■^.y.i' >^^-J 8* SÉRIE, 1er Avril 1901. LE BOTANISTE Directeur: M. P. -A. DANOEARD Professeur de Botanique A LA Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers 1"' c5c 2" FASCICULE SOMMAIRE 1» P. -A. Dangkard. — Etude sur la structure de la cellule et ses l'onctions. Le Polytoma uvella. 2* P. -A. Daxgeard. — Nutrition ordinaire. Nutrition sexuelle et nutrition holophy tique. PRIX DE L'ABONNEMENT A LA SERIE DE SIX FASCICULES 16 francs pour la France. — 18 francs pour l'Etrangep DIRECTION : 34, Rue de la Chaîne, POITIERS PARIS LONDRES ^■'^- BAILLIÈRE BERLIN DULAU à C ^"' ^««^^^'"«^. 19 FRIEDLANDER & SOHN Soho Square, 37 N. W. Carlstrasse, 11 LE BOTANISTE LE BOTANISTE Directeur : M. P. -A. DANGEARD Professeur de Botanique A LA Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers HUITIÈME SJÉRIE 1901 PRIX DE L'ABONNEMENT A LA SÉRIE DE SIX FASCICULES 16 francs pour la France. — 18 francs pour l'Etranger LIBRARY NEW YORK BOTANICAL QARDEN. ç. A' LA DIRECTION, 34, RUE DE LA CHAINE POITIERS ET CHEZ TOUS LES LIBRAIRES ETUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE ET SES FONCTIONS LE POLYTOMA UVELLA Par P -A. DANGEARD La puissance d'un mot suffit parfois à déterminer un mouvement d'opinion et une direction nouvelle dans les recherches d'histoire naturelle ; sans le « plankton », beaucoup d'observateurs auraient ignoré à tout jamais la variété des infiniment petits et l'intérêt que présentent leurs moeurs et leurs habitudes ; il n'y a là cependant qu'un problème très spécial ; une foule d'autres questions concernant l'organisation de la cellule et ses fonctions ne seront définitivement résolues que par l'étude des or- ganismes inférieurs ; les différenciations cellulaires ont, comme les individus, leur histoire dans l'évolution ; il eri est de même des fonctions; nous en avons fourni la preuve dans un essai sur la karyokinèse et dans notre 6 P.-A. DANGEARD théoriedela sexualité(l) ; nous nous sommes laissé guider, dans la rédaction de ce nouveau mémoire, par les mêmes' considérations et les mêmes principes. Le genre Polytoma se trouve placé dans la classification à la base des Chlamydomonadinées ; il forme la transition entre les Flagellés et les Chlorophytes. Bien qu'il ne possède pas de chloroleucite, il fabrique néanmoins de l'amidon dans son protoplasme; sa reproduction, d'autre part, n'est plus une simple division longitudinale comme chez les Flagellés ordinaires; elle se fait par sporulation; enfin nous voyons apparaître, avec cette sporulation, une conjugaison de gamètes qui marque le début de la repro- duction sexuelle. Ce genre est donc un de ceux qui président à l'établis- sement d'un nouvel état de choses et qui marquent une direction nouvelle en évolution ; à ce titre il sera souvent consulté, et son étude ne saurait être faite d'une manière trop complète. Aperçu historique. Il existe une excellente monographie du genre Poly- toma (2) ;elle nous dispensera d'un long historique. Les premiers auteurs qui se sont occupés sérieusement du Polytoma uvella sont Ehrenberg, Perty, Cohn et Schneider. Ehrenberg est le créateur du genre ; il attribue à cet organisme un appareil digestif et il le place en consé- quence dans ses « Polygastrica » (3) ; sur la foi de ses ob- servations, on a cru pendant longtemps que le Polytoma (1) P.-A. Dangeard: Mémoire sur les Chlamydomonadinées {Le Bota- niste, 6* série). (2) France : Die Polytomeen (Ja/irb. /"ur \vîss Bolanik, T. 26, 1894, p. 295). (3) Ehrenberg: Die Infusionsth. als volkommene Organismen, 183». ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 7 uvella, était capable d'ingérer des granules d'indigo et possédait par conséquent la nutrition animale. Perty étudie un certain nombre de formes nouvelles qu'il élève au rang d'espèces (1) ; certaines d'entre elles ont dû disparaître de la classification. Cohn, en 1854, donne une description très complète du Folytoma uvella, et reconnaît les affinités qu'il présente avec les Chlamydomonadinées (2) ; il propose même de le désigner sous le nom de Çhlaniydomonas hyalina; ce savant signale en outre un stade de repos représenté par des kystes. Presque en même temps paraissait un mémoire de Schneider (3) qui mettait hors de doute l'existence d'un noyau chez le Polytoma, ; la reproduction sexuelle est étu- diée avec soin et l'auteur reconnaît la nature amylacée des granules qui se trouvent dans le corps ; il décrit également les vacuoles contractiles. Avec Dallinger et Drysdale (4) le développement du Polytoma uvella, s'enrichit d'un nouveau mode de repro- duction très spécial, sur lequel il n'y a pas lieu d'insister; nous en avons montré, il y a quelques années (5), toute l'invraisemblance ; personne n'y croit plus aujourd'hui. On peut faire la même remarque en ce qui concerne l'ingestion de granules d'indigo signalée d'abord par Ehrenberg ; bien que cette opinion ait reçu l'appui de Saville-Kent (6), tous les auteurs s'accordent maintenant (1) Perty : Die Kleinst. Lebensformen. Bern, 1854. (2) Cohn: Entw. der mikros. Algen und Pilze(.Vo!;a Acta Léop., 1854). (3) Schneider : Beitriige zur. Naturgesch. der Infusorien {MuUer's Archiv.f. Anat., 1854). (4) Dallinger et Dryâdale : Researches on the life history {Monthl. micr. journ. 1874). (5) P. -A. Dangeard : Recherches sur les algues inférieures {Ami. d. Se. nat. Bot., 7e série, t. VII, 1888). (6) Saville-Kent : A Manual of the Infusoria. Bd. I, London, 1880- 1881). 8 P -A. DANGEARD avec nous pour considérer le Polytoma, comme une espèce saprophyte. Stein (1) et Butschli(2) figurent le Polytoma uvella dans leurs ouvrages sur les Infusoires et les Protozoaires ; on doit citer tout particulièrement les magnifiques dessins que Stein consacre à cette espèce. La contribution récente la plus importante est celle de Krassilstchik (3) qui découvre le mode de reproduction sexuelle ; à un moment donné du développement, il se produit des gamètes qui se conjuguent deux à deux pour donner naissance à Toeuf; cet œuf germe en donnant de nouvelles zoospores; ces phénomènes se produisent non seulement dans le Polytoma uvella, mais aussi dans une espèce nouvelle : le Polytoma. spicata. La monographie de France, à laquelle nous faisions allusion au début de cet historique, contient avec les ob- servations personnelles de l'auteur un exposé bien com- plet et très exact de ce que nous savons actuellement de l'organisation et du développement des Polytomées ; un nouveau genre s'y trouve décrit sous le nom de Clilamy- dohlepharis. Ilnenousreste plus à signaler qu'une note très courte de Blochmann sur la division du noyau des Polytoma (4) ; contrairement à ce que l'on croyait, le noyau ne subit pas une division directe, il se multiplie par karyokinèse. Cette indication faisait prévoir qu'une étude histologique du Polytoyna uvella pourrait sans doute fournir des résultats nouveaux et intéressants. (1) Stein : Der Organismus der Infusorien , III , Flagellaten , 1878. (2) Butschli : Protozoa, 1883-1886. (3) Krassilstschik : Zur System, und Entw. von Polytoma {Zool. Anz. 1882). (4) Blochmann : Kleine Mittheilungen viber Protozoën {Biol. Central- blat, 1894). ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA. CELLULE 9 I r STRUCTURE DE LA CELLULE. he Polytomauvellgivit dans les milieux riches en ma- tières organiques ; on le rencontre seul ou en compagnie des Chlorogonium dans les citernes à purin, dans les ré- servoirs d'eau contenant des déjections et dans des infu- sions diverses. Pour en faire une étude complète, il est bon de suivre son développement en cellules humides et de conserver séparément des cultures en grand : ces dernières sont fixées aux diverses périodes du développement : sporula- tion, formation des gamètes, maturation des œufs. On perd toujours un grand nombre d'individus pendant les manipulations qu'exigent la coloration et le montage des objets ; d'un autre côté, pour suivre les divers stades de la karyokinèse, il faut souvent examiner des milliers d'individus ; il est donc nécessaire d'opérer la fixation sur des cultures vigoureuses. A) Le cyloplcLsme. Le cytoplasme du Polytoma uvella est incolore ; il ren- ferme une quantité plus ou moins grande de granules d'amidon, La présence de ces granules d'amidon donne au cyto- plasme l'aspect d'une structure alvéolaire au sens de Butschli ; mais ce n'est là qu'une apparence trompeuse, car si cette substance vient à disparaître, le cytoplasme redevient homogène ; l'absence de granulations amylacées au contact du noyau explique pourquoi on trouve là une zone plus ou moins étendue de cytoplasme, assez bien délimitée du reste de la cellule (fig. 1, A). Il peut se produire aussi dans le protoplasma une sorte 10 P.-A. DANGEARD de réticulum à mailles très fines résultant de la présence de trabécules de cytoplasme chromatique se ramifiant dans du cytoplasme incolore : c'est ce que nous avons déjà constaté à propos des Chlamydomonadinées (1). Blochmann, qui a étudié des préparations fixées au su- Fig. 1. — Structure des zoospores du Polytoma uvella. blimé et colorées au carmin aluné, parle de protoplasme finement granuleux au voisinage du noyau (2) ; cette diffé- rence dans nos deux descriptions s'explique aisément. Ce savant a employé comme réactif fixateur le sublimé qui donne avec un certain nombre de substances albumi- noïdes, telles que les albumoses, les peptones, l'acide nu- cléique, des précipités granuleux insolubles dans l'eau (3); (1) P.-A. Dangeai'd : Loc cit., p. 168. (2) Blochmann : Loc. cit. (3) A. Fischer : F'ixirung, Farbung und Bau des Protopl.ismas. léna, 1899. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 11 l'alcool absolu, dont nous nous sommes servi, coagule aussi ces substances, mais ne leur enlève pas la propriété d'être solubles dans Teau. En résumé, le cytoplasme de la celluUe est sensible- ment homogène; à partir d'une certaine distance du noyau, il se creuse d'alvéoles renfermant des grains d'amidon ; les trabécules limitant les alvéoles ont une épaisseur va- riable. Il n'existe pas en général de vacuoles ordinaires dans le protoplasme du Polytoma : Schneider est le premier au- teur qui en ait signalé; elles se trouvent, d'après lui, dispersées dans le corps, et elles ont une coloration rou- geâtre (1). France n'a observé que très rarement ces for- mations rquelques individus possèdent bien parfois une ou plusieurs vacuoles sphériques à la partie postérieure du corps ; mais il s'agit là d'un phénomène de dégénéres- cence, car ces vacuoles ne se produisent que chez des indi- vidus malades ou placés dans des conditions défavora- bles ; quant à la coloration rougeâtre que leur attribue Schneider, il s'agit là, selon France, d'une illusion d'op- tique due à l'emploi d'un vieux microscope (2). Les vacuoles contractiles sont au nombre de deux : elles sont situées un peu au-dessous de la base d'insertion des flagellums : leur grosseur atteint 1 /jl5 environ ; elles n'of- frent rien de particulier. Le point oculi forme se trouve au-dessous des vacuoles contractiles, ou à leur niveau ; sa présence n'est pas con- stante dans le Polytoma uvella : par contre, il n'est pas rare de rencontrer, ainsi que l'a signalé Stein, des indivi- dus qui possèdent un ou plusieurs corpuscules rougeâ- tres, soit à la partie antérieure, soit à la partie postérieure du corps. France a fait remarquer avec raison qu'il ne (1) Schneider; Loc. cit., p. 193. (i) France: Loc. cit., p. 313. 12 P. -A. DANGEARD faut pas les confondre avec le véritable point oculiforme qui est toujours unique, lorsqu'il existe ; les autres gra- nulations rougeâtres sont des produits de dégénéres- cence (1 . Perty avait désigné sous le nom de Polytoma ocellata toutes les formes chez lesquelles il avait trouvé un point oculiforme : les auteurs qui l'ont suivi n'ont pas adopté cette espèce. France la conserve cependant pour une forme chez laquelle le point oculiforme est situé exacte- ment entre les deux vacuoles contractiles ; un autre ca- ractère distinguerait cette espèce du Polytoma uvella, ; outre les deux vacuoles contractiles, on en trouverait ré- gulièrement une troisième dans leur voisinage chez le Polytoma ocpllata ; nous ignorons jusqu'à quel point cette distinction est fondée. Uamidon dans le Polytoma uvella forme des grains ar- rondis ou plus rarement ovales ; leur grosseur est exces- sivement variable : ainsi certains atteignent un diamètre de 3 y-, et même davantage, alors que d'autres ne dépas- sent pas 1 |jt,. La quantité d'amidon accumulée à l'inté- rieur du corps est en rapport avec la richesse du milieu nutritif ; ainsi, lorsque l'eau est chargée de matières or- ganiques, il arrive souvent que les grains d'amidon rem- plissent presque complètement la cellule ; il ne faut pas oublier, toutefois, que dans la même culture on trouve des différences considérables à ce point de vue entre les individus. L'iode et le chlorure de zinc iodé colorent ces granules en beau bleu ou en brun violet ; nous avons fait remar- quer, dans un travail précédent (2), que lacoloration passe au brun rougeâtre lorsque les individus attaquent leur (1) France : Loc. cit.^ p. 319. (2) P. -A. Dangeard : Recherches sur les algues inférieures, loc. cil., p. 140. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 13 réserve ; cette observation a été confirmée par France qui admet comme nous que la digestion de l'amidon est accom- pagnée d'une modification chimique qui explique ce chan- gement de réaction vis-à-vis de l'iode. La répartition des grains d'amidon au sein du proto- plasma n'a rien de fixe ; le plus souvent, ils sont localisés à la partie postérieure du corps ; mais on peut tout aussi bien en trouver à l'avant et sur les côtes (fig. 1, A, F) cependant, un examen attentif permet de reconnaître que le dépôt de cette substance a lieu principalement dans la portion périphérique de la cellule ; on constate que pres- que toujours le cytoplasme qui entoure le noyau en est dépourvu ; il existe tout autour de l'élément nucléaire une zone irrégulière de cytoplasme homogène, assez chro- matique. En comparant cette disposition à la structure d'une Chlamydomonadinée, on a l'impression que le chro- matophore a pris naissance dans cette portion périphé- rique du Polytoma où se dépose l'amidon; la zone entou- rant le noyau représente le cytoplasme non différenciéd'un ChlcLinydomonas ou d'un Chlorogonium. Dans cette inter- prétation, non seulement l'amidon a précédé l'apparition du chromatophore, mais l'apparition de la chlorophylle et la formation du leucite sont liées à l'existence de cet amidon. Il faudrait alors comprendre autrement le problème de la fonction chlorophyllienne : si les champignons et les animaux ne possèdent pas de chlorophylle, c'est peut-être parce que leurs ancêtres et eux-mêmes n'ont pas réussi à fabriquer normalement, comme le Pohjtoma.^ de l'amidon dans leurs tissus ; dans cette hypothèse, la chlorophylle serait à la fois effet et cause ; pour se développer, elle exi- gerait d'abord la présence d'amidon, et ensuite elle devien- drait apte à remplir son rôle dans la nutrition holophy- tique. Une observation de Schneider, sielleétait vérifiée, vien- 14 P.-A. DANGEARD drait à l'appui de cette manière de voir ; ce savant aurait vu lesgrains amylacés du Polytoina, donner naissance à un pig- ment bleu indigo qui colorait ensuite le protoplasme ; mais l'alfirmation que « die amylumkornchen konnen in einen blauen oder grûnen Farbstoff ubergehen (1) » doit être accueillie avec réserve, parce qu'une confusion avec un Chlamydomonas quelconque mélangé aux cultures n'est pas impossible. Il est absolument certain que l'amidon dans le Poly- toma uvella est formé sans l'intermédiaire de leucites : les granules se déposent directement dans le protoplasme ; les mailles des alvéoles renfermant l'amidon sont homo- gènes, et leur substance paraît moins chromatique que le cytoplasme entourant le noyau. Diverses inclusions, en dehors de l'amidon, ont été signalées à l'intérieur de la cellule. Schneider a vu que chez les individus en dégénérescence, la substance du corps prend un aspect sombre, oléagi- neux (2). France a même observé chez des individus bien portants la présence de globules huileux ; ils sont situés à la partie postérieure de la cellule (3) ; ils ressemblent à ceux que Stein a décrits chez V Atractonema, teres et le Sphenomonas quadrangularis ; à notre avis, il est impos- sible de considérer ces corps comme des productions normales. On désigne sous le nom d'« excret kornchen », des gra- nules qui sont dispersés au milieu des grains d'amidon ; ce sont surtout les individus âgés qui en renferment une assez grande quantité ; leur réfringence et leur couleur sombre les rendent difficiles à distinguer de l'amidon ; ainsi que leur nom l'indique, ils représentent un produit de sécrétion. {{) Schneider : Loc. cit., p. 204. (2) Schneider: Loc. cit., p. 194. (3) France: Loc. cit., p. 320. ETUDE SUR LA STLCTURE DE LA CELLULE 15 B) Le noyau. Le noyau du Polytoma a été indiqué pour la première fois par Cohn en ces termes : « Le noyau n'est pas nette- ment visible sur le vivant : mais si l'on fait agir l'alcool, on voit au milieu du corps une tache claire au milieu de la- quelle existe un nucléole : el!e représente probablement un noyau (1). Cet élément a été vu par tous ceux qui ont étudié de- puis à nouveau cette espèce. France en particulier a reconnu les différentes positions qu'il peut occuper (2); or- dinairement il est situé au milieu du corps ; mais parfois, il est placé à la partie antérieure de la cellule ou latérale- ment; nous donnerons l'explication de ces modifications lorsque nous nous occuperons de la karyokinèse. La grosseur du noyau est de 2 à 3 (ji : elle atteindrait jusqu'à 6 iJ- dans certains kystes, selon France. La structure de l'élément nucléaire, d'après le même auteur, est la suivante; il appartient au type vésiculaire et possède un gros nucléole entouré par une zone de suc nucléaire ; cette zone est limitée elle-même par une membrane. Cette description est exacte si l'on remplace l'expression de suc nucléaire par celle de nucléo- plasme : la substance qui entoure le nucléole est en effet constituée pap un plasma assez compact, ho- mogène et achromatique. En ce qui concerne le nucléole, France a commis une erreur bien excusable ; il pense que le nucléole renferme plusieurs disques chromatiques se touchant les uns les autres et disposés en spirale (3). En réalité, le nucléole du noyau à l'état de repos est homogène (fig.l. A, F); l'aspect décrit par France {i) Cohn : Loc. cit^ p. 135. (2) France : Loc. cit., p. 322. (3) France : Loc. cit., p. 323. 16 P. -A. DANGEARD n'est autre chose qu'un stade de karyokinèse avec une plaque équatoriale vue de face ; les disques qu'il signale sont donc des chromosomes; nous ne voyons pas que sa description soit susceptible d'une autre explication. C) Les flagellums. Les zoospores du Polytoma. uvella possèdent normale- ment deux flagellums : il existe cependant une variété de cette espèce qui ne possède qu'un flagellum v. unifilis (Perty) ; leur longueur est égale à celle du corps ou la dé- passe parfois sensiblement. L'insertion des flagellums se fait parfois à droite et à gauche d'une petite papille qui rappelle celle que l'on observe dans le Chlainydomonas ua?'ia6i7isDang.; mais, le plus souvent, ils partent directement de la partie anté- rieure amincie de la cellule ; les divers aspects qui peu- vent se présenter ont été figurés avec soin par France ; ainsi, les flagellums se détachent en général du corps au même point, cependant ils sont quelquefois séparés par un assez large intervalle ; on peut trouver alors une sorte de petit fourreau à la base de chaque flagellum. Nous avons reconnu que ces diverses dispositions n'ont qu'une importance relative : les deux flagellums, dans tous les cas, viennent s'insérer sur un nodule plus colo- rable qui se continue lui-même par un mince filet de cyto- plasme dirigé suivant l'axe de la cellule (fig. 1). Ce nodule d'insertion ou blépharoplaste est placé au contact de la surface; c'est un renflement de l'ectoplasme; comme il est plus ou moins large, les flagellums semblent partir du même point ou de points différents; cette dernière appa- rence est encore plus accentuée lorsque le nodule d'in- sertion se trouve surmonté d'une papille. Ce nodule est difficilement colorable, c'est pour cette raison qu'il a échappé jusqu'ici aux investigations : on ne ÉTUDE SUIl LA STRUCTURE DE LA CELLULE 17 saurait le confondre, en effet, avec « eine kleine Partie feinkornigen Protoplasmas » que France a cru remarquer à la base des flagellums dans certains sporanges (1) : sa substance est dense, homogène ; il est identique à celui que nous avons découvert dans le Chorogonium euchlorum. Cette formation n'existe pas seulement dans les individus ordinaires : on la retrouve chez les gamètes au moment de la conjugaison; nous aurons à nous occuper assez lon- guement, aux « considérations générales », de son rôle et de son importance. La structure des flagellums est homogène ; la consis- tance de leur protoplasme se rapproche de l'état solide chez les individus ordinaires ; mais cette substance chez les jeunes zoospores, encore enfermées dans le spo- range, est plus molle^ car France a vu nettement à ce moment des mouvements ondulatoires des flagellums. On ne sait pas encore, d'une manière précise, comment se comportent les flagellums au moment où les cellules passent à l'état de repos : sont-ils simplement abandon- nés dans le milieu extérieur, ou bien font-ils retour au cytoplasme ? Cette dernière hypothèse est laplus probable. Il est certain que chez quelques individus les deux flagel- lums sont remplacés par deux vésicules placées à la partie antérieure du corps ; mais ce n'est peut-être là qu'une modification pathologique semblable à celle qui a été signalée par Seligo chez plusieurs Flagellés (2j. Le Polytoma uvella dans les cultures se fixe assez fré- quemment par sa partie antérieure : Schneider pensait qu'un organe d'adhésion se trouvait placé entre les flagel- lums. Dallingcr et Drysdale, puis Savilel-Kent ont décrit à la base des flagellums un renflement sphérique, qui, selon eux, sert de pelote d'adhésion : nous avons déjà autrefois (1) France: Loc. cit., p. 330. (2) Seligo : Untersuchungen ùber Flagellateu {Cohn'sBeitràge z. Biol. d. Pflanzen. Bd. IV, p. 175). 2 18 P.-A. DANGEARD nié formellement l'existence de ce renflement et son rôle (1). France, tout en admettant que les flagellums peu- vent être plus gros à leur base qu'à leur sommet, recon- naît qu'il n'existe pas de renflement basilaire : quant au rôle qu'on attribuait à ce prétendu organe, il ne saurait exister, puisque les Pohjtoma se fixent sur le substratum par l'extrémité de leurs flagellums. Dans nos observations sur les Chlamydomonadinces, nous avons déjà attiré l'attention sur l'existence d'un mince filet chromatique qui, partant du blépharoplaste, se dirige dans la direction du noyau : cette disposition se rencontre également dans le Polytoma. Nous avons pu constater que cet organe se met, au moins dans certains cas, en relation directe avec le noyau (fig. t, B, C) ; ainsi, nous avons vu le filet chromatique ou rhizoplaste se ter- miner sur la membrane nucléaire par un petit renflement chromatique ou condyle analogue au blépharoplaste ; malheureusement cette disposition n'est visible que rarement, et rien ne prouve jusqu'ici qu'elle soit cons- tante ; il est néanmoins certain que l'appareil locomo- teur est en communications avec le noyau. D) La membrane. On trouve tous les intermédiaires entre une simple pel- licule sans structure appréciable et une véritable mem- brane. Cette enveloppe se distingue difficilement lorsqu'elle est appliquée directement sur le cytoplasme en tous ses points ; par contre, on la voit nettement au moment de la sporulation ou encore lorsque le corps de la zoospore ne remplit pas complètement la cellule. Elle est exten- sible, puisqu'elle suit l'accroissement dii corps qui précède la division dans le sporange. (i) P.-A. Dangeard : Loc. ci/., p. 1 13 ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 19 Cohn n'a pas réussi à déceler la présence de la cellu- lose dans cette membrane (1) ; nos essais ont été aussi infructueux. France, au cours de ses nombreuses recher- ches, a fait les constatations suivantes: leciilorure de zinc iodé ne réagit pas, alors que l'acide acétique et la potasse dissolvent la membrane ; celle-ci se colore faiblement en bleu par l'hématoxyline ; il s'est produit dans un cas un faible bleuissement par le chlorure de zn iodé, et la pelli- cule est sensible à l'action de la fuchsine (2). A . Schneider a vu que la membrane, dans certaines con- ditions, se fragmente en granules, et qu'en section trans- versale elle offre l'aspec! d'un collier de perles (3). France suppose que l'apparence en question est due pour une part à la présence de Bactéries qui existent toujours dans les cultures de Po^î/foîna et qui s'accumulent parfois au- tour des individus (4) ; cela n'exclut pas cependant la pos- sibilité d'une structure propre, puisqu'on a déjà signalé quelque chose d'analogue chez les Eugléniens et chez de nombreuses Chlorophycées. Nos propres observations nous permettent d'afïirmer que la membrane du Polytoma présente souvent une or- nementation définie : dans certaines de nos cultures, pres- que tous les individus possédaient cette structure. La membrane, quoique restant mince, se montre formée par des éléments sphériques excessivement petits, serrés les uns contre les autres : il n'en existe qu'une seule couche; la coloration générale est brune ; ces éléments sont inclus dans une substance amorphe qui leur sert de ciment ; la paroi semble ainsi couverte d'une quantité innombrable de petites protubérances arrondies, probablement orien- tées en spirale. (I) Cohn : Loc.cit., p. 314. (",') France : Loc. cit., p. 307. (3) Schneider : Loc. cit., p. t9'2. (4) France : Loc. cit., p. 307. 20 P. -A. DANGEARD Ces granulations n'ont aucun rapport avec celles qui ont été dessinées par France et parStein(l) ; elles sont beaucoup plus petites et plus nombreuses ; elles sont disposées régulièrement en une assise unique ; on peut comparer cotte ornementation a celle qui existe chez beaucoup d'Euglènes. Les individus dont la membrane présente cette struc- ture ne diffèrent en rien des autres dans leur développe- ment : on en trouve à tous les stades de la vie végétative et delà reproduction. II LA REPRODUCTION ASEXUELLE. Tandis que la plupart des Flagellés se multiplient par simple division longitudinale, le Polytoma uvella se repro- duit par sporanges ; à un moment donné, chaque individu produit à son intérieur deux, quatre ou huit zoospores qui ne tardent pas à sortir de l'enveloppe commune pour vivre en liberté. La formation de ces zoospores a été suivie avec soin par tous les auteurs qui ont étudié le Polytoma, en parti- culier par Schneider, Stein, Krassilstschik, Butschli, France ; il restait cependant à déterminer exactement la façon dont se comporte le noyau pendant les divisions successives. Nous ne possédons, en fait de renseignements à ce sujet, qu'une très courte notedeBlochmann qui a reconnu sur les préparations d'un de ses élèves la division karyokiné- tique du noyau ; ce savant s'exprime de la façon sui- vante : « Die beistehenden Figuren zeigen dies (karyo- kinèse) ohne weitere Erklarung Genaueres lasst sich an deri in nicht geeigneter Weise behandelten Praparaten (1) stein: Loc. cit., PL XIV, fig. 13. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 21 doch nicht feststollen. Bemerken will ich, dass die spin- del sich oft von dem umgebenden feinkornigen Plasma sehr scharf, von durch eiiien hellen Zwischenraum getrennt abhebt. Wahrscheinlich bleibt auch hier wie bei Fig 2. — La formation du sporange. den Kernenvon Euglypha, Actinosphœrium, der Opalinen und der Mikronuclei der ûbrigen Infusorien die Kern- membran wahrend der garize Theilung erhalten, Ferner scheint mir noch der Erwahnung wert, was ûbrigens auch aus den Figuren ohiie weiteres ersichthch ist, dass das feinkornige von Starke freie Plasma stets da in grosse- rer Menge sich ansammeit, wo die Trennende Furche 22 P. -A. DANGEARD beginnt, so dass derProzess eine gewisse Aehnlichkeit mitder inequaîten Furchung eines Eies erhalt (1). » Il était nécessaire de reprendre ces observations et de les compléter; nous avons dans ce but examiné un très grand nombre de sporanges à tous les états. L'individu qui va se transformer en sporange com- mence par subir un accroissement de volume: son noyau, qui était central, se porte à la partie antérieure du corps et se place latéralement {fig. 2, A) ; il continue d'être en- touré par un protoplasma homogène ; c'est alors que se forme le premier fuseau de cloisonnement. La position de ce fuseau est bien particulière : l'un des pôles se trouve au voisinage du point d'insertion des fla- gellums, et l'autre pôle vienttoucher la paroi du corps en son milieu (fig. 2, B, C, D) ; ce fuseau est ainsi placé obliquement par rapport à l'axe longitudinal delà cellule. La plaque équatoriale renferme un petit nombre de chro- mosomes : ils sont réduits à l'état de granulations chro- matiques ; on ne peut essayer de les compter que sur une plaque équatoriale vue de face; nous en avons distingué tantôt quatre, tantôt six ; ce dernier chiffre nous semble devoir être choisi de préférence et nous attribuons au noyau du Pohjtoma six chromosomes. L'origine de ces chromosomes n'a pu être déterminée avec certitude : nous ignorons s'ils proviennent directe- ment du nucléole comme chez ÏAmœba hyalina (2), la Vampyrella vorax (3), les Actinosphairium (d'après R. Hertwig), etc., ou bien s'ils apparaissent dans le nucléo- plasme. Le fuseau est formé par le nucléoplasme du noyau ; il (1) Bloohmann : Loc. cit. (•2) P.-A. Dangeard : Etude de la kai-yokinèse chez l'Amœba hyalina (Le Botaniste, 7^ série, février 1900). (3) P.-A. Dangeard : Etude de la icaryokinèse chez la Vampyrella vorax {Le Botaniste, 7« série, mai 1900). ETUDE SUR LA. STRUCTURE DE La CELLULE 23 est dense, homogène, avec quelques stries difficiles à apercevoir; sa substance est légèrement chromatique au même titre que le cytoplasme entourant le noyau ; ce fuseau est contenu dans la cavité nucléaire distendue ; un espace incolore plus ou moins bien déterminé le sépare de la mem- brane nucléaire, et par conséquent du cytoplasme. Les pôles s'amincissent en pointe fine qui s'appliquent sur la membrane même de la cellule ; ce mode de terminai- son des pôles implique nécessairement l'absence de cen- trosome ; on ne voit d'ailleurs rien qui puisse rappeler même de loin l'existence de sphères attractives ; il n'existe aux pôles ni granulations, ni radiations d'aucune sorte. La phase tonnelet (fig. 2, E, F) n'offre rien de particu- lier ; les deux noyaux frères se reconstituent à chaque extrémité du fuseau ; dans chacun d'eux, les chromosomes contractent des adhérences et forment une masse chroma- tique qui atout d'abordun aspect spongieux; le cytoplasme qui les sépare est dépourvu de granulations (fig. 2, G). On a décrit la première- division du sporange comme étant tantôt transversale, tantôt longitudinale. Butschli a fait remarquer qu'il s'agit toujours d'une division lon- gitudinale, et il exprime ainsi son opinion : « In Bezug auf die Sprosslinge selbst scheinen nach Stein's Abbil- dungen die Furchungs ebenen quer orientirt zu sein. Dies hangt damit zusammen, dass schon vor der ersten Quertheilung sich eine Art volliger Verlagerung der Regionen des Polytoma-Korpers zu vollziehen scheint. Dabei wird namlich die Seite des Korpers, wo die Eins- chnûrung zuerst beginnt, zur Vorderregion der beiden Sprosslinge, so dass also im Hinblick auf die Regionen der letzteren die Theilungsebene eigentlich eine Langse- bene darstellt wodurch also ein gewisser Anschluss an die gewohliche Langstheilung der ïibrigen Chlamy domo- naden vermittelt wird (1). » (I) Butschli : Loc. cit., p. 756. 24 P. -A. DANGEARD Si nous consultons la fig. 16, PI. XIV de Stein, nous voyons, en effet, le début de l'échancrure se produire non loin de la partie antérieure et en direction oblique ; nous retrouvons cette disposition dans la note de Blochmann; l'échancrure est d'abord perpendiculaire au fuseau ; elle se trouve reportée finalement au milieu du corps. Il nous a été impossible de rencontrer cet aspect sur nos préparations fixées et colorées ; son caractère général nous paraît discutable. Voici, selon nous, comment les choses se passent, au moins dans la plupart des cas ; les deux noyaux ne con- servent pas longtemps l'orientation primitive qu'ils devaient au fuseau ; ils se déplacent, accompagnés par le protoplasme de choix qui les entoure, et se portent laté- ralement l'un au-dessus, l'autre au-dessous du plan trans- versal médian du corps (fig. 2, G, H, I) ; ils conservent d'abord entre eux la distance qui les séparait, puis ils se rapprochent ; leur structure s'est modifiée ; ils ont l'as- pect d'une sphère chromatique dense dans laquelle on ne distingue à ce moment aucune différenciation en nucléo- plasme et nucléole ; lacloison de séparation s'établit alors entre les deux noyaux qui étaient arrivés presque au contact. Nous avons vu très fréquemment les deux noyaux occu- per cette dernière position, alors qu'aucune trace de séparation n'était encore visible : ces noyaux assez sou- vent avaient même repris leur structure normale, et l'on voyait à leur intérieur le nucléole de moyenne grosseur et la zone de nucléoplasme qui l'entoure {(\g. 2, K, M) ; nous pensons donc que la cloison de séparation est net- tement transversale dès le début, au moins dans la plu- part des cas. Cela n'infirme nullement d'ailleurs l'idée de Butschli. Les cloisons se forment ordinairement dans le plan per- pendiculaire au fuseau ; or, si les choses se passaient ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 25 ainsi dans le Polytoma, le plan de séparation des deux moi- tiés serait oblique par rapport à l'axe du corps ; il suffirait donc d'un léger déplacement de la partie antérieure pour que la première division puisse être considérée comme longitudinale. Nous venons de voir comment les noyaux se déplacent accompagnés du protoplasma de choix : ce dernier renferme les éléments qui détermineront pour chacune des nouvelles cellules la partie antérieure du corps ; il est donc probable, sinon certain, que ces éléments proviennent par division des éléments de même nature qui caractérisaient l'avant de la cellule-mère; ces derniers ont subi, comme les noyaux, un déplacement ; peu im- porte alors l'endroit où commence l'échancrure. On se trouve ainsi en présence de deux hypothèses : \o Dans toute cellule polarisée, les divisions, quelle que soit leur direction apparente, sont toujours en réalité des divi- sions longitudinales séparant la cellule en deux moitiés sy- métriques. Ou bien les nouvelles cellules sont susceptibles de se polariser à. nouveau, soit sous Vinfliience du noya,u, soit par suite d'une différenciation de leur cytoplasme, et alors il est inutile que la division sépare des moitiés symétriques. Nous penchons pour la première hypothèse qui n'exige qu'un simple déplacement du cytoplasme dans le cas de cloisons obliques ou perpendiculaires à l'axe longitudinal. La ligne de séparation est tout d'abord peu marquée chez le Pobjtoma ; une échancrure se produit qui gagne toute l'épaisseur et forme alors une plaque incolore, sépa- rant les deux moitiés. Si le sporange est destiné à ne fournir que deux zoos- pores, les deux moitiés prennent la forme ovale ; leurs extrémités s'orientent en sens inverse; à la partie anté- rieure de chacune poussent deux flagellums ; il ne reste plus aux zoospores qu'à sortir du sporange (fig. 2, L, O). Fréquemment, les sporanges donnent naissance à quatre zoospores; chacun des noyaux subit alors une seconde 26 P. -A. DANGEARD bipartition; elle a lieu comme la première par karyoki- nese. La direction des fuseaux n'a plus rien de fixe : il suffit pour s'en convaincre de consulter la fig. 3, A, E ; ou voit Fig. 3. — La sporulation chez le Polytoma uvella. que si certains de ces fuseaux ont une tendance à s'orien- ter dans le sens de la plus grande largeur disponible, beaucoup d'autres ne présentent pas cette disposition ; on en rencontre même qui se placent perpendiculairement à l'axe du sporange; cette orientation est peut-être cepen- dant soumise à l'influence du cytoplasme. Nous savons, ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 27 en effet, que chaque noyau est entouré d'une zone irré- gulière de cytoplasme homogène ; tout autour de ce dernier se trouve du cytoplasme alvéolaire renfermant de l'ami- don ; ce dernier doit offrir une certaine résistance à l'ex- tension du fuseau, et comme sa dispersion est irrégulière, il serait assez naturel de penser que l'axe du fuseau est en définitive dirigé dans le sens de la moindre résistance. Les fuseaux vont s'appliquer par leurs pôles à la sur- face interne de la membrane du sporange ; l'adhérence qu'ils y contractent doit être assez forte, puisque dans l'une de nos observations nous avons vu, après retrait du cytoplasme, sous l'action du réactif fixateur, le pôle d'un fuseau achromatique maintenir son contact avec la mem- brane (fig. 3, A). Si l'espace disponible est insuffisant à l'extension com- plète du fuseau, celui-ci se bombe en son milieu. Les divers stades delà karyokinèse ont été rencontrés ; mais ils ne nous apprennent rien de plus que ceux de la première division. Le cloisonnement ne suit pas une mar- che absolument parallèle à celle de la division des noyaux ; nous avons rencontré des sporanges renfermant deux noyaux à Tanaphase, et cependant il n'existait encore aucune trace deséparatien en cellules (fig. 3, F); d'autres qui contenaient quatre noyaux au stade de repos ne montraient encore qu'une trace à peine perceptible delà première division transversale (fig. 3, 0) ; plus souvent, cependant, cette division est déjà visible au moment où les deux noyaux entrent en karyokinèse (fig. 3, A, B, C). Au moment où s'organisent les quatre zoospores, les noyaux se rapprochent par paires ; entre chaque paire, il se produit une séparation comme dans les sporanges à deux zoospores ; les aspects différents que l'on observe dans la direction du cloisonnement sont le résultat de l'orientation variable des fuseaux (fig. 3, F, G, H, I, J). France admet que cette seconde division peut ne pas se 2S P -A. DANGEARD produire en même temps poui les deux moitiés du spo- range ; il représente (fig. 7, PI. XVI) un sporange dans lequel la moitié supérieure a terminé sa division, alors que la moitié inférieure est indivise ; nous pensons qu'il y a là probablement une erreur due au fait que si une cloison se produit parallèlement au plan d'observation, elle se trouve masquée : cette disposition assez fréquente se trouve indiquée (fig. 3, G). ' Nous ferons une remarque analogue en ce qui concerne une autre observation du même auteur ; il est intéressant, dit-il, de constater que le second cloisonnement n'est pas toujours perpendiculaire sur le premier (!); il fait un angle aigu avec lui d'un côté et divise l'une des moitiés en deux parties inégales. Cette inégalité des deux cellules- filles n'est qu'apparente : le plan de séparation dans ce cas n'est pas lui-même perpendiculaire au plan même d'observation (fig, 3, F, G). Les intervalles de séparation des zoospores devien- nent assez larges ; ils sont remplis par une substance in- colore, peut-être de nature gélatineuse ; une simple inter- calation d'eau entre les cellules expliquerait difficile- ment, il semble, l'orientation définie et l'épaisseur constante que présentent ces cloisons jusqu'au moment où les zoospores prennent leur forme définitive. Les quatre cellules du sporange prennent finalement la forme des zoospores : on observe alors deux disposi- tions principales : dans chaque couple, les deux zoos- pores sont orientées en sens inverse suivant l'axe même du sporange (fig. 3, N) ; ou bien, elles sont disposées parallèlement les unes sur les autres en faisant un angle aigu avec Taxe du sporange (fig. 3, M). Ces zoospores ont fréquemment Itur extrémité anté- rieure amincie en pointe ou en papille ; elles possèdent (1) France : Loc. cit., p. 328. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 29 des flagellums, et, avec un peu d'attention, on reconnaît le nodule d'insertion dont nous avons parlé précédemment ; on distingue parfois aussi le point oculiforme. On trouve quelquefois des sporanges à huit zoospores : mais ce fait se produit assez rarement : ils atteignent alors un diamètre de 15 à 17 |jt : la disposition des zoospores est variable ; la troisième bipartition apporte, en effet, une nouvelle complication aux différents modes de cloisonne- ments signalés dans les sporanges ordinaires. Le sporange reste mobile pendant la durée de la spo- rulation ; les flagellums disparaissent plus ou moins long- temps avant la sortie des zoospores ; ils peuvent même persister sur l'enveloppe vide abandonnée par les zoos- pores. Butschli et Stein cherchent à expliquer le mouvement de la celiule-mère pendant la sporulation, en admettant que les deux flagellums restent en contact avec l'une des zoospores. France affirme que dans de nombreux cas» aussi bien dans les sporanges à quatre zoospores que dans ceux qui en renferment huit, il a pu mettre hors de doute l'absence de toute relation entre les flagellums et le protoplasma des zoospores ; par contre, cet auteur aurait constaté la présence, sous la papille, d'un petit amas de protoplasma : ce dernier a peut-être pour rôle d'assurer le mouvement des flagellums (1). L'appareil locomoteur, suivant notre description, se compose des deux flagellums, du nodule d'insertion et d'un prolongement mince qui s'étend dans le cytoplasme ; il est assez naturel de supposer que la substance chromati- que du nodule sufïit pour assurer le mouvement des fla- gellums pendant un certain temps, en l'absence du pro- longement protoplasmique. (1) France; Loc. cit., p. 330. 30 P -A. DANGEARD III LA REPRODUCTION SEXUELLE. Dallinger et Drysdale ont les premiers signalé dans le genre Polytoma, une conjugaison de deux individus ; mais Ils ont en môme temps donné une description inexacte de la germination des zygotes, ce qui a jeté un certain dis- crédit sur leurs observations (1). Krassilstschik a au con- traire suivi avec beaucoup de soin la fusion des gamètes etla germination de l'œuf. Selon cet auteur, les gamètes sont toujours formés au nombre de quatre dans la cellule- mère (2). France assure que la copulation se produit tout aussi bien entre les individus qui proviennent d'une cel- lule-mère à huit zoospores. Il existe encore d'autres diver- gences, au sujet des gamètes ; ainsi Krassilstschik a vu que la conjugaison pouvait avoir lieu entre gamètes de taille différente, tandis que France n'a jamais rencontré que des gamètes d'une seule sorte. Il nous est impossible de dire s'il existe des gamétan- ges à huit zoospores ; dans nos cultures, les gamètes étaient formés par quatre dans la cellule-mère ; mais nous pouvons du moins affirmer que la conjugaisoa a lieu très souvent entre individus de taille inégale (fig. 4, E, F). La distinction entre les sporanges et les gamétanges est difficile à faire: nous serions assez disposé cependant, d'après ce que nous savons par ailleurs, à admettre que les cellules-mères dont les noyaux subissent une double bipartition avant tout cloisonnement sont des gamétan- ges ; ici comme chez le Chlorogonium euchlorum la forma- tion des gamètes serait simultanée. Les gamètes ne présentent aucune différence sensible avec les individus asexués ; le noyau est central ou plus (!) Dallinger et Drysdale : Loc. cit. (■-') Krassilstschik ; Loc. cit., p. 427. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 31 rarement postérieur (fig. 4, J) ; le nodule d'insertion des fiagellums se voit nettement ; il est plus difficile d'aperce- voir le rhizoplaste. lia conjugaison, selon France, se produit à toutes les heures de la journée. Les gamètes s'unissent par leur partie antérieure : ils Fig. 4. — La conjugaison des gamètes. sont d'abord opposés l'un à l'autre ; nous avons cru voir les deux nodules d'insertion réunis à ce moment par un tractus incolore (fig. 4, E, F) ; on trouve aussi des gamètes placés côte à côte (fig. 4, A, B, C) et qui se fusionnent à leur partie antérieure. Cette fusion devient complète ; les noyaux se rapprochent au contact et s'unissent en un seul (fig. 4, H, 1), ainsi que l'a constaté pour la première fois Krassilstschik. L'œuf ainsi formé s'arrondit et se recouvre d'une membrane incolore et lisse (fig. 4, 1) ; à son intérieur s'accumule l'amidon ; la fusion des noyaux est parfois assez tardive ; le noyau unique occupe le centre de la sphère ; il est entouré directement par du 32 P. -A. DANGEARD protoplasme ordinaire autour duquel se trouve le proto- plasme alvéolaire contenant de gros grains d'amidon ; les flagellums ont disparu à un stade avancé de la con- jugaison, faisant retour au cytoplasme général : quant aux deux blépharoplastes, il nous a été impossible de savoir ce qu'ils deviennent ; certains aspects semblent indiquer une fusion de ces doux éléments (fig. 4, C). Lagrosseur des œufs est de 10 à 12 [i. Nous avons rencontré des formations ayant l'apparence de kystes à deux noyaux (fig. 4, G) ; il est probable que ce sont des zygotes chez lesquels la fusion des noyaux s'est trouvée retardée ou empêchée par une causeinconnue. La germination des œufs a été observée par Krassilsts- chik et par France ; les zygotes donnent naissance à deux ou plus souvent à quatre zoospores. Nous ne parlerons pas ici de l'enkystement, qui a été étudié par un grand nombre d'observateurs : il nous suffira de dire qut; les kystes ont une structure semblable à celle des œufs : leur germination se fait également de la même façon ; l'origine seule est différente. Tandis que les œufs proviennent de la conjugaison de deux gamètes, les kystes sont des individus ordinaires qui s'arrondissent et passent à l'état de repos, lorsque les conditions de milieu deviennent défavorables. CONSIDERATIONS GENERALES LES BLEPHAROPLASTES ET LES ELEMENTS QUI EN DEPENDENT Le nom de « blépharoplastes » a été donné par Weber à des corpuscules chromatiques qui prennent part à la formation des cils vibratiles dans les Gymnospermes. ÉTUDE SUH r^A STRUCTURE DE LA CELLULE 33 Ces corpuscules ont été découverts tout d'abord par Hirase dans la spermatogénèse des Ginkgo (1); Weber les rencontra ensuite dans le boyau pollinique du Zamia in- tegrifolia (2). Ikeno les a étudiés avec soin dans le Cycas revoluta (3). Tandis que Weber considère les blépharo- plastes comme des éléments d'une nature particulière (4), Hirase (5) et Ikeno (6) les assimilent à des centro- somes : ces deux derniers auteurs reconnaissent toute- fois qu'ils diffèrent en quelques points des centrosomes ordinaires. Des corpuscules semblables ou « nebenkern » ont été vus par Belajeff dans les cellules spermatogènes des Characées (1892), desFilicinéeset des Equisetacées (1895) ; ce savant laissa indécise le question de savoir s'ils repré- sentaient des centrosomes. Depuis, Shaw a étudié ces mêmes corps dans le développement des spermatozoïdes des Marsilia et des Onoclea : il se prononce nettement contre leur assimilation avec des centrosomes (7). Bela- jeff, poursuivant ses premières recherches, a étudié récem- ment les Marsilia et les Gymnogramme ; sa conclusion est que les blépharoplastes sont bien réellement des cen- (1) Hirase ; Notes on the attractions sphères in the Pollen cells of Ginkgo biloba {Bot. Magasin Tokyo, v. VIII, 1894, p. 359). — Etudes sur la fécondation et l'embryogénie du Ginkgo biloba [Journal of the Collège of science. Imp. Un. Tokyo, v. VIII, 1895). (2) Weber : Peculiar Structures occurring in the Pollen Tube of Za- mia {Bot. Gaz. v. XXIII, 1896, 1897, p. 453). (3) Ikeno : Unters. iiber die Entw. derGeschl. und den Vorgang der Befr. bei Cycas revoluta (Jahrb. f, viss.Bot., Bd. XXXII, 1898). (4) Weber : The develop. of the Antherozoids of Zamia et notes on the Fecundation of Zamia {Bot. Gazette, v. XXIV, 1897-1898, p. 16 et p. 2'25). (5) Hirase : Etudes sur la fécondation, Zoc. cit. (6) Ikeno : Zur Kenntniss des sog. centrosomàhniichen Kôrpers im Pollenschl.derCycadeen(F/ora, 1898. Bd.LXXXV, et Jahrb. f. wiss. Bot. Bd. XXXII). (7) Shaw: Ueberdie Blepharoplastenbei Onoclea und Marsilia [Berich. d. Dent. bot.Gesellsch., 1898, p. 177). 3 34 P -A. DANGEARD trosomes ; il en donne comme preuve la relation qui s'établit entre eux et le fuseau achromatique (1). Pour aider à la solution du problème qui intéresse à la fois la spermatogénèse des animaux et des végétaux, il est utile de se reporter à la constitution de l'appareil locomoteur des zoospores chez les organismes inférieurs, Nous avons démontré que dans les Chlamydomona- dinées (2) cet appareil comprend les flagellums,un nodule d'insertion, et un filet de protoplasma chromatique que l'on peut quelquefois suivre jusqu'au voisinage du noyau. Le nodule d'insertion, qui est nettement visible chez le Chlorogonium, correspond aux blépharoplastes des anthérozoïdes; or, ^ rien ne permet de le considérer comme un centrosome : il y a même contre cette assimi- lation des raisons qui semblent convaincantes. En effet, en attribuant à ce nodule la signification de centrosome dans le Chlorogoniuvi , il faudrait admettre que ces corpuscules deviennent plus visibles après la division du noyau, ce qui est contraire à tous les précédents ; de plus, ce serait un centrosome sacrifié, puisqu'il est abandonné avec la membrane vide du sporange, lors de la sortie des cellules-filles ; il serait nécessaire, d'autre part, qu'il y eût, dans la cellule-mère, d'autres centrosomes pour présider aux divisions nucléaires (3). » Strasburger se prononce également contre l'assimila- tion des blépharoplastes avec les centrosomes (4) ; chez les Vaucheria, les Œdogonium, les Cladophora, on trouve au point d'insertion des flagellums un petit nodule chro- matique, semblable à celui du Chlorogonium ; ce nodule fait partie de l'ectoplasme. Strasburger fait remarquer (1) Belajeff : Ueber die Centrosome in den spermatog. Zellen {Berich. d.Deut. bot. Gesellsch. Bd. XVII, 1899). (?) F. -A. Dangeard : Loc. cit. (3) P.-A. Dangeard : Loc. cit., p. 180. — (4) btrasburger : Ueber Reduktionsth., p. 185. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 35 avec raison que dans ÏŒclogonium, où le nombre des cils est de 100 à 120, si on voulait assimiler les nodules aux centrosomes, on se touverait dans l'alternative de consi- dérer chaque nodule comme un centrosome, ce qui porte- rait le nombre de ces éléments à un total trop élevé pour une seule cellule : si on voulait au contraire appliquer la même appellation à Tensemble des nodules, il faudrait admettre Texistence d'un centrosome annulaire, d'une grande dimension, alors qu'on n'a rien vu de semblable dans la karyokinèse chez cette algue (1). Selon Stras- burger il est probable que les blépharoplastes, qui chez les algues font partie de l'ectoplasme, se sont ensuite formés directement à l'intérieur de la cellule, aux dépens du kinoplasme : c'est là, en effet, qu'on les rencontre dans les Filicinées et les Gymnospermes ; cette différence de situation n'a aucune importance, puisque l'ectoplasme serait lui-même de nature kinoplasmique, et elle n'est pas un obstacle à une commune descendance de ces for- mations. Il existe probablement une relation étroite entre la substance nucléolaire et l'appareil locomoteur, ainsi que l'a déjà pensé Fischer : « Man wird zu der Vermuthung gedrangt, dass das material der ausgestos- senen nucleolenzu der Cilienbildungverwendet wird('2). » L'étude du Polytoma. uvellsi confirme nos premières observations faites sur le Chlorogonium ; elles concordent aussi d'une manière générale avec les nouvelles recher- ches de Strasburger. Le plus souvent, il n'existe qu'un seul blépharoplaste pour les deux flagellums ; dans quelques individus cepen- dant, chaque flagellum possède un nodule chromatique distinct; ces blépharoplastes sont des épaississements de l'ectoplasme qui se confondent souvent avec la pellicule (l)Mitzkewitsch: Zu derFrage nach derZell. und Kernth. von Œdo- gonium, 1899. (2) Fischer : Loc. cit., p. 271. 36 P.-A. DANGEARD d'enveloppe : parfois, dans le cas d'une papille, le blépha- roplaste se trouve reporté en dedans cà une certaine dis- tance de la surface. Les gamètes possèdent ces formations, ainsi que les zoospores ordinaires: nous les avons aperçues très nettement au moment de la conjugaison ; au début de l'union des deux gamètes, leurs blépharoplastes sont très rapprochés, et il est fort probable qu'ils se fusionnent comme les noyaux ; mais il nous est impossible cependant de l'afïirmer. On peut s'assurer avec de bonnes colorations qu'un mince filet de protoplasma plus chromatique part du blépharoplaste et se dirige du côté du noyau. La pré- sence de ce filet chromatique qui relie ainsi les flagellums avec l'intérieur de la cellule a une grande importance : nous avons réussi quelquefois à suivre ce filet jusqu'au noyau lui-même ; il se termine à la surface de la mem- brane nucléaire sur une sorte de petit renflement. 11 est utile, pour les descriptions, de donner un nom à chacune de ces formations: nous avons déjà l'expression blépharoplaste qui est appliquée au nodule d'insertion des flagellums : nous proposons d'appeler rhizoplaste le filet chromatique qui part du blépharoplaste et s'avance à l'in- térieur de la cellule ; le renflement qui termine le rhizo- plaste au contact de la membrane nucléaire peut être désigné sous le nom de condyle. L'appareil locomoteur au grand complet se com- pose donc des flagellums, du blépharoplaste, du rhizo- plaste et du condyle ; toutes ces parties ne sont pas nécessairement visibles : aussi ne saurait-on les consi- dérer autrement que comme des différenciations transi- toires du protoplasma ; c'est d'ailleurs le cas des flagel- lums eux-mêmes, qui représentent cependant l'élément le plus durable ou du moins le plus facile à distinguer. Le rhizoplaste semble souvent être incomplet ; il se forme à partir du blépharoplaste et s'avance plus ou moins loin dans la direction du noyau (fig. 1). C'est ce que nous avions ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 37 déjà constaté dans nos observations sur les Chlamy- domonadinées ; chez le PhcLCotus lenticularis, on réussit en effet à mettre en évidence sur certaines zoospores un petit filet qui part du nodule d'insertion et va se continuer dansle cytoplasma jusqu'au voisinage du noyau (1) ; nous supposions déjà à cette époque que le rhizoplaste devait se mettre en communication avec l'élément nucléaire ; l'étude du Polytoma, uvella, a confirmé nos prévisions. Etant donné que les éléments dont nous venons de parier sont très difficiles à colorer et de taille exiguë, on doit admettre, pensons-nous, que leur existence est beaucoup plus générale qu'on ne serait amené à le supposer d'après l'observation directe. Cette disposition de l'appareil locomoteur chez le Polytoma uvella soulève une foule de questions intéres- santes sur la structure des spermatozoïdes et sur le rôle des centrosomes. Commençons tout d'abord par les sper^ matozoides. Un spermatozoïde comprend ordinairement les parties suivantes : l*' Le noyau, qui forme la portion la plus importante de la tête ; il est constitué par une masse homogène et dense de chromatine qui se colore avec une très grande intensité par les réactifs nucléaires : il est entouré par une enve- loppe mince de cytoplasme ; 2° Un corpuscule, qui occupe le sommet de la tête et dont les dimensions sont très variables : c'est l'acrosome; 3° La pièce moyenne, qui donne insertion au fiagellum : elle est, comme racrosome,sensibleaux réactifs colorants du cytoplasme ; 4° Le fiagellum, qui consiste en un filament axial entouré par une enveloppe mince de cytoplasme. Le rôle principal dans la fécondation est dévolu au (]) p. -A. Dangeard : Loc. cit., p. 120. 38 P.-A. DANGEARD noyau;\si pièce intermédiaire aurait cependant, selon beau- coup de zoologistes, un rôle peut-être plus important encore : ce serait l'élément fertilisateur par excellence ; cette pièce est, selon les uns,uncentrosome modifié ; selon les autres, elle contient un ou deux centrosomes « end- knob » ; cet élément fournirait à l'œuf le « stimulus » de sa division. Le flagellum ne sert qu'à opérer la translation du sper- matozoïde, et l'acrosome lui-même n'a pas de fonction définie. Nous allons comparer maintenant la structure du Polytoma uvella avec celle des spermatozoïdes. Comme le Polytoma est un ancêtre direct des Métazoaires et des Mé- taphytes(l), on peut prévoir que les spermatozoïdes pré- sentent encore quelques traits de ressemblance avec les gamètes du Flagellé que nous étudions ; l'hétérogamie, en modifiant la forme des gamètes isogames, a conservé au spermatozoïde son appareil locomoteur, et celui-ci, a priori, devrait présenter 'les caractères primitifs que nous venons de faire connaître : si ses caractères sont masqués dans le spermatozoïde adulte, ils devraient tout au moins se retrouver au cours de la spermato- génèse. Or, si nous examinons la constitution des spermatozoï- des telle qu'elle a été déterminée par les travaux de Moore (2), de Suzuki (3), de Korff (4), nous sommes tout d'abord frappé de la similitude complète d'organisa- tion entre Tappareil locomoteur de ces spermatozoïdes (1) Consulter les divers mémoires que nous avons publiés dans le Botaniste, au sujet des affinités des organismes inférieurs. (2) Moore : On the structural changes in the reproductive Cells du- ring the Spermatog. of Elasmobr. {Quat. Journ., v. XXXVlII, 1895). (3) Suzuki: Notiz uber die Entst. des mittelst., von Selachiern (Anat. Anzeiger, XV, 1898). (4) Korff : zur Histog.der Spermien von Holix (Arc/i. micr. Anat. v. LIV, 1899), ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 39 et celui du Polytoma, ; s^msi, le flagellum est inséré sur un nodule chromatique qui rappelle le blépharoplaste ; ce dernier est rattaché au noyau par un filament chro- matique comparable au rhizoplaste, et enfin, au contact du noyau, se trouve un corpuscule chromatique « end- knob » qui est l'analogue du condyle. On ne saurait méconnaître Timportance de ce résultat qui semble être la conséquence naturelle et prévue de la parenté des Métazoaires et des Flagellés. Malheureusement, s'il est incontestable que l'appareil locomoteur offre, dans les deux cas, une similitude par- faite, on est néanmoins obligé, si l'on s'en tient aux obser- vations actuelles sur la spermatogénèse, d'attribuer à ces formations une origine différente. Il nous est impossible de faire ici un exposé complet de la spermatogénèse, d'autant plus que les nombreux auteurs qui se sont occupés de ce sujet sont loin de s'enten- dre et que les diverses parties du spermatozoïde ont reçu une interprétation différente ; nous signalerons cepen- dant les observations qui se rattachent plus particuliè- rement à l'origine du flagellum et des parties qui s'y rattachent. Constatons que la plupart des auteurs qui ont écrit sur la spermatogénèse sont d'accord pour faire jouer un rôle aux centrosomes de la spermatide dans la formation du flagellum et dans celle du rhizoplaste. Chez les Elasmo- branches et VHelix, la spermatide possède deux centro- somes qui sont rapprochés de l'ectoplasme ; celui qui est le plus voisin de la surface donne naissance aux flagel- lums, alors que le centrosome postérieur s'allonge en un filament qui va s'appliquer sur le noyau et s'y termine par un petit renflement « end-knob» ; c'est là ce qui sem- ble résulter des recherches de Suzuki (i) et de Korff(2) ; (1) Suzuki : Loç. cit. (2)Korff : Loc. cit. 40 P.-A. DANGEARD ce dernier auteur admet que Tidiozome qui repré- sente la sphère attractive dégénère, sans prendre part à la formation de l'acrosome. Dans les Amphibiens, les centrosomes occupent la périphérie de la spermatide ; du centrosome externe, part le filament axial ; les deux centrosomes quittant la sphère attractive ou idiozome dontils sont entourés se portent alors vers le noyau ; le centrosome externe se transforme alors en un anneau au travers duquel le filament axial passe pouraller s'attacher au centrosome le plus interne. Ce dernier s'enfonce dans la base du noyau et s'élargit énormément pour former la partie principale de la pièce moyenne, « middle pièce » ; l'anneau se divise en deux parties, dont l'une fournit un corpuscule chromatique identique avec le « end-knob »^ alors que l'autre se déplace le long du flagellum. L'acrosome est formé par l'idiozome qui chemine autour du noyau et se place au pôle anté- rieur Selon Me Grégor (1), qui a étudié V Amphiuma,, l'acrosome n'est formé que par une partie de l'idiozome ; celle qui reste, plus petite,va constituer à la base du noyau la « pièce moyenne », et le « end-knob » n'est autre chose que le centrosome interne. Si nous nous reportons aux mammifères, nous trouvons les travaux récents de Lenhossek sur le rat, et ceux de Meves sur le cobaye, le rat etl'homme -, chez le rat, selon Lenhossek (2), les deuxcentrosomes persistent à labase du noyau, donnant un double « end-knob » .Meves (3) est d'un avis différent ; cet auteur admet que l'un des centrosomes s'aplatit sur le noyau en forme de disque ; l'autre centro- (1) Me Gregor : The Spermatogenesis of Amphiuma (Journal of Mor phology, XV, Supp.). (2) Lenhossek : Unters. iiber Spermatog. {Archiv. f. mihr. Anal. Bd. LI, 1898). (3) Meves : Ueber Structur und His fcrgenese der Saraenfàden von 3-ilamandra raaculosa (^cc/ur f. mikv. Anat., Bd. 50, 1897). ÉTUDE SUR LA. STRUCTURE DE LA CELLULE 41 some se divise, donnant naissance à un « end-knob » et à un anneau. Quant à l'acrosome, il provient dans le cobaye de la sphère attractive, d'après Meves, alors que dans le rat, selon Lenhossek, il se forme dans le cytoplasme sans aucune relation avec les parties constituantes de la der- nière mitose. Il est assez difficile de se reconnaître dans ce dédale de contradictions, d'autant plus qu'un certain nombre d'au- teurs, parmi lesquels Platner, Field, Benda, Julin, Prenant, Niessing, affirment que le centrosome de la spermatide passe dans l'acrosome du spermatozoïde (1). En ce qui concerne le Polytoma, nous pensons qu'il n'y a pas le moindre doute sur la constitution et l'origine de l'appareil locomoteur ; il n'existe pas de centro- some dans cette espèce, pour les raisons que nous avons données ; le blépharoplaste est d'origine ectoplas- mique, le rhizoplaste qui en part et se continue parfois jusqu'au noyau n'est que la manifestation d'une relation étroite entre les flagellums et le noyau ; quant au con- dyle qui correspond à l'end-knob du spermatozoïde, on serait tenté d'y voir un simple épaississement de la membrane nucléaire. Nous serions disposé à croire que l'appareil locomo- teur du spermatozoïde n'a pas une constitution différente ; la similitude presque complète entre les deux dispositions plaide fortement en faveur de cette manière de voir, et il y a en outre les raisons tirées de l'ontogenèse et de la phylogènese du gamète ; celles-ci ont une valeur qu'il serait difficile de méconnaître. En effet, l'hétérogamie a pris naissance aux dépens de l'isogamie; les gamètes isogames ont commencé à se montrer dans la série as- cendante au niveau du Polytoma, uvella ; il serait assez (I) Consulter Wilson: Tha Cell in Development and Inheritance 2e édition, i900, p. 162. 42 P. A. DANGEARD étonnant que le spermatozoïde, qui représente une simple différenciation morphologique du gamète des Polytoma, ait modifié aussi profondément la nature et l'origine de son appareil de translation ; cela serait d'autant plus extraor- dinaire que le résultat définitif est le même dans les deux cas ; de telles ressemblances ne peuvent être l'effet du hasard. On se trouve ainsi en face de deux conceptions très différentes sur la nature des diverses parties des gamè- tes et des spermatozoïdes : 1° Les zoologistes sont d'accord presque tous actuelle- mentpour faire jouer un rôle prépondérant aux centrosomes, lors de la spermalogénèse, dans la constitution de l'appa- reil locomoteur et de ses dépendances. 2° Nos recherches sur le Polytoma uvella prouvent au contraire que l'appareil de translation des gamètes et des zoospores, avec ses dépendances, se forme sans le concours d'aucun centrosome ; il est cependant identique à celui des spermatozoïdes. Il y a donc lieu de reprendre sur ces nouvelles données l'étude des éléments sperma- tiques ; nous pensons qu'on peut, sans inconvénient, ap- pliquer dès maintenant à ces derniers la terminologie employée pour les gamètes du Polytoma ; le « end-knob » n'est autre chose que \econdyle ; le filet chromatique qui s'avance du blépharoplaste vers le noyau représente notre rhizoplaste. En faisant cela, on préjuge, il est vrai, des résultats de l'avenir, et on fait bon marché de l'opinion courante ; il nous semble cependant que les contradictions nombreuses qui se rencontrent dans les descriptions de la spermatogénèse autorisent tous les doutes. Ainsi, il est évidemment anormal qu'une sphère attrac- tive puisse abandonner les centrosomes qui occupent son centre, pour aller former une partie sans signification définie, l'acrosome ; c'est pourtant à cette conclusion qu'arrivent la plupart des auteurs qui se sont occupés de la ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 43 spermatogénèse. Il n'est pas compréhensible, d'autre part, que ces centrosomes de la spermatide, qui sont de taille minuscule, puissent donner naissance à un filament axile souvent très long. Nous trouvons qu'on abuse vraiment trop de ces centrosomes ; on leur attribue le transport des chromosomes aux pôles ; on croit qu'ils déterminent l'orientation du fuseau ; voilà maintenant qu'ils donnent naissance dans la spermatogénèse au flagellum et au rhizoplaste ! Nous savons bien qu'on a essayé une expli- cation en comparant ces filaments à un des rayons de la sphère attractive. Meves a trouvé, par le moyen de divers réactifs colorants, a: dass beide, Centralkorper und Axenfa- den, substantielle von einander verschieden sind (1) d ; il en résulterait que : « um einen mitosenfaden der Zells- ubstanz handeln, w^elcher ebenso, wie Z. B. ein Polstrahl oder eine Spindelfaser der achromatischen Figur der mi- tose anden Centralkorper angeheftet ist und welcher die Substanz auf Grund deren er wachst, um der Centralkor- per herum oder vielleicht durch ihn hindurch aus der Zelle bezieht > ; nous avouons n'être pas convaincu du rôle du centrosome en cette occasion. La description de Korff ne nous satisfait pas davantage ; ce savant trouve au début trois centrosomes au centre de la sphère attrac- tive : deux seulement persistent sans qu'on sache ce que devient le troisième ; ces centrosomes se placent sur une ligne perpendiculaire à la surface : « von dem peripheren, distalen geht ein feines Fadchen ab, welches die erste Anlage des extracellularen Schwanzfadens darstellt » ; le second centrosome se développe en un petit bâtonnet qui finit par atteindre la surface du noyau. « Schliesslich erreicht der Stab mit seinem vorderen Ende den Kern und verbindet sich mit ihm intracel.lularer Schwanzfaden von Platner und Prenant (2). Dans la description de (1) Meves : Loc. cit., 1897, p. 117. (i) Korff : Loc cit., p. 259. 