LEl^ONS

SUR

LA PHYSIOLOGIE

ET

L'ÂNATOMIE COMPAREE

DE L'HOMME EX DES ANIMAUX.

l'ini.-. liiiiiiiiiiciii; lie L. MAKTlNiiT, iiic Mi^jauii, 2.

LEÇONS

SUIl

LA PHYSIOLOGIE

L'ANATOMIE GUiMPARÉE

DE L'HOMME DES ANIMAUX

FAITES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS

PAIi

H. MILME: EDWARD.«i

0. L. H., C. L. N.

Doyen tic la Kacullc des sciences de Paris, Professeur au Miiséunui'llisloiro naturelle;

Membre de l'Inslilut,(Académie des sciences) ;

des Sociélés royales de Londres et d'Edinibourg; ; des Académies tU: Sluckliolni,

de Saint-Pclersbourg, do licrlin, de Kdnigsberg, de CopeniKiguo, de Bruxelles, de Vienne,

de Hongrie, de Bavière, de Turin et de Naples ; delà Société Hollandaise des sciences;

de l'Académie Américaine ;

De la Société des Naturalistes de Moscou ;

des Sociétés Lirmcenne et Zoologiqno de Londres; de l'Académie

des Sciences naturelles de Pliiladelpliie; du Lycéum de New-York; des Sociétés des Sciences

et d'Histoire naturelle de Municli, Gutlienibourg, Somerset, Montréal, l'ilo Maurice;

des Sociétés Entomologi(pies de France et de Londres; des Sociétés Etlinologiipics

d'Angleterre et d'Amérique ; de l'iiistitul liistorique du lirésil ;

De l'Académie impériale de Médecine de Paris; dos Sociétés médicales d'Edimbourg, de Suède et de Bruges ; de la Société des l'Iiarm.icien-

de l'Allemagne septentrionale;

Des Sociétés d'Agriculture de Paris, de New -York, d'Alliany, etc.

TOME CINQUIÈME

PARIS

LIBRAIRIE DE VICTOR MASSON

PLACE DE L'ÉC0LE-DE-MÉ1)ECL\E

M DCCC LIX

Di'oit de tr.iihiction rése;\é.

c t

^ 6 J

LEÇONS

SUR

LA PHYSIOLOGIE

ET

. L'ANATOMIE COMPARÉE

DE L'HOMME KT DES ANIMAUX.

QUARANTE -TROISIÈME LEOGN.

DE L'ABSORPTION. Preuves de la pénétration des matières étrangères jusque dans le torrent de la circulation. Du rôle des veines et des vaisseaux lym- phatiques dans l'absorption. Notions préliminaires sur le mécanisme de cette fonction ; imbibition des tissus. InsuHîsance des anciennes théories pour l'explication du mécanisme de l'absorption. Découverte des phénomènes d'en- dosmose.

§ 1. L'absorption, c'est-à-dire rintroduction des matières i''''^"^^''

(le l'absorption

étrangères jusque dans la profondeur de l'organisme et leur chez tous

mélange avec les fluides nourriciers, est un phénomène qui s'observe chez tous les êtres vivants, et qui est rendu mani- feste par une multitude de faits dont la connaissance est banale. Je ne m'arrêterai donc pas longtemps à donner ici des preuves de l'existence de cette faculté, soit chez l'Homme, soit chez les Animaux inférieurs; mais afin de ne pas laisser sans démons- tration un fait de cette importance, je citerai quelques expé- riences qui le rendent évident.

V. 1

il9l P ^,

les .\niiiiaux.

2 ABSORPTION.

Si nous plongeons dans de l'eau le eorps d'un Colimaeon, en maintenant la tête de l'Animal au-dessus de la surface du li([uide, ou eu lui fermant la bouche de laçon à rendre toute déglulition impossible, nous le verrons se gonfler peu à peu et souvent doubler de volume dans l'espace de quelques heures. En pratiquant la même expérience sur une Grenouille réduite à un étal d'émaciation par une abstinence prolongée, il nous sera également facile de constater dans le poids du corps une grande augmentation déterminée par le seul fait du contact de l'eau avec la surface extérieure de la peau (1). Il en faut conclure que la Grenouille, de même que le Colimaçon, a absorbé, c'est- à-dire fait pénétrer une certaine quantité de ce liquide dans l'intérieur de son organisme, et que cette introduction s'est effectuée par la surface générale du corps (2). . Si nous injectons de l'eau dans l'estomac d'un Chien, et si

(1) Des faits de ce genre ont (îté constatés par Treviranus et plusieurs autres physiologistes (a). Ainsi, dans les expériences de William Edwards, nous voyons des Grenouilles dont Je corps ne pesait qu'environ 33 gram- mes , augmenter en poids de plus de 10 grammes, par suite de l'immersion de leur corps dans Teau et sans que ce liquide ait pu pénétrer dans les voies digestives (6). INous aurons à revenir sur ces expériences lorsque nous étudierons d'une manière spé- ciale l'absorption cutanée.

(2) Des expériences de ce genre ont

été faites sur les Colimaçons et les Li- maces par Spallanzani et par Nasse (c). J'ai souvent eu l'occasion d'observer ce gonflement lorsque je déterminais l'asphyxie, soit des Gastéropodes dont je viens de parler, soit des Doris, des Pleurobranclies et de beaucoup de Mollusques acéphales que je destinais à des recherches anatomiques. J'ajou- terai que des faits analogues ont été constatés chez différents Vers intesti- naux, tels que les Ascarides (d), les Distomes (e) et les Échinorhynques (/"), mais sont surtout remarquables chez les Rotifères et les 'l'ardigradcs qui

(a) Voyez : Treviranus, Biolo/jie, t. IV, p. 289.

Bluff, Dissert, de absorptione cutis, p. 22 (d'après Bui'dacli, Traité de physiologie, t. IX, p. 15).

(b) W. Edwards, De l'influence des agents pliysiques sur la vie, 182i, \>. 596,

(c) Spallanziini, Mémoires sur la respiration, p. ■137.

Nass(!, Untersuchungen z-tir Physiologie und Pathologie, t. I, ji. i82.

(d) Cloqucl, Anatoinie des Vers intestinaux, p. 33.

(e) Melilis, Obscrvationes anatomicœ de Distomate, p. It (/■J PiiiJolplii, Physiologie, t. II, 2' partie, p. 200.

CONSIDKlSATlOiNS GÉNÉRALES. 3.

jioiis lions les deux orifioes de celte poche membraneuse de façon à empêcher le liquide de remonter dans la bouche ou de passer dans l'intestin, et si au bout de quelques heures nous tuons l'Animal pour en faire l'autopsie, nous trouverons (pie l'eau n'est pas restée emprisonnée dans son estomac, mais a été absorbée en grande partie, ou même en totalité (1). Des expé-

ont été mis dans un état de mort ap- parente par la dessiccation , et qui se trouvent ensuite en contact avecde l'eau (fl).

(1) MM.TiedemannetGmclinontfait une série intéressante d'expériences sur l'absorption d'un grand nonilire de matières dilïérentes par la surface des voies digeslives. Ils ont vu que chez le Chien et le Cheval diverses substances odorantes , telles que le camphre, le musc, Talcool, l'essence de térébenthine, l'ail et l'asa fœtida, introduites dans l'estomac , peuvent être reconnues jusque dans la moitié inférieure de l'intestin grêle, ou même jusque dans le caecum, mais dispa- raissent peu à peu à mesure qu'elles avancent dans cette portion du tube digestif. Les matières colorantes dont ils firent usage de la même manière traversèrent en partie l'intestin dans toute sa longueur , de façon à être évacuées au dehors en quantité plus ou moins considérable, mais furent aussi

en partie absorbées. II en fut de même pour diverses matières salines, telles que le prussiale de potasse (ou cyano- fcrrure de potassium), le sulfate de po- tasse, l'hydrochlorale de fer, etc. {h). Goodwyn, Schliipfer, ,Mayer et Go- hier, avaient vu précédemment que de l'eau peut être injectée en quantité considérable clans les voies respira- toires, et disparaît des poumons avec une grande promptitude (c). On cite aussi, comme preuve de l'absorption des liquides par la surface des cellules pulmonaires chez l'Homme, un acci- dent qui s'est présenté dans le service chirurgical de Desault, à l'Hôtel-Dieu de Paris. Une sonde œsophagienne ayant été introduite par erreur dans la trachée , on injecta dans les voies aériennes un bouillon que le chirur- gien croyait pousser dans l'estomac du malade, et il n'en résulta aucun accident grave ; l'ait qui ne peut s'ex- pliquer qu'en admettant que le liquide avait été promptement absorbé (d).

(dj Spallanzani, Observ. et expér. sur quelques Animaux surprenants que l'observateur peut à son gré faire passer de la mort à la vie {Opuscules de physique animale et végétale, t. II, p. 29'J).

Doyôre, Mém. sur les Tardigrades {Ann. des sciences nat., sério, 18i2, t. XVI]I, p. 5).

(b) Ticdemann et Gmelin, Recherches siir la route que prennent diverses substancespour passer de l'estomac et du canal intestinal dans le sang, etc., trad. par Hcllcr, p. 51 cl siiiv.

(c) Goodwyn, The Connexion of Life with Respiration, 1789 ((rad. fi-aiiç,. par Halle, p. IC).

Scliliipfer, Dissert, sistens expérimenta de effectu liquidorum quorumdam mcdicamenlo- sorum ad vias aeriferas applicalorum in corpus animale. Tubingen, 1816.

Gohier, Mémoires el observations sur la chirurgie et la médecine vétérinaire, t. II, p. 41 9).

Mayer, Ueber das Einsaugungsrcrmôgen der Venen des grossen und kleinen Krcislauf-r Systems (Meckcl's Deutsches Archiv filr die Phgsiologic, 1817, t. III, p. 493 ut siiiv.).

((/) Desaiili, Œuvres chirurgicales, par Bicliat, t. II, p. 200.

il ABSORPTION.

riences analogues faites sur les autres cavités naturelles de l'or- -ganisme, l'intérieur du sac péritonéal ou de la plèvre, par exemple, donneront des résultats semblables : l'eau disparaîtra plus ou moins rapidement(i) ; et si, au lieu d'employer de l'eau, nous faisons usage de certaines matières qui peuvent être iden- tifiées avec le milieu des substances constitutives de l'organisme, il nous sera également facile de constater que l'absorption a [H)ur effet de porter ces matières étrangères jusque dans l'intérieur de l'appareil irrigatoire.

Ainsi, nous savons, par l'observation journalière, que cer- taines substances qui ont été introduites dans notre estomac avec nos aliments sont promptement expulsées au deliors par les voies urinaires. D'autre part, des expériences dont je rendrai compte ailleurs prouvent que les produits ordinaires de la sécrétion rénale sont fournis par le sang, et l'anatomic nous apprend qu'il n'existe ni dans le corps humain, ni dans celui des Animaux , aucune communication directe entre la cavité digestive et l'appareil urinaire. Par conséquent, les ma- tières dont je viens de parler, pour passer du canal alimentaire dans l'appareil rénal, ont être absorbées dans le premier de ces organes, et transportées dans le second par le torrent de la circulation.

Une autre expérience très intéressante, sur laquelle j'aurai à revenir dans une des prochaines Leçons, rend saisissables par la vue les effets de cette absorption. Quand on mêle aux aliments certaines substances colorantes, telles que la garance, ces matières sont absorbées, et leur présence dans les parties les plus profondes de l'organisme est décelée par un phéno-

(1) La rapidité avec laquelle les sorplion très puissant. La même re-

épanclienients pleurétiques disparais- marque est applicable aux accuinula-

scnt dans quelques cas, suflirait pour lions de sérosité dans le tissu aréolaire

établir que chez l'Homme la plèvre sous-cutané et dans beaucoup d'autres

peut être le siège d'un travail d'ab- parties du corps.

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. 5

mène fort remarquable : la teinture des os, dont le tissu se colore en rouge (1).

Les effels toxiques qui dépendent de l'action toute locale d'un grand nombre de poisons sur le cerveau ou sur d'autres parties du système nerveux, et qui se manifestent à la suite de l'application de ces substances sur la surflicc de la membrane buccale, sur la conjonctive ou sur la peau dépouillée de son épidémie, ainsi que de leur introduction dans l'estomac, dans la cavité tboracique ou dans les aréoles du tissu conjonctif sous- cutané, peuvent être invoqués également comme des preuves de l'absorption de ces matières vénéneuses, et leur transport rapide d'une partie quelconque de l'organisme jusque dans le

(1) En parlaiil de la ciiciilalioii la- ciinaiie chez les Insecles, j'ai déjà eu l'ocrasion de citer des expériences diins lesquelles des matières tincto- riales introduites dans l'estomac ont manifesté leur présence dans le sang par la coloration, soit de ce liquide lui-même, soit de certains organes qui y baignent [a], La coloration des os en rouge par suite du mélange de

la garance avec les aliments est aussi un phénomène de teinture à la présence de cette matière colorante dans le sang et à sa fixation par les sels calcaires. Je reviendrai ailleurs sur ce sujet, et je me boincrai à indi- quer ici les principales sources il faudrait puiser pour obtenir plus de renseignements sur ce phénomène intéressant (6).

(a) Vojcz toino III, pa^c 231.

(b) Mizaldi (ou Mizaml), Memovab'diwn, sive arcanorum omnis generis centuriœ, 1572, p. ICI.

lîelcliior, An Account of [loues of Animais bLiiuj changea ta a red Colour by Aliment alone {Philos. Traus., d"3l!, l. XXXIX, p. 287 et 299).

liiilianiel, Sur une racine qui a la faculté de teindre eu rouge les os des Animaux vivants (Mém. de l'Acad. des sciences, 1739, p. I].

Dazaiuis, De coloratis animaliiim qnorumdnm vivorum ossibus {Commentarii Inslil. Bolo- (jnensis, 174."), i. Il, pais i, p. I2'J, el lie ossiiim colorandovuni artifwio per radicem rubice [Ibid., I. II, pais II, p. 12i).

J. Hunier, Expériences et observations snr le développement des os {Œuvres, t. IV, p. 409).

lUillierforil, cite jmi' Blake {Ulssert. inanyur. de dentium formalione, 1798), d'api-ès Gibson {Op. cit., p. 154).

Gibson, Observations on Ihe Effects of Maddcr on the Boues of Animais {Memuirs of the I.iter. and ['hilosoph. Soc. a f Manchester, 18U5, 2" série, I. I, p. 14ii).

-- l'iourcns, Recherches sur le dévelopfcment des os {Archives du Muséum d'hist. nat., t. II, p. 315 cl suiv.).

Fagcl, De l'influence de la garance dans l'élude du développement des os {Galette médicale de Paris, 18-40, p. 204).

Serres et Dovèi'c, E.rposé de quelques faits relatifs à la coloration des os chez, les Animaux sbuni'is au régime de la garance {Ann. des sciences nat., série, 1842, t. XVll, p. 153 et suiv.).

Brullie el Hui;iicny, Expériences sur le développement des os dans les Mammifères et les Oiseaux, faites au 'uioyen de l'alinientniion de la garance (.4h?!. des sciences nat., 3* série, 1845, I, IV, p. 283).

6 ABSOHPTION.

point leur présence détermine les symptômes caractéristi- ques de leur action ne peut s'expliquer qu'en admettant qu'elles ont pénétré dans le torrent de la circulation. Mais, pour mieux établir cette conclusion, je citerai d'autres ùits qui sont plus probants.

Lorsqu'on introduit dans l'estomac d'un Chien de l'eau tenant en dissolution certains sels métalliques qui normale- ment n'existent pas dans l'organisme, et qu'au bout d'un temps convenable on examine chimiquement le sang de l'Animal, on y retrouve ces matières étrangères (1). Ainsi le prussiate de potasse (ou le ferrocyanure de potassium, pour enq)loyer ici le nom adopté aujourd'hui) , ingéré dans la cavité digestive ou dans les voies respiratoires, ne tarde pas à pénétrer dans le sang et à être ensuite expulsé de ce liquide par la sécrétion rénale: de sorte qu'en versant un sel de fer soit dans le sérum, soit dans l'urine, on obtient un précipité de bleu de Prusse (2).

11 me serait facile de multiplier beaucoup ici les faits du

(1) Ce fait paraît avoir été constaté à 0,860 (6). Il est vrai que la saignée

expénmenlaleuient, vers le milieu du est en elle-nièine luie cause d'appau-

siècle dernier, par Kaau-Boerliaave , vrissemenl du sang (c) ; mais la grande

neveu du célèbre médecin de ce augmen talion dans la quantité d'eau

dernier nom («). observée dans ce cas ne pouvait s'ex-

On peut constater aussi Tinlro- pliquer de la sorte seulement, et dé- duction de l'eau dans le sang à la vait dépendre en grande partie de suite de l'absorption de ce liquide par l'absorption des boissons. la surface gastrique. Ainsi, dans une (2) En 1817, Mayer a constaté que du expérience citée par Bérard, un Bœuf cyanoferrure de potassium dissousdans qui avait été privé de boissons peu- l'eau, de même que divers autres dant vingt-quatre heures, fut saigné sels, injecté dans les cellules aérifères avant et après qu'on l'eut fait boire, du poumon, se retrouve très prompte- et l'on trouva que la proportion d'eau ment dans le sang, et se montre dans contenue dans le sang, qui était de l'oreillette gauche du cœur avant que 0,775 avant l'injection du liquide dans d'être arrivé dans l'oreillette droite, l'estomac, s'était élevée bientôt après il a reconnu aussi la présence de ce

(a) Kaaii-Bocrliaavc, Pcrspivalio dicta lUppocrati per unwerstim corpus analomicc illustrata, 4738, g 400, |>. 202.

(6) bôriml, Cnws de physioloyie, t. II, p. 505. (c) Ynvi'/ ci-ilessiis, luni'' I, \r,\'^c 249,

CONSIDÉUATIONS GÉNÉRALES. 7

même ordre, mais ceux que je viens de citer prouvent suffi- samment que les Animaux possèdent In faculté d'absorber les liquides en contact avec les organes et de verser ces matières étrangères dans le torrent sanguin en circulation dans leur corps (1).

sel clans le sérum du sang, quand il en avait introduit une certaine quan- tité dans l'estomac (a).

Quelques années après, J\1M. Tie- demann et Gmelin ont reconnu dans le sang des Animaux soumis à leurs expériences l'odeur du camphre et du musc qui avaient été introduils dans les voies digestives. Ils y ont constaté aussi la présence du cyano- ferrure de potassium, du sulfate de potasse, d'un sel de plomb, etc., qui avaient été absorbés de la même ma- nière (6).

Une mullitude de faits du même ordre ont été constatés par plusieurs autres expérimentateurs , tels que Lebkiichner , Westrumb , Lawrence et Goaies, les membres de la Société médicale de Philadelpliie , Orlila ,

MM. Panizza et Kramer , Clia- tin , etc. (c).

Le passage du cyanoferrure de po- tassium de l'extérieur jusque dans le sang par la voie de l'absorption cu- tanée a été constaté aussi chez les Animaux inférieurs, par les expérien- ces de Jacobson sur les Colimaçons ((i).

(1) Il arrive souvent que les ma- tières étrangères dont l'absorption n'est pas très rapide ne se reconnais- sent pas dans le sang , bien qu'on les retrouve dans les urines, dans le foie ou dans d'autres parties de l'écono- mie , et quelques auteurs ont été con- duits de la sorte à supposer qu'il existe des voies de transport pour les substances absorbées, indépendantes de l'appareil circulatoire (e) ; mais cela tient en général à ce que les

(a) Mayer, Op. cit. (MecUcrs Dcutschcs Archiv, t. III, p. 49G). {b} Tiedemaiin et Gmelin, Op. cit., p. 05.

(c) Lebkùciiner, Dlssertalioii inaugurale sur la permcabilité des tissus vivants. Tiibingeii, 1819 {Arch. gén. de méd., 1'° série, 1825, t. VII, p. 424).

Cantu, Sur la présence de l'iode dans le sang {Journ. de chim. méd., 1820, t. II, p. 291).

Westrumb, Physiol. Untersnch. ûbcr die Einsaugungskraft. der Yenen ; ut E.epcriences sur l'absorption cutanée (Arch. gén. de méd., 1829, t. XXI, p. 113).

Ëxperiments on Absorption bg ihe Comniittee of the Acad. of Philadelphia (London Med. and Phys. Journ., 1832, t. XL Vit, p. 275).

Lawrence et Coates, Account of some furlher Experiments to détermine the absorbing Power ofthe Yeins and Lymphatics (Philadelphia Journal, 1823, n" 10).

Panizza, Dell'assorbimento venoso [Mem. dell'lstit. Lombarde, t. I, p. 109).

A. de Kramer, liicerche per discopriere nel sangue, neW urina ed in varie altre secrezioni animali le combinazioni minerali amministrale per bocce (Memorie detl'Istitulo Lombarde, Milano, 1843, t. I, p. 115).

Franchini, liicerche tisiologiche inlorno ali assorbimcnto. Bologna, 1823, p. 2 et suiv.

Orfila, Mém. sur l' empoisonnement (Mém. de VAcad. de médecine, t. VIII, p. 375).

Chatin, Sur les fonctions des vaisseaux chylifères et des veines (Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1844, t. XVIII, p. 379).

(d) Voyez Oersieil , Ovcrsigt over Selskabets Forhandlinger og dels Medlemmcrs Arbeider fra 1824 til 1827 (Mém. de i.icad. danoise, 1828, t. III, p. xix).

(e) Danger et Flandin, De la localisation des poisons (Revue scientifique cl induslricUc, 1841). Orlila, ?lém. sîo- l'empoisonnement (Mém. de l'Acad. de médecine, 1. VllI, p. 521 , 540, etc.).

absorbants.

5 ABSOUPTION.

Opinions §2. L'existence de cette propriété pliysiologiquc était

des anciens 1 1 ^ c i '

piiysioiosisies coniiue longtem|)S avant que 1 on eut tait aucune des expe-

rclativcs . i i > i i i '

aux vaisseaux ricnccs dout jc Viens d arguer; et lorsque les découvertes d'Aselli, de Pecquet et de leurs émules nous eurent appris que des produits de la digestion passent de l'intestin dans les vais- seaux lymphatiquesdu mésentère, puis dans le canal thoracique, pour être ensuite versés dans les veines, et que des vaisseaux du même ordre naissent dans toutes les parties du corps pour aller se terminer de la même manière (1), on fut conduit à penser que tout ce système de canaux centripètes devait être affecté à des usages analogues, et constituer les voies par les- quelles les matières élrangères à l'organisme, quelle qu'en fût la nature, avaient à passer pour aller gagner le torrent circula- toire et s'y mêler au sang.

Les recherches des frères Hunter et de Monro contribuèrent plus que toutes les autres à faire prévaloir cette opinion (2), et vers la fin du siècle dernier elle paraissait si bien établie, que la [ilupart des physiologistes ne désignèrent plus l'ensemble des vaisseaux lymphatiques et chylifères que sous le nom de STjstème absorbant.

matiôres absoiijées sont climiuécs du même sujet. La question de priorité

saii^ à mesure qu'elles arrivent dans relative à cette prcHendue découverte

ce liquide, et |)ar conséquent ne s'y donna lieu à des discussions fort vives,

accumnlcnl pas en quantité siiflisantc etdont le ton était peu digne d'iiomnies

pour C'tie reconnaissables par l'emploi aussi honorables (a). Du reste, le pre-

dcs réactil's mis en usage. mier auteur qui ait soutenu l'opinion

(1) VoyezlomclV,page/iû7 et suiv. d'après laquelle l'absorption aurait

(?) Les vues de Hunier à ce sujet lieu exclusivement par les vaisseaux

fuient d'abord rendues publiques par lymphatiques paraît être le célèbre

les leçons orales de ce professeur, et, Frédéric Hoffmann, qui vivait près

peu de temps après, Monro fil pa- d'un siècle avant {b). raîtie à l'.i'rlin une diss.ertalion sur le

(«) Al. Monro, jun., De veiils hjinjilialiiis vatnilosis, el de eariim in primis origine. lierlin, 17(H. Ohseiv. auat. and phjjswL, v'.c.

\V. Huilier, Hedical Cnniiiicnlarirs, pari 1, ronlainintj a pluin and direct answer lo Prof. Monro jun., ilDi.

NOvez iiiissi II ce >iijct : lioslocli, .\n Llcinenl inj Sustem (if l'Iiysiolorm, t. II. p. ,'ij8. {bj Hi lïmanii, Medicina ralionnlis srj\lenwtica, lib. I, sect. n, cap. W, 17:10.

ROLE DES VEINES.

9

Il pst en offel bien démontré que les lymphatiques sont des P'cuvcs

* t i 1 jg l'absorption

vaisseaux qui absorbent et qui versent dans l'appareil circula- par

' les veines.

toire les matières dont ils se sont chargés ; mais le nom de vaisseaux absorbants ne leur convient pas, car les expériences de Magendie sont venues montrer qu'ils ne jouissent pas seuls de la l\icultéde pomper en quelque sorte les fluides qui baignent la surface des organes vivants, ou qui sont déposés dans la profondeur de ceux-ci ; que ces conduits ne sont pas des organes absorbants par excellence, et que les veines peuvent, sans leur aide, s'emparer des mômes substances et les mêler au sang en mouvement dans l'économie (1).

Magendie obtint ce résultat important en faisant des recher- ches sur une de ces sid)stances vénéneuses dont diverses peu- plades sauvages se servent pour empoisonner la pointe de leurs flèches, Vvpas lieuté, qui doit sa puissance à la strychnine. Lorsqu'un peu de ce poison est déposé sous la peau de la patte d'un Animal vivant ou dans toute autre partie du corps, il est promplenieiit absorbé; après avoir été mêlé de la sorte au sang et avoir été transporté par le torrent circulatoire dans toutes

(l) Ces recliorclios expérimcnlales datent de 1809. Elles furent d'abord publiées à part, pnis reproduites dans le journal de pliysioloyie expérinien- tale de \iag;en(lic {a).

Peu d'années après (eu IStl), Everard Home, sans connaître les ré- sultais déjà obtenus par Magendie, a clierclié aussi à élablir que les fluides absorbés par resloniac arrivent dans le sang sans avoir passé dans les vaisseaux lymphnliqurs. Il lia le canal thoraci-

que, et introduisit dans l'estomac des Animaux soumis à ses expériences une infusion de rliubarbe ; bientôt après, la présence de cette substance pouvait être constatée dans l'urine an moyen de la réaction déterminée par la potasse [b]. Dans nn premier tra- vail , Home avait supposé que le passage entre l'estomac et l'appareil nrinaire était direet; mais, dans le mémoire que je viens de citer, il aban- donna celte opinion erronée.

{a) Mn^cndie, Mémoire sur les organes de l'absorption cha les Mammifères, 1809 {Journal de physiolofiie, li^21, t. I, p. 18).

(6) Home, Exiieriincnls to proie that Flnids pass direclhj from the Stomach lo thc Circulation of the Blood, and from thence into the Cells of the Spleen, the Gall Bladder and urinary Bladder, uitho^it going through the thoracic Duct {i'Iiilos. Trans., tSH, p. t<i3).

10 ABSORPTION.

les parties de l'organisme, il exeree sur la moelle éi»inière une action puissante, et il détermine ainsi dans tous les muscles des contractions spasmodiques d'une grande violence. Dans l'hypo- thèse de l'absorption par les vaisseaux lymphatiques seulement, qui régnait sans partage dans les écoles à l'époque Magendie commença ses expériences, on expliquait ce transport de l'upas tieuté en supposant qu'il avait été pompé par les lymphatiques delà patte ou de toute autre partie le dépôt en avait été etïec- tué, puis charrié par la lymphe de ces vaisseaux jusque dans le canal thoracique, qui l'aurait versé dans la veine sous-clavière, laquelle à son tour l'aurait conduit au cœur, dont les contrac- lions devaient le pousser ensuite à travers le reste du système circulatoire jusque dans les vaisseaux capillaires du système nerveux. Mais Magendie trouva que le poison suit une route plus directe, et arrive dans les veines sans l'intermédiaire des lymphatiques. Ainsi, dans une des expériences de ce physiolo- giste éminent, l'abdomen d'un Chien ayant été ouvert et une anse de l'intestin comprise entre deux ligatures, on Ha égale- ment tous les vaisseaux lymphatiques de la portion du tube digestif ainsi isolée, et l'on en fit la résection, de façon à ne la laisser en communication avec le reste de rorganismc que par une artère et une veine, à l'aide desquelles la circulation du sang s'y maintint ; puis on introduisit dans ce tronçon d'intestin une certaine quantité d'upas tieuté, et on le replaça dans l'abdomen. Six minutes après, les effets généraux du poison se manifestèrent avec leur intensité ordinaire, et Magendie en conclut avec raison que l'absorption de cette substance s'était effectuée à l'aide de la veine mésentérique restée intacte.

D'autres expériences dans lesquelles la cuisse de l'Animal fut divisée de façon à ne tenir au reste du corps rjue par le tronc de l'artère crurale et sa veine satellite, donnèrent les mêmes résultats, ^lais nous savons qu'il existe deslympliatiques dans l'épaisseur des parois des vaisseaux sanguins, et par con-

ROLE DES VEINES. 11

séquent on auroit pu arguer de cette circonstance pour soutenir qu'ici encore l'absorption du poison avait été effectuée par des conduits de ce genre. i\Iagendie prévit cette objection, et y répondit en répétant l'expérience dont je viens de rendre compte, et en maintenant la circulation dans le membre, non à l'aide de l'artère et de la veine laissées intactes, mais au moyen de deux ajutages inétalliciues par l'intermédiaire des- quels la continuité fut établie entre le bout supérieur et le bout inférieurdes vaisseaux divisés. Or l'upas ticulé, déposé dans une plaie faite à la patte ainsi isolée, n'en fut pas moins absorbé comme dans le cas précédent, et lorsque, dans les expériences de ce genre, on interrompait temporairement le passage du sang veineux de la patte amputée vers le corps, on suspendait d'une manière correspondante l'apparition des symptômes de l'em- poisonnement.

Nous avons vu, dans une des dernières Leçons, que les lymphatiques des membres ne débouchent jamais directement dans les veines de ces i)arties du corps (1), et par conséquent nous devons conclure de toutes ces expériences, comme l'a fait Magendie lui-même , que les veines sont en réalité des vaisseaux absorbants, c'est-à-dire des vaisseaux dans lesquels les matières étrangères peuvent pénétrer directement, et être charriées depuis leur point d'application jusque dans le cœur qui les distribue ensuite avec le sang dans toutes les parties de l'économie (2).

(1) Voyez tome IV, page 526. des piiblicalions ultérieures il crut

('2) Dans le beau travail dont je pouvoir aller plus loin, et révoquer

viens de donner l'analyse, Magendie, en doute leur aptitude à pomper au

tout en établissant que les veines sont dehors de l'organisme d'autres ma-

des vaisseaux absorbants, ne contesta tières que le cbyle. pas l'existence de propriétés analogues II est à noter que plusieurs physio-

dans les lymphatiques (a); mais dans logistes du xviii' siècle avaient sou- fa) Boerhaave, Prœlectiones academicœ, edidit Haller, t. I, p. 402 et siiiv.

12

ABSORPTION.

Rôle § 3. Ce résultat, obtenu il y a cinquante ans, fut

des vaisseaux

mphatiques confirmc par un grand nombre d autres faits, et aujourd nui absoTpHon. tous Ics pliysiologisles l'admetlent sans contestation. Mais le cbangement dans les opinions régnantes qui s'opéra sous l'in- fluence des travaux de Magendie, détermina bientôt une exa- gération dans les conclusions que l'on en tira, et beaucoup d'expérimentateurs crurent devoir soutenir que les lympha- tiques n'interviennent jamais dans le travail d'absorption dont l'organisme est le siège, si ce n'est pour introduire dans le sang les produits de la digestion (l). Quelques auteurs crurent même que la présence du chyle dans les lymphatiques de l'in- testin n'était pas la conséquence d'un phénomène d'absorption, mais devait être attribuée à une action sécrétoire analogue à celle qui donne naissance au lait, à la bile ou à l'urine. Nous

lenii que les veines sont les organes par lesquels l'absorption s'eflectue : Hoerliaave, par exemple; mais celte opinion manquait de preuves, et élait généralement abandonnée depuis le commencement du siècle aciuel.

(1) M. Ségalas a élé conduit, par diverses expériences, à penser que les substances autres que le cliyle, dépo- sées dans le canal inleslinal, ne pou- vaient être absorbées que par les veines. Il isola une anse d'intestin et fit la ligature des vaisseaux sanguins qui en dépendent, mais laissa intacts les lym- pliatiqucs ; puis, nyant introduit de la noix voiniquedans le tronçon ainsi cir- conscrit, il le remit en place, et ne vil se manifester aucun des symptômes d'empoisonnement qui résultent tou- jours de l'absorption de cette sub- stance. Pans une autre expérience, il

procéda de la même manière ; seule- ment, au lieu d'interrompre la circu- lation dans l'anse intestinale élait emprisonnée la matière toxique, il ouvrit la veine de cette partie et dis- posa les choses de façon à faire couler au dehors le sang qui y avait passé : or, dans ce cas, de même que dans l'expérience précédente, il ne se dé- clara pas d'empoisonnement. On en pouvait conclure que, dans les condi- tions où M. Ségalas avait opéré, les vaisseaux lymphatiques de l'intestin n'avaient exercé aucune action absor- bante appréciable (a).

Je citerai également ici quelques- unes des expériences faites plus ré- cemment sur le même sujet, par M. Panizza. Ce physiologiste opéra sur un Cheval, et ayant, à l'aide d'une incision pratiquée aux parois de l'ab-

(a) Ségalas, Note sur rabsnv]ilion inleslinale (Journal ik physiologie de Majfcndie, 1822, t. II, p.tl-I).

RÔLE DES VAISSEAUX LYMPHATIQUES. 13

reviendrons sur cette dernière manière de voir, lorsque nous étudierons le cas particulier de l'absorption des matières ali- mentaires élaborées dans le tube digestif, et ici je me bornerai à examiner le rôle du système lymphatique dans l'absorption générale, c'est-à-dire dans l'introduction des matières non digérées du dehors dans l'intérieur de l'organisme; question qui a beaucoup occupé l'attention des physiologistes, il y a un quart de siècle, et qui a donné lieu à un grand nombre de travaux.

Les principaux faits dont on a argué pour établir que les vaisseaux lymphatiques sont susceptibles d'absorber les matières étrangères autres que le chyle, sont fournis en partie par les observations pathologiques, en partie par les expériences dans lesquelles diverses substances, plus ou moins faciles à recon-

domen, fait sortir au dehors une anse d'intestin, il l'isola à l'aide de deux ligatures placc^es de façon que le sang de la partie ainsi délimitée ne retour- nait au corps que par un seul tronc veineux. 11 lia ensuite ce vaisseau et y fit une ouverture, afin que la circula- tion ne fût pas interrompue dans l'anse intestinale, mais que le sang de cette partie ne pût pas rentrer dans le torrent circulatoire général ; les lymphatiques furent laissés libres, et, à l'aide d'une ponction, une certaine quantité d'acide cyanhydrique fut in- troduite dans l'anse intestinal ainsi disposé. Aucun symptôme d'empoi- sonnement ne se manifesta, et le sang qui s'échappait de la veine ouverte présenta bientôt l'odeur et les autres signes indicatifs de la présence de l'acide cyanhydrique. Dans une autre

expérience, les choses étant disposées de même, le tronc veineux venant de l'anse intestinale isolée ne fut ni lié ni ouvert, mais simplement comprimé entre les doigts de l'opérateur, de façon à empêcher le sang d'y passer. Aucun symptôme d'empoisonnement ne se manifesta à la suite de l'introduction de l'acide cyanhydrique dans l'anse intestinale ; mais lorsqu'on cessa de comprimer la veine, l'action toxique de ce corps devint évidente en moins d'une minute (a).

Les recherches de M. Fenwick por- tèrent même ce physiologiste à penser que l'absorption du chyle dépend uni- quement de l'action de l'appareil cir- culatoire, et que les lymphatiques ne font (lue transporter une partie des matières que les vaisseaux sanguins ont reçues et leur transmettent (6).

(a) Panizza, Dello assorbimento venoso [Memorie deW Islituto Lombardo, 1843, i. I, p. 176).

(b) Fenwick, An Expérimental Inquivy into the Functions of the Lacteals and Lymphatic {Lancet, 1845, 1. 1, p 29 et suiv.).

1Z|. ABSOnPTION.

naître, ont été déposées clans dilTérenles parties de rorganisinc et ont paru avoir passé dans la lymphe.

Je ne m'arrêterai guère sur les arguments en laveur de l'absorption par les lympliati([ues, qui ont été fournis par la pathologie, parée qu'ils n'ont à mes yeux que fort peu de valeur. Les médecins ont eu l'occasion de remarquer qu'à la suite d'une blessure faite par un instrument chargé de matières putrides, ou d'un virus quelconque, les vaisseaux lymphatiques provenant de la partie lésée sont très aptes à s'enflammer, et que les ganglions placés sur le trajet de ces mêmes vaisseaux s'engorgent souvent. Ils ont vu des phénomènes analogues se manifester dans le voisinage de certaines ulcérations dont le pus est doué de propriétés contagieuses, et ils ont pensé que cet état morbide des vaisseaux lympliatiques dépendait de l'irri- tation produite sur leurs parois par le passage des virus qui, dans ces circonstances, ont être introduits dans l'organisme par voie d'absorption. La route mise ainsi hors d'état de ser- vice semble en effet devoir être celle que ces matières toxiques ont du suivre, et l'on a cru voir une preuve de l'action absorbante des lymphatiques; mais il est fort possible que l'altération des liquides en mouvement dans ces vaisseaux soit la conséquence non de leur mélange avec les matières étran- gères ou morbides déposées à la surface externe de la plaie, mais bien du développement d'un travail sécrétoire dans leur intérieur; travail qui serait provoqué par l'action du virus, et qui aurait le même caractère que celui dont dépend la forma- tion du pus excrété au dehors (1). J'en dirai autant des cas

(1) Les accidents de ce genre sont d'y donner lieu, est de cautériser malheureusement très fréquents par- immédiatement la plaie, afin de de- mi les personnes qui se livrent à des iruirc le virus, ou ferment patholo- travaux analomiques, et l'expérience giquc, qui peut y avoir été déposé. a prouvé que le meilleur moyen pour Cruiksliank attribue l'inflammation empêcher les piqûres envenimées développée ainsi dans les lymphati-

ROLE DES VAISSEAUX LYMPHATIQUES. 15

dans lesquels quelques chirurgiens ont trouvé les lymphatiques gorgés d'un liquide purulent ; rien ne prouve que ce liquide ait été puisé dans les dépôts de pus adjacents, et qu'il ne soit pas le résultat de l'état inllammatoirc de la surface interne de ces vaisseaux eux-mêmes (1).

ques an passage des matières irri- tantes absorbées par ces vaisseaux, et ne voyant pas de phénomènes mor- bides du même genre se manifester dans les veines, il en conclut que celles-ci n'absorbent pas (a). Cette manière de voir a été adoptée par beaucoup d'autres physiologistes : mais, ainsi que Bérard le fait remar- quer avec raison, rien ne prouve que la matière étrangère dont la pré- sence dans la plaie détermine tous ces désordres ait passé par les lympha- tiques, et que rinflammation de ces vaisseaux soit due à son action directe sur la surface interne de leurs pa- rois (b). J'ajouterai que, dans beau- coup de cas de ce genre, l'intoxication générale me semble dépendre non de l'absorption directe de la petite quan- tité de virus déposée dans un point très circonscrit de l'organisme, mais de la dispersion consécutive des pro- duits morbides dont la formation a été déterminée dans ce point par le contact du virus ; et si cela est, on comprendrait facilement que la sé- crétion pathologique ainsi provoquée pût s'établir à la surface interne des cavités lymphatiques situées dans la substance des tissus malades, aussi bien qu'à la surface externe des la- melles ou des fibrilles constitutives de

ces mêmes tissus. Or, s'il en était ainsi, la présence des matières irri- tantes ou toxiques dans les vaisseaux lympiiatiques serait une conséquence non de leur absorption du dehors, mais de leur formation sur place dans l'intérieur des radicules de ces con- duits.

(1) « La preuve la plus forte qu'on puisse donner que les lymphatiques absorbent, dit Criiikshank , est que toutes les fois que les fluides sont extra vases sur des surfaces ou dans des cavités, ou toutes les fois que de pareils fluides distendent outre mesure leur réservoir, on trouve les vaisseaux lymphatiques appartenant à ces sur- faces et à ces cavités entièrement remplis du même fluide. La démons- tration est encore plus évidente quand les fluides dont nous parlons sont fortement colorés. Nous avons ainsi fréquemment vu, chez les Animaux qui meurent d'hémoptysie , et chez l'Homme même , les lymphatiques , qui, dans les autres circonstances, con- tiennent un fluide transparent, être gorgés du sang qu'ils avaient absorbé des celUiles aériennes (c). »

La présence d'une quantité plus ou moins considérable de globules rouges du sang dans les lymphatiques d'une partie dont le tissu a été lacéré, ne

(a) Cruiksliank, Anatomie des vaisseaux absorbants, p. 58. (6) Bérard, Cours de physiologie, t. II, p. 6i3, (c) Cruilisliank, Op. cit., p. 88.

10

ABSORPTION.

Dans un grand nombre d'expériences faites par divers phy- siologistes, on a cherché vainement à découvrir dans les Hfpiides contenus dans le canal Ihoracique, ou dans ses afférents, des traces de l'existence de matières colorantes ou salines déposées à la surface des membranes ces vaisseaux prenaient nais- sance (1). Aussi paraît-il bien démontré aujourd'hui que les lymphatiques ne jouent d'ordinaire (ju'un rôle très secon- daire dans le travail de transport des matières absorbées du

prouverait pas que ces derniers vais- seaux absorbent dans les conditions normales; car, ainsi que je l'ai déjà dit, les communications accidentelles s'«^tablissent très facilement entre les capillaires sanguins et les cavités radi- culaires adjacentes du système lympha- tique (a), et il y a tout lieu de croire que dans les cas dont Cruikshank parle, c'est de la sorte, plutôt que par un véritable travail d'absorption, que les vaisseaux blancs se sont remplis de sang.

La présence de pus dans les lym- phatiques, provenant d'une partie existait un dépôt purulent , a été signalée par plusieurs pathologistes, tels que Dupuytren (6) ; mais, sauf dans les cas de métrite, cela se voit très rarement, et, dans plus de deux cents autopsies faites à ce point de

vue par M. Andral, le liquide renfermé dans ces vaisseaux n'a jamais olferl de rapport avec les humeurs contenues dans les parties adjacentes (c). Bérard a fixé aussi son attention sur ce point, et n'a jamais rien trouvé qui fût de nature à faire supposer que les lym- phatiques eussent absorbé du sang ou du pus ((/).

Parfois on trouve aussi du pus dans les veines, et quelques auleurs ont considéré ce fait comme une preuve de la faculté absorbante de ces vais- seaux (e) ; mais rien ne prouve que la suppuration ne se soit pas établie à leur siu'face interne aussi bien que dans les parties adjacentes.

(1) Plusieurs anciens physiologistes ont cru avoir constaté le passage des matières colorantes (notamment de l'indigo ) de l'intestin dans les vais-

(a) Voyez tome IV, page 548 el suivantes.

(6) Voyez Cruveilliier, Essai sur l'anatomie pathologique, 1810, I. I, p. 200.

Danyau, Essai sur la rnctrite gangreneuse. Tlièso, Paris, 4 82!).

Tonnelle, Des fièvres puerpérales observées à la Maternité en 1829 {Arch. gén. été méét., 1" série, t. XXII, p. 345 ctsuiv.).

Nonat, De la métro-péritonite puerpérale compliquée été l'inflammation des vaisseaux lym- phatiques de l'utérus. Thèse, Varh, 1832.

Duplay, Ve la suppuration des vaisseaux lymphatiques de l'utérus à la suite de l'accouche- ment {Arch. gén. de méd., 1835, 2' série, t. Vil, p. 293). De la présence du pus daiîs les vaisseaux lymphatiques de l'utérus {Arch., série, t.X, p. 308).

(c) Amiral, Iteclierches pour servir à l'histoire des maladies du système lymphatique {Arch. gén. de méd., 1824, 1" série, t. VI, p. 502).

(d) Bérard, Cours de physiologie, l. 11, p. (144.

(e) Gendrin, Histoire anatomique des injlammalions, I. I, p. 707.

Kay, On the ulcerative Process in Joints {Med. Chir. Trans., 4818, t. XVIII, p. 214).

ROLE DES VAISSEAUX LVMIMIATIQDES. 17

lieu de dépôt de ces subslances vers le centre de l'appareil irrigatoire. Mais il faut bien se garder de les croire inaptes à absorber; car il existe dans la science d'autres laits {pii ne

seaux chylifèrcs {a) ; et les expérien- ces de J. Hunter ont été considérées par \V. IJnnter comme démonstra- tives de ce genre d'absorption. En effet, J. Hunter, après avoir injecté de l'indigo dans le péritoine d'un Animal vivant, crulapercevoircetle substance foi't peu de temps après dans les lym- phatiques du mésentère (6); mais il s'était probablement laissé induire en erreur par quelque circonstance acci- dentelle : car celte expérience a été répétée par beaucoup d'aunes phy- siologistes et a toujours donné des résultats négatifs, ou du moins fort douteux; et M. 11. Alayo , qui crut d'abord avoir vérifié l'assertion de Hunier, ne tarda pas à reconnaître qu'il s'était lui-même trompé, et que la teinte qu'il attribuait à la pn'sence de l'indigo était le résultat d'une alté- ration cadavérique ordinaire (c).

D'autres matières colorantes, telles que la garance et le curcuma, ont été retrouvées dans les vaisseaux cliyli-

fères, mais c'était après que ces sub- slances eurent été administrées fort longtemps avant l'examen des hu- meurs, et quand par conséquent elles pouvaient être arrivées dans les lym- phatiques par la voie des vaisseaux sanguins (Jj.

Magendie s'est élevé très fortement contre l'opinion de Hunter (e), et, d'a- près l'ensemble des résultais négatifs obtenus par ce physiologiste et un grand nombre d'autres expérimenta- teurs, il parait bien démontré aujour- d'hui que les matières colorantes en question ne passent pas en quantité appréciable dans les vaisseaux chyli- fèrcs (/'). Ainsi, dans une série nom- breuse d'expériences sur l'absorption, faites par une commission de l'Aca- démie médicale de l'hiladelphie , le chyle fut toujours trouvé incolore , malgré l'ingestion de l'indigo, de la rhubarbe, de l'orcanette ou de la co- chenille dans les voies digestives (y).

L'absorption de quelques autres

(a) Mari in Lisler, Expcrimcnt made for altcring the Colour of the Chijle {l'hilos. Traiis., 1G83, t. XUI, p. 7).

Musjrave, Lelter coiicerniiig soinc Expcrtments madc for transmitling a blue Colour Liqv.or inlo thelMCteals {Philos. Trans., 1701, t. XXIII, p. 99(5).

Haller, Elementa phijsiologiœ, t. VII, p. (32.

Onlyd, Dlsscrl. acad. de causa absorptionis per vasa lymphatica. Leyde, 1795, p. 2(3. (/)) Voyez W. Huiilfi-, Médical Commenlarics, 1762, part, i, p. 44.

(c) Mayo, Anatomical and t'hysiological Commcntaries, t. II, p. 42.

(d) Seiler et Ficiiiiis, \crsuch ilber das Einsaiigiingsverinogen der Vencii {Zeitschr. fiir nalur- ûnd Heilkunde, 1S21, t. Il, p. 317).

Buisson, Colnraliûii du chyle avec la garance (Gazette médicale, 1844, p. 295).

(e) Mai;c'ndie, Précis élémentaire de physiologie, t. II, p. 2U1.

(f) maniirin, E.rpéricnces sur l'absorption des vaisseaux lymphatiques des Animatix {Journal de médecine, 1798, t. LXXXV, p. 372).

Lebkiioliner, Dissert, inaug. sur la perméabilité des tissus, Tubingen, 1819 {Archives générales de médecine, 1825, t. VII, p. 432.

Blondlot, Traité analytique de ta digestion, p. 42G.

{g) Experiments on Absorption by a Committee of the Acad, of Med. of Philadelphia {Londoii Médical and Physical Journal, 1832, t. XLVII, p. 47).

•48

ABSORPTION.

Preuves

ilo l'absoriition

par les

peuvent laisser aucun doute, quant à la possibilité de leur intervention dans cette portion du travail physiologique. Ainsi, lyniphaïKiucs. ^^^^^^ ^^^^^^ ^y ^^^^^ circoustance, les expérimentateurs qui se sont

occupés d'une manière spéciale de l'étude de cette question, ont

matières colorantes par les vaisseaux lymphatiques paraît se faire plus fa- cilement. Ainsi, dans le voisinage du foie, on les a souvent trouvés colorés en jaune par la présence de la bile dansleurintérieur;el MM. Tiedemann et r.melin, dans des expériences sur les eilels produits par la ligature du canal cholédoque , ont constaté la présence des principes constituants de cette humeur, non-seiiloment dans les lymphatiques du foie et dans les gan- glions que ces vaisseaux traversent, mais jusque dans le canal thora- ciqiie (rt). Quelques auteurs ont sup- posé que la piuiétration de la bile dans les tissus alisorbants était un phéno- mène cadavérique seulement, et ne dépendait pas de l'absorption physio- logique. Mais Lebkiichner a constaté expérimentalement que les principes caractéristiques de ce liquide traver- sent promptement le péritoine pen- dant la vie aussi bien qu'après la mort. Effeclivcment, ayant injecté de la bile dans la cavité péritonéale d'un Chat, et ayant tué l'animal douze mi- nutes après Topération, il trouva que la matière jaune et la matière amère de ce liquide avaient déjà pénétré dans

le tissu conjonctif sous-péritonéal (6). Je dois ajouter que, dans un grand nombre de cas, des réactifs chimiques, tels que du cyanoferrure de potas- sium et du sucre, ont été ingérés dans l'appareil digestif et absorbés sans qu'on ait pu en découvrir de traces dans les vaisseaux chylifères ou dans les autres parties du système lympha- tique. Un résultat négatif de ce genre fut obtenu par Haller en employant un sel de fer (c). MM. Tiedemann et Omelin cherchèrent en vain dans les liquides du canal thoracique des traces de divers sels de fer, de plomb, de mercure et de liaryte dont ils avaient déterminé l'absorption par les voies digestives (d). MM. Bouchardat et Sandras n'ont pu y retrouver ni le cyanoferrure de potassium, ni le sucre qu'ils avaient administrés de la même manière et qui se reconnaissent dans le sang {e). Dans quelques expériences faites par MM. Panizza et de Kramer, la présence des réactifs absorbés ne put être démontrée nettement dans le chyle {f). Je citerai également à celte occasion des recherches infruc- tueuses faites par Magendie, Mayer, Weslrumb, etc. {g). Enfin il est aussi

[n) Tiedeiiiann tt Gineliii, Recherches sur ta (Vnjestion, t. II, p. 50.

(h) Lebliiicliiier, Op. cit. {Arrh. (jcn. de médecine, 1825, t. \'!!, p. 439).

(c) llallur, Ëlcmenta pliysiolo(iiœ, t. VII, p. (13.

(d) Ticilcnianii eldincliii, lii'clierches sur la route que prennent diverses substances pour passer de l'estomac et du canal intestinal dans le sang, p. GO.

(e) Boiiclianlat et Sandras, De la digestion des matières féculentes et sucrées (Annuaire de Ihé- rapeitlique, 1840, suppléiiicnt, p. 80 cl suiv.).

(/') Panizza, Dell' assurlnmenlo venoso [Mem. dcll' Istiluto I.ouibardo, 1 S il , l. 1, p. 1 13). {(jj Magendie, Précis clt'mcnta'ire de physinlvgie, t. II, p. 20-2.

Mayer, Op. cit. (Mcckel's Deutsches Archiv filr die l'iiysiolngie, 1817, t. III).

Weslrundi, Op. cit. {Ai'ch. yen. de méd., 1820, l" série, 1. NM, p. 115).

liOLE DES VAISSEAUX LYMPHATIQUES, 19

VU le cyanolerrure de potassium qu'ils avaient injeetc soit dans les cavités séreuses, soit dans le tube digestif, ou qu'ils avaient mis en contact avec le dcraie dénudé, apparaître plus ou moins prompfement dans l'intérieur du système lymphatique (1). Il est

à noler que M. Chatiii a trouvé des traces d'arsenic dans !e sang d'un Chien auquel il avait administré ce poison , mais il n'a pu en découvrir dans la lymphe du canal thoracique. D'autres expériences, faites sur l'é- métique , lui donnèrent des résultats analogues la).

Les résultats obtenus par l'emploi de diverses matières odorantes sont moins nets, et parfois les expérimen- tateurs ont cru reconnaître la pré- sence de ces substances dans les liquides du système chyiifère.

(1) Tar exemple , dans les expé- riences de Foderà, laites sur déjeunes Lapins, une infusion de noix de galle ayant été injectée dans la plèvre ou dans la vessie, et une solution de sul- fate de fer dans la cavité péritonéale, on trouva bientùt après un précipité noir dans le canal thoracique, aussi bien que dans d'autres parties du corps [b). Eu introduisant de la mêiue manière une dissolution de cyanolerrure de potassium dans l'ab- domen ou une dissolution de sulftite de 1er dans la plèvre, on a trouvé du bleu de Prusse dans les gan- glions mésenlériques et dans le canal thoracique, aussi bien que dans les veinules sous- péritonéales (c). Un

résultat analogue fut obtenu en em- prisonnant une solution de cyano- ferrure de potassium dans une anse intestinale dont la surface extérieure fut ensuite mise eu contact avec une solution de sulfate de fer {cl). Enfin, le cyanolerrure ayant été introduit dans le tissu conjonclif sous-cutané de la cuisse de plusieurs jeunes La- pins, on constata la présence d'une certaine quantité de ce sel dans le canal thoracique, au bout d'une demi heure ou même de quelques mi- nutes (e).

11 est, du reste, bon de noter que dans ces expériences Foderà faisait usage d'un peu d'acide chlorhydrique pour aviver la couleur bleue du préci- pité résultantde la rencontreducyano- ferrure de potassium avec le sel de fer ; procédé à l'aide duquel il pouvait rendre visiblesdes traces de cette sub- stance, qui parfois auraient pu échap- per à l'œil, s'il n'avait employé cet artifice.

Des résultats analogues avaient été obtenus précédemment par d'autres physiologistes. Ainsi, dans quelques- unes des expériences de Lawrence et Coates sur l'absorption, faites sur de jeunes Chats, le cyanolerrure de potas- sium s'est montré dans le canal Iho-

(«) Cliatiii, Sur les fondions des vaisseaux chylifères et des veines {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, I. XVIII, p. 379).

(b) I-'oileià, Recherches expérimentales sur l'absorption et l'exhalation, 1824, p. 22. (r) Idoiii, ibid., p. 24. ((/) lilcm, ibid., p. 27. ie) Idem, ibid., p. 48.

20 ABSOUPTION.

vrai que quelques physiologistes ont supposé que ces matières avaient été absorbées parles veines et avaient été transmises des capillaires sanguins aux radicules lympliali(pies, comme cela a lieu pour le plasma du sang(lj; mais dans plusiera^s cas cette

racique de deux à huit niiinik's après son injection dans le ttilic dit^cstif (a).

MaycM'a trouvé aussi Iccyaaofeniirc de potassium dans la lymphe du canal thoracique, quand il introduisait cette substance dans les voies respiiatoiics, mais elle se montrait plus promptc- ment dans le sang (6). Dans une des expériences faites par VVesirumb, le même sel, introduit dans l'organisme par une portion dénudée de la peau, se retrouva dans les ganglions de l'aine et dans le canal thoracique ; mais, dans d'autres expériences ana- logues, ce physiologiste n'oblint que des résultats négatifs (c).

Enfin des faits du même ordre ont été constatés par Seiler et Ficinns , Lebkuchner, Kay, Mac-Neveu, M. Cl. Bernard, Ilorner et plusieurs autres physiologistes ((/).

Les expériences relatives à l'absorp- tion des substances odorantes par les

lymphatiques n'ont pjs donné des ré- sultais aussi nets ; cependant, dans quelques cas, divers physiologistes ont cru leconnaître ces matières dans les liquides tirés de ces vaisseaux. Ainsi, .Schreg(!r, ayant eu l'occasion d'obser- ver liiie femme chez laquelhî un des troncs lymphatiques du pied avait élc ouvert, et chez laquelle on pratiquait une saignée, (il îles friclions sur le dos du pied avec du musc, et bientôt après il crut reconnaître l'odeur de cette substance dans la lymphe recueil- lie sous une venlouse [e). Les mem- bres de la commission médicale de Pliiladelphie pinsent aussi avoir vu l'asa fœtida passer de l'intestin dans le chyle aussi bien que dans le sang (/■).

(1) Cette opinion a été professée par MM. Bouisson, Fenwick et quelques physiologistes ((/;.

(a) Lawrence el Coales, Account ofsome furlhev Experiments to détermine Ihc absorbinij Power of Ihe Veins and l.yuiphatics {Philadelphia Journal, 1823, dO).

(b) Mayer, Op. cit. (Mcckftl's Deulschcs Archiv fi'ir die Physiologie, 1817, t. 111, p. 483).

(c) Weslrunib, Pliysiol. Untersuch. ûber die Einsaxiq. der Vcnen. Expériences sur l'ab- sorption cutanée {Archives (jcnérales de médecine, d82'J, t. XXI, p. 113).

(d) Mac-Nevcii, Expériences pour s'assurer de la non-décomposition des composés chimiques à travers les fluides de l'économie animale (.Urhives rjénéralcs de médecine, 18^3, t. III, p. 2C<J, et New-York Mcd. and Phijs. Journ., 1822).

H. Soilor uiul D. Ficinns, Versuche ûber das E'insawjungsvermoijcn der Yenen und Unter- siichung ûber die Satujadern der MHz [Zeitschr. fur Natur und Hcilkunde von den Professoren der Chir.-Med. Akad. in Dresden, 1821, t. II, p. 317).

Kay, On Ihe Ulcerative Process in Joints {Trans. nf ihe Med.-Chir. Soc. ofLondon, I. XVIII, p. 213).

Claude Bernard, Sur l'absorption (Union médirale, ISiO, t. III, p. 4-45). (c) Sclirej^er, lie functione pincentcc nterinœ. ErlaiiijcMi, IT'J'J.

(f) Exper'imcnls on Absorption Inj the Commiltee of Ihe .\cad. ofPhilad. (Londoii Med. and Physiol. Journal, 182-2, l. XLVII, p. 275).

(g) Buisson, De la coloration du chijle par la garance [Gaiclle médicale, 184 l, p. 2115), et Études sur le chyle {loc. cit., p. 523).

Fenwick, Expérimental Inquiry {Lancet, 1845, t. I, p. 29).

Boucliardat et Sandras, Hemarques nouvelles sur la digestion (Annuaire de thérapeulique, 1845, p. 271).

nOLK DKS VAISSEALX LYMPHATIQUES. 21

}iy|iotIicsc n'est pas ndniissible. Ainsi, M. Bisclioff a reirouvé dans la lymplie du cyanolerrure de potaL-sium qu'il avait intro- duit dans la palle d'un Animal après avoir suspendu la circula- tion dans ce membre (1), et, dans des expériences faites sous mes yeux par M. Colin, del'iodurede pola^-sium introduit dans le canal digestif d'un Mouton s'est bientôt retrouvé dans le liquide obtenu à l'aide d'une fistule du canal tboracique ; eniin du cyanofcrrure de potassium logé dans le tissu conjonctif sous- culané de la tèîe d'un Clieval s'est montré en quelques minutes dans la lymplie qui s'écoulait par un orifice pratiqué au tronc lympbatique cervical du côté droit.

Dans l'état actuel de nos connaissances, il est donc impos- sible de refuser aux vaisseaux lymplialiques en général l'aptitude à se laisser pénétrer par des matières étrangères et à transporter ces matières de la périphérie vers le centre de l'appareil irriga- loii'C, par conséquent à fonctionner, ainsi (jue les veines, comme des instruments d'absorption.

Nous aurons à examiner quelle peut être la part de l'un et de l'autre de ces systèmes de vaisseaux absorbants dans le travail à l'aide duquel les substances qui se trouvent à l'exté- i-ieur de l'organisme ou dans le corj)S vivant, bien qu'en dehors du système irrigatoire, sont introduites dans le torrent de la circulation. iMais, avant d'aborder cette question, il nous faut étudier le n:écanisme par lequel cette introduction s'effectue dans un vaisseau quelconque, dans une veine comme dans un lymphatique.

(1) DanscesoxpOrienceSjM.Bisclioir tassiuni. L'absorption de ces sub-

lia l'ariè'ie aoile aljdcniinaie , puis il stances ne s'efl'cctiia que fort icnte-

introduisil, dans l'une des patles pos- ment , mais n'était pas douteuse , et

térieiîies la circulation du sang il cT même constaté leur présence dans

se trouvait ainsi suspendue, des poi- la lympbe (a). sons végétaux et du cyanure de po-

(n) Bischoff, Veber die Résorption der narkotischen Gifte dvrch die Lympligefâsse {Zeilschrift fiir rutionelle Medicin, 1840, t. IV, p. 62).

Résumé.

22 ABSORPTION.

Mécanisme ^ II. LorsQii'iine idée fausse a disparu de la Sfience et n'v l'absorption, a laisse aucune (race durable, je me garde bien d'en parler ici; car dans ces Leçons je ne fais pas l'bisloire des opinions émises par les physiologistes, et je ne dois m'attacher qu'aux résultats positifs obtenus par leurs récherches. Mais quand une théorie erronée émane d'un homme de génie dont l'autorité est jonr- nellement invoquée dans nos écoles; quand elle trouve encore des défenseurs, et qu'elle a exercé juscpie dans notre temps une grande influence sur les doctrines régnantes, je ne crois pas pouvoir me dispenser d'en faire mention, ne fût-ce que pour prémunir les étudiants de notre Faculté contre ce qu'elle peut avoir de séduisant. !1 me paraît donc nécessaire de dire que pour expliquer l'introduction des matières absorbées de l'exlé- rieur de l'organisme jusque dans l'intérieur des vaisseaux, l'illustre Bichat supposait que ceux-ci s'ouvraient au dehors par des espèces de bouches invisibles pour nos yeux, mais douées de la faculté de choisir les substances qui se présentent à elles, de se resserrer pour exclure les unes, et de se dilater pour attirer les autres et les faire pénétrer dans leur inté- rieur (1). Mais l'hypothèse de ces racines béantes d'un sys- tème de vaisseaux absorbants n'a pas plus de fondement que l'opinion relative aux vaisseaux exlialants dont j'ai rendu compte dans une Leçon précédente. En effet, il est bien démontré aujourd'hui que l'entrée des matières étrangères dans la pro- fondeur de l'organisme, ainsi que leur mélange avec les liquides nourriciers en circulation dans les vaisseaux est, de môme que l'exhalation, c'est-à-dire le passage en sens inverse, un phénomène qui s'effectue sans l'intervention d'instruments

(1) L'hypoihèse de l'absorpiion par générale, et a été professée dans nos

des bouches douées d'une sensibilité écoles médicales jusque dans ces der-

élective a été développée par Biciiat nières années (o). dans son célèbre Traité d'anatomie

(a) Bichat, Anatomie générale, 1. 11, p. 425 et suiv. (édit. de 1818).

PERMÉABILITÉ DKS TISSUS. 23

Spéciaux et à Taidc de la perméabililc des tissus vivants qui se trouvent interposés entre ces fluides en mouvement et l'exté- rieur.

En traitant de la transsudation, j'ai fait voir que les parois des vaisseaux, de même que toutes les autres parties de l'organisme, sont plus ou moins perméables aux fluides, et sont susceptibles de s'imbiber d'eau tenant en dissolution des matières étran- gères (1). 11 nous est donc facile de comprendre que des tissus qui se laissent traverser [lar les liquides de dedans en dehors, puissent livrer passage à des substances également fluides qui tendraient à les pénétrer en sens inverse, et qui seraient pous- sées par une force quelconque de l'extérieur des vaisseaux dans l'intérieur de ces conduits. Mais en physiologie, comme dans les autres sciences expérimentales, il ne faut pas se contenter de lumières fournies par le raisonnement seul, et il fL\ut cher- cher les preuves matérielles de ce que l'esprit nous fait aper- cevoir. Avant d'avancer davantage dans l'étude du mécanisme de l'absorption , il me semble donc nécessaire do montrer qu'effectivement les vaisseaux absorbants, c'est-à-dire les veines et les lymphatiques, sont susceptibles de se laisser pénétrer directement par les liquides qui les baignent extérieurement; (|ue ces liquides, en passant à travers leurs parois et les autres tissus qui séparent le sang et la lymphe du milieu ambiant, ^ peuvent se mêler à ces humeurs, et que leur absorption est un phénomène dépendant du jeu des forces générales dont l'étude est du domaine de la physique.

§ 5. Dans une des premières Leçons de ce cours, lorsque i,„bibiiioi.

des

j'exposais la série de découvertes à l'aide desquelles nous nssus ,„.ivés sommes arrivés à connaître la nature du travail res[>iratoire, j'ai dit que Priestley avait constaté que rinterposiUon d'une membrane organique entre l'oxygène et le sang n'empêche

(1) Voyez tome IV, page 392 et suivantes.

2/l ABSOUPTIO.N.

pas le gaz de pénélrer dans ce liquide et d'en aviver la cou- leur (1). Or le même résultat est obtenu quand le sang, au lieu d'être placé dans un vase de verre recouvert d'un morceau de vessie, se trouve renfermé dans les vaisseaux qui lui sont propres. Ainsi, prenons sur une Grenouille vivante le poumon gorgé de sang, et après avoir placé une ligature autour de la base de cet organe pour y emprisonner ce liquide, séparons-le du resie du corps et suspendons-le alternalivement dans de l'oxygène et dans du gaz acide carbonique : dans le premier cas, nous verrons le sang prendre une teinte vermeille, et dans le second il ne tardera pas à présenter un ton rouge rabattu de noir; cliangemenis qui dépendent, comme nous le savons, de l'action dilTérenle de ces deux fluides sur les globules liéma- tiques. I,es gaz, en contact avec la surface extérieure de ce poumon privé de vie, ont par conséquent traversé le tissu des membranes dans l'épaisseur duquel serpentent les vaisseaux le sang est lenfermé, et ont été se mêler à ce liquide, comme dans les phénomènes d'absorption dont les êtres vivants sont le siège.

