-H "t S^.*>^1 C^J ■■' ' : rO z co »i^- ^*?i^f, Jif^v^ co ■■JÉB H i • •..•*< ÏTJ^'f/ ►* .,%*•*> 14-3 P2B6 *»^ ^'^■^.^^ ;*^ kl^ *^« / Cn .Ift*^ i» *»^l^ï^SrH3 C4 -«éirà ^^^''^i^^ i ""^L*^ /_ .^tr. ri mmb ^ mmm m liiïeisité libpiE be keiiielles ->4^ LA ViE&L'ŒUVRE DE PASTEUR PAR LE D^ J. BORDET Directeur de l'Institut Pasteur de Bruxelles -^i«i^- \^. a ' BRUXELLES y IMPRIMERIE UNIVERSITAIRE J.-H. MOREAU 4, Rue d'Or, 4 La Vie et l'Œuvre de Pasteur LEÇON I. 1. utilité que présente l'étude de la me d'un savant tel que Pasteur. — En premier lieu, cette étude nous permet d'assister à la naissance et à l'évolution de diverses sciences, au déve- loppement progressif de nos connaissances. En second lieu, elle nous montre quelles sont les qualités les plus nécessaires au savant, et quelle discipline il faut imposera l'esprit pour que l'in- vestigation conduise régulièrement à des résultats exacts. Les recherches expérimentales de Pasteur sont des modèles de rigueur et de précision ; ses conceptions théoriques, prudentes et audacieuses, résultent toujours de la collaboration indissoluble d'une imagination très vive, ifui lui ouvrait'les perspectives, et d'un sens critique sans cesse en éveil, qui prévoyait les objec- tions et soumettait immédiatement les diverses hypothèses pos- sibles au contrôle sévère de l'expérience. A côté des qualités intellectuelles, il faut tenir compte des qualités morales qui sou- tiennent le savant dans son œuvre. En outre, il convient de con- sidérer le milieu social où Pasteur a vécu, et de noter les cir- constances et les événements qui ont pu favoriser le libre exer- cice de ses hautes facultés. II. Origine de Pasteur et ses premières années. — Son esprit, dès le jeune âge, se montrait plus réfléchi et sérieux que brillant. A l'âge de vingt ans, il se rende Paris pour se préparera l'École Normale ; il éprouve beaucoup d'admiration pour certains de ses professeurs, et notamment pour J.-B. Dumas. Le rôle de cet illustre chimiste et d'autres savants encore (Biot, Balard, Sénar- mont) dans la destinée de Pasteur fut considérable. Caractère — 2 — enthousiaste de Pasteur et son ardeur au travail. La science vers laquelle il se sent le plus attiré est la cristallographie, qui comp- tait, à cette époque, des représentants éminents en France. 11 devait du reste bientôt, en s'appuyant sur des données cristal- lographiques, établir une notion capitale, relative à la forme des molécules, relative encore aux rapports qui peuvent exister entre les propriétés des substances et la forme des molécules dont elles sont formées. m. Etat des connaissances à cette époque. — On avait la notion de l'atome et de la molécule : on admettait en d'autres termes que les plus petites particules concevables d'une sub- stance composée (molécules) résultent de l'association d^un cer- tain nombre de particules infiniment petites de corps simples (atomes) ; on savait donc (|ue les caractères et les propriétés d'une substance composée dépendent nécessairement de la nature et du nombre des atomes dont ses molécules sont formées. Mais ces propriétés doivent dépendre encore, on peut le supposer, du mode de groupement des atomes, de la manière dont ils sont accolés pour constituer la molécule. Deux (ou plusieurs) substan- ces peuvent être différentes, bien que leurs molécules soient formées du même nombre d'atomes de même nature, à condi- tion que dans la molécule de la première les atomes ne soient pas arrangés comme ils le sont dans la molécule de la seconde. Dételles matières sont dites isomères. Mais, à l'époque où Pas- teur commença ses recherches, on n'avait sur l'isomérie que des notions très vagues, et l'on ne pouvait, par conséquent, se aire aucune idée de la forme des molécules, puisque celle-ci est l'ex- pression du mode de groupement (alors inconnu) des atomes constitutifs. La cristallographie devait apporter des renseignements pré- cieux sur cette question. La forme des cristaux est d'une régula- rité remarquable, qui (il est rationnel de le supposer) doit être sous la dépendance soit de la forme propre des particules très petites (molécules) qui en s'agrégeant constituent le cristal, soit du mode d'association de ces molécules. — 3 — Phénomènes d'hémiédrie, étudiés notamment par Hauy et Delafosse. Cristaux i gauches ou droits » non identiques (non superposables), bien que possédant mêmes faces et mêmes arêtes en même nombre, par conséquent