44 P. -A. DANGEARD l'auteur, nous trouvons un fait qui nous semble démon- trer que les corpuscules chromatiques en question ne sont pas des centrosomes ; en effet, au moment où il existe trois de ces éléments, l'un d'eux est compris dans l'ectoplasme ; cette position n'est pas celle d'un centro- some, mais, par contre, elle correspond tout à fait à celle qu'occupe le blépharoplaste du Polytoma. En résumé, nous pensons que Vappareil locomoteur des spermatozoïdes est Identique k celui des gamètes duPolytoma uvella. Nous appliquons la même conclusion aux diverses cel- lules vibratiles. Les recherches d'Engelmann (1) ont montré que dans les cellules à cils vibratiles bien développées, telles que celles des branchies de l'Anodonte, il existe à la base de chaque cil un nodule, puis un segment intermédiaire en rapport avec une granulation, à laquelle fait suite un fila- ment qui s'enfonce dans le protoplasma et qui constitue la racine du cil ; les granulations basilaires des cils se colorent comme des centrosomes. Zimmermann a montré, à la réunion de la Société anato- mique tenue à Strasbourg en 1894 (2), des préparations de cellules épithéliales d'utérus de Femme, de gros in- testin et de rein de Lapin, dans lesquelles il avait coloré des granulations situées à la surface libre des cellules ; ces granulations possédaient les caractères de véritables centrosomes. Heidenhain et Cohn (3) ont vu également, dans diffé- rentes cellules épithéliales d'embryon de Canard de (1) Engelmann : Zur Anatomie und Physiologie der Flimmerzellen {Pfliiger's Archiv. XXIII, 1880). (2) Zimmermann : Demonstrationsbericht {Verh. d. A anat. Ges. zu. Strassburg, 1894), (3) Heidenhain et Cohn : Ueber die Mikrocentrea {Morphol. Arbeiten, VII, 1897). ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 45 quatre jours deux petits centrosomes très nets situés loin du noyau, tout près de la surface libre de la cellule. Meves, de son côté, annonçait, en septembre 1897 (1), que, dans les cellules séminales de différents Lépidop- tères, il avait observé, en rapport avec les centrosomes si- tués à la périphérie de la cellule, des filaments se termi- nant librement dans la cavité ampullaire. Henneguy, auquel nous empruntons ces détails (2), a reconnu également que dans les cellules à cils vibratiles bien développés, telles que celles des branchies de La- mellibranches, le renflement qui existe à la base de chaque cil se comporte, vis-à-vis des divers réactifs colorants, exactement comme un centrosome (3). Henneguy a vu en outre que les spermatocytes du Bombyx Mori possèdent quatre flagellums qui s'insèrent sur un corpuscule chro- matique autour duquel on observe des radiations (4) ; la preuve que ces éléments sont réellement des centrosomes serait donnée par la position qu'ils occupent aux pôles du fuseau pendant la karyokinèse ; ce savant est amené ainsi à conclure que « les centrosomes sont les centres moteurs dukinoplasme ». Peter a essayé récemment de fournir une démonstration expérimentale du fait (5) ; ses expériences ont porté sur les cellules vibratiles des Anodontes et sur des spermatozoïdes : les mouvements d'un groupe de cils vibratiles continuent, après séparation de la partie de la cellule renfermant le noyau : ils cessent si on enlève la (1) Meves : Ueber Central korper in mannl. Geschl. von Schmetter- lingen {Anat. Anz., XIV, 1897). (•2) Henneguy : Sur les rapports des cils vibratiles avec les centro- somes [Archives d'anatomie microscopique, t. I, avril 189:!). (3) Henneguy : Sur le rapport des centrosomes avec les cils vibra- tiles {Comptes rendus, Acad. se. no 13, mars 1898). (4) Henneguy : Sur les rapports des cils vibratiles avec les centroso- mes {Arch. d'anatomie microscopique, t. I, fasc. 4, 25 avril 1898). (5) Peter : Das Oentrum fur die Fliramer, und Geisselbewegung (Anaf. Anz., Bd. XV, 1899). 46 P. -A. DANGEARD partie basilaire renfermant le nodule d'insertion. Zimmer- mann a été plus loin en suggérant que les mouvements amiboïdes eux-mêmes pourraient être régis par les cen- trosomes {!). Ces faits nous semblent loin d'être démontrés. Stras- burger et d'autres ont déjà fait observer qu'ils exige- raient, pour être exacts, une multiplication vraiment extra- ordinaire des centrosomes, puisqu'une cellule ciliée du testicule chez le chien possède de 90 à 100 cils vibratiles. On rencontre les mêmes difficultés en étudiant les Infu- soires : ainsi Hoyer (2) retrouve chez le Colpidiumcolpoda, pour chaque cil, une formation analogue aux précédentes, et, cependant, il est impossible de rattacher ces éléments d'une façon quelconque à des centrosomes qui n'existent même pas dans cette espèce. Meves a vu les mouvements se continuer après l'enlèvement de la pièce moyenne dans les spermatozoïdes de la Salamandre ; il est ainsi amené à mettre en doute le rôle de centre cinétique attri- bué au centrosome (3). Nous avons montré, dans nos ob- servations sur les Chlamydomonadinées, qu'il existe des blépharoplastes enVabsence de tout centrosome: après nos recherches sur le Polytoma uvella, nous sommes disposé à croire que les nodules d'insertion des flfigellums n'ont jamais lalvaleur de centrosomes ; ces derniers ne jouent aucun rôle dans les mouvements externes de la cellule. D'un autre côté, le transport des chromosomes aux pôles du fuseau se fait aussi bien lorsque les centrosomes manquent que lorsqu'ils existent (4) ; il est donc inutile d'attribuer (1) Zimmermann : Beitràge zur Kenntniss einiger Driisen uad Epi- thelzellen {Arch. f. mik. Anat. Bd. 52). (2) Hoyer : Ueber das Verhalten der Kerne bei der Conjugation des Infusors Colpidiura colpoda (Acchiu. f.mikr. Anat.. Bd. 54, 189», p. 101). (3) Meves : Loc. cit., 1899, p. 382-383. (4) P.-A. Dangeard : loc. cit., Essai sur la karyokinèse (Le Botaniste, 6° série, p. 236). — Etude de la karyokinèse chez l'Amœba hyalina (Le Botaniste, 7e série, p. 79-81). EIUÛE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 47 à ces éléments le pouvoir de régir les mouvements inter- nes delà cellule. En résumé, le centrosome ne possède aucune fonction dynamique spéciale ; le cytoplasme est susceptible de se différencier en éléments transitoires qui participent aux propriétés générales de la substance vivante ; les relations de ces éléments sont réglées par le métabolisme général^ ainsi que le lieu de formation et le mode de différenciation. On comprendra l'intérêt qui s'attache à ces problèmes de l'organisation cellulaire, en comparant notre conclusion à celle d'Henneguy. «En résumé, écrit ce savant, les centrosomes, qui n'a- vaient été regardésjusqu'à présent par la plupart des bio- logistes que comme des organes jouant le rôle de centres cinétiques, tenant sous leur dépendance les mouvements qui se manifestent dans le corps même de la cellule pen- dant sa division, doivent être considérés également comme centres cinétiques pour les mouvements externes de la cellule (1). » Il ne nous reste qu'un mot à ajouter à propos de la comparaison qui doit être établie entre l'anthérozoïde et le spermatozoïde. Ordinairement, on admet que l'anthérozoïde porte ses cils à l'avant, alors que le spermatozoïde traîne le sien à l'arrière ; cette différence tient à ce que l'on considère comme « tête » la partie du corps dirigée en avant pen- dant le mouvement. Cependant, si l'on se reporte au ga- mète du Polytoma uvella^ on voit que la comparaison n'est sans doute pas juste, et qu'il serait plus scientifique de considérer avec Strasburger et Belajeff comme par- tie antérieure du corps, celle qui porte les flagellums ; on en serait quitte pour attribuer au spermatozoïde une marche à reculons ; cette manière d'envisager la pola- (1) Henneguy : Loc. cit., p. 495. 48 P. -A. DANGEARD rite des gamètes rendrait plus facile la comparaison des diverses parties de la cellule et rendrait plus saisissante leur équivalence ; elle rendrait compte aussi de cette par- ticularité encore inexpliquée, du retournement du sper- matozoïde après sa pénétration dans l'œuf. La conju- gaison de sgamètes débute, dans les espèces isogames, par la partie antérieure du corps ; le retournement du sperma- tozoïde à son arrivée dans l'œuf aurait pour but d'arri- ver au même résultat dans les espèces hétérogames ; l'explication du changement d'orientation du spermato- zoïde, à son arrivée dans l'œuf, se réduirait à un piiéno- mène d'atavisme. LA QUESTION DES CENTROSOMES CHEZ LES VEGETAUX. Pour Ikeno(l), Hirase (2) et Belajeff (3), les blépharo- plastes de Weber sont des centrosomes qui sont utilisés dans la formation des flagellums des anthérozoïdes : comme nous l'avons vu précédemment, cette assimilation est loin de reposer sur des preuves convaincantes ; ces corps n'ont été rencontrés que dans les cellules-mères des anthérozoïdes ; ils échappent à l'observation directe dans les cellules végétatives : c'est pourquoi Belajeff est obligé d'admettre que le centre cinétique désigné sous le nom de centrosome peut n'être pas toujours représenté par un corpuscule colorable. Au début, on attribuait une structure uniforme aux cen- trosomes des plantes supérieures ; cette idée semble (1) Ikeno : Zur keniitniss des sog. centrosomiihnlichan Kôrpers im Pollenschl. der Cycadeen (F/ora,Bd. LXXXV, 1898). (2) Hirase : Etudes sur la-fécondation et l'embryogénie du Ginkgo biloba {Journal of the Collège of Science Univ. Imp. Tokyo, v. XII, 189.S). (3) Belajeff : Loc. cit. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 49 avoir été abandonnée : nous avons à ce sujet les déclara- tions deGuignardqui sont précieuses à enregistrer, puis- qu'elles émanent de la plus haute autorité en cette matière : « Depuis mes premières recherches sur le Lilium, dit-il, j'ai retrouvé, surtout dans le sac embryon- naire de cette plante, des corps granuleux entourés d'une auréole transparente ou d'une substance condensée, plus colorable que le cytoplasme ambiant : ce sont les sphères directrices que j'avais signalées. Cette condensation m'a paru aussi, dans certains cas, être exagérée par l'action coagulante des réactifs fixateurs, car, autour d'elle, à chaque pôle du fuseau, on trouve parfois un espace cir- culaire complètement vide. Au lieu d'un seul corpuscule au centre, j'en ai souvent vu plusieurs, excessivement petits. Il est certain que, dans un grand nombre de cas, on n'aperçoit rien ou presque rien de nettement distinct ; mais il en est d'autres où le doute disparaît, et je crois que, dans cette question, une observation positive a une toute autre valeur qu'une observation négative (1). » Ce même savant, qui a vu dans le Nymphœa, le Nuphar et le Limodoru7n, plusieurs corpuscules très petits, ayant des caractères variables, occuper les pôles du fuseau, arrive à la conclusion suivante: « De tout ce qui précède, il semble donc permis de conclure que les centrosomes, sphères attractives ou directrices, centrosphères, etc., peuvent offrir tous les degrés possibles de différenciation morpho- logique. La notion du centrosome surtout doit être com- prise maintenant dans un sens plus large qu'au début de nos connaissances sur ce sujet. Si les centrosomes ne sont pas toujours morphologiquement distincts et si, comme le pense M. Strasburger,le kinoplasme semble souvent suppléer leur absence, il n'en parait pas moins certain (1) Guignard; Les centres cinétiques chez les végétaux {Ann.sc. nat. Bof., 8« série, t. V,p. 214, 215). 4 50 P.-A. DANGEARD que les plantes supérieures peuvent être pourvues d'é- léments cinétiques différenciés, dont le rôle est le même que celui des corps analogues observés chez les plantes inférieures et chez les animaux (1). » L'existence de centrosomes, qui pendant quelques an- nées semblait être établie d'une façon indiscutable dans les cellules des Phanérogames, des Gymnospermes et des Ptéridophytes, a fini par présenter un caractère d'incerti- tude que Guignard lui-même reconnaît. C'est qu'en effet, dans une série d'importants mémoires, Strasburger et ses élèves contestent la présence de centrosomes aux pôles du fuseau dans ces mêmes plantes (2). Citons les observa- tions d'Osterhout pour les Equisetum, de Juel pour les Hemerocallis, de Debski pour les Chara, de Mottier pour quelques Dicotylédones et Monocotylédones. Os- terhout et Mottier ont vu que le fuseau bipolaire définitif commençait par montrer un nombre variable de pôles, souvent plus d'une douzaine ; ils estiment cette dispo- sition incompatible avec l'existence de sphères attractives. D'autres auteurs arrivent au même résultat négatif. Zimmermann, qui a essayé diverses méthodes, n'a jamais réussi à voir les centrosomes des plantes supérieures (3) : « Ebensohabe auch ich bei meinen Bemûhugen, in vers- chiedenen pfianzlichen Organen die Centrosomen sicht- bar zu machen, obwohl ich namentlich auch die bei tie- rischen objekten fast aus nahmslos zum Ziele fïihrenden Fixierungs und Tinklions methoden in der verschiede- nartigsten Weise miteinander kombiniert habe, in keinem F'alle distinkt gefarbte korper beobachtenkonnen, die ich un zweifelhaft als Centralkorper batte deuten konnen. Die pfianzlichen Centrosomen dûrften somit zum mindesten (1) Guignard ; Loc. cit., p. 215, 216. (2) Cytologisehe Studien {Jahrb. f. wiss. Bot., Bd, XXX, 1897). (3) Zimmermann : Die Morphologie und Phys. des pfianzlichen Zellkernes, léna, 1896, p. 63-64. ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 51 eine von lierischen abweichende Zusammensetzung besitzen. » Raciborski explique que, dans certains cas, on peut observer aux pôles du fuseau une formation qui a une certaine ressemblance avec un centrosome ; mais on reconnaît, en l'examinant de plus près, qu'il s'agit du point de rencontre des filaments radiaires. Les recherches de Raciborski ont eu lieu principalement sur le Liliiun Mar- tagon, les Fritillaria et ÏAsclepias : à propos de cette der- nière plante, il s'exprime ainsi : a Sind die Schnitte sehr dïinn, und die Linse stark genug, so erscheinen die ver- meintliche kugligen Centrosomen nur als centra der ra- diarem Polstrahlungen (1). » Plus récemment, Anstruther A. Lawson a expérimenté l'action des divers réactifs fixateurs et colorants sur les cellules-mères du Cobcea scandens sans réussir avoir lescentrosomes (2) ;cetauteur a étudié avec soin les fuseaux multipolaires et les fuseaux bipolaires ; leurs extrémités se terminent en pointe effilée dans la zone de trophoplasme qui entoure le noyau en division ; de ces pôles partent de nombreux filaments de kinoplasme qui rayonnent tout autour ; la place qui devrait être occupée par les centrosomes est donc nette- ment délimitée ; si on ne les voit pas, il est peu probable que les réactifs aient causé leur disparition, puisque la struc- ture du protoplasma est par ailleurs bien conservée. Il fau- drait donc admettre, s'ils existent réellement, qu'ils échap- pent à l'observation à cause de leur ténuité, ce qui n'est guère conforme aux données anciennes sur ces corps et aux descriptions qui en ont été faites. Chamberlain, dans ses recherches sur l'oogénèse du Pinus Laricio (3), avoue (1) Raciborski ; Flora, Bd. LXXXIII, 1897. (î) A. Lawson : Some observations on the Uevelopp. of the Karyo- kinetic Spindle in the Pollen Mother-Cells of Cobaea scandens (Proc. of. the Calif. Acad. ofSc, sériss lU, Bolany, v. I, 1898). (3) C.-J. Chamberlain : Oogenesis in Pinus Laricio [Bot. Gaz., v. XXVII, 1899, p. 279). 52 P.-A. DANGEARi) n'avoir pu mettre en évidence les centrosomes ; toutefois, il est disposé à croire que ces éléments existent cepen- dant dans cette plante. « Although centrosomes werenot positively identified in any part of thework, appearances favor the supposition that they may accompany the maie nuclei. » Blackman n'a pas réussi davantage à voir ces formations dans le Pinus sylvestris (1), alors même qu'il s'adressait au tissu de l'endosperme ; ceci est important, car Overton avait signalé Tendosperme de différents Coni- fères comme étant particulièrement favorable à cette recherche. Dans les Convallarîa et les Potamogeton, K. Wiegand a rencontré des fuseaux multipolaires ; il n'a pas vu de cen- trosomes ; chez les Convallaria en particulier, il n'exis- tait aucune granulation aux pôles: « In no case was there even so much as a granule présent at the pôle, or any thing that could be misfaken for a centrosphere (2).», B.-M. Duggar a aussi observé des fuseaux multipolaires dans les Symplocarpus et les Peltandra; il a porté toute son attention sur la formation du fuseau et sa structure défini- tive, sans y trouver aucune indication de corpuscules pouvant être pris pour des centrosomes : le cytoplasme renferme, il est vrai, des granulations chromatiques ; mais ces dernières ne sont pas spécialement localisées dans la région polaire (^3). Lesbelles observations de Grégoire sur les Liliacées con- firment l'absence de centrosomes chez ces plantes (4) ; ses (1) Blackman : On the cytological Features of Fertilisation {Phil. Trans. of the Royal Society, v. CXO, 1898). (2) Karl Wiegand : The development of the microsporangium and microspores in Convallaria a.nd Potamogeton [Bot. Gaz., v. XXVIII, 1899, p. 340). (3) B.-M. Duggar: Studies in the development of the pollen grain in Sym- plocarpus fœtidus and Peltandra undalata {Bot. Gaz. \. XXIX, 1900, p. 88). (4 Grégoire : Les cinèses polliniques chez les Liliacées (La Cellule, t. XVI, 1899). ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA. CELLULE 53 remarques au sujet des nucléoles qui se rencontrent dans le cytoplasme expliquent peut-être la méprise de ceux qui ont cru apercevoir des centrosomes. Il est évident, par exemple, que les corpuscules décrits" récemment par Ch. Bernard, comme sphères attractives et centrosomes, n'ont plus rien de commun avec les éléments de même nom tels qu'on les a compris jusqu'ici ; cet auteur dit « que le contour des sphères dans le Lilium, candidum est souvent difficile à saisir ; leurs dimensions n'ont rien de constant même dans des stades identiques et, à plus forte raison, dans des stades différents. Nous n'avons pas toujours vu deux sphères bien nettes accolées l'une contre l'autre ; au contraire, on en voit souvent une seule ; souvent aussi, on en voit deux, et quelquefois il semble qu'on puisse en distinguer plus de deux (1) > ; mêmes irrégularités dans le nombre des centrosomes qui est de deux ou trois. En résumé, personne, à l'heure actuelle, n'admet plus chez les plantes supérieures l'existence d'un centrosome se divisant en deux à chaque cinèse et se perpétuant ainsi in- définiment ; mais quelques auteurs persistent à croire qu'il existe aux pôles du fuseau des corpuscules ou des sphères qui jouent le rôle d'un centre cinéti- que ; on ignore d'ailleurs leur origine et leur sort défini- tif ; s'ils sont invisibles, on admet que leur ténuité en est cause ; on accuse l'action des réactifs ; mais on se refuse à croire qu'ils manquent réellement ; dans une telle con- troverse, les preuves d'ordre négatif ne sufïïsant plus, il faut autre chose. Osterhout etMottier, qui ont découvert les fuseaux mul- tipolaires aperçus déjà par Belajeff, ont fait remarquer que ce mode de formation du fuseau est incompatible avec l'existence de véritables centrosomes ; mais cette conséquence n'est pas absolue, car, ainsi que le fait re- (1) Ch. Bernard: Recherches sur les sphères attractives chez Lilium candidum, Helosis guyanensis {Journal de Botanique, v. XIV, 1900). 54 P.-A. DANGEARD marquer Guignard, le fuseau finit toujours par devenir bipolaire, et le rôle des centrosomes serait de provoquer cette concentration des filaments du fuseau ; d'un autre côté, on connaît des exemples, soit chez les végétaux {Pema),Boitc\\ezles Simmaux{Ascciris,Cijclops,Branchipus), où le fuseau, d'abord multipolaire, présente de véritables centrosomes lorsqu'il est devenu finalement bipolaire (1). Pour mettre fin à cette discussion qui menace de s'éter- niser, il fallait une preuve d'une autre nature, permettant d'affirmer dans un exemple donné, l'impossibilité absolue pour le centrosome d'exister sous la forme figurée ou sous la forme abstraite. Cette preuve, nous l'avons fournie dans nos recherches sur les Chlamydomonadinées; « nous avons suivi, disions- nous, très souvent et très facilement, lorsque nos prépa- rations étaient bien colorées, le contour du fuseau au stade de la plaque équatoriale : chaque pôle se terminait en pointe effilée, ce qui exclut, dans ce cas, la présence d'un centrosome ordinaire; la pointe venait souvent jusqu'au contact de l'ectoplasme. Nous considérons comme très générale cette disposition des pôles à venir affleurer, dans les Chlamydomonadinées, à la surface du corps ; on peut même supposer que c'est dans le but d'y prendre un point d'appui,et celaexpliquerait,jusqu'à un certain point, l'ab- sence de radiations dans le cytoplasme (2). » Avant nous, quelques observateurs avaient déjà signalé des faits analogues, mais sans y accorder, semble- t-il,aucune importance; Osterhout, par exemple, a vu qu'au début de la formation du fuseau multipolaire dans VEqui- setum, certains filaments de kinoplasme atteignent l'ecto- plasme ; mais les pôles du fuseau définitivement consti- tué se terminent à quelque distance de la membrane ; son (1) Guignard : Les centres cinétiques, loc. cit., p. 207-211. (•;'} P.-A. Dangeard : Loc. cit., p. 214-215. ÉTUDE SUR LA. STRUCTURE DE LA CELLULE 55 observation (I) ne peut donc nous être d'aucun secours en la circonstance. Mottier a vu que les pôles du fuseau peu- vent atteindre la membrane dans les cellules-mères du Podophyllum : « Nicht aile Pôle erreichen die Zellwand, einigeenden vielmehr frei im cytoplasma » ; mais l'auteur ne tire aucune conséquence de cette constatation (2). Strasburger a compris l'importance de ce mode de termi- naison des pôles du fuseau, sur lequel nous avions le premier attiré l'attention, et tout récemment il a exposé le résultat de ses propres observations ; le phénomène s'ob- serve avec la plus grande facilité dans les cellules-mères polliniques du Nymphfea, alba (3): on rencontre également cette disposition dans les mêmes cellules chez les Iris, le Funkia Sieboldiana le Butomus umbellatus ; elle existe aussi chez les Lilium, mais elle ne semble pas générale : dans VAllium fistuloswm et le Larix europea,les pôles du fuseau n'atteignent pas toujours l'ectoplasme ; ils se terminent à une certaine distance de la surface ; une étude atten- tive du Larix montre que ces pôles sont reliés à l'ecto- plasme par de nombreuses radiations de kinoplasme. Strasburger pense que les pôles du fuseau adhèrent à l'ectoplasme, mais non à la membrane cellulaire. Nos recherches sur le Polytoma uvella montrent que l'adhérence peut se faire avec la membrane elle-même, au moins dans certains cas ; en effet, nous avons vu dans cette espèce un des pôles du fuseau fixé solidement à la paroi; son extrémité effilée était nettement visible en dehors de l'ectoplasme contracté par le réactif fixateur ; par conséquent, il est fort possible que la chose existe aussi chez les plantes supérieures. Quoi qu'il en soit, ce mode de terminaison des pôles du fuseau ne peut se concilier avec la présence de centro- (1) Osterhout: Loc. cit., p. IBO. (2) Mottier : Loc. cit., p. 178. (3) Strasburger: Ueber Reduktion stheilung, p. 146. 56 P -A. DANGEARD somes ; quand il existe, les centrosomes manquent forcé- ment; comme la karyokinèse s'effectue, en l'absence de ces corpuscules, sans aucune modification ni changement, oh est en droit de conclure qu'ils n'ont nullement le rôle cinétique qu'on leur attribue. C'est ce que nous nous sommes efforcé de montrer dans notre essai sur la karyokinèse (1) ; on a voulu faire des chromosomes des éléments passifs incapables de se dé- placer sans l'intermédiaire de « centres d'attraction » et de « filaments tracteurs » ; cette idée est adoptée si géné- ralement ; elle est si enracinée dans l'esprit des histolo- gistes, qu'il faudra probablement beaucoup de temps et d'efforts avant qu'elle disparaisse. Cependant, en réflé- chissant sur cette question, on ne voit aucune raison sérieuse de refuser aux chromosomes un mouvement propre ; le fait de constituer une partie intégrante de la substance vivante leur confère la faculté de se nourrir, de s'accroître et de se déplacer comme le reste du protoplasma ; si on nous objecte que les chromosomes ont un con- tour net et une forme déterminée, que leur substance est dense, que, sans cause extérieure, il est difficile de leur attribuer la faculté de se diriger et de se mouvoir dans la cellule, nous répondrons que dans la cellule il y a con- cordance dans les mouvements des diverses parties, que la faculté pour les chromosomes de se diviser et de se sépa- rer en deux groupes leur a été léguée par la division directe. Il n'est pas plus étonnant d'assister à la séparation des chromosomes dans la karyokinèse que de voir le corps d'une amibe se diviser en deux, alors que le noyau ainsi que le nucléole se partagent en deux moitiés qui s'éloi- gnent ensuite l'uncî de l'autre; ce nucléole a toutes les (l)P.-A.Dangeard: Mémoire sur les ChIamydomonadinées(Le Bota- niste, 6e série, p. 236). — Etude de la karyokinèse chez l'Amoeba hyalina (Le Botaniste, 7* série, p. 81). ÉTUDE SUR LA STRUCTURE DE LA CELLULE 57 propriétés des chromosomes, densité, contour net, chro- maticité, etc. ; cependant ses deux moitiés, pour s'éloigner l'une de l'autre, n'ont pas besoin de l'intervention d'un « centre cinétique » ; leur déplacement propre se fait en concordance avec celui du protoplasma. Nous avons déjà développé ces considérations dans de précédents travaux : les théories classiques sur la karyo- kinèse nous semblaient reposer sur une base peu solide. Aujourd'hui, nous avons le plaisir de n'être plus seul de notre avis : Fischer, en suivant une direction autre que la nôtre, et par des moyens différents, arrive à des conclu- sions identiques : « Besondere Krâfte zum Transport der Chromosomen braucht die Zelle iiberhauptnicht zu entfal- ten, denn die ganze Theilung des kernes ist ein Wachs- thum, dessen Richtung und Intensitatmit dem Wachstum der ganze Zelle gegeben ist (1). » De son côté, W. Smith, sans avoir pris, semble-t-il, connaissance de nos travaux, exprime, en parlant des chromosomes et de leurs mouve- ments propres, des idées analogues aux nôtres: « How then are the chromosomes propelled ? Inasmuch as there are no fibers discoverable by which they can be pulled, is it not possible that they hâve a power of motion in themselves? This hypothesis is not absurd. Itis quite as reasonable to assume an automobility of the chro- mosomes as a contractilityof the spindle fibers. The initiatory séparation of the chromosomes into pairs by longitudinal fission implies a power of movement which is entirely independent of external tension : and the same inference is possible from the graduai shor- tening of the spiren to form the chromosomes and from the reexpansion of the chromatin in the daughter nuclei (2). » (1) Fischer : Loc. cit., p. 256-257. (2) W. Smith : The achrpmatic spindle in the spore mother cells of Osmundsiregalis {Bot. Gaz., v. XXX, p. 369-.'{70). 58 p. A. DANGEARD Il n'est pas téméraire de penser que les théories méca- niques actuelles de la karyokinèse, si en honneur parmi les zoologistes, ont fait leur temps : c'est l'étude des orga- nismes inférieurs qui leur a porté le coup décisif; il en a été de même pour les théories de la sexualité. NUTRITION ORDINAIRE NUTRITION SEXUELLE ET NUTRITION HOLOPHYTIQUE Par P. -A. DANGEARD La nutrition, dans son sens le plus général, comprend l'ensemble des phénomènes qui tendent à conserver ou à augmenter la substance vivante d'un organisme et son énergie ; on peut distinguer la nutrition ordinaire, la nutrition sexuelle et la nutrition holophy tique. L'exercice des fonctions vitales a comme résultat une usure du protoplasma et une diminution de son énergie : aussi, la vie n'est-elle possible que grâce à la nutrition ; celle-ci, sous sa forme ordinaire, a dû nécessairement faire partie des propriétés primitives du protoplasma. Nous avons étudié assez longuement, dans un mé- moire précédent, la nutrition ordinaire et son influence sur l'évolution ; nous exposerons ici quelques réflexions concernant la nutrition sexuelle et la nutrition holophy- tique. I C'est en nous appuyant sur l'idée de nutrition que nous avons formulé récemment une théorie nouvelle 60 P.-A. DANGEARD de la sexualité (1) ; comme elle est destinée, dans notre pensée, à remplacer celles qui sont enseignées actuelle- ment, nous ne devons rien négliger pour entraîner la conviction. En traitant de la nutrition sexuelle, nous aurons Toccasion de répondre à quelques objections qui nous ont été soumises ; elles visent d'une part Véiat affamé des gamètes, et d'autre part la signification d'au- tophagie sexuelle que nous attribuons au phénomène de copulation. Examinons successivement ces deux points en discusion. Nous avons démontré, contrairement aux théories exis- tantes, que rien, dans la structure des ga^nètes, ne pouvait justifier la nécessité, ou même simplement Vutilité deleur union : ce sont des éléments cotnplets, en tant que cel- lules ; il faut donc, pensons-nous, chercher la cause de la conjugaison dans une raison d'ordre physiologique : c'est pourquoi nous avons désigné cette fonction sous le nom d'autophagie sexuelle. La preuve que la sexualité a des rapports étroits avec la nutrition est fournie par un grand nombre d'observa- tions. Tous ceux qui ont cultivé des organismes infé- rieurs pendant un certain temps, savent que la formation des gamètes coïncide le plus souvent avec l'appauvrisse- ment du milieu nutritif : on peut retarder ou provoquer les conjugaisons en faisant varier les conditions de l'ali- mentation. Lorsqu'on sème les conidies du Basidiobolus ranarum dans un milieu nutritif riche, elles donnent naissance à un mycélium vigoureux qui produit de nouvelles conidies (1) P.-A, Dangeard : Théorie de la sexualité (Le Botaniste, 6e série, p. 253). — Programme d'un essai sur la reproduction sexuelle (Le Botaniste, 7^ série, p. 263). NUTRITION ORDINAIRE 6l et quelques zygospores ; mais si la culture a lieu sur un substratum épuisé, il se forme un mycélium réduit qui donne exclusivement des zygospores, c'est-à-dire des éléments sexués (1). L'expérience suivante de Klebs est encore plus démons- trative : il choisit un réseau d'eau{Hydrodictyon reticula,- tum) dont les cellules commencent à former des gamètes, et il le porte dans une solution nii/7'iiiue contenant de 0,5 à 1 0/0 de sulfate de magnésie, une partie de phosphate de po- tasse, une partie de nitrate potassique et quatre parties de nitrate calcique. L'algue cesse de donner des gamètes ; elle les remplace au bout de quelque temps par des zoo- spores asexuées, même si elle est reportée dans l'eau pure (2). Mais ce sont surtout les expériences de Maupas qui doivent être invoquées ici, car elles sont des plus con- cluantes (3). On peut, en effet, selon ce savant, empêcher indéfiniment les Infusoires ciliés, à toutes les périodes de leur existence, de contracter des accouplements, en les plaçant dans des milieux toujours abondamment pourvus d'aliments. Pour obtenir des conjugaisons, il suffît, au contraire, d'isoler des individus remplissant certaines conditions organiques, de les laisser jeûner, pour les voir immédiatement se rechercher et s'unir ; au moment de l'accouplement, tant qu'il ne s'est pas établi une solide soudure entre les conjoints, il suffit de donner une abon- dante pâture pour amener la séparation des gamètes ; ceux-ci recommencent alors une nouvelle période d'ac- croissement végétatif et de multiplications agames. La conclusion de ces expériences est, à notre avis, de (1) Eidam : Basidiobolus, eine neue Gàttung der Entomophthora- ceen {BeUr. z. Biol. d. Pflanzen, Bd. IV, Breslau, 1884). (2) Klebs : Zur Physiol. der Fortpfl. {BloI. Centr., Bd. IV, 1889). (3) Maupas ; Le rajeunissement karyogamique chez les Ciliés {Arch. de Zool. exp. et génér., 2^ série, t. VII). 62 P. -A. DANGEARD considérer les gamètes comme des éléments affaiblis par le jeûne, par la disette d'aliments ; ces gamètes peuvent reprendre leur développement, soit par un apport d'ali- ments, c'est alors la parthénogenèse, soit par la conju- gaison ou reproduction sexuelle ; la nutrition ordinaire et la nutrition sexuelle ont donc un résultat identique et peuvent se suppléer mutuellement. Malheureusement, ces idées qui semblent si naturelles ont pour adversaires les savants mêmes dont nous venons de rappeler les expériences. D'après Maupas, la disette d'aliments ne doit modifier en rien d'essentiel l'état organique interne des Infu- soires en expériences, pas plus d'ailleurs que la condition opposée, c'est-à-dire une abondante et riche alimentation. Mais, dans le premier cas, ils s'accouplent de suite, et, dans le second, ils s'y refuseront complètement. La pri- vation d'aliments agit indirectement et occasionnellement sur leur activité karyogamique. Une riche alimentation endort l'appétit conjugant ; le jeûne, au contraire, réveille et l'excite (1). Maupas pense qu'on ne saurait tenter ac- tuellement une explication plausible de la nature de cette excitation ; ce n'est pas notre avis. L'insuffisance de la nutrition n'agit pas indirectement et occasionnellement sur l'activité karyogamique ; elle a été à l'origine la cause directe et nécessaire de la différenciation des gamètes ; elle opère encore actuellement dans le même sens, chez les espèces qui ont conservé le caractère primitif de la repro- duction sexuelle. Si Maupas cherche à réduire ici le rôle de la nutrition et sa signification dans la sexualité, c'est parce qu'il croit à l'existence de causes qu'il appelle organiques, comme l'évolution en cycles des générations et la maturité karyo- gamique. (1; Maupas : Loc. cil., p.4U3. NUTRITION ORDINAIRE 63 L'idée d'une évolution alternante, enveloppant les géné- rations des Infusoires dans un cycle, n'est que l'expression môme du développement; sans doute, actuellement, la reproduction sexuelle intervient d'une façon normale dans la vie des individus ; mais on se tromperait en fai- sant de cette alternance une loi primordiale de la vie, et' en considérant la sexualité comme une propriété primitive du protoplasma. On peut poser en principe que le protoplasma était im- mortel du moment où il pouvait par la nutrition recon- stituer sa substance; son accroissement a eu pour résultat la division flssijDare ; celle-ci a sufii pour assurer le déve- loppement indéfini d'un certain nombre d'organismes in- férieurs; nous avons la certitude presque complète que les Bactériacées,par exemple, que beaucoup de Flagellés et certains Rhizopodes sont dépourvus de reproduction sexuelle ; ils continuent cependant d'exister ; par suite, il est faux que l'organisme s'use forcément par l'exercice de la vie ; la succession des générations asexuelles n'affai- blit en aucune façon le protoplasma, qui conserve ses propriétés intactes, du moment où la nutrition est assurée; la dégénérescence sénile ne se rencontre pas dans les organismes inférieurs dépourvus de sexualité. La multiplication par sporanges se rattache facilement à la division fissipare; si elle favorisait la dispersion de l'espèce, elle était beaucoup moins favorable à la nutri- tion. Dans une espèce qui se reproduit par simple biparti- tion,on observe une période de nutrition et d' accroissement ^ à laquelle succède une période de division ; l'équilibre se trouve ainsi maintenu. — Sup2:)osons que plusieurs périodes de division se succèdent sans période de nutrition corres- pondante yil est évident que les nouveaux organismes doivent être affamés ; c'est le cas du Polytoma uvella, chez lequel la sexualité s'est montrée pour la première fois avec tous ses caractères. 64 P-A. DANGEARD Ce n'est pas par une simple coïncidence que nous voyons apparaître la sexualité dans un groupe qui montre le premier une reproduction régulière par sporanges; sans doute, l'organisme a pu, dans une certaine mesure, suppléer aux périodes de nutrition intercalaires qui sont supprimées par la sporulation, au moyen d'une assimila- tion préalable plus abondante et plus complète; mais il n'en reste pas moins évident que l'équilibre entre la nu- trition, Taccroissement et la reproduction est plus diffici- lement maintenu avecla sporulation qu'avec la division fis- sipare, et qu'il suffit d'une ou deux bipartitions supplé- mentaires pour placer les zoospores dans les conditions de cellules ayant faim. Remarquons encore que les ga- mètes chez les Chlamydomonadinées sont des zoospores qui ont précisément subi une ou deux de ces bipartitions supplémentaires; dans le Chlorogonium euchlorum, \)a.r exemple, les sporanges ordinaires ne donnent en général que quatre zoospores, alors que le nombre des gamètes s'élève ordinairement à seize et parfois même à trente- deux (1). Ces considérations semblent donc justifier notre ma- nière de voir sur l'état particulier des gamètes ; sans doute, le mode de formation de ces éléments a subi par la suite des modifications nombreuses qui ont altéré le ca- ractère primitif du phénomène; mais si nous voulons rechercher l'origine d'une fonction, c'est chez les espèces où elle a débuté que nous avons le plus de chances de retrouver la trace des causes qui l'ont produite. A ce titre, le fait de constater que les différences d'ali- mentation suffisent encore à provoquer ou à empêcher la conjugaison dans les organismes inférieurs, constitue une indication précieuse; la nutrition ne saurait agir aujour- d'hui, chez ces mêmes spèces, en sens différent d'autre- (1) P. -A. Dangeard : Recherchessur les Chlamydomonadinées, loc. cit. NUTRITION ORDINAIRE 65 fois; puisqu'un gamète, alors même qu'il a commencé les préliminaires de l'accouplement, est encore susceptible de reprendre son développement asexuel et indépendant par un apport d'aliments, c'est que la nutrition ordinaire et la sexualité correspondent à une même nécessité phy- siologique et arrivent à un résultat identique qui est la continuation du développement. La reproduction sexuelle une fois établie s'est conser- vée à cause des avantages qu'elle présentait directement et indirectement ; sa présence a introduit une alternance dans les générations; reste à savoir si cette fonction est devenue nécessaire à l'immortalité du protoplasma au même titre que la nutrition ordinaire. Nous ne le pensons pas, mais nous reconnaissons volontiers que la chose en elle-même n'a cependant rien d'impossible, ni même d'invraisemblable ; le mélange de deux protoplasmas d'individus différents, répété à inter- valles plus ou moins rapprochés, peut avoir introduit dans la vie de l'être une habitude nécessaire ; dès lors, la théo- rie du rajeunissement karyoganiique se concilierait avec celle de ïautophagie sexuelle, à condition de ne pas la considérer comme une loi fondamentale de la vie, mais simplenieiit comme le résultat indirect d'une' fonction nouvelle. S'il en était ainsi, on s'expliquerait la sénescence des Infusoires dans les cultures de Maupas; la nutrition ne suffirait plus, dans les espèces possédantla reproduction sexuelle, à assurer le développement indéfini de la vie ; les cellules seraient fatalement vouées à la mort chaque fois que, par suite d'une différenciation spéciale ou de leurs conditions de vie, l'autophagie sexuelle ne peut être réalisée. Entre les deux hypothèses, celle de l'immortalité cellu- laire liée uniquement à la nutrition et celle de l'immortalité exigeant nécessairement le concours de la nutrition et de 3 66 P. A. DANGEARD l'autophagie sexuelle, il est impossible de se prononcer d'une façon absolue. Nous savons bien que, dans la na- ture, les cellules qui meurent sont celles qui ne peuvent copuler; mais on peut toujours incriminer leur différen- ciation ou l'insuffisance deleur nutrition. D'un autre côté, nous voyons des cellules, comme la plupart de celles qui constituent la partie non renouvelable du corps humain, vivre jusqu'à une centaine d'années, avec la nutrition or- dinaire; l'exemple de la pomme de terre qui se reproduit indéfiniment par bouture semble nous montrer comment l'immortalité peut s'accorder avec l'absence de sexualité ; on pourrait peut-être citer encore avec Weismann certains Crustacés et Insectes chez lesquels la parthénogenèse a remplacé la reproduction sexuelle ; mais cette parthéno- genèse, à la vérité, n'est sans doute assez souvent qu'une modification de la reproduction sexuelle. Quoi qu'il en soit, si la première hypothèse est vraie, la vie pourrait théoriquement être prolongée indéfi- niment, à condition que la nutrition puisse être assurée effectivement aux cellules de l'organisme; pratiquement, il ne serait pas déraisonnable de penser qu'on puisse reculer sensiblement les limites de la vie. Avec la seconde hypothèse, la science se heurte à un obstacle infranchis- sable : la sénescence arrivera plus tôt ou plus tard, mais elle ne souffre pas d'exceptions. Dans notre « Théorie de la sexualité », nous avons dit que la parthénogenèse est la continualion de la reproduction asexuelle que Vabsence d'aliment aurait fait dévier en autophagie sexuelle (i) , nous citions, à l'appui de cette manière de voir, les belles expériences de Klebs sur les Chlamydomoyias, les Ulolhrix, le Protosiphon, etc. (2). Or, Klebs prétend que nous avons donné à ses observations (1) P.-A. Dangeard : Loc. cit., p. 268. ('■l) Klebs : Die Bedingungen der Fortpfl. bei einigen Algen und Piizen, léna, 1896, p. 169. NUTRITION ORDINAIRE 67 une interprétation qu'elles ne comportent pas ; il nous oppose à cet égard l'exemple du SporocUnia. grandis qui développe des parthénospores au lieu de zygospores en l'absence d'oxygène, ou sous l'action d'une température élevée, ou encore dans une atmosphère desséchée ; on ne peut incontestablement, dit-il^ invoquer dans ce cas, en faveur de la parthénogenèse, un apport d'énergie ; ce sont les conditions extérieures qui empêchent la conju- gaison ; les gamètes sont pourvues de tout ce qui leur est nécessaire pour développer un carpospore ; l'idée de gamètes affaiblis, ayant faim, est donc nettement arbi- traire (1). L'objection que Klebs présente contre notre conception de la nature des gamètes ne peut être admise pour la bonne raison qu'il considère comme gamètes les rameaux copulateurs des Mucorinées ; or, ce sont en réalité des gamétanges ayant de nombreux noyaux comme ceux des Pérosnoporées et des Saprolégniées. Nous savons que dans ces familles il y a une tendance marquée à la parthé- nogenèse ; cette tendance est liée à la manière dont se comportent les noyaux des gamétanges ; un certain nom- bre se détruisent au profit d'un ou jjlusieiirs gamètes pri- vilégiés ; l'apport d'énergie aux gamètes peut donc prove- nir du gamétange lui-même, sans venir de l'extérieur. Nous ignorons encore la destinée des nombreux noyaux des gamétanges chez les Mucorinées ; mais la parenté de cette famille avec les précédentes permet de supposer également une destruction de noyaux au profit des éner- gides qui persistent. Klebs a donc eu tort de prendre comme exemple le Sporodinia : 1" parce qu'il considère comme gamète un organe qui a la valeur d'un gamétange ; 2° parce que, dans un gamétange, Vapport d'énergie peut provenir d'une diminution du nombre des gamètes sans (1) Klebs : Zur Physiol. der Fortpfl. einiger Pilze (Jarhrb. f. iviss, Bot., Bd. XXXV, p. 194-198). 68 P -A. DANGEARD qu'aucune cause extérieure entre en jeu ; 3° parce qu'en tout état de cause, Vunion de gamétanges représente une déviation de la sexualité ordinaire ; notre définition ne vise que les gamètes. Klebs pense que dans la parthénogenèse des Spirogijra et du Protosiphon qui se produit avec les solutions sa- lines, c'est principalement la consistance « wasseranzie- hende Kraft » du milieu qui agit en empêchant la réunion des gamètes ; la manière dont se comporte le Protosiphon serait à cet égard très instructive ; dans la solution saline, les gamètes ne copulent point ; ils se développent parthé- nogénétiquement ; si cette solution est remplacée en temps opportun par de l'eau pure, l'affinité sexuelle reparait et les conjugaisons se produisent à nouveau. Après les développements qui précèdent, on sera d'avis avec nous qu'il faut distinguer dans les expériences qui déterminent la parthénogenèse : 1" l'action d'ordre méca- nique ou autre qui empêche la réunion des gamètes, comme la consistance épaisse ou visqueuse du milieu ; 2° l'action nutritive ou énergétique qui permet le dévelop- pement indépendant des gamètes ; tant que ce dernier facteur n'a pas rendu la cellule à son état physiologique normal, l'affinité sexuelle est susceptible de reparaître. Gomme nous désirons, avec un savant du mérite de Klebs, fournir à la discussion tous les éléments d'appré- ciation, non seulement pour le présent, mais pour l'ave- nir, nous signalerons comment on pourrait être amené à supposer que l'action mécanique est suffisante à produire la parthénogenèse. Supposons un milieu visqueux et non nutritif arrêtant le mouvement des gamètes : l'éner- gie qui était destinée à la translation du corps se trouve économisée ; il n'est pas impossible que cette énergie puisse être utilisée par la nutrition générale et suffise dans certains cas à déterminer la parthénogenèse. D'un autre côté, les gamètes des algues, du moins ceux NUTRITION ORDINAIRE 69 qui possèdent de la chlorophylle, se trouvent dans des con- ditions spéciales qu'il est bon de ne pas oublier ; toute cause susceptible de prolonger leur existence, en dimi- nuant l'activité de leur fonction respiratoire ou locomo- trice, constitue un avantage au point de vue de la nutri- tion générale, puisque la nutrition holophytique aura ainsi le temps de s'exercer et de rétablir l'équilibre qui se trouvait momentanément rompu. En l'absence même de la nutrition holophytique, le rsilentissement des fonctions peut sans doute conserver la vie à des gamètes affamés en leur permettant d'atten- dre des conditions de vie meilleures ou en leur fournissant le temps nécessaire pour utiliser celles dont elles dis- posent. Deux hommes privés de nourriture sont placés dans des conditions différentes : l'un continue à s'agiter, à marcher, à travailler ; l'autre cesse tout travail; il reste immobile et évite tout effort ; ces individus sont affaiblis tous les deux ; cependant le dernier pourra résister assez longtemps pour attendre des jours et même des mois — témoin les fakirs de l'Inde — le retour de la nutrition normale, alors que le premier sera depuis longtemps mort d'épuisement. Nous considérons que la parthénogenèse est possible, non seulement par un apport d'énergie ou d'aliment, mais encore par un ralentissement momentané des fonctions, qui a comme conséquence une économie d'énergie interne. Il ne faut pas oublier que ce sont les conditions primi- tives de la sexualité et son origine que nous essayons d'établir sur une base solide > de même qu'il s'est produit, surtout chez les champignons et les algues, de nombreuses déviations d'ordre morphologique, de même nous obser- vons aussi quelques différences dans l'état physiologique des gamètes; on reconnaîtra toujours avec un peu d'atten- tion la raison d'être de ces différences. Nous comprenons bien, par exemple, pourquoi l'un des gamètes s'est diffé- 70 P -A. DANGEARD rencié en élément allongé, réduit comme volume et très mobile, alors que l'autre est devenu une grosse cel- lule immobile et chargée de réserves ; au lieu de conti- nuer à nous opposer les déviations résultant d'adapta- tions spéciales, il sera plus profitable, sans doute, d'en chercher la raison. C'est ainsi qu'il serait peut-être possible d'expliquer les cas curieux de parthénogenèse obtenus par Loeb,avec des œ^fs d'Oursins ; n'ayant pas eu à notre disposition les travaux de Loeb, nous citerons en entier la note suivante de Giard (1) qui rend admirablement compte de l'état actuel de la question : « Dans une communication antérieure (2), j'ai dit que le développement des oeufs d'Echinodermes provoqué par l'effet des solutions salines sans le concours des spermatozoïdes était dû non à l'influence spécifique des ions, mais à l'action déshydratante des sels employés sur les plasmas ovulaires et à celle de l'hydratation subsé- quente, lorsque l'œuf est remis dans de l'eau de mer pure. Il nous semblait, en effet, téméraire d'attribuer dans le phénomène de Loeb un rôle prépondérant à l'ioni- sation et de vouloir interpréter par les seules lois de l'os- mose les échanges interstitiels qui s'accomplissent dans un organisme aussi compliqué que l'oeuf mûr. Notre collègue, M. Lapicque, a justement insisté, dans une séance récente [Comjjtes rendus du 27 octobre, p. 879), sur les dangers qu'il y a d'assimiler un tissu de cellules vivantes à un précipité colloïdal, et la critique qu'il a faite de la méthode s'applique à fortiori au cas de la cellule- œuf. (d) Giard : Sur la pseudogamie osmotique {Comples rendus des séances de la Société de Biologie, 5 janvier 1901). (2) A. Giard : A propos de la parthénogenèse artificielle des œufs d'Echinodermes (Comptes rendus de la Société de Biologie, séance du 28 juillet 1900, no 28, p. 761). NUTRITION ORDINAIRE 71 « D'autre part, certaines solutions salines, celle de chlo- rure de magnésium en particulier, exercent une action déshydratante manifeste sur les cellules vivantes. « Dans un mémoire qui n'a pas suffisamment attiré l'attention des biologistes, Tycho Tullberg a indiqué, il y a quelques années, la remarquable action anesthésiante d'une solution au centième de chlorure de magnésium (1). Des expériences faites, cet été, sous mes yeux, par M. A. Michel, dans mon laboratoire de Wimereux, montrent tout le parti qu'on peut tirer de ce procédé pour la fixa- tion à l'état d'extension des Actinies et autres ani- maux marins. « Or, on sait, depuis les intéressantes recherches de R. Dubois, que le mécanisme de l'action d'un grand nombre d'anesthésiques consiste dans une action déshy- dratante (2). Si, à la dose de 1/100, le chlorure de ma- gnésium exerce déjà un effet déshydratant assez éner- gique pour produire Tanesthésie d'un Actiniaire, son action à la dose de 12 p. 100, que Loeb a employée et que sur son conseil j'ai employée également avec succès pour provoquer la segmentation des œufs d'Echino- dermes, doit déterminer une déshydratation bien plus intense, « D'ailleurs, dans un travail qui a paru presque jour pour jour en même temps que ma note rappelée ci-dessus, Loeb, abandonnant sa première manière de voir, attribue comme moi-même la parthénogenèse artificielle à l'aug- mentation de la pression osmotique du milieu et à la perte par l'oeuf d'une certaine quantité d'eau. « Dans de nouvelles expériences, Loeb a pu, en effet, (1) T. Tullberg : Ueber Çonservierung von Evertebraten in ausge- dehatenZustand, 1892. Analysé dans les Archives de Zoologie expéri- mentale, 1892 (2), t. X, p. XI des Notes et revue. (2) R. Dubois: Mécanisme de l'action des anesthésiques {Revue géné- rale des sciences pures et appliquées, II, 1891, p. 561). 72 P A. DANGEARD obtenir le développement des hlaslulsù et même des. plutei en employant pour augmenter la pression osmotique du liquide ambiant, non plus des électrolytes, mais des corps non conducteurs (sucre de canne par exemple) (1). « C'est donc enfoncer une porte ouverte que de s'efforcer de prouver par une analyse chimique d'ailleurs peu dé- monstrative, si les chiffres donnés sont exacts, que le spermatozoïde n'agit pas par un apport de magnésium (2); ce qui, au surplus, n'avait jamais été la pensée de Loeb^ autant que je l'ai pu comprendre, même dans son mémoire préliminaire. « Mais il y a lieu de rapprocher des nouvelles expériences de Loebles résultats si importants obtenus naguère par Klebs en faisant agir des solutions salines et sucrées sur les Spyrogira. et divers autres Cryptogames. On s-ait que Klebs obtenait ainsi la formation de parthénos- pores ou la germination parthénogénétique de la gyno- gamète et même de l'androgamète (3). Ne peut-on sup- poser que, dans ces cas encore, ce qui a été considéré comme le résultat exclusif de phénomènes nutritifs était dû, en partie pour le moins, à l'action osmotique des solutions employées ? « J'ai déjà rappelé à l'appui de cette manière de voir que les œufs des Branchipes et des Apus ont besoin pour leur développement parthénogénétique d'un dessèche- ment suivi d'une réhydratation. <^ 11 en est sans dou te de même pour les œufs parthénogé- (1) J. Loeb : Further experiraents on artificial parthenogenesis and the nature of the procesy of fertilization [American Journal Physiology IV, août 1, 1900, p. 178). (2) Y. et M. Delage : Sur les relations entre la constitution chimique des produits sexuels et nelle des solutions capables de déterminer la parthénogenèse [Comptes rendus de VAcadémie des sciences, 24 décem- bre 1900. p. 1227). (3) Klebs : Die Bedingungen der Fortpl. bei einigen Algen und Pilzen,1896, p. '245. NUTRITION ORDINAIRE 73 nétiques de nombreux Crustacés Gladocères et Ostra- codes. « Il convient de citerégalement les expériences deTicho- miroîî {Bull. mens. Bachicolt. Padova, 1886), qui a vu se produire les premières phases de la segmentation des œufs de vers à soie préalablement immergés pendant 2 minutes 1/2 dans l'acide sulfurique concentré. « Il est bien évident que toutes les parthénogenèses provo- quées ne sont pas nécessairement dues à la déshydratation suivie d'hydratation (tonogamie). Certaines actions méca- niques ou chimiques semblent, en effet, produire des ré- sultats analogues à ceux obtenus par les modifications de la tension osmotique. Les expériences de R. Dubois et celles beaucoup plus précises de Winkler et d'Oudemans montrent que le liquide spermatique privé de spermato- zoïdes peut aussi déterminer un développement pseudo- gamique (J). (' Enfin, nous avons montré que l'adjonction des substan- ces nutritives ovulaires à l'androgamète suffisait dans les cas de mérogonie et dans ceux de fausse hybridité à produits semblables au mâle, pour donner également un développement parthénogénétique, par pseudogamie nu- tritive ou trophogamie. « Mais il importe de distinguer nettement tous cescas de pseudogamie d'avec la fécondation vraie ou fertilisation qui est fondamentalement, comme l'a démontré Maupas, un phénomène nucléaire, un rajeunissement karyoga- mique (2). H Déjà, dans son dernier mémoire, Loeb s'est servi juste- (1) Winkler : Ueber die Furchung unbefruchteter Eier unter der Einwirkung von Extractivstoffen aus Sperma {Nachricht. d. K. Gesell. d. Wiss. zu. Gôilingen, 1900, Heft II). (2) Je laisse de côté, pour le moment, la question si intéressante des deux cycles cellulaires à n et 2 n chromosomes dont les travaux de Strasburger et de Dangeard ont montré l'importance, surtout en ce qui concerne les Métaphytes et les Métazoaires. 74 P. A. DANGEARÛ ment du mot de parthénogenèse arlificielle {artificial par- thenogenesLs), que j'avais également employé (Comptes rendus de la Société de Biologie, 28 juillet 1900, n° 28, p. 761), mais il est regrettable qu'il appelle encore proces- sus de fertilisation {process of fertilization) ce qui n'est qu'une pseudogamie cinétique dans le sens le plus large du mot. » Les résultats contenus dans cette note peuvent être l'objet d'une interprétation plus générale. Il nous semble que si la déshydratation suivie d'hydrata- tion peut provoquer la parthénogenèse, c'est en fin de compte « le ralentissement momentané » des fonctions ob- tenu par cette déshydratation qui est seul en cause : il a comme conséquence^ ainsi que nous le disions plus haut^ une économie d'énergie interne ; nous rentrons ainsi dans le cas général. Si nous sommes dans le vrai, il est inutile d'appliquer un nom spécial à la parthénogenèse ainsi obtenue : que le supplément d'énergie fourni aux gamètes provienne de conditions internes ou externes, le résultat est le même ; on ne doit même, à notre avis, faire entrer l'expression de garnie dans la reproduction sexuelle que dans le cas où la fécondation est obtenue par le concours complet ou partiel d'un second gamète (1). Alors, il y a réellement mariage ; si l'apport d'énergie au gamète est d'origine physique ou chimique, il y a simple parthénogenèse; nous ne croyons pas devoir accepter le terme de « tonogamie » proposé par Giard ; nous pensons également que l'expression de « trophogamie » doit être rejetée. L'expression de tono- gamie est destinée dans la pensée de Giard à désigner la parthénogenèse obtenue par déshydratation ; celle de trophogamie s'applique àla parthénogénèseprovoquéepar ( 1 ) P. -A. Dangeard : Programme d'un essai sur la reproduction sexuelle (Le Bota.nisle, 7e série). NUTRITION ORDINAIRE 75 l'apport d'aliment ; mais, en dehors de l'objection fonda- mentale qu'il n'existe dans ces phénomènes aucun ma- riage, nous ne pensons pas qu'il y a intérêt à distin- guer dans la parthénogenèse autant de cas qu'il existe de formes variables dans le mode d'apport de l'énergie au gamète. Notre « théorie de la sexualité a donné pour la première fois une explication simple et rationnelle de la parthéno- genèse, alors que, dans la théorie de Van Beneden, elle était inexplicable ; nous avons vu avec plaisir Strasburger adopter notre manière de voir à ce sujet. « Ausserdem aussert Dangeard zum ersten Mal Ansichten ùber das Ver- haltniss der Chromosenreduction zur Parthenogenesis, mit welchen meine hier entwickelten Vorstellungen in vielen Punkten libereinstimmen (1). » Les gamètes représentant chacun une spore ouun indi- vidu, il est naturel que leur développement isolé puisse être obtenu dans certaines conditions par des formes dif- férentes de l'énergie ; les expériences de Loeb, ainsi que nous venons de le constater, ne font pas exception à la règle que nous avons posée ; reste à connaître, d'une part, la façon dont le gamète à n chromosomes fournit les cel- lules à 2 n chromosomes des Métazoaires, et à rechercher, d'autre part, dans quelles espèces la chose est possible. Les zoologistes ont là un champ d'observation merveil- leux, dont il serait téméraire de prévoir les résultats. Toutes ces questions ont une portée philosophique in- contestable ; malheureusement la route est peu sûre et l'on risque fort de s'égarer en chemin ; mieux vaut sans doute s'abstenir. N'est-il pas extraordinaire, par exemple, de voir que la nutrition ordinaire qui favorise la durée des individus est l'objet de tant de sollicitude dans nos sociétés, alors que (1) Strasburger : Ueber Reduktionstheilung., loc. cit., p. 92. 76 P.-A. DANGEARD la nutrition sexuelle, qui favorise le nombre des individus, est au contraire entravée par tous les moyens ? Il y a là peut-être une nécessité fondamentale de l'existence des sociétés, mais, en cherchant bien, on trouverait aussi sans doute beaucoup d'égoïsme. B Nous venons de voir que les gamètes sont bien réelle- ment des zoospores affaiblies par le jeûne ; elles manquent d'énergie ; cet état particulier doit être attribué, non seu- lement à l'absence d'aliment, mais aussi aux effets de la sporulation remplaçantladivision fissipare. Il s'est produit à ce moment de l'évolution une rupture d'équilibre entre la fonction de nutrition et la multiplication de l'espèce; nous arrivons ainsi à comprendre comment des cellules ont pu avoir faim, alors même qu'elles se trouvaient dans un milieu nutritif non épuisé; la pénurie d'aliment produit le même résultat et amène la formation des gamètes. Dans ces conditions, il est naturel d'envisager la conju- gaison comme un acte de nutrition ; la reproduction sexuelle a la signification d'autophagie sexuelle. Cette conception a soulevé quelques critiques plutôt bienveillantes ; mais dans les objections qu'on nous op- pose il existe un malentendu qui doit tout d'abord dispa- raître : L'opinion de Strasburger est que « gegen dièse Vors- tellung sobald sie mehr als ein blosses Gleichniss sein wil, mûssten sehr bestimmte Einwande erhoben werden. Denn ein Organismus, der von einem anderen gefressen wird, vereinigt sich mit ihm als Organismus, er bûsst vielmehr seine Organisation ein, und nur die Stoffe seines Korpers dienen dem anderen als Nahrung. Zwei Orga- nismen kônnen einander gleichzeilig ûberhaupt nicht auffressen, da hiermit beide ihre Organisation ein bûssen NUTRITION ORDINAIRE 77 mûssten, also aufhoren wurden, als Organismeii fortzu- bestehen (1).» Klebs partage l'avis de Strasburger à ce sujet ; il cite l'exemple de deux S tylonichi a ayant faim ; le gros individu mange le petit; il s'agit alors d'autophagie et non d'une conjugaison (2). Lescritiques de Klebs s'appliquent à la définition donnée par Rolph delà conjugaison: «DerConjugationsvorgangist nur eine besondere Form der Nahrungs auf nahme, welchc bei sinkendem Angebot von Nahrung, oderbei gesteiger- tem Nahrungs bedûrfniss, in Folge der oben angegebe- nen Ursachen eintritt ; er ist eine Isophagie, welche an Stelle der Heterophagie tritt(3). » Il est évident que l'exem- ple des deux Stylonichia, cité par Klebs, est un cas d' Iso- phagie au sens de Rolph ; celui-ci n'a pas fait la distinc- tion entre la nutrition ordinaire et la nutrition sexuelle ; mais ce reproche n'est pas applicable à nos idées, car nous avons toujours eu soin, en parlant de la copulation des gamètes et de la sexualité, de préciser qu'il s'agissait d'ait- tophagie sexuelle et non de simple autophagie (4). Les arguments dont s'est servi Strasburger à l'égard de notre théorie ne visent aussi en réalité que l'idée de Rolph. Weismann les avait déjà indiqués de la manière suivante : « Pour qu'un animal serve de nourriture à un autre, il faut qu'il soit tué, liquéfié et finalement assimilé, mais ici les deux protoplasmas se touchent et se fondent sans que l'un d'eux se dissolve. Ce sont deux idioplasmas, avec toutes les tendances héréditaires qu'ils contiennent, qui se réunissent (5). » Pourtant Weismann a eu la presciencedece qui devait arriver, carilajoute immédiate- (1) strasburger : Ueber Reduktionsth., loc. cit., p. 89-90. (2) Klebs : Zur Physiol. der Fortpfl., loc. cit., p. 196. (3) Rolph : Biologische Problème, Leipzig, 1884, p. 136. (4) P.-A. Dangeard : L'influence du mode de nutrition sur l'évolution de la plante (Le Botaniste, 6« série, p. 52-58). (5) Weismann : Essais sur l'hérédité et la sélection naturelle. Tra- duction Henri de Varigny, Paris, 1892, p. 333. 78 P. A. DANGEARD ment : « Mais bien qu'il n'y ait pas ici nutrition au sens propre du mot, puisqu'aucun des deux animaux ne reçoit par la conjugaison une plus grande quantité d'aliments, il faut bien que dans un certain sens la conséquence de la conjugaison soit analogue à celle qui résulterait de la nu- trition et de l'accroissement : la masse du corps s'accroît et avec elle l'ensemble des forces qui y sont liées, et on peut croire que ce moyen rend pussibles des eflets qui sans cela n'auraient pu se produire. C'est du moins dans cette direction qu'il faudra chercher si l'on veut pénétrer la signification primitive delà conjugaison et arriver par là à son origine phylétique. » On voit par cette citation que Weismann, tout en combattant l'idée de nutrition appliquée à la conjugaison, avait eu cependant l'intuition qu'il fallait chercher de ce côté pour trouver l'origine de la sexualité. Sous le nom général de nutrition, on comprend l'en- semble des phénomènes qui permettent à l'individu d'augmenter sa masse et son énergie : on distingue actuel- lement la nutrition ordinaire, avec ses diverses modalités, et la nutrition holophytique. Or, si nous examinons les choses sans parti pris, il est indiscutable que la nutri- tion ordinaire offre beaucoup p)lus de rapports communs avec Vacte sexuel qu'avec la nutrition holophtj tique. Ainsi, la nutrition ordinaire peut, au moins dans cer- tains cas, re?72p?ace?' l'autophagie sexuelle. Les expériences de Maupas, à cet égard, sont des plus concluantes ; on peut empêcher indéfiniment les Infusoires, à toutes les périodes de leur existence, de contracter des accouple- ments, en les plaçant dans des milieux toujours abon- damment pourvus d'aliments ; c'est là une première preuve des relations étroites qui existent entre la fonction de nutrition et la reproduction sexuelle. Une autre preuve est fournie par la parthénogenèse; le développement d'un gamète s'obtient, soit à l'aide d'un milieu nutritif, soit au NUTRITION ORDINAIRE 79 moyen de la conjugaison de tout ou partie d'autre ga- mète; il est naturel de dire qu'il y a nutrition ordinaire dans le premier cas et nutrition sexuelle dans le second ; nous restons dans la définition générale de la nutrition, puisque la masse du corps augmente et qu'il en est de même de Ténergie. Strasburger objecte encore à notre conception de l'au- tophagie sexuelle, la fusion des noyaux que nous consi- dérons comme lé phénomène le plus important de l'acte reproducteur, à cause de ses conséquences sur l'évolution. « Bei dieser kann es sich ja schlechterdings nicht um das gegenseitige sich auffressen der kerne handeln, sondern um ihre organische Vereinigung (1). » Nous avons beaucoup réfléchi pour essayer de trouver la cause qui a déterminé la fusion des noyaux dans l'auto- phagie sexuelle ; lors de l'union des amibes en plasmodes chez les Myxomycètes, les noyaux restent indépendants ; pourquoi cet état primitif s'est-il trouvé modifié? C'est là une des questions les plus ardues de la phylogénèse de la sexualité. Il est cependant possible, jusqu'à un certain point, d'en- trevoir les raisons de cette fusion ; il ne faut pas oublier, en effet, que Vunion des gatnètes remplace une période de nutrition ordinaire. Revenons, en effet, à l'exemple déjà cité de la reproduction fissipare ; à une période de nutri- tion et d'accroissement succède régulièrement une période de bipartition. Supposons maintenant qu'il se produise, comme dans la sporulation, deux bipartitions successives sans intervalles de repos ; une période de nutrition se trouve ainsi supprimée et occasionne naturellement l'état affamé des quatre zoospores ; mais cet état est commun au cytoplasme et au noyau ; ces deux éléments ont éprouvé un jeûne dont ils vont détruire l'effet par un (1) strasburger : Loc. cil., p. 90. 80 P.