Un résultat tout semblable s'oblient quand, au lieu d'em- ployer des gaz, on se sert d'eau tenant en dissolution des matières salines dont la présence est facile à constater au moyen de (iuelfjues réactifs chimiques. Ainsi, prenons le poumon d'un Lapin et laissons- le Iremper dans une dissolution de chromate de plomb, ou bien introduisons cette dissolution saline dans les voies aériennes; juiis, a[)rès avoir attendu un certain temps poui' permeltre à l'imbibilion de s'effectuer, injectons dans l'ar- tère pulmonaire une dissolution d'acétate de plomb ; nous ver- rons aussitôt se former dans l'intérieur des vaisseaux sanguins un précipité jaune de chromate de plomb, indice certain du passage du chromate de potasse de l'extérieur dans l'intérieur de ces mêmes vaisseaux. (1) Voyez tome I, page /|00.

PERMÉABILITÉ DES TISSIS. 25

Les expériences «le ce genre peuvent elre varices de mille manières, et elles montrent toujours que sur le cadavre les fluides peuvent pénétrer de l'extérieur jusque dans l'intérieur de l'appareil de la circulation ; que, par conséquent, le premier acte de l'absorption peut s'effectuer sans l'intervention de la puissance vitale, et que ce résultat est une conséquence de la perméabilité des tissus organiques (1). Pour établir ce fait, on pourrait même se contenter des observations cadavériques qui sont fournies journellement i>ar les autopsies; et d'ailleurs tous les physiologistes admettent depuis fort longtemps, qn'après la mort les tissus organiques sont perméables aux liquides : mais on devait se demander si pendant la vie les choses se passent de la môme manière.

Au i)remier abord, la rci)onse à cette question semblait rc'm^^.iii.c \^ devoir être négative. Effectivement, sur le cadavre, la bile ^i^^'-^ ^î^m.. transsude de la vésicule du fiel dans les parties voisines et teint

(I) Magendic, qui fui le premier à bien nietlie en lumière le rôle de rimbiiîilion diins le mécanisme de Tabsorplioii , employa souvent une expérience pou dillerente de celle décrile ci-dessus. 11 prenait le cœur d'un Chien mort depuis la veille, et poussaitdans les artères de l'eau liède ; un courant s'établissait ainsi dans les vaisseaux snnguins de ce \i.scère et s'en échappait par l'oreillclle droite. On injectait alors dans le péricarde une cerlaine quanlilé d'eau légèrement acidulée, el, au bout de quelques mi- nutes, il devenait facile de conslater des signes d'acidité dans l'eau qui s'échappait des veines du cœur {a].

On peut conslater aussi la pénétration des liquides acides de l'e-xlérieur dans l'intérieur d'une veine, en disposant en l'orme d'anse un de ces vaisseaux préalablement isolé, en plongeant sa partie intérieure dans un bain acidulé et en y faisant passer un courant d'eau fournie jiar un tlacon - fontaine en communication avec une de ses extré- mités ; l'eau qui sort du conduit ainsi disposé ne tarde pas à donner des signes d'acidité, comme il est facile de s'en assurer à l'aide de la teinture de lournesol. Celle expérience, faite d'abord par Magendie, a été répétée par un grand nombre d'autres phy- siologistes (6).

(a) Magendie, Mémoire sur le mécanisme de l'absorption ch,e% les Animaux à sang rouge et chaud {Journal de physiologie, 1821, t. I, y. 12).

(b) Idem, ibid., p. 8.

Foderà, Recherches expérimentales sur l'absorption et l'exhalalion, 1824, p. 9.

26 ABSORPTION.

en jaune toutes ces parties, tandis que chez le vivant on n'aperçoit en général rien de semblable; et dans diverses expé- riences où des matières colorantes, telles que de l'encre, ont été introduites dans la cavité abdominale d'un Animal vivant, on a vu que les tissus situés à une petite distance de la surface en contact avec ce liquide avaient conservé leur aspect nor- mal (1). Cependant on pourrait ^xpli(;iuer ces laits d'une autre manière, et croire que si les liquides en question ne s'intillraient pas au loin dans les organes vivants comme dans les tissus morts, cela dépendait non pas d'un défaut de perméabilité dans les premiers, mais de ce que les matières qui y pénètrent, ren- contrant sur leur passage une Ibule de courants rapides formés par le sang en circulation, avaient été entraînées au loin, avant de pouvoir gagner la rive opposée de ces torrents et d'y être imbibées par les tissus sous-jacents. C'est de la sorte que Magendie se rendait compte des différences dans les effets produits par le contact des matières tinctoriales avec les tissus perméables de l'économie après la mort et durant la vie, et une multitude de faits tendent à prouver qu'il avait raison. perniéabiiiié Alusl, cc physiologlstc ayant mis à découvert la veine jugu- (itrSs. l^ire externe d'un jeune Cbien , et s'étant assuré que dans la partie observée ce vaisseau ne recevait aucune brandie, le sépara des tissus adjacents, et l'isola en plaçant entre ceux-ci et sa face externe une carte (ou mieux encore une lame de ploml)) ; puis il apjiliqua sur la veine dénudée de la sorte une certaine quantité d'extrait de noix vomique. Il avait détruit toutes les

(1) Dans quelques cas, Magendie a d'un jeune Chien (ou mieux encore

vu que, même chez les Animaux vi- d'un Lapin ou d'un Cochon d'Inde), il

vants, les membranes se pénéuaient a trouvé qu'en moins d'une heure, la

des matières colorantes avec lesquelles plèvre, le cœur, et même les muscles

elles se trouvaient en contact. Ainsi, intercostaux, peuvent se colorer en

en injectant de l'encre dans la plèvre noir (a).

(û) Magendie, Mém. sur lemécanisme de l'absorption {Jonrnalde physiologie, iB'ii,t.ï,f A3),

PERMÉABILITÉ DES TlSSliS. 27

connexions qui existaient entre la portion du vaisseau dont les parois étaient en contact avec ce poison et les parties voisines; mais le sang coulait, comme d'ordinaire, dans l'intérieur de la veine, et par conséquent si la noix vomi(|ue pouvait pénétrer à travers le tissu des parois de ce vaisseau, cette substance devait être absorbée, et donner lieu aux symptômes caractéristiques de l'empoisonnement par la strychnine. Or, c'est effectivement ce qui eut lieu, et il fallait nécessairement en conclure que les parois de la veine s'étaient laissé pénétrer par le poison (1).

Dans une expérience faite , il y a plus de trente ans, par Foderà, une solution de cyanoferrure de potassium fut introduite dans la cavité de la plèvre, et une solution de sultate de fer dans l'abdomen d'un Lapin. Au bout de trois quarts d'heure, l'Animal fut tué, et l'on trouva le diaphragme qui sépare ces deux cavités coloré en bleu, ainsi que toutes les parties voisines, et à l'aide de la loupe on pouvait se convaincre de l'existence du précipité de bleu de Prusse jusque dans l'intérieur de beaucoup de veinules qui se trouvaient au milieu des parties teintes de la sorte (2).

Dans d'autres expériences, toutes les communications entre

(1) En répétant celle expérience sur un Chien adulte, l'absorption de la noix vomiquc par les parois de la veine était encore bien manifeste ; mais les effets produits étaient moins intenses , ce qui s'explique par l'é- paisseur plus considérable des tuniquis du vaisseau sanguin.

RIagendie obtint des résultats sem- blables en appliquant la noix vomique sur la surface externe de l'artère caro- tide chez un Lapin, et, après la mort de l'Animal, il reconnut au goût amer du

sang que le poison se retrouvait dans l'intérieur de ce vaisseau. U est d'ail- leurs bien entendu qu'il avait pris toutes les précautions nécessaires pour s'assurer que ni les veines, ni l'artère sur lesquelles il expérimentait n'of- fraient, ni solution de continuité, ni vaisseaux lymphatiques accolés à leurs parois (a).

(2) Nous reviendrons ailleurs sur les conditions dans lesquelles Foderà a vu cette imbibition s'effectuer avec le plus de rapidité (6).

(a) Magendie, Op. cit. {Journal de physiologie, 1821, t. I, p. 10),

(b) Foderà, Recherches expérimentales sur l'absorption et l'exhalation, p. 24,

l'cniiL';ibili(c'

di's parois

lies

lun|ilinlifiiies.

28 ABSORPTION.

une anse d'inîesliii et le res(e de l'organisme ont élé iiiler- ronipues à l'aide de ligatures, et cependant les poisons ouïes réactifs chimiques introduits dans cette portion du canal diges- tif ont été absorbés et se sont mêlés au sang en circulation dans les parties voisines (1) ; par conséquent, ces substances étran- gères ont traverser les tissus vivants des tuniques intesti- nales, et c'est par un phénomène d'imbibition seulement qu'on jieut expliquer ce passage.

§ G. Les recherches dont je viens de rendre compte, et d'au- tres expériences qu'il serait trop long de décrire ici, nous mon- trent que tous les tissus constitutifs de l'organisme sont plus ou moins perméables et s'imbibent des liiiuidesqui se trouvent en contact avec leur surtace. Sous ce rapport, les paroisdes vaisseaux lymphatiques ne diffèrent pas des tuniques des veines, et par conséquent tout ce que je viens de dire relativement au méca- nisme de l'introduction des iluides dans ces derniers vaisseaux est applicable aux premiers. ïMais nous avons vu (jue le sang circule dans les uns avec une grande rapidité, tandis que la

(1) Je pourrais ciler égalenionl ici une expérience que je fis il y a loil longlenips, pour nionlrer à la fois la pos.sibilili' de la liansniission crnn poison par inibibition seiiienienl (Fune exiréniilé d(! Porganisnic à l'antie, et lu grande influence que le lorront cir- culatoire exerce d'ordinaire sur le temps nécessaire pour edectuer la ré- |)artiliôn des matières absorbées dans Tensemble de Téconomie. Le tborax d'une ilrenouille vivante ayant élé ouvert, une ligature fut passée autour du faisceau des gros vaisseaux san- guins auxquels le cœur est suspendu, puis de la strycbnine fut introduite dans le tissu conjonctif sous-culané de Tune des pattes postérieures. Les symptômes nerveux indicatifs de l'ac-

lion de cette substance sur la moelle éj)inière ne se déclarèrent pas au bout de quelques minutes , comme cela aurait été le cas si Tanimal fût resté dans son élat normal, mais se mani- festèrent au bout d'une lièure environ. Or, la ligature jilacée autour du cœur avait complètement interronipu la circula lion, et avait rendu impossible l'envoi des liquides contenus soit dans le système veineux, soit dans le sys- tème lympbatique, des membres infé- rieurs vers le racliis,et par conséquent la progression lente de la strycbnine depuis l'exlrémilé de la patte jusque dans la moelle épinière devait s'être effectuée de proclie en proche et par imbibilion seulement.

FORCE MOTRICE. 29

progression des liquides est lente dans les autres ; nous pou- vons donc comprendre que la part de ces deux ordres de con- duits doit être très inégale dans l'accomplissement du travail de l'absorption considéré dans son ensemble, et (pie, dans les circonstances ordinaires, l'absorption veineuse doit avoir le plus d'importance. Ce sera donc de ce dernici' pbénomène (pie je m'occuperai principalement en ce moment, me réservant de reprendre l'élude de l'action des lym[ihati(pies dans une autre occasion.

§ 7, .l'ai Diit voir au commencement d(^ cette Leçon,' que causes

, . 111 1 déleniiinanli s

sur le vivant comme dans le cadavre, tous les tissus organiques ac sont plus ou moins perméables, et qu'à raison de celte propriété ' '"' "" ' physi(pie, ils n'opposent aucun obstacle invincible au passage des fluides de l'extérieur jusque dans l'intérieur des vaisseaux sanguins. Mais, pour quecemouvement s'accomplisse, il ne suftit pas qu'un cbemin praticable soit ouvert pour le passage de ces substances étrangères : il faut aussi (pi'une force motrice inter- vienne pour faire avancer les molécules (jui se présentent à l'entrée de ces voies et pour les faire pénétrer jusque dans le torrent circulatoire, qui ensuite les entraîne au loin et les dis- tribue dans toutes les parties de réconomie. Or jusqu'ici nous n'avons étudié que la route suivie par les matières étrangères qui s'introduisent ainsi dans l'organisme, et nous ne connais- sons pas encordes forces qui déterminent leur mouvement de dehors en dedans. 11 nous faut donc cberdier maintenant quelles peuvent être les causes de cette translation.

En étudiant les phénomènes de iranssudation que les êtres vivants nous offrent, nous avons vu les conditions hvdrostati- ques influer beaucoup sur la rapidité avec laquelle les humeurs filtrent à travers les membranes animales (1), et il est facile de montrer que toute pression exercée par un fluide sur une des

(1) Voyez tome IV, page /i02 et suivantes.

30 ABSORPTION.

surfaces de celles-ci tend à accélérer le passage de ce corps à travers la substance poreuse de ces tissus perméables. Des expériences laites, il y a quelques années, par M. Liebig, et d'autres rechercbcs analogues dues à M. Cima, mettent très bien en évidence, non- seulement la possibilité de cette filtra- tion forcée sous l'influence de pressions médiocres, mais aussi la facilité variable que les divers tissus organiques offrent pour le passage des li(|uides en général, elles différences qui existent dans la grandeur des forces nécessaires i>our déter- miner ce passage à travers une même membrane, suivant la nature de la substance dont celle-ci s'imbibe (1). Les pbysio-

(1) Dans ces oxpériences, M. Liebig fait usage (riiii sipiion dont la petite branche se termine par une portion élargie qu'il ferme à l'aide de la mem- brane dont il veut mesurer la per- méabilité, il introduit ensuite dans le tube !e liquide qui doit filtrer à travers cette cloison, et après l'avoir fait mon- ter dans la petite branche du siphon de manière à l'amener en contact avec la membrane, il verse du mercure dans la grande branche de l'inslrn- mcnt, de façon à exercer de bas en haut sur le liquide contenu dans la petite branche une pression plus ou moins considérable. Or, sous l'in- fluence de cette pression , le liquide emprisonné sous la membrane tra- verse celle-ci, et s'écoule au dehors avec une rapidité variable.

Ainsi, en employant pour filtre un morceau de vessie de Bœuf d'un dixième de ligne d'épaisseur, M. Lie- big a vu l'eau transsuder sous une pression de l'2 pouces de mercure ; une solution concentrée de sel marin, pour passer de même, nécessitait une pression de 18 à 20 pouces. L'huile ne suintait que sous une pression de

3i pouces, et sous une pression de l\8 pouces de mercure l'alcool ne pas- sait pas encore.

En employant de la même manière un morceau de péritoine d'un Bœuf, M. Liebig a trouvé que des ellets ana- logues étaient obtenus beaucoup plus facilement. Ainsi le suintement du li- quide se produisait sous l'influence d'une pression de :

8 il 10 pouces clc mercure avec l'eau, ■12 à 16 avec la solution

saline, 22 à 24 avec l'huile,

3G à 40 avec l'alcool.

En employant une lame extrêmement mince du péritoine qui recou vrele foie, chez le Veau, ce chimiste a obtenu non-seulement dos résultats sembla- bles sous l'influence de pressions plus faibles, mais il vu que l'huile passait plus facilement que l'eau; particu- larité dont je donnerai l'explication dans la Leçon prochaine.

Enfin M. Liebig a vu que cette fil- iralion forcée devient plus facile à mesure que l'expérience a duré plus longtemps; circonstance qui est im-

FORCE MOTRICE. ol

logistcs pouvaient donc prévoir que toute la pression exercée de dehors en dedans devait tendre à déterminer l'inlroduction des fluides en contact avec la surface des tissus perméables de l'économie ; et d'ailleurs les médecins avaient remarqué depuis longtemps que l'absorption de diverses substances médica- menteuses est beaucoup accélérée par des actions mécani(|ues de ce genre. Pour en donner la preuve, il suffît de rappeler le mode d'administration de certaines préparations mercurielles (jui, appliquées simplement sur la peau, ne pénètrent pas en quantités sensibles, mais qui , employées en frictions sur la même surface, s'introduisent rapidement dans l'organisme. Or clia(Hm sait que l'atmosphère exerce sur la surface exté- rieure des êtres vivants, comme sur tous les autres corps répandus sur la terre, une pression énorme; et la pratique nous apprend qu'en soustrayant à cette pression la portion de cette surface sur laquelle une substance vénéneuse a été déposée, on parvient souvent à empêcher celle-ci d'être absor- bée. C'est pour cette raison qu'il est utile de sucer les plaies empoisonnées , et qu'on obtient des effets encore meilleurs

portante à noter pour la théorie de cerlains phénomènes d'endosmose, et qui s'explique d'ailleurs très bien par l'agrandissement des canaux capil- laires du tissu, qui a être déterminé par l'action dissolvante du liquide sur la substance de celui-ci (a).

Les expériences de M. Cima ont montré aussi que la pression néces- saire pour faire filtrer les liquides au travers de diverses membranes était très différente. Elle était générale- ment d'environ un tiers moins grande

quand il faisait usage d'un morceau de péritoine de Bœuf de 1/20'' de ligne d'épaisseur que lorsqu'il employait de la vessie de Bœuf épaisse de 1/10' de ligne. Avec le péritoine de Veau épais de 1/166' de ligne, la pression nécessaire pour déterminer la transsu- dation de l'eau était près de 1/180*' de fois moindre que celle employée pour produire le môme effet avec la vessie de Bœuf. Avec l'huile, la différence n'é- tait que dans la proportion de 1 à IG avec les mêmes membranes (6;.

(a) Liebig, Recherches sur quelques-unes des causes du mouvement des liquides dans l'onja- nisme animal (Annales de chimie et de physique, ■1849, série, t. XXV, p. 37 J et siiiv )

(6) Cima, Sali evapocaiione e la transudaiione dei liquidi attraverso le membrane anhnali {Mem. delV Accad. di Torino, 1853, 2= série, t. XIII, p. 279).

32 ABSORI'TION.

par l'application d'une venlouse sur !n partio lésée (1). Il est vrai que dans les circonstances ordinaires, la pression atmos- phérique est balancée par l'élasticité de l'air contenu dans les cavités de l'organisme, ou par celle des parties constitulives de l'économie; mais en éludianl le mécanisme de la respiration inmience chcz l'Hommc et beaucoup d'Animaux, nous avons vu que le

(.lo l'aspiration i i . . -, , . , ,

ihuiaciqi.c. jeu de la pompe tnoracique determme a chaque mouvement d'in- spiration une diminution très notable dans la pression à laquelle sont soumises les parois des grosses veines contenues dans cetle cavité, et par conséquent aussi dans la pression supportée parle sang inclus dans ces vaisseaux. Il est donc évident (jue, dans la sphère d'action de la force aspirante développée de la

(1) Cette pratique date de l'anti- quité la plus reculée. Les jongleurs de l'Egypte, appelés psylles, avaient l'ha- bitude de sucer les plaies produites parla morsure desSerpents venimeux, et Plutarque raconte qu'à raison de la fréquence des accidents de ce genre parmi les soldais de l'armée d'Afrique, commandée par Caton d'Ulique , ce chef attacha au service de son camp un certain nombre de ces cn^py- riques (a). Celse, qui exerçait la mé- decine à nome du temps de Tibère, recommande de la manière la plus formelle l'emploi de ventouses pour le traitement des plaies empoison- nées (6) ; Rcdi suivit son exemple, et Boerhaave parla a«ssi de ce pro- cédé curalif (c). Mais lorsque les doc- trines de l'école iatro - malhémali-

cienne tombèreni on discrédit, on cessa de préconiser l'emploi de ce moyen mécanique, et l'on n'y revint que de nos jours. Orfila conseilla l'ap- plication d'une ventouse sur la plaie produite par la morsure d'un (-bien enragé. Enfin, D. Ban y nionUa, par un grand nombre d'expériences, qu'à l'aide de ce moyen, on pouvait retar- der beaucoup, ou même empêcher pendant très longtemps l'absorption des substances vénéneuses en con- tact avec la surface sur laquelle cet instrument était placé (d). L'exac- titude des faits annoncés par ce phy- siologiste fut reconnue par une com- mission chargée d'examiner son travail et par plusieurs autres expérimenta- teurs (e); mais il exagéra beaucoup les conséquences à tirer de ces faits.

(a) Plutaii|iic, Vies des hommes illustres, IraJ. de Ricard, t. II, p. 2G2.

(6) Aiirclius Cornélius Ccisiis, De re medica, lib. V, cap. i-T).

(c) Rcdi, Observaliones de viperis {Ojnisnila, 1. Il, p. 155 cl siiiv.).

((/) Orlila, Traité des puisons, I. Il, p. 5!JS. ,

D. Rany, Expérimental liesearches on thc Influence of Atmosphcric Pressure upon Ihc Progression ofthe IHood on the Veins, upon that Function calied Absorption, and upon thc pre vention ofthe Symptômes causcd hn the Itites of Paibid or venemous Animais, t826.

{e) Adolon, Oïlila, Scgalas, Andral et Pariset, liapport fait à l'Académie de médecine {Examen de rapport, par Goiuirci, iii-8, Paris, 1826, p. 3 et suiv.)-

FORCE MOTRICE. 33

sorte par les mouvements respiratoires, l'équilibre doit se trou- ver rompu entre la pression extérieure et la résistance inté- rieure, et que les li(iuides adjacents doivent être attirés vers le cœur, connue l'air du deliors est attiré dans les poumons. Un physiologiste distingué, dont j'ai déjà eu l'occasion de citer le nom, David Barry, a cru pouvoir attribuer à cette force mé- canique la faculté absorbante dont l'économie animale est douée (1). Mais tout en reconnaissant que la pression négative développée de la sorte peut avoir quelque influence sur la marche de ce phénomène, il est facile de voir que l'action aspirante du thorax ne saurait être la cause qui détermine l'entrée des matières absorbées du dehors dans le torrent de la circulation : d'abord parce que chez tous les Animaux l'absorp- hon s'effectue, et que chez la plupart il n'existe aucune pompe aspirante comparable à la chambre thoracique de l'Homme et des Mammifères ; et en second lieu parce que chez l'Homme lui- même, ainsi que chez les autres jMammifères, l'action aspirante de cette cavité dilatable ne fait sentir son influence qu'à peu de

(1) Pour arriver à celle conclasion, Bany se fonda principalemenl : 1" sal- les expériences dont j'ai déjà parlé en traitant de l'action aspirante des mou- vements du thorax sur le sang vei- neux (a) ; 2" sur les expériences dans lesquelles il empêchait ou retardait l'absorption de matières toxiques dé- posées sur une surface absorbante, lorsqu'il appliquait sur celle-ci une ventouse de façon à y établir une suc- cion énergique (6). Mais pour admet- tre que la pression négative dévelop- pée dans la portion centrale de l'éco- nomie par la dilatation du thorax, se fasse sentir sur la partie périphérique

du syslème circulatoire et y appelle les liquides du dehors, il faudrait que les parois des veines, au lieu d'être flasques , fussent assez rigides pour résister à la pression atmosphérique. Or nous avons vu que cela n'est pas.

Quant à la cause de l'influence de la ventouse sur l'absorption des poi- sons ou autres substances en contact avec une surface saignante, il est facile de s'en rendre compte , puisque la succion exercée de la sorte détermine l'écoulement d'une quantité considé- rable de sang, et que ce sang entraîne au dehors la matière étrangère qui se trouve sur son passage.

(a) Voyez tome IV, page 312 et suiv.

(6) D. Barry, Mémoire sur l'absorption (Ann. des sciences nat., i" série, 1 826, t. VIII, p. 31 51, et Expérimental Researelies on the Influence of Almospheric Pressure, p. 94 et suiv.

Influence du courant circulatoire.

3^ ABSORPTION.

distance, ainsi (jne nous l'avons vu en étudiant les accidents produits par l'introduction de l'air dans les veines pendant les opérations chirurgicales (1). Du reste, il est facile de prouver expérimentalement que l'absorption n'est pas subordonnée au jeu de la pompe respiratoire. En effet, j'ai souvent eu l'occasion d'entretenir la vie, à l'aide de la respiration artificielle, chez des chiens dont le thorax avait été largement ouvert ; et bien que j'eusse soin de refouler l'air dans les poumons pour effec- tuer l'inspiration, et de comprimer ensuite ces organes pour en chasser ce fluide, j'ai plus d'une fois constaté que l'absorption d'un poison déposé dans des parties éloignées du corps ne s'en effectuait pas moins. Or, dans ces circonstances, l'action aspi- rante du thorax était abolie.

§ 8. Plus récemment, un autre physiologiste anglais, M. Robinson, a cru pouvoir expliquer le mécanisme de l'ab- sorption physiologique en invoquant un principe bien connu d'hydrodynamique. Nous savons que les liquides en mouvement qui mouillent les parois des canaux dans lesquels ils coulent adhèrent plus ou moins fortement à la surface de ces parois, et sont retardés dans leur marche par cette adhérence , mais que ces attractions sont réciproques, et que par conséquent la couche externe de la veine fluide tend à déplacer et à entraîner avec elle les molécules de la gaine solide adjacente. ïl en résulte que si ces molécules étaient suffisamment mobiles, elles pour- raient être entraînées par le courant, et, dans certains cas, il s'établit de la sorte un appel qui fait pénétrer dans l'intérieur du tube contenant le lirpiide en mouvement les lluides adjacents qui peuvent y avoir accès. Ainsi, quand de l'eau s'échappe d'un réservoir avec une certaine vitesse en traversant un ajutage (\ylindrique d'un diamètre voulu, on voit que le courant déve- loj)pe une pression négative sur les parois de ce tuyau au

(1) Voyez lome IV, page 315.

FORCE MOTRICE. 35

moment il y pénètre; et, pour le prouver, il suffit de faire communiquer dans ce point la surface de la veine lluide avec un tube recourbé dont l'extrémité inférieure plonge dans un liquide coloré, car on voit alors celui-ci monter dans le tube, et, si le courant est suffisamment rapide, être attiré jusque dans le canal occupé par celui-ci et entraîné au dehors par le jet qui s'échappe (1). M. Kobinson a pensé que les choses devaient se passer de la même manière dans toute l'étendue du système de tubes formé par les vaisseaux sanguins, et que par consé- quent l'appel résultant du mouvement circulatoire du sang devait être une force capable d'attirer dans l'intérieur de ces canaux les li(|uides qui occupent les passages capillaires creusés dans leurs parois. Il considère donc cet appel comme étant la force motrice dont dépend le pliénomène de l'absorption (2).

(l) L'influence du courant sur l'état des liquides adjacents est mise aussi en évidence par une expérience de M. Kurscliner relative à la traiissuda- tion. Ayant plongé la partie inférieure d'une anse d'intestin dans un bain de sulfocyanure de potassium, et ayant fait arriver dans l'intérieur du tube en U ainsi constitué une dissolution de percblorure de fer, ce physiolo- giste remarqua que ce dernier sel traversait les parois de l'intestin, et se répandait dans le bain extérieur en beaucoup plus grande quantité quand le liquide intérieur était en repos que lorsqu'il était en mouvement , ,et qu'en imprimant à ce courant inté- rieur une certaine vitesse, on empê- chait presque complètement la trans- sudation (a). Or, cela ne pouvait dépendre que de l'appel produit du

dehors en dedans par le courant qui occupait l'intérieur de l'intestin.

(2) M. llobinson argue aussi d'ex- périences dans lesquelles un poison déposé dans une plaie faite à la patte d'un Animal vivant, la circulation était suspendue, a pu y rester pendant fort longtemps sans donner lieu aux symptômes qui suivent toujours l'ab- sorption de la substance vénéneuse employée et son arrivée dans certaines parties de l'organisme (b). Mais ce fait prouve seulement que le transport des matières étrangères par imbibi- tion seulement ne s'opère que très lentement , et que les molécules ab- sorbées dans une partie circonscrite du corps ont besoin d'être charriées par le torrent circulatoire pour par- venir promptement dans un lieu éloi- gné de leur point de départ. Le même

(a) Kurscliner, art. Mtfsauguiuj (Wagncr's Handworterbuch der Physiologie, t. I, p. 64). (6) G. Piobinson, On the Mechanism of Absorption (London Med. Gazette, 1843, I. XXXII, p. 318, et Contribuions to the Physiology and Pathology of the Blood, 1857, p. 53 et suiv.).

36 ABSORPTION.

Mais l'expérience nous a déjà appris que dans le système circu- latoire, le courant sanguin, loin de produire à la surface interne des vaisseaux une pression négative , y exerce tou- jours une poussée considérable : l'élévation du sang dans les piézomètres adaptés à ces conduits le démontre ; et d'ailleurs il aurait suffi d'un examen attentif des conditions dans lesquelles la circulation du sang s'opère, pour voir que partout, excepté à l'entrée de l'aorte et de l'artère pulmonaire, la veine fluide ne doit pas se contracter de façon à pro- duire les effets constatés dans l'expérience hydraulique dont je viens de parler. Nous ne pouvons donc nous contenter de l'hypothèse de M. Robinson, et j'ajouterai même que si l'on prend en considération, d'une part la grande rapidité avec laquelle l'absorption fait souvent pénétrer les matières étran- gères jusque dans le sein du torrent circulatoire, d'autre part les fortes résistances que les attractions moléculaires exercées par les parois des passages capillaires des tissus organiques sur les liquides inclus dans ces cavités étroites doivent opposer à tout mouvement de translation de ces matières , qui serait provoqué seulement par quelque inégalité de pression hydro- statique , on doit être peu disposé à croire que ce phénomène physiologique puisse dépendre d'une cause de ce genre, et l'on doit être porté à en chercher plutôt la raison d'être dans le jeu de forces moléculaires.

Quoi qu'il en soit, nous voyons donc que toutes ces hypo- thèses sont insuffisantes, et que, pour expliquer le mécanisme de l'absorption, il nous Hiut découvrir d'autres agents ou mon-

résultat aurait été obtenu, si le poison toire, l'absorption locale ne puisse avait été injecté directement dans une avoir lieu, et la matière étrangère ar- veine, pourvu que le sang fût stagnant river jusque dans Pintérieur des vais- dans ce vaisseau. Par conséquent, cette seaux sanguins voisins de la surface expérience ne prouve en aucune façon avec laquelle cette matière est en qu'en l'absence du courant circula- contact.

FORCE MOTRICE.

37

trer comment l'inlervention de forces pliysiqiies dont jusqu'ici nous n'avons pas tenu compte peuvent déterminer l'introduc- tion des matières étrangères jusque dans la profondeur de l'organisme, et leur mélange avec la niasse des liquides en mouvement dans l'appareil circulatoire.

§ 9. Ce sujet d'étude n'avait fixé que peu l'attention des Découverte

, . .du phénomène

expenmentateurs, lorsque Diitrochet, nomme d un esprit lin et de ingénieux, découvrit toute une série de phénomènes d'un haut intérêt, dont la connaissance est également précieuse pour l'explication des phénomènes de la vie chez les Végétaux et pour l'intelligence du mécanisme de l'ahsorption chez les Ani- maux (1). En observant les effets de l'action de l'eau sur les fila- ments de quelques moisissures, il fut conduit à penser que le passage des liquides à travers les membranes organiques devait dépendre surtout de la nature des substances qui se trouvent du côté opposé de ces espèces de filtres, et en renfermant

[i) Henri Dutrochet naquit en 1776, et commença sa carrière comme médecin militaire ; il exerça ensuite la profession méLiicale à Cliàteau-Uenaud, et ne se fixa à Paris que dans les der- nières années de sa vie. Oa lui doit des travaux importants sur la consti- tution de l'œuf des divers Vertébrés, sur la structure intime des végétaux, sur leur accroissement , sur leurs mouvements, et sur beaucoup d'autres questions physiologiques ; mais ses

travaux les plus importants sont ceux relatifs à Tendosmose, dont la publi- cation commença en 18'26 (a). La plupart de ses mémoires se trouvent réunis dans un recueil spécial {b). il s'occupa aussi beaucoup de l'étude des mouvements de certains corps légers sur la surface de l'eau (c), et il porta dans toutes ses recherches une intelligence vive, un grand talent d'observation et une activité infati- gable. 11 mourut à Paris en 18/j7 {d).

[a) Dulrocliet, L'agent imnu'dlat du nxouvemenl vital dévoilé dans sa nature et dans son mode d'action chex- tes Végétaux et che^i les Animaux, ln-8, Paris, 1820.

Nouvelles recherclies sur l'endosmose et l'exosmose. In-8, Paris, 1828. De l'endosmose (Mémoires, t. I, 1837).

Article Ekdosmosis (Todd's Cyclopœdia ofAnat. and Physiol., 1839, t. II, p. 98),

(6) Diitrocliel, Mémoires pour servir à l'histoire analomique et physiologique des Végétaux el des Animaux. 2 vol. in-8, Paris, 1837.

(c) Dutrocliet, Recherches physiques sur la force épipolique. ln-8, 1842. Nouvelles recherches sur la force épipolique. ln-8, Paris, 1843.

[d) Voyez A. Brongniart, Notice sur Dutrochet (Méni. de la Société centrale d'agriculture, 1 852, 2' partie, p. 421 et siiiv.).

38 ABSORPTION.

diverses substances, telles que de la gomme, du sucre ou de l'albumine, dans des poches dont les parois étaient ibrmées de tissus de ce genre, il a vu l'eau, mise en contact avec la surface extérieure de ces réceptacles , pénétrer avec rapidité dans leur intérieur et les distendre. En adaptant à une des poches ainsi disposées et plongées dans un bain un tube verti- cal, il a vu l'absorption du liquide extérieur s'opérer avec assez de force pour faire monter le liquide intérieur à une hauteur considérable ; et en variant ses expériences, il a reconnu que dans les circonstances dontje viens de parler, la membrane organique était traversée en sens contraire par deux courants d'inégale intensité : l'un dirigé de dehors en dedans, l'autre de dedans en dehors, et que les résultats observés dépendaient de la pré- dominance du premier de ces mouvements sur le second (1). De les noms d'endosmose et lïexosjnose dont Dulrochet lit

(1; Longtemps avant que Diitrochet eût fait la découverte ù laquelle son nom doit rester attaché, certains résul- tats dus à l'endosmose avaient été re- marqués par divers physiciens ; mais les faits constatés de la sorte demeurè- rent stériles entre les mains de ces ex- périmentateurs, et passèrent inaperçus jusqu'au moment ce naturaliste, frappé de la vue de phénomènes nou- veaux, quoique du même ordre, en eut saisi la portée et fait comprendre l'importance. C'est donc bien réelle- mentà Dulrochet que la physiologieest redevable de ce service signalé; ce- pendant il ne faut pas oubher les ob- servateurs qui l'ont devancé sur quel- ques points, et parmi ceux-ci il faut placer en première ligne l'un des membres de noire ancienne Académie des sciences, l'abbé Nollet.

Ayant rempli d'alcool un llacon cy- lindrique et ayant bouché ce vase avec

un morceau de vessie, Nollet le plaça dans un bain d'eau, et il vit avec sur- prise qu'après cinq ou six heures d'immersion, le liquide ainsi empri- sonné avait augmenté notablement de volume ; la vessie qui bouchait le vase était devenue convexe et telle- ment distendue , que, lorsqu'il y lit une petite ouverture, le liquide s'é- chappa en formant un jet de plus d'un pied de hauteur. Puis, en ren- fermant de l'eau dans le llacon bou- ché par une vessie et en le plon- geant dans de l'alcool, INollet obtint un résultat inverse. Enfin , il s'as- sura qtic ces déplacements de l'eau ne dépendaient pas de quelque va- riation de température, et qu'ils ne se produisent pas quand les deux surfaces de la membrane ne sont pas en contact direct avec les liquides réagissants. Le phénomène observé par Nollet était donc un phénomène

FORCE MOTRICE. SJ

usage pour désigner les courants produits à travers les cloi- sons poreuses par l'action de liquides dissemblables. Il donna ensuite une acception plus large au mot endosmose, et l'appliqua à tout transport de liquides qui, dans des circonstances de ce

d'endosmose paifaileiiient caractérisé. Or, les expériences de ce physicien datent de 17/i8 (a).

Dans une dissertation publiée en 1802, Parrot lit mention de la tur- gescence produite par l'entrée spon- tanée de l'eau dans un œuf sans coquille, et renfermé seulement dans sa tunique membraneuse, à travers laquelle ce liquide avait pénétré (6) ; mais il n'étudia pas les circonstances de ce phénomène avec autant de soin que l'avait fait INollet un demi-siècle avant.

On peut considérer comme se rat- tachant également aux phénomènes osmotiques les faits relatifs à la con- densation des liqueurs spirilueuses par l'évaporation de l'eau à travers les membranes animales , observés en 1812 par Sœmmering, le fils du célèbre anatomiste. il a trouvé que les mélanges d'eau et d'alcool n'é- prouvent aucun changement sen- sible par suite de ce phénomène, quand le liquide est séparé de l'atmos- phère par une cloison ligneuse, mais se concentre quand cette cloison est une membrane animale, telle qu'une

peau ou une vessie. Cela dépend de ce que ces divers tissus laissent passer l'eau beaucoup plus facilement que l'alcool (c) ; et, ainsi que l'a fait re- marquer Van .Mous, cela explique la préférence que l'on accorde assez gé- néralement aux outres pour la con- servation des liqueurs spirilueuses dans les pays chauds. Mais ni ce der- nier chimiste, ni Sœmmering, ne firent aucune application de ces faits à l'inlerprélation des phénomènes de l'absorption [d].

Ainsi que nous le verrons ailleurs, un physicien anglais, Porret, décou- vrit, en 1816, qu'un courant galva- nique peut entraîner de l'eau à travers une cloison membraneuse, et détermi- ner l'accumulation de ce liquide au- tour du pôle négatif (e).

Un exemple plus net des phéno- mènes d'endosmose fui constaté en 1822 par le professeur Fischer, de Breslau.

Ayant plongé dans une dissolution d'un sel de cuivre le bout inférieur d'un tube fermé en dessous par une vessie, et contenant de l'eau distillée ainsi qu'un fil de fer, ce physicien vit

(a) Nollet, Recherches sur les canses du bouillonnement des liquides {Mém. de l'Acad. des sciences, 1748, p. 101).

(b) Parrot, Uebev den Einlluss der Phijsik und Chemie au f die Anneikxmde (cité par ce physicien dans une noie intitulée : l'hémmène frappant d'endosmose dans l'organisation animale, et publié dans le Bulletin scientifique de l'Académie de l'ctersbourg, 1840, t. Vil, p. 340).

(e) Sœmmering:, Ueber das Yerdilnsten des \yeingeists durch thierische Haute und dnrch Kautschuck (Gilbert's Annalen der Physik, 1819, t. LXI, p. 104).

(d) Van Mons, Sur la perméabililé à l'eau des vessies et autres membranes animales, et appli- cations de cette propriété à la rectificalion à froid de l'alcool (Annales générales des sciences physiques, Bruxelles, 1819, t. I, p 7G).

[e) l'orret. Curions Galvanic Experimenls {Annals of Philosophy, 1810, t. VUI, p. 'Î4, cl Ann. de chimie et de physique, 1810, i. II, p. 137).

l\0 ABSOUI'TION.

genre, produit une augmentation dans la quantité d'eau située du côté vers lequel le courant se dirige ; et dans ces derniers temps, afin d'éviter la confusion d'idées qui parfois peut résulter de ces expressions, quelques physiciens ont proposé d'appeler osmose tout transport d'eau qui s'effectue de la sorte, quelle qu'en soit la direction ou la puissance, comparée à celle du mouvement inverse dont peut être animée une portion du liquide opposé (1).

Les physiologistes accueillirent avec un vif intérêt les décou- vertes deDutrochei, et se livrèrent à une multitude d'expériences variées sur cette espèce d'absorption qui ressemblait tant à celle dont les Animaux et les plantes sont le siège, mais qui s'effec- tuait dans un appareil inerte et sans le concours de la puissance vitale. Des recherches entreprises par des physiciens habiles vinrent aussi jeter de nouvelles lumières sur ces phénomènes remarquables; un grand nombre de faits importants furent de

le sel de cuivre pénétrer dans l'appa- trochet désigna, sous le nom de cou-

reil, se décomposer sous Tinfliience rant endosmotique , le flux d'eau qui

du fer, et le liquide inlérieur s'élever pénètre du dehors dans l'intérieur

dans le tube à une hauteur considé- d'un réservoir à parois niembra-

rable au-dessus du niveau du bain. neuses, se trouve du sucre ou toute

Mais ni Fischer, ni les autres expé- autre substance analogue, et courant

rimenlateurs qui l'avaient précédé exosmotique, celui qui se dirige en

dans ceUe voie, ne semblent avoir sens conlraire, c'est-à-dire de dedans

saisi la portée des faits dont ils avaient en dehors [h) ; mais, dans les derniers

été témoins (cr),et c'est à Dutrochlt temps de sa vie, il généralisa davan-

qu'apparlient le mérite d'avoir le pre- tage le sens des mots endosmose et

mier mis en lumière le phénomène de exosmose, et, sans avoir égard fila

Vendosmose, et d'en avoir fait corn- l'orme de la cloison à travers laquelle

prendre l'importance. Il en a poursuivi le phénomène se produit , il appliqua

l'étude avec ardeur, et il est arrivé le premier ces mois au courant fort,

ainsi à un grand nombre de résultats quelle qu'en soit la direction, et le

pleins d'intérêt pour la physiologie. second au courant faible, de sorte que

(1) Dans ses premiers écrits. Du- endosmose devint synonyme d'aug-

(a) N. W. Fischer, Ueber die Wiederherstellung eines Metalls dnrch ein anderes und ûber die Eigenscluift der thierischen blase, Flilssigkeiten diurh sich hindurch »u lasseii xind sie in einigen Fâllen anz-uheben (Gilbert's Annalen der Pliysik, 1822, t. LXXII, p. 301).

(b) Dutroclicl, L'agent immédiat du mouvement vital, 1826, p. 115.

FORCE MOTRICE. 41

la sorte a(3qiiis à la science, et plusieurs auteurs crurent même pouvoir en donner la théorie. Jusqu'ici cependant l'osmose ne me semble pas avoir été expliquée d'une manière satisfaisante; et pour bien comprendre ce qui se passe dans les expériences dont je viens de dire quelques mots, aussi bien que dans le travail physiologique de l'absorption, il me paraît nécessaire de remonter plus haut qu'on ne le fait d'ordinaire, et de chercher d'abord à se former une idée nette des forces qui inter- viennent dans des phénomènes moins complexes , mais du même ordre.

Pour exposer clairement ma pensée à cet égard, il me faut revenir sur un sujet dont j'ai déjà eu l'occasion de dire (juelques mois dans la Leçon sur la transsudation, et examiner de plus près les phénomènes de capillarité. Du reste, je me livre à celte digression d'autant plus volontiers, que dans la plupart des traités de physique dont les étudiants de nos universités

meiitatioii du volume dans l'un des li- quides réagissants, et exosmose signifia le transport d'une porlion de ce même liquide en sens inverse. Ainsi, quand il dit qu'une dissolulion sucrée en pré- sence de l'eau détermine l'endosmose, cela signilieque le courant d'eau qui se dirige vers cette substance et y pénètre, est plus rapide que le courant formé par la matière sucrée qui se rend dans l'eau, et cela, soit que le sucre se trouve à l'intérieur ou à l'extérieur du réservoir membraneux à travers les parois duquel rechange s'établit (a).

M. nraham, à qui l'on doit une série d'expériences très importantes sur les phénomènes de cet ordre , a été frappé des inconvénients que cette

nomenclature peut présenter, et il a proposé d'appeler simplement os77iose (wdij.iî, impulsion), le mouvement qui détermii^.e une accumulation d'eau de l'un des côtés d'une cloison membra- neuse. La force osmotique est donc la force qui détermine cette accumula- tion, et quant au mouvement en sens inverse d'une portion des particules du sel ou de la substance quelconque dont l'action détermine l'osmose, il le considère comme un phénomène de difTusion. Dans ce langage, les elfets de l'osmose deviennent donc positifs ou négatifs, suivant que le volume de l'eau attirée est supérieur ou infé- rieur au volume de l'autre liquide qui passe en sens opposé (6).

(n) Dutrorliet, De l'endosmose {Mémoires pour servir à l'histoire anatomique et physiologique des Végétaux et des Animaux, 1837, t. I, p. 10)

(b) T. Graham, On Osmotic Force (Philos. Trans., 1854, p. 177).

4*2 ABSORPTION.

font usage, les questions relalives aux attractions moléculaires ne nie semblent pas démontrées de manière à être facilement saisies par beaucoup de naturalistes, et que la connaissance de ces actions est d'une haute importance pour l'appréciation et l'explication d'un grand nombre de faits qui sont du domaine de la pliysiologic.

QUARANTE - QUATRIÈME LEÇON.

Suite de l'iiisloire de l'absorption. Étude des forces qui interviennent dans la |iroduclion de ce phénomène. Actions capillaires ; théorie physique du déplacement des liquides dans leur point de contact avec des corps solides ; circonstances qui font varier ces effets. Étude physique des phénomènes d'imbibition. Insuflisance de ces actions pour l'explication des phénomènes d'absorption. De la diflfusion des liquides et de son rôle dans le mécanisme de l'absorption. Des phénomènes d'osmose : endosmose et exosmose; leur nature. Influence des membranes perméables sur les produits du travail endosmotique et de la diffusion ; influence des agents physiques sur le déve- loppement des forces dont dépend l'osmose ; actions chimiques qui l'accom- pagnent.

§ 1. Ainsi que je l'ai dit en terminant la dernière Leçon, lorsqu'on veut se rendre compte, soit de la nature du pliéno- mène appelé endosmose^ soit du mécanisme de la tbnclion que les physiologistes désignent sous le nom d'absorption , il faut examiner attentivement rinlluence que les forces physitiues peuvent exercer sur l'introduction des substances étrangères dans l'organisme, et chercher en premier lieu à se former une idée nette des actions dites de capillarité , en vertu desquelles on voit l'eau et beaucoup d'autres liquides s'élever dans les tubes étroits, malgré l'intluence de la gravitation qui tend tou- jours à les faire tomber vers la terre (1).

(1) Le fait de rélévation de l'eau observé au coiiimencenient du xvii'

au-dessus du niveau de la surface siècle par un des membres de l'Acadé-

générale de ce liquide dans Tintérieur mie florentine del Cimentu, nommé

d'un tube lin , qui est ouvert aux Nicolas Aggiunti (a) , mais ne com-

deux bouts et qui y baigne par son mença à occuper l'attention des phy-

extrémité inférieure, paraît avoir été siciens que postérieurement à l'époque

(a) Voyez Nelli, Saggio di storia letteraria Fiorentina, 1759, p. 92.

Dh

la capillaiilé.

llk

ABSORPTION.

Notions. ^2. Chacun sait que pour expliquer les inouvemenis

préliminaires. ' ' '■ ^

des planètes, et pour se rendre compte d'un grand nombre d'autres phénomènes physiques, lels que la chute des corps, il faut admettre que les molécules de la matière pondé- rable sont douées d'une propriété ou force particulière en vertu de laquelle ces molécules tendent à se rapprocher entre elles. Cette force, inconnue quant à sa nature, mais manifeste par les déplacements ou les résistances qu'elle dé- termine, est désignée -d'une manière générale sous le nom ù' attraction. On l'appelle gravitation lorsqu'elle s'exerce entre des corps séparés par un espace perceptible, et Newton, cou- ronnant l'œuvre commencée par Galilée et par Kepler, découvrit

l'ascal composa son traite sur l'équilibre des liquides (a), c'est-à- dire vers 16Zi6. Boyle en parla comme d'un phénomène nouvellement décou- vert en France (b) , et , en 1667, Montanari en traita avec plus de détail {&/.

On attribua d'abord l'ascension des liquides dans les tubes capillaires à l'action de l'air, et l'on chercha à s'en rendre compte en supposant que les molécules de ce fluide ne pouvaient pénétrer dans les canaux étroits l'eau aurait été poussée par la pres- sion de l'aimosphère. Mais, vers le commencement du siècle dernier, llauksbee et Biiiflinger firent vt)ir que l'air n'est pas exclu des tubes

capillaires, et que la hauteur à la- quelle les divers liquides s'élèvent dans ceux-ci n'est pas, comme dans le tube barométrique, en raison inverse de leur pesanteur, car l'eau y monte plus haut que l'alcool, dont la den- sité est moindre ((/). Voscius et quel- ques autres physiciens de la même époque furent moins éloignés de la vérité, en attribuant l'ascension de l'eau dans les tubes capillaires à l'ad- hésion de ce liquide contre les pa- rois de ces conduits ; mais on ne tarda pas à reconnaître que cette hy- pothèse ne suffirait pas pour expli- quer ce qui se passe dans les phéno- mènes de cet ordre. Déjà, vers 1717, Newton et son ami llauksbee (ou

(a) Voyez Ucsniarcst. Histoire cviliquc des systèmes que l'on a imaginés pour expliquer les phéncmèiies des Ivbes capillaires (dans la IraïUiction française de rouvrage de Haukbee, t. II, p. 168).

(b) Boyle, Neiu Experimenls Physico-SIathevmtical lovching Ihe Spring of the Air (Works, 1. 1, p. 80).

(c) G. Monlanari, Pensieri jisico-mathematico. Bologna, 1667.

(d) Haiiksboe , An E.rper. mode ut Gresham Colleije shotiùng that the seemingly Spontaneoui Ascension of Water m Small Tubes open at both Ends is the same in vacuo as in tlie Open Air {Philos. Trans., 1705, t. XXV, p. 2^23).

Biiiflinger, De tubulis capillaribus dissertatio experimentalis (Commentarii Acad. scient. Petropolilanœ, 1727, i. II, p. 251 et suiv.).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 45

les lois qui, dans ce cas, en règlent l'action; car il prouva que les effets dus à cette puissance universellement répandue sont alors en raison directe de la masse des corps réagissants et en raison inverse du carré de la distance qui sépare ceux-ci entre eux. Mais lorsque celte distance diminue au point d'être insensible pour nos moyens d'observation , l'attraction cesse d'être soumise à des lois si simples , et elle donne naissance à des résultats qui varient suivant des circonstances dont nous

Hawksby) avaient eu recours à Pat- principes de l'équilibre des fluides (d). traction pour s'en rendre compte, et Ce sujet délicat fut traité de nouveau ce dernier pliysicien appuya son par rilhistre géomètre Laplace, par opinion sur un grand nombre de Poisson et par Gauss (e) ; enfin, les faits constatés expérimentalement (a). recherches expérimentales de Gay- La théorie qu'il donna des effets ca- Lussac et d'un grand nombre de pillaires pèclie à certains égards; savants de l'époque actuelle ont fait mais le principe qui en forme la faire de nouveaux progrès à celte base est aussi le point de départ de partie intéressante de la physique l'explication adoptée de nos jours (b). moléculaire. Cependant, en y regar- Les recherches expérimentales. faites dant de près, on y aperçoit bien des par Jurin, par Weitbrecht et quelques questions qui sont encore très obs- autres physiciens du siècle dernier, cures, et dont l'étude jetterait pro- contribuèrent aussi beaucoup à l'avan- bablement d'utiles lumières sur les cernent de nos connaissances sur cette rapports des forces dites physiques matière (c). Enfin, Clairault chercha avec celles qu'on en distingue sous le à donner, des efl'ets capillaires, une nom cVaffinités chimiques. théorie mathématique fondée sur les

(a) Newton, Traité d'optique, livre III, quest. 31, Irad. franc., p. 573 et suiv.

(6) Hauksbee , Expériences physico-mécaniques sur différents sujets, Irad. par de Brémond, 1754, t. II, p. 1 et suiv.).

(c) Weitbrecht, Tentamen theoriœ qua ascensus aquœ in tubis capillaribus explicatur {Com- mentarii Acad. scient, Petropolitanœ, 1736, t. VlU, p. 2G1). Explicatio difficiliorum expe- rimentnrum circa ascensum aquœ in lubos capillares {Op. cit., 1737, 1. IX, p. 275).

{d} Jurin, An Account of some Experiments shoiun before the Royal Society, with an Inquiry inlo the Cause of the Ascent and Suspension of Water in Capitlary Tubes [Philos. Trans., 1718, t. XXX, p. 739).

(e) Clairault, Théorie de la figure de la terre, tirée des principes de l'hydrostatique, cliap. x ; De l'élévation ou de l'abaissement des liquides dans les tuyaux capillaires, 1743, p. 105 et suiv.

Laplace, Mécanique céleste, supplément au livre X [Œuvres, t. IV, p. 389).

Gauss, Principia generalia theoriœ fluidorum in statu œquilibrii [Commentat'iones Soc. scient. Gotlingensis, 1829-183-2, t. VII, cl. Malh., p. 39).

Poisson, Nouvelle théorie de l'action capillaire, 1831.

Voyez aussi à ce sujet : Desains, Recherches sur les phénomènes capillaires {Annales de chimie et de physique, 1857, série, t. Ll, p. 385).

Cohésion des liquides.

/|6 ABSORPTION.

ignorons la nature, et au nombre desquelles il faudra ranger probablement la forme des moléeules ou le mode de groupe- ment des atomes dont eelles-ci se composent. On la désigne alors sous le nom ^'attraction moléculaire^ quand son action paraît agir seulement sur l'ensemble de ces agrégats primaires, de façon à les rapprocher ou à résister aux forces qui tendent à les éloigner entre eux; et on l'appelle affinité chimique, quand elle paraît exercer sur ces groupes d'atomes une influence plus orande, et déterminer un nouveau mode d'arrangement des particules constitutives de ces molécules. Enfin, pour bien pré- ciser ce dont j'ai à parler ici, il est bon de rappeler une autre distinction qui est moins importante que les précédentes, mais dont nous aurons besoin dans nos études actuelles : quand on parle de la force physique qui tient unies, ou du moins rappro- chées, les molécules d'un même corps, on appelle cette attrac- tion cohésion, et quand l'attraction moléculaire s'exerce entre des corps différents qui sont simplement en contact apparent, on l'appelle adhésion (l).

Les effets dus à la force de cohésion des molécules des corps solides sont trop bien connus, même du vulgaire, pour que nous ayons à nous y arrêter ici ; mais, au i)remier abord, il est moins facile de concevoir l'action de cette puissance enh^e les molécules des corps à l'état liquide, car on sait que ces molécules se déplacent avec une si grande facilité, que la

(1) Afin (Vintroduire plus de préci- sion dans le langage employé dans Pétude de ces pliénomèncs, quelques physiciens désignent sous le nom de Ay?iap/i/e, ratlracUon réciproque exer- cée par les molécules d'un même corps les unes sur les autres, c'est-à-dire la force de cohésion de ce corps, et

ai^pellent prosaphie, l'attraction exer- cée par les molécules du corps solide sur les molécules liquides adjacentes, et vice versa, c'est-à-dire la force d'adhérence dont jouissent ces molé- cules hétérogènes. Mais ici je crois préférable de ne faire usage que de mots vulgaires (a).

(a) M. L. Frankenheim, hle Lehre von der Cohésion. Breslau, 4835, (i. Cl

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. d']

masse constituée par leur réunion alTecte d'ordinaire une forme qui est déterminée, d'un côté par la pesanteur, d'un autre côté par les résistances extérieures qui balancent l'in- fluence de l'attraction terrestre. Pour mettre en évidence l'action de la force cohésive des liquides, il suffit cependant de quelques expériences d'une grande simplicité. Ainsi, cha- cun sait que lorsqu'une petite masse d'eau tombe librement dans l'espace, elle affecte une forme constante, et le calcul montre que cette forme est précisément celle qui résulte du plus grand rapprochement possible de ses molécules entre elles, savoir, la forme sphérique. Il est donc légitime de supposer que cette forme particulière est déterminée par l'at- traction mutuelle des molécules de l'eau, c'est-à-dire la force de cohésion de ce liquide. Mais cela devient encore plus visible quand on place deux de ces globules d'eau sur la surface hori- zontale d'une lame de verre enduite de graisse : les gouttes conservent à peu de chose près leur forme propre tant qu'elles restent à une distance sensible l'une de l'autre; mais, dès qu'elles viennent à se toucher par un point de leur circonfé- rence, on les voit se confondre, et constituer par le rappro- chement de leurs molécules une seule masse de forme sphé- roïdale (1).

Si , au lieu de déposer la goutte d'eau sur un corps Aiuadion gras, on la place sur une lame de verre dont la surface est horizontale et parfaitement nette, les choses ne se passeront

(1) Cette expérience est également par Tatmosphère ; mais les membres

facile à faire avec des globules de de l'Académie del Cimenlo firent voir

mercure sur une lame de verre un que cette forme se conserve dans le

peu humide. On avait d'abord sup- vide aussi bien qu'à l'air , et ne

posé que la forme sphérique des li- peut dépendre que d'une force inté-

quides divisés en gouttelettes dépen- rieure [a). dait de la pression extérieure exercée

(a) Saggidi naturaU esperienxe {alte nelV Accailemia del Cimento, p. 78 («lit, de 1016).

IxS ABSORPTION.

plus (le la même manière : le globule liquide ne conservera pas sa forme sphériquc, mais s'aplatira rapidement, et s'étalera comme une lame mince sur la surface sous-jacente (1). il faut donc qu'une force étrangère ait balancé l'action de la cohésion de l'eau , et il est facile de montrer que cette force réside dans le verre. Pour s'en convaincre, il suffit d'incliner le pla- teau qui supporte le globule : quand la surface de ce corps a été graissée, et que la goutte d'eau y a conservé sa sphéricité, celle-ci, obéissant à l'action de la pesanteur, roule vers la partie la plus déclive du plateau, et, s'en détachant sans peine, tombe vers la terre; tandis que la petite masse d'eau étalée à la surface du verre non graissé se rassemble en partie sous forme de goutte au bord intérieur de celui-ci, mais y reste suspendue {"2). Il y a donc entre les molécules de l'eau et les molécules du verre une certaine action attractive ou force d'adhésion, et cette force n'existe pas au même degré entre l'eau et les corps gras. On ne peut apercevoir aucune différence sensible dans les distances qui existent entre l'cîau et les deux solides avec la surface desquels nous venons de supposer ce Hquide en con~

(1) Pour que cet effet se produise d'une manière complète, il faut que la surface du verre ne soit souillée par aucune matière étrangère, et il est si difficile de la nettoyer parfaite- ment, que pour faire l'expérience en question, il est bon d'employer la sur- face d'une cassure faite au moment même.

(2) On trouve dans les mémoires de Weitbrecht et de quelques autres phy- siciens du siècle dernier, beaucoup d'expériences curieuses relatives à l'attraction du verre pour l'eau, et vice

versa. Ainsi quand une goulte d'eau est déposée sur la surface d'un corps sur lequel elle ne s'étale que peu, elle conserve en dessus une forme bom- bée ; mais si l'on approche une ba- guette de verre du sommet de la sur- face courbe par laquelle elle se termine, on verra celle-ci changer de forme dès que le contact se sera établi. L'eau s'élancera, pour ainsi dire, contre la baguette de verre, s'y étalera, et les parties latérales de la goutte, au lieu d'être convexes , deviendront con- caves (a).

la] Wcitlii'cihl Tcntamen thcoriœ qua ascensus aquœ in tubis capillaribus explicalur {Com- mentarii Acad. scient. Petropolitanœ, i73G, t. VIII, p. 2U5, pi. 22, tig. 2 et 3).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. /|9

tact; et par conséquent nous pouvons conclure de cette expé- rience, non-seulement que l'attraction s'exerce entre les molé- cules du verre et celles de l'eau, comme elle s'exerce entre ces dernières, mais que l'intensité de cette force adhésive varie suivant la nature des corps réagissanls (1).

Une autre expérience très simple, et également propre à mettre en évidence la force d'attraction mutuelle développée à des distances insensibles entre le verre et divers liquides, peut servir à montrer que la force de cohésion qui tend à ra[)- "au/soiide"."* l)rocher entre elles les' molécules de ces derniers corps varie en

Rapports

entre

la cohésion

des liquides

et

(1) Sous ce rapport, il existe donc une différence très grande entre les effets de la gravitation universelle, suivant que cette force agit à des distances sensibles ou à des dislances insensibles. Dans le premier cas, ainsi que je viens de le montrer, la nature chimique des corps réagissants influe beaucoup sur leur attraction mutuelle; dans le second, elle n'exerce aucune action appréciable. Ainsi, on sait que dans le vide tous les corps tombent avec la même vitesse , et les observations astronomiques montrent que Faction attractive des planètes les unes sur les autres n'est réglée que par la dis- tance qui sépare ces corps et par la quantité de matière dont ils se com- posent. Or, on sait également que la densité de celte matière planétaire varie considérablement d'une de ces étoiles à une autre ; que la densité moyenne de la terre, par exemple, étant de 5,Zi6 , celle de Mercure est 15,99 ; celle de Jupiter, 1,'29, et celle de Saturne seulement 0,75. Des différences de cet ordre ne peuvent être attribuées à des inégalités dans la température de ces planètes, et par conséquent il est très probable que la

Y.

nature chimique de leur substance constitutive n'est pas la même. L'uni- formité de leur mode de gravitation serait donc encore une preuve de la non-intervention de la nattne intime des corps dans le jeu de l'attraction entre les corps situés à une distance sensible les uns des autres. Mais si j'in- siste sur les différences qui existent à cet égard entre les effets de l'attraction planétaire et ceux de l'attraction ca- pillaire, ce n'est pas que je suppose ces forces distinctes dans leur essence ; tous ces effets semblent devoir être rapportés à une seule et même cause ; mais la force de répulsion intermolé- culaire que l'on attril)ue à la chaleur, et que l'on doit considérer comme balançant plus ou moins l'attraction, décroît si rapidement avec la distance, qu'elle ne produit aucun effet appré- ciable quand celle distance est sen- sible , tandis qu'elle joue un rôle important quand la distance cesse d'être visible , et , comme nous le verrons bientôt, les résultats qu'elle produit varient en grandeur suivant la nature intime des corps qui la dé- veloppent.

50 ABSOIU'TION.

intensité suivant la nature de eeux-ci. Suspendons au tléau d'une balance, d'un côté un disque de verre bien horizontal , et de l'autre côté des poids (|ui le mettent en équilibre ; puis, plaçons sous le plateau de verre un vase contenant de l'eau, et faisons montei' celui-ci graduellement jusiju'à ce que la surlace du liquide arrive en contact avec la lace intérieure du disque. Le fléau restera immobile : mais si nous ajoutons alors des poids dans le plateau opposé, nous verrons que, au lieu de faire trébucher immédiatement la balance, comme cela avait lieu avant l'éta- blissement du contact entre le plateau de verre et l'eau sous- jacente, il faudra exercer de la sorte un effort considérable pour enlever ce disque et le détacher du liquide au([uel il adhère. Or, la surface du verre, en se séparant du bain, reste mouillée; elle emporte donc avec elle une lame mince d'eau, et la force em- ployée poiu^ faire trébucher la balance n'est pas celle qui aurait été nécessaire pour rompre l'adhérence établie entre ce corps solide et l'eau, mais seulement celle employée pour vaincre la résistance opposée par la force de cohésion du liquide. Or, si l'on répète cette expérience en substituant à l'eau de l'alcool, de l'essence de térébenthine ou tout autre liquide suscephble de mouiller le verre , on obtient des résultats analogues ; mais, pour détacher le disque, il faut des poids variables suivant la nature de ces corps. Par conséquent, la force de cohésion de ces liquides varie quant à sa puissance (1).

(1) Gay-Lussac a faii quelques ex- périences de ce genre pour vérifier les résultats théoriques obtenus par La- place (ffl). 11 est, du reste, essentiel de noter que, dans les circonstances indi- quées ci-dessus, les choses ne se pas- sent pas comme dans celles Ton emploie une certaine force de traction

pour vaincre la cohésion d'un corps solide ; car, à mesure que la distance entre la surface inférieure du disque et le niveau général du bain augmente, les côtés de la colonne d'eau soulevée se rapprochent de plus en plus, de sorte que le diamètre de cette colonne vers la moitié de sa hauteur diminue de

(a) Voyez Laplace, Op. cit. (Œuvres, t. IV, p. 527).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 51

J'appellerai aussi rattenlioii sur une autre conséquence qui |»eut se déduire de ces faits. Nous avons vu que le plateau soulevé par un cerlain poids entraînait avec lui une lame mince de liquide. La résistance opposée par la cohésion de celui-ci est donc moins grande (jue celle développée par l'attraction adliésive du verre sur le licpiide sous-jacent: et j'insiste sur cette circonstance, parce que nous verrons bientôt cette inéga- lité dans ces deux forces dont la direction est contraire, jouer un grand rôle dans les ])liénomènes dont l'étude doit nous occuper maintenant.

Pour avancer davantage dans l'examen de ces questions, il est bon de considérer de plus près ce qui se passe dans une goutte d'eau qui repose sur un cor[)s que ce liquide ne mouille pas, et qui augmente de volume par Tadjonction de nouvelles quan- tités de matière. Nous avons vu que si le globule ainsi constitué est très petit, il conserve une forme sensiblement sphérique, et cela suppose que l'attraction cohésive des molécules de liquide suffit pour Aiire équilibre à la pression exercée par une colonne verticale du liquide ayant pour hauteur le diamètre de cette sphère. Mais si le volume du globule vient à augmen- ter, il arrive un moment la force d'attraction réciproque des molécules de l'eau ne suftît plus pour balancer la pres- sion développée par les particules élevées ainsi au-dessus de leur base de sustentation, et l'inégalité de ces deux forces contraires déterminera la déformation du sphéroïde. Alors, par

plus en plus, et que la rupture s'effec- faudrait tenir compte de l'influence de

tue quand celte portion étrangli-e est la forme des surfaces libres, c'cst-à-

devenue très grêle (a). Le pliénomène dire latérales, de la colonne liquide

est donc beaucoup plus complexequ'on soulevée sur l'équilibre de ses molé-

ne serait porté à le supposer au pre- cules constitutives, mier abord, et, pour l'analyser, il

(a) Donny, Mcmolre sur la cohésion des liquides et sur leur adhérence aux corps solides {Au- uales de chimie et dephysique, 3" série, 1840, t. XVI, p. dG7).