très analogues et ne différant que par le sens de l'hémiédrie. Exemple : Cristaux de quartz. Deux cristaux de quartz, l'un gauche, l'autre droit, sont iden- tiques chacun à l'image de l'autre dans une glace, sans être identiques à leur propre image. En d'autres termes, ils sont dissymétriques individuellement et symétriques l'un de l'autre par rapport à un plan. Analogie avec la main gauche et la main droite. Comme les cristaux, les objets peuvent être classés en objets symétriques et dissymétriques, chacun de ceux-ci ayant son congénère (image dans un miroir). Les molécules d'un cristal gauche de quartz sont absolument identiques à celles d'un cristal de quartz droit. La différence de forme est due uniquement, par conséquent, à une différence dans l'orientation, dans la disposition des molécules : les mêmes molécules peuvent, suivant leur mode de groupement, fournir les deux types de cristaux. IV. Un cristal est formé de molécules. De même une molécule est constituée d'atomes. Pourquoi dès lors les mêmes atomes en même nombre ne pourraient-ils pas (pour certaines sub- stances tout au moins, etsi les atomes constitutifs sont assez nom- breux pour qu'on puisse en combiner plusieurs agencements divers) donner deux molécules non identiques bien que fort sem- blables, toutes deux dissymétriques, mais dont l'une serait de forme gauche tandis que l'autre serait de forme droite ? Acide paratartrique de la fabrique de Thann. Acides tartriques droit (anciennement connu) et gauche (découvert par Pasteur). Cette comparaison suggérée par Pasteur, entre la structure des cristaux de quartz gauche et droit d'une part, et celle des molécules tartriques gauche et droite, de l'autre, est confirmée par l'étude des propriétés optiques. Tous les cristaux de quartz dévient la vibration de la lumière polarisée (pouvoir rotatoire). Mais les cristaux de même forme la dévient tous dans le même - 4 — ser)S, les cristaux de forme opposée la déviant dans le sens con- traire (Herscbell). Les molécules de tous ces cristaux étant iden- tiques, c'est la diversité de leur groupement qui crée cette diffé- rence dans la propriété optique, en même temps qu'elle crée la différence de forme. Au surplus, ce qui démontre encore, pour ce qui concerne cette propriété, l'importance du mode de grou- pement des molécules, c'est que le quartz non cristallisé (dans lequel les molécules ne sont pas agencées suivant un ordre déterminé) est sans action sur la lumière. Dans le cas du quartz, ce n'est donc pas la nature, mais bien la disposition des molé- cules, qui intervient. Mais l'action sur la lumière polarisée n'est pas toujours liée à la structure cristalline. Certaines substances, telles que l'acide tartrique (d'autres encore, le sucre, l'albumine, etc.) exercent cette influence déviatrice même quand leurs molécules sont disséminées sans aucun ordre précis ; par exemple, lorsqu'elles se trouvent en solution dans l'eau. Dans de tels cas. l'influence sur la lumière doit évidemment être attribuée à la nature propre, à la conformation particulière des molécules elles-mêmes (pou- voir rotatoire d'origine moléculaire). La molécule d'acide tartrique gauche et celle d'acide tartrique droit (formées du même nombre des mêmes atomes, mais dis- posés différemment) ayant été comparées comme structure aux cristaux gauche et droit de quartz — en ce sens qu'elles présen- tent entre elles des différences comparables à celles qui distin- guent les deux sortes de cristaux — on doit prévoir que, si la comparaison est légitime, l'analogie se continuera pour ce qui concerne la propriété optique. Pasteur trouve, en effet, que la solution d'un des acides dévie dans un sens, celle de l'autre déviant avec la même énergie, mais dans le sens opposé. Les deux acides tartriques se distinguent aussi par leur forme cristalline, de la même manière que les cristaux de quartz (dis- symétrie inversej. En résumé, ces recherches de Pasteur apportaient des don- nées précieuses relativement à la forme des molécules, c'est-à- dire au mode de groupement des atomes. Elles fournissaient un exemple démonstratif d'isoniéric de deux molécules, très sembla- bles à tous égards, sauf qu'étant toutes deux dissymétriijues, elles le sont en sens contraire. D'autre part, le pouvoir rotatoire des molécules est lié à la dissymétrie de leur structure, et le sens de la déviation lumineuse est eu relation avec le sens de la dissymé- trie. Ces