à cette heure, se dirige de nouveau plein de confiance vers les régions inexplorées et encore mysté- rieuses du Chari et du lac Tchad. Grâce à ces échantillons, qu'il nous a été très facile de comparer avec ceux de la collection du Muséum — et nous sommes heureux de remercier M. Hua de son obligeance à notre égard — ainsi qu'avec ceux de la collection de Matière médicale de l'École de Pharmacie, nous pensons pouvoir trancher définitivement la ques- tion de l'origine botanique du Kinkéliba, et nous pouvons fournir une description des plus détaillées de cette intéressante plante. Description. — Le Kinkéliba est, en général, un arbrisseau touffu de 2 à 4 mètres de hauteur, mais qui peut atteindre, dans certaines régions de l'Afrique occidentale, des dimensions beaucoup plus élevées. D après les notes de voyage de M. Alg. Chevalier, il devient parfois même un arbre de 8 à 10 mètres, et forme (^-à et là de véritables petites forêts. Les feuilles, pour la plupart, jaunissent et tombent en février, mais les fruits restent encore adhérents à l'arbre. Les jeunes rameaux sont rougeàtres, et leurs extrémités deviennent sarmenteuses, blanchâtres et s'enroulent de droite à gauche. L'écorce des troncs âgés est blanc grisâtre et iibrilleuse ; les fleurs petites, de couleur vert jaunâtre, inodores, apparaissent pendrnt la période d'hivernage en octobre-novembre, et les fruits arrivent à maturité en février-mars. Les divergences de vue des Systématiciens sont ])arfaitement expli- cables si l'on considère le polymorphisme de cette plante dont le port est exti'êmement variable avec les conditions biologi{pies naturelles. Tantôt c'est une liane sarmenteuse, s'enroulant sur les arbres voi.sins, et presque pjriree de feuilles; d'autres fois, au contraire, elle se présente sous la forme d'un buisson loullii, à fcuilln(fe frès dense. De plus, son aspect varie considérablement ;ivec réj)oque de l'année : c'est ainsi que, au moment de l'apparition des fruils, le feuillage s'éclaircit et l'arbuste se dénude de plus en plus, pendant (jue les feuilles restées adhérentes passent du vert au jaune plus ou moins rougeâtre. l'^nlin, ^L (]hi:vamei< alïlrme avoir rencontré côte Fig. 1. — Reproduction iihotographi(iue d'un écliantillon d'herl)ier du vrai Kinkoliba (Herbier Clievalier). LE KINKÉLIBA 71 à côte des Kinkélibas arborescents, les uns couverts de feuilles quand leurs voisins en étaient presque entièrement dépourvus; les échantillons de l'herbier Chevalier ne laissent aucun doute sur ce polymorphisme remarquable. Habitat. — Le Kinkéliba croît dans les sols sablonneux (Gayor) ou sur les plateaux ferrugineux (Thiès, plateau du Soudan), sur les grès de Koulikoro, dans les sols alluvionnaires riches en humus de la Casamance, etc. Très commun, en un mot, dans la région que M. Chevalier a désigné sous le nom de zone soudanienne, il est très peu répandu dans la zone guinéenne et paraît manquer dans la zone sahélienne. Caractères botaniques externes. — Arbuste ou parfois arbre à feuilles opposées, pétiolées, ovales-elliptiques, à nervation pennée, plus ou moins atténuées aux deux extrémités et acuminées au som- met. Epis floraux axillaires, entourés de bractées charnues et caduques, et composés généralement de fort nombreuses petites fleurs, légèrement rosées et ponctuées de taches couleur de rouille. Chacune d'elles comprend un calice à 4 dents, une corolle à 4 pétales en languette et 8 étamines exsertes sur deux verticilles, les épisépales insérées au-dessous des épipétales ; à la base des filets des étamines, et séparant le gynécée, on distingue nettement une couronne de poils. Le style est droit, plus court que les étamines, et terminé par un renflement stigmatique. L'ovaire est une sorte de tube oblong, court, qui se développe en un fruit courtement pédoncule, d'une longueur de 10-12 mm. et pourvu de 4 ailes mem- braneuses semi-lunaires, finement striées dans le sens horizontal et un peu découpées sur les bords. Ces dernières sont de couleur vert pâle et prennent à la maturité un aspect argenté caractéristique avec de petites stries brillantes rayonnant du centre à la périphérie qui lui donnent un aspect moiré. La surface du fruit comprise entre ces ailes est couverte à l'état frais de petites écailles pourpre noi- râtre, et, à l'état sec, d'une abondante poussière brune. Le fruit renferme une seule graine à deux cotylédons charnus et plissés. Si l'on compare cette description à celles que Dois, Glillemin et Perrotet, Spach, Diels et Engler ont donné du C. micranthuni Don., on voit qu'il est impossible de trouver des caractères diffé- rentiels permettant de faire du Kinkélika une espèce nouvelle. Peut-être aussi le C. altum Perrott. pourrait-il lui-même rentrer 72 ETUDES ET MEMOIRES a l'état de sous-espèce ou même de variété dans ce même type. Quoi qu'il en soit, le Kinkéliha s'éloig-ne franchement du C. gluti- nosurn Perrott.^ bel arbre à feuilles verticillées par trois, ellip- tiques, allongées, rétrécies en péliole ; d'ailleurs, les comparai- sons anatomiques apportent ici des arguments sans réplique. MorpJwloyie inlcnie. — Tige. Fig. 2. — Schémas de coupes transversales de tige. — A. Combrelurn micraïUhum type ; B, Kinkéliba; L, Liber; Icp. tissu crililé périiiiéduilaire. La structure est identique. G ^=30 diamètres environ. La structure de la tige du Kinkéliba est absolument identique à celle du C. micranthum Don., comme le montrent les schémas ci- contre (A. et B., fîg. 2). La tige jeune présente un épidémie avec des poils unicellulaires et un parenchyme cortical avec nombreuses macles d'oxalate de calcium. Un périderme, qui se développe vers la partie moyenne de l'écorce, exfolie dans les tiges âgées, la partie externe de cette région, et plus tard les assises subéro-phelloder- mique prennent naissance plus profondément vers le j)éricycle. Le liber est formé d'amas irréguliers, dans lesquels il apparaît (^'à et là des îlots de fibres, et le jiarenchyme est très riche en oursins d'oxalate de calcium. Le bois est très dense, avec de larges vaisseaux isolés au milieu du sclérenchynie ligneux, dont les éléments renferment fréquemment des prismes oxalifères. 1. Voir description, in Diki.s e( KNr-.i.nn. Mon. Afrili. /'//., loc cil., p. 49. LE KINKÉLIBA 73 A la face interne du bois, le tissu criblé périmédullaire tcp^ caractéristique de la famille des Combrétacées, est généralement réuni en deux larg-es bandes, à peu près symétriquement disposées et pourvues de màcles et de fibres. Enfin, dans la moelle, on remarque d énormes fibres, fortement sclérifiées, et renfermant souvent, à l'intérieur, de volumineux cristaux d'oxalate calcaire '. Fig. 3. — Schéma de la coupe transversale d'une tige de C. (jliilinosum. E, écorce exfoliée par le fonctionnement d'une assise phellog-ène. L, liber avec strates de fibres; Ici, ilols criblés interligneux; Icp., tissu criblé périmédullaire. G ^^= jO diamètres. Dans le C. glutinosum, l'aspect g-énéral dilfère peu, mais la pré- sence d'îlots criblés interligneux est tout à fait caractéristique et ne permet en aucune façon la confusion avec l'espèce ci-dessus. 1. E. Lefùvre, Sur le Giiierr du Sénéfjal, liei\ des Cuil. col., 1902; 6' année, t. X, p. 199-206. 74 ETUDES ET MEMOIRES Ces îlots, jDroduits à la façon de ceux de Slrychnos. par arrêt de fonctionnement du coté externe d'un arc cani])ial, possèdent clia- cun à leur intérieur une poche à f/nmmc issue de la transformation gommeuse des parois cellulaires, et leur destruction consécutive. B. Fi" Portion de bois du (J. glnlinosiim montrant un Ilot criljlé iiitorlijxnoux tci avec sa poclic à pomme. G ^ MO d. Feuille. — Le pétiole et les nervures principales reproduisent les caractères anatomiques de la tig^e. Chez le Klnl.éliha F et le C. micninllinin lî, donl Tanaloyie est encore complète, le système fasciculairc est en arc et le faisceau est accom[)aj^né d'une larg-e bande de tissu péridesmique, représen- tant le tissu criblé j)érimédullaire do hi ti^e; le mésopliylle est bi- facial, avec une seule assise de cellules palissadiques, représentant un tiers de l'épaisseur totale. Dans le C (flulinosuin. le faisceau est représenté par deux arcs se regardant par leur région ligneuse^ et à peine séparés latérale- LE KINKELIBA 75 Fit:^. 5. — A. Schéma de la coupe de la nervure médiane du C. glulinosum B C. niicraiillium; F, KinkéliljH ; C, épidémie supérieur et F,, épiderme intérieur du Kinkélika ; D, épidémie supérieur du C. gliilinosinii ; Icj), tissu criblé péridermi((ue ; mes., jiuiésohylle ; pp, pas. palissadique : /);■. poils en rosette. G — 220 d. environ pour des épidémies. ment par deux amas de fibres. On ne trouve pas de tissu cril^lé interligneux, mais le tissu criblé péridesmique est très développé. Des îlots de fibres forment une sorte d'anneau discontinu dans le parenchyme du mésopliylle de la nervure. 76 ETUDES ET MEMOIRES L'épiderme de ces espèces est caractérisé par la présence de poils en rosette pr, assez volumineux, rares chez le Kinkéliba, au con- traire très nombreux chez le C. (jlutinosiini (C. D., 11^^. 5). L'épi- derme inférieur est riche en stomates, dont les cellules annexes se dillerencient dilïicilement, et il est interrompu par des invagina- tions représentées en pointillé dans les figures D et G, et qui, très nombreuses chez le C. gliitinosuin, semblent parfois chevaucher les unes sur les autres. Ce sont des cryptes à stomates avec cel- lules prolongées en poils comparables à celles du Nerium olemider. Quant au fruit mûr du Kinkéliba, sa partie centrale offre la structure représentée dans la figure 6. Fig'. 6. — Portion tir r(iivclii]i[ic ilu l'niil ilu Kinlirlib;!. Lépicarpe présente d(îs poils j)luricc'llulaires en rosette, déjà signalés sur la feuille, particulièrement nombreux dans la partie du fruit situé entre les ailes ; le mésocarpe comprend une bande de fibres épaisses, disposées longitudinalement, puis une seconde bande de fibres tangentielles qui forment au fruit une puissante pro- tection ; cette disposition rappelle celle que l'un de nous a déjà Le kInkélibà 'il signalée chez le Guiera senegalensls. La partie plus Interne de l'en- veloppe du fruit est parenchymateuse avec quelques îlots de fibres scléreuses et des faisceaux libéro-ligneux. Le Kinkéliba, qui est désigné dans les dilîérents dialectes afri- cains sous les noms de Késéou, Séhéou, Séréou (Wolof), Talli (Foulbé), Paqiila-Karo (mandingue de Sedhiou, en Casamance), constitue -l'un des médicaments les plus courants de la médecine indigène. On emploie les feuilles en décoction, et il y a tout lieu de croire, dans une certaine mesure, à son efficacité réelle. Il mérite donc d'attirer à nouveau l'attention; mais l'on ne devra pas oublier, en entreprenant de semblables recherches, que des espèces voisines pourront se trouver très facilement mêlées avec la plus grande facilité au véritable Kinkéliba. La plus grande circonspection sera de rigueur pour les expé- riences à entreprendre, et il faudra établir un contrôle sévère sur l'origine authentique de la drogue, du moins jusqu'au jour où l'on aura pu s'assurer que les espèces voisines du Combretum sont entièrement dépourvues d'action thérapeutique. En résumé, d'après nos recherches, le Kinkéliba est fourni par une plante arborescente à port variable, et présentant un aspect très dilférent suivant les conditions biologiques du sol, et suivant l'ex- position. De l'examen de nombreux échantillons d'origines les plus diverses que nous avons eus entre les mains ; il nous est permis de conclure que la plante est exclusivement le Combretum micranthum Don., et l'on sait que, d'après Engler, les synonymies de cette espèce sont les suivantes: C. micranthum Don. ^z: C. parviflorum Reich., = C. altum DG. Le Combretum Raimbaulti de Heckel n'est qu'une des variétés ou formes de cette filante. Devant les affirmations des voyageurs ayant habité les régions où le Kinkéliba jouit dune réputation qui paraît méritée nous le répétons, il serait bon de reprendre l'étude chimique, physiologique et thérapeutique de cette drogue, car nous ne devons pas oublier que la fièvre bilieuse hématurique, dont elle serait un des agents de guérison, constitue l'un des véritables fléaux qui accablent l'Euro- péen sous les climats tropicaux '. E. Perrot et G. Lefèvre. 1. Travail l'ait au Laboratoire de matière médicale de l'École supérieure de Phar- macie de Paris, où l'un de nous poursuit l'étude anatomique comparée des Combré- tacées utiles. MALADIES DU VANILLIER LÉGENDE VE LA PLANCHE Glœosporium-Collelotrichum Vanillée. i. Coupe Lransv. d'une frucLificalion en forme Glœosporium sur feuille : F. fila- ments hyalins entourant la fructilication ; Cutic. cuticule déchirée; Ep. épiderme; S-Ep. cellules sous-épidermique. Ces deux couches sont imprégnées du mycélium My. (Gross. 350 diam.). 2. Trois spores a, b, c isolées (Gross. 600 environ). 3. Stérigmate et spore jeune (Gross. 600). 4. Fructification jeune de la forme Collelolrichum; S. soies très noires (Gross. 150). 5. Une soie isolée (Gross. 600). 6. Poi-tion de fructification de la fig. 4 : Sp. spore jeune au sommet du stérigmate; S. h. soie encore hyaline, jeune (Gross. 380). 7. Germination de spores dans l'eau, le 5' jour à 16" cent, environ. Les 2 spores J, e ont germe et anastomosé leurs filaments germinatifs en un seul, lequel rencontrant la spore g. ayant germé elle-même, s'anastomose avec elle par un court filament. Le même filament germinatif, F. (j, se réunit avec le filament germiiiatif Fy' de la spore /', qui a germé aussi par son autre extrémité et s'est réunie à un filament voisin par une courte anastomose K (Gross. 350). 8. Formation de conidies secondaires /i, (', l dans un liquide nutritif. Elles appa- raissent à l'extrémité de filaments courts divariqués (Gross. 580). 9. Pi-oduction de chlamydospores m, n, o dans l'air humide (Gross. 580). Uromyces Joffrini G. Del. 10. Portion d'un urédo sur fruit : f/r, uredospores : Pa, paraphysc (Gross. 350). 11. Urédospore isolée (Gross. 580). 12. Téleutospore isolée (Gross. 580). 13. Une cellule de la pulpe remplie de mycélium M. (Gross. 350). MALADIES DU VANILLIER ^i^^i-ô 0^0^ Glœosporium-Colletotrichiim Vanillœ (l-Sl. — Uromyces Vanillée (10-13). Cette planche se rapporte à l'article du D'' Delacroix qui a paru dans le n" précédent in" (i de la 1" année, page (JSOj. LA MALADIE VERMICULAIUE DES CAFÉIERS A LA MAHTlNlQLt: ET A LA GUADELOUPE A lu date du 15 avril dernier. M. J. Dybo^^^ski faisait parvenir à la Station de Patholog-ie vég-étale une caisse d'échantillons de racines de caféiers d'Arabie et de Libéria, ainsi que de racines de pois doux {Iiif/a laurina). Ces racines étaient atteintes d'une mala- die parasitaire qui cause, paraît-il, de grands dégâts dans les plan- tations de caféiers de la Guadeloupe. Une lettre de M. Elot (de Saint-Claude, Guadeloupe) les accom- pagnait. J'en extrais les passages suivants : Celte maladie n'est pas de date récente, on est convenu de la désigner couramment dans nos campagnes sous le nom de maladie du pois doux. Depuis 1898, je m'attachais à reconnailre cette atrection, et dans ce but, j'avais eu la bonne l'orlune d'intéresser à cette recherche M. Dela- croix qui l'avait déjà provisoirement dénommée Poiirridic du (Caféier. Si vous vouliez vous reporter à la page 130 du tome IV de la lieviie des cultures coloniales (janvier-juin 1899), vous pourriez lire les observations dont je faisais part, à celte épocpie à M. Delacroix sur celle maladie. Mais à ce moment un travail de M. Thierry sur la maladie vermiculaire semblant être venu èclaircir la question, je lavais alors un peu aban- donnée, attribuant au pourridié un rôle accessoire, les ravages graves étant exercés par les némalodes. De nouvelles observations que j ai recueillies depuis, m'engagent à reprendre ce sujet du plus haut intérêt pour les planteurs de la Guade- loupe. Je suis loin de contester l'existence de la maladie vermiculaire dans nos plantations, mais, vu la nature des dégâts (pie j'ai conliiiuellemenf sous les veux, je me demande si on doit toujours les allrihucr aux néma- todes exclusivement, ou bien si à côté des anguillules, il n'y aurait pas un autre agent encore plus dangereux que ces dernières. Plusieurs raisons nnlilenl en faveur de celle hypothèse. Ainsi que Ta fait remarquer très justement M. Thierry, l'examen des racines de tous les caféiers d'Arabie cultivés dans le pays, ne laisse pas de doute sur l'existence des nodosités plus ou moins nombreuses, révélant la présence MALADIE VERMICULAIRE DES CAFÉIERS 81 des ncmatodes. Toutes les plantations étaient plus ou moins envahies, il n'est pas étonnant qu'en arrachant un caféier sur le point de mourir, et quelle que soit d'ailleurs la cause de cette mortalité, de constater des nodosités sur ses radicelles. Or, sur les propriétés ravagées par la mala- die qui nous intéresse ici, j'ai constaté que toutes les essences végétales susceptibles de se rencontrer dans une plantation y sont exposées, je cite- rai notamment le Poix doux, le Rocouyer, le Caféier de Libéria, etc. J'ai lâché de distinguer sur les racines de ces arbres mourants les nodosités caractérisant la présence des ancjuillules, sans y être parvenu. La maladie semble contagieuse au plus haut point, et beaucoup de planteurs affirment qu'il suffit d'une portion de racines oubliée dans le sol, après l'extirpation d'un arbre mort, pour provoquer ultérieurement la mort d'un jeune caféier qu'on viendrait y planter à la même place. Dans le but d'élucider ce point intéressant, j'ai enterré depuis deux mois, autour de deux caféiers en bonne santé des portions de racines de caféiers morts de fa maladie, le temps me permettra de me renseigner jusqu'à quel point cette assertion est exacte. En attendant, il est incontestable que, par exemple, un arbre (Pois doux ou Caféier) venant à mourir sur yn point quelconque d'une planta- tion, la tache ne tarde pas à grandir et, de proche en proche, tous les arbres disparaîtraient si on n'extirpait et ne bridait de suite, comme on a l'habitude de le faire, les racines des sujets morts. Que cette mortalité soit due à la maladie vermiculaire ou, comme je le suppose, à un champignon, ce qu'il y a d'important à noter, c'est que le Caféier de Libéria n'en paraît pas du tout à l'abri et si on avait pensé, à un moment donné, rendre nos cultures invulnérables par l'adoption de la greffe du Caféier d'Arabie sur le Libéria, cette opération perdrait désor- mais de son intérêt, ou du moins il serait nécessaire de rechercher un autre porte-greffe. A l'appui de mes observations, et pour vous permettre l'examen de la question, je vous adresse en un colis postal, cinq échan- tillons de racines d'arbres dillerents portant les traces de la maladie qui nous occupe : N° 1 . Racines d'un Caféier d'Arabie de huit ans, souffrant de la mala- die et sur le point de mourir; récoltées à 400 mètres d'altitude, sur ter- rain argilo-siliceux, frais. N" 2. Racines du Caféier de Libéria mort de la maladie et récoltées au même endi^oit que ci-dessus. N" 3. Racines du Caféier d'Arabie (arbres de trois à dix ans morts de la maladie), récoltées à 350 mètres d'altitude, en teri^ain silico-argileux. N° 4. Jeune Pois doux semis d'un an, souffrant de la maladie au moment de l'arrachage et sur le point de mourir. N° 5. Portion de racine d'un gros Pois doux de douze ans, malade. Bulletin du Jardin colonial. 6 82 KTLDES ET MÉMOIRES J'ai examiné les échantillons de racines envoyées par M. Elot. J'ai pu reconnaître que, parmi les cinq échantillons, un seul, se rap- portant au Caféier d'Arabie, portait des radicelles, avec un certain nombre de nodosités anciennes, et la plupart déjà très avancées ; sur les quatre autres échantillons renfermant un d'Arabica, un de Libéria, deux de Pois-doux, je n'ai pas vu de nodosités, et, d'ailleurs, les radicelles y étaient en très petit nombre. On observera que M. Elot, malgré ses observations répétées, n'est parvenu à les voir que sur Caféier d'Arabie. Sur une radicelle du n° 4 (Pois doux), j'ai trouvé seulement deux tubérosités oblongues que l'analyse microscopique me montra être des tubercules bactériens de cette légumineuse. Il est donc impossible jusqu'ici d'affirmer la présence des nodo- sités de l'Arabica sur le Caféier de Libéria, le Pois doux, le Rocouyer, etc., que l'on peut rencontrer dans les plantations de caféier d'Arabie à la Guadeloupe. L'examen de ces nodosités y montre des aiguillules peu nom- breuses, je n'en trouvai qu'à l'état larvaire. Les tubérosités, ai-je dit plus haut, étaient presque toutes âgées. Je n'en ai rencontré que sur des radicelles d'un certain calibre. Les ramifications fines de ces radicelles n'existaient plus, soit que, par suite d'un arrachage peu soigneux, elles soient restées dans le sol, soit plutôt, par le fait même de la décomposition de ces ramifications sous l'influence de l'aiguillule au moment de l'arrachage. Au moment où j'examinais ces échantillons de M. Elot, j'ai pu retrouver d'autres échantillons que je croyais perdus, de jeunes pieds et semis de caféiers d'Arabie provenant de la Martinique et que M. A. J. Thierry m'avait donnés en juillet 1900, au moment du Congrès d'Agriculture, comme atteints par une aiguillule de racine. Il a publié sur ce sujet une étude ^. Les jeunes j^ieds de caféier de M. A. J. Thierry sont en fort bon état, le collecteur ayant j)ris soin dès leur récolte de les placer dans l'alcool. Ils mon- traient de nombreuses tubérosités, la plupart jeunes et présentant de nombreuses aiguillules à tous les états, œufs, larves, mâles et femelles adultes. Les caractères de cette aiguillule, qui appartenait évidemmentau genre Hcterodera, cadraient d'une façon parfaite avec 1. A. J. TiiiiinuY. Noies sur le (jre/J'iKje du Caféier, du Cuatoi/er et du Muscadier et la maladie lermiculaire du Caféier in « Bullelia agricole de la Martinique » n" i et 5, mai et juillcl ISO'J, el tiiat;e à part de 77 i)ages. MALADIE VERMICULAIRE DES CAFÉIERS 83 //. radicicola. Mais pour confirmer mon diagnostic, j'envoyai à M. J. Ritzema Bos à Amsterdam des spécimens de la Martinique et delà Guadeloupe, ceux de la Martinique étaient numérotés 1, ceux de la Guadeloupe 2. M. Ritzema Bos me répondit le 6 mai par une lettre dont j'extrais les passages suivants : Les échantillons de très jeune caféier n" 1 contiennent dans les nodosités des racines un très grand nombre d'aiguillules dans toutes les périodes, de développement et ces aiguillules sont, sans aucun doute, Helerodera radicicola, conformément à votre détermination. Les échantillons n" 2 ne contiennent dans leurs nodosités qu'un petit nombre d'aiguillules ; je n'y ai point trouvé de femelles, ni de larves à un âge assez avancé. Je n'ai rencontré que quelques larves avec stylet buccal, qui ressemblent beaucoup dans leurs formes et leurs dimensions aux larves très jeunes de Helerodera radicicola. Il est très vraisemblable que c'est aussi cette aiguillule qui cause les nodosités des i^acines du n" "2 ; mais il reste toujours quelque doute, parce que les larves très jeunes ne peuvent être déterminées avec complète certitude. Il résulte donc de ces recherches que l'aig-uillude du ColFea ara- bica de la Martinique est bien sûrement Helerodera radicicola et que c'est fort vraisemblablement la même qui existe dans des con- ditions assez identiques à la Guadeloupe. Or, on sait, d'après les observations du D"" Jobert ' et du D'" Goeldi que la maladie produite par Helerodera radicicola au Brésil dans la province de Rio de Janeiro se présente avec des caractères g-raves, qu'elle tue en quelques semaines, quelquefois moins, des caféiers semblant tout à fait bien portants '-. Il ne semble pas que ce soit exactement le cas à la Martinique et aussi bien à la Guade- loupe, mais on doit observer comme le fait très justement remar- quer M. A. J. Thierry (tirage à part, p. 78 et suivantes), que suivant les circonstances, la maladie se comporte vis-à-vis du caféier d'Arabie, d'une façon très différente. Mais M. A. J. Thierry a pu constater en particulier, l'importance du « fatrassage », c'est-à-dire de l'accumulation des détritus végétaux à la base des caféiers, ce 1. Voir à ce sujet et pour la biljliographie de la question : D'' G. Delacroix. Les Malndies et les Ennemis des Caféiers, Paris, 1900, 2" édition, Cliallamel, p. 183 et sui- vantes. 2. Ihid. 84 ÉTUDES ET MÉMOIRES qui permet à la plante de produire de nouvelles racines au fur et à mesure de l'attaque par l'aiguillule de racines plus profondes. Cette production de nouvelles racines donne évidemment à la plante envahie une survie beaucoup plus longue. Liniluence de la nature, du sol, de son d'egré d'humidité est aussi à considérer. On a constaté au Brésil, que dans les sols sableux les caféiers étaient bien plus exposés et périssaient très rapidement. Ces particularités permettent donc d'expliquer la nocivité relative- ment moindre du mal à la Martinique, sans doute aussi à la Guade- loupe. M. A. J. Thierry assure que le caféier de Libéria [ici., p. 23) est indemne de la maladie vermiculaire à la Martinique, et M. Elot, quoique moins affirmatif, semble bien partager cette opinion pour la Guadelou])e. Le D"" Gœldi^ au contraire, a vu le Libéria attaqué au Brésil. Le fait mériterait d'être vérifié à nouveau avec le plus grand soin, puisque c'est précisément et uniquement dans le greffage de r Arabica sur Libéria que M. A. J. Thierry voit un remède préven- tif. La question a une importance considérable, car elle ne semble pas localisée à la Guadeloupe et à la Martinique, où en particulier la catastrophe de la Montagne Pelée a, il y a lieu de le croire, épar- gné les plantations où M. A. J. Thierry a fait ses observations. Récemment une maladie très analogue à celle de la province de Rio de Janeiro et aussi bien de la Martinique et de la Guadeloupe a été signalée sur la côte est de Madagascar par M. Deville de Sar- delys K La description donnée, la présence de nodosités semblent bien indiquer, quoique l'examen n'ait pas été fait par une personne compétente, la présence de VHelcrodera radkicola. Ici encore le Libéria est atteint. Et je ferai encore observer, comme je l'ai déjà dit ])lus haut, au sujet de la maladie vermiculaire du Bananier, (jue par suite du nombre considérable de plantes attaquées par Ilclerodcra radicicola, il est fort possible que l'aiguillule provenant d'une })lante quel- conque ait pu s'installer progressivement sur le caféier d'Arabie et sur place même. L'étude microscopique (jue j'ai pu faire des nodosités sur semis de caféier de la Martinique m'a montré avec une parfaite certitude 1. \'nir Hevliedcs Ciilliires roloninlcs les n"" 02, du jainiiT 1002 et lOO du b mai 1002. MALADIE VERMICULAIRE DES CAFÉIERS 85 l'existence des lésions signalées sur les nodosités très jeunes du melon, par M. M. Molliard ^ La déformation du cylindre central très jeune, la formation de cellules géantes avec hypertrophie et aspect lobé du noyau, puis multiplication des noyaux par division directe se présentent ici avec des apparences identiques et au sujet desquelles, je renvoie au mémoire que je viens de citer. Mais ces déformations du cylindre central de la racine ne se montrent pas toujours sur le caféier; je ne les rencontre que dans les nodosités produites sur des radicelles extrêmement jeunes, et dans lesquelles les parties ligneuses, surtout les vaisseaux, sont en grande partie constituées par des éléments encore cellulosiques, dans lesquels le protoplasma et le noyau sont encore bien vivants. Il ne paraît pas douteux que les nodosités se produisent souvent au dépens de radicelles plus Agées, dans lesquelles le cylindre central déjà lignifié est devenu incapable de réagir et de cloisonner ses éléments. Dans ce cas, c'est du seul parenchyme cortical que procède l'hypertrophie entièrement cellulaire ; et, dans la radicelle, par suite même de cette hypertrophie, le cylindre central est déjeté du côté opposé à celui où la nodosité a pris naissance. Ce sont des cas de ce genre, que j'ai rencontrés généralement dans les caféiers de la Guadeloupe. Mais la déformation du cylindre central, dans le très petit nombre de nodosités que j'ai vues sur des radicelles jeunes, offrait le même caractère que ci-dessus dans les éléments du cylindre, production de cellules géantes, déformation et division de leurs noyaux. J'ajouterai que c'est là un nouvel élément de proba- bilité pour l'identification des deux anguillules de la Martinique et de la Guadeloupe. Sur des nodosités âgées, d'où les aiguillules avaient émigré, la déformation du cylindre était le plus souvent remplacée par des pertes de substance de cette portion de la tige; les bords détruits irrégulièrement montraient bien l'action d'un parasite animal. La lésion ne peut être ici attribuée aux mycéliums généralement peu abondants dans les radicelles encore en état. ' C'est maintenant le lieu de parler de ce feutrage mycélien noir qui préoccupe tant M. Elot, et à juste raison, sans doute. 1. Marin MoLi.iARi). Sur quelques caruclères histoloqiques des Cécidies produites par i'Heterodera radicicola Greff in <■ Revue générale de Botanique », 1900, tome XIII, page 157 et suivantes. 8G ÉTUDES ET MÉMOIRES Ce mvcélium, je l'ai déjà dit, se montre identique à lui-même sur Caféier d'Arabie, accompagné là de nodosités d'anguillules, sur Caféier de Libéria, sur Poix doux. Il est de même aussi sur Rocouyer, où je l'ai constaté jadis sur un envoi de M. Elot, et, sur ces dernières plantes, il ne semble pas être accompagné de ces nodosités que M. Elot, malgré ses nombreuses recherches, n'a jamais pu rencontrer. Extérieurement aux tissus, le mycélium forme siu' l'écorce un feutrage peu dense, irrégulièrement réparti, de cou- leur brun foncé, formé de filaments plutôt intriqués entre eux dans une direction à peu près parallèle à leur axe, disposés et accolés en faux tissu comme dans un stroma. Ces filaments forment ainsi de courtes mèches brunes peu cohérentes qui se dissocient sans dif- iiculté avec une aiguille. Sous le microsco^ie, on les Aoit ramifiés irrégulièrement à angle aigu, d'un calibre variable de 3 à 12 [j. de large et avec des cloisons en général assez espacées. La colora- tion, d'un brun sépia assez foncé, est d'autant plus marquée que le filament est plus large. Sur un filament donné, et entre deux cloi- sons successives, la largeur est souvent inégale, surtout pour les gros filaments. La cellule mycélienne se rétrécit vers une cloi- son et s'élargit vers l'autre ; mais le renflement est inégal sur les deux côtés du filament, et on voit souvent près de la cloison, une dilata- tion variqueuse, obtuse et non arrondie à son '^'^- ' sommet (Vis;. \). Le contenu des éléments est Filaiiicnts (Icnivcéliuni noir \ o / ^ iiiis sur nicincs lie (Mfricp de homoffènc, dépourvu dc "•ranulatu)ns et de 1,ih(ri:i il l:i CuikIcIouik' : J{, » ' 1 O ]i;ii'lir l'ciilliM' 00 tonnes, fournit plus de la moitié de la production totale. Viennent ensuite par ordre d'importance pour les quinquinas de culture : Les Indes Orientales, Ceylan, l'Amérique centrale et la Jamaïque, etc. Le tableau donné ci-contre, établi d'après les indi- cations fournies par le " Ferguson's Ceylon hand book and Direc- tory ", mentionne aussi, pour la côte occidentale d'Afrique, des envois dépas.sant oOO.OOO kilogrammes d'écorces par an. L'origine de ces envois est assez mal connue. 11 paraît à peu près certain, LE QUINQUINA 93 Ô 000 7 500 7000 6500 6000 5500 5000 i.500 %ù.000 3 500 3000 2500 2000 1500 lOOO 50O T ■il 10C- 80 B i-0 f- 20 <0 g ^ 2J ^ S :r 7000 C; 500 Cl e5 3 !? cb -S t 0) Q ^ -^ -Si 1 § :^- 1^ ta _1^ ■g •^ <« -^^. ^ Tonnes 1500 13 ^5; 43- 2000 '^ ïi Qi 20 1^ 5 s -il C5, ^ _-5 :^__lb3 ^ 0 111 0 lllll.l Fig. 2. — Évaluation approximative de la production et de la consommation de la qui- nine dans le monde entier. l'Angleterre, qui peut annuellement livrer à l'exportation près de 50.000 kilogrammes de sels de quinine, et l'île de Java, dont les fabricants cherchent à se créer de nouveaux débouchés pour ce produit en Extrême-Orient (Chine, Japon, Philippines, etc.). 0() ÉTlDtvS ET MÉMOIRES On remarquera que nos colonies ne sont même pas mentionnées dans les dillerentes statistiques auxquelles il vient d'être fait allusion. Il semble, en elfet, que le gouvernement fran(,*ais, moins directement atteint par la disparition des peuplements de Cin- clîonas que les Anglais et les Hollandais dont les immenses posses- sions coloniales nécessitaient Tacquisilion dune quantité énorme de quinine, n"a attaché jusqu'à ce jour qu un intérêt tout à fait secondaire aux plantations de quinquina dont on n'a sérieusement tenté l'introduction qu'à l'île de la Réunion. La reconstitution de notre empire colonial remet cette importante question à Tordre du jour, et nous fait un devoir de chercher à produire dans nos posses- sions équatoriales le demi-million de kilogrammes d'écorces que nous demandons à l'heure actuelle aux étrangers. II. — LE QUINQUINA A JAVA C'est en 1851 que le premier plant de Cinchona fut introduit à Java. Cette première tentative fut bientôt suivie en 18.')i et 1855 d'introductions plus importantes dues à tiasskarl et à Jughuhn. Ces essais se heurtèrent au début aux plus grandes diiïicultés et rien ne permit de prévoir pendant longtemps les remarquables résultats auxquels on est arrivé depuis cette époque. Grâce aux plus louables efforts et à la ténacité de tous ceux qui s'intéressaient à cette culture, on parvint, à force de travail, à surmonter tous les obstacles, et ces essais, conduits avec une admi- rable patience, aboutirent entin vers 187U à la réussite conqolète de l'acclimatation du quinquina. Cette culture a fait, à partir de ce moment, des progrès si rapides qu'en moins de quarante ans, Java est devenu le centre de pro- duction le plus important. Les cultures de quincpiina, aujourd'hui, sont surtout développées dans la Régence des Préangers. On en trouve aussi, mais très peu, dans les Résidences de Samarang, de Paserocan et de Benjoens. Le gouvernement néerlandais, ne négligeant aucune occasion d'aider au développement de l'agriculture, et soucieux de diriger ses efforts vers la meilleure mise en valeur de son domaine colonial, ne s'est pas borné à acclimater le ((uinquina à Java. Il n'a pas cessé de s'occu])er de cette culture après avoir démontré qu'elle pouvait réussir. Persuadé, au contraire, ([ue le succès ne serait LE QLliNQUiNA 97 8 000 7500 7 000 6 500 6000 5 500 S 000 i. 500 (0 c; uoao 3500 3000 2 500 2000 7'5 00 1000 500 •s^ 5. ci ^ T57 f^ Tonnes 5 000 14-500 A. II. 000 3500 fi o ■ S (a 3000 2500 -or 2000 15O0 1000 jhû. i I 1j to Cl .^ -M 1) !> a -§ .Il lu Pig.. 3. _ Évaluation approximative de la consommation dï'corce de quinquina dans le monde entier, avec indication des princi- paux pays consommateurs. Sont comprises dans ces évaluations, les écorces employées à la fabrication des sels de quinine. durable qu à la condition de chercher à toujours faire mieux, il a chargé dès le début des agronomes et des chimistes d'étudier les améliorations à apporter aux plantations de quinquina. Grâce à cet appui scientifique qui n'a jamais fait défaut aux planteurs de Bulletin du Jardin colonial. ' VI8 ÉTUDES ET .MÉMOIKES Java, on cultive actuellement dans la Régence des Préangers des Cinchonas tellement supérieurs aux quinquinas sauvages sous le rapport de la teneur en alcaloïdes, que toute nouvelle tentative de culture de cet arbuste en pays étranger, n'a de chance de réussir qu'à la condition de pouvoir se procurer des plants ou des semences améliorés, et de ne pas négliger de suivre l'exemple donné par les Hollandais en continuant sur place la sélection méthodique des quinquinas pour la création de nouvelles cultures. L'administration des Indes néerlandaises possède à Java d'impor- tantes plantations de Cinchonas établies dans le double but de fournir aux particuliers des plants et des graines provenant d'arbustes riches en alcaloïdes et d'augmenter les recettes du budget par la vente des écorces. Ces exploitations, au nombre de huit, sont installées à Leml^ang, Xagrak, Tirtasari. Tjijiroen, Tjibeureum, Tjibitoeng, Rioeng- Goenogen et Kawah-Tjiwidei. Elles occupent au total une super- ficie d'environ 803 hectares et produisent plus de 330 tonnes d'écorces sèches par an. Le gouvernement hollandais s'occupe de la gestion de ces plan- tations comme le ferait un sinqile particulier en faisant exécuter tous les travaux par main-d'œuvre salariée, et vend le produit de ses cultures à Amsterdam, en s'etforçant de réaliser les plus hauts prix. Les planteurs hollandais, plus pratiques que nous, pensant, peut-être avec raison, qu'il vaut mieux voir l'Etat se créer de nouvelles ressources par l'exploitation du sol que par la création de nouvelles taxes, ne songent pas à se plaindre de cette concur- rence administrative que supporterait sans doute dilïicilement le colon français. Ces plantations ont rapporté plus de 250.000 francs de bénéfices nets en 1898. Les frais d'exploitation se sont élevés pour cette année à 207.739 francs, y compris le traitement du personnel européen, qui comporte un directeur général aux appointements de 25.200 francs par an et un botaniste recevant une solde coloniale de 12.000 francs. Les plantations du gouvernement se composent surloul de cultures de (^inc/ionu Led(jcriaiia\ l'exploitation du quin(juina rouge, quoiqu'en progression, y occupe une place beaucoup moins impor- tante ; quant au Cinchona of/icinalis, dont on ne trouve encore que quelques plantations non loin de Gandjoeng, il ne (igure plus depuis 1895 parmi les exportations des cultures administratives. LE QUINQUINA 99 Voici, d'après M. Belin, consul de France à Batavia, à combien se sont élevées les récoltes du gouvernement de 1895 à 1898. 1895 1896 1897 1898 Cinchona Ledgeriana 293.240 kil. 290.507 kil. 5 289.149 kil. 294.717 kil. Cinchona Succirubra 21.491 kil. 5 31.242 kil. 5 30.738 kil. 36.602 kil. Cinchona OfGcinâlis Totaux 2.655 kil. . 317.387 kil. 321.760 kil. 325.887 kil. 331. 9J9 kil. Il existe, suivant M. Belin, 93 plantations de quinquina appar- tenant à des particuliers, répartis entre les Résidences des Préani^ers de Semarang, de Pasoerocan, de Benjoenas comme il est indiqué ci-après : Préangers, 83 plantations. Semarang, 3 — Pasoerocan, 6 — Benjoenas, 1 — Total. . 93 plantations. Les exportations de quinquina nont cessé de s'accroître à Java depuis une vingtaine d'années, mais les progrès sont surtout sen- sibles depuis 1888, époque qui correspond, à peu de chose près, avec le commencement de la décadence de cette culture à Ceylan. Le dévelop23ement du commerce du quinquina a subi une hausse très rapide jusqu'en 1896. On a constaté à cette époque un ralen- tissement sensible, bientôt suivi d'une nouvelle hausse, qui n a cependant pas dépassé de beaucoup le chiffre des exportations de 1896. Ce fait doit, je crois, être attribué à la création de fabriques de sulfate de quinine, qui manipulent sur place une quantité assez considérable d'écorces; aussi ne faudrait-il pas voir là un symptôme de décadence de cette intéressante culture, dans le cas où la baisse persisterait et même, chose fort admissible, si elle venait à s'accentuer. Il convient de remarquer enfin que, grâce aux continuels progrès réalisés par la sélection continue, la production d'alcaloïdes utili- sables, c'est-à-dire de principes utiles, peut augmenter dans de notables proportions et amener des changements sensibles dans le chiffre des exportations. On peut donc conclure que la culture du quinquina est en ce moment dans une situation très prospère à Java. La majeure partie des quinquinas des Indes Néerlandaises est ioo ETUDES ET MEMOIRES envoyée à Amsterdam, où se font en ce moment les transactions les plus importantes. On en expédie également une certaine quantité à Londres ; mais le coût du fret depuis Java jusqu'en Angleterre étant un peu plus élevé (3 fr. IS en plus par 100 kilogrammes), et les prix obtenus à ItOOO 3ooo S? I 2000 lOOO CD oi "û •-. «M 3) * "> "^ 2> S 5 . — Marche des exportations de quinquina à Ceylan de 1869 à 1898. 2" Au développement du quinquina, dans les Indes Néerlandaises depuis 1888; 3" Aux reinarcjuables résultats donnés par le thé qui, moins exigeant que les Cinchonas sous le rapport du sol, pousse avec une extrême vigueur à Ceylan. Il est probable (jue les progrès réalisés par les Hollandais auraient eu pour consé(|uence d'amener peu à peu les planteurs de Ceylan il rcnoïKcr au (piincpiina, même si l'exploitation du thé n'}-^ avait pas pris l'extension (|ui fait aujourd'hui la prospérité de l'île. La réussite du théier a certainement activé la marche de la crise du (juinquina. mais ne doit pas être considérée comme la cause déter- niinaiile de eelte ruinr, ainsi (pie les Anglais semblent le croire. LE QUINQUINA 105 En effet, les plantations de Ceylan se composaient surtout de Cinchona succirubra dont on rencontre encore aujourd'hui d'assez nombreux spécimens au milieu des plantations de thé de la (( Cen- tral Province ». Les Anglais n'auraient pu continuer à lutter contre les planteurs de Java qu'à la condition de substituer à l'exploitation du quin- quina roug^e, celle du Cinchona Ledgeriana et des variétés hybrides qui, à cause de leur richesse alcaloïdique, permet aux Hollandais de supporter plus aisément l'abaissement du prix des sels de quinine. Cette substition aurait-elle été possible ? Il est permis d'en dou- ter, car le Quinquina Ledgeriana et les hybrides, c'est-à-dire les variétés les plus importantes, sont beaucoup plus exigeantes sous le rapport du sol que le Cinchona succirubra et ne trouveraient pas à Ceylan des terres d'une fertilité comparable à celle de la Régence des Préangers. Quoi qu'il en soit, la culture du quinquina a eu pour conséquences de permettre aux planteurs de Ceylan de sortir victorieux de la crise agricole, la plus terrible que l'île ait eu à traverser, et de mettre à la portée des moins fortunés un médicament de première utilité, dont l'usage se répand de plus en plus. L'histoire de cette culture nous montre en outre : 1° Pour Ceylan, le parti qu'une colonie de planteurs courageux, persévérants et bien secondés par l'Administration, peut tirer de l'exploitation d'une seule plante; 2° Pour Java, l'influence que peuvent exercer sur la prospérité d'un pays l'introduction de nouvelles plantes économiques et l'amé- lioration raisonnée et continue des méthodes de culture. IV. MARCHE DU PRIX DU QUINQUINA ET DES SELS DE QUININE. La réussite des quinquinas de culture, tant à Ceylan qu'aux Indes et à Java, a eu pour conséquence une diminution considé- rable de prix des écorces et de la valeur commerciale des sels de quinine. Ce résultat, dont les consommateurs du monde entier et surtout les habitants des régions tropicales ont largement profité, a malheureusement causé la ruine d'un grand nombre de planteurs, et rendu plus difficile la réussite de cette culture, qui restera con- centrée maintenant sur les terres de très bonne qualité et dans les 100 ÉTUDKS KT MÉMOIUES pavs où Ion pourra nu'tlre en pi;iti(|m' les nouvelles méthodes d'ex- ploitation employées à Java. Le kilogramme d'écorce a valu jusqu'à 47 iVancs sur le marché de Londres. En 1883, les cours étaient encore voisins de 4 fr. 50, mais depuis cette époque les écorces de qualité ordinaire sont descendues momentanément à moins de 0 fr. 50 le kiloj^., à Amsterdam, au commencement de 1897 (lîg-. 7). 0^500 0, ItSo Ctoo 0,350 0, 3oo o s f.SSo o, eoo 0,150 O,100 0,5o ^ .•». c \.i ? ) <; ^ \ \ 2 \ ^ ■" ■ — 5 ■ 1  1 J, 1 (& <0 00 0 «> 05 <0 (^ ^ (^ V) b. CD o (Ti -^ r-, o "■ î? _« OO y) ■ t; I-. "^ -Ci ^ »1 o ■c o co 0) _^ ra CJ o =3 CJ 7j 3 3 o «j d'elles, de les vendre à l'analyse et de prendre comme base d'aj)- préciation une quantité déterminée de quinine, contenue dans un poids fixe d'écorce sèche. 108 KTUDKS ET MEMOIKES On a. ainsi qu'on la vu précédemment, adopté dans ce but comme unité commerciale 1 pour "/„ de quinine renfermé dans i/2 kilog-. d'écorce. Le cours de cette unité a beaucoup varié depuis 1891 d'une année à l'autre et dans le courant d'une même année. Aussi les planteurs de Java observent-ils la marche du prix du quinquina avec la plus grande attention, afin d'auj^menter leurs envois au moment où les cours sont avantageux, et pour les réduire au minimum quand la baisse persiste (fig-. 8). Le prix du quinquina, très bas en 1895 et en 1896, accuse heureu- sement, depuis janvier 1897, une hausse assez sensible qui s'accen- tuait encore au moment de mon séjour à Java, en lévrier et mars 1900. Marche du prix. L'avilissement du prix des écorces a eu sa répercussion sur la valeur des sels de quinine. Le prix du sulfate de quinine n'a cessé de décroître d'une manière continue de 1880 i» 1890. 11 était évalué à 0 fr. iOri le gramme en 1880, et à 0 fr. 054 en 1898. Il se main- tient depuis cette époque à environ 5 centimes le gramme sur le marché de Londres. Son prix était de 0 fr. 04935 à Batavia en mars 1900. Marche du prix du kilogramme d'écorce à 5 "/„ de quinine, sur le marché d'Amsterdam, de janvier 1891 à décembre 1898. MOIS IX'.H 1S02 ISlIli 1801 18!i5 1806 1807 1808 Janvier .... F('-\ rici-. . . . Mars Avril Mai Juin Juillcl Ar.ùt Scplcnihrc. Oclohiv... . Nn\ cinhic. l)(MTiiil)r(; . M»y. Biiniiellr.. 1 .5S7(i 1 . 107 1 .107 1 . 107 1.3S(i 1 . 323 1 . 230 1 . 2 1 S 1 .2 105 ] . 1 SC.â 1 .3N(i 1 . 1175 1 . 3(J5 1.26 1.2.S1 1 . 2S94 i . 2000 1 . 2K52 1 . 2(5 1 . 2 1 ,S 1 . 170 1 .IONS 1 .0S3() 1,02 1 S 0.7155 0.5523 0.5775 0.7050 0 . S 1 00 0.S205 0.021 O.02K2 0.903 0 . 92 1 1.0.'i5 0.9135 0.0S25 0.735 0.6027 0.507 0 . 52.) O..50S5 0,0132 0.0027 0.5712 0.512 0,0(125 0.0027 0.03 0.03 0.5022 0.5SS O.50S5 0.(iOO 0.50S5 0 . 5355 0.5355 0. 1557 0.1725 0. 1 152 0.00 1 S O.SIO O.SOl 0.SS2 0.003. 0.0072 1 .3107 1.059 1. 17 1.110 1.155 0.0025 1 .002 O.SOl 0.SS2 O.S52() 0.S505 0 . 02 1 0.0S7 1 . 020 1 . 325 1 1 .3101 0.0000 0.S310 0.5.S50 0.5007 0.9S7 1 .0007 LE QUIlSQUlNA 109 Il résulte de la comparaison des prix des écorces de Cinchona et de ceux du sulfate de quinine, qu'il existe un écart assez considé- rable entre le cours de la quinine contenue dans l'écorce et celui du produit manufacturé. Les fabricants bénéficient dans une larg-e mesure de cette différence ; aussi la création de manufactures ana- logues à la « Bandoensche Kinine Fabrick » de Java ou de fabriques installées par des syndicats de planteurs, est-elle de nature à cau- ser de g-raves préjudices aux usines d'Europe ou des États-Unis, car ces installations permettent aux producteurs de quinquina d'ajouter à leurs recettes le prix du fret des écorces jusqu'en Europe ou jus- qu'en Amérique et la majeure partie des bénéfices de fabrication. Ces diverses considérations nous amènent à tirer les conclusions suivantes : l** L'avilissement des prix du quinquina ou des sels de quinine rend impraticable toute tentative de culture entreprise avec des plants non améliorés ; 2'' L'exploitation en grand du quinquina pour l'exportation ne peut être entreprise avec chances de succès que sur des terres d'ex- cellente qualité ; 3° Le cours actuel des écorces de quinquina est suffisamment élevé pour assurer de beaux bénéfices aux planteurs ; 4° La préparation des sels de quinine au lieu de production des écorces est de nature à augmenter dans une notable proportion les chances de réussite de tout nouveau centre de plantation créé autre part qu'à Java. E. Prudhomme. 110 ETUDES ET MEMOIRES ÉVALUATION APPROXIMATIVE DES FRAIS D INSTALLATION ET DE PRODUCTION d'une PLANTATION DE QUINQUINA A JAVA D'après les indication:: fournies par iliflérenls planteurs des environs de Bandoôni; et les rensei- i-nements donni's par l'indische culturalmanak. A Madagascar Dans la région d'altitude moyenne du Versant Est. 1° FHAIS d'iNSTAM.ATION ET Kn.NTIU; TIKN JtlSyUA 3 ANS par II . 1" Dérricliemcnl de l'orèL (aba- lajre des arbres) 33 » 2" Enlèvement des arlircs abat- tus, terrassenienl. pi(|iK'laî;i'eL troiiaison à 1 ni. 20 d'écart... 70 » 3" Frais de pépinière 126 » i" Frais de mise en place, y com- pris la pdse diin abri ])ro\i- soire s.) » 5" Entretien jiistju'à Viv^c de 3 ans, à i-aison d'im nettoyafre j)ar mois pour commencer et l 225 <> de fi nettoyantes quanil le sol commence à moins se salir. Total 511 IV. 1" Défrichement tic l'orèt abu- tag'e des arbres) 55 » 2" Enlèvement des arbres abat- tus, terrassement, piciuetageet troiiaison 110 » 3" Frais de pépinière l'Jfi >> i" Frais de mise en place, y coni- ])i'is la ))ose d'un abri i)ro\i- soire 1 20 >> 5" Entretien jusqu'à l'àiic de 3 \ ans, à raison d'un nettoyage / ])ar mois pour commencer et ) 350 » de 6 nettoyaf^es quand le sol commence à moins se salir. ToTAi SiO l'r. 2" FR.MS n'E.NTKliTlliN .VNMEI.S .V l'AHTlU DE 3 .\>"S 50 » I 3" FH.\IS DE IlÉCOI.TE ET l>I'; TU.VNSPOllT Jl.SyiîA AMSTEHl>.\M VAH 100 KM,. d'ÉCOHCE SÈCHE Abata^e. arracha,i,''e et lians|>(irl à l'usine 1 25 Sécliaj;e. concassafçe et embal- laf.'e i 55 Sac de jnte imperméable ])iiur l'emballap^e 2 » Transport à bord 3 25 Expédition à Amsterdam. Trais d assurance compris Il 55 ToTAi 27 50 Abataf::e. arrachaj;e cl Irans- porL à l'usine r;iscar. 2. Trans|)ort h dos d'homme. (2elle évaluation devi-a être considérablement diminuée ipiand on disposera de moyens di- Iranspurt muins primitifs. r LES INSECTES DERNIÈRES RÉCOLTES DE MM. LANDES ET TOUIN A SAINT-PIERRE (MARTINIQUE) L'effroyable cataclysme qui vient de détruire toute la population d'une ville française, plong-eant dans la désolation l'humanité entière, a frappé beaucoup d'entre nous dans ses affections. Un volcan a soufflé la mort un beau matin, et quelques instants lui ont suffi pour anéantir l'existence de milliers d'êtres humains. Les mots manquent pour rendre le sentiment de grande tristesse et de pro- fonde commisération qui s'est emparé de nous à la lecture des pre- mières dépêches annonçant la catastrophe et en les comparant au dernier courrier parti la veille du sinistre. Je considère comme un devoir de faire connaître les récoltes entomologiques faites aux environs de Saint-Pierre, par M. Landes, professeur, et M. Touin, son élève au Lycée. Plusieurs espèces ont été capturées sur les flancs mêmes de la montagne meurtrière, qui était le lieu de promenade, l'excursion favorite des infortunés Martiniquais. Les espèces marquées d'une astérisque ont été retournées, au fur et à mesure de leur communication, à M. Touin, qui désirait con- server la collection complète des uniques. COLÉOPTÈRES : Carabidae. qu'une autre espèce de la Guadeloupe, le C. Lhermi- Colpodes 71. sp. Montagne Pelée, nicii Chaud, se trouve éga- sous les pierres, lement dans la terre chaude, les mousses, les à la Soufrière, détritus, etc. *Calathus sp? voisin de Espèce très voisine de C. al- quadricollis Lee, ternans Chand, de la Gua- Montagne Pelée, deloupe. Il est à remarquer 112 ÉTL't)ES ET MÉMOIRES Dytiscidae. * Laccopliilus cayenncnsis Aube. Lathrididae. Morne Rou^e. — americanus Aube. Saint-Pierre. Copclatus poslicatiis Fab, Moine Rouge. Hydrophilidae. * Ccrcyon ceniromaculatusSiurm Saint-Pierre, — insnlaris Chev. Saint-Pierre, dans les bouses. * Plixnonotum csfriafiim Sav, Saint-Pierre. Tropisfernus Interalis Fab. Saint-Pierre. *Oosternum costatum Sharp. Saint-Pierre, Hydrophilus insularis Casi. Saint-Pierre, Staphylinidae. Pœderus n. sp., voisin de tricolor Er. Montagne Pelée. Thoracophorusy sp. '■ S''-Pierre, dans lesbranches de cacaoyer, Histeridae. * Hister confînis Er. Saint-Pierre, dans les bouses. Colydidae. * Dislaphylu lialcsi Pasc. Saint-Pierre, dans le bois pourri. Tisiphonc fij). ? voisin des ex i lis Murr. Saint-Pierre, dans les branches de cacaoyer. Nitidulidae. Carpophilus hemipterus L. Saint-Pierre, dans les branches de cacaoyer. *Colastiis sp. ? Saint-Pierre. * Conoteliissp.? id, Cucujidae. Inopeplus praeus/us Chev. Saint- PieiTe, dans les branches de cacaoyer. Dermestidae. * Dermestes vulpinus Fab. Saint-Pierre. Atlagenus suhfascialus Chev. Saint-Pierre. *Cryptorhopalum fulvipcs Guér. Saint-Pierre. Temnoçliilidae. Nemozomia Landesi Lev. Saint-Pierre, dons les branches de cacaover. Passalidae. Nelcus unicornis Serv. Saint-Pierre. LES INSECTES il3 Scarabœidae. Chœridiuin insulaire Fleut. et S. Le Carbet, dans les bouses. Ca lit ho n sp . ? Saint-Pierre , dans les bouses. */^' * OnthopJiagus sp. ? Aphodius (jranarius L. id. id. — tcnninaUsCÀ\Q\.'\A. — lividiis 01. id. * — />/cf/)e5FleutetS.id. — sp. ? voisin de stercoratoi^ Har. et de elongatus Beauv. Saint-Pierre, Ânoniala insularis Cast. Saint-Pierre. Biilcla slriata 01. Saint-Pierre, Cyclocephala tridentata 01. Saint-Pierre. sp. id. — sp. ? Trois-Ponts, à la lumière. *Ligyrus hituberculatus Beauv. Saint-Pierre. — antillariim Beauv. Saint-Pierre. *Dynastcs Perseus 01. Saint- Pierre. Buprestidae. Chrysobotliris sp.? voisin de melazona Ghev. et de thoracica Fab. Saint-Pierre. Elateridae. Ckalcolepidius sulcatus Fab. Saint-Pierre. Bulletin du Jardin colonial. Anchastus insularis Cand. Trois-Ponts. Heteroderes amplicollis Ga'II. Trois-Ponts, sous les troncs d'arbres morts, Cleridae. * Tarsostenus univittatiis Rossi. Morne-Roug-e, à la lumière. Lycidae. Photinus vittifjer Gyll. Saint-Pierre. — littoralis Mots. id. — sp.? id. Aspidosonia if/ ni fa L. id. Bostrycllidae. *r)inodcrus minutus Fab. Saint-Pierre. Apate monacha Fab. id. Tenebrionidae. *Blapstinus sp:? voisin de opacus Muls. Saint-Pierre. * Allegoria dilatata Cast. id. Uloma sp. ? id. — retusa Gast. id. *Alphifohius piceiis 01. id. — diaperinus Panz. Saint-Pierre. * Delognatha sp. ? Saint-Pierre, dans le bois pourri. * Triholium ferrugineum Fab. Saint-Pierre. Anœdus sp.? près Delauneyi. Fleut. et S. Saint-Pierre. 1i KTIDES KT MEMOlHIiS ArrhitLœus sp. ? près (/uiuleloiipensis. Fleut. et S. id. Lobopoda? sp.? id. Zopliuhns rnoriu Fab. id. Cistelidae. *Cis(eln? sjt.? Saint-Pierre. Rhipidoplioridae. * Emcnadia octoinaculata Gerst. Habitation Pécoul, sur les herbes. Oedemeridae. Oxacis vit ta/ a Fab. Saint-Pierre. Curculionidae. Ci/p/nis Iciicocepliidus Chev. Le Cari jet, sur les bourgeons de pois d'Angola. Diaprepes ahbreviatus L. Saint-Pierre. — sp. ? voisin de quadritœnia Chev. Saint-Pierre. — Icpidopleriis Gyll. Saint-Pierre. * Uadromerus sj).? id., sur les bourgeons de pois d'Angola. Anchonus plicaticolis Chev. Montagne Pelée, sous les pierres et dans les mousses. Promrcops poslicalis? F;dirs. Saint-Pierre. * — sp. ? id. Phyllolrox sp.? voisin de pallidus Fahrs. Saint-Pierre, dans les herbes. *Anfhononius sp.? id. *Poli/d('rc('s n. .sy;., très voisin de zonatus Swed. Sommet du Morne Lacroix. Cryptorhynclius corticalis Boh. Saint-Pierre. * Macromcrus n. sp.^ voisin de lanipcs 01. Morne Rouge. *Pantuteles sp. ? Saint-Pierre. Baris sp. ? voisin de scissa Chev. Saint-Pierre, dans les herbes. — sp. ? id. *('cntrinus sp. ? Saint-Pierrë. li/iynchophoriis palmariun L. Saint-Pierre. * Trypctes rhinoides Gyll. Saint-Pierre. Splicnophurus hcniiplcrus L*. Saint-Pierre. — Uraiiis GvU. Saint-Pierre. — surdidus Germ. Saint-Pierre. * RliiincoJus sp.? Saint-Pierre. * — sp.? id. Brachi/tcniniis sj). ? Saint- Pierre, dans les branches de cacaover. Scolytidae. * A'// /chorus sp.? Saint-Pierre. Dryucœtes sp. ? id. LES IXSECTES 115 CrijpJialus? (plusieurs espèces). Saint-Pierre. Rhopalopleurus ? id. Bruchidae. * BrudiLis sp.? Saint-Pierre. Cerambycidae. *Eburia sp.? voisin de octoinaculata Chev, Saint-Pierre. * Cyriorneriis pUicornis Fab. Saint-Pierre. * Callichroma velutinurn Fab. Saint-Pierre. Trachyderes succinctus L. Saint-Pierre. Oreodera glauca L. id. Onychocerus scorpio Fab. id. Stirasioma depressiim L. id., et sa larve dans les branches de cacaoyer. Lagochirus araneif oignis L. Saint-Pierre. — sp.? id. Diahrotica furcataFâh. id. " Cerotoma riificornis 01. Morne Roug^e, sur les herbes. Homophseta sequinoctialis L. Saint-Pierre. Haltica occidentalis Sulîr. Saint-Pierre. * Graptodera sp. ? id. * Crepidodcra sp.? id. Cassididae. Chelymorpha polyslica Boh. Saint-Pierre. Coplocycla histripunctata 01. Saint-Pierre. Coccinellidae. Megilla macnlala De^eer. Saint-Pierre. Neda sanguinca L. id. Cladis nitidulus Fab, id. Gorylophidae. Leploslylus hidentatus Fab. Snint-Pierre * Saccium sp. ? Saint-Pierre, Chry somelidae . Lcma e tiisa ? F'ab. Saint-Pierre. — sp.? id., dans les branches de cacaoyer. AUTRES ORDRES Hémiptères. Pangaeus ? sp. ? Saint-Pierre. Nezara viridula L. id. Notonecta pallipes Fab. id. Pelocoris feinoratus Beauv. Saint-Pierre. Hyménoptères. Centris apicalis Degeer. Saint-Pierre. Xylocopa aeneipennis Degeer. Saint-Pierre. Evania antillarurn (Pérez), Saint-Pierre. lll) ÉTLDtS lit MÉM01Ki:S Orthoptère ' . GnjUopalpH sp. ? voisin de cullrhjcr SeucUl. Suiul-PieiTe. Lépidoptères -. A(jiinisthos odius Vnh. Chœrocanijja /ersn L. Tripfo;/on camerius Cr. Enlhisanotia Tiniais Cr. Gli/jj/i()(l('S hyalinatu L. NOUVELLE NOTE SLR LE Slephanodcres du café m Kouïllou [Coffca cancphora, vak. Kouillouensis Pierre). M. Chalot, dii'ocleur du Jardin d'Essai de Libreville, a profité de son dernier séjour au Congo pour observer les habitudes du petit coléoptère dont je me suis déjà occupé ici ^. Comme je le pensais, la femelle pénètre dans la g-raine pour y j)ondre, et c'est la larve qui le manii^e. L'insecte parfait paraît en juin et juillet, à l'époque où le café approche de la maturité. Il ne s'attacjue qu'aux cerises rouges, délaissant les cerises encore vertes. Si l'on prend soin de récolter le café dès sa maturité et de le décorti(juer de suite, les dégâts sont insignifiants. Mais ils piennent de l'inqjortance quand on laisse le café trop longtemps sur l'arbre, ou lorscpi on le fait sécher pour l'exporter en cerises, ce qui permet à 1 insecte de continuer son œuvre de destruction. Les grands dégâts signalés dans ces dernières années se sont produits surtout parce qu'on a l'Iiabilude d'envoyer en France du café séché en cerises. Il serait préférable de le décortiquer sur place. La Compagnie agricole du KouïUou a employé, en 1901, des pul- vérisateurs pour le sulfatage des cerises; il paraît que ce traite- ment a produit de bons résultats. Ainsi, les pulvérisations de sulfate de fer ou de cuivre et surtout 1. Noiiinié pur .M. Finol. 2. Nommés par M. de Jounnis. :i. //II//. J»rd. Col.. I, l'.tOl.p. l rj. \'uir aussi lu A'.i/ii»-e. juin l'.Kll.p. 1. LES INSECTES 117 la décortication sur place donneraient un café sans grains piqués et d'une bonne valeur marchande. Un autre procédé a été mis en usag-e, c'est la fermentation à la sortie du dépulpeur, pour faire disparaître les parcelles de pulpes encore adhérentes aux graines i. On a constaté que cette fermenta- tion faisait périr les insectes. 11 y a donc lieu de la préconiser, au lieu du lavage simple des grains opéré autrefois au KouïUou. A Aschouka, dans l'Ogooué, il existe une importante plantation de café du KouïUou, et, jusqu'à présent, l'on n'y a pas remarqué la présence du Sfephanoderes. Le café est décortiqué sur place et ne subit pas de fermentation. En résumé, la cueillette dès la maturité et la décortication sur place, paraissent être les meilleurs moyens* d'éviter la ponte. Il est donc simple et facile de se mettre à l'abri de l'invasion de l'insecte. LES CALANDRES DU BANANIER Plusieurs espèces de coléoptères du genre Sphenophorus vivent à l'état de larve dans les troncs de bananiers pourris. On les ren- contre fréquemment dans nos colonies des Antilles et de Guyane; les plus communs sont : s/riafus Fahrs., hemipterus L. et liratiis Gyll. Goquerel a étudié les métamorphoses de ce dernier et publié dans les Annales de la Société Entoniolof/ique de France de 1849, p. 445, un mémoire accompagné d'excellentes figures. G'est un extrait de ce mémoire et une reproduction de ces figures que nous donnons ci-après : NOTE SLR LES MÉTAMORPHOSES du Sphenophorus liralus. Larve. Long., 15 mill. D'un blanc jaunâtre, tête brune, mandi- bules noires, stigmates d'un jaune orangé. Tête forte, quelques impressions et une empreinte en forme de V sur le vertex. Parties de la bouche : lèvre supérieure petite, échancrée à son bord inférieu-r, garnie de quelques poils raides ; mandibules épaisses, bidentées à l'extrémité, comprimées, excavées, leur bord interne 1. Voir Lecomte, le Café. Paris, 1899, p. 150, Fermentation. IIS KTLDKS ET MEMOIIŒS très rugueux et olïrant (juel(|ue.s dcMitolui'cs ; màclioires arrondies, munies de dentelures et de poils i-aides très courts à leur partie interne: leurs palpes de deux articles, dont le dernier cylindricpie et très petit. Lal)re assez large à sa base, languette étroite, prolon- gée entre les palpes labiaux, ces derniers formés de deux articles cylindriques. Corps épais, déprimé en dessous, arrondi en dessus; les sixième, septième et huitième segments abdominaux élargis, ce qui fait paraître la larve comme boursoufllée en ce point. Le pre- mier segment llioracique un ])eu rugueux en dessus, muni sur les côtés, près de son bord supérieur, d'un stigmate très remarquable par sa grandeur, qui l'emporte du double sur les ouvertures tra- chéennes abdominales ; les deux segments suivants beaucoup plus petits que le précédent, confondus ensemble, très plissés, dépour- vus de stigmates et d appendices. Les segments abdominaux fortement plissés en dessus ej» sur les côtés, présentant à leur partie latérale une série d'éminences j)lus ou moins prononcées h la partie supérieure de laquelle sont placés les huit stigmates abdominaux ; ces segments augmentent graduel- lement d'épaisseur jusqu'aux sixième et cinquième qui sont les plus considérables; ils décroissent ensuite rapidement juscju'au dernier, (jui présente un mamelon rétractile muni de longs poils raides. La nymphe ressemble à celle des autres espèces du même groupe eL n OllVe rien de remarquable. Liirv. Coqui- (•(iiil<'h:iiil l:i ii\iii]ili Iiisccli' )i;ii'rail Les larves du Sphenophonift lirnfiis vivent dans l'intérieur du tronc de bananier commun (Mus.i />;ir;nllsi,'icn), au milieu des libres du(|uel (Iles creusent de nombreuses galeries. Au moment d'accom- phi- leur (iciiiièi-c mélam()r|)l)()se, elles ('(instruisent, à l'aide de leurs LES INSECTES 119 fortes mandibules, des coques très solides avec les fibres qui les entourent. Ces coques présentent à l'intérieur des couches de fibres parallèles placées circula irement et avec une grande régularité; elles sont de forme ovale avec une extrémité plus pointue; c'est en écartant les fibres circulaires de cette dernière à l'aide de son bec que l'insecte parfait abandonne sa prison, lorsqu'il s'est dépouillé de l'enveloppe de la nymphe. J'ai trouvé un grand nombre de larves et de cocons dans le tronc d'un bananier pourri et couché à terre, au voisinage des Pitons, à la Martinique. Les larves que j'ai recueillies variaient pour la grandeur; celles qui étaient adultes n'avaient que 15 mill. de long, tandis que la longueur des cocons était de 22 à 24 mill.; je m'attendais à en voir sortir une calandre d'une taille bien supé- rieure à celle du Sphenophorus liratus. Il serait intéressant de savoir si ce Curculionite attaque les bana- niers quand ils sont encore vivants, ou seulement lorsque ces végé- taux sont abattus et déjà en voie de décomposition. J'ai cherché plusieurs fois sans succès des larves dans l'intérieur des troncs de ces arbres si communs dans les pays chauds. Les gaines des feuilles emboîtées qui forment leur tige apparente se reproduisent tous les ans, et si, comme je le suppose, elles ne sont attaquées qu'après leur mort, le Sphetiophorus liratus serait un insecte utile, loin d'être nuisible, j)uisqu'il contribuerait à hâter la décomposition des vieilles tiges et respecterait les jeunes pousses. INSECTES NUISIBLES DE MADAGASCAR Nous avons reçu, par les soins de M. le Gouverneur de Madagas- car, différents insectes dont les dégâts lui ont été signalés par le service de l'Agriculture de la Colonie. Ce sont : l** Apoderus humeralis 01. — Coléoptère curculionide c[ui s'at- taque aux plantations de haricots ; les feuilles envoyées sont mangées par l'insecte sur des espaces nombreux plus ou moins largement découpés en rond. M. le lieutenant Jobit avait déjà, en 1895 ^, observé que la femelle de cette espèce roule les feuilles pour pondre à l'intérieur. C'est ainsi que procèdent d'autres espèces appartenant 1. Voir Bull. Soc. Eut. Fr., 1896, p. 398. 120 ÉTUDES ET MÉMOIRES Fig:. 1. — Apoderus himeralis mâle. (Grossi i fois.) au même groupe des Attélabidos. Le mâle (lilVère de la femelle par la tête beaucoup plus allongée. M. Piret, sous-inspecteur de TAgri- cullure, a remarqué que Tinsecte parfait se ren- contre de janvier à mars et qu'il a complète- ment disparu au commencement d'avril. Des planches entières, en très bon état et en pleine lloraison, ont été absolument détruites en quelques jours. Le seul moven pratique de réduire le fléau, me paraît être la destruction des feuilles roulées contenant la génération à venir. 2° CaUimation venustum Guér. — Goléop- tère longicorne dont la larve perfore les branches du mûrier blanc. Ses longues galeries compromettent l'existence de l'arbre. Le fait est connu; M. le commandant Dorr, des troupes coloniales, a pris cette espèce sur le Mûrier à Alara- manga en novembre'. Les larves de longicornes sont lignivores. Dès leur naissance , elles pénètrent dans le bois ; les unes cheminent dans le liber, les autres creusent des galeries dans le bois lui-même. C'est le cas de celle du CaUi- mation. Vi-. 2. — r.;illiiii;ili(in v.iUsiuiin. (Grossi ;t fois.) A l'épOqUC de la nvnii)lu)se, elle si-mble se construire une sorte de coque avec les libres et la sciure provenant de son travail. A 1 état parlait, l'insecte mange les jeunes pousses. Au moment où il est sérieusement question de propager à Mada- 1. VoirFairmaire, \U-m. S,>r. Zn„l. Fr., isOO. p. 27. LES INSECTES 121 gascar l'élevage du ver à soie du mûrier, il est intéressant de se préoccui^er activement des moyens à employer pour se débarrasser d'un ennemi aussi dangereux. Étant donnée la ditïïculté d'anéantir l'insecte avant la ponte, on pourrait essayer des injections dans les galeries pour atteindre les larves. 3° Diploxys fallax Stal. — Ilémiptère qui pullule dans les rizières ; il s'en prend au pied de la tige et l'écoulement de la sève amène l'épuisement de la plante, au point d'empêcher lu formation de l'épi; les coques des grains sont vides. La culture du riz, faite en grand, ne se prête k aucun traitement efficace. Peut-être existe- t-il dans la nature, à côté du fléau, un para- site chargé de rétablir l'équilibre ? Il est probable que l'abondance de la punaise appelle une contre-partie et qu elle ne devient un danger que périodiquement, après que sa rareté a fait à son tour disparaître son ennemi. 4° Sitotroga cerealeUa 01. — Microlépidoptère cosmopolite qui ravage toutes les graines des céréales. La chenille mange le grain et le papillon sort par un petit trou rond pratiqué dans l'enve- loppe de la graine. Ces dégâts ont déjà été signalés au Tonkin (de Joannis) et aux Philippines (Baer). Fiii 3. ^ Diploxys fallax. (Grossi 3 fois.) INSECTES RÉCOLTES A LIBREVILLE PAR M. CHALOT Directeur du Jardin d Essai. COLEOPTERES TachinoinorphusafricanusFauY, Gymnochila sparsuta Thoms. Carpophilus nitidus Murr. — dimidiatus Fii\^ Lordites curtivihius Kr. Haptoncura opaca A'. Grouv. ^ Poccadius africanus Kr. Se rie a sp. Evides sp. Apate monacha Fab. -^ 1. Dans les graines d'Ambrevacle {Cajaiius flaviis) 2. Dans les fleurs de Tahernœmonlana, 3. Dans les troncs de cacaoyers. 122 ÉTUDES ET MÉMOIRES Selinua sp. Siclcrodncfylus sp. Opa/rum sp. Cioniis sp. Pra-uffcna marginatn Fab. Aracoceriis fasciculatusDegeerK Pcrichilus hrcvicornis Oupd. Ancvlonofus (rihulus 01. f.af/ria villosa Fab. Chilotucncs liinala Fab. — vcst'Ua Fab. HÉMIPTÈRES (déterminés par M. Martin). Microsicmmaafroci/ancinnSï^n. Xczara SicLcri Slal. Dysdercus fasciatiis Si^n. Aspongopus tristis Stal. Brachjiplaiijs tesludo - niyra Atelocera spinulosa Pal. ut sa De^eer. larve 2. Coptosorna sp. Piezosternum caliduni Fab. Nezara punciafo-rur/osa Stal. Haiyomorpha sp. — jjnllidoconspej'sa Siixi. nY:\[ÉNf)PTÈRES (déterminés par M. de Gaulle.) Synayris vornuta L. — sp. Blennocampa sp. ORTHOPTÈRES (déterminé par M. Finot). Leucophœa surinamensis Stoll. COLÉOPTÈRES 1)K KATI (Soudan) envoyés par M. Dumas, agent de culture du Haut-Sénégal et Moyen Niger Te f pus Mt'f/erlci Fixh. GyFJinoj)lc'iirus œncus (De'].), hinoulcs sp. — aziireus Fab. Caf/iarsiiis arhates 01. Onlopliayus gazella Fab. Anacalcos riiprrus i'ab. Scliizotiyclui seneyalensis Burm. I. Dans les graines d"Ambrcvade. U. Siii- le cacaoyer. LES INSECTES 123 Anomala sp. Adoretus hirtellus Cast. Trochalus sp. Oryctes boas Kl. 1 rionychus aui'iculatus Burm. Pachnoda mai^ginata Drury. — ormata Fab. DipJofjnatha (jagates Fab. Rhahdotis sobrina Gory. Macro ma cognât a Schaum. Heferorrhina abbreviata Fab. Charadronota quadrisignata Go- Gametis sanguinolenta (.)]. •Sternocera intei^rupia 01. Steraspis sp. Psiloptera hioculaia Fab. Evides pubiventris Cast. Sphenopteriis sp. Acmœodera sp. Cbrysobofris sp. Megalordiipis validicornis Boh. Tefralohus Chevrolati Cand, — gigas Fal). Psephus sp. Lycus sp. Apate terebrans Pall. Prœugena marginata Fab. Epicaula flavicornis Lac Mylabris sp. Tithoes maculât us Fab. Phryneta aurocincta Guér. Pa c hy diss us sp. Plocederus fucatus Thoms. — sp. Hypatium nitidicolle Guér. Prosopocera sp. Coptops? sp. Lixus dorsalis Sc\von\i. Entomoscelis cincta Fab. Peploptera cylindriformis Lac. Syagrus calcaratus Fab. Nosognatha ruficollis 01. Aspidomorpha nigrosparsa Boh. — cincta Fab. Epilachna rcticulata Fab. Alesia hamata Thunb. Nota. — Lin certain nombre de ces déterminations sont dues à MM. Fairmaire et Donckier de Donceel. LISTE DES INSECTES RAPPORTÉS DES ILES COMORES PAR M. LE D^ LAFONT Médecin-major des Troupes coloniales. Coléoptères. Cicindela trilunaris Kl. Cybisfer tripunctatus, var tus Sharp. Figulus anthracinus Kl. Onthophagus yazella Fab, cinc- Encya inermis Fairm. minor. Phseochrous lœviceps Fairm. Tlybosorus Illigeri Reiche. Trionychus mainty Fairm. Oryctes comoriensis Fairm. — colonicus Coq. et sa larve. Oxythyrea Clouei Blanch. 124 ÉTUDES ET >IÉMOIRES Psiloptera mayottensis Snel. Lépidoptères. Macrostoma sp. ni- t r, , , , lii/polimnafi mifiippus L. Bafocera riihus L. et sa larve. _/ , \^- n ^ . , . „ . tiintsa subretracta \\ alk. otenwtomis Levassori rairm. Philcmatium fémorale 01. Hémiptères. Bruchus scutellaris Fab. Di/sdercus supersfitiosus Fab. Bachyplatys unicolor Sign. Nota. — Ces insectes ont été déterminés par MM. Alluaad, Fairmaire, de Joannis, Léveillé. Ed. Fleltiaux. NOTE SUR UN COTON DE L'ASIE MINEURE Au moment où la culture du cotonnier est rol)jet dans nos colo- nies de tentatives nombreuses, il nous paraît utile de sig-naler à l'attention des colons une variété orig-inaire de lAsie Mineure. Cette variété serait intéressante à introduire dans les réji;-ions qui, comme le Soudan et même la Guinée, oiTrent au cotonnier une période de développement relativement courte. Ce cotonnier est cultivé au deli d'Adabaya, depuis Guévéli, dans la plaine d'Ak-Hissar, notamment à Lefké. Le terrain y est arg-ilo-siliceux, roug-e, pierreux en «général. On laboure en automne (labours de 0'" 10 à 0'" 15 de profondeur), puis de nouveau au printemps vers la lin d'avril. A ce moment se font les semailles, à la volée ; un labour léger sert ensuite à enfoncer les semences, puis on donne un hersage. Dans le cours du développement de la plante, on bine deux ou trois fois et on pratique le j)incement à environ ()'" iO de hauteur. Par suite du pincement, les cotonniers s'étalent fortement et ne dépas.sent généralement pas la taille de 0'" GO. La récolte s'opère en trois ou quatre fois selon que la maturité est plus ou moins groupée. Les rendements s'élèvent à 10 ou 30 okes de coton par deunoum ', 1. L'okc vaut 1.2S2 {ji'amnicis; le doimmim, ','30 m. q. NOTE SUR L'N COtON DE l'aSIË MINEURE l2o c'est-H-dire de 120 à -380 kilog. par hectare de coton en fibres, lequel se vend quatre à cinq piastres l'oke ou 0 fr. 65 à 0 fr. 85 le kilo. Le rendement en graines s'élève de 250 à 500 kilos à Fhectare, Voyons la valeur des fibres obtenues par une culture qui, on peut le voir, est assez rudimentaire : Longueur moyenne Diamètre moyen Résistance moyenne 27 mm. 8 grammes. La fibre est d'un beau blanc brillant, nerveuse, longue mais un peu grosse; elle ne peut être utilisée que pour la fabrication des filés de bas numéros. Le rendement en fibres est de 32 à 35 % du coton brut. En résumé, cette variété, qui par sa végétation ressemble fort aux cotonniers du Soudan, produit des libres analogues au coton africain, mais infiniment plus blanches et en même temps plus longues et plus nerveuses. L'affinité existant entre ces deux types nous permet de croire à un résultat heureux d'introduction de cette variété dans nos colo- nies africaines. Nous tiendrons les colons au courant de nos essais de sélection et d'acclimatement. Yves Henry, CULTURE DE LA KETMIE MUSQUÉE La Ketmie musquée, Ahelinoschus mosc/iatus Mich, connue vuli^airement dans la Colonie sous le nom de Gombo musc, est une plante annuelle, droite, pouvant atteindre près de deux mètres dans les très bonnes terres. Cette plante, acclimatée dans notre Colonie, est originaire de TEg'ypte et de l'Arabie. La Ketmie n'est point soumise, à la Martinique, à une culture rationnelle et intensive. Les propriéiaires qui n'ont point en vue un seul revenu et qui récoltent sur leurs terres tous les produits qui trouvent acquéreurs sur nos marchés de Saint-Pierre et de Fort-dc- France sont seuls à récolter les fruits de cette malvacée qui pousse dans leurs planta- tions vivrières. Il n'y a donc, on peut le dire, aucune culture sérieuse de la Ketmie dans la Colonie. Terrain qui lui convient. — (]ette plante n'est point exigeante sur le choix du sol, mais elle donne peu de produits dans les terres troj) légères ou peu profondes. Les terrains argilo-silicieux sont ceux qui lui conviennent le mieux. Travaux de culture. — Les racines de la Ketmie étant à la fois pivotantes et traçantes, cette plante exige que le sol soit bien pré- paré et assez profondément travaillé. Le terrain devant être toujours j)ropre, il est bon de faire deux labours pour détruire les mauvaises herbes. Epoque des sentis; distance entre les plants ' plantation. — La Ketmie étant une plante annuelle, le semis doit être fait à l'époque (Us [)luies, c'est-à-dire de mai à septembre. Dans les terres sèches et bien fumées, la distance entre les plants doit être diin nu'lre en tous sens, ce qui représente par hectare dix mille plantes. La plantation peut se faire en poquets ou j);ir trans- plantation. l);ins le premier cas, on met 4 à 5 g-raines, puis, après la levée, on procède à l'éclaircissaj^e, en ayant soin de ne laisser que deux pieds. Si le mode de trans])lanlation est riiiployé. on doit CULTURE DE LA KETMIE MUSQUÉE 127 prendre les précautions d'usage : temps couvert, pieds assez forts et abris. Le semis direct convient mieux, les graines étant généralement fertiles. Soins d^ entretien. — Trois sarclages suffisent généralement. On doit faire en sorte de ne pas abîmer les racines ni briser les branches en effectuant ce travail. Si on prend la précaution de tailler les tiges mères qui sèchent après la cueillette des fruits, on peut obte- nir une seconde récolte. Les graines sont plus petites et le nombre de fruits moindre, mais le revenu paie largement les débours. Récolte. — Quatre mois après la plantation commence la récolte, qui doit se faire tous les huit ou quinze jours, suivant le temps. Cette récolte est l'un des travaux les plus coûteux de cette culture et exige de la part du propriétaire le plus d'attention. Chaque fruit doit être cueilli à l'aide d'un instrument tranchant, « sécateur » ; les fruits sont ramassés dans un sac attaché autour de la taille des cueilleuses. Cette récolte doit être bien surveillée, car, pour un fruit oublié, c'est un gramme de perdu. De plus, au moment de la cueillette, toute écorchure faite à la plante nuit à la production. La surveillance doit donc être constante. Il ne faut aussi cueillir que les fruits bien mûrs. La cueillette doit se faire de préférence par un beau temps et après la disparition de l'humidité de la nuit. Les fruits ainsi cueillis sont apportés à la ferme et les graines extraites sont mises au soleil jusqu'à dessication. Ces graines étant exportées, la dessiccation doit être complète pour éviter la germina- tion et les moisissures qui peuvent se produire pendant la traversée. Rendement . — Il serait assez difficile de fixer le rendement obtenu sur des données certaines, cette culture n'étant faite que par les petits propriétaires, qui ne tiennent aucune comptabilité. Tou- tefois, le rendement peut ainsi se calculer : 1 pied donnant 100 fruits, et le fruit donnant 1 gramme de graines, 1 pied donnera .... 0 k. 100 grammes, 10.000 pieds donneront 1000 k. 12S ÉTUDES Et MÉMOIRES Gliaquo po([iict contenant deux pieds, la récolte sera donc d'en- viron 2.000 kilos à Fhectare. Prix (le rcvicnl : 2 labours ii la chai'rue 40 fr. à la houe 125 Ir, 3 sarclajji'es à 40 tâches à Ihcctare, au prix de 1 fr. 25 150 150 Semis et plantations 50 50 Récolte, séchag-e et emballag-e. . . . 300 300 Imposition et frais généraux 50 50 Engrais, fumier 200 200 "tÛÔ 875" Soit environ 900 francs de dépense. Or, la récolte étant de 2.000 kilos à 3 fr., soit G. 000 IV., il reste comme bénéfice net, moins les frais de transport et de commission, 5.000 francs environ. Cette marchandise est achetée sur les marchés de Saint-Pierre et de Fort-de-France au prix de 1 fr. 50 le kilo, soit un revenu de 3.000 fr. et un bénéfice net de 2.000 fr. à l'hectare. C'est donc une culture qui laisserait de beaux bénéfices à ceux qui voudraient s'y adonner en faisant une culture rationnelle et intensive. Saint-Pierre, le 10 novembre 1901. E. NOLLET. Directeur du Jardin botanique. MAÇON, l'UOTAT KKKHIiS, IMPllI.MKrilS. Le Ueraill '. A. CjH.\LL.\MEL. 2« année. Septembre-Octobre 1902. N» 8 MINISTÈRE DES COLONIES Inspection générale de l'Agriculture coloniale. U Agriculture pratique des pays chauds BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES Paraissant tous les deux mois. Tous documents et toutes communications relatives à la rédaction doivent être adressés à l'Inspection générale de VAgriculture coloniale au Ministère des Colonies. PARIS AuGi'STiN CHALLAMEL, Editeur Rue Jacob, 17 Librairie Maritime et Coloniale. Les abonnements partent du 1^^ Juillet. Prix de l'Année (France, Colonies et tous pays de l'Union postale). — 20 fr. La. reproduction complète d'un article ne peut être faite qu'après autorisation spéciale. Les citations ou reproductions partielles sont autorisées k la condition de mentionner la source de l'article. PUBLICATIONS DU MINISTÈRE DES COLONIES REVUE COLONIALE Explorations. — Missions. — Travaux historiques et géographiques. — Archives Etudes économiques Un fascicule de !i feuillex yrand in-S", panât tous les deux mois PARIS — Algistin CHALLAMEL, EDiTf:LR, kli: Jacob, M PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL (France et Colonies) 15 1V. L'Agriculture pratipe ki Pays CMufls BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES Un fascicule de À' feuilles c/rand in-S°, parait tous les deux mois PARIS — Algusti.n CHALLAMEL, Éditeur, rue Jacob, 17 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : (France et Colonies) 20 fr. Annales d^Hygiène et de lédecine COLONIALES PUBLICATION TRIMESTRIELLE PARIS — Octave DOIN, Editeur, place de l'Odéon, 8 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : France et .Mgérie, 10 IV. — Étranger, 12 fr. Feuille de Renseignements de l'Office Colonial P UBLI C A T ION M E A .S U E 1. L E COLONISATION : Exploitations agricoles et industrielles, enquêtes économiques, etc. COMMERCE : Renseignements commerciaux et statistiques ; Avis d'adjudications ; Offres et demandes commerciales ; Mouvement des paquebots ; Listes des maisons de commerce, ih . PARIS — AuGusTi.N CHALLAMEL, Éditeir, rue Jacob, 17 ABONNEMENT ANNUEL : France, 5 fr. — Colonies et Union postale, 6 fr. PARTIE OFFICIELLE ARRÊTÉ Le Ministre des Colonies, Vu le décret du 28 mai 1902, portant création d'un Conseil technique de l'Afi^riculture coloniale, Arrête : Sont nommés pour une période de cinq années vice-présidents et membres du Conseil technique de l'Agriculture coloniale, savoir : i VICE-PRÉSIDENTS I MM. Viger, sénateur, ancien ministre de l'Agriculture; Ed. Perrier, directeur du Muséum d'Histoire naturelle. MEMBRES : MM. Prillieux, sénateur, membre de l'Institut ; Godin, sénateur ; Decker-David, député ; Girod, député ; Henrique, député; Tisserand, directeur honoraire au Ministère de l'Agriculture ; Hamelle, conseiller du Commerce extérieur; D"" Heckel, directeur de l'Institut colonial à Marseille; Chailley-Bert, secrétaire général de l'Union coloniale française ; Delhorbe, colon agriculteur à Madagascar, secrétaire général du Comité de Madagascar, membre du Conseil supérieur des Colonies; Dabat, sous-directeur de l'Agriculture au Ministère de l'Agri- culture; Ch. Deloncle, inspecteur général de la pisciculture ; Le Directeur de l'Institut agronomique ; Le Directeur de l'Ecole d'agriculture de Grignon ; Bulletin du Jardin colonial. 9 130 DOCXMEiNTS OFFIClliLS Le Directeur de lEcole (Ihorlicnlture de \crsailles; Bureau, professeur au Muséum d Histoire naturelle; Coslantin, — — — Stanislas Meunier, — — Bouvier, — — — Arnaud, — — — Dubard, inspecteur général des Colonies, directeur du Contrôle au Ministère des Colonies; Binger, directeur des Allaires d'Afrique au Ministère des Colonies; Bloch, directeur de la Comptabilité ; Vasselle, directeur des AlFaires d'Asie ; Dybow'ski, inspecteur général de l'Agriculture coloniale. Fait à Paris, le 5 août 1902. Gaston Doumergue. ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS DE L'OCÉANIE RAPPORT au Président de la République française. Monsieur le Président, L'administration locale des l'^tablissements français de l'Océanie s'est émue du nombre croissant des vols de vanille verte dans la colonie. Elle a fait reniai'cjuer que des planteurs honorables se trouvent troj) souvent frustrés du prix de leurs elforts et que, de plus, le renom commercial de la vanille de Tahiti se trouve atteint par la vente sur le marché extérieur de gousses insuffisamment nourries ou mal préparées frauduleusement acquises. L'action répressive du pouvoir judiciaire ne peut malheureusement s'exercer en j^areille matière que d'une manière tout à fait insuffisante. Il n'est pas possible à la police locale de surveiller des plantations souvent fort étendues et sans clôtures; de plus, les vols sont le |)lus souvent habilement dissimulés, car ils sont clfectués généralement par de petits propriétaires qui ciillivciit eux-mêmes et peuvent toujours prétendre que les gousses dont ils sont détenteurs proviennent de leur exploitation. En présence de cette situation, le (iouvernenr des Etai)lissements fran- çais de l'Océanie a pensé qu'il conviendrait d'appliquer à Tahiti une régle- mentation semblable à celle (|u'm institué à la Réunion le décret du 13 mars lH7i, relatif à l'achat, au transport et à la vente des vanilles vertes. L'économie de ce texte peut se résumer en deux dispositions essentielles ; 1" la vanille ne peut circuler dans la colonie qu'accompagnée lîAPPOKT SIR LES ÉTABLISSE:MErsTS FRANÇAIS DE l'oCÉAME 131 d'une expédition indiquant la nature, le poids et l'ori^nne des produits, les noms et domiciles de l'expéditeur, du conducteur et du destinataire, la rouie à suivre et le délai dans lequel le transport doit être effectué ; 2° tout acheteur de vanille est tenu d'inscrire ses opérations sur un registre spécial et de le présenter à toutes réquisitions de l'autorité. Ce régime a donné de bons résultats à la Réunion où il a été établi pour obvier à des inconvénients semblables à ceux dont souffrent les planteurs de notre possession océanienne. Il s'agirait donc de le mettre en vigueur à Tahiti, avec cette modification toutefois qu'il serait appliqué non seulement à la vanille verte, mais aussi à la vanille préparée, exten- sion motivée, d'ailleurs, par ce fait déjà signalé que les voleurs sont le plus souvent de petits planteurs qui préparent eux-mêmes la vanille soustraite et modifient ainsi la nature et l'aspect du produit dérobé. D'ailleurs, pour faciliter la surveillance, l'administration locale recom- mandera aux propriétaires d'adopter la méthode de faire poinçonner leurs gousses avec des marques déposées. Je ne vois que des avantages à donner suite à la proposition du Gou- verneur des Établissements français de l'Océanie, d'autant plus qu'elle a rencontré auprès de la Chambre d'Agriculture de Papeete une adhésion sans réserves. J'ai fait préparer en conséquence le projet de décret ci-joint, que j'ai l'honneur de soumettre à votre haute sanction. Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'hommage de mon profond respect. Le Ministre des Colonies, Albert Decrais. DÉCRET réglementanl rachat, le transport et la vente des vanilles à Tahiti. Le Président de la République française, "Vu l'art. 18 du Sénatus-Consulte du 3 mai 1854, Vu le décret du 28 décembre 1885 sur le Gouvernement des Établisse- ments français de l'Océanie, Décrète : Art. l""". — Quiconque sera trouvé sur la voie publique transportant des gousses vertes ou des lianes de vanille ou de la vanille préparée devra représenter une expédition délivrée sur la demande du propriétaire 132 UOCIMENTS OFFICIKl.S producteur par le maire de Papeele, les présidents des Conseils de dis- tricts ou le gendarme résidant au lieu de départ. (]ette expédition indiquera la nature et le poids des produits, le lieu de leur provenance, les noms, prénoms et domicile de l'expéditeur, du con- ducteur et du destinataire, la route qui sera suivie, le délai dans lequel le transport sera ell'ectué. Ce délai sera limité, suivant les distances, par arrèlé du Gouverneur. Les autorités désignées ci-dessus, ainsi que tous agents de la force publique pourront toujours interdire le transport pendant la nuit. AuT. '2. — I>es préparateurs de vanille et tous industriels ou commer- çants qui achètent de la vanille verte ou préparée sont tenus d'avoir un registre coté et paraphé par le maire de Papeete, le président du Conseil du district de leur résidence ou le juge de paix de leur canton judiciaire, sur lequel ils devront consigner, par ordre de dates, sans blancs, surcharges, ratures ni interlignes, leurs acquisitions, avec indication des noms, pré- noms et domicile des vendeurs, du poids, en toutes lettres, des gousses vertes de vanille ou de la vanille prépai'ée par eux, achetées, et du prix d'acquisition. Ils devront communiquer ce registre sans déplacement à toutes réqui- sitions des autorités mentionnées à l'art. 1*"" ou de tout agent de la force publique. Ils sont obligés, en outre, d'exiger de leurs vendeurs de conserver ou de produire, comme pièces justificatives, les expéditions délivrées aux termes de l'art. 1®"". Aht. '.\. — Tout transport avant ou après le délai indiqué dans l'expé- dition ou par une autre route que celle qui a été déclarée sera puni comme s'il avait été ellectué sans expédition, d'une amende de vingt-cinq à cinquante francs et de cin(| à dix jours de prison ; si la contravention a eu lieu pendant la nuit, la peine sera de cent francs d'amende et de dix à quinze jours de prison. Toute fausse indication donnée aux autorités chargées de la délivrance des expéditions, sf)it dans l'intérêt d'autrni et |)ar pure complaisance, à l'eirct d'obtenir des expéditions destinées à facililei- I Ciilèx cnicnl fraudu- leux des gousses vertes des lianes de vanille ou de la vanille i)réparce, sera punie de cinq à cinq cents francs d'amende et de sei/.e jours à trois mois de prison. Les contraventions aux prescriptions de iarl. 2 seront punies d'une amende de vingt-cinq à cinquante francs cl de cin([ à dix jours de prison. AnT. i. — Les gousses, lianes et toute vanille préparée, transportées en contravention, seront, ainsi (pie les moNcns rie liansjxnl, saisies pour gai-anlie de l'amende. ARKÊTÉ CO>'CERNAM' LA CHASSE AU CONGO FBANÇAIS 133 Les délinquants ne pourront obtenir mainlevée quà la condition de consigner le montant de l'amende ou de présenter une caution solvable. Art. 5. — Le Ministre des Colonies est chargé de l'exécution du pré- sent décret qui sera publié au Journal officiel de la République fran- çaise et inséré au Bulletin des lois et au Bulletin officiel du Ministère des Colonies. Fait à Paris, le 4 mars 1902. l''mile LouBET. CONGO FRANÇAIS arr1':te interdisant dans la colonie la chasse aux oiseaux insectivores dénommés pi(fue-bœufs. Le Commissaire g'énéral du Gouvernement dans le Congo Français, Vu le décret du 28 septembre 1897, \u le décret du 6 mars 1877 rendant le Code pénal métropolitain appli- cable dans la colonie du Sénégal et dépendances, notamment l'art. 3 dudit décret. Vu la décision du 13 février 1882 promulgant dans la colonie le décret du 6 mars 1877, Vu la circulaire du 23 juillet 1900, Xu la lettre de M. l'Administrateur de Brazzaville, en date du 8 avril 1802, Considérant qu'il importe d'enrayer dans la colonie l'extermination des oiseaux insectivores dénommés pique-bœufs, dont la conservation est reconnue nécessaire pour l'élevage du gros bétail. Le Conseil d'administration entendu, Arriîte : Art. l*^"". — La chasse aux oiseaux insectivores dénommés pique-bœufs est interdite dans toute l'étendue de la colonie. Art. 2. — Les contraventions au présent arrêté seront considérées comme contraventions de police simple et punies des mêmes peines. Art. 3. — Le présent arrêté sera communiqué partout où besoin sera et publié au Journal et au Bulletin officiel de la colonie. Libreville, le 15 mai 1902. Albert Grodet. 134 DOCUMENTS UI-FIClliLS MADAGASCAH KT DÉPENDANCES ARRÊTÉ rapporlniil l'arrùlê du 12 septembre 1900, réglemenlant la chasse aux bœufs, sans maître connu, dans la province de Majuncju. Le Général Commandant en chef le corps d'occupation et Gouverneur (iénéral de Madaj^^ascar el Dépendances ; \'u les décrets des 1 1 décembre 1895 et 30 juillet 1897 ; \'u l'arrêté du 12 septembre 1900, rég'lementant la chasse aux bœufs, sans maître connu, dans la province de Majung^a; Considérant que l'exercice de cette chasse a donné lieu à de nombreux abus dans cette circonscription ; Considérant qu'un nombre considérable d'animaux a été capturé dans la province de Majunga ; que, par suite, il importe d'éviter la disparition complète des bœufs sauvages dans cette contrée, et que le seul moyen de favoriser la reproduction des troupeaux est d'interdire la chasse ; Sur la proposition de M. l'Administrateur en chef de la province de Majunga ; Le Conseil d'administration entendu, Arrête : Article l'"". — Est rapporté l'arrêté du 12 septembre 1900, réglemen- tant la chasse aux bœufs sans maître connu, dans la province de Majunga. Art. 2. — (]ette chasse est interdite à l'avenir sur tout le territoire de la province de Majunga. Art. .'i. — M. M. le Secrétaire général et l'.Administrateur en chef de cette circonscription sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive le 28 juin 1902. Pour le Gouverneur général, et par délégation, Le Secrétaire général, Lehreux. ÉTUDES ET MÉMOIRES SUR LA MALADIE DU COTONNIER EN EGYPTE Vers le milieu de juin dernier, je recevais, par l'intermédiaire de M. Dybowski, directeur du Jardin colonial de Nogent-sur-Marne, des échantillons de cotonnier d'Egypte constitués par la base des tiges et les racines. Ces échantillons, envoyés dans des conditions défec- tueuses, me parvinrent couverts de moisissures, et, examinées soi- gneusement, ils montrèrent de simples saprophytes vulgaires. Je trouvai bien un mycélium dans les tissus, mais l'incertitude résul- tant de la présence des précédentes moisissures ne me permit pas de poser un diagnostic précis et je répondis à M. Dybowski que l'examen des échantillons envoyés ne pouvait autoriser une déter- mination certaine, et je le priai de me procurer de nouveaux échan- tillons. Quelques jours plus tard, MM. Choremi et Benachi, d'Alexandrie, envoyèrent à M. P. Viala, professeur à l'Institut Agronomique, par l'intermédiaire de M. Th. Couladès, des échantillons en bon état, accompagnés d'une notice de ce même M. Couladès, sur les symptômes du mal, Fimportance du dégât et la réjaartition de la maladie en Egypte. M. Viala me fît transmettre cet envoi. L'examen à l'œil nu me montra à la base de la tige, dès le collet et sur la partie du pivot la plus rapprochée du sol, une dépression longitudinale plus ou moins élargie, mais n'occupant qu'une portion de la surface. Généralement cette région rétrécie est brune, et exté- rieurement se montre désorganisée, alors que plus haut sur la tige ou plus bas vers l'extrémité du pivot, la plante conserve à peu près son apparence saine. D'après les renseignements que je puise dans le rapport de M. Th. Couladès et surtout dans un mémoire très documenté qu'a bien voulu me faire parvenir M. Y.-K. Agathon- Bey, les cotonniers envahis continuent de végéter pendant un temps de durée assez variable, mais ils semblent soutirants dès le début. !3fi ÉTUDES ET MÉMOIRES La tif^fo. au lieu de rester verticale, s'incline latéralement ; les feuilles, surtout vers la base, restent chétives, perdent leur turgescence, jaunissent et s'abaissant vers le sol, paraissent fanées. Puis ces phé- nomènes s'accentuent et la plante meurt. L'observation microscopique m'a fait voir, dans les tissus de la plante, aussi bien dans les vaisseaux et le parenchyme ligneux que dans l'écorce ou la moelle, la présence d'un mycélium hyalin, rami- fié, cloisonné. Ce mycélium produit dans les éléments mêmes, dans leur cavité, une première fructification conidienne, constituée par de petites conidies droites, cylindroïdes, arrondies aux deux extré- mités. Ces conidies apparaissent isolément à l'extrémité de stérig- mates dressés presque à angle droit sur les filaments mycéliens, et les conidies mûres qui sont tombées, rayonnant autour de la coni- die encore en place, donnent une apparence très spéciale et carac- téristique à cette fructification. En même temps, à la surface de la plaie, je rencontrai un bon nombre de spores fusiformes, arquées, aiguës aux deux extrémités, munies généralement de trois cloisons transversales, quelquefois quatre, rarement cinq. Souvent ces spores sont un peu étranglées au niveau des cloisons, alors qu'au contraire, à la partie moyenne de chacun des articles, elles sont un peu ventrues. Ces spores, beau- coup plus longues que les précédentes, sont toutes, pour ainsi dire, isolées, tombées de leur support. J'ai pu me persuader cependant, par la culture en chambre humide des échantillons, qu'elles appa- raissaient sur un filament dressé qui se ramifie par la production vers son sommet d'un ou deux verticilles dont les rameaux hyalins se terminent chacun par une conidie. C'est \k évidemment une forme Fusariurn. C est tout ce ((ue je puis voir sur les pieds de cotonnier envoyés par MM. Choremi et Benachi. Mais déjà la description de la maladie (pil m'était fournie par M. Tli. (Roulades, l'apparence extérieure des échantillons, la consta- tation du mycélium dans les tissus et ses caractères, la présence de conidies dans les éléments de la plante, vaisseaux et aussi cellules, tout cela se rapportait bien à la description d'une maladie du coton- nier (jui a sévi très gravement en Améri([uo, aux l^tats-Unis, dejmis plus de dix ans. .1 ai dès lors pensé (jue la maladie actuelle; du cotonnier d'b]gypte n'était |)as différente de cette maladie, observée et déjà décrite aux LA MALADIE DU COTONNIER EN EGYPTE 137 Etats-Unis, dès 1892, par M. Atkinson ^ et attribuée par lui, avec quelque doute pourtant, à une forme mycélienne ascomycète Fusa- riuni vasinfectiini Atkinson, dont j'avais observé la forme typique Fusarium. L'étude du parasite a été complétée plus récemment par M. Erwin- F. Smith ', et celle de la maladie par M. Orton -^ Cette maladie, appelée par M. Erwin-K. Smith « wilt disease of cotton, waterme- lon and cowpea », se montre aussi, d'après l'auteur américain, sur le melon et Vigna sinensis (cowpea), lég-umineuse fourragère d'une importance considérable aux Etats-Unis. En possession de ces données, j'en ai fait part à MM. Choremi et Benachi, en leur fournissant (juelques renseignements sur les indi- cations générales que comportait le traitement. Peu de temps après, au commencement de juillet, M. Y.-K. Aga- thon-Bey vint me faire visite à la station de Pathologie végétale, à Paris; il m'apportait de nouveaux échantillons en excellent état et, sur ma demande, il rédigea le rapi)ort très circonstancié, dont j'ai parlé plus haut, sur les symptômes et l'évolution générale de la maladie. Les échantillons frais que M. Y.-K. Agathon-Bey m'avaient com- muniqués mont permis de constater tout d'abord une nouvelle forme du parasite, à la surface même des plaies de la racine. Je trouvai là les chlamydospores, les spores durables, produites par le mycélium et qui, à mon avis, permettent à ce mycélium de persister longtemps dans le sol. Les chlamydospores, dans de nombreuses espèces de champignons, apparaissent sur le mycélium lorsque celui-ci a déjà donné une ou plusieurs formes conidiennes qui n'ont qu'une durée de -*iersistance assez courte. Les chlamydospores, comme leur nom l'indique, ont une membrane généralement épaisse, qui leur permet de résister à l'action des agents exté- rieurs, surtout à la sécheresse et au froid ; elles ne germent le plus souvent que lorsque certaines conditions, bien définies, se ren- contrent : chaleur et hu iiidité, humidité surtout. Dans le cas actuel, ces chlamydospores ont pris tous leurs caractères et ont mûri sur les 1. G. -F. Atkinson, Some diseasesof cotton, in « Alabama Collège agriculturalexpe- riment Station », Bull. n° 41, décemb. 1892, p. 19 à 29, 3 fig., Aiiburn. 2. Er\vin-F. Smith, Wilt disease of cotton, loaternielon and cowpea, W^ashington, 1899 (avec toute la bibliographie du sujet). 3. W. A. Orton, The Wilt disease and its conlrol, Washington, 1900. 138 ÉTUDES i:t mémoires racines malades, après que celles-ci eurent été exposées pendant quelques jours k l'air confiné et saturé d'humidité. A l'état de déve- loppement complet, ces chlamydospores sont arrondies, avec une membrane assez épaisse ; hyalines au début, elles prennent bientôt une coloration jaune ou rouge brique pâle cpii est définitive. J'ai récolté ces spores tardives et j'en ai essayé la germination. Un petit nombre seulement ont pu germer, elles ont reproduit des apparences tout à fait analogues à celles que figure M. Erwin-F. Smith dans son rapport et donné des filaments qui se cloisonnent et produisent souvent des articles un peu ventrus. Ces mêmes échantillons, remis par M. Y.-K. Agathon Bey, pré- sentaient sur d'autres pieds des spores du type Fiisariuni qui ont germé et reproduit des figures se rapportant également aux germina- tions de la forme Fusarium données par M. Erwin-F. Smith. Enltn, j'y ai constaté encore les conidies endocellulaires du début de l'évo- lution indiquées plus haut. Bien que dans ma culture, je n'aie pas encore vu apparaître la forme ascospore qui permet de classer d'une façon définitive le cham- pignon parasite du cotonnier dans l'ordre taxonomique, je ti'hcsile pas maintenant à déclarer que la maladie du cotonnier d'Egypte est due au parasite décrit par M. E.-F. Smith et appelé par son créateur Neocosmospora vasinfecta (Atkinson) E.-F. Smith. Cette espèce, qui est un ascomycète du sous-ordre des Pyrénomycètes, appartient à la famille des Nectriacées ou Ilypocréacées, et la forme ascospore n'apparaît sur le support ou dans les cultures qu'au bout de plusieurs mois, après les formes conidiennes et les chlamydospores. Je dois dire maintenant ([ue le Neocosmospora vasinfecta, bien spécifié par M. Erwin-F. Smith, me semble identique à un parasite que j'ai étudié sur 1 d'illet dans les cultures importantes du littoral de la Méditerranée, à Cannes, Antibes, Nice; je n'avais pas, à ce moment, connaissance du rapport de M. E.-F. Smith. J'ai trouvé sur l'd'illet ' des formes primaires [Cy lindrophora et Fusarium), et des chlamydospores fort semblables à celles dont j'ai constaté la pré- .sence sui- le cotonnier. Néanmoins, et bien que l'identification ne j)araisse guère laisser place au doute, elle ne peut être alïirmée que si l'on arrive à infecter l'œillet avec le parasite dn cotonnier et réci- j)ro(juemenl. J'ai en cours d'expérimentation des infections d'oeillet I. D' (1. DclniToix, /„! ni:thi(lii' des (rillelx " Cocotier. Nous résumerons brièvement nos observations sur ces matières. TJn troisième chapitre sera consacré aux plantes et arbres utiles de l'archipel. CULTURES DE l'aRCIIIPEL DES COMORES 145 CANNE A SUCRE Cette culture a fait jadis la prospérité de Mohéli, d'Anjouan et de Mayotte; à Mavotte, une propriété sucrière Soulou est vendue jadis plus de 400,000 de francs et 41 à 12 usines y ont eu leur période d'activité. Sans parler de la situation actuelle, si différente, nous ne pou- vons nous empêcher de remarquer l'état primitif des procédés d'extraction du sucre (à part dans deux usines à matériel plus récent). Le vieux matériel, avec les basses températures, a dominé long- temps; les cannes ne sont passées souvent qu'une fois au moulin. Quant à la culture de la canne, les premiers planteurs ont usé et abusé du sol, pendant de nombreuses années, sans y ajouter le moindre engrais, on jetait même les fumiers, chacun agissant iso- lément pour son compte. J'ai vu des plantations (Longoni, Cavani, etc.) où les cannes n'ont pas été dessouchées et renouvelées pendant 12 à 15 ans ; à partir de la 5^ à G*" récolte, ou coupe, on sait que le rendement diminue dans de grandes proportions. Il en est résulté en bien des points l'appauvrissement du sol et la dégénérescence des espèces plantées, jamais ou rarement renouvelées de semis. Les frais généraux se sont accrus à mesure que les rendements baissaient. Et cependant les terres rouges de Mayotte sont des terres sucrières au premier chef, l'humidité permanente du sous-sol à couche argileuse compacte y sauve les récoltes aux périodes de sécheresse prolongée. A côté de cette situation, comparons ce qui a été fait à Maurice. La crise a été la même dans les deux pays. Devant les prix décrois- sants du sucre, on a conservé la canne, modernisé le matériel, sélectionné les espèces et adopté les culture intensives ; la produc- tion a doublé et sauvé le pays. La production intensive a été favorisée par tous les moyens : 1° Rénovation par sélection et perfectionnement des espèces; 2" Adjonctions d'engrais chimiques, fumures, adaptés aux ter- rains, après analyses chimiques répétées ; 3" Abandon aux travailleurs et à leur famille des terres médiocres, sous la réserve qu'ils en cultiveraient une notable partie en cannes ; Bulletin du Jardin colonial. 10 146 ÉTUDES ET MÉMOIRES le propriétaire fournil les boutures et les engrais, a droit en retour à la moitié de la récolte et achète l'autre partie à l'Engat^iste, à des prix lixés d'avance. En intéressant ainsi le travailleur à son exploitation, le planteur se Test attaché définitivement, a tiré un judicieux parti des terres médiocres et vu le rendement de son usine s'accroître de 30 à 50 Vo. Je ne parlerai pas de l'assistance médicale effective et de tous les instants qu'il lui accorde, ainsi qu'à sa famille, l'élévation des salaires et des sacrifices consentis rohlig;eant à prévenir pour ainsi dire les journées de chômag-e, qui sont pour le colon une perte sèche. Aussi Maurice résiste victorieusement, produit et réalise des bénéfices, malgré la crise actuelle et l'existence de la peste bubo- ni(jue dans le pays. On ne saurait sans injustice comparer de point en point Mayotte à Maurice, mais l'effort tenté chez les voisins pouvait en partie s'adapter à Mayotte. Sans insister sur le labourage du sol, possible et pratique en beaucoup d'endroits, tenté autrefois avec succès et économisant de la main-d'œuvre, je dois reconnaître que c'est là une arme à deux tranchants. L'axiome bien connu aux pays chauds : « qui creuse le sol, creuse sa tombe », est encore vrai aux Comores. Tout se réduit à une question d'assainissement en profondeur. La charrue rendra de précieux services là où les cultures ont suffi- samment drainé le sol et épuisé ses principes fertilisants. Dans les terres vierges ou trop neuves, elle amènera des réveils terribles de paludisme qui faucheront les existences, comme cela est arrivé à Mohéli où Sonley dut abandonner ce procédé, et à Mayotte lors de l'établissement de la dig-ue vers Pamenzi etc. Aux abords des usines actuelles, ce paludisme dévorateur des éner- gies et destructeur de la race indigène est soigneusement entretenu par ignorance et inertie. Une partie des déchets de la fabrication des sucres et les résidus des distillations répandent autour de l'usine une odeur fécaloïde, et vont polluer les ruisseaux voisins, comme à Combani ; dans les mares stagnantes qu'on rencontre souvent, pul- lulent des myriades de larves de m()usti<|ues. ('/est dans les chau- dières abandonnées de l'usine en ruines de Mirémani, dans le sud, que j'ai (lécouvfi-t un véritable bouillon de culture de larves d'ano- CULTURES DE l' ARCHIPEL DES COMORES 147 phèles. Pour ces raisons, les points comme Soulou, Débénay, etc. puent le paludisme. Un propriétaire m'affirmait il J a quelques mois que ces résidus infects épuraient l'eau des ruisseaux que pré- férait ainsi l'indig-ène. Or, c'est précisément dans cette partie que la mortalité par dysenterie s'était montrée le plus élevé dans ces cinq dernières années. On ne saurait pousser plus loin l'amour du paradoxe. Ces déchets, cause puissante d'insalubrité, sont de plus une source de substances fertilisantes très riches qui se perdent, faute d'être canalisées, vers des citernes qui les recueilleraient, et où il serait possible de les neutraliser et de les utiliser. Il existe aux portes de Mayotte, aux Iles glorieuses, des gise- ments importants de petit guano, ainsi appelé parce qu'il n'a pas la richesse du guano du Pérou, dont les stoks sont épuisés. Ces pro- duits assureront 10 à 15 années d'exploitation, d'après les plus récentes estimations ; ils sont recherchés des Mauriciens. Pourquoi nos planteurs ne les utiliseraient-ils pas? Cet engrais ne peut être employé seul, mais seulement après analyse des terres et comme adjuvant précieux des fumures ordi- naires, en combinaisons variables mais bien définies, selon les ter- rains. A Maurice, un chimiste attitré donne toutes les indications aux planteurs et vient de découvrir une formule heureuse de mélange permettant d'utiliser largement les ressources des Glorieuses. La variété de canne « la Bigtama », obtenue de semis, donne à Maurice et à la Réunion d'excellents résultats; sa culture se com- plète par celle d'une variété précoce mûrissant en douze mois. A Anjouan, des essais de semis tentés par un directeur intelli- gent ont réussi. Cette pratique ne s'est pas généralisée, bien que les cannes obtenues ainsi après trois à cinq années d'efforts fussent fort belles. Pas plus que Mayotte, Anjouan et Mohéli n'ont tenté la culture intensive, ils perdaient encore récemment 20 à 30.000 francs de mélasses inutilisées chaque année. Là, l'effort principal s'est porté sur la vanille. Et cependant il est un principe de culture coloniale qu'il ne faut rien abandonner des cultures tentées et ne jamais se baser sur une seule, celle-ci pouvant craquer à un moment donné. Aux îles Havvaï, les sélections de cannes jointes aux cultures 1 iS ÉTUDES FT MÉMOIRES intensives ont donné aux capitaux américains un rondement de 12 à 15 tonnes et au delà à lliectare, soit cinq ou six fois plus qu'à Mayotte et dépendances. Tandis qu'enfin la betterave a atteint son summum de perfection- nement, la canne à sucre commence seulement son évolution, sa culture est loin d'avoir donné tout ce qu'elle peut et ne devrait pas être abandonnée, mais perfectionnée. Il existe à Mayotte d'importantes rhumeries et une distillerie vient récemment d'être installée à x\njouan. VANILLIER Cette remarquable orchidée est la dominante des cultures colo- niales dans l'archipel. A la Grande Comore les plantations de la Société représentent 500.000 à 600.000 pieds. Celles des indigènes, quelques milliers de plants. Mohéli est représenté par environ 350.000 à 400.000 pieds. Anjouan occupe le premier rang- avec 1.200.000 vanilliers environ. Mayotte ne vient actuellement qu'en dernier lieu, sinon comme lianes (500.000), du moins comme chiffre producteur dans ces der- nières années. Rien n'est plus variable que les méthodes de cultures suivant les îles, les sols et les préférences de tel ou tel planteur. Tout en renvoyant à la savante monographie de Delteil sur la vanille, nous résumons ici les différents procédés suivis aux Comores. PLANTATIONS Celles de la Grande Comore, faites au milieu des coulées anciennes de Salimani, ont parfois nécessité l'emploi de la mine pour briser la couche rocheuse supei'licielle et représentent un tra- vail considérable. Plantées au début entre 400 et 600 mètres, les lianes ont fourni des pousses vigoureuses, mais une floraison à peu près nulle, cette zone se trouvant trop humide, trop pluvieuse et abritée (zone de la forêt). Du bord delà mer, à 100 et 150 mètres, les plantations sont belles, mais la floraison en est capricieuse et Inrdive. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 149 Elle bat son plein en octobre, novembre et décembre, et va par- fois jusqu'en janvier et février, tandis qu'à Anjouan, Mayotte et Mohéli, floraison et fécondation sont g-énéralement terminées avant novembre et décembre. Par cette particularité la Grande Gomore se rapproche de la Réunion, malheureusement le régime des pluies survenant sur ces floraisons et fécondations tardives produit un coulage désastreux ; il donne aux lianes une poussée vigoureuse dont se ressent la gousse, qui croît trop rapidement, se remplit mal et n'a plus le temps maté- tiel, les 6 à 7 mois nécessaires à sa maturité parfaite, Deux espèces de loches, blanche et jaunâtre, très voraces, causent d'énormes ravages dans les vanilleries. Elles dévorent tout : feuilles, jeunes tiges, gousses; leur simple passage sur une gousse l'enduit d'une traînée visqueuse et corrosive qui l'altère et la déprécie. Ges ennemis des plantations n'existent qu'à la Grande Gomore. PRÉPARATION A la préparation, la gousse trop aqueuse, à demi remplie par les graines, donne souvent une vanille à gros déchet et à vilain aspect, bien qu'odorante. A ces désavantages se joignent, au moment dû séchage des gousses au soleil, des grains fréquents et inattendus qui obligent à des manutentions multiples, compromettant cette phase impor- tante de la préparation (moisissures, non conservation des lots mouillés ou mal séchés). On pourrait y remédier par le séchage des gousses dans des bâtiments étuves. Des conditions climatériques aussi spéciales mettent donc la Grande Gomore en état d'infériorité vis-à-vis des îles voisines comme pays producteur, PRATIQUES LOCALES Le planteur a tenté ici avec succès : 1° Le marcottage de ses vanilles : on sait en quoi consiste l'opé- ration, et par là a régénéré des plants de vanille qui ont de 10 à 12 ans d'existence et produisent encore; le vieux pied disparaît et se trouve remplacé par le pied issu de marcottage ; 2° Les lianes ne reçoivent pas d'empaillage mais un petit chien- loO ÉTUDKS ET MÉMOIUKS dent, spécial au pays, forme un feutrage serré et recouvre les rochers, donnant lillusion d'un tapis verdoyant qui retient l'humi- dité et préserve les pieds des vanilliers des coups de soleil par réver- bération sur le sol. Cette pratique est bonne la première et la deuxième année. Autant le marcottage nous paraît rationnel, et c'est le seul endroit où nous l'ayons vu pratiqué, autant le non-empaillage des plants nous semble critiquable à la troisième année. On nous objec- tera que la liane, poussant déjà avec trop de vigueur, l'empaillage ou engrais végét;il surajouté en retarderait la floraison. Nous avons observé chez un indigène, possesseur de 2.000 à 3.000 pieds, un empaillage bien fait, pendant une période de séche- resse, sur un sol excessivement rocailleux ; les plants avaient ainsi pu résister à la chaleur sèche et conserver de très belles gousses, bien charnues et en pleine croissance. Ce fait expérimental détruit l'objection ci-dessus : La question de l'empaillage est sans doute délicate, le moment opportun diflîcile à préciser, mais le planteur qui l'abandonnera de parti pris, surtout sur des sols aussi poreux et rocheux que ceux de la Grande Gomore, s'exposera à perdre, à la grande sécheresse, une notable partie de sa récolte, faute d'apports nutritifs végétaux suf- fisants. La principale difficulté à la Grande Gomore serait d'amasser du fourrage sec longtemps d'avance dans les hauts, c'est-à-dire en des points très distants des plantations. G'est là, je crois, la vraie raison pour laquelle l'empaillage ne se fait pas. De nouvelles vanilleries se créent en ce moment entre loO et 400 mètres, au-dessous de la zone des forêts, dans des parties plus riches en humus. La culture de la vanille est plus ancienne dans l'île qu'à Anjouan, à Mohéli. La fécondation est confiée aux enfants qui ont la main plus légère que les hommes et vont plus rapidement. ANJOUAN Le vanillier à Anjouan croît un peu partout, du bord de mer à 500 et GOO mètres d'altitude. Gullivé par quelques Arabes comme plante de curiosité, mais non fécondé, par ignorance, il s'est déve- loppé étonnamment de 1893-94 à nos jours. CULTURES DE l'aRCIIIPEL DES COMORES 151 Ces petites plantations indigènes fournirent les premières lianes et furent une indication pour les colons sur la nature et l'existence des sols à vanille. Le nombre des plants dépasse 1.200.000, De secondaire, cette orchidée est devenue la culture principale de l'île. Sa production est près d'atteindre annuellement 20 tonnes de vanille sèche. Son procédé de plantation varie un peu sur le versant oriental et sur le versant occidental. Sur la côte est où la sécheresse sévit davantag-e, le trou de plantation est plus ou moins creux, plus ou moins large, selon la nature des terrains, de 5 à lo centimètres de profondeur sur 10 ou 20 centimètres de largeur et de longueur. Dans l'interligne on propage souvent une toute petite graminée en forme de trèfle à racines profondes qui fouillent le' sol et l'ameublent ; souvent de véritables bordures en pierre encadrent les rangées de vanilliers et retiennent le paillage, dont l'importance légère à l'origine ne devient considérable que dès la deuxième ou la troisième année. Sur la côte ouest où le volume d'eau annuel est le double (3 mètres), le planteur eut des mécomptes au début, les lianes pour- rissant parfois, grâce à une sursaturation d'humidité. On a remédié à cet inconvénient en entourant la liane, à la base, d'un lit de petits cailloux qui la drainent. L'empaillage se fait par-dessus. Cette méthode a parfaitement réussi; mais, soit qu'il faille l'attribuer à l'excès d'humidité, aux pluies plus fréquentes ou à la nature rocheuse du sol en cette partie, il j a la un relard appréciable de la floraison. Les gousses sont également plus aqueuses et moins odorantes ; à poids égaux, le rendement est inférieur à celui de la côte orientale. En commençant, les trous étaient creusés et préparés avec un soin minutieux; devant la réussite et la fièvre des nouvelles planta- tions, on s'est bientôt contenté d'un simple sillon pour recevoir les 3 à 8 nœuds inférieurs de la liane bouture. Tous ces essais ont été couronnés de succès. Il est communément admis que les plantations ne peuvent se faire qu'à une époque limitée de l'année, de décembre à fin mars, au moment des pluies. De quelques essais personnels sur le plateau de Hombo, en des 152 KTUDF.S ET MÉMOIRES terres médiocres, pendant mon sr-jour à Anjouan, j'ai constaté que cette limite n'a rien de précis. En période de sécheresse, si les tuteurs (piji^non d'Inde) sont bien pris, les plantations peuvent avoir lieu, sous la réserve de creuser les trous plus profondément, 20 à 30 centimètres et davantage, de façon à ce que la liane se trouve au contact des couches profondes du sol, encore humides ; la liane sommeille sans périr. S'il survient la moindre pluie, elle pousse aussitôt, mais nécessite un robuste paillage. Dans la pratique, les colons plantent un peu en toute saison, selon les lianes dont ils disposent, et selon les altitudes et les lieux abrités. En certaines parties on a constitué de lég^ers ados, la partie infé- rieure de la liane est étalée sur le sol en un mince sillon, et paillée, mais ce procédé s'est surtout généralisé à Mayotte. Nous ne parlerons des tuteurs de la vanille, le pignon d'Inde, etc., qu'à la lin de cette étude comparative. Ce qui a favorisé l'extension des vanilleries à Anjouan, c'est la présence dans les cirques de terres noires et d'humus légers accu- mulés par les siècles et les désagrégations constantes des roches volcaniques. En ce pays, certaines montagnes sont comme laminées, au j)oint qu'une crête étroite, entre deux précipices, permet seule le passage au piéton. De hautes collines érodées par le temps, mais boisées, ou les parois des cratères, qui subsistent, protègent les cultures des cvclones, des vents violents et desséchants du sud, d'une durée de 5 à 6 mois. C'est ainsi que les cyclones de 1897-08, si néfastes à Mayotte, n'ont pas eu de prise sérieuse sur les cultures d'Anjouan. Dans les pentes inclinées jusqu'à il)'^ dans les vallées sinueuses, abritées et profondes parfois de plusieurs kilomètres, le vanillier se plaît également et donne les plus belles récoltes, les eaux torren- tielles s'écoulant très vite et s'absorbant sur un sol d'une porosité extrême. Les terres rougeâtres, les unes dures et à fond argileux, les autres légères et meubles (ce sont les terres à vanille de Mayotte) sont ici de prime abord moins favorables. La rc'[)rise de la bouture et sa croissance y sont, en effet, très longues dans les premières. L;i liiine nécessite des soins constants, le sol se fendillant pro- CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES lo3 fondement k la sécheresse; dans les secondes, l'humidité est moins persistante et la vanille souffre. On y peut remédier par des ados, le drainag-e au besoin et un paillage soigné, néanmoins ces vanilleries, qui produisent tardive- ment entre la quatrième et la cinquième année, paraissent de plus long"ue durée que les autres. A NOTER A ANJOUAN 1° Le paillag-e formidable des vanilleries au moment de la florai- son et de la fécondation qui dépasse tout ce qu'on peut imag-iner, en opposition avec ce qui a lieu k la Grande Comore et k Mohéli. 2° Le surproduction k laquelle sont soumises les lianes parfois porteuses de 300 gousses, souvent de 100 k 150, alorsque la moyenne raisonnable est de 60 k 80 gousses. 3" L'épuisement rapide des vanilleries qui ne dépassent guère 5 k 7 ans d'existence et ne donnent pas plus de deux récoltes sérieuses. C'est ainsi que les premières vanilleries de l'île, datant de 1893- 189S, ont déjk disparu, soit près de 200.000 pieds. Les planteurs ont suppléé k ces disparitions par l'extension déme- surée de leurs plantations, les sols k vanille très nombreux le leur permettant. On peut poser comme règle que, du bord de la mer k 600 mètres d'altitude, partout k Anjouan. la vanille peut croître et produire. Exception est faite pour les régions côtières, qu'un rideau d'arbres ou une zone broussailleuse d'arbustes ne protège pas comme un écran contre les brises marines. L'action des atmosphères salines est, en effet, funeste aux vanilleries ainsi que les infiltrations d'eau de mer dans les sous-sols sablonneux. Cependant il est k craindre et prévoir l'abaissement brusque de la production dans cette île pour les causes suivantes : En premier lieu, les colons ont planté dès le début et pendant des années toutes leurs lianes disponibles. Ils ont été longs k sélec- tionner. Or, il est un fait d'expérience bien connu k la Réunion, c'est la disparition rapide de vanilleries entières entre la troisième et la quatrième année au moment de la première récolte. Les lianes boutures plantées provenaient de plants mères épuisés l.'ii ÉTUDES ET MÉMOIRES et dégénérés. Ce phénomène de dég-énéroscence s'observe fréquem- ment à la Réunion où la production baisse d'année en année. En second lieu, des maladies parasitaires graves, causées par des champignons inférieurs, attaquent les feuilles et les gousses des plants surmenés dont elles entraînent la disparition. Le mal n'a pas pris une grande extension, mais des foyers ont été constatés. C'est un danger pour l'avenir. C'est ainsi que les Seychelles perdirent leurs plantations en 1885. Des lianes dégénérées transportées à Mayotte récemment et replantées ont péri pour la plupart. En troisième lieu, les terrains à vanille ne sont pas indéfinis ; nous voulons parler des bons terrains. Le riz de montagne et le Vanillier sont des cultures épuisantes au premier chef; après elles, le sol demande des années pour se refaire. Or, les indigènes cultivent le riz depuis des siècles, partout où ils le j)euvent. Mieux inspirés sont les planteurs du pays lorsqu'ils créent avec des débris de 30 à 50 centimètres de lianes vigoureuses des pépi- nières sous bois. Ces lianes abandonnées à elles-mêmes poussent aA-^ec force et en hauteur sans produire. Elles pourront plus tard produire des boutures neuves et régé- nérées. Aux dangers de la dégénérescence (épuisement, maladies parasi- taires) s'ajoutent ceux de la surproduction. A Anjouan, les récoltes généreuses ont surpris les prévisions. La présence sur un vanillier de \ 50 à 300 gousses nuit également à la qualité des produits ; les vanillons dominent et créent une marchandise au-dessous de la moyenne. Au moment de la récolte, la surcharge de production encombre la préparation et surmène les préparateurs au détriment d'une belle manipulation. C'est ainsi que des lots importants ont été gâtés et jetés, que d'autres sont arrivés moisis en France et fortement dépréciés. Ces mécomptes ont parfois été si sévères qu'un planteur ne réalisa que 4 à 5.000 francs au lieu de 30.000 francs espérés [d'après les cours du jour. Ailleurs, le préparateur jetait en cachette les vanilles abî- mées par une préparation hûtive. Où se trouve l'avantage de produire beaucoup au point de com- CULTURES DE L ARCHIPEL DES COMORES 1S3 promettre l'avenir de ses plantations et d'encombrer le marché si le résultat final pour 10 tonnes de vanille sèche, de qualité moyenne par exemple, ne donne pas plus de rendement que 5 tonnes de vanille sélectionnée supérieurement préparée. Les cours moyens en 4901 ont oscillé entre 20 et 30 francs ; les vanillons ne se vendant pas, on a des prix inférieurs, tandis que des lots soig'nés se sont vendus, malgré la crise, 45 à 46 francs le kilo, ainsi que j'en connais des exemples. MAYOTTE Iciles terres noires n'existent pas ; dans les pentes boisées, la couche d'humus est insignifiante, 1 centimètre ou 2, et disparaît aux pluies. Les terres rouges, plus ou moins perméables et à fond argileux compact, voilà tout ce que le colon, sauf en certains endroits plus favorisés, trouve à sa disposition. Les planteurs ont vu leurs vanilleries détruites vers 1897-1898 par deux cyclones successifs et ont su les reconstituer dans des sols infiniment moins privilégiés que ceux d'Anjouan et de Mohéli. Dans ces terres fortes, les ados triomphent, limités d'interlignes qui servent à l'écoulement des eaux ; le vanillier (bout inférieur), couché dans un léger sillon, pousse ses racines sur le sol auquel un paillage incessant conserve l'humidité et fournit la nourriture, ses suçoirs cheminent entre la couche végétale et l'ados où ils s'en- foncent. Mais un gros danger menace les vanilliers quand la couche d'en- grais végétal s'épuise, les champignons inférieurs s'y développent avec rapidité, ces mycéliums en nombre prodigieux empoisonnent le sol, s'attaquent aux racines de la plante et produisent des fermen- tations qui font pourrir les vanilliers. Les plantations seraient rapi- dement détruites sans une surveillance constante. La meilleure pratique consiste à rejeter dans les interlignes les engrais végétaux épuisés, le soleil détruit les mycéliums et arrête net l'envahissement. On connaît l'influence bienfaisante du soleil et de la lumière sur les organismes inférieurs, champignons, moi- sissures, bactéries qui perdent alors leurs propriétés nocives. Un nouveau paillage redonne au plant l'alimentation nécessaire. Une des plus belles vanilleries de Mayotte (Dzoumognié) nécessite trois fois plus de soins que celles des îles voisines. ir36 ÉTUDES ET MÉMOIRES En parcourant l'île, j ai remarqué la soulVrance des petites vanil- leries à la période sèche par défaut ou insuffisance ou retard de pailUige. Les plants se coupent à la base et des milliers de plants (Combani) disparaissent sans profit pour personne. Ailleurs, la liane, enroulée à une trop i^rande dislance du sol, émettait des racines aériennes qui pourrissaient avant d'atteindre la couche d'humus et se cannelait. Un autre ennemi redoutable c'est l'escargot inoffensif à la Grande Comore, mais qu'on doit détruire incessamment dans les trois autres îles. Les uns les écrasent, semant ainsi des milliers d'œufs (130 à 200 œufs par femelle), les autres les brûlent ; mais amassés en grand nombre ils résistent en partie, grâce à l'enduit visqueux qu'ils sécrètent. Le procédé de choix de destruction consiste à les plonger dans un lait de chaux vive et les jeter dans des fosses profondes qui, par la suite, forment de véritables dépôts calcaires et azotés utili- sables dans les fumures, les sous-sols des îles manquant de chaux et perdant leur azote. L'eau de mer les détruit aussi, mais c'est un engrais perdu. Une propriété, sur mon indication, put recueillir et enfouir en peu de temps 7.000 kilos d'escargots. AMayotte, les taurecs, petits lémuriens des pays chauds, ont pul- lulé. En fouillant le sol de leurs museaux pointus, à la recherche des vermisseaux dont ils se nourrissent, ils dispersent les fumures végétales et cassent ou mettent à nu les racines délicates du A'anil- lier. Il faut alors une véritable meute pour les détruire. Chaque île se trouve donc avoir pour ses cultures des méthodes différentes et des ennemis spéciaux. Je citerai des réserves de terrain à 'Vanille, notamment à Passa- menti, etc., mais elles sont limitées. Dans le sud, la taille de cette liane est plus soignée et métho- dique, se rapprochant de celle des Seychelles, dont nous parlerons. Comblé jadis par les rendements du succès, hypnotisé par cette même culture, Mayotte a laissé prendre aux îles voisines une avance considérable, et se trouve en état d infériorité. Des colons ont fait des écoles coûteuses, plantant des lianes trop petites et dans des terres trop médiocres ou en plateau, sans grand CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 15? écoulement pour les eaux, l'un deux enlevait les racines adventives comme nuisibles à la plante et par esthétique la tuait sûrement. La nature des terres fortes à fond argileux et humide retenant les eaux de pluies, oblige à un drainag-e sérieux, témoin la méthode suivie au Qualey pour vanilliers et caféiers, etc. A Anjouan, un petit colon sauva sesplantations dans la vallée de Pag-et en creusant des fossés très profonds. Bien des terrains des régions basses, là où l'on ne soupçonne pas la venue possible de la vanille, où le sol se fissure profondément aux sécheresses et se trouve gorgé d'eau aux pluies, seraient à mon avis utilisables s'ils étaient à l'abri des vents du large. Des expé- riences timides faites dans cette voie réussissaient, mais on les a abandonnées en délaissant les propriétés. Une triple condition serait indispensable pour les utiliser : des canaux larges et profonds dans les interlignes avec collecteur, des ados de hauteur variable, un paillage considérable. Les coteaux comme à Dapany, Dzoumognié, Passamenti seront cependant toujours préférables. L'introduction des lianes d'une île dans une autre peut régénérer l'espèce. N'oublions pas que ces essais aboutissent souvent à des échecs. Ainsi les lianes des régions aqueuses ou trop abritées, à pousses rapides et incessantes, transplantées en des climats plus secs, dépé- rissent et meurent, tandis que celles élevées en plein soleil, à crois- sance lente, dans des terres fortes ayant supporté des sécheresses prolongées, deviennent magnifiques lorsqu'on les replante dans des terrains à humus, etc.. Les lianes de Mayotte se régénèrent à Anjouan, dont les terres sont plus riches ; les essais des lianes anjouanaises à Mayotte ont donné des résultats déplorables. Faut-il en incriminer la mauvaise qualité ? Je ne sais. L'expérience serait à reprendre et les planteurs auraient intérêt à faire en petit des comparaisons et des pépinières sélectionnées avec les vanilles des quatre îles. La culture du vanillier reste stationnaire comme perfectionnement. On peut l'améliorer à tous les points de vue. MOHÉLI La plus petite, la plus ignorée du groupe, possède sans conteste les plus belles vanilleries. 1o8 ÉTI'DKS ET MÉMOIRES Des vallées en pentes douces étroites, bien arrosées, parfaitement abritées par de véritables murailles ou des collines de 300 à 500 mètres, des cirques, des plateaux inclinés otTrent à cette culture la terre de choix, mélange de cailloux et d'humus, d'apport et de sédi- ment, vrai terreau végétal à la surface où la liane plonge sans peine ses racines adventives et souterraines. Le sol est meuble en toutes saisons ; en bien des points, l'empail- lage devient inutile. Moins surmenées que dans les autres Gomores, les lianes très sélectionnées fournissent une remarquable moyenne de gousses charnues et de belle dimension. Le rendement n'a pas dépassé cinq tonnes sèches en 1900, mais les prix de vente se sont montrés d'un quart ou d'un cinquième supérieur à celui des îles voisines, même quand le marché s'est trouvé encombré. Les derniers cours de vente donnent pour une grosse propriété d'Anjouan (surproduction) : Anjouan, 27 fr., 21 fr., 47 fr. (l''^, 2« et 3« qualités) ; Mohéli, 1)2 fr., 42 fr., 38 fr. pour les qualités équivalentes. Comme grosseur et longueur, comme qualité et finesse de parfum, la vanille de Mohéli est la première de l'archipel. Les plantations s'étendent beaucoup et seront d'avenir si la sélec- tion s'y maintient. Des lianes de 1 "* 50 à 2 '" 50, plantées en mars-avril, ont donné dans la môme année 10 à 15 belles gousses par liane. Dans une petite exploitation de 5,000 pieds, sans doute on est tombé pour une part sur des boutures devant lleurir dans l'année, mais il est hors de doute que l'excellence du terroir ait aussi forcé la végétation. C'est là un fait unique aux Comores d'une plantation donnant la même année. Les premières lianes ont été importées par Lambert, et j'ai pu voir des plants ayant de 15^à 17 années d'existence, privés de leurs tuteurs morts d'épuisement, se marcottant d'eux-mêmes sur le sol qu'ils couvraient, et donnant des fleurs et des fruits. Un indigène a su utiliser cette reproduction spontanée par mar- cottes pour tirer parti de ses lianes. Les vanilleries de Mohéli, non surmenées par la surproduction croissant dans les sols neufs à terre de bruyère n'ont pas traces de maladi(^soude dégénérescence. Elles sont dans des conditions à tenir 15 à 16 ans, c'est-à-dire deux fois plus que les vanilleries des autres CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 159 îles. Leurs produits n'ont pas atteint leur summum et leur qualité sera toujours supérieure si les colons tiennent à leur marque. Pour conserver ces avantages, ne sont plantées que des lianes sélectionnées de bonne grosseur et longues de 1 ™ 30 à 2 "* 50. Les planteurs hésitent à couper les cœurs, pratique suivie à Anjouan et Mayotte, qui force la floraison et qu'on ignorait à Mohéli fin 1900; ils ne laissent sur les pieds que les belles vanilles, supprimant tous les vanillons conservés autre part. Rarement un balai dépasse 10 à 15 gousses. La fécondation est particulièrement soignée. Des équipes d'hommes sont dressées à féconder les fleurs prématurément un jour avant qu'elles ne s'ouvrent. En procédant ainsi on gagne une avance précieuse et la totalité du pollen, adhérant mieux au stigmate, n'est pas exposé k tomber et, par fécondation incomplète, à donner des vanillons. Cest là un gros progrès. — Le transport du pollen d'une fleur sur la fleur d'un pied voisin, opération délicate effectuée sur des plants vigoureux, donne les plus heureux résultats et des gousses hors marché. Cette sélection, possible chez un petit planteur, ne saurait entrer dans la pratique courante des grandes vanilleries, mais pourrait créer des hybrides intéressantes ; on devrait la tenter sur des plants de choix, voisins de l'habitation, qui serviraient de plants mères. TUTEURS DE LA VANILLE Aux Comores c'est généralement le pignon d'Inde, non de graine mais de bouture. Une remarque, faite chez un planteur, semble prouver que le pignon d'Inde mis en terre à la lune montante réussit en toute sai- son ; d'où avance considérable pour l'établissement d'une vanillerie, au lieu d'attendre la période de repos du pignon d'Inde comme on fait habituellement. Ce fait de plantations et de semis mieux réussis à la lune mon- tante est bien connu et utilisé des jardiniers en France. Il est à rap- procher des exsudations de beaucoup d'arbres, qui dans le même mois ont une période de repos et d'absence d'exsudats ou de sucs et une période d'activité (ascension de la sève, exsudations). Il expli- querait pourquoi les espèces à caoutchouc saignées à certain moment ne donneraient rien et à certains autres des gommes ou coagulats spontanés. 