52 ABSORPTION.

l'addition de nouvelles (iiiantités de matière, le globule ne s'élèvera plus, mais s'élargira seulement, et prendra peu à peu la forme d'im disque dont la surfoce supérieure tendra à devenir plane et horizontale , tandis que les bords resteront arrondis et leur section méridienne sera sensiblement égale à la demi- circonférence d'un cercle qui aurait pour diamètre l'épaisseur du disque. Supposons maintenant que la masse de liquide ayant cette forme vienne à rencontrer un obstacle qui s'oppose à son élargissement ultérieur, et que cet obstacle soit un plan solide vertical dont la substance n'exerce sur les molécules de l'eau aucune intluence attractive appréciable. Il est visible que par l'accroissement de sa masse le disque liquide augmentera d'épaisseur, et que la poussée déterminée par son poids contre l'enceinte constituée de la sorte modifiera la forme de la portion du bord du disque liquide qui s(^ trouve au-dessous du premier point de contact de ce bord avec l'obstacle, c'est-à-dire au- dessous d'un plan horizontal passant par le centre de courbure de la section méridienne rei^résentée par ce même bord ; mais cette poussée n'aura point d'intluence sur l'équilibre des mo- lécules situées au-dessus du plan horizontal que nous venons d'imaginer, et par conséquent, quelle que soit la profondeur du bain ainsi délimitée, sa partie supérieure se trouvera terminée latéralement par une surface convexe dont le rayon de courbure sera déterminé par la grandeur de la force de cohésion du liquide. Aciioii Cet état d'équilibre se trouve réalisé, à peu de chose près, quand

IcslZl's de l'eau est déposée dans un vase dont les parois sont imprégnées .qui (jggi^^isse, mais est plus facile à constater dans une cuve à mer-

qiii y sont contenus.

cure ou dans le tube d'un baromètre ordinaire dont le calibre est très grand. La surface supérieure de ce métal liquide est horizontale à une certaine distance des parois du vase; mais, dans leur voisinage inunédiat, elle s'incline et ne rencontre la surface de ces parois qu'à une certaine distance au-dessous du

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 53

niveau général du bain. Or, le liquide est alors en repos, et par conséquent toutes les séries verticales de ses molécules se font équilibre muluelleinent : près du bord, ces filets verticaux sont moins hauts que dans la portion du bain la surface libre est horizontale. Nous savons que les liquides ne sont pas sen- siblement compressibles ; la densité de ces lilets ne peut donc dilTérer d'une manière appréciable, et le poids de la Iranche supérieure du filet central qui dépasse le niveau de l'extrémité supérieure du filet marginal ne peut être soutenu que par l'ac- tion d'une force déprimante agissant sur ce dernier, Otto tbrce n'est autre que l'attraction réciproque des molécules du liquide, c'est-à-dire la cohésion de celui-ci ; et puisqu'elle tient en équilibre la couche fluide comprise entre la surface générale du bain et le plan horizontal suivant lequel cette surface ren- contre les parois du vase, elle doit être égale en puissance à la pression verticale exercée par chaque filet vertical constituant cette même couche, ou, en d'autres mots, d'une colonne de ce liquide dont la hauteur serait égale au sinus de l'arc décrit par la section méridienne de la surface convexe.

Mais si la masse aqueuse, qui, en grossissant, a cessé d'être sphérique et s'est étalée en forme de disque à bords convexes, rencontre un obstacle constitué par un solide dont la substance, au lieu d'être sans influence appréciable sur ses molécules, exerce sur celles-ci une action attractive comme celle que nous avons vue se manifester quand une goutte d'eau est mise en contact avec une lame de verre, les choses ne se passeront plus de la même manière, car l'attraction exercée par ce corps a balancé, dans une certaine mesure, la force de cohésion qui tend à maintenir les molécules liquides le plus rapprochées possible, et par conséquent les effets de cette force cohésive seront diminués d'autant. Il en résulte que la forme de la sur- face du liquide sera modifiée dans le voisinage immédiat des parois de l'enceinte constituée par ce solide , et que l'état

54 ABSORPTION.

d'équilibre sera déterminé, non pas uniquement par la résultante des deux forées inhérentes aux molécules du liquide, savoir, leur cohésion et leur poids , mais par la résultante de trois forces : dont une, celle de la cohésion, tend à abaisser la ligne de contact du liquide avec le solide ; dont la deuxième , la poussée ou pression développée par les parties voisines du liquide, tend à élever cette même ligne au niveau de la surface générale du bain-, et dont la troisième, dépendante du solide adjacent, tend à soulever les molécules de l'eau qui se trouvent dans sa sphère d'attraction. Il est donc facile de concevoir que si la force attractive du solide est moins grande que l'excédant de Teffet de la cohésion sur la pression dont je viens de parler, la portion adjacente de la surface du bain conservera une forme convexe dont le rayon de courbure variera suivant la grandeur de la résultante de ces trois forces; mais que si cette force attractive devient égale à l'excédant de la cohésion sur la poussée du liquide , la surface du bain deviendra horizontale au point de contact avec le solide comme ailleurs ; enfin que dans le cas la puissance d'attraction développée par ce solide s'accroît encore, et devient , par conséquent , plus grande que la résultante dont je viens de parler, elle dimi- nue d'autant les effets de la pesanteur sur les filets marginaux du liquide, et ceux-ci, pour faire équilibre aux tilets adja- cents, doivent avoir plus de hauteur, de sorte que la ligne de jonction du liquide avec le solide se trouve élevée au-dessus du niveau général du bain et se relie à celui-ci par une surface concave (1).

(1) Il ne sera peiU-Ctre pas inutile la ligne de jonction de la sin-face libre

de faire remarquer ici que Tattraction du liquide avec la surface adjacente

dont résulte ledéplacementdu liquide du solide. En effet, la force attractive

n'est pas exercée par les molécules du qui agit latéralement et qui t*nd

solide qui sont en contact apparent à rapprocher deux molécules si-

avec celui-ci, mais par celles qui se tuées sur un uiC'me plan horizontal,

trouvent immédiatement au-dessusde et qui fait équilibre aune force ré-

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 55

Or, les inégalités dans la pression déterminée par les divers filets d'eau que nous venons de considérer sont la conséquence de l'action des deux forces attractives antagonistes que nous

piilsive d'une inlensilé donnée, ne peul ni abaisser ni élever Tiui ou l'autre de ces corps ; les molécules li- quides qui se trouvent au-dessous de la ligne de jonction dont je viens de parler sont également sollicitées à s'élever et à s'abaisser par l'action attractive des molécules du verre si- tuées immédiatement au-dessns et au-dessous du plan horizontal passant par le centre de chacune d'elles, et par conséquent le voisinage du solide ne peut déterminer leur déplacement; mais les molécules immobiles qui se trouvent immédiatement au-dessus de la ligne de jonction précédemment indiquée, c'est-à-dire au-dessus de la surface libre du liquide, en attirant obliquement les molécules adjacentes de ce dernier corps, doivent tendre à les élever et diminuer proportionnel- lement la pression qu'elles exercent sur les portions voisines du fluide. Ainsi le raisonnemenl nous conduit à trouver que l'ascension ou la dépres- sion des liquides dans les tubes capil- laires dépend de l'action de la portion de la surface intérieure de ceux-ci qui surmonte immédiatement la ligne de rencontre de cette surface avec celle du liquide inclus.

Du reste, ce fait peut être démontré matériellement par une expérience très simple due à Jurin.

Ainsi que nous le verrons bientôt, la hauteur à laquelle l'eau monte dans un tube étroit est en raison inverse

du diamètre de la cavité cylindrique de ce tuyau. Or, si l'on soude à l'ex- trémité d'un tube capillaire dont le diamètre est égal à 10 un second tube dont le diamètre intérieur n'est égal qu'à 1, et qu'on plonge l'extrémité libre du gros tube dans l'eau, on verra le liquide s'y élever jusqu'à une cer- taine hauteur que je suppose inférieure à l'extrémité supérieure de cette pre- mière portion de l'appareil; mais si l'on enfonce davantage le tube dans l'eau, de façon que l'extrémité su- périeure de la colonne liquide ainsi élevée, arrive en contact avec l'extré- mité inférieure du tube étroit qui forme en quelque sorte l'étage supé- rieur de l'appareil, on verra aussitôt la hauteur de la colonne augmenter et devenir proportionnelle au diamètre de ce second tube, de manière que le tout se maintiendra au-dessus du ni- veau général du bain, comme si le tube avait dans toute sa longueur les dimensions qu'il offre dans le point ses parois se joignent à la surface libre du liquide inclus {a). L'étendue de la surface du tube située au-dessous de cette ligne de jonction, et le dia- mètre de la portion sous-jacente de la colonne liquide soulevée, n'exercent donc aucune influence appréciable sur la hauteur de la colonne, et l'élévation est déterminée seulement par l'an- neau du tube qui surmonte immédia- tement la surface supérieure de celte colonne.

(a) Jurin, An Account of some Experimenls, elc. ; îuith an Inquiry into Ihe Cause of the Ascenl and Suspension of ^yater in Capillary Tubes (Philos. Trans., 1H8, I. XXX, p. li'i).

56 ABSORPTION.

avons appelées cohésion et attraction adhésive; par conséquent, la forme de la surface libre du liquide dépendra en dernier ressort de l'intensité relative de ces deux [luissances : quand la cohésion l'emporte sur l'attraction adhésive, la portion de cette surface qui est adjacente au solide sera convexe; et quand c'est au contraire l'attraction adhésive qui devient plus puissante que la cohésion, cette surface se relèvera sur les bords et deviendra concave.

C'est de la sorte que de l'eau dont on remplit incomplète- ment un verre se relève contre les parois du vase, et que la surface de ce liquide devient au contraire convexe lorsqu'on remplit le vase à pleins bords, car dans ce dernier cas la puis- sance attractive du verre agit de bas en haut sur la couche d'eau qui dépasse son niveau supérieur, et vient en aide à la cohésion pour le retenir et le mettre en é(iuilibre avec les parties centrales de la colonne fluide qui s'élèvent tlavan- tage (1).

Du reste, les phénomènes de ce genre ne se manifestent pas seulement sur les bords des vases, et se produisent de la même

(1) Pour melire mieux en tWidence Tobstacle que raUiaclion du verre sur l'eau oppose au déversement de ce liquide, il sulTit de répéter ime expé- rience très simple qui; Ton attriljue généralement à l'un des membres de notre ancienne Académie des sciences, C.-F, du l''ay (a), mais qui appartient en réalité ù Aggiunti {h). Si l'on verse de l'eau dans une des branches d'un tube de grand diamètre et recourbé en forme d'U, le poids du liquide dans celle branche fera monter l'eau dans la branche opposée, jusqu'à ce que,

conformément aux lois de réipiilibre dans les vases communicants , le même niveau se soit établi de part et d'autre ; mais si l'une des branches de ce siphon renversé est formée par un tube capillaire, le plan horizontal passant par la surface du liquide dans l'autre branche sera inférieure à celui qui correspondra à cette sur- face dans la branche capillaire, et la dilférence des niveaux sera pro- portionnée aux effets produits par raltraclion de la surface intérieure des parois de ce dernier tube sur l'eau

(a) C.-F. ilii l'.iy, De Vasicnsmi des liqueurs dans les Inyaux capillaires {llist. de l'Acad. des sciences, 172i).

{b) Voyez Nclli, Op. cit., y. 92, liij. 19.

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 57

manière lorsqu'on plonge dans un bain liquide, sur un point quelcon(iiie de sa surface , la partie intérieure d'un corps solide : la ligne de contact des deux substances s'élève ou s'abaisse suivant l'intensité relative de la cohésion du liquide et de l'attraction adhésive exercée sur les molécules de celui-ci par le solide incomplètement immergé. En eftet, les molécules du liquide qui baignent l'une quelconque des surfaces latérales du solide se trouvent alors soustraites à l'influence de la force attractive des molécules liquides situées du côté opposé de l'espèce d'écran que ce solide constitue, et sont placées dans les mêmes conditions que celles situées au bord externe de la surface libre du bain. Ainsi, quand on plonge verticalement le bord inférieur d'une lame de verre dans de l'eau en repos , on voit le liquide prendre une forme concave et s'élever à une certaine hauteur contre sa surface; puis, en répétant la même expérience sur un bain de mercure, on observe un résultat inverse : la surface du métal s'abaisse et devient convexe dans ses points de jonction avec le verre.

Ces effets sont produits avec le même degré d'intensité, quelle que soit la minceur de la lame de verre immergée de la sorte. Dans tous les cas, les molécules du liquide situées de l'un des

adjacente dont la surface deviendra qui y fait équililjie dans la brandie

concave. Cet état de choses persistera capillaire, et d'autre part, que cette

tant que la colonne de liquide, dans dernière surface deviendra convexe,

cette dernière brandie de l'instru- L'attraction exercée par les parois du

ment, n'aura pas monté jusqu'au bord tube capillaire sur l'eau qui, dans le

libre du tube capillaire ; mais lorsque premier cas, faisait équilibre à une

ce terme sera atteint, l'attraction exer- force agissant de haut en bas et contre-

cée par ces mêmes parois sur l'eau balançait en partie l'action de la pe-

lendra à l'empêcher de sortir, et si sanleur, agira alors en sens inverse, et

l'on continue à verser doucement du fera équilibre à la chaige constituée

liquide dans la grande branche du par la couche du liquide qui, dans la

siphon renversé , on remarquera, grande branche, dépasse le niveau de

d'une part, que le niveau pourra s'y l'extrémité supérieure de la petite

élever notablement au-dessus de la branche et tend à y élever l'eau, surface supérieure de la colonne fluide

58 ABSORPTION.

côtés de cet écran sont complètement soustraites à l'infliience attractive des molécules de même nature qui se trouvent du côté Oj3posé, et qui sont séparées des premières par la lame solide : la grandeur de la distance à laquelle ces molécules sont éloignées les unes des autres ne fait pas varier la grandeur de la résultante de leur force de cohésion combinée avec la force attractive du verre, et ce fait jette de nouvelles lumières sur le mode d'action de ces forces.

Effectivement, si les effets de l'attraction coliésive de deux molécules liquides A et B se trouvent annulés par l'interposition d'un troisième corps C, quelle que soit la faible épaisseur de ce dernier, et si la force d'attraction adhésive (|ue C exerce sur A et B reste la môme, quelle que soit l'épaisseur de ce corps, il en faut conclure que l'une et l'autre de ces forces ne produisent des effets sensibles qu'à des distances imper- ceptibles (I).

Les physiciens ne connaissent pas la loi suivant laquelle l'ac- tion de ces forces diminue à mesure que la distance entre les molécules réagissantes augmente ; mais, d'après les expériences dont je viens de parler , et beaucoup d'autres faits du même ordre, il est visible que l'intluence, soit de la cohésion , soit de

(1) Ilaulvsbee constata que l'eau monte sensiblement à la même hau- teur dans (les tubes capillaires dont l'épaisseur est variable [a), et Weit- br.echt vit que celte hauteur restait la même, soit que le tuyau dépassât de peu ou de beaucoup le sommet de la colonne liquide déplacée {b). En- fin , Laplace tira des expériences de llauksbec celte conclusion , que la sphère d'attraction des molécules du

verre sur les molécules de l'eau ne peut s'étendre qu'à des distances impercep- tibles, et il en fit la base de sa théorie mathématique des ed'els de la capil- larité (c).

fJes recherches plus récentes, faites par M. Bède, montrent que les résul- tats fournis par les expériences de Hauksbee ne sont pas d'une exacti- tude complète, et que l'élévation de l'eau, ou l'abaissement du mercure

[a] Haultsbce, Expériences physico-clnmiqiies, trad. par Desmarest, t. II, p. 27 et 127. {b) Weilbreclit, Op. cit. [Comment. Avad. scient. l'elro]ml., 1736, t. VllI). (e) l.aplace, Mécanique céleste, supplément du livre X (Oeuvres, t. IV, p. 391).

ACTION DE L\ CAPILLARITÉ. 59

l'attraction adhésive, cesse d'être appréciable à des distances extrêmement petites.

Mais, s'il est démontré que la puissance attractive du verre, ou de tout autre corps jouant un rôle analogue, ne puisse pro- duire des effets sensibles qu'à des dislances imperceptibles, ou tout au moins extrêmement petites , comment expliquer ce qui a lieu quand une lame de verre est partiellement immergée dans de l'eau, car dans ce cas ce n'est pas seulement une coucbe d'eau excessivement mince qui est soulevée par le verre, mais une masse assez considérable de ce liquide, masse dont la surface libre devient concave et dont la base s'étend assez loin de la surface attirante.

Ici la force cobésive du liquide intervient de nouveau, et, pour bien saisir le mécanisme de ce pbénomène, il est utile d'avoir recours à un artifice de raisonnement dont nous avons déjà eu l'occasion de faire usage.

Isolons par la pensée une lame verticale d'eau qui viendrait rencontrer à angle droit la surface du verre, et imaginons cette tranche divisée en une série de filets verticaux dont l'épaisseur ne serait pas sensible; enfin, admettons encore que cbacun de ces filets marginaux, que j'appellerai m, m', w", etc., soit

est un peu plus considérable dans les tubes capillaires à parois épaisses que dans ceux dont les parois sont min- ces {a) : mais ces perturbations s'ex- pliquent par l'action atlraclive de la surface horizontale du bout immergé du tube, et n'infirme en rien les dé- ductions tirées par Laplace touchant la distance à laquelle la substance du verre cesse d'exercer une action sen- sible sur l'eau.

Du reste, bien que tous les physi-

ciens reconnaissent aujourd'hui que les effets sensibles des attractions cohésives et adhésives ne sont appré- ciables qu'à des distances très petites, plusieurs expérimentateurs pensent que la sphère d'activilé de ces forces s'étend un peu plus loin que ne l'ad- mettait Laplace, et sont susceptibles de produire des effets sensibles à des dis- tances perceptibles , quoique très courtes ; question sur laquelle nous aurons roccasion de revenir bientôt.

(o) Bède, Mém. sur l'ascension de l'eau et la dépression du mercure dans les tubes capillairea Mémoires couronnés par l'Académie de Bruxelles, t. XXV}.

60 ABSORPTION.

relié à un filet vertical semblable, c, c, etc., situé vers le milieu du bain, au moyen d'un filet horizontal placé à quelque dislance de la surface du liquide, soit /*, h\ etc. Chacun des systèmes formés par m, A, c, ou par m', h\ c\ etc., se trou- vera au sein du milieu ambiant dans les mômes conditions que les deux colonnes fluides qui se balancent dans les branches montantes d'un tube en U, ou siphon renversé. Le filet mar- ginal r?î, par exemple, pressera par sa base sur le filet c, et tendra à le faire monter; niais c pressera également sur la base de m, et tendra à produire sur celui-ci le même effet : de sorte que si le poids de ces deux filets est le même, ils resteront stationnaires, conformément au principe de l'équilibre des liquides dans les vases communicants. Si m n'était soumis à l'influence d'aucune force étrangère, ces conditions d'équilibre seraient réalisées quand sa surface serait au même niveau que celle de f, car le liquide ayant partout la même densité , la pression p exercée par w serait égale à la pression p' de c quand ces colonnes auraient la même hauteur. Mais le filet m, étant en contact avec le verre, se trouve soumis à l'action attractive de ce corps, et cette force tendant à le faire monter, que j'appel- lerai a, doit balancer une partie de celle qui tend à faire des- cendre ce même iilet, c'cst-à-dirc p. Ce sera donc p— a qui se trouvera opposé à p\ et par conséquent m s'élèvera au-dessus du niveau de c jusqu'à ce que la différence dans la hauteur reladve de ces deux colonnes liquides suffise pour compenser l'action attractive du verre. Si cette puissance attractive était considérable, la différence des niveaux serait 1res grande, pourvu qu'aucune autre force n'intervînt dans ce phénomène, car nous avons supposé le filet m extrêmement mince, et par conséquent très léger; mais m n'est j)as libre, et, à raison de la force de cohésion de l'eau, se trouve comme enchaîné à m', c'est-à-dire au filet liquide suivant. En s'élcvanl le long de la suiface du verre, il agira donc sur m' de la mênie manière que le veire a

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 61

agi sur lui, et, en appliquant au système de filets ?w', c', le raisonnement que je viens de faire pour le système m, c, nous voyons que m! s'élèvera d'une certaine quantité au-dessus du niveau de c, c'est-à-dire au-dessus du niveau général du bain. Or, la puissance attractive de m' sur m est égale à celle de m sur ?7i', et par conséquent ce second filet liquide, en s'élevant sous l'intluence du premier, réagira aussi sur celui-ci, et l'empêchera de monter aussi haut qu'il l'aurait fait s'il avait été libre. Des relations semblables existent entre les filets verticaux suivants, c'est-à-dire entre m' et m", entre îw" et m'", etc. ; de façon que les effets de l'action attractive du verre portent en réalité sur un nombre plus ou moins considérable de ces petites colonnes liquides, et s'étendent à une certaine distance du bord vers le milieu du bain. Mais, ainsi que nous l'avons déjà vu, la force de cohésion de l'eau est inférieure à la puissance attractive du verre; l'attraction exercée par m sur m' sera donc moindre que a ; et m' ne s'élèvera pas aussi haut que m pour faire équi- libre à c. Ainsi la ligne passant par le sommet de ces deux filets rencontrera la surface du verre sous un certain angle, et la hauteur à laquelle m" sera élevée, par suite de la cohésion qui l'unit à m', sera encore plus faible, car les molécules des liquides , tout en étant maintenues à une certaine distance les unes des autres par l'attraction cohésive, sont parfaitement libres de se mouvoir autour les unes des autres, et par consé- quent la position dans laquelle la molécule terminale du filet m' se placera par rapport à la molécule supérieure du filet m sera déterminée par la résultante de deux forces contraires, l'attrac- tion de m, qui agit obliquement, et la pesanteur qui agit suivant la verticale; m" restera donc comme suspendu à m! sans attein- dre son sommet. Il en sera de même pour m'" par rapport à m", et ainsi de suite. Or, l'observation, de même que le calcul, montre que la ligne passant par le sommet de ces verti- cales s'abaisse de plus en plus, et décrit une certaine courbe

62 ABSORPTION.

qui, par ses deux extrémilés, se eonfoiid, d'une part avec la surface verticale du verre, et d'autre part avec la surface horizon- tale du bain.

Ainsi, l'attraction adliésive exercée parle verre, d'une part, et l'attraction cohcsive exercée par les molécules d'eau, d'autre part, déterminentdans le voisinage du contactdu premier de ces corps avec le second l'élévation d'un certain volume de liquide qui se termine par une surface concave, et qui se compose d'une lame verticale très mince adhérant au verre et d'une masse d'eau qui est comme suspendue à la face opposée de cette lame fluide, et qui, à raison de sa pesanteur, diminue d'autant la hauteur à laquelle celle-ci peut monter,

Il est donc visible que si, par une cause quelconque, la résistance opposée à l'ascension des lames aqueuses les plus rapprochées du verre par celles qui sont plus éloignées de ce corps pouvait être diminuée ou annulée, l'élévation de la por- tion marginale du bain au-dessus du niveau général de celui-ci augmenterait, la force attractive du verre restant la même. Or, il est facile de réaliser ces conditions.

Effectivement, si au heu d'employer dans ces expériences une seule lame verticale de verre, on immerge incomplètement dans l'eau deux de ces lames placées parallèlement, et si l'on rapproche graduellement cesdeux plans, qui d'abord étaient très éloignés entre eux, il arrivera un moment les deux portions concaves de la surface du liquide intermédiaire viendront à se rencontrer. Ce résultat sera obtenu quand la moitié de la dis- tance comprise entre les deux verres sera égale à la largeur de l'espace dans lequel l'action de chaque verre exerce sur la surface de l'eau une influence sensible ; et si l'on conhnue à rapprocher de plus en plus les deux verres, on annulera les résistances dues à la portion de chacune des masses liquides soulevées (\w se trouvait entre cette première ligne de jonction et le point actuel de rencontre des deux moitiés de la courbe

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 63

décrite par la surface de la masse liquide soulevée. Les deux lames d'eau qui adhèrent aux verres, et qui peuvent être consi- dérées comme les agents moteurs de tout ce système de molé- cules liquides, se trouveront donc allégées d'autant, et par conséquent, pour faire équilibre aux pressions exercées par les portions circonvoisines du bain, devront s'élever davantage. Plus la dislance comprise entre les deux plans du verre décroî- tra, plus l'effet produit de la sorte devra être considérable, et l'expérience, de même que le calcul, montre qu'effectivement il en est ainsi, et que, toutes choses étant égales d'ailleurs, les hauteurs auxquelles les liquides s'élèvent ou s'abaissent entre deux plans solides parallèles et verticaux sont en raison inverse de la dislance qui sépare ces plans (1).

A l'aide de quelques données fournies par la géométrie élémentaire, il est facile de déduire de cette loi le mode d'ac-

(1) Poisson atlribue l'établissement de celte loi fondamentale à Jiirin («) , qui effectivement Texposa en 171S (6) ; mais dans une note jointe à son mé- moire, ce pliysicien reconnaît que Newton l'avait devancé. Voici en quels termes ce dernier philosophe en parle :

« Si deux plaques de verre, planes et polies (supposez deux pièces d'nn miroir bien poli), sont jointes ensem- ble, leurs côtés parallèles et à une distance très petite l'une de l'autre, et que par leur extrémité d'en bas on les enfonce un peu dans un vase plein d'eau , cette eau montera entre les deux verres; et à mesure que les plaques seront moins éloignées, l'eau s'élèvera à une plus grande hauteur.

Si leur distance est environ la cen- tième partie d'un pouce, l'eau mon- tera à la hauteur d'environ un pouce, et si la distance est plus grande ou pins petite en quelque proportion que ce soit, la hauteur sera à peu près en ])roportion réciproque à la distance ; car la force attractive des verres est la même, soit que la distance qu'il y a entre eux soit plus grande ou plus petite ; et le poids de l'eau attirée en haut est le même, si la hauteur de l'eau est réciproquement proportion- nelle à la distance des verres. C'est encore ainsi que l'eau monte entre deux plaques de marbre poli, lorsque leurs côtés sont parallèles et à une fort petite dislance l'un de l'autre (c). »

(a) Poisson, Nouvelle théorie de l'action capillaire, p. 2.

(6) Jurin, .4?! Account of some Experiments, etc. ; wi.th an Inquiry into the Cause of the Ascent and Suspension of Water in Capillary Tubes {Philos. Trans., 1718, t. XXX, p. 739). (c) Newton, Traité d'optique, p. 573.

6ilj. ABSORPTION.

tion des tubes capillaires qui sont ouverts à leurs deux bouts, et qui plongent dans un liquide par leur extrémité inférieure. Effectivement, nous venons de voir qu'entre deux plans de verre verticaux parallèles et fort rapprochés , l'eau s'élève de façon à v constituer une lame dont la hauteur est en raison inverse de la distance des deux verres, c'est-à-dire de son épaisseur, et dont la longueur peut être quelconque. Or, con- sidérons en particulier une lame semblable d'une longueur seulement égale à son épaisseur, et achevons de la circonscrire complètement en ajoutant à ces deux plans de verre deux nou- veaux plans parallèles perpendiculaires aux premiers , et situés à la même distance, de manière, en un mot, à limiter ainsi un tube prismatique à base carrée ; il est clair que la force qui agit sur le liquide intérieur étant ainsi doublée, le volume du liquide soulevé sera lui-même doublé. D'ailleurs, la force attrac- tive étant également répartie entre les quatre faces du prisme, elles pourront être" considérées comme soulevant quatre masses prismatiques de liquide dont les bases seraient les triangles isocèles déterminés par les deux diagonales du carré. Chacun de ces triangles a lui-môme pour base un côté du carré et une hauteur égale à la moitié de la distance de deux faces parallèles ; en sorte que pour les tubes prismatiques à base carrée on est autorisé à dire que les colonnes de liquide soulevées sont inver- sement proportionnelles au rapport de la surface qui leur sert de base et au périmètre de cette même base. Au moyen d'un arti- fice semblable, c'est-à-dire par une décomposition en triangles isocèles, il est aisé de voir géométriquement, et j'admets ici comme acquis, que ce principe subsiste quand on remplace le carré qui sert de base au prisme par un polygone régulier quelconque ; et l'aire d'un polygone régulier quelconque étant égale au produit de son périmètre multiplié par la moitié du rayon du cercle inscrit, il s'ensuivra que les hauteurs dans les tubes prismatiques réguliers seront en raison inverse du rayon

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 65

du cercle inscrit. Enlin en passant, comme on le fait en géo- métrie, des polygones réguliers au cercle, (jui peut être assimilé à un polygone régulier d'un nombre infini de côtés, on en con- clut rigoureusement que, dans les tubes cylindriques, les hau- teurs sont en raison inverse des rayons de la base, et, pour chacune d'elles, sont deux l'ois i)lus grandes qu'entre deux sur- faces planes parallèles ayant pour disfance le diamètre du tube cylindrique.

Les mouvements dus à l'altraction moléculaire des solides sur les liquides sont par conséquent plus faciles à observer dans les tubes étroits qu'entre des surfaces planes, et c'est prin- cipalement à l'aide d'instrumenls de ce genre que l'étude en a été faite. De les noms d'attraction capillaire et de phénomènes de capillarité que l'on donne généralement aux forces et aux effets dont nous nous occu|»ons en ce moment.

D'après ce que j'ai déjà dit relativement à la courbure de la surAice des liquides dans le voisinage immédiat de leur point de contact avec un plan solide, nous pouvons prévoir que, dans un tube capillaire, ils se termineront par une surface de révo- lution qui sera convexe quand la force attractive de la substance dont se composent les parois du tuyau n'est pas égale en puis- sance à la moitié de la force coliésive du liquide, et concave quand l'attraction adhésive sera supérieure à la moitié de cette force de cohésion. Quant à la nature de cette courbe, on peut déduire aussi des faits exposés précédemment (jue, pour des tubes d'un certain diamètre, la surface de révolution doit être sensiblement un segment de sphère, et que le rayon de cette sphère doit diminuer dans un certain rapport avec le dia- mètre du tube ainsi qu'avec la hauteur de la colonne liquide déplacée.

L'étude attentive des propriétés hydrostatifjues de ces sur- faces concaves ou convexes permet aux physiciens de calculer les conditions de l'équilibre des divers liquides dans l'intérieur V. 5

66

\BSORPTION,

des tubes capillaires, et c'est de la sorte que Laplace est arrive à une théorie matlicmatiquc de la plupart de ces phéno- mènes (1). 11 ne conviendrait pas de nous arrêter ici sur le détail de ces considérations, dont les conclusions seules impor- tent à la i)hysiologie, et, pour le but que je me propose d'at- teindre à l'aide de cette digression, il me suffira d'ajouter

(1) Laplace a fait voir que la pres- sion qu'une masse fluide terminée par une surface sphériqiie concave on convexe exerce par sa base sur la co- lonne fluide verticale sous-jacenle, el par conséquent sur la poussée de celle-ci sur les parties circonvoisines du fluide, est plus grande ou plus pe- tite que si sa surface était plane. Il existe donc une dépendance néces- saire entre la forme de la surface libre de la colonne liquide intérieure à l'espace capillaire, et son élat d'ex- haussement ou de dépression. Laplace a démontré que cette dépendance pouvait être établie directement sans considérer Taclion des parois sur le liquide, el, dans sa théorie mathé- matique des actions capillaires, Ten- semble des phénomènes observés se déduit de la forme des surfaces des fluides (a).

[]n médecin anglais. Th. Young, dont j'ai eu déjîi l'occasion de citer le nom, et dont raltention avait été fixée sur ce sujet (b), présenta quelques objections graves à la théorie de Laplace (c), et Poisson remarqua que ce grand géo- mètre avait omis dans ses calculs une

circonstance physique dont la consi- dération paraissait être essentielle, savoir : la variation rapide de la den- sité que le liquide éprouve près de sa surface libre et près de la paroi du tube. En tenant compte des variations que ces changements dans la densité de la couche très mince qui termine !a masse liquide doivent exercer sur les pressions dont dépend la position d'équilibre des diverses parties de cette masse, l'oisson a fondé une autre théorie mathématique des actions capil- laires (d) ; mais le grand travail auquel il se livra à cette occasion ne paraît pas avoir beaucoup avancé la question fondamentale, et aujourd'hui la plupart des physiciens considèrent les vues de Gauss comme étant préférables. Ce dernier géomètre établit ses calculs sur la considération de l'action de la pesanteur, des attractions mutuelles des molécules mobiles du liquide et des attractions exercées sur ceux-ci par les molécules fixes de la surface des tubes ; puis il a recours au prin- cipe des vitesses virtuelles pour éta- blir les équations de l'équilibre (e).

(a) Laplace, Mécanique céleste, supplément an livre X (Œuvres, t. IV, [). 389 et suiv.).

(b) Young', An Essay on tlie Cohésion ofFluids (Philos. Trans., 1805, p. (15 et suiv.).

(c) Young, art. Cohésion of Fiuids (Supplément to the Encyclopœdia Britannica, 1824, t. 111, p. 211 et suiv.).

(d) Poisson, Nouvelle théorie de l'action capillaire. Paris, 1831 .

(e) G. -F. Gauss, Principia generalia theoriœ ftgurœ fiuidorum in statu œquilibrii (Commen tationes Soc. scient. Gotlingensis, cl. math., 1832, t. VII, p. 39 et suiv.).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 67

qu'il existe une relation constante entre la tornic du inénisquc terminal de la colonne liquide sonicvce on déprimée de la sorte et la grandeur des eflets produits, c'est-à-dire la distance à hKjuelle la snriace du liquide déplacé se trouve portée au- dessus ou au-dessous du niveau général du bain.

Il jne semble cependant nécessaire d'entrer {»lus avant dans l'examen de certaines questions que soulève l'étude des phéno- mènes de capillariti', et de chercher à nous éclairer davantage sur les circonstances qui, indépendamment des dimensions des espaces étroits occupés par les liquides, peuvent influer sur la grandeur des effets |)roduils.

Nous savons déjà que dans les tubes de verre à très petit calibre l'eau s'élève à une certaine hauteur, qui est en raison inverse du diamètre de ces tuyaux, et (jiie le mercure y descend au-dessous du niveau général du bain circonvoisin. Il existe entre ces deux résultats si différents une multitude de degrés intermédiaires. Ainsi, l'alcool s'élève dans les tubes de verre comme le fait l'eau, mais à une hauteur moindre; il en est à peu près de même pour diverses dissolutions salines ; l'éther sulfurique monte aussi, mais reste à un niveau inférieur à celui des liquides dont je viens de parler, et pour l'eau chargée de certaines matières minérales le contraire s'observe, et la colonne liquide dépasse en hauteur celle formée par de l'eau pure (1).

(1) Cané, un dos membres de notre beaucoup moins haul que ne le fait

ancienne Académie des sciences, fut l'eau distillée (a).

l'un des premiers à étudier compara- Plus récemment, Emmeit et un

tivement rinfluence des tubes capil- grand nombre d'autres physiciens ont

laircs sur l'ascension de divers li- fait des expériences analogues (6), et,

quides, elil trouva que, toutes choses pour bien iixer les idées à ce suje!,

étant égaies d'ailleurs, l'esprit-de- vin je rap])ellerai ici quelques résultats

et l'essence de lérébenlliine montent numériques tirés d'un travail publié

(a) Carré, Expériences sur les luyaux capillaires {Mcin. de l'Acad. des sciences, 1725, p. 241).

(b) Emimtt, On CapUlary AUraclion (The Philosopliical Magazine, série, 1827, t. I, p. 334).

68 ABSORPTION.

Nous nvons vu que ces différences dépendaient essentiellement des rapports de grandeur de deux forces contraires : l'attraction adhésive du solide pour le liquide et la cohésion de celui-ci. Mais ne pourrions-nous pas avancer davantage la question qui

dernièrement par Simon (de Melz). Cet expérimentateur a pris pour unité la hauteur à laquelle l'eau distillée s'élève dans des tubes capillaires d'un certain diamètre, et en opérant dans les mêmes conditions, sur diverses dissoluiions salurées, il a observé les élévations suivantes :

Chlorhydrate d'ammoniaque . i ,077

Sulfhydrale de potasse .... 1,020_

Nitrate de cuivre 1,012

Sulfate dépotasse 1,007

Sulfate de fer 0,989

Acide sulfurique 0,824

Sulfure de carbone 0,470

Hydrate de méthylène 0,359

Élher sulfurique 0,280 (a)

Ainsi la présence de certains sels augmente l'action de la capillarité , tandis que d'autres substances du même ordre produisent des effets contraires.

On voit aussi, par des expériences faites coniparativeinent sur des disso- lutions salines à divers degrés de con- centration, que dans certaines limites au 7iioins la modificntion détermi- née dans l'ascension de l'eau par son mélange avec des substances solubles croît proportionnellement à la quan- tité relative de ces dernières. Ainsi, dans des expériences faites par Du- trocliet sur de l'eau chargée de chlo-

rure de sodium, la hauteur de la colonne était :

Pour l'eau pure 12

Pour la dissolution saline faible

(densilé : 1,00) 91

I^our la dissolution concentrée

(densité : 1,12) Ci

Mais, à densités égales, les solu- tions salines de nature différente ne donnent pas des résultats semblables. Ainsi Dutrochet a vu que de l'eati chargée de sulfate de soude ne s'éle- vait qu'à 8 lignes dans les condi- tions où colle chargée de chlorure de sodium, de f.icon à avoir la même densité (savoir 1,085), montait à 10 lignes (ô).

Enimelt a trouvé aussi qu'il n'existe aucune relation entre la densité de l'eau alcoolisée et la hauteur à la- quelle ce mélange s'élève dans les tubes de verre ; ainsi il a obtenu :

Pour l'alcool 0,5

Pour un mélangée de 83 parties

d'alcool et 100 parties d'eau. 0,7 Pour le même niélang-e ctcnilu

de ■] d'eau 10,5

Pour le premier mélange étendu

de 7 { d'eau 13

Pour l'eau pure 16

Par conséquent, l'addition d'une très petite quantité d'alcool diminue beau- coup le pouvoir ascensionnel de l'eau,

(a) Simon, Recherches sur la capillarité {Annales de chimie et de physique, 3" série, 1851, I. .\X\II, p. 15).

(h) Dutrociiet, De l'endosmose {Mém. pour servir à l'Iiistoire aiiatomique et plujsioloijiquc des Yégétaiix et des Animaux, t. I, p. 83 et suiv.).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 69

nous occupe, et nous former une idée de la cause de ces dilTérences dans la puissance de ces agents physiques ?

Les altraclions moléculaires dont les effets de capillarité

et l'addition d'une quaiili le assez con- sidérable d'eau n'aii!i;menlc que fort peu la hauteur alleinte par Tal - cool (a). On volt, par les expériences de M. Valson , que la présence de r«hii d'alcool produit sur une colonne capillaire d'eau de (il"'"\[iS de hau- teur une variation de 0'"'",'2 (b).

On avait supposé d'abord que la densité relative du liquide et du so- lide réagissants pouvait être la cause de la prédominance de l'allraclion cohésive sur ratlraclion adhésive, ou vice versa; mais, ainsi que je l'ai fait remarquer, il n'existe aucun rapport constant entre la hauteur à laquelle divers liquides s'élèvent dans un tube de verre dont la densité ne varie pas et la pesanteur spécifique de ces sui)- slances.

Il y a lieu de croire que la force de cohésion des liquides peut être consi- dérablement altérée , et par consé- quent les actions capillaires modiîiées par la présence de petites proportions de certains corps étrangers.

.l'ai déjà parlé de la diminniion considérable que la présence d'une très petite proporlioii d'alcool déter- mine dans la iiauleur à laquelle l'eau s'élève dans les tubes de verre, et j'ajouterai que, par les expériences de Dulong, on sait que le mercure mêlé à une petite quantité d'oxyde de ce métal, au lieu de se terminer par m\

ménisque convexe dans l'intérieur des tubes barométriques, devient adhérent à leurs parois (c).

Il est aussi à noter que les elfets de la capillarité se compliquent par suite de l'attraction adhésive plus ou moins puissante qui [leul se développer entre la surface du solide ou celle du liquide et l'air almijsphériquc. C'est pour écarter l'obstacle créé de la sorte que les piiysiciens chauU'ent préala- blement les tubes en présence des liquides sur lesquels ils veulent faire leurs expériences, et les dillV'rences dans la grandeur des résulials sont parfois très considérables, lors même que le gaz interposé ne serait pas vi- sible Comme exemple de l'iulluence que cette circonstance peut exercer sur les ellets de l'attracliou adhésive entre le verre et certains liquides, je citerai les faits observés par M. Donny dans ses expériences tur l'acule sul- furique. En plaçant sous le récipient de la machine pneumatique un ma- I omètre rempli de ce liquide, et en faisant le vide, il a vu l'acide roter en suspension dans le !i;be, formant cloche à une hauteur de 1"',"J5 au- dessus du niveau du bain, loisque l'appareil était complètement purgé d'air; tandis que dans le cas con- traire, le niveau devenait le même dans les deux brandi es de 'instru- ment ((/).

(a) EmmoU, On CapiUary Attraction {Pliilos. Magaxine, 18"2", t. I, p. 335).

(b) Valson, Sur la théorie de l'action capillaire [Comptes rendus de l'Acadcmie des sciences, 1857,1. XLV, p. 103).

(c) Voyez Poisson, Nouvelle théorie de l'action capillaire, p. 291.

(d) Donny, Mém. sur la cohésion des liquides et sur leur adhérence aux corps solides [Annales de chimie et de physique, série, 1840, t. XVI, p. 171).

70

ABSORPTION .

dépendent ne produisent dos effets sensibles (ju'à des distances très petites, nous en avons eu des preuves multipliées ; mais ces distances ne sont pas nulles, et, d'après l'analogie, nous devons être porté à croire que la grandeur de ces effets doit varier avec la grandeur de l'espace compris entre les particules de matière l'éagissantes. Or, la physique nous enseigne que les molécules de tous les corps, des solides aussi bien que des fluides, bien que se touchant en apparence, sont en réalité placées à distance, et que cette distance est susceptible de varier beaucoup , soit d'un corps à un autre, soit dans le même corps à des tempéra- tures différentes. Il est donc à présumer que l'intensité des effets dus à la capillarité doit varier suivant trois conditions : 1" le degré d'écartement des molécules du liquide , circonstance qui, toutes choses étant égales d'ailleurs, détermine le degré de cohésion de ce corps ; 2" la distance qui sépare les molécules duli(iuidedes molécules occupant la surface adjacente du solide, distance dont l'augmentation déterminerait, suivant une certaine loi, l'affaiblissement de l'action attractive exercée par ces molé- cules hétérogènes les unes sur les autres; S" enlin, l'écarté - ment plus ou moins grand des molécules du solide entre elles, circonstance qui ferait varier le nombre des molécules solides dans la sphère d'attraction desquelles chaque tnolécule adja- cente du liquide se trouverait placée, pour peu que le rayon de cette sphère fut notablement plus grand que la distance intermoléculaire, condition qui, dans la plupart des cas au moins, paraît être réaUsée (1).

(1) Ainsi que je l'ai déjà dil, La- place et la plupart des physiciens de l'époque actuelle admettent que l'at- traction adhésive ne produit des effets sensibles qu'à des distances iniper- ceptibles ; mais divers laits semblent montrer que la sphère d'activité des corps solides est un peu plus étendue,

et que dans certaines circonstances on pourrait l'évaluer numériquement.

Un des arguments que ces auteurs emploient pour établir leur opinion est tiré des expériences dans lesquelles on mesure l'ascension de l'eau dans des tubes i'ormés de substances diflérentes et dont la surface interne a été préa-

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 71

Les résLiUats fournis par les expériences relatives à l'in- fliicnce de la chaleur sur les effets de la capillarité viennent à l'appui de ces vues. On sait depuis longtemps que ces effets diminuent généralement avec l'élévation delà température; mais c'est dans ces derniers temps seulement que les variations déterminées de la sorte ont été l'objet de recherches attentives, et les faits constatés ainsi par un des jeunes docteurs de notre Faculté, M. Wolf, offrent beaucoup d'intérêt. Ce physicien a

lablcnient nioiiilléc. La couche mince du liquide qui y reste adhérenle forme un cylindre creux dans l'intérieur du- quel l'eau du bain monte lorsqu'on plonge l'extrémité inférieure du tube dans ce dernier liquide. Or, on n'avait aperçu duiis ces cas aucune différence dans la hauteur de la colonne d'eau soulevée par des tubes de nature diffé- rente, et par conséquent on admet- tait que l'élévation du liquide était duc uniquement à l'action de la gaine aqueuse dont le tube solide était revêtu, et que l'écartement dé- terminé par la présence de cette lame liquide, extrêmement mince, entre la colonne aqueuse soulevée et les parois du tube, suffisait pour soustraire com- ph'tement la première à l'intluence de celui-ci; influence qui, en variant avec la nature de la substance conslilulive de l'appareil, aurait amené des diffé- rences dans les hauteurs observées. Mais si les choses se passent ainsi dans quelques cas, il n'en est pas tou- jours de même, et dans d'autres cir- constances on a vu l'action attractive du sulide sur le liquide se manifester à travers la couche mince en question, et s'exercer par conséquent à une

distance appréciable. Ainsi, dans les expériences de M. Linck , faites sur des lames parallèles de diverses na- tures et préalablement mouillées , l'ascension du liquide est restée à peu près la même quand c'était de l'eau qui se trouvait en contact soit avec du verre, du zinc ou du cuivre ; mais la hauteur à laquelle l'alcool, l'éther sul- furique, la potasse on dissolution, l'a- cide sulturique, etc., s'élevaient entre les la mes également écartées, varia très notablement, suivant qu'on employait l'une ou l'autre de ces substances. Par exemple, elle était pour l'alcool, 8 avec le verre , 9,5 avec le zinc, et 10 avec le cuivre, l'our l'acide sul- turique, elle était de 11,0 pour le verre ou le cuivre, et de 15,0 avec le zinc (a).

Les recherches de M. Ijède condui- sent à un résultat analogue. Ce phy- sicien a trouvé que les hauteurs observées dans les expériences com- paratives sur l'ascension de l'eau , dans les tubes capillaires de différents calibres, ne s'accordent pas exacte- ment avec celles indiquées par le calcul ; et M. Plateau a fait remarquer que, pour se rendre compte de ces ano-

(fl) Linck, Forigeselile Versiiche ûber die Cajnllaritâl (PoggcndovlT» Annalen dev l'hyslk itnd Chenue, 1834, t. XXXI, ji. 595 el suiv.).

72 ABSORPTION.

constaté que l'élévation de la température produit des change- ments si considérables dans la résultante des diverses forces dont dépend l'ascension des liquides dans les tubes de verre à cavité capillaire, que la surface terminale du fluide placé dans l'intérieur de ceux-ci peut, sous l'influence de cet agent, cesser

malies,ilfallailcléduiîedudianiè:redu tuyau l'épaisseur de la couche de li- quide qui adhère direciemenlau verre, et qui constitue pour ainsi dire un tube aqueux dans l'intérieur duquel le cy- lindre fluide s'élève en vertu de l'at- traction de l'eau sur elle-même. Or, pour faire coïncider de la sorte les résultats de l'observation et du cal- cul, il faut attribuer à celte couche adhérente une épaisseur conslanie d'environ 0""",()01. Par conséquent, les effets sensibles de l'allraction du verre sur les molécules de l'eau s'é- tendraient dans ces circonslanccs à une distance de '- de milliniètrc {a). Si les expériences de Simon sur l'ascension comparative des liquides à la surface de lames planes et dans l'intérieur de tubes capillaires sont exactes, on serait porté à croire que celle sphère d'aclivilé sensible est en- core plus étendue. Ainsi que je l'ai dit ci-dessus, dans l'Iiypolbèse adoptée par Laplace et la plupart des autres physiciens, les rapports de hauteur du liquide déplacé entre deux plans pa- rallèles et dans l'inlérieur d'un tube cylindrique seraient à peu près dans la proportion de 1 à 'J, Mais Simon a trouvé la hauteur relative beaucoup plus grande; dans ces derniers . et , suivant lui, les ascensions entre les

glaces et dans les tubes seraient dans les rapports du diamètre à la circonférence, c'esl-à-dire à peu près comme 3 est à 1 {b). Or cela sem- blerait indiquer que l'action attrac- tive du verre s'étend à une certaine distance sensible ; de sorte que cette attraction exercée par chaque molé- cule de ces corps produirait des ell'ets appréciables non-seulement sur le (ilet linéaire du liquide normal à la surface de celui-ci, mais sur les filets circon- voisins. La molécule du liquide située à une certaine dislance de la surface attractive serait donc sollicitée par l'action combinée d'un nombre plus ou moins considérable de molécules du solide ; circonstance qui permettrait à la forme de cette surface d'influer sur la f;randeur de la résullante, el qui amènerai! la production d'efl'els plus considérables dans l'inlérieur d'un cercle qu'entre deux surfaces planes et parallèles. Mais je ne signale ici ces résultats qu'avec beaucoup de réserve, à cause des objections qui peuvent être faites au procédé expérimental dont Simon faisait usage. Il est aussi fi noter que , d'après la théorie de dauss, la différence entre les altitudes déterminées par un tube capillaire ou par deux plans parallèles dont la dis- tance égale le diamètre du tube serait

(a) Bôde, Mémoire sur Vasiensinii de l'eau et In dépvessinn du mercure dnns les tubes capil- laires, p. i! I {Mcinoires cotironncs par l' Académie de Uru.rclles, tS53, I. XXV).

((() Simon, Hechcrrhes sur In capillnrilc [Attimles de chimie et de physique, si'ric, 1851, t. .WXll, p. t'J).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ, 73

d'être concave et devenir plane, ou même se transformer en un ménisque convexe, et que par conséquent le niveau de la colonne terminé de la sorte, au lieu de se trouver à une hauteur plus ou moins considérable au-dessus du niveau de la surface générale du bain circonvoisin, pourra descendre au- dessous de ce même niveau (1).

précisément la moitié du rapport trouve par Simon, savoir : 1,57 : 1 au lieu de û,1/i : 1 (a).

(1) Le fait de la diminution des effets de capillarité par l'élévation de la température a été indiqué soni- mairement, il y a près d'un siècle, par de la I^ande (6), et a été mieux observé par Emmelt (c). fins récem- ment , de nouvelles recherches à ce sujet ont été laites par plusieurs phy- siciens de rAllemap;ne (d) ; mais ce sont les expériences de M. Wolf qui, dans ces derniers temps, ont conduit aux résultats les plus intéressants. D'après les théories mathématiques de Laplace et de Poisson, on avait été assez généralement conduit à penser que, pour chaque liquide susceptible de mouiller les tubes, l'ascension de-

vait être en raison inverse de la den- sité de cette substance ; mais celte loi n'est pas en accord avec l'expérience. Effectivement, M. Wolf a conslaté que non-seulement le décroissement des hauteurs avec l'élévalion de la tempé- rature est beaucoup plus rapide que la diminution de la densité, mais qu'il n'existe même entre ces deux phéno- mènes aucun rapport constant. En effet, la hauteur de la colonne déplacée peut diminuer quand la densité aug- mente, et inversement. Ainsi, au- dessous de /i degrés, l'élévation delà colonne capillaire d'eau croît rapide- ment avec l'abaissement de la tem- pérature, et cependant la densité du liquide diminue.

A une certaine température, l'élé- vation des liquides qui mouillent les

(a) Gilbert, Noie sur la théorie des phénomènes capillaires {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1857, t. XLV, p. 771).

(&) De la Lande, Lettre sur les tubes capillaires {Journal des savants , 1708, p. 74.1).

(c) J.-B. Enimetl, On CapUlanj Attraction {The PItilosophical Magazine, 2* série, 1827, t. I, p. 116).

(d) Frankenheim, Die I.ehre von der Cohdsion, 1835, p. 122 et suiv.

Sondliaiiss, Deviquam calor habet in fluidorum cajnllaritate. Dissert, inaug,, 1841 (Enim. et Mardi., t. XXllI, p. 401).

Hiklebrand, De cohœsionis et ponderis specifici conunutalionibus quœ innonnullis fluidis vi caloris efficluntur. Disserl. inaiig , 1844.

A. Morilz, Einige Bemerkungen ûbcr Coulomb' s Yerfahren, die Cohâsion der Flûssigkeiten zu bestimmen (PoggendorfTs Annalen der Physik und Chemie, 1847, t.IAX, p. 74, cl Archives des sciences physiques et naturelles de Genève, 1847, t. IV, p. 391).

Bruniier, Untersuclmngen iïber die Cohâsion der Flûssigkeiten (Poggendorlï's Annalen der Physik und Chemie, 1847, t. LXX, p. 481).

Hollzniaiin, Ueber die Cohâsion des Wassers (PoggendoriTs Annalen, 1849, t. LXXI,

p. 463).

Buys-Ballot, Ueber den Einfluss der Temperatur aufdie Synaphie (PoggendorfT's Annalen,

t. LXXI, p. 177).

Frankenheim, Ueber die Abhângigkeit einiger Cohasionserscheinungen flûssiger hSrpe

der Temperatur (PoggendorlTs, Annalm, t. LXXII, p. 177).

74 ABSORPTION.

Au premier abord, on pourrait être porté à attribuer cette décroissance dans les effets de l'attraction adhésive du verre sur l'eau, ou sur tout autre liquide qui dans les circonstances ordinaires est susceptible de mouiller la surface de ce corps solide, à la diminution de la densité que l'élévation de la tem- pérature détermine dans le liquide, c'est-à-dire à l'écartement plus considérable des molécules de celui-ci et à aucune autre cause. Les théories mathématiques de l'action capillaire in- ventées par Laplace et par Poisson le supposaient, et con- duisaient à admettre que les liquides susceptibles de mouiller les tubes capillaires s'y élevaient à des hauteurs proportion- nellement inverses à leurs densités; mais l'expérience a montré que les choses ne se passent pas de la sorte. La diminution dans la hauleur de la colonne soulevée n'est pas en raison de la diminution que l'élévation de la température amène dans la densité du liquide, et dans certaines circonstances ces deux phénomènes peuvent suivre une marche inverse. Il faut donc chercher une autre explication du mode d'action de la chaleur, et, pour en trouver la clef, il suffit, ce me semble, de faire entrer dans la question un autre élément du même

parois du tube capillaire devient nulle, et la colonne contenue dans rintérieur de ces tuyaux, au lieu de se terminer par une surface concave, présente une surface plane, ou peut même affecter la forme d'un ménisque convexe, et descendre alors au-dessous du niveau général du bain. j\j. Wolf a constaté ces faits en observant la marche de l'étlier sulfurique, du sulfure de car- bone, de l'alcool, etc., à des tempé- ratures élevées et dans des condi-

tions de pression qui empêchaient la transformation de ces liquides en vapeur (a).

M est également à noter que l'élé- vation plus ou moins grande de la colonne liquide, suivant la tempéra- ture, dépend essentiellement de la température de la portion voisine de la surface, et n'est induencée que peu par celle des parties inférieures du cylindre tluide contenu dans le tube (6).

(a) Wolf, De l'influence de la température stir les phénomènes qui se passent dans les tubes eapillaires. Thèses, Faculté îles sciences de Paris, 4850, 199. (Reproduite dans les Annales de eldmie el de pimsique, li* série, 1857, t. XLIX, p. ii30.)

(b) Emmell, Op. cil. [Philosophical Maga»ine, 1827, 1. 1, p. 332).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. ' 75

ordre dont les physiciens ne me paraissent pas avoir tenu compte, savoir, l'écartement que l'élévation de la température doit déterminer entre les molécules du solide et du licjuide qui se trouvent en contact apparent. Effectivement, l'augmen- (alion produite de la sorte dans la distance comprise entre la molécule du verre et la molécule de l'eau qui réagissent l'une sur l'autre doit entraîner une décroissance plus ou moins rapide dans les actions attractives réciproques exercées par ces molécules, et suivant la valeur relative du coefiicient de la dilatation produite par la chaleur dans le système hétéro- gène formé de ces deux molécules comparé à celui de la dilatation du liquide considéré en lui-même, les conditions dont nous avons vu dépendre le caractère des effets capillaires pourrait changer. .

Ceci nous permet de concevoir comment, à la température ordinaire, les différences que nous avons rencontrées dans l'ac- tion attractive d'un même solide sur divers liquides, ou de di- vers solides sur un môme liquide, peuvent exister, sansquepour expliquer ces phénomènes il faille supposer que cette force molé- culaire varie avec la nature des corps réagissants, hypothèse qui cadrerait mal avec la simplicité ordinaire des agents phy- siques. En effet, nous savons que le coefficient de la dilatation peut varier suivant la nature soit des solides, soit des liquides; il est donc légitime de supposer que le coefficient de l'écartement, c'est-à-dire l'augmentation de la distance imperceptible qui existe entre deux corps .en contact apparent, un solide et un liquide, [)ar exemple, correspondant à un accroissement donné de température, puisse varier aussi avec la nature de ces corps. Admettons donc que le coefficient de la dilatation de l'eau soit heaucoup plus petit que celui de l'écartement ou de l'accroisse- ment de l'espace compris entre les surfaces de jonction appa- rente de l'eau et du verre; il arrivera un moment où, par l'élé- vation de la température sous une pression extérieure suffisante

76 ABSORPTIO.X.

pour empêcher la volatilisation du liquide, l'attraction adhésive du verre, diminuant avec l'augmentation de la distance comprise entre les molécules du verre et les molécules adjacentes du liquide, deviendra trop faible pour balancer l'attraction coliésive des molécules de l'eau, et alors celles-ci, obéissant aux lois d'équilibre indiquées précédemment, se grouperont de façon à présenter en dessus une surface convexe, conditions dans les- quelles la colonne fluide logée dans le tube capillaire devra s'abaisser au-dessous du niveau général du bain, au lieu de s'élever à im niveau supérieur. Or, les expériences de M. Wolf prouvent que ces conditions sont réalisées pour l'étlier sulfu- rique et le verre à une température de 491 degrés; et pour l'eau le même résultat parait être produit à une température infé- rieure au rouge, car on sait que des gouttes de ce liquide projetées sur une plafpie de fer tbrtemeiit chauffée ne s'y étalent pas , mais conservent leur forme sphérique jusqu'à ce qu'elles se soient réduites en vapeur, phénomène (pii me paraît être du même ordre que ceux dont l'étude nous occupe en ce moment (1).

Ainsi la différence qui se remarque entre l'action capillaire du verre sur l'eau ou sur le mercure semble devoir dépendre seulementdece que la distance à laquelle la puissance attractive du verre devient inférieure à la moitié de la puissance cohésive du liquide adjacent est atteinte par l'influence dilatante de la chaleur à la température ordinaire dans un cas, et seulement à une température voisine de la chaleur rouge dans l'autre.

Quant à la nature des puissances qui entrent en jeu pour produire les phénomènes dont l'étude vient de nous occuper, je ne pourrais rien préciser; mais il est à noter (juc ces attrac-

(1) C'est (lo la sorte que les phéno- nom d'éUU sphérotdal me paraissent mènes désignés par Boutigny sous le devoir être expliqués (a).

(a)Boutiffny, Nouvelle branche de physique, on Étudca sur les corps à l'état sphérohlal, iS47.

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 77

tions physiques diffèrent moins de l'affinité clnmique qu'on ne serait porté à le supposer au premier abord , et beaucoup de laits tendent même à faire penser que toutes ces actions molé- culaires ne dépendent que d'une force unique. Ainsi M. Pouillet a constaté que toutes les fois qu'un corps solide quelconque vient à être mouillé par un liquide, l'union qui s'établit ainsi entre les molécules hétérogènes est accompagnée d'un dégagement de chaleur, comme le sont les combinaisons chimiques (1). Et, plus récemment, d'autres expérimentateurs, en étudiant l'action que divers liquides non miscibles exercent les uns sur les autres, ont découvert des faits qui semblent indiquer l'existence de certaines relations entre l'atTinité cliimique et l'attraction adhé- sive (2).

(1) Ce physicien a fait des expé- riences sur un nombre considérable de corps, et il a trouvé que l'éléva- lion de tenipéialure est à peu près la même pour les dilîérenls solides avec le même liquide, et pour le même solide avec les liquides diiïérents [a).

(2) On doit à M. VVilson, professeur dechiniieà Edimbourg, une série d'ob- servations 1res intéressantes sur les actions capillaires produites par divers liquides les uns sur les autres. Elles ten- dent à établir l'existence d'une liaison intime entre l'attraction adliésive et l'affinité chimique, ou plutôt à faire penser que les cflets mécaniques et chimiques dus aux actions molécu- laires ne dépendent que d'une seule et même force. Quand on laisse tom- ber dans de l'eau une goutte de chlo - roforme, celle-ci ne se mouille que difficilement, et à raison de sa den- sité supérieure à celle du liquide am-

biant, descend vers le fond du vase en y conservant une surface convexe et une grande mobilité ; mais si l'on ajoute à l'eau du bain un peu de po- tasse, de soude ou d'ammoniaque, on voit aussitôt le globule de chloroforme s'aplatir et s'étaler en forme de disque mince; puis, si l'on neutralise l'alcali par un acide, le chloroforme reprend sa forme arrondie. Des phénomènes analogues se produisent dans les tubes capillaires : le chloroforme s'élève dans ceux-ci à une certaine hauteur, et s'y termine par un ménisque con- cave ; mais si l'on verse soit de l'eau, soit de l'acide sulfurique étendu ou une autre dissolution analogue sur la surface du liquide ainsi suspendu dans le tube, cette surface change immé- diatement de forme et devient con- vexe ; enlin si au lieu d'acide on verse une dissolution alcaline sur la colonne capillaire, on voit la surface de celle-ci

(a) Pouillet, Sur de nouveaux phénomènes de production de chaleur [Annales de chimie et de physique, 1822, t. XX, p. lil).

78 ABSORPTION.

J'ajouterai que l'état électrique des corps réagissants exerce, de même que la chaleur, luie grande influence sur la puissance de leur attraction adliésive (1). Ainsi, quand un courant galva- nique d'une certaine intensité passe de l'éleclrode positive dans une goutte d'eau, et de dans un bain de mercure, pour se rendre au pôle négatif de la pile, l'eau, au lieu de conserver sa forme spliérique, s'étale en lame plus ou moins mince, et

devenir presque plane. La liqueur des Hollandais et le sulfure de carbone se comportent de même , et l'on observe des pbénoniènes analogues quand on met dans un bain lanlôt alcalinis(^ , lanlôt acidulé , diverses essences, telles que l'essence de gi- rofle, de sassafras, etc., et même le brome {a\

M. Swan a vérifié les résultats ob- tenus par M. Wilson, et a coustaté des faits du même ordre en étudiant les rapports qui s'établissent entre l'buile d'olive et de Peau, des dissolutions alcalines ou acides, de l'alcool ou de l'élber. Enfin , ce physicien a montré que les changements observés clans la forme du ménisque dans les tubes capillaires, sous l'influence de tel ou tel réactif, ne dépendent ni de l'at- traction adliésive existant entre ces derniers liquides et les parois du tube, ni de la densité relative des hquides en présence, et ne peuvent être attri-

sion, les difl"ércnces qui se remar- quent dans les relations qui existent souvent enire l'aptitude d'un liquide il mouiller un solide et à le dissoudre. Chacun sait que le mercure ne mouille ni le verre, ni le fer, et ne peut dis- soudre ni l'un ai l'autre de ces corps ; mais il mouille l'argent, l'or, le plomb, l'élain, etc., avec les(iucls il forme des amalgames liquides. Il paraîtrait aussi, d'aprfîs les expériences de Guyton- ?dorveau, que la force nécessaire pour séparer de la surface d'un bain de mercure des disques niélalliques de nature diflérente croît proportion- nellement à l'aplilude des métaux à former des amalgames (c).

(1) Vers le milieu du siècle dernier, Boze et NoUel virent que la vitesse avec laquelle l'eau s'écoule d'un tube capillaire sous une charge conslanle, augmente beaucoup quand on élec- trise le vaisseau, et que le change- ment produit de la sorte est d'autant

hués qu'aux propriétés chimiques de plus marqué, que le conduit est jilus ceux-ci {b). étroit (d). Or, ce qui retarde l'écou-

Je rappellerai aussi, à celte occa- lenienl dans ces lubcs, c'est l'adhé-

(a) C. Wilson, On some Phcnomena of Caplllanj Attraction observed wilh ClUoroform, Bisuliiliu- ret of Carbon and other Liquids {Quarterly Journal of Ctiemical Science, dSiO, t. I, p. 17i).

(b) W. Swiiii, On certain Phenomena ofCapillary Attraction exhibited by Chloroform, the pxed Oils and other Liquids, with an Inquiry into some of the Causes which modify the Form of the mutual surface of two immiscible Liquids in contact luith the walls of the vessel in which ihey arecontained {Philos. Magazine, 1S48, t. XXXUl, p. :^<!)-

(c) Guyion-Morveau.art. Adhérence et AuHiîsioN' do V Encyclopédie par ordre de matières {Chi- mie', t. 1, p. 401')).

^d) Noilet, Des effets de félcctricitc sur les corps organisés (Hist. de l'Acad. des sciences, 1748,

p. 2 et suiv.).

ACTION DE LA CAPILLARITÉ. 70

mouille la surface adjacente du mêlai. Il y a même des raisons pour croire que les corps qui adhèrent entre eux sont dans un état électrique différent, et (juelques physiciens pensent même que l'attraction qui est alors en jeu n'est autre chose que la force électrique, de sorte (\ue les phénomènes de capillarité dépendraient de cet agent (1); mais ce sont des vues de l'esprit dont nous n'avons pas à nous occuper ici.

rence du liquide aux parois du canal. Plus récemnieiil, Fischer (de Bres- au) a conslaté que lorsqu'il existe dans les parois d'un vase de verre des fêlures d'une si grande finesse, que dans les circonstances ordinaires les liquides ne peuvent traverser ces fentes, ni pour se mettre en équilibre hydrostatique avec le milieu ambiant, ni pour obéir à des attractions chimi- ques, le passage de ces substances peut être déterminé par l'action du galvanisme. Ainsi, une dissolution d'azotate d'argent renfermée dans un vase étoile de la sorte et plongé dans un bain d'eau peut y rester pendant plusieurs jours sans que la moindre parcelle du sel d'argent passe dans l'eau du bain extérieur ; mais dès qu'on vient à y établir un courant galvanique, la transsudalion du sel d'argent dans le liquide extérieur s'effectue (a).