-A. DANGEARD processus identique. Les quatre cellules se réunissent deux à deux, cytoplasme à cytoplasme, noyau à noyau, et Veffet de la seconde bipartition est neutralisé ; la période de nutrition qui manquait est suppléée par cette copu- lation qui -replace les cellules dans les conditions de la division fissipare. En ce qui concerne la fusion des noyaux, nous voyons qu'elle pourrait être attribuée à un état affamé, compa- rable à celui des gamètes et produit dans les mêmes conditions. Nous retrouvons quelque chose de semblable, lorsque nous envisageons les cas de conjugaison snucléai- res anormales : les fusions entre les macronucleus des Infusoires n'ont lieu qu'en cas de disette, et nous serions disposé à croire que les fusions nucléaires observées dans l'albumen de certaines Phanérogames sont dues à un état physiologique de même rature (i). Nous venons de voir que la copulation des gamètes^ avec fusiofi des noyaux, n'est en réalité qu'une sorte de retour en arrière, annulant Veffet de l'absence d'une période de nutrition et la remplaçant effectivement. Cette idée mériterait d'être approfondie : la question de l'ovogénèse et de la spermatogénèse s'y rattache peut- être directement ou indirectement ; ces deux bipartitions successives, sans intervalle de repos, qui s'effectuent dans la cellule mère, ovocyte ou spermatocyte, ne sont pas sans analogie "avec l'état primitif qui a produit la nature des gamètes et provoqué leur réunion ; la réduc- tion chromatique s'y est superposée ultérieurement. Sans doute, dans la sporulation, le nombre des bipar- titions successives est devenu variable ; mais c'est parce que la période de nutrition préalable s'est allongée con- sidérablement ; il sufTit toujours d'une bipartition supplé- mentaire pour que le raisonnement précédent puisse être (1) P. -A. Dangeard : La reproduction sexuelle des Champignons (Le Botaniste, 7e série, mai 1900, p. 98-99), NUTRITION ORDINAIRE 81 applicable ; il ne faut pas s'attendre évidemment à re- trouver actuellement les phénomènes qui ont présidé à l'évolution des espèces dans leur netteté première : comme pour les débris fossiles, nous ne rencontrons souvent que des empreintes incomplètes ou des traces indis- tinctes ; il faut y suppléer par le raisonnement et par une étude comparative des types existants. Ainsi, nous serions d'avis de rattacher à l'idée précé- dente l'existence de divisions successives qui s'effectuent chez les Infusoires ciliés, avant la conjugaison. Certaines espèces comme la Leiicophrijs patula, lors- qu'elles sont poussées par la disette de vivres et se dis- posent à la conjugaison, commencent, selon Maupas, à se fissiparer jusqu'à quatre et cinq fois de suite, donnant ainsi naissance à des rejetons de taille naine, destinés à jouer le rôle de gamètes ; chez beaucoup d'autres espèces, il n'intervient probablement qu'une division, non suivie d'accroissement végétatif ; Maupas considère « comme une loi générale, chez les Ciliés, l'existence d'une ou plusieurs divisions fîssipares non suivies d'ac- croissement végétatif, servant de préambule à la conju- gaison (i). Aucune période de nutrition n'étant intercalée entre chacune de ces divisions, les individus se trouvent affamés d'abord ; 1° par la, privation d'aliments ; 2" par l'effet de ces bipartitions successives rapprochées. L'état de gamètes est précédé de divisions analogues chez Y Actinophrys et V Actinosphserium ; on trouve une division chez VActinophrys Schaudinn, deux dans VActi- nopshœrium Hertwig ; mais le noyau seul y prend part. Les auteurs désignent sous le nom de globules polaires, les noyaux qui disparaissent en se désagrégeant à la suite de ces divisions (2). (1) Maupas : Loc. cit., p. 40C. (2) Consulter Wilson : The Cell in Development and Inlieritance 2e édition, lyuu, p. 278. 6 82 P.-A. DANGEARD Les théories relatives aux globules polaires sont nom- breuses : celle qui attribue à ces formations la valeur de cellules-sœurs des gamètes semble exacte; mais elle ne permet pas de comprendre l'origine même de ces forma- tions. On pei\t croire qu'il y a dans ces divisions rapides qui précèdent la maturité sexuelle, un caractère ancestral rappelant celui qui a déterminé l'état affamé primitif des gamètes : la privation d'aliments et Texistence de biparti- tions successives sans période de nutrition agissent dans le même sens; les deux phénomènes sont d'ailleurs en quelque façon liés l'un à l'autre; si nous recherchons, en effet, quelles sont les causes de la division de la cellule, nous trouvons que cette division est le résultat de la gêne produite par les difficultés que rencontre la cellule à se nourrir lorsque son accroissement dépasse un certain degré; la nutrition est assurée par la surface, et celle-ci varie comme le carré de ses dimensions; l'assimilation au contraire doit être proportionnelle au volume, et ce volume varie comme le cube de ses dimensions; de là une gêne nutritive et la nécessité d'une division. La gêne nutritive produite par la disette d'aliments a le même effet que celle qui a pour cause V accroissement de volume; elle détermina la division; c'est pour cela que nous trouvons, au début de la sexualité, les deux phéno- mènes réunis et donnant aux gamètes leur caractère propre. Le fait que chez les Métazoaires et certains Protozoaires le noyau seul prend part à la division, est une simple modification de la bipartition primitive; elle a eu pour effet de conserver aux gamètes une quantité de cytoplasme suffisante pour leur développement ultérieur : l'avantage de cette adaptation est surtout évident pour l'oosphère des Métazoaires. La conjugaison des gamètes, tout le prouve, possède NUTRITION ORDINAIRE 83 la signification d'autophagie sexuelle que nous lui avons attribuée : il s'agit d'un acte de nutrition. L'étude du Polyphagus Euglense est bien intéressante à cet égard; dans cette espèce les gamètes sont tout d'abord dépourvus d'attraction sexuelle; celle-ci ne se développe que plus tard, après une période de végétation. Ce fait a entraîné quelques modifications intéressantes dans le mode de formation de l'œuf. En effet, les gamètes s'étant dispersés, à leur sortie du gamétange, sans aucun souci d'une copulation ultérieure, ils se trouvent souvent éloignés les uns des autres, lors- que l'attraction sexuelle apparaît sous l'influence d'une disette d'aliments. L'autophagie semble difficile à réaliser dans ces condi- tions ; elle se fait cependant le plus simplement du monde; le gamète mâle utilise un de ses filaments nourriciers pour atteindre le gamète femelle; ce pseudopode per- fore la paroi de l'ampoule et assure une communica- tion entre les deux éléments sexuels ; nous avons vu comment s'opère ensuite le mélange des deux cyto- plasmes. La copulation, dans le Polyphagus^ plaide en faveur de notre théorie de la sexualité; la nature du pseudopode, les conditions dans lesquelles il se forme, indiquent clai- rement que les phénomènes sexuels ne sont qu'une variante de la nutrition ordinaire. La reproduction sexuelle du Polyphagus est exactement comparable à celle d'un Chlamydomonas : les différences qui existent entre le mode de formation de l'œuf dépen- dent uniquement du moment où se manifeste l'attraction sexuelle; chez le champignon, les gamètes sont d'abord indifférents les uns pour les autres; ils germent, se nourrissent aux dépens des Euglènes comme des zoo- spores; lorsque l'attraction sexuelle agit, il faut un organe copulateur pour assurer l'union des cytoplasmes ; cet 84 - P.- A, DANGEARD organe n'est autre chose qu'un filament nourricier adapté à sa nouvelle destination, de telle sorte que la sexualité est assurée par le même procédé et par les mêmes éléments que la nutrition ordinaire. Le moment où l'attraction sexuelle apparaît dans les gamètes est variable, et il est loin de correspondre pour les deux cellules en présence : on voit des gamètes mâles copuler dès la germination ; par contre des gamètes femelles atteignent le stade qui, chez les individus ordi- naires, précède immédiatement la germination (1). Ceci nous rend compte de la déviation que nous obser- vons dans la reproduction sexuelle des Mucorinées, des Péronosporées, des Saprolégniées, où la copulation a lieu entre les gamétanges eux-mêmes. Si tous ces faits s'expliquent facilement dans notre théorie, on conviendra qu'il n'en est pas de même avec la théorie régnante de Yan Beneden et celles plus récentes qui en découlent. It LA. NUTRITION HOLOPHYTIQUE La fonction chlorophyllienne domine la vie de la plante tout entière : l'étude de la morphologie générale des organes aériens nous en fournit la preuve évidente. Mal- heureusement, nos connaissances sur cette fonction, sur son origine, sur sa nature, sont encore très incomplètes ; ceux qui envisagent la science autrement qu'à travers le prisme trompeur des notions classiques s'en rendent bien compte. C'est ainsi que tout récemment, Davis, dans un mémoire sur les cellules-mères des spores chez les Antho- (1) P. -A. Dangeard : Recherches sur la structure du Polyphagus Euglenae (Le Botaniste, T^ série. 5*" fascicule, août 1900). NUTRITION ORDINAIRE 85 ceros, était amené à poser les questions suivantes : « Le plastidplasme est-il une forme particulière de protoplasme avec des caractères .morphologiques qui puissent per- mettre de le distinguer du trophoplasme, du kinoplasme, des centrosphères et des autres parties différenciées de la cellule ? Si ce plastidplasme existe, quelle forme assume- t-il à la période de l'ontogenèse dans laquelle la chloro- phylle manque ainsi que les autres pigments? Le plastide est-il un organe permanent de la celuUe, comme on le suppose généralement ? Comme le plastide est une région du protoplasme où le pigment existe, il se trouve être le siège d'une activité métabolique, et il est possible que la fonction puisse donner à l'élément sa forme et sa structure. On peut même concevoir que la différenciation d'un plas- tide ne repose pas sur des particularités du protoplasme lui-même, mais qu'elle représente simplement les effets du métabolisme spécial au pigment lui-même. » C'est avec raison que le même auteur considère la cytologie végétale comme ayant devant elle un champ d'investigation des plus importants, avec la structure des chromatophores et leur place dans l'ontogenèse (i). Nos observations récentes sur le Polytoma uvella. et celles que nous avons faites précédemment sur d'autres orga- nismes inférieurs nous ont suggéré quelques réflexions sur le parallélisme entre l'ontogenèse de la fonction chlo- rophyllienne et sa phylogénèse. Les organismes inférieurs incolores ne forment pas en général d'amidon dans leur protoplasme ; aussi ne saurait- on manquer d'être surpris de voir qu'à Torigiae de cha- cun des groupes qui forment la base des Chlorophytes, il existe un Flagellé incolore produisant soit de l'amidon, soit, ce qui revient au même, du paramylon. Pour le groupe principal, celui des Chlamydomonadi- (1) Davis : The Spore-Mother-Cell of Anthoceros {The Bot. Gaz., t. XXVIII, 1899, p. 95). 86 . p. -A. DANGEARD nées qui a donné naissance aux Métaphytes,nous trouvons le Polytoma uvelia étudié dans un travail précédent; il en est de même pour les autres groupes secondaires : Cryp- tomonadinées, Péridiniens, Eugléniens. C'est ainsi que le Chilomonas Paramœcium précède immédiatement dans l'évolution les Cryptomonas. Nous avons montré d'autre part que le Colpodella pugnax qui renferme en abondance de l'amidon dans son protoplasme pourrait bien être l'an- cêtre direct des Péridiniens (1); nous avons des raisons de croire que certains Péridiniens incolores, tels que le Gymnodinîum vorlicella forment de l'amidon sans l'inter- médiaire de leucites. Enfin, les espèces du genre Astasia, qui sont à la base des Eugléniens, sont dépourvues de leucites et ne possèdent pas de chlorophylle; elles n'en forment pas moins, à l'intérieur du corps, des corpus- cules nombreux de paramylon (2). On est en droit de formuler cette première conclusion : La formation de Vamidon ou du paramylon dans le cyto- plasme a précédé la différenciation des leucites et Vappa- rition de la chlorophylle au cours de l'évolution. Une seule observation, celle de Fisch, peut être op- posée à cette manière de voir : cet auteur a décrit en effet chez le Chilomonas Paramœcium des plastides ou amylo- plastes, en relation avec les grains d'amidon ; si le fait était exact, nous ne serions plus en droit de dire que. l'a- midon a précédé la différenciation des plastides ; nous serions plutôt conduit à admettre que la présence de l'a- midon est liée à l'existence de ces plastides. Kunstler s'exprime de la façon suivante (3) : « Au point (1) P. -A. Dangeard : L'organisation et le développement du Colpo- della pugnax (Le Botaniste, 7« série, 1900). (2) Klebs : Ueber die organisation einiger Flagellaten — Gruppen {Unt. auis d. Bot. Inst. z. Tûbingen, Leipzig, 1881, Bd. i, p. 322). (3) Kunstler : Recherches sur la morphologie des Flagellés {Bullet. se. de la France et de la Belgique, 3« série, 2» année, t. XX). NUTRITION ORDINAIRE 87 de vue de la situation des grains d'amidon, Butschli, le premier, leur a figuré une disposition régulière. Dans son mémoire de 1868 il figure, chez le Chilomonas, une assise amylogène, régulièrement disposée autour du corps. Sous ce rapport, le travail plus récent de Fisch (1) lui est infé- rieur, cet auteur répartissant l'amidon dans le corps de la manière la plus irrégulière et la plus fantaisiste. Mais Fisch a vu, — et il a cru être le premier en cela, oubliant peut-être de lire l'auteur qu'il combattait, — que chaque grain d'amidon était entouré d'une pellicule protoplas- mique plus épaisse d'un côté. « Tout en réservant mes droits de priorité, je constaterai cependant que l'observation de Fisch, telle qu'il a su la présenter, est d'un haut intérêt et mérite d'attirer l'atten- tion. Ces êtres, traités d'une certaine manière, colorés par l'iode, lui montraient, après dissociation de leur substance, les grains d'amidon bleuis, entourés par une mince couche jaunâtre de protoplasma, plus abondant en un point de la circonférence. Or, j'ai montré que, norma- lement, il existe une assise vacuolaire, plus ou moins régulière contenant ces grains. « Il semble donc admissible que cette assise s'est disso- ciée régulièrement en corpuscules protoplasmiques, cor- respondant par leur nombre, leur structure et leur dis- position aux mailles primitives de la couche décrite (2). » Cette description est quelque peu obscure et, pour ma part, j'ignore si Kunstler admet l'existence de plastides comme Fisch. Senn, tout récemment, dans ses études sur les Flagellés (3), accepte l'opinion de Fisch, et il figure d'après cet auteur les amyloplastes du Chilomonas Paramœcium. L'importance du problème en discussion (1) Fisch : Unters uber einige Flagell. [Zeitschr. f. wiss. Zoo/., Bd. 42, 1885). (2) Kunstler: Loc. cit., p. 445-446, (3) Senn : Flagellata [Die nat. Pflanzenfamilien, Leipzig, 1900). 88 P. -A. DANGEARD nous a engagé à faire de nouvelles observations sur cette espèce incolore; l'amidon se forme directement au sein du cytoplasme ; les grains sont souvent de grosseur très inégale ; sur les côtés du corps et à la partie anté- rieure, l'amidon ne se dépose que dans la couche parié' taie : les granules sont disposés en une seule assise régu- lière ; à la partie postérieure du corps, les grains d'ami- don s'étendent jusqu'au contact du noyau. Il n'existe aucune trace d'amyloplastes; le cytoplasme qui renferme l'amidon a une structure vacuolaire et les mailles qui li- mitent les logettes ont une structure homogène. Si l'on voulait chercher ici l'équivalent des plastides, il faudrait se reporter au chloroleucite en cloche des Cldamydomo- nas : ce serait l'assise amylifère tout entière qu'il faudrait considérer comme un plastide unique. Nous éprouvons quelque difficulté en considérant l'ensemble des végétaux à savoir si les choses se passent encore de la même façon au cours de l'ontogenèse d'une espèce déterminée. Il semble que, chez plusieurs algues tout au moins, les plastides sont devenus des formations permanentes de la cellule qui, dans les générations suc- cessives, proviennent toujours de la division d'éléments semblables préexistants (1). Cette continuité a été démon- trée en particulier pour les Conjuguées (2) et les Chlamy- domonadinées (3); Schimper a même étendu cette notion de la continuité des plastides à toutes les Chlorophytes ; selon lui, ces éléments ne prennent jamais naissance par nouvelle formation, c'est-à-dire par simple différenciation du protoplasma (4). (1) Schmitz : Die Chromatophoren der A\gen{Vêrhandl. natur.hist. Ver. derpr. Rheinlande u. Westf., Bd. 40, 1883). (2) Klebahn : Studien iiber Zygolen, I [Jahrb. f. w. Bot., Bd. xxii). (3)P.-A. Dangeard: Recherches sur les Ghlamydoinonadinées,Zoc. cit. p. 261. (4) Schimper: Uber der Eatw. derChl. und Farbk. [Bot. Zeil., 1883.— Unters. iiber die Ghlorophyllkorper {Pringsheim's Jahrb,{%Bb). NUTRITION ORDINAIRE 89 Cette notion de l'éternité des plastides est loin cepen- dant d'être démontrée ; elle a été combattue par God- frin (1) et Belzung(2) ; ce dernier auteur semble avoir donné d'excellentes raisons en faveur d'une formation nouvelle de plastides aux dépens du protoplasma ; mal- heureusement son opinion reste flottante : « Pour recher- cher l'origine des plastides ou leucites dans la plante, il est nécessaire, dit-il, de remonter aux premiers stades du développement de l'embryon, mieux encore à l'oeuf. Le germe des futurs corps chlorophylliens n'est alors re- présenté que par de simples vésicules, à contenu semi- fluide, incolore ou vert pâle, peu apparent, sans granu- lations autres que l'amidon et par suite difficile à mettre en évidence (Lin.); plus tard seulement, le substratum granuleux se constitue en même temps que la chloro- phylle l'imprègne, ce qui fait delà vésicule première un corps chlorophyllien complet, bien distinct du proto- plasma ambiant. » Toutefois, il ne semble pas en être toujours ainsi chez les plantes phanérogames. Dans diverses espèces, Papi- lionacées, Pois, Lupin...., l'ébauche première des chloro- leucites apparaît sous forme d'une simple vésicule, remplie de suc cellulaire et limitée par une paroi proto- plasmique analogue à celle des mailles ordinaires du protoplasma fondamental. Voici, par exemple, quels sont les stades du dévelop- pement pour le Pois ou le Lupin. Dans le très jeune embryon, les vésicules destinées à être constituées ulté- rieurement à l'état d'autant de grains verts, reçoivent chacune préalablement un grain d'amidon qui peut s'ac- croître jusqu'à remplir complètement la maille protoplas- (1) Godfrin : Anat. comparée des cotylédons {Ann. se. nat., 1884, t. XIX). . (2) Belzung : Recherches morphologiques et physiol.sur l'amidon, Thèse, Paris, 1887. 9d p. -A. DANGEARD mique qui le contient. Plus tard, quand la graine entre dans la phase de maturation, une sorte de végétation centripète du protoplasma envahit la vacuole et donne lieu au substratum protéique du grain vert, lequel, peu à peu, s'imprègne de chlorophylle. Pendant cette genèse, le granule d'amidon se résorbe dans la mesure même où la masse verte s'accroît, jusqu'à disparaître entièrement : l'amidon intervient donc comme matière première, dans la constitution des corps chlorophylliens ou chloroleu- cites (1). Malheureusement, Belzung ne se prononce pas sur le point important en discussion, celui de la permanence des leucites, car il ajoute : « Que l'on considère l'ébauche première des chloroleucites de la plante comme de sim- ples vésicules protoplasmiques, ou déjà comme des plas- tides dont la portion vivante se réduirait à la pellicule périphérique, le développement précédent n'en montre pas moins qu'au nombre des principes générateurs des grains verts, figure un hydrate de carbone (2). » Les observations de Davis permettent de supposer que, dans les Anthoceros, les chromatophores peuvent prove- nir d'une différenciation du protoplasma ; ce savant, en effet, n'a pas réussi à voir ces corps dans les cellules de Varchesporium ; on ne rencontre dans ces cellules qu'un cytoplasme granuleux contenant de petites vacuoles ; tou- tefois, Davis se réserve d'étudier à nouveau ce point spé- cial. Les cellules mères des spores ne montrent d'abord aucune trace des chromatophores ; la première preuve certaine de leur existence est fournie par la présence de grains d'amidon qui sont englobés dans une substance plus dure que le cytoplasme ordinaire (3). Nous n'hésitons pas à penser que, fréquemment dans (1) Belzung : Anatomie et physiologie végétales, Paris, 1900, p. 73-74. (2) Belzung : loc. cit,, p. 74. (3) Davis : loc. cit., p. 9L NUTRITION ORDINAIRE 91 l'ontogenèse d'une espèce de cas, les chromatophores sont de nouvelle formation ; ils se comportent à cet égard comme les pyrénoïdes qui, suivant les cas, se multiplient par bipartition ou apparaissent par nouvelle formation (1); s'il en était autrement, il semble qu'avec les méthodes perfectionnées, appliquées dans ces dernières années à l'étude du sac embryonnaire, nous aurions des renseigne- ments complets sur l'existence de ces éléments dans l'oeut et la façon dont ils se comportent lors des premiers cloisonnements de l'embryon. Nous venons de voir que la différenciation des plasti- des est précédée dans la phyllogenèse d'une formation d'amidon ; les observations de Belzung et de Davis ten- dent à montrer qu'il en est de même dans l'ontogenèse : par conséquent, les conditions de la différencisitiôn des plastides sont sans doute encore aujourd'hui celles qui ont donné naissance à ces éléments au cours de l'évolution. Il est important de remarquer que la formation des grains d'amidon, dans ces espèces incolores, a une ten- dance à se produire à la périphérie de la cellule, alors que le protoplasma qui environne le noyau en est dé- pourvu; cette disposition est très nette dans le Chilo' monas Paramœcium, où les granules d'amidon sont fré- quemment disposés en une couche régulière sous la membrane; elle est très marquée également dans lePoly- toma uvella dont la partie postérieure du corps ainsi que la partie antérieure sont souvent remplies d'amidon, alors que le centre de la cellule n'en montre aucune trace. Cela est dû, pensons-nous, aux différences qui existent dans le métabolisme cellulaire : le protoplasme, par le seul fait qu'il est plus ou moins éloigné du noyau, se trouve dans des conditions qui tendent à modifier sa structure et sa (l)P.-A.Ddngeard: Recherches sur les Chlamydomonadinées, /oc, cit., p. 191. 92 P. -A. DANGEARD nature même ; le mouvement de cyclose, si fréquent dans la cellule, annule, il est vrai, le plus souvent les effets de l'éloignement; mais s'il n'existe pas, ou s'il est incom- plet, le protoplasma périphérique arrive à différer sensi- blement du protoplasme qui entoure le noyau : le dépôt d'amidon dans le protoplasma périphérique immobilise ce dernier et tend ainsi à le soustraire à l'action directe du noyau. D'après cela, nous serions assez disposé à croire que la différenciation des leucites a eu pour origine la, formation d'amidon dans les points les plus éloignés du noyau ; la zone amylifère, devenue immobile^ a acquis des propriétés différentes de celle du protoplasma ordinaire en contact d'échanges incessants avec le noyau. On pourrait, à l'appui de cette idée, invoquer un certain nombre d'observations; c'est ainsi que chez les Cnjplo- monas, les chloroleucites sont pariétaux; ils occupent exactement la même situation que la zone amylogène dans le Chilomonas Paramœcium. D'autre part, la disposition des grains d'amidon dans le Polytoma uvella délimite des zones qui rappellent d'une manière frappante la confor- mation des diverses formes de chloroleucites rencontrées dans les Chlamydomonadinées. Enfin, nous avons vu que chez les Phanérogames les leucites naissent, selon Bel- zung,à la place occupée par un grain d'amidon ; les recher- ches de Davis permettent de supposer qu'il en est de même dans les cellules mères des Antfioceros. Si la formation de l'amidon et la différenciation des plastides ont précédé réellement l'apparition de la chlo- rophylle dans l'évolution, nous sommes en droit d'admettre que si les Champignons et les Métazoaires ne possèdent pas la fonction chlorophyllienne, cest parce que leurs ancêtres n'ont pas su mettre en dépôt dans leurs cellules V amidon nécessaire à la production du pigment chloro- phyllien. NUTRITION ORDINAIRE 93 Beizung a bien signalé, il est vrai, l'existence d'amidon dans les cellules de l'ergot de seigle et dans celles dusclé- rote des Coprins, et il se demande pourquoi les tissus des champignons n'auraient pas la propriété de verdir dans des conditions déterminées (i); nous sommes de son avis. Mais fût-il prouvé que la chose est impossible, qu'il n'y aurait pas lieu de s'en étonner; les Polytoma et les Cliilo- monsLs possèdent eux aussi de l'amidon; cependant il est peu probable qu'on puisse réussir à les colorer en vert, parce que nous ignorons le mécanisme de la synthèse qui, à un moment donné de l'évolution, a utilisé cet amidon pour la production de la chlorophylle; connaîtrions-nous la marche du phénomène, que nous serions peut-être encore impuissants à réaliser cette synthèse, car il y a loin encore de nos laboratoires à celui de la cellule. Si maintenant nous considérons l'origine de l'amidon, nous pouvons actuellement distinguer deux cas, selon qiie l'espèce est saprophyte ou parasite. Ainsi le Polytoma. uvella est, comme nous l'avons montré autrefois (2), une espèce saprophyte qui ne vit que de substances liquides ou gazeuses empruntées au milieu extérieur ; il exige, pour se développer, un milieu riche en matières organiques ; cette espèce trouve là tout le carbone organique qui lui est nécessaire pour la formation des grains d'amidon ; ceux-ci affectent le caractère d'une substance de réserve, d'un dépôt qui peut ensuite être repris par la cellule. Mais nous sommes en droit de penser qu'à l'origine le protoplasme incolore avait la faculté d'assimiler l'anhydride carbonique lui-même; la nitromonade a conservé cette propriété ; on peut, en effet, cultiver cette Bactériacée dans un milieu composé exclusivement de sels minéraux sans autre (1) Beizung : Recherches morphologiques et physiologiques sur l'ami- don, p. 115. (2) P. -A. Dangeard : Recherches sur les algues inférieures, loc. cit.^ 1888. 94 p. -A. DANGEARD élément carboné que du carbonate de calcium; il est pos- sible que d'autres espèces se comportent de la même façon. Le second cas est celui du Colpodella pugnax; ce flagellé est parasite d'algues vertes renfermant de l'amidon ; il ingère tout le contenu de l'algue; il n'a ainsi qu'à utiliser l'amidon d'origine étrangère pour en faire un élément de son propre organisme (1). (1) P. -A. Dangeard : L'organisation et le développement du Colpo- della pugnax (Le Botaniste, 7^ série, février 1900). CARL ZEISS Optisehe Weftestaette lÉflfl MICROSCOPES ET APPAREILS PHOTOMIGROGRÂPHIQUES Do première qualité depiih les plus simples jusqu'aux plus complets CATALOGUE ILLUSTRÉ GRATIS ET FRANCO Dépôt : à Paris, chez M. Adnet, constructeur, 20, rue Vauquolin MICROGRAPHIE E. GOGIT PARIS — 49, Boulevard Saint-Michel, 49 — PARIS Médaille d'Argent à l'Exposition Universelle de 1889 Spécialité de fournitures pour la Micrographie Lames porto-objets et lauiolles minces de toute espèce, cellules de verre, chambres humides, nécessaires à réactifs ; boîtes à préparations, instruments, verrerie, matières colorantes et réactifs pour les recherches de microscopie et de bactériologie préparés consciencieusement, d'après les instructions des auteurs, prépa- rations microscopiques variées, et spécialement de Bacilles et de Botanique. — Dépôt dos Microscopes Leitz et dos Microtomos MiEiiE et Ji .N(;. TiioMA. Puilioi-i. — Sociale fi'ançai^o fl'lmprimorip ol ilo Liliraiiir. 8e SERIE. 10 Juin 1902. LE BOTANISTE Directeur: M. P. -A. DANGEARD DOCTEUR ES SCIENCES, LAURÉAT DE l'iNSTITUT "Professeur de )3otanique a la Faculté de "Poitiers 3-Q' FASCICULKS SOMMAIRE P. -A. Dangeard. — l'' Recherches sur les Eugléniens, avec 4 planches et 53 figures dans le texte. 2o Le Caryophysème des Eugléniens. 3° Ouvrages reçus à la Direction du « Botaniste, >> pendant la pu- blication de la 8^ Série. PRIX DE L'ABONNEMENT A LA SÉRIE DE SIX FASCICULES 16 francs pour la France. — 18 francs pour l'Etranger DIRECTION : 1, Rue Jules-Ferry, POITIERS PARIS LONDRES J.-B. BAILLIÈRE BERLIN DULÂU & C" Bue Hautcfouillo, 19 FRIEDLANDER à SOHN Soho Square^ 37 N. W. Caristrassc, 11 RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS INTRODUCTION b^anÎ^"^ OARDBN Les naturalistes qui cherclient dans Tétude des Infu- soires et des Algues soit un simple délassement, soit la solution des problèmes les plus complexes et les plus captivants de la biologie générale, rencontrent à chaque instant des Eugléniens ; ils ne sauraient se défendre d'ac- corder tout au moins un instant d'attention à ces orga- nismes qui ont tout l'attrait du fruit défendu ; la contro- verse sur leur nature animale et végétale ne date pas d'hier, en effet, et elle dure toujours; il s'agit d'une bande de territoire contestée qui est l'objet d'un continuel litige entre deux pays voisins ; les médiateurs ont eu jusqu'ici peu de succès. Les partisans de l'animalité des Eugléniens les mon- trent en pleine activité dans la goutte d'eau qui les ren- ferme ; c'est une agitation extraordinaire ; on a l'impres- sion d'une ruche en pleine miellée ; les individus se croisent et s'entre-croisent ; les uns filent avec la rapidité d'une flèche, d'autres se contractent et rampent comme des vers; la plupart, nouveaux Cyclopes, ont, à l'avant, une sorte de 1 93 P.-A. DANGEARD disque rouge qui leur sert, dit-on, d'oeil unique. Mais la question du mouvement est devenue secondaire depuis que nous savons qu'il est impossible d'établir une dis- tinction quelconque entre les déplacements qu'effectuent les Flagellés et ceux des zoospores d'Algues et des gamètes. La description si poétique et pourtant si exacte de Turpin sur la manière « dont on voit les Goniuin se balancer avec grâce, pirouetter, se tourner en avant, en arrière, se ployer majestueusement ; comment ils forment une chaîne qui se promène en décrivant toutes sortes de figures, si bien qu'on croirait, dans une goutte d'eau ani- mée par ces émeraudes étincelantes, assister à un bal magnifique, masqué et paré » ; cette description, disons- nous, n'a pas empêché que les Goniufn soient classés d'une manière qui semble définitive dans les Algues. Le point oculiforme lui-même est sans valeur à cet égard ; dès 1842, Kutzing signalait l'identité de la tache rouge antérieure qu'il venait de découvrir dans les gonidies de VUlotrix zonata, avec l'œil prétendu des Infusoires (1). D'ailleurs, il est facile d'opposer une autre scène à la précédente lorsqu'il s'agit des Eugléniens ; ici, plus de mouvement, le repos, l'immobilité complète, absolue ; chaque cellule verte est entourée d'une gaine épaisse de gélatine à l'abri de laquelle elle se multiplie ; la végétation de ces colonies va se continuant ainsi fort longtemps, et sous cet état, il n'est pas un botaniste qui hésite à recon- naître une Algue. En explorant cette zone neutre constituée par les Eugléniens, nous avons accordé une attention spéciale à un caractère qui permettra sans doute de fixer plus tard, avec exactitude, ses frontières naturelles si indécises aujourd'hui. (1) Kutzing : Ueber die Vorwandlungen der Infusorien in niedere Algenformen, 18 i4. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIEN3 99 La valeur d'un caractère est en grande partie fonction de sa généralité ; c'est pour cela quel'autophagie sexuelle qui existe à partir des Chlamydomonadinées (1) et la karyokinèse qui débute chez les Amibes (2) ont dû jouer un rôle très important, prépondérant même, dans la dif- férenciation organique : lorsqu'on arrive à constater leur absence dans un groupe, il y a bien des chances pour que ce dernier se termine en cul-de-sac ; c'est ce qui est arrivé pour un certain nombre de familles d'organis- mes inférieurs, et nous avons ainsi l'explication proba- ble de leur isolement. Lorsque Blochmann et Keuten eurent décrit la division du noyau chez VEuglena viridis (3), ils ne songèrent qu'à en faire une modification peu importante de la karyoki- nèse ; en réalité, nous avons affaire à un mode de division particulier, caractéristique, auquel nous donnerons le nom d' haplomitose (mitose simple). En démontrant que ce processus existe sans modifiation appréciable chez plusieurs genres et de nombreuses espèces, sans qu'il y ait eu une seule exception rencontrée, nous fournissons le moyen de tracer les limites exactes de la famille des Eugléniens et la possibilité de retrouver son origine parmi les autres ProtiS' tes; nous donnons au caractère tiré du mode de division nucléaire une valeur en classification. Déjà, dans le domaine des Protozoaires, nous voyons qu'une des grandes subdivisions, celle des Infusoires ciliés, se différencie nettement des autres par la présence d'un macronucléus et d'un micronucléus à l'intérieur du corps ; en l'absence des cils vibratiles, remplacés par des tentacules, nous n'hésitons pas à classer cependant les (1) p. -A. Dangeard : Mémoire sur les Chlamydomonadinées (Le Botaniste, 6e série, 1899). (2) P. -A. Dangeard: Elude de la. karyokinèse chez l'Amœba hyalina (Le Botaniste, 7e série, 1900, p. 49-87). (3) Keuten : Die Kerntheilung von Euglena viridis (Zeitsch. f. wiss. ZooL,Bd. 60, 1895, p. 21b). 100 P.-A. DANGEARD Acinétiens au voisinage des Ciliés, proprement dits, parce qu'ils possèdent également un macronucléus et un micronucléus. Si, malgré les efforts tentés en ce sens, nous ignorons encore la filiation directe des Ciliés, il est à présumer cependant que les indications fournies par la constitution des noyaux seront tôt ou tard utilisées, et que c'est avec leur aide que nous saurons si ces êtres dérivent directement des Rhizopodes ou s'ils se détachent des Flagellés, ce qui est plus probable ; mais, pour arriver à une certitude plus complète, il faudra soumettre à une investigation histologique des plus minutieuses les genres Stepha7iomonas Kent, Trichonema From., Hetero- mastix Clark., Mitophora Perty, qui semblent posséder à la fois des flagellums et des cils vibratiles (1) ; or, nous ne savons rien de leurs éléments nucléaires. Nous ignorons donc encore quand et comment se sont diffé- renciés les Ciliés ; nous savons cependant que malgré leur organisation élevée, ils constituent un groupe fermé par en haut ; ils sont totalement étrangers à l'évolution des Métazoaires ; cela nous pouvons l'affirmer en nous appuyant, d'une part, sur la nature de leurs éléments nucléaires et, d'autre part, sur leur mode de reproduction sexuelle si particulier. Or, nous devons en dire autant des Eugléniens, parmi les Protophytes, avec cette diffé- rence que nous les connaissons moins. Actuellement, sous le nom d'Eugleninese, on a rapproché un certain nombre de genres dont quelques-uns peut-être feront retour aux Monadinées, lorsqu'on les aura mieux étudiés ; c'est précisément dans une telle controverse qu'apparaît la valeur des raisons fournies par le mode de division nucléaire ; ressemble-t-il à celui des Euglènes : aucune hésitation possible ; est-ce au contraire une véritable karyokinèse, alors nous avons affaire à une famille diffé- {\) G. Senn : Flagellata. in u Die Nalûrlichen Pflanzenfamilien von A. Engler und K. Pranil n. Livraison 202-203, p. 146. RECHERCHES SUR LES EUGLÈNIENS 101 rente. Si, par surcroît, on arrivait à établir comment la division nucléaire des Eugléniens dérive de l'amitose, on aurait par là même obtenu sans aucun doute la filiation directe de la famille en question, exactement de la même façon qu'on arrivera à connaître l'origine des Ciliés, en recherchant à quel moment sont apparus les macronucléus et les micronucléus. Si, maintenant, nous avançons que le groupe des Eugléniens est fermé par le haut au même titre que celui des Ciliés, per- sonne ne pourra, semble-t-il, opposer une objection sérieuse ; en effet, nous connaissons l'origine des Méta- taphytes avec certitude, surtout depuis que nous avons montré l'origine de l'autophagie sexuelle chez les Chla- mydomonadinées et l'existence dans tous les genres de cette famille, de la karyokinèse ordinaire. Ce qui est vrai des Eugléniens l'est sans doute aussi de plusieurs autres familles d'organismes inférieurs ; ainsi les observations que nous avons effectuées chez quelques espèces de Péridiniens incolores, jointes à celles de Lauterborn sur leCeratium hirundinella {i) font prévoir que là, également le noyau se divise suivant un schéma unique, caractéristique du groupe ; on ne saurait se dissimuler l'intérêt que pourront présenter des recher ches d'histologie comparée entre les noyaux des Péridi- niens, ceux des Chrysomonadinées et ceux des Dia tomées ! (1) Lauterborn : Kern und Zellleilung von Ceratium hirundinella (Zeits. f. wiss. ZooL, Bd. lix, 1895, p. 167-190). 102 P. -A. DANGEARD HISTORIQUE Les Eugléniens ont presque toujours été étudiés jus- qu'ici avec les Flagellés, et leur histoire est intimement liée à celle des Infusoires. Le premier essai de classification des Infusoires, si nous négligeons les tentatives faites par Hill (1) et restées dans l'oubli, est dû à O.-P. Mûller (2) ; il s'agissait de soumettre aux règles de la nomenclature linnéenne une foule d'organismes imparfaitement connus, à cause de l'imperfection des méthodes d'observations et des in- struments d'optique dont on disposait alors. Il ne pouvait donc être question à ce m^oment de délimiter le groupe des Eugléniens ; le genre Cercaria de Muller renfermait à côté du Cercaria viridis et du Cercaria pleuronectes qui sont devenus respectivement VEuglena viridis et le Pha- eus pleuronectes, des helminthes, plusieurs espèces de Rotateurs, quelques Infusoires symétriques, un Péridi- nien, etc.; la plupart des autres genres étaient à l'ave- nant, et on trouvait confondus avec les Infusoires des Navicules, des Anguillules, des propagules d'Algues. Malgré ces défauts inévitables, le travail de Muller réalisait vm progrès considérable. Les ouvrages d'Ehrenberg et particulièrement le grand mémoire publié en 1838 par ce savant (3) ont eu un reten- tissement considérable ; sans nous occuper ici d'appré- cier l'œuvre dans son ensemble, nous constaterons que le groupe des Eugléniens tend à se dessiner au milieu des autres Infusoires ; Ehrenberg décrit avec une pré- cision sufTisante : Euglena sanguinea, E. hyalina, E. de- (1) Hill : Essày ofnatural history, 1752. (2) Muller: Animalcula Infusoria fluviatilia et marina, 1786. (3) Ehrenberg : Die Infusoriensth. aZs volkommene Organismen. Leip- zig, 1838. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 103 ses, E. vividis, E. spirogyra, E. acus; nous devons encore signaler les espèces suivantes qui font actuellement partie du genre Phacus : E. pyrum, E. pleuronectes, E. Longi- Cciuda, E. triquetra ; le genre Trachelomonas est moins bien partagé, car ses divers représentants sont dissé- minés dans les genres Trachelomonas, Lagenella, Chœto- typhla, Chœtoglœna, et ces deux derniers sont même placés parmi les Peridinsea ! Ehrenberg s'était fait une idée fausse de l'organisation des Infusoires : il leur attribua un système digestif avec une bouche, des estomacs, un intestin, un système repro- ducteur avec des testicules et des ovaires ; un système nerveux avec un cerveau ou tout au moins des gan- glions ; sa classification se ressent de ces erreurs. Les Infusoires, considérés comme Polygastriques, sont divi- sés en Anentera, sans intestin, et Enterodela, pourvus d'intestin. Les Anentera, qui seuls nous intéressent ici, sont partagés en trois sections : la première comprend ceux qui sont sans pieds ou appendices ; ce sont les Gymnica ; la deuxième renferme ceux qui ont des pieds ou appendices variables ; ce sont les Pseudopoda ; la troi- sième contient ceux qui sont ciliés ou Epitricha. Les Gy)nn2ca forment plusieurs familles : 1° lesMona- dina avec les genres Monas, Uvella, Polytoma, Micro- glena, Phacelomonas, Glenomorum, Doxococcus, Chilomo- nas et Bodo ; 2° les Cryptomonadina avec les genres CryptomonaSy Ophidonionas, Prorocenlrum, Lagenella^ Cryptoglena et Trachelomonas', 3° les Volvocina, avec les genres Gyges, Pandorina, Gonium, Syncrypta, Syniira, Uroglena, Eudorina, Chlamydomonas, Sphœrosira et Vol- vox ; 40 les Vibrionia ; 5o les Closterina ; 6» les Astasise avec les genres Astasia, Amblyophis, Euglena, Chlorogo- nium, Colacium et Distigma, et enfin 7° les Dinobryinâ avec les genres Epipyxis et Dinobnjon . Les Pseudopoda nus constituent la famille des Amœ- 104 P.-A. DANGEARD bsea, et ceux qui sont cuirassés sont des Arcellina ou des Bacillaria. Les Epitrîcha. nus comprennent la famille des Cycli- dina et les cuirassés celle des Peridinœa. Cette classification emprunte à l'appareil digestif les caractères de ses deux divisions principales, Anentera et Enterodela formant l'ensemble des Polygastriques ; bien qu'elle repose sur une base erronée, plusieurs de ses groupes sont parfaitement naturels ; les espèces sont décrites, pour la première fois, avec un luxe de détails et un souci de la synonymie qui étonnent; aussi a-t-on pu écrire avec raison : « Tout ce qui a rapport à la biblio- graphie et la synonymie anciennes est fait avec un si grand soin dans l'ouvrage de M. Ehrenberg que, sauf de rares exceptions, il est parfaitement inutile que ses suc- cesseurs reviennent sur ce sujet (1). » Dujardin apporta des modifications importantes aux théories d'Ehrenberg (2) ; il prouva que les Infusoires ne possèdent pas de véritable intestin ; il fit voir que les prétendus estomacs n'étaient autre chose que des vacuo- les creusées dans une substance gélatineuse dont il dé- crit les propriétés et qu'il désigne sous le nom de sarcode devenu depuis synonyme de protoplasme. Cesontles caractères de l'appareillocomoteur qui servent dans la classification de Dujardin à délimiter les ordres. Le premier ordre est destiné à contenir des animal- cules chez lesquels on n'observe aucun organe spécial pour la locomotion, soit qu'il n'existe pas, soit que son extrême ténuité le dérobe encore à nos moyens d'investi- gation ; cet ordre renferme la famille des Vibrioniens. Dans le second ordre, se trouvent réunis les organismes qui sont pourvus d'expansions variables formées par la (1) Claparèdo et Lachmann : Etudes sur les Infusoires et les Rhizo- podes, Genève, 1868, p. 6. (2) Dujardin : Histoire naturelle des Zoophytes, Paris, 1841. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 105 substance même du corps, laquelle, par l'effet d'une force propre, s'allonge et s'étend au dehors en lobes, en fila- ments susceptibles par la rétraction de revenir plus ou moins promptement se fondre dans la masse : cet ordre ren- ferme les Amibiens, les Rhizopodes et les Actinophryens. Dans le troisième ordre, se voit toujours un filament flagelliforme simple ou multiple servant d'organe loco- moteur et dont la présence est un caractère général et exclusif. Ce troisième ordre renferme les Monadiens, Volvociens, Dinobryens, Thécamonadiens, Eugléniens, Péridiniens. On voit apparaître ici pour la première fois la famille des Eugléniens avec les genres Peranema, Asta- sia^Euglena, etc.; mais Dujardin, accordant trop d'impor- tance à la présence d'une enveloppe résistante non con- tractile, place le genre Trachelomonas et le genre Phacus parmi ses Thécamonadiens. Ehrenberg, en réunissant les espèces de ce dernier genre aux Euglènes, avait eu un sens plus précis des affinités de ces êtres. Les deux autres ordres IV et V sont destinés aux In- fusoires ciliés. Nous voyons que Dujardin éloigne des Infusoires les Closterina et les Bacillaria d'Ehrenberg, qui sont sans hésitation possible des végétaux ; en écartant de sa clas- sification les Vibrioniens qui sont aussi des végétaux, les divisions qui restent sont celles que nous adoptons encore aujourd'hui dans l'étude des Infusoires ; le pre- mier ordre est celui des Rhizopodes ; le second celui des Flagellés ; le troisième, formé par les ordres IV et V, celui des Ciliés. C'est à ce titre que Dujardin a pu être considéré comme le père de la classification moderne des Infusoires « und insofern kann man Dujardin wohl den Vater der moder- nen Classification der Infusionsthiere nennen (1) ». (1) Stein : Der Organismus der Infusionsthiere, III, Abth., I Halfte. Leipzig, 1878, p. 9. 106 P. -A. DANGEARD Tandis qu'Ehrenberg désignait le flagellum des Infu- soires sous le nom de trompe, Dujardin montrait que les expansions des Amibes et des Diffiugies, tantôt plus courtes, tantôt plus effilées, et enfin tout à fait filiformes, simples comme dans le Trlnema, ou ramifiées dans les Gromies et les Rhizopodes, offrent tous les passages jusqu'au long filament flagelliforme qui sert d'organe locomoteur aux Monades; il avançait également que les cils vibratiles paraissent être de la même nature que ces divers filaments, opinion qui pouvait sembler audacieuse, alors qu'Ehrenberg avait attribué le mouvement des cils à des muscles basilaires. En fondant ce groupe des Flagellés, pour les « ani- maux pourvus d'un ou plusieurs filaments flagelliformes servant d'organes locomoteurs », Dujardin ajoutait cette mention : « Sans bouche » ; c'était là une grave erreur qui n'avait de comparable que celle commise par Ehren- berg en attribuant des estomacs à tous ses Anentera ; l'imagination de ce dernier savant l'avait emporté trop loin ; en voulant réagir, Dujardin était amené à nier la nutrition animale des Flagellés ; il n'admet chez les Mo- nadiens, par exemple, aucun autre mode de nutrition que l'absorption effectuée par toute la surface externe ou par les vacuoles ; pour expliquer l'ingestion des corps étran- gers, observés par Ehrenberg sur plusieurs espèces, il arrive à raisonner de la manière suivante : '<■ Des vacuo- les ou cavités sphériques se creusent spontanément dans le corps des Monadiens près de la surface ; quelquefois, elles s'ouvrent au dehors, et, venant à se contracter, elles enferment les corps étrangers qui y sont entrés. C'est ainsi que sont venus à l'intérieur les divers objets que ces animaux paraissent avoir mangés et non par une bouche qui n'existe point (1). » (1) Dujardin : Loc.cit., p. 271. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 107 En ce qui concerne la reproduction même des Fla- gellés, Dujardin n'avait pas été plus heureux, car, à pro- pos des Monadiens, il exprime l'opinion suivante : « Quant au mode de propagation des Monadiens, que M. Ehren- berg dit avoir lieu par division spontanée transverse dans huit de ses genres, et suivant deux directions en croix dans son Polytoma, je dois avouer que je ne l'ai jamais vu bien nettement ; il me semblerait plus probable que la propagation a lieu comme pour les Amibes par l'abandon d'un lobe ou de l'extrémité d'une expan- sion (1). M En somme, si Ehrenberg a trop souvent péché par excès d'imagination, Dujardin n'est pas à l'abri de toute critique; quoi qu'il en soit, ces deux noms resteront inti- mement associés dans l'histoire des Infusoires. Les botanistes avaient depuis longtemps rencontré des corpuscules reproducteurs mobiles chez les Algues. Mer- tens avait découvert, en 1805, des zoospores dans le DraiDarnaldia. plumosa (2) : deux ans plus tard, Trente- pohl (3) voyait le même phénomène se produire dans une Vaucherie; Nées von Esenbeck (4), Treviranus (5), Bory de Saint-Vincent (6), Unger (7), Thuret (8), Meyen (9), Agardh (10) font des observations analogues sur diverses (1) Dujardin : Loc. cit., p. 277, (2) Consulter : Weber und Mohr's : Beitrâge zur Naturkunde, I, 1805, p. 345. (3) Consulter : Roth's Botanisch. Bemerk. und Beobacht., 1807, p. 185. (4) Nées von Esenbeck : Die Algen des sussen Wassers nach ihrer Entwick., Bamberg, 1814. (5) Treviranus : Beitrlige zur Pflanzenphys. (Vermischte Schriften, 1814). (6) Bory de Saint-Vincent : Encyclopédie méthodique, Histoire natur., t. II. (7) Unger: Acten der Acad. der Naturforsch., vol. XIII. (8) Thuret: Recherches sur les organes locomoteurs des Algues (Ann. se, nat., 2« série, t. XIX, 1843). (9) Meyen : Nov. Acta Acad. Oaes. Leop. natur. curiosorum., vol, XIX, Pars 2. (10) Agardh : Annales des se. nat., 2e série, 1836. 108 P. -A. DANGEARD Algues et Champignons. Nées von Esenbeck avait sans façon baptisé ces zoospores du nom d'Infusoires, préten- dant même avoir reconnu des viscères à leur intérieur. Unger, qui avait porté son attention sur les zoogonidles du Vaucheria clavata, ne doute pas un seul instant du caractère animal de ces éléments, et, pour tout concilier, il admet que la zoogonidie, en germant, quitte la vie ani- male pour ressusciter dans la vie végétale (1). Fresenius se refuse à voir des animaux dans les zoospores d'Algues, mais il avoue qu'elles ne diffèrent par aucun caractère essentiel, soit dans le mode d'organisation du corps, soit en ce qui concerne les mouvements, de certains Infusoires d'Ehrenberg; il arrive ainsi à conclure qu'il y aurait pro- bablement lieu d'exclure ces infusoires de la série ani- male pour les reporter parmi les végétaux (2). Les classificateurs vont se trouver désormais dans une situation fort embarrassante : comment distinguer parmi les organismes inférieurs l'animal du végétal ? Siebold, dès l'année 1844, cherche à résoudre cette difficulté (3) ; il s'appuie sur la manière d'être du corps ; selon lui, le caractère qui sépare l'animal de la plante, c'est que l'un est un organisme de forme invariable, alors que Vautre jj&ut effectuer des contractions et émettre des expansions ; W résulte de là que les Volvocinées doivent être retirées des Infusoires, au même titre que les Clos- térinées et les Bacillariacées. Dans sa classification, Sie- bold divise les Infusoires en Astoma et Stomatoda ; ce dernier groupe, très naturel, correspond aux Infusoires ciliés, mais la désignation d'Astoma pour le second groupe indique que Siebold partageait l'erreur de Du- jardin sur l'absence d'une bouche chez les Flagellés ; de (1) Unger: Die Pflanze im Moment der Thierwerdung. Wien, 1843. (2) Fresenius : Zw Controverse ûber die Verwandl. von Infusorien in Algen^ Frankfurt-a-Mein, 1847. (3) iSiebold : Dissertatio de finibus inter'regnum. animale et vegeiabile constitiiendis, Krlangcc, 1844. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 109 plus, ce savant rapprochait à tort sous ce nom d'Astoma. les Opalines des Astasiées et des Péridiniens. Dans un mémoire postérieur, ce même savant revient sur les affi- nités végétales des Volvocinées^ qui sont, d'après lui, des Algues unicellulaires passant presque toute leur exis- tence à l'état de zoospores (1). Leuckart va beaucoup plus loin, puisqu'il n'hésite pas à ranger dans le règne végétal les Péridiniens et les Asta- siées, y compris les Euglènes (2). Cette même année 1852, Perty publiait son grand tra- vail sur les organismes inférieurs (3) ; il essaie d'esquiver la difficulté en créant le groupe des Phytozoïdia. (ani- maux-plantes), à côté du groupe des Ciliata^ destiné à renfermer les Infusoires ciliés. Parmi les Phytozoïdia^ Perty distingue une I" section, celle des Filigera, avec les familles suivantes : Peridinida, Cryptomonadina, The- camonadina, Astasisea, Monadina, Volvocina, Dinobryina. Ls section II est celle des Sporozoïdia. La section III, des Lampozoïdia, contient la seule famille des Vibrionida. Il est extrêmement curieux de voir Perty placer dans les Sporozoïdia les zoospores des Algues et des Champi- gnons, qu'il s'agisse d'une Vauchérie, d'un Cladophora, d'un Ulothrix ou d'un Achlya ; à ce compte, les anthéro- zoïdes découverts récemment chez les Cycadées et les Conifères devraient prendre place dans la classification des Infusoires! Cette idée, malgré son originalité évidente, a pourtant un fonds de vérité, si l'on veut bien réfléchir que le règne végétal a évolué aux dépens des Flagellés et que la similitude d'organisation entre les gamètes et les Infusoires n'est autre chose qu'un rappel de la structure ancestrale (4). (1) Siebold und Kolliker : Zeitschr. f, wiss. Zool., Bd. I, 1849. (2) Bergmann und Leuckart : Vergleichende Analornie und Physio- logie, Stuttgart, 1852, p. 132. (3) Perty : Zur Kenntniss kleinster Lebensformen, Bern, 1852. (4) P. -A. Dangeard : Etude comparative de la zoospore et du spermato- zoïde (Le Botaniste, T^ série, 1891). 110 P-A. DANGEARD Selon Perty, les Phytozoïdes sont dépourvus de bou- che; ils ne peuvent donc se nourrir d'aliments solides, mais seulement des liquides qui les entourent ; cet auteur avait cependant observé la présence d'une Bacillariée dans le Peranema, protractam et des filaments étrangers à l'intérieur de VAnisonema. acinus ; il avait même cru apercevoir un débris de fibre végétale chez une forme d'Euglena, viridis [Amblyophis viridis) ; mais, comme Du- jardin, il refuse de se rendre à l'évidence d'une digestion animale chez certains Piagellés. Ces exceptions sont si rares, dit-il, qu'elles ne prouvent nullement l'existence d'une bouche, ces corps étrangers ayant pu être intro- duits dans le corps par une action mécanique, une pres- sion, ou bien englobés par la surface comme chez les Rhizopodes (1). Perty décrit deux modes de reproduction, l'un par di- vision, l'autre pacv blasties : l'existence d'une division lon- gitudinale est signalée chez les Péridinidiens {Ceratium hirundinellà) , chez VEuglena acus, VEuglena spirogyra ; il a vu une division en croix dans le Chlorogonium eu- chlorum ; ce sont là des faits exacts que les observations ultérieures ont vérifiées. Il n'en est pas de même de la théorie des blasties ; ces prétendus germes se voient lorsqu'on écrase l'Infusoire ou qu'il se décompose ; ils persistent alors à titre de corpuscules indépendants qui ont pour fonction de multiplier l'espèce ; on voit par là à quelles suites d'erreurs Perty s'est laissé entraî- ner. Un botaniste dont le nom est attaché aux plus grandes découvertes algologiques, Thuret, était loin de partager l'opinion de Siebold ; dans ses recherches sur les zoo- spores des Algues (2), il reconnaît que l'organisation de (1) Perty: Loc. cit. p. 6i. (2) Thuret : Recherches sur le» zoospores des Algues (Ann. scienc. na- tur., Bot., série lll, vol. XIV, 1850. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 111 ces éléments présente beaucoup d'analogie avec celle des Infusoires ; il insiste même sur la ressemblance très grande qui existe entre les corps reproducteurs des Con- ferves et le Diselmis viridis {Chla.niydomonas Pulvis- culus Ehr.) ; le caractère distinctif propre aux zoospores est leur germination, cest-k-dire leur extension, en un tissu semblable à celui de la plante mère. Selon ce savant, les Diselmis, les Gonium, les Pandorina. les Volvox, le Pro- tococcus pluvialis, les Euglena, les Tetraspora, etc., ont des caractères d'animalité trop prononcés et trop perma- nents pour qu'il soit possible de les rapporter au règne végétal ; il propose de les réunir, avec tous les autres Infusoires colorés en vert, en un même groupe sous le nom de Chlorozoïdes. Thuret ne se fait d'ailleurs aucune illusion sur la valeur du caractère emprunté au mode de germination des zoospores ; il reconnaît lui-même qu'il ne saurait servir de base à une division entre les produc- tions inférieures des deux règnes, car les végétaux qui occupent le dernier rang de la série des Algues (Nosto- chinées, Palm.ellacées, etc.), semblent n'avoir d'autre mode de reproduction qu'une division spontanée analogue à celle des animaux les plus simples. Quanta la contrac- tilité invoquée par Siebold, elle ne saurait être consi- dérée comme l'apanage exclusif du règne animal, puis- qu'elle existe assez marquée dans les zoospores de Vau- chei'ia, de Saprolegnia et du Stigeoclonium protensum. Du reste, Thuret admet que l'extrême analogie des animaux et des végétaux inférieurs ne permet pas de tracer une ligne de démarcation précise entre les deux branches du règne organique (1). La plupart des botanistes se sont rangés cependant à la manière de voir de Siebold sur la nature végétale des Volvocinées et les remarquables mémoires publiés à cette (1) Thuret : Loc.cit., p. 250. 112 P.-A. DANGEARD époque par Cohn (1), Braun (2) et Naegeli (3) sur les Algues ne pouvaient que fortifier cette opinion. Naegeli, pour distinguer les Algues unicellulaires des Infusoires, propose de s'appuyer sur les remarques sui- vantes : {'' Ici membrane des Algues est forinée comine celle des autres végétaux par de la cellulose ; 2° à Vintérieur des cellules d'Algues, se trouve de la chlorophylle ou un pig- ment analogue ; 3° la présence d'amidon dans une cellule implique la nature végétale de cette cellule ; 4° les Algues unicellulaires ont une forme fixe, qu'elles ne peuvent mo- difier par contractilité. Malgré les critiques que chacun de ces caractères a pu faire naître, nous n'hésitons pas à dire que Naegeli a de- vancé son époque; sa conception des différences entre une cellule végétale et une cellule animale était bien supérieure à toutes celles que nous aurons à enregistrer. Pour comprendre la valeur de ces caractères, il ne faut pas les envisager en bloc ; ainsi, la cellulose a été rencontrée chez les animaux, dans le manteau des Asci- dies, et, d'autre part, certaines zoospores sont dépour- vues de membrane ; les Euglènes, dont le corps est très contractile, renferment de la chlorophylle, alors que le Polytoma uvella, qui est une espèce incolore, produit de l'amidon ; nous verrons à expliquer ces apparences d'anomalie lorsque nous aurons à prendre parti dans la question des affinités. Schmarda enrichit la famille des Eugléniens de quel- ques espèces : dans un premier mémoire (4), on trouve la (1) Cohn iNachtràge z. Naturgesch, des Protococcus pluvialis {^o\. Aot. Ac. Leop., vol. XXII, 1850). (2) A. Braun : lietrach. iïber die Erscheinung der Verjungung in der Na/ur, Leipzig, 1851, et De Algis unicellularibus nonnullisnovis vdmi- nus cognitis. Berlin, 1855. (3) Naegeli : Gatlungen einzelliger Algenphysiol. und syst. bearbeitet. Zurich, 1849. (4) Schmarda : Kleine Beilr. zv.r. Naturg. der Infusorien. Wien, 1846 RECHERCHES SUR LES EUGLÉXIENS 113 description de VAslasia, margaritifera et de VEuglena, oxyuris, espèces nouvelles bien caractérisées; on ne sau- rait en dire autant de ïEaglena chlorophœnîcea, qui, selon Stein, ressemble à VEuglena, sanguinea et de VEuglena ovum, qui n'est autre chose que la forme contractée de VEuglena viridis. Dans le second mémoire (1), nous notons le Lagenella acuminala, passé depuis dans le genre Tra- chelomonas et VEuglena pygmsea, insuffisamment diffé- renciée selon Stein de VEuglena viridis. D'un mémoire d'Eichwald, dont les diverses parties ont paru dans le Bulletin de la Société impériale des natura- listes de Moscou, en 1844,i847j 1849, 1852, et qui sont con- sacrées à l'étude des Infusoires, nous ne retiendrons que VEuglena hispidula, classée maintenant dans le genre Phacus. Weisse s'est occupé spécialement deVEuglena viridis et de son développement en culture, ce qui lui a permis d'observer des faits intéressants (2) ; au bout de quelques jours, les individus avaient perdu leurs mouvements, s'étaient arrondis en sphère ; le corps, après s'être entouré d'une membrane, se divisait en deux ; il s'agis- sait là de la division ordinaire. Après une quinzaine de jours, certains des kystes présentèrent des modifications remarquables : la chlorophylle disparaissait, le contenu devenait plus clair ; l'auteur observa alors des forma- tions endogènes qu'il ne sut interpréter ; il lui fut impos- sible de décider si les jeunes embryons mis en liberté étaient de jeunes Euglènes ou des spermatozoïdes. En réalité, Weisse avait affaire à un parasite de la familUe des Chytridinées, auquel nous avons donné plus tard le nom de Sphserita endogena Dang. (3). (1) Schmarda : A^eue Formen von Infusorien (Denksch. der Wiener Acad. der Wiss., Bd. I, 1850). (2) Weisse : Ueber den Lebenslauf der Euglena (Bull. phys. nat. de l'Aoad. de Saint-Pétersbourg, t. XII, 1854). (3) P. -A. Dangeard ; Recherches sur les organismes inférieurs (Ann. se. nat., Bot., série VII, t. IV). 8 114 P.-A. DANGEARD Focke n'est pas de ceux qui tendent à multiplier les espèces à l'infini (1) ; il a eu l'idée que l'influence des saisons et l'âge des individus avaient pour résultat de modifier la forme du corps de telle sorte que la même espèce se trouvait décrite plusieurs fois sous des noms différents ; cette hypothèse, juste en elle-même, a conduit ce savant à ne considérer VAmblyophis viridis, VEuglena. deses, VEuglena acus, VEuglena spirogyra que comme de simples variétés de VEuglena viridis ; c'était aller beau- coup trop loin. Focke a été plus heureux lorsqu'il a pro- posé le nom de paramylon, pour désigner la substance, voisine de l'amidon, qui se trouve à l'intérieur des Eu- glènes, sous la forme de corpuscules ou de bâtonnets; il a reconnu également les stries en spirale de la cuti- cule. Les travaux de Carter sur les Algues et les Infusoires sont nombreux : on y rencontre une foule d'erreurs à côté d'observations importantes : sous le nom d'Euglena zonalis et d'Euglena fusiformis, il a décrit deux formes qui doivent être rapportées sans doute au Phacus ovum (2) ; nous croyons inutile d'insister ici sur la théorie de cet auteur relative à la reproduction des Eugléniens ; ce savant a été induit en erreur, d'un côté, par les corpuscules de paramy- lon ; del'autre, parles formations endogènes parasitaires (3). Carter sépare les Eugléniens des Astasiées; les premiers sont des plaîites qui se nourrissent par endosmose, un se- cond caractère montre leur nature végétale, c'est la pré- sence sur la membrane de stries en spirale comme dans les trachées des faisceaux vasculaires. Claparède et Lachmann n'acceptent pas de placer les Eugléniens en dehors des Infusoires ; ils veulent même (1) Focke : Physiol. Studien, Bremen, 1847. (2) Carter : Ann. of Natur. Hist., série III, vol. III, 1859. (3) Carter : Notes on the Fre&hwater Infusoria. of the Island of Bom- bay (Ann. of nat. Hist., série II, vol. XVIII, vol. XX). RECHERCHES SUR LES EUGLÉMENS 115 restituer au groupe des Flagellés les Volvocinéep, que les botanistes étaient accoutumés déjà à regarder comme des Algues. Le critérium de fanimalité consiste pour ces savants dans la présence d'une vacuole contractile ; la dé- couverte de cet organe chez une foule de zoospores d'Al- gues a enlevé toute signification à ce caractère. Claparède et Lachmann, qui sont des adversaires ré- solus de l'unicellularité des Infusoires, classent ces êtres en quatre ordres, d'après le tableau suivant (l) : Ordre I. Ciliata. (Des cils ou cirrhes même à l'état a- dulte: pas desu- Pas de cils à 1 état J adulte. I Ordre II. Suctoria. Des suçoirs. ^ Un ou l ^^^^^ ^^ 0^ ^^^ ^^' ) plusieurs / gellums, encore [ Ordre III. Cilioflagellata. flagellums p ^es «ils- { ,, , t.. n, „ , ° l Pas de cils, | OrdrelV. Flagellala. Les recherches nombreuses effectuées par ces deux savants s'étendent seulement aux trois premiers ordres : nous n'avons donc pas à nous en occuper spécialement ; contrairement à l'idée de Leuckart, qui plaçait les Péridi- niens parmi les végétaux, ils se rangent, disent-ils, à l'opinion la plus généralement accréditée, c'est-à-dire à celle qui considère ces êtres comme des animaux (2). Le nom de Cienkowski mérite une mention particulière: ce savant suit avec un soin scrupuleux V ensemble du développement d'un être ; il établit la succession des diver- ses phases de la vie, nutrition, reproduction, enkyste- ment, et si l'état de la technique histologique ne lui a pas permis de voir tous les détails d'organisation, il n'en est pas moins vrai que ses travaux peuvent être cités comme des modèles d'exactitude et de précision. (1) Claparède et Lachmann : Etudes sur les Infusoires et les Rhizopo- des, Genève, 1868. (2) Claparède et Lachmann : Loc. cit., p. 392. llS P.-A, DANGEARD Dans un premier mémoire (1), Cienkowski nous fait connaître les Vampyrelles et les Monadinées zoosporées qu'il considère comme des animaux à cause de leur -niods de nutrition ; dans deux autres mémoires, il étudie com- parativement les Euglena, les Çryptomonas, les Vacuola- na, les Colacium et plusieurs Palmellacées ; il reconnaît à tous ces êtres des affinités végétales (2). Stein, au contraire, cherche à rendre à Torde des Fla- gellés son extension ancienne, en lui restituant non seu- lement les Eugléniens, les Cryptomonadiens,mai8 encore les Volvocinées et les Chlamydomonadinées (3). Il groupe de la manière suivante les familles et les genres : 1° Monadina, comprenant les genres Cercomonas, Monas, Gonionionas, Bodo, Phyllomitus, Tetramitus, Tre- pomonag, Trichomonas, Hexamita, Lophomonas, Platy- theca. — 2* Dendromonadina avec les genres Dendromonas, Cephalothamnium, Antophysa. — 3°Spongomonadina, com- prenant les Cladomonas, Bhipidodendron, Spongomonas Phalansterium. — A° Craspedomonadina, comprenant les Codonosiga, Codonocladium, Codonodesmus, Salpingœca. b° BiKOEGiDA, avec les deux genres Bihoeca et Poterio- dendron. — 6° Dinobryina, renfermant les Epipyxis, Dino- bryon. — 7» Chrysomonadina, avec les genres Cœlomonas Raphidomonas, Microglena, Clirysomonas, Uroglena, Syn- crypta, Synura, Hymenomonas, Stylochry salis, Chrysopy- xis. — 8" Chlamydomonadina, contenant les Polytoma, Chlamydomonas, Chlamydococcus, Phacotus, Coccomonas, Tetraselmis et Gonium. — 9* Volvocina, avec les genres Eudorina, Pandorina, Stephanosphsera, Volvox. — 10° Hy- (1) Cienkowski : Beitràge zur Kenntniss der Monaden (Archiv. f. mi- krosk. Anat.,Bd. I, 1865). (2) Cienkowski : Ileber einige chlorophyl. Glœocapsen (Bot. Zeit., 1865). — Ueber Palmellaceen und Flagellaten (Archiv. f. mikrosk. Anat., Bd. VI, 1870). (3) Stein : Der Organismus der Infusionslhiere, Abth. III, Heft I, Leipzig, 1878. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS il7 DROMORiNA, Comprenant les Chlorogonium, Chlorangium, Pyramidomonas, Chloraster, Spondylomovum. — H'Cryp- TOMONADiNA, avec Igs genres Chilomonas, Cryptomonas, Nephroselmis. — 12*CHLOROPELTiDEA,dont les genres sont: Cryptoglena, Chloropeltis, Phacus. — 13° Euglenida, avec les genres Euglenay Colacium, Ascoglena, Trachelomonas. — 14°AsTASiA^, dont les genres sont : Eutreplia, Astasia, Heteronema, Zygoselmis, Peranema. — 15° Scytomonadina, renfermant les Scytomonas, Petalomonas, Menoidium, Atractonema, Phialonema, Sphenomonas, Tropidocyphus, Anisonema, Colponema, Eatosiphon. Par le nombre des espèces étudiées, par la perfection des figures qui leur sont consacrées, l'ouvrage de Stein est un véritable monument élevé à la science ; il sera con- sulté au môme titre que ceux d'Ehrenberg et de Dujar- din ; comme dans ces derniers, on y rencontre d'ailleurs beaucoup de rapprochements inexacts et d'hypothèses erronées. C'est ainsi que ce savant a établi toute une théorie de' la reproduction chez les Flagellés, d'après la présence de germes endogènes, qu'il faisait dériver du noyau ; ces formations ne sont autre chose, ainsi que nous l'avons démontré, que les sporanges d'un parasite appartenant à la famille des Chytridinées, le Sphœrita endogena Dang. On pourrait également reprocher à Stein d'avoir trop négligé l'étude du développement ; ce savant a été ainsi conduit à décrire, chez beaucoup de Flagellés, comme un phénomène de conjugaison, ce qui n'était en réalité qu'un stade de division ; par contre, les détails d'organisation tels que le nombre et le mode d'insertion des flagellums, la position du noyau, la forme exacte du corps, les ornements de la membrane, sont indiqués avec une exactitude assez grande pour que la détermination des espèces devienne facile^ même aux débutants. Il faut regretter que la partie descriptive qui devait être ajoutée à ce grand ouvrage n'ait pas été publiée. 