recherches ont, ouvert la voie à la stéréochimie, science du relief, de la confii^uration des molécules. LEÇON II. I. Stéréochimie. — Cette science nouvelle, qui a pris un grand développement, dérive en droite ligne des travaux de Pasteur. Les notions stéréochimiques ont une très grande importance, non seulement pour la connaissance approfondie de la matière, mais aussi en biologie ; elles font prévoir l'énorme complication de la chimie des êtres vivants ; ceux-ci sont sensibles aux moin- dres détails de l'architecture des molécules. Pasteur avait trouvé des exemples de ce fait en étudiant le pouvoir nutritif de certains corps, tels que les acides tartriques. Des moisissures qui se développent dans de l'eau contenant en solution les deux acides tartriques, consomment l'acide droit, tandis qu'elles dédaignent l'acide gauche. Elles font un choix entre deux sub- stances pourtant bien semblables. Le fait qu'un être vivant détruit une substance organique telle que l'acide tartrique droit, qui lui sert d'aliment, fait prévoir l'importance des êtres animés dans l'altération d'un grand nom- bre de matières. Il y a là une transition toute naturelle à l'étude des fermentations. II. Travaux de Pasteur sur les fermentations. — Pendant le cours de ses travaux de cristallographie, Pasteur s'était rendu à Strasbourg d'abord, puis à Lille, où Ton put apprécier son dévouement à l'enseignement. 11 fut amené à s'occuper des fer- mentations, d'abord parce que ses recherches antérieures l'avaient préparé à cette étude, ensuite parce que les circonstances lui permirent de l'entreprendre dans de l)onncs conditions. Liquides fermentescibles. La fermentation alcoolique est carac- térisée par ce fait ({ue la molécule de sucre se désagrège, don- nant ainsi naissance à des molécules plus petites, celles de — 7 — l'alcool et de l'acide carbonique : ces deux substances dérivent du sucre. Mais quelle est la cause première de cette décomposi- tion du sucre? État des connaissances sur la fermentation alcoolique à l'époque do Pasteur. Constance de la levure dans ce phénomène. Cette levure est un être vivant (Ca^-niard Latour) qui se repro- duit par bourgeonnement, mais l'importance de son rôle, soup- çonnée par Schwann, n'était nullement démontrée. La théorie régnante était celle de Liebig. Ce savant ne recon- naît aucun rôle important à la levure considérée comme être vivant. Pour lui, la production d'alcool et d'acide carbonique (]ui caractérise la fermentation alcoolique, est un phénomène pure- ment chimique dû à un ébranlement transmis à la molécule de sucre par des matières organiques en voie de décomposition ; l'altération de ces dernières entraîne, par une sorte de mouve- ment communiqué, celle du sucre. Liebig interprétait habilement les expériences faites de son temps et spécialement celles de Thénard. Pasteur considère d'abord la fermentation lactique; il démontre qu'elle est provoquée par un microorganisme ; celui-ci se nour- rit de sucre et élimine, comme produit de déchet, de l'acide lactique. Pasteur recueille les premières indications sur les qualités qu'un miheu de culture doit posséder pour que les êtres microscopiques puissent y prospérer et se multiplier active- ment. Il étudie l'action des antiseptiques, qui atteignent ces êtres dans leur vitalité. Comme la fermentation lactique, la fermentation alcoolique n'est autre chose q'un phénomène de nutrition. Le sucre est consommé par la levure, celle-ci rejette les produits d'excrétion qu'elle a fabriqués au dépens de cet aliment (alcool, acide car- bonique, petites quantités de glycérine et d'acide succinique). D'autre part, la levure élabore aux dépens du sucre (et aussi de certaines substances, tels cjue des sels azotés que les jus sucrés ou les moûts renferment en quantité suffisante) d'autres matières qu'elle conserve et qui sont destinées à édifier ses propres tissus et à subvenir aux besoins de la multiplication. Pasteur ruine la théorie dé Liebig, en montrant que la fermen- tation alcoolique peut s'effectuer dans un milieu ensemencé d'une trace de levure et qui ne contient pas de matières orga- niques autres que le sucre. Fermentation butyrique. Pasteur découvre le premier exemple d'organismes vivant à l'abri de l'air al pour qui le contact avec l'oxygène est fatal. La notion de la vie aérobie, et de la vie anaérobie, fondamentale au point de vue théorique, est en outre indispensable à la