LE BOTANISTE LE BOTANISTE Directeur : M. P. -A. DANGEARD Professeur de Botanique A LA Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers NEUVIEME SERIE 1903 PRIX DE L'ABONNEMENT A LA SÉRIE DE SIX FASCICULES 16 francs pour la France. — 18 francs pour l'Etranger •o*- LIBRARV NEW YORK BOTANICAL OARDEN A LA DIRECTION, I, RUE JULES- FERRY POITIERS ET CHEZ TOUS LES LIBRAIRES INTRODUCTION La publication de cette neuvième série ayant subi un certain retard, les lecteurs du Botaniste ont dû penser que notre activité scientifique s'était ralentie ou que la ma- ladie était venue interrompre nos recherches. Il n'en est heureusement rien : nous continuons à con- sacrer le temps dont nous disposons en dehors de notre enseignement aux études qui nous sont chères, et les notes s'accumulent sur notre table de travail. Nous avions entrepris un mémoire d'ensemble sur le mode de division du noyau chez les Protozoaires et les Protophytes. Les communications préliminaires qui sont intercalées dans ce fascicule permettent déjà d'entrevoir l'intérêt très grand qui s'attache à ce sujet au point de vue de l'évolution, de la biologie générale et des théories de la karyokinèse et du développement. La partie inédite a aussi son importance : pour n'en citer qu'un exemple, nous dirons que la mitose des Cryptomonadinées, suivie dans tous ses détails pendant les vacances de 1901, offre un type nettement caractérisé et différent de la téléo- mitose ordinaire. Ces observations devaient constituer notre neuvième série : il ne restait qu'à établir la rédac- tion définitive et à compléter la bibliographie, lorsqu'une nouvelle parue dans les Comptes Rendus modifia brus- quement nos projets. L'Académie des sciences proposait au concours de 1903 6 P. -A. DANGEARD pour le grand prix des sciences physiques et naturelles le sujet suivant : La sexualité chez les Champignons su- périeurs. Nous n'avons pas eu la douce illusion de croire que, pour obtenir le prix, il suffirait seulement de présenter les nombreux mémoires que nous avons publiés sur ce sujet depuis une dizaine d'années. Nous n'ignorons pas que si beaucoup acceptent nos découvertes et les ensei- gnent, quelques-uns restent dans Texpectative, alors que d'autres , sans méconnaître les résultats acquis à la science, préfèrent adopter les idées du professeur Harper. Si Harper avait vu nettement et d'une façon certaine ce qu'il décrit, nous serions le premier à reconnaître la valeur de ses objections. Ce savant prétend avoir constaté une première fusion de noyaux au début du périthèce chez le Sphœrotheca, Castagnei (1) ; nous avons donné la preuve que cette fusion ne se produit pas (2). Harper, loin de reconnaître son erreur, va de l'avant et cherche de nouveaux arguments contre notre théorie. Dans un mémoire sur le Pyronema confluens^ il annonce avoir découvert des fusions nucléaires entre les noyaux de l'anthéridie et ceux de l'oogone (3). Barker, entraîné par son bon exemple, suppose que des conjugaisons analo- gues se produisent dans le genre Monascus (4). D'après cela, la véritable fécondation, chez les As- comycètes, aurait lieu à la naissance du périthèce et non à la formation de l'asque ; les phénomènes de karyogamie que nous avons signalés dans l'asque et la baside, cons- (1) Harper : Die Entv. bei « Sphœrotheca ■» Castagnei (Ber. d. deut. bot. Gesell., Bd. XIII). (2) P. A. Dangeard : Second Mémoire sur la reproduction sexuelle des Ascomycètes (Le Botaniste, série V). (3) Harper : Sexual Reproduction in Pyronema confluens (Ann. of Bot., t. V, p. 14). (■'i) Barker : The Morph. and Decel. in Monascus (Ann. Bot., vol. XVII). INTRODUCTION 7 titueraientun fait absolument nouveau dans le règne cellu- laire : il serait particulier aux champignons supérieurs. Cette constatation ne serait pas pour nous déplaire si elle correspondait à des observations exactes; l'intérêt scientifique est aussi grand dans un cas que dans l'autre ; la découverte existe, indiscutable ; seule l'interprétation est en discussion. En ce qui concerne Harper, la situation est tout à fait différente : il s'agit de savoir si ce savant a réellement découvert la fécondation chez quelques Ascomycètes ou s'il n'a fait que retarder l'adoption de notre théorie de la sexualité des Champignons supérieurs en décrivant des fusions nucléaires qui n'existent pas. Wager, dont la compétence en cette partie est bien connue, nous écrivait que seules les dernières observations d'Harper l'empê- chaient de se rallier complètement à notre manière de voir ; il exprimait ainsi l'opinion d'un grand nombre de naturalistes qui pour la môme raison restent dans une indécision souvent bienveillante d'ailleurs. La responsa- bilité d'Harper paraît d'autant plus grande qu'ancien élève de Strasburgeret histologiste distingué, il savait que son intervention aurait une grande influence ; notre première réfutation à propos du Sphœrotheca Castagnei comman- dait cependant la prudence. Quoi qu'il en soit, la controverse est arrivée à sa pé- riode critique : tous les arguments qu'on nous a opposés jusqu'ici sont abandonnés, sauf le dernier : existence de deux fusions nucléaires successives chez les Ascomycètes. La seconde fusion que nous avons découverte et qui se rencontre dans toutes les espèces n'est contestée par per- sonne ; mais nous nions d'une façon formelle l'existence de la première : les résultats annoncés par Harper sont en contradiction absolue avec nos propres observations. L'Académie des sciences, en mettant au concours cette question de la sexualité des champignons supérieurs, 8 P.-A. DANGEARD semblait convier à une lutte courtoise, sur le terrain de la discussion et des faits, les représentants de l'une et l'autre opinion : c'était le meilleur moyen de provoquer une solution rapide et définitive de l'un des problèmes les plus captivants de la sexualité et aussi l'un des plus ardus. Nous avons été fidèle au rendez-vous : dès le premier instant notre parti fut pris. Abandonnant non sans regret nos recherches sur les Protozoaires et les ProtophyteS;, nous reprîmes l'étude des Ascomycètes ; on nous opposait les deux mémoires publiés par Harper : nous allions les contrôler en nous servant des mêmes espèces et en em- ployant les mêmes méthodes. Ordinairement, rien n'est plus facile qu'un travail de vérification : on connaît d'avance le but à atteindre ; on sait de quelle façon y arriver. Lorsqu'on s'aventure en pays inconnu, une erreur est vite commise ; si la route est jalonnée, l'erreur est moins excusable ; si vous êtes averti, votre responsabilité est engagée. Le premier résultat de notre essai de contrôle fut de montrer qu'aucune fusion nucléaire n'existe au début du périthèce dans les genres Pyronema, et Monascus : la per- plexité où nous étions disparut comme par enchantement ; aucun doute ne pouvait subsister dans notre esprit : les noyaux de l'anthéridie restent toujours séparés de ceux de l'oogone par une cloison. Décidément, nous avions bien fait de renoncer provi- soirement à nos organismes inférieurs : non seulement il nous était facile de réfuter le dernier argument de nos adversaires, mais nous arrivions du même coup à une découverte intéressante : les noyaux de ranthéridie et ceux du trichogyne entrent en dégénérescence sur pla.ce et disparaissent. Ce phénomène recevait son explication naturelle dans une comparaison avec ce qui a lieu chez les Péronosporées. INTRODUCTION 9 Telles sont les conclusions que nous avons présentées à l'Académie des sciences. Notre conviction est telle que nous n'avons pas hésité à écrire au professeur Harper pour le prier de bien vouloir examiner à nouveau ses préparations et reconnaître la justesse de nos affirmations : la réponse ne nous est pas encore parvenue. D'ailleurs, nous avons voulu, à notre tour, prendre l'offensive : nous avons suivi en détail le développement du périthèce chez une grand nombre d'Ascomycètes : Ctenomyces, Aspergillus, Sordaria, Rhyparobius, Sporor- micL, Erysiphe, etc. ; partout nous avons trouvé une con- firmation de nos idées. A diverses reprises, nous avons considéré l'asque et la baside comme un oogone renfermant les deux ga- mètes ; mais cette interprétation ne rendait pas compte de la présence des organes décrits par de Bary au début du périthèce. Notre travail aura eu ce résultat de fournir l'explication de cette anomalie :du même coup, la reproduction sexuelle des champignons supérieurs rentrait dans le cadre ordi- naire de la sexualité. Partout, en effet, l'acte sexuel consiste dans l'union de deux gamètes ; partout ces deux gamètes ont la valeur de spores affaiblies. Or, chez les Champignons supérieurs, les sporanges ont été remplacés par des conidiophores ; les spores sont devenues des conidies. 11 était à prévoir que les gamétanges avaient subi une différenciation analogue à celle des sporanges; les ga- mètes devaient faire partie d'un système semblable à celui des conidiophores, et l'acte sexuel paraissait à priori devoir s'opérer entre gamètes semblables aux conidies. La choso a lieu, en effet, avec cette modification spé- ciale : les gamètes qui s'unissent sont groupés par deux, 10 P.-A. DANGEARD sans i7iterviédiaire de nwinbrane, et Vun des gaméto- phores, devenu par suite inutile, s'est atrophié d'abord, a disparu ensuite complètement. Cette disparition est d'ail- leurs sans importance : chacun sait que, chez les Chlamy domonadinées par exemple, les gamètes qui s'unissent ne proviennent pas nécessairement de gamétanges diffé- rents. Nos lecteurs et fidèles abonnés savent maintenant pour- quoi cette série du Botaniste renfermera un Mémoire sur les Ascomycètes, au lieu du travail projeté sur les organismes inférieurs ; tous, sans doute, approuveront notre conduite en la circonstance. Histologie. — La téléomitose chez l'Amœba Gleichenii Dujrird. « Il résulte de certaines observations, pour la plupart incomplètes il est vrai, que la division nucléaire dans, le genre A?nœba présente des différences marquées chez plu- sieurs espèces ; cette constatation a une grande impor- tance si l'on considère que les Amibes occupent l'un des derniers échelons de la série animale. « Nous avons été conduit à entreprendre une étude d'ensemble de ce genre, et nous indiquerons les résultats obtenus avec ÏAmœba Gleichenii. « On sait que la détermination des Amibes a été pres- que impossible jusqu'ici; les études histologiques auront ce premier avantage de permettre l'établissement de sec- tions dans le genre en s'appuyant sur le mode de divi- sion nucléaire : ainsi, parmi les espèces qui possèdent la téléomitose, on pourra distinguer un premier groupe caractérisé par la disparition du nucléole à la prophase ; dans un second groupe, le nucléole se sépare en deux et chaque moitié persiste aux pôles du fuseau jusqu'à l'anaphase. « L'Amœba Gleichenii pourra être choisie comme type du premier groupe ; elle se développe dans diverses infusions ; ses dimensions ordinaires sont de 30 [x à 40 ij- ; le sarcode est hyalin et la distinction en ectoplasme et endoplasme très visible sur le vivant : l'endoplasme ren- ferme des granulations nombreuses : il n'existe qu'une vacuole contractile. Cette espèce se présente avec plu- 12 P.-A. DANGEARD sieurs aspects; sous la forme arrondie, la surface est couverte de nombreux pseudopodes courts, épais et obtus à leur extrémité : souvent aussi le corps s'aplatit, et il n'existe alors qu'un ou deux larges pseudopodes. « Le développement comprend une bipartition ordi- naire et un enkystement ; contrairement à ce que nous avons observé chez d'autres espèces, il se produit une division de noyau dans le kyste, si bien que tous les kys- tes sans exception possèdent finalement deux noyaux. « Nous avons suivi la division nucléaire pendant la bipartition du corps et lors de l'enkystement; les choses se passent exactement de la même façon dans les deux cas. « Le noyau au stade de repos est muni d'une membrane nucléaire et d'un gros nucléole central ; l'intervalle com- pris entre les deux est rempli par du nucléoplasme sen- siblement homogène. « Le nucléole, à la prophase, se vacuolise, devient spongieux ; le noyau augmente beaucoup en diamètre ; dans le nucléoplasme se différencie un cordon nucléaire enroulé ou spirème. Après disparition complète du nucléole, il y a segmentation du spirème en petits rubans entremêlés dans une substance homogène, achromatitjue, qui va former le fuseau ; la membrane nucléaire cesse d'être visible à ce moment, il n'existe pas de centro- somes. « Les chromosomes, à ce stade de la plaque équato- riale, se groupent sur le plan médian du fuseau en deve- nant globuleux ; nous en avons compté environ vingt- cinq sur la plaque vue de face. « La métaphase représente des modifications en sens inverse de celles qui viennent de se produire ; les chro- mosomes se séparent en deux groupes qui s'éloignent l'un de l'autre ; le tonnelet s'allonge beaucoup ; dans le kyste, ses deux extrémités viennent toucher à la paroi NOTES DIVERSES 13 cellulaire. Les chromosomes se disposent finalement en une masse arrondie qui s'entoure d'une membrane ; de granuleux, ils deviennent fibrillaires ; le spirème se reforme et le nucléole ne tarde pas à se montrer au cen- "^redelîh^que nouveau noyau ; ceux-ci ont repris la struc- ture du stad^ de repos. « En résunaé, la division du noyau chez VAmœba, Gleichenii est due téléomitose ne présentant aucune différence sensible aVQ^c celle que nous observons dans la cellule des organismes supérieurs ; cette espèce nous conduit aux Téléomonadiens ; elle est le prototype de la série des Métaphytes et des Métazoaires. « Les résultats que nous avons obtenus avec d'autres espèces d'Amibes et de Flagellés nous permettent d'affir- mer qu'il existe d'autres prototypes se rattachant direc- tement aux Haplomonadiens et Haplozoïdes (1). » Comptes rendus Acad. Se, n° 24, t. CXXXV, Zoologie. — L'organisation du Trepomonas agilis DujsLvdin. « Dans le cours de nos observations sur les Protozai- res et les Protophytes, nous avons eu l'occasion d'élu- cider la structure du Trepomonas agilis déjà étudié par un grand nombre d'auteurs, parmi lesquels il faut citer Stein, Butschli et Klebs. « Le Trepomonas agilis, contrairement à la description qui en a été donnée, ne répond pas au schéma ordinaire des Flagellés ; il est constitué par une cellule double ; c'est le premier exemple dûment établi d'une telle orga- nisation dans ce groupe ; mais il est à prévoir que cette (1) Cf. P.-A. Dangeard : Recherches sur les Eugléniens (Le Botaniste, 8" série, juin 1902). 14 P.-A. DANGEARD particularité se retrouvera chez les genres voisins de la famille des Distomatinese. « L'espèce se développe dans les infusions ; le corps est aplati ; son contour est ovale ou elliptique ; il existe deux groupes de fiagellums opposés l'un à l'autre dans la partie équatoriale ; sous chacun d'eux, se trouve une ouverture pour l'entrée des aliments. c^ Nous laisserons de côté les détails de nature pure- ment morphologique pour insister sur la disposition de Tappareil nucléaire. « Sur les exemplaires fixés et colorés, on remarque à Tavant du corps une formation chromatique recourbée en croissant : les deux extrémités amincies de l'arc se prolongent jusqu'au point d'insertion des fiagellums. Cette apparence nous avait fortement intrigué au début, et nous avons cherché pendant longtemps un noyau en dehors de cet appareil chromatophile. L'arc se compose de deux parties réunies au contact à l'avant du corps par leur extrémité renflée : chacune a la valeur d'un noyau et comprend une membrane nucléaire très nette et un nucléoplasme peu chromatique. « L'étude de la division nucléaire pouvait seule justi- fier cette interprétation. « Le Trepomonas , au moment où il se prépare à une bipartition, augmente d'épaisseur; chaque noyau forme son fuseau suivant cette direction ; les deux tonnelets à la métaphase sont parallèles et très distincts l'un de l'autre, quoique se touchant presque. L'échancrure, qui sépare suivant un plan médian vertical les nouveaux indi- vidus, conserve donc à chaque organisme deux éléments nucléaires d'origine différente ; ceux-ci en passant à l'état de repos reprennent leur disposition en croissant. « En résumé, la cellule du Trepomo7ia.s renferme deux énergides : elle représente un organisme double com- parable £^ux deux frères siamois, avec cette différence NOTES DIVERSES 15 toutefois qu'il s'agit ici d'une organisation normale se transmettant à travers toutes les générations. « Nous proposons de désigner sous le nom de Diplo- monadiens les Flagellés possédant cette structure, et sous le nom plus général de Diplozoïdes, les animaux ainsi constitués. « Chez le Trepomonas, l'origine de cette anomalie pro- vient soit d'un dédoublement primitif, soit de la fusion incomplète de deux individus ; en tout cas, elle s'est transmise à la descendance ; nous retrouvons dans VAmœba binucleata un phénomène analogue ; d'autres Diplozoïdes pourraient devoir leur organisation à un dé- doublement s'effectuant à chaque génération. « L'existence des Diplozoïdes soulève une foule de questions intéressantes ; nous nous proposons d'en dé- velopper quelques-unes dans un prochain Mémoire. Comptes rendus Acad. Se, n» 26, t. CXXXV. Biologie. — Observations sur la théorie du cloisonnement. « Nous avons été conduit progressivement à l'idée que toute théorie générale relative à la reproduction, à la nu- trition, à la sexualité, à toutes les grandes fonctions de l'être, en un mot, doit avoir sa base et son point de dé- part chez les organismes inférieurs. Nous avons déjà formulé dans ces conditions une nouvelle théorie de la sexualité (1); nous voudrions montrer aujourd'hui qu'on aurait avantage à suivre la même voie dans Tétude du cloisonnement. (1) Le Botaniste, 6e série, p. 263. 16 P -A. DANGEARD « On considère avec raison les lois d'Hertwig et de Pflueger comme fondamentales ; nous les rappelons brièvement. « Selon Hertwig, les deux pôles du fuseau nucléaire viennent se placer dans la direction de la plus grande masse de protoplasma, à peu près de la même manière que la position des pôles d'un aimant est influencée par les particules de fer qui l'environnent. D'après Pflueger, le fuseau nucléaire s'oriente dans le sens de la moindre résistance. « L'étude des Flagellés prouve : 1° que ces lois n'ont qu'un caractère secondaire ; 2° qu'elles sont le résultat de modifications introduites dans l'organisme cellulaire au cours de l'évolution. « Chez les Flagellés, en effet, la division est longitudi- nale ; cependant, très souvent le corps est cylindrique ; le fuseau nucléaire s'établit dans le sens de la plus petite largeur de la cellule et aussi dans le sens de la plus grande résistance, ce qui est contraire à la fois aux lois d'Hertwig et de Pflueger. « C'est que chez les Flagellés, ancêtres des Métaphytes et des Métazoaires, nous nous trouvons en présence d'un cloisonnement primitif qui a pour but de séparer une cellule en deux moitiés symétriques et équivalentes ; ce résultat n'est atteint qu'autant que les divers grou- pements permanents de la cellule se divisent et portent leurs moitiés à droite et à gauche de l'axe ; de ces grou- pements et de leur mode de division, nous ne connais- sons bien que celui qui est représenté par l'élément nu- cléaire ; c'est, d'après la façon dont il se comporte, qu'on peut essayer d'établir les lois primitives du cloisonne- ment. « La cellule du Flagellé est nettement polarisée, elle possède une extrémité antérieure et une extrémité pos- térieure ; l'axe cellulaire est l'axe qui passe par le mi- NOTES DIVERSES 17 lieu de ces deux extrémités ; si la cellule présente, eu outre, une face ventrale et une face dorsale, il existe un plan cellulaire, passant par l'axe et parallèle aux deux faces. « Avec cette organisation, les lois primitives du cloi- sonnement peuvent être ainsi formulées : « 1» L'axe nucléaire se place perpendiculairement à l'axe cellulaire ou au plan cellulaire, s'il en existe un ; € 2° Le plan de division passe par l'axe ou le plan cel- lulaires ; ceux-ci sont déterminés par la morphologie gé- nérale de la cellule et la position de ses éléments per- manents. « Nous allons examiner maintenant comment et pour- quoi ces lois se sont trouvées modifiées au cours de l'évolution ; à cet égard, les exemples fournis par les genres Euglenopsis et Trachelomonas sont des plus pro- bants. « Chez VEuglenopsis vorax, le corps offre une certaine résistance à Textension en largeur ; aussi le fuseau nu- cléaire est-il tantôt perpendiculaire à l'axe, tantôt plus ou moins oblique ; parfois même il se montre complè- tement parallèle à l'axe (1) ; malgré cette dernière dis- position, la bipartition du corps reste longitudinale, grâce à une courbure du fuseau à la fin de la division. Il s'agit ici d'une exception remarquable à une loi du cloisonnement considérée comme générale, à savoir que la cloison est perpendiculaire à l'axe nucléaire. . « Nous entrevoyons chez VEuglenopsis vorax la cause des différences d'orientation du fuseau : une explication complète va nous être fournie par le genre Trachelomo- nas^ qui possède une coque épaisse faisant obstacle à tout élargissement du corps. (1) La divisio 1 nucléaire que nous avons étudiée récemment dans cette espèce est une haplomitose. 2 18 P-A. DANGEARD « Le Trachelomonas volvocina a une forme sphérique : le fuseau nucléaire s'oriente transversalement comme chez les autres Flagellés et la bipartition est longitu- dinale. Dans le Trachelomonas lagenella, au contraire, le corps est allongé^ cylindrique ; le fuseau nucléaire, d'abord transversal, ne peut subir son extension com- plète ; il effectue une rotation de 180° qui le rend pa- rallèle à l'axe ; la bipartition du corps est transver- sale (1). « En résumé, nous sommes autorisé à conclure que les lois primitives du cloisonnement, que nous venons de faire connaître, se sont trouvées modifiées par l'ap- parition d'une membrane ou d'une enveloppe inexten- sible : les lois d'Hertwig et de Pflueger ne sont que l'expression de cette modification intervenue dans la structure cellulaire au cours du développement. » Comptes rendus, Acad. Se, n° 3, t. CXXXVI. ËiOLOGiE. — Observations sur le Monas vulgaris. « De nombreuses controverses se sont élevées depuis plusieurs années au sujet du rôle du centrosome dans la division nucléaire et de son influence sur l'appareil loco- moteur. « Les relations des flagellums avec le noyau sont incon- testables chez un certain nombre d'espèces ; ainsi, nous avons établi que, dans le Polytoma uvella, il existait un blépharoplaste, un rhizoplaste et un condyle(2) : ces di- (1) Consulter P. -A. Dangeard : Recherches s^ir les Eugléniens (Le Botaniste, 8e série, p. 224). (2) P.- A. Dangeard : Etude sur la structure de la cellule et ses fonc- tions (Le Botaniste, 8e série, p. 36). NOTES DIVERSES 19 verses parties viennent d'être retrouvées par Nicolaus Maier dans un Chlamydomonas {\). Mais, si l'existence de ces différenciations est hors de doute actuellenlent, la na- ture du blépharoplaste reste très discutée, beaucoup d'auteurs voulant assimiler cet élément à un centrosome. « Nous avons essayé d'élucider cette question, et nos recherches se sont portées sur une espèce du genre Monas^ le M. vulgaris, que l'on peut obtenir facilement en grande quantité dans une infusion de foin. « L'organisation de ce Monas est très simple ; c'est une sphère de protoplasma ayant 8 p- à 10 fJ- de diamètre ; à l'avant se trouvent deux flagellums d'inégale longueur : ils sont insérés sur un petit nodule colorable inclus dans la couche corticale ou ectoplasme : le noyau se trouve à une très faible distance au-dessous du blépharoplaste; il est relié à celui-ci par un cordon chromatique plus ou moins épais qui représente le rhizoplaste. « Le noyau possède un nucléole central, une membrane nucléaire à double contour et du nucléoplasme homogène dans l'intervalle ; il se divise suivant le mode indirect ; c'est une téléomitose semblable à celles que nous avons décrites chez les Chlamydomonadinées (2). « Dans ces conditions, il est facile de se rendre compte de la nature du blépharoplaste ; s'il représentait un véri- table centrosome, il devrait se diviser, abandonner l'ec- toplasme et se porter aux deux pôles du fuseau ; or on n'observe rien de semblable. « Au moment de la division, le fuseau s'oriente perpen- diculairement à l'axe cellulaire, et les chromosomes, au nombre de huit, se disposent en plaque équatoriale. « On observe déjà à ce stade deux groupes de flagel- (1) H. Nicolaus Maier : Ueber den feineren Bau'der Wimperapparate der Infusorien (Archiv. f. Protisten Kunde, Bd. II, 1903). {t) P.-A. Dangeard : Mémoire aur les Chlamydomonadinées (Le Bota- niste, 6e série). 20 P -A. DANGEARD lums : l'un, l'ancien, n'a pas modifié sa structure ; son blé- pharoplaste continue à faire partie de l'enveloppe et le rhizoplastese relie àla substance achromatique du fuseau au voisinage immédiat de la plaque équatoriale ; le second groupe de flagelums est également en relation par un mince filet avec la substance achromatique ; mais son blé- rophaste n'est pas encore différencié: il se montre un peu plus tard. « La plaque nucléaire se sépare en deux moitiés qui s'éloignent l'une de l'autre en restant parallèles ; il se forme de la sorte un tonnelet qui s'allonge de plus en plus ; les deux groupes de flagellums suivent ce mouvement, restant ainsi superposés à chaque masse chromatique ; les chromosomes se reforment bientôt en une sphérule nucléaire à l'aide de la substance achromatique du ton nelet ; les deux nouveaux noyaux ont conservé avec l'appareil locomoteur les mêmes relations que l'ancien. « Par suite de la forte croissance qui se produit à la partie antérieure du corps, les deux noyaux s'éloignent de plus en plus l'un de l'autre ; ils finissent par se trouver situés exactement aux deux extrémités d'un même dia- mètre : c'est à ce moment que la séparation se fait ; elle a lieu dans un plan perpendiculaire à l'axe cellulaire; la bi- partition pourrait être facilement prise pour une division transversale dans laquelle l'extrémité postérieure de la cellule-mère deviendrait la partie antérieure de l'une des cellules-filles ; l'erreur a dû se produire ; on peut s'en rendre compte en consultant la bibliographie spéciale des Flagellés; il est extrêmement probable, par exemple^ que la prétendue division transversale de VAncyromonas sig- moîdesKent est, en réalité, une bipartition longitudinale. « Nous pouvons, de nos recherches sur le Monas vulga- ris^ tirer les conclusions suivantes : « 1° La bipartition du corps est longitudinale; elle est accompagnée d'une croissance rapide, dans la partie an- NOTES DIVERSES 2l térieure du corps, qui a pour résultat d'amener en oppo- sition les deux extrémités des cellules-filles ; « 2° Le noyau se divise suivant le mode indirect ; c'est une téléomitose semblable à celle des Chlamydomonadi- nées ;nous l'avons retrouvée avec les mêmes' caractères chez VAntophysa vegetans ; « 3° Le blépharoplaste et le rhizoplaste sont très ap- parents dans le Monas vulgaris ; on ne saurait assimiler le premier de ces organes à un centrosome, puisqu'il reste inclus dans l'ectoplasme pendant la téléomitose. » Comptes rendus, Acad. Se, n" 5, t. CXXXVL Botanique. -— Un nouveau genre de Chytridiacées : le Rhabdium acutum. « Nous avons rencontré au mois de septembre dernier, dans une source d'eau ferrugineuse, des filaments de Spyrogyra Qid' Œdogonium dont la surface était recouverte par une quantité de petits tubes incolores de nature incon- nue ; on aurait pu facilement les confondre avec une Bac- tériacée filamenteuse quelconque en voie de développe- ment. « L'étude histologique de ces singulières productions et de cultures nombreuses nous a montré qu'il s'agit d'une Chytridiacée nouvelle d^organisation très simple ; nous lui avons donné le nom de Rhabdium acutum^ à cause de sa forme en baguette très caractéristique. « Le thalle du parasite consiste en un filament qui est fixé sur la paroi de l'algue par sa base ; celle-ci perfore la membrane et se met en contact avec le protoplasma par une sorte de disque qui remplit l'office de suçoir; dans son passage à travers la membrane, le tube diminue de 22 P-A. DANGEARD diamètre, comme il arrive fréquemment pour beaucoup d'autres champignons parasites ; d'ordinaire, le disque suçoir prolonge directement le thalle ; parfois, cependant, il est placé latéralement à une petite distance de la base. Le diamètre du tube oscille entre 2 ^j, et 4 p, ; sa longueur atteint de 20 p, à 50 p, environ. « Le thalle tout entier se transforme en un sporange ; le nombre des zoospores est en général de seize : elles sortent lentement à l'extrémité antérieure du tube, l'une entraînant l'autre; le corps delà zoospore remplit com- plètement le diamètre du sporange. Devenue libre, la zoospore est réniforme; elle possède un flagellum qui est traîné à l'arrière pendant le mouvement. Au bout d'un certain temps d'activité, la zoospore se fixe sur la paroi de l'algue, et presque aussitôt un prolongement perfore la membrane; la partie restée à l'extérieur s'allonge en un tube qui deviendra le sporange, celle qui a pénétré dans la cellule constitue le suçoir. a L'étude histologique du parasite nous a fourni les résultats suivants : le thalle jeune ne renferme qu'un noyau très petit placé à la base ; un peu plus tard, ce noyau se porte dans la partie moyenne du tube, et son diamètre augmente : on peut alors reconnaître facilement une membrane nucléaire, un nucléoplasme granuleux et un nucléole. Lors de la sporulation, le noyau se divise ; on rencontre des sporanges renfermant 2, 4, 8 ou 16 noyaux ; leur diamètre est égal à celui du filament ; à chaque divi- sion, ils repassent à l'état de repos. « On observe, au moment de la formation des zoos- pores, un cloisonnement qui débute dans la partie cen- trale et s'étend ensuite vers le sommet et vers la base ; le nombre des compartiments ainsi délimités est de 16 ; il correspond par conséquent à la quantité des noyaux ren- fermés dans le sporange ; un peu plus tard, ces cloisons s'effacent ; le cytoplasme, qui était Homogène, montre des NOTES DIVERSES 23 granulations brillantes et de petites vacuoles, puis il se fragmente en zoospores. « Tel est le développement de ce parasite : dans nos cultures, qui ont duré environ deux mois, il ne s'est rien produit qui puisse faire soupçonner l'existence d'organes sexuels. « Le Rhabdiumacutum possède des affinités multiples ; sa place est à la base de la famille des Chytridiacées avec les genres Sphaerita, Olpidiwn, dont il possède la simpli- cité d'organisation ; mais Tétude de son développement suggère la possibilité d'autres relations de parenté. « En effet, nous venons de voir que la formation des zoospores est précédée d'une sorte de cloisonnement qui dispai'aît ensuite ; ces phénomènes rappellent ceux qui se produisent dans le sporange des Saprolegnia. De plus, la succession des sporanges dans un même thalle paraît très rare chez les Chytridiacées ; or elle a lieu normalement dans notre champignon ; les sporanges successifs s'y emboîtent les uns dans les autres comme chez les Sapro- legnia. « Il semble, d'après cela, que l'on puisse considérer le genre Rhabdium comme effectuant la transition entre les Saprolegniacées et les Chytridiacées ; en effet, s'il existait chez ce parasite un appareil végétatif distinct de Tappareil de végétation, nous n'hésiterions pas à le placer tout près des Aphanomyces, des Pythium, des Saprolegnia, dont il possède la forme filamenteuse. » Comptes rendus, Acad. Se, n° 7, t. CXXXVI. Botanique. — Sur le nouveau genre Protascus. « En étudiant les nombreux parasites qui s'attaquent aux Anguillules, nous avons rencontré une espèce qui a 24 P-A. DANGEARD passé inaperçue jusqu'ici, sans doute à cause de sa res- semblance avec le Myzocytium vermicolum. « Le thalle adulte a la forme d'une bouteille placée dans l'axe de l'hôte ; le col très allongé se recourbe pour venir perforer la paroi de l'Anguillule ; assez rarement, le thalle est composé de plusieurs articles semblables. « Au début de sa croissance, le parasite est constitué par un cordon de protoplasme ne renfermant qu'un seul noyau ; le nombre des éléments nucléaires augmente rapidement par téléomitose, et le sporange contient fina- lement 8, souvent 16, parfois 32 noyaux. « L'intérêt qu'offre cette espèce réside dans le mode de sporulation : le sporange, au lieu de donner naissance à des zoospores, comme on serait en droit de s'y attendre, fournit, en même nombre que les noyaux, de très longues spores immobiles ; elles ont la forme [de petites massues, et leur orientation dans le sporange est constante ; l'extré- mité renflée est toujours placée du côté du col. « La sortie de ces spores a lieu par projection brusque : elles sont lancées avec force dans le milieu extérieur par paquets à intervalles de quelques secondes, ou même en une seule fois, si bien qu'il faut se résoudre, pour observer le phénomène, à ne pas quitter un seul instant de vue les sporanges. « Ces spores arrivées au contact d'autres Anguillules se fixent à la paroi par leur extrémité amincie : une vacuole se montre à l'autre extrémité renflée ; on peut alors assister au passage lent de la substance du parasite à l'intérieur du corps de l'hôte ; elle y forme ce cordon uninucléé qui est le début du thalle, ainsi que nous l'avons vu. La même Anguillule renferme souvent une vingtaine de ces parasites. « Par sa forme et sa structure, ce champignon est voi- sin des Lagenidium et des Myzocytium ; mais l'existence des spores immobiles et le mode particulier de projection NOTES DIVERSES 25- indiquent des affinités précises du côté des Ascomycètes inférieurs; l'opinion de Brefeld sur la parenté de l'asqus et du sporange se trouve à nouveau confirmée, et c'est pourquoi nous proposons de désigner ce genre sous le nom de Protascus: l'espèce sera le Protascus subuliformis, à cause de l'aspect des spores. « Il existe, en outre des Protascus, un certain nombre de genres qui établissent la transition entre les Phyco- mycètes et les Ascomycètes : ce sont principalem.ent les Protomyces et les Taphridium ; l'asque dans ces genres dérive directement du sporange asexuel. « Mais il ne faut pas oublier que la grande majorité des Ascomycètes, au lieu de former simplement des asques comme les précédents, aux dépens du sporange asexuel, ont hérité du sporange provenant de la germination de l'œuf. On n'en saurait guère douter lorsqu'on compare avec soin la reproduction sexuelle du Polyphagus {l) et surtout celle du Dipodascus (2) avec la formation de l'asque telle que nous l'avons décrite autrefois. » Comptes rendus, Acad. Se, n° 10, t. CXXXVI. Zoologie. — Contribution à Vétude des Diplozoaires. « Nous avons signalé, il y a quelque temps, l'existence d'un Flagellé double possédant deux énergides d'origine différente ; nous proposions de désigner sous le nom de Diplozoaires les animaux qui présenteraient cette parti- (1) P. -A. Dangeard : Recherches sur /a structure du Polyphagus Euglenae (l.e Botaniste, 7e série, p. 213). (2) Juel : « Ueber Zellinhalt, Befruchtung und Sporenbildung bei Dipodascus » (Flora, Bd. XCI, 1902). 26 P -A. DANGEARD cularité (T ; ce groupement, il est à peine besoin de le dire, est d'ordre biologique et non phylétique. Aux deux exemples déjà connus, nous pouvons aujourd'hui en ajouter un troisième, celui de ÏArcellsL vulga.ris, qui, comme son nom l'indique, est une espèce des plus com- munes. « Les traités généraux qui s'occupent de l'étude de cette espèce mentionnent la présence d'un nombre variable de noyaux dans le protoplasme ; ainsi, Butschli (2) parle d'une grande quantité d'éléments nucléaires et Y. De- lage (3) admet que ce nombre oscille entre quatre et trente-deux. En présence des résultats différents que nous avons obtenus, il n'est pas inutile de noter que nos cul- tures ont duré trois mois environ ; plusieurs milliers d'in- dividus ont été examinés en préparations durables : nos conclusions semblent donc pouvoir être considérées comme ayant un caractère général. « UArcellsi vulgaris a la forme d'un verre de montre ou, plus exactement, d'un béret dont les bords repliés en de- dans limitent une ouverture circulaire par laquelle sort un gros pseudopode ramifié ; dans la cavité générale, remplie de cytoplasme, se trouvent deux très gros noyaux ; ils sont ordinairement situés, dans la gouttière circulaire, aux deux extrémités d'un même diamètre ; dans certaines cultures, tous les individus, sans exception, possèdent cette organisation ; dans d'autres cultures, on rencontre parfois des cellules ayant trois, quatre, ou même six noyaux ; mais il est bon de remarquer que la proportion de ces cas anormaux était inférieure à 1 pour 100 ; ces mo- difications sont, à n'en pas douter, du même genre que celles qui sont fréquentes dans les cellules des tissus âgés ; (1) P. -A. Dangeard: forganisation du « Trepomonas agilis » (Comptes rendus, t. CXXXV, no '26, p. 1366). (2) Butschli : Protozoa, 183. (3) Y. Delage : La cellule et les Protozoaires, p. 103. NOTES DIVERSES 27 mais elles ne peuvent entrer en ligne de compte dans la considération d'une structure normale. « Il est donc bien établi que VArcella vulgccris est un Rhizopode à deux énergides comme le TrepomonsiS ngilis : il est impossible d'ailleurs d'en douter lorsqu'on suit le mode de division. « UArcella vulgaris se multiplie par une sorte de bour- geonnement ; une partie du cytoplasme sort par l'ou- verture circulaire, s'arrondit et forme bientôt une cellule- fille symétrique de la cellule-mère, avec des dimensions beaucoup plus faibles. K Lorsqu'un individu se dispose à la division, ses deux noyaux sont au stade de la prophase ; à l'état de repos, ils sont constitués pai^ une membrane nucléaire, un très gros nucléole central et du nucléoplasme réticulé ; à la pro- phase, le nucléole a perdu ses limites, comme s'il se dis- solvait peu à peu, et sa substance s'est accumulée aux pôles en deux calottes achromatiques hémisphériques ; elles sont réunies par un fuseau achromatique à stries nombreuses ; on distingue dans le plan équatorial des granulations chromatiques assez nombreuses qui repré- sentent les chromosomes. L'existence des deux calottes polaires donne l'impression d'un stade tonnelet ; cette apparence a trompé Gruber, qui n'a pas vu les chromo- somes (1). Lorsque la séparation de ceux-ci est effectuée, le noyau, qui avait conservé sa formejusque-là, commence à s'allonger en tonnelet, et bientôt les chromosmoes ces- sent d'être visibles. « A ce moment, la cellule-fiUe est déjà recouverte d'une membrane ; elle reste en communication avec la cellule- mère par un gros cordon de protoplasme : c'est dans ce cordon que s'engagent simultanément les extrémités po- (1) Gruber : Ueber Kernvermehrung und Schwarmbild bel Sûsswas- ser Rhizopoden (Ber. d. nat. Gesells. zu Freiburg, 1892). 28 P.-A DANGEARD laires des deux fuseaux ; ceux-ci ont pris la forme d'hal- tères ; la rupture se fait au milieu et les nouveaux noyaux se reconstituent. « Il résulte de cette description que les noyaux de VAr- cella vulgaris se comportent comme ceux du Trepomonas et des Urédinées : les noyaux d'une même cellule appar- tiennent à deux lignées parallèles indépendantes. L'ave- nir nous dira si cette constitution si intéressante aura, comme chez les champignons basidiomycètes, sa réper- cussion sur le modede reproduction sexuelle. » Comptes rendus^ Acad. Se, n° 12, t. CXXXVI. Physiologie végétale. — La. sexualité dans le genre Monascus. « L'étude de trois genres de champignons, Sphaero- theca (1), Pyronema (2) et Monascus (3), a paru mettre un instant en échec notre conception de la sexualité chez les Ascomycètes. « Dans un premier Mémoire, nous avons montré qu'il n'existe aucune communication entre Torgane considéré comme anthéridie et l'ascogone du Sphaerotheca ; par suite, il ne se produit aucune fusion nucléaire à ce stade, et la karyogamie qui précède la formation de l'asque n'est précédée d'aucune autre dans le développement (4). (1) Ilarper: Die Entw. des Perith. bei «.Sphaerotheca Castagyiei» (Ber, d. deutsch.bot. Gesell.,Bd. XIII). (2) Harper): Sexual reproduction in « Pyronema confluens» (Ann. Bot. vol. XIV). (3) Barker: The Morphology and Develop. of the ascocarp in « Mona- scus » (Ann. Bot. vol., XVII.) (4) P.