160 ÉTl'DES ET MÉMOIRES De graine, le pignon d'Inde est trop lent à venir (3 ans) mais d'une résistance prodigieuse aux grands vents, grâce à sa racine pivotante profonde. De bouture, il n'acquiert la solidité voulue que si la branche mise en terre est de grosseur suffisante et placée dans des trous de 30 à 40 centimètres de profondeur. Il est essentiel d'en surveiller la plantation avec soin et le damage autour des plants qui accélère la reprise. Faute de ces précautions minutieuses, le pignon pourrit ou culbute au moindre vent, cassant la liane qu'il supporte. La liane ne doit être mise en place qu'après la reprise du tuteur, sinon, de ses suçoirs tenaces, elle arrête l'évolution du tuteur et le tue. Autres tuteurs. — Des fdaos en quinconce en bordure de mer ont été judicieusement utilisés à Anjouan, comme à la Réunion, ainsi que les Vacquois, des manguiers, etc. Les manguiers, tantôt abritent les lianes superbes, tantôt les font dépérir. L'explication de ces divergences est fourni par ce fait que la sève des racines du manguier intoxique les suçoirs délicats des racines du vanillier, lorsque les racines de cet arbre puissant courent hors du sol, superficiellement à sa surface, tandis que sous un manguier en sol riche et profond, à racines pénétrant à de grandes profondeurs, la Vanillaplanifolier échappe à ce danger et croît avec vigueur. C est aux Seychelles que s'emploie la plus grande variété de tuteurs. Là, on est éclectique : pignon d'Inde, acacia Lueck, un arbuste appelé « Galice du Pape », Vacquois, etc., et fréquemment aussi les jeunes Canneliers servent indifféremment. Le Vanillier réussit sur tous. Le Gannelier pousse à Mayotte à l'état sauvage ; il peut y avoir là des indications, le cas échéant, pour le planteur. Ennemis du Vanillier. — Nous avons signalé les loches de la Grande Gomore, les escargots, les tanrecs, la pourriture noire sévis- sant sur des plants épuisés, les champignons inférieurs. Ajoutons-y les fermentations du paillage à fourrage vert, ou par excès d'engrais végétaux au moment des pluies. Sur les Vanilliers de Nossi-Bé on a récemment découvert un petit coléoplère ({ui creuse et détruit l'intérieur du Vanillier (charançon) et le fait périr. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 161 Dans les plantations, souvent des gousses de 12 à 15 centimètres coulent soit sur des pieds cannelés, coupés à la base et insuffisam- ment nourris, soit par action solaire sur des gousses à moitié fécon- dées. Il est nécessaire de les enlever aussitôt. Gaeoulag-e spontané sauve souvent les vanilleries des risques de la surproduction. CONCLUSION ■ Sans jamais s'arrêter à des règles immuables, le planteur pourra s'inspirer des différentes méthodes suivies dans les îles. Choix du terrain. — Il évitera les parties du littoral balayées par les brises de mer trop desséchantes ou exposées aux infiltrations salinées, funestes aux vanilliers. Un fort rideau de verdure : Voiro, Takamaka, Badamier, Aca- cias, filaos, bananiers très serrés, vacquois, etc., protégera dans les régions basses les terrains favorables, Pour avoir négligé ces précautions, deux colons perdirent : l'un une partie de sa jeune vanillerie, l'autre des plants exposés aux infiltrations d'eau de mer. Dans les terres fortes et argileuses, il choisira de préférence les coteaux, formera des ados et n'hésitera pas à drainer. Il surveillera les engrais végétaux qu'il choisira secs pour éviter les fermenta- tions. Le nettoyage et l'aération des pieds au renouvellement de l'en- grais seront des plus importants contre le développement de la pourriture et des organismes inférieurs. Dans les terres de bruyère, un très léger paillage suffira. Dans les sols trop humides, entourer le plant d'un lit de petits cailloux qui facilitera l'écoulement des eaux et pailler par-dessus. Partout ailleurs, nécessité d'engrais végétaux constants, surtout à l'époque de la floraison et de la fécondation du Vanillier, époque où il subit une crise grave, et a besoin d'une forte assimilation. La préparation du sol dune vanillerie peut se faire une ou deux années d'avance en apportant sur le terrain choisi des débris -d'arbres pourris, des détritus végétaux, etc., et surtout des troncs de bananiers qui, pourrissant lentement, forment un humus parfait. Le Bananier a des cendres très riches en potasse, base indispensable au Vanillier. Ces détails s'adressent surtout au petit planteur, n'étant pas d'application facile sur une grande exploitation. îiiilletin du Jardin colonial. 11 162 ÉTUDES KT MÉMOIRES Sélection des boutures. — Le choix des boutures a une impor- tance extrême. Toute liane épuisée ou malade doit être détruite par le feu, pour s'éviter la tentation de planter quand même. Procéder autrement serait s'exposer, après trois années d'elforts, à perdre sa vaniUerie, ses capitaux et le fruit de son labeur. C'est la pratique suivie à Dzoumog'nié et qu'il faudrait g'énérali- ser. J'ai vu un malheureux petit colon lutter pendant des années, sur ses plantations, abaissant sans cesse ses lianes qui, au bout de deux ans d'elforts, ne mesuraient plus (pie de 30 à 40 centimètres. Les lianes plantées au début étaient dé|j;énérées. Il vaut mieux planter ces lianes de 1'" 50 à 2'" 50 de lono^ueur si possible, c'est g-ag-ner une année pour le rendement. Une plus grande longueur (5 à 7 nœuds) est mise en terre et assure une ali- mentation suffisante de la plante, Actuellement, on ne devrait utiliser que des boutures ayant au moins un centimètre de diamètre. La bouture se terminant par un cœur est celle de choix et reprend aussitôt. Fécondation. — L'usage adopté à Mohéli de féconder précoce- ment les fleurs à la veille de s'ouvrir est excellente. 1° Elle fait gagner du temps ; 2" Assure la fécondation parfaite ; 3" Réalise des produits bien supérieurs. Opérée par des femmes à Anjouan, par des enfants c\ la Grande- Gomore, la fécondation ordinaire se fait plus vite, femmes et enfants ayant la main plus légère. Avec le procédé que je préconise, ainsi que pour le transport du pollen d'un plant sur un autre, il devient nécessaire de dresser des équipes spéciales. L'ablation des vanillons doit être d'autant plus la règle, que le marché se trouvant encombré, les vanillons se vendent à très bas prix. De môme, il faut arrêter le balai en coupant toute la partie deve- nue inutile à la sève, sinon il y a déperdition et la pourriture peut s'y mettre. Préparation. — Elle devra se perfectionner de plus en plus, car CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMOPES 163 le planteur ne pourra lutter qu'avec des produits supportant mieux les traversées sans moisir et sans fermenter. La préparation devra être tout particulièrement soignée, d'où la nécessité d une bonne période d'observation sur place. Un préparateur ne donnera sa mesure qu'autant qu'il participera aux bénéfices, ce qui se fait généralement. La moindre négligence peut tout compromettre. Les surproduc- tions tromperont les espérances des planteurs en épuisant ses plan- tations, en sorte que 500 kilos de vanilles sélectionnées vaudront le prix d'une tonne de qualité moyenne. LTne erreur du préparateur consiste à dissimuler dans des vanilles de choix quelques gousses boisées ou escargotées, les experts à l'af- fût des moindres défauts abaissent aussitôt le prix du lot, de cinq ou six francs par kilo, ainsi que j'en connais des exemples. Nous terminons cette étude par quelques particularités concer- nant : 1" La taille; 2° Un nouveau mode de plantation; 3° Les engrais végétaux ou minéraux ; 4" Les hybrides; 5" Les emplois de vanille. Taille du Vanillier. — Dans les îles Gomores, cette taille s'effec- tue au petit bonheur, le Vanillier ressemble à un buisson globuleux parfois énorme, avec une liane de oO à 100 mètres de longueur (Anjouan). Enroulée indéfiniment sur elle-même, la liane pousse des cœurs de partout. Avec cette disposition il arrive qu'en prélevant des boutures on enlève celle qui doit fleurir prochainement. Dans une plantation, les Vanilliers formaient ainsi un fouillis inextricable rendant difficile la fécondation. C'est à Mayotte et aux Seychelles, que s'observent les tailles les plus rationnelles. Le Vanillier ne dépasse guère 6 à 8 mètres de longueur totale. La taille force généralement la nouvelle pousse à sortir au dernier ou à l'avant-dernier nœud de la branche, dont on coupe aussitôt le cœur ; cette pousse suffisamment développée est suspendue soit sur le même tuteur, soit sur le tuteur voisin, d'où elle retombe gracieusement. On arrête sa végétation. Plusieurs pousses ainsi conservées, une seule continuant à croître, fleurissent 164 ÉTLDES FT MÉMOIRES vite et ne supportent chacune qu'un ou deux balais, bien en évi- dence. Facilité de la floraison et de la fécondation, fructification plus à l'abri des atteintes des escari^ots, etc., puis suppression et destruc- tion facile de la partie de la branche aN'ant produit, tels sont les avantagées de cette méthode, qui passe cependant pour épuiser rapi- dement le pied qu'elle force. Je la signale parce qu'elle n'est connue et appliquée aux Gomores qu'à Mayotte dans le Sud. Dans l'Archipel, quand la plante tarde trop à fleurir, malg-ré l'arrêt forcé de vég^étation, j'ai vu dépailler quekjues jours, la liane en plein soleil, pratique dangereuse qui la fait soull'rir et amène une abondante floraison^ mais exposant à perdre sa vanillerie. Le pro- cédé seychellois comporte moins de risques. Un nouveau mode de plantation. — Une bouture de 1'" 50 à 2 mètres est plantée en cerceau par ses deux extrémités. L'ascension de la sève ainsi contrariée, des cti^urs partent du sommet du cerceau et se trouvent nourris des deux côtés à la fois. Taillées, ces pousses passent pour fructifier très vite. Cette méthode paradoxale mériterait d'être essayée en petit par les colons. Engrais végétaux ou minéraux. — Parmi les engrais végétaux, la paille des cannes, les fourrages secs, les troncs d'arbres et les écorces en décomposition, bois mort, troncs de fougères arbores- centes, feuilles mortes, etc., ont tous été employés avec succès, ainsi (jue les cendres des végétaux et des bananiers riches en sels de potasse. Je recommande en plus, les débris de planches vermoulues et les fougères de manguiers appelées cornes de cerf, dont la partie inférieure est riche en lerreau végétal et abrilr l)ii'n les racines (ki Vanillier. Je lésai utilisées à Anjouan avec un résultat remar((ua])le; des lianes ainsi alimentées ont pu fleurir, d'autres croître de i i mètres en cinq mois, en pleine sécheresse ; ce sont des moyens utiles aux petites plantations. Les engi-ais minéraux tentés à Mayotte, à Conibani ont produit une |)oussée vigoureuse de la liane et empêché la floraison. L'expérience est h l'ejirendre avec un mélange de fumures, d'en- grais minéjai'.x mêlés à des Ijouiih^s (k' cocos. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 165 Ces bourres, long-ues à se décomposer, serviraient de contrôle jusqu'à ce que le tout soit réduit à l'état de terreau atténué et pul- vérulent. Employées seules, elles sont par leur richesse en chlorure de sodium défavorables au Vanillier, qui redoute le sel marin. Le point délicat restera le moment opportun de son emploi. Des essais d'autant plus intéressants seraient à tenter, que le paillage absorbe un très s-rand nombre de travailleurs. En tout cas, c'est au moment de la fécondation, ou peu après, que cet engrais composé paraît devoir trouver sa meilleure application. Hybrides. — Les Vanilliers des différents pays sont loin de se ressembler. Parmi ces espèces, plusieurs (variétés de Taïti, de la Guyane, etc..) sont à introduire aux Comores. On pourrait partir de là pour créer des hybrides. La nature nous en offre des exemples spontanés. C'est ainsi qu'il n'est pas rare de rencontrer dans les vanilleries des lianes à tige et à feuilles vertes et blanches, à bandes alter- nantes. Ce curieux hybride, que nous appellerons « le Vanillier panache », existe à Mayotte et à Anjouan. Il se caractérise par la présence sur sa feuille d'un blanc mat, de deux à cinq liserés verts qui dessinent plus ou moins grossièrement une gousse de vanille verte. La gousse à pellicule très mince, à odeur très fine, demeure con- stamment jaune pâle, ce qui rend délicat le moment de la cueillette. La préparation en serait moins longue que celle de la vanille ordinaire. Ces lianes, guère propagées, ont encore peu produit, mais sont à l'étude. L'intérêt de cet hybride réside dans la coloration, peu intense, de la gousse, dépourvue de chlorophylle. On sait qu'une des raisons qui restreint l'usage de la vanille en teinturerie comme mordant puissant, c'est la difficulté de la débar- rasser de sa matière verte. Emplois de la vanille. — Le Vanillier panaché fournirait donc des produits appropriés à l'industrie. La vanille n'offre pas des emplois indéfinis, néanmoins son bon marché la fait utiliser en grand en Allemagne, dans la distillation des alcools inférieurs, qu'elle rectifie en leur enlevant leur mauvais goût. \{\C) ÉTL'DKs i:t mémoires L'industrie la recherche comme mordant. La parfumerie l'emploie de plus en plus. Inutile d'insister sur ses autres usages. La découverte de la vanilline retirée à prix élevé du cambium des pins et des hêtres ne la menace pas sérieusement, les fabricants ayant intérêt à extraire au besoin directement la vanilline de la vanille. Un autre produit, la Vanilline Porcher, isolée des sous-produits du goudron, récemment découvert par un chimiste lyonnais, tend à se vulgariser. Malgré son bon marché, elle est loin de remplacer la vanille et les arômes complexes que la gousse renferme. Devant ces concurrents, le planteur devra perfectionner sa pro- duction et ne pas perdre de vue que, depuis la découverte de la fécondation artificielle, la culture du Vanillier s'est vulgarisée; mais en dehors de la préparation n'a pas réalisé de progrès réelle- ment important. L'étude du Vanillier marron de la Grande Comore est renvovée à la dernière partie de ce travail. LE CAFÉIER La croissance dans tout Tarchipel de deux petits arbustes très communs appelés par les indigènes (( Cafés marrons », par la dispo- sition de leurs feuilles, leur inllorescence et leurs fruits à baies voi- sines du genre Colfea, indique l'existence aux Comores des terrains à café. Le sol est loin d'être aussi favorable h sa culture que les terres brésiliennes ou javanaises dont on connaît l'inépuisable fertilité ; il dilîère d'une île à l'autre, et bien qu'à Mayotte la couche d'humus soit absente, le Caféier Libéria trouve dans les terres rouges et brunes à sous-sol argileux les éléments suffisants de belle venue et de fructilication abondante. Espèces. — Deux espèces : le Bourbon et le Libéria ont surtout réussi. Le Bourbon bien connu des Arabes d'Anjouan fut introduit par Sonbey et lit à une époque la fortune du pays. Un retrouve encore de vieux caféiers aux troncs arborescents ; une maladie para- sitaire « l'ilemileia Vastatrix » a depuis des années détruit les plantations indigènes. CULTURES DE l'aRCIIIPEL DES COMORES 167 De nouveaux essais tentés par les colons avec sulfatages inces- sants des plants à la bouillie bordelaise et adjonction d'engrais n'ont donné qu'un demi-succès notamment à Dziani (500 mètres). Le Caféier résiste mieux à la maladie et produit des graines à arôme supérieurs, mais ne donne pas ce qu'un planteur serait en droit d'en espérer. Au reste, les sols volcaniques d'Anjouan et de la Grande Comore manquent généralement de sels de potasse et de chaux, et l'azote, aux grandes pluies y est entraîné. Le Bourbon ne saurait être recommandé pour de grandes plan- tations. A Mayotte, l'insuccès est à peu près complet, l'altitude et le sol compact ne lui convenant pas. Points où réussirait le café Bourbon. — Malgré l'Hemileia, ce caféier pousse avec vigueur k Boboni (Grande Comore), entre 600 et 800 mètres d'altitude, et rapporte ; nul doute que, s'il y était soigné et fumé, la production en serait plus fructueuse. Les plants sont devenus des arbustes élèves de 3 à 5 mètres, ce qui rend la cueillette difficile. Au début, les champignons inférieurs les empêchaient de croître et de fleurir, mais avec le temps par une sorte d'accoutumance spon- tanée à la maladie, accoutumance qui s'observe également chez le cocotier pour la coccidie, les caféiers ont pu supporter les ravages de l'Hemileia et faire les frais d'une récolte. Avec les graines des plantes accoutumées à la maladie des semis sur place^ c'est-à-dire définitifs, sont faits actuellement et paraissent réussir. Voici la façon de procéder : des trous suffisants sont creusés et préparés dans les parties de la forêt où viennent de se pratiquer des coupes. Trois à quatre grains sont semés dans chaque poquet; des feuilles de sicca ou de fougères, etc., les protègent contre les limaces. La forêt leur sert d'ombrage contre le soleil et d'abri contre les vents , Le plant le plus vigoureux est laissé en place, les autres servent à étendre la plantation ou remplacer les manquants. A Mohéli, se retrouvent dans un fond de vallée des caféiers de Bourbon ou Arabica au feuillage verdoyant, âgés de 6 à 7 ans, et chargés de fi^uits à se rompre. Ces magnifiques sujets ont été plan- 168 ÉTUDES ET MÉMOIRES tés par le régent Mahmoud ; ils n'ollVenl pas trace « d'Hemileia ». Un planteur s'emploie à les propager avec de très grandes chances de réussite, mais, comme en môme temps de Mayotte, sont intro- duits des semences de Libéria, il est ;i craindre le transport du ter- rible parasite avec elles dans le pays jusqu'alors à l'abri de ses ravages. Chose remarquable, ce même café Arabica existe dans la partie sud d'Anjouan, entre GOO à 700 mètres d'altitude, et les sujets intro- duits par les Arabes sont vigoureux sains et de plein rajiport. Ils sont encore vierges de maladies. Il y a là une indication précieuse qu'on pourra utiliser pour les propager dans les vallées hautes qui semblent son véritable habitat (GOO à 1.200 mètres). LE LIBERIA Ce Caféier rustique, aux baies de la grosseur d'une prune,, a merveilleusement réussi à Madagascar où un plant adulte donne jusqu'à 2 kilos de semences en coques de plus en plus appréciées et cotées sur le marché. Dans l'archipel des Comores le succès en est aussi assuré. On retrouve de belles plantations à Salimani, à Anjouan, mais princi})alement à Mayotte oii les Caféiers de Dzoumognié et de Combani sont les plus importantes. Détestable au début, le grain du Libéria, en s'adaptant à des sols nouveaux, s'est totalement modifié dans sa structura et ses qualités. D'année en année il diminue de volume et tend à se rajiprocher de l'Arabica. C'est ainsi (ju'il s'est comporté à Madagascar, dans les Comores, à la Réunion, aux Seychelles, mais surtout à Mayotte. C'est donc un café d'avenir dont la production est encouragée par l'extinction, dans les dix années qui vont suivre, des droits d'entrée en France. Il est appelé à supplanter les Santos à gros grains et à saveur médiocre. Le Libéria n'échappe pa^ à l'Hemileia, supporte, au besoin de vigoureux sulfatages et se trouve assez robuste pour suffire à la maladie parasiUiire et à une bonne production. Beaucoup moins exigeant que le Bourbon il croît du bord de la mer, à 400 ou 500 mètres. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 169 Ce qui manque dans les plantations ce sont : ' 1" Des tailles judicieuses et opportunes ; 2° Des abris contre les vents du large; 3° Des engrais rationnels. Les tailles, en etTet, sont souvent négligées, et les gourmands tuent souvent la pousse'principale à laquelle ils se substituent, d'où retard et diminution dans la production. Un point délicat, c'est le moment où l'on doit arrêter la pousse en hauteur, afin de faciliter la récolte. Opérée trop tôt, la section de la tige force à une production hâtive qui épuise la plante prématu- rément. Le caféier donne tout ce qu'il peut donner, deux ou trois récoltes, et meurt. La règle est de n'opérer que sur des plants très vigoureux, attei- gnant leur plein développement. Quand les arbustes ne produisent plus, une greffe de Libéria sur Libéria pratiquée à l'extrémité de la tige principale avec un simple rameau, suffît quelquefois k revivifier le plant. Cet essai tenté à Madagascar a donné des résultats'. C'est ainsi, du reste, que pro- cèdent les cultivateurs dans les pommeraies, sur les arbres qui se reposent trop longtemps. Les abris font le plus souvent défaut aux Comores. Si à Anjouan, Grande Comore et Mohéli les essais de Libéria ne font que commencer dans cette île, les replis naturels du sol suf- fisent à protéger les plantations. Mayotte se trouve exposé de partout soit aux rafales du large, soit aux vents de terre. En 1901, les caféières de Combani se trouvaient littéralement brûlées et desséchées pendant la mousson Sud ; les pertes ont dû être considérables à la récolte suivante. Des rideaux d'arbres sont donc indispensables sur des plateaux ou des points balayés de toutes parts. En Calédonie, les planteurs de Café ont dû se protéger judicieu- sement par des bordures d'accacia vereck établies de distance en distance dans leurs plantations comme de véritables écrans. . A une certaine période l'accacia perd ses fleurs, ses feuilles et ses fruits qui projetées partout forment un véritable engrais très utile au caféier. 1. Essai tenté par le D^Crenn, à Mousamangue. 170 ÉTLDi:s i:t mémoirks Le caroubier, en plus de l'accacia qui existe si abondamment à Mavotte, remplirait le même but protecteur par la facilité de sa pro- pagation et fertilisateur par ses j^i-ousses riches en sucre et mélasse. 3" Enf/rais. Ceux-ci deviennent de plus en plus indispensables, ils ont donné dans la culture du tour de maison des résultats extraordinaires aux Antilles comme à la Réunion. Il est bien peu de planteurs qui. aux Comores, fument méthodiquement leurs caféières comptant trop sur un sol généreux k fertdité inépuisable. Dans les plantations de « Libéria » les résidus de la fabrication du sucre et des distillations riches en éléments minéraux et orga- niques, etc., trouveraient un emploi judicieux. Préparation du café. — Les grosses exploitations ont intérêt à adopter les moyens mécaniques les plus récents et opérer soit par voie sèche, soit par voie humide; c'est affaire de comparaison, les divers procédés avant leurs avantages et leurs inconvénients. Ces méthodes modernes commencent à être appréciées aux Comores. Sur de petites plantations, des échantillons conservés en coque et séchés avec soin au soleil assureront la conservation indé- finie du grain et gagneront en arôme avec le temps ; au Harar, les Pères de la mission conservent et vendent ainsi toute leur récolte près de 6.000 francs (café arabica), c'est la production d'un hectare. Quelques kilogrammes de café en coque que j'avais apportés d'un voyage en Abyssinie valaient, trois ans après, le meilleur moka. Café perlé. — Dans le liberia comme dans les autres caféiers, beaucoup de grains ne renferment qu'un seul grain très petit et de belle apparence. Les planteurs hollandais à Java, après la préparation, en font un triage soigneux. Ces grains sont vendus à part et font prime. Cette particularité est ignorée dans l'archipel des Comores et nos colons laissent ainsi aux intermédiaires un bénéfice appréciable. A Djibouti, les commerçants grecs qui reçoivent des pays gallas de forts approvisionnements de cafés, savent, d'une même espèce, retirer trois ou quatre (jualités, selon la forme et la grosseur du grain, et les vendre à des prix sensiblement différents. Ces indications sont fournies pour montrer le meilleur parti que les planteurs pourraient tirer de leurs produits. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 171 Utilisation des coques. — Les indigènes Gallas s'en servent exclusivement dans leurs infusions et les pi'éfèrent au grain; de même ils emploient à cet usage les jeunes tiges et les feuilles. Ces coques renferment une proportion notable de principes actifs, notamment de la « Caféine » ; à Madagascar, certains colons les ajoutent en petite proportion au « Libéria » pendant la torréfac- tion. Ce mélange serait des plus heureux, faciliterait l'opération et cor- rigerait le goût un peu acre du Libéria. A la Réunion un insulaire est arrivé à préparer avec ces mêmes coques une pâte sucrée vendue un bon prix à Hambourg. Les usiniers allemands en extraient directement la Caféine, l'uti- lisent dans la fabrication des liqueurs, et les commerçants s'en servent comme adjuvant ou succédané du café. Plantations. — Sans insister sur les méthodes adoptées par tel ou tel planteur, nous croyons que ces cultures épuisantes ont besoin des meilleurs sols. Les plantations intercalaires dans les vanilleries sont séduisantes au premier abord. La vanillerie dispa- rue, la caféière reste, mais elle oblige à éloigner les rangées de vanil- liers les unes des autres, et, bien qu'espèce à racine pivotante, le caféier par ses racines secondaires et leur chevelu très abondant doit épuiser le sol environnant dans des proportions excessives. 11 vaudrait donc mieux employer; tout entier un terrain à vanille au vanillier et créer des cultures séparées, la première culture se trouvant infiniment plus rémunératrice que la seconde. Néanmoins à Anjouan et à la Grande Comore ces cultures combinées réussissent. Ennemis des plantations. — Ils sont innombrables : les loches, les escargots, les rats, les tanrecs ravagent les jeunes plants, et les coccus, les charançons et autres coléoptères (Lecanium, etc.) dévorent les feuilles, les bourgeons et les jeunes pousses à tel point qu'aux Comores un Directeur les faisaient ramasser chaque jour par des jeunes indigènes, dans des flacons, et détruire ensuite. Cette pratique est excellente, elle peut sauver de jeunes plan- tations. Nous avons déjà parlé des dégâts causés par l'Hemilea et autres champignons. En plus des antiseptiques (sulfatage) une robuste fumure est le meilleur remède à opposer au parasite. 172 ÉTUDES ET MÉMOIRES Autres rspèccs. — Les variétés (( Maragogype », <( café Leroy », « rio Nunez » ont été essayées, mais trop récemment pour qu'on soit fixé à leur égard. Le Maragogypc semble réussir à Anjouan, mal- heureusement on l'a planté dans des terres médiocres. A rapprocher de ces espèces le caféier sauvage de la Grande Comore, « Goiïea Ilumblotiana », (jui atteint des proportions gigan- tesques. C'est un arbre véritable, croissant de GOO ;i 1.800 mètres; son grain est petit, sa saveur nauséeuse, il passe, d'après des ana- lyses récentes, pour ne pas contenir de caféine ; son amertume et l'absence de principes excitants en rendraient l'usage précieux chez les nerveux et les convalescents. Nous avons rapporté deux serres de jeunes plants de caféier pour le Jardin de Nogentoù il est à l'étude. De nouvelles données compléteront ce paragraphe parla suite. Améliorations à apporter. — De ce que nous avons observé dans l'archipel, il en résulte que le caféier a devant lui un certain avenir. Nos planteurs auront k substituer avec le temps leurs produits aux produits étrangers sur le marché français. Des avantages sérieux leur sont consentis pour les favoriser. En même temps l'amélioration des cultures s'impose : Soit par greffe; Soit par h3'bridation ; Soit par introduction d'espèces nouvelles. Greffe. — Des essais sont en coursa Anjouan et Mayotte ; on greffe le Bourbon ou Arabica sur Libéria et sur Caféier marron. Il suffit de quelques réussites qui permettraient dans l'avenir des propaga- tions par semis. Des tentatives sont à encourager, les espèces nouvelles pouvant être assez résistantes aux maladies et donner des semences se rap- prochant des meilleures variétés. Hybrides. — Les insectes en sont souvent les auteurs incon- scients ; la variété Leroy en est un exemj)le. Hécemment, M. Manès, à la Réunion, a obtenu un sujet remar- quable par hybridation spontanée, le fruit, d'après la photographie, était un intermédiaire au Libéria et au Boui'bon ; les rameaux étaient chargés de baies dont la qualité ne, le cédait pas au Moka. Si cette espèce est fixée, nos colonies pourront en profiter, car des plants viennent d'être transportés au Jardin Colonial. CULTURES DE l'aRCIUPEL DES COMORES 173 Espèces nouvelles. — Parmi elles, il y aurait profit à donner aux planteurs des semences venant de pays neufs, comme le Harar et TAbyssinie, où les maladies parasitaires sont à peu près inconnues. Dans une prochaine étude, nous résumerons nos observations sur le cacaoyer, le cocotier, les plantes utiles de l'archipel des Gomores. LE CACAOYER Le Theobroma Cacao ne vient comme culture secondaire aux Gomores qu'après la canne à sucre, le vanillier, le caféier et le cocotier. Il mérite mieux cependant que la place effacée qu'il occupe, son rendement se trouvant plus rémunérateur que celui du caféier. Les écoles à son sujet ne sont plus à faire, des petites planta- tions existent à Mayotte, Anjouan et Mohéli. C'est à la Grande Gomore que nous avons rencontré les plus importantes cacaoyères. Les arbres .hauts de 3 à 6 mètres sont vigoureux et en plein rapport. Ils ont de 6 à 10 ans d'existence. Poussant dans un sol essentiellement volcanique, semé de blocs trachytiques, leur crois- sance a été longue. Fait d'observation courante dans toute l'île, la végétation des essences forestières, la plupart à racines horizon- tales (arbres et arbustes), celles des cocotiers s'elfectue très lente- ment par suite du peu de profondeur des terrains, superposition des coulées du Karatala et de ses cratères secondaires. Production. — La production par arbre sans être comparable à celle de l'Amérique centrale, en est appréciable. Elle se trouve amoindrie par les ravages des rongeurs (rats) qui foisonnent dans les îles, notamment à la Grande Gomore, et par l'absence de taille, les gourmands n'étant généralement pas enlevés. Mais il est difficile de fixer un chiffre, ces plantations datant de peu d'années. A Mayotte, ces cultures sont de moindre importance, mieux soi- gnées et la préparation des amandes faite à peu de frais comme à la Grande Gomore, d'après les méthodes suivies à la Réunion. Anjouan a passé la période des essais, cependant la production est encore insignifiante. Avenir du cacaoyer aux Coniorcs. — Plus exigeante que celle du caféier, la culture du cacaoyer ne trouvera à Anjouan et à Mayotte que des espaces restreints, des fonds de vallées à terres riches et bien arrosées ou des cirques à sols neufs. 171 ÉTIDKS ET MÉMOIBKS Elle réussira particulièrement à Mohéli ou les vallées alluvion- naires riches en humus s'y prêtent admirablement. C'est dans cette île que se trouvent des couches de terre de 8 à 10 mètres de profondeur sulïisamment perméables et d'un grand avenir. Des cacaoyères existent et rapportent, mais la préoccupation dominante, « le Vanillier », a empêché qu'on les étende. Voir le cacaoyer en rapport à la Grande Comore, pays où il n'existe pas un cours d'eau^ où la sécheresse dure huit mois, paraît surprenant. Cette espèce à racine pivotante parvient à s'insinuer entre les divers plans rocheux recouvrant et emprisonnant les couches végétales et soumis à des altérations et décompositions incessantes. Ces laves et scories emmagasinent dans leurs mailles, à de grandes profondeurs, une humidité persistance pendant les plus fortes chaleurs. L'exportation de ce pays a atteint récemment une tonne et demie et ne peut aller qu'en croissant. Espèces cultivées. — Les variétés à cabosse rouge sont les plus courantes. Elles proviennent de Maurice et la Réunion. A la Grande Comore, une espèce à cabosse blanche y est encore peu répandue, elle passe pour donner un cacao plus apprécié sur le marché. Il y aurait intérêt à la propager. Pendant mon séjour à Anjouan, j'ai réussi à introduire de nou- velles variétés de l'Amérique Centrale dont j'ai distribué quelques plants aux colons, à savoir : var. Amellonado, Cala-bacillo, Forastero Socomusco. Les résultats n'en seront connus que vers 1905. Ennemis du cacaoyer. — Parmi ceux-ci nous avons les coléop- tères, les tanrecs et aussi les makes communes à Anjouan, et Mohéli. Particularité curieuse, ces derniers n'existent pas à la Grande Comore. En revanche, les rats les remplacent au grand détriment des cabosses qu'ils détruisent avant maturité. La maladie « le balai de la soi^cière » récemment, décrite, est inconnue dans l'archipel. Pièges lacets, nasses, substances empoisonnées ou bactéricides ra tiers, tout a été mis en œuvre avec insuccès contre ces terribles rongeurs. Un entourage de fer blanc ou manchon aux arbres rend peu de services, les sujets non soumis à la taille poussant souvent en buis- son avec un tronc peu élevé. A une épo(|ue de l'année, au moment dos mangues et des autres CULTURES ET MÉMOIRES 175 fruits, on a remarqué que ces rongeurs délaissent le cacaoyer, ce qui permet de sauver une partie de la récolte. Pour lutter, reste à tenter l'introduction de la Mang-ouste qui peut rendre de réels services. On sait que cet animal est également redoutable aux basses-cours et qu'il ne s'attaque aux rats qu'après avoir détruit les gallinacées et les oiseaux voisins. Les méthodes bactériologiques, qui consistent à donner au rat une maladie contagieuse et mortelle, septicémie, etc., chez cette race et non transmissible à d'autres espèces, ont donné des succès remar- quables en France dans les égouts et dans les fermes. Nul doute qu'elles ne donneraient à la Grande Gomore des résultats encou- rageants, si l'on se plaçait dans les conditions requises, c'est-à-dire préparation et exaltation sur place par ensemencement des cultures virulentes par un bactériologue. L'expérience est à reprendre parce que l'on ne s'est jamais placé dans les conditions voulues et que les cultures microbiennes arrivaient à la Grande Gomore, comme les vaccins, inertes et stéri- rilisées. Dans ces transmissions de maladies virulentes, c'est un fait connu qu'à la troisième et quatrième génération les rongeurs se trouvent immunisés et ne meurent plus. Il faut leur inoculer alors une autre maladie. Perfectionnements. — Dans |les pays pi-oducteurs, le cacaoyer se perfectionne par hybridation, par greffe et par les engrais. Parmi les meilleures fumures, les cabosses recueillis avec soin et mises au pied de chaque arbre lui restituent une partie des prin- cipes enlevés au sol. G'est là une pratique excellente suivie à la Grande Gomore. [A suivre.) D"" Lafont, Médecin-major de l'armée coloniale. LA RAMIE Tout le monde sait que la ramie est une plante textile dont les fibres servent à confectionner des tissus d'une beauté et d'une soli- dité remarquables. On sait aussi que malgré les qualités précieuses de ce textile, l'exploitation industrielle de la ramie est encore peu développée, mais on ignore généralement pourquoi. On a beaucoup écrit cependant et beaucoup discouru sur la ramie, sur sa culture, son utilité et son emploi. 11 semble même que tout a été dit k ce sujet. Il peut donc paraître inutile au pi'emier abord d'en reprendre ou d'en continuer l'étude, et superflu de faire paraître après tant d'autres un nouveau travail sur une question qui a déjà été si longuement et si minutieusement examinée, sans qu'on soit parvenu néanmoins à des résultats satisfaisants. Nous n'hési- tons pas cependant à le faire, j)arce que nous sommes persuadé que les circonstances qui n'ont pas permis jusqu'à ce jour une utili- sation industrielle de la ramie n'existent plus actuellement. Sans vouloir énumérer toutes ces circonstances, il nous semble utile cependant d'en indiquer les principales, afin de permettre au lecteur de se faire une opinion personnelle sur la question. Les fibres dont on se sert dans l'industrie proviennent exclusive- ment de l'Extrême Orient, de la Chine surtout ; elles sont désignées sous le nom de China grass ; elles sont obteniuîs au moyen de pro- cédés de décortication primitifs longs et coûteux qui en rendent le prix assez élevé ; elles sont en outre grevées de frais de transport relativement onéreux, de sorte que la matière première revient en Europe à un prix qui ne permet pas do l'employer couramment dans la lilature et le tissage. Aussi depuis longtemps a-t-on cherché à obtenir mécaniquement et économiquement des fibres de ramie en quantité suffisante pour satisfaire aux besoins des industries textiles. Mais la plupart des procédés employés pour obtenir ces résultats n'ont pas réussi. Empressons-nous d'ajouter qu'ils étaient préconisés bien souvent LA RAMIE 177 par des g^ens qui voyaient surtout dans la ramie l'occasion de spé- culations merveilleuses, sans aucun souci de l'insuccès des procédés indiqués ni du discrédit qui en résulterait. Cette question a été très bien exposée dans un article publié il y a quelques années : qu'on nous permette d'en citer le passage principal. En Europe, la question de la ramie semble s'être posée pour la première fois vers 1809; mais malgré l'intérêt incontestable qui s'y attache, malgré la sorte d'engouement qui s'est maintenu à son sujet, malgré l'emploi de capitaux considérables et la mise en œuvre d'efforts intelligents, malgré surtout le désir général de l'industrie d'utiliser enfin une fibre dont les qualités et les applica- tions lui sont bien connues, la ramie est restée encore à l'état de problème. Tous les gouvernements ont encouragé les inventeurs, même par des concours où les prix étaient considérables ; la plupart de ces concours n'ont révélé aucun résultat pratique. Cet insuccès d'une question qui est excellente en soi tient à des causes assez diverses qu'il nous faut indiquer. La solution a été retardée par le fait des inventeurs eux-mêmes qui créaient des machines ou des procédés compliqués, nécessitant une main-d'œuvre ou habile ou nombreuse, qui ne s'inquiétaient pas de savoir si les filasses obtenues par eux avaient conservé les qualités industrielles de la fibre de ramie et qui se préoccupaient avant tout de vendre leur machine. Elle a été retardée, parce que beaucoup de charlatanerie s'est mêlée à l'affaire. Des lanceurs ingénieux ont monté des sociétés basées sur des systèmes qui n'avaient aucune preuve industrielle ; on annonçait des rendements en filasse exhorbitants, on parlait même de rendement de culture absolument insensés. A tout cela s'ajoutait un mystère soigneusement entretenu sur le fonctionnement réel, et les malheureux planteurs qui se laissaient allécher par des prospectus emphatiques ou par des promesses d'achat de tiges à un prix vraiment tentant se trouvaient, à la récolte, en présence de la liquidation de déconfitures et avaient perdu les avances assez éle- vées que demande un champ de ramie. Aussi il ne faut pas nous étonner de voir cette question de la ramie engouffrer plus de 50 millions de capitaux et rester au point où elle était presque au commencement du siècle. On a voulu tou- jours et partout faire de la ramie au point de vue financier; on ulletin du Jardin colonial. 12 ils ÉTUDES ET MÉMOIRES n'en a jamais fait sérieusement de la ramie au point de vue indus- triel. C'est pourtant là où se trouve la question vraie. Aussi, à la suite de tant de tentatives infructueuses et de tant de déceptions, avait-on fini par admettre que la ramie ne pouvait être utilisée industriellement. Il faut bien dire aussi qu'indépendamment des considérations que nous venons d'exposer, l'insuccès de toutes ces tentatives était dû surtout aux difficultés réelles que l'on a rencontrées jusqu'à ces derniers temps pour décortiquer, défibrer et dég-ommer rapidement et économiquement la ramie. C'est là assurément la principale cause du retard qu'a subi le développement de la culture intensive de cette plante précieuse. Une autre cause moins importante que la précédente, mais qui a beaucoup contribué à retarder la solution de la question et qui est à la veille de disparaitre, consiste dans ce fait que, d'une part, les cultivateurs n'osaient pas faire de dépenses pour une culture qui donne des produits dont l'écoulement n'était pas assuré, et que, d'autre part, les fîlateurs n'avaient pu jusqu'à ce jour prendre d'engagements vis-à-vis des premiers, ni leur fixer des prix sans connaître la marchandise qu'on leur offrirait à la récolte. On tournait donc dans un cercle vicieux. Mais le dernier Congrès .sur la ramie qui s'est tenu à Paris pen- dant l'Exposition de 1900 a fourni des indications précieuses qui ont permis d'établir les bases fondamentales de l'exploitation indus- trielle de la ramie. Il y a été démontré en effet que l'on pouvait décortiquer et défibrer rapidement et économiquement la ramie, soit au moyen de machines, soit au moyen de procédés chimiques qui ont en même temps l'avantage de dégommer les fibres. On y a déterminé en outre la valeur marchande du textile qui a été fixé à 70 francs les 100 kilos de lanières dépelliculées. Les principales difficultés qui empêchaient le développement de l'exploitation de la ramie ont donc à peu près complètement dis- paru, et rien ne s'oppose plus maintenant à l'essor d'une culture aussi avantageuse que celle de ce précieux textile qui va enfin pou- voir remplir dans l'industrie le rôle important que la nature lui a assigné, venant ainsi concurrencer victorieusement le lin, le chanvre et le coton auxcjuels il est bien supérieur. Aussi le moment semble-t-il venu de s'occuper sérieusement de cette ({uestion. Elle présente d'ailleurs d'autant plus d'intérêt et LA RAMIE 179 d'opportunité que les textiles commencent à faire défaut à nos fila- teurs qui ont beaucoup de difficultés à se procurer, même à des prix élevés, les quantités de chanvre et de lin nécessaires pour ali- menter leurs manufactures et satisfaire aux besoins du commerce. Cette pénurie de matière première provient de ce que l'étranger, la Russie notamment, qui fournissait ces textiles en grande quan- tité, les utilise maintenant sur place et les réserve pour les manu- factures qu'elle a créées sur son territoire depuis quelques années. C'est donc le chômage de nos usines à brève échéance et peut être une révolution en perspective. D'un autre côté, la culture du lin et du chanvre en France même n'est pas assez rémunératrice pour que nos cultivateurs s'y adonnent. Aussi, malgré des primes assez élevées, ont-ils presque totalement abandonné cette culture. D'une manière générale d'ailleurs, l'agriculture ne rapporte plus ce qu'elle rapportait autrefois ; nous le constatons en Algérie où les céréales, bien que de qualité supérieure, sont concurrencées par les produits de l'étranger, où le tabac devient d'un écoulement très limité, où la vigne enfin, qui semblait appelée à faire la fortune du pays pendant de longues années encore, ne donne plus que des revenus insignifiants : la France en effet a reconstitué son vignoble et pro- duit du vin en quantité supérieure à sa consommation et aux besoins de l'exportation, aussi les vins d'Algérie ne se vendent-ils plus et restent-ils dans les caves. Il faut donc trouver autre chose. Une culture industrielle, telle que la ramie, qui aurait le double avantage de fournir aux filateurs du Nord le textile dont ils ont besoin et à nos colons de beaux reve- nus, viendrait juste à point pour remédier à la situation. Mais, dira-t-on, si des débouchés sont assurés à ce textile, est-il bien certain que la plante qui le produit, étant donnée son origine asiatique, se développerait en Algérie dans de bonnes conditions? On ne peut que répondre très affirmativement à cette question. L'Algérie en effet avec ses terres fertiles, son climat privilégié, ses ressources de toute nature, étant données sa situation géographique et ses conditions climatériques, se prête admirablement bien à la culture de la ramie. Il suffit pour le démontrer de rappeler les essais qui ont été tentés il y a quelques années avec un plein succès sur quelques points de la colonie, notamment à Boufarik, à la Chilîa et même aux portes d'Alger, au Jardin d'Essai du Hamma. La ramie 180 ÉTL'DES ET MÉMOIRES prospèrv^ donc en Alg-érie, s'y développe et s'y nuilliplie aussi bien peut-être que dans les meilleures terres de la Chine placées sous la même latitude. Elle peut en elîet fournir dans ce pays jusqu'à 5 coupes par an, alors que dans les régions les plus favorables elle ne fournit pas plus de 6 à 7 coupes, et qu'en France elle n'en fournit que 2 ou 3 tout au plus dans le Midi. Enfin, la ramie est d'une plantation facile, coûte très peu comme culture, n'est sujette à aucune maladie et subit sans s'altérer toutes les variations de l'atmosphère. Il convient donc d'encourag-er, de favoriser par tous les moyens possibles la culture de cette plante, en faisant connaître au culti- vateur algérien la manière de la planter, de l'entretenir et de la récolter, ainsi que les bénéfices qu'il peut en retirer. Notre étude n'a pas d'autre but. Elle sera donc un guide précieux et sûr, nous le souhaitons du moins, dans lequel le colon algérien pourra puiser un enseignement utile et fécond, qui est le fruit de 25 années d'études et d'expériences personnelles. Nous aurons ainsi la satisfaction d'avoir propagé les avantages remarquables d'une plante qui est appelée à révolutionner les industries textiles et d'avoir contribué dans la mesure de nos moyens au développement économique de l'Algérie. DESCRIPTION DE LA PLANTE La ramie est une plante vivace originaire des îles de la Sonde. Elle est classée en botanique dans la famille des Urticées et appar- tient au genre Boehmeria, Elle a été cultivée de tout temps par les peuples de l'Extrême Orient pour ses fibres précieuses. Elle a été désignée tour à tour sous le nom d'ortie de Chine, d'ortie blanche, de China grass, mais le nom de ramie est beaucoup plus répandu que les autres. On reconnaît plusieurs espèces de ramie, deux surtout : la liueh- meria ulilis ou Urtica Icnucissirna el hi Booinnorw niroH, une troisième du nom de vandicnns n'est en l'éalité qu'une variété de celle-ci. Aussi ne distingue-t-on généralement (pie deux (pialités de ramie <]ue 1 on (k;signe simplement sous les noms de ramie verte et de ramie blanche, ('elte dernière dénomination est due à la pré- LA RA3HE 181 sence d'un duvet blanc qui tapisse le dessous des feuilles tandis que dans la ramie verte les feuilles ne possèdent pas ce duvet. La ramie verte (Urtica tenacissima) est celle qui est cultivée dans les pays tropicaux à pluies abondantes. La ramie blanche (Urtica nivea) produit moins, mais convient beaucoup mieux aux pays tempérés, comme l'Algérie et le midi de la France ; elle est plus robuste, plus résistante et donne une fibre supérieure comme finesse à la précédente. C'est celle que nous recommandons aux colons algériens de cultiver. Aussi ne nous occuperons-nous dans cette étude que de la ramie blanche. Les tiges grosses seulement de 8 à 10 millimètres en moyenne, sont droites à feuilles alternes ou opposées, sans nœuds et atteignent en pleine maturité près de 2 mètres de hauteur dans les pays tempérés. Une tige de ramie complètement mûre se compose en allant du centre à la périphérie : 1° d'un cylindre central formant la plus graaide partie de la tige et contenant à l'intérieur de l'anneau ligneux la moelle qui, au moment de la maturité, se dessèche pour ne laisser à sa place qu'une matière friable ; à la périphérie se trouve un ensemble de plusieurs assises de fibres nées dans le péri- cycle d'un ensemble de plusieurs couches de fibres, assez minces d'ailleurs ; 2° de l'écorce proprement dite appelée pellicule qui est d'autant plus adhérente aux fibres que la tige est plus vieille et plus sèche, elle brunit au moment de la maturité et prend une couleur marron foncé. Le nombre des tiges, par pied, varie suivant les latitudes, la nature du terrain, les soins donnés à la plante, l'âge de la planta- tion, etc.. Nous examinerons cette question à propos du rende- ment de la ramie. QUALITÉ DES FIBRES De toutes les plantes textiles connues, la ramie est celle qui pro- duit les fibres les plus tenaces, les plus élastiques et les plus fines. Elle est donc supérieure au lin, au chanvre et au coton, elle ne le cède qu'à la soie ; les fibres sont d'ailleurs dune finesse, d'une couleur et d'un lustre tels qu'elles ressemblent à la soie des cocons, et qu'on leur a donné le nom de soie végétale. La ramie peut en effet si bien soutenir la comparaison avec la soie 182 ÉTUDES ET MÉMOIHES animale, qu'elle peut être mélanjj^ée avec celle-ci dans la confection des tissus, sans que l'œil puisse au premier abord distinguer l'une de l'autre. En Chine, où l'on file et on tisse la filasse de ramie depuis des siècles, on fabrique des tissus qui ont le brillant de la soie et que les Chinois portent sous forme de longue blouse (Gal-abiech) ; ces tissus sont d'une telle résistance qu'ils ne sont teints qu'après avoir été portés pendant 15 ou 18 mois et l'opération n'est renouvelée que tous les 2 ou 3 ans, tant l'étolTe est inusable. Aussi les tissus de ramie sont-ils en Chine plus estimés que la soie, non seulement à cause de leur dureté mais aussi à cause de leur fraî- cheur et de leur prix beaucoup moins élevé, la ramie coûte en effet quinze fois moins cher que la soie, elle est aussi moins chère que le lin : ainsi le fil de ramie n*' 40 qui correspond au fil de lin n" 10, vaut 8 francs le kilog. tandis que celui-ci se paye 9 francs. En outre le fil de ramie est blanc tandis que le fil de lin est écru et le blanchiment lui fait perdre 18 à 20 °/o de son poids. A cause de cette énorme différence de prix, et de ses qualités extraordinaires, elle est très recherchée en Belgique, en Suisse, en Allemagne, et surtout en Angleterre, Nous croyons utile d'ailleurs, pour bien préciser les qualités de la ramie, d'indiquer ici les résultats d'une étude intéressante du docteur Ozanan qui s'est livré à des recherches micrométriques et microdynamiques dans lesquelles il a comparé la fibre simple et primitive de la ramie à celles du lin, du chanvre, du coton et de la soie. Cette étude comporte: 1° la structure microscopique de la fibre; 2" la longueur de la fibre primitive ; 3° la largeur des fibres ; 4° l'épaisseur des fibres ; 5" leur résistance à la traction ; 6" leur allongement avant la rupture (élasticité) ; 7° leur résistance à la torsion. Mesures prises au microscope : (Grossissement de 80 diamètres.) i° Structure microscopique de la fibre. La fibre de la ramie est pour ainsi dire de toute la longueur de la tige car on peut la suivre sur une étendue de 0'" 25 dans le champ du microscope, sans la voir s'interrompre soit parce qu'elle est constituée par une cellule continue, soit parce que les diverses cellules qui se suivent ont perdu leur cloison de séparation par LA RAMIE 1S3 suite d'une fusion plus intime : de là vient la grande solidité de la libre de ramie. Au contraire, la fibre du lin et celle du chanvre, qui semblent si longues, sont en réalité très courtes ; ce sont des fibres, cellules fusiformes de 0"' 03 de longueur environ, juxtaposées à leurs extré- mités, imbriquées l'une sur l'autre, les ruptures s'opèrent toujours sur un point faible de l'accolement. La fibre du coton ordinaire n'est que 0™ 02 à 0'" 03 de longueur, celle du coton longue-soie va jusqu'à 0"" 06 ou 0"* 07 ; de là le peu de solidité du fil de coton, malg-ré la torsion qu'on donne à ses éléments réunis. 2° longueur de la fibre 3° largeur 4° épaisseur primitive 1 Ramie 1 j G-" 25 ! 0"' 50 j 6/10 de mm. 7/100 de mm Lin 0"i05 3/10 de mm. 3/100 de mm Chanvre 0°' 05 5/10 de mm. 3/100 de mm Coton ^ ( 1 0°»03 1 0™ 06 1 4/10 de mm. 5/100 de mm Soie SO"» 2/10 de mm. 1/500 de mm Les mesures ont été obtenues avec l'instrument du professeur Alcan, des Arts et Métiers, sur des fibres de 0'" 05 de longueur. Mesures microdynamiques. 5" Résistance à la traction 6° Élasticité ou allonge- 7' ment avant rupture Résistance à la torsion (tours) Ramie Lin Chanvre Coton Soie 24 grammes 3 — 6 — 2 — 1 — O"- 003 G"' 002 0" 0025 0°» 004 G'» 011 180 140 176 696 1 .038 Mais les différentes fibres étant de g-rosseurs différentes on juge- rait difficilement de leur valeur si on les ramenait à une donnée commune. Etant donnée la ramie comme unité nous obtenons les rapports suivants : i84 ÉTUDES ET MÉMOIRES Grosseur R. Bsistance à la traction Kl asticité R à ésistance la torsion Ramie 1 1 1 1 Lin 1/2 1/4 1/3 4/5 Chanvre 2/3 1/3 3/4 19/20 Coton 1/3 1/3 1 4 Soie 1/4 1/6 4 6 Ainsi la fibre de la ramie est plus long-ue et plus uniforme que toutes les autres après la soie, elle est plus solide, plus résistante à la traction et à la torsion plus élastique que le chanvre et le lin, et même que le coton, qui est seulement plus souple à la torsion ; elle n'est inférieure qu'à la soie. Ajoutons pour terminer qu'en 1811 la cour des Directeurs de la Compagnie des Indes ayant reçu du docteur Bùchanan un échantil- lon de libres de ramie le fît filer par une maison de Londres. Un fil de ramie porta un poids de 252 livres sans se rompre tandis qu'un fil de même grosseur en chanvre de Russie se rompit avec un poids de 82 livres. USAGES DE LA RAMIE Nous avons déjà vu que de tout temps les Chinois ont fabriqué des tissus de ramie qu'ils préfèrent à tout autre. Les habitants de l'Archipel Indien se servent aussi beaucoup de ramie pour la fabri- cation des cordag-es, des filets de pêche, en raison de ses qualités imputrescibles : ils l'utilisent presque exclusivement pour la confec- tion des vêtements et du linge de corps. Les tissus de ramie sont en effet légers, frais, et absorbent facilement les liquides transpires. Ces étoiles sont connues sous le nom de soieries de Canton. Une plante aussi précieuse que la ramie ne pouvait manquer d'être importée en Occident, et elle l'a été en elfet depuis le commence- ment du siècle dernier aussi bien en Europe qu'en Amérique où ses fibres ont été utilisées depuis longtemps pour fabriquer les cordes de qualité supérieure. On la mélange dans certaines proportions avec les fils de coton, de laine, de soie, de lin et de chanvre, et on obtient ainsi des tissus d'une grande solidité et d'une beauté remar- quable. On en fait des fichus en dentelles qui ressemblent h s'y méprendre à la soie, des coutils, des étoffes en drap mélangé de LA RAWIE l8o rainie, des tissus d"ameul)lement qui se recommandent par leur souplesse, leur brillant et leur solidité, on l'emploie avec avantage dans la passementerie, Tétirage des fils d'or et d'argent, le linge de table, la mousseline, unie ou brochée, les dentelles, les foulards riches, les soies brochées. Enfin, elle fournit avec les déchets une pâte à papier supérieure à celle que l'on obtient avec l'Alfa. On peut donc affirmer que la ramie sera dun usage courant en France et en Europe, dès que l'agriculture fournira la matière première en quantité suffisante à l'industrie et pourra livrer cette matière première à plus bas prix que précédemment, grâce aux nouveaux procédés récemment mis en pratique. CULTURE DE LA RAMIE Climat. — D'une manière générale, la culture de la ramie ne peut être tentée avec succès au delà du 43'' degré de latitude nord ou sud. Mais plus on se rapproche de l'équateur plus le climat est favo- rable, à condition de donner à la plante la quantité d'eau dont elle a besoin. Il faut d'ailleurs distinguer la ramie verte (Urtica utilis ou tena- cissima) de la ramie blanche (Urtica nivea), au point de vue des con- ditions climatériques qui conviennent le mieux à chacune de ces deux variétés. Les climats chauds et humides à grandes pluies sont surtout favorables à la ramie verte ; les climats tempérés comme celui de l'Algérie conviennent mieux à la ramie blanche. Dans les régions où les hivers sont froids, celle-ci se développe mf»ins bien et donne la moitié moins de coupes ; encore est-il nécessaire de recouvrir les plantations avec delà paille, du fumier ou des feuilles sèches, afin de les garantir des gelées qui peuvent leur être nuisibles. Tandis que dans les régions où l'hiver est doux, ces précautions sont inutiles et l'on peut y obtenir 4 et mêmeo coupes par an. Il faut en résumé à la ramie une température élevée, une expo- sition assez abritée, naturellement ou artificiellement des grands vents, notamment des vents froids du nord. Nature du ten^ain. — En raison de sa force de végétation, la ramie croit et se développe dans presque tous les sols. Mais elle a comme toutes les plantes des terrains de prédilection. Ceux qui lui 18G ÉTUDES ET MÉMOIRES conviennent le mieux sont les terrains légers, sablonneux, profonds, bien ameublis et suffisamment frais. D'autre part, comme elle a de puissantes racines, qui s'enfoncent profondément dans la terre, il lui faut naturellement un sous-sol perméable à défaut de quoi elle ne saurait prospérer. Si les racines ne pouvaient aller chercher la nourriture et la fraîcheur dont la plante a besoin, leur développe- ment serait arrêté et la plante tout entière s'en ressentirait. D'ailleurs, dans un sous-sol imperméable, les eaux de pluies ou d'irrig-ation ne s'écoulant pas, les racines finissent par pourrir. Autant la fraîcheur laissée par l'infiltration est favorable à la vég-étation de la ramie, autant l'humidité constante résultant du défaut d'écoulement lui est nuisible. Les terrains marécageux, ceux sujets à des inondations prolongées, ceux à sous-sols fortement argileux doivent être repoussés; les terrains salés, alors même qu'ils ne le sont que faiblement, sont impropres ; les terres com- pactes contenant beaucoup d'azote ou d'alumine sont peu favo- rables à la culture et les drageons ne peuvent y prendre leur développement normal : la qualité et le rendement y sont mauvais. Dans ces terres trop fortes, la plante ne se développe pas. C'est ce qui est arrivé il y a quelques années à la Chilfa et à Joinville, près Blidah : trois plantations avaient été faites à peu de distance l'une de l'autre, à la fin du mois de mars et au commen- cement d'avril 1881. avec des éclats de racines. Deux de ces plan- tations avaient été faites dans des terres fortes ; beaucoup de plants malgré les soins dont ils ont été l'objet, malgré des arrosages répé- tés quatre et cinq fois par mois, ne sont pas sortis de terre. Tandis que les plantations faites dans les terres légères en même temps que les précédentes mais avec beaucoup moins de soins, moins de fumure, moins d'arrosage ont donné une première coupe au mois de juin, une deuxième au mois d'août, une troisième en octobre. Les tiges étaient fines et n'avaient presque pas de matière ligneuse, mais beaucoup de fibres. Comme on le voit, le choix des terrains est très important. Ceux qui conviennent le mieux à la ramie sont aussi les plus propices au lin, dont les racines sont également profondes. Ce sont les terrains silico-calcaires contenant une bonne partie d'humus, ou les terrains d'alluvion sablonneux, bien ameublis et suffisamment frais. C'est dans de tels sols que la ramie atteint toute sa croissance et arrive sous l'influence des rayons ardents du soleil, à son maximum de production. LA RAMIE 187 En résumé le terrain doitêtre léger, profond, arrosable, perméable, et quoique la ramie croisse partout, plus le sol qu'on aura choisi se rapprochera de ces conditions, plus les résultats seront satisfaisants comme qualité et comme quantité. Nous ne saurions donc trop recommander au cultivateur de ramie de bien étudier et de bien connaître tout d'abord son terrain, il devra s'attacher au besoin à le ramener aux conditions néces- saires. Il est inutile d'indiquer ici les moyens à employer pour rendre légère une terre trop forte, tous les agriculteurs les con- naissent. Plantation. — La ramie étant une plante très vivace on peut obtenir des plantes par tous les moyens connus : graines, boutures, marcottes et rhizomes. Le premier moyen est le plus difficile, et le plus incertain, car un semis demande beaucoup de soins et ne réussit pas toujours. On ne doit avoir recours à ce moyen qu'à défaut de tout autre ; les deux autres ne doivent être employés qu'accessoirement. C'est donc au dernier, celui des rhizomes, qu'il faut donner exclusivement la préférence. La ramie présente des rhizomes qui naissent au voisinage du col- let et courent horizontalement sous le sol ; ils fournissent par leurs bourgeons des tiges aériennes. Ce sont donc ces rhizomes qu'on doit arracher et replanter ensuite séparément. La plantation des rhizomes peut se faire à toute époque de l'année, mais l'époque la plus favorable est le mois de février et le mois de mars. Les plants de ramie devant rester dans le sol pendant plus de vingt ans, mieux ce sol aura été préparé, mieux et plus longtemps il nourrira la plante. Il faut donc commencer par un défonçage ou par deux labours, profonds de 0 "' 40 de profondeur, l'un en long, l'autre en travers. Puis après avoir sarclé et fumé le terrain, on le divise en plates-liandes, dont le nombre et la largeur varient avec le nombre de plants que l'on veut planter. Nous conseillons déplanter 30.000 plants au moins par hectare, de manière à avoir dès la première année un rendement plus élevé. On peut ainsi obtenir trois coupes qui valent à elles seules les coupes de première et de seconde année de plantations, faites à raison de 10.000 plants par hectare. L'expérience a d'ailleurs 188 ÉTUDES ET MÉMOIRES démontré que la fibre est d'une qualité supérieure lorsque les plants sont très serrés, les tiges poussent alors droites et sans nœuds ; elles conservent une écorce verte et les moissonneurs les fauchent sans la moindre difficulté, surtout quand la plantation est faite sur plates-bandes. Pour obtenir ces résultats on divise le terrain en bandes de 1 ™ 50 de largeur. En dedans et sur le bord de chacune d'elles on établit un petit chemin de 0 "^ 30 de largeur qui servira tant pour le passage du cultivateur que pour l'écoulement des eaux. On forme ainsi des plates-bandes de 1 "• 20 entre sillons servant de fossés et de passages. L'hectare se trouve ainsi divisé à peu près en 60 plates-bandes exigeant chacune environ 500 plants de ramie, soit 30.000 par hectare. Au milieu de chacune d'elles on trace deux sillons dans lesquels on plante à 0 "' 40 l'un de l'autre un morceau de rhizome garni de deux yeux, un par trou, absolument comme si on plantait des pommes de terrre. Une autre manière de planter la ramie et qui est très recom- mandée consiste à planter en sillons dos à dos ; les pieds de ramie sont plantés avec une binette comme pour les choux et buttés pour bien tasser la terre sur les pieds. Ce système facilite les irrigations, la première notamment qu'il faut faire immédiatement après la plantation, la seconde six jours après, de manière à maintenir le terrain humide jusqu'à ce que les premières pousses aient apparu. Un troisième moyen de reproduction et de multiplication des tiges consiste à coucher en terre comme nous l'avons fait à la ChifTa dans une terre trop forte, celles qui ont atteint 20 k 30 centi- mètres de hauteur, puis de les butter pour leur faire prendre racine. Nous avons continué celte opération jusqu'à fin juillet de la même année, au fur et à mesure que les pousses atteignaient 20 à 30 centimètres. La plantation s'est ainsi développée et le champ s'est couvert de tiges très fines et très belles. Nous avons fait deux bonnes coupes, une dans les premiers jours de septembre, l'autre vers la fin d'octobre. Enfin un quatrième moyen très simple encore consiste à pincer ou à couper les tètes des pousses quand elles ont de 15 à 20 centi- mètres de hauteur, ce qui a pour effet de faire pousser sur les tiges LA RAMIE 189 des branches latérales en g-rand nombre. On peut alors prendre les têtes ainsi coupées et les replanter dans une plate-bande comme des boutures ; elles fourniront de beaux plants pour l'année suivante ; il suffira de les maintenir humides et à Tabri des vents du nord les 15 premiers jours, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'ils aient pris racine, puis on procède comme pour les autres plants. Sarclages et binages. — Quel que soit le mode de plantation adopté, il faudra procéder pendant la pousse des premiers plants, c'est-à-dire pendant la première année, à plusieurs sarclages pour empêcher le terrain d'être envahi, aux dépens de la ramie, par les herbes parasites. Au printemps suivant, un seul binage suffira, car si les plants ont été bien soignés, ils ne tarderont pas à être, maîtres absolus du sol et aucune autre plante ne pourra s'y dével- lopper. On fera toujours bien néanmoins de remuer la terre autour des plants, au moins superficiellement tant que les champs de ramie ne seront pas fournis, comme les champs de luzerne ou d'es- parcette. Nous croyons que, dans ce cas, on pourrait employer le scarificateur soit pour faciliter l'irrigation, pour ameublir partielle- ment le sol et favoriser la végétation. Mais après chaque coupe un binage sera nécessaire pour bien ameublir le sol. Fumure. — Tous ceux qui ont écrit sur la culture de la ramie ont reconnu que cette plante exige peu de fumier et que lorsqu'elle a atteint son comjilet développement elle n'en a plus besoin, les détritus de la plante elle-même répandus sur le sol suffisant à ses besoins. Cependant il faut bien reconnaître que l'engrais constitue une nourriture substantielle pour la ramie, aussi l'agriculteur doit-il donner à la plante tout ce que le mode de culture adopté permet de faire pénétrer dans la terre. Lorsque la plante a envahi tout l'es- pace qui lui est destiné et, cela dès la deuxième année, on ne peut plus labourer, ni même biner, à plus forte raison ne peut-on plus enfouir des engrais ; mais alors avant l'hiver on peut recouvrir le sol d'une couche de fumier de ferme qui sera délayé par les pluies et s'infiltrera jusqu'aux racines les plus profondes. On assurera ainsi des récoltes supérieures d'un tiers au moins à celles qui n'au- ront pas eu de fumier. 1!>0 ÉTUDES ET MÉMOIRES Les principaux éléments fertilisant à donner au sol sont l'azote, la potasse et (juelque peu l'acide phosphorique. La proportion exacte est difficile à déterminer puisqu'elle varie suivant la compo- sition chimique de chaque terrain. Mais en principe il faut à la ramie des eng'rais très azotés et potassiques. Irrigations. — D'une manière générale on peut poser l'axiome pas d'eau, pas de ramie; aussi dans les pays où les pluies ne sont pas assez fréquentes et abondantes pendant l'été, tels que l'Algé- rie, la Tunisie, l'Egypte, l'irrigation est-elle indispensable. La ramie n'exige cependant pas une quantité d'eau considérable, mais elle en demande assez pour ne pas souffrir de la sécheresse ; .caria végétation s'arrête dès que la fraîcheur fait défaut. Ainsi nous avons eu à Mouzaïaville des plantations de ramie faites dans de bonnes conditions, c'est-à-dire dans des terrains légers et sablonneux, mais difficiles à arroser. Grâce à la pluie, les plants avaient bien pris racine, et les tiges étaient sorties de terre assez rapidement, mais l'eau ayant complètement manqué pendant près de quatre mois d'été, c'est-à-dire en juin, juillet, août, sep- tembre, les tiges ont beaucoup souffert, elles sont restées pendant tout l'été à la hauteur de 30 à 40 centimètres qu'elles avaient lorsque l'eau a commencé à leur faire défaut ; mais au mois d'octobre, dès les premières pluies, les tiges se sont rapidement développées et ont couvert tout le champ. Ce (jui prouve que l'eau est indispensable pour la culture de la ramie. L'irrigation doit être faite modérément et le nombre d'arrosages réglé, d'après la saison et la température, à des intervalles qui peuvent varier de 6 à 8 jours, c'est-à-dire qu'il faut arroser quatre ou cinq fois par mois. Mais ces arrosages doivent cesser dix jours au moins avant la coupe, afin de donner aux tiges le temps de se for- tifier, de mûrir et de perdre leur excès d'eau. En revanche, il faut arroser immédiatement après chaque coupe. Coupes. — En Algérie, on peut faire (juatre coupes par an : la première à la fin du mois de mai, la seconde quarante-cinq jours après, c'est-à-dire vers le 15 juillet, la troisième à la fin d'août, la quatrième dans le courant de novembre, c'est la dernière qu'il faut faire pendant l'année, afin de ne pas laisser de sève inutile à la plante, ce qui lui serait très nuisible pour la saison suivante. LA RAMIE 191 On coupe les tiges lorsqu'elles ont pris à leur partie inférieure, jusqu'à une hauteur d'environ vingt centimètres, une teinte d'un brun rougâtre, elle sont alors 1"> 26 à l"" 30 de hauteur totale. Il est bon de procéder à la coupe par un temps sec, afin d'éviter la fermentation qui peut se produire par un temps humide, et qui serait nuisible à la décortication et à la qualité des fibres. Pour couper les tig-es, il est essentiel que l'instrument soit aussi trancliant que possible, afin d'éviter les déchirures de la plante. La serpette nous paraît l'instrument le plus convenable pour trancher net et d'un seul coup plusieurs tiges à la fois. L'opération est un peu plus longue qu'à la faux ou à la faucille ; mais étant mieux faite, la reprise de la végétation de tiges a lieu plus tôt. D'ailleurs, avec un peu de pratique, les cultivateurs ont vite trouvé l'instrument qui leur convient le mieux pour la coupe. Dès que les tiges sont coupées, on les effeuille sur place, puis on les transporte immédiatement après, à l'endroit où elles doivent être décortiquées, si on les traite à l'état vert. Si au contraire on doit les traiter à l'état sec, il importe essentiellement de les faire sécher aussi rapidement que possible, afin d'éviter qu'elles fermentent. A cet effet, on les expose au soleil pendant trois, quatre ou cinq jours, suivant l'état de l'atmosphère, en ayant soin de les tenir debout et assez éparpillées pour que l'air circule librement entre elles et que l'évaporation se produise plus facilement et plus rapi- dement. Les tiges de ramie étant très hygrométriques ne tarde- raient pas, alors même qu'on les croirait entièrement sèches, à se couvrir d'une légère moisissure, si elles restaient simplement exposées dans un milieu où pénètre l'humidité. Une autre recommandation à faire au sujet du séchage : si l'on effeuille les tiges une à une au fur et à mesure qu'on les coupe, on fait un travail long, dispendieux. Tandis que, si on commence par faire sécher au soleil les tiges encore munies de leurs feuilles, il suffit de secouer les tiges une fois sèches, pour que les feuilles tombent d'elles-mêmes. De sorte que le cultivateur devra employer l'un ou l'autre de ces deux procédés, suivant qu'il voudra faire manger les feuilles aux bestiaux, et alors il les enlèvera fraîches, ou qu'il voudra s'en servir comme engrais; dans ce dernier cas, il sera plus rapide, plus commode et plus économique d'attendre qu'elles soient sèches, pour en dépouiller les tiges, et les laisser sur le sol même de la plantation. 192 ÉTUDES ET MÉMaiRES RENDEMENT D'après ce que nous avons exposé dans cette étude, on doit voir qu'en somme la culture de la ramie n'offre pas de véritables diffi- cultés ni de grandes complications. On ne peut mieux la comparer qu'aux travaux nécessités par une prairie qu'il faut fumer, arroser, faucher et dont en engrange le foin. En elfet, lorsque la plantation est terminée, la fumure, l'irrigation, le coupage, le séchage consti- tuent, pour l'ag-riculteur, le travail ordinaire qui lui incombe annuel- lement dans la culture de la ramie. Si à l'avantage de la simplicité dans la culture, on ajoute que la ramie convient aux petites comme aux grandes et moyennes exploitations, que chaque coupe est supérieure à la meilleure récolte de lin et de chanvre, que, loin d'appauvrir le sol elle l'améliore, que les insectes ne peuvent l'at- taquer parce qu'elle les éloigne par la surabondance de son tanin, qu'elle n'est sujette à aucune maladie, nous aurons le droit de la proclamer la reine des plantes industrielles. Nous ne lui voyons que deux ennemis : la grêle et la gelée, et encore le dommage pouurra-t-il le plus souvent être en grande par- tie évité ou réparé. Si en elfet la tige est arrivée à maturité, on la coupera immé- diatement et, dans la plupart des cas, il n'en résultera qu'une légère dépréciation dans la valeur de la iilasse. Si la tige frappée par le fléau est encore trop jeune pour être traitée industriellement on la coupera également afin de provoquer au plus tôt une nouvelle pousse et on pourra donner les tiges vertes à manger aux bestiaux. Dans ces conditions, la perte ne sera pas très grande, étant donné qu^on fait quatre coupes par an en Algérie, la récolte ne sera donc jamais complètement perdue, comme c'est le cas bien souvent [)our d'autres cultures. Le rendement de la ramie peut êtçe considéré soit au point de vue de la production des tiges, soit au j)oint de vue des bénéfices pécuniaires à en retirer. Au point de vue de la production des tiges, le rendement est de deux sortes : les feuilles et les tiges. Les feuilles peuvent servir à la noui'rilure des bestiaux ou être employées comme engrais pour la plante même avec tous les autres résidus. Si on donne la feuille aux bestiaux, on pourra l'em- LA RAMIE 193 ployer à l'état frais ou à l'état sec. Dans les deux cas, il convient de mélanger dans la proportion de un huitième avec d'autres four- rages, sauf k aug-menter cette proportion au fur et à mesure que les bestiaux s'y habituent, ces feuilles sont en effet très nutritives; il en faut donc moins que d'autres fourrages. Elles peuvent encore servir k la fabrication du papier. Disons k ce sujet que les billets de la banque de France sont faits avec des fibres de ramie. Le rendement de la tige dépendant évidemment des conditions du sol, du climat et surtout des soins qu'on a donnés k la plante, il est impossible de présenter un état des récoltes et de bénéfices absolument invariables. Nous nous contenterons d'énumérer les divers résultats que nous avons obtenus nous-mêmes sans affir- mer qu'ils seront nécessairement toujours les mêmes partout ail- leurs. La première année, nos plants, placés k la distance de 0'" 40, comme nous l'avons indiqué, c'est-k-dire k raison de 30,000 envi- ron k l'hectare, nous ont donné une coupe de tiges fraîches pesant 18.000 kilos, dont moitié pour les feuilles. Les 9.000 kilos de tiges effeuillées ont perdu quatre cinquièmes de leur poids par la dessiccation et ont été réduits par conséquent k 1.800 kilos de tiges sèches. On en a retiré 450 kilos de filasse, La seconde coupe a donné 22.000 kilos de tiges vertes avec les feuilles et un peu plus de 500 kilos de filasse. La seconde année, les mêmes plants ont donné : pour la pre- mière coupe, 34.150 kilos de tiges vertes avec feuilles; pour la seconde, 31.700 kilos ; pour la troisième, 27,000 kilos; et pour la quatrième, 30.000 kilos, soit pour les quatre coupes 122.850 kilos de tiges vertes avec feuilles, soit 12.300 kilos de tiges sèches, et k peu près 3.000 kilos de filasse. La troisième année, la plantation est arrivée k son état définitif et normal; k peu de chose près, les plantes se rejoignaient par les rejets et les rhizomes. La première coupe a donné 41.200 kilos de tiges fraîches avec feuilles; la seconde, 39.600 kilos; la troisième, 36.240 kilos ; la quatrième 38.000 kilos, soit pour les quatre coupes 155.000 kilos environ ou 77.000 kilos de tiges fraîches effeuillées qui ont été réduites k 15.000 kilos de tiges sèches, lesquelles ont donné 3.900 kilos de filasse. La quatrième année et les suivantes^ le rendement est k peu près le même que la troisième année. Il est donc certain, d'après nos Bulletin du Jardin colonial. 13 iO'l ÉTUDES ET MICMOIKES expériences personnelles, qu'en pleine exploitation une plantation de ramie dun hectare avec cjuatre coupes par an produira en moyenne, à partir de la troisième année, 160.000 kilos de tiges vertes avec feuilles ou 10.000 kilos de tiges sèches, ou 4.000 kilos de filasse. Les feuilles pourront être utilisées, comme nous la vous déjà dit pour la nourriture des bestiaux, elles ont ainsi une certaine valeur comme fourrage. Avec de grandes plantations on pourrait trouver le moyen de les employer industriellement. Si maintenant nous considérons le rendement de la ramie au point de vue des bénéiices à en retirer, nous devrons tout d'abord indiquer les dépenses à faire pour les différents travaux que comporte la plantation, la culture et la récolte d'un hectare de ramie, puis les prix de vente des produits soit à l'état naturel, soit après avoir été transformés en filasse. Nous diviserons donc le sujet en dépense et en recettes, et nous connaîtrons ainsi le bénéfice net. DÉPENSES Frais de plantation. — Les dépenses se divisent en : Location d'un hectare de terrain 50 Achat de 30.000 plants à 25 francs le mille. .. 750 Préparation du terrain : 2 labours profonds à 40 centimètres, 7 journées d'attelage à 7 francs 49 Hersage et roulage : 2 journées 14 Tracement des sillons au ravonneur : un homme et 1 cheval, 2 journées 10 Main-d'œuvre pour planter : 6 hommes à 2 fr. 50 pendant 6 jours 00 Engrais (la l''" année) 50 1013 Frais de culture. — Arrosages chaque fois un homme à 2 fr. 50 par jour, 2 journées par hec- tare 5 fr. Et pour '{ arrosages par mois 15 LA RAMIE 195 Pendant o mois (juin, juillet, août et sep- tembre) 7o fr. Binages et sarclages (la \^^ et la 2^ année seu- lement), 4 hommes par hectare à 2 fr, 50 par jour 10 Et pour 2 binages et sarclages par an 20 Frais de récolte. — Pour chaque coupe de ramie, il faut 6 hommes à 2 fr. 50 par jour, 15 fr., et pour 3 jours 45 2 enfants ou 2 femmes à 1 fr. 25 pour enlever les tiges coupées et transporter, soit par jour 18 francs, pour 3 jours de coupe 54 fr 198 Total des frais la l""® année 1306 La 2* année il y a lieu de déduire du chiffre de la 1'^*' année : Achat de plants 750 fr. Labours 73 Main-d'œuvre pour planter 90 Engrais 50 963 963 Reste 343 Il convient d'ajouter à ce dernier chiffre, les frais de 2 coupes, de plus 198 Total S41 La 2^ et les années suivantes, la dépense sera diminuée des frais de binages et de sarclages devenus inutiles; elle sera donc de 541 — 20 . . . 521 Si on ajoute à ce chiffre de 521 francs la somme nécessaire pour amortir en 20 ans le capi- tal de 1 .300 francs, soit 65 francs, et un certain imprévu, on arrive à un total de frais maximum de 600 Mais il est absolument probable que pour beaucoup de cultiva- teurs ces frais annuels seront bien moins élevés et n'atteindront pas 500 francs. On admet en effet généralement que 300 à 400 francs 196 par ail suflisent pour entretenir et récolter une plantation de ramie d un hectare. Le montant des frais varie tl'ailleurs suivant les moyens mis en pratique et les procédés employés par chaque culti- vateur. BÉNÉFICES Au moment de la récolte, c'est-à-dire après chaque coupe, le cultivateur a deux partis à prendre, ou vendre ses tiges à l'état vert ou sec à un industriel qui les traitera soit au moyen d'un procédé chimique, soit au moyen de machines pour en faire de la filasse, ou les traiter lui-même d'après l'un de ces deux systèmes et vendre ensuite à des lilateurs les filasses qu'il aura obtenues. Dans le premier cas, il pourra vendre ses tiges à raison de 2 francs les 100 kilos sans feuilles à l'état vert ou de 10 francs les 100 kilos à l'état sec, les tiges pesant cinq fois moins à l'état sec qu'à l'état vert. Dans le second cas, il pourra vendre ses filasses de 70 à 120 francs les 100 kilos suivant la qualité. Nous avons calculé, d'après ces données, ce que rapportera un hectare de ramie. Nous avons vu que la production en pleine exploitation, c'est-à-dire à partir de la 3*^ année de plantation, était à peu près de 40.000 kilos de tiges vertes avec feuilles par coupe, soit pour i coupes par an KiO.OOO kilos de tiges ({ui, elTeuillées, donnent la moitié ou 80.000 kilos dé tiges vertes, ou le cinquième, c'est-à-dire IH.OOO kilos de tiges sèches. Les tiges vertes se vendent 2 francs les 100 kilos et les tiges sèches 10 francs; nous voyons que le rendement annuel brut d'un hectare sera de 1.600 francs, déduction faite des frais annuels de culture, de coupe, etc., (jui s'élèvent à 600 francs au maximum: le rendement net sera donc de KiOO— 600 = 1.000 francs par an. Mais si le cultivateur veut traiter lui-même les tiges de ses récoltes, il obtiendra un poids de filasse à peu près égal au quart du poids des tiges sèches, soit Ki.OOO: 4= i.OOO kilos environ de filasse par an, valant au minimum 70 francs les 100 kilos, soit pour les i coupes annuelles 2.800 francs. Lu déduisant de ce chilTre les frais (le culture (|ui peuvent s'élever à 600 francs au maximum et les frais de décortication à '500 francs environ, on trouve que le produit net est de 2000 francs par an et par hectare. 11 n'y a pas LA RAMIE 197 de culture qui fournisse un tel revenu avec aussi peu de dépenses et aussi peu de risques. En admettant même qu'une baisse de 50 °/o se produise dans la valeur des produits ou, pour tenir compte de tous les aléas, que les récoltes de ramie, pour une raison ou pour une autre, ne donnent qu'une demi-récolte, le rendement sera toujours assez élevé pour couvrir les frais et laisser encore au cultivateur un bénéfice suffi- samment rémunérateur de son travail et de ses capitaux. CONCLUSIONS On voit d'après ce qui précède que le cultivateur qui possède un terrain lég-er, profond à l'arrosage, peut, avec une première mise de fonds de 12 à 1.400 francs environ par hectare et même beaucoup moins, suivant les moyens dont il dispose, se livrer avantageuse- ment à la culture de la ramie. Cette culture est simple, d un entre- tien peu pénible, peu coûteux et d'un rendement élevé. Les débou- chés par les filateurs qui manquent de matière première et qui sont tout disposés à acheter des fibres de ramie en aussi grande quan- tité qu'on leur en fournira, et a des prix rémunérateurs, puisqu'ils sont obligés de faire venir ce textile des pays d'Extrême-Orient à des prix très élevés. Nous ne saurions donc trop engager les colons algériens à se livrer à cette culture qui leur procurera plus que toute autre de beaux bénélices avec peu de capitaux, peu de travail et peu de risques à courir. NUMA BOTHIER. LE QUINQUINA A MADA(,ASCAR 1° INTRODUCTION DU QUINQUINA A MADAGASCAH Le Service de rAgriculture essaya, pour la première fois, d'intro- duire le quinquina à Madagascar, dans le courant de 1896. Cette première tentative, faite avec des semences demandées à une impor- tante maison g'rainière de Paris, ne réussit pas. Un peu plus d'un an après, M. Fauchère actuellement directeur de la station d'essais de Nanisana, amenait à Madagascar un lot important de plantes économiques offert par le regretté M. Cornu, professeur de culture, au Muséum d'Histoire Naturelle, à qui la colonie doit l'introduction d'un si grand nombre de végétaux utiles. Ces collections comprenaient quelques cinchonas (jui, malheureu- sement, ne purent supporter la traversée. Malgré ces deux premiers insuccès, le service de l'Agriculture tenta, une troisième fois, l'introduction du quinquina à la lin de 1897. Cettre troisième tentative, faite d'ailleurs dans de bien meil- leures conditions, réussit aussi bien qu'on pouvait l'espérer. Une serre ward contenant environ une soixantaine de jeunes cin- chonas fut expédiée de Bourbon vers le 15 octobre 1897 et parvint à ïananarive dans les premiers jours de novembre de la même année. La majorité des plants arrivés en excellent état furent mis en place à la station d'essais de Nanisana. La plupart d'entre eux se sont convenablement développés, malgré la pauvreté du sol des environs de Tananarive et quoiqu'ayant beaucoup souffert du voisi- nage des manguiers sous lesquels on avait cru nécessaire de les planter, pour leur permettre de passer plus facilement la saison sèche. L'orage de grêle du mois de novembre 1899, qui faillit détruire toutes les plantes nouvellement introduites à Nanisana, a causé la perte d'un grand nondjre de cinchonas de Bourbon. Une quaran- LE QUINQUINA A MADAGASCAR 199 taine de spécimens seulement, partiellement abrités par des man- guiers, purent être sauvés. Quelques-uns d'entre eux, dont les bles- sures causées par les grêlons sont encore mal cicatrisées, ne se sont presque pas développés depuis cette époque et ne formeront jamais de belles plantes, mais plus de 30 quinquinas ont heureusement pu prendre le dessus, et j)euvent maintenant être considérés comme sauvés. Deux de ces arbustes ont fleuri en 1901, mais il n'a pas encore été possible de récolter des graines. L'apparition des premières branches à permis de commencer la multiplication par bouturage, dans le courant de l'hivernag'e 1899- 1900. Une dizaine de nouveaux quinquinas, obtenus de cette façon et mis en place à Nanisana, a porté à 40 le nombre de cinchonas bien venants, provenant de la Réunion. Quoiqu'ajant bien réussi, cette première introduction ne pouvait suffire pour faire un sérieux essai de culture à Madagascar. Les plants originaires de Bourbon, rustiques mais pauvres en alcaloïdes utiles, permettront au Service de l'Agriculture de préparer assez prochainement une grande quantité de porte-greffes pour des espèces ou des variétés plus délicates, mais plus riches en quinine, tels que le Ginchona ledgeriana et les quinquinas hybrides; mais leur cul- ture ne saurait donner aucun résultat concluant, puisque l'exploita- tion des cinchonas non sélectionnés est devenue pratiquement impossible sur une grande échelle, depuis que les Hollandais sont arrivés à sextupler la richesse des quinquinas sylvestres les plus recherchés autrefois, pour la pré^Jaration des sels de quinine. Le passage à Java, au commencement de 1900, de la mission envoyée en Extrême-Orient par le général Gallieni a permis de com- pléter les introductions de 1897, par l'envoi de graines et de plants gracieusement mis à notre disposition par l'administration locale et par quelques planteurs des environs de Bandoëng, Un premier stock de semences de Ginchona succirubra donné par M. Kist, résident de la Régence des Préangers, fut réparti entre le Jardin Golonial, le Muséum d'histoire naturelle et la sta- tion d'essais de Nanisana, et expédié de Batavia, le 6 avril 1900, en même temps que des semences de cinchona ledgeriana provenant de la plantation Kerkhoven de Ganboëng. Les graines de Ginchona ledgeriana ont donné une bonne germi- nation à Tananarive et au Jardin Golonial ; celles de quinquina 200 ÉTUDES ET MÉMOIRES rouji^e, (juoique placées dans K>s mêmes conditions et traitées de la même façon, n'ont pas germé à Nanisana. Ce premier semis exécuté à Tananarive, en opérant exactement comme k Java, a réussi g-ràce à Thabileté et aux soins de M. Fau- chère, qui se basant sur la manière de faire des planteurs hollan- dais a pris la précaution de faire venir de la forêt d'Ankeramadinika, le terreau nécessaire au semis. Les jeunes plants furent repiqués en godets, puis placés sous châssis. Un premier essai de mise en place tenté 8 à 9 mois après le semis n'ayant pas donné de résultats assez satisfaisants, le reste des cin- chonas sera conservé sous verre jusqu'au début du prochain hiver- nage. Presque tous ces arbustes seront mis en place à Nanisana, c'est-k-dire Ik où on pourra le mieux les soigner, mais il est certain que les terres des environs de Tananarive ne sont pas assez fertiles pour qu'il soit possible de se livrera l'exploitation de cette essence. Le but étant seulement, pour commencer, d'avoir sous la main des arbres produisant graines et boutures en abondance, le sol sera suffisamment amélioré, pour assurer la réussite de ces premiers sujets qui fourniront, k Nanisana, la plus grande partie des plants dont on aura besoin ultérieurement pour la création de véritables plantations dans une région plus favorisée, sous le rapport des terres. La mission envoyée aux Indes Néerlandaises a pu, en t)utre, se procurer k Java quelques plants très améliorés de cinchona hybride grell'é, choisis dans les serres de sélection des plantations du gou- vernement hollandais. Ces spécimens de grande valeur otferts par Monsieur Kist, résident des Préangers, ont été expédiés au Jardin Colonial de Nogent-sur-Marne. La plupart d'entre eux y sont arri- vés en bon état k la fin de mai P.IOO. On pourra en réexpédier un certain nombre à Madagascar après les avoir multipliés par boutu- rage et greifage sur quinquinas rouges venus de graine. Cette combinaison a réduit les chances d'insuccès au minimum en évitant un transbordement k Aden ou k Djibouti et en ne livrant pas d'un seul coup tous les plants aux hasards d'une très longue traversée. I^lle permettra, en outre, de répandre ces variétés amélio- rées dans toutes les colonies françaises où le quinquina mérite d'être propagé. La teneur en alcaloïdes des arbres d'où ont été tirés les greffons LE QUINQUINA A MADAGASCAR 201 des plants envoyés au Jardin Colonial est donnée par les analyses suivantes et montre l'importance qu'il convient d'attacher à cette introduction. Ginchona lettre B Vo Quinine 11 70 Cinchonidine 0 25 Quinidine cin- clîonine et sub- stances amorphes 0 80 12 11) Ginchona lettre G Quinine Ginchonidine Quinidine cin- chonine et sub- stances amorphes 12 24 0 28 0 54 13 06 Malgré l'intérêt qu'il pourrait y avoir à posséder à bref délai à Madagascar des représenttmts de variétés de quinquina aussi amé- liorées, je ne pense pas quil serait avantageux de demander au Jardin Golonial de nous en expédier dès maintenant. Il résulte, en eiïet, d'observations auxquelles a donné lieu, en sep- tembre dernier, le transport d'une grande quantité de plantes éco- nomiques de Marseille à Tamatave, que les quinquinas doivent être classés parmi les espèces qui supportent le moins facilement les longues traversées. Les chances d'insuccès sont surtout grandes pour les très jeunes cinchonas, dont la tige est encore entièrement herbacée. Il est donc prudent, pour éviter de trop grandes pertes, de n'expédier que des plants n'ayant pas moins d'un an et demi à deux ans. Les quinquinas souffrent beaucoup des températures très élevées, aussi est-il indispensable, pour ce qui concerne Madagascar, de s'ef- forcer de ne pas leur faire passer la mer Rouge au moment le plus chaud de l'année et de réduire la durée de la traversée au minimum, en leur faisant quitter Marseille par les courriers qui vont directe- ment de Djibouti à Diégo-Suarez. En résumé, la station d'essais de Nanisana possède à l'heure actuelle une cinquantaine de quinquinas originaires de Bourbon, dont plusieurs ne tarderont pas à donner des graines et 50 plants de Ginchona ledgeriana. Un assez grand nombre de fleurs, apparues à la fin du dernier hivernage, ayant formé des fruits encore incom- plètement mûrs en ce moment, le Service de l'Agriculture pourra, sans doute, commencer d'ici peu à mettre de jeunes pieds de cin- chonas en distribution. 202 ÉTlDi;S H|- MÉMOIHES La colonie pourra en outre obtenir du Jardin Colonial au moment le plus favorable l'envoi d'une partie des plants sélectionnés prove- nant des exemplaires rapportés l'année dernière de Java. On peut donc assurer que les efforts du Service de l'Agriculture, pour intro- duire ce précieux arbuste à Madagascar, n'ont pas été infructueux, et espérer qu'à une époque assez rapprochée la Station de Nanisana sera en mesure de tenter un premier essai de culture avec des quinquinas aussi améliorés que ceux que Ton rencontre dans la plu- part des plantations de Java. 2" RÉGIONS DE MADAGASCAR OU LA CULTURE DU QUINQUINA EST SUSCEPTIBLE* DE RÉUSSIR Bien des points de Madagciscar conviennent au quinquina sous le rapport du climat. La plus grande partie du versant est, située au- dessus d'environ sept cents mètres d'altitude, est dans ce cas, mais la médiocrité de la plupart des terres de File nous amène à faire un choix dans cette immense région et réduit dans une forte propor- tion l'étendue des terrains où l'on peut espérer voir réussir cette culture. Le remarquable travail de MM. Muntz etRousseaux sur la valeur agricole de Madagascar nous permet de faire approximativement une première sélection et de signaler les points suivants comme étant d'après ce que Ton sait jusqu'à ce jour ceux qui paraissent les plus convenables pour les quinquinas. 1° Montagne d'Ambre. Le massif d'Ambre, situé à peu de distance d'Antsirane, chef- lieu de la province de Diégo-Suarez, comprend des terrains de cul- ture situés à près de 1 .000 mètres d'altitude, dont la composition chi- mi((ue paraît olfrir, d'après les analyses données ci-après, un fonds de fertilité suffisante pour le quincjuina. Échantillon n° 22. Montagne d'Ambre. Lieu de prise situé à 000 mètres d'altitude, à environ 37 kilomètres de Diégo-Suarez et à 150 mètres au sud de la demeure de M. Grandin. Toute la région se compose à peu près du même terrain. L'échantillon ne renfermait pas de cailloux. LK QUINQUINA A MADAGASCAR 203 1.000 de terre contiennent : Azote 2,22 Acide phosphorique 7,97 Potasse 0,44 Carbonate de chaux 0,30 Cette terre a l'aspect d'une terre arable très foncée; elle est très dure après dessiccation. Elle est riche en humus et en azote, extrê- mement riche en acide phosphorique, mais pauvre en potasse. Elle offre cependant des ressources assez grandes à la culture. La rég-ion de Sakaramy, également située sur la montagne d'Ambre, présente des terres de meilleure qualité que la précé- dente, principalement sous le rapport de la teneur en potasse, mais cette zone est constamment balayée par des vents violents ; l'altitude de Sakaramy ne paraît pas suffisante, pour permettre d'y planter le quinquina. 2" Région dAmbatondrazaka. La région d'Ambatondrazaka est signalée, d'après les analyses exécutées dans les laboratoires de l'Institut national agronomique, comme une des plus fertiles de l'île. Cette contrée, qui sera visitée par un agent de la direction de l'Agriculture avant la fin de 1901, offre des terres d'une grande ferti- lité, notamment aux environs d'imérimandroso, à peu de distance du lac Alaotra et dans le voisinage d'Ambatondrazaka, comme il est facile de s'en rendre compte par les analyses reproduites ci-dessous, extraites de l'étude de M, Muntz. Échantillon n" 81. Lieu de prise sur le plateau qui domine le village d'imériman- droso. Altitude 880 mètres. Plateau d'environ 2.000 hectares k l'est du lac Alaotra. L'échantillon renfermait pour 1 .000 de terre : Terre fine 82,80 Cailloux 17,20 (siliceux) 204 ÉTIDKS ET MÉMOIRES 1000 de terre contiennent : Terre fine Terre brute Azote 2,49 2,06 Acide phosphorique 15,06 12,97 Potasse 4,90 4,06 Carbonate de chaux 12,00 9,94 Cette terre a l'aspect d'une terre arable, elle est légèrement friable après dessiccation, elle contient beaucoup dhumus. d'azote et de potasse, elle offre une richesse exceptionnelle en acide phos- phorique. Cette terre est abondamment pourvue d'éléments de fer- tilité et doit se prêter à une culture très intensive. Échantillon n" 77. Lieu de prise à 250 mètres de Mangalaza au nord-est d'Amba- tondrazaka. Altitude 800 mètres. L'échantillon renfermait pour 1.000 de terre : Terre fine 953,0 Cailloux 47,0 (siliceux). 1.000 de terre contiennent : Terre fine Terre brute Azote 0,79 0,75 Acide phosphorique 1,37 1,30 Potasse 4,34 4,14 ' Carbonate de chaux 2,20 2,10 Cette terre jaunâtre, ocreuse, lég-èrement micacée, est dure après dessiccation ; elle contient sensiblement d'humus et d'azote ; elle est riche en potasse. Elle olfre un bon fonds de fertilité. 3" Région de Moramanga. Un certain nombre de points de l'ancien cercle de Moramanjj^a paraissent présenter un fonds de fertilité suffisant, pour justilier un essai de culture du quinquina. Ce sont les environs des villages d'Amboissary, d'Ambalombe, d'Ambilona et de Sabotsy, tous situés à environ 1 .000 mètres d'altitude. LE QUINQUINA A MADAGASCAR 20o Les analyses exécutées sous la direction de M. le professeur Muntz ont donné les résultats suivants. Echantillon n° 09 (Amboasary). Altitude 1.050 mètres. Lieu de prise à flanc de coteau. Terrain herbeux. L'échantillon renfermait pour 1000 de terre : Terre fine 948,0 Cailloux 52,0 (siliceux). 1.000 de terre contiennent : Terre fine Terre brute Azote 1,06 1,00 Acide phosphorique 7,66 7,55 Potasse 0,68 0,64 Carbonate de chaux 1,30 1,23 Cette terre a l'aspect d'une terre arable, elle est friable après des- siccation. Elle contient sensiblement d'humus, d'azote et de potasse et une quantité extraordinairement élevée d'acide phosphorique. Elle offre un bon fonds de fertilité. Echantillon n" 88 (Ambilombe). Altitude 1.050 mètres. Etendue approximative 10.000 hectares. Lieu de prise k flanc de coteau. L'échantillon renfermait pour 1.000 de terre : Terre fine 940,00 (siliceux). Cailloux 60,00 1.000 de terre contiennent : Terre fine Terre brute Azote 1,14 1,07 Acide phosphorique 7,99 7,50 Potasse 0,51 0,48 Carbonate de chaux 0,80 0,75 :iOl) En DES El MlbiniHES Cette terre a l'aspect d'une terre arable, elle est friable après des- siccation. Elle est sensiblement riclie en humus, extrêmement riche en acide phosphorique, peu riche en potasse. Elle est susceptible de donner une terre de culture de bonne fertilité. Echantillon n" 1)8 (Ambilona). Altitude 1.000 mètres. L'échantillon ne renfermait pas de cailloux. 1 .000 de terre contiennent : Azote 2,4.3 Acide phosphorique 1,91 Potasse 1,77 Carbonate de chaux 0,70 Cette terre a l'aspect d'une terre arable, elle est dure après des- siccation. Elle est riche en humus, en azote, en acide phosphorique et en potasse. Elle constitue un sol bien pourvu d'éléments ferti- lisants. Échantillon n° 97. Lieu de prise à Sabotsy au pied des collines, à 700 mètres du poste. Altitude 1.000 mètres. L'échantillon renfermait pour 1.000 de terre : Terre fine 84,80 Cailloux 15,20 (siliceux). 1.000 de terre contiennent : Terre fine Terre brute Azote 0,46 ' 0.39 Acide phosphorique 14,85 12,59 Potasse 5,41 4,59 Carbonate de chaux 7,70 6,53 Cette terre a l'aspect d'une terre arable jaunâtre et micacée, elle est friable après dessiccation. Elle est pauvre en humus et en azote, mais par contre extrême- ment riche en acide phosphorique et très riche aussi en potasse ; elle contient sensiblement de chaux. Elle ollre de grandes ressources et elle est susceptible de devenir extrêmement fertile, si la culture LE QUINQUINA A MADAGASCAR 207 OU des apports de fumiers apportent rélément humique et azoté qui y est peu abondant. 5<* Province de Betafo. La province de Betafo, considérée depuis long'temps comme une des rég-ions les plus fertiles d'Emyrne, renferme, en effet, d'après les analyses de M. Muntz, des terres où le quinquina a des chances de réussite, principalement à l'ouest du district de laromalaza, près du villag-e de Maharivo et aux environs d'Antsirabe ; mais il est possible que le climat de cette région, encore imparfaitement connue à Theure actuelle, soit un peu froid pour les cinchonas. Échantillon n° 27. Lieu de prise situé à l'ouest du district de laromalaza. Altitude 1.330 mètres. L'échantillon ne renfermait pas de cailloux. 1.000 de terre contiennent : Azote 6,11 Acide phosphorique 6,98 Potasse 1,44 Carbonate de chaux 30,00 Cette terre, noire, très humifère, est très friable après dessiccation. Elle est extrêmement riche en azote et en acide phosphorique, riche aussi en potasse et en carbonate de chaux. Elle est bien le type des bonnes terres de culture maraîchère absorbant de grandes quantités d'eau, et se prêtant aux cultures les plus intensives. Échantillon n» 28. Lieu de prise à flanc de coteau, au nord-est du village de Maha- rivo. Altitude : 1.350 mètres. L'échantillonne contenait pas de cailloux, 1.000 de terre renfermaient : Azote 3,67 Acide phosphorique 1,53 Potasse 0,51 Carbonate de chaux 10,00 Cette terre ocreuse et d'un brun très foncé est très friable après dessiccation, elle est très riche en humus et en azote, riche en acide 208 ÉTUDES ET MÉMOIRES pliosphorique, peu riche en potasse ; elle contient sensiblement de carbonate de chaux. Elle doit être regardée comme une terre de bonne production. Echantillon n" 'M. Lieu de prise à Morafeno, aux environs d'Antsirabe. Altitude d'environ 1.300 mètres. L'échantillon renfermait pour 1.000 de terre : Terre fine 993,8 Cailloux 6,2 LOOO de terre contiennent : Terre fine Terre brute Azote 0,11 5,08 Acide phosphorique 3,07 3,05 Potasse 0,59 0,58 Carbonate de chaux 0,30 0,29 Cette terre foncée est très riche en humus et en azote, de même qu'en acide phosphorique, peu riche en potasse et en calcaire. Elle pourrait devenir très fertile par l'apport d'engrais potassiques et surtout par le chaulag-e. Ces indications ne suffisent pas pour délimiter, même d'une manière approximative, les zones où le quinquina pourrait être planté avec profit dans la colonie, mais elles permettent de montrer qu'il y a à Madagascar des localités où il existe, selon toute proba- bilité, des terrains d'une étendue relativement considérable offrant un fonds de fertilité suffisant pour cet arbuste. Il ne faudrait pas croire non plus que les endroits convenables se trouvent exactement là où ont été prélevés les échantillons, dont la composition chimi([ue a été donnée plus haut. Ces renseigne- ments permettent simplement de prévoir qu'il existe dans le voisi- nage de ces points des emplacements remplissant toutes les conditions exigées. Remarquons enfin que les localités signalées dans cette étude, comme convenant au (juinquina, ne désignent (ju'une petite partie des régions où cet arbuste pourrait être essayé. Les renseignements recueillis jusqu'à ce jour sont encore insuffisants pour me permettre LE QUINQUINA A MADAGASCAR 209 d'être plus précis et plus complet sur ce point, mais les voyages d'études exécutés chaque année, par les agents de la direction de l'Agriculture permettront de compléter et de rectifier peu à peu ces premières indications et de définir, d'une manière plus précise, les limites des zones culturales de chaque plante i. 3<> AVENIR DE LA CULTURE DU QUINQUINA A MADAGASCAR L'étude de la mise en valeur par l'Agriculture d'un pays neuf aussi vaste que Madagascar doit s'étendre à toutes les plantes cultivables, pouvant y trouver le climat et le sol qui conviennent à leur développement. La plupart de ces cultures ne peuvent donner lieu, si on les prend une à une, à un mouvement commercial assez important, pour qu'une seule d'entre elles soit en mesure d'assurer la prospérité agricole d'une grande colonie ; mais, comme elles peuvent par leur ensemble, ou jointes à d'autres plantations plus importantes, telles que celle du thé, donner plus de régularité et de stabilité aux entre- prises culturales, on ne doit pas négliger, surtout au début, d'en favoriser l'extension, ou tout au moins d'en répandre le plus pos- sible toutes les plantes cultivables afin de trouver sur place, au moment opportun, toutes les graines ou boutures nécessaires à la création de grandes plantations. Le quinquina est dans ce cas. Il n'est guère probable qu'il pren- dra à Madagascar un développement aussi considérable qu'à Java ou aux Indes, mais il ne faut pas oublier que la France achète tous les ans près de 500.000 kilogrammes d'écorces à l'étranger, dont elle tire plus de 18 tonnes de sulfate de quinine et qu'il serait à désirer que ces achats fussent faits dans une colonie française. Ce premier débouché est amplement suffisant pour lancer cette culture dont les produits pourront peut-être prendre par la suite une place avantageuse, sur les marchés de Londres et d'Amster- dam. Il est donc important que le Service de l'Agriculture se mette en mesure de fournir, aussi prochainement que possible, les plants de cinchonas améliorés, nécessaires à la création d'une exploitation de 1. 11 résulte de renseignements parvenus tout récemment à la direction de l'Agri- culture que la région s'étendant depuis Béparasy jusqu'à Ambohimilanya renferme très probablement des terres pouvant convenir au quinquina. Bulletin du Jardin colonial. , . 14 21(1 KTIDES liT MÉMOIRES ce g'enre ot qu'il installe ;iii hcsoin, dans une des rog'ions conve- nant au quin(|uina, une petite plantation d'essai où seraient mises en pratique les méthodes culturales en usa^e à Java. Il se pourrait très bien que la culture des cinchonas prenne une extension relativement considérable à Madagascar, car si les prix se maintiennent aussi élevés qu'en 1898 et 1891), il serait à conseiller dans ce cas, comme on l'a vu précédemment, de procéder sur place à l'extraction des sels de (juinine. Les plantations de l'île trouve- raient alors un premier débouché d'une certaine importance auprès de l'administration locale, dont la consommation en sels de qui- nine et autres médicaments à l^ase de quincpiina peut être évaluée pour 1900 à environ 12.000 kilog-rammes d'écorce sèche à o °/o d'alca- loïdes, d'après les renseig-nements fournis par M. Kerebel, phar- macien principal des colonies. Elles pourraient également fournir à tout le Sud africain, ainsi qu'aux colonies européennes des côtes orientale et occidentale d'Afrique, la majeure partie de la qui- nine nécessaire à leur consommation. E. Prud'homme. NOTES RECHEliCHE ET DOSAGE DE LA CAFÉINE DANS PLUSIEURS ESPÈCES DE CAFÉ Dans un mémoire publié l'année dernière', j'ai montré que Coffea HiinihJotiana Bâillon, orig-inaire de la Grande Comore, ne contenait pas trace de caféine. Or, on sait que cet alcaloïde, auquel on attri- bue la propriété excitante du café, s'est rencontré jusqu'ici dans toutes les analyses, k la dose moyenne de un pour cent. Malgré ce qu'on pourrait croire tout d'abord, l'absence de caféine dans le Coffea Huinhlotiana n'est due ni au sol, ni au climat de la Grande Comore. J'ai analysé, en elfet, des graines de Coffea ara- bica L., cultivé dans la même île, et j'y ai trouvé une quantité normale d'alcaloïde (exactement 1.34 "/„). Ce caractère inattendu du Coffea Huinhlotiana est non seulement fort intéressant au point de vue de la physiolog-ie vég-étale — j'en ai fait ressortir les conséquences dans le mémoire précité — mais il laisse entrevoir une application qui peut devenir importante. Il existe, en effet, un nombre considérable de consommateurs de café qui ne peuvent satisfaire leur besoin autrement que dans la journée ; le soir, ils sont tenus de s'abstenir, à cause de l'insomnie. D'autres, ég-alement très nombreux, sont même, par suite d'une affection plus sérieuse, complètement privés de l'usag-e du café. Or, on pourrait peut-être, à laide d'une espèce de Coffea, exempte de caféine, satisfaire le désir des uns et des autres, sans crainte d'in- convénient ou de danger. Mais il faudrait pour cela que le Café en question, une fois tor- réfié, donne une infusion dont la saveur et le parfum ne s'éloig-nent pas de ceux auxquels on est habitué. Malheureusement, comme je l'ai déjà fait remarquer, les g-raines du Coffea Humhlotiana ren- ferment une substance amère, la cafamarine, dont on ne peut les 1. Comptes rendus de T Académie des Sciences; vjjjir aussi : liuUeiin de la Société chimique. 3' sér., t. XXV, p. 379-381. ■2\2 NOTES débarrasser entièrement par la torréfaction. Il en résulte que leu infusion possède une saveur assez désag-réable, ([u'on ne saurait imposer à un consommateur. On pourrait sans doute, par des procédés de culture convenables, atténuer et même faire disparaître ce défaut; néanmoins, j'ai pensé qu'un examen général de tous les cafés qu'on pourrait se procurer permettrait peut-être de résoudre plus rapidement le problème, en mettant en évidence de nouvelles espèces, exemptes de caféine ou du moins très pauvre de cet alcaloïde. Grâce au bienveillant concours du Directeur du Jardin Colonial, j'ai pu entreprendre ce travail. Les résultats, qu'on trouvera plus loin, ont été obtenus par l'analyse de 18 espèces, variétés ou sortes de café, coUationnés et mis à ma dispo- sition par M. Dybowski. J'y ai joint ceux que j'ai obtenus, en étu- diant 4 échantillons authentiques, appartenant à 3 espèces de café, que j'avais pu me procurer d'autre part. Nom des Espèces Lieux d'oriifine Eau a Il 110» Cendres Azote total Caféine CofTea arabica — — (var. Moka) — — (variété pelil Moka) ColTea libcrica ColTea Cancphora (^ud'ca laui'ina. Coll'ea Conjijensis Collca Slenophylla (^oITca maui'itiana CdlTca Iliimbloliana Café (Ai/.cngo ' Guinée Française Abyssinie Tahiti 11.60 11.00 12.20 12.07 11.82 1 1 . SO I 2 . 00 I I . 92 10.65 10.15 9.71 1 1 . 20 11.50 Il .75 12.05 11.25 10. SO 1 1 . SO 9 . :u) I 2 . SO 11.61 I I . 20 1.35 1 . 65 1.30 3.50 3.57 1.00 3.75 4.27 3.90 3.90 3.66 5.00 3.75 1.05 1.15 1.10 1.05 1.30 1 . 35 3.27 2.S0 3.65 2.30 1.97 2.05 1.85 2.05 1 .67 2.10 i .,S5 1 .90 2.10 1 .95 2.37 2.05 2 . 20 2.07 2 . 00 2 . 00 2.10 3.70 1 . 15 1.50 2.15 1.60 1.01 1 .07 0.75 1 ,00 0 . S3 1 . 20 0,69 1.01 1.10 1 .31 1. 15 1 .06 1 .37 1 .97 0.63 1.19 1.52 1.70 0.07 0.00 1 . 85 Tonkin Nouvelle Calédonie . . . Guadeloupe Nouvelle Calédonie. . . Indes françaises Gi'ande Coniore .Java Confio Français MadajA'ascar d Congo Français Nouvelle (Calédonie... Congo Français (ïuinée Française Soudan Guinée Française Grande Coniorc Congo Français 1. J'ai examiné une autre sorte de café, dit Cazengo, mais dfint. mallieureusemcnt, l'origine est douteuse. Il m'avait été donné par M. Tassiliy eoninie exempt de calcine. A 1 analyse. j"y ai trouvé quelques rares erislaux, se enm[)orlant cnnimc la caféine, mais que je n'ai jm iiicidilier complèlcmcnl a\('c ri'i alcalnïdc, à cause delà Ircspelilé (pianlilé de maliérc dniil je disposais. Il s'agissait là, (;ii Inus cas, ti'unc sorte île café encore plus pau\i-o (jue le f-'o//(M nuinrilinmi. RECHERCHE ET DOSAGE DE LA CAFÉINE 213 Ces premiers résultats sont déjà intéressants. Ils montrent, d'une part, dans quelle proportion peut varier la teneur en caféine d'une espèce donnée, quand on cultive celle-ci dans des conditions très variées de sol et de climat. Le tableau renferme l'analyse de 11 sortes de Coffea arabica, provenant de divers points du globe où s'effectue cette culture. La caféine y varie de 0.86 à 1.60 °/o, c'est- à-dire juste du simple au double, le chiffre moyen étant 1.08 '. Ils montrent, d'autre part, les variations beaucoup plus considé- rables qui existent quand on passe d'une espèce à une autre. A côté du Coffea Humhlotiana, qui ne contient pas trace de caféine, on trouve le Coffea mauritiana, avec une teneur extraordinairement faible de 0.07 "/q. A l'autre extrémité de l'échelle, au contraire, le Coffea canephora atteint le chiffre remarquable de 1.97 °/o, c'est- à-dire renferme près de 20 grammes de caféine par kilog-. Enfin, au point de vue très spécial qui m'a engagea entreprendre le présent travail, ces résultats décèlent l'existence d'une espèce de café, le Coffea maaritiana^ si pauvre en caféine, qu'on peut la con- sidérer pratiquement comme dépourvue d'alcaloïde. Je ne sais pas encore comment se comporte cette espèce de café à la torréfaction, encore moins si elle est susceptible de fournir une infusion agréable ; mais il sera facile de s'en convraincre en disposant d'une quantité suffisante de graines. Si le but est atteint, ce sera le rôle du culti- vateur colonial d'améliorer, de multiplier et de mettre en valeur une sorte de café qui, j'en ai eu de nombreuses preuves, par les nom- breuses lettres de demande qui m'ont été adressées, de plusieurs pays, à la suite de ma communication sur le café de la Grande Comore, est vivement désirée. Gabriel Bertrand, Chef de service de chimie biologique à l'Institut Pasteur. 1. On a déjà publié d'assez nombreuses analyses de Coffea arabica : mais les dosages d'alcaloïdes ayant été efïectués par des méthodes différentes, ne sont pas toujours comparables. D'une manière générale cependant, il n'y a pas de divergence entre ces résultats et les miens. CULTURE DES SANSEVIEHA EXTRAIT D UN RAPPORT DE M. LE VICE-CONSUL DE FRANCE AU VENEZUELA Il résulte de mes investig^ations qu'un agriculteur de Caracas, M. S. J. Diaz Montijo, se rendant compte depuis plusieurs années des inconvénients de la culture exclusive du café et du cacao, a song-é à procurer à la République une autre source de revenus. Ses efforts se sont portés sur les plantes fibreuses de l'espèce dite « Sanseviera », il a établi à ses frais un champ d'expériences, mais jusqu'ici sa propagande n'a pas fait beaucoup d'adeptes et il s'est même trouvé des personnes qui l'ont combattue. Un de nos compatriotes, M. Frierdich, a partagé l'enthousiasme de M. Diaz Montijo, convaincu cependant que le Venezuela n'olfrait pas de suf- fisantes garanties à la propriété rurale, il s'est procuré 6.000 boutures de « Sanseviera » et rendu à la Martinique pour y poursuivre ses travaux. D'après M. Diaz Montijo, dont je vais rapporter ici l'opi- nion, les sortes de (( Sanseviera » sont nombreuses, mais la seule dont la culture doive être recommandée est la Sanseviera longi- fîora. La Sanseviera longifïora, originaire de l'Afrique équatoriale, appartient à la famille des liliacées. Ses feuilles sortent de terre sous la forme d'une langue verte, transversalement tachée de blanc, légèrement concave, d'environ cinq centimètres de lai'geur et d'une longueur qui, au bout de di.x-huit mois, atteint parfois deux mètres. Sa culture, des plus rustiques, peut se faire, à l'exception des endroits marécageux, dans n'importe quel terrain et n'ayant besoin d'aucun soin spécial, n'est par conséquent pas onéreuse. La reproduction s'opère soit par tubercules — les i-acines de la « Sanseviera » formant des tubercules après quehjue temps de cul- ture, — soit par boutures. Les boutures s'obtiennent de la façon suivante : on prend une feuille de « Sanseviera » d'une année envi- CULTURE DES SANSEVIERA 215 ron, on la coupe en morceaux de dix à douze centimètres, qu'on place sur le sol, à l'ombre, pour laisser aux coupures le temps de se cicatriser, après cinq à six jours, on enfonce ces morceaux de feuille, en pépinière, dans un terrain meuble suffisamment humide, le bout le plus larg-e hors de terre ; des racines ont bientôt poussé et les boutures ne tardent pas à être propres au repiquage. Celui-ci s'opère dans un terrain préalablement labouré, les bou- tures ou les tubercules étant placés à 2o centimètres d'écartement seulement, de façon que la « Sanseviera » poussant drue et com^ pacte, empêche la germination des herbes. Dix-huit mois après la plantation on peut procéder à une première coupe, les feuilles sont taillées à ras de terre. Si cette culture était faite sur une vaste étendue, on aurait la faculté d'échelonner la coupe par lots, de façon à travailler à la décoi-tication d'une manière continue, avec une main-d'œuvre peu nombreuse, la c Sanseviera » n'est pas en effet comme le café, le cacao, la canne à sucre, une plante dont la récolte doit être faite à une époque et dans des condi- tions déterminées. Au contraire de la ramie, la « Sanseviera » peut être décortiquée avec une g-rande facilité. M. Montijo ne possède à cet effet que des instruments rudimentaires, et les échantillons qu'il m'a remis sont la meilleure preuve des résultats obtenus. Il se borne à soumettre les feuilles vertes de <( Sanseviera » à un écrasement entre deux rouleaux métalliques juxtaposés et actionnés en sens inverse, puis à une macération dans l'eau pendant six jours, l'eau des récipients étant renouvelée au troisième. 11 n'y a plus alors qu'à séparer la matière charnue de la partie fibreuse, en frottant les feuilles sur une planche, avec un racloir quelconque, couteau large ou lame de bois émincé. Les fibres lavées et suspendues au soleil pendant trois heures peuvent être empaquetées dès que toute trace d'humidité a disparu. M. Diaz Montijo calcule qu'on obtiendrait dans de bonnes terres, tous les dix-huit mois et par mètre carré, 600 à 700 feuilles d'une longueur moyenne de 1 mètre à 1"^ 50, produisant de 3 kilog. 500 à 4 kilog. 50, soit à l'hectare 350 à 450 quintaux. En réduisant cette production de 50 °/o et en ne donnant à cette fibre qu'une valeur de 0 fr. 50 le kilo, on aurait un revenu brut de 17 à 22.500 francs à l'hectare, chiffre énorme si l'on pense : 1° que la « Sanseviera » n'a pas besoin de soins spéciaux ; 2" que pour la 216 NOTES décortication un homme produirait, avec les moyens rudimentaires indiqués plus haut, de 16 à 20 kilos de fibres par jour; 3° qu'un champ de « Sanseviera » n'aurait besoin d'être replanté qu'au bout de cinquante au-". Pour obtenir un semblable résultat, il importe toutefois de ne pas se tromper ou de ne pas être trompé dans le choix des boutures. C'est bien la Sansevira Longiflora qu'il faut cultiver et non pas de types analogues dont le rendement en fibres serait presque insigni- fiant : telle est la conclusion de M. Diaz Montijo. NOTE SUR LE PALMIER A SUCRE ARENGA SACCHARIFERA LahUl. En Cambodgien (Tlinot), Le palmier à sucre se rencontre en assez grande quantité au Cambodge, principalement dans la province de Kampot où son exploitation, au point de vue de la production du sucre indigène, présente une importance qui nous a paru suffisante pour en faire l'objet d'une étude spéciale. Le palmier à sucre qu'on rencontre au Cambodge (Thnot) appar- tient au genre Arenga, établi par Labillardière pendant son voyage à la recherche de Lapeyrouse, d'après un palmier des Moluques déjà figuré par Rumphius (vol. L pi. 13), mais dont les caractères n'étaient pas encore connus des botanistes. Loureiro le confondait dans le genre Borassus. Le nom d' Arenga lui a été donné par Labillardière en raison de la dénomination sous la([uelle il était vulgairement connu à Java- Areng. Ce même palmier, d'après Rumphius, serait désigné dans certaines îles de la Malaisie sous le nom de Gomuto, et plus habi- tuellement sous le nom portugais de Segueiro. Rumphius en a fait dériver le nom latin Seguerus, sous lequel il l'a décrit et figuré. Ce dernier nom, admis du reste par Roxburgh et Blum, devrait être logiquement conservé en raison de son antériorité scientifique; nous emploierons cependant celui d'Arenga, plus universellement adopté aujourd'hui. C'est à tort que les indigènes, se basant sur des apparences vraisemblables à première vue, mais dont un examen plus attentif révèle la fausseté, distinguent des individus mâles et des individus femelles^ sous les noms respectifs de Thnot-chlmol thnot-nhi. Leur erreur provient certainement de ce que leur ignorance ne leur per- met pas de constater les nombreux cas d'avortement qui se pro- duisent si souvent chez les plantes monoïques ; en réalité, l' Arenga saccharifera est monoïque. 218 NOTES La fleur niàle, petite, blanche, a uu réceptacle convexe, un périanthe à 2 verticelles trimères, rextérieur à 3 sépales courts, imbriqués, squammiformes, l'extérieur ;i 3 pétales alternes, avec les sépales, plus longs qu'eux, épais, coriaces, et valvaires dans le bouton, un androcée formé de 50-60 étamines, à filets courts, à anthères biloculaires, introrses, déhiscentes par deux fentes longi- tudinales surmontées du prolongement aigu et triangulaire du connectif. Dans la fleur femelle, on observe le même périanthe que dans la ileur mâle : un androcée rudimentaire hypogine quelquefois nul, un ovaire à 3 loges uniovulées, surmonté d'un style à branches stigmatifères et coniques. A ces fleurs succèdent des fruits ou drupes, accompagnés du périanthe, persistant au nombre de 8-10, assemblés de chaque côté des axes dans des alvéoles cupuliformes. Ces fruits arrivés à leur complet développement dépassent le volume du poing et atteignent le poids d'un kilo. Ils sont presque sphériques, bacciformes, sur- montés de 3 protubérances, à 3 loges monospermes au moins par avortement. Les graines sont convexes en dehors, déprimées du côté interne, avec un embryon latéral situé dans une cavité parti- culière. Elles renferment sous leurs téguments un albumen corné très abondant. L'inflorescence est constituée par une panicule lâche, enveloppée dans des spathes, et située au sommet de la tige, dans l'intervalle des feuilles. Elle se compose d'un axe commun ou spadice, ramifié en 0-7 divisions secondaires, cylindriques, écailleuses, longues cha- cune de 30 à 40 centimètres. Elles ne supportent habituellement que des fleurs d'un' seul sexe : les mâles groupées par 2 au niveau des coussinets des axes, et séparées par une fleur femelle avortée ; les femelles acconq)agnées de 2 bractéoles latérales : c'est sans doute cette disposition particulière des fleurs qui provoque l'erreur des indigènes et les incite à regarder ce palmier comme dioïque. Le tronc est un stipe épais, solide, droit, portant, surtout à sa partie inférieure, la trace des cicatrices du pétiole engainant des feuilles tombées. Il s'élève à 15-20 mètres de hauteur, et c'est à tort que Léveillé, dans son Histoire des Pnhniors^ assure qu'il atteint à peine 12 mètres. Au sommet s'épanouit un majestueux bouquet de feuilles compo- sées, pennées, à digitations nombreuses, dentelées h leur partie NOTE SUR LE PALMIER A SUCRE 219 supérieui'e, s'étalant en un larg-e éventail, déplus d'un mètre de dia- mètre, supportées par un robuste pétiole canaliculé engainant à sa base . L'Areng-a Saccharifera, connu dans certaines contrées, par les Européens, sous le nom de (c palmier candiar », est originaire des Moluques et des Philippines d'où il a été introduit dans les parties chaudes de l'Asie. 11 a de nombreux usages : des fibrilles qui garnissent le stipe, on fait de grossiers cordages, mais d'une grande résistance; du tissu celluUaire de son tronc on retire une fécule alimentaire, espèce de sagou, et de ses spadices incisés s'écoule une grande quantité de liquide sucré, dont on fait une boisson appelée « vin de Saguère », Après fermentation, on en retire également de l'alcool. Le fruit vert, confît au sucre, passe pour stomachique pectoral et fortifiant ; à l'état frais, il contient une sève caustique qui, mise en contact avec les muqueuses, y cause des démangeaisons insup- portables et en provoque l'inflammation. L'eau dans laquelle on a fait infuser ces 'ruits verts a quelquefois servi, dit-on, d'arme défen- sive aux habitants des Moluques qui la lançaient sur leurs assail- lants ; elle était nommée par les Européens « Eau infernale ». Les Cam])odgiens distinguent plusieurs variétés de palmier à sucre, distinctions basées sur le plus ou moins de grosseur des fruits, sur leur coloration, les uns restant verts à maturité, d'autres prenant alors une teinte brun foncé presque noir, comme pruinés. Ces variétés, qui sont également estimées au point de vue de la produc- tion du sucre, ne paraissent pas présenter d'intérêt au point de vue botanique. De même, sous le rapport du rendement, les indigènes ne seml)lent pas établir de différence entre les individus portant des fruits et les sujets stériles qu'ils exploitent également, les premiers sous le nom de « Thnot-nhi », les seconds sous celui de « Thnod- chmôl ». L'intérêt pi-incipal que présente ce genre de palmier réside dans le liquide sucré qu'on en retire pour obtenir ensuite, par simple évaporation à chaud, un sucre grossier ou plutôt une mélasse, d'un usage courant chez les indigènes. Nous nous étendrons donc sur les mo} ens pratiqués en vue de cette récolte et nous indiquerons minu- tieusement les procédés préparatoires usités, tels que nous les avons vu employer dans la province de Kampot. L'^arbre commence généralement à être exploité à l'âge de 8-10 220 NOTES ans ; à ce moment, il a environ 7-8 mètres de haut et peut donner déjà, s'il est dans un sol convenable, une récolte presque aussi abondante qu'un arbre plus âgé. Signalons en passant une erreur de Léveillé, Histoire des Pal- miers, qui prétend que ce palmier ne fructifie c[u\ine seule' fois, et périt aussitôt; on rencontre partout des sujets àg-és de 25 à 30 ans et davantag-e, qui chaque année donnent des fleurs ou des fruits. La récolte se fait dans les premiers jours de novembre, pour se continuer jusqu'en avril, intervalle de temps qui correspond à la période de la saison sèche. C'est des axes secondaires qui supportent les fleurs, situées, comme on le sait, au sommet de l'arbre, que découle la liqueur sucrée. Pour y atteindre, les indig-ènes emploient de longs bambous auxquels ils laissent alternativement, à droite et à g-auche, de courts tronçons des ramifications latérales, formant ainsi une échelle de perroquet. Ces bambous sont appliqués le long- du stipe, maintenus par de solides liens de rotin. Dès que les fleurs apparaissent, il est temps de procéder aux soins minutieux qui précèdent la récolte, et dont dépend en partie sa plus ou moins grande abondance. L'axe principal de l'inflorescence est fendu en deux, et Ion supprime les divisions secondaires ou ramifications les plus rappro- chées de sa base, en ne conservant que les 4 divisions de l'extré- mité. L'axe est ainsi fendu pour permettre de rassembler plus facilement les 4 divisions réservées, qui devront plus tard laisser écouler leur suc dans un même bambou creux servant d'engin collecteur. L'extrémité des 4 divisions conservées est alors coupée, et à Laide de deux morceaux de bois plats maintenus réunis à un bout et libres de l'autre, on exerce sur chacune des ramifications, prises isolément entre les deux morceaux de bois formant pince, des pressions successives et répétées, qui ont pour but de désorganiser les tissus et de permettre un écoulement plus facile du liquide. Ce travail doit se renouveler matin et soir, pendant 4-() jours environ, jusqu'à ce que le li({uide commence à s'écouler, en ayant soin chaque jour de renouveler la section des extrémités. Le cinquième ou le sixième jour, on suspend sous l'inflorescence un entre-nœud de bambou, d'une contenance de 1 litre à 1 litre et demi environ, plein d'eau, dans laquelle on fait trenq)er l'extrémité NOTE SUR LE PALMIER A SUCRE 221 des i ramifications réunies, préalablement attendries par pression. Après 48 heures, le récipient est retiré, l'eau en est jetée, et les ramifications sont encore soumises à de nouvelles pressions, matin et soir, pendant 2 jours. Là se terminent les travaux préparatoires, il n'y a plus qu'à procéder à la récolte proprement dite. Chaque soir, on réunit les extrémités des 4 ramifications dans le récipient de bambovi, préalablement passé à la fumée de bois vert, pour éviter la fermentation ; le lendemain matin, le récipient est retiré plus ou moins plein du liquide qui s'est écoulé pendant la nuit. L'on procède de même les jours suivants, en aj'ant soin chaque fois d'enfumer le récipient et de renouveler les sections des extré- mités pour éviter la cicatrisation, mais sans exercer de pressions comme précédemment. La récolte n est pas très abondante au début : mais vers le dixième jour elle atteint 1 litre à 1 litre et demi par inflores- cence et par nuit, et peut ainsi se continuer pendant plusieurs mois^ La quantité de liquide écoulé dépend beaucoup du plus ou moins de soins apportés aux travaux préparatoires ; les arbres qui chaque année sont traités normalement paraissent donner un liquide plus copieux que ceux qui ne sont pas annuellement exploités. Chaque arbre donne 4-5 inflorescences par an, quelques-uns en portent jusqu'à 10, qui toutes peuvent subir simultanément le même traitement. Le liquide récolté chaque matin doit être immédiatement traité en vue de sa conversion en sucre, on le verse dans de g^randes bas- sines de métal où il est soumis à une ébullition de 3 heures. Les indig-ènes y ajoutent une petite quantité de son de riz, dont la pré- sence, suivant eux, favoriserait la cristallisation. La masse est vig-oureusement brassée et coulée enfin dans des pots en terre. Là le sirop durcit par refroidissement et donne un produit de couleur brun foncé, d'une saveur agréable et très sucrée, mais trop mélang-é d'impuretés et dans lequel se retrouve l'odeur de la fumée dont les bambous ont été imprégnés à dessein. Tel quel, ce sucre est très recherché par les indigènes et sa valeur sur les marchés est de 18 à 20 cens le kilog., environ 35 à 40 centimes de notre monnaie. 11 est à reg-retter que la culture de l'Areng-a saccharifera ne prenne pas plus d'extension au Cambodge, où l'on paraît se contenter de 222 NOTES l'exploitation des sujets anciennement plantés, existant V'< et là clans la campag^ne; les individus jeunes, intentionnellement multipliés, y sont rares, et nulle part je n'ai rencontré de plantations proprement dites. Cette culture devrait être d'autant plus préconisée que l'arbre est rustique et s'accommode du plus mauvais terrain. 11 pousse particu- lièrement bien dans les sols sablonneux d'alluvion récente, encore imprég'nés de sel si commun dans le Bas-Cambodge, et résiste par- faitement, sans soins, à la privation à peu près complète d'eau pen- dant les six mois delà saison sèche. Sans avoir pour l'eau salée la prédilection marquée du cocotier, le palmier à sucre végète norma- lement dans les sables salés, impropres à toute autre culture, et il n'est pas rare de rencontrer des sujets dont les racines baignent pendant plusieurs mois de l'année dans Feau saumàtre que le flux ramène à chaque marée dans les cours d'eau intérieurs. Cette culture mériterait d'être encouragée, mais il est à désirer que les procédés de saccharification par trop primitifs employés par les indigènes soient l'objet d'améliorations. En ell'et, le liquide sucré découlant de l'arbre renferme, en plus de sels organiques de potasse et de soude, une ({uantité considérable d'albumine végétale dont la présence est un obstacle à la cristalli- sation. Pour obvier à cet inconvénient, et sans vouloir apporter aucune complication à l'outillage indigène, il conviendrait, croyons- nous, de préconiser la méthode suivante : le jus est porté rapide- ment à 70" environ, et aussitôt retiré du feu ; on y ajoute alors o grammes de chaux en poudre par litre de liquide, et un vigou- reux brassage est eifectué pour assurer le mélange, après quoi on remet sur le feu, et on chauffe jusqu'à l'ébullition. Aussitôt que celle-ci se manifeste, on cesse le feu, on enlève les écumes et on laisse reposer quelques heures. On décante alors le jus clair, qui est remis dans le bassin et évaporé comme à l'ordinaire à feu aussi doux que possible. Il est bien entendu que nous ne donnons les doses ci-dessus, relatives à la chaux, qu'à titre d'indications, la ])ratique et quelques essais bien conduits pouvant seuls fournir des données plus exactes. Lo'is BOUILLOD. ÉTUDE DE LA GRAINE DE L'IRWINGIA OLIVERII La famille des Rutacées, dont un représentant, V Invimiia Gaho- ncnsis^ fournit déjà le beurre de Dika, possède en Cochinchine un autre représentant dénommé Cay-Cai/ par les indigènes et, plus scientifiquement, Inviiu/ia Oliverii. Cet arbre fournit une g^raine de la grosseur d une petite prune, oblongue, en forme d'amande et constituée par une coque épaisse de plusieurs millimètres, assez dure et fibreuse, renfermant une amande blanche susceptible de donner une matière grasse. Graine. — 100 kilog. de la graine brute donnent en moyenne 13 k. 72 d'amande contre 86 k. 3 de coque, proportion désavan- tageuse, l'amande étant le seul produit utile. En el'et, la composi- tion chimique de la coque est au point de vue de l'analyse élémen- taire : Azote 0.39 Vo Acide phosphorique 0.10 Potasse 0.13 Tandis que celle de Tamande est : Matières azotées 12.56 7o Azote 2.01 » grasses 58 . 