technique de l'isolement et de la culture des espèces microbiennes. m. Comme les fermentations, les phénomènes de putréfac- tion sont toujours dus à l'ingérence d'être vivants très petits. Ces microbes se nourrissent aux dépens des matières organiques, qu'ils modifient ainsi profondément. Chaque espèce microbienne a sa manière à elle de se nourrir, de consommer et d'utiliser ses aliments. De ses études sur les fermentations lactique et alcoolique, et sur les putréfactions. Pasteur déduit le principe de la spécificité dans Taction fermentative des germes. Un même microorga- nisme ne produit pas indifféremment diverses fermentations. Chaque fermentation a son microorganistne particuUer. Cette notion de la spécificité d'action prendra, dans l'étude des mala- dies contagieuses, une importance considérable. IV. Pasteur trouve encore que lorsiju'ils se reproduisent, les êtres microscopiques donnent toujours naissance (comme les plantes et les animaux) à des êtres semblables à eux-mêmes. V. Mais doivent-ils toujours et nécessairement dériver de parents ? Ne peuvent-ils jamais apparaître spontanément, dans des liquides appropriés? (génération spontanée). Importance qu'on attachait à cette question au point de vue théologique : si les microbes ne peuvent prendre naissance de — 9 — toutes pièces, spontanément, le premier microbe (pii a apparu à la surface de notre globe a dû ôtre créé par la volonté divine. On ne con(;oit plus guère aujourd'hui l'intérêt de ce point de vue: tout phénomène, quel (ju'il soit, a ses causes. L'apparition de la vie — comme sa transmission continue et incessante (tout aussi difficile à expliquer d'ailleurs) d'une génération à une autre — a les siennes. Désigner celles-ci sous un nom particu- lier (créateur, force biogénésique, volonté divine, impulsion vitale, etc..) ce n'est pas nous les faire connaître davantage. Quelle que soit l'étiquette dont on les décore, elles ne sauraient être précisées maintenant ; par conséquent, elles ne peuvent, à l'heure actuelle, que servir de thème aux fictions (parfois gra- cieuses et poétiques) de la mythologie. LEÇON III. I. Des êtres microscopiques penvent-Us prendre spontané- ment naissance dans un milieu approprié, contenant des matières organiques altérables ? — C'est le problème de la génération spontanée, dont l'importance scientifique est évidente, mais auquel on attachait aussi un intérêt théologique. L'étude des fermentations devait nécessairement conduire Pasteur à aborder cette question. État des connaissances à cette époque. Les expériences de Needliam, Spallanzani, de Schultze, Schroeder et Dusch comportaient souvent de graves causes d'erreur, étaient fréquemment contradictoires, condui- saient à des conclusions bien incertaines. Il est intéressant de passer en revue les expériences extrême- ment ingénieuses que Pasteur institua pour résoudre le problème. Mais on peut en exprimer le résultat en disant qu'un liquide ren- fermant des matières putrescibles ou fermentescibles, et ([ui a été préalablement stérilisé (par l'action de la chaleur), se con- serve indéfiniment inaltéré, même si l'atmosphère intérieure du vase renfermant le licjuide communique librement, par un orifice ouvert, avec l'air extérieur. La seule précaution qu'il faut néces- sairement observer pour empêcher tout développement de ger- mes, c'est de préserver le liquide de l'accès des poussières qui voltigent dans l'atmosphère. Dans ces poussières on trouve, en effet, souvent sous forme de graines (spores), des êtres vivants capables de se reproduire et de pulluler bientôt s'ils tombent dans un liquide nutritif approprié. Distribution des microbes de l'air. Abondants dans l'air des villes, rares à la campagne et surtout au sommet des montagnes. Malgré la force démonstrative des expériences, les conclu- sions de Pasteur, opposées à la théorie de la génération sponta- née, se heurtèrent à des objections dictées plutôt, en général, - 11 — par des préoccupations métaphysiques que par le souci de la vérité. Tournure d'esprit des philosophes et de beaucoup de savants à cette époque. Quanta Pasteur, il n'admettait l'ingérence, dans le domaine des sciences exactes, d'aucun système philosophique préconçu; ses principes, à cet égard, sont ceux des vrais hommes de science. Les controverses que Pasteur dut soutenir contre Pouchet et plus tard contre Bastian, consolidèrent ses conclusions et le con- duisirent à de nouvelles