-A. Dangeard : Second Mémoire sur la reproduction sexuelle des Ascomycètes (Le Botaniste, série V). NOTES DIVERSES 29 « Grâce à l'obligeance de MM. Barker et Treub, il nous a été p.ossible d'examiner deux espèces appartenant au genre Monascus : l'une est le M. purpureus décrit par Went ; la seconde, étudiée par Barker, est une espèce nouvelle pour laquelle nous proposons le nom de M. Barkeri. « La formation du périthèce débute de la manière sui- vante : un filament désigné sous le nom d'anthéridie est recouvert par un second filament qui est l'ascogone ; ce dernier se cloisonne en une cellule terminale, le tricho- gyne, et une cellule basiiaire qui est la cellule centrale ; à un moment donné, l'anthéridie se met en communication par une anastome avec le trichogyne. « Il est probable que ces divers organes dérivent effec- tivement de l'anthéridie et de l'oogone des Siphomycètes, comme nous l'avons expliqué ailleurs ; mais les phéno- mènes de fécondation ne se produisent plus à ce stade : ils ont été reportés à la naissance des asques. « Barker admet, sanstoutefoisl'afïirmer, que les noyaux de l'anthéridie viennent se fusionner par paires avec ceux de la cellule centrale : c'est donc sur ce point précis que devaient porter nos observations. ce L'anthéridie s'isole du thalle avec deux noyaux ordi- nairement; ces noyaux se divisent et, plus tard, on trouve de 4 à 10 noyaux environ ; de même l'ascogone débute avec un nombre d'éléments nucléaires qui varie de 2 à 5 ; plus tard, après division, il renferme de 6 à 12 noyaux en deux groupes ; la cloison qui se forme avant l'anasto- mose de l'anthéridie sépare l'ascogone en une cellule centrale renfermant 2, 4, 6 ou 8 noyaux, et une cellule terminale, le trichogyne, qui en possède A ou 5. « Or, on peut constater avec la plus grande certitude que les noyaux de l'anthéridie et du trichogyne subissent une dégénérescence sur place ; ceux de la cellule centrale seuls ont un rôle actif. « Selon Barker, cette cellule centrale contient plus tard, 30 P A. DANGEARD à son intérieur, les lilaments ascifères ; Tauteur n'a pas vu deux assises nutritives qui forment la paroi interne du périthèce, comme dans le Sphœrotheca ; de là vient son erreur ; ces assises, en effet, se désagrègent de bonne heure et entourent l'ascogone d'une couche de proto- plasme qui est utilisé pour la nutrition des asques ; ceux- ci proviennent desimpies cloisonnements successifs ; les asques possèdent chacun deux noyaux d'origine diffé- rente qui se fusionnent en un seul. ce En résumé, il n'existe dans le genre Monascus aucune autre fusion nucléaire que celle qui a lieu à la naissance de l'asque ; d'ailleurs, le simple examen morphologique permet de reconnaître la nature indifférente de l'anthé- ridie; celle-ci, en effet, donne souvent naissance soit à une chlamydospore, soit même à un périthèce tout entier. « Les objections qui ont été formulées sur notre décou- verte de la sexualité chez les champignons supérieurs tombent d'elles-mêmes en ce qui concerne l'exception tirée du genre Monascus ; nous montrerons, dans une prochaine note, si l'Académie veut bien nous y autoriser, que les arguments fournis par le développement des ro- settes chez le Pyronema sont également sans valeur. » Comptes rendus, Acad. Se, n°21, t. CXXXVI. Botanique. — Sur le Pyronema, confluens. « Nous avons réussi à obtenir, cette année, de belles cultures artificielles du Pyronema confluens, et nous en avons profité pour reprendre l'étude de ce champignon si intéressant. « Il est à peine besoin de rappeler que la découverte de grosses vésicules, de rosettes sur le mycélium, est due NOTES DIVERSES 31 aux frères Tulasne ; ces organes ont donné lieu à de nom- breuses controverses qu'il serait trop long de rappeler. Disons seulement que, dans un iMémoire récent (1), Harper a cru trouver, dans la manière dont ils se com- portent et leur structure, des arguments contre notre théorie de la sexualité chez les champignons supérieurs. Selon Harper, l'anthéridie et l'ascogone possèdent de nombreux noyaux ; les deux organes se mettent en com- munication par un long tube qui prolonge l'ascogne ; ce trichogyne possède une cloison basilaire qui se forme avant la fusion anthéridienne. « Notons que, sauf les dimensions plus grandes, cet appa- reil ressemble exactement à celui des Monascus; le cloison- nement de l'ascogone précède la fusion avec l'anthéridie. « Ce point est très important ; pour qu'un échange de noyaux puisse avoir lieu, il faut nécessairement que la cloison disparaisse ; nous avons démontré que, chez les Monascus, cette cloison est persistante ; sa disparition ne servirait d'ailleurs à rien, puisque les noyaux de l'an- théridie et du trichogyne se détruisent sur place. « Harper a pensé que cette cloison disparaît un moment pour laisser passage aux noyaux de l'anthéridie et se reforme ensuite ; ces noyaux, au nombre de deux cents environ, copuleraient par paires avec ceux de l'ascogone ; seuls les noyaux du trichogyne se détruiraient. « Or, nous avons pu constater que la cloison qui -se trouve à la base du trichogyne est persistante comme chez les Monascus ; elle présente simplement en son centre une ponctuation analogue à celles qui existent chez beaucoup de champignons. « Il ne se produit aucun échange de noyaux entre l'anthéridie et l'ascogone ; on peut assister à la dégéné- rescence sur place des éléments nucléaires de l'anthé- (1) Harper : Sexual reproduction in « Pyronema confluens » (Annals of Bot., t. V, p. 14). 32 P.-A. DANGEARD ridie et du trichogyne : il résulte de là qu'aucune fusion nucléaire n'a lieu à ce stade du développement. « Les noyaux de Tascogone seuls restent actifs ; ils sont orientés à la surface de l'organe ; quelques-uns s'enfoncent vers le centre et là se divisent ; le nombre de ces divisions augmente rapidement ; les noyaux prove- nant de ces divisions sont naturellement plus petits à leur reconstitution que ceux de la zone superficielle ; bientôt l'ascogone produit par bourgeonnement les fila- ments ascifères dans lesquels passent les noyaux. « Ces résultats confirment d'une manière absolue ceux que nous avons obtenus dans l'étude des Monascus (1) ; au lieu des fusions nucléaires annoncqes, nous avons trouvé une dégénérescence des noyaux de l'anthéridie et du trichogyne. « Si l'on veut avoir l'explication de ces faits, il faut se reporter au pjenre Dipodascus (2) ; là, deux branches, anthéridie et ascogone, se développent côte à côte sur le même rameau ; elles contiennent de nombreux noyaux ; or, deux seulement se fusionnent pour fournir un noyau sexuel ;.les autres disparaissent : cette dégénérescence est évidemment du même ordre que celle des éléments nucléaires du Monascus et du Pyronema ; elle se rattache d'autre part aux phénomènes analogues décrits chez les Siphomycètes. 11 est donc infiniment probable que les anthéridies et ascogones signalés chez quelques Asco- mycètes représentent bien les vestiges des organes sexuels des Siphomycètes ; mais aucune fécondation nucléaire ne s'y produit plus ; cette fécondation a été reportée plus loin, ainsi que la formation des asques, à laquelle elle est intimement et nécessairement liée (3). » (4) Voir la note précédente. (2) Juel : Ueber Zellinhalt, Befrucht, und Sporenb. bei « Dipodascus y> Flora, Bd. XCl, 1902). (3) Comptes rendus, Acad. Se, n» 22, t. CXXXVI. NOTES DIVERSES 33 Botanique. — Sur le genre Ascodesmis. « On sait qu'un certain nombre d"Ascomycètes possè- dent à l'origine du périthèce des filaments copulateurs qui ont été assimilés à des anthéridies et à des oogones, c'est-à-dire à des gamétanges. Un intérêt spécial s'atta- chait au genre Ascodesmis, découvert par M. Van Tieghem, parce que, jusqu'ici, on admettait que la for- mation du périthèce y résulte des dichotomies successives d'un filament mycélien unique (1). « Nous avions été frappé cependant par la ressem- blance que présente ce filament avec celui qui produit les rosettes chez le Pyronema : cette analogie nous a conduit à la découverte de rameaux accouplés par paires, semblables à ceux des Gymnoascus : leur nombre est variable pour chaque périthèce ; on en trouve de six à dix environ dans VAscodesmis nigricans. « Chaque couple est constitué par deux rameaux enroulés l'un sur l'autre en spirale ; au début, ils ne présentent aucune différence bien sensible ; un peu plus tard, l'ascogone se distingue facilement à son contenu plus riche en cytoplasme et à son diamètre légèrement supérieur à celui de l'anthéridie. « Nos observations montrent que, dès les premières dichotomies du filament générateur, la branche qui four- nira les anthéridies se différencie de celle qui donnera naissance aux ascogones ; ces organes ne seraient donc pas portés sur un même rameau comme chez les Ere- mascus, mais proviendraient de branches différentes comme chez les Pyronema. (1) Van Tieghem : Sur le développement du fruit des Ascodesmis (Bull. Soc. botanique de France, t. XXIII, 1876, p. 271). .3 N 34 P -A. DANGEARD « Les anthéridies et les ascogones sont plurinucléés ; nous avons cherché la trace d'une communication directe entre les deux rameaux accouplés, mais sans parvenir à la découvrir : le cytoplasme se raréfie de bonne heure dans les anthéridies et disparaît également au sommet de l'ascogone ; cette partie qui s'isole par une cloison du reste de l'organe est donc identique au trichogyne des Monascus. « On ne voit ordinairement que trois ou quatre noyaux dans l'anthéridie ; l'ascogone en renferme sept ou huit ; il n'en reste finalement que quatre ou cinq après sépa- ration du trichogyne ; mais ces derniers ont augmenté de volume et ils possèdent un gros nucléole ; ce sont les seuls qui, lors du bourgeonnement de l'ascogone, four- nissent, après une ou plusieurs bipartitions, les noyaux copulateurs des asques. « Les paraphyscs proviennent de ramifications basi- laires du fiUment initial ; elles contiennent plusieurs noyaux. « Comment concilier l'existence de ces organes copu- lateurs chez les Ascomycètes avec l'absence de fusions nucléaires dans l'oogone, alors qu'il s'en produit plus tard à la naissance des asques ? « Nous sommes en mesure maintenant d'en donner une explication rationnelle. « Lorsque les Siphomycètes ont passé de la vie aqua- tique à la vie aérienne, leurs sporanges sont devenus des conidiophores de formes variées, isolés ou inclus dans des conceptacles ; or les gamétanges ne sont que des sporanges à spores affaiblies (1) ; il est naturel qu'ils aient ^bi une différenciation analogue à celle des spo- ranges ; ils se sont transformés en gamétophores à (1) Consulter notre Théorie de la sexualité (Le Botaniste, 6'^ série, p. 263). NOTES DIVERSES 35 gamètes extérieurs. Le gamétophore fertile, ou ascogone, équivalent d'un conidiophore à spores affaiblies, donne naissance à des gamètes qui s'unissent par deux, grâce à l'absence de cloison. L'origine différente des noyaux copu- lateurs montre bien qu'il s'agit de la formation d'un œuf, comme nous Tavons toujours soutenu : le mode de ger- mination est encore celui d'un œuf, puisque le produit en est un asque ou sporange, comme chez les Péronos- porées ; enfin, la réduction chromatique qui, selon nos observations, intervient à ce moment, ne laisse aucun doute sur la nature sexuelle du phénomène. « Avec cette interprétation, qui nous paraît définitive, la sexualité des champignons supérieurs rentre dans le schéma général de la fécondation. i> Comptes rendus, Acad. Se, n» 14, t. CXXXVIL NOUVELLES CONSIDÉRATIONS SUR LA REPRODUCTION SEXUELLE DES CHAMPIGNONS SUPERIEURS Actuellement, ce sont les Basidiomycètes qui sont les mieux connus des Champignons supérieurs, au point de vue de la structure et des phénomènes reproducteurs; on peut formuler les règles suivantes, qui sont générales ou ne comportent que de rares exceptions. !• La cellule des Basidiomycètes contient normalement deux noyaux, tout au moins dans l'appareil reproducteur sexué. S*» Les noyaux possèdent deux chromosomes. 3° La division des noyaux est simultanée dans chaque 36 P-A. DANGEARD article ; il existe deux lignées parallèles et indépendantes d'éléments nucléaires. 4° Cette disposition assure une parenté très éloignée aux noyaux de la baside. 5" L'union des deux noyaux dans la baside constitue un phénomène sexuel. 6° La réduction chromatique a lieu à la germination de l'œuf. Il nous sera peut-être permis de rappeler que chacun des résultats que nous venons d'énumérera eu son origine première dans notre laboratoire. Cette constatation n'a- moindrit en aucune manière le grand mérite et la valeur des mémoires publiés sur l'histologie des Basidiomycètes par Rosenvinge, Rosen, Wager, Juel,Iiarper, Maire, etc. ; mais elle nous permet d'évoquer avec intiniment de plaisir la collaboration dévouée de notre ancien préparateur Sappin-Trouffy. Si nous envisageons maintenant le groupe des Asco- mycètes, nous pouvons encore formuler certaines conclu- sions bien établies : 1° Le nombre des noyaux par article est variable selon les espèces et les genres : lorsque les articles sont pluri- nucléés, il existe fréquemment de grandes différences dans le nombre de leurs noyaux. 2° Dans tous les cas, l'asque jeune contient deux noyaux d^origine différente, comme la baside. 3" L'origine différente de ces noyaux est obtenue de deux manières : T par division simultanée de deux no- yaux superposés dans le sens de la longueur du filament, comme chez les Péziza, les Helvella,, etc. ; l'article médian qui donne naissance à l'asque possède ainsi deux noyaux cousins et non frères ; ce procédé a été retrouvé par Ilarper chez plusieurs espèces: il semble être très répandu, et nous en donnerons de nombreux exemples dans notre prochain mémoire sur les Ascomycètes. Dans la seconde NOTES DIVERSES 37 manière, il se produit une division simultanée et paral- lèle des deux noyaux de chaque article, exactement comme chez les Basidiomycètes : ce mode a été entrevu par nous chez les £^xoascus ; il vient d'être décrit avec précision par Maire chez le Galactinia, succosa (1). 4» Les deux noyaux de l'asque se fusionnent comme ceux de la baside. Pour que la question de la sexualité des Ascomycètes devînt aussi claire que celle des Basidiomycètes, il fallait : A) Trouver la signification des organes décrits autrefois par de Bary sous le nom d'archicarpes et d'anthéridies. B) Chercher le nombre des chromosomes du noyau ; voir si ce nombre est constant dans le groupe. C) Indiquer Tendroit où se produit la réduction chro- matique. A Les organes décrits par de Bary représentent divers stades de transition du gamétange au gamétophore. Les gamètes, comme les conidies, sont portés, chez les Asco- mycètes, sur des appareils de forme variable qui provien- nent de la transformation, sous l'influence d'un change- ment de milieu, des sporanges et des gamétanges qui ca- ractérisent la fructification des Siphomycètes ; rien d'étonnant à ce qu'il existe encore quelques termes de pas- sage rappelant cette origine. Pour, bien comprendre les modifications qui se sont produites dans le mode de reproduction asexuel et le mode de reproduction sexuel, il faut avoir nettement présentes à l'esprit les relations qui rattachent le second mode au premier : lecfamétange dérive du sporange; il n'est qu'un sporange à spores affaiblies ; les gamètes sont des spores {{) Maire : Recherches cytologiques sur le Galactlnia s uccosa (Comp- tes rendus, Acad. Se, novembre 1903). 38 * P.-A. DANGEARD affa,niées^ incapables, dans les conditions ordinaires, de con- tinuer leur développement. Si le milieu agit d'une certaine façon sur l'un des modes de fructification et modifie la forme de l'appareil, son. ac- tion doit avoir une répercussion analogue et parallèle sur Vautre ; tout au moins, si elle a lieu, ne doit-on pas s'en étonner. Or, il en est bien évident que les Champignons supé- rieurs qui ont pour ancêtres les Siphomycètes, ont trans- formé, en passant delà vie aquatique à la vie aérienne, leurs sporanges en conidiophores. Si nous voulions rechercher par quelles transitions, nous serions porté àcroire que le renflement terminal du conidiophore, chez VAspergillus, rappelle le sporange primitif ; les spores, au lieu de con- tinuer à se former à l'intérieur de l'organe, sont devenues externes ; mais, déjà, dans ce genre Aspergillus, le renfle- ment peut diminuer jusqu'à disparition presque complète ; nous arrivons, par de nombreuses transitions, à un aspect voisin de celui qui nous est offert par le conidiophore des Pénicillium', si une seule chaînette de spores existe, comme dans les Erysiphe, l'ensemble des spores du coni- diophore correspond quand même à la totalité des spores d'un sporange. Nous trouvons une preuve de la justesse de ces con- clusions dans les considérations suivantes : Chez les Champignons supérieurs, l'asque seul a con- servé les caractères généraux d'un sporange ; l'oeuf des Ascomycètes germe directement en un sporogone ana- logue à celui des Cystopus. Chez les Basidiomycètes^ la baside en germant se comporte aussi tout d'abord comme un sporange ; le noyau de l'œuf subit plusieurs biparti- tions successives ; mais la transformation du sporange en conidiophore est commencée; les spores bourgeonnent à l'extérieur du renflement. Nous saisissons donc ici le pre- mier terme de passage du sporange au conidiophore. Si, NOTES DIVERSES 39 nous reportant au mode de reproduction asexuel, nous considérons le renflement de VŒdocephalum, nous constatons qu'il est encore plus voisin du sporange que celui des Aspergillus ; à vrai dire, sa parenté avec le sporange est la même que celle du conidiophore d'une baside. Puisqu'il existe encore des intermédiaires entre le spo- range et le conidiophore, qui nous permettent de suivre la marche de la différenciation de l'appareil asexuel, il n'est pas étonnant que nous trouvions encore des vestiges de la transfornicition du gamétange en gamétophore. Ce sont ces vestiges qui constituent les organes rencontrés au début du périthèce dans les Sphaerothecay les Erysiphe, les Monascws, les Pyronema. L'ensemble des spores d'une chainette à'Erysiphe, d'une tête conidifère d' OEdocephalum ou d' Aspergillus, d'un conidiophore de baside correspond évidemment à la tota- lité des spores d'un sporange ; de même l'ensemble des spores d'un ascogone, c'est-à-dire d'un gamétophore, cor- respond aux gamètes d'un gamétange. Si une copulation s'effectue entre ces gamètes, Vacte sexuel ne peut être contesté. Normalement, la copulation aurait dû avoir lieu entre gamètes portés par deux gamétophores développés aux dépens des deux gamétanges ; si ces gamétanges étaient restés indépendants, comme chez beaucoup d'algues ou comme chez les Monoblépharidées, il est probable que l'évolution aurait suivi cette marche naturelle. Mais, chez les Siphomycètes les deux gamétanges se mettent en relation directe : la communication qui s'établit entre ces organes n'a d'autre but que de permettre la réunion des gamètes ; avec la transformation du gamétange en gamétophore, ce phénomène devient sans objet: il pourra encore servir peut-être à assurer une meilleure nutri- tion de l'ascogone pendant quelque temps ; puis il dis- 40 P -A. DANGEARD paraîtra avec l'organe lui-même, au cours de l'évo- lution. Pour beaucoup de conidiophores, il est inutile de re- chercher les traces du sporange ancestral ; de même, pour beaucoup d'ascogones, il est impossible de retrou- ver aucun vestige du gamélange primitif : ce sont là choses ordinaires en évolution. Notre théorie s'appuie sur des observations nombreuses et précises: les phénomènes de karyogamie sur lesquels elle repose ont un caractère général ; l'interprétation s'adapte aux lois générales de la sexualité ; elle explique de la façon la plus naturelle les débuts du périthèce des Asco- mycètes qui pendant un demi-siècle ont été l'objet de dis- cussions passionnées entre des savants comme de Bary, Tulasne, Brefeld, Van Tieghem ; chacun d'eux tenait une parcelle de la vérité ; mais la solution définitive était liée à un progrès delà technique histologique; elle ne pou- vait venir qu'à son heure; peut-être même l'opposition qu'elle a rencontrée n'est-elle pas étrangère à sa mise au point exacte. B La détermination du nombre des chromosomes dans la division nucléaire des Ascomycètes semblait devoir être attribuée au professeur Harper. Ce dernier, en effet, a étudié avec beaucoup de soins cette division dans ÏEry- siphe vulgaris, VAscobolus furfuraceus, le Peziza, Steven- soniana, le Pyronema, confluens. Ainsi, à propos de VEry- siplie imlgaris, il dit : « Wenn die Tochterchromosomen auseinander rûcken und sich nach den Polen bewegen, gelingt es ziemlich leicht festzustellen, das ssie in der Zahl von je acht in jeder Spindelhalfte vertreten sind (1) »; (1) Harper: Kernth. und freie Zell, im Ascus (Jahr. f. Wiss, Botanik, Bd. XXX, p, 254). NOTES DIVERSES- 41 ce nombre huit se maintiendrait constant dans les trois divisions. Dans un autre mémoire, ce savant écrit à pro- pos du même stade dans VAscobolus farfuraceus et le Peziza Stevensoniana. : « In diesem Zustande ist est ziem- lich leicht festzustellen dass sie beiderseits acht an der Zabi sind, sowohl bel Ascoholus, wie bei Peziza (1). » Enfin, dans son récent travail sur le Pyronema confluens, nous lisons : « The larger nuclei in the first division in the ascus are by far the most favourable for this work, and I am of the opinion from a study of a large séries of cases that there are ten chromosomes présent at thiç; stage » ; il ajoute plus loin^, à propos de la division dans les hyphes ascogènes: « lam inclined to the view that the same numberthat is ten,is présent hère as in the divisions in the ascus described above (2). » Harper est donc très affirmatif en ce qui concerne les trois premières espèces : celles-ci posséderaient incontes- tablement huit chromosomes à leur noyau, tandis que le Pyronema confluens en aurait, selon toute apparence, une dizaine. En suivant le développement du périthèce dans VAsco- bulus fur/uraceus et le Pyronema confluens, nous avons été conduit a reprendre en détail l'étude de la karyoki- nèse dans ces deux genres; la fixation a été faite avec le liquide de Merkel, et les colorations ont été obtenues sui- vant le procédé de Flemming(safranine, violet degentiane, orange). Cette méthode est celle qui a été employée par Harper ; néanmoins nous arrivons à des résultats diffé- rents de ceux qu'il a obtenus. Tout d'abord, nous noterons la manière d'être de la centrosphère et du ccntrosome dans l'asque ; après la (1) Harper : Beiirag zur kennt der kernth. und Spor. im Ascus (Ber. d. Bot. Cxesell., Bd. xiii. 4895, p. 72). (2) Harper : Sexual Repr. in Pyronema confluens (Ann. of. Botany, V, XIV, p. 395). 42 P -A. DANGEARD seconde bipartition et la troisième, nous avons vu très nettement, pendant la période de repos du noyau, une sphère en contact avec la membrane nucléaire ; sa sub- stance, sensiblement homogène, se colore en bleuet se dif- férencie très nettement du cytoplasme ; au centre de la sphère, existe un nodule qui se colore en rouge comme le nucléole : c'est le centrosome qui ordinairement est unique; parfois cependant, il est fragmenté en plusieurs granulations. Nous n'avons pas suivi la bipartition de la centrosphère ; mais elle se poursuit sans aucun doute, car, à la prophase de la troisième bipartition, on retrouve deux corpuscules semblables à deux pôles opposés. Lors de la mitose, la substance bleue de la centro- sphère fournit les rayons de l'aster, et le centrosome, arrivé au contact de la membrane nucléaire, donne inser- tion aux pôles du fuseau; après la troisième bipartition, la centrosphère s'étend en calotte à la surface du noyau, prenant une part active à la différenciation des spores. Si nous examinons maintenant le fuseau au stade de la plaque équatoriale, nous trouvons seulement quatre chro- mosomes, au lieu des dix signalés par Harper. La détermination du nombre exact de chromosomes présente dans la circonstance une importance considé- rable ;«,ussi n'avons-nous rien négligé pour obtenir un résultat précis : nos numérations ont été effectuées avec soin sur de nombreux fuseaux aux trois mitoses succes- sives de l'asque; partout, avant le dédoublement de la plaque, il n'existe que quatre chromosomes. Dans VAscobolus furfuraceus, la mitose présente des ca- ractères généraux identiques à celle du Pyronenia, con- fiuens; le fuseau est plus ou moins parallèle à l'axe dans les deux premières bipartitions ; il est transversal à la dernière : or, à chacune des divisions, on compte quatre chromosomes au stade de la plaque équatoriale ; les figures pourraient être aisément confondues avec NOTES DIVERSES - 43 celles qui sont fournies par le Pyronema; toutefois, le nucléole est plus réduit. Le noyau des Pyronema et des Ascoholus possède donc quatre chromosomes, contrairement aux observations d'Harper. A la suite de ce résultat inattendu, nous avons examiné à nouveau d'anciennes préparations de Borrera cilia,ris et d'Endocarpon miniatum ; nous avons reconnu la pré- sence de quatre chromosomes soit au stade de la plaque équatoriale, soit au stade tonnelet ; la même constatation a été faite chez Y Ascodesmis nigrica,ns. L'existence de quatre chromosomes dans la division nu- cléaire a été reconnue par Maire chez le Ga,la.ctinia, succosa. On est donc en droit de penser que les Ascomycètes possèdent peut-être, comme les Basidiomycètes, [e même nombre de chromosomes dans toutes les espèces : ici ce nombre est quatre. Cette découverte a été faite simultanément et d'une manière indépendante par Maire et nous (1) : elle offre, semble-t-il, toutes garanties de certitude (2). C Le noyau de l'œuf de plusieurs Ascomycètes possède, comme nous venons de l'établir, quatre chromosomes dès sa première bipartition. 11 suOit donc, pour connaître l'en- droit où se produit la réduction chromatique, de trouver un bon exemple de mitose dans l'appareil végétatif; les divisions nucléaires qui précèdent la karyogamie sont, en effet, toutes du même type, sans aucun doute. (1) Séance de la Société mycologique de France tenue à Poitiers en octobre 1903. (2) Dans une note récente (Comptes rendus, Acad. se, n» 22, 1903), Guillermond indique le chiffre de huit chromosomes ou douze pour plusieurs Pézizées ; la vérificatioa de ce résultat offrirait un grand intérêt. 44 P.-A. DANGEARD Je ne puis ici apporter, à mon grand regret, que des probabilités, très sérieuses, il est vrai, mais non une affirmation catégorique, comme je l'aurais désiré. Il était tout indiqué de chercher à suivre les divisions nucléaires qui précèdent directement la formation' de l'asque chez le Pyvonema, confluens\ nous avons bien ren- contré quelques stades « tonnelet » qui donri'dient Vim- pression de quatre chromosomes ; mais la petitesse des éléments est telle qu'on craint toujours d'être le jouet d'une illusion, et disons mieux, d'une suggestion. Nous sommes disposé à considérer comme aussi pro- bantes d'anciennes observations sur le Sphaerotheca Casta- gnei : on se rappelle que nous avons signalé une mitose dans la cellule-mère du conidiophore de cette espèce. « Nous avons eu quelque peine à nous faire une idée sur le nombre des chromosomes, écrivions-nous ; certains aspects portaient à fixer leur nombre à quatre ; d'autres laissaient supposer un nombre plus élevé, qui était de huit environ (1). » Si nous avions finalement adopté ce der- nier chiffre, c'est qu'il correspondait à celui qui était attribué par Harper au noyau de l'asque des Erysiphs. En réalité, c'est bien le chiffra quatre qui représentait le nombre normal des chromosomes du noyau de la cellule- mère; l'autre provenait évidemment du dédoublement de la plaque équatoriale. Dès maintenant, nous nous croyons autorisé à ad- mettre que la réduction chromatique se produit, comme chez les Basidiomycètes, à la germination de l'œuf. Les véritables affinités des Champignons supérieurs ont été tellement obscurcies dans ces derniers temps qu'il est nécessaire de les exposer sous leur véritable jour : ce serait, pensons-nous, fermer les yeux à la lu- 1. P.-A. Dangeard : Second mémoire sur la reproduction sexuelle des Ascomycètes. (Le Botaniste, 5® série, p. 259). NOTES DIVERSES 45 mière que de ne pas accepter leur parenté avec les Asco- mycètes, surtout après les considérations qui précèdent! On sait que la sexualité a introduit dans le développe- ment des êtres vivants un stade gamétophyte qui s'est ajouté au stade sporophyte; ceis deux stades ne sont net- ment différenciés l'un de l'autre que si la réduction chro- matique a été retardée; le sporophyte possède alors 2 n chromosomes à son noyau ; c'est un sporophyte secon- daire qui a pris une importance considérable dans la plante supérieure (1). Mais si la réduction chromatique intervient à la germi- nation de l'œuf, le sporophyte conserve les caractères primitifs; il ressemble plifs ou moins au gamétophyte; tous deux sont d'origine primaire avec un noyau à n chromo- somes. Dans ces conditions, le gamétophyte se montre tel qu'il était à son apparition au cours de l'évolution : c'est une simple modification du sporophyte qui inter- vient en fin de végétation ; les deux états sont fréquem- ment réalisés snr le même thalle qui produit d'abord des sporanges, puis un mélange de sporanges et de gamé- tanges, et finalement des gamétanges exclusivement. Cette disposition est très marquée chez les Siphomy- cètes; il n'est pas étonnant que nous la retrouvions chez les Champignons supérieurs. Nous distinguerons, dans le développement de ces derniers : 1° Un stade sporophyte qui donne naissance à des coni- diophores, très variés comme forme, isolés ou inclus dans des appareils qui portent, selon les cas, le nom d'écides, de spermogonies, etc. ; 2" Un stade gamétophyte, qui intervient, comme tou- jours, en fin de végétation ; il produit des gamétophores 1. Consulter dans \e Botaniste les diverses considérations que nous avons développées sur la reproduction sexuelle et plus particuliè- rement notre théorie de la sexualité. 46 P-A. DANGEARD isolés ou inclus dans des appareils qui portent, selon les cas, le nom de périthèces, de chapeau, etc. Les gamétophores donnent naissance à des gamètes unis par deux : ce sont des « diplogamètes » ; leur réunion en une seule cellule constitue l'œuf. L'oeuf germe, comme celui des Siphomycètes, en un sporogone qui est un asque ou une basidé, c'est-à-dire un sporange ou un conidiophore. Le mélange des cytoplasmes est assuré chez les Cham- pignons supérieurs par les nombreuses anastomoses qui s'établissent entre les filaments du thalle. A PROPOS d'une lettre du professeur Harper relative AUX FUSIONS nucléaires DU « PyRONEMA GONFLUENS » par p. -A. Dangeard. La discussion au sujet de la sexualité des Champignons supérieurs se prolongeant outre mesure, nous avons pris, ainsi que nous le disions dans l'introduction de cette neu- vième série du Botaniste, la détermination d'écrire au professeur Harper pour le prier de revoir ses prépa- rations.Nouslui faisions part de nos nouvelles et récentes recherches sur les Erysiphées, qui confirment d'une ma- nière absolue nos anciennes observations sur le Sphae- Totheca. ; nous lui communiquions les résultats concor- dants obtenus avec les Pyronema et les Monascus ; nous insistions tout particulièrement sur l'importance de son témoignage, puisque toute une école s'est engagée à sa suite. Nous avons reçu la réponse suivante qui marquera né- cessairement une date dans l'histoire de la sexualité des Ascomycètes : NOTES DIVERSES 47 « Madison, États-Unis. Novembre 1903. « Dear Sir, € I am surprised that your study of Pyronema bas brougbt you to no more clear or satisfactory resuit and I am sure tbat a rea^y complète séries of préparations will show you ail tbe stages I bave figured. « Tbe form is a favorable one and is well worth careful and protracted investigation. I hâve never seen any évi- dence of degeneration in tbe nuclei of tbe antheridia which hâve fused witb tricbogynes. Tbe nuclei of tbe tricbogyne on tbe ofcber band can be casily found in ail stages of de- generation just as I bave figured tbem. Tbere is no de- generation of tbe maie nuclei and tbe copulation is just as I bave described it... » Cette réponse n'est pas telle que nous la souhaitions : le professeur Harper maintient les conclusions de son mémoire sur le Pyronema. : de notre côté, nous affirmons l'absence de fusions nucléaires dans l'oogone et l'existence dans l'antbéridie de dégénérescences nucléaires analo- gues à celles que nous avons reconnues dans le Sphae- rotheca Castagnei, VErysiphe Martii, VEryslp/ie Cichora- cearurn et les Monascus. Nous en sommes réduit à réclamer un arbitrage pour régler ce différend d'ordre purement scientifique ; il ne manque pas heureusement d'bistologistes capables d'en- treprendre un travail de cette nature, et de le mènera bonne fin. En attendant, nous demandons la permission d'exposer brièvement les raisons qui militent en faveur de notre opinion et permettent de l'accepter sans aucune réserve. 1° Harper a récolté son Pyronema sur des feuilles mortes. « Tbe substratum on which I bave found tbe Pyro- 48 P -A. DANGEARD nema. most abundant, makes it especially favourable for sectioning, the leaves or leaf mould offering little or no résistance to the microtome-knife. More trouble is some- times occasioned by diatoms, which were foud extremely abundant in the substratum in son^e cases and indicate the degree of moisture favoured by the Pungus(l). » Nous avons cultivé le Pyronema, sur un milieu artificiel d'agar-agar, dans lequel nous avions incorporé de la pous- sière de charbon ; nos récoltes étaient abondantes et vi- goureuses ; l'apparition des rosettes se faisait dès le troisième jour de la culture,etlespérithèces se montraient au bout d'une semaine. Il sutlisait de racler légèrement la surface du milieu nutritif pour enlever, sans aucune défor- mation, les nombreuses rosettes du Pyronema,, avec le mycélium qui les porte. Personne ne s'était placé jusqu'ici dans des conditions aussi favorables d'étude : nos maté- riaux ne renfermaient aucun corps étranger. Entre des échantillons de cett?. nature et des exemplaires mélangés à du terreau ou k des feuilles, aucun histologiste n'hésiterait un seul instant. 2° La fixation et la coloration des objets ayant été faites par les mêmes méthodes, il ne reste à envisager que la question d'aptitude professionnelle et la nature de la col- lection réunie pour l'étude du point controversé. Nous reconnaissons bien volontiers la valeur incon- testée dti professeur Harper comme histologiste ; mais, puisque nos résultats diffèrent des siens, il nous sera permis de faire observer que nous avons décrit une centrosphère là où il n'avait rien figuré : nous remar- querons en outre que nous avons rectifié sa description de la division nucléaire. Harper signalait une douzaine de, chromosomes dans le noyau de Tasque; nous avons pu montrer qu'il n'en existe que quatre seulement (2). {\ ) Harper : Sexual Reprod. in Pyronema (Ann. of Botany, v. XIV, p. 337). (2) Consulter le travail précédent. NOTES DIVERSES 49 Si nos descriptions ont été plus complètes et meilleures que celles d'Harper en ce qui concerne l'aaque et son contenu, il y a de fortes présomptions pour admettre que nos préparations valaientles siennes et que /'interprétation elle-mêrne ne comportait aucune infériorité. Sur le second point, nous nous expliquerons également très franchement. Nous ignorons l'importance de la collection de notre honorable contradicteur ; mais nous dirons on quoi con- siste la nôtre. Sans compter les préparations non durables faites dans un milieu glycérine, après colorations variées, nous pos- sédons plus d'une centaine de préparations durables, co- lorées par la méthode de Flemming (safranine, violet de gci'. liane, orange B).Dans chacune, il existe trois ou quatre rubans en séries continues d'une longueur de 30 à 40 mm ; chaque ruban contient en moyenne 100 à 150 sections d'oogones et d'anthéridies ; à 5 sections par oogone, cela représente un minimum de cent oogones et anthéridies par préparation. Au total un ensemble de 10.000 éléments de chaque sorte à tous les stades, depuis la naissance des rosettes, jusqu'à la production des périthèces, le tout tixé à différentes heures de la journée. D'autres prépara- tions durables renferment un grand nombre de rosettes entières. On nous concédera peut-être que cette collection est « really complète ». Nous ajouterons que toutes ces préparations ont été examinées, sans exception, avec un soin scrupuleux, de même que les préparations non durables, qui étaient supé- rieures en nombre. Nous sommes beaucoup plus à l'aise maintenant pour entrer dans la discussion des faits. Nous commencerons par prémunir contre une erreur possible ceux qui étudieront à nouveau le Pyronema : à 4 50 P -A. DANGEARD un moment donné, les noyaux de l'organe sont tous parié- taux ; le centre de l'organe est absolument dépourvu d'élé- ments nucléaires, puis, un peu plus tard, on aperçoit, au centre, des disQuesc/i?-omah'guesdont le nombre augmente peu à peu; ces disques sont constitués par des granules; ils ont tout à fait l'aspect d'une plaque équatoriale, soit qu'on les regarde de face, soit qu'on les observe de profil ; l'illusion est encore fortifiée par le fait que deux plaques ont fréquemment leurs faces parallèles et situées aune dis- tance variable l'une de l'autre. Nous avons pris ces for- mations au début pour des noyaux en division ; sans pouvoir affirmer que ces disques n'ont pas la significa- tion que nous leur avons attribuée à un premier examen, nous nous bornerons ici à manifester des doutes sérieux sur leur nature que nous discuterons plus amplement dans un prochain numéro. Parmi les points controversés, il en est un dont la solu- tion fournit immédiatement la clef du difficile problème posé dans ces pages. La cloison hasilaire se détruii-elle un instant en vue du passage des noyaux mâles pour se reformer ensuite, ainsi que le veut Harper ? Ou bien^ cette cloison est-elle persis- tante comme nous l'affirmons, après Kihlm9.nn ? La cloison qui se trouve à la base du trichogyne est une paroi épaisse, exactement semblable à celles qui sépa- rent les divers articles d'un thalle : elle est perforée comme chez beaucoup d'Ascomycètes ; ce pore central se retrouve avec les mêmes caractères dans la cloison des articles qui supportent les rosettes ; au bout de quelque temps, ce pore est recouvert par un bouchon d'une substance gélatineuse qui se colore par les divers réactifs nucléaires employés. Si cette cloison se détruisait, elle ne pourrait être rem- placée que par une membrane d'origine et de structure très différente. En effet, du côté du trichogyne, le cyto- NOTES DIVERSES 51 plasme, au moment de la prétendue migration des noyaux, n'existe plus qu'à l'état de substance inerte ; c'est donc au contact direct du protoplasme de l'organe que devrait se former la nouvelle cloison. Or, la première cloison est située au fond d'une sorte d'entonnoir constitué par la jonction du trichogyne à l'oo- gone ; la seconde devrait apparaître à l'ouverture même de l'entonnoir, c'est-à-dire en continuation directe avec la membrane de l'oogone. La destruction de la première cloison impliquerait un changement de position pour la seconde et aussi une modification de structure, la perforation n'ayant plus de raison d'être. Harper place ces deux cloisons au même niveau : la première, comme la seconde, continuerait directement la membrane de l'oogone (fig. 6, 10, 17, 18,29; PI. XlV-Pl. XX). L'erreur est manifeste : on n'a qu'à se reporter à la fig. 97 donnée par de Bary dans son Traité des champignons, on verra que la cloison occupe, comme nous venons de le dire, le fond d'une sorte d'entonnoir {A.), et cette dispo- sition persiste jusquk la production des filaments asco gènes (C). La preuve de la persistance de la cloison résulte : i° du fait qu'elle occupe toujours la même situation relative par rapport à V oogone et au trichogyne', 2° de ce qu'elle conserve la n'iême structure. Le premier point est acquis malgré les protestations d'Harper, puisqu'à notre témoignage s'ajoute celui de Bary lui-même; on notera simplement que l'ouverture de l'entonnoir formé par la cloison s'élargit avec l'augmen- tation de volume de l'oogone. En ce qui concerne le second point, nous venons d'in- (1) De Bary : Morphol. tind Biologie of the Fungi, traduction Garnsey-Balfour, Oxford, 1897, p. -^09. 