40 Acide phosphorique. . 0.48 » hydrocarbo- nées 14 Potasse 0.76 Cellulose 6.28 Gendres 2 . 24 Eau 6.52 Malheureusement, la matière grasse ne représente réellement que 8 7o environ du poids de la graine brute, rendement extrême- ment faible. 224 NOTES Tourteau. — Le tourteau des graines débarrassées entièrement de leur huile aura pour composition : Matières azotées 30.1 9 °/o » hjdrocarbo - nées 33.65 Azote 4 . 83 "/o Cellulose lo.lO Acide phosphorique. 1.15 Cendres 5.38 Potasse 1 . 59 Eau 1 5 . 68 Cette composition nofîre rien d'anormal relativement aux tour- teaux les plus usuels. Elle se rapproche plutôt de celle du tourteau de colza. Sa valeur comme engrais serait de 8 à 9 fr. les 100 kil. Mais, il ne faut pas oublier que 100 kil. de graines ne donnent que 5 k. 7 de ce tourteau. Le déchet de beaucoup le plus considérable formé par la coque n'ayant guère, au point de vue engrais, qu'une valeur d'environ 70 c. les 100 kil. L'écorce est donc négligeable, l'amande seule utilisable. Nous sommes autorisés à penser que son tourteau pourrait être utilisé dans l'alimentation du bétail, par analogie avec les espèces comestibles voisines du genre Irwingia. Nous avons donc établi que 100 kilos de graines fournissent : Ecorce. ... 86.3 . , j o - ( tourteau ... 5.7 Amande. . . lo. / ^ , ., „ ( huile. ..... o Huile. — Voyons maintenant quelle est la nature de cette huile. La matière grasse extraite des graines à' Imùngia Oliverii se pré- sente sous la forme d'un suif végétal de couleur grisâtre blanchis- sant en vieillissant et se débarrassant en même temps de l'odeur un peu forte qu il possédait. Il est de consistance solide, onctueux au toucher, s'écaillant légèrement en lamelles semblables à l'acide borique. Ses principaux caractères chimiques sont les suivants : Densité 036 Rancidié 8.5 Saturation 22.8 Acides gras libres .... 6. 66% Indice d'iode 3.5 Huile 93.32 Solidification des acides gras 3306 Glycérine 12.22 Fusion des acides gras 35" Rendement en acides gras 95 GRAINE DE l'iRVVINGIA OLIVERII 225 Fusion de la matière grasse 38° 5 \ i ( concrets 94 Action de Azo^ Ag . . . rien ° ' ( fluides. . 6 » HCl sucre. rien Indice de Reichert Meinl 1.7 Point de fusion des acides concrets 36° On voit que ce produit ne ressemble guère aux huiles usuelles, même concrètes. Elle se rapproche plutôt du genre palmiste et coprah par sa saturation élevée, son indice d'iode faible et aussi par les propriétés de son savon de soude. Elle est, pour ainsi dire, plus concrète encore que ces liuiles, puisque son point de fusion, son titre sont plus élevés, et la proportion d'acides gras liquides et volatils plus faible. Les acides présentent une saturation de 22.8 correspondant à un poids moléculaire de 219,3. Ceci nous permet de déduire la composition probable des acides gras. Acides caprylique et inférieurs ... 0.5°/ » oléique 5 » laurique 39 •) myristique 55.5 La très faible proportion d'acides non saturés explique l'indice d'iode de cette huile. Cet indice est le premier observé dont la valeur soit aussi faible. Etant donné cet indice très faible et la saturation assez forte, cette huile se prêterait admirablement à falsifier les huiles de graines. Par exemple, un mélange de 79.5 °/o de colza épuré avec 20.5 Irwingia présente toutes les propriétés principales de J'huile d'olive. Le savon que forme cette huile avec la soude est blanc, de con- sistance très ferme et moussant abondamment. Il se dissout très facilement dans l'eau, présente en un mot une grande analogie avec le savon de coprah, avec une dureté plus grande. Le beurre d'Irwingia aurait donc en savonnerie les mêmes applications que celui de coco, n'était son prix. Quant à son emploi en stéarinerie, malgré l'exemple des indigènes de Cochinchine qui en font des chandelles, il nous paraît qu'il ne saurait être que d'un emploi restreint, étant donné le titre peu élevé en somme de ses acides gras. Bulletin du Jardin colonial. \ 15 226 NOTKS Il resterait à examiner le point de vue alimentaire. Ce produit étant de couleur blanche, d'odeur et de saveur agréables, plutôt intermédiaire entre le coprah et le beurre frais, et moins intense, et étant, d'autre part, assez analog-ue à des beurres vég-étaux voisins et comestibles, il nous semble que celui-ci })ourrait ég-alement entrer dans l'alimentation, mais l'expérience reste à faire. En général, ces applications possibles nous paraissent devoir rester théoriques tant qu'on ne pourra se procurer cette graine en abondance et décortiquée. Ernest Miixiau. NOTE SUR LE POLYGALA BUTYRAGEA STATION AGRICOLE DE DITINN Les graines de Poli/gala hutyracea envoyées par le directeur des cultures, ont été semées en place, à la station le 30 juin 1901 , dans un terrain légèrement incliné, de qualité médiocre, sablonneux, suffisamment fumé en engrais de ferme. Après plusieurs labours préparatoires le semis a été fait à la volée, les graines jetées à une distance d'environ 20 centimètres les unes des autres et recouvertes au râteau. La superficie occupée était de 50 centiares. La levée s'est effectuée très régulièrement six à huit jours après 1« semis. Le développement de la plante, très lent au début, a aussi été assez régulier. Les sujets atteignaient 0'" 25 à 0"* 30 de hauteur lorsqu'il a été procédé à l'éclaircissage et au repiquage des plants arrachés. Cette opération faite pour rendre l'essai plus régulier a eu lieu le soir par un temps couvert. Les jeunes sujets ont été transplantés, autant que possible avec la motte de terre enveloppant leurs racines. Malgré cette opération et les nombreux et copieux arro- sages qui ont suivi, ces plants sont toujours restés plus chétifs et n'ont jamais rattrapé ceux venus de semis. Deux binages ont été donnés le premier au moment de la for- mation des tiges, le deuxième à l'apparition des premières fleurs. Entre temps il a été procédé à plusieurs desherbages. Les plantes étaient droites, l'épi légèrement recourbé en crois- sant à partir de la formation des graines. Les premières fleurs sont apparues le 18 septembre, au premier jour de novembre les graines ont commencé à se former à la base de l'épi pendant que le haut continuait à se développer et à émettre des fleurs. A l'aisselle des dernières feuilles, d'autres épis se sont dévelop- pés, au nombre de trois à six, suivant les plantes. Les épis au moment de la maturité atteignaient une longueur moyenne de 0™ 40 et portaient une moyenne de 120 graines. Les graines se 228 NOTLS trouvent placées dans une enveloppe parcheminée, très fine, en forme de cœur aplati, adhérente à la tige par un pédoncule de quelques millimètres. Chacune de ces petites samares contient deux graines, rarement une. Quelques jours après les dernières pluies, les plantes paraissaient soutTrir de la sécheresse, les enveloppes se flétrissaient et auraient eu des tendances à tomber avant la formation des graines. Un abondant arrosage leur a alors été donné, d abord tous les jours, puis tous les deux jours et ensuite deux fois par semaine. Cette opération commencée le 12 novembre a duré jusqu'au 18 décembre. Ce jour-là, une forte averse ayant suffisamment mouillé le terrain, les arrosages ont été interrompus ; par la suite, voyant que la maturation suivait son cours, nous ne les avons pas repris. Récolte. — Les plantes ayant repris une vigueur nouvelle plus une graine n'est tombée jusqu'à la récolte qui a eu lieu le 25 janvier. Lors de la récolte toutes les graines étaient mûres, à l'exception de quelques fleurs venues tardivement au sommet de lépi, les- quelles ne s'étaient pas développées. Les épis ont été coupés et transportés au magasin sans s'égrener. Le plupart des graines tombées avant la récolte étaient vides. Elles avaient été détachées accidentellement en cours de développe- ment. Rr>"demp;nt. — Le rendement en graines nettoyées a été, pour la superficie dont il vient d'être question, de 630 grammes, soit pour 1 are de 1 kilog. 300. EiNNKMi. — Le Périe nest pas nuisible: au contraire, s'il est carnassier comme on le croit, il serait plutôt utile. Etant donné ce qu'on a dit du Brachytrupes du Tonkin et de celui de Madagascar, on doit taire des réserves à leur sujet^ en attendant des observations bien sérieuses sur leurs mœurs. LE CURCULIONIDE DE L'ANANAS Le Centrinus SipoUai Fairmaire, remarquable par sa belle couleur bleu d'acier, vit dans le parenchyme des feuilles de l'Ananas. La larve, après avoir dévoré la partie charnue, se construit une sorte de coque feutrée et s'y enferme pour opérer sa métamorphose. Sa présence se révèle par un rentlement résistant à la pression des doigts. Je n'ai pas vu le trou de sortie de l'insecte, car tous ceux que j'ai examinés étaient morts dans leur cocon ; mais je suppose qu'il l'ouvre à l'extrémité, du côté de la tête et qu'il n'a ensuite aucune peine à percer la peau de la feuille. Voici la description qu'en donne Fairmaire, dans le Bulletin des séances de la Société entomologic/ue de France de 1887, p. clxxix : « M. L. Fairmaire présente à la Société deux Gurculionides. avec leurs coques, qui lui ont été communiqués par M. l'abbé David, auquel ils ont été envoyés par M. Sipolis, missionnaire lazariste dans la province de Minas-Geraes. L'un, le Sphenophorus dispar Sch., est bien connu ; il vit dans l'intérieur des tiges de bananiers, où il construit, pour se métamorphoser, une coque analogue à celles des S. decoratus et liratus ^ Mais le second a des mœurs, plus curieuses et me paraît constituer une espèce nouvelle : c'est un Centrinus dont la larve vit dans l'épaisseur des feuilles des ananas. Elle y construit une coque bien diirérente des j)récédentes. Celles-ci sont formées de libres grossières, peu agrégées, tandis que celles du Centrinus sont composées de lilaments assez fins, serrés, et paraissent agglutinées par une matière mucilagineuse qui leur donne de la solidité; elles sont aussi bien |)lus courtes et un peu 1. Voir RiiU. Jurd. Col., 1902, n° 7, p. 117. LES INSECTES 231 comprimées. Il paraît que les larves de ce Gurculionide pullulent dans certaines plantations et y font des ravages sérieux. Ce Cen- trinus a 5 millimètres de longueur sans le rostre ; il est d'un bleu foncé asssz brillant ; les élvtres sont médiocrement convexes, surtout avant le milieu, ont le dernier article dun brun mat, presque aussi long-, chez le mâle, que le rostre, à partir de l'insertion, tandis que chez la femelle cet article est bien plus court; le corselet est lisse; les élytres sont nettement, mais finement striées, plus fortement sur les côtés; les stries sont finement ponctuées; la suture est déprimée ; le prosternum n'est nullement sillonné ; le dessous du corps est ponctué, sans taches; les derniers segments abdominaux sont un peu noirâtres ; les fémurs sont munis en dessous d'une très petite dent. Je lui donne le nom de Centrinus Sipolisi. L'espèce dont il semble se rapprocher le plus est le C. parellinus Sch., du Brésil. » LE PAPILLON DES GRAINES DE SESAME Les provisions de graines de Sesamum orientale L., du Soudan, que possède le Jardin Colonial, sont attaquées par un petit papillon dont la chenille chemine à l'intérieur d'un tube soyeux autour duquel les graines s'agglomèrent en chapelet. J'ai pu facilement suivre l'éducation de la chenille et recueillir un certain nombre d'insectes j)arfaits. M. l'abbé de Joannis l'a déterminé Corcyra translineella Ragonot, dont la description, faite depuis longtemps, à la base ; la tête et le rostre sont plus foncés ; ce dernier est long, légèrement arqué, comprimé à la base ; les antennes, insérées bien vient de paraître, après la mort de l'auteur, dans le magnifique ouvrage publié par les soins de S, A. I. le Grand- Duc Nicolas Mikhaïlovitch Romanofî. Le travail posthume de Ragonot a été complété par M. Hampson, du British Muséum de Londres, et par notre compatriote l'abbé de Joannis. Le type est un mâle dont la chenille a vécu dans des fèves de cacao provenant de la Réunion. Cette particularité est à noter et démontre que l'insecte se retrouvera dans d'autres produits de diverses provenances. 232 NOTES La description de la chenille a été faite par M. de Joannis sur les exemplaires que nous avons trouvés à Nogent. Voici du reste la description oriji^inale de Corcyra translineella, extraite des Mémoires sur les Lépidoptères, t. VIII^ 1901 ; Rag-o- not, II, p. 492, pi. LI, fi-. 26 : CORCYRA TRANSLINEELLA Ragonot. (^ , 20 mill. Ailes supérieures d'un gris foncé saupoudré de noir, nervures fortement striées de noir; lignes transA^ersales bien visibles, sous forme dombres brunes diffuses, la première arquée sur la cellule et brisée en dedans sur la nervure dorsale, la deuxième lég'èrement courbée à son milieu ; une lig-ne de points noirs terminaux. Inférieures d'un brun noirâtre. Tète et thorax gris; abdomen brunâtre. Ressemble aux exemplaires foncés de Cephalonica ; mais on la reconnaît aisément à ses lignes transversales. Plusieurs exemplaires éclos de chenilles qui se nourrissaient de fèves de cacao. La Réunion. Coll. de Joannis et Ragonot. Des chenilles de cette espèce ont été trouvées au Jardin Colonial de Nogent-sur-Marne, près Paris, parmi des graines de sésame [Sesamum orientale L.), provenant du Soudan (Afrique occiden- tale). La chenille est d'un blanc d'os, la tête couleur d'aml)re avec le bord antérieur et la bouche plus foncés, brun rougeàtre. Sur le deuxième segment, quelques taches et un liséré postérieur, formant l'écusson, couleur d'ambre clair; l'écusson anal de même teinte, très claire. Des poils roux clair sur la tête et sur le corps à la place des points verruqueux qui sont invisibles, sauf ceux, très petits, placés au-dessus et un peu en avant des stigmates. Stig- mates cerclés de noir. Pattes rougeàtres. Chrysalide jaune safran, les divisions des anneaux et des gaines des divers organes très finement rougeàtres. Le dos est légèrement caréné et porte, sur chacun des sept premiers anneaux de l'abdomen, deux petites sail- lies allongées, parallèles, très rapprochées, brun rougeàtre. Les chenilles font des tubes à travers les graines de sésame et chrysalident, dans leurs galeries, dans un cocon de soie blanche, souple, allongé. Les papillons ont commencé à éclore en février. LES INSECTES 233 INSECTES RÉCOLTÉS PAR M. LE CAPITAINE ROCHE, DU GÉNIE, dans la vallée de la Rivière Mouni (Golfe de Guinée). La Commission franco-espag-nole de délimitation du golfe de Guinée, dont faisait partie le capitaine Roche, avait pour mission de tracer la frontière séparant le Congo Français de la Guinée Espa- gnole. Cette dernière colonie, située entre le Cameroun au nord, et le Congo Français au sud, a été reconnue à l'Espagne par la Conven- tion du 27 juin 1900. La Commission, partie de l'estuaire de la rivière Mouni, a d'abord suivi son cours, puis son affluent l'Outem- boni jusqu'à sa rencontre avec le l*"' degré de latitude nord. Elle a ensuite cherché à marcher sur ce ^parallèle jusqu'à son intersection avec le 9*^ degré de longitude est. Elle a alors suivi ce méridien jusqu'à la frontière de Cameroun (2<* 10' 20" de latitude nord) et est revenue enfin à la côte en longeant cette frontière. En somme, elle a parcouru environ 1 .000 kilomètres sur un itiné- raire compris entre l°et 2" 15' nord et les méridiens 1° et 9° 15' est. Le pays est couvert par la forêt tropicale qui v est absolument impénétrable en dehors des sentiers indigènes. Le sol est argileux et très humide ; il présente de nombreux marais et d'importantes rivières. Les insectes suivants ont été récoltés entre fin juillet et fin octobre 1901 : COLÉOPTÈRES Meiopoclontus Planeti Boil. Archon cenlaurus Fab. EudiceUa Morgani W'hite. Plesiorhina watkinsiana Lew. Chrysaspis aurovittata Saund. ChirosceUs passaloides Westw. Sironc/i/lium sp. Callichroma afrum L. — sp. Prosopocera sp. Sternotoniis imperialis Fab. 234 NOTES ORTHOPTÈRES (^tlctcrmiuô?; par M. Finot). Rhyparobia Madcrae Vah. Dans tous les pavschaiuls. Zonocerus variec/Hlus L. Dans toute rAlVique tropicale, Leproscirlus graniilnsus Karsch. Afrique occidentale : Gabon. Cymatomera argillata Karsch. Congo, Cameroun. Acanthoplus sp. 9 Ed. Fleutiaux. LE BOMBYX FAIDHERBEI Dans certaines régions du Soudan Français, les indigènes uti- lisent la soie du cocon d'un boml^yx pour confectionner des bandes de tissus et ornementer de diverses broderies les étofFes de choix à leur usage. Ce lépidoptère, signalé plusieurs fois, est le Bombyx Faiderbii, il vit sur le Zjzyphus Orthacantha. arbuste très commun dans le pays, appelé Tombourou. La larve de ce papillon est de la grosseur de celle du bombyx du mûrier, noire et velue après l'éclosion, elle est verte avant la trans- formation en chrysalide, les poils et les pattes de couleur blanche à l'extrémité, sont entourées d'un cercle noir à la naissance; le pour- tour des ouvertures est bordé de rouge. La vie de la larve se divise en 5 âges, dont la durée totale est d'environ 42 jours : Premier âge, depuis l'éclosion à la l'^ mue, durée de 4 jours Deuxième âge, du 5'' jour à la 2^ mue, — 4 jours Troisième âge, du 9*^ jour à la '> mue, — 7 jours Quatrième âge, du 17*^ jour à la 4^ mue. — 8 jours La cinquième mue se fait dans le cocon — 2o jours Soit un total de 42 jours La larve se tient à la face inférieure des feuilles à l'abri des pluies ; arrivée à son complet développement, elle fixe solidement son fil à une brindille, en dessous d'une feuille intacte, elle forme une tunique très résistante dans laquelle elle s'enferme pour tisser son cocon et se transformer en chrysalide. Cette tunique, ou enve- loppe extérieure, remplace la bourre du cocon du Bombyx Cericaria, elle est lisse et parcheminée, chaque extrémité est percée d'un trou, l'un d'eux servira de sortie au papillon. Le papillon présente les caractères des Bombyx : Antennes plu- meuses, blanches, plus développées chez le mâle, abdomen poilu ; les ailes sont celles des Lépidoptères hétérocères ou nocturnes; il ressemble à l'Attacus Cvnthia de l'ailante pour la coloration des ailes. 236 NOTES La femelle pond sur la face inférieure des feuilles 50 à 100 œufs, aplatis, blancs ; la coloration reste la même. Il y a, durant la saison ovi la végétation est active, plusieurs générations. L incubation est de 7 à 8 jours. Le cocon est de forme ovale, parcheminé ; la soie en est brune, le fil moins iin que celui du bombyx du mûrier est très résistant. Pour le dévidage, il est nécessaire d'enlever au préalable la tunique. L'arbuste qui nourrit le Bombyx, le Zyzyphus Orthacantha, pousse en touffes de 4 à 5 tiges, d'une hauteur de deux ou trois mètres ; il est très commun sur les terrains secs, rocailleux ou sablonneux. La feuille est entière à trois nervures principales, plus grande que celle de notre jujubier, accompagnée à la base de deux stipules épineuses. Une autre variété ou espèce de Zyzyphus, de taille un peu plus forte, ne nourrit pas le bombyx. Le papillon est très répandu; sur un arbuste de 4 à 5 tiges, on trouve souvent lo à 20 cocons; le ver se déplace aisément d'une branche à l'autre pour consommer les dernières feuilles. Le genre Bombyx Faiderbii, comme nous venons de le voir, est très voisin du B. Cericaria. L'élevage de ce dernier serait intéres- sant à essayer au Soudan. Le mûrier réussit très bien, cultivé en touffes, ou conduit à hautes tiges; dans les terres profondes, il ne perd pas ses feuilles ; il se multiplie facilement de boutures. Dès la deuxième année, un mûrier forme une touffe de 2 mètres de dia- mètre et 3 mètres de hauteur ; les rameaux ont 2 mètres et 2"' 50 de longueur sans ramifications. Le ver à soie, qui n'a pas encore été importé, pourrait s'élever dans les cases ou directement sur le mûrier. Durant la saison du repos de la végétation, les œufs ne pourraient être conservés sans éclore, la quantité de feuilles serait néanmoins suffisante pour permettre de nourrir les vers qui devront fournir la ponte de la génération suivante. Dans la région montagneuse du Haut-Sénégal et Moyen-Niger pendant l'hivernage, la température est presque uniforme, les orages y sont moins pénibles que partout ailleurs ; la saison paraît propice pour l'élevage du ver à soie. Dumas, Agent de culture à Kati (Soudan). CULTURES LÉGUxMIÈRES A MADAGASCAR LÉGUMES CULTIVÉS A NANISANA, ESSAIS, DIVERS RESULTATS OBTENUS, NOTICES CULTURALES, ETC. Tous les légumes d'Europe sont cultivés à la Station de Nanisana concurremment avec quelques légumes exotiques introduits par cet établissement. Nous indiquons sommairement ci-après les observations aux- quelles chacune des espèces a donné lieu jusqu'à ce jour. Artichaut. — L'artichaut a été mis à l'étude à Nanisana en 1898, à laide de graines provenant de France ; les premières capi- tules ont étés récoltés en 1899; les pieds qui les ont portés ont été détruits par l'averse de grêle du 4 novembre de la même année. L'artichaut est, aux environs de Tananarive, une plante délicate, souvent attaquée par les pucerons. On doit donc lui réserver les parties les plus riches du potager ; près de la forêt, l'artichaut vient beaucoup mieux. Cullui^e. Multiplication. — Jusqu'à présent, les artichauts sont a sez peu nombreux, et pour en eiîectuer une plantation un peu importante il serait difficile de se procurer un nombre suffisant d'oeilletons; aussi faut-il recourir au semis. Le semis est un mode de reproduction assez aléatoire, en ce qu'il fournit souvent un grand nombre de plants dégénérés donnant des produits médiocres ou nuls. Cependant, en demandant les semences à des maisons sérieuses, on obtient ainsi des résultats assez satisfaisants. Epoque et exécution du semis. — On peut semer toute l'année, mais il est préférable de mettre les graines en terre en mars et avril, on obtient ainsi des plants qui portent leurs premières inflorescences en octobre. Le semis se fait en place ou en pépinière ; mais nous conseillerons d'employer de préférence cette dernière méthode qui permet de mieux 238 NOTES surveiller les plants et d'opérer une première sélection lors de la transplantation à demeure. Le sol réservé au semis doit être très fortement amélioré et par- faitement ameubli. Les foraines y sont semées en poquets, à 5 ou 6 centimètres d'intervalle en tous sens, pour qu'il soit possible de lever les jeunes plants en motte lors de la mise en place. Il est bon de pailler fortement le sol avec du fumier un peu long, immédiatement après le semis. La terre de la pépinière doit être constamment maintenue humide par des arrosag-es quotidiens. Mise en place. — Lorsque les plants ont trois ou ([uatre feuilles, il faut procéder à leur mise en place. Le terrain destiné à porter une culture d'artichauts doit être frais, très copieusement amélioré et facilement irrigable. On choisit, pour effectuer la transplantation, un temps couvert et l'on opère de préférence le soir. Les jeunes pieds doivent être levés avec leur motte. On rejette tous les plants mal développés et ceux dont les feuilles sont très épineuses, car ils donnent toujours des capitules de qualité très médiocre. On ombre après la mise en place jusqu'à la complète reprise. Les arrosages doivent être donnés très fréquemment. Il est nécessaire, si les pucerons envahissent la plantation pendant la végétation, de répandre immédiatement, sur les pieds attaqués, une décoction de jus de tabac à laquelle on ajoute un peu de pétrole et de savon. Les artichauts commencent à fructifier 6 à 7 mois après le semis. Quand ils sont plantés sur un sol riche et frais, ils émettent, après la récolte, des œilletons avec lesquels on peut faire d'autres planta- tions. Il est alors facile de sélectionner et de ne propager que les sujets bien caractérisés. Variétés. — Les variétés qui nous ont donné les meilleurs résul- tats jusqu'à ce jour, et que nous recommanderons plus particulière- ment pour le centre de Madagascar, sont : l'artic/iaut (jros vert de Laon et V artichaut camus de Bretagne. Asperge. — Les premiers semis d'asperges furent exécutés à Nanisana, ;i la fin de 18'J7; les premières griffes provenant de ces semis furent mises en place au mois de juillet I8!)8. On commença à recueillir (juelques turions en 18!)ÎJ, cL l'année dernière on obtint une récolte très satisfaisante, tant sous le rapport de la quantité que CULTURES LÉGUMIÈRES A MADAGASCAR 239 SOUS celui de la beauté des produits. La plantation faite en 1898 couvre une surface de 8 ares environ; une nouvelle asperg-erie d'en- viron 2.000 mètres carrés a été créée l'année dernière. Nous ne pouvons mieux faire, pour tout ce qui a trait à la culture de l'asperg-e, que de reproduire ici la notice publiée l'année dernière au Journal officiel de la Colonie. Culture de l'asperge en Emyrne. — L'asperge est une plante vivacepar ses souches : les botanistes lui ont donnée le nom ^Aspa- ragus officinalis et Font classée dans la famille des Asparag-inées. Elle est indigène en Europe où elle croît à l'état spontané dans différentes régions du nord de la France, de la Belg'ique et de la Hollande, etc., etc.. Elle affectionne particulièrement les terrains légers et salés du bord de la mer. Outre ses aptitudes légumières, l'asperge possède des propriétés médicinales qui la font souvent employer en thérapeutique pour les affections du cœur. Elle est également diurétique. Variétés. — L'asperge a produit de nombreuses variétés. Nous conseillerons aux cultivateurs du centre de n'employer que les asperges hâtive cVArgenteuil, tardive d'Argenteuil et violette de Hollande. Sol. — Lasperg'e redoute les terres fortes ; l'humidité stagnante est préjudiciable à ses racines, il faut donc lui choisir des terrains légers et sains. Toutes les terres d'Emyrne (sauf les rizières), une fois profondément remuées et copieusement améliorées, peuvent lui convenir. Elle se plairait tout particulièrement dans les alluvions sableuses des bords des lacs et de quelques cours d'eau. Les sols très pierreux ne lui conviennent pas ; il est nécessaire de les éviter. Au point de vue de l'exposition, l'asperge n'est pas délicate, et peut, au besoin, croître partout. 11 paraît cependant bon d'éviter l'exposition Est, à cause des vents violents qui peuvent briser ses tiges. Multiplication. — En pratique, l'asperge se multiplie exclusive- ment par le semis ; elle pourrait, à la rig-ueur, être propagée par la di^dsion des souches mais ce dernier procédé, peu employé, donne de maigres résultats, et il est bon de s'en tenir aux semis. Le semis d'asperge peut être fait directement en place; toutefois, il est bien préférable de secner en pépinière, et de planter à demeure 240 .NOTES ensuite. Ce dernier procédé est le seul pratique à Madagascar. Le semis se fait au potag'er dans des planches dont le sol léger a été très copieusement fumé à diverses reprises. On donne aux planches une largeur maximum de 1"'20 et on les sépare entre elles par des sentiers de 40 à 50 centimètres de large. Cette disposition est indispensable pour que les arrosages, les sarclages et les binages puissent être donnés sans qu'il soit néces- saire d'entrer dans les planches. Lorsque celles-ci ont été préparées, on trace à leur surface, et dans le sens de la longueur, des rayons distants de 0'" 25 à 0™ 30 et profonds de 2 à 3 centimètres. Les graines sont placées dans les rayons, de façon qu'il reste entre elles i à 5 centimètres d'intervalle; elles sont ensuite recou- vertes par les bords rabattus des rayons ou, mieux, par du terreau avec lequel on remplit les rigoles. Il faut, pour éviter que la surface des planches ne se dessèche ou ne se croûte, les recouvrir d'une mince couche d'herbes sèches, puis donner un bon arrosage qui doit être renouvelé chaque fois que le besoin s'en fait sentir. La levée est lente et les premières jeunes asperges n'apparaissent guère que 40 à 80 jours après le semis; il faut sarcler avec soin sur les rayons pour que les jeunes plantes ne soient pas gênées au moment de la levée. En Imérina on sèmera de mai à juillet inclusivement. Les griffes issues de ces semis seront arrachées pour être mises en place au mois de juillet de l'année suivante, c'est-à-dire qu'elles resteront 12 à 14 mois en pépinière. Pendant tout ce temps, les binages, les sarclages et les arrosages ne devront jamais être négligés. 11 est utile de ces- ser d'arroser à la lin du mois de mai, qui précède l'arrachage des griffes, pour qu'au moment de procéder à cette opération les jeunes asperges soient au repos complet. Préparation du sol qui doit porter lasperyerie. — Le terrain qui doit porter l'aspergerie aura dû être défoncé à 40 ou 50 centimètres de profondeur, et très abondamment fumé avec du fumier de cheval si possible, une année avant la plantation. Il faut, en défonçant, débarrasser le sol des racines et grosses pierres qu'il pourrait con- tenir. Si l'aspergerie n'a pu être préparée ([ue peu de temps avant la mise en place des grifîes, il faut avoir soin de fumer avec du fumier très CULTURES LÉaUMIÈRES A MADAGASCAR 241 décomposé ou du bon terreau. L'apport de cendres, un mois avant la plantation, est à recommander. Si le cultivateur dispose de terrains sains, ayant été cultivés depuis longtemps, c'est sur eux qu'il devra planter ses asperges, il n'aura alors qu'à les labourer et les fumer quelque temps avant la mise en place. Arrachage des (jriffes. — Il a été dit plus haut que les griffes devaient être arrachées pendant leur repos, c'est-à-dire 12 à 14 mois après le semis. Si les arrosages ont été arrêtés au commencement de mai, les tiges des jeunes asperges sont à l'ordinaire complète- ment desséchées en fin de juin; on peut, à la rigueur, procédera leur déplantation à cette époque, mais il paraît préférable d'attendre la fin de juillet. L'arrachage des griffes est une opération assez délicate qui demande quelques soins; il faut briser le moins possible les racines, et c'est assez difficile. Pour arriver à arracher convenablement les jeunes asperges, il convient de creuser, en dehors des plantes, une tranchée dont la profondeur dépasse celle à laquelle s'étalent les racines, on mine ensuite à l'aide d'une fourche ou d'un angady sous les pieds qui tombent à mesure que l'on avance. Il est bon de procéder à la mise en place aussitôt après l'arra- chage; si on ne peut le faire, on conservera les griffes en les strati- fîant à l'ombre dans un sable bien sec ; elles peuvent ainsi se con- server jusque dans les premiers jours d'octobre, mais il est indis- pensable de les planter à cette époque, au plus tard, j^arce que, mal- gré tout, elles se mettent en végétation et les bourgeons qui com- mencent à s'allonger se brisent très facilement. Mise en place. — Le sol ayant été préparé comme il a été dit plus haut, on trace à sa surface, en les espaçant de 0'" 10 à 0"' 20, des lignes sur lesquelles on marque, de mètre en mètre, l'emjalace- ment des pieds. A la place de chaque marque, on ouvre une petite fosse de IS à 20 centimètres de profondeur, et de 40 à 50 centimètres de diamètre ; le fond de la fosse doit être légèrement convexe. Sur ce fond, formant monticule, on place une griffe dont on recouvre le pied de terre légère, ou mieux de bon terreau, et de telle sorte que la griffe se trouve enterrée de 10 ou 12 centimètres. Le sol environnant sur- plombe de 6 à 8 centimètres ; il faut, dans les lignes, enlever la Bulletin du Jardin colonial. 16 2i.2 .NuTi;s terre, de sorte (|ue le niveau de la fosse se trouve à la même hau- teur. La terre ainsi retirée doit être placée entre les lignes où elle forme une sorte de billon qui sert ensuite à butter les toull'es. L'emj)lace- ment de chaque pied doit être marqué par une petite baguette, 23our (jue, en binant, les ouvriers n"endommati;-enl pas les racines. Culture pendant la première année. — Il est utile, s'il est pos- sible de le faire, de donner une irrit^ation ou darroser pour hâter le déveloj)pement des asperji^es, aussitôt après la transplantation des tig-es nouvellement plantées. Il est bon, enlin, de tuteurer les tiges sortant des gritfes lorsqu'elles atteignent 35 à 40 centimètres de hauteur. Le sol de Taspergerie devra être tenu constamment très propre, par des binages donnés en temps voulu. Pour diminuer les frais d'entretien, on peut cultiver dans les interlignes divers légumes, tels que : choux, salades, etc., etc. S'il n'a pas été possible de fumer îdjondamment au moment de la plantation, il est important de répandre à la surface de l'aspergerie, durant la saison sèche suivante, une bonne couche de fumier décom- posé, que l'on enterre par un léger labour. Il faut enfin couper les tiges aériennes à 24 ou 30 centimètres du sol, dès qu'elles se sont desséchées. Les soins de culture sont, pendant la deuxième année, les mômes que durant les douze premiers mois. Culture pendant la troisième année qui suit la plantation. — Si l'on désire commencer à récolter au début de la troisième année, c'est-à-dire deux ans environ après la mise en place des griffes, il faut butter les asperges en août. Cette opération consiste à amonceler, au-dessus de chaque touffe, de la terre très légère et très meuble, de façon à former une butte conique de 25 à 30 centimètres de hauteur, et de 50 à 60 centimètres de diamètre à la base. Le bultage est nécessaire pour forcer les turions à s'allonger avant d'arriver à la lumière. Il est nécessaire, bien entendu, d'enlever complètement les tiges sèches de l'année précédente avant de procéder au buttage. Il est prudent de ne pas prendre plus de 4 et 5 asperges par pied pour commencer, on ris([uerait, sans cette précaution, de trop alfaii)lir les griffes, et de compromettre les récoltes suivantes. CULTURES LÉGUMIÈRES A MADAGASCAR 243 La récolte commence, aux environs de Tananarive, vers la fin d'octobre, mais s'il était possible d'irriguer ou d'arroser aussitôt après le buttage, les asperges feraient leur apparition au moins un mois plus tôt. Aussitôt après la récolte, c'est-à-dire en décembre, il faut débutter les asperges et tuteurer les tiges. A la saison sèche, on forme de nouveau l'aspergerie et l'on commence à butter au mois d'août, après avoir débarrassé les touffes de leurs tiges desséchées. Les soins à donner par la suite sont les mêmes que durant la troi- sième année de culture, les plantations intercalaires sont supprimées lors du premier buttage. Les fumures, toujours copieuses, doivent être renouvelées tous les deux ans. Cueillette des asperges. — La manière dont on récolte les turions influe beaucoup sur leur valeur et sur la quantité produite par chaque pied. En opérant avec soin, à l'aide d'un couteau, on brise les jeunes asperges incomplètement développées. Il convient, dès que l'on aperçoit l'extrémité d'un turion, d'écarter la terre de la butte autour de la jeune asperge à cueillir et de la détacher soigneusement à la main, la terre est ensuite ramenée au jaied de la touffe. La cueillette doit avoir lieu le matin à la première heure ; il con- vient de ne pas laisser les turions s'allonger trop ; ils sont bons à récolter lorsque leur extrémité émerge d'un à deux centimètres hors terre. Tous les turions trop petits doivent être laissés sur le pied. Les asperges doivent être mises en bottes de 10 à 15 centimètres de diamètre. Il est utile, si l'on ne peut les envoyer immédiatement au marché, de les placer dans du sable légèrement humide, pour éviter qu'elles ne deviennent flasques. On peut ainsi les conserver deux ou trois jours au maximum. Aubergine. — L'aubergine pousse bien toute l'année, mais il se produit un ralentissement dans la production pendant les mois froids, c'est-à-dire en mai, juin, juillet et août. La culture de ce légume, en Emjrne, ne diffère pas sensiblement de ce qu'elle est en France. Les semis se font depuis le mois de septembre jusqu'au mois d'avril. Toutes les variétés essavées ici nous ont donné des résultats satis- 24 i NOTES faisants, lorstjue la plantation a été faite dans une terre très fumée et copieusement arrosée. Ail. — L'ail réussit à la Station de Nanisana et il y mûrit très bien ses caïeux. Nous avons toujours employé l'ail indi*>-ène qui donne des têtes assez peu volumineuses, mais qui se conservent bien. La multiplication de l'ail se fait ici comme en Europe. On {)lante depuis le mois d'août jusqu'au mois de décembre. On récolte soit en vert, dans le courant de l'hivernage, soit en sec, au commencement de la saison sèche. Betterave. — La betterave a toujours été cultivée à Nanisana, où elle a donné de bons résultats. La meilleure époque pour semer s'écoule du 15 août au lo novembre. Les jeunes plants ont souvent à souffrir des fortes pluies pendant l'hivernage, on peut cependant le sauver en les abritant. Pendant les mois froids, mai, juin et juillet, la levée est plus régulière et la croissance excessivement lente. Les betteraves peuvent être semées en place ou repicjuées ; nous préférons cependant les semer en place. Variétés. — Les variétés qui nous ont donné les meilleurs résul- tats sont : la heltcravc crapaudine, la betterave roiiye et la noire plate (VEyypte. Gardon. — A diverses reprises, le Cardon a été essayé, mais on n'a pas, jusqu'à ce jour, obtenu de résultats réellement satisfaisants. Les plantes se développent très peu. Il est en outre tri's diflicile de les défendre contre les pucerons. Carotte. — La carotte a été cultivée dès le début. Elle produit aussi bien et aussi abondamment qu'en France, mais elle demande un sol léger, riche et toujours mainteim humide. On sème la carotte toute l'année, cependant il est indipensable de protég-er les semis contre les fortes pluies de l'hivernage. La crois- sance des jeunes carottes est beaucoup [)lus lente pendant les mois froids. Variétés. — Presque toutes les variétés de carottes réussissent bien ; les .suivantes sont les plus reoommandables ici : CULTURES LEGUMIERES A MADAGASCAR Carotte roug'e courte hâtive. 245 )) )) demi-courte oDtuse de « )) » » longue nantaise. )) )) » » de Luc. » )) » )» long-ue. Céleri. — Le céleri réussit assez mal à Nanisana où il pousse avec une extrême lenteur. Le céleri rave n'a rien donné jusqu'à ce jour. Cerfeuil. — Le cerfeuil pousse très bien, mais il faut le semer chaque année. La meilleure époque pour le semis s'étend du 15 septembre au 15 novembre. 11 faut l'abriter pendant l'hivernag-e. La germination est excessivement lente dui^ant la saison froide. Chicorée frisée et chicorée scarole. — La chicorée et la scarole réussissent très bien pendant toute la saison sèche, mais elles montent ordinairement très vite durant la saison des pluies, et il est difficile, en outre, de les faire blanchir à cette époque, sans qu'elles pourrissent. 11 faudra donc semer de préférence depuis le mois de mars jug- qu'en octobre. Variétés. — Les variétés suivantes ont été cultivées avec succès à la Station de Nanisana. Chicorée frisée de Meaux. — Chicorée fine d'Italie., Chicorée frisée de Bii/fec, Chicorée scarole verte, Chicorée scarole blonde. Chicorée sauvage. — La chicorée sauvage donne un produit abondant pendant toute l'année ; sa culture est excessivement simple. Il suffit de semer en place en août, septembre ou octobre. La plan- tation peut durer longtemps. Chou cabus. — Les choux sont certainement les plantes pota- gères qui donnent ici le plus de mal au maraîcher. Les innombrables petites chenilles qui les attaquent en rendent la culture très difficile. Il est indispensable, si l'on veut obtenir de beaux choux, de faire rechercher les insectes sur les feuilles, plusieurs fois par jour, ce qui ne manque pas de coûter cher. 2i6 NOTES En raison des pluies, la culture du chou est encore plus diflicile qu'en saison sèche, La meilleure époque pour le semis de ce léj^ume s'écoule du mois d'avril au mois de novembre. Les semis exécutés en avril, mai, août et septembre, sont ceux qui réussissent le mieux. Le rejjiqua^e se fait comme en France, mais si l'on ne dispose pas d'une dose assez considérable d'eng-rais pour fumer très copieuse- ment les plates-bandes, il, est préférable de transplanter dans des trous de 30 à 35 centimètres de diamètre et de profondeur éj^ale^ dans le fond desquels on met beaucoup de fumier et un peu de cendres. Il est indispensable de donner des arrosag'es copieux et fréquents pendant la végétation. Les variétés qui ont donné les meilleurs résultats, à Nanisana, sont les suivantes : chou express, chou très hâtif d'Etampes, chou cœur de bœuf, chou d' York, petit chou d'York, gros chou de SchiceinfurlJi, chou quintal d'Alsace, chou Milan des vertus, chou rouge gros. Chou de Bruxelles. — Les choux de Bruxelles, essayés plusieurs fois à Nanisana, n'ont pas donnés les résultats attendus; ils viennent très beaux en feuilles, mais ne produisent presque pas de bour- geons. Nous en avons vu cependant, dans le voisinag-e de la forêt, qui produisaient en abondance. Choux-fleurs. — 11 nous a été impossible, jusqu'à présent, d'obtenir de choux-fleurs à Nanisana; les plants issus de semis faits à différentes époques ont toujours été complètement dévorés par les chenilles. Le chou-fleur vient bien dans la région forestière où la continuelle humidité lui permet de résister aux insectes; jusqu'à présent, on en a vu très peu aux environs de Tananarive. Choux-raves. — Les choux-raves viennent très bien pendant toute Tannée. Concombre. — Le concombre est im des légumes qui produit le plus abondamment, pourvu qu'il soit planté dans un sol très fumé. La période qui convient le mieux aux semis de concombres est celle (jui s'écoule de septembre à février. La végétation est excessivement lente et la production presque nulle ]iendant la saison froide. CULTURES LÉGUMIÈRES A MADAGASCAR 247 Les variétés les plus recommandables sont le concoml)rc lAanc hâtif et le concombre blanc de Bonnciiil. Cornichons. — De même que les concombres, les cornichons viennent très bien ; ils demandent les mêmes soins et se plantent aux mêmes époques. Nous avons cultivé le cornichon vert petit de Paris, le cornichon fin de Meaux ; ces deux variétés prospèrent très bien en Emyrne. Courges et potirons. — Les courges sont très connues et très appréciées des indigènes. Nous en avons cultivé plusieurs variétés à Nanisana, elles viennent en général bien, mais il arrive souvent que les feuilles des variétés françaises sont attaquées avant la maturité des fruits par une maladie cryptogamique qui tue les pieds avant leur complète évolution. Quoi qu'il en soit il faut semer dès le mois d'août pour récolter avant l'hivernage. Les variétés suivantes ont bien réussi à la Station d'essai : courr/e non compense (réussit même pendant l'hivernage), courçje jjrolifique, courr/e à la moelle, courife (/iraumon, potiron rouge vif cVEtampes, courge Benincasa, courge patate. Dolicfue bulbeux, Dolichos bulbosus. — Le Dolique bulbeux fut introduit à la Station de Nanisana en 1898, grâce aux semences qui nous furent envoyées par M, Cornu, professeur au Muséum d'histoire naturelle, et par M. Teisonnier, chef du service des cultures à la Guinée Française. Les quelques semences mises en terre ont donné naissance à de nombreux pieds. On a récolté cette année une quantité importante de graines qui ont été distribuées à un grand nombre de personnes. La racine du Dolique bulbeux devient énorme ; nous en avons récolté pesant plus d'un kilog. Lorsque cette racine est jeune, elle a un goût rappelant celui de l'Igname. Il est probable qu'elle ne sera acceptée des Européens que dans les parties de l'île où les légumes des pays tempérés se développent mal. Le Dolique bulbeux est à ce titre une plante intéressante pour les régions côtières. Culture. — Le Dolique bulbeux se multiplie de semis; ceux-ci doivent être exécutés dans les premiers jours de l'hivernage. Ils se 2i8 NOTES font 011 place et en poquets dans des planches bien ameublies et copieusement fumées. On espace les poquets de 0'"40 environ et l'on dépose dans chacun d'eux 3 graines que l'on enterre à 2 ou 3 centimètres de profondeur. Si le temps est sec il est utile d'arroser. La germination se produit 15 jours à 3 semaines environ après le semis. Il faut sarcler toutes les fois que les mauvaises herbes se développent. On commence la récolte 3 mois et demi ou 4 mois après le semis. Les racines sont bonnes à consommer lorsque les premières inflo- rescences apparaissent; il ne faut pas attendre plus long-temps, car elles durcissent très vite. Disons que le Dolique bulbeux est une plante grimpante qui ne manque pas de valeur ornementale, ses belles grappes de ileurs bleues sont du plus joli aspect. Echalotte. — Nous avons essayé l'échalotte l'année dernière à l'aide de caïeux venus de France, mais les résultats obtenus n'ont pas été satisfaisants. Cet essai est à reprendre. Epinard. — L'épinard vient bien, on le sème d'août à décembre, la récolte a lieu toute l'année mais se ralentit en saison froide. Les jeunes plants sont souvent dévorés par les insectes. Fève. — La fève donne d'assez abondantes récoltes, mais elle est souvent attaquée par un puceron noir qui entrave son dévelop- pement. On doit semer de préférence de septembre à décembre, mais à la rigueur on peut mettre les fèves en terre toute l'année. Elles poussent peu en mai, juin et juillet. Gombo. ITibificua esculcn/iis. — Les jeunes fruits de Gombo sont consommés dans beaucoup de colonies comme légumes; il ne semble pas toutefois qu'ils présentent un grand intérêt })our le centre de Madagascar où les légumes européens sont assez l'épandus. Cependant cette plante a toujours été cultivée à Nanisana et de nombreuses graines ont été distribuées chaque année. Oseille de Guinée. Hibiscus sabdariffu. — Essayé au dernier CULTURES LÉGU3IIÈRES A MADAGASCAR 2i9 hivernage, il a été détruit par les froids du mois de juin, avant d'avoir fructifié. Haricot. — On peut récolter des haricots en vert toute l'année, cependant les variétés de France que nous avons essayées ont été attaquées durant l'hivernage par un petit coléoptère du genre charançon qui perfore les feuilles et cause de grands dommages à ce légume. De plus les feuilles sont fréquemment attaquées par une sorte de rouille qui tue très vite les plantes. Aussi le haricot réus- sit-il surtout bien depuis le mois d'avril jusqu'au mois de novemljre. Si l'on tient à récolter des haricots complètement mûrs, il faut les semer en août ou septembre, afin qu'ils mûrissent dans la 2" quinzaine de novembre. Les variétés cultivées par les indigènes sont plus robustes et résistent pendant l'hivernage. Elles ont l'inconvénient de donner des haricots de moins bonne qualité. Les variétés énumérées ci-après ont surtout donné de bons résultats à la Station d'essai de Naniasana : Haricot de Belgique ; Haricot de Bagnolet ; Haricot de Soissons nain ; Haricot de Soissons à rames; Haricot flageolet blanc. Igname. — M. le Directeur de 1 agriculture a rapporté en 1897 quelques rhizomes d'une variété d'igname renommée à la Réunion. Cette plante est cultivée à Nanisana depuis cette époque. Elle produit beaucoup, mais l'abondance des autres légumes fait qu'on dédaigne un peu l'igname à Tananarive. Laitue et Romaine. — La laitue vient bien toute l'année, mais elle a des tendances à monter pendant les mois pluvieux. Les variétés suivantes réussissent surtout très bien : Laitue gotte lente à monter'^ Laitue Batavia brune ; Laitue grosse brune paresseuse \ Laitue Palatine. 250 NOTES La romaine pousse et pomme bien, mais elle monte rapidement pendant l'hivernage. La romaine blonde maraîchère et la romaine verte maraîchère sont surtout à recommander. Melon. — A diverses reprises nous avons essayé le melon, mais jusqu à présent les fruits obtenus ont toujours manqué de saveur. Il y aura sans doute lieu d'en essayer Ici culture sous châssis. Navet. — Le navet réussit bien pendant toute Tannée, mais très souvent les chenilles dévorent les feuilles. Pour permettre à la plante de lutter victorieusement contre les insectes, il faut la semer dans un sol très riche et l'arroser fortement, Nous recommandons les variétés suivantes : Navet des Vertus, race marteau \ Navet blanc plat hâtif] Navet de M eaux; Navet demi-long blanc. Ognon. — Nous n'avons pu jusqu'à ce jour récolter d'og-nons secs. Les bulbes n'atteignent jamais un gros volume et la tige ne se dessèche pas. Les ognons blancs nous ont toujours procuré plus de satisfaction que les jaunes. On peut semer toute l'année, mais il est préférable d'éviter l'hivernage pendant lequel il est indispensable de soustraire le semis à l'action des grandes pluies, à l'aide d'abris quelconques. La meilleure époque pour semer l 'ognon se trouve comprise entre le mois d'août et le mois de décembre. Les variétés suivantes sont celles qui ont donné les résultats les plus satisfaisants à Nanisana : Of/non blanc très hâtif de la Reine; Or/non blanc hâtif de Paris; 0(/non rouge pâle de Niort. Oseille. — L'oseille vient bien. Elle estvivace et dure plusieurs années. Persil. — Le persil, comme le cerfeuil, se plaît à Nanisana, mais il faut autant que possible le resemer chaque année. On peut CULTUUES LÉGUMIÈRES A MADAGASCAR 251 faire les semis toute l'année, il est préférable cependant de mettre les graines en terre en septembre, octobre ou novembre. Piment. — Toutes les variétés de piment réussissent très bien, il faut les cultiver de préférence pendant Thivernag-e et les semer par conséquent en septembre ou octobre. Poireau. — Le poireau réussit parfaitement et donne des pro- duits toute l'année. On le sème à toutes les époques, mais il y a lieu d'abriter les semis pendant la saison des pluies. En mai, juin et juillet, la germination est très lente. (3n sème toujours en pépinière et l'on repique. Les variétés suivantes sont les plus recommaiidables, pour le centre de Madagascar : Poireau très gros de Roucn\ Poireau monstrueux de Charenton ; Poireau long de Paris. Pois. — Le pois réussit, mais il est ordinairement moins prolifique qu'en France. On peut le cultiver toute l'année. Il donne de bons résultats d'août à décembre. Il est indispensable de cultiver le pois dans un sol meuble, riche et frais. Les variétés naines et demi-naines sont celles qui réussissent le mieux près de Tananarive. Nous recommandons surtout : Le pois nain merveille d'Amérique ; Le pois ridé de Kinght\ Le pois plein le panier. Poirée à cardes blanches. — La poirée pousse et produit toute l'année. On peut la semer à n'importe quelle époque. Les semis réussissent cependant moins bien pendant les mois froids. Il faut les abriter pendant l'hivernage. Pommes de terre. — La pomme de terre ne se plaît pas du tout dans les terres de Nanisana, elle pousse misérablement et donne toujours de très petits tubercules. Nous avions essayé des semis de graines de variétés françaises, 252 NOTES nous n'avons pu arriver à o])tenir de tubercules assez gros pour la consommation, La pomme de terre n'est, du reste, peu ou pas cultivée aux envi- rons immédiats de Tananarive où le sol trop pauvre en humus est toujours excessivement compact. Elle donne de bons résultats dans FAnkaratra, dans la province de Betafo et sur les terres sablon- neuses du bord de rivières. Radis. — Le radis pousse toute l'année, mais sa croissance se ralentit beaucoup pendant les mois froids. Toutes les variétés réussissent également bien. Salsifis et Scorsonère. — Le salsifis et le scorsonère donnent des racines de très bonne qualité, mais il faut leur réserver les parties du potager les plus meubles et les plus légères. On peut semer toute Tannée. La meilleure époque est celle qui va d'août à novembre et du mois de mars au mois de mai. Tomates. — Il est à peine utile de parler de la tomate qui pousse partout sans soin. On peut la cultiver toute l'année; toutes les variétés essayées nous ont donné d'excellents résultats, il arrive souvent, cependant, qu'elles sont attaquées par une grosse chenille qui s'introduit à l'intérieur des fruits avant la maturité et provoque leur pourriture. MAÇON, PHOTAT fHKHES, IMI'HIMEUHS. Le (jiéranl : A. Chalf-^mel. 2^ année. Novembre-Décembre 1902. N® 9 MINISTÈRE DES COLONIES Inspection générale de lAgriculture coloniale. L Agriculture pratique des pays chauds BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES Paraissant tous les deux mois. Tous documents et toutes communications relatives à la rédaction doivent être adressés à l'Inspection générale de VAgriculture coloniale au Ministère des Colonies. PARIS Augustin CHALLAMEL, Editeur Rue Jacob, 17 Librairie Maritime et Coloniale. Les abonnements partent du 1" Juillet. Prix de l'Année (France, Colonies et tous pays de l'Union postale). — 20 fr. La, reproduction complète d'un article ne peut être faite qu'après autorisation spéciale. Les citations ou reproductions partielles sont autorisées à la condition de mentionner la source de l'article. PUBLICATIONS DU MINISTÈRE DES COLONIES REVUE COLONIALE Explorations. — Missions. — Travaux historiques et géographiques. — Archives Etudes économiques Un fascicule de S feuilles çfrand in-S", paraît tous les deux mois PARIS — Augustin CHALLAMEL, Editeur,, kue Jacob, 47 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL (France et Colonies) 15 fr. L'Agriculture pratipe fles Pajs Cliaufls BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES Un fascicule de S feuilles grand in-S", parait tous les deux mois PARIS — Augustin CHALLAMEL, Éditeur, rue Jacob, 17 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : (France et Colonies) 20 fr. Annales d'Hygiène et de lédecine COLONIALES PUBLICATION TRIMESTRIELLE PARIS — Octave DOIN, Éditeur, place de lOdéon, 8 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : France et Algérie, 10 fr. — Étranger, 12 fr. Feuille de Renseignements de l'Office Colonial PUBLICATION MENSUELLE COLONISATION : Exploitations agricoles et industrielles, enquêtes économiques, etc. COMMERCE : Renseignements commerciaux et statistiques ;'• Avis d'adjudications ; Offres et demandes commerciales ; Mouvement des paquebots ; Listes des maisons de commerce, etc. PARIS — Augustin CHALLAMEL, Éditeur, rue. Jacob, 17 ABONNEMENT ANNUEL :• France, 5 fr. — Colonies cl Union postale, 6 fr. PARTIE OFFICIELLE ARRÊTÉ Le Ministre des Colonies, Vu le décret du 28 janvier 1899, instituant un Jardin dEssai colonial ; Vu le décret du 5 mai 1900, portant modilication du titre du Jardin d'Essai colonial et déterminant ses attributions; Vu la loi de finances du 31 décembre 1900; Vu le décret du 29 mars 1902, instituant au Jardin colonial un ensei- gnement agricole sous le nom de Ecole nationale supérieure d'Agriculture coloniale. Après avis du Conseil d'Administration du Jardin Colonial, Arrête : Article premier. — Les fonctionnaires coloniaux des services métropo- litains ou locaux, qui en feront la demande au Ministre des Colonies, seront admis à suivre, pendant la durée de leur séjour en Finance, les cours et les travaux de l'Ecole nationale supérieure d'Agriculture coloniale. Art. 2. — Ils devront, pendant la durée de leur présence à ladite école, se soumettre aux règles prescrites par le règlement. Ils seront exemptés des droits d'inscription. Art. 3. — Les agents du service de l'Agriculture des Colonies pour- ront, s'ils en font la demande, être admis à suivre, en qualité d'élèves réguliers, les cours de l'Ecole nationale supérieure d'Agriculture coloniale et en obtenir le diplôme. Fait à Paris, le 23 octobre 1902. Gaston DOUMERGUE. Paris, le 16 septembre 1902. Le Ministre de la Guerre à Monsieur le Ministre des Colonies. (Bureau militaire. P® Section.) Monsieur le Ministre et cher Collègue, Vous m'avez demandé que les élèves diplômés de l'École d'Agriculture Coloniale de Tunis, qui bénéficient de l'art. 81 de la loi du 15 juillet Bulletin du Jardin colonial. 17 254 DOCUMENTS OFFICIELS 1889, soient exceptionnellement autorisés à séjourner un an en France, à l'elFet de pouvoir suivre renseignement donné à Ibxole nationale Supé- rieure dAgricullure Coloniale. Conformément à votre proposition, et par extension des dispositions bienveillantes des art. 283 et 290 de Tlnstruction du 28 décembre 1895, j'ai décidé, à titre exceptionnel, que des autorisations de séjour d'un an pourront être accordées aux jeunes gens visés par votre dépêche du 6 août 1902. Il est bien entendu, toutefois, que ces autorisations ne seront accor- dées qu'aux seuls jeunes gens diplômés de l'Ecole d'Agriculture Coloniale de Tunis et quelles leur seront retirées s'ils ne terminent pas leur année d'études. Mention de cette restriction devra être portée sur le titre d'autorisa- tion du séjour en France. J'écris dans ce sens à M. le Général commandant la Division d'occupa- tion de Tunisie. Agréez, Monsieur le Ministre et cher Collègue, les assurances de ma haute considération. Général André. GUINEE FRANÇAISE PRODUCTION DE CIRE Le Gouverneur de la Colonie vient d'adresser au personnel placé sous ses ordres une circulaire pour lui indiquer les mesures à prendre pour augmenter la production de la cire qui constitue « un produit que le commerce prendra en quantité illimitée et à des prix satisfaisants ». Voici la partie principale de cette circulaire : a La princi-pale donnée du problème consiste à permettre la récolte facile des rayons, sans qu'il soit nécessaires de massacrer l'essaim, comme cela ne se pratique que trop. La seconde, étroitement liée à la première, vise l'augmentation de la production tant par la survie des abeilles, qui ne seraient plus massacrés, que par l'obligation j)our elles de construire à nouveau leurs alvéoles. L'idéal de l'apiculteur guinéen serait de ne faire pour ainsi dire produire que de la cire à ses abeilles, tandis que l'apicul- culteur européen cherche à ne leur faire produire que du miel. A la Gui- née, on devrait rendre aux insectes tout (ou à peu près) leur miel comme en l'Europe on leur i-end (les mobilistes surtout) toute leur cire. >< De ce qui vient d'être dit, ajoute le Gouverneur dans sa circulaire, il semble résulter que le type de ruches convenables serait à chercher en CIRCULAIRE RELATIVE A LA PRODUCTION DE LA CIRE 255 s'inspirant des ruches à hausses ou des ruches à calotte. Eu effet, dans Tuu comme dans l'autre cas, il est facile de refouler, soit dans le haut, soit dans le bas, les abeilles par l'enfumage, de prendre la partie dont on veut faire la récolte et de lui eu substituer une nouvelle. « Si comme précautions supplémentaires on opère le soir, à la tombée de la nuit, et si on ferme les portes d'entrée des abeilles, il est certain que l'on pourra récolter sans aucun danger de piqûres et en n'employant cependant qu'un minimum de fumée, par suite en n'asphyxiant pas les insectes. L'un et l'autre type ont encore l'avantage de permettre aux essaims nouveaux de produire, sans avoir à essaimer dans le vrai sens du mot, c'est-à-dire à chercher une autre installation au dehors, ce qui dans ces pays aboutit forcément à la perte. u Je recommande à MM. les Commandants de cercle de se hâter de trou- ver un type de ruche facile à construire et répondant aux indications générales que je viens d'indiquer et à celles que chacun d'eux pourrait trouver. Si je ne cherche pas à faire construire quelques modèles et à les envoyer dans les postes, c'est qu'il me semble que l'on doit, dans l'éta- blissement de cette ruche type, tenir compte des conditions spéciales à chaque région. Il faut faire son essai en recourant aux ouvriers indigènes du cercle même, alîn de trouver ce qui est vraiment pratique, vraiment approprié à la région, ce qui peut être fabriqué couramment et se répandre chez tous les habitants. Bien que la lecture, tant soit peu attentive des volumes que j'envoie, doive renseigner sur toutes les questions générales concernant l'élevage des abeilles, je crois devoir attirer l'attention sur deux points : d'abord le fait que les abeilles ont une tendance marquée à gagner le haut de la ruche, bien qu'on les voie fréquemment remplir une hausse placée dans le bas. Je pense que pour faciliter l'exploitation apicole dans ce pays où l'on doit toujours tendre à la simplicité, il est tout indiqué de mettre cette tendance à profit et de la faire connaître. En second lieu, les indigènes accrochent leurs ruches dans les arbres. Je n'ignore pas que cette manière de faire présente de grands avantages puisqu'elle met, au moins jusqu'à un certain point, les abeilles hors de portée de quelques-uns de leurs ennemis. Cependant il est bien clair qu'on ne peut arriver facilement ainsi à avoir des ruches productives et notamment des ruches se rattachant aux types à calotte ou à hausses. Et je ne crois pas qu'on arrive à augmenter d'une façon sérieuse la produc- tion de cire, tant qu'on n'aura pas renoncé à cette position des ruches qui complique trop les manipulations. Il serait à désirer que les ruches fussent placées, un peu comme elles sont en Europe, posant sur un grossier plan- cher surélevé au moyen de pierres, à cause des termites qui détruiraient les piquets de support. La hauteur au-dessus du sol devrait être assez con- 2o6 DOCUMENTS OFFICIELS sidérable, 0'" 80 à 1 mètre ; et il serait assurément très avantag'eux que les diverses ruches d'un propriétaii'e lussent réunies sous un toit de paille. « Je n'ignore pas que du moment où Ton renonce à accrocher les ruches aux arbres, on est conduit à les placer auprès de Thabitation. En elFet, l'ennemi le plus à redouter, celui contre lequel l'arbre défend sur- tout, c'est rhonime lui-même. « Mais si, dans les villages compacts, le fait de placer les ruches auprès des habitations présente quelques inconvénients, dont le plus gros est d'augmenter le parcours des abeilles lorsqu'elles vont butiner, il n'y a, au contraire, aucune espèce d'objection à faire contre cette situation chez tous les gens qui vivent en Daka, Marga Foulaso. Le rucher est le com- plément naturel de la ferme. MADAGASCAR ET DÉPENDANCES ARRÊTÉ sappn'mnnf dans la province de Mananjarij Vimpôt sur les terres ciilli- vahles, el la taxe sur les chevaux, mulets, ânes, chiens, porcs, mou- tons et chèvres. Le Général commandant en chef du Corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 3(1 juillet 1897; Vu l'arrêté 1846, du 3 juin 1898, lixant les impôts à percevoir dans la province de Mananjary ; Vu l'arrêté du 15 avril 1902, étenrlanl à toute la colonie l'impôt sur les animaux d'espèce bovine, suivant un tarif uniforme; Vu l'arrêté du 15 avril 1902 portant à 20 francs le taux de la taxe per- sonnelle dans la province de Mananjary ; Considérant que ce dernier arrêté a augmenté d'une façon sensible les charges des indigènes de cette province, qu'il est juste de supprimer cer- tains autres impôts dont le produit est peu élevé et dont le recouvrement doime lieu à de nombreuses difficultés ; Sur la proposition de M. l'Administrateur en chef de la région de l'Est ; Le Conseil d'administration entendu, AKm';TK : Article premucr. — Les dispositions des paragraphes 2 et 4 de l'arrêté I84()du 3 juin 1898 relatives à l'établissement d'un inq)ôt de 0 l'r. 45 par aie sur les terres cultivables et d'une taxe sur les chevaux, mulets, ânes, chiens, bœufs, porcs, moutons et chèvres sont abrogées. ARRÊTÉ 257 Art. 2. — MM. rAdmiiiistrateur en chef de la région de TEst et rAdministrateur en chef de la province de Mananjary sont chargés, cha- cun en ce qui le concerne, de l'exécution du pi^ésent arrêté. Fait à Tananarive, le 19 juin 1902. Pour le Gouverneur général et par délégation : Le Secrélaire général, Lépreux. ARREÏl] portant organisation de postes de stagiaires attachés à la Direction de V Agriculture. Le Général, commandant en chef du Corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1897; Vu les arrêtés du 12 février 1897, du 11 décembre 1897 et du 21 avril 1899 portant création des Stations d'essai de Nanisana, de l'Ivoloina et de Fort-Dauphin. Considérant qu'il y a intérêt pour la Colonie à étendre le programme des études techniques entreprises par la Direction de l'agriculture et à développer les moyens d'action dont dispose ce service pour continuer les recherches dont il est chargé; Sur la proposition de M. le Directeur de l'Agriculture; Le Conseil d'administration entendu, Arrête : Article premier. — Des postes de stagiaires permettant d'augmenter le programme des études agronomiques entreprises par la Direction de l'Agriculture et destinés à activer les recherches techniques rentrant dans les attributions de ce service seront créés sur la proposition du Directeur de l'Agriculture et au fur et à mesure des besoins de la Colonie dans les différentes Stations d'essai de l'île. Art. 2. — Ces stagiaires seront recrutés, par les soins de l'Inspection générale de l'Agriculture coloniale, parmi les élèves sortis avec le numéro 1 ou le numéro 2 de TListitut national agronomique ou des écoles nationales d'agriculture qui bénéficient d'une bourse de voyage ou de mission allouée par le Ministre de l'Agriculture. Art. 3. — Nul ne sera accepté comme stagiaire s'il n'a déjà satisfait aux obligations delà loi militaire, sauf dans le cas où il pourra achever son stage avant d'être appelé sous les drapeaux. 2o8 DOCUMENTS OFFICIELS Art. 4. — La durée du stage, f|iii. nu plus lard, prendra fin en même temps que la bourse allouée par le Minislro de FAgriculture. est fixée à deux ans au minimum et à trois ans au plus. La colonie n'acceptera donc comme staj^iaires que les jeunes gens devant encore profiler de leur bourse pendant au moins deux ans, à compter du jour de leur débarque- ment dans la colonie. Art. 5. — La colonie accordera aux stagiaires les avantages énumérés ci-après : 1° Voyage d'aller et de retour et transport gratuit jusqu'à la station où doit se faire le stage ; 2° Logement gratuit dans l'un des établissements agronomiques de la Direction de l'Agriculture ; 3" hidemnité mensuelle de cent francs pendant toute la durée du séjour dans la colonie. Art. 6. — Les stagiaires seront classés, au point de vue de la conces- sion des indemnités de route et de séjour, et des passages dans la troisième catégorie du tableau annexé au décret du 3 juillet 1897. Art. 7. — Les stagiaires seront tenus de faire en France un stage pré- paratoire de trois mois sous la surveillance de M. l'Inspecteur général de l'Agriculture coloniale. Ce stage pourra être fait au Jardin Colonial ou dans tout autre établissement désigné par l'Inspection générale de l'agri- culture coloniale. Art. 8. — Les stagiaires devront, en principe, la moitié de leur temps à la Direction de l'Agriculture, qui pourra, si besoin est, les employer dans les stations d'essai à la surveillance où à l'exécution de certains travaux agricoles (plantations, constructions rurales, recherches scientifiques, etc.). Le reste du temps sera consacré, sous la direction de M. le Directeur de l'Agriculture ou de son délégué, suivant un programme arrêté à l'avance, à l'étude d'une ou plusieurs questions techniques que la colonie a intérêt à faire élucider et aux travaux personnels du stagiaire. Art. 9. — La durée du stage, fixée à l'article IV, est obligatoire et ne pourra être interrompue par un rapatriement qu'en cas de maladie con- statée par le conseil de santé. Art. 10. — Tout stagiaire refusant de continuer son stage malgré l'avis du conseil de santé sera tenu de rembourser à la colonie : V Le prix du voyage d'aller et de retour, ainsi que l'allocation versée par la colonie, si la durée de la présence à Madagascar est inférieure à six mois ; 2° Le prix de la traversée de relier et de retour si le séjour à Mada- gascar est inférieur à un an ; 3° Le prix du voyage de retour si la durée de la présence dans la colonie est inférieure à deux ans. ARRÊTÉ 259 Art. 11. — La colonie fera connaître à Tavance, à l'Inspection géné- rale de l'Agriculture coloniale, les sujets et questions à faire étudier par les stagiaires, et arrêtera le programme de ces recherches après entente avec M. l'Inspecteur général de l'agriculture coloniale. Art. 12. — Pour chaque nouveau stagiaire, la colonie mettra à la dis- position de l'Inspection générale de l'Agriculture coloniale une somme de cinq cents francs destinée à acheter, pour le compte de la direction de l'agriculture, qui les prendra en charge, les ouvrages et le matériel spécial dont le stagiaire pourra avoir besoin pour les recherches qui lui seront confiées. Art. 13. — Chaque stagiaire devra fournir, en quittant la colonie et indépendamment des rapports qui pourront lui être demandés pendant son séjour à Madagascar, une étude exposant d'une manière aussi com- plète que possible tous les travaux et toutes les recherches exécutés pen- dant le stage. Art. h. — Aucun document ne pourra être livré à la publicité par les stagiaires, pendant leur séjour à Madagascar, sans l'autorisation du Gou- verneur général, à qui toutes les études destinées à être publiées devront être transmises par les soins du Directeur de l'Agriculture. Ces études pourront être insérées au Bulletin économique de Madagascar et seront communiquées à l'Inspection générale de l'Agriculture coloniale. Art. 15. — MM. le Secrétaire général et le Directeur de l'agriculture sont chargés, chacun en ce qui le concerne, d'assurer l'exécution du pré- sent arrêté. Tananarive, le 9 juillet 1902. Pour le Gouverneur général et par délégation : Le Secrétaire général^ Vu : Le Directeur du contrôle financier^ FiLLON. Lépreux. Par le Gouverneur général : Le Secrétaire général^ Lépreux. ARRÊTE portant création d'un poste de stagiaire à la Station d'essai de VIvoloina. Le Général, commandant en chef du Corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, 260 DOCUMEM'S OFFir.IKLS Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1897 ; Vu les arrêtés des 12 février 1897, Il décembre 1897 et 21 avril 1899 porlanl création des Stations d'essai de Xaiiisaïui, de i'Ivoloina el de Fort-Dauphin ; Vu l'arrêté du 9 juillet 1902 ])orlant orj^auisatinn de postes de sta- giaires attachés à la Direction de l'Agriculture; Considérant que la Station d'essai de I'Ivoloina est sut'Hsamment déve- loppée et outillée à l'heure actuelle pour recevoir un stagiaire ; Sur la proposition de jNI. le Directeur de l'Agriculture, Arrête : Article premier. - Un poste de stagiaire est créé à la Station d'essai de I'Ivoloina. Art. 2. — MM. le Secrétaire général et le Directeur de l'Agriculture sont chargés, chacun en ce qui le concerne, d'assurer l'exécution du pré- sent arrêté. Fait à Tananarive, le 10 juillet 1902. Pour le Gouverneur général et par délégation : Le Secrétaire cfénéral, Lépreux. Vu : Le Directeur du contrôle financier, FiLLON . Par le Gouverneur général : Le Secrétaire (fénéral, Lépreux. ARRÊTÉ instituant aux secteurs de Fort-Dauphin, Manamhara et Banomafana, r application de l'arrêté du 15 avril 1902, établissant une taae sur les animaux de Vespèce bovine. Le Générai commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1897 ; Vu l'arrêté du 15 avril 1902 établissant une taxe sur les animaux de l'espèce bovine ; Vu l'arrêté du 14 mai 1901 ; Considérant que les secteurs anlandroy du cercle de Fort-Dauphin se trouvent dans une situation politique sensiblement la même que celle du territoire sakalava ; ARRETE 261 Que, par suite, il y a lieu d'adopter pour cette région les mêmes mesures politiques et fiscales, qu'il est dès lors équitable d'ajourner ainsi qu'il a été fait pour le territoire sakalava l'application de l'arrêté du 15 avril 1902; Sur la proposition de M. le Secrétaire Général, Le conseil d'administration entendu, Arrête : Article premier. — I^'application de l'arrêté du 15 avril 1902 établis- sant une taxe sur les animaux de l'espèce bovine est limitée dans le cercle de Fort-Dauphin aux secteurs de Fort-Dauphin, Manambara et Ranoma- fana. Art. 2. — MM. le Secrétaire général et le Commandant du cercle de Fort-Dauphin sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive, le 31 juillet 1902. Pour le Gouverneur général et par délégation. Le Secrétaire général^ Lépreux. ARRÊTÉ déclarant le district de Mahanoro contaminé par la maladie vermiculaire du caféier. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1898; Vu l'arrêté du 9 juin 1902 interdisant l'exportation des végétaux hors des territoires où sévit la maladie vermiculaire du caféier; Considérant que l'existence de la maladie vermiculaire a été constatée à Ampeka, district de Mahanoro, Sur la proposition de M. le Directeur de l'agriculture. Arrête : Article premier. — Le territoire du district de Mahanoro est déclaré infesté par la maladie vermiculaire du caféier. En conséquence, les dispositions de l'arrêté du9juin 1902 sont, à partir de ce jour, applicables à ce territoire. Art. 2. — MM. le Secrétaire général, le Chef de la région de l'Est, le Directeur du service des douanes, l'Administrateur chef du district de Mahanoro, les Chefs de province et de district et les commandants de cercle sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du pré- sent arrêté. Fait à Tananarive, le 9 juin 1902. Gallieni. 262 DOCUMENTS OFFICIELS ARRÉTI^ interdisant V exportation des végétaux hors des territoires où sévit la maladie vermiculaire du caféier. Le Général commandant en chef du corps d'occupation, et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 1 1 décembre 1895 et 30 juillet 1897 ; Vu les décrets des 6 mars et 20 septembre 1877; Considérant que l'apparition d'une maladie vermiculaire du caféier a été signalée dans la colonie ; Considérant que la gravité de cette maladie exige que l'on prenne des mesures rigoureuses pour en empêcher la propagation ; ^'u l'urgence; Sur la proposition de M. le Directeur de Tagriculture, Le Conseil d'administration entendu, Arrête : Article premier. — Il est interdit de transporter, soit parterre, soit par eau, hors du territoire des circonscriptions administratives où l'existence de la maladie vermiculaire du caféier aura été ofïiciellement constatée : 1° des plantes enracinées de toute nature, mortes ou vivantes, et en par- ticulier des caféiers ; 2° des tuteurs ou échalas ayant déjà servi ; 3" des engrais végétaux, terres et terreaux. Art. 2. — La circulation des plantes et matières énumérées à l'art, l""", provenant des territoires contaminés, est interdite dans tout le reste de l'île. Art. 3. — Les territoires où la maladie vermiculaire aura été officielle- ment constatée seront, par arrêté du Gouverneur général, déclarés conta- minés et soumis aux dispositions du présent arrêté. Art. 1. — Tout envoi de plantes enracinées ou de matières énumérées à l'art. 1*"", circulant dans la colonie, devra être accompagné d'un certifi- cat d'origine conforme au modèle annexé au présent arrêté. Ce certificat sera délivré par un agent de la Direction de l'agriculture s'il s'agit d'un envoi provenant d'une station d'essai, d'une pépinière agricole ou de la cocoterie de Vohidrotra, et par le chef de province ou de district s'il s'agit d'une expédition de toute autre provenance. Art. 5. — Les infractions au présent arrêté seront punies d'un empri- sonnement de quinze jours et d'une amende de cent francs, ou de l'une de ces deux peines seulement. Art. 6. — MM. le Secrétaire général, le Procureur général, le Chef de la région de l'Est, le Directeur du service des douanes, le Directeur de ARRÊTÉ 263 l'agriculture, les Chefs de provinces et de districts, les Commandants de territoires et de cercle, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, d'assu- rer l'exécution du présent arrêté, qui sera soumis à M. le Ministre des Colonies pour être transformé en décret dans le délai de six mois, confor- mément aux décrets des 6 mars et 20 septembre 1877. Fait à Tananarive, le 9 juin 1902. Gallieni. COLONIE DE MADAGASCAR Cercle ou province de Enregistré sous le n° CERTIFICAT D'ORIGINE En exécution des prescriptions de l'arrêté du 9 juin 1902, Le soussigné, certifie que l'envoi dont le détail est donné ci-après, adressé à M. demeurant à par M. demeurant à provient de point situé dans 1 territoire non contaminé. DÉTAIL DE l'envoi 1" Nombre et poids approximatif des caisses, des ballots ou des serre- ward ; 2° Nature et nombre, poids ou volume des plantes ou matières trans- portées. Fait à le Le Remarques importantes : 1° Un duplicata du présent certificat d'origine sera envoyé directement par la personne qui l'a délivré au chef de la pro- vince ou du district où habite le destinataire. 2° Dès réception des plantes ou matières susvisées, faire parvenir d'ur- gence le présent certificat au chef de province ou de district qui devra le conserver dans ses archives. DIRECTION DE L'AGRICULTURE Cessions gratuites de graines de vers à soie par la Statioïi d'essai de Nanisana. L'arrêté du 7 mai 1901, en créant une magnanerie modèle à la Station d'essai de Nanisana, a eu pour principal objet de donner un nouvel 264 DOCUMENTS OFFICIELS essor à l'industrie séricicole par Tétude des meilleures méthodes de sélec- tion et d'élevage de vers à soie à appliquer dans les prox inces de l'Ime- rina. L'n premier résultat vient d'être acquis dans cet ordre d'idées. La Sta- tion de Nanisana est, en efl'et, en mesure de délivrer gratuitement, aux personnes qui en feraient la demande, trois variétés de graines de bombyx soigneusement sélectionnées. Plusieurs autres espèces de vers venues de France sont actuellement en observation et pourront fournir des graines avant la lin de l'année courante. Les personnes désireuses de se livrer à l'élevage simple et rémunéra- teur (lu ver à soie sont priées d'adresser leurs demandes de graines à M. le Sous Inspecteur chef de la circonscription agricole du centre à Xanisana, conformément aux indications de l'avis ci-après : DIRECTION DE L'AGRICULTURE STATION d'essai DE NANISANA Station séricicole. AVIS La Direction de Tagriculture a l'honneur d'informer le public que la Station d'essai de Nanisana est en mesure de mettre gratuitement des (Bufs de vers à soie à la disposition des personnes qui en feront la demande, par écrit, à l'avance, à M. le Sous-Inspecteur chef de la cir- conscription agricole du centre. Dès réception de chaque demande, le service de l'agriculture fera con- naître à l'intéressé à quelle date les graines pourront lui être livrées et dans quelle mesure il sera possible de lui donner satisfaction. Alin d'éviter la propagation des maladies contagieuses et dans le but d'empêcher les races élevées à Nanisana de dégénérer, la Direction de l'agriculture a seulement recours au grainage cellulaire, soumet toutes ses éducations à la plus sévère sélection et ne livre que des pontes dont les papillons ont été soigneusement examinés au microscope. Toute ponte provenant d'un bombyx reconnu malade ou dont l'aspect paraît simplement douteux est immédiatemcul détruite par le feu. Les cellules ne présentant aucune trace de maladie et provenant d'éducation saine, olFrant par conséquent le maximum de garanties pour l'éleveur, sont marquées d'un signe distinctif et sont seules mises en cession. Cette marcpie distiuctive est accoin|)agnée d'un numéro d'ordre indiquant quelle est l'éducation dont provient chaque cellule. ARRÊTÉ 265 Il est rappelé qu'une cellule comprend la ponte d'un papillon et se compose d'environ 400 œufs. On estime que 100 cellules représentent approximativement de 35 à 87 grammes de graines. L'emplacement et la quantité de feuilles nécessaires pour nourrir 37 grammes d'œufs aux dillerenls âges sont donnés par le tableau sui- vant, qui permettra à chacun de calculer approximativement le nombre de cellules qui lui sera nécessaire. TABLEAU indiquant approximativement Vespace et la quantité de feuilles néces- saires pour élever les vers provenant de 37 grammes d'œufs. AGES ET MUES Eclosion à la mue (l"' âge). De la 1'" à la 2' mue (2=àgej . De la 2» à la 3« mue (3'a|?e). De la 3" à la i' mue (4" âge . Délai" à la montée (S" âge). ESPACE nécesscùre 'Il iiiMres car. 4 12 30 à 35 60 à 70 Totaux. QUANTITÉ DE FEUILLES NECESSAIRES i k. jeunes f"''' ou 12 ' id. 36 id. 108 id. 650 id. 20 k. f"" adultes 48 id. 108 id. 216 id. 700 id. 810 1.092 k. Les intéressés pourront faire prendre livraison, à la Station d'essai de Nanisana, des graiiies mises à leur disposition à la date indiquée par la direction de l'agriculture, ou se les faire envoyer par la poste en payant à l'avance les frais d'emballage et d'expédition, dont il sera délivré reçu par les soins du directeur de la Station d'essai de Nanisana. Tarif des frais d^ emballage et d'expédition. TARIF DES FRAIS d'emballage et d'expétlition. OBSERVATIONS De 1 à 5 cellules. 0 IV. 50 De 5 à 10 cellules. 0 55 De 10 à 25 cellules. 0 60 Au-dessus de 25, les frais d'em- ballage sont calculés par fraction de 1 à 5, 5 à 10 et 10 à 25 cellules. Les variétés actuellement olfertes en cession comprennent : 1° Une variété à cocons blancs ; 2° Une variété à cocons de couleur jaune mate ; 3° Une variété à cocons de couleur franchement jaune. Tananarive, le 14 avril 1902. Le Directeur de l agriculture^ Prudhomme. 266 DOCUMENTS OFFICIELS DIRECTION DE L'AGRICULTURE STATION d'essai OK NAMSANA Encouragemenl k V élevage du mouton. AVIS Le Directeur de rAgriciillure a l'honneur d'informer le public que la Station d'essai de Nanisana est en mesure de mettre tous les ans, gratui- tement, à la disposition des personnes qui en feront la demande par écrit, à l'avance, à M. le Sous-Inspecteur, chef de la circonscription agricole du centre, un certain nombre de saillies de béliers d'importation de variété solognote et de race algérienne. Dès réception de chaque demande, la Direction de l'Agriculture fera connaître à l'intéressé le nombre de luttes qu'il est possible de mettre à sa disposition. Les brebis à saillir devront être conduites, au moment où elles sont en rut, à la Station d'essai de Nanisana, où ces animaux seront reçus tous les jours, sauf les dimanches et fêtes, entre 7 heures et 11 heures du matin, et de 2 heures à 6 heures de l'après-midi. Il sera délivré pour chaque saillie une liche indiquant, outre le signa- lement sommaire de la brebis luttée, la date de l'accouplement, la race et le numéro du bélier employé. Le Directeur de l' Agriculture^ Prudhomme. ÉTUDES ET MÉMOIRES LES LÉGUMES Eï LES FRUITS A MADAGASCAR DANS LA CIRCONSCRIPTION AGRICOLE DE L'EST ^ I. _ CONSIDÉRATIONS GENERALES SUR LA PRODUCTION DES LÉGUMES ET DES FRUITS SUR LA COTE EST 4" ÉTAT ACTUEL DE LA PRODUCTION DES FRUITS Un assez grand nonil^re d'espèces fruitières existent sur la côte orientale de Madagascar, plantes indigènes ou plantes introduites à une époque plus ou moins éloignée, mais il résulte de la qualité médiocre de la plupart des fruits indigènes et du nombre insuffisant des arbres fruitiers de valeur venant du dehors ou de leur âge encore peu avancé, que la production fruitière est sensiblement inférieure aux besoins de la consommation. La population européenne et créole s'est accrue très rapidement depuis quelques années, dans la plupart des villes de la côte, et la demande des fruits a été naturellement en augmentant, en raison directe de cet accroissement, sans qu'il se soit créé cependant des vergers suffisamment nombreux ou suffisamment étendus pour alimenter les marchés. Il s'en suit qu'à part certaines espèces très répandues et en tête desquelles il faut citer le bananier, on ne trouve qu'un stock 1. Rapport établi conformément aux prescriptions de la circulaire ministérielle du là avril 1901, d'après les renseij;nements fournis par M^L Deslandes, sous-inspecteur chef de la circonscription agricole de l'Est; Martin, agent de culture de 2' classe, chargé de la Station d'Essai de l'Ivoloina ; Rollr)t. agent de culture de 2' classe, chargé de la pépinière agricole de Mananjary; Delgove, agent de culture de 2° classe, chargé de la Station d'essai de Fort-Dauphin, et Keating, contremaître d'agriculture chargé de la cocoterie de A^ohidotra. 268 ÉTUDES ET MÉMOIRES de fruits, insuffisant pendant la plus grande partie de l'année. Les prix se ressentent fatalement de cette pénurie, et sont ordinaire- ment très élevés, le plus souvent supérieurs à la valeur réelle du fruit. Il faut noter aussi que la plupart des espèces n'ont qu'une sai- son de rapport très limitée ; aussi ne rencontre-t-on sur la côte Est que des fruits peu variés pendant près de huit mois par an, même sur les tables les mieux servies. Ces faits ne sont pas passés inaperçus, et sans parler des efforts tentés par le directeur de l'agriculture, pour introduire des variétés nouvelles, sujet sur lequel nous reviendrons dans cette étude, on doit signaler une tendance générale à multiplier les arbres fruitiers. Il est donc permis d'espérer que dans un petit nombre d'années l'approvisionnement se fera dans de meilleures conditions, sous le rapport de l'abondance, de la qualité et de la variété des fruits. 2° ESPÈCES ET VARIÉTÉS FRUITIÈRES EXISTANT DANS LA ' CIRCONSCRIPTION AGRICOLE DE l'eST Pour donner une juste idée de la richesse fruitière de la côte Est, richesse déjà appréciable au point de vue du nombre des espèces et même sous le rapport de la production totale, il importe de distinguer tout d'abord les fruitiers indigènes et les fruitiers d'introduction. Les fruitiers indigènes ne paraissent que bien rarement sur les tables européennes, bien peu en effet présentent un parfum agréable, et il n'est possible de trouver dans la plupart d'entre eux qu'une légère saveur sucrée ou acidulée peu appréciée des euro- péens. On ne peut faire exception que pour quelques variétés d'oran- gers et de citrons, pour la goyave, l'ananas sauvage et la framboise indigène, aussi les Malgaciies, assez peu délicats cependant, ne multiplient-ils pas les fruits de leur pays. Depuis longtemps déjà, des espèces étrangères ont été introduites par les Arabes, ou apportées de Bourbon et de Maurice. Certaines se sont multipliées avec rapidité, par suite de la dis- persion facile des graines ok du déplacement fréquent des villages, aussi peut-on considérer comme complètement acclimatés sur toute la côte Est : le bananier, l'avocatier, le papayer, le pamplemoussier, LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 269 le cœur de bœuf, les deux variétés d'arbre à pain, le jacquier, le jamerosier, etc. On rencontre assez fréquemment aussi : le mandarinier, de bonnes variétés d"orang-es et de citrons, puis, dans certaines rég-ions, des tamarins. Malgré la fréquence de ces espèces, nous les classerons comme introduits, puisque c'est là en réalité leur véritable origine. Il est assez difficile, sous un autre rapport et pour une autre rai- son, de limiter la liste des fruitiers indigènes. Les Malgaches mangent des fruits d'un grand nombre d'espèces qui, à vrai dire, ne présentent aucune qualité fruitière ; tout ce qui n'est pas poison ou par trop amer, est susceptible d'être mangé par le Malgache, surtout lorsque la faim le presse. Mais il ne se donne ordinaire- ment aucune peine pour rechercher ces fruits, dont il apprécie lui- même assez peu les qualités. Il étend la main pour les saisir sur son chemin, et c'est tout. Ceci dit, passons rapidement en revue d'abord les principales variétés indigènes, dont les fruits sont comestibles, puis les variétés introduites. A) Fruits indigènes. Ananas {Bromelia ananas). Nom malgache, Mananasy. — L'ananas sauvage a les feuilles dures, épineuses sur les bords, longues et étroites. Cette plante est peu exigeante, au point de vue du sol On la trouve à la fois dans des terrains légers et sur des sols compacts. Ces derniers cependant semblent mieux lui conve- nir. 11 y est plus vigoureux et s'étend avec rapidité de proche en proche. Le fruit est d'un rouge ardent, assez gros, mesurant de 10 à 15 centimètres de longueur. Malheureusement, sa qualité est assez médiocre, et l'on n'a pas intérêt à multiplier cette variété. L'Ana- nas Victoria, bonne variété importée de la Réunion, existe en efl'et chez tous les planteurs et dans tous les jardins. Framboisier. Nom malgache, Voaroy. — Les framboisiers, ou pour mieux dire les ronces, sont appelés Voaroy [Bubus] par les indigènes; Betsimisaraka etVoaroisaka [Riibus pauciflorus) parles Malgaches du Sud. Une espèce fournissant une sorte de framboise d'un goût assez Bulletin du Jardin colonial. iS 270 ÉTUDES ET MÉiMOIUES ^■\ agréable est tort répandue sur tout le littoral, jusqu'à Fort-Dauphin. Les Européens apprécient généralement ce fruit qui atteint à peu près les dimensions d'une fraise de moyenne taille. Sa couleur est rouge clair. Les grains (fruits réels isolés) sont bien plus nombreux que chez la véritable framboise, mais sensiblement plus petits. Goyavier {Psklium). Nom malgache, Goavy. — Le Goya- vier est aussi un arbuste des terrains pauvres. On le rencontre non seulement dans la région sablonneuse, mais aussi dans les terrains argileux, à côté du Stry- chnos spinosa, des orangers et des citronniers. Il est ditTicile à dé- truire dans les défrichements, ses racines donnant de vigoureux rejets. Les Maliiraches sont friands de son fruit pyriforme, vert clair, prenant à la maturité une coloration jaune pâle. Cette Ijaie est remplie d'une chair rose très parfumée, d'un goût caractéris- tique. La goyave est certai- nement un des meilleurs fruits malgaches. On la sert sur les tal)les européennes et l'on en fait de très bonnes confitures. 11 existe un grand nombre d'autres espèces indigènes dont les fruits sont mangeables. Mais c'est à peine si (juelques-uns de ces végétaux méritent le nom d'à ibres fruitiers. Cilons cependant : Rameau de Goya\iLT avec fruits. 1° Le Nato \ hahricaria itiadiujnscai'icnsis). — Le Nato (Imbri- caria in;idagascariensis) de la famille des Sapotacées, est un LÉGCMES ET FRUITS A MADAGASCAR 271 arbuste assez abondant entre Farafangana et Mananjary, près de la mer, qu'on rencontre aussi à Fort-Dauphin et, d'autre part, au nord de Tamatave. Cet arbre donne un latex sans valeur, mais son bois, dur, rouge et veiné, est de très bonne qualité. L'écorce est rugueuse, creusée de sillons profonds chez les grands sujets. Le fruit, aplati suivant l'axe prologeant la direction du pédoncule, iTiesure environ 3 centimètres sur 3 cm. 1/2. Il es'; d'abord vert, puis devient brun à l'époque de la maturité. Les graines noyées dans une sorte de pulpe sont brunes et lui- santes, longues de 18 à 20 mm. La maturation a lieu de septembre à novembre. La qualité du fruit est fort médiocre. 2" Le Pandanus ou Vaquois. — Le Pandanus ou Vac{uois donne aussi des fruits comestiljles, mais c'est encbre là un fruitier de peu de valeur dont le principal mérite est d'être très commun sur toute la côte Est. Les fruits de plusieurs ficus sont également bons à manger, ceux du Nonoka (Ficus melleri) et du Voara, par exemple. Citons aussi, dans le même ordre d'idées, le Voahena (Landolphia), duquel on tire un excellent caoutchouc, mais dont le fruit est de qualité médiocre. Orangers et citronniers. Voasary. — On trouve à Mada- gascar des orangers et des citronniers sauvages. Ils sont même très communs sur toute la côte. On les rencontre soit sur la zone littorale, de nature sablonneuse, qui borde immédiatementl'Océan, soit plus dans l'intérieur, sur des sols parfois très compacts, souvent caillouteux ou rocheux, presque toujours pauvres et arides. Les citronniers et les orangers ne viennent point sous le couvert de la forêt, mais sont répandus dans la brousse de petite taille, où ils forment parfois des peuplements importants à côté des goya- viers et des Voavontaka (Strychnos spinosa). La qualité des fruits, sauf pour les citrons, est ordinairement assez médiocre. Les l)onnes variétés ont été introduites. Voavontaka [Strychnos spinosa). — Le Voavontaka est le fruit du Strychnos spinosa ou Brœhmia spinosa, arbuste épineux, très répandu sur toute la côte orientale. Il croît surtout dans les terrains sablonneux, souvent d'une pauvreté extrême. C'est assu- 272 ÉTUDES ET MÉMOIRES rément l'une des plantes les moins exigeantes au point de vue de la richesse du sol. Le tronc et les branches toujours torses, l'écorce creusée de sil- lons long-iludinaux assez profonds, les feuilles peu abondantes, dun VL'il terne aussitôt quelles ont un certain ài^e, lui donnent un aspect cliétif et rabougri. Les feuilles opposées sont entières, lisses et de forme ovale; les Heurs disposées en cymes à l'extrémité des rameaux sont d'un l)lanc verdàlre, les sépales sont soudés, ainsi cjue les pétales. Ils sont au nondjre de cinq, de même (jue les éta- mines. Le fruit est une grosse baie indéhiscente atteignant 10 cm. de diamètre. Il est presque sphérique. Une proéminence plus ou moins considérable de 1 enveloppe extérieure le rattache toutefois au pédoncule et donne parfois au A'oavontaka l'aspect dune poii-e très rentlée. La couleur d'abord d'un vert foncé devient à maturité jaunâtre puis brune. L'enveloppe extérieure est une c()([ue dure, épaisse de 3 milli- mètres environ, renfermant une pulpe mucilagineuse d'un blanc translucide avant maturation, puis brune lorsque le fruit est mûr, dans laquelle sont noyées des graines (une trentaine environ) ovales, plates, mais lui peu enflées vers le centre et mesurant 1 centimètre dans leur plus grande dimension. Les indigènes sont assez friands de la pulpe (jui ])Ossède un goût acidulé et sucré rappelant celui dune marmelade de ponmie de mauvaise qualité. Zaliana \ .irtrophjillani bajcrinnutn). — (x'tte belle essence du Centre existe aussi sur la cote et se rencontre très souvent au milieu de la brousse qui couvre en partie la zone sablonneuse du littoral. Son fruit, d un goût légèrement sucré, est à peine connu des Européens. Fruits d'introduction ancienne. Depuis de longues années, des espèces l'ruitièi'es d'une certaine valeur ont été introduites à Madagascar, et certaines sont devenues tellement communes cpi'on ne peut distingiUT à première vue si elles ne sont pas indigènes, (l'est ainsi (jue le manguier, K- b;inanier et le jamerosa, par exenq)le. croissent en pleine brousse. Le Jacquier (Artocarpus integrifolia) LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 275 Disons quelques mots de chacune des espèces d'introduction ancienne. Arbre à pain [Artocarpus incisa). — Les deux variétés « d arbre à pain » prennent naturellement place à côté du Jacquier. On les rencontre moins fréquemment que ce dernier, surtout l'arbre à pain proprement dit, qui, ne donnant pas de graines, se reproduit assez difficilement. Les racines émettent des drageons que l'on sépare et transplante au moment des grandes pluies. La variété à graines porte ici le nom de Pdiima. Cet arbre est plus vigoureux que le précédent et sa croissance plus rapide. Sa feuille en est plus grande et moins découpée. La chair de larbre à pain prend, lorsqu'elle est cuite, un goût farineux assez agréable. Elle est très riche en fécule et nourrissante. Dans le fruit du rhima, les indigènes recherchent particulière- ment les graines, qui, grillées ou bouillies, offrent un goût analogue à celui de la châtaigne. La chair entourant les graines est égale- ment comestible. L'arbre à pain, comme le jacquier, vient bien jus- qu'à Fort-Dauphin, tout à fait au sud de l'île, mais dans cette région les spécimens en sont rares; on ne les trouve qu'à la station d'essai, de même que tous les autres fruitiers d'ailleurs. Artocarpus integrifolia. Jacquier. Nom malgache, Ampa- lihe. — Le jacquier se trouve chez les j)lanteurs, et près des vil- lages indigènes ou de leurs anciens emplacements. Le jacquier est un fort bel arbre, atteignant de grandes dimen- sions, 20 à 25 centimètres de hauteur. Sa feuille entière est d'un beau vert foncé luisant, et les fruits dont il se charge le long du tronc et des grosses branches, fruits énormes et jaunes clairs, lui donnent un aspect tout particulier. A la maturité, le fruit se fendille, laissant exsuder un latex blanc ; les lèvres des fentes prennent une coloration brune. Si on le frappe légèrement, il rend un son caractéristique. Les indigènes sont friands de ce fruit, qu'ils coupent en tranches pour le consommer. La chair possède une odeur fétide fort désa- gréable, à laquelle l'Européen ne s'habitue que très difficilement. Les graines grillées sont comestibles et d'assez bon goût. Le jac- quier commence à rapporter à l'âge de quatre ou cinq ans dans de bonnes conditions. On rencontre l'Artocarpus integrifolia jusqu'à Fort-Dauphin, où il se développe encore d'une manière très satisfaisante. 276 I^nUDES ET MÉMOIRES Il existe également dans le centiv, iiolaninu'ul eu Eiuyrne (Station d'essai de Nanisana), à l'état de spécimens isolés, rabougris et chétifs. Son fruit ne dépasse pas, près de Tananarive, la grosseur d "un cornichon de moyenne grosseur. Le jacquier est employé avec succès conuiie ])rise vent et comme arbre d'avenue dans quelques plantations de la côte Est, notam- ment près de Mahanoro, sur les bords du Mongoro, Ananas Victoria [BroinclUi uunnnsi). Nom malgache, Mnnn- nasij . — L Ananas Victoria a été introduit de Maurice et de la Réunion. C'est une très bonne variété (jui vient l)ieu sur toute la côte. Elle y est malheureusement peu répandue. Cœur de bœuf [Anona rcllculata). — Cet arbre existe dans presque tous les villages de la côte Est. Le fruit bien mûr ne manque pas d'une certaine finesse dans le parfum qui malheureuse- ment n'est pas très accentué. L'Anona muricata (Corossol) et l'Anona squamosa (pomme can- nelle) sont beaucoup moins répandus. On ne les rencontre que chez quelques planteurs et toujours en petit nombre. Papayer [Carica papaya). Nom malgache, Papaj/. — Le papayei- a été introduit anciennement par les créoles. On le trouve dans les villes, autour des maisons et dans les villages indigènes. Ce fruitier présente de grands avantages, il ne demande aucun soin, rapporte au bout d'un an environ, et fructilie pendant presque toute l'année. Enfin son fruit possède un goût agréable, il est sain et facilite la digestion, grâce à le papaïne qu'il contient. La papaye confite est encore supérieure au fruit frais. On trouve d'excellents papayers jusqu'à Fort-Dauj)hin. Bibassier. Néflier du Japon {Eri/obo/rj/n Japnnica). Nom malgache, Bihasi/. — Le bilnissier. arbuste bien connu de tous les vovatreurs, donne d'assez bons fruits sur la côte Est. Il est abondamment représenté sur la plupart des exploitations agricoles de la circonscription. Jamerosa, jambosier ou jamerosier {EiKjcma jamhosa). Nom malgache, Zakuinhorizano. — C Cst aussi une plante d'intro- duction ancienne, qu'il est fréquent de rencDuIrer dans la brousse de la région côtière. ■■■Wft^' Le Cœur de Bœuf(Anona reticulata). LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 279 La jamerosa est un arbuste ou petit arbre, dépassant rarement 5 à 6 mètres de haut, ordinairement ramifié, à partir d'un mètre du sol. Le fruit a une odeur de rose prononcée (pomme rose). Il peut être considéré comme d'assez bonne qualité. Ce fruit distillé donne un alcool parfumé qui est très recherché. La plus forte maturation a lieu vers le mois de janvier. Cette essence se rencontre jusqu'à Fort-Dauphin. Elle n'est pas exi- geante sous le rapport du sol et mérite d'être utilisée pour border les avenues de peu de largeur. On peut ég-alement en tirer un très bon parti comme brise vent. Bananier [Musa). Nom malgache, Akondro. — Le bananier se rencontre principalement au bord des rivières. Les indigènes ne manquent jamais d'en planter quand ils établissent un nouveau village, et comme ils choisissent toujours un emplacement voisin de l'eau potable il s'ensuit que presque tous les bas de rivières ont été occupés par des villages indigènes. C'est pourquoi on y trouve très fréquemment des bananiers de dilTérentes variétés, plus ou moins vigoureux, sous la brousse qui les entoure.. La production de ces plantes est presque nulle. Elles ne donnent que quelques fruits mal développés, mais il suffit d'un simple défrichement sommaire pour les voir bientôt porter de beaux régimes. Ce qui rend la banane le fruit le plus commun c'est aussi la grande quantité de bananiers qu'on trouve chez les jîlanteurs, qui emploient en ell'et cette essence pour ombrager les jeunes cacaoyers et parfois aussi les caféiers pendant les deux ou trois années qui suivent la mise en place. Les bananes servent souvent à l'alimentation de porcs. Certaines variétés seulement sont vendues comme fruits, à raison de 0 fr. 50 le régime environ. La banane se trouve toute l'année, mais l'époque de forte production s'étend surtout de novembre à janvier. Les variétés que distinguent les indigènes sont nombreuses. Voici celles qui ont été réunies jusqu'ici au Verger de la Station d'essai de Tamatave (Mahanoro sur Ivoloina) : Akondro hihe, Akondro Mahe/'y, Akondro Malimasoa, Akondro Malabary , Akondro Oritavao, Akondro Batavia, Akondro Madinika [Banane figue), Akondro Kamhana [Banane double), Akondro Iranomhy , Akondro Baraba, Akondro Fotsiloha, Akondro Vatasoa, Akondro Mitra. 280 ÉTUDES ET MÉMOIRES Ajoutons la grosse banane Akomlro Tsiomeroa (traduction = dont on ne donne pas deux.) Le marché des villes de la cote est approvisionné de bananes pendant toute l'année av(H' abondance. Les indi^èn-'s les ;ij)p<>it(Mil par pirogues et les vendent au détail. Le bananier se rencontre sur loule la côte, et à une grande dis- tance dans l'intérieur. Mans^uie? [Mniif/ifcra iirlic'i). Nom Malg'acbe ; Man(i!\. — On trouve le manguier sur toute la cote Est, d;ins la brousse, sur les mamelons ou sur les plateaux où ont séjourné d(\s villages, enfin partout où le hasard a tait qu'une graine a été jetée. Il existe de forts beaux manguiers depuis le nord de File jus([u'à Fort-l)auj)hin, et il n'est pas très rare d'en rencontrer qui doivent être cente- naires. La portion de la Cote Orientale où se trouvent les plus beaux spécimens paraît être celle de Farafangana, notamment aux environs d'Ambohipeno, sur la Matitanana. On peut distinguer d'assez nom- breuses variétés formées parmi ces manguiers retournés à l'état sauvage et provenant sans doute de fruits d'origines diilerentes, mais l'étude de ces variations n'a pas encore été faite d'une manière assez approfondie pour qu'il y ait lieu d't'u parler ici. La mangue « Auguste » se rencontre assez souvent dans les ver- gers des planteurs ou autour des habitations dans les villes ; mais les indigènes ignorant ce que c'est que la grefîe n'oni pu multiplier cette bonne varii'té. On trouve parfois, nudgré cela, autour des vil- lages des mangues sauvages, v;u"iétés produites par le semis (pii ne numquent pas de sérieuses ({ualilés comnu> fruits. Le manguier présente deux lloraisons pres(pie successives. La première, qui se produit en juillcl ou eu aoùl à Tanuitave, ne donne pas de fruits; la seconde, au contraire, qui n'a lieu (pi'cn scpteml)re, est celle dont les llcurs se nouent. La maturation a lieu, suivant les terrains et les exploitations, de décembre à février dans la région de la côte h]sl. Il est à remarquer que, près de la nu'r, les manguiers sont très peu fructifères du coté exposé aux vents régnants. Le fait a été très caractéristique, surtout dans le courant de l'année 1900-1901. Le côté exposé à Test et au sud-est ne portait [)as du tout de fruits aux environs de ïamatave, à nu>ins qu'ils ne fussent abrités ; du côté ouest, au contraire, la récolte a été très abondante. Le Papayer. LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 283 Nephelium letchi iLetchi). — Cet arbre est un des fruitiers les plus appréciés de la côte. Il est relativement répandu à proximité de tous les centres d'une certaine importance, et de novembre à janvier le letchi paraît au dessert sur toutes les tables euro- péennes. On le reproduit exclusivement par marcotte, car le semis ne fournit ordinairement que des arbres de mauvaise qualité. Le mar- cottage du Nephelium letchi ne présente aucune difficulté. 11 suffit d'inciser circulairement ou de briser légèrement une branche de 2 ou 3 centimètres de diamètre environ, puis d'entourer la por- tion entamée d'un peu de mousse humide, de terre ou de bourre de coco. Les racines ne tardent pas à se développer si l'on a soin d'en- tretenir les marcottes humides en arrosant de temps à autre. La floraison a lieu de juillet à septembre. La maturation se pro- duit en novembre-décembre et janvier. Les premiers letchi paraissent à Tamatave vers le 13 novembre d'une façon à peu près régulière. Raketa {Opuntia). — La Raketa, nom donné par les indigènes à une cactée du genre Opuntia, extraordinairement abondante dans l'extrémité sud de l'île, donne une sorte de figue de barbarie d'assez bonne qualité dont on peut faire des marmelades d'un goût agréable. D'après M. G. Grandidier, cette cactée aurait été introduite dans le sud de Madagascar il y a environ deux ou trois cents ans. Avocatier iPersea Gratissima). — L'avocat est un bon fruit fort répandu sur la côte Orientale. On le trouve dans toutes les propriétés et près d'un grand nombi^e de villages indigènes. Il se reproduit par graines avec une grande facilité. La crème jaunâtre entourant le noyau constitue un excellent dessert seule, additionnée de sucre et de kirsch, ou encore après l'avoir salée et poivrée. L'avocatier est très fructifère et peu exigeant comme sol. La floraison se produit d'août à octobre, la maturation de décembre à avril. Arbre de Cythère 'Spondias Cytherea). — Ce grand arbre, presque dépourvu de feuilles pendant la plus grande partie de l'an- née, donne des fruits d'assez bonne qualité, recherchés en particulier par les créoles. 284 ÉTDDKS ET MÉMOIRES Badamier [Terminalia Calappa). Nom malg-ache, Antafana. — Arbre introduit aujourd'hui très répandu sur la côte Est, près de la mer, et particulièrement sur le bortl des rivières. L'amande de cette essence au port si caractéristique est comestible, mais peu recherchée par les indigènes. Tamarin [Tamarindus indica). — Cette essence a été proba- blement importée de llnde. Lu pulpe rou<2^eàtre contenue dans le fruit est très rafraîchissante et possède un goût légèrement sucré et acidulé, assez ag-réable même pour les Européens. Le tamarin se rencontre presque exclusivement dans l'extrême sud de lîle, sur les bords des cours d'eau des régions Androy et Mahafaly, où il est représenté par de très beaux spécimens. On est souvent heureux, dans ces contrées arides et souvent privées d'eau, même sur le bord des rivières, d'avoir recours au tamarin pour se désaltérer. On en rencontre également quelques beaux spécimens de cet arbre à Antsirana (province de Diego Suarez). Rappelons en passant que le Tamarindus indica est fréquemment employé pour hâter la coagulation du latex à caoutchouc. Cette essence est certainement un des plus beaux arbres d'avenues des pays tropicaux. Citons enfin quelques très rares sujets de Carambolier (Averrhoa Carambola) et de Goyavier de Chine (Psidium Cattleyanum). Le Carambolier donne de nombreux fruits gorgés d'un liquide acidulé très rafraîchissant, mais sans grand parfum. Le goyavier de Chine produit un bon fruit et mérite d'être mul- tiplié. 3" INTÉHÈT DE LA PRODUCTION FRUITIÈRE L énumération ({ue nous venons de faire montre que la côte Est de Madagascar, mieux partagée que la plupart des autres régions de l'île et que bien d'autres colonies, possède cependant peu d'espèces fruitières de bonne qualité, en quantité suffisante pour approvisionner toute l'année les nuirchés des principaux centres. Les letchi, les ananas, les mangues, les avocats, quelques variétés de bananes, voilà les fruits de bonne f[ualité, et encore les quatre premières espèces ne garnissent-elles U's tables que de novembre à la mi-avril. Tout le reste de l'année on doit se contenter de bananes. Le Carambolier. Bulletin du Jardin colonial. 19 LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 287 On sait quelle est, dans tous pays, particulièrement aux Colonies, l'influence salutaire des fruits sur les conditions de l'existence, leurs qualités hygiéniques, le plaisir que Ton éprouve à manger un produit frais, au lieu des conserves auxquelles on est trop souvent forcé de recourir aux Colonies. Il est donc impossible de ne pas reconnaître l'importance des études entreprises pour sélectionner, augmenter et répandre le plus possible les bonnes variétés dans toute la colonie. L'écoulement des fruits sur la côte Est de MadaiJrascar est assuré. Les besoins des marchés sont encore bien loin d'être atteints en ce moment. Si Tamatave et Vatomandry sont relativement bien approvi- sionnées, il n'en est pas de même de beaucoup d'autres points de Mananjary et de Fort-Dauphin par exemple. On jjourrait donc et l'on devrait établir de grands vergers, au moins à proximité des centres principaux. La plupart des villes et des gros villages de la côte sont, en effet, des ports plus ou moins actifs, et en cas de surproduction les navires de passage ne man- queraient pas d'offrir un débouché assez important aux producteurs européens ou indigènes. Il est très probable, enfin, qu'on trouvera aisément à écouler une quantité très considérable de fruits de bonne qualité dans le sud africain, lorsque les vergers de la côte Est seront mieux approvi- sionnés et que les communications avec l'Afrique australe seront devenues plus fréquentes et plus régulières. La production des fruits offre dans la circonscription agricole de l'Est une importance qui n'a pas été perdue de vue par les Sta- tions agronomiques. Depuis sa création, la Direction de l'Agricul- ture n'a pas cessé en effet de s'occuper de la recherche, de l'introduc- tion, de la sélection et de la multiplication de toutes les espèces fruitières susceptibles de réussir dans la colonie. Nous verrons, dans la deuxième partie de ce travail, tout ce qui a été fait dans cette voie par la Sous-Inspection agricole de l'Est. 288 ■ ÉTUDES ET MÉMOIRES II. - CONSIDERATIONS GENERALES SUR LA PRODUCTION DES LÉGUMES 1° ÉTAT ACTUEL DE LA PRODUCTION DES LÉGUMES On peut répéter à peu de chose près pour les légumes ce qui a été dit pour les fruits. La production légumière ne répond pas aux besoins de la con- sommation dans la plupart des centres. Les indigènes^ paresseux et sans initiative, ont négligé dans la culture des légumes européens une source de bénéfices facile qui leur était assurée dans le voisi- nage des villes de la côte. Ils se contentent de faire quelques légumes indigènes pour leur consommation ou pour la vente aux Malgaches qui, travaillant dans les villes, ne peuvent se livrer à la culture. Quelques Européens et quelques créoles ont créé des jardins potagers où ils cultivent principalement pendant 6 mois de l'année, d'avril à octobre, la plupart des légumes d'Europe, qu'ils vendent très aisément sur le marché; mais il y a toujours une demande supérieure à la production, aussi les prix sont-ils constamment très élevés. Pendant la mauvaise saison, il est très difficile de faire de la culture potagère dans la partie moyenne de la côte. A mesure qu'on s'avance vers le Sud, les difficultés sont moins considérables, mais n'en restent pas moins sérieuses. Les ports oii font escale les paquebots venant des colonies voi- sines reçoivent, de novembre à avril, une assez grande (juantité de légumes de la Réunion, mais ces produits atteignent des prix excessifs ; le chou, par exemple, devient à cette époque de l'année un légume de luxe, puisqu'on arrive à le payer 1 fr. 50 pièce, 2 francs, 2 fr. oO et (juelquefois plus. 2° ESPÈCES ET VARIÉTÉS DE LÉGUMES EXISTANT OU INTRODUITS DEPUIS LO.NG'IEMPS DANS LA CIRCONSCRIPTION .\) Lcjjumos indir/ônes. Malgache, Anana : Beaucoup d'herbes ou de plantes croissant à l'état spontané sont consommées par les indigènes qui les ajoutent LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 289 volontiers à leur nourriture habituelle composée de riz. Ce sont les « brèdes ». Il y en a une quantité considérable, et il faut renoncer à en donner une liste complète qui d'ailleurs ne présenterait pas un très g-rand intérêt. Nous en citerons cependant un certain nombre, et en particulier celles dont on connaît le nom botanique : Ananafana composée, une des brèdes les plus répandues. Anamafaitra ou brède Martin Solanum nigrum. Anamalaovary Gonyza bellidifolia. Anambalaza Alternanthera sessilis. Anamamy Solanum nodiflorum. Anambondihena Gheponodium murale. Anampatsa Amaranthus spinosus. Angivry Salanum heterocantum. Anampozalabrv Convza livitella. Ananakondro Gelosia trig-yna. Anandaing-o Lomelia natelensis. Anandrambo Gynura cernua. Ananandrano Nasturtium officinale. Anangoaika Hypericum japonicum. Anantarika Amaranthus tristis. Anantsaritaka Drvmaria corda ta. Anantsinahy Bidem bipinnata Anantsing'itantsoavahy Senebiera didg-nia. Anantsong'a Brassica campestris. Anantsong-anala Géranium simense. Les indig-ènes mangent, en outre, après cuisson, les feuilles de patates, de maniocs et de saonjos. Quand le malgache a faim, tout végétal qui n'est pas poison est plus ou moins brède pour lui. Quand il n'a plus de riz, de patates ou de manioc, il s'attaque au chou des raphias ou à celui du palmier lafa, commun dans la région forestière comprise entre Mananjary et Fort-Dauphin, et à diverses racines. Il y ajoute des brèdes d'espèces cultivées ou sauvages, pre- nant d'abord celles qu'il considère comme les meilleures. Il est parfois obligé aussi, comme cette année, d'avoir recours au chou du ravinala, qui n'est pas mangeable pour les Européens à cause de son amertume. [A suivre.) ESSAI SUR LA DKTE RUMINATION DES AMIDONS L'amidon est une matière universellement répandue dans le rèf^ne végétal ; les espèces botaniques qui en produisent en abon- dance sont nombreuses. Cet amidon se présente en grains possé- dant des caractères fixes pour une espèce donnée, mais variables dans certaines limites d'une espèce à l'autre ; on conçoit donc que l'étude raisonnée d'un ensemble de caractères conduise, par l'exa- men morphologique d'un amidon, à déterminer l'espèce botanique qui la produit. D'autre part, l'amidon étant l'élément fondamental de loute farine, on comprend facilement l'intérêt que présente cette déter- mination. L'examen microscopique peut, par exemple, dans de nombreux cas, révéler des mélanges, constituant des fraudes, par suite de la valeur diiîérente accordée à chaque farine ; ainsi l'intro- duction de farine d'orge ou de seigle dans le produit de la mouture du froment est considérée comme une fraude, et, dans le commerce, la valeur maxima est accordée à la farine de blé exempte de ces farines étrangères. Il en est de même pour les farines servant à l'alimentation du bétail : les amidons de légumineuses se révèlent très souvent dans les farines achetées comme étant le produit de la mouture de l'orge. Ces mélanges constituent des fraudes, par suite de l'action phy- siologique [)ropre de chacune de ces farines. Bien que la base de ces farines, c'est-k-dire l'amidon, soit considéré jusqu'à présent comme une substance de ])ropriétés chimiques constantes, quelle que soit l'espèce botanique qui l'a produite, il n'en est pas moins vrai que cha(pie farine jouit de qualités particulières correspondant à un l)esoin de la j)ratique ; il en est ainsi pour les farines de maïs et de sarrasin dont les propriétés dillerentes sont très connues des aviculteurs : tandis que h\ première convient très ])ien lorsqu'il s'agit de pousser les volailles à l'engraissement, la seconde est employée lorsqu'il s'agit d'activer la ponte de certains oiseaux. La ESSAI SUR LA DETERMINATION DES AMIDONS 291 farine d'orgue est un aliment rafraîchissant qu'on distribue aux ani- maux d'élevag-e. Dans l'alimentation des chevaux, l'avoine est un aliment de surexcitation fonctionnelle que l'orge ou le blé ne sau- rait remplacer. Ces différences de propriétés proviennent surtout de produits que la mouture laisse à côté de l'amidon ; pour être secondaires, ils n'en conservent pas moins leur action spécifique qui explique l'utilisation spéciale de telle ou telle farine. Ces considérations relatives aux amidons indigènes et concer- nant l'adaptation d'un certain nombre de farines à des besoins par- ticuliers nous sont de pratique familière ; elles peuvent et doivent être étendues aux farines et aux fécules extraites des plantes colo- o o O O O o p S 0 "< ^ o^ o " 8 0 0 C» %o 0 a 0 o" '■ . C 0 Oc. '^ o a Q o " 0 a o O 0 o oO Oi-yza sativa Gr. 400 d. Dimension 4-G {jl. Cycas circmalis Gr. 400 d. Dimension 8-3G jj.. niales avec l'espoir de mieux satisfaire à certaines exigences. Il est donc intéressant d'étudier les amidons exotiques au point de vue morphologique et de les différencier assez nettement pour en assu- rer la reconnaissance dans un mélange commercial ; c'est le seul moyen pratique d'estimer le degré de pureté et par suite la valeur d'un lot de farine amené sur le marché. Nous devons aussi considérer la valeur que présente chaque ami- don au point de vue industriel, valeur qui peut dépendre des pro- priétés physiques de la fécule. A l'heure actuelle oîi l'alcool est à la veille de devenir un producteur d'énergie couramment employé par l'industrie, et où cet emploi ne dépend plus en somme que d'une question de prix, il convient de se renseigner sur les sources capables de produire cette matière dans les conditions les plus éco- nomiques. La transformation de l'amidon en alcool ne serait certes pas une innovation, même pour nos Colonies. Il est fort probable 202 ÉTUDES ET MÉMOIRES c[ue le.s nombreuses sortes d'amidon se eomportent dilVéremment H l'ég-ard des agents saccharifiants au point de vue de la plus ou moins facile transformation de l'amidon en glucose puis en alcool ; on peut espérer tirer de l'examen microscopique une indication capable d'orienter les recherches à faire sur ce sujet. On pourrait aussi trouver entre la présence ou l'absence de stries, la condensa- tion des éléments constitutifs de chaque grain, l'agglomération ou la liberté des grains eux-mêmes, et la rapidité ou la totalité de 1 at- taque du grain d'amidon quelque relation permettant d'expliquer dans une certaine mesure les variations observées dans le traite- ment de chaque amidon par les acides ou les diastases ; cette expli- cation pourrait au moins suflire en attendant le jour où la chimie saura représenter par une formule spéciale l'amidon de chaque espèce botanique ; car. à l'heure actuelle, il parait déjà bien pro- bable que les amidons constituent un groupe de corps voisins et non une substance unique, et que les différences d'aspect et de pro- priétés physiques sont en relation avec des variations plus profondes de nature chimique. Des travaux récents sur la composition de la matière verte des végétaux ont posé les bases d'un groupe de chlo- rophylles, substitué à une matière de composition immuable ; la relation qui existe entre la substance assimilatrice et les produits qu'elle fournit vient encore confirmer notre manière de voir au sujet des divers amidons. La valeur propre accordée à chaque amidon au point de vue ali- mentaire ou industriel, les renseignements que peut tirer l'industrie d'un examen approfondi des caractères extérieurs du grain, nous amènent à discuter ces caractères, puis à en déduire une classifica- tion permettant la détermination rapide et facile d'un amidon donné. Nous nous sommes surtout appliqués à établir un tableau dichotomique qui puisse être facilement élargi et dans lequel il soit facile d'admettre sans modifications fondamentales telle ou telle nouvelle sorte dont on aurait intérêt à faciliter la détermination. Un amidon est rarement reconnaissable par le fait d un seul caractère ; ce n'est guère que lors([u'on s'est assuré de la présence d'un certain nombre des particularités déterminées à l'avance qu'on peut se prononcer sur l'espèce botanique productrice de l'amidon examiné. Ces caractères groupés ainsi pour la détermination d'un amidon et considérés d'une manière générale ont chacun une impor- tance à peu nrès é([uival(;nte ; il est donc bien difficile d'attribuer ESSAI SUR LA DÉTERMINATION DES AMIDONS 293 en toute rig-ueur à l'un d'eux une valeur suffisamment supérieure qui permette de le choisir comme point de départ pour l'établisse- ment de quelques g-rands g-roupes dans l'ensemble des amidons que nous voulons examiner. La forme et les dimensions du grain, la forme du hile, la netteté des stries sont autant de caractères précieux pour la diag-nose que nous poursuivons. Cependant, lors de l'examen d'une fécule, le caractère qui frappe le plus, immédiate- ment, est la dimension ; c'est elle que l'on cherche à déterminer en premier lieu, et pour cela on établit souvent des moyennes qui n'ont qu'une valeur très relative, si l'on s'en rapporte aux variations qu'on Batatas edulis Gr. 400 d. Dimension 20-30 a- Dioscorea alata Gr. 400 d. Dimension 20-40 a. observe dans les chiffres fournis par les différents auteurs. L'amidon de blé, par exemple, présente des grains mesurant 45 [x, ceux-ci étant en petit nombre ; il en présente également dont le grand dia- mètre n'atteint que 12 [j,. Entre ces deux dimensions extrêmes sont compris tous les intermédiaires ; l'établissement d'une moyenne arithmétique entre le maximum et le minimum n'aurait aucune valeur ; une dimension moyenne n'a d'intérêt qu'à la condition qu'elle s'applique au plus grand nombre, et rien n'indique que la moyenne obtenue par le procédé ci-dessus s'applique à la majorité des grains de l'amidon en question ; il est beaucoup plus intéres- sant d'établir directement la dimension s'appliquant au plus grand nombre de grains, mais là encore réside une difficulté, car cette dimension dépend beaucoup de l'appréciation de la persenne qui opère. Cette variation dans les dimensions moyennes provient surtout 294 ÉTUDES ET MÉMOIRES d'un écart considérable entre les diamètres des grains extrêmes ; cependant il est quelques amidons tels que ceux du riz, du Dolichos tuberosus (graines) dont les extrêmes sont tellement voisins qu'il n y a plus aucune place pour les hésitations dans la détermination de cette moyenne; d'autre part, la valeur même de ces dimensions extrêmes permet de ranger ces amidons dans un même groupe. C'est donc sur la faible dimension des grains de quelques amidons et sur leur uniformité qu'est basée la première division établie dans notre tableau ; nous réunissons dans un même groupe les amidons mesurant moins de 6 ;j,, dont les variations de diamètre ne dépassent ordinairement pas 2 [j., tandis que, dans l'autre groupe, sont rap- prochés tous les amidons mesurant plus de 6 [;, et dont les variations de diamètre sont, en général, beaucoup plus étendues. L'examen de deux amidons très opposés sous le rapport de la dimension et de l'uniformité fera comprendre la valeur de cette première division : le grain élémentaire de l'amidon de riz est le type de ceux dont le diamètre ne dépasse point 6 [j, ; les variations de diamètre s'étendent de 4 à 6 [j,. A la seule inspection de ce caractère, on le différencie très nettement, sans que le moindre doute subsiste, de l'amidon de cycas^ lequel, sans être très différent sous le rapport de la forme, présente des variations de dimension beaucoup plus étendues, comprises entre 8 et 33. Les amidons dont les grains mesurent plus de 6 [j. étant de beau- coup les plus nombreux, il convient d'avoir recours à d'autres carac- tères également très nets pour établir des subdivisions dans cha- cune desquelles il sera plus facile de différencier chaque amidon. La forme même des grains est un caractère par trop variable pour ser- vir de base à une division aussi générale que celle que nous voulons établir maintenant. Son étude nous amènerait à admettre un grand nombre de groupes ; il ne serait plus possible de ré2)ondre à chaque question par affirmation ou négation ; on devrait admettre des caté- gories intermédiaires dont il serait assez délicat de saisir les limites. De plus, la forme est souvent difficile à définir, soit par suite de son irrégularité, soit à la cause de la diversité que présente parfois un même amidon dans l'aspect de ses grains. Il était aussi très natu- rel de se servir, pour l'établissement de ces subdivisions, de ce qui frai)pe le plus dans la forme, c'est-à-dire l'allure générale du con- tour. Ce contour se présente avec une plus ou moins grande régu- larité permettant d'établir deux classes : dans l'une le contour est ESSAI SUR LA DETERMINATION DES AMIDONS 295 continu, dans l'autre il est anguleux. Ces deux manifestations du même caractère sont suffisamment nettes pour qu'il soit inutile d'in- sister, h avoine fournit un amidon dont le contour est des plus irréguliers ; les contours des grains sont des polygones diversement irréguliers; nous rangeons donc cet amidon dans la catégorie des amidons à contour anguleux. L'amidon de sarrasin est également k contour anguleux par suite de la forme polygonale de la projection de ce grain. Par contre, l'amidon de haricot possède un contour continu ; aucun angle saillant ou rentrant ne vient tourmenter la ligne courbe qui constitue le contour. Nous rangeons dans la même catégorie tout amidon à contour polygonal régulier. Dans ce dernier Maranta arundinacca 400 d. Dimension 23 à 53 a. Voandzeia subterranea 400 d. Dimension 40-60 [j.. cas on remarque très souvent des arêtes de polyèdre; ceci est vme conséquence naturelle du contour polygonal, étant donné que ce dernier provient d'une forme polyédrique du grain examiné dans l'espace. Cependant il ne faudrait pas se laisser influencer par cette présence d'arêtes dans la projection du grain, et conclure de cette observation que le contour est forcément polygonal : les amidons de Cycas et de Ba/a/as présentent de nombreuses arêtes de polyèdre, tout en offrant un grain à contour circulaire, ou ovale, quelquefois déformé. Malgré la priorité que nous avons accordée à l'allure du contour dans l'utilisation des caractères pour la détermination des amidons, il n'en est pas moins vrai que cette allure est intimement liée à la forme générale et qu'il convient d'utiliser celle-ci pour la subdivi- sion des catégories basées sur la régularité du contour. La forme est certainement vm des caractères les plus plastiques ; étant don- 296 ÉTUDES KT MÉMOIRES nées deux formes très difTérentes, il est possible de trouver entre elles tous les intermédiaires. De plus, un même amidon présente souvent de nombreuses formes ; la place qu'il peut occuper dans notre classification serait alors à même de changer avec Tapprécia- tion de chaque observateur. Cependant, il est quelques formes qui, n étant réalisées que par un seul amidon, deviennent caractéris- tiques ; ce cas se présente pour l'amidon de certaines if/nanws qu'on reconnaît par la présence de grains triangulaires à angles arron- dis; une autre forme caractéristique est celle qu'on observe dans l'amidon de Maranta arundinacea : des grains ovales présentant une ou plusieurs hernies par suite de la coalescence de plusieurs grains très inégaux, des grains trilobés en vertu de la même coalescence, permettent de déterminer cet amidon, à la simple constatation de ce caractère. Ce sont là les seuls amidons caractérisés par la forme ; nous avons réuni dans un même groupe tous les amidons à grains ovales, arrondis ou réniformes, n'ayant pas saisi entre les grains arrondis et ovales ou ovales et réniformes une limite suffisamment nette, et ces formes se rencontrant très souvent ensemble dans un même amidon. L'amidon de Mucuna utilis est un des plus hétérogènes sous le rapport de la forme : les grains j sont arrondis, ovales et quelque- fois réniformes. L'amidon de Baiatas présente également des formes très variées : les grains y sont circulaires, en calottes de sphère, ovales ou irréguliers. Jusqu'ici, pour la détermination, nous n'avons nullement fait intervenir la nature du milieu dans lequel on étudie l'amidon. Par suite, sans doute, de la plus ou moins grande différence de réfrin- gence entre le milieu utilisé et l'amidon examiné, il est des liquides dans lesquels certains détails ne paraissent pas ; l'eau nous semble être le milieu le plus convenable pour l'observation des caractères que nous employons dans la suite de cette classification. La glycé- rine ne permet pas toujours de distinguer ces détails, alors même qu'ils sont très visibles dans l'eau ; c'est ainsi que les amidons de Voandzo.ia subterranea et de Mucuna ufilis, dont le hile et les stries sont très nets dans ce dernier liquide, semblent totalement dépoui'- vus de ces accidents si on les examine dans la glycérine. Un autre phénomène que la réfringence du milieu peut être la cause de ces aspects différents présentés par les grains d'un même ESSAI SLR LA DLTERMINATION DES AMIDONS 297 amidon : cette autre cause conviendrait surtout pour expliquer la netteté des stries tandis que la différence de réfringence entre le milieu et le grain pourrait être invoquée pour rendre compte de la visibilité du hile. On sait, en effet, que les grains d'amidon sont constitués par une série de couches alternativement anhydres et hydratées de la matière amylacée. Par dessiccation prolongée, l'eau des couches hydratées s'évapore ; la composition chimique des diffé- rentes assises devient analogue ; par suite, les indices de réfraction, différents auparavant d'une quantité variant suivant la teneur en eau de chaque couche, deviennent identiques et les stries cessent d'être visibles. Le même phénomène de dessiccation se produit dans un Sagus Ruinphii 400 d. Dimension 9 à OS [jl. Curcunia longa 400 d. Dimension 45 à o'J ij.. liquide désh3'dratant ; on se place dans ces conditions si on plonge de l'amidon dans la glycérine ou l'alcool. Par contre, en observant les grains dans l'eau, les couches hydra- tées en partie modifiées dans leur composition par un séjour pro- longé dans l'air sec, reprennent peu à peu leur constitution normale et la netteté des stries s'accentue. Ces observations étant faites, nous ne nous permettons pas d'avancer que les amidons de lentille, de blé, de sorgho sont dépourvus de stries ; que ceux de Canna, de blé, sont privés de hile, mais seulement que ces accidents ne sont pas visibles dans l'eau alors qu'ils pourraient l'être dans un milieu différent et en par- ticulier de plus faible réfringence. Par suite de l'influence du milieu sur l'hydratation ou la dessicca- tion des couches, il convient, pour observer les caractères invoqués dans le tableau, de n'examiner un amidon, quant à l'apparence des 298 ÉTUDES ET MÉMOIRES stries, qu'au bout d'un instant d'immersion dans le milieu choisi ; il faut, en effet, accorder aux grains le temps nécessaire pour que l'ac- tion du liquide puisse se produire. Cette précaution doit être parti- culièrement observée dans l'examen de l'amidon de Vvjna catiang, dont les stries n'apparaissent dans l'eau qu'au bout d'un instant. L'amidon de cette espèce paraît particulièrement sensible à la des- siccation ; mais, d'une manière plus générale, il faut bien admettre que les divers amidons perdent et récupèrent [)lus ou moins facile- ment leur eau dans des conditions déterminées suivant leur taille et la disposition intime des couches dont ils sont formés. Les stries, d'autre part, n'en sont parfois visibles qu'avec un très faible éclaire- ment. Ce n'est donc qu'au bout d'un instant et après avoir éclairé diversement la préparation qu'on pourra se prononcer sur la pré- sence ou l'absence de stries. Ces différences d'aspect des stries nous ont été d'une certaine utilité pour la détermination de quelques amidons : c'est ainsi que nous différencions les amidons de Cajanus et de Cicer d'après ce fait que les g-rains d'amidon de Cicer présentent des stries visibles dans l'eau seulement, tandis que ceux de l'amidon de Cajanus laissent apparaître leurs stries dans l'eau et dans la glycérine ; les stries de ce dernier sont d'ailleurs beaucoup moins nettes dans la glycérine que dans l'eau, ce qui concorde parfaitement avec ce que nous avons dit précédemment relativement à la réfringence et à la déshydratation. En résumé, l'observation du hile et des stries fournit, dans quelques cas, des indications précieuses, mais cette observation est des plus délicates et pourrait entraîner à des erreurs, si l'on ne s'entendait bien au sujet des conditions où elle doit se faire. Le caractère fourni par la forme du hile a été utilisé après l'ob- servation des stries pour former des groupements moins importants. Le hile le plus simple est constitué par un point obscur plus ou moins excentré par rapport au grain lui-même, et qu'on n'aperçoit ordinairement que lorsque les stries sont visibles. Il est constitué par le noyau primitif autour duquel se sont déposées les couches de réfringences différentes, d'épaisseur partout égale lorsque celui- ci est central {Ci/cas), ou d'épaisseur inégale lorsqu'il est excentrique. Les amidons de Sagus, de Curcuma^ de Maranta présentent un hile punctiforme. Le hile étoile se réduit quelquefois, comme dans le Manioc par ESSAI SUR LA DÉTERMINATION DES AMIDONS 299 exemple, à un point duquel partent 2, 3 ou 4 branches; quelquefois, au contraire, il comprend une large craquelure plus ou moins cir- culaire, de laquelle partent un grand nombre de fêlures ; ce cas se présente pour l'amidon de Batatas edulis. Le hile linéaire varie également ; il se compose parfois d'une ligne droite, plus souvent un peu courbe, dirigée suivant la plus grande dimension du grain, sans aucune ramification, c'est ce que nous appe- lons un hile linéaire simple : amidon dePisum, de Cicer, de Cajanus. Il peut se composer aussi d'une ligne encore dirigée dans le sens de la plus grande dimension du grain, mais hérissée de ramifica- tions très courtes n'altérant pas toutefois la nette.té de la direction : Manihot utilissima Gr. 400 d. Dimension 3-20 p.. Sorg-hum vulgare Gr. 400 d. Dimension 25-45 [x. le hile de l'amidon de Vigna catiang est dans ce cas. Enfin le Voand- zeia subterranea, le Miicuna utilis, et à un degré moindre le Pha- seolus, présentent un hile méritant k peine ce nom. Si parfois dans ces amidons le hile est net, il est le plus souvent constitué de lignes tout à fait irrégulières, quelquefois indépendantes les unes des autres, faisant que Tensemble paraît plutôt un réseau de craquelures qu'un hile ramifié. Cette apparence irrégulière du hile est très accentuée lorsque les grains sont très secs. On comprend en efi'et que la con- traction du grain sous l'action de la sécheresse amène des craque- lures de la matière. La dessiccation des grains d'amidon peut même, en certains cas, donner à un hile régulier, en temps ordinaire, cet aspect accidenté. D'autres caractères nous ont été d'une certaine utilité pour la détermination spécifique de chaque amidon. L'agglomération des grains entre eux nous a par exemple permis de former les deux 300 ÉTUDES ET MÉMOIRES groupes : Avena et Polygnnuin far/opjjruni, Zea mays et Dolichos fuberos us [tubercule s); clans les deux premiers, les grains se présentent souvent en amas, même après la pulvérisation dans un mortier, tan- dis qu'ils sont isolés les uns des autres dans les deux derniers. On comprend très bien la relation qui existe entre cette agglomération et la forme des grains. Ce groupement amène forcément des com- pressions latérales dont le résultat est de former des polyèdres assez réguliers dont le contour apparent est par suite anguleux. Cette relation se vérifie dans le riz, l avoine, où les amas forment en réalité des grains composés. Un caractère très particulier est celui que nous n'avons remarqué que sur les grains d'amidon de Sorghuni viiUjare. Il s'agit d'une irradiation se produisant autour d'un seul point central, ou de plu- sieurs points diversement situés les uns par rapport aux autres. Le contour arrondi joint à cette particularité nous a donné l'impression d'un nodule, et nous traduisons ce caractère par : aspect noduleux. Enfin, en dernier lieu, nous avons tenu compte de la dimension propre des grains, mais plutôt comme d'un moyen de contrôle que d'un facteur de détermination. Les dimensions indiquées s'appliquent aux extrêmes sans toutefois tenir compte des monstruosités qui se rencontrent parfois dans un amidon même homogène. Nous nous sommes abstenus d'établir des moyennes, étant donnée la valeur particulière que chaque observateur peut leur attribuer. La valeur que nous accordons à chaque caractère étant établie, et le sens que nous prêtons à chaque expression étant défini d'après les remarques précédentes, il devient facile de se servir du tableau ci-joint qui résume nos observations. Nous nous sommes efforcés de n'employer que les caractères les plus nets et différant le, plus d'un amidon à l'autre, de telle sorte que l'interprétation équivoque dun caractère est à peu près impossible. Malgré les nombreuses espèces étudiées dans ce tableau, il présente encore bien des lacunes; étant donné un amidon qui n'y figure point, il est toujours facile, on s'aidant des caractères invoqués, de le faire entrer dans un groupe déterminé, et de trouver la sorte mentionnée dont il se rap- proche le plus ; la comparaison directe de l'amidon classé et de l'amidon à introduire permettra toujours de les distinguer, et par conséquent de généraliser l'emploi du tableau. DUFOUH. o , a 03 a ■j^ m 03 -O ex < Bulletin du Jardin colonial- 20 L'AGRICULTURE DANS LA RKCxIOX NORD DU SOUDAN ET LES ESSAIS DU JARDIN DE GAO l. NATURE DU SOL Boches. — Nous trouvons d'abord un terrain rocheux com- j)renant des g-neiss, quartz, quartzines, feldspaths des grès noi- râtres ferrug-ineux avec argile alumineuse du Dévonien des schistes, des grès micacés et des g-rès verts du système permien des poudingues appelés conglomérats de Dwyka dans l'Afrique Australe et composés de cailloux, de quartzine, de grès ferrugi- neux, de gneiss et de granité dans une pâte grise verdàtre (système permien). Enfin les gaizes et autres pierres argileuses. Ces terrains rocheux émergent ça et là (Tondibi Fagoua, Heïni, Thanaziten, monts x\ida, etc.) et portent des acacias (ferrugineux et girafii), des mimoses (ferrugina et nilotica), quelques rares balanites et des Teyras. La désagrégation de ces roches a donné la partie inculte du sol comprenant des graviers, des sables et des terrains plus ou moins argileux. Graviers. — Ils n'ont pas une grande importance dans la région on les rencontre parfois à la surface du sol ou le plus sou- vent à plusieurs mètres de profondeur, par exemple dans le lit du Niger et dans les terrains d'alluvion, notamment ceux des alentours de Gao, qui proviennent des alluvions du Oued Nuouag, à son point de réunion avec le Niger. Ces graviers sont formés de fragments de quartz, de quartzite, de grès vert, de grès rose, de grès micacés ou ferrugineux et noirs, etc.. Les calcaires font absolument défaut. Sables. — Ils forment presque la totalité du sol meuble et sont constitués de grains de quartz dv 1/4 millimètre au [)lus. Ces L AGRICULTURE AU PAYS DE GAO 303 sables renferment de 4 à 5 % d'argile de couleur ocre et des détritus organiques. Ils s'amoncellent en dunes plus ou moins hautes, aux formes chang-eantes, se laissent emporter par les vents et demandent à être fixés. Terrains argileux. — On trouve des terrains argilo-silicieux ou silico-argileux dans les îles du fleuve. Dans les marig-ots, le lit des Oueds et dans les cuvettes situées entre des dunes ou des rochers. Ces terrains sont les seuls propres aux cultures vivrières et demandent à être protégés contre l'envahissement constant des sables. TABLEAU DES PROPRIÉTÉS DES TERRAIINS ARGILEUX ET SABLONNEUX DÉSIGNATION DES TERRAINS "S rv "2 o Q 5 c G O ce W '5 'S. o o o %. bCi c 'îc 3 c o H 0) bD _3 O a Sol des dunes, couclies verti- cale de 0"' 30 100 g. 100 g. 100 g. 100 g. 100 g. 100 g. 100 g. 100 g. 65'=' 6 65*^^' 6 2-1- 70" 61-2 52" 5 78" 68" 0 0 Jra3 •ICC Il ce 10" 14" 25" 25" 53 iO 47" 47" 50 52'^'= 5 61" 67" 2.68 2.68 2 .22 2.50 2.56 2.62 2.46 2.50 4 à 5°/» 4 à 5V„ 52''/o 32% 23.5-'/o 20.50% 63"/o ocre. oci'e. grise. grise. ocre. ocre. grise, grise. Sol des dunes, couche à l'" de profondeur Sol des cuvettes, couche vert de 0"> 30 Sol des cuvettes-couche à 0"" 50 de profondeur. . . . Sol des Marigots , couche de 0"' 30 Sol des Marigots , à 0"" 50 de profondeur Sol des Iles, couche de G"" 30. Sol des Iles, à 0"> 50 de prof. Ces chiffres sont la moyenne d'un grand nombre d'analyses. Quant aux propriétés chimiques de ces terres les moyens d'études font totalement défaut. 