118 P. -A. DANGEARD L'étudedesEugléniensn'avaitfait, depuis Ehrenberg, que des progrès peu sensibles ; cette famille s'était augmentée simplement de quelques espèces et de quelques genres ; l'organisation générale restait mal connue. Cette lacune a été comblée par une monographie due à G. Klebs (1) ; ce savant s'attache à déterminer exactement la structure du corps ; il passe en revue les divers organes et indique leur manière d'être ; il nous fait connaître la forme des chloroleucites et leur position dans la cellule, alors qu'on ne possédait, en fait de renseignements à leur sujet, que des observations fort incomplètes de Schmitz (*?). Le déve- loppement est aussi l'objet d'une attention spéciale ; l'au- teur a fait de nombreuses récoltes et entrepris des cul- tures ; il sépare, ainsi que l'avait fait Ehrenberg, VEuglena viricUs de VEuglena sanguinea, alors que Stein les réunissait ; il crée de nouvelles espèces, dont la plu- part sont bien caractérisées : Euglena variabilis, E. velata., E. pisciformis, E. gracilis, etc. Quant aux affinités des Eu- gléniens, Klebs considère que ces organismes, malgré les points de rapprochements qu'ils présentent avec les Algues, sont mieux à leur place parmi les Flagellés, alors que les Péridiniens doivent être considérés comme des Thallophytes. Klebs avait mis en doute l'exactitude des observations de Schmitz, qui établissaient une relation de continuité entre les rubans chlorophylliens de YEuglena viridis et le pyrénoïde central. Schmitz, en réponse à cette critique, ne tarde pas à donner un travail très complet sur les chromatophores des Eugléniens (3) ; il avoue s'être trompé dans la détermination d'une espèce qu'il avait considérée (1) G. Klebs : Organisationeiniger Flagellatengr. u. ihre Beziehun- gen zu Algen u. Infusorien (Unters. aus dem bot. Inst. zu Tûbingen, Bd. I, Leipzig, 1881-1885). (2) Schmitz : Die Chromatophoren der Algen, Bonn., 1883. (3) Schmitz : Beitrcige zur Kenntnis cl. Chromatophoren (Pringsh Jahrb.,Bd. XV, 1884). RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 119 comme VEuglena oxyuris et qu'il assimile maintenant à VEuglena geniculata, Dujard. L'impression qui se dégage de ce mémoire est que Schmitz sait parfaitement établir la structure des chromatophores ; mais qu'il est beaucoup moins familiarisé avec la connaissance des espèces ; on ne saurait dire avec certitude si ses nouvelles créations : Euglena obtusa, E. oblonga, E. mutabilis, etc., ont quelque valeur au point de vue systématique. C'est à ce moment que se placent nos premières recher- ches sur les Cryptomonadinoe et les Euglenœ. Kunstler venait de décrire, chez le Cryptomonas ovata^un estomac, unintestin, unechambre incubatrice, des embryons, etc. (1); nous commençons par montrer qu'il n'existe rien de pareil dans ce genre, et après une étude du développement dans les Cryptomonas^ PJiacus et Traçhelomonas, nous con- cluons à la nature végétale de ces êtres (2). Plus tard, Kunstler, tout en reconnaissant ses erreurs, ayant formulé des appréciations défavorables sur nos observations (3), nous reprenons à nouveau l'étude des Cryptomonas et, entre autres faits nouveaux intéressants, nous signalons la présence d'un véritable pyrénoïde dans le Cryptomonas erosa et dans le Cryptomonas cyanea^ sp. nov. (4). Stokes avait publié, en 1884, une liste d'Eugléniens dans laquelle étaient signalées un assez grand nombre d'espèces nouvelles appartenant principalement au genre Trachelomonas (5) ; après examen du mémoire en question, il nous semble que toutes ces espèces sont insufTisam- (1) Kunstler: Contribution k l'étude des Flagellés (Bulletin de la Société zoolog. de France, 1882). (2) P. -A. Dangeard : Recherches sur les Gryptomona,dinse et les Euglenx (Le Botaniste, Ir» série, 1888). (3) Kunstler: Recherches sur la morphologie des Flagellés (Bull. se. de la France et de la Belgique, 1889). (4) P.-A. Dangeard: CoJ^ de s'attar- der davantage à vouloir établir une synonymie douteuse. Beaucoup d'individus semblent posséder un chloro- leucite identique à celui de VEuglena viridis ; on voit, en effet, un certain nombre de rubans verts qui rayonnent autour d'un large espace central incolore (T. fig. 2, A) ; cette structure est celle qui doit servir de point de départ dans l'étude de cette espèce. Ces Euglènes placées en chambre humide peuvent mo- difier leur forme et se déplacer après avoir pris l'aspect d'une toupie (T. fig. 2, C), ce qui est un nouveau trait de ressemblance avec rEugie?;a uiî'irZis. Toutefois, il est fa- cile de remarquer certaines différences : les cellules n'ont pas toutes leurs chloroleucites disposés en rayonnant au- tour d'un centre ; les rubans sont parfois dispersés d'une façon quelconque ou placés parallèlement à l'axe ; dans ce cas, le noyau n'est plus situé à la partie postérieure du corps ; il tend à occuper une position méJiane ; de (1) Dujardin: Loc. cit., p. 32. (2) Schmitz : Loc. cit., p. 12, pi. fig. 11. 144 P. -A. DANGËARD plus, il est facile alors de constater l'indépendance des chloroleucites (T. fig., B, D). Si. nous examinons à quoi tiennent ces différences d'aspect, voici ce que nous constatons; lorsque les chlo- roleucites rayonnent autour d'un centre, nous ne trouvons que rarement un seul pyrénoïde, comme dans VEuglena viridis ; ce pyrénoïde s'est ordinairement fragmenté en deux ou trois corpuscules, quelquefois davantage ; ils sont de grosseur différente, arrondis ou irréguliers ; à leur contact existe parfois des grains distincts de para- mylon; d'autres sont nus; les chloroleucites ont une de leurs extrémités dirigée vers ces pyrénoïdes , mais l'adhérence n'existe pas nécessairement. C'est à ce moment que le noyau tend à occuper une position mé- diane (T. fisr. 2, D) ; les pyrénoïdes augmentent en nombre par bipartition, et ils se placent autour du noyau à quelque distance ; leur nombre varie : beaucoup de cel- lules en renferment de 5 à 7 ; d'autres en contiennent plus d'une douzaine ; ils sont entremêlés avec les chloroleu- cites ; ceux-ci sont fragmentés en courts bâtonnets ou en disques. Les cellules, dans cette variété^ passent facilement à l'état de repos (T. fig. 2, P) , elles s'arrondissent sous une mince enveloppe ; on retrouve, à leur intérieur tous les stades de fragmentation du pyrénoïde ; nous avons repré- senté (T. fig. 2, G, H,I, J) ceux qui nous ont paru les plus intéressants ; le noyau finit par être entouré d'une di- zaine de corpuscules arrondis colorables par la fuchsine acide. Cette Euglène forme, comme VEuglena viridis, des kystes sphériques à membrane épaisse et jaunâtre ; nous avons pu constater qu'à l'intérieur de ces kystes, le pyrénoïde est fragmenté comme aux autres stades du développement (T. fig. 2, K). Dans cette variété, le point oculiforme est très développé ; RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 145 le flagellum ne dépasse guère la longueur du corps ; il est inséré au fond d'une échancrure latérale sur une sorte de tache qui se colore par ^les réactifs nucléaires Fio. 2. Euglena viridis, variété violacea. (T. fîg. 2, E) ; un canal de plus petit diamètre part de cette échancrure ; on peut le suivre assez loin, jusqu'au niveau de la vacuole principale. Nous avons pu observer, à l'aide de la fuchsine acide et de l'acide picrique, une colo- 10 146 P. -A. DANGEARD ration rouge de la cuticule, des parois du canal et même de la vacuole principale. Dans ces préparations à la fuchsine acide, on rencontre des individus dont les chromatophores discoïdes ont une structure finement granuleuse ; d'autres ne laissent voir que les pyrénoïdes fortement colorés en rouge et de structure homogène ; ce réactif permet aussi de diffé- rencier dans le corps des Euglènes un réseau à mailles irrégulières de cytoplasme granuleux. En résumé, cette variété se distingue de VEuglena viri- dis par ses dimensions plus grandes, par l'indépendance fréquente des chloroleucites et surtout par la fragmenta- tion du pyrénoïde ; ces propriétés des chloroleucites et des pyrénoïdes servent à établir des transitions entre ÏEuglena viridis et des espèces qui, à première vue, en paraissent très différentes, telles que VEuglena sanguinea, VEuglena velata, etc. Nous avons cultivé cette Euglène pendant plusieurs mois ; elle s'est multipliée activement ; les cellules immobiles avaient conservé leur point oculiforme ; les chloroleucites étaient nombreux en rubans courts ou en disques plus ou moins aplatis ; sur quelques individus, les chloroleucites en rubans tendaient à s'orienter, en rayon- nant autour d'un centre. Nous avons fait, de temps à autre, l'examen histologique ; les pyrénoïdes nombreux, arron- dis ou irréguliers, ont fini par disparaître à la surface de la cellule (1) ; ils ont été remplacés par un pyrénoïde unique, central, ayant un volume considérable (T. fig. 3, A, B) ; tout autour une couronne épaisse de gros grains de paramylon ; la substance du pyrénoïde ne se colore plus que faiblement ; sa structure est d'apparence homogène (T. fig. 3, D); quelquefois cependant on distingue dans la masse des parties filamenteuses entremêlées plus chroma- Il) Dans ce cas, les chloroleucites discoïdes montraient une électivité plus grande pour les réactifs. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 147 tiques. Ce pyrénoïde, dans beaucoup de cellules, a la forme d'une grosse sphère ; les gros grains de paramylon en bâtonnets sont disposés en couronne épaisse dans le sens des rayons ; à l'intérieur d'autres cellules, la masse du pyrénoïde est allongée perpendiculairement à l'axe, et sa surface présente une série de concavités logeant les corpuscules de paramylon. Le noyau est repoussé au contact de la paroi ; il est fréquemment al- longé en biscuit ; sa structure ne présente rien de particulier (T.fig. 3, C, D). La couche cor- ticale renferme dans ses alvéoles les chloroleucites et des grains de paramylon plus petits que ceux de la couronne. Lescellules dans ces cultures sont entourées d'une couche épaisse gélatineuse que les réactifs mettent en évidence ; dans les colonies de seize et de trente-deux individus, ceux-ci sont par groupes de deux, espacés les uns des autres dans la masse gélatineuse commune. Ces cultures, dans lesquelles le nouveau pyrénoïde se reproduit par nouvelle formation au centre de la cellule, alors que les restes de l'ancien ont disparu après fragmentation, nous ramènent au point de départ, à tra- vers un cycle assez long. La structure de la cellule est revenue au type de l'-Bug^ena viridis, avec cette différence toutefois que les relations des chloroleucites avec le py- FiG. 3. — Euglena viridis, variété violacea. Après plusieurs mois de culture. 148 P.-A. DANGEARD rénoïdene sont pas aussi étroites que dans cette dernière espèce. Par les modifications que présentent les chloroieucites, par les transformations subies par le pyrénoïde et qui sont indiquées ici pour la première fois d'une manière com- plète, cette variété est l'une des plus remarquables du groupe. Il sera évidemment très intéressant de chercher main- tenant si VEuglena viridis type, celle qui, dans les condi- tions ordinaires, conserve sa structure, n'est pas suscep- tible de présenter des modifications analogues aux précé- dentes, lorsqu'on fait varier les conditions du milieu ; pour être fructueuse, une étude de ce genre devra être con- duite avec toutes les précautions usitées en Bactériologie. Tout récemment, nous avons lait une récolte pure d'une Euglène dont les chromatophores rayonnaient autour d'un centre (PI. I, fig. 12); les individus, dès le second jour, se sont arrondis sous une mince enveloppe et sont entrés en division. A notre grande surprise, les échantillons, fixés à 10 heures du soir, en vue d'étudier la division du noyau, ne présentaient aucune trace de pyré- noïdes (PI. I, lig. 9,10) ; par contre, les chloroieucites se coloraient assez fortement. Comme nous avions cru reconnaître la variété vlolacea de VEuglena, viridis, nous avons continué la culture pendant quelques jours dans diverses conditions ; au bout d'une semaine, les pyrénoïdes sont apparus dans les cellules très nets et disposés comme dans VEugle7ia viridis : il est donc prouvé que la variété violacea peut se multiplier soit avec un pyrénoïde unique, soit avec un pyrénoïde fragmenté, soit même en l'absence de toute formation de ce genre : c'est un résultat digne d'être enregistré. Ces dernières cultures nous ont servi pour établir le schéma général de Vhaplomitose chez les Eugléniens, telle qu'elle est décrite dans la seconde partie de ce mémoire. RECHERCHES SUR LES EUCtLÉNIENS 149 S'^ Euglena. genlculata. Dujard. (Schmitz). Schmitz, dans son premier mémoire, avait attribué à VEuglena oxyuris deux chromatophores étoiles identiques à celui de VEuglena, viridis ; de son côté, Klebs, étudiant cette dernière espèce, a rencontré parfois chez la forme principale a deux corpuscules entourés de paramylon et situés l'un en avant, Tautre en arrière : ils étaient, selon ce savant, sans relation directe avec les chloroleu- cites (1). Schmitz revient, dans le second mémoire, sur cette disposition des chloroleucites : il reconnaît que sa première détermination était erronée; mais il maintient son opinion relativement à la structure des chromatophores ; il propose de rattacher les Euglènes qui possèdent plusieurs chloro- leucites ainsi constitués à l'espèce désignée parDujardin sous le nom d'Euglena geniculcLt£i{2). Nous avons rencontré plusieurs fois dans nos récoltes des individus à deux pyrénoïdes:ils étaient ordinairement mélangés à d'autres n'ayant qu'un pyrénoïde (T. Og. i, A) ; dans ces conditions, il devient diiïicile de savoir s'il s'agit d'une espèce distincte ainsi que l'admet Schmitz. Toutefois, comme VEuglena, viridis s'est maintenue dans plusieurs cultures, en conservant son unique pyrénoïde, nous nous rangeons à l'avis de Schmitz, et nous réunis- sons à son exemple les formes à plusieurs chloroleucites étoiles sous le nom cVEuglena, geniculata Duj. Dans cette espèce, les dimensions sont celles de VEuglena, viridis ou de sa variété violacea, : le noyau occupe une position m.édiane ; au-dessus se trouvent les pyrénoïdes (T. fig. 4, D) : ils sont très gros, se colorent facilement par la fuchsine acide et sont entourés par des grains de para- il) Klebs: Loc. cit., p. 265. (2) Schmitz : Loc. cit., p. 12. 150 P -A. DANGEARD mylon : des rubans chlorophylliens rayonnent tout autour ; mais ces rubans deviennent quelquefois indépendants et se placent dans la direction de l'axe. Schmitz indique des variations assez nombreuses dans le nombre des chromatophores : ils peuvent être en nombre égal (1-2) au-dessus et au-dessous du noyau, ou en nombre inégal et alors les deux ou trois situés à la partie antérieure sont plus gros que ceux de la partie postérieure réduits à un ou deux (1). Il serait intéressant de connaître l'origine de ces varia- tions, d'autant plus qu'elles paraissent assez constantes : ainsi nous avons rencontré une de ces formes, en culture presque pure dans une mare des faubourgs de Poitiers, à la Cueille ; deux des pyrénoïdes, sensiblement de même grosseur, étaient placés au-dessus et au-dessous du noyau ; le troisième, plus petit, était situé à la partie antérieure, au niveau du point oculiforme (T. fig. 4, B, C). La position de ces pyrénoïdes se reconnaît sur les individus vivants aux amas sphériques constitués par les grains de para- mylon ; mais il est facile de les colorer par la fuchsine acide. Les rubans chlorophylliens qui rayonnent autour de ces pyrénoïdes dans cette variété sont plus étroits et plus rapprochés les uns des autres que dans les espèces déjà décrites ; aussi est-il difficile d'établir leur relation directe avec la substance des pyrénoïdes, d'autant plus que ces derniers sont entourés par une couronne de grains de paramylon (T. fig. 4, C). Selon Schmitz, les pyrénoïdes de VEuglena. geniculata sont beaucoup plus faciles à voir que ceux de VEuglena viridis, parce qu'ils sont plus riches en substance propre ; en réalité, la distinction des pyrénoïdes, lorsqu'ils existent, se fait avec la plus grande facilité, au moyen de la fuchsine acide et de l'acide picrique ; on arrive ainsi à bien délimiter (1) Schmitz : Loe. cit., II, p. 12. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 151 leur contour ; quant à la grosseur du pyrénoïde, elle est susceptible de varier beaucoup dans la même espèce. Cette espèce nous a mis longtemps dans l'embar- ras, parce que les pyrénoïJes peuvent disparaître comme celui de VEuglena viridis^ variété violacea, ;j comme elle FiG. 4. — Euglena geniculata. était dans nos dernières récoltes mélangées à d'au- tres espèces, nous ne savions plus la reconnaître au milieu des autres après fixation et coloration , car les deux pyrénoïdes (PL I, fig. 1-2) caractéristiques étaient devenus invisibles. Lacellule, dans ces conditions, possède une structure alvéolaire beaucoup plus nette que dans la plupart des Euglènes que nous avons étudiées ; la couche pariétale renferme en assez grand nombre des corpus- cules arrondis ou allongés qui se colorent en rouge par la fuchsine acide, l'hématoxyline et le picro-carmin (PL I, fig. 3, 4) : ce sont les chloroleucites qui, par suite de la disparition des pyrénoïdes, sont devenus plus chroma- tiques. 152 P-A. DANGEARD Le noyau occupe le milieu de la cellule ; son contour est arrondi ou irrégulier : le nucléole est entier ; les chro- mospires sont en forme de pseudo-granules ou de petits bâtonnets; on en compte parfois plus d'une cinquantaine (PI. I, fig- 5). Les alvéoles qui entourent le noyau contiennent des grains de paramylon plus ou moins gros, arrondis ou discoïdes. h' Euglena g eniculata est une des espèces qui se prêtent le mieux à l'étude de la division du noyau ; la bipartition du corps se fait soit sous la forme complètement sphé- rique, soit sous la forme allongée, avec des intermédiaires nombreux. Nos échantillons ont été fixés entre 9 h. 1/2 et 10 h. du soir; les divisions étaient nombreuses et à tous les stades ; certaines étaient déjà terminées. Au moment où le nucléole atteint la surface nucléaire, les chromospires sont allongées suivant l'axe de division (PI. T, fig. 6) ; nous en avons vu une d'une façon certaine qui, comme le nucléole, s'étendait d'une surface à l'autre (PL I, fig. il); mais cela n'est pas général. En regar- dant ce noyau par l'un des pôles, on voit l'extrémité des chromospires ; aucune ne montre un indice quelconque de division longitudinale; en faisant alors varier le point, on peut compter le nombre des bâtonnets ; il est de 25 à 30 au plus (PL I, fig. 11). Si nos numérations sont justes, comme nous avons raison de le croire, il existe une différence de moitié ou davantage entre le nombre des granulations chro- matiques contenues dans le noyau avant la division et le nombre des chromospires rencontrées à la prophase ; cela tient au degré d'enchevêtrement du cordon nu- cléaire. Le nucléole s'étire, entraînant avec lui à chacune de ses extrémités une moitié du nucléoplasme avec ses chromo- RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 153 somes : dans chaque nouveau noyau le nombre des chromosomes est de 25 à 30, comme dans le noyau à la prophase (PI. I, fig. 7). L'impression qui se dégage des divers stades est que cette division n'est pas longitu^- dinale : chaque chromosome se comporte comme le nu- cléole, et se divise par conséquent transversalement ; nous aurons l'occasion d'insister plus tard sur cette question. Lorsque la bipartition a lieu sous la forme arrondie, elle ressemble un peu à celle de VEuglena viridis ; mais il n'y a pas ordinairement d'enveloppe commune aux deux cellules-filles (PI. I, fig. 10) ; la plupart des cel- lules, dans notre récolte, se divisaient en conservant une forme ovale ou allongée ; nous en avons rencontré une dans laquelle les deux noyaux frères étaient déjà sépa- rés, alors que l'échancrure buccale avec son canal était encore unique; chez d'autres, la sépa ation était com- mencée à l'avant et les deux cellules étaient munies cha- cune d'une échancrure très nette se continuant dans le cytoplasme par un canal (PI. I, fig. 8-9). 4° Euglena geniculata v'^ terricola Dangeard. Cette variété a été rencontrée vivant à la surface de la boue des fossés ; le corps est très allongé, cylindrique, ter- miné par une pointe incolore à sa partie postérieure ; les chloroleucites ont la forme de bâtonnets disposés parallè- lement à l'axe ; le noyau occupe un espace incolore dans la partie médiane du corps ; le paramylon est dispersé un peu partout sans ordre en petits éléments rectangulaires (T.fig.5,A, C, D). Cette Euglène est très métabolique ; elle rampe en se déformant de toutes les façons ; c'est presque son seul 154 P.-A. DANGEARD moyen de locomotion clans les conditions où nous l'avons rencontrée (T. fig. 5, B). Il nous a été impossible, immédiatementaprès la récolte, de déceler la moindre trace de pyrénoïde ; trois jours après, nous en apercevions, non sans difficulté, deux qui étaient apparus l'un au-dessus, l'antre au-dessous du noyau; ces pyrénoïdes n'avaient en- core aucune relation avec les pyrénoïdes ; mais ils étaient entourés de quel- ques grains de paramylon (T. fig. 5, 0). La diagnose decetteva- riété peutêtre ainsi fixée: Corps cylindrique, très allongé, terminé en pointe; chloroleucites nombreux en cordons ou en rubans dépourvus de pyré?ioïde; corpuscules de paramylon rectangulaires dispersés dans le corps ; noyau cen- tral; flagelhun court. Mé- tabolie caractéristique : le corps s'aplatit et se déforme de toutes les façons pendant la reptation. Caractère particulier : deux pyrénoïdes entourés de granules de paramylon peuvent se montrer Vun au-des- sus, Vautre au-dessous du noyau, mais leur présence n'est pas constante. Par ces deux pyrénoïdes ainsi disposés, cette variété se rattache à VEuglena geniculata Duj. (Schmitz). 5° Euglena proxima sp. nov. Cette espèce a été recueillie dans un fossé boueux aux environs de Poitiers. Le corps est cylindrique, terminé FiG. 5. — Euglena geniculata, variété terricola Dangeard. RECHERCHES SUR LES EUGLENTENS 155 en pointe à son extrémité postérieure ; le point oculiforme est excessivement développé ; il a la forme d'un disque large et très aplati : les granulations rouges qui le com- posent sont très nettes. Le flagellum est peu mobile; sa longueur est 1 fois 1/2 celle du corps environ. Les chloroleucites sont au nombre de 50 ou 60; ils sont arrondis en disques plus ou moins réguliers et dépourvus de pyrénoïdes (T. fig. 6, A, B, C) : ils rem- plissent tout le corps, sauf l'extrémité anté- rieure qui reste inco- lore. Le paramylon est en gros grains arron- dis ou en petits bâ- tonnets ; fréquemment les grains sont annu- laires : ils ont une cavité interne bien dé- limitée (T. fig. 6, B) ; on peut facilement cons- tater qu'ils sont indé- pendants des chloro- leucites ; leur nombre ne dépasse guère une vingtaine. Le noyau est le plus fréquemment postérieur : quelquefois cependant il est près du centre; par son volume, il se rapproche du noyau de VEuglena sanguinea'^ le nucléole très gros et non fragmenté est allongé suivant l'axe cellulaire; son contour est irrégulier ; le nucléoplasme renferme des chromospires sous l'aspect de taches chroma- I-'iG. 6. — Euf/lena proxiina, sp. nov. 156 P. -A. DANGEARD tiques ; leur nombre paraît supérieur à cinquante (T. fig 6, C). Cette espèce est très métabolique ; le corps se contracte en forme de toupie ou de plaque irrégulière (T. fig. 6, D) ; il a une tendance marquée à prendre la forme sphé- rique; sous la seule influence de la pression d'une la- melle, la plupart des individus s'arrondissent et tournent sur eux-mêmes ; c'est sous cette forme que la division se produit (T. fig. 6, E). Le noyau , dans ces cellules sphériques, est excentrique ; il est situé non loin de la membrane : la division nuclé- aire se produit suivant le schéma général ; les deux cellu- les filles sont formées sous une mince enveloppe com- mune. Cette espèce se rapproche de VEuglena variabilis Klebs par la forme de ses chloroleucites, par les dimensions considérables du point oculiforme, par l'absence de pyré- noïde ; elle en diffère par son mode de division; en effet, selon Klebs, VEuglena variabilis ne se divise jamais sous la forme sphérique; la cellule reste ovale, « bei der Theilung zieht sich die Euglene ein wenig zusammen, wird aber nie kuglig wie viridis sondern eiformig (1) ». luEuglena proxlma, au contraire, s'arrondit facilement ; il suffit de la pression d'une lamelle pour amener ce ré- sultat ; c'est sous cette forme qu'elle se divise. La culture a duré plus d'un mois, et nous avons pu observer des kystes à parois épaisses un peu colorées en jaune et montrant des stries concentriques ; ces kystes se divisent comme les cellules ordinaires. Tandis que VEuglena variabilis possède les dimensions de VEuglena viridis : long., 46 /J., larg., 13 fJ<., notre espèce atteint une longueur de 60 à 70 i^ environ, sur une largeur de 20 fJ-. (1) G. Klebs : Loc. cit., p. 301. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 157 UEuglena. jjroxima n'a montré aucune trace de pyré- noïde pendant les quelques semaines où elle a été soumise à l'observation ; cette espèce devrait donc, semble-t-il, être étudiée dans une autre section, alors surtout que les chloroleucites sont discoïdes ; cependant, par son mode de division et par ses kystes, elle offre avec VEuglena viridis des affinités tellement étroites que nous avons cru nécessaire de la grouper avec les espèces précédentes autour d'un même type. 6° EuglensL variabilis Klebs. Cette espèce aurait besoin d'être étudiée à nouveau. Le corps, pendant la locomotion, est, selon Klebs (1), briève- ment cylindrique ou ovale, ar- rondi à sa partie antérieure, avec un petit mucron à sa partie pos- térieure (T. fig. 7, A). Le fla- gellum est deux ou trois fois plus long que le corps. La mem- brane est fortement striée. Le point oculiforme est extraordi- nairement développé, rouge brun et c'est là, selon Klebs, une carac- téristique de l'espèce. Les chlo- roleucites sont discoïdes, sans pyrénoïdes; un corpuscule de paramylon se trouve au voisinage de la vacuole principale. Le corps se raccourcit pour la division ; mais il ne s'arrondit pas complètement comme dans VEuglena viri- dis-, le phénomène n'a été suivi qu'en chambre humide et on n'a pas observé d'enveloppe gélatineuse pendant cette bipartition (T. fig. 7, B). Fig. 1. — Euglena varîabilis. D'après Klebs. (1) Klebs : Loc. cit., p. 300-301. 158 P.-A. DANGEARD Les dimensions sont : longueur 0,046 — 0,033 mm., largeur 0,013. En résumé, nous pensons avoir introduit un peu de clarté dans les espèces et variétés du groupe de VEuglena viridis: le tableau suivant peut fournir quelques indica- tions pour une détermination rapide, alors que le texte précédent donne les renseignements nécessaires sur les modifications de structure qu'on y rencontre : I. Un chloroleucite étoile médian ; Euglena. viridis et sa variété noyau postérieur. violacea II. Deux chloroleucites étoiles quel- Euglena geniculala et sa va- quefois trois: noyau médian. riété terricola m. Chloroleucites dissociés sans ! Division à l'état sphérique pyrénoïdes connus. ) E. proxima Division sous la forme ovale. E. variabilis. Groupe de i'Euglena sanguinea. Stein considérait VEuglena sanguinea, comme une sim- ple variété de VEuglena viridis {\)\ Klebs a séparé avec raison les deux espèces en insistant sur les différences qu'elles présentent entre elles : ainsi la première atteint des dimensions beaucoup plus grandes que la seconde; sa membrane est plus nettement striée en spirale, et elle ne se dissout pas dans l'acide acétique. Le cytoplasme se fait remarquer par sa réfringence et aussi par sa richesse en granulations de nature encore indéterminée; la dispo- sition des chloroleucites est différente de celle qu'on rencontre chez VEuglena viridis. Le flagellum est très long, fort et peu actif; le mouvement est le même que celui de VEuglena viridis, mais beaucoup plus lent ; la métabolie est très faible. La facilité avec laquelle le corps sécrète une enveloppe gélatineuse est très caractéristique de cette espèce ; le (1) otein : Loc. cit., pi. XX, fig. 19. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 159 vert de méthyle la colore en bleu intense ; mais elle reste incolore dans l'iode et le carmin. La division se produit au repos et sous une enveloppe sphérique. L'Euglena sanguinea, se rencontre avec la couleur verte dans les bassins et les étangs qui renferment une faible végétation d'algues; elle ne se développe pas habituelle- ment en aussi grande abondance que VEuglena viridis. Dans quelques localités, sous l'influence de conditions encore mal déterminées, il se développe à l'intérieur du cytoplasme une substance colorante rouge, qui a valu son nom à l'espèce; on ne trouve aucune différence con- stante entre les individus colorés en vert et ceux qui ont acquis une coloration rouge ; peut-être ces derniers sont- ils un peu plusgroset un peu plus allongés ; la sécrétion de mucus semble également se faire moins facilement. Klebs a observé, assez rarement du reste, une forme incolore de cette espèce ; elle possède encore une tache oculaire et elle est entourée d'une enveloppe qui se colore en bleu sombre dans le vert de méthyle (1). Il est certain que YEuglena sanguinea doit être séparée de VEuglena viridis ; mais nous irons plus loin que Klebs ; celui-ci la décrit en continuant de la rattacher au type de VEuglena viridis ; nous en ferons un type spécial qui nous semble suffisamment caractérisé. De plus, K^lebs ne signale entre la variété verte et la variété rouge aucune différence d'organisation ; il semble seulement, d'après lui, que les individus de la variété rouge sont plus gros et plus allongés que ceux de la première ; la sécrétion muqueuse s'y produirait aussi moins facilement. Après avoir étudié avec soin l'organisation générale dans les deux cas, nous sommes disposé à croire qu'il existe deux espèces distinctes confondues sous le nom dCEuglena san- (1) Klebs :Loc.cit., p. 299-300. 160 P. -A. DANGEARD guinea ; peut-être sera-t-on de notre avis après avoir cou- suite nos descriptions ; tout au moins devra-t-on recon- naître qu'il est nécessaire, avant de les réunir, de n->ontrer comment il est possible de passer d'une forme à l'autre. 1° Euglena sànguinea Ehr. Nous avons récolté cette espèce dans le bassin du jardin botanique de Poitiers ; ses dimensions sont con- sidérables : long. 120F;larg. 30 |jl. Le corps est ovale allongé, souvent presque cylindrique ; le flagellum est très long, peu mobile; Textrémité antérieure est obtuse, l'extrémité postérieure est terminée en pointe ; quelque- fois elle est comme tronquée; les chloroleucites ont la forme de bâtonnets ou de rubans ; ils sont rapprochés de la surface dans une sorte de couche corticale qui limite un grand espace central renfermant le noyau ; ces chlo- roleucites sont disposés parallèlement à l'axe ou un peu obliquement (T. fig. 8, A, B) ; ils ont une tendance à se replier en arc ; de nombreuses granulations réfringentes se voient entre les chloroleucites. Le corps s'arrondit fréquemment en sphère (T. fig. 8, C, début) ; les chloroleucites se recourbent alors en fer achevai ; leurs branches sont tournées du côté de la sur- face. Selon les individus et selon Tétat des cultures, le cytoplasme est bourré de très gros grains de paramylon ou bien il n'en renferme que peu ou point. L'hématochrome se dépose dans le cytoplasme sous forme de granulations rouges ; elles s'accumulent d'abord dans la partie centrale (T. fig. 8, A, C) et finissent peu à peu par remplir tout le corps dans les intervalles laissés libres par le noyau et les grains de paramylon ; les chloroleucites eux-mêmes disparaissent à l'obser- vation. Le noyau est situé un peu au-dessous du centre ; lors- RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 161 que le corps est arrondi, il se trouve légèrement excentri- que au contact de la couche corticale constituée par les FiG. 8. — Euglena sanguinea. chloroleucites ; il est sphérique (T. fig. 8, D) ; mais parfois le développement du paramylon est tel que les globules de cette substance effectuent des pressions sur la sur- 11 165 P. -A. DANGEARD face nucléaire et la déforment ; le contour devient ainsi plus ou moins anguleux (T. fig. 8, F). Le nucléo- plasme se montre parfois complètement homogène ; dans d'autres préparations, il est grossièrement granuleux; enfin, on arrive quelquefois à distinguer dans la masse plusieurs centaines de granulations chromatiques régu- lières qui représentent sans doute les chromospires (T. fig. 8, E). Le nucléole occupe le centre du noyau ; il est soit entier, soit fragmenté en un nombre variable de cor- puscules (PI. II, fig. 1-2-3) ; lorsqu'il est entier, sa masse est dense, homogène, très chromatique ; sa surface est net- tement séparée du nucléoplasme ; il existe même une petite zone incolore de séparation, due à l'action des réac- tifs ; lorsque le nucléole est fragmenté, le nombre des corpuscules chromatiques n'a rien de fixe ; il varie de deux à trente ; on trouve cette disposition aussi bien pendant la période d'activité que pendant la période de repos. Il était important d'établir la manière d'être des chro- matophores dans cette espèce ; Klebs, en effet, s'est con- tenté de dire que leur disposition est différente de celle des Euglènes ; il ajoute en note qu'en écrasant des cellules, il a observé au milieu du cytoplasme, suitout dans les exemplaires colorés en rouge, des calottes de paramylon semblables à celles qui recouvrent les pyrénoïdes dans les autres espèces ; il lui a été impossible cependant d'é- tablir leurs relations avec les chloroleucites (1). Nous avons fait des recherches nombreuses pour élu- cider cette question ; nous constateron>* tout d'abord que nous n'avons aperçu aucune trace de pyrénoïdes sur un certain nombre d'individus ; sur d'autres, on les voit net- tement au stade de repos ; on s'aperçoit tout d'abord que les chloroleucites se colorent bien et fortement par les réactifs ordinaires ; au stade d'activité, la coloration ne (I) Klebs : Loc. cit., p. 299. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 163 varie pas d'intensité aux divers points du chloroleucite ; mais sur les individus qui se sont arrondis en sphère, on ne tarde pas à constater certaines différences. Nous sa- vons qu'à ce moment, les chloroleucites sont recourbés en fer à cheval ; la concavité de l'anse étant du côté inté- rieur, alors que les deux branches viennent toucher la surface ; entre ces deux branches se trouve un gros grain de paramylon à contour elliptique (T. fîg. 8, D) ; la cou- che corticale est ainsi nettement délimitée du cytoplasme interne. En faisant agir sur ces cellules l'hématoxyline et la fuchsine acide, on met en évidence de nombreux cor- puscules qui prennent une teinte rouge comme les pyré- noïdes ordinaires ; ils sont disposés en cercle à la partie interne de la couche corticale ; leur contour est net, leur substance est homogène et dease ; mais quelquefois la coloration est plus forte aux deux extrémités du bâtonnet qu'au centre (T. fîg. 8, G) ; ce pyrénoïde n'est autre chose que la partie médiane du chloroleucite qui s'est ainsi dif- férenciée; alors que les deux branches du fer à cheval sont restées moins chromatiques (T. fig. 8, D), ces pyré- noïdes sont arrondis ou allongés en bâtonnets ; parfois, ils sont plus ou moins contournés et irréguliers (T. fig. 8, G). Entre les gros corpuscules de paramylon qui se trouvent au milieu des branches du chloroleucite, on voit sur quel- ques individus des calottes minces de paramylon qui s'ap- pliquent à la surface des pyrénoïdes ; ce sont elles sans doute que Klebs a remarquées dans le protoplasma des Euglènes après écrasement, mais sans pouvoir détermi- ner leur origine. Il existe un autre aspect que nous allons maintenant décrire : dans les individus qui viennent d'être étudiés, les corpuscules de paramylon étaient localisés dans la couche corticale ; dans d'autres, le corps est complète- ment rempli de ces gros grains, et l'aspect des chloroleu- cites se trouve modifié ; les pyrénoïdes ont disparu ; mais 164 P -A. DANGEARD la substance des chloroleucites est devenue plus chroma- tique; elle se colore lie devin ; en même temps, sa distri- bution a perdu de sa régularité ; les chloroleucites n'ont plus leur forme normale ; ils ont contracté entre eux des anastomoses donnant naissance à un réseau chroma- tique irrégulier (T. fig. 8, F, H); à l'approche de la division, ce réseau disparait, et nous ignorons ce qu'est devenue l'individualité des chromatophores. On voit quelles difficultés présente l'étude d'une es- pèce comme celle-ci et l'embarras où l'on se trouve au débutpour interpréter ces modifications déstructure. Au moment de la division, le corps est sphérique; il est rempli de gros grains de paramylon; on ne voit plus trace des chloroleucites; tous les intervalles existant entre le paramylon et le noyau sont remplis par de l'hé- matochrome (PI. II, fig. 4). Le nucléole, dans la division, se comporte d'une façon remarquable ; il s'allonge, et ses deux extrémités attei- gnent la surface du noyau, avant que celui-ci ait sensi- blement modifié sa forme; selon la structure primitive du nucléole, l'aspect de l'axe est très différent; s'il est simple, ce qui est rare, faxe possède ce même caractère; si, au contraire, le nucléole est fragmenté, chaque frag- ment s'allonge séparément; on a ainsi des axes formés par deux bâtonnets ou un plus grand nombre (PI. II, fig. 5-9) ; les deux extrémités nucléolairesse renflent, et alors s'éloignent l'une de l'autre, entraînant avec elles lenucléo- plasme. Cette substance dans nos préparations s'est mon- trée complètement homogène; elle était peu chromatique par rapport au nucléole; si nos matériaux avaient ren- fermé unplus grand nombre decellules en bipartition, peut- être aurions-nous réussi à mettre en évidence les granula- tions chromatiques très petites et très nombreuses dont nous avons signalé l'existence dans le noyau à l'état de repos et aussi les chromospires. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 165 Le noyau en division ressemble à une haltère ; la sépa- ration des deux moitiés se produit et chacune reconstitue un noyau (PI. II, fig. 10-12). La cloison qui sépare les deux cellules apparaît comme une ligne mince perpendiculaire à l'axe de division nucléaire (PI. II, fig. 13). Toutes les cellules en division que nous avons observées étaient remplies de gros grains deparamylon, et les espaces qui séparaient ces grains renfermaient de l'hématochrome ; il nous est impossible par suite de dire ce que devien- nent les chloroleucites, à ce moment, on dirait qu'ils ont disparu. Dans les cellules filles, les deux noyaux ont leur nucléole fragmenté ; nous avons vu de ces nucléoles qui renfermaient jusqu'à vingt et même trente globules chro- matiques. En résumé, VEuglena sangiiinea, est remarquable par ses grandes dimensions, par la présence d'une couche corti- cale renfermant les chromatophores, par la différenciation de pyrénoïdes dans la partie médiane de ces derniers élé- ments, par le très grand nombre des chromosomes, par la fragmentation du nucléole et surtout par le dépôt d'hé- matochrome qui se fait dans le cytoplasme. Il faut aussi remarquer la facilité avec laquelle cette espèce s'arrondit en sphère et s'entoure d'une enveloppe épaisse gélatineuse à stries concentriques. 2° Euglena splendens sp. nov. Cette espèce a été récoltée à la Cassette, aux environs de Poitiers ; sa longueur ne dépasse guère 70 à 80 [ji ; sa forme est ovale, ce qui permet déjà de la distinguer de l'espèce précédente. Les chloroleucites sont également plus nom- breux et plus courts ; dans les individus qui nagent et ont conservé leur forme normale, ces chloroleucites sont disposés tangentiellement à la surface et en spirale comme les stries de la membrane ; entre chaque ligne se trouve 166 P. -A. DANGEARD une rangée de granulations réfringentes, arrondies, rap- prochées les unes des autres comme les grains d'un chapelet (T. fig. 9, A). Lorsque les individus s'arrondis- sent, les chloroleucites se disposent perpendiculairement à la surface ou un peu obliquement (T. fig. 9, D) ; cela constitue une sorte d'épaisse couche corticale limitant une grande chambre centrale, renfermant du cytoplasme, un gros noyau, des corpuscules de paramylon qui sont en gros globules, plus rarement en bâtonnets; d'autres se trouvent dans la couche corticale, entre les chloroleucites ; la vacuole principale est très grosse, et le canal antérieur qui y donne accès est large et nettementdélimité. C'est pendant la période d'activité que cette espèce mérite le nom de splendens ; avec ses lignes de granules réfringents alternant régulièrement avec les chloroleu- cites disposés en spirale, elle se distingue facilement de toutes les autres variétés d'Euglènes et c'est sans con- tredit l'une des plus belles. Le noyau est médian ; il ressemble à celui de VEuglena sanguinea ; son nucléole, en effet, est souvent fragmenté en un nombre variable de corpuscules chromatiques qui occupent le centre du nucléoplasme (T. fig. 9, h, C). Le noyau, à l'état de repos, ne laisse pas voir les chro- mospires ; au moment de la division, le corps s'arrondit, et l'on aperçoit dans le noyau des granulations chromatiques au nombre de trente à quarante environ ; ces granulations, qui représentent les chromospires, sont assez fréquem- ment étirées en fils ou en bâtonnets (T, fig. 9, E) ; le nu- cléole, à ce moment, est rarement entier ; le plus souvent, il est fragmenté en cinq ou six masses chromatiques dis- tinctes ; quelquefois, il affecte l'aspect d'un ruban pelo- tonné (PI. III, fig. 1). Le noyau qui occupe une position centrale ou subcen- trale entre en division : il prend un contour elliptique; le nucléole s'allonge dans le sens du plus petit diamètre. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 167 de façon avenir à la limite de la surface nucléaire : les chromospires se montrent alors nettement filamenteuses à l'intérieur du nucléoplasme ; leur direction générale est parallèle à l'axe du nucléole (PI. HT, fig. 3). Celui-ci FiG. 9. — Eitrjlena splendens, sp. nov. s'allonge davantage et se renfle à ses deux extrémités qui alors s'éloignent l'une de l'autre suivies par le nucléo- plasme contenant les chromospires. (PI. III, fig. 4.) Rien ne nous permet d'attribuer aux chromospires une division longitudinale; elles sont entremêlées, ce qui compliquerait singulièrement leur distribution aux noyaux frères, dans le cas d'une division longitudinale ; 168 P.-A. DANGEARD tout semble indiquer qu'elles se comportent comme le nucléole et s'étirent en sens inverse. Les deux nucléoles composés restent encore quelque temps réunis par un mince filet ; autour de chacun d'eux, le nucléoplasme s'arrondit en sphère; les chromosomes qu'il contient cessent d'être parallèles à l'axe de division ; ils reprennent l'aspect de granules ou de bâtonnets dis- persés dans la masse ; leur nombre est sensiblement resté le même pour chaque élément; mes numérations portent le chiffre de 35 à 40 environ (PI. III, fig. 5-6). Finalement, les deux noyaux deviennent complètement indépendants, et une cloison se forme rapidement, isolant les deux cellules (T. fig. 9, E). Dans cette dernière division, le nombre des chromo- spires ne semblait pas dépasser 25 à 30; nos numérations indiquent des différences assez sensibles dans ce nombre ; nous avons fait cette même observation pour un cer- tain nombre d'autres espèces. Les caractères qui distinguent cette forme de la précé-- dente sont suffisants pour justifier la création d'une es- pèce : l'aspect est différent ; les chloroleucites sont plus nombreux, plus courts, régulièrement disposés en spi- rale : nous n'avons jamais aperçu la moindre trace de pyré- noïde. Enfin le nucléoplasme renferme des chromo- spires très apparentes pendant la division, alors que dans VEuglena. sanguinea, le nucléoplasme semble homo- gène. Nous ignorons si VEuglena sjDlendejis est susceptible dans certaines conditions de se colorer en rouge par l'hématochrome; elle a conservé sa couleur verte dans nos cultures. Cette espèce, comme la précédente, sécrète abondam- ment du mucus gélatineux autour d'elle. Klebs dit que f enveloppe mucilagineuse chez VEuglena sanguinea résulte de la sécrétion de filaments fins qui RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS i69 s'unissent rapidemment en une masse homogène : il a vu sous la membrane de petits corpuscules arrondis qui se colorent par le vert de méthyle et qui correspondent bien à l'endroit de formation des filaments muqueux (1). Chez VEuglena splendeiis, nous avons réussi à colorer, au moyen de l'action combinée du picro-carmin et de l'hématoxyline prolongée fort longtemps, un réseau mu- queux à mailles irrégulières, qui se trouve dans le cyto- plasme (PL III, fig. XI) ; ce réseau se continue à travers la membrane avec des filaments externes qui ne tardent pas à s'anastomoser en un second réseau bientôt indis- tinct ; celui-ci forme l'enveloppe muqueuse externe. La production du mucus a donc lieu à l'intérieur même du cytoplasme, et il exsude en traversant les pores très fins et très nombreux de la membrane, comme au travers d'un filtre ; il en résulte autour de la cellule une sorte de coque qui se colore parfois très fortement : on est obligé de la briser par une pression modérée de la lamelle pour distinguer les détails de structure interne. Section B des Euglena. Cette seconde section comprend toutes les espèces qui possèdent des chloroleucites aplatis, disciformes : elle peut être divisée en deux groupes : dans le premier, les chloroleucites contiennent un pyrénoïde en leur milieu; dans le second, ils en sont dépourvus, PREMIER GROUPE Ce groupe renferme un assez grand nombre d'espèces dont l'une des mieux connues estVEuglena velata, Klebs : après l'avoir cherchée sans succès pendant longtemps, (1) Klebs : Loc.cit., p. 275. 170 P. -A. DANGEARD nous avons fini par la rencontrer à Nouaillé, aux environs de Poitiers. 1° Euglena velata Kl. Cette Euglène était mélangée à plusieurs autres es- pèces : Euglena cleses, Euglena pisciformis, etc. ; mais il est très facile de la reconnaître. Ses dimensions se rap- prochent de celles de VEuglena sanguinea : ainsi la lon- gueur du corps atteint 100 fJ- et sa largeur 25 à 30 p- ; sa forme est ovale; la partie antérieure est arrondie; la partie postérieure se termine généralement en une pointe fine. Le flagellum est de la longueur du corps; le point oculiforme est un gros disque granuleux (T. fîg. 10, A). Les choroleucites sont au nombre de 20 à 30 ; ils sont aplatis et à bords profondément découpés en lobes (T. fig. 10, E) ; la présence de ces lobes est un bon caractère spécifique; au centre des chloroleucites, existe un pyrénoïde recouvert de deux calottes de paramylon qui l'emboîtent, l'une sur sa face externe, l'autre sur sa face interne (T. fig. 10, B, C) ; la cellule s'arrondit assez facilement (T. fig. 10, F). Le noyau, qui est très gros, occupe en général une po- sition médiane ; son nucléole n'est pas fragmenté comme dans VEuglena sànguinea. Le caractère le plus remarquable de cette espèce est l'abondance de la sécrétion muqueuse dont le mode de formation peut être facilement suivi, ainsi que l'a indi- qué Klebs (1). Dans les colorations à l'hématoxyline et à la fuschine acide, on ne tarde pas à remarquer que la surface présente des lignes noires disposées irrégulière- ment; avec un peu d'attention, on reconnaît, à l'intérieur du cytoplasme, unréseau de filaments qui viennent aboutir à la membrane perpendiculairement à sa surface (1) Kleba : Loc. cit., p. 274-275. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 171 (T. fig. 10, C) ; quelquefois, on ne distingue que des bâ- tonnets, colorés en noir, dont l'une des extrémités touche à la membrane, alors que l'autre se termine brusquement Fig. 10. — Euglena velata. dans le cytoplasme (T. fig. 10, D). La substance de ces bâtonnets se continue à l'extérieur au travers de pores très fins; nous retrouvons à la surface de l'Euglène, soit des bâtonnets, soit un réseau plus ou moins compliqué, d'épaisseur variable (T. fig. 10, C). Le mucus prend donc naissance dans le cytoplasme, traverse les pores de la 172 P.-A. DANGEARD membrane, et il se dissémine autour du corps de l'Eu- glène ; nous verrons, en étudiant le mode de sécrétion des Euglènes,que ce phénomène est très répandu chez les Protophytes. Nous n'avons pas réussi à observer la division dans cette espèce : Klebs dit qu'elle se produit à l'intérieur d'une épaisse enveloppe mucilagineuse, la cellule con- servant une forme ovale et son mucron postérieur (1). Des individus, conservés plus de deux mois en chambre humide, ne montraient à la fin aucune trace de division ; mais ils avaient pris, au stade de repos, un contour ellipti- tique ; nous reconnaissions facilement ces cellules au milieu des autres à leur mucron incolore (T. fig. 10, D) ; quelques-unes, plus grosses, étaient arrondies, sans mu- cron et renfermaient de gros grains de paramylon. Klebs a décrit une variété [3 gra.nula.ta de cette espèce : les matériaux lui ont manqué pour une étude plus com- plète; il a cependant remarqué qu'elle formait à la sur- face de l'eau des masses de couleur jaune brun consti- tuées par les enveloppes gélatineuses des cellules; les chloroleucites de forme discoïde renferment un pyré- noïde recouvert d'une calotte de paramylon : la cellule s'arrondit pour la division (2). Il existe un certain nombre d'espèces qui ont des affi- nités avec VEuglena velata : il est très difficile de dire laiiuelle correspond à la variété granulata Kl.; Schmitz, qui a élevé cette variété au rang d'espèce, nous met dans un nouvel embarras, car la forme qu'il étudie est colorée « hell gelbgrlin >? et non « licht gelbbraun » ainsi que Klebs l'indique, et les couches « ûberzuge >y qui surnagent à la surface de l'eau sont « hellgrïme » et non « gelb braun- liche » (3). (1) Klebs: Loc. cit., p. 301. (2) Klebs : Loo. cit., I, p. 31);'. (3) Schmitz : Loc, cit., II, p. 16. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 173 Le caractère qui a servi à distinguer i'E. granalata est commun à plusieurs autres espèces qui forment égale- ment à la surface de l'eau une couche gélatineuse pro- venant des enveloppes sécrétées par les cellules ; dans ces conditions, nous appliquerons le nom d'E. granulata., à celle qui nous paraît le mieux mériter cette qualifica- tion. 2° Euglena granulata Schmitz {E. velata, v'*^ granulata Kl.) Nous avons rencontré cette espèce à Poitiers et à Ségrie dans la Sarthe; sa longueur est de 60 à 80 i-i, sa largeur de 20 [Ji environ, elle est donc beaucoup plus petite que VEu- gleyia velata'^ l'extrémité postérieure du corps s'amincit ordinairement en pointe incolore (T. fîg. 11, A, B, C, D). Sous la membrane qui est fortement striée en spirale, on trouve de nombreuses granulations disposées régulière- ment; elles se colorent par le picro-carmin et l'hématoxy- line en lie de vin ou en noir (T, fig. 11) ; elles sont situées en contact immédiat avec la membrane; ces corpuscules sont probablement en rapport avec la sécrétion du mucus, comme chez ÏEuglena velala, mais avec des différences de forme très caractéristiques, puisque, dans cette der- nière espèce, les éléments colorables sous-cuticulaires ont Taspect de bâtonnets. Le nombre des chloroleucites est de 10 à IS; ils sont eu forme de larges disques à bords irréguliers ; en leur milieu se trouve un gros pyrénoïde recouvert par deux valves de paramylon. Le noyau occupe une position médiane ou postérieure ; son volume est relativement considérable; le nucléoplasme renferme de nombreuses chromospires, et le nucléole est ordinairement unique (T. fig. 11). Le cytoplasme est disposé en réseau granuleux à mailles inégales (PL I, fig. 15); les détails de la partie 174 P. -A. DANGEARD antérieure sont assez faciles à différencier dans cette espèce; le fiagellum atteint presque deux fois la longueur du corps; les parois du canal antérieur se colorent bien: aussi avons-nous réussi plusieurs fois à suivre ce canal jusqu'au bord interne de la vacuole principale qui est très développée (T. fig. 11, B, D). FiG. 11. — Euglena granulala. La division se produit à l'état de repos sous une enve- loppe gélatineuse (T. fig. il, E). Les changements de forme, dans cette espèce, sont peu considérables et s'effectuent lentement. Schmitz a fait une étude très complète de la structure du chromatophore dans cette espèce (1). (1) Schmitz : Loc. cit., p. 18-19, RECHERCHES SUR LES EUGLENlENS 175 d° Euglena polymorpha sp. nov. Nous décrivons sous ce nom une espèce que nous avons longtemps confondue avec VEuglena velata ; elle se trou- vait dans le bassin du Jardin botanique en compagnie de — Euglena polymorpha, sp. nov. VEuglena sangumea; sa longueur est de 80 à 90 t^; sa largeur de 20 à 25 [^ environ. Le corps est ovale ou cylindrique, avec une pointe incolore à la partie postérieure (T. (ig. 12, A ) ; il se renfle fréquemment en forme de toupie, et à cet état (T, fîg. 12, B) il peut se déplacer très rapidement ; le flagellum est 176 P.-A. DANGEARD très long; il n'est pas rare qu'il atteigne deux fois la longueur du corps ; la cuticule est striée en spirale comme dans VEuglena viridis ; le point oculiforme est très apparent. Les individus de cette espèce, conservés en soucoupe, perdent leur flagellum, s'arrondissent et s'entourent d'une enveloppe ( T. fig. 12, E, F, H); lorsque ces mem- branes sont abandonnées^ elles simulent une sorte de réseau cellulaire. Il y a de très grandes différences dans la répartition du paramylon, selon les cultures et les individus; certaines cellules en sont remplies ; d'autres n'en présentent que quelques granules autour des pyrénoïdea. Les chromatophores sont au nombre d'une quinzaine ou davantage ; vus de face, ils ont la forme de disques à contours arrondis ou irréguliers; au centre se voit le pyrénoïde ; de profil, ils ressemblent à des rubans dis- posés parallèlement à l'axe (T. fig. 12, C). On colore facilement le pyrénoïde en rouge vineux au moyen du picro-carmin et de l'hématoxyline, alors que le reste du chloroleucite prend une teinte moins accentuée. On rencontre deux manières d'être des chloroleucites qui sont, semble-t-il, en relation étroite avec la présence ou l'absence de paramylon. Ainsi, dans des individus dépourvus de cette substance et arrondis en sphère, le chloroleucite tout entier se colorait en bleu clair, alors que le pyrénoïde central prenait une teinte bleu très foncé (T. fig. 13, A, D); ce pyrénoïde non recouvert de para- mylon était constitué par la partie centrale du chloro- plaste, et ses contours étaient souvent mal délimités ; parfois, il était réduit à l'état de petit globule et parfois même manquait tout à fait; ces chloroleucites s'appliquent par leurs deux extrémités sur la couche corticale ; ils sont donc disposés tangentiellement (T. fig. 13, D, E) ; cette couche corticale assez dense et granuleuse se distinguait RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 177 facilement du cytoplasme interne plus vacuolaire traversé par quelques trabécules. La disposition la plus fréquenté des chloroleucites est celle-ci : les pyrénoïdes sont très gros et entourés de deux calottes épaisses de paramylon ; entre les deux calottes et FiG. i3. — Eurjlena polijmorphe sp. nov. débordant plus ou moins de chaque côté se trouve le disque même du chloroleucite imprégné de chlorophylle (T. fig. 13, B, C). Il n'est pas rare de rencontrer des individus chez lesquels on ne distingue que les pyrénoïdes, alors très gros avec leur revêtement de paramylon ; quelques-uns même, devenus presque incolores, laissent à peine distin- guer trois ou quatre amas chromatiques, derniers vestiges 12 178 P -A. DANGEARD des pyrénoïdes (T. fig. 13, G) ; au milieu de très gros cor- puscules de paramylon serrés les uns contre les autres. Dans cette espèce, on observe facilement, sur les exem- plaires maintenus quelque temps à l'obscurité la réduc- tion graduelle des chloroleucites ; c'est la substance même des pyrénoïdes qui persiste le plus longtemps avec une teinte jaune clair (T. fig. 12, F) ; des masses rougeâtres apparaissent dans le cytoplasme. Lorsque les cellules s'arrondissent, les chloroleucites se recourbent de diverses façons (T. fig. 12, D). Les chroraatophores se multiplient par bipartition; le pyrénoïde se divise ; ses deux moitiés s'écartent, et la séparation se produit; ce phénomène qui précède la division du corps est assez facile à observer dans cette espèce. Il est probable que les chromatophores peuvent égale- ment prendre naissance dans le corps par simple diffé- renciation du cytoplasme ; nous avons vu que ces éléments disparaissent graduellement lorsqu'on maintient les cultures à l'obscurité ; les choses se passent de deux ma- nières un peu différentes : ainsi, dans les individus gorgés d'amidon, les pyrénoïdes persistent quelque temps avec leur calotte de paramylon ; on voit ensuite la substance des pyrénoïdes diminuer; elle se réduit à un point au centre de la sphère amylacée ; finalement on ne voit plus rien; reste-t-il cependant un centre do formation qui servira à la naissance d'un nouveau chloroleucite? C'est ce qu'il est bien difficile de dire; nous penchons toutefois pour la négative. Lorsque les chloroleucites ne com- prennent qu'un disque avec pyrénoïde sans paramylon, la disparition ne suit pas une marche parallèle pour tous ces éléments; nous avons noté, en effet, des individus qui possédaient encore trois chromatophores, d'autres un ou deux seulement (T. fig. 13 P, H) ; à la dernière limite que nous ayons observée, il n'existait plus dans le cytoplasme RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 479 en dehors du noyau, des grains de paramylon et du cyto- plasme granuleux, qu'une seule sphérule qui pouvait être considérée comme un vestige du dernier chromatophore (T. fig. 13, 1). Il est donc à peu près certain que les chro- matophores perdent complètement leur individualité et se reforment à nouveau par différenciation du cytoplasme. Le noyau sur les individus en mouvement occupe à peu près le milieu du corps; sur ceux qui sont au repos il est légèrement excentrique (T. fig. 13) ; le nucléole est entier ou fragmenté; le nucléoplasme est assez rarement homo- gène ; on y distingue le plus souvent des granulations ou des taches chromatiques au nombre d'une trentaine; quelques-unes affectent l'aspect de bâtonnets. La bipartition du corps a lieu comme dans VEuglena splendens^ avec un axe nucléolaire simple ou fragmenté ; les chromospires restent très nettes pendant la division (P. Ill, fig. 7-10) ; au moment où les deux moitiés du noyau tendent à se séparer, on voit les chromosomes étirés suivant l'axe et reliés les uns aux autres par des trabé- cules (PL III, fig. 9). Il est impossible, dans ces condi- tions, de faire intervenir une division longitudinale de ces éléments ; Taspect des figures correspond à une division transversale analogue à celle du nucléole lui- même. Les chloroleucites restent souvent visibles pen- dant la bipartition avec leur structure ordinaire. Dans cette espèce, les individus jouissent au plus haut degré de la faculté de s'arrondir ; on les voit tourner len- tement à l'intérieur de leur enveloppe ; ils forment ainsi à la surface de l'eau une couche plus ou moins épaisse ; il est facile de les voir reprendre la vie active ; ils se dé- gagent rapidement de leurs enveloppes, et celles-ci, pri- vées de leur contenu, dessinent une sorte de réseau cellu- laire. Nous avons réussi, parfois, à colorer sous la membrane des granules, qui sont sans doute, comme dans VEuglena. 180 p. -A. DANGE/VRD velata, VEuglena sjolendens, Veuglena g ranulata, etc., en rapport avec la sécrétion gélatineuse ; mais ils sont beau- coup plus nombreux et plus petits que dans les espèces que nous venons de citer. 4° Euglena. flava sp. nov. Cette Euglène a été récoltée à la Cueilleet à la Cassette, FiG. 14. — Euglena flava. aux environs de Poitiers ; ses dimensions sont celles de VEuglena viridis ; ainsi sa longueur ne dépasse guère 60 ij- sur une largueur de 25 à 30 (jl ; sa forme générale est RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 181 aussi celle de VEuglena viridîs ; mais la structure des chromatophores est très différente. Le corps renferme une dizaine ou une douzaine de chloroleucites discoïdes dispo- sés parallèlement à la surface (T. fig. 14, A) ; lorsqu'on les voit de profil, ils ont l'apparence de rubans ; au milieu se trouve le pyrénoïde qui est recouvert de deux calottes épaisses de paramylon. Nous avons vu quelques indivi- dus se colorer en rouge ; il se produisait, comme dans VEuglena sanguinea un dépôt d'hématochrome en granules au centre de la cellule ; jamais cependant, ce dépôt n'a envahi le corps tout entier (T, fig. 14, B). Cette espèce a une tendance à se décolorer ; du moins, nous avons ren- contré certains individus dont le nombre des chloroleuci- tes était descendu à trois (T. fig. 14, C) ; le paramylon avait disparu, et à sa place on remarquait chez certains indi- vidus des corpuscules rougeâtres ou des sortes de vési- cules renfermant des nodules noirs. Les individus s'arrondissent facilement ; le flagellum, qui est de la longueur du corps, disparait, et la cellule se divise en deux sous une mince enveloppe (T. fig. 14, J.) Le noyau occupe le milieu du corps pendant la période d'activité (T. fig. 14, B, G) ; il est relativement très gros ; • son contour est sphérique, polyédrique, quelquefois en forme de biscuit ;le nucléole est unique; le nucléoplasme renferme un grand nombre de chromospires, près d'une quarantaine. La division du noyau se fait comme chez les autres espèces ; nous avons figuré cependant un stade de la métaphase qui montre nettement la marche du phéno- mène (T. fig. 14, H) ; les chromospires orientées à la périphérie des deux masses nucléaires encore réunies par des filaments incolores ; les nouveaux noyaux ont leurs chromosomes nettement délimités ; quelques-uns ont la forme de bâtonnets courts (T. fig. 14, I). Une mince cloison sépare les deux cellules filles ; dans 182 P.-A. DANGEARD chacune d'elles, le noyau ne tarde pas à se contracter, et les chromospires disparaissent dans le nucléoplasme {T. fig. 14, 1). L'espèce se divise aussi pendant la période d'activité (T. fig. 14, F) ; mais ce phénomène est assez rare. 5° Euglena sociabilis sp. nov. Cette espèce a été recueillie en compagnie de VEuglena deses de ÏEuglena joisciformis et de VEuglena velata ; elle présente avec cette dernière des affinités assez grandes pour que la distinction réclame une certaine attention ; mais le mode de division permet de séparer nettement les deux espèces. La longueur du corps est de 85 |jl environ sur 25 i-i de largeur ; la cellule est arrondie à l'avant et terminée en pointe à l'arrière ; le point oculiforme est très apparent (T. fig. 15, A). Le nombre des chloroleucites est moins élevé que dans VEuglena velata ; il ne dépasse guère une dizaine ; les py- rénoïdes sont gros et recouverts de deux larges calottes de paramylon ; le chloroleucite lui-même n'a point l'ap- parence d'un disque comme dans les espèces précédantes ; on dirait plutôt que du pyrénoïde se détachent plusieurs rubans chlorophylliens ; pourcomprendre cette structure, il suffit simplement de supposer que dans un chloroleu- cite étoile du type de VEuglena velata, les échancrures atteignent la surface du pyrénoïde. Le noyau est médian ou légèrement postérieur ; il est moins gros que celui de VEuglena velata et son contour est assez souvent irrégulier. Cette espèce s'est divisée rapidement dans nos cultu- res ; la cellule s'arrondit et s'entoure d'une épaisse membrane ; elle renferme assez souvent beaucoup de pa- ramylon en gros globules ovoïdes ou en bâtonnets ; les RECHKRGHES SUR LES EUGLÉNIENS 183 chloroleucites se placent tangentiellement à la surface ; on voit parfois les rubans s'orienter presque perpendi- culairement à la membrane constituant ainsi une sorte de couche corticale qui rappelle celle de VEaglenu splendens'^ les pyrénoïdes avec leur revêtement de paramylon sont FiG. l.'j. — Eufjlena sociabilis sp. nov. gross. 800, sauf pour les figures F. G. H. aplatis à la face interne de cette couche corticale (T. fig.l5, D, B, E). Le noyau est excentrique et il conservera cette position dans les divisions qui vont suivre ; son contour est sphé- rique ou irrégulier ; cette dernière disposition est sur- tout prononcée dans les cellules qui renferment beaucoup de paramylon. Dans la plupart des espèces d'Euglènes, les cellules filles 184 P.-A. DANGEARD après la division se trouvent éloignées Tune de l'autre par une sécrétion de substance gélatineuse ; lorsque la seconde bipartition se produit, on ne trouve plus trace de la première membrane commune. Il en est tout autre- ment dans VEuglena, sociabilis ; les bipartitions se con- tinuent sous la première enveloppe qui persiste : il en résulte des colonies sphériques de deux, quatre ou huit cellules (T. fig. 45, E, F) ; on peut dire que ces sortes de colonies ne diffèrent guère des sporanges de Chlamydomo- nadinées que par la lenteur des bipartitions ; toutes ces divisions sont longitudinales ; c'est à cause du déplace- ment des individus que le sens des cloisons parait trans- versal ou irrégulier ; les cellules des colonies conservent leur point oculiforme et leurs chloroleucites ; c'est même en considérant la position du point oculiforme qu'on peut facilement vérifier la direction longitunale de la divi- sion. En résumé, l'Euglena sociabilis est une espèce qui est nettement caractérisée par la forme de ses chloroleucites et par son mode de division. Dans une culture en chambre humide qui a duré deux mois, cette espèce est toujours restée très distincte de l'^'ii- glena velata avec laquelle elle se trouvait mélangée ; les colonies étaient de deux ou de quatre cellules ; la disposi- tion rayonnante des chloroleucites était très remarqua- ble ; il en résultait une sorte de couche corticale comme dans VEuglena sanguinea ; le paramylon était peu abon- dant, mais l'enveloppe gélatineuse avait acquis une assez grande épaisseur (fig. 15, G, II). 6° Euglena pisciformis Klebs. Cette espèce a été créée par Klebs qui en a donné une bonne description (I ) ; elle existe aux environs de Poitiers, (1) Klebs : Loc. al., p. 302. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 185 OÙ on la rencontre assez fréquemment mélangée à d'autres espèces. Le corps est ovale allongé, se terminant progres- sivement en pointe (T. fig. 16, A) ; le point oculiforme a la forme d'un disque dans lequel on aperçoit de fines granula- tions rougeâtres ; le flagellum est de la longueur du corps ; il se détache facilement. C'est une des plus petites espèces du genre: sa longueur atteint à peine 30 /j. et sa largeur est Fifi. 16. — Eîifjlena pisciformi's . de 6 à7 p. ; onla reconnaît facilement à ses mouvements vifs qui ont quelque analogie avec ceux d'un poisson ; lorsque ce mouvement cesse, le corps se déplace par mélabolie en se déformant beaucoup (T. fîg. 16, B). La structure interne possède un caractère de fixité qui rend facile la détermination de cette espèce ; il existe deux chloroleucites disposés parallèlement à l'axe et qui attei- gnent presquela longueur du corps; un pyrénoïde se trouve en leur milieu, recouvert d'une calotte d'amidon ; quelques rares individus montrent trois chloroleucites (T. fig. 16, C) et même quatre; il est probable que l'origine de cette ano- 186 P -A. DANGEARD malieest la suivante; les chloroleucites se divisant avant le noyau, il peut arriver que les individus reprennent leur état d'activité sans achever leur division ; ces individus possèdent alors trois ou quatre chloroleucites au lieu de deux ; à la bipartition suivante, l'équilibre se rétablit ; sans cela nous aurions des formes constantes dans l'espèce, ce qui ne semble pas avoir lieu. Les individus qui vont se diviser se fixent aux parois des vases et s'arrondissent; à l'intérieur de cette sphère, on distingue nettement les deux chloroleucites recourbés en arc ; la place des deux pyrénoïdes est indiquée par les deux calottes de paramylon (T. fig. 16, D) ; quelques granules decette substance sont libres dans le cytoplasme. La sphère se recouvre bientôt d'une épaisse membrane ; à. ce stade, la cellule est parfois remplie de gros grains de paramylon (T. fig. 16, E) ; le noyau est presque central, et on distingue le nucléole avec une douzaine ou une quinzaine de chromo- spires. La division se produit pendant la nuit ; comme dans l'espèce précédente, il y a formation de colonies de quatre ou de huit cellules (T. tig. 16, F,J): les divisions ont lieu sous la membrane primitive qui se colore parfois en brun ; ces colonies sont remarquables par leur petitesse ; ainsi le diamètre de celles qui renferment huit cellules ne dépasse pas beaucoup 30 /J-. On ne peut manquer aussi d'être frappé de la ressemblance qu'offrent ces colonies avec les formations palmelloïdes des Chlamydomonadinées et des autres Algues unicellulaires vertes. On arrive assez facilement à colorer le noyau des cellules dans ces colonies ; il est très petit; son diamètre est de 3 à 4 p. ; on ne dis- tingue qu'un petit nucléole, entouré d'un nucléoplasme homogène (T. fig. 16, J). A chaque bipartition, les deux choroleucites se divisent, de sorte que le nombre se main- tient constant. UEuglena pisciforniisKl. esiune des meilleures espèces; elle est commune, avec des variations de taille assez sen- RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 187 sibles ; nous l'avons récoltée un très grand nombre de fois aux environs de Poitiers, et nous avons constaté sa présence au bord de la mer, dans une excursion aux Sables- d'Olonne. 1'^ Euglena gracilis Klebs. Nous avons rencontré cette espèce une seule fois en explorant les divers bassins qui se trouvent chez les hor- ticulteurs de Poitiers ; elle était en culture pure ; sa des- cription correspond à la diagnose donnée par Klebs (1) mieux qu'au dessin qui en a été fourni par ce savant. Le corps a une forme cylindrique ou ovale (T. fig. 17, A, B) ; sa longueur est de 40 à 45 jj^, sa largeur est de 10 i^ environ ; le point oculiforme est réduit ; les chloroleucites discoïdes sont peu nombreux ; on en compte douze ou quinze. Il y a là une légère différence avec la description de Klebs qui attribue à cette espèce des chloroleucites nombreux, telle- ment pressés les uns contre les autres que le corps semble uniformément coloré en vert (2). Dans notre récolte, au contraire, les chloroleucites étaient assez espacés ; on trouve bien au centre un pyrénoïde arrondi, mais il n'est pas recouvert de paramylon ; cette substance manquait complètement dans la plupart des cellules ; dans quel- ques-unes cependant on apercevait deux ou trois petits bâtonnets (T. fig. 17, C). Le mouvement de ces Euglènes est très vif; elles se portent en masse du côté de la lumière, et arrivées sur les bords de la soucoupe, elles se fixent, deviennent immo- biles et prennent une forme ovale ou arrondie (T. fig. 17, D, F) ; cette espèce s'est montrée très délicate, et il nous a été impossible de la conserver longtemps. (1) Klebs : Loc. cit., p. 30:!. |2) Klebs : Loc. cit., p. 33U. 188 P. -A. DANGEARD Le noyau est assez gros ; il est situé un peu au-des. sous du centre ; dans les cellules arrondies, il est excen- trique (T. fig. 17, D). La division de la cellule a été observée au bout de cinq jours de culture ; elle a lieu sous la forme ovale ou sphé- rique; les deux cellules filles ne sont point entourées d'une membrane commune (T. fig. 1 7, E, G). A la prophase, on dis- tingue de nombreuses chromospires dans le nucléoplasme ; pen- dant la période de re- pos, le noyau est plus petit, et le nucléoplas- me est homogène. Les pyrénoides tendent à disparaître pendant la division, mais le fait n'est pas géné- ral. Klebs fait remar- quer que cette espèce se distingue par la délicatesse du corps et sa transparence : c'est ce qui nous a décidé à identifier notre espèce avec la sienne, mais nous ne sau- rions affirmer quec'estbienla forme étudiée par Zumstein sous ce nom. Fig. n. — Euglena gracilis. 8° Euglena deses Ehrbg. Cette espèce a été distinguée pour la première fois par Ehrenberg en 1832, puis décrite plus complètement par ce même savant en 1838 (1) ; le corps ressemble à un fil non élastique ; il n'est jamais fusiforme, mais seule- (1) Ehrenberg : Loc. cil. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 189 ment cylindrique; jamais nageant, mais rampant (1). D'après la descrip- tion de Dujardin, le corps est très allongé , cylindri- que, obtus ou ter- miné en pointe peu marquée , flexible et contractile de diverses manières, mais avec lenteur ; vert. — Longueur de 0,07 à 0,112.— Largeur 0, OU (2). Les trois figures que Stein consacre k! à cette espèce nous montrent que le corps peut être ter- miné en pointe ; le noyau est central, les chloroleucites ont la forme de courts bâtonnets et les corpuscules de paramylon disper- sés dans le corps sont rectangulai- res allongés (3) ; à côté de cette forme jeune, Stein en re- présente une plus Fio. 18. — Euglena deses, v'* intermedîa. âgée dans laquelle l'extrémité postérieure du corps est (4) Dujardin : Loc. cit., p. 363. (2) Stein : Loc. cit., T. XX, fig. 14-16. 190 P.-A. DANGEARD arrondie, alors que les chloroleucites sont discoïdes {l). Klebs sépare cette dernière forme de la première sous le nom d'Eaglena Ehrenbergii sp. nov. et dans la descrip- tion qu'il donne de VEuglena cleses (2), il distingue deux variétés; la première possède des chloroleucites en bâ- tonnets courts avec un pyrénoïde apparent, mais nu; les grains de paramylon sont petits, oblongs ou en courts cylindres. Dans la variété (3 intermedia les chloroleucites sont discoïdes, sans pyrénoïdes; cette variété est carac- térisée par la présence au-dessus et au-dessous du noyau de quelques longs bâtonnets de paramylon assez gros ; elle établit la transition avec VEuglena Ehrenbergii ; cette dernière espèce se distinguerait par ses dimensions plus grandes, par ses extrémités arrondies, par son gros point oculiforme bombé ; les grains de paramylon sont en bâ- tonnets fins et longs, souvent recourbés ; mais ils peuvent être aussi cylindriques, aplatis ou discoïdes ; les chloro- leucites sont dépourvus de pyrénoïdes (3). Nous avons récolté cette espèce plusieurs fois et nous pensons qu'aucun de ces caractères n'est constant. Nous avons étudié tout d'abord une forme sans pyrénoïdes: les chloroleucites étaient nettement discoïdes et dépour- vus de pyrénoïdes. Immédiatement après la récolte, les individus de grosse taille étaient les plus nombreux ; le corps se contracte, s'aplatit, se recourbe avec la plus grande facilité; il est arrondi à ses deux extrémités (T. fig. 18, A, B, C); le point oculiforme situé à côté de la vacuole principale est très large ; à l'intérieur du cyto- plasme, on aperçoit quelques bâtonnets de paramylon; leur grosseur et leur longueur présentent des variations sensibles; d'autres grains de même substance, mais beau- coup plus petits, sont disséminés çà et là entre les chlo- (1) Stein : Loc. cit., T. XX, fig. 14-16. (2) Klfibs : Loc. cit., p. 303-304. (3) Klebs : Loc. cit., p. 304-305. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 191 roleucites ; nous avons vu aussi quelquefois deux corpus- cules en anneau mélangés aux bâtonnets ordinaires (T. fig. 48, A) ; parfois le corps est complètement rempli de gros grains de paramylon (T, fig. 18, F, G). Cette espèce d'Euglène correspond exactement à celle qui a été considérée par Klebs comme nouvelle sous le nom d'E. Efwenbergii ; elle rappelle également la forme âgée de VEuglena deses figurée par Stein. Nous avons continué nos cultures pendant quelque temps afin de pouvoir choisir entre l'opinion de Klebs et celle de Stein ; or, toutes les transitions existaient entre les gros individus que nous venons de décrire et d'autres plus petits ; ceux-ci étaient vermiformes : le corps très allongé, cylindrique, se termine en pointe ou s'arrondit en se contractant (fig. 18); le corps se recourbe fréquemment sur lui-même ; l'organisation générale n'a pas changé; on retrouve dans le cytoplasme des chloroleucites discoïdes dépourvus de pyrénoïdes et des bâtonnets de paramylon. Pour nous, il est absolument hors de doute qu'il s'agit là d'une seule et même espèce pouvant présenter des différences de taille considérables; afin d'écarter toute chance d'erreur, nous avons étudié la structure du noyau ; celui-ci présente les mêmes caractères dans tous les exemplaires ; il est gros, allongé en biscuit dans le sens de l'axe (T. fig. 18, D,E) ; au milieu se trouve le nucléole ; ce dernier est rarement arrondi ; presque toujours, il est étiré en un cordon chromatique entier ou fragmenté; le nuécloplasme s'est toujours montré homogène. En résumé, il nous était impossible de maintenir une distinction spécifique entre les gros individus à extrémités arrondies, atteignant une longueur de 200 f ou davantage et les plus petits ne dépassant pas 70 i^, puique nous ob- servions toutes les transitions, tant sous le rapport de la distribution et de la forme des grains de paramylon que sous celui de la morphologie générale. 192 P.-A. DANGEARD Au bout d'un mois de culture, nous trouvions quelques individus au stade de repos ayant une forme assez va- riable ; ils étaient remplis de paramylon, en gros bâton- nets mélangés à des corpuscules plus petits (T. fig. 18, F, G). D'autres individus étaient restés à la période d'activité; ils rampaient sur les bords de la soucoupe ; le noyau se prête facilement à toutes les déformations que subit le corps pendant ce mouvement ; il peut même se replier complètement sur lui-même (T. fig. 18, J) ; d'autres aspects ont une signification moins précise. Il n'est pas très rare, en effet, de trouver des noyaux séparés en deux moitiés par une mince cloison perpendiculaire à l'axe du corps (T. fig. 18, K) ; nous ne saurions dire s'il s'agit d'une division anormale; car malgré le grand nombre de prépa- rations que nous avons examinées, nous n'avons jamais rencontré d'autres stades intermédiaires. La forme que nous venons de décrire correspond donc selon nous à VE. deses variété (3 intermedia Kl. et à VEu- glena Ehrenhergii du même auteur. Selon Schmitz, il serait préférable d'éleverla variété in- termedia au rang d'espèce (1) ; on conserverait le nom à'EuglenEi deses à celle qui possède des chloroleucites avec pyrénoïde central. Cette distinction spécifique nous parait superflue; en effet, il est impossible, sans le secours des réactifs, de reconnaître dans une récolte d'Euglena deses, s'il s'agit de la forme possédant des pyrénoïdes ou de la forme qui en est dépourvue: de plus, ces pyrénoïdes sont loin de se présenter toujours avec le même caractère de netteté ; parfois ce pyrénoïde se colore nettement ; son contour est très distinct de la zone incolore du chloroleucite qui l'entoure (T. fig. 19, E) ; mais parfois le pyrénoïde est (1) Schmitz : Loc. cil., II, p. 39. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 193 mal délimité, peu apparent ; il se continue insensiblement avec la substance même du chloroleucite. En dehors de la différence de structure du chloroleu- cite, les deux formes ont exactement la même allure générale. Nous avons recueilli à diverses reprises VEuglenadeses type, celle qui possède des pyrénoïdes ; dans l'une de ces récoltes, le protoplasma était très granuleux ; le cytoplasme était dépourvu de paramylon ou il n'en ren- fermait que très peu (T. fig. 19, A, F); dans une autre récolte, au contraire, les cellules renfermaient cette sub- stances à des degrés variables ; les corpuscules étaient groupés en deux amas (T. fig. 19, B) ou bien disséminés (T. fig. 19, C). En poursuivant en chambre humide, pendant plus de trois mois, la culture de la première récolte, nous avons vu que le paramylon, d'abord absent dans la cellule, a fini par l'envahir tout entière. Au début, quelques Euglènes se sont décolorées (T. fig. 19, J) ; les chloroleucites étaient remplacés par des granulations rougeâtres et le noyau était envalii par un parasite que nous nous proposons de décrire en détail : ces Euglènes, devenues ainsi incolores, avaient conservé leur vitalité, ainsi qu'en témoignaient leurs mouvements ; elles ont fini cependant par mourir. La plupart des autres Euglènes ont conservé leur vita- lité ; au bout de plusieurs semaines, elles étaient deve- nues immobiles et plus ou moins contractées ; certaines possédaient encore la forme générale de Tespèce et même la petite pointe incolore postérieure ; d'autres étaient ar- rondies aux deux extrémités ; toutes étaient remplies de grains de paramylon dont quelques-uns en bâtonnets (T. fig. 19, G, H). A la fin du second mois, on observait quelques divi- sions s'effectuantà l'intérieur d'une enveloppe gélatineuse 13 194 P. -A. DANGEARD (T. fig. 19, 1) ; plusieurs ont eu lieu dans les cellules de la forme H. Nous avons obtenu récemment une belle récolte d'Eu- '^ te Fig. 19. — Euf/lena deses type. ylena deses, dans laquelle les divisions ont été nombreuses : les chloroleucites i)0ssédaient un pyrénoïde ; il s'agissait donc de la forme type. La fixation a été faite à 10 h. du soir ; dans beaucoup d'individus, la division était com- mencée ; elle n'était terminée que chez quelques-uns seulement. Les individus sont entourés d'une couche gé- RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 195 latineuse ainsi que Klebs l'a indiqué ; mais elle est plus ou moins épaisse. Le noyau se porte à l'avant, au-des- sous de la vacuole principale : son nucléole est unique à ce moment ; le nucléoplasme a une apparence homogène. Le nucléole s'allonge transversalement et atteint la sur- face nucléaire ; il n'est pas toujours exactement central ; il continue à s'étendre et atteint presque la paroi de la cellule ; le nucléoplasme l'accompagne ; à ce stade, l'en- semble du noyau a un contour elliptique et sa substance paraît fibreuse dans le sens de l'axe. Pendant cette division, beaucoup d'individus sont ren- flés à l'avant et a l'arrière et contractés en leur milieu ; au-dessous du noyau, on aperçoit trois ou quatre bâton- nets de paramylon et un grand nombre de corpuscules de même nature, dispersés un peu partout dans le cyto- plasme ; l'échancrure antérieure et la vacuole principale sont encore indivises. Les deux noyaux frères deviennent indépendants comme chez les autres espèces d'Euglènes ; ils se trouvent alors accolés à la paroi : une échancrure se produit qui s'étend de l'avant à l'arrière du corps et sépare les deux indivi- dus (pi. IV, fig. 1, 2, 3, 4). Le mucus gélatineux qui entoure les cellules en divi- sion était plus ou moins abondant. 2^ GROUPE. Ce groupe comprend les espèces qui possèdent des chloroleucites disciformes sans pyrénoïdes; elles ont comme caractère assez général la propriété de se diviser longitudinalement sans modifier leur forme comme dans les espèces étudiées précédemment ; elles se rencon- trent en moins grand nombre. La métabolie y est très faible, ou nulle ; elles établissent le passage au genre Phacus. 196 p. -A. DANGEARD 1° Euglena. oxyuris Schmarda. lia Espèce de grande dimension; longueur 490 p- ; lar- geur 30-40 II. Enveloppe épaisse à stries relevées en sil- lons et disposées en spirale. Le corps est allongé, cylindrique ou quelque peu aplati, terminé à la partie postérieure en une pointe incolore effilée. Noyau médian, à contour elliptique; nucléole très gros et fragmenté en nombreux corpuscules : deux gros grains de paramylon à stries concentriques disposés l'un au-dessus, l-'autre au-dessous du noyau ; le cyto- plasme renferme, en outre, d'autres cor- puscules de cette même substance beau- coup plus petits et dispersés dans le cy- toplasme. Le canal antérieur est limité par une paroi à double contour se colo- rant en rouge par les réactifs nucléaires. Chloroleucites petits, nombreux, discoïdes. Flagellum atteignant la moitié de la lon- gueur du corps, peu mobile. Le mode de division n'a pas été observé et les kystes sont inconnus. On rencontre quelques individus dont le corps présente une torsion avec deux ou trois tours de spirale. Nos observations montrent que le no- yau est allongé en biscuit comme dans V Euglena deses (T. fig. 20) ; le nucléole est constitué par de nombreux petits frag- ments : le nucléoplasme est homogène comme dans les espèces qui se divisent FiG. 20. — Euqlena , oxyuris. rarement. RECHERCHES SUR LES EUGLÉN1EN3 197 2° Euglena. tripteris {Phacus tripteris Dujard). Cette espèce a quelque rapport avec la précédente, ce \ qui explique pourquoi Stein la considérait J comme une forme jeune de V Euglena oxyuris ; nous partageons l'avis deKlebs qui lui conserve son autonomie (1). Ses dimensions atteignent en longueur 70 à 80 p, et sa largeur 12 à 14 ju : la torsion du corps, qui est aplati, est parfois assez prononcée pour donner l'apparence d'ailes comme dans le Phacus alata ; il existe deux cor- puscules de paramylon, l'un au-des- sus, l'autre au-dessous du noyau ;ils ont la forme de gros bâtonnets et non celle d'un anneau comme dans ÏEu- (jlena oxyuris (T. fig. 21) ; les stries de la membrane sont très accusées. Le corps est presque rigide: la méta- FiG.21.— E«- bolie est rare et faible; nous touchons qtena tripte- 'vis. D'après avec Cette espèce au genre Phacus. Nous n avons rencontre cette es- pèce que rarement. 3° Euglena acus Ehrbg- Corps très allongé, cylindrique ou en forme d'aiguille, terminé en pointe fine à l'extrémité postérieure. Flagellum assez court; membrane épaisse et striée. Noyau central. Chloroleu- W cites nombreux, petits, discoïdes, paramylon \, en gros bâtonnets plus ou moins nombreux, \î dispersés dans le cytoplasme (T. fig. 22). La division est longitudinale, sans changement fig. 22. — em- préalable dans la forme du corps. Enkyste- ^^^"* "''"^' ment inconnu. Klebs a décrit une variété 8 mutabilis (1) Klebs :Loc. cit., p. 306. 198 P.-A. DANGEARD qui se distingue du type principalement par sa méta- bolie, ses dimensions plus faibles et ses corpuscules de paramylon qui sont courts, petits et cylindriques; une autre variété y liyalina est incolore. Cette espèce a été rencontré à Poitiers et à Ségrie, mais toujours en exemplaires isolés. 4° Euglena spirogyra Ehrbg. Le corps est allongé, cylindrique ou aplati, terminé par une pointe courte et incolore ; la membrane est recouverte de ponctuations disposées en spirale et colorées en jaune ou en brun par un oxyde de fer. Le flagellum est moins long que le corps. Chloroleucites nombreux dis- coïdes. On reconnaît facilement cette espèce à la présence de deux gros corpuscules de paramylon en forme d'anneau qui sont placés l'un au-dessus, l'autre au-dessous du noyau (T. fig. 23). Division longitudinale, sans mo- dification de la forme du corps. Klebs a décrit une variété P fusca qui se distingue du type par sa coloration brune, vn\|rjf par ses ponctuations plus grosses. Le flagel- {f^w!^ lum est de la longueur du corps (1). Nous avons rencontré plusieurs fois cette espèce, soit à Poitiers, soit dans la Sarthe, mais sans pouvoir observer la division ; le noyau de forme arrondie occupe une posi- tion médiane : son nucléole est unique ou fragmenté ; le nucléoplasme était homogène. ^ifna'lpi^o^yra. GENRE EUTREPTIA Perly. Ce genre se distingue des Euglena par l'existence de deux (1) Klebs : Loc. cit., p. 30:". ■ ^ RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 199 flagellums au lieu d'un seul ; on ne connaît actuellement qu'une seule espèce ; nous avons retrouvé dans nos notes anciennes une mention indiquant sa présence aux environs de Caen ; depuis nous ne l'avons pas revue ; sa description, d'après Klebs, est la suivante (I) : Eutreptia viridis Perty. - // / Cette espèce rappelle dans son organisa- tion VEuglena viridis ; elle en diffère par ses deux ilagellums et ses chloroleucites dis- coïdes sans pyrénoïdos (T. fig. 24). Le noyau est situé dans la partie antérieure de la cel- lule ou au milieu ; il possède un nucléole. La métabolie rappelle celle de VAstasia mar- garitifera,; les flagellums sont de la longueur du corps ; celui-ci a une forme conique, et son extrémité postérieure se termine parune longue pointeincolore. Lesindividusperdent facilement leurs flagellums, la cellule s'ar- rondit et s'eiitourc d'une membrane ; c'est sous cette forme qu'elle se divise très pro- bablement. La longueur est de 49 p. sur 13 p. de largeur. Fifi. 24. — Eii- l replia viridis. GENRE COLACIUM Elirbg Ce genre n'a guère été étudié que par Stein qui en a figuré trois espèces : Colacium calvum, C. arhuscula et C . vesiculosum [1] \ les ccllbles possèdent, selon KlebF, l'organisation de ÏEuglena viridis, seulement les chlorc- leucites sont discoïdes. Eu réalité, ce genre est insulli- samment connu ; les figures de Stein semblent indit|uer l'existence dans le C. calvum de chloroleucites discoïdes (1) Klebs : Loc. cit., p. ^15. (2) Stein : Loc. cit.,']:. XXI. 200 P.-A. DANGEARD avec pyrénoïdes recouverts de paramylon comme dans VEaglena vela,ta, et les espèces voisines ; la cellule du Cola.ciuni arbuscula ressemble davantage à VEuglena gra- cilis. Le caractère principal du genre consiste dans la sé- crétion à la partie antérieure du corps d'une sorte de pédicelle simple ou ramifié sur lequel repose l'Euglène ; ces pédicelles sont fixés à la surface des petits crustacés d'eau douce ou sur d'autres supports. Les individus libres ont un flagellum de la longueur du corps ; ils présentent des mouvements de métabolie comme lesautres Euglènes. La division a lieu pendant la période de fixation; elle est longitudinale. 1° Colacium calvum Stein. Corps cylindrique, arrondi à ses deux extrémités ; très contractile; la partie antérieure, sur les individus libres, FiG. 25. — Colacium calvum. D'après Stein. présente une large zone incolore striée dans le sens de Taxe. Le noyau est situé au tiers postérieur du corps ; le cytoplasme renferme un grand nombre de chloroleu- RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 201 cites discoïdes à pyrénoïde central recouvert de para- mylon (T. fig. 25). La cellule sécrète à sa partie antérieure un pédicelle gros et court sur lequel elle se divise dans le sens longi- tudinal ; chacune des cellules filles sécrète alors pour son propre compte un nouveau pédicelle. 2° Colacium arbuscula St. Très jolie espèce ; cellules portées sur de très longs pé- dicelles minces et ramifiés ; elles ont une forme ovale arron- die ; le noyau est médian ; les chloroleucites sont discoïdes sans pyrénoïdes ; l'organisation générale est à en juger d'après le dessin de Stein, complète- ment semblable à celle de VEu- glena gracilis (T. fig. 26). t5j*h^ mt^^ Fig. 26. — Colacium arbuscula. D'après Stein. 3* Colacium vesiculoswn Ehr. Cette espèce, pendant la période de liberté, ressemble Fig. 27. - Colacium vesiculum. D'après Stein. à VEuglena viridis ; mais elle semble en différer par la 202 P.-A. DANGEARD structure et la disposition de ses chloroleucites qui sont discoïdes ; les individus se fixent par l'avant et sécrètent un pédicelle qui reste très court ; il en résulte que ces pédicelles, dans les colonies un peu nombreuses, sont dif- ficiles à distinguer (T. fig. 27). Les espèces de ce genre ont été rarement rencontrées : nous trouvons cependant les deux dernières espèces si- gnalées dans la flore véronèse(i). GENRE ASCOGLENA Stein. Ce genre a été créé pour une Euglène qui habite à l'in- térieur d'une sorte de loge; on n'en connaît qu'une es- pèce (2). Ascoglena. vaginicola Stein. Cette espèce a été découverte par Stein qui en a donné une bonne figure, mais sans y ajouter de description. Selon Klebs, le corps ressemble à celui de VEuglena gracilia ; le fiagellum est de la longueur de la cellule. La caractéristi- que du genre est la présence d'une loge à paroi finement ponctuée, colorée en jaune ou en brun par un oxyde de fer ; celui-ci ne se fixe pas à la par- tie antérieure de la loge qui reste ainsi incolore (T. fig. 28). L'Euglène est fixée psr sa pointe postérieure au fond de cette loge ; c'est là qu'elle se divise ; ensuite l'une des cellules filles sort et nage librement jusqu'au moment où elle se sécrète une nouvelle demeure. (1) Consulter Achille Forti : Contributo 4 alla conoscenza délia flo rida flcologica Veronese. (2) Stein: Loc. ci/., T. XXI, fig. 35-36. A Fiu. 28. — Ascofflena vaginicola. D'après Stein. RECHERCHES SUR LES EUGLÊNIENS 203 GENRE PHACUS Nitzsch. Le genre Phacus a été créé par Nitzsch pour une espèce que Muller avait décrite sous le nom de Cercaria pleuro- nectes; Ehrenberg l'avait réunie à son genre Euglena. Dujardin est revenu au genre Phacus, caractérisé par un tégument privé de contractilité et une forme invariable, alors que dans les Euglènes le tégument contractile permet aux individus de changer de forme à chaque in- stant. Cette différence n'est pas aussi tranchée que le pensait Dujardin ; en effet, nous trouvons des espèces d'Euglènes, comme VE. acws, VE. oxyuris dont la méta- bolie est très faible; il en est même une, comme nous l'avons vu, 1'^. tripteris, que Dujardin plaçait dans le genre Phacus; d'autre part, la métabolie se rencontre, à un faible degré, il est vrai, dans certains Phacus comme le P. pyrum (1). Bien qu'il existe quelque difficulté à déli- miter exactement les deux genres, il est avantageux néanmoins de les conserver; sauf pour une ou deux formes critiques, il est toujours facile, même à un examen rapide, de distinguer une Euglène d'un Phacus. La définition donnée par Dujardin de ce dernier genre était celle-ci (2). « An. à corps aplati et comme foliacé, ordinairement vert et orné d'un point rougeen avant, avec un filament flagelliforme et revêtu d'un tégument membraneux résis- tant, prolongé postérieurement en manière de queue. » Dujardin plaçait le genre Phacus dans ses Thécamona- diens et rangeait le genre Euglena dans les Eugléniens ; il n'y a pas lieu de les séparer ainsi à grande distance ; nous sommes de l'avis de Klebs qui rapproche les deux genres sans les confondre. (1) Klebs : Loc. cit., p. 314, (2) Dujardin : Loc. cil., p. 334, 204 P A. DANGEARD 1° PhEicus pleuronecte Nitsch. Cette espèce est sans doute la plus commune du genre; Dujardin nous apprend qu'elle a été rencontrée dans presque toute l'Europe; lui-même l'a observée dans une FiG. 29. — Pliacus pleuronectes. eau stagnante des côtes du Calvados ; dans des eaux maré- cageuses infectes des environs de Paris, dans l'eau de l'étang de Meudon et pour la première fois en grandes masses à Toulouse, dans l'eau des fossés du boulevard (1). Le corps est très aplati, foliacé, un peu plus long que (1) Dujardin: Loc. cit., p. 336-337. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 205 large; arrondi à ses deux extrémités, dont l'une, la posté- rieure, se termine brusquement par un mucron incolore recourbé ; l'un des côtés se relève dans sa partie médiane en une crête longitudinale qui limite ainsi une sorte de sillon ; la membrane possède des stries longitudinales assez espacées; le noyau est rapproché de la partie pos- térieure ; à son voisinage existe un très gros corpuscule de paramylon,de forme discoïde, qui est situé au-dessus ou au-dessous du noyau. Le point oculiforme est placé à côté delà vacuole principale. Chloroleucites petits, assez nom- breux, discoïdes (T. fig. 29, B, G). La membrane est très résistante ; tandis que celle de VEuglensL viridis, sous l'influence delà pepsine, a presque complètement disparu au bout de 24 heures; celle du P/iac us reste inaltérée; elle est un peu soluble dans les acides et les alcalis (Klebs) ; il n'est pas rare de trouver des enveloppes vides qui ont persisté, après la destruc- tion du cytoplasme; on distingue alors très facilement la crête médiane et les sillons longitudinaux. La crête médiane produit à la partie antérieure du corps l'effet de deux lèvres : placée sur le côté convexe du corps, elle est parfois assez proéminente pour donnera la section trans- versale du corps un contour triangulaire. L'aspect du corpuscule de paramylon est variable; il est fréquemment sphérique et montre des stries concentriques jusqu'au centre; parfois la surface offre l'aspect d'un anneau ; quelquefois ce corpuscule paraît creux ; d'autres grains de paramylon sont disséminés en plus ou moins grand nombre dans le cytoplasme. Le flagellum, très long, est inséré au fond d'une échan- crure, sur une petite plage de cytoplasme chromatique (T. fig. 29, C, D). Le développement est très complet dans cette espèce : il comprend une division à l'état libre, une division à l'inté- rieur d'une enveloppe gélatineuse et un enkystement. 206 P.-A. DANGEABD Si la division à l'état libre est connue, les détails nous manquent sur la manière dont elle se produit; ayant ren- contré quelques individus en bipartition (T. fig. 29, G), nous avons pu saisir les points les plus importants du phénomène; ainsi, il faut tout d'abord remarquer que nous sommes en face d'une cellule dont les trois dimensions sont différentes; l'épaisseur est faible par rapporta la lar- geur, et celle-ci est de son côté plus petite que la lon- gueur. Comment va s'orienter le fuseau nucléaire? Elle est exactement inverse de celle qui est prévue par la loi d'Hertwig et de Pflueger ; le nucléole s'allonge suivant l'épaisseur, c'est-à-dire dans le sens de la dimension la plus faible. La division est longitudinale et de plus elle se fait suivant l'épaisseur du corps. Lorsque nous examinons la structure de la cellule au moment de sa division, nous constatons la disparition du flagellum ; au niveau de l'insertion se trouve une tache très chromatique (T. fig. 29, H) ; du reste, le cytoplasme se colore assez facilement par le picro-carmin et l'héma- toxyline; nous avons des préparations où il avait pris, tout autour du noyau, une teinte vineuse ; cette chroma- ticité est assez rare chez les Eugléniens. Le noyau, qui est ordinairement postérieur, devient médian ; les chromospires étaient indistinctes dans nos préparations : ce n'est guère qu'à la prophase que nous avons aperçu quelques traces de striations. Au-dessous du noyau, on trouve généralement, à ce moment, deux corpuscules de paramylon de grosseur sensiblement égale ; il en existe d'autres de taille plus petite disséminés sans ordre dans le cytoplasme (T. fig. 29, H, 1, J, K). Le nucléole s'allonge perpendiculairement aux deux faces planes; comme il rencontre les parois de la cel- lule à ses deux extrémités, il ne peut subir son exten- sion complète qu'à la condition de se bomber en son RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 207 milieu ; c'est ce que nos figures montrent nettement. Après la division la cellule mère se trouve séparée en deux dans son épaisseur, et chaque cellule fille est reconstituée avec la forme générale de l'espèce; chacune emporte avec elle un des deux gros corpuscules de paramylon. Le Phsicus pleuronectes se multiplie également à l'inté- rieur d'enveloppes gélatineuses, ainsi que nous l'avons établi depuis longtemps (1). Il donne naissance de cette façon à des colonies palmelloïdes analogues à celles que nous avons vues chez les CryptomonELs ; « ces colonies se produisent en grand nombre, mais il faut savoir les trouver; il est difficile de les obtenir dans les cultures ordinaires ; on ne peut guère qu'assister au début ; ce sont les plus gros individus qui sont destinés à former les colonies; ils perdent la pointe incolore qui se trouve à l'extrémité postérieure du corps, leur flagellum dispa- raît, le protoplasma se condense; ils arrondissent leurs contours ; on croirait alors avoir affaire à une espèce diffé- rente ; puis le Phacus tourne lentement sur lui-même et cela peut durer assez longtemps; on constate alors facile- ment l'existence d'une enveloppe mucilagineuse, à stries concentriques, qui s'élargit de plus en plus; le mouve- ment cesse et la division se produit ; toute trace de la carapace avec ses stries caractéristiques a disparu ; il y a formation de deux cellules, dont on reconnaît très bien la nature au gros corpuscule de paramylon qui se trouve dans chacune d'elles ; c'est même la présence constante de ce corpuscule qui permet de reconnaître à coup sûr les colonies peu nombreuses de Phacus, au milieu des autres cellules d'algues ; ces colonies se trouvent dans les réservoirs d'eau ; il est bon de gratter les parois de ces réservoirs, de placer les résidus obtenus dans une cuvelte peu profonde et de les dissocier ; on arrive ainsi (1) P. -A. Dangeard : Ràc.herches sur les Euglenese et les Cryptomona.- dineœ (Le Botaniste, série 1). 208 P-A. DANGEARD à mettre en évidence des colonies composées de quatre, huit ou seize cellules (T. fig. 30); ces cellules sont souvent groupées par quatre; elles ont des contours arrondis ; elles sont mises plus tard en liberté par dissolution de l'enveloppe mucilagineuse ; on continue toujours à dis- tinguer les chromatophores, dans de telles colonies. 11 n'en est plus de même dans la période d'enkystement ; Fig. 30. — Pliacus pleuronectes. elle est beaucoup plus rare à observer ; la cellule conserve sa forme elliptique et s'entoure d'une couche épaisse de gélatine, comme dans le cas précédent ; mais le corpuscule de paramylon prend un développement considérable; il arrive à occupper presque les deux tiers de la cellule ; le reste contient un protoplasma jaunâtre, finement granu- leux, sans trace de chromatophores (T. fig. 30, G). La ger- mination de ces kystes n'a pu être obtenue jusqu'ici. Cette espèce, dans sa détermination, donne lieu à quel- ques difficultés. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 209 Ehrenberg distinguait de la manière suivante VEuglena pleuronectes et VEuglena. triqaetra, : 1° Euglena, pleuronectes. Euglène pleuronecte à corps comprimé- ovale orbiculaire, foliacé, rayé iongitudinale- ment, vert, queue grêle, aiguë, égalant le tiers ou le quart du corps, hyaline. 2'' Euglena, triquetra. Euglène trilatérale, à corps ovale, foliacé caréné, trilatéral, vert, la queue plus courte que le corps, hyaline (1). Klebs n'a pas maintenu cette distinction spécifique ; il considère le Phacus triquetra Ehrbg. comme une simple variété du Phacus pleuronectes. De son côté, Schmitz est d'avis qu'il y a lieu de conser- ver les deux espèces (2). Il est très difïicile de prendre parti dans cette discus- sion ; pour le faire utilement, il faudrait pouvoir conser- ver en culture assez longtemps les diverses formes voi- sines du type; nous avons dû nous borner à les repré- senter, en laissant indécise la question de savoir s'il s'agit d'espèces ou de simples variétés. Le développement indiqué dans notre description s'ap- plique au Phacus pleuronectes type (T. fig. 29, B, G, I, J, K; fig. 30, A, B, C, D, E, F, G). Les autres formes sont : 1" Un Phacus assez commun aux environs de Poitiers qui semble pouvoir être identifié avec la variété |3 brevi- caudata Klebs (T. fig. 29, A). 2" Le Phacus triquètre, considéré, selon les auteurs, comme espèce distincte ou variété du Phacus pleuronectes (T. fig. 29, C, D). S** Une forme possédant régulièrement deux corpuscules discoïdes de paramylon (T. fig. 29, E, F). 4° Un Phacus, à extrémités obtuses rencontré en ré- (1) Ehrenberg : Loc. cil., p. 1 ll-l 12. (2) Schmitz •.Loc. cit., II, p. 71. 14 210 P. -A. DANGEARD coite pure et qui pourrait bien être élevé plus tard au rang d'espèce distincte (T. fig. 30, H, I, J, K, L). 2» Phacus alata Klebs. Cette espèce doit prendre place près du Pha,cus pleuro- nectes dont elle offre l'aspect général ; les côtés du corps se prolongent en sortes d'ailes plus ou moins proémi- nentes qui renferment chacune un gros disque de para- mylon, un peu allongé ; on reconnaît facilement l'espèce à ce dernier caractère (T. fig. 31, A, B). Stries espacées longitudinales ou en spirale : la torsion du corps, quoi- que moins prononcée que dans le Pha,cus longicauda^ est cependant quelquefois déjà très sensible (T. fig. 31 , C). Nous avons recueilli cette espèce autrefois aux envi- rons de Caen, à Moult-Argences : elle se rencontre éga- lement aux environs immédiats de Poitiers ; nous avons réussi à suivre son développement qui était totalement inconnu. Au moment de la division, le corps est devenu moins irrégulier; on ne distingue plus guère les deux ailes que par la présence des gros corpuscules de paramylon qui persistent avec leurs caractères; le mucron postérieur peut disparaître et se trouver remplacé par une sorte de papille; l'échancrure latérale au fond de laquelle est in- séré le flagellum devient médiane (T. fig. 31, D); on trouve là un protoplasma chromatique se continuant plus ou moins loin dans le corps ; le flagellum a deux fois la longueur du corps : les deux gros corpuscules de para- mylon forment entre eux un angle aigu ; d'autres grains de paramylon plus petits sont fréquemment disséminés dans le cytoplasme. Le noyau à l'état de repos est situé à la partie posté- rieure du corps; il est nucléole et son nucléoplasme est sensiblement homogène. Pour la prophase, le noyau se porte au centre de la cellule : de nombreux granules RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 211 apparaissent, le nucléole commence à s'allonger per- pendiculairement à l'axe du corps (T. flg. 31, D, E); il atteint la surface nucléaire et continue à s'accroître; les chromospires deviennent parallèles et avant la sépa- FiG. 31. — Pkacus aluLa. ration des noyaux frères, on voit les deux moitiés du spirème encore réunies par de nombreux cordons inter- médiaires (T. flg. 31, F). La séparation se produit; chaque nouveau noyau s'arrondit en sphère ayant au centre un petit nucléole et tout autour de nombreuses chromospires en séries radiaires (T. fig. 31, G, iï). La division du corps suit celle du noyau ; à l'avant, les deux bords derinfundibulum(T. fig. 31, G) s'écartent. 212 P. -A. DANGEARD constituant une sorte de cratère de volcan, avec au milieu une papille colorable donnant insertion au fla- gellum et rappelant un blépharoplaste. Un peu plus tard, la séparation qui débute par cette partie antérieure s'étend progressivement; on trouve alors chaque moitié avec son infundibulurn incliné du côté interne et conte- nant un peu de protoplasma chromatique ; l'échancrure s'étend de plus en plus, séparant les noyaux, puis les deux corpuscules de paramylon ; ces derniers ne sont pas tou- jours visibles à la fin de la division, et leur disposition est assez variable. Enfin les deux nouveaux individus se sé- parent (T. fig. 31,11, I, J). Dans les cultures, un grand nombre d'individus tombent au fond des cuvettes et là s'entourent d'une enveloppe gé- latineuse ; on trouve ainsi des alvéoles limitées par une substance muqueuse, prenant une couleur brune par l'hématoxyline et la fuchsine acide; quelques-unes ren- ferment encore les cellules du P/iacus ; les autres sont vides. Chez certains individus (T. fig. 31, B), les corpuscules de paramylon sont annulaires; cette disposition semble assez rare, du reste. La répartition de cette substance montre d'assez grandes variations ; les deux gros corpuscules sont carac- téristiques de l'espèce ; mais les cellules renferment, en outre, fréquemment d'autres granules de paramylon ; quelques-unes en sont remplies (T. fig. 34, K) : d'autres en sont presque dépourvues (T. fig. 31, A). Les chromosomes dans cette espèce sont très petits et nombreux; on les observe facilement à tous les stades de la division ; la difficulté est de se procurer des individus en voie de bipartition. 3° P/iacus longicauda Ehrbg. (Dujardin). Le corps est aplati, plus long que large ; il se termine RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 213 par une pointe effilée incolore qui peut atteindre la lon- gueur du corps ; au voisinage du noyau, au-dessus géné- ralement se trouve un gros corpuscule discoïde de para- mylon ; la membrane possède des stries longitudinales. Longueur 80-90 /j. ; largeur 40-45 fi. On rencontre deux formes de cette espèce; dans l'une la pointe caudale n'est guère plus développée que dans le Phacus pleuronecteset le corps est plat, foliacé (T. fig. 32, A) ; dans Tautre, cette pointe at- teint la loagueui' du corp s qui est lui-même tordu plu- sieurs fois en spirale (T. fig. 32, B). Stein admet que cette dernière forme peut se mo- difier lentement pour revenir à l'aspect plat et foliacé qui caractérise les individus a pointe caudale peu dévelop- pée. Nous n'avons jamais rencontré cette espèce qu'en exem- plaires isolés: Klebs a fait la même constatation ; c'est ce qui explique que nous ne sachions rien de. son mode de division. Il esta remarquer toutefois que Dujardin semble avoir eu à sa disposition une culture abondante de ce Phacus : « De l'eau rapportée de l'étang du Plessis-Piquet, le 23 novembre 1835, et conservée dans un flacon avec des débris de plantes marécageuses, me fournissait abondam- ment, dit-il, ce Phacus que j'ai représenté dans les An- nales des sciences naturelles (1836, t. 5, pL IX) pendant les mois de décembre et de janvier (i). » C'est sur de telles récoltes qu'on peut espérer fixer le mode de développe- ment de cette espèce. (1) Dujardin : Loc. cit., p. 337 Fig. 32. — l'hacuf! longicauda. 21' P.-A. DANGEARD 4° P/iacus pyrum Ehrbg. (Stein). Le corps est pyriforme, un peu aplati : il est arrondi à l'avant et échancré latéralement ; à l'extrémité posté- rieure, il se termine par une pointe incolore plus ou moins longue : les stries de la membrane sont espacées, proéminentes et disposées en spirale. Klebs admet que FiG. 33. — Phacu^ pyrttm. cette espèce se distingue des précédentes parce que, au lieu de gros corpuscules de paramylon, il en existe un grand nombre de plus petits. Ce caractère ne doit pas être retenu; nous avons observé à cet égard de très grandes différences. Chez la plupart des individus, les corpuscules de paramylon sont au nombre de deux seu- lement et disposés de chaque côté comme dans le Pha- cus alata; chez d'autres, il en existe plusieurs à cette même place (T. fig. 33, A, B, C). Les deux corpuscules, vus de profil, ressemblent à deux longs bâtonnets appli- RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 215 qués directement sous la membrane et possédant la même courbure; avec un peu d'attention, on s'aperçoit que ces formations sont en réalité discoïdes ; on constate de plus que le centre se colore par les réactifs nucléaires (T. fig. 33, E). Cette disposition rappelle les pyrénoïdes recouverts d'une calotte de paramylon, que nous avons rencontrés chez certaines Euglènes, avec cette différence qu'ici la plage chromatique occupe la face^interne et mé- diane du corpuscule de paramylon. Les chromatophores sont discoïdes et très apparents: le point oculiforme est gros et granuleux, le flagellum de la longueur du corps. Le noyau est postérieur ; il devient médian en vue de la division ; le nombre des chromospires varie : sur certains individus nous en comptions une quarantaine, alors que sur d'autres le nombre de ces éléments parais- sait inférieur à trente ; elles ont la forme de petits bâton- nets (T. fig. 33). La division se fait à l'état libre, sans sécrétion de mem- brane gélatineuse : le corps s'arrondit à l'avant ; àl'arrière, la pointe diminue de longueur; sur quelques individus, il devient même assez difficile de distinguer la partie posté- rieure du corps de la partie antérieure. Le nucléole s'allonge transversalement (T. fig. 33, F, (t) ; il vient buter contre les deux corpuscules de paramylon (T. fig. 33, F, H); les chromospires sont très nettes dans le nucléoplasme; elles ont la forme de petits bâtonnets. Lors- que la division du noyau est terminée, une échancrure se produit a l'avant et s'étend progressivement séparant la cellule mère en deux cellules filles (T. fig. 33,1, J, K). Pon- ' dant cette séparation, chaque corpuscule de paramylon se colore vivement dans sa partie centrale ; il peut se frag- menter en deux ; on est autorisé à penser que les deux cellules filles emportent chacune un corpuscule de para- mylon avec son pyrénoïde ; celui-ci en se divisant rétablit # 2J6 P. A, DANGEARD la structure normale de la cellule ; il est toutefois difTicile d'être afïirmatif, étant donné que le phénomène se pré- sente avec des aspects quelque peu variables. Les cellules filles restent réunies pendant un certain temps ; les poin- tes caudales se reforment ; le noyau qui montre nettement une quarantaine de chromospires descend à la partie pos- térieure du corps (T. fig. 33, I). Schmitz considère le Phacus pyrum, comme une Eu- glène, et il revient ainsi à l'ancienne opinion d'Ehrenberg. Selon lui la constitution des chromatophores est la sui- vante (1); il en existerait deux très minces, discoïdes, dis- posés tangentiellement à la surface ; le pyrénoïde est repré- senté par un renflement médian, développé sur la face externe du chloroleucite; il est recouvert en dehors par un corpuscule deparamylon en forme de verre de montre; à la surface interne du chloroleucite se trouvent de nom- breux petits grains de paramylon. Si cette description était exacte, l'appareil chlorophyl- lien du Phacus pyruin serait très différent de celui des autres Phacus qui ont des chromatophores nombreux, dis- coïdes. Nous avons tenu à élucider ce point important de la structure ; or, il est absolument certain que cette espèce possède des chromatophores absolument identiques à ceux du Phacus pleuronectes,) par exemple ; les corpuscu- les de paramylon avec leur plage chromatique interne sont indépendants des chloroleucites. Il n'existe donc au- cune raison de retirer cette espèce du genre Phacus. 5'* Phacus ovum Ehrbg. Cette espèce possède un contour elliptique ; on observe des intermédiaires vers la forme presque sphérique et la forme cylindrique ; le corps est arrondi à la partie pos- {\) Qchmitz: Loc. cit., p. 60, pl.I, fig. 19. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 217 térieure avec un petit mucron droit ; ce mucron manque assez souvent. Stries en spirale plus ou moins nombreuses en général assez espacées. Les chloroleucites sont parié- FiG. 34. — Phacus ovum. taux, discoïdes, et ils se touchent presque les uns les au- tres (T. fig. 34, A, B, C, D, E). Stein attribue à cette espèce une sorte de col antérieur duquel se détache le flagellum ; il en fait par suite le type d'un nouveau genre Chloropeltis (1). Klebsareconnu que cette disposition n'exislaitpas sur la plupart des individus, et qu'il n'y avait pas lieu, par conséquent, de séparer cette espèce des autres (2). Dans nos récoltes, aucune des cellu- (1) stein : Loc.cit.,T. XIX, fig. 45-50. (2) Klebs : Loc. ci*., p. 315. 218 P.-A. DANGEARD les ne présentait de col antérieur; toutes laissaient aper- cevoir plus ou moins facilement une sorte d'infundibulum dans lequel s'insère le flagellum. Stein figure diverses dispositions des grains de para- mylon ; Klebs considère l'une d'elles comme caractéris- tique de l'espèce ; il existerait deux gros corpuscules de paramylon en anneau de chaque côté de la vacuole prin- cipale. Cette observation n'est pas confirmée par nos pro- pres recherches ; dans la plupart des individus que nous avons étudiés — et ils sont nombreux — les grains de pa- ramylon étaient globuleux, plus ou moins gros et disper- sés dans tout le corps ; chez quelques autres, cependant on trouvait de chaque côté, au-dessus du noyau, deux anneaux appliqués sur la membrane. Klebs a distingué deux formes de cette espèce, qui se maintenaient constantes dans les cultures : 1° la forme a globula presque sphérique et dont le flagellum atteint 2 à 3 fois la longueur du corps. Longueur 0,021 mm . ; largeur 0,016 ; 2" la forme b cylindrica cylindrique et dans laquelle le flagellum est de la longueur du corps, long. 0,027; larg. 0,010. UEuglena, fusiformis de Carter (1) tient le milieu en- tre ces deux formes . Cette espèce nous a paru assez polymorphe ; son as- pect varie aux divers stades du développement et aussi selon les récoltes ; mais il ne semble pas facile d'y distin- guer des variétés bien définies. Le noyau occupe la partie postérieure du corps ; à l'état de repos, le nucléoplasme est sensiblement homo- gène; il renferme un nucléole arrondi ; les chloroleucites se colorent faiblement parles réactifs ordinaires, de sorte qu'on les voit beaucoup mieux sur les individus vivants. Le noyau qui va se diviser augmente considérablement de volume ; c'est dans cette espèce et dans le Pkacus alata (1) Carter : Ann. and Mag. of Xat. Ilist., loc. cit., 1859. RECHERCHES SUR LES EUGLEMENS 219 que nous avons remarqué les noyaux les plus gros du genre ; les chromospires sont nombreuses dans le nucléo- plasme;les unes ont l'aspectde simples granulations ;d'au- tres ont la forme de bâtonnets radiaires (T. fig. 34, F, G, H). Ce noyau se porfe vers le milieu de la cellule en vue de la division. Nous avons rencontré cette espèce à l'état de division libre et à l'état de colonies palmelloïdes. Dans la division libre, les individus s'arrêtent, perdent leurs flagelhims ; on trouve parfois autour d'eux des tra- ces d'une sécrétion ; la substance qui en provient se colore en brun parThématoxyline. La partie antérieure du corps est tantôt complètement arrondie (T. fig. 35), tantôt creusée en cratère comme dans le Phcicus alata,{T. fig. 34, I, J) : à la partie postérieure se trouve ordinairement une sorte de papille recouverte d'une calotte se colorant en noir par i'hématoxyline (T. fig. 35). Les phénomènes de la division du noyau se voient fa- cilement dans cette espèce ; au moment où le nucléole en s'allongeant transversalement atteint la surface nucléaire, le noyau a son plus grand diamètre perpendiculaire à cet axe (T. fig. 35, A) ; les chromospires sont entremêlées et disposées plus ou moins parallèlement à l'axe nucléolaire ; cellui-ci s'allonge beaucoup ; le nucléoplasme se déplace (T. fig. 35, B) ; ses deux moitiés suivent le mouvement du nucléole et les deux noyaux frères se reconstituent avec un nombre dé chromospires sensiblement égal à celui du noyau primitif ; elles affectent fréquemment une disposi- tion en séries radiaires (T. fig. 35, C). La cellule a subi un élargissement considérable dans le sens de la division nucléaire ; une échancrure se produit ; elle débute à la partie antérieure et s'étend progressivement, séparant définitivement les deux cellules filles ; les sillons restent visibles pendant la durée de la division ; ils sont assez nombreux (T. fig. 35, D). 22(J P. -A. DANGEARD Dans d'autres exemplaires, la biparlilion a lieu sous une membrane commune assez mince (T. fig. 35, E) ; enfin nous en trouvons d'autres qui constituent de véritables colonies palmelloïdes ; ce qui nous a frappé, c'est que, dans ces colonies, les cellules situées au milieu d'une en- FiG. 35. — Phacxis ovum. veloppe gélatineuse épaisse conservent encore des traces des sillons de la membrane (T. fig. 35, F) ; ils sont légère- ment aplatis; la partie antérieure du corps se distingue de la partie postérieure, parce que cette dernière est recou- verte d'une sorte de calotte noirâtre, comme dans la divi- sion libre; le paramylon est dispersé en granules dans toute la cellule ; les noyaux ont leurs chromospires visibles, même dans l'intervalle des divisions. Nous avons rencontré des colonies de quatre et de huit cellules ; elles pourraient RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS " 221 êtreconfondues par l'algologue le plus expérimenté avec des algues protococcacées (T. fig. 35, F). Toutes ces divisions ont été observées dans une même culture dont les individus étaient très vigoureux ; les diffé- rences d'aspect qu'elles présentent pourraient faire croire que nous avons eu affaire à plusieurs espèces distinctes ; il y a heureusement un caractère général dans ces divisions qui n'existe pas dans les autres Plmcus étudiés ; c'est la présence à la partie postérieure de la cellule d'une sorte de petite calotte qui se colore en noir ou en brun par l'hé- matoxyline ; on la retrouve même dans les colonies palmel- loïdes. Par contre, la distribution du paramylon ne sau- rait fournir ici aucune indication sérieuse, puisqu'elle est très irrégulière ; les deux corpuscules antérieurs sont ra- rement visibles, et cette substance est distribuée dans le corps en granules de grosseur variable ; mais cette irrégu- larité même est utile à la détermination de l'espèce, puis- qu'elle permet de la distinguer des précédentes chez lesquelles les corpuscules de paramylon ont une forme déterminée et une situation d'une certaine fixité. 6° Phacus par vida Klebs. Cette espèce se rencontre en compagnie du Ph. pleuro- nectes-^ le corps est à contour ovale ou elliptique ; il est aplati, muni d'une crête longitudi- nale : l'extrémité postérieure est terminée en pointe ; la mem- brane présente des stries. On distingue le Ph.parvuladu Ph. pleuronectes à ses dimensions plus faibles et à la présence d'un corpuscule de paramylon médian discoïde (T. fig. 36). Longueur 12-17 pt. ; largeur 6-9 p.. Fi' et la largeur est de 5 à 6 ,'-''. Le noyau est situé au tiers inférieur du corps (PI. IV, fig. 12). Pendant le mouvement, alors que la cellule ne modifie pas ses contours, la ressemblance avec le Menoidium pellucidum Perty est frappante, ainsi que Klebs l'a con- staté lui-même. Il est certain que l'avant du corps, chez ÏEitglena. curvata, est organisé exactement comme dans le Menoidium pellucidum', il ne reste comme différence que la forme rigide du corps dans ce dernier genre. Menoidium incarvum (Fres.) Klebs. Le Menoidium incurvum ou Rhabdomonas incurva se trouvait en compagnie de VAslasia marrjarili fera ; nous avons déjà vu les nombreuses con- troverses qui se sont élevées à propos de cette espèce; nous nous rangeons à l'avis de Klebs qui en fait une espèce distincte ;le corps est rigide, cylin- drique, arrondi aux deux extré- mités, et ordinai- rement un peu recourbé ; la sur- face présente quelques côtes espacées longitudinales (T. fig. 46). La longueur atteint 25 [J- sur, une largeur de 7 [}-. Klebs n'a pas réussi avoir un sillon longitudinal séparant le corps en deux moitiés inégales ; il est certain que cette Fig. 46. — Menoidium incurvum. 248 P.-A. DANGEARD disposition, signalée par Seligo, n'est pas visible sur tous les individus; mais elle existe sur quelques-uns; c'est une sorte d'aile analogue à celle du P/iacus a/afa mais beaucoup moins prononcée (T. fig. 46, F). Seligo se demandait s'il ne fallait pas voir dans cette apparence un indice de la division du corps ; il se prononçait pour la négative, à cause de l'inégalité des deux moitiés ainsi séparées; nous pouvons ajouter que rien dans la struc- ture interne de ces cellules n'indique une division pro- chaine. D'après le même savant, un gros corpuscule discoïde de paramylon existe régulièrement à la partie antérieure du corps sur la plupart des gros individus ; à côté se trouve une vacuole principale ; la vacuole an- nexe contractile n'a pas été vue. Le noyau se trouve au milieu du corps dont il occupe presque toute la largeur ; au-dessus et au-dessous sont disposés des corpuscules de paramylon de différentes grosseurs. Nous ajouterons seulement que le noyau est loin d'être toujours médian ; il est assez souvent situé au premier tiers postérieur du corps : cet élément est quelquefois aplati par les grains de paramylon, et dans ce cas sa structure est difficile- ment reconnaissable. Nous avons pu nous assurer, sur des exemplaires plus favorables, qu'il possède un nucléole entouré d'un nucléoplasme homogène (T. fig. 46, B, C), et qu'il ressemble complètement au noyau de VAstasia mar- garitifera, bien que les chromospires soient plus rare- ment visibles. A la partie antérieure du corps, nous avons mis en évidence par les réactifs un petit canal latéral qui se dirige du côté de la vacuole. Le Menoidiwnx incurvwn a un stade de repos comme VAstasia margaritifera ; il conserve sa forme générale, son cytoplasme est rempli de gros grains dont la nature aurait besoin d'être étudiée à nouveau ; ils rappellent les corpuscules gélatineux du Sphenomonas teres ; les sillons de la membrane, ainsi que la crête longitudinale, RKGHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 249 sont plus visibles que pendant la période d'activité ; le noyau est comprimé, presque méconnaissable (T. fig. 46, E, F, G, H). Nous avons observé la division dans cette espèce; les deux individus, sur le point de se séparer, nageaient de concert, en conservant leur position parallèle ; l'avant de chaque cellule renfermait des grains deparamylon, alors que la partie postérieure contenait de petits granules protéiques (T. fig. 46, I). En résumé, des quatre genres qui, à l'heure actuelle, forment le groupe des Astasia, deux, d'après nos observations, ont une autonomie réelle : le genre Astasia, et le genre Menoîdium. On doit se demander s'il en est de même des genres Distigma, et Sphenomonas qui ne diffèrent des deux pré- cédents que parce qu'ils possèdent un second fiagellum plus petit à côté du premier. Or, nous savons que les flagellums,*dans la division longitu- dinale libre, ne se multif lient pas par bipartition, mais par nouvelle formation ; ainsi, lorsqu'un Astasia se divise, un second fiagellum pousse à côté du premier ; il y a là une cause d'erreur, ainsi qu'en fait foi une observation an- cienne que nous rapporterons ici. Il s'agissait d'un organisme ne possédant normalement qu'un fiagellum et ressemblant à une Euglène incolore, par conséquent un Astasia très probablement ; le corps était cylindrique ou ovale allongé, terminé en pointe ; il Fig. 41. — Division d'un Astasia. 250 P.-A. DANGEARD montrait, à certains moments, des déformations considé- rables. Parmi ces individus, l'un d'eux présentait un tout petit flagellum à côté du second beaucoup plus long. Stein a figuré VAstasia proteus ayant ainsi normalement deux flagellums, l'un atteignant la longueur du corps et l'autre beaucoup plus court : dans notre observation, l'individu à deux flagellums représentait un stade de la division, ainsi que nous nous en sommes assuré. Bientôt, en effet, les deux flagellums s'éloignaient l'un de l'autre, une échancrure les isolait ; les deux moitiés du corps ainsi séparées se plaçaient dans le prolongement l'une de l'autre (T. fig. 47, A, B, C); on avait alors l'illusion d'un organisme ayant un long flagellum à l'avant et un court flagellum à l'arrière ; pendant cette division, VAsta- sia rapproche successivement ses deux moitiés et les éloigne ensuite ; un étranglement médian se produit et la séparation a lieu ; la division a donné naissance à deux individus, l'un qui conserve l'ancien flagellum et qui re- prend immédiatement son mouvement ordinaire ; l'autre qui rampe en attendant l'allongement de son flagellum de nouvelle formation {T. fig. 47, D, E). On voit par ce qui précède l'utilité de reprendre à nou- veau l'étude du genre Distigma, afin de s'assurer si la présence du second flagellum n'est pas tout simplement l'indication d'une division prochaine chez un Astasia ordi- naire. m. — PERANEMACE-ffi. Senn établit dans ce groupe plusieurs sous-familles : Euglenopseée, Peranemese, Peialomonadeœ, Heteronemeas, Anisonemese (1); les espèces qui en font partie ont une nutrition animale et elles produisent dans leur cyto- plasme du paramylon ou des matières grasses. (1) Senn : Loc. cit., p. 179. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 251 En admettant le groupe des Feranemacese dans ses Eu- gleninese, Senn ne fait que suivre l'opinioci de Klebs, qui a essayé d'indiquer dans un tableau les affinités des divers genres entre eux (1). On pouvait croire que certains de ces genres n'étaient pas à leur place dans les Eugleninœ ; c'était même notre opinion avant d'avoir entrepris ce travail : aussi avons-nous été heureux de pouvoir étudier assez complètement une des espèces les plus différenciées parmi les Peranemacese, VEntosiphon sulcatum ; le résultat de nos observations a trompé notre attente. Butschli, qui avait décrit la division nucléaire dans ce genre, l'avait considérée comme une division directe : nous avons pu constater qu'au contraire cette division est absolument identique à celle des autres Eugléniens ; de la sorte, les afïinités de VEntosiphon sul- catum se trouvaient établies solidement. 1" Peranema trichophorum Ehrbg. Cette espèce a été étudiée par un grand nombre d'au- teurs, en particulier par Klebs (2), Butschli (3) et Fisch (4) ; on la rencontre dans les cultures d'Eiiglènes; le corps est ovale ou cylindrique, aminci en avant; il est très spas- modique. Longueur 50 ^,; largeur 12-15 p.. Le flagellum, qui est de la longueur du corps ou un peu plus long, est inséré au fond d'une échancrure antérieure; au-dessous se trouve, dans une sorte d'infundibulum plus ou moins visible, la bouche ; puis, tout à côté, un organe particulier que Butschli considère comme un œsophage, tandis que Klebs pense qu'il s'agit de deux bâtonnets parallèles. Nous n'avons pas d'éléments suffisants pour prendre (1) Klebs : Loc. cit., II, p. 391. (2) Klebs : Loc. cit., I, p. 324; II, p. 368. (3) Butschli : Loc. cit. (4) Fisch : Untersuch. iiber einige Flagellaten (Zeit. f. wiss. zool., Bd. XLII, 1885). 252 P.-A. DANGEARD part à la discussion; mais nous serions assez disposé à admettre qu'il s'agit d'une sorte de gouttière, au lieu d'un tube cylindrique, comme chez l Entosiphon sulcatum. L'ingestion des aliments a été suivie par Klebs et par Fisch ; nous avons réussi, de notre côté, à faire absorber à quelques individus des granules de carmin ; le déplace- ment de ces granules peut se faire très rapidement dans le cytoplasme. Ainsi, l'un des individus contenait deux granules de carmin, l'un situé au-dessus du noyau, l'autre à la partie postérieure du corps ; en quelques secondes le granule du haut rejoignait celui du bas ; le même gra- nule se trouvait ensuite reporté vers le milieu du corps. Les Peranema se nourrissent de petites algues vertes; le cytoplasme en renferme parfois un assez grand nombre (PL IV, fig. 11) ; d'autres individus sont in- colores et ne contiennent que quelques granules de para- mylon (PI. IV, fig. 10). L'origine de ce paramylon est, selon Senn, encore douteuse ; il pourrait provenir des ali- ments ingérés; selon nous, c'est certainement un produit propre de la cellule, comme chez les Astasia. La membrane du corps est striée en spirale; à l'avant, au niveau de la gouttière, se trouvent une vacuole princi- pale et des vacuoles annexes ; le noyau occupe le centre de la cellule. 2» Petalomonas ^nediocscnellata, Stein. Le genre Petalomonas comprend environ huit espèces avec de nombreuses formes intermédiaires que l'on trou- vera indiquées et décrites dans le dernier ouvrage de Klebs (1). Nous avons rencontré dans nos cultures le Petalomonas mediocanellata Stein et nous avons tenté quelques essais de coloration. Le noyau est witué sur le côté gaucho du (\) Klebs : Loc. cit., II, p. 3S0. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 253 corps; il possède un nucléole entouré de nucléoplasme ; malheureusement, aucun de ces noyaux n'était en division (T. fig. 48, A, B, C). Le cytoplasme renferme, selon Senn, des pelotes ali- mentaires, des globules oléagineux, et peut-être diussi des corpuscules de paramylon. Il ne saurait plus y avoir le Fig. 48. — Petalomonas mediocancllata. moindre doute sur l'existence du paramylon dans les Petalomonas ; dans l'espèce que nous étudions ici, le corps renfermait de nombreux corpuscules de paramylon de différentes grosseurs ; ils étaient accumulés dans la partie médiane du corps autour du noyau ; c'est un pro- duit d'assimilation et une réserve, ainsi que nous avons pu le constater. Le flagellum est inséré au fond d'une échancrure très nette; nous n'avons vu aucune trace de blépharoplaste ou de rhizoplaste, même dans nos meilleures prépara- tions. 3° Entosiphon sulcatum (Dujard.) Stein. Dujardin, qui a le premier caractérisé cette espèce, la rangeait parmi les Anisonema, tout en faisant remarquer 254 P.-A. DANGEARD que cet infusoire devrait probablement constituer plus tard un genre nouveau (1). Stein observe à la partie antérieure de ce Flagellé un tube qu'il considère comme comme un oesophage « Schlundrohr » ; d'où le nom générique d'Entosiphon qui a été conservé. Ce savant figure plusieurs stades de la division longitudinale (2). Klebs, dans son premier mémoire, conserve cette es- pèce dans le genre Anisonema : selon lui, le tube vu par Stein est en réalité une sorte de bâtonnet plat ayant une signification inconnue :- le noyau, muni d'une d'un gros nucléole, serait placé à la partie postérieure du corps (3). Seligo est de l'avis de Klebs, en ce qui concerne l'appa- reil spécial de VEntosiphon ; ce serait un tube long et plat : le noyau est, cette fois, placé dans sa position exacte, c'est-à-dire vers le milieu du corps (4). Klebs, dans son second mémoire, maintient sa pre- mière interprétation sur la nature de l'appareil buccal de VEntosiphon et il le compare à ceux des Peranema, Urceolus, Dinema. « Ein Unterschied zeigt sichdarin, dass bei Peranemaund besonders bei Dinema das organ aus zwei Staben besteht, die am vorderen Ende verbunden sind, wahrend bei Entosiphon ein einziger, flacher nach hinten sich verjungender Stab vorhanden ist, den man sich gleichsam durch Verschmelzung entstanden denken kann (5). » Enfin Senn, à la description du genre Entosiphon, nous dit que l'ouverture buccale se trouve à l'extrémité d'un tube à travers lequel la nourriture est ingérée sous la forme de petits granules (6). (1) Dujardin : Loc. cit., p. 345. (•2) Stein : Loc cit., T. XXIV, fig. 17-25. (3) Klebs : Loc. cit., I, p. 329. (4) Seligo : Loc. cit., p. 161. (5) Kle.bs : Loc. cit.. Il, p 390. (6) Sean : Loc. cil., p. 184.- RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 255 Tout en portant plus spécialement notre attention sur le noyau, nous n'avons pas manqué d'étudier l'organisa- tion générale. Le corps est à contour elliptique ; la surface présente des côtes larges au nombre de sept ou huit, séparées par d'étroits sillons assez profonds ; aussi la section trans- versale a-t-elle un peu la forme d'une rosace; à l'avant, ces côtes proéminent en limitant une sorte de vestibule ; c'est dans ce vestibule que vient affleurer l'organe en forme de bâtonnet dont la véritable nature est, comme nous l'avons vu, si controversée. Lorsqu'on examine ce bâtonnet suivant sa longueur, il est presque impossible de décider s'il est plat ou creux ; cependant le fait que la paroi présente un double contour est déjà une indication ; les présomptions se changent en certitude, lorsqu'on peut réussir à observer V Entosiphon par sa face antérieure ; on voit qu'il a une section annu- laire; au moment de la séparation du corps, le bâtonnet se divise comme le noyau ; de face, on aperçoit deux an- neaux complets qui représentent les tubes en section transversale; le bâtonnet est donc arrondi et creux; sa paroi est très mince. L'opinion de Klebs et de Seligo sur la forme de cet organe doit être abandonnée: ce point est définitivement établi. Selon Senn, les aliments passent dans ce tube sous forme de petites granulations : malheureusement l'auteur ne donne aucun détail. Seligo n'a pu observer l'ingestion des aliments ; il n'a pas réussi davantage avec le carmin. Nous avons été plus heureux : ayant mis en cellule humide de nombreux individus de cette espèce, nous avons constaté, au bout de quelques heures, qu'un certain nombre contenaient des granules de carmin (T. fig. 50, A). Encouragé par ce premier succès, nous avons essayé de voir comment ces granules pénétraient dans le cytoplasme ; malgré plusieurs jours consacrés à cette 256 P -A. DANGEARD recherche, les résultats n'ont pas répondu à notre attente ; à un moment donné, nous avons aperçu dans le tube des sphérules qui descendaient avec la rapidité d'une flèche; mais il nous a été impossible d'assister à leur en- trée; nous n'avons pas vu davantage comment elles sor- taient du tube pour pénétrer dans le cytoplasme. Or, le tube se continue jusqu'à la partie inférieure du corps; on le suit jusqu'au contact de la membrane à laquelle il adhère (T. fig. 49, B): il faut bien qu'il y ait quelque part une interruption, puisque nous retrouvons les granules de carmin dispersés dans le cytoplasme jusqu'à la moitié antérieure du corps; ils sont plus nombreux dans la par- tie postérieure, ce qui ferait croire qu'ils sont aban- donnés à leur sortie du tube dans cet endroit et qu'ils re- montent ensuite plus ou moins haut dans le cytoplasme ; au bout de quelque temps, on peut constater leur réu- nion par petits groupes dans des vacuoles digestives. Notre conclusion est celle-ci : Le prétendu bâtonnet de Tentosiphon est certainement un véritable tube ; les gra- nules alimentaires qui pénètrent par cet organe descendent à la partie postérieure du corps et sont abandonnés dans le cytoplasme, où ils sont digérés à des niveaux variables dans le cytoplasme, par l'intermédiaire de vacuoles digestives ', mais nous ne pouvons faire actuellement que des hypo- thèses sur la façon dont les aliments passent du tube œsophagien dans le cytoplasme. Stein avait remarqué les déplacements de cette sorte d'œsophage ; il peut, en effet, remonter au niveau de la surface du corps et même proéaiiner quelque peu ; il rentre ensuite plus ou moins profondément (T. fig. 49, D). Ces mouvements sont faciles à observer ; mais comment doit-on les interpréter? Est-ce le fait d'une sorte de con- traction de l'organe, ou bien le résultat d'une action directe du cytoplasme sur le tube ? Nous pensons que la pre- mière opinion est seule admissible : pendant les déplace- RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 257 ments en question, le corps ne subit aucun changement FiG. 49. — Entosipkon sulcatum. appréciable ; c'est bien le tube lui-même qui se contracte; la paroi à double contour se colore par l'hématoxyline et n 258 P.-A. DANGEARD lepicro-carmin, comme la membrane elle-même ; on peut, selon nous, assimiler ces mouvements à ceux des tenta- cules des Acinétiens ou des pédoncules de Vorticelles. Le noyau occupe une position médiane : sa structure semble au premier abord très différente de celle du noyau des Eugléniens ; un gros nucléole paraît occuper la plus grande partie de la cavité nucléaire ; il n'est séparé de la membrane que par un espace très étroit qui reste inco- lore sous l'action des réactifs ; par contre, la membrane est très chromatique et épaisse ; c'est donc le nucléole qui constituerait de la sorte la majeure partie du noyau ; il se colore fortement et sa substance parait homogène à l'observation (T. fig. 49, B, C). C'est bien ainsi que nous avions tout d'abord inter- prêté cette structure; mais il nous a fallu par la suite mo- difier cette manière de voir. Déjà avec certaines colorations au picro-carmin suivies sous la lamelle, nous avions cru apercevoir dans le pré- tendu nucléole une sorte de masse centrale plus chroma- tique, à contour peu net; mais les méthodes ordinaires ne laissaient pas voir cette différenciation dans le noyau à l'état de repos. Ce n'est qu'en étudiant le noyau en division que nous avons reconnu que le prétendu nucléole se compose en réalité de deux parties : Tune, occupant le centre, est le véritable nucléole; l'autre, qui l'entoure, est le nucléoplas- me. Lorsque le noyau a pris la forme d'un biscuit, on dis- tingue parfaitement l'axe nucléolaire disposé comme chez les Eugléniens : il est allongé transversalement et ses deux extrémités renflées atteignent la surface nuclé- aire (T. fig. 50, B) ; le nucléoplasme ne laisse pas voir de chromosomes. Le nucléole continue à s'allonger, entraî- nant avec lui à ses deux extrémités le nucléoplasme; la forme est alors exactement celle d'une haltère ; le pont qui réunissait les deux moitiés se rompt, et dans les deux RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 259 noyaux devenus indépendants, la distinction du nucléole et du nucléoplasme devient à nouveau difficile (T. fig. 49, I, J) ; le noyau conserve sa membrane pendant toute la division. En résumé, le noyau de VEntosiphon semble au premier aspect différer beaucoup de celui des autres Eugléniens ; Fig. 50. — Entosiphon sulcatum. A. — Ingestion de granules [de carmin ; B. — Noyau en division. cependant, en réalité, les seules différences résident dans la membrane et le nucléoplasme, et elles sont sans doute plus apparentes que réelles. Alors que la membrane nu- cléaire des Euglènes fait défaut ou est excessivement mince, dans VEntosiphon, elle est au contraire épaisse et chromatique ; chez les Euglènes, le nucléoplasme ren- ferme des chromospires ; elles ne sont pas visibles dans VEntosiphon, mais il ne faut pas oublier que la même chose se produit chez YEuglena sanguinea, VEuglena, deses, etc. Le mode même de division est celui des Eugléniens ; 260 P.-A. DANGEARD nous nous permettrons de rappeler ici ce que nous disions récemment à propos du noyau des amibes : « Nous trou- vons chez les Amibes des différences nombreuses dans la structure du noyau ; chacune d'elles correspond à un mode particulier de division ; ainsi, nous connaissons à l'heure actuelle la division directe par étirement, et la division indirecte par cloisonnement ; nous savons égale- ment que la karyokinèse peut se faire suivant deux mo- des sensiblement différents. Ces essais, ces tâtonnements que nous ne trouvons nulle part ailleurs, nous indiquent que l'évolution s'est exercée ici de façon toute spéciale et que le groupe des Amibes est la souche d'où partent de nombreux rameaux. Il devient évident que le noyau a subi de bonne heure dans son mode de division une série de modifications et de perfectionnements étroitement liés aux progrès d'ordre morphologique et physiologique : il sera intéressant de montrer que cette évolution corres- pond dans ses grandes lignes aux principaux groupes primaires animaux et végétaux (1). » Nos prévisions sont bien près de se réaliser ; dans le groupe des Flagellés, nous avons d'un côté des espèces à division indirecte, comme le Polytoma uvella, qui est la souche des Chla- mydomonadinées et des Chlorophytes ; d'autre part, il existe des espèces, comme VEntosiphon sulcatur)i et les autres Eugléniens, dont le noyau se divise suivant un schéma commun ; malgré leur organisation perfection- née, elles n'ont aucune descendance ; elles occupent le dernier échelon de leur ligne d'évolution. L'étude du noyau de VEntosiphon nous apprend encore autre chose : elle nous montre que ce genre est réellement à sa place parmi les Eugléniens'^ ceux-ci ont des noyaux de même structure et la division s'y produit d'une manière identique. Cette conclusion devra être sans nul doute (1) P.-A. Dangeard : Etude de la karijokinèse chez VAmœba hyalina (Le Botaniste, 7e série, p. 81-82). RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 26i étendue à la famille des Anisonemece tout entière, lors- qu'on connaîtra mieux les genres qui la composent. Nous ne nous arrêterons pas longtemps sur les autres phénomènes qui accompagnent la bipartition du corps : la plupart ont déjà été signalés par Steinet Butschli. Les individus qui vont se diviser ont la forme d'un gros tonnelet, avec quatre flagellums groupés par deux ; la séparation ne demande qu'une dizaine de minutes ; une échancrure médiane se produit à l'avant et s'étend pro- gressivement ; finalement les deux cellules ne sont plus réunies que par un mince trabécule qui s'allonge, s'étire en fil et se rompt ; nous insisterons seulement sur le fait que le tube œsophagien de chaque cellule-fille provient de la bipartition de celui de la cellule-mère (T. fig. 49, E, F, G, I, J, K). Les flagellums sont insérés à la partie interne de cha- que cellule-fille, au fond d'une profonde échancrure qui se trouve au contact de chaque tube œsophagien ; leur longueur dépasse celle du corps. Au niveau de l'échan- crure se trouve le système des vacuoles contractiles. Stein a dessiné une vacuole principale, entourée d'une couronne de vacuoles annexes ; Seligo indique la pré- sence de deux vacuoles contractiles qui se vident dans la vacuole principale ; Senn admet plusieurs vacuoles annexes pulsatiles. Le cytoplasme est peu chromatique ; sa structure est alvéolaire : il renferme en plus ou monis grande abon- dance des sphérules de grosseur variable, d'aspect oléa- gineux, très réfringentes ; on les considère comme des produits de sécrétion ; ces corpuscules remplacent sans doute l'amidon et le paramylon comme substance de ré- serve dans la cellule ; lorsque la nutrition est ralentie, ils arrivent à disparaître complètement. Lorsque la cel- lule meurt, le protoplasma se désagrège et se détruit plus ou moins complètement ; au bout de 24 heures on ne 262 P.-A. DANGEARD trouve que des traces du noyau ; mais la membrane et le tube œsophagien sont encore souvent intacts; ce dernier dépasse alors la surface du corps beaucoup plus qu'à son état d'extension complète sur les individus vivants. DEUXIEME PARTIE Cette deuxième partie comprend cinq chapitres : Le chapitre i traite de l'organisation générale de la cellule. Le chapitre ii est. consacré au mouvement et à l'appa- reil locomoteur. Le chapitre m contient une étude de la nutrition. Le chapitre iv renferme la description du mode de reproduction des Eugléniens. Le chapitre v termine ce mémoire par un aperçu des affinités des Eugléniens. CHAPITRE I ORGANISATION GENERALE. La plupart des Eugléniens, pendant la période d'acti- vité, ont une forme ovale ; quelques-uns sont allongés en un long ruban [Euglena, deses) ; d'autres sont amincis en navette à leurs deux extrémités {Euglena acus) ; enfin il en est qui sont arrondis en tonnelet ou en sphère, comme les Trachelomonas lagenella et Tr. volvocina. La cellule est limitée par une membrane, ordinaire- ment striée en spirale ; parfois il existe de véritables sillons [Phacus] et même des côtes proéminentes {Entosi- phon sulcatum). La membrane présente à l'avant du corps une sorte d'invagination au fond de laquelle est inséré un flagellum, rarement deux : c'est le vestibule. Ce vestibule se conti- nue par un canal qui débouche dans une grande vacuole antérieure ou vacuole principale ; celle-ci est accompa- gnée de vacuoles annexes. Au contact de la vacuole principale se trouve le point oculiforme ou stigma. Le cytoplasme renferme un noyau dont nous étudierons en détail la structure et le mode de division dans le cha- pitre IV, consacré à la reproduction. Chez les espèces qui possèdent la nutrition holophyti- que, le cytoplasme contient deschloroleucites diversement conformés : leur description trouvera sa place naturelle au chapitre m, qui traite de la nutrition générale ; c'est RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 265 dans ce chapitre également que nous nous occuperons du paramylon, substance de réserve analogue à l'amidon. Il reste donc à étudier dans ce premier chapitre: 1° les téguments ; 2° le cytoplasme ; 3" le système des vacuoles pulsatiles ; 4° le point oculiforme. 1<* Les téguments. Les téguments comprennent : A) la membrane pro- prement dite ; B) les enveloppes accessoires. A) La. Tnembrane. Les Eugléniens possèdent une membrane que Dujardin distinguait déjà sous le nom de tégument contractile à surface « lisse ou régulièrement plissée ou striée (1) ». Ces stries ont été vues ensuite par plusieurs observa- teurs.Focke les signaledansT^mb^yop/iisuindis (2); Carter lescompare aux fils en spirale des trachées végétales et il conclut de ce caractère que les Eugléniens sont des végé- taux (3). Stein, par contre, assimile ce système de stries aux muscles des animaux supérieurs (4). Cienkowski con- sidère les Euglènes en mouvement comme des zoospores, d'où la conclusion que leur tégument est un simple ecto- plasme (5). Klebs nous fournit des notions beaucoup plus com- plètes sur la membrane des Eugléniens ; il indique sa structure, ses propriétés, sa manière d'être vis-à-vis des"" réactifs colorants, dans les diverses espèces. Le cytoplasme est adhérent à la membrane et il ne peut en être éloigné par plasmolyse, comme on le fait à l'égard (1) Dujardin : Loc. cit., p. 347. (2) Focke : Loc. cit., Heft II, 1854, t. IV, fig. 21. (3) Carter : Loc. cit. (4) Stein : Loc. cit., p. 145. (5) Cienkowski : Loc. cit., p. 424. 266 P.-A. DANGEARD des cellules végétales ; pour amener un retrait sensible, le mieux est d'employer l'alcool; si l'on veut examiner la membrane seule, il suffit souvent d'une pression sur la lamelle pour vider la cellule de son contenu ; on peut encore détruire le cytoplasme par l'oxyde de cuivre ammo- niacal. Les stries de la membrane ne se voient pas chez tous les individus lorsqu'il s'agit de VEuglena viridis et des espèces voisines ; de temps en temps seulement, on ren- contre des cellules favorables à l'observation ; les stries sont rapprochées les unes des autres et disposées en spi- rale. Chez VEuglena, granulata, les stries sont déjà plus faciles à mettre en évidence; dans VEuglena, spirogyra,, on les voit facilement sur tous les individus, d'autant mieux qu'elles sont recouvertes par de petites protubérances à section trapézoïdale disposées en chapelet, le long des lignes. Dans VEuglena, oxyuris, chez les Phacus, les Asta- sia, la surface de la membrane présente de véritables sillons faisant avec l'axe de la cellule des angles variables; ils sont étroits {Astasia) ou larges [Phacus) ; les plus remarquables existent chez l'Enfosip/ionsu/ca^um; ils sont parallèles à l'axe, au nombre de sept ou huit ; le fond des sillons étant profond, le corps présente des côtes longitu- dinales, et sa section transversale a la forme d'une rosace. Chez le Phacus ovum, les stries de la membrane se voient encore dans les colonies palmelloïdes, ainsi que nous avons pu le constater. La résistance aux acides est variable selon les espèces. Si l'on traite VEuglena viridis par l'acide acétique con- centré, la membrane se gélifie rapidement ; l'action est moins prononcée sur les échantillons fixés au préalable par l'alcool ; la même chose se produit avec la v"^ olivacea. L'acide acétique laisse intacte la membrane de beaucoup d'autres espèces, telles que VEuglena spirogyra, VEuglena deses, etc. L'acide chromique n'agit que lentement sur ces RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 267 derniers ; la membrane du Phacus pleuronectes, du Phn- cus alata, résiste très longtemps ; la potasse et l'acide sul- furique eux-mêmes n'ont qu'une action lente. Si l'on exa- mine dans l'acide sulfurique un mélange contenant Eu- cflenai spirogyra, E. deses^ Phaçus pleuronectes^ Ph. alata, Phacus longicauda^ on s'aperçoit qu'au bout d'un quart d'heure, aucune membrane n'est encore dissoute: les sil- lons des P/iacus se voient alors avec la plus grande net- teté. La membrane a une sensibilité assez faible pour la plu- part des réactifis colorants ; parmi ceux-ci, les meilleurs sont l'hématoxyline et les préparations au carmin. Elle se colore en jaune ou en brun par l'action de l'iode et de l'acide sulfurique, ou encore par le chlorure de zinc iodé. On en conclut que la membrane des Eugléniens est très différente de celle des cellules végétales : elle serait cons- tituée par une substance protéïque, alors que la mem- brane végétale est de nature cellulosique. Klebs a examiné comment se comporte la membrane sous l'influence des ferments; celle de VEufflena viridis est digérée par la pepsine en 24 heures, tandis que dans les Phacus, elle reste en apparence inaltérée fort longtemps ; entre ces deux états extrêmes, il existe tous les intermé- diaires. Les bactéries de la pourriture permettent d'obser- ver chez VEugiena Ehrenbergii les phénomènes suivants : une partie de la membrane se dissout, laissant une enve- loppe qui ne se colore plus par l'iode et qui se gélifie très peu dans la potasse, alors que la membrane non modifiée devient jaune par l'iode et se gélifie rapidement dans la potasse. Klebs conclut de cela que la membrane des Eugléniens contient des substances différentes : l'une appartenant au groupe protéïque, l'autre de nature chi- mique inconnue ; elles sont mélangées en proportion variable ; la première se colore facilement ; elle se géli- fie, est élastique, et la pepsine la digère ; c'est elle qui 268 P.-A. DANGEARD domine chez VEuglena viridis ; la seconde, dépourvue de ces propriétés, se rencontre dans les Phacus. Nous ne pensons pas que la membrane des Euglenss soit sensiblement différente de celle des Algues. La cellulose est loin de présenter toujours les mêmes réactions ; on sait qu'il en existe plusieurs variétés : les unes sont solubles dans l'oxyde de cuivre ammo- niacal ; les autres sont insolubles dans ce réactif ; les unes bleuissent par le chlorure de zinc iodé ; les autres restent incolores ou ne bleuissent qu'après des traite- ments appropriés. Nous avons conservé pendant 24 heures dans l'acide sul- furique diverses espèces, telles que VEuglena. deses, VEu- glena spirogyra, plusieurs Phacus ; la membrane des cellules prenait alors, sous l'action de l'iode, une teinte verte, identique à celle des Diatomées renfermées dans la préparation. En traitant les mêmes espèces par l'oxyde de cuivre ammoniacal, le cytoplasme disparait rapidement ; il ne reste que la membrane et les grains de paramylon, qui sont encore sans changementappréciable au bout de trois ou quatre heures. Les stries de la membrane et les cou- ches concentriques des grains de paramylon se voient facilement par ce procédé. B) Les enveloppes accessoires. La présence de ces enveloppes est en relation étroite avec l'assimilation chlorophyllienne. Sans doute, un certain nombre de Flagellés filtrent au travers de leur membrane un mucus dont l'existence a donné lieu à pas mal d'erreurs ; le plus souvent, les stries formées par ce mucus, lorsque l'animal est fixé en pleine activité, ont été prises pour des flagellums ; ce n'est pas RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 269 à une autre cause qu'il faut attribuer les formes anor- males d'Oxyrrhis marina, dessinées par Gourret et Rœ- ser(l);nous avons pu le constater avec certitude; nous re- viendrons sur ce sujet plus tard. Pour l'instant, nous nous bornerons à dire que l'organisation de ce mucus gélatineux en véritables tuniques est fréquente chez les Eugléniens. Ces enveloppes se produisent lorsque les individus passent à l'état de repos, se divisent, forment des colonies palmelloïdes ou des kystes ; c'est tantôt une masse de gé- latine épaisse à contour indécis qui entoure la cellule, tan- tôt une véritable tunique à stries concentriques, ou en- core un ensemble de plusieurs enveloppes distinctes su- perposées. Ces formations sont le résultat d'une sécrétion dont les principaux caractères ont été fixés par Klebs dans VEu- glena. velata, et VEuglena, sangainea, (2). Nous avons revu et complété ces observations en nous servant de la pre- mière de ces espèces. On arrive, au moyen de la fuschine acide et de l'hématoxyline, à colorer, à l'intérieur du cyto- plasme, un réseau de filaments qui viennent aboutir à la surface interne de la membrane ; là se trouvent des bâ- tonnets très colorables perpendiculaires à la surface ou disposés obliquement; ils sont en communication par un pore très fin avec d'autres bâtonnets extérieurs à la mem- brane ; ceux-ci se continuent avec un réseau à mailles irrégulières, qui finissent par se confondre en une masse homogène (T. fig. 10, C); parfois, on ne distingue que les bâtonnets internes bien délimités, qui semblent se termi- ner brusquement dans le cytoplasme (T. fig. 10, D) ; enfin, sur certains individus, la membrane n'offre, à sa surface, que des sillons irréguliers ou des cordons ondulés. (1) Senn : Loc. cit., p. 185-186. . (2) Klebs : Loc. cit., I, p, 274 et Uber die organisation der Gallerte bel einige Algen und Flagellaton (Unters. Bot. Institut zu Tubingen, Bd. II, p. 405). 270 A.-P. DANGEARD Klebs a déterminé dans quelles conditions YEuglena sanguinea, filtre autour d'elle un abondant mucus gélati- neux. En faisant passer une solution de bleu de méthy- lène au milieu des individus en mouvement, on constate la présence autour d'eux d'une masse de mucilage, d'as- pect très variable ; elle paraît homogène dans les solu- tions très étendues et réticulée, si l'action du bleu de mé- thylène est brusque; en amenant progressivement le réactif sous la lamelle, la structure devient irrégulière- ment filamenteuse. Il s'agit bien d'une sécrétion au tra- vers de la membrane, et à voir parfois la disposition en spirale des filaments muqueux, on peut supposer que cette sécrétion se fait dans les petits sillons correspon- dant aux stries de la membrane. On n'a pas vu, chez VEuglena sanguinea, la continuité entre le mucus gélati- neux extérieur et le cytoplasme; à la surface de celui-ci, il existe toutefois de petits corpuscules sphériques qui se colorent par le vert de méthyle et jouent sans doute un rôle dans la sécrétion. Nous avons réussi à voir dans VEuglena. splendens, espèce voisine de VEuglena sanguinea., un réseau intérieur muqueux analogue à celui de VEuglena velata', certains fils traversaient la membrane et se reliaient à une sorte de coque provenant de la condensation du mucus ; les exemplaires avaient été fixés à l'alcool absolu et colorés pendant douze heures à l'hématoxyline et fuschine acide ; le réseau et la coque étaient colorés en noir ; il fallait briser cette coque par une pression sur la lamelle pour distinguer le contenu de la cellule. Il se produit une sécrétion analogue chez la plupart des Eugléniens^ mais il est impossible d'en suivre le mode de formation comme dans les espèces précédentes. On ne saurait rien dire de général sur ces enveloppes, parce qu'elles varient beaucoup dans leur disposition, dans leur épaisseur, dans leur homogénéité; fréquem- RECHERCHES SIJR LES EUGLÉNIENS 271 ment, elles montrent un grand nombre de couches con- centriques ; quelquefois, elles sont colorées en jaune brun par un oxyde de fer; leur contour extérieur est indécis ou nettement délimité. UEuglena, viridis offre à elle seule toutes ces modifications; la tunique qui entoure les kystes est épaisse, colorée en jaune brun et striée concentrique- ment; dans les cultures, les cellules deviennent immo- biles, s'arrondissent, s'entourent d'une enveloppe mince incolore; les individus se pressent les uns contre les autres, donnant l'illusion d'un stade palmelloïde; lorsque ces cellules reprennent leur liberté, soit après division, soit sans division, l'ensemble des enveloppes vides des- sine une sorte de réseau cellulaire {Euglena viridis, Eu- glena polymorpha,, etc.) ; si la division des cellules se continue sans retour à l'état d'activité, il se forme des colonies palmelloïdes dans lesquelles les diverses enve- loppes restent distinctes ou se confondent en une masse de mucilage. Chez le genre Ascoglena., la cellule est contenue dans une sorte de sac coloré en jaune, sauf à la partie anté- rieure restée incolore, tandis que les Colacium ont des pédicelles gélatineux supportant les cellules. Les diverses enveloppes des Eugléniens, qu'elles aient l'aspect de mucus, de mucilage, de tuniques gélatineuses, ont une même origine ; elles représentent une sécrétion de la cellule : cette substance se forme dans tout le cyto- plasme et filtre ensuite par les pores très fins de la membrane ; le phénomène ne peut être suivi que dans les cas assez rares {Euglena velata, Euglena sanguinea, Eu- glena sjolendens) où le produit de la sécrétion est très sensible aux réactifs colorants. Il est assez difïicile de savoir où placer la coque des Trachelomonas ', on sait qu'elle est rigide, plus ou moins épaisse, colorée en brun ou en jaune par un oxyde de fer; elle se brise facilement; sa surface est lisse ou munie de 272 P.-A. DANGEARD stries, d'épines ou de protubérances ; on y distingue par- fois des sillons espacés ; à l'avant se trouve une ouverture annulaire ou un col cylindrique pour le passage du fiagel- lum. Klebs range cette tunique parmi les enveloppes qui doivent leur origine à une sécrétion ; cette assimilation souffre quelque difficulté; on s'explique mal comment cette tunique sécrétée peut posséder des protubérances, des épines, et surtout une striation en spirale. Il serait peut-être plus exact de considérer la coque des Trachelo- monas comme une membrane ; lorsque la coque apparaît sur les individus libres, c'est sous- la forme d'une enve- loppe mince, incolore, qui se détache de la surface du corps ; il ne semble pas qu'il y ait, à ce moment, à la sur- face de la cellule, une autre enveloppe représentant la vé- ritable membrane à travers laquelle se serait effectuée la sécrétion de la coque ; d'un autre côté, nous avons cru voir que les petites protubérances qui garnissent parfois la tunique du Trachelomonas lajenella étaient disposées en spirale, comme dans ÏEuglena spirogyra; il nous semble donc assez probable que la coque des Trachelo- monas n'est autre chose qu'une membrane épaissie. 2" Le cytoplasme. On ne saurait rien dire de général sur le cytoplasme des Eugléniens ; la quantité de cette substance qui se trouve dans la cellule et la disposition qu'elle affecte varient conti- nuellement avec le fonctionnement vital; ainsi, certaines cellules, gorgées de paramylon, ne renferment plus qu'une faible quantité de cytoplasme constituant des en- veloppes minces autour des grains ; d'autres, presque entièrement dépourvues de paramylon, ont un cytoplasme abondant, homogène, strié ou tacheté de parties plus chromatiques. Sur le vivant, on ne distingue qu'une substance inco- RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 273 lore, hyaline, homogène ou granuleuse, remplissant la cellule. Après fixation et coloration, on constate que le cytoplasme est peu chromatique; en limitant l'action des réactifs, on arrive à colorer le noyau en laissant le cyto- plasme incolore, particulièrement chez les Euglènes ; les Phacus, les Trachelomonas, les Astasia ont une plus grande sensibilité ; chez le Phacus plouronectes et le Phacus alata, le contenu de la cellule se colore parfois fortement d'une manière uniforme, de sorte que le corps, malgré sa faible épaisseur, cesse d'être transparent. En prolongeant pen- dant une douzaine d'heures l'action de l'hématoxyline et de la fuschine acide, on arrive, môme dans les cas les plus difficiles, à obtenir des colorations sufïisantes ; le cyto- plasme se présente alors le plus souvent avec la struc- ture réticulée-alvéolaire. Il existe deux dispositions principales qui sont, d'ail- leurs, reliées entre elles par de nombreux intermédiaires. La première se rencontre chez beaucoup d'Euglènes ; elle est surtout très marquée dans VEuglena polymorpha'^ on distingue une couche corticale qui limite une grande cavité interne renfermant le noyau\ la couche corticale débute, au contact de la m.embrane, par une assise de petites alvéoles dont les parois sont perpendiculaires à la sur- face; elle se continue par du cytoplasme également alvéo- laire, qui renferme à son intérieur les chloroleucites ; dans la grande cavité interne, les mailles du cytoplasme de- viennent plus grandes, de sorte que la séparation entre les deux couches est très nette. La seconde disposition se rencontre chex les Astasia, les Menoidium, etc. ; chez V Astasia niargaritifera, par exemple, il n'existe aucune dif- férenciation en couche corticale et couche interne; les mailles du réseau, de grandeur variable, sont disposées d'une façon quelconque. La distinction que nous venons d'établir ne tient pas exclusivement à la position qu'occupent les chromato- 18 274 P. -A. DANGEARD phores sous la membrane ; car chez les Euglena deses, Eiiglena spirogyra, nous n'avons rien vu de pareil, bien que les chloroleucites soient pariétaux; le cytoplasme, dans ces cellules, est sensiblement homogène. Chez les Trachelomonas même, où la structure réticulée alvéolaire est assez fréquemment bien caractérisée, la couche corti- cale se relie insensiblement à la partie centrale de la cel- lule ; au contraire, la couche corticale se voit facilement dans YEuglena sanguinea, VEuglena velata, VEuglena. flava, etc. Le cytoplasme renferme parfois dans sa masse un ré- seau plus ou moins net et des bâtonnets chromatophiles disposés sous la membrane; nous avons vu que cette structure est en rapport avec la sécrétion de la substance gélatineuse qui forme les enveloppes accessoires. Les grains de paramylon qui remplissent fréquemment le corps des Euglènes sont probablement aussi le produit d'une sécrétion analogue du cytoplasme et aussi des chloroleucites. Chez VEuglena sanguinea.^ le cytoplasme produit en abondance un pigment rouge qui finit par envahir la cel- lule tout entière ; il est sous forme de petites gouttelettes qui apparaissent d'abord au centre de la cellule; leur nombre augmente et la coloration rouge s'étend jusque sous la membrane ; on a ainsi, parmi les individus d'une même culture, des cellules restées vertes et d'autres com- plètement rouges ; on ignore les conditions exactes qui provoquent la production de ce pigment. L'Euglena san- guinea était jusqu'ici la seule espèce connue présentant cette curieuse propriété ; nous avons rencontré chez une nouvelle espèce, VEuglena flava, une formation d'hémato- chrome, mais les globules rouges sont moins abondants que chez VEuglena sanguinea. Le cytoplasme des Eugléniens est pauvre en substances oléagineuses; à peine en trouve-t-on de temps en temps RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 275 quelques traces au moyen de l'acide osmique dans les in- dividus au stade d'activité ; les kystes ou les celulles au stade de repos en renferment plus fréquemment. Chez les espèces incolores, à nutrition animale, on trouve parfois une formation abondante de globules oléagineux. Klebs a rencontré dans VEuglensL Ehrenbergii, en grande quantité, de petits corpuscules discoïdes, réfrin- gents, qui restent inaltérés dans l'acide acétique et la potasse ; ils deviennent réfringents dans l'acide sulfurique : l'iode ne les colore pas sensiblement ; leur nature et leur fonction sont inconnues. Le cytoplasme de lEaglena sanguînea. est quelquefois parsemé de petits cristaux dont on ignore également la constitution (1). 3° Le système des vacuoles pulsatiles. Il existe à la partie antérieure des Eugléniens une grande cavité, considérée par Ehrenberg comme un gan- glion nerveux. Carter a reconnu qu'à côté se trouve une vacuole contractile qui déverse son contenu dans la cavité en question, observation confirmée un peu plus tard par Claparède et Lachmann. Stoin, dans VEuglena oxyuris distingue la vacuole principale sous le nom de « leibe- sohle » et la vacuole contractile sous le nomde w neben- behalter » ; il admet une communication directe de la première avec l'extérieur par l'intermédiaire d'un canal qu'il regarde comme un oesophage, « schlund » ; cet œsophage se termine par une ouverture conique qui serait l'équivalent d'une « bouche », « mund » (2). Klebs montre que la vacuole contractile est formée par la réunion de va- cuoles plus petites : il la désigne sous le nom do vacuole (1) Klebs : Loc. cit., I, p. 274. (2) Stein : Loc. cit., p. 144, T. XX, fig. 4-6. 276 P.-A. DANGEARD annexe, « neb:)a vakuolc »; la plupart des espèces n'en possèdent qu'une ; les. autres, comme VEuglena deses, en ont plusieurs qui déversent séparément leur contenu dans la grande vacuole ou « vacuole principale ». Tandis que Stein admet une communication directe avec l'extérieur par l'intermédiaire du canal oesophagien, Klebs pense qu'il n'existe.aucune ouverture de ce genre; selon lui, on ne sau- rait donner le nom de bouche à l'échancrure antérieure ; celle-ci qui a la forme d'un entonnoir et dont les bords sont disposés comme des lèvres, n'atteint pas la vacuole principale; son extrémité postérieure se termine dans le cytoplasme; c'est là au fond de cet entonnoir, « membran- trichter)),que se trouve l'insertion duflagellum placée par Stein sur le bord même de l'échancrure (1 ), Nous avons essayé d'élucider ce point controversé et nous avons reconnu qu'en effet le flagellum prend nais- sance au fond d'une sorte d'entonnoir, que nous désigne- rons sous le nom de vestibule; il est plus ou moins pro- fond; le vestibule se continue par un canal qui, contraire- ment à l'opinion de Klebs, débouche directement dans la vacuole principale; cela se voit nettement chez ÏEuglensL granulata, VEuglena deses, VEuglena sanffuinea, etc. On arrive, sur certains exemplaires, à colorer les parois du vestibule, du canal et de la vacuole principale tout comme la membrane; le double contour est même visible pour le vestibule et le canal ; on doit seulement remarquer que, selon les conditions de l'observation, le vestibule se con- tinue sans transition avec le canal, ce qui est le cas le plus fréquent, ou bien, au contraire, montre une séparation très nette. Nous avons vu de plus, chez VEuglena deses eiVEuglena granulata, soit sur les individus vivants, soit après fixa- tion, un petit conduit qui s'aperçoit à travers la vacuole (1) Klebs : Loc. cit., I. p. 246-247. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 277 principale; nous ignorons absolument sa signification ; il semble partir du point de jonction du canal efférent de la vacuole principale. En résumé, il existe à la partie antérieure des Euglé- niens un vestibule plus ou moins profond en entonnoir, au fond duquel est inséré le flagellum : dans ce vestibule débouche le canal efférent de la vacuole -pTincipale', les parois du vestibule et du canal sontà double contour et se colorent comme la membrane. Klebs admet que la vacuole principale ne contient pas de l'eau pure, parce que les solutions osmotiques et l'alcool n'amènent pas sa disparition; elle persiste même après la mort ; cependant son contenu ne se colore pas et rien ne révèle l'existence à son intérieur d'une substance quelconque. Il semble, au contraire, que la vacuole prin- cipale étant en communication avec le dehors, son contenu doit être peu différent du milieu extérieur; si la cavité ne disparait jamais complètement, c'est que sa paroi a une constitution voisine de celle de la membrane ; elle est parfois sensible aux réactifs colorants, comme la membrane^ surtout dans sa partie antérieure : son con- tenu est simplement de l'eau fournie par la vacuole an- nexe; cette eau ne contient que quelques substances soUibles abandonnées par le cytoplasme, en petite quan- tité certainement. La durée d'une pulsation complète est de trente secondes environ ; on voit d'abord apparaître au voisi- nage delà vacuole principale et ordinairement à sa partie antérieure quelques petites vacuoles qui se fusionnent pour former la vacuole annexe ; celle-ci s'arrondit, gros- sit, arrive au contact de la vacuole principale ; la mem- brane de séparation se rompt; après la fusion, la vacuole principale reprend peu à peu son contour normal et sa dimension primitive; l'eau provenant de la vacuole annexe ,est évacuée lentement au dehors par le canal efférent. 278 P. -A. DANGEARD Klebs a cherché à prouver par diverses expériences l'autonomie du système des vacuoles pulsatiles. En effectuant des pressions sur VEuglena deses, on pro- duit l'immobiUté de la membrane et du cytoplasme : le point oculiforme et les chloroleucites présentent un com- mencement de désorganisation; cependant les vacuoles continuent à effectuer leurs pulsations ; alors même que, par une pression plus forte, la cellule est désorganisée à tel point qu'elle ne pourra plus revenir à la vie, les va- cuoles peuvent encore se montrer quelque temps, si l'on supprime la pression. L'action de la chaleur agit dans le même sens; comme toutes les fonctions vitales, les pulsations sont fonction de la température; pour ÏEaglena, deses, le maximum est vers 52°; la pulsation se fait alors en 22 secondes ; au- dessus et au-dessous de cette température, sa durée augmente. A 42", elle exige 30 secondes comme à 18° ; la métabolie et les mouvements internes du cytoplasme ont cessé; à 48°, la désorganisation du cytoplasme et des chlo- roleucites se manifeste nettement. Le refroidissement sera impuissant pour ramener à la vie les divers éléments de la cellule, à l'exception toutefois du système des va- cuoles, qui montre encore de faibles pulsations. On obtient des effets analogues en employant le nitrate de strychnine à 0,1 0/0. Ces observations conduisent Klebs à considérer le système en question comme un organe distinct du cyto- plasme; il est le plus résistantde la cellule, puisqu'il conti- nue à fonctionner après la mort de celle-ci; son autonomie résulterait également du fait qu'il se multiplie d'un indi- vidu à l'autre par division et non par nouvelle formation. L'opinion actuelle des zoologistes et des botanistes au sujet de la nature des vacuoles contractiles et autres ne semble pas encore bien fixée. On sait que de Vries, Went, etc.,en font de véritables leucites ou plastides; d'au^ RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS . 279 très auteurs combattent cette manière de voir ; Wilson se contente de dire qu'il est probable que cette interprétation est seulement applicable à certaines formes de vacuoles (1). Il semblerait, après l'étude si consciencieuse de Klebs, que le doute n'est pas permis en ce qui concerne les Eugléniens; nous allons cependant exposer les objections qui nous empêchent d'adopter complètement ce point de vue. Nous ne faisons nulle difficulté pour accorder une certaine autonomie à la vacuole principale et admettre qu'elle se multiplie d'un individu à l'autre par division, bien qu'il ne soit pas facile de le démontrer pour tous les cas; mais on ne saurait étendre cette conclusion à la va- cuole annexe. En effet, celle-ci naît de la fusion de plu- sieurs petites vacuoles , qui lui transmettent leurs pro- pres membranes pour former la sienne ; de même, lors- que la vacuole annexe s'unit à la vacuole principale, sa membrane fait désormais partie de celle-ci. Il résulte de là que les vacuoles annexes, de même que les plus petites qui leur donnent naissance, sont à chaque pulsation for- mées à nouveau au milieu du cytoplasme, et que, seule, la vacuole principale jouit d'une réelle autonomie ; les autres sont de simples cavités qui se creusent dans le cytoplasme ; la surface qui les limite ne peut être une membrane au sens propre du mot , puisqu'à chaque pulsation cette surface vient se confondre et se perdre dans la vacuole principale. 4" Le j)oint oculi forme. Ehrenberg avait décrit chez la plupart de ses Astasiées un point rouge qu'il considérait comme un organe de la vision : cet organe a été rencontré chez un grand nombre (1) Wilson : The Celle in Development and Inherilance, 2° édition, 1900, p. 53. 280 P A. DANGEARD de formes, en particulier chez beaucoup de zoospores d'algues. Alors que la plupart des conceptions théoriques de ce savant sur le rôle des divers organes rencontrés chez les Infusoires ont dû être abandonnées, celle-ci a résisté jusqu'à ce jour. On trouvera dans le mémoire de Klebs les raisons d'ordre morphologique et physiologique qui peuvent être données à l'appui de cette manière de voir (1) ; nous éviterons de prendre parti dans la question. Le point rouge ou stigma est placé au contact de la vacuole principale ; ses dimensions sont très variables dans l'ensemble du groupe ; mais elles sont assez con- stantes pour une même espèce ; il a la forme d'un disque mince qui peut se creuser en verre de montre ou se replier plus ou moins sur lui-même. Il est constitué par une trame protoplasmique, renfermant un grand nombre de petits granules rouges qui sont serrés les uns contre les autres en une seule assise, du moins assez souvent. La trame possède les propriétés ordinaires du cytoplasme : elle se gélifie avec l'ammoniaque, la potasse, mettant en liberté les granules ; la pression produit le même effet : une solution de strychnine à 0,1 0/0 rend tout d'abord le point oculiforme plus net, puis amène sa fragmentation chez plusieurs espèces. Le pigment est soluble dans l'alcool, l'éther; il est inso- luble dans l'ammoniaque, la potasse, l'acide acétique ; l'acide sulfurique le colore en bleu sombre et l'acide chlorhydrique en bleu ciel. C'est Cohn qui a le premier remarqué que le stigma de VEuglena viridls se colorait en bleu par l'iode, comme la substance rouge de VEuglena sang uinea ; ceiCe même réaction est donnée par la plupart des kystes colorés en rouge et par le Chlamydococcus pluvialis. Cohn désigne cette substance sous le nom d'hé- matochrome, et il pense que sa production est en relation (1) Klebs : Loc. cit., p. 202-264. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 281 étroite avec la chlorophylle : dans les kystes, chez les Chla- mydococcus pluvialis\ dans VEuglena, sanguinea, elle se forme lorsque la chlorophylle disparait, et elle s'en va lors- que la chlorophylle se montre à nouveau. Le point oculiforme des Euglènes se comporte comme un leucite ; il se divise au moment delà bipartition de la cellule, ainsi que Klebsl'a constaté. CHAPITRE II LE MOUVEMENT. Les Eugléniens se déplacent de deux façons différentes : 1* au moyen d'un long cil ou flagellum : c'est le mouve- ment ciliaire; 2'' par contraction du corps : c'est le mou- vement désigné jusqu'ici sous le nom de métabolie (Perty) ; enfin on observe parfois des mouvements inter- nes dans le cytoplasme. La durée du mouvement, dans la vie de Tètre, présente des différences qui sont en rapport avec la nutrition ; les espèces incolores, comme les Astasia^ les Entosiphon, etc., restent mobiles pendant la plus grande partie de leur existence, et cela se conçoit facilement, surtout en ce qui concerne les genres à nutrition animale. En effet, pour vivre, la cellule doit sans cesse être à la recherche des aliments ; l'immobilité pour elle, c'est la famine et la mort, à moins d'un enkystement temporaire ou de conditions spéciales. Il en est tout autrement des espèces colorées en vert par la chlorophylle ; la nutrition holophytique s'accorde très bien avec l'absence de mouvement ; aussi n'est-il pas exact de dire, comme on le fait souvent, que Tac- tivité locomotrice est l'état normal des Eugléniens. Selon Klebs, c'est seulement pendant les courts moments de la bipartition que les individus sont au stade de repos : « Nur wahrend des kurzen Moments der Thcilung gehen sie in einen Zustand des Ruhe ïiber (1). » En réalité, les Euglé- (1) Klcbs : Loc. cit., p. 238. RECHERCHES SUR LES EUGLÉiNIENS 283 nieiis peuvent végéter très longtemps sans passer par l'état de zoospores: nous avons eu pendant plusieurs mois, en chambre humide, des espèces comme VEuglena cleses, VEuglena velata, le Pliacus pynun et le Phacus pleura--' nectes, qui, tout en conservant leur vitalité, avaient leurs cellules immobiles; beaucoup de nos cultures d'Euglena vlridis et de ses variétés étaient vigoureuses, en pleine multiplication pendant des semaines, sans offrir aucune trace d'individu en mouvement ; c'est dans ces conditions que se forment des colonies palmelloïdes de quatre, huit, seize, trente-deux cellules, ou même davantage, entourées d'enveloppes gélatineuses. La nutrition holophytique a donc eu comme effet chez les Eugléniens, aussi bien que chez les algues inférieures, d'introduire dans la vie de l'être la possibilité d'une exis- tence toute sédentaire. i° Mouvement clllaire. Ce mouvement permet au corps les déplacements rapi- des : il se fait par l'intermédiaire des flagellums. La plupart des Eugléniens ne possèdent qu'un seul flagellum ; VEutreptia, viridis en a deux. Dans les Astasias et les Peranemse on trouve plusieurs genres qui ont deux flagellums, l'un dirigé en avant, l'autre trainé à l'arrière ; nous nous occuperons plus spécialement des Euglense. La longueur du flagellum varie beaucoup avec les espè- ces, ainsi qu'on l'a vu dans la première partie de ce mé- moire ; le diamètre du filament est à peu près le même en tous ses points; il n'existe pas de diminution sensible à l'extrémité; la structure est sensiblement homogène^ Tou- tefois, il faut faire une exception pour les Trachelomonas, dont le flagellum montre quelquefois un axe chromato- phile entouré d'une gaine incolore. A. Fischer figure le flagellum des Euglena avec de fines 28 i P. -A. DANGEARD ramifications (1) : il le désigne sous le nom de « flimmer Geissel» ; il s'agit sans doute d'une modification produite par certains réactifs, car nous n'avons jamais aperçu rien de semblable dans nos préparations ou sur le vivant. Il était intéressant d'étudier le mode d'insertion de cet oigane; nous avons montré, en effet, que dans le Poly- loma, uvella, le système locomoteur comprend les flagel- Lums, un nodule d'insertion qui est le blépharoplaste, un filet chromatique ou rhizojjlaste qui se termine sur le noyau par un petit renflement, le condyle (2). Chez les Eugléniens, le mode d'insertion du flagellum est moins compliqué, en apparence du moins. Au fond du vestibule, à l'endroit où le flagellum s'unit au cytoplasme, on rencontre bien parfois une petite plage plus chroma- tique, une sorte de blépharoplaste; il n'existe pas cepen- dant de corpuscule différencié [I^uglena, Phacus), mais simplement une tache chromatophile plus ou moins large et à contour indécis. Chez les Trachelomonas, nous avons obtenu de meilleurs résultats ; en effet, ici on voit très nettement, dans certains individus, un gros cordon chro- matophile, qui commence au point d'insertion du flagel- lum et se termine en queue de cheval au-dessus du noyau, dans le cytoplasme; ce rhizoplasle est homogène dans toute sa longueur [T. lagenella). Enfin, chez l'Asfasia înar- garitifera, nous trouvons une autre disposition ; le cyto- plasme renferme un corpuscule nettement différencié : c'est un nodule homogène, légèrement chromatophile, qui est séparé du protoplasme par une petite zone incolore ; il est placé soit au voisinage immédiat du noyau, soit à l'endroit même d'insertion du flagellum ; au moment où la côUule se divise, il occupe cette dernière position et se (1) Fischer : Uber die Geisseln einiger F/age//aterî(Pringsheiin Jahrb., Bd. XXVI, 1894). (2) P.-A. Dangeard : Etude sur la structure de la cellule et ses fonc- lions. Le Polytoma uvella. (Le Botaniste, Se série, p. 36). RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 285 sépare en deux. Etant donné que ce nodule n'a aucune relation avec la division nucléaire, il est naturel de suppo- ser qu'il joue un rôle dans la formation du nouveau fla- gellum : c'est pour cette raison que nous le considérons comme un blépharoplaste. Nousavons discuté ailleurs l'assimilation faite par beau- coup d'auteurs entre les blépharoplastes et les centro- Bomes (I) ; la question ne se pose pas en ce qui concerne les Eugléniens, puisque, dans ce groupe, la division nu- cléaire s'opère suivant un schéma unique, sans interven- tion de centrosome. Si nous trouvons dans le cytoplasme des corpuscules différenciés, ce sont des leucites ou des blépharoplastes ; le nodule chromatique de VAstasia mar- garilifera ne possède pas les caractères d'un leucite : c'est pourquoi nous le rangeons dans la seconde catégorie. Selon Klebs, la substance du flagellum diffère du cyto- plasme ; elle ressemble beaucoup par contre à la masse nucléaire et à celle des chloroleucites ; elle se gélifie faci- lement en effet dans l'eau, l'ammoniaque, etc. ; les déshy- dratants lui font perdre à un haut degré cette propriété ; elle reste alors inaltérée par l'acide acétique concentré et se gélifie faiblement dans la potasse. Nous avons con- staté,de notre côté, que les individus fixés à l'alcool absolu conservent leurs fiagellums ; ce dernier reste visible dans l'oxyde de cuivre ammoniacal, alors que cytoplasme et les chloroleucites ont déjà disparu {Trachelomonas, Phaciis) ; le filament, dans ces conditions^ ne présente aucune différen- ciation ; son diamètre n'augmente même pas sensiblement. Le flagellum reste incolore avec l'éosine, les prépara- tions au carmin, le vert de méthyle ; le bleu d'aniline lui donne après 24 heures une teinte bleue ; l'hématoxyline agit davantage. Le flagellum est abandonné facilement dans le milieu (I) P. -A. Dangeard : Elude de la cellule, loc. cit. 286 P.-A. DANGEARO extérieur ; il suiïit pour amener ce résultat chez beau- coup d'espèces d'Euglènes d'une simple pression de la lamelle : rapidement le filament se recourbe, se vacuoliso et disparaît. Klebs a vu le flagellum des Trachelomoims séparé du corps, effectuer quelques mouvements, ce qui semble montrer que cet organe possède une certaine indépendance. On peut provoquer la chute du flagellum soit par la pression, soit par des modifications chimiques du milieu, soit par privation d'oxygène ; l'organe se reforme à nou- veau, lorsque les conditions sont redevenues favo- rables. Normalement, chez les espèces qui se divisent en de- hors de la période d activité, il y a une nouvelle formation de flagellums à chaque bipartition, lorsque les cellules filles sont mises en liberté ; on ignore si l'ancien flagel- lum se détache simplement ou rentre dans le cytoplasme, quand la cellule mère se prépare à la division. Le même phénomène se produit lorsque les Euglènes passent à l'état de repos sans se multiplier ; le flagellum disparait pour se former à nouveau lorsque la cellule reprend sa vie active. Pendant le mouvencent, le corps progresse en tournant sur lui-même ; il décrit à l'avant une circonférence d'ou- verture variable ; le sens de la rotation n'est pas constant, et K4ebs a observé à cet égard dans le Trachelomonas volvocina un changement périodique qui se produit peut-être aussi chez les autres espèces : en général, ce mode de locomotion présente des caractères propres à chaque espèce ; ainsi VEuglena. pisclformis a un mouve- ment vif et rapide, alors que VEuglena deses avance lente- ment. La température n'a qu'une influence très limitée sur le mouvement qui reste le même à 1" centigrade et à 25°; il cesse vers 45° et reprend si l'on abaisse la température ; RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS ^87 mais il est plus lent ; beaucoup de cellules ont perdu leur flagellum. La lumière n'influe que sur la direction du mouvement ; elle ne le fait pas disparaître ; si on transporte des Eu- glènes au repos dans de l'eau ordinaire, les individus reprennent leur mobilité (1). ^° Mouvement par contraction du corps. La plupart des Euglénicns peuvent se déplacer sans l'aide de leurs flagellums; ce mode de locomotion a été vu par les plus anciens auteurs, en particulier par Muller (2) ; Cohn s'est appuyé sur ce caractère pour soutenir la nature animale des Euglènes, et Stein insiste à diverses reprises dans le même sens. Perty désigne ce mouvement sous le nom de métabolîe ; cette expression a été conservée par Klebs, Zumstein,etc. Nous avons cru devoir l'employer dans nos descriptions. On doit maintenant se demander s'il n'y aurait pas lieu de la remplacer par une autre. En effet, on a pris l'habitude, depuis quelques années, de désigner sous le nom de métabolisme, l'ensemble des changements moléculaires et des transformations qui s'effectuent continuellement dans le protoplasme sous l'influence de la vie ; on parle couramment d'anabolisme et de catabolisme. Il serait impossible, le voudrait-on, de supprimer actuellement l'expression de métabolisme du langage scientifique ; or il peut s'établir une confusion avec le terme de métabolie, d'autant plus que le qualifi- catif est le même dans les deux cas. Pour cette raison, nous proposons de remplacer le terme de métabolie par celui de spasmodie (de auoLaiJM^'fiç,^ (1) Klebs : Loc. cit., p. 257. ("2) Muller : Loc, cit., p. Î26. 288 P. -A. DANGEARD convulsif) ; c'est bien, en effet, une sorte de mouvement spasmodique qui supplée chez les Eugléniens le mouve- ment ciliaire ; le corps s'aplatit, se contracte, s'allonge, se rétrécit, se renfle et s'élire; son contour se modilic à chaque instant, lentement ou brusquement. Nous en avons vu un bel exemple chez VAstasia margaritifera ; VEuglena viridis et les espèces voisines sont spasmodi- ques à un haut degré ; d'autres le sont moins, comme VEuglena spirogyra ; la spasmodie disparaît chez les Pha- cws, où le corps est rigide- Ce qui pourrait encore plaider en faveur du change- ment que nous proposons, ce sont les circonstances dans lesquelles ce mouvement se produit ; on Tobserve, en effet, lorsque les conditions de la culture deviennent défavora- bles ; il est provoqué parla présence de substances noci- ves, par la pression, par une insuffisance d'eau, etc. ; il se montre, en général, après la disparition du flagellum. On ignore encore quel rôle exact joue la membrane dans ces changements de forme successifs ; il est certain qu'elle pourrait, tout aussi bien que le flagellum, possé- der une contractilité propre. Dans ce cas, on pourrait dire que le flagellum est l'organe du mouvement ciliaire, tandis que la membrane est celui du mouvement spasmo- dique. 3° Mouvements internes. Nous dirons très peu de chose des mouvements internes du cytoplasme, parce que nous les connaissons mal. Klebs n'a réussi à les observer que chez les espèces spas- modiques, comme VEuglena deses, VEuglena Ehrenbergii, etc. (4); lorsque la spasniodiediminued'activité,on voit des courants s'établir dans la cellule ; les grains de paramylon, (1) Klebs : Loc.cil., I, p. 259. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 289 les chloroleucites se déplacent en même temps que le cytoplasme; les mouvements se produisent dans toute l'épaisseur de la cellule. Les courants intérieurs sont moins affectés que la spasmodie, par les conditions défa. vorables, pression ou haute température ; chez l'Euglena deses, les mouvements spasmodiques cessent vers 40°, tandis que les mouvements internes du cytoplasme exis- tent encore vers 45°. En somme, ces mouvements internes doivent être assez rares et très limités ; en effet, la distribution des divers organes de la cellule, noyau, chloroleucites, etc., est sen- siblement la même chez tous les individus d'une même espèce. 19 CHAPITRE III LA NUTRITION DES EUGLÉNIENS Le mode de nutrition sert à caractériser les trois familles composant le groupe des Eugleninx ; les Pere- nemaceœ ont une nutrition animale ; les Astasise possèdent la nutrition saprophytique, et les Euglense, qui ont conservé ce dernier mode, possèdent en plus la nutrition holophytique. La nutrition animale s'effectue par l'intermédiaire d'un appareil qui n'est pas encore suffisamment connu dans tous ses détails ; celui de ï Entosiphon sulcatum semble être l'un des plus perfectionnés. Nous avons vu qu'il existe un tube contractile conique qui s'étend d'une extrémité du corps à l'autre; il se porte au contact de la surface, puis se retire brusquement à une certaine profondeur ; ces mouve- ments se succèdent parfois assez rapidement; la section de cet organe est annulaire ; ce n'est donc pas un bâtonnet aplati ainsi que l'admet Klebs. Nous nous trouvons là en présence d'une sérieuse difTiculté : Senn, qui décrit cet ap- pareil comme un tube, pense qu'il se termine à quelque distance de la partie postérieure du corps (1); dans ces conditions, rien n'empêche de croire que les aliments descendent au fond du tube et sont abandonnés de là dans le cytoplasme. Il est cependant bien certain que sur tous les échantillons examinés après fixation, le tube est au (1) Senn : Loc. cit., p. 178, RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 291 contact direct de la membrane ; il adhère à cette surface, et, dès lors, nous ignorons commentles aliments pénètrent dans le cytoplasme. Ayant réussi à faire ingérer des par- ticules de carmin à plusieurs individus, nous avons con- sacré de longues heures à essayer de suivre l'ingestion de ces granules; il faut croire qu'elle est extrêmement ra- pide, car nous n'avons rien aperça de concluant. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que les granules en question s'amassent au fond de la cellule. Quelques-uns remontent jusqu'au niveau du noyau; d'autres se groupent dans des vacuoles digestives en une petite pelote. Il est possible que le tube puisse se contracter à sa partie inférieure comme il le fait dans sa partie antérieure ; de la sorte, on s'expli- querait l'abandon des particules nutritives à cet endroit ; mais ce n'est là qu'une hypothèse. Ajoutons que, lors de la division, ce tube se divise en deux, par étranglement. Les Peranema, les Urceolus et probablement aussi les Dinema et les lleteronema possèdent un appareil analogue mais construit différemment ; il serait constitué de deux bâtonnets parallèles réunis à l'avant par une pièce en forme de fer à cheval ; cette interprétation exige confir- mation. La nutrition animale entraîne l'existence dans le cyto- plasme de résidus digestifs, sans qu'on sache de quelle façon exacte ils sont rejetés au dehors. Le produit de cette digestion consiste en globules oléa- gineux et en corpuscules de paramylon, diversement dis- tribués selon les espèces et les genres. La nutrition saprophytique ou hétérotrophe n'offre rien de bien particulier : on trouvera cependant dans le mé- moire de Khawkine quelques détails intéressants sur le mode de vie de VAstasia ocellata : « Il se peut, dit l'auteur, que l'Astasie vive exclusivement d'hydrates de carbone (du groupe amylacé) ; du moins, cette supposition de ma part est fondée sur ce que je n'ai pu réussir à élever l'As- 292 P. -A. DANGEARD tasie dans des extraits de viande à divers degrés de con- centration ou dans des bouillons d'albumine, d'œuf, de gélatine, etc. Il est vrai que je n'ai peut-être pas fait un assez grand nombre d'expériences (1). » Par contre, la colle d'amidon et les hydrates de carbone qui en dérivent, joints à une certaine quantité d'aliments minéraux, présen- tent une nourriture complètement sufïisante pour élever VAstasia ocellata. L'auteur a encore remarqué l'action utile de l'acide carbonique dans les cultures ; il montre également, par ses expériences sur l'apparition et la for- mation des grains de paramylon, que cette substance re- présente une réserve, un approvisionnement. Nous ne sommes pas tout à fait d'accord avec l'auteur sur le mode de disparition des grains: selon lui, ils disparaissent en commençant par le bout antérieur, c'est-à-dire dans le voisinage du filament flagelliforme, où a lieu la dépense de force et de matière la plus intense (2). Dans ÏAstasia margaritifersL, au contraire, c'est à la partie antérieure que les grains de paramylon persistent le plus longtemps (T. fig. 46). La nutrition hétérotrophe est le seul mode de nutrition des Astasiœ. Chez les Euglenœ, on trouve la nutrition hétérotrophe, la nutrition autotrophe et la nutrition mixotrophe. Zumsteina étudié l'influence de ces divers modes sur le développement de ÏEuglena gracilis (3). La nutrition hétérotrophe est très développée chez les Euglènes ; elle sufïit seule à assurer une végétation ac- tive des cellules. On supprime l'assimilation chlorophyl- lienne en plaçant les cultures à l'obscurité ; si ces cultures renferment des substances organiques appropriées, les divisions s'effectuent normalement. Le séjour à l'obscu- (1) Khawkine : Loc.cit.,p. 27. (2) Khawkine : Loc. cit., p. 39. (3) Zumstein : Loc. cit., p. 179. RECHERCHES SUR LES EUGlÉNIENS 293 rite fait disparaître la chlorophylle, et l'Euglène se nourrit alors exactement comme un Astasia. La nutrition autotrophe, au sens de Pfoffer, comprend l'assimilation chlorophyllienne avec absorption de sels inorganiques. Les cultures faites avec la solution de Knopp, à divers degrés de concentration, sont maintenues à la lumière ; la végétation est lente et les cultures com- parées à celles qui renferment des substances organiques ont un aspect maladif. La nutrition mixotrophe se compose de la nutrition sa- prophytique et de l'assimilation chlorophyllienne ; elle est la plus favorable au développement ; les divisions sont rapides; toute la cellule est colorée en vert par les chlo- roleucites ; c'est là le mode de vie ordinaire normal des Euglenx. Nous allons étudier maintenant les organes de l'assi-- milation chlorophyllienne, c'est-à-dire les chloroleucites; puis nous verrons le paramylon, substance de réserve provenant de la nutrition au même titre que l'amidon des Chlorophytes. 1° Les chloroleucites. Les chloroleucites n'existent que chez les Euglenee ; les deux autres groupes, Astasise et Peranemse en sont dépourvus. Chez les Euglenœ, la chlorophylle ne se rencontre pas chez toutes les espèces; quelques-unes sont normalement incolores, d'autres peuvent le devenir au cours du dévelop- pement. On est ainsi conduit à distinguer les espèces qui ne possèdent jamais de chlorophylle et celles dans lesquel- les la disparition de la chlorophylle n'est que transitoire. Parmi les premières, il faut placer en première ligne le Trachelomonas reticulata ; le cytoplasme est incolore ; non seulement les chloroleucites manquent, mais, à en 294 P-A. DANGEARD juger par l'examen histologique le plus consciencieux, il n'y a pas trace de leucites quelconques. Malgré l'absence de chlorophylle, on n'hésite pas à placer cette espèce parmi les Euglenœ, parce que la présence d'une coque identique à celle des Trachelomonas ne laisse aucun doute sur l'attribution générique. Ainsi, un même genre renferme à la fois des espèces incolores et des espèces possédant des chloroleucites ; il est donc naturel qu'il puisse exister des Euglènes inco- lores, mais il sera impossible de les distinguer des Astasia. Ehrenberg a décrit un Euglena hyalina que Klebs consi- dère comme une simple variété de VEuglena viridis ; on pourrait avec autant de raison en faire un Astasia. En ce qui concerne les diverses variétés incolores rencontrées par Klebs, la môme difficulté se présente ; il peut se faire que, pour plusieurs de ces dernières, l'absence de chloro- phylle ne soit que transitoire ; si elle est permanente, le mieux sans doute sera de les placer dans les Astasia. Klebs a donné lui-même l'exemple en changeant de place son Euglena çurvata qui est devenu ainsi V Astasia cur- vata (1). Si l'on n'admettait pas cette manière de voir, il faudrait constituer parmi les Euglènes une section à part destinée à renfermer les espèces chez lesquelles les chloroleucites manquent d'une façon permanente ; cette façon de procéder serait plus scientifique que la première, l'exemple du Trachelomonas reticulata le montre; mais elle a peu de chances d'être adoptée, car elle compliquerait encore la classification. Parmi les espèces chez lesquelles la disparition des chloroleucites n'est que transitoire, il faut citer en pre- mière ligne VEuglena gracilis. Zumstein,dans ses cultures, a obtenu à volonté des individus incolores (2) ; l'auteur (1) Klebs : Loc. cit., II, p. 358. (2) Zumstein : Loc cit., p. 184. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 295 semble croire que le chloroleucite s'est simplement trans- formé en leucoplaste ; il n'en a pas fourni la démonstra- tion. Nos observations semblent prouver qu'au contraire, il y a bien disparition des chloroleucites chez les Indivi- dus incolores. Toutes les espèces ne se prêtent pas égale- ment à cette étude ; nous citerons, parmi les plus favora- bles, VEuglena, polymorpha sp. nov. et VEuglena viridis v^'- violacea ; la transformation se fait même dans les cul- tures ordinaires exposées à la lumière ; on peut hâter le phénomène en plaçant ces cultures à l'obscurité. Le nom- bre des chloroleucites se réduit ; dans la variété violacea, c'est la partie d'avant qui devient incolore tout d'abord ; à l'arrière on voit encore quatre ou cinq taches vertes qui finissent par disparaître complètement. Il est presque impossible d'affirmer que les chloroleucites disparaissent complètement sans laisser de substratum pour un développement nouveau ; tout ce qu'on peut dire, c'est que les réactifs ordinaires ne laissent apercevoir aucune différenciation spéciale du cytoplasme chez les individus devenus complètement incolores; notre opinion est que les chloroleucites peuvent naître par nouvelle formation. La forme des chloroleucites chez les Eugléniens est assez différente selon les espèces ; on rencontre un cer- tain nombre de variétés en apparence très dissemblables ; il est cependant assez facile de les rattacher les unes aux autres par des transitions presque insensibles. Les chloroleucites les plus simples ressemblent à une pièce de monnaie ; ils sont disciformes ; dans ce cas, chaque cellule en renferme un grand nombre placés dans la couche pariétale du cytoplasme; leurs faces sont parallèles à la membrane ; la substance qui les constitue est en général assez chromatophile; elle semble homogène; les bords sont nets ; la fuchsine acide colore uniformément en rouge l'ensemble du corpuscule. Cette variété de chloroleucites est très répandue chez les Eugléniens {Euglena spirogyra, 296 P-A. DANGEARD E. acus, E. oxyuris, etc.; Phacus pleuronectes, pyrum, etc.). Schmitz avait signalé une exception dans le Phacus pyrum ; nous avons montré que c'était le résultat d'une erreur; toutes les espèces connues du genre Phacus pos- sèdent des chloroleucites disciformes semblables. VEuglena deses fournit la transition à des chloroleu- cites plus larges et plus différenciés ; dans la variété intermedia, on n'observe encore qu'une simple augmen- tation dans le diamètre du disque; mais dans le type, on voit apparaître au centre du disque un corpuscule qui se distingue du reste par sa chromatophilie : c'est le pyré- noïde. A partir de ce moment, le chloroleucite comprend deux parties : l'une centrale, très chromatique, c'est le pyrénoïde ; l'autre périphérique, beaucoup moins sensible à l'action des colorants. Il semble qu'une substance spé- ciale, imprégnant d'abord tout le chloroleucite, se localise au centre pour former le pyrénoïde; cela nous explique- rait pourquoi le chloroleucite tout entier de VEuglena spi- rogyray par exemple, est chromatophile, alors que celui de VEuglena deses ne l'est que dans sa partie centrale ; le pyrénoïde, dans cette espèce, présente un grand nombre d'états intermédiaires; tantôt il est nettement délimité, tantôt, au contraire, il se relie insensiblement au reste du chloroleucite. Chez VEuglena graciiis, les chloroleucites sont un peu plus larges et le pyrénoïde mieux différencié. A partir de ce moment, nous observons deux modifica- tions importantes ; la première consiste dans la forma- tion de deux calottes de paramylon qui emboîtent le pyré- noïde sur sa face externe et sur sa face interne ; elle est très nette dans VEuglena polymorpha; le pyrénoïde est tunique. La seconde modification porte sur le bord même du chloroleucite ; celui-ci s'échancre plus ou moins en donnant des lobes {Euglena velata) ou des rayons {Eu- glena sociabilis). RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 297 Klebs et Schmitz ne sont pas d'accord sur la structure du pyrénoïde tunique ; le premier admet que les calottes de paramylon ne sont pas au contact direct du pyrénoïde; elles en seraient séparées par un intervalle plus ou moins large ; le second décrit le pyrénoïde comme formé par deux lentilles plan-convexes s'appuyant par leur face plane sur le chloroleucite ; dans nos préparations, le py- rénoïde s'est montré comme un globule homogène se continuant dans son plan médian avec la lame du chloro- leucite; les calottes de paramylon se forment au contact et elles peuvent être repoussées dans le cytoplasme pour faire place à d'autres qui naissent de la même manière. A cette variété de chloroleucites à bord entier ou étoile appartiennent ceux de beaucoup d'Euglena {E. velata, polyinorpha, /"/aua, sociabilis, etc.) et de la plupart des Tr^achelomonas {T. voloocina, lagenella, hispida, etc.). Les colorants sont loin de fournir les mêmes résultats chez tous les individus; l'intensité de la coloration est en rapport souvent très sensible avec la quantité de para- mylon. Ainsi, chez VEuglena polymorpha, en l'absence de paramylon, le pyrénoïde prend une couleur vineuse très prononcée par le picro-carmin et l'hématoxyline, alors que la teinte du chloroleucite est seulement un peu plus faible; les deux calottes de paramylon peuvent manquer, et le pyrénoïde lui-même perd de sa netteté ; son contour devient moins régulier et quelquefois il arrive à dispa- raître complètement. D'autres individus sont remplis de gros grains de paramylon ; les deux calottes de cette sub- stance qui recouvrent chaque pyrénoïde sont devenus énormes ; le pyrénoïde est gros et chromatophile, mais les limites du chloroleucite disparaissent, parce qu'il ne présente plus de sensibilité aux colorants. Les chromatophores à pyrénoïde tunique sont pariétaux comme les chromatophores plus simples d'organisation ; il faut toutefois observer que les lobes et les rayons du 298 P.