(1) M. Draper, professeur de chi- mie à New-York, a proposé une nou- velle théorie des attractions capillaires qui ne changerait rien aux conditions d'équilibre dont i! a été question ci- dessus, mais qui attribuerait à l'état électrique des corps en contact la force attractive en vertu de laquelle ils adhèrent ou n'adhèrent pas entre

eux. Il cite, à l'appui de son opinion, diverses expériences dans lesquelles on peut constater que les corps qui ont contracté entre eux une cer- taine adhérence donnent des signes d'électricité différente ; ou bien encore qui montrent qu'en troublant l'état électrique normal des corps juxta- posés, on peut modifier les effets de capillarité produits par ce contact. Ainsi , quand on place du mercure dans un verre de montre, et qu'on dépose sur ce métal une petite goutte d'eau , celle-ci conserve une forme à peu près sphérique ; mais si l'on met le mercure eu communication avec l'électrode négative, et la goutte d'eau en communication avec le pôle posi- tif d'une pile d'une certaine puis- sance, on voit l'eau s'aplatir en forme de disque et mouiller le mercure. Si l'on place du mercure dans un tube en U, dont l'une des branches est capil- laire, le métal, comme on le sait, s'élève moins haut dans cette branche que dans l'autre; mais si, après avoir versé un peu d'eau sur la siu-face du mercure ainsi déprimée dans la bran- che capillaire, et avoir plongé dans cette eau l'extrémité d'un fil conduc- teur en connexion avec le pôle positif d'une pile, on fait communiquer

(a) Fischer, Ueberdas Verhalten der Risse in Glâsern deii davin enlhaltenen Flûssigkeiten (Poggendorfï's Anrtd/ÊJi, 1827, t. X, p. 480).

Iiiil)iliilion

par cnjiillarité.

80 ABSOr.l'TION.

En résumé , nous voyons donc que les effets capillaires dépendent des rapports qui existent entre la cohésion , c'est- à-dire la force d'attraction des liquides pour eux - mêmes , l'attraction adhésive exercée sur ceux-ci par les solides adja- cents , entin la pesanteur du liquide déplacé ; que les forces attractives qui réagissent ainsi ne produisent des effets sensibles qu'à des distances insensibles, et que la grandeur de chacune d'elles paraît être liée à la distance qui sépare entre elles les molécules réagissantes.

§ o. Nous avons vu aussi que la forme des cavités cir- conscrites parles corps solides, et ouvertes aux liquides, pouvait influer beaucoup sur la grandeur apparente des effets produits de la sorte , mais ne changeait rien au caractère essentiel du phénomène. Nous pouvons donc prévoir que si nous substituons aux tubes capillaires dont nous avons fait usage dans les expé- riences précédentes des corps criblés de petites cavités en communication les unes avec les autres et ouvertes au dehors, par exemple une certaine masse formée de grains de sable amoncelés ou de fragments de verre réduits en poudre fme, on obtiendra des effets analogues, car ces corpuscules ne se tou- cheront que très incomplètement, et laisseront entre eux des passages étroits et irréguliers dont les surfaces pourront agir

rélectrode négative avec le mercure contenu dans la grande branche de rappnrt'il, on voit aussitôt le métal s'élever dans la branche opposée, puis redescendre à son niveau primitif, quand on interrompt le circuit (a).

Ces faits sont intéressants , mais ils me paraissent indiquer seulement que le développement de la puissance

répulsive qui balance plus ou moins l'attraction moléculaire est soumis à riniluence de l'électricité aussi bien qu'à celle de la chaleur, et contribue ainsi à faire varier le degré d'écarle- ment des molécules hétérogènes, qui, en s'attirant, produisent des effets de capillarité.

(a) i. \V. Draper, h CapiUarij Altraclioii an Electric Phenomenon'! {Philos. Magazine, 3' séiic, 1845, t. XXVI, p. 185 etsuiv.).

IMBIBITION PAR CAPILLARITÉ. 81

à la manière de celles des tuyaux fins dont je viens de parler (1).

Or, tous les tissus organiques de l'économie animale res- semblent plus ou moins à ces substances poreuses; leurs parties

(1) Comme exemples de l'élévalion limèlres; enliii dans la sciure de bois,

des liquides à diverses hauteurs dans l'eau n'est montée qu'à 60 millimè-

des masses poreuses de ce genre, je très, tandis que l'alcool s'est élevé, à

citerai les résultats obtenus récem- 125 millimètres, ment par M. Matteucci , en imnier- Un autre fait constaté par le même

géant dans des bains de nature diiïé- physicien est moins facile à com-

rente, mais de même densité , des prendre, car il est en opposition avec

tubes remplis de sable fin. Les tem- ce que nous avons vu précédemment

pératures étant les mêmes, l'imbibi- touchant l'influence de la température

tion, au bout d'un temps donné, s'est sur les elfels de capillarité. En com-

étendue aux hauteurs suivantes : parant l'ascension de l'eau dans des

tubes remplis de sable, M. Matteucci a

Solution de carbonate de soude. . 85 '^^» q''^ l'élévalion du liquide était

Solution de sulfate de cuivre . . 75 beaucoup plus rapide à la température

Sérum '0 de 55" qu'à 15" : au bout de soixante-

Solution de carbonate d'ammo- dix secoudes les dfiux hnutcurs étaient

"iaque 02 de 10 et de G millimèlres, et au bout

Eau distillée 60 ^g ^^^e minutes l'oau chaude était

Solution de sel marin 58 montée à 175 millimètres, tandis que

Blanc d'œuf étendu de son vo- ,, <• i i-> -. i- ,r, -i

I eau froide n était encore qu a 12 mil- lume d'eau 35 ,

II mètres (a). Lait 55 ^ '

Magendie avait déjà remarqué des

On remarquera que dans le sable différences analogues dans la rapidité

les elTets relatifs de la capillarité sur avec laquelle des substances d'origine

ces diverses substances ne sont pas les organique (du linge, par exemple)

mêmes que dans les tubes capillaires s'imbibent d'eau à la température

de verre. En remplaçant le sable tan- de 15° ou à celle de 60" {b).

tôt par du verre pilé, d'autres fois par II est à présumer que l'élévation de

de la sciure de bois, et en employant la température, en diminuant l'adhé-

comparativement de l'eau distillée et sion des grains de sable entre eux ,

de l'alcool, M. Matteucci a observé des avait augmenté le nombre des voies

différences encore plus grandes. Dans capillaires aptes à poinper l'eau. Ce

le verre pilé, l'eau s'est élevée à serait probablement un phénomène

182 millimètres et n"a dépassé l'alcool analogue à celui qui paraît se mani-

que de 7 millimètres; dans le sable, fester dans les métaux, quand ceux-ci,

l'eau n'est montée qu'à 175 milli- étant dilatés par l'action d'une très

mettes et a dépassé l'alcool de 90 mil- forte chaleur, paraissent devenir per-

(a) Matteucci, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie.

(b) Magendie, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, 1836, t. I, p. 27.

V. 6

§5 ABSORPTION.

eonslilLitives laissenl toujours cnlrc elles des espaces (lui tantôt sont visibles pour I'omI , innis qui d'autres fois sont si étroits, que nous ne pouvons les apercevoir, même avec le secours du microscope, et qui forment par lein^ réunion un système de ca- vités cai»illaires dont les parois agissent sur les liquides adjacents à la manière des tubes et des lames dont nous venons d'étudier la puissance attractive.

C'est à raison de ce mode d'action que l'buile d'une lampe monte dans la mèche de coton dont on garnit cet appareil; et, j)our mettre ce phénomène encore mieux en évidence, il suffit de disposer en manière de siphon un gros écheveau de filaments de la même matière, car on parvient ainsi à faire monter l'eau par-dessus le bord du vase qui la contient, et à vider celui-ci plus ou moins rapidement (1). roMvoir C'est aussi en majeure ])artie de l'action capillaire que dépend le gonflement qui s'opère dans la plupart des tissus animaux, lorsque, après avoir été desséchés, ils se trouvent en contact avec l'eau. Le liquide s'introduit alors dans les interstices de leur substance, comme il monterait dans un système de tubes de verre de très petit calibre; mais le lluide qui pénètre dans chacune de ces cavités et s'y accumule, exerce, à raison de sa cohésion, une certaine pression sur les parois de celles-ci ; ces parois sont extensibles, et par conséquent, au lieu de conserver son diamètre initial, chacun de ces filets liquides s'élargit et dis- tend l'espèce de réservoir il s'est logé. Le tissu augmente

méables pour certains corps étrangers seulement des forces de cet ordre, et

et s'en imbibent [a]. se trouve compliqué par la pression

(1) Celte expérience est bonne pour atmosphérique : ainsi, dans le vide, la

démontrer, dans un cours public , mf>che s'imbiberait sans donner lieu

l'action des attractions moléculaires ; à un courant allant du vase à l'ex-

mais le résultat obtenu ne dépend pas lérieur.

(a) Henry, Observations on Capillarity (Proeeedings of the American physiological Society, cl Philos. Magaz., i«Ul, t. XXVIII, p. 343).

Horsfoi'd, On the Permeability of Metals ta Mercury (Sillinian's American Jonrn. of Scienc, 1852, t. Xlll, p. 305).

Niclès, Sur la perméabilité des métaux par le mercure {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1853, t. XXXVI, p. I 54).

absorbant des tissus organiques,

IMBIBITION PAU CAPILLARITÉ. 83

donc de vol'mne, et oppose d'autant [)lus de résistance à l'intro- duction de nouvelles quantités d'eau, (pie son élasticité a été plus fortement mise en jeu.

Pour constater que la turgescence des tissus organiipies ainsi gorgés d'eau est due principalement à l'action des (brces phy- siques dont l'étude vient de nous occui)er, il suflit de prendre en considération les résultats fournis par une série d'expé- riences dues à 31. Chevreul. Effectivement, ce cliimiste a fait voir que, par rem|)loi de forces mécaniques, on pouvait enlever à la chair musculaire, aux tendons, au tissu jaune élastique, aux membranes et à la plupart des autres parties de l'économie animale , une quantité considérable de l'eau interposée dans leur substance; que, desséchés de la sorte, ces tissus se res- serraient, devenaient transparents, et perdaient la plupart de leurs propriétés physiques les plus importantes; mais que, mis en contact avec l'eau, ils s'en imbibaient de nouveau, se gon- flaient et reprenaient leur aspect accoutumé (1).

Si l'on chasse l'eau des tissus organiques par l'emploi de forces plus grandes, mais qui ne sont cependant pas de nature à détruire les combinaisons chimiques que cette substance pourrait avoir contractées avec la matière constitutive de ces corps , on fait subir à ceux-ci des pertes encore plus considé-

(1) M. Chevreul a vu que les ten- sieurs fois de suite sans qu'il en ré-

dons, en se desséchant, diminuenl suite aucune altération appréciable

beaucoup de volume, surtout dans le dans leur substance. La quantité d'eau

sens de leur épaisseur; ils perdent qu'un tendon trais perd par l'exposi-

leur blancheur, leur éclat satiné, leur tion à l'air ou dans le vide sec est, en

extrême souplesse et deviennent jau- général, d'(Miviron 50 p. 100 de son

nâtres, demi-transparents et beaucoup poids; quelquefois plus de GO p. 100.

moins élastiques que dans l'état frais; Après avoir été desséché, il peut ab-

mais que si on les plonge dans l'eau, sorber beaucoup plus d'eau qu'il n'en

ils reprennent peu à peu leurs pro- renferme naturellement. Parla des-

priétés premières, et ces changements siccation, la fibre musculaire se réduit

alternatifs peuvent être elfectués plu- à environ 1/5" de son poids initial {a).

[a) Clievreul, De l'influence que l'eau exerce sur plusieurs substances azotées solides {Annales de chimie cl de physique, 1821 , t. XIX, p. 33).

84 ABSORPTION.

rablcs. Ainsi, par la dessiccation à l'air libre, ou mieux encore dans le vide sec, on parvient souvent à enlever à ces tissus moitié plus d'eau qu'on ne l'avait fait au moyen de la pression mécanique (1) : et cela se comprend fiicilement; car le liquide qui a pénétré entre les molécules du solide ou qui adhère direc- tement à la surface des aréoles plus grandes dont la substance de celui-ci est creusée, y est retenu avec bien plus de force que celui qui, à raison de sa cohésion seulement, a été entraîné par son enveloppe fluide dans l'intérieur de ces cavités. Ce que l'on chasse d'abord, c'est donc l'eau qui occupe le centre ou l'axe des filets li({nidcs logés dans les interstices du tissu , et ce qui reste le plus obstinément, c'est la couche périphérique de ces mêmes filets.

On verra bientôt pourquoi j'insiste sur cette circonstance C?-).

Les attractions moléculaires (uii déterminent celle union entre l'eau et les tissus organiques, tant animaux que végétaux, sont très puissantes. Ainsi, chacun sait qu'un coin de bois enfoncé dans une fissure de rocher se gonfle avec lant de force en s'imbibant d'eau, qu'il fait souvent éclater la pierre, et qu'une corde, en se mouillant, se tend de façon à développer une force énorme. Il est aussi à renrarquer que ces actions moléculaires sont accompagnées d'un dégagement de chaleur qui est souvent assez considérable, et qui semble indiquer l'existence d'une cer- taine condensation de la matière sur laquelle ces forces s'exer- cent (o). Eidin la puissance des effets produits de la sorte res-

(1) En soumeltant à l'action niécani- M. Pouillet, dont j'ai déjà en l'occa-

qiie d'nne presse à pupier des tendons sion de parler, la soie, h laine, les

frais, CCS tissns ont perdn ol ponr peaux , les membranes de i'esto-

100 de leur poids; tandis que par la mac, etc., après avoir été desséchées,

dessiccation à l'air ils auraient perdu ont produit, lorsqu'on venait à les

53 pour 100 (a). mouiller, une élévation de tempéra-

('2) Voyez page 88. ture de 2 degrés ou davantage, quel-

(15) Ainsi, dans les expériences de quofois jusqu'à 10 degrés (/;).

(n) Clicvrciil, Op. cil. {.\nnales de chimie et de physUiue, 18"2t , t. XIX, p. 50). {b} l'ouillet, Op. cit. (Ibid., 18-22, t. XX, p. 151).

Influence

de l'clasliciié

des lissus

IMBIBITION PAR CAPILLARITÉ. 85

sort également du phénomène de la fixation de la vapeur aqueuse par un grand nombre de ces lissus avides d'eau , car les propriétés hygrométriques dont les cheveux et beaucoup d'autres substances animales sont doués dépendent du jeu des mêmes forces (1).

Quant à la proportion d'eau dont un tissu organique peut s'emparer par voie d'imbibition, elle varie beaucoup, toutes

, , ' I T j *'"" ^'^"^ pouvoir

choses étant égales d'ailleurs, suivant la quantité de liquide absorbant. déjà existante dans la substance de ce corps solide. A mesure que cette quantité augmente, la résistance que l'élasticité du tissu oppose à l'introduclion de quantités additionnelles s'ac- croît d'une manière plus ou moins rapide (2); mais la dis- tension croissante des cavités capillaires occupées par l'eau permet à celles-ci d'utiliser d'une manière plus complète le pouvoir attractif dont leurs parois sont douées. Du reste,

(1) La condensalion de la vapeur aqueuse par les matières organiques liygromélriques est considérée, par la plupart des physiciens, comme dépen- dant du jeu de forces chimiques, et par conséquent comme ne pouvant être assimilée aux actions capillairos(ai. Mais M. i'ouiilet a constaté des effets du même ordre produits sur la vapeur aqueuse par des corps dont la iiatiiie chimique ne paraît pas susceptible de modifications dans des circonstances de ce genre. Ainsi il a vu que Far- gent et le platine se couvrent d'une couche d'eau dans l'air très humide, mais non saturé, et ses expériences l'ont conduit à celte conclusion, que tous les corps qui se mouillent sont

plus ou moins hygrométriques (6). Par conséquent, il faut ranger l'attrac- tion moléculaire dont dépend cette condensalion dans la catégorie des agents que l'on désigne généralement sous le nom de forces physiques. Je ferai remarquer cependant que dans la classification adoptée aujourd'hui |)ar M.Clievreid, l'allraclion (a])illaire prend place parmi les forces chimi- (jucs, et se trouve désignée sous le nom (VaffinUé LupiUaire (c).

(2) Au sujet des rapports qui exis- tent entre l'allongement et les charges, on peut consulter le travail de M.Wer- iheim sur l'élasticité des lissus orga- niques ((/).

{a) Clievreul, Op. cit. {Annales de chimie et de physique, t. XtX, p. 50).

(6) Pouillet. Op. cit. [loc. cit., p. 156).

(c) Voyez l'article de ce savant sur la Mécanique chimique, dans le Cours de chimie générale de MM. Pelôuze et Freniy, 1850, t. III, p. 890.

((/) fi. Werllifim, Mémoire sur l'élasticité et la cohésion des principaux lissus du corps humain {Annales de chimie et de physique, 1847, t. XXI, p. 385).

86 ABSORPTION.

l'augmentation dans la puissance d'inibibition due à cette der- nière cause est très petite, comparativement à la progression négative déterminée par la réaction du tissu élastique , et il arrive toujours un moment celle-ci fait équilibre à l'attrac- tion capillaire. L'imbibition est alors parvenue à son terme, et c'est pour désigner cet état que les physiologistes, emprun- tant leurs expressions au langage de la chimie, disent que les tissus sont arrivés à leur point de saturation. Ainsi, plus un tissu organique est éloigné de cet état de saturation, plus il aura de tendance à s'emparer de l'eau avec laquelle il se trouve en contact. Or, nous verrons bientôt que l'ab- sorption suit cette loi chez l'animal vivant aussi bien que sur le cadavre. Influence Lcs différcuccs que nous avons déjà eu l'occasion de remar- ci.im^quT quer dans le mouvement ascensionnel de divers liquides dans esbquides j^^^ petits tubes de verre s'observent aussi dans le degré d'ac- de rirabibîuon. l'^ïté avcc Icqucl les tissus organiques s'imbibent de substances dont la nature chimique varie. Ainsi un morceau de tendon, préalablement desséché et plongé dans l'huile n'éprouvera presque aucun changement, et son poids n'augmentera que très peu ; dans l'alcool , il se chargera d'une quantité un peu plus considérable de liquide , mais il ne reprendra ni son volume ni son aspect naturels, tandis que dans l'eau son poids doublera bientôt, et pourra même tripler ou quadrupler; et en se gontlant de la sorte il retrouvera ses propriétés physiques ordinaires. Des différences analogues s'observent quand on compare l'action absorbante des tissus organiques sur l'eau et sur les dissolutions salines. Ainsi, dans les expériences inté- ressantes faites sur ce sujet, il y a près de quarante ans, par M. Chevreul, le tissu jaune élashque, préalablement dessé- ché, ne s'est emparé que d'environ 57 centièmes d'eau quand on le plongeait dans une dissolution saturée de chlorure de sodium , taudis qu'il se chargeait de 240 centièmes de liquide

IMBIBITION PAR C\PlLLMilTÉ. 87

quaiKl c'était de l'eau pure avec laquelle il se trouvait en con- tact (1).,

On pouvait donc prévoir (|u'en faisant varier le degré de conceniration des dissolutions salines dans lesquelles on plon- gerait un corps analogue , on déterminerait des dit'terences correspondantes dans les f[uantilés de liipiide dont celui-ci s'imbiberait; et, en effet, les reclierclies plus récentes de M. Liebig et de M. Cloetta montrent (pie les choses se passent de la sorte ("2).

(1) L'auguientalion de poids obser- vée par M. Chcvieul n'élait que de 3 à 8 pour iOO, lorsqu'il plaçait du tissu élastique jaune, des tendons, des li- gaments, etc., dans de Thuile pendant onze heures, terme au delà duquel le poids de ces substances resta sla- tionnaire.

Dans ces mêmes expériences , la quantité d'eau dont les tissus orga- niques s'imbibaient était toujours plus petite quand ils étaient immergés dans de l'eau salée que lorsqu'ils étaient en rapport avec de l'eau pure; mais, en général, la différence n'était pas aussi considérable que dans l'exemple cité ci-dessus. Ainsi 100 parties de tendon d'Éléphant desséchées ont pris en vingt-quatre heures 178 parties d'eau, tandis que le même tissu également desséché, mais plongé dans de l'eau saturée de chlorure de sodium, a ga- gné en poids 11^8 pour 100 ; et, pour arriver à ce degré de saturation, il a fallu prolonger l'immersion pendant vingt et un jours (a).

('2) Ainsi M. Liebig a trouvé que 100 parties du tissu desséché de la

vessie du Bœuf prenaient par imbi- bilion, en vingt-quatre heures :

208 volumes d'eau pure,

t33 volumes d'une dissolulioii conceii- Irée de clilorure de sodium (den- sité, 1,204).

En quarante-huit heures la quan- tité de liquide absorbé était de :

310 vohuncs d'eau pure;

288 volumes de dissolution saline con- tenant 4 tl'eau et ~ de la dissolu- lion précédente ;

235 volumes du même mélange dans les proportions de ~ d'eau et -J de la dissolution concentrée;

219 volumes du mélange contenant \ d'eau el -r de la dissolution con- centrée de sel marin.

Avec la vessie de Porc desséchée, les dilïércnces furent encore plus grandes. Kn vingt - quatre heures 100 parties absorbèrent : »

350 volumes d'eau distillée,

1 59 volumes d'eau saturée de chlorure

de sudium {b}.

Dans une expérience analogue,

(a) Chevreul, Op. cit. (Annales de chimie et de physique, 4821 , t. XIX, p. 52).

(b) Liebig, Reclterches sur quelques-unes des causes du mouvement des liquides dans l'org»- nisme animal (Annales de chimie et de physique, 1849, 3" série, t. XXV, p. 374).

88 ABSORPTION.

innuc-nce § k- L'éfLitle allciitive des pliéiiomènes qui accompagnent ''"''r""''''rimbil>ifion des dissolutions salines par les tissus organiques '%TSe°" a permis aux i)liysiologistes de découvrir certains effets de des liquides. (,.^p|j].,j,j(ji ^Jqjjj ]gg piiysicicns nc pouvaient soupcoimer l'exis- tence tant qu'ils ne se servaient que de tubes de verre de petit calibre pour leurs expériences sur les attractions moléculaires, et dont la connaissance est d'une grande valeur pour la philosophie chimique ainsi que pour l'explication des actes physiologiques.

Je viens de montrer que l'attraction adhésive exercée par les tissus organiques sur l'eau et sur le sel commun n'est pas également énergique. Nous en pouvons conclure qu'en pré- sence d'un mélange de molécules de ces deux substances, ces tissus attireront dans leurs interstices les unes avec plus de force que les autres, et s'en chargeront en plus grande pro[)or- tion. .'Mnsi, (juand un tissu perméable est plongé dans une dissolution saline, le liquide qu'il accumule dans son intérieur est moins riche en sel (jue ne l'est le bain circonvoisin, et la différence est d'autant ])his marquée, que l'imbibition s'est effectuée par l'action attractive de cavités plus petites.

En étudiant les [)hénomcnes de Iranssudation dont l'orga- nisme est le siège, j'ai déjà eu l'occasion de mentionner des faits du même ordre, et de les attribuera ce que j'ai appelé une fiUralion élective (1 ). Nous aurons bientôt l'occasion d'y revenir

M. Cloella a constaté une absorp- Avec le sulfate do sonde la quantité

tion de : de liquide absorbé était de :

5,4 pour \ 00 d'une dissolution de sel j _i 5 ijuand la dissolution était cliargce

lOMunun dont la densité était de 5,5 pour 100 de sel ;

1,35; O.f^O quand elle ciiMleiiaitl 1,7 ponr 100

24,3 poiw 100 d'une dissolution seni- dg sp) f^a). Ijlalde, mais n'ayanl que 1,01

de densité. (1) Voy. ci-dcssiis, tonic IV, p. /|23.

(a) Cloelta, Di/I'iisionspenurlii- durcit Nnnbvanen mit zwei Sahen. Zuricij, 1851,

INFLUENCE DE LA CAPILLARITÉ SLR LES MÉLANGES. 89

encore une fois, et je me bornerai à ajouler ici que cette influence remarquable des effets de la capillarité sur la compo- sition chimique des liquides s'explique facilement par l'inde'- pendance des actions attractives exercées par le corps solide sur les molécules de l'eau et sur les molécules du sel qui se trouvent mélangées avec les premières. Le tissu perméable attire plus fortement l'eau ; cette substance doit donc tendre à s'accumuler contre la surface des cavités capillaires du tissu organique, et à constituer dans celles-ci une sorte d'enveloppe à l'inlérieur de laquelle se trouvera la dissolution saline non modifiée (1).

(1) M. Bi'iicke fut le premier à ap- peler rallention des physiologistes sur la faculté que les tissus perméa- bles ont de séparer Teau d'une disso lution saline, et par conséquent de modifier le degré de concentration de celle-ci (a). Je reviendrai sur ses ex- périencer. quand je parlerai plus par ticulièrenient de Tendosmose. M. Lud- wig alla plus loin, et fit voir que le mécanisme du phénomène devait êlre celui indiqué ci-dessus. Ce physiolo- giste compara d'abord avec beaucoup de soin les proportions d'eau et de matières salines contenues dans le liquide que le tissu organique enlevait à une dissolution dont la composition était connue. Il opéia tantôt avec du chlorure de sodium, tantôt avec du sulfate de soude, et toujours il trouva que la proportion d'eau devenait plus forte dans la dissolution dont le tissu organique préalablement desséchi' s'é- tait imbibé que dans le bain dont ce liquide provenait. Ainsi, en employant comme bain de l'eau chargée de

7,220 pour 100 de sulfate de soude, il trouva que le liquide imbibé par le tissu de la vessie de Cochon desséchée ne renfermait que /i,'i3 pour 100 de sel, et en plongeant un morceau des parois de l'aorte du Bœuf dans de l'eau chargée de 19,79 centièmes de chlorure de sodium, il reconnut que la dissolution perdait environ 3 pour 100 de sel en pénétrant dans ce tissu spongieux.

Pour vérifier ou infirmer les vues théoriques de M. Briicke, relativement à la cause de cette dilTérence et au mode (le distribution de l'eau et de la matière saline dans les capillaires des tissus animaux, M. Ludwig fit une autre série d'expériences. Il est évi- dent que si celle théorie est l'expres- sion des faits, la dissolution saline dont le tissu s'est chargé ne doit pas être homogène dans toutes ses parties ; que dans le voisinage immédiat des surfaces dont l'attractwn adhésive détermine la séparation de l'eau et du sel, il doit y avoir une couche

(fl) E. Briicke, De diffusione humorum per sepla mnrtna d viva. Berlin, 1S41. DeUràçie iur Lehre von der Diffusion tropfbar/Ulssiger KOrper durcit porose ScheidevMnde (Po^g'endorÛ"» Ànnalen, 18i3, t. LVItl, p. 77).

90 ABSORPTION ,

Cette eouclie périphérique, composée d'eau pure ou d'eau avec très peu de inalières étrangères, adhère riécessairemenl avec plus de force aux parois des cavités interstitielles, et ne peut être que très difficilement chassée de celles-ci par une pression mécanique; aussi quand on examine comparativement le degré de concentration d'une dissolution saline qui va se trouver en contact avec un tissu organique ajite à s'en imhiber, la densité moyenne de cette même dissolution après son entrée dans ce corps poreux, et la composition du liquide qui s'écoule ensuite de celui-ci sous l'inlliience de la pression, trouve-t-on que les proportions relatives d'eau et de sel varient d'une manière conforme à ce que la théorie indique.

Pour rendre les effets de ces actions moléculaires saisissables

mince do la première de ces sub- stances, sinon à l'étal de pureté, au moins très peu chargée de particules salines, et que la densité de la disso- lution doit augmenter de la circonfé- rence vers Taxe de chacun des petits conduits occupés par le liquide ab- sorbé. Il est évident aussi que la cou- che fluide qui adhère directement aux parois de ces cavités cai)iliaires doit y être retenue beaucoup plus forte- ment que les couches centrales de ces petits lilets liquides, et que par con- séquent ce sera d'abord cette dernière portion qui sera chassée au dehors par l'action d'une pression mécanique exercée sur le tissu ainsi chargé de liquide. Si la théorie de M. Briicke est vraie, il faut donc que r(>au qui s'échappera d'un tissu spongieux im- bibé d'une dissolution saline soit plus riche en sel que ne l'est en moyenne le liquide qui occupe la totalité des

cavités inlerstitielles de ce tissu. M. Ludwig compara donc la composi- tion de la dissolution saline existant d'ans la substance spongieuse de di- vers tissus animaux et celle du liquide qui s'échappait de ceux ci sous l'in- fluence d'une pression mécanique, et il trouva qu'elfectivement ce dernier était notablement plus chargé de sel, mais ne dillérait pas beaucoup eu densité de la dissolution dans laquelle le tissu avait puisé le liquide dont il s'était imbibé ; de sorte que la diffé- rence entre la composition de ce der- nier et celle du liquide absorbé devait être attribuée à l'introduction d'une couche d'eau pure ou presque pure, puisée dans le bain salin et appliquée immédiatement contre les parois des cavités capillaires, eu manière de gaine autour des lilets de dissolution entraînés dans ces mêmes cavités par suite des actions de capillarité (a).

(a) G. Ludwig, Ueber die endosmotischen .équivalente wid die endosmotische Théorie (Zeit- schrifl tiïr rationelle Médian, 1 «49, t. Vlll, \>. ■! u et sniv.). Lehvbuch der l'hyswlogie des Menschcn, 1852, t. I, p. 02.

INFLUlilNCE DE LA CAPILLARITÉ SUR LES MÉLANGES. 91

à la vue, j'aurai recours à une expérience faite par M. Ludwig. Plaçons dans deux ilacons munis do bouclions de cristal bien rodés, de façon à empêcher l'évaporation du liquide inclus, une solution saturée à froid de chlorure de sodium, et, avant de les fermer, introduisons dans l'un des vases un morceau de vessie préalablement desséchée. Dans le flacon il n'y a que la dissoluhon saline, celle-ci ne donne lieu à aucun dépôt de cristaux ; mais dans celui se trouve le lissu organique, les choses ne se passent pas de même : le tissu ne tarde pas à s'imbiber du liquide dans leijuel il baigne; mais, comme il enlève à celui-ci plus d'eau que de sel, et que la dissolution dont le bain se compose est saturée, il ne peut effectuer celte soustraction qu'en déterminant la solidification d'une certaine quantité de la matière saline, et effectivement on le voit se couvrir de cristaux abondants.

§ 5. En résumé, nous voyons donc qu'à raison même insunk des propriétés physiques des parties solides de l'organisme, il 'crpiiTairés existe, chez les animaux comme chez les plantes, une force véiabdnent

1 !>/>• '', 1 1 (>i 1 X* (lus coiiranls

rpu tend a hure pénétrer dans la prolondcur des tissus per- observés. méables de ces êtres l'eau et beaiicou[) d'autres liquides avec lesquels la surface de leurs organes se trouve en contact. Nous voyons aussi que les effets dus à ces actions capillaires doivent varier d'intensité et même de signe, suivant la nature des substances en contact avec les tissus organiques , suivant les propriétés de ceux-ci, et suivant les dimensions des espaces confluents dont ils sont creusés. Nous aurons à revenir bientôt sur ces conditions , dont dépend le degré d'activité avec lequel Timbibition s'opère; mais, en ce moment, une autre question doit nous préoccuper, et nous devons nous demander si l'attraction capillaire exercée par les solides de l'économie animale peut suffire à l'établissement de courants, soit de l'exté- rieur du corps vivant jusque dans les cavités dont se compose l'appareil circulatoire, soit du bain Dutrochet a découvert

sancn les actions

92 ABSORPTION.

les phénomènes osmotiques jusque dans l'intérieur des poclies membraneuses employées dans les expériences de ce physiolo- giste ingénieux?

Quelques auteurs ont supposé qu'il en était ainsi (1); mais il suffit de considérer attentivement le jeu des forces dont dépend l'élévation d'im liquide dans un tube capillaire, pour reconnaître que cette liy[)othèse est inadmissible. Effective- ment, la puissance attractive qui fait monter le liquide de la sorte pourrait bien faire arriver celui-ci jusqu'au bord supérieur du canal, si son intensité était suffisante ; mais elle ne pourrait jamais le déterminer à se déverser au dehors, et établir de la sorte un courant comme on en observe souvent dans les expé- riences sur l'osmose, car, dès que le liquide en mouvement dans l'endosmomèlre dépasserait le niveau de l'extrémité supé- rieure du tube capillaire, elle agirait en sens inverse et tendrait à retenir ce même liquide. Les anciennes expériences de du Fay, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler (2), montrent que rallraction adhésive exercée par les parois d'un tube capillaire sur le liquide inclus [)eut balancer les effets d'une pression hy- drostatique très notable, et devient un obstacle à l'écoulement de celui-ci au dehors.

Ainsi l'action capillaire dépendante de la surface des cavités invisibles dont les membranes organiques sont creusées pourra suffire pour amener des liiiuides de l'une des surfaces de ces corps solides jusque dans le voisinage iuimédiat de la surface opposée, et pour produire l'imbibilion des tissus de l'organisme, mais sera toujours insuffisante pour faire avancer ce liquide plus loin et pour établir à travers la subslance de ces corps

(1) Magendie, par exemple, sup- qu'en une inibibilion à double cou- posait que les phénomènes d'endos- rant (a). mose et d'exosmose ne consistaient ('J) Voyez ci-dessus, page 56.

(fl) MaijeiKlie, Lci'ons sur les plinwmènes 'pitysiques de la vie, t. I, p. 83.

ACTION DES LIQUIDES LES UNS SUR LES AUTRES. 93

un courant quelconque. Tout en attribuant beaucoup d'impor- tance aux eiïets de la capillarité dans la production des phéno- mènes complexes dont l'étude nous occupe ici, nous ne pouvons donc expliquer par le jeu des forces attractives que possèdent les tissus organiques, ni les phénomènes osmotiques, ni l'ab- sorption qui fait pénétrer les matières étrangères de l'extérieur des vaisseaux jusque dans le torrent de la circulation. Ce mou- vement ne peut être déterminé que par l'intervention de quelque autre force, et, pour en dé(;ouvrir la cause, cherchons d'abord à nous rendre compte de l'action que le milieu en rapport avec la surface vers hKjuelle le courant se dirige peut exercer sur les liquides dont les cavités capillaires de la cloison se sont rem- plies.

§ 6. Si la cloison qui sépare entre eux deux liquides est éga- lement perméable dans tous les sens, et si ces deux liquides sont doués des mêmes propriétés, l'intluence de ceux-ci ne produira aucun effet sensible sur l'état d'équilibre du fluide logé dans les canaux capillaires dont cette cloison est creusée (1). Mais si ces liquides sont hétérogènes, il pourra en être autrement, car l'at- traction exercée parles molécules du liquide intérieur sur celles du liquide extérieur pourra l'emporter sur la force qui fait ad- hérer ces dernières aux parois des conduits capillaires intermé-

Actioii des liquides liétérogèncs

les uns sur les autres.

(1) Si le fluide que j'appellerai interstitiel élail compressible comme le sont les gaz, son volume diminue- rait par l'eiïet de la pression exercée en sens opposé par les deux filets liquides attirés dans le canal capillaire parlesextrémitésopposéesde celui-ci ; mais cette pression étant égale de part et d'autre, il resterait stationnaire au milieu de la cloison et continuerait à former écran. Si le canal capillaire était vide, les deux filets liquides s'y rencontreraient et formeraient une masse continue, mais le liquide A ne

pourrait repousser le liquide B ni être repoussé par lui, puisque nous avons supposé l'action capillaire égale de part et d'autre; par conséquent il n'y aurait établissement d'aucun courant. Eulin, si le canal capillaire est déjà occupé par un liquide identique avec A et B, ceux-ci ne pourront pénétrer ni l'un ni l'autre, parce que l'attraction exercée par les parois de ce conduit sur le liquide cavitaire sera égale à celle que ces mêmes parois exercent sur A et sur B, et il n'y aura aucune cause de déplacement.

9/l ABSOr.l'TlON,

diaircs, ainsi (lue sur la force (jui tendrail à faire pénéirer le liquide inlérieur dans ces mêmes canaux et à s'opposer au pas sage du lirpiide extérieur. Celui-ci serait alors sollicité à avancer -davantage et à se réunir au li(]uide inférieur; enfin, si l'attrac- tion e^î^ercée de la sorte par l'un des liquides sur l'autre était suffisamment grande, il en résulterait un mouvenient d'afflux de l'extérieur à l'intérieur, c'est-à-dire un courant endos- motique, et un phénomène analogue à celui qui constitue l'ab- sorplion.

Pour avancer dans l'étude du mécanisme du transport des matières étrangères de l'extérieur de l'organisme ou des cavités circumvasculaires jusque dans le torrent de la circulation, nous avons donc besoin de connaître le mode d'action des liquides sur les liquides, et je me vois conduit de la sorte à faire une nouvelle excursion sur le domaine des sciences physico- chimiques.

S 7 Chacun sait que les liquides, quand ils sont en

Cause '-' 111

deianiiscibilité ^Q,-,jjjj.[ j.ç comuortent d'une manière très variable : les uns

des liquides. ' '

sont miseibles, les autres ne se mêlent pas; et lorscju'on veut se rendre bien compte de la cause de ces différences, il est bon de revenir au point de départ que j'ai choisi pour l'étude des actions capillaires, et de considérer ce qui se passe quand de très petites masses ayant la forme de gouttes sont en pré- sence.

Nous avons déjà vu qu'il existe de très grandes variations dans l'intensité relative de la force de cohésion qui tient unies les molécules des divers liquides et de l'attraction adhésive que les corps solides exercent sur ces substances. 11 en est de même jiour les réactions des différents liquides les uns sur les autres. Ainsi, quand une goutte d'eau roule sur une surface elle conserve sa forme sphérique et qu'elle vient à rencon- trer un globule de mercure, elle ne se confond pas avec celui-ci et reste arrondie, parce que la force d'attraction des

ACTION DES LIQUIDES LES UNS SUR LES AUTRES. 95

molccules de l'eau pour elles-niêmes est supérieure à la force d'allraclion agissant entre ces molécules et celles du mercure, qui, de leur côté, sont maintenues le plus rapprochées possible, c'est-à-dire en boule, par une force de cohésion supérieure :\ l'attraction dont je viens de parler. 11 en est encore de môme quand des globules d'eau et d'huile viennent à se rencontrer; mais, quand une goutte d'eau arrive en contact avec une goutte d'alcool , les choses se passent tout autrement ; les deux glo- bules se confondent rapidement, et ne forment plus qu'une masse unique. En effet, l'attraction des molécules de l'eau pour celles de l'alcool, et réciproquement, est plus énergique que l'attraction cohésive des molécules de l'un ou de l'autre de ces liipiides pour elles-mêmes, et celte attraction détermine leur rapprochement.

Il y a donc des différences très considérables dans le degré de puissance avec lequel les liquides liétérogènes s'attirent mutuellement.

Pour mieux apprécier riniluence de cette inégalité dans la force adhésive, examinons de plus près ce qui se passe (]uand l'eau est en présence de l'huile ou de l'alcool.

Chacun a pu remarquer que l'imile versée sur l'eau surnage à raison de sa moindre densité, et que si la quantité d'b.uile déposée ainsi est très petite, ce liquide conservera en dessous une surface convexe, tout en s'étalant en lame mince, et ne se mêlera pas à l'eau; bien plus, si l'on agite le vase de façon à diviser l'huile en parcelles très minimes et à éparpiller celles-ci dans tous les sens au milieu de l'eau, on la voit, par le repos, se réunir plus ou moins rapidement à la surface de ce liquide, et reprendre la position que l'équilibre hydrostatique lui assigne. Ainsi le mélange opéré artificiellement n'est pas permanent.

Si, au lieu d'employer de l'huile, on verse doucement à la surface de l'eau une certaine quantité d'alcool, ou mieux encore du vin coloré, atin de rendre les phénomènes plus visibles, on

Action

96 ABSORPTION.

remarque aussi que ce dernier liquide forme au-dessus de la première une couche distincte ; mais la ligne de démarcation cesse bientôt d'être nette, et l'on voit le vin, malgré sa légèreté, descendre peu à peu dans l'eau et la teinter de plus en plus ; au bout d'un certain temps, le mélange se sera complété spontané- ment, et, lorsque ce résultat sera obtenu, ou lorsqu'on aura mêlé les deux liquides en les agitant, la différence de leur pesanteur spécifique ne suffira plus pour les séparer : les molécules du vin se seront distribuées d'une manière uniforme dans toutes les parties de la masse d'eau sous-jaccnte. Ces deux liquides sont donc miscibles, et la force qui lient les molécules du vin unies aux molécules de l'eau balance non-seulement l'attrac- tion cohésive de ces deux substances , mais aussi la force hydrostatique due à leur densité inégale, qui tend à faire monter les premières et descendre les secondes.

Des phénomènes analogues s'observent quand on met en deslquilill présence un corps solide et un li(juide qui est susceptible, non- seulement de mouiller le premier, mais aussi de le dissoudre. Les mêmes forces déterminent les dissolutions aussi bien que les mélanges permanents dont je viens de parler, et, pour arriver à des idées nettes touchant l'action réciproque des li(piides, il me paraît indispensable de considérer d'abord ce qui se passe dans le travail de la dissolution.

Prenons pour exemple un morceau de glace, et plaçons-le en rapport avec de l'acide sulfurique concentré : la glace se dissoudra, c'est-à-dire fondra et se dispersera dans l'acide, jusqu'à ce que celui-ci se soit chargé d'une certaine propor- tion d'eau. L'attraction exercée par l'acide sulfurique sur les molécules de la glace aura donc vaincu la force de cohésion qui retenait celles-ci comme enchaînées entre elles et leur donnait l'état solide ; elle aura produit sur ces particules un el'fet analogue à celui qui résulte de leur combinaison avec une quantité considérable de chaleur, et l'eau ainsi liquéfiée aura

ACTIONS MOLÉCULAIRES DES LIQUIDES. 97

été introduite dans la masse de l'acide et distribuée d'une ma- nière uniforme dans toutes les parties de celle-ci, car la combi- naison ou mélange ainsi produit sera identique sur tous les points. Pour arriver au but que je me propose d'atteindre, nous n'avons pas besoin d'examiner ici quel est le caractère de la force attractive déployée [)ar l'acide sulfurique , et de chercher si elle moditie ou non le mode de groupement atomique des corps réagissants ; que cette force soit l'affinité chimique ou l'agent que nous avons vu intervenir dans la production des phénomènes de capillarité, et que nous avons appelé attraction adliésive, les effets dynamiques pourraient différer quant à leur intensité, mais resteraient les mêmes en ce qui touche au chan- gement d'état du corps dissous et à son mode de répartition au sein du menstrue, c'est-à-dire du lUiide dissolvant; et toujours l'action dissolvante de celui-ci se prolongera tant qu'il n'y aura pas équilibre entre la puissance attractive dont ce menstrue est doué et la somme des forces contraires qui ten- dent à maintenir les molécules de l'eau à l'état de glace séparées de celles-ci et réunies entre elles sous la forme solide. Le degré de solubilité de la glace dans l'acide sera donc déterminé par la résultante de ces forces contraires ; et quand cette résultante deviendra égale à zéro, la dissolution de l'eau dans l'acide sera dans l'état d'équilibre que les chimistes appellent sa^raaon. Mais les molécules de l'acide et celles de l'eau à l'état solide n'en persisteront pas moins à s'attirer réciproquement avec un certain degré de force; et il est visible que si l'on supprimait l'influence de la cohésion de la glace qui balance cette attrac- tion, celle-ci continuerait à déterminer le rapprochement entre les particules de ces deux corps hétérogènes, et une nou- velle quantité d'eau pénétrerait entre les molécules de l'acide. Or, cette désagrégation des particules de l'eau solide s'effectue par l'action de la chaleur, quand la glace vient à fondre sous l'influence de cet agent physique, et par conséquent l'acide sulfu- V. 7

98 ABSOrU'TION'.

riquc, en vertu des l'oroes attraelives doiit nous venons d'exa- miner le jeu, pourra se pénétrer d'une quantité d'eau liquide supérieure à celle dont il s'emparerait si ce dernier corps était à l'état solide. Il en résulte que des phénomènes du même ordre que ceux qui caractérisent l'action dissolvante peuvent se pro- duire quand deux li(}uides sont en contact, et déterminer la répartition uniforme des molécules de l'un dans la masse con- stituée par l'autre.

Nous verrons bientôt que l'attraction dévelo[)pce de la sorte est une cause de mouvement pour les dissolutions salines et les autres liquides qui se trouvent en rapport avec les humeurs de l'organisme, et joue un rôle considérable soit dans l'endosmose, soit dans l'absorption physiologique; mais, avant d'examiner ce point, cherchons à compléter l'idée que nous devons nous former de la réaction des liquides miscibles qui viennent à se rencontrer. Mode Si la force qui détermine le rapprochement des molécules

.ifl distribution j l'aeide sulfurifiue et de l'eau était seulement rallniité clii-

des molécules i<>-i i»-- .^ j

enîiLoiuTion m'*liie, Ic mélange spontané de ces deux liquides ne se produi- rait plus du moment que cette affinité serait satisfiiite, et, en admettant même qu'à raison de cette force chaque molécule d'acide pût agglomérer autour d elle un très grand nombre de molécules d'eau, les effets ainsi produits auraient un terme, et, passé ce terme, rien ne solliciterait les particules d'acide hydraté à se répandre dans un volume d'eau plus considé- rable. Il en serait encore de même si le mélange des deux liquides n'était provoqué que par l'atlraclion adliésive agissant seule ou conjointement avec l'affinité; car, d'une part, la sphère d'activité sensible de cette force aurait aussi des limites, et, d'autre part, dès que la molécule d'acide serait en équilibre au milieu d'un groupe de molécules occu[)ant la totalité de l'espace correspondant à cette sphère, elle y resterait station- naire tant qu'une autre cause ne viendrait pas troubler cet

ACTIONS MOLÉCIILAIKES DES LIQUIDES. 99

e(iiiilibre. Or, le voisinage d'une masse plus ou moins consi- dérable d'eau située au delà de ces limites ne saurait produire cet effet. Cependant l'expérience nous ap[)rend que si l'on met en contact de l'acide sulfuri([ue et de l'eau, le premier de ces corps se répartira uniformément dans le second et y restera distribué de la sorte, (piel que soit le volume de ce dernier li(juide. Ainsi, dix molécules d'acide qui se placeront à égale distance dans un volume d'eau constitué [)ar mille molécules de ce corps, se répartiront de la même manière dans un volume composé d'un million ou de cent millions de ces mêmes molé- cules ; de sorte que des portions du mélange prises dans des parties quelconques de la masse formée par celui-ci offrent les mêmes proportions d'eau et d'acide.

L'explication de ce pliénomène a été donnée par un des pliysiciens que la Faculté des sciences de Paris est heureuse de pouvoir compter au nombre de ses membres : Gay-Lussac (Ij.

Chacun sait que les corps, tant solides que liquides, changent i.-diat dos corps

d, t. ... ,, ,, / , c^,, . '1 ' en (lissolulioi

état sous 1 mlluence d une température suilisamment élevée, est analogue

pourvu qu'ils ne soient pas décomposés préalablement par cette force, et que lorsque leurs molécules conslitutives ont été de la sorte écartées entre elles, celles-ci cessent d'exercer sur elles- mêmes une attraction réci[)ro(jue ap|)réciable, mais obéissent à la force répulsive que la chaleur leur communique, et tendent en conséquence à se répartir uniformément dans l'espace; quand des obstacles s'opposent à leur dispersion, elles pressent

(1) Gay-Lussac élait à la lois un qui a été Torigiiie de nos connais -

grand chimisle et un des physiciens sances sur les radicaux composés, et

les plus illustres de son époque. Ou un grand nombre de travaux d'iuie

lui doit la découverte de la hn dite grande importance. 11 naquit en 177 S

des onluines, qui régit les combinai- et mourut en 1850, Arago et M, Biot

sons des gaz; un travail capital sur ont publié l'un et l'autre des notices

l'iode, la découverte du cyanogène, sur ses ouvrages (a).

(a) Arago, Notices biographiques , I. III {Œuvres).

Biot, Notice sur Gay-Lussac (Journal des savants, 1850).

en dissolution est analojue celui des gaz.

100 ABSORPTION.

contre ceux-ci, et, ({luiikI elles cessent d'être confinées, elles se répandent au loin. Nous avons déjà eu l'occasion de voir qu'en vertu de ce pouvoir expansif, les gaz occupent tous les espaces vides ils ont accès, et se logent aussi dans les interstices que les molécules des fluides laissent entre elles (1). Or, les mo- lécules d'un solide ou d'un liquide qui, par l'action dissolvante d'un menstrue , se trouvent écartées entre elles de la même façon, doivent se comporter d'une manière analogue; et par conséquent si les forces attractives (jui déterminent le groupe- ment d'un certain nombre de molécules du corps dissolvant autour de chaque molécule du corps soluble conservent une action sensible à des distances déjà la force de répulsion l'emporte sur la force de cohésion, ces molécules doivent se comporter comme le font les particules d'un gaz ou d'une va- pein-, c'est-à-dire se repousser mutuellement et tendre à se ré[)artir uniformément dans la totalité de l'espace que le menstrue leur offre. C'est précisément de la sorte (ju'on les voit se répandre au loin, et par conséquent le phénomène de la diffusion des liquides dans les liquides, de même que l'expan- sion des gaz dans l'espace, s'explique par l'inégalité dans la loi de décroissance des forces attractives et répulsives avec les distances, décroissance qui amène la cessation des effcis sen- sibles de l'attraction quand les molécules réagissantes sont arri- vées à un certain degré d'écartement, mais qui ne modifie pas de la même manière la puissance répulsive, dont l'intensité ne dimiiuierait pas aussi rapidement avec l'augmentation de la distance et produirait seule des effets appréciables au delà des limites cpie je viens d'indiquer.

Le mélange spontané des liquides miscibles qui se trouvent dtnVd-r'œs en contact est donc un phénomène complexe et peut être déter- miné par deux causes : par les forces attractives chimiques ou

(1; Voyez tome 1*", page Z|56 et suivanles.

DilVusion

liquides.

DIFFUSION DES LIQUIDES. 101

physiques qui sollicitent les molécules hétérogènes à se rappro- cher, et par la force répulsive qui, duc à la chaleur ou à tout autre agent, tend à écarter entre elles les molécules homogènes, et n'est plus balancée par l'attraction réciproque de celles-ci dès que ces mêmes molécules sont situées à nne certaine distance les unes des autres. Ce sont les effets dus à cette action répul- sive qui constituent essentiellement le phénomène que les phy- siciens désignent sous le nom de diffusion des fluides, et il est facile de concevoir qu'une puissance tendant à faire pénétrer les molécules d'ini corps du sein d'un licjuide dans la siihstance d'un liquide adjacent, doive jouer un rôle considérable dans l'absorplion physiologique, phénomène par suile duipiel les fluides en contact avec la surface humide de nos organes pénètrent jusque dans la masse des liquides nourriciers en cir- culation dans l'organisme.

Tout ce que je viens de dire au sujet du mécanisme de la dissolution de la glace dans l'acide sulfurique, et de la diffusion subséquente des molécules de l'acide hydraté au sein d'un volume quelconque d'eau liquide, est applicable au phénomène de la dissolution en général, quel que soit le corps solide dont le liquide s'empare, et quel que soit le menstrue qui produit cet effet (1). Pour arriver au but que je me propose," il n'est pas

(1) Ainsi quand l'eau dissonl du sel, rique, elle s'empare donc d'une qunn-

cedernieiToips est liquéfié par l'action tité correspondante do chaleur, et en

attractive de ce menstrue, tout comme sonsirayant celle-ci aux corps envi-

nous avons vu la glace fondre au con- ronnants , produit du froid. Aussi

tact de l'acide sulfurique. Or nous malgré le dégagement de clialeur

savons que les corj)s, en changeant qui résulte en même temps de l'union

d'état, rendent latente une quantilé de l'acide sulfurique avec un certain

plus ou moins considérable de chaleur, nombre de molécules du liquide, et

et que l'eau, par exemple, pour pas- qui balance en partie cet effet frigo-

ser de l'état solide à l'étal liquide, rilique, peut-on obtenir ainsi un grand

sans changer de température, absorbe abaissement de température : par

79 calories par kilogramme. Quand exemple, en mêlant 8 pari les de neige

la glace se dissout dans l'acide sulfu- et 10 parties d'acide sulfurique étendu,

102 ABSORPTION,

nécessaire de chercher à démêler la part que l'affinité chimique peut avoir dans l'action attractive exercée par le dissolvant sur les particules du corps soluble; la distinction serait d'ailleurs bien difficile à établir (1), et nous pouvons également nous dis- penser de l'examen des lois de la dissolution. Mais, d'après ce que nous savons déjà concernant la diffusion des liquides, les physiologistes conviendront avec moi qu'il peut nous être

on parvient à faire descendre le ther- momètre jusqu'à 68 degrés au-dessous de zéro.

La même absorption de chaleur se fait quand un sel se dissout dans l'eau. Ainsi en mettant en présence des par- ties égales d'azotate d'ammoniaque et d'eau, on détermine dans le mélange un abaissement de température de près de oO degrés.

Mais les effets frigorifiques dépen- dants des piiénomènes de la dissolu- tion ne tiennent pas seulement à la fusion du solide dissous, et continuent de se produire après que ce résultat a élé obtenu. Ils sont alors dus à la diffusion des molécules du corps en dissolution dans l'espace que lui offre le menstrue. Cette diffusion, ai -je dit, est un phénomène analogue à l'ex- pansion d'un gaz dans le vide. Cette expansion est toujours accompagnée d'une production de froid, et par con- séquent la dilliision d un liquide dans un autre doit être accompagnée aussi d'une absorption de chaleur. L'abais- sement de température produit de la .sorte peut souvent être reconnu au thermomètre; mais dans d'autres cas Il est masqué par le dégagement de chaleur déterminé par le rapproche- ment des molécules du corps dissous

et des molécules du menstrue qui viennent se grouper autour de cha- cune des premières.

Comme exemple des effets calori- fiques complexes qui peuvent se pro- duire dans l'acte de la dissolution, je rappellerai qu'un équivalent de sulfate de magnésie anhydre, en se dissolvant dans une quantité déterminée d'eau, produit une élévation de température de h"f'6o; tandis que la dissolution du même sulfate cristallisé, et contenant 7 équivalents d'eau , détermine uu abaissemenlde température de 0",92. La quantité totale de chaleur dégagée par l'action de MgOjSO^surUOadonc été de Zi%33 -f 0",92 = 5°,23 (a).

(1) Ainsi, quand on mêle de l'eaii et de l'acide siilfurique, on observe une diminution dans le volume des liquides, un grand dégagement de chaleur et tous les signes d'une com- binaison chimique ; mais une cer- taine élévation de température se pro- duit encore lorsque l'acide a déjà reçu une quantité d'eau si grande, qu'il est dillJcile de croire que l'hy- drate formé puisse s'unir chimique- ment à un nombre plus considérable d'atomes de cette substance basique. Par exemple, dans les expériences de M. Graham, un dégagement de cha-

(a) r.raliam, Op, cit. {Annales de chimie, 3* série, t. VIII, p. 159).

DIFFUSION DES LIQUIDES. ]0o

iilile d'opprotbiidir davimdige l'élude de ce dernier pliéno- mène (1).

§ 8. Si l'on met en contact de l'eau pure et une dissolution loî^

,,,,-., de la dilTusion.

de sel commun, on voit que les moleculesde cette dernière sub- stance s'échappent en partie du menstrue (jui les contient, et que cette diffusion se poursuit jusqu'à ce que la proportion des molécules salines et aqueuses soit devenue égale de part et

leur 1res sensil)le s'observa lorsqu'on ajoulait de l'eau à de l'acide sulfuiique précédeiunieut dilué au point de con- tenir ^|8 équivalents de base pour un équivalent d'acide (a). Or, dans les cas de ce genre, fuut-il attribuer le dégagement de chaleur à des ac- tions moléculaires de l'ordre de celles qui déterminent l'adhésion de l'eau sur tout corps solide que ce liquide est susceptible de mouiller, et qui, en s'exerçant , produisent , comme M. Pouillet l'a constaté, une certaine élévation de température (6) ? Ou bien, faut-il supposer que Taflinité chimique de l'acide pour l'eau puisse s'étendre sur un groupe extrêmement consi- dérable de molécules de ce liquide basique? et alors, de même que dans le premier cas, sera la limite de cette intluence? Dans l'état actuel de la science, ces questions ne me pa- raissent pas solubies, et d'ailleurs je ne crois pas que la distinction cuire les forces attractives dites chimiques et physiques soit aussi fondée qu'on l'enseigne généralement dans nos écoles.

(1) Le phénomène de la diffusion des liquides dans les milieux liquides a été étudié avec beaucoup d'attention par l'un des chimistes les plus habiles de l'Angleterre, M. Th. Graham (c).

Pour mesurer le pouvoir diiïusif d'une dissolution saline ou de toute autre substance dans un milieu quel- conque, ce savant a fait usage d'une méthode expérimentale très simple. Un flacon à large goulot est renipU de la dissolution saline et placé dans un grand vase que l'on remplit ensuite avec de l'eau pure, de façon que ce dernier liquide dépasse de beau- coup le bord supérieur du llacon, et que pendant l'opération la dissolu- tion saline n'ait pas été notablement agitée par des courants produits dans le bain elle plonge. Au bout d'un certain temps, on recueille une cer^ taine quantité de Teau du bain, et l'on détermine, par évaporalioa ou par l'emploi de réactifs titrés, la propor- tion de matière saline qui s'y trouve répandue et qui lui a été fournie par la dissolution contenue dans le flacon ouvert et immergé (d).

{a) Graham, Expériences sur la chaleur dégagée par les combinaisons chimiques {Annales de chimie et dephysique, 3' série, 4843, t. VIII, p. 175).

(h) Voyez ci-dessus, pages 77 et 84.

(c) Graham, On Ihe Diffusion of Liguids (Philos. Trans., 1840, p. 1). Supplément. Observ. on the Diffusion of Liquids {Philos. Trans., 1850, p. 805). Additional Observ. on the Dlffw sion of Liquids {Pliilns. Trans., liibl, p. 483).

{d) T. Graham, Op. cil. {Philos. Trans., 1840, p. 1, llg. 2).

104 ABSORPTION.

d'autre ; mais que ce mouvement cxpansif diminue d'intensité à mesure que l'expérience avance et que l'équilibre parfait ne s'établit que très lentement. En effet, la diffusion est d'autant plus rapide, que la différence est plus grande entre la proportion du sel dans les deux liquides; et pour mieux constater cette proportionnalité entre la quantité de la matière saline qui existe dans une dissolution et celle qui se répand dans un liquide adjacent, il suffit de placer dans autant de bains de môme vo- lume quatre vases contenant de l'eau chargée de chlorure de sodium dans les proportions de 1, 2, o et li centièmes, puis, au bout d'un temps voulu, une semaine, par exemple, de déter- miner la quantité de sel qui se sera répandue dans l'eau de chacun de ces bains : on verra que ces quantités seront entre elles dans les mêmes rapports que dans les dissolutions, c'est- à-dire comme 1, 2, 3, Il (]).

Il résulte aussi des expériences de M. Graham que la rapidité de la diffusion croît, dons certaines limites, avec l'élévation de la température (2).

La rapidité avec laquelle la diffusion s'effectue varie beau- coup, suivant la nature des substances qui se répandent dans

(1) Ces expériences ont été faites par M. Giaham (a) ; mais je dois ajou- ter que pins récemment M. Beilslcin, sous la direction de M. Joliy, a exa- miné la proposition de ce cliimisle, relative aux rapports existant entre la rapidité de la diffusion et la pro- portion de sel, et qu'il n'a pas trouvé un accord si parfait; il pense donc que cette loi n'a qu'une exactitude approximative (6).

(2) Ainsi, dans des temps égaux, des dissolutions également cliargées de

chlorure de sodium ont répandu dans le bain circonvoisin 10 parties de sel quand la température était d'environ Zi degrés, et 13,6 quand la tempéra- ture était d'environ 19 degrés (c).

L'inlluence accélératrice de l'éléva- tion de la température sur le pouvoir diffusif de diverses dissolutions salines est également mise en évidence par les expériences suivantes, faites, les unes à 15 degrés, les autres à 3 degrés, avec des liquides contenant un dixième de matière saline. La quantité de sel

(a) Graham, Op. cit. {Philos. Traits., iS50, p. 0).

(6) Beilt-tciii, Ueber die Diffusion von Flûssigkeiten (Liebig's Annalen, 1850, 1. XCIX, p. 165).

[cj C.raliani, Up. cit., p. 0.

DIFFUSION DES LIQUIDES. 105

un menstrue et aussi suivant la nature de celui-ci. Par exem- ple , dans une série d'expériences comparatives faites par M. Graham dans des conditions semblables, le temps employé pour la diffusion de 3 parties d'albumine dans un bain d'eau pure a suffi pour la dispersion de 13 de gomme, de 2G de sucre, de 51 de nitrate de soude , de 58 de chlorure de so- dium, et de 69 d'acide sulfurique monoliydraté. L'alcool ne possède qu'environ la moitié du pouvoir diffusible de ce der- nier corps ; mais l'ammoniaque, la potasse, et surtout l'acide chlorhydrique, se répandent dans l'eau avec une rai)idité beau- coup plus grande (1).

Ces différences ne coïncident pas avec le degré d'aflînité plus ou moins considérable des substances solublesdansle menstrue. Ainsi le chlorure de sodium a plus d'aftiuité pour l'eau que le

DitTuslbililé

inégale

(les dilTérenls

corps.

supposé anliydrc, qui s'est répiindne dans le bain pendant des temps égaux, était dans la proportion suivante :

T. = 15'. T. = 3°. Chlorure de sodium. Nifrale de soude . . Chlorure d'ammo- nium

Amylafe de potasse. d'ammoniaque. . Chlorure de baryum. Sulfate d'eau .... Sulfate de magnésie. Sulfate de zinc . . .

On voit qu'en généial l'accroisse- ment de la ditTusibilité qui accom- pagne l'élévalion de la tempéfature est d'autant plus grand que le pouvoir diffusif est lui-même plus considé- rable (a).

(1) Ainsi, dans des solutions d'égale densité, lorsque les produits de la dif-

32,2

22,5

30,7

22,8

40,2

31,1

35,5

28,7

35,3

29,2

27,0

21.1

36,8

29,8

15,4

13,1

15,8

12,0

fusion du chlorure de sodium étaient 12 et ceux de l'acide sulfurique 18, la quantité d'acide nitrique dispersée était de 28, et celle de l'acide chlorhy- drique de oh {b).

Les expériences de M. Beilstein ont conduit ce physicien à évaluer de la manière suivante le pouvoir dilTusif des divers sels qu'il a étudiés , la dif- fusion de chlorure de potassium étant prise pour unité :

Chlorure de potassium. ... 1

Salpêtre 0,9487

Chlorure de sodium 0,8337

Bichromate de potasse. . . . 0,7453

Carbonate de potasse .... 0,7371

Sulfate dépotasse 0,6987

Carbonate de soude 0,5436

Sulfate de soude 0,5309

Sulfate de magnésie 0,3857

Sulfate de cuivre 0,3440 (c)

(a) Graham, Op. cit. {Philos. Trans.. 1850, p. 12).

(6) Idem, ibid. {Philos. Trans., 1850, p. 10).

(c) Beilstein, Op. cit. {Ann. filr Chemie undPharm., 1850, t. XCIX, p. 105).

1 06 ABSORPTION.

chlorure de potassium ; mais ce dernier sel, étant dissous, se répand plus rapidement dans ce liquide (1). inniicnce Lorsquc deux sels qui sont susceptil^les de se mêler sans se

lie la diffusion

sur combiner ni se décomposer, coexistent dans une dissolution, ils

la composition

chimique se répandent dans l'eau adjacente d'une manière presque indé-

des liquides. , , ,

pendante et avec un degré de vitesse qui est règle principale-

(1) On peut, jusqu'à un certain mosplif're, question qui avait été déjà point, estimer l'affinité d'un sel pour étudiée par M. Bliicher et quelques l'eau par la force de résistance que ce autres physiciens (6), M. Harzer a dé- corps oppose à la transformation de terminé avec beaucoup de soin l'aug- ce liquide en vapeur, ou, en d'autres menlation de poids qu'elles offrent par termes, par l'élévation du pointd'ébul- suite de leur exposition à l'air, dans lition de la dissolution saturée. Or la des conditions identiques, et a obtenu comparaison des données fournies de ainsi les résultats numériques sul- la sorte avec la quantité des produits vants :

de la diffusion ne laisse apercevoir Augmentation

aucune relation constante entre ces po,u,™"'ait

deux phénomènes. On en pourra JU- Acide sulfm-ique monoludralé. 105,1

ger par les exemples suivants : Sulfate de soude 50,7

Acide acétique 40,7

PriinI Produit ,,, . i j- nn n

(lYbuiiition. lit- In Glilorure de sodumi 39,3

■''ff""'""- Chlorure d'ammonium .... 28,3

Chlorure de sodium . . 107,7 100,0 o, , . . aa o

Chlorure de potassium .... 2s, 8

Chlorure do potassium. 105,0 118,7 o if . j -• oo

Sulfate de magnésie 8,6

Nitrate de soude. .. . 104, i 96,4 m u , j j «a/,

Phosphate de soude 4,2 (c)

Bisulfate de potasse . . 103,9 118,2

Sulfate de magnésie. . 101 ,1 95,5 q, \^^^^^ ^g.j^,,, ^j^ ^.^■^^. ^^^^ ,p p^,,.

Sulfate de cuivre. . . . 100,8 28,7 . ,.(>• -c i i i i i-

voir diiiusu du chlorure de sodi'.ini

Je dois ajouter cependant que est presque aussi élevé que celui de

M. Graham considère rensenible de Facide siilfurique, et les expériences

ses recherches comme étant favorable de M. Graham montrent que la diffu-

à rbypolbèse d'une relation entre la sion du chlorure de potassium se fait

dill'usibilité et l'affinité (o). plus rapidement que celle du chlorure

Pour apprécier le de<,'ré relatif de de sodium, tandis que, sous le rapport

la puissance attractive exercée par du pouvoir hygroscopique, la première

diverses substances chimiques sur la de ces substances est inférieure à la

vapeur aqueuse répandue dans l'at- seconde.