304 ÉTUDES ET MÉMOIRES TABLEAU DES TEMPÉRATURES COMPAREES DES DIFFÉRENTS TERRAINS X o £ S 'r- '^ S C S - Eau du fleuve à 1"' lie profond' o o X -) a ■Si Sable arrosé 2 t'ois par jour Terrains argileux secs u 5 1 "" X ~ "i 9 ■- - L ^ * 1 S*- soir... 27°5 10°5 22" 5 27°5 30° 32° 29° 5 48°5 29° 41° 30° 5 16° 27" 40" 27° 39° i 6'' matin. 10 octobre 1900 .,. 1 i^ soir. .. 23° 9 38°9 jooi 18" 2 2i°5 25° 29" i(5° 26" 39» 29" 3 41° 2 1" 25° 2 1° 36° i 6'' matin. 22 octobre 1900 ,, ( 3'' soir . . 21° 1 10° 3 13° 21"fi 28° 2s°ri 2S°3 -13° 25° 39° 29° 12° 23" 31° 23° 5 31° 6'' matin. 2,'j janvier 1901 ,. •' 3^ soir. .. 9° 23° 5 5° 11° 8 1S° 19° 17°5 27° 5 11" 5 20° 2 2.5° 27= 15° 21° 5 12" 5 18" 1 Ces températures ont été prises au Jardin de Gâo. Le terrain est en pente légère, regarde l'Ouest et touche au bord du fleuve. II. — CLIMATOLOGIE L'on peut distinguer dans la région une saison fraîche et une saison froide. l** La 1'*' va du 15 novembre au 10 février, les nuits sont fraîches, surtout en décembre et janvier, le thermomètre manjue comme minimum 8 à 10°, l'après-midi est tempérée, le maximum varie de 25" à 35°. Les vents dominants sont les alizés du nord-est. Le ciel est géné- lement sans nuages ou présente des cirrus. L'air est très sec, sauf au bord du fleuve où l'on constate un léger brouillard qui disparaît d'ordinaire dès que le soleil est assez haut à l'horizon. Cette saison convient à merveille aux cultures potagères. Elle correspond aux hautes eaux du Niger et est très favoral)le au repicjuage des arbres (dattiers, filaos, céaras) sur les bords humides du fleuve. Les quel((ues pluies du Nissan ou petit hivernage favorisent le l'agriculture au pays de gao 305 repiquage. Les cultures indigènes de cette saison sont le tabac, les blés et l'orge, on pourrait y ajouter l'avoine. 2° La 2'' saison chaude va des premiers jours de février (10 ou 13) aux premiers jours de février (10 ou 15). Cette saison est coupée en son milieu par les pluies d'hivernage qui font baisser la température et augmentent l'état hygromé- trique. On a donc de la sorte trois parties dans la saison chaude : 1** de mi-février au 10 au 15 juin, saison très chaude et sèche ; 2" du 10 au 15 juin à la mi-septembre, saison humide et chaude, c'est l'hi- vernage ; 3'' du mi-septembre, saison humide, chaude et très sèche. A. — La première partie de la saison présente les plus hautes tem- pératures de l'année. Le maximum peut atteindre 48 à 50" à l'ombre, le minimum varie de 20 à 24''. Les vents dominants sont ceux de l'est, brûlants, et chargés de sable pulvérulent. A la fin de cette saison apparaissent des vents d'Ouest, du Sud-Est, du Sud-Ouest qui saturent peu à peu l'atmosphère d'humidité. La pression baro- métrique est généralement faible, le ciel se couvre peu à peu l'après-midi de nuages plus bas que ceux de la saison précédente ; qui montant chaque matin de l'horizon annoncent l'approche des pluies d'hivernage. A la fin de cette saison, presque toutes les plantes potagères d'Europe crèvent, elles demandent à être protégées contre le soleil et les vents brûlants de l'est. Le Niger présente à la fin de cette saison ses plus basses eaux (15 au 25 juin). Le mil est repiqué en avril et mai, au fur et à mesure de la retraite des eaux. La deuxième partie de la saison chaude est la saison humide dite d'hivernage. Les grandes chaleurs subissent une rémission causée par les tornades et l'évaporation des eaux de pluies. Les vents dominants sont ceux de l'ouest, du sud-ouest. Ces vents amènent dans l'air les grandes quantités de vapeur d'eau qui se condensent dans les zones supérieures de l'atmosphère et se pré- cipite ensuite en pluies torrentielles. Les tornades viennent presque toutes de l'est, les premières et les dernières presque exclusivement sablonneuses, celles du milieu sont pluvieuses. Ces météores sont de courte durée, de violence, souvent extrême, amenant parfois en une demi-heure des chutes 306 ÉTUDES ET MÉMOIRES d'eau de 5 à ti centimètres. La hauteur totale de l'eau tombée à Gao en 1900 a été de 0 '" il, ainsi répartie: en 1900 en 1901 Mai 0'^">776 - 2'^"'500 Juin 10 47o 0 375 Juillet 15 906 5 155 Août 2 6861 Septembre . . 6 880 Au total 41'=-'>7231 La pression atmosphérique se relève de façon notable durant cette saison. Le ciel se couvre k l'horizon dès 8 à 7 heures du matin de gros nuages qui montent peu à peu et finissent en général par amener une tornade et de l'eau dans l'après-midi. Cette saison est la plus favorable pour les grandes cultures indigènes (riz, mil). On pouvait y ajouter le maïs, le coton, les arachides. La crue du fleuve arrive en fin de juin ou aux premiers jours de juillet. Le jardin potager peut avoir quelques légumes (salades, radis, melons) et autres cucurbitacées, niébés, pois d'Augel, etc., c'est la saison la plus favorable au repiquage des jeunes arbres (dat- tiers, plaos, dedras, figuiers, tamariniers, acacias, Libbek, syco- mores, etc.). La brousse se couvre d'herbes hautes au milieu desquelles émergent les vertes frondaisons des mimosas, acacias, capparis et balanites, etc. Dans la dernière partie de la saison chaude, les vents brûlants de l'ouest font une nouvelle apparition. Le fleuve poursuit sa crue. L'herbe se dessèche peu à peu dans la brousse où les arbres trouvant encore de l'humidité profonde continuent à verdir. La sécheresse se fait peu à peu, enfin viennent les premiers vents du nord et du nord-est, et avec eux commence la belle saison. Un fait important à signaler est le développement successif des plantes diverses dans la brousse en hivernage. On voit, aux pre- mières pluies, un grand développement successif des pourpiers et de petites crucifères qui ne tardent pas d'ailleurs à disparaître, puis viennent diverses légumineuses dont les racines présentent toutes les nodosités d'Ltelriegel ! Viennent enfin le cram-cram et le mil. L AGRICULTURE AU PAYS DE GAO 307 11 y a cependant des graminées plus hardies, telles que le pagri, dont les touffes puissantes résistent à la sécheresse par leurs rhizomes d'où repartent des tig-es nouvelles aux premières pluies d'hivernag-e. Ces plantes qui se succèdent ainsi servent les unes aux autres d'engrais ou remplissent un rôle physiologique important pour la fixation de l'azote atmosphérique. Les graminées, sont avec les coloquintes et les pastèques sau- vages, les dernières plantes annuelles de ces régions; elles dispa- raissent avec la saison froide. Désiffnatiou des Saisons Année 1900 ( 1" saison (15 n'"'''-]0 févrierj, 3 mois. ) 2" saison (10 fcvrier-15 jiiini, 4 mois. I 'i" saison (15juin-lô 7*"^"). 3 mois.... ( 4" saison (15 7'"^"=-10 n*'"'), 2 mois Année 1901 (1'" saison (15 n'"»-10 février), 3 mois. / 2" saison (10 fevrier-15 juin), 4 mois. Maximum moyen 30 i 41 = 51 37 ■91 41 '09 31 >77 42 '72 Minimum moyen 13'"i8 22°23 2i''30 23 "01 12°27 23°64 Tempé- rature moyenne 21°7t Sl-S? 31<>105 32''01 22°02 33° 1 S III. RÉGIME DU NIGER La crue du Niger importe au plus haut point pour la culture du riz, et il serait utile de renseigner les postes sur la marche de la crue en amont, La grande crue, en effet, lorsqu'elle arrive, fait très rapidement monter le niveau du fleuve. A Gao le fleuve monte de 9 k 10 centimètres par jour pendant une dizaine de jours et atteint 1 m. 80 au bout d'un mois, c'est-à- dire que l'eau a atteint les rizières à cette époque. Si l'eau y arrive avant que le riz soit assez développé, la récolte est compromise ; cela aurait été le cas de l'année 1901, si le repiquage n'avait pas été pratiqué en partie. Avant l'arrivée de la grande crue, les eaux du fleuve peuvent monter dans la région ; sous l'influence des pluies, c'est en quelque sorte une crue locale assez faible et indépendante de la grande crue. En 1900, la crue locale a commencé au 22 juin, la grande crue au 2 juillet. 308 ÈTLDliS ET MÉMOlRIiS En 1901, la crue locale commence au 21 juin, la grande crue au 18 juillet. Le Nig-er a de forts alTluents qui, s'ils sont à sec, à la surface roulent les eaux d'infiltration entre deux couches d'argile. Tel est le cas de l'ijaouag qui vient du massif de l'Air et du Tel- emsi, qui descend du massif du Hoggarou Ahaggar. Ces deux oueds se réunissent à 15 ou 20 kilomètres de Gao, avant de déboucher dans le Niger, Si l'on creuse, ce que nous avons fait, une tranchée parallèle au fleuve au commencement de l'hivernage, dès que le lleuve monte, ce qui arrive souvent avant qu'il soit tombé de fortes quantités d'eau aux environs de Gao (année 1901), on voit, après avoir traversé une couche de sable^ puis une couche d'argile imperméable, l'eau sourdre en abondance du coté du Oued Ijaouag, tandis que l'infiltration est à peine sensible du côté du fleuve. Cette eau du reste n'a pas la même composition physique que celle du Nig-er. Il est possible que dans des conditions convenables de disposi- tion des couches imperméables on puisse créer dans la rég-ion des Oued Ijaouag" et Telemsi (grandes artères de translation profonde) des puits artésiens analogues à ceux du Oued Mya de la nappe pro- fonde d'Ouargla et de l'Igharghar, dans l'extrême sud algérien (voir Hydrolog-ie du Sahara de Rolland et le Mémoire du pharma- cien Lahache). IV. GRANDES CULTURES VIVRIÈRES Les grandes cultures vivrières des indigènes se limitent pour la région à celles du riz, du mil et du blé. Riz. — [Ori/za sativa). Le riz cultivé est le riz commun ou aquatique [Oriza saiiva) de grain petit, elliptique, rougeâtre et dur. Les terrains qui servent à la culture de cette plante sont parfois plans, parfois exvasés en cuvettes où s'accumulent les eaux des pluies d'hivernage pendant un temps plus ou mois long. Ils sont sur les rives basses du Niger, au fond des marigots (|ui s'avancent plus ou moins loin dans l'intérieur des terres ou le plus souvent dans les îles. Ces terrains subissent les inondations du lleuve, et la crue y atteint un niveau de 1 mètre à 2 '" 50 au maxi- L AGRICULTURE AU PAYS DE GAO 309 muni, la nature de ces terrains arg-ilo-silicieux varie assez peu; leurs propriétés ont été décrites au tableau général. Ces terres sont souvent très riches en arg-ile, en endroits ; nous trouvons même dans. le sous-sol de l'argile à peu près pure, grise, 3 H Ouani 0^' \ H Ha 23 000 3 H Karcbandia 0^ jj H Amagoulagrhi n OOO^' 3 H Fagouma ^' 5 H Jamci 25 000^' I H Força t35. 00(/^' 6 Kûschakan Uyoooo'" m H Komboi 76 000^^ H Kokoram 135.000"^ H Magnandmié 905 000' LEGENDE D Village. ^1 Rizières cultivées. Les terrains propres à faire des rizières sont infiniment plus étendus que ceux des rizières cultivées. La distance de Ouani à Gao est de 80 kil. Les villages sont placés suivant leur distance. Il est à remarquer que plus l'on s'éloigne du poste de Gao, moins les rizières sont étendues, cela résulte de l'insécurité due au voisinage des nomades. I H Rizières situées sur le Haoussa. G — — sur le Gourma. \H Seyna ZZ5 ooo"' „ □ . , m' ^ H Batal 1 BTt aoo^ P H Bena Z 820 ooo' G GoronxGorom?, k7000' H Gao SiiO ooo'" TABLEAU SCHÉMATIQUE DES KIZIÈRES DU CERCLE DE GAO EN 1900. (Dressé par le poste.) telles sont les argiles, plastiques de Gor ou Gorom, employées par la poterie indigène. Le riz est cultivé dans toute la région, mais principalement au coude de Bourem, dans les îles du delta de rijaouag et du Telemsi, à Gao, Magandoué, Seina, Batal, Berra, dans les villages de Badi, dans l'île d'Ansongo. 310 ÉTUDES ET MÉMOIRES Les conditions favorables k la culture du riz se résument dans la proposition suivante : il faut des chutes d'eau importantes avant la crue du fleuve. On comprend en effet quil faille l'eau des pluies pour faire germer le g-rain semé et permettre au jeune plant d'at- tendre l'arrivée de la crue, à moins de faire du repiquage de jeunes plantes arrosées en pépinières. Lorsque les eaux se retirent en avril et mai, les terres argilo- siliceuses, sous l'action du soleil, sont toutes craquelées en fissures, souvent à une profondeur de 10 à 20 centimètres ; la largeur des fentes peut atteindre 2 à 4 centimètres. C'est là en somme un phé- nomène analogue à celui observé par Grandidier sur les argiles rouges de Madagascar. Ces terres sont alors compactes, très dures et inaptes k être travaillées. Quand elles ont été mouillées par les premières pluies d'hivernage on voit disparaître le craquelage ; ces terres deviennent friables avant de presque former des glaises quand l'humidité j est considérable. Au commencement de juin, les indigènes brûlent les herbes desséchées de ces champs, la terre est alors légèrement bêchée au moyen de petits piochons que des travailleurs alignés sur un rang manœuvrent en cadence sous la surveillance du maître. Il v aurait évidemment avantage à faire le travail k l'aide d'une charrue et d'un couple de bœufs. Ces terres ont en somme peu d'adhérence quand elles ont subi les premières pluies. Le riz est semé à la volée dans le courant du mois de juin et le grain est légèrement recouvert. Il ne tarde pas k germer, et de juin k août l'indigène opère quelques sarclages dans les champs, mais le plus souvent il abandonne la jeune plante k son sort. La crue du Niger, qui commence dans la région d'ordinaire vers la fm de juin, atteint les rizières en juillet et août. Le riz est assez rarement repiqué, sauf dans les années de séche- resse, avant la crue du fleuve, comme en 1901 . Cette pratique aurait cependant, surtout dans la région, les plus grands avantanges. Les jeunes plantes sont en effet très souvent dévorées par les saute- relles dont les nuages considérables abondent dans la vallée du Niger en août et septembre ; coupés ainsi au ras du sol, les jeunes phnites crèvent en majorité. Si le riz était repiqué peu k peu au fur et à mesure de la crue, pareil inconvénient serait moins redou- table, l'eau protégeant la plante. Le riz en pépinière servant au repiquage pourrait, lui, facilement être protégé contre les nuées de l'agriculture au pays de gao 311 sauterelles. Le repiquage aurait de plus le très grand avantage de répartir également les plants svu^ la surface cultivée, ce qui n'a nullement lieu lorsque le riz est semé à la volée. Cette pratique d'ailleurs s'impose quand les pluies sont insuffisantes avant l'arri- vée de la crue. En 1901, les indigènes ont créé au bord du fleuve des pépinières arrosées par une irrigation analogue à celle employée pour le tabac (voir Tabac). Les plants ont en fin juin de 0 '" 20 à 0 "' 30 et pourront être repiqués après les premières fortes pluies ou dès que les eaux du fleuve atteindront les rizières. Cette année en efîet il n'est tombé à Gao avant le 20 juin, époque du commencement de la crue, que 2 cm. 7o0 d'eau de pluie; or, en 1900, à la même date, le sol avait déjà reçu 8 cm. 370 qui avaient par- faitement permis les semailles de riz vers le 10 juin. Maintenant si on considère que le niveau de l'étiage en 1901 est supérieur de 62 cm. 5 à celui de 1900, et si on se reporte pour l'année 1900 à la date qui correspond à ce niveau de 62 cm. 5 de la crue, c'est-à-dire au 12 juillet, on voit que la quantité d'eau tombée était de 16 cm. 100. Le riz semé était alors déjà grand au 12 juillet 1900, tandis qu'en 1901, si l'on n'avait pas eu soin de créer des pépinières irriguées, les semailles n'auraient pas pu avoir lieu et la récolte aurait été nulle. Les sauterelles dont nous parlions plus haut sont dans la région un danger qui ne fait qu'aller en augmentant avec l'incurie des indigènes, et contre lequel il serait urgent de réagir. Disons que les Allemands, dans leurs colonies, combattent ce fléau en répandant, sur le sol des coccidées parasites des sauterelles et qui les tuent. Peut-être serait-il utile d'étudier cette pratique qui semble ration- nelle et de l'employer dans la région. La récolte du riz se fait au mois de décembre ; les épis sont séchés au soleil, puis soumis au battage, le grain est ensuite mis en sac ; le chaume sert à recouvrir les cases. Le grain est décortiqué dans un pilon. Ce procédé de décortica- tion ne donne comme rendement que la moitié du poids de paddy ou riz en coque. Les grains sont en partie brisés et une notable proportion, réduite à l'état pulvérulent, se perd dans le vannage des- tiné à séparer le grain de son enveloppe après décortication. Les travaux faits par les indigènes pour la culture du riz sont assez rudimentaires, comme tous ceux qu'ils savent entreprendre, et sont insuffisants. 3i2 ÉTUDES ET MÉMOIRES Les indig-ènes sont loin de donner à la culture du riz tout le dévelopi>ement qu'elle devrait avoir. ()u.e de terrains présentant toutes les conditions requises pour la culture de cette céréale restent improductifs, que de terrains pourraient être rendus aptes à cette culture, grâce à quelques travaux d'irrig-ation ! Et cependant la demande est dans la rég-ion bien supérieure à la production. Peut- être faut-il accuser de ce fait l'insécurité dans la région, peut-être aussi faut-il se reporter au peu de besoins de la vie des indigènes du fleuve et à l'inertie que le fatalisme de l'Islam peu ou prou pra- tiqué sait toujours engendrer. Après plusieurs années de culture d'un terrain, l'indigène le laisse inculte lou2 ans et va semer son grain ailleurs, la terre ne manque pas, tout va bien. Ce terrain est rapidement envahi par des herbes vivaces dont la destruction est ensuite assez difficile. Les engrais sont à peu près inconnus, sauf ceux fournis par les herbes développées dans les champs à la retraite des eaux et qui sont brûlées quand le soleil les a desséchés en fin de mai. Les indigènes auraient cependant les plus grands avantages à amender leurs terrains de rizières soit avec le fumier de leur bétail, soit avec les tiges de bourgeon légèrement calcinées pour détruire toute végétation, et enfouies dans le sol. Rendement . — Après avoir nettoyé le sol, nous dit M. Jacquey, un coin est réservé au semis qui se fait très serré pendant le mois de juillet, lorsque les pluies ont suffisamment détrempé le terrain. La quantité de semence employée par hectare est de 70 kilogrammes de riz en paille. Le repiquage a lieu en terrain vaseux, à sous-sol argileux, le rendement varie de 2.000 à 3.000 kilogrammes au maximum à l'hectare; au grand maximum, d'après le tableau dressé par le poste, le village de Gao aurait 314 hectares de terrain cultivé en riz, ce qui devrait faire même en mettant une demi-tonne par hectare, plus de 1;)0 tonnes de riz. Je crois le chiffre un peu fort pour un rendement aussi faible par hectare. Riz de montagne {Oryza). Nous avons fait en 1900 et 1901 des essais de culture de riz de montagne, qui ont particulièrement réussi. Semé en fin mars, il pousse rapidement, thalle beaucoup et com- mence à donner en juillet. La récolte est terminée en fin d'août. l'agriculture au pays de CtAO 313 Les 4 mètres carrés que nous avons ensemencés nous ont donné 2 kilog-rammes de paddy, ce qui est dii, il est vrai, aux soins que nous avons pris de cette culture. Nous pensons toutefois que l'indi- g-ène pourrait retirer de cette culture 2 k 3 tonnes par hectare dans la région. Après avoir montré nos essais aux habitants de Gao nous leur avons fourni des échantillons et les indications nécessaires, qui n'ont d'ailleurs pas été suivies; semés comme le riz aquatique, ces échantillons n'ont évidemment donné aucun résultat. Cette culture, au lieu d'être faite en mars ou août, se ferait avec plus d'avantag'e de mai à octobre. Nous ne l'avons entreprise en mars ({ue pour montrer à l'indig-ène que l'on peut obtenir du riz quatre mois avant la récolte de décembre. Il y a aux environs de Gao des terrains paraissant propices à cette culture, ce sont ceux situés dans le lit de rijaouag^; le sol y est argileux, et les pluies de Ihivernage y forment une succession de mares. Drainés, ces terrains seraient excellents pour le riz de montag-ne. Ces terrains ont une superficie considérable, et ne sont actuellement l'objet que de cultures peu étendues de mil et de riz aquatique. Ils seraient très facilement travaillés à la charrue. Mil La culture du mil, ou Sorgho, n'est, pas très répandue dans la région. Pas plus que celle du ri/ elle n'acquiert l'importance qu'elle devrait avoir. L'espèce généralement cultivée est l'Amadi Bougon, à gros grains presque sphériques. Ce plant résiste mieux aux séche- resses qui précèdent les pluies d'hivernage. Le mil en effet est très souvent semé dans les terrains de marigots que viennent d'abandonner les eaux, c'est-à-dire dans le courant d'avril. Cette pratique fait avancer la récolte d'un mois sur celle du mil semé après les premières pluies d'hivernage, ce qui, ici, a un grand avantage, à cause des ravages causés par les sauterelles en août et en septembre. Le Mil Amadi Bougou, ou gros Mil, est cultivé dans la région dans des terrains analogues à ceux qui servent aux rizières, ce sont des terres riches en argile, de 20 à 30 %, et qui se trouvent sur le bord du fleuve, dans les îles ou au bord des marigots- 314 ÉTUDES ET MÉMOIRES Les hautes eaux atteig-nent d'ailleurs souvent ces terrains vers le mois d'août et les recouvrent de 10 à 20 centimètres d'eau avant la récolte. Si les indigènes ont choisi ces teri'ains de préférence, c'est qu'il y a des années, témoin l'année 1899, où les pluies dans la réj^ion sont totalement insuffisantes au complet développement de la plante, la crue devient alors nécessaire. Pour les années bonnes, au point de vue de la quantité d'eau tombée, cette précaution est totalement inutile. Le mil Amadi Boujj^ou est également semé dans la région après les premières pluies d'hivernage, la récolte est alors retardée de un mois environ et se fait en fin septembre. Les champs ne sont l'objet que de soins rudimentaires. Débar- rassés par le feu des herbes qui s'y sont développées, ils sont à peine travaillés ; l'indigène enfouit les graines (5 à 6) dans les trous creu- sés d'un coup de piochon et les recouvre d'un peu de terre. Dès lors, la nature se charge du reste, les plants sont très rarement chaussés de terre, ce qui aurait le plus grand avantage, étant donné le grand nombre de racines adventives que développe la plante. Celles-ci atteignent en très petit nombre le sol, tandis qu'elles deviendraient très utiles à la plante si on les recouvrait. Les jeunes plants de mil ont à souffrir pendant l'hivernage d'un gros ver blanc analogue aux larves des hannetons : il a G à 7 cen- timètres de long. Ces vers se rencontrent en grand nombre dans le sol, autour de chaque jeune plant, dont ils dévorent les racines. A l'état parfait, cette grosse larve donne un coléoptère qu'on ren- contre en très grand nombre dans la région, occupé à rouler de ses pattes de derrière et à ensevelir tous les excréments qu'il ren- contre. Le mil est dévoré en assez forte proportion par des passereaux. Les indigènes dressent parfois des mannequins ou le plus sou- vent laissent flotter au vent des lambeaux de guinée pour les éloi- gner. Mais le véritable fléau des plantations de mil ce sont les sauterelles qui, en l'espace de quelques minutes, dévorent toutes les feuilles, et s'attaquent ensuite au grain, surtout s'il n'est pas à maturité; c'est sans obtenir des résultats bien appréciables que les indigènes essaient de les éloigner en allumant des feux de paille humide, donnant force fumée, ou par des cris, des bruits de ferrailles, ou encore en les pourchassant sans trêve, dès qu'elles se posent. l'agriculture au pays de gao 315 Victoire reste au nombre, et le champ est fort endommagé, sinon anéanti. L'indigène, il est vrai de le dire, prend une revanche légitime en recueillant les sauterelles qu'il mange grillées. Semé à la retraite des eaux (mars et avril), en terrain encore humide, le mil après avoir poussé assez rapidement, subit un arrêt dans son développement jusqu'aux pluies d'hivernage (juin). 11 ne trouve d'humidité, en effet, que celle de trop rares rosées et celle du sous-sol argileux, mais cette dernière ne tarde pas à diminuer fortement, et au commencement de juin elle se tient entre 6 et 10 %, d'après les différentes recherches que nous avons entreprises à ce sujet dans la région. Avec les premières pluies la végétation repart très rapide et la récolte a lieu en fin d'août. Le mil est alors coupé, séché au soleil et égrené par battage ; le grain est conservé dans des sacs ou dans des greniers en terre. Le mil Amadi Bougou dans la région donne un rendement de 1 à 2 tonnes par hectare, mais il est évident que quelques soins minimes pourraient augmenter ce chilfre du double; la tige du mil contient du sucre. Nous avons entrepris des essais de culture du mil Amadi Bougou et du petit mil dans plusieurs terrains, aux environs de Gao (cuvettes plus ou moins argileuses et éloignées du fleuve), mais nous n'en avons obtenu que de très maigres résultats. Ces terrains se sont montrés impropres à cette culture. 11 n'est pas de même des terres légères qui forment les ondulations ou petites dunes des alentours du poste, et où le cram-cram, ou pennisetum, se déve- loppe à merveille. Le petit mil Sanés des Bambaras et louma en Malinké y vient très bien, à condition que les pluies ne soient pas trop rares. Ces terrains, peu riches en argile (4 à 10 °/o), pour peu qu'ils soient légèrement fumés et humides, conviennent à merveille à cette culture, et nous avons pu voir tout aux alentours du poste, où des fumiers de troupeau ont quelquefois peu fertilisé le ^ol, le mil sans aucune culture arriver à complet développement, donnant des épis très fournis en 1900. La culture du petit mil, qui donne d'excellents résultats à Doungou, dans la vallée du Gourouol, pourrait en bien des endroits de la région nord être d'un bon rapport. Celte plante vient d'ailleurs parfaite- ment dans les terres employées à la culture du gros mil. Le sol demande à être remué s'il est trop dur, et s'il n'a pas été travaillé 316 ÉTUDES ET MÉMOIRES depuis lonp^lemps, de façon à permettre à l'eau des pluies de péné- trer ces argiles difficilement perméables. A Gao, en 1900, nous avons semé du petit mil, d'une part dans un terrain arg-ileux non remué, et d'autre part dans le même terrain remué à 20 ou 'iO cen- timètres de profondeur. Nous avons obtenu des résultats bien diffé- rents. Dans le premier cas. la récolte a été insignifiante, tandis qu'elle a été très bonne dans le deuxième. Le chaume de mil sert à faire des claies ou est brûlé sur place comme engrais. 11 trouverait peut-être un emploi comme fourrage. Le mil Amadi Bougou est souvent repiqué au lieu d'être semé sur place. C'est cette pra- tique que les villageois ont suivi en 1901. Les eaux du Niger recouvraient encore leurs champs à l'époque des semailles (mars et avril), et, pour ne pas subir un retard trop considérable de ce chef, ils se sont livrés à la pratique du repiquage du mil, déjà âgé de quinze à vingt jours. Le petit mil est souvent aussi repiqué. Le mil est peu cultivé dans le cercle de Bamba; sans raison que je sache, les habitants de ce cercle préfèrent la culture du riz et du blé. Le mil Amadi Bougou vient cependant très bien dans le cercle de Bamba ; il en est de même du petit mil. Blé [Trillcum). Le blé est l'objet d'une culture assez importante, le long du Niger, depuis Eguedesche jusqu'au delà de Bamba ; les principaux villages de production sont : In-Zamen, Garbonne et Teriafoso ; le produit est de bonne qualité et il serait désirable de voir cette cul- ture se répandre tout le long du Niger. Si la culture du blé demande plus de peine que celle du mil ou du riz, en revanche elle n'a pas à subir les mêmes aléas. Faites en hiver, elle n'a pas à redouter les sauterelles qui dévorent les jeunes plants de riz, si le fleuve ne montcipas assez vite, et la récolte de mil si elle n'arrive pas à temps à maturité. Les passereaux s'abattent en nombre sur ces plantations ; les enfants des villages les parcourent la journée pour chasser les oiseaux. Le blé se cultive à la même époque et de la même façon que le tabac (voir Tabac). Ces deux plantations sont en général contiguës et les mêmes canaux d'irrigation servent à l'arrosage. l'agricuture au pays de gao 317 Lorsque les eaux du fleuve sont assez hautes et rendent humides ces terrains de culture, l'irrigation cesse. Semé en novembre, le blé arrive à maturité en mars après la retraite des eaux du fleuve. La récolte a lieu au commencement de mars ; les épis sont très fournis et le rendement semble analogue à celui qu'on obtient en France. Le blé ne met guère dans la région que 120 à 130 jours pour arriver à son complet développement. Il en met 162 à Malte, 229 à Berlin et 319 dans les Alpes, Le blé que nous avons semé à Gao, en lin d'octobre 1900, est parfaitement venu ; mais les oiseaux ont en partie dévoré la récolte en février et mars. Mieux vaut attendre le 15 novembre pour les semailles; la fin d'octobre est trop chaude, comme les premiers jours de novembre. L'hiver est d'ailleurs la seule saison qui convienne à la culture du blé et nos essais faits en 1900, en février et en juin, n'ont rien donné. V. — graminées diverses Orge [Hordeum vulgare). L'orge est l'objet d'une très faible culture dans le cercle de Bamba et In-Zamen où nous avons vu quelques rares champs. Cette culture est identique à celle du blé et donne de très bons résultats. A Gao, nos essais en 1901 ont parfaitement réussi. Semée trop tôt, en fin d'octobre (mieux vaut attendre le IS novembre), l'orge est arrivée à maturité en fin de février, commencement de mars. Cette culture serait à répandre dans le pays pour la nourri- ture des chevaux, surtout si l'on veut mettre les spahis dans la région. A.voine [Avena sativa). L'avoine n'est l'objet d'aucune culture dans la région. Nos essais en 1901 ont parfaitement réussi. Les semailles devraient avoir lieu dans les dernières semaines de novembre. Les indigènes pourraient en faire la culture de façon identique à celle du blé et de l'orge. Semée au poste de Gâo en octobre (époque un peu hâtive), Bulletin du Jardin colonial. 21 318 . ÉTUDES ET MÉMOIRES l'avoine est arrivée à maturité en fin de février, commencement de mars, donnant un très beau produit. Comme l'orge et pour les mêmes raisons, la culture de l'avoine est à répandre. Il est évident d'ailleurs que ce n'est qu'en demandant de l'org-e et de l'avoine comme imputa l'indigène, qu'on pourra l'amènera entreprendre ces cultures. Luzerne. Nous n'avons obtenu aucun résultat de nos essais en 1900 et 1901, tant en hiver qu'à la saison des pluies. Trèfle {Trifolium). En 1900 comme 1901 nous avons obtenu de nos essais de culture quelques pieds qui sont venus avec des soins, mais cette culture ne paraît pas convenir à la région. Fonion. Le fonion dont nous avons fait des essais au jardin est une petite graminée dont les graines peuvent être employées comme tapioca. 11 vient très mal en hiver ; mais pendant Ihivernage, juin, juillet, et août, il croît très rapidement et donne dans la région de bon produit. Téosinte. Grande graminée fourragère, la téosinte ne nous a donné aucun résultat en'1901..Les semis ont été faits en janvier. Maïs [Zea mays). Le maïs n'est dans la région l'objet d'aucune culture. En 1900, nos essais, malgré les soins pris, ne nous ont donné ({ue des épis mal fournis. Cette année nous expérimentons une autre variété, le maïs c'araga, à grains blancs, qui paraît plus résistant et pousse mieux que le maïs ordinaire. Sur ces essais en cours, nous n'avons que des renseignements insuiïisants encore. Cram-cram et Pagri. Ces deux graminées formentla majeure partie de la brousse dans la LAURICI LTURE AV PAYS DE GAU 319 région et sont très appréciées des indigènes. Leur développement est très rapide, il commence avec les premières pluies d'hivernage, aux premiers jours de juin, et la récolte a lieu dans les dernières semaines d'août. Ces plantes tout à fait rustiques ou plutôt déser- tiques se contentent des dunes de sable ayant une teneur de 3 à 4 '^/o d'argile et de débris végétaux. Le pagri est plus estimé que le cram-cram. Cette plante donne des toutFes assez fortes d'herbe fine d'où s'élèvent les hampes flo- rales hautes de 30 à 80 centimètres, le grain est en tout analogue au millet d'Europe. Ecrasé, il donne une farine blanche de goût agréable que les indigènes mêlent au lait. Le grain de cram-cram est plus petit de 2/3 et l'enveloppe épi- neuse qui le protège jette un certain discrédit sur ce produit qui demande un peu de peine. Il existe d'ailleurs des variétés de cram- cram où les piquants sont remplacés par des barbes analogues à celles du blé barbu. Le cram-cram est d'ailleurs inférieur au pagri comme blan-. cheur de farine et comme goût. Il est surtout récolté par la classe pauvre, dont la faim n'est pas toujours satisfaite, par ce que lui donne la classe aisée et dirigeante des villages. Dans les années de grande sécheresse, quand le cram-cram vient à manquer en même temps que le riz et le mil, la famine sévit cruellement sur la classe pauvre. En 1899, la mortalité de ce chef, dans la région, peut être estimée à 4 ou 5 "/o de la population pauvre. Le pagri et le cram-cram, ou Pennisetum disticum, dont l'abon- dance est considérable dans toute la région des puits, forment un excellent fourrage pour les bestiaux. Ces grains entrent pour une bonne part dans l'alimention des tribus nomades. Bourgou. Plante de la tribu des Oryzées, le bourgou est une graminée qui croît en très grande abondance dans le Niger et dont les tiges longues de 4 à 5 mètres contiennent un principe sucré en assez gi'ande abondance. Les graines germent dans les terrains laissés à sec par la retraite des eaux et se développent sous l'action des pluies d'hivernage. Les jeunes tiges croissent très rapidement avec la crue du Nigeret consti- tuent un bon fourrage. Les graines de bourgou, appelées horri, sont 320 ÉTUDES ET MÉMOIRES utilisées par l'indigène pour l'alimentation, lorsque les récoltes de riz et de mil ont été mauvaises. Il en est de même des patates et des fruits de nénuphars, des fruits de l'acacia girafîi, et des diverses autres plantes de la brousse qui ne sont qu'un pis-aller alimentaire et sur lesquelles nous n'insisterons pas autrement. Les tiges de bourgou, ou koundou, sont recueillies par les indigènes au mois de mars et d'avril, elles sont séchées au soleil puis légèrement torré- fiées et liées en paquet. Ces tiges, assez finement pilées, servent à fabriquer une boisson légèrement sucrée, le koundrou-karri. Cette boisson tourne rapidement à l'aigre. Dans la fabrique, l'in- digène recueille dans un canari l'eau versée sur le bourgou pilé et entassé dans une corbeille. Concentré et fermenté, le koundou- karri donne une boisson alcoolisée enivrante, appelée souvent karri- foutou (ou mauvaise eau). Par concentration, l'indigène obtient du koundou-harri une sorte de sirop épais, le katou, dont il fait usage en place de miel. On pourrait assez facilement retirer du sucre du bourgou ainsi que de l'alcool pesant de 30 à 40°. Pour être économique, une installa- tion destinée à l'exploitation de bourgou devrait pouvoir facilement être transportable après exploitation d'une zone d'un certain rayon, car le transport du Bourgou à une usine fixe serait difficile et onéreux. Un certain avenir industriel paraît donc devoir être réservé à cette plante dans la région. Notons en passant que les tiges de bourgou présentent un grand nombre de racines flottantes qui puisent dans l'eau les sels néces- saires à la vie de la plante. Si l'on se rend compte de l'énorme développement du bourgou dans le Niger, on comprendra quelle est la raison de la très faible teneur des eaux de ce fleuve en sels. Le degré hydrotimétrique est de 1 à 3° au maximum, ce qui fait 1 à 3 centigrammes de sels terreux par litre. VI. CULTURES INDUSTRIELLES INDIGÈNES Elles se résument dans la culture du tabac et du coton encore qu'elles ne dépassent pas les besoins locaux. AtiUICLLTl lU; AL l'AVS UE GAO 321 Tabac. Le tabac est dans la rég;ion l'objet d'une culture assez étendue. Dans chatiuc villa«,H\ on plante à peu près ce qu'il faut à la consom- mation. Le tabac indij^ène vient d'ailleurs k merveille, la culture se fait au bord de l'eau dans des terres argilo-siliceux divisées en car- rés entourés d'un petit talus de terre, percé de deux ouvertures, l'une poui- larrivée et l'autre le départ des eaux d'irrigation. (letle eau est amenée par un canal AB, alimenté par un réservoir su;élevé C, dans le([uel un homme verse de l'eau qu'il puise dans le fleuve. Rien n"enq)ècherait 1 indij^ène d employer la même système pour cultiver le ri/, di' montagne dès le mois d'avril, si ce n'est la paresse et le peu d'enthousiasme qu'inspire la nouveauté. Les semis sont faits en pleine terre en lin de novembre et abri- tés contre les oiseaux par des branches épineuses d'acacias et de mimosas. Les jeunes plants sont repiqués dans la deuxième semaine de décembre dans les carrés préparés pour cette culture. Ces plants sont peu élevés à leur complet développement (no à ()0 cm,). La récole a lieu en fin de février et en mars. Les feuilles de ce tabac sont petites, 10 à 20 centimètres de long ; elles sont cueillies par les indigènes avant maturité et séchées. Ils s'en servent soit pour le fumer dans leurs pipes, soit pour priser ou le chiquer une fois réduit en poudre, en le mêlant à du carbonate de potassse inq)ur (jui existe en assez grande abondance à Congoro, près de Tosage ou près do Tondibi ; à Gorom Gorom, ce produit semble provenir de la décomposition des roches phosphatiques. Le tabac indigène n'est pas désagréable à fumer, bien qu'inférieur aux tabacs euroj)éens ou algériens. Tabac Maryland Nous avons fait Gào, en 1900 et 1901, des essais de culture de tabac Maryland, lesquels ont parfaitement réussi. Les semis faits en février ont mis 12 jours à lever, les jeunes plants ont été repiqués en fin de mars, et dès le mois de mai l'on pouvait commencer la récolte qui s'est poursuivie pendant tout l'hivernage. Nos plants 322 ÉTUDES ET MÉMOIRES mis en terrains argileux légèrement fumés sont devenus très forts, atteignant une hauteur de 1 '" 40 à 1 '" oO à complet développe- ment. Ils ont très peu souil'ert durant tout l'hivernage; des troncs, sont sorties des tiges nouvelles en juin, tiges vigoureuses qui ont continué à porter de belles feuilles. Cette plante peut donc être cultivée durant toute l'année. Les chefs de village qui ont visité nos cultures ont demandé des graines que nous avons distribuées. Les feuilles du tabac Maryland peuvent atteindre dans la région de 60 à 70 centimètres de long sur 40 à TiO centimètres de large, si on a soin de pincer la tige en ne laissant que 10 à 12 feuilles. Le produit obtenu est agréable à fumer et de beaucoup supérieur au ta])ac indigène. En 1901, le village de Gào a cultivé une certaine quantité de tabac Mar3'land. Moins bien soigné que le nôtre, ce tabac avait cependant bon aspect et a été apprécié des indigènes. Coton. Le coton est l'objet d'une petite culture dans quelques villages de la région Nord-Tafîa, Labezenga, Firkou, c'est-à-dire dans le Sud de la région. Mais ici comme dans bien d'autres villages, le coton n'est pas cultivé comme plante annuelle. L'on gt^rde les vieux pieds ; or, seules, les plantes annuelles, dit M. Dybowski, directeur du Jardin Colonial sont capables 'de fournir des soies longues et nerveuses, et l'abâtardissement des cotons des Indes, de la Chine et de Tahiti, n'est dû qu'à la seule cause d'une substitution d'une culture vivace à la culture annuelle primitivement pratiquée. Il y aurait sans doute avantage à voir la culture annuelle rem- placer la culture vivace ; mais comme le produit, tel qu'il est, suilit amplement aux besoins des indigènes de la région et que d'autre part il n'est aucunement demandé par ailleurs (commerçants ou dioulas), il y a tout lieu de croire que des recommandations toutes platoniques à ce sujet tomberaient dans un pai'fait oubli. Seule la demande saurait améliorer l'ollVe et par suite les procé- dés de culture. La récolte du coton se fait en sept{mil)re, octobre et novembre. Le coton obtenu a toutes les qualités des cotons soudanais ; il est fort souple et résistant, de soie courte et un peu rude au toucher. l'agriculture au pays de gao 323 Cultures d'essais. 1" « I;es phases de la végétation du coton doivent s'accomplir en une période de temps qui ne doit pas dépasser 7 à 9 mois, et cela depuis le commencement du semis jusqu'à la fin de la récolte du produit. « 2° « Pendant toute la première période, celle qui accompagne les semis et qui correspond au premier développement de la plante, il importe que le sol soit abondamment pourvu d'humidité ; ce n'est qu'à ce compte que le cotonnier prendra un développement robuste et assurera une récolte abondante. » 3° a On peut estimer la quantité d'eau nécessaire pour pourvoir au développement complet du coton, comme état, d'environ 70 centimètres d'eau fournis soit par les pluies, soit par les irriga- tions. » Telles sont les trois propositions établies par M. Dybowski pour la culture du coton. Voyons maintenant si elles sont réalisables dans la pratique, dans la région nord, et ce qu'on peut y attendre de la culture de cette plante. L'on peut compter, de mai à septembre, environ 40 centimètres d'eau provenant des pluies d'hivernage dans le bassin du Niger à sen coude dans les bonnes années. Dans les années sèches, qui sont assez rares, ce chiffre doit être diminué des 2/3 ou de moitié. Il est donc nécessaire d'emprunter au Niger, au minimum 30 centimètres d'eau pour que la plante ait toute l'humidité désirable, c'est-à-dire 70 centimètres, bien que dans la pratique elle peut se contenter d'un peu moins (60 cm.). Les plantations devront être faites en terrains avoisinant les marigots, où le fleuve est assez peu élevé au-dessus des eaux au maximum de la crue, pour que l'infiltration puisse s'y faire sentir, si l'on ne se décide pas à faire de l'irrigation, ce qui, nous l'avons dit, est très praticable dans le lit de l'Ijaoug et dans la partie supé- rieure du marigot de Gâo. Les cultures que nous avons faites réalisaient ces conditions. Le temps des phases de la végétation complète du coton dans la région est, d'après nos essais, inférieur à celui qu'assigne M. Dybowski, ce qui, comme il le dit, ne fait qu'être en faveur de cette culture. Semé au milieu du mois de mai, au bord du fleuve, le coton indi- 324 ÉTUDES ET MÉMOIRES gène, comme celui provenant du Jardin de Kati, s'est développé rapidement avec les pluies d'hivernage en 1900. Il atteignait bien- tôt 1 "' 20 à 1 '" 50 de haut. Ces plants se sont montrés particuliè- rement vigoureux, donnant des rameaux de 1 mètre à 1 '" 50 et fleurissant en juillet. La récolte a commencé à la (in d'août et s'est poursuivie en septembre et en octobre, ce qui t'ait en tout y mois 1/2 à G mois pour le développement complot de la plante, au lieu de 7 à n, comme l'indique M. Dybowski. Le coton obtenu avait des soies fines, résistantes souples, blanches ou grises, suivant les variétés, d'une longueur de 2 à 3 centimètres environ ; le produit est rude ou doux au toucher, suivant la variété. Nous avons distribué aux chefs de villae-es des 2:raines de diverses espèces de cotonniers dont nous avons fait des essais. Nos conclusions au sujet de cette culture sont donc les suivantes: Elle peut se faire parfaiteinent dans la région dans d'excellentes conditions, donnant un très bon rendement d'un produit de bonne qualité ; cette culture demande à être encouragée chez l'indigène. L'ensemencement peut se faire à deux époques de l'année : l*' Aux bords du fleuve et des marigots en fin janvier, le grain germe rapidement dans les terrains imprégnés d'humidité par la crue qui est alors à son maximum, le jeune plant résiste ensuite parfaitement aux chaleurs et à la sécheresse d'avril et mai, pour atteindre son plein développement en hivernage. Ce procédé a l'avantage de ne pas nécessiter d'irrigation (tels sont à Gào nos essais en 1901). 2" Au bord du fleuve en mai ou juin (mais alors l'irrigation est nécessaire (essais de 4900). VIL ESSENCES FORESTIÈRES (REBOISEMEiNT) Tous les villages du bord du Niger, depuis Tombouctou jusqu'à Sav, se font remar([uer par un bou([uet de grands arbres verts, tama^'iniers, énormes acacias, sycomores, ficus, etc., tristes con- trastes avec les dunes dénudées, mais ([ui prouvent qu'avec un peu de soin on pourrait avoir, au moins sur les rivesdu Niger, une végé- tation plus ou moins luxuriante. Si l'aspect des bords du Niger est souvent si désolé, c'est ({ue les arbres y ont été détruits dans un passé plus ou moins lointain, sans jamais y avoir été remplacés. l'agriculture au pays de gao 325 Cette rég-ion qui nous occupe aujourd'hui est en tout semblable à tant d'autres où Tinsouciance de l'homme a semé la désolation : le désert est en général une œuvre humaine, l'histoire est là pour nous l'apprendre, et le professeur Deherain nous la retrace dans sa chimie ag-ricole. Qu'est devenu, dit-il, la fertilité de la Mésopotamie et de la terre de Chanaan sous l'incurie musulmane ? Les pachaliks de Damas et d'Acre sont loin de présenter l'aspect des cités antiques et florissantes de Ninive et de Babvlone. Les environs dénudés de Boghari, en Algérie, d'une parfaite stérilité aujom*d'hui, présentent les ruines de trois villes romaines importantes ; le déboisement a donné en ces pays des résultats aussi beaux que ceux obtenus dans la vallée du Nig-er. La sécheresse n'est en effet qu'une fonction du déboisement. Rome tirait son blé de Sicile ; le déboisement a fait là aujourd'hui son œuvre de stérilité. En L^)13, on introduisit des chèvres à Sainte-Hélène, elles s'y multiplièrent tellement que, en 1709, les forêts y avaient presque totalement disparu. Sainte-Hélène n'était plus qu'un rocher dénudé. 11 en est de même pour les hautes régions des Alpes. Dans la vallée du Nig-er le déboisement est l'œuvre du nomadisme et de l'Islam : les feux de brousses, les arbres abattus pour nourrir les bestiaux aux époques de sécheresse trouvent une raison d'être, une consécration dans la log-ique d'un (( c'était écrit » prononcé par des tribus qui s'en iront plus loin lorsque le sol ne pourra plus suffire à leurs exig-ences La terre doit nourrir le nomade qui, loin de la cultiver et de l'ensemencer, semble avoir reçu la mission de détruire et de laisser après lui le désert. On ne saurait expliquer autrement qu'avec un terrain fertile comme celui de la vallée du Nig-er, de l'eau et du soleil, on n'ait pas une végétation plus développée. D'aucuns cepen- dant pensent encore que c'est le désert qui oblige les tribus à nomader et que la nomadisation est nécessaire à l'élève du bétail, richesse future delà région. Pour ma part, j'estime que le désert est fonction des nomades et qu'il serait peut-être utile et temps d'y remédier. Ala Réunion, quand, au commencement de siècle dernier, Bory de Saint-Vincent vit le créole acharné à déboiser partout le sol pour étendre la culture de la canne à sucre, il prédit dans un avenir rapproché la stérilité plus ou moins grande de ces terres que les 326 ÉTUDES ET MÉMOIRES pluies ne devaient point tarder à raviner, entraînant à la mer l'hu- mus et le sol arable. Ces prévisions n'étaient que trop fondées, le sol arable des ter- rains plus ou moins en pente n'étant plus retenu par une puissante vég-étation, ne tarda pas k s'en aller dans les torrents, laissant à nu des basaltes granitiques ou des terrains rocailleux. En même temps les pluies devenaient moins abondantes. Ce n'est que depuis quelque 30 ans qu'on a commencé à reboiser l'île au moyen de filaos. Dans la région nord, nous nous trouvons en présence de terrains arides, dénudés même au bord du fleuve, où les sables s'élèvent en dunes changeant de l'orme et de place. Il importe donc au plus haut point de fixer le sol. Le reboisement des bords du fleuve est une chose qui s'impose, et les cultures ne sauraient que profiter d'une ombre protectrice, le soleil étant le principal ennemi. On connaît les expériences entreprises par le commandant Landas, sous la direction de M. de Lesseps, dans les sables de la région des chotts en Tunisie. Ces sables arrosés ont permis la culture des palmiers et au-dessous d'eux de tout un monde de végétaux moindres. Prenons encore le tableau de l'oasis de Racape que nous donne Pline : « Là, dit-il, sous un palmier très élevé croît un olivier, sous l'oli- vier un figuier, sous le figuier un grenadier, sous le grenadier la vigne, sous la vigne l'on sème le blé, puis des légumes, puis des herbes potagères, tous dans la même année, tous s'élevant à l'ombre les uns les autres. » Il serait bien difficile, ce me semble, de donner aux contrées arides des régions nord cet aspect enchanteur, toujours est-il qu'il y a un effort sérieux à tenter pour améliorer la culture de ces terres un peu légères, comme dit Lord Salisburg, mais qui n'en sont pas moins fertiles dans la vallée du Niger, et dans celles des Oueds. Il est même probable que le développement d'une végétation robuste, approprié à la région, modifierait à la longue le climat, et augmenterait assez rapidement la chute des eaux d'hivernage. Le sol serait de plus fixé, ce qui aurait un avantage considérable. Reboiser, serait, en somme, réparer peu à peu l'œuvre néfaste accomplie par l'Islan et la nomadisation durant des siècles. Quelles sont les essences à choisir pour le reboisement? Nous avons examiné et relevé dans toute la région de Tombouctou à Say l'agriculture au pays de gao 327 les arbres qui croissent naturellement et dont il suffirait de faire des semis aux grandes pluies d'hivernage, et de protéger ensuite les jeunes plants contre l'indigène du fleuve et contre le nomade, pour obtenir de bons résultats. Ce sont, sur les bords du fleuve, le long des Marigots et des terrains de culture, tout d'abord le dattier, puis le tamarinier (Tamarindus indica), le ficus, le sycomore, le yourou, Capparis vadata), le ronier (Borasus flabelliformis), le palmier d'Egypte (Goncifera thebaica.). A ces plantes, très répandues déjà, il convien- drait d'ajouter le fileaos (casuarina equisetifolia). dont les essais faits à Gao ont parfaitement réussi. L'Elucalyptus qui trouverait dans ces terrains un excellent milieu, le fromager (Bombax anfractuosum), le baobab (Adansonia digitata), le caïlcédrat (Khaya senegalensis) qui viendraient parfaitement sur- tout du côté du Taffa, Labé, Zeuga, Kentadji, oii il existe d'ailleurs de rares échantillons de ces plantes. Dans l'intérieur, sur les dunes, on pourrait répandre en grand nombre les plants qui y sont déjà, à savoir : le beyra ou Euphorbia Ganariensis, les acacias ferrugina et girofii, les mimosas ferrugina et nilotica, les gommiers, les balanites agyptiacus dans les val- lées, etc., toutes plantes de développement facile, mais présente- ment insuffisant et imparfait. Gette imperfection est loin de tenir au milieu ; mais à la période sèche, quand toute herbe a disparu de la brousse, les indigènes abattent les branches de ces arbres pour permettre aux troupeaux d'en atteindre les maigres frondaisons, enfin les incendies brûlent les jeunes plants et achèvent la destruction commencée par le nomade. Il y aurait des mesures de protection simplement à prendre et l'on aurait déjà fait un grand pas. L'on pourrait objecter que les troupeaux n'auraient plus de quoi se nourrir, si on leur interdisait de manger les feuilles des arbres quand le sol ne présente plus une herbe. Evidemment, mais il suffirait à l'indigène de couper et de recueillir les herbes de la brousse pagri, ou cram-cram, avant le complet développement de l'épi qui présente des coques épineuses à maturité, c'est-à-dire en juillet et en août, pour avoir tout le four- rage nécessaire à l'élève d'un bétail cent fois plus nombreux que celui qu'il a. Mais cela demanderait de la peine; c'-est là le point délicat, faire travailler un indigène qui n'en éprouve pas la nécessité 328 ÉTUDES KT MÉMOIRES absolue et immédiate. Je ne mets néanmoins [);is en doute (juune fois pénétré de cette idée ([iie le meilleur moyen de favoriser la culture dans la région est de développir le reboisement, on arrivera en quinze ou vingt ans à transformer complètement le haut de la bouche du Nii>:er. La nomadisation semble au premier abord un obstacle presque insurmontable, mais ces tribus errantes finiront par se fixer. En restreignant d'ailleurs les terrains de parcours on pourrait diminuer les dégâts causés par les nomades, et les éloigner de la vallée du Niger serait faire reculer d'autant le désert. Il est d'ailleurs permis de supposer que si ces tribus restent réfractaires au contact de l'Européen, leur évolution à travers les siècles différera assez peu de celle des Zoulous d'Afrique Australe et des Indiens Apaches dans l'Amérique du Nord. Dattiers [Phœnix dactylifera). Il n'existe malheureusement dans la région qu'un petit nombre de palmiers dattiers, d'une part à Baniba, et d'autre part à Gao. Les indigènes nous apprennent que cette plante y était autrefois abondante, mais que les plantations ont été détruites aux époques de troubles plus ou moins reculées dans l'histoire de ces peuples. Le développement de la culture du dattier s'impose dans toute cette région peu favorisée par son sol, et par son climat. Nous en avons fait une plantation autour du poste, et tout le long de la rive jusqu'aux abords du Gao. Sur cent rejets plantés en 1900, nous en avons pu sauver une vingtaine. Ceux du bord de l'eau viennent parfaitement, ceux plantés autour du poste ont eu à souffrir de la sécheresse. Ces plantations vont être continuées dès que la saison hivernale sera suffisamment avancée. Nous avons également semé des graines en pé})inières en 1900, et les jeunes plants vont être repiqués au moment des fortes pluies. Les résultats de notre plantation en j)épinière ont été, en somme, assez peu satisfaisants; sur 600 graines mises en terre, nous n'avons au bout d'un an que 50 jeunes plants. Ces essais ont été continués en 1901. Nous avons semé un millier de graines. Le dattier doit devenir dans la suite une ressource précieuse pour la région, et il serait assez facile d'en faire étendre la culture dans les villages, comme celle du caoutchouc s'étend dans la région sud, c'est-à-dire l'agriculture au pays de gao 329 en la rendant obligatoire. Les graines de dattiers demandent à être semées en pépinière dans un terrain sablonneux, mêlé en assez forte proportion avec des vases argileuses du fleuve, et très peu de l'umier, au mois de juillet et d'août ; elles germent au bout de 30 à 40 jours. Les jeunes plants peuvent être repiqués l'année suivante, à r hivernage. L'inconvénient est de ne pas savoir si on obtiendra un arbre mâle ou un arbre femelle, c'est-à-dire stérile ou fertile'. Les rejets peuvent être plantés à deux époques. Ils doivent être pris sur des palmiers femelles, c'est-à-dire donnant des fruits, ils doivent être vigoureux, on en coupe les feuilles à HO ou 60 centimètres du tronc ; on lie ce qui reste et on l'entoure de paille pendant trois à quatre semaines, pour éviter une déperdition trop grande quantité d'eau par les feuilles et par suite la dessiccation. Ces plantations se feront au commencement de juillet, lorsque le régime des pluies sera bien établi, et mieux encore en janvier, à la limite des inondations, le sol est alors humide, et le rejet prend rapidement. Le poste de Gao pourra fournir des graines de dattiers en 1901 aux différents postes. Jujubier [Zizyphus vulgaris). Cette plante est très répandue sur les dunes aux environs de Gao, les fruits en sont recueillis par les indigènes à Tombouctou, les pères blancs en font une eau-de-vie qui rappelle les marcs et eaux- de-vie de cidre. Gommier [Acacia vereck). La gomme est fournie par des acacias (Arabica, adansonii, vera albida, etc.). Dans la région, c'est l'acacia Vereck qui la donne. Ces acacias sont très nombreux, surtout au voisinage des mares, tant sur le Gourma que sur le Haoussa. Mais la gomme n'est dans la région de Bamba, Tosaye, Dounzou l'objet d'aucun commerce. Elle est cependant de très bonne qualité ; les nomades la concassent l)our la transporter dans des peaux de bouc. Semées au Jardin, les graines d'Acacia vereck sont parfaitement venues. Sene [Cassia ohovata). Le séné croît en abondance dans le sable des dunes, mais n'est pas récolté. 330 KTLDI-:s KT MÉMOIRES Beyra {Euphorhia corariensis). De la famille des Euphorbiacées le beyra est un arbuste qui pousse en touffes, et dont les feuilles ont une odeur balsamique assez prononcée et agréable. Il croît silr les dunes et se contente de ter- rains très pauvres en argile, 3 k 4 "/„. Cette plante existe en très grande abondance dans la région. Elle fournit un latex blanc en très grande quantité : un arbre en peut donner plusieurs litres. Le latex a une forte odeur de caoutchouc, mais les divers procé- dés de coagulation par lesquels nous l'avons traité ne nous ont jamais donné qu'une matière élastique qui, au début, se détériore lentement à l'air, et se transforme peu à peu k sa surface en une résine opaque et d'odeur balsamique. Il serait désirable que les propriétés de ce latex fussent définies, car s'il contient un produit utilisable dans l'industrie, le beyra deviendra une source de produit considérable pour les régions déshéritées. Toute la région abonde encore en balanites agyptiaca, arbustes épineux, en yoursus (Gapparis sodata) , dont les tiges flexibles pourraient être utilisées pour la vannerie ; les fruits de cet arbre sont des baies rouges ou roses qui ont un goût poivré très prononcé et dont les indigènes sont assez friands. On y voit également des palmiers nains, plantes des plus utiles aux indigènes, qui emploient les nervures des feuilles et le tronc de la plante comme bois de chauffage. Continuellement ils allument des feuxparmices jeunes palmiers pour avoir des feuilles desséchées, lesquelles leur servent de matériaux de construction. Cette pratique désastreuse me semble être la cause du peu de développement de cette plante dont on trouve dans toute la région de beaux échantil- lons disséminés. Le limbe des feuilles sert k faire des nattes, des cordages assez grossiers et de l'étoupe pour les réparations k faire aux pirogues. Bien des mimosées et des acacias occupent les régions plus ou moins arides du territoire, entre autres les acacias gratis et ferru- ginea, et le mimosa nilotica, ou gherred, dont les racines longues et droites servent, comme celles des balanites agyptiaca, ethel, ou taborah, k faire des bois de lances. l'agriclxture au pays de gao 331 Roniers. Sous ce nom on désigne généralement deux plantes : le borras- sus flabelliformis et le Gucifera thebaica dont on trouve encore des échantillons dans plusieurs villages de la région. Ces plantes ont été comme les dattiers détruites presque complètement dans la région aux époques de troubles et de grandes conquêtes. Au point de vue de la destruction des roniers, l'action du peuple civilisé que nous sommes diffère assez peu de celles des tribus les plus sauvages. Nous détruisons pour nos besoins, il est vrai, au lieu de le faire par le feu, mais le résultat final est assez analogue. C'est par mil- liers qu'on abat les roniers dans la région, à Sumpi, sans songer à réparer les trop larges brèches faites aux plantations par la cul- ture de cette plante. Je pense qu'il serait urgent de prendre des mesures à ce sujet. VIII. — ESSAIS DE CULTURES DIVERSES Filaos [Casuarina EquisetifoUa). Cet arbre paraît devoir jouer un rôle important dans le reboise- ment de la région. Il peut atteindre 15 à 20 mètresde haut, pousse droit comme le pin et donne un bois utilisable pour la construction. La croissance de cette plante est très rapide. Celles que nous avons à Gao ont de I mètre à 1 "■ 50 au bout de 15 mois, tandis que les tamariniers au bout de 12 mois n'ont que 0™ 20. La culture de cette plante demande au début beaucoup de soins. Le sol pour les semis doit être de sable mêlé d'un peu de terreau léger, les graines y sont semées et, à peine recouvertes, sur ces semis, on met un peu de paille sèche et on arrose deux fois par jour. Les semi^s ne viennent qu'au moment de la saison froide, de décembre à février inclus. Les graines germent au bout de 15 jours. Il faut enlever un à un tous les jeunes plants de 8 à 10 jours et les placer chacun dans un petit panier fait en feuilles de ronier et plein de terre arable légère Ces paniers sont ensuite mis à l'abri du vent, d'un soleil intense et surtout doivent être préservés des 332 ÉTUDES ET MÉMOIRES chenilles termites et insectes qui les dévorent. On peut les mettre en pleine terre 5 à C mois après, en pépinière d'abord. Ce n'est qu'à l'hivernage suivant, c est-à-dire un an après, qu'on les mettra en pleine terre pour faire la culture en grand. A Gao, nous avons 30 jeunes filaos qui viennent parfai- tement. Tamariniers ( Tamarindus Indica). Soixante graines ont été semées en septembre et octobre 1000. Nous n'avons pu sauver qu'une dizaine de jeunes plants jusqu'à l'hivernage 1901. époque à laquelle ils ont ont été repiqués en pleine terre. Le temps de la germination est de 15 à 20 jours. Les jeunes plants ont une croissance très lente. Ces essais sont poursuivis en 1901. Figuier indigène. C'est un arbre très robuste, pouvant atteindre 8 à 10 mètres, de croissance facile et rapide, donnant des fruits de qualité inférieure, en comparaison des produits européens , mais appréciés néan- moins des indigènes. Venant de graines ou de préférence de bou- tures, comme le sycomore , ces plants atteignent, au bout de la première année, 1 mètre à 1™ 30. Nous n'avons que quatre figuiers au Jardin. Orgueil de Chine. Arbuste élégant et de croissance rapide. Nous en avons vingt échantillons en parfait état. Céaras [Manihot f/laziouni). Le Céara,qui donne au Brésil un caoutchouc très apprécié vient excessivement bien dans la région. Les résultats que nous avons obtenu ont dépassé nos espérances. En 1900, un lot de 50 graines nous avait été adressé par M. Vuillet, directeur du Jardin de Kati. De ces graines, lesunesont été limées aune extrémité, d'autres semées intactes, enfin les dernières ensemencées après fracture de la coque par un léger coup de marteau. Ce sont ces dernières seules qui ont germé et rapidement, c'est-à dire en 15 jours, dans un l'agriculture au pays de gao 333 terrain sablonneux, mêlé de très peu de terreau et arrosé deux fois par jour. Nous n'avons obtenu que 9 plants, mais qui, du 20 janvier, jour de l'ensemencement, au io juin, ont de 60 à 70 centimètres, malg-ré la g-rêle du 19 mai qui les a fortement abîmés. Dès que ces plants seront assez forts on pourra le multiplier par boutures et en étendre ainsi très rapidement la culture. C'est donc un produit désormais implanté dans la région nord. Bois noir [Alhizia Lebhek). Nos semis en mars 1901 nous ont donné une dizaine de pieds qui viennent très bien et dont la croissance est assez rapide. Les jeunes plants ont en juin de 20 à 30 centimètres. Le bois noir est un bon bois de construction et d'ébénisterie. Les semis seront poursuivis dès les fortes pluies d'hivernage qui sont en retard en 1901. Kola [Sterculia acurninata). Nous en avons un plant qui vient mal et qui n'a qu'un mois encore. Musa Ensete. Plante ornementale ; un échantillon que nous avons vient bien à Gao. La culture du bananier à fruits comestibles pourrait éga- lement s'y faire avec soins. Mingo. Arbre donnant un fruit à pulpe acidulée, assez agréable au goût. (Essais infructueux.) Caïlcédrat [Kliaya Senegalensis). Donne un bon bois de construction. Essais infructueux. Les jeunes plants sont morts pendant l'hivernage en 1900. Flamboyants [Colvillea Racemosa). Essais infructueux en 1900 et 1901. Les insectes ont dévoré les jeunes plants. Cet arbre semble néanmoins devoir vivre dans la région. Bulletin du Jardin colonial. 22 334 ÉTUDES ET MÉMOIRES Bani. Arbuste iii{lii;ène du jj^enre acacia qui vient très bien dans la rég-ion, au bord des mares et marigots, et donne un fruit très riche en tannin ; les nomades s'en servent pour le tannage des peaux. Essais infructueux. Les jeunes plants ont été dévorés par les insectes. Citronnier [Citrus limonium). Le citronnier peut venir dans la région; nous avons au Jardin un jeune plant assez vigoureux. Pomme cannelle. Essais en 1900. Les jeunes plants sont morts. Lingue. Donnant un bon bois de construction. Les jeunes plants sont morts après Thivernage de 1900. Café. Essais infructueux. Chanvre. Essais infructueux. Sésame [Astragalus sesamuni). Vient très bien pendant l'hivernage dans les terrains argilo-sili- ceux. Essais en 1900 et 1901. Cette plante n'a besoin que de soins rudimentaires. Arachides [Arachis Jiypixjea). Vient très bien pendant l'hivernage. Nos essais en l'JOO ont par- faitement réussi, donnant un bon rendement ; les indigènes n'en font encore aucune culture dans la région. La culture de cette plante est aussi utile que celle de la luzerne en France pour enri- chir le sol en azote. Les racines d'arachides sont en effet littéralement couvertes des nodosités bactériennes d'Helriegel. L'A(iBI<;ULTLRE AL". PAYS DE (iAO 335 Ricin. En dehors du ricin indigène (Ricinus communis), le ricin d'Amé- rique vient très bien. Papayer [Carica papaya). Paraît devoir très bien venir dans la région. Nous n'avons que de trop de jeunes plants pour pouvoir nous prononcer. IX. ESSAIS DE PLANTES ORNEMENTALES. Ces essais, tant en 1900 qu'en 1901 ne nous ont donné presque que des déboires Nous avons semé, sans résultats, à peu près toutes les espèces florales des Jardins européens, et les quelques rares plantes qui germaient ne tardaient pas à disparaître. Cepen- dant, les zinias, l'Abebéeroschus, le tournesol et les cheveux de Vénus viennent bien dans la région. La brousse contient d'ailleurs quelques plantes ornementales (héliotropes sauvages et plusieurs jolies liliacées) qui peuvent suf- fire à la rigueur à orner un parterre en hivernage. X. ESSAIS DE PLANTES INDIGÈNES COMESTIBLES ÉTRANGÈRES A LA RÉGION Dolique comestible ; vient très bien pendant l'hivernage et donne un bon produit. Osonifi vient très bien en hivernage et donne une récolte abon- dante. Goumbo vient très bien dans la région, Niébé vient très bien également. Il en est de même du Dâ ou oseille indigènes et des goyadés, sorte de petites aubergines rouges à maturité. XI. — CULTURES POTAGÈRES. Je n'insisterai guère sur les cultures potagères pour lesquelles tous les renseignements utiles se trouvent dans les diverses notices sur l'agriculture au Soudan, notices en tout applicables dans la région. 336 ÉTUDES ET MÉMOIRES Avec quelques soins, on peut avoir pendant la saison froide tous les légumes d'Europe, et si l'hivernage est une saison moins propice que la saison froide, il n'en demeure pas moins vrai qu'on peut, en cette saison, conserver des choux et des choux-navets jusqu'en août, des carottes et des betteraves jusqu'après l'hivernage, ces plantes ayant été semées en hiver. Enfin, les aubergines, les tomates, les concombres, les potirons, les cornichons et le cresson de fontaine donnent avec les radis et les salades des ressources en toute saison. XII. ESSAIS A FAIRE. Avant de condamner la culture des plantes dont nos essais ont été infructueux, d'autres expériences seraient encore nécessaires, car il est possible qu'en changeant les conditions de terrains et de sai- sons des essais nouveaux puissent donner de meilleurs résultats. Bien des essais resteraient encore à faire avec de grandes chances de succès. Si nous ne les avons pas entrepris, c'est que nous n'avons pas toujours reçu toutes les graines que nous demandions. CONCLUSION Si la région nord n'offre pas les richesses qu'on est en droit d'at- tendre de la Guinée et de la région sud du Soudan, il n'en est pas moins vrai que le haut de la boucle du Niger a dans ses ri/ières un grand avenir. Avec la sécurité des habitants, les cultures du dattier, du mil, du blé, de l'orge et de l'avoine, pourraient prendre un grand dévelop- pement. Le talxïc, le bourgou, le sésame, le ricin, l'arachide, le beyra et le cedra pourront fournir en abondance leurs produits k l'industrie. Enfin, par un reboisement méthodique (pie nous avons longue- ment étudié et dont nous fournissions les données essentielles, l'Eu- ropéen secondé par l'indigène pourra bientôt réparer l'œuvre néfaste de l'Islam et du nomadisme, fixer le sol, étendre les terrains de cul- ture et donner un peu de vie à ces terres presque désertes. Mainc.l'v, iMcdecin-niaJor de ^'' dusse. LES CULTURES DE L'ARCHIPEL DES COMORES LE COCOTIER C'est sans contredit Farbre le plus admirable et le plus utile des pays tropicaux. On n'oublie jamais, pour l'avoir vu une seule fois, ce palmier géant à la hampe grêle et élégante, épanouissant sa tige en dentelle aérienne, à des hauteurs prodigieuses, avec sa couronne de fruits à la base, à l'instar d'une véritable parure. Le bruiss'ement incessant de ses feuilles, donnant à s'y méprendre l'illusion d'une pluie d'orage, lui semble particulier. Aux Comores, le fruit de ce précieux palmier est, avec la banane, le manioc, la patate, le maïs, l'ambrevade et le riz, la base de la nourriture de l'indigène. Il entre également pour une large part dans les recettes alimentaires du pays comme véritable beurre végétal, et avant sa maturité est réputé des malades boisson agréable et aliment léger. Nous n'insisterons pas sur les usages innombrables de toutes les parties du cocotier, dont la moindre parcelle (tronc, écorce, feuilles, sève, fruit, racines, bourgeon terminal, etc..) est utilisée aux Indes, tandis que les naturels des îles les laissent perdre en grande partie. Ils savent pourtant fabriquer les cuillers et des vases, etc., couvrir leurs cases des feuilles tressées, préparer du vin de palme, du vinaigre et des liqueurs fermentées, ainsi que des cordes assez solides. Le coco, vidé de son amande, est recueilli avec soin et sert de récipient pour le transjaort de l'eau potable, surtout dans le sud d'Anjouan et à la Grande Comore. Malgré les services inappréciables que rend le cocotier, les îles vivent depuis l'occupation française des plantations séculaires. Aucun effort, aucune amélioration n'a été tentée pour les renou- veler jusqu'à ces trois dernières années oi^i des colons intelligents essaient d'en rénover la culture. Notre but, après avoir décrit la zone d'habitat du cocotier, est d'en énumérer : 338 ÉTUDES ET MÉMOIRES 1" Les variétés principales, leurs avantages et leur rendement; 2" Les modes de plantations indigènes et européens ; 3" Les maladies et les ennemis des cocotiers ; 4" Les améliorations de toute nature à apporter aux planta- tions ; 5° Un résumé d'essai de culture intensive à Anjouan. 1° Habitat du cocotiei^ dans l'archipel des Gomores du bord de mer jusqu'à 300'" d'altitude et un peu au-dessus, soit dans les ter- rains en plaine de nature sablonneuse et calcaire ou volcanique, soit dans les sols en pente légère ou abrupts, rougeâtres et argileux, ce palmier croît avec vigueur et produit. A des altitudes plus élevées (350 à 600 mètres), il étale sa touil'e verdoyante, mais sans fructifier. Nous marquons sur la carte les zones qu'il occupe actuellement dans chaque île. A Mai/otte, où des cocoteries couvraient autrefois l'île entière, il n'en existe pour ainsi dire jdIus sur les propriétés. Il faut aller dans le Sud, au point où l'île s'étrange vers la baie de Boueni et au-des- sous du pic Ouchonghi, pour retrouver des plantations éparses à l'entour des villages. Dans les parties Nord et Nord-Est, dans quelques vallées, on en rencontre également mais clairsemées. On peut évaluer la totalité à 25 ou 30.000 pieds environ. Mohéli offre, malgré sa petitesse, des plantations plus importantes. Toutes les vallées et elles sont nombreuses, surtout sur les côtes Sud-Ouest et Nord-Est, sont semées de cocoteries au hasard et d'une façon pittoresque. Est-ce la nature, est-ce l'indigène qui les a plantées? l'un et l'autre assurément, mais il reste de grandes étendues où les plantations pourraient s'étendre d'une façon régulière ; sans pouvoir pré- ciser, on peut estimer à plus de 100.000 le nombre de ces palmiers à Mohéli. Vîle voisine, la Grande Comore, grande comme la moitié de la Réunion, est bien loin d'être aussi riche. Par rapporta son étendue ses cocoteries sont insignifiantes. Pendant les guerres des petits sultans entre eux, avant notre protectorat, les palmiers furent détruits en grande partie pour alVamer l'ennemi et l'amener à se rendre. Ainsi, il en existait dit-on, 40 à 50.000 dans la province d'Itsandraoù c'est une rareté d'en trouver de nos jours. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 339 Depuis, les indig-ènes ont si peu replanté qu'Anjouan et Mohéli fournissent une g^rosse partie des cocos nécessaires à la nour- riture d'une population dépassant 50.000 habitants. Cet arbre est devenu si précieux que les Comoriens, qui se con- naissent bien entre eux, en entourent le tronc sur une longue étendue d'une ceinture de branchages épineux pour soustraire la récolte aux voleurs. Cet obstacle joint à la paresse des indigènes suffit en g-énéral à éloig-ner les maraudeurs. C'est la seule des quatre îles où sembla l)le précaution soit prise d'indigène à indig-ène. Une des raisons qui a empêché le grand Gomorien de replanter les cocoteries de ses aïeux, c'est la lenteur excessive de la crois- sance de ce palmier, qui ne rapporte guère qu'entre la 12"^ ou la IS"^ année. L'arbre en effet est oblig-é d'aller au loin chercher sa nourriture et de disjoindre peu à peu de ses racines les couches volcaniques et celles de terres brûlées, véritable ciment qui retarde longtemps son développement. Il ne faut pas oublier que la Grande Gomore est un pays neuf et volcanique en pleine formation. Néanmoins, étant donné que l'indigène paie à la fin du Ramadan un coco jusqu'à 0 fr. 20 et 0 fr. 30 et le fait venir des îles voisines ; il y aurait un réel intérêt à encourager les villages collectivement par des primes, des dégrèvements et tous autres moyens raison- nables à réparer le temps perdu (15 années) par de jeunes planta- tions. La Grande Gomore ne possède pas 250.000 cocotiers et son sol pourrait en nourrir plus d'un million. Anjouan^ qui tient déjà la tête comme pays producteur de la yanille, a des cocoteries considérables. On peut évaluer à 300.000 environ ces palmiers, dont 200.000 en rapport et 50 à 60.000 de plantations récentes. Le regard est surpris et charmé de voir de très anciennes planta- tions arabes bien alignées et très denses. G'est d'autant plus remar- quable que généralement chez les peuples africains orientaux (Abyssins, Somalis, Gomoriens, Anjouanais et Malgaches) la ligne droite n'est pas en honneur ni dans les constructions, ni dans les cultures où dominent les courbes et les irrégularités les plus extra- ordinaires. Dans ces cocoteries, nombre d'arbres sont touchés par les para- 3i0 ÉTUDES ET MÉMOIRES sites, les maladies et la vétusté ou plantés trcip près el diniinuent leur production d'année en année. Mais le terrain est si favorable qu'on peut estimer la récolte globale à 2.500.000 cocos par an. En moins de dix ans, nous entrevoyons la possibilité de quintupler plantations et rendement. I. VARIÉTÉS PRINCIPALES Avantages et rendements. — Le coco double ou des Sevchelles, curiosité botanique, n'existe pas aux Comores. Aucune tentative européenne n'a été faite pour l'introduire, bien que ce fruit curieux fasse l'objet d'un certain commerce. Les Arabes l'auraient jadis planté sans succès. Nous le citons pour mémoire. Cinq variétés principales peuplent les plantations de 1 Archipel. Variétés. — 1° Le coco sept verres, ainsi nommé pour sa conte- nance remarquable. 2"^ Le coco vert ou Moundon. (Désignation anjouanaise.) 3" Le coco roug-e ou Mocoundon. 4" Le coco jaune à 3 côtés ou Voule. 5° Le coco nain de Pemba ou Mérassi. Une variété, dite coco noir, m'a été signalée, mais elle ne m'a pas paru sufïîsamment différenciée des autres pour l'en séparer. Avantages. — De la première et de la cinquième espèces, il y a peu à dire, car elles sont assez rares et disséminées çà et là dans les cocoteries. Le palmier n" 1 atteint une belle hauteur, évaluée à lo et 18 mètres, ses fruits sont volumineux et abondants, pesant jusqu'à 6 et 8 kilos, et au delà. Il existe une disproportion entre la bourre très profonde qui enveloppe la noix et cette dernière. A la section, l'amande est remarquable par son épaisseur, 1 cm. 1/2 à 3 cm. 1/2. L'abondance de li([uide lactescent est connue puisqu'elle a déterminée le nom de la variété. La lenteur extrême de sa croissance ne permet à ce cocotier qu'un rapport vers la 12" et 15'' année. C'est pourquoi les naturels ne l'ont guère propagé. Le n** 5 vient de Pemba où il a été vraisemblablement importé CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 341 de Ceylan, grâce aux très anciennes relations commerciales existant entre les Indes et les Archipels de l'Océan Indien. Les indig-ènes de nos possessions Font planté de préférence dans les cours de leurs maisons ou cases et dans les jardins à proximité des mosquées, (( afin disent-ils qu'on ne leur vole pas ». Cette précaution est justifiée par le peu de développement de ce palmier qui produit parfois avant la cinquième année et permet à une g-rande personne la cueillette à la maison de ses fruits. L'en- veloppe fibreuse est assez mince, jaune et souvent couleur pomme d'api extérieurement, le lait plus sucré est recherché comme boisson rafraîchissante, les noix se trouvent ainsi consommées avant maturité. La production en est abondante. Hcndemcnt . — Les variétés n°^ 2, 3, 4 sont les plus importantes et les plus répandues ; cependant le coco rouge, qui passe, malgré sa petitesse, pour renfermer une amande plus riche en huile, ne vient aux Comores qu'après les deux autres. 11 serait à propager. Les n"* 2 et 4 fournissent de belles récoltes. J'ai observé certains sujets qui donneraient une moyenne de 25 à 50 noix à chaque cueillette trimestrielle ; quelques colons ont vu cette production remarquable pour les îles se maintenir des années chez des pal- miers vigoureux bien soignés ou bien exposés. Le rendement annuel atteindrait ainsi pour les quatre récoltes de 100 à 200 noix, chilfre normal à Taïti et aux Marquises. Ce sont là des chiffres exceptionnels, je m'empresse de le dire. Un cocotier rapporte couramment dans les îles de 30 à 60 cocos par an. On compte surtout deux bonnes récoltes, la première après les pluies qui vont de la mi-décembre à fin d'avril, en juin-juillet ; la deuxième à fin d'année, l'ascension de la sève se trouvant favorisée par les grandes brises qui soufflent par rafales violentes et déra- cinent parfois les cocotiers. Des deux variétés citées précédemment, la variété jaune est répu- tée la plus précoce. On l'a vu produire entre la 5" et la 7'' année. Cette remarque la recommande à l'attention des planteurs. Elles donnent un coprah de bonne qualité. 342 ÉTUDES tT MÉMOIRES II. — MODES DE PLANTATION (luclig-ène et Européen). 1° Mode indigène. — Toutes les cocoteries des îles k en rapport, c'est l'indig-ène qui les a plantées et l'Européen qui en a g-énérale- ment profité par voie de location au sultanat. L'Arabe intelligent a tenté d'établir cette culture avec méthode. En bien des endroits les plants sont alig-nés et distants les uns des autres de 4 à 8 mètres, si bien que l'alig^nement, à peu près observé, servait en même temps de limite entre les propriétés. Par la suite, cette symétrie s'est trouvée détruite, le propriétaire laissant croître les jeunes palmiers dans les intervalles, au hasard de la g-ermination des fruits tombés sur le sol ou dans les herbages sous-jacents. C'est ainsi que dans les palmeraies, les sujets sont tantôt g^éminés ou groupés à moins d'un mètre les uns des autres, tantôt éloignés à des distances considérables, tantôt absents sur de notables espaces. Chaque arbre, à la recherche de l'air, de la lumière ou des brises salines, a évolué pour son compte; de là l'aspect désordonné des plantations indigènes. A Mohéli, j'ai noté en certains points de véritables pépinières spontanées, la graine ayant germé sur place et créé des toulTes de cocotiers. Ailleurs, le Mokois, le Budmen-Mvouanais, le Mohélien, le Maoré ouïe Comorien a planté de-ci de-là, dans les fonds de vallées ou la déclivité des coteaux, au gré de son caprice et avec une patience de primitif, les cocos germes qu'il trouvait sur son chemin, La nature a eu, somme toute, autant de part que l'autochtone dans la création de ces précieuses réserves. 2" Mode européen. — La méthode a présidé aux nouvelles for- mations, chaque planteur a adapté ses plantations à ses vues et à son expérience personnelle. Les uns mettent la semence en place aussitôt dans des poquets creusés à une bonne profondeur, les autres tirent de leurs pépinières des sujets robustes plus ou moins Agés et les plantent au début de la saison pluvieuse. Entre les plants, les distances varient de 5 à 8 mètres et deviennent rationnelles. CULTURES DE l' ARCHIPEL DES COMORES 343 A son tour, le naturel profite des progrès accomplis et les imite peu à peu. 50 à 60.000 cocotiers plantés dans les meilleures conditions ont ainsi bénéficié de l'évolution culturale de ces dernières années. III. MALADIES ET ENNEMIS DU COCOTIER Innombrables sont les agents destructeurs qui s'attaquent au roi des palmiers. Avant de citer les principaux, notons cette coutume indigène, très répandue dans les îles, qui consiste à marquer le tronc dans toute sa hauteur de hachures transversales assez profondes. Faites au couteau, ces empreintes, au début, étaient destinées à favoriser l'ascension, mais le naturel par habitude entaille comme à plaisir les jeunes sujets ainsi que tous les arbres à sa portée, manguiers, jacquiers, cacaoyers, etc. Ces blessures sont une porte d'entrée offerte aux parasites du dehors. Termites. — Aussi n'est-il pas rare de rencontrer de grosses ter- mitières greffées sur les plaies des cocotiers. Le termite maçon se creuse le longdela hampe de véritables tunnels avec relais, les canaux atteignent un développement extraordinaire et communiquent entre eux. Ainsi touchés, les arbres cessent de rapporter et meurent quand la colonne médullaire est envahie, comme j'ai pu en suivre un cas très remarquable à Anjouan. Ces termites à Mayotte s'attaquent aux maisons et même sur le plateau de Dzaoudzi causent annuellement de notables ravages. Dans les déserts somalis, les termitières se dressent par milliers atteignant des proportions surprenantes qui A^ont de 1 mètre à 5 mètres de hauteur. Ces fourmis envahissent, cocotiers, manguiers et peuvent devenir un danger. Larves et Scarabées. — Par les entailles s'introduisent souvent des larves des coléoptères, résultat de la ponte en ces godets artificiels. La larve dévore tout sur son passage, elle ne tarde guère à per- forer la colonne centrale à diverses hauteurs. En général, le trajet est oblique et peut intéresser le tronc dans son entier. Selon la partie médullaire lésée, s'observent chez un sujet en plein rapport de 344 ETUDES ET MEMOIRES curieux phénomènes de dég-énérescence, on voit le régime corres- pondant peu à peu s'atrophier et disparaître. Tel cocotier très touché ne mûrit plus (ju'un régime sur quatre qu'il donnerait auparavant, tel autre cesse sa production et dépérit. La lésion est souvent irrémédiable quand la larve détruit le bour- geon terminal, anéantissant les espérances de plusieurs lustres. Le scarabée auquel elle donne naissance est connu dans le pays sous le nom de hanneton du cocotier. 11 vole à une g'rande hauteur, existe en alîondance et se trouve muni de maxillaires puissants. Les dégâts qu'il cause sont considérables. L'arrosage des plants atteints à l'eau de mer suffît souvent k les en débarrasser. On sait que la partie centrale du cocotier est une vaste colonne filtrante à absorption rapide. La pourriture. — Les termites et larves des scarabées ont pré- paré le terrain où les détritus végétaux s'accumulent, et dans ce milieu préparé g-erment des plantes et des orchidées qui précipitent la décomposition et la mort du cocotier. Les rats qui foisonnent dans Tarchipel trouvent «àans les coco- tiers mal tenus le g-îte et la nourriture. Ils font une importante consommation de jeunes cocos dont ils provoquent la chute inces- sante ; quelquefois le rat tombe avec la noix. Les phanies^ sont un ennemi plus redoutable encore, car elles sont en nombre prodig-ieux et s'abattent le soir sur les plantations pour leurs déprédations nocturnes. Peu chassées, elles s'accroissent d'année en année et s'attaquent à tous les fruits. Le cyclone de Mayotte, en 1808, les avait à peu près fait disparaître de l'île, on ne saurait en dire autant d'Anjouan et de Mohéli où on les compte par milliers. Quelles que soient les pertes que fassent subir aux indigènes et aux planteurs ces divers ennemis, rien n'approche du dommage causé par la « Coccidiose ». Coccidiose. — Cette maladie parasitaire a détruit autrefois les 4/5 des cocotiers aux Comores. Mayotte. qui possédait il y a 30 ou 40 ans de belles plantations, ne s'en est pas relevé. Les îles voisines t)nt vu leur production compromise pendant longtemps. . 1. Phanics (grosses cliauves-soiiris fru},'ivores). CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 345 Par son extension extrême, le coccus semble s être atténué spon- tanément ; en tout cas les cocotiers actuels produisent en suppor- tant les atteintes du parasite. Les jeunes plants sont retardés dans leur croissance par cette maladie ; au point attaquée, la feuille brunit et se rouille, il y a rapidité extrême de la ponte et de l'envahissement des parties encore intactes; si l'on intervient pas, Tarbre peut succomber. La coccidée serait analoi^ue à celle qui fît péi-ir tous les fusains en Europe, il y a quelques années. C'est là le danger le plus redoutable qui menace les cocoteries, les vents transportant les germes à de grandes distances. Un bon noml)re de plants, fougères, graminées, arbres variés se trouvent à Anjouan, comme à Mayotte et Grande Comore, atteints de maladies parasitaires ou cryptogamiques variées, fumagines, rouille, hemileia, puceron, etc.. Ce dernier couvre les anibrevadiers, les rosiers, etc. Je pense qu'il faut attribuer aux nombreux espaces en friche la multiplicité des causes parasitaires à différencier qui sévissent sur des espèces botaniques dissemblables. Les vols. — Aux causes énumérées plus haut s'ajoutent des lar- cins nombreux et incessants. Le noir n'a pas le respect de la pro- priété, qui du reste est encore mal établie. Pour lui les productions de la terre sont au premier venant. D'après une coutume anjouanaise, tout voyageur a droit à des cocos pour étancher sa soif, et l'Arabe assez inhospitalier qui refusait était sévèrement puni du temps des sultans. Il ne se passe pas d'année qvi'il n'y ait une ou plusieurs morts tragiques de marau- deurs tombant la nuit du haut de ces palmiers, entraînés par le poids du régime dérobé. Aussi une réglementation sévère de la cueillette et de la circulation des noix dans l'île est venue mettre une entrave sérieuse à ces fraudes. On peut estimer à 1/3 de la récolte les pertes relevant des enne- mis et des maladies du cocotier. 3i6 ÉTUDES ET MÉMOIRES IV. AMÉLIORATIONS DE TOUTE NATURE A APPORTER AUX PLANTATIONS L'observateur qui visiterait les cocoteries de l'archipel serait frappé non seulement de leur irrég-ularité déjà signalée, mais en même temps de leur ancienneté et de leur peu de stabilité. En elîet, vice initial, la semence a poussé du l'as du sol à tel point que le sujet s'est, dans bien des cas, incliné et replié sur lui-même, à la recherche d'un point d'appui ou bien le tronc s'est renflé de façon anormale et a donné naissance à une masse de racines adventices qui épuisent le palmier prématurément. On observe des plants qui tiennent en équilibre, vous ne savez comment, et vég-ètent. Aux forts moussons, ces cocotiers sont culbutés souvent en plein rapport. Les sujets centenaires ou entamés ne résistent pas davantage. Dans le sud d'Anjouan, écornés par le cyclone de 1898, un grand nombre d'arbres ne rapportent plus depuis cette époque. Il y aurait intérêt à refaire les plantations d'après les méthodes européennes, c'est-à-dire rationnelles. Il est bon cependant de noter les procédés indigènes en usage jusqu'à ce jour. Les entailles en blessant le cocotier forcent la production et favo- risent l'envahissement par les parasites. La section des racines adventices au sabre d'abatis est très en honneur, elle agit heureusement et produit un nettoyage salu- taire. Pour activer le rendement, l'Anjouanais enfonce quelquefois un grand clou à la base du sujet, de manière à irriter la moelle. Dans de petites cocoteries tous les sujets ainsi cloutés rapportent hâtive- ment, mais ils s'épuisent vite. Ce procédé original ne se trouve pas dans les îles voisines. Un sarclage soigneux se remarque dans quelques propriétés indigènes, surtout à l'époque des cultures intercalaires (ri/., etc..) Contre la coccidiose, les naturels ont employé un remède radical : le feu. Ayant remarqué que les parasites gagnaient d'arbre en arbre, ils ont coupé toutes les feuilles du cocotier, laissant à nu le bourgeon terminal. i CULTURES DE l'aRCIIIPEL DES COMORES 347 Les parties enlevées sont brûlées sur place ; aux pluies, tout repousse avec vigueur, la fructification est retardée. Cette méthode a sauvé les cocoteries, notamment à Anjouan. Je la rapprocherai volontiers des incendies spontanés ou accidentels qui, vers novembre ou décembre, à la période des semailles, s'al- lument un peu partout et sont relFroi des planteurs. Bien surveillés, ils assainissent le pays en détruisant une quantité prodig-ieuse de germes parasitaires et d'ennemis nuisibles, moisissures, insectes, rats, escargots, etc. C'est une habitude séculaire à conserver et à discipliner. Progrès que pourrait accomplir V Européen. — Ils sont d'ordre différent et comprennent : 1" La création et la sélection des pépinières ; 2° Les soins à donner aux sujets adultes ; 3° Le choix des engrais. Les pépinières sont faciles à établir; les semences se trouvant dans leur habitat naturel germent spontanément, même lorsqu'elles sont mises en magasin pour la vente. Ce fait est à mettre en parallèle avec la rapidité de croissance et d'évolution de certaines espèces (fourcroya gigantea, arbres fruitiers, sagoutiers, etc., dans l'archipel des Comores). Les noix entassées au pied des arbres, manguiers de préférence, et couvertes de feuillages forment les pépinières les plus simples ou bien sont placés côte à côte sur un lit d'herbes sèches recouvertes de débris de bananier ou autres et enclosées, ou bien dans le sable, ou dans une fosse facile à irriguer, au voisinage d'une rivière. Tous ces procédés réussissent, mais il faut arroser. Cueillies à maturilé, les noix germent plus rapidement que les semences sèches et dans la proportion de 75 °/o- Avec n'importe quel mode de procéder la réussite est certaine. Il vaut mieux que le sol de la pépinière soit assez dur et per- méable pour retarder l'enracinement du sujet. Les planteurs des îles connaissent toutes ces particularités. En retour, ils pratiquent peu la sélection^ ayant tendance à mettre en place tous les sujets germes, sans prendre soin d'écarter les moins robustes. Ces nurseries permettent d'agir à coup sûr, à une saison détermi- 3i8 h*;TUDES ET MÉMOIRES née, un peu avant les pluies ; elles sont préférables à la mise en place immédiate de semences dont on i<^nore le pouvoir g-erminatif, et que les noirs ne se font pas faute de dérober souvent. On a ainsi le loisir de préparer les trous de plantations. A une certaine distance de la mer, quelques livres de sel au fond des poquets faciliteraient une culture intensive. On sait lavi- dité du cocotier pour les chlorures; en dépit des brises contraires, l'arbre s'incline toujours vers la mer. 2** Soins nécessaires aux sujets adultes. — La taille est utile les premières années, surtout par suite des ravages de la coccidée. Les sarclag'es répétés et de lég^ers labourages deux fois par an sont indispensables à une croissance vigoureuse. On les néglige généralement, et le jeune plant pousse comme il peut, jusqu'à ce qu'il soit assez fort pour étouffer la végétation ambiante. Certaines vanilleries plantées sous cocoteries assurent à ces der- nières des soins constants et un bon rendement par le paillage qu "elles reçoivent et le nettoyage minutieux des palmiers dont les feuilles menacent constamment dans leur chute les vanilliers voisins. On ne se préoccupe pas assez des dégâts des termites, des larves et des blessures faites aux arbres. Ces blessures, quand la cicatrisation est vicieuse, produisent un étranglement qui retarde longtemps la fructification. A Tarrière-saison chaude (octobre et novembre), le palmier se dépouille de ses feuilles les plus anciennes et des régimes sevrés de leurs fruits. Ces débris assurent aux femmes des naturels qui les recueillent avec soin un combustible abondant. Le moment est venu de nettoyer le cocotier tant des poussières et des germes de toute sorte accumulés à la base des feuilles que des nids de rats et des parties desséchées. Les noirs sont très experts dans cette besogne dont ils apprécient l'utilité. C'est alors que l'on devrait détruire les termites et badigeonner au lait de chaux additionné de pétrole ou autre mixture appropriée (bouillie bordelaise, etc.) les parties du tronc qui sont entamées. Une semblable prati(jue sauverait bien des palmiers. Les planteurs Seychellois prennent un tel soin de leurs cocotiers qu'ils leur évitent la plus légère blessure et, à part un nettoyage annuel, se contentent de ramasser les cocos tombés. CULTURES DE l'aRCHIPEL DES COMORES 349 Ce procédé serait l'idéal mais ne saurait guère s'appliquer à des pays aussi tourmentés que les Comores où les cueillettes trimes- trielles ont donné des résultats encourageants et permettent des toilettes de l'arbre plus fréquentes. 3° Choix des ençjî'ais. — Indigènes et planteurs ont profité des récoltes dont les a comblés un sol fertile, sans chercher à lui rendre les principes fertilisants. De plus, par les répétitions, les semailles de riz, de mais, etc., sont venues épuiser les palmeraies. Cet appauvrissement des terres n'a pas été sans influer sur l'en- vahissement des arbres par la coccidée et autres parasites. Dans une cocoterie modèle dont les plants seraient distants de 6 à 8 mètres, selon les terrains, on devrait les entourer d'herbes sèches provenant de sarclages. Pendant les huit mois de sécheresse, ce paillage maintiendrait une humidité suffisante et fournirait un engrais végétal aux jeunes sujets. Quand le palmier est en rapport, l'adjonction à la base des bourres de cocos, si riches en sels minéraux et qui se perdent, de troncs de bananiers et autres détritus végétaux, lui serait un adjuvant précieux. Le paillage méthodique (paille de cannes, fourrages secs) d'une cocoterie produirait des rendements inespérés, s'il faut en juger d'après le bénéfice qu'en retirent les sujets qui occupent les vanil- leries. Jamais les fumures animales, les mélasses inutilisées, les déchets de la fabrication de rhums, les guanos des Glorieuses mélangés ensemble en des proportions à trouver, etc., n'ont pas été employés aux Comores comme engrais intensif sur les cocoteries. J'ai vu des propriétés perdre annuellement 25 à 30.000 fr. d'engrais qui eussent trouvé là une utilisation judicieuse et rémuné- ratrice. C'est en essayant des engrais végétaux, et parmi eux des feuilles de Fourcroya gigantea, sorte d'agave textile assez répandue à Anjouan, que j'ai pu réaliser une expérience très suggestive, au point de vue production. Ces feuilles de fourcroya, riches en éléments azotés, se perdaient. J'eus l'idée de les faire couper et mettre au pied des cocotiers de mon jardin à la saison sèche. Bulletin du Jardin colonial. 23 350 ÉTUDES ET MÉMOIRES Chaque sujet reçut ainsi cent feuilles et des débris de bourres de cocos. En pourrissant lentement, il se forma autour de chaque arbre un fumier vég-étal analogue par lodeur au fumier d'étable. La provision s'épuisa en trois mois. Les cocotiers qui, sur le plateau de Hombo, composé de terres médiocres, soullVent beaucoup et rapportent peu reprirent leur allure vig-oureuse et fructifièrent. L'expérience s'est poursuivie pendant l'année 1900. Voici les résultats qu'elle m'a donnés : V. ESSAI DE CULTURE INTENSIVE A ANJOU AN Nous la résumons dans le tableau suivant Elle porte sur 27 cocotiers. •Si fl - Avant les enj^rais APRÈS LES ENGIIAIS 11 l'"' récolle t" récolle 3= récolle 1» récolle Observations 1" 3 Janvier 1900 !'='■ Avril 1-r Juillet l"' Octobre Z I 0 10 16 7 •J 3 13 50 46 3 10 20 32 50* * Maximum de pro- i 00 2 6 6 duction, tlcpcril en jan- f) 2 3 21 10 vier 1901, le cceui- se (i 3 5 7 10 trou\anl,attaquéi)ai'les 7 00 00 9 10 larves. S ■i 9 13 15* "Sujet fortement 9 2 5 11 13 échaneré à la hase. Ini- 10 5 13 20 6 ])lan(ation vicieuse et II 00 00 15 9 racines advcntives, est J2 00 7 19 21 renversé par im coup 1.5 3 3 20 9 de vent en décembre IS 1 2 H 17 1900. 15 2 19 11 21 16 7 S 10 3 17 00 M 13 6 is 5 7 11 S Kl 3 (i 13 15 20 4 4 11 10 21 2 00 12 13 22 00 î 12 8 2. '5 1 7 <) 19 2/, A'icîi'KO » l'-'Tcc'") 10 00 2.-) Vicpf^c (Jro ,.(:^;t«) ^ 10 3 2(i Vici-j;i' » » „ * *Etrani;lé au sommel 27 00 2 7 7 jiar cicatrice \icieiise, se couvre de fruits en janvier 1901. .Vttaqnéel 57/24 = 2.3 173/25 = (). 9 376/26 = 14 342/26= 13 ci)uisi'- par les Termites. CULTURES DE L AHCHIPEL DES COMORRS 351 Critique de ce tableau. — La première récolte en janvier 1900 est sujette à caution, mes boys prélevant des fruits sans autorisation. Par la suite, je pus obtenir un contrôle sévère en abandonnant à mon personnel le produit de la cueillette effectuée et comptée devant moi arbre par arbre. Les noix tombées dans l'intervalle m'étaient fidèlement apportées et sont comprises dans l'ensemble. On voit la progression de trimestre en trimestre avec les engrais, elle passe de 6, 6 à 14 et 13 en moyenne par sujet. Un cocotier pourrait donc produire à Hombo plus de 38 semences annuellement. Rappelons ici que notre expérience s'est poursuivie sur un sol ingrat, composé de scories et de graviers volcaniques, c'est-à-dire dans les pires conditions. Quatre arbres sur 26, soit lo°/o, étaient gravement touchés et la plupart des autres entaillés. La quatrième récolte, celle d'octobre, devrait accuser une baisse plus sensible, car elle a lieu aux mois d'extrême chaleur et d'extrême sécheresse, époque où la cueillette est médiocre. C'est aux fumures végétales et aux nettoyages qu'il faut attribuer ce rendement. Enfin les cocotiers promettaient une magnifique production quand nous avons quitté l'île, en janvier 1901. Le tableau ci-dessous, basé sur des palmiers abandonnés à eux- mêmes, dans le même jardin, pendant la même période, va corro- borer le précédent : c o .-s ■a) 1" r^'colte Z" récolte 3" récolte ■i" récolte Observations 3 Z 1 Vierge » » » 2 2 2 7 3 3 0 2 :i 0 te 4 1 2 7 2 se . 5 0 3 0 2 . Il en sera délivré à la partie versante reçu du quittancier à souche; ce reçu sera transmis par l'intéressé au Directeur de l'Agriculture qui, au vu de cette pièce, établira la demande. Le premier jour de chaque mois, le Directeur de l'Agriculture enverra sous bordereau, au bureau fie la comptabilité du Gouvernement général, pour régularisation ultérieure des opérations, tous les récépissés qui lui auront été transmis pendant le mois précédenl. DOCUMENTS OFFICIELS 383 3° Les graines expédiées par paquets recommandés ou par colis postal seront délivrées par les soins de la Direction de l'Agriculture, partout où cette administration est représentée, et, dans le cas contraire, par les chefs de province, de cercle ou de district. 4° Le règlement de compte définitif sera effectué aussitôt après la réception des envois. 5° L'administration s'efforcera de faire venir des semences de bonne qualité ; mais un grand nombre de celles-ci s'altérant avec la plus grande rapidité, toutes les commandes seront faites aux risques et périls des colons intéressés ; aucune réclamation ne pourra être acceptée pour cause d'avarie, de mauvaise qualité ou de retard dans la livraison des graines. 6° Les livraisons de semences et de plants, provenant des Stations d'es- sai agricoles, continueront à être faites, comme par le passé, sans que le dépôt d'un cautionnement soit exigé, mais la Direction de l'Agriculture fera paraître dorénavant, au Journal Officiel de la Colonie, en janvier, avril, juillet et octobre, le tarif et la liste des graines et plants, mis en distribution par les stations d'essai de Tananarive, Alakamisy, Tamatave, Mananjary et Fort-Dauphin. Les personnes désirant commander un nombre assezconsidérablede plants à ces établissements devront s'entendre quelques mois à l'avance avec les directeurs des différentes Stations d'essai. Les commandes, comprenant plus de l.OOO plants, devront enfin, en ce qui concerne la Station agronomique de Tananarive, parvenir au sous- inspecteur, chef de la circonscription agricole du centre, avant le V août de chaque année. Tananarive, le 6 mars 190'2. Le Générai commandant en chef du corps d'occupation, et Gouverneur (jénéral de Madagascar et Dépendances. Gallieni. CIRCULAIRE à MM. les Administrateurs chefs de province ou de district autonome et les Commandants de cercle, au sujet de la participation de la Colonie au concours général agricole de Paris et aux expositions annuelles de la Société nationale d'horticulture de France. Messieurs, Par circulaire du 12 octobre 1901, j'ai attiré votre attention sur les sérieux avantages qu'il pourrait y avoir pour la Colonie à participer chaque année au concours général agricole de Paris et aux expositions de la Société nationale d'horticulture de France. Je vous signalais, notamment, dans cette circulaire, qu'un grand nombre des produits du sol de nos possessions équatoriales étant encore 384 DOCUMENTS OFFICIELS insunisamment ronnus des consommateurs Iriuiçais, les colons se trouvent somi'iil aux jinses avec de très sérieuses dil'licultés j)onr obtenir un placement régulier et avantageux de leurs denrées, surtout dans les possessions nouvellement acquises comme Madagascar. Le succès obtenu par la Colonie, d'abord à ri'>\position universelle de 1900, puis, plus récemment, au concours agricole de Paris et à la der- nière exposition de la Société nationale d'horticulture de France, où les collections envoyées de Madagascar ont été particulièrement remarcpiées du jury et du j)ublic, grâce au soin apporté à leur présentation [)ar l'ins- pection générale de l'agriculture coloniale el aux précautions prises dansles cercles on pr(u inces pour ne recueillir que des échantillons réellement intéressants, prouve que, cette l'ois encoi-c, noselfortsnonl pas été perdus. Toutefois, il ne vous échapj)era pas qu'il ne suffit pas, pour bien faire connaître nos [)roduclions et établir des relations plus suivies entre les consommateurs et les agriculteurs ou commerçants établis à .Madagascar, de participer seulement de temps à autre aux expositions de la Métro- pole comportant une section coloniale. Pour être efficaces, il est indis- pensable que ces efforts soient continus et qne l'administration et les colons ne laissent échapper aucune occasion de bien mettre en évidence, par l'envoi de nouvelles collections soigneusement préparées, les progrès accomplis dans l'anuée écoulée, afin de tenir les négociants français exac- tement an courant de la qualité de nos denrées agricoles et des stocks disponibles pour le commerce d'exportation. J'ai donc décidé, comme l'a fait prévoir la circulaire du '2'2 juillet dernier, que Madagascar prendrait part au concours agricole de Paris devant avoir lieu dans le courant de février 1903, ainsi qu'à la prochaine exposition delà Société nationale d'horticulture de France. Sachant que je puis compter sur votre zèle et sur vos soins pour que chaque circonscription territoriale soit représentée par l'envoi d'échantil- lons et de documents judicieusement choisis, capables de faire mieux apprécier les richesses agricoles et naturelles de la (irandc lie, je suis persuadé que les résultats obtenus en 1903 seront encore supérieurs à ceux de cette année, et contribueront ainsi, dans une large mesure, à l'accroissement de nos débouchés et au développement de nos relations commerciales. Pour arriver à ce but et en vue d'éviter des dépenses inutiles, il est indispensable que les instructions de ma circulaire i\u \'2 octobre 1901 soient rigoureusement observées et que vous teniez coni[)te des recomman- dations faites au moment de la préparation des collections de lexposition de Ilano'i, puis, [tins récemment, dans la circulaire (\u 2'2 juillet. Ces inslrucfions semblant avoir élc |)crdn('s ili' \ ne dans (pichpics |)i'o- vinces ou di>(iicts, je crois utile de conipIctiT aujourd'hui les observations DOCUMENTS OFFICIELS 38o de rinspeclion générale de l'agriculture coloniale, portées dernièrement à votre connaissance, en vous rappelant en détail les mesures prescrites rannée dernière pour la préparation du concours agricole de 1902. Il conviendra, comme l'an passé, de commencer la préparation de vos collections, dès réception de la présente circulaire, et de faire en sorte que les intéressés soient prévenus, dans le plus bref délai possible. Je vous prie, en outre, de mettre tous les fonctionnaires ou agents sous vos ordres en mesure de fournir aux exposants tous les renseignements dont ils pourront avoir besoin. Prévenus im peu tard Tannée dernière, un grand nombre de planteurs n'ont pu participer aux expositions de 1902, malgré les facilités accordées par l'administration, faute de pouvoir disposer d'un laps de temps suffi- sant pour préparer leurs envois. Cette raison n'existe pas cette fois-ci ; je suis donc convaincu que les colons, persuadés que l'administration, en les engageant à prendre part au concours agricole de Paris, leur donne un excellent mo3'en de faire connaître et apprécier leurs produits, s'em- presseront de prendre immédiatement leurs dispositions, afin d'être prêts à temps. II vous appartiendra d'ailleurs. Messieurs, de vous attacher à démontrer à vos administrés les avantages qu'ils peuvent tirer de ces expositions, sans avoir à engager des dépenses de quelque importance, puisque la Colonie et le Jardin Colonial de Nogent-sur-Marne prennent la la majeure partie des frais à leur charge. Comme la dernière fois, l'exposition de Madagascar comprendra trois sections : I. — Section des stations d'essai et pépinières agricoles, dont la pré- paration sera faite par les soins de la direction de l'agriculture, et pour laquelle M. le Directeur de l'agriculture voudra bien donner en temps utile toutes les instructions nécessaires aux agents placés sous 'ses ordres. II. - Section des cercles, provinces ou districts. III. — Section des colons, planteurs ou commerçants. Les e)M'ois des provinces devront faire ressortir les derniers progrès réalisés dans chaque partie de Madagascar et représenter une exposition complète des produits agricoles proprement dits et de ceux provenant de la forêt ou de la brousse, susceptibles d'exportation, ou donnant lieu à des transactions commerciales locales. Il conviendra, en outre, d'ajouter à ces collections des échantillons des produits encore peu exploités qu'on croit cependant susceptibles de recevoir ultérieurement des applications pratiques. Vous voudrez bien aussi, pour rendre ces expositions particulières plus instructives, joindre aux collections d'échantillons une carte à grande échelle de chaque subdivision administrative et dessinée, autant que 386 DOr.lMKNTS OFFICIELS possible, sur toile d'architecte, iii(Ii(|iiaiil, nutic les voies de communi- cation, les ressources agricoles du i)ii\s, reniplacement des propriétés et concessions exploitées, les centres de culture et de pâturage, et les lieux de prise des écliaiilillons de terre analysés en 1900 par M.M. Miinl/. et Kous- seaux en vue de commencer la carte agronomique de lîle. Des tableaux annexés aux cartes feront connaître les résultats donnés par lanalyse et les appréciations formulées par MM. Mimlz et Rousseaux dans leur beau travail sur la valeur agricole des terres de Madagascar. Chaque carte devra, en outre, être complétée par une note conforme au modèle n" .3 ci-joinl, faisant connaître limportancede la population chevaline, bovine, ovine et porcine, el par des tableaux ou graphiques mettant en évidence le dévelo|)pemcnt de chaque culture et les progrès de notre commerce d'exportation. L'énumération des principaux produits à exposer, soit par les pro- vinces, soit par les colons, est donnée dans le tableau sui\aiil, (|iii indique également quel devra être le poids ou le volume de l'haque échantillon, et quels sont les soins à prendre pour que le jury puisse apprécier exactement la valeur des produits exposés el 1 importance du commerce auquel ils peuvent donner lieu. Dans le but de faciliter le classement des collections des pro\ inces, chaque échantillon devra être accompagné dune fiche indiquant dune manière très exacte tous les renseignements capables (rinlércssci- les membres du jury, les visiteurs du concours agricole et les commerçanls. Ces liches seront conformes au modèle n" 1, annexé à la présente circu- laire, et devront être établies avec le plus grand soin. Elles diffèrent de celles prescrites en 1901 par l'adjonction de quelques questions auxquelles il convient d'attacher la plus grande importance, si l'on veut que la par- ticipation de la Colonie au concours agricole de Paris donne des résultats réellement sérieux et utiles. Les colons pourront avantageusement s'inspirer des indications don- nées précédemment pour préparer leurs envois, mais les fiches, qu'ils auront le plus grand intérêt à joindre aux échantillons, devront fournir quelques autres renseignements complémentaires indiqués par le modèle n" "2, que vous voudrez bien leur conseiller d'adopter. Afin de réduire les frais au minimum, l'inspection générale de l'agriculture coloniale \ eut bien se charger de centraliser tous les échantillons et de les présenter au nom de la Colonie ou des particuliers, en prenant à sa charge toutes les dépenses entraînées par la manipulation el fiiistallation des collections dans les locaux mis à sa disposition pai- le Ministère de l'agriculture el la Société nationale d'horticulture de France. Toutes les collections, emballées avec le plus grand soin, en tenant compte des recommandations doniu'>es précédemmenl, devront donc être DOCUMENTS OFFICIELS 387 expédiées directement, par vos soins, au Jardin Colonial de Nogent-sur- Marne et porter à l'extérieur, outre l'adresse de cet établissement, un numéro d'ordre, le nom de la province et la mention « concours agricole de Paris » marqués d'une manière ti'ès apparente avec de l'encre ou de la peinture. Ces dispositions sont applicables aux collections présentées par les par- ticuliers, qui devront numéroter leurs colis et inscrire sur chacun d'eux le nom de leur plantation. De même que l'année dernière, la Colonie prend à sa charge les frais de transport depuis le chef-lieu de chaque subdivision administrative. Tous les envois quitteront Madagascar, à destination de Paris, au plus tard par le courrier passant à Tan^alave clans la première quinzaine de janvier, mais tous les colis prêts avant cette époque devront être embarqués le plus tôt possible, dès leur arrivée à Tamatave, afin d'éviter l'encombrement, qui ne manquerait pas de se produire au Jardin Colonial, si les envois de Madagascar arrivaient tous à la fois, au dernier moment, en même temps que ceux d'autres Colonies. Les colons désirant profiler du transport gratuit de leurs collections devront vous remettre leurs colis aux dates que vous leur indiquerez, afin d'être en mesure de les expédier au moment convenable. Il est bien entendu, d'autre part, que chaque planteur pourra, s'il le préfère, faire parvenir directement ses échantillons à ses frais à M. Dybowski, directeur du Jardin Colonial, et s'entendre avec ce haut fonctionnaire au sujet de l'organisation de son exposition spéciale. Les crédits nécessaires à la préparation et à la réunion des collections présentées par l'administration de la Colonie, à la préparation des cartes économiques sur toile d'architecte et au payement des frais de transport, dans les conditions indiquées ci-dessus, seront respectivement mis à votre disposition, au titre des chapitres XXIX (dépenses diverses et imprévues) et XXIII (frais de transport) du budget local de l'exercice courant. Je vous prie, enfin, de m'accuser réception de la présente circulaire, et de me rendre compte, en un rapport détaillé, qui devra me parvenir au plus tard le 2.5 décembre, des mesures prises pour assurer, dans les meilleures conditions possibles, la participation de votive circonscription au prochain concours agricole de Paris. ^'ous devrez m'adresser, en même temps, un duplicata de toutes les listes-inventaires des envois des provinces et des colons, ainsi qu'une copie des cartes et tableaux présentés pour les archives de la direction de l'agriculture. Tamatave, le 24 septembre 1902. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur Général de Madagascar et Dépendances, Gallieni. 388 DOnAlKNTS OFFICIELS DESIGNATION- FORMES SOUS LESQUELLES les l'clianl liions doivent drc pri'sonli's POIDS VOI.IMi:. (JlAMITI^ l'« Catégorie. — Produits agricoles proprement dits Cafr en parc lu a) café à gros I />! cafr il |)clils grains (ffenr(> I}()url)on) -. 2° (Incno 3 S'' Vanille, '< (laie préparé cl soigntnisc- ment trié, prêt pour la vonle I Lois assortis'. (^afé CMi parclu'. Café préparé ot soigiuniso- ment trié, prêt jioiir la v(Mile (Lots assortis). Cacao préparé et trié, prêt à être livré au commerce fLols assortis). Gousses givrées, autant que possible, ou sur le point de former des cristaux de vanili- ne (Lots assortis). 2 A .'i kilogrammes au minimum. 2 il '^ kilogrammes au miiiinuim par échan-; lillon. j 2 à i{ Ivilogi'ammes au minininni. 2 à "i Icilogrammes au minimum jar échan tillon. id. (-iia(iue éciianlillou devra se composer diui patpn^l de gousses soigneus('m(,'nl fait pe- sant au minimum de 100 à l.'iO ijranimt's. 1. Le triage exerce une influence considérnble sur le ]irix du cafc'. sui'lmil li)rs([uil s"afj:it (lu Libéria. Les |ilanleurs auront donc le plus (//•.ira/ inU'rël ù trier Irèx soiçfneusenienL leurs éciiantillons, comme on le fait à Ce_> lan et surlmil au.\ Indes Néerlandaises. 2. Ciiaquo ])!anteur fera bien, dans ces conditions, de présenter plusieui-s ijualités de café, de valeur et d'aspect bien uniformes, et d'envoyer un bon écliantillun de chacune des catégories marchandes ainsi obtenues. .'î. Idem. 4. L'extension prise par la culture de la \aniile à Maila^ascai' el la baisse i('tiiiIc du cours de cet aromate donnent une grande importance aux éciiantillons (pu pniu'runl être pi'ésentés au pi'ochain concours agricole. Il est utile que la Cohjuie se fasse reniai-quer par de très bons échantillons, dont la beauté permettra, dans une certaine mesm-e, de lutter conti-e l'abaissement des prix. Le concours agricole de Paris devant avoir lien ;) In /in ilc fth^ricr. la plui)art des producteurs de vanille pot/jTon,/, snna difficullê, avoii' pour celte épo(pie des échan- tillons soigneusement préparés, cajiables d'intluencer lieureusenuMil ropinidii du jury et du public sur la valeur des vanilles de Madagascai-. Les gousses sont déjà triées avec soin par fmis les |)réparateurs. Il parait donc superflu d'insister encore sui" l'importance de celle o|)ération. Il ^ auia a\anlage. puisque le concdui's agricole de Paris est avaid tout une exposition coiuincrciale, à IJrésenter des éclianlilhuis de chaque longueur cl de cliaipie qualité. 11 send)li' utile de i'a|)peler, entin, (pie les gtmsses de vanille (loi\enl être end)allées a\ ce le plus grand soin dans des huiles nu''talli(pies recouvertes iid('i'i('urcnu-nl t\c fcnilK papier bhuu^ d'une pi'oprelé parfaite, qu'on achève de rcnq)lir a\('c (\r la ouate cxenq)le, pour atténuer l'inllneiu-i; des secousses. Le triage s'impose pour le giroth' aussi bien cpic pour le café et le cacao. (le lai' DOCUMEINTS OFFICIELS 38Î) DÉSIGNATION FORMES SOUS LESQUELLES les POIDS (■■chaiitillons doivent être présentés VOLUMK. QUANTITÉ i'* Girofle Cloiis préparés, prêts à être Echantillon de 2 à 3 livrés au commerce (Lots kilogrammes. assortis). ô'o Tht' 6" Riz Echantillons triés, prêts pour la vente. Riz en paille. 1 kilogramme par échantillon. 3 kilogrammes de Riz décorti([ué. chaque variété pure, id. 7« Maïa Maïs en j^rains. 3 kilogrammes de chaque variété. Maïs en épis. 25 épis de chaque S" Céréales divei'ses 9° Manioc Racines coupées et séchées. variété. 5 kilogrammes par échantillon. 3 kilogrammes de 10'' Arachides P^arine. Tai)ioea. Arachides décortiquées. chaque variété. 1 id. id. 3 kilogrammes de Arachides non décorti- chaque variété. 3 id. 11'^ Voanjohonj quées. Voanjobory non décorti- 3 id. 12° Ricin qué. Graines. 3 id. 13° AniJjrPvade Graines ou gousses. 3 id. 1 i° Pois du Cap 15° Ampemhij 16° Gimgemhrc 11° Fibres diverses Ecossés et secs. Graines. Rhizomes secs. Echeveau. 3 id. 3 id. 3 id. 3 id. (taretra, chanvre, coton...) IS° Tabac Pacpiet de feuilles pré- Echantillon de 1 ki- parées, comprimées ou logramme. 19" Pailles pour la la confection des cha- peaux, nattes et sobika (dara, ahibano, benjy, etc.) < non . Tabac en poudre, etc. Roltillons. Lots assortis (différentes ((ualités). 3 kilogrammes par botillon. 1. Diverses demandes de renseignements adressées dernièrement au Gouvernement général montrent qu'il convient d'attacher un réel intérêt à cette question, sur laquelle il y aurait lieu de recueillir dans toute l'île des renseignements précis. Une de ces pailles, la dara, donne déjà lieu, siu' la côte Est, de Mananjary à Farafangana, à des transactions commerciales avec l'Angleterre et l'Allemagne. L'envoi de quelques beaux échantillons de dara au concours agricole de Paris permettra, peut-être, de trouver en France de nouveaux débouchés pour ce produit. 390 DOCUMENTS OFFICIELS DESIGNATION 20° G mines el pro- duits divers (haricots, graines ali- mentairos ou iililos à ilivers liti'(>s. elc). FORMES SOUS LESQUELLES l.-s ûchantillous lioivenl être présentés Lois assortis. l'OlDS VOLUME, QUANTITÉ Echaulillons de 1 kilogramme. 2' Catégorie. — Produits de la forêt et de la brousse. 21" ('.uoultliour ' 22' Uaphiu -' 23" Crin ri''(/f'-l;il •* 24° Cire 23" Gomme eopul'' 26" Gomme et résines diverses (ramy, kimba, etc.) 27" Orseillle 2S" Eeorces ef aufres siihsiances finetorinlex ■' 29" Eeorces et fihres te.rliles *" Roules ou pains de caout- chouc. Fibres en échoveau ou bottillons, cortles, tresses, etc.. Bottillons, tresses ou éche- veaux. Echantillons soigneuse- ments triés suivant la qualilé (Lots assortis). Echantillons soigneuse- ment ti'iés suivant la ([ualilé (Lots assortis). Lots assortis échan tillons de 1 kilogram- me. Lots assortis, di verses qualités : échan- tillons de 10 kilo- grammes. Lots assortis : échan tillons de 10 kilogram mes. Echantillons de .5 kilogrammes. Chaque échantillon de 2 kilog'rammes. Echantillons de 2 kilogrammes. Echantillon do 1 kilogramme. 1. Il est important de ne pas né^lifier d'envoyer des caoutchoucs de dilVérentcs ((ua- litcs et de provenances variées (Lianes, arbres, etc.). 2. Phisieurs néf;ociants français se sont plaints, dansle courant de tannée dernière, d'éprouver quelque difficulté à trouver du rapliia i\e Madagascar de belle qualité. Il serait donc très utile d'envoyer de nond^reux et importants échantillons de celte fibre, bien ])réparés et bien triés, avec l'indication exacte des commerçants et plan- teurs s'occu|)ant du conmierce du rnphia. (^.es envois devront comporter des échan- tillons de toutes les sortes commerciales : rapliia nalurci, ra])liia teint, etc.. 3. Envoyer dilTérenlos qualités. •i. Envoyei- des éclianl liions de dilTércnlcs qualités. 5. Joindre A ces ])ro(hiils des échantillons teints de soie, de raphia, de coton, etc., afin de l)ien montrer ce (pi'il csl possible d'obtenir avec ces substances tinc- toriales. 6. On peut éf^alement présenter des billes Ijien sèches de 50 à 60 centimètres de lonf^-uenr, au moins, sur 10 à l'i de diiunèl rc. aii\([uelles onlaissei-a leiu' éct)rce, afinde montrer le ^rain de chaque éclianlillon sui\ uni une coupe \erticale el dans le sens de la longueur ; on doit scier ces billes suivant un lèlc des dilTércntcs espèces de lioin-i-e de snie ol)leiiues a\ec les cf)Cons précédents : c) Une collection send)lid)le de soie de ].,andil)e en ('elieveaiix ; d) Une collection de eou|)ons de tissus de soie Landihe. 1. H est utile (|ue cliaeun des échantillons pré\ us au n" l'.i de ce tableau soit aecom' pa^■né d'un ou ]ilusieurs chapeavix, de nattes et d'arlieles de \annerie, montrant ce que les indi^'^èues peuvent obtenir avec ces paill2, il sera établi au Jar- din d'essai de Brazzaville une école indigène d'apprentissage agricole et cultural. 394 DOCUMENTS OFFICIELS Pour l'année 1002-1903, Técole comprendra dix enfants, à chacun des- quels il sera mensuellement alloué 1 "2 francs pour leur nourriture et leur entretien. La dépense à prévoir de ce chef sera, en ce qui concerne l'exer- cice 1902, imputable au chapitre XIII, article Dépenses imprévues, du budget local du Congo Français. Il est ouvert au même chapitre un crédit de 250 francs destiné à l'édification des cases et à l'achat du matériel nécessaire pour ladite école. Art. 2. — L'administrateur de la région de Brazzaville est chargé d'assurer l'exécution du présent arrêté qui sera enregistré et communiqué partout où besoin sera, et publié et inséré au Joiirnul Officiel de la Colonie. Brazzaville, le h") août 1002. Albert Grodet. INDO-CIIINE \\i la loi du 12 juillet 1902, qui a modifié la législation douanière pour les poivres de llndo-Chine. Décrète : Article premier. — Sont fixées ainsi qu'il suit, les quantités de poivres originaires des Colonies et pays de protectorat, ci-dessous désignés, qui pourront être admises en France, au bénéfice de la détaxe coloniale pen- dant l'année 1902, non compris les stocks existant dans les entrepôts français, à la date du 31 mars 1902, et admis au régime de faveur : Cochinchine 1 .000 tonnes Cambodge 2.100 tonnes. Art. 2. — Le ministre des Colonies et le luinislre des Finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret. Fait à Rambouillet, le i août 1902. Emile Loubet. Par le Président de la République, Le Minisire des Fiv^tnces, RoiIVIEH. Ae Minisire des Colonies, Gaston Doumergi;e. ÉTUDES ET MÉMOIRES ÉTUDES SUR LES PRODUITS ODORANTS DES COLONIES FRANÇAISES A côté de la multitude de produits odorants que fournit le sol français, l'Industrie de la Parfumerie emploie encore un grand nombre d'huiles essentielles exotiques, pour la plupart desquelles nous sommes tributaires des colonies anglaises. Très fertiles, pos- sédant des climats variés, des situations géographiques favorables, nos Colonies pourraient cependant produire pour les besoins de la métropole, en complétant de la façon la plus heureuse la gamme des parfums exquis qui s'élaborent sous le ciel clément de la Côte d'Azur. Dans le but de mettre en lumière les ressources otfertes par nos possessions et d'encourager les colons h s'attacTier à la solution de l'important problème économique qui vient d être soulevé, nous avons entrepris l'étude d'un certain nombre dhuiles essentielles nouvelles envoyées au Jardin colonial de Nogent-sur-Marne. ESSENCE d'oCYMUM CANUM En 1897, MM. Bertram et Walbaum signalèrent la présence du camphre droit dans l'huile essentielle élaborée par une plante du genre ocymum, le basilic [Ocymum basilicum L.), originaire de la Nouvelle-Calédonie. Par contre, MM. Justin Dupont et Guerlain constatèrent que l'essence de basilic de Grasse ne renfermait pas de camphre. Ces observations opposées, faites avec des produits d'origines différentes, montrent l'influence considérable que peuvent exercer le climat, la nature du sol, les circonstances atmosphériques, en un mot les conditions de milieu, sur la formation des principes immédiats de la plante. Nous avons rencontré un autie végétal du genre ocymum, YOcijmum caniim Sims, qui élabore du camphre. lu Ocymum canwm (famille des Labiées) est originaire de Mayotte. Cette plante fournit une huile essentielle jaunâtre qui abandonne 396 ÉTUDES ET MÉiMOlKES une niasse solide importante. Par refroidissement dans un mélange de glace et de sel marin, 16 i2r. 3 d'essence ont abandonné 5 <>r. 7 de produit concret. La partie liquide, isolée par filtration dans le vide, déviait de -f il" le plan de polarisation de la lumièi-e, sous une épaisseur de 100""". La composition de la substance cristallisée contenue dans l'essence d'Oci/niuni caniim correspond à la formule C"^ 11^'^ 0. Son point de fusion, déterminé en tul)e fermé, est de 177" ; son odeur et sa saveur sont celles du camphre. Pour compléter son identification, nous avons préparé son oxime, C^*^ IP*^ : AzOII, de la façon sui- vante : 0 gr. 5 de chlorhydrate d'hydroxylamine ont été dissous dans 3 gr. d'alcool et la solution additionnée de 1 gv. de la sub- stance à identifier et de 0 gr. 5 d'oxyde de zinc ; nous avons chaufTé au bain-marie pendant une heure, filtré, précipité par l'eau, enfin soumis le produit ainsi isolé à la cristallisation dans l'éther de pétrole. Nous avons obtenu des cristaux possédant l'odeur caracté- ristique de la camphoroxime et le point de fusion, 118", de ce dérivé. Il en résulte que l'huile essentielle àOcymum canum renferme des proportions notables de camphre. Une détermination polarimé- trique a montré, au surplus, qu'il s'agit du camphre droit. La tota- lité de ce corps ne peut être isolée par refroidissement ; on en trouve encore des proportions notables dans les parties liquides. Pour voir si les cristaux isolés par refroidissement ne renferment pas un peu de bornéol, alcool correspondant au camphre, nous avons fait un essai préconisé par M. llaller. Cet essai consiste à chauffer au bain-marie le produit à essayer avec un peu d'acide nitrique pur. Si le camphre est accompagné de bornéol, celui-ci s'oxyde aux dépens de l'acide nitrique c{ui se colore. Dans le cas contraire, l'acide nitrique reste incolore. C'est ce que nous avons observé en opérant avec les cristaux abandonnés par l'essence d'Ocymiun canum. ESSENCE DE CLALSENA WILDEiNOWU Originaire des Indes françaises, cette essence se présente sous la forme d'une huile épaisse, rougeâtre, douée d'une odeur particulière (pii ne nous paraît pas manquer d'inlérêt. Nous ne disposions ({ue d'un faible échantillon de ce produit, PRODUITS ODORAi\TS DES COLONIES FRANÇAÎ^ES 397 aussi avons-nous dû nous borner à déterminer quelques-uns de ses caractères chimiques, sans essayer d'en isoler les corps à compo- sition définie. Dosage des ét/iers. — Le dosag-e des éthers s'effectue en ohaull'ant au bain-marie pendant une demi-heure, dans un ballon surmonté d'un réfrig-érant ascendant, un poids connu d'essence avec un volume déterminé de potasse alcoolique demi-normale. La saponification terminée, les acides primitivement combinés aux alcools saturent une certaine quantité de potasse. On ajoute de l'eau, on titre l'excès d'alcali à l'aide d'une solution demi-normale d'acide sulfurique en présence de la phtaléine du phénol. La diffé- rence entre le vol Lime de potasse versée et le volume de potasse en excès rep'^ésente le nombre de centimètres cubes de potasse néces- saires pour saponifier les éthers. On peut en déduire la proportion d'éthers à l'aide de l'équation : CH3. GOOG^'^Hi" + KOH= CIP. COOK + Gi»^ Hi^ OH en supposant qu'il s'ag-isse d'éthers de la formule GH-\ GOOGi^H^^ Voici les résultats que nous avons obtenus avec l'essence de Clausena Wildenoivii : Poids d'essence soumis à la saponification 1 gr- ^^'^ Potasse demi-normale consommée 2" 2 Ethers (calculés en GII'^. GOOGi^IP') 11, 0 "/o ce qui correspond à 8,7 °/o d'alcool G'o IV^ 0 combiné. Dosage des alcools. — Pour doser les alcools dans une huile essentielle, on opère de la façon suivante : On chauffe pendant 2 heures, à une douce ébullition, environ 10 centimètres cubes du produit à analyser avec un égal volume d'anhydride acétique et 1-2 gr. d'acétate de sodium fondu, dans un ballon surmonté d'un long tube faisant fonction de réfrigérant à reflux. Dans ces conditions, l'alcool libre se convertit en acétate. On laisse refroidir, on ajoute de l'eau et on chauffe au bain-marie pendant environ un quart d'heure pour transformer en acide acétique l'anhydride acétique en excès. La couche huileuse qui surnage est alors décantée, lavée avec une solution étendue de carbonate de sodium, puis avec de l'eau distillée jusqu'à réaction neutre, enfin séchée sur du sulfate de sodium anhydre et fdtrée. 