découvertes relatives surtout à la phy- siologie des bactéries (les spores ; conditions nécessaires pour que ces spores puissent germer), découvertes importantes et qui, en outre, étaient indispensables au perl'ectionnnement de la technique bactériologique. II. Fermentation acétique. — Au contact de l'air, l'alcool contcMiu dans le vin s'oxyde et leliquide se transforme en vinaigre. Cette modification s'effectue plus activement quand on donne au liquide une grande surface de contact avec l'air. Liebig croyait que cette oxydation était un phénomène purement chimique, Pasteur montra que dans la fabrication du vinaigre, la formation d'acide acétique est due à l'activité d'un germe particulier (rayco- derme du vinaigre). III. Remarquable propriété des ferments. — La quantité de matière qu'ils peuvent transformer est souvent énorme rela- tivement au poids des germes qui se développent au cours du phénomène. Ces germes consomment donc de grandes quan- tités d'aliments ; cela tient généralement (on le verra plus loin à propos de la levure en vie anaérobie) à ce qu'ils ne les utilisent souvent qu'imparfaitement. IV. Maladies des Vins. — A côté des ferments utiles, le vin peut renfermer des êtres microscopiques qui lui enlèvent ses qualités. Pasteur montre qu'on peut préserver le vin de ces alté- rations en le stérilisant par la chaleur. Il faut éviter de pratiquer ce chauffage en présence d'une quantité trop forte d'oxygène ; si — 12 — cette précaution n'est pas observée, l'oxydation se fait énergique- ment et le vin est soumis ainsi à un vieillissement artificiel exagéré, de nature à compromettre son goût. V. Études sur la Bière. — Après la guerre de 1870, Pasteur se remit à l'étude des fermentations. Comme le vin, la bière est sujette à l'invasion de germes nuisibles ; il importe d'employer dans la fabrication, des levures pures. Dans ses études sur la bière, Pasteur étudie non seulement des questions d'intérêt pratique, relatives à la fabrication de la bière, mais aussi des problèmes théoriques. a) Pasteur donne une réponse négative à cette question : peut- on transformer une espèce de ferment en une autre? b) Cependant les principales propriétés de la levure (activité de la reproduction, intensité de la production d'alcool) ne se manifestent pas avec une énergie constante et immuable lors- qu'on fait varier les conditions d'existence. Vie aérobie, vie anaérobie. A l'abri de l'air, la levure se reproduit peu, mais met en liberté beaucoup d'alcool. Ces faits découverts par Pas- teur (et dont il a donné une interprétation intéressante, mais forcément incomplète) s'expliquent aujourd'hui grâce aux recher- ches récentes : Travaux de Buclmer. Les idées actuelles sur la fermentation. Zymase. En l'absence d'oxygène, la levure ne peut utiliser l'alcool qu'elle a formé. VI. Orientation de Pasteur vers la pathologie. — Ses recher- ches sur la maladie des vers à soie (maladie de la pébrine). — Surmontant ses hésitations, qui provenaient de ce qu'un tel sujet était bien étranger à ses préoccupations habituelles, Pasteur accepta, sur les instances de Dumas notamment, de se consacrer à l'étude de cette question, d'une importance capitale pour l'in- dustrie française. Caractères de la maladie : présence de taches sur les vers à soie, et d'éléments particuliers, dont la signification n'est pas précisée, les corpuscules. Ceux-ci se rencontrent également dans — 13 — les papillons et même dans les œufs. Pasteur montre que ces corpuscules sont des ôtres vivants, des parasites. Il constate que les papillons exempts de corpuscules donnent des œufs sains, capables de produire des vers normaux. Il établit la technique de la recherche, au microscope, des corpuscules dans le corps des papillons, après la ponte. Si le résultat de la recherche est négatif, les œufs issus de ces papillons donneront naissance à des vers capables de filer de beaux cocons. Or, dans un lot de papillons (même dans les élevages les plus infectés), on en trouve toujours quelques uns qui ont échappé à la maladie (ou qui en sont guéris) et ne présentent pas de corpuscules. Les œufs provenant de tels papillons doivent être soigneusement recueillis. La maladie est contagieuse, ce que Pasteur ne put démontrer qu'au bout d'un certain temps. Mais les vers nés sains (de parents non corpusculeux) peuvent, même s'ils se contami- nent, donner de bons cocons , ceci résulte de ce (jue la maladie se