52 P -A. DANGEARD diquer pourquoi une cloison de nouvelle formation serait dépourvue de pore central. Or, nous avons rencontré maintes fois la calotte gélatineuse chromatique qui recouvre le pore de la cloison à un moment où le contenu du tri- chogyne et de l'anthcridie était complètement désorga- nisé. Si Kilhmann n'a pas aperçu ce bouton chromatique aux derniers stades du développement de l'oogone, c'est qu'à ce moment le cytoplasme du trichogyne est ordinai- rement transformé lui-même, au contact de la cloison, en une substance gélatineuse chromatique. En résumé, il est parfaitement établi que Kilhviann avait raison lorsqu'il reconnaissait qu'aucune communica- tion directe ne se produit entre le contenu de Vanthéridie et celui de Voogone ; par suite, le mélange des noyaux dans Voogone et leur fusion par paires est impossible ; tout l'échafaudage élevé par Harper s'écroule, au risque d'atteindre non seulement l'auteur, mais ceux qui avaient mis leur confiance dans la solidité de l'œuvre. Nous arrêterions ici cette discussion, devenue sans objet, sans le désir que nous avons de guider ceux qui reprendront cette étude. I. — Harper estime à deux cents environ le nombre des noyaux contenus dans l'oogone et dans l'anthéridie ; les noyaux malts se fusionneraient par paires avec les noyaux femelles ; s'il existe une légère différence (slight différence) entre le nombre des noyaux de chaque organe copulateur, les éléments nucléaires surnuméraires se détruisent par la suite (1). Nous sommes d'accord avec Harper sur le nombre approximatif des noyaux de l'oogone; mais nous estimons que l'anthéridie n'en renferme guère plus d'une centaine. Une section longitudinale d'anthéridie renferme au maxi mum de 40 à 50 noyaux : celle de l'oogone en montre de (1) Harper : loc. cil., p. 353. NOTES DIVERSES 53 35 à 40 ; mais, tandis que l'oogone dans nos préparations fournissait cinq sections, l'anthéridie n'en donnait que deux tout au plus. Il y a là déjà une forte présomption en faveur d'une inégalité de moitié environ dans le nombre des noyaux de chaque organe ; mais nous comprenons trèis bien qu'on n'admette pas notre estimation sans plus ample informé ; aussi continuons notre examen. Déjà, Kihlmann avait décrit une anthéridie bifurquée en relation avec deux oogones; nous avons retrouvé un exemple du même genre, mais il ne prouve rien, parce que l'anthéridie dichotome avait une grosseur anormale- Il n'en est plus de même lorsqu'une anthéridie ordinaire est perforée par deux trichogynes appartenant à deux oogones différents et de grosseur normale ; dans nos cultures le cas était fréquent. Harper, qui n'a travaillé, semble-t-il, que sur des exemplaires enrobés dans la paraffine, n'a pas vu ces cas pourtant fort intéressants au point de vue du nombre différent des noyaux en présence. Nous sommes autorisé à conclure que Vinégalité entre le nombre des noyaux qualifiés de mâles et les noyaux consi- dérés comme femelles d'un système copulateur est telle- ment grande quelle ne 'permet pas de supposer une fusion par paires dans les conditions indiquées par Harper ; il resterait une moitié et peut-être même parfois les trois quarts des noyaux femelles inutilisés. II. — Selon Harper, les deux cents noyaux de l'anthé- ridie traversent toute la longueur du trichogyne, aban- donnant sur place le cytoplasme qui les contient (1). N'oublions pas qu'à ce moment les noyaux du trichogyne sont en complète dégénérescence ; le protoplasma du tube est devenu par suite de cette disparition en quelque sorte substance inerte ; il contient un réseau chromatique formé (1) Harper : loc. cit., p. 352. 4* 54 P. -A. DANGEARD par les débris nucléaires et « with the intlow ot" thèse antheridial nuclei, the entire protoplasmic contents of the tube become still further disorganised » (2). Qu'on veuille bien réfléchir sans parli pris à cette série d'invraisemblances ; deux cents noyaux, abandonnant le cytoplasme qui est la raison d'être de leur vitalité et chevauchant au travers d'une substance visqueuse en désorganisation sur une longueur qui atteint parfois 50 /J- et davantage. Sans entrer ici dans des détails qui trouveront leur place dans notre prochain mémoire, nous citerons une observation qui montre bien l'inexactitude de la descrip- tion d'Harper. Ce savant admet que les noyaux de l'anthéridie ont la viême grosseur et la même structure que ceux de l'oogone jusqu'au moment où s'opère la fusion. Il est très facile de se rendre compte du contraire ; la ressemblance d'aspect n'existe que pendant la période de croissance de la rosette; à ce moment le cytoplasme ren- ferme de nombreuses vacuoles de diamètre variable ; les noyaux sont disséminés un peu partout. Sitôt que les deux organes sont en relation au moyen du trichogyne, on voit des changements se produire en sens contraire. Le protoplasma de l'oogone perd ses vacuoles et prend une stucture réticulaire ; les noyaux se groupent en une assise très régulière sous la membrane ; d'un autre côté, les noyaux du trichogyne entrent en dégénérescence et le phénomène s'étend à ceux de l'anthéridie. Pendant que les noyaux pariétaux de Voogone augmen- tent de volume, épaississent leur membrane, chargent leur nucléole de chromatine, on voit, dans le même couple, les noyaux anthéridiens, réduits à Vétat de simple vésicule, avec un nucléole imperceptible qui disparaît finalement ; (2) Harper : loc. cil.^ p. 349. NOTES DIVERSES 55 le cytoplasme qui les renferme se creuse d'une ou deux grandes vacuoles centrales ; il s'accumule en croissant du côté du trichogyne dans lequel il pénètre plus ou moins avant; sa structure, qui était homogène, devient granuleuse, et les granules se dissocient avant de passer à l'état gélatineux, amorphe et chromatique. Ce stade, très caractéristique et très démonstratif, se rencontre très fréquemment pour l'excellente raison qu'il dure longtemps : aussi n'arrivons-nous pas à comprendre comment il a pu échapper à un observateur aussi sagace que le professeur Harper. Nous en sommes d'autant plus surpris que celui-ci a parfaitement vu dans le trichogyne la translormalion des noyaux en vésicules à membrane mince après disparition du nucléole; les noyaux de Tan- théridie se comportent exactement de la même manière; l'aspect est le même et il ne peut être confondu avec celui des gros noyaux 'pariétaux de Voogone. Harper a donc certainement commis une erreur en at- tribuant aux noyaux de Voogone et de l'anthéridie unmême diamètre, une même structure et une même destinée. III. — Il nous reste à examiner le prétendu stade des fu- sions nucléaires dans l'oogone. Si l'on en croit la description du savant américain, les noyaux femelles s'assemblent au centre de l'oogone, où ils sont rejoints par les noyaux mâles; aucun caractère ne permet de les distinguer ; la masse provenant de cette réunion est tellement dense qu'elle rend l'étude diffîcile ; on réussit cependant à rencontrer, sur les bords, des noyaux aux divers états de la conjugaison ; celle-ci opérée, lacloison basilairedu trichogyne se reforme et les noyaux se dispersent rapidement dans les hyphes ascogènes. Ici, nous sommes arrêté par une première difïiculté : nous venons de constater plus haut que, pendant une pé- riode assez longue du développement, les noyaux de Voogone sont disposés en couche pariétale : la proportion des 56 P.-A. DANGEARD oogones qui sont à cet état dans certaines de nos prépa- rations varie de 1/4 à 4/5 environ. On ne saurait parler d'exception, de castératologique, puisque nous assistons ensuite à une répartition progressive de ces noyaux dans tout le cytoplasme et à leur exode dans les filaments as- cogènes : dans nos cultures, la production des périthèces avait lieu très régulièrement. Comment se fait-il qu'Harper n'ait pas remarqué ce stade important entre tous par sa netteté et sa durée? Nous n'en voyons qu'une raison qui, en même temps rend compte des phénomènes d'agrégation signalés par Ilarper au centre de l'oogone. Si l'on immerge dans l'eau des rosettes de Pf/ronema,, les oogones ne tardent pas à différencier leur contenu en une couche externe homogène réfringente d'abord, incolore et aqueuse par la suite, tandis que le centre de l'oogone est occupé par une masse sombre granuleuse ; l'aspect est sensiblement celui qui a été figuré par Harper ; mais ce sont là des phénomènes qui entraînent la mort de l'or- gane, ainsi qu'il est facile de s'en assurer en continuant l'observation un certain temps. D'une manière générale, fimmersion dans l'eau du champignon apporte des trou- bles dans la structure normale : c'est ainsi que certains de nos échantillons ont été placés, à titre d'essai, dans l'eau avant la fixation : ils montraient des différences sensibles avec ceux qui avaient été fixés directement ; le cytoplasme ;etait plus granuleux, et la dispersion des noyaux dans l'oogone n'offrait plus la même régu- larité. L'action directe de l'eau, agissant par osmose, a pour effet de hâter la distribution des noyaux pariétaux de l'oo- gone dans tout le cytoplasme avant leur sortie dans les filaments ascogènes : prolongée un certain temps, elle pro- duit des accumulations irrégulières du genre de celles qui ont trompé Harper ; mais avec les conditions ordinaires NOTES DIVERSES 57 de végétation, la répartition des noyaux à travers le cyto- plasme est régulière et progressive. Dans un cas comme dans Vautre, les noyaux de Voogone restent parfaitement visibles et nettement indépendants ; la cloison basilaire du trichogijne n'est nullement absente ; elle occupe sa place ordinaire au fond de l'entonnoir ; les noyaux de V anthéridie ne pénètrent pas dans Voogone\ ils ont disparu dès le stade précédent qui n'a même pas été signalé par Harper, bien qu'il soit le plus long et le plus caractéristique. Il n'est pas inutile d'ajouter, en terminant cet essai cri- tique, que si nous avons employé les expressions d'an- théridies et d'oogones, c'est pour la commodité de la rédaction ; nous nous sommes expliqué suffisamment, dans l'article précédent, sur l'origine de ces organes, sur leurs transformations et leur rôle actuel : il vaudrait mieux sans doute reprendre les expressions de paracystes et de ma- crocystes usitées par les anciens auteurs. Si le renflement conidifère d'un OEdocephalum, si une baside no peuvent plus être considérés comme sporanges, le macrocyste du Pyronema n'est pas davantage un gamétange. Noue aurions sans doyte le droit, après nos recherches concordantes sur les Erysiphées, sur le Monascus, le Pyronema, de dire et de répéter que le professeur Harper a tort de persister dans sa manière de voir, qu'il rend un mauvais service à ceux qui le suivent et qu'il retarde ainsi l'adoption d'une théorie de la reproduction sexuelle des Champignons en accord avec les lois générales de la sexualité et de l'évolution. Nous préférons garder l'espoir que notre savant con- tradicteur reviendra de lui-même et prochainement sur ses affirmations, et nous l'en remercions d'avance très sin- cèrement et très cordialement. RECHERCHES SUR LE DÉVELOPPEMENT DU PERITHEGE CHEZ LES ASCOMYCÈTES RECHERCHES SUR LE DÉVELOPPEMENT DU PÉRITHÈCE CHEZ LES ASCOMYCÈTES Par P -A DANGEA.RD INTRODUCTION Nous avons donné à l'historique qui précède ce Mémoire une importance inusitée ; il nous a paru, en effet, que le moment était venu d'établir avec impartialité le rôle des nombreux mycologues qui se sont occupés, depuis un siècle, de rechercher les phénomènes de sexualité chez les Champignons supérieurs. Parmi ceux qui ont pris part à ce travail, digne des an- ciens, si l'on envisage sa durée et les difiicultés de tout genre qu'il présentait, un grand nombre, commeBuliiard, Tulasne, de Bary, ne sont plus là ; d'autres se sont retirés sous leur tente ; chez quelques-uns subsiste encore l'ardeur des luttes anciennes; beaucoup sont sur la brèche et n'abandonnent que lentement et progressivement leurs positions. Rien ne donne, en effet, si nettement l'image d'une guerre que les diverses péripéties qui se déroulent sous les yeux du spectateur ; il s'agit d'un agrandissement de territoire, celui de la science, d'une conquête qui sera la II INTRODUCTION découverte tant souhaitée ; nous y trouvons les mêmes alternatives de succès et de revers, le même acharnement dans la bataille : des trêves forcées sont suivies de sur- prises; les blessures sont graves, difficiles à panser, car elles intéressent l'amour-propre ; chaque adversaire s'at- tribue l'avantage et crie bien haut sa victoire ; celle-ci bien souvent n'a pas de lendemain. Au lieu de s'unir pour le triomphe de la vérité, on use malheureusement ses forces en tactiques savantes qui n'ont d'autre résultat que de disperser les efforts et de retarder les solutions inéluctables. Nous avons pris une part active aux nombreux engage- ments qui ont signalé la troisième période : là, nous ra- contons des souvenirs personnels; on s'étonnerait à bon droit d'y trouver le même caractère de sérénité que dans les impressions qui se rapportent à la première et à la seconde période ; tels qu'ils sont, ils constituent un docu- ment vécu, et c'est peut-être ce qui en fera le véritable intérêt. Le Mémoire lui-même est divisé en trois parties : dans la première, nous étudions les « ancêtres des Ascomycè- tes » ; dans laseconde, nous passons en revue « le dévelop- pement du périthèce chez un grand nombre de genres et d'espèces d'Ascomycètes » ; cette partie est de beaucoup la plus importante. Enfin, dans la troisième partie, nous donnons des « Considérations générales qui ont pour ob- jet de grouper les résultats et de mieux faire ressortir les principales conséquences de notre étude. L'étendue du Mémoire, le grand nombre de planches qu'il renferme, retarderont de quelques mois sa publica- tion complète, qui aura lieu en plusieurs fascicules dis- tincts: le dernier terminera la neuvième série du Bota- niste. HISTORIQUE La recherche de la sexualité chez les Champignons su- périeurs préoccupe depuis longtemps les mycologues et tous les amis de la science. Tandis que la plupart des organismes supérieurs et inférieurs livraient successivement les secrets les plus intimes du gynécée aux investigations heureuses de sa- vants tels qu'Amici, Pringsheim, Thuretet Bornet, Cohn, Van Beneden, Hertwig, Boveri, Maupas, de Bary, Nawas- chin, Guignard, le groupe des Champignons supérieurs résistait comme une forteresse inexpugnable aux efforts répétés de plusieurs centaines d'observateurs. L'histoire de cette lutte contre la nature qui se refuse à dévoiler ses mystères, est instructive à plus d'un titre ; afin d'en mieux faire saisir les différentes phases, nous distinguerons trois périodes. , I L'existence d'une sexualité chez les Champignons su- périeurs est déjà soutenue au xviii* siècle, mais avec des arguments notoirement insuffisants. C'est ainsi que Micheli considérait déjà à cette époque comme « fleurs apétales, nues, solitaires ou associées, formées d'un seul filament », les ampoules, désignées plus 1 60 JP.-A. DANGEARD tard sous le nom de cystides qui se rencontrent en parti- culier dans l'hyménium des Coprins (1). Hedwig rencontrant des spores tombées du chapeau sur l'anneau et les écailles du pédicelle, est trompé par cette apparence et il considère ces derniers organes comme le support des organes mâles (2). Jussieu, après avoir signalé les divergences de vue entre Micheli et Hedwig, n'hésite pas cependant à admettre l'existence d'une sexualité chez les Champignons : Tenui- tas pa,rtiu7n in prima, evolutione non finit nodwn plane solvere, sed observata phsenomena sexuum actionetn et analogiam cum. cœteris plantis confirmant {3). Parmi les opinions diverses qui vont se donner libre carrière dans cette première période, nous ne retien- drons que les plus importantes. On ne conteste guère le principe d'une sexualité ; mais on s'entend moins quand il s'agit d'en préciser la nature et le lieu d'élection ; les efforts des chercheurs se portent tout d'abord de préfé- rence du côté des organes de fructification : basides et cystides, asques etparaphyses. Bulliard écinvait en 1791 (4) : « Dans les Champignons, comme dans les autres végétaux, les rudiments des se- mences, les germes proprement dits, existent dans le lieu où ils doivent être fécondés ; ils n'y jouissent que d'une vie temporaire, puisque, s'il ne peut y avoir fécondation, ils périssent... Aune certaine époque, ils sont pénétrés d'un fluide tel que celui que renferment les grains de pollen. » Bulliard précise d'autre part l'origine de ce fluide (5) : « Tous les Champignons, dit-il, qui ont leurs graines situées à leur surface, Agarici, Boleti, etc., ont, (1) Micheli : Nov. PL Gen., 1729. (2) Hedwig : Theor. gêner, et fruct. plant. Crypt. Ed. 2. (3) Jussieu : Gênera Planlarum, p. 5. (4) Bulliard : Histoire des Cliamp.de la France, 1791, p. 12 et 36-37. (5) Bulliard: Loc, cil.) p. 39, fiO. HISTORIQUE Gl dans le voisinage de leurs graines, de petites vessies dans lesquelles est renfermé leur fluide spermatique ; à une certaine époque, ces vésicules fécondatrices se crèvent et répandent ce fluide sur les graines. » Cette théorie est fort ingénieuse ; aussi ne doit-on pas être surpris de voir beaucoup de mycologues considérer par la suite les ampoules de l'hyménium, baptisées par Léveillé du nom de cystides, comme des organes mâles ; ceux-ci sont désignés sous le nom d'antJières, anthëridies ou pollinides. Corda (1) les assimile aux organes du même nom chez les Mousses, les Algues, etc. Une connaissance plus approfondie de l'organisation des cystides, due à Hoffmann et à de Bary, devait amener une réaction dans les idées (2). Les partisans de la nature mâle des cystides admet- taient, à la suite de Bulliard, que ces organes déversent leur contenu à l'extérieur pour la fécondation des graines : l'action fécondatrice du liquide aurait eu pour effet de res' tituer à ces graines leur pouvoir germinatif ou simple- ment de l'augmenter. De Bary fait observer que les cystides ne s'ouvrent pas au dehors : si leur surface est humide ou porte parfois des gouttelettes, c'est une propriété commune à toutes les cellules mycéiiennes gorgées de sucs ; selon ce savant, les cystides doivent être rangées vraisemblablement dans la catégorie des poils (3). Chez les Ascomycètes, les spores sont formées à l'inté- rieur d'un sac qui est l'asque ; elles sont baignées de toutes parts par un liquide auquel Bulliard attribue le rôle d'agent fécondateur. Tulasne, parlant de la naissance des spores chez la truffe, (1) Corda : Icon. Fung., III, p. 44. (2) De Bary : Morphologie und Phi/siol. der Pilze, Leipzig, 1860, p. 170. (3) De Bary : Lac. cit., p. 171, 62 P.-A. DANGEARD s'exprime ainsi : « Les endospores, dès leur apparition, nagent dans un liquide fécondant {humore fœcundo) au sein duquel elles arrivent à leur état de perfection, bien qu'il n'existe jamais cependant la moindre adhésion entre elles et l'utricule mère (1). L'année suivante, Tulasne n'attribue au même liquide qu'un rôle nutritif; il est probable, dit-il, qu'il ne sert réellement qu'à l'alimentation des spores ; mais il s'em- presse d'ajouter : « Quoiqu'il en soit de l'opinion de Bul- liard, il ne conviendrait pas que les observateurs fussent détournés de la. voie des investigations qui tendraient a obtenir la preuve que les spores des truffes sont vraiment soumises à une fécondation quelconque, car c'est à regret que nous avouons ne pouvoir rien mettre à la place de son hypothèse (2). » Tulasne ne pouvait prévoir les phénomènes de karyo- gamie qui précèdent la formation des spores ; mais il avait une sorte de pressentiment que la fécondation de- vait se produire à ce stade du développement. En 1869, Bonnet croit encore à une fécondation s'opé- rant dans l'asque : « Les spores endothèques, dit-il, atteignent dans la cellule mère leur état de perfection ; or cette cellule étant dépourvue d'ouverture, il y a tout lieu de croire qu'elles sont fécondées par le liquide, au milieu duquel elles sont suspendues, puisqu'elles en sortent pourvues de la faculté de germer (3). » Corda croyait avoir rencontré, entre les paraphyses des Champignons thécasporés, de grandes cellules assez sem- blables aux asques, remplies d'un liquide granuleux et qui plus tard se vident : il les comparait aux pollinides des Hyménomycètes et leur attribuait un rôle identique ; il s'agissait tout simplement d'asques jeunes. (1) Tulasne : Selecla P'ungorum, t. I, p. 27, 1861. (2) Tulasne : Fungi hypogœi, p. 54, 1862. (3) Bonnet : La Truffe, Paris, 1869, p. 27. HISTORIQUE 63 De son côté, Hofmeister attribuait au Tuber sestivum une reproduction sexuelle analogue à celle des Sapro- légniées ; des filaments ténus, jouant le rôled'anthéridies, s'appliqueraient sur les asques pour les féconder (1) : ceux-ci seraient donc de véritables oogones ; les observa- tions ultérieures n'ont pas confirmé cette manière de voir. Les travaux de Tulasne ont un tout autre caractère scientifique, et s'ils n'ont pas abouti au résultat cherché, ils ont eu, du moins, des conséquences de la plus haute importance qui ont contribué à immortaliser le nom du célèbre mycologue français. Tulasne étudie d'abord chez les Lichens ces conceptales punctiformes qui avant lui étaient considérés tantôt comme des Champignons de l'ordre des Pyrénomycètes, tantôt comme des fructifications anormales (2) ; il les désigne sous le nom de spermogonies ; les corpuscules ténus produits par ces organes sont des spermaties. Tout en reconnaissant le peu d'analogie des spermogonies, quant à la structure, avec les anthéridies des Algues ou des Muscinées, Tulasne envisage avec faveur Topinion d'Itzigsohn, qui voit dans ces conceptablesles organes du sexe masculin chez les Lichens, et il cherche immédia- tement à appliquer cette théorie aux Champignons. La grande ressemblance des spermogonies des Lichens avec les Pyrénomycètes du genre Septoria porte ce sa- vant à soupçonner que ces petits Champignons ne sont pas, comme on le croit généralement, des productions autonomes, mais un simple appareil reproducteur d'une espèce fongine déterminée : Tulasne est ainsi amené à proposer une classification des organes reproducteurs chez les Champignons : il conserve le nom de spores aux (1) Hofmeister : Jahrb. f. wiss. Bot., II, p. 378. (2) Tulasne : Noies sur l'appareil reproducteur dans les Lichens et les Champignons (Ann. se. nat., Sesérie, Bot., t. XV, 1851). 64 P.-A. DANGEARD éléments les plus parfaits, ceux qui sont engendrés dans des thèques ; il appelle siT/iospores ceux qui naissent nus, c'est-à-dire de cellules linéaires stipitiformes analogues aux basides des Agaricinées : les séminules plus ténues, dont la germination est également acrogène, reçoivent le nom de spermaties. « Sans vouloir en aucune façon préjuger la nature et le rôle des spermaties, dit Tulasne, on ne peut s'empêcher de remarquer qu'elles précèdent les spores endothèques, de la même manière que les an- théridies des Fougères ou des Equisetum devancent la naissance des capsules séminifères de ces végétaux (1). » L'année suivante, Tulasne cherche à justifier par de nombreux exemples son opinion au sujet des Lichens (2). La recherche de la sexualité des Champignons l'ayant conduit à découvrir les diverses sortes d'éléments re- producteurs qui propagent une même espèce, il étudie avec ardeur les divers appareils de fructification dans un grand nombre de genres (3). Jusqu'ici Tulasne, n'avait reconnu l'existence de sper- maties que chez les Discomycètes et les Hypoxylées : une étude des Trémellinées lui montre que les Hyménomy- cètes ne sont point non plus privées de ces organes (4). Meyen, à propos des JEcidiolmn des Urédinées, avait émis l'hypothèse qu'elles représentaient peut-être l'appa- reil du sexe masculin chez ces plantes ; mais la plupart des auteurs, avec Bonorden, considéraient ces organes comme indépendants de Y/Ecidium qu'ils accompagnent. Tulasne, qui, dès le mois.de mars 1851, rangeait les Uré- dinées au nombre des Champignons pourvus de spermo- (1) Tulasne : Loc. cit., p. 380. (2) Tulasne : Mémoire pour servira l'histoire organogr. et physiol. des Lichens (Ann. se. nat. Bot., t. XVIII, p. 5 et 153). (3) Tulasne : Nouvelles recherches sur Vappareil reproducteur des Champignons (Ann. se. natur., Bot., t. XX, 1853, p. 129). (4) Tulasne : Observations sur l'organisation des Trémellinées (Ann des se. nat.. Bot., t. XIX, 1853). HISTORIQUE 65 gonies, indique, en 1854, dans un nouveau mémoire, les rapports si complexes des organes reproducteurs chez les Urédinées et les Ustilaginées (1). Ces remarquables travaux avaient ouvert à Tulasne les portes de l'Institut ; mais ce savant n'avait pas obtenu de résultats décisifs en ce qui concerne la sexualité des Cham- pignons, ainsi qu'il le reconnaît lui-même. « La plupart des spermaties, celles du moins qui sont très ténues ou finement linéaires, et qui sont par conséquent le mieux caractérisées, ne germent poiat ; par là, nous avons été conduit, écrit Tulasne en 1856, à leur supposer un rôle physiologique analogue à celui qu'ont les anthérozoïdes dans les autres végétaux cellulaires ; mais nous avouons que cette analogie est incertaine et n'a pas encore été suffisamment démontrée (2). » Dix ans plus tard, l'illustre mycologue de Bary, dis- cutant cette manière de voir au sujet de la sexualité des spermaties, laconsidère comme fort douteuse; sans doute, la formation des spermogonies précède celle des spores, mais on ne connaît aucun appareil femelle susceptible d'être fécondé par les spermaties : des écides d'Endo- phyllum Sempervivi ont pu en culture développer norma- lement leurs spores, en l'absence de toute trace de sper- maties. D'ailleurs, si ces derniers éléments ne germent point, c'est peut-être uniquement parce qu'on n'a pas su jusqu'ici trouver une méthode favorable (3). Dans le désir où l'on est de découvrir la sexualité des Champignons, on s'arrête complaisamment à toutes les hypothèses. Nous voyons de Bary décrire, à la suite des phéno- (1) Tulasne : Second mémoire sur les Urédinées et les Ustilaginées (Ann. se. nat., Bot., 4e série, t. II, p. 77). (2) Tulasne : Note sur Vappareil reproducteur multiple des Hypoxy- lées ou Pyrénomycètes (Ann. se. nat., Bot., t. V., 1856). (3) De Bary : Loc. cit., p. 168. 66 P.-A. DANGEARD mènes de conjugaison présentes par les Mucorinées, les anastomoses qui se produisent entre les sporidies pri- maires du Tilletia, celles de VUstilago receptaculorum et les spores du Proiomyces macrosporus ; il est vrai que ce savant a soin d'ajouter : « In vi^ieweit sich die drei letzt- beschriebenen falle den Copulationserscheinungen der Conjugaten, Mucorinen und mit diesen den sexuellen Zeugungen anschliessen, muss vorlaufig dahingestellt bleiben (1). i> L'idée d'attribuer un caractère sexuel à ces anasto- moses d'ordre végétatif aura des partisans jusque dans ces dernières années. Renonçant aux hypothèses précédentes, quelques au- teurs eurent Tidée de rechercher les phénomènes repro- ducteurs à la naissance même des appareils de fructification. C'est ainsi qu'en 1860, Karsten, selon de Bary {loc. cit., p. 72), avait déjà envisagé à ce point de vue les premiers développements du chapeau dans VAgaricus campestris; le même botaniste annonçait, en 1866, dans son Journal de Botanique, paru à Berlin, avoir observé, sur le mycé- lium de la Volvaire orangée {Amanitopsis vaginata), un organe femelle accouplé à des cellules cylindriques mâ- les (2) : le résultat de cette fécondation devait être la production du fruit ou jeune champignon. L'année précédente, (Ersted avait signalé quelque chose d'analogue sur le mycélium de VAgaricus varia- bilis (3) ; dans cette espèce, l'auteur avait découvert une cellule réniforme qui se développait sur le mycélium comme un rameau; cette cellule-œuf, riche en protoplasma, était entourée par deux organes filiformes mâles, nés à sa base et à côté d'elle. (1) De Bary: Loc. cit., p. i6^. (2) Karsten : Zur Befruçht. der Pilze {Bot. Unters., I, 1867, p. 160-169, PI. IX, fig. 7-12). (3) (Ersted : Actes de la Société royale danoise des sciences, 1865. HISTORIQUE ' 6"^ Si ces vues s'étaient trouvées justifiées et si elles avait pu être généralisées, l'appareil reproducteur des Hymé- nomycètes aurait été tout entier le résultat d'une féconda' tion. De Bary s'efforçait d'arriver à une conclusion de ce genre chez les Ascomycètes. FiG. 1. — D'après de Bary. En 1863, il décrit avec soin, en leur attribuant un carac- tère sexuel, les premiers stades du développement chez VErysiphe Cichoracearum. Le mycélium de VErysiphe Cichoracearum consiste, comme celui des autres espèces du genre, en filaments ramifiés qui se croisent et s'entre-croisent à la surface de la plante hospitalière ; au point de contact de deux fila- ments se produit le début d'un périthèce ; les deux fila- ments se renflent quelque peu et chacun émet un rameau perpendiculaire à lui-même ; le rameau du filament infé- (1) A. de Bary : Morphologie und physiologie ddr Pilze, Flechten und Myxomyceten, 1866, p. 162. 68 P -A. DANGEARD rieur prend une forme ovale et un diamètre double de celui du mycélium dont il se sépare à la base par une cloison : c'est la cellule-œuf p (fig. 1) ; l'autre, qui s'ap- plique intimement sur le premier, arrête sa croissance au sommet de la cellule-œuf et se sépare également du fila- ment qui lui a donné naissance; puis, une seconde cloison, voisine du sommet, détermine la formation d'une petite cellule terminale qui est Tanthéridie a (fig. 1). Après la formation de l'anthéridie, des changements se produisent autour de la cellule-œuf et dans cette cellule elle-même ; de nouveaux rameaux, au nombre de huit à neuf, se for- ment sur les filaments à la base de la cellule-œuf ; ils l'en- tourent étroitement jusqu'à son sommet où ils se rejoi- gnent; chacun de ces filaments recouvrants se divise par des cloisons en deux^ou trois cellules, et la paroi du péri- thèce se trouve ainsi constituée avec une assise unique. La cellule-œuf se divise alors en deux parties, dont une cellule centrale plus grosse qui deviendra l'asque et une cellule basilaire qui reste petite et stérile ; elles sont en- tourées directement par une assise le plus souvent unique de cellules formant la paroi interne du périthèce et pro- venant de la première. Les changements qui se produi- sent par la suite consistent en une augmentation de vo- lume du périthèce tout entier, dû à l'accroissement en diamètre des cellules qui le constituent ; des poils se montrent sur la paroi externe qui prend une couleur brune : finalement des spores se produisent à l'intérieur de l'asque. L'anthéridie reste longtemps reconnaissable, sans éprouver de modification appréciable ; elle devient indistincte, lorsque la paroi externe du périthèce se co- lore en brun. A. de Bary admettait à ce moment que la fécondation pouvait s'opérer par le simple contact de deux éléments de sexe différent : ces éléments étaient ici la cellule-œuf ou oogone et l'anthéridie, ainsi appelés par analogie HISTORIQUE 69 avec le s organes sexuels bien caractérisés découverts par Pringsheim chez les Algues et chez les Saprolégniées. Pringsheim avait en effet, dès l'année 1855, émis, dans un premier mémoire sur la fécondation des Algues, l'hy- pothèse que les spores immobiles des Saprolegnia pou- vaient être des œufs fécondés, et il considérait les ramifi- cations qui entourent l'oogone commedes anthéridies (1); dans un second mémoire très important (2), ce savant apporte des faits nombreux, probants, à l'appui de ses idées sur la reproduction sexuelle des Saprolegnia, : il signale également, chez le Pythiwm 7nonospermuvi, l'exis- tence d'anthéridies venant s'appliquer sur l'oogone et y déversant leur contenu par un petit appendice. A. de Bary ne tardait pas à attribuer le même rôle sexuel aux organes analogues qui avaient été décou- verts par Tulasne chez les Peronospora (3), et que celui- ci avait désigné du nom de fruits endothèques ; il donne d'excellentes figures de l'anthéridie et de Toogoïie non seulement dans les Peronospora, mais aussi dans les Cys- topus ; aussi est-on quelque peu surpris de la conclusion à laquelle il arrive : « Il est remarquable que, chez ces Champignons, le tube poussé par l'anthéridie opère la fécondation par le seul contact. Jamais son extrémité ne s'ouvre, jamais on n'y trouve des anthérozoïdes ; tout au contraire, l'anthéridie conserve, jusqu'à la maturation de l'oospore, l'aspect qu'elle présentait au moment de la fécondation (4). (1) N. Pringsheim : Monatsberitche der K. Académie d. Wissench. zu Berlin, mars 1855. (2) N. Pringsheim : Beitr. zur Morphologie und Systematik der Algen (Jahrb. f. wiss. Botanik, 1, 1 858, et Ann. se. natur. Bot. , 4e série, t. XI, 1859) . (3) Tulasne : Notes sur les Champignons entophytes, tels que celui de la pomme de terre (Comptes rendus de l'Acad. d. se, t. XXXVIII, juin 1854). (4) A. de Bary : Recherches sur le développem,ent de quelques Cham- pignons parasites (Ann. se. nat., Bot., 4^ série, t. XX, 1863, p. 17). 70 P. -A. DANGEARD Priiigsheim croyait, à tort du reste, que le contenu de Tanthéridie passait dans l'oogone sous forme d'anthé- rozoïdes ; A. de Bary, qui n'avait point réussi à voir de corpuscules mobiles dans l'anthéridie, en était arrivé à admettre la fécondation par simple contact. Le développement du périthèce des Erysiphe était bien propre, il faut le reconnaître, à donner l'illusion d'une reproduction sexuelle, surtout à une époque où les con- ditions de la fécondation étaient encore mal connues. De Bary songe bien à généraliser sa découverte, mais il avoue être dans l'impossibilité d'en fournir aucune preuve : « Nachden Erscheinungenbei Erysiphe liegtdie Vermuthung nahe, dass auch bei anderen Ascomyceten entweder das einzelne Perithecium, oder das meherere Perithecien tragende stroma, oder die entsprechenden Organe derDiscomyceten, Tuberaceen, etc. Producte einer geschlechtichen Zeugung sind. Beweise hierfur konnten jedoch bisher nicht gefunden werden (1). » A la fin de cette première période, vers 1866, les myco- logues ont à peu près épuisé toutes les hypothèses pos- sibles sur la fécondation des Champignons supérieurs, sans qu'aucune d'elles ait réussi à s'appuyer d'une obser- vation positive. De Bary lui-même, après avoir étudié VErysiphe, se montre fort perplexe quand il s'agit des Eurotium ou des Pyronema,. Ce savant avait découvert, en 1854, le filament enroulé en spirale qui donne naissance au périthèce des Eurotium ; mais, n'ayant pu suivre complètement tous les stades ultérieurs, il hésite à se prononcer : « Das ein hierher gehorender Vorgang (Befruchtung, Copulation) dabei stattfindet, ist jedoch nicht unwahrscheinlich (2). > L'illustre mycologue avait également signalé la pré- sence de rosettes précédant la formation de l'appareil re- (i) De Bary : Morph. und Phys., loc. cit., p. 164. (2) De Bary : Loc. cit., p. 163. HISTORIQUE 71 producteur dans le Pyronema. confiuens ; ces rosettes se montraient composées d'un certain nombre de rameaux unis par couple. N'ayant remarqué aucun changement dans ces couples, en dehors d'une augmentation de vo- lume, il laisse indécise la question de fécondation : « Ob undwle sie einer Befruchtung dienen, ist eine durchaus unentschiedene Frage (1). » En résumé, à la fin de cette période, dans laquelle les travaux de Tulasne tiennent une place prépondérante, on n'a pas réussi à sortir du domaine de l'hypothèse ; les diverses tentatives qui ont eu pour objet la recherche de la sexualité chez les Champignons supérieurs ont toutes échoué ; mais elles ont fourni une foule de notions nou- velles sur la morphologie et l'anatomie des organes, sur le développement des espèces et leurs affinités. Les diverses théories qui tendaient à placer l'acte sexuel à la formation des spores sur la baside et dans l'asque tombaient en défaveur, à cause de l'impossibilité où elles étaient d'alléguer la moindre trace de copulation où de fécondation. On ne peut toutefois s'y tromper : les mycologues d'alors, parmi les plus illustres, avaient mon- tré une préférence marquée pour les idées de Bulliard. Celui-ci avait fait preuve d'une sorte de divination qui n'est pas rare dans l'histoire des sciences, lorsqu'il écri- vait que, dans les Champignons, comme dans les autres végétaux, les rudiments des semences, les germes propre- ment dits, existent dans le lieu où ils doivent être fé- condés. Si quelqu'un avait pu soupçonner à ce moment que la formation des spores est toujours précédée dans l'asque et dans la baside d'un phénomène qui caractérise essen- tiellement la fécondation des animaux et des végétaux, c'est-à-dire d'une fusion entre éléments nucléaires de (1) De Bary : Loc. Gif., p. 164. 72 P.-A. DANGEARD parenté éloignée, ses idées auraient, n'en doutons pas, été acceptées avec enthousiasme, et personne ne lui au- rait marchandé son approbation et ses encouragements. Un siècle après BuHiard, cette découverte restera long- temps incomprise et discutée. Cette anomalie peut paraître étrange : elle tient à une foule de causes qu'il est inutile d'énumérer ; il sufîit d'in- diquer la principale, sans laquelle les autres eussent été impuissantes : elle consiste dans l'état des esprits au mo- ment où la sexualité des Champignons supérieurs se trouve établie. Il nous suffira, pour le comprendre, de suivre attentivement les diverses phases de la seconde période de cet historique ; elle s'ouvre sur un début plein de promesses et se termine, après des fortunes diverses, sur un échec retentissant. II Dans cette seconde période, de Bary, aidé par ses élèves, soutenu par toute une école qui s'est engagée résolument à sa suite, essaie de démontrer l'existence d'une sexualité chez les Ascomycètes en généralisant les résultats obtenus avec VErysiphe Cichoracearum. Dès le début, nous avons à signaler un mémoire de Woronin sur le développement de VAscobolus pulcherrî- mus (1). Ce savant nous fait connaître l'organe vermiforme des Ascobolus dont l'existence avait déjà été entrevue par Cœmans dans son Spicilège mycologique ; après en avoir donné une bonne description, appuyée par d'excellentes figures, il le compare à l'oogone des Erysiphe et le con- (1) Woronin : Zur Entiv. des Ascobolus pulcherrimus und einiger Pezizen. (Beitr zur Moi-ph. und Phys. der Pllze^ II, 1866), HISTORIOUE 73 sidère comme un organe femelle : les filaments recou- vrants auraient la valeur d'anthéridies. L'auteur envi- sage une seconde hypothèse qui consisterait à assimiler l'ensemble des filaments recouvrants aux cellules qui cor- tiquent l'œuf des Coleochaete ou celui des Chara, : il faudrait alors, dans ce cas, chercher ailleurs les organes mâles. Quoi qu'il en soit, Woronin admet difficilement que ce premier développement du fruit des Ascoboles puisse être rangé dans la catégorie des phénomènes purement végé- tatifs. Nous avons vu précédemment que de Bary s'était montré fort perplexe au sujet du rôle des rosettes dans le développement du périthèce, chez le Pyronema con- fluens, Tulasne reprend cette étude et il établit l'existence d'une anastomose entre l'extrémité du tube porté par le macrocyste et le sommet du paracyste ; à l'endroit de l'union, on observe une perforation circulaire, définie par un bourrelet à peine sensible ou au contraire très prononcé ; c'est le premier exemple d'une communication directe entre organes prétendus sexuels. Tulasne renonce à interpréter ce phénomène de copulation ; il constate seulement que les cellules conjuguées, la plus grosse sur- tout, se flétrissent et se vident pendant que se développe le périthèce (1). L'année suivante, Fuisting(2),étudiantle développement des Stictosphaeria, Diatrype, Eutypa, Quaternaria et les Xylariées, retrouve à l'origine^du périthèce un organe analogue à celui des Ascobolus : il le désigne sous le nom d'« hyphe de Woronin », sans se prononcer sur sa nature exacte et son rôle, (1) Tulasne : Note sur les phénomènes de copulations que présentent quelques Champignons (Ann. des se. nal.^ série V, t. vi, 1866, p. 217- 218). (2) Fuisting : Zur Entwick, der Pyrenomyceten (Bot. Zeit., 1867, p. 177 et 305). ^74 p. -A. DANGEARD Sachs, dans son Traite de Botanique, trouve une grande ressemblance entre les phénomènes décrits parWoronin chez les Ascobolus et la fécondation des Floridées (1) qui venait d'être découverte par deux savants français, Thuret et Bornet. Dans un second mémoire, Woronin étudie le Sphaeria. Lemaneae et les Sordaria (2). Le périthèce du Sphaeria a pour origine un filament mycélien qui se renfle en sphère à son extrémité ; cette sphère s'isole par une dloison : elle est remplie d'un protoplasme incolore et finement granu- leux avec une grande vacuole centrale ; sur cette sphère, viennent s'appliquer des filaments partant du même mycélium. Les choses se passent d'une manière identique dans le Sordaria fimiseda, où on peut observer la cellule renflée en sphère et ses filaments recouvrants six ou sept jours après le semis des spores. A la suite de ces diverses recherches, Woronin devient plus afïirmatif au sujet de la sexualité des Ascomycètes, et il donne son opinion en ces termes : « Hiergeht, meiner Meinung nach, wie ich schon oben sagte, ein Befruchtungact vor sich, wel- cherviel Aehnlichkeit und Analogie mit der Befruchtung der Florideen hat und sich mit der Zeit, bei weiterer sorg- faltiger Untersuchung, als eine allen Ascomyceten zu kommende Erscheinung bestatigen wird (3).» L'existence d'une sexualité chez les Ascomycètes com- mence donc à être envisagée sérieusement. De Bary s'était appuyé sur une réelle analogie entre les rameaux copulateurs du Sphaerotheca Castagnei et les organes sexuels des Péronosporées désignés sous le nom d'oogones et d'anthéridies. D'un autre côté, Sachs (1) Sachs: Lehrbuch der Botamk, 1868, p. 239. (2) Woronin : Sphaeria Lemaneae, Sordaria coprophilu, fimiseda, Arthrobotrijs oligospora (Beitr. zur Morph. und Physiol.,111, Frankfurt -a. M., 1870). (3) Woronin : Loc. cit., p. 20. HISTORIQUE 75 et Woronin en arrivent à comparer les phénomènes re- producteurs des Ascomycètes avec ceux des Floridées. Mais à ce moment surgit une grosse difficulté. On savait déjà, en effet, que chez les Pythium le contenu de l'an- théridie se déversait dans l'oogone ; on connaissait égale- ment, grâce aux travaux de Thuret et Bornet, le mode de copulation chez les Floridées : des anthérozoïdes immo- biles agissent sur l'oosphère par l'intermédiaire d'un long prolongement ou trichogyne. Or, rien de semblable n'était connu chez les Ascomycètes. De Rary avec sa science consommée ne pouvait manquer d'être frappé des lacunes que présentait sa théorie : il va s'efforcer de découvrir l'acte fécondateur destiné à mettre hors de doute la nature des prétendus organes sexuels. Cette entreprise est fatalementcondamnée àTinsuccès, car la sexualité des Ascomycètes se trouve à un autre stade du développement ; mais il est impossible de ne pas ad- mirer la conscience absolue qui préside aux investigations de ce savant : si le but poursuivi est chimérique, les résul- tats obtenus aux cours de cette recherche seront des plus remarquables ; ils éclaireront d'un jour nouveau la pro- duction des asques à l'intérieur du périthèce. Le mémoire dans lequel de Bary consigne ses observa- tions fait suite à celui de Woronin (1) ; il est également daté de 1870 ; mais il présente une grande différence ce- pendant au point de vue des idées générales. On peut affirmer sans témérité qu'avec le chapitre intitulé : «ï Re- marques sur la sexualité des Ascomycètes », la théorie du savant allemand atteint son apogée. Ledéveloppementde cette théorie s'appuie sur une étude minutieuse des Eurotiwm et des Erysiphe. Dans l'Euroiium, l'extrémité d'un filament s'enroule en plusieurs spirales, ordinairement cinq ou six, qui se rap- (1) De Bary ; Eurolium, Erysiphe Cicinnobolus nebst Bermerkungen uber die Geschlechtsorg. der Ascomyceten (Beitr., III, 1870). 