(a) Graham, On the Diffusion ofJAquids {Philos. Trans., 1849, p. 5).

{!>) H. von Bliicher, Ueber das Vermôgen verschiedener Salze Wasser aus der Atmnsphôre auszuziehcn (l'oggendorff's Annalen, 1840, t. L, p. 541).

Schwedc, De hygroscopicitale, disscrt. inaug. Dnrpat, 1851.

Bucklicim, Bcitràge iur Lchve von der Endosmose (Arch. filrphysiol. Heilk., 1853, t. XII, p. 217).

(f) tlarzci', Beitràge zur Lehre von der Endosmose [Archiv (iir physiologische HeUkurtde, 185fi, t. XV, p. 232 et. 235).

I

DIFFUSION DES LIQUIDES. 107

ment par la diffusibilifé propre de chacune de ces substances ; souvent même l'inégalité qui existe à cet égard se prononce davanlage, et il résulte de ces différences dans le mouvement expansif que la diffusion peut devenir une cause de séparation entre les matières diverses mélangées dans un mêmemenstrue. Ainsi les sels à base de potasse sont plus diffusibles que ceux à base de soude, et par conséquent, si une dissolution contenant une proportion déterminée de deux de ces sels se trouve en contact avec de l'eau pure, elle perdra, dans les premiers temps de l'expérience, plus du sel potassique que du sel sodique, et les proportions relatives de ces deux sels changeront tant dans la dissolution primitive que dans le bain (1) ; circonstance dont il faut tenir grand compte lorsqu'on veut analyser les phéno- mènes qui accompagnent le transport des liquides de l'extérieur dans l'intérieur de l'économie animale.

Enfin il est également important de noter que la diffusion d'un sel n'est pas notablement rolenlie {)ar la préexistence d'un autre sel dans le liquide on il se répand, particularité qui con-

(1) Dans une des expéi ieiices faites par M. (ira lia m, une dissolu; ion de poids égaux de carbonate de soude anhydre et decliiorurede sodium dans 100 parties d'eau fut placée dans un vase ouvert au fond d'un bain d'eau distillée. Après sept jours de contact, le bain contenait un mélange des denx sels dans la proportion de 31,3 de car- bonate de soude pour 6S,7 de cblorure de sodium. Pans le réservoir intérieur, contenant la dissolution primitive, la proportion de carbonate, au lieu d'être de 50 pour 100, comme au commen- cement de l'expérience, s'était donc élevée à près de 69 pour 100, et celte dissolution s'était surtout appauvrie

en sel commun. Dans une expérience anidoguc fuite sur un mélange de car- bonate de potasse et de carbonate de soude en poids égaux, les produits de la dilïusion furent dans la proportion d'environ 36 p. 100 de ce dernier sel pour(i/idu premier. Quelquefois même la dilîusibilité inégale de deux sels sus- ceptibles de naître par double décom- position peut devenir la cause déter- minante de celle décomposition. Ainsi du bisulfate de potasse peut être trans- formé de la sorte en sulfate neutre de potasse et en sulfate d'eau ou acide sulfurique hydraté. L'alun potassique se modifie également sous l'intluence de cette force moléculaire {a].

(a) Graham, Op. cit. {Philos. Trans., 1849, p. 15, 17 et 19).

108 ABSORPTION,

stitiie un nouveau trait de ressemblance entre ce phénomène et l'expansion des gaz. Déplacement ])^i^^ jgg (.r,g ç[q niélan"es de liquides dont ie viens de parler,

réciproque <^' i d i '

des liquides, je n'ai tenu compte que de la manière dont la substance logée dans le réservoir intérieur se répand dans le menstrue exté- rieur, etje ne me suis pas occupé de ce qui pourrait s'introduire de ce dernier milieu dans le liquide dont le réservoir est rempli. Effectivement, dans certaines circonstances ce déplacement est nul ou tout au moins insignifiant. Ainsi, quand le degré de dilution de la liqueur saline est tel que la distance entre les molécules du corps dissous est supérieure au double du rayon de la sphère d'attraction sensible de chacune de ces molécules sur la substance du menstrue, il est évident que cette attrac- tion ne saurait exercer aucune influence appréciable sur les molécules du bain extérieur qui se trouvent à une distance plus grande, et que par conséquent aucune force ne sollicitera celles-ci à pénétrer dans le sein de la dissolution saline qui occupe l'intérieur du réservoir. Le mélange ne sera déterminé que par la répulsion mutuelle des molécules du corps en dissolution, et la distribution uniforme de celles-ci dans les diverses parties des deux liquides ne sera produite que par le passage d'un certain nombre de ces particules de l'un des menstrues dans l'autre.

Mais si la dissolution saline ou autre dont le réservoir diffu- sant se trouve chargé est dans un état de concentration tel que les effets de l'attraction mutiielle des molécules du corps en dissolution et du menstrue se fassent sentir au delà des limites du groupe de particules du liquide dissolvant dont chaque particule du corps dissous est entouré, le phénomène deviendra plus complexe. Les molécules du corps dissous, en même temps qu'elles tendent à s'écarter entre elles et à se répandre au loin dans le nouveau milieu qui leur est ouvert, attireront aussi à elles un nombre plus considérable de particules du meusliMie,

THÉNOMÈNES OSJIOTIQUES. 109

et, pour obéira cette attraction, une portion du liquide extérieur pourra pénétrer dans le réservoir et s'y mêler à la substance constilutive de la dissolution. Il y aura donc entre les deux masses fluides deux mouvements en sens opposé, un courant de diffusion qui se portera de la dissolution dans le liquide adjacent, et un courant déterminé par l'attraction moléculaire qui ira de ce dernier milieu dans la dissolution.

S 0. Faisons maintenant un pas de plus: supposons que inm.ence

-^ w . d'un liquide

deux liquides miscibles et de nature différente, que j'appellerai intermédiaire A et B, soient placés dans un vase cylindrique et séparés entre formation

, , des mélanges.

eux par un troisième liquide G, d'un poids spécifique intermé- diaire, qui ne serait miscible qu'à l'un des premiers, par exemple à B, et appliquons à l'examen des phénomènes qui doivent se produire les principes fournis par l'étude de la diffusion.

Il est évident que B et C se mêleront d'abord, et que par conséquent un certain nombre des molécules de B se réparti- ront d'une manière uniforme dans l'espace occupé par C. Une partie de ces molécules, en parvenant ainsi à la surface opposée de C, se trouveront par conséquent en contact avec A . Or, A et B sont miscibles, et par conséquent les molécules de B doivent pénétrer aussi dans l'espace occupé par A, soit pour s'y ré- pandre en obéissant seulement à la force diffusive qui les anime, soit pour satisfaire à la force d'attraction adhésive ou à l'affinité chimique qui peut exister entre elles et les molécules de A. Le liquide A, n'étant pas miscible à C, ne pourra se déplacer de la même manière pour aller vers B, et par conséquent le mouve- ment de translation ne se fera que dans une seule direction ; C sera traversé par un courant du liquide B qui passera peu à [)eu dans A, et ce déplacement ne devra s'arrêter que lorsque la totalité de B aura pénétré dans C, et que celles de ses molé- cules qui y seront demeurées s'y trouveront à des distances compatibles avec la nouvelle constitution du liquide A.

M. Lhermite a réalisé ces conditions en plaçant dans un tube

110

ABSORPTION.

une coloiHio de chlorolbriiie, puis inie couche d'eau, et au- dessus de l'eau une cuuclie d'éther. Le chloroforme ne pénètre pas dans l'eau, mais l'édier se répand peu à peu dans ce li(piide, et arrive ainsi en rap|)ort avec le chloroforme pour lequel il a de l'affiiiilé ; il passe donc graduellement daiis ce dernier liquide, et ce mouvement persiste jus(ju'à ce que la totalité de la couche d'éther superposée à l'eau ait disparu en s'enibnçant dans les liquides sous-jacents; enfui, on remarque en môme temps (pie le chloroforme augmente de volume, tandis que la couche d'eau conserve, à peu de chose près, son épaisseur primitive (1).

§ 10. Substituons maintenant à la couche d'eau qui, dans solides l'expérience précédente, séparait entre eux le chloroforme et E.iria formation j'^lj nac cloisou [lorcuse. Si ce diaphragme est également

ries raelaiiges. ^ i l i o o

perméable aux deux liquides, il est visible que sa présence ne pourra ipie ralentir leur mélange et n'introduira aucun chan- gement important dans le caractère de ce phénomène (2). Une

Influence

des

diaphragmes

(1) M. Lhermite a varié ces expé- riences sur les phénomènes osmoli- ques délerminés par l'interposition d'nne cloison fluide entre deux liqui- des miscibles, et il a vu que toujours les résultats étaient conformes à ce que la théorie indique eu égard à la solubi- lité connue des liquides réagissants (a).

(2) Il est probable que c'est à rai- son d'une disposition de ce genre que les efl'els osmotiques sont tou- jours très faibles ou même nuls , quand on sépare entre eux les li- quides réagissants à Taide de cloi- sons faites avec diverses substances inorganiques très perméables, telles que des lames minces de grès tendre, de calcaire grossier ou de porcelaine

dégourdie. En employant ces corps, Dutrochet n'a pu obtenir aucune action endosmotique sensible à l'aide du su- cre, de la gomme ou de l'alcool : les liquides prenaient le même niveau dans le bain extérieur et dans l'endos- momètre. Mais en employant dans les mêmes conditions des lames d'argile blanche (ou terre de pipe;, ce physio- logiste a obtenu une ascension assez grande du liquide dans l'intérieur de l'instrument (6). Des résultais sem- blables ont été obtenus par M. Gra- ham à l'aide d'un endosmomèlre dont le réservoir était formé par un de ces vases poreux de terre cuite dont on fait usage dans la construction de la pile galvanique de Grove (c).

(a) Lhermite, Recherches sur l'endosmose {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 185i, t. XXXIX, p. 1179, elAiin. des sciences nat., partie hotanique, 4*série, t. 111, p. 78). (6) Diilrocliel, Op. cit. (Mnnoin's, t. I, p. 21 et siiiv). (C) Grahani, On Osmolic Force (Philos. Trans., 185i, p. 180).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. 111

partie de l'éther se répandra dans le chlorolbrine, et une partie du chlorolbrine se distribuera dans l'espace occupé par l'étlier. Mais si la substance de la cloison perméable ressemblait à celle de l'can, en ce sens qu'elle se laisserait traverser par l'éther sans livrer passage au chloroforme, il est évident ({uc les effets pro- duits par la juxtaposition de ces deux liquides seraient très diffé- rents et ressembleraient en tout à ce que nous avons vu dans l'expérience précédente. L'éther, appelé dans les lacunes inter- stitielles du dia[)hragme par l'attraction capillaire, arriverait en contact avec le chloroforme, et serait sollicité à pénétrer dans ce liquide par l'attraction chimique ou [tliysique exercée sur ses molécules jiar celles de ce dernier liquide. Le chloroforme enlèverait donc sans cesse à la (doison une portion de l'éther dont elle serait imbibée, et la cloison à son tour en absorberait une quantité correspondante puisée dans le liijuide en contact avec sa surface opposée. Un courant se dirigeant de l'éther vers le chloroforme serait donc établi à travers le diaphragme, et le premier de ces liquides se trouverait transporté dans le sein du second, dont le volume augmenterait proportionné- ment à la quantité d'éther qui aurait été de la sorte ajoutée à sa propre substance. Il y aurait donc production d'un phé- nomène d'osmuse^ et ce phénomène serait la conséquence des osmose, effets combinés de trois forces : la résistance opposée par le diaphragme à tout passage du chloroforme vers l'éther; l'ac- tion capillaire de cette cloison sur l'éther, action qui amènerait ce liquide de l'une de ses surfaces à l'autre et le mettrait à la portée du chloroforme; enfin, l'attraction mutuelle de ces deux liquides.

Des résultats analogues s'obtiennent dans d'autres expé- riences. Ainsi Dutrochet a vu que si l'on place entre un certain volume d'eau et une quantité quelconque d'alcool une cloison mince de caoutchouc, le volume de l'eau ne tarde pas à aug- menter aux dépens de celui de ce dernier liquide. Tant que la

112 ABSORPTION.

cloison conserve ses qualités normales, elle ne se laisse pas traverser par l'eau, mais elle livre passage à l'alcool, qui se trouve alors attiré par l'eau adjacente et s'y mêle en quantité considérable (1). Mécanisme Pour quc la clolsou poreuse placée entre deux liquides /endosmose, hélérogèncs et miscibles détermine l'accumulation d'une de ces substances dans l'espace occupé par l'autre, et l'augmenta- tion du volume de cette dernière, il n'est pas nécessaire que ce diapbragme soit imperméable pour l'une et admette l'autre: il suffit que l'action capillaire qu'elle exerce sur les deux liquides soit inégale en intensité, condition qui est presque toujours réalisée quand les cavités confluentes creusées dans son épaisseur et ouvertes à ses deux surfaces opposées sont de très petites dimensions , ainsi que cela a lieu dans les membranes organiques : par exemple, dans les tuniques de la vessie ou de l'intestin d'un Animal quelconque. Effective- ment , le géomètre Poisson a montré que dans ce cas les deux liquides peuvent de prime abord s'engager dans les deux extrémités de ces canaux capillaires, mais que celui de ces corps qui y est appelé avec le plus de force doit repousser l'autre, et s'avancer dans toute l'étendue de ces passages jus- qu'à la surface opposée, pourvu que ceux-ci n'aient pas une longueur trop considérable. Afin de simplifier l'examen de ce phénomène, supposons que la cloison perméable soit repré- sentée par un seul canal de très petit diamètre, un tube capil- laire de verre, par exemple, et que les deux liquides mis en relation par ce conduit étroit soient de l'eau et de l'alcool. Nous

(1) L'étoffe dont Dutrochet a fait verrons bientôt qu'après un certain

usage dans cette expérience était du temps, cette étoile, employée de la

taffetas gommé, c'est-à-dire enduit de sorte , cesse d'être imperméable à

gomme élastique ou caoutchouc. Nous l'eau (a).

(a) Uiilrocliot, De l'endosmose (Méin. pour servir à l'hislolre anatomique et physitiue des Végé- taux et des Animaux, t. I, j>. 19).

PHÉNOMÈiNKS OSMOTIQL'ES. 113

avons vu au commencement de celle Leçon que chacune tie ces subslances est susceptible de mouiller le verre, et que par conséquent elle s'élève dans des tubes de ce genre en y for- mant un ménisque concave et en faisant équilibre à une certaine traction hydrostatique s'exercant en sens contraire. Nous avons vu aussi que, toutes choses étant égales d'ailleurs, l'eau monte de la sorte beaucoup plus haut que ne le fait l'alcool. L'action capillaire exercée sur l'eau est donc beaucoup plus énergique que celle dont dépend l'ascension de l'alcool, et par conséquent, si ces liquides rencontraient des obstacles, ils tendraient à les vaincre avec des i)uissances inégales. Or, la colonne d'eau qui pénètre dans le canal capillaire y rencontre la colonne d'alcool qui s'oppose à sa marche, tout comme elle met de son côté obstacle à la progression de l'alcool. Ces deux colonnes, pour obéir à l'attraction capillaire, se reiiousseront donc mu- tuellement ; mais, comme la foire qui tend à faire avancer l'eau est beaucoui) plus grande que celle qui sollicite l'alcool à mar- cher en sens inverse, ce sera l'alcool <jui cédera, et l'eau con- tinuera à se diriger vers rextrémité opposée du conduit, et ce liquide en envahira peu à peu toute la longueur, pourvu que la différence entre les deux forces contraires dont je viens d'expli- quer le jeu soit assez grande pour effectuer ce mouvement. L'eau sera donc transportée à la surface de la cloison se trouve l'alcool, et elle sera sollicitée à se répandre dans la substance de ce li(iuide, soit par l'attraction adhésive et par rafiinité chi- mique qui tendent à les unir, soit par la force de répulsion que les molécules de l'eau exercent les unes sur les autres, quand, par suite de leur dispersion dans l'alcool, elles se trouvent à une certaine distance et doivent obéir aux lois de la diffusion (1).

(1) Les remarques faites par Poisson doivent s'exercer de la sorte («), et, montrent cjiic les actions < apillaires pour rendre le phénomène visible à

(fi) l'cisfon, Note sur des effets qui peuvent être ]ivoiltiils par la capillarité et l'aflinité des substances hétéicriènes (Jcvriwl île ph\jSH<i(,(iie itiWnseuiWe. {820, t. Vl, p. 301, et Annales de chimie et de jlnjsiiiiie, 1827, t. XXXV, p. 1)8).

Y. 8

114 ABSORPTION.

II y aura donc établissemcnl d'un courant d'eau qui traversera le tube capillaire pour aller se répandre dans l'alcool et grossir le volume du liquide situé du côté de la cloison se trouve cette dernière substance. Enfin celle-ci devra être considérée comme la cause de ce transport , et appelée en conséquence Yage7it usmogène.

Le phénomène que je viens de décrire est donc en tout sem- blable à celui que nous avons vu se produire en sens inverse, quand l'alcool était séparé de l'eau par une lame de caoutchouc qni ne livrait point passage à ce dernier liquide, et la théorie que j'ai donnée de l'iuie de ces expériences est applicable à Éiabiissenient l'autre. Mals, dans le cas dont il est ici question, de même que contre-courant, daus la plupart dcs phénomèttcs osmotiques, il y a quelque chose de plus : les effets se compliquent davantage, et pendant que le courant du liquide le plus facile à transporter traverse ki

l'œil nu aussi bien qu'à l'esprit, il suffit de répéter une expérience faile par le professeur Briicke de (Vienne). Si Ton dépose sur la surface d'une lame de verre bien nclte une petite goulte d'buile d'olive, celle-ci conser- vera une forme convexe et ne mouillera pas le verre ; mais il n'en sera pas de même si l'on dépose sur le verre un peu d'essence de térébenlliine : ce liquide s'y étalera aussitôt en coucbe mince et mouillera la surface sous-jacenle. L'attraction capillaire exercée par le verre sur ces deux liquides est donc d'inégale intensité ; elle est plus grande entre 1 essence et le verre qu'entre le verre et rbuile. Cela établi, amenons la nappe d'essence eu coulait avec la gouttelette d'buile. D'api è.^ ce qui pré- cède, ou voit que l'essence, en tendant

à s'étaler sur le verre pour obéir à l'at- traction adbésive dont je viens de par- ler devra repousser l'buile, et eflecti- veiuent c'est ce qui a lieu. Dans un tube capillaire le résultat du jeu de ces forces moléculaires sera encore plus manifeste, et l'huile, tout en se mêlant à une certaine quantité d'es- sence, sera repoussée par ce dernier liquide, qui s'insinuera entre elle et la surface du verre (a).

C'est à raison d'actions attractives analogues que l'huile dont un tissu organique se trouve imprégné est peu à peu expulsée de celui-ci, quand on place le tissu ainsi chargé dans de l'eau ou dans une dissolution .saline liquide, qui ont sur la substance de ce corps poreux une attraction plus éner- gique que l'huile.

(a) Briicke, Beilrâge %ur Lelire von der Diffusion tropfbarllûseiger Kiirper durch poriise Scheide- wânde (Poy:ge)idorfl"s Annalen, 1843, l. LVIll, p. 77).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQIES. 151

cloison perméable pour aller s'unir à la substance osmogène, un courant inverse s'établit dans cette même cloison, et verse une certaine quantité de ce dernier corps dans le liquide silué du côté opposé. Ainsi , pendant que l'eau traverse la membrane perméable pour se rendre dans l'alcool, et que le mélange formé pai' ces deux liquides augmente de volume aux dépens de l'eau située de l'autre côté du diapln^agme, de l'alcool passe en sens inverse et va se mêler à l'eau. Il y a donc en réalité échange entre les deux liquides, et les diiïérences de volume qui résul- tent de ces mouvements dépendent de la valeur inégale des deux courants qui se croisent dans l'intérieur de la cloison. Pour s'en convaincre, il suffit d'analyser les deux liquides ; on trouvera que la proportion d'eau unie Talcool augmente à mesure que l'expérience avance, et qu'en même temps l'eau située du côté opposé de la cloison se charge d'une quantité croissante d'alcool jusqu'à ce qu'enfin le mélange soit devenu uniforme de part et d'autre.

Au premier abord, on pourrait croire que l'établissement de Lexofmose ces courants contraires dépend de l'existence de passages dit- „„ phénomène férents qui existeraient dans la substance de la cloison, et (jui seraient aptes à attirer avec plus de force dans leur intérieur les uns de l'alcool, les autres de l'eau ; mais cette hypothèse ne résisterait pas à la discussion, et d'ailleurs il est facile à montrer que les choses pourraient se passer de la même manière s'il n'existait qu'une seule voie de communication entre les deuxhquides. En cITet, nous venons de voir que l'eau appelée dans l'intérieur du canal pratiqué à travers le diapln^agme arrive en contact avec l'alcool qui baigne l'une des surfaces de cette cloison. Conformément aux lois de la dissolution des corps et de la diffusion des liquides miscibles les uns dans les autres, les molécules d'alcool (pii se trouvent ainsi en rapport avec une colonne capillaire d'eau doivent s'y répandre et s'y disperser; si la rapidité avec laquelle elles y progressent est supérieure à

116 ABSORPTION.

celle du courant formé par cette même colonne aqueuse, elles |»arviendront ainsi, par l'intermédiaire de celle-ci, jusque dans la masse d'eau située du côlé o[)posé de la membrane et s'y répandront. 11 pourra donc y avoir dans le même canal un courant d'eau qui, mis en mouvement par l'action capillaire de la membrane et par la puissance attractive de la substance osmogène , ira vers cette dernière, et un courant opposé formé par les molécules de celle-ci qui se répandent dans l'eau par diffusion (Il

Dutrocbet, à qui l'on doit la connaissance de la plupart des faits fondamentaux relatifs aux pbénomènes osmotiques, a par- faitement démontré l'existence de ces courants inverses, et les a désignés sous des noms différents. Ainsi que nous l'avons

(1) Dulroclict supposait que l'en- dosmose était produite soil par l'élec- tricité (a) , soit par quelque force inconnue liée à l'action vitale (6) ; inais celte hypothèse ne pouvait sou- tenir un examen sérieux.

Poisson a très bien rendu compte du rôle que les actions capillaires jouent dans le transport de l'un des liquides vers l'autre ù travers la sub- stance de la cloison perméable, mais il n'a pris en considération qu'une portion des phénomènes osmotiques, et, par conséquent, la théorie qu'il cherche à en donner ne peut satis- laire ni les physiologistes ni les physi- ciens (c).

i\I. Magnus s'occupa aussi du même

sujet, et pensa pouvoir expliquer tous les faits observés en tenant compte : de l'inégalité de la force d'attrac- tion entre les molécules des liquides diirérenls; de la facilité inégale avec laquelle les divers liquides traversent la même ouverture capillaire (d). Ef- fectivement cela rendrait compte de l'inégalité de niveau entre les deux liquides séparés par une membrane perméable, mais n'expliquerait pas le double transport en sens inverse qui s'opère à travers cette cloison. Quel- ques années plus tard, M. Rainey in- voqua la force de diffusion des molé- cules en dissolution, pour expliquer ce qui se passe dans les actions osmo- tiques (e) ; mais cet auteur ne s'ap-

(rt) Dulroclict, L'agent immédiat du mouvement vitat dévoile, p. 133 et siiiv.

Becqucifl, Traité de l'étectricili, t. IV, p. \<n cl smw Traite de physique considérée dans ses rapports avec la chimie et les sciences naturelles, 1844, l. 11, p. 274 ci suiv.

(6) Itiilroclicl, art. Endosmosis (Toitit's Cyclop. of Anat. and Physiol., 1839, t. II, p. 110).

((•) Poisson, Op. cit. {Journal de pitysioloijic {\c }A:vj:cm\w, 182G, t. VI, p. 3(i1).

(d) Magnus, Ueher einigc Ersi heinungen der Capillarilàl (Poijsendorfr's Annalen, 1827, t. X, p. 81 ), ol Sur quelnues phénomènes de capillarité [Annales de chimie et de physique, 1 832, t. LI, p. 173 et siiiv ).

{e)G. r.iiirrey, On ihe Cause of Endosmose and E.cosmose {l'hilosnpliical Magaùne, 18i0 t. XXIX, p. 1711).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. H 7

déjà vu, le courant fort, c'est-à-dire celui qui se rend au liquide dont le volume augmente , est appelé par ce physiologiste le courant endosmotiqiie ; l'autre, qui répand une certaine quantité de la substance osmogène dans le liquide aux. dépens duquel l'endosmose s'effectue, est dit communément le courant exos- motique ; mais quelques auteurs préfèrent l'appeler le courant de diffusion.

Afin de rendre l'exposé des faits et les raisonnements qui s'y rattaclient plus faciles à suivre, io n'ai parlé jusqu'ici que des produits

^ '' ..-Il P^'' fl*^* liquides

phénomènes produits par la réaction de liquides dont la nature analogues,

... mais d'inégale

fondamentale est différente, telle que 1 eau et 1 alcool ; mais la densité. tliéorie que j'en ai donnée est également ap[)licable aux eftets osmotiques qui peuvent être déterminés par l'interposition d'une

Effets osmotiques

puya pas sur des faits assez probants pour faire prévaloir son opinion. La question du mécanisme de ces éciian- ges inégaux fut discutée aussi par plusieurs physiologistes de l'Aile - magne, et les faits introduits dans la science par quelques - uns de ces savants sont d'une grande impor- tance (a) ; mais ce sont surtout les re- cherches plus récentes de ]\IM. Briiclie, Ludwig et Grahain qui m'ont fourni les principales vues exposées dans la suite de cette Leçon, touchant le jeu

des forces qui concourent avec l'at- traction capillaire, et l'adiiésion ou l'aflinité des liquides hétérogènes, à produire les ell'ets dont l'osmose est accompagnée [b). .le dois ajouter cepen- dant que ce dernier expérimentateur ne me semble pas tenir assez compte du rôle de la capillarité dans la pro- duction de ces phénomènes, cl que je ne saurais adopter ses vues théoriques relatives à l'origine toute chimique des forces osmotiques.

(a) Jericliau, Veher das Zusammenstrômen flûssiger Kuvper, welche duvch porôse Lamelkn getrennt sind (Poggendorff's Atuialen dev Plnjsilc iind Chemie, i835, t. XXXIV, j). 013).

Kûrscliner, art. Aui^-saugung (Wagiier's Handwûrtevbuch dev Physiologie, 1842, t. 1, p. 54).

Vierordt, Bericht ilber die bisherigen die Endosmose betreffcnden Untersuchungen (Archiv fur physiologische.Heilkunde, 184G, t. V, p. 479). Physik des organischen Sloffwechsels (Op. cit., -1847, t. VI, p. 651).

Ph. Jolly, Experimeutalunlersuchungen ûber Endosmose {Zeitsclir. fiir rationelle Medicin, 1849, t. VII, p. 138 etsuiv.).

(6) Bidcko, De diffusione hiimonim per septa mortua et viva (Dissert, iiiaug.). Berlin, 1843. Beitràge iiir Lchi-e von der Diffusion tropfbarlUissiger Korper duvch Scheidewcinde (Poggen- dorff's.4»)irt/f)i, 1843, t. LVIII, p. 77).

Ludwig, Ueber die endosmolischen .-Equivalente nnd die endosmotische Théorie (Zeilschr. fur rationelle Medicin, 1849, t. VIII, p. 1 5 et suiv., et Lehrbuch der Physiologie des Meuschen, 1852, t. 1, p. 01).

Th, Graham, On Osmotic Force (Philos. Trans., 1854, p. 179).

Et comme préliminaires des reclierclics de cet auteur sur la dilTusiou des liquide?, voyez ci-dessus, p. 103 et suiv.).

118 ABSORPTION.

cloison perméable entre deux portions d'un même li(|uide qui se trouvent inégalement chargées d'une substance étrangère en dissolution dans leur intérieur ou entre deux liquides de même nature dont l'im serait pur et l'autre servirait de menstrue à une certaine quantité de matière étrangère , par exemple de l'eau distillée, et une solution aqueuse de chlorure de sodium. Nous savons que le sel commun est un corps qui attire l'eau avec une ccriaine force; l'étude des phénomènes d'imbibilion nous a npi)ris que les tissus organiques exercent une action capillaire plus intense sur l'eau que sur la dissolution saline. Nous pouvons donc prévoir que si de l'eau pure est séparée d'une dissolution concentrée de chlorure de sodium dans de l'eau par une cloison membraneuse, le sel déterminera un courant endosmoti({ue et appellera ainsi dans son sein l'eau du dehors. JMais nous avons vu aussi que les molécules de chlorure de sodium en dissolution dans un liquide tendent à se répandre uniformément dans la totalité de l'espace qui leur est offert par ce menstrue ; elles doivent donc faire effort pour s'avancer dans l'eau qui arrive dans la dissolution elles se trouvent, et pour occuper ensuite l'espace que leur présente le volume du même liquide qui se trouve au delà du diaphragme. Ces molécules, en obéissant aux lois delà diffusion, formeront donc dans le liquide en mouvement dans les canaux de la cloi- son un contre-courant dirigé de la dissolution vers l'eau, et arriveront avec une certaine vitesse dans ce dernier liquide pendant qu'une portion de celui-ci se déplacera en sens inverse pour aller s'accumuler du côté du diaphragme se trouve la dissolution saline, et se confondre avec celle-ci.

Ces échanges devront s'effectuer aussi entre les deux liquides lorsque ceux-ci seront des dissolutions de la même substance dans un mcnstrueidenlique, mais d'inégale densité, c'est-à-dire dont l'un contiendra une proportion [)lus grande de la matière dissoute, et les deux courants contraires ne devront cesser

PHÉNOMÈNES OSMOTIQLES. H9

complètement que lorsque la dislance entre les molécules de cette matière sera égale des deux côtés de la cloison, ou, en d'autres mots, le degré de concentration de la dissolution iden- ti(iue dans les deux volumes du liquide séparés par la cloison perméable.

Nous voyons donc que pour se former nne idée nette de ces phénomènes, il ne faut pas considérer les passages capillaires de la cloison osmotique comme étant traversés à la fois par un ''licuiosmose courant du menslrue qui se dirigera vers la dissolution, et un courant de la dissolution qui se rendrait dans le menstrue, mais comme logeant un seul courant du liquide dissolvant dans l'intérieur duquel des molécules de la substance en dissolution se meuvent en sens inverse (1 ) ; et cette indépendance des mou-

Rcsuiiié

relatif

à la iintiire

des pliiMiomènes

d'ciulosmose

et d'oxosmose.

(1) Dutrocliet, et la plupart des antres physiologistes on chiiiiistes qui ont écrit sur rendosniose, n'envi- sagent pas ce phénomène d'une ma- nière aussi simple, et pensent que l'échange entre les deux liquides ne consiste pas seulement dans le trans- port de l'un à travers la cloison et la dilïusion des molécules en dissolu- tion dans la totaiilé de la masse du menstrue, mais résulte de l'établisse- ment de deux courants plus considé- rables. Ainsi, quand de l'eau salée est dans l'cndosmomètre et de l'eau dis- tillée dans le bain extérieur, ils suppo- saient que l'exosmosc consiste non pas dans la sortie d'un certain nombre de molécules de sel seulement, mais dans le passage du dedans au dehors d'un courant d'eau salée, c'est-à-dire de ces mêmes molécules escortées des molécules d'eau dont elles étaient en- tourées dans la dissolution ; mouve- ment qui serait accompagné d'un

transport en sens inverse d'un volume d'eau égal à celui de la dissolution qui s'écha])pe et à la dillérence qui se manifeste entre la quantité initiale et la quantité finale du liquide empri- sonné dans l'endosmomètre. Dutro- cliet dit positivement que ces deux courants doivent se trouver réunis dans chacun des canaux capillaires formés par les cavités interstitielles de la cloison endosmique (o); et M. Liebig semble avoir voulu donner une démonstration matérielle de ce mode d'échange, lorsque, au lieu de charger son endosmomètre d'une dissolution saline ordinaire, il y place du sel dissous dans de l'eau colo- rée en bleu. Etlectivement , dans cette expérience, on voit la teinte bleue se répandre de proche en pro- che dans le bain pendant que l'eau de celui-ci traverse la membrane en sens inverse pour entrer dans l'appareil et s'y mêler à la dissolution saline (6) ;

(a) DiUrochet, De l'endosmose {Mémoires, t. I, p. 97).'

{b} Liebig, Op. cit. {Atinales de chimie et de physique, série, 4849, t. XXV, p. 382).

120 ABSOKPTION

vemeiits des molécules de ce dernier corps, lors même (]Lie celui-ci serait uni à la substance du menstrue par des attractions puissantes, est facile à comprendre, car elle serait assurée au moyen d'une série de décompositions et de recompositions suc- cessives des groupes d'atomes constitués par les deux corps en présence. Supposons, par exemple, que la dissolution soit for-

mais ce pliéiioniène ne prouve en au- cune façon que de l'ean soit sortie de rendosmonn'tre en même temps que de Teaii y entrait ; car du moment que la dissolution de matière lincloriale se trouvait en contact avec de l'onu pure, les molécules de cette matière, en vertu des lois de la dillusion , de- vaient tendre à se distribuer unifor- mément dans cette eau et à se ré- pandre dans le bain circon voisin, ab- solument comme le font les molécules salines dans les expériences de diffu- sion ordinaire. Je ne comprendrais pas comment un courant d'eau char- gée de sel ou de matière colorante pourrait avancer dans un canal étroit qui est parcouru en sens inverse par un courant dont la direction est con- traire et dont la puissance est plus grande ; mais il est facile de concevoir le mouvement progressif des molé- cules de sel ou d'indigo dans le sens de chacun des (ilets capilhiires d'eau qui s'avancent en sens inverse : et lors même que ces molécules seraient unies à un groupe plus ou moins considérable de particules d'eau, soit par le jeu d'affinités chimiques, soit par simple attraction adhésive, leur transport indépendant n'en serait pas plus difficile à comprendre, car il s'effectuerait, à l'aide d'une série de

décompositions et de recompositions successives de ces groupes molécu- laires, de la même manière que l'hy- drogène séparé de l'oxygène par la décomposition de l'eau, au pôle po- sitif de la pile, se trouve transposé au pôle négatif à travers le bain intermé- diaire, phénomène qui a été donné, il y a plus d'un de mi- siècle, par Gro- thuss.

Ce sont principalement les recher- ches importantes de ]\I. Briicke et de M. Graham qui ont fait connaître le rôle de la diffusion dans la production des phénomènes osmotiques (a).

En effet, l'indépendance des mou- vements de l'eau dans les cas d'en- dosmose, et par conséquent la possi- bilité d'une indépendance égale pour les molécules d'un sel ou de tout autre corps en dissolution, a clé mise en lumière par une expérience de M. Briicke. Ce physiologiste a constaté que si l'on plonge dans une dissolu- tion d'acétate de plomb la cloison membraneuse formée par un mor- ceau de vessie et fixée à l'extrémité inférieure d'un tube , et si , après l'avoir laissée s'imbiber de ce réactif, on verse dans le tube une dissolution de bichromate de potasse , ce dernier sel pénètre promplement dans la membrane et y donne lieu à un pré-

(rt)Bruclie, Beitràge zur Lehrevoii der Diffusion tropibar/lûssigev Kôrpo' dwch p )rosc S;heide- wânde (Poj,'i5cn'loi'IT's Annalen der Plujsik und Chimie, 1843, l. LVIII). Graliain, Ou Osmolic Force {Philos, Traiis., 1854, p. 178).

PHÉNOMÈNES OS.MOTIQUES. 121

mée par du chlorure de sodium dans de l'eau, et. ([ue ce soit aussi dans de l'eau que la diffusion s'opère : les molécules d'eau qui, dans le premier de ces liquides, entourent chaque molécule de sel, resteront en place et n'accompagneront pas cette der- nière dans son voyage ; chaque grou[)e de molécules déjà formé d'après les lois de la dissolution abandonnera des molé-

cipité de chromale de plomb ; mais, de même que racétale de plomb, il ne pénèlre pas au delà, et il ne se forme de précipité ni dans l'un ni dans l'autre des deux liquides. Cepen- danti si l'on sature alors avec du sucre la solution d'acétate de plomb, on voit le volume de celui-ci augmenter pen- dant plusieurs jours aux dépens de l'eau de la dissolution de cbromate de potasse, sans que la transparence des liquides soit troublée ni d'un côté de la cloison membraneuse ni de l'autre. Il est donc visible que c'est de l'eau pure qui a passé à travers celle-ci pour se rendre de la solution plombique dans la dissolution du chro- male, et que l'action osmotique ou capillaire de la membrane a déterminé la séparation des molécules d'eau et de cbromate polassique qui se trou- vaient mêlées ou combinées dans la dissolution située du côté électro- positif de l'appareil (a).

M. Buckheim (de Dorpat) a donné plus récemment une nouvelle théorie des phénomènes osmoliques, qui, au premier abord, peut sembler très dif- férente de celle adoptée dans ces leçons, mais qui, en réalité, y ressemble beau- coup , excepté par les mots employés pour désigner les forces moléculaires réagissantes. M. Buckheim dislingue dans le tissu de la membrane osmotique

les parties solides et les parties po- reuses ou lacunaires, et, eu ce qui concerne les premières, il pense que l'imbibition n'est pas un phénomène de capillarité, mais le résultat d'une combinaison chimique entre l'eau et la substance constitutive du tissu. Les molécules d'hydrate ainsi formées, qui occupent la surface en contact avec la matière osmogène , laquelle est avide d'eau, seraient décomposées par celle-ci et lui céderaient en totalité ou en partie lein- eau constitutive, mais se reconstitueraient aussitôt en enle- vant aux molécules d'hydrate de la couche suivante une partie de l'eau constituée de celles-ci qui, à leur tour, en prendraient aux molécules d'hy- drate adjacentes, et ainsi de suite, depuis la surface de la membrane qui est en contact avec l'agent osmogène jusqu'à celle qui est en contact avec l'eau pure et qui se réhydraterait aux dépens de ce dernier liquide. Il y au- rait donc de la sorte un courant établi à travers la substance de la mem- brane du bain jusque dans le liquide osmogène, tout comme dans le cas l'eau imbibée par la membrane y se- rait appelée et retenue par l'attraction adhésive au lieu de l'afTinité chimique. Quant au courant inverse formé par les molécules du sel ou de tout autre agent osmogène, M. Buckheim en rend

(a) Brùcke, Op. cit. (Poggeiidorrs Annalen, t. LVIII, p. 89J.

/r(i'

122 ABSORPTION.

Cilles salines aux molécules aqueuses voisines pour leur fournir les éléments d'un groupe semblable ; il se reconstituera ensuite aux dépens du groupe qui le suit, et ainsi de procbe en proche. L'espèce d'atmos|)lière aqueuse dont chaque ])articule de sel est entourée conserve sa forme et sa gi-andeur ; mais sa matière constitutive change à mesure que sa translation s'effectue, et ce renonvellement s'opère sans difficulté, les forces attractives étant égales de [)art et d'autre, tout comme l'hydrogène dégagé de l'eau par la décomposition de ce liquide au pôle positif de la pile galvanique se transporte en apparence à travers le bain jusque dans le voisinage du pôle négatif par la décomposition et la recomposition de la série des atomes d'eau intermédiaires aux deux électrodes : pliénomène dont la théorie, donnée par

compte par la diffusion à travers les porcs ou ci>vit('S interstitielles de la membrane; il admet que la substance de celle-ci n'est pas apte à former avec ces matières des combinaisons chimi- ques comme elle en constitue avec l'eau, et que par conséquent le trans- port de ces molécules vers le bain ne peut se faire par les parties compactes de la cloison mend)raneuse, et a lieu seulement par les pores ou passages capillaires (a).

En réalité, la valeur proportionnelle des deux courants endosmolique et exosmotique serait donc réglée par le rapport existant entre la somme des espaces capillaires d'un certain calibre les molécules de l'agent osmogène peuvent passer, et celle des parties d'une structure plus serrée le li- quide dont cet agent est avide peut seul pénétrer; et la différence entre la théorie de M. Buckheim et celle de

iMM. Briicke et Ludwig se réduit à con- sidérer la pénétration de ce liquide dans la portion compacte de la mem- brane osmotique comme étant déter- minée par le jeu d'affinités chimiques faibles, au lieu d'être due à l'attraction adhésive ou effet de capillarité. Nous avons déjà vu que la ligne de démar- cation entre ces forces moléculaires est très difficile à établir, en supposant même que, d'après la nature des cho- ses, il soit possible de la tracer autre- ment que d'une manière arbitraire ; et l'on rendrait la conception des phéno- mènes chimiques ordinaires moins fa- cile et moins nette, si Ton attribuait à l'affinité tous les effets du même ordre que ceux dont il est ici question, car on se trouverait conduit de la sorte à considérer comme une combinaison chimique toute union qui s'établit entre un liquide et un solide, quand le pre- mier mouille le second.

(a) Biichheim, Deitrage %ur Lehre von der Endosmose [Archiv fur physiologischc Ueilkiinde, 1853, t. XII, p. 217).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. l'iS

Grothus , il y a pHis d'un demi-siècle, est admise aujourd'hui par tous les pliysiciens.

En résumé, nous devons donc considérer les phénomènes Équivalents osmotiques comme consistant essentiellement en un échange «"dosmouqncs. entre deux liquides miscibles qui est déleruiiué à la fois par les attractions physiques ou chimiques exercées par les molécules hétérogènes de ces cor|)s les unes sur les autres, et })ar le pouvoir diffusif des molécules des substances en dissolution ; échange qui est réglé, quant aux proportions dans lesquelles il s'effectue, par Taelion capillaire inégale que la cloison perméable exerce sur les matières que cette cloison sépare.

On désigne généralement sous le nom iV équivalents endos- motiques les quantités des diverses substances réagissantes qui, par suite de ces échanges, se substituent à une unité de volume de l'une d'elles dans l'espace occupé par celle-ci, et il est évident que les changements (jui s'observent dans le volume de chaque liquide à mesure que l'action osmotique se poursuit, doivent dépendre de la valeur de cet équivalent. Enfin il est également aisé de comprendre que pour évaluer la puissance osmogène d'un corps, il faut tenir compte, non-seulement de l'accroissement déterminé de la sorte dans son volume, mais aussi des pertes de substance qu'il subit pendant que ce i)héno- mène se produit, et qui sont masquées par l'effet de cette substitution (1).

(1) Al. Pli. Jolly fut le premier à faire une élude spéciale des substiui- tioiis osmotiques, et à désigner, sous le nom à" équivalents endosmotiques, les quantités d'une substance qui rem- place une autre dans les éclianges ainsi effectués ; mais cet expérimentateur pensait que ces quantilés sont con- stantes, opinion qui a du être aiîan- donnée.

Pour déterminer Véquivalent en-

dosmotique d'un corps, M. Jolly place un poids connu de celte substance soit à l'état solide, soit en dissolu- tion, dans un vase dont le fond est formé par une membrane perméable (de la vessie de cochon), et plonge de quelques millimètres seulement dans un bain d'eau distillée, dont le volume est très considérable et que l'on re- nouvelle souvent, ou mieux encore qui se renouvelle sans cesse à l'aide

12/l ABSORPTION.

Je ne prétends pas que les forces moléculaires dont je viens d'expliquer le jeu soient les seules qui puissent contribuer à. la production des effets osmotiques, mais elles peuvent suffire pour déterminer les déplacements de matière qui constituent le phénomène dont l'étude nous occupe ici, et, daus la plupart

d'un courant, de manière ù rester tou- jours à peu près pure, malgré la dif- fusion de la matière osmogène. L'ap- pareil est disposé de façon à maintenir à peu près l'équililjre hydrostatique entre les deux liquides, malgré l'aug- meiilalion de volume de celui qui oc- cupe rinlérieurde rendosmomètre, et l'expérience se prolonge jusqu'au mo- ment oii la totalité de la substance osmogène déposée dans cet instru- ment s'est répandue au dehors et a été remplacée par de l'eau que l'on peut considérer comme pure. On dé- termine alors le poids du liquide qui s'est substitué ainsi au corps osmo- gène, et l'on compare ce poids à celui

de ce dernier corps au commence- ment de l'expérience, en ramenant ce dernier poids à une valeur con- stante choisie comme unité de me- sure : un gramme , par exemple. En expérimentant de la sorte, M. Jolly a trouvé que, dans les conditions il se plaçait, les quantités d'eau accu- mulées dans l'endosmomèlre en rem- placement d'une même substance os- mogène ne variaient que peu, mais que ces quantités dilTéraicnt beaucoup suivant la nature de ces substances (a). Le tableau suivant résume les résul- tats ainsi obtenus , en supposant que le poids de chaque substance osmo- gène était d'un gramme :

NOM DE LA SUBSTANCE OSMOGENE.

Chlorure de sodium . . Sulfate de soude. . . . Siilfntc de ])Otasse . . . Sulfate de uiaijnésie . . Sulfate de cuivre. . . Bisulfate de potasse . Sulfate d'eau (SO^HO). Isolasse liydratce . . .

Alcool

Sucre ,

Gomme

EQUIVALENTS ENDOSMOTIQUES.

MAXIMUM.

4,31G

12,440

d 2,760

11,802

9,504

2,345

0,391

231,400

4,330

7,2r,0

H, "90

MINIMUM.

3,820 11,000 11,420 11,503

0,308

200,090

4,132

1,004

TERME MOYEN.

4,223 11,628 12,277 11,652

0,349

215,745

4,109

7,157

Plus récemment, un des jeunes phy- siologistes de l'école de Dorpat, M. Ihn- zer, a fait de nouvelles recherches sur ce sujet , en évitant quelques causes

d'erretu- dont M. Jolly ne s'était pas préservé, et en variant la nature des membranes à travers iestiuelles les échanges osmotiques s'cflectuaient.

(a) Ph. Jolly, Experimentaluntersuchiingen ûhtv Endosmose ( Zeitschrift fur vationelle Nedicln, 1849, t. VU, p. 83).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. 125

des cas, les circonslances qui font varier les résultats obtenus n'interviennent qu'en influant sur le degré d'intensité avec lequel l'une ou l'autre de ces puissances exerce son action. Pour le moment, je laisserai donc de côté la recherche des forces accessoires qui, dans certains cas, peuvent provoquer des mouvements analogues, et je m'attacherai d'abord à l'étude des conditions qui d'ordinaire déterminent ou règlent les échanges dont il vient d'être question.

Pour évaluer ces échanges, on peut se contenter de calculer les profits et les pertes de l'un des liquides réagissants, et, pour faire cette estimation, on emploie communément un appareil très simple que Dutrochet a désigné sous le nom û'ejîdosmo- mèlre. C'est un réservoir dont la paroi inférieure est formée par une lame perméable , le plus souvent une membrane ani-

Or il a trouvé ainsi que la quanlilé d'eau atliiée dans l'intérieur de l'en- dosmomètre, pendant la période de temps employé par la substance os- niogène pour se répandre au dehors dans le bain adjacent, pouvait varier dans la proportion de 1 à 6, suivant que la membrane à travers laquelle ces mouvements de translation s'ef- fectuaient élait préparée de manière à être plus ou moins perméable à la substance employée {a\

M. Ludwig a publié aussi des recher- clies sur la valeur des équivalents en- dosmotiques d'une même subslancc. H a fait varier soit la durée de l'ex- périence, soit le degré relatif de con- centration des deux liquides, et il a obtenu de la sorte des différences très considérables. Ainsi, en plaçant du

chlorure de sodium cristallisé dans un endosmomètre et en mettant cet instrunienl en rapport avec l'eau pure, il a vu que l'équivalent était, dans une expérience, de 3,ù au bout de soixante-huit heures, et de 5,7 au bout de deux cent trente-quatre heures; dans une autre expérience, à la pre- mière de ces périodes, de Z|,0, et après la seconde, de 6,'J. Cela indique que la dissolution 1res concentrée du sellaisse échapper par dllfusion une plus grande proportion de molécules salines que la dissolution étendue. Du reste, on re- marque beaucoup d'irrégularité dans la marche de ces expériences {h).

On doit également à M. Cloetta des recherches sur les équivalents endos- motiques (c).

(a) Harzcr, Beiiriicje z-tir Lchve vom Endosmose (Arcldv fur physiologische Heilkunde, 1856, I. XV, (.. 19i).

(b) Luilwig-, Vebcv die eiidosmotisclieii .Equivalente uud die endosmolischc Théorie (Zeitschr, fur 1-alionelle Medicin, 184'J. t. VUl, p. 8).

(c) Cloella, Diffusionsversiiche durch Membranen mit 2 Salzcn. Zuricli, 185i,

126 ABSORPTION.

maie, un morceau de vessie, par exemple, et dont la partie supérieure est fermée, sauf dans le point se trouve insérée l'extrémité d'un tube vertical ouvert par le haut. On renferme dans cet instrument le liquide dont on veut étudier l'action osmogène, et l'on met la surface extérieure de la paroi perméable du réservoir en contact avec le second liquide en la faisant plonger plus ou moins dans le bain constitué par celui-ci ; puis on note le point correspondant au niveau du liquide intérieur dans le tube vertical de l'cndosmomctre, et l'on évalue les chan- gements de volume que ce liquide éprouve en conséquence des actions osmotiques, par le déplacement de ce niveau qui monte ou qui descend dans le tube proportionnelleuient à ces chan- gements (1).

(1) Dans les premières expériences failes par Dulrochet, le réservoir de rendosniomèlre était formé par un sac membraneux, tel que le caecum de l'inleslin d'au Poulet ou la vessie natatoire d'un Poisson (a) ; mais il ne tarda pas à faire usage de l'instrument décrit ci- dessus (6).

Afin d'éviter les erreurs d'observa- tion qui pourraient résulter de la cour- bure de la cloison membraneuse sous Ja pression exercée par le liquide su- perposé, M. Graham place ce genre d'endosmomètre sur une lame rigide criblée de trous et supportée par un trépied (c). Enfin, pour diminuer les complications dues à la transsudalion que pourrait délemiiner la uièuie pres- sion l)ydroslatique,il a soin d'élever le niveau du bain extérieur à mesure que l'endosmose augmente, de façon à maintenir ce niveau à une petite dis-

tance seulement au-dessous du niveau du liquide intérieur. Pour se mettre plus sûrement à l'abri de cette der- nière cause d'erreur, M. Ludwig a fait usage d'uu llacon qui avait pour fond la cloison perméable et qui était sus- pendu à l'aide d'une poulie, de façon à descendre dans le bain à mesure que la quantité de liquide qui s'accu- mulait dans son intérieur augmeulait. Les efl'els endosmotiques étaient éva- lués non par l'élévation du liquide dans un tube, mais par les dilléren- ces de poids avant et après l'expé- rience {(]).

MM.Matieucciet Cima ont substitué à l'appareil de Dulrocliet une espèce d'endosmomètre différentiel, composé d'un réservoir divisé en deux compar- timents par une cloison membiancuse verticale, et se continuant, par clia- cune des cellules ainsi établies, avec

(a) Dutrofliel, L'agent immédiat du mouvement vital dévoilé, p. 130 et suiv. (6; Dulrocliet, Nouvelles recherches expérimentales sur l'endosmose et l'exosmose, 1828, p. 4, pi. i.fig. i.

(c) Giaham, Op. cit. {Philos. Trans., 1854, p. 185, fig. 2, 3 et i). {d) Liiilwig, Lthrbuch der Physiologie, t. I, p. G4, ilg. 7,

PHÉNOMÈNES OSMOTIQl'ES. 127

Les expériences pratiquées de la sorte, ou faites d'après des méthodes analogues, rendent visible à l'œil la résultante des échanges osinotiques, mais ne suffisent pas lorsqu'on veut approfondir l'étude de ces mouvements, et déterminer, soit le pouvoir osmogèm d'vm corps, c'est-à-dire la quantité d'une autre substance qu'une quantité donnée de ce corps est susceptible d'attirer dans son sein en l'enlevant à la cloison perméable adjacente, soit Y équivalent endosmolique de cette substance, c'est-à-dire le volume du liquide extérieur qui se substitue à chaque unité de volume de celle-ci, ou, en d'autres mots, la balance entre les gains déterminés par le jeu des forces attrac- tives dont dépend l'endosmose, elles pertes occasionnées par la diffusion des molécules de la matière osmogène dans le second liquide. Dans ce cas, l'observation des volumes ne nous éclai- rerait en rien, et il faut constater les changements opérés dans la composition des deux masses liquides qui sont séparées par le diajtliragme perméable, et déterminer les proportions dans les- quelles l'une des substances réagissantes entre dans la consti- tution de ces volumes avant et après la réalisation de l'écliange osmotique (1).

un tube vertical ouvert par le haut et liam a fait usage d'un endosmomètre

muni d'une écliellec Les deux liquides dont le réservoir était constitué par

sont déposés dans les deux coniparli- un des vases poreux que les pliysi-

menlsde l'instrument, etchacun d'eux ciens emploient pour la construction

s'élè\e à une certaine hauteur dans le des piles de Grove, et il y adaptait un

tube correspondant. On établit d'abord tube vertical à l'aide d'un ajutage de

le même nivedu dans les deux bran- guUa-percha (c). Il s'est servi aussi

ches de ces vases communicants, et, de ces pots sans ajutage, en évaluant

par l'inégalité de niveau due à l'action les produits des échanges par des pe-

osmolique, on juge des résultats ob- sées ou des dosages chimiques, tenus [a). M. Vierordt a employé un (1) Ainsi, danstouleslcsexpériences

appareil analogue (6). dont je viens de parler, Teflet appa-

Dans d'autres expériences, M. Gra- vent, c'est-à-dire le changement dans

(fl) Matleucci el Cinia, Mcm. sur l'endosmose {Annales de chimie et de physique, 'i' série, 1845, t. Xlll, p. G3, pi. \).

(b) Vierordi, Physik des organischen Stoffwechsels [Archiv fur physiologische Heilkunde, 1847, t. VI, p. B55, pi.).

(c) Graham, loc. cit., p. 1 80, lig. \ .

128

ACSOHPTION.

inniiencc § 'l ^ Un [ireiîiier résullat qui a été donné par les expé-

(le l'élendiic . ' i i » . « /

de la surface riencGS praliquccs de la sorte, et qui était facile a prévoir par la théorie, est que , tontes choses étant égales d'ailleurs , la quantité de liquide introduit dans une cavité de l'endosivomètre est proportionnelle à l'étendue de la cloison perméable à travers

le volume ou dons le poids du liquide que j'ai appelé osmoqène, parce qu'il est la cause principale du pliéno- iiKMie, n'est que le produit de la dif- férence entre les quantités de matières déplacées dans un sens par le courant endosmotique qui ])énè!re dans ce li- quide, et en sens contraire par l'ex- pansion dilTusivedes molécules en dis- solulion dans ce dernier milieu ou courant exosmotique, pour employer ici les expressions adoptées par Du- irochel. Pour évaluer la puissance osmotique déployée dans ces circon- stances, il faudrait donc ajouter aux effets apparents la valeur des perles subies par l'agent osmogène. Par exemple, quand l'endosmomètre est amorcé avec une dissolution de sucre et plongé dans un bain d'eau distillée, la quantité de ce dernier liquide qui pénètre dans l'intérieur de l'instru- ment pour obéir à l'action attractive du sucre est en réalité beaucoup plus grande qu'on ne le croirait au premier abord, car elle correspond en même temps à l'excédant de volume final du liquide intérieur comparé au volume initial de celui-ci, et à la quanlilé de sucre qui s'esl écliappée au dehors et qui a été remplacée par de l'eau dans la cavité de rcndosmomètre. Or, les expériences de M. Craliam montrrnt que le poids du sucre qui s'écliappe de l'instrument par lolTet de la difl'u- sion est d'ordinaire égal à environ 1/5" (\x\ gain réalisé par la dissolution

sucrée, par suite de ces échanges. lien résulte que la quantité d'eau qui, sous l'influence attractive du sucre, a tra- versé la cloison membraneuse , est aussi d'environ 1/5" plus considérable que celle indiquée par la comparaison des volumes du liquide intérieur au commencement et à la fin de l'expé- rience.

Ainsi, dans une série de huit expé- riences faites avec des dissolutions de sucre à divers degrés de concentra- tion (depuis 1 jusqu'à 10 pour 100 de sucre), la proi)ortion entre les pro- duits de la dilfusion, c'est-à-dire la quantité de sucre répandue au dehors, et les produits apparents de l'osmose, c'est-à-dire l'aiigmenlalion de poids déterminé dans la dissolution sucrée par l'endosmose, n'a varié que peu. Elle était en moyenne de o8',82Zi de sucre épanché au dehors, etdel7s',639 de gain réalisé par la dissolution. Mais la quantité d'eau reçue par ce dernier liquide se composait à la fois du volume correspondant à ce dernier poids, et de ce qui avait remplacé les 3s',8'2i de su- cre perdu, volume qui peut être estimé à 'is',25. Par conséquent, pour ù«',82/j de sucre déplacé par la dilfusion, il était entré 198','r82 d'eau, ce qui cor- respond à 5,2 parties d'eau pour rem- placer 1 partie de sucre. Dans d'autres expériences analogues faites avec des dissolutions à divers degrés de con- centration, M. Graham a obtenu à peu près les mêmes rapports : ainsi, pour

Différences

(ians la puissance

PHÉNOMÈNES osmotujues. 129

laquelle ce passage s'effectue (l). Nous verrons bientôt (jn'il en est de même pour l'absorption, et que par conséquent un des moyens employés par la Nature pour accroître la puissance absorbante d'un organe, c'est d'augmenter la surface par laquelle celui-ci se met en rap])ort, d'une part avec la matière (pii doit pénétrer dans l'économie , et d'autre part avec le fluide destiné à la recevoir, c'est-à-dire le sang.

§ 12. Lorsqu'on varie les substances dont l'endosmo- mètre est cliargé, et (ju'on opère d'ailleurs dans des condi- tions identiipics, on ne tarde pas à reconnaître que les cftets TsTu"rl'!'' obtenus dilTcrcnt beaucoup suivant la nature cliimique de ces corps.

Ainsi, prenons une série d'instruments de ce genre d'égale capacité et garnis tous avec la membrane muqueuse de la vessie du Bœuf; plaçons dans cbaque endosmomètre une quantité de lifpiidc suffisante pour que la surface de celui-ci arrive au niveau du zéro dans le tube gradué , et cboisissons pour les charger ainsi des dissolutions aqueuses de divers chlorures dans la proportion de 1 en poids pour 100 parties d'eau ; enfin, plongeons la partie inférieure de chacun des instruments ainsi

1 partie de sucre déplacée par diffusion ou exosmose, l'eau absorbée était de :

5.21 par la dissolution à 1 p. 100 de sucre. 5,85 à 2 p. 100

5.22 à 5 p. 100 4,43 il 10 p. 100 4,66 à 20 p. 100

La moyenne était de 5,07 parties d'eau .se substituant à 1 partie de sucre (a).

(1) Ainsi, dans une expérience com- parative faite par Dutroclietjles réser-

voirs des deux endosmomèlres con- struits avec les mêmes matériaux et amorcés avec les mêmes substances, mais dont les cloi.sons perméables avaient des diamètres dans le rapport de 1 à 2, funMU pesés avant leur im- mersion dans l'eau et après un séjour de deux heures dans ce liquide. Le grand présenta une augmentation de poids quatre fois plus considérable que le petit; rapport qui était préci- sément proportionnel aux différences des surfaces absorbantes (6).

(a) Graham, On Osmotic Force (Philos. Trans., 1854, p. 197J.

(b) Uuirochet, Op. cit. (Mémoires, t. I, p. 28).

] 30 ABSORPTION .

préparés dans un bain d'eau distillée : au bout d'un certain temps le Hquide contenant le cblorure de sodium sera monté de 12 millimètres ; celui contenant du chlorure de potassium sera monté à 18; la dissolution de chlorure de strontium se trouvera à 26 millimètres; la dissolution de cblorure de man- ganèse à 36 millimètres ; celle de chlorure de nickel à 88 milli- mètres ; celle de bicblorure de mercure à 121 millimètres; celle de chlorure de cuivre à 351 millimètres ; enfin celle de chlorure d'aluminium à S^O millimètres (1).

Nous verrons bientôt qu'il existe une certaine proportionna- lité entre le degré de densité d'une dissolution saline ou sucrée et la grandeur des effets osmotiques déterminés par cette sub- stance. Par conséquent, on pourrait croire au premier abord qu'il doit y avoir des relations analogues entre la [)esanteur spé- cifique de corps de nature différente , et l'intensité de la force motrice qu'elles sont suscepfibles de déployer dans les circon- stances dont l'étude nous occupe en ce moment. Mais il suffit d'un petit nombre d'observations pour prouver (jue les choses ne se passent pas ainsi. Par exemple, le chlorure de potassium, qui donne des effets endosmotiques plus considérables que le chlorure de sodium, est moins dense que ce corps, et les chlorures de baryum et de calcium en diffèrent à peine sous le rapport osmotique, quoique la densité du premier soit 3,9 et celle du second seulement 2,2. Du reste, pour mettre bien en évidence ce défaut de relation entre la pesanteur spécifique des corps et leur pouvoir osmogène, il suffit de comparer les résultats fournis par l'emploi de dissolutions d'égale densité de certaines substances, telles que du carbonate de [)otasse, du car- bonate de soude, de l'acide oxalique ou de l'acide chlorhydrique :

(1) Les résultats indiqués ici sont trouve dans le mémoire de ce chi- ceux obtenus dans les expériences miste beaucoup d'autres faits analo- comparalives de M. Graham. On gués (a).

(a) Graham, On Osmotic Force {Philos. Trans., 1854, p. 225.

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. 131

avec ces sels basiques, la colonne endosmomélrique s'élèvera rapidement ; avec les acides convenablement dilués, elle s'abais- sera d'une manière non moins remarquable, el descendra beau- coup au-dessous du niveau du bain extérieur (1).

Ces faits, et beaucoup d'autres du même ordre que je pour- rais invoquer si je ne craignais de m'arrêter trop longtemps sur l'examen de cette question, prouvent aussi d'une manière sur- abondante que la valeur des effets endosmotiques n'est pas liée uniquement à la grandeur des forces attractives développées entre les deux liquides réagissants ; et d'ailleurs le raisonne- ment suffirait pour établir qu'il ne saurait y avon^ de connexité nécessaire entre l'avidité plus ou moins grande d'une substance pour une autre et l'accumulation des molécules de ces corps dans l'espace occupé par l'un plutôt que dans celui occupé par l'autre. Effectivement, si le corps A attire le corps B, celui-ci doit agir de la même manière sur A, et par conséquent le

(1) Les effets négatifs de l'acide oxalique n'ont pas éctiappé à l'atten- tion de Dutrochet, et contribuèrent beaucoup à reclilier les opinions de ce physiologiste, relatives à l'ensemble des phénomènes osmotiques. Il vit aussi que des effets analogues pou- vaient être produits par l'acide chlor- hydrique, l'acide sulthydrique et plu- sieurs autres substances acides, mais que cela était subordonné au degré de dilution de ces corps dans l'eau {a). M. Graham a repris plus récemment l'étude de l'action osmotique de ces substances, et a trouvé que le courant dirigé de l'acide vers l'eau était le plus puissant quand on chargeait l'endos- momètre avec une dissolution d'acide oxalique au litre de 1 p. 100.

L'acide sulfurique produit des effets tantôt négalils, tantôt positifs, lors- qu'il est étendu dans 1000 parties d'eau,

M. Graham a observé des varia- tions plus considérables dans ses ex- périences sur d'autres acides, et il a constaté que, sous ce rapport, quel- ques-uns de ces corps changent de caractère par le seul fait de leur fusion ignée. Ainsi une dissolution faite avec de l'acide citrique ou de l'acide tar- trique, au titre de 1 p, 100, donne des produits osmotiques positifs, tan- dis que, préparées avec ces mêmes acides préalablement fondus par la chaleur, ces dissolutions donnent des effets négatifs {b).

(a) Dutrochet, Sur V endosmose (Méinoii'es, t. I, p. 46 et suiv.). {b) Graliam, Op. cit. {Philos. Trans., 1854, p. 191).

La direction

du courant

cndosmotiquB

est déleniiinée

par l'aclion

,13Ç2 ABSORPTION.

déplacement de l'un ou de Taulre sera déterminé, non par le degré d'intensité de cette attraction muluelle, mais par la résis- tance différente que cette force rencontrera pour mouvoir de la sorte A et B. Or, la résistance inégale à vaincre dans cette circonstance est due essentiellement à l'obstacle que le dia- phragme situé entre les deux liquides oppose à leur passage. Nous avons déjà vu que la direction du courant principal, ou courant endosmotique, c'est-à-dire celui qui baigne directe- ment les parois des passages interstitiels de la cloison placée "dcïa" entre les deux liquides, est déterminée par la prédominance de membrane. j'g^^JQj^ Capillaire cxercée par cette cloison sur l'un de ces liquides, lequel vient occuper ces passages, et traverse ainsi le diaphragme pour se mêler ensuite à l'autre liquide. La théorie nous conduit donc à poser en principe que, toutes choses étant égales d'ailleurs , celui des deux liquides miscibles réagissants qui sera attiré avec le plus de force par la substance de la cloison perméable sera versé dans l'autre et en augmentera la masse.

Connaissant la force de pénétration relative avec laquelle deux liquides s'accumulent dans un tissu organique, nous pour- rons donc déterminer à priori celui vers lequel le courant endosmotique se dirigera quand celui-ci sera séparé de l'autre liquide par une cloison mince composée de ce même tissu. Ce sera toujours le liquide le moins apte à s'insinuer dans la sub- stance du diaphragme qui augmentera de volume aux dépens do l'autre.

Yovons si l'expérience confirme ce raisonnement. Nous savons, par l'étude des phénomènes d'imbibition, que la force avec laquelle les divers liquides sont attirés dans les espaces interstitiels d'un môme tissu organique varie beaucoup suivant la nature chimique de ces corps et suivant les condi- tions dans lesquelles la réaction s'opère. Le volume du liquide dont le tissu s'imprègne est réglé par le rapport entre cette force qui tend à accumuler de la matière dans ses cavités à

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. 133

parois extensibles et la résistance que la substance élastique de ces mêmes parois oppose à la distension ; en sorte que si la nature de cette substance reste la même, on peut juger delà puissance d'imbibition par le degré dégonflement du tissu, ou, ce qui revient au même, pnr le poids du liquide qu'il est sus- ceptible d'accumuler dans son intérieur. Or, nous avons vu que les tissus animaux, après avoir été privés d'eau par la dessicca- tion, se gorgent d'eau quand on les plonge dans ce liquide, et que si, au lieu de les placer dans l'eau, on les immerge dans une dissolution aqueuse de sel commun, ils absorbent aussi une certaine quantité de liquide, mais beaucoup moins que s'ils étaient en présence d'eau pure(l). Nous savons également que ces mêmes tissus se laissent pénétrer par l'alcool, mais n'ad- mettent que fort peu de ce liquide.