développe lentement : seulement, les œufs que pondront les papillons issus de ces vers, seront infectés et devront être rejetés. Il importe donc de préserver de toute contamination (mesure d'isolement) les vers sains que l'on réserve pour la reproduction. Grâce à ces indications de Pasteur, les sériciculteurs pratiquant la recherche des corpuscules au microscope, purent lutter contre la maladie, et l'industrie de la soie.gravemeni menacée, prospéra de nouveau en France. L'existence d'une autre maladie (flacherie) compliqua beaucoup les recherches de Pasteur. Néanmoins, il surmonta ces difficultés ; précisa la nature de ce nouveau mal (infection du tube digestif) et montra ([ue des mesures d'hygiène pouvaient enrayer sa pro- pagation. Pasteur rencontra beaucoup de contradicteurs, et dut, pour faire triompher sa méthode, dépenser beaucoup d'énergie, bien que sa santé eût été ébranlée. Quelques hommes clairvoyants le soutenaient (Duruy, Bernard, Dumas ; voir au sujet des relations de Pasteur avec les savants illustres de son temps, le beau — 14 — livre de M. R. Vallery-Radot, La Vie de Pasteur), qui parta- geaient son enthousiasme, et avaient, sur le rôle de la science dans la société, les mêmes opinions que lui, rôle que les Gouver- nements ne peuvent méconnaître sans danger pour le pays. Désormais, le prmcipe fondamental du rôle des êtres micros- copiques dans l'apparition et la propagation des maladies conta- gieuses était nettement établi. LEÇON IV. I. Résumé rapide des notions recueillies par Pasteur sur le rôle des êtres microscopiques dans la nature. Leur importance dans la transformation des matières organiques. Passage, d'un être vivant à un autre, des matériaux alimentaires, incessamment modifiés ; inlervcntion des microbes dans la restitution à la plante des matières mortes provenant d'autres organismes. — Mais les microbes s'attai[uent parfois aussi à la matière vivante. II. Les maladies contagieuses sont causées par des microbes. — a) Conditions exceptionnelles dans lesquelles se trouvait Pasteur pour aborder l'étude des microbes pathogènes. Ecole de Pasteur : Duclaux, Gernez, Raulin^ Joubert, Roux, Chamberland; perfectionnement delà technique. Etat d'esprit de nombreux médecins au début et pendant le cours des recherches de Pasteur. Règne des systèmes préconçus et artificiels. La méthode expérimentale, si féconde pourtant dans les laboratoires entre les mains d'hommes tels que Cl. Rer- nard, Villemin, n'a guère de crédit dans le corps médical. b) Histoire de la maladie charbonneuse. Rayer et Davaine, en 1850, avaient découvert des bâtonnets particuliers dans le sang des animaux morts du charbon. Ces bâtonnets (bactéridie char- bonneuse) sont-ils la cause de la maladie? Davaine répond affirmativement à cette question, mais ses expériences, bien que fort ingénieuses, ne réfutent pas toutes les objections. Travail important de K.och (spore charbonneuse). Pasteur démontre définitivement, grâce à la technique perfec- tionnée qui lui permettait d'obtenir une série indéfinie de cultures pures successives, que la bactéridie est la cause unique du charbon. — 16 — c) Les microbes palliogènes peuvent être dangereux, non seulement par eux-mêmes, mais encore par les poisons qu'ils fabriquent. Pasteur le démon! re à ])ropos du charbon et du cho- léra des f)Oules. Roux devait, plus tard, dans ses recherches sur la diphtérie, mettre en évidence la toxicité des sécrétions micro- biennes d'une manière encore plus saisissante. dj Comme ceux qui provoquent les fermentations, les microbes qui causent les maladies peuvent être aérobies ou anaérobies. Le vibrion septique, microbe répandu partout et habituellement inoffensif, devient dangereux lorsqu'on l'injecte profondément dans les tissus. Le bacille du tétanos est également anaérobie. e) Origine microbienne des suppurations. Les suppurations qui se déclarent à la suite des interventions chirurgicales sont dues à l'absence de précautions antiseptiques. Pansements antiseptiques de Lister, qui s'inspira des idées de Pasteur. Décou- verte du staphylocoque et du streptocoque de la fièvre puerpé- rale. IIL Principe de l'atténuation des microbes virulents. — Idée de lutte entre l'organisme et les parasites. Virulence et état réfractaire. S'il est vrai qu'il s'engage un conflit, un véritable combat, entre l'organisme et le microbe envahisseur, on peut espérer modifier l'issue de la lutte en aff'aiblissant