2 76 P.-A. DANGEARD prochent les unes des autres en limitant un espace cylin- drique ou conique ; pendant l'enroulement, le filament reste simple, mais il se divise par de minces cloisons en plusieurs articles ; c'est alors qu'une ou deux des cellules qui occupent la base de la spirale donnent naissance a des rameaux recouvrants, ordinairement au nombre de deux; l'un des rameaux atteint le premier l'extrémité de la spirale sur laquelle il s'applique étroitement ; c'est alors que se produit l'acte fécondateur tant cherché : c( Zuweilen gelingt es deutlich zu sehen dass die Verbin- dung beider alsbald eine noch innigere w^ird, indem zwis- chen den Enden beider eine Copulation eintrit, eine Vers- chmelzung der protoplasmafuhrenden Innenraume durch Verschwinden eines circumpscripten Membranstuckes. » On sent toutefois que deBary n'est pas absolument certain de la réalité de cette copulation, car il a bien soin d'énu- mérer ensuite toutes les causes qui empêchent de la voir nettement. Tandis que les rameaux recouvrants, y compris le rameau copulateur, se ramifient pour fournir l'enveloppe du péri- thèce et ses assises stériles, la spirale déroule ses tours : de nouvelles cloisons transversales se forment, si bien que chacun des articles est à peine plus long que large. Ces articles bourgeonnent en nombreux rameaux qui se cloisonnent et se ramifient en pénétrant de tous côtés dans le tissu stérile du périthèce ; les asques sont constitués par les dernières ramifications. Le rameau contourné en spirale, qui fournit ainsi les asques, après copulation reçoit le nom d'ascogone ou de carpogone ; il représente l'organe femelle. Le rameau copulateur est désigné sous le nom de pollinode ; c'est l'organe mâle. En ce qui concerne le développement des Erysiphées, (1) De Btiry : Loc. cit., p. 7. • HIStORIQÙE 77 de Bary confirme l'exactitude de ses premières recherches dans leurs traits essentiels ; mais il applique aux organes sexuels ou prétendus tels la nouvelle terminologie: la cel- lule œuf devient l'ascogone, et le rameau miâle, un polli- node. Après une étude minutieuse du Sphaerotheca. Casta^ gnei, de Bary avoue qu'il n'a pu déceler aucune communi- cation entre l'ascogone et le pollinode : « Ihre Membran fand ich auch jetzt, wie schon friiher angegeben und nachher von Tulasne bestatigt wurde, ringsum geschlossen, eine Durchbrechung derselben und communication der beider seitigen Innenraume konnte nie undnirgends bemerkt werden. » La même conclusion est appliquée aux Erysi- phe :« Eine Verschmelzung, Copulation der beiderlei Or- gane konnte ich zu keiner Zeit nachweisen, so sehr ich auch danach suchte(l). » Avant d'en arriver à cet aveu, si défavorable à sa théorie, on peut supposer que de Bary avait épuisé toutes les res- sources de l'observation ; il donnait un bel exemple de probité scientifique. Si l'existence d'une fécondation était loin d'être démon- trée, un résultat remarquable était acquis : Tétude du pé- rithèce avait permis de reconnaître l'origine des asques aux dépens de l'ascogone dans les Eurotium et les Evysi- p fiées. De Bary fait observer avec raison qu'on ne peut assi- miler à des carpogones les organes vermiformes et les cellules vésiculeuses qui se rencontrent da^ns les Ascobolus et les Pézizes, tant qu'on ignorera leur rôle dans la forma- tion des asques. Deux points vont donc solliciter plus spécialement l'attention des partisans de la sexualité des Ascomycètes : phénomènes de copulation et origine des asques. (1) De Bary : Loc. cit., p. 31. (2) De Bary : Loc. cit., p. 37. 78 P.-A. DANGEARD En 1871, paraît le très beau mémoire de Janczewski sur VAscobolus furfuraceus (1) ; ce savant complète sur plu- sieurs points les observations de Woronin. Le corps ver- miforme ou ascogone est un gros rameau de mycélium qui.se recourbe en arc et qui se cloisonne en un certain nombre de cellules riches en protoplasme : sa croissance terminale cesse. Une branche remplissant les fonctions de pollinode se détache du mycélium au niveau du corps vermiforme : elle se ramifie et ses branches vont s'ap- pliquer étroitement sur l'extrémité libre du rameau femelle. Ce contact est suivi de la formation d'un grand nombre de ramifications qui partent des hyphes suppor- tant les organes sexuels et du mycélium adjacent : il se forme ainsi une sorte de tubercule de pseudo-parenchyme renfermant le corps vermiforme : les branches anthéri- diennes cessent à ce moment d'être visibles. Tandis que l'ascogone reste inclus dans la portion basilaire du tubercule, la formation des paraphyses se produit dans la portion apicale aux dépens d'une zone de petites cel- lules situées dans le tissu de l'enveloppe du tubercule. A ce moment une des cellules de l'ascogone se montre riche en protoplasme, alors que les autres épaississent leur paroi et s'appauvrissent : la cellule privilégiée, qui est ordinairement la troisième ou la quatrième de la série, donne alors naissance à des hyphes qui croissent dans la direction de la zone subhyméniale à paraphyses : ce sont ces hyphes ascogènes qui produisent les asques. Si le progrès de nos connaissances sur la sexualité et les phénomènes de fécondation ne nous permettent plus d'accepter le rôle de pollinode attribué aux filaments re- couvrants de l'ascogone, le mémoire de Janczewski n'en reste pas moins un des plus remarquables que nous ayons à citer dans cet historique ; avec des moyens d'investi- (1) Janczewski : Morph. d. Ascobus furfuraceus (Bot. Zeit., 1871). HISTORIQUE 79 gation bien inférieurs à ceux que nous possédons actuel- lement, il a réussi à élucider l'origine des asques dans un des cas les plus difficiles du développement des Asco- mycètes. Par contre, la question de la fécondation n'avait pas fait un seul pas. « Ob dort irgend wo eine Copulation stattfindet, konnte ich nicht bestimmen (1). » Sachs, après avoir rappelé dans son Traité de Botanique le résultat important obtenu par Janczewski, en conclut qu'on doit s'attendre à voir établir bientôt pour le Peziza confluons une pareille relation entre les asques et l'ap- pareil reproducteur femelle. Il insiste de nouveau sur l'analogie de ces phénomènes avec la fécondation et la formation du fruit chez les Floridées. La principale différence est que, dans les Floridées, les pollinodes sont remplacés par des cellules libres, qui se détachent de la plante et viennent se conjuguer avec l'appareil femelle. L'ascogone au contraire ressemble au trichophore dans tous les points essentiels, dans tous les points précisé- ment où tous deux diffèrent des oogones des autres Algues et Champignons (2). Cette même année, Gilkinet fournissait une bonne des- cription de l'ascogone du Sordaria fimicola : il croit à une reproduction sexuelle dans ce genre, mais avoue n'avoir pas vu de copulation (3). Chez les Eurotium, les Erysiphe et VAscobolus, le rôle d'ascogone est dévolu, comme nous venons de le voir, au rameau central, alors qu'on attribue la signification de pollinode ou de branches anthéridiennes aux filaments recouvrants. Dans le Gymnoascu Rseesii ,dont Baranetzky nous fait (1) Janczewski : Loc. cit., p. 273. (2) Sachs : Traité de Botanique, 3e édition. Traduction Van Tieghera, Paris, 1874, p. 362. (3) Gilkinet -.Recherches sur les Pyrénomycètes (Bull.Acad. Belge, 1874.) * , 80 P.-A. DANGEARD connaître le développement, les rôles des deux organes se trouvent renversés (1). Deux rameaux sont en pré- sence à l'origine du périthèce ;ils se développent au con- tact sur un même filament mycélien de chaque côté de la cloison qui sépare deux articles : l'un se renfle en une sphère qui présente à sa base une cloison : c'est \sl cellule stérile : le second rameau qui s'enroule autour de cette cellule constitue la cellule ascogène. Baranetzky constate qu'il n'a vu aucune communication directe entre les deux organes: «Einewirkliche Copulation findetaber nie statt,in- dembeideZellen immer volkommengeschlossenbleiben. » L'ascogone, lorsqu'il a atteint sa croissance définitive en longueur, se cloisonne en articles isodiamétriques : une ou deux de ces cellules se développent en branches courtes qui se ramifient abondamment et se cloisonnent : les derniers rameaux fournissent directement les asques ; ceux-ci renferment huit spores ; parfois cependant le nombre des spores est plus faible : il pourrait même descendre à l'unité dans quelques cas. Pendant que ces changements se produisent dans l'ascogone, de fines ra- mifications, qui sont nées de bonne heure à la base de la cellule stérile, s'allongent, s'entremêlent et arrivent à former une enveloppe plus ou moins lâche à l'appareil fructifère. Baranetzky, ayant remarqué que les deux rameaux copulateurs sont parfois exactement semblables, est disposé à rapprocher la sexualité des Gymnoascus de celle des Mucorineaeet de celle des organismes inférieurs isogames ; mais il insiste sur ce fait qu'il n'y a pas mé- lange des py^otoplasmes, mais seulem,ent échange par dios- mose au travers des membranes. On aurait ainsi rencontré chez les Ascomycètes une sexualité suivant le mode des Péronosporées, une autre (1) Baranetzky : Ent. d. Gymnoascus Reesii (Bot. Zeil., 1872). (2) Baranetzky : Loc. cit., p. 147. HISTORIQUE 81 d'après le type des Floridées, et une troisième rappelant celle des Mucorinées. L'accord semblait cependant sur le point de se faire au profit des idées soutenues avec tant de talent par de Bary ; les recherches deGibelli et de Griffini sur le déve- loppement du périthèce chez le Pleosporn herha-rum vien- nent jeter une note discordante (1). Dans cette espèce, le périthèce est formé par la différenciation qui se produit dans un tubercule primordial composé d'un pseudo- parenchyme homogène. Celui-ci se forme aux dépens d'une ou deux cellules mycéliennes adjacentes qui, sans montrer aucun arrangement fixe ou aucun changement dans leur contenu, se cloisonnent dans toutes les directions. Un faisceau de paraphyses naît dans la région basale du tubercule et à son intérieur, déplaçant et dissolvant le tissu environnant; plus tard, les asques apparaissent au milieu des paraphyses comme des branches de leurs cellules basilaires. Ces observations vont servir de point de départ à un mouvement de réaction puissant qui finira non seulement par mettre en échec la théorie de la sexualité des Asco- mycètes, mais qui réussira à obscurcir pour un temps l'importance des découvertes réalisées par de Bary et ses élèves. Au moment où les adversaires de la sexualité des Cham- pignons supérieurs vont multiplier leurs objections et leurs critiques, il est bonde savoir ce qui avait été fait du côté des Basidiomycètes dans cette première période si remplie par les travaux concernant les Ascomycètes. L'Académie des sciences avait mis la question au con- cours pour 1874 ; un mémoire étendu fut présenté par Sicard ; nous ignorons ce qu'il contenait exactement, (1) Gibelli et Griffini : Sul polymorphismo délia Pleospora herbarum (Archiv. del Labor. di Bot. Crittog. in Pavia, 1, 1873, p. 53). 82 P.-A. DANGEARD mais nous savons par le rapport de Brongniart que l'au- teur avait cherché à établir que des corpuscules, regardés par lui comme des anthérozoïdes, sortent de ces cystides et vont féconder les basides ; ce mémoire resté d'ailleurs inédit, avait le tort grave d'arriver en retard d'un siècle. Rien n'était venu confirmer ou infirmer les observations de Karsten et d'Œrsted, lorsqu'on 1875 Max Rees publia un mémoire dans lequel étaient exposés et figurés les résultats de ses observations sur le Coprinus stercora- rius (1). Sur le mycélium provenant de la germination d'une spore, l'auteur avait observé la formation de rameaux disposés perpendiculairement à ce mycélium et constitués par plusieurs articles; ces derniers produisent à leur surface un grand nombre de cellules très petites en bâtonnets auxquelles l'auteur attribue le rôle d'organes fécondants ou spermaties. D'autres filaments portant des cellules renflées auraient joué le rôle d'organe femelle ou de carpogone ; une ou plusieurs spermaties, venant se fixer sur la cellule supérieure du carpogone, déterminent la cellule basilaire, par cette fécondation, à donner successivement naissance à de nombreux rameaux qui finalement constituent la masse du fruit. La même année, en février 1875, Van Tieghem (2), ayant eu connaissance du travail de Max Rees, présente, de son côté, à l'Académie des sciences une note dans laquelle il expose le résultat de recherches entreprises sur les Copri- nus epheineroides eiradlatus et qui avaient mis en évidence à ses yeux la réalité d'une fécondation semblable à celle qu'avait décrite le savant allemand. Quelques mois s'étaient à peine écoulés, que Van Tieghem reconnut l'erreur commise par Max Rees et qu'il (1) Rees : Ucber den Befrucht. bei den Basidiomyceten (Jahrb. f . wiss. Bot., X, -1875, p. 179-199). (2) Van Tieghem: Sur la fécondation des Bdsidiomycètes. (Comptes rendus, LXXX, 1875, p. 373). HISTORIQUE 83 avait d'abord faiie sienne (1) ; les prétendues spermaties germent dans un milieu nutritif: ces organes ne sont donc pas des corpuscules fécondateurs mâles, mais une espèce particulière de spores, éminemment altérables et éphé- mères, des conidiee. C'est alors que Van Tieghem se montre un adversaire résolu de la théorie de de Bary : il la combat dans une série de notes qui se succèdent rapidement depuis la fin de l'année 1875 jusqu'à Tannée 1877. On sait que de Bary et ses élèves s'efforçaient de mettre en évidence une communication directe entre l'ascogone et le pollinode, mais que dans la plupart des cas ils étaient obligés d'admettre une fécondation par simple contact ou par échange osmotique. Van Tieghem prend dès le début une position tout autre et assez difTicile- ment explicable. Après avoir étudié le carpogone des Çhœtomium, il s'exprime ainsi au sujet des anastomoses : « Plusieurs fois j'ai vu, dit-il, un rameau émané de la base du carpogone non encore enveloppé^ s'anastomo- ser avec lui ; or, précisément, dans aucun de ces cas le carpogone n'a continué à se développer. Il semble donc que, lorsque, en vertu d'une propriété générale pos- sédée par toutes les cellules de la. plante, le carpogone vient a se copuler avec un rameau voisin, il se trouve par cela même stérilisé, ramené à Vétat végétatif, et que lune des fonctions du tégument est précisément de le protéger contre de tels accidents Ci). » Ainsi l'anastomose du pollinode tant cherchée, loin de remplir l'acte fécondateur, n'aurait eu d'autre effet que de stériliser l'ascogone, et Van Tieghem revient sur cette idée dans son dernier travail sur le déve- loppement de quelques Ascomycètes : « J'ai vu plusieurs (1) Van Tieghem: Sur le développement du fruit des Coprins (Comptes rendus, LXXXI, 1875, p. 877). (2) Van Tieghem : Sur le développement du fruit des Chaetomium (Comptes rendus, LXXXI, 1875, p. ilH). 84 p. -A. DANGEARD fois, dit-il, dans mes cultures cellulaires d'Aspey^gillus, une pareille anastomose avoir lieu entre l'une des premières branches couvrantes et le carpogone, soit à son sommet, soit en quelque point de sa longueur ; dans tous les cas observés, il y a eu, à partir de ce moment, arrêt de dévelop- pement du fruit (1). » Un second argument était tiré de l'existence d'Asco- mycètes monocarpogonés, c'est-à-dire dans lesquels le périthèce se développerait aux dépens d'un seul rameau primitif, sans autre différenciation, comme dans les Hel- vella, certaines espèces de Pézizes (2) et surtout les Asco- desmis (3) ; c'est par un bourgeonnement dichotomique, condensé et homogène, avec contournement et enchevê- trement des branches successives, que le carpogone sim- ple et nu des Ascodesmis donnerait naissance à la masse cellulaire fondamentale qui produit plus tard à sa surface d'abord les paraphyses, puis les asques. Nous n'osons insister outre mesure sur la valeur des diverses objections formulées ainsi par Van Tieghem ; ce savant, dont l'action a été féconde par ailleurs, a manifes- tement fait fausse route dans cette question de la sexua- lité des Champignons supérieurs ; les arguments qu'il opposait à la théorie de de Bary, ne reposaient que sur des observations trop superficielles ; rien ne le prouve mieux que l'attitude nouvelle qu'il adopta en présence des premiers travaux d'Harper ; il devint alors un chaud partisan des idées de de Bary qu'il avait combattues et un adversaire déterminé des nôtres qui apportaient ce- pendant la solution définitive du problème. (1) Van Tieghem: Sur le développement de quelques Ascomycètes (Bull. Soc. Bot. de France, t. XXIV, 1877, p. 99). (2) Van Tieghem: Nouvelles obseroations sur le développement du fruit et sur la prétendue sexualité des Basidiomycètes et des Ascomy- cètes (Bull. Soc. Bot., t. XXIII, 1876, p. 99). (3) Van Tieghem : Sur le développement du fruit des Ascodesmis Bull. Soc. Bot., t. XXIII, 1876, p. 270). HISTORIQUE 85 Un autre savant commençait à battre en brèche la sexualité des Champignons supérieurs (1) ; son action a été lente, méthodique ; elle s'est appuyée sur une étude extrêmement remarquable du développement chez un grand nombre d'espèces. Nous verrons plus loin, à la fin de cette seconde partie, les magistrales conclusions for- mulées par Brefeld ; si l'avenir ne les a pas justifiées, la faute n'en est pas à leur auteur, qui s'était entouré de toutes les garanties désirables ; la science parfois a de ces caprices ; elle sait néanmoins ordinairement dégager le mérite du chaos des controverses : les noms des deux rivaux Brefeld et de Bary resteront associés dans l'his- toire de la sexualité des Champignons. Maxime Cornu, de son côté, reprenait l'étude des sper- maties (2). Tulasne avait essayé de faire germer ces corps, et il avait éprouvé une série d'échecs ; aux caractères qui lui faisaient considérer ces éléments comme mâles, s'ajoutait donc le refus d'entrer en germination. Maxime Cornu obtint dans un milieu nutritif la germination d'un grand nombre de spermaties, et il en conclut que chez les Ascomycètes ces spores ne sont pas des organes mâles, mais très probablement les agents de dissémination des espèces à grande distance. On croyait en avoir fini avec les spermaties, en tant qu'éléments fécondateurs ; mais le moment est proche où ces corpuscules vont à nouveau occuper l'opinion. En 1877 se place un événement important au point de vue qui nous occupe. Stahl expose ses observations sur la reproduction sexuelle des Collema (3) : la fécondation serait opérée^ non par un pollinode, mais par des sper- maties. Tulasne avait cherché en vain un organe femelle (1) Brefeld : Bot. Zeitung, 1876, p. 56. (2) Maxime Cornu : Reproduction des Ascomycètes (Ann. d. Se. nat., série 6, t. III, 1876, p. 53). 3) Stahl : Beitr. z. Entw. d. Flechten, l, Leipzig, 1877. 86 p. -A. DANGEARD susceptible d'être fécondé par ces corpuscules ; or, d'après Stahl, cet organe existe chez les Collemacesie : il est con- stitué par un ascogone cloisonné, enroulé sur lui-même en peloton et situé à une certaine profondeur dans le thalle; une des extrémités libres se prolonge au-dessus de la surface en un trichogyne qui est fécondé par les sper- maties : flelles-ci contractent une anastomose avec le sommet du trichogyne ; à la suite de cette union, les cel- lules de Tascogone augmentent de volume et de nombre, et lorsque l'enveloppe du périthèce et les paraphyses pro- venant du mycélium adjacent ont atteint un certain état de développement, les cellules de l'ascogone bourgeonnent les hyphes ascogènes. Borzi répète les observations de Stahl en choisissant d'autres espèces de Collemacea,e, et il arrive à des résul- tats identiques : il cherche ensuite à appliquer le même mode de sexualité aux Ascobolées ; mais sa tentative est loin d'être heureuse (1). Une reproduction par trichogyne et spermatie est éga- lement attribuée par Pisch aux Polystigma rubrum et P. fulvum (2). ■ Les spermogonies ressemblent à celles des Collema, dans leur structure ; elles donnent naissance à des spermaties filiformes arquées. Les périthèces débutent par un petit tubercule, composé de filaments mycéliens entrelacés, tous semblables d'apparence et sans aucune différenciation : plus tard, au centre apparaît un filament cloisonné com- posé de cellules larges et presque isodiamétriques ; il fait deux ou trois tours à l'intérieur du tubercule, et l'une de ses extrémités se relève, traverse le mycélium et arrive à la surface de la feuille en passant par l'ouverture d'un stomate : c'est le trichogyne. L'auteur a vu des spermaties (1) Borzi : Studii sulla sessualita degli Ascomicete (N. Giorn. Bot. Ital.,X, 1878, p. 43). (2) Fisch : Zur Entw. einiger Ascomyceten (Bot. Zeit., 1882, p. 851). HISTORIQUE 87 adhérer à l'extrémité du trichogyne, mais sans réussir à apercevoir une véritable conjugaison : « Die Befruchtung konnte nicht constatirt werden », écrit Fisch (1). Le tri- chogyne meurt, se détruit, alors que le périthèce s'élar git. Dans le Polystigma rubrum, les choses restent en l'état tout l'hiver, alors que le développement se poursuit sans interruption dans le P. fulvum, où l'ascogone donne finalement des hyphes ascogènes aux dépens de toutes ses cellules, si l'on en juge par les apparences. Ainsi donc le Polystigma, montre un appareil reproduc- teur semblable à celui des Collema. ;' malgré cela, le souci de l'exactitude est tel chez de Bary et ses élèves que Fisch, n'ayant pu constater une fécondation directe, n'hé- site pas à reconnaître que la question de la sexualité des Polystigma, n'est pas résolue : « Die Frage nach der Sexualitat dièses Pilzes ist nicht erledigt (2). » Fisch étudie encore le développement du périthèce chez le Xylstria pohjmorpha,, le Claviceps purpurea et les Cor- dyceps. Il retrouve chez les Xylaria le peloton central de fila- ments que Fuisting avait désigné sous le nom d'hyphes de Woronin ; cette formation représente bien un ascogone, mais celui-ci n'est plus fonctionnel ; il se détruit et les asques naissent aux dépens du tissu stérile. Chez les Cla- viceps^ il ne reste plus aucune trace des organes sexuels, et les asques prennent naissance d'une manière purement vé- gétative aux dépens du tissu périthécial. Nous devons souligner l'importance des conclusions formulées par Fisch à la fin de son mémoire : elles mar- quent une orientation nouvelle des idées ; les partisans de la sexualité des Ascomycètes vont renoncer à l'éten- dre à toutes les espèces : ils se résignent à admettre (1) Fisch : Loc. cit., p. 861. (2) Fisch: Loc. cit., p. 894. 88 P.-A. IDANGEARD l'existence de nombreuses espèces complètement apoga- mes : « Wenn ich mit wenigen Worten die im Vorigen erorterte Anschauung zusammenfasse, so besteht si da- rin, dass ich in den zusammengesetzten Pyrenomyceten eine Reihe erkenne, deren Formen von vollig sexuell dif- ferenzirte (mit Ascogon, Trichogyne und Spermatien ver- sehenen) zu ganz apogamen regressiv sich fortbilden^ um in solchen, die parenchymatische Perithecien bildung erwar- ben, eine selbstandigeWeiterentwickelung zuzeigen (1). y> Un mémoire récent de Brefeld n'était pas étranger sans doute à ce revirement. Brefeld venait en effet de publier le fascicule IV de son magnifique ouvrage « Botanische Untersuchungen uber ScHiMMELPiLZE ». Nous trouvous dans le chapitre inti- tulé : Bemerkungen zur vergleichenden Morphologie der Ascomyceten, la première réfutation vraiment sérieuse de la théorie de de Bàry. Brefeld fait remarquer tout d'abord que les éléments fertiles se montrent suivant les genres à divers stades du développement du périthèce et suivant des modes diffé- rents (Chsetomium, Peziza,, Rhyparobius, Aspergillus): ce sont pour lui de simples variations sans importance qui se rencontrent également au début des conidiophores ; ceux-ci naissent en effet, tantôt aux dépens d'une seule hyphe {Aspergillus, Pycnis), tantôt avec un faisceau de filaments {Cordyceps cinerea). Il appelle aussi l'attention surl'existence simultanée chez les Sordsiria de spermaties analogues à celles qui fécondent le trichogyne des Collema et d'un organe mâle réduit à l'état de prétendu pollimode; il pose la question de savoir s'il existe dans tout le règne végétal un seul exemple d'une plante possédant à la fois des éléments mâles d'une nature aussi différente qu'une spermatie et un pollinode. (1) Fisch : Loc. cif., p. 901* aiSTORIQUE 89 La différenciation en une partie stérile et une partie fer- tile, qui se produit à la naissance du périthèce chez plu- sieurs Ascomycètes, ne constitue pas aux yeux de ce sa- vant une présomption de sexualité, car chez les Mortie- rella, au moment de la fructification asexuée, on trouve quelque chose d'analogue. Il faut convenir que nous sommes ici en face de la partie la plus délicate de la controverse et que l'explication de Brefeld est manifeste- ment embarrassée et insuffisante. Quant aux anastomoses, en admettant qu'il s'en produise parfois entre l'ascogone et le poUinode, elles ne prouve- raient rien, constate l'éminent mycologue, car on en ob- serve fréquemment de semblables entre organes de nature purement végétatifs. Que si l'on voulait admettre l'homologie des trois sor- tes de fructification des Ascomycètes avec la reproduc- tion des Champignons inférieurs et des autres Thallo- phytes, il faudrait considérer les conidiophores comme constituant la reproduction asexuelle ; les spermogonies et les périthèces représenteraient la génération sexuelle. Mais, du fait que la fructification ascosporée se déve- loppe en l'absence d'acte sexuel, il faudrait supposer la disparition des caractères femelles ; les spermaties seules auraient conservé, dans leur inaptitude à la germination, un reste des caractères mâles. A l'appui de cette idée, on pourrait citer un grand nombre d'exemples fournis par les Champignons inférieurs ; azygospores des Mucorineae, spores des Saprolégniées, etc. Pour Brefeld, l'asque joue le rôle d'une sorte de fanal dans le système entier des Champignons ; par lui et le sporange, dont il n'est qu'une manière d'être, se trouve réalisée la transition avec les Mycètes inférieurs, alors que la conidie qui représente une transformation du spo- range établit le passage aux Mycètes supérieurs. Brefeld fait même une comparaison à laquelle nos der- 90 P.-A. DANGEARD nières observations ont donné une portée considérable : il compare la formation des conidies sur le conidio- phore des Pénicillium à la production des asques sur les hyphes ascogènes du sclérote ; ce sont, dit-il, deux fructifi- cations homologues : « deren Wesentlichster Unterschied darin bestehht, dass im einen Falle die Conidien Ascen- sind und die Sporen endogen bilden, dass im andern Falle der Ascus zur Conidie geworden ist (1). » Ce savant, rendons-lui cette justice, ne pouvait guère aller plus loin dans cette voie; qu'on se reporte à nos observations, et on verra combien il était près de la vérité ; il reconnaît Véquivalence du conidiophore et du gaméto- phore ; il ne lui manque que de signaler la même parenté entre le sporange et le gamétange. Dès lors, Brefeld aurait eu l'explication de la présence, dans quelques cas, des deux gamétanges ancestraux à la base du gamétophore. Ignorant les phénomènes de karyogamie qui se pro- duisent entre les diplogamètes, Brefeld en serait resté, il est vrai, à la conclusion d'une apogamie générale dans le groupe des Ascomycètes. La théorie de de Bary venait de subir un rude assaut ; elle ne s'en relèvera que mutilée et diminuée ; ses meil- leurs partisans seront obligés de restreindre de plus en plus les cas de véritable sexualité pour se rejeter sur une simple homologie des organes, avec extension croissante des phénomènes d'apogamie. On n'osera même pas affirmer l'existence d'une fécon- dation dans les cas qui pourtant semblent le mieux s'y prêter, tel le Pyronema confluens, par exemple. « Tulasne avait réussi, en 1866, à observer l'union de l'extrémité du tube porté par le macrocyste avec le para- cyste voisin ; il existe à cet endroit une perforation cir- culaire, définie par un bourrelet à peine sensible ou, au (1) Brefeld -.Loc.cit., p. 152. HISTORIQUE 91 contraire, très prononcé ; mais Tulasne s'était refusé à donner une interprétation du phénomène. En 1883, Kihlman reprend cette étude (1) ; selon lui, les macrocystes et les paracystes proviennent d'hyphes sé- parés : ils se mettent bien en communication directe au moyen du tube connecteur, mais, avant que la fusion soit effectuée, une cloison se produit à la base du tube, de telle sorte qu'un mélange direct du contenu du paracyste avec celui du macrocyste est impossible. Kihlman pense qu'une diffusion de substance peut se produire au tra- vers de la cloison basilaire effectuant la fécondation ; mais il reconnaît que ce n'est là qu'une simple hypothèse. Ce savant découvre l'origine des hyphes ascogènes : les macrocystes, après avoir augmenté considérablement de volume, donnent naissance à des branches qui se cloi- sonnent et se ramifient dans le tissu stérile, se compor tant comme les filaments engendrés par l'ascogone chez les Ascobolus. Si Kihlman hésite à se prononcer sur l'existence ou l'absence de fécondation, il admet du moins l'homologie complète des organes, dans le sens indiqué par de Bary : ainsi le macrocyste représente un ascogone, le para- cyste est une anthéridie, et le tube connecteur un tricho- gyne, comparable à celui des Collema-, la question de savoir si ces organes sont encore fonctionnels reste indé- cise, car la parthénogenèse et Tapogamie sont, ainsi que le reconnaît l'auteur, des phénomènes ayant une grande extension. En cette même année 1883, Eidam publie deux mé- moires dont le dernier surtout offre un intérêt parti- culier. • Dans le premier (2), le savant reprend l'étude des Gym- (1) Kihlman : Zur Entw. cl. Ascomyceten (Act, Soc. se. Pennicae, XllI, Helsingfors, 1883.) (2) Eidam : Beitr. d. Gymnoasceen (Cohn's Beitr. z. Biol,, III, p. 271). 3 92 P.-A. DANGEARD noascus ; il indique le développement des G. Reesii Ba- rat., G. ruber V. Tieg. et G. uncinatus sp. nov., ajoutant quelques détails à ceux qui avaient été fournis par Bara- netzky ; il donne ensuite une description très complète d'un nouveau genre rencontré sur des plumes, le Cteno- myces serratus, qui doit prendre place dans la famille des Gymnoascées. Eidam ne réussit pas plus que Baraneztky à observer une communication directe entre l'ascogone et la cellule stérile qui se trouvent à l'origine du périthèce, et il se montre très réservé dans ses appréciations sur la sexualité de ces Champignons. C'est pourtant à Eidam qu'est échu l'honneur d'avoir découvert un genre dans lequel la copulation des deux rameaux est complète et a réellement la signification d'un acte sexuel nettement caractérisé (1) ; c'est le pre- mier exemple que nous ayons à citer d'un Ascomycète dans lequel les gamétanges sont encore fonctionnels et donnent naissance à l'œuf sans se développer en gamé- tophores. h'Eremascus albus possède un mycélium cons- titué par des filaments cloisonnés : pour former l'asque, deux articles adjacents d'un même filament émettent de chaque côté de la cloison un rameau court : les deux rameaux s'enroulent en spirale l'un sur l'autre, cessent de croître, se cloisonnent à leur base, et entrent en com- munication à leur sommet. Le protoplasme des deux rameaux s'accumule à l'endroit de la fusion en une vé- sicule sphérique qui s'entoure d'une membrane et donne naissance plus tard à un asque renfermant huit spores. Parfois, il n'existe qu'un seul filament donnant à son som- met un asque normal ; mais celui-ci serait alors d'origine parthénogénétique et non sexuel. Suivant Eidam, VEre" mascus albus établit le passage entre les Mucorineae et (1) Eidam : Z. Kennt. d. Eut. d. Ascomycelen (Cohn s Beitr. Biol.j III, p. 377). HISTORIQUE 93 es Ascomycètes ; tout le fruit est réduit à un seul asque produit directement par deux filaments copulateurs. Il nous faut signaler ici les recherches de Zukal (1), qui étudie les premiers développements du périthècedans les Thelebolus stercorarius^ Chaetomium crispatum, Peziza sp., Euro tium herbariorum et Ascodesmis nigricans ; il ne constate, dans aucun cas, la présence d'organes sexuels ; à propos de VEurotium, il fait même cette observation intéressante que parfois les asques se développent libre- ment, non seulement sans poUinode, mais encore sans aucun filament recouvrant. Zukal rencontre chez une Pézize indéterminée, au début du périthèce, des filaments noduleux qui rappellent ceux que nous avons décrits dans V Ascophanus ochraceus ; il en tire cette conclusion : « Die erste Fruchtanlage ist demnach in diesem Palle stets das Product mehrerer und allem Anscheine nach Volkommen gleichartiger Hyphen (2), » Zukal combat l'idée d'une sexualité chez les Asco- mycètes, en s'appuyant sur diverses raisons (3) : 1" la grande variabilité de l'appareil initial ; 2^ le fait qu'un périthèce provient, dans une même espèce, soit d'un ascogone, soit de plusieurs ; 3° la constatation que dans une même espèce l'ascogone peut disparaître complè- tement, les hyphes ascogènes prenant alors naissance aux dépens d'hyphes renflées et riches en protoplasme ; il attribue au filament stérile un rôle nourricier à l'égard du filament fertile porteur d'asques. Dans ce même mémoire, Zukal signale un développement du Pénicillium crusta- ceum, très différent de celui qui a été décrit par Brefeld : (1) Zukal : Mycologische Vyxters. (Denk. d. Kais. Akad. d, Wiss. zu Wien.,51, 1886, p. 21). (2) Zukal : Loc. cit., p. 26. (3) Zukal : Ueber einige neue Pilz formen und ûber daè Verbal tniss der Gymnoascen xu den ûbrigen Ascomyceten (Berich. der Deut. Bot. Gesell., 1890, Bd. 8, p. 298). 94 p. -A DANGEARD au lieu des deux rameaux enroulés, par lesquels débute le sclérote, on trouverait des éléments semblables et de même valeur (1). L'existence de l'ascogone des Chaetomium a été fort contestée, surtout par Zopf (2) ; Oltmannsdonneune excel- lente description de celui du Ch. Kunzeanum (3) : la spi- rale de l'ascogone se divise en un complexe de cellules dont une partie se détruit, alors que les autres donnent naissance aux asques. Il ne nous reste plus, pour terminer cette seconde par- tie de notre historique, qu'à mettre en présence partisans et adversaires de la sexualité des Champignons, repré- sentés par leurs organes les plus autorisés. En consul- tant les traités généraux de Van Tieghem, de Zopf, de de Bary et l'œuvre de Brefeld, nous dégagerons l'impres- sion générale qui régnait dans les laboratoires et dans le monde scientifique, au sujet de cette question de la sexualité des Champignons, au moment où vont com- mencer nos propres recherches. La seconde édition du Traité des Chaynpignons de de Bary paru en 1884 nous montre quel avait été le chemin parcouru par ce savant durant cette seconde période ; en réalité, on assiste à une retraite en bon ordre. Il ne pouvait plus être question d'étendre les phénomènes de fécondation à tous les Ascomycètes, ainsi qu'on était dis- posé à le faire à la suite des premières recherches effec- tuées sur VErysiphe Castagnei. De Bary le reconnaît avec la plus entière bonne foi ; il est même amené à ne parler de copulation que pour trois ou quatre espèces, comme l'Eremascus, le Pyronema, les Eurotiwn, les Collema ; et encore s'empresse-t-il de faire certaines réserves en ce (1) Brefeld : Loc. cit., II. (2) Zopf : Monog. du genre Chaetomium (Nova Acta, Bd. 42, n° 5, 1881). ^3) Oltmanns : Ûebei- die Enlw. d. Perith. in d. Chaetomium (Bot. Zeit., 1887). HISTORIQUE 95 qui concerne plus spécialement les Eurotium ; mais il ne transige pas sur la question de l'homologie des organes ; il considère partout l'archicarpe comme un organe fe- melle, Tanthéridie ou les spermaties comme des éléments mâles. Admettant sans difficulté que dans la plupart des cas ces organes ne sont plus fonctionnels, il arrive à con- céder qu'un très grand nombre d'Ascomycètes ont perdu la sexualité et sont devenus apogames. Parti d'un point de vue très différent de celui de Bre- feld, il arrive à des conclusions qui se rapprochent beau- coup, lorsqu'on les dégage des idées acce'ssoires, de celles qui ont été émises par son éminent contradicteur. Ce sera toujours un sujet d'admiration de voir avec quel soin scrupuleux de Bary essaie de dégager l'homo- logie et la nature des éléments qui président à la nais- sance du périthèce : cette recherche lui a imposé un tra- vail ardu, sans lui apporter grande satisfaction ; on ne doit donc pas s'étonner outre mesure de la vivacité avec laquelle il prend à partie ceux qui refusent de le suivre sur ce terrain des homologies. Van Tieghem à ce moment n'admettait l'existence d'au- cune trace de sexualité chez les Ascomycètes ; d'après lui, Torgane femelle ne serait qu'une hypheascogène diffé- renciée à une période très jeune, et les prétendus organes mâles, de simples parties du tégument périthécial. De Bary proteste vivement ; il avance qu'en niant les homo- logies établies par ses travaux, on dépasse les limites per- mises de le négation, et il apprécie de la manière sui- vante l'opinion de Van Tieghem au sujet du rameau anthéridien et du trichogyne : « Was seine positiven An- sichten ûber die Function der fraglichen Organe betrifft, wonach z. B. Antheridienzweigedem Ascogon als Stutze, das Trichogyn beiCoUemaas Respirations organe dienen soll, so ist darauf nicht naher einzugehen, bevov einiger- maassen wahrscheinlich gemachtwird,dass die Ascogone 96 P.-A. DANGEARD ohne jene Stutze umzufallen in Gefahr sind und das betr. Organ bei CoUema mittelst eines eigenem Apparates nach Luit schnappen muss and nicht ohnesolchen ebensogut zu respiren vermag wie die innern Thalluselemente neben welchen es steht. Keinesfalls durften solche Einfalle den Namen des hypothèses gratuites minder verdienen, wie die Ansichten welche im Vorstehenden dargelegt sind (1). Ces critiques ne modifièrent en rien l'opinion de Van Tieghem, puisque, dans la seconde édition de son Traité de Botsinique, nous retrouvons les mêmes objections et les mêmes interprétations (2), non seulement en ce qui concerne l'origine du périthèce, mais encore au sujet du rôle du trichogyne. < Dans ce phénomène tout accidentel, dit Van Tieghem, Stahl voit un acte sexuel indispensable à la formation du périthèce, une fécondation semblable à celle des Flori- dées. Les conidies linéaires seraient alors des anthéro- zoïdes immobiles, et le périthèce serait l'analogue du système complexe qui se forme chez les Floridées à la suite de la fécondation. Pareille hypothèse a été formulée plus récemm.ent pour les Discomycètes du genre Polys- tigme, où Ton retrouve la même branche initiale enroulée à sa base et s'allongeant plus haut en ligne droite de ma- nière à pousser son sommet au dehors. Suivant nous, c'est là une disposition physiologique nécessitée, dans le Polystigme comme dans le CoUème, par le parasitisme de la plante, et destinée à donner au jeune périthèce, malgré son enfoncement dans le tissu, l'air dont il a besoin pour se développer : c'est un appendice respiratoire, non un appareil récepteur femelle. « Remarquons, en terminant, que les partisans de l'ori- gine sexuelle du périthèce des Ascomycètes sont forcés (1) De Bary : Morph. und Biolog. der Pilze, 1884, p. 2) Van Tieghem -.Traité de Botanique, 1891. HISTORIQUE 97 aujourd'hui d'admettre dans des genres voisins : 1' une sexualité à la façon des Péronosporées ; 2" une sexualité à la façon des Floridées ; 3° une sexualité perdue ou apogamie : autant d'hypothèses gratuites qu'il fallait peut-être signaler, mais qui ne doivent pas nous arrêter longtemps » (1). Beaucoup de mycologues, surtout en France, adoptaient ces idées et ne voyaient dans les faits décrits par de Bary et ses élèves que des phénomènes purement végétatifs. Zopf se montre beaucoup moins catégorique (2) : il évite de se prononcer sur la question de savoir si l'asco- gone est réellement un organe femelle, susceptible d'être fécondé par une anthéridie ou par les spermaties, mais il reconnaît une analogie certaine ave*c les Phycomycètes et certaines algues comme les Floridées. Tant qu'on n'aura pas montré une copulation de noyaux entre les éléments mâles et femelles, on pourra, pense-t-il, s'en tenir aux vues de Brefeld, d'après lesquelles les Ascomycètes ne possèdent plus la sexualité. On serait d'autant plus tenté, ajoute-t-il, d'adopter ce parti que, d'après les recherches récentes, il n'existerait chez plusieurs Ascomycètes aucun organe qui puisse être interprété comme mâle {Chaeto- mium^ Penicilliopsis). La position prise par Zopf dans un débat qui pas- sionnait les esprits est celle d'un critique judicieux et avisé : il réserve l'avenir et indique un moyen d'arriver peut-être à la solution tant cherchée ; il réclame avec rai- son une étude des noyaux dans les filaments copulateurs. De 1881 à 1891, Brefeld publie successivement les Mé-- moires V à X de son grand travail : « Untersuchungen ans dem Gesammtgebiete der Mycologie ». Nous n'avons pas l'intention de résumer même brièvement les résul- (i) Van Tieghem : Loc. cit.., p. H66. (2) Zopf : ûiePi/ze(Handb. der Boj;anik, 1890, p. 340). 