11 Bulletin du Jardin colonial. ^^ 398 ÉTUDES ET MÉMOIRES suffît ensuite de doser l'étlier dans le produit ainsi transformé, autrement dit dans le produit acétylé. De la proportion d'étlier, on déduit la proportion d'alcool total ; et, connaissant la quantité d'alcool primitivement combiné, on obtient par dilFérence la quantité d'alcool libre. L'essence de Clausena Wildenowii a donné, après acétylation, les nombres que voici : » Poids d'essence acétylée soumis à la saponification. ... 2 g-r. 387 Potasse demi-normale consommée 4" o Alcool total (calculé en Gi^H'^O) 14,9 % Alcool combiné (nombre fourni par le précédent dosage). 8,7 Alcool libre 6,2 En résumé, l'essence de Clausena Wildenown renferme \ 1 °/o d'éthers (calculés en CH^GOOG'" Ri?) et 6,2 % d'alcool libre. ESSENCE DE MENTHE SAUVAGE Nous avons étudié une huile essentielle qui a été envoyée des Gomores sous le nom d'essence de menthe sauvage. L'odeur de cette essence est assez commune et un peu camphrée. Son pouvoir rotatoire est de -|- 3^ pour une épaisseur de 100""". Le dosage des éthers, effectué comme il vient d'être dit à propos de l'essence de Clausena Wildenoivii, a conduit aux nombres que voici : Poids d'essence soumis à la saponification 2 gr. i6.') Potasse demi-normale consommée 1" 05 Ethers (calculés en GIP.COOGi^'Il'^ 4,2 <>/o ce qui correspond à 3,3 "/^ d'alcool combiné. Nous avons également dosé les alcools libres et sommes arrivés aux résultats ci-dessous : Poids d'essence acétylée soumis à la saponification.. . 1 gr. 837» Potasse demi-normale consommée 6^' 35 Alcool total (calculé en G'» H'^O) 28,7 Vo Alcool combiné 3,3 Alcool libre 25,4 PRODUITS ODORANTS DES COLONIES FRANÇAISES 399 Quelques essais effectués avec la petite quantité de matière dont nous disposions nous portent à croire que l'essence en question renferme du camphre, mais nous ne pouvons annoncer ce résultat qu'avec une extrême réserve. Dans un prochain mémoire nous continuerons l'exposé de nos recherches sur quelques nouvelles huiles essentielles des Colonies françaises. Eug-. Charabot. CONSTRL'GTIONS KLHALtlS. — OUVRAGES DE DÉFENSE Cours de Génie rund npjdiqué aux Colonies PAU MAX iun(;elmann Dans beaucoup de localités, appartenant à des pays parfaitement policés, les bâtiments des exploitations agricoles sont groupés autour d'une cour centrale et présentent à l'extérieur une suite de murs élevés, percés d'un très petit nombre de fenêtres ; une ou rarement deux portes donnent entrée dans cette sorte de forteresse dont les habitants n'ont pourtant aucune attaque à redouter de la part de leurs voisins. Ces dispositions, qu'on rencontre surtout aux environs de Paris (Seine-et-Oise, Seine-et-Marne, Oise), dans le Nord, etc., sont totalement opposées à celles d'autres régions (Nor- mandie, Bretagne, centre, littoral de l'Océan Atlantique, etc.) où les bâtiments se présentent isolés les uns des autres, espacés quelquefois dans une sorte de verger ou de prairie, et souvent sans ({u il y ait une clôture quelconque à la cour de ferme largement ouverte ainsi à tout individu. Nous n'avons pas à examiner ici les avantages (diminution de la propagation des incendies; séparation des différents services, etc.) ou les inconvénients (surface nécessaire, extension dillicile des bâtiments, etc.) de chacune des deux dispositions, ni à chercher les motifs qui guident les agriculteurs (économie des matériaux ; volume d'eau disponible ; influence du système de culture et des habitudes locales; surveillance; etc.) ; cependant nouscroyons que dans beau- coup de circonstances le motif est d'ordre historique et l'habitude aurait été prise bien avant le moyen âge', alors que les fermes se confondaient avec l'habitation du chef de la communauté. 1. Danslcs pays où les constructions rurales ont cotte ajjparenci'tle l'oilercsse dont nous parlions plus haut, on les désigne sous le nom général de fermes. — Selon Besclierelic {Diclionnaire fruarnis) le mot /"ernie vient du celte /erm, tiré lui-niénu', de /"er/i, herh, signifiant enclos, défendu, lortifié, c'est-à-dire que les hâliments ruraux étaient entourés de clôtures, iuiics, fossés, murailles, qui en rendaient l'accès ou CO.NSTRLCTJONS KLKALES "' 401 Dans nos Colonies il y toujours lieu de se tenir en g-arde contre les populations indigènes; aussi les comptoirs et les exploitations s'établissent surtout à l'abri des postes ou des lignes protégées par les soins de l'Administration. Cependant les circonstances peuvent obliger à l'établissement de constructions rurales éloignées des postes, bien que cela ne soit pas très prudent ; il sera bon, dans ces conditions, d'adopter certaines dispositions, qui, combinées avec les besoins de l'exploita- tion considérée, peuventjouer efficacement un rôle défensif lors d'une agression des populations indigènes. Nous ne pouvons donner ici qu'un exposé des principes qu'on pourrait suivre, laissant à chacun le soin de les modifier suivant leurs applications. Au point de vue de la sécurité contre les incendies, il est bon d'avoir des bâtiments séparés les uns des autres par un intervalle d'une quinzaine de mètres au moins; au point de vue de la défense, ces divers bâtiments A (fig. 1) seront W^:<^:^^^ëM>^^^ enfermés dans une enceinte continue a. h nlacée sur ^^'^' '■ — rrofll de l'emplacement des bâtiments ^ d'une exjjloitation. une surélévation, une butte naturelle, un dos dâne, etc., dont le profil m A n contribue à l'assè- chement de la cour et par suite à la salubrité des habitations; enfin, tout autour de l'enceinte, le sol sera dégarni d'obstacles ou d'abris sur une zone de protection dont la largeur a//i, hn^ sera plus grande que la plus longue portée des armes des indigènes (flèches, lances, mauvais fusils, etc.). En définitive, au milieu de la l'aiiproche diflicile. — D'après de "U^ailly (Diclionnaire), ferme viendrait de firiiui qui chezles bas latins, signifiait un lieu clos et fermé. — Suivant Ch. Garnier et A. Ammann, les constructions rurales des Avares (vallée du Danube) étaient j^roupées et protégées par des enceintes circulaires, appelées rings, qui présentaient aux assaillants des obs- tacles insurmontables. — Selon Fustcl de Coulantes l'Alleu et le domaine rural pendant l'époque mérovingienne), la villa mérovingienne avait l'aspect d'une ferme immense protégée par des enceintes palissadées et entourées de fossés. — D'après Larousse, ferme viendrait du bas latin firma. /?rm us, ferme : la ferme signifiant ainsi propre- ment chose ferme, établie, convenue. Gilles Ménage (auteur du premier Dictionnaire élymologique, 1613-1692) donnait à firmus le sens de lieu fermé, d'où l'emploi de ferme dans l'acception de métairie, de même qu'en Anjou on se sert de cLoserie dans le même sens: mais la signification de bail et de convention appliquée au mot ferme aurait ])récédé celle de métairie. i02 ErUDKS Kl .Mli.MOlRES / --4>/"- zone de protection m n. lenceinte fortifiée a h doit abriter les cons- tructions rurales A. Laissons de côté les constructions proprement dites A pour nous occuper ici de ce qui est relatif à la clôture défensive a h. Pour le tracé de l'enceinte fortifiée (en dehors de la confi^^i-ura- tion générale géométrique : polygone régulier ou irrégulier) nous devons partir d'un principe dilférenl de celui appliqué par le Génie militaire pour rétablissement des fortifications. Dans les fortifications militaires (système des fronts bastionnés), l'enceinte comprend des parties droites, telles que a C h (lig. 2), relativement longues, appe- lées courtines-, reliées entre elles par des bastions B B', placés aux angles saillants du tracé général ; cette dis- position est adoptée parce qu'il faut avoir un front ou développement sufiisant de courtines et de bastions, afin de placer le matériel d'artillerie et les combattants toujours en assez grand nombre ; les lignes de tir sont réparties sur tout le périmètre de l'ouviage : les courtines envoyant leurs feux dans les directions f (|ui sont croisées par celles f' des bastions, dont les flancs sont chargés d'envoyer les feux f" destinés à protéger (à flanquer) le pied des courtines a h. Pour les constructions rurales qui nous occupent, dont les défen- seurs disponibles sont toujours en nombre restreint, il y a lieu de demander à la courtine de se défendre elle-même *, par sa propre construction, afin de pouvoir concentrer les défenseurs dans un petit nombre de bastions placés d'une façon favorable. D'un autre côté, il n'est pas prudent d'adopter le tracé de la figure 2, les postes de défense étant en B, B' à chaque angle du polygone, car les combattants, souvent inhabiles et en tous cas peu exercés, ris- queraient de se blesser, les feux du bastion B pouvant accidentelle- ment atteindre le bastion B' par exemple. Ainsi, vers l'axe des faces rectilignes ab, bel (fig. 3) de l'enceinte Fig. Principe d'un front bastionné. t. Cette dernière n'est plus alors ((u'unc enceinte défensive. CONSTRUCTIONS RURALES 403 X /' A de nos constructions, on élèvera des bastions B, B',..i ; les enceintes G, C C" ... seront résistantes par elles-mêmes; leur face externe pourra être ba- layée par les feux /", tandis y / qu'au début d'une attaque la zone de protection est placée sous les feux /' de chaque bastion. Au lieu de construire CL -/-- I PL __/__ rande Le tracé des chemins cen- traux m et des chemins de ronde n divise le carré a I) c d de lenceinte en huit grands triangles que nous jiouvons utiliser pour les constructions. 11 faudra autant que possible placer les bâtiments A-A, A', A" A'" dans les quatre triangles principaux du centre en alîectant chacun d'eux h une ccmstruction ou à un groupe de constructions destiné spécialement à un service déterminé : 1° logement des hommes, 2° — des animaux, 3° — des produits, 4° — du matériel, dont les emplacements sont réglés par l'orientation et les besoins du service ; ainsi disposés, ces bâtiments A-A, A', A", A"', ne gênent pas la vue et les signaux des bastions entre eux ni leur facile communication. Enfin les triangles externes D peuvent être utilisés de nombreuses façons : jardins, enclos pour le bétail, basse-cour, abris temporaires des récoltes, emplacement du fumier et des ordures, etc. ; de même, la paroi intérieure de certaines por- tions d'enceinte convenablement exposées peut supporter des espa- liers. L'exemple qui précède (fig. 3) est applicable à une exploitation importante, comprenant un certain nombre d'hommes capables de concourir à sa défense à l'aide d'armes à feu. Pour des plus petits 1. Nous donnons la préférence <\ la porte P, iilacée dans un an^lo ,i. cninmo ('laiit bien mieux défendue par H, H ", e et ^ que si elle élail placée à enlé (l'un haslidii H par exemple, demi un côté serait seul oliarjré d'en assurer la défense. CONSTRUCTIONS BUBALES 405 71 \ m ^ ^' domaines, on peut réduire à deux les postes de défense en appli- quant le principe des caponnières d'ang-le, placées aux extré- mités d'une même diag'o- nale, comme l'indique la j /^ I figure 6 ; l'enceinte a b c d ^ est pourvue des bastions C et C, ayant chacun deux côtés à défendre ainsi que la porte principale P, placée en retraite et dont l'accès est défendu en e et en e' ; les bastions communiquent par le chemin rectilig-ne n et les quatre g-roupes de bâiiments occupent, avec leur dépendances, les trian- gles A, A', A'^ et A'"; au besoin, une seconde porte peut être ouverte à l'angle c et défendue comme la porte P. Au point de vue de la construction on doit donner la préférence à la disposition représentée par la figure 6; on pourra réserver le principe de la figure 5 dans le cas où le côté de l'enceinte [bc^ fig. 5) serait trop long pour être défendu efficacement par une seule de ses extrémités; nous croyons qu'on peut fixer la longueur ab de la figure 6 à une centaine de mètres. \ ^ CL :M Fiff. G. - \e' oc Principe tle fortification d une niovi-nne exploitation. Examinons maintenant ce qui est relatif aux enceintes défensives et aux bastions dont nous indiquerons plusieurs modes de construc- tion, le choix à faire étant surtout imposé parles ressources dispo- nibles de la contrée, tant en matériaux qu'en main-d'œuvre. Enceintes en terre. — Les enceintes en terre peuvent s'établir partout où Ion dispose de travailleurs en nombre suffisant ; dans certains cas on protège extérieurement ces clôtures par des planta- tions défensives. Pour être efficace, le talus extérieur doit avoir une hauteur totale de 3'" 50 à 4 mètres; les terres nécessaires au remblai R (fig. 7) qui entoure l'emplacement A sont prises dans un fossé extérieur F, le 406 ÉTUDES ET MÉMOIRES niveau primitif du sol naturel étant indiqué par la lig-ne xx. Dans ce mode de retranchement on distingue : Le glacis N (dont Timpor- tance est déterminée par la ligne de visée a? N r ; he fossé ¥, comprenant la contre-escarpe c e, leplafond p et l'escarpe e ; La hermc /», petit sentier qu'on a intérêt à faire dis- paraître après le tassement du remblai et quand ce der- nier est recouvert de végéta- tion ; he parapet H^ dont la par- tie supérieure ou crête r a au moins 0 '" 00 d'éjDaisseur et présente une inclinaison, ou plongée, d'au moins 0"' 20 à 0'" 25 par mètre ', le talus extérieur t, le talus inté- rieur t' . — Dans le cas où Ton voudrait pouvoir utili- ser cette enceinte, ou une de ses portions pour les tirail- leurs, il faudrait ménager en B une banquette (indiquée en pointillé sur la figure 7); cette banquette, de 0'" 80 de largeur au moins, devra être à 1 ™ 30 'au-dessus de la crête intérieure r du parapet R. Les talus ce, e, /, /' doi- vent être aussi raides que 1. La plonfïce rdoil rciiconlrer la zone de proteclidii à la civtecle la conlre-escarpe; si les dimensions du profil ne pernietlenL pas celle eondilion, comme dans la fiy;ure 7, o 1 l'oblient en surélevant le niveau du sol naturel parle glacis N. CONSTRUCTIONS RURALES 407 possible et dépendent de la nature des terres à travailler : en général, on leur donne : 4 de base pour 0, S de hauteur dans le cas des arg-iles susceptibles de se déliter '; 1 de base pour 1 de hauteur dans le cas des terres fraîches et légères ; 1 de base pour 1, 5 de hauteur dans le cas des terres consistantes. Les terrassements doivent être etï'ectués avec soin et les rem- blais bien damés par couches successives de 0"' 10 à 0"' io d'épais- seur. Ces retranchements (qui sont surtout applicables avec les talus inclinés à J pour 1 ou à i pour 1,5) peuvent se combiner avec d'autres procédés de défense, comme les palissades, les palanques et les fraises, au sujet desquelles nous parlerons dans un instant ; on peut également leur annexer certains végétaux dont le choix dépend t' Fig. 8. — Retranchement en terre, garni de végétaux défensifs. de la flore de la région : les talus / et /' (fig. 8) comme le fond f du fossé peuvent être utilement garnis de plantes épineuses traînantes ; la crête r peut recevoir des arbustes touffus et enchevêtrés (ces haies r peuvent être remplacées par un clayonnage) ; — le glacis G peut de même être planté de 3 lignes de certaines plantes très défen- sives, comme le figuier de barbarie, les agaves, etc.; ces lignes, des- tinées à ralentir la marche des agressseurs, doiveni pouvoir être entretenues et, pour ce motif, il faut les espacer d'au moins 1™50 1. Dans le cas de semblables sols, la pente étant faible, il faudra augmenter beau- coup la hauteur du parapet, ou mieux avoir recours à d'autres modes de constru( tion étudiés plus loin. 408 ETLDKS i;i MliMOlHKS à 2 mètres, les plantes étant disposées en quinconce sur ces lignes. On peut combiner une partie de ces retranchements en terre avec la construction de certains magasins et même de logements d'animaux. La figure 9 en donne un exemple ; le parapet P comprend une couche de terre t d'une épais- seur d'environ I mètre, soutenue par des branchages, des fascines, ou des fagots />, maintenus eux- mêmes par des fermes ou châssis très simples, formés d'une semelle .9, d'un montant m, d'un poteau n et d'un chapeau c; le montant /» sou- tient les fascines a contre lesquelles s'appliquent les terres. La ligure \) représente un magasin en partie en- terré, reconstruit en terrain sec ; inutile de dire qu'avec un travail plus considérable on peut surélever le parapet, aiin que la semelle .. (La rampe est plus faci- lement ac- Y\a. 17. — C.oii]»' vertical':' cl un liastiun. CONSTRUCTIONS RURALES 413 ^^^ Fil--. 18. Plan du rc/.-dc-cliaussùe d'un bastion. ---: s ^ î c cessible qu'un escalier, surtout quand plusieurs personnes se pressent dans un moment d'airolement.) Le sol x' devra être abrité du côté externe par une paroi m d'au moins 1 '" 30 de hauteur, qu'on pourra prolong-er par des pièces de g-arantie n, telles que des créneaux, des clayonnages ou des palissades. La construction peut se faire en terre, en bois, en maçonnerie, et il nous suffit d'appliquer ici les principes exposés à propos des enceintes. — Par suite de la surélévation obligatoire du plan x^ il est recommandable d'u- tiliser le dessous de la construction en y établissant un local ou magasin M, en adoptant des protils tirés des figures 9 et 16. Le rez-de-chaussée du bastion peut être pourvu d'une porte de service ou de dégag-ement ; cette porte pleine (/ (fig. 18) doit être ménagée dans un des pans a h ou h c du triangle; il est bon de la faire ouvrir du dehors E au dedans A et de j)rendre d'avance des précautions, atin qu'on puisse la barricader facilement et solidement par des traverses et des arcs-boutants ; ces portes seront munies d'une ou de deux meurtrières. La ligure 19 donne les différents détails d'une meurtrière : E élévation du côté exter- ne, C la coupe verticale, A l'élévation du côté interne et x une coupe horizontale. La porte charretière, qui doit avoir au moins 3 mètres de largeur, est placée à un des angles de l'enceinte (fîg. 5 et 6), afin d'être Bulletin du Jardin colonial. 27 /// ' 11 Ji ~A^^-- Fig. l'J. — Meurtrière. 414 ÉTUDES ET MÉMOIRES défendue par les deux bastions voisins. Le portail P (fig. 20) est protéine par les deux retraites /) et />', de 3 k 4 mètres de long-ueur, établies, suivant les mêmes procédés que les enceintes C et C ; mais n. V. «KP «'•ssrii -■^' ///(AvVV^i - vfê ■M v^ %. Fig. 20. — Élévulion cl plan trun porUiil, ces parois h et b' sont pourvues de meurtrières m, espacées les unes des autres de 1 mètre au moins. Le portail doit s'ouvrir en dedans, sur la cour n, et on doit prendre d'avance toutes ses dispositions pour le consolider et le barricader avec des matériaux mis en réserve à proximité, le lourdes enceintes C et G'. Le portail peut avoir environ 2'" TiO de hauteur et être plein ou en partie à claire-voie ; dans le cas d'un portail plein, on le percera de meurtrières (fit;'. 1î)). Si on adopte un portail en partie à claire-voie, CONSTRUCTIONS RURALES 415 sa portion inférieure sera pleine sur une hauteur d'environ 1"' 50; la claire-voie, placée au-dessus du panneau, pouvant être garnie intérieurement de clayonnages, afin d'abriter les combattants char- gés de la défense de l'entrée principale de l'exploitation. LA BANANE AUX CANARIES La banane a fait, depuis ces dernières années, l'objet d'études spéciales. D'après un article publié récemment dans le Neiv-York Herald, ce fruit serait, à égalité de poids, yingt-cinq fois plus nourrissant que le blé, il posséderait quarante-quatre fois plus d'éléments nutritifs que la pomme de terre et serait trente fois plus alimentaire que le riz, Linj^énieur Jésus Lameda prétend, de son côté, que l'on peut exploiter les iibres du bananier qui jusqu'à présent paraissent n'avoir attiré que médiocrement l'attention des planteurs : chaque tronc produirait, selon sa grosseur, de 1 à 4 livres de fibres, dont une maison de Liverpool aurait déjà olîert 1.000 francs de la tonne. Les Américains du Nord ont été les premiers à faire une grande consommation de bananes : un capitaine marchand introduisit, à titre d'essai, quelques régimes du (Centre- Amérique, puis il se forma une Compagnie qui dispose aujourd'hui de cent millions de capital, et iinporte par an vingt millions de régimes. C'est à M. A. Johnes, surnommé « le Roi des bananes », que l'Angleterre est redevable de l'importation de ce fruit, et les Iles Canaries lui doivent leur grande prospérité actuelle : au moment où ce pays était entièrement ruiné par la non-valeur subite de la cochenille, il sut attirer l'attention des indigènes sur les diverses méthodes de culture du bananier. Mais la production de ce petit archipel ne pouvait suffire à la consommation toujours croissante des Iles Britanniques. C'est alors que ce philanthrope, dont le desideratum est de voir la banane se vendre meilleur marché que la pomme de terre, afin qu'elle soit à la portée des classes les plus pauvres , jeta son dévolu sur la Jamaïque. Le gouvernement anglais accorda, sur ses instances, une subvention annuelle de 40.000 livres sterling à la maison (( Elder Dempster et C''= », dans le seul but de faciliter l'importation des bananes des LA BANANE AUX CANARIES 417 Antilles. Un an et demi s'est à peine écoulé, et sept vapeurs, con- struits spécialement à cet effet, transportent tous les mois de la Jamaïque à Bristol un minimum de 40.000 régimes de bananes. M. A. Johnes n'est pas encore satisfait et il a Fintention de doubler cette ligne de vapeurs, afin de desservir le port deLiverpool; Bristol approvisionnerait les marchés du sud et Liverpool ceux du nord. L'Allemagne tend à marcher sur les pas des Etats-Unis et de l'Angleterre, et l'importation des bananes à Hambourg- prend une grande extension. La France est plus retardataire, mais la consommation de ce fruit aug-mente tous les jours, et les îles Canaries y importent à elles seules plus de 150.000 régimes par an, bien que les moyens de transport soient très défectueux. Dès mon arrivée à Las Palmas, mon attention a été appelée sur le g-rand intérêt qu'il y aurait à tourner l'activité des colons alg-é- riens vers la culture du bananier, qui exige peu de main-d'œuvre, et dont le rendement est prodigieux. La production pourrait se développer dans des proportions considérables, elle trouverait tou- jours en Europe un débouché illimité : pour l'Angleterre, aussi bien que pour la France et l'Allemagne, il serait plus facile et moins coûteux de venir acheter à Alger ou à Oran les bananes qu'on demande aujourd'hui aux Canaries et à la Jamaïque. D'un autre coté, comme la culture rationnelle du bananier a atteint dans cet archipel son plus haut degré de perfectionnement, à tel point que les régimes importés de ce pays font prime sur tous les marchés, j'ai pensé qu'il serait intéressant pour les planteurs de l'Algérie de traiter cette question avec quelque détail. SUR LA CULTURE ET LE COMMERCE DES BANANES AUX ILES CANARIES I. — ORIGINE Il existe aux Canaries de nombreuses variétés de bananiers, comme le bananier de Saint-Domingue, celui de Cuba, mais le seul 418 ÉTUDES ET MÉMOIRES cultivé et exploité en vue de l'exportation des rég^imes est le bana- nier nain (enano). On raconte plusieurs versions sur son introduction dans l'archi- pel ; l'une d'elles qui semble mériter créance est la suivante : une mission scientifique française de passage à Ténérifîe, au retour d'un voyag-e d'études en Indo-Chine, aurait remis deux plans de bana- niers à M. Sabin Berthelot, consul de France. L"un de ces bana- niers fut envoyé au Jardin botanique de La Orotava et l'autre adressé au comte de la Vega Grande à Las Palmas. L'exportation des régimes de bananes date de 15 à 16 ans : vers 1886, M. Robert T. Millar, chef de la maison Elder Dempster et C'% succursale de l'établissement de même "nom à Liverpool, dont le directeur et principal intéressé est encore M. Jhones. com- mença le premier à faire des envois suivis. Jusqu'alors, quelques essais isolés avaient été tentés, mais sans résultat satisfai- sant : les moyens de transport étant défectueux à tous égards, le produit des fruits, arrivés en bon état à destination, suffisait à peine à couvrir les frais. • Aussi le bananier n'était l'objet d'aucun soin particulier : arbre de jardin et de clôture, ses fruits figuraient de temps à autre sur la table du propriétaire, ou étaient offerts, hors de l'archipel, à titre de curiosité. IL CHOIX DU TERRAIN La meilleure terre pour le bananier est un sol léger et présen- tant une certaine richesse en humus. A la rigueur, un terrain légè- rement calcaire pourrait être approprié en l'amendant avec du sul- fate de fer, mais un fonds calcaire à sous-sol argileux ne convient aucunement. L'altitude de 400 mètres marque aux Canaries la limite au delà de laquelle le bananier ne saurait être cultivé avec succès. A mesure que l'on s'éloigne du rivage, en gagnant la hauteur, la plante pousse plus difficilement, le régime a de la peine à mûrir et le fruit n'est plus aussi savoureux. Le prix de vente des terrains propres à la culture du bananier, eau comprise, est de 35.000 à 40.000 francs l'hectare h Las Palmas, Telde, Arucas, Banaderos. Au nord de l'ile, à Guia, Gaïdar et LA BANANE AUX CANARIES 4l9 Ag-aëte, le prix est sensiblement moins élevé et cette différence tient uniquement à la distance du port d'embarquement. Au temps de la plus grande prospérité de l'archipel — époque de la cochenille — ces prix exorbitants ne furent que très rarement dépassés. Le prix de location des terrains est de 1.500 à 1.600 francs l'hectare. Les baux sont passés pour une durée de 4 à 6 ans. in. — REJETONS On ne saurait trop insister sur l'importance qu'il convient d'atta- cher au choix des rejetons de bananiers. Le prix d'achat est de 0 fr. 40 à 0 fr. SO chaque rejeton. On les choisit sains, vigoureux, de taille moyenne (l mètre envi- ron), âg-és de 4 à 5 mois. En les séparant de la souche-mère, on a bien soin que la racine soit intacte et conserve le plus de radicelles possible. Le nouveau plant est plus robuste et pousse plus vite quand il provient d'une racine ayant déjà fructifié : dans ce cas, il suffît que la tige mesure de 0 '" 30 à 0'" 40 centimètres. La couronne de la racine doit être pourvue de boutons qui donneront naissance à de nouveaux rejetons. On se procurerait assez facilement un bon nombre de rejetons. IV. — LA PLANTATION Après avoir labouré profondément te terrain (la charrue Brabant double, de l'ingénieur Bajac à Liancourt (Oise) est employée par les cultivateurs aisés), l'on y pratique des trous de 0 '" 40 de pro- fondeur, évasés, beaucoup plus larges en haut qu'en bas, de façon que le jeune plant puisse étendre aisément ses racines en tous sens. Ces fosses sont préparées en ligne droite, k un écartement d'en- viron 3 mètres, et en carrés. Après y avoir planté les rejetons, on les comble de manière à ce que la couronne de la racine soit enterrée à 0'" 10 centimètres de profondeur. 420 ÉTUDES RT MÉMOIRES Un hectare de terrain planté de la sorte peut recevoir 1,100 reje- tons approximativement. Une fois les bananiers plantés, il ne reste plus qu'à façonner la surface du terrain, pour en faciliter la lionne irriji;ation. A cet eifet, on le divise en parcelles comprenant chacune trois ou quatre plants. En bordure de ces divisions, on relève la terre avec le fossoir, en forme de chevalet, de façon à dessiner comme une cuvette dont les bananiers occupent le fond. Pour l'arrosage, l'eau est amenée dans l'enclos, où elle circule dans les sillons pratiqués à ^i charrue entre les diverses parcelles. On fait une brèche à la cuvette pour y laisser pénétrer l'eau jusqu'à ce qu'elle soit remplie, puis on bouche la brèche pour alimenter une autre cuvette, et ainsi de suite. L'époque à laquelle il convient de planter comprend les mois d'avril, mai et juin, alin que le jeune bananier prenne durant l'été et soit déjà robuste quand viendra l'hiver. Après la récolte du premier régime, on coupe la tige du bananier vers la moitié de sa hauteur. Puis, quand la partie qui reste a séché lentement, jusqu'au ras du sol, on l'enlève avec le couteau ou le fossoir, en prenant bien garde d'endommager les jeunes rejetons que l'on laisse autour de la souche au nombre de deux ou trois, choi- sissant pour cela ceux de la plus belle venue, mais pourtant de taille inégale, afin d'obtenir des récoltes espacées. Les autres reje- tons, qui ne feraient qu'appauvrir ceux qui sont réservés pour la fructification, sont éliminés en prenant les mêmes précautions. Les ouvriers employés pour la culture du bananier, dans ses phases diverses, sont généralement payés à raison de 1 fr. 50 par jour ; s il s'agit de journaliers bien expérimentés et de toute con- fiance, comme il en faut pour l'irrigation, le salaire est porté à 2 fr. V. FUMURE Le cultivateur canarien emploie les engrais naturels et les engrais chimiques, ces derniers souvent à l'excès, pour avoir dos bananiers vigoureux et des fruits de belle apparence, au détriment de la qua- lité. Trop forcé par les engrais, le liananicr donne un fruit gros, mais aqueux et moins droit de goût. LA BANANE AUX CANARIES 421 Dans les terres ordinaires, il faut deux fumures par an. En janvier et en février, aussitôt que le temps le permet, on fume avec du fumier d'étable, à la dose de 25 à 30 kilos par pied ou toufte de bananiers, en y ajoutant 1 kilo de superphosphate de chaux. Le tout est étendu autour de la plante et enterré aussi pro- fondément que le permettent ses racines. Entre mai et septembre, nouvelle fumure, cette fois avec des engrais chimiques, dans la proportion de 1/2, 3/4 ou 1 kilo par pied, suivant l'âg-e de la souche et le nombre de rejetons qu'elle doit nourrir. Le bananier a besoin de beaucoup de potasse et de phosphate, et aussi, étant donnée sa croissance rapide, d'éléments nitrog-énés. D'après les indications et les formules de Georg-es Ville {les Engrais chimiques. Conférences agricoles faites sur le champ d'ex- périences de Vincennes), l'engrais complet à employer serait com- posé comme suit : Phosphate acide de chaux 400 Nitrate de potasse 200 Sulfate d'ammoniaque 250 Sulfate de chaux 350 1.200 Le nitrate de potasse étant cher, la préparation ci-dessus est remplacée aux Canaries par cette autre : Superphosphate de chaux 400 Sulfate ou muriate de potasse 170 Nitrate de soude 200 Sulfate d'ammoniaque 200 Sulfate de chaux 230 1.200 Aperçu des prix pratiqués en ce moment, sur place : Ammoniaque blanc de 24° 1/2 à 25". . . . 16 fr. 80 les 46 kil. — — 23° 16 fr. 50 Superphosphate d'os 6 fr. 75 » — de chaux (II-" qualité).. 6 fr. 00 » 422 ÉTUDES ET MÉMOIRES Sang en poudre 12 fr. 00 les 46 kil. Nitrate de soude 15 fr. 00 » Nitrate de potasse 2() fr. 25 » Sulfate de fer (en l>arilj 5 fr. 62 » Les en<^rais chimiques proviennent d'Angleteri-e presque exclusi- vement. En outre des deux fumures précitées, on fume parfois partielle- ment avec du sulfate de fer, pour tonifier les plants, quand leur couleur pâle dénote deTanémie. VI. IRRIGATION Le bananier ne prospère que dans les terrains entretenus dans un état d'humidité constante. 11 faut l'aiToser aussitôt planté et après chaque fumure ; ensuite tous les 15 à 25 jours, suivant la nature du terrain, son exposition, etc.. On estime k 500 mètres cubes la quantité d'eau nécessaire, chaque fois, pour un hectare de terrain. Aux Canaries, le pays étant complètement déboisé, sans cours d'eau permanent, et les pluies étant peu fréquentes et peu abon- dantes (à Las Palmas, la colonne d'eau annuelle est de 25 centi- mètres en moyenne; à San-Mateo (à 000 mètres d'altitude), de 70 centimètres), l'ag-riculture manque deau pour l'irriiji-ation, sur- tout depuis que le bananier est cultivé à outrance. Les bonnes propriétés sont toutes pourvues de f^^rands réservoirs, souvent très coûteux, pour conserver les eaux de pluie ou amasser celles de source, dans l'intervalle des irrigations. Les cultivateurs qui ont besoin d'eau pour mettre levirs terres en A'aleur, l'achètent aux particuliers plus favorisés ou aux conmm- nautés d'eaux. Durant la saison sèche, il se tient, dans les principaux centres agricoles, un marché où l'on vend l'eau aux enchères, à des prix régis, comme pour tous les objets de commerce, par la loi de l'olfre et de la demande. Plus la sécheresse persiste, moins la pluie est probable, plus élevé est le prix : c'est une spéculation. Cette année, l'eau a atteint le prix excessif de 320 francs les 400 mètres cubes. L'acheteur à ce taux était sûr de ne pas retirer de la terre l'équivalent de ce débours. 11 s'y résignait cependant, LA BANANE AUX CANARIES 423 pour sauver ses bananiers, car cette plante a un besoin impérieux de sa ration d'eau. Si le bananier est privé d'un arrosage, il ne fruc- tifie pas, dépérit, et il faut recommencer la plantation. Lorsque l'eau trouve preneur à ces prix exorbitants, il arrive que des propriétaires de cultures pauvres, telles que le maïs, les pommes de terre, etc., trouvent avantage à les laisser se perdre faute d'arrosag-e. Ils vendent leur eau au cours du marché et en retirent deux ou trois fois plus de bénéfice que s'ils faisaient la récolte. Aux Canaries, l'eau vaut donc souvent plus que la terre, et, depuis que la culture du bananier prime toutes les autres, on cherche de l'eau comme ailleurs de l'or. Il existe des Communautés d'eau datant des premiers temps de la conquête, organisées à l'instar de celles qui existaient en Espagne, notamment dans le royaume de Valence, qui les tenait, croit-on, des Arabes. Elles sont formées par un certain nombre de propriétaires qui se sont associés pour canaliser et distribuer, à frais communs, les eaux de source leur appartenant. L'eau est reçue dans une enceinte murée, d'où elle est répartie entre les ayants droit, à tour de rôle, dans la proportion qui leur est conférée par le titre de propriété. Ces Sociétés s'administrent elles-mêmes, nomment des gardes, des juges, qui rendent des sentences exécutables sans appel. Les eaux appartenant à la Communauté ne font que passer par le réservoir collecteur, d'où elles sont équitablement réparties par les bouches de sortie. Tous les mois, pendant un jour ou deux, toute l'eau est séques- trée, c'est-à-dire retenue dans le réservoir, pour être vendue, et le produit en être appliqué k payer les dépenses de la Communauté. A l'instar de ces Communautés, il se forme des Sociétés commer- ciales : leur objet est de recueillir l'eau de pluie, pendant l'hiver, et de l'amasser dans de grands réservoirs, pour la vendre l'été. Une Société de ce genre, dite de la « Represa », fonctionne très bien à Arucas et fait de brillantes affaires. Une autre est en voie de formation pour exécuter des travaux analogues dans la région de San- Lorenzo, 424 ÉTUDES ET MÉMOIRES VII. — a(;e de rapport, rendement Le jeune plant de bananier, dans un terrain bien fumé, bien arrosé et réunissant, en un mot, les meilleures conditions, com- mence à fructifier au bout de 18 mois. Le réfi^ime ayant besoin de 4 à o mois pour atteindre son complet développement et être expor- table, ce n'est donc qu'au bout de deux ans que la nouvelle planta- tion est en plein rapport. Toujours dans les mêmes bonnes conditions de terrain et de culture, chaque souche donne trois régimes tous les deux ans. VIII. — POIDS moyen et prix des régimes Le poids moyen des régimes bons pour l'exportation est de 18 à 25 kilos. On en a vu, mais très exceptionnellement, qui attei- gnaient le poids de 40 et même 45 kilos. Aux Canaries, comme en Angleterre et en France, les bananes se vendent par régime ; sur la place de Hambourg, au kilo. Dans l'archipel, le prix du régime augmente en raison du nombre de volutes de fruits dont il se compose ; les régimes qui n'atteignent pas 8 volutes au minimum sont consommés sur place. Les régimes exportables sont généralement classés comme suit : Extra n° I , n° 2. Le prix du régime extra (11 volutes et plus) est de 4 fr. 10 H 4 fr. 70 ; celui du régime n° 1 (10 volutes) est de 3 fr. 75 à 4 fr. ; celui du régime n° 2 (8 à 9 volutes) est de 1 fr. 90 à 2 fr. 25. Le propriétaire ou le fermier exportent eux-mêmes directement. — c'est la tendance actuelle — ou vendent sur place à l'exportateur qui envoie marquer et classer les régimes avant de les couper. IX. EMIiAELAGR L'emballage des bananes est, ici, très minutieux, tandis qu'au Centre Amérique et à la Jamaïque on expédie les régimes nus. Aux Canaries, après avoir bien brossé et lavé le régime, on l'en- veloppe dans plus ou moins de ouate (suivant la saison), on l'en- LA BANANE AUX CANARIES 425 toure de papier, et on le met enfin dans une caisse à claires-voies avec force paille ou feuille sèche de bananier, pour l'y bien main- tenir. Ces caisses sont faites sur place, mais avec des planches reçues d'Ang^leterre, des États-Unis ou de Norvège. Elles arrivent et sont vendues toutes prêtes pour être clouées, en faisceaux bien numéro- tés, afin qu'il n'y ait pas d'erreur possible. Les caisses employées couramment ont une longueur de 27 à 36 pouces anglais (70 à 92 centimètres) et valent sur place entre 0 fr. 55 et 1 fr. Il est difficile, sinon impossible, d'avoir, ici, l'adresse des four- nisseurs en première main. La plupart des maisons anglaises établies à Las Palmas reçoivent les planches de leur siège social en Angleterre. Voici l'adresse de quelques-unes : Swanston et G"", 1 , Laurence Pountney Hill, Londres; Miller & C''^, 84, Leadenhall street, Londres ; For\\"ood Bros et G"', 3, Grosly Square, Londres ; Yeoward Bros et G'*", 27 et 29, Stanley street, Liverpool ; Elder Dempster et G'*", Liverpool. L'emballage en caisses à claires-voies est le meilleur en usage jusqu'à ce jour. Mais comme il a l'inconvénient d'être fragile, les fruits arrivent souvent à destination meurtris et très endommagés. Vendus à vil prix ou rebutés, il en résulte presque une perte sèche; les frais de transport, de vente, commission, etc., devant être payés comme si l'afCaire était bonne. Pour remédier à cet inconvénient, on parle depuis quelque temps d'un nouveau mode d'emballage qui consiste en un baril de carton- pierre, ouvert aux deux bouts. Son principal avantage serait d'être beaucoup plus résistant que la caisse à claires-voies. Peut-être aussi serait-il plus économique si, comme on l'affirme, le même baril pouvait être utilisé plusieurs fois. L'inventeur ou l'acheteur de ce nouveau baril est la maison Forwood Bros et G'^, nommée ci-dessus, qui l'a déjà mis à l'essai. Jusqu'à présent, elle entoure l'alfaire du plus grand secret : ne peut pas ou ne veut pas fixer le prix du baril et ne s'engage pas pour des quantités à livrer; elle m'a cependant offert un échantil- lon à titre gracieux. 426 ETUDES ET MÉMOIRES X. — VAPKURS TOUCHANT A I.AS PALMAS Noms lies Coiiipag-nies LIVERPOOL R. P. IIoiif,'hton Lamport et Holl Hritisli ACrican Steam Navi- iiation C"' Lt Alrioan Stcain sliip G'" "^'eoward Bros Goodyean et C"' Hoiilciers Bros Mac Y ver Nelson Line LONDRES Ilouldcrs Bros Cioodyean et G'" Abei-deen Line of Steamers.. Morocco, Ganary, Madcira Line of Steamers {^astle Line Hullalkin et O" Lund et G'" HAMBOURG A\^ternuinn Line Ilambourfi' Sudamerikanis- che et G'" British AtVican Steam Navi- j^ation G'= Lt African Steam Ship G'" MARSEILLE Fraissinet et G'" Société G'" des Transports maritimes Woermann Line LE HAVRE Woermann Line Vai>i'ur.s par mois Kri'l |iar réj 1 à 2 i i\ 4 3 3 2 3 à 1 1 à 2 '1 2 1 à 2 1.2,^ 1.87 + 10 0/0 3.12 + 1.S7 + 1.87 + .. 3.12 + 1.S7 + 4 à 5 / 1 à 2 1 à 2 1.25 2 a 3 1 1.75 + 10 0/0 1.75 + 10 oy(» 1.25 Consignalaires à Las Patinas 1.25 Miller et G-. id. Elder Dt'm|)ster et G'"'. id. ^'eowai'tl Bros. M . tic la Torre. The G'' Ganary Goald G'" id. id. id. M. de la Torre. Miller et G-. Eorwood Bros. Miller et G'". Blandy Bros et G", id. id. F, Lopes dos Santos. Elder Dempster et C'°. id. .T. Ladevèze. Miller et G'^ Brandy Bi-os et G'". id. Parmi ces Gompag-nies, quelques-unes : Yeoward Bros et C'°, Forwood Bros et C''^, Goodyean et G''' ne trafiquent qu'entre les Ganaries, Madère, T Angleterre ; le transport des bananes, tomates, engrais, caisses d'eml>allage, etc., leur assure assez de fret. Les îles Ganaries exportent annuellement environ 2.000.000 de régimes : l'Angleterre reçoit à elle seule plus des 3/4 de cette somme totale, et la France 150.000 régimes. Les bateaux à vapeur qui transportent ces fruits mettent de cinq à sept jours entre les Ganaries et les ports destination. Las Palmas, 20 septembre 1!)02. Gazard, Vice-Consul, Gérant du Consulat de France. LE MATE Il y a plusieurs espèces de maté dans la province de Misiones ; il y en a trois qui croissent dans les montag-nes. Je n'ai pu les déterminer que d'après la forme, taille et couleur de la feuille, car il faudrait en posséder les autres organes pour les classer. Les trois espèces sont connues vulgairement sous le nom de vio- lette, blanche ou menu et jaune, ou caami, ou caamiri. La meilleure pour la consommation est cette dernière : les trois espèces croissent dans la même nature de terrain. En outre de ces variétés dites de montagne, où elles acquièrent de grandes dimen- sions (jusqu'à dix mètres de hauteur) il y a aussi l'herbe maté qui croît en plaine, mais en petite quantité, et seulement dans la pro- vince de Campo-grande et de Campina de Américo où elles occupent généralement les gorges ou ravins où coule quelque ruis- seau. Le maté se rencontre à partir du 28® parallèle jusqu'au nord, dans le voisinage des cours d'eau, de préférence dans les lieux ombragés et humides. Cependant l'humidité et l'ombre nécessaires à la germination et aux débuts de la croissance ne sont plus indispensables quand la plante a pris plus d'accroissement. En général, on croit que les plantes qui poussent sur les hau- teurs sont supérieures à celles qui croissent dans les terrains bas. D'autre part, on a remarqué que les feuilles de ces dernières sont plus grandes. Plus le sol est sablonneux, moins l'arbre de maté est élevé. La vie du maté est fort longue quand on ne le détruit pas par une taille mal comprise. Il existe des arbres de maté d'un siècle d'âge. On ne connaît ni maladie, ni insecte parasite du maté. Les pluies ne lui sont pas préjudiciables, la sécheresse au contraire lui est funeste. Les gelées ne mettent pas la vie du maté en danger, elles ne font mourir que les jeunes pousses. On trouve des plants de maté à 428 ÉTUDES ET MÉMOIRES 1.000 mètres d'altitude, où il neiye tous les ans. Au contraire, au point de vue industriel, les gelées améliorent les feuilles destinées à la consommation. Dans les montag-nes où pousse le maté, parfois sur de grandes étendues, lorsque les incendies se déclarent, on peut être certain que les plants de maté repousseront avec plus de force, pour peu que l'on prenne la précaution de les retailler à ras-du-sol. La région qui convient au maté est comprise entre le 28" paral- lèle et la frontière argentine. Les grandes étendues d'herbe de maté se trouvent presque toutes à l'est de la Cordillère. (Cependant à l'ouest cette plante prospère également. INDUSTRIE IIERIUÈKE Les travaux d'exploitation que sont obligées de faire les Compa- gnies pour l'exploitation de l'herbe maté sont pénibles et périlleux: les chemins n'existent pas ; il faut commencer par les faire, c'est la lutte contre la nature à travers des fourrés impénétrables. Quand on a trouvé les Manchas de Burha (étendue d'herbe maté) on fait un campement composé du noqiic, lieu où Ton dépose la récolte de la harhacua^ où Ton grille la plante de la cancha, où Ton triture les plantes grillées. On complète le campement par la construction des habitations pour les exploiteurs et les travailleurs. La Société Mauas, Rodri- guez et C'*", a établi des postes fixes entre Piray et San-Puro qui sont de véritables installations. Le transport de l'herbe maté se fait à dos de mulets. Le person- nel des exploitations importantes de maté est composé du repré- sentant de la Compagnie, d'un contremaître, de (quelques uriis (chargés spécialement de la torréfaction des feuilles), et d'une cinquantaine de travailleurs. Les appointements flottent entre 50 et 25 pesos mensuels. L'emballage usité dans lu province de Misiones consiste dans des espèces de grandes bourses de cuir de boi'uf dont on n'a ])as retiré les poils, ou faites avec de l'arpillera (espèce de tissu en étoupe). Ce mode d'emballage assez primitif demande évidemment des modifications qui le l'endent [)his pralicpie. LE MATK 429 RECOI.TK La récolte devrait être une simple taille qui ne serait pas plus préjudiciable k larhre maté qu'elle n'est à la vig-ne et autres végé- taux, si l'on choisissait l'époque et les moyens propres à cette opé- ration ; malheureusement on ne tient pas compte de ces conditions pour récolter le plus de feuilles possible dans le moindre temps. La récolte commence en mars et dure sans interruption jusqu'à fin juillet ou fin août. On fait la récolte en coupant tout ce qu'on peut atteindre avec la matchete (coupe-choux). Ensuite on incline l'arbre pour couper toutes les autres branches, ne laissant c[ue la terminale (appelée handerola)^ le règ-lement en vig-ueur dans la province défendant uniquement de couper cette partie de l'arbre. Le seul instrument de taille est donc la matchètc primitive et imparfaite. On ne peut faire de calcul approximatif sur la production d'un arbre de maté, cela varie selon la taille et son état de végétation : cer- tains arbres ne produisent que 20 kilos de feuilles, d'autres atteignent le poids de 200 kilos et plus. L Opération c|ui suit la récolte con- siste à faire passer les ramilles d herbes maté destinées à être grillées sur une flamme vive, pour évaporer rapidement une par- tie de l'humidité qu'elles contiennent. Cette opération se fait sur le lieu même de la récolte ; on presse ensuite l'herbe, dans le but de lui faire occuper le moins de place possible, et on la porte à dos d'homme, au campement, oîi on la torriiie à feu direct, ce qui lui donne souvent un goût de fumée, ou indirect, c'est-à-dire en élevant un peu plus le châssis de cannes sur lequel se placent les feuilles, qui perdent à peu près la moitié de leur poids dans cette opération. La couleur de l'herbe maté après la torréfaction doit être vert doré, couleur que l'on n'obtient pas toujours. Après la torréfaction on procède k la mouture des feuilles. Cette opération comme les autres est défectueuse et dépourvue jusqu'à présent de perfectionnements. Les plus grandes précautions sont prises pour éviter l'humidité qui est l'élément le plus préjudiciable dans les différentes opéra- tions. L'herbe maté prête à être livrée au commerce doit être le plus possible préservée de l'air qui l'éventé, par conséquent on doit éviter le plus possible les transvasements. Bullelin dn .Inviiùi colonial. 28 430 ÉTUDES ET MÉMOIRES CULTURE Malg^ré la croyance que l'on avait autrefois, le maté peut se reproduire par semis, mais lesi^raines mettent neuf, douze, cjuinze mois ou jîlus pour g-ermer, et ont besoin de conditions spéciales au point de vue de l'humidité et du choix du sol. On assure que l'on peut é<^alenient multiplier le maté par échits, marcotte ou grell'e, ou encore par la transplantation. Les plants de maté sont très délicats, les rayons directs du soleil leur sont très préjudiciables ; en conséquence, il faut les en préserver et leur conserver une continuelle humidité: Le plant doit être trans- planté avec toute la motte de terre. Après reprise des plants, il faut ôter les abris destinés à leur donner de l'ombre, et sous l'in- fluence du soleil et de la lumière on les verra prospérer rapide- ment. Le terrain où croît de préférence le maté, dans les forêts, de la province de Misioiies, est une terre argileuse, rou«fe, extrême- ment ferrugineuse, qui noircit rapidement quand elle dévale dans les terrains bas où la proportion dhumus est considérable. D'autre part, le maté croît en abondance dans le voisinage des sources et des cours d'eau. Les plants spontanés se trouvent toujours à l'ombre tl'arbres ou de g-raminée gigantesques, nombreuses dans la province de Misiones, PRÉPAHATlOiN d'UiN CHAMP DE Cl I.TI HE On choisit un grand espace ])oisé, on le débarrasse des grands arbres puis on fait des tranchées parallèles où l'on plante le maté, à 1 ombre des arbustes, que l'on suppi-ime graduellement au fur et à mesure de la croissance des plants, lescpiels doivent être placés à trois mètres de distance les uns des autres. Les soins consistent dans la taille i-aisonnée, qui doit tendre à éviter de laisser croître la plante en hauteur cl au contraire à en faire une plante ;t tronc bas, rameux depuis la base, (jui donne beaucoup de pousses et de bran- chages de facile accès, afin de ^a^()riserhl récolte. On peut profiter de la place laissée entre les plants ])our cultiver des légumes ou des plantes à lacines supei'licielles (|ui bénéficieront des arrosages donnés au maté. DE LA CULTURE DES ILEX PRODUISANT LE MATÉ Les semences du Maté, leur germination lente et difficile, moyens d'y remédier et la possibilité de faire des plantation de Maté, là où Valtitude et les circonstances climatériques s'y prêtent. Le petit fruit des Ilex Maté pousse, le plus souvent, en bouquets. Son péricarpe, dont la couleur varie du blanc au rose et au roug-e, et devient brune en séchant, est mince. Celui-ci couvre une chair blanche, sucrée, dont les oiseaux sont très friands. Le fruit contient généralement quatre graines ou semences. Durant la digestion, dans Festomac des oiseaux, il va fer/nentation qui dissout, non seulement l'enveloppe du fruit, mais aussi le ciment organique, qui unit ensemble ces graines, lesquelles sont passées par les oiseaux, parfai- tement nettes. Si les graines tombent dans un endroit propice et sont recou- vertes d'im peu de terre, amenée par les pluies, elles germent tôt ou tard, et produisent ainsi les arbres de maté des forêts. Toutefois, la quantité de g raines que peut produire un arbre de maté est très considérable, et cependant celles qui germent naturellement dans la forêt sont en nombre très réduit. C'est indiquer les difficultés qu'ont les graines de maté à lever, si on ne vient en aide à la nature. Les Jésuites du Paraguay et des Missions, en faisant ingérer à leurs Indiens le fruit du maté, suivaient scrupuleusement le travail de la nature dans l'estomac des oiseaux. C'est ainsi qu'ils ont créé les Hervaes, qui se rencontraient aux environs de leurs missions, d'abord, parce que les arbres étant à portée des cases de leurs Indiens, le travail de ceux-ci était plus rémunérateur, ensuite parce qu'ils avaient trouvé que les arbres cultivés donnaient des feuilles ayant un goût plus doux, plus agréable que celui des feuilles provenant des arbres sauvages. Il est probable qu'on obtiendrait le même résultat en g-ardant les graines du maté lo à 18 heures dans de l'eau, à la température du corps humain : 37", pourvu qu'on ait soin de les débarrasser ensuite de leur péricarpe, par le lavage et le frottement. 432 ÉTL'Di;s i:t mé.'\ioiiu:s On vend m;iinteuanl au jardin d acclimatation de Buenos-Ayres des plants de maté ()])tenus de g^raines qui ont été baig-nées dans l'eau cliaude im certain temps, puis lavées et frottées, jusqu'à ce ([ue les semences soient parfaitement propres et débarrassées de leur péricarpe. Dans les zones ofi l'arbre de maté est très abondant, la plante se reproduit spontanénuMit sur les i< rocas » ou les clairières de forêts, faites par l'abattage du bois et le feu. Dans ce cas, lesg^raines dematé tombées à terre sont entraînées par les eaux de pluie, d'ici, de là ; celles qui restent à la surface du sol sont réduites en charbon ou en cendres par le feu, et c'est le sort de l)eaucoup, le plus g-rand nombre ; mais c[uelques-unes d'entre elles, tombant dans un trou ou dans une dépression du terrain peuvent se trouver recouvertes d'un peu de terre amenée par les pluies, et sont protég-ées par cette couche de terre, qui fait matelas, pendant l'in- cendie. L'elfet même de la chaleur les débarrasse du péricarpe dessé- ché (|ui les enveloppait, et l'eau alcaline provenant des cendres du feu, amenée soit par les rosées abondantes de la nuit, ou à la pre- mière pluie qui suit l'incendie, pousse à leur germination, ({ui a lieu dans un temps plus ou moins long. Cependant le maté se reproduit spontanément aussi sur des clairières ou les bords de la forêt (jui n'ont pas été brûlés. Dans ce cas, les pieds naissent de fruits qui ont passé par l'estomac des oiseaux ou par l'estomac du bétail qui ])aît dans la forêt, le péricarpe de ces fruits peut avoir été brisé pai- le frottement à réj)oque des grands vents. Ou bien étant tombés à terre déjà mûrs, au pied de l'arbre, avant que le péricarpe soit desséché, celui-ci esi rompu par le pied des animaux, bœufs, chevaux, nmlets, et les semences séparées sont alors entraînées de-ci, de-là par les eaux el g-ei-ment là où elles trouvent une place convenable. Il est à reinar([uer que c'est principalement sur les bords de la forêt, là où le bétail paît de préférence, parce que l'herbe y est meil- leure et plus serrée, (|ue la i-eproduction spontanée des matés a lieu. La composition chimicpu^ du péricarpe et de la chair des fruits du maté (la chaux, le fer, le tannin, le glucose notamment) forme, avec la texLure même, un tout homog-ène d'une g-rande résistance, une fois que le fruit est sec, et c'est ce cpii explicjue la non-germi- nation de ces graines, tant qu'elles ne sont pas débarrassées de ce LA CULTURE DES ILEX MATÉ 433 parchemin spécial sur lequel l'eau, k la température normale, ou l'humidité de la terre n'ont pas d'effet immédiat. D'un autre côté, l'imperméabilité de cette enveloppe conserve long-temps intacte la vitalité de ces fruits desséchés, et ce n'est que lorsqu'elle est détruite par le temps et la pourriture que la vitalité des semences dis- paraît. En elfet, dans la g-ermination spontanée des Hervaes, sur les « clairières » ou sur les c rocas » qui sont brûlées, celle-ci n'est-elle pas due à des fruits de l'année seidement, mais provient aussi de g^raines vieilles, accumulées les années précédentes. On doit noter, ici, que la fructification des Ilex Maté n'apparaît qu'après une période de quatre années, pendant lesquelles on n'a pas taillé les arbres, et aussi qu'elle n'a pas lieu tous les ans, mais g^énéralement k des intervalles de trois années. Je parle ici d'une fructification régulière et abondante. Ce qui a été dit plus haut indique suflisamment que le jjrincipal emj^êchement k la germination des graines de maté est le péricarpe desséché qui les entoure On peut y remédier comme suit : 1° Si les fruits du maté sont secs (le péricarpe étant parfaitement desséché) on les mettra dans une solution concenti"ée de potasse, mélang^ée à dix fois son volume d'eau, et on les y g-ardera pendant quelques heures, k une tempéi'ature tiède, voir plutôt chaude, après quoi on décantera la solution alcaline, et on la remplacera par de l'eau k la température normale ; puis on brassera les fruits k la main ou k l'aide d'une petite pelle en bois, pour enlever le mucilag^e et obtenir les semences parfaitement nettes et séparées les unes des autres. A cette fin, on répétera plusieurs fois le lavag;e k l'eau, on essuiera alors les semences et on les laissera sécher k l'ombre. 2° Si les fruits sont frais et pris sur l'arbre, on aura soin qu'ils ne soient cueillis que lorsqu'ils sont parfaitement miÀrs. On les mettra dans un récipient plein d'eau et on les y brassera k la main, ou k l'aide d une petite pelle en bois, pour séparer la pulpe du fruit. On lavera les semences k plusieurs eaux, jusqvi'k ce qu'elles soient parfaitement séparées, et on les essuiera. Que ce soit des semences provenant de fruits secs ou de fruits frais, on mélang-era k chaque kilo de graines lavées et essuyées deux poignées de cendres tamisées, et on les y gardera quelques heures, après quoi on les lavera de nouveau k l'eau, et on les laissera sécher k 1 ombre, ou bien on mettra les graines lavées et essuyées dans une solution de 434 ÉTUDES ET MÉIMOIRES potasse au vino-tième, ou on les yj^-ardera (juelcjues heures à la tem- pérature normale, après quoi on Ks lavera de nouveau à Teau et on les laissera séeher à Tombre. Traitées de ces manières, les semences des fruits de maté, (pie ceux-ci soient secs ou tpiils soient frais, conservent parfaitement leur vitalité et leur pouvoir de germer, qui est de longue durée, et peuvent être expédiées loin du lieu de production. D'après ('arl Boig-t. de ll^lal de Rio (Irande du Sud (Brésil), il con- vient, pour la reproduction des Ilex Maté, de former des pépinières qu'il j) ré pare ainsi : « Les semences sont mélangées à du sable : 1/3 de semences à 2/3 de sable, dans des caisses, n'ayant pas plus de 10 centimètres du mélange, en profondeur, caisses que Ton garde humides et à l'ombre. Au bout d'un temps assez prolongé, qui peut aller jusqu'à quatre ou cinq mois, les semences commencent à lever, c'est-à-dire que le germe apparaît. On a soin, de temps en temps, de s'assu- rer, en grattant le sable des caisses, si la germination est en train de se faire. Quand celle-ci est arrivée à point, on sème alors le contenu des caisses en l'étendant à la superficie de plates-bandes, ombragées et maintenues humides, préparées avec une bonne terre légère, mélangée de sable, et qui ont été défoncées de 2o à 30 centimètres de profondeur. On couvre de un pouce de terre, passée au tamis. Les semences lèvent très près l'une de lautre. On les trans- plante alors dans des planches ombragées, jusqu à ce que les plants aient atteint une grosseur suffisante pour être établis en lieu fixe et à lépoque de la bonne saison, là où devra avoir lieu la plantation définitive. » Je préfère semer les graines directement sur les plates-bandes, à l'ombre, comme il a été dit plus haut; mais sans passer par les caisses, ce (|ue je juge inutile, et ce tpii permet en outre une semaille plus régulière et moins serrée, de sorte que les jeunes plants peuvent être laissés en place plus longtemps, avant d'être transplan- tés. Autant que faire se pourra, cette transplantation devra avoir lieu en forêt, à l'ombre, c'est-à-dire dans des conditions de terrains, et de climat, identiques à celles de la germination spontanée des « Ilex Maté ». Si cependant on désirait faire une plantation de maté dans les même position dans le trou où le panier sera placé. Il serait bon aussi de planter, de distance en distance, quelques arbres de croissance rapide, pouvant donner de l'ombre en peu de temps, et qu'on enlèverait plus tard, lorsque les ar])res de maté seraient devenus grands. Pour des plantations directes, en forêt, on clôturera d'abord entiè- rement le terrain choisi, de manière à ce que le bétail ne puisse y entrer. On préparera, à l'avance, et à la distance voulue les uns des autres, des trovis où la terre aura été défoncée avec soin ; au moment des semailles du printemps, on remplira de nouveau ces trous avec la terre mise de côté, et on mélangera à celle-ci un peu de sable, et de terreau ou terre de bruyère, jusqu'à ce que les trous soient pleins. On sèmera alors deux ou trois semences de maté, préparées comme il a été dit plus haut, en les plaçant à la surface, et en recouvrant celle-ci de un pouce de terre, passée au tamis, puis on attendra le résultat. Lorsque les arbres à maté auront atteint un certain développement, on enlèvera les arbres qui pourraient gêner, sans dénuder complè- tement la forêt ; on aura alors au bout de 5 ans, une plantation bien formée qui sera en plein rapport à 7 ans. Gurityba. Paranâ (Brésil), 16 décembre 1900, P. MlCHEA. QUELQUES PLANTES A LATEX DU DAHOMEY ' C'est sur le plateau de la montafi^ne, exclusivement, que j'ai rencontré le Pendjaija^ euphorbiacée (U)nt nous allons faire une étude sommaire. Mais, dès le début, je tiens à faire remarquer •"i-'i la ressemblance qui existe entre le Penaucoup LÉGUMES ET FRUITS A MADAGASCAR 4SI plus régulière et ne porte pas un préjudice sérieux aux arbres frui- tiers. L'imperméabilité des terres aurait rendu dangereux l'établisse- ment de plantations dans des replis de terrain formant cuvette. On a dû tenir compte de ce fait en créant le verger, et réserver pro- visoirement quelques-uns de ces emplacements trop humides pen- dant les pluies, qui ne pourront être mis en culture qu'après avoir été assainis. Le terrain occupé par le verger est un étroit plateau bordé par un ruisseau encaissé courant du sud-est au nord-ouest. Ce plateau est limité de l'autre côté par une colline et des marais sur les bords desquels on a planté quelques niaoulis (Melaleuca leucodendron). Les parties planes et la base des collines bordant le verger à l'ouest ont seules été plantées, car la qualité des terres du coteau a paru trop médiocre pour mettre en place des arbres fruitiers récem- ment introduits à grands frais dans la colonie. Le tout n'est élevé que de quelques mètres au-dessus du niveau de la mer, éloignée d'environ 4 kilomètres à vol d'oiseau. La création d'un verger en plantation régulière de l'Ivoloina ne date que de mars à mai 1901. Jusqu'à cette époque les arbres frui- tiers existant à la Station étaient dispersés en différents endroits, faute d'emplacement suffisamment bien préparé pour les réunir tous sur un seul point. La plupart des fruitiers d'introduction n'étaient d'ailleurs pas encore assez développés à cette date, pour être transplantés à demeure, mais il a semblé nécessaire de créer le plus tôt possible une section spéciale où seront rassemblés : d'une part, les arbres fruitiers introduits des différentes régions tropicales; d'autre part, une collection des fruitiers indigènes. ^u fur et mesure des introductions, les espèces nouvelles pren- dront place à côté de ceux existant déjà à l'Ivoloina, et le visiteur ayant ainsi sous les yeux, réunie sur un espace restreint, une col- lection sans cesse pius riche des fruitiers qu'il est possible de cultiver dans la région moyenne de la côte Est, pourra apprécier en quelques minutes la venue plus ou moins satisfaisante des diffé- rentes espèces et variétés mises en observation. Le nombre des arbres fruitiers réunis à la Station d'essai de l'Ivoloina, provenant pour la plupart du Jardin Colonial, des envois faits par M. Prudhomme pendant son séjour en Extrême-Orient, et du Muséum d'histoire naturelle, est déjà considérable. 4o2 ÉTUDES ET MÉMOIRES La plupart des espèces auraient pu être représentées au vero;er par un nombre bien plus important d'exemplaires, mais on a dû se contenter d'abord, pour ne pas être amené à donner une importance disproportionnée à cette section et surtout pour ne pas y consacrer une main-d'œuvre trop considérable, d'y mettre simplement queUjues spécimens de chaque espèce ou variété. On n'a pas hésité, cependant, chaque fois qu'il s'est ag-i d'arbres fruitiers de valeur, encore peu répandus ii Madag-ascar, comme le mang-oustan, par exemple, de les représenter par un nombre relati- vement grand de sujets dispersés sur toute l'étendue du domaine et surtout mis en place en bordure des allées de service de la section de g-rande culture, seuls soit alternant avec d'autres espèces. C'est ainsi qu'on trouve à la Station de l'Ivoloina, une allée de mangoustans, une de Nephelium lapaceum, une d'Aeg'le marmelos, une d'Anona discolor et une de mandariniers de Zanzibar. Il faudra bientôt ajouter (après la saison pluvieuse) à ces espèces les fruitiers indig-ènes, qui prendront place dans la partie qui leur est réservée, et aussi, peu à peu, les différentes espèces tropicales qui seront envoyées à la Station de l'Ivoloina. Un certain nombre d'es- pèces fruitières manquent encore, et il rerait désirable qu'elles vinssent compléter prochainement les collections déjà réunies. CONFÉRENCES DU JARDIN COLONIAL LE SULTANAT D'ANJOUAN CONFÉRENCE FAITE LE 13 NOVEMBRE 1902 à l'Ecole Supérieure d'Agriculture coloniale de Nog-ent- sur-Marne. PAR 31. GEORGES LAURENT Directeur de la « Société des Plantations d'Anjouan ». L'île d'Anjouan, située dans l'Océan Indien, au nord du canal de Mozambique, occupe le centre de l'archipel des Comores, à égale distance de la cote de Mozambique, à l'Ouest, et de Madagascar à l'Est. Elle est placée entre 41° 50 et 42M0 de longitude Est, et 12*^3 et 12" 22 de latitude Sud. à 45 milles de Mavotte, 35 milles de la Grande-Comore et 20 milles au N.-E. de Mohéli. La superficie est de 380 kilomètres carrés. Toutes ces îles sont de formation volcanique, le sol d'Anjouan est tout particulièrement accidenté, et, vue de large, cette île apparaît comme une gigantesque pyramide, dont les contreforts sont pro- fondément cannelés par les vallées. Parallèlement aux chaînes de montagnes qui constituent Fossatui^e centrale de l'île, ossature atîectant la forme d'une étoile à 3 branches, s'étag-ent jusqu'à mi- côte des immenses plateaux très fertiles. J)u niveau de la mer à 300 mètres, la végétation est presque uni- quement composée de cocotiers, de manguiers, de jacquiers et d'arbres à feuillage persistant. De 300 h 600 mètres, les frondaisons sont plus clairsemées. Enfin, de 600 mètres au pic d'Anjouan — 1 .578 m. — la végétation est extrêmement dense. A partir de ce point, les plateaux cessent brusquement, les flancs des montagnes deviennent escarpés et retiennent accroché à leurs parois abruptes, un manteau inextri- cable d'épaisses forêts. Ces sommets sont souvent ensevelis sous les brumes. Les nuages. en passant sur les crêtes des arbres, se refroidissent, se condensent rapidement, se transforment en petits ruisselets, qui, se réunissant 454 CONFÉRENCES dans les j^orges profondes, se convertissent en torrents impétueux, en cascades bondissantes, et viennent s étaler dans les vallées, en rivières calmes, assagies. Grâce à cette abondance deau, Anjouan est d'une grande ferti- lité. Dans les vallées, le sol est noir, chargé d'humus, très per- méable, la température est toujours chaude et humide, la végétation luxuriante, et l'air généralement si malsain, que les Européens, pour éviter le paludisme, doivent habiter des régions plus élevées, où les brises du large arrivent plus pures et plus vivifiantes. Sur les plateaux, le terrain varie suivant les régions. Sur la lace Nord, on rencontre le sol siliceux, chargé de mâchefer, graveleux ou pulvérulent. Sur les côtes Est et Ouest, le sol est argileux, mais riche en humus. Les pointes extrêmes Nord-Ouest et Sud, balayées par les vents de mer, sont à peu près exclusivement composées d'argiles rouge ou jaune très compactes, dont les indigènes se servent pour la confection d'objets de poterie. Le climat d'Anjouan est relativement sain. L'année est partagée en deux saisons bien distinctes. La saison des pluies ou hivernage dure 6 mois, d'octobre à mars. La saison sèche commence fin mars pour Unir fin septembre. Excep- tionnellement, en 1901-1902, la saison des pluies a duré neuf mois, et je suppose qu'il faut attribuer cette perturbation aux éruptions vol- caniques de la Martinique. En hiver, le thermomètre oscille de 22 à 32° à l'ombre. Pendant la saison sèche, la température varie de 16 à 28" au niveau de la mer. D'après mes observations personnelles, je crois pouvoir avan- cer que la température s'abaisse d'un degré environ par 100 mètres d'altitude. La moyenne barométrique est de 759/761 '"'" sans grande oscilla- tion. Le régime des pluies varie suivant l'exposition et la situation par rapport aux courants aériens. Sur la côte Nord (Page), où la vallée est très abritée, nous avons enregistré, l'an dernier, 3 "'52 de pluies. A Sima (face S.-O.), où le sol est moins boisé et les collines peu élevées, la hauteur d'eau n'a atteint (jue 2 '" 37. Les côtes d'Anjouan sont très découjîées, et forment de nom- breuses cri({ues suflisantes pour protéger et laisser aborder les LE SULTANAT d'aNJOUAN 45S bateaux de faible tonnag-e. Suivant les régions, ces côtes se com- posent de falaises à pic sur la mer, de jjlag-es de sable fin, jaune, noir et brillant, de g-alets polis par le remous incessant des vag-ues, ou encore de rochers effondrés dans un éboulis impraticable et dange- reux. La base de l'île est constituée d'amas madréporiques se prolon- geant jusqu'à 500 mètres du bord, où se brise la puissance des vag-ues de fond, venant du larg-e. Anjouan fut découverte, croit-on, vers le xiv'' siècle. Les Portu- gais la visitèrent en l'an 1500, sans y rester. Puis vinrent les musulmans du Chiraz, apportant avec eux la religion qui devait, plus tard, être celle de tous les Comoriens. Depuis cette époque, et jusqu'en 1886, le pouvoir fut entre les mains de sultans arabes venus de l'Yemen, qui s'entourèrent de ministres pour mener à bien les affaires du pays, sans cesse compli- quées cependant par des guerres civiles. Les règnes furent presque tous ensanglantés par des incursions venant des îles voisines ou par des crimes des prétendants au pouvoir. En 1880, le vieux sultan Abdalla, las 'des persécutions de ses sujets, demanda à la France de signer un traité de protection ; ce traité fut accepté et ratifié en 1887. La France envoya, pour la représenter, un résident. La discorde éclata bientôt entre le résident et le sultan, qui, poussé par les Anjouanais, regrettait sans doute notre protectorat. Une révolte s'ensuivit, le drapeau français fut souillé, et, pour ven- ger cette insulte, le résident demanda à Mayotte l'appui d'un navire de guerre. Le sultan Abdalla mourut, peu après, dans des circonstances mystérieuses. Des compétitions s'élevèrent pour désigner un sultan. Deux par- tis étaient en présence, tous deux ennemis de notre protectorat, ayant à leur tête Salim, fds du défunt, et Saïd Othman, son frère. L'aviso le Boursaint arriva enfin de Mayotte, bombarda la cita- delle de Mutsamudu, et, peu après, les navires de la division de l'Océan Indien, réunis dans la baie de Mutsamudu, débarquèrent une compagnie d'infanterie de marine qui occupa l'île pendant un an. Le calme fut rétabli. Les deux prétendants au trône furent cap- turés et déportés à Obok. En 1891. la France nomma sultan le prince anjouanais Saïd- 456 œiNFÉHRNCES Omar, qui mourut on 1892, peu après la signature des traités de pro- tectorat et de laholition de l'esclavage. Son fils Saïd Mohamed lui succéda. Depuis 1892, les aiïaires du sultanat sont administrées par les fonctionnaires français, trouvant chez le sultan un conseiller dévoué à notre cause. Anjouan n"a que six fonctionnaires, y compris le docteur. Ils assurent le service de l'île, qui, en dehors des 12 ou 15. 000 indi- gènes, ne comprend que cinq importantes exploitations agricoles dirigées par des Européens. Le protectorat français apporta avec lui des améliorations notables dans l'administration de l'île. L'impôt de capitation fut fixé à 5 fr. par tête d'honmie valide, et perçu d'une façon très sérieuse, sous le contrôle de la police. Des droits de douane frappèrent à l'entrée les marchandises étrangères au profit des produits français, qui en furent exonérés. L'esclavage supprimé fut remplacé par l'engagement à longue durée, 3 à 5 ans, suivant les si précieux enseignements du général Galliéni à Madagascar. Le cadastre fut à peu près établi, un tribunal mixte institué ; bref, l'arrivée des colons européens créa dans le pays une animation extraordinaire, transformant en quelques années, une terre féerique, heureuse, mais presque inculte, en riches plantations de cannes k sucre et de vanilliers sur lesquelles s'agitent 3.000 ouvriers, et dont les produits se chilTreront cette année, par plus de 2 millions de francs. C'est sur une de ces exploitations que je me permettrai de vous conduire par la pensée ; et si mon récit est parfois un peu aride, il a le mérite d'être vécu et de toujours rester sincère. LA COLOMSATION En mars 1899, je partis à Madagascar pour le compte de >< La France coloniale », association mutuelle coopérative de retraites, pour faire un voyage d'études dans la région de Tamatave. Pendant le temps que j'y passai, je n'eus pas beaucoup l'occa- sion de me documenter. La partie Nord de Tamatave, cpioique fer- tile, occupée par de petites exploitations agricoles, n'était pas à cette époque en grande activité; de récents cyclones avaient meur- LE SULTANAT d'aNJOLAN H')! tri les plantations, et en dehors d'un champ de cannes à sucre et d'une plantations de cocotiers sans importance au bord de Flvolina, je ne conservai de ce voyage qu'une vision de cacaoyère abandon- née et infestée de rats, d'une gigantesque liane de vanillier qui mesurait au moins 100 mètres, poussant sans aucun soin dans une partie humide de cette cacaoyère, et sur laquelle jamais son pro- priétaire n'avait pensé à féconder une fleur, encore bien moins à tirer parti des boutures. A cette époque, le Jardin d'essai de Tamatave n'avait pas une collection de plantes bien intéressante ; c'était, il est vrai, son début, et M. Martin, son directeur, ne put me montrer que quelques semis de caféiers, de cacaoyers, de coco- tiers et des essais encore timides de culture potagère. A Nossi-Bé, où je m'arrêtai quelque temps, les plantations de vanilliers étaient plus curieuses. Les vallées chaudes de l'île offraient à cette orchidée un terrain très favorable. Quelques plantations étaient bien entretenues. En arrivant à Anjouan, fin mai 1890, je retrouvai un collabora- teur que la Société « La France coloniale » m'avait envoyé et que j'avais vu à Paris avant mon départ. Grâce à l'obligeance de colons français établis dans l'île depuis cinq années, nous pûmes nous rendre compte de visu, de planta- tions bien entendues, bien comprises, sur lesquelles aussitôt notre sagacité s'exerça. Je ne veux pas vous entretenir de nos débuts comme planteurs, des diflicultés sans nombre que nous éprouvâmes pour trouver des terrains propices à nos cultures, pour faire élever notre pre- mière case, et pour nous assurer la main-d'œuvre nécessaire à nos travaux; cela m'entraînerait trop loin. Ce sont des moments pen- dant lesquels il faut faire abstraction de soi-même, penser à sacri- fier son existence pour la cause que l'on défend, et on doit regarder ces jours néfastes, quand ils sont passés, comme une émulation utile et bienfaisante. Fin septembre, notre installation était terminée, nous avions en mains les actes des terrains loués au Sultanat. La Société (( La France coloniale », tenue au courant de nos travaux, nous apprit la bonne nouvelle de la constitution de la Société des plan- tations d'Anjouan. La Société débutait avec un capital de 24.000 francs, fourni moitié par « La France coloniale », moitié par mt)n collaborateur et 458 CONFÉRENCES par moi, et s'engaalsamuni ; Le Santalum album ; et trois variétés de Cinchonas ; Les variétés de Collea congoensis, padang'iu% laurina ; Les Cinamomum Zevlanicum, Kiamis ; Les Myristica fragrans, etc., etc., un choix très varié d'arbres fruitiers des Colonies françaises ou des pays tropicaux. La majeure partie de ces vég-étaux s'est bien acclimatée ; multi- pliées à outrance, ces plantes présentent une végétation très active et leurs phases de développement sont l'objet de nos observations, qui seront bien intéressantes à vous communicjuer, lorsque nous serons sortis de la période des essais. En dehors de ce choix de plants, M. Dybowski nous a remis toute une collection de g-raines de haricots, pois, antaques, ricins, provenant de ses propres récoltes au Jardin Colonial de Nogent, et des jardins d'essai des Colonies françaises. Ces espèces semées à Anjouan ont déjà donné d'abondantes graines, et nous avons constaté que tous ces végétaux en s'y accli- matant ne dégénéraient nullement sous notre climat. Depuis, nos pépinières se sont encore étendues; des semis de 17 variétés d'Eucalyptus furent faits, et il semble dès à présent établi que les Eucalyptus colossea, globulus, robusta, citriodora, sont celles qui s'acclimatent le mieux. Ayant dans nos vastes concessions des altitudes très variées, depuis le niveau de la mer jusqu'à 750 mètres, et des terrains éga- lement variés, nous allons pouvoir par tâtonnements déterminer l'habitat qui convient le mieux à chaque plante. Nous avons aussi fait des semis de Casuarinas, d'Acacias, de pins, de Grevillea robusta, qui semblent réussir. Les plantes médicinales, en particulier h;s Cinchonas, lesSmilax salsepareille, les plantes à résines parfumc'es, à essences, les textiles. Agave, Sisals, Sanseviera, ont été l'objet d'études intéressantes, et nos essais nous encourag^ent à persévérer. Récemment, nous avons semé près de 200.000 graines de (^aryo- phyllus aromaticus — Giroflier — de caféiers de Libérica, laurina et autres variétés, de Cacaoyers de Bourbon, et (juanlité d'autres plantes utiles, industrielles ou alimentaires, que j'eus la bonne for- tune de rapporter d'un voyag-e d'études à la Réunion. LE SULTANAT d'aNJOUAN 469 A côté de ces productions à long terme, nos essais se sont por- tés sur la culture des céréales et des espèces potag^ères. Les céréales semblent s'acclimater difficilement. L'avoine noire et le blé réussissent mieux que l'orge, mais il faut encore tâtonner pour placer ces graminées aux endroits qu'elles exigent. Par contre, les légumes ont obtenu un complet succès. C'est en ce moment à Tontoni-Fombani un vrai potager de maraîcher de France; les planches sont fumées au fumier d'étable que nous pro- cure notre troupeau de bœufs, les arrosages sont faits à la lance, et il nous est facile à chaque passage du paquebot de l'approvision- ner en légumes frais. Seul l'artichaut, qui exige un climat froid, n'a pas réussi, mais les concombres, melons, courges, céleris, ciboule, oignons, choux, carottes, navets, salades, tomates, voire même la pomme de terre, donnent des produits aussi beaux que nos légumes de France. Je terminerai cette nomenclature en vous signalant nos premiers essais de greffage de Colfea arabica sur liberia. Ces greffages, prati- qués en fente, nous ont donné une lionne moyenne de reprise. Nous poursuivons ces travaux en étendant ces procédés aux autres végé- taux susceptibles de s'améliorer par leur application. En un mot, nous voulons nous mettre à la hauteur des connais- sances modernes et faire profiter, dans la mesure du possible, l'agri- culture tropicale des travaux pratiqués jusqu'à présent sous un cli- mat plus froid. Dans nos explorations en forêt, nous avons rencontré de nom- breuses orchidées, appartenant aux Angraecum, aux Laelias^ aux Gattleyas et aux Vandas. A côté de ces plantes décoratives, si curieuses, si richement colorées, et si capricieuses dans leur struc- ture, nous avons rapporté en herbier des végétaux divers, arbres, arbustes, herbes, fougères, mousses, lichens, champignons qui nous ont paru intéressants. Nous avons confié leur détermination à M. Hariot, le distingué préparateur du Muséum, dont les connais- sances botaniques sont si étendues et si appréciées. Maintenant, Messieurs, que vous connaissez les résultats obtenus par notre Société, je vous expliquerai en quelques mots pourquoi elle a réussi : (( La France Coloniale » est, comme je vous l'ai dit, une asso- ciation mutuelle coopérative de retraites. Elle est formée de 3.000 sociétaires qui lui adressent mensuelle- 470 CONFKRENCES ment leurs cotisations. Ces cotisations sont, en grande partie, employées à la mise en valeur de propriétés dans les colonies fran- çaises. Après un délai de quinze années, les versements des socié- taires cessent, et ils participent toute leur vie aux bénéfices des affaires dans lesquelles leurs capitaux ont été versés. « La France coloniale » envoie dans les pays qui lui paraissent intéressants à coloniser, un chargé de mission, qui examine le pays, s'entoure des renseignements concernant la main-d'œuvre, le régime de la propriété, le climat, les moyens de communication, étudie le sol, les débouchés, en un mot ne risque ses capitaux qu'avec un maximum de garanties. Elle constitue ensuite des Sociétés filiales, dont elle surveille étroitement les intérêts, les membres du Conseil d'administration de ces Sociétés étant les mêmes que ceux du Conseil de « La France coloniale ». Ces filiales partant d'un petit capital, augmenté lentement chaque mois, procèdent avec une parfaite méthode. Tout en faisant des cultures à rapport immédiat, elles pratiquent des essais peu coûteux sur une très petite échelle, et n'augmenteni leur essor que lorsque ces essais ont donné des résultats appréciables. Les produits des plantations sont envoyés sur les marchés de France, le Conseil d'administration peut ainsi mieux défendre ses intérêts que si le planteur avait recours à un intermédiaire oné- reux. Le Directeur technique des plantations, allégé de ces préoccupa- tions, se livre plus entièrement à ses cultures pour le plus grand bien de la production. Beaucoup de Sociétés coloniales, montées à gros capitaux, ont dû abandonner leurs exploitations. Voulant tout faire d'un seul coup, mettre en valeur des immensités de terrain, et se bornant à une seule culture, elles arrivaient, en cas d'insuccès, à ne plus avoir de fonds pour tenter d'autres plantations. Au contraire, notre Société, en marchant à pas comptés, est parvenue à exploiter un domaine très important, et aurions-nous à subir des ravnges imprévus, elle pourrait reconstituer en peu de temps, et à coup sûr, grâce aux recettes mensuelles des cotisations, des plantations aussi impor- tantes que celles dont elle dispose aujourd'hui k Anjouan. Ne pas aller trop vite, étudier son sol, connaître à fond la vie des végétaux, apporter le plus grand soin à ses plantations, telles sont LE SULTANAT d'aNJOUAN 471 les conclusions que je livre aux futurs colons, persuadé à l'avance qu'avec un peu d'énerg-ie et de ténacité ils feront dans notre vaste empire colonial ce que nous avait fait nous-mêmes à Anjouan. Je me fais un devoir, en terminant, de remercier M. l'Inspecteur général de l'ag-riculture coloniale de l'hospitalité si généreuse qu'il m'a offerte aujourd'hui, et vous. Messieurs, de l'attention avec laquelle vous avez bien voulu m'écouter et me suivre. LA COTE OUEST DE MADAGASCAR CONFÉRENCE FAITE LE G NOVEMBRE 1902 PAR M. CHARDON, ingénieur .if/mnoino, adminisirateur adjoint des Colonies, aux élèves de l'Ecole nationale supérieure dWgriculture coloniale. La première conférence publique a été faite à l'Ecole supérieure d'Agriculture coloniale, le 6 novembre, par M. R. Chardon, inii:;é- nieur-ag-ronome, administrateur adjoint des Colonies, qui a fourni quelques impressions personnelles résultant d'observations recueil- lies par lui sur divers points de la grande île. Avant d'entreprendre quelque discussion que ce soit sur un pays comme Madagascar, il faut toujours considérer la région dont on veut parler, il y a des différences absolues entre les facteurs de la colonisation dans ces diverses régions, savoir : le sol, le climat, l'esprit de la population, les moyens de communications avec la côte. Ces différences font qu'il faut éviter soigneusement de généra- liser des méthodes, des régimes, des procédés, même s'ils sont excellents dans un endroit. — en l^myrne par exemple, — car ils peuvent être dangereux dans les régions sakalaves. Après avoir examiné les conditions de sol et de climat dans cette région sakalava, de Tulear à Majunga, il convient d'insister parti- culièrement sur l'esprit des indigènes dont le concours est indispen- sable pour la main-d'œuvre et les transports. En ce qui concerne ces régions, ce concours ne peut être acquis le plus souvent que si LA CÔTE OUEST DE MADAGASCAR 473 les indig-ènes ont confiance dans leur employeur et se rendent compte de ce cjuils font . La première de ces conditions peut être obtenue par différents moyens, suivant les goûts et le caractère du colon. Toutefois, il est bon de signaler que beaucoup de colons commencent d'abord par faire des affaires, du commerce avec les indigènes, ils les habituent à avoir affaire à eux plutôt qu'à tout autre pour la vente des produits du sol, que peu à peu ils les amènent à fournir régulièrement ces produits échangés contre les marchandises ou contre l'acquittement des impôts, par exemple. Sans aller jusqu'au commerce, qui, entendu de cette façon, cependant aide puissamment à la colonisation en donnant une impulsion à la production industrielle, certains se con- tentent d'un régime mixte, mais qui n'est pas le salariat fixe, mal compris des sakalaves et qui se rapproche plutôt d'une sorte de métayage. En tout cas, il faut admettre que les sakalaves ont besoin de s'assimiler l'idée du travail salarié et il faudra se résoudre long- temps encore à des moyens transitoires. Il importe aussi — au point de vue économique naturellement — pour les sakalavas qu'ils se rendent compte de l'utilité du travail qui leur est imposé, ou au moins qu'ils n'en soient pas effarouchés ou surpris. C'est pour cela qu'il faut n'implanter des nouveautés pour eux qu'avec la plus grande prudence. S'ils travaillent déjà difficilement avec les instruments et aux cultures qu'ils connaissent et apprécient, que sera-ce pour des plantes étrangères et des instru- ments inconnus? A ce point de vue, il serait peut-être intéressant, pour les régions sakalaves, si peu connues au point de vue indigène et économique, de se contenter de chercher d'abord à perfectionner les ressources locales en en tirant parti. Le perfectionnement des cultures indigènes — le riz, par exemple — la sélection de produits venant à l'état sauvage et laissés de côté jusqu'à présent, comme par exemples les cotons^ la gomme du sud-ouest, aurait autant d'intérêt que l'introduction hâtive de cultures et procédés étrangers au pays. La monographie de quelques exploitations agricoles ayant à peu près réussi dans les conditions ci-dessus vient à l'appui de cette argumentation, qui, encore une fois, ne s'applique qu'à des régions déterminées de la colonie, différentes en tous points de l'Emyrne et de la Côte Est, sur lesquelles portent la plupart des appréciations 474 ' ÉTUDES Eï MÉMOIKES g-énéralisées jusqu'aujourd'hui, au point de vue de la colonisation agricole. Dans les régions dont il s'agit, elle semble pour le moment ne devoir chercher à s'appuyer que sur les ressources locales et le con- cours confiant des indirjènes. LA qup:stion cotonnière au Sénégal ET AU SOUDAN CONFÉRE>'CE FAITE LE 5 NOVEMBRE 1902 au Syndicat général de l industrie cotonnière, PAR M. Yves HENRY Inspecteur de V Agriculture de V Afrique Occidentale. Le Comité du Syndicat général de l'Industrie cotonnière française s'est réuni le mercredi 5 novembre 1902, dans le local de l'Association de l'Industrie et de l'Agriculture françaises La séance ' est ouverte à 3 heures 15 sous la présidence de M. Albert Esnault-Pelterie, président. 1. Sont présents : MM. Yves de la BruchoUerie. Vice-Président. Maigret Trésorier ' '^ T^ ■ ! Secrétaires Georges Douine ) 'gi"^ Huillard 1 G . Lemaitre [ Membres A. Ponnier * Assistent en outre à la réunion : MM. J. Dybowski, inspecteur général de l'Agriculture coloniale. Yves Henry, inspecteur général de l'Agriculture de l'Afrique occidentale. R. S. Carmichael, président de l'Union des Syndicats patronaux des Industries textiles. David-Mennet, président de la Chambre syndicale des Tissus. J. Le Blan, président du Syndicat des fdateurs et retordeurs de coton de Lille. Ferdinand Roy, trésorier de l'Union des Syndicats patronaux des Industries textiles. Gustave Roy, industriel. Jaubert, administrateur-délégué de l'Association de l'Industrie et de l'Agricul- ture françaises . P. Du Maroussem, délégué de 'Union des Syndicats patronaux textiles. Georgeot, secrétaire de l'Association de l'Industrie et de l'Agriculture fran- çaises. Marande, administrateur-délégué de la Société cotonnière du Havre. Suzor, administrateur de la Société française des cotons à coudre. Gallois, membre de l'Union coloniale française. Kuhwarth, secrétaire de la réunion. 476 CO.NFKItKNCFS M. le PrésidtMit rappelle que M. DyhoNvski, au cours de la conférence qu'il fit le 21 décembre dernier, avait annoncé qu'une mission spéciale pour l'étude du coton, à la tête de laquelle se trou- vait M. Yves Henry, allait partir au Soudan. Cette mission étant de retour, M. Dybowski a exprimé le désir de présenter M. Yves Henry à notre Comité. M. le Président donne la parole à M. Dybowski. M. Dybowski, inspecteur ji^énéral de IWgriculture coloniale, déclare que l'administration a préparé depuis loni^i-temps la culture du coton dans les Colonies françaises; qu'à cet etl'et, M. Yves Henry fut envoyé en mission en Amérique, qu'il est, j^ar conséquent, très au courant de la question. Sans vouloir s'étendre plus lons^uement sur ce point, il expose qu'il était nécessaire d'aller étudier sur place les conditions les plus favorables à la culture du coton, afin de se rendre compte de quels côtés on pourrait la vulgariser en Afrique Occidentale. Il n'est pas inditrérent, en elfet, de choisir telles ou telles situations climaté- riques. On savait bien que le coton poussait au Soudan, non pas spontanément, mais à l'état demi-spontané; néanmoins il y avait intérêt à savoir quelle race devrait être adaptée au pays, en mettant à profit les résultats qu'auraient donnés les essais tentés avec les graines que M. Yves Henry avait rappprtées des Etats-Unis. Mal- heureusement ces essais n'ont pas été partout satisfaisants, et s'ils sont parfois restés sans effet, cela tient à ce que les services ag-ri- coles n'étaient pas encore suffisamment bien organisés. Ces expé- riences n'ont donc pas atteint le but qu'on se proposait, mais il n'en sera plus de même dans l'avenir, car la réorganisation de la colonie qui vient d'être parachevée aboutira à une solution définitive sous l'impulsion de M. Roume, gouverneur général de rAfri(|ue Occidentale. Des stations nouvelles seront créées où des essais mélho- (li([ues seront recommencés, et le manque de direction, auquel on attri]:)uait la stérilité de nos efforts, ne subsistera plus. M. Dybowski termine en disant que M. Yves Henry, à qui incom- bera désormais le soin d'assurer le fonctionnement de ces services, va communiquei- au Comité ce qu'il a pu voir, émettre son opinion sur la culture du coton au Sénégal et au Soudan, et sur les variétés qu'il conviendra de propager; il dira enfin ((uel est l'avenir réservé au coton au point de vue économique. M. le Président remercie M. Dvbowski de ces déclarations et LA QUESTION COTONiMÈRË 477 invite M. Yves Henry, inspecteur de l'Agriculture en Afrique Occidentale, à prendre la parole sur la question cotonnière au Séné- gal et au Soudan. M. Yves Henry explique que la première partie de sa mission s'est passée aux Etats-Unis à faire des recherches scientifiques, et que la deuxième partie, qui cadrait avec la mission organisée en 1898 par M. le général de Trentinian, a été consacrée en Afrique Occidentale à poursuivre l'étude des matériaux qu'il avait rapportés. Il n'a pas l'intention de raconter les différentes phases de son der- nier voyage, mais de donner son opinion sur la mise en valeur de ces territoires et surtout du Soudan. Envisageant d'abord la question technique au point de vue agri- cole, il indique que l'on pourra produire autant que l'on voudra et que le problème qui se pose est de connaître les variétés de coton qu'il faudra propager. Le coton indigène actuel est court, laineux, assez résistant, et peut être utilisé pour faire des filés, des numéros 0 à oO, mais il est certain qu'on pourra l'améliorer par des sélec- tions attentives et par l'introduction de races nouvelles. La pre- mière idée a été de faire des essais sur des sortes, telles que le Sea Island, le Géorgie, l'Abassi, le Mit Afîfi, qui se vendent le plus cher sur le marché. Néanmoins on n'aurait pas fait ces tentatives si l'on avait considéré que ces variétés doivent être cultivées dans le voisi- nage de la mer et soumises à l'action de l'air salin, conditions qui ne sont plus remplies lorsqu'on s'éloigne de la cote, ce qui est le cas au Soudan. M. Yves Henry estime qu'on ne pourra introduire, avec succès, dans ces contrées des qualités à longue soie et que dans des régions comme le Sénégal, le Soudan, la Guinée il faudra s'adresser k des cotons de 34 millimètres environ, cotons américains qui sont d ailleurs les plus répandus. M. Yves Henry ne croit pas que cette culture puisse se faire par les colons européens directement et pense préférable d'engager les indigènes à récolter la plus grande quantité de coton possible. Ensuite on arrivera peu à peu à leur faire réussir une qualité meil- leure que celle qu'ils produisent. Lorsqu'on aura beaucoup étudié et qu'un courant sera établi, alors seulement il sera possible d'en- treprendre de grosses exploitations. Aujourd'hui, il serait difficile de donner un devis approximatif des dépenses à faire, car une culture directe serait forcément grevée de frais considérables. C'est entre les mains des indigènes qu'il faut laisser cette culture, puisqu'ils Bulletin du Jardin colonial. 31 478 CONFÉRENCES récoltent déjà une quantité de coton importante, qu'ils utilisent à tis- ser des étoffes pour leur consommation, et dont une partie même est exportée. M. Yves Henry, sur la demande de M. Jaubert, définit la région cotonnière delà vallée du Niger, entre Koulikoro et le cercle de Dienné. Il expose ensuite qu'au point de vue cultural on est étonné de trouver des cotonniers à l'état d'arbres; en elïet, les noirs ne se soucient pas d'arracher les pieds aussi longtemps qu'ils fournissent du coton. Dès qu'on ferait une culture directe, elle devrait être annuelle, car il est bien connu qu'à 2 ou 3 ans les soies produites sont de moindre valeur. S'ils sont certains que leur coton sera acheté régulièrement, les indigènes amélioreront en peu de temps leurs procédés de culture, surtout s'ils voient refuser le produit des pieds de cotonniers qui seraient trop vieux. Après avoir décrit la manière dont les indigènes égrènent le coton, M. Yves Henry rappelle que M. le général de Trentinian avait fait venir à Kayes des égreneuses à rouleaux, dont le principe est excel- lent pour éviter que la fibre soit déchirée, mais qui ne sont pas appro- priées aux cotons à courtes soies dont l'adhérence des fibres à la graine est plus forte et nécessite un travail industriel plus puissant. En Amérique, ces variétés sont travaillées avec des machines à scies. Pour le coton actuellement produit, dont l'adhérence des fibres à la graine est considérable, les machines à rouleaux à double action qu'on avait installées à Kayes n'étaient pas suffisantes ; il est pro- bable qu'on aura augmenté la vitesse, et il en est résulté un très mauvais travail. Une certaine quantité de coton fut néanmoins transportée au Havre et vendue 50 fr. environ les 50 kilos. Ces égre- neuses avaient été conduites par un officier du génie, qui n'était pas expérimenté, mais il est certain que, profitant des enseignements de la première tentative d'égrenage, un deuxième essai donnerait toute satisfaction. M. Yves Henry dit qu'il a fait acheter du coton, au cours de son voyage. Dans les conditions les plus défavorables, il a payé le prix moyen de 15 à 20 centimes le kilo non égrené. En supposant un rendement minimum de 25 "/„ du poids total, cela met le coton égrené à 80 centimes le kilo, soit 80 francs les 100 kilos. Il rappelle qu'en 1899 le coton, quoique taché, ayant perdu par conséquent une LA QLESTIO> COTONNIÈRE 479 grande partie de sa valeur marchande, avait été vendu 50 francs les oO kilos au Havre. D'autre part, considérant un coton récolté dans la région la plus éloignée, c'est-à-dire celle de Dienné, il communique les différents pris de transport de ce point extrême en France : De la région de Dienné à Koulikouro, par le Niger l i tr. la tonne De Koulikoro k Kayes, par chemin de fer 14 « » De Kaves en France (Le Havre) 65 » » Ensemble 93 » » Soit 9 fr. 30 les 100 kilos M. Lemaître, comme M. G. Roy, insiste sur la nécessité d'appro- fondir la question des frais de transport qui leur paraissent peu élevés. M. Yves Henry fait observer que les prix qu'il a donnés sont exacts et fournit quelques explications. Les nègres apportant eux- mêmes leur coton au centre d'achat, les frais de transport sur le Niger ne sont à calculer que du centre le plus distant de Koulikoro comme maximum. Conformément au cahier des charges, le tarif de 14 francs sera applicable lorsque le chemin de fer sera achevé. Enfin, le fret indiqué de Kayes en France est celui qui fut payé lors de l'envoi fait par le général de Trentinian, mais il est certain qu'à l'heure actuelle on pourrait obtenir d'une Compagnie maritime une très forte diminution, à condition toutefois de charger au moins la moitié du bateau. En définitive, le chiffre total de 9 fr. 30 les 100 kilos est un maximum. Si nos vues se portent sur le Saloum. les frais seront encore réduits, car le fret a considérablement baissé. Quant à la navigabi- lité du Sénégal, M. Yves Henry déclare qu'elle est en bonne con- cordance avec l'époque de la récolte du coton. M. David-Mennet estime qu'il n'y a pas de raisons pour qu'on produise plus cher qu'en Amérique, et après lui M. G. Roy demande s'il n'y a pas à redouter des désastres sérieux par les invasions de sauterelles. M. Yves Henry répond qu'il n'y a guère que la région du Fouta- Djalon qui soit dévastée, et M. Dybowski expose que les oasis n'ont jamais à souffrir de ce fléau, car l'éclosion de ces insectes se fait en terres sèches. L'invasion se dirige toujours de la région saha- 480 CU.NFÉKEiNCES rienne vers la côte; ils partent en petit nombre et se multiplient par étapes successives. Comme la réf^ion cotonnière est voisine du point de départ, elle n'aurait à supporter que le passage de très petits vols dont les dégâts seraiejit insigniliants. En Egypte, on enregistre de grandes invasions toutes les 6 ou 7 années, mais comme en Tunisie les désastres ne sont pas très graves; elles ne coûtent plus fort cher maintenant qu'on sait les combattre. M. G. Roy s'informe ensuite si le climat du Soudan est à peu près le même qu'à la Louisiane et si la Gasamance, dont il montre les avantages au point de vue géographique, ne conviendrait pas à la culture du coton. Pour la première de ces questions, M. Yves Henry affirme que les saisons sont mieux tranchées au Soudan qu'en Amérique, car aux pluies qui durent de 4 à 5 mois succède une sécheresse complète. 11 ne se prononce pas en ce qui concerne lu Gasamance, mais il cite qu'on a fait des essais au Fouta-Djalon qui ne furent pas très satisfaisants, car vers la côte la saison des pluies est ti*op longue, la capsule est mouillée et le coton pourrit. Cependant rien ne dit qu'on n'arriverait pas à améliorer la culture. Peut-être serait-il pos- sible de créer un centre cotonnier dans la Gasamance où l'on aurait l'avantage d'avoir des frais de transport moindres. Il est d'avis qu'on pourrait cultiver le coton dans la région com- prise entre la Gasamance et Dakar. Dans le Bas-Sénégal il y aurait des irrigations à faire. Le gouverneur général s'en occupe pour faciliter l'entreprise de la culture du coton ; cette région deviendrait ainsi une petite Egypte et on pourrait espérer y cultiver des variétés à longues soies. M. le Président signale l'exemple des Allemands, au Togo; des Anglais, au Lagos, et appelle l'attention sur le Dahomey qui se trouve entre ces deux régions. M. Yves Henry fait remarquer que nos voisins se sont heurtés aux mêmes difficultés cpie nous, et M. Dybowski ajoute qu'ils ont d'al)ord tenté leurs essais dans une région côtière, (ju'ils n'ont pas réussi et les ont déjà reportés dans une région plus haute. Il se buteront donc aux mêmes inconvénients de la création de voies de transport, mais ils ne désarment pas, et notamment le Comité de Berlin, qui est très riche, s'est montré désireux d'étudier la question et de poursuivre de nouvelles tentatives en collaboration avec nous. LA QUESTION COTONNIÈRE 481 Les Anglais n'ont pas été bien inspirés dans leurs entreprises, ils ont installé des noirs d'Amérique et fait transporter des appareils et des matériaux avant même de s'être rendu bien compte de la nature du sol. Il se dég-ag-e de ces expériences, et nous sommes tous d'accord sur ce point, c'est que le véritable territoire propice à la culture du coton est entre nos mains et non dans celles de l'étranger. Cependant, M. Dybowski ne pense pas que notre Guinée et la Gasa- mance qui sont des contrées côtières et forestières donneraient de bons résultats. On a vu, en effet, les Allemands s'éloig-ner de la côte pour faire leurs essais dans l'intérieur des terres; ils devront créer des chemins de fer et il faudra les alimenter. Gertainement on peut prédire que le coton jouera un g-rand rôle dans l'avenir du Sou- dan, quand le Sénégal sera relié au Niger, tout en laissant une marge assez large pour d'autres plantes textiles. Il est temps tou- tefois de préparer la réalisation de ce problème, et c'est pourquoi il a été institué une station spéciale à Koulikoro pour faire des essais méthodiques. On peut promettre qu'avant l'achèvement du chemin de fer ils auront donné des résultats sérieux. M. Yver demande si on pourra faire des cotons genre Louisiane. M. Yves Henry répond affirmativement, et M. Dybowski démontre qu'à l'examen du coton du Soudan on constate de belles qualités à côté de mauvaises. Ce manque d'homogénéité tient à ce que dans certains endroits la culture a subi une préparation qu'elle n'a pas eu dans d'autres. Il est évident qu'on obtiendra des améliorations de la part des noirs, et si l'on considère à quels résultats on est arrivé avec les arachides on peut espérer qu'il en sera de même pour le coton. En ce qui concerne la question des engrais, M. Dybowski estime qu'il n'y a pas lieu de s'en préoccuper maintenant, en raison de la superficie immense du Soudan. Les noirs font le lougan dans un endroit puis dans un autre, c'est-à-dire qu'ils déplacent leurs cultures ; ils pourront continuer cette coutume. M. Dybowski insiste sur la nécessité de laisser la culture du coton aux indigènes. Quant aux prix d'achat ils sauront se contenter de ce qu'on voudra leur donner et cultiveront quand même du moment qu'on leur achètera régulièrement leur récolte. Il termine en expo- sant que les commerçants devraient avoir des factoreries pour ache- ter le coton non égrené et l'égrener eux-mêmes. L'opération de l'égre- nage paraît impossible aux nu\ins des indigènes. A une observation de M. le Président que la vente des graines 482 CONFÉRENCES viendrait sensiblement diminuer les frais, M. Yves Henrv dit que que c'est intentionnellement qu'il n'en a pas parlé, car il faut comp- ter qu'elle compense les frais d'égrenage dont il n'a pas tenu compte dans son prix de revient. Il insiste sur ce point que dans son exposé il a envisagé les conditions les plus défavorables et les rendements les plus mauvais. Il émet l'opinion (juaprès ce premier examen il y a lieu de continuer les essais. M. G. Roy croit qu'il serait bon de faire une tentative d'abord sur la côte et plus tard dans l'intérieur des terres. M. Yves Henry expli(jue que c'est la conclusion à la([uelle il vou- lait arriver. Essayer en premier lieu dans les régions du Sine et du Saloum, afin d'avoir une indication précise sur les variétés à intro- duire et sur les machines à égrener que l'on devra employer. M. Le Blanc demande quelle serait approximativement la super- ficie de la région cotonnière au Soudan. M. Yves Henry répond qu'il est difficile de donner une apprécia- tion exacte, par suite des variations noml^reuses de la largeur de la vallée du Niger, qui n'offre à certains endroits qu'une étendue de trois kilomètres, alors qu'elle atteint dans d'autres 80 kilomètres. Quant à la longueur on peut l'évaluer h (iOO kilomètres environ. M. le Président remercie, au nom du Comité du Syndicat général de l'Industrie cotonnière française, MM. Dybowski et Yves Henry de leurs intéressantes communications, et déclare qu'il ressort de cette conférence que le moment est venu de poursuivre la formation d'une association pour le développement de la culture du coton dans nos Colonies. M. Dybowski donne l'assurance qu'il fera tout ce qui dépendra de lui pour tenir l'Association au courant des essais que l'adminis- tration a l'intention de continuer. NOTES CACAO PENOX DE LA SIERRA-NEVADA DE SAINTE-MARTHE Les qualités de cet arbre précieux, a)3pelé c Penon » par Godefrov- Lebœuf, du nom de la personne qui la première le lui montra, nous incitent à nous occuper ici des travaux de Thomson et de Godefroy- Le])œuf sur ce cacao sauvage. Thomson avant son excursion à la Sierra avait fortement recommandé au gouvernement de Colombie l'introduction des graines de cacao de la Trinité pour améliorer les plantations dégénérées du Centre de la Piépublique, mais après, il eut à modifier son opinion, au point que son rapport aux parle- ments anglais dit que le cacaotier sauvage de Sainte-Marthe est par excellence l'espèce que l'on doit cultiver dans toute la Colombie. M. Thomson est un explorateur très au courant des cultures tropicales, et M. Penon un cultivateur si convaincu des avan- tages du cacao sauvage, qu'après avoir visité les cultures les plus réputées de la Trinité il n'a pas hésité à multiplier le cacao sauvage à l'exclusion de tout autre ; son exemple a été suivi par plusieurs planteurs, qui, après les premières ventes k Paris et au Havre, ont renoncé aux autres variétés locales ou importées. Pour le planteur qui commence, et ne peut faire de grosses dépenses d'installation de locaux et d'appareil perfectionnés, et qui, limité par les fonds, ne peut offrir sur les marchés qu'une sorte inférieure, le cacao Penon offre des avantages inestimables, parce que, préparé par les procédés les plus rudimentaires, son produit est classé parmi les plus estimés dont la préparation a coûté des frais énormes. Le cacaotier Penon se trouve, à partir d'une altitude de 100 mètres jusqu'à lOiO mètres, toujours donnant un produit excellent et abondant. La température moyenne en ces lieux élevés baisse suffisamment pour qu'elle soit propice au cacao commun. Cette 484 NOTES constatation augmente la zone de culture du cacao Penon et permet d'autres cultures, car le Penon nest pas une plante exigeante. A 100 mètres, le cacao Penon pousse sans le moindre ombrage. A cette hauteur l'ombre peut même lui être préjudicialile, et dans le cas d'une plantation mixte de cacao et de café, lombre projetée par le cacaotier sauvag-e peut suffire au café. Le planteur doit préférer aux arbres qui n'ont d'autre utilité que de donner de l'ombre, ceux qui peuvent en même temps donner un produit rémunérateur qui puisse compenser le cas échéant une mauvaise récolte de cacao. Le cacao sauvage n'exige pas une ond)re épaisse. Tous les deux mètres un arbre portant un feuillage peu épais est suffisant. L'arbre caucho (caoutchouc) est particulièrement recommandable dans les terrains bas, et le Manihot Glaziovii ou le caucho de ceara font bien. On peut planter un ceara tous les six mètres et un cacaotier au milieu, et séparer chaque rang de cette plantation morte par un rang de cacaotiers seuls, plantés à trois mètres de distance l'un de l'autre, et à trois mètres de la file mixte. L'Hevea, ou caoutchouc du Para, exige un climat très chaud et humide, de même que le castilloa, ou caoutchouc de Panama. Pour les planter avec le cacao, il faudrait une distance de 12 mètres, en mettant trois plants de cacao entre chaque hevca ou castilloa, et séparant chacun de ces rangs par trois rangs de cacaotiers, de manière que les arbres à ombre soient tous à 1 2 mètres les uns des autres. Pendant les premières années, quand les cacaotiers et caout- choucs sont jeunes, on peut planter entre eux des bananiers, yucas, plantes à essence, de croissance rapide, et de facile manipulation. Quand les cacaotiers et caoutchoutiers grandissent et rendent impo-s- sibles les cultures intercalaires, le planteur commence à récolter les premiers fruits du cacao, ensuite quand la production de ceux-ci sera terminée, il vendra les produits du caoutchouc. Le cacao Pénon pousse spontanément dans ces zones immenses, entre Diego et Trienta (100 milles), dont la valeur est ignorée. 11 constitue, sans doute, le Theobroma type de ces régions. A l'ombre de grands arbres de 80 pieds de haut et de cinq à six de diamètre, le cacaotier présente un aspect très différent de son con- génère cultivé. L'adulte atteint 3.^) à 45 pieds de haut, avec im tronc mince, sans branches jusqu'à quelques pieds de la cime. Le tronc est lisse comme celui d'un palmier^ et les fruits se trouvent entre les CACAO PENON 485 branches. Sous les arbres en pleine vigueur, se trouvent des cen- taines de plants de taille différente. L'ombre est alors excessive et ces plantes ont encore à lutter contre les mille espèces qui consti- tuent le sous-bois tropical. Le produit est très variable. Les arbres les mieux placés donnent jusqu'à 12 livres de cacao préparé. La couleur est peu variée, jaune généralement et quelquefois rou^eàtre. Les grains coupés pré- sentent une section parfaitement blanche. Toutes appartiennent à une espèce unique, fait très intéressant pour le planteur, à cause de l'avantage d'une fermentation uniforme. Plusieurs essais ont été tentés pour faire une culture régulière de ces arbres. Les premiers ont été faits k Lalania il y a longtemps. On s'était borné à la suppression du sous-bois épais qui entoure les cacaotiers, et à couper tous les deux ans les broussailles nouvelles. Les résultats ne peuvent être considérés comme bons, car le plus grand obstacle à la vigueur de la plante est l'ombre excessive. Cependant on a obtenu ainsi quelques indications utiles. Le procédé adopté en Lalania a été de supprimer le sous-bois en laissant les grands arbres. On a essayé aussi de planter de la vigne là où le cacao manquait, et de couper la cime des arbres moyens pour les faire ramifier à une hauteur convenable ; mais, dit Thomson, malgré ces essais, il est impossible d'admettre que les arbres qui ont surgi dans la forêt vierge peuvent être amenés à un état de produc- tion satisfaisante, comme c'est le cas pour les cacaotiers cultivés. Appelé à donner mon opinion, j'ai seulement indiqué la destruction de quelques grands arbres, à distance régularisée, pour donner plus de lumière. Il n'est pas douteux qu'un peu plus' de lumière améliore les résultats; mais les plus grands avantages dépendent de l'établis- sement rationnel des plantations. On sait que le cacaotier cultivé aime l'ombre ; cependant en quelques circonstances la protection contre le soleil n'est pas indispensable. Le cultivateur doit cher- cher une ombre moyenne. A la Trinité, dont on exporte 20.000.000 livres par an, on cultive à cette fin deux espèces (Y Erythrina, en plantant les arbres à une grande distance. Le fruit de cette espèce est plus petit et tout à fait différçnt des types plus allongés de CrioUo et Forastero, variétés plus estimées à la Trinité et au Venezuela. Bien que les fruits de la nouvelle espèce soient plus petits que ceux des espèces bien cultivées, il faut remar- quer qu'ils ont les grains plus gros et mieux disposés, de sorte 486 NOTES qu'avec dix à onze fruits ou a une livre de cacao préparé. La compa- raison avec le cacao de la Trinité est probante. Les f>rains, pulpe etc., d'un fruit de la Trinité pèse quatre onces et la pulpe qui entoure les grains pèse autant que ceux-ci, tandis que ceux de Sainte-Marthe pèsent trois onces au lieu de deux. De sorte que le cacaotier sau- vage a le fruit plus petit mais d'un plus grand rendement. De plus, la pulpe, inutile, est une source d'inconvénients pour le planteur, parce qu'il ne peut pas la séparer par le lavage avant la fermenta- tion, et même après on l'enlève difficilement. Ces qualités : fruits plus petits et plus pleins, conséquence de la diminution de matières perdues, font que le plant sauvage, dans le domaine pratique et physiologique, peut donner de meilleures récoltes que les variétés cultivées, d'où il d'écoulé l'utilité de la propagation et de l'établisse- ment de plantations avec le cacao Penon ; on sait que sur les mar- chés européens on tient compte de la coloration et de la consistance de Famande, d'oîi la grande importance que l'on donne à la fermen- tation, à la Trinité et dans les autres pays de production. D'autre part, la méthode de préparation au pied de la Sierra Nevada est très pri- mitive, comparée au .s3^stème employé à la Trinité. Malgré cela, le cacao sauvage a été placé, sur la place de Paris, au même rang que les meilleures sortes de cacaos. La culture du cacao est certainement une source de fortune pour le planteur, même pour les pays qui n'ont pas de terrains au bord des fleuves, où il y a une grande épaisseur de dépots fluviaux faciles à drainer. La Colombie, non seulement possède des terrains favo- rables mais encore des sols de qualité supérieure, tels que ceux que l'on trouve au pied de la Sierra de Sainte-Marthe. Janvier 1902. J.-J. Serrano, Consul de Colombie à Southamplon. CONSERVATION DE LA FACULTÉ GERMINATIVE DES GRAINES DE CACAOYER Nous avons déjà eu l'occasion d'indiquer un moyen qui permet de conserver pendant un temps assez long, deux mois et plus, la faculté germinative des graines de cacaoyer i. Ce moyen consiste à recouvrir la surface des cabosses de cacao d'une couche continue de paraffine, épaisse d'environ 2 millimètres? pour mettre les graines à l'abri de l'oxj'dation qui ne manque pas de se produire assez rapidement à l'état normal, sous l'influence de l'oxygène de l'air, de la lumière et de l'humidité. Or il est arrivé que dans ces derniers temps des cabosses de cacaoyers, recouvertes de paraffine, sont parvenues au Jardin Colo- nial, en partie gâtées, ])ien que la durée d'un voyage qu'elles avaient supporté n'ait guère excédé une vingtaine de jours. L'examen de ces cabosses nous a montré qu'elles avaient été paraf- finées, mais trop légèrement et probablement aussitôt après avoir été cueillies ou, en tout cas, avant qu'elles aient été bien ressuyées. Dans ce cas, en effet, la paraffine se boursoufïle, se décolle, et n'adhère pas complètement au fruit ; il s'ensuit que la protection est inefficace et que les fermentations qui ne manquent pas de se produire dans l'intérieur des fruits ont vite fait d'altérer et de faire pourrir l'embryon des graines. Nous croyons donc utile de préciser certains points de la note précitée, et de dire comment il faut employer la paraffine pour pro- téger d'une façon certaine les graines à albumen huileux comme celles des cacaoyers, des Pachyra, etc. Après avoir été détachés des arbres, il est absolument nécessaire de laisser se ressuyer à l'air, pendant deux ou trois jours, les fruits de cacaoyers, destinés à être expédiés au loin, et de ne les préparer que lorsque la surface des fruits, sur une épaisseur d'au moins 2 millimètres, aura perdu une partie de son humidité et sera deve- 1. Revue générale des sciences pures et appliquées, n" 4, 1S99, p. 127. 4»o ^■OTEs nue assez sèche. On peut alors les plon et I i). Mais, si désireux que nous soyons d'éviter les c-omplications et les pertes de temps, il n'a pas paru possible de laisser à d'autres qu'au ser- vice forestier, seul responsable, sous le contrôle de la Direction de l'.Vgri- culture et du (Commerce, le soin de délivrer le permis de coupe lui-même. Pour tenir compte du milieu et ménager les transitions, il a semblé nécessaire de prévoir la possibilité de prendre un permis de coupe pour six mois. Les permis de trois mois existent dans la législation actuelle du Tonkin. Le prix des permis de coupe est porté de 6 S (pour six mois) à 50 e( RAPPORT 507 60 $ pour un an. 11 n'y a là rien d'exorbitant. Le prix est de 140 S en Cochinchine. D'autre part, si l'on tient compte de ce fait que ce permis de coupe permet d'avoir 50 bûcherons à sa disposition (5 ateliers de 10 hommes chacun, et en supposant que ces hommes ne tra- vaillent que 200 jours par an, cela fait 10.000 journées pour 80 S ou un impôt de moins d'un cent (0 $ 008) par journée de travail. La limita- tion du nombre des bûcherons que pourra employer chaque porteur de permis est une innovation. La réglementation de Cochinchine a bien pi^évu la limitation du nombre d'arbres à l'abattage desquels donnerait droit chaque commission de bûcheron (15), mais elle a oublié de limiter le nombre de commissions de bûcherons que pourrait délivrer chaque por- teur de permis. 11 en est résulté de véritables abus. C'est ainsi qu'en 1900, 46 porteurs de permis de coupe (dont 4 Européens) ont délivré 7.498 com- missions de bûcherons. En 1901, 29 porteurs de permis de coupe (dont 5 Européens) ont déli- vré 5.101 commissions de bûcherons. Il se produit, dans certains cas qui sont venus à la connaissance du service forestier, un véritable trafic de ces commissions qui sont vendues de huit à dix piastres chacune. 11 était indispensable de corriger cet abus, et c'est ce que fait l'art. 8 du présent arrêté. La même raison a fait rendre le droit de coupe incessible et spécial au lieu pour lequel il est accordé (Art. 9). En ce qui concerne les dimensions minima d'abattage (art. 10), les chiU'res fixés par les bois d'ébénisterie, de menuiserie et de charpente — 1 ™ 20 de circonférence au petit bout pour les bois en grume et 0 ™ 30 d'équarissage — sont ceux à partir desquels une exploitation devient réelle- ment rémunératrice et un arbre abattu véritablement" marchand ». Les dimensions usitées en fait sont d'ailleurs généralement supérieures, ainsi qu'ont permis de le constater des vérifications faites sous mes yeux en forêt et une simple visite au marché des bois en grume à Hanoï. Pour les bois d'essences secondaires (bois de feu et de charbon), la dimension minima est fixée à 0 "* 60 de circonférence au petit bout. Enfin des autorisations spéciales de coupes de bois de moindres dimen- sions pourront être accordées par le service forestier pour les usages spé- ciaux : pilotis, colonnes, etc.. (Art. 7). Les redevances à payer ont été fixées par l'article 12, suivant des caté- gories entre lesquelles une classification provisoire et révisable des bois a été faite. Le montant de ces redevances est modéré, elle est de 3 S par mètre cube pour les bois de la première catégorie. Or, deux des plus répandues de ces essences, le Gû, ou Go, et le Lin valent de 30 à 35 $ le mètre cube, et quelques-unes, comme le Trac, atteignent de 40 à 50 $ à Hanoï. La redevance est une moyenne de 10 "/o de la valeur du produit sur les 508 DOCUMENTS OFFICIELS marchés de consommation. La taxe de flottage ajoute un maximum de 0 S 50 par mètre cube, et elle descend jusqu'à 0 S 15 pour les bois com- muns, l'^ii Cochinchine, d'ailleurs les essences hors classe (qui corres- pondent à la première classe de la classification du Tonkin) payent 5 S par mètre cube. C'est cette même proportion de 10 «/,^ de la valeur marchande qui est appliquée pour les autres catégories de bois d'ébénisterie et de charpente. Pour les bois à brûler débités, dont la valeur au mètre cube est de 4 à 5 piastres, la redevance perçue n'est que de 0 S- 10. l'allé est très faible aussi sur les bambous (0 S 50 pour le cent de bambous, dit mâles, qui vaut de 5 a 7 piastres sur les lieux de production, et de 8 à 10 piastres à Hanoï, et 0 S 0-J pour le cent d'autres bambous, qui vaut 2 S 50 dans les provinces productrices, et 5S à Hanoï. Des l'éductions de 50 7o sur ces redevances peuvent être consenties pour les bois employés sur place. Cette exception se justifie par une double considération. D'abord, la valeur marchande des bois qui sert de base à la redevance est évidemment moindre sur place que sur les mar- chés de consomnation. En second lieu, il est naturel de favoriser les habitants des régions forestières qui font un emploi plus important et plus usuel de bois. Deux dispositions spéciales visent, l'une (art. 15) des mesures techniques destinées à rendre moins brutale l'exploitation des forets, l'autre (l'art. 17) à prévenir l'invasion du marché du Tonkin par les bois du Nord de l'Annam qui, en attendant une réglementation générale, ne sont pas soumis au même régime que ceux du Tonkin. Le Nord de l'An- nam a exporté en cabotage 10.000 tonnes de bois de toutes sortes sur le Tonkin l'année dernière. Enfin, sous peine de faire une œuvre sans portée pratique, il fallait assurer la répression des contraventions au présent arrêté. C'est ce que permettra de faire, en tenant compte, comme le prévoit l'article 18, de l'organisation forestière particulière au pays, la promulgation au Tonkin du décret du 0 janvier 1895 et de ses annexes des 1 septembre et novembre de la même année. Son application au Cambodge, par un arrêté du 11 avril 1809, n'a suscité aucune difficulté. L'arrêté du '2'.i juin 1894 portant réorganisation du service forestier en Cochinchine, qui est égale- ment rendu applicable au Tonkin, contient, sous la même réserve, diverses dispositions utiles, notamment sur la vérification des bois abat- tus, dont il a paru indispensable d'assurer le bénéfice à l'organisation forestière tonkinoise. Une disposition spéciale (art. 15) prévoit la création de réserves fores- tières dans lesquelles un droit d'exploitation sera donné sous forme de privilège exclusif de coupe, avec charges imposées et avantages corres- ARRÊTÉ 509 pondants assurés aux exploitants. Le service forestier attend les meilleurs résultats de ce mode d'opération, qui sera prochainement étendu à toute rindo-Chine Telle est, en résumé, la réglementation proposée. Tout en sauvegardant dans la mesure du possible une richesse naturelle dont la dilapidation n'est pas seulement une perte sèche pour la fortune publique, mais a des réper- cussions indirectes désastreuses, tout en assurant à la colonie la rémunéra- tion modérée mais nécessaire des produits qu'elle détient dans l'intérêt général et qu'elle vend dans ce même intérêt, l'arrêté proposé crée un régime suffisamment souple, précis, et en même temps libéral, nous l'es- pérons du moins, pour que, l'urgence nous pressant d'autre part, et les diverses administrations intéressées l'ayant approuvé, je vous demande avec instance de vouloir bien le revêtir de votre signature après qu'il aura été soumis à la Commission permanente du Conseil supérieur. Hanoï, le 20 mai 1902. Pour le Directeur de l'Agriculture et du Commerce de l'Indo-Chine absent, Le Sous-Directeur, Brenier. ARRÊTÉ Le Gouverneur Général de l'Indo-Ghine, p. i., Vu le décret du 21 avril 1891 ; Vu ensemble les arrêtés des 20 février 1888, 31 août 1890, l"'' mai 1892, 23 décembre 1894, 21 décembre 1895 et 1" juin 1897, relatifs à la régle- mentation forestière au Tonkin ; Vu l'arrêté du 23 juin 1894, portant réorganisation du service forestier en Cochinchine ; Vu le décret de juin 1895, relatif aux pénalités en matière forestière, applicable en Cochinchine et au Cambodge, et ses annexes des 4 sep- tembre et 9 novembre de la même année ; Vu l'arrêté du 13 septembre 1899, établissant en Indo-Chine une taxe sur les bois flottés et radeaux ; Vu le décret du 7 février 1901, créant un service forestier rattaché à la Direction de l'Agriculture et du Commerce de l'hido-Chine ; Sur la proposition du Directeur de l'Agriculture et du Commerce, et l'avis conforme du Résident supérieur au Tonkin et du général comman- dant en chef les troupes de l'Indo-Chine, La commission permanente du Conseil supérieur de l'Indo-Chine entendue. Arrête : Article 1'''. — \e peuvent se livrer à l'exploitation des produits des forêts au Tonkin que les Français et les sujets et protégés français. olO DOCUMENTS OFFICIELS Exceptionnellement, pourront être admis à cette exploitation les étran- gers demeurant au Tonkin et y acquittant régulièrement les charges com- munales et autres. AuT. 2. — Toute personne qui désire se livrer, en dehors des massifs réservés prévus à l'article 16 du présent arrêté, à l'exploitation des bois d'essences classées, soit pour son usage personnel, soit pour en faire le commerce, devra en faire la demande sur papier timbré. Cette demande peut être adressée soit directement aux agents du ser- vice forestier, soit, dans les provinces où il n'en existe pas, aux chefs de provinces et de territoires, ou à leurs délégués désignés à cet effet. Ceux-ci acceptent ou refusent la demande, sauf recours de l'intéressé, à la Direction de l'Agriculture et du Commerce. Ils mentionnent, dans le premier cas, l'acceptation sur la demande elle- même qui servira de titre de recouvrement pour le prix du permis de coupe prévu à l'article 4. Art. 3, — La demande de permis de coupe indiquera les noms, pré- noms, qualités et domicile du pétitionnaire, la nature des produits à exploiter et le lieu où doit se faire l'extraction (province, phu, huyên ou châu, territoire cercle ou secteur). Art. 4. — Le prix du permis de coupe est iîxé à cinquante piastres (.50 $) pour six mois. Il pourra être délivré pour quatre-vingts piastres (^80 S) des permis de coupes valables pour un an. Art. 5. — Exceptionnellement pourront être exemptés du permis de coupe, les services publics et les particuliers habitant les régions fores- tières qui en auront fait la demande au service forestier pour des besoins urgents et limités dont le service reste juge. Cette demande peut être adressée sur papier libre, mais elle contiendra les mêmes indications que la demande visée à l'article 3. Art. 6. — Les prix visés à l'art. 4 sont payables d'avance, tant aux caisses du Trésor qu'entre les mains des fonctionnaires des Douanes et Régies, et le Directeur de l'Agriculture et du Commerce. Le paiement a lieu, au vu de l'autorisation visée à l'article 2, contre délivrance d'une quittance détachée d'un registre à souche. Art. 7. —Au vu de cette quittance, les agents du service forestier, dési- gnés à cet effet, délivrent le permis découpe. Ce permis rappelle les noms, prénoms, qualités et domicile du pétitionnaire, et la nature des produits dont l'exploitation a été accordée et le lieu de l'exploitation projetée. Art. 8. — Les porteurs de permis de coupe doivent en même temps (piils l'obtiennent, ou par la suite et avant tout travail d'exploitation, faire commissionner par le service forestier le ou les ateliers de bûcherons qnils désirent employer. Chaque atelier ne pourra pas comprendre plus ARRETE 511 de dix hommes, et chaque permis de coupe ne donnera droit qu'à cinq ateliers. Les noms des bûcherons employés figureront sur la commission. Art. 9. — Le droit que donne le permis de coupe ou l'autorisation gra- tuite visée à l'article 5 est personnel, incessible, sauf consentement du ser- vice forestier, et ne peut être exercé que dans le lieu pour lequel il a été demandé et délivré. Art. 10. — Aucun arbre destiné à donner des bois d'ébénisterie, de menuiserie ou de charpente ne peut être abattu s'il n'a au moins l"» "20 de circonférence au petit bout. Les pièces de bois équarries ne seront accep- tées à la vérification que si elles ont au minimum 0"' 30 d'équarrissage sur la plus grande de leurs faces. Pour les bois d'essences secondaires, exploités hors des réserves fores- tières et destinés à donner des bois de feu ou de charbon, les tiges à abattre ne devront pas avoir moins de 0"'60 de circonférence au petit bout. Art. 11. — Des autorisations spéciales de coupe pourront être accor- dées par le service forestier, dans le cas de demandes faites pour des usages spéciaux nécessitant des bois de moindres dimensions. Art. 12. — Les redevances à percevoir comme prix de vente des pro- duits du domaine forestier sont fixées ainsi qu'il suit. Une classification provisoire et révisable des bois des trois premières catégories est jointe au présent arrêté. — - DÉSIGNATION MONTANT bt t, UNITE DE I,A OBSERVATIONS "S -G DES PRODUITS REDEVANCE Bois d'ébénisterie provenant Les pièces de bois des 1 des essences précieuses spéciales Bois de construction et de mètre cub"" 3S00 trois premières caté- g:ories ayant au mi- 2 menuiserie ~ 2.00 nimum la circonfé- 3 Bois ordinaire d'industrie. _ 1.00 rence exigée et me- Bois à brûler en j^^rume. — 0.20 surant plus de 8 mè- 4 — — débités. stère 0.10 tres de longueur. 5 Charbons de bois. quintal 0.10 ainsi que les bois 6 A. Bambous dits mâle. (Construction). le cent 0.50 destinés à être em- ployés dans le can- B. Tous autres bambous. — 0.02 ton ou le secteur de Tous autres Ijois, produits mesure 2 "/„ de la l'exploitation ne ' bruts ou manufacturés non en usafïe valeur paieront que la moi- 7 désignés ci-dessus et pro- venant du domaine fores- suivant les marchande au point de tié de la redevance tier. cas. \ éritication. applicable. 