D'après les principes établis ci-dessus, nous pouvons donc prévoir que lorsque de l'eau se trouvera en contact avec une des surtaces de la cloison osmolique formée par une membrane organique de ce genre et de l'alcool en contact avec la surface opposée, le courant endosmotique se portera de l'eau vers l'al- cool, bien que ce dernier liquide soit moins dense que le pre- mier; et, effectivement, c'est ce que l'expérience nous monire. Ainsi, quand on [ilace de l'alcool dans le réservoir del'endos- momètre garni d'un diapbragme fait avec de la vessie et qu'on met de l'eau en contact avec l'extérieur de l'instrument, le liquide intérieur augmente de volume et monte dans le tube qui termine supérieurement cet instrument ; tandis que si le môme endosmomètre est cbargé d'eau et plongé dans un bain d'alcool, le liquide intérieur, au lieu de s'élever, descend plus ou moins rapidement, et sa surlace peut être portée ainsi beau- coup au-dessous du niveau du bain circonvoisin (2).

(1) Voyez ci-dessus, page 81 el Dulrochet avaient porté ce pliysiolo--

suivantes. f^iste <i penser que Kendosniose s'i'ta-

(2) Les premières expériences de jjlissail toujours du liquide le moins

134 ABSOEtPTiON.

Nous avons déjà eu l'occasion de voir (ju'il en est de même quand une dissolution de chlorure de sodium, sub- stance qui ne pénètre que faiblement dans un tissu animal , est séparée d'un bain d'eau pure par une cloison formée d'une membrane de ce genre. C'est l'eau qui traverse le dia- phragme osmotique pour aller grossir le volume de la disso- lution saline.

Je viens de dire qu'un endosmomètre chargé d'acide chlor- hydrique dilué, et plongé dans de l'eau pure, donne lieu à une osmose négative, c'est-à-dire que le courant dominant se porte de l'intérieur à l'extérieur, et que c'est le volume de l'eau qui augmente. Nous en pouvons conclure que la substance animale dont la cloison se compose se gonflera davantage dans une dis- solution semblable d'acide chlorhydrique que dans un bain d'eau distillée; et, effectivement, des expériences faites dans une tout autre vue, et dont j'aurai à rendre compte en traitant de la théorie de la digestion, montrent que les choses se passent de la sorte (1).

Les faits nous manqueraient bientôt, si nous voulions vérifier l'exactitude de cette application des lois de la capillarité à tous les cas particuliers le courant endosmolique s'établit dans une direction déterminée. Je ne pousserai donc pas cet examen plus loin , mais il me semble nécessaire de dire que dans un

dense vers le liquide le plus dense (a); musculaire, des membranes ei autres

mais ses recherches ultérieures lui matières animales immergées pendant

ont fait voir que cela n'est pas, et que, quelques heures dans de Teau aiguisée

dans un grand nombre de circon- d'acide chlorhydrique se sont gorgées

stances, le contraire s'observe (6). d'une quantité si considérable de ce

(1) Dans les expériences faites par liquide, qu'elles se sont gonflées énor-

MM. r.oucliardat et Sandras sur les mément et sont devenues transpa-

digeslions artificielles de la chair rentes comme de la gelée (c).

(a) Diilroriicl, L'agent immédiat dti. mouvement vital, p. 126 et suiv. (b)Kieiu, Pc i'ciidosiiwse (Mémoires, t I, p. 40).

(c) Dumas, napport sur un Mémoire de MM. Sandras et Boiicliardat, relatif à la digestion {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1843, t. XVI, p. 254).

^HÉNOMÊNES OSMOTiQUEâ. iâS

grand nombre de cas on voit cette direction varier avec la nature de la cloison osmotique. Ainsi , Dutrochet a remarqué que si l'on substitue à la cloison perméable faite avec un mor- ceau de la membrane muqueuse de la vessie un diai)lu\igme analogue composé de la membrane interne du gésier d'un Poulet, le courant endosmotique déterminé par la réaction de l'eau et de l'alcool ne se dirige plus, comme dans le premier cas , de l'eau vers l'alcool , mais en sens contraire : c'est l'alcool qui forme le courant dominant et qui se verse dans l'eau (1).

Il en résulte que cette direction ne saurait dépendre des rap- ports existant entre les propriétés physiques des deux liquides, comme l'ont sup[)03é quelques i)hysiologistes, car ces propriétés ne sont pas changées par le fait de la substitution de tel dia- phragme à tel autre ; et cependant nous venons de voir fpi'une substitution de ce genre peut déterminer le renversement du mouvement endosmotique (2).

(1) Celle observation de Du- lablit du liquide dont la capacilé calo- trochet a élé vérifiée par M. Mat- rifique est la plus grande vers celui teucci (a). qui possrdc à un moindre degré cette

Le premier de ces expérimenta- capacité, et même que Tintensilé du

leurs a vu aussi qu'en chargeant Ten- courant est proportionnée à la dillc-

dosmomèlrc d'une dissolution d'acide rencc des cludeurs spécifiques pour

sulfliydrique d'une densité de 1,106, les liquides qui se mêlent en toutes

le courant endosmotique s'établissait proportions (c). Ainsi, quand on l'ait

toujours vers l'eau quand la cloison usage d'éther et d'alcool, le courant

perméable était une membrane ani- principal se porte de ce dernier liquide

maie , et au contraire de l'eau vers vers le premier, et l'on sait que les

l'acide, quand cette cloison était un chaleurs spécifiques sont : 0,503 pour

tissu végétal (6). l'éther et 0,6A/l pour l'alcool ; mais,

(2) M. Béclard a remarqué que dans si l'on emploie de la même manière de les expériences endosmoméiriques l'éther chargé d'une certaine quantité faites avec les membranes commune- d'eau, la chaleur spécifique du mé- menl employées comme cloison per- lange peut être rendue supérieure à méable, le courant endosmotique s'é- celle de l'alcool, et alors le courant

(a) MaUeucci, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, p. 57.

(b) Diiiroclii;!, art. Endosmosis (Toild's Cyclop. of Anat. and Physiol., t. II, p. 108).

le) i. Béclard, Mémoire sur la théorie de Vendosmose {Gaz-ette des hôpitaux, 1851 , p. 3-23).

Influence

du decjré

tle'

conccnlralion

lies liquides

sur l'endosmose.

430 ABSOnPTîON.

§ 13. La direction da courant endosmotique clant déterminée par le jeu des actions capillaires dont la cloison perméable est le siège, le second acte du phénomène com- mence : le liquide amené à l'extrémité des passages interstitiels est appelé au delà, et se disperse plus ou moins rapidement dans le li(juide adjacent dont il augmente le volume. Ce mou- vement de progression dépend, comme nous l'avons déjà vu, des attractions adhésives ou chimiques exercées parles molé- cules de l'une des substances réagissantes sur celles de l'autre. 11 est donc évident que si toutes les autres conditions restaient identiques, le déplacement devrait être d'autant plus rapide que la molécule qui arrive dans l'espace occupé par le liquide

endosmoliquc se dirige de Tétlier vers l'alcool.

M. Béclaid s'appuie aussi sur les fails suivants :

Alcoiil (tli.'d. spc'cif. 0,044) et eau (chai, spccif. 1,0), courant jirincii'al vers l'alcool.

Alcool (0,644) et esprit de bois (chai. spécif. 0,071), courant principal faible vers l'alcool.

Alcool (0,044) et essence de térében- liiine (chai, spécif. 0,467) , courant principal vers l'essence.

4* Alcool (0,644) et huile d'ohve (chai, epécif. 0,309), courant principal vers l'huile.

Ëlher acétique (0,484) et essence de térébenthine (0,467), courant princi- pal vers l'essence.

G" Élhcr acétique (0,484) et clher sidfu- rique (0,503), courant principal vers l'étlier acétique.

'i' Essence do térébenthine (0,4G7) et es- prit de bois (0,671), courant piiuci- pal vers l'essence.

8" E^scnco do térébeiilliiiic (0,407) et éthcr sulfuriquo (0,503), courant principal vers l'essence.

9" Essence de térébenthine (0,407) et huile d'olive (0,309), courant prin- cipal vers l'huile.

Cette concordance entre la direc- tion du courant osmotique du liquide dont la chaleur spécifique est la plus élevée vers celui qui a une clialeur spécifique moindre, est très remar- quable, et semble indiquer l'existence d'un certain rapport entre la grandeur de la capacité calorilique de ces sub- stances et le degré de puissance de l'attraction adhésive qui se développe entre chacime d'elles et la membrane animale. Mais, ainsi que je l'ai déjà fait remarquer, le phénomène de l'os- mose ne peut dépendre de cette cir- constance, car, en faisant varier la nature des diaphragmes, on ne change en rien les rapports entre la chaleur spécifique des liquides en présence, et, par conséquent, si rhypollièsc de M. Béclard était fondée, la direction de l'endosmose ou du courant prin- cipal devrait rester invariable, tandis que dans beaucoup do circonstances celte direction est renversée.

PHÉNOMÈNES OSMOTlQUES. 137

en repos se Irouverait dans les limites de la sphère d'attraction d'un plus grand nombre de molécules de ce dernier corps, et, toutes choses étant égales d'ailleurs, ce nombre est réglé par le degré de concentration du liquide contenant ces mêmes molé- cules. Or, dans une dissolution saline ou sucrée, ce sont les particules de sel ou de sucre qui déterminent le déplacement des molécules d'eau situées à l'embouchure des passages inter- stitiels de la cloison ; les particules d'eau qui s'y trouvent associées ne peuvent produire aucun effet de ce genre, et par conséquent si les résistances à vaincre ne changent pas, et si les autres conditions de l'expérience restent invariables, les effets endosmotiques devront croître avec le nombre de molé- cules de sel ou de sucre qui se trouvent comprises dans un espace déterminé, ou, en d'autres mots, être proportion- nels au titre de la dissolution comparée à celui du liquide affluent.

Mais, pour que le liquide contenu dans les canaux capillaires du diaphragme soit tiré de ces passages, il y a des résistances à vaincre, car les molécules constitutives de la couche périphé- rique de chaque petit courant adhèrent aux parois de ces canaux. Nous savons aussi que les résistances dues aux frottements de ce genre augmentent très rapidement avec la vitesse du mou- vement. Il en résulte que les obstacles à surmonter pour que le courant endosmotique satisfasse à la puissance attractive croissante développée par l'intervention d'une quantité du corps osmogéniquc qui elle-même croîtrait, grandiront rapi- dement avec la vitesse des courants, et détermineront dans les effets du travail de translation une diminution d'autant plus marquée que cette vitesse deviendra plus considérable.

Ainsi la théorie physique des phénomènes osmotiques nous fait prévoir que les changements de volume effectués dans des temps égaux doivent être liés d'une manière intime à la pro- portion de la substance osmogéniquc qui se trouve dans le

1â8 ABSORPTION.

liquide vers lequel le courant se dirige ; mais que la raison suivant laquelle les produits du travail de translation augmen- teront ne sera fias la même que la progression des quantités de la matière agissante, et que, toutes choses restant égales d'ailleurs, le volume de li(}uide déplacé en une certaine unité de temps par chaque unité de la matière osmogénique dimi- nuera, suivant une certaine loi, avec l'augmentation de la quan- tité de cette matière.

L'expérience est en accord avec ces vues théoriques. Quand on place dans des endosmomètres à diaphragme membraneux diverses dissolutions aqueuses d'une même substance, on voit que la hauteur à laquelle le liquide intérieur s'élève en un temps donné augmente avec le degré de concentration de la dissolution , et que dans certaines limites la progression dans la quantité d'eau dont l'instrument se charge est, à peu de chose près, proportionnelle à l'accroissement de la densité du liquide intérieur comparée à celle du bain extérieur. Ces relations ont été mises en lumière par les expériences de Dutrochet et ressortent également des résultats obtenus par MM. Vierordt, Ludwig et Graham (1). Mais quand la concentration du liquide osmo-

(1) Dans une première série de recherches faites par Dutrocliet, le sirop, tionl la densité moyenne pen- dant la durée de l'expérience était 1,080, donna en une heure et demie une ascension de 19 1/2 degrés. Avec une dissolution, dont la den- sité moyenne était l,l/il, la colonne s'éleva , dans le même espace de temps, à 'ÔU degrés. Enfin, avec une dissolution, dont la densité moyenne était 1,222, l'ascension était de 53 de- grés. Les quantités de sucre employé étaient comme 1, 2, U. Or, en jnenant pour base d'une pareille progression 19 1/2, on aurait pour les vitesses pro-

portionnelles de l'endosmose 19 1/2, 39,78; nombres qui s'éloignent beau- coup de ceux donnés par l'expé- rience. Jl n'y a aussi aucune relation entre les nombres observés et ceux correspondant aux densités respec- tives des trois sirops. Mais il y a un accord très grand entre ces quantités et celles que donne la progression des excédants de la densité du sirop sur la densité de l'eau. Effectivement, la pro- gi cssion, dont le premier leime serait 19 1/2, et qui serait comme les nom- bres 0,80, 0,l/!l, 0,222, donnerait 19 1/2, o/i, 5/|. Or les nombres trou- vés par l'expérience étaient, commeje

PHÉNOMÈNES OSMOTiaUES. 11^9

gène dépasse un certain degré , la valeur des produits cesse d'être sensiblement proportionnelle à la (juantité de la matière attractive ; on y remarque un déficit de plus en plus considé- rable, et l'on voit que l'effet utile de la force motrice dévelop- pée par chaque molécule osmogénique diminue avec l'accroisse- ment du nombre de ces molécules dans un espace donné (1).

l'ai déjà dit, 19 1/2, 3/i et 53. Deux autres séries d'expériences, discutées de la même manière, donnèrent :

N" 1.

2.

Résultats obseï

-vés.

Résultats calculés.

. 10,25

10,25

n

16,30

32,52

32,30

9

9

14,50

15,60

30

28

On voit que les résultats du calcul ne s'éloignent que très peu de ceux fournis par l'expérience, et Dutrochet pensait que les écarts pouvaient s'ex- pliquer par certains changements dans le degré d'imbibition de la cloison os- motique (a).

De nouvelles recherches faites avec plus de précision par M. Vierordt sont venues confirmer, dans certaines li- mites, la loi établie par Dutrochet (6).

Enfin, M. Graham a fait également diverses séries d'expériences analo- gues, d'où il résulte qu'entre Ip. 100 et 10 p. 100 de sucre, la progression des effets endosmoliques était à peu près proportionnelle aux quantités re- latives de cette substance. Ainsi, dans une de ces expériences, la hauteur de la colonne endosmométriquc était de 10 ou 12 avec la dissolution contenant 1/100 de sucre , de avec 2/100 de

sucre , de 6/i avec 5/100, et d'environ 100 avec 1/10 de sucre. Mais avec des dissolutions contenant 1/5, les effets ne s'accrurent pas dans la même pro- portion, et la colonne ne s'éleva en moyenne qu'à environ 129 millimè- tres. Or celte diminution dans la va- leur des effets produits par des quan- tités égales de matière n'était pas due à une augmentation dans les pertes par diffusion , car celles-ci diminuè- rent dans une proportion encore plus forte (c).

(!) Dutrochet et quelques autres expérimentateurs, en n'opérant que sur des dissolutions dont la densité ne variait que peu, ou en n'examinant pas d'assez près l'ensemble du phéno- mène, avaient été conduits à penser que la proportionnalité entre la ri- chesse de la dissolution et la gran- deur des effets endosmotiques existait pour les matières salines aussi bien que pour les substances peu actives , telles que le sucre; mais \'. Ludwig, en étudiant avec plus de soin ce qui se passe quand on fait usage de chlo- rure de sodium, ou de sulfate de soude à divers degrés de concentration, a vu que les valeurs des produits n'aug- mentent pas suivant la même loi que le titre des dissolutions, et devaient

(a) Dutrochet, Op. cit. {Mémoires, p. 30 et suiv.).

(b) Vierordt, Physik des organischen Stoffivechsels {Archiv fur physiol. Heillc, l. VI, p. 668 et suiv.).

(c) Graham, On Osmotic Force (Philos, Trans., 1854, p. 196),

uo

ABSORPTION.

Indiience des

§ 1/|. Dans la discussion de ces questions délicates, il faut modifications avoir uussi égard aux modifications que les matières réagissantes osmoik|ue" peuvent déterminer dans la constitution physique ou cliimique

ilolerminées i i i .• , i , ,

j.r les liquides de la cloison osmotique, et aux changements qui peuvent en employés. r^g^,](g^. (]a,jg ]g Jegi^é dc perméabilité de ce diaphragme. En effet, quand celui-ci est formé par un tissu très extensible et fort élastique, comme le sont la plupart des membranes ani- males, le contact d'une dissolution saline concentrée peut y déterminer une rétraction considérable, et diminuer beaucoup la capacité de ses cavités interstitielles, Ainsi, un morceau de vessie qui, en s'imbibant d'eau pure, serait susceptible de se charger de 5 volumes de liquide, ne pourra en contenir que 2 volumes si l'eau est saturée de chlorure de sodium, et l'on conçoit que le resserrement des voies de communication dépen- dant de causes de ce genre puisse amener une telle diminution dans le débit de ces conduits, que l'afllux du liquide vers la sub- stance osmogène devient insuffisant pour ahmenter le travail osmotique que celle-ci tend à effectuer, ou même pour rendre les produits de ce travail inférieurs à ceux que donnerait l'ac- tion d'une dissolution faible.

Les modifications que l'action des substances différentes peut déterminer dans l'extensibilité des tissus organiques, et par

être représentées non par une droite, mais par une ligne courbe (a).

I\I. draliam a éiendu plus loin ses observations, et a soumis à ce genre d'examen un grand nombre de sub- stances salines et autres. On pourra juger des eilels de la concentration par les résultats suivants obtenus en cbar- géant l'endosmomètre de dissolutions de sulfate de magnésie à divers degrés de concentration :

PROPORTION

ÉLÉVATION

DU SEL

de la

|ioilr 1 00 parties

COLOMNE ENDOSMOMETniQUE,

d'eau.

Maximum.

Minimum,

2

33

20

5

70

73

H)

tr.2

4 34

20

1

283

238 (b)

{a) Ludwig, Op. Cit. [Zeilschr. fin- ralioucUc Medicin, 1849, t. VUI, p. 9). (6) Graham, Op. cit. [Philos. Trans., 1854, p. -199].

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. l/ll

conséquent sur la dilatation des passages osmotiqucs sous l'in- fluence d'une force constante qui tend à accumuler des volumes croissants de liquide dans ces cavités , sont mises également en évidence par les expériences dans lesquelles on mesure les produits de la filtration sous l'influence d'une pression donnée. Plus une membrane perméable sera extensible, plus, sous l'action d'une force d'impulsion de même intensité , ses pores se laissent distendre, et plus aussi ces orifices débiteront de liquide. Or, une membrane qui, en présence d'un réactif donné, résistera à la poussée du li(iuide de façon à ne laisser passer qu'un volume de celui-ci pendant cbaque unité de temps, pourra être traversée pendant le même espace de temps par près de 200 volumes d'une autre substance. Un physicien de Pise, M. Cima, a fait des expériences de ce genre, et dans l'une d'elles on voit que, pour faire filtrer à travers la membrane muqueuse du jabot d'ime Poule, sous une pression de liO centi- mètres de mercure, un certain volume d'eau, il a suffi de 18 secondes, tandis que pour faire passer un même volume d'eau contenant un peu d'ammoniaque, il fallait 92 minutes 30 secondes. La valeur des courants qu'un même degré de force osmotique est apte à établir dans l'épaisseur d'une mem- brane animale doit par conséquent être susceptible de varier beaucoup avec la nature des substances qui constituent, d'une part cette cloison , d'autre part le liquide qui en occupe les cavités interstitielles. Or, l'action exercée de la sorte sur l'état physique d'un tissu organique par un réactif donné varie beau- coup en intensité, suivant la nature des membranes, et il en résulte que, toutes choses étant égales d'ailleurs, il y aura une cause de différences dans les produits du travail endos- mique.

Supposons, par exemple, l'endosmomètre chargé d'une sub- stance qui serait également avide d'eau et d'alcool : si la cloison de l'instrument est faite avec un morceau de vessie de Bœuf,

l/l^ ABSORPTION.

le volume de liquide qui pénétrera de l'extérieur dans l'inté- rieur de l'instrument en un temps donné pourra être de 1 pour l'alcool et de 2 pour l'eau; mais, en employant une cloison faite avec le jabot d'une Poule, la différence pourrait être dans le rapport de 1 à 8, ou même beaucoup plus (1).

Je m'expli({ue delà sorte, au moins en partie, les changements que la présence de certaines substances détermine parfois dans la valeur des effets osmotiques produits par les agents auxquels on les associe. Ainsi, la présence d'une très petite proportion d'acide chlorhydriquedans la dissolution de chlorure de sodium dont on charge un endosmomètre, loin de produire une osmose négative,

(i) Dans les expériences de M. Cima par le passage d'un volume conslant,

sur la fillration forcée de divers li- sous l'influence d'une pression de

quides au travers de membranes diffé- 10 centimètres de mercure, a varié de

rentes, on voit que le temps employé la manière suivante :

LIQUIDE EMPLOYE.

Dissolulion aqueuse d'ammoniaque (-ij).

Eau pure

Dissolution satm'ée de sel commun. . . Alcool

JABOT.

14' 10" 19 35

129 9

170 0

VESSIE.

20' 0" 29 0 33 22 37 10

Sous une pression de 30 centimètres de mercure, les résultats ont été :

Dissolution ammoniacale.

Eau

Dissolution saline. . . .

Jabot. Vessie.

0'33" 4'53"

2 9 5 48

16 45 G 2

Alcool 112 3

10 11

Enfin, sous une pression de ZiO cen- timètres , la durée de la filtration a été de :

0'18" avec la dissolution ammoniacale;

119 avec l'eau ;

10 52 avec la dissolution saline ;

92 30 avec l'alcool.

Ainsi l'accroissement du débit dé- terminé par une augmentation de la pression comme 1 à /i, a été, avec la membrane du jabot, dans le rapport d'environ 1 à 17 pour l'eau, de 1 à 12 pour la dissolution de sel commun, et de 1 à 10 pour l'alcool (a).

(a) Cima, Sulievaporazione e la transudazione dei liquidi attraverso le membrane animali (Memor. delV Accadem. délie scienze di Torino, série, 1853, t. XIII, p. 281).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES, 1/|3

comme si elle était seule, augmente considérablement les effets déterminés par celte substance saline : et cela se conçoit faci- lement. Le chlorure de sodium provoque le resserrement des tissus organiques ; l'acide chlorhydrique paraît diminuer la force de résistance de la substance constitutive des membranes animales, et par conséquent son action sur celles-ci doit balan- cer plus ou moins l'infïnence du sel et rendre les passages interstitiels plus extensibles ; circonstance qui aura pour effet de rendre l'afflux de l'eau vers l'agent osmogénique plus facile, et par conséquent aussi d'augmenter les produits du travail endosmotique.

L'addition d'une petite quantité de chlorure de sodium suffit d'ordinaire pour produire un effet contraire et pour diminuer notablement les produits endosmotiques dus à l'action des ma- tières auxquelles on l'associe ; or, ce résultat est également en parfait accord avec ce que je viens de dire touchant l'action constrictive de cette substance et l'influence (pie cette constric- tion doit avoir sur le débit des passages capillaires traversés par les courants endosmotiques (1).

Je suis porté à croire aussi que certaines différences dans l'extensibilité des tissus d'une même membrane vers les deux surfaces opposées de celle-ci, et les modifications qui peuvent

(1) Ainsi, dans une série d'expérien- ces faitesà Taided'iin endosniomètre à cloison de toile albuminée, M. Graham a vu que le liquide intérieur s'élevait, dans l'espace de cinq heures, à envi- ron 25 millimètres quand il employait une dissolution chargée de 1 centième de chlorure de sodium, et à IZiO ou à 150 millimètres quand il faisait usage d'une dissolution de carbonate de soude , soit dans les mêmes propor-

tions, soit contenant '2 pour 100 de ce sel ; mais lorsqu'il employait une dis- solution contenant 1 pour 100 de car- bonate et 1 pour 100 de chlorure, la colonne endosmométrique ne montait qued'environ 60 ou 70 millimètres. Le mélange de ces deux substances avait donc diminué de plus de moitié la somme des effets osmotiques qu'elles auraient produit si elles avaient agi isolément (a).

(a) Graham, On Osmotic Force (Philos. Trans., 1854, p. 209).

U4

ABSORPTION.

Différwues en résultcr dans la l'orme aussi bien que dans le calibre des

dan

icmodcd'aciioii passages intcrstitiels, sont en partie la cause de l'inégalité qui

des

deux surfaces s'observc parfols dians les produits du travail osmotique quand membrane, on vanc Ics rapports de la cloison perméable avec les liquides réagissants.

MM. Matleucci et Cima ont vu qu'en prenant pour diapbragme osmotique un morceau de la peau d'une Torpille, en cbargeant l'instrument avec une dissolution de gomme et en le plongeant dans un bain d'eau pure, le courant endosmotique faisait monter le liquide intérieur à une bauteur de 30 millimètres quand la gomme était en rapport avec la surface externe de la peau, et de 6 à 13 millimètres seulement quand celte membrane était tournée en sens inverse. L'eau a donc passé beaucoup plus facilement de la surface interne de la peau au dehors que de la surface épidermique de celle-ci en dedans. Des résultats ana- logues ont été obtenus avec la peau de la Grenouille (1) ; et

(1) Voici les résultais numériques de peau de Grenouille et chargé de

obtenus par MM. Malteucci et Cima, sucre donnait une élévation de 50 ou

en mettant alternativement les sur- même 80 millimètres lorsque la face

faces opposées des membranes en rap- intérieure de la membrane était eu

port avec l'eau et en chargeant Tin- conlact avec l'eau extérieure, et seu-

strument avec diverses matières. lement de 2 millimètres quand c'était

Le liquide inlérieur s'est élevé aux la surface épidermique qui était en

hauteurs suivantes, l'eau du bain rapport avec ce dernier liquide. OH'Titl

étant en contact avec les surfaces in- la peau d'An;^uille a été détachée du

diquées ci-dessous. corps de l'Animal depuis plusieurs

„, .„ . ,. , Externe, intn ne. jQurs , la différence devient nulle;

Peau d Anguille et dissolu- •• '

lion de sucre 20--30 à 40™» P"'"' ''' P^a» ^l^ Grenouille, au con-

Mcnic memlirano ei disso- Uwivc, elle augmente pendant un cer-

luiion de gomme 13 26 tain temps après le Commencement de

Peau de Grenouille et dis- l'expérience (a).

solution de sucre 24 36 M. Graliaui pense que ces dillé-

Mêmc membrane et disso- rcuces dépendent seulement de la pu-

huion d'albumine 12 32 trescibilité plus grande des libres

Quelquefois l'endosmomètrc garni musculaires adhérentes à la face in-

(a) MaUeucci et Cima, Op. cit. {Annales de chimie et de physique, 3' série, 1845, p. GG et suiv.).

PHÉNOMÈiNb:s OiîMOTIUUliS. 145

d'îiiilres expériences laites sur la résistance hy(lrostati(|Lie des membranes animales montrent que la transsudation se iait aussi beaucoup plus facilement dans le même sens que dans la direc- tion opposée (1). Or, nous avons vu que les effets de l'action capillaire son! en raison inverse des diamètres des tubes dans l'intérieur desquels les liquides sont contenus, élevés à la quatrième puissance (2) ; et par consé(]uent on conçoit que l'effort nécessaire ponr déterminer l'écoulement varie considé- rablement, suivant que les orifices de sortie offrent des dimen- sions plus grandes ou plus petites, genre de ditïérencMî dont l'existence est présumable dans les orifices par lesquels les cavités interstitielles déboucbent aux surfaces opposées des membranes. Ainsi que je viens de le dire, la ra[)idité avec laquelle l'en- dosmose s'effectue est nécessairement subordonnée à deux circonstances : d'une part, à la grandeur des puissances attrac- tives qui déterminent le mélange des liquides réagissants ;

terne de la peau; car, en faisant des expériences sur des morceaux de vessie, il a vu que les variation:; déterininées par les changements de position de la membrane disparais- saient presque toiaiement lorsqu'on avait soin de dépouiller celle-ci aussi complètement que possible du tissu charnu adjacent (a) ; mais celte opi- nion ne me paraît pas admissible.

(1) Ainsi, dans les expériences de IVI. Cima , le temps employé pour effectuer récoulemenl d'un volume d'eau à travers la peau de la Gre- nouille, sous une pression de 10 cen- timètres de mercure, était d'environ 5 miiiulcs quand le liquide était en contact avec la face interne de cette membrane, et d'environ o7 minutes

quand la position de celle-ci était ren- versée. La différence devenait même beaucoup plus consid'rable sous une pression de 50 centimètres de mer- cure. Il est aussi à noter que l'iné- galité déterminée ainsi dans les pro- duits de la transsudation était beau- coup plus grande avec une dissolution saturée de chlorure de sodium, et au contraire plus petite avec une dissolu- tion ammoniacale. Dans le premier cas , les produits obtenus dans des temps égaux, sous une pression de 10 centimètres, ont été dans le rap- port de l à 10, ou même de 1 à 17, tandis qu'avec l'ammoniaque la diffé- rence n'était que dans le rapport de 1 à 2 ou 3 (6).

(2) Voyez tome IV, page 273.

(a) Graliam, Ûii Osmotlc Force {Philos. Trans., p. 187).

[b] Cima, Op. cit. (Mémoires de IWcadcmie de Turin, 2' série, 1853, t. XIII, [<. iHi).

V. 10

l/lO ABSORPTION.

d'autre part, le degré de résistance que ces forces ont à vaincre pour déplacer l'un de ces corps et pour l'introduire dans l'es- pace occupe par celui qui se trouve du côté opposé de la cloi- son. Or, l'attraction adliésivequi fait })énétrer le li(|uide absorbé dans les cavités interstitielles de la membrane, et qui le me! , pour ainsi parler, à la portée de la substance osmogène, tend à le retenir dans ces mêmes cavités et s'oppose par conséquent à son écoulement dans ce dernier liquide. Il en résulte que, toutes choses étant égales d'ailleurs, plus cette attraction capil- laire sera grande, moins le courant cndosmotique sera intense. Nous savons déjà, ]>ar la différence des hauteurs aux(pielies les divers liquides s'élèvent dans les tubes capillaires, que cette attraction adhésive peut varier en puissance suivant la natm'c chimique, soit de la substance qui constitue le tube , soit de la matière qui y pénètre, et, en étudiant les mouvements des fluides dans les tuyaux de petit calibre, nous avons vu aussi que parfois ces circonstances influent beaucoup sur le débit d'un canal quand la force motrice reste constante. Nous pouvons donc prévoir que, toutes choses étant égales d'ailleurs, le temps nécessaire pour la réalisation du phénomène endosmolique sera d'autant plus long que le liquide absorbé sera plus fortement attiré par la substance de la membrane perméable, et que la route qu'il aura à y parcourir sera plus longue (1). Plus cette

(1) Les expériences de M. Poi- seuille, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler (a), montrent que le moiive- nient de l'eau dans les tuyaux capil- laires peut, la force motrice étant constante, devenir plus rapide ou plus lent, suivant que ce liquide se trouve chargé de telle ou de telle autre ma- tière saline. Par exemple, que l'écou-

lement de l'eau est ralenti par la présence d'une certaine quantité de sulfate de potasse ou de magnésie en dissolution dans ce liquide, mais s'ac- célère quand on substitue ù ces sels du nilrate de potasse ou de l'iodure de potassium {b). On conçoit donc que, toutes choses étant égales d'ail- leurs, l'eau qui pénètre dans l'endos-

(a) Voyez ci-depsus, tome IV, page 248 et suiv.

(b) PoiscuiUe, Hecherches expérimentales sur le mouvement des liquides de nature différente dans les tubes de très petits diamclres [Annales de chimie et de physique, 'i° série, i 847, t. XXI, p. 10).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. l/l7

cloison sera mince , poreuse et indifférente pour le liquide qui la traverse, plus le courant endosmolique sera rapide sous l'influence d'une force osmogène donnée. Pour (ju'il y ait endosmose, il faut que l'altraction adhésive exercée par la membrnne sur l'un des deux liquides réagissants soit assez puissante pour l'emporter sur l'aclion capillaire que celle-ci exerce sur l'antre liijuido; mais, [)ourvu que celte condition se trouve remplie, raccomj)Iissementdu phénomène sera d'autant plus facile, et par conséquent plus rapide, que ces attractions seront plus faibles.

Il est une autre circonstance dont il faut ("gaiement tenir influence compte dans l'étude des phénomènes osmohques, c'est la prLxi's"LiS nature du liquide dont la substance de la cloison [lerméable h membrane. peut se trouver imprégnée avant le commencement de l'expé- rience. Nous avons déjà vu que les liquides adhèrent souvent d'une manière si forte aux corps solides mouillés par eux, qu'il est extrêmement difficile de les en détacher compléteuient, et que la présence d'une couche de matière étrangère, tellement mince (ju'elle échappe à l'observation, peut suffire pour empê- cher la surface ainsi souillée d'exercer sur un autre liquide son action attractive ordinaire. Les effets de cai)illarité jouant un grand rôle dans le passage des li(|uides au travers des cloisons perméables , passage qui constitue la base des phénomènes osmotiques, nous devons donc nous attendre à voir ceux-ci être subordonnés, dans certaines limites, non-seulement à la na- ture chimique de la substance constitutive du diaphragme, mais aussi aux qualités des liquides dont cette substance peut se

moinètre peut y arriver lanlôt plus dont la membrane osmolique est

vite et d'autres fois plus lentement, creusée. Au sujet de l'influence de

suivant que ce liquide est exempt de l'épaisseur de la membrane sur la

tout mélange, ou bien qu'il se trouve rapidité des courants osmotiques, je

chargé de matières qui augmentent ou renverrai à ce que j'ai déjà dit sur

qui diminuent le degré de son adlié- les mouvements des liquides dans les

rence aux parois des canaux capillaires tubes capillaires (lome IV, page 272).

l/l8 ABSORPTION.

trouver imprégnée. L'expérience prouve qu'effectivement il en est ainsi, et, en variant les liquides dont la paroi perméable d'un endosmomètre est imbibé, on peut même changer la direc- tion du courant qui la traverse. Par exemple, si l'on place de l'eau dans un vase de terre, et qu'on immerge celui-ci dans un bain d'alcool, ce dernier liquide mouillera le vase moins rapi- dement que ne le fera l'eau, et bientôt un courant s'établira de dedans en dehors de la même manière que dans une des expé- riences dont j'ai déjà rendu compte en traitant de l'action osmotique des membranes animales (1); mais si le vase poreux a été préalablement imprégné d'une matière grasse qui y adhère beaucoup, un phénomène inverse se produira ; ce sera l'alcool qui traversera la cloison pour aller se mêler à l'eau extérieure, tout comme dans le cas nous avions choisi pour diaphragme entre ces deux liquides une lame mince de caout- chouc (2).

L'activité du courant endosmotique que détermine une sub- stance donnée peut être accrue ou diminuée par la présence d'une très petite quantité de certaines matières qui semblent rendre le tissu de la cloison osmotique tantôt plus, tantôt moins apte à se laisser imbiber (5). Ainsi, M. Graham a remarqué

(1) Voyez ci-dessus, page 113. pour diminuer beaucoup les eirets en-

(2) M. Lhennite a fait cette expé- dosmotiques produits d'ordinaire par rience on imprégnant le vase poreux ces substances, et qu'en augmentant la avec de l'huile de ricin (a) ; mais il est dose de cet acide il déterminait un à noter que l'effet ainsi obtenu n'est abaissement dans le niveau du liquide pas permanent, et qu'au bout d'un intérieur. Il avait d'abord supposé que temps plus ou moins long, l'huile est l'acide sulfhydrique possédait la fa- déplacée, cnlté de s'opposer à l'action endosmo-

(3) Dutrochet a constaté que la pré- tique (6), et cette opinion a été l'objet sono; d'une trîs petite proportion de critiques trop vives (c) ; mais il ne d'acide sulfiiydrique dans ime disso- tarda pas à reconnaître que le phéno- lutiou dégomme ou de sucre suffit mènecnquestiondépendait del'inten-

{a) Lliuniiitc, Recherches sur l'endosmose {Cimiptcs rendus de V Académie des sciences, 1854, t. XXXIX, p. 1179).

(6) Diitnichet, L'aijcnt immi'diat du mouvement vital dévoilé.

(c) Magoiidic, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, t, I, p. 90, elc.

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. 1/|9

que les tissus enduits d'albumine coagulée donnaient, avec le sulfate de soude, des produits beaucoup plus considérables que d'ordinaire quand ils avaient subi préalablement l'action d'une dissolution môme extrêmement faible de carbonate de potasse, et que la modification elïectuée de la sorte persistait pendant fort longtemps, malgré le lavage de la membrane, mais n'était pas permanente (1).

On voit donc que les propriétés osmotiques des membranes animales peuvent être grandement modifiées par le seul fait de l'introduction dans leur épaisseur d'un liquide déterminé ou de la présence de celui-ci à leur surface, et j'insiste sur ce point, parce que certains i)hénomènes d'absorption dont nous

silé relative des deux courants contrai- res, l'acide donnant lieu à un courant vers l'eau dont les elTets masquent plus ou moins ou dépassent ceux d(5pendants du courant de l'eau vers le sucre (a).

Des faits du même ordre , et non moins remarquables, ont été consta- tés par M. l'oiseuille en mêlant de très petites quantités de chlorhydrate de morphine à certaines dissolutions salines. Ainsi, en chargeant l'endos- momèlre avec une dissolution de chlo- rure de potassium et en plongeant rinslrument dans un bain de sérum, ce physiologiste vit le liquide inté- rieur s'élever assez rapidement à une hauteur de 9 millimètres; mais, en substituant à la dissolution du sel po- tassique pur une dissolution du même Sel mêlé à du chlorhydrate de mor- phine en très petite proportion, le mouvement endosmoiique n'a été que de 6 millimètres et a été bientôt suivi

d'un phénomène d'exosmose très pro- noncé (b).

(l) En employant pour cloison os- motique une double meudjrane , la dissolution de sulfate de soude parfai- tement neutre et au titre de 1/100, I\I. Graham obtint une ascension de 20 ou de 21 millimètres; mais, eu ajoutant à cette dissolution saline un dix-millième de carbonate de potasse, il faisait monter la colonne endosmo- lique à 101 et même à 167 millimètres. Or, le carbonate alcalin employé seul dans les mêmes proportions n'aurait donné que de 17 à 23 millimètres, et, après avoir fait macérer la cloison ainsi imprégnée dans de l'eau pendant toute une nuit, M. Graham trouva qu'elle produisait avec la dissolution de sulfate de potasse pure une ascen- sion de 65 millimètres au lieu de 20, comme avant son imprégnation de carbonate alcalin (c).

(a) Dutrochet, De l'endosmose {Mémoires, t. 1, p. 05).

(b) Poiseiiillo, liechcrches expérimentales sur les médicaments {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1844, t. XIX, p. -1001).

(c) Graham, On Osmolic Force {Philos. Trans., p. 2H).

150 ABSORPTION.

aurons bientôt à nous occuper trouveront ainsi leur explica- tion.

Je suis porté à croire aussi que riucgalité dans l'intensité de l'action osmotique qui, dans certains cas, s'observe entre les deux surfaces d'une même membrane animale, dépend souvent de quelque circonstance de ce genre, c'est-à-dire d'une diffé- rence dans la nature chimique, soit du tissu, soit des li(]uides dont ce tissu est imprégné, dans le voisinage immédiat de ses surfaces (1). Peut-être faudra-t-il attribuer également à des modifications du môme ordre les phénomènes qui se mani-

(1) MM. Matteucci et Cima ont vu qu'en employant comme cloison per- méable la peau de diveis Animaux, et en cliargeant i'endosmomètre avec de Talcool, le courant s'établit toujours de l'eau vers ce liquide, mais que l'in- tensité du courant endosmoli(iue va- rie beaucoup suivant que leau entre dans la substance de ce tissu orga- nique par la face interne ou par la face épidermique de la membrane. Jj'eauqui se rendait à l'alcool, en pas- sant de la face épidermique vers la face interne de la peau de la Gre- nouille, faisait monter la colonne en- dosmoméliique jusqu'à une hauteur de ZiO millimètres, tandis que dans les cas la surface épidermique était en contact avec l'alcool et la face interne de la membrane en lapport avec l'eau, l'ascension ne dépassait pas 20 millimètres.

Avec la peau d'Anguille, ces dilfé- rences sont en sens inverse; le cou- rant endosmotique formé par l'eau qui se rend à l'alcool est le plus puissant quand le premier de ces liquides

arrive par la surface interne du derme (a).

[1 me paraît probable que ces diffé- rences dépendent du mode de distri- bution de la matière grasse dans la substance de la peau de ces Animaux. Les histologistes savent qu'elle n'est pas répandue d'une manière uni- forme, mais logée dans des utricules spéciaux. Elfeclivemenl, il suflirait de l'existence d'un nombre plus considé- rable de ces points imperméables à l'eau vers la surface interne du derme ou à sa surface externe pour rendre rimbil)ition de ce liquide plus facile par l'une ou par l'autre de ces voies, et pour cbanger par conséquent la puissance du courant osmolique, sui- vant que l'eau se trouve en contact avec l'une ou avec l'autre de ces sur- faces. Or, il ne serait pas impossible que la distribution de la graisse ne fût pas la même dans la peau de l'An- guille et dans celle de la Grenouille. Avant de rien conclure de ces fails, il faudrait donc en faire une étude plus approfondie.

(a) MaUeiicci et Cima, Op. cit. {Ann. de chimie et de physique, 4 845, 3" série, t. Xlll.p. G8)..

Causes

dos variation*

dans

le courant

i»HÉNOMèNES OSMOTiaUËS. l51

lestent quand l'osmose s'clïectue sous l'inlluence de forces électriques; mais, pour le moment, je n'aljorderai pas celte question, voulant, au préalable, compléter l'exposé des faits fondamentaux de l'histoire des actions osmotiqnes.

§ 15. Si nous cherchons maintenant à nous rendre compte des circonslances qui peuvent inlluer sur le courant exosmo- tique, c'est-à-dire sur la dilïusiou des molécules de la matière «o^'™tia"« active en sens inverse du mouvement d'aftlux déterminé par celle-ci, nous aurons à considérer en premier lieu les relations qui peuvent exister entre la rapidité avec laquelle ce phénomène se produit et la valeur des résultats fournis par le jeu des mêmes forces dans un milieu ces molécules se meuvent librement. Nous avons déjà vu que la rapidité avec laijuelle diverses sub- stances se répandent au loin dans le sein d'un même liquide varie beaucoup, et il ne me parait pas douteux que la lacilité plus ou moins grande de ce transport contribue à régler le mouvement des courants exosmotiqiies : ainsi les deux substances que j'ai citées comme étant remanpiables par la fai- blesse de leur pouvoir diffusif dans l'eau, l'albumine et la gomme, sont aussi, de tous les agents osmogèncs connus, ceux qui fournissent le moins de matière au bain situé du côté opposé d'une cloison membraneuse. D'antre part, nous voyons que les acides, dont la diffusion se fait toujours avec un grande rapidité, sortent de l'endosmomètre en volume presque égal ou même supérieur à celui de l'eau qu'ils y attirent du dehors.

Mais les relations entre la dilfiisibilité des corps dans un liquide libre et leur pouvoir exosmolique sont loin d'être con- stants, et souvent on voit deux substances qui, sous le premier rapport, diffèrent à peine l'une de l'autre, remonter les courants endosmoliques et traverser les cloisons perméables pour se répandre dans le liijuide adjacent avec des vitesses très diffé- rentes; enlin, dans certains cas, les résultats de la dilfusion libre et de la diffusion à travers les passages capillaires sont

152 At?SOnPTlON.

dans un désaccord plus grand encore, car c'est la matière In moins diffiisiblc dans les circonstances ordinaires qui alors se déplace avec le plus de rapidité.

Pour faire un pas de plus dans l'étude de cette question, il nous faut donc examiner l'action que la cloison au travers de laquelle la diffusion exosmotique s'opère, peut avoir sur le déplacement de matière que celte force répulsive tend à opérer, et, pour comprendre comment cette aciion s'exerce, il est nécessaire de se rappeler la manière dont les molécules d'une dissolution saline se distribuent dans l'intérieur d'une cavité capillaire. En étudiant les phénomènes d'imbibition (1), nous avons vu que les particules des corps en dissolution ne sont pas réparties uniformément dans toutes les couches du mcnstrue ainsi placées, quand celui-ci exerce sur la substance des parois de la cavité une action attractive plus grande que celle de ces mêmes particules; qu'il se fait alors, sous l'influence de la paroi à laipiclle le liquide adhère, une séparation entre les molécules qui sont associées dans la dissolution , et (pie , par suite de ce départ, la couche extérieure du liquide ne se trouve contenir que peu ou point de la matière dissoute, mais que la proportion de celle-ci augmente progressivement de la circonférence vers le centre de la masse fluide ainsi entourée ('2).

Or, ce qui a lieu pour un mélange qui était uniforme dans sa constitution doit avoir lieu, à plus forte raison, pour un mélange

(1) Voyez ci-dessus , page 88 et série de recliciclies pour soumettre

suivantes. cette tliéoiie à i'éprciive de l'expé-

('2j M. V'mk a fait voit* que celte riencc. Les résultais qu'il a oijtenus

conséquence découle des vues lliéo- ne sont pas tous concluants, mais pa-

riques de M. Bri'ickc, iclalivcs au raissent cire généralement favorables

mode de diffusion des liquides au tra- à cette manière d'expliquer les phé-

vers des nirnd)ranes, et il a fait une nomèncs osmotiques [a).

(a) Kink, ['fber Di/fiisinn (Pdi^giiidorlT's Annalcn dcr Phijsik itiid Chemic, 1855, t. XCIV, p. 59).

153

l'HENOMENES OSMOTlQUES. I 'J'5

qui (end à s'élablir, et pai^ consé((iient chacun des petits filets d'eau qui occupent les passages capillaires de la cloison osino- lique, et qui constituent les voies par lesquelles la diffusion de la substance osniogénique s'opère, doit opposer moins d'obstacle à la pénétration près de son axe que près de sa surface. Nous savons aussi, par l'examen que nous avons fait des actions capillaires, que l'influence attractive des parois d'un canal de ce genre décroît très rapidement avec la distance, et par con- séquent la couche liquide l'équilibre entre les molécules du menslruc et de la matière dissoute se trouve ainsi troublé ne peut avoir qu'une faible épaisseur. 11 en résultera donc que l'obstacle de la plus grande intensité de l'action attractive des parois sur les molécules du menstrue aura d'autant moins d'influence sur le courant exosmotique que l'épaisseur de cette couche peu ou point accessible à ces molécules sera une fraction plus petite du rayon du cylindre liquide dans lequel la diffusion s'effectue.

Ainsi, supposons que, dans un conduit de ce genre, une dissolution chargée d'une quantité donnée de chlorure de sodium se modifie de façon que la couche liquide en contact avec les parois ne contienne en moyenne que rô'ô^ (1^ sel et qu'elle ait j^ de millimètre d'épaisseur, tandis que la portion centrale du cylindre liquide contienne 70 ^^ ^^^ '• il ^st visible que l'existence de la couche formée de la dissolution faible n'aura aucune influence notable sur le degré de concentration de la quantité totale du liquide, si le canal a un millimètre de diamètre, mais en exercerait une très grande si ce même canal n'avait que ^h ^^^ millimètre , et diminuerait encore davantage le titre de la dissolution à laquelle le conduit livrerait passage, si le calibre de celui-ci était réduit à ^ de milli-- mètre, car alors il ne se laisserait traverser que par la couche chargée de j^^^ de sel.

Nous pouvons donc prévoir que dans les canaux capillaires

^ 54 ABSORPTION.

de grande section la diffusion s'effectuera à peu près connue dans un liquide libre, et que sa rapidité ne sera guère dimi- nuée que par celle du courant en sens inveise que les mole- cules mises en mouvement par leur force ré|)ulsive auront à remonter pour gagner le liquide situé de l'autre côté de la cloi- son perméable ; mais que dans les voies capillaires très étroiles il en sera autrement, et que les produits de la diffusion pendant un temps donné décroîtront à mesure que le calibre des pas- sages interstitiels deviendra plus petit.

Il en résulte que l'équivalent endosmotique d'un corps, c'est- à-dire la quantité d'un autre corps qui se substituera à une quantité déterminée du premier par l'effet des écbanges osmo- tiqucs, ne saurait être une valeur eonslante, et doit varier avec les dimensions des passages interstitiels à travers lesquels ces écbanges s'effectuent. Toutes clioses étant égales d'ailleurs, cet équivalent devra s'élever, suivant une certaine loi, avec l'abais- sement du diamètre des conduits capillaires dont la cloison osmotique est creusée (1)*

(1) M. Graham n'a pas pris en con- sidéialion les relations qui peuvent exister entre le degré de j)erméabilité des cloisons osniotiques et les quan- tités de la nialière qui s'échappe par voie de dillusion comparées ù celle de l'eau qui vient en occuper la place ; mais on trouve dans les détails de ses cxi)ériences plusieurs faits qui vien- nent à l'appui des vues exposées ci- dessus. Ainsi, ce savant a souvent évalué la résistance hydrostatique du diaphragme de Tosmomètre par le temps écoulé entre la chute de deux gouttes d'eau distillée filtrant à raison de son poids au travers de celte cloison membraneuse quand l'instrument était suspendu dans l'air ; et, dans deux expériences faites avec un tissu albu-

miné comme diapliragme et une dis- solution de carbonate de soude au même titre (10 pour 100), la résis- tance hydrostatique était de 12 dans un cas et de (J seulement dans l'autre. Or, dans la première expérience, l'as- cension du liquide intérieur é:ait de 206 et la diffusion de is%66; dans la seconde, l'ascension était de 1G3 de- grés et la diffusion de ls',^3. Par con- séquent, une mèmequaniilé de sel a été remplacée par environ IZi volumes quand la résistance hydrostatique était considérable, et par 8 volumes d'eau quand cette résistance était moitié moindre. Je trouve aussi dans cette sé- rie d'observations faites avec des disso- lutions du même sel an litre de 1/100, des cas dans lesquels les résistances

PHÉNOMÈNES OSMOÎIQIJES. l55

Ces considérations Ihéoriques nous donneront la clef de divers phénomènes osmotiques qui ont été enregistrés par les expérimentateurs, et qui semblaient de prime abord inexpli- cables.

Ainsi un jeune physiologiste de l'école de Dorpat, M. Harzer, a fait dernièrement une série d'expériences comparatives sur les équivalents endosmotiques du chlorure de sodium séparé de l'eau pure par des membranes animales dont le tissu était tantôt dans son état naturel, et dans d'autres cas avait été rendu plus dense ou plus lâche par l'action de divers réactifs chimiques. 11 a trouvé qu'en garnissant son endosmomètre avec un morceau de péricarde de Bœuf à l'état frais, un volume de sel commun était remplacé dans l'instrument par près de 5 volumes d'eau; mais que si la même membrane avait été préalablement attaquée par de l'acide sulfm^ique faible, l'équi- valent de chlorure de sodium descendait au-dessous de /|. L'aclion de l'acide tannique sur la même cloison osmotique déterminait une augmentation de l'équivalent qui, dans une expérience, s'est trouvé être alors 7,6; enfin, en soumettant la

hydroslatiquos élaient de 3 et de G : dans la preinièie, 1 centigramme de sel a é.té remplacé par 11 volumes d'eau, et dans le second par 10 volumes du même liquide. Enfin, en opérant avec une dissolution au litre de l/lOOO, et une cloison dont la résistance hy- drostatique était représentée par 10, l'unité en poids du carbonate potas- sique était remplacée par plus de 37 volumes d'eau ; tandis qu'avec une dissolution plus concentrée (1 p. 100) et une résistance hydrostatique de 6, la dillusion s'est accrue de façon à

amener l'échange d'un même poids de sel pour moins de 1 volume d'eau (o).

Dans une autre série d'expériences, portant sur un mélange de nitrate d'urane et d'acide nitrique, poiu- un même volume d'eau absorbée, les pertes par dillusion ont été de /|6 avec une résistance hydrostatique repré- sentée par l, et de 19 avec une résis- tance hydrostatique de 3 (6j.

Ainsi, dans tous ces cas, l'équiva- lent endosmotique s'est élevé lorsque la cloison était moins perméable.

(a) Graliam, On Osmotie Force {Philos, Trans., p. 209).

(b) Idem, ibid., p. 222.

156 ABSORPTION.

membrane à l'action de l'acide cliromiqiie avant de l'employer à la construction de l'endosmomètre , il a obtenu pour équiva- lent de sel commun jusqu'à 25, /i. Dans ce dernier cas, chaque molécule de chlorure avait été remplacée par environ six lois plus d'eau que dans l'expérience l'absorption de l'eau s'était effectuée à travers une membrane attaquée par l'acide sulfu- rique (4). Or, nous savons, par d'autres observations dont les anatomistes ont tiré grand profit, que l'immersion des tissus animaux dans une dissolution d'acide chromique les rend plus consistants, plus denses; nous savons aussi que le tannage pro- duit sur les membranes animales un effet analogue, tandis que l'immersion dans l'acide sulfurique dilué en augmente la per- méabilité. Les résultats obtenus par M. Harzer sont donc en parfaite harmonie avec les données fournies par la théorie physique des pliénomènes osmotiques.

Une autre conséquence de ce mode de distribution des par- ticules du corps dissous dans les diverses couches de chacun des petits filets liquides renfermés dans les canaux capillaires de la cloison, c'est que le rapport entre la quantité du liquide extérieur qui pénètre dans l'endosmomètre et la rpiantité de matière osmogène qui s'échappe au dehors par diffusion doit varier avec le degré de concentration de la dissolution, et que l'équivalent doit croître avec la densité de celle-ci.

Cette diminution relative dans les produits de la diffusion

(1) Ces expériences se trouvent des membranes à déterminer l'en-

dans le mémoire que j'ai déjà eu l'oc- dosmose ; mais il n'a pas examiné les

casion de citer (a). M. Langeau a cliangemenls que la niodificalion du

étudié aussi l'influence que le tannin, tissu produit de la sorte peut exercer

le sublimé corrosif et quelques autres sur la valeur des équivalents endos-

subsiances exercent sur l'aptitude motiques {b).

(a) Harzer, Deitrà'ge zur Lehre Von der Endosmose {Arch. fïtv physiol. Heilkunde, ISSfl, f. XV).

(i) LangoQii, ^vle sur certaines subslatices auxquelles on altribtic Ui jiroprù'ti' de prévenir l'absorption en déterminant l'obstruction des vaisseaux capillaires superficiels [Comptes rendus de la Société de biologie, 2- série, 1855, l. H, p. 38).

l'HÉNOMÈNES OSMOTlQUIiS. 157

comparés à la recelte endosmotiqiie, à mesure que la ({uantité de matière à la fois dilïusible et osmogène augmente, est facile à constater expérimentalement , et je m'étonne que M. Graham n'en ait pas été frappé, car elle est manifeste dans plusieurs des séries de résultats consignés dans le travail de ce chimiste habile. Je me bornerai à en citer ici un exemple. En employant une dissolution de sulfate de magnésie à divers degrés déconcentration, nne partie de ce sel s'est répandue au dehors pendant que l'instrument se chargeait de :

5,16 volumes d'eau avec la dissoliilion cliargée de 2 pour 100 de sel; 5,76 volumes d'eau avec la dlssolutron à 5 pour 100 ; 6,01 volumes d'eau avec la dissolulion à 10 pour 100; 6,57 volumes d'eau avec la dissolulion à 20 pour lOO (1).

Mais lorsque la substance de la cloison perméable est en partie dissoute par l'action du réactif employé, circonstance qui doit amener l'agrandissement des passages capillaires, la proportion de la matière osmogéni(]ue qui s'échappe par diffusion, comparée à la quantité d'eau qui pénètre dans l'en-

(1) Dans une autre série d'expé- riences faites également avec du sul- fate de magnésie, M. Graliam a obtenu comme équivalent endosmotique de ce sel :

5,3 avec la dissolulion à 2 pour 100; 5,9 avec la dissolulion à 5 pour 100; 6,3 avec la dissolution à 10 pour 100 (a).

Je vois aussi que, dans une série d'expériences faites avec un ondos- momètre à membrane simple qui offrait une résistance hydrostatique uniforme, l'équivalent endosmotique du chlorure de sodium s'est élevé

en poids à 1,1 ou 1,2, avec des disso- lutions à 2 pour 100, et ù 2,2 avec une dissolution chargée de 10 pour 100 de sel (6) ; mais je dois ajouter que, dans des expériences faites avec une double cloison, les résultats ont beaucoup varié. Voici un autre exem- ple fourni par le chlorure de calcium : l'équivalent endosmotique était de 0,3 avec la dissolution de 2 pour 100 ; de 0,8 avec la dissolution à 5 pour 100; et de 2,3 avec la dissolution à 10 pour 10J3, la résistance hydro- statique restant constante (c).

(a) Graham, On Osmotic Force (Philos. Trans., 1854, p. 201).

(b) Idem, ibid., p. 202, lab. 8.

(c) Idem, ibid., p. 204,

158 ABSORPTION.

dosmomètre, augmente avec la concentralioii de la dissolu (ion

employée (1).

La persistance de la distension du tissu perméable déterminée par l'infiltration capillaire paraît susceptible de diminuer l'élas- ticité de ces corps, et d'amener ainsi un élargissement dans le calibre des passages interstitiels à travers lesquels la diffusion exosmotique s'effectue. Cela explique comment des cloisons qui, au commencement d'une expérience, donnent lieu à l'établissement d'un cerlain équivalent endosmolique, fournis- sent souvent un équivalent plus faible quand l'épreuve a duré longtemps (2).

11 me semble probable que les différences observées dans le volume des équivalents endosmotiques d'une même substance, quand on emploie diverses membranes animales comme cloi- son osmotique, dépendent en partie de l'inégalité dans le

(1) Ainsi, en employant une disso- lulion de carbonate de potasse au titre de 2/100, M. Graham a vu que la résistance hydrostatique était de 20, et l'équivalent a été en moyenne de 5,6 ; tandis qu'avec une dissolution au litre de 10/100, la résistance hy- drostatique est descendue à 16, et l'équivalent endosmotique est tombé à 13 (a).

(2) Un exemple très remarquable de variations dans les produits du travail osmotique dont l'explication semble être donnée de la sorte, nous est oHert par une expérience de Du- trochet, dont j'ai déjà eu l'occasion de dire quelques mots. Ce physiologiste a vu qu'en employant comme dia- phragme osmotique un morceau de taffetas gommé, c'est-à-dire un tissu

revêtu d'une couche mince de caout- chouc, et le plaçant entre de l'eau et de l'alcool, le courant endosmotique s'établissait de ce dernier liquide vers le premier. Il a vu aussi que, pendant les premiers temps de l'expérience, il ne passait pas d'eau en sens inverse , mais qu'après une certaine dmée de l'action endosmotique, une petite quan- tité de ce liquide traversait la cloison de caoutchouc pour se répandre dans l'alcool (b). Ce phénomène de diffu- sion ne s'est donc produit que lorsque l'alcool dont la cloison de caoutchouc s'était pénétré avait eu le temps né- cessaire pour élargir à un certain de- gré les interstices capillaires de cette substance en balançant sa force élas- tique.

des

(a) Graham, loc. cit., p. 200, tab. 13.

(b) Dulrocliel, De l'endosmose (Mémoire pour servir à Ihistoii-e anatomique et phnsiologique s végétaux et des animaux, l. I, p. l'J).

PHÉNOMÈNES OSMOTIQUES. 159

calibre des passages que ces tissus organiques offrent pour l'accouiplissement des échanges entre les liquides liélérogènes. Comme exemple de ces différences, je citerai encore une expé- rience de M. Harzer. En employant comme cloison osmotique le péricarde du Bœuf, l'équivalent de sel commun était /i, et, en substituant à cette membrane un morceau de la vessie du même Animal, cet écpii valent a dépassé 0 (1).

D'après ce que nous savons de la grande inégalité des actions capillaires exercées par un même tissu perméable sur des liquides de nature différente, ou par des tissus différents sur un même liquide, nous devons penser aussi que les obstacles opposés à la diffusion des molécules en dissolution par les j)aroisdes canaux capillaires varieront également en force sui- vant la constitution chimique des substances qui forment ces parois, et qu'il y aura une nouvelle cause de variations dans la valeur des équivalents endosmotiques.

Comme exemple de l'influence que la cloison perméable peut exercer sur les produits de la diffusion de diverses sub- stances, je citerai en premier lieu les résultats obtenus par M. Mialhe en étudiant les courants exosmotiques qui s'établissent au travers de la membrane interne de la co(piille de Tœuf de la Poule, quand on la dénude et qu'on la met en contact avec l'eau. Des phénomènes endosmotiques se manifestent bientôt;

(1) Voici quelques-uns des résultats ■i.S avec la vessie de Cochon ;

nniiiériqiies obtenus dans des expé- ^-^ avec la vessie de Bœuf (a).

i-iences comparatives faites avec des ^^^^^ ^^^ expériences analogues

membranes dont le tissu était plus ou ^^.^^^ p^,. ^,_ olechnowicz, en em-

moins serré. L'é.iuivalent du chlorure ^^^^^^^^ ^^,^j„,g ^,^1^^,^ osmolique

de sodium s'est trouvé de : ^^^^ ,3,^^ ^^-^^^ ^^ collodium, l'é-

2,9 avec la vessie natatoire d'un Poisson ; quivalent du sel COmmun s'est élevé

4,0 avec le péricarde de Bœuf ; à 10,2 (o).

(a.) Harzer, Beitrage zitr Lehve von der Endosmose {Avchiv fur physiologische Heilkunde, 1 856, t. XV, p. 202 et suiv.).

(6) F. Olechnowicz, Ba;pertme/ifa quœdamde e/n/osmosi (dissert, inaug.). Uorpat, 1851.

160 ABSOUI'TION.

l'eau du dehors pénètre dans l'intérieur de l'œuf, et une partie des matières salines qui se trouvent dans ce corps s'en échappent pour se répandre dans le bain extérieur ; mais ^I. Mialhe assure que l'albumine de l'œufne passe pas. Quand on emploie la mem- brane externe de l'œuf de la même manière, en y plaçant du sucre ou du sel commun pour exciter Faction osmoti(jue, l'eau du dehors y pénètre et s'y accumule également ; mais il y a en même temps exosmose, et le sucre, ainsi que le sel, se répand dans le bain extérieur. Par conséquent, la diffusion de l'albu- mine est empêchée ou rendue extrêmement faible par une cloison perméable qui non-seulement se laisse traverser par l'eau, mais qui permet la diffusion du sucre et du sel (1).

Nous avons déjà vu que dans certains cas les deux surlaccs opposées d'une membrane animale n'exercent pas la môme action capillaire sur les liquides qui les baignent, et qu'il en résulte des variations dans l'intensité du courant endosmolique, quand les rapports entre la cloison perméable et la substance osmogénique viennent à clianger. Il paraît en être de même pour le passage de ces dernières matières par voie de diffusion dans l'intérieur des courants affluents jusque dans le bain adja- cent, et il en résulte que le produit de l'échange osmotique peut être augmenté on diminué par l'influence exercée de la sorte

(1) Pour pratiquer celle expérience, M. iMiallie enlève une petite portion de la coquille à Tune des extrémités de l'œuf, et soutient la membrane dénu- dée à Taidc de bandelettes de liégc entrecroisées ; puis il fait un trou à l'extrémité opposée de l'œuf, el y adapte un tube qu"il lute avec de la cire. Il assure que l'albumine reste emprisonnée dans le réservoir ainsi constitué, soit qu'on laisse cette sub-

stance dans son état naturel , soit qu'on la batte préalablement avec de l'eau et qu'on la filtre avant d'en charger l'endosmomèlre. M. Miallie a obtenu les mêmes résultais en sub- stituant au blanc d'œuf du sérum du sang («). Mais je dois ajouter que, dans des expériences analogues fiiites par M. Béclard, les mêmes résultats n'ont pas été obtenus , et le passage de l'albumine a pu être constaté (h).