98 P -A. DANGEARD tats obtenus par ce savant aidé par des collaborateurs qui s'appellent Zopf, G. Istvanffy, Johan-Olsen, Franz von Tavel, G. Lindau ; mais ce qui doit nous préoccuper, c'est de connaître l'opinion de Brefeîd sur la sexualité des Champignons supérieurs, après une aussi vaste enquête s'étendant à la fois aux Ascomycètes et aux Basidiomycètes. D'après Brefeld, les Ascomycètes et les Basidiomy- cètes dérivent des Zygomycètes par l'intermédiaire des Hemiasci pour les premiers, des Hemibasidii pour les seconds ; tandis que les Hemiasci empruntaient aux Choanephoreen leurs sporanges et leurs conidies, les Hemibasidii se contentaient de la fructification coni- dienne des Chaetocladiaceen et des Piptocephalideen ; l'asque dérive du sporange ; la protobaside et la baside du conidiophore ; la fructification sexuelle des Zygos- porées n'a pas été transmise aux descendants. La série végétale s'est ainsi trouvée séparée à son début en deux parties : l'une possédant la sexualité et se continuant par les Archegoniées et les Phanérogames, l'autre dépourvue de sexualité et comprenant les Mésomycètes et les Myco- mycètes, c'est-à-dire les Ascomycètes et les Basidiomy- cètes. Aussi Brefeld, croyant avoir prouvé l'absence complète de sexualité chez les Champignons supérieurs, voit dans cette démonstration un des événements les plus impor- tants qui se soient produits dans l'histoire de la Morpho- logie et de la Systématique des plantes : « Ich glaube mich nicht zu irren, wenn ich annehme, dass mit dem Nachweise dieser beiden Reihen, der sexuellen und der asexuellen Reihe, einer der wichtigsten und ersten Fortschritte gewonnen ist welche auf dem Gebiete der Morphologie und der Systematik der Pflanzen und der Gesammtheit der Lebewesen uberhaupt moglich sind. Die. Masse der Pilze, die bis dahin ungefùgige und HISTORIQUE 99 disharmonische Hafte der Pflanzen, ist nun zu einem wesentlichen, harmonisch eingefiigten Bestandtheile des Pflanzensystems geworden, und der Nachweis einer asexuellen Reihe der Lebewesen ist eine Bereicherung unserer morphologischen Kenntnisse im Allgemei- nen, welche nicht mehr die Botanik allein, sondern die Gesammtheit der morphologischen Gebiete zugleich betrifft (1). » Après avoir fait rentrer les Champignons supérieurs dans les règles ordinaires de la sexualité, nous aurions peut-être quelque droit de retourner à notre profit les précédentes conclusions, si nous voulions tirer vanité d'un hasard heureux et d'une volonté persévérante. Brefeld, dans ses premières critiques de 1881, n'avait aucune idée préconçue au sujet de la sexuaHté des Lichens, telle qu'elle venait d'être formulée par Stahl : « Ich will die Moglichkeit der Deutungen Stahls nicht angreifen, wurde mich vielmehr freuen, wenn sie richtige waren ; aber fur etwas anderes als blosse Deutungen konnen sie nicht gelten, bis der Beweis fur ihre Richtig- keit durch das Experiment beigebracht ist (2). » Les conditions étaient bien changées en 1889 ; Moller avait repris les expériences de Maxime Cornu sur la cul- ture desspermaties, et il avait obtenu la germination des spermaties mêmes de Collema : on peut chez les Lichens arriver a l'obtention d'un nouveau thalle, à partir de la spermatie, aussi bien qu'en semant une ascopore (3). Dès lors, Brefeld, qui, de son côté, avait réalisé de nombreuses cultures de spermaties appartenant à des genres fort diffé- rents, n'hésitait plus à considérer ces corpuscules comme (1) Brefeld : Loc. cit., VIII, p. 272. (2) Brefeld : Loc. cit., IV, p. 149. (3) Moller : Cultur Flechten bildender Ascomrjceten, Munster, 1887. — Ueber die sogenannten Spermatien der Ascomyceten (Bot. Zeitung, no 27, 1888), 100 P.-A. DANGEARD de simples conidies. On ne songeait pas encore à invo- quer une parthénogenèse de l'élément mâle ; aussi la question de la sexualité des Lichens paraissait-elle défini- tivement enterrée (1). La sexualité des Basidiomycètes, qui d'ailleurs n'avait jamais été l'objet d'observations sérieuses, ainsi qu'on a pu le constater au cours de cet historique, n'avait plus aucun représentant autorisé. Il ne restait donc que les Ascomycètes ; or, si l'on fait exception pour deux ou trois espèces auxquelles de Bary attribuait encore des phénomènes sexuels, sans toutefois pouvoir en préciser la nature exacte, l'accord était com- plet entre naturalistes sur cette formule : « Les Champi- gnons supérieurs sont dépourvus de sexualité. » La discussion ne porte plus que sur l'homoiogie des organes ; les uns acceptent le caractère femelle de l'as- cogone et la nature mâle des anthéridies et des poUinodes ; ils sont obligés de reconnaître toutefois que ces organes ont perdu leur fonction, d'où apogamie presque générale chez les Ascomycètes et totale chez les Basidiomycètes ; les autres, faisant table rase des résultats obtenus par de Bary et ses élèves, ne considèrent, à l'exemple de Van Tieghem, ascogones et poUinodes que comme des manifesta- tions d'ordre végétatif sans imjjortance. Tel était l'état des esprits au moment où commencent nos premières re- cherches, c'est-à-dire au début de la troisième période ; aussi n'échapperons-nous pas à la loi commune : il va nous arriver ce qui se produit généralement lorsqu'on s'interpose entre deux adversaires pour un essai de con- ciliation ; nous allons avoir tout le monde contre nous au début, et il faudra de longues années de luttes et de travail avant que nous puissions entrevoir les promesses d'une entente meilleure. (1) Brefeld : Loc. cit., VIII, p. 268. HISTORIQUE 101 III On se figure difficilement à quelle série de tracas, de mécomptes, d'ennuis divers, un naturaliste s'expose lors- qu'il entreprend certaines recherches; mieux vaudrait pour sa tranquillité marcher dans les sentiers battus, où les traces de son passage, il est vrai, seraient bien vite effacées par ceux qui le suivent. C'est par un labeur incessant, souvent ingrat, que les hommes politiques arrivent à exercer une légitime influence ; mais combien d'illusions s'envolent dans cette marche au progrès ! combien de heurts et de chocs ! Les véritables chefs d'école, en science, éprouvent fréquemment les mêmes résistances, et leur vie est remplie des mêmes difficul- tés ; nous venons d'en voir un exemple frappant dans cette longue joute entre de Bary et Brefeld. Ces deux savants, de mérite sensiblement égal à des titres différents, luttent désespérément l'un contre l'autre en poursuivant un mythe ; l'un des adversaires disparaît bien avant le moment où une partie tout au moins de son œuvre renaît de ses cendres ; le second assiste à un revi- rement dans les idées que personne n'aurait jamais osé soupçonner ; le temps heureusement répare souvent bien des injustices : les noms de ces deux savants resteront toujours écrits en gros caractères dans l'histoire de la sexualité des Champignons supérieurs. La solution défi- nitive qu'ils cherchaient l'un et l'autre avec la passion de la vérité, ils ne pouvaient l'atteindre avec les moyens dont ils disposaient : la découverte était liée à un progrès des méthodes histologiques. Cette troisième période est caractérisée par l'applica- tion raisonnée de l'histologie à la recherche des phéno- mènes reproducteurs chez les Champignons. 102 p.-A. DANGEARD L'histologie des Champignons n'a fait tout d'abord que des progrès extrêmement lents, et la chose s'explique d'elle-même par la difficulté des colorations et la petitesse des noyaux dans ce groupe. On n'avait guère réussi, jusqu'en 1889, qu'à démontrer l'existence d'éléments nucléaires dans le mycélium et les appareils sporifèresMe quelques Champignons ; plusieurs auteurs, comme Fisch, Chmielewski, Hartog, avaient bien essayé de déterminer le rôle des noyaux dans la fécondation, soit chez les Péronosporées, soit chez les Saprolégniées ; leurs tentatives avaient échoué : les conclusions auxquelles ils étaient arrivés se trouvaient entièrement fausses, maison l'ignorait. En 1890, commencent nos recherches histologiques sur les Champignons (1) ; nous nous trouvons en face de très grandes difficultés ; les méthodes n'avaient pas la per- fection qu'elles possèdent aujourd'hui, et, au lieu de trouver le champ libre, nous nous heurtions à chaque in- stant à des notions fausses sur le mode d'action des noyaux dans les phénomènes reproducteurs. Il est rela- tivement facile le plus souvent de vérifier' des résultats exacts et même de les compléter ; mais, lorsqu'on se trouve en face de conceptions erronées, le travail devient pénible ; on doit arracher les mauvaises herbes avant de songer à les remplacer par autre chose. Il ne faut donc pas trop s'étonner de la réserve que nous nous étions imposée dans notre mémoire de 1890 : une partie était consacrée à rectifier les observations de Chmielewski et de Fisch sur la structure de l'oogone et de l'anthéridie des Cystopus ; nous montrions également l'inexactitude des faits décrits par Hartog et concernant une fusion successive des noyaux dans l'oospore des (1) P. -A. Dangeard : Recherches histologiques sur les Champignons (Le Botaniste, 2e série, 1890-1891). HISTORIQUE 103 SaprolégTiiées. Chemin faisant, l'existence du glycogène était signalée pour la première fois chez un Siphomycète, et un organe nouveau, qui a été étudié depuis sous le nom de cœnocentre, était indiqué au centre des oosphères des Saprolegnia. et des Péronosporées. D'autre part, nos observations n'étaient pas suffisamment complètes et précises pour permettre d'établir exactement le rôle des noyaux dans la fécondation des Siphomycètes ; nous nous bornions à montrer que les gamétanges en pré- sence renferment de nombreux noyaux et qu'une grande partie de ceux-ci entrent en dégénérescence au moment de la formation de l'œuf. « Peut-être, écrivions-nous, un noyau de l'anthéridie peut-il passer de l'oosphère par le canal de communication. En ce cas, quel est son rôle? Se fusionne-t-il avec un noyau de nature spéciale con- tenu dans l'oosphère ? Est-ce de ce noyau ainsi renouvelé que proviennent les noyaux qui existent à la maturité des oospores entre le globule oléagineux et la membrane? C'est possible (1). » Ce que nous indiquions comme pos- sible a pu être démontré depuis grâce aux travaux de botanistes dont les noms ont acquis une juste notoriété ; à côté de Wager, auquel nous devons une mention spé- ciale, puisque son premier mémoire sur le Peronospora parasirica date de 1889, nous citerons Berlèse, Stevens, Trow, Miyaké, Ruhland, Davis. C'est bien à regret que nous avions été forcé d'aban* donner l'étude histologique des Siphomycètes ; mais le travail d'un seul ne peut sufïire à tout ; nous en avons fait maintes fois l'expérience. Lorsque les circonstances ou les événements ne permettent pas d'être entouré de nombreux collaborateurs, il faut se résigner à ne donner sur un grand nombre de questions que de simples aper- çus, des interprétations nouvelles, ou des notes som- 1) P. -A. Dangeard : Loc. cit., p. 144. 104 P.-A. DANGEARD maires; l'effort principal doit porter sur les problèmes les plus importants qui se rencontrent. Un cas de ce genre allait précisément se présenter. Les Champignons supérieurs, au début de cette troi- sième période, étaient considérés, ainsi que nous l'avons vu, comme étant dépourvus de sexualité ; aucun intérêt spécial ne semblait donc devoir attirer l'attention des histologistes. La genèse de cette découverte se trouve dans deux notes publiées en collaboration avec notre préparateur Sappin-Trouffy sur l'histologie des Urédinées (1) ; nous appelions l'attention sur ce fait que, dans cette famille, des cellules de valeur bien différente ont normalement deux noyaux ; on les retrouve non seulement dans les écidiospores, lesurédospores, les téleutospores, dans les cellules du pseudopéridium, dans les paraphyses, mais aussi dans beaucoup de mycéliums et de suçoirs : ces deux noyaux s'unissent en un seul dans chaque article de la téleutospore, se comportant ainsi, l'un comme noyau mâle, l'autre comme noyau femelle. En résumé, disions- nous, les Urédinées présentent un phénomène regardé jusqu'ici comme caractérisant la fécondation ;il est vrai- semblable qu'elles suppléent ainsi à la reproduction sexuelle nettement caractérisée. Tel est le germe qui semé, il y a onze ans, s'est déve- loppé malgré toutes les résistances. Pendant que Sappin-Trouffy poursuivait, sous notre di- rection, l'étude des Urédinées, nous cherchions à nous rendre compte de l'importance que pouvait avoir cette fusion de noyaux dont nous venions de constater l'exis- tence sous le nom de pseudo-fécondation. Nos observations se portèrent tout d'abord du côté des (1) P.-ADangeardet Sappin-Trouffy : Recherches histologiques sur les Urédinées (Comptes rendus, 30 janvier 1893). — Une pseudo-fécondation chez les Urédinées (Id», février 1893). HISTORIQUE 105 Ustilaginées à cause des affinités étroites que présente cette famille avec les Urédinées ; nous étions, au mois d'octobre 1903, en mesure d'affirmer l'existence d'une fusion nucléaire à l'intérieur des jeunes spores d'Ustilago, de Doassansia, d'Eutijloma (1), et bientôt nous publiions un mémoire avec quatre planches contenant le résulta de nos recherches (2). On peut dire que, de tous les Champignons supérieurs, les Ustilaginées sont parmi les plus rebelles à l'action des réactifs colorants ; la petitesse des noyaux rend leur étude particulièrement déUcate ; cependant nous avions réussi à montrer que le noyau des Ustilaginées, malgré sa pe- tite taille, est construit sur le même type que celui de la plupart des Champignons étudiés à ce point de vue ; i possède membrane nucléaire, nucléole, hyaloplasmeavec chromatine. Les phénomènes de fusion nucléaire étaient décrits en considérant chaque cellule primitive comme un oogone, renfermant un noyau mâle et un noyau femelle ; dans cet oogone, il se produit une oospore provenant delà fusion des deux noyaux et du protoplasma qui les accom- pagne : l'oospore, avec son noyau sexuel, va se compor- ter, à la germination, comme les zygospores des Conju- guées, comme l'œuf des Chlamydomonas en donnant naissance à un certain nombre d'embryons ; lors de cette germination, le noyau sexuel subit ordinairement dans le promycèle trois bipartitions successives suivant le mode indirect ; les huit noyaux qui en résultent passent dans les sporidies ; parfois, comme dans les Urocijstis, ces sporidies uninucléées donnent naissance à des sporidies secondaires à deux noyaux, ce qui indique un retour à rétat végétatif proprement dit ; en ce qui concerne les (1 ) p. -A. Dangeard : La reproduction sexuelle des Ustilaginées (Comptes rendus, 9 octobre 1893). (2) P.-A. Dangeard : Recherches sur la reproduction sexuelle des Champignons (Le Botaniste, 3« série). 106 P.-A DANGEARD anastomoses entre sporidies, si fréquentes chez le TU- letia Caries pdiV exemple, il ne faut voir là qu'un phéno- mène purement végétatif. Dans la recherche des phénomènes sexuels chez les Urédinées et les Ustilaginées, notre principale préoccu- pation avait été de chercher dans tout le développement le moment où se produit une fusion de noyaux : l'ayant trouvé et afin d'appuyer nos conclusions, nous avons dû considérer la nature de l'organe dans lequel s'est opérée cette fusion et comparer ensuite cet organe avec les for- mations sexuelles appartenant à d'autres groupes. « Pre- nons un œuf de Chlamydomonas, disions-nous, nous voyons que le noyau de l'oospore ne donne pas directe- ment celui de la nouvelle plante ; il subit un nombre de bipartitions déterminé, qui, ici, donne naissance à quatre nouveaux noyaux qui sont ceux des nouvelles zoospores ; dans un Volvox, le noyau fournira un nombre plus grand de bipartitions pour la nouvelle colonie : dans les Clos' terium et les Cosmarium, le nombre des bipartitions est également déterminé et, si nous appelons du nom général d'embryons la nouvelle plante provenant de la germina- tion de l'œuf, nous constatons que pour arriver à ce stade le noyau de l'œuf subit toujours un nombre déterminé de divisions (1). » Et nous ajoutions : « Ce raisonnement nous conduit à considérer dans les Ascomycètes le noyau de Vasque comme un noyau sexuel provenant de la fusion d'un noyau mâle et d'un noyau femelle ; il subit, en effet, un nombre déterminé de divisions pour arriver à fournir le noyau du nouvel individu, de la spore, qui équivaut pour nous à l'embryon tel que nous l'avons défini précédemment (2). » Nous avions contre nous l'opinion de Schmitz et de (1) P.-A. Dangeard : Loc. cit., p. 235. (2) P.-A. Dangeard : Loc. cit., p. 239. HISTORIQUE 107 Strasburger, qui n'avaient signalé qu'un noyau dans les asques jeunes ; qu'allait-il advenir en passant du domaine des idées dans celui des faits ? Tous ceux qui ont vécu la vie de laboratoire et se sont adonnés à des recherches de ce genre comprendront quelle importance nous atta- chions à la vérification de notre hypothèse ; elle était d'un intérêt capital pour la solution du problème que nous avions en vue ; c'est avec une sorte de fièvre, il nous en souvient, que nous abordâmes l'étude de l'asque. Les Champignons supérieurs comprennent les deux grands embranchements des Basidiomycètes et des Asco- mycètes ; dans le cas où nos prévisions se réaliseraient, les Ascomycètes rentraient dans le schéma général. L'époque était peu favorable ; en Tabsence de jeunes périthèces, nous prîmes des Lichens qui se prêtent mal à une observation de ce genre : nous eûmes des instants de découragement : puis vint la découverte tant escomp- tée ! En mai 1894, nous communiquions à TAcadémie des sciences une note sur la reproduction sexuelle des Asco- mycètes en choisissant comme exemple la formation de l'asque chez le Peziza. vesiculosa ( 1). L'article à deux noyaux qui produit l'asque est disposé de telle façon qu'il semble provenir de deux filaments différents et c'est effective- ment ce que nous avions cru d'abord ; dans le mémoire paru un peu plus tard, sur ce même sujet, nous donnons en détail le mode de formation de l'asque tel qu'il est admis par tous aujourd'hui (2). Dans ce mémoire, nous distinguons deux modes défor- mation de l'asque : dans VExoascus deformans, chaque ar- ticledu thalle possède deux noyaux nucléoles ; ceux qui vont (t) P. -A. Dangeard : La reproduction sexuelle chez les Ascomycètes (Comptes rendus, 7 mai 1894). (^) P. -A. DAîic^card : Li reproduction sexuelle- des A '^comycètes {Le Bo- taniste, 4c série, p. 21). 4 108 P.-A. DANGEARD se cloisonner en ont quatre ; au stade précédant la forma- tion des asques, les articles ont encore deux noyaux ; ils sont placés de telle sorte que leur origine différente est manifeste: dans chaque cellule, les deux noyaux se fu- sionnent en un seul et bientôt l'oeuf qui résulte de cette union se développe en un asque ; ainsi, chez les Exoas- cées, le mycélium, dont les cloisons sont d'abord espa- cées, se fragmente en cellules à deux noyaux qui donnent naissance aux asques. Dans le second mode de formation de l'asqae, cette ori- gine différente des noyaux copulateurs avait été établie nettement ; notre description a servi de modèle à toutes celles qui ont été données depuis ; un filament vient dans le stroma ascifère et son extrémité incolore se recourbe en bec ; à ce moment, nous avons vu un noyau en division dans le filament : la partie recourbée s'allonge et vient s'accoler sur l'autre ; elle peut même se porter à quelque distance à droite et à gauche : un second noyau a subi une division dans le filament, de sorte qu'il y a maintenant quatre noyaux. Deux de ces noyaux occupent la partie bombée qui s'isole par une cloison à la fois du filament et de son extrémité recourbée. Pour la première fois, l'analogie étroite qui existe entre Vasque et le promycèle se trouvait établie; ces deux organes ont la même origine et se comportent identiquement pendant la division du noyau sexuel ; cest à leur intérieur que ce dernier subit plusieurs bipartitions, en général trois. La seule différence, et elle est d'ordre physiologique, consiste en ce que les embryons dans les Ascomycètes restent à Vintérieur de Vasque y alors que chez les Urédinées et les Ustilaginées^ ces embryons deviennent externes par bourgeonnement (1). Pour établir d'une façon indiscutable l'exactitude de nos observations chez les Ustilaginées, nous avions donné (1) P.-A. Dangeard: Loc, cit., p. 57. histolUQue 109 une description complète des phénomènes copulateurs dans VEntyloma du Glauciurn (1). Il ne restait plus à étudier que le groupe des Basidio- mycètes proprement dits ; à la vérité, on possédait déjà quelques renseignements sur le développement de la jeune baside ; mais ils étaient plutôt de nature à égarer l'opinion. Ainsi, Rosen avait supposé que le noyau de la baside provient de la fusion successive de six à huit petits noyaux venant des hyphes (2), et Wager admettait également que le noyau de la baside provient de la fusion d'un nombre d'éléments nucléaires supérieur à deux (3). On ne manquait pas naturellement d'opposer à notre théorie de la sexualité cette prétendue pluralité des noyaux copulateurs. C'est dantS ces conditions que nous donnons notre Mé- moire sur la reproduction sexuelle des Basidiomy- cètes (4), où nous établissons que partout le noyau de la baside ou de la probaside est le résultat de la fusion de deux noyaux seulement, comme chez les Urédinées, les Ustilaginées et les Ascomycètes ; ces recherches- s'éten- dent à un grand nombre d'exemples : chemin faisant, nous élucidons l'origine et la structure des chlamydo- spores du Nyctalis asterophora. La généralité des phéno- mènes de karyogamie ne pouvait plus être contestée ; nous montrons qu'ils sont conformes aux caractères or- dinaires de la fécondation et nous insistons principale- ment sur l'origine différente des noyaux copulateurs. (1) P. -A. Dangeard : La reproduction sexuelle de i'Entyloma Glaucii (Le Botaniste, 4e série, p. 12). (2) Rosen : Beitvag z. Kennt. d. Pflanz (Cohn's Beitr. z. Biol. d. Pfl., Bd., VI, 1892-1893). (3) Wager : On nuclear division in the Hymenomycetes (Annals of Botany, VII, 1893, p. 489). — On Ihe présence of Centrosph., in Fungi (Id., VIII, 1894, p. 331). (4) P. -A. Dangeard : Mémoire sur la reproduction sexuelle des Basi- diomi/céfes ("Le Botaniste, 4* série, p. 119). no P.-A. DANGEARD Nous distinguons trois cas dans le mode de germination de l'œuf : 1" l'œuf germe par l'intermédiaire d'un pro- mycèle ou d'un asque, Ustilaginées, Urédinées, Asco- mycètes ; 2* l'œuf se cloisonne, Protobasidiomycètes ; 3* l'œuf fournit directement, sans se cloisonner, les spo- ridies, Basidiomycètes. On peut dire^en complète justice, qu'à ce moment la. dé- couverte de la sexualité des Champignons supérieurs était faite ; quiconque examinera sans parti pris les résultats que nous venons de rappeler brièvement ne manquera pas d'être étonné des progrès réalisés en un court espace de temps, grâce aune orientation nouvelle. Lorsqu'un pont vient d'être jeté sur une rivière ou sur un fleuve, on lui impose, à titre d'essai, une charge bien supérieure à celle qu'il devra supporter par la suite ; c'est donc à sa période d'achèvement qu'on lui demande le maximum de résistance. Il est arrivé quelque chose d'analogue pour notre œuvre : à peine était-elle terminée qu'elle a dû supporter, de plusieurs côtés à la fois, des critiques, dont les unes ne visaient que la partie théorique, alors que les autres mettaient en doute l'exactitude des faits.- En juillet 1895, Poirault et Raciborski, dans une Note à l'Académie des sciences, combattent nos idées sur la fé- condation des Urédinées (1) ; ils mettent en doute la fu- sion des deux noyaux dans la téleutospore ; leurs conclu- sions reposaient sur une erreur d'observation : ils avaient pris la division ordinaire, normale de deux noyaux voisins pour la division d'un noyau unique et, avec ce point de départ faux, ils étaient arrivés à des ré- sultats tout à fait inattendus. Nous n'eûmes pas de peine, Sappin-Trouffy et moi, à (1) Poirault et Raciborski : Les phonomènes de Karyokinèsc dans les Urédinées (Comptes rendus, Acad. se, t. CXXI, 15 juillet 1895). HISTORIQUE 111 relever cette inexactitude, et nous profitâmes de l'oc- casion pour établir l'origine différente des noyaux de la téleutospore et de l'écidîospore chez les Urédi- nées (1). Dans une seconde Note (2), Poirault et Raciborski re- connaissent l'erreur dans laquelle ils sont tombés ; mais ils considèrent encore les deux noyaux comme des demi- noyaux qui, à eux deux, représentent l'ensemble des pro- priétés du noyau ordinaire et qui, pour cette raison, sont incapables de se diviser isolément, mais forment en- semble une figure caryokynétique tout à fait symétrique. Dans un autre travail (3), les mêmes auteurs dévelop- pent cette idée et discutent l'hypothèse d'une fécondation; « Il nous paraît préférable, jusqu'à plus ample informé, disent-ils, de ne pas confondre ces phénomènes de fusion des noyaux des Basidiomycètes avec les phéno- mènes de fécondation chez les plantes et chez les ani- maux; si nous voulons considérer la fusion des noyaux de la probaside comme un acte sexuel, nous devons donner le même nom à la fusion des deux noyaux polaires du sac embryonnaire chez les Phanérogames », et plus loin ils ajoutent : « On doit néanmoins savoir gré à ces savants d'avoir insisté sur ces phénomènes de fusion de noyaux, qui sont extrêmement intéressants et qui con- tribueront, sans doute, à éclairer la question encore si obscure de la phylogénie de la fécondation. » Poirault et Raciborski n'avaient vu qu'un chromosome dans le noyau des Urédinées ; leurs observations étaient incomplètes sur un grand nombre de points ; le Mémoire (1) Dangeard et Sappin-Trouffy : Réponse à une Note de MM. G. Poi~ rault et Raciborski sur la Karyokinèse des Urédinées (Le Botaniste, 1er août 1895). (2) Poirault et Raciborski : Sur les noyaux des Urédinées (Comptes rendus Acad. se, 5 août 1895). (3) Poirault et Raciborski : Sur les Urédinées (Journal de Botanique, septembre 1895). H 2 p. -A. DANGEARD de Sappin-Trouffy vint heureusement combler toutes ces lacunes (1). Nous n'avons pas à faire l'éloge de ce dernier travail, qui a été honoré d'un prix de l'Institut ; ainsi que l'a écrit René Maire (2), « Sappin-Trouffy, dans ce Mémoire, décrit avec soin la structure des noyaux et leur division dans un grand nombre de genres et d'espèces et établit définitivement le schéma de l'évolution nucléaire chez les Urédinées. Le noyau possède deux chromosomes ; il est unique dans chaque cellule jusqu'à l'écidie ; à partir de l'écidie, jusqu'à la jeune téleutospore, il y a, dans chaque cellule, deux noyaux qui se divisent synergi- quement. Ces deux noyaux se fusionnent dans la téleu- tospore, avec réduction chromatique, car lors de la for- mation du promycélium, on trouve deux divisions succes- sives à deux chromosomes chacune ; ces phénomènes de réduction chromatique suivant immédiatement la fusion des noyaux, militent en faveur du caractère sexuel de celui-ci. » Pendant que Poirault et Raciborski discutaient notre interprétation de la sexualité des Basidiomycètes, Harper nous opposait, en ce qui concerne les Ascomycètes, l'exis- tence d'une fusion nucléaire au début du périthéce dans le Sphasrotheca, Castagnei (3). L'observation ne reposait que sur une seule espèce; elle introduisait dans le cycle du développement d'un être deux fusions nucléaires successives, ce qui sapait les bases mêmes de nos connaissances sur la sexualité générale. Personne ne semble s'en douter : on n'y voit (1) Sappin-Touffy : Recherchei^ histologiques sur la famille des Uré- dinées {Le Botaniste, 5e série, p. 59). (2) René Maire : Recherches cylologiques et taxonomiques sur les Basidiomycètes. Thèse, 1902, p. 12. (3) Harper : Ueber das Verhalten d. Kerne h. d. Fruchtentw. ein. Ascomyceten {idi)\v. f. wiss. Bot., Bd. xxix, 1896). HISTORIQUE 113 qu'un argument contre nos idées et on s'empresse de reproduire les deux ou trois dessins d'Harper. Quand nous arrivons, après de longs mois d'un travail opiniâtre, avec un Mémoire sur le même sujet (1), les positions sont déjà prises. Pourtant, nous n'avions rien négligé pour arriver à une conviction absolue ; des milliers' de tout jeunes périthèces nous étaient passés sous les yeux ; nous donnions tous les stades successifs du développe- ment de l'ascogone et de la prétendue anthéridie ; nous étions autorisé à affirmer de la façon la plus absolue l'inexactitude du fait avancé par Harper, à rencontre de notre théorie. « Les idées que nous défendons, disions-nous en ter- minant, n'exigent pas une renonciation aux idées soute- nues avec tant de talent par A. de Bary sur les homo- logies des archicarpes et des anthéridies, et elles permet- tent de supposer un rôle important aux anastomoses des protoplasmes ; elles ne demandent pas davantage à ses adversaires d'abandonner leur opinion sur la nature pu- rement végétative de ces organes et des phénomènes de fusion protoplasmique. « Aussi est-il possible de tomber d'accord sur cette cons- tatation, la seule essentielle ; dans les Champignons, il existe; comme chez les autres organismes, plantes ou ani- maux, des embryons possédant un noyau double à leur berceau : partout ailleurs on dit que de tels embryons sont d'origine sexuelle ; pourquoi leur refuserait-on ce caractère chez les Champignons (2) ? » Nous ne nous chargeons pas d'expliquer pourquoi, dans certains milieux, on continua d'accorder aux observations d'Harper de préférence aux nôtres une confiance illi- mitée. (1) P. -A. Dangeard '■ Second Mémoire sur la reproduction sexuelle des Ascomycétes (Le Botaniste, 5^ série, p. 245). V (2) P.-A. Dangeard : Loc. çit.,Tp. 284. 114 P. -A. DANGEARD Si du côté des Ascomycètes la situation reste quelque temps stationnaire, par la faute de notre adversaire, il n'en est pas de même en ce qui concerne les Basidio- mycètes : les adhésions à notre théorie arrivent mainte- nant de tous côtés ; les unes se font sans réserve au- cune, d'autres avec quelques modifications de détail. Dès le début, alors que nous n'avions pas encore réussi à prouver l'origine différente des noyaux copulateurs, Strasburger s'était exprimé en ces termes sur notre théorie (1): « Si les noyaux qui se mêlent ainsi provenaient de parties de la plante éloignées dans le développement, on pourrait voir dans cette fusion un rétablissement d'é- quilibre nécessaire à la conservation de l'espèce. Cette fusion de noyaux serait, en fait, comparable dans ses effets physiologiques à une fécondation. Mais jusqu'à pré- sent, il n'est pas prouvé que ces noyaux aient une origine différente et qu'ils ne soient pas semblables, et peut-être ne faut-il voir dans cette fusion qu'un phénomène en rap- port avec un redoublement de l'activité des processus de nutrition, dont cette cellule est le siège. » Or, l'origine différente des noyaux copulateurs ne fai- sait plus l'objet du moindre doute : aussi avons-nous la satisfaction de voir un de nos adversaires delà veille, Ra- ciborski, considérer la fusion des noyaux chez les Cham- pignons supérieurs comme un acte sexuel (2). Ce savant distingue dans la fécondation deux phases : l'une com- prend l'union des protoplasmes ; la seconde, qui peut être retardée, résulte de l'union des noyaux. Celle-ci, chez les Champignons, s'effectue dans la « zeugite » qui, en fournissant un sporocarpe, est le point de départ d'une (1) strasburger : Ueber periodische Reduktionder Chromosomenzahl in. Entw. der Organismen{Bio[. Centralbl., 1894, p. 864). (2) Raciborski : Ueber den Einfluss ausserer Bedingungen auf die Wachsthuniweise des Basidiobolus ranariim (Flora, 1896, Bd. 82, Heft. 2). HISTORIQUE 115 nouvelle génération; le sporocarpe,chez les Ascomycètes, est un asque ; chez les Basidiomycètes etles Trémellinées, c'est une baside. La seule différence avec notre propre théorie, c'est que, pour nous, le phénomène sexuel tout entier se passe au moment de la karyogamie, alors que, pour Raciborski, il débute avec la formation des articles binucléés, des syn- karons, comme les appellera plus tard René Maire. Perrot constate les différences profondes qui séparent les noyaux de la baside des noyaux végétatifs et il admet le caractère sexuel que nous leur avons attribué (1). De son côté, Wager publie une Etude critique de nos travaux sur la sexualité ; il examine avec une compé- tence indiscutable les diverses objections qui nous ont été opposées, et il conclut en disant que si les fusions ne sont pas « morphologiquement sexuelles, elles sont du moins physiologiquement équivalentes à la féconda- tion (2). » Sur ces entrefaites, nous avions publié une théorie de la sexualité en général qui n'a pas été sans jeter quelque lumière sur les phénomènes reproducteurs (3) ; nous y avions fait rentrer tout naturellement la reproduction sexuelle des Champignons ; aussi, bien que la conclu- sion de Wager fût toute à notre avantage, nous avons cru nécessaire de fournir une note documentée en réponse à ce savant, pour maintenir notre interprétation sans mo- dification (4). La chose n'était pas inutile ; car Percy Groom, allant (1) A. Perrot : Kernfrage und Sexualitat bei Basidiomyceten, Stutt- gart, i897. (i) Wager : The sexuality ofFungi (Annals of Botany, t. XIII, 1899). (3) F. -A. Dangeard : Théorie de la sexualité {Le Botaniste, 6^ série, 1898, p. 263). (4) P. -A. Dangeard: La reproduction sexuelle des Champignons, étude critique (Le Botaniste, 7* série, 1900). 116 p. -A. DANGEARD plus loin que Wager, cherchait à réunir les phénomènes découverts par nous chez les Champignons supérieurs, dans un mode spécial de reproduction sexuelle, qu'il dé- signait sous le nom de deutérogamie (1). Un des arguments principaux invoqués d'abord par Wa- ger était la pluralité des noyaux prenant part à la for- mation du noyau secondaire de labaside; or, de tous côtés, nos observations sont confirmées : Maire (2), Ruhland (3), Harper (4) montrent que deux noyaux seulement s'u- nissent, ainsi que nous l'avions indiqué, pour former le noyau de la baside.. Wager lui-même, dans une lettre, nous annonce qu'il a pu se convaincre, par ses propres recherches, de l'exactitude de notre observation. Dans une importante contribution à l'histologie des Basidiomycètes, qui lui a valu un prix à l'Académie des sciences, René Maire constate que notre théorie tend à être unanimement acceptée, en ce qui concerne les Basi- diomycètes. Parmi les conclusions de ce Mémoire, nous citerons les suivantes : 1° Le nombre des chromosomes est constamment de deux dans les noyaux des Basidiomycètes ; 2° La première mitose de la baside présente un nom- bre, variable de protochromosomes jusqu'à la métaphase ; puis ces protochromosomes se transforment en deux chromosomes définitifs ; 3* Le kinoplasma joue un rôle prépondérant dans la sporulation des basides des types supérieurs ; (1) Percy Groom : On the fusion of nuclei among Plants (Transac. and Froceed, of the Bot. Soc. of Edingburg, décembre 1898). (2) Maire : Les variations de la baside (Bull. Soc. Sciences de Nancy, 1901). (3) Ruhland : Zur Kennt d. intracellularen karyogamie bei den Ba- sidiomyceten (Bot. Zeit, octobre 1901). (4) Harper: Binucleate Cells in certain Hymenomycetes (Bot. Gazette, 1902). HISTORIQUE 117 4' Utilisation des données cytologiques dans la classifi- cation ; 5» Présence de deux noyaux par cellule dans les organes de reproduction les plus différenciés ; ils se divisent si- multanément ; pour Maire, leur ensemble constitue une unité morphologique ou synkaron, qu'il assimile au noyau double des Sporophytes et des Métazoaires. Après avoir analysé brièvement ce travail, M. Prillieux, rapporteur du prix Montagne, s'exprime ainsi : « Peut-on voir dans ces faits la preuve de l'existence d'une féconda- tion dans les Champignons basidiomycètes ? M. Maire ne le pense pas. « La fécondation, dans les végétaux supérieurs, là où elle n'est pas contestable, est caractérisée par la fusion de deux noyaux sexuels dont l'union constitue l'œuf. Ce dernier contient un nombre double de chromosomes et donne naissance, par des divisions successives, à toute une lignée de pareils noyaux jusqu'à un stade défini où se produit une réduction numérique des chromosomes dans les noyaux qui sont l'origine d'une nouvelle lignée aboutissant aux noyaux sexuels. Dans les Basidiomycètes, le noyau produit dans la baside par la fusion des deux noyaux associés contenant chacun deux chromosomes donne naissance aux noyaux des spores qui ne contien- nent eux aussi que deux chromosomes. Il y a là une différence que M. Maire considère comme essentielle et d'où il résulte que la fusion des noyaux accouplés dans la baside est, selon lui, un phénomène de tout autre nature que celui qui caractérise une fécondation véritable (1). » Il n'est peut-être pas inutile de faire remarquer que la distinction admise par R. Maù'e et citée par l'honorable (1) Prillieux : Rapport sur le prix Montagne (Comptes rendus, t. CXXXVII, p. 1121). 1J8 P A. DANGEA.RD rapporteur a été faite pour la première fois et par nous, à la suite de nos recherches sur les Chlamydomonadinées; nous avons établi dans notre théorie de la sexualité deux cas dans le mode de reproduction sexuelle : 1" la réduction chromatique se produit à la germination de l'œuf ; il en résulte que le noyau des cellules contient le même nom- bre de chromosomes, pendant tout le développement ; 2° il y a un retard dans la réduction chromatique, de telle sorte que les cellules provenant de l'œuf ont un noyau à 2 n chromosomes (1). Dans le premier cas, nous placions les Chlamydomo- nadinées, les Ulothrix, les Conjuguées, les Champignons supérieurs, etc. René Maire réserve pour le second cas seulement le nom de fécondation : c'est une pure question de terminologie et il n'est pas .probable que les naturalistes veuillent ainsi restreindre la signification très générale accordée jusqu'ici au mot de fécondation ; mais du fait que ce jeune savant, par suite d'une limitation dans le sens d'une expression qui lui est toute personnelle, n'admet pas la fécondation chez les Champignons, il serait inexact de le considérer comme un adversaire de nos idées ; il est, au contraire, un partisan convaincu delà reproduction sexuelle des Basidiomycètes : elle est caractérisée par la mixie, c'est-à-dire par la fusion de deux noyaux an chro- mosomes, en un noyau à n chromosomes ; c'est un type de sexualité, dit-il, analogue à celui des Cosmariiim et des Chlamydomonas ; or bien peu se refuseront à voir dans ce dernier genre le prototype de la sexualité. Nous pouvons constater, non sans une légitime satis- faction, que si, en ce qui nous concerne, l'Académie des sciences n'a pas encore jugé le moment venu de consa- crer la découverte d'une reproduction sexuelle chez les Champignons supérieurs, elle a du moins déjà décerné (4>P.-A. Dangeard : Théorie de la sexualité^ loc. cit. HISTORIQUE 119 deux prix sur ce sujet, l'un à notre élève Sappin-Trouffy, l'autre à René Maire, qui s'est inspiré de nos travaux et en a confirmé les principaux résultats. Du côté des Basidiomycètes, nous ne rencontrons plus guère de contradicteurs : la reproduction sexuelle de ce groupe de Champignons est admise, soit avec l'inter- prétation que nous proposons, soit avec des réserves qui n'en modifient ni l'importance ni la signification géné- rale. Notons les diverses tendances qui se manifestent ; elles ont leur intérêt. Pour nous, les deux énergides contenues dans labaside ou la probaside ont la valeur de gamètes : la division si- multanée des deux noyaux dans le thalle n'a pas de signi- fication spéciale ; si elle ne s'était pas produite, l'origine différente des noyaux sexuels aurait été obtenue par un autre procédé, comme chez les Ascomycètes. La vési- cule qui contient les deux gamètes est une sorte d'oogone, à l'intérieur duquel s'effectuent tous les phénomènes de la formation de l'œuf ; cet œuf germe par l'intermédiaire d'un promycèle ou sans promycèle. Raciborski et Maire expriment en des termes différents une seconde opinion, qui a son point de départ dans l'in- dépendance relative que conservent un certain temps les noyaux mâle et femelle, après la fécondation, chez quel- ques animaux (1). On sait que chez les Cyclops, en par- ticulier, le noyau sexuel, dans ses divisions successives, conserve longtemps une structure double ; au stade de repos, les pronuclei sont accolés, mais non fusionnés ; pendant la division, leurs chromosomes font partie du même fuseau, mais ils forment deux groupes distincts. On compare cette disposition à la mitose conjuguée des Urédinées : la réduction chromatique, qui a pour effet de diminuer de moitié le nombre des chromosomes, (1) Wilson : The Cell in Devel. and Inheritance. 