-A. DANGEARD chloroleucite, quand il en existe, tendent à se placer per- pendiculairement à la surface, au moment où la cellule s'arrondit pour la division {Euglena sociabilis, etc.). La forme la plus compliquée est celle que nous trouvons chez VEugleyia viridis, et, chose remarquable, c'est elle qui, en se modifiant au cours du développement, nous ra- mène au point de départ. Pour la comprendre, il faut partir d'un chloroleucite disciforme, lobé ou étoile, à pyrénoïde tunique comme celui de ï Euglena, sociabilis et de ÏEuglena velata ; les rayons, au lieu d'être compris dans un plan unique, se détachent du pyrénoïde dans toutes les directions. Cette modification entraine une autre répartition dans la distri- bution du paramylon ; au lieu de deux calottes placées sur la face interne et externe du pyrénoïde, nous avons des grains nombreux appliqués à la surface de cet or- gane entre les divers rubans chlorophylliens ; ceux-ci s'allongent beaucoup, se ramifient même quelquefois. Au lieu d'un seul chromatophore de ce genre, la cellule peut en posséder davantage, deux ou trois, par exemple, comme chez ÏEuglena geniculata. C'est sur cette variété de chromatophores que nous avons pu suivre les transformations remarquables qui ont pour résultat la formation de chloroleucites discoïdes homogènes, analogues à ceux de ÏEuglena spirogyra. Le phénomène peut être suivi facilement sur ÏEuglena viri- dis v'* violacea ; il y a fragmentation du pyrénoïde, chaque partie ainsi isolée emportant les rubans chlorophylliens qui lui correspondent; les fragments du pyrénoïde venant à disparaître eux-mêmes, les rubans chlorophylliens de- viennent indépendants dans la cellule et ils prennent sou- vent l'aspect de simples plaques disciformes; à ce mo- ment, l'Euglène ne renferme plus que des chloroleucites semblables à ceux de ÏEuglena spirogyra. Les rubans chlorophylliens deviennent aussi indépendants d'une RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 299 autre façon ; les grains de paramylon qui s'accumulent par- fois en un amas compact autour du pyrénoïde amènent la rupture des rubans chlorophylliens à leur point d'attache sur cet organe. Toujours est-il que, sur certaines récoltes, toutes les Euglènes ont leurs chloroleucites en courts rubans ou en disques sans aucune relation avec le pyré- noïde ; lorsque celui-ci a disparu, la détermination devient presque impossible. Quelquefois, le pyrénoïde, au cours des cultures, fait son apparition, indiquant les affinités de l'espèce [Euglena geniculata v'' terricola, E. viridis v'^ vio- lacea); si son absence se prolonge au delà d'un mois de culture ou davantage, on se trouve réduit à créer au moins provisoirement une espèce nouvelle [Euglena pro- xima). Pendant l'absence du pyrénoïde chez VEiiglena, viridis V** violacea et VEuglena geniculata, les chloroleucites se colorent en rouge par la fuchsine acide, de sorte qu'il faut beaucoup d'attention pour ne pas les confondre avec des fragments de l'ancien pyrénoïde. Au contraire, lors- que cet élément apparaît à nouveau, la sensibilité aux co- lorants disparaît chez les chloroleucites ; en se reformant, le pyrénoïde atteint parfois un volume considérable, ainsi que nous l'avons figuré dans la variété violacea, : c'est alors une grosse sphère entourée de grains de paramy- lon qui lui forment une couronne ; la substance n'est pas toujours colorée uniformément; elle est parfois différen- ciée en parties chromatiques et achromatiques diverse- ment mélangées (T. fig. 3). On peut rattacher indirectement aux chloroleucites de VEuglena viridis ceux de VEuglena splendens et de VEu- glena sang uinea; dans la première, les cordons chloro- phylliens libres n'ont pas de pyrénoïde ; dans la seconde, il se produit parfois, au milieu de chaque cordon, un cor- puscule colorable, plus ou moins bien délimité, méritant cependant le nom de pyrénoïde : il apparaît lorsque les 200 P.-A. DANGEARD cellules s'arrondissent; à ce moment, les cordons chloro- phylliens se reploient en fer à cheval et leur partie mé- diane se différencie et devient chromatophile ; le pyré- noïde est homogène et dense, ou bien il y a un mélange de substance achromatique et chromatique (T. fig. 8). Il nous a semblé inutile de faire ressortir les différen- ces considérables qui existent entre notre exposé et les descriptions de Klebs et de Schmitz; ceux qui voudront s'en rendre compte n'auront qu'à se reporter aux travaux de ces deux savants. La structure intime des chloroleucites est peu connue chez les Eugléniens. Schmitz avait remarqué que de nom- breux chromatophores présentaient une striation après la mort de la cellule; mais, pour lui, cette apparence n'avait rien de commun avec la structure normale. Klebs, au contraire, ayant observé cette striation sur des chloro- leucites après l'action d'une substance gélifiante (Quel- lungsmittel) ou de la pression, y voit la preuve d'une dif- férence de composition : « Dièse sehr charakteristiche Quellungsart der Chlorophylltrager spricht ohne Zweifel fiïr eine Differenzirung ihrer Substanz in starker und schwacher quellungsfahige radiale Streifen (1). » Schmitz discute vivement cette conclusion; mais la sienne est peut- être encore moins satisfaisante : « Ich habe an der Chro- matophoren dieser Organismen eine feinere Struktur bisher noch in keiner Weise zu constatiren vermocht und kann deshalb nur aus Analogie der deutlich durchsichti- gen Chromatophoren anderer Pflanzen die Hypothèse herleiten, dass auch den Chromatophoren der Euglenen eine feinnetzige Fibrillenstruktur eigen sei (2). >; Dans nos nombreuses préparations, nous n'avons jamais vu de chloroleucites réticulés ; le chloroplasme est sans vacuoles, ni mailles ; seulement, il y a parfois mélange de (1) Klebs : Loc. cit., p. 267. (2) Schmitz : Loc. cit. y u, p. 157. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 20J deux substances ayant une électivité différente pour les réactifs : l'une est plus chromatophile que l'autre; c'est la première qui s'accumule dans le pyrénoïde, ou se trans- porte dans le chloroleucite en communiquant à ces élé- ments leur sensibilité particulière aux réactifs colorants ; la distinction de ces doux substances est particulièrement nette dans les gros pyrénoïdes de i'Euglena, viridis \**vio- lacea et ceux plus petits de VEuglena, sanguinea,. La sub- stance chromatophile est caractéristique du pyrénoïde; nous proposons de la désigner sous le nom de pyrénoï- dîne ; son meilleur réactif est la fuchsine acide seule ou employée avec l'acide picrique ; elle joue sans doute un grand rôle dans l'assimilation chlorophyllienne. Les chloroleucites se multiplient ordinairement par simple bipartition ; selon Klebs, elle a lieu par une scis- sion rapide ou, plus rarement, au moyen d'une échan- crure qui s'étend progressivement; le même savant a constaté la division du pyrénoïde dans VEuglena deses ; il n'a pu réussir à voir la bipartition des pyrénoïdes tuni- ques. Il est exact que le pyrénoïde peut se diviser; lors- que VEuglena viridis subit une bipartition, le pyrénoïde s'allonge en forme de biscuit et une échancrure sépare les deux parties avec leur couronne de grains de paramylon [Euglena viridis, etc.) ; mais cette division n'est pas très différente d'une simple fragmentation, car les deux moitiés sont fréquemment inégales. Dans VEuglena polymorpha, qui possède des pyrénoïdes tuniques, nous avons ren- contré des chloroleucites à deux pyrénoïdes; l'un con- serve sa calotte de paramylon, le second la reforme rapidement; le phénomène est plus facile à suivre sur les pyrénoïdes dépourvus momentanément de para- mylon. La bipartition des pyrénoïdes précède celle du noyau ; elle n'a pas lieu en môme temps dans tous les chloroleucites. En résumé, le pyrénoïde des Eugléniens, comme celui 302 P -A. DANGEARD des Chlamydomonadinées, se reproduit soit par division, soit par nouvelle formation ; le chloroleucite lui-même est moins individualisé que celui des Chlamydomonadinées, car il est très probable qu'il prend parfois naissance par nouvelle formation. Les chloroleucites sont imprégnés par une chloro- phylle qui ne semble pas différente de celle des Algues ; le processus d'assimilation est le même : il a pour résultat la décomposition de l'acide carbonique et la formation de composés organiques : le paramylon remplace l'amidon. Il faut toutefois signaler ici une grande différence dans dans le lieu de formation du paramylon et de l'amidon ; l'amidon est élaboré à l'intérieur du chloroleucite, soit à la surface du pyrénoïde, soit dans les alvéoles du chloro- plasme ; le paramylon se trouve exclusivement dans le cytoplasme, comme nous le verrons tout à l'heure en étu- diant les caractères de cette substance. Les chloroleucites ne sont pas d'ailleurs indispensables à l'élaboration du paramylon : les Astasia incolores, les Peranema, les Petalomonas sont parfois remplis de ces grains : dans ce cas, le carbone nécessaire est fourni soit par la nutrition saprophytique (As/asia), soit par la nutrition animale [Peranema). Le cytoplasme est donc capable de produire du paramylon, sans l'intermédiaire des chloroleucites ; la nutrition holophytique ne repré- sente chez beaucoup d'Eugléniens qu'un supplément, im- portant sans doute, mais nullement indispensable. C'est ce qui explique que des individus puissent perdre leurs chloroleucites, sans cesser de vivre. La disparition des chloroleucites s'obtient par plusieurs moyens et dans diverses conditions : 1° en culture dans les solutions riches en matières carbonées, ainsi que Zumstein l'a montré pour VEuglena gracilis ; 2» dans les cultures maintenues à l'ombre ; 3° lors de l'attaque des cellules par des parasites du protoplasme ou du noyau. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 303 Le produit de désorganisation des chloroleucites con- siste en granulations rouges ou brunes, d'aspect oléagi- neux; dans les cellules envahies par le Sphcvrita endogena Dang., le cytoplasme devient rapidement incolore; il ne renferme plus que ces résidus et cependant l'Euglène conserve sa vitalité jusqu'au moment où la membrane éclate, lors de sporulation. Ces Euglènes ont dû suffire, sans nutrition holophytique, à leur vie propre et à celle du parasite. La résistance est encore plus étonnante chez VEuglena deses ; ici c'est un parasite du noyau que nous étudierons plus tard ; il nous suffit de dire pour l'instant que le noyau s'hypertrophie énormément, que le cyto- plasme devient incolore : il ne renferme qu'une dizaine ou une vingtaine de granulations rouges à Tavant et à l'arrière du corps ; cependant l'Euglène continue ses mouvements pendant plusieurs semaines. Les chloroleucites sont de tous les organes de la cel- lule ceux qui se détruisent les premiers, soit par la cha- leur, la pression, soit dans les cultures en solutions colo- rantes ou maintenues à l'obscurité, en un mot, dans tous les cas où les conditions de vie deviennent défavora- bles. Avec une solution de potasse à 0,5-1 0/0, les rubans chlorophylliens de VEuglena viridis v'* violacea perdent leur disposition normale ; ils s'arrondissent à la périphé- rie du cytoplasme ; la même chose se produit avec les solutions colorantes d'éosine, de vert de méthyle, etc. Si l'on étend d'eau ces solutions, les individus reprennent leur structure normale. Une température de 42 à 45° amène un plissement des chloroleucites de VEuglena deses ; le refroidissement opéré à temps leur permet de reprendre une position normale (1). (1) Klebs : Loc. cit., I, p. 268. 204 P.-A. DANGEARD 2° Le Paramylon. Le paramylon commence à se montrer chez les Perane- mace^e, c'est-à-dire chez les Eugléniens à nutrition ani- male ; son origine est restée quelque peu douteuse dans ce groupe, parce qu'on ignorait s'il constituait un produit de l'activité de la cellule ou représentait simplement un ali- ment ingéré. Les nouvelles recherches de Klebs ont ap- porté un peu de lumière sur ce point ; ayant trouvé cette substance dans des espèces qui se nourrissent d'orga- nismes sans paramylon [Heteronema, Dinema), il en a conclu qu'elle était due à l'assimilation (1). Cependant Senn considère toujours comme douteuse l'origine du paramylon chez les Peranema; à propos des Petalomonas, il nous dit que le cytoplasme renferme des pelotes ali- mentaires, des globules oléagineux et peut-être aussi des grains de paramylon (2). Nous avons vu que les Peranema et les Petalomonas renferment en plus ou moins grande abondance des corpuscules de paramylon qui appartiennent en propre à la cellule. Il est donc certain que le paramylon existe chez plu- sieurs Peranemacese, c'est-à-dire chez des Eugléniens à nutrition animale; il se forme également chez les Astasiae et est particulièrement abondant dans VAstasia marga- ritifera. Ces faits nous prouvent que l'apparition du paramylon de même que celle de l'amidon, a précédé la différencia- tion des chloroleucites (3). On rencontre le paramylon, chez toutes les Euglenœ, en corpuscules de différentes grosseurs ; les plus gros (1) Klebs : Loc. cit., II, p. 364. (2) Senn : Loc. cit., p. 181. (3) P.-A. Dangeard : Nutrition ordinaire, nutrition sexuelle et nu- trition holophijtique (Le Botaniste, 8e série, avril 1901, p. 86). RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 305 avaient été pris par Ehrenberg pour des œufs ou des glandes. Stein reconnut leur nature voisine de l'amidon et conserva le nom de paramylon donné par Focke ; Klebs et Schmitz en ont fait une étude plus complète. Le paramylon a la même formule approchée que l'ami- don (C®H*° 0^) ; mais il en diffère par ses propriétés : ainsi l'iode ne le colore pas en bleu ; il est indifférent vis- à-vis des acides organiques, de l'alcool, de l'éther, de l'eau, etc.; l'acide chromique ne l'attaque que difficilement et lentement. Klebs a constaté que la solution de potasse à 5 0/0 ne modifiait pas le. grain de piramylon, tandis qu'à 6 0/0 il y a gélification, suivie de dissolution ; à titre plus élevé, les solutions produisent une dissolution rapide sans trace de gélification ; l'acide sulturique agit de la même façon, mais plus lentement. La forme des grains de paramylon est ordinairement celle d'un disque ou plutôt d'une lentille biconvexe, avec des intermédiaires nombreux vers la forme globuleuse ou en bâtonnet ; on trouve mélangés des corpuscules très petits avec d'autres très gros ; parmi ces derniers, il en est qui servent par leur forme et leur position à caracté- riser certaines espèces. Le P/iacus alata montre deux gros disques de paramylon situés latéralement ; VEuglena spi- rogyra et VEuglena oxyuris possèdent deux gros cylin- dres de paramylon, l'un au-dessus, l'autre au-dessous du noyau ; VEuglena deses renferme souvent de longs bâton- nets de cette substance, ainsi que VEuglena acus ; dans toutes ces espèces, le cytoplasme renferme en outre d'au- tres grains plus petits et de forme ordinaire. Nous avons vu d'autre part que dans toute une section des Euglènes [Euglena velata, etc.) et chez divers Trachelomonas les pyrénoïdes sont entourés de deux valves de paramylon d'épaisseur variable. Selon Klebs, le grain de paramylon se compose d'une série de plaques superposées, de telle sorte que, vu de 20 306 P.-A. DANGEARD profil, il présente des stries parallèles ; chacune des pla- ques à son tour se compose de zones annulaires, ce qui produit la striation concentrique du corpuscule vu de face; ces zones annulaires seraient à leur tour décompo- sables en parties plus claires et plus foncées. Les stries concentriques se voient souvent sans l'aide d'aucun réac- tif ; mais pour étudier la structure complète du grain, il vaut mieux se servir de l'acide sulfurique ; son emploi doit être préféré à celui de la potasse, car il agit plus len- tement; la partie centrale du grain se détruit la première, si bien que tous les corpuscules,^ petits et gros, au bout d'un certain temps, ont l'aspect d'un anneau qui s'amin- cit de plus en plus jusqu'à disparition. Schmitz a essayé de vérifier ces faits, mais sans y parvenir ; il n'a vu que la striation concentrique (1). Nous avons repris cette étude et constaté l'exactitude de la description de Klebs, en nous servant comme lui de l'acide sulfurique ; les grosses cellules au repos de VEu- glenaviridis v'^ violacea. sont très favorables à ce genre de recherches ; elles sont remplies degrains biconvexes, les uns très gros, les autres petits ; la membrane se détruisant rapidement ne gêne pas l'action du réactif. Les phénomènes qui accompagnent la gélification des corpus- cules de paramylon sont différents, selon que l'acide sul- furique agit lentement ou brusquement. En faisant péné- trer peu à peu l'acide sous la lamelle, le grain conserve son contour ; la lentille biconvexe se creuse simplement en son milieu; la cavité centrale s'élargissant de plus en plus, on obtient un anneau dont l'épaisseur diminue pro- gressivement jusqu'à disparition complète ; tous les grains, même les plus petits, se comportent de la même façon ; pendant cette disparition graduelle, la striation concentrique et la striation parallèle sont nettement visi- (i) Schmitz : Loc. cit.,U, p. 400-101. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 307 bles. On doit donc admettre avec Klebs que le corpus- cule est formé de plaquettes superposées comme une pile de sous, chacune étant à son tour constituée par des zones annulaires dont la présence est indiquée par la striation concentrique. Nous ajouterons que ces zones se correspondent exactement d'une plaquette à rautre,car, vu de profil, en section optique, le grain présente des stries parallèles au pore central, lia différenciation de zones an- nulaires en parties plus sombres et plus claires n'est pas aussi nette que les précédentes; nous ne l'avons rencontrée que rarement et elle n'offre aucun caractère de régularité. Si l'action de l'acide sulfurique est brusque, le corpus- cule se gélifie rapidement et se dissout ; mais on a par- fois le temps de saisir les principales phases du phéno- mène. On constate d'abord que, très fréquemment, la len- tille biconvexe se sépare en son milieu en deux lentilles planconvexes ; puis chaque moitié, sans modifier sensi- blement son diamètre, s'allonge en un cylindre; il semble donc que les plaquettes superposées s'écartent comme les replis d'un accordéon ; dans ce cordon, la partie externe devient rapidement homogène, alors que la partie cen- trale montre des plis plus ou moins nombreux. Le mode de formation du paramylon est entouré d'ob- scurité. Klebs fait ressortir cette différence qu'au con- traire de l'amidon qui se produit à l'intérieur des chloro- leucites, le paramylon se forme dans le cytoplasme. Selon Schmitz, les grains de paramylon des Euglènes provien- nent des chromatophores comme l'amidon et grossissent par l'apposition de nouvelles couches ; ce savant pense avoir fourni la preuve que les grains de paramylon pen- dant leurs premiers développements sont au contact des chromatophores ; selon toute probabilité, ils naissent de la substance même de ces derniers (1). Cette opinion n'a (-1) Schmitz : Loc. cit., II, p. 106-107. 308 P. -A. DANGEARD pas prévalu, et nous voyons Zumstein reproduire l'idée de Klebs : « Das Paramylon ist nicht wie die Bildung von Starke an dieGegenwart von Chromatophoren gebunden, sondern es entsteht frei aus deni Cytoplasma » (1). Il est certain que le paramylon peut prendre naissance dans le cytoplasme, en l'absence complète de leucites, comme chez les Astasia ; mais il en est de même pour Tamidon dans \e Polytomauvella. Dès que les chloroleucites sont apparus, la production d'amidon s'est localisée à l'inté- rieur de ces éléments ; nous n'avons jamais rencontré d'amidon chez les Chlamydomonadinées en dehors du chloroleucite. Pourquoi donc cette différence en ce qui concerne le paramylon des Eugléniens? Nous pensons que cette différence est due au mode de nutrition ; la nutri- tion hétérotrophe ou purement saprophytique comporte la possibilité pour le cytoplasme de former directement de l'amidon ou du paramylon dans le cytoplasme {Polytoma, Astasia). Dans les Chlamydomonadinées, cette propriété a disparu avec la nutrition hétérotrophe ; ces algues ont une nutritionautotrophe qui ne comporte que l'absorption de sels inorganiques et la fonction chlorophyllienne ; or avec la fonction chlorophyllienne seule, l'amidon est sous la dépendance exclusive du chloroleucite. Il en est autrement chez les Eugléniens colorés en vert ; ceux-ci ont conservé la nutrition hétérotrophe en même temps qu'ils acquéraient la nutrition holophytique ; donc régulièrement, le paramylon doitêtre à lafois sous la dépen- dance du cytoplasme et du chloroleucite ; parla nutrition hétérotrophe, le cytoplasme a conservé la propriété de former directement du paramylon à son intérieur ; par la nutrition holophytique, il a acquis la possibilité d'en produire au moyen des chloroleucites et des pyré- noïdes. (1) Zumstein : Loc, cit., p. 193 RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 309 Les deux modes s'enchevêtrent et se confondent; toute- fois, il est naturel d'attribuer plus spécialement à la nutri- tion holophytique les grains de paramylon qui recouvrent le pyrénoïde lorsqu'il existe ; nous ne voyons aucune dif- férence sensible entre la formation de la couche amylacée qui entoure le pyrénoïde d'un Chlamydomonas et les deux valves de paramylon qui emboîtent les pyrénoïdes de VEuglena velata ou de VEuglena polymorpha. Le pyrénoïde est un produit de la fonction chlorophyllienne; qu'il soit entouré complètement par le chloroleucite, comme chez les Chlamydomonas, ou bien qu'il conserve ses faces libres et même devienne indépendant, comme chez les Euglé- niens, peu importe. La substance du pyrénoïde a les mêmes réactions générales dans les deux groupes, et son rôle est analogue certainement dans la production de la zone amylacée, que ce soit de l'amidon ou du para- mylon. Chez les Chlorophytes, la quantité d'amidon renfermée dans la cellule est en relation directe avec la fonction chlorophyllienne; on peut, ainsi que l'a montré Sachs, obtenir des plantes dépourvues d'amidon en les cultivant à l'ombre ; avec des Chlaraydomonas, on constate une très grande différence entre la quantité d'amidon renfermée par les cellules à la fin de la journée et le lendemain matin; la plus grande partie des grains ont disparu pendant la nuit, utilisés pour la nutrition générale. Klebs et Zumstein constatent que la production du paramylon et sa diminution dans la cellule ne présentent point une relation aussi claire avecl'assimilation chlorophyllienne. Le premier de ces auteurs a vu que l'Eugienaumdis conservée cinq jours à l'ombre renferme peu de paramylon ; en été, avec une lumière intense et une haute température, les Euglènes sont très actives et le paramylon est en petite quantité. Lorsque les cultures se prolongent, que les con- ditions de vie deviennent défavorables, les cellules se rem- 310 P.-A. DANGEARD plissent de gros grains de paramylon; il en est de même pour les cellules qui s'enkystent (1). Zumstein, de son côté, a constaté que le paramylon ten- dait à diminuer ou à disparaître: 1° pendant la germina- tion des kystes et un peu après; 2° lorsqu'on porte une culture de la lumière à Tombre ; 3o quand les Euglènes repassent de l'ombre à la lumière et reverdissent; 4» quand on les transporte d'un milieu neutre dans un milieu légè- rement acide {'2). Nous avons montré qu'il existe deux sources différentes de production du paramylon : la nutrition saprophy- tique et la nutrition holophy tique: il est donc naturel que la quantité de paramylon contenue dans une cellule ne présente pas upe relation aussi étroite avec l'assimi- lation chlorophyllienne que chez les autres plantes vertes ; nous avons ainsi l'explication de la prétendue anomalie signalée par Klebs et par Zumstein. Le pro- blème devient plus complexe; mais avec ces données nouvelles, il sera possible sans doute d'avoir une explication des divers cas qui peuvent se rencontrer. Si les cultures d'Euglènes conservées à l'obscurité conti- nuent à renfermer du paramylon, c'est un résultat de la nutrition saprophyiique; si ce paramylon disparaît lors- que ces cultures sont reportées à la lumière, c'est que les chloroleucites se reforment aux dépens du paramylon, comme la chose a lieu avec l'amidon; enfin, si les Eu- glènes, en pleine activité, ont peu de paramylon, c'est uniquement parce que le métabolisme général étant très rapide, le paramylon se trouve utilisé au fur et à mesure de sa production; les divisions sont alors très fréquentes. Le mode de dissolution du paramylon n'est pas connu : nous avons quelque raison de penser que sa digestion (1) Klebs : Loc. cit., I, p. 272-273. "(2) Zumstein : Loc. cit., p. 194. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 311 donne lieu à des effets semblables à ceux de l'acide sul- furique ; en effet, nous avons rencontré chez quelques espèces et en particulier dans ÏEuglenaproxima^VEuglena deses, etc., des anneaux de paramylon absolument iden- tiques à ceux qui se forment à la suite de l'action lente de l'acide sulfurique. D'ailleurs, les gros corpuscules perma- nents que l'on trouve dans VEuglena. acus, dans VEuglena. spirogyra, etc., se creusent en anneau ou redeviennent massifs selon Tétat des cultures. Il existe probablement dans le cytoplasme un ferment qui agit sur les grains de paramylon en les dissolvant; on s'explique de cette façon la disparition rapide des grains dans certaines conditions du développement, au passage du stade de repos à la vie active, par exemple. Stein a dessiné chez le Fhacus pleuronectes et chez le Phacus longicauda les gros corpuscules de paramylon avec une zone annulaire et une grande cavité centrale remplie d'une substance incolore : « Bei Phacus pleuro- nectes liegt in der mitte des Leibes gewohlich ein sehr grosser scheibenformiger Paramylon-Korper, der wieder eine grosse concentrische,ebenfallsalsNucleusgedeutete Scheibeumschliesst; im Mittelpunktderletzteren sah ich haufig noch eine kleine, schrage, spaltformige Hohle (1). » Klebs parle simplement de grains de paramylon disci- formes. Schmitz a entrevu l'explication de l'apparence signalée par Stein ; mais sa description est incomplète (2). En traitant par l'oxyde de cuivre ammoniacal les cel- lules de Phacus, il devient relativement facile d'étudier les corpuscules de paramylon. Occupons-nous d'abord du Phacus pleuronectes ; certaines cellules renferment un ou deux gros corpuscules disciformes ordinaires à stries concentriques (T. fig. 51. F, K); mais fréquemment il (1) stein : Loc. cit., p. 146. (2) Schmitz : Loc. cit., II, p. 75. 312 P.-A. DANGEARD n'existe qu'un seul gros corpuscule ayant l'apparence signalée par Stein ; une zone annulaire extérieure, avec une partie centrale blanche et un petit canal au milieu (T. fig. 51. A). Or, lorsqu'on regarde la cellule de profil, on voit que le corpuscule, d'ailleurs massif, ressemble assez à un chapeau haut de forme ; ce sont les bords du chapeau qui donnent l'impression de la zone annulaire ; il repose à plat d'un côté tout au moins sur la membrane elle-même (T. fig.51. B,C, D, E); l'aspect est quelque peu variable ; ainsi parfois, le corpuscule se compose de deux troncs de cône unis par leur petite base; dans d'autres cellules, le corpuscule est formé d'un cylindre reposant sur un piédestal plus large. Sa structure est facile à com- prendre ; il se compose de deux moitiés constituées elles-mêmes par une série de plaquettes minces super- posées ; au centre, se trouve un pore comme dans les autres grains de paramylon ; les stries qui indiquent l'existence de plaquettes sont très visibles. Le Phacus longicauda est remarquable par les variations considérables de taille qu'il présente; on arrive, à partir des plus gros individus, par une série complète d'inter- médiaires, diU Phacus parvula Klebs, dételle sorte qu'on peut sedemander si cette dernière espèce est réellement auto- nome ; dans les cellules de grosseur moyenne, le corpuscule est médian, disciforme ; dans les plus petites cellules, on assiste à la formation d'un grain de paramylon semblable à celui du Phacus pleuronectes{TA\g. 51. G, H, I, J, M, N); enfin chez les gros individus, il est très large (T. fig. 51,0); sa structure ne présente aucune différence sensible avec celle que nous venons de décrire dans le Phacus pleu- ronectes. Chez les autres espèces de Phacus, le paramylon affecte une position différente. Dans le Phacus alata, chaque aile renferme un large dis- que à stries concentriques (T. fig. 51, P). Le Phacus ovum RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 313 possède deux anneaux de paramylon qui s'appliquent sur la membrane ; ils sont placés latéralement et plus ou FiG. 51. — Diverses formes des corpuscules de paramylon chez les Phacus. moins rapprochés de la partie antérieure (T.fig. 51, Q, R) : ces anneaux sont constitués par des couches concentri- ques. Le Phacus pyrum présente ordinairement deux calottes minces de paramylon qui s'appliquent par leur 314 P.-A. DANGEARD face convexe sur la membrane ; certains individus en ont trois ou quatre; leur position varie (T. fig. 51. L, S). Outre ces gros corpuscules caractéristiques, les cellules de Phaous renferment en plus ou moins grande quantité de très petits grains : on peut s'assurer, au moyen de l'a- cide sulfarique, qu'ils se creusent tous en anneau comme les grains de paramylon des Euglènes. La même struc- ture apparaît également dans les grains de paramylon des Trachelomonas ; elle est donc très générale. En résumé, nous avons montré que dans VEuglena viri- dis v'* violacea,, on pouvait décomposer, au moyen de l'acide sulfurique, chaque grain de paramylon en deux lentilles plan-convexes ; l'étude des gros corpuscules qui se rencontrent chez le Phsicus pleuronoctes et le Phacus longiccLuda montre l'exactitude de cette manière de voir ; les deux moitiés sont ici de forme différente, il est vrai, mais elles se distinguent sans aucun réactif. Il est donc vraisemblable que tous les grains discoïdes de paramylon, même les plus minces, sont constitués de cette façon. Nous pensons qu'il faut rattacher à la structure précé- dente les corpuscules en bâtonnets plus ou moins gros que l'on rencontre chez VEucflena, deses, VEuglena oxyuris et même ceux de Euglena spirogyra. Tous ces grains se creusent d'un pore central arrondi ou d'une fente, sous l'action de l'acide sulfurique ; ils se comportent de même sous l'influence de la digestion. Le mode de striation des grains de paramylon indique qu'ils sont constitués par une série de plaquettes super- posées en pile; chaque plaquette est à son tour décompo- sable en un grand nombre d'anneaux ; l'accroissement en largeur est dû aux zones annulaires et l'accroissement en épaisseur au nombre des plaquettes. Nous serions disposé à penser que la formation du pa- ramylon est due à une sécrétion du cytoplasme ; cette substance appartient, comme la gélatine qui constitue les RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 315 enveloppes accessoires, au groupe des hydrates de car- bone ; or, nous avons vu que le mucus gélatineux est sécrété dans le cytoplasme et filtré ensuite au travers de la membrane ; les enveloppes qu'il forme sont plus ou moins épaisses et elles sont striées concentriquement. Il nous paraît extrêmement probable que la substance du grain de paramylon est aussi sécrétéedans le cytoplasme; elle est ensuite déposée dans les alvéoles ; comme les en- veloppes accessoires, les corpuscules de paramylon aug- mentent d'épaisseur par l'apposition de nouvelles couches. CHAPITRE IV LA REPRODUCTION DES EUGLÉNIENS. La reproduction des Eugléniens est une division lon- gitudinale du corps qui se répète à des intervalles plus ou moins rapprochés ; elle a lieu soit pendant la phase d'activité, soit pendant une période de repos, sans chan- gement dans la forme générale de la cellule, ou plus sou- vent après que celle-ci s'est arrondie, à l'intérieur d'une enveloppe commune ou sans tégument. Lorsque les cel- lules continuent de se diviser, sans reprendre leur liberté à chaque division, il se forme des colonies palmelloïdes ; lorsque la cellule s'entoure d'un tégument épais et reste longtemps sans se diviser, il s'agit d'un enhystement. C'est Ehrenberg qui a reconnu le premier le mode de division des Euglènes : il remarqua chez VEuglena acus deux individus au contact et il interpréta cet aspect comme Tindice d'une division longitudinale (1). Perty fit la même remarque en ce qui concerne VEuglena, spirogyra, et VJEu- glena viridis (2). Stein a vu aussi la division longitudinale de VEuglena viridis', mais il la considère tantôt comme une véritable division, tantôt comme un phénomène de conjugaison (3) ; il indique cependant une division longi- tudinale des Colaciuin. D'autres auteurs, Meyen^ Thuret, Cohn, Focke, Cien- (1) Ehrenberg : Loc. cit., p. 105-112. (2) Perty : Loc. cit., p. 78. (3) Stein : Loc. cit., p. 87. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 317 kowski, ont parlé du mode de division des Euglènes, mais tous pensent que la séparation se fait comme chez les Chlainydomonas, c'est-à-dire transversalement. Cohn, en particulier, qui a étudié le développement d'un cyste, dit que « der Inhalt wird gleichmassiger, die festen Gebilde, der rothe Punkt verschwinden ganz und die Theilung tritt ein, die Euglene schnurt sich erst in 2, dann meist in 4, unter Umstanden auch 8 und 16 Partieen ab (1) ». G. Klebs, qui a suivi le développement d'un grand nom- bre d'espèces, a étudié le mode de division principalement chez VEuglena deses et VEuglena spirogyra, (2). Chez VEu- glena, deses, la cellule conserve sa forme allongée et s'en- toure d'une épaisse enveloppe ; la partie antérieure s'élargit, le noyau qui occupait une position centrale vient au voisinage de la vacuole principale et là il se divise ; après cette bipartition, dont Klebs n'a pu suivre lesdétails, le point oculiforme et la vacuole principale se divisent à leur tour ; la métabolie cesse complètement. La partie an- térieure du corps s'arrondit de plus en plus ; le canal an- térieur disparaît à l'observation et une échancrure se produit ; pendant que la séparation progresse, les parties libres commencent leurs mouvements métaboliques, tandis que l'extrémité postérieure du corps encore indivise reste immobile; lorsque la séparation est complète, le mouve- ment cesse à nouveau et les deux cellules-filles restent au repos pendant quelques heures jusqu'à ce que l'enve- loppe mucilagineuse ait disparu. Les flagellums se déve- loppent ensuite très lentement à partir du canal antérieur sous forme d'un bâtonnet qui s'allonge progressivement. La division de VEuglena, spirogyra a lieu sans sécrétion d'enveloppe; la métabolie disparaît; le noyau se porte à l'avant, de sorte que les deux gros corpuscules de para- (1) Cohn : Zeitschr. f. wiss. ZooL, Bd. IV, 1853, p. 275. (2) Klebs : Loc. cit.', I, p. 279-280. 318 P.-A. DANGEARD mylon se trouvent maintenant au-dessous de lui. Après la division du noyau, du point oculiforme, de la vacuole principale, on voit se produire une échancrure qui gagne peu à peu la partie postérieure ; les moitiés libres se con- tractent de diverses manières; la portion commune reste immobile : après séparation complète, chaque cellule-fille emporte un des gros corpuscules de paramylon. Le mémoire de Klebs contient encore d'autres détails sur la division des Euglènes ; VEuglena. viridis s'arrondit presque complètement et s'entoure d'une enveloppe avant d'effectuer sa bipartition : celle-ci est toujours longitudi- nale, bien qu'on l'ait si souvent décrite comme transver- sale. On ne saurait d'ailleurs comparer ce mode de repro- duction à celui des Volvocinées : dans cette dernière famille, la cellule-mère se divise en 4-32 zoospores sous une membrane unique, alors que chez VEuglena viridis chaque division est précédée de la formation d'une nou- velle enveloppe. En chambre humide, VEuglena viridis se divise librement, sans sécrétion préalable de membrane. h'EuglensL velata prend une forme ovale et s'entoure d'une épaisse enveloppe; VEuglena sanguinea est égale- ment entourée d'une couche gélatineuse épaisse ; mais le corps s'arrondit en une sphère légèrement aplatie : VEu- glena acus conserve sa forme allongée et se divise à l'état libre comme la plupart des espèces de Pkacus ; toutefois 4 le Phacus parvula sécrète du mucilage. La division des Trachelomonas est moins connue : Perty pensait qu'elle s'effectuait à l'intérieur de la coque, mais sans en avoir donné la preuve (1). Stein combat l'idée de Perty et suppose que la division a lieu en dehors de la coque, parce qu'il en a vu sortir l'Euglène indivise (2). Klebs nous dit avec cette restriction « so weit aber meine (1) Perty : Loc. cit., p. 81. (2) Stein : Loc. cit., p. 87-88, RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 319 Beobachtungen reichen » que la division des Trachelomo- nas se fait au repos, à l'intérieur de la coque ; l'une des cellules-filles sort, tandis que l'autre reste dans la tuni- que (i). Dans nos « Recherches sur les Cryptomonadinda et les Eaglenex », nous avons donné quelques détails sur la di- vision des Phacus et montré qu'il existait dans ce genre des colonies palmelloïdes et des kystes (2). Zumstein a fait des observations très intéressantes sur la division de VEuglena, gracilis ; la division au stade de repos, à l'intérieur d'une enveloppe, n'a lieu qu'à partir du moment où le milieu est suffisamment, consistant pour empêcher le mouvement. « Sowie die Unterlage ein Um- kerkriechen oder gar eine Schwimmbew^egung gestattet. theilt sich die Euglene im beweglichen Zustand (3) » ; le mode de division n'est en relation qu'avec les propriétés physiques du milieu ; il est indépendant des propriétés chimiques et de la présence ou de l'absence de chroma tophores. Pour comprendre cette conclusion, il est bon de savoir que Zumstein interprète d'une façon trop large la division à l'état de « beweglichen Zustand » ; en réalité il s'agit d'une division sans enveloppe com-mune, avec cessation plus ou moins longue du mouvement pendant la biparti- tion. Nous avons suivi dans l'eau ordinaire la division de cette espèce : la cellule-mère, ainsi que les cellules-filles, peuvent rester très longtemps à l'état de repos ; ce sont des colonies palmelloïdes que Zumstein a obtenues dans ses milieux de culture à la gélatine. On peut faire dans le mode de division des Eugléniens les distinctions suivantes : 1" Division libre, sans enveloppe commune. La cellule- (1) Klebs : Loc. cit., p. 281-282. (2) P,-A. Dangeard : Loc. cit., p. 19. (3) Zumstein : Loc. cit., p. 167-168. 320 P.-A. DANGEARD mère, dans ce cas, reste active ou bien elle devient immo- bile pendant la bipartition. Elle reste active et conserve sa forme générale chez un certain nombre d'espèces [Entosiphon sulcatum, Menoi-. dium incurvum, Astasia, etc.); ce mode de division est celui des Flagellés ordinaires et il a été observé chez la plupart des PeranemsB et des Astasia^ ; on peut dire qu'il représente la reproduction normale de ces êtres. Avec l'apparition de la nutrition holophytique, il tend à disparaître ou à devenir moins fréquent ; on le rencontre encore de temps en temps chez quelques espèces {Euglena vii'idis, Euglena geniculata, Euglena flava) ; mais il est rare. Aussi Steinqui n'avait rencontré que très peu d'individus doubles, les considérait-il non comme un produit de la division, mais comme le résultat d'une conjugaison (1). La cellule, dans la division libre, peut cesser plus ou moins longtemps son mouvement; elle conserve sa forme générale {Euglena spivogyra^ Phacus pleuronectes, etc.), ou bien prend un contour ovale ou arrondi {Euglena viri- dis v^é inlermedia, Euglena geniculata., Eufjlena gracilis, etc.). Dans la division libre des Euglenss, la cellule-mère pré- sente quelquefois dans la même espèce {Euglena viridis, etc.) tous les intermédiaires entre le mouvement ordinaire et une immobilité complète de durée variable, entre la forme normale et la forme sphérique. Zumstein a eu tort, selon nous, de comprendre la divi- sion libre de VEuglena gracilis dans la division « im beweglichen Zustand », parce que la cellule-mère reste souvent fort longtemps privée de mouvement. 2° La division tégumentée dans laquelle les cellules-filles sont entourées d'une enveloppe commune. La cellule-mère est toujours immobib pendant la bipar- {\) Stein : Loc. cit., p. 87. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 3^1 tition; on peut distinguer trois cas principaux : division ordinaire, formation de colonies palmelloïdes , enkyste- ment. a) Dans la division ordinaire^ les cellules-filles redevien- nent libres, avant d'effectuer une seconde bipartition; la cellule-mère conserve sa forme générale {Euglena deses^ Phacus ovum, etc.) ou s'arrondit en sphère {Euglena viri- dis, Euglena proxima, Euglena sanguinea, Euglena pobj' morpha, E. flava, etc., etc.). On peut dire que ce dernier mode est de beaucoup le plus fréquent; nous en avons vu de nombreux exemples dans la partie descrip- tive. b) Lorsque les cellules continuent à se diviser sans re- prendre leur vie active, il y a formation de colonies palmel- loïdes ; dans ces colonies on retrouve habituellement les enveloppes successives particulières à chaque division ; leslimitesfinissentcependantleplussouventparseconfon- dre; ces colonies se composent de quatre, huit, seize, trente- deux individus diversement orientés : elles sont incluses dans une masse gélatineuse plus ou moins abondante. On rencontre de beaux exemples de ces colonies dans Y Euglena viridis v'^ intermedia, dans VEuglena polymorpha, V Eu- glena sociabilis, le Phacus ovum^ etc. Quelquefois, à Tin- térieur de la première enveloppe commune, il semble que les divisions soient libres : dans ce cas, la colonie entière ressemble à un sporange; nous avons signalé le fait pour VEuglena sociabilis et VEuglena pisciformis. Les stries en spirale de la membrane continuent à être visibles pour chaque cellule [Phacus ovum) ; nous ignorons si la chose est générale. Régulièrement, dans ces colonies, les cel- lules devraient être orientées en file, puisque la division est longitudinale ; si elles sont groupées irrégulièrement, c'est qu'elles modifient leur orientation dans l'intervalle de deux divisions. Les Euglena peuvent ainsi végéter très longtemps, plu- 21 322 P.-A. DANGEARD sieurs mois, sans que les cellules redeviennent libres et mobiles. c) L'enkystement mérite une mention spéciale ; en effet, s'il est fréquemment accompagné ou suivi d'une bipartition de la cellule, cela n'est pas absolument général. L'enkystement représente un ralentissement des fonc- tions vitales; aussi se produit-il lorsque les conditions du milieu de culture deviennent défavorables; le principal facteur de l'enkystement est donc le manque de nourri- ture, une dessiccation lente, une modification du milieu ; l'envahissement des parasites bactériens et autres agis- sent dans le même sens. UEuglena viridis est l'espèce qui se prête le mieux à l'observation des kystes ; quand on abandonne quelque temps à elle-même une culture de cette espèce, on ne tarde pas à obtenir un grand nombre de ces formations: la cellule devient exactement sphérique ; elle est recouverte d'une coque plus ou moins épaisse, à stries concentriques et souvent colorée en jaune brun par un oxyde de fer ; le cytoplasme est rempli de gros grains de paramylon. On trouve des kystes identiques dans la variété violacea, dans VEuglena proxima^ etc.; parfois, il existe plusieurs tégu- ments différents superposés, ainsi que Zumstein l'a con- staté chez VEuglena gracilis. Dans ces kystes, la cellule est unique ou divisée en deux cellules-filles, la bipartition n'a lieu assez souvent qu'à la germination. Le meilleur moyen d'obtenir la germination des kystes est de les transporter dans un milieu nutritif; ainsi ceux de VEuglena gracilis germent déjà au bout de 16 heures, lorsqu'on les transporte dans une décoction de lentiles ou dans des solutions renfermant des extraits de viande, des peptones, etc. Les kystes d'Euglena viridis, qui ont résisté plusieurs semaines à la dessiccation, germent lorsqu'on les replace dans l'eau ordinaire ; ceux de la variété violacea mettent RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 323 leurs cellules en liberté, dans un décoction de jus de fumier, ce qui est lié au mode de vie particulier à cette Euglène (Klebs). VEuglena. sanguinea s'enkyste en> devenant sphérique; elle s'entoure d'une épaisse enveloppe gélatineuse : VEu- glena, deses se contracte, prend la forme d'un cylindre et se recouvre d'une épaisse membrane qui reste incolore ; le Phacus pleuronectes prend un contour ovale et il sécrète autour de lui une couche épaisse de gélatine à stries con- centriques. Parfois, c'est une colonie palmelloïde tout entière qui s'enkyste, comme nous avons vu la chose se produire dans VEucflena, socisibilis. Beaucoup d'espèces peuvent supporter pendant long- temps les conditions défavorables du milieu sans procé- der à un véritable enkystement ; de ce nombre, VAstasia margaritifera, qui se contracte quelque peu, se remplit de gros grains de paramylon et reste ainsi plus ou moins longtemps ; le Menoidium incurvum fait de même, tout en conservant sa forme ; les Phacus restent immobiles pen- dant des semaines sans autre protection que leur mem- brane; le cytoplasme est alors gorgé de grains de para- mylon et les gros corpuscules disciformes ont aug- menté sensiblement de grosseur ; VEuglena deses v^^ intermedia s'aplatit ; sa membrane devient rigide ; le nombre des bâtonnets de paramylon augmente et tout mouvement cesse; il en est de même dans VEuglena spi- rogyra, VEuglena granulata, VEuglena velata, etc. Chez ces deux dernières espèces, le contour du corps à ce stade possède un aspect caractéristique. La germination des kystes ou des pseudo-kystes est accompagnée par une diminution rapide du paramylon. 324 P.-A. DANGEARD PHÉNOMÈNES QUI ACCOMPAGNENT LA DIVISION CELLULAIRE Tous les éléments de la cellule, à Texception des flagel- lums qui naissent par nouvelle formation, se divisent en même temps qu'elle : stigma, vacuole principale, chloro- leu cites et noyau. Dans la division libre, lorsque la cellule reste active, les nouveaux flagellums apparaissent à côté des anciens ; dans VEntosiphon sulcatum, la cellule-mère possède déjà, avant de se diviser, deux couples de flagellums disposés comme ils le seront dans les cellules-filles ; chez les Astasia, le nouveau flagellum ne s'allonge que lentement, et la divi- sion terminée, sa longueur est encore inférieure à celle de l'ancien; c'est du moins ce que nous avons vu dans une de nos observations. L'étude de VAstasia marcjaritifera offre un intérêt particulier : nous avons vu, en effet, qu'il existe dans cette espèce une sorte de blépharoplaste qui se porte à l'avant de la cellule et se dédouble au moment dé la bipartition. La division du stigma et celle de la vacuole principale n'offrent rien de bien intéressant; remarquons toutefois que la division de ces éléments implique une bipartition longitudinale de la cellule ; nous ignorons comment les choses se passent quand cette division est transversale, comme chez le Trachelomonas lagenella. Il est vrai que le stigma n'a pas grand déplacement à effectuer ; mais nous ne voyons pas que la vacuole principale puisse aussi faci- lement se transporter dans le plan équatorial. Nous serions assez disposé pour notre part à admettre que ces éléments peuvent parfois apparaître par nouvelle formation. En ce qui concerne la division des chloroleucites et des RECHERCHES SUR LES EUGLÊNIENS 325 pyrénoïdes, nous avons vu précédemment dans quelles conditions elle se produit. Il nous reste à voir comment se comporte le noyau ; cet organe est l'élément principal de la division ; on ignorait cependant jusqu'à ce jour sa structure exacte, et le mode de karyokinèse qui lui était attribué, doit faire place à une autre interprétation totalement différente de la première. ÉTUDE DU NOYA.U. Le noyau des Eugléniens a été vu par un assez grand nombre d'observateurs, et malgré cela il est encore peu connu dans l'ensemble du groupe. Stein a dessiné chez toutes les espèces un noyau homogène nucléole : sa po- sition est indiquée assez exactement; malheureusement, Stein attribuait au noyau la formation de germes endo- gènes, d'où une théorie aussi peu fondée que celle des blasties, de Perty. Klebs fait avancer quelque peu l'étude du noyau; il a examiné plus spécialement celui de VEu- glena Ehrenbergii dans lequel il ne trouve pas de nucléole, mais une simple cavité contenant une masse irrégulière et dense ; le reste du noyau semble constitué, aussi bien avant qu'après l'action des réactifs, par un peloton de filaments; on ne saurait affirmer s'il s'agit de filaments distincts réunis comme les pièces d'un échafaudage, ou d'un cordon unique. Le centre du noyau offre quelques différences avec les espèces ; chez VEuglena sanguinea,^ la cavité centrale renferme 4 ou 5 masses denses; d'autres espèces n'ont à cette place qu'un corpuscule arrondi qui mérite alors le nom de nucléole. La plus haute différen- ciation du nucléole se rencontrerait chez le Menoidium, où cet organe occupe la plus grande partie du noyau (1). (1) Klebs : Loc. cit., p. 253-254. 326 P -A. DANGEARD Nous verrons que le nucléole existe chez tous les Eu- gléniens ; seulement, il est unique ou fragmenté en un plus ou moins grand nombre de corpuscules. Keuten n'a étudié qu'une seule espèce, VEuglena, viri- dis (1); son mémoire a été fait sous la direction de Bloch- mann qui avait déjà publié un travail sur ce même sujet. Le noyau de ïEuglena. viridis est situé à la partie pos- térieure du corps ; il est ovale ; son plus grand diamètre est placé suivant l'axe. Keuten donne au corpuscule cen- tral, plus colorable, le nom de nucléole-centrosome à cause du rôle actif qu'il joue pendant la division. La chroma- tine n'est pas distribuée, comme d'ordinaire, irrégulière- ment en granulations chromatiques dans la cavité nu- cléaire; il existe des chromosomes en bâtonnets plus ou moins recourbés, disposés radialement autour du nu- cléole ; les bâtonnets paraissent homogènes, sans distinc- tion en parties de chromaticité différente. La membrane nucléaire n'est pas visible à ce moment, sans doute parce que les chromosomes remplissent toute la cavité du noyau ; plus tard, dans les derniers stades de la division, on la voit nettement. La cellule s'arrondit avant d'opérer sa bi- partition; le phénomène se produit pendant la nuit; il commence deux heures environ après la chute du jour et se termine cinq heures plus tard. Le nucléole s'allonge en un bâtonnet qui atteint la surface nucléaire ; les chro- mosomes font d'abord un angle avec lui, puis ils se placent parallèlement ; le nucléole se renfle à ses deux extrémi- tés, qui ne se colorent plus de la même façon que la par- tie médiane amincie. Les chromosomes, jusque-là dissé- minés, se retirent des pôles et s'amassent dans la partie équatoriale, tandis que le noyau modifie son contour ; il est plus large alors dans le sens perpendiculaire à l'axe nucléolaire. C'est à ce moment qu'aurait lieu une division (1) Keutçn : Loc. cit. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 327 longitudinale des chromosomes. L'axe nucléolaire s'étire ensuite longuement; les chromosomes cessent d'être pa- rallèles ; ils sont entremêlés ; une moitié se rend à l'un des pôles et l'autre moitié au second ; le noyau s'est élargi à nouveau dans le sens du nucléole ; les chromosomes sont disposés maintenant en deux g-roupes au voisinage de chaque pôle, et parallèles à. la direction de division; comme les extrémités du nucléole, ils sont renflés vers l'extérieur et amincis en pointe vers le centre. La sépa- ration des nouveaux nucléoles a lieu, et autour de chacun d'eux, les chromosomes reprennent la direction radiale qu'ils avaient à la prophase. Keuten considère ce mode de division comme une variété de la karyokinèse. Butschli s'est occupé du noyau des Eugléniens à un point de vue plus général (1); il est caractérisé, d'après ce savant, par ce fait que le nucléole est relativement pe- tit par rapport au volume total, et qu'entre lui et la mem- brane se trouve une substance chromatique finement gra- nuleuse, plus rarement composée de granules plus gros; le nucléole est homogène; parfois, cependant, on y observe des sortes de vacuoles; le cas le plus rare serait celui qui a été signalé par Klebs dans VEuglena sa.nguinea^ le nu- cléole étant remplacé par 4 ou 5 masses de substance chro- matique dense. D'après Butschli, ces noyaux ne seraient qu'un état de différenciation plus avancé des noyaux vési- culeux ; les deux formes pourraient exister dans la même espèce {Petalomonas abscyssa)', VAnisonevia grande pré- sente sans doute la même variation, car Stein ligure les noyaux avec la structure vésiculaire, alors que Butschli a trouvé dans cette espèce des noyaux sans nucléole, fine- ment granuleux. Ce savant admet que le nucléole peut manquer ; toute la substance du noyau est. alors finement granuleuse ou réticulée {Phacus, Anisonema). En ce qui (1) Butschli : Protozoa, loc. cit., p. 741, 328 P.-A. DANGEARD concerne la division elle-même, Butschli observe que les noyaux vésiculeux se divisent suivant le schéma de l'amitose ; toutefois, il a constaté chez VEntosiphon sulca- tum une disposition particulière qui établit une transition à la division indirecte ; le nucléole se dissout au stade d'allongement en un nombre de filaments fins parallèles à l'axe ; leurs extrémités sont épaissies et plus sombres ; ils disparaissent avant la fin de la division. Keuten, dont le travail est postérieur à celui-ci, pense que l'aspect granuleux ou réticulé du noyau signalé par Butschli ne correspond pas à la structure normale, mais à une modification d'ordre pathologique analogue à celle qu'il a lui-même rencontrée dans les cultures en mauvais état (1); on pourrait également attribuer à la même cause la présence des masses pseudo-nucléolaires vue chez VEuglena sanc/uinea par Klebs. Ces diverses interprétations s'éloignaient sensiblement de la réalité, ainsi que nous allons le démontrer. A) Structure du noyau. Le noyau occupe, chez un grand nombre d'Euglènes, une position voisine du centre de la cellule {Euglena, san- cfuinea, E. splendens, E. geyiiculata, E. granulata, E. de- ses^E. spirogyra, etc.); il est quelquefois postérieur {Eu- glena viridis); si la disposition des chloroleucites se mo- difie, le noyau change lui-même de place {Euglena viridis V violacea). Dans les Phacus, le noyau est postérieur; chez les Trachelomonas, il occupe le fond de la cellule or- dinairement. Il n'est question, ici, que du noyau à l'état de repos, car au moment de la division il se déplace ; il devient mé- dian chez les Phacus et les Trachelomonas ; il se porte à la (1) Keuten : Loc. ci<., p. 23i, pi. XI, fig. 19-21. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 329 partie antérieure du corps chez VEuglena deses, VAstasia, marcfaritifera, etc. ; dans VEuglena viridis, il reste posté- rieur, sans doute à cause du chloroleucite central. La grosseur du noyau est ordinairement en relation avec la grosseur même de la cellule : c'est ainsi qu'on trouve les plus gros noyaux dans ÏEuglena sanguinea, VE. splendens, ÏE. velata, le Phacus ovum, tandis que les plus petits noyaux se rencontrent chez VEuglena piscifor- mis, VE. graciliSy le Phacus pyrum^ le Trachelomonas vol- vocina, etc. ; parfois, la grosseur du noyau est considé- rable par rapport au volume total de la cellule {Euglena flava).ll faut bien remarquer, d'ailleurs, que le diamètre du noyau, dans une même espèce, peut varier de moitié environ ; lorsque les cellules sont en division fréquente et rapide, le noyau conserve sa grosseur maximum ; mais si les divisions sont rares, le noyau se condense et dimi- nue de volume dans de très fortes proportions. Le noyau a le plus souvent une forme arrondie ou ovale {Euglena vb^idis, etc., Phacus, Trachelomonas, Asta- sia, Entosiphon); lorsque la cellule est gorgée de paramy- lon, sa surface éprouve quelquefois des déformations ; le contour du noyau devient anguleux (E. sanguinea, E. splendens, E. sociabilis, etc.). Plusieurs Euglènes à corps cylindrique filiforme ont des noyaux allongés en forme de biscuit {Euglena deses, Euglena spirogyra, etc.). La structure du noyau des Eugléniens présente des difficultés d'interprétation très grandes : c'est ce qui ex- plique les opinions différentes à son sujet de Butschli, de Klebs, de Keuten ; le premier y voit une structure granuleuse ou réticulée ; le second parle de fibrilles entre- mêlées ; le troisième de bâtonnets chromatiques radiaires. La structure réticulée n'existe jamais dans le noyau sain des Euglènes; on ne la rencontre que dans certains noyaux hypertrophiés par l'action d'un parasite; il s'agit d'une maladie d'origine microbienne à laquelle nous avons 330 P.-A. DANGEAR» donné le nom de Caryophysème des Eugléniens; de là provient sans doute l'erreur de Butschli. Nous indiquerons tout d'abord sous quelles apparences le noyau se présente lorsqu'il est étudié au moyen des réactifs colorants ; nous verrons ensuite quelle est l'inter- prétation qu'il faut leur donner. Si nous prenons le noyau de VEntosiphon sulcatum, nous voyons qu'il est limité par une membrane épaisse et chromatique; il renferme une masse centrale d'apparence homogène, que l'on serait d'autant plus porté à considérer comme un nucléole qu'elle est séparée de la membrane par un intervalle incolore ; il semblerait donc que ce noyau appartienne au type vésiculeux. Cela, il faut bien l'avouer, a été notre première impression; nous avions cependant observé, dans une coloration progressive au moyen de glycérine picro-carminatée, que le centre de la masse se colorait un peu plus fortement que le reste; mais, comme les autres réactifs ne laissaient voir qu'un ensemble chro- matique sensiblement homogène, il a fallu l'étude de la division pour nous remettre dans le droit chemin ; nous avons reconnu alors qu'au centre de la masse nucléaire, il existait, même dans le noyau à l'état de repos, un nu- cléole. Le noyau de VEntosiphon sulcatum comprend donc une membrane nuclénire, du nucléoplasme et un nucléole, le tout très chromatique. Dans VEntosiphon sulcatum, le nucléoplasme paraît homogène ; nous retrouvons cet aspect dans beaucoup de noyaux, principalement ceux qui sont à l'état condensé entre deux divisions éloignées ; elle est alors associée dans les mêmes espèces à la structure pseudogranu- leuse; celle-ci apparaîtau moment des divisions, alors que le volume du noyau augmente; elle persiste même dans l'intervalle des divisions, lorsque celles-ci sont fréquentes. Dans cette structure pseudogranuleuse, le noyau atout l'air de contenir de véritables granulations chromatiques ; RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 331 quelques-unes sont allongées en bâtonnets. Keuten a été trompé par cette fausse apparence ; il a considéré ces formations comme des chromosomes et s'est trouvé entraîné de la sorte dans une suite d'erreurs. Nous ne saurions d'ailleurs lui en faire le moindre reproche, car nous avons écrit d'abord toute la première partie de ce travail en adoptant cette manière de voir ; cependant nous n'avions pas la satisfaction que procure un résultat simple et définitif ; ces pseudogranulations sont en effet en nom- bre très variable dans une même espèce ; certains noyaux n'en montrent qu'un seul rang ; quelques-uns en présen- tent trois ou quatre rangs entre le nucléole et la surface ; d'autre part, il n'était pas facile d'expliquer pourquoi la forme bâtonnet était rare, alors qu'elle aurait dû être générale; enfin dans l'hypothèse de chromosomes, il fallait soit admettre une fusion de chromomères, soit une varia- bilité excessive dans le nombre des chromosomes. N'étant pas satisfait de l'une ou l'autre conclusion, nous recommencions, et toujours sans succès, des essais de coloration, quand dernièrement, ayant dilacéré des cellules sous le microscope, nous avons eu la chance de tomber sur un noyau séparé en deux ; les moitiés étaient assez écartées l'une de l'autre et réunies par les replis lâches d'un mince cordon. Dès lors, nous avions Texplica- tion tantcherchée : la masse nucléaire n'est autre chose qu'un peloton formé par l'enroulement en divers sens d'un simple cordon ; il nous fut facile ensuite de voir que l'apparence granuleuse ou fibrillaire est uniquement due à la façon dont sont entremêlés les replis du spirème, ou chromo- .<5pires(de/pw,aa, couleur, et dearretpa, repli), comme nous les appellerons. Nous n'hésitons pas à dire que ce cordon existe même avec la structure du noyau dite homogène ; si l'on examine un peloton de fil à quelque distance, nous n'apercevrons aucun détail ; il ne faut donc pas s'étonner que la masse nucléaire n'offre dans certains cas aucune 332 P A. DANGEARD différenciation apparente ; ce qui nous engage à admettre la persistance du spirème dans le noyau à l'état de repos, c'est l'action différente des réactifs ; avec les mêmes échan- tillons, la quantité des noyaux montrant les chromospi- res est très variable selon la réussite de la coloration et selon la nature des colorants. Nous en arrivons par cette transition à considérer que certains noyaux qui paraissent homogènes même pen- dant la division, sont en réalité constitués comme les au- tres ; on les rencontre assez rarement d'ailleurs [Euglena. ScLuguinea, Euglena, deses, Euglena spirogyra, P/iacus pieuro7iectes). Dans ces espèces, le nucléoplasme se colore uniformément le plus souvent ; cependant nous avons vu plusieurs fois, chez VEuglena sanguinea,\es chromoepires attester leur existence sous forme d'un noyau finement granuleux ; ÏEuglena deses a montré aussi quelques traces du spirème. Chez les autres espèces que nous avons étudiées, les chromospires sont nettement visibles, au moins pendant la division nucléaire et souvent dans les noyaux ordi- naires. Le nucléole est unique dans un très grand nombre d'espèces; il est entouré au contact par le nucléoplasme ou en est séparé par un inter-valle plus ou moins large ; sa grosseur varie dans d'assez fortes proportions ; la substance qui le constitue est homogène et très chroma- tophile ; son existence est absolument générale. Lors- qu'il est fragmenté [Euglena sanguinea, E. splendens^ E. polymorpha, E. spirogyra, etc.), le nombre des sphéru- les indépendantes est ordinairement de deux ou trois ; chez VEuglena sanguinea, il peut atteindre une trentaine ; la fragmentation n'est pas un phénomène constant, car même ddius V Euglena sanguinea, il existe parfois un gros nucléole unique. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 333 B) La division nucléaire. Nous avons vu que, selon Keuten, il existe dans le noyau des chromosomes qui se divisent longitudinalement avant d'être distribués aux noyaux-frères. Ce n'est pas de cette façon que se produit la division du noyau chez les Eugléniens ; pour la comprendre, il sufïit de se reporter à la structure du noyau à l'état de repos : il comprend un nucléole entouré par les replis d'un cordon chromatique ou spirème. Ce cordon n'est pas composé d'éléments chromatiques distincts ou chromomères, comme dans la division indirecte ordinaire ; la substance est homogène ; on n'aperçoit que ses replis diversement disposés. Le noyau, en vue de la division, sauf quelques rares exceptions (Eugienauiridzs), se rapproche du centre de la cellule, s'il n'était déjà médian, ou bien se porte vers l'ex- trémité antérieure; à ce moment, son volume a augmenté et les chromospires se voient sous la forme de simples granulations, de bâtonnets ou de fibrilles. Nous allons suivre les divers stades de la division en prenant comme exemple VEuglena. viridis \^^ vioUcea. On peut distinguer la prophase et Vanaphase ; chacune comprend deux périodes principales. Prophase. . I. Le nucléole s'allonge en un bâtonnet qui atteint la surface nucléaire. Le noyau prend un contour elliptique ; le nucléole cen- tral sphérique commence à s'étirer transversalement en bâtonnet ; les chromospires du spirème, placés d'abord plusouraoins obliquement par rapport à l'axe nucléolaire, tendent à prendre une position parallèle (T. fig. 52, D, E, F). 334 P.-A. DANGEARD On peut à ce stade arriver à dérouler une partie du cor- don (G, H). Le nucléole finit par atteindre à ses deux extrémités la surface nucléaire ; l'axe qu'il constitue au centre du noyau a un diamètre sensiblement égal en tous P ^^i.