(a) Mialilc, Chimie appliqm^e à la physiologie, \>. l'M) et suiv.

ib) Béclard, Mémoire sur la thcoric de l'endosmose {Gazelle des hùpilaux, 1851, p. 3:24).

l'IlÉNOMÈiNES OSMOTlyiliS. 101

sdi' l'cNOsiiiose aussi bien ([ue sur l'endosinose. Ainsi, (iiiund on lait usage de la muqueuse gastrique de l'Agneau, et qu'on charge l'instrument avec une dissolution d'albumine, l'eau exté- rieure pénètre en plus grande quantité à travers la membrane lorsque celle-ci est en contact avec ce dernier liquide par sa sur- lace péritonéale; mais si l'on substitue à l'albumine un dissolu- tion de sucre, l'ascension du liquide intérieur est la plus consi- dérable quand l'eau arrive par la surface épithélique. Or, dans le |)remier cas, quelle que soit la direction du courant endos- motiquc, les produits du courant contraire, c'est-à-dire la quan- tité d'albumine répandue au dehors est 1res faible ; et nous pouvons conclure de ce fait que les différences dans les résul- tats de l'expérience, quand on change les rapports de la mem- brane avec les li(piides réagissants, dépendent principalement de la pénétration [)lus facile de l'eau par la surface musculaire ou péritonéale de la muqueuse que par sa surface épithélique. Mais les résultats, ai-je dit, sont autres quand on substitue à l'albu- mine une dissolution de sucre. Cela ne semble pas devoir dépendre d'une intluence inégale que le sucre exercerait sur le courant endosmoti(|ue, quand cette substance est en contact avec telle ou telle surface de la membrane, mais plutôt à la f^icilité plus grande que le courant contraire formé par les molécules de sucre qui s'échappent par diffusion trouve à tra- verser la muqueuse gastrique quand ces molécules y pénètrent par la siuiaco épithélique, au lieu d'y arriver par la surface détachée des autres tuniques de l'estomac (i

(1) Il esl aussi à noler qu'en faisant était en contact avec la surface épi-

usa^c de la muqueuse gastrique de tliélique, et l'eau en rapport avec la

divers Carnivores, MM. Matteucci et surface péritonéale ; mais lorsque

Cimaontobtenudes résultats inverses. l'eau baignait la surface épithélique

Ainsi, avec la tunique interne de l'es- delà muqueuse, le liquide n'est monté

tomac du Cliien, ils ont vu la colonne dans l'endosmomètre qu'à 8 milli-

cndosmoméirique s'élever à 60 niilli- mètres.

métrés quand la dissolution sucrée Dans les expériences citées ci-des-

V. 11

162 ABSOUPTION.

L'influence que la nalurc chimique du liquide logé dans les cavités capillaires d'un (issu organique peut exercer sur la diffusion de la maiière osmogène à travers ces passages, ou, en d'autres mots, sui' Tinlensité du courant exosmotique, et par conséquent aussi sur la valeur du produit de l'échange, est mise en évidence par Texpérience suivante. Si l'on emploie connne cloison osmotiqnc la membrane interne de la coquille de l'umil', et (ju'on charge l'instrument ainsi préparé avec de l'albumine, cette matière ne s'échappera'pas en quantité notable si le li(juide réagissant est de l'eau pure ; mais si l'on substitue à ce bain une dissolution de chlorure de sodium, une (juanhté considérable d'albumine se répandra au dehors, bien que le courant endosmotique continue à se diriger vers l'intérieur du réservoir et à augmenter le volume de la dissolution albumineuse qui s'y trouve logée (1).

sus, les haiileurs observées furent, avec la membrane gastrique de l'A- gneau et le sucre :

60 à 72 millinièlrcs, quand l'eau élait en contact avec la surface épilhé- lique de la membrane.

54 à 56 millimètres, quand l'eau clait en contact avec, l'autre surface de l;i membrane, et le sucre eu rapport avec sa surface dpitlié- liquo.

Avec le blanc d'œuf :

11 à 22 millimètres, quand l'eau baignait la surface épithéliquo, et l'albu- iiiine la surface pcritonéale.

23 à 35 millimètres, (piand l'eau était en contact avec la surface pcrito- néale, et l'albumine en contact avec la surface épilhélique.

Avec la tunique muqueuse de Tes-

tomac du Chat, une dissolution gom- meuse a donné une ascension de :

38 millimètres, quand l'eau était en contact avec la surface viscérale, et la gomme en rapport avec la surface cpitliélique.

1 4 millimètres, quand l'eau était en contact avec la surface épitliélique (a).

(1) En opérant de la sorte avec une cloison osniolique formée par la mem- brane interne de la coquille de l'œuf, !\I. Witlich a vu qu'en présence de l'eau pure, 2 centimètres cubes d'une dissolution albumineuse augmentaient en volume de 3" ,5 et ne laissaient échapper que 0«',015 de substance organique.

Mais , en substituant au bain d'eau distillée un bain d'eau salée contenant 3,7 pour 100 de chlorure de sodium, la même quantité de dissolution albu-

(a) Malleucci cl Cima, Op. cil. (.\iinales de chimie et de ■phijsUiuc, 3' série, 1845, t. XIII, p. 73 et suiv.).

Rësimié.

l'HÉNOMKNKS OSMOTIQUES. 163

il est aussi à iiote.i' que le degré d'iulensité des courants exosmoti(}ues peul être augmenté ou diminué par le lait de l'as- sociation de certaines matières osmogènes.

^ i6. En résumé, nous voyons donc que tous les laits fondamentaux de l'histoire des phénomènes osmoticpies trouvent leur explication dans les lois connues de la capillariié, de rat- traction adhésive ou de l'aninité chimi(iue des liquides hétéro- gènes, et de la diffusion des corps en dissolution ; mais il ne faudrait [)as en conclure que des effets analogues ne puissent être dus à d'autres causes, ni (|ue des forces dont je n'ai pas tenu compte jusiju'ici n'exercent aucune intîuence sur la valeur, ou même sur le caractère des résultats ohteniisde la sorte. Ce serait tomhcr dans une erreur grave, et le physiologiste a par- ticulièrement besoin de connaître le rôle de ces agents acces- soires.

§ 17. Ainsi, la chaleur peut déterminer de grandes modi- lications dans le jeu des forces dont dépendent les mouvements de translation et les échanges qui constituent le phénomène com- ,„ ph-non,cnes plexe dont l'élude nous occupe ici. Nous avons vu pré(^édem- ^'■^'""'"'"'^'• ment que l'élévation de la température^ tend à diminuer les effets dus aux actions capillaires, mais active le travail ])ar lequel l'imbihition des substances poreuses s'accomplit. La

liilluence

de

la lonipéralure

mineuse a gagné seulement 2"',1 en volume, el a perdu, par dilîusion, Os',^31 de matirro organique (a).

Dans dos expériences faites vécein- ment par M. lleynsius, en vue d'é- clairer l'histoire de la sécrétion uri- naire , des faits analogues uni été observés. Deux endosmométres i'er- més par un morceau de la memjjrane

amniotique, et chargés de sérum du sang de Bœuf, furent plongés, l'un dans un bain d'eau, l'autre dans de l'urine acide; au bout de vingt-quatre heures, le premier avait laissé écliap- |)cr beaucoup d'albumine, le second pas; mais lorsque l'urine était alca- line, l'albiiniiae passait au travers de la cloison osinotique (6).

((() VVillicli, Ueber Einieiss-DiU'usioii (Miillur's Avchiv fur Anal, itiid l^hijsioL, 1S5G, p. JUi). (b) Heynsius, Zuv Théorie der Harnseorelion {Arcliiv filr die Hollaiidischen [ieitrâaex-jtr Natitr- Hiid Hcilkvnde yrui Donder? iind W., lîiTliii, IS.iS, t, 1, p. 20r.).

154 ABSUIU'TIUN.

chaleiii' accélère aussi les iiiuiiveiuciils osinolicjui's , et eela semble pouvoir dé[)endre prineipalemenl de deux eireoiisUuiees diftereiiles : de la diminution dans les résistanees opposées au passage des liquides dans les eavités capillaires de la mem- brane, résultat qui est produit tant par l'affaiblissement que la chaleiu^ détermine dans l'attraction adhésive développée entre les deux corps en contact, que par la dilatation du tissu per- méable ; ^2° du dévelo{)pement de la puissance attractive réci- proque, ou affinité , exercée par les liquides miscibles réagis- sants, ([ui est aussi, dans certaines limites, une conséquence ordinaire de l'élévation de la température.

Cette influence accélératrice de la cbaleur sur le travail endosmotique a été mise en évidence par les expériences de Dutrocbet. Ce [ibysiologiste a vu un même endosmomètre, cliargé avec des dissolutions identiques de gomme, n'absorber en un temps donné qu'un volume d'eau à la température de 0 degré, et prendre o volumes d'eau à la température d'en- viron 34 degrés (1). En employant de l'acide cblorhydrique, il obtint des résultats encore plus remarquables, car une disso- lution de ce réactif dans une proportion voulue d'eau lui donna des effets négatifs à la température d'environ 20 degrés, tandis qu'à 10 degrés cette même liqueur déterminait un courant en sens contraire et faisait monter le liquide dans l'intérieur de rendosmomètre (2;. Ainsi, par le seul fait d'un léger clian-

(1) Ces expériences rurciil faites avec un caecum de l'oulel chargé d'une (lissolulion de goninie, adapté à un tube de verre, et plongé dans un bain d'eau distillée. L'augmenlation de poids fut, dans une expérience, de lo grains à 5 degrés, et de grains à environ 32 degrés. Dans une autre expérience , l'appareil se chaige de

10 ]/2 grains à 0 degré, et de 37 grains à environ 'SU degrés la).

(2) Dutrocheta trouvé qu'en plaçant dans un endosnionièlre garni d'un morceau de vessie de l'acide clilorhy- drique étendu d'eau, et en opérant à la température de 10 degrés, le courant principal s'établissait de l'acide vers le bain extérieur lorsque la densité de la

(«j Diilroclicl, Ui i'cndosiiwac [Mànuucs, l. I, \<. "27).

PIIKNOMKNES OSMOTIQUKS. 1 G5

i^ement de tcmpc'rnliire, raUrnclion cnpilhiiro exercée par nue membrane sur l'eau acidulée peut devenir supérieure ou infé- rieure à celle que cette même membrane exerce sur l'eau pure, et la direction du courant endosmotique peut être de la sorte intervertie (1).

§ 18. En étudiant les effets de capillarité, nous avons vu innucncc que l'état électrique des corps réagissants exerce parfois une grande influence sur le jeu des attractions moléculaires dont ces phénomènes dépendent. 11 en est de même pour les actions osmotiques.

Ainsi, on sait depuis longtemps qu'un courant galvani(pje, en traversant l'eau pour se rendre du pôle positif au pôle né- gatif, détermine nn certain déplacement des molécules de ce liquide, de façon que si, à l'aide d'un diaphragme perméable,

dissolution acide élaitinféneureà 1,02, et que le courant se portail de l'eau vers l'acide quand la densité était plus grande; mais qu'à la teuipéraUire de 22 degrés, le courant s'intervertissait quand la densité de l'acide dépas- sait 1,003. Ainsi l'acide chlorhydriquc au nnènie titre peut donner lieu à des effets de signe opposé, suivant que la température dépasse 20 ou s'ahaisse à 10 degrés, et Dulrochet est arrivé à celte conclusion : Pour que les ré- sultats endosmoliqncs soient sembla- bles à des températures qui ne va- rient que de 12 degrés, il faut que les densités de la dissolution d'acide clilorliydrique cliangent dans le rap- port d'environ l,00o à 1,027, c'est- à-dire que la liqueur doit contenir à peu près six fois plus d'acide quand la température est basse que lois- qu'elle est élevée (a).

(1) Si l'élévation de la température diminuait dans le même rapport la puissance de l'attraction adliésive exercée par les parois des conduits capillaires sur les deux liquides réa- gissants, la chaleur ne changerait pas la direction du courant endosmotique, et tendrait seulement à en accélérer le mouvement; mais, en étudiant les phénomènes de capillarité, nous avons vu que le coeflicienl de l'écartemeiit moléculaire entre les solides et les liquides en contact apparent, déter- miné par l'élévation de la tempéra- ture, semble varier avec la nature chimique des corps en présence {b}; et par conséquent on conçoit facile- ment que dans certains cas les chan- gements de température puissent rendre l'action capillaire de A sur B plus grande ou plus petite que celle de B sur C.

(a) Diilrocliet, avl. Enuosmosis (ToJil's Cyclnpœilia of Anal, (nul Pliysial., l, II, )> 10S). Ib] Voyez ri-tlps>>is, page 71 pi snivantes.

166 ABSORPTION.

011 SL'pare ou deux perlions ki jiuisse foriiiro par celui-ci, le volume de la portion située entre la cloison et le pôle positif diminuera, et le volume de celle comprise entre le coté opposé de la cloison et l'électrode négatif augmentera. Ce fait, constaté pour la première fois il y a plus de quarante ans par un physicien anglais nommé Porrett, a été depuis lors observé par plusieurs expérimentateurs, et montre que des effets sem- blables à ceux de l'endosmose peuvent être produits par le jeu des forces électriques. On a trouvé aussi que lorsque dans ces circonstances l'eau est décomposée par l'action de la pile, un volume de ce liquide proportionnel à la grandeur de celte action accom[)agne pour ainsi dire l'hydrogène qui s'accumule autour du pôle négatif (1), et ce déplacement paraît être à la résis- tance que l'eau oppose au passage de l'électricité positive (•2);

(1) Plusieurs années avant la pu- blication des travaux fie Dutrochel sur reiidosmose, Porreu avait remar- qué que si l'on plonge les deux con- ducteurs d'une pile galvanique dans les deux compartiments d'un vase contenant de l'eau et divisé par une cloison membraneuse , le niveau du liquide s'abaisse dans le comparliment en rapport avec le pôle positif et s'é- lève dans l'autre (a). Cet eflet singu- lier semblait indiquer que le courant électrique, en passant du pôle positif au pôle négatif, entraîne avec lui une certaine quantité d'eau à travers les porcs de la cloison membraneuse, et M. Wiedemann, en ajjprofondi.ssant l'étude de ce phénomène, a constaté que le volume de l'eau qui accompagne riiydrogène pour s'accumuler autour

du pôle négatif est toujours propor- tionnel à la quantité d'eau décom- posée, et est indépendant de l'étendue et de l'épaisseur du diaphragme per- méable. Il est aussi à noter que celte quantité est d'autant plus grande que le liquide employé conduit moins bien l'électricité (6).

('J) La physique nous apprend que l'électricité positive, quand elle est en mouvement, possède la faculté de ren- verser les obstacles qui se présentent sur sa route. On sait également que l'eau est un mauvais conducteur de l'électricité, et par conséquent l'eau qui se trouve dans les canaux de la membrane doit être un obstacle au passage du courant électrique qui se rend au pôle négatif. Ce courant devra donc tendre à déplacer ce liquide, et,

(a) PoiTL'll, Curions Calvanir Experiments (Ami. ofnhUosnphij, \^iC,, l.VtlI.p. 74, ri Annales de chimie et de physique, 1X1 lî, t. 11, p. 137).

(b)\Vieilemaiin, Vcber die Beweyuny von Fliissirikeiten imkreisc dernesclihisxeneu (jaivanischen Saule (Pnggfenil.irll's Annalen, 18r.-2, I. lAX.WII, p. '.i-li ; ISr.li, I. XC.IX, p. 17").

PHÉNOMÈNES OSMOTIQIIES. 1()7

mais, quoi qu'il eu soit de l'explication du phénomène, on peut conclure légitiniement de ces faits que dans d'autres circon-

en le déplaçant, tendre à le pousser dans la cellule en rapport avec rélec- trode négatif. M. Becquerel explique de la sorte le phénomène constaté par Porrett, et, à Tappui de cette théorie, il fait remarquer que l'accumulation du liquide vers le pôle négatif ne se produit que lorsque l'eau conserve le faible pouvoir conducteur qui est na- turel à cette substance, et que l'expé- rience ne réussit pas si ce liquide se trouve mêlé à un acide ou à un sel dont la présence rend le passage de l'électricité facile (a).

il serait possible cependant que l'inégalité de niveau du liquide dans les deux compartiments du bain tînt à quelque dilférence dans le mode de groupement moléculaire des atomes d'eau ou de leurs éléments constituants qui, sons l'influence du courant élec- trique, constitueraient des particules de composés difTérenis douées , les unes de propriétés éleclro-positives, les autres de propriétés électro-néga- tives et ayant des volumes inégaux; mais ce sont des questions théori- ques qui ne peuvent être discutées ici {b).

Quant aux phénomènes osmotiqucs que l'électricilé détermine dans les dissolutions salines ou autres, les expé- riences de V. Raoult tendent à établir qu'ils sont dus à des décon)positions et au volume relatif des substances qui se rendent à l'un ou à l'autre

pôle. Ce physicien considère toute dissolution comme étant une véritable combinaison chimique dans laquelle l'eau joue tantôt le rôle d'éli^ment électro-positif, tantôt celui d'élément électro-négatif, suivant la nature acide ou basique du corps dissous ; que sous l'influence d"un courant électrique, cette combinaison se sépare en deux parties , l'une formée d'eau pure , l'autre renfermant toute la substance dissoute ; enfin, que les matières ainsi dissociées se transportent aux pôles opposés, de façon que si le liquide compris entre ces pôles est divisé en deux porlions par une cloison per- méable, le volume de l'une de ces portionsaugmente ou diminue suivant que la substance qui s'y trouve ainsi transportée est plus ou moins volu- mineuse que la substance attirée par l'autre pôle. Or, dans ces liquides, chaque équivalent de l'acide , de la base, du sel ou de toute autre sub- stance en dissolution, se trouve asso- cié à plusieurs équivalenis d'eau, et par conséquciit c'est du côté se rend l'eau que l'endosmose se ma- nifeste. ^\. Ilaoulta constaté aussi que dans les réactions de ce genre, quand deux liquides difi'érents sont séparés par une cloison perméable et sont traversés par un courant électrique, le niveau baisse toujours dans celui qui abandonne son eau avec le plus de facilité (c).

[a) Becquerel, Traite expérimental de l'électricité, 1S30, I. IV', p. 200.

(6) Voyez à ce sujet le mémoire de M. Graliam Sur la force osmotique (l'hilos. Trans., 1854, p. \U).

(c) Raoii!t, Cames des pliéiiomèiie.i d'endosnwsf électrique (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1853, t. \X\Y1, p. 820).

168

ABSORPTION,

Stances des forces analogues se développent , celles-ci de- vront tendre à produire des mouvements du même genre.

Diverses expériences prouvent d'ailleurs que l'électricité est apte à exercer une influence considérable sur les phénomènes osmotiques (1). Ainsi, un chimiste de Genève, M. Morin, a constaté que des membranes organiques qui, dans les circon- stances ordinaires, ne se laissent })as traverser par certaines substances, leur livrent parfois passage quand les forces élec- triques interviennent, et que des phénomènes du même ordre se manifestent dans les expériences osmotiques, lors même qn'on emploie comme cloisons perméables des matières miné- rales. Ainsi, en opérant à la tempéralure d'enviroji 30 degrés sur des endosmomèlres garnis de la tunique muqueuse du duo- dénum, M. Morin a vu que le sucre passait, tandis que ni le caséum, ni la gomme, ni les graisses, ne traversaient la mem-

(1) Lorsque Diitrocliol conimeiiça à ctudiei' les eflels osmotiques, il était porté à les considérer comme dépen- dant essentiellement du jeu des forces électriques (a); mais il ne chercha pas à expliquer comment ces forces pouvaient produire les résultais ob- servés. M. Becquerel a cru pouvoir aller plus loin, et donner la théorie de ces phénomènes.

« Lnc solution saline concentrée, dans sa réaction sur Teau, dit ce phy- sicien, prend rélectricité positive et donne à l'eau l'électricité contraire. L'effet ayant lieu entre les pores de la membrane ou de la cloison sépara- trice, la recomposition des deux élec- tricités s'oU'ectue par rinterniédiaire de ses parois, quand bien même la membrane ou corps intermédiaire

n'est pas conductrice do l'éleclricilé. Il doit donc y avoir probablement au- tant de courants électriques partiels qu'il y a de pores ; ces courants sont tous dirigés de l'eau vers la solution saline. L'eau pure étant un mauvais conducteur, le courant positif fera passer facilement l'eau au travers de la mendjrane dans le compartiment se trouve la solution ».

Mais !\L Becquerel, tout en con- sidérant l'électricité comme étant au nombre des causes productrices de l'endosmose , a soin de faire re- marquer qu'elle ne saurait être celle qui a le plus d'influence, car il arrive souvent que les elfets produits sont dans une direction inverse de ceux que l'on aurait obtenus si elle eût agi seule {b).

(a) rtiitroclid, L'nijeiil iminrdial dit mouvement vital dévoUi', \\. \?i'^ et siiiv, {b) l'..'C(|m>rH, Tvn'tli' île rèlirivinte, I. IV, ]>. 200 el 201.

PIIKNOMÈNRS OSMOTIQUES. 1 ()9

brane; mais qu'en faisant intervenir l'action d'un eonrant galvanique modéré , les matières grasses du lait passaient tout comme le sucre, puis s'arrêtaient dès que l'action électrique était interrompue (1).

(1) Une partie des expériences de M. Morin portent sur la membrane placentaire des Pauninants. Il a vu que la portion munie de cotylédons lais- sait passer l'émulsion de jaune d'œuf (corps g;ras et matières alhumineuses), ainsi que le sucre et le sérum du lait, mais excluait les matières grasses et le caséum de ce dernier liquide.

Les parties de la même membrane qui étaient dépourvues de cotylédons se laissaient traverser par Talbumine du jaune d'œuf, mais ne livraient pas passage à la matière grasse du vitellus.

Le courant éieciriquo fit passer les matières grasses du lait même au tra- vers de la partie de cette membrane qui est dépourvue de cotylédons, et cela quel que fût le sens du courant galvanique , mais plus rapidement quand le lait était en rapport avec Télectrode négatif.

Quand, en opérant sur la muqueuse intestinale sans le concours du galva- nisme, les corps gras, le caséum et la gomme ne passaient pas, le sucre pas- sait et la membrane admettait ou cé- dait de la gélatine. En faisant interve- nir la cbalenr et l'électricité, on déterminait le passage du corps gras et de la gélatine ; mais cette dernière substance ne traversait que pour se rendre du pôle positif au pôle négatif. Le caséum et la gomme ne passaient pas.

Lorsque la muqueuse intestinale avait été imbibée de potasse, puis lavée jusqu'à ce que la neutralité y

fût revenue, tous les principes du lait passaient sous l'intluence de la pile et d'une température de 30 degrés. Ce transport s'ett'ectuait alors le plus facilement de en -j- ; mais lorsque le liquide était légèrement alcalinisé , le mouvement s'établissait le plus faci- lement en sens contraire.

En employant de la baudruche (c'est-à-dire une double membrane péritonéale aluminée, puis desséchée et vernie à l'albumine), une dissolution d'albumine n'a déterminé que très peu d'atllux osmotique et ne s'est pas ré- pandue au dehors. En ajoutant du sucre à l'albumine , on a rendu l'en- dosmose beaucoup plus active , et il y a eu passage en sens inverse de sucre , d'albun)ine , etc. Mais ni sans ni avec le concours de la chaleur et de l'électricité, le passage de l'albu- mine n'est devenu abondant, et la matière albuminoïde abandonnée par la membrane n'était pas coagulable par la chaleur.

Enfin, en employant des godets po- reux de grès d'une structure grenue, IVI. Morin a vu que divers liquides, tels que du lait, une émulsion de jaune d'œuf et une dissolution d'albumine, filtraient au dehors quand les vases étaient à l'air, mais ne passaient pas dans l'eau du bain , l'on plongeait ceux-ci de façon à empêcher toute pression hydrostatique. Le sucre pas- sait très lentement. Or, en faisant agir à la température ordinaire un faible courant galvanique, de petites

170

ABSORPTION.

Relations H est doiic bieii démontré (jne les forces électrinues pcii-

fnlre l'osmose

et les réactions vent oxercer une inlliience considérable sur la production des

ciiiiniques.

ciiets osmotiqnes, et l'on sait d'autre part qu'il y a manifestation de ces forces toutes les fois que des corps hétérogènes arrivent en contact, mais surtout quand ce contact est suivi de quelque combinaison ou décomposition chimique. Or, des réactions chimiques accompagnent presque toujours , sinon constam- ment, les phénomènes osmotiques; en général, elles s'établis- sent non-seulement entre les liquides hétérogènes qui s'unissent, mais aussi entre ceux-ci et la substance des cloisons per- méables que ces liquides traversent. M. Graham, l'un des chimistes les plus distingués de l'Angleterre, après avoir fait une étude approfondie de ces questions, a été môme conduit à penser que le jeu des affinités était une condition essentielle du développement de toute puissance osmotique. Celte opinion ne me paraît pas fondée; mais il semble y avoir quelque liaison entre tout grand déploiement de cette force et la réalisation de quelque travail chimique.

Ainsi, en opérant avec des endosmomètres à parois inorga- niques, M. Graham a constaté une certaine coïncidence entre la manifestation des courants osmotiques et l'altération des pa- rois du vase par les agents employés (1). Il a vu (juc les mem-

qiiantités d'albumine passèrent clans le bain extérieur. L"exosmose de l'albumine n'augmenta que peu lors- que la température s'est élevée de 35 à 50 désirés , et se fit à peu près de même, quelle que fiit la di- rection du courant galvanique. Le caséum du lait passait pour se rendre vers le pôle négatif; mais les corps

gras du lait et du jaune d'(euf ne passèrent pas (a).

(1) En employant des godets formés de gypse, de charbon comprimé ou de cuir tanné, substances qui n'étaient pas attaquées par les sels dont il fai- sait usage, M. Graham n'a obtenu au- cun elfet osmotique, et, en examinant les matières qui provenaient des vases

(a) A. Morin, Nouvelles expériences sur la prrmcabilUi: des vases poreux et des membranes desséchées par les sitbslances nutritives (Mémoires de la Société de phjisique et d'histoire natu- relle de Cenère, 1854, t. MU, \i. âr.1 et sniv.i.

Pni'>;OMKNF,S ORMOTlQri'S. 171

braiies organiques qui lonctionnonl <1o la sorte sont d'or- ilinaire plus ou jnoins fortement attaquées par les matières salines qui les traversent. Enfin il a remarqué que les sub- stances qui possèdent nn pouvoir osmotique très considé- rable sont toutes des matières (\m se décomposent le plus facilement en présence, soit des menstrues, soit des tissus dont on fait usage, ou qui attaquent le plus énergiquement ceux-ci.

Afin de mettre en évidence ces rapports, M. Graham a classé par ordre de puissance osmotique les diverses sub- stances minérales dont il a mesuré l'action, et, si l'on jette les yeux sur cette liste (1), on ne peut qu'être frappé de la coïnci- dence signalée par cet expérimentateur. On remarque, en effet, que ce sont les acides , les sels alcalins et les composés les moins stables qui donnent lieu aux courants, soit positifs, soit négatifs, les plus puissants , et que les sels les plus stables occupent la région moyenne de la série, c'est-à-dire produisent le moins de cbangements dans les volumes des liquides réa-

de terre cuite il avait réalisé des effets osnioliqiies considérabies, il y a toujours reconnu des composés à base de cliaiix et d'alumine. Il lui fut im- jiossible d\''puiser les parois des go- dets en les lavant, soit avec de l'eau, soit avec des acides étendus, et le tra- vail de décomposition dont leur sub- stance était le siège lui paraissait indéfii'.i. [);ins d'auires cas, des quan- tités considérables de matières salines étaient arrêtées au passai;e et fixées dans l'épaisseur des parois de ces vases poreux {a).

(l) Dans ce tableau, M. (Iraham a représenté par des valeurs posi- tives ou négatives les différences de poids déterminées dans leur masse par les échanges opérés de la sorte en un temps donné (h). Ces résul- tats ont été fournis par des expé- riences faites à l'aide de membranes animales identiques, et avec des dis- solutions contenant un centième du poids de la substance osmogène. Les effets sont représentés par l'é- lévation ou la dépression du ni- veau du liquide dans le tube de

(a) Gratiaiii, On Osmolic Force {Philos, frans., IST)!, p. 183) (6) Idem, Op. cit. (Philos. Trans., -1854, p. 225).

172 ABSORPTION.

gissaiils (1). Il est aussi à noter que la plupart de ces matières salines attaquent les tissus organiques. L'eau elle-même agit chimiquement sur les substances albuminoïdes, et les mou- vements osmotiques sont souvent accompagnés d'altéralions profondes dans le mode de constitution de ces corps, dues à la séparation du chlorure de sodium ou d'autres sub-

rosiiiomètre, évaluée en niillimèlres.

Acide oxalique 148

AciJo chlorhydrique (0,1 p. 100}. 92

Ti'itophlorurc d'or 54

Biciilorurc d'ctain AQ

Nitrate de magnésie 2"2

Chlorure de magnésium 2

Chlorure de sodium ^- 12

Chlorure du polassium -j- 18

Nitrate de soude 4- 14

Nitrate d'argent -U 34

Sulfate de fer -}- 20 à 25

Sulfate de potasse -(- 21 à 60

Sulfate de magnésie 4- 14

Chlorure de calcium -L. 20

Chlorure de baryum _[_ 21

Chhu-ure de siroulium -|_ 20

Chlorure de cobalt -j_ 20

Chlorure de manganèse -j- 34

Chlorure de 2inc -L. 45

Chlorure de nickel -j- 88

Nitrate de plomb _1- 204

Nitrate >](' cadmium _[_ 1 37

Nitrate d'ur.uiiuin _|_ 1 58

Nitrate de cuivre 4- 204

Chlorure de cuivre -j- 351

l'iolochlorure d'élain 4- 289

Pi'otochlorure de fer 4_ 435

Chlorure de mercure 4-121

Prolonitrate de mercure 4- 350

Pernilrale de mcicure 4- 470

Acétale de scsquioxyde de fer . . 4- \'Jl

Chlorure d'aluminium ~\-. 540

Phosphate de soude 4-311

Carboualo de potasse 4- 439

M. Cii'aliam a beaticotip insisté sur

la coïncidence des actions cliiniiques et osmotiques. Il ne s'explique pas sur les relations qui doivent exister entre ces actions chimiques et le jeu de forces électriques ; mais il pense que la condition essentielle pour la pro- duction de l'osmose, c'est le dévelop- pement d'actions chimiques différentes des deux côtés de la cloison per- méable (a).

(1) Ainsi nous savons que les car- bonates alcalins attaquent fortement les matières albuminoïdes, et les expé- riences de M. Graham montrent que le carbonate de potasse qui traverse la membrane organique de l'endosmo- mètre contracte des combinaisons nouvelles en passant dans la substance de cette cloison. Le pouvoir osmo- gène de la potasse hydratée est égale- ment très grand ; mais ce réactif dé- truit si promptement les membranes organiques, que celles-ci perdent très vite la faculté de fonctionner de la sorte.

Le sulfate de fer, qui est très stable, n'a qu'un très faible pouvoir osniogé- nique ; le sesquiazotate de fer produit au contraire des effets très considé- rables; mais aussi, en s'échappant par diifiision à travers la mcndjf.ino, il se décompose et laisse un sel basique du côté interne de la cloison, tandis que

[a] Craliam, Op. cil. {Philos. Trnns., 1854, p. 225),

ClIÉNOMtNKS OSMOTIQUES. 173

stances iiùncralcs (]iii y étaient eonihhices (1). En un mot, des phénomènes résultant du jeu des affinités eliimiques aeeompagnent presque toujours, peut-être même toujours, la production des effets osmotiques; mais, dans l'état actuel de la science, il ne me send^le y avoir aucun motif pour consi- dérer ces derniers comme dépendants des premiers, et l'on ne voit pas comment dans ces cas la ])uissance chimique se transformerait en une puissance motrice. Nous avons vu ^ d'ailleurs, que tout ce qui est essentiel dans le travail osmo- ticjiie trouve son explication dans les lois de la physique géné- rale, et si les influences chimiques, de même que les forces électriques, interviennent dans l'accompHssement de ces actes, il est probable «pie c'est à la manière de la chaleur, en modi- fiant les conditions dont dépend le développement plus ou moins énergique de l'une ou de plusieurs des forces molécu- laires dont nous avons étudié le rôle au commencement de cette Leçon.

§ 19. En résume, nous voyons donc que les phéno- mènes osmotiques sont beaucoup plus complexes qu'on ne

Hésiiiiiû gênerai.

c'est lin nitrate acide qui se répand dans le bain adjacent.

L'acétate d'alumine se décompose très facilement de la sorte par le seul fait de sa diffusion dans l'eau, et de même que les autres sels d'alumine dont le pouvoir osmogénique est gé- néralement grand, il se combine forte- ment avec les matières albuminoïdes. Chacun sait que sous ce dernier rapport le chlorure de mercure est également remarquable, et c'est aussi une des substances dont le pouvoir

osmogénique est le plus considé- rable.

(1) Dutrochet a remarqué que le blanc d'œuf mis en contact avec l'eau se coagule à sa surface de façon à y former une pellicule blanchâtre («). Cette action a été étudiée avec plus de soin par M. Virchow et par M. Wit- ticli, qui ont fait voir que dans ce cas l'eau enlève à la matière protéique une portion de chlorure de sodium qui lui était associée et qui lui donnait de la tluidité (6).

(») Dutrochet, De l'endosmose {Mémoires, I. I, p. 43).

(b) Virchow, Ueber ein cigenthûmliches Yerhalteii albiminosev l-'lûssujkeilcn ba Âusalx, von Salzcn {Ài-ch., t. VI, p. 572).

Willich, Uebcr Eiweiss-Diffuswa (Mitllur's Archlv, 1850, p. 28(3).

17 4 ABSORPTION.

serail porte à le su[)poser au premier abord; (jue les éehanges qui s'établissent eutre les liquides séparés par une membrane animale ou toute autre cloison analogue peuvent être déter- minés par deux causes : l'attraction physique ou cliimi(iue de ces corps l'un pour l'autre, et la force répulsive, ^jui tend à effectuer la diffusion uniforme des particules à l'état de disso- lution dans la totalité du menstrue elles peuvent avoir accès; (jue l'inégalité des résultats de cet échange dépend delà facilité relative du passage des deux substances réagissantes à travers les cavités interstitielles de la cloison, et que cette perméabilité pour un liquide déterminé varie suivant la nature de celui-ci, la nature de la cloison elle-même , le diamètre des passages capil- laires dont cette cloison est creusée , et les circonstances dans lesquelles la réaction s'opère; enfin que la chaleur, l'état élec- trique, le jeu des forces chimiques, et d'autres inlluences dont il n'est pas possible de déterminer avec précision le rôle, modifient les effets produits de la sorte. Dans l'étal actuel de la science, nous ne possédons pas une théorie assez parl\]ite de ces phénomènes pour pouvoir calculer ce qui doit arriver dans tous les cas particuliers ; mais nous pouvons au moins prévoir ce qui se passera dans un grand nombre de circonstances, et nous rendre nettement compte du mécanisme à l'aide duquel le déplacement des liquides et leur accumulation de l'un ou de l'autre côté d'une membrane animale s'effectuent d'ordinaire. Cette étude, qui vient de nous occuper un peu longuement, nous permettra donc de faire à la physiologie d'utiles applications de la physique moléculaire, et un examen approfondi des ques- tions que nous avons passées en revue dans cette Leçon était nécessaire aussi pour nous mettre eu garde contre l'explica- tion erronée d'un gran(t nombre de faits doiit les naturalistes croient souvent pouvoir se rendre compte en les attribuant à l'endosmose, bien (pie ces phénomènes n'aient en réalité rien de commun avec les effets osuiotiques.

s

l'HÉNOMÈNES OSMOTIQL'ES. 175

Le transport des liquides qui s'efïectuc de la sorte, je le répèle, ne dépend pas d'un agent spécial , et s'effectue sou l'influence de la résultante de plusieurs forces physiques ou chimiques ; mais, pour la commodité du discours, il est bon de personnifier en quelque sorte celte cause de mouvement. Je continuerai donc à la désigner sous le nom de puissance osmogénique, et à appeler eH(/o5/?»o5e l'accumulalion de liquide qui est produite par son action.

QUARANTE - CINQUIÈME LEÇON.

Suite de I'Histoire de l'absorption. Application des lois des pliénomènes osmotiques à la connaissance de l'action absorbante des corps vivants. Cir- constances qui influent sur la rapidité avec laquelle cette fonction s'exerce.

Du rùie § 1 La connaissance des pliénomènes osmotiques que nous de i 'j||^'^^os""'^'° avons acquise dans la dernière Leçon nous permettra d'expliquer iJ.SobSq"ûè. en grande partie ce qui se passe dans l'organisme de l'Homme et des autres iVnimaux, quand de l'eau ou un liquide quelconque arrive en contact avec la surface extérieure du corps ou pénètre dans une des cavités qui communiquent librement au dehors. Eflectivement, nous trouvons réunies dans ces points toutes les conditions physiques dont nous avons vu dépendre l'absorption des liquides dans un endosmomètre : car les membranes qui constituent ces surfaces sont perméables ; d'un côté elles sont en contact avec de l'eau ; du côté opposé se rencontrent le sang et la lymphe qui circulent dans les vaisseaux qui leur sont propres, et ces liquides, plus ou moins chargés de matières organiques et salines, sont aptes àjouer le rôle d'agents osmogènes. A moins de supposer que l'organisme vivant soit soumis à des forces (pii balanceraient les actions dont résulte l'osmose, il faut donc admettre que dans ces points des courants semblables à ceux que nous avons vus traverser la paroi poreuse de l'en- dosmomèlre s'établiront , et que par l'effet do ces mouve- ments l'eau pénétrera du dehors dans l'intérieur du système vasculaire pour s'unir aux liuineurs de l'économie, ou, en d'autres mois, que l'absorption de ce li((uide sera réalisée. Or, nous avons déjà vu que, dans ces dernières circonstances, l'eau est en réalité absorbée, et par consc(juenl il est légitime d'al-

TJlÉOUIt: DE CE PHÉiNOMÈNli. 177

tribuer cette absorption, au moins en partie, au jeu des forces osniotiques.

Tous les foits dont je vais avoirà rendre compte dans cette Leçon viennent à l'appui de cette conclusion. Je ne dis pas que l'endos- mose et la diffusion soient les seules causes qui déterminent le passage des matières circonvoisines jusque dans le torrent circu- latoire, mais elles jouent évidemment un grand rôle dans l'accom- plissement de ce transport, et par conséquent, avant de chercher quelles peuvent être les autres forces qui interviennent pour déterminer l'absorption physiologiques, il nous faut examiner attentivement la part qui revient à ces actions physiques.

§ 12. Pour procéder méthodiquement dans cette étude du Résorption mécanisme de Tabsorplion en giMiéral, il me semble convenable ''VpancîS'.'^ d'examiner d'abord ce qui doit se passer entre le sang ou la lymphe (|ui se trouvent dans l'intérieur des vaisseaux irrigatoires et les liquides qui baignent la surface extérieure de ces mêmes vaisseaux, et qui occupent les aréoles du tissu conjonclif.

Dans une précédente Leçon, nous avons vu que ces liquides cavitaires, connus sous le nom général de sérosité., se com- posent d'eau et de diverses matières organiques et minérales qui se rencontrent également dans le plasma, soit du sang, soit de la lymphe, mais qui s'y trouvent en moins grande propor- tion que dans ces fluides nourriciers (1). Nous savons égale- ment (lue les parois de ces vaisseaux sont perméables (2), et par conséquent, d'après les lois connues de l'osmose, la séro- sité doit céder au sang et à la lymphe une partie de son eau, ou, en d'autres mois, un courant cndosmotique doit s'établir de la sérosité des espaces interorganiques vers les liquides conte- nus dans le système vasculaire, courant qui diminue le volume des humeurs épanchées dans les aréoles du tissu conjonctif et qui augmente celui des liquides en circulation dans l'organisme.

(1) Voyez tome IV, page 617 et ('2) Voyez lome IV, page 3'J2 el

suivantes. suiv. ; tome V, page 23 et suiv,

V. 12

178 ABSORPTION.

Ce courant endosmotiqiie doit être d'autant plus puissant que la différence dans le tilre, ou ce qui, dans ce cas, revient au même, dans la densité des liquides réagissants, est plus con- sidérable, pourvu que toutes les autres conditions du phénomène restent invariables. Or, nous savons que les matières osmo- gènes, c'est-à-dire les priucipes organiques, tels que l 'albumine et les substances salines qui se trouvent associées à l'eau dans ces divers liquides, sont en proportion plus grande dans le sang que dans la lymplie. Par conséquent aussi, conformément aux lois de l'osmose, l'aclion absorbante exercée sur le sérum doit être plus puissante que celle de la lymphe sur ce dernier liquide. Nous verrons bientôt qu'effectivement les choses se passent de la sorte dans l'organisme vivant, et, comme tout ce que j'ai ;\ dire de l'absorption parles vaisseaux lymphatiques est appli- cable aux vaisseaux sanguins, que les effets produits par ces derniers sont plus grands et que l'élude en est beaucoup plus facile, il me paraît inutile de compliquer nos études actuelles par la considérahon simultanée des fonctions de ces deux ordres de vaisseaux, et, laissant de côté pour le moment ce qui est relatif au système lymphatique, je concentrerai mon atten- tion sur les phénomènes d'absorption dont le système circula- toire est le siège. Mode § S. Au premier abord, il pourrait sembler étrange

'^'timïuanT"' d'aduicttrc (pie nous avons constaté l'existence d'une de l'absorption jj^Qj^ggLidation , c'cst-à-dirc d'un mouvement des liquides du ^"^'danî""" dedans au dehors des vaisseaux sanguins, il puisse y avoir le même point. ^^^ mcmc tcuips, aîusi quc je viens de l'avancer, absorption ou trans[)ort de matières de l'extérieur à l'inlérieur des mêmes parois. Mais le fait est facile à constater, et il est non moins facile à expliquer, lors même que les courants en sens inverse seraient formés les uns et les autres par des liquides iden- tiques.

Effectivement, les tissus constitutifs des [larois vasculaires,

THÉOKIE DE CE PHÉNOMÈNE. 179

de même que les autres membranes organiques de l'économie animale, sont creusés de cavités interstitielles très irrégulières par leur calibre aussi bien que par leur forme et leur direction ; et parmi les passages ainsi établis , les uns sont assez larges [)0in* agir à la manière de filtres, et pour laisser passer, sous l'iulluence de la pression hydrostatique exercée par le sang, luie certaine quantité de sérum dépouillé d'une partie des matières solubles dont ce liquide est chargé : de Iranssudatioii plus ou moins rapide d'une portion des matériaux les plus tluides du sang de l'appareil circulatoire dans les aréoles adjacentes du hssu conjonclif. Mais d'autres pores ou lacunes interstiUelles de la même membrane sont de plus petit calibre, et leur action capillaire ne permet pas à la poussée latérale exercée par le sang de déplacer les liquides logés dans leur intérieur ; là, par con- séquent, il n'y a point de courant sortant, point de transsuda- tion ; mais, par le jeu des Ibrces déi)endantes des actions moléculaires entre ces liquides et ceux qui baignent les deux surfaces de l'espèce de cloison formée par la paroi du vaisseau, un courant osmotique s'établit de l'extérieur vers l'intérieur, car l'eau se trouve en moins grande proportion dans le liquide (]ui occupe l'intérieur de cet organe que dans la sérosité qui en baigne la surface externe. Ainsi la théorie nous conduit à prévoir que les parois des veines doivent être le siège de deux courants de direction contraire dus à des forces diffé- rentes , d'un courant de transsudalion déterminé j)ar la pres- sion hydrostatique, et d'un courant centripète dépendant des actions moléculaires dont l'ensemble détermine l'endosmose. Les effets apparents de ces deux courants d'extravasation et d'absorption doivent se balancer plus ou moins, et si leur puis- sance est égale, ils pourront facilement échapper aux investi- gations du physiologiste, car ils n'auront alors aucune intluence sur le volume des liquides situés de l'un ou de l'autre côté de la membrane perméable, et tout paraîtra en repos; mais, pour

180 ABSORPTION.

peu que l'un d'eux acquière une puissance relative plus grande, son existence se manifestera par une augmentation dans la quantité de liquide vers lequel celui-ci se dirige, et, au premier abord , on pourrait croire que dans ce cas il y a seulement absorption ou seulement transsudation. Nous verrons cependant que toujours, ou presque toujours, ces deux mouvements coexistent |»artout dans l'organisme, de façon qu'il y a dans l'économie animale circulation des fluides nourriciers, non- seulement dans le système des vaisseaux irrigatoires, mais dans la profondeur des tissus intermédiaires, entre ces canaux et les cavités interstitielles circonvoisines, et cela sur tous les points ces vaisseaux existent : circonstance dont nous ver- rons [tlus tard l'utilité (juand nous étudierons les phénomènes de nutrition.

Dans ce que je viens de dire des échanges effectués entre raj)parcil vasculaire et le système aréolaire circonvoisin, il n'a été question que de l'eau qui s'échap|)e du plasma pour con- courir à former la sérosité, ou qui est enlevée; à ce dernier liquide pour être portée dans le sang. Mais cette eau, de part et d'autre, tient en dissolution diverses matières organiques et minérales ; d'autres substances peuvent y être ajoutées acci- dentellement, et par conséquent, pour compléter cette investi- gation préliminaire des phénomènes de l'absorption, il faut chercher comment se comportent les molécules hétérogènes qui se trouvent disséminées dans ce menstrue.

Nous avons eu déjà plusieurs fois l'occasion de reconnaître que l'attraction adhésive exercée par les surfaces des tissus organisés sur les molécules de l'eau est plus puissante que celle que ces mêmes surfaces exercent sur les molécules de la })lupart des nvatières salines ou organiques en dissolution dans ce liquide. Nous savons aussi que, par suite de cette inégalité, les passages étroits dont ces tissus sont creusés effectuent une sorte de triage dans les molécules qu'ils admettent, et qu'ils laissent passer

THÉORIE DE CE PHÉNOMÈNE. 181

l'eau en plus grande proportion ; que cette action moléculaire ne s'exerce qu'à de très petites distances, et que par conséquent ses effets ne sont sensibles que quand les canaux sont très étroits ; enfin que les différences déterminées ainsi dans le degré de concentration des liquides qui traversent les membranes sont d'autant plus marquées, que les cavités interstitielles par lesquelles ils passent sont plus petites (1). En étudiant le phé- nomène de la transsudation, nous avons vu que le plasma du sang est de la sorte très appauvri par le fait de sa filtration au travers des parois des vaisseaux, et que, par suite de cette ac- tion, la sérosité déposée soit dans les aréoles du tissu conjonctif, soit dans les poches séreuses, contient de l'eau en plus grande abondance. Or, tout ce que je viens de dire des modifications que la filtration détermine dans la composition du courant effé- rent est à plus forte raison applicable au courant afférent qui ramène dans les vaisseaux sanguins une portion de la sérosité des cavités d'alentour; car nous avons vu que ce transport, à l'endosmose, se fait par des passages plus étroits que ceux à l'aide desquels la pression hydrostatique détermine la transsu- dation, et par conséquent le liquide absorbé doit être aussi moins riche en matières solubles que la sérosité dont il provient. La résorption d'une porhon des liquides épanchés dans les cavités closes de l'organisme doit donc tendre à produire une certaine concentration dans la portion qui reste en place, et si d'autres causes ne balancent les effets produits de la sorte, l'espèce de circulation locale et inlershliellc qui s'établit ainsi entre les cavités vasculaires et les cavités séreuses en général amènerait une accumulation de matières solubles dans ces dernières. Du reste, cette accumulation a souvent lieu, et nous en avons déjà eu des exemples en étudiant les changements qui se manilcstent àlalonguedanslacomposifion des produitsdela transsudation (-2).

(1) Voyez ci-dessus, page 88 et (2) Voyez tome IV, page /|35 et

suivantes. suivantes.

IS^ ABSORPTION.

Mécanisme Lfl quaulité fles matières nlbuminoïdes et minérales qui se

lie l'ahsorpfion ^ , i » /■

des matières trouvent a la lois dans le sang et dans la sérosité sera donc aug- ;. lorgamsme. mentée dans ce dernier liquide plutôt que diminuée, par l'effet des courants et contre -courants dont résultent l'absorption et la franssudation dont une même surface organique est le siège; mais si la sérosité vient à se cliarger de quelque substance qui n'existe pas dans le sang ou qui n'y existe qu'en moindre pro- j)ortion, le résultat, en ce qui concerne cette substance, sera très différent, et l'ensemble du pliénomène pourra même changer de caractère.

Supposons d'abord que la substance étrangère en dissolution dans la sérosité soit apte à agir comme agent osmogène, et soit en proportion suffisante pour que ses effets l'emportent sur ceux du sang. Le courant osmotique qui traverse la paroi vasculaire changera alors de direction , et le sang , au lieu de prendre de l'eau à la sérosité circonvoisine , en fournira à ce dernier liquide ; il y aura endosmose centrifuge du vaisseau sanguin dans les aréoles du tissu conjonctif adjacent, et les produits de ce courant effcrent viendront grossir ceux de la transsudalion ordinaire. Dans ce cas, l'endosmose ne contril)uera donc en rien au transport de cette matière étran- gère de l'extérieur du vaisseau jusque dans le torrent cir- culatoire, c'est-à-dire à son absorption. Mais nous avons vu qu'à raison du pouvoir diffusif dont les molécules des corps en dissolution sont douées, ces molécules tendent à se répartir uniformément dans la totalité de l'espace occupé par le men- strue, et par conséquent à se répandre dans les courants afférents qui , en traversant les membranes , donnent lieu à l'endosmose ; ces mêmes molécules tendent aussi à se répandre d'une manière semblable dans le liquide situé au delà de la cloison constituée par ces membranes, et elles forment de la sorte un contre-courant ou courant exosmotique qui est dirigé de la sérosité vers le sang. Dans ce cas, en vertu des actions

THÉORIE DE CE PHÉNOMÈNE. 183

moléculaires que nous avons vues intervenir dans la production des phénomènes osmotiques, il y aura donc encore absorption de la matière étrangère, c'est-à-dire transport des molécules de cette matière de l'extérieur des vaisseaux sanguins dans l'intérieur de ces conduits, elle se mêlera au liquide nourri- cier en circulation ; seulement cette absorption , effectuée par la diffusion seulement, sera très lente. Du reste, il est évident que par l'effet même des courants centrifuges ainsi établis , l'agent osmotique s'affaiblira de plus en plus , car, en même temps qu'une portion de sa substance pénétrera dans le vaisseau sanguin par diffusion, ce qui en restera se trouvera mêlé à une proportion toujours croissante de sérosité, et il arrivera ainsi un moment son action deviendra insuffisante pour balancer celle du sang, dont la direction est inverse ; le sens du mou- vement endosmotique sera alors interverti, et le courant s'éta- blira de la sérosité encore chargée d'une certaine quantité de la substance étrangère vers le sang en circulation.

Ces conditions sont faciles à réaliser dans des expériences phénomènes

, osmotiques

osmotiques, et il est également aise de constater que sous ce déterminés

. . pai'

rapport les choses se passent dans l'organisme vivant comme les purgaufs. dans un endosmomètre inanimé. Pour le prouver, il me suffira de répéter une des expériences faites par M. Poiseuille dans le but de s'éclairer sur le mode d'action des médicaments purga- tifs. Plaçons dans un réservoir endosmométrique une dissolu- tion un peu concentrée d'un de ces sels neutres à base alcaline que l'on administre souvent aux malades pour provoquer les évacuations alvines, et qui ne se trouvent pas normalement dans le sang ou n'y existent qu'en proportions extrêmement faibles, du sel de Glauber ou sulfate de sonde, par exemple, ou bien encore de Feau de Sedlitz, qui est riche en sulfate de magnésie, et plongeons l'instrument dans un bain formé de sérum. Un courant osmotique ne tardera pas à s'établir au travers delà membrane, et se dirigera du sérum vers l'eau de

184 ABSORPTION.

Sedlitz : celle-ci augmentera de volume, et cet accroissement sera marqué par l'ascension de la colonne endosmométriqne; l'eau du sérimi, en [)assant dans la dissolution purgative, ~ aura emjiorté avec elle nne certaine quantité d'albumine qui se retrouvera dans l'eau de Sedlitz; enfin le courant endos- moti(|ue dont dépendent ces Iransporls de matières aura été accompagné d'un mouvement de diffusion en sens contraire, ou phénomène d'exosmose , ayant pour résultat le passage d'une certaine quantité de sulfate de magnésie de l'intérieur de l'endosmomèlre dans le bain adjacent formé par le sérum. Supposons maintenant que le réservoir endosmotique dont je viens de faire usage, au lieu d'être formé par une membrane muqueuse prise sur le cadavre, soit l'intestin d'un Animal vivant. Si les actions physiques qui ont déterminé les échanges dans l'expérience précédente s'exercent de la même manière, nous devons être témoin de résultats analogues, caria subslance [lurgative sera séparée du sérum qui circule avec les globules hématiques dans les vaisseaux sanguins de la muqueuse par une couche mince de tissu perméable réunissant toutes les con- ditions voulues pour fonctionner à la manière d'un diaphragme osmotique. Il devra donc y avoir, comme conséquence de l'en- dosmose provoquée })ar l'eau de Sedlitz, transport d'une cer- taine quantité de sérum, c'est-à-dire d'eau chargée d'albumine, des vaisseaux sanguins dans l'intérieur du tube intestinal, mou- vement qui amènera une augmentation du volume des liquides renfermés dans cette cavité, et il y aura en même temps, comme conséquence du courant de diffusion ou courant exosmotiqiie, absorption d'une certaine quantité de sulfate de magnésie et des autres matières salines contenues dans l'eau de Sedlitz, et ver- sement de ces matières dans le torrent de la circulation. Or, ce sont précisément les principaux phénomènes qui sont déter- minés pai' l'administi'ation de celle eau médicamenteuse : l'excrétion d'un hipiide chargé d'albumine est provoquée à la

THÉORIE DE CE PHÉNOMÈNE, 185

surface libre de h muqueuse intestinale, et en même temps les matières salines de l'eau de Sedlilz passent dans le sang, puis dans les urines, ainsi qu'on s'en est assuré par l'analyse chi- mique de ces humeurs (1).

(1) On sait généralement que les sels dont il est ici question, de même que !)caucoup d'autres médicaments dits purgatifs, déterminent par leur présence dans le tulje intestinal l'éva- cuation d'une quantité considérable d'eau plus ou moins chargée de ma- tières organiques, et que ce liquide est fourni par les parois de la cavité di- gestive. Or, en examinant cliimique- ment ce produit dont l'abondance est en général très grande, on y trouve des quantités assez considérables d'al- bumine, substance dont on ne dé- couvre que des traces dans les déjec- tions alvines ordinaires, mais dont la présence dans ces circonstances s'ex- plique parfaitement par l'aftlux de sérum du sang que l'action osmo- gène du purgatif a provoqué. D'un autre côté, en examinant la compo- sition de l'urine cliez les personnes soumises à ce genre de médication, on reconnaît dans ce liquide une quan- tité considérable du sel qui a été ad- ministré par les voies digestives, et qui n'a pu arriver dans l'appareil rénal qu'après avoir été absorbé dans l'intestin.

En faisant des expériences endos- motiqucs avec le sérum du sang et d'autres eaux minérales purgatives ( telles que l'eau de Piillna) , ou bien encore des dissolutions de sulfate de

soude, de sulfate de magnésie, de sel commun, de nitrate de potasse, de phosphate de soude, etc., à des de- grés voulus de concentration, M. Poi- seuille a obtenu des résultats sem- blables à ceux fournis par les expé- riences décrites ci - dessus. A un certain degré de concentration, ces dissolutions salines déterminaient tou- jours l'établissement d'un courant en- dosmotique alimenté par le sérum, et à un certain degré de dilution, au contraire, elles étaient attirées par le sérum et formaient un coinant dirigé vers ce dernier liquide ; enfin, dans toutes ces expériences, il y avait en même temps passage en sens inverse, soit d'une certaine quantité d'albu- mine dans la dissolution saline, soit d'une portion de sel dans le sérum (a). Ces expériences donnent la théorie d'une partie du mode d'action de ces médicaments purgatifs ; mais les effets que ces substances produisent ne con- sistent pas seulement dans ces cou- rants osmotiques , et les phénomènes provoqués par leur présence dans les voies digestives sont en général beau- coup plus complexes, comme nous le verrons ailleurs. Je dois ajouter que M. Liebig était arrivé précédemment à des résultats analogues, et attribuait aussi l'action des purgatifs au jeu des forces osmotiques (6) ; mais, dans ces

(a) PoiseuiUe, Recherches expérimentales sur les médicaments (Complet rendus de l'Académie des sciences, 1844, t. XIX, p. i94 et suiv.).

(b) Liebig, Untersuchung der Mineralquelle zu S9den iind Itemerkimgen iiber die ]yirkiing der Sahe attfdeii Organismus. Wiesbaden, 1839.

186

ABSORPTION.

Nous verrons dans une autre occasion que ces mouvemenis osmotiques ne sont pas les seuls résultats fournis par l'action des purgatifs sur la muqueuse intestinale, mais ce sont les phénomènes fondamentaux, essentiels, que cette action déter- mine ; et ce qui a lieu de la sorte dans le tube intestinal d'un Animal vivant se produirait d'une manière analogue dans toutes les autres parties de l'organisme les mêmes conditions phy- siques se trouveront réunies, c'est-à-dire un agent osmo- gène plus puissant que le sang sera séparé de ce liquide par les parois perméables des vaisseaux ou par des tissus ana- logues. Absorption Voyons maintenant ce qui doit avoir lieu dans le cas la

des matières , i i ' / > >

salines, etc. substancc dont la sérosité du tissu areolaire est chargée ne serait pas douée d'une force suffisante pour balancer l'action osmogène du sang, soit à raison de sa nature chimique, soit parce qu'elle se trouverait unie à une trop grande proportion d'eau.

dernières années, ce sujet a été étu- dié de nouveau par M, Auiîcrt, et paraît être plus compliqué qu'on n'au- rait été porté à le supposer. En efl'el, ce médecin a vu que des sels neutres pouvaient déterminer des phénomènes ordinaires de purgaliou sans avoir été ingérés dans le tube digestif, mais étant injectés directement dans les veines, il n'a pas trouvé que la quantité de l'évacuation fût en rapport avec le degré de concentration de la disso- lution saline introduite dans l'in- testin, et il n'a pas reconnu la pré- sence de l'albumine dans ces produits, circonstance qui est défavorable à l'explication adoptée par iMM. Liebig

et Poiseuille. Il a été conduit de la sorte à penser que ce n'est pas en provoquant un courant endosmo- tique des vaisseaux de la muqueuse intestinale dans l'intérieur de ce tube que les n)édicamenls en question déterminent la purgation (a). Mais le fait de la difTusion de l'albumine du sérum dans les liquides contenus dans l'intestin me semble avoir été mis hors de doute , non-seulement par les expériences de M. Poiseuille, mais aussi par les recherches plus récentes de M. Knapp sur les phé- nomènes que la présence de l'eau détermine dans l'intestin grêle du Lapin (6].

(fl) Aulierl , Experimental-Unlcrsucliitngen ûber die Frage ob die Mitteîsnlie auf endosmo- tischem Wege abfiihren (Zeitschrift fur ratloncllc Mcdicin, 2" série, 1852, t. Il, p. 225).

(b) Knapp, De l'absorption de l'albumine dans l'inteslin grêle {Gazette hebdomadaire de méde- cine, 1858, t. IV, p. 308),

THÉORIE DE CE PHÉNOMÈNE, 187

Prenons ponr exemple nne dissolution étendue de cyano- ferrure de potassium. Etant séparée du sérum du sang par une membrane perméable, l'eau de la dissolution sera attirée par ce dernier liquide et constituera un courant endosmotique dirigé vers celui-ci. jMais l'eau, en pénétrant dans les passages inter- stitiels de la membrane, ne se séparera pas de toutes les molé- cules du cyanure dont elle était chargée, et par conséquent le courant endosmotique ainsi établi transportera une certaine quantité de cette substance de l'extérieur jusque dans la cavité se trouve le sérum. Un mouvement analogue, à la ditïu- sion, se produira dans les conduits plus larges par lesquels le sérum transsude an dehors, et par conséquent le passage du cyanoferrure de la dissolution dans le sérum sera déterminé à la fois par le jeu des forces moléculaires dont dépendent l'en- dosmose et l'exosmose, et s'effectuera d'autant plus rapide- ment, que les circonstances seront plus favorables à leur déve- loppement.

Nous avons vu, dans une précédente Leçon, que le cyano- ferrure de potassium déposé dans les lacunes aréolaires du tissu conjonctil', ou introduit dans l'une ({uelconque des grandes cavités du corps, ne tarde pas à être absorbé et à se montrer dans le sang. Pour nous rendre compte des causes de ce phénomène, il nous suftit donc d'invoquer les actions osmo- tiques dont nous venons d'être témoin, et tout ce que je viens de dire au sujet de cette matière saline est applicable aux autres substances étrangères à l'organisation qui sont miscibles au sérum ou solubles dans ce liquide, et qui se trouvent en contact avec une surface absorbante, le sucre, par exemple (1).

(1) Le mode d'absorption du sucre nionUé en tout conforme aux lois

par la membrane muqueuse du tui)e connues des phénomènes osmotiques.

alimentaire a été étudié récemment Ainsi, quand une dissolution concen-

avec beaucoup de soin par le docteur trée de sucre est emprisonnée dans

F. von Becker, de Helsingfors, et s'est une portion de l'intestin d'un Animal

Absorption élective.

188 ABSORPTION.

La connaissance que nous avons acquise de ces phénomènes physiques, dont le développement est indépendant de toute influence vitale, nous permet aussi de concevoir comment dans l'organisme vivant une surface absorbante , tout en laissant pénétrer dans l'économie certaines matières étrangères, pourra refuser le passage à d'autres substances. A raison du jeu des attractions moléculaires dont dépendent les phénomènes de capillarité, un tissu donné pourra s'imbiber de tel liquide et être iuiperméable à tel autre, par conséquent être apte à absorber le premier et incapable de conduire le second de l'extérieur jusque dans le torrent de la circulation. Ainsi, on a remarqué depuis longtemps que certains poisons déposés à la surface d'une plaie saignante sont absorbés avec rapidité

vivant à l'aide de deux ligatures qui ne gênent pas la ciiculation du sang dans les parois de Torgane , on voit que Tendosmose piovoquée par ce corps étranger di; termine la transsu- dation d'une certaine quantité de li- quide provenant du sang, et qu'en même temps une certaine quantité de sucre passe en sens inverse de l'in- testin dans le torrent de la circula- tion ; que ce courant exosmotique ou de diiïusion dont résulte l'absorption du sucre est d'autant plus intense, que le liquide logé dans l'intestin est plus chargé de cette substance, et que l'activité de l'endosmose est en même temps proportionnelle à la richesse de cette même dissolution sucrée. Le liquide intestinal devient donc de moins en moins chargé de sucre, parce qu'il y arrive de l'eau fournie par le sang et parce qu'il en sort du sucre qui se répand dans les liquides adja-

cents. Arrivée à un certain degré de dilution, la dissolution de sucre cesse de provoquer un courant endosmo- tique aux dépens du sang ou des autres liquides contenus dans les pa- rois de l'intestin, et la diffusion du sucre dans ces derniers liquides de- vient aussi très faible, mais ne s'ar- rête pas, puisque ceux-ci sont encore plus pauvres en molécules de matière sucrée ; et il arrive ainsi un moment le liquide intestinal, devenu infé- rieur au sérum quant à la force os- mogène , est à son tour déplacé par endosmose et porté en totalité ou en partie dans le sang. M. von Becker a constaté aussi que la diffusion (ou absorption du sucre) , de même que l'endosmose, qui porte les liquides de l'organisme dans la cavité de l'intestin , est d'autant plus active que la dissolution sucrée est plus riche (a).

(a) F. 3. von Ucckcr, Ueber das Verhalten des Zuckers beim thierinchen Stoffwechsel (Zeil' schrift fur ivissenschaflliche Zooloijie, 4 8r>i, t. V, p. 137 et sniv.).

THÉORIE DE CE l'HÉNOMÈNE. 189

et déterminent ainsi une mort prompte, mais peuvent être impunément introduits dans le canal digestif, cependant les substances étrangères sont d'ordinaire absorbées avec une grande force. Le venin de la Vipère, et le curare , dont les Indiens des bords de l'Orénofjue se servent i)Our empoisonner leurs tlèches, présentent cette singularité (1), et au premier abord on pourrait être disposé à attribuer l'innocuité de la sub-

(1) Les anciens savaient que le ve- nin des Serpents peut être mis en contact avec nos lèvres sans qu'il en résulte aucun accident, et lîedi, dans ses expériences sur le venin de la Vipère, a constaté l'innocuité de cette matière quand on l'introduit dans l'estomac (a). H a vu aussi que la sub- stance toxique dont les Javanais endui- sent la pointe de leurs flèches, et dont les effets sont foudroyants quand elle est introduite dans une plaie, n'exerce en général aucune action nuisible sur l'économie animale, quand elle est ingérée dans les voies digeslives {b). Gumilla , la Condamine , de Huni- boldt et plusieurs autres voyageurs, ont eu l'occasion de reconnaître que le poison dont les Indiens de l'Amé- rique méridionale se servent dans leurs chasses, c'est-à-dire le ourari, woorara ou curare (c), se comporte de la même manière (<i). Enfin MM. Pe- louze et Cl. Bernard ont reconnu que l'innocuité du curare, quand on l'in- troduit dans l'estomac, ne tient pas à l'altération de cette substance végé-

tale par l'action des organes digestifs, mais dépend de ce qu'elle n'est pas ab- sorbée. Or, cette non-absorption est à son tour une conséquence de l'inapti- tude des membranes muqueuses à se laisser pénétrer par le curare. En effet, I\IM. Bernard et Peiouze ont constaté que si l'on garnit un endosmomètre avec un fragment frais de la mu- queuse gastrique d'un Chien ou d'un Lapin, et qu'après avoir chargé l'in- strument d'un sirop de sucre, on le plonge dans un bain formé par une dissolution aqueuse de curare, il y aura endosmose, mais que de l'eau seulement traversera la membrane, et que le curare n'accompagnera pas le courant endosmotique formé par ce liquide (e).

La membrane muqueuse de la ves- sie, la conjonctive, etc., sont égale- ment imperméables au curare chez les Mammifères; mais chez les Oi- seaux cette substance est absorbée facilement par la muqueuse du ja- bot (/■)•

Chez les Mammifères et les Oiseaux,

(a) Redi, Observationes de viperis [Opusculorum pars secunda, p. 1G3 et suiv.). (ft) Colle substance, que Iledi appelle le poison des /lèches de Dantam, était probablemcHt Vupas antiar.

(c) Voyez tome IV, page 142.

(d) Voyez Reynoso, Recherches sur le curare, 1855, p. 18 et suiv.

(e) Peiouze et Cl. Bernard, Recherches sur le curare {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1850, t. XXXI, p. 536). , ,0.7

(/•) Cl. Bernard, Cours de médecine : levons sur les effets des substances toxiques, etc., l»s', p. 287.

190 ABS0IU>T10N.

stance toxique introduite dans l'estomac à une puissance vitale dont cet organe serait doué, à une sorte de sensibilité particu- lière qui le porterait à repousser ce qui est nuisible, tandis qu'il laisse passer ce qui est utile à l'organisme. ÎMais on a constaté expérimentalement qu'il n'en est pas ainsi, et que l'exclusion du curare est la conséquence des propriétés pliysiques de la membrane stomacale, qui, sur le cadavre aussi bien que cbez l'Animal vivant, est perméable à l'eau, aux dissolutions salines, au sucre et à une multitude d'autres substances, tout en étant imperméable pour la matière particulière dont il est ici (juestion. L'explication du pbénomène nous est doncdoiméeparla théorie physique de l'absorption.