120 P. -A. DANGEARD se trouverait alors correspondre au stade de fusion nucléaire qui se produit dans la baside. La fécondation, ou le phénomène qui y correspond, serait reportée, dans cette interprétation, au moment où les deux noyaux se trouvent pour la première fois en présence. Nous avons toujours pensé que les mitoses conju- guées des Urédinées n'ont aucun rapport avec les noyaux doubles provenant de l'œuf dans les Sporophytes ou les Sporozoaires : les premiers ont toujours une indépen- dance, une individualité propre, que ceux-ci sont loin de poséder. D'autre part, nous avons signalé des mitoses conjuguées dans VArcella vulgaris, dans le Trepomonas SLgilis{\), et chez les Vampyrelles (2); ces mitoses, en particulier les dernières, ne sont certainement pas compa- rables à la division du noyau à 2 n chromosomes ; mais, par contre, elles sont identiques à celles des Urédinées, en ce que les noyaux, quoique se divisant simultanément, sont complètement indépendants et éloignés les uns des autres. Cette discussion, ainsi que celle qui porte sur l'équi- valence physiologique des fusions nucléaires, offre tou- jours quelque chose d'incomplet, tant qu'on n'a pas recours à la phylogénie même de la fécondation ; mais les Basidiomycètes se prêtaient fort mal à cette recherche, et ce n'est que grâce à l'étude des Ascomycètes que ce point d'interprétation a pu être fixé récemment dans le sens de nos idées. Les Ascomycètes nous réservaient en effet une rude épreuve, mais ils nous livraient en même temps la solu- tion définitive du problême. (1) p. -A. Dangeard; L'organisation du Trepomonas avilis et Contribu- tion à l'étude des Diplozoaires (Le Botaniste, 9e série, le"^ fascicule, dé- cembre 1903). (2) P. -A. Dangeard : Etude de la Karyohinèse chez la Vampyrella vorax (Le Botaniste, 7c série, p. 131). Historique 121 Nous avions été amené, par induction, à découvrir la karyogamie qui s'effectue à la naissance de l'asque ; il était naturel de la comparer à celle qui se produit dans la jeune baside ; une concordance remarquable se trouvait ainsi établie dans tous les groupes de Champignons su- périeurs. Sur ces entrefaites, Harper, nous l'avons vu, signale dans le Sphœrotheca, Casta.gnei une autre fusion nu- cléaire, précédant dans le développement celle que nous avions décrite ; comme cette fusion se produit dans les organes considérés comme sexuels par de Bary, toute la théorie de ce dernier revient sur l'eau, avec les carac- tères que nous lui connaissons. On n'a pas jusqu'ici d'exemple avéré de deux fusions nucléaires successives dans la série des cellules germi- nales, soit chez les animaux, soit chez les végétaux ; or, il faut toujours se méfier a priori d'une exception de ce genre, surtout quand elle s'applique à tout un groupe ; la fusion nucléaire de l'asque étant reconnue par tous, il était permis d'avoir des doutes sur l'observation de notre contradicteur. L'erreur à propos du Sphœrotheca. Castagnei est de 1895; deux ans après, nous la relevons, en nous entou- rant de toutes les garanties désirables. L'espèce est commune : Harper peut donc reprendre ses premières observations, nous rendre justice ou nous couvrir de confusion par une réplique péremptoire. Or, voici comment, sans étude nouvelle, il apprécie notre effort (1) : « Je suis tout à fait convaincu, dit-il, qu'une recherche plus prolongée, avec de meilleures méthodes, aurait conduit Dangeard à trouver les stades qui .lui manquent. » Or, il faut bien remarquer qu'à la place des (î) Harper : Sexuul Reproduction in Pyronema eonfluens and the Morph. of Ascocarp (Ann. of Botany, vol. XIV, 1900, p. o30). " 122 P-A. DANGEARD trois ou quatre stades figurés par Harper, nous en° avions fourni cinquante, indiquant tous les changements qui s'opèrent dans le contenu des organes et la structure des noyaux, modifications qu'il n'avait même pas soupçon- nées. Harper continue avec le Pyronema, confluens ce qui lui a si bien réussi avec le Sphœrotheca ; il décrit, dans cette espèce, des fusions nucléaires entre les noyaux de l'an- théridie et les noyaux de l'oogone ; ce Mémoire fait grand bruit dans les divers milieux scientifiques, et personne, sauf nous peut-être (1), ne songe un seul instant à mettre en doute les résultats avancés par ce savant. Il nous faut chercher ce Pyronema confluens, l'obtenir dans de bonnes conditions d'étude et refaire le travail d'Harper ; or, pour la seconde fois, nous surprenons ce savant en flagrant délit d'inexactitude (2). Mais, dans l'intervalle, le coup avait porté: les traités généraux s'étaient emparés des figures d'Harper ; par- tout, on nous opposait ses observations ; la confiance était telle que les histologistes qui s'occupaient de l'étude des Ascomycètes, ne pouvant mettre en évidence ces fu- sions nucléaires dans les archicarpes, supposazenf néan- moins qu'elles avaient lieu. Nous n'exagérons rien : il nous suffit de citer le Mémoire de Barker sur les Monascus et celui de Miss E. Dale sur les Gymnoascées. Voici comment s'exprime Barker (3). Les noyaux de l'as- cocarpe sont relativement nombreux ; il en résulte que lorsqu'on les examine, môme en sections, quelques-uns (1) P. -A. Dangeard : La. reproduction sexuelle des Champignons su- périeurs comparée à celle de i'Actinosphserium (Le Botaniste, 7c série, 1900, p. 273). (2) P. -A. Dangeard : Sur le Pyronema confluens (Comptes rendus, t. CXXXVI, 1903). (3) Barker, The Morphol. an Deocl. of the Ascocarp. in Monascus (Ann. of Botany, vol. XVII, 1903). HlSTORloUE ^'23 paraissent toujours superposés ; on a ainsi l'apparence de fusions nucléaires ; une. observation attentive permet cependant, dans la plupart des cas, de reconnaître une simple superposition. Les noyaux sont si petits et leur contenu en substance colorable si faible qu'une conclusion ferme relative à leur fusion ne saurait être donnée. Cependant, il est extrêmement probable que des fusions se produisent. Puis, après avoir rappelé les observations d'Harper sur les Pt/ronema, Barker ajoute : « Il y a de fortes présomptions en faveur de fusions par paires entre noyaux mâles et femelles, dans la cellule centrale. » Barker est un observateur consciencieux ; il a cherché vainement ces fusions nucléaires : il croit qu'elles se produisent réellement parce qu'Harper en a décrit dans des conditions semblables ; mais il ne les a pas vues et il le dit en toute sincérité. Même impression dans le Mémoire de Miss E. Dale sur les Gymnoascées (1). Dans les Gymnoasciis, le périthèce débute par deux rameaux qui s'enroulent l'un sur l'autre; l'auteur pense qu'il s'établit une communication entre eux et que cytoplasme et noyaux se trouvent mélangés ; « sans doute, une fusion nucléaire se produit à ce moment, mais la chose n'a pas été déterminée avec certitude (2). » ' Cependant, Barker avait eu la grande obligeance de nous procurer l'espèce de Monascus qu'il avait étudiée ; d'un autre côté, Treub nous envoyait de « l'ang quac », substance qui nous permettait d'obtenir le Monascus purpureus. Nous pouvions démontrer, quelque temps après, dans une Note à TAcadémie des sciences, l'impos- sibilité de fusions nucléaires dans l'ascogone (3). (1) Miss E. Dale : Observations on Gymnoascaeœ (Annals of Botany, vol. XVII, 1903). (2) Miss E. Dale : Loc. cil., p. 580. (3) P. -A. Dangeard : La sexualité dans le genre Monascus (Comptes rendus, t. CXXXVI, 1903). 124 p. -A. DANGEARD Il ne restait donc rien des allégations d'Harper; la théorie de de Bary n'avait pas fait un seul pas depuis la fin de la seconde période ; il était souverainement injuste de continuer à l'opposer à nos découvertes qui, elles, repo- saient sur des faits réels et d'un caractère général. Deux nouveaux Mémoires ont paru sur le genre Mo- nascus ; l'un est dû à Ikeno (1), le second a été écrit par Kuyper (2). Les conclusions du premier sont manifeste- ment erronées ; celles du second paraissent se rappro- cher des nôtres ; c'est tout ce que nous pouvons dire, étant donnée notre ignorance de la langue néerlandaise. Du côté des Lichens, on avait repris, les yeux fermés, l'ancienne doctrine de Stahl sur la sexualité des Collema- cées. Baur décrit le carpogone et le trichogyne du Collema crispum (3). Cette espèce présente deux variétés : l'une, plus massive, est dépourvue de spermogonies ; son thalle ren- ferme de nombreux ascogones, qui dégénèrent pour la plu- part sans se développer en apothécies : dans la seconde forme, les ascogones se développent normalement en apo- thécies, grâce à la présence de nombreuses spermogonies. Baur est fort perplexe lorqu'il s'agit de préciser la nature de l'acte sexuel. Le trichogyne comprend une longue file de cellules à un seul noyau ; l'ascogone est lui-même com-* posé de cellules uninucléées, et toutes ses cellules prennent part à la formation des hyphesascogènes. Or, il faudrait une fécondation pour chacune de ces cellules : on ne trouve pourtant qu'une spermatie à l'extrémité du trichogyne et il ne paraît pas probable que le noyau de la spermatie puisse (1) Ikeno : Uber die Sporenb. und syst. Stell. von. Monascus purpu- reus (Berich. d. deuts. Bot. Gesell., t. XXI, 1903, p. 259). (2) Kuyper : De perithecium-outivik. van Monascus purpureus Went ent Monascus Barkeri Dangeard in verband met de phylogenie der Ascomyceten. (3) Baur : Zur Frage nach der Sexualitat der Collemaceen (Bar. d. d. Bot. Gesell., 1898). HISTORIQUE l'25 se diviser pour fournir le nombre d'éléments nucléaires nécessaires à la fécondation. En désespoir de cause, Baur suggère l'idée d'une fusion nucléaire dans la première cel- lule de l'ascogone seulement; les autres cellules de l'as- cogone seraient des cellules auxiliaires qui recevraient chacune un noyau provenant du noyau de l'œuf. Darbishire, après avoir décrit, dans leParmeUa pulveru- lenta (1), la disposition del'ascogone et du trichogyne, com- posés l'un et l'autre de cellules à un seul noyau, reste sur la réserve et se contente de dire que le mode compliqué de fécondation réclame de nouveaux éclaircissements, bien que le procédé indiqué par Baur, à la suggestion de Kars- ten, soit après tout bien possible; il insiste principalement sur le rôle du trichogyne, qui, selon lui, ne peut jouer le rôle d'organe perforant, au sens de Lindau. Van Tieghem avait autrefois proposé de considérer le trichogyne comme un organe de respiration ; de son côté, Lindau attribue à cet élément un rôle mécanique et le désigne sous le nom de '< terebrator » : il servirait à ouvrir le chemin qui permettra à l'apothécie plus tard de venir gagner la surface du thalle : c'est cette opinion que dis- cute Darbishire^ en la combattant. Dans une seconde note, Baur étudie le Parmelia. aceta- buluTii, VAnaptychia, ciliaris, le Pertusaria, communis et le Pyrenula nitida (2) ; tandis que VAnaptychia ciliaris pos- sède des carpogones distincts, les autres ont des groupes de carpogones à l'origine de chaque apothécie. Nous re- trouvons ^-oujours les mêmes hypothèses, au sujet de la fécondation ; parmi les ascogones d'un thalle, quelques- uns seulement arrivent à fournir les apothécies ; ceux-ci sont donc privilégiés ; ils reçoivent une impulsion que n'ont pas les autres ; cette réaction est due à l'action d'une . (1) Darbishire : Ueber die Apotheciumentw. der Flechte (Jahr. f. wis. Bot, Bd. 34). (2) Baur : Ueber Anlage und Entw. ein, Flècht. (Flora, Bd. 88, 1901). 126 P -A. DANGEARD spermatie sur le trichoygne. Une particularité présentée par le Parmelia aceiabuluin ne milite guère cependant en faveur de cette déduction : dans cette espèce, les tricho- gynes sont nombreux et situés au voisinage immédiat des spermogonies; malgré cela, beaucoup de carpogones avor- tent. Baur en est réduit à invoquer ou bien la nécessité d'une fécondation croisée, ce qui, dans le cas présent, est invraisemblable, ou bien une action nulle des spermaties sur le développement de l'apothécie, ce qui est la vérité. Funfstûck, quoique partisan de la sexualité chez certains Lichens, ne semble pas avoir beaucoup d'illusions sur le cas du Parmelia : il voit là quelque chose d'analogue à ce qu'ila rencontréchez les Peltigera et les Nephromium (1) : dans ces deux genres, l'ascogone se développe en apothé- cie : d'une manière purement végétative il est vrai qu'il n'existe même plus, alors, ni trichogynes ni spermogonies ; l'auteur, qui est au courant de notre première réponse aux travaux d'Harper, reconnaît qu'on ne possède encore aucune preuve de la réalité d'un acte sexuel chez les Lichens. Nous arrivonsà un dernier Mémoire tout récent de Baur, dont voici les conclusions principales (2) : 1° Dans les genres Parmelia^ Anaptychia, Endocarpon^ Gyrophora^ Lecanora et Cladonia^ les hyphes ascogènes naissent d'un carpogone semblable à celui des Collema ; ces formes sont probablement sexuelles : mais il a été im- possible de suivre l'acte sexuel chez aucune espèce, à cause de la petitesse des objets et de la lenteur du déve- loppement. 2° Le Soiorma se comporte comme les genres Peltigera Peltidea et Nephromium étudiés par Funfstûck : ce groupe, selon toute probabilité, est apogame: les trichogynes ont (1) Funfstûck : Der gegenwartige Stand d. Flectenkunde (Ber.d, Bot. Gesell., 1902). (2) Baur. Uni. nber die Enlw.der Flechtenapothecien (Bot.Zeit., 1904). HISTORIQUE 127 disparu ; dans le Solorina, on ne trouve plus de spermogo- nies, alors que les espèces du premier groupe en possè- dent. Nous ferons suivre ces conclusions de quelques re- marques. Il est établi qu'aucun fait nouveau n'est venu à l'appui de l'hypothèse d'une sexualité chez les Lichens au sens de Stahi : par contre, on sait d'une façon précise que cer- tains genres forment normalement leurs périthèces sans intervention de trichogynes et despermaties. Les apothé- cies ayant les mêmes caractères partout, il est extrême- ment probable que pour les unes comme pour les autres, trichogynes et spermaties n'ont rien à voir dans leur développement. Que si on insistait sur la nature mâle des spermaties, les objections de Moller, qui a obtenu leur germination et leur développement en nouveaux thalles, ont toujours leur valeur ; la parthénogenèse n'est pas un phénomène banal dans l'hétérogamie accentuée : les partisans de la sexualité des Lichens, qui trouvent naturelle cette par- thénogenèse des spermaties, se mettraient sans entrain à la besogne, si on leur demandait d'obtenir un thalle de Floridée à l'aide des seuls anthérozoïdes. Baur nous dit que certains Lichens sont « probablement >> sexuels, tout en avouant qu'on ignore tout de l'acte fé- condateur : nous demandons qu'il veuille à nouveau dé- velopper ses idées sur la manière dont les choses doi- vent se passer. Admet-il encore la possibilité d'une fécon- dation pourune seule cellule del'ascogone et le transport de noyaux aux cellules auxiliaires ? ou bien a-t-il réuni de nouveaux aperçus au cours de ses récentes recherches. La vérité^ c'est que toute fécondation par une spermatie est impossible, d'abord à cause du très grand nombre de cellules qu'elle aurait à traverser avant d'arriver à l'asco- gone, ensuite, parce que l'ascogone est un complexe de 128 P. -A. DANGEARD cellules qui toutes sont susceptibles de fournir des hyphes ascogenes. Baur aurait été mieux inspiré si, au lieu d'emprunter pour justifier sa thèse, le secours inefficace et trompeur de notre adversaire, il avait consulté et cité nos recherches ; c'était une question dejustice, puisque ces recherches sur les caractères histologiques des Lichens sont les pre- mières qui aieni été publiées. Il était naturel également de signaler l'opposition que nous avons apportée à tout es- sai de renouveau dans la théorie de de Bary. En science, on a le devoir de tenir compte à la fois de ses partisans et de ses adversaires. Ainsi, pour ma part, je n'hésite pas un seul instant à reconnaître la valeur des observations de Baur, si on les dégage du parti pris qu'elles reflètent ; nous trouvons dans ses travaux de bonnes descriptions de l'ascogone et des hyphes ascogenes chez un certain nombre de Lichens. En résumé, si du côté des Basidiomycètes, aucune voix ne s'élevait plus pour contester notre découverte, nous assistons, en ce qui concerne les Ascomycètes, à un for- midable mouvement de réaction, dû à une influence que nous serions peut-être autorisé à qualifier de néfaste, si cette influence, en retenant notre attention sur ce sujet, n'avait eu finalement pour résultat de nous permettre d'établir la phylogénie delà fécondation chez les Cham- pignons supérieurs. La théorie de de Bary, abandonnée à la fin de la se- conde période, avait reconquis ses positions ; elle avait même gagné à sa cause un de ses adversaires d'autrefois, Van Tieghem, qui, confiant dans les travaux d'Harper, avait renoncé à ses anciennes objections. On ne parlait rien moins que de retrouver une fusion nucléaire à l'ori- gine de tous les périthèces. Nous venons de voir les efforts faits en ce sens par Barker, Miss E. Dale, Darbishire, Baur, etc. ; mais ces HISTORIQUE 129 tentatives n'avaient pas eu le moindre succès ; il fallait revenir à la conception d'une sexualité disparue chez la plupart des Ascomycètes, à l'idée d'une apogamie presque générale dans le groupe. Quant à fournir la moindre explication des phénomènes de karyogamie de l'asque et de la baside, les partisans de de Bary n'y songent pas, et quelques-uns, comme Baur, trouvent beaucoup plus sim- ple de les ignorer. Si ces partisans avaient pu faire état d'un cas incontesté de fécondation, l'hypothèse d'une apogamie aurait été acceptable ; mais la confiance qu'ils ont dans les exemples du Sphaer^otheca, et du Pyronema, ne saurait durer longtemps en présence de nos affirma- tions, qui restent sans réponse. Pendant que cette opposition à nos idées se manifes- tait dans les conditions que nous venons d'indiquer, il se passait du côté des Saccharomycètes un fait caractéris- tique, bien propre à encourager ceux c[ui nous accordent leur confiance. Les Saccharomycètes forment un groupe aberrant, et de nombreuses hypothèses ont été faites au sujet de leurs afïinités ; beaucoup les considèrent comme des Ascomy- cètes. Aussi, après avoir mis hors de doute l'existence d'une fusion nucléaire à l'origine de l'asque, nous avions en- gagé les histologistes à entreprendre des recherches du côté de l'organe considéré comme asque chez les Levures. « Dans les Saccharomycètes, nous avons démontré, écrivions-nous, la présefice d'un seul noyau dans chaque cellule pendant le bourgeonnement (1) ; mais nous n'avons pas réussi jusqu'ici à observer la formation des asques ou des organes considérés comme tels: il sera excessi- vement curieux de voir si, au moment de cette formation, (1) P.-A. Dangeard : Sur la structure histologique des Levures et leur développemeiit {Comptes rendus, 3 juillet 1893). 130 P. -A. DANGÉARD la cellule destinée à devenir Vasque renferme deux noyaux opérant leur fusion. On peut cependant prévoir ce résultat d'après l'étude très complète que nous avons pu faire de la cloque du pêcher ; ce parasite appartient à une famille voisine des Saccharomycètes, celle des Exoascées (1). » Or, dès l'année suivante, Schionning (2) décrivait dans le Schizosaccharomyces octosporus un mode de formation de l'asque par conjugaison de deux cellules sœurs ; malheureusement, l'auteur ignore comment se com- portentles noyaux. Hofmeister (3), en 1900, dansune Note sur le noyau des Levures, constate que les deux cellules destinées à s'unir contiennent chacune un corpuscule chromatique qui représente un noyau ; la fusion des deux cellules-filles est suivie de l'union des noyaux ; l'unique élément nucléaire ainsi formé subit trois bipartitions suc- cessives ; autour de chaque noyau, une spore s'organise. Nos prévisions étaient donc réalisées ; l'asque, chez certains Saccharomycètes tout au moins^ possédait une origine sexuelle : la formation des spores était précédée d'une fusion de noyaux. Les Schizosaccharomyces forment un groupe particulier de Levures ; leurs cellules se multiplient par division . transversale, alors que chez les Saccharomyces il y a bourgeonnement. Or, si l'on en croit les recherches de Janssens et Leblanc, on trouverait également chez les Saccharomyces une fusion de deux noyaux dans la cellule-mère de l'asque (4); ces deux auteurs "observent une première (1) P.-A. Dan^eard : La reproduction sexuelle des Asccmycélcs (Le Botaniste, 25 juillet 1894, p. 31). (2) Schionning : Nouvelle el sitiguUère formation d'asque dans une Levure (Compt. r. des Meddel. fra Carisb. Labor., V, 4, 189d). (3) Hofmeister : ZumNachweise des Zellkernes bei Saccharomyces (Sitz. d. Naturw. med. Ver. d. Bohmen, Lotos, 1900). (4) Janssens et Ijcblanc : Recherches histologiques sur la cellule de Levure (La Cellule, t. XIV, 1S98). HISTORIQUE ■ 131 division dans la cellule ; elle tend à introduire dans celle- ci deux noyaux qui, en se conjuguant, transforment cette cellule en un œuf. S'appuyant sur nos travaux, Janssens et Leblanc n'hésitent pas à interpréter l'union des deux noyaux de la cellule-mère de l'asque comme un acte sexuel. Barker, qui a suivi les indications de Janssens et Leblanc sur le mode de culture et le moment propice à l'examen des cellules, a rencontré des aspects semblables à ceux qui ont été figurés par ces savants (1). Barker a d'ailleurs décrit en 1901, chez une Levure à cellules bourgeonnantes découverte par lui dans le gin- gembre commercial, une forme de l'asque analogue à celle des Schizosa,ccharomi/ces ; deux cellules distinctes et indépendantes s'unissent par un canal étroit ; il semble que ce phénomène est accompagné d'une fusion nu- cléaire (2) ; mais la preuve n'en sera donnée que plus tard (3). Toutefois, Barker n'hésite pas à reconnaître dans cette conjugaison un exemple de sexualité du mode le plus simple. Il propose de désigner cette Levure sous le nom générique de Zj/gosaccharomî/cètes. Presque en même temps, Guillermond reprenait l'étude du Schizosaccharomyces octosporus (4) ; il confirmait, sans la connaître, l'observation d'IIofmeister sur l'existence d'une fusion nucléaire à l'origine de l'asque : sa descrip- tion de la structure des noyaux est plus exacte que celles de Barker et d'Hofmeister. Guillermond a étendu ses recherches à plusieurs sortes de Levures (5) ; il a retrouvé (1) Barker : On Spore-formation among the Saccharomycetes (Journal of the Federated Inst. of Brewing, V, 8, 1902, p. 63-66). (2) Barker : A conjugaling Yeast (Philos. Transactions of the Royal Society of London, vol. CXCIV, p. 467-*485, lu le 6 juin 1901). (3) Barker : On Spore-formation, loc. cit., p. 57. (4) Guillermond : Recherches histol. sur la sporulation des Schizosac- charomycètes (Comptes rendus, 22 juillet 1901). (5) Guillermond : Recherches cytologiquessur les Levures (Paris, thèse, 1902, et Revue générale de Botanique, t. XV, 1903). 132 • P. -A. DANGEARD des phénomènes d'isogamie avec fusion nucléaire dans le SchizosacchcLVomyces Pomhe et le Schizoccharotriyces Mel- laceî ; l'apogamie, qui est assez rare dans les deux pre- mières espèces, est assez fréquente dans la troisième, qui possède même une variété complètement apogame. Les faits dûment constatés d'apogamie chez un Schizo- saccharomyces ordinairement sexué nous fournissent peut-être l'explication de la controverse qui s'est élevée à propos des Levures ordinaires. Nous avons vu que Jans- sens et Leblanc avaient signalé un phénomène de karyo- gamie précédant la formation des spores dans l'asque ; les observations de Barker sont favorables à cette manière de voir. Wager a nié le fait et Guiilermond admet égale- ment l'absence de karyogamie (1). Il est donc prudent d'attendre, avant de se prononcer, d'autant plus que Janssens, dans un second Mémoire, maintient énergi- quement ses premières conclusions. En résumé, les phénomènes d'isogamie sont indiscu- tables chez les Schizosacchsirorayces et les Zygosaccha.ro- myces, à l'origine de l'asque, alors que chez les Saccharo- myces on ignore encore s'il y a karyogamie ou apogamie. Quoi qu'il en soit, tandis que la théorie de de Bary est impuissante à expliquer la nature sexuelle de l'asque des Levures, la nôtre nous avait permis de l'indiquer par avance. Un point restait obscur aussi bien pour nous que pour nos adversaires : certains genres réunis fréquemment sous le nom d'Hemiasci, comme les Taphridium (2), les Ascoidea{S), les Protomyces, sont dépourvus de périthèce : on ne peut leur attribuer ni archicarpes ni anthéridies ; (1) Guiilermond: Sur le noyau de la. Levure (Annales Mycologici, vol. II,' n° 2, 1904). (2) Juel : Taphridium (Bihang t. K. Svenska Vet-Acad. Handlingar, Bd. 27, 1902). (3) i-'opta : Beitrag zur Kennt. d. Herniasci (Flora, 1899). HISTORIQUE 133 mais on ne trouve pas davantage de fusion nucléaire à l'origine de l'asque. La difficulté a été résolue par l'é- tude du nouveau genre Protascus, un des nombreux para- sites de l'Anguilluie fl) ; l'asque, dans les Hemiasci, dé- rive du sporange asexuel. Après avoir été si longtemps sur la brèche, nous aurions pu nous contenter d'assister en spectateur aux efforts in- fructueux de nos adversaires, d'autant plus que nous étions engagé dans des recherches d'une autre nature également intéressantes (2), mais l'Académie des sciences, désireuse sans doute de mettre en présence les représen- tants de l'une et l'autre école, avait proposé comme sujet de concours du grand prix des sciences physiques pour 1903 1a question suivante : « Rechercher et démontrer les divers mgdes de forma- tion et de développement de l'œuf chez les Ascomycètes et les Basidiomycètes. » Tous ceux qui auront lu attentivement cet historique ju- geront avec nous que notre abstention eût été mal interpré- tée ; nous eûmes donc l'honneur de soumettre nos travaux au concours. Le rapporteur, M. Van Tieghem, se borna à cette constatation : « Deux Mémoires ont été présentés. La commission estime que, dans l'un comme dans l'autre, la question n'est traitée que d'une façon incomplète »; mais, en même temps, la commission proposait à l'Académie de proroger la date, qui se trouvait reportée en 1906. Dans un concours comme celui de 1903, qui porte sur une découverte dont l'historique précédent a fait ressor- tir à la fois l'importance et les difficultés, il n'existe, si l'on écarte toute subtilité d'appréciation, que deux solu- tions, puisqu'on réalité ne sont en présence que la théorie (1) P.-A. Dangeard : Sur le nouveau genre Protascus (Comptes rendus, t. CXXXVI, 1903). (2) P.-A. Dangeard: Introduction à la neumème série du Botaniste, décembre 1903. 134 P. -A. DANGEARD de de Bary, soutenue par Harper, et nos propres décou- vertes. Le sujet du concours porte lui-même sur deux points : Iel recherche des divers modes de formation et de développe- ment de Vœuf chez les Ascomycètes et les Basidiomy- cètes. En ce qui concerne les Basidiomycètes, personne n'a songé à nous contester la paternité de la découverte des phénomènes sexuels : nous avons même eu la satisfaction tout intime de voir le prix Montagne, de cette même an- née 1903, donné à René Maire, qui, dans sa thèse, s'est montré un chaud partisan de la sexualité des Basidiomy- cètes ; nous connaissons déjà les adhésions nombreuses venues de tous côtés, y compris celles d'adversaires de la première heuçe, comme Raciborski. Rarper lui-même n'est pas très éloigné de se rallier à notre interprétation. Péchoutre, qui, dans l'Année biologique, a la charge de fournir l'impression d'ensemble qui se dégage des tra- vaux particuliers, s'exprime ainsi au chapitre de la repro- duction asexuelle : « Des recherches approfondies sur la reproduction par spores des Thallophytes tendent de plus en plus à démontrer que des processus considérés jus- qu'ici comme purement asexuels représentent en réalité une sexualité réduite. C'est ainsi que Maire considère la fusion nucléaire de la jeune baside des Basidiomycètes comme un processus sexuel réduit, qu'il désigne sous le nom de mixie. Harper est moins catégorique et n'ose affir- mer que cette fusion représente un acte sexuel ; il recon- naît toutefois qu'une telle interprétation a en sa faveur ce fait que la fusion ne se produit pas entre noyaux-sœurs, mais entre noyaux qui, grâce à la mitose conjuguée, sont restés différents pendant de longues périodes d'accrois- sement végétatif (1) . » Donc, à moins de vouloir attendre un accord unanime (1) Année biologique, dirigée par Y. Delage, 7e année, 1902, p. 102. HISTORIQUE 135 et complet, qui n'a probablement jamais existé pour aucune théorie, fût-elle, comme la nôtre, appuyée sur les faits les mieux établis, on est bien obligé d'admettre nos conclu- sions ; la sexualité des Basidiomycètes est démontrée, et si l'on épilogue, ce n'est plus que sur les détails. Nous voyons par exemple Blackman, dans un Mémoire que nous voudrions louer sans réserve, essayer d'une di- version qui ne trompera certainement personne (1). La sexualité comprend trois phases : union des ga- mètes, fusion des noyaux, réduction chromatique , le mot fécondation n'a jusqu'ici aucun sens précis. Doit-il ser- vir à caractériser uniquement soit l'union des gamètes, soit la fusion des noyaux sexuels ? En général, les deux phénomènes sont concomitants et alors aucune difficulté n'existe. Mais comme chez un certain nombre d'animaux le noyau de copulation reste double à travers ses divi- sions successives longtemps après l'union des gamètes, certains auteurs réservent le mot de fertilisation ou de fécondation, à la réunion des cytoplasmes, mâle et femelle, sans se préoccuper du moment où la fusion nucléaire de- vient complète. Dès lors, quand il s'agit de Champignons, certains au- teurs, par suite d'une fausse analogie, reportent le phé- nomène de fécondation à l'instant où, dans le dévelop- pement, les deux noyaux qui vont constituer les deux lignées sexuelles se trouvent pour la première fois en présence. A diverses reprises, nous avons montré que l'existence des deux lignées indépendantes d'éléments nucléaires constituait un simple moyen pour le mycète d'obtenir une origine différente des noyaux copulateurs : cette ori- gine est obtenue par des procédés qui varient selon les (l) Blackman : Of the fertilisation, Alt. of Générations and gênerai Cytology of the Uredinex (Armais of Botany, vol. XVIII, 1904). 136 P.-A. DANGEARD groupes : nous connaissons ceux de VExoascus et de la Pézize : dans VAspergillus et plusieurs autres Asco- mycèseSjla formation d'un article binucléé se fait par seg- mentation d'un article à nombreuses énergides. Blackman croit avoir découvert un mode encore différent dans une Urédinée, le Phragmidium vioiaceum : il y aurait, chez cette espèce, émigration du noyau d'un article uninucléé dans un autre ne possédant également qu'un noyau ; l'auteur s'empresse alors de qualifier ce phénomène de fécondation. Si la description de Blackman, malgré son invraisemblance notoire, se trouvait confirmée, nous aurions un procédé de plus dans la mise en présence des deux énergides ; nous retombons dans l'interprétation de Raciborski et de Maire, et nous avons déjà dit pourquoi nous ne pouvions partager l'opinion de ces deux savants, bien qu'elle ne puisse nuire en aucune façon à notre découverte. Blackman va plus loin et, s'appuyant sur la structure des spermaties, il considère les spermogonies comme des appareils mâles qui ne sont plus fonctionnels : cet auteur fait trop bon marché des expériences qui ont permis d'obtenir chez les Lichens un nouveau thalle à partir de laspermatie. Puisque l'occasion se présente, nous pouvons sans in- convénient tenter une explication des divers appareils de fructification chez les Urédinées : elle nous est suggé- rée pas nos recherches récentes sur les Ascomycètes. Chez les Ascomycètes, sporanges et gamétanges ont été remplacés respectivement par des conidiophores et des gamétophores. Les conidiophores peuvent être de diverses formes dans une même espèce : on ne connaît jusqu'ici qu'une seule sorte de gamétophore pour une même espèce. Les Basidiomycètes répondent au même schéma gé- néral ; mais il nous paraît que, si chez les Urédinées, la HISTORIQUE 437 spermogonie, par sa place dans le développement, repré- sente un conidiophore, l'écide et l'urédo sont peut-être des gamétophores au même titre que l'appareil à téleu- tospores : cela expliquerait la similitude de leur origine et de leur structure. Les diplogamètes de l'écide et de l'u- rédo seraient restés parthénogénétiques, par suite de la vigueur de leur nutrition, et Vâcte sexuel ne serait inter- venu qu'en fin de végétation dans la téleutospore. On aurait ainsi l'explication du cycle réduit des Endophyl- lum, qui serait le cycle normal avec parthénogenèse. En résumé, Isl sexualité des Basidiomycètes ne fait plus aucun doute ; on ne la conteste plus : on cherche seulement à discuter, — sans trop de succès, — quelques points de détails; Vaccord est réalisé sur le fond. La question des Ascomycètes est beaucoup plus déli- cate. Les partisans de la théorie de de Bary se dérobent en général à la discussion : ils procèdent par aphorismes ; ils feignent d'ignorer les objections qui leur sont oppo- sées (l). Or, jamais, de notre côté, nous n'avons refusé de ré- pondre aux critiques dont nous avons été l'objet : maintes fois, nous les avons provoquées. Nous avons été plus loin ; nous avons essayé de faciliter à notre principal contradicteur une retraite honorable (2) ; nous avons laissé entendre le tort qu'un plus long silence peut causer, non seulement dans le domaine des idées, mais dans celui des intérêts matériels. Notre appel n'a pas été entendu ; nous aurions mauvaise grâce à insister. Mais nous ne cesserons de protester quand nous ren- contrerons des auteurs négligeant systématiquement les (1) Consultera ce point de vue le Mémoire déjà cité de Baur et celui de Davis signalé plus bas. (2) P. -A. Dangeard : A propos d'une lettre du professeur Harper (Le Botaniste, 9" série, 1903, p. 46). 138 P -A. DANGEARD divers éléments de la controverse. Il est naturel, par exemple, d'éprouver quelque surprise, en voyant Davis s'appuyer (l), pour développer ses idées, sur les travaux d'Harper concernant le Sphœrotheca et le Pyronema, sans même prendre la peine de citer la réfutation que nous en avons donnée ; — nous pourrions faire la même re- marque lorsque cet auteur utilise les recherches de Bar- ker et de Miss Dale ; son zèle dépasse toute mesure. Nous sommes persuadé, par exemple, que Barker, après la note que nous avons publiée sur les Monascus, se garderait bien d'écrire, comme le fait Davis : « Although not posi- tively established, there are good reasons for believing that the numerous gamète nuclei of Monasous fuse in pairs as in Albugo Bliti, A. Portulacse, and Pyronema{\). » Nous reviendrons sur ce point, car il est de la plus grande importance : l'intérêt des lecteurs exige qu'on les renseigne exactement et complètement ; en leur lais- sant ignorer les divers éléments de la controverse, on peut se procurer un succès facile, mais il n'est que momen- tané : tôt ou tard les responsabilités sont établies. Rien n'est si difficile d'ailleurs, en un pareil sujet, que de gar- der une juste mesure. Nous avons vu de Bary, à la fin de la seconde période, exprimer avec vivacité son étonnement au sujet de cer- taines résistances qu'il trouvait injustifiées. Dans ^ette troisième période, nous nous heurtons depuis longtemps à une hostilité du même genre avec des différences que chacun est maintenanten mesure d'apprécier: plus que de Bary, nous avons cherché à atténuer l'expression de nos doléances, pourtant si justifiées parfois. Si, malgré nos réels efforts, nous n'avons pas su ménager toutes les susceptibilités, nous le regretterons profondément : nos (1) Davis : The relationships of sexual organs in Plaiits (Bot. Gazette, 1904, V. XXXVIII]. HISTORIQUE 139 lecteurs savent que nous avons toujours fait passer au premier rang l'intérêt des causes que nous défendons. En France, où nous pouvions espérer que nos idées rencontreraient dès le début un accueil favorable, une prudence que nous trouvons excessive a longtemps banni des traités de Botanique tout ce qui pouvait tendre à faire connaître et à propager notre découverte : à peine s'est- on décidé à faire çà et là de timides allusions aux faits de karyogamie, en se gardant de toute interprétation. Si nous avions pu compter sur l'appui d'un savant de grand mérite, dont le nom a été fréquemment mêlé aux controverses de la seconde période, les choses au- raient changé de face : à diverses reprises nous avons essayé vainement de le convaincre. Mais Van Tieghem n'a jamais caché, depuis plusieurs années, ses sympathies nouvelles pour la théorie de de Bary. Dans un mémoire qu'il a publié sur l'œuf des plantes (1), la classification des Algues et des Champignons se trouve remaniée d'une manière complète : VEremascus et le Dipodascus, par exemple, se trouvent placés sous le nom d'Eremascinées au voisinage des Desmidinées, tan- dis que le Sphssrotheca et le Pyronema constituent deux familles différentes réunies avec les Laboulbéninées, les Némalinées, les Banginées, les (Edogoninées, etc., dans les Tomiées hétérogames. Van Tieghem, pour établir ses deux familles des Pyronemacées et des Erysibacées, s'appuie sur les recherches d'Harper concernant le Sphœrotheca {iS9b) et le Pyronema (1900) qu'il considère comme démontrées ; ■ 152 P.-A. DANGEARD là pour nous montrer l'importance d'un tel changement ; il a fallu une adaptation spéciale dont nous pouvons suivre les grandes lignes chez les Ptéridophytes, les Gymnospermes et les Phanérogames. Il n'est donc pas étonnant que le même effet ait produit les mêmes causes chez les Champignons. D'un côté, nous voyons le sporange transformé en coni- diophore ; Vensemble des spo- res d'un conidiophore corres- pond aux spores d'un sporange (fig-2). Mais le gamétange, nous le savons, est l'équivalent d'un sporange, rien d'étonnant à ce qu'il ait subi une différen- ciation analogue et se soit dé- veloppé en un gamétophore ; l'ensemble des gamètes du ga- métophore correspond aux ga- mètes d'un sporange^ c'est en- tre eux que doit s'effectuer la fécondation. Si les deux gamétanges en présence s'étaient différenciés chacun en un gamétophore^ avec gamètes s'unissant de l'un à Vautre, il n'y aurait pas eu la moindre difficulté dans l'interprétation ; la difïiculté n'existe que parce que l'un des deux gamétophores seul s^est développé et que l'union des gamètes a lieu sur le même gamétophore (fîg. 3). L'objection tombe pourtant d'elle-même, lorsqu'on entre plus avant dans l'examen des faits. Pour qu'il y ait formation d'un œuf, il n'est nullement FiG. 2. — Sporange S et conidio phore G. — L'ensemble des zoo- phores Z du sporange S correspond" à l'ensemble des conidies C du ga- métophore G. HISTORIQUE 153 nécessaire que les gamètes appartiennent à des gamé- tanges différents ; on connaît de nombreux exemples où la copulation s'effectue entre gamètes d'un même ga- métange {Ulothrix, Chlamydomonas, etc.). FiG. 3. — 1. Schéma de la reproduction sexuelle telle qu'elle doit se produire entre gamètes provenant de deux gamétanges. — 2. Modifications se rencon- trant chez les Péronosporées ; chaque gamétange possède un gamète privilégié; le gamète de l'anthéridie traverse le pore de communication et va se fusionner avec celui de l'oogone. — 3. Deux gamétophores en présence : normalement l'union devrait se produire entre gamètes, provenant de gamétophores dif- férents. — 4. Modification introduite, permettant l'union des gamètes sur le même gamétophore. On est donc absolument autorisé à afïirmer que l'œuf peut également se former aux dépens des gamètes d'un même gam.étophore (fig. 3, 4). Prenons le Dipo(iascu.s de tout à l'heure : les noyaux de chaque gamétange proviennent fréquemment d'un même article (fig. 4) : il est naturel de supposer que les deux noyaux copulateurs sont passés par un gamétange diffé- rent ; mais en quoi la sexualité serait-elle troublée, si 154 p.-A. DANGEARD par hasard ou autrement ces deux noyaux avaient suivi la même direction ? Le second gamétange n'aurait plus de rôle sexuel a re-ïripliv ; tout se bornerait à une question de nutrition ; cet organe devenu inutile pourrait même disparaître sans inconvénient : c'est ce qui est arrivé chez la plupart des Ascomycètes. FiR. 4. — Dipodascus albidus. — Reproduction sexuelle analogue à celle des Péronosporées ; elle en diffère par la germination immédiate de l'œuf en asque C. Au moment de la différenciation en gamétophore, c'est le seul gamétnnffe utile qui a subi la différenciation ; le second n'a laissé que des traces (fig. 5), et il a même fini par disparaître complètement : voilà toute l'explication des insuccès de de Bary et de ses élèves, cherchant une fé- condation dans des organes qui sont transformés ou en voie de disparition ; ce sera toutefois Vhonneur de de Bary d'avoir soupçonné une partie de la vérité alors que beau- HISTORIQUE 135 coup n'accordsiient à ses archicarpes et à ses anthéridies qu'une valeur purement végétative. Nous trouvons donc chez les Ascomycètes un seul ga- métophore, avec des traces çà et là du second rameau dont le rôle n'a plus rien de sexuel ; il contribue sans doute, lorsqu'il persiste, à assurer une meilleure nutrition du gamétophore ; mais ses noyaux n'ont plus rien à voir avec la fécondation. Déjà chez beaucoup d'Ascomycètes, il est devenu inutile et a disparu complètement ; sa pré- sence n'est connue chez aucun Basi- diomycète.