au préalable l'un des deux antagonistes. a) La culture a une température trop élevée (45o), affaiblit le microbe charbonneux. Ainsi traité, il devient presque inoffensif pour les animaux fort sensibles au virus normal : L'injection d'une telle culture ne détermine plus d'accidenls mortels. Non seulement les animaux ainsi inoculés guérissent, mais ultérieure- ment leur résistance est augmentée et ils peuvent désormais tri- ompher d'une infection réalisée par l'injection d'une culture très virulente du même microbe {immunisation arlitlcicile). Vaccins charbonneux. Expérience de Pouilly-le-Fort. Mais si, dans le conflit de l'organisme et du virus, on peut favoriser l'organisme en affaiblissant au préalable le virus injecté, on peut aussi, inversement, favoriser le virus en affaiblissant les — 17 - moyens de défense tic l'organisnne: le refroidissennent fait perdre à la poule la résistance qu'elle possède normalennent à l'égard du microbe du charbon. Le fait de l'atlénuation des virus permet d'exi)liquer le mode d'action de la vaccination jennérienne. Vaccine et variole. IV. Application à d'autres microbes des procédés d'atténua- tion. — Choléra des poules, rouget du porc. — Etudes sur la rage; cette maladie n'apparait jamais spontanément. Elle est due à rinlroduction dans l'organisme d'un parasite spécial, extraordi- nairement petit ; le microscope ne suffit pas à le mettre en évidence. L'homme et les animaux ne deviennent donc enragés que s'ils ont été contaminés. Incubation prolongée. . La mnladie s'attaque aux centres nerveux, où le virus, d'ail- leurs invisible, s'installe de préférence et se développe abon- damment. Pasteur et Roux produisent la rage expérimentale avec évolution très régulière, en inoculant les animaux sous la membrane qui enveloppe le cerveau, par trépanation. La moelle épinière extraite de l'animal rabique et soumise pendant quelques temps à une dessication progressive, perd peu à peu sa virulence; le virus qu'elle contient passe à l'état de vaccin. La durée de l'incubation rabique étant très longue, on a le temps de traiter les personnes après morsure. V. Horizons ouverts par les travaux de Pasteur à l'étude : a) Des microbes eux-mêmes (culture, caractères, milieux où on les rencontre, moyen de les détruire, mode de propagation des diverses maladies contagieuses ; b) Des moyens dont l'organisme dispose pour se défendre con- tre les microbes (immunité, thérapeutique rationnelle). BIBLIOGRAPHIE. R. Vallery Radot. — La vie de Pasteur. Paris, 1900. DucLAUX. — Pasteur. Histoire d'un Esprit. Paris. 1896. Roux — L'Œuvre inèdicale de Pasteur. Agenda du Chimiste. 1896. DucLAUX. — Traité de microbiologie. IV vol. 1898 et années suivantes. Principales publications de Pasteur : Etudes des phénomènes relatifs à la polarisation rotatoire des liquides. Pans, 1847. Recherches sur les relations qui peuvent exister entre la for7ne cristalline, la composition chimique et le sens du pouvoir rotatoire C. R , 1848. Mémoire sur les acides aspartique et malique. Annales de Chimie et de Physique, t. 34. De la dissymétrie moléculaire des produits organiques naturels. Leçon professée à la Société chimique de Paris, 1860. Mémoire sur la fermentation appelée lactique. Ajinales de Chimie et de Physique. 3e série, t. 52. Mémoire sur la fermentation alcoolique. Annales de Chimie et de Phy- sique. 30 série, t. 58- Animalcules vivant sans gaz oxygène libre et déterminant des fermenta- tions. C. R-, t. 52, 1861. Examen de la doctrine des gémératiojis spontanées. Annales de Chimie et de Physique. 3» série, t. 64. Discussions relatives à la génération spontanée. C.R., passim depuis 1863. Influence de l'oxygène sur le développement de la levure et sur la fermen - tation alcoolique. Bull, de la Soc. chimique. Paris, 1861. Faits nouveaux pour servir à la connaissance des fermentations propre- ment dites. C. R., t. 75. Note sur la production d'alcool par les fruits. C R. t. 75. — 19 — Mémoire sur la fermentation acétique- Annales de l'Ecole normale supé- rieure, t- I, 1864. Études sur les vins. Paris, 1866. Études sur la maladie des vers à soie. Paris, 1870. Idem. C. R., t. 61. 