512 DOCIMENTS OFFICIELS Aht. 13. — La perception du montant clos redevances, des amendes encourues et des transactions accordées esi faite par les aj^ents du Trésor, par ceux des Douanes et Régies, et les agents du service des i'oréts. Art. I i. — Outre les agents du service des forêts, ont qualité pour constater les contraventions en matière forestière les .Aidministrateurs et Commandants de cercle ou leurs délégués, ainsi que les agents des Douanes et Régies, et les Inspecteurs et gardes principaux de la garde indigène, désignés à cet elFet par décisions spéciales. .Akt. 15. — Les arbres doivent être exploités, autant que faire se peut, au ras du sol, et les souches recouvertes de terre. L'usage du feu est abso- lument interdit comme moyen de débroussaillement ou d'exploitation. Art. 16. — Sur la proposition du service forestier, le Directeur de rAgricuUurc et du Commerce pourra créer, après enquête etenteiile avec l'Administration locale, des réserves forestières dans lesquels le droit d'ex- ploitation sera donné sous forme de privilège exclusif de coupe. Art. 17. — Les bois de TAnnam ne pourront être importés au Tonkin s'ils n'ont au moins les dimensions exigées dans ce dernier pays pour les bois de même essence de provenance locale. A leur entrée au Tonkin, ces bois seront soumis aux mêmes vérifica- tions que les bois de provenance locale, et évalués selon le même tarif, déduction faite des redevances qui auraient déjà été perçues par applica- tion de prescriptions spéciales à l'Annam. Art. 18; — Sont rendus applicables au Tonkin, en ce qu'ils ont de com- patible avec l'organisation forestière du pays et les dispositions du pré- sent arrêté, les décrets des 9 janvier 1895, 4 septembre et 9 no\ embre de la même année, relatifs aux pénalités en matière forestière, et l'arrêté du 23 juin 1894 portant réorganisation du service forestier en Cochinchine. Art. 19. — Toutes dispositions antérieures applicables au Tonkin, con- traires au présent arrêté, sont et demeurent abrogées. Aht. '20. — Le Directeur de l'Agriculture et du Commerce de Tlndo- Chine, le Résident Supérieur au Tonkin, le général commandant en chef des troupes de l'Indo-Chine et le Directeur des Douanes et Régies sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Hanoï, le 3 juin 1902. Bru.m. Par le (iouverneur général. Le Bèsiflenl Supérieur au Tonkin, J. FuURKS. Pour le Directeur de l'Agriculture et du Commerce de F Indo-Chine absent, Le Sinis-Direcleur, Rrhmeh. ARRÊTÉ 513 RAl'l'ORT AU GOUVERNEUR GENERAL Hanoï, le •_>() août 1902. Monsieur le Gouverneur g'énéral, L'arrêté du 3 juin 1902 relatif à la réglementation forestière au Tonkin prévoit clans son article 16, la création de privilèg-es de coupe en domaine forestier réservé. Ce régime nouveau sera étendu à toute l'Indo-Chine, aussitôt que le Conseil supérieur aura pu se prononcer sur lui, mais il a paru utile d'en faire une première application au Tonkin, afin de profiter, pour la rédaction du projet définitif, des modifications ou améliorations qu'une pratique partielle pourra sug-j^érer. Le service forestier est déjà saisi en effet de plusieurs demandes de colons tendant à ce que la régle- mentation projetée, dont les grandes lignes leur ont été exposées, leur soit appliquée. Le principe qui a inspiré le rédacteur du projet d'arrêté qui vous est soumië est le suivant, associer dans la plus large mesure possible les parti- culiers à l'exploitation rationnelle et rémunératrice de nos richesses boisées, sous l'inspiration technique et la haute surveillance du service forestier. 11 est de toute évidence qu'à moins de prendre un développement hors de proportion avec les ressources budgétaires de la Colonie, et de perdre en frais généraux une bonne partie des redevances qu'il percevrait par ailleurs, le Service forestier ne peut exploiter lui-même, sauf exception, le Domaine forestier. Il y a donc profit pour l'Etat à confier cette exploitation à des parti- culiers, à condition de leur fournir les règles techniques d'aménagement et de veiller à l'application de ces règles. Il a paru tout d'abord nécessaire de réserver aux Français seuls et aux sujets ou protégés français, conformément à ce qui se passe pour les con- cessions agricoles, et aussi parce qu'ils sont mieux susceptibles d'être guidés par le service technique compétent, le droit d'obtenir ces privi- lèges. Exception est cependant faite pour les villages forestiers qui existent dans certaines régions (la province de Quendyen par exemple). Ils pourront obtenir eux aussi des privilèges de coupe dans des conditions ' à déterminer, dans chaque cas, entre l'administration locale et le Service forestier. Il y a des organisations naturelles, pour ainsi dire, qu'on ne peut négliger, mais pour lesquelles il suffit de poser le principe du droit au privilège de coupe, dans des conditions variables suivant les cir- constances. Il a semblé également utile de faire de sérieux avantages à ceux qui consentiraient à se soumettre aux règles générales de la sylvi- culture interprétées par le Service forestier. La sylviculture, soit dit en 514 DOCUMENTS OFFICIELS passant science éminemment française qui, de chez nous a rayonné dans toute l'Europe, dont les Anglais se sont inspirés aux Indes (ils continuent à envoyer un certain nombre de leurs forestiers s'initier aux méthodes françaises), a des principes fondamentaux applicables dans tous les milieux, contrairement à ce que l'on croit trop souvent, les périodes d'évolution des végétaux et les règles de coupe variant seules. Les avantages faits au porteur de privilège de coupe font l'objet du litre premier et sont les suivants : P Le porteur de privilège de coupe a un droit exclusif à tous les pro- duits forestiers (arbres, arbrisseaux, résines, gommes, latex, huiles, matières fibreuses, tannifères, tinctoriales etc.), de la ou des réserves qu'il obtient en privilège, à condition de se soumettre aux règles d'exploi- tation et aux exceptions prévues par l'arrêté (art. 2 et 3). 2" Il a un droit de priorité pour obtenir pour ses bûcherons la con- cession d'après la réglementation en vigueur ou à intervenir d'une partie des terres susceptibles d'être mises en culture contenues dans sa réserve, exception faite pour les droits antérieurs des villages ou des particuliers (art. 4). Il a paru qu'il y avait là un moyen de fixer des populations spéciale- ment préparées aux travaux en forêt, pour le plus grand avantage à la fois de l'exploitant et de l'Etat. La surveillance de ce dernier s'exercerait ainsi plus facilement et il verrait mettre en valeur des terrains qui, sans cette combinaison, risque- raient de rester incultes. Dans le même but de faciliter au porteur de privilège le recrutement et la surveillance de son personnel, l'article 7 stipule que les bûcherons qu'il emploiera d'une façon permanente seront assimilés, au point de vue impôts, livrets, etc., aux travailleurs agricoles au service de colons euro- péens. Ce sera là pour lui un avantage sérieux sur les porteurs de coupe qui exploiteront en domaine forestier non réservé. Enfin, toujours à ce point de vue du personnel mis à la disposition du porteur de privilège exclusif de coupe, on assimile les gardes coupes, qu'il est tenu d'avoir aux gardes champêtres au service des colons européens (art. 17). 3" Le porteur de privilège de coupe a le droit de faire dans sa réserve tous travaux de constructions, bâtiments, etc., utiles à son exploitation, à condition d'en avertir le Service forestier (art. 5). Pour lui faciliter ces travaux, il pourra obtenir la délivrance gratuite des matériaux qui se trouveraient en forêt. Il aura même droit au rem- boursement d'une partie des dépenses faites pour l'amélioration des voies de communication (routes, canaux, barrages, etc.), dans sa réserve, yi d'autres exploitants ou des tiers sont amenés plus tard à profiter de ces ARRÊTÉ 515 améliorations dans un but commercial privé. L'article 6 entre clans des explications détaillées à ce sujet et précise bien les cas dans lesquels il a droit à cette indemnité. 4" Le porteur de privilèj^e de coupe jouit en outre d'un certain nombre d'avantages pécuniaires. Il ne paie que les 8/10'' des redevances fixées parla réglementation forestière en vigueur (art. 8). 5" Enfin le privilège de coupe est accordé par périodes renouvelables de dix années, et, en cas de décès, avant l'expiration d'une de ces périodes, les héritiers du porteur de privilège lui seront substitués de plein droit, à condition, s'ils ne sont pas présents dans la colonie, de se faire repré- ter par un mandataire spécial (art. 9 et 11). Mais si les droits du porteur de privilège sont à la fois très étendus et entourés de garanties qui en assurent une application efficace, il était impossible d'en faire des droits absolus. Les porteurs de privilège de coupe sont des exploitants privilégiés ; ils ne sont pas propriétaires du sol ni du sous-sol, et l'arrêté évite avec soin de parler de concession. Il est donc soumis à toutes réserves de droit commun (réserve des produits du sous-sol ; servitude de passage (art. 13) ou d'exploitation au profit des villages forestiers (art. 3), etc., et d'autre part, pour eux, pas plus que pour les propriétaires de concessions proprement dites, l'Ltat ne donne de garantie contre les revendications des tiers, pas plus qu'en ce qui con- cerne la valeur ou la contenance de la réserve accordée en privilège, ni aucune indemnité, en cas d'incendie, inondation ou sinistre quelconque (art. 14 et 15). D'autre part, l'article 12 est destiné à assurer un droit de contrôle efficace par l'administration, des travaux poursuivis dans les réserves. Enfin, il n'était pas possible d'accorder sans aucune compensation pécuniaire, pour l'État, des droits aussi étendus que ceux qu'obtiennent les porteurs de privilège. Ceux-ci, en effet, ne sont pas astreints au permis annuel de coupe, ni limités comme nombre d'ateliers de bûche- rons qu'ils peuvent employer et ne payent que les 8/10 des redevances ordinaires sur les bois coupés. Aussi une redevance territoriale annuelle a été prévue (art. 16). Elle est extrêmement modérée 4 cents (0 $ 04 par hectare). Il est naturellement impossible de fixer d'une façon mathématique le rendement à l'hectare d'une forêt en Indo-Chine, mais même en tenant compte des vides sur une superficie donnée et de l'inégale valeur des peuplements, un rendement (surtout avec l'exploitation intensive qui sera pratiquée dans les réserves, et étant donné, d'autre part, le prix des produits forestiers) de 2 francs à l'hectare paraît une appréciation ultra- timide. En effet, pour que ce minimum ne fût pas atteint, il faudrait qu'on ne pût même pas tirer d'un hectare de forêt un demi-stère de bois ni 6 DOCUMENTS OFFICIELS à brûler dont la valeur marchaiule est de 1 à ') piastres (le stère) sur les marchés de consommation, ce qui jjarait invraisemblable. Or une rede- vance de 4 cent, à l'hectare rejDrésente, dans ce cas, en supposant la valeur auchang'e de la piastre remontée à '1 l'v. 50, 0 S 10, soit le droit tout à l'ait minime de 5 "/„ ad valorem. VI nous sommes certain que le produit à l'hectare de la forêt bien exploitée dépassera notablement 2 francs. Pour mettre les futurs exploitants en garde contre la tentation de demander des superficies plus étendues qu'ils n'en peuvent raisonnable- ment mettre en valeur, et pour assurer en même temps à l'I'ltat la colla- boration eifective des colons sérieux disposant des capitaux nécessaires pour faire œuvre utile, le demandeur de privilège devra verser un cau- tionnement calculé à raison de 20 cent. (0 S 20) par hectare (art. 25). Ce cautionnement est très modéré puisque pour une surface demandée en privilège de 1.000 hectares, ce qui représente déjà une bonne étendue, cela ne fera que deux cents piastres, et d'autre part il pourra être remboursé dès que le Service forestier aura reconnu que le porteur de privilège de coupe a engagé pour l'exploitation des avances sérieuses pouvant en tenir lieu. Il est suffisant, d'autre part, pour faire réfléchir les demandeurs. Le titre III du projet d'arrêté ci-joint a trait aux formalités à remplir pour l'obtention du privilège de coupe (art. 21 à 26). La matière étant nouvelle, il a paru préférable d'entrer dans les détails assez précis sur ces formalités plutôt que de les réserver pour une circu- laire explicative. On s'est contenté d'ailleurs, la plupart du temps, de reprendre la régle- mentation existante pour les concessions agricoles, qui semble avoir donné, dans son ensemble, de bons résultats. Enfin le titre IV et dernier expose les conditions d'exploitation en péri- mètre réservé. A ce sujet, l'attention peut être appelée sur ce fait que le projet d'arrêté tient le plus grand compte des difficultés inhérentes aux exploitations forestières dans ce pays, en prévoyani, au point de vue de la délimitation indispensable des coupes, que cette délimitation n'aura lieu qu'au com- mencement de chaque campagne pour la coupe de l'année (art. 27). De même le nombre d'arbres réservés à l'hectare pour la régénéra- tion naturelle de la forêt n'est que de 120, d'essences à désigner suivant les cas, et il est prévu que ce nombre pourra être abaissé à la suite de l'enquête préalable à laquelle doit se livrer le Service forestier (art. 31). Quant à l'obligation de faire des pépinières de replantation elle n'est pas imposée au porteur de privilège de coupe, mais incombera, s'il le juge utile, au Service forestier. ARRÊTÉ 517 Les autres prescriptions du lilre IV ont trait à des mesures techniques de mise en valeur de la forêt. Tels sont les traits généraux de la législation nouvelle dont le service compétent attend de bons résultats au point de vue de la mise en valeur rationnelle de nos richesses forestières, qui a reçu, pour la partie qui les concerne, l'approbation du résident supérieur au Tonkin, et du général commandant supérieur des troupes de l'Indo-Ghine, et que je vous serais reconnaissant de revêtir de votre signature, après avis de la Commission permanente du Conseil supérieur. Pour le Directeur de V Agriculture et du Commerce de V Indo-Chine, Le Sous-directeur, Brenier. Le Gouverneur général de Tlndo-Chine, Vu le décret du 21 avril 1891 ; Vu le décret du 7 février 1901 créant un service forestier rattaché à la Direction de l'Agriculture, des Forêts et du Commerce de Tlndo-Chine ; Vu l'arrêté du 3 juin 190:2 relatif à la réglementation forestière au Tonkin ; Sur la proposition du Directeur de l'Agriculture des Forêts et du Com- merce de rindo-Chine ; \u l'avis conforme du Général commandant suj^érieur des troupes de r Indo-Chine, du directeur des AU'aires civiles et du Résident supérieur du Tonkin ; La Commission permanente du Conseil supérieur de l'Indo-Chine entendue , Arrî:te : Article premier. — Il pourra être accordé à tout Français, sujet ou protégé français domicilié au Tonkin, un ou plusieurs privilèges exclusifs de coupe dans des massifs et périmètres du domaine forestier dont la création en réserve résultera de l'application du présent arrêté. Un privilège analogue pourra être accordé aux villages ayant, de par la législation ou la coutume, des droits particuliers sur une forêt ou les pro- duits d'une forêt, dans des conditions à déterminer, dans chaque cas, entre l'Administration locale et le Service forestier. titre premier Droit des porteurs de privilège exclusif de coupe. Art. 2. — Le porteur de privilège de coupe aura un droit exclusif à l'exploitation de tous les produits forestiers de sa réserve, à condition de 518 DOCUMENTS OFFICIELS se soumettre ;iiix règ-les d'exploitation et aux excejjtions ci-après déter- minées. Akt. 3. — On entend par les « produits forestiers » visés à larlicle 2, les arbres, arbrisseaux et tous autres végétaux, ainsi que les produits divers, tels que les huiles, résines, latex, matières fibreuses, lannifcres, tinctoriales, etc.. sauf les restrictions qui pourront être édictées dans un intérêt g'énéral ou qui résulteront de droits antérieurs des villages fores- tiers constatés au moment de la cession en privilège de la forêt et sauf entente à ramiable entre les intéressés. Art. 4. — Le porteur de privilège a un droit de priorité pour obtenir pour lui ou ses bûcherons la concession, d'après la réglementation en vigueur ou à intervenir, d'une partie des terres susceptibles d'être mises en culture, contenues dans sa réserve, exception faite pour les droits anté- rieurs des villages ou des particuliers. Art. 5. — Le porteur de privilège aura la faculté d'élever dans les limites de sa réserve toutes les constructions utiles à l'exploitation des bois et antres produits forestiers, ainsi qu'à leur transformation, à la con- dition d'en faire la demande au Service forestier. Il pourra, pour l'exécution de ces travaux, obtenir la délivrance gratuite des matériaux qui se trouveraient en forêt. Art. 6. — Si d'autres exploitants forestiers ou des tiers, dans un but commercial privé, sont amenés à profiter d'une façon permanente des améliorations aux voies de communication apportées à ses frais dans sa réserve par le porteur de privilège, celui-ci aura droit au remboursement d'une partie des dépenses faites pour ces améliorations. Le montant de ce remboursement sera llxé à dire d'experts, et l'un des experts sera de plein droit, dans ce cas, un agent du Service forestier désigné d'accord entre les parties ou nommé, en cas de désaccord par le Directeur de l'Agriculture et du Commerce de l'Indo-Ghine, sauf recours aux tribunaux de droit commun. Cette indemnité ne s'appliquera pas en cas de transports faits par l'administration ou dans un but d'utilité publique. Art. 7. — Les bûcherons employés d'une façon permanente par le por- teur de privilège de coupe en périmètre réservé jouiront des mêmes privi- lèges et seront soumis aux mêmes obligations que les travailleurs agricoles au service des colons européens. Ils sont soumis aux dispositions de l'arrêté du 26 août 1899 fixant les conditions des contrats de travail au Tonkin entre patrons européens et asiatiques. Art. 8. — Les bois sortant des réserves données en privilège de coupe ne paient que les 8/10 des redevances fixées par la réglementation fores- tièr-e en vigueur. .\rt. 9. — Les privilèges de coupe seront accordés pour une période ARRÊTÉ 519 de dix années, à partir du jour de l'insertion au Journal officiel de l'arrêté les accordant, et sont renouvelables par périodes successives de dix années, sauf avis contraire du Service forestier. Art. 10. — Le retrait du privilège de coupe ne pourra être prononcé sur la proposition du Directeur de l'Agriculture des Forêts et du Com- merce, par le Gouverneur Général statuant en Commission permanente du Conseil supérieur que dans les cas suivants : 1"' Non-paiement des redevances dues dans les délais voulus; •2" Si le porteur de privilège ne se conforme pas aux décrets et arrêtés en vigueur, ainsi qu'aux prescriptions du Service forestier régissant la matière. Art. 11. — En cas de décès, avant l'expiration du délai de validité du privilège de coupe, les héritiers du privilège lui seront substitués de plein droit. Ils devront, s'ils ne sont pas présents dons la colonie, se faire représen- ter par un mandataire spécial dans le délai d'un an, à partir du décès faute de quoi leurs droits deviendront caducs. titre II Des ohhgalioiis Huxquelles .sont aoiunis les porteurs de privilèges de coupes. Art. 12. — L'Administration se réserve le droit d'établir, postérieure- ment à l'arrêté qui accorde le privilège de coupe, aux endroits qu'elle jugera utile, des postes forestiers destinés à la surveillance des exploita- tions et de délimiter autour de chacun de ceux-ci le terrain nécessaire à l'établissement de pépinières et de zones d'expérience. Elle peut ouvrir à ses frais des voies de pénétration, des sentiers de ronde, aménager les cours d'eau, partout où elle le jugera nécessaire, et faire, à condition d'en avertir le porteur de privilège exclusif de coupe, tous autres travaux touchant à l'amélioration de la forêt et au maintien des terres. Les bois abattus par elle lors de ces travaux resteront sa propriété pour en disposer selon ses besoins. En cas de cession de ces bois, celle-ci sera faite de plein droit au porteur de privilège de coupe, qui ne pourra se refuser à les prendre et à en payer la valeur au prix moyen du revient des bois similaires. Art. 13. — Les réserves sont données en privilège avec les servitudes et droits de passage qui peuvent exister ou être établis au prolit des autres parties du Domaine ou des propriétés particulières et communales enclavées ou placées dans le voisinage desdites réserves. 520 DOCUINIEMS OFFICIELS Art. 11. — Ll'.lal ne doit au porteur de privilè|;e de coupe aucune garantie contre les revendications des tiers, pas plus qu'en ce qui con- cerne la valeur et la contenance de la réserve accordée en privilège. Art. 15. — En cas de sinistre, incendie, inondation, ouragan ou tout autre accident qui détruirait partie ou totalité de la forêt des constructions élevées en icelle, etc., le porteur de privilège ou ses héritiers ne pourront prétendre à aucune indemnité, à quelque titre que ce soit, mais auront la faculté de réclamer la résiliation de leur privilège. Art. 16. — Une redevance annueile territoriale de quatre cents (OS 04) par hectare pour toute la superficie des forêts accoi'dées en privilège de coupe, représentant la valeur du privilège accordé, est exigible davance, chaque année, sans qu'il puisse y avoir lieu à remboursement de la part de l'Administration, sous quelque prétexte que ce soit. Art. 17. — Les porteurs de privilèges de coupe sont obligés d'avoir à leur service des gardes coupes européens ou indigènes, à raison de un par mille hectares ou fraction de mille hectares. Ces gardes coupes assimilés aux gardes champêtres sont soumis aux dispositions de l'arrêté du 23 janvier 1901, portant institution de gardes champêtres au Tonkin. Ils devront être agréés par le Service forestier. Art. 18. — Les gardes coupes seront logés dans les réserves et à proxi- mité de la partie plus particulièrement soumise à leur surveillance. Art. 19. — Dans les trois mois qui suivront la date de la délivrance du certificat annuel du Service forestier, constatant le versement au Trésor de la redevance territoriale prévue à l'article 16, le porteur de privilège sera tenu de délimiter par ses moyens et à ses frais, contradictoirement avec les particuliers, les villages intéressés et le Service forestier, et de marquer d'une façon apparente et durable les limites de la coupe de l'année, telle qu'elle est prévue aux articles 27 et 29 du présent arrêté. ■ Art. 20. — A l'expiration du privilège de coupe ou en cas de résilia- tion, les chemins, canaux, ponts et constructions diverses établies par le porteur du privilège ou ses héritiers restent la propriété de l'Adminis- tration, qui pourra, si elle le juge convenable dans certains cas, rembour- ser, à dire d'expert, toutou partie des dépenses faites. titke m Prescriptions relatives à F obtention de privilège de coupe. Art. -21. _ I,a demande d'obtention d'un permis exclusif de coupe en périmètre réservé, rédigée sur papier timbré, devra être adressée aux administrateurs, chefs de province ou aux commandants de cercle. ARRÊTÉ 521 Cette demande indique les nom, prénoms, le lieu, la date de naissance, le domicile du pétitionnaire, qui doit y joindre une pièce établissant sa qualité de Français, de sujet ou de protégé français. La demande énonce en outre la situation et les limites générales, ainsi que la contenance approximative de la ou des réserves dont il sollicite l'exploitation. Un croquis au I/IOOOOO'^ des massifs désignés est joint. Art. "22. — L'administrateur ou le commandant de cercle transmet immédiatement cette demande à la Direction de l'Agriculture et du Com- merce de rindo-Chine (Service forestier^ et en donne avis au public par voie d'atfiches rédigées en français, en quôc-ngu et en caractères chinois : 1" Au chef-lieu de la province; 2° Dans les villages limitrophes des massifs à réserver. Cette affiche mentionne le droit de priorité, tel que le consacre l'article 4 du titre P'' du présent arrêté, en vue de l'obtention de conces- sions agricoles dans les limites de la réserve forestière accordée en privi- lège. Les oppositions sont reçues pendant trente jours, à partir de TafTichage au chef-lieu de la province. Passé ce délai, les oppositions ne sont plus reçues par l'autorité admi- nistrative ; le règlement doit en être demandé aux tribunaux. Art. 23. — Dans la semaine qui suit l'expiration de ce délai d'un mois pour les oppositions qui pourraient se produire, un agent du Service fores- tier se transporte sur les lieux pour procéder, de concert avec un repré- sentant de l'administration locale et le demandeur, à la reconnaissance de la réserve à établir, et faire toute enquête nécessaire au point de vue technique. Art. 24. — Procès-verbal de cette reconnaissance est dressé pour être joint au dossier de l'alîaire, réuni par les soins de l'administrateur ou du commandant de cercle, et accompagné d'un rapport de celui-ci, don- nant son avis sur la concession du privilège demandé. Ce dossier et le procès-verbal sont adressés au Service forestier pour examen et présentation d'un arrêté à prendre par le Gouverneur général, en commission permanente du Conseil supérieur. Art. 25. — Il est joint au projet d'arrêté un récépissé du versement au Trésor par le demandeur de privilège d'un cautionnement calculé à raison de vingt cents (0 S 20) par hectare. Ce cautionnement sera remboursé, soit immédiatement en cas de rejet de la demande, soit en cours d'exploitation, soit dès qu'il aura été reconnu par le Service forestier que le porteur de privilège de coupe a engagé pour lexploitation projetée, des avances sérieuses pouvant en tenir lieu. Art. 26. — Le pétitionnaire d'un privilège de permis de coupe peut Bulletin du .Inrdin colonial. •^' 522 D0( :l;m i;n ts uff ici els obtenir la permission immédiate d'exploitation de la zone forestière demandée, conformément aux dispositions dn présent arrêté, sur une simple autorisation du chef du Service forestier de Tlndo-Chine qui sera contirmée par l'arrêté délinitif prévu à l'article 9 ci-dessus. TrrHK i\- Des conditions trexploilalion en périmètre réservé. Art. 27. — Avant de commencer son exploitation, le porteur du privi- lège de coupe devra : 1° Faire une déclaration de domicile : 2° Procéder pour la première coupe annuelle à la délimitation pré\ue à l'article 19 du titre II, délimitation dont il sera dressé procès-verbal avec croquis joint ; 3° Soumettre à l'agrément du Service forestier un projet sous forme d'état du règlement des exploitations qu'il a en vue ; 4° Faire agréer les gardes coupes prévus à l'article 17. Art. 28. — Le porteur de privilège de coupe est tenu de prévenir le Service forestier de l'époque à laquelle il compte commencer ses travaux. Ceux-ci devront être ouverts au plus tard trois mois après la date de la signature de l'arrêté créant le privilège de coupe. Art. 29. — L'exploitation se fera, selon les prescriptions de l'aménage- ment, par coupes annuelles assises de proche en proche, d'après les règlements d'assiette et de façon à ce que chaque coupe soit parcourue en entier pendant l'année de son exploitation, à moins d'autorisation conti'aire. Art. 30. — Les arbres proprement dits, les cépées, broussailles, lianes non caoutchoutifères et bambous abandonnés à l'exploitation seront coupés au ras du sol, de manière à assurer la régénération par rejets. L'usage du feu pour l'exploitation est absolument interdit. Art. 31. — A moins de stipulations contraires contenues dans l'arrêté accordant le privilège de coupe, il sera fait réserve dans les futaies pures de cent vingt arbres à l'hectare d'essences choisies parmi les meilleures, et, à défaut de celles-ci, d'essences secondaires. Le Service forestier se réserve le droit, lorsqu'il le pourra, d'en faire le martelage. Dans le cas de présence reconnue de lianes à caoutchouc et autres espèces, ne venant qu'en massif plein, des bouquets d'arbre devront être réservés et aménagés après entente avec le Service forestier sur les sur- faces qu'il désignera. 11 en sera de même dans les coupes exploitées en taillis, pour lesquelles 523 le nombre d'arbres à réserver sera indiqué pour chaque cas particulier par le Service forestier. Art. 32. — La récolte des écorces et tubercules tannifères ou tincto- riaux, des gommes, résines, caoutchoucs, etc., se fera suivant les indica- tions du Service forestier, afin de ne pas détruire les végétaux producteurs. Art. 33. — L'exploitation et la vidange de chaque coupe devra être terminée à l'expiration de Texercice auquel elle appartient, à moins de modification approuvée parle Service forestier dans l'aménagement. Un procès-verbal de récolement sera dressé en présence de l'exploitant ou de son mandataire par le Service forestier. Une fois récolée, la partie de la forêt parcourue par les exploitations sera remise en défends et le porteur de privilège ne pourra y faire opérer à nouveau ses bûcherons ou ouvriers qu'en vertu d'une autorisation du chef du Service forestier. Art. 34. — Le porteur de privilège est responsable du paiement des amendes, dommages-intérêts et restitution encourus pour délits et con- traventions commis en forêt et pour les dégâts de toutes sortes occasion- nés par ses ouvriers, bûcherons, voituriers et tous autres employés. Il fournira tous les ans au Service forestier la liste du personnel employé dans la forêt exploitée en privilège. Art. 35. — L'exploitation pratiquée selon les règles prescrites par le Service forestier devra être conduite de façon à ce que le montant des redevances payées sur les bois et autres produits exploités dans la réserve pour l'année courante ne soit pas inférieur à quarante cents (0 S 40) par hectare de terrain boisé. Sur la requête de l'intéressé et après avis du chef du Service forestier, leDirecteur de l'Agriculture et du Commerce pourra abais.ser ce minimum. Art. 36. — Le Général commandant supérieur des troupes de Tlndo- Ghine, le Directeur des AlFaires civiles, le Résident supérieur au Tonkin et le Directeur de l'Agriculture des Forêts et du Commerce de Tlndo- Ghine sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Hanoï, le 20 août 1902. Broni. MADAGASCAR ARRÊTÉ réglementant les encouragements à donner à la culture du cocotier. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépeiidances. 524 DOCUMENTS OFFICIELS ^'ll les décrets des 1 1 décembre 1895 et 30 juillet 1897 ; \'u larrèté du 21 décembre lU(M), portant création d'une cocolerie à \'ohidrotra, près Tamatave; Wi l'arrêté du 11 mars 1902, réglementant les encouragements à don- ner à la culture du cocotier en territoire sakalava ; Considérant que la colonie a le plus grand intérêt à encourager le déve- loppement des cultures capables d'augmenter l'importance de son com- merce d'exportation et que, grâce à la multiplicité des usages auxquels il se prête, le cocotier doit être classé parmi les plantes dont la dissémina- lion mérite le plus d'être encouragée ; Considérant l'importance des débouchés qui s'offrent aux principaux produits du cocotier, tant en France qu'à l'étranger, et l'influence que cette culture peut exercer sur le développement économique de la Colonie ; Considérant que le régime climatérique de la plus grande partie des côtes Est et Ouest convient à ce palmier et qu'il existe dans ces i^égions des terrains sur lesquels cette culture peut donner d'excellents résultats : Considérant, enfin, qu'il y a intérêt à adopter une réglementation applicable aussi bien au versant oriental que sur la côte Ouest ; Sur la proposition du directeur de l'agriculture ; Le conseil d'administration entendu, Arriîte : Article premier. — Il sera fait choix, tous les ans, dans les provinces, cercles ou districts des régions côtières, de terrains domaniaux spéciale- ment destinés à la culture du cocotier. La jouissance de ces terrains sera attribuée aux villages auprès desquels ils auront été choisis et placés sous la surveillance des chefs de district, des commandants de secteur ou des chefs de poste dont ils dépendront ou dont ils seront voisins. Art. 2. — Chaque année, avant le 1'^''" juin, les chefs de province et les commandants de cercle devront soumettre au Gouvernement général leurs propositions, déterminant, d'après le chill're de la population de chaque village intéressé, l'étendue des cocoleries à créer et le nombre de noix à planter par village dans le courant de l'exercice suivant, celui-ci prenant date du 1*^'' janvier. Art. lî. — Les propositions prévues à l'article précédent seront com- muni(|uées, |)ar les soins du Gouvernement général, au directeur de l'agriculture, qui les renverra avec son avis motivé. VjU ce qui concerne la côte Est, une commission composée : Du chef de |)rovince ou de son délégué ; D'un délégué (lu directeur de l'agriculture ; ARRÊTÉ 325 Du gouverneur indigène de la circonscription ; Du gouverneur du village intéressé, procédera, sur place, à l'examen et au choix des terrains domaniaux des- tinés à la création de cocoteries. La commission soumettra au Gouverneur général, avant le 1^^ novembre de chaque année, ses propositions en vue de la création de cocoteries. Le délégué du directeur de Tagriculture devra consigner sur cet état ses observations, au point de vue technique, relativement au choix des ter- rains à affecter à la création de plantations de cocotiers. En ce qui concerne la côte Ouest, les commissions se composeront, jusqu'au moment où un agent technique de la direction de Tagriculture pourra être spécialement affecté à la « circonscription agricole de rOuest » : Du chef de province ou du commandant de cercle ou de leur délégué ; D'un délégué du directeur de l'agriculture, choisi parmi le personnel administratif en service dans la province ou le cercle ; Du chef du village intéressé. Les propositions de toutes ces commissions seront communiquées par le Gouverneur général au directeur de Tagriculture, qui les renverra avec son avis. Art. 4. — Un arrêté du Gouverneur général, pris en conseil d'admi- nistration, mettra à la disposition des villages les terrains domaniaux défi- nitivement choisis par les commissions prévues à l'article précédent. Ces terrains ne pourront être désaffectés sans l'autorisation du Gouverneur général, après avis du conseil d'administration. Art. 5. — Les noix seront fournies gratuitement par les soins de l'ad- ministration et réparties, conformément à la décision prise par le Gou- verneur général, suivant les propositions des chefs de province ou des commandants de cercle et après avis du directeur de l'agriculture, entre les villages intéressés, à qui il appartiendra de procéder à l'établissement des pépinières, ainsi qu'aux travaux d'installation et d'entretien des cocoteries, conformément aux instructions techniques données par la direction de l'agriculture. Art. 6. — Les commandants de cercle et de secteur, ainsi que les chefs de province ou de district et, sous leur contrôle, les autorités indigènes, devront veiller au bon entretien des pépinières et des plantations, et don- ner la plus g'rande publicité possible aux instructions du service technique sur les précautions à prendre pour les soins en pépinières, la mise en place et l'entretien des cocotiers. Art. 7. — Inspections techniques. Le directeur de l'agriculture fera procéder, chaque année, à l'inspection des pépinières et plantations déjà créées ou en voie d'installation. 526 DOCUMENTS OFFICIELS Il fournira aux chefs de circonscriptions administratives toutes les indications nécessaires et consignera ses observations sur l'état des cocoteries et des pépinières, ainsi que les modifications et améliorations à apporter à cette culture, en un rapport qui sera soumis au Gouverneur général. Il sera donné à ce rapport la plus grande publicité, en vue du développement des cocoteries et de Tamélioration des procédés de culture. Art. 8. — A partir de l'année de la première récolte des cocotiers pro- venant des premiers semis, le quart des noix obtenues sera réservé pour étendre les plantations; les trois quarts seront acquis aux villages. Art. 9. — Afin d'encourager les indigènes à apporter tous leurs soins à la culture du cocotier, des primes, dont le montant total sera fixé chaque année par arrêté du Gouvernement général, seront réparties tous les ans entre les villages qui auront montré le plus de zèle et obtenu les meilleurs résultats au prorata du nombre de cocotiers bien entretenus dans chaque village. Art. 10. — Ces allocations seront accordées par le Gouverneur géné- ral, sur la proposition motivée des chefs de circonscriptions territoriales intéressées et après avis du directeur de l'agriculture et des commissions prévues à l'article 3 qui, en même temps qu'elles procéderont sur place au choix définitif des terrains à réserver, devront examiner l'état des pépinières et cocoteries existantes, et vérifier le nombre des habitants con- tribuant à leur entretien. Ces propositions devront parvenir au Gouvernement général au plus tard le 1*" mai de chaque année. Art. 11. — Pour intéresser les autorités indigènes au développement de la culture du cocotier, il leur sera alloué, sur le montant total des primes calculées d'après le nombre de cocotiers bien entretenus dans leurs cir- conscriptions respectives, un pourcentage déterminé sur les bases sui- vantes : Gouverneur indigène de la circonscription : 5 7o au montant global de la prime accordée aux plantations de sa circonscription. Chef de village : 5 "/o de la prime accordée aux plantations de son village. Art. 12. — Pénalités. — Si des pépinières ou des jeunes plants viennent à dépérir par manque de soins, le village responsable devra res- tituer la valeur des noix qui lui avaient été confiées. Si la destruction des jeunes plants est due à la malveillance, les cou- pables seront passibles des peines édictées "par les articles 444 à 448 du Code pénal contre ceux qui détruisent des objets appartenant à la colonie. Art. 13. — Le présent arrêté est applicable aux provinces de la côte ARRÊTÉ 527 Est, au cercle d'Analalava, à la province de Majunga, au cercle de la Grande-Terre, à la province de Nossi-Bé, au territoire de Diégo-Suarez, ainsi qu'aux cercles de Morondava, de Maintirano et de la Mahavavy. Art. 14. — MM. le Secrétaire général, le chef du service des domaines, le directeur de lagriculture, les chefs de province ou de district et les commandants de cercles intéressés sont chargés, chacun en ce qui le con- cerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive, le 28 novembre 1902. Gallieni. Vu : Le Directeur du contrôle financier, FiLLON. Par le Gouverneur général : Le Secrétaire général, Lépreux. CIRCULAIRE à MM. les Administrateurs chefs de province ou de district autonome et les Commandants de cercle, au sujet des échantillons végétaux soumis à Vexamen de la direction de lagriculture. Messieurs, Par circulaire N" 4164^, du 22 mai dernier, je vous ai signalé la décou- verte dans le district de Mahanoro, d'une maladie des caféiers, due à la présence d'un ver nématode, qui ronge les racines, et je vous ai invité à me faire parvenir des échantillons de racines prélevés sur les arbustes que vous auriez quelques motifs de croire atteints de cette affection. En exécution de ces prescriptions, quelques-uns d'entre vous m'ont adressé des spécimens que j'ai immédiatement transmis à M. le Directeur de l'agriculture. Mais, malgré toute la diligence apportée aux différentes transmissions, la plupart de ces spécimens sont arrivés complètement des- séchés et dans un état tel que les recherches étaient rendues impossibles. Afin d'éviter cet inconvénient, vous aurez soin désormais, quand vous aurez à effectuer des envois semblables, d'y joindre un flacon d'alcool, renfermant un échantillon des racines soupçonnées attaquées par les vers nématodes. Vous ne manquerez pas de prendre cette précaution, non seu- lement lorsqu'il s'agira de caféiers que vous croirez atteints de maladie vermiculaire, mais encore toutes les fois que vous désirerez soumettre à l'examen de la direction de l'agriculture des rameaux ou des racines d'un o28 DOCUMENTS OFFICIELS végétal quelconque, sur lequel vous aurez constaté des traces dune mala- die causée par un insecte ou un cryptogame. Tananarive, le '2b novembre 1902. Le Général commandant en chef du corps doccupalion, et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Galliéni. CONGO FRANÇAIS ARRÊTÉ établissant au Jardin d'essai de Libreville une école indigène d'apprentissage agricole et cultural. Le Commissaire général du Gouvernement dans le Congo Français, Vu les décrets des 28 septembre 1897 et 5 juillet 1902; Considérant qu'il y a lieu de vulgariser les principes élémentaires de culture parmi les indigènes de la Colonie tant dans leur intérêt que dans celui de la colonisation française ; Considérant qu'il existe à Libreville un jardin d'essai où les enfants indigènes pourront tout d'abord être occupés et formés à la culture vivrière ; Considérant que, par arrêté du Commissaire général en date du 15 août 1902, un enseignement élémentaire agricole a déjà été organisé au Jardin d'essai de Brazzaville ; Après en avoir conféré avec le directeur du jardin d'essai du chef-lieu, Arrête : A partir du l""" janvier 1903, il sera établi au Jardin d'essai de Libre- ville une école indigène d'apprentissage agricole et cultural. Pour l'année 1903, l'école comprendra dix enfants à chacun desquels il sera mensuellement alloué douze francs pour leur nourriture et leur entre- tien. Il est ouvert au directeur du Jardin d'essai de Libreville sur le cha- pitre Mil, article dépenses imprévues, du budget local pour l'exercice courant un crédit de cinq cents francs destiné à l'édilication de cases et à l'achat du matériel nécessaire pour ladite école. Le présent arrêté sera enregistré et communiqué partout où besoin sera et inséré au Journal officiel et au Bulletin officiel de la Colonie. Libreville, le 5 novembre 1902. Albert Grodet. ÉTUDES ET MÉMOIRES DOCUMENTS DIVERS RELATIFS A LA CULTURE DU MANIHOT GLAZIOVII I Le Manihot Glaziovii au Céara ^. Le Manihot Glaziovii ou Maniçoba a besoin pour son dévelop- pement d'une température comprise entre 18" et 27", c'est-à-dire qu'il est capable de prospérer dant tout le Brésil. C'est un arbre assez élevé, de croissance rapide, atteignant envi- ron 6 mètres en 5 ans. Il abonde dans le Piauhy et le Céara, soit à l'état sauvag-e, soit à l'état de culture; sa tige est droite, rougeâtre, peu rameuse; les rameaux n'apparaissent qu'à une assez grande hauteur au-dessus du sol ; ils sont obliques avec tendance à la ver- ticalité. Le bois est facilement attaquable par les insectes qui profitent pour s'insinuer à l'intérieur de la plante des incisions faites pour l'exploitation du latex. to Dans la cordilière de Baturité, on rencontre des Maniçobas sau- vages et des plantations d'un ou deux ans ; la terre y est assez ier- tile, argilo-sablonneuse, humide; l'altitude est de 550 mètres et la température de 16" à 24° pendant le jour. Quoique cette tempéra- ture représente une moyenne pour tout le sommet de la chaîne et que la composition du terrain y soit à peu près constante, on ne trouve le Maniçoba que sur les pentes, c'est-à-dire sur les points 1. Note extraite de Cultura da Maniçoba no Ceara, B' Theodoreto Nascimento- Aracaju, 1899. 532 ÉTUDES ET MÉMOIRES exposés aux vents venant de la plaine brûlante. La plante semble avoir besoin de l'humidité du sol et de la chaleur que ces vents lui apportent . Les terrains des versants sont rougeàtres et probablement riches en sels de fer. Le M. Glaziovii se rencontre aussi au bas de la chaîne dans des terrains argileux durs et secs, presque impropres k toute culture ; la température est de 26" k 32**, très sèche; ce sont des restes de cultures faites il y a 25 ans, décimées par une exploitation mal réglée, puis abandonnées. Dans le Marang-uape, il y a aussi des plantations de Manihot en plaine ; la terre est noire et très fertile ; on en trouve aussi sur les cordillères, dans les terrains les plus variés, k toutes les altitudes; il en pousse même dans du sable pur, comme on peut le voir dans la capitale du Céara ; au parc de la Liberté, les arbres ont 5 ans et mesurent 6 mètres de haut. Les conditions culturales de la plante sont actuellement très obscures ; la plante exige peu , mais pousse mieux dans les bons terrains ; les terres légères doivent être préférées à défaut de terres fertiles ; un sol argileux conservant l'humidité et protégeant les racines contre l'évaporation superficielle paraît favorable. La multiplication se fait par semis, 15 jours ou l mois avant l'hiver, ou par boutures, à l'époque des pluies. Le bouturage n'est pas k recommander parce qu'il amoindrit les arbres sur lesquels on prélève les boutures, et parce que celles-ci résistent mal, au moins pendant les deux premières années, k la sécheresse. On sème 3 graines, en les séparant les unes des autres, dans des trous peu profonds creusés k 20 palmes les uns des autres ; on ne conserve par la suite que la pousse la plus vigoureuse. Les graines fraîches, dit-on, ne germent pas; elles ne lèveraient bien qu'au bout d'une année après récolte ; mais c'est Ik un fait controversé. Pour trier les graines, on les met dans l'eau pendant 24 heures, et on n'utilise que celles qui tombent au fond du vase. Le tégument de la graine étant très dur, cette imbibition préa- lable ne peut avoir d'effet sur le début de la germination ; la cha- leur seule est capable d'avancer la germination en faisant éclater le tégument; aussi, certains cultivateurs soumettent-ils les graines k l'action du feu, sous une fine couche de terre, ou brùlent-ils le terrain après le semis. Quant k l'opération qui consiste k limer le LE MAiNlHOT GLAZlOVll 533 tég-ument du côté de la radicule, elle est dispendieuse et dang'e- reuse, car on risque d'entamer la plantule. Les graines lèvent au bout de 20 à 30 jours, un peu après les pre- mières pluies, le développement de la plante est rapide, il atteint de 8 H 10 pouces dans les trois premières semaines, et de 3 à 4 mètres la première année. La plantation étant faite en terrain neuf et bien brûlé, il est inu- tile de sarcler ; le Maniçoba étouffe rapidement les plantes qui vou- draient se développer sous son ombre; ce n'est que dans le jeune âg-e qu'il peut être nécessaire de nettoyer le terrain. Certains con- seillent de taillader le tronc pour accélérer le déA^eloppement, mais celte pratique paraît peu recommandable. Pour extraire la gomme, on emploie des écuelles, petits récipients contenant oO à 60 g-rammes, faits d'une seule pièce. On les insère à l'extrémité d'une incison faite à la hachette, en enfonçant le bord de l'écuelle dans l'écorce ; ou bien on les fixe avec de l'argile ; le latex s'écoule pendant environ deux heures. Les incisions ne doivent jamais entamer le bois pour ne pas donner accès aux insectes ; on fixe 4 écuelles à la même hauteur, équidistantes entre elles. Les jours suivants, on pratique des incisions à 3 ou 4 doigts au-dessous des premières, et l'on s'arrête quand on n'est plus qu'à 3 palmes au-dessus du sol. Un ou deux mois après, on recommence en pratiquant les inci- sions dans les intervalles des premières, jusqu'à ce que l'arbre ne donne plus rien ; on obtient par individu de 200 gr. à un kilog, , suivant l'âge; en pratiquant des incisions en \/ et en plaçant l'écuelle au sommet du V la récolte est plus rapide. Le taillage, opération qui consistait à entamer à la hache une face du tronc sur une longueur de 2 mètres et une largeur de 3 à 4 pouces, et à recueillir le latex sur le sol, est défendu aujourd'hui. La gomme obtenue, mélangée de terre et de feuilles, était appe- lée Choro] maintenant, ce nom est réservé à la gomme, qui coulant des incisions se coagule sur l'écorce même de l'arbre, d'où on la décolle facilement; la gomme très impure des marchés contenant de la terre et des feuilles est appelée Chapa. Un autre procédé de récolte consistait à attacher une liane autour du tronc, à 5 ou 6 palmes du sol; au-dessus, on faisait des incisions ; le lait s'écoulait en suivant la liane qui le conduisait dans des vases de terre ; ce procédé est défendu. o34 ÉTUDKS ET MÉMOIRES La gomme Sernamhy , la plus pure, est celle coag-ulée dans les écuelles même; elle perd de 20 k 25 °/o de son poids en séchant, le choro perd k peine 3 "/q. La coag-ulation se produit par la simple chaleur atmosphérique; on peut l'obtenir par le procédé d'enfumag-e, bien connu et employé pour la préparation du para^ on utilise la fumée fournie par la com- bustion des noix de coco ; on a construit des machines spéciales pour enfumer, mais elles sont peu employées. L'enfumage doit se pratiquer moins de 2 heures après la récolte, sinon la coagulation se produit d'elle-même. On peut employer aussi l'alun qui réussit bien dans la coagulation du latex d'Hancornia; le sel marin qui a été préconisé enlève au latex son élasticité. Il Note sur les variétés de M. Glaziovii et sur la culture au Brésil. Il existe trois variétés bien distinctes. On les rencontre principa- lement dans les provinces de Céara, Fernanbuco et Alagoas, où sont pratiquées des cultures de cette plante. La première variété que nous décrivons est la meilleure au point de vue de sa croissance rapide et de son développement total ; dès le jeune âge, on la reconnaît k la façon dont lève la graine. La partie de Taxe de la plantule comprise entre le sol et les coty- lédons épigés mesure 10 centimètres. Les cotylédons sont d'abord appliqués 1 un contre l'autre et ne se séparent que lorsque l'axe hipo- cotylé a atteint cette hauteur, pour laisser échapper les premières feuilles. La tige principale atteint environ 6 mètres de hauteur en poussant droite comme une flèche, sans aucune ramification ; k ce moment, elle donne sa première floraison et développe des rameaux en conti- nuant toujours k pousser verticalement. Les fleurs sont peu abon- dantes. Les feuilles sont caduques et la plante est entièrement dépouillée de son feuillage vers le mois d'août de chaque année ; la frondaison nouvelle se produit en novembre. Le tronc est droit et uni, son écorce est couverte de taches d'un blancd'argent, s'agrandissant au fureta mesurede son développement; LE MANIHOT GLAZIOVII 535 on pourrait surnommer cette espèce Manihot Glaziovii à bois arg-enté ; les feuilles sont plus grandes que dans les autres variétés, d'un vert brun, uniforme ; la graine est plus allongée et plus grosse, terminée en cône vers chaque extrémité. Cette variété donne très peu de graines dans son jeune âge ; les graines ramassées aussitôt après qu'elles sont tombées et semées de suite ne lèveraient pas pour la plupart, à cause de leur dureté ; elles ont besoin de séjourner envi- ron quatre mois par terre, pour subir les' alternatives de soleil et d'humidité, qui diminuent la résistance de leur tégument. Seconde variété. — Celle-ci se distingue de la première par une plus grande ressemblance avec le manioc ordinaire ; son bois est de couleur rougeàtre ainsi que ses feuilles ; le tronc est noueux à chaque nœud, comme chez le manioc, et conserve cet aspect jusqu'à un âge très avancé. Cette espèce se ramifie à 1™ 50 environ du sol et ne peut supporter les vents violents et les grosses pluies sans se briser. Troisième variété. — C'est la plus mauvaise au point de vue ren- dement en même temps que celle qui donne le plus de graines. Elle se ramifie en buisson à partir d'un mètre du sol ; son bois est tortueux, fin et flexible. Les feuilles sont plus petites que dans les autres variétés, très courtement pétiolées, de couleur verte comme dans la première variété ; le bois est un peu argenté ; les graines sont beaucoup plus petites que dans la première variété. Le carac- tère distinctif le plus net provient de la germination. Ici, les cotylédons sont hypogés, c'est-à-dire qu'ils ne sont point portés par un axe bien développé au-dessus du sol. Il est impossible d'extraire le latex de cette variété ; on doit donc la repousser. Du meilleur mode de semis usité au Brésil pour la giie ministérielle Au siijel (le la culture de la Maïuçoba [Manihot Glaziovii). Nogent-sur-Manie, le lOjuillet 1903 Monsieur le Gouverneur, Piirini les nombreuses plantes pouvant produire le caoutchouc et dont on préconise la culture, la Maniçoiîa (Manihot Glaziovii) est une des plus répandues. La facilité de sa multiplication, la vigueur de sa véf^étation en même temps que son peu (rexiyence à Féj^ard de la nature du sol, entêté les causes qui ont contribué à sa rapide propaj^ation. Cependant, dans bon nombre de plantations, les résultats obtenus ont été peu encourageants. Le caoutchouc n'est en oHél, dans bien des cas, produit qu'en quantité trop faible pour rémunérer les frais de récolte. Il est de toute importance, alin de pouvoir guider utilement les elForts des colons, d'établir p;ir une enquête générale quelles sont les conditions dans lescjuelles les [liantes restent stériles ou fournissent un produit sulfi- sant |)0ur que la culture puisse en être préconisée. Je vous serais donc reconnaissant de vouloir bien prescrire qu'il soit répondu, de la façon la plus précise et la plus complète au questionnaire ci-join t. LE MANIHOT GLAZIOVII 539 J'attacherai du prix à tenir le plus rapidement possible les résultats de cette enquête. Veuillez, etc.. Pour le ministre des Colonies et p. o,, Le Chef du Cabinet^ chargé du service du Secrétariat général, J. Decrais. ENQUETE SUR LA PRODUCTION DU CAOUTCHOUC PAR LE Manihot Glaziovii. 1" Le Manihot Glaziovii est-il abondamment répandu dans la Colo- nie ? 2" Quelle est la date de l'introduction ? 3" Quel est environ le nombre d'arbres plantés? 4" Quels sont les terrains consacrés à cette culture? 5" Quelle est la situation de ces terrains [plaines humides, collines, montagnes) ? 6° Quel est le développement pris par les arbres [joindre si possible des photographies) ? 7" Quelle a été la distance conservée entre les arbres dans les planta- tions ? 8" Les arbres ont-ils donné un produit ? 9" A quel âge ? 10° Quelle quantité par arbre? 11° Quelle est la quantité du produit {Joindre autant que possible des échantillons de / 00 grammes au moins)? 12° Quel a été le mode d'extraction employé? 13° A quel moment de Vannée cette extraction a-t-elle été pratiquée? 14° A-t-on remarqué si la qualité du sol influait sur le rendement ? 15° Quels ont été les prix obtenus par ces caoutchoucs ? 16° Quelle a été la quantité totale exportée? GUINÉE FRANÇAISE 1° Le Manihot Glaziovii est encore peu répandu dans la colonie. Un semis de 100.000 graines a été fait cette année par une mai- son de Conakry. 2" Cette plante a été introduite en 1893 (5 exemplaires). 540 ÉTUDES ET MÉMOIRES 4" et 5" Les terrains de lexploitation citée sont argilo-siliceux et sont situés en plaine assez élevée. 6" Les arbres prennent un rapide développement, les exem- plaires du Jardin d'essai âgés de deux ans ont une hauteur moyenne de 6 mètres, 7° Au Jardin d'essai, la distance conservée entre les arbres est de 6 mètres, 4 mètres dans la plantation en création plus haut citée. 8° Les premiers exemplaires introduits ont été saignés cette année . 9° Ils étaient âgés de 5 ans. 10" Ont donné 123 grammes de caoutchouc par arbre. Il"* Le caoutchouc a été classé de bonne qualité. Des échantil- lons seront envoyés au commencement de la période sèche, lorsque de nouvelles saignées seront pratiquées. 12'' Le latex a été extrait par incision. 13" L'extraction a été pratiquée en janvier.-Il est préférable de la faire dans le courant de novembre, au plus tard en décembre. 14° Les cinq exemplaires étant dans le même terrain, on n'a pu se rendre compte si le sol influait sur le rendement. Les arbres du Jardin d'essai nous renseigneront un peu plus à ce sujet. lo" L'échantillon obtenu a été coté au prix de 9 francs le kilo. 1(>" Jusqu'ici le caoutchouc du Géara n'a pas été exploité dans la colonie. JARDIN D'ESSAI DE KONAKRY RAPPORT DE l'aNiNÉE 1901 Jusqu'ici aucune expérience concluante n'a été faite dans la colo- nie sur le rendement de cette plante et les exemplaires du Jardin sont trop jeunes pour nous donner une idée exacte à ce sujet. Néan- moins, il m'est possible, dès maintenant, d'en tirer quelques conclu- sions. Dès la (quatrième année, les arbres peuvent être exploités ; au- dessous de cet âge, les arbres ne doivent pas être saignés, à moins de compromettre leur végétation. D'ailleurs, le latex est d'autant moins riche en caoutchouc (pie les arbres sont j)lus jeunes. Un arbre de I (S mois, saigné au Jardin au mois de novera])re dernier, a donné 20 grammes de produit et n'a pas survécu à l'opération. LE MANIIIOT GLAZIOVII 541 Sur les arbres adultes, on peut pratiquer 3 à 4 saignées par an, mais je ne pense pas qu'on puisse dépasser ce nombre, car on doit chercher k prolonger le plus longtemps possible la durée des arbres. Une expérience faite au commencement du mois sur 2 arbres, âgés de 2 ans 1/2, m'a donné 90 grammes de caoutchouc. En admettant qu'on puisse faire trois incisions pendant Tannée, on obtiendrait un total de 270 grammes, soit 135 grammes de caout- chouc par arbre. En supposant qu'à 4 ans chaque arbre donne un produit double (ce qui n'est pas possible), on aurait comme rendement dans la colonie, pour le Manihot Glaziovii, 270 grammes de caoutchouc par an et par arbre. Il va sans dire que les expériences seront con- tinuées au Jardin avec le plus grand soin, et dans deux ans j'aurai un chiffre exact du rendement. Supposons le chiffre plus haut cité comme définitif. Il s'agit de savoir s'il est sufïisant pour conseiller la culture de ce caoutchou- quier dans la colonie ; à mon avis, il faudrait obtenir 400 grammes de caoutchouc par an et par arbre pour que la culture de cette plante soit rémunératrice. Examinons les dépenses occasionnées par une plantation pendant 4 ans, c'est-à-dire jusqu'au moment où les arbres pourront être saignés. On devra compter par hectare : . Débroussaillement. Défrichement 500 fr. Creusement des trous et plantation 100 Frais d'entretien de la 1'" année 150 — 2*^ année 150 — 3*' année 150 — 4" année 150 Extraction du caoutchouc 150 Total 1350 Cette dépense doit être considérée comme minima et dans laquelle ne sont pas compris les frais du chef d'exploitation, frais généraux, ainsi que l'intérêt du capital engagé. A raison de 600 pieds par hectare, on aurait comme rendement à la 4" année 0,270 X 600 = 162 kilos, à raison de 5 francs le kilo, représenteraient une valeur totale de 810 francs par hectare. 542 ÉTIDES ET MKMOIRKS Les dépenses de la 5« année seraient : Dépenses des années précédentes, 1350 — 810 540 fr. Entretien et extraction du caoutchouc 300 Total 840 En supposant la récolte la même, il resterait encore 840 — 810 = 30 francs des dépenses antérieures, ce qui donnerait pour les 6 années : Dépenses des années précédentes 30 fr. Entretien et extraction du caoutchouc. . . . 300 Total 330 A la fin de la O*" année, on réaliserait un bénéfice de 810 — 330, soit 480 francs par hectare, et à la 1'' année, le bénéfice serait de 810 — 300 = 510 francs. Mais tout ceci n'est qu'une hypothèse, les frais qui sont réduits au minimum ne comprennent pas ceux du chef d'exploitation ainsi que l'intérêt du capital. De plus rien ne prouve qu'à la 3'' année d'exploitation, la production reste la même et qu'elle ne diminue pas dans de notables proportions. Conclusion. De ce qui précède, il faut en conclure que momentanément les colons ne doivent pas songer à la culture du Manihot Glaziovii dans là Guinée Française. Le produit de cet arbre est trop faible et il faudrait opérer sur de trop g'randes étendues de terrain pour en tirer un bénéfice. Il ne faudr.iit pas poui- cela perdre de vue cette plante, car, à l'aide de semis successifs, on arrivera certainement à obtenir une variété plus riche qui pourra être avantageusement cultivée. Dans ce but, des semis sont faits chaque année au Jardin d'essai; mal- heureusement ces observations faites sur des arbres demandent toujours un temps assez long pour en connaître les résultats. Mais si les colons ne peuvent songer à la culture du caoutchouc du (léara, ce dernier est précieux pour les indigènes, et je ne sau- rai trop insister auprès de l'Administration pour en encourager les plantations. LE MANIHOT GLAZIOVll 543 A l'aide de quelques plants distribués dans chaque village indi- gène, dans 4 ou 5 ans le caoutchouc du Céara couvrirait de grandes étendues de terrain sans aucun soin de culture. A cause de sa fer- tilité et de la propriété que possèdent les fruits, de projeter les graines à une assez grande distance, cette plante peut être considé- rée comme envahissante, et sa zone irait chaque année en augmen- tant. En admettant que dans ces conditions chaque arbre ne donne que 130 grammes de caoutchouc par an, ce serait là, je crois, un grand profit pour les indigènes. On arriverait ainsi non seulement à maintenir la production de caoutchouc dans le statu qiio, mais elle augmenterait chaque année. Cette question mérite certainement d'être examinée avec soin, et l'Administration ne doit pas hésiter à faire quelques sacrifices pour encourager les indigènes à entrer résolument dans cette voie. Gonakry, le 12 décembre 1901. Teissonnier. JARDIN D'ESSAI DE KONAKRY RAPPORT DE l'année 1902 L'essai a porté sur deux exemplaires semés en mai 1898 : le tronc présentait à sa base une circonférence de 90 centimètres et une hauteur de 2'"40. Une seule saignée a été pratiquée et a donné pour les deux arbres 222 grammes de caoutchouc. L'exemplaire planté en terrain rocailleux et se rapprochant par ce fait du sol du pays d'origine de cette plante, a donné 158 grammes de produit, tandis que celui planté en sol profond n'a donné que 64 grammes. 11 était intéressant de comparer le rendement du Manihot Glaziovii avec celui de notre liane indigène. L'essai a porté sur une liane du même âge, c'est-à-dire semée en mai 1898, et a produit 20 grammes de caoutchouc. On peut donc conclure que le Manihot Glaziovii peut être exploité dès la 4^ année, mais son rendement ne permet pas aux colons de cultiver cet arbre dans la colonie. Il serait cependant très intéressant de faire cultiver cette plante par les indigènes et de l'utiliser comme essence de reboisement. En 544 ÉTLDES ET MÉMOIRES elîet, les graines du caoutchouc de Géara lèvent sans être limées, avec la plus grande facilité, et sa multiplication peut se faire sans aucun soin. En raison de sa grande fertilité et de la propriété que possèdent les fruits de projeter les graines à. une assez grande dis- tance, cet arbre peut être considéré comme une plante envahis- sante, et il sulïîrait dun nombre restreint de sujets pour obtenir au bout de quelques années et sans aucun soin des bois de Manihot Glaziovii. En admettant que, dans ces conditions, chaque arbre adulte ne donne que 11 1 grammes de caoutchouc, c'est-k-dire le poids moyen donné par les deux exemplaires saignés au Jardin, ce serait là, je crois, un bon produit pour les indigènes, dans les régions arides du Fouta, oîi le Manihot Glaziovii se trouverait placé dans de meil- leures conditions que dans la région côtière. Teissonnier, 1902. COTE D'IVOIRE l"* Le Manihot Glaziovii n'a pas encore été abondamment répandu dans la colonie. 2° Il a été introduit au Jardin botanique de Dabou, au commen- cement de l'année 1895. 3*^ Aujourd'hui, il y a plus de 100.000 arbres de plantés aux environ?' de Dabou. i" Les terrains consacrés à cette culture sont plutôt argilo- sablonneux et pierreux. 5" La situation de ces terrains est par fonds humides à l'empla- cement de la forêt abattue, on en trouve aussi sur les collines arides en savane. 6*> Comme développement, le tronc de cet arbre peut atteindre dans sa 6'- année 60 à 65 centimètres de circonférence. 7" La distance moyenne conservée entre ces arbres dans les plantations est de 6 mètres. 8" Les arbres les plus anciens et les plus vigoureux n'ont pas jusqu'à présent donné un produit sulHsant pour encourager la cul- ture. 0" La dernière expérience a eu lieu sur des sujets de plus de 5 ans. 10" La quantité extraite par arbre, après trois opérations, à (juelques jours d'intervalle, a été de 15 grammes. LE MANIHOT GLAZIOVII 545 11*' La qualité du produit semble très bonne. 12° Le mode d'extraction a consisté d'abord k enlever la première écorce sèche et ensuite à frapper légèrement sur toute l'écorce verte, avec une planchette improvisée pour la circonstance, traver- sée de fines pointes imitant la carde du matelassier. 13° L'extraction a été pratiquée au mois d'août. 14° Il n'a jamais été remarqué jusqu'ici qu'un sol quelconque donnât- un rendement supérieur à un autre. A mon avis, je crois que le sol et le climat de notre région sont peu propices à la cul- ture de cette plante. 15° Aucun prix n'a encore été obtenu pour ce caoutchouc, attendu qu'il n'a pu, jusqu'à ce jour, être extrait en quantité suffisante pour être livré au commerce. Dabou, le 14 octobre 1900. Le Jardinier en chef, A. JOLLY. CONGO FRANÇAIS 1° Peu répandu dans la région de Mayumba. Existe en assez grande quantité dans le Bas Kouillou. 2° En 1892. 3° 13.000. 4° Divers, mais principalement les terrains secs. 5° Collines et pentes, altitude variant de 10 à 50 mètres. 6° Développement excessivement rapide. Fructification au bout de 18 mois. 7° Aucune distance n'a été rationnellement conservée. Il faut laisser 10 mètres au moins entre les arbres. 8° Sur une seule plantation les arbres ont été saignés. Ils ont donné peu de produit. 9° Cinq ans. 11° La qualité varie d'un arbre à l'autre. 12° On abat les arbres, puis on enlève l'écorce de façon k récolter la totalité du latex. 13° Pas de renseignement. 14° Le Céara ne pousse pas bien dans les terrains bas et humides. 15°, 16° L'exportation a été nulle jusqu'k présent. o46 ÉTUDES ET MÉMOIRES MAYOTTE ET DÉPENDANCES 1« 1896. 2» 9.000. 3° Terrains sablonneux et rocailleux. Plaines humides, collines, montagnes plaines sèches et collines rocailleuses. i° Les plus hauts de 7 à 8 mètres et 30 à 40 centimètres de dia- mètre. 5° 4 mètres en quinconces. fi° Ils sont encore trop jeunes pour être saignés sans courir les risques de les voir dépérir. 7" Il en existe aussi quelques pieds à Pomoni, introduits plus récemment, mais à titre d'essai seulement, le sol y étant plus humide qu'à Bambao. NOTES SUR LES ESSAIS DE PLANTATIONS DE CÉARA FAITS A FOMBANI Premier essai. Date de semis Mai- Juin 1899. Nombre 12 plantes. Terrain Argileux, pauvre en humus. Situation Plaine à 150 mètres d'altitude. Distance entre les arbres. ... 8 mètres. Développement des arbres. . Hauteur 2 mètres à 3™ 50, grosseur 5 à 6 centimètres de diamètre. Commencent à produire des graines. Les semis ont été faits à Kombo par le D'' Lafont. Deuxième essai. Date de semis 5 janvier 1900. Nombre 22 plantes provenant d'un semis de 50 graines. Terrain Sablonneux très sec. Situation Plaine, même altitude tpie ci- dessus. Développement des arbres 1'" 50 à 2 mètres de haut, diamètre 4 à 5 centimètres. Distance entre chaque arbre. . . ',\ mètres en bordure de route. Ne donnent pas encore de graines. LE 3IANIH0T GLAZIOVII 547 - Troisième essai. Date de semis Avril 1900. Nombre 1.200 provenant d'un semis de 5.000 graines qui lèvent tous les jours. Terrain Sec, sablonneux, mais contenant aussi de Targile. Situation Pente douce. Développement des arbres O'^IO à 1 mètre. Pas encore tous en place. Distance entre chaque arbre. . . 3 mètres en tous sens. Au bout de la 5'' année, nous avons l'intention de supprimer un arbre sur deux, afin de laisser prendre aux autres tout leur développement. Le produit des arbres abattus doit rembourser les frais des 5 pre- mières années de culture. GUADELOUPE Le Manihot Glaziowii est peu répandu à la Guadeloupe ; on le rencontre isolément ou par petits groupes sur quelques propriétés, où il a été planté plutôt dans un but de curiosité. Cette plante a été introduite dans la Colonie dans le courant de l'année 1895. Les conditions dans lesquelles elle se rencontre ici ne permettent pas d'évaluer avec beaucoup de précision le nombre d'arbres plan- tés ; dans tous les cas, ce nombre est restreint et ne semble pas dépasser im millier. Une seule propriété caféière qui comporte aujourd'hui une cen- taine de Manihots, dispersés dans les cultures, est en mesure de fournir quelques indications sur la végétation de cette plante sous notre climat. Elle appartient à la Société agricole de Grandmaison et se trouve située en colline dans la commune des Trois Rivières, à l'altitude moyenne de 170 mètres. Les sols de cette propriété sont généralement profonds, de consistance sablo-argileuse, riches en azote organique et en acide phosphorique, pauvres au contraire en potasse et en chaux. Les arbres les plus âgés, au nombre d'une douzaine, ont été plan- tés en 1895 ; ils mesurent en moyenne 7 à 8 mètres de hauteur totale et 0"^40 à 0"^ 50, de circonféi^ence, à G"' 50 du sol. Ces arbres 548 ÉTUDES ET MÉMOIRES ont fleuri et fruetilié à partir de la deuxième année de plantation, mais on n'a pas essavé la l'acuité germinative de ces premières semences. C'est seulement à partir de la troisième année que les graines produites ont été utilisées, elles ont servi à étendre les plan- tations. Des Manihots semés dans le courant de Tannée dernière à Grandmaisou mesurent aujourd'hui 1 mètre k 1'"20 de hauteur. Ces plantes n'ont pas encore fourni de produits, car le gérant de la Société, M. Dugau. les trouvait trop jeunes pour être saignées. Il compte cependant extraire le latex des arbres les plus âgés à partir d'octobre prochain ; à ce moment, nous aurons les premiers résultats de la culture du Manihot Glaziovii à la Guadeloupe. MARTINIQUE 1" Cette plante existe dans la colonie, mais n'est point répandue. 2° Introduite sous l'administration de M. Bellanger, deux pieds existaient au Jardin botanique en 1891. En 1892, une demande de graines fut adressée à M. Chalot et les pieds distribués gratuitement aux propriétaires. 3° Il a été distri})ué par le service du Jardin plus d'un millier de pieds, mais il existe à peine 200 pieds. 4" Les pieds sont disséminés sur les propriétés. 5" Les pieds qui existent dans la colonie sont placés dans des plaines ou des collines. 6" A 80 mètres d'altitude, sol léger, la plante n'a point donné de développement; après 6 ans, il atteint à peine 2'" 50 de hauteur. A 7 ou 8 mètres d'altitude, terre forte , 5 ou 6 pieds, âgés d'environ 10 mois ont .3 mètres de hauteur. Enfin, à 200 mètres d'altitude, dans une terre demi-forte, j'ai trouvé un pied bien développé ayant 4'" 50 de hauteur et très branchu. 7*> Il n'existe pas de plantation, ce sont des essais que font les pro- priétaires. 8" Les arbres donnent peu de latex. Aucun produitn'ayant jamais été récolté, les éléments me manquent pour répondre aux autres questions posées. Un pied existant au Jardin, à 80 centimètres d'altitude, sol léger et pauvre, ne m'a donné aucun résultat. 3: '^ ô r ^ ^ > K -, t^ s V\ ^ ■3 ^^V^ ^ ••-. «^ ■S '". fV"^— ^ .^p^v'"'-- -^ ^ J£ '•. / /^ K>^^' r^ \V j • ^ z \ r— -N^ ••* Cv Pfe??>v ; <, '. /■* ; ( -!E ^^--1 «\*.^ ■'■■■■■y ■■'■'-■:■ -'-'^ ) '.3 / ^ ' ^-i::^ ^1 ? r(î5-J2. ^ ^ 1^1^. 1 *•• /^^^ ^^^vA'n' 55 "* 'S ( » ^ ^ y^ V. <^ -^ *«*_/ ^^ '^'-^---^ ( 1 ** / T^-' r <4 V ' "" ^ V." \ . w J i ^ y^ >^ • /, t»3 L 0^ •. / 1 k J 1 __ii...F ^ 0 1 ) u -- ^ / < '^A .rî LE COTON AUX ÉTATS-UNIS CENTRES DE PRODUCTION La rég-ion cotonnière aux États-Unis couvre 24 degrés de longitude et 10 de latitude. Sans comprendre la plus grande partie de la Virginie, plus de 100.000 milles carrés du Texas, et tout le Kentucky, Kansas, Mis- souri, Utah, Californie et Mexico, États dans lesquels le cotonnier a été ou peut être cultivé, il reste une étendue de 600.000 milles carrés cultivés en coton. Les vingt millions d'acres plantés en coton en 1890 occupent à peu près cinq pour cent de la superficie de ces États. Il faut penser que la moitié de cette superficie seulement est occupée par les fermes. Cette partie contient environ huit millions de blancs et cinq mil- lions de nègres, en tout treize millions d'individus produisant une moyenne de 234 livres de coton par tète. Dans sa course, le Mississipi partage cette région en deux parties presque égales, laissant sur la rive droite l'Arkansas, la Louisiane et le Texas, et sur la rive gauche, le Tennessee, le Mississipi et TAlabama. Dans cette immense étendue de territoire, on trouve des parties plates comme l'immense vallée du Mississipi, ovi les alluvions sont d'une richesse incomparable, et qui se terminent par des régions marécageuses. A côté de cela, on trouve des régions montueuses et même monta- gneuses que les Américains désignent sous le nom de a Uplands » et qui se trouvent principalement le long de la chaîne des Alle- ghanys. Ces régions sont presque complètement de formation siliceuse, ou argileuse par fractions. Dans l'examen de ces différentes régions nous adopterons non pas la division par État, qui au point de vue cultural signifie peu de chose, mais le classement par régions natu- relles. 552 ÉTUDES ET MÉMOIRES The pine levels. La plaine des pins. Cette portion de la zone cotonnière s'étend en dedans des côtes de rOcéan Atlantique et du g-olfe du Mexique. Elle atteint une élévation qui va jusqu'à 200 pieds au-dessus du niveau de la mer, embrassant une étendue de 34.000.000 acres. 44 "/„ de cette superficie est occupée pjsr des fermes. 1 °/o de ces terrains était planté en 1880, en coton; mais en 1890 le double de cette quantité était atteint. Ils produisent environ 2,6 et 3,2 "/o de la récolte totale en coton des Etats-Unis. Depuis cette époque, la surface était augmentée de 57 "/o et la récolte de 62 % Cependant, cette région ne se donne pas aussi entièrement à la récolte du coton que le reste de la zone cotonnière. La production moyenne de coton par tête était de : 231 livres de fibres en 1880* 259 — — 1890 La population blanche prédomine dans 61 des 89 comtés consti- tuant cette région. Le seul Etat dans lequel la population noire est en excès est le Sud Caroline, sur les côtes duquel on produit le coton à longues soies appelé le Sea-Island. Une observation qui découle de l'opinion générale est que dans les parties basses oîi l'humidité est considérable et le climat chaud, les blancs ne sont pas adaptés à la culture du sol. 11 en serait de même des bêtes de somme, dont les mulets seuls seraient aptes k un long travail, et dont la santé ne soullVirait pas trop d'un pareil milieu. Cependant cette opinion n'est pas une règle ; avec l'extension de la culture, le pays s'est en partie assaini, puis l'élément blanc a gagné petit à petit, s'est acclimaté et finit par dominer. Les fermes dans cette région sont plus grandes généralement que dans les autres parties de la zone cotonnière. Leur superficie moyenne est de 233 acres en 1880, de 190 acres I LK COTON AUX ÉTATS-UMS 553 en 1890, contre une moyenne "énérale de 119 acres pour la superfi- cie des fermes des Etats, 69 "/o de ces fermes sont travaillées par leur propriétaires, 31 7o seulement étant louées. Le travail de ces terrains est aisé; la moyenne de terrain travaillée par un animal est de 37 acres, contre 22 pour Tensemble des États. Trois balles pour le travail de chaque animal est la moyenne; moyenne qui s'est élevée, car la moyenne totale est de 2,1 balles. Le g-rand besoin ag-ricole de cette région est le drainag-e, et cette nécessité, malgré une grande subdivision des fermes, n'a pas reçu une attention suffisante. La culture générale dans cette partie est sensiblement la même que dans la région des collines de pins. Il y a cependant deux exceptions notables : la culture du coton Sea-lsland dans le Sud Caroline et la Géorgie, et la même culture dans l'intérieur de la Géorgie, qui méritent une notable attention. Culture du Sea-lsland. Dans les îles maritimes du Sud Caroline, le travail de la terre est fait presque exclusivement par les nègres. Presque tous sont engagés dans la culture de la terre pour leur propre compte, un grand nombre possèdent leurs fermes. Un certain nombre louent également le terrain, enfin d'autres sont payés de leur travail par la possession momentanée de quelques acres de terrain. La plus grande superficie cultivée en Sea-lsland sous une seule direction ne dépasse guère 100 acres. Les planteurs blancs ne travaillent pas plus de 30 acres. Le drainage a reçu une grande attention dans cette région peu élevée au-dessus de la mer. D'ailleurs, le mode de culture usité dans cette région, qui consiste k planter le coton sur des billons très élevés, de un à deux pieds, concourt fortement à assainir le terrain. Autrefois les bons fermiers faisaient en outre dans leurs champs des drains à ciel ouvert, dressés à l'aide de deux coups de charrue et approfondis ensuite à la houe. Dans ces dernières années, les fermiers de James Island ont fait des fossés profonds, au fond desquels ils ont placé des drains en planches. Bulletin du Jardin colonial. ■^^ 354 ÉTLDEs i:t mémoires Ces drains étant bien jointes aboutissent dans les drains princi- paux qui vont se jeter à la mer. Ils sont fermés à leur extrémité par un clapet qui au moment des basses eaux se relève et laisse écouler l'eau des drains. Au moment des hautes eaux, le clapet se referme de telle sorte que l'eau de marée ne puisse envahir les conduites. De telle sorte, un sol placé à un ou deux jDieds seulement au- dessus du niveau de la mer peut être assaini sur une profondeur de 4 à 0 pieds. Les bords de ces îles étant généralement les parties les plus élevées et les plus fertiles, cette opération est des plus faciles. Autrefois, la culture dans ces îles se faisait entièrement à la main, mais depuis 1870 les procédés culturaux ont bien changé avec l'introduction des instruments aratoires. Une mule peut faire le travail nécessaire à l'entretien de 30 acres de coton Sea-Island, et en outre un supplément de culture de maïs. La première opération culturale consiste dans le renversement des sillons et l'enlèvement des tiges de cotonnier. On donne ensuite un labour pour briser les mottes de terre. En février, deux labours sont donnés avec une charrue à un che- val. Dans un de ces labours, on peut opérer un défoncement qui n'est pas toujours praticable, selon que la saison est sèche ou humide et selon la nature du sol. A James Island, où le drainage du sous-sol est j>ratiqué, le défon- cement est généralement utilisé. Dans ces opérations, on applique les engrais, qui consistent le plus souvent en débris animaux ou en 1 .000 à l . iOO livres de graines de coton à l'acre. Dej)uis (juelques années on utilise également les engrais com- merciaux, (^ette pratique, absolument inconnue autrefois, est deve- nue très courante, et le plus petit cultivateur nègre emploie les engrais chimiques. Le terrain est alors prêt pour la plantation, laquelle peut com- mencer après le 20 mars, mais qui se fait de préférence du l'"" au 10 avril. Les machines à planter le coton ne sont pas généralement utilisées. Trois ouvriers font le; travail de la plantation. Le premier avec une houe pratique dans le sonnnet du billon des trous distancés d'environ un pied ii un pied et demi. Cotonnier Sea-Islancl. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 557 Le second qui porte les graines en laisse tomber huit ou dix dans chaque trou, et le dernier à l'aide de la houe referme soigneusement les poquets. Les jeunes plants font leur apparition huit ou dix jours après la plantation et sont bien développés dans la première semaine de mai . Les binages commencent au début de mai, le second se fait à la fin de ce mois. Au second binage on pratique un éclaircissement en ne laissant que les deux pieds les plus vigoureux ou même trois. Puis à chaque binage on en enlève un certain nombre pour favo- riser les plus vigoureux, et en juillet on ne laisse plus qu'un pied par poquet. On donne en général quatre binages et quatre éclaircissages ; vers la fin de juillet, la culture est complétée par un sarclage qui a sim- plement pour but la destruction des mauvaises herbes. Les premières fleurs apparaissent vers le milieu de juin, alors que les cotonniers ont environ Ld pouces de haut, les capsules ouvrent en août, alors que les plantes ont acquis la hauteur de 4 à 5 pieds. La récolte du coton commence vers la dernière semaine d'août ou la première semaine de septembre, elle se termine vers le milieu de décembre. Quand le coton a été cueilli, pesé et emmagasiné, on le dessèche sur une claie appelée <( arbor ». Là le coton se dessèche, et une fois emmagasiné il prend au contact de la graine une petite quantité de matière grasse qui lui donne un toucher des plus doux et un lustre pai^ticulier. Légrenage se fait toujours au moyen du rol- lergin ; le type Mac-Garthy à simple action n'est pas utilisé. La première récolte de valeur de Sea-lsland fut faite en 1790 par William EUiot sur Hilton Head. En 1805, cette qualité de coton était payée 1 fr. 50 la livre pendant que le coton des Uplands ne dépassait pas 1 fr. 10. En 1816, le Sea-lsland 2 fr. 35, le Upland 1 fr. 35. La récolte de 1825 monta à 26.039 balles, dont 7.779 furent récoltées en Géorgie, le reste dans le Sud Caroline. En 1889, la récolte atteignit 46.841 balles, la Floride en produi- sant 26.111 balles, la Géorgie J2.431 et le Sud Garoline 9.299. Ce fut vers cette date que cette culture commença à se développer chez les petits fermiers de* la région de la plaine des pins, à une distance considérable de la mer. OoS ÉTUDES ET MÉMOIBES Cette tentative a eu un tel succès que, en 18î)4, la récolte de Sea- Island fut de 39.367 balles, pendant que, en Floride, elle tomba à 11). 107. En Sud Caroline, où la culture avait commencé et était deve- nue si florissante, la récolte ne fut que de 2. "578 balles. Ceci a prouvé pour plusieurs années que les îles et les côtes de la Géorgie sont particulièrement bien adaptées à cette culture. Autrefois, la culture du Sea-lsland était sous la direction d'hommes dei^rande intelligence, qui apportaient dans la sélection des semences, des procédés culturaux une foule de soins. A l'heure actuelle, cette culture est en partie aux mains d'une population nègre peu intellig-ente et principalement occupée à sub- venir à sa subsistance assez précaire. On a également tenté la culture du Sea-lsland dans l'intérieur de la Géorgie, mais on s'est heurté toujours à une dégénérescence plus ou moins grande du produit. De toute façon, il est nécessaire de changer annuellement les graines pour éviter une dégénérescence trop grande. Dans le Sud Caroline, le coût de la culture de Sea-lsland était estimé en 1880 de 0 fr. 7.1 à 1 fr. 05 par livre de fibres, avec un béné- fice net à l'hectare de 380 à 780 francs. Le coût de production des courtes-soies dans l'intérieur était estimé à 0 fr. 35 sur sols riches, et à 0 fr. 50 à 0 fr.70 sur sols pauvres. En Géorgie, ce coût était estimé à 0 fr. iO, 0 fr. 50. En Mississipi, dans la plaine des pins, le coût de production était estimé en 1894 à 0 fr. 20 sur les sols riches, et à 0 fr. 35 sur les sols pauvres The pine-hills région. Iic(/ion des collines de j)ins. Cette région s'étend à l'intérieur de la plaine des pins atteignant une élévation de 200 à 400 jneds au-dessus du niveau de la mer. La végétation de pins est remplacée par des forêts de [)ins à longues feuilles, et un sous-bois composé de chênes el (pudques autres essences. Cette région couvre environ 30 millions d'acres, dont 58 °/o envi- ron est cultivée. LE COTOM AUX ÉTATS-UNIS 559 22 °/o de l'étendue totale sont occupés par du terrain travaillé, et 7 "^/o en 1890 étaient plantés en coton. Elle produisit en 1890 15 «/« de la récolte totale. Depuis, il s'est produit un accroissement de la surface consacrée au coton, sauf dans le Texas où il s'est manifesté une légère diminu- tion. L'aug-mentation de superficie et surtout de rendement a été notable pour la Géorgie, l'Alabama, le Mississipi et la Louisiane. Dans cette région se trouvent Burkes, le comté de la plus grande production en Géorgie, Mecklembourg pour le Nord Caroline, et Bar- bour, le second comté, pour la production en Alabama. La population ne s'accroît pas d'ailleurs dans la même proportion que la superficie et la production cotonnière. De 1888 à 1890, l'augmentation de population a été seulement de 16 7o. La race blanche prédomine dans 63 "/„ des comtés ; elle est plus nombreuse que la race colorée dans le Nord Caroline, l'Alabama, Mississipi, Louisiane et Texas. Dans le Sud Caroline et la Géorgie, la race noire forme environ 51 "/o de la population totale. La race colorée formait en 1880 environ 53 "/o de la population. La production de coton par tète d'habitant était de 275 livres de fibres environ au commencement, et 337 livres à In fin de la dernière décade. Les animaux de travail sont plus spécialement des mules en Géor- gie et Sud Caroline où prédomine la population noire. Dans le Mississipi, Louisiane et Texas, le nombre de chevaux est plus élevé. La moyenne de sol travaillé par tête d'animal est d'environ 33 acres, soit une augmentation de 3 acres sur la moyenne de la décade précédente. Cette augmentation est plus grande dans le Nord et le Sud Caro- line (40 et 37 acres respectivement) qu'elle n'est en Louisianne (19) et dans le Texas (6). Par tête d'animal on produisait 4,1 balles contre 3,7 en 1800. La moyenne des dimensions des fermes en 1890 était de 134 acres, accusant une diminution d'environ 27 acres. Malboro County est un comté typique de production de coton dans cette région. 560 ÉTLDES ET MÉMOIRES Il produisit en 1890 32.30() balles de coton sur 58.836 acres, ce qui donne un peu plus d une balle pour 1^8 acre. Ce rendement en tant que moyenne est excellent et n'a été dépassé que dans le Mis- sissipi sur les alluvions de Mississipi River. L'impulsion énerg-ique qui a été donnée dans ce comté à la pro- duction agricole et principalement à la production du coton ne peut être mieux représentée que par les chiffres de production moyenne depuis i8i0 : En 18i-0 71 livres de fibres 36 boisseaux céréales. 1860 437 — _ 29 — — 1890 647 — _ 21 — — Lauo^mentation de la production et surtout de la productivité est due principalement aux améliorations foncières, en particulier le drainage, et à l'adoption de pratiques cnlturales des plus profitables pour ces régions, par exemple l'emploi d'engrais verts. L'emploi des légumineuses et en particulier des pois à vaches a été d'une adoption presque générale. Cette culture précède celle du coton et au premier labour on enfouit la matière verte entre les raies du cotonnier. Les autres engrais appliqués consistent principalement en graines de coton, farine de tourteau, superphosphates et chaux. En 1880. une moyenne de 20 à 25 francs par acre étaient dépensés pour Tapplication de fertilisants. Après un labour de défrichement qui brise les tiges de cotonniers de l'année précédente et arrache les racines, on en donne deux autres qui servent à confectionner les billons. Souvent à ces premières façons on opère un défoncement ; cepen- dant le profit d'une telle opération n'est pas tout à fait démontré. La plantation se fait ordinairement en avril, avec un semoir méca- nique. Planter de meilleure heure est préférable, sauf pour les risques que l'on court des premiers froids ; si l'on plante tard, on peut craindre une chute trop grande de pluie. La culture suivante se fait à la houe, avec lacjuelle on opère des binages en rejetant les débris dans les raies. ()ii |)rati(pie principalement ces binages dans la première saison de développement, car les plantes n'ayant pas encore mûri sont LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 561 détruites par les premières sécheresses et ne peuvent se multiplier. Si au contraire les façons culturales étaient opérées dans le cou- rant de l'été, les semences nuisibles germent aux premières pluies et le travail est à recommencer. Dans toute la région, la culture ne varie guère de ce que nous venons de dire, sauf pour l'arrachage des vieux pieds. On emploie pour cet office des charrues de divers modèles ; un homme et deux chevaux peuvent arracher 10 à 12 acres par jour, en se servant de machines arrachant deux rangées à la fois. On attache dans la région une grande importance à ce que les graines soient placées à une distance également constante. Aussi un grand nombre de fermiers emploient-ils des instruments plus ou moins perfectionnés pour que le semis soit tout à fait homo- gène. Une des façons consiste à faire passer en avant un cheval qui traîne une charrue à double soc. Ces socs font un sillon au sommet de deux billons voisins. Derrière, vient un cheval marchant également dans la raie et tirant une machine qui constitue le semoir proprement dit. C'est un coffre dans lequel on peut mettre une assez grande quantité de semences et formant alimentateur. Une roue de chaque côté est disposée et porte sur la jante deux cavités diamétralement opposées, dans lesquelles un ouvrier jette une dizaine de graines au moment où elles se montrent à la partie supérieure. Derrière, viennent des jeunes garçons qui ont pour mission de recouvrir chaque poquet de graines. De cette façon on est absolument certain d'avoir des poquets éga- lement espacés. Métamorphic région. Région métamorphique. La bordure nord des collines de pins touche une région s'éten- dant à travers le Nord Caroline, Géorgie et TAlabama, région constituée principalement de formations granitiques et de rocs. On la désigne aussi sous le nom de pied des monts. La région entière n'est pas plantée en coton ; deux comtés mon- 562 ÉTUDES ET MÉMOIRES tagneux de la Géorgie n'en produisent pas. Dans six comtés de louest du Nord Caroline, 2.000 acres seulement étaient consacrés à cette culture, pendant que dix autres comtés n'en produisent pas du tout. La superficie totale de la région cultivée, y compris celle occupée par la culture du coton, est de 32 millions d'acres et produisit en 4890 16,8 7o de la récolte totale. Seulement 10 °/o de cette superficie est plantée en coton, avec une augmentation de 2 °/o depuis 1880. 3o "/o de ce sol est occupé par les terres labourables, légèrement en augmentation sur la décade passée. La population blanche prédomine assez fortement ; on ne compte guère plus de 42 "/„ appartenant à la race colorée. Cette race a diminué de 1 °/oi principalement dans le Sud Caroline, Géorgie et Alabama. Cette décroissance a été accompagnée d'une augmentation de production par tête d'habitant dans chaque Etat. Il y a cependant une exception marquée pour le Nord Caroline où la population colorée a augmenté. Cette augmentation a d'ail- leurs été suivie par une décroissance dans le rendement moyen. En 1890, les 220.000 fermes de cette région avaient en moA-enne une superficie de 114 acres, accusant une diminution sur 1880, où la moyenne de superficie était de 131 acres. La moitié seulement de ces fermes était occupée par les proprié- taires à cette dernière date, alors que, en 1880, 60 °/o des fermes étaient exploitées directement. Le pourcentage des petites fermes a également augmenté de 36 à 40 °/o de la totalité des fermes. Dans le Sud Caroline et la Géorgie, où la population colorée est la plus grande, on trouve une majorité de fermes louées et de petites propriétés. L'inverse est vrai pour le Nord Caroline, l'Alabama, où la popu- lation noire est en moins grande quantité. Le nombre de mules emplo} ées pour les travaux de la ferme est également plus élevé que celui des chevaux dans le Sud Caroline et la Géorgie, et moins élevé dans le Nord Caroline et l'Alabama. La culture du coton dans le Sud n'a pas atteint encore un degré de perfectionnement aussi élevé que dans les autres régions. Un grand nombre de procédés culturaux sont employés de façons fort diverses. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 563 Dans cette région, M. David Dickson, de Sparta en Géorgie, est un des planteurs les plus avisés et les plus instruits ; il a d'ailleurs publié dans des journaux agricoles des exemples de culture qui ont souvent été suivis avec succès. 11 recommande fortement, pour de telles formations de sols, les labours profonds et les défoncements, disant que le champ de coton doit avoir 5 pouces de terre bien pulvérisée et 6 en dessous bien ameublie . Il n'est pas avantageux non plus de pratiquer de forts labours avant l'hiver, car celui-ci étant généralement pluvieux, il se pro- duirait des ravinements violents qui entraîneraient le sol. Dans le cas d'hivers froids et secs, l'inverse est vrai; les labours pratiqués à l'automne permettent aux mottes d'être brisées par la succession des gels et des dégels, et d'avoir au printemps une terre ameublie. La rotation des cultures est généralement la suivante : coton, maïs, céréales. Les façons culturales se commencent toujours à la base des col- lines et se terminent au sommet ; de cette façon on ne risque pas de dégarnir la partie supérieure du champ, dont la terre meuble est toujours plus ou moins entraînée par les pluies. Lorsque les billons sont terminés on place dans les raies les engrais que l'on veut appliquer à la sole, et l'on refend les billons, versant dans chaque dérayure deux raies de labour. Les billons sont alors terminés en faisant passer un large buttoir que tirent deux chevaux. Les ensemencements sont opérés à l'aide de semoirs. Les façons culturales suivantes consistent principalement en quatre binages, effectués à la houe, et autant de sarclages. M. Dickson commença à utiliser les fertilisants en 1846 et fut le premier à le faire, et c'est sur son exemple que la plupart des fer- miers de cette partie des États en firent un emploi considérable. The prairie région. La région des prairies. Cette région de la zone cotonnière comprend les prairies noires de l'Alabama, du Mississipi et du Texas, ainsi que les prairies côtières de la Louisiane et du Texas. 564 ÉTUDES i:r mémoires On peut ég-alement y comprendre les prairies sableuses de lArkansas et les prairies à marnes roug-es de l'Ouest Texas. Cette rég-ion couvre plus de (55 millions d'acres, dont ii "/o seulement en 1S80, et 55 "/o en 1890 étaient en fermes. Le pourcentage de terrain défriché dans la décade passée était de 12 à 27 °/o et l'augmentation dans la production du coton de 4 à 6 %. En 1880, les prairies produisaient 16,3 °/o de la récolte totale des États-Unis, et en 1890 elles donnaient 20,6 "/o. La production par tète en fibres de coton est d'environ 277 à 381 livres. Le plus haut pourcentage en ferme de la surface totale existe dans les vieux Etats de l'Alabama (72 °/o) et le Mississipi (74 7o)- Le plus petit pourcentage existe dans les prairies côtières du Texas (24 «/o). Les prairies établies sur les marnes rouges produisaient seule- mene en 1880 10.000 balles, et l'on pensait à cette époque que la culture du coton avait atteint à l'Ouest ses extrêmes limites. Il n'en était rien; en 1890 on constatait une au<>mentation de 74.000 balles dans leur production. L'accroissement le plus important dans l'étendue des fermes a lieu dans la région centrale des prairies noires du Texas (35 "/„). Cet accroissement correspond d'ailleurs à une augmentation énorme dans la production (146 "/o)- Les 2i0.000 balles produites en 1880 furent dépassées de 600.000 en 1890. C'est une bonne raison pour croire que les 21 millions d'acres des praii'ies noires du Texas produisent la presque totalité du coton récolté dans le Sud. En 1870, 40 "/„ de la population des prairies était colorée; en 1890, le pourcentage tomba à 39. Il est de 78 dans l'Alabama, 51 dans h; Mississipi, 44 en Louisiane, 37 dans l'Arkansas et 18 dans le Texas. Le nombre et la variété des procédés culturaux récemment introduits ilans la culture du coton, et particulièrement dans les prairies du Texas, est plus grantl (jue dans n'importe quelle autre partie des Etats. La plantation commence ici le l''" décembre, un mois plutôt que dans l'Est. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 565 La première opération à faire dès que la dernière récolte a été elï'ectuée est de disposer des tiges de cotonniers On les enlève habituellement à la machine, dont un g-rand nombre de types ont été proposés. Elles consistent généralement en 5 à 7 couteaux puissants en fer de 2 pieds de long, tournant dans une charpente en face d'un autre bâti supporté par 2 roues. Deux chevaux tirent la machine, et les pieds de cotonniers saisis par les contres sont arrachés de terre et mis en pièces. Quelquefois la machine est double et travaille deux rangées à la fois. Dans ce cas, elle est tirée par 3 chevaux. Les labours se font également avec des instruments particuliers. On emploie fréquemment un genre de charrue formé d'un large disque tournant dans un bâti très solide tiré par 4 à 8 chevaux. Cet instrument travaille en moyenne de 2 à 7 acres de prairies par jour, à une profondeur de 15 à 20 centimètres. Souvent cependant la préparation du sol consiste simplement à briser les anciens billons par deux coups de charrue et à faire passer un large versoir qui termine les buttes. On utilise pour l'ensemencement un grand nombre d'excellents planteurs de coton, dont nous ne pouvons certes faire ici la des- cription. On utilise fort peu et rarement les engrais. Un grand nombre de fermiers disent que les engrais, quels qu'ils soient, brûlent la fibre en saison sèche, et que la fertilité naturelle du sol suffît pour avoir de bonnes récoltes. Cependant les vieux fermiers qui occupent des terrains ancien- nement cultivés commencent à sentir par places une diminution dans le rendement, et nul ne doute que la cause en soit le défaut complet de fumure. L'écartement donné autrefois était de 4 pieds entre les lignes de coton, mais depuis l'emploi des houes mécaniques on a trouvé plus commode de n'espacer les billons que de 3 pieds et demi. Par la suite de la végétation on opère en bonne culture deux binages à la houe à main et six sarclages, destinés principalement à enlever les mauvaises herbes. Souvent cependant les travaux de désherbement sont insuffisants pour prévenir l'envahissement du sol par les mauvaises herbes et particulièrement par quelques graminées traçantes, comme le « nut grass » et le « Johnson grass ». 566 ÉTUDES ET MÉMOIRES La récolte du coton est un sujet de grandes dépenses, le prix moven étant de 2 fr. 50 pour 100 livres de coton brut. Les récolteurs de coton sont dans cette région plus experts que partout ailleurs. Des enfants de 6 ans récoltent fréquemment iOO livres dans une journée, et des petites filles de 9 ans ont récolté jusqu'à 200 livres. Les récolteurs de première classe arrivent à 500 et 600 livres de coton par jour, et parfois à 800. Une telle rapidité dans la cueillette ne peut naturellement pas s'accompagner de grands soins. Aussi le coton cueilli possède-t-il une certaine quantité de débris de feuilles et de capsules. Après la cueillette on laissait autrefois assez souvent le coton en tas dans le champ, mais cette pratique a été abandonnée. A cette époque de l'année, en effet, l'air est sec et le coton ne subit pas la maturité complémentaire qui lui donne le soyeux et le brillant. En outre, il perd une assez grande partie de son poids. Actuellement, le coton égrené est porté près de wagons blanchis extérieurement ; des monte-charges le pèsent et le déposent dans les wagons que l'on conduit à l'usine d'égrenage. L'estimation du coût de production est le suivant pour les diverses parties : Mississipi 0,55 par livre de fibres. Arkansas 0,15 à 0,40 — — Texas, prairies 0,15 à 0,50 — — Prairies des côtes 0,15 à 0,45 — — Prairies marneuses 0,45 — — En résumé, la région des prairies de diverses natures forme un centre de production des plus importants. Le Texas à lui seul, s'il était entièrement cultivé, pourrait produire la presque totalité du coton fourni par les Etats. Certaines parties de cette région contiennent d'ailleurs des colo- nies allemandes importantes qui sont arrivées à produire le coton à un taux moitié moins élevé que celui des autres régions des Etats. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 567 TYPES DE COTON CULTIVÉS Il est difficile, dans le nombre considérable de variétés cultivées aux Etats-Unis, défaire une classification rif^oureuse. Nous pouvons cependant, dès le début, les rattacher sans exception à deux types botaniques : le Gossjpium barbadense et le Gossypium hirsutum. Avant d'examiner en détail chacune des variétés nous allons donner les caractères des types qui les ont fournies, ainsi que leur origine, autant qu'elle puisse être connue. Gossypium barbadense. — C'est le même que Todaro désigne sous le nom de Gossypium maritimum, en conséquence de ses affinités pour les climats marins. Ses caractères sont les suivants : Cotonnier à tige glabre ; feuilles pourvues d'un pétiole assez long, à limbes divisés en 3 à 5 lobes ovales ou ovales lancéolés. Fleurs jaourvues de 3 bractées, glabres, terminées chacune par 9 à 11 pointes. Calice 3 à 4 fois plus court que l'involucre, à bord à peine lobé. Corolle plus longue que l'involucre, pétales obtus et ondulés, jaunes avec une tache pourpre à l'onglet. Etamines deux fois plus courtes que la corolle, dépassées par le stvle. Capsules entourées par l'involucre persistant, pointues au som- met, s'ouvrant par 3, 4 ou o valves, et contenant dans chacune de ses loges au moins 6 graines. Ouvrages consultés : Culture of cotton, par Harry Hammond (Cotton plant). Ces graines, noires, lisses, terminées en pointe à leur partie inférieure et couvertes d'un duvet long et fin. Les plantes appartenant à ce type sont généralement de grandes taille, atteignant facilement 3 ou 4 mètres. Elles sont peu ramifiées à la base et ne portent qu'un nombre restreint de capsules ; elles sont de maturité généralement tardive. Plusieurs auteurs rapportent à cette espèce les variétés à longues soies produites en Amérique, Ceci est une grande erreur, car si un grand nombre y appar- tiennent, et notamment le fameux Sea-Island, bien d'autres, telles 568 ÉTUDES ET MÉMOIRES le Allen, le Griffîn, qui souvent ne le cèdent en rien au Sea-Island comme long-ueur et Hnesse de soies, appartiennent au second type, le Gossypium hirsutum. Il y a eu d'ailleurs, depuis que le coton est cultivé aux Etats- Unis, un nombre considérable d'hybrides créés entre les deux types, le premier appelé « Long Staple cotton », le second « Upland cotton », ou « Short Staple ». Certains types, très estimés, comme le Péterkin par exemple, pos- sèdent la moitié de leurs graines noires, l'autre moitié des semences vêtues. Il ne faut d'ailleurs chercher à tirer de là une conclusion quel- conque qui puisse servir au classement botanique des variétés existantes. Ses caractères scientifiques sont à tel point mélangés qu'il est impossible de s'en servir. Gossypium hirsutum. — Ou cotonnier velu, que le D^" Forbes Royle et avec lui un certain nombre de botanistes considèrent à tort comme une variété du Gossypium barbadense. Il en est cependant parfaitement distinct : par le velu des jeunes pousses et des pétioles ; par sa capsule unie et lisse à la surface, sans dépression ; par sa fleur qui est blanche ou d'un rose pâle à taches foncées cependant dans quelques variétés, et complètement ouverte ; enfin par des graines recouvertes d'un duvet fin et serré, de couleur verte ou grise. La pubescence des graines ne peut pas cependant, à l'heure actuelle, servir de base de distinction entre les différentes variétés. A ce sujet, un grand nombre d'observations ont été faites, et l'on a maintes fois constaté qu'une variété à graines nues don- nait, dans des conditions de végétation défavorables, une certaine quantité de graines velues. On a conclu de cela (jue les variations dans les conditions du milieu faisaient naître ces ditlerences dans la pubescence des semences. C'est, à notre avis, une erreur profonde et qui provient de la méconnaissance des faits de l'hybridation. Pour conclure dans ce sens, il eût fallu que les opérateurs aient eu recours à des semences appartenant au type pur de l'espèce essayée, et à l'heure actuelle c'est chose presque impossible à faire. LE COTON AUX ÉTATS-LMS 569 Toutes les variétés cultivées sont des hybrides à vui titre plus ou moins élevé. Or un hybride placé dans des conditions défavorables de végé- tation retourne généralement au type le moins perfectionné et le moins exigeant. Dans le cas actuel, le Sea-Island étant le type le plus difficile à cultiver et le plus exigeant comme sol et comme climat, le retour des produits se fait en partie vers le type à courtes soies. Dans aucun cas, il n'y a transformation d'une espèce dans l'autre, et chaque espèce conserve ses caractères propres, même après un grand nombre de générations. Le G. hirsutum semble avoir été connu en Italie en même temps qu'en Amérique et peut-être même avant. Il se subdivise en deux types : l'une, plante vivace à graines vertes ; l'autre, plus délicate, réussissant mieux dans les Etats du Sud, donnant des fibres plus longues et plus soyeuses. Mais ses graines sont grisâtres; c'est le type appelé communé- ment Louisiane. On dit cette variété originaire du Mexique. Quoi qu'il en soit, d'après Forbes Royle, les bons planteurs, afin d'éviter la dégénérescence de leurs plantes, auraient soin de chan- ger leurs graines de temps en temps. Pour cela on en importerait de nouvelles du Mexique, le pays d'origine. Autant que nous avons pu le constater, cette pratique est totalement abandonnée, et l'on cultive actuellement en Louisiane les mêmes variétés acclimatées qu'en Alabama et Géorgie. CLASSIFICATION DES VARIÉTÉS On peut grouper ditféremment les variétés actuellement culti- vées, et les caractères servant à les distinguer ne peuvent être tirés que de leurs caractères négatifs : I. Port de la plante ; II. Longueur des soies; III. Temps de maturation ; IV. Déhiscence de la capsule. L'on peut également combiner plusieurs de ces caractères pour en tirer une conclusion ferme et plus détaillée : Bulletin du Jardin coloninl. '■'" 570 ÉTUDKS KT MIÎMOIHIiS I. Dans le port de la plante on disting'ue : 1" Les variétés à grand développement, désii^i-nées par les Améri- cains sous le nom de « Lon<^ limh varieties ». A ce type appar- tient, dans les Ioniques soies, le Sea-Island, et dans les courtes soies, le Petit Gulf. 2'^ Les variétés à faible développement, trapues, branchues dès la base et désignées sous le nom de « Short limb varieties », dont fait partie le King. On comprendra 1 importance de cette distinction si l'on sait que l'écartement des pieds varie du simple au double, selon que Ton cultive une variété ou l'autre ; que les variétés k grand développe- ment couAàennent plutôt aux sols siliceux et légèrement argileux. IL Dans cet ordre d'idées, on partage les variétés en trois groupes bien distincts, d'après la longueur moyenne : 1° Courtes soies, ou <( Short Staple » : 20 à 25 millimètres. 2° Moyennes soies, <( mean Staple » : 25 à 30 millimètres. 3" Longues soies, ou « long Staple » : 30 millimètres et au-dessus. Ces considérations n'ont guère qu'un intérêt commercial, aussi nous nous bornerons à mentionner pour chaque variété la longueur moyenne des soies, sans attacher d'importance à cette considéra- tion. III. Les variétés de coton peuvent se diviser en variétés hâtives, moyennes et tardives; cette considération est d'une grande impcH"- tancé dans la culture, aussi la prendrons-nous comme base de clas- sification. IV. Enfin, certaines variétés sont dénommées « cluster », ou fer- mées, à cause de la propriété qu'elles ont à la maturité île ne pas s'ouvrir complètement et de ne pas laisser tomber le coton à terre par les vents violents. LE COTON AUX ETATS-UNIS 571 On désigne sous le nom de « Big boll varieties » les variétés donnant de grosses capsules. Gela ne correspond pas forcément à un rendement élevé en fibres, car à des grosses capsules correspondent généralement de grosses graines. En outre, si les capsules sont grosses, leur nombre est générale- ment moindre, de telle sorte qu'en définitive il est pour le rende- ment souvent plus avantageux de cultiver des variétés ordinaires, surtout à petites graines. Encore, dans ce cas, si le pourcentage en fibres est élevé, faut-il compter avec le rendement total. CLASSIFICATION DES VARIÉTÉS, Variétés très hâtives. Dickson Dearing King Lovory Nancy Hank's Parks. Variétés hâtives. Bailey Baies big bol! Borden Brook's Improved Burr Cherry Gluster Early Carolime Grayson Hawkins Hunnicutt Jeulsins Okra Ozier Peerless Shine Early Smith Improved Texas Wood Welborn Pet Willamsonn Zellner Variétés moyennes. Barnett Big boll Variétés tardives. Allen et Hybride Bank's 572 ÉTUDKS ET -MÉMOIRES Barnes Bâtes favorite Bragg Long-Staple. Cataooba Champion Clusler Ghristopher Goppedge Cobvveb Colthorp Cook Duncan Dongthy prolilic Excelsior prolilic Ellis EUswork Grayson Guun Jones Iniproved Maddox Matthews L. Staple Mars ton Minier Pinkerton Peeler Russell Scrnggins Strickland Texas Storm proof Willis Japan Trash Gheise Improved L. Staple Sea-Island Nous allons maintenant pour chacune des principales variétés examiner les qualités particulières. Ben Smith Boyd prolilic Bran non Culpcpper Gumming's Drake Eurêka Griilin long Staple I^wkins Yumbo Herlong Herndon Hilliard Jackson limbless Jones Long-Staple Mattis Minor Moon Peterkin Petit Guir PoUock Texas Oak Texas burr Trnitt Tyler Sprueill Wise l*"" GROUPE. Très hâlivcs. Dickson. — Ou Dickson (Uuster ou Dickson Improved. M. Dickson écrit (jue ce fut son père, David Dickson, ([ui créa cette LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 573 variété par sélection de plants de Boyd prolific par une sélection de plusieurs années. Aucun croisement n'a été pratiqué pour son obtention, et la variété est uniquement le résultat d'une sélection de plantes hâtives et prolifiques. Les plants sont vigoureux, bien branchus, pyramidaux; les rameaux courts, les capsules de moyennes dimensions, rondes, fermées, de maturité hâtive. Proportion des fibres, 31 à 32 °/o. Long-ueur moyenne, 22 à 25 millimètres. C'est une des variétés fermées les plus populaires. Dearing. — Ou encore Dearing à petites graines. Est une variété très similaire du Herlong. Le créateur de cette variété, Dr J. Dearing, de Géorgie, dit qu'il a créé cette variété par sélection, dirigée spécialement vers le pourcentage en fibres et qu'il a obtenu couramment 45,28 "/o de fibres, sous le témoignage du professeur H. C. White, chimiste de l'Etat de Géorgie. C'est une des variétés rendant le plus de fibres proportionnelle- ment au poids total. Maturité très précoce. I King. — Ou royal ou poudre d'or, créée par T. J. King, à Louis- burg. Nord Caroline. Plante de dimension moyenne, pyramidale, bien branchue, très prolifique. Les capsules sont petites, rondes, toutes de maturité hâtive. Proportion des fibres, 32 à 34 °/o. Longueur moyenne, 25 à 28 millimètres. Les graines sont petites. Le fait que toutes les capsules mûrissent en même temps rend cette variété précieuse dans la zone extrême nord de la culture du coton. Là, en effet, les gelées constituent un des grands aléas de la cul- ture et font souvent perdre une grande partie de la récolte. C'est une des variétés les plus désirables pour les régions où la période de végétation est courte. 574 ÉTUDES KT MÉMOIRES 2^ GROLPE. — FLîfives. Barnett. — Originaire de l'Alabama. Plante élevée et peu ramifiée ; capsules de dimensions moyennes, rondes, de maturité hâtive. Proportion des soies, 32 °/o. Longueur moyenne, 23 à 25 millimètres. C'est une variété localisée à l'Alabama. Bâtes bigboll. — Gréée par R. Bâtes, à Jackson, station dans le Sud Caroline, de sélection répétée de plants appartenant au Rio- Grande type. Plante vigoureuse, très symétrique, bien branchue ; les capsules sont grosses, de maturité hâtive. Proportion des fibres, 33 à 35 "/(,. Longueur moyenne, 24 à 27 millimètres. En 1892, cette variété donna le plus grand rendement en fibres de 25 variétés cultivées à la station expérimentale de Géorgie et en 1893 fut classée cinquième de 26 variétés à la station de l'Etat de Mississipi. Cherry cluster. — Originaire du Sud Caroline. Plante de moyen développement, de forme conique, de branches de longueur moyenne ; capsules petites, rondes, fermées, de maturité hâtive. Proportion des fibres, 30 à 32 °/o. Longueur moyenne, 18 à 22 millimètres. Paraît être le même type que le Dickson. Grayson early prolific. — Créée par W. B. Grayson, àGray- son, Louisiane. Plante de dimension moyenne, branches courtes, très prolifique ; capsules détaille moyenne, quelquefois fermées, mûrissant de bonne heure. Proportion des fibres, 34 à 36 "/„. Longueur, 22 à 25 millimètres. Ressemble an Pélerkin, mais mûrit plus tôt. Hunnicutt. — ('réée par le [)rofesseur J. B. Hunnicutt, k LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 575 Athens, Géorgie, d'un mélange de graines de Bâtes, Boyd prolific, Herlong, Truitt et autres variétés. Des plantes qui en résultèrent, on en choisit un certain nombre qui se rapprochaient le plus d'un type idéal et on sélectionna dans ce sens plusieurs années. La plante est large et bien branchue, prolifique ; les capsules moyennes, rondes de maturité hâtive. Proportion des fibres, 30 à 32 "/q. Longueur moyenne, 22 à 25 millimètres. Jenkins. — Ou Jenkins, pour pauvres cultivateurs. Créée par .1. V. Jenkins, à Natchez, Mississipi, par une sélection répétée du Brannon. Plante forte, pyramidale, prolifique; capsules de moyennes dimen- sions, ovales, de maturité hâtive. Proportion des fibres, 34 à 36 ° j o. Longueur moyenne, 22 à 23 millimètres. Une des meilleures du tj'pe Rio-Grande. Okra. — Une des plus anciennes variétés cultivées dans les Etats du Sud, qui a donné un grande nombre de nouvelles variétés. Vers 1870, A. Alexander, de Washington, Géorgie, la créa d'un seul pied trouvé dans son champ et la répandit de 1885 à 1890 dans presque tous les Etats. La plante est de moyenne dimension, branches courtes ; capsules petites, fermées, rondes, maturité hâtive. Proportion des fibres, 32 à 34 *'/o. Longueur moyenne, 24 à 26 millimètres. Cette plante possède un feuillage peu développé, de telle sorte qu'en saison humide, alors que les chenilles causent de grands ravages, elle est plus apte à la résistance et peut mûrir plus facile- ment ses capsules. Ozier. — De J. B. Ozier, de Corinth, Miss. Plante moyenne, pyramidale, moyennement prolifique; capsules de dimensions moyennes, mûrissant de bonne heure. Peerless. — Probablement d'origine géorgienne. Plante moyenne, bien branchue, pyramidale; capsules petites ou moyennes^ rondes, cjuelquefois fermées, de maturité hâtive. 576 ÉTLDES ET MÉMOIRES Proportion des fibres, 32 à 33 °/o. Lono-ueur moyenne, 23 à 27 millimètres. Une des meilleures variétés de Upland. "WelbornPet. — Créée par G. Welbord, à New-Boston, au Texas, par sélection de plantes trouvées dans un champ de Barnes, Jones Big-boU et Zellner. Plante érectée, branches courtes et nombreuses, très prolifique ; capsules rondes, moyennes, quelquefois fermées, de maturité hâtive. Proportion des fibres, 31 à 32 "/o. Longueur moyenne, 22 à 2o millimètres. Cette variéré a un petit foliage en proportion de la dimension de la plante. C'est ime des meilleures variétés fermées. "Williamson. — De M. Williamson, k Dovesville,Sud Caroline. Plante peu large, branches courtes, prolifique ; capsules petites, rondes, maturité hâtive. Proportion des fibres, 30 à 31 %. Longueur moyenne, 22 à 25 millimètres. Zellner. — Créée probablement par sélection du Boyd prolific. Plante petite ou moyenne, branches courtes, prolifique. Capsules moyennes ou petites, rondes, de maturité hâtive. Proportion des fibres, 30 à 3i "/o. Longueur moyenne, 20 à 25 millimètres. Très semblable au Dickson. S*' GROUPE. — Moyennes. Bâtes. — Longueur moyenne, 2i à 27 millimètres. En 1892, cette variété donna le plus grand rendement en fibres de 25 variétés cultivées à la station expérimentale de Géorgie, et en 1S93 fut classée cinquième de 2() variétés à la station de IT^^tat de Mississij)i. Ben Smith. — Ou encore Smith Standarf, créée par B. S.Smith, à Hedwine, Louisiane. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 577 Plante forte, pyramidale ; capsules de moyenne dimension, habi- tuellement deux à chaque intersection. Proportion des fibres, 32 à 33 °/o. Long-ueur moyenne, 23 à 26 millimètres. Cette variété fut cultivée pendant plusieurs années en Alabama et en Géorg-ie, sous le nom de « Bush », et elle est originaire proba- blement du (( tige rouge >. ou du « feuille pourpre », variétés com- munes en ces Etats. Boyd Prolific. — Une des variétés les plus anciennement sélectionnées, elle fut très cultivée dans le Mississipi et provenait de plusieurs variétés fermées de récente introduction. M. Boyd, le créateur, la développa d'un seul pied trouvé dans son champ. Plante moyennement vigoureuse, moyennement branchue ; cap- sules petites, rondes, hâtives en maturité. Proportion des fibres, 30 à 32 °/o. Longueur moyenne, 20 à 24 millimètres. Brannon. — Ou petit Brannon, créée en Texas depuis un grand nombre d'années. Plante moyenne, bien branchue ; capsules petites, de maturité hâtive. Proportion de fibres, 32 à 35 "/o- Longueur moyenne, 18 à 22 millimètres. Cette variété ressemble au Rio-Grande type. Drake cluster. — Créée en 1882 par R. W. Drake, de Greens- bow en Alabama. Elle fut créée par la sélection du Peerless, eu égard aux plantes les plus hâtives en même temps que les plus prolifiques. Elle ressemble donc au Peerless, sauf en ce que sa maturité est plus précoce et que les capsules sont plus fermées. Proportion de fibres, 31 à 33 °/o. Longueur moyenne, 23 à 25 millimètres. C'est une des variétés les plus populaires pour les régions mon- tagneuses. Eurêka. — Ou Colthorp Eurêka, créée d'un seul pied trouvé dans un champ de Louisiane, et appelée pendant quelque temps « Maud Atkins ». 578 ÉTUDES ET MÉMOIRES La plante est très vig^oureuse et prolifique ; branches de dimen- sions moyennes ; capsules larges, oblongues. Proportion des fibres, 2 )) )) 7 4 )> 1 10 » » )) » )) )) 6 12 10 5 » » 11 S » » It » » )) » 2 )> IX9Ô 1x96 1897 1S9S 1X99 0 c c Allen L. 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La description des plantes caoutchoutifères et g-uttifères, la distribution du latex dans les plantes, les procédés de récolte de ce latex, en usage suivant la tra- dition et la pratique, améliorés par l'observation scientifique, se rattachent intimement à la question botanique. Vient ensuite la question que j'appellerai ge'o(/nij)/ii(/ue^ qui com- porte deux subdivisions principales : 1° celle de \ habitat. ; 2" celle des existences actuelles et des disponibilités futures de matière pre- mière. La question commerciale vient en troisième ligne. Elle comporte également des sections, savoir : 1° la question de la main-d'œuvre pour la récolte ; 2'' celle des transports ; 3** celle des intermédiaires, de la centralisation des produits récoltés, soit dans la forêt vierge, soit dans les plantations, aux divers ports d'expédition ; 4" les con- ditions et prix de vente dans les régions de production ; 5" les mar- chés européens, leurs cours de vente avec toutes les lluctuations de l'olfre et de la demande ; 0° les statistiques. Enfin, en quatrième lieu, se place la question industrielle, c'est- à-dire celle de l'utilisation des matières premières pour les besoins multiples de la fabrication, les transformations de ces matières pre- mières, notamment la vulcanisation du caoutchouc, la dérésinifica- tion, \ épuration des gutta-percha, l'énunuu-ation et la description LE CAOUTCHOUC EN MALAISIE 587 des articles, dont la liste s'accroît chaque jour, dans la manufacture desquels entrent soit le caoutchouc, soit la gutta-percha , soit même l'un et l'autre, comme les câbles sous-marins. Voilà, Messieurs, un bien vaste programme, qui réclamerait un temps et une compétence tout à fait en dehors de mes prétentions. Je ne suis point un professionnel de la science botanique, et encore moins de l'art industriel. Le haut enseignement que vous recevez, dans cette enceinte, de maîtres éminents, les ouvrages techniques dont vous disposez, vous suffisent amplement en ce qui concerne les points de vue scientifiques, commerciaux et industriels. Je n'ai d'autre ambition, dans cette causerie, que celle de vous faire part des observations personnelles que j'ai recueillies dans la Malaisie, dans la région équatoriale, à l'extrémité méridionale de notre conti- nent, aux confins de l'Asie et de l'Océanie, au cours de deux mis- sions, lesquelles m'ont été confiées par le Gouvernement de la République. 1878 à 1902, — - cela fait exactement un quart de siècle, — trois années au début, quatre années à la fin de cette période, telles sont les limites chronologiques de mes deux séjours en Extrême-Orient. Pendant la première, c'est-à-dire en 1881, j'ai eu la bonne for- tune de me trouver en contact avec M. Seligman-Lui, alors jeune ingénieur des Télégraphes, auquel le Gouvernement français avait confié la première mission d'étude, sur les lieux de production, de la gutta-percha. J'ai été heureux d'avoir pu faciliter son exploration de Sumatra, en mettant à sa disposition mon chancelier d'alors, M. Lucien Rochet, très au courant de la langue malaise, des mœurs des indigènes, des choses de Sumatra, par un long séjour à Déli, sur une plantation de tabac. Je vous recommande la lecture du livre si intéressant de M. Seligman-Lui. C'est le premier ouvrage qui ait appelé l'attention du monde scientifique et industriel sur l'habitat et les conditions d'exploitation des arbres à gutta-percha en Malai- sie. Cette importante mission française a précédé et provoqué, immédiatement après, des missions anglaise et hollandaise, si bien que, dans l'intervalle de cinq à six années, les travaux du docteur Burcke, de M. Léonard Wray, de M. Serulaz, ayant complété ceux de Sir William Hooker et autres pionniers de la première heure, la question de la gutta-percha était sortie des limbes et était entrée dans le domaine scientifique et pratique. En même temps que M. Seligman-Lui parcourait l'île de Sunia- rJSS CONFÉRENCKS tra en compag-nie de M. Rochet, décembre 1881, je faisais ma pre- mière exploration de Bornéo. Je visitais, dans le sultanat de Brunei, sur la côte ouest, la forêt vierg'e où les indigènes Dayaks, pour le compte de négociants chinois, abattaient les arbres de gutta Taban, récoltaient et traitaient le latex, par des procédés tout à fait primi- tifs et produisaient une gutta-percha, beaucoup plus pure que celle d aujourd hui, qu'ils livraient sous la forme de petits jambonneaux. J'ai revu. Messieurs, vingt années plus tard (1*101), les mêmes localités que j'avais autrefois visitées, non seulement à Bornéo, mais dans la péninsule malaise, dans les îles de la Sonde; j'ai exploré maints endroits de Sumatra. Je n'ai rencontré que bien rarement, dans le voisinage des rivières ou sur des emplacements facilement exploitables, des arbres adultes. Tout, absolument tout avait disparu sous le parang (hache indigène) des Sakeys, des Dayaks et des Malais. Il ne restait que des cadavres végétaux en pourriture et, partant des souches et des racines, déjeunes arbustes, en très grand nombre, formant souvent buissons, la réserve problé- matique d'un avenir lointain. Je dis problématique, parce que les défrichements le long des rivières, les plantations de gambier, de manioc et autres, ne respectent pas les gutta. La preuve en est que dans l'île de Singapore, où les Palaquium abondaient il y a quarante ans, on compte en bien petit nombre les arbres survivant au mas- sacre. Le service des forêts les a pris sous sa tutelle, et les protège par une législation sévère. La même protection, hélas! trop tar- dive a été établie dans toute la partie centrale et méridionale de la Péninsule malaise, c'est-à-dire dans les Etats fédérés malais, pro- tectorat britannique, et dans le Sultanat de Jahore. La récolte du latex, la cueillette des feuilles y sont en ce moment interdites. Mais si Singapore a cessé depuis longtenq)s d'être un des lieux de production, son port est resté, comme par le passé, le grand centre de réception et de distribution pour les caoutchoucs et les gutta-percha, de même que pour tous les produits de Ui Malaisie. Ce n'est (ju'un vaste entrepôt, mais d'une importance tellement grandissante, avec son tonnage de 13 millions de tonnes et son commerce général de quinze cents millions de francs, qu'on peut l'appeler la Métropole de l'Asie méridionale. Penang, à l'entrée N.-(). (In (h'Iioit de Malacca, occupe le second rang pour l'expor- tation des caoutciioucs et de gutta. Elle reçoit et expédie les pro- venances du Nord de hi Péninsule (Kedah, Perak) et du N.-O. de Sumatra (Deli, Atcheenj. l LE CAOUTCHOUC EN MALAISIR o89 Le commerce des deux produits qui nous occupent est entière- ment, à Singapore et k Penang, dans la main des négociants chi- nois, lesquels ont su établir un réseau de correspondants, lesquels traitent avec les indigènes, ont organisé un système d'avances, de paiements en nature, de surveillance, grâce auquel ils ont institué un monopole, à leur profit, aussi savant mais moins dispendieux et plus lucratif que celui d'une Rég-ie française. Les mailles de ce réseau enserrent toute la Malaisie, aussi bien la partie britannique que les Indes néerlandaises et l'archipel amé- ricain des Iles Sulu, producteur lui aussi de gutta-percha, et que la Malaisie siamoise (Kedah, Tringanu, Kelantan et Patani). Cette région malaise, c|ue se partagent les Anglais, les Hollan- dais, les Américains et les Siamois, mais oîi les Chinois sont en train d'établir une sorte de domination commerciale, s'étend entre les 104° et 120° de Longitude Est, le 7" N. et le 9" de Latitude Sud. Cette région est l'habitat naturel exclusif des variétés de la famille des Sapotacées, produisant la gutta-percha et appelées Dichopsis et Payenna. Il faudra de longues années, en effet, avant que les tenta- tives d'acclimatation des Dichopsis en Indo-Chine, aux Comores, Madagascar, au Congo Belge, au Congo Français, au Brésil et ail- leurs, aient donné des résultats appréciables. Singapore restera le grand centre d'approvisionnement de la gutta-percha aussi longtemps que les arbres producteurs n'auront pas absolument disparu de la région malaise. Je vous dn-ai même tout à l'heure que cette disparition totale n'est pas à craindre. L'heure n'est pas éloignée où l'approvisionnement se fera par plantations en remplacement de celui de la forêt vierge. L'Indo-Chine française produit un dichopsis, de la variété Kran- /iana, dont le latex fournit une gutta-percha, jusqu'à présent infé- rieure, susceptible, je l'espère, d'amélioration et que l'on connaît k Singapore sous le nom de Tliior. Cette gutta contient une forte proportion de résine. Elle est employée frauduleusement dans les mélanges de la gutta malaise. Sa valeur à Singapore est de 25 dollars le pikul, alors que la gutta- percha malaise de la meilleure qualité, celle de Pakang, atteint jusqu'à 600 dollars le pikul. J'ai relevé, dans un dernier rapport commercial, 1902, une importation à Singapore de gutta-percha, provenant de Londres, probablement de la variété américaine dite Balata (Mimusops), I 590 CONFÉRENCES pour une valeur de trois à quatre cent mille francs. Nul doute que cet article, importé pour le compte de quelque Chinois très débrouil- lard, était destiné à quelque savante sophistication de produits de Malaisie. Je vous sij^nialerai en passant, Messieurs, que les savants dExtrême-Orient ne se sont point encore mis d'accord sur les noms botaniques des arbres à gutta-percha de Malaisie. A mon avis, les Pala((uium, les Dichopsis et les Isonandra ne constituent pas des espèces distinctes, mais sont une seule et même famille, pour hupielle la dénomination générale, et uniforme de Dichopsis, devraient être adoptée par tous. Les variétés de Dichopsis sont en nombre illimité, comme d'ailleurs le sont les qualités des gommes qu'elles produisent. Les Malais désignent les Dichopsis sous le nom de g-utta Tahan, et ils ajoutent des qualificatifs suivant la couleur des gommes pro- duites, merah (rouge), puteh (blanche) itam noire). La gutta- percha, produit du Payenna Leerii, s'appelle, en malais, gutta Sundeik. Pour compléter cette énumération des gommes de Malaisie, je mentionnerai ici les espèces caoutchoulifères qu'on y rencontre et qu'on y exploite, soit dans la forêt vierge, soit sur des planta- tions. Si vous consultez les statistiques d'exportation des Straits Settlements (Singapore et Penang), vous y relèverez deux espèces de caoutchouc, Flndia Rubber et le Bornéo Rubber. L'India Rubber, en malais Gutta Ramboun, est le produit du Ficus Elastica et autres variétés de la même espèce. Les Ficus se rencontrent dans les forêts de toute la Malaisie ; de plus, ils sont cultivés, en plantations, à Java, Sumatra et dans la péninsule. Le Bornéo Rul)ber est le produit de lianes caoutchoutifères des espèces Urceola et Willoughb(Ma. en malais gutta sorapat, gutta garip, très abondantes ;i lioi-néo, où illes atteignent quel((uefois une longueur de 10(1 à 200 mètres, s'attachent aux troncs les grands arbres de la forêt vierge et mêlent leurs rameaux innom- brables aux branches de leurs su|)i)()rts. Les caoutchoucs de Malaisie. (pii seraient d'excellente qualité si les indigènes en faisaient lionnèleinenl la récolte, sont aujourd'hui très discrédités par les corps étrangers (pii y sont frauduleusement intro- LE CAOUTCHOUC EN MALAISIE 39 1 duits. Au laminage, la perte est de 33 à 75 °/o. Les prix ont baissé proportionnellement. D'ailleurs, la Malaisie, au point de vue du caoutchouc, occupe, comme importance de production, une place très inférieure, bien loin après le Brésil, l'Amérique centrale, l'Ouest africain et le sud de l'Afrique. Toutefois, les colons anglais et hollandais ont la pré- tention de détrôner dans quelques années le Brésil, par l'énorme production de leurs plantations d'Hevea Bresiliensis. Les apparences actuelles de ces plantations sont pleines de promesses. L'acclimatation du Céara (manihotis glaziovii) n'a pas donné en Malaisie plus qu'à Geylan de résultats satisfaisants. Toutes les variétés américaines et africaines d'arbres et de plantes à caoutchouc ont été expérimentées avec succès dans les jardins botaniques de Singapore, de Penang, de Buitenzorg- et d'ailleurs. Mais les colons s'en sont tenus, dans leurs plantations, à l'Hevea Bresiliensis (Para), et au Ficus Elastica. Après cette digression botanique et géographique, je reprends, Messieurs, le compte rendu de mes expériences de Singapore. J'avais quitté la Malaisie, en mars 1882, pour occuper successi- vement des postes à Aden, à San-Francisco, à Wellington (Nou- velle-Zélande), à Zurich, à Falmouth, à Mons, à Wellington pour la seconde fois. Seize années s'étaient écoulées depuis mon départ de Singapore. Au mois de juillet 1898, je m'y retrouve pour la seconde fois. A peine débarqué, j'entends comme un cri de détresse de tous les côtés, dans la presse principalement ; « Il n'y a plus de gutta-percha ! » « C'en est fait des câbles. » Je vous avouerai, Messieurs, que ces manifestations pessimistes me laissèrent assez sceptique, lorsque j'eus étudié les statistiques locales de 1897. Celles des années subséquentes enregistrent des transactions importantes, quoique avec des fluctuations. En somme, on coupe chaque année, en Malaisie, environ deux millions d'arbres, et on exporte de 3 à S. 000 tonnes de gutta-percha, par année. Voici les statistiques, de 1897 à 1901,1e pikul, mesure courante de poids, en Extrême-Orient, représentant 60 kil. J'ajouterai que dans mon évaluation du rendement, par arbre, en gutta, j'ai compté un peu plus de 2 kil. pour un arbre : 592 CONFERENCES Statistiques : 1898 93.000 pikuls = 5.580 tonnes 5.580.000 kilo-. 1899 78.000 pikuls 6 i. 680. 000 kib^. 1900 97.000 pikuls 6 5.820.000 kilog. 