- L'intérêt tout entier se concentre sur le gamétophore. La copulation entre gamètes provenant de gamé- tanges différents a pour résultat d'obtenir une parenté plus ou moins éloignée des noyaux copulateurs : le même but, c'est-à-dire, l'origine fig. s. —; Schéma d'un ga- ,.„,,,, , , métophore d'Ascomycète, différente des noyaux sexuels, est avec la fusion o des dipio- atteint d'autre manière, dans le ga- pmètes d et la gerniina- ° tion enasques A; alabase, métophore unique, fig. 5. On connaît même deux procédés différents chez les Ascomycètes : l'un est réalisé par une sé- rie de mitoses conjuguées comme dans les Exoascus; le se- cond par une formation en crochet, comme chez les Pézizes. Chez les Urédinées, l'origine commune des noyaux co- pulateurs est reportée très loin, jusqu'à l'écide, à partir de laquelle les mitoses conjuguées se continuent sans interruption jusqu'à latéleutospore. Dans tous les cas, Vœuf résulte de Vunion de deux éner- gides, de deux gamètes^ renfermés sous la même mem- brane, et il germe en un asque ouen une baside. trace du second gamétange stérile. 156 P -A. DANGEARD La germination en asque est le seul caractère ancestral nettement conservé : l'analogie avec le sporange est tel- lement évidente que Brefeld n'a pas manqué d'y insister longuement au cours de ses laborieuses recherches. La germination en baside représente un nouveau pro- grès d'adaptation à la vie aérienne; le sporange provenant de l'œuf, a résisté chez les Ascomycètes à une différen- ciation en conidiophore, semblable à celle du sporange ordinaire : chez les Basidiomycètes, au contraire, ce sporange est devenu un conidiophore. D'après cela, il semble certain que les Basidiomycètes sont supérieurs dans l'évolution aux Ascomycètes : cela expUque l'absence du second rameau stérile à l'origine de leur gamétophore. L'un et l'autre groupe dérivent des Si- phomycètes : on arrivera sans doute à savoir plus tard si l'origine est distincte ou si les Basidiomycètes ne sont qu'un rameau des Ascomycètes, détaché de bonne heure et ayant évolué parallèlement. Les organismes inférieurs, Protophytes et Proto- zoaires offrent aux naturalistes une mine inépuisable de découvertes : l'élan est donné dans tous les pays, et per- sonne ne songe à en contester l'opportunité. La France conservera, nous l'espérons, dans ce mou- vement, le rang que lui ont donné les travaux de Du- jardin, de Tulasne, de Thuret et Bornet, de Renault, de Van Tieghem, etc. L'étude delà Cryptogamie a été officiellement consa- crée par la création récente d'une chaire au Muséum : il s'agit là d'une mesure sage et prévoyante. On pourrait peut-être toutefois regretter le caractère de classification pure qui lui a été attribué, si d'autres créations ne devaient dans l'avenir donner aux recherches sur l'orga- nisation et le développement des organismes inférieurs la part qui leur revient si légitimement. PREMIÈRE PARTIE LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS. La marche générale de l'évolution à la surface du globe qui nous montre un perfectionnement continu de l'orga- nisation des êtres et de leurs fonctions, semble indiquer tout d'abord comme « ancêtres des Champignons supé- rieurs » les Champignons de structure plus simple, de dé- veloppement plus réduit que nous désignons habituelle- ment sous le nom de Champignons inférieurs ; si, partant de ces derniers, nous arrivons par des transitions ména- gées et nombreuses aux précédents, notre conviction s'af- fermira davantage ; si, de plus, nous réussissons à retrou- ver les causes qui ont modifié progressivement ces êtres et leurs fonctions, le doute aura disparu de notre esprit, et nous essaierons de communiquer aux autres notre im- pression. Depuis la publication de nos premières recherches sur les organismes inférieurs où nous rattachions déjà les Champignons inférieurs aux Monadinées zoosporées, en montrant qu'une simple différence dansle mode de nutri- tion les séparait, nous n'avons cessé de nous intéresser aux diverses causes qui ont présidé à la constitution de tel ou tel groupe d'Algues ou de Champignons. Dans ces essais de reconstitution, nous n'avons jamais eu jusqu'ici :— et nous en sommes surpris — à renverser ce que nous avions construit la veille, à renier nos idées an- ciennes pour en émettre de nouvelles; les déductions semblent s'enchainer et se compléter. Pour ne citer qu'un 158 P. -A. DANGEARD exemple, celui de la reproduction sexuelle des Champi- gnons supérieurs, nous verrons qu'il corrobore jusqu'à l'évidence l'opinion que nous avons toujours professée sur l'origine monophylétique de la série incolore des Mycètes et son indépendance à l'égard de la série verte des Algues et des Chlorophytes. Nous n'ignorons pas qu'il existe une tendance opposée d'après laquelle l'antique distinction entre Algues et Champignons ne répondrait plus à aucun objet ; cette dis- tinction serait contraire aux affinités réelles de ces êtres ; par suite, les diverses familles qui les réunissent pour- raient être sans inconvénient mélangées et dispersées suivant un ordre qui indiquerait mieux leur parenté réelle ; cette nouvelle classification invoque aussi les phénomènes de reproduction sexuelle et plus particulièrement l'œuf de la plante. Entre ces deux conceptions si opposées, il en existe d'autres moins intransigeantes, et, comme toutes se récla- ment de savants autorisés, nous avons le devoir de n'en négliger aucune. Nous allons essayer de marquer nettement les différen- ces qui caractérisent ces diverses théories sur les affinités réciproques des Champignons et des Algues. La théorie qui semble avoir recueilli jusqu'ici le plus de suffrages est celle qui consiste à admettre tout au moins pour les Champignons inférieurs une descendance directe des Algues filamenteuses. De Bary est un de ceux qui ont le plus contribué à ré- pandre cette notion: ainsi, il considère la série principale des Champignons ou série des Ascomycètes, composée des Phycomycètes, des Ascomycètes et des Urédinées, conime issue directement des Algues ; chez ces mycètes, les stades du développement sont homologues avec ceux des Algues, dont ils descendent phylogénétiquement. Les a'utres groupes de Champignons, spécialement les Ustila- LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS i 59 ginées et les Basidiomycètes ne peuvent prendre place jusqu'ici dans cette série principale^ bien qu'ils se relient à certains de ses membres par plusieurs lignes qui di- ^isi^^j^y vergent ensuite latéralement (1). '^^^ voi^K Dans son « Essai de classification », daté de 1881, de ^^^^cai, Bary plaçait le point d'attache de la série des Champignons ^^' sur celle des Chlorosporées, près des Œdogonium et des Cylindrocapsa. D'après lui, « chacune des quatre séries des Chlorosporées, des Phéosporées, des Ploridées et des Champignons est une série fermée ; aucune d'elles ne peut être intercalée dans une des autres sans en détruire violemment l'ensemble. Il y a parfois une certaine res- semblance entre les termes les plus inférieurs de deux séries, mais il n'y a aucun rapport entre les termes les plus élevés. Les Phycomycètes les plus simples, tels que les Pythium^ pourraient très bien, si on les considérait seuls, être rangés parmi les Chlorosporées, et cela avec autant de raison que les Monotropa, parmi les Ericacées. Mais les Erysiphe, les Eurotium, les Ascobolus, qui con- tinuent la série des Champignons commençant au Py- thium, n'ont plus avec les Chlorosporées le moindre ca- ractère commun. En un mot, les quatre séries ci-dessus sont séparées les unes des autres ; elles marchent côte à côte avec une divergence variable, mais, si rapprochées qu'elles paraissent, elles ne peuvent être intercalées Vune dans Vautre (2). » De Bary est donc un partisan de l'origine monophylé- tique des Champignons ; mais, comme il admet que l'an- cêtre mycète est une algue qui a perdu sa chlorophylle, il se place dans des conditions assez défavorables pour la CD discussion ; car on ne va pas manquer de lui objecter que en cette transformation a pu se produire à divers niveaux (1) De Bary : Morphologie und Physiologie der Pilze, î* édition, p. 130, £ 142'. -ofomy- ces dans les Ustilaginées (1). Les auteurs qui ont suivi ont éprouvé le même embarras ; aussi les voit-on classer ce genre tantôt à côté des Entyloma. chez les Ustilaginées, tantôt au voisinage des Exoascus, parmi les Ascomycètes. Nous le trouvons encore placé par Schroter tout à côté des Dipodascus et des Monascus (2). La connaissance du développement de l'asque et du mode de formation des spores chez les Ustilaginées allait permettre de fixer cette fois d'une façon certaine les véri- tables affinités des Protomyces. Sappin-Trouffy, après un examen rapide de l'espèce, ayant constaté l'absencfe des phénomènes de karyogamie, conclut avec raison : « Pour trouver un développement semblable dans les Champignons, il faut se reporter à la famille des Chytri- dinées, et notamment au Cladoclu/trium, où la reproduc- tion se fait par kystes et par sporanges (3) ». La note de Sappin-Trouffy pouvait cependantdonnerlieu à des réserves, car il n'avait vu les noyaux « qu'à l'état de taches chromatiques qui ne laissent voir aucun détail de structure » ; d'autre part, il avait dessiné les spores à l'intérieur même des kystes, alors que, suivant la descrip- tion classique donnée par de Bary, la formai ion des spores n'a lieu qu'après la sortie du contenu du kyste à l'ex- térieur. Dans un excellent mémoire sur les « Hemiasci », Popta reprend l'ensemble du développement de cette espèce (4) ; il n'ajoute que peu de choses à la connaissance des noyaux, car il se contente de dire à propos d'une section de chla- (l)De Bary : Morph. und Biol. der Piize, 1884, p. 185. (2) Engler et Prantl : Die Naturl. Ptlanzenfamilien, I Theil, 1897, p. 143. (3) Sappin-Trouffy : Note sur la place du Protomyces macrosporus dans la classification {Le Botaniste, 5e série, p. 285). (4) Popta ; Beitrag. zur Kenntniss der Hemiasci (F/ora, 1899, Heft 1). LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 265 mydospore : « Wieder andere Bilder lassen ein netzartig hellbraunlichblaues Plasma sehen mit vielen blauen ker- nen und Kerntheilungsstadien. » Ce qu'est la structure normale de ces noyaux et ce que représentent ces stades de division, il est impossible de le dire, même avec l'aide de la figure donnée à l'appui. D'un autre côté, Popta signale l'existence dans le sporange d'une couche de cytoplasme pariétal avec noyaux qui persiste- rait après la formation des spores ; ce fait était à vérifier, car on ne connaît jusqu'ici rien de semblable dans les Champignons, du moins à notre connaissance. Enfin le même auteur aurait vu dans les spores cinq ou six noyaux. Ces résultats nous laissaient perplexe, et nous avons été amené, un peu malgré nous, à étudier les échantillons de Protomyces qui se trouvaient dans notre collection ; nous exposerons brièvement les constatations que nous avons pu faire, sans revenir sur la partie morphologique du développement, si bien décrite par de Bary. Les petites divergences que nous avons rencontrées sur ce point tiennent sans doute pour une part à une différence d'habi- tat : le Protomyces macrosporus type vit sur VIEgopodium Podagraria ; il est plus rare sur VHeracleum Sphondylium et quelques autres Ombellifères terrestres. Dans nos échantillons, le parasite s'était développé sur les folioles d'une Ombellifère aquatique, VHelosciadium nodiflorum. Occupons-nous d'abord du système végétatif. La section d'une foliole présente sous l'épiderme supé- rieur une assise de cellules en palissade, puis quelques assises de mésophylle lacuneux, ordinairement de trois à cinq, et enfin l'épiderme inférieur avec stomates. Sur ces folioles, on observe des taches circulaires de la largeur d'une tête d'épingle et nettement circonscrites ; elles sont groupées par îlots dune dizaine ou bien disper- sées sans aucun ordre sur tout le limbe. Une section à 266 p. -A. DANGEARD l'endroit d'une tache montre un grand nombre de chlamy- dospores qui se sont développées dans les espaces inter- cellulaires, et qui arrivent à se toucher les unes les autres en écrasant les cellules de l'assise palissadique et du mé- sophylle. Il est facile de constater dans une de ces sections que les chlamydospores les plus âgées occupent le centre de la tache, alors que les plus jeunes se trouvent sur les bords : il est probable que chacune des taches est produite par la germination d'une seule spore dont le mycélium se ramifie en ordre centripète et produit ses fructifications dans la même direction, sans jamais envahir les faisceaux des nervures. Le mycélium a été bien figuré par de Bary avec ses ramifications et ses cloisons. Sappin-Trouffy, de son côté, a représenté sur les gros rameaux d'autres filaments plus petits qui viennent s'appliquer sur les membranes cellu- laires de la plante hospitalière, les dépriment ou s'étalent à leur surface. L'existence de cloisons dans le thalle offre un grand intérêt : on sait, en effet, que les Champignons d'une ma- nière générale peuvent être divisés en Siphomycètes et Champignons supérieurs à thalle cloisonné ; chez les Siphomycètes, le thalle est continu ; or, il se trouve que les affinités des Proiomyces les rapprochent des Sipho- mycètes, et plus particulièrement des Chytridiacées ; comment concilier cette apparente anomalie ? Nous avons examiné avec beaucoup d'attention ce mycé- lium et ses cloisons ; la chose n'est pas des plus faciles, et il est souvent nécessaire d'employer l'eau de Javelle pour arriver à distinguer nettement le cloisonnement ; de plus, il faut examiner la feuille de face, et non sur des sections transversales ; avec ces dernières, il arrive fré- quemment qu'aucune cloison n'existe sur la portion de thalle visible. LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 267 Les tubes mycéliens n'ont pas partout le même dia- mètre (fi^. 2) ; il y a des troncs principaux qui donnent naissance à des ramifications plus petites; d'une manière générale, on peut dire que les chiamydospores se for- FiG. 2. — Protomyces macrosporus. Section d'une feuille avec le thalle du parasite. meront sur ces troncs principaux, alors que les ramifica- tions sont surtout destinées à assurer la nutrition ; ces dernières s'appliquent étroitement sur les parois cellu- laires ; leur contenu est incolore et les cloisons y sont rares. Dans les tubes plus gros, les cloisons sont placées de distance en distance (fig. 3) ; le protoplasma dans ces 268 P. -A. DANGEARD articles est vacuolaire au début, et plus tard il devient granuleux ; les noyaux sont très petits, en nombre variable dans chaque article. Le mode de cloisonnement du mycélium et la structure des articles sont totalement différents de ce que l'on trouve chez les Ustilaginées ; on ne peut guère le com- FiG. 3. — Protomyces macrosporus. Portion du thalle avec ses cloisons. parer qu'à celui qui se produit dans les Catenaria, les An- cylistes, les Lagenidium, au moment delà reproduction. Chez les Chytridiacées, les cloisons n'ont eu d'abord d'autre objet que de séparer les sporanges ou les gamé- tanges ; puis il s'en est produit d'intercalaires, comme dans les Catenaria et V Anci/listes ; il semble bien que le mode de cloisonnement du Protomyces est encore très voisin de ces derniers. De Bary décrivait le mycélium du Protomyces comme LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 269 étant constitué par des hyphes de même diamètre divi- sées par de nombreuses cloisons en articles dont la lon- gueur égalait la largeur ou la dépassait du double ou davantage. Suivant nos observations, les filaments du parasite sont loin d'avoir partout le même diamètre ; il existe sur les troncs principaux des sortes de rhizoïdes à diamètre plus petit qui ont un trajet moins rectiligne que les autres, se contournent autour des cellules et ont un rôle nourricier (fig-. 2) ; de plus, les cloisons nous ont toujours paru espacées ; elles sont en relation avec la production des chlamydospores. Nous sommes disposé à considérer les cloisons du Pro- tomyces comme devant rentrer dans la catégorie de celles qu'on rencontre chez quelques Siphomycètes, soit au mo- ment de la formation des sporanges et des gamétanges {An- cylistes, etc.), soit également àl'apparition des chlamydos- pores {Mucor racemosus, etc.) ; le mycélium, à coup sûr, ne peut être rapproché de celui des Ustilaginées, et il n'offre avec celui des Ascomycètes que des analogies lointaines ; il représente plutôt un système végétatif de Chytridiacée supérieure. La suite du développement n'est pas pour infirmer cette conclusion. Les articles qui se forment sur les troncs principaux vont se transformer en organes qui ont reçu différents noms : sporanges, asques, chlamydospores. La dénomi- nation d'asque doit être écartée sans aucune hésitation : rien, ni dans le mode de formation de ces organes, ni dans leur mode de germination, ne rappelle ce qui a lieu dans les véritables asques : les phénomènes de karyoga- mie sont absents, et la naissance des spores a lieu comme chez les Siphomycètes. Nous nous trouvons simplement en présence de sporanges qui passent par une période d'enkystement avant de sporuler. Les renflements qui vont donner naissance aux spo- 270 p. -A. DANGEARD ranges enkystés sont le plus souvent intercalaires ; ils ont au début une forme plus ou moins irrégulière ; plus tard, ils s'arrondissent généralement. Assez souvent, ils sont limités par deux cloisons ordinaires ; mais il arrive quel- quefois qu'ils restent assez longtemps en communication directe avec le filament (PI. VII, fig. 2); ce sont même, dans quelques cas, les premiers épaississements de la membrane qui isolent le kyste (PI. XVII, fig. 1). Les jeunes sporanges ont un protoplasma très aqueux, dont les vacuoles dessinent des mailles assez régulières ; une dizaine de noyaux se trouvent à l'intersection des lignes du réseau ; par exception, les vacuoles peuvent être plus grandes et moins nombreuses. Les noyaux des sporanges, comme ceux du thalle, ne sont pas de simples taches chromatiques ; ils possèdent la structure ordinaire, avec membrane, nucléole et nucléo- plasme ; ce dernier est assez chromatique. Lorsque les sporanges approchent de leur taille maxi- mum, on trouve sous la membrane encore peu épaissie une assise régulière de grandes vacuoles ; l'intérieur est constitué par un réseau de protoplasma granuleux, à mailles plus petites au voisinage de la surface (PI. XVII, fig. 4). C'est à ce moment que le sporange va s'enkyster. Si nos numérations sont exactes, le nombre des noyaux est à ce moment de trente à quarante dans le sporange : il se serait donc produit une ou deux bipartitions depuis la naissance du renflement sur le thalle. Dans l'enkystement, il y a deux choses à considérer: d'une part la nature des membranes qui apparaissent, et d'autre part les modifications qui se produisent dans le protoplasma. De Bary a fournide nombreux détails sur la paroi du kyste ; il la décompose en épispore, mésospore et endospore (1). (1) De Baiy : Abh., loc. cil., p. 141-143. LES ANCETRES DES CHAMPIGxNOlNS SUPÉRIEURS 271 L'épispore à elle seule aurait une épaisseur supérieure à la moitié de l'épaisseur totale de la paroi; elle se dé- compose en une assise superficielle mince, très cassante, qui se continue avec la membrane des filaments mycé- liens et une couche plus interne à stries concentriques à teinte bleuâtre. L'endospore est une membrane simple, mince, à dou- ble contour, tenace et élastique, qui dans l'eau montre également une teinte bleuâtre. Entre l'épispore et l'endospore se trouve une mem- brane, la mésospore qui esta peine aussi importante que l'assise interne, qui est dépourvue du reflet bleuâtre et paraît constituée par une substance aqueuse gélatineuse. L'examen de nombreuses sections transversales de kystes nous conduit à faire quelques remarques. Il serait peut-être préférable de mettre à part la mem- brane primitive du sporange que de Bary considère comme la moitié la plus externe de l'épispore; elle est très nettement distincte ; sa couleur est plus sombre, et elle peut se séparer de la seconde enveloppe. Dans ces conditioFiS, les trois autres membranes qui restent appartiennent en propre aux phénomènes d'en- kystement ; elles sont déposées par couches successives et apparaissent en ordre centripète : c'est tout d'abord l'é- pispore de moyenne épaisseur, de densité assez grande, et striée concentriquement, puis la mécospore, également striée concentriquement ; celle-ci, dans nos préparations, était plus épaisse que l'épispore; sa substance est net- tement gélatineuse ; la dernière enveloppe, celle qui en- toure directement le protoplasma, est l'endospore. En résumé, il existe quatre enveloppes : la plus exté- rieure appartient au sporange, les autres proviennent du phénomène d'enkystement. Examinons maintenant quels sont les changements qui se produisent pendant cette période dans le protoplasma. 8 t 272 P.-A. DA.NGEARD Le contenu du sporange enkysté a une couleur jaune brun, d'après de Bary ; au contact de l'eau, il se montre comme une masse dense qui est homogène et réfringente à sa surface et grossièrement granuleuse à l'intérieur ; rarement on y trouve quelques grosses gouttes d'huile entre les granulations ordinaires. Ce contenu du kyste consiste pour la plus grande partie en substances grasses solubles dans l'éther presque entièrement; il reste en fai- ble quantité une substance granuleuse qui se colore par l'iode en jaune-brun. D'après nos observations, la structure réticulée que nous avons signalée dans les jeunes renflements persiste en général jusqu'au moment où la dernière enveloppe fait son apparition ; on constate simplement que le proto- plasma devient plus dense ; les mailles du réseau sont petites et nombreuses ; les noyaux augmentent en nom- bre. Puis une modification se produit qui est en rapport avec l'accumulation de substances de réserves ; celles-ci se déposent dans des vacuoles de taille variable ; les tra- bécules de cytoplasme qui limitent ces vacuoles sont gra- nuleux; le protoplasma est plus abondant dans la couche pariétale. En résumé, on est passé de la structure réticulée à la structure vacuolaire. Pendant ces changements, le nombre des noyaux a aug- menté ; chaque kyste, selon sa dimension, en possède de cent à deux cents en moyenne ; il s'est donc produit, de- puis le début du renflement, trois ou quatre bipartitions. Ces noyaux se trouvent placés dans les mailles du reti- culum (Pi. XVII, fig. 7, 8, 9) ; après le dépôt des sub- stances grasses dans les vacuoles, on les trouve plus nombreux dans la couche pariétale. Leur petitesse extrême empêche de suivre le détail des mitoses ; dans d'excellentes préparations nous avons réussi à voir, à côté du nucléole, des granulations chro- LES ANCETRES DES CHAMPIGNONS SUPERIEURS '273 matiques ordinairement disposées par deux, sans pou- voir affirmer qu'il s'agit d'un stade dekaryokinèse. Popta a figuré quelque chose de semblable : « Wieder andere Bilder lassen ein netzartig hellbraunlichblaues Plasma sehen mit vielen blauen Kernen und Kerntheilungsta- dien (1). » La germination des sporanges enkystés a été suivie avec beaucoup de soin par de Bary ; ce savant a obtenu en hiver la sporulation de kystes qui s'étaient formés au printemps précédent. Popta n'obtenait ces germinations qu'un peu plus tard, au commencement de février, et elles se continuaient jusqu'au milieu de juin. Ces deux savants n'ont jamais observé la formation des spores à l'intérieur même du kyste ; à la germination, l'épispore se déchire en plusieurs valves et le contenu du kyste sort entouré de l'endospore et de la mésospore dans le milieu extérieur où se produisent les phénomènes de sporulation. Cependant, Sappin-Trouffy avait déjà représenté les spores à l'intérieur du kyste, et l'observation avait donné lieu aux réserves suivantes de la part de Popta: « Zum Schluss sei noch ervhant, das Sappin-Trouffy, eine Figur *gibt von Protomyces viacrosporus, wofertigeSporen offen- bar von Chlamydosporen umgeben sind. Er spricht nicht von einen Austreten des Sporangium, obwohler de Bary's Arbeit anfuhrt. Wenn es sich hier wirklich um Proto- myces macrosporus handelt, so liegt hier ein Ausnahme- fall vor, v^elchen ich in meinen Culturen nicht beobachtet habe (1). » L'échantillon que nous étudions ici est de notre collection : c'est le même qui a servi à Sappin-Trouffy ; le parasite se trouve sur une ombellifère aquatique, VHelosciadium nodiflorum ; les chlamydospores occupent le milieu du mésophylle ; pour la plupart, le contenu ne (1) Popta : Loc. cit., p. 21. 274 P.-A. DANGEARD peut s'échapper au dehors, et la germination se fait sur place ; dans un grand nombre, les spores se forment à l'intérieur du kyste de la façon que nous allons indiquer. Devons-nous constituer une espèce nouvelle caractérisée par ce mode de germination ? Nous ne le pensons pas, et il est plus simple, croyons-nous, d'attribuer cette diffé- rence dans le mode de germination à la différence d'habi- tat ; lorsque le parasite vit sur une ombellifère terrestre, les chlamydospores expulsent leur sporange au dehors ; s'il s'agit, comme dans le cas présent, d'une ombeUifère aquatique, la germination s'opère dans des conditions dif- férentes, puisque la plante hospitalière est totalement immergée ou seulement en partie. Si cependant on voulait établir une espèce nouvelle, nous proposerions le nom de Protomyces inundatus. ,Cet habitat aquatique entraîne une autre différence dans VéjDoque de la germination ; dans les échantillons étudiés parPopta et de Bary, les sporanges ne germaient que longtemps après leur naissance ; ainsi Popta, sur des cas d'infection expérimentale avec V^^gopodium Poda- graria, obtenait au milieu de juin des sporanges enkystés, et cependant la germination ne s'est pas produite avant le commencement de février de l'année suivante. Nous ignorons la date de récolte de nos échantillons, mais sur la même tache nous avons trouvé des sporanges en for- mation et des sporanges en germination ; les premiers se trouvaient sur les bords, à la périphérie de la tache, alors que les derniers en occupaient le centre. On peut en conclure que le stade d'enkystement peut être considérablement réduit lorsque le parasite se déve- loppe sur une plante aquatique. Nous n'insisterons pas sur les détails morphologiques delà germination qui ont été donnés par les auteurs, sauf pour rectifier quelques points et indiquer la structure his- tologique correspondante à chaque stade. LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPERIEUnS 275 La germination s'annonce par une disparition progres- sive des substances grasses, et le cytoplasme reprend une structure réticulée (PI. XVIII, fig. 1). Le volume du spo- range augmente considérablement ; sa membrane primitive est incapable d'une telle extension et elle se fend en plu- sieurs endroits ; la mésospore par contre reste continue, ainsi que l'endospore. Le protoplasme émigré vers la périphérie (PI. XVIII, fig. ?, 3) et bientôt il forme sous la membrane une couche de moyenne épaisseur, très ré- gulière; le centre de l'organe est complètement vide de protoplasma. La couche pariétale a une structure très finement réticulée ; les noyaux s'y divisent activement ; lorsque, par suite d'un accident de préparation, on réussit à voir de face une partie du protoplasma, on voit très dis- tinctement les éléments nucléaires, malgré leur petitesse (PI. XVIII, fig. 5) ; leur nombre dépasse certainement un millier, et on peut dire qu'à partir du début de la germi- nation le nombre des bipartitions successives a été au moins de deux ou trois. Après la dernière bipartition, le protoplasma se frag- mente en autant d'îlots qu'il existe de noyaux ; chacun d'eux est le centre d'une spore : dans l'épaisseur de la couche pariétale, le nombre des assises de spores est de deux ou trois. . Les spores ont, en général, laforme d'un petit bâtonnet ; leur cytoplasme est sensiblement homogène et se colore en bleu par la triple coloration de Flemming ; si la déco- loration est suffisante, on aperçoit au centre le noyau qui occupe tout le diamètre transversal de la cavité ; la mem- brane est épaisse, incolore ; sa couche externe a l'appa- rence gélatineuse. Après la sporulation, les spores abandonnent la péri- phérie du kyste et gagnent le centre, où elles forment un amas plus ou moins régulier séparé de l'endospore par du liquide ; c'est alors que se produisent la rupture des 276 P.-A. DANGEARD enveloppes et la dissémination des spores (PI. XVIII, fig. 6); celles-ci sont retenues ensemble par une substance incolore analogue à celle qui existe dans les sporanges des Chytridiacées ; ce n'est qu après sa dissolution par l'eau que les spores sont complètement libres. Nous avions, dans cette dernière partie du développe- ment, à vérifier certaines conclusions de Popta qui nous paraissaient laisser prise au doute. Cet auteur admet que tout le protoplasma du sporange n'est pas utilisé dans la formation des spores ; il en reste- rait une assise pariétale renfermant de nombreux noyaux. Le fait, s'il eût été exact, prenait de l'importance par son caractère d'exception ; on n'a rien signalé de pareil, si je ne me trompe, dans les sporanges ordinaires ; quant aux asques, le protoplasma qui persiste sous le nom d'épi- plasme est dépourvu de noyaux. L'observation de nom- breux kystes de Protow.yces ne nous a jamais permis de constater la présence de cette couche pariétale avec noyaux; tout le protoplasma est utilisé dans la sporula- tion, et nous rentrons dans la règle générale. Un autre point du développement se trouve en discus- sion. Popta a bien figuré quelques spores uninucléées; mais dans le sporange même on en trouverait qui au- raient les unes deux, les autres trois noyaux ; après leur dissémination, elles renfermeraient normalement cinq ou six noyaux. Nous ignorons ce qui a pu causer cette erreur ; mais nous croyons pouvoir affirmer que les spores n'ont jamais qu'un noyau à leur sortie du sporange; elles le conservent assez longtemps jusqu'au moment où elles vont germer. En résumé, nous n'avons pas affaire ici à des spores à plusieurs énergides, comme chez les Mucorinées ; ces spores ne possèdent qu'un noyau. Ici se pose une question bien intéressante que nous n'avons pas eu le loisir de résoudre. LES ANCÊTRES DÉS CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 277 Les spores du Protomyces ont une tendance très mar quée à se fusionner par deux, comme dans les Ustilagi- nées ; la signification du phénomène est encore assez obscure. Malgré certaines observations récentes, nous persistons à croire, d'après nos études antérieures, que ces fusions chez les Ustilaginées ne sont pas accompagnées d'une union des noyaux. Il eût été très intéressant de savoir à quoi s'en tenir au sujet du Protomyces ; nous devons nous borner à représenter quelques figures dessinées à Ja chambre claire (PI. XVIII, fig. 7) : on ne voit partout qu'un noyau; mais nous ne voulons en tirer aucune conséquence, car dans ces exemples il n'est même pas toujours facile de distinguer ce qui est réel- lement anastomoses entre deux spores, d'une germination unique avec renflement secondaire ; les anastomoses peuvent se produire à l'intérieur même du sporange. Il sera nécessaire de revenir sur ces cas divers d'ana- stomoses entre spores d'une façon spéciale pour en dégager la signification exacte. Le développement que nous venons de suivre indique des affinités très étroites avec les Chytridiacées ; comme pour le Protascus, l'immobilité des spores est le seul carac- tère important qui établisse une démarcation et puisse permettre de commencer avec ces genres la série des Hemiasci, qui se continue ensuite avec les Tscphridium. Genre Taphridium. Le mode de développement de l'asque ne pouvait man- quer d'être pris en sérieuse considération pour la classi- fication; c'est ce que Juel a très bien compris dans son étude du genre Taphridium : il a distingué deux espèces qui vivent l'une et l'autre sur les feuilles d'ombellifères(l}. (1) Juel: Taphridium eine neue Gattung der Protomycetaceen (Bihang Till. K. SV. Vet. Akad. Handl.,27). 278 P.-A. DANGEARD P Taphriclium umhellifer^Txim Lagerh. et Juel. Cette espèce se développe sur les feuilles de divers Heracleuin et Peucedanum : elle a été rencontrée en Suède, en Danemark, en Allemagne, en Suisse, en Italie. Ros- trup, qui l'a distinguée le premier en 1883, en avait fait une espèce du genre Taphrina; plus tard, Sadebeck, dans sa monographie des Exoascées, la faisait rentrer dans son genre Magnusiella. Lagerheim et Juel, ayant reconnu que cette espèce ne forme pas des asques à la manière des Exoascus, mais bien de véritables sporanges, l'ont rapprochée du genre Protomyces sous le nom générique de Taphridium. Le thalle du parasite comprend deux sortes d'hyphes : les unes, qui se forment les premières, se trouvent entre l'épiderme et la couche palissadique ; elles sont cloison- nées en articles qui se renfleront plus tard en sporanges : ces articles fertiles donnent naissance à des filaments mycéliens qui s'intercalent entre les cellules de l'assise palissadique et viennent se ramifier à la surface supé- rieure du mésophylle ; cette dernière partie du thalle est purement végétative; ces diverses cellules contiennent toujours plusieurs noyaux. Les très jeunes sporanges, de forme irrégulière, con- tiennent déjà de nombreux éléments nucléaires, dans un cytoplasme à larges mailles. Plus tard, ces sporanges se sont arrondis en augmentant de volume ; leur cyto- plasme finement réticulé comprend de nombreux noyaux qui sont encore très petits et situés pour la plupart dans la couche périphérique du sporange (fig. 4, A). Ces noyaux augmentent de grosseur ; à côté du nucléole se voit maintenant un réseau de chromaline distinct: le cytoplasme-perd sa structure réticulée, et les noyaux pré- sentent des phénomènes de division. On ignore encore le mode de formation exact des spores. Juel a remarqué dans les sporanges presque mûrs deux LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 279 sortes de noyaux ; les uns sont petits et entourés d'un protoplasme de choix nettement délimité, com- me s'il s'agissait d'une spore ; les autres sont beaucoup plus gros, avec un réseau de chromatine et se trouvent dans le protoplasma général. Comme les premiers se trouvent ordinairement vers la périphérie, alors que les autres sont vers le centre, Juel a suggéré l'idée que la formation des spores avait peut- être lieu en direction centripète (fig. 4, C). De nouvelles observa- tions sont nécessaires, car cette dernière partie du développement sem- ble tout à fait anormale. Quoi qu'il en soit, nous retiendrons ces deux faits intéressants : les spores se forment dans toute l'é- paisseur du sporange, et une couche mince de cy- toplasme dépourvue de noyaux persiste à la péri- phérie du sporange(fig.4, B). Jueladécrituneseconde , .,. ^ ,,.^ Fig. 4. — Taphruhum umbelLifevarum espèce de Ta.phridmm. (d'après Jlel). 280 p. -A. DANGEARD 90 Taphridium algeriense Juel. Cette espèce a été rencontrée en Algérie sur les feuilles de Ferula, communis. Le thalle, comme dans l'espèce pré- cédente, présente une partie fertile sous l'épiderme et une autre, de nature végétative ; celle-ci s'étend dans tout le mésophylle (fig. 5, A). Tous les articles des hyphes fertiles ne se développent pas en sporanges ; un certain nombre restent stériles. Les sporanges présentent dès le début de nombreux noyaux; ces noyaux sont nucléoles et situés dans un cy- toplasme à larges mailles. Le volume de ces sporanges augmente; la paroi s'épaissit; le cytoplasme devient plus finement réticulé, et les noyaux, maintenant très gros, présentent un réseau chromatique. Au moment de la sporulation, tous les noyaux se portent à la périphérie ; leur grosseur ne dépasse plus celle des noyaux végétatifs, ce qui est sans nul doute le ré- sultat des bipartitions qu'ils ont subies (fig. 5, C); la cavité interne du sporange ne contient plus maintenant qu'un réseau de protoplasma vacuolaire sans noyaux. La couche de cytoplasme périphérique qui renferme les noyaux se fragmente en autant de cellules qu'il y a d'élé- ments nucléaires : cette formation est libre, car du cyto- plasme persiste en dehors de ces cellules sur la paroi et à l'intérieur du sporange (fig. 5, D). Les cellules ainsi formées ne sont que des « protos- pores » ; chacune d'elles, en se divisant probablement plusieurs fois, fournit les spores (fig. 5, E); celles-ci, d'a- bord petites et à noyau indistinct, prennent leur forme définitive, avec membrane et noyau. Elles peuvent con- tracter entre elles des anastomoses (fig. 5, F), comme dans le Proiomyces macrosporus. LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 281 L'étude rapide de ces deux espèces nous suggère quel- ques réflexions : l'' Leur parenté avec le genre Protomyces n'est pas Û F D FiG. 5. — Taphridium algeriense (d'après Juel). douteuse, mais la différenciation est déjà plus avancée, comme le montre la distinction nette du thalle en partie fructifère et en partie végétative, qui n'est qu'ébauchée dans le Protomyces. D'autres caractères viennent corroborer cette première impression : c'est ainsi que dans les deux espèces de TaphrirUimi,\\ existe une couche mince de protoplasma 282 P.-A. DANGEARD sans noyaux qiij n'est pas utilisé dans la formation des spores. Nous en tirons cette conclusion, c'est que, dans les sporanges ordinaires, nous assistons à l'élimination d'un épiplasme dans les espèces les plus différenciées ; comme l'asque n'est en réalité qu'un sporange de germination de l'œuf ou sporogone, nous voyons que le phénomène de l'élimination d'un épiplasme a porté à la fois dans l'évolution sur les sporanges ordinaires et les sporo- gones. Le Taphridium algeriense nous fait assister à une autre complication dans les phénomènes de sporulation : les protospores, qui se divisent pour donner les spores définitives, rappellent les cellules de même nom, ren- contrées par Harper chez les Pilobolus*; mais l'asque lui-même offre souvent des phénomènes du même genre ; quand une spore d'abord à un seul noyau arrive à en posséder un grand nombre et se cloisonne, il sufïirait que ces articles deviennent libres pour que l'analogie fût complète. CHAPITRE VI ■ l'évolution de la sexualité chez les champignons inférieurs. En faisant descendre les Champignons des Algues, les partisans de la doctrine polyphylétique expliquent d'une façon en apparence très simple les divers types de reproduction sexuelle que nous rencontrons chez les Siphomycètes ; chaque groupe d'Algues, en se déco- lorant sous Tinfluence du parasitisme, a conservé le mode de sexualité qui lui était particulier ; ainsi les Mo- noblépharidées ont hérité de l'oogone et de l'anthéridie des Œdogonium, les Péronosporées ne s'éloignent pas trop des Vauchéries, du moins en ce qui concerne les organes sexuels ; il en serait de même des Floridées et des Ascomycètes. Ayant admis une origine commune des Mycètes aux dépens des xMonadinées zoosporées pour les raisons que nous avons données précédemment, il nous faut maintenant suivre l'évolution de la reproduction des Champignons à partir d'un type unique. L'essai est nou- veau ; il n'en est que plus intéressant ; nous allons donc essayer de dégager les causes qui ont amené les variations que nous constatons chez les Chytridiacées et les familles qui s'y rattachent. Remarquons d'abord, et la chose a son importance, que si les Algues ont transmis fidèlement aux champi- gnons leur reproduction sexuelle, elles devraient égale- ment leur avoir donné une fructification asexuelle iden- 284 p. A. DANGEARD tique ; on conviendra facilement que les sporanges des Monoblépharidées et ceux des Saprolégniées sont presque semblables, alors qu'ils diffèrent considérablement de ceux des Œdogoniées et des Vauchéries ; letétrasporange des Floridées n'a que des analogies bien lointaines avec les conidiophores des Ascomycètes. On peut dire que l'étude des sporanges des Siphomy- cètes montre chez tous ces organes une ressemblance presque complète, que la doctrine polyphylétique essaierait en vain d'expliquer : cette doctrine exigerait au contraire une diversité dans la forme des sporanges qui rappelle- rait les différences que nous trouvons chez les Chloro- phycées ; c"est là, selon nous, une objection capitale. Remontons à l'origine même des Algues et des Cham- pignons ; nous voyons que les Flagellés leur ont transmis un sporange à peti près identique ; on ne saurait;, en effet, accorder une trop grande importance au fait que dans la cellule-mère les divisions cellulaires sont suc- cessives ou simultanées ; cela nous permet simplement de fixer un niveau différent aux diverses lignes d'évolution des Protophytes sur l'embranchement des Flagellés. Mais, dans les deux cas, nous avons comme base de la reproduction un sporange et des spores. Nous avons montré ailleurs comment l'autophagie sexuelle s'est établie chez les Algues aux dépens du spo- range et des spores qui sont devenus respectivement gumé- tanges et gamètes (1). Le même phénomène s'est produit chez les Champi- gnons ; la sexualité est intervenue également pour sup- pléer au défaut de nutrition ; l'œuf résulte, comme chez les Algues, de l'union de deux zoospores affaiblies, de deux gamètes; mais la fonction s' esi adapléeaux différences (1) P. -A. Dangeard : Mémoire sur les Chlamydomonadinces (Le Bola- niste, 6^ série, p. 263). LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 285 de nutrition que pr Isente le thalle chez les Algues et les Champignons. On ne semble pas s'être rendu compte jusqu'ici de cette considération qui pourtant domine l'ensemble : sans elle, il est impossible de comprendre les divers essais et tâtonnements que noui constatons chez les Chytridinées et dont quelques-uns n'auront aucun succès. Le mode le plus naturel consistait dans l'union des gamètes, après leur sortie du gamétange, pour former l'œuf, ainsi que la chose a lieu chez les Chlamydomona- dinées ; ce mode a dû. certainement se produire avec sa simplicité primitive, mais comme il présentait des dés- avantages marqués, il n'en reste plus que des vestiges dont la signification a échappé jusqu'ici aux mycologues. Grâce à la nutrition holophytique, les gamètes d'algues peuvent vivre assez longtemps en attendant la copulation ; l'œuf, de son côté, pourra se suffire et même augmenter ses i-eserues, toujours grâce à la. présence de la chlorophylle . Les gafnètes des Champignons n'avaient pas cette res- source ; leur phase d'activité achève leur épuisement, et l'œuf qui résulterait de leur union serait condamné lui- même a la famine, tout au moins dans les conditions or- dinaires. C'est sans doute ce qui explique pourquoi nous ne trouvons chez les Champignons que deux cas qui rap- pellent Vunion de gamètes en dehors des gamétanges : celui du Polyphagus Euglenae et celui des Monoblepha- ridées, et encore le premier a-t-il été mal interprété jus- qu'ici. A. — La reproduction sexuelle du Polyphagus diffère du type des Chlamydomonadinées, parles particularités sui- vantes qui tiennent à l'absence de chlorophylle. Les gamétanges du Polyphagus ne peuvent être dis- tingués des sporanges, et les gamètes qui en proviennent ont la structure et l'aspect des zoospores ordinaires. 