1865. Études sur la bière. Paris, 1876. Pasteur et Joubert. — Etudes sur la maladie charbonneuse .C R., 1877. Idem. — Charbon et septicémie. C. R., 1877. La théorie des germes et ses applications à la Médecine et à la Chirur- gie. Lecture faite à l'Académie de Médecine) 1878. Pasteur, Chambekland et Roux. — Étiologie du charbon C. R., 1880. Etiologie et prophylaxie du charbon. C. R., 1880. Pasteur et Chamberland. — Sur la non récidive de l'affection charbon- neuse, C. R., 1880. Sur le choléra des poules. C, R., 1880. Travaux sur la rage (en collaboration avec Chamberland^ Roux et Thuillier). c. r. passim depuis 1881. LISTE DES SYLLABUS PARUS : M. Berge Chimie industrielle (cp.) M. Boisacq La Sculpture grecque M. Ch. Bommer L'Infiuence des Vei;ctaux sur le dé- veloppement cîes Sociétés hu- maines (ép-) M. J. Bord et La Vie et l'Œuvre de Pasteur M. J. Capart Pourquoi les Egyptiens faisaient des Momies? (cp) MM. J. Capart ei J. De Mot L'Évolution de l'Art dans (Antiquité M. E. Cattier Le Naturalisme littéraire (ép) M. F. Cattier Principes de Colonisation M. J. Chot L'Évolution de l'Art littéraire fran- çais en Belgique Histoire de la Renaissance artistique en Italie. M. T. Claes Cours de Cosmographie M. Clautriau La Chimie dans la vie quotidienne M. Cocq Erreurs et préjugés populaires con- cernant la Médecine (ép-) L'Alimentation (cp) M. Cornil L'Asstirance municipale contre le chômage involontaire (4 fr.) M. Crismer Les Frontières de la Physique et de la Chimie (ép-) M. Dallemagne Criminologie (ép.) M. De Boeck L'Alcoolisme physiologique et social Les Frontières de la Folie M. Debray Comment naît et se conserve l'Intel- ligence. M. Ch. De Keyser Considéraiions générales sur la Ma- chine à vapeur et les autres Moteurs thernu(|ues. M. De Leener L'Évolution industrielle et les Trusts M. J. Demoor Les Bases scientifiques de l'éducation L'Ecole (épuisé) L'Education physique Evolution fonctionnelle du Système nerveux (ép) La l,utte de l'Organisme contre les Maladies infectieuses Physiologu de l'Esprit Quelques grands faits de la Biologie (Nutrition et Irritabilité; M. J. De Mot La Grèce de Minos et d'Agamemnon M. Depage Les premiers soins à donner en cas d'accidents (ép-) M. P. De Reul La \'ie du Langage Les Poètes anglais du xix* siècle Le Théâtre de Shakespeare M. G. Des Marez Les Villes Flamandes M. L. Dollo Les grandes époques de l'Histoire de la Terre Les Ancêtres des Animaux domes- tiques Poissons belges et Poissons du Congo MM. Donny & Goldschmidt Le Pendule de Foucault M. L. Dumpnt-"Wilden Les Grandes Époques de l'Esprit Français M. L. Errera Existe-t-il une force vitale? Les Bases scientifiques de l'Agricul- ture M. P. Errera Les Institutions communales belges Littérature française : Historiens et Chroniqueurs Littérature française : Philosophes et Moralistes Quelques aspects de l'Evolution de la Propriété Quelques Historiens français En vente à la Librairie Lamertin, Rue Marchà-au-Bois, 20, au prix de 75 centimes l'exemplaire. LISTE DES SYLLàBUS PARUS : (ép.) M. Franck La Législation féministe M. Goblet d'Alviella Les premières Civilisations Les Origines du Christianisme d'après l'exégèse contemporaine M. R. Goldschmidt Quelques actualités scientifiques (ép. ) M. Hanssens Le Contrat de Travail (ép.) M. Heger Les Fonctions du Système nerveux L'Alimentation (ép.) Histoire de la Physiologie M. A. Herlant Les Falsifications des Denrées ali- (ép.) mentaires M. A. Hubens Histoire de l'Art musical M. M. Huisman L'Évolution du Commerce en Bel- gique M. A. Lameere Le Transformisme Le Transformisme expérimental Les Associations biologiques M. E. Lameere Histoire du Livre ; M. L. Leclèr^' Les grands faits Ûe l'Histoire du Moyen-Age Histoire contemporaine (1789- 1815) Histoire contemporaine (1815-1852) Histoire contemporaine depuis 1852 M. Le Marinel L'Utilité des F.xercices physiques M. A. Levoz L'Education et la Protection do l'En- fance M. J. Massart Impressions de la Nature équatoriale Le Désert La Guerre et les Alliances entre Ani- maux et Végétaux Comment les Montagnes se font et se défont M. Pechère La Lutte contre les Maladies infec- tieuses L'Eau potable M. Pelseneer L'Intelligence des Animaux (Suite) M. Pelseneer Les Abîmes de la Mer et leurs Habi- tants. L'Océanographie M. Pergameni Le Théâtre français au xix« Siècle(ép.) Le Roman au xix'^ Siècle (épuisé) Origine et Développementdu Roman- tisme en Europe et principalement en France 'ép. ) Le Théâtre politique en France depuis 1789 Le règne de Joseph II et la Révolu- tion brabançonne M. Petrucci Histoire de la Peinture Flamande Histoire générale de l'Art Rubens et ses Contemporains M. M. Philippson La Vie au sein des Mers M. E. Pierard L'Électricité et quelq