1901 74.000 6 17440 = 4.C80 tonnes = 5.820 tonnes = 4.400 tonnes 2 millions • d'arbres 1/2 2 millions 2 millions 1/2 2 millions On a donc coupé en cinq années environ dix millions d'arhres dans la région malaise. C'est évidemment un très gros chiffre, car cela représente à 200 arbres par hectare une forêt de 50.000 hectares qui serait entièrement et exclusivement peuplée d'arbres guttifères. Or comme on rencontre rarement plus de dix arbres à gutta exploi- tables par hectare, c'est une surface d'environ un million d'hectares qui pendant ce court intervalle a été mise à sac. L'œuvre destructive des vingt années antérieures représente bien un abattage complet des arbres de grande croissance sur trois autres millions d'hectares. Au total 4 millions d'hectares jusqu'à présent exploités, peut-être cinq millions d'hectares, où il ne reste pas de gros arbres. Mais rassurons-nous, Messieurs, la superficie de la Ma'laisie tant britannique que néerlandaise, siamoise, américaine, est d'environ 1.900.000 kilomètres carrés, ce qui fait un total, à raison do 100 hectares par kilom. carré, de 192.000.000 hectares. A supposer que les forêts vierges, où se rencontrent les précieuses sapotacées, ne représentent que le quart de ce chiffre, cela fait encore le joli chiffre de 48.800.000 d'hectares, dont 40.000.000 au moins con- tiennent d'imporlanles réserves pour le prochain quart de siècle. Mais il faut bien le reconnaître, toutes les régions facilement accessibles, dans le voisinage des cours d'eau, ont été entièrement exploitées. Chaque année, la récolte devient plus ditïicile, surtout dans les deux régions les plus riches en gulta, Bornéo et Sumatra, à moins que l'on \ établisse, ce ijui arrivera bien quelque jour, des routes et des chemins de fer de pénétration, LE CAOUTCHOUC EN MALAISIE 593 En attendant, vous me demanderez si les arbres ne repoussent pas, et si les districts exploités il y a vingt ans. par exemple, ne fournissent pas des arbres nouveaux, dès aujourd'hui ou très pro- chainement exploitables. Je me suis posé cette question moi-même, et je me suis renseigné tant par des explorations personnelles dans tous les sens, que par de nombreux explorateurs dont j'ai recueilli les informations. Les explorations sont devenues faciles dans la péninsule de Malaisie. D'abord il y a quelques chemins de fer, des services de navigation à vapeur faisant le cabotage sur toutes les côtes de la presqu'île, dans les îles, et sur tous les points des Indes néerlandaises. D'autre part, les chaloupes à vapeur sont très nombreuses à Singapore et il est facile d'en alfréter pour quelques jours à des prix abordables. Je me suis même rendu acquéreur d'une petite chaloupe, très commode pour l'exploration des rivières, chaulFée par la gazoline, allumée par l'étincelle électrique, ayant un tirant d'eau de trois pieds au maxi- mum, une vitesse de 10 nœuds. Tantôt avec cette chaloupe, tantôt avec une autre, j'ai remonté plus de cinquante rivières de la Malaisie, en remontant un ou plu- sieurs canots malais montés par des indigènes. J'ai également visité un grand nombre d'îles dans les archipels néerlandais. J'ai revu des localités où j'avais vu couper les arbres à gutta il y a plus de vingt années. En maints endroits, j'ai trouvé de nombreux reje- tons, partis des racines des vieux arbres. Mais très souvent j'ai trouvé tous les jeunes arbres, qui n'étaient point encore arrivés à maturité pour l'extraction du latex, également massacrés et gisant à terre. Pourquoi ce massacre, pourquoi cette destruction intempestive, prématurée ? C'est le résultat amené par une industrie nouvelle, très intéres- sante, née pendant mon absence des Détroits, à la suite des missions scientifiques, des explorations de M. Seligman Lui, M. Serulaz, Léonard Wray, D-^ Burk, M. Adolphe Combanaire, MM. Es. Chas- sériau. Cette industrie, que je crois appelée à un bel avenir, quand elle sera placée sur une base solide et rationnelle, a une origine bien française, comme tant d'autres dont nous n'avons pas toujours tiré le principal profit. 594 CONFÉRENCES Dès 1867, réminent professeur M. Yungfleisch sigrialait la pré- sence de la goutta, c'est-à-dire du latex, dans les feuilles des dichopsis, et il indiquait un procédé rationnel pour son extraction. Par la suite, deux procédés ont été simultanément mis en pratique, par nos compatriotes principalement. Le procédé chimique, basé sur la solubilité de la yutta dans diverses substances, telles que le sulfure de carbone, le toluène, le chloroforme, la g^azoline, consiste à traiter les feuilles à l'état sec, par une élimination de la substance lij^neuse et la séparation de la g-utta à l'état soluble, laquelle est ensuite mise en liberté par la volatilisation de la substance chimique employée. Le second procédé, dit mécani(|ue, repose en principe sur le fait que la gutta a une densité plus légère que leau ; les feuilles à l'état frais, après un travail préliminaire de déchiquetage, de macé- ration et de brojag-e sont traitées par l'eau bouillante dans des chaudières. La gutta surnageant est recueillie, nettoyée par un laminage et mise en pains quand elle est encore chaude. Je ne puis entrer dans les détails de fabrication par l'un ou l'autre procédé. Cela m'entraînerait trop loin. Le procédé chimique permet de traiter les feuilles de gutta dans les usines d'Europe, puisque les feuilles doivent être à l'état sec : 3 pikuls de feuilles fraîches donnent un pikul de feuilles sèches. La première usine fut celle de Chessy, près Orléans; la seconde, celle de Lembecq, près Bruxelles; la troisième, celle du Havre; une quatrième, en Angleterre; une cinquième, à Sarawak, Bornéo. L'usine du Havre esta ma connaissance la seule en existence, et je lui souhaite longue vie et prospérité, en dépit des obstacles qu'elle pourra rencontrer et quelle surmontera grâce à l'énergie bien connue de son directeur et de ses collaborateurs. Quant au {)rocédé mécanique, il exige impérativement le traite- ment sur place puisque les feuilles sont traitées à l'état frais, c'est- à-dire avant la dessiccation complète, laquelle rend presque impos- sible l'élimination de la gutta autrement que par l'emploi de dissol- vants chimiques. Le premier essai, (jui n'a guère dépassé la limite d'expériences rudimentaires, fut fait à Singapore, d'une manière concluante par un modeste mécanicien français, nommé Arnaud, mort à la peine, vers liSÎM». Son continuateur fut M Ledeboer, docteur es sciences, Fac. Paris, ancien préparateur de physique à la Sorbonne, ex-direc- LE CAOUTCHOUC EN MALAISIE 595 leur de la Lumière électrique. Il installa dVibord, en 1897, une petite usine assez primitive à Pasir Panjang, dans l'île de Singa- pour (2 ou 3 pikuls par semaine Eastern extension). Puis il forma ime société avec l'aide de colons hollandais de Deli Sumatra et fonda la première usine importante à Bourou, dans l'île de Bentam, dans l'archipel de Riow. Puis après avoir vainement cherché des capitaux en France, il réussit à intéresser à sa fabri- cation mécanique de la g-utta-percha des familles des financiers de Hollande, son pavs d'origine. C'est en 1900 que fut créée la Néder- landische G. P. Maatschapij, au capital de 3 millions de florins. Cette compag-nie a fait construire à Pasir Panjang^, à dix kilomètres de Singapore, un très g-rand établissement, lequel fut inauguré il y a environ huit ou dix mois. Installations de chaudières, machines, eau douce, eau de mer, wharves, flottille. Dès à présent, cette nouvelle usine, pour les opérations de laquelle rien n'a été éparg'né, me semble devoir être assurée d'un insuccès. Et voici pourquoi : Pour rémunérer le capital et payer les frais de l'entreprise, il faut arriver à une production minima de 1.000 pikuls de gutta-percha par an. En calculant le pikul à 350 dollars, ou 700 francs, cela fait une recette de 700.000 fr. En admettant que le profit soit de 50 °/o, 350.000 fr. représentent l'intérêt à 5 '% d'un capital de 3.000.000 de florins ou 6.300.000 francs. Par le procédé mécanique, dont le rendement est bien inférieur à celui du procédé chimique, il faut pour obtenu^ un pikul de g-utta ((iO kilog-rammes) environ ()0 pikuls de feuilles, soit 3.600 kilogrammes de feuilles fraîches. La manufacture de 1.000 pikuls de gutta nécessite donc un appro- visionnement de 3.600.000 kilog-rammes de feuilles à l'état frais, par année, 300.000 kilog-rammes par mois, 10.000 kilog-rammes, soit dix tonnes par jour! En calculant une moyenne de 10 kilog-r. de feuilles par arbre, il faudra faire faire la cueillette de 3()0.000 arbres par une armée de deux mille individus. Il faudrait une flot- tille org-anisée de chaloupes à vapeur pour apporter ce fret volu- mineux à l'usine. Pour que les feuilles arrivent à l'état frais, c'est-à-dire dans les cinq jours, il faudrait que les approvisionnements fussent possibles à proximité des rivières. Or, Messieurs, tous ces éléments lont 396 CONFERENCKS défaut, ou à peu près. Il est impossible aujourd hui dassurer réi^u- lièrement un approvisiounenient de cette importance. Au prix de trois dollars le pikul de feuilles fraîches, prix très élevé, ([ui met la matière première au chillVe de 180 dollars, ou iOO fr. par pikul, non compris les frais de transport, il est désormais impossible de se procurei- régulièrement 200 pikuls par mois, c'est-à-dire 12.000 kilo- grammes, alors qu'il faudrait être assuré de 10 tonnes par jour, de 300.000 kilogrammes par mois. La cueillette et l'exportation des feuilles est interdite aujourd'hui dans la Malaisie britannique, c'est-à-dire dans presque toute la péninsule. Elles sont autorisées dans les archipels et les grandes îles néerlandaises, Bornéo et Sumatra. Mais comme je l'ai dit tout à l'heure, toutes les parties accessibles de ces îles sont presque épuisées. La population malaise, d'ailleurs très fainéante, est très clairsemée. Les collecteurs de feuilles sont très peu nombreux et méritent peu de confiance. Quand une famille aura fourni 100 pikuls. elle se trou- vera à la tète de 300 dollars, une fortune pour ces gens-là, et ils ne travailleront plus de l'année. Et puis il y a la concurrence des feuilles sèches. Le Malais préfé- rera toujours livrer des feuilles sèclies \A\\ibi que des feuilles fraîches. Il lui sera plus facile de pratiquer la fraude en mélangeant les espèces d'aspect similaire et de rendement nul. Il j^ourra travailler à loisir sans se préoccuper d'une livraison rapide. Et puis le trans- port des feuilles fraîches, très volumineuses, est extrêmement difficile et pénible dans la forêt vierge, au milieu de renchevêtrement des lianes et des rotins. Pour les feuilles sèches, la difficulté est dimi- nuée d'un tiers. Le Malais dans les archipels, le Dajak à Bornéo, préfèrent un travail plus aisé, plus rémunérateur, celui de la saignée des arbres à caoutchouc, des gutta dites inférieures, comme le jelu- tong, dont les Etats-Unis font une énorme consommation. Après avoir suivi cette question des feuilles pendant c|'uatre années, j'en suis arrivé à cette conclusion, Messieurs, à savoir (pi il n'y a pas d'industrie durable possible ayant })oiir objet l'extraction de la gutta des feuilles, sans assurer un approvisionnement régulier, indéjîcndant de toutes les vicissitudes exposées ci-dessus, par des plantations (h- dichopsis à jjroxiniité de l'usint', s'il s'a;/it de mani- puler les feuilles f miches. (^uant aux usines (pii travaillent en lùirope, les feuilles sèches LE CAOUTCHOUC EIN JJALAISIE 597 par (les procédés chimiques, elles auront tout avantag-e à créer aussi leur matière première par les plantations. Dans le voisinag-e de leurs cultures, elles auront une petite usine où on fera une pré- paration préliminaire de la matière première, d'après le procédé de M. le professeur Yungfleisch. Au lieu d'exporter des feuilles sèches, qui représentent un volume et par suite un fret énorme par com- paraison avec l'article manufacturé, 100 pikuls de feuilles sèches donnant au maximum sept pikuls de gutta, on exportera de Malai- sie un compost, sous la forme de briques, contenant au moins 25 % de gutta. Le fret sera donc réduit dans la proportion de quatre pikuls de matière première pour un pikul de gutta, au lieu de 100 pour 7, c'est-à-dire 14.3 pour un. La question c|ui se pose est-celle-ci : Est-il possible d'établir une plantation d'arbres à gutta de dichopsis comme on plante le caféier, l'arbre à thé, la canne à sucre, le manioc, ou tant d'autres cultures tropicales? Je suis en mesure de répondre par l'affirmative. J'ai d'ailleurs payé assez cher mon expérience, ayant eu le contrôle d'une con- cession de 10.000 hectares dans l'Etat malais de Johore où je me suis livré à des études très minutieuses et quelque peu dispen- dieuses. Si l'on pouvait aisément se procurer en grande quantité des graines de dichopsis, la solution serait très simplifiée. Malheureu- sement les graines sont très rares, pour ne pas dire introuvables. En quatre ans, je n'ai pu m'en procurer que quelques centaines provenant de Sarawak. Les graines ne conservent leurs facultés germinatives que pendant une quinzaine de jours. Celles que j'ai mises enterre ont germé dans la proportion de 80 "/o. J'avais ainsi en pépinière environ 300 arbustes qui. en deux mois, mesuraient 20 centimètres environ et portaient de quatre à cinq feuilles. Elles sont restées à Johore, sans que j'aie reeu de leurs nouvelles depuis. Mais à défaut de graines, il y a la transplantation et le bouturage, et aussi le marcottage. La transplantation est tout ce qu'il y a de plus jîratique, en rai- son de la facilité avec laquelle on peut se procurer de jeunes arbustes, à un prix abordable. 11 faut tout d'abord choisir, pour la plantation, un district à gutta, où les dichopsis sont répandus en grand nombre, quoique irrégulière- 598 CONFÉRENCES ment. C'est ce que j'avais fait àPunchor — c'est le nom de la conces- sion dont je parlais tout à l'heure, (^ette concession était traversée en partie par sept grands cours demi, naviles par chaloupes à vapeur , tous perpendiculaires à la i^rande rivière de Johore kujuelle formait une frontière occidentale et me rattachait à Sin<^a- pore, à une distance de quarante kilomètres. J'avais préalablement remonté toutes ces rivières, en compagnie de vieux Malais du pays, tous botanistes consommés, hommes du bush, comme on dit là-bas, au courant de tous les mystères de la forêt. Oh! Messieurs, les joies de l'exploration en pays équatorial. Comme l'on se trouve récompensé de quelques fatijjues et d'un menu plutôt sommaire, lorsque, comme par enchantement, on se trouve tout d'un coup, après avoir franchi les palétuviers, après avoir escaladé les troncs d'arbres abattus, coupé les lianes et les rotins, en présence d'un dichopsis, de 10 dichopsis, quelquefois de 100 dichopsis, une pépinières naturelle, (^es 100 dichopsis je les ai vus et revus en cent endroits dill'érents ; quelquefois ils étaient niille et plus. 11 fallait voir l'enthousiasme d'Adolphe Combanaire, riiistorien du pays des coupeurs de têtes, qui m'accompagna dans plusieurs prospections à Punchor. Ce fanatique de la gutta faisait plus que contempler les dichopsis : il les sentait, les flairait, les l^alpait, les caressait... Il eût été si facile, dans ce district privilég-ié de Punchor, d'éta- blir une plantation réj;;ulière de 3 à 400.000 arbres des meilleures espèces de g'utta, tant avec les existences reconnues c(u'avec l'im- portation déjeunes arbres de Bornéo, et que par le bouturage. J'ai fait plusieurs essais de transplantation qui ont parfaitement réussi. J'ai été moins heureux avec les boutures que j'ai tentées. Mais le bouturage des dichopsis est aujourd'hui un problème parfaitement résolu, l^t c'est en Europe, à Bruxelles, dans les serres de l'Horti- cole coloniale; à Merxem, près d'Anvers, (|ue le bouturage en grand a été enfin obtenu l'année dernière, avec des plantes mères importées de Sembas, Bornéo. Il s'est même formé une société, cpii s"ap[)elle la Compagnie du jiarito, et (pii a déjà expédié 10.000 boutures^ en parfait état, à destination du Congo. 90 "/„ arrivées en bon état. Ce magnili([ue résultat me paraissait impossible. Le prospectus du Barito me laissait scepti(jue. Or, mercredi dernier, il y a huit jours seulement, j'ai voulu me rendre conqjte par moi-même des résultats annoncés. J'ai pris le train pour la Belgicpu;. Je suis allé tout droit LE CAOUTCHOUC EN MALAISIE 599 aux serres de Merxem, faubourg- d'Anvers. Il n'y restait que quelques plantes. Le .stock important des boutures de diehopsis avait été déménag-é sur Bruxelles. Sans désemparer, je pars pour Bruxelles, appréhendant une nouvelle fuite des ^utta. Dieu soit loué! 4.000 boutures en parfait état s'étalaient, dans la serre de r Horticole coloniale, au parc Léopold. Ce qui ne m'a pas le moins surpris, c'est que ces boutures avaient été transportées de Merxem à Bruxelles, en bateau, sur un canal, par une température glaciale. De plus, à ma grande surprise, la température de la serre n'était, lors de ma visite, que de 14" centigrades. Et j'avais toujours cru que 20° de chaleur étaient insuffisants pour la vie des diehopsis. Mais alors, avec 14^, on pourrait acclimater ces arbres en Algérie et en Tunisie, peut-être sur la Riviera. Je considère l'expérience de Belgique comme tout à fait con- cluante. La multiplication des arbres par bouturage pourra, par des procédés identiques, se faire en Malaisie, aussi bien qu'en Belgique. Il n'y manque que des jardiniers belges. 11 existe déjà, Messieurs, des plantations régulières d'arbres à Gutta-Percha, Palaquium et diehopsis, Payenna Leerii. Mais elles sont l'œuvre d'un gouvernement. Je veux parler de celles du Jardin d'essai de Buitenzorg, près Batavia, dans l'île de Java, et de ses dépendances de Poerwokerto, de Tjikeumeuh et de Tjipetir. Dans la première, on a planté dès l8o6 environ 2.000 plants de Palaquium oblongifolium, provenant de Bornéo, district de Pontia- nak, sur la côte ouest. Aujourd'hui les arbres ont une hauteur c|ui varie de 12 mètres à 20 mètres et une circonférence de i mètre à 1"' 20. Il paraît que les graines y sont abondantes, ce qui permet- tra de réaliser le plan du Gouvernement des Indes néerlandaises, l'extension de la plantation de Tjipetir, à laquelle 1.500 hectares sont affectés. A raison de 200 arbres de Palaquium oblongifoliuni par hectare, la plantation en voie de formation sera de 300.000 arbres. Il m'eût été possible de réaliser à Punchor ce que l'on est en train de faire à Tjipetir. J'avais un terrain infiniment meilleur et de grands avantages au point de vue des transports, de la transforma- tion et de la multiplication. Je m'étais assuré d'un approvisionne- ment important de plants et de graines de Sarawak et de Sumatra. Il ne m'a manqué qu'une chose : c'est le budget de la colonie néer- landaise. Je n'ai point réussi à intéresser des capitalistes français dans mon tiOO COiNFKRRNCES projet de plantation à Punchor. C'est que cette affaire ne donnait à espérer des résultats rén^uuérateurs qu'après un minimum de o ou 6 années. Or les capitaux aiment à être rémunérés rapidement et périodiquement, sans aléa. Etant donné qu'il faut attendre o ans avant que les arbres donnent une récolte en feuilles, pour alimenter une usine, la nécessité s'im- pose, pour une entreprise particulière, d'inaugurer parallèlement à la plantation des Dichopsis une autre culture, une autre industrie immédiatement rémunératrice, comme par exemple une exploitation de forêts, le g-ambier, le poivre, les ananas; les plantes aromatiques à huiles essentielles : patchouli. Limon grass, citronnelle. C'est ainsi qu'opèrent, dans la région malaise, les planteurs d'arbres à caoutchouc : Ficus elastica et Hevea bresiliensis. J'ai visité de nombreuses plantations tant dans les Etats fédérés malais, de la péninsule de Malaisie, que dans la riche province de Déli, à Sumatra. Dans les Negri Sumbilem, j'ai vu ces plantations menées de front avec des cultures de manioc (pour le tapioca), d'ananas, de gam- bier, etc. Dans l'Etat de Selangore, plus de 20.000 hectares d'anciennes plantations de café cèdent progressivement la place à l'Hevea Bre- siliensis. Les caféiers sont encore en rapport; mais le jour n'est pas éloigné où le caoutchouc, de la qualité para, constituera l'unique rendement. A Perak. et dans la province Wellesley, il est peu de plantation de canne à sucre ou de manioc qui n'ait également, comme réserve de l'avenir, sa plaiitation de caoutchoutiers. Dans son rappr)rt annuel de l'année 1901, le Résident général des Etats fédérés malais, l'honorable M. Treacher, s'exprime ainsi qu'il suit : « Non seulement nous avons à enregistrer les promesses qui résultent de la saijniée des arbres à caoutchouc, Para et Rambong, nous pouvons attendre des rendements extrêmement rémunérateurs. Il est impossible à tout visiteur attentif de ne point reconnaître la merveilleuse croissance des plantations dans presque tous les dis- tricts de la Presqu'ile, et principalement de celles situées sur les ter- rains d'alluvion bien drainés dont nous avons une si grande étendue. « Durant Tannée écoulée, deux experts en caoutchouc bien connus ont visité Selangore et les Negri Sumbilan, et ils ont affirmé qu'ils n'ont vu nulle part une meilleure croissance et ils ont manifesté LE CAOITCHOLC EN MALAISIE 601 leur surprise de l'énorme rendement obtenu en latex par unité de nos jeunes arbres livrés à la saignée. Il n'y a pas de doute que nous sommes en présence d'une indus- trie nouvelle de grand avenir et que la Péninsule malaise enlèvera au Brésil la première place qu'il occupe aujourd'hui comme contrée productrice du meilleur caoutchouc. C'est là une prophétie auda- cieuse, mais elle est justifiée par des indications sérieuses. Messieurs, il y a vingt années, le Gouverneur anglais de Ceylan prédisait aux planteurs de cette colonie, victimes de la maladie des caféiers, que l'arbre à thé les relèverait de la ruine et qu'ils dépas- seraient la Chine comme producteurs de thé. Cette prophétie est aujourd'hui justifiée. Je cvois pour ma part à la réalisation prochaine, dans deux ou trois ans au plus, de la récente prophétie de M. Trea- cher. Le caoutchouc sera, en Malaisie, la revanche du café, comme le thé l'a été et l'est encore à Ceylan. Trois millions d'arbres d'Hevea Bresiliensis produiront en 1900, dix millions de livres de caoutchouc para, parfaitement pur, translucide comme de la gelée de coing et d'une valeur de près de cent millions de francs, si les cours actuels se maintiennent. A ces résultats attendus et même escomptés des plantations d'Hevea bresiliensis viendront s'ajouter le rendement d'un million d'arbres de J^icus elastica, en malais gutta ramboun, en anglais India rubber. Reste la culture des arbres à gutta-percha, des dichopsis, qui, j'en suis sûr, ne tardera pas à être entreprise par l'initiative privée. Le Gouvernement anglais se borne pour le moment à organiser un service forestier, à protéger par le déblayage les arbres existants, à préparer pour le bouturage et la transplantation futurs les pépinières naturelles, très nombreuses dans les Etats fédérés, et surtout à Pérak. J'ai exploré au mois de juin dernier, avant de quitter la Malaisie, un district plus riche que Punchor, par le nombre et par la qualité des arbres exis- tants. C'est le seul endroit où les feuilles, à l'analyse, dépassent le rendement de 9 °/o. Mais il est défendu d'y toucher. Cette interdiction ne sera levée que pour un concessionnaire qui prendra l'engagement de créer une plantation régulière, sous le contrôle du service des forêts, et qui donnera la garantie d'une exploitation rationnelle. J'ai mentionné tout à l'heure les plantations de caoutchouc à Déli. province de Sumatra, célèbre par son énorme production de tabac, dans laquelle nos compatriotes ont eu une très large part. Là encore, à Sumatra, les Hevea Bresiliensis et les Ficus elastica se Bulletin du Jardin colonial. ^^^ 602 CONFÉRENCES multiplient dans le voisinati^e des champs do tabac; et des caféiers. .Tai conduit, il v a deux ans, dans ce district, et jusque dans les hauteurs de Serdanj^, en plein pays BattaU, M. Prud'homme, inspec- teur de Tag-riculture à Madagascar, alors en mission dans la Malaisie. Les caoutchoucs de Malaisie ont en ce moment un très mauvais renom sur les marchés de Londres^ de Paris, d'Anvers et de Ham- bourg. Cela tient, non à la qualité possible de ces produits, mais à la malhonnêteté des Malais qui livrent un article impudemment mélangé de corps étrangers. Aussi quand des acheteurs de caout- chouc ont constaté des pertes de 35, 50 et même 75°/o d'impuretés par le laminage des provenances dites Burneo Rubber, India Rubber, ils baissent considérablement leu,rs prix quand ils font un nouvel achat. Le résultat e.st que nombre de maisons européennes de Singapore refusent de s'occuper de caoutchouc et découler en Europe les produits sophistiqués des Malais. C'est ainsi que les exportations d'india Rubber, produit du Ficus elastica, qui étaient de 13.000 pikuls en 18*JS, sont tombées à 6.000 en 1900 et à 1.000 seulement en 1901. Le Bornéo Rubber, produit des lianes d'Urceola et de Willougbeia, pour le même motif de sophistication éhontée, est tombé de 16.000 pikuls en 1898 à 8.000 en 1901 , soit une diijiinution de oO "/o. Les Malais tiniront peut- être par reconnaitre qu'on ne trompe pas impunément les industriels européens. Actuellement, ils mélangent de la pierre, de la terre, des écorces au caoutchouc qu'ils récoltent. Ils s'étonnent ([ue leur marchandise ne trouve pas preneur à bon prix. Contraints de l'abandonner à vil prix à quelque marchand chinois, ils renoncent à la récolte du caoutchouc et vont chercher de la gomme Damar, du jelutong ou des rotins. Le Chinois n'est pas moins fripon que le Malais, mais il y met des formes. Il sauve les apparences. S'il altère les produits naturels, il se gardera bien d'y introduire des corps étrangers qui révéleront sa mauvaise foi. Il a le génie des mélanges, et il les pratique savam- ment en ce ({ui concerne la gutta-percha dont il a su monopoliser le commerce. Des 4.440 tonnes de gutta-percha exportées de Singapore en 1901 à destination de l'Europe et de l'Amérique, il n'y a pas dix tonnes qui n'aient point passé par l'étuve chinoise, qui n'y aient pas été triturées, manipulées, transformées par un savant dosage de (|ua- lités bonnes, médiocres et inférieures. Mais l'apparence et la couleur LE CAOUTCHOUC EN MALAISIE 603 voulues s'y trouvent. Les marchands européens n'y connaissent rien. Leurs achats sont faits par les compradores chinois (jui s'en- tendent avec les détenteurs de la g-utta comme larrons en foire. Un fait caractéristique, c'est que les exportations de gutta-percha dépassent de 23 7o les importations à Singapore. Et comme la ville n'en produit pas, cette majoration d'un quart reste le secret et le profit du Chinois, Or le quart de ving-t-huit millions de francs, c'est sept millions que le g^énie chinois a su faire sortir du néant pour entrer dans sa poche. Je puis garantir, d'autre part, que sur les vingt millions restant, le tiers à peine a suffi à payer les récolteurs de gutta, Malais, Dayaks, Battacks et autres travailleurs de la forêt vierge, tous indignement exploités par les Chinois. J'ai reçu de Singapore, tout dernièrement, un très intéressant échantillonnage des principales variétés de la gutta-percha du com- merce, avec les indications des provenances, des qualités et des prix. Ces échantillons ne sortent pas de Tétuve méphistophélique d'un Chinois du cru. Ils ont été préparés et déterminés par le D'" Ledeboer, notre compatriote par naturalisation, le promoteur de 1 industrie de l'extraction de la gutta-percha des feuilles fraîches. Il s'y trouve un échantillon de sa fabrication. J'ai le plaisir d'offrir à l'Ecole d'agriculture coloniale, pour ses collections scientifiques, ces deux boîtes de spécimen, comme sou- venir de cette causerie et en reconnaissance de votre bienveillante attention '. 1. M. de Jouffroy d'Ahhans a lerminé xa conférence par une vinfflaine de projec- tions Imnineuses, vues de la forêt vierge de Malaisie, de pliinlalions, spécimens de diverses variétés guttifères et câoutchoutifères. CONFEREA'CE TAITE A L ECOLE SUl'ERIEURE D AGRICUL lUUE COLUMALE PAR M. HENRY Iiifjcnicur agronome^ chargé de mission. Messieurs, Mon premier devoir et mon plus grand plaisir en commençant cette conférence est d'adresser ici mes remerciements les plus sincères au Directeur de cette école, M. Dybowski, inspecteur o^énéral de l'ag'riculture, dont les conceptions économiques et une initiative des plus persistantes ont présidé à l'élaboration et à Taccompliseement de la mission dont M. le Ministre des Colonies a bien voulu me charger. La mission se composait, indépendamment du chef, d'un de mes amis, M. Puech, ingénieur agronome, et d'un noir, ancien stagiaire du Jardin colonial, Ali liounda. Son l^ut princi])al était de continuer Fœuvre déjà ébauchée, mais mal dirigée, de la mise en valeur coton- nière du Soudan Français. Ce n'était que la seconde partie d'une mission d'ensemble élaborée et préparée sous les auspices de M. Cjuy, alors chef de service des missions, aujourd'hui Gouverneur du Sénégal, à qui je tiens à témoigner toute ma reconnaissance. La première partie de la mission s'était déroulée dans les Etats cotonniers de l'Amérique du Nord et avait eu pour but l'étude approfondie des procédés culturaux et des variétés de coton utilisées dans ces régions. Bien entendu, nous avons, dans cette longue tra- versée de Conakry à Tombouctou, recueilli, en dehors de cette ques- tion spéciale, une fouhî de renseignements techniques intéressant les dillei-entes cultures en usage ou possibles, ainsi que les produits susceptibles de donner lieu, pour la culture ou le commerce, à des opérations fructueuses. Les conclusions délinitives de ces études ne pourront être déduites que lorscpu; j'aurai [)u terminer ou faire terminer les exper- tises et analyser des échantillons que je rapporte. Je ne manquerai pas de vous tenir, par le Bulletin du Jardin Colonial, au courant de ces différents travaux. CONFÉRENCE DE M. HENRY 605 Je classerai les produits divers que fournissent les colonies de la Guinée, Soudan, Sénégal, en deux catégories : ceux de consomma- tion locale et ceux d'exportation. Parmi les premiers, il en est beaucoup cités par des missions antérieures qui n'ont qu'un intérêt purement scientifique ou local, mais si restreint que leur étude doit être laissée de côté. Dans cette catégorie, je classe notamment le bourgou, le zanguèné, plantes saccharifères; rousinifî,le yabèré, tubercules comestibles, et beaucoup d'autres dont on s'est en France exagéré de beaucoup l'importance, mais qui, en réalité, ont surtout fait l'objet d'études botaniques et d'articles coloniaux. A côté de ceux-ci, il en est d'autres très intéressants, notamment: 4° Le cheval, dont la consommation tant au Soudan que dans le nord de la Guinée est considérable. L'élevage n'en fournit que fort peu et les produits sont rarement beaux, presque toujours chers. Dans le Soudan, qui est le pays de production par excellence, un cheval de bonne conformation ne se paye pas moins de 500 à 600 francs. Les étalons atteignent et dépassent 1 .000 francs. Pour en favoriser la production, un dépôt d'étalons a été établi à la station d'essai de Koulicors ; malheureusement, si cette station est admirablement choisie au point de vue cultural, elle ne convient nullement à ce genre d'opérations, l'humidité y étant considérable. Dans la région de Touba et de Banemba notamment, centre impor- tant de production, l'opération serait très fructueuse. 2° Dans le même sens, l'élevage des bovidés pourrait recevoir des améliorations considérables, principalement en ce qui concerne l'alimentation et la production du lait. 3° Le blé, dont la production dans la région des Daounas, du marigot de Goundam et de Gas, suffirait à alimenter en partie de farine fraîche l'intérieur de la colonie. De grands efforts ont été ten- tés pour mener cette idée à bien ; s'ils n'ont pas abouti, la raison en est peut-être dans le manque de direction ou un mauvais choix de l'époque des transports, ce qui a amené la décomposition du srain, avant son arrivée au Koulicoro. L'utilisation de cette denrée est indiscutable ; une plus forte pro- duction dépendra des mesures que l'on prendra et de la contmuité des efforts faits dans ce sens. 4° Le mil, qui du jour où l'on pourra utiliser l'alcool sous une forme quelconque dans la colonie, en sera le seul producteur vrai- 606 CONFÉKE.NCES ment économi([ue. C'est une matière première produite en quanti- tés énormes, qui ne fera jamais défaut, et dont le traitement est simple et peu coûteux. On a souvent, dans le même but, préconisé l'emploi de plantes à sucre, telles que le bourgou. Mais, outre que les grandes étendues de hourgou se trouvent loin des centres d'habitation, que la récolte demanderait des frais de main-d'œuvre énormes, il serait néces- saire d'avoir une installation ambulante complète et coûteuse pour traiter une matière peu riche en sucre; d'ailleurs, le combustible ferait promptement défaut. Le bourg-oune sera jamais utilisé que par les noirs qui en font par petites quantités une boisson fermentée, le koundou hari. Dans la catégorie des produits d'exportation, nous trouvons des questions véritablement bien intéressantes : 1° Au premier rang, je place le caoutchouc, dont l'exportation est une des plus anciennes et procure les bénéfices les plus élevés. Beaucoup de cercles, notamment en Guinée (Siguiri, Kouroussa, Kankan) et le Soudan intérieur, possèdent encore un nombre consi- dérable de lianes, et il est indiscutable que dans les cercles où les commandants ont tenu la main à la bonne exploitation des lianes en rendant responsables les chefs de villag-es des lianes mortes ou épuisées, les ressources sont infiniment plus grandes que dans les régions où l'indigène les exploite à sa fantaisie. Les réserves de lianes ont été considérablement épuisées ou détruites, et à l'heure actuelle, les fortes caravanes de caoutchouc proviennent en grande partie des parties reculées du Soudan ou de l'hinterland de la Côte d'Ivoire. Or, il ne faut pas songer à acclimater dans ces colonies d'autres plantes à caoutchouc que les divers types de lianes y existant natu- rellement : L. lleudelotii pour le Soudan, Sénégal, Guinée, Côte d'Ivoire ; L. Ovariensis et autres pour le Congo. Les essais en cours nous apprendront sous peu si la culture directe en taillis est vraiment fructueuse, mais en tout cas une précaution s'inqjose d'une façon absolue, c'est le repeuplement par les indi- gènes des lianes à caoutchouc et la surveillance de leur exploitation. 2" La gomme, qui ne constitue (ju'un produit commercial et dont la |)ro(fuction ne peut être ni améliorée, ni augmentée parles procé- dés culturaux. Des espaces considérables sont couverts d'acacias gommiei's d.'ins la région comprise sui- les l'ives du Niger, au sud de CONFÉRENCE DE M. IIENRî 607 Tombouctou. Ces arbres ne sont pas exploités faute de main-d'œuvre, et il est difficile de prévoir le moment où ils le seront. 30 Le coton, dont on a beaucoup parlé jusqu'ici, mais dont on a dit peu de chose au point de vue cultural et industriel, si ce n'est des inexactitudes. Je me suis tout particulièrement occupé de cette question que je considère, avec le caoutchouc, comme l'avenir de ces contrées. Il a été démontré que le coton indig-ène, tel qu'il est, sans aucune amélioration, était vendable à un prix rémunérateur. Il restait à étudier à quel moment des industriels pourraient véritablement s'occuper de la question et ce qu'il y avait à faire jusque là. J'ai constaté avec un infini reg'rêt qu'aucun essai suivi n'avait été tenté jusqu'ici et que la tonne des semences soigneusement choisies que j'avais rapjiortées de ma mission aux Etats-Unis avait été égarée. Aucune tentative d'amélioration des variétés indigènes n'a été également faite, de telle façon qu'au point de vue cultural aucune conclusion ne permet de diriger la question dans un sens ou dans l'autre. Au point de vue industriel, l'échec éprouvé à Kayes était piteux, mais était à prévoir. J'ai fait à Saint-Louis, sur la question, à MM. les Membres de la Chambre de Commerce, une conférence où je leur ai exprimé sans ambiguïté et mes déceptions et mon espoir. Je leur ai démontré, chiffres en mains, que lorsque la voie ferrée atteindrait Koulicoro, un commerçant pouvait apporter sur le mar- ché du Havre la tonne de coton, avec un bénéfice net d'au moins cent francs. Les affaires traitées sur le coton ne se faisant jamais que par centaines de tonnes, cela constitue pour une entreprise im revenu qui est loin d'être à dédaigner. D'ici à ce que les voies de communications soient terminées, le travail ne manquera pas ; on n'aura pas trop de temps, peut-être même pas assez, pour élucider le problème cultural qui reste dans son entier. 4° L'indigo, 'qui, quoi qu'on en dise, n'est pas à mon avis complè- tenient perdu. M. Faure, le directeur de la mission Devès et Chau- met, m'a assuré qu'il trouvait preneur d'indigo indigène au prix de dix francs le kilogramme. Ce prix serait certes très rémunérateur et permettrait même la culture directe ; mais l'opération ne serait à tenter que dans le cas d'une installation simple et peu coûteuse, car si les prix viennent à baisser, la perte sera peu élevée et ne por- 608 CONFÉRENCES tera jamais que sur une culture annuelle qu'il est facile de rem- placer. S" La ^omme copal. qui existe en assez grande abondance dans le sud de la Guinée, notanmient sur le bord du Konkouié. 6" L'élevage des bovidés, qui, avec le caoutchouc, forme la richesse de la Guinée. L'exportation des bœufs et des vaches vers les colonies voisines constitue dans cette région un commerce important. 7" La culture des fruits tropicaux, bananes, ananas, papayes, litchi, etc., qui peut se faire depuis la région des Niayes (Sénégal) jusque sur les côtes de la Guinée. Une association munie de capi- tauxassez considérables pourrait installer en dilîérents points de la côte des cultures qui, en quelques années, pourraient contre- balancer la production des Canaries, au point de vue de la quantité et surtout de la qualité. Cet essai est tenté actuellement, mais ne paraît pas être mené avec toute la décision et la compétence néces- saires. Telles sont. Messieurs, les principales observations que j'ai pu faire dans le cours de ce voyage ; je me suis attaché à vous les décrire d'une façon absolument impartiale, et si ces quelques obser- vations peuvent vous paraître optimistes eu égard aux résultats obtenus jusqu'ici, cela tient à ce que les directeurs agricoles de ces exploitations n'ont jamais été des agriculteurs et à ce qu'ils n'ont pas pu trouver, dans les conseils pratiques qu'on leur a fournis, la compensation du manque d'in.struction technique. Il est légitime de penser que les quelques opérations qui donnent les plus belles espé- rances, une fois bien en main et sagement conduites, récompense- ront largement ceux qui les auront entreprises avec bon sens et avec méthode. Henry. NOTES SUR LA PRÉPARATION DES HERBIERS La confection d'un herbier et son expédition nécessitent un certain nombre de précautions qu'il est très important d'observer ; les échan- tillons botaniques, qui arrivent au Jardin Colonial, y parviennent trop souvent en mauvais état, par suite d'une préparation insuffisante ou d'une expédition défectueuse; souvent aussi, ils sont incomplets, et partant indéterminables. Nous voudrions, en quelques lignes, rap- peler aux collecteurs de plantes les soins qu'ils doivent prendre pour la constitution des herbiers, soins faute desquels de très louables efforts et de long-ues fatigues peuvent rester sans résul- tat. L Récolte de plantes. — On doit mettre en collection des échan- tillons complets autant que possible ; il est relativement rare, que par l'examen d'une feuille ou d'un fragment de tige, on puisse arriver à la détermination spécifique ; celle-ci, encore possible pour les plantes de nos régions, dont l'anatomie est bien connue, et pour lesquelles les documents fourmillent, devient d'une difficulté très grande lors- qu'il s'ag-it de plantes tropicales encore très imparfaitement étudiées au point de vue de la structure interne. Chacun sait, du reste, que les descripteurs basent les espèces d'après l'examen morphologique de tous les organes, et que, par conséquent, pour déterminer un végé- tal il faut pouvoir en examiner tous les membres, non seulement les fleurs, mais encore les feuilles, les fruits et même les racines. Ces différentes parties ne sont pas toujours faciles k réunir, si l'on a afîaire k un arbre élevé : un coup de fusil adroit pourra détacher de la couronne de cet arbre la fleur convoitée. Il est bon de recueillir, quand on le peut, fleurs et fruits k divers états de leur développe- ment ; certains stades de la ditférenciation morphologique peuvent en en effet donner des indications intéressantes; ainsi la fleur en jeune 6 1 0 NOTES bouton fournit clans les dispositions de la [)rélloraison des caractères qui disparaissent lorsqu'elle est conq^lètement épanouie. Pour ce qui est des feuilles, il faut voir si la plante en possède un système polymorphe, si leur mode d'insertion et U'ur disposition sont les mêmes sur les dill'érentes réj^ions de la tig-e, si, par exemple, les feuilles ne sont pas verticillées à la base et alternes au sommet. Les racines sont-elles tuberculeuses? sont-elles grêles? partent-elles d'un rhizome ? il faut le noter et en prendre un échantillon. II. Pképaration des échantillons. — 1° Dessiccation. — Le but principal de la préparation doit être d'obtenir une dessiccation com- plète, afin de se mettre à l'abri du développement subséquent des moisissures. On obtient ce résultat en soumettant les échantillons alternativement à des expositions au soleil et à des compressions entre des feuilles de papier, dans un endroit bien aéré, où l'évapora- tion puisse se faire facilement. La durée relative de ces périodes d'insolation et de compression n'a rien d'absolu, elle varie beaucoup suivant la nature plus ou mois charnue des plantes à préparer. Chaque échantillon doit être placé dans une feuille double de papier paille et soigneusement étalé ; il faut veiller à ce que, sans cassure, les feuilles se présentent par leur face inférieure et par leur face supérieure, les fleurs également par leurs faces supérieure et inférieure, et aussi de profil ; la position naturelle doit pourtant être le plus possible respectée. Si un rameau se refuse à prendre la position qu'on lui veut donner, une petite pierre plate ou une ron- delle de plomb suiîisent pour le maintenir; avec un peu d'habitude, du reste, on n'a pas besoin d'avoir recours à cet expédient. En général, on se sert du papier paille vendu spécialement pour cet usage dans le commerce; il est peu coûteux, et les couleurs s'y conservent fort bien. Mais on peut utiliser tout autre papier, par exemple le papier de journal ', l'essentiel étant de respecter le format universellement adopté de 45 cent, sur 28 centimètres. Il faut toujours veiller à donner aux échantillons frais les dimensions habituelles, car la réduction de leurs dimensions quand ils sont secs est inqiossible, et pourtant la nécessité d'un format identique pour 1. (Jn ne préconise plus comme auti-efois l'emploi de papier non collé absorbant l'iui- niidité : non seulement on a renoncé au jjapier si épais employé par les Anj-lais, mais on se sert beaucoup moins du I)u\ar";;'.;°» 'i'«' PUBLICATIONS DU MINISTÈRE DES COLONIES REVUE COLONIALE Explorations. — Missions. — Travaux historiques et géographiques. — Archives Etudes économiques Un fascicule de S feuilles grand in-8°, parait tous les deux mois PARIS — Augustin CHALLAMEL, Editeur, rue Jacob, 17 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL (France et Colonies) : 1:5 fr. - ' L'Airicilture pratipe ûes Pajs CMiils BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES Un fascicule de S feuilles grand in-8* parait tous les deux mois PARIS — Augustin CHALLAMEL, Éditeur, rue Jacob, il PRIX DE L'ABONN£MENT ANNUEL (France et Colonies) : 20 fr. Annales d^Hygiène et de Médecine COLONIALES PUBLICATION TRIMESTRIELLE ' PARIS — Octave DOIN, Éditeur, place de l'Odéon, 8 PRIX DE L'ABONNEMENT ANNUEL : France et Algérie, 10 fr. — Étranger, 12 fr, Feuille de Renseignements de roffice Colonial PUBLIC A TION MENSUELLE COLONISATION : Exploitations agricoles et industrielles, enquêtes économiques, cLc COMMERCE : Renseignements commerciaux et statistiques ; Avis d'adjudications ; Offres et demandes commerciales ; Mouvement des paquebots ; Listes dei maisons de commerce, de. PARIS — Augustin CHALLAMEL, Editeur, rue Jacob, \1 ABONNEMENT ANNUEL : France, 5 fr. — Colonies et Union postale, 6 fr. UAGRIGULTURE PRATIQUE DES PAYS CHAUDS BULLETIN DU JARDIN COLONIAL ET DES JARDINS D'ESSAI DES COLONIES FRANÇAISES 2" année. Mai-Juin 1903. N° 12. SOMMAIRE DOCUMENTS OFFICIELS Pages Guyane française. — Primes d'encouragement à la culture 633 Congo Français. — Jardin d'essai de Brazzaville. Rapport 633 Guinée française. — Arrêté interdisant la circulation et la vente des caoutchoucs frelatés 635 Madagascar. — Arrêté interdisant la chasse aux bœufs dans la pro- vince d'Antsirabe 636 Circulaire relative aux envois d'échantillons à faire au Jardin Colonial 637 Arrêté supprimant les droits de sortie à l'exception de ceux qui frappent le bétail 638 Arrêté autorisant la création d'une Société pour l'amélioration des races de chevaux .■ • ■ ■ Arrêté promulguant le décret du 19 février 1903 interdisant l'exportation des vaches et génisses 639 ÉTUDES ET MÉMOIRES Le Transport des bois dans les forêts coloniales, par M. Jolyet. 641 Le Ksopo (Poison des Sakalaves), par M. Emile Perrot 675 La Lutte pratique contre la Malaria, par le D"" Loir . . . . 688 Essais de décorlication des riz de Madagascar à la Station d'essai de machines, par M. Ringelmann 697 Le Coton aux Etats-Unis, par Yves Henry {fin) 703 CONFÉRENCE Les Plantations dans le Mayemhé, par M. G. Berthelot du Chesnay. 725 NOTES Rapport de M. Cazalbon sur la soie soudanaise 739 Destruction de la fourmi tamagure, par M. Defontaine 742 Les Insectes, par M. Fleutiaux '^^ CHEMINS DE FER DE L'OUEST PARIS A LONDRES Vin Rouen, Dieppe et Newhaven, par la gare Sainl-Lazare. Services rapides de jour et de nuit t()us les jours (y compris les dimanciies et fêtes) et toute l'année. Grande économie. — Trajet de joiu" en t) heures, 1" et 2« classes seulement. Billets simples, valables 7 jours. l'« classe : 43 Ir. 25. — 2° classe ; 32 IV. — H" classe : 23 IV. 25. Billets d'aller et retour, valables 1 mois. 1" classe : 72 Ir. 75. — 2« classe : 52 IV. 75. — :v classe : 41 IV. 50. Départs de Paris {Sainl-Luzitre), 10 h. matin et 9 h. soir. Arrivées à Londres [Loii(Iuii-Ih-i(lc/e\ 7 h. soir et 7 h. 50 matin; {Vicinria), 1 h. soir et 7 h. fiO malin. Départs de Londres (London-Bridge), 10 h. matin et 9 h. soir; ( VicLoria), 10 h. matin et 8 h. 50 soir. Arrivées à Paris {Saitil-Lazare), 6 h. 55 soir et 7 h. 15 matin. Des voitures à couloir (%v.-c., toilette, etc.) sont mises en service dans les ti'ains de niarcc de jour entre Paris et Dieppe. — Des cabines ]iarticulières sur les bateaux peuvent être réservées sur demande préalable. La Compagnie de l'Ouest envoie iVanco, sur demande all'ranchie, des petits guides-indicateurs du service de Paris à Londres. CHEMINS DE FER D'ORLÉANS Billets û'aller et retoir collectifs fle faille En vue de donner de nouvelles facilités pour les déplacements des personnes qui vovagent en famille, la Compagnie d'Orléans vient de soumettre à l'homologation de r.Vdministration supérieure une proposition ayant pour objet de délivrer pendant toute l'année aux familles composées d'au moins trois personnes des billets collectifs de toute gai-e à tonte gare distante d'au moins 125 kilomètres. Les membres de famille admis au bénéiice de ces billets sont : les père, mère, enfant, grand-père, grand'mère, beau-pèi-e, belle-mère, gendre, belle-fdlc, et les sei'viteurs de la famille. Les délais de validité sont les mêmes que ceux des billets d'aller et retour ordi- naires. Les prix s'obtiennent ainsi : ])o\n' les trois premières personnes, prix des billets d'aller et retour ordinaires; pour chaque personne en sus, à partir île la quatrième, réduction de 50 "/„ sur le prix des billets simples applicable aux trajets d'aller et retour. Chacune de ces personnes supplémentaires bénélicie ainsi, par rapport au prix déjà réduit des billets d'aller et retour actuels, d'une nouvelle réduction de 25 •'/„ en 1" classe, et de :M) "/o en 2" et 3" classes. (2es facilités applicables aux dé|)lacements de coui'le durée sont indépendantes de i-clics cjui existent actuellemenl |)our les vacances, les bains di^ mer et les stations ilii'i'malcs; ces dernières sont elles-mêmes améliorées tic la manièrt^ suivante : Les pri.x sont ramenés aux taux îles nouveaux billets ci-dessus, ce qui représente l>our les trois |)reniières personnes une réduction su|)plénientaire de 8,3 •/„ eu 1'" classe, et de 3, 3 "/„ en 2° et 3- classes. La durée de validité (33 jours ou 30 jours) est étendue à 2 mois sans supplémenl et à 3 mois avec suijplémcnt de 20 %• Ces nouvelles facilités dfinnées aux voyages de faniilK-s seront cei-tainemcnt très appréciées. La Compagnie d'Orléans a organisé dans le grand hall de la gare de Paris-Quai- d'Orsay une exposition peruianenle d'environ 1.600 vues artistii/ucs {peintures, eaux- forles, litliographies, photographies) , i eprésenlant les sites, monuments el villes, des régions desservies par son réseau. CHEMINS DE FER DE PARIS-LYON-IVIÉDITERRANÉE VOYAGES CIRCULAIRES A ITINÉRAIRE FIXE Il est délivré toute l'année à la gare de Paris-Lyon, ainsi que dans les principales gares situées sur les itinéraires, des billets de voyages circu- laires à itinéraires fixes, extrêmement variés, permettant de visiter en ire ou 2'* classe, à des prix très réduits, les contrées les plus intéres- santes de la France, ainsi que l'Algérie, la Tunisie, l'Italie, l'Espagne, rAutriche et la Bavière. DEMANDER LES LIVRETS SPÉCIAUX BILLETS D'ALLER ET RETOUR La durée de validité des billets aller et retour émis sur le réseau P.-L.-M. est notablement augmentée. Celte durée de validité est de 2 jours pour la 1'"'' zone jusqu'à 50 kilomètres ; de 3 jours pour la 2*' zone de 51 à 100 kilomètres; elle est ensuite augmentée d'un jour par 100 kilomètres jusqu'à la 13^ zone de 1. 101 kilomètres à 1.200 kilomètres pour laquelle cette durée est de 14 jours. En outre, lorsque le délai de validité d'un billet aller et retour expire un dimanche ou un jour de fête légale, ce délai est augmenté de 24 heures; il osl augmenté de 48 heures lorsque le jour où il expire est un dimanche suivi d'un jour de fête légale, ou un jour de fête légale suivi d'un dimanche. CHEMINS DE FER DU NORD PARIS A LONDRES Via Calais on Boulogne. Cinq services rapides quotidiens dans chaque sens. Trajet en 7 U. — Traversée en 1 h. — Tous les trains comportent des 2«» classes. En outre, les trains de malle de nuit partant de Paris pour Londres et de Londres pour Paris à 9 li. du soir et les nouveaux trains de jour partant de Paris pour Londre» à 3 li. -45 du soir et de Londres pour Paris à 3 h. 45 du soir via Boulogne-Folkestone prennent les voyageurs munis de billets de 3« claf^se. Départs de Paris. — Via Calais-Douvres : 9 li. il h. 50 du nvatin, 9 li. soir. Via Boulogne-Folkestone : 10 h. 50 du matin, 3 li. 45 soir. Départ de Londres. Via Douvres-Calais : 9 h. 14 du malin et 9 h. du soir. Via Folkestone-Boulogne : 10 li. du matin et t li. 15 soir. Services officiels de la poste (via Calais). La gare de Paris-Nord, située au centre des affaires, est le point de départ de tout les giand» Express Européens pour l'Angleterre, l'Allemagne, la Russie, la Belgique, la Hollande, l'Espagiio, le Portugal, etc. CRÉSYL-JEYES Désinfectant - Antiseptique - Parasiticide lo seul d'une Ellitacité Antiseptique scienti- liquenient dénionlrée, ayant obtenu la Méiluille d'Or à V Exposilion Universelle de Paris 1900, la plus haute récompense décernée aux Désinfectanls-Antisepliciues. Acli^plé par les Ecoles Nationales Vétérinaires, les Ecoles d'Ag;riculture. d'aviculture, les serxices d'Hygiène de Paris et des Départements, les Services- Vétérinaires de l'Armée, les Municipalités, Hôpitaux, les Haras, etc. Le « Crésyl-Jcyes » est indispensable pour l'Assainissement et la Désinfection des Habitations et des Exploitations agricoles, pom* assainir et désinfecter les locaux : 'W.-C, Puisards, Fumiers, Ecuries, Etables. — Pour éloigner les Rats et les Souris et toute vermine. Képand\i sur les mares et les Eaux stagnantes, le « Crésyl-Jcyes " détruit les Lar\es de Moustiques et désinfecte en supprimant les miasmes dangereux. Envoi franco sur demande'de Brochure avec Prix-courant et Mode d'emploi. Ilefiiser tout imitalion. — Exiger le nom exact, et les cachets ou plombs de garantie sur tous les Récipients Crestfl-Jet/es, 3"). rue des Francs-Bourgeois, Paris (I^''';. — Télégramme ; Crésyl-Paris. CRÉSYL-JEYES FOULOIRS^PRESSOIRS PRESSES-CONTINUES SIMON Frères *o. Coiistr^-Méc"^ Fondeurs à CHERBOURG NOMBREDSES RÉFÉRENCES — CATALOGUE VIUIFICATION FRANCO GRANDS PRIX PARIS 1900^^ LIBRAIRIE MARITIME ET COLONIALE AUGUSTIN CHALLAMEL, Éditeur Spécialité d'ouvrages sur les Colonies françaises L^ALGÉRIE LES CULTURES COLONIALES Etude des Langues — Voyages — Sciences — Ilistoiie n;diirelle — Droit, elc. Cartes des Colonies françaises et Cartes géographiques diverses. V. VERIVIOREL o.^o.^, coostrocleor, raLEFRANCHE (Rliône) PULVÉRISATEURS ET SOUFREUSES APPAREILS A GRAND TRAVAIL A IIAT KT A THACTION Soliclité TD\xré& — Bon. fonctionnemezit Bouillie instantanée " ÉCLAIR " EcLMR Les nppnreils sont lirrrs nrrr f/aranlii' Torpille Demander Catalogue et nenseignenients à V. VERMOREL, Vil,IJ•:KRA^'ClI^: Rhônc^ PARTIE OFFICIELLE GUYANE FRANÇAISE PRIMES D'ENCOURAGEMENT A LA CULTURE Le Gouverneur p. i. de la Guyane française, Vu Tordonnance organique du 27 août 1828, Vu l'arrêté local du 28 juin 1902 modifiant l'article 4 de celui du 27 octobre 1900 portant institution, à la Guyane française, des primes d'encouragement à la culture et aux travailleurs agricoles. Vu la délibération du Conseil général en date du 3 décembre 1902, Décide : Article P'". — M. Régis (François), conseiller général, est appelé a présider, pendant l'année 1903, la commission chargée de procéder, dans l'île de Cayenne (commune de Cayenne, Remire et Matoury), à l'examen des titres à l'obtention de la prime d'encouragement à la culture et aux travailleurs agricoles. Art. 2. — La présente décision sera enregistrée et communiquée par- tout où besoin sera. Cayenne, le 30 décembre 1902. Emile Mehwart. CONGO FRANÇAIS JARDIN D'ESSAI DE BRAZZAVILLE Cultures. —'- Le tabac qui avait été planté le mois dernier a réussi d'une façon satisfaisante ; plusieurs pieds ont été écimés et ébourgeonnés, et, dès maintenant, on peut se rendre compte de la belle qualité des feuilles; néanmoins, ce ne sera qu'après la récolte et la fermentation que l'on sera fixé sur la valeur de ce tabac indigène. Bulletin rhi Jardin colonial, 41 <>'{i docl'.mi:nts officiels ^'lI l'ahstMice déjeunes planis de manguiers au .laidiii d'essai, il avait été semé environ '200 noyaux le mois dernier; actuellemenl, plusieurs liges sont s'orlies de terre et l'ont espérer que celte pépinière réussira. Les pieds de calé I>ibéria sont de belle venue et en pleine vigueur ; quand les l'AU'opéens auront eu les cessions qu'ils désireronl. les plants restants seront mis en [)lace dans une des réserves du Jardin d'essai. Trois nou- velles plaies-bandes ont été semées de calé Libéria. Les jeunes cacaoyers qui sont encore en pépinière ne se développent (pie très lentement : cela lient à la terre sablonneuse dans laquelle ils se trouvent ; quand ils seront plus Torts, on les transplantera dans un terrain argilo-silicieux. Si on procédait à cette opération actuellement, il y aurait à craindre de voir mourir ces jeunes plants. Il n'y avait pas de maïs au jardin el cependant des demandes de cession avaient été faites par les Européens. J'ai semé le 15 novembre 3 ares (iO de maïs (pii a déjà de 10 à 12 t'cntimètres de venue. Ayant pu me procui-er 1.") graines de kolatier, je les ai mises en terre le 19 novembre ; au dei-nier joui- du mois, elles n'étaient pas encore levées; je crois qu'elles étaient trop dessécbées quand on les a données. Il y a trois carrés de faits de pommes de terre de Madagascar; la récolte sera très abondante, el quand en arrivera le moment on pourra en distribuer dans les villages au.x environs de Hra/zaville. Les pépinières d'orangers, mandariniers, citronniers, goyaviers, ceri- siers de Cayenne, noyers du Brésil, rocous, cotonniers, etc., sont dans de très bonnes conditions de culture. Jahdin ni; i,a hésidenci;. — Toutes les allées et plates-bandes sont termi- nés ; toutes les plantes on arbres qui doivent garnir ce jardin ne sont pas totalement mis en place ; ce travail se fera et sera terminé dans la première quinzaine de décembre. Divers. — N'ayant pas suffisamment de i-once artilicielle pour clore la partie du Jardin d'essai donnant sur la route, on a terminé cet ouvrage par une palissade d'environ 65 mètres de longueur. lù.ÈVHS. — Les élèves ont pris pari à tous les travaux (pu ont élé exé- cutés ; ce sonl eux (|ui ont fait les semis nouveaux, iiidicpiés |)lus haut. Il n'y a eu aucune tléfection et aucun de ces enfants n'a été midade. IJia/./.aville, le I'' décembre \\H)2. Le Chef de Station, (j. l)i:i,A\dii'n":iu:. ARRÊTÉ 63 K GUINÉE FRANÇAISE ARRÊTÉ interdisant la circulation, Vachat et la vente des caoutchoucs frelatés. Le Lieutenant-Gouverneur de la Guinée Française, chevalier de la Légion d'honneur, Vu l'ordonnance organique du 7 septembre 1840, art. 50, Vu l'arrêté local du 2 mai 1901 portant interdiction de la circulation et de la vente du caoutchouc en boules non coupées, Vu l'arrêté local du '22 mai 1901 portant interdiction de l'exporlation des caoutchoucs frelatés, Vu la délibération de la Commission permanente du commerce et de l'industrie dans sa séance du 28 janvier dernier. Considérant qu'il importe, pour maintenir la pureté de la qualité des caoutchoucs de la Guinée Française .et par conséquent leurs prix élevés, de soumettre à un contrôle sévère non seulement les exportateurs, mais aussi les intermédiaires qui facilitent l'achat des produits frelatés ou les falsifient eux-mêmes. Sur la proposition du Chef du service des Douanes, Le Conseil d'administration entendu, Arrête : Article I""^. — A dater du jour de la promulgation du présent arrêté, la circulation, l'achat ou la vente, ou le dépôt des caoutchoucs frelatés ou mouillés, dont la sortie est prohibée par l'arrêté du 22 mai 1901, sont interdits dans toute l'étendue de la Colonie. Art. 2. — Les agents des douanes et tous autres fonctionnaires dési- gnés à cet elFet pourront procéder à la visite du caoutchouc soit sur les routes suivies par les porteurs, soit dans les boutiques ou magasins accessibles au public et où se traitent les opérations commerciales. Si les lots visités par eux contiennent des caoutchoucs des catégories défendues, ils les feront conduire au plus prochain bureau des douanes où le pro- priétaire sera autorisé à en eifectuer le triage. Art. 3. — Les boules ou parties de boules reconnues frelatées seront toujours confisquées et il y aura lieu à la rédaction immédiate de procès- verbal en cas d'opposition du propriétaire ou de falsilication intention- nelle par mouillage ou par tout autre procédé. /\rt. i. — Les contraventions au présent arrêté seront punies des peines de simple police. Les procès-verbaux seront rédigés dans la forme G36 DOCUMENTS OFFICIELS prévue pour les procès de douane. Le produit des amendes et confisca- tions éventuelles sera assimilé aux recettes contcntieuses de douane ; toutefois les parts revenant aux chefs et saisissants seront versées inté- gralement au fonds commun pour être alFectées à l'entretien des postes non classés. Art. 5. — Le Secrétaire général et le Chef du service des Douanes sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, cjui sera inséré au Journal officiel et communiqué partout où besoin sera. Conakry, le "20 février 1903. Signé : Gousturier. MADAGASCAR ET DÉPENDANCES ARRÊTÉ interdisant dans la province d'Antsirabe la chasse aux bœufs sans maître connu. Le Général commandant en chef le corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1897, Vu l'arrêté du 8 mars 1900 réglementant la chasse aux bœufs sans maître connu dans la province de Betafo, Vu l'arrêté du 18 septembre 1901 interdisant provisoirement la chasse aux bœufs sans maître connu sur tout le territoire de la province de Betafo, Vu la décision du 28 avril 1902 transférant le chef-lieu de la province de Hetafo à Antsirabe, Considérant que l'interdiction de la chasse aux bci'ufs san\agcs dans la province d'Anlsirabe, du l'^^'" octobre 1901 an 1''' janvier 190.3, n'a pas eu de suite, il est nécessaire de maintenir cette interdiction pendant une nou- velle période de deux ans. Sur la proposition de M. l'Administrateur des Colonies, chef de la pro- vince d'Antsirabe, ARRf:TK : AiiTici.r: 1''. — Les dispositions contenues dans l'arrèlé du 19 sep- tembre 1901, interdisant, du P"" octobre 1901 au 1''' janvier 1903,1a chasse aux bœufs sans maître connu dans la province d'Antsirabe, sont mainte- nues jusqu'au 1*"" janvier 1905. CIRCULAIRE 637 Jusqu'à cette date, la chasse aux bœufs sans maître connu est interdite sur tout le territoire de la province d'Antsirabe. Art. 2. — MM. le Secrétaire général et l'administrateur des Colonies, chef de la province d'Antsirabe, sont charg-és, chacun en ce qui le con- cerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive, le 1'^'' janvier 1903. Gallieni. CIRCULAIRE à MM. les Administrateurs^ Chefs de province et les officiers commandants de cercle. Messieurs, J'ai eu l'honneur de vous signaler, plusieurs fois déjà, l'importance que présente la connaissance exacte de la composition des terrains desti- nés à la culture et je vous ai invités à prélever dans vos circonscriptions respectives, et à envoyer directement à M. le professeur Mûntz, de nom- breux échantillons de terre destinés à être analysés. Or, M. le Ministre des Colonies vient de m'informer que les laboratoires du Jardin colonial sont maintenant en mesure d'exécuter tous les travaux de ce genre, et m'in- vite, enconséquence, à utiliser désormais le concours de cet établissement. Je saisis cette occasion pour vous rappeler mes instructions précé- dentes des 10 avril 1897, 28 février 1899 et 8 janvier 1902, et pour attirer de nouveau votre attention sur l'intérêt qui s'attache à ce que la carte agronomique de la colonie puisse être terminée le plus tôt possible. J'en- gage très vivement ceux d'entre vous qui n'ont pas encore prélevé, dans leurs circonscriptions, les échantillons nécessaires à l'élaboration de cette œuvre importante, à profiter de leurs tournées pour recueillir des spéci- mens des terres de leur région. Je vous rappelle, à ce propos, les indica- tions déjà fournies par la Direction de l'Agriculture sur la manière de procéder aux prélèvements et reproduites ci-après. Les envois seront faits directement par vos soins à M. le Directeur du Jardin colonial de Nogent-sur-Marne. Les frais d'emballage et d'expédition seront respectivement imputés sur les chapitres 29 (dépenses imprévues) et 23 (frais de transport). Tananarive, le 6 février 1903. Le Gouverneur général, Signé : Gallieni. 638 DOCUMKMS OFFICIELS ARRETl-: supprimant (es droits de sortie à Madagascar et Dépendances, à [^exception de ceux qui frappent le hétail. Le Général commaiulant en chef du corps d'occupation et Gouverneur f^énéral de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 1 1 décembre 1895 et 3() juillet 18U7, \'u la dépèche ministérielle du 22 mai 1897, \"ii I arrêté du 19 septembre 1897 établissant un droit de sortie sur les produits exportés de Madagascar et Dépendances, Vu les arrêtés des 19 avril 1898, 23 juin, 5 octobre et 30 novembre 1899, et 16 janvier 1901, moditiant, pour divers produits, le tarif annexé à Tarrêté du 19 septembre 1897, \'u le décret du 11 janvier 1903 maintenant la prohibition de l'expor- tation des vaches et génisses, Considérant que la suppression des droits de sortie, à l'exception de ceux grevant le bétail, est conforme aux intérêts économiques de la Colonie, Sur la proposition du Secrétaire général. Le Conseil d'administration entendu, Arkéte : AuTici.K I"". — Les droits de sortie sur les produits exportés à ^Lnda- gascar et Di'pendances sont supprimés, à l'exception du droit de \'i IV. par tête, applicable aux bd'ufs, l'exportation des vaches et génisses demeurant interdite. Art. 2. — MM. le Secrétaire général, le Chel' du service des douanes et les administrateurs chefs de provinces et commandants de cercle des régions cotières sont chargés de l'exécution du prêscMil arrêté. Fait fi 'l'ananarive, le 21 février 1903. (i\i,i.n:M. \'u : I.e Directeur du i-itulrùte financier, \\\.\.n\. Par le (Gouverneur général : Le Secrétaire (jéncral, Llvl'Rlîl'X. » AilRÈTÉ 639 ARRETE autorisant la création à Madac/ascar d'une Société (T encouragement pour V aniélioration des races de chevaux à Madaqascar. Le Général commandant en chef le corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1897, Vu la loi du 5 août 1874 (article 7), Vu l'article "291 du Code pénal, Vu les statuts relatifs à la création à Madagascar dune Société d'encou- ragement pour l'amélioration des races de chevaux à Madagascar, Arrkte : Article V. — La création à Madagascar d'une Société d'encourage- ment pour l'amélioration des races de chevaux à Madagascar est autorisée. Art. 2. — M. le Secrétaire général est chargé de l'exécution du pré- sent arrêté. Fait à Tananarive, le 16 décembre 1902. Gali.iem. ARRÊTÉ proniuh/uanl à Madac/ascar et Dépendances le décret du J 9 février J903 interdisant Vexportation des vaches et génisses hors de la colonie de Madagascar et Dépendances. Le Général commandant en chef du corps d'occupation et Gouverneur général de Madagascar et Dépendances, Vu les décrets des 11 décembre 1895 et 30 juillet 1897, \'u le câblogramme de M. le Ministre des Colonies, en date du 21 février 1903, n° 26, annonçant l'insertion au Journal officiel de la République française du 21 du même mois du décret, en date du 19 février 1903, interdisant l'exportation des vaches et génisses hors de la colonie de Madagascar et Dépendances et donnant le texte dudit décret. Vu l'arrêté local du 5 février 1903 maintenant la prohibition de l'cxi^Tr- tation des vaches et génisses, Vu l'arrêté du 24 février 1903 supprimant les droits de sortie à Mada- gascar et Dépendances, à l'exception de ceux qui frappent le bétad. Considérant qu'il y a urgence, pour sauvegarder les intérêts écono- miques de la Grande Ile, à promulguer sans délai, dans la Colonie, le décret précité du 19 févi'ier 1903, 6i0 DOCUMENTS OFFICIELS \'u lavis émis par M. le Procureur fjénéral p. i., chef du service judi- ciaire, daus sa lettre du 24 février 1903, n" 539, Sur la proposition du Secrétaire général, Arrkte : Article I-"". — Est promulgué dans la colonie de Madagascar et Dépendances le décret du 19 février 1903 interdisant l'exportation des vaches et génisses hors de la colonie de Madagascar. Art. 2. — Un numéro du Journal officiel de la colonie, portant la date du 28 février 1903 et contenant le texte dudit décret dûment coUationné, sera déposé aux greffes des tribunaux de Madagascar et Dépendances. Art. 3. — MM. le Secrétaire général et le procureur général p. i., chef du service judiciaire, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté. Fait à Tananarive, le 26 février 1903. Gallieni. ÉTUDES ET MÉMOIRES LE TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES' I La question de la mise en valeur des Colonies françaises est de plus en plus à Tordre du jour. Tout récemment encore, l'Université de Nancy ouvrait un Cours d'Enseig-nement colonial, grâce à une subvention du Gouvernement Général de Tlndo-Chine, et cette création avait pour corollaire, à l'Ecole Nationale des Eaux et Forêts, une augmentation du temps consacré à l'étude de nos richesses forestières d'outre-mer. Nous avons pensé qu'il importait avant tout d'appeler l'attention sur les procédés de vidang-e et de transport des bois. Il serait certes bien téméraire de notre part de vouloir donner la solution de difficultés dont peuvent seuls triompher l'esprit d'ini- tiative et l'énerg'ie d'hommes ayant l'habitude des exploitations coloniales. Un résumé des procédés en usag-e dans les forêts métropolitaines n'est pourtant pas sans utilité, car une simple indication suffit parfois à faire imaginer quelque système nou- veau. Et, d'ailleurs, si ces forêts métropolitaines se trouvent dans des pays de vieille civilisation pourvus de tout un réseau de voies de transport perfectionnées, il n'en est pas moins vrai que, pour accéder à ces dernières, il faut souvent recourir aux seules ressources dont dispose le forestier : faire vite et à bon marché. Nous parlerons donc brièvement : du débardag-e, des chemins forestiers, des ^lissoirs, des transports par eau. 1. Extrait du cours de « Forêts coloniales », de Nancy. Gi2 ÉTUDES ET MÉMOIRES II. Débardage Le débardag-e consiste à transporter les bois tlu lieu même d'exploitation jusqu'à la voie de vidante la plus proche. Il est rendu dirticile parla nature du sol de la forêt, fréquemment meuble, sans consistance, et par la gêne qu apportent les blocs de rochers, les racines, etc.. Les g-randes pièces ne peuvent être que traînées. FiK- 1- Le plus simple est de les tirer sur le sol sans autre précaution, mais cette manière de faire a des inconvénients multiples : le terrain est labouré et bouleversé ; les jeunes semis et les arbres restés sur pied sont jjrisés ou meurtris ; les pièces elles-mêmes se dégradent en frottant sur toutes les aspérités, en se heurtant à tous les obstacles; enfin, il y a une perte d'ell'ort considérable. On y remé(li(! dans une certaine mesure en soulevant, avec le cric ou la « chèvre » (fig. 2, en haut), le gros bout de la tronce et en le faisant porter sur un traîneau, ou « bouc » (fig. I, à droite), ou ment TRANSPORT DES BOÏS DANS LES FORÊTS COLONIALES 643 sur un avant-train ' ; le traînag-e s'opère alors beaucoup plus aisé- On peut encore amener lavant-train au-dessus de la bille, et, tan- Fif?. 2. dis que Ton soulève cette dernière avec un cric, on passe en dessous d'elle une chaîne dont les deux extrémités sont reliées solidement 1. Nous avons pense devoir donner la plidlo^rapliie d'un modèle d ;nanl-(i'ain (|ui' nous avons retrouvé dans les collections de l'Ecole (fij;. 1, à j^auche : en liaul, lapai-lie qui reçoit la charge ; en bas, l'essieu avec ses roues ; la première se [xise simplement sur l'essieu). Ce modèle provient de Santander; ce n'est pas un clier-il'o'uvre de carrosserie, mais il présente l'avantage de pouvoir être construit sur |)lace et ses roues doivent èti'c équivalentes à celles que l'on découpe en Indo-Chine dans les expansions ailées du tronc de certains arbres. (Rapport de M. de Lanessan.) 644 ÉTUDES ET MÉMOIRES au bâtis de ravant-tiain, et dont on raccourcit la longueur au fur et à mesure que le gros bout de la pièce sélève. Celui-ci se trouve main- tenu à quelques décimètres au-dessus du sol qu'il ne peut dès lors labourer, et, chose importante, le centre de gravité restant en des- sous de l'essieu, l'équipage a peu de chance de verser. Les pièces moins longues, partant moins encombrantes et moins lourdes, sont chargées sur des voitures. Et, à ce propos, signalons l'avantage que l'on trouve à tronçonner immédiatement sur place FiK- 3. les arbres qui ne doivent pas être employées sur toute leur lon- gueur. Dans les Vosges, les sapins destinés au débit en planches marchandes de 4 mètres sont immédiatement partagés en billes de cette longueur et la vidange est beaucoup plus facile que dans le Jura, où les grands sapins sortent entiers de la forêt pour servir h faire des échafaudages dans nos arsenaux maritimes. Les bûcherons des Vosges chargent avec beaucoup d adresse les voitures do^ tronces (llg. •i) en employant de simples leviers'. 1. On place le chariot parallèlcmenl à la lioiue, et on enlève la roue de derrière du cotéoù estcettetronce, roue généralement plus haute que celle de devant; l'essieu est soutenu à sa hauteur habituelle par un madrier entaillé, placé debout. Cela fait, TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 645 Parfois ils utilisent un plan incliné dont la partie inférieure arrive au niveau de la voiture (fîg-. 2, en bas) ; ce plan incliné se fait en juxtaposant des perches de la grosseur du bras, disposées sur le sol parallèlement entre elles et perpendiculairement à l'axe de la voiture : la pièce est amenée par une paire de bœufs en face du plan incliné et on n'a plus qu'à la rouler. III. — Chemins forestiers Le transport sur le sol même de la forêt reste toujours difficile. On a donc intérêt à établir un chemin forestier desservant les can- tons où se font les exploitations. Une bonne route bien tracée, bien empierrée est un idéal qu'on ne saurait trop désirer, mais pour la construire il faut du temps, de l'argent, et d'ailleurs il n'est pas de notre compétence de traiter pareille question. Voyons donc simplement comment il est possible de créer avec peu de ressources une voie suffisamment rou- lante. Cette création comporte le tracé du chemin et l'établissement d'une chaussée. En ce qui concerne le tracé, l'essentiel est de faire une recon- naissance intelligente du terrain. On tiendra compte de la situation des cantons à desservir. Si l'on est en montagne, on établira la route au bas des versants plutôt qu'en haut ; lorsque ce sera possible, on la fera dans le thalweg pour que les bois des deux versants puissent y accéder sans difficulté ; on évitera toutefois de se tenir dans le fond même du vallon s'il est trop humide ou s'il risque d'être parcouru par les eaux dans les périodes de grandes pluies ; de même, s'il existe une falaise, un banc de rochers d'où les bois ne pourraient tomber sans se détériorer, on se tiendra au-dessus de ce banc de rochers, quitte à s'écarter du thalweg et à laisser non desservie une minime partie du versant. on dispose deux bois formant plan incliné s'appuyant d'une part sur le sol, d'autre part sur le châssis de la voiture. On roule la tronce sur ce plan incliné en se servant décries, de chaînes et de leviers ; si la pièce est lourde, on la (ait hisser par des bœufs placés de l'autre côté de la voiture et tirant dans ime direction |)erpcndiculaire à l'axe de celle-ci. Une fois la voiture chargée, on soulève l'essieu de derrière avec un cric, on enlève le madrier, et on replace la roue. 646 ÉTUDES ET MÉMOIRES On reconnaîtra le point d'arrivée : port d'einl)arquomont, chantier de façonnage, etc — En (in on notera les « points de passage » : cols franchissables, endroits solides entre des bas fonds marécageux, etc... Cela fait, il n'y aura plus qu'à jalonner une route reliant tous ces points et suivant l'itinéraire le plus court. On observera toute- fois : Fig. 1'' De ne pas faire des tournants trop brusques et trop répétés ; 2" D'éviter les pentes excessives. Le rayon des courbes dépend de la longueur des pièces de bois à transporter ou plutôt la distance qui sépare l'avant-train de l'ar- rière-train. Il est facile de le calculer '. D'ailleurs rien n'est plus 1. Le i'a>on miniiinitii iHliuissihlc |):ii' uni' i'i>ui'l)i' t-sl, iloiiiu' \).\v la Inniiiili' 1 élanl la dislanci' (iiii srpai'C liM'antcl ranii'ic I lain soiiU'iianl les hnis ; sin a — a Tiinplc formé pur l'axe du titnoii sup|)()><('' placé dans k- ])r()l()ii};ciu('ni de l'axe passant par le milieu des deux essieux, el l'axe de ce uième tiiiiou déplaiH' vei's la droite ou vers la },^auelie en eniraînani l'avant-lrain jns((u'à ce ([u'uiie inue \itMine licurtercoiUi'elo cliarKemenI . (]e i'a\nn m lui muni es! celui au-dessous du(|ucl on ne peut, descendre si l'on \-eut, (]uc les idues ne ;;lissenl pas, mais conlinucnl à lourner, si 1 on TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 647 simple que de le déterminer pratiquement en relevant les ornières laissées par une voiture chargée qui a évolué librement. Chacun sait qu'il faut, autant que possible, faire ces tournants dans des endroits plats ou à faible déclivité, et que Ton doit toujours dimi- nuer la pente générale de la route dans ces tournants qui sont des passages dangereux. Alors que dans le tracé des bonnes routes on cherche à maintenir les pentes en dessous de 5 «/o , on admet facilement pour les che- mins forestiers des pentes de 7, de 8 et même de 10 "/o, quand les voitures chargées n'ont qu'à les descendre. Un instrument commode pour établir une route suivant une pente donnée et le clisimètre Goulier, modilîé par M. Thiéry, professeur à l'Ecole nationale des Eaux et Forêts {Vig. 4) : l'instrument est tixé par sa douille sur une canne ferrée ; on l'incline de façon que le perpen- dicule accuse la pente voulue, et l'on fait déplacer par un aide une mire jusqu'à ce que son voyant se trouve sur la ligne de visée : cette mire consiste en un simple morceau de papier blanc fiché sur un bâton dont la longueur ^ est égale à la hauteur au-dessus du sol de l'œilleton par lequel on vise ; la ligne droite reliant le pied de la mire au pied de l'instrument a la pente marquée par celui-ci '^. Une bonne précaution, avant de faire la chaussée, est de relier les points du tracé par un sentier ; en le suivant, on se rend compte des imperfections et on les rectifie. Il reste à construire cette chaussée. C'est affaire de terrassiers. Une largeur de 2'" 50 sutïit, à condition d'établir de distance en distance des gares de croisement pour les A'oitures. La chaussée est bombée et bordée de deux fossés. Quelques veut, en d'autres termes, ne pas revenir au IVoltenient de tjlisscincnt (|ue les voilures ont pour but de supprimer. Quant aux bois qui, charj;és sur la voituie, dépassent celle-ci en longueur, ils ne peuvent évoluer dans le tournant que si la route est en remblai, — auquel eas leur extrémité surplombe au-dessus du vide, — ou que si l'on a donné une largeur suffisante à la route en déblai. 1. Cette longueur est comptée depuis le pied du bâton supposé reposant sur le sol usquau bord de la feuille de carton blanc que l'on vise, bord remplaçant la lù/ne (le foi horizontale des mires plus perfectionnées. 2. Ce clisimètre de la valeur d'une quinzaine de francs, sert eu même temps cduniie dendromètre ; il peut, pour ce dernier usage, être smiplement tenu à la main. Pour le trace d'un chemin, au contraire, il est indispensable de le tîxer sui' une eaïuie ferrée. On doit donc faire adapter à la boite de l'instrument une douille eu cuivre à charnière. 648 ÉTUDES ET MÉMOIRES menus travaux d'art rudimentaires sont nécessaires : des cassis pour récoulement des eaux qui, sans eux, traverseraient la chaussée et la ravineraient. Ce sont des simples caniveaux pavés (fîg. 5 A) ou g-arnis de rondins de bois disposés perpendiculairement à l'axe de la route (li^. 5 B), ou des riji^oles étroites, dont les bords sont ^T-i 1 ■*'■ I r-*^-^ -55JSlJ^SLC2SLI^a,XZIl_ErrL^El_£31 G Vv^. 5. maintenus par des perches de 10 à 15 centimètres de diamètre. Des aqueducs en pierres sèches reliant le fossé amont au fossé aval remplissent encore mieux ce rôle ((ii^\ H C). Pour franchir les ruisseaux, le })lus simple est de construiiv un pont en ])ois. Les poutres et les planches du phmcher P sont en bois élastique, les semelles S en bois résistant à la j^ourriture. Le plancher n'est pas joiutif, de favon cjue l'eau en déj^outte aisément TRANSPORT DES lîOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 049 (fig. 5 D) 1. Si la portée des poutres paraît excessive, on soutient celles-ci en leur milieu par une sorte de grand tréteau, dont les pieds reposent dans le fond du ravin. M. Petitcollot, sous-directeur de l'École Nationale des Eaux et Forêts, et professeur de mathé- matiques appliquées, qui a bien voulu nous guider de ses conseils, a eu l'obligeance de nous communiquer les renseignements donnés en note '^, qui permettent d'établir rapidement le nombre et les dimensions des poutres. Une bonne chaussée doit être empierrée. On décape le terrain sur une trentaine de centimètres de profondeur, et dans cette excava- tion on dispose un « hérisson » ; ce sont des pierres ayant même 1. On augmente bcaueoup la durée de l'ouvrage en imprégnant les pièces d im corps conservateur comme les carbonyles, ou, tout au moins, en les goudronnant sur les points où elles se trouvent en contact les unes avec les autres. 2. Les chiffres ci-après proviennent de mesures relevées sur des ponts qui ont bien résisté. Supposons : Une largeur de voie de 2"° 60. Une charge accidentelle de 4.400 kilogr. Bois employé : épicéa de bonne qualité (le chêne et le sapin résistent encore mieux).' Pour une portée de : I mètre, on emploiera 3 poutres d'un diamètre de 15 centimètres 2—3 — 1,S à 19 3 — 3 — 22 à 24 4—3 — 24 à 28 5—4 — 27,5 à 31 6—3 — 30,5 H 34,5 7 — 4 — 31 à 35, 5 8 — 5 — 31 à 37 9 — 5 — 34 à 39 10—5 — 37 à 42 Les pièces peuvent être employées rondes ; plus sou^•cnt on les éqnari-if sur la face inférieure, qui repose à ses deux extrémités sur les semelles, cl sur la l'ace supérieure, qui supporte le plancher ; l'équarrissage peut être poussé sans inconvénients jusqu'à ce que chacune de ces faces planes ait une largeur égale à la moitié du diamèlre de la pièce ronde. L'idéal serait d'avoir des pièces cylindriques, c'est-à-dire ayant même diamètre à leurs deux extrémités. En fait, il n'en sera jamais ainsi, mais la chose n'aura pas d'importance si l'on prend soin de disposer les travées de telle sorte que chaque semelle reçoive successivement le gros bout d'une travée, puis li- pclil jjont de la suivante, puis le gros bout de la troisième, etc.. Les diamètres lignrant dans le tableau ci-dessus seront alors les diamètres moyens, c'est-à-dire les diamètres mesurés au milieu des pièces. Quand la portée dépasse 4 mètres, mais reste inférieure à 9 mètres, pour éviter les hanchements, on dispose en dessous des travées une autre poutre de 3 mètres de lon- gueur et de 20 centimètres d'équarrissage, qui les relie transversalement; — de 0 à 10 mètres de portée, on en met deux. Bulletin du Jardin coloninl. '2 6o0 ÉTUDES ET MÉMOIRES hauteur, mises de champ, et serrées les unes contre les autres : on y arrive en chassant à la masse, entre les ji^rosses pierres une fois placées, des fnig^ments plus petits. Sur le tout on répand une couche de macadam. Malheureusement c'est très coûteux, et l'on se contente souvent du sol naturel, dont on rebouche tant bien que mal les ornières avec des pierres cassées, ou tout au moins avec de la terre sèche bien pilonnée. Sur des terrains solides, cela sutïit à la rig-ueur. Mais sur des sables, sur des terrains fangeux il n'en est plus de même. Sur le sable, on rend la chaussée sutïisamment roulante en faisant quelque chose d'analog-ue aux « chemins paillés » des pineraies des Landes : pour établir ces chemins paillés, on dépose sur le sable une couche continue, épaisse d'une trentaine de centi- mètres, de bruyères, de mousses, arrachées dans le voisinage ; ce feutrage se tasse assez vite et supporte de lourdes charges traînées par des mules. Tout menu arbrisseau à tige suffisamment sèche et résistante servira au même usage. Dans les terrains fangeux, on consolide la chaussée avec des matériaux empruntés encore à la forêt. Tantôt ce sont des fascines de branchages ou de morts-bois que l'on couche en travers du chemin. Tantôt, et ceci vaut mieux, on fait un revêtement continu de rondins de la arrosseur du bras, dont la longueur est légèrement supérieure à la largeur de la voie, et que l'on couche l'un contre l'autre. Pour éviter qu'ils se déplacent sous les pas des attelages ou sous les roues des voitures, on les maintient par des crochets enfoncés dans le sol (lig. 3 E), ou, pour avoir plus de solidité encore, on les serre entre des gi.sants et des longrines (lig. 3 F) assemblées comme l'indique la ligure 3 G. Tantôt, enfin, on établit une voie de rails en bois sur lesquels roulent les chariots. Sur ces chemins cireulcni sans peine les voitures de tronces telles qu'on les a chargées dans la coupe. Quant aux pièces de longueur, on ne saurait songer à les traîner, même soulevées par un avant- train : elles détérioreraient immédiatement la chaussée. Force est donc de faire porter le petit bout de ces pièces, lui aussi, sur un arrière- train. On peut néanmoins se contenter d'un seul avant-train, ou « diable » ; mais il faut alors, à l'aide de la chèvre, placer les pièces de façon (juc le centre de gravité du chargement tombe très peu en arrière de l'essieu, sur le({uel les arbres se trouvent en équilibre, le gros bout pointant vers le ciel, le petit bout sabaissant vers le sol TRANSPORT DES HOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES f)ol qu'il ne touche pas, —à peu près comme le fléau d'une balance dont un des plateaux est très %èrement surchargé : l'attela-^e est alors tout entier dominé par la partie antérieure des pièces : il est d'ail- leurs évident que si une voiture aussi chargée peut aller sur route, elle serait infailliblement sens dessus dessous avant d'avoir roulé quelques mètres sur le sol accidenté d'une coupe. Avant de terminer ces quelques mots, nous devons rendre justice aux merveilleux animaux que sont les bœufs. Patients, plus agiles qu'on ne le pense souvent, ils se tirent adroitement des bourbiers, et ne « s'emballent pas » quand ils se sentent poussés par leur charge. Pendant la campagne de 1902, les bœufs des Vosges ont puissamment aidé à venir à bout des amoncellements de chablis accumulés par les ouragans des 31 janvier et l*"" février K Ils ne sont pas moins estimés dans le Jura. Nous sommes persuadé que les bœufs indo-chinois et les buffles, dont M. de Lanessan vante les services, ne failliront pas à la réputation de « bonnes bêtes » de leurs cousins de la métropole. L'adresse est d'ailleurs une qualité précieuse chez tous les ani- maux employés au débardage et au transport des bois ; autant que la force, elle fait la valeur de l'éléphant, qui est un utile auxi- liaire, disons plus, un précieux collaborateur, dans l'exploita- tion des forêts de teck de la Birmanie, du Siam - et du Laos. L'éléphant rendrait-il des services dans les entreprises agricoles de toutes nos colonies tropicales, nous l'ignorons : peut-être le climat serait-il parfois trop sec pour lui ; mais là où existe la forêt, l'élé- phant se trouve dans son domaine ; il parcourt à l'état sauvage les immenses massifs de l'Afrique occidentale ; pourquoi ne l'utilise- rait-on pas pour la mise en valeur de nos forêts de la Côte d'Ivoire et du Congo ? Son prix élevé -^ est un inconvénient, mais non pas un obstacle insurmontable. 1. E. Martin, Chablis des Vosges en 1902, Bulletin de la Société forestière de Franche-Comté et Belfort, septembre 1902. 2. A. Badetty, Le Tech au Siam, Bulletin économi([ue de l'Indo-Cliine, novembre 1900. 3. M. R. Badetty estime à 4.000 et 5.000 francs le prix de l'cvient d'un éléphant au Siam. 652 ÉTLDKS ET ME.MUIUKS IV. — Glissoirs En montag-ne on trouve un adjuvant précieux dans la déclivité, ou, pour parler plus exactement, dans l'utilisation possi])le de la pesanteur pour conduire les bois au bas des versants où les recueil- leront des routes ou des cours d'eau. Souvent on se contente de lancer les pièces, le i^ros bout en avant, dans un couloir naturel : elles glissent avec rapidité sui- vant la lig"ne de plus grande pente, surtout si on a eu soin de les écorcer. On retrouve dans cette manière de faire tous les inconvé- nients du traînag-e sur le sol, exagérés par la vitesse de la descente. Non seulement le terrain est raviné, ce qui peut amener des éro- sions pai'fois très g-raves, mais encore les billes qui heurtent contre un obstacle rebondissent à droite et à gauche du couloir, brisant ou détériorant gravement les arbres voisins, causant même parfois des accidents de personnes. De plus, ces billes se déchirent, leur extrémité est hachée, et souvent de menues pierrailles pénètrent profondément dans leur intérieur, au grand dommage des scies qui plus tard débiteront le bois. Il faut donc chercher mieux. Nous recommanderons l'emploi des couloirs en bois et celui des chemins de schlitte. 1. Couloirs on hais. — Le couloir en bois est un chenal dont le fond peut être simplement la terre nue, et dont les parois sont constituées par deux fortes pièces de bois rondes superposées et appelées sponda dans certaines régions du Tyrol (lig. 6, A'). D'autres fois, le fond est lui-même formé de trois pièces de bois appelées : celle du milieu fondo, celle de gauche et celle de droite, funetti (fig. 6, B'^). Nous verrons plus loin que c'est à ce deuxième type qu'il faudra presque toujours donner la préférence. Nous ne pouvons mieux faiio ([ue de citer textuellement les lignes ci-dessous du rapport de M. Marchand, conservateur des Eaux et Forêts et directeur de l'Ecole forestière des Barres, sur une mission au Tyrol qui lui avait été confiée en 18G8. C'est à ce rap- port que nous enq)runtons la majeure partie de ce qui concerne les 1. Couloirs (lits " cava ». 2. Coultiifs (lits (I à porte corridojo ». TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 653 couloirs, comme aussi les transports par eau. Nous exprimons nos respectueux remercîments k M. le directeur Marchand, qui a bien voulu nous autoriser à copier les figures accompagnant son travail '. « Les dimensions d'un couloir doivent être telles que les A B Fis-. 6. (( plus gros troncs touchent le fond en frottant légèrement les « parois, ou sponda; à Cadino on a adopté les chiffres suivants : (( Largeur en haut ... 1 mètre _ en bas ... 0 ■" 70 « Profondeur 0 '" 70 1. L. Marchand, Mission forestière en Autriche. Arbois, imp. Javel, IS69. 0."i I^TIDES I:t MÉ.MOIUES (( On peut lancer sur les couloirs ainsi construits des pièces « d'un mètre de diamètre. « On doit se <>;-arder de donner aux couloirs une trop grande lar- <( geur; la pièce doit toujours rester à peu près tangente aux (( parois, on évite de la sorte les oscillations qui peuvent la jeter « hors du couloir. « Les sponda doivent être formées de grosses pièces; pour un (( couloir de la nature de celui dont j'ai parlé, leur diamètre ne « peut être inférieur k 0 '" 30. leur longueur à 3 ou 4 mètres. (( J'ajouterai que les arbres les plus forts sont employés à la con- « struction des sponda supérieures. « Les fondo et funetti peuvent avoir un diamètre de 0"M0 à (< 0"' 12, leur longueur doit être uniforme, de 4 mètres générale- « ment. Ces dilTérentes pièces peuvent être d'essence sapin, <( épicéa ou mélèze; elles sont écorcées et ébranchées avec un grand K soin, de façon à ne présenter aucune irrégularité. « Les sponda sont assemblées bout a bout et fixées avec des « chevilles en bois. Les assemblages ne doivent jamais se corres- « pondre, mais toujours alterner (lig. G F). « Dans les couloirs o à ponte corridojo », les pièces inférieures, « fondo et funetti, sont ajustées de façon à présenter leurs extré- « mités sur une même ligne. Elles reposent sur des traverses et " sont assujetties au moyen d'entailles à mi-bois et de chevilles. « Les sponda ne sont pas superposées verticalement, elles (( doivent être placées d'une façon telle que les tangentes situées '( dans l'intérieur fassent avec la verticale un angle de 10 à <( 15 degrés. Les pièces du fond (fondo et funetti) présentent un « abaissement vers le milieu; on l'obtient en employant pour « fondo des arbres plus petits que les funetti. <( Enfin, les dilférentes pièces qui composent le couloir sont « assemblées et taillées de façon à ne présenter aucune saillie sur « les joints, résultat facile à obtenir à l'aide de quelcpies coups de « hache. Cette condition est essentielle pour éviter les déraille- « ments et les chocs cjui démoliiMÏent le couloir mal ou peu soigneu- (' sèment construit. « Les couloirs cava, comnie je lai dit plus haut, ont leur partie " inférieure formée par un sol extrêmement uni, dans ce but on " enlève avec soin les pierres et on brise les afileurements de « rochers (pie l'on recouvre ensuite de sable ou de terre fine. TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 6oo (( Les couloirs tels que je les ai décrits sont construits suivant « des lignes droites ou présentant des courbes à grands rayons ; (( ils seraient d'un emploi dangereux dans les changements brusques « de direction, car les bois s'en échapperaient en vertu de la force (( centrifuge et de l'inclinaison des rebords. Dans ce cas, les parois (( ou sponda, situées en dedans de la courbe deviennent inutiles, (( tandis que celles qui sont extérieures ont à supporter un travail ((' considérable pour forcer les pièces à changer de direction. On a « dû supprimer les premières et renforcer les secondes, qui (( prennent le nom de « Faudrœ » . Contrairement aux sponda qui « sont inclinées, les faudrée doivent présenter une face interne ver- « ticale; elles sont formées de pièces présentant 0 ™ 50 de diamètre, « équarries sur trois côtés (fig. 6, C). (' Les fronces dans leur course tendent à les éloigner du couloir, « aussi prend-on soin de les consolider à l'air d'un mur de soutè- « nement et d'étançons fichés en terre, de les relier au moyen de « barres ajustées à queue d'aronde. (( Les faudra? les plus résistantes sont en bois de hêtre ou en <( mélèze; le sapin et l'épicéa se réduisent facilement en esquilles (( et demandent à être remplacées trop souvent. « Les tournants sont dans tous les cas munis de funetti et de (( fondo « Le couloir doit souvent franchir des rochers, des ravins ou « d'autres accidents de terrain, sur lesquels on établit des ponts « extrêmement simples. Les traverses qui sont placées à l'extré- « mité des fondo, funetti, sont choisies un peu plus fortes et sou- « tenues par trois ou quatre pieux fichés en terre. Les sponda « sont dans ce cas solidement reliées ensemble au moyen de che- « villes en bois (fig. 6, D et E). (( Quelquefois, deux couloirs doivent se réunir en un seul, il « suffit de les joindre sous un angle très aigu et de renforcer les <( sponda au confluent ; ailleurs, il faut établir une bifurcation ; « dans ce cas, le changement de direction s'obtient à l'aide d'une (( sponda mobile qui se nomme u barre ». Cette pièce est équarrie (( sur les deux faces qui doivent diriger les tronces dans l'un des a deux couloirs inférieurs. Au point de bifurcation, une forte « poutre fichée en terre sert d'appui au cane qui d'autre part vient « se placer dans une entaille faite dans les sponda du couloir 656 ÉTUDES ET MKMOinES (( unique. Pour obtenir un changement de voie, il sufïit de faire « décrire au cane un arc de cercle et de l'enj^ager dans l'entaille de « la sponda opposée. (( Les chantiers sont situés généralement sur un terrain légère- « ment incliné ; tantôt ils se trouvent au bas de plusieurs couloirs, « et tantôt ils ne servent qu'à un seul. « L'extrémité du couloir débouche à quelques décimètres de (( terre, sa pente a été peu à peu diminuée de façon que la vitesse « d'arrivée des tronces ne soit pas trop considérable. On range les (( pièces autant que possible en éventail et dans le sens de la direction (( qu'elles ont à leur arrivée ; on a également soin d'en superposer « les extrémités, afin que les nouvelles venues glissent sur les « premières arrivées et qu'elles ne rencontrent pas de saillie qui (( pourrait les faire sauter ou les briser *. » En général, le couloir est dirig-é suivant la ligne de plus grande pente. Il arrive cependant, quand cette pente est rapide et longue, que les pièces acquièrent des vitesses exagérées. On y remédie en intercalant, sur le tracé, des « wurfs ». Un wurf consiste en une déviation du tracé du couloir que l'on rejette sur le versant de la montagne et auquel on fait décrire une courbe telle que la pente diminue peu à peu, puis cesse, pour faire place aune rampe. Ensuite la pente reprend. Le rayon de la courbe doit être assez grand pour que, si l'on projette le tout sur un plan horizontal, la projection de la pièce soit toujours contenue dans la projection du fond du couloir, sinon elle sauterait par-dessus les parois. En supposant que la longueur des pièces ne dépasse pas 6 mètres et que le glissoir ait les dimensions habituelles, on trouve que le rayon ne doit pas être inférieur à 10 mètres. Pour écarter toute chance d'accident on lui donne en g-énéral 30 et même 40 mètres. Quant à la quantité dont il faut faire remonter les pièces pour diminuer sufiisamment leur vitesse, elle est bien difiicile à calculer. On l'établit pai- tâtonnement. On peut, nous semble-t-il, imaginer deux types de wurf. Dans le premier (lig. 7, A), la pièce continue d'elle-même sa route, après 1. I,os couloirs j'i l'oiid «iirni de bois m'ocssid'iil en moyt'iino rcni])loi de 0 "" :n7 de bois par mèli'c couranl, abslracLion l'aile des wurl's et des pouls. TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 657 avoir traversé le wurf. Dans le second {i\a;. 7, B , elle remonte, et quand elle s'arrête, elle se trouve sur le bord d'un plan incliné que l'on fait assez long pour que toutes les pièces puissent en profiter ; elle roule autour de son axe sur ce plan incliné et au bas elle retrouve une nouvelle portion de couloir : elle repart toute seule, le bout qui était en arrière se trouvant dès lors en avant. GZO SSo B Fig. 7. Les pièces destinées à être lancées dans les glissoirs ont généra- lement une long-ueur de 5 mètres. Il n'est pas possible de dépasser le maximum de 7 mètres, surtout s'il y a des courbes et des wuri's. Leurs extrémités sont arrondies pour qu'elles n'oti'rent pas de prise, ce qui pourrait amener des détériorations. Disons enfin que Ton simplifie beaucoup le travail des ouvriers si on les munit de crampons (fig-. 6 G) qui leur permettent de circuler sur le bois du couloir, et qu'il faut leur recommander la plus g-rande prudence : ils doivent se tenir à distance pendant tout le temps de la descente des bois. 658 ÉTLDKS KT MÉMOIRES A vrai dire, les couloirs sont employés dans des montagnes dont le climat est froid. On facilite la descente des pièces en jetant un ruisseau dans le couloir, dont il mouille les parois que la gelée rend alors des plus glissantes. Dans nos colonies, il sera impossible de recourir k pareil expé- dient, mais nous ne voyons pas qu'il soit le moins du monde indis- pensable ; il suffira de donner aux couloirs une pente assez forte pour que les pièces écorcées les parcourent sans peine. La vitesse étant moindre, on n'aura que très rarement à installer des wurfs. Par contre, on sera probablement conduit à toujours garnir de bois le fond du glissoir, précaution nécessaire d'ailleurs pour que les pièces ne se détériorent pas, comme cela arrive parfois dans les cou- loirs à fond de terre nue. On profitera, d'ailleurs, pour effectuer le transport, des journées de pluie qui humectent et rend glissants les couloirs M. Marchand a vu dans le Tyrol des couloirs à pente rapide où l'on opérait ainsi. Si la déclivité est faible, on aura encore deux ressources : dévier un ruisseau et le jeter dans le couloir dont on aura calfaté les joints avec de la mousse pour faire quelque chose d'analogue aux « was- serriesen », décrits par M. Gaver, et en usage, paraît-il, aux Indes et en Californie, ou bien utiliser la traction animale : une paire de bœufs tirera sans effort les pièces sur une sorte de couloir dont on aura pu réduire sensiblement les dimensions des sponcla, la Aatesse étant trop faible pour que la tronce puisse s'échapper par-dessus les parois; les chaînes d'attelage seront toutefois assez longues pour que l'on puisse les détacher vivement si la vitesse de la pièce de bois s'accélérait d'une façon dangereuse. Les (( wegriesen » de M. Gayer sont basés sur ce principe ou à peu près. 2. Chemins de schlitte. — Sur les chemins de schlitte les bois ne sont pas abandonnés à eux-mêmes, mais charriés à l'aide de traîneaux ou schlittes : les échantillons de petite dimension sont empilés entre les montants qui les retiennent (fig. 8 B); les tronces, qui ne peuvent jamais être bien longues (4 mètres environ), ont leur gros bout soulevé sur la schlitte, l'autre bout traînant sur le sol, ou s'appuyant sur une deuxième schlitte K 1. I-a fi},'. X, A cl H, suffit à (Idiiiicr imc idi'-c des solilillos vf)S}fionnes. Niuis appel- lerons seulement raltention sur la senii'lli' ipii se (rouve loujours en dessous de la traverse a. Cette semelle doit être très glissante et les schlitteurs la fabriquent eux- TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 639 Un homme placé à l'avant, entre les brancards, ou « cornes », et s'arc-boutant sur la voie établie comme nous allons le dire, retient le traîneau quand la pente est rapide ; il le tire au contraire dans les passag-es où la pesanteur ne suffit pas à le faire avancer. La voie est constituée par des rondins ayant au plus la grosseur du bras, couchés transversalement sur le sol à des intervalles de B ^<^é Fi^^ 8. 70 centimètres environ et maintenus par des piquets ou des cro- chets enfoncés en terre. Le pentes à préférer sont de 12 "/o quand les rondins sont en sapin, de 1 1 °/o quand ils sont en hêtre, plus glissant ' ; elles peuvent d'ailleurs varier entre 7 et 20 7o- La voie franchit les ravins sur des ponts rustiques. Ajoutons qu'on se con- niêmes et y apportent beaucoup de soins. Ils la font dun jeune hctre dans lequel ils détachent, par'la fente, cette longue lame de bois, qui est ensuite desséchée dans une cheminée au milieu d'un courant de fumée. 1. Ch.BR0iLLi.\Rn, Le traitement des bois en France. Paris et Nancy, Berger-Levrault et C*', 1894. 660 ÉTLDKS ET MKMOIKES tente de faire glisser sur le terrain naturel les schlittes transportant les trouées dont une extrémité traîne sur le sol : les rondins ne résisteraient pas à un pareil rabotement. Ces chemins de schlitte sont très usités dans les ^^osges; tantôt ils constituent tout un réseau de voies de vidang-e, à tracés et pentes bien étudiés en vue de concentrer les produits d'un canton de forêt sur une route, sur un chantier, sur une scierie; tantôt ce sont de simples c raftons », ou « ravetons », faits à la légère par les bûcherons avec de gros rais de sapin pour la vidange d'ime coupe. V. — Transports par eau Les cours d'eau de la montag-ne sont fréquemment employés à la descente des bois. Toutefois ces cours d'eau n'ont pas toujours un débit suffisant pour assurer le transport dans de bonnes conditions : c'est le cas de la plupart des ruisseaux qui coulent dans les vallées secondaires. On y remédie en produisant des crues artificielles par la constitution de retenues d'eau qu'on laisse brusquement échapper. On établit donc en un point du ruisseau un barrage, qui doit, comme le dit M. Marchand, être placé le plus haut possible dans le thalweg, de façon que la crue parcoure un long trajet et desserve par conséquent une grande étendue de forêt. On choisit, d'ailleurs, un endroit tel que, d'une part, le barrage soit solidement adossé aux berges, et que, d'autre part, la pente du lit, à l'amont, soit assez faible; on pourra retenir ainsi un cube d'eau considérable, sans être conduit à faire une digue trop élevée. Il est facile de calculer la quantité d'eau qu'il est nécessaire d'emmagasiner et pai- suite les dimensions à donner au barrage: ayant reconnu un endroit où la section du lit ait une forme régu- lière, on y mesure la hauteur de l'eau ///; joiu^ de crue paraissant assez forte pour faire flotter des bois. On peut ainsi calculer la surface S, section verticale de la masse d'eau au point considéré un jour de crue. Soit V la vitesse de l'eau à la surface au moment et au point considéré (distance f)arcouiue en une seconde par un flotteur). Si on admet que la vitesse moyenne de la masse liquide est 0,7o X V, le débit est : Q = S X 0,7:; X V. TRANSPORT DES liOIS DANS LES FORKTS COLOMALES 661 Or il est admis qu'un barrage doit retenir assez d'eau pour que la crue dure 15 minutes au moins, soit 15 X 60 secondes, c'est-k- dire que la masse d'eau en arrière du barrage doit être M = 15X60XQ. Connaissant M. on arrive facilement à établir la hauteur à don- ner au barrage K Puis on détermine l'épaisseur, (jui sera probable- ment toujours plus que suffisante si on la fait égale à la moitié de la hauteur, — et la surface de l'ofifice de l'écoulement, cette dernière Q '• étant donnée par la formule S = A~F?i — , 0,60 y/ 2 gH Le barrage doit être bien construit, afin de résister à la poussée de l'eau, non seulement quand cette eau atteint la hauteur prévue, mais encore quand une pluie violente amène une crue naturelle et que l'eau déborde par-dessus son couronnement. On l'établira donc sur un terrain solide, ou sur pilotis, et on l'épaulera quand ce sera possible, contre les rochers de la berge. (( Le barrage de Panneweggio, que je vais décrire comme type, 1. « Une série de profils en travers et un profil en lonfif suffisent pour établir ' moyen d'une vanne simple (pii se lève lorsque le Ijarrage est vide. « Enfin il peut arriver (|u'à la suite d'une crue exceptionncdle les « deux orifices se trouvent insuffisants, le niveau s'élève alors et ■< l'eau passe sur le barrage (pii résiste grâce à sa solidité ; pour « surcroît de précautions on a ménagé à la partie supérieure un TRANSPORT DES l$01S DANS LES FORÊTS COLONIALES 663 canal à ciel ouvert garni de pièces placées longitudinalement. Il ( facilite en outre récoulement du trop plein, lorsque des circon- ( stances imprévues forcent à surseoir au flottag-e. « Quelquefois les pentes des réservoirs sont assez rapides pour donner lieu à des érosions sur les bords, et compromettre la solidité de l'ouvrage : on établit alors sur les parties qui peuvent être attaquées des lignes de fascinage se coupant de manière à former un damier dont les cases vides se remplissent bientôt de c terre, ce qui donne naissance à un nouveau lit d'une grande soli- dité. Ce travail s'exécute de la manière suivante : on commence par tracer des lignes espacées de 1 mètre, se coupant à angles aigus, sur lesquelles on plante des piquets de 0 "' 05 environ de diamètre sur 0 '" 60 à 0 "' 80 de long, enfoncés de 0 '" 40 à 0 "' oO et espacés de 0 "' 50. Puis on relie ces piquets par des branchages flexibles entrelacés obliquement et dont le gros bout est fiché en terre. » La porte du barrage doit appeler spécialement Tattention. Il faut quelle puisse s'ouvrir brusquement et livrer passage immédiate- ment à une masse d'eau considérable; aussi, plutôt que de faire une vanne, toujours longue à soulever, vaut-il mieux établir une véri- table porte. Parmi différents types en usage nous avons choisi celui qui est décrit ci-dessous et que nous empruntons, à part de très minimes modifications, à la Technologie forestière de M. le professeur Gaver i. Nous avons déjà eu l'occasion de citer cet ouvrage, mais nous croyons devoir le signaler plus spécialement aux Exploitants. A côté de chapitres intéressants sur tout ce qui concerne la techno- logie, notamment l'exploitation, le façonnage des bois, ils y trou- veront une centaine de pages consacrées à l'étude détaillée des modes de transport : chemins, couloirs, écluses pour le flottage, cons- truction de trains de bois, chemins de fer forestiers, câbles, etc.. De nombreuses figures rendent la compréhension du texte facile, même aux personnes peu familiarisées avec la langue allemande. La porte b (fig. 9, A) peut pivoter autour d'un gond a. Ouverte, elle se loge contre la berge et s'efface derrière un épaulement k. Elle est tenue fermée par un bloc de fermeture c, solide pièce de bois pivotant autour d'un gond a, placé excentriquement. On con- çoit que sous la poussée de l'eau la porte tende à faire tourner le 1. D' Karl Gayer, Die Forstbenulzung, Berlin, chez Paul Parey, 9» édition, 1903. 664 ÉTUDES ET MÉMOIRES bloc qui s'effacerait, lui aussi, derrière un épaulement 1, s'il n'était maintenu en place par le dispositif suivant. umjiln B F FiK. 0. 11 |)()rtc vers le milieu de sa hauteur un gros tenon e ayant la forme représentée sur la fif^ure. Une pièce de bois, ou détente, ^ est coincée entre le rebord du tenon el la berg-e. Que Ton tire sur la TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 66* chaîne i, la détente pivote aussitôt autour du point h en se déga- geant de l'encoche du tenon e, le bloc de fermeture s'efface i et la porte s'ouvre brusquement. Il est sage, avant d'ouvrir, de placer quelques fascines contre la berge, pour que la porte ne se brise pas en se rabattant sur elle. Il est sage également de faire un radier en bois ou en pavés en avant de la porte, et de soutenir les berges par des pilotis pour éviter l'érosion de ces berges et du lit sur lesquels la masse d'eau se pré- cipite avec violence. Tandis que la porte est tenue fermée et que l'eau s'accumule derrière elle, qn descend dans le lit presque à sec du ruisseau les pièces à transporter, qui ont été découpées en tronces de i à 5 mètres ; on les range dans le sens du courant. Quand tous ces bois sont en place, on lâche l'eau qui les entraîne. Il y a bien tou- jours quelques retardataires qui restent en route, s'accrochent aux berges... ; la crue terminée, on les replace au milieu du thalweg et on les fait rejoindre en provoquant une nouvelle crue. Au point d'arrivée sont établies des grilles destinées à arrêter les bois. Le croquis ci-joint dispense d'une description. Disons seule- ment que la grille est installée obliquement en travers du lit ; elle est constituée par des pieux dont le diamètre, oscillant entre 8 et 15 centimètres, est d'autant plus fort que les pièces flottées sont plus grosses. Ces pieux sont aussi espacés que possible, à condi- tion de ne pas présenter un intervalle tel qu'ils laissent échapper les bois les plus petits. On les enfonce dans le lit du cours d'eau non pas verticalement, mais avec une légère inclinaison vers l'aval, et on les maintient par deux paires de moïses : une paire un peu au des- sus du fond de l'eau, l'autre paire plus haut. Enlîn, tout l'ouvrage est soutenu sur sa face aval par des « pieds de chèvre », dont les trois pièces principales ont de 15 à 20 centimètres de diamètre et sont solidement enfoncées dans le sol; à une faible hauteur au- dessus du fond du lit, elles portent un plancher que l'on charge de grosses pierres-. Si, au lieu d'un simple ruisseau, on dispose d'une rivière flot- 1. Une cavilo f est inénagcc dans la paroi à la Iiauleur du (ennii e (|ni xiciil s'y loj^^cr. 2. Dans les chantiers d'arrivai;e ini[)()rtants, un canal, déhuucliant innnédiateinenl en amont de la grille, permet de conduire les bois arrêtés par celte dernière A une gare ou à des quais de débarquement (lig'. 9B). Bulletin du Jardin colonial. '"' 666 ÉTUDES ET MÉMOlUES table, à débit sufTisant, la construction crun réservoir est inutile ; les pièces sont jetées à l'eau qui peut les entraîner aussitôt; des ouvriers cheminent le long- des rives et, avec de longues g-all'es, repoussent vers le milieu du courant les bois qui s'approchent des berges. Il suflit de faire quelques travaux pour améliorer des passages difïiciles ou consolider des berg-es menacées. Enfin on établit encore au point d'arrivée une grille pour arrêter les bois'. B Fig. 10. Sur ces rivières flottables circulent des radeaux ou trains de bois que pilotent des bateliers. Un train se compose de plusieurs rang-ées de pièces, ces rang-ées étant amarrées l'une à la suite de l'autre. Chaque rang-ée est con- stituée g-énéralement par des bois de même longueur placés côte à côte et reliés par divers procédés. Tantôt (lig. 10, A) chacune porte à sa partie avant et à sa partie arrière deux trous percés « de biais » aa, par chacun desquels passe un lien : //A, corde ou liane-, c{ui l'attache à ses similaires de droite et de gauche. Tantôt, au contraire, toutes les pièces étant alignées, on les ndie par deux traverses en bois, une à l'avant, l'autre à l'arrière 1. Relativfiiiciit ;i rimicMidralion du l'r^iiiu' des i'i\i('ros llottiihli's i-t à tnul ci- i|ui concerne le llolla^c, mi pciil i-onsullci' l'ini|)i: LA(im:M':, iiifAciiii'iir des ])0"ls el chaussées. Paris, I)iin()(l, éditeur, IK(i!). 2. Dans les foréls ti-opicales, on Ircme raeilcnieiil des lianes p(iu\ant sei'\ir à eet oflel, ])ar exemple la " liane tVanelie .• de la (lucane eih'e parM. IJrousseaii dans son ouvrage : Les richesses île lu diiyune friinijiiise el île l'unrien Conleslé fninco-hrésilien. Paris, Société d'éditions scientifiques, 1!»01. TRANSPORT DES ROIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 667 (fig-. 10 B). Des paquets d'une dizaine de planches superposées et bien ficelées peuvent être maintenus de même côte à cote par des traverses ^ . Ce deuxième mode d'assemblage est peut-être plus expéditif (|ue le premier. 11 a, par contre, l'inconvénient de donner de la rigidité à chaque rangée considérée individuellement, et c'est là un incon- vénient dans les rivières où se produisent des remous. A ce point de vue les simples liens sont préférables. Dans le même ordre d'idées, la nécessité de laisser au train une certaine souplesse qui lui permette de suivre les sinuosités du cours d'eau, oblige parfois à réduire la longueur des bois, et, par suite, de chacune des rang-ées qui, mises bout à bout, forment le train. Si l'on veut transporter une ou deux pièces de long'ueur en même temps que ces bois plus courts, on les amarre à côté du train par des liens assez long-s, de façon que ce -dernier en reste indépendant ; train et long-ues pièces naviguent de conserve, mais ne sont pas solidaires. Les bois exploités dans les forêts tropicales sont souvent plus lourds que l'eau. On les flotte néanmoins en les accouplant avec des bois légers comme il en existe dans toutes nos Colonies'-. Quel- quefois aussi, des bois, plus lourds que l'eau quand ils sont coupés verts, flottent quand on les a ceinturés sur pied en enlevant à leur base un anneau complet d'écorce, et qu'on a attendu leur mort pour les exploiter. Le Service forestier anglais procède ainsi pour le Teck en Birmanie '■'' : il a constaté d'ailleurs que cette opération préalable non seulement diminuait la densité du bois de teck, mais encore augmentait sa durée et sa valeur^. 1. De nombreux systèmes d'amarrage sont décrits dans l'ouvrage de M. le profes- seur Gayer cite plus haut. 2. M. le capitaine Sébert, rendant compte d'essais de transport de bois entrepris à Nouméa sous sa direction, cite l'emploi dans la Guyane, sur le Mnroni nolammcnt. de flotteurs en tôle destinés à alléger les radeaux de bois lourds. Sous chacun des lieux bords du radeau on place un certain nombre de ces flotteurs en fin nie de cigare, — flotteurs dont M. le capitaine Scbert reproduit la disposition dans une planche, el qu'il a remplacés, lors de ses essais, par des " rats », composés chacun de six bar- riques placées bout à bout, et maintenues par de forts cadies en bois eniretoisés et boulonnés. — H. Sébert, Notice sur les bois de la Nouvelle Cnlédonie. Paris, Arthns Bertrand. 3. J.-S. Gami!le, .1 lufinual of Indian Timhers. Londres, Sampson I.ow, Maston et C'% 1902. 4. M. l'inspecteur Mer, attaché à la station d'Expérience de l'Ecole nationale des Eaux et Forêts, a reconnu que des ceinturages analogues, pratiqués sur les chênes, avaient pour conséquence une diminution considérable de la (piantité d'amidon con- tenue dans l'aubier, et mettaient, par suite, ce dernier à l'abri des dégâts des vrilleltes. 6G8 ÉTUDES ET MÉMOIRES Le numéro du Bulletin économique de V Indo-Chine, paru au mois de novembre 11)00, publie un intéressant compte rendu jde flottage entrepris par M. Lussan sur le Mé-Kong. En 1900, M. Lussan a réussi à tlotter 600 mètres cubes de teck de la rég-ion de Pack-Lay à Khone, puis à Saigon, avec une perte ne dépassant pas 2 1/2 à 3 °/o. Son système, qui peut servir de modèle sur les rivières entrecoupées de rapides, est le suivant. Les billes, attachées par groupes de trois à quatre seulement, sont abandonnées au fil de l'eau ; deux pirogues suivent en explorant les rives et les îles pour rejeter dans le courant les billes qui accostent. En amont de chaque rapide, un poste, placé à un étranglement du fleuve, arrête ces petits groupes, et les délie pour abandonner chaque bille isolément. En aval, on les reprend et les attache à nouveau. Pour les reprendre, il est bon d'installer deux postes éloignés d'une distance telle que les pièces passant de nuit devant le premier passent de jour devant le second. Un chemin de fer Decauville contourne d'ailleurs les grands rapides de Khône. VI Les chemins de fer forestiers à traction mécanicpie ou animale, les chemins de fer à rail unique, les câbles, rendent les plus grands services dans les exploitations importantes. Leur inconvé- nient est d'exiger une mise de fonds considérable. Nous ne pou- vons, en ce qui les concerne, que renvoyer aux ouvrages spéciaux', mais nous appellerons tout spécialement l'attention sur le — mono- rail porta/ if qui paraît devoir rendre les plus grands services^. Nous signalerons aussi un dispositif que nous avons vu employer dans les Alpes Maritimes et qui permet de faire servir un seul câble comme d'ailleurs un seul modeste couloir en bois, à l;i des- serte de tout un versant de montagne. Il arrive souvent — c'est lé ;ik' (les 1. E. TiiiKin, professeur de Matluîmallciucs api>Iiqiu''cs à l'Kcdlo nalioii; Eaux cL Forets, Étude sur les pelils clicuiins de fer foresliers. Nancy, Berger- Levrault, 1S93. E. TiiiKHY et Demonkt, Les Irnnsiinrls jmr c.'ihles aériens. Nancy, Nicole, l.sOO: Cours professés h l'Ecole nationale des Eau.\ et Forêts. 2. D' Kaiii, (1ayi:i«, nurnu/e vile, etc.. Noiicc de M. rinspeclcur Uo^cr Ducaïup, directeur des l'o-rèts de riiido-(21iine, sin- le luiiinn-ail ptii-talifà ni\'cuu du sol. Jlevae des Eaux el Forêts, nuiiu ro du I "■ avril 1!)02. TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORÊTS COLONIALES 669 cas dans la vallée de la Tinée — que la forêt occupe une région d'altitude moyenne, dont la déclivité n'est pas excessive, tandis qu'une pente très raide, voire même un escarpement, sépare le bas de cette forêt du thalweg où se trouve la rivière flottable, la route ou lé chemin de fer. En pareil cas, on ouvre une route qui court tout le long de la lisière inférieure de la forêt, route à peu près horizontale, qui suit donc le rebord du versant rapide ou de l'escar- pement dominant le fond de la vallée. C'est la « tire » des mule- tiers alpins. En un point convenable, on installe le câble reliant la tire au thalweg, et tous les bois de la forêt amenés par schlittes ou par petits couloirs sur la tire, convergent, en la suivant, vers la gare de départ dudit câble. VII En écrivant cette notice, nous songions surtout à indiquer aux exploitants de forêts coloniales quelques ouvrages « pratiques » leur donnant des renseignements utiles. Nous voulions aussi appeler leur attention sur le lien étroit qui nous paraît rattacher l'installation de voies de vidanges utilisant le bois (chaussées revê- tues de rondins, couloirs en bois...) aux exigences culturales. En eftet, quand une forêt est abandonnée à des exploitations non réglementées, celui qui veut y prendre du bois va au plus commode : il se garde bien d'abattre de très vieux arbres, dont les tissus sont souvent désorganisés, et dont le transport est, en tout cas, très dif- ficile : il ne s'attaque qu'aux bois moyens. Bien plus, dans la forêt sauvage, les essences précieuses ne sont pas toujours représentées par de très nombreux individus; souvent ceux-ci sont noyés dans une masse de sujets d'essences secondaires. Si le climat est froid, cela n'offre qu'un demi-inconvénient : l'homme, qui a besoin de chauffage, n'est pas très difficile. Au contraire, si le pays est chaud, si, en même temps, comme c'est le cas le plus général, les chemins sont rares, on n'exploite que les bois ayant une haute valeur d'ex- portation : les meilleurs bois d'ébénisterie par exemple. En d'autres termes, alors qu'on s'extasie sur les richesses soi-disant inépuisables d'une forêt tropicale, ce qui a de la valeur pour l'exploitant, surtout pour l'exploitant mal outillé, est, en réalité, assez peu de chose. Comme cet exploitant, pour diminuer ses frais, n'abandonne un fi70 ÉTUDES FT MÉMOIRES canton qu'après avoir réalisé (ont ce qu'il contenait d'utilisable, il laisse le désert derrière lui. Il n y reste du moins que des bois dépérissants qui n'ont pas plus de valeur, au point de vue de la reproduction, que les innom- brables troncs d'arbres renversés qui g-isent sur le sol, — et des espèces secondaires. Celles-ci, maîtresses du terrain, pullulent, et la forêt est définitivement ruinée. Trop souvent le colon ou l'indi- gène ne lui reconnaît plus aucune valeur, il l'incendie ou la défriche. C'est ce qui s'est passé à l'île de la Réunion ', c'est ce qui commence sans doute dans notre superbe massif forestier de la Côte de l'Ivoire,.,.. Il y a évidemment quelque chose à faire. On l'a d'ailleurs bien compris en haut lieu, et les cahiers des charges imposés aux Com- pagnies concessionnaires et aux exploitants prescrivent d excel- lentes mesures : interdiction de couper les arbres de certaines essences tant qu'ils n'ont pas atteint un diamètre minimum, oliliga- tion de faire des plantations, etc.. Nous nous permettons de penser que l'on peut aussi, par des mesures culturales, même très som- maires, éviter l'appauvrissement en favorisant la régénération naturelle. Le plus pratique paraît être de diviser la forêt en un certain nombre de coupons : chaque année un de ces coupons sera parcouru par une coupe jardinatoire basée sur les deux considérations sui- vantes : 1° Dans de pareilles forêts, il y a moins à se préoccuper d'assurer progressivement la régénération de toute la surface d'un coupon qu'à veiller à enrichir le peuplement en sujets appartenant aux essences précieuses; 2" Il est en général prudent, quand on veut obtenir des sen)is d'une essence donnée dans un peuplement mélangé, de s'arranger de façon à avoir des semis de cette essence installés avant ceux des autres espèces. A titre d'exemple, passons en revue ce que l'on peut faire dans (juehjues cas parliculiers : 1" On renconlic un ou jdusieura arbres expiai fabloa d essences précieuses, en dessous des(/uels, ou dans le voisinafje desquels, sont 1. Hxpiisé de M. KL-rourio, clicl' du sci-vic-c; des Eaux et Forêts de l'ile de la lii'-u- nion, dans la Notice sur cette colonie, pul)liéc à l'oecasion de rivvposilinii uiii\ erselle de 1900. Paris, Librairie africaine et coloniale, 1900. TRANSPORT DES BOIS DANS LES FORP^TS COLONIALES 07 1 installés des semis préexistants ' desdites essences. — On coupera lesdits arbres exploitables et, en plus, on s'astreindra à couper les arbres d'essences secondaires qui entravent le développement des semis intéressants (fîg-. H). 2° On rencontre un arhre d'essence précieuse qui na pas encore donné de semis. — On respectera scrupuleusement cet arbre, fût-il a re server Arbre sans ua/eur marchande vj Ar[> l't prec/ertjc^ U a ex ploiter préejciifdnfs • . ■ 0^ „ o. r, o " ^ '■> ' • °0 ^^ ^-"o^°^°o.;o»V^^b 0 . 0 ^ ^ ' ' ' o c c o " Ûo o ■O' o 0 .m, ■ ° c ^ o " o° o o Q C ' o '. Oo o^ 0-^0 " " 0 o oO» ^ ° 0ilïr='- O o^ °o; o » n O O o » "A 0 O L°0 ^,0 OoO: On G 0 0 0 ^9^ o '-^ o' Q „ " 0 o o • "^ 0 P o „ o o 0 o » a t" o ■ \ o o '°7^ c o ^ 0 o 0 0 " o /^ " 0 •âi: o o o o 0 oVO Fig. H. o o o o 0 ° «s o°°ô <^ o exploitable, ou même dépérissant, mais on coupera autour de lui un ou plusieurs arbres d'essences secondaires, si Ton juge que' la lumière n'arrive pas au sol en quantité suffisante pour que des semis puissent s'installer. Toutefois, si on trouve côte à côte plu- sieurs sujets d'essences précieuses n'ayant pas encore donné de semis, il ne sera pas défendu d'en couper quel({ues-uns, — les 1. On nomme semis préexistants des semis qui sont nés dans un peuplement avant que celui-ci ait été parcouru par une coupe de régénération. L 072 ÉTUDES ET MÉMfMRES sujets dépérissants de préférence, — mais en en laissant une quantité largement suffisante pour assurer la régénération sur ce point. 3° On rencontre un Jeune sujet d'essence précieuse gêné dans son développement par des arbres d'essences secondaires. — On coupera un ou plusieurs de ces derniers : ceux dont la cime écrase la cime de 1 arbre d'avenir, 4° On rencontre sous des arbres d'essences secondaires des semis préexistants d'essences précieuses K — On donnera delà lumière à ces semis. o" Partout ailleurs on ne coupera rien. Il va sans dire que, soit pour assurer le développement de semis préexistants, soit pour faire naître ces semis, on ne coupera, en arbres d'essences secondaires, que le nombre de sujets nécessaires pour donner au sol la lumière indispensable. En coupant trop, on s'exposerait à voir le sol envahi par une végétation herbacée ou par une végétation de bambous qui rendrait très aléatoire une régénération ultérieure. Les auteurs forestiers anglais du service des Indes mettent particulièrement en garde contre ce danger, qui existe sous toutes les latitudes, mais dans les forêts tropicales plus qu'ailleurs. Il sera donc sage d'étudier les exi- gences desdifférentes essences précieuses au point de vue delà lumière. On acquerra les connaissances nécessaires à cet égard en observant les conditions dans lesquelles naissent et se développent spontané- ment les semis dans la forêt : les uns naîtront et se développeront sous le couvert des grands arbres, ce seront des semis d'essences d'ombre; les autres ne croîtront bien et même ne se maintiendront vivants que dans des trouées, des clairières, ce seront des semis d'essences de lumière ; on agira en conséquence. Si 1 on dispose de la main-d'œuvre nécessaire, on fera couper ou mieux arracher la broussaille et les plantes herbacées au pied et dans le voisinage des sujets d'essences précieuses dont on attendra des semis ; un crochetage, c'est-à-dire un piochage grossier, rom- pant la partie superficielle du terrain sera généralement une bonne o[>ération, favorable à la germination des graines. Enfin, en même temps que dans un coupon, on fera une exploitation d'arbres, on 1. Ces semis sci-ont nés de semences apportées par le vent ou les animaux, ou seront les descendants d'un arbre disparu. TRANSPORT DES BOIS DA^S LES FORÊTS COLONIALES 673 emploiera quelques ouvriers à dégager les semis de bonnes essences perdus dans une brousse ou dans un fourré qui leur est manifeste- ment nuisible : des coups de croissant^ ou de sabre d'abatage, sobrement, mais judicieusement distribués, sutliront à permettre à ces semis de prendre le dessus sur des voisins trop gênants. Il va sans dire encore qu'on limitera le nombre des arbres d'es- sences précieuses à enlever dans chaque coupon au quantum fixé par Taménagement sommaire établi, lors même que les seules exigences culturales permettraient d'en couper davantage. En opérant ainsi, on assurera probablement la conservation, voire Taugmentation du nombre des individus de bonnes essences dans le peuplement. Sous ces climats chauds où la fructification des arbres est sans doute abondante et régulière, où les gelées ne sont pas à craindre, il y a tout lieu d.e supposer que la régénération se fera vite dans le voisinage des porte-graines, et qu'au passage de la coupe suivante, une dizaine d'années plus tard, on trouvera des semis sur les points où Ton aura provoqué leur naissance. La plus grosse difficulté résulte de l'obligation d'abattre une quan- tité relativement importante de bois d'essences secondaires sans valeur marchande, ou bien encore, car ils peuvent être tout aussi gênants pour la régénération, de bois d'essences précieuses trop vieux pour qu'ils soient rémunérateurs. Nous ne voyons malheureusement pas moyen d'agir autrement. Un expédient dispense, à la rigueur, de l'exploitation des arbres sans valeur. M. Hùifel, professeur à TEcole nationale des Eaux et Forêts, nous disait récemment qu'en Galicie et en Transylvanie les habitants sont autorisés à exploiter dans les forêts montagneuses les sapins dont ils ont besoin pour la construction de leurs maisons et surtout pour faire des bardeaux. Ces extractions de résineux ayant pour conséquence un envahissement de plus en plus inquié- tant de la forêt par les semis de hêtre, on a eu l'idée d'imposer à toute j^ersonne qui enlèverait un sapin l'obligation de faire subir à quelques hêtres une annélation, c'est-à-dire l'enlèvement de l'écorce sur quatre ou cinq centimètres de hauteur et sur tout le tour de l'arbre : les hêtres ainsi mutilés sèchent sur pied infailliblement. Pareille mesure ne serait-elle pas souvent utile dans les forêts coloniales ? 1. Serpe munie d'un manche de 1 mètre à 1 " 50 de longueur. 674 ETIDES ET MÉMOIRES Il va sans dire, toutefois, que mieux vaudrait encore exploiter les arbres gênants et en tirer parti. Les uns pourraient fournir des traverses pour les voies ferrées en construction ou à l'étude dans plusieurs de nos Colonies. Mais le meilleur débouché serait le suivant : il faudrait obtenir des compa- gnies exploitant lesdits chemins de fer, ou exploitant la navigation des lignes fluviales, le chauffage au bois de leurs chaudières'. Il serait vraiment regrettable de voir des bateaux circuler sur le Maroni ou la Comoë en brûlant de la houille étrangère au milieu de vastes forêts françaises dont les arbres resteraient sans emploi. Le chauf- fage au bois des machines à vapeur est d'ailleurs courant au Mexique, aux Etats-Unis, en Russie, en Roumanie..., il ne serait pas impos- sible chez nous, à condition que Ton offrît les bois à bas prix, et que Ton s'occupât de cette question suffisamment à temps pour que les chaudières des locomotives et des bateaux fussent aménagées en conséquence '-. Enfin, et c est à cela que nous voulions en venir, ces mêmes essences secondaires fourniront en abondance, le jour où on voudra les employer, la matière première nécessaire à l'établissement des voies de vidange que nous recommandons plus haut. Nous devons, en terminant, adresser nos remercîments à M. Valentin, adjudant à l'Ecole nationale des Eaux et Forêts, qui a bien voulu se charger de dessiner ou de reproduire par la photo- graphie les figures accompagnant cette notice. A. JOLYET, Chargé de Cours à l'Ecole nationale des Eaux et Forêts. 1. Ce dcsideralum est exprimé dans la Notice sur lu Guijane, écrite pnv M. Bas- sières à l'occasion de TExposiLion universelle de 1000. 2. .-Vu Ci>nj;o-l''i'anvais. Ions les haleanx ([ni naxi^iienl soit sui" l'Ogoué, soil sni' le Congo ou rOubanfîui ne brûlent (pie du bois pour le elianlTa^e de leurs cliauiiières. Sur les rives de l'O.noué, |)ar exemple, il existe de nombreux dép(">ts de bois, cons- tamment tenus ai)pro\isionnés par les intii^^ènes. (^e bois de cliaull'aj^e leur est payé ■i francs les lOO bûches. Les bûclies qui sont d'inie bonne grosseur ont environ 80 centimèlr(;s de lon;,'uenr. (N.I).L.R.j. LE KSOPO [Kissoumpo, Kisounipa, Psoko'ij, Tançjhin de Menahé), POISON DES SAKALAVES I. HISTORIQUE Parmi les végétaux rapportés de Madagascar par M, Grandidier, se trouvaient quelques échantillons d'une plante toxique, qui comme le Tang-hin, servait de poison judiciaire aux Sakalaves. Bâillon, en 1890, décrivit cette plante qu'ilrattachaaux Asclépiadacées sous le nom nouveau de Menahea venenata, mais l'insufFisance de matériaux ne permit pas à ce savant de tirer de leur examen une étude définitive, et pendant dix années la plante resta à peu près ignorée. Son existence fut même mise en doute, malgré la présence au Muséum des 'types qui avaient fait Tobjet des descriptions de Bâillon. En 1901, nous recevions fin novembre, de M. Prudhomme, direc- teur de l'Agriculture à Tananarive, quelques fragments de racine d'une plante toxique de la région nord-ouest de l'île, avec quelques tiges pourvues de feuilles et d'un petit nombre de fleurs. Cet envoi était accompagné d'une note très concise de M. le D"" Lasnet médecin de première classe des colonies, contenant des renseigne- ments divers sur la plante et son utilisation • : « remède efficace contre les douleurs syphilitiques, la racine serait toxique à ce point qu'un très petit fragment tue un homme adulte en l'espace d une demi-heure. » La plante était depuis quelques jours en notre possession, h)rsque M. Poisson, assistant au Muséum, de passage à notre Laboratoire, nous demanda de lui en laisser prélever un échantillon, car elle lui paraissait inconnue. Quelques jours après, une lettre nous priait 1. E. Perrot, Sur le Ksopo, etc. C. /{. .le. Se, 1902, CX.\Xn', 303 ; /ier. des Cuit, col., 1902,' X, 105-113, avec figures. 