286 P.-A. DANGEARD Ces gamètes sont cependant incapables d'assurer, dans les conditions ordinaires, la continuation du développe- ment ; il est nécessaire qu'une copulation intervienne. Si cette copulation avait lieu, comme chez les Alc/ues, entre gamètes actifs, sortant de gamétanges, l'œuf ne pourrait remplir son rôle de cellule de réserve, puisqu'il serait réduit à un élément incolore, dépourvu de tout mode de nutrition ; cet œuf, très pauvre en protoplasme et en énergie par le fait même de son origine, ne pourrait accu- muler les substances nécessaires à la formation d'un nou- veau sporange. Nous nous expliquons ainsi pourquoi les gamètes chez les Champignons ne s'unissent pas comme chez les Al- gues à leur sortiedesgamétanges ; ce procédé, s'il a existé, a bien vite disparu, puisqu'il montrait des désavantages certains. La difficulté a été tournée de diverses manières, et le Polyphagus Euglenae nous en fournit précisément un exemple. Dans ce genre, les gamètes commencent à se nourrir en parasites des Euglènes, exactement comme les zoospores ordinaires, et ce n'est qu'après avoir ainsi ac- cumulé des réserves suffisantes que ces gamètes effec- tuent leur copulation ; comme ils sont immobiles, ils utili- sentun de leurs filaments nourriciers pour assurer Vunion des cytoplasmes et des noyaux. La zygospore qui en pro- vient possède, grâce à cette nutrition préalable des gamètes, les matériaux nécessaires pour assurer la suite du déve- loppement (fig. 6). D'après les observations du D' W. Lœwenthal, un mode de reproduction analogue se produirait dans le Zygorhizidium Willei (1). 11 est même possible que cette nutrition préalable desga- (1) w. Lœwenthal : Weitere Untersuchungen an Chytridiaceen {Archiv. f. Protïstenhunde, \90^). LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPERIEURS 287 mètes avant la copulation existe chez des espèces qui n'ont pas encore acquis de système radiculaire ; on pourrait FiG. 6, — Le Polyphagus Euglense. Kystes et zygospores. 288 P.-A. DANGEARD sans doute donner cette signification aux phénomènes dé- crits dans le genre Diplophysa , si on les connaissait mieux. On sait, en effet, que dans les espèces de ce genre on trouve, au moment de la reproduction, deux cellules voi- sines détaille différente ; la plus petite déverse son con- tenu dans la plus grosse qui est désignée sous le nom d'oosporange. Si nos vues sont exactes, il s'agit simplement de la co- pulation de deux gamètes après nutrition préalable, et la grosse cellule n'est nullement un oosporange : elle doit être considérée simplement comme un gamète femelle ; nous nous trouvons en présence d'un cas d'hétérogamie rappelant celui du Chlsimydomonas Monadina, ; le contenu du microgamète se déverse dans la cellule du macroga- mète. Il sera fort intéressant de savoir comment se com- portent les noyaux. Dans cette manière d'envisager les choses, on n'a plus affaire à des modes de sexualité, sans relation les uns. avec les autres : nous rentrons dans le schéma général, auquel s'ajoute simplement la nutrition préalable des ga- mètes avant la copulation ; les différences d'aspect dans la copulation tiennent uniquement au fait que cette nu- trition préalable est assurée par des rhizoïdes ou par la surface même du corps. Si ce mode de reproduction sexuelle ne s'est pas généra- lisé chez les Champignons, c'est qu'il n'a pu s'adapter au mode de vie des diverses espèces ; cette nutrition préala- ble des gamètes assure bien la vitalité de l'œuf, mais elle rend très difficile la réunion des gaviètes, puisque ceux-ci ont perdu leur motilité et qu'il leur faut se mettre en re- lation par un filament copulateur ; cela suppose une orga- nisation particulière et exige d'autre part que les individus ne soient pas trop éloignés les uns des autres. B. — Les Monoblépharidées nous montrent un autre essai qui s'est produit sur un type d'orgailisation déjà LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 289 FiG. 1. — Monoblepharisbrachyandra. A, thalle avec rhizoïdes: B, C, sporanges; E, anthéridie et oogone à une seule oosphère; F, fécondation. — Monohlepharis polymorpha, variété. B, D, sporanges; G, sortie de l'œuf; 1, œuf avec sa mem- brane épineuse ; H, oosphère à un seul noyau. D'après Lagerheim. 290 p.A. DANGEARD moins primitif : nous pouvons nous en faire une idée en consultant un mémoire récent de Lagerheim (1). L'organisation générale de ces Champignons est celle des Chytridiacées supérieures et des Oomycètes ; le thalle qui est continu se compose de rhizoïdes et de filaments végétatifs ; les premiers s'enfoncent dans le substratum constitué ordinairement par des débris de plantes ou de lichens séjournant dans l'eau ; les filaments végétatifs se dressent perpendiculairement au substratum et se rami- fient plus ou moins (fig. 7, A) ; le protoplasma renferme un grand nombre de noyaux. Le Champignon se reproduit au moyen de zoospore^ arrondies, à un seul flagellum, qui se forment au nombre d'une dizaine dans des sporanges terminaux ou inter- calaires (fig. 7, B, C, D). La reproduction sexuelle s'effectue entre gamètes mobi- les ; mais, tandis que les gamétanges mâles se compor- tent comme les sporanges ordinaires et donnent nais- sance à des anthérozoïdes que l'on pourrait confondre avec des zoospores, il en est autrement des gB.meta.nges femelles; ceux-ci ne fournissent qu'un seu^ gamèie uninu- cléé\ celui-ci renferme donc, condensée en un élément unique, la. valeur de plusieurs gamètes (fig. 7, E, F, G) ; aussi l'oosphère est-elle riche en substances de réserve. L'œuf pourra par suite suffire aux débuts de la germination (fig. 7, I). Le rameau des Monoblépharidées nous montre un second essai en vue d'assurer une nutrition sufïisante de l'oeuf, malgré l'absence de la nutrition holophytique ; il possède un avantage marqué sur le premier essai re- présenté par le Polyphagus, en ce sens que la rencontre des gamètes, s'opérant à la «ortie des gamétanges, utilise (1^ G. Lagerheim : Un ter. ûber die Monoblepharideen (Travaux de Botanique de l'Université de ytockholm. Bd. III, 1900). LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 294 encore l'appareil locomoteur ; mais il a un grave incon- vénient, c'est d'entraîner une inégalité très grande entre le nombre des gamètes mâles et fies gamètes femelles, d'où une perte de substance considérable. Enfin l'oeuf se trouve abandonné dans un milieu quelconque qui peut être totalement impropre à son développement ultérieur. Peut-être faut-il voir dans ces raisons l'explication de l'ar- rêt qui s'est produit dans l'évolution des Monobléphari- dées, alors surtout que d'autres espèces avaient su résoudre les difficultés que l'absence de nutrition holo- phytique apportait à la réunion immédiate des gamètes et au développement ultérieur de l'œuf. En effet, la marche en avant des diverses lignées phy- logénétiques s'est faite sur un progrès d'une nature bien spéciale et adaptée très étroitement au but poursuivi: les gamétanges se sont formés au contact et se sont mis en relation directe. Q_ — Lorsque les gamètes deviennent libres dans l'eau, une partie d'entre eux se trouvent sacrifiés sans aucun profit pour la plante, parce qu'ils n'arrivent pas à rencon- trer le second gamète nécessaire à la formation de l'œuf; cette perte de substance ne semble avoir eu aucune im- portance chez les Algues, qui puisent à discrétion leurs éléments carbonés dans le grand réservoir de l'atmos- phère. Les Champignons, moins bien partagés à ce point de vue, ont réussi à éviter cet inconvénient, en idéalisant Vu- nion des gamétanges eux-mêmes qui se mettent directement en communication ; certains gamètos se trouveront encore inutilisés parce que le nombre de ces éléments peut va- rier beaucoup dans les gamétanges en présence ; mais leur substance ne sera pas perdue ; elle servira à assurer une meilleure nutrition des gamètes privilégiés. Il faut croire que ce dernier résultat primait tous les autres, puisque nous voyons chez les Péronosporées le nombre des 292 P.-A. DANGEARD gamètes privilégiés diminuer progressivement jusqu'à Vu- nité. Ainsi les avantages d'une telle disposition sont incon- testables ; aucune perte de substance n'a lieu du fait de gamètes qui s'égarent à la poursuite d'une copulation de plus en plus problématique ; d'autre part, l'oeuf reste ainsi en communication avec la plante mère au moins pendant un certain temps. Cette mise en communication directe des gamétanges devient la règle pour tous les Champignons siphomycè- tes ; elle fait son apparition de très bonne heure avecles Chytridiacées, se continue avec les Saprolégniacées, les Péronosporées, les Mucorinées, et se transforme pro- gressivement sous l'influence de la vie aérienne pour donner les gamétophores des Ascomycètes et des Basi- diomycètes. Dans ces conditions, comment pourrait-on rattacher les Champignons aux Algues ? Chez celles-ci, il n'existe rien de pareil : presque partout nous voyons le gamète mâle doué de mouvements aller à la recherche du gamète femelle ; quand il est immobile, comme chez les Flori- dées, il n'en doit pas moins être transporté plus ou moins loin avant de rencontrer le trichogyne ; la repro- duction des Conjuguées elle-même n'a que des rapports bien éloignés avec celle d'un Ancylistes ou d'un Myzocy- tium ; à coup sûr, il n'existe entre elles aucun lien phy- logénétique. La conjugaison des gamétanges chez les Champignons se fait au contraire suivant un schéma général qui répond à une nécessité physiologique et dont il est facile de dé- gager les divers types. Ces derniers correspondent à des directions différentes de l'évolution. Afin de bien saisir les caractères de la sexualité dans les divers types issus d'une même souche que nous allons étudier, il est nécessaire de conserver aux gamétanges et LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 293 aux noyaux qu'ils renferment leur valeur exacte et leur signification propre : un gamétangeest un organe qui à maturité fournit autant de gamètes qu'il contient de noyaux. Lorsque les gamétanges restent séparés, les gamètes sont mis en liberté ; Vunion directe des gamé- tanges a eu pour premier résultat de rendre inutile la diffé- renciation morphologique des gamètes ; mais chaaue noyau de gamétange continue à être le centre d'un éner- gide sexuel ayant la valeur d'un gamète. Lorsque les gamétanges sont séparés, la fécondation consiste en l'union de deux gamètes avec fusion des noyaux ; lorsque les gamétanijes sont en communication, la fécondation ne sera plus apparente que parles fusions nucléaires entre les énergides sexuels copulant deux par deux. L'essence du phénomène est identique dans les deux cas : fusion de deux gamètes, fusion de deux éner- gides. Avec des gamétanges séparés, le résultat de la copula- tion de deux gamètes est un œuf simple. Avec des gamé- tanges communiquant librement, il y a autant de ces œufs simples que de noyaux doubles de copulation ; mais cha- cun d'eux ne se différencie pas morphologiquement ; c'est l'ensemble qui se recouvre d'une membrane et ac- quiert ainsi la valeur d'œuf composé. •Avec des gamétanges séparés, il y a fréquemment une grande disproportion entre le nombre des gamètes mâles et celui des gamètes femelles ; un grand nombrameurent surtout parmi les premiers, parce qu'ils n'arrivent pas à destination. Lorsqu'il s'agit de gamétanges mélangeant directement leur contenu, il existe toujours une certaine inégalité dans le nombre des énergides sexuels fournis par chacun ; l'inégalité peut s'accentuer du fait de l'an- théridie, qui ne fournira au gamétange femelle qu'un certain nombre de ses énergides. Très souvent, c'est l'an- théridie qui joue le rôle de régulateur et qui détermine 294 P. -A. DANGEARD le nombre des gamètes mâles et femelles qui copule- ront. Ld dégénérescence d'un plus ou moim^ grand nombre de noyaux dans Voogone n'est donc pas une anoinalie : c'est une conséquence de l'absence de noyaux mâles en nombre suffisant pour assurer la copulation de tous les énergides femelles. Nous devons distinguer deux directions principales: l'une dans laquelle les gamétanges qui se mettent en communication sont semblables ; il y a isogamétangie comme chez les Mucorinées ; l'autre dans laquelle les gamétanges sont de taille et parfois aussi de forme diffé- rente ; on les distingue alors en anthéridies et oogones : il y a hétérogamétangie comme chez les Péronosporées et les S iprolégniacées. a) L'isogamétangie, selon toute probabilité, a été léguée aux Mucorinées par des Chytridiacées voisines du Zygo- chytrium aurantiacum. Cette espèce, qui n'a été étudiée jusqu'ici que par Sorokin, offre le plus grand intérêt :a priori, on doit admettre que les rameaux copulateurs et par suite les gamétanges qui les terminent sont plurinu- cléés ; selon toute probabilité, on rencontrera à l'intérieur de la zygospore des phénomènes nucléaires analogues à ceux que nous avons découverts chez les Mucorinées. Dans les Mucorinées, les gamétanges renferment ap- proximativement le même nombre de noyaux. Après Ta mise en communication des deux organes, il se produit une bipartitiofi de noyaux avant la formation des énergides sexuels définitifs. Cette division préalable des noyaux dans les gamétan- ges semble avoir un caractère général ; nous la retrou- verons dans l'hétérogamétangie. Il est inutile d'entrer ici dans des détails que nous connaissons ; ces énergides se fusionnent par deux au fur et à mesure que le mélange des protoplasmes des deux gamétanges amène leur rencontre ; les noyaux qui LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPERIEURS 295 ne trouvent pas à copuler entrent en dégénérescence, mais ils sont relativement peu nombreux. La zygospore est un œuf composé, qui renferme un grand nombre de noyaux doubles de copulation. On y trouve également en abondance des substances de ré- serve, consistant en globules d'huile et en gros corpus- cules chromatiques , ces derniers se colorent comme les cristaux de mucorine qui se rencontrent dans les jeunes zygospores, et nous serions assez disposé à croire que les gros corpuscules chromatiques de la zygospore âgée sont constitués par de la mucorine. Notons encore les changements déstructure qui se suc- cèdent dans la zygospore : structure dense, vacuolaire, réticulaire, alvéolaire, et la constitution de la membrane propre qui se divise en épispore ou couche charbonneuse et endospore, le tout enveloppé au contact par la mem- brane des gamétanges. La conjugaison des Mucorinces réalise un type normal et primitif de sexualité par communication directe des gamétanges, et nous serions bien étonné si l'on rencon- trait chez les divers genres non étudiés des variations ■considérables par rapport à nos observations sur le Mu- cor fragilis et le Sporodinia, grandis. Ces variations ne peuvent guère exister, car le nombre des énergides en présence de provenance opposée n'est pas soumis à de grands écarts ; le T type qui nous reste à étudier présente au contraire, à cet égard, les plus grandes différences. h) Dans l'hétérogamétangie, nous devons actuellement distinguer deux cas principaux : dans le premier, tous les gamètes restent indifférents ; par suite, il n'existe pas de fusions nucléaires lors de la mise en communication des gamétanges. Dans le second cas, un plus ou moins grand nombre des gamètes de chaque gamétange arrivent à copulation. 296 p. -A. DANGEARD loUneseule espèce, l'Ancyh's/^es C/psieru, semble jusqu'ici réaliser le type des gamétanges à gamètes indifférents ; déjà, nous avons vu que les zoospores ne se différencient pas dans les sporanges .-ceux-ci germent directement en un filament. Les gamétanges se distinguent en anthéridies et en oogones : tandis que le nombre des énergides de l'anthé- ridie est ordinairement de quatre, celui des énergides de l'oogone est de huit ou de seize : ce nombre n'est atteint qu'après une division préalable des noyaux. L'anthéridie déverse son contenu dans l'oogone : l'œuf devrait se trouver formé régulièrement de l'union de qua- tre énergides mâles avec quatre énergides femelles, les autres noyaux femelles surnuméraires étant appelés à disparaître. Au lieu de cela, nous avons trouvé, jusquedans des oos- pores très âgées, tous les noyaux distincts et possédant chacun une structure normale. Nous sommes donc forcé de conclure que dans VAn- cylistes nous avons affaire à des gamètes indifférents. Far suite, la formation que nous désignons sous le nom d'oospore ne rentre dans la catégorie d'aucune de celles que l'on connaît actuellement : elle renferme mélangés et non fusionnés des énergides mâles et des énergides femelles en proportion variable : c'est une hété- rospore. Le fait est tellement exceptionnel dans la nature que, malgré le grand nombre de nos observations, nous nous demandons encore si une fusion tardive n'interviendrait pas à la germination. Nous ne le croyons pas cependant, et sans doute faut-il rattacher cette anomalie à celle que nous avons constatée dans le sporange, où le filament germinatif renferme, non différenciées, les huit zoospores. Il faut croire du reste que ce phénomène d'indifférence LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 297 constatée tout à la fois du côté des zoospores et des ga- mètes n'a guère été favorable à l'évolution, puisque VAn- cylistes Closterii se présente comme un type unique, sans aucune descendance. 2° Le second cas se trouve réalisé chez les Péronospo- rées : ceux-ci tiennent ces caractères de leur reproduc- tion, d'ancêtres comme le Myzocytium vermicolum, appartenant aux Chytridiacées supérieures. Nous avons établi précédemment comment les choses se passent dans le Myzocytium ; il existe une grande disproportion entre le nombre des noyaux de l'oogone et celui de Tanthéridie : tandis que l'oogone renferme ordi- nairement huit énergides, l'anthéridie n'en possède que deux; encore peut-elle, sans doute, les partager entre deux oogones voisins. Il en résulte qu'un seul énergide de chaque oogone peut être fécondé : l'œuf qui en résultera utilisera pour lui-même la substance des autres gamètes sacrifiés ; leurs noyaux disparaîtront progressivement par dégénérescence. Il nous a été impossible de vérifier s'il existe une mitose dans chaque gamétange, préalablement à la copu- lation : d'après ce qui a lieu ailleurs, la chose est assez probable. Le but atteint chez le Myzocytium vermicolum, dont l'œuf arrive ainsi à ne comprendre qu'un noyau double de copulation, présentait sans doute de grands avantages pour f espèce, car c'est de ce côté que va tendre la série des transitions que nous observons chez les Péronos- porées. Nous avons été l'un des premiers avec Wager à étudier la reproduction sexuelle des Péronosporées : elle a fait depuis l'objet de nombreux travaux, parmi lesquels il est juste d'accorder une mention spéciale à ceux de Stevens : en réalité, c'est ce savant qui semble avoir fixé définiti- vement les caractères généraux de la fécondation dans ce 298 p. -A DANGEARD groupe ; il les a résumés dans un mémoire publié en 1901 (1). Le fait qui nous frappe tout d'abord dans le gamétange femelle, c'est la séparation du protoplasma, au bout d'un temps assez court, en une couche périphérique, désignée sous le nom de périplasme, et d'une partie centrale, qui a reçu le nom d'ooplasme ; une autre particularité, c'est que les noyaux de l'oogone, comme ceux de i'anthéridie, subissent deux bipartitions successives. Cela étant, nous constatons les variations suivantes qui peuvent se montrer dans des espèces très voisines. Considérons d'abord VAlbugo Bliti (2) : l'oogone et I'an- théridie en présence contiennent de nombreux noyaux gui se mettent bientôt en division ; ces noyaux sont au nombre de 250 environ dans l'oogone et approximative- ment de 35 dans I'anthéridie : le cytoplasme de l'oogone se différencie en ooplasme et périplasme ; les noyaux en division se groupent à la surface de Tooplasme et à la métaphase, un certain nombre d'entre eux abandonnent un des noyaux-frères dans l'ooplasme; celui-ci reçoit de la sorte une cinquantaine de noyaux (fig. 8, B). L'oosphère est donc multlnucléee; un globule oléagineux, analogue à ceux que nous avons signalés autrefois chez plusieurs Saprolégniées et Péronosporées, apparaît au centre de l'oosphère ; Stevens le désigne sous le nom de cœnocentre (fig. 6, D); il est très réduit et disparaît plus tard; les noyaux de l'oosphère subissent une seconde mitose. C'est à ce moment que le tube anthéridien apporte dans l'oos- phère ses éléments nucléaires qui ont subi, eux aussi, deux divisions successives (fig. 8, A) ; ils sont au nombre d'une centaine et copulent pai paires avec les noyaux femelles (1) stevens : Gametogenesis andFertilization in Albugo {Bot. Gazette, voi.XXXlI, 1901). (2) Stevens : The Compound oosphère of Albugo Bliti {Bot. Gaz., vol. XXVIII, 1899). LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPERIEURS ^99 (fig. 6, C). La membrane de l'œuf s'épaissit, se subdivise en endospore et exospore ; celle-ci est recouverte de pro- tubérances. Fig. 8. — " Albugo Bliti (d'après Stevens). \JAlhugo Portulacx se comporte à peu près de la même façon. Chez ces deux genres il existe une sorte d'invagina- 300 P.-A. DANGEARD tion dans ranthéridie,de la portion d'oogone au contact : c'est ce que Stevens désigne sous le nom de <( papille réceptive ». Dans VAlbugo Tragopogonis, l'ooplasme se différencie comme dans les deux espèces précédentes avec de nom- breux noyaux ; l'anthéridie fournit également de nom- breux noyaux. La fécondation, malgré cela, ne se produit qu'entre un seul noyau mâle et un seul noyau femelle, les noyaux surnuméraires se détruisant. Le noyau de copu- lation subit des mitoses répétées, si bien que l'oospore devient multinucléée. La papille réceptive est réduite, mais le cœnocentre est bien développé. Enfin, avec VAlbugo candi(ia,lepériplasme et l'ooplasme ne se différencient que lorsque la seconde mitose est achevée (fig. 9, A) ; les noyaux, à l'exception d'un seul, se rendent dans le périplasme, qui s'isole par une cloison (fig. 9, B, C, D) ; l'anthéridie fournit un ou deux noyaux; un seul est utilisé dans la fécondation. La papille réceptive est rudimentaire ; le cœnocentre atteint ici son maximum de développement et paraît jouer un rôle chimiotactique sur les noyaux sexuels (fig. 9, D, E,F); c'est d'ailleurs dans cette espèce que nous avions signalé sa présence, il y a déjà fort longtemps, sans nous pro- noncer sur son rôle. Plusieurs questions importantes se posent au sujet des différences que nous venons de constater. Stevens incline à penser que dans l'évolution Vœuf com- posé tel qu'il est formé dans VAlbugo Bliti et dans VAlbugo Portulacse a précédé l'œuf simple de VAlbugo candida; la chose est fort possible. Mais il est bien évidc nt que ces structures ont pu se développer individuellement; les différences s'expliquent très bien en supposant que l'an- théridie seule a joué le rôle de régulateur : quand le second gamétange fournissait un nombre de noyaux sen- LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉRIEURS 301 siblement égal à celui du premier, comme chez les Mu- corinéee, le plus grand nombre des énergides arrivaient à copulation, et on ne rencontre alors aucune distinction en FiG. 9. — Albugo candida (d'après Stevens). ooplasme et périplasme. L'existence d'une anthéridie change les conditions de la fécondation ; elle ne fournit en aucun cas à l'oogone un nombre suffisant de noyaux pour assurer la copulation de tous les énergides femelles ; 302 P.-A. DANGEARD l'écart est assez considérable pour que normal eynent un grand nombre de noyaux femelles soient sacrifiés : nous voyons là V origine du périplasme ; l'ooplasme correspond à la cinquantaine de gamètes privilégiés qui copuleront avec ceux qui sont fournis par l'anthéridie. Que celle-ci arrive à ne plus fournir qu'un ou deux noyaux, et on aura le cas de VAlbugo candida. UAlbugo Tragopogonis repré- sente un exemple d'indifférence des énergides sexuels en présence analogue à celui qui nous a été fourni par VAn- cylistes,3iyeG cette différence que celui-ci est partiel, alors que celui-là est total. On a souvent tort de vouloir faire dériver toutes ces dispositions les unes des autres en ligne droite : il s'agit fréquemment de déviations sous l'influence des causes les plus simples ; aussi est-il inutile parfois de rechercher quelle est la disposition la plus primitive ; pour nous, par exemple, Thétérogamétangie et l'isogamétangie ne dérivent pas nécessairement l'une de l'autre chez les Champignons; le Zygochytrium est un type primitif au même titre que les Lagenidium et les Myzocytiwni : leurs descendants ont évolué séparément et parallèle- ment. Le rôle et la nature du cœnooentre peuvent prêter encore à controverse ; sans vouloir critiquer les raisons fournies par Stevens à l'appui d'une action sur les noyaux tout à la fois attractive et nutritive, nous pensons qu'on aurait tort d'en exagérer l'importance. En effet, nous avons vu que chez les Mucorinées, il existe dans la zygospore un certain nombre de corpus- cules chromatiques analogues : nous avons été conduit à les considérer comme des dépôts de mucorine non cris- tallisable. Allons plus loin ; cette substance présente avec la chromatine des nucléoles une analogie certaine : ses propriétés chromatophiles sont sensiblement les mêmes : cette dernière peut augmenter progressivement LES ANCÊTRES DES CHAMPIGNONS SUPÉHIKURS 303 de volume OU se dissourlre ; ellos'amasse pendant la pé- riode de repos et est utilisée dans la période d'énergie kariokynétique. Nous supposons qu'il pourrait bien en être de même de ces corpuscules chromatiques qui ne mo paraissent pas devoir rentrer tous dans la catégorie des éléments figurés de la cellule. Quoi qu'il en soit, nous sommes arrivé au but que nous nous étions proposé de remplir dans cette première par- tie de nos recherches sur l'origine du périthèce chez les Ascomycètes ; il nous semble que l'exposé précédent et les observations nouvelles sur lesquelles il s'appuie ne lais- seront aucun doute sur le développement autonome de la sexualité chez les Siphomycètes ; nous avons essayé de la suivre pas à pas et de rendre compte des raisons et des causes qui l'ont modifiée en lui imprimant ses carac- tères particuliers et qui «e résument en deux mots : union des (jamétanges. C'est avec ce point de départ solide que nous suivrons le développement de la «exualité chez les Ascomycètes dans la seconde partie de ce travail ; nous y développerons le mémoire manuscrit qui a été soumis dernièrement au jugement de l'Académie et qui, sur un rapport de M. le D"" Bornet, a été honoré du grand prix des sciences phy siques. 10 LE BOTANISTE 9" SERIE PL. I. Rhabdium liedenii. PLANCHE II Myzocylium vei'micohim Zopf, fig. 1-6. FiG. 1. — Différents aspects du parasite à l'intérieur d'une anguil- lule. Fig. 2. - Id. FiG. 3, 4. — Sporanges dont l'un présente deux cols de sortie pour les zoospores; au niveau de chaque col, la cuticule se colore en forme de calotte sous l'action digestive du parasite. FiG. 5. — Sporanges avec très long col. PiQ. 6. — Groupe d'oospores avec leur membrane réticulée. LE BOTANISTE 9« SERIE PL. II. '"^X^<^4'/ 1 fe ,5^^^^ ■■■■■■ ■w..i-y^,<<^: '•jW.OîÏ'"'*'--...;, Myzocytium vermicolum. PJ.ANCHE III Myzocytium vermicolum Zopf, fig. 1-11. FiG. \, 2,3,4, 5. — Structure histologique du parasite à ses divers stades de développement. Fig. b. — Sortie des zoospores. PiG. 7. _ Zoospores à deux tlagellums et début de germination. p,g. 8. _ Sporange avec protoplasma granuleux contenant de gran- des vacuoles. FiG. 9. —Chaînette de sporanges avec vacuoles : le sporange médian n'en renferme qu'une grande au centre. FiG. 10. — Sporanges vides. FiG. 11. — Anguillule envahie par le parasite. EXPLICATION DES PLANCHES Nota. — Toutes les figures représentant des détails histologiques ont été dessinées à la chambre claire à l'aide d'un apochromatique Zeiss : elles ont subi ensuite une légère réduction pour la photogra- vure. PLANCHE I Wiabdium hedenii Wille (Dangeard), fig. 1-4. FiG. 1. — Divers états du Rhabdium sur un filament de Spirogyra ; a, b, c, d, parasite avec son disque suçoir ; e, second sporange formé à l'intérieur du premier ; f, sortie des zoospores ; g, forme des zoos- pores. FiG. 2. —Le même parasite après l'action des réactifs; position, struc- ture et nombre des noyaux. Fig. 3. — Changements d'aspects du sporange pendant la sporula- tion ; cloisonnement transitoire. Fig. 4. — Le même parasite sur un filament d'Œdogonium. LE BOTANISTE : 1 Myzocytium vermicolum. PLANCHE IV Myzocytium vermicolum Zopf, fig. 1-7. FiG. \. — Germination de zoospores à l'intérieur d'un sporange : elles germent par une sorte de bourgeonnement, comme celles qui sont dans le milieu extérieur. FiG. 2. — Germination sur la paroi même d'une Anguillule. FiG. 3. — Sporanges en chaînette. FiG. 4. — Germinationsassez avancées de zoospores àTintérieurméme des sporanges. FiG. 5. — Zoospore germant sur les parois d'une anguillule. FiG. 6. — Id. Fjg. 7, — Zoospores avec leur noyau, après fixation et coloration. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. IV. Myzocylium vermicolum. PLANCHE V Myzocytium vermicolum Zopf, fig. 1-13. FiG. 1, 2, 3. — Gamétanges femelles et anthéridies avec leurs noyaux. FiG. 4. — id, au moment de la fécondation. FiG. 0,6, 7, 8. — Oospore au début de sa formation. Fig. 9, 10. — Oospore âgée vue de face et en section. Fig. 11, 12. — La germination d'une oospore; la membrane réticulée ou épigpore n'a pas été figurée. Fig. 13. — Le parasite montrant sur le même filament un sporange ordinaire, un oogone et une anthéridie. LE BOTANISTE PL. V. Myzocytium vermicolum. PLANCHE VI Ancylistes Closlerii Pfitzer, fig. 1-9. FiG, 1. — Thalle du parasite à l'intérieur d'une Clostérie. Fio. 2. — Répartition des noyaux par groupes de quatre ou cinq, avec le début de la formation des cloisons qui limitent les sporanges. Fig. 3. — Thalle divisé en sporanges. FiG. 4. — Sporanges après la première bipartition des noyaux. Fig. 5, 8. — Détails de la division nucléaire. FiG. 9. — Noyaux spirales tels qu'on les trouve dans les filaments de germination. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. VI. Ancylistes Closlerii. PLANCHE VII Ancylistes Closterii Pfîtzer, fig. 4-5. FiG. 1. — Thalle mâle et thalle femelle disposés l'un à côté de l'autre dans une même Clostérie ; gamétanges femelles avec noyaux en divi- sion. — Thalle mâle avec noyaux disposés par deux, sans qu'il y ait en- core de cloisons. Fig. 2. — Gamétanges à 8 noyaux. Division nucléaire à l'anaphase. FiG. 3. — Thalle mâle et thalle femelle au moment de la copulation : les deux noyaux de chaque anthéridie sont en division. Fig. 4. — Cas intéressant de fécondation entre deux articles du même thalle. FiG. 5. — Passage des quatre noyaux mâles dans les gamétanges : ces noyaux sont pyriformes etpossèdent la structure caractéristique de la fin de l'anaphase. Nota. — Toutes les divisions nucléaires sont représentées schéma- tiquement ; elles se font suivant le mode figuré à la planche précé- dente. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. VII. ^^•5^, ■ r-.è-: ■^•:. M'Ç^^'^é^ ■©: M Ancylistes Closterii. PLANCHE VIII Ancylistes Closterii Pfitzer, fig. 1-10. FiG. 1. — L'extrémité d'un filament de germination d'un sporange au moment où il entoure la Clostérie ; noyaux filiformes avec ou sans nucléole. Fig. 2. — Noyaux spirales dans un filament de germination en voie de progression. Fig. 3. — Extrémité d'un filament au moment où il perfore la paroi de l'hôte. Fig. 4, — Condensation du protoplagma d'un filament de germination au voisinage d'une Clostérie, lorsque la pénétration n'est pas immé- diate. Gros noyaux au stade de repos. FiG. 5. — Renflement terminal d'un même filament avec les huit noyaux provenant du sporange. FiG. 6, 7, 8. — Oospores d'âge variable avec leurs noyaux. Fig. 9. — Oospore âgée recouverte de son épispore et de son en- dospore. Fig. 10. — Oospore envahie par les filaments d'un parasite. LE BOTANISTE 9« SERIE PL. VIIL Ancylistes Closlerii. #* PLANCHE IX Mucor fragilis Bainier, fig. 1-13. FiG. 1. — Deux gamétanges inégaux avec leurs noyaux. FiG. 2. — Id. : la cloison, dans cet exemple, semble devoir persister. FiG. 3. — Id. Le mélange des protoplasmes a eu lieu. FiG. 4. — Id. FiG. 5. — Les deux gamétanges se développent en azygospores. FiG. 6. — Formation de chlamydospores dans une solution sucrée, à partir de la germination d'une spore iS. FiG. 7, 8. — Les mêmes chlamylospores après quelques jours de cul- ture. FiG. 9, 10. — Chlamydospores mélangées aux zygospores dans un thalle adulte. FiG. 11, 12. — Leur structure. FiG. 13. — Chlamydospore sur le thalle aérien sporangifère. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. IX. Mucor fragilis. PLANCHE X Mucor fragilis Bainier, fig. 1-10. FiG. 1, 2, 3. — Structure des rameaux copulateurs avant et après la formation de la cloison basilaire. FiG. 4, 5, 6. — Apparition des plaques de la membrane charbormeuse et structure dense du protoplasma. FiG. 7, 8, 9. — Augmentation du diamètre de la zygospore et appari- tion des vacuoles. FiG. 10. — Structure vacuolaire de la zygospore : répartition régu- lière des noyaux : on distingue facilement la membrane primitive des gamétanges qui recouvre la couche charbonneuse. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. X. e .j ''. ;, ; » o 7 8 .>%. '^M^'j'^ Mucor fragilis. PLANCHE XI Mucor fragilis Bainier, fig. 1-6. FiG. 1-5. — Cinq sections successives dans la même zygospore au moment des conjugaisons nucléaires. Le protoplasma est réticulé ; il renferme quelques cristaux de mucorine ; les conjugaisons sont assez nombreuses. FiG. 6. — Section d'une autre zygospore avec conjugaisons nucléai- res. Nota. — Les dessins ontété faits à la chambre claire avec l'apochro- matique de Zeiss 2 mm. 1.40, puis réduits légèrement pour la photo- gravure. LE BOTANISTE 9« SERIE PL. XL 6 Mucor fragilis. PLANCHE XII Mucor fragilis Bainier, fig. 1-8. F, G. \, — Portion de thalle avec jeunes zygospores. FiG. 2. — Aspect de la zygospore dans cette espèce. FiG. 3, 4. — Noyaux dont quelques-uns laissent voir nettement un centrosome et un réseau délicat de chromatine : structure prépara- toire à la division. FiG. 5. — Un des noyaux laisse voir, semble-t-il, une plaque équato- riale de face. Fig. 6, 7. — Structure de la zygospore après les conjugaisons nu- cléaires. Quelques noyaux surnuméraires en dégénérescence. Fig. 8. — Zygospore ne renfermant plus que des noyaux doubles de copulation. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. XII. Mucor 'ragilis. PLANCHE XIII Sporodinia grandis Link, fig. 1-10. FiG. 1, 3. — Jeunes gamétanges au moment de la destruction de la paroi de séparation. Le protoplasma central est plus finement réticulé dans chacun d'eux : les noyaux sont représentés par des points. FiG. 2. — La communication des protoplasmes se fait à partir du centre. FiG. 4, 5. — Le protoplasma finement réticulé arrive à former une couche pariétale très dense, KiG. 6. — Conjugaisons nucléaires. FiG. 7. — Section dezygospore montrant trois gros corpuscules chro- matiques. Fig. 8. — Ces corpuscules et les noyaux avoisinants dessinés à la chambre claire, afin de montrer leurs proportions relatives. Fig. 9, 10. — Détails de la paroi. LE BOTANISTE 9« SERIE PL. XIII. ■■' -: ■■ ■ » ■ -"ft ■■■>;► ' ■••■A. ;•?.•■/ Sporodinia gran lis PLANCHE XIV Sporodinia grandis Link, fig. 1-15. FiG. 1, 2, 3, 4, 5. — Dessins à la chambre claire de la zygospore de- puis la séparation des gamétanges sur les rameaux copulateurs jusqu'à la zygospore âgée. Fig. 2. — Montre la rétraction du protoplasma qui se sépare de la paroi. Fig. 3. — Le protoplasma delà zygospore devient plus dense au con- tact des parois basilaires : cristaux de mucorine M : la section de la zygospore affecte la forme d'une lentille biconvexe. Fig. 4. — La zygospore, en augmentant de volume, tend à ^'arrondir; la couche de protopla^ma pariétale s'étend maintenant à toute la surface- FiG. 5. — Section schématique d'une zygospore âgée montrant la membrane primitive, l'épispore charbonneuse et Tendospore. l' iii. 6. — Cristaux de mucorine au stade de la fig. 3. Fig. 7. — Structure vacuolaire du protoplasma et distinction en cou- che pariétale et partie centrale au stade de la fig. 4; position des noyaux à la chambre claire. PiQ. 8, — Les conjugaisons nucléaires dans la zygospore après que la distinction en couche pariétale et partie centrale a disparu. Chambre claire, apochromatique de Zeiss 2 mm. 1,40 et réduction de 1/5 pour la photogravure. PiQ. 9. _ ytructure alvéolaire du protoplasma, noyaux doubles de copulation et corpuscules chromatiques dans une zygospore âgée. Pi(j. -10. — Schéma de la destruction de la paroi de séparation de deux gamétanges. Pig. \\^ — Une partie de cette paroi à la chambre claire. Fig. 12. — Couche d'épaississement de la membrane primitive et ploques de l'épispore. FiG. 13. — Apparition des protubérances de l'épispore sous la couche d'épaississement de la membrane primitive. FiG. 14, 15. — Mode de formation de l'épispore. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. XIV. ■i- t'y 8 W Sporodinia grandis. PLANCHE XV Protascus subuliformis Dangeard, fig. 1-8. FiG. i. — Anguillules renfermant des sporanges du parasite à divers stades. FiG. 2. — Structure histologique du parasite depuis la spore jusqu'à la sporulation. Fig. 3. — Sporange de grande dimension avec assise pariétale de protoplasma, à l'intérieur de laquelle s'effectue la dernière mitose. Fig. 4, 5, 6, 7, 8. — Divers états du parasite. LE BOTANISTE 1 9e SERIE PL. XV. 'L #xrfel ^ ./■■ •^^ k. .î"-' 11 «- . Ta Protascus subuliformis. PLANCHE XVI .Protascus subuliformis Dangeard, fig. 1-10. FiG. 1, 2, 3, 4, 5. — Aspects successifs du sporange, sur le vivaut, au moment de la sporulation. Fig. 6. — Projection des spores dans le milieu extérieur. Fig. 7. — Sporange avec deux cols pour la sortie des spores. FiG. 8. — Anguillule sur laquelle sont fixées des spores en germina- tion. Fig. 9. — Sporange double avec col plus long qu'à l'ordinaire. Fig. 10. — Spores germant au moyen d'un simple tube qui continue la partie amincie en pointe de leur corps. LE BOTANISTE 9e SERIE PL. XVL m a '-M 1B ■ Protascus subuliformis. PLANCHE XVII Protomyces macrosporus Unger, fig. 1-9. FiG. 1,2. — Jeunes sporanges. FiG. 3. — Structure réticulée du protoplasma et noyaux. FiG. 4. — Etat plus avancé; assise pariétale avec mailles plus grandes. FiG. 7, 8, 9. — Structure réticulée et noyaux au début de l'enkyste- ment. FiG. 5, 6. — Sporanges enkystés avec leurs réserves de substances oléagineuses. LE BOTANISTE 9» SERIE PL. XVII. Protomyces macro