11 en sera de môme dans une foule d'autres circonstances. Je ne prétends pas que les forces osmoliques soient les seules qui puissent intervenir dans l'accomplissement de la fonction physiologi([ue de rabsor|)lion, et je chercherai bientôt à mettre en lumière rintluence d'autres agents; mais, dans la plupart des cas, il me parait évident que l'osmose est la cause prin-

le curare n'est pas absorbé par la peau (a), mais chez les Grenouilles il l'est, quoique lentement {b).

Il est probable que c'est aussi de l'inaptitude de la membrane mu- queuse des voies alimentaires à se laisser traverser par les virus orga- niques que dépend l'innocuité de cer- taines substances d'origine animale, quand elles sont introduites dans l'es- tomac, bien que leur contact avec une plaie soit suivi d'accidents des plus graves. M. Renault , directeur de l'École vétérinaire à Alfort , a

constaté beaucoup de faits de ce genre. Ainsi il a vu que la chair des Animaux morts du charbon, la ma- tière virulente de la morve, et d'autres poisons analogues dont l'inoculaiion est généralement mortelle, peuvent être mêlés aux aliments et introduits dans les voies digestives du Chien, du Porc et de la Poule, sans déterminer aucun trouble dans l'organisme de ces Animaux. Chez le Mouton , la Chèvre et le Cheval, l'absorption peut au contraire en être efl'ectuée par les parois de l'estomac (c).

(a) Vircllow et Munter (voyez Reynoso, Op. cit., p. 22),

(6) Cl. Bernard, Op. cit., p. 292.

(c) Renault, Etudes expérimentales cl pratiques sur les effets de l'ingestion des matières viru- lentes dans les voies digestives de l'Homme et des Animaux domestiques (Recueil de médecine Vétérinaire, 1851, t. XXVUI, p. 873).

THÉORIE DK CE PHÉNOMÈNE. 191

cipîile cUi passage des matières étrangères de l'extérieur dans l'inlérieur de l'appareil circulatoire, et la légitimité de cette opinion deviendra de plus en plus manifeste à mesure que nous avancerons dans l'étude des circonstances C|ui sont ou favorables ou défavorables, soit à la rapidité de l'absorption pbysiologique, soit à la production d'effets osmotiqnes consi- dérables (1).

(1) M. Longet, tout en admettant qiio beaucoup de substances puissent pénétrer dans le corps vivant en verlu de la force d'endosmose, pense que souvent les phénomènes d'absorption physiologique sont en contiadiclion avec ce qui s'observe dans les expé- riences faites avec des tissus privés de vie, et que dans l'accomplissement de cet acte les forces mécaniques, physiques et chimiques sont dominées par la force vitale (a). J'examinerai ailleurs l'influence que la puissance propre aux êtres vivants semble sus- ceptible d'exercer sur la marche de l'absorption; mais, pour justifier l'o- pinion que j'.ii émise ici, il me paraît nécessaire d'examiner les faits que M. Longet considère comme étant en opposition avec la théorie physique de cette fonction. « Et d'abord l'expé- rimentation, dit ce physiologiste, éta- blit que, chez l'Animal vivant, en injectant dans plusieurs anses intes- tinales des dissolutions de sucre de densités variables, les dissolutions très concentrées, et notablement plus den- ses que le sérum, disparaissent tout aussi vite que les plus étendues. Elles démontrent aussi que des solutions de nitrate de potasse ou de sulfate de

soude, qui, douées d'un pouvoir cn- dosmotique considérable , et offrant plus de densité que le sérum du sang, l'attirent dans le tube de l'endosmo- mètre, font précisément le contraire quand on les injecte dans le tissu cellulaire sous- cutané d'un Animal vivant, c'est-à-dire qu'après peu d'in- stants on ne retrouve plus aucun vestige de ces solutions, qui, vite ab- sorbées , ont été entraînées dans le torrent circulatoire (b) ». Effective- ment, les choses peuvent se passer de la sorte dans l'économie animale, et, dans les expériences de i\l. von Bec- ker, dont il a déjà été question (c), nous en avons vu des exemples; mais il suffit d'analyser ces faits pour voir qu'ils ne sont pas en dés- accord avec la théorie physique de l'absorption exposée ci-dessus. Quand du sucre , du nitrate de potasse ou du sulfate de soude en dissolution .se trouve en présence du sérum , dont une membrane perméable le sépare , la puissance osmogène du sucre ou du sel peut déterminer la sortie d'une certaine quantité de l'eau du sérum, et produire ainsi un phé- nomène d'endosmose dont la direc- tion sera opposée à celle que les

(a) Longet, Traité de phjjsiologie, t. I, 2" partie, p. 291 , 401 et suiv.

(6) Idem, ibid., p. 402.

(c) Von Becker, Op. cit. (Zeitschr. fur tuissenschafll. Zoologie, 1854, t. V, p. 137 et suiv.).

192 ABSORPTION.

Examinons donc de plus près quelles sont ces circonstances et quel degré d'influence elles peuvent avoir. Circonstances § /i. Il cst évldcnt quc, toutcs clioscs étant égales d'ail - sur" l'acliviié Icurs, Ic couraul endosmotique déterminé par le sérum du

de l'absorplion. , a n , , i , i i- <

sang devra être d autant plus [)uissant, que la torce osmogene propre à ce liquide est plus grande comparativement à celle de l'autre liquide réagissant , c'est-à-dire la sérosité du tissu conjonctif, ou le liquide en rapport avec la surface libre des

molécules de sucre devront suivre pour pénétrer dans ce dernier liquide ; mais cela ne les empècliera pas d'o- béir aux lois de la diflusion, et de se répandre par conséquent dans le sé- rum par voie d'exosmose. Or, le cou- rant exosmolique ou de dillusion devra être d'autant plus rapide que la dis- solution sucrée ou saline sera plus concentrée; et il en résulte que si l'absorption physiologique était dé- terminée seulement par le jeu des forces physiques ou chimiques dont dépendent les phénomènes osmoli- ques, il y aurait, comme dans les expériences citées par M. Longel , passage du sucre ou de la matière saline de l'extérieur a l'intérieur des vaisseaux sanguins , c'est-à-dire ab- sorption de ces substances ; et quant à la sérosité, dont la transsudation aurait été provoquée par la présence de la substance osmogene dans l'in- testin ou dans les aréoles du tissu conjonctif sous-cntané, elle devrait être résorbée à son tour par endosmose, quand les molécules de sucre ou du sel, obéissant à la force de diflusion, auraient pénétré dans le sang en quan- tité suflisantc pour y être en équilibre

avec celles restées dans le liquide exté- rieur. Je ne vois donc rien qui soit incompatible avec l'explication phy- sique des phénomènes physiologiques de l'absorption , et la dissidence de nos opinions me semble dépendre de ce que mon savant confrère et ami M. Longct ne tient pas compte du pouvoir diffusif des matières en dis- solution. Ce physiologiste éminent se fonde aussi sur la facnllé que pos- sèdent les Animaux d'absorber les matières grasses, sujet sur lequel je reviendrai bientôt ; enfin , il argue également de l'espèce de triage des matières absorbées dans diverses par- ties de l'organisme, phénomène qui se lie trop intimement au travail chi- mique des sécrétions pour que je puisse l'examiner utilement ici. Mais je crois devoir rappeler que les forces physiques dont le jeu détermine les mouvements osmotiques ne sont pas sans influence sur la composition des liquides qui traversent les membra- nes; nous en avons eu des preuves en étudiant les phénomènes de lillra- tion élective et certains résultats four- nis par les expériences sur l'endos- mose la).

(«)Vojcz ci-dussiis, [Kiye 88.

lllUCONSTANCES QLl INFLLEM SLU CKTTi: FONCTION. 103

membranes tégiimcntaires, soit externes, soit internes, de l'or- ij^anisme.

Nous savons, par les expérienees de M. Graham, (pie le pon- imiiuciico voir endosmoii(iue du sérum n'est pas très eonsidérable ; (pi'il Maunecinnii-iue est de beaueoup nnerieur a celui d une dissolution salme eon- à absorber. tenant seulement un centième de phospliate ou de carbonate de soude: mais que, d'autre part, il est beaucoup plus grand (jue celui de [)lusieiirs autres dissolutions salines, et qu'il est même très grand comparativement à celui des acides dilués (i). Par conséquent , l'action osmogène du sérum doit sut'lire pour déterminer l'absorption , non-seulement de l'eau, mais aussi de diverses dissolutions, et en s'exercant sur un acide dilué, elle doit faire naître des courants endosmoli(iucs très puissants, ou, en d'autres mots, déterminer l'entrée ra[)ide de ces substances dans le torrent de la circulation. Nous avons vu aussi que la [irésence d'une petite quantité d'acide, surtout d'acide chloiiiydrique ou d'un acide organique, diminue beau- coup le pouvoir osmotique d'une substance (2), etparconsétpient nous devons prévoir que le mouvement endosmolique déter- miné par le sérum produira des effets beaucoup plus considé- rables sur un liquide légèrement acidulé que sur un li(}uide neutre ou basique. Si dans l'estomac d'un Animal on introdui- sait une dissolution aqueuse d'acide oxalique ou d'acide citriipie au titre d'un centième, et si les vaisseaux sanguins de ce vis- cère ne contenaient que de l'eau pure, il y aurait une absorption ra[)idc du li({uide acidulé qui serait transporté en grande ptuHe

(1) Dans une série cl'expéi-iences attribue la faible action ondosmo-

comparatives , l'élévation de la co- tique du sénini à la présence du clilo-

lonne endosmoniélrique n'a pas dé- lure de sodium, qui fort souvent diini-

passé 39 millimètres avec le sérum nue la puissance osmogène des sels

de Bœuf, et a atteint environ 200 basiques, tels que le phospliate de

avec une dissolution de pliosphate de soude (a). soude à 1 pour 100. M. Graham ("2) Voyez ci-dessus, page HiH.

(a) Graliani, On Os)tioHc Force {l'Iiilos. Truns., 1854, p. 209).

V. 13

19/1 ABSOr.PTION.

de la cavité gastrique dans rintérieiir des veines; à plus forte raison, quand ces derniers vaisseaux sont occupés par du sang, le incfue phénomène devra-t-il se produire. L'acide clilor- hydrique détërn>ine aussi avec beaucoup d'énergie l'osmose négative, c'est-à-dire le passage du liquide à travers la mem- brane perméable vers l'autre liquide réagissant, et nous verrons bientôt que cette circonstance a une grande influence sur l'activité de l'absorption dans certaines parties du corps com- parées à d'autres, et notamment sur le rôle de l'estomac dans cette fonction ; mais en ce moment je ne cherche qu'à étabbr les principes qui doivent nous guider dans l'appréciation des phénomènes de ce genre, et par conséquent je ne m'arrêterai pas sur les faits de détail. innuencc § 5. La connaissancc des lois qui régissent le dévelop- tiiisang. pcment des phénomènes osmoliques nous [lermet également de prévoir comment les variations dans la composition du sang doivent influer sur la rapidité avec laquelle l'absorption en général , ou l'absorption de certaines substances en particulier sera effectuée.

Ainsi le pouvoir osmogène du sang est en grande partie aux matières albuminoïdes dont ce liquide est chargé. 11 en résulte donc que, toutes choses étant égales d'ailleurs, l'ab- sorption déterminée par cette force sera d'autant plus rapide que le sang contiendra une moindre proportion d'eau. Cet abaissement dans la quantité relative d'eau peut être déter- miné de diCférentes manières. Ainsi, il peut être l'effet d'une évaporation abondante qui , en enlevant de l'eau aux tissus superficiels de l'organisme, rend ceux-ci plus aptes à en sous- traire aux fluides en circulation dans leur intérieur. Il peut être amené aussi par l'établissement d'une excrétion osmotique on autre dans nn point déterminé de l'économie ou par une production surabondante de rd)rine, ainsi qu'on en voit dans les états inflammatoires, et par conséquent, dans tous ces cas,

CIRCONSTANCES QUI INFLUENT SUR CETTE FONCTION. 195

nous devons nous attendre à trouver que l'activité tbnction- neiie de l'absorption augmente. En un temps donné, une même surface fera donc pénétrer dans l'appareil circulatoire un volume d'eau et de matières étrangères d'autant plus considérable, que ce liquide tiendra en dissolution une plus grande proportion de matières solides.

La composition chimique du sang devra exercer une iniluence analogue sur les produits de l'absorption, quand celle-ci est la conséquence du pouvoir dilTusif des substances en dissolution dans le liquide en contact avec la surface externe des vais- seaux ou avec les tissus situés entre ces organes et l'extérieur du corps. Or la diffusion, comme nous l'avons vu, joue un rôle iuiportant dans le mécanisme de cette fonction ; et moins le sang contiendra de molécules de la nature de celles dont est formé le corps qui tend à y pénétrer de la sorte, plus les particules de celui-ci trouveront de facilité pour y pénétrer. Par conséquent, toutes choses étant égales d'ailleurs, l'entrée d'une substance diffusible dans l'appareil circulatoire sera d'autant [jIus facile, qu'il y aura moins de cette même substance préexistante dans le sang en contact avec la surface opposée de la membrane absorbante. Ainsi, quand toutes les autres conditions du phé- nomène restent invariables, les substances qui ne se trouvent pas dans le sang doivent y arriver plus vite que celles dont ce liquide est déjà chargé, et doivent en général y pénétrer d'au- tant [ilus ra[)idement, qu'elles se trouvent en plus forte propor- tion dans le liquide qui les fournit à l'organisme (1).

§ 6. Les principes fournis par l'étude des phénomènes infi»cnee osmotiques nous permettent également de comprendre (juel drciaZIa'.

(l) Ainsi, dans les expériences sur dilé avec laquelle cetlo subslauce j)as-

i'absorption du sucre dans le canal sait de l'intestin dans le santj éiait

digestif dont il a déjà été question, proportionnelle à lu richesse de la

M. von Becker a trouvé que la rapi- dissolution eniployée (a).

(a) Von Beckei', Op. cit. (Zeitschrift fiir wissenschaftl. Zonlo'jie, 1854, I. V, p. ibG).

19G AiisoumoN.

genre d'iiiiluence le muavemeiilcireulatoiredu sang doil avoir sur les actions moléculaires dont dépend en grande partie le travail de Tabsorplion. Le renouvellement continuel de la {)or- tion du sang qui est en contact direct avec la face interne de la membrane absorbante a pour effet de maintenir constant le pouvoir osniogône de ce tluide, ainsi que son degré d'aptitude à recevoir dans sa masse les molécules qui tendent à y pénétrer pour obéir à la force diffusive dont elles sont douées. Si le sang était en repos, comme l'est le liquide osmogène dans le réservoir d'im endosmomètre ordinaire, la couche en conlact direct avec la membrane absorbante perdrait de son activité comme agent endosmotique, à mesure que le liquide extérieur y arriverait, et bientôt ne continuerait à attirer celui-ci que parce qu'elle céderait aux couches de sang situées plus loin une porlion des matières dont elle s'était chargée. La rapidité du courant endosmoticpie se trouverait donc subordonnée à la facilité avec laquelle ce transport s'effectuerait dans le sein du lluide nourricier, et tout ce que je viens de dire relative- ment à l'alfaiblissement progressif des effets de l'endosmose est également a|»plicable à l'arrivée des molécules du dehors, par suite de leur répulsion mutuelle dans le sein du licpiidc elles sont en dissolution. Mais le mouvement circulatoire détermine à chaque instant le renouvellement de la portion du sang qui sert à la fois comme agent osmogène et connue menstrue j>our les molécules en voie de dilfusion , et par conséquent ce mouvement maintient toujours intacte la ])uis- sance de réception , ainsi que la puissance attractive de cette humeur, tant que sa masse tout entière n'a pas été modifiée dans sa constitution chimique par les effets de cette absorption locale.

Si ces conclusions avaient besoin de nouvelles preuves pour être admises parles i)hysiologistes, je citerais ici riniluence que l'agitation du bain extérieur exerce siu' la valeur des [troduils

C1RC0>JSTANCES QV\ INFLUENT SUR CETTE FONCTION. 197

de l'endosmose, lorsqu'on emploie le sérum du sang pour dé- terminer le déplacement d'une dissolution saline dans des vases inertes. Il arrive souvent dans ces expériences, lorsque l'ap- pareil est en repos, que le courant endosmotique, après avoir duré quelque temps, s'arréle, mais reprend dès que l'on agite le liquide osmogène de façon à disperser dans la masse tout entière de celui-ci la quantité de l'autre liquide qui avait déjà pénétré dans les couches en rapport immédiat avec la membrane osmotique, et qui avait dilué ces couches au point de les rendre inactives (1). Ainsi, la rapidité du torrent circulatoire est une circonslance

(1) Comme exemple de la recru- descence de l'endosmose délerminée par le renouvellement des portions du bain en contact avec la membrane os- motique, je citerai rexpérionce sui- vante, faite par M. Poiseuille. Ce phy- siologiste a reconnu qu'en plaçant dans son endosmomètre une dissolu- lion de phospiiate de soude au litre de 1 pour 100 et en plongeant l'in- strument dans un baii\ de sérum, il y avait osmose de la dissolution saline vers ce dernier liquide, et par consé- quent abaissement du niveau de la colonne fluide intérieure ; tandis qu'a- vec une dissolution au litre de à pour 100, l'endosmose s'établissait en sens inverse, c'est-à-dire au profit de la dis- solution saline, et faisait monter celle-ci dans l'endosmomètre. Dans ce der- nier cas, il vit le liquide monter jus- qu'à une hauteur de oU millimètres; mais, au bout de quelques heures, l'appareil étant dans un repos com- plet, la colonne commença à redes- cendre cl ne se trouva bientôt qu'à 3 millimètres au-dessus du bain ex- térieur. Alors il lui suffit d'agiter celui-ci pour faire renaître le mouve-

ment ascensionnel à raison d'abord de [\ millimètres par heure. Ces varia- tions ne dépendaient donc pas de changements survenus dans la résis- tance hydrostatique de la membrane, mais de changements dans la direction du courant osmolique qui se portait d'abord du sérum vers la dissolution concentrée de phosphate de soude, et qui se ralentissait à mesure que les couches adjacentes de cette dissolu- lion s'aflaiblissaient par suite de l'ar- rivée du sérum, et qui changeait de di- rection quand, par suite des échanges efl'ectués de la sorte et du transport d'une certaine quantité de phosphate dans la portion voisine du bain formé par le sérum, l'aclion osmogénique de ce dernier liquide était devenue apte à balancer celui de la dissolu- tion affaiblie. Mais ces changements de densité étaient locaux , et les effets qui en résultaient ont cessé lorsqu'en agitant le bain, on a dissé- miné les portions moLiifiées de l'un et de l'autre liquide dans la masse entière de chacun d'eux, ce qui a ré- tabli les rapports de pouvoir osmo- lique dont résultait au commencemeni

(le

la membrane absorbante.

198 ABSORPTION.

(jiii fnvorise le jeu des forces osmoti{}iies et qui tend à activer l'absorptiou, indépendamuient de rinfiuence mécanique que ce mouvement de translation peut avoir sur l'arrivée plus ou moins facile des courants endosmotiqucs dans la colonne sanguine et sur le mode de répartition des matières absorbées dans les par- ties éloignées de l'organisme, circonstances sur lesquelles nous aurons bientôt à revenir. iMiiiRnco § 7. D'après ce (lue nous savons des effets osmotiques,

Jp la disposition t . i >i '

nous pouvons comprendre aussi comment les propriétés ana- tomiques et chimiques des membranes par lesquelles l'ab- sorption j)hysiologique s'effectue peuvent exercer une grande intluence sur le degré de puissance avec lequel cette fonction s'accomplit.

Le raisonnement, aussi bien que l'expérience, montre ([ue l'absorption, de même que l'endosmose, doit, toutes choses étant égales d'ailleurs, donner un produit d'autant plus grand, qu'elle se fera par l'intermédiaire d'un diaphragme dont la surface de contact avec les liquides réagissants sera plus étendue (1).

L'une de ces surfaces de contact est constiUiée parla paroi

riude^rc (jgg vaisseaux dans lesquels le sang circule, et par consé-

quent, en cas de parité des autres conditions, l'absorption sera

Influence

do- du tissu absorbant.

de Pexpérience l'afllux du sérum dans le réservoir occupé par le phosphate de soude («).

M. Liebig a montré également que si de l'eau est renfermée dans une anse d'inleslin dont la surface extérieure baigne dans une dissolution saline, le passage du premier do ces liqm'des

dans le second devra i-e faire plus ra- pidement si celui-ci est en mouvement que s'il était en repos, car cela est une conséquence du rapport qui existe entre le degré de richesse de la solu- tion osmogène et la grandeur des elTclsosmotiqucs qu'elle détermine ;fe). (]) Voyez ci-dessus, page 128.

(o) Poiseuilic, Recherches expérimentales sur les médicaments {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1844, t. XIX, p. 'J'.J7).

(6) Liebicr, Heclierclies sur Qticlqucs-nnes des causes du mouvement d(s liquides dans l'orga- nisme animal (Ann. de chimie et de physique, '■i' série, 1849, t. XXV, p. 413).

CIRCONSTANCES QVl INFLUENT SUR CKTTE FONCTION, 109

d'autant plus rapide, que l'organe qui l'eflectuc est plus vas- culaire.

L'autre surface, c'est-à-dire la surface libre du tissu dans imincnco

de l'élencliio

l'épaisseur dunuel sont creusés les vaisseaux sanauins dont ciciasmtace

' 1 ^ libre.

je viens de parler, est celle en rapport avec la substance absor- bable. Par conséquent, toute disposition qui tend à agrandir cette surface sera favorable tu développement de sa puissance absorbante, et nous devons nous attendre à voir la Nature adopter dans la structure des organes des dispositions anato- miques conformes à ce principe (1 ). J'ai déjà eu l'occasion de montrer qu'effectivement c'est un des procédés mis en usage pour perfectionner l'appareil respiratoire, qui est un instrument d'absorption, et, lorsque nous étudierons d'une manière spé- ciale le mode d'introduction des produits de la digestion dans la profondeur de l'économie animale, nous verrons aussi que les surfaces en contact avec ces matières, deviennent d'autant plus étendues, que la fonction dont elles sont chargées doit être plus active.

Il est également aisé de comprendre que la puissance absor- influence

^ , ^'^ '■* densité

bante d'une surface doit être en rapport avec le degré de per- «im 'issus. méabilité du tissu qui la constitue et l'épaisseur des couches poreuses que les liquides ont à traverser poiu^ passer de l'exté- rieur jusque dans les vaisseaux sanguins adjacents.

(l) Les expériences (le M. von Bec- lube digestif (:;) ; mais il me par;iît ker, citées ci dessus , paraissent ne prol)aijle que cela devait lenir à ce pas s'accorder avec celte proposition, que, dans tous les cas, la surface ab- cur il a trouvé que la quanlilé de sorbante était sutTisanlc pour fournir sucre absorbée était, dans certaines à la masse du sang en circulation la limites, à peu près la même quand quantité de molécules de sucre né- celte substance était en contact avec cossairc pour établir l'équilibre entre une étendue considérable de la mem- ce liquide et la dissoluliou sucrée brane muqueuse intestinale ou circon- contenue dans l'intestin, scrite dans un tronçon assez court du

(a) Von Becker, Op. cit. {Zeitschrift. fur wissenschaftl. Zool., 1854, t. V, p. 148).

200 ABSORPTION

Obstacle Ainsi que je l'ai déjà dit et que je le montrerai plus en détail par iv-pMerme. dons nuc autfe parlie de ce cours, le tissu épiihéiique qui revêt extérienrenient la peau aussi bien que les muqueuses, et (|ui tapisse de la même manière les vaisseaux irrigatoires, ne renferme pas de vaisseaux sanguins dans son épaisseur, et n'offre que peu de lacunes confluenles qui puissent remplir le rôle de canaux capillaires pour le passage des liquides, tandis que le derme et les autres tissus sous-jacents sont à la fois (rcs vasculaires et d'une structure lacunaire, car ils se composent de fibrilles ou de lamelles qui se rencontrent sous divers angles et laissent entre elles des espaces vides en communication les unes avec les autres. La présence du tissu é[)ithélique entre les matières qui doivent être absorbées et les vaisseaux ces substances ont à pénétrer, est donc un obstacle à l'absorption de celles-ci, et cet obstacle doit être d'autant plus grand, que la couche ainsi con- stituée est plus épaisse et ])lus dense.

Or, il existe à cet égard des différences très grandes dans les diverses parties (|ui sont aptes à recevoir le contact des matières dont rabsorj)tion est voulue, et par conséquent il y a encore une source d'inégalité dans la puissance absorbante fie ces surfaces.

En étudiant , dans la dernière Leçon , les phénomènes de

Influence

qunnbrinëi'n capillarité et les mouvements osmoliques, nous avons vu que ib'orbanies. préscncc dc quantités très petites de certaines substances sur les parois des cavités étroites destinées à recevoir un liquide peut avoir une inOuence très considérable sur les effets de l'action attractive exercée sur celui-ci par ces mêmes parois. Nous pouvons donc prévoir que si les choses se passent dans l'organisme vivant connne dans nos appareils osmométriques, la puissance absorbante d'une membrane pourra varier suivant (jue celle-ci se trouvera lubrifiée par une humeur de telle ou telle nature, et ipie la uiatière dont elle sera imbibée pourra être un obstacle à l'infi-oduclion de certains lifjuides, tout en

PAR LES VOIES RESPIRATOIRES. 201

favorisant l'entrée d'autres substances (1). Ainsi, une mem- brane déterminée, si elle vient à être mouillée par une bumeur alcaline, n'agira pas toujours de la même manière que si elle était imprégnée d'un acide, et la présence d'une quantité plus ou moins considérable de graisse dans son tissu modifiera aussi son mode d'action comme organe d'absorption. Par conséquent, dans l'examen des phénomènes dont l'étude nous occupe ici, il faut avoir égard, non-seulement à la texture des parties, mais aussi à la nature des sécrétions dont les surfaces absorbantes peuvent être le siège (2).

En tenant compte des circonstances anatomiques et chimiques ^,^^";;"J™;^ dont je viens de parler, on peut en général juger assez exacte- absorbamo ment de la puissance absorbante d'une partie déterminée de l'or- -uvers organes. ganisme.

§ 8. Ainsi chez l'Homme, de même que chez les Animaux p^,t"''nli^". plus ou moins inférieurs, l'appareil respiratoire est de toutes les parties de l'économie celle qui réunit au plus haut degré les conditions de perfection comme instrument absorbant, et celle aussi l'introduction des matières étrangères jusque dans le torrent de la circulation est le plus facile et le plus rapide.

C'est pour cette raison que des substances gazeuses et des vapeurs délétères qui ne peuvent exercer leur intluence nuisible (|u'à la suite de leur absor[)tion et de leur transport par le torrent circulatoire dans les profondeurs de l'organisme, déter- minent souvent avec une grande promptitude des accidents graves, et même la mort, quand elles arrivent en contact avec la surface respiratoire.

J'ai déjà eu l'occasion de dire quelques mots des empoison-

(1) Voyez ci-dessus, page l/i8. tics différences qui se manifeslenl sou-

(2) Les variations qui se produisent vent dans le pouvoir absorloant d'une dans les qualités des liquides sécrétés même membrane , quand les autre par les surfaces absorbantes me pa- conditions physiques et physiologiques laissent être une des principales causes semblent être restées identiques.

^O^ ABSORPTION

nements qui peuvent être produits de la sorle par la pré- sence d'une pelife quanlité de quelque gaz toxique dans l'air que nous respirons (1) ; mais pour mettre mieux en évidence la rapidité avec laquelle des vapeurs et des gaz sont absor- bés par la surface des cellules pulmonaires , je citerai ici quelques aulres exemples d'une mort foudroyante due à cette cause.

L'acide cyanbydrique est un poison violent qui, introduit dans le torrent de la circulation, exerce principalement son influence délétère sur le système nerveux, et qui détruit l'irrita- bilité des muscles, il n'agit donc qu'après avoir été absorbé, et ses effets sont d'autant plus terribles, que son absorption s'ef- fectue plus rapidement. Or, il suffit d'approcber des narines d'un Cbien ou d'un Lapin un flacon ouvert se trouvent quelques gouttes de cette substance à l'état de pureté, pour que la vapeur qu'elle dégage tue l'Animal en quelques secondes (2).

(1) Voyez tome I, page hM.

(2) Dans une expérience dont je me souviens d'avoir clé témoin, Magendie ayant mouillé le bout d'une baguette de verre avec de l'acide cyanbydrique anliydre étendu d'un peu d'alcool, et l'ayant introduit brusquement dans la gueule d'un Cbien vigoureux, vit l'a- nimal faire aussitôt quelques grandes inspirations, et au bout de quelques secondes tomber mort. Le même poi- son, appliqué sur la conjonctive, pro- duit des ellets semblables, mais moins rapidement, et, introduit dans la ca- vité péritonéale ou déposé dans le tissu conjonclif sous-cutané, il tue plus lentement. Enfin, mis eu contact avec la peau, il se dissipe souvent en

vapeur avant que d'avoir été absorbé en quantité suffisante pour déterminer des accidents graves (a). !\Iagendie cite une autre expérience dans laquelle l'Animal lomba comme foudroyé , parce qu'on avait passé rapidement sous ses narines un flacon débouché contenant de l'acide cyanhydrique anhydre (h).

Il est aussi à noter que le curare, dont l'absorption par la poau ou par la muqueuse dig^stive n'est pas assez rapide pour donner lieu à des sym- ptômes (rempoisonnement.di'termine promptement la mort quand il arrive en contact avec la surface pulmo- naire (c).

(a) Magendie, Recherches physiologiques et cliniques sur l'emploi de l'acide prussique ou hydro- cyanlque. I;i-8, l'aris, ISlU, p. 4.

(b) MagcnrJie, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, t. I, p. i3i.

(c) Cl. Bernard, Cours de médecine : Leçons sur les substances toxiqties,[>. 287.

PAR LES VOIF.S UKSPHlVl'OinES.

'203

o

Plus d'un accident luneste a é(c causé par l'absorption pulmo- naire, et je ne saurais mettre les élèves de nos laboratoires trop en garde contre les dangers invisibles qu'ils affrontent souvent sans les connaître, quand ils respirent un air cbargé de vapeurs toxiques. C'est de la sorte que la science a été privée d'un des chimistes les plus distingués de Munich, Gchlen (1). Ce savant s'occupait de l'étude d'un gaz récemment découvert, et composé d'hydrogène nni à l'arsenic; voyant que le dégagement ne s'en faisait pas bien, et pensant rpie son appareil perdait, il flaira les bouchons pour reconnaître les fuites à l'odeur qui se répan- drait. La quantité d'hydrogène arséniqué attiré de la sorte dans ses poumons devait être bien faible, et cependant en moins d'une heure il commença à en ressentir l'atteinte mortelle, et, après avoir langui quelques jours en proie à de vives souf- frances, il périt victime de son imprudence. Il ne faut pas croire que les gaz délétères ne soient redoutables que lorsqu'on les respire en proportion suflisante pour en être asphyxié ; l'hy- drogène arséniqué n'estpas le seul fluide aériforme qui, absorbé par les poumons, même en quantité peu considérable, puisse être un poison mortel (2), et toutes les vapeurs qui se trouvent

(1) Ce savant s'était fait connaître par des recherches sur l'cther et sur diverses questions de chimie minérale. Il publia pendant plusieurs années, à Berlin, un journal de chimie intitulé d'abord Neiies allgemeine.s Journal der Chemie (1803 à 1806), puis Jour- nal fur der Chemie und Physik (1806 à 1810). Il mourut empoisonné par l'hydrogène arséniqué, en 181 5 (a).

(2) 11 est d'observation vulgaire que l'ivresse peut être causée par

l'action de vapeurs alcooliques répan- dues dans l'air que l'on respire. Ce fait a été constaté expérimentalement par M. Piollet (b) , et s'explique par l'absorption pulmonaire, car l'alcool ne délermine cet état qu'après avoir été introduit dans le torrent de la cir- culation et porté jusqu'au cerveau.

L'absorption de la vapeur d'iode par les voies repiratoires a été con- statée expérimentalement par M. Pa- nizzn (c).

(a) Scliweigger, Zu Gehlens beiliegcndem DUdnisse (Jouni, fiïv Chemie und Physik, 1815, t. XV. p. 1, el Annals of Phtlosophy, isiti, t. Vlll, p. 401).

(b) Piollet, De l'absorption pulmonaire (Archives générales de médecine, 1" série, 1825, t. IX, p. 6H).

(c) Panizza, Dell'assorbemenlo venoso (Mem, dell'Isiit. Lomb., 4843, t. I, p. 181).

20/l ABSORPTION

mêlées à l'air peuvent arriver avec une grande rapidité jusque dans notre sang, quand nous les respirons (1). C'est par suite de cette absorption que beaucoup de matières odorantes déter- minent souvent dans notre organisme un trouble caractérisé par de la céphalalgie ou d'autres accidents nerveux, et, dans certains cas, il est facile de constater que la matière volatile a pénétré dans la substance de notre corps, car, après y avoir séjourné quelque temps, elle est rejetée au dehors avec l'urine et donne à ce liquide une odeur particulière (2). Du reste, celte

(1) Ainsi, on connaît plusieurs cas la mort a été déterminée par l'ai> sorpUon du gaz nitreux par les voies respiratoires sans qu'il y ait eu as- phyxie («).

{'2) On sait que la vapeur odorante de l'essence de téréhcnthine pénètre fa- cilement dans l'économie par les voies respiratoires, et manifeste sa présence dans l'urine par l'odeur de violette qu'elle communique à ce liquide. C'est en majeure partie de l'absorption de celle substance par les voies respira- toires que dépendent les accidents déterminés souvent par le séjour dans un appartement nouvellement peint à l'huile ou au vernis ordinaire.

Il faut attribuer aussi à l'absorption des matières odorantes des tleurs par les voies pulmonaires les accidents plus ou moins graves, tels que cépha- lalgie , nausées et même syncope , que le voisinage de certaines plantes détermine chez quelques personnes. Les essences extraites des mêmes fleurs produisent ces effets avec beau- coup plus d"intensilé, parce qu'elles

dégagent des vapeurs semblables en plus grande abondance. Orfila a réuni plusieurs exemples curieux d'acci- dents de ce genre produits par l'o- deur des roses ou d'autres fleurs {b), et, d'après mon expérience person- nelle , je puis ajouter que parfois l'existence d'une très petite quantité d'essence de citron dans l'air confiné suffit pour déterminer des symptômes nerveux bien caractérisés.

Depuis longtemps j'emploie avec beaucoup de succès , pour détruire les larves rongeuses dans les collec- tions enlomologiques, un procédé qui repose sur l'absorption de vapeurs par les organes respiratoires. La ben- zine introduite de la sorte dans l'éco- nomie est un poison pour les Mam- mifères et les Oiseaux, mais agit avec bien plus de force sur les Insectes et les fait périr promptement (c). D'a- près mes conseils, M. Doyère a mis en usage des moyens analogues pour détruire les Charançons dans les blés attaqués par ces Insectes, et ses expé- riences montrent que la vapeur de

(a) Voyoz Orlila, Traite des poisons, t. I, p. 15^2 et suiv. (l'.lil. Ho 18-27). {b) Orlila, Traité des poisotts, iSiT, t. II, p. 4.(57.

(c) Milnc Edwards, Sur l'emploi de la benzine pour la destruction des Inseetes {Flulletin de la Soriétt' centrale d'agriculture, 1852, t. VIII, i>. •40(1).

t'AH LKS VOŒS Kfcl^l'IKATOll'.KS. tîOS

grande puissance absorbante est bien plus utile ([u'elle n'est nuisible; c'est elle qui rend nos poumons aptes à satisfaire aux besoins de la respiration, travail dont l'activité est dans un ra[)port nécessaire avec celui de tous les autres instruments pbysiologiques qui constituent notre organisme, et, indéi)en- damment de ce service normal, c'est encore elle qui rend possible une des plus grandes merveilles de l'art médical : la production de l'état d'anesthésie à l'aide duquel l'opé- rateur préserve de toute souffrance physique et morale le ma- lade dont il entaille les chairs. En effet, si le chloroforme ou l'éther introduit sous la tbrme de vapeur dans nos poumons nous plonge dans une sorte de sommeil durant lequel la faculté de sentir est suspendue, c'est que la matière diffusible ainsi répandue dans l'appareil respiratoire passe rapidement dans le sang en circulation, et arrive ainsi en contact avec certaines [)arties du système nerveux dont elle interrompt l'action. L'é- tude de ce beau phénomène serait prématurée en ce moment; mais nous aiu^ons à y revenir, car nous y puiserons d'utiles lumières, et même, en fùt-il autrement, nous ne pourrions passer avec indifférence à côté d'une question physiologique qui touche de si près aux intérêts de l'humanité (1).

sulfure de carbone remplit toulcs les Hier tïu faite en I8/16, à Boston, par

conditions voulues pour assurer la M. M. Jackson, professeur de chimie,

conservation des céréales contre les et Morton, chirurgien -dentiste (h).

attaques des Insectes (a). L'emploi du chloroforme fut substitué

(1) On sait que la découverte de avec avantage à celui de l'éther, en

la production d'un état d'anesthésie 1867, par iM. Simpson, professeur

par l'inhalation de la vapeur d'é- d'accouchements à Edimbourg (c). Au

(a) Doycre, Méinrnve sw l'emploi des aiiesthésiquespour la destniclion des Insectes qui dcvorenl les grains [Comptes vendus de l'Acadànie des sciences, d85~, l. XLIV, p. 993).

(b) Jaclcson, De l'inhalation de réthcv pour suspendre la sensibililé che-^ des personnes sou- mises à une opération chirurgicale (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 18i7, t. XXIV, p. 74).

Voyez aussi ttoux, Rapport sur les prix de médecine et de chirurgie [Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1850, t. XXX, p. 241).

(c) Simpson, Hislorical Researches regarding Ihe Superinducfion of Insensibilitg to Pain in Surgical Opérations, and Announcemcnt of a New Anœslhelic Agent, ]LA\n\sw£\\, \%M (voy. Monthbj, Journ. of Med. science, 1847, t. Vlll, i'. 451).

Absorption par la peau

chez les Animaux.

20G ABSORPTION

Quant à l'absorption rapide des liquides par la surface pul- monaire, j'en ai déjà donné des preuves (1), et je me bornerai à ajouter ici que, sous cette l'orme, les matières étrangères arri- vent ainsi plus rapidement dans le torrent circulatoire que par toute autre partie de l'organisme (2).

§ 9. La peau est aussi une des voies par lesquelles l'ab- sorplion peut s'eflectuer; mais cette membrane tégumentaire est spécialement destinée à protéger les parties sous-jacentes de l'organisme, et, pour bien remplir cette fonction, elle doit offrir une épaisseur et une densité qui sont peu favorables à la

sujet du mode d'action de ces sub- stances sur le système nerveux, je ren- verrai aux pubHca'.ions de MM. Flou- rens, Longet, clc. (a).

(1) Voyez ci-dessus, page 3.

(2) Ainsi, dans une des expériences faites par Lebkiichner, une dissolution de cyanoferrure de potassium fut in- jectée dans les voies aériennes d'un Chat, et, au bout de deux minutes, le sang tiré de la carotide de l'animal donna, avec un sel de fer, un préci- pité de bien de Prusse {h). Mayer avait obtenu précédemment un résul- tat fort semblable (c).

Magendie a constaté aussi que la teinture alcoolique de noix vomique, injectée dans le poumon d'un Chien, est absorbée avec une grande rapi- dité (rf).

EnOn M. Ségalas a reconnu que 3 centigrammes d'extrait de noix vo- mique, dissous dans GO gram. d'eau, produisaient la mort en deux minutes quand il injectait ce poison dans les voies respiratoires d'un Chien ; 10 cen- tigrammes du même extrait ne pro- duisaient aucun effet, étant portés dans l'estomac d'un autre Animal de même espèce, et li gros (c'est-à-dire plus de 7 grammes et demi) de ce poison, ayant été injectés dans la ves- sie, ne déterminèrent des symptômes d'empoisonnement qu'au i)0ut de vingt minutes (e).

De l'indigo, du safran, de la rhu- barbe et d'autres matières colorantes injectées dans les poumons par Leb- kiichner n'ont pas été reconnus dans le sang (/").

l'a) Flourens, S'oles toucliant les ejfets de l'inhalation éthérée sur la moelle épiniére, etc. {Comptes rendus de VAcadcmic des sciences, 1847, t. XXIV, p. HH, ii53, 340);

Longet, Expériences relatives aux effets de l'inhalation de l'éilier snlfuriiiue sur le sys- tème nerveux, ln-8, Paris, 1847.

(&) Lebkiichner, Sur la perméabililc' des t'isstis vivants {.\rcli. ijcii. de méd., 1" série, 1825,

t. VII, p. 432).

(c) Mayer, Op. cit. (Mecliel's Deutsches Archiv fïir die Physiologie, 1817, t. III, p. 4"J(3).

(rf) MiiL,'enilie, l.rrons sur les pliénumèiies physiques de la vie, t. I, p. 32.

(e) Ségalas, Note sur quelques points de pltysioloyie {Journal de physiologie de Ma'jcndie, 1824, t. IV, p.'iiSs').

{/■) Lebliuchner, Op. cit., p. •434.

PAR LA. PEAU. 207

réalisation des échanges osmotiques. Sous ce rapport, on y remarque cependant de grandes différences chez les divers Animaux. Tantôt elle est en totalité ou en majeure partie revêtue d'une couche épidermique qui acquiert un haut degré de développement, et qui se consolide par le dépôt de ma- tières calcaires ou d'apparence cornée dans son épaisseur, de façon à constituer une armure presque imperméable, telle que la coquille des Mollusques et le squelette extérieur des Crustacés ou des Insectes. D'autres fois cette membrane se recouvre de plaques osseuses, d'écaillés ou d'appendices cor- nés qui affectent la forme de plumes ou de poils, et qui la préservent du contact direct des corps étrangers ; dans tous les cas, les surfaces ainsi revêtues ne se laissent que très difficilement traverser par les lluides adjacents (1). Mais, chez d'autres Animaux , dans certaines régions du corps , la peau n'est garnie que d'une couche mince de tissu épithélique, et les zoologistes disent qu'elle est nue, bien que sa partie

(1) L'existence d'écaillés ne rend pas la peau impénétrable à l'eau -, mais il est probable que l'absorption de ce liquide a lieu principalement par les espaces situés entre ces pla- ques solides.

L'absorption de l'eau par la peau écailleuse des Lézards a été prouvée par les expériences de W. Edwards. Un de ces Reptiles, qui avait éprouvé des pertes considérables par évapora- tion, fat assujetti dans un tube ouvert aux deux bouts; on plongea alors dans un bain la moitié postérieure de son corps, et au bout d'un certain temps on reconnut que son poids avait nota-

blement augmenté {a). Le même phy- siologiste a constaté des phénomènes analogues chez les Poissons (6).

M. Longet cite aussi des expé- riences dans lesquelles il a déterminé des accidents tétaniques chez des Couleuvres, des Orvets et des Lézards en appliquant une dissolution de chlorhydrate de strychnine sur la sur- face écailleuse de la peau du ventre de ces Animaux ; mais l'absorption du poison ne se faisait que très lente- ment, et les symptômes de l'intoxi- cation ne se manifestèrent qu'au bout de quelques heures (c).

(a) VV. Edwards, De l'iii-lluence des agents physiques de la vie, p. 34(j.

(b) Idem, Op. cit., p. liJ3.

(c) Longet, Traité de physiologie, 1859, I. I, p. 2'J5.

"208 AUSORI'TION

tbndaineutale et vasculaire, c'est-à-dire le demie, ne se trouve pas à découvert. Uaus les parties disposées de la sorte, Tab- sorption est moius diflleile que dans les parties mieux cuiras- sées ; mais, sous ce rapport, il y a une distinction importante à établir, suivant (|ue les parties ainsi constituées sont habituel- lement en contact avec l'air atmosphérique ou baignées par l'eau. Chez les Animaux aquatiques à peau nue, le tissu épider- mique ne se consolide que peu, se détache à mesure qu'il s'accroît, et ne l'orme que rarement autour du corps une gaine épaisse et* dense, tandis que chez les Animaux terrestres il se dessèche et se consolide davantage, au point de constituer une tunique externe résistante et fort peu perméable. Dans le premier cas, la surface tégumentaire est généralement douée d'une puissance absorbante assez grande: ainsi chez une Limace ou une Grenouille, par exemple, la peau livre facilement passage aux liquides que les forces osmotiques tendent à faire pénétrer dans l'intérieur de l'organisme (1). Mais, dans le second cas, il en est tout autrement, et l'épiderme oppose de très grands ob- stacles à toute introduction de ce genre (;2). Chez l'Homme, par

(1) Au sujet de Tabsorplion de Fcau par la surl'acc de la peau clicz les Gre- nouilles, je renverrai aux expériences de Townson {a) et de W. Edwards. Dans certaines circonstances, ces Ba- traciens ont gagne! ainsi en une heure environ 1/lS" de leur poids (h).

Des faits du même ordre ont été constatés par Blufl' (c).

Spallanznni a vu que cliez les Lima- çons ral)s(»rption cutanée est remar- quablement active; dans une de ses

expériences, l'augmenta lion de poids déterminée de la sorte fut égdle à environ les deux tiers du poids initial de l'Animal (f/), Biirdach cite aussi des expériences de Nasse , dans les- quelles des Limaces placées dans du papier buvard humide augmentèrent en poids d'environ un tiers dans l'es- pace d'une demi-heure (e).

(2) Il est h noter que le passage de l'eau à travers l'épiderme est encore plus diflicile de dedans en dehors que

(a) Townson, Observaliones phys'wloijica: de Amphibiis, 1795, p. 25 et .<uiv. (h) W. Eiiwnrds, Influence des aijenls physiques sur la vie, p. 98 et suiv., t:ib. XI, p. 590, etc. ((■) BlutV, Disserl. de absnrplwne cutis (cilé p:ir Bnrdadi, Trailc de physiologie, I. IX, p. 15). (d) S\iMm7.;m\, Mémoires surin respiration, [>. 137.

(c) N;ifso, L'ntcrsuchungcmur l'hyswlO(jie, 1. 1, ]i. -482 (d'ïiiirès Bunlacli, Trnité de physiologie, I.IX.P. 15).

PAU LA. PtiAi;. iîO'J

cxeiiiitle, la poaii, daus son élat normal, n'absurbo (|uo très leiiteiiiLMit ; mais, [luur peu ({ue sa timique cpidermi(iiie vieillie à être enlevée, el le derme, c'est-à-dire la porliou vasculaire du système tégiimentaire, mis à nu, les lluides en conUiet avec sa surface externe pénètrent facilement dans sa substance caverneuse, et passent avec rapidité jusque dans les courants sanguins dont se.s vaisseaux sont le siège (i).

de dehors eu dedans, el c'est pour celte raison que la sérosité accumulée sous cette membrane par l'elTct de la vésicalion ou de la brûlure ne s'en échappe qu'avec une lenteur extrême. Celte diflérence entre les propriétés absorbantes des deux surfaces de l'épi- derme a été bien démontrée pnr \!a- gendie. Ce pliysiologiste a vu que si l'on renferme une certaine quantité d'eau dans un morceau de peau dispo- sée en manière de bourse, le liquide s'échappe au dehors , et s'évapore assez rapidement quand celui-ci est en contact avec la surface externe de l'épiderme ; tandis que dans le cas la face interne du derme était tournée en dedans, l'eau, après avoir imbibé cette membrane , s'accumulait solis l'épiderme et le détachait, mais ne la traversait que fort diflicileinent, et restait emprisonnée pendant plusieurs jours (a).

(1) Les physiologistes, et surtout les médecins, se sont beaucoup occupés de la question du pouvoir absorbant de la peau de l'Homme dans son élat normal. Je reviendrai bientôt sur ce qui est relatif à l'introduction des ma- tières étrangères sous i'iniluence de la pression (des frictions, par exemple) ;

mais, au sujet de l'absorption spon- tanée des liquides par cette voie , les opinions ont été fort partagées, l'our montrer que l'edu peut arriver ainsi dans l'inlérieur de l'organisme, on s'est appuyé d'abord sur des preuves indirectes seulement : par exemple, l'apaisement de la soif par le fait de l'immersion du corps dans un bain, fait que beaucoup de per- sonnes ont pu remarquer, et dont la médecine a pu tirer parti (6j; mais quelques auteurs pensaient que les ef- fets produits par l'immersion du corps dans l'eau dépendaient seulement de la diminution, ou de i'mlerruption de la déperdition due à la transpi- ration cutanée et pulmonaire (c). Cette opinion fut fortement appuyée par les expériences de Séguin ((/). Ce chimiste pesa avec beaucoup de soin le corps de différentes personnes avant leur entrée dans un bain d'eau tiède et après un séjour plus ou moins long dans cette eau. Or, dans aucun cas, il ne constata une augmentation de poids ; toujours il y avait au con- traire perte ; seulement cette perte était beaucoup moins considérable qu'elle ne l'aurait été pendant le même espace de temps dans l'air : la

ou.

(a) Mageudiu, Leçons sur les phtinoinèiies physiques de la vie, I.

(&) Cruilishanlvs, Anatomi' des vaisseaux lympliatiques, p. -218.

(c) Poutoaii, (Eavres posthumes, t. I, [i. 185 ol siuv.

{d} l'oiircroy, La ninlecine cclain'c par les sciences physiiiues, 179-2, t. III, p. 2o2.

V.

14

210

ABSOKI'TJON

C'est puur cette raison que lorsque l'éfnderme a été enlevé sur quelques points même assez circonscrits, il est souvent fort dangereux de toucher certains poisons qui d'ordinaire

différence était généralement dans la proportion de 13 H 23 (a). Séguin cher- cha ensuite si des matières salines, telles que du sublimé corrosif, dis- soutes dans l'eau du bain, étaient ab- sorbées par la peau, et, dans les cas l'épidei me n'était pas altéré , il n'obtint le plus souvent que des résul- tats négatifs, ou ne constata qu'une faible absorption de la substance sa- line, qui ne paraissait pas avoir été ac- compagnée par de l'eau. Enfin, pour rendre compte des résultats obtenus, il crut devoir admettre que les vaisseaux absorbants de la peau ne fonctionnent pas quand l'épiderme est intact, et que dans ces conditions c'est seule- ment par pénétration dans les canaux exhalants de cette membrane qu'une petite quantité de matière étrangère en dissolution dans le bain peut en- trer dans l'organisme (6). Plusieurs autres physiologistes ont nié aussi le pouvoir absorbant de la peau de l'Homme {(:), Mais W. Edwards a fait

voir que les faits constatés par Séguin avaient été mal interprétés , et que lors même que le poids du corps se trouve diminué à la suite d'un séjour plus ou moins prolongé dans l'eau, cette diminution est loin de représen- ter la totalité des pertes que l'orga- nisme a éprouver pendant le même espace de temps, et que la dif- férence correspond à la quantité d'eau absorbée par la surface cutanée {d). Plus récemment, de nouvelles recher- ches, faites par MM. Dill, Madden et î^lusieurs autres physiologistes, sont venues donner une démonstration complète de la faculté absorbante de la peau (e). Ainsi, M. Berthold, en expérimentant sur lui-même , a con- staté , dans certaines circonstances , une augmentation du poids du corps par le fait de l'immersion prolongée dans un bain tiède , et , en tenant compte des pertes que l'organisme a éprouver pendant ce temps, il évalue à 1 once 7 gros 30 grains, c'est-à-dire

(a) A. Ség-uin, Premier Mémoire sur les vaisseaux absorbants, sur les vaisseaux exhalants, et sur les maladies qui proviennent ou d'un dérangement quelconque dans ces vaisseaux, ou des altérations quelconques que peuvent éprouver nos humeurs, ou enfin de la relation de ces deux causes [Annales de chimie, 1814, t. XC, p. 185).

(6) Séguin, Suite du Mémoire sur les vaisseaux absorbants (Annales de chimie, 1814, t. XCII, p. 35).

((•) Ciirric, Med. Reports on the Effecis of Cold and IVari» Water, 1805, t. I, p. 320 et suiv.

Bérard rite comme ayant soutenu cette opinion les auteurs suivants, dont je n'ai pas eu Tocca- sion (le consulter les ouvrages :

B. C. Rousseau, An Inaugural Dissertation on Absorption. Pliiladclpliia, 1800.

Chapman, On Absorption [London Med. Repository, t. IX, p. 440).

Dangerfieli, An Inaug. Dissert, on cutaneous Absorption. Philadelphia, 1805.

Gordon, Outlines of Lectures on Uuman l'hysiology. Edinbur^li, 1817.

(d) W. Edwards, Influence des agents physiques sur la vie, p. 348 et suiv.

(e) L)ill, Observations on rutanenus .ibsorption with Experiments {Trans. of the medico- chirurg.Soc. of Edinburgh, 1826, t. I!, p. 350 et suiv.).

Madden, An Expérimental Inquiry into the Physiology of cutaneous Absorption {Medico- chirurg. Rcview, nouvelle série, 1838, t. XXIX, p. 187).

PAR LA PEAT,

'2[{

peuvent être maniés sans inconvénients, et la médecine a tiré profit de la connaissance de ce fait pour déterminer par- fois l'absorption de médicaments que l'estomac se refuserait à

environ 59 grammes, la quantité d'eau absorbée de la sorte en mie heure (a). M. Collard (de Marti£;ny) a fait aussi beaucoup d'expériences pour démon- trer l'existence de la faculté aI)sor- bante dans la peau de l'Homme. Celles dans lesquelles ce physiologiste, à l'i- mitation de qnelqiies-uns de ses pré- décesseurs (6), a cherché à appré- cier la diminution déterminée de la sorte dans le volume du bain une partie du corps était plongée, sont peu satisfaisantes (c) ; mais dans d'au- tres, ayant déposé une petite quan- tité d'eau, de vin ou de bouillon à la surface de la peau sous un verre de montre bien assujetti , il vit ces liquides disparaître pins ou moins ra- pidement. Il rapporte des faits ana- logues observés par M. Bonlils et par M. Margault, en opérant avec du lait ou avec une décoction de ciguë (:/). Weslrumb a constaté celte absorption d'une manière encore plus positive. Ainsi, dans une expérience, il respi- rait l'air puisé dans une pif'ce voisine à l'aide d'un tube, et il tint un de ses bras plongé dans im bain chargé de

musc ; bientôt l'odeur de cette sub- stance était reconnaissable dans son haleine. Dans un autre cas, une par- tie du corps fut plongée dans un bain chargé, soit de cyanoferrure de po- tassium, soit de rhubarbe, et ces sub- stances se retrouvaient dans l'urine, dans la sérosité d'un vésicatoire, el dans le sang obtenu par l'application d'une ventouse scarifiée (e).

Des faits analogues ont été constatés par M. Homolle, en expérimentant sur l'iodure de potassium et d'autres substances minérales (/").

En parlant de la respiration cuta- née, j'ai déjà eu l'occasion de citer divers faits qui prouvent (|ue les gaz peuvent être absori)és par la surface de la peau 'gj. J'ajouterai que l'em- poisonnement i)ar l'acide sulfhydrique a été déterminé par le contact de ce gaz avec la peau chez des Animaux dont les voies respiratoires étaient en communication avec de l'air pur (/i).

Il est aussi à noter que, d'après les expériences de M. Collard (de Marli- gny), l'absorption par la surface de la peau serait beaucoup plus lente dans

(a) Bci'lliolil, Einige Versuche iiber die Aufnaugungsthàligkeit (inhahlion) der Haut. (Mùller's Archiv lûr Anat. und PhysioL, 1838, p. ITT), (h) Simpfon, voy. Darwin, Zoonomia, 1. 1, p. -400.

(c) Collard (de Wartigny), Observ. et expér. sur l'absorption cutanée de l'eau, etc. (Arch. gén. de mçd., X" série, 1826, t. XI, p. 73).

(d) Collard (de Marlis^ny) , Recherches expérimentales et critiques pour servir à l'histoire de l'absorplio}L {Nouvelle Bibliothèque médicale, 1827, t. III, p. 7 et suiv.).

(e) Weslrumb, Unlers^uhvngen iiber die Einsaugnnqskraft der Haut (Meckel's Archiv fur .Anat. und Physiol., 1827, p. 40'J).

if) Hcmolle, Expér. sur l'absorption par le tégument externe {Union médicale, 1853, t. VII, p. 4G2).

{g) Voyez lonie II, page 039.

</i) Chaussicr, Précis d'expériences faites sur les .Animau.x avec le gflî hydrogène sulfuré {Bibliothèque médicale, t. I, p. 108).

- - Lebkùchiior, Op. cit. (Arch. gén. de méd., t. VII, p. 428),

21 '2 AiîSOUl'TKtN

garder (i ). On doimo le nom de méthode endermiquo à ce modo d'adniinistralion des substances absorbables (2).

ceitaines parties du corps que dans u'aulres. Ainsi il vit un même nom- bre de gouttes d'eau disparaître de la corte en quatre heures sur la paume de la main, à l'aine et au front ; en cinq heures, ù la partie interne des cuisses ; en huit ou neuf heures, sur la poitrine, Tabdomen ou la face dor- sale de la main; et en onze heures, sur la face externe de la cuisse (a).

Dans ses expériences sur les Batra- ciens, 'i'ownson a remarqué aussi que chez les lîainelles l'absorption est plus rapide par la peau du ventre que par les autres parties de la surlace du corps {()).

(i) Ainsi, Magendie s'est souvent exposé impunément au contact de la salive des Chiens enragés, parce que les parties de sa peau qui étaient baignées par ce liquide étaient revê- tues de leur épidémie, tandis que ce poison aurait probablement déter- miné riiydrophobie s'il avait louché le derme dénudé (c).

La facilité avec laquelle l'absorplion s'elfectue par la surface d'une plaie récente est démontrée par la rapidité elhayanteavec laquelle les symptômes de Tempoisonnement se manifestent parfois à la suite de la morsure des Ser- pents venimeux. Onsaitque le venin de ces [leptiles n"est pas absorbé en quan- tité notable par l'épiderme, mais que, déposé au fond d'une piqûre, il peut dé- terminer la mort en quelques minutes.

Les chirurgiens emploient souvent comme corrosifs des topiques dont l'absorption peut donner lieu à des accidents graves , la pâte arsenicale, par exemple, et par conséquent ils ont intérêt à savoir si l'introduction des matières étrangères par cette voie est moins facile à une période des plaies qu'à une autre. Bonnet, de Lyon , a fait une série d'expériences à ce sujet avec de la strychnine, pen- dant vingt-quatre jours après l'éta- blissement de la solution de conti- nuité, et il n'a pu reconnaître aucune din'érence dans le degré d'activité de l'absorption (d) ; mais la pratique mé- dicale prouve que lorsque la surface du derme vient d'être enlevée, l'ab- sorption par la partie dénudée est beau- coup plus active qu'elle ne l'est quel- ques jours plus tard. H est aussi à noter que sur les cicatrices récentes l'épiderme est très mince et le derme très vasculaire, l'absorption est éga- lement plus facile que dans les points la peau est dans son état normal. Le développement d'un certain degré d'inflammation à la surface du derme peut accroître aussi le pouvoir absor- bant de la partie ainsi modifiée. Ainsi, les applications de tartre slibié sur la peau déterminent le développement de plilyctèues, et occasio)inent quel- quefois des vomis-semenls sans que le derme ait été mis à nu. (2) Ce n'est pas seulement dans les

{a) Collai'J, Heik. cxpci'. et crii. pour servir à l'Iusloire de l'absoriitioii {i\ijtn'. Ulbliulh. incd., 48-27, t. 111. i). 14).

ib] Towiisoii, Obscrr. physiol. de Aniphibiis, p. oti.

[c) Buiiiiui, Méin. sur la cautérisalioii. considérée sartoul comme moijeii de (juérir la phlébite et l'iiifectidii- purulente [Gaielte médicale, 1843, \t. iî8I).

(b) Ma^'oiidic, Leç.ons sur les phénomènes physuiues de la vie, '.. 1, p. 34,

'1\?>

!'AR LA PEAT.

D'nprès ce que nous avons vu lehiliveineiu à la fiUralion élective et à l'iniluence des passages très étroits sur la compo- sition chimique des mélanges liquides fi), nous pouvons pré- voir que les membranes dont le tissu est très dense pourront, se laisser traverser par de l'eau plus facilement (pie par les ma- tières en dissolution dans ce liquide, et opérer de la sorte un certain triage dans les matières dont elles s'imitibent. La peau humaine paraît remplir ces conditions et être apte à absorber de l'eau phitôtquc des substances sahnes. Ainsi, dans une série d'expériences sur l'action des bains, faite il y a (pielques années par M. Homolle, l'introduction d'une quantité considérable d'eau dans l'organisme par la surface cutanée a été manifeste, mais il n'a pas été possible de constater l'absorption du cyano- fcrrure de potassium, ni de plusieurs autres sid)stances miné- rales, par la môme voie (:2).

cas l'adminislralion tic ccriains mé- dicaments, tels que l'acélalc de mor- phine ou le sullate de quinine, par les voies digeslives, présenterail des in- convénients, qu'il a été utile d'avoir recours à la méthode eudermique; on s'en est servi avec avantage aussi dans quelques circonstances il im- portait d agir d'une manière locale sur des parties situées a peu de dislance de la peau ; car en appliquant la substance absoibahie sur le derme dénudé , on détermine l'imbibitionde l'agenlthéra- pcutique parles tissus sous-jacenls, et son action s'exerce de la sorte directe- ment sur ces tissus aussi bien que par

rintermédiairedusangetde la circula- tion générale. Ij'attenlion des médecins lut appelée sur ce mode d'administra- tion des médicaments absorbables par MM. A. Laiiiberl et J. Lesueur (a).

(1) Voyez ci-dessus, page SS.

{'2) M. ilomolie, qui ne connaissait pas les faits constatés précédenmient par iMM. Briicke, Ludwig et plusieurs autres physiologistes, relativement à l'imbibition élective, a obtenu des ré- sultats qui s'accordent parfaitement avec les vues théoriques fondées sur les recherches expérimentales de ces auteurs. Elfectivenient, il est arrivé s'i cette conclusion que, dans un bain

(a) Lambert et Losiieui', Exposé sommaire d'une mcdicalioii nouvelle par la voie de In ptrfti privée de sonépiderme, ou par celle des autres tissus uccideateltement dénudés [Arcli. (léii. de méd., 1^24, t. V, p. 158).

Lesueur, De la mcltwde eudermique, Ihèso. Paris, '1825.

Aelelon, Rappnil sur la médicaiion eudermique {Arch. gén. de méd., 182(3, 1. M, \>. 2'.»S;. Lauibcrt, Essai sur la métl!Ode eudermiqv.e. ln-8, 1828.

Piicur, Méthode eudermique en général, lliôse. Paris, 1X34.

^ Voyez aussi à ce sujet les ihèses de MM. Gogat(Pans, 1831), Porte (1R34) et Proliii (183j).

Absorption

par la coiijoniiive.

:21/| ARSOP.PTION

Les membranes murjueuses externes, la eonjonclive qui revêt antérieurement le globe de l'œil, par exemple, ont une texture beaucoup plus délicate que la peau, et ne sont garnies que d'une couche très mince de tissu épithéli(iue; aussi sont- elles douées d'un pouvoir absorbant beaucoup plus consi- dérable i'ï

l'eau pure est évidemment absorbée par la peau, et que dans un bain chargé de substances minérales ou or- ganiques, ceite in trodiiclion d'eau dans l'économie a lieu également , mais n'est pas toujours accompagnée d'une absorption des substances en disso- lution dans ce liquide, de façon qu'il se produit un départ entre les ma- tières unies dans le bain, et que la peau exerce une absorption élective sur l'un des composants du mélange, à l'exclusion de l'autre.

M. Uomollea vu aussi que, dans des expériences endosmoliques , la peau ne laisse passer ni le lerrocyanure de potassium ni plusieurs autres sub- stances en dissolution dans l'eau, tandis que ces matières traversaient la membrane muqueuse intestinale [a).

On connaît aussi des substances qui sont absorbées très facilement par les voies digestives et respiratoires, mais ne paraissent pas traverser la peau en quanlilés appréciables. Ainsi, dans des expériences faites récemment sous la direction de M. Funke par M. Braune, la vapeur d'iode qui se dégageait d'un pédiluve contenant une certaine quan- tité de teinture alcoolique de cette substance a suffi pour modifier la sé-

crétion salivaire, par suite de son ab- sorption par les poumons ; mais lors- qu'on empêcha ce dégagement à l'aide d'une couche d'huile répandue sur le bain, aucun symptôme ana- logue ne se manifesta, et l'iode ne parut pénétrer dans l'organisme, ni à la suite d'applications de ce genre sur la peau, ni à l'aide de frictions' (6).

(1) Ainsi Magendie, dans ses expé- riences sur l'acide cyanhydrique an- hydre, trouva que quelques gouttes de ce poison, déposées sur la conjonctive, produisaient la mort presque aussi prompiement que si elles avaient été introduites dans les voies respira- toires (c).

Bérard a pensé que, pour expliquer la grande rapidité avec laquelle ce poison agit sur le système nerveux encéphalique lorsqu'on l'applique sur l'œil, il ne suffit pas de supposer que la matière absorbée a été transportée dans le torrent général de la circula- lion et envoyé par le cœur dans toutes les parties du système artériel ; mais qu'il faut admettre que le sang de la conjonctive, qui passeen majeure par- tie par la veine ophthalmique dans le sinus caverneux, a pu relluer de directement dans les veines capillaires

(a) Homolle, E.rpcrienccs sur L' absorption par le tégument externe che% l'Homme dans le bain [Union médicale, 1853, i. VII, p. 462 et fiiiv.).

(6) Braune, De culls fncuUate jodumresorbendi dissert. Lipsiœ, iSSd {\oyeî Archiv filr pathol. Anat vnd l'hijsioL, t. IX, p. 29."i).

(c) Maifciulic, Herherches physinlogiques et clinuiMs sur l'emplin de l'acide prussique, p, 5.

PAR LES VOIES DlGESTlVES. '^'15

La nuinneiise de la lace interne des lèvres est plus dense Ai^orpiio,;

' _ par 1-1 