676 ÉTUDES ET MÉMOIRES de venir la comparer au Menabea venenata de Bâillon, avec lequel elle semblait identique; en etlet, le doute n'était plus permis. A peu près à la même époque, M. Perrier de la BatJiie de Suberbieville expédiait au Musée colonial de Marseille une certaine quantité de racines toxiques d'une plante inconnue, que M. Ileckel envoya dune part à M. K. Schumann et d'autre part au Muséum de Paris. Le savant professeur de Berlin, qui ne connaissait naturel- lement pas la plante de Bâillon, crut se trouver en face d'une espèce nouvelle qu'il qualilia « d'une des plus intéressantes qu'il ait jamais vues ^ ». C'est alors que l'histoire du Ksopo s'éclaire, et que nous publions tous les renseignements que nous permettent l'état de nos échan- tillons. M. K. Schumann et M. Ileckel ajoutent aussitôt de nou- velles observations qui, tout en rectifiant quelques inexactitudes d'interprétation, confirment la plupart des nôtres. Il restait néanmoins comme on va le voir, à fixer différents points intéressants de la structure et des relations des organes floraux, et nous attendions pour cela les nouveaux envois promis par la direc- tion à l'Agriculture à Madagascar. Dès le mois de mars 1902, M. Prudhomme nous faisait savoir qu'il avait prévenu MM. les Commandants de Cercle et Adminis- trateurs de l'intérêt qui s'attachait à cette plante, et en juillet der- nier nous annonçait de nouA^eaux renseignements avec un envoi de plantes. M. le chef de bataillon Metz ordonna des recherches dans le cercle de Morondava (territoire sakalave) et la plante fut retrouvée à Ankalobé et Mandronarivo : « Les plantes « Kisoumpa » ou « Psokoy » sont, dit-il ', du reste très rares )> ; dans certaines régions du même cercle, « elles sont au contraire très répandues et les indigènes ne leur attribuent aucune vertu curative: Ils ne con- naissent que ses qualités vénéneuses qu'ils utilisent pour se suici- der. Ils râperaient alors les racines, les feraient macérer dans de l'eau qu'ils boiraient ensuite )>. Dans la note du lieutenant Guénot, qui accompagne l'envoi de racines, il est dit que la plante mûrit en août et que les racines séchées et pilées ne servent qu'à soigner les accidents extérieurs 1. Ed. IIii(;Ki:i., Sur le Mciiahea veneiiuLi II. liii., etc., C.R. Ac. Se, 1902. CXXXIV 364-366 et 441-443. 2. Lettres du 2S mai 1902 et du 28 juin 1902. LE KSOPO G77 Fig. 1. — Menahea venenata H. Bâillon. (1/3 grandoiir naturelle environ.) 678 ÉTUDES ET MÉMOIRES (syphilitiques probablement!). On en lait aussi la base de frictions. D'autre part, le lieutenant Lamoureux n'a pu dans le secteur de Mang^oky retrouver le Ksopo, mais en revanche il donne des détails importants sur divers végétaux qui mériteraient d'être étudiés de plus près. Il n'est pas douteux que, grâce à la collaboration effective de MM. les Commandants de Cercle et de leurs subordonnés, nous ne puissions bientôt aborder de nouvelles et intéressantes recherches. La plupart des envois de racines annoncés nous sont parvenus par l'intermédiaire du Jardin colonial fin octobre et novembre dernier; mais ce n'est que tout récemment, au commence- ment de cette année, que M. Dybowski nous fit adresser un lot de très beaux échantillons de tiges pourvues de fleurs à tous les états de développement et de quelques fruits. La planche annexée à ce mémoire reproduit une photographie de quelques-uns de ces échantillons, sur lesquels ont porté les dernières recherches qui viennent d'être publiées K Ajoutons, pour terminer l'histoire de cette plante, que M. Heckel a remis a M. le professeur Béhal une certaine quantité de racines à laquelle nous avons ajouté ce qu'il nous a été possible de distraire de nos envois, et que la composition chimique de cette plante sera bientôt connue. Une autre partie de nos échantillons nous a permis de préparer des extraits alcooliques et aqueux qui entre les mains du D'" L. Camus ~ ont fourni une première série d'expérimentations physiolo- giques du plus grand intérêt. Nous nous bornerons, dans ce qui va suivre, d'exposer en résumé, l'état de nos connaissances sur celte plante curieuse à divers points de vue, en renvoyant pour les détails aux mémoires spéciaux. IL MORPHOLOGIE EXTERNE Orf/ancs véf/efafifs. — Le Menahea venenaia est un arbrisseau l)uissonnant, xérophitique, avec une souche qui porte jusqu'à \ 5- 20 rameaux atteignant un mètre de hauteur environ, jdcu ramifiés I. E. Perrot, Le Mennhea venenaln II. Bn. ; ses caractères et sa position systéma- ti>^^ Fig. 2. — Racines de Ksopo. leur diamètre le plus grand 1,5 à 2 centimètres. Ces racines sont rarement rameuses et leur nombre peut s'élever k 35-iO par souche, atteignant le poids total de 3 à 400 grammes. Les feuilles opposées sur les tiges et les l'ameaux sont brièvement pétiolées, coriaces, simples, entières, elliptiques, mesurant 2-3 centimètres de longueur sur 1 à 1 centimètres 5 de largeur. Le limbe est arrondi au sonmiet ou très légèrement mucroné, à bord un peu recourbé vers la face inférieure, d'aspect velouté et de couleur vert cendré à la face supé- rieure, tandis qu'il e.st blanchâtre en dessous, grâce à la présence 680 ÉTUDES ET MÉMOIRES d'un tomcntum épais, formé de poils soyeux unisériés, enroulés, fortement imhricjués les uns dans les autres et atteignant une lon- gueur de 2 millimètres. La nervation est pennée, mais seule la ner- vure médiane est franchement apparente. Orfjanes floraux. — Les inflorescences souvent fort nombreuses forment de petites cvmes contractées, pauciflores et sessiles à l'ai- selle des feuilles. Les /?\,( Kig'. 4. — Sclii'ni;is dirt-rs. — I, 2, '\. onupc I i';iiisvris;ilr (i;nis la ivu'inr à ili\ri's ('Urs de di''Vclo|)|)('mcnl : ri\ cyliiidi'i' liyiu'ux; l.;il.. NiclilÏTcs ; i. piMidlc: .i, liijc : c, ('■corcc ; //i lilircs péricy(Iii|iics : .1/. molles. 111. — M(ir>l'll()l.(»(HK IMi:ilNE liacinc. — Les racines qui sont seules employées naissent d'une souche courte, en fascicule serré, decouleui- rougeàde. La cassure est ])lanchâtre, à cause de la (juantité (raniidon (|u\'IU's renrermciil, et leur amertume est extrêmement prononcée et dès tenace. Des cor- dons vasculaires apparents parcourent sans ordre le parenchyme fondamental de ces org-anes. LE KSOPO 683 La structure histologique de la racine est un peu dilïerente suivant que Ton s'adresse aux fragments peu développés, ou bien au con- traire aux morceaux volumineux. Dans les petits échantillons, on trouve un cylindre ligneux, mince, compact, entouré d'un anneau de liber et plongé plus ou moins excentriquement au milieu d'un parenchyme amylacé à larges éléments, protégé extérieurement par un liège mince; çà et là on distingue des laticifères assez volumi- neux et des cristaux prismatiques d'oxalate de calcium. ""-Lat. Fig-. 5. — liU'int'nlx de la racine. — I, 2, frag'iiienls de pareiiL-hyme cortical, avec amidon, cristaux et laticileres en coupe transversale; 4, en coupe longitudinale: 'i, anii'lnn, dunl quelques grains sont vus à la lumière polarisée '. Dans les grosses racines, le cylindre ligneux est crevassé forte- ment, et se divise même en fragments qui se séparent et vont con- stituer autant de cylindres centraux irréguliers dispersés dans le parenchyme. Ce sont ces cordons vasculaires qu'il est aisé d'aper- cevoir à l'œil sur la cassure de ces racines. L'amidon qu'elles renferment est en gros grains isolés, arrondis, elliptiques ou fusiformes avec stries d'hydratation peu visibles. lUu-e- ment ils sont accolés par 2 ou 3 et toujours ils sont accompagnés de grains très petits qui remplissent les cellules du parenchyme cortical. 1. Ces deux clichés proviennent de noire premier article in lier. ciiU. col. et nous ont été obligeamment prêtés par M. Miles-Poutingon. 684 ÉTUDES ET MÉMOIRES Les cristaux d'oxalate de calcium sont surtout abondants dans le parenchyme libérien. Les laticifères, peu nombreux dans la région corticale, mais larges et peu ramifiés, sont au contraire plus petits et en abondance plus grande dans les zones criblées des différents fragments libéro- ligneux. Tige. — De couleur jaune cendré, la tige porte un vêtement épi- dermique formé de poils unicellulaires, ou pluricellaires unisériés, avec 1-3 cellules courtes à la base, la cellule terminale étant tou- jours très longue. Sous l'épiderme, on trouve une couche subéroïde ou hypoderme de 4-6 assises de cellules qui constitue en un excellent appareil de protection contre la transpiration. Dans la zone corticale profonde, parenchymateuse, on distingue des laticifères et des cel- lules hypertrophiées renfermant soit un cristal prismatique, soit une mâcle d'oxalate calcique. Les mêmes éléments se retrouvent dans le liber et la moelle. Le péricycle épais est composé d'amas très serrés et très volu- mineux, de filtres séparés parfois par une seule rangée d'éléments parenchj'mateux . Le liber est mince, avec laticifères, et le bois extrêmement lignifié et peu vasculaire. A la périphérie de la moelle on constate la ])vé- sence d'amas du tissu criblé surnuméraire. Pétiole. — Il est surtout caractérisé par l'importance de son revête- ment pilifère qui atteint là et à la face inférieure de la feuille son maximum de développement. Le système fasciculaire est disposé en arc presque fermé, sans amas de libres protectrices. Feuille. — L'épiderme supérieur est privé de stomates et les poils y sont peu nombreux ; le mésophylle bifacial comprend une assise de longues cellules palissadiques et un parenchyme lacuneux dont cer- taines cellules hypertrophiées contiennent une macle volumineuse d'oxalate de chaux. Quant à l'épiderme inférieur, ses petits éléments se prolongent pour la plupart en poils imbriqués, recourbés, qui composent le revê- tement tomenteux de la plante. Fruit. — La structure histologique des follicules ne présente aucun intérêt. Graine. — La sti-ucture des expansions aliformes des graines est assez particulière, elles sont formées d'une à trois assises de cel- LE KSOPO 685 Iules à ornements spirales ou réticulés, limitant une mince bande de parenchyme au centre. Dans la partie renflée de la graine, cet épi- derme du tég-ument est composé d'éléments de dimension beaucoup moindre, souvent privés d'ornements. L'albumen et le tissu des cotyléons ont à peu près la même épaisseur, et la zone interne du tégument contient une file de cel- lules oxalifères à cristaux prismatiques. Appareil sécréteur. — Dans tous les organes on trouve des lati- cifères anastomosés dont la forme et la répartition sont absolument identiques à ce que l'on rencontre chez toutes les Asclépiadacées. Composition chimique. Toxicité et usages du Ksopo. — Seule la racine de cette plante est utilisée par les Sakalaves, et sa composi- tion chimique est actuellement à l'étude ; mais il était intéressant de faire d'abord quelques expériences. Dans ce but, nous avons pré- paré avec des racines fournies par le Jardin colonial, un extrait alcoolique et un extrait aqueux à l'aide desquels notre ami M. le D"" Camus ^ a pu instituer un certain nombre d'expériences. L'extrait alcoolique a servi de préférence aux expérimentations pharmacodynamiques en solution dans l'eau salée physiologique ou dans l'eau distillée au moment de l'injection. Sec et pulvérisé, cet extrait est une poudre jaunâtre, très amère et hygrométrique, un peu odorante ; il est plus soluble dans l'eau distillée que dans l'eau salée et plus soluble à froid qu'à chaud — une solution limpide à -|- 40° précipite fortement et même déjà à -|- 25° à + 40°. — Les solutions sont très amères, légèrement odorantes et suffisamment limpides, si le titre en est de 0,5 à 1 °/o. Si l'on compare la sensibilité du chien et de la grenouille vis-à- vis du Ksopo, on voit, d'après les observations du D"" L. Camus, qu'il existe des différences assez grandes. Le chien est beaucoup plus sensible que le lapin à l'action de ce poison, et le lapin beau- coup plus sensible que la grenouille. Tandis que la dose mortelle est de 0,04 cg. par kilog pour celle-ci, elle est de 0,008 mmg. pour le lapin et seulement de 0,005 mmg. et peut-être au-dessous pour le chien. Le symptôme dominant au début de l'intoxication est le vomisse- 1. D"- L. Camus, Recherches sur la toxicité du Ksopo, C. R. Ac.Sc, 1903, CXXXVI, 176-178. Toxicité comparée du Ksopo, chez le chien, le lapin et la grenouille, C. R. Soc. bioL, 1903, LV. G8() ÉTLDIiS ET MÉMOIUKS ment; il apparaît Irès rapidement et a une ii;rande persistance. Ce sont dalxird des vomissements alimentaii-es, si l'animal a niantré depuis peu ; il rejette ensuite un liquide spumeux blanc de plus en plus vis(jueux et teinté en jaune par la bile; progressivement ces vomissements deviennent plus pénibles et ne se produisent plus qu'à la suite de violents efforts; on eu observe en moyenne une quinzaine au cours de l'intoxication. La salivation est ([uel(:[uefois al)ondanto et la salive s'écoule hors de la gueule. L'animal, épuisé parées vomissements, se couche et reste allongé, sa respiration est peu modifiée, sauf au moment des vomissements; son cœur change de rythme, il s'accélère quelquefois passagère- ment, mais il se ralentit très habituellement et devient irréi^-ulier, les pulsations se font par groupes de 2, 3 ou 4 et sont suivies de longues poses; dans les derniers instants qui précèdent la mort, il n'est pas rare de voir le rythme cardiaque suivre celui de la res- piration : 2 ou 3 pulsations accompagnant chaque respiration. Quand, après les crises de vomissement, l'animal n'est pas dérangé, il devient somnolent et sa pupille se rétrécit; dans cette phase de l'intoxication les mouvements provoqués sont mal coordormés, ils s'accompagnent de tremblements, enlin la para- lysie apparaît. Toute l'intelligence et la sensibilité sont conservées jus([u'au moment de la mort. L'approche de la mort est souvent annoncée par la modification du rythme respiratoire, par la fai- blesse de la pulsation fémorale qui devient imperceptible et enlin par une petite attaque convulsive ([ui acconqiagne 1 arrêt du c(eur. Peu après se produisent 2 ou 3 respirations agonicjues. A l'autopsie, on est frappé surtout par la congestion intense du poumon, du foie et du pancréas, le cœur est mou et dilaté, il peut secondairement se rétracter. L'extrait alcoolique du Ksopo est donc un poison violent, nota- blement plus toxicjue chez le chien (|ue chez le lapin, (^diez ces ani- maux, comme chez la grenouille dont on a étudié l'intoxication, l'action toxique se manifeste sur clill'érents appareils, mais elle agit d'une façon prédominante sui- le système nerveux et sur le cœur. Usaf/es. — l) a])rès les renseignements recueillis, la racine de Ksopo est un poison dangereux cjui, s il n'est guère employé connue on l'avait cru comme poison d'épreuve judiciaire, sert tout au moins à des usages criminels ou comme moyen de suicide Son action loxi([ue est des j)lus intéressantes et il n'est pas impossible cjue si l'on en LE KSOPO (iST jDeut extraire un principe chimique détini, qu'on ne se trouve en pré- sence d'une plante susceptible d'applications thérapeutiques dans certaines affections nerveuses ou cardiaques. Son action comme anti-syphilitique est aussi douteuse que celle de tant d'autres vég-étaux réputés dans les régions tropicales, et ajoutons que les Sakalaves donnent une petite prise de racines de Ksopo râpées dans un peu d'eau en potion contre les maladies du foie, de la rate et contre le tambary, Emile Pebhot, Professeur à f Ecole supérieure de pharmacie de Paris. LA LUTTE PRATIQUE CONTRE LA MALARL\ CE on CAUSE LA MALARIA La malaria a pour cause un orti^anisme microscopique découvert par Laveran qui vit dans les corpuscules roug-es du san^. Pour avoir un accès il doit exister dans le corps de l'homme environ 2r30.000.0()0 de ces petits êtres ; dans les casg-raves on peut en trouver plus d'un billion. Lorsqu'ils sont en nombre sullisant, on peut les voir facilement en reg-ardant au microscope le sang d'un malade. C'est au moment où ces êtres microscopiques font leurs (imfs et les répandent dans le sérum du sang-, que commence l'élévation de la température du malade et apparaît le frisson. Puis, ces œufs en- vahissent les corpuscules rouges du sang^ ; la fièvre disparaît alors peu à peu et la sueur se montre. Au bout d'un, deux ou trois jours, un nouvel accès se manifeste au moment où une nouvelle g-énératinn de plusieurs millions de ces êtres microscopiques est orrivée à maturité et vient de faire ses œufs. Après des accès successifs, ces organismes microscopiques peuvent diminuer de nombre, le malade n'a plus de lièvre et il paraît en voie de g-uérison, mais sous une influence quelconque : froid, exposition exagérée au soleil, une rechute peut se produire. Ces nouveaux accès surviennent quelquefois au bout de plusieurs années et souvent après que le malade a quitté la rég-ion où il a contracté la malaria ; à Paris, par exemple, à la suite d'une opération chirur- g-icale. Dans l'intervalle des rechutes, les êtres microscopiques con- tinuent à vivre dans le sang- mais en trop petit nombre pour produire un effet. Si au contraire ils disparaissent complètement, le malade est à jamais guéri, pourvu qu'il ne soit pas infecté de nouveau. Cef? êtres microscopicpies sont la cause de l'anémie et de la grosse rate que l'on rencontre si fréquemment chez les paludi({ucs. La quinine tue les parasites. Lorsqu'on a été atteint de fièvres palustres, même longtemps LA LUTTE PRATIQUE CONTRE LA MALARIA 689 après la guérison, il faut toujours, lorsqu'on se trouve dans le cas de consulter un médecin, en avertir celui-ci. COMMENT SE PRODUIT l'iINFECTION ? Il est aujourd'hui scientifiquement démontré^ à la suite des travaux de Laveran en Algérie et de bien d'autres savants dans toutes les parties du globe, que les moustiques sont les agents pro- pagateurs de la malaria. Ils ne créent pas la maladie mais ils trans- portent les germes de cette dernière. CONTAGION PAR LES INSECTES De nombreuses maladies de l'homme, des animaux et des plantes sont souvent transmises par des insectes ou par d'autres animaux parasites. Voici, en résumé, un aperçu de l'évolution de la vie des parasites en général : Les hommes, les animaux et les plantes sur lesquels habitent les parasites sont appelés les hôtes de ceux-ci. Tous les parasites ou leurs œufs passent d'un hôte à un autre et peuvent aller d'un indi- vidu infecté à un individu sain auxquels ils transmettent la maladie. Les migrations s'effectuent de différentes manières : beaucoup de parasites passent successivement dans le corps d'un sujet d'une autre espèce et viennent de l'animal à l'homme ou d'une plante aux animaux ; d'autres fois aussi les insectes sont les agents transitaires dlune infection. L'être qui cause la trichine vit pendant une partie de son existence dans le porc aussi bien que dans l'homme. Le porc se nourrit des excréments de l'homme et ce dernier mange le porc. C'est par ce moyen que ces parasites peuvent contagionner l'un et l'autre. Le chien a souvent dans son sang un petit ver qui s'introduit dans la puce et lorsque cet insecte va sur un autre chien il lui donne la maladie. Tout le monde sait que la puce est le véhicule de la peste entre le rat et l'homme. La malaria bovine est donnée par la tique des vaches; la maladie de la mouche tsétsé est transportée par l'insecte de ce nom, et le ver qui cause l'éléphantiasis est transmis par les moustiques, de même que le microbe de la malaria de l'homme. Il est prouvé que ces GÎ^O lin DKS KT MK.MUlltKS insectes sont lesai^ents propag-ateurs de cette maladie niallieureuse- ment fréquente aux colonies. Nous étudierons aujourd'hui les moyens de s'en sauveg-arder et de diminuer la fréquence des cas. HISTOIRE NATURELLE DES MOUSTIQUES Les cousins et les moustiques apj)artiennent à la grande famille de culicides dont on connaît plus de deux cents espèces dilVérentes. Les cousins ne naissent pas dans l'herbe ou dans les arbres comme on le croit souvent ; mais avant d'arriver à l'état d'insecte parfait leur vie se passe dans l'eau. J'ai fait souvent dans mon laboraloire et il vous est facile de le faire vous-mêmes de l'élevage des moustiques. 11 suiïit d'introduire cinq à six de ces insectes sous une cloche de verre dans laquelle on a mis un récipient plein d'eau. Vous verrez bientôt de petites masses brunes flotter à la surface : ce sont des œufs de cousins. Si vous les reg-ardez avec une forte lovipe vous leur trouverez la forme de cônes, fermés par une sorte de couvercle. Peu à peu, le couvercle s'entre-bàille et quatre jours après la ponte il s'ouvre tout à fait, livrant passage à la larve, qui est au mousti([ue ce que la chenille est au papillon. Sa tète est grosse si on la conqjare au corps, couvert de distance en distance par des bouquets de poils; au microscope on disting-ue le système de la circulation. La cjueue est munie d'un tube qui sert à la respiration. Au bout d'une semaine la larve se chang-e en nymphe, elle est plus courte, plus ramassée sur elle-même et nag'e par saccade ; deux jours après, l'insecte parfait brise cette dernière enveloppe et prend son vol. Si je vois ai décrit long-uement cette évolution, c'est que je voudrais vous voir essa^-er de faire la culture du moustique; si vous connaissez bien votre ennemi, vous saurez le reconnaître et vous lutterez plus facilement contre lui. La vie du mousl i(jue est proportionnellement très long-ue. Ils vivent des mois et j'en ai gardé dans des tubes qui ont vécu dix semaines sans aucune nourriture. En Italie, ces insectes jiassent l'hiver. Les cousins se nourrissent de fruits, du sang des oiseaux et des animaux aussi bien ((ue de celui de 1 homme. Comme les bourdons, les mâles sont dépourvus d'aiguillon, la femelle seule suce le sang. Après s'en être goi-g-ée, elle dort pendant loulela journée sur le mur de la chand:)re. LA LUTTK PKATIOt i: CONTRE LA MALAIUA ()!) 1 De temps en temps elle doit retourner dans l'eau pour v dép,.ser ses œufs, puis elle revient à l'endroit où elle avait \rouvé sa nourriture. DIFFÉRENTES ESPÈCES DE MOUSTIQUES Lesg-enres les plus connus de la famille des culicides sont les culex etles anophèles. Il faut savoir les reconnaître, car les anophèles seuls transportent la malaria, tandis que les culex paraissent ne point être dangereux. On peut assez facilement les disting-uer. Les anophèles ont un corps mince et élég-ant, une petite tète, un long et fort aiguillon. Lorsqu'ils se reposent sur un mur, l'axe du corps est en angle droit avec ce dernier. Leurs ailes sont généralement pointillées. Un corps et un thorax épais, un aiguillon beaucoup [)lus grêle donnent au culex un aspect différent. Au repos leur corps est parallèle au mur auquel ils sont fixés. Il est aisé aussi de ne pas confondre les larves de ces deux insectes ; celles des culex fli)ttent, au repos, la tête en bas, à la surface de l'eau et s'enfuient au fond si on les dérange ; celles des anophèles nagent à plat, presque hori- zontalement, comme de petits morceaux de bois, et se trémoussent à la surface de l'eau si on vient les troubler. ou TROUVE-T-ON LES LARVES DES MOUSTIQUES Les larves de culex se trouvent dans les nappes d'eau artificielles jDots, bouteilles cassées, citernes, tuyaux, etc.). Celles des ano- 692 ÉTUDES ET MÉMOIRES phèles préfèrent les mares d'eau naturelles, dans lesquelles se trouvent des herbes vertes dont elles se nourrissent ; on les ren- contre dans les flaques d'eau de pluie qui ne contiennent pas de poissons, qui, eux, dévorent ces larves, surtout lorsque ces llaques d'eau ne sont pas susceptibles d'être nettoyées par les fortes averses. PRÉCAUTIONS A PRENDRE POUR ÉVITER LA MALARIA Il n'existe pas, jusqu'à présent, d'inoculation préventive contre la malaria. Les précautions que nous devons prendre pour éviter cette infection sont les suivantes ; d'abord et surtout 1" éviter, autant que possible, d'être piqués par les moustiques ; 2° tâcher de tuer ces insectes et les empêcher de se reproduire autour des mai- sons d'habitation; 3° détruire le parasite chez Ihomme par l'usage de la quinine : 4** faire l'éducation des intéressés. MOUSTIQUAIRE L'usag-e des moustiquaires s'impose dans les régions où sévit la malaria. Ne vous servez pas de celles en usage dans nos pays, fixées par des anneaux et retombant autour du lit en plis lourds. Cela donne chaud et empêche de respirer. Que votre moustiquaire soit carrée, enfoncée soigneusement sous le matelas et bien tendue pour permettre à l'air de pénétrer. La partie supérieure doit être en tulle comme le reste et pas en toile. 11 ne doit y exister ni trous, ni ouverture, elle ne doit pas non plus pendre et traîner sur le sol autour du lit. Les mains et les pieds sont souvent mordus parce qu'on les met contre le tulle durant le sommeil. On peut éviter ces mor- sures en mettant à l'extrémité inférieure une bande de toile de cin- quante centimètres environ ; celle-ci, lorsque la moustiquaire est rentrée sous le matelas, doit dépasser celui-ci de vingt centi- mètres. Ce n'est pas seulement la nuit, mais aussi pendant la journée, si on dort, qu'il faut se servir de la moustiquaire ; les anophèles mordent aussi durant le jour. 11 est nécessaire de mettre la mousti- quaire en place avant le coucher du soleil, c'est-à-dire avant que les insectes ne se mettent en mouvement, car alors il est dillicile d'éviter d'emprisonner un moustique sous le tulle. Le matin on doit plier soi-même sa moustiquaire ; du reste, toutes ces LA LUTTE PRATIQUE CONTRE LA MALARIA 693 opérations ne doivent jamais être confiées à un domestique. D'au- cuns se fig-urent que les moustiques ne les piquent pas, la vérité est que leur épiderme est peu sensible et qu'ils ne ressentent pas de douleur de cette morsure. Ils doivent donc se servir du môme mode de préservation que les autres. QUELQUES FAITS A PROPOS DES MOUSTIQUES Les anophèles ne donnent pas la malaria, ils en transportent le germe ; dans les rég-ions où la fièvre palustre n'existe pas on peut donc trouver des anophèles qui n'ayant pas été en contact avec des hommes atteints de malaria, ne sont pas infectés. Si des personnes en proie à la malaria sont mordues par des anophèles indemnes, on retrouve dans ceux-ci, en les examinant, les parasites de cette maladie qu'ils transportent ailleurs. En dis- séquant les moustiques de ce genre, il est facile de suivre le développement de l'infection. L'insecte, en suçant, introduit les parasites dans son estomac, puis ils se répandent dans les tissus du corps où ils séjournent environ une semaine. Arrivés à maturité ils produisent une génération de spores, qui passent dans la glande salivaire de l'anophèle, comme le virus de la rage passe du système nerveux du chien, dans la glande salivaire de ce dernier. Vous con- naissez tous la sensation de démangeaison produite par la morsure d'un moustique. Elle est causée par une petite goutte de liquide irritant, injectée dans la blessure faite par son aiguillon. Ce liquide venant de la glande salivaire peut contenir de jeunes parasites de la malaria et par conséquent communiquer la maladie. L'aiguillon du moustique peut être comparé à la seringue qui sert au bactériologiste à faire une inoculation sous la peau d'un lapin pour faire une expérience. Lorsque les moustiques mordent une personne malade de la malaria, ils peuvent, au bout d'une semaine, infecter de malaria le corps d'une personne saine. Ceux qui ont la malaria ou qui l'ont eue doivent se souvenir qu'ils peuvent répandre l'infection ou la reprendre, ils seront donc aussi soigneux c|ue possible pour empêcher ces résultats. Lorsque les accès se manifestent au retour en France il n'y a pas lieu de s'étonner, la personne ayant été infectée par les mous- tiques durant son séjour dans les pays où sévit la malaria. 694 ÉTIDES ET MÉMOIIIES DESTRUCTION DES LARVES DES MOUSTIQUES Kii même temps que vous prendrez les précautions que je viens d'énumérer, il faudra essaver de détruire ces dangereux hôtes s'il v en a dans nos maisons. Veillez à ce qu'une propreté absolue règne dans celles-ci ; exigez que vos domestiques procèdent souvent à un nettoyaj^e complet et qui ne soit pas borné à une netteté superfi- cielle. Dans les régions paludéennes les habitations doivent être suré- levées par i-apport au sol, car les moustiques ne volent pas bien haut. 11 est bon de mettre aux fenêtres des toiles métalliques qui empêcheront les moustiques de pénétrer aussi facilement dans les maisons. Une attention spéciale doit être apportée k la ventilation et à l'éclairag-e, les insectes n'aimant ni l'air, ni la lumière. Il convient d'éviter et de proscrire tout ce qui peut leur fournir un abri soit à l'intérieur, soit à l'extérieur de la maison : rideaux de couleur sombre, orifices de ventilation ouvrant sur le toit ; végétation touffue à proximité, bâtiments inutilisés, etc. On sait que les moustiques qui mordent l'homme se reproduisent près des maisons; cherchez donc autour de ces dernières et même à l'intérieur de celles-ci s'il ne se trouve pas de leurs larves : regar- dez dans les bouteilles cassées, les vieilles gourdes, les seaux où on met les bouteilles à rafraîchir, les baquets, dans les petits récipients que l'on place sous les pieds des tables ou des garde-manger pour empêcher l'invasion des fourmis; si vous avez un jardin, passez l'inspection des fontaines, regardez dans U's pots de fleurs. Si on voit des anophèles ou s'il y a des cas récents de malaria dans une maison, on trouvera non loin de celle-ci les larves de ces insectes : dans les petites mares, les llaquos d'eau, le long des routes ; dans les trous des rochers ; dans les vieux puits, dans les marécages au milieu de l'Iierbe, autour des étables, vous les verrez pulKder. L'existence des anophèles dans les eaux stagnantes expli(jue pour- quoi les contrées marécageuses sont particulièrement malsaines. 11 en est de même dans les régions oii des travaux de terrassement viennent d'avoir lieu et où l'écoulenu'ul des eaux n'est pas encore bien assuré. Voilà j)our(puti le drainagi' d'un pays fait, en général, disparaître les (lèvres palustres. Le geiinc de la malaria n'est donc j)as un miasme (jui s'élève du sol. LA LUTTE PRATIQUE CONTRE LA MALARL4 ()9o Lorsque vous voulez détruire les larves, faites votre inspection une fois par semaine; c'est suffisant, puisqu'il faut plus de dix jours à un moustique pour arriver à l'état d'insecte parfait. Pour accomplir cette œuvre de destruction utile, on peut se servir de pétrole ; celui-ci se répand en couche mince à la surface d(i l'eau et il emplit les tubes respiratoires des larves qui meurent asphyxiées. Le pétrole doit séjourner sur l'eau environ une demi-heure; on doit l'étendre en promenant à la surface de l'eau un linge trempé dans du pétrole. Mettez à l'abri vos citernes et vos récipients contenant de l'eau de boisson en plaçant dessus un couvercle. DESTRUCTION DES MOUSTIQUES Quant aux moustiques qui se trouvent dans les maisons, le meil- leur moyen pour les tuer est d'employer un gaz asphyxiant. La for- maldéhyde, qui est un bon antiseptique pour détruire les microbes, est un mauvais insecticide; le meilleur gaz que nous ayons à notre disposition est l'acide sulfureux, parce qu'il possède un grand pou- voir de pénétration. Il peut être produit soit par la combustion directe du soufre, soit en employant le gaz Clayton qui est plus toxique et plus efficace. Lorsqu'on emploie le gaz Clayton, non seulement les moustiques sont détruits, mais encore ils ne reviennent pas dans l'espace ainsi fumigé. Voici une lettre publiée dernièrement par le journal médical le Caducée et qui met bien ce fait en lumière. MÉDECINE SANITAIRE MARITIME A PROPOS DE LK DESTRUCTION DES MOUSTIQUES La défense contre les moustiques est une question capitale en méde- cine sanitaire maritime; aussi croyons-nous devoir reproduire la lettre suivante qui constitue un document intéressant dans la question. u Londres, 27 février 1903. « Monsieur, (( J'apprends que vous désire/ connaître les résultats observés dans remploi du u Gaz Clayton » pour la destruction des moustiques dans les bateaux et leurs cabines. Je suis très heureux de vous ailirmer qu'après la fumigation de ces cabines sur le steamer Ashniore, que je commandais, dans un voyage à Galveston, non-seulement tous les moustiques pré- sents ont été détruits, mais ce bateau est resté absolument sans 696 ÉTUDES ET MÉMOIRES aucun moustique pendant toute la durée de notre séjour à Galveston, alors que les équipages des autres bateaux qui se trouvaient dans le port, et qui n'av^aient pas été fumigés, étaient tourmentés par les moustiques toutes les nuits. u Rien n*a été abîmé, ni nos effets personnels, ni nos provisions. (( Je me suis servi plusieurs fois de ce gaz sur V Ashmore que je comman- dais auparavant. Mon prédécesseur sur lAher(/eldie, que je commande en ce moment, s'en est aussi servi, car ce navire possède à bord un appa- reil Clayton, et nous l'avons employé avec succès pour nous débarrasser de toutes sortes d'insectes. William Keith. « Commandant du navire Aheryeldie. » Nous avions déjà fait des remarques analogues dans des maisons qui avaient été désinfectées par le gaz Clayton. Ce procédé de des- truction des moustiques par l'acide sulfureux est économique et peut être employé dans toutes les pièces d une maison, rien ne sera abîmé. Toutes les précautions que nous venons d'indiquer sont dune application simple et facile ; en aous efforçant de les suivre, vous verrez diminuer rapidement autour de vous les cas de malaria. Il ne s'agit pas de tenter une expérience; depuis plusieurs années, la preuve en a été fournie nombre de fois. ESSAIS DE DÉCORTICATION DES RIZ DE MADAGASCAR Les essais de décortication de riz des Colonies françaises (dont les premiers résultats relatifs aux riz de la Guinée ont été publiés dans le n** 3 du Bulletin du Jardin Colonial) ont été poursuivis à la Station d'essais de machines par M. Ringelmann, professeur à l'École supérieure d'xVgriculture coloniale, sur des riz provenant de Mada- gascar. Les expériences ont porté sur différentes machines, et quatre variétés de riz ont été successivement soumises à ces essais dont voici les résultats principaux : EXTRAIT DU BULLETIN û'eXPÉRIENCES, N" 374. Machine à décortiquer le riz, de Nicholson. M. Pilter, 24, rue Alibert, Paris, 10". Prix de vente : 5o0 francs. Renseignements généraux. — Un arbre horizontal, à manivelles ou à poulies, commande par une roue à denture hélicoïdale (43 dents) une vis sans fin (à 5 filets), calée sur un arbre vertical qui porte à sa partie inférieure un volant de 0"'410 de diamètre et à sa partie supérieure une meule tronc-conique en aggloméré. Diamètres de la meule : 0- 105 — 0- 220. Hauteur : 0"' 23o. La meule tourne dans une enveloppe en bois garnie de 6o bandes de cuir, placées suivant les génératrices. La meule peut s'élever plus ou moins dans son enveloppe fixe. Bulletin du Jardin colonial. 698 ÉTUDES ET 3IÉM01RES Machine à décorticiuer le riz de Xicholson. Poids de l'hectolitre de paddy nettoyé au tarare ordinaire (kil.i Nombre de tours de l'arbi-e de commande fpar minute) Temps nécessaire pc^ur passer 100'' de jjaddy (heure-ininule) . . Travail ) pî"' seconde... niécani(jue f |iuimI0O'' de |iii(l(iy. nécessaire en i pour 100'' i-iz Kilo},nanini- à repasser Hrisurcs Halles Poussières, perles, déclicts Ï5 s ■M 12'2 K22 210 2:i(i ;")(; so 22 :w I il) IN so 0 7o De l'Inde 3S 11, 3;{,„ 23 13 130 739 227 709 57 10 20 r).'i 1 1 1 19 11 I iS Riijo Me II il Ô1.S2 3 S jh 21'" l-Kl 2i Of) 110 8S3 221 991 .")! 9.') 2 1 90 1 17 IS 3 9N \'ari madinika 58 . 86 3 S ,1, I-,,,, kKl 2i 70 I I I I M lÔJ 129 71 Oj 7 ,')0 0 9.") IS .-)7 1 33 ESSAIS DE DÉCORTICATION DES RIZ DE MADAGASCAR 699 EXTRAIT DU BULLETIN N° 375 Machine à décortiquer le riz de M. A. Billoud (à La Ferlé-sous-Jouarre, Seine-et-Marne). Prix de vente : 350 francs. Renseignements généraux. — La partie travaillante est constituée par une meule tronc-conique en aggloméré, montée à l'extrémité d'un arbre horizontal : Diamètre de la meule Hauteur 0-243 0™ 060 O™ 032 La meule tourne contre une plaque en cuir maintenue par une enveloppe en fonte qui reçoit le paddy à sa partie centrale. L'arbre des manivelles porte une roue de 90 dents, qui entraîne un pignon de 30 dents, calé sur l'arbre intermédiaire sur lequel une roue de 105 dents engrène avec un pignon de 35 dents, fixé sur l'arbre horizontal de la meule. Cet arbre porte un volant de 0'" 400 de diamètre . Nombre de tours de larbre de commande par minute Temps nécessaire pour passer 100'' de paddy (heures-minutes). Travail nécessaire en kilogram- mètres : par seconde nar lOO** de oaddv O •il £ VARIÉTÉS DE RIZ Fotsy De llnde Rojo Mena Va ri madinika '1 "^ 3 l 5 6 8 9 10 11 12 39 4'' 27 kgm 14 73 235 680 412 02S 57 20 23 66 - 0 86 15 64 2 64 39 S"^ 25 kgm 33 30 649 350 1487 288 43 66 40 18 0 90 12 30 2 96 39 4'' 50 kg,n 26 2? 456 228 1302 020 35 01 50 0 92 12 48 1 56 39 4'' 39 1 11 80 248 048 367 478 67 50 12 30 0 96 18 70 0 51 par 100'' de riz décortiqué. . .. 100'' de paddy passés à la machi- ne donnent Riz décortiqué Paddy à repasser Brisures Balles Poussières, pertes, déchets 1 1. Température du grain: à l'entrée 6° 5. à la sortie 12". différence 5° 5. 2. Avec du riz décortiqué 700 ÉTUDES ET MÉMOIKES EXTRAIT DU BULLETIN N° 376. Moulin concasseur à bras, « Record », de M. Pilter, 24, rue Alibert, Paris, 10°. Prix de vente : 160 francs. Renseifi^nements généraux. — Petit moulin à axe horizontal, à volant-manivelle ; plateaux ondulés et striés de 0 "^ 155 de diamètre. Un des plateaux est fixe, l'autre est calé sur l'arbre. Bien que ce moulin soit construit spécialement en vue du concas- sage des grains, on a cru intéressant d'essayer à lui faire faire le travail de décortication du riz par un réglage convenable, afin de voir si la machine peut rendre des services dans les moyennes exploitations. Moulin concasseur ii Ihms ' itccorcl ». ESSAIS DE DÉCORTICATIOIS' DES RIZ DE MADAGASCAR 701 Nombre de tours de Tarbre de com- mande (par minute) Temps nécessaire pour passer 100'* de paddy (heures-minutes) Travail nécessaire en kilogrammotres : par seconde par 100'' de paddy jjar 100'' de riz décortiqué 100'' de patldy passé à la machine donnent : Riz décorti(|ué Paddy à repasser Brisures Balles Poussières, pertes, déchets y< 0 . 6 7 '.) 10 11 12 VARIETES DE RIZ Fotsy 38 ;■)'' 10 l-K m 7 40 137 640 458 SOO 30 51 20 11 50 5 30 1 6 102 314 32 52 1, 10 3 37 16 256 634 50 so 20 50 De "Inde 3S 4'' 33 kgm 6 16 101 024 307 063 32 90 53 2 10 10 0 Rdjo- Menu 38 kgn, 6 16 92 400 381 818 24 20 63 1 50 0 2 30 Uailiriika 38 3'' 25 kgm 6 90 84 S70 179 809 47 20 42 20 1 20 8 30 1 10 EXTRAIT DU BULLETIN N*' 377. Machine à décortiquer le riz, « Le Melchior », de la Société générale meulière de La Ferté-sous-Jouarre (Seine-et-Marne). Prix de vente : 350 francs. Renseignements généraux. — La pièce travaillante est constituée par un tronc de cône à axe vertical, dont la surface est garnie de tôle alvéolaire; le cône tourne dans une enveloppe en forte toile métallique. Le volant-manivelle, à denture inté- rieure (147 dents), actionne un pignon de 29 dents, monté sur un petit axe horizon- tal à l'extrémité duquel deux roues d'angle, de même nombre de dents, sont chargées de donner le mouvement à l'axe vertical du cône, dont voici les dimensions : Machine à décortiquer le riz de la Société générale Meulière. Diamètres Hauteur 0'" 300 -0'" 130 0"' 254. 702 ÉTUDES ET MÉMOIRES Nombre de tours de l'arbre de corn mande (par minute) Temps nécessaire pour passer 100'' de paddy (heures-minutes) Travail mécanique nécessaire en kilo- grammètres : par seconde par 100'' de paddy par 100'' de riz décortiqué 100'' de paddy passés à la machine donnent : Riz décortiqué Paddy à repasser Brisures Balles Poussières, pertes, déchets s 8 9 10 11 12 A'ARIETÉS DE RIZ Fotsy 3t) 16 03 123 110 274 799 4i 80 37 1 30 13 94 2 96 De ITnde 3 s 0*> 37 39 2'' 5 i-f. m 17 3C 129 750 502 908 25 80 62 20 1 20 6 20 4 60 54 120 235 27 479 310 51 20 22 50 1 10 11 10 14 10 Rojo- Mcna 37 5 0^ 36 kgni 54 25 117 180 241 568 48 50 31 80 0 95 13 70 5 05 Vari Madiiiik.1 O'' 35 56 25 H8 125 165 580 71 34 8 84 0 so 14 40 4 62 /■. X c o cf—' ce Cfl îfi •5 c ~ Si 3 tn c o a^ y2 <5 " - ^ 1 v\ \ 1 N ' ' • • • < % ..••• 'v.,,.^ • • ^ ^ (V'~^ _^CKV '•. ^ t J£. •• ^ ^ ^^^ C "T^ L ^ \ J^^ * , •5 (. '•• .r 1 \\ iT^ k • 5 )2 ^fc:^ yyj 'i O oi N^_^ • «1 * * r r. o^ >. 5; z •2 '■■•■- 1 -/•./^7l o._.^= \ c - X, \ r>A4 "./••■ ,1 ,«, *jt ^--^^-v-/ ^» . ^ : : • • • ^ .1^ 1 -^v^ _..,*.•■•■'' •C o \ 1 :s'^r^-& ><^^-^^ : ^ • 1"- \; 5in V *fe^ * • \ / • • \\ 'l A. _ •* / ^^ ) : ( jK>^m ^ • .<0 71 »- 1^. . 0 ^ !■ ^.-^f irt (/) -« s f II J ""N A^ '^ ^'^"^-^ < / y z ^ J'i"':^ t«5 é y ! < r o V. 0^? „ ".. / § 1*, * î B^^ « \ î .1...:^.. ■Pw T\j ^ J vj?^ 1 |'\, 40s ^ r --li^^»' < 'ri Or LE COTON AUX ÉTATS-UNIS [Suite. ) VALEUR RESPECTIVE DES VARIÉTÉS Pour bien fixer sur la valeur relative des variétés ci-dessus étu- diées nous examinerons des essais faits à la Station dAlabama d'une part dont les sols sont argileux et alluvionnaires, et de l'autre à la Station de Géorgie où les sols sont siliceux. Une des considérations les plus importantes dans cet ordre d'idées est fournie par le rendement net en fibres. Le tableau ci-contre donne les classements des variétés pour une période de 10 ans. De toutes ces variétés, deux se sont particulièrement maintenues en bon rang et donnent d'ailleurs dans la pratique courante les meil- leurs résultats. G^sont le Truitt et le Péterkin. La comparaison des poids récoltés ne permet pas d'ailleurs de dire laquelle des deux est la meilleure. De 1890 à 1899 leurs rende- ments ont été relevés et sont les suivants : Récolte de fibre Années de récolte par acre Péterkin Truitt 1890 786 783 1891 465 489 1892 338 302 1896 320 384 1897 246 245 1898 339 330 1899 427 442 La moyenne du rendement a été pour le Péterkin de 417 et pour le Truitt de 425. A ce sujet, quoiqu'il y ait peu de différence entre les deux, on peut prendre le Truitt comme la variété fournissant le plus haut rende- ment en fibres par unité de surface. 704 ÉTUDES ET MÉMOIRES Voyons maintenant la jj-rosseur des capsules. Le tableau ci-dessous donne le poids de coton contenu dans 100 capsules et le nombre de capsules nécessaire pour avoir une livre de coton. Variétés Cheise Improved Texas Storm proof Drake Cluster Strickland Bank's Russell big- boll Lee Improved Japan Christopher Improved. . . . Culpepper Peerless Trash Select Truitt Jones Improved Alex. C. Jones Improved Curry. . . . Ellis Duncan Scroggins prolific Nancy Ilank's Norris Truitt premium Maddox Gumminges Sprueill Goppedge ; . . . , G ri fil n Park's Own Grayson big bnll Gunn Matthews L. Slaplc Texas burr , Smith Improved Jackson limbless. U. S. . . Ilerndon sélect W.-A. Gook Poids de coton Xombre de dans 100 capsules capsules en livres par livre 2.00 50 1.97 50 1.80 56 1.80 56 1.77 57 1.73 58 1.70 59 1.70 59 1.67 60 1.67 60 1.64 61 1.64 61 1.64 61 1.64 61 1.60 63 1.60 63 1.57 64 1.57 64 1.57 64 1.57 64 1.57 64 1.57 64 1.53 65 1.53 65 1.53 65 1 . 53 65 1.50 67 1.47 68 1.47 68 1.47 68 1.40 71 1 . 40 71 I . io 71 1.40 71 1.37 73 LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 705 DoughtyL. S 1.37 73 Bi&^oJl 1.33 75 Minor 1 33 75 Texas Oak I.33 75 Mattis 1 30 77 Hawkins 1 . 30 77 Hawkins Jumbo 1 . 30 77 Hilliard ] . 30 77 Pinkerton î 30 77 Petit Gulf 1 30 77 Allen Improved L. S ] .30 77 Burr 1-27 79 King 1.23 81 Lowry 1.23 81 Texas Wood l . 23 §1 Cobweb 1 . 23 81 Improved L. Staple 1.23 81 Jackson African l .20 81 Mon 1.17 83 Welborn 1 . 17 86 Tyler limb Glustei- 1.17 86 Allen Hybride L. S 1.13 86 N° 12. Herlong 1.13 89 Borden prolific 1.13 89 Wise .; 1.10 89 Peterkin 1.07 91 Dickson 1 . 07 9 i Boyd prolilic'. 1.07 94 Shine Early 1.07 94 Dearing 1 . 07 94 Norris 1 .07 94 Bâtes Poor Land 1 .03 96 Excelsior 0.87 111 Sea Island 0.77 130 La même Station a fait sur le nombre de capsules ouvertes du 9-i 1 octobre des observations intéressantes. Les chiffres indiqués ci-dessous mentionnent le nombre de bou- tons à fleurs, de fleurs et de capsules ouvertes ou formées à la date ci-dessus indiquée. Cette considération a une g-rande importance pour la limite Nord 706 ETUDES ET MEMOIRES de la culture du coton où les gelées sont fort à craindre et où l'on cherche surtout à récolter le plus de capsules avant les premiers froids. PRÉCOCITÉ COMPARÉE DES VARIÉTÉS Nombre de Pourcentage Variétés de capsules caps, ouvertes Nancy Hanks 47 Texas Wood 40 Borden 36 Griffîn 40 Park's Own 34 Deariny 37 Boyd . 55 Norris 32 Smith 32 Shine 48 Texas burr 24 Hawkins Yumbo. . . 34 Peterkin 46 Moon 31 Burr 34 Lowry 36 Minor 47 N" 12. Herlong 28 Gunn 28 Texas Oak 29 Drake cluster 40 Coppedge 48 Truill premium. ... 34 KUis 25 Big boll 37 Gheise 25 Allen Hybride 54 Bâtes poor land . . . . 38 King 43 John Iniproved G. A. 40 Tn.ilt 33 Japaii 37 100 100 97 97 97 95 94 94 94 92 92 91 91 90 89 89 89 88 86 86 85 85 85 84 84 84 84 83 82 82 82 81 LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 707 Cobweb 54 gQ Doughty L. S 40 80 Petêrkin 44 gQ Dickson 4g 79 Grayson 3g 79 Pinkerton 43 79 Bank's 32 7g Gulpepper 30 77 Duncan 38 77 Jones Imp. Alex. ... 29 76 Mattis 63 76 Excelsior 52 75 Hilliard 40 75 Russel big boll 35 75 Maddox 39 74 Wise 39 74 Improved L. Staple. 49 73 Herndon 41 71 Hawkins 33 70 Texas Storm proof . . *>6 70 Peerless 43 69 Cook W. A b'2 67 Matthews 36 64 Sprueill 31 64 Trash 39 62 Welborn pet 55 62 Cumming's 62 58 Strickland 23 56 Tyler 35 50 Jackson African. .. . 43 42 Lee Improved 45 36 Christopher 39 35 Jackson limbless U.S. 51 29 Sea Island 90 23 Voyons maintenant en chiffres la quantité de coton récoltée pour quelques-unes de ces différentes variétés : 708 ÉTUDES ET MÉMOIRES ESSAIS DE 23 VARIÉTÉS DE COTON Variétés Culpcpper Iniproved. . Texas burr Moss' Iniproved Schley Russell big" boll Prize Lec-Imprnvo(! n° 2. . . Lee Iniproved n° 1 . . . Strickland Iniproved. Texas Oak Norris l)ipboll Todd's Iniproved Mascolt Breedens" Prolific.... Shires • Leetle Iniproved Cliatt"s Hinji's Iniproved n" 1 . Christoplier Iniproved Sprneilî prolific Ellis bij;boll Hawkins prolific Jackson liniblcss Hinji^'s Iniproved n" 2. Herndon Select Moyenne récolte 115 161 70 106 68 171 69 lOi 52 96 138 58 229 119 291 118 127 330 73 9S 73 7 i 92 259 161 2" •écoltc 130 ■Il 8 i31 362 439 335 455 446 475 2S0 399 383 308 506 479 525 429 44 i 477 375 427 345 392 322 446 461 416 3« 4" récolte récolte 529 203 336 122 453 211 508 185 605 262 397 133 550 126 511 112 . 503 395 478 1 96 533 165 509 241 376 73 462 137 378 49 477 116 169 138 293 53 479 219 520 138 538 188 483 179 412 188 288 51 381 90 167 160 Récolte totale 1.275 I .250 1 . 096 1.238 1.270 1.156 1.191 1 . 202 230 169 219 116 184 197 243 I . 200 1.17S 1 .153 1 . 1 16 1 , I S3 1 .114 1.122 1.011 1.041 1 . 093 1.173 Poids des fibres 123 115 420 409 403 109 405 403 396 396 392 395 386 383 379 382 383 384 384 378 379 380 359 350 346 389 \'aleur totale dollars 33 33 32 32 32 32 32 32 31 31 31 31 31 30 30 30 30 30 30 30 30 30 28 27 31 En relevant ainsi pour chacune des cueillettes la quantité de coton récolté, on a du premier coup une idée de la proportion du rendement sur laquelle on peut compter comme récolte de })remière, seconde et troisième qualité. Ces expériences sont dues à la Station expé- rimentale de Géorgie, où pendant plusieurs années on lit à ce sujet des relevés culturaux. Le champ d'essais était préparé comme on le fait pour la culture du coton et fertilisé de la façon suivante, par acre : Phosphate acide (Ihlorate de potasse Farine de colon Nitrate de soude Total 35G livres 30 .) 1 bV) )) 36 )) 578 LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 709 Valeur des engrais à l'acre : 23 fr. 85. L'on fit quatre cueillettes ainsi que suit : 1"''' cueillette -21 aoûl 2'^ » î septembre 3« .) 12 4« » 28 » -5' CHOIX DES VARIÉTÉS A PROPAGER DANS NOS COLONIES Les variétés américaines déjà essayées dans nos colonies au point de vue cultural sont les suivantes : Louisiane, courte soie. c ' 1 \ Géorgie, lonscue soie. Senes-al -^ t- i i Upiand, courte soie. Sea-lsland, longue soie. ; Sea-lsland, » I Géorg-ie, long'ue soie. Tahiti / Mammoth » Choice Upiand, courte soie. Louisiane, » En ce qui concerne les essais faits à Tahiti, les variétés étaient bien choisies, quoique leur désignation manquât un peu de précision. Les mots Géorg-ie, Choïce Upiand et Louisiane désig-nent simplement des régions de culture et non des variétés caractérisées par certaines qualités. Mais comme la rég-ion était très favorable à la culture de cette Malvacée, une distinction plus profonde n'était pas absolument nécessaire. Toutes ces sortes, sauf le Sea Island, ont d'ailleurs parfaitement réussi et se sont toutes transformées en long-ues soies. Le premier, comme nous l'avons vu, est trop exig-eant pour compter sur lui. En ce qui concerne le Sénégal et le Soudan, il n'est pas permis de raisonner semblablement. Le climat sec et dur de cette partie de l'Afrique doit faire dès le début exclure des rég-ions non maritimes les longues soies. D'une végétation généralement exubérante et capricieuse ils ne peuvent pas résister aux vents desséchants du désert. 710 ÉTLDES ET MÉMOIRES A part une zone très limitée aux bords de la mer vers le Sine et le Saloum on n'eût jamais dû essayer de telles variétés. Le choix doit uniquement se porter sur les variétés à moyennes et à courtes soies. Cependant il existe un certain nombre de variétés à longues soies, appartenant surtout au type Gossi/pium hirsutum, qui poussent admirablement bien dans un climat continental, à condition que le sol soit suffisamment riche et profond. Ces variétés a longues soies ont surtout un avenir dans les par- ties littorales de la Guinée et particulièrement dans le Rio-Nunez. Dans cette région, en effet, on produit un coton indigène qui peut être classé dans les longues soies; ce qui fait incliner à penser que des variétés plus perfectionnées donneront là de bons résultats. Toutes les autres variétés à essayer doivent être à courtes soies. Dans cette série nous possédons, comme nous l'avons vu, toutes les qualités culturales fixées individuellement sur lelle ou telle variété. Quelle qualité doit être préférée pour l'acclimatement ; sur ce point nous ne savons absolument rien, les essais précédents ne nous renseignent en aucune façon. En agriculture, seule la voix de l'expérience a de la valeur et les types essayés ne répondent culturalement à aucune qualité particu- lière. Ces qualités, qui nous ont fixé sur le choix des variétés, sont les suivantes : i° Variétés poussant soit sur sols siliceux et silico-argileux, variétés poussant sur les sols riches. 2*> Variétés hâtives, mi-hâtives, tardives. 3" Variétés prolifiques. Toutes, sans exception, appartiennent à cette catégorie. Elle sont forcément vigoureuses et bien adaptées Dour résister à des chang-ements de milieu. M. O 4° Haut rendement en fibres. o" Variétés originaires du Nord de la région cotonnière, variétés originaires du Sud. Une des plus importantes de ces qualités est sans contredit la maturité précoce et surtout la maturité de toutes les capsules presque en même temps. C'est ce qui se produit par exemple dans le king, qui est la sorte typifjue Nord du coton. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 711 Les deux premières cueillettes enlèvent presque tout le coton bien vendable. Cette aptitude est précieuse pour nous qui avons à craindre sur la fin de la maturité des sécheresses intenses et des vents brûlants détruisant parfois toute la récolte. VARIÉTÉS RÉPANDUES EN 1901 1° — LONGUES SOIES Allen. — Vigoureuse, grosses capsules, sols d'alluvions. Lon- gueur : 30 à So™'". Variété maritime. Régions chaudes. Sea Island. — Variété maritime. La meilleure des longues soies. Sols siliceux. Matthews L. S. — Très prolifique, Variétés pour sols silico- argileux, régions tempérées. Longueur : 33-40™"', Griffin. — Variété continentale. Très prolifique, régions tempé- rées. Doughty longue soie. — Variété des Uplands. Venant sur sols siliceux, en climat tempéré, presque froid. 2° — COURTES SOIES Dickson. — Variété fermée, très hâtive. Longueur : 23-26""". King. — Hâtive, très prolifique. Longueur : 2a-2fi"'"'. Péterkin. — Rendement très élevé en fibres, 35 %. Longueur : 22-25""". Hawkins extra-prolific. — Maturité moyenne, très prolifique. Longueur : 18-22""". Peerless. — Variété hâtive de Upland. Longueur : 23-27""". Excelsior prolific. — Très prolifique. Rendement de 3i à 35°/o. Longueur : 26-30"'"'. Russel big boll. — V^ariétés à grosses capsules et à fort ren- dement. Variété nouvelle très promettante. Petit Gulf. — Variété à courte soie pour régions chaudes et sol ai^gileux ou alluvionnaires. 712 ÉTUDES ET MÉMOIRES CONDITIONS DE CLIMAT La production du coton dans les États-Unis est limitée par des conditions climatériques dont une des principales est la tempéra- ture. Au sud du 37"^ degré de latitude nord il n'est plus guère pos- sible de cultiver avec profit le coton. Une petite quantité de coton est produite au nord de cette limite, mais réellement la limite cul- turale du cotonnier s'arrête à la partie septentrionale de la Caroline du Nord, du Tennessee et de l'Arkansas. Pendant les quelques années qui suivirent la g-uerre de sécession, alors que les prix du coton étaient fort élevés, la zone culturale s'était accrue assez fortement vers l'ouest, mais également vers le nord. De telles conditions économiques n'étaient que passagères et dans les comtés où l'on ne réussissait la récolte que dans les années favorables on abandonna peu à peu la culture de cette plante. Au début de la culture, le cotonnier n'occupait guère que les sols profonds, silico-argileux, alluvions et sols analogues que l'expé- périence avait montré être très favorable à cette plante. Depuis, avec l'extension de l'immigration, le coton a été cultivé sur toutes sortes de sol, et les limites culturales, à part quelques points très calcaires, ne se sont établies que d'après les données climatériques des Etats-Unis. Nous avons vu plus haut que la région favorable à la culture du coton a sa limite nord un peu au-dessous du 37'" degré de latitude nord. Au sud de cette limite, les conditions climatériques sont favorables, c'est-à-dire que la moyenne de température est assez élevée et que surtout les minimas ne détruisent pas les j^lantes. Si l'on compare la moyenne de températures annuelles des Etats situés au sud de ce parallèle à celle des Etats situés au nord, on voit qu'elle est plus élevée d'environ 15 degrés dans le Sud Caro- line, Géorgie, Alabama et Mississipi que dans le Massachusets, New-York et Pensylvania. Pendant l'hiver, la moyenne de tempé- rature est d'environ 20 degrés plus chaude que dans le Sud, et pen- dant l'été d'environ 10 degrés. Ceci donne donc une saison de végétation à la fois plus chaude et plus longue. LE COTON AUX ÉTATS-UNIS 71;^ Les écarts de température sont sensiblement les mêmes, mais ils sont lé-èrement moins élevés dans le Sud pour la saison d'été don- nant des conditions de végétation plus uniformes. Par contre, ces écarts sont plus élevés au Sud dans les derniers mois, au moment de la maturation. Or ce sont là d'excellentes conditions pour le développement des capsules et la maturation des fibres. D'ailleurs on peut admettre comme règ-le générale que les écarts journaliers de température sont de plus en plus importants à mesure que l'on s'éloig-ne de la mer. L'humidité de l'air diminue également. La moyenne annuelle de chute de pluie, pour la section nord des Etats-Unis, est d'environ 40 pouces, pendant que pour le sud, cette quantité est dépassée de 16 à 17 pouces. La chute de pluie dans les deux sections augmente généralement en hiver, atteignant un maximum vers le milieu de l'été, l'automne étant une période sèche. La grande chute de pluie et les hautes températures dans le Sud donnent une humidité considérable, phénomène qui est d'ailleurs vrai pour toute la côte. La température du point mouillé dans le Sud est 10 à 12 degrés plus haute que dans les États du Nord et un volume d'air donné contient deux fois autant d'humidité. Mais comme la quantité d'humidité que l'air peut contenir augmente avec, la température, le tant pour cent de la quantité saturante ou l'humidité relative est environ la même dans les États du Sud que dans les Etats du Nord. L'humidité relative varie quelquefois pendant l'année, mais elle est légèrement plus grande pendant l'été au Sud que dans le Nord. Les traits principaux du climat adapté à la culture du coton sont les suivants : La saison totale de végétation doit être sulïisamment longue pour que la récolte ait le temps de mûrir. Un des facteurs les plus importants par conséquent est la date probable des dernières gelées mortelles du printemps et celle des premières gelées de l'automne. La cueillette du coton s'étend souvent tard en automne, mais les premiers froids de l'hiver arrêtent l'activité de la végétation, et les Heurs et jeunes capsules partant à ce moment n'ont pas le lem;)s d'arriver à complète maturité. La végétation du cotonnier demimdc six à sept mois favorables de pleine végétation. BiiUelin du Jardin colonial. -46 714 ÉTUDES ET MÉMOIRES Après la température, la considération la plus importante, est la quantité et la distribution de la chaleur et de l'humidité. Le cotonnier est une plante qui prospère dans les climats très chauds et tempérés, pourvu que l'atmosphère soit humide et que la transpiration ne soit pas excessive, ce qui pourrait apporter dans la vie de la plante un trouble sérieux. Autant que possible, la température sera élevée et l'écart journa- lier de température uniforme dans la première période de la végé- tation. La moyenne journalière de température devra s'élever à par- tir du moment où les g-raines sont mises en terre jusque vers le L' août, après quoi elle devra baisser assez rapidement de façon à faire dans la vie de la plante deux saisons nettement distinctes. Dans la première période de hautes tenqîéralures, la plante sera en plein développement. Un grand et soudain écart de température ou un froid pi-olongé survenant à ce moment sont sujets à arrêter la végétation et à con- trarier fortement la maturation des capsules, ce qui n'est pas dési- rable à cette période. Vers le 1*^'' ou le L5 août, la plante aura atteint son entier déve- loppement et réunit la presque totalité des matières nutritives néces- saires à sa maturation. A partir de ce moment, une décroissance de température et sui'- tout de grands écarts de températures entre le jour et la nuit sont favorables à la production d'une réc(dte maxima, parle phénomène de l'arrêt de végétation. Les matériaux que la plante a accumulés ainsi peuvent se trans- former en fruits. Le sol sera ('gaiement plus sec pendant cette seconde période. En règle générale, la chute de pluie augmente normalement dans le Sud du printemps au milieu de l'été, et le climat pendant l'au- tomne est reniar(pial)lement sec. Ce sont des conditions très favoral)les à la jjroduction des fibres. Durant la picmière période de développement, les chutes de pluies seront fréquentes et peu abondantes, il n'est |)as désirable ((ue ce soient des orages. Le mieux est que ces pluies se déversent la nuit laissant le ciel clair dans la journ(M\ ce rpii pi-ocure à la plante une grande (pum- tité de himière. Telles sont les données climatériqutîs h's plus iniptjrtantes j)our LE COTON AtX ÉTATS-UNIS 71o le coton, elles résultent plus de l'observation des agriculteurs que des météorologistes, car les relations du climat et de la végétation du coton sont embarrassantes et complexes, et il est impossible à l'heure actuelle de tirer des données météorologiques des conclu- sions culturales. C'est amsi que Ton peut facilement se procurer les movennes mensuelles de température, mais de quelle utilité peuvent être ces moyennes si l'on songe qu'une température défavorable d'une jour- née, ou seulement d'une heure, peut avoir sur la récolte une influence désastreuse. Nous devrions donc à ce sujet considérer non pas la moyenne de température ou de chute de pluie pour la saison ou pour le mois, mais ces moyennes pour chaque jour et pour chaque heure. Tout cela revient à dire que de pareilles relations sont excessivement complexes et difficiles à déterminer. Les tableaux suivants, préparés par le professeur P. H. Mell et publiés au bulletin 8 du bureau des températures de ce départe- ment, donnent les principales données des conditions climatériques des différentes sections de la zone cotonnière pendant la saison de végétation. Le tableau 1 donne les dates des dernières gelées printanières mortelles et des premiers froids d'automne mortels de 1871 à 181)1 inclusivement. Les froids puissants dans le Sud se sont générale- ment terminés vers le 15 avril et il est courant de planter le coton du l''"' avril au 10 mai. Il n'est pas considéré comme prudent cepen- dant de commencer la plantation avant le 15 avril, à cause des nuits froides dp ce mois, ce qui pourrait réduire fortement la vitalité des plantes. DATES DES FROIDS PBINTANIERS MORTELS POUR LE COTON (1871-1891) Stations Premiers froids » Derniers froids Région nord Atlanta 2 février Charlotte 3 mai Région moyenne Charleston '»• janvier Wilmington 20 avril 716 ÉTUDES ET MÉMOIRES Région sud Jacksonville 18 décembre Indianula li avril San- Antonio 14 avril Le tableau 2 donne les dates des premiers froids mortels d'au- tomne dans la zone cotonnière de 1832 à 1891. Les informations détaillées pour les localités séparées ne sont pas pul^liées dans le bulletin d'où sont tirées la plupart de ces données. Il est un fait établi, c'est que, à Charlotte, Chattanooga et Nashuille, les froids peuvent être attendus dès le 15 octobre. A xVtlanta, Starksville, Vicksbourg- et Palestine, les froids mor- tels commencent en g-énéral au 1" novembre, pendant que le long des côtes de Géorgie et l'Alabama ils ne sont attendus qu'après le 15 novembre. Ces tableaux montrent la longueur de la saison culturale dans les différentes sections de la zone cotonnière. Les hivers dans la zone cotonnière sont rarement très rudes et la température atteint rarement le zéro, sauf dans les portions extrêmes de la zone où les conditions climatériques sont sujettes à des varia- tions brusques. Là où la température d'hiver et de printemps est très basse, les conditions ne sont pas favorables au cotonnier. DATES DES PREMIERS FROIDS d'aUTOMNE [Dates (lu froid le plus hàtif pnr période de 10 ans.) 1 l'ri-iiidi'S. Années. OclolM-f. Xn\Cll brc 1 1X32 à IS'iO « 1S32 2 isil à IXÔO 1X15 12 1S5I à 1860 185X 7 isiil à IS70 1 Sfi.î 20 IS7I à I«S() 1X73 7 ISXI à ISiH) 1 1S91 à I8'j:5 7 Le tableau suivant domu! les mininias de température et l.i moyenne de température du mois de janvier : LE COTON AUX ÉTATS-UNIS / 1 / Stations d'observations Minimum en Fahrenheit Moyenne miniina de janvier N'"' maximum de j;:elées au-dessous de /érii Portion nord Atlanta Ga 2 0 6 36 41 1 12 1 0 Fort Daris Portion moyenne Palestine Tex Kitty Hawjs N. E.... Portion sud San-Antonio Tex Le tableau 4 donne les moyennes de température des Stations des différentes parties du « cotton belt », pendant la saison de végéta- tion. La table suivante donne les moyennes des mininias de tempé- ratures mensuelles. Si l'on consulte ces tableaux on constate une longue saison de végétation et des conditions uniformes de chaleur, particulièrement dans la région moyenne et dans la région sud. Ce sont des conditions très favorables à la végétation du coton- nier. MOYENNES MENSUELLES DE TEMPÉRATURE EN FARENHEIT Stations Avril Mai Juin Juillet Août Sept. Octobre Novembre Région nord Knoxoville 58 66 13 Fort Eliotl Fort David Tex . i:\ 76 73 6N 61 Région moyenne Hatteras N. B.. . . 56 77 53 Kittv Hawk N. C. 65 l i 76 Augusta Ga Wilmington N. C. /O 62 Région sud SomanakGa Jacsonville Pensacola 66 72 80 81 80 71 66 58 7IS ET L" DES ET ME.MOIUES Le tableau suivant donne la moyenne de chutes de pluies pour les trois parties de la zone cotonnière. Réfiior iKirfl Réj;ii>n moyenne Région sud Années • Cluite Jours de Chute Jours de Cliute Joui's de d"e-5 o — ■ — l~ — Î-) {M -^-f O — î-l W O W H P o c ►-5 en a _o '■2 a en cO -* Cl çsl r^ ce «M oo W M to ~0 :0 CO -^ — I •!- ' (M 00 lO lO lO ^T ^f œ SS CO t~- --1" o 'O l~ (D CO 1~ co co -1 m oo — Cl -JD 'O co co c^ '-1" in o ss Cl O) 'O '■o .n o C-l c-> o: lO co Cl ce o o l^ es lO --« ^f CO ^-r co o o o to ta H O ' « -:; -j o ca C8 UJ « Q C8 C H o c i2 c: « « ^ Û Ô fa 3 3 <1 3 3 O K « c r^ •— O OJ ;? tt p '^î — =^ ^ 3 U ^. z o C3 pjox[ utMioo^ ouua.-Cojv uoipag pn^ u'ino.ig 720 ETUDES ET MEMOIRES (Test le même cas pour les sols de vallées. Sur des sols d'alluvions, en saison un peu sèche, ce cotonnier produit des rendements considérables, mais en saison humide, comme d'ailleurs sur les sols argileux, il est sujet à des dommages considérables de la part des insectes et des maladies ci-vptog-a- mitjues. La récolte en même temps est toujours plus précoce sur les sols légers ou siliceux, alors qu'elle est tardive sur les terrains conte- nant une dose plus ou moins élevée d'argile. Les qualités des sols qui se présentent les premières à l'observa- tion sont les qualités physiques qui consistent principalement dans leur pénétrabilité. Le sol est en ell'et un milieu de culture des plus fréquentés par une foule de ferments et de bacilles, les uns i-éducteurs, les autres oxydants, qui en général sont des microbes aérobies. La présence de l'air leur est donc nécessaire, et dans un sol où leur vie sera gênée, les réactions ne se produisent qu'imparfaite- ment. D'autre part, les relations du sol avec l'eau sont aussi des plus importantes; ce sont elles qui régissent les phénomènes d'absorp- tion de la sève, c'est-à-dire une des fonctions jirincipales de la vie de la plante. Ces qualités, qui peuvent se résumer dans une seule : l'hygros- copicité des sols, doivent être envisagées au même point que les qua- lités chimiques. Ces dernières peuvent en effet être facilement modifiées par l'ap- port plus ou moins complet d'engrais de toute nature. Il n'en est pas de même des ([ualités physiques qui sont immuables et que l'on doit subir. Pour les qualités chimiques des sols, nous n'entrerons pas dans une critique détaillée de la valeur pratique des analyses. On est fixé complètement k l'heure actuelle sur la valeur relative de recherches faites avec des réactifs dont la concentration est fixée d'avance et qui ne donnent que des renseignements incom- plets. Nous donnerons simplement ici, par Etat, les résultats extrêmes d'analyses chimi(|ues prises parmi les innombrables analyses faites par Ililgard : LR COTON AUX ÉTATS-UMS 721 Alabama. La teneur en alumine varie de 0,00 % à Pratville à 12,07 à Livingstone — potasse — 0,04 «/o à Pratville à G,")» à Washington C — acide phosph. — 0,03 à Barbour à 0,51 à Union Springs — chaux — 0,01 à Barbour à 29,20 à Washington D Arkansas. La teneur en alumine varie de 0,40% à Cro\vleysC°« à 10,34 à Jefîerson — potasse — 0,09 à Pulasky à 1,01 à Jefferson — acid. phosph. — 0,06 à Pulasky à 0,40 à Jefferson — chaux — 0,02 à Pulasky à 28,13 à Hempstead Mississipi. La teneur en alumine varie de 0,14 à Monroe G. à 17,83 à Clarke C. — potasse — 0,12 à Lafayette C. à 1,10 à Isaquena C. — acide phosph. — 0,02 à Kosciusko C. à 0,47 à Raukin C. — chaux — 0,08 à Chikasam à 7,ii7 à ClaiJjarn C. Géorgie. La teneur en alumine varie de 0,62 "/o à Liberty C. à 10,00 à Stewart C. — potasse — 0,03 "/o à Thomasville à 0,33 à Cedartown — acide phosph. — 0,01 à Thomasville à 0,30 à DouglasC. — chaux — 0,02 à Clarkville à 0,20 à Cedartown Louisiane. La teneur en alumine varie de 1,41 % à Redriver à ll,71àVienna — potasse — 0,15 à SerpentBoyon à 0,31 à Vienna — acide phosph. — 0,04 à SerpentBoyon à 0,27 à Vienna — chaux — 0,10 à Vernan à 1,74 à NewHeria Caroline du Nord. La teneur en alumine varie de 0,03 à Matamuskeet à 7,40 °,o à Penny hill — potasse — 0,05 à White oak à 0,20 à Penny hill — acide phosph. — 0,02 à Selma à 0,30 à Matamuskeet — chaux — 0,05 à Sparta à 0,45 à Selma Caroline du Sud. La teneur en alumine varie de 1,85 à Savanah à 26.54 à Spartanburg — potasse — 0,08 à Savanah à 0,21 à Spartanburg — acide phosph. — 0,04 à Savanah à 0,21 à Jamcslsland chaux — 0,03 à Spartanburg à 0,11 à Savanah Tennesse. La teneur en alumine varie de 3,10 "/o à Memphis à 17,30 à Belle Meade potasse — 0,25 à Murplviey's Coro à 8,38 h Belle Meade 722 ÉTUDES liT .AlÉMOIHES La Icnciir en acide phospli. varie do 0,06 à Gills Station à 0,36 à Belle Meade — c'Ikuix — 0.I2 à Florence à 8,38 à Belle Meade Texas. La teneur en nlnmine varie de 0,28 à Texarkana à 11,07 à Mekinney — potasse — 0,05 à Texarkana à 0,72 à La C. — acide phosph. — 0,04 à Hennis à 0,30 à Tehukana — chaux — • 0.03 à Muneola à 9.78 à Clairhanc Un bon sol pour cotonniers devra maintenir des conditions à peu près uniformes d'humidité pour des variations soudâmes et princi- palement pendant la période de végétation. Durant la première période, le sol sera humide mais non mouillé. En règle g-énérale, un sol siliceux ne retient pas sulïisamment d'humidité, de telle sorte que les plantes n'ayant pas assez d'eau restent petites et mûrissent de très bonne heure. Pour les sols argileux, c'est le contraire c[ui se produit, tant que le sol reste humide dans le début, la plante se charpente bien et prend un développement considérable. Mais si ces conditions persistent après le 1'"'" août, la plante au lieu de mûrir, continue à pousser à bois et donne une végétation luxuriante et peu de capsules. Une pareille tendance est empêchée par l'usage des engrais com- merciaux et principalement des engrais jjhosphatés. Le meilleur sol pour une ])onne récolte est un sol d'alluvions, profond, meuble et naturellement bien drainé, mais qui cependant retienne suiïisamment d'eau pour permettre à la plante de traver- ser toute la saison sèche. A côté de cela quelques sols sont favorables au cotonnier et ont des compositions particulières. C'est ainsi que le sol sur lequel on cultive le coton Sea Island, le plus long et le plus iin de tous les cotons est le seul qui permette d'obtenir une pareille quantité de fibres. Ce sol contient 4-8 "/„ d'argile. — 4-8 "/„ de limon argileux. — 7r)-90 "/„ de sable siliceux. Ce sol, dont le type existe surtout à James-lsland, maintient pen- dant toute la période de développement environ 5 "/„ d'humidité. Dans le Sud Caroline, les sols des colHnes contiennent une étendue considérable et sont les types de sol très pioduclifs. LE COTOiS AUX ÉTATS- IJ M S 723 Ils contiennent 25 à 30 % d'argile. — 40 «/„ de sable. Ce sont les sols par excellence du cotonnier. A l'heure actuelle, la culture continue de plantes épuisantes en a considérablement diminué la fertilité. OUVRAGE CONSULTÉ : LE (( COTON PLANT », PAR MILTON WIIITIINRY MACHINERIE DU COTON La machinerie du coton se divise en deux parties : 1° E^renag-e et ballade; 2'^ Extraction de Fhuile. 1° ÉGRENAGE ET HALLAGE Dans la première partie se rangent toutes les machines qui servent à séparer les libres des graines et à faire les balles. Les égreneuses employées ne varient guère et appartiennent à deux types : 1° Celles travaillant les graines ; 2° Celles travaillant les capsules entières. Nous ne ferons pas dans ce rapport la description de ces machines dont le Jardin colonial possède les devis, prix, instructions de mise en marche et d'installation. Nous indiquerons seulement le meilleur mode, à notre avis, de disposition des machines. L'usine est à deux étages. A la partie inférieure se trouvent : le moteur qui est à la vapeur ou au pétrole, et les principaux arbres de transmission munis de leurs poulies de renvoi. On peut aussi, ce qui est plus prudent, mettre le moteur en dehors des bâtiments ou dans une cabane appropriée. Au premier étage sont disposées les égreneuses qui sont toutes d'un type à scies et qui dans le cas particulier sont au nombre de trois. Sur la droite se trouve l'aspirateur qui prend le coton dans le chariot même et l'amène à la partie supérieure des égreneuses. Les g-raines tombent à la partie inférieure, et par un (( conveyor » sont dirigées dans la charrette vide de coton. 72 i KiUDEs i:t .mémoires Les fibres, elles, sont prises par un courant d'air qui les entraîne clans un nettoyeur et de là dans une presse qui fait la balle. A l'autre extrémité, la balle est descendue dans la voiture. Tout le travail se fait donc à l'air et il n'y a plus à craindre des incendies aussi fréquents. On peut recommander la disposition adoptée dans une usine du Mississipi à Brookhaven. Le constructeur est GuUet Gin et C" qui paraît avoir réalisé dans cette construction presque la perfection. 2" HUILERIE Il a également été remis aux dossiers du Jardin colonial, la des- cription complète, les devis d'installation d'une huilerie de graines de coton. L'usine comprend, au rez-de-chaussée : la salle de graines et le trieur qui enlève les corps durs, tels que pierres, morceaux de fer. Dans la salle suivante sont placés les broyeurs qui font la farine après avoir séparé 1 amande des coques. Plus loin se trouvent les bouilleurs ou autoclaves dans lesquels la farine se délite et abandonne une partie de son huile. En face sont les presses hydrauliques actionnées par des pompes puissantes placées dans la salle de droite. Au premier étage, oîi passent les graines avant d'aller au broyeur, se trouvent des égreneuses à scies très serrées qui enlèvent aux graines la totalité des fibres adhérentes. Yves Henry, Ingénieur-agronome, chargé de mission, Inspecteur de r Agriculture de l'Afrique occidentale. CONFÉRENCES DU JARDIN COLONIAL LES PLANTATIONS DANS LE MAYUMBÉ CONFÉRENCE FAITE LE 26 FÉVRIER t'J03 A l^ Ecole nationale supérieure d'agriculfure coloniale de Nogent-sur-Marnc, par M. G. Bertiieloï du Chesnay Agent de cultures de la Compagnie du Kouilou-Niari à Kakamoëka (Congo Français). On entend par Mayumbé cette région montagneuse qui part du pays de Monchi Congo, dans les environs de San-Salvador, par G^âO de latitude Sud pour s'arrêter aux bassins des nombreux cours d'eau, qui se rendent aux grandes lagunes N' Kogo et N' Goué par 2°20' de latitude Sud. Elle aurait environ une longueur de 500 kilomètres sur une lar- geur moyenne de 150. Les chaînons qui la composent sont constamment parallèles entre eux et à la côte, leur direction est donc sud-est, nord-ouest; les plus rapprochés de la côte se terminent à une distance variable de la mer, beaucoup plus grande dans le Sud que dans le Nord, mais pouvant être évaluée, en moyenne, k une quarantaine de kilomètres. Les plus hauts sommets n'atteignent pas 800 mètres ; quant à l'altitude moyenne des chaînons, elle est de 300 mètres. Les montagnes du Mayumbé s'étendent sur le Congo Portugais, l'Etat indépendant, l'enclave de Cabinda et le Congo Français. Nous allons parler de cette dernière partie, habitée, au sud par les Mayumbés, dans les bassins des fleuves Loémé et Kouilou- Niari; et, au nord, par les Baloumbos dans celui de la Nyanga. Tous ces cours d'eau viennent de l'intérieur, c'est-à-dire des plateaux qui s'étendent à l'est de la zone montagneuse (plaine de Yangala). Pour se rendre à la mer, ils doivent traverser les chaî- nons perpendiculairement, et ils le font par une série de rapides 726 CONFÉRENCES plus OU moins violents (Rapides de Mongo-Nyanga ; chutes de Koiitfunda), suivant que les cours d'eau ont à vaincre les obstacles de la partie occidentale ou orientale de la chaîne, cette dernière beaucoup plus élevée et abrupte. Le Kouilou-Niari — le plus important de ces cours d'eau — est navigable en toute saison jusqu'aux g-rands rapides de la Mandji, à 100 kilomètres de la côte, ce qui lui fait 60 kilomètres navigables dans le Mayumbé proprement dit. Les cours d'eau Loéme et Nyanga ne sont navigables que dans la zone littorale basse, qui s'étend de la mer à la montagne. Dans le Mayumbé, ils forment des biefs profonds, entrecoupés de rapides infranchissables. Les affluents, qui lui arrivent latéralement en suivant les vallées des chaînons, ne sont que des rivières torrentueuses, abondantes et claires. Cela dit, on se fera une idée du Mayumbé en supposant un ensemble de chaînons parallèles, d'une altitude totale peu considé- rable, mais d'un relief très accentué, les vallées, qui les séparent, étant très profondes. Si la moyenne de l'altitude des lignes de faîte peut être évaluée, comme je l'ai dit tout à l'heure, à 300 mètres, celle des thalweg ne peut pas être considérée comme supérieure à 40 mètres : ce qui fait — pour les vallées — des profondeurs con- stantes d'au moins 260 mètres. Les flancs de ces vallées sont toujours à [)ente très forte de 20° à 45°. La plupart du temps, ils viennent se rencontrer, suivant un thalweg rocailleux, où clapote un torrent temporaire, sur son lit de grès. Il n'y a pas de partie horizontale et, par suite, pas de terre arable. Quelquefois cependant, les pentes sont moins abruptes et le fond de la vallée présente une surface plane d'une cinquantaine de mètres de largeur, où s'étale une couche de terre arable de 0"" 40 en movenne. Enfin, rarement, on a alîaire à une rivière importante, qui décrit ses sinuosités à travers une plaine de 2 à 300 mètres de largeur, où l'épaisseur de la couche arable peut atteindre 2 à 3 mètres. Si les vallées sont très étroites, en règle générale, par réciprocité, les faîtes sont très aigus, et les plateaux rares. Montagnes et vallées sont couvertes d'épaisses forêts, où l'on rencontre partout ime eau abondante et claire. L'année, dans le Mayund)é, se divise en deux parties : une saison sèche et une saison humide. LES PLANTATIONS DANS LE MAYUMBÉ 727 La saison sèche dure du !«'• juin au !''■■ octobre, soit environ 4 mois. Le vent souffle du sud-ouest, c'est-à-dire de la mer, ame- nant avec lui des amas de nuag-es, qui recouvrent constamment le ciel. Quand il y a condensation, ce qui est très rare, il tombe une pluie très fine insuffisante pour humecter le sol. Le matin, d'épais brouillards flottent dans Tair, et, plusieurs heures après le lever du soleil, on aperçoit encore leurs lambeaux accrochés aux crêtes boisées. L'état hygrométrique de l'air est assez bas et la tension élec- trique nulle... Pour la journée, le thermomètre indique une moyenne de 25", ce qui rend les nuits agréables pour l'Européen, froides pour le noir. La saison humide dure du I'''' octobre au l'"' juin avec une accal- mie pendant les mois de janvier et de février. Le vent de l'hiver- nage souffle du nord-est, d'une façon irrégulière. Il est souvent remplacé par les tornades, coups de vent violents, qui naissent dans l'Est , mais font le tour de l'horizon. Ce sont ces tornades qui amènent les orages qui éclatent chaque après-midi; souvent avec une violence inouïe! Alors, pendant 6, 12 et même 2i heures, le tonnerre est assourdissant; les éclairs se succèdent sans inter- ruption et la pluie tombe à torrents. Même en dehors de ces orages, la tension électrique de l'atmo- sphérique est très élevée, et c'est une des principales causes de l'énervement de l'Européen. Quant à l'état hygrométri({ue de l'air, il est presque arrivé à saturation (95°). La température moyenne atteint 33°, et il n'y a pas 5° de différence entre le jour et la nuit. Dans cette atmosphère d'étuve, il est impossible de respirer. Des sueurs profuses s'écoulent constamment le long du corps, sans pouvoir s'évaporer, et, par suite, sans profit pour l'organisme. Ces sueurs, qui épuisent, fatiguent aussi l'estomac, dont elles appau- vrissent les sucs. Des bourbouilles se forment et la fièvre apparaît. Si vous ajoutez à tous ces fléaux l'invasion des diptères (mous- tiques, fourous, etc..) qui vous dévorent avec rage, les uns : le jour, les autres : la nuit, se relayant ainsi dans leur tâche cuisante, vous avez une idée de l'état pénible dans lequel l'Européen doit passer ces huit mois de pluies?... Le sous-sol est constitué par des couches schisteuses, vertes satinées, grises ou micacées, disposées obliquement les unes vers les autres, en s'inclinant vers la côte, et en faisant avec l'horizon 7'28 CONFÉRENCES un anp^lo de 30°. Elles sont dirig-ées dans le même sens que les plissements montaj^neux, c'est-à-dire du sud-est au nord-ouest, à des distances variables, en j^énéral assez faibles. Elles sont veinées de filons de grès ferrug-ineux (dont les débris encombrent les lits des rivières) et de quartz ; riches en cristal de roche, mais ne con- tenant qu'une quantité d'or infinitésimale. Le cuivre, au contraire, existe abondamment, notanmient dans la région de Mandjo. Enfin, à de grandes profondeurs, on rencontre des gneiss. Sous l'influence des agents atmosphériques, les couches superfi- cielles se sont décomposées pour donner naissance à des argiles ferrugineuses jaunes ou rouges, de 3 mètres d'épaisseur moyenne. A la surface, on peut évaluer à 0 '" 25 l'épaisseur imprégnée de substances organiques, qui se sont déposées dans ses vacuoles séparant les molécules d'argile. Au-dessus, se trouve une couche d humus de 0 '" 02 d'épaisseur, provenant de la décomposition des feuilles mortes et des débris végétaux, qui couvrent le sol de la forêt. Nous sommes en présence d'un sol argilo-ferrugineux pauvre. En effet, on trouve les proportions suivantes dans les terres de montagnes qui constituent la plus grande partie du pays : Acide silicilique GO Oxyde aluminique . 34 Oxyde ferrique 6 100 Analysé à un autre point de vue, la caractéristique de ce sol est sa faible teneur en j)otasse et en chaux. La potasse y dépasse rare- ment 0,2 pour 1000; quant à la chaux, elle n'y existe ordinaire- ment qu'à l'état de traces. Sur cette tçrre, éminemment pauvre et peu épaisse (car la couche d'argile n'est fi'iable que dans sa partie supérieure, le reste est compact et imperméable) s'est développée une magnifique forêt, dont la puissance de végétation ne peut s'expliquer que par l'atmosphère humide et tiède de toute l'année, et aussi par la richesse en azote des pluies tropicales (hauteur annuelle des pluies, 2 '" 30). La forêt est essenliellen:enL constituée par le « bois » et le « sous-bois ». A Iravcis ce double dôme, les i-ayons solaires ne peuvent traverser; une demi-obscurité règne près du sol, recouvert de moisissures. La liane énorme du sfrychnos rampe, couverte de s LES PLANTATIONS DANS LE MAYLMBÉ 729 lichens, au milieu des crypto^^ames phosphorescents et des cruci- fères décolorées. L'air lourd est chargé de Thumidité du sol et du suintiMuent perpétuel des plantes. Constamment, il est imprégné de parfum violents, d'odeurs fétides, et ces miasmes malsains engendrent la fièvre des bois. Sans le sabre d'abattis, il serait impossible de se frayer passage à travers l'épaisse broussaille, où poussent, entremêlés par les lianes Landolphias et Strophantus, des ficus à latex, des nmsan- gas. des vitex, des palmiers divers, et un caféier : le Gollea cane- phora. A travers cette première brousse, une deuxième a percé, for- mant, à 30 mètres au-dessus du sol, un enchevêtrement de branches énormes, où se suspendent les orchidées. L'acajou voisine avec le fromager; le gaiac avec le copalier. On y trouve un mélange d'arbres à latex (ficus dendroïca), Kickxia Afri- cana de Bentham) et un assortiment excessivement riche d'arbres à résine du genre Bursera, et surtout à graisse végétale : Coula edulis Pentaclethra, macrophylla, Carapa guineensis, dont les cotylédons gras des graines renferment jusqu'à 60 % d'huile. Enfin, notons deux arbres qui jouent un grand rôle dans la vie des indigènes : le Kolatier (Kola Ballayi) et le Santal rouge d'Afrique (Pterocarpus tinctorius). Le kolatier (Makenso des indigènes) donne une noix rouge que les noirs recueillent avec soin, à cause de ses propriétés excitantes et aphrodisiaques; ils le font entrer dans la plupart des médica- ments. Quant au Santal rouge (N'Tissiésé... des indigènes) il donne — surtout à la base du tronc — un bois très riche en matière colorante rouge. Ce bois séché, pilé et aggloméré en une sorte de savon, forme le (( takoul », substance rouge grenat, dont ils s'en- duisent le corps. Les habitants de cette immense forêt semblent écrasés par elle, tant au physique qu'au moral. D'une part, aucune industrie, aucun commerce; et, de l'autre, une imprévoyance, une insouciance extraordinaires. Vous en aurez une idée en apprenant (pi'une année, dans la région, où je me trouvais, ils oublièrent de faire leurs cultures vivrières, s'étant trompés de saison; les pluies vinrent et le défrichement n'étant même pas fait, il fallut se rési- Bulletin du Jardin colonial. '»"' 730 CONFÉKENCES «;ner à attendre l'annéo suivante. Il en résulta, pendant six mois, une famine (|ui les força à vivre des fruits de la forêt et des ig-names qu ils pouvaient y déterrer. Leurs villa<,^es se dressent sur les hauteurs, k peu de distance d'une de ces petites rivières torrentueuses, si fraîches et si lim- pides. Sur les pentes, ils abattent et brûlent la forêt pour y faire leurs champs de manioc (Mayaka. en (( liote ») (ju'ils obtiennent par l)<)utures de 30 centimètres, plantées sans ordre, à des distances de I à 2 mètres. Au bout de 15 mois, les tubercules auront déjà atteint la grosseur voulue; on les déterrera partout où on les trou- vera, en refermant le trou au pied de chaque souche. Tous les trois ou quatre jours, on viendra en chercher de nouveaux, au fur et à mesure de leur maturité, et le champ sera ainsi exploité jusqu'à épuisement complet des pieds, ce qui arrivera au bout de deux ans environ. On transportera alors le village ailleurs pour faire un nou- veau défrichement. On a beaucoup critiqué le noir pour cette habitude qu il a de ne jamais planter deux fois au même endroit, ce qui l'oblige à se déplacer constamment et à détruire de plus en plus la forêt. Qu'il y ait intérêt à fixer le n choquards x ont un mètre de long et sont plantés dans des trous de 15 centimètres, disposés sans ordre : ils appar- tiennent à ditïérentes variétés. Celle que l'on rencontre K' pUis communément est la N'Donguila des indigènes (Banane « cochon ■• du Gabon). On trouve aussi, fréquemment, la Ne'Sandaman (Bana- 732 CONFÉRENCES nera plata de San-Thonié) et, plus raivinent, la « Madoungo » (Bananera Mulher) de la même île. La Banane (Bitobe) se mang'e toujours cuite : bouillie ou grillée. A cet effet, elle est cueillie verte, quand la peau se détache. A ce moment, elle contient son maximum d'amidon et est, par consé- quent, plus nourrissante que lorsqu'elle sera mûre, époque où le sucre se sera formé aux dépens de ses substances amylacées. Dans certains villag-es, on sème, près des cases, des graines de maïs, de tabac, d'arachide (Arachis h^pogea) et de piment. Le maïs des indigènes donne des épis volumineux qui se mang-ent rôtis sous la cendre. L'arachide des indig-ènes se mang-e telle quelle, une fois décor- tiquée. Le tabac (N'Sunga des indig-ènes) est à côtes trop dures pour être utilisé par l'Européen. Le noir le prépare d'une façon rudi- mentaire. Les feuilles, petites ou g-randes, souples ou dures, sont mises à macérer dans l'eau, pendant plusieurs jours, puis éten- dues sur les toits des cases pour sécher au soleil; enlin, tressées, trois par trois; les tresses d'une long-ueur de 0 '" 25 sont assemblées en paquets longs ou ronds, d'un kilo environ, représentant une certaine valeur. Dans les travaux de plantation, les hommes armés d'une petite hache (Kitalé) fabriquée par eux, en forme de coins, et du « Machete » (sabre d'abattis de traite), font les défrichements. Tout le reste des travaux est dévolu aux femmes, qui n'ont — comme unique outil — qu'une sorte de houe droite (N' Seng-o), dont le manche, manié avec une main, n'a guère que 0 '" 50 de longueur. « Pour voir le soleil, il vous faut abattre des arbres », disent, par moquerie, aux Mayumbés, les Bavilis, gens des savanes de la côte. Et, eU'ectivement, (jue 1 on veuille construire ou planter, il faut faire une clairière à la hache. 11 en résulte que les Mayumbés s'ils ont beaucoup de défauts, ont au moins une qualité : celle d'être de bons bûcherons. Ils arrivent à couper des arbres énormes, (pii ont justpi'à 10 mètres de tour, à la base, en un tem[)s l'elalive- ment court. Ils opèrent d'une façon curieuse. Une liane solide est attachée autour du tronc de l'arbre, et d'une façon suflisamnient libre pour (\\w l'homme puisse entrer dans le cercle. C.ela fait, à l'aide (le soubresauts successifs, il s'élève le long de l'arbre, faisant avec sa hache, à mesure qu'il monte, des coches, oîi il place les LES PLANTATIONS DANS LE MAYUM«É 781} pieds. Arrivé à une hauteur de 10 à 15 mètres et plus, suivant le cas, il attaque Varbre, dont le tronc dépourvu de jambes à cet endroit, et par suite parfaitement cylindrique, a une épaisseur moitié moindre. Tournant constamment, il pratique une rainure cir- culaire qui s'approfondit à vue d'œil. Une liane, montée à dessein, établit une communication entre la terre et Thomme; et c'est par là que sa femme qui chante au pied de Farbre, pour lui donner du cœur (!), lui passera sa pipe et son manioc. ' Quand l'arbre tombe, l'homme — avec l'agilité dun sin^^e — se laisser g-lisser jusqu'à terre, du côté opposé à la chute, avec une clairvoyance qui ne se dément jamais. Les Mayumbés sont paresseux et peu intelligents, mais mal- léables «et faciles à conduire. Au bout d'un mois de dressage, ils connaissent leur métier et le font automatiquement. Des équipes de 20 à 30 hommes, sous les ordres d'un contremaître énergique, de race différente, font un travail considérable, mais seulement à la condition d'y maintenir une discipline très dure, dont les châtiments corporels et les récompenses matérielles devront être la base. C'est une grande erreur de croire que le noir arrivera un jour ou l'autre à travailler de lui-même! 11 faut n'avoir jamais vécu chez lui pour avancer pareille théorie ! Le noir est un grand enfant, incapable d'avoir une idée suivie, ni de comprendre une pensée de morale. D'ailleurs, très intelli- gent à son point de vue, à lui, qui est de ne rien faire, puisqu'd peut vivre sans travail, grâce à son peu de besoins et aux générosi- tés de la nature tropicale. Deux mobiles seuls pourront le faire agir. D'un côté, l'assurance d'avoir une bonne ration et de pouvoir acheter une femme, si le travail est fait; et, de l'autre, la certitude de recevoir des coups de « chicote », s'il n'est pas fait. Il y a donc, dans le Mayumbé, une main-d'œuvre convenable, pas toujours facile à se procurer, mais qui le deviendrait si le gou- vernement voulait aider quelque peu le colon. C'est là un premier facteur pour l'établissement de plantations. Voyons, maintenant, si un second facteur, aussi important que le premier, le terrain, s'y prête ? Si nous nous reportons à ce que nous avons dit tout à l'heure, en faisant la description physique du sol, nous voyons de suite que les pentes des montagnes sont trop fortes et trop argileuses puisqu elles 7lli CONFÉRKNCKS ont juscjuà 80 "/„ daij^ilL'. ( )n sait (jiu' largile est suilisainmenl riche en éléments cliimiques pour servir à la nourriture des plantes les j)lus exig-eantes, mais aussi (jue sa plasticité s'oppose d'une favon absolue à la croissance des radicelles. Il nous faudra donc chercher des endroits où les sables, en se mélangeant h l'arg'ile, auront détruit sa plasticité, en en séparant mécaniquement des molé- cules. Dans les rares vallées, à fond plat, où les cours d'eau sont impor- tants, nous les rencontrerons ; car ces rivières, au cours toujours plus ou moins torrentueux, charrient beaucoup de sable, et leurs crues ont contrilmé pour une large part à la formation des terres de leur vallée. Ces terres seront donc de constitution arg-ilo-sablonneuse D'autre part, les détritus végétaux, charriés par les eaux «[ui des- cendent de chaque versant, ont considérablement enrichi le sol, de sorte que l'épaisseur de la couche arable, riche en matières orga- niques, peut atteindre de 2 à 3 mètres d'épaisseur. Voici l'analyse physique des terres qui constituent la vallée de la R. Minouka, tributaire de la R. Limbo, affluent du Miari ; Cailloux o.rio Silice (irj.16 Argile 23.08 Calcaire 1.25 Matières organiques 1.00 Humus 0 . 89 Eau Total : 8.12 1 00 . 00 Un tel sol est éminemment favorable à la croissance de la plupart des cultures arborescentes riches, notamment celle du cacaoyer. Toutefois, dans cette culture, le planteur devra s'assurer : 1" si cette couche arable a une épaisseur suflisante qui devra être de l'"20, le pivot du cacaoyer ne dépassant guère cette dimension ; 2» si le sol n'est pas trop inondé lors des crues. (La plupart des vallées sont inondées, au moins dans leur jiartie inférieure, à la (in de l'hiver- nage, c'est-à-dire fin d'avril.) Un sol, inondé par une eau courante, pendant ([uelques jours seu- lement, n'est pas foncièrement mauvais, k la condition que la couche d'eau ne dépasse pas 0'" 30, que l'on ait obtenu des plants (au LES PLANTATIONS DANS LE MAYl'MUÉ 7.'^') moment de la crue) une hauteur suffisante pi)ur que leurs ti-lrs el leurs premières feuilles ne soient pas sùbmerg-ées?... Si toutes ces conditions sont remplies, on pourra piauler à c()U|) sûr, et tabler sur de fortes récoltes, sans aléa possible. Les vallées, à fond platetàcours d'eau importants, représentent le 1/8 environ de la surface du pays. Si nous retranchons celles d'entre elles, cultivées autrefois, jusqu'à épuisement, par les indig-ènes, qui onl su reconnaître bien vile les meilleurs sols; puis celles, trop marécageuses loi's des crues, ou trop inondées lors des pluies, il reste à peine les 1/20 de la région. On conçoit que dans ces ccfnditions les exploitations agricoles soient plus difficiles à faire dans le Mayumbé que partout ailleurs, étant donné le choix judicieux que Ton devra faire du terrain, sous peine d'échec certain. C'est parce qu'on a méconnu cette loi fonda- mentale de la reconnaissance préalable que les échecs ont été si nombreux, pour ne pas dire (( universels », dans celle partie du Cong-o Français. (( Puisqu'il y avait partout» forêt », disait-on, le sol élail [)arloul aussi bon, et toutes les cultures arborescentes devaient y venir >> ! On ne se rendait pas comptç que les essences forestières n'étaient pas du tout les mêmes sur un sommet argileux que dans un bas- fond alluvionnaire ; alors que dans le premier cas on avait alïïiire à des arbres à racines traçantes et à bois mou, par consé([uenl peu exigeants, comme les individus du genre Bursera (Kissafoukala des indigènes) ; dans le deuxième, on avait affaire à des arbres à racines pivotantes et à bois dur, beaucoup plus épuisants, tels que le Gaïa- cum officinale (M'Bota des indigènes). Un certain nombre de factoreries s'échelonnaient le long du fleuve Kouilou, construites sur les lieux de passage, dans un but commer- cial. Du jour au lendemain, sur l'exemple donné par une compagnie hollandaise, les agents de commerce devinrent planteurs. On les lit défricher autour de leurs postes et planter du café du pays (ColTea canephora) et du cacao de San-Thomé, sorte rin, des chiffres intermédiaires entre ceux de la soie du mûrier et ceux de la soie sauvage, dite tussah, dont elle se rapproche beaucoup comme caractères. Elle pourrait trouver un assez large emploi dans la fabrique Lyonnaise, mais afin de tirer des conclusions pratiques, le syndicat des marchands de soie de Lyon, auquel notre Chambre a également soumis votre envoi, exprime le vd'u d'être mis en possession dune quantité assez importante pour faire un essai industriel, 100 kilo- grammes par exemple. Il serait également intéressant que ces cocons fussent, si toutefois cela est possible, recueillis avant d'avoir été percés par la chrysalide et étouffés avant que celle-ci sorte du cocon. » « Enfin, Monsieur le Lieutenant-Gouverneur, nous vous serions fort obligés de nous faire connaître approximativement les quantités qui pourraient être expédiées en Europe, les prix d'achat sur les lieux, les frais de transport et autres débours, afin que les intéres- sés puissent, après s'être rendu compte de la valeur industrielle de la soie du Soudan, en calculer le prix de revient aux 100 kilos. Ces cocons pourraient être utihsés soit par la filature de la soie, s'il était possible de les recueillir non percés, soit par la filature des déchets de soie, s'ils ne pouvaient être récoltés que dans l'état des spécimens (jue vous avez bien voulu transmettre à notre Chambre. C'est ce dernier ers qui nous paraît le plus probable. » Les conclusions de la Chambre de commerce de Lyon sont fort importantes et, en raison de l'étude sérieuse qu'a faite de la soie le Laboratoire de cette ville, doivent être tenues pour les plus exactes. Depuis cette époque, de nouveaux envois furent effectués de Kayes en 1899, mais en quantité trop restreinte. La soie soudanaise 741 Désireux de réaliser le vœu exprimé dans la lettre de la Chambre de commerce de Lyon, je voudrais adresser, au courant de l'année 1903, à cette assemblée, un lot d'au moins 100 kilogrammes de cocons. Pour faciliter inon projet, j'ai l'honneur. Monsieur le Gouverneur général, de vous demander de bien vouloir faire assurer le transport de cette quantité de soie de Ség-ou à Lyon. Cazalbon. DESTRUCTION DE LA FOURMI TAMAGURE PAU LE CARBURE DE CALCIUM La fourmi tamagure ou fourmi du manioc, fourmi cisailleuse, cause de grands dég-àts dans les plantations de l'Amérique du Sud, La femelle est ailée et munie de cisailles, son corps est noir, de la grosseur d'une grosse mouche. Vers le mois de mars, après la première pluie, les femelles fécondes quittent leur ancienne colonie et prennent leur vol à la tombée de la nuit. Une heure plus tard, elles ont perdu leurs ailes, tombent sur le sol et commencent à se creuser un trou profond d'environ 0'" 50 et vertical. Elles arrivent à cette profondeur vers le jour et sont hors d'atteinte lorsque l'on travaillera la terre. La ponte sera préservée ainsi et donnera un mois après naissance à des milliers d ouvrières qui creuseront d'autres galeries très préjudiciables aux plantations avoisinantes. Les débris de végétaux tombant dans ces galeries forment une couche protégeant la ponte de la femelle. A la veille des grandes pluies, les fourmis sortent et dépouillent tous les végétaux de leurs fruits et de leurs feuilles en quelques jours, caféiers, cacaoyers, maniocs, etc., jusqu'à plus d'un kilomètre de leur terrière, en se frayant des sentiers unis d'une largeur de plus de 10 centimètres, et quel({ue temps après ce seront de véritables montagnes que ces fourmillières d'où partiront ces dévastatrices des cultures. Le danger que présentent ces fourmis tamagures est assez grand pour ([u'on se préoccupe de les détruire. Un planteur de l'Amérique du Sud préconise un système de destruction qui semble devoir don- ner de bons résultats en produisant du gaz acétylène dans les cavi- tés souterraines, afin de pouvoir atteindre les fourmis qui s'y trouvent, et cela à l'aide de carbure de calcium. Pour employer ce procédé — ■ qui peut s'appliquer à bien d'autres cas, et à ce point de vue paraît intéressant, — on écrase d'abord le carbure de calcium pour obtenir une décomposition plus ra|)ide. On en pèse 10 grammes à la fois pour cha({ue l)()uclie de la fourmillière. DESTRUCTION DE LA FOURMI TAMAGURE 713 On verse ensuite 20 litres d'eau environ dans chaque bouche pour entraîner le carbure jusqu'au fond des cavités. On bouche les ori- fices avec des tampons d'herbe et on attend lo à 20 minutes qui suffiront à la production du gaz acétylène et à sa pénétration dans toutes les galeries. A ce moment, avec une torche ou un chilVon imbibé de pétrole allumé au bout d une longue perche, on mettra le feu aux galeries remplies de gaz acétylène. L'opérateur devra s'éloigner rapidement, et une explosion souterraine se produira, brû- lant et ensevelissant les fourmis. Ce procédé est facile mais nécessite une exécution rapide et aucun oubli de galeries. Si une bouche, obstruée par les herbes ou dis- simulée n'était pas préparée comme les autres, les fourmis sauraient s'y réfugier et échapperaient à la destruction. Defontaine. Note. — Les fourmis envoyées de l'État du Para (Brésil), par M. Defontaine, appartiennent aux trois espèces suivantes : Atia sexdens L. Camponotus rufipes Fab. Dinoponera grandis Guér. Nous les avons communiquées à M. E. André, le savant spécia- liste, qui a bien voulu nous donner son avis; nous pensons (pi il sera lu avec le plus vif intérêt : « La fourmi qui a fait l'objet de la note de M. Defontaine est « YAtfa sexdens L., répandue dans la majeure partie de l'Américpie « du Sud. Les Atta, qui comptent un certain nombre d'espèces, « toutes américaines, sont depuis longtemps connues par les dégâts « qu'elles occasionnent, et plusieurs naturalistes ont signalé leurs « curieuses expéditions qui ont pour but la récolte des feuilles qui « leur sont nécessaires. J'ai moi-même, dans mon livre Los u Fourmis (Paris, Hachette, 1885), résumé ce qui était alors « connu de leurs mœurs, mais il restait un point obscur et ((ui n a « été éclairci que plus tard et même assez récemment, je veux c< parler de l'usage que faisaient ces insectes des rondelles de « feuilles qu'elles emportaient dans leur nid. Grâce k de patientes 744 NOTRS (( et sag-aces observations, nous savons aujourd'hui à quoi nous en « tenir et le problème se trouve tout à fait résolu, en nous dévoi- « lant Tune des plus étranges industries qui aient jamais été (( reconnues chez les fourmis, dont la biolog-ie est cependant déjà si « riche en faits inattendus. » « La notice de M. Defontaine me paraît exacte, sauf cette phrase : (( Les débris de végétaux tombant dans ces galeries forment une « couche protégeant la ponte de la femelle. » Les débris végétaux (( ne tombent pas accidentellement dans les galeries, mais y sont « apportés intentionnellement par les ouvrières, et leur destination « n'est pas de protéger la ponte, mais de servir à rétablissement « de la champignonnière. C'est sur la couche spongieuse formée « par ces feuilles que les Atta cultivent les champignons destinés « à leur nourriture. » TRAVAUX A COXSULÏEK I . Belt. The Naturalist in Nicaragua. 1874. Mac Gook. Cutting or Parasol ant. Philadelphie, 4879. — Note on a new Northern cutting ant., Atta septentrio- nalis. Philadelphia, 1880. Ern. André. Les Fourmis. Paris, Hachette, 1885. Alf. MoELLER. Die Pilzgarten einiger Siidamerikanisc/ier Amci- sen. léna, 1893. Aug. FoREL. Communication verbale sur les jmvurs des fourmis de r Amérique tropicale. Bruxelles, 1897. Ern. André. Les Fourmis champignonnistes. Gray, 1899. LES INSECTES NOTE SUR UN CHARANÇON VIVANT DANS LES TRONCS DE BANANIER A MADAGASCAR M. Fleutiaux m'a communiqué sous ses divers états le Spheno- phorussordidus Germar. Ce Curculionide, recueilli à Mada^'-ascarpar M. Duchène, agent de culture h la Station de l'Ivoloina (Circons- cription agricole de l'Est), vit, paraît-il, dans les bananiers qui abritent les jeunes plantations de cacao; minés ainsi par le bas, ces arbres de protection ne tarderaient pas à se flétrir et à tomber. (Voir Acfr. pratique des pays chauds, 1903, n" 10. p. 499.) Les larves que j'ai examinées présentent l'aspect de celles que Coquerel a décrites sous le nom de S. liratus, qui se réfèrent en réalité à S. alricolor Chevr., et dont M. Fleutiaux a reproduit ici la description [Agr. pratique des pays chauds, 1902, n" 7. p. 117 i). Le corps paraît cependant moins poilu; il est boursouflé dès le S*" seg-ment, les stigmates sont très petits, sauf le stigmate protho- racique, remarquable par son développement, et bien conforme, au reste, à ce qu'en dit Coquerel. Le vertex porte, non pas <( une empreinte en forme de V », mais un profond sillon longitudinal, à parois très chitinisées, accompagné de deux bandes pâles, conver- gentes en arrière, sans s'atteindre. Il existe un ocelle bien visible, derrière le tubercule antennaire. Quant à la nymphe, il est probable qu'elle s'abrite dans un cocon ligneux, ainsi que les choses se passent chez S. atricolor. Malgré les renseignements qui accompagnaient l'envoi, je ne pense pas que ces charançons nuisent réellement à l'arbre, (^uand Coquerel parle de S. atricolor, il dit expressément : « J'ai trouvé un grand nombre de larves et de cocons dans le tronc duii bananier pourri et couché à terre » ; et plus loin il suppose (jue les gaines de feuilles emboîtées c[ui forment la lige apparente « ne sont atta- quées qu'après leur mort ». H y a tout lieu de croire que les larves 1. La larve d'une U-oisième espèce, s. /ieHu7jk'r/(.s L. (sous le nom de Siirrh.iri i-ifU., a été décrite par Guilding-, in Trans. Soc. EncDur. Arts, -46, p. lis. (Henseifriicinenl communiqué par M. Fleutiaux.) Bulletin du Jardin colonial. '^ 746 NOTES de S. sorclidus ont des habitudes analog^ues et n'infestent la racine ou le collet des bananiers que quand ceux-ci sont morts ou tout au moins dépérissants. P. DE PeYERIMHOFF. NOTE SUR UN MICROLEPIDOPTÈRE PROVENANT DE MADAGASCAR ET DONT LA CHENILLE MANGE LA CIRE M. E. Fleutiaux m'a communiqué, il y a quelques mois, des fragments de cire venant de Madagascar et rongés par des che- nilles. A l'éclosion des papillons, je reconnus une espèce du genre Achroia. Ce genre comprend jusqu'ici trois espèces : .1. grisella Fabr., grise, unicolore, répandue jusqu'en Australie, et dont la chenille, une des plus nuisibles aux ruches d'abeilles, mange la cire également, mais aussi les fruits confits et autres denrées analogues; A. ohscurevittella Hag., connue, jusqu'à présent, seulement de Chine et du Japon, reconnaissable à une petite ligne noirâtre qui traverse l'aile non loin du bord externe : ses mœurs ne sont pas connues; enfin .4. innotata Walk., décrite de Bornéo. C est à cette dernière espèce que se rapportent les insectes de Madagascar, ainsi que j'ai pu le vérifier récemment sur les types, au Musée bri- tannique. Cette espèce se distingue d'.4. grisella par les caractères sui- vants : l'aile antérieure paraît brun rougeàtre, étant saupoudrée très finement d'atomes de cette couleur sur un fond plus clair. De plus, la frange est précédée d'une série de points bruns, allongés en forme de traits courts, suivis d'une fine ligne claire. Enfin, la taille moyenne de A. innotata est un peu supérieure à celle de ,1. grisella. Il est à remarquer que, chez les trois espèces connues du genre Achroia, la tête est jaune. Les éclosions ont eu lieu pendant tout le mois de juillet (30 juin à 30 juillet). La chenille et la chrysalide ressemblent beaucoup à celles de A. grisolla ; en voici la description : Chenille : longueur, 18 mill. Blanc jaunâtre, la moitié antérieure du corps paraissant grise par trans[)arence. Vaisseau dorsal très fortement marqué. Calottes jaune brun, parfois plus foncées en arrière ; mandibules brun noir. Ecusson gris noirâtre, plus ou moins LES INSECTES 747 foncé, divisé par une ligne de la couleur du fond, et suivi, de chaque côté, d une petite tache de même couleur que lui et accompaf,niée, à l'arrière, par le premier stigmate. Stigmates cerclés de noir; pas de clapet anal ; points verruqueux invisibles, indiqués seulement, chacun, par un poil assez long, roux clair. La chenille vit dans la cire où elle tisse des tubes en soie a.ssez lâche. Chrysalide : longueur 8 mill., a. Jaune terne, le thorax et la tète noirâtres, ainsi que les ptérothèques de la base jusqu'aux deux tiers. Tout le long du dos court une petite crête double, rougeàlre. accompagnée de chaque côté d'une teinte rougeàtre portant une ponctuation très fine, plus foncée. Le mucron ressemble à celui d'.4. grisella ', il est formé de huit pointes divergeant horizontale- ment, quatre du côté ventral, courtes et peu aiguës, et quatre du côté dorsal, grosses et terminées par une pointe fine, courbée. L'extrémité de la crête dorsale semble faire une cinquième dent, à la partie dorsale. La chrysalide se fait dans un cocon en soie blanche assez forte, recouverte de débris de cire et d'excréments, en dehors du tube de soie où vit la chenille. .1. l)i; JoANMS. NOTE Un exemplaire de Pijralis farinalis L. est éclos de la cire que nous avions enfermée dans un bocal avec des Achroia ; il est pro- bable que cette unique chenille a dû venir de divers échantillons de farine de manioc, provenant également de Madagascar, et phi.és dans le voisinage des pains de cire qui nous ont fourni VAc/iroia en grand nombre. LE GRILLON DU CAl^l^IER A M M)AGASCAli J'ai donné ici-même, 1902, n" 8, p. 22Î), l'opinion de ^L l'iiiol sur le (( Sahabaka », et M. le Directeur de l'Agriculture à Mada- gascar a rédigé à son sujet une note qui fut adressée à tous les centres agricoles de la colonie. Cette note donne quehpies rensei- gnements venant compléter ce qui a été dit sur ce grillon : I. Je remercie M. A. -L. Clément qui a eu l'nbliKeaiu-e de nu- onmniimii|mT des chrysalides d'.4. grisella. 748 NOTES <( M. le capitaine Gil, commandant le secteur autonome d'An- driamena, dans le cercle de Maevatanana, a fait parvenir, en mars 1902, à la direction de l'agriculture, par l'intermédiaire du Gouvernement général, des spécimens d'un insecte connu, dans cette région, sous le nom de « Sahaijaka » et signalé comme ayant causé d'importants dégâts dans une petite caféerie située à Antsatrana, en rongeant toute Técorce des racines. Cet insecte, suivant M. le chef de ])ataiIlon Gallois, commandant le Cercle de Maevatanana, entre éventuellement dans l'alimentation des Sakalaves. » M. Finot ayant émis un doute sur le caractère nuisible de l'in- secte, la note ajoute : « En présence de ces deux opinions absolument différentes, il y aurait lieu de s'assurer si le dégât n'est pas l'œuvre d'un autre insecte et de faire des observations suivies, en vue de déterminer quelle est celle des deux versions qui est conforme à la réalité. » Tamatave, le 20 août 1902. Signé : Prudmomme. LE CHARANÇON DES HARICOTS A MADAGASCAR La communication parue dans le Bulletin du Jardin colonial, 1902, n" 7, p. 119, sur YApoderus humeralis Olivier, a fait l'objet d'une note de M. le Directeur de l'Agriculture à Madagascar. Voici les indications recueillies par M. l'agent de culture Mar- chand, confirmant les premiers renseignements fournis : « h'Apoderus humeralis est une sorte de petit charançon à rostre très allongé, qui ronge le parenchyme et même les nervures des feuilles de haricot. Ce coléoptère s'envole très rapidement, ou se laisse tomber sur le sol, dès qu'on essaye de le prendre ; il est donc très dilïicile de s'en débari'asser en faisant chasser les insectes parfaits. « Aux environs de Tananarive, il fait son apparition en janvier et février, et disparait au commencement d'avril. « Les ravages causés par cet insecte dans les potagLMs sont très importants. 11 arrive souvent que des planches entières de haricots en très bon état et en pleine lloraison soient complètement anéan- ties dans l'espace de quelques jours. » LES INSECTES 7 tO LA PUNAISE DES RIZIÈRES A MADAGASCAR Après la publication du n« 7 du Bulletin du Jardin colonial, en 1902, où il est question du Diploxys fallax Stal 'p. 121 , nous avons reçu, par les soins de M. le Directeur de l'Agriculture à Madag-ascar, le résumé des renseig-nements fournis sur cet hémiptère, par M. Péan, administrateur en chef, chef de la province de Manan- jary. C'est vers la fin de 1901 que M. Péan a si^^nalé, dans les termes suivants, au Gouvernement général l'apparition du nouveau parasite s'attaquant au riz : (( La récolte s'annonçait très bien et toutes les rizières ont encore un très bon aspect. Malheureusement, elles n'ont produit que de la paille. « D'une part, c'est la sécheresse; d'autre part, dans le district de Tsiatosika et dans celui de Mananjary, un nouvel ennemi a fait son apparition. « C'est un insecte du genre de la punaise des bois, qui attaque la tige vers la base et produit un écoulement de sève et un épuist'- ment qui empêchent l'épi de se former. « Les coques des grains sont vides dans les deux cas. C^es insectes, nouvellement trouvés dans les rizières, n'avaient jamais dû y com- mettre de dégâts, car les indigènes ont l'air de ne pas les connaître. » Lors de ses voyages à Madagascar, à Diégo-Suarez et dans le Sud, M. Alluaud a déjà observé le Diploxys en grand nombre dans les rizières, mais il est possible qu'il soit un nouveau venu dans hi région de M. Péan. D'un autre côté, il convient de tenir compte des ravages du micro- lépidoptère de la graine, Sitotroga ccrealella Olivier, et de ne pas attribuer à la punaise seule, les dégâts signalés par M. Péan. LE CHARANÇON DU FRUIT DU RAOBAB A MADAGASCAIi M. Prudhomme, Directeur de l'Agriculture à Madagascar, a envoyé au Jardin colonial des charançons trouvés dans les fruits de baobab à Fort-Dauphin. Ce charançon est le Bathyaulacus suhcucullatus Fairmanv {Annales de la Société entomologique de Belgique, 1893, p. .'it7), auquel je crois pouvoir rapporter en synonymie le nom de B. suh- fasciatus, du même auteur. 730 NOTKS Le g^enre a étc' décrit (/. c.) sous le nom de Macraulacus, nom déjà employé j)our un autre coléoptère de la famille des Mélasides, et chan«jé par Fairmaire lui-même, /. r., 1894-, p. 395. M. AUuaud, dont les recherches à Madagascar ont enrichi la science d'un nombre considérable d'espèces de tous les ordres d'in- sectes, a rencontré ce curculioni le dans les mêmes conditions à Diégo-Suarez. J'ai eu l'occasion d'examiner au Jardin colonial des fruits dessé- chés de baobab provenant de la Guinée française, et je les ai trouvés attaqués par Lasiodcrma serricorne Fab., coléoptère de la famille des Ptinides, et Calandra oryzao L., l'éternelle calandre qui ravage toutes les graines des céréales et beaucoup d'autres produits les plus variés. LE L0XGK:0RXK du MURIER BLANC A MADAGASCAR Une autre note de M. Prudhomme, Directeur de l'Agriculture à Madagascar, nous fait connaître des détails intéressants sur le Calli- mation venusfum Guérin. On trouvera une figure de cet insecte dans le Bulletin du Jardin colonial de 1902, n° 7, p. 120. Voici un extrait de cette note : (( Le mûrier est attaqué, dans le centre de Madagascar, par un beau longicorne rouge et blanc, qui, tant à l'état larvaire que sous la forme d'insecte parfait, commet d'assez grands ravages. (( Des spécimens de cet insecte, envoyé au Jardin colonial de Nogent-sur-Marne en mars 1902, ont permis de s'assurer cju'on se trouvait en présence d'un cérambycide appelé ( 'alliniation Dcnustuni Guérin. L'insecte est assez commun aux environs de Tananarive. « Contrairement à l'opinion émise par M. le garde principal de milice Charbotel, commandant la sous-section de Hetatao, dans la province de Manjakandriana, où ce longicorne paraît très abondant, il est facile d'attaquer les insectes adultes qu'on découvre d'ailleurs sans ditliculté, et dont la présence est révélée par les feuilles cou- pées jonchant le sol au-dessous des arbres altacjués. « On a pu, à la Station d'essai de Manisana. lutter d'une manière assez efficace contre le (Jallirnntion vcnusftirn, en faisant recueillir les individus adultes ; aussi paraît-il utile de conseiller, jK)ur le monKMit du moins, d'avoir recours à cette métliode. LES INSECTES 751 « Suivant M. Fauchère, qui a visité la rég'ion de Betatao en 1901, la larve du Calllmation venustiun atteint 3 centimètres de long- et cause d'assez grands dégâts en rongeant l'intérieur des canaux médullaires du mûrier ; mais il ne semble pas que ce parasite puisse compromettre sérieusement la culture du mûrier à Madagascar. « M. Charbotel, qui a pu étudier les mœurs de cet insecte d'assez près, estime que sa larve peut atteindre jusqu'à 5 cenlir êtres de long- sur 6 millimètres de diamètre. Il propose, pour lutter contre ce long-icorne, d'avoir recours à la taille et de cultiver le mûrier principalement sous forme de haies. Cette taille consiste à recher- cher les branches attaquées, opération assez facile puisque les rameaux rongés se cassent sans le moindre effort et presque toujours à l'endroit où réside le ver, puis à les couper au moyen d'un séca- teur, et à brûler bois et vers recueillis de cette façon. « M. Charbotel conseille de procéder à cette taille le plus tôt possible et de ne pas attendre pour cela que le ver ait atteint son entier développement, car alors les dég-âts deviennent très impor- tants et s'accroissent rapidement ; il paraît en effet qu'à ce moment les galeries creusées avancent de 20 à 25 centimètres par jour. » SUR QUELQUES COLÉOPTÈRES NUISIBLES A MADAGASCAR Le 15 janvier dernier, M. le Directeur de l'Agriculture à Mada- gascar adressait à M. le Ministre des Colonies (Inspection de l'Ag-ri- culture coloniale) plusieurs insectes nuisibles, dont voici la liste accompagnée de quelques renseig-nements que nous avons recueil- lis sur leur compte : « N" 51() N. — « Fovato >>, mot à mot : cœur de pierre. Curcu- lionide s'attaquant aux jeunes pousses de vigne et de mûrier. Pro- vince de Manjakandriana (Betatao). » Il s'agit de VAlcides excavatus Olivier {gihbus Fabricius). La dureté de ses téguments lui a fait donner par les indig-ènes le nom pittoresque sous lequel il nous a été envoyé. Cette espèce a été décrite de Bourbon, de Comores et de Madag-ascar. (( N° 516 N bis. — Commet les mêmes dégâts que le précé- dent. » C'est un autre curculionide, le Lixus defloratus Olivier, connu depuis longtemps de Madagascar. 752 NOTES « N° 538 N. — « Vo'anosy », insectes s'attaquant surtout aux jeunes pousses d'arl>res fruitiers et particulièrement à celles de pêcher, bibassier et de vigne. Cet insecte a fait pour la première fois son apparition au commencement de novembre 1902. Province de Manjakandriana, signalé par M. le garde régional Echambard. » L'insecte en question est le Poh/clcis Bohe/nani Boheman et sa variété saturala Fairmaire (curculionide). Décrit de Maurice et de Madagascar, en 1840. (( 538 N bis. — Avec le précédent. » Euryomia argentata Olivier, espèce de cétonide, spéciale à Madagascar. <( 539 N. — « Manetrobe ». La Direction de l'Agriculture de Madagascar a reçu sous ce nom, de la région de Betatao (province de Manjakandriana), trois espèces ou variétés de coléoptères s'attaquant surtout à la vigne, aux arbres fi'uitiers et à la patate. M. Berthier, administrateur, chef de la province de Manjakan- driana, signale, dans sa lettre du 28 novembre 1902, que trois pieds de vigne très fournis en feuilles ont été complètement dépouillés par le « Manetrobe », dans l'espace de quarante-huit heures. Insectes recueillis par M. le garde régional Echambard. Ces trois espèces portent respectivement les N** 539N, 539 N his et 539 N ter. » Il n'y a en réalité que deux espèces, toutes deux appartenant à la famille des Lamellicornes (mélolonthides), mais à des genres très différents : d'abord Serica cruciata Burmeister et une variété à bandes jaunes des élytres ininterrompues, et Hoplia marjarifacea Burmeister. « 540 N. — Petits coléoptères provenant d'Ambohitrimanjaka (province de Tananarive). Ces insectes attaquent le parenchyme des feuilles du riz, principalement lorsque cette céréale se trouve en pépinière. Suivant M. Piret. sous-inspecteur, chef de la Circons- cription agricole du centre, ces coléoptères commettent des ravages peu importants et ne s'attacjuent qu'aux pépinières ; après le repi- quage, les plants reprennent le dessus. Mais il y a lieu de remar- quer que, d'après M. Hesling, administrateur, chef de la province de Tananarive, plusieurs rizières d'Ambohitrimanjaka ont beaucoup souffert de la présence de ce coléoptère. <> L insecte des rizières est un coléoptère phytophage de la famille des Ilispides, Trichispa sericea Guérin-Méneville. D'abord venu de LES UN SECTES 753 Zanzibar, il a été reçu ensuite d'Abyssinie, puis de Madagascar, notamment de la Baie d'Autong-il. « 542 N. — Larves recueillies par M. Piret, sous-inspecteur, chef de la Circonscription agricole du centre, dans la région d'An- jozorobe, dans une plantation de caféiers appartenant à M. Dufour, colon militaire. Ces larves attaquent le caféier et commettent des dégâts appréciables, principalement sur les jeunes plants. Elles rongent complètement l'écorce, suivant un anneau régulier, à proximité du collet. Les pieds attaqués ne tardent pas à se dessé- cher et à mourir. On a joint à ces larves, une petite branche de caféier attaquée. » Ces larves sont celles d'un coléoptère de la famille des Ténébrio- nides, dont il est impossible de déterminer l'espèce; il faudrait que M. Piret ait l'obligeance de guetter l'éclosion de l'insecte parfait, c'est le seul moyen d'être fixé sur ce point, car l'examen du pre- mier état ne saurait donner aucun résultat sous ce rapport, les larves se ressemblant toutes d'une façon désespérante. Nous aurions voulu pouvoir indiquer pour chacune de ces espèces des moyens de destruction quelconques, mais nous devons con- fesser notre impuissance. Nous nous bornerons à conseiller des expériences faites sur place, suggérées par les procédés générale- ment en usage. C'est en tâtonnant et en se livrant à différents essais qu'on aura la possibilité de se rendre compte de leur effica- cité. La destruction des œufs, des larves et surtout des insectes par- faits par des femmes ou des enfants, pourra donner un résultat. Nous disons surtout des insectes parfaits, parce que ceux-ci sont souvent plus faciles à voir et à capturer, et que pendant leur vie, qui est de courte durée, ils circulent et déploient une grande acti- vité, stimulés par le souci de la reproduction de l'espèce. Dans certains cas, l'emploi de badigeonnage ou d'aspersions avec des solutions de sulfures sera peut-être préférable. Mais, nous le répétons, c'est aux agents de culture et aux colons eux-mêmes, à tenter des procédés variés pour dégager le meilleur. 754 NOTES SUR UN LONGIGORNE DU CAFEIER AU TONKIN Par lettre du 15 janvier dernier, M. Capus, Directeur de l'Ag^ri- culture à Hanoï, a demandé au Jardin Colonial des renseignements sur un coléoptère nuisible au caféier dans notre colonie du TonUin. Ce coléoptère appartient à la famille des Long-icornes, tribu des Clytides, c'est le XylotrecJius (Glytus) quadripes Chevrolat, Cucu- Jus coffeophagus Richter. Comme toutes les larves de cette famille, celle du Xylotrechus creuse des galeries dans les branches et l'insecte parfait sort par une ouverture circulaire pratiquée dans Técorce. Les dégâts de cette espèce ont été signalés à maintes reprises, notamment dans des publications agricoles de l'Inde anglaise et par Dunning dans les Transactions de la Société entomologique de Londres, 1868. M. le D"" Delacroix, dans son magnifique ouvrage « Les maladies et les ennemis du caféier », Paris, 1900, p. 137, cite toute la bibliographie de la question et résume les observations de ses devanciers. Nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer nos lec- teurs à cette source. Cependant, pour ceux qui n'auraient pas sous les yeux le livre remarquable que nous venons de citer, nous don- nerons les quelques renseignements suivants : On a remarqué que la femelle vient pondre sur les branches expo- sées au soleil, sans doute pour que ses œufs y trouvent une tempé- rature qui facilite leur éclosion. Le D'' Bibie el le D' Haoul con- seillent, et le D"" Delacroix après eux, d'ombrager les plantations pour éviter la ponte sur les rameaux abrités. Voilà le moyen préservatif préconisé par ceux qui ont été étu- dié de très près les mœurs de l'insecte. Comme procédé de destruction, M. Delacroix cite les expé- riences faites par M. Wisser. Il consiste à boucher l'orifice des galeries du longicorne avec un tampon de coton inqjrégné de créo- line ou de chloroforme. A défaut des produits enqîloyés par M. Wisser, on peut se servir de benzine ou de sulfure de carbone. A hi bibliographie donnée par M. Delacroix, il convient d'ajouter les (( Indian Muséum Notes » du Musée de Calcutta, où il est sou- vent parlé de cet insecte. Cette publication paraît depuis 1893. LES INSECTES 755 LISTE DES INSECTES rapportés par M. Henry, de sa mission dans nos colonies de la Côte occidentale d'Afrique. (GUINÉE FRANÇAISE ET FOUTA DJALLOn) COLEOPTERES Adoretus sp. Mylahris sp. ^ Oryctes hoas Fab. Rhynchophorus phœnicis Fab. ^ Apate terehrans Pall. Calandra oryzae L. Thalpophlla ahhreviata Fab. Diaslocera trifasciata Fab. HÉMIPTÈRES (déterminés par M. Léveillé.) Anoplocnemis curvipes Fab. Oxy car nues hyaUmpennis Costa Platypleura près repanda L. HYMÉNOPTÈRES (déterminés par M. R. du Buysson.) Chrysis splendiduni Fab. Eu me nés tinctor Christ. '^ — lyncœa Fab. Icaria cincta Lep. Belonoyaster rufipennis Deg-eer ^ Synagris aequatorialis Sauss. (avec — junceus 0\.'^ son nid). Pelopœus spirifex L. ^ Di^colia melanaria Burm. Megachile grandis Lep. 1. Vivant dans les capsules de coton. 2. Charançon rongeant les troncs abattus de palmier à huile. Cette observation se rapporte, à ce que dit Coquerel du Sphenophorus liratus, de la Martinique, qui vit dans les bananiers, à savoir que l'insecte ne s'attaque qu'aux arbres abattus ou déjà malades. (Voir ci-dessus, la note de M. de Peyerimhoff sur le charançon du bananier à Madagascar.) 3. Konakry. 4. Manéah (Guinée Française). NOTES for:\iicide Anomma Bunneisteir Shuck. (ouvrière) Cette fourmi, rapportée en nombre, a été communiquée à M. André, qui nous écrit ce qui suit à son sujet : « C'est la fameuse « fourmi chasseresse de l'Afrique tropicale dont j'ai décrit les mœurs « dans mon livre « Les Fourmis », de la Bibliothèque des Mer- (( veilles, p. 215, Ces ouvrières varient considérablement de taille. » Nota. — Un certain nombre d'insectes sont arrivés brisés et il m'a été impossible de les identifier. ORTHOPTÈRES (déterminés par M. Finot.) Rhyparobia Maderae Fab. Schistocerca peregrina 01. Clonaria gracilipes Westw. Macroscirtus monrovianus'l Karsch Pacliytylus migratorioides Reiche Gryllus melanocephalus Serv. LÉPIDOPTÈRES (déterminés par M. de Joannis.) Papilio demoleus L. ',•' — nireus L. ^ — policenes Cr. -^ — antheus Cr. ^ Tcrias hrigilta Cr. ^,-' sp 1 3 Catopsilia florella Fab. ^ Callosune Evippe L. ' Tachyris chloris Drury ^ Idmais Eris Kl. ' Belcnoïs Calypso Drurj ' Junonia délia Cr. ' Euryphcnc sp. ^ Euryphene sp. - Acraea serena Fab. ^,'^ — 5^(?/i0i&aea? Wall. ',•* Hypolycœna Philippus Fab. ' — sp. * Ncptis agatha Cr. '■'' Euphœdra pholus IIoov., var. janassia Fab. '-^ Ypthima Do loi a Kirby^ Cœnides cylinda Hew. ' Mycclesis vulgaris'^xxÛ. ~ Eiichromia lelhe Fab, ' lÀlhosia sc.r maculât a Wall. -,3 1. Konakry. 2. Koussi. 3. Manéah (Guinée Française). LES INSECTES 737 LA PUNAISE DU COTONNIER AU SOUDAN M. Vuillet nous a adressé en janvier dernier, de la Station de Koulikoro, des capsules de cotonnier attaquées par un hémiptère qui a fait cette année de g-rands ravages dans les plantations. Nous avons communiqué Tinsecte à M. Bergroth, qui a reconnu YOxyca- renus hyalinipennis Costa, espèce de la famille des Lvg'andes. Il se trouve également dans l'Europe méridionale, toute l'Afrique, la Syrie, le Siam, etc. '. Nous avons trouvé également, dans les mêmes capsules, une autre punaise assez grande, YHotea suhfasciatus Westw., et un coléop- tère, la Coccinella hilincata. En même temps, M. Vuillet nous a adressé quelques autres insectes dont voici la liste : COLÉOPTÈRES : Anthia sulcata Fab. Distichus gagatinus Dej. Brachynus sp. Chlœnius venator Laf. Aciipalpus (2 esp.) Blechrus'l sp. Aphodius (2 esp.) Apogonia sp. Schizonychu sp. Sphenoptera spj. Chrysohothris sp. Pachypterus elongatus Muls. Zophosis qiiadriUneata 01. Triholium ferruginum Fab. Mylahris sp. Anthicus sp. Lsefana histrio Balv — sp. HYMEKOPTERE (déterminé par M. R. du Buysson.) Crocisa. guineensis'] Rad. 1. On verra plus loin que M. Henry a signalé un Mylahris, coléoptère vésicant, vivant également dans les capsules du cotonnier, au Fouta Djallon. 758 NOTES INSECTES RÉCOLTÉS PAR M. LUC DIRECTEUR DU JARDIN d'eSSAI DE BRAZZAVILLE COLÉOPTÈRES '. Popilia sp. ? Tetralohus sennaariensis Cand. Anomala sp. ? Atraciocerus sp. ? Heteronychus Claudius Kl. Sternotomis sp. ? ORTHOPTÈRES (déterminés par M. Finot) : Rhyparohia Maderae Fab. Truxalis iiasula L. Danuria Thunbenji Stal. Eurycorypha securifera Brun. Idolomorpha, voisine de Madarjascariensis Westw. Clonaria ?, larve. HYMÉiNOPTÈRE (déterminé par M. R. du Buysson) : Belonogaster Mencliki Gribodo. LLSTE DES INSECTES DE LA GUADELOUPE récoltés par M. le D'' Vitrac. HYMÉNOPTÈRES *. Trignna VitraciPéTez Cœlioxys abdominalis Guér. Apis melUfica L. Cœlioxys sp. ? Ceniris decolorata Lcp. Mcsoplia aziirea Lop. — apicalis De Geer Polistes amoricanus Fab. — variipes Pérez Odyncrus yuadclupensis Sauss. — lanipes Fab. Tachytes tribihus Say. Diclis perer/rina Lep. — argent ipcs Smel. Xylocopa hrasilianorum Latr. — pavipcnnis Pérez — cornuta Lep. Moncdiihi signala Latr. — seneipennis De Geer Pompyhis amefhystinus (? colona Lep.) Sphex ru/ijicnnis Fab. — sp. ? Knodia dorsalis Lep. LES INSECTES 759 Exomalopsis chrysopyga Pérez Pelopseuslunatus hep. — fulvopilosaSpin. Elis dorsata Fab. Augoclilora regina Smel. — tricincta Fab. Megachile Vitraci Pérez Evania antillarum Pérez — lanata Ophion sp. ? — carinafa Pérez Prenolepsis sp. ? — rufipennis Fab. Monomorium sp. ? L'ORGYIA ANTIQUA DANS LES SERRES LOrgyia antiqua L. est un lépidoptère hétérocère, bombycide de la famille des Liparides, qui apparaît de juin à septembre et dont la chenille vit sur nos arbres fruitiers, le genêt, le saule, etc., de mai k juillet. Cette année, un certain nombre de chenilles ont pénétré dans une serre du Jardin Colonial, spécialement affec- tée à la culture du cacaoyer; elles se sont nourries d'abord des jeunes pousses de cacaoyer, et lorsque les feuilles sont devenues un peu dures, elles les ont délaissées pour s'attaquer aux feuilles nou- velles du bananier. A la température chaude, elles se sont rapidement développées dans une boîte où je les ai recueillies et j'ai obtenu des insectes parfaits en mars dernier. Le fait n'a d'autre intérêt que d'ajouter à la liste des plantes qui conviennent à cette espèce polyphag-e. LA SERICICULTURE AUX ETATS-UNIS Les Américains, constatant qu'une somme de 250 millions sort chaque année de leur poche, au profit de l'industrie étrangère de la soie, vont essayer d'introduire chez eux l'élevage du ver k soie du mûrier. Ils viennent de fonder k Charleston une école de séricicul- ture, dotée d'un premier budget de 50.000 francs par le Ministère de l'Agriculture. La direction de cette école est confiée k une dame. Miss A. Kelly, qui a étudié la question dans les pays où les meilleures méthodes sont employées, notamment en Lombardie, où elle a séjourné long- temps. 760 NOTES Jusqu'à présent, aucun projet de cette nature n'a réussi, mais l'on augure bien de la nouvelle tentative, entourée de garanties sérieuses. Miss Kelly s'adjoint un personnel capable d'enseigner la sérici- culture dans la magnanerie modèle qu'elle organise. Bientôt, des filatures s'élèveront, et au lieu d'être tributaire de l'Italie et du Japon, la nation américaine sera en mesure non seulement de sub- venir à ses besoins, mais peut-être sera-t-elle à même de devenir un concurrent redoutable sur le marché du monde. Avec les quali- tés entreprenantes de ce peuple d'affaires, on peut prévoir un grand avenir à la nouvelle industrie. Beaucoup de régions de la partie méridionale des Etats-Unis remplissent les conditions nécessaires à la culture du mûrier, et une grande population agricole trouvera dans l'élevage du ver une source importante de bénéfices. BIBLIOGRAPHIE Dans la Revue de Madagascar du 10 janvier dernier (Paris, 44, rue de la Chaussée-d'Antin), M. le capitaine Bossavy, de l'Artille- rie coloniale, commence une étude sommaire sur l'entomologie de Madagascar. L'auteur a eu l'heureuse idée d'intercaler dans le texte de nombreuses figures qui parlent aux yeux et faciliteront les pre- mières recherches. 11 donne en outre d'excellents conseils pour la chasse, la conservation et l'envoi des insectes, et les débutants trou- veront dans son mémoire une foule de renseignements utiles. M. Bossavy pense très justement qu'en dehors des services qu'ils peuvent rendre à la science, les coloniaux en général occuperont leurs loisirs d'une façon agréable et attachante, en se livrant à des observations toujours intéressantes. Les promenades dans la cam- pagne seront pour eux une suite ininterrompue des joies intimes, et cette occupation intelligente viendra charmer le désœuvrement de l'existence solitaire que beaucoup sont obligés de mener, loin des distractions du monde civilisé. En outre, la plupart des insectes étant nuisibles à l'agriculture, il y a une œuvre utile à faire en observant leurs mœ'urs et en expéri- mentant dos pr