>' s ^•5^^. N FiG. 52. — Euglena viridis, variété violacea. Haplomitose ses points ; les chromospires sont dirigées approxima- tivement suivant le sens de l'axe (I, J, K) ; comme leur parallélisme n'est pas rigoureux, leur aspect est quelque peu différent au même stade selon le degré d'enche- vêtrement. Le nombre des chromospires est très élevé, mais varia- ble avec les noyaux ; on s'en rend compte d'après les figures L, M, qui représentent au même stade deux noyaux vus par un des pôles ; les granulations ne sont RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 335 autre chose que la section transversale des replis du spi- rème. IL Dans la seconde période, l'axe nucléolaire dépasse la surface; il se renfle à ses deux extrémités, de façon varia- ble ; dans ce mouvement il soulève les chromospires qui s'opposent à son passage (N), et comme nous n'avons pas vu ici de membrane nucléaire distincte, nous supposons qu'il pénètre directement dans le cytoplasme. Le peloton nucléaire ne suit pas immédiatement l'impulsion donnée; on dirait même qu'il subit parfois une sorte de contrac- tion (P) ; puis il s'aplatit dans le sens de l'axe et arrive au niveau des deux renflements nucléolaires(R, T). Pendant ce stade, les chromospires conservent leur position (N, 0, P, Q, R, S, T) ; quelquefois le parallélisme avec l'axe devient complet, et alors on peut les suivre d'une surface à l'autre (Q). Anaphase. L L'axe nucléolaire estdenouveauaucontact delasurface nucléaire, et il se produit un léger temps d'arrêt pendant lequel le peloton tend à se séparer en deux moitiés (T. fig. 53. A, B, C); les chromospires sont plus nettes aux pôles ; lorsque la séparation se produit au milieu, elles sont sensiblement toutes parallèles (D, E, F). Il s'agit bien d'une division transversale des parties du spirème qui continuaient à unir les deux moitiés ; ces cordons se séparent en effet, comme le fera plus tard l'axe nucléolaire. Il est bien évident que cette division transversale entraîne la fragmentation du spirème ; chaque segment devient un chromosome ; mais il est impossible de fixer leurs limites exactes, car s'ils ont leur bout libre du côté de l'équa- teur, on ne saurait dire d'une façon certaine s'il en est de même aux pôles. Pendant cette période, le contour du noyau, d'elliptique 336 P.-A. DANGEARD est devenu cylindrique; puis il présente un léger étran- glement en son milieu (E, F). II. Dans la seconde et dernière période, les chromo- somes s'enchevêtrent de nouveau à chaque pôle ; l'axe nucléolaire continue son mouvement, entraînant avec lui chaque moitié du peloton ; son allongement est limité par ^'"^^ ■^^Ciîifec^^-' B ^^iggffgSki^jl: sîsf "^^^^^ "^^^ m^mm - m-^^-^ <^i5f "■^igs? •-^7. r:-/ ^: ■sv-n .:%-^ FiG. 53. — Eîiglena viridis, variété violacea. Ilaplomitose. la surface de la cellule-mère ; il se rompt dans son milieu et la substance nucléolaire se condense dans chaque noyau-frère (G, H, I). Nous ignorons comment a lieu dans ces noyaux l'union des chromosomes en un nouveau spirème ; tout ce que nous pouvons dire, c'est que les chromospires sont placées de façon variable et que leur nombre est également très différent selon les noyaux (J, K, L). RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 337 Le noyau de tous les Eugléniens se divise suivant le schéma que nous venons d'établir : pour la plupart d'entre eux, nous n'avons même aucune remarque particulière à faire [Euglena viridis, Euglena flava, Euglena, splendens, Trachelo'mona.s volvocina, T. lagenella^ Phacus ovum, Pha- cus pyrum, etc.) : le nombre et la disposition des chromospires varient simplement avec la grosseur du noyau. ^ Dans les espèces à nucléole fragmenté, les divers amas chromatiques s'unissent ordinairem.ent en un nucléole unique au moment de la division et l'axe nucléolaire reste simple; mais parfois ils restent plus ou moins distincts, de sorte que l'axe est formé d'un plus ou moins grand nombre de rubans {Euglena. sanguinea). Lorsque le nucléoplasme s'est montré homogène, même pendant la division [Euglena sanguinea, E. deses, Entosi- phon sulcatum), nous avons des raisons sérieuses de croire qu'il existe néanmoins un spirème et des chro- mospires, puisque nous avons parfois réussi à aperce- voir une structure fibrillaire très nette. La question de la présence d'une membrane n'a aucune importance : en effet, chez V Entosiphon sulcatuni, il existe une membrane nucléaire épaisse et chromatique; elle reste visible pendant toute la durée de la division, aussi bien que sur le noyau à l'état de repos. Par contre, chez la pluplart des Eugléniens, bien que le contour du noyau soit net, on ne distingue pas de membrane appréciable. Cependant, la marche générale de la division est la même dans les deux cas. On ne saurait faire, chez les Eugléniens, une distinc- tion absolue entre le protoplasme achromatique dans le- quel sont plongés les chromospires et celui du spirème lui-même: l'enchevêtrement du peloton est tel que la quantité de substance unissante paraît être très faible dans la plupart des cas. 22 338 P. -A. DANGEARD Nous devons indiquer maintenant les conséquences qui découlent de ces recherches sur le noyau des Eugléniens et sur son mode de division : elles ont une portée générale sur laquelle il n'est pas inutile d'insister. Dans nos précédents travaux, nous avons montré que la mitose existe chez les Chlamydomonadinées, les Vol- vocinées, les Vampyrelles et une amibe (1), elle présente les mêmes caractères que chez les Métaphytes et les Mé- tazoaires. On ne saurait confondre avec cette mitose la division du noyau des Eugléniens ; cette dernière est la plus sim- ple ; la différence essentielle consiste dans la manière d'être du spirème : dans la karyokinèse, il se dédouble ; la division des chromosomes est longitudinale : chez les Eugléniens le cordon reste simple; la séparation des deux moitiés du peloton a lieu par rupture transversale des chromospires. Il devient nécessaire d'établir une distinc- tion entre ces deux modes de division. Le schéma donné par Remak en 1855 et 1858 de la divi- sion du noyau fut accepté très longtemps par les histolo- gistes ; ce n'est qu'à partir de 1873 environ que, grâce aux travaux de Schneider, deButschli, de Fol, de Strasburger, de Van Beneden, de Flemming, d'Hertwig, on arriva à une conception plus nette du phénomène ; on décrivit une série de modifications et de transformations auxquelles Schleicher appliqua, en 1878, le nom de Karyokinèse. Van Beneden en 1876 reconnut l'existence de deux types dif- férents, l'un très simple, correspondant au schéma de Re- mack, l'autre très compliqué, comprenant l'ensemble de la karyokinèse; il appela le premier fragmentation et ré- serve Je nom de division au second. Trois ans plus tard, Flemming substitue à ces termes ceux de division directe et division indirecte ; enfin, en 1882, le même savant pro- (l) Le Botaniste, séries VI- VII. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 339 pose les noms de mitose, ayant pour synonymes ksiryoki- nèse, division indirecte, et celui d'ami/ose, ayant pour sy- nonymes division directe, fragmentation (1). L'expression de mitose, qui vient de julitoç, filament, est souvent employée par les histologistes, concurrem- ment avec celle de karyokinèse ou cinèse. Maintenant qu'une nouvelle distinction s'impose dans le mode de division du noyau, nous avons dû chercher comment la désigner ; il nous a paru que le mot de mitose pouvait être conservé avec avantage, à condition de lui adjoindre un qualificatif: c'est ainsi que nous proposons de désigner la division nucléaire des Eugléniens sous le nom d' haplomitose (de ànlovç simple), et la karyokinèse proprement dite, qui représente le dernier terme de com- plication, sous le nom de téléomitose (de téXsoç dernier). Nous aurons ainsi trois types principaux de division nucléaire : Vamitose, Vha.plomitose et la téléomitose ; la mitose des Eugléniens est une haplomitose ; celle des Chlamydomonadinéesest une téléomitose; le qualificatif ne sera employé que lorsqu'il s'agira de caractériser l'en- semble du phénomène (2). Examinons maintenant la répartition dans le règne vé- gétal et le règne animal de ces trois types. I. L'amitose ou division directe devrait être le mode de division le mieux connu; il s'agit d'une simple fragmen- tation du noyau et du nucléole s'il existe, en l'absence de spirème ; c'est le schéma de Remack. Il existe uneamitose par cloisonnement et une amitose par étirement; la pre- mière a été rencontrée par nous dans le Sappinia pedata, et la seconde a été décrite par Schultzo dans VAmœba polypodia. (1) Wilson: The Cell, p. 64. (2) Un certain nombre d'histolologistes emploient l'expression de ci- nèse, comme synonyme de mitose : ils pourront faire la distinction en haplocinèse et téléocinèse. 340 P.-A. DANGEARD Mais il existe une foule de cas où l'amitose a été cons- tatée, existant concurremment avec la téléomitose : sa signification biologique est loin d'être encore élucidée (1) ; il est à prévoir même qu'un certain nombre des exemples d'amitose fournis jusqu'ici représentent une véritable divi- sion haplomitotique. Le groupe des Amibes est réellement bien intéressant à cet égard ; on y retrouve l'origine des divers modes de division nucléaire, ainsi que nous l'avons déjà cons- taté. Uamitose par étirement se produit dans VAmœba poly- podia, d'après Schultze. Uamitose par cloisonnement existe chez VAmœba proteus, d'après Grûber, et dans le Sappinia pedata^ selon nos pro- pres observations. La téléomitose se rencontre chez VAmœba binucleata (Schaudinn) et chez VAmœba hyalina (Dangeard). Nous ne serions même pas surpris que la division du noyau deVAmœba cristalligera, considérée par Schaudinn comme une amitose, fût en réalité une haplomitose. «Ces essais, ces tâtonnements que nous ne trouvons nulle part ailleurs, nous indiquent que l'évolution s'est exercée ici de façon toute spéciale et que le groupe des Amibes est la souche d'où partent de nombreux rameaux. Il devient évident que le noyau a subi de bonne heure dans son mode de division une série de modifications et de perfectionnements étroitement liés aux progrès d'ordre morphologique et physiologique; il sera intéressant de montrer quo cette évolution correspond dans ses grandes lignes aux principaux groupes primaires animaux et végé- taux (2). » Aujourd'hui, nous remplissons une partie de cette (1) Wilson •. The Oeil, loc. cit., p. 114. (2) P.-A. Dangeard : Etude de la Karyohincse chez CAmœba hyalina. (Le Botaniste, 7« sério, p. 82.) RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 341 tâche; nous ne savons pas encore, il est vrai, clans quelle mesure l'amitose a persisté chez les organismes inférieurs et supérieurs. On a souvent décrit des divisions directes : elles auraient besoin d'être contrôlées à nouveau. C'est ainsi que Butschli considérait comme directe la division du noyau chez VEntosiphon sulcatum ; nous avons vu qu'il s'agissait d' haplomitose ; le cas ne doit pas être isolé. Si Tamitose reste encore entourée d'obscurité, on peut juger dès maintenant de l'importance acquise par l'haplo- mitose. IL Dans Vhaplomitose, le noyau renferme un cordon ou spirème, enroulé autour d'un nucléole ; il est recouvert ou non d'une membrane. Le nucléole s'allonge, formant l'axe de division ; la masse nucléaire suit le mouvement et son contour devient elliptique ; en même temps, les re- plis du spirème ou chromospires tendent à se placer paral- lèlement à l'axe du nucléole ; celui-ci est renflé à srr; deux extrémités. Les chromospires se divisent transversale- ment suivant le plan équatorial, séparant ainsi les deux moitiés du spirème. Le nucléole, continuant de s'allonger, entraîne avec lui chaque moitié du peloton ; il finit par se rompre en son milieu ; le spirème s'enroule à nouveau autour de la substance nucléolaire qui, regagnant l'inté- rieur du noyau, forme bientôt dans chaque noyau frère un nucléole arrondi. Uhaplomitoseestle seul mode de division nucléaire qui existe chez les Eugléniens, ainsi que nous l'avons démon- tré dans ce travail ; mais on doit se demander si les mi- toses décrites chez certains organismes inférieurs ne seraient pas susceptibles de rentrer dans ce groupe. Tout d'abord, nous trouvons les mitoses du macronu- cleusetdumicronucleus des Infusoires décrites par R.Hert- wig (1) ; le rôle du nucléole n'est pas établi d'une façon (1) Consulter Wilson : Loc. cit., p. 89, fig. 38. 342 P. -A, DANGEARD aussi nette que chez les Eugléniens ; mais l'ensemble de la division rappelle de près ce que nous avons observé et décrit ici : en particulier il se produit, selon R. Hertwig, une division transversale des chromosomes, suivant le pian équatorial du fuseau ; nous rangeons donc, sans hésitation , ces divisions nucléaires dans l'haplomi- tose. Les quelques observations que nous avons faites sur le gros noyau d'un Podop/i^ra indiquent aussi l'existence del'haplomitose dans la famille des Acinétiens ; le nucléo- plasme a une structure pseudogranuleuse exactement semblable à celle du noya,u des Eugléniens ; au centre se trouve un gros nucléole, qui au moment de la division forme un axe s'éteadant jusqu'à la surface nucléaire ; les chromospires deviennent visibles ; le noyau s'allonge alors en un long biscuit courbé en arc ou replié sur lui- même ; on voit toujours au centre l'axe nucléolaîre et les chromospires parallèles à cet axe. Nous n'avons pas vu malheureusement le dernier stade de la division, mais il est dès maintenant presque certain que la division nu- cléaire des Acinétiens est unehaplomitose. Nous en dirons autant de la mitose décrite par Lauter- born dans le Ceraimm hirundinella. ; d'après cet auteur, le noyau au repos a une structure réticulée lacuneuse ; mais nous nous sommes assuré, en suivant la division de Péridiniens incolores [Gymnodiniwnx sp.), que le nucléo- plasme, qui semble fréquemment homogène, montre avec de bonnes colorations la structure pseudo-granuleuse du noyau des Eugléniens. La disposition des chromosomes parallèle à l'axe dans le Ceratium hirundinella, leur divi- sion transversale, toutindique nettement une haplomitose ; cependant, dans cette espèce, le rôle du nucléole est moins important que chez les Eugléniens ; d'abord situé à la surface du noyau, il pénètre dans la masse nucléaire au moment de la division ; mais il ne forme jamais d'axe pro- RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS ^3 prement dit (1). Nos observations sur les Gymnodiniums, qui devront faire plus tard l'objet d'un mémoire spécial, montrent un autre aspect du nucléole ; la substance nucléolaire est très abondante ; elle est condensée en deux ou trois gros amas superficiels ; lorsqu'il n'en existe que deux, ils sont parfois réunis par un trabécule qui traverse l'intérieur du nucléoplasme ; le nucléole est parfois uni- que et allongé en massue à la surface du noyau. Nous avons rencontré quelques noyaux à la métaphase, avec chromospires parallèles à l'axe de division et deux ou trois bâtonnets nucléolaires placés de la même façon. La mitose des Péridiniens est une haplomitose dans laquelle le nucléole affecte une disposition particulière et variable. Nous ne pouvons nous empêcher d'être frappé par le fait que tous les groupes qui possèdent l'haplomitose (Eugléniens, Infusoires ciliés et Acinétiens, Péridiniens) n'ont eu qu'une évolution limitée; ils se terminent encul- de-sac n'ayant pas pris part à la différenciation des Méta- phytes et des Métazoaires. Il nous semble même que la division nucléaire des Dia- tomées (2) aurait besoin d'être étudiée à nouveau ; elle ressemble sous plus d'un rapport à l'haplomitose, et il n'est peut-être pas absolument certain qu'elle comporte un dédoublement des chromosomes. III. La téléomitose est une division nucléaire perfec- tionnée. Le noyau renferme un spirème composé de dis- ques chromatiques ou chromomères. Si cette différencia- tion semble exister aussi quelquefois dans l'haplomitose, par exemple chez les Infusoires ciliés, il en est une autre qui caractérise la téléomitose ; le spirème dans cette der- (1) Lauterborn : Kern und Zelltheilung von Ceratium hirundinellsL (Zeitsch. f. wiss. Zool. ; Bd. 59, 1895, p. 167). (2) Lauterborn : Unt. uber Bau, Kernth. und Bew»g. der Diatomeen, Leipzig, 1896. 344 P. -A. DANGEARD nière se dédouble dans le sens de la longueur. Cette diffé- rence a une conséquence importante; dans l'haplomitose, les noyaux frères reçoivent des parties différentes du cor- don et sans doute plus ou moins inégales ; dans la téléo- mitose, chaque noyau frère reçoit une des moitiés du cordon dédoublé. On conçoit que si le cordon conservait sa longueur, la séparation serait presque impossible ; aussi observe-t-on une contraction de ce spirème et une fragmentation en chromosomes : ceux-ci se groupent dans le plan médian du fuseau et forment la plaque équatoriale: chaque chromosome est en réalité double par son ori- gine ; ses deux moitiés s'écartent et se rendent au pôle correspondant. Les chromosomes alors reforment un spi- rème pour chaque noyau frère. Nous n'avons pas parlé des centrosomes et des fils achromatiques du fuseau, parce que ce sont là des détails accessoiressusceptiblesde présenter des variations consi- dérables ou de manquer tout à fait ; nous avons vu qu'il en était de même du nucléole dans l'haplomitose. La différence essentielle entreles deux sortes de mitose est celle-ci : Dans l'haplomitose, le spirème se sépare en deux moitiés forcément plus ou moins inégales ; les noyaux frères reçoi- vent des parties différentes du spirème. Dans la téléomitose, le spirème se dédouble suivant le sens de la longueur ; chaque noyau frère en reçoit une moitié égale à la seconde et identique comme propriétés. Nous constaterons maintenant que la téléomitose est le modenormaldedivisionnucléairechezlesMétaphytesetles Métazoaires ; nous ajouterons queles organismes inférieurs quicommeles Chlamydomonadinées etles Volvocinées pos- sèdent la téléomitose ont à d'autres points de vue été considérés comme la souche des organismes supérieurs. CHAPITRE V LES AFFINITES DES EUGLÉNIENS Nous avons deux choses distinctes à considérer : d'une part la délimitation du groupe ; d'autre part, sa place dans la classification, A) Délimitation du groupe. Nos observations ont prouvé l'importance du mode de division nucléaire, lorsqu'ils'agitdedéterminerlesaffinités des principaux groupes primaires d'organismes infé- rieurs ; c'est là un résultat assez inattendu. On peut cependant déjà prévoir qu'avec son aide, on arrivera à fixer avec une certitude presque mathématique, l'origine, l'évolution et la destinée des rameaux et ramuscules qui divergent à partir d'une source commune. Après avoir montré que le schéma de Blochmann et de Keuten était inexact, nous avons caractérisé sous le nom d' haplomitose une division nucléaire dans laquelle le spirème ne subit pas de dédoublement longitudinal : l'haplomitose se rencontre chez les Infusoires ciliés, les Péridiniens, les Eugléniens, etc. ; mais dans chacune de ces grandes familles, l'haplomitose présente des diffé- rences qui permettent d'établir plusieurs types facilement reconnaissables. D'un autre côté, toute une catégorie d'organismes inférieurs possède des noyaux qui se 346 P. -A, bANGEARD divisent en dédoublant leurs chromosomes dans le sens longitudinal : il s'agit alors de téléomitose. Nos connaissances sur l'histologie des organismes inférieurs sont actuellement suffisantes pour prévoir qu'on ne pourra réunir ensemble désormais des espèces dont les unes ont des noyaux se divisant par haplomitose, alors que les autres ont une division nucléaire téléo7nito- tique. Cette première constatation nous fait voir qu'on ne doit effectuer aucun rapprochement entre les Chlamydomo- nadinées, par exemple, et les Eugléniens. La confusion d'ailleurs ne s'est guère produite qu'au début des études microscopiques : c'est ainsi que nous voyons Ehrenberg placer dans ses Astasise les Chlorogo- niura avec les genres Astasiay Euglena, Aynblyophis, Ço- la,ciwn et Distigina (1). Si Dujardin n'a pas compris le genre Chlorogonium au voisinage des Euglena, c'est, il est vrai, parce qu'il ne le connaissait pas ; en effet, il place les Diselmis qui sont nos Chlamydotnonas actuels dans ses Thécamonadiens avec les genres Trachelomonas, Cryptomonas, Phacus, Crumenula, Ploeotia, Anisonema, Oxyrrhis {'2) . On sait que Dujardin réunissait dans une seconde famille, — celle des Eugléniens, — les Peranema, Astasia, Euglena^ Zygosehnis, Heteronema^ Polyselmis. Le genre Chlorogoniuyn est encore maintenu par Perty au voisinage de V Eutreptia viridis et des Astasia^ alors que les Phacotus sont rangés avec le genre Phacus parmi les Chryptomonadina{S). Avec Stein, la classification s'améliore ; le genre Phacotus est rapproché des Chlamydomonas ; mais le genre Chlorogonium s' aitsirde encore da.ns\esH/dromorina; (i) Ehrenberg : Loc. cit. (2j Dujardin : Loc. cit., p. 327. (3) Perty : Loc. cit., p. 168. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 347 Stein divise les Flagellés en un certain nombre de familles: c'est ainsi qu'il faut rechercher les Eugléniens actuels parmi les Chloropeltideay les Euglenida, les Astasiaea^les Scytomonadina (1). Deux savants vont entreprendre la tâche ardue d'é- tablir de grandes subdivisions. Le premier, Bucschli a le tort d'accorder trop d'impor- tancepour la constitution deses sous-ordres au nombre et àladisposition des flagellums; on a ansilesMonacZina, les Eucflenoidina, les Heteromastigoda, les Isomastigoda et les Phijtomastigoda. Malheureusement, aveccette méthode, les affinités des genres entre eux sont souvent sacrifiées ; nous trouvons parmi les Euglenoidina les Coelomonas, les Vacuolaria, les Microglena, les Chromulina (2) ; par con- tre, les Anisonema et les Entosiphon sont reportés dans un autre sous-ordre, celui des Heteromastigoda. Klebs a été beaucoup plus heureux dans ses tentatives de classification :il conserve les Euglenoidina de Bustchli, mais il en retranche certains genres et en ajoute d'autres; l'ensemble est réparti dans trois familles : Euglenida^ Astasiida, Peranemida (3) ; dans la première famille, la nutrition est le plus souvent holophytique ; elle est sapro- phytique dans la seconde ; quant aux Peranemida, ils possèdent la nutrition animale. Dans les Euglenida, Klebs rapproche avec raison les Fhacus et les Trachelonionas des Euglena, alors que ses prédécesseurs éloignaient ces genres dans des familles différentes. Senn a suivi les idées de Klebs, en changeant quelque peu les dénominations : ses Eugleninse se divisent en Euglenaceœ, Astasiaceœ, Peranemaceœ (4). (1) Stein : Loc. cit., p. x de l'Introduction. (2) Butschli : Loc. cit., p. 819. (3) Klebs : Loc. cit., II, p. 353. (4) Senn : Loc. cit., p. 174. 348 P.-A. DANGEARD La méthode de Klebs est bien préférable à celle de Butschli : Dujardin avait eu l'idée géniale de se servir de la présence des flagellums pour établir à côté des Rhi- zopodes l'embranchement des Flagellés ; mais il ne faut pas aller trop loin dans cette voie ; les caractères tirés du nombre des flagellums, de leur longueur, de leur disposition, ne peuvent servir tout au plus qu'à la distinction des genres ; cela se comprend d'ailleurs faci- lement. Les flagellums sont des organes qui tirent leur origine des pseudopodes ; leur nombre a d'abord été va- riable comme dans ces derniers ; on peut dire la même chose de leur disposition ; de plus, ils ne se transmettent pas d'une espèce à l'autre par division ; on les voit naî- tre à chaque génération par nouvelle formation. Ce ne sont pas là des conditions bien favorables à une fixité de l'organe au cours de l'évolution ; plus tard, il est vrai, l'appareil locomoteur est devenu d'organisation plus stable, comme chez les spermatozoïdes des Métaphytes et des Métazoaires ; cela tient à l'apparition de nouvelles diffé- renciations, blépharoplastes, rhizoplastes et condyles, dont quelques-unes tout au moins arrivaient à se trans- mettre d'une cellule à l'autre par bipartition. Klebs utilise pour classer les espèces la connaissance approfondie qu'il a du développement et de la structure ; encore devait-on se demander dans quelle mesure il avait réussi à rapprocher les espèces selon leurs afïi- nités. Pour trancher la question, l'étude du mode de division nucléaire est sans contredit d'unegrande valeur. Le noyau est un organe indispensable à la vie de la cellule : il se transmet d'une génération à l'autre pardivision ; sa struc- ture présente ainsi une grande fixité ; la division s'effectue d'après une marche uniforme. On est ainsi amené à con- clure que s'il existe dans un groupe un mode de division nucléaire particulier, il est infiniment probable que nous RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 349 le retrouverons au début de ce groupe et dans la lignée qui provient de son évolution. Puisque rhaplomitose est le mode de division nucléaire des Eugléniens, nous devons nous servir de ce caractère pour la délimitation du groupe et pour la recherche de son origine et de son évolution. Si nous examinons tout d'abord les Euglenœ, nous voyons que pour les trois genres les plus importants, Euglena, Phacus, Trachelomonas, ïhaplomitose a été suivie en détail pour un grand nombre d'espèces ; les autres genres de cette famille, à l'exception toutefois des 6>yp- tocflena, ont une organisation si voisine de celle des Euglo- nes que leurs affinités ne sauraient faire l'objet du moin- dre doute. Chez les Astasiœ, l'haplomitose a été vue dans le prin- cipal représentant de la famille : VAstasia margaritifera ; elle existe sans aucun doute dans les formes voisines. La difficulté était plus grande en ce qui concerne les Peranemaceœ ; nous avouons sincèrement que, pendant très longtemps, nous avons pensé que cette famille, telle qu'elle est comprise par Klebs et Senn, était hétérogène ; il nous semblait qu'un certain nombre de genres, en par- ticulier les Anisonenipe^ n'appartenaient pas au type Euglénien ; notre opinion se fortifiait du fait que Butschli avait décrit une division directe du noyau dans VEntosi- phonsulcatum. Le hasard a voulu que nous puissions étudier cette espèce critique. Or, le noyau de VEntosiphon se divise par haplomitose, comme celui des autres Eugléniens ; la conséquence toute natuy^elle est qu'il faut conserver ce genre parmi les Eugle- naceae et avec lui, ceux dont V organisation est analogue ou identique. D'autres conclusions s'imposent. En effet, en nous ap- puyant sur l'étude du développement, nous avons émis 350 P.-A. DANGEARD depuis longtemps l'idée que les Flagellés ont donné nais- sance d'une part aux champignons, par l'intermédiaire des Chytridinées, d'autre part aux Chlorophytes par l'in- termédiaire des Chlamydomonadinées ; les Myxomycètes et les Sporozoaires ont une même origine. On remarquera que, dans tous ces êtres, le 7ioyau se divise par téléomi- tose. D'un autre côté, les Flagellés ont donné d'autres ra- meaux, en particulier les Eugléniens et les Péridiniens, sans doute aussi les Ciliés et les Acinétiens : ici la divi- sion se fait par haplomitose. Nous aurons ainsi parmi les Flagellés les Haplomona- DiENs et les Téléomonadiens. Les casiers sont prêts ; mais beaucoup sont vides, dans l'ignorance où nous sommes encore du mode de division du noyau, chez beaucoup de Flagellés. Nous allons toutefois essayer de montrer l'importance de cette distinction. Il semble résulter de cette constatation que les Flagellés comprennent deux séries parallèles, ayant évolué séparément avec un mode de division nucléaire différent. Prenons les Cryptomonadinese ; Butschli les place parmi les Phytomastigoda, avec les genres Cyathomonas^ Chilomonas, Cryptomonas et Oxyrrhis (1) ; Klebs en fait une famille constituant avec les Chrysomonadinées la division des Chloromonadina (2); Sennles constitue en un embranchement spécial (3). Les affinités des Cryptomonas sont donc très obscures. Je n'ai vu qu'une seule fois un état de division avancé du noyau chez le Cryptomonas ovata ; mais cela m*a pro- duit l'effet d'une téléomitose ; que l'observation soit con- firmée et les Cryptomonadinées viendront prendre place (1) Butschli : Loc. cit., p. 844. (2) Klebs: Loc. cit., p, 391. (3) Senn : Loc. cit., p. 167. RECHERCHES SUR LES EUGLÊNIENS 351 dans les Téléomonadiens, non loin des Chlamydomonadi- nées et peut-être tout près des Chrysomonadinées. Un autre exemple est encore bien démonstratif : VOx?/r- rhis msiTina, dans la classification de Butschli, est au voisinage des Cryptomonas ; Senn le range au milieu des Protomasticfineœ. Après avoir étudié cette espèce avec soin, nous pensons qu'elle a des affinités très étroites avec les Péridiniens à nutrition animale; si notre opinion est juste, le noyau doit se diviser par haplomitose, ce que nous chercherons à vérifier tôt ou tard. IL esta noter que les différences secondaires qui existent dans Vhaploinitose permettront de séparer les Proto-Péridi- niens des Prolo-Eugléniens. Nous ignorons si la téléomitose des organismes in- férieurs présentera des différences analogues pouvant servir à tracer plus sûrement l'arbre généalogique. Il est encore une autre conséquence des faits que nous venons d'exposer sur la valeur de l'haplomitose et de la téléomitose en classification; les Haplomonadiens et les Téléomonadiens ont dû évoluer séparément sans con- tracter d'anastomoses. On aura ainsi un grand nombre de modifications à faire au tableau dans lequel Klebs a essayé de résumer les affinités des Protozoaires et des Protophytes ; en par- ticulier, il faut dès maintenant supprimer le trait d'union qui réunit les Volvocineœ aux Euglenoidina {\). Du moment qu'elle peut s'appliquer à la recherche des affinités réelles des groupes primaires, l'étude de la di- vision nucléaire chez les organismes inférieurs présente un intérêt de premier ordre. Attendons maintenant patiemment les résultats défini- tifs : le travail d'un seul ne pourrait suffire qu'à remplir (1) Klebs : Loc. cit., p. 428. 352 t».-A. DANGEARD quelques-uns des casiers dont nous parlions tout à l'heure : il faut, pour l'achèvement du programme que nous avons tracé, le concours de nombreux collabora- teurs. B) Plice des Eugléniens dans la, classification. On a beaucoup discuté pour savoir si les Eugléniens sont des animaux ou des végétaux, et nous avons vu déjà, au début de ce mémoire, combien les avis étaient partagés à ce sujet. Il n'y a pas lieu de reprendre chaque opinion en par- ticulier pour la discuter : les animaux-plantes de Perty n'ont plus qu'un intérêt historique : la striation d'une membrane ne sera jamais plus considérée comme l'indice d'affinités végétales ; peut-être la métabolie ou spasmodie, si souvent invoquée par Stein, en faveur de la nature ani- male des Eugléniens, offre-t-elle un point d'appui plus solide. On aurait tort cependant d'accorder une trop grande confiance à ce caractère, car la spasmodie n'est qu'une forme de mouvement et l'activité locomotrice est commune aux représentants inférieurs des deux règnes. La question de la place des Eugléniens dans la classi- fication fait partie d'un problème plus général : celui de la distinction des animaux et des végétaux, dont nous nous sommes occupé à diverses reprises. On n'a pas su en généraléviter deux écueils également dangereux; les uns ont cru inutile de séparer les orga- nismes inférieurs en animaux et végétaux ; les Phytozoïdia de Perty, les Protistes d'Haeckel doivent leur origine à cette dernière conception; les autres ont voulu établir une distinction entre les deux règnes, en s'appuyant sur des caractères insignifiants, comme la présence ou l'ab- sence d'une vésicule contractile, l'existence de stries sur la membrane, la durée du mouvement, etc. RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 353 Quelques savants, comme iNsegeli, Cienkowski, Klebs, ont appuyé leur manière de voir sur l'étude du développe- ment des espèces et la structure de la cellule : ils étaient dans la bonne voie ; leurs travaux ont fait progresser la science ; mais néanmoins, lorsqu'il s'est agi de fixer les affinités végétales ou animales d'un groupe critique comme celui des Eugléniens ou des Péridiniens, ces auteurs sont arrivés à des conclusions différentes. Pour arriver à une solution satisfaisante du problème de. la distinction des animaux et des végétaux, il fallait pouvoir s'appuyer sur les idées d'évolution; or, cette ressource a manqué à beaucoup de nos prédéces- seurs. Les idées d'évolution admises, on devait se préoccu- per de savoir si les deux règnes avaient eu une origine séparée ou s'ils provenaient, au contraire, d'une source commune ; dans le premier cas, on aurait pu parler de distinction absolue ; dans le second, il ne pouvait être question que d'une distinction relative. Les études de développement et les observations histo- logiques sur la structure de la cellule ont prouvé l'exis- tence d'une unité biologique unique ayant mêmes pro- priétés générales dans les deux règnes. En réalité, il n'existe qu'un seul règne, le règne cellulaire, se subdivi- sant lui-même en deux sous-règnes, le règne animal et le règne végétal. Les nombreux caractères communs que nous trouvons dans la cellule semblent indiquer un germe unique pri- mitif ou plusieurs germes semblables, ce qui revient au même : il paraît inadmissible qu'il y ait eu à l'origine de la vie plusieurs types différents. En effet, par les études de développement, nous arrivons à relier étroitement les divers groupes entre eux; par les études histologiques, nous savons que la téléomitose et l'haplomitose dérivent de l'amitose. En admettant plusieurs germes primitifs 23 354 P. -A. DANGEARD différents, il faudrait leur supposer des noyaux semblables^ ce qui est peu probable. La distinction des animaux et des végétaux se trouve ainsi réduite à un essai de classification ordinaire. Dans la formation de ce que l'on appelle avec raison groupements naturels, il existe en général un caractère prédominant, dont l'apparition au cours de l'évolution a entraîné l'acquisition de caractères secondaires qui don- nent par leur ensemble une physionomie spéciale à cha- que groupement. Si nous recherchons quel est le caractère qui a influé sur le développement de la série animale et de la série végétale et a imprimé à chacun des êtres qui composent ces deux sous-règnes une structure spéciale, il est difïi- cile de ne pas reconnaître immédiatement l'influemce du mode de nutrition', l'organisation est en relation directe soit avec la nutrition animale, soit avec la nutrition végé- tale (1). La nutrition est donc le caractère prédominant qui a présidé à l'évolution des deux séries parallèles ; les autres différences que nous constatons sont secondaires; elles ne sont, pour la plupart, qu'une conséquence directe de la différenciation dans le mode d'ingestion des aliments et leur utilisation. Ce principe admis, il est facile ensuite, lorsqu'on est familiarisé avec la connaissance des organismes infé- rieurs, de voir que la série végétale se greffe sur la série animale en divers endroits; il existe plusieurs points de contact et non un seul. Certains auteurs ont pensé que l'apparition des végé- taux avait dû précéder celle des animaux; la nutrition végétale leur paraît plus compatible que la nutrition ani- (1) P. -A. Dangeard : L'influence du mode de nutrition dans révolu- tion de la plante (Le Botaniste, 6^ série). RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 355 maie avec les conditions primitives de l'existence des premiers êtres organisés. Ce n'est pas cependant la conclusion que l'on peut tirer d'une étude approfondie des divers groupes primaires. En effet, on voit très bien comment, par exemple, les Chlamydomonadinées et, avec elles, les Chlorophytes se sont détachées des F'iagellés, par l'intermédiaire du Poly- toma uvella, en changeant leur mode de nutrition. De même, on s'explique la naissance de la série incolore des Champignons, grâce au saprophytisme remplaçant la nutrition animale des Monadinées zoosporées. Mais il est totalement impossible, selon nous, de chan- ger le sens de la différenciation et de supposer les Fla- gellés issus des Chlamydomonadinées et les Chytridinées passées à l'état d'ancêtres des Monadinées zoosporées; on se heurte non seulement à des invraisemblances, mais à une impossibilité matérielle. Nous pensons qu'on est justifié à admettre que la série végétale dérive de la série animale. Nous avons dit, et la chose est incontestable, qu'il existe plusieurs points de contact entre les deux séries; nous avons ainsi plusieurs rameaux qui se détachent des Protozoaires dans la direction végétale. Ces rameaux n'ont pas tous la même netteté à leur point de départ et leur destinée est différente. Prenons la série incolore des Champignons ; elle dé- bute assez brusquement avec les Chytridinées à nutrition superficielle; sa souche est constituée par les Monadinées zoosporées à nutrition animale, qui se relient elles-mêmes aux Vampyreîles. Les considérations histologiques vien- nent appuyer celles que nous avons tirées autrefois du développement. Le noyau des Vampyreîles se divise par téléomitose, ainsi que celui des Champignons ; nous pré- voyons sans peine que la division nucléaire des Monadi- nées zoosporées est la même. 356 P. -A. DANGEARD La série des Chlorophytes se sépare aussi brusquement des Flagellés avec les Chlamydomonadinées : elle a pour souche des Flagellés à division longitudinale; le sporange du Pohjtoma est le résultat de plusieurs divisions succes- sives, s'effectuant sans intervalle de repos. Ici encore, le noyau se divise par téléomitose. C'est sans doute à la téléomitose et à Vaatophagie sexuelle que les Champignons et les Algues doivent leur magnifique évolution ; si celle des Algues l'emporte beau- C()up en étendue, c'est à cause de la nutrition holophytique. Si nous n'avions que les deux groupes primaires des Chytridinées et des Chlamydomonadinées, la distinction des végétaux ne ferait Tobjet, maintenant, d'aucune dis- cussion sérieuse ; mais il est d'autres groupes à évolution limitée qui ont conservé avec les Flagellés des affinités telles qu'on hésite à les séparer. Les principaux sont les Péridiniens, les Eugléniens et les Chrysomonadiens ; la base de chacun de ces groupes est occupée par des espèces. à nutrition animale; on se trouve donc en présence d'organismes proches parents, ayant un caractère animal ou végétal, selon la façon dont ils se nourrissent. Cette anomalie n'est qu'apparente; elle se rencontre à chaque instant en classification; c'est une conséquence prévue des doctrines d'évolution. Prenons, en effet, la classe des Reptiles et celle des Oiseaux; les découvertes paléontologiques ont montré que les oiseaux ont pris nais- sance aux dépens des reptiles; quelques-uns de ceux-ci ont eu leurs membres antérieurs transformés en ailes. Le caractère prédominant de la différenciation des oiseaux est donc l'apparition des ailes ; cette différenciation se fait sur des êtres ayant Vorganisation reptilienne. De même le changement du mode de nutrition entraîne une orienta- tion dans la direction végétale : ce changement a Heu sur de véritables Protozoaires. RECHERCHES SUR LES EUGLENIENS 357 Nous dirons donc que les Eugleninsp. constituent un ordre de Flagellé qui a émis un rameau dans la direction végétale. Il sera fort intéressant de rechercher à quel moment s'arrête l'évolution des Eugléniens, Péridiniens, Chryso- monadiens; pour les deux premiers groupes, cette re- cherche sera facilitée par des considérations tirées de l'haplomitose; quant aux Chrysomonadiens, il faut atten- dre, pour émettre une opinion, que leur mode de division nucléaire soit connu. LE GARYOPHYSÈME DES EUGLÉNIENS PAR P.-A. DANGEARD Nous avons observé, dans le cours de nos recherches sur les Eugléniens, une épidémie qui s'est développée avec une grande intensité sur VEuglena, deses. Dans cette maladie, le noyau subit une hypertrophie considérable ; son volume atteint presque les 2[3 du vo- lume total de la cellule. Ce n'est pas sans difficulté que nous avons réussi à dé- terminer la cause de cette altération ; les individus atta- qués perdent leurs chloroleucites; ils deviennent inco- lores ; leur cytoplasme renferme de nombreux granules rougeâtres ayant l'aspect de résidus ; la cellule continue ses mouvements pendant plusieurs semaines, mais elle ne se divise plus. Le noyau de VEuglena deses comprend une masse nucléaire, d'apparence homogène, allongée en forme de biscuit ; au centre, se trouve un nucléole unique ou fragmenté en plusieurs corpuscules distincts: ce noyau occupe le centre de la cellule. Au début de la maladie, le nucléole est remplacé peu à peu par une vacuole à l'intérieur de laquelle on aper- çoit des corpuscules dont il est à ce moment impossible RECHERCHES SUR LES EUGLÉNIENS 359 de préciser la nature ; plus tard, la masse nucléaire de- vient réticulée ; la chromatine est reléguée à la surface en calottes minces, irrégulières. Le noyau augmente alors de volume dans des proportions considérables; son intérieur est divisé en compartiments irréguliers par de^ trabécules de substance chromatique. On arrive, avec de bonnes colorations, à voir que ces compartiments sont occupés par une agglomération de corpuscules sphériques, serrés étroitement les uns contre les autres ; le noyau est rempli par une zooglée qui n'est pas sans analogie avec V Ascococcus Billrothli. Nous proposons de désigner cette bactérie parasite du noyau des Eugléniens sous le nom de Caryococcus hypertrophiciis. Ce parasite est intéressant à plusieurs points de vue que nous allons indiquer brièvement : lo On ne connaissait pas jusqu'ici d'exemple de bacté- ries vivant exclusivement à l'intérieur du noyau cellu- laire ; peut-être réncontrera-t-on des cas analogues dans les cellules des organismes supérieurs, maintenant que l'attention est sollicitée de ce côté. 2° Le nombre des parasites nucléaires connus à l'heure actuelle est excessivement restreint. On a signalé un genre Caryophagus appartenant à la famille des Sporo- zoaires ; le genre Holospora, parasite du noyau et du nu- cléole des infusoires, a des affinités douteuses : elles tiennent, selon Haikine, des levures et des Schizomicètes, ce qui semble très problématique; \eNucleophaga amœhœ, qui vit à l'intérieur du noyau des amibes, a été décrit précédemment (i) ; c'est une chrytridinée. 3° Nous avons maintenant à notre disposition un nou- veau moyen d'étudier l'influence du noyau sur la vie de (1) P. -A. Dangeard : Mémoires sur les parasites du noyau et du pro- toplasma (Le Botaniste, 4" série, 6^ fascicule). 360 P -A. DANGEARD la cellule; après avoir montré que la meVofo?7iie pouvait être remplacée avantageusement par la caryophagie, nous donnons aujourd'hui à cette nouvelle méthode un nou- veau sujet d'observation. Constatons dès maintenant que l'envahissement progressif du noyau par le parasite n'em- pêche ni la vie de la cellule, ni son activité locomotrice', In nutrition holopht/tique cesse par destraction des chloroleu- cites ; niais la nutrition sajnophytique continue ; pour qu'une Euglène attaquée vive plusieurs semaines, et reste active pendant ce laps de temps, il est nécessaire que l'assimilation ne soit pas trop sensiblement ralentie ; les grains de paramylon qui représentent une substance de réserve ne disparaissent pas complètement ; jusqu'à la fin, on trouve plusieurs gros bâtonnets de cette substance localisés à la partie postérieure de l'Euglène ; la cellule naturellement est devenue incapable de se diviser. Le genre Euglena est destiné probablement à servir de champ d'expériences aux recherches biologiques. En effet, pour l'étude des relations réciproques du cytoplasme et du noyau, on dispose actuellement de deux parasites des Euglènes : l'un se développe uniquement dans le cytoplasme, c'est le Sphxrita endogena Dangeard ; l'autre envahit l'intérieur du noyau qu'il finit par remplacer : c'est le Caryococcus hypertrophicus que nous venons de décrire.Comme ces parasites ne sont pas rares, on pourra facilement varier les expériences et peut-être les observer simultanément dans une même cellule. OUVRAGES REÇUS PAR LE BOTANISTE " Pendant la publication de la S'' série Aderhold (D' Rud) : Uber die spriih-und Dùrrtleckenkrankheiten \Aus. d. bot. abt. d. vers, des Kônig Pomologischen Instituts s. Proskau, 1901]. Allen (Charles E.) : On the origine and nature of the middle Lamelia [Bot. Gazette, vol. 32, n° 1. July, 1901]. Arnould. (Louis) : Un pèlerinage au pays Messin. [Extrait de « La Quinzaine », le' oct. 1901]. Barker (B. T. P.) : A conjugating « Yeast >■> [Philosop. Trans. of the Royal Soc, vol. 194, pp. 467-485, 1901]. — Sexual spore-formation among the Saccharomycètes, Sept. 1901. [Ann. of Bot., vol. 15, no LX, déc. 1901]. — On spore-formation among the Saccharomycètes [Reprint. from the Journal of the Federated Inst. of Brewing, vol. 8, n" 1, January and February, 1902]. Baur (D' E ) : Die Anh^ge und Entwickelung einiger Flechtenapo- ihecien [Sond. abd, aus « Flora ad. allg. bot. zeitung », 1901, 88, Bd. 3 Heft]. Bay (J. Christian) : Materials for a mongraph on Inuline [Contri- butions fronn the Missouri Bol. Garden, n° 11. Beau (D' Maurice) : Du Rôle de la rate dans les intoxications expé- rimentales [Travail du Laboratoire de médecine expérimentale et de Baclériol. 1901, Lyon]. Beille (Lucien) : Recherches sur le développement floral des Disci- flores, Bordeaux, 1902. — Sur l'organogénie florale des Discillores (C. R., 17 juin 1901). Benda (C.) ) : Ueber neue Darstellungsmethoden der centralkor- perchen {^Ver. d. phys. Gesells. z. Berlin. Jahrg. 1900-1901, n»» l-2,24nov. 1900]. Billard (M. Armand) : De la stolonisation chez les Ilydroides (C. R., 30 septembre 1901). — De la scissiparité chez les Hydroïdes (0. R., 2 septembre 1901). 362 OUVRAGES REÇUS PAR « LE BOTANISTE » Bornet (Ed.) : Notice sur la vie et les travaux de M. G. A. Chatin (Société d'agricult. de France, séance du 23 janvier 1901). Bouin (P.) : Mitoses spermatogénétiques chez Lithobius forficatus- L. — Etude sur les variations du processus mitosique [A7//* con- grès international de médecine, Paris, 29 août l'.lOO]. — Sur le développement précoce de filaments axiles dans les sperma- tocytes de premier ordre. [Bxtr. de la « Bibliog. anatomique », fasc. 3,1901]. Bouygues (M.) : Sur l'origine et la différenciation des méristènies vasculaires du pétiole [Soc. Linn. de Bordeaux, 6 mars 1901]. Bucheaeau (D' Fr.) : Index criticus Butomacearum Alismacearum Juncaginacearumque [Sep. abd. ans d. Abhand. d. nat. ver. z. Bremen, 1868]. — Karl Noldeke [Sond. aus d. Berich. d. deuts. Bot. Gesells. Jalirg. 1898, Band 16, Generalversammlungs-IIeft]. — Marsippospermum Reicheï Fr. B., eine merkwùrdige neue lun- cacee aus Patagonien [Sond. aus d. Berichte d. deuts Bot. Gesells. Jahrg. 1901, Band 19, Heft 3]. — Tabacks-Doppelblatt [Sond. abd. aus abh. 7iat. ver. Brem. 1900, Bd. 16, Heft S]. — Kritisches verzeichniss aller bis jetzt beschriebenen Juncaceen nebst Diagnosen neuer Arten, Bremen, 1880. ^ Ueber EinheitUchkeit der botanischen kunstausdriicke und ab- kiirzungea [Beilage z. Ost. 1894 d. Realschuls beiny Doventhor z. BremenJ' Bucholtz (Von F.) : Hypogaeen aus Russland [Sond. aus « Hedwigia », Bd, XL, 1901]. Bujor (P.) : Sur l'organisation de la Vérétille. [Ext. des Arch. de zoot. expérimentale, n° 4, 1901]. Buscalioni e Pollacci : Ulteriori ricerche sull'applicazione délie pellicole di collodio allô studio di alcuni processi fisiologici délie piante, etc. [Atti dell' ht Bot. delV Università di Pavia, nuova série, vol. 7]. Byxbee (Sumner):The Development ofthe karyokinetic spindle in the Pollen Mother-Cells of Lavetera [Proceedings of the California acad. of se. Bât., vol. 2, n» 2]. Campbell (Doublas Houghton) : On the aifinities of certain anoma- lois Dicotyledons [Reprint from, The American naturalis vol. 36. n» 421, January, 1902]. Gardot (J.) : Messes of the Azore.s and of Madeira [From the Eighth ann. missouri Bot. Garden, issued april, 14, 1897]. Gelakovsky (L. J.) : Die Gliederung der Kaulome [Bot. Zeitung, 1901, Heft V-VI]. Conférences (Les; de laboratoire de l'Institut botanique [Extrait de PENDANT LA PUBLICATION DE LA 8® SÉRIE 363 la Revue de VUniv. de Bruxelles, t. IV, 1898-1899, Juin et Juillet ; t.VI,1900-190!, nov. et déc. 1900]. Gonstantineanu (M. J. C.) : Contributions à la Flore mycologique de la Roumanie [Extrait de la Revue générale de bot., t. XIII, p, 369, 1901]. Cuénot (L.) : Recherches sur l'évolution et la conjugaison des Gréga- rines [Extrait des Arch. de biolog., t. XVII, 1900]. Czapek (M. F.) : Sur quelques substances aromatiques contenues dans les membranes cellulaires des plantes (Congrès international de bota- nique à l'exposition univ. de 1900) [Ext. du Compte rendu, pp. 14-18]. Daveau (J.) : liCs échanges entre les grandes collections botaniques [Univ. Montpellier, Inst. de bot., 30 nov. 1900]. Davis (Bradley, Moore) : Nuclear Studies on Pallia [Ann. of Bot. vol. 15, no LVII, march. 1901]. Duboscq(0.) : Sur l'évolution du testicule de la sacculine [Extr. des Arch. zool. expérimentale. Notes et Revue, n° 2, 1901]. Duggar (B. M.) : Physiological studies with référence to the germi- nation of certain Fungous spores [Reprinted from the Bot. Gazette, vol. 31. January, 1901]. — The stérile Fungus Khizoctonia [fîui/etin, 186, January, 1901, Bot. division Ithaca]. Fauvel (Pierre) : Les néphridies [Ext. Bulletin se. de la France et de la Belgique, t. XXX VI]. Ferguson (A. M.) : Crotons of the United States [Sep. issued, feb., 16, 1901]. Forti (Achille) : Contributo 4o alla conoscenza délia florula ficologica veronese [Est. dalla Naova .Vof., série XIII, april,Luglio, 1902]. Foucaud(J.) : Recherches sur le Spergularia Azorica Lebel. Roche- fort, 1'^ mars 1901. — Un hybride nouveau. Rochefort, 1901. Frye (T. C.) : Development of the Pollen in some Asclepiadaceae [Conlrib. from the Hull. Bot. laboralonj, XXXII, 1901]. Galloway (T. W.) : Studies on the cause of the accelerating effect of beat upon Grovvth [From the zoolog. Laboratory of the Muséum; American Nat., vol. 34, n" 408, 1900]. Giard (M. Alfred) : Pour l'histoire de la Mérogonie [Ext. des Comptes rendus des séances de la Soc. de Biol., 19 oct. 1901]. Giardina (A.) : Sui pretesi movimenti anieboidi délia vescicola ger- minativa [Revista di se. biolog., no^ 6, 7, vol. 2, 1900]. Glatfelter (N. M.) : A Study of the venation of Salix [From the Fifth ann. of the Missouri Bot. Garden, issued, octobre 5, 1893]. Gran (H. H.) : Studien uber Meeres bakterien [Bergens Muséums Aarbog, no 10, 1901]. Guilliermond (M. A.) : Recherches histologiques sur la sporulation des Schizosaccharomycètes, 22 juillet 1901. 364 OUVRAGES REÇUS PAR « LE BOTANITTE » Guilliermond : Recherches sur la structure de quelques champignons inférieurs (C. R.,2I janvier 1901). — Recherches histologiques sur la sporulation des levures (C. R., 13 mai 1901). Guitel (M. Frédéric) : Sur le rein du Lepadogaster Goûanii (C. R., 25 juin 1900). Gwynne-Vaughan (D. T.) : Observations on the Anatomy of Sole- nostic Ferns. I. Loxsoma [Ann. ofBot.vol. 14, n° LVII, raarch.1901 ]. Harper (R. A.) : Cell and nuclear division in Fuligo varians [Bot. Gazette, oct. 1900, n°, 4, vol. 30]. Hattori (H.) : Studien ueber die Einwirkung des Kupfersulfats auf einige Pflanzen [Journal ofthe collège of se. Imp. Univ., Tokyo Ja- pan, vol. 15, Pt. 3, 1901]. Hitchcock (A. S.) : Plants of the Bahamas Jamaica and grand Cay- man [From the ann. Report Ihe Missouri Bot. Garden, Issued, March 9, 1893]. — Liste of cryptogams collected in the Bahamas, etc. {^Frorn the Ninlh ann. of the Missouri Bot. Garden, Issued, april 20, 1898]. Husnot (T.) : Le dessin d'histoire naturelle sur papier, pierre litho- graphique, etc. Cahan, par Athis (Orne), 1900]. Inui (T.) : Untersuchungen iiber die niederen organismen welche sich bei der zubereitung des alkoholischen Getrankes. Awamori betheihgen [Abd. auH d. Journal of the collège of se. Imp. Univ. Tokyo Japan, vol. 15, Pt. 3, 1901]. Irlsh (H. G.) : Garden beanscultivatedas esculents [From the Tvvelfth ann. Report of the Missouri, Bot. Garden, Issued, June 22,1901]. — A Revision of the Genus Capsicum [From the ninth ann. Rep. of the Missouri Bot. Garden, Issued, april 20, 1898]. Gahn (E.) : Myxomycetenstudien ISond. aus. d. Berich. d. deuts. Bol. Gesells.Jahrg. 1901, Bd. 19, Heft2]. Jônsson (B.) : Die ersten Entwicklungsstadien der Keimpflanze bei den succulenten [Lunds univ. Arsskrifl, Bd. 38, afd. 2, n° i]. Juel (H. O.): Pyrrhosorus, eine neue marine Pilzgattung. [Bi/i. ri//. K. sv. vet. ahad. Handl. Bd. 26, afd. 3, no 14]. Kellermaa (W, A.) : Ohio f ungi exsiccati [Ohio nat , 2, 135-140, nov. 1901]. — TheNou-indigenous flora of Ohio [Bot. séries, n" 4, 1900]. Kienitz-Gerloff (F.) : Neue Studien uber Plasmodesmen [Berichlen d. dents, bot. Gesells.Jahrg, 1902, Bd. XX, Heft 2]. Kny (L.): On corrélation in the Growth of Roots and Shoots (Second Paper). [Ann. of Bot. vol. 15, n» L X, déc. 1901] — Ueber das augebliche Vorkommen lebenden Protoplasmas in den weiteren Luftraiiraen von Wasserpflanzen [Sond. aus d. Berich. d. deuts. Bot. Gesells. Jahrg. 1900, Bd. 18, Heft 2]. — Ueber die Einfluss von Zug und Druck auf die Richtung der Schei- PENDANT LA PUBLICATION DE LA 8^ SERIE 365 dewande in sich theilenden Pflanzellen [ Sond. aus d. Ja.hr. f. wiss. Bot. Bd. 37, Heft 1]. Kny : Uber die Bedeutung des Blattgruns fur das Pflanzenleben [Vortrag geh.in d.Deuis Gesells.f.VoIkst. nat. ann. 10 october 1900]. Kofoid (Charles A.) : The Plankton of Echo River, Mammoth Gave Transactions of the american microscopical iSociety, vol. 21, pages 113-126]. Kusano(S.): Transpiration of Evergreen Trees in Winter [Reprinl from the Journal of the collège of se. Inip. Univ. Tokyo Japan, vol. 15, Pt. 3, 1901]. Lamson-Scribner (F.) : Grasses in the Bernhardi Herbarinm des- cribed by J. S Presl [From the Tenth ann Rep. of the Missouri, Bot. Garden, issued, June 7, 1899]. Léger (Louis M.) : Sur la morphologie des éléments sexuels chez les Grégarines Stylorhynchides (G. R., 10 juin 1901). — Sur une nouvelle Grégarine parasite des Pinnothères des moules (C. R., 3juin 1901). — Sur un nouveau Sporozoaire des larves de Diptères (C. R., 29 oot. 1900). Lemmerxnann (E.) : Die parasitischen und saprophytischen Pilze der algen [Sond. abd. aus abh. nat. ver. Brem. 1901, Bd. 17, Heftl]. — Zweiter Beitrag zur Pilz flora der ostfriesischen Insein ISond. abd. aus abh. nat. ver. Brem. 1901, Bd. 17, Heft 1]. Lindroth (J. L) : Uredineae novae [Ex Meddel. fr. Stock Hogsk bot. Inst. Bd. 4,1901], Livingston (B. Ed.): Furthernotes on thePhysiology of Polymorphism in green Algae [Rep. from the Bol. Gazelle, vol, 23, oct. 1901]. Loisel (M. Gustave) : Formation des spermatozoïdes chez le Moineau [Ext. Comptes rendus, séances de la Soc. Blolog. , 16 nov. 1901]. — Origine et développement de l'enseignement de l'histoire naturelle à la Faculté des sciences de Paris [Ext. de la Revue internationale de V Enseignement, 1901]. Lùdi (Rudolf) : Beitrage zur Kenntniss der Chytridiaceen {Inaugurale Dissertât, univ., Bern}. Luther (A.): Ueber die Samenverbreitung bei Nuphar luteum [Medd. af soc. pro Fauna et Flora, Fennica, n° 27, 1901], Magocsy-Dietz (D' Alex.) : Das diaphragma in dem marke der Di- cotylen Holzgewachse [So7id. aus den, 17 Bande der math, und- nat. Berichte aus Ungarn]. Maire (René) : De l'utilisation des données cytologiques dans la Taxo- nomie des Basidiomycètes [Ext. du Bulletin de la Soc. bot. de France, t. XLVIII, session ext. en Corse, mai-juin 1901]. — Nouvelles recherches cytologiques sur les Hyménomycètes (C. R., 1er avril 1901). 366 OUVRAGES REÇUS PAR LE « BOTANIS'l E » Maire : Les variations de labaside et la phylogenèse des Autobasidio- mycètes [Ext. Bulletin, séances Soc. des se. de Nancy]. L'évolution nucléaire chez les Urédinées et la sexualité [Congrès international bol. à VExposilion de 1900, Ext. Compte- Rendu, pp. 135-150]. Manca (D^ G.) : Recherches chimiques sur les animaux à sang froid soumis à l'inanition [Arc. Italiennes de Biologie, t. 35, fasc. I, 1901]. Marchand (B.) : Le jardin botanique alpin [Ext. du Bu^etin de /a Soc. Ramond, 1901, 1er trimestre]. Marsson (Dr M.) : Zur Kenntniss der Planktonverhaltnisse einiger Gewasser der Limgebung von Berlin [Sep. aus d. Forsch. d. Biolog. Station 2u Pion VIII]. — Die Schadigung der Fischerei in der Peene durch die zuckerfa- brik in Anklam [Sond. abd. aus d. zeits. F. Fischerei IX, Jahrg. 1901, Heft I]. Massart (Jean) : Recherches sur les organismes inférieurs : V. Sur le protoplasme des Schizophytes. Bruxelles, 1901. — Essai de classification des réflexes non nerveux [Ext. des Ann. de l'hist. Pasteurl. Mattirolo (Oreste) : Sulla importanza pratica délia Bolanica scientifica [Prelezione al Corso di Bot. nella R. Univ. di Torino, anno 1900- 1901]. Meyer (D'Arthur): Ueber die verzweigung der Bakterien [Centralbl. Bakteriol. Farasit. u. Infektions Krank, XXX Bd. 1901, no 2]. Miyaké (K.): The Fertilization of Pythium de Baryanum [Ann. of Bot. vol. 15, no LX, déc. 1901]. — On the starch of Eyer-Green Levés and ils relation to carbon assi- milation during ihe winter [Hep. from the Bot. magazine, vol. 14, no 158]. — How Botany is studied and Tanght in Japan [Rep. from science n. s. vol. 13, no 332, pages 734-738, may 10, 1901]. Miyoshi (M.): Ueber die sporocarpenevacuation und darauf erfolgend- des sporenaulstreuen bei ciner Flechte [Jouryial of the collège of se. Imp. Univ. Tokyo, Japan, vol. 15, Pt. 3, 1901]. — Untersuchuhgen ueber die schrum pfkrankheit (« Ishi kubyo ») des Maulbeerbaumes [Journal of the collège of sc.lmp. Univ. Tokyo, Japan, vol. 15, Pt 3, 1901]. Montemartini (D' Luigi) : Appunti di Ficobiologia, Padeva, 1901. Moore: Nicotiana alata Link et Otto [.( Fachliche mitlheil d. k. k. ùst. Tabakregie », Heft I, Wien, 1902].' Murbeck (Sv.) : Ueber den Bau und die Entwickelung von Dictyosi- phon foeniculaceus (Huds.) Grev [_Vid. skrifter. math. nat. Klasse, 1900, no 7]. — Uber anomalien im baue des nucellus und des Embryosackes [Lunds univ. Arsskrift, Bd. 38, afd. 2, n» 2, 1902]. PENDANT LA PUBLICATION DE LA (S" SERIE 367 Murbeck : Parthenogenetische Embryobildung in der gattung Alche- milla [Lunds univ. arsskrift, Bd. 36, afd. 2, no 7. Kongl. Fysiografiska. Sàllsk. handl., Bd.\\,nol]. — Ueber das verhalten des PoUenschlauches bei Alchemilla arvensis (L.) scop. und das wesen der chalazogamie, Lund, 1901. Nathansohn (Alex.) : Zur Lehre vora stoffaustausch [Sond. aus d. Berich. d. deuls. Bot. Gesells. Jah., 1*?01, Bd. 19, Heft 9]. Néinec(B.): Die Bedentung der fibrillaren strukturen bei den Pflan- zen [Sojid. aus dem « Biol. centralblatt ». Bd. 21, no 17, 1er sept. 1901]. — Ueber centrosomenahnlicheGebilde in vegetativen zellen der Ge- fasspflanzen [Sond. aus d. Be?nc/i. d. deu/s. Bot. Gese//s. Jahrg.1901, Bd. 19, Heft 5]. — Lfeber schuppenfôrraige Bildungen an den wurzeln von Cardamine amara. [.Sep. aus d. sitz der Konicjl. bôhm. Gesells. d. Wissens. in Prag, 1901]. — Ueber das Plagiolropwerden orthotroper wurzeln [Sond. aus d. Berich. d. deuts. Bot. Gesells. Jahrg. 1901, Bd. 19, Heft 5]. Nestler (A.) : Der directe nachweis des cumarins und Theïns durch su- blimation [Sond. aus. d. Berich. d. deuts. Bot. Gesells. Jahrg. 1901 > Bd. 19, Heft VI]. Nôldeke (0.) : Das vorkommen der Eibe îm nordwestlichen Deutschiand [Sond. nbd.a. abh. nat. ver Brem, 1898, Bd. 14, Heft. 3]. Norton (I. B. S.) : Coloring Matter of Borraginaceae und Herbarium, Notes [ From the ninth. ann. Missouri Bot. Garden, issued april 20, 1898J. Olive (Edgar W.): A Preliminary enumeration of the Sorophoreae [Proceed. of the Americayi Acad. of arls and se, vol. 37, n° 12, déc. 1901]. Paatu(C.) et Procopianu. Procopovici (A.): Contributiuni la Flora ceahlauliu, etc. [Ext. de Bulletin de Vherbier de l'inst. bot. de Bucarest, n" 1, sept. 1901] . Perrédès (D. E. F.) : The anatomy of the Bark of Robinia pseud-acacia, Linné [The Wellcome chemical Research Laboratories, n° 21]. — A. new admixture of commercial Strophanthus seed [The Wellcome chemical Research Laboratories, n° 17]. Perret (M. E.) : Congrès international de Botanique tenu à Paris du l^'' au 10 oct. 1900. Paris, 1900. Pizon (Antoine): Anatomie et Physiologie végétales, suivies de l'étude des principales familles et des fermentations, Paris, Doin, 1902. Pluinb(('. S.) : Edward Lewis Sturtevant. A Biographical sketch [From the Tenth ann. Missouri Bot. Garden S. Louis, 1899. Pound(R. Ph. D.) : The Phytogeography ofNebraska, I, General Sur- vey, Lincoln, 1900. Power (Frédéric B.) : The chemistry of the Bark of Robinia pseud- 368 OUVRAGES REÇUS PAR LE « BOTANISTE » acacia, Linné [The Wellcome chemical Research Laboratories, no 20]. Proskan (D-- A.) : Ein der Moniliakrankheit anhlicher Krankheitsfall an einem samerkirschbaume [« Zeils fur Planzenk », Bd XI, 2 u 3. Heft]. Raciborski (M.) : Ueber die epiphyllen Bluthen der Gabelger^te (Hor- deum trifurcatumSchlch). [Ext. Balletindi l'acad. des se. de Craco- vie, janvier 1902]. Raymond (M. G.) : Note sur un animalcule voisin des Chlamydomo- nadinées [Ext. du Micrographe préparateur]. Renaudet (Georges) : Contribution à l'étude de la Tératologie végé- tale — de la fasciation herbacée et ligneuse, Poitiers, 1901. Rentrée solennelle des Facultés et de l'Ecole préparatoire de méde- cine et de pharmacie de l'Université de Poitiers, 1900. Rimbach (A.) : Physiological observations on some pereraial Herbs IRep from the Bot. Gazette, vol. 30, septembre 1900]. Rosenberg (O.) : Ueber die Embryologie von Zostera marina, L. [Medd fiiin stock Ilogshola, ïi" 2{\, Bih-till K. sv. vet. akad. Handl. hd. 'il, afd. III, no 6]. — Ueber die Pollenbildung von Zostera [Medd. frdn stock. Hôga- kolas, Bot. Instit. 1901]. Saito (K.) : Anatomische studien ueber wichtice Faserpflanzen japans mit besonderer Beruecksightigung der Bastzellen [ ilbc/. aus d. Journal of the collège of se Imp. univ. Tokyo, Japan, vol. 15, Pt. 3, 1901]. Sauvage (Roger) : Action du chlorure de Benzoyle sur les naphtols en présence de chlorure d'aluminium, Poitiers, 1901. Scherffel (A.) : Kleiner Beitrag zur Phylogenie ciniger (xruppen nie- derer organismen [Sep. aus d. Bot. Zeitung, 1901, Heft VIII'. Schrenk(H. von) : A Diaease of Taxodium Known as Peckiness, also a similar Disease of Libocedrus decurrens [Print. in adv from the Missouri bot Garden, n» 14]. Sebert (M. H.]: Sur l'utilité scientifique d'une langue auxiliaire in- ternationale [pjxt. des Comptes rendus, séances acad. des se, t. CXXXII, p. 869, 9 avril 1901]. Serbinoff (I. V.) : Die Entvickelungsgeschichte des Chytridiaceen Pilzes ; Sporophlyctis roslrata (nov. gen. et spec.) [Vorlàufîge m.ittheilung, 1899]. — Die Brysipheen des Gouvernements S'-Petersburg [Sep. abd. a Scripta Bot. », fasc. 18, 1901]. — Vorlâufiger Bericht iiber die Morphologie und Biologie des Olpi- dium ramosum spec. nov. IVorlàufige mitlheilung, 1899]. Sha-w (H. Will.) : Etablishing the Missouri Botanical Garden [Admit- ted to probate ai Saint-Louis, Missouri, september 2, 1889]. Smith (Jared, G.) : North araerican species of Sagittaria and Lophoto- PENDANT LA PUBLICATION DE LA 8^ SÉRIE 369 carpus [Print in adv. fi'om the Sixth Ann. Missouri bot. Garden, issued, may 24, 1894]. — Lophotocarpus of the United States and Sagittaria Eatoni [Print in adv. from the Eleventh Aîzr. Report of the Missouri Bot. Gar- den, issued, september 27, 1899]. Steinbrinck(0.) : Ueber Auftreten und Wirkungen negativer Fliiss- igkeitsdrucke in Pfianzenzellen [Physik. Zeits. 2 Jahrg, no 33]. Tischler (D'' G.) : Untersuchungen iiber die Entwicklung des endos- penns und der sanienschale von Corydalis cava [Heidelberg, 1900]. Toumey (I. W.) : An undescribed Agave from Arizona [sep. issued, Missouri, Bot. Gard. 1901]. Trelease (W.) : The Progress mado in Botany During the nineteenth century ITrans. of the acad. of se. of Saint-Louis, vol. XI, no 7J. — A cristate Pellaea [sep., issued, april 16, 1901]. — A pacific-slope Palmetto [sep., issued, avril 16, 1901]. — North american species of Rumex 1892 [Prom the Third Ann. Mis- souri bot. Garden, issued, april 12, 18921. — The Botanic Garden as anaidto agriculture [Proceed. Ann. meeting of soc. for Promotion agricult. se. 1900]. — E lible and poison ous Mushrooms and Toadstoole iContrihuliofis from the Shaw school of Bot., no 18]. — Leitneria Floridana [Print in adv. from ^ ..-<< >' T -^ i < •.:•. ■'•^. /" "".: v' 4 ( !-;i i-''-\ S;., ;?■-■ . '" 1- " : • -i Eitglena sanguinea PLANCHE III Euglena gplendens sp. nov. (1-6) FiG. 1. Noyau à nucléole fragmenté : chromospires orientées suivant la surface nucléaire. FiG. 2. Noyau à nucléole entier : autre aspect des chromospires. Fi&. 3. Noyau avant la division. FiG. 4. Noyau à la prophase. FiG. 5. Noyau à l'anaphase : en haut, les chromosomes sont vus sui- vant leur longueur : en bas, ils sont vus de face. FiG. 6. Autre aspect de l'anaphase. FiG. M. Coloration de filaments enchevêtrés, en rapport avec la sé- crétion gélatineuse. Euglena polymorpha. sp. nov. (7-10) FiG. 7. Deux individus à la fin de la division ; aspect des noyaux. FiG. 8-9. Prophase et anaphase. FiG. 10. Formation de la cloison qui sépare les cellules-filles. Euglena deses Ehrbg. FiG. 12. Partie antérieure delà cellule montrant le flagellum inséré au fond du vestibule, la vacuole principale et son canal efférent, le point oculiforme et les chlorolenciles discoïdes, avec pyrénoïde central. FiG. 13. Formation d'un groupe de petites vacuoles annexes à côté de la vacuole principale. FiG. 14. Les vacuoles se sont réunies en une seule qui se fusionne à son tour avec la vacuole principale. LE BOTANISTE 8e SERIE PL. III. Euglena spleiulens (1-6) (11). Euglena poli/morpha (7-10) Euglena deses (12-14) PLANCHE IV Euglena deses Ehrbg (1-5) FiG. l. Début de la division : noyau à la prophase ; nucléoplasme très dense et d'apparence homogène. FiG. 2. Etat plus avancé ; nucléoplasme fibrillaire dans le sens de l'axe nucléolaire. Fift. 3. Les deux noyaux-frères, immédiatement après leur séparation, sont au contact de la membrane. FiG. 4. Une échancrure antérieure se produit qui amène la sépara- tion progressive des deux cellules-tilles. Le caryophysème des Eugléniens (6-9) FiG. 6. Euglena deses avec un gros noyau hypertrophié : ce noyau est divisé en compartiments par des trabécules chromatiques. FiG. 7. Id. : on a représenté dans l'un des compartiments les corpus- cules sphériques du Caryococcus hypertrophicus ; tout le noyau en est rempli. FiG. 8-9. Aspect du noyau au début de la maladie. Peranema trichophorum iStein. FiG. 10-11. Deux individus de cette espèce. Astasia curvata Klebs (12) FiG. 12. Un des individus rencontrés dans nos cultures. LE BOTANISTE PL. IV. Euglena deses Division (1-5) ;. Caryophysème (6-9) Peranema Ivickophorum (10 11) Euglena curvata (12) TABLE DES MATIERES DE LA 8e SÉRIE DU « BOTANISTE » 1° Etude sur la structure de la cellule et ses fonctions. Le Polytoma uvella, p, 1-58. 2° Nutrition ordinaire, nutrition sexuelle et nutrition holophytirfue, p. 59-94. 3° Recherches sur les Eugléniens, p. 97-357. 4° Le ('ariophysème des Eugléniens, p. 358-360. 00 Ouvrages reçus par le « Botaniste » pendant la publication de la 8= série, p. 361-370. 6° Explication des planches 372-379. CARL ZEISS Optisehe Weftestaette lÉNA MICROSCOPES ET APPAREILS PHOTOMIGROGRAPHIQUES De première qualité depuis les plus simples jusquaux plus complets CATALOGUE ILLUSTRÉ GRATIS ET FRANCO Dépôt : à Paris, chez M. Adnet, constructeur, 26, rue Vauquelin MICROGRAPHIE E. GOGIT PARIS — 49, Boulevard Saint-Michel, 49 — PARIS Médaille d'Argent à lExposition Universelle de 1889 Spécialité de fournitures pour la Micrographie Lames porte-objets et lamelles minces de toute espèce, cellules de verre, chambres humides, nécessaires à réactifs : boîtes à préparations, instruments, verrerie, matières colorantes et réactifs pour les recherches de microscopie et de bactériologie préparés consciencieusement, d'après les instructions des auteurs, prépa- rations microscopiques variées, et spécialement de Bacilles et de Botanique. — Dépôt des Microscopes Leitz et des Micro tomes MiEHË et Jung. Tuoma. Poitiers. - Société française d'Imprimerie et de Librairie. New York Botanical Garden Librar 3 5185 00259 3562 Is V. vàt-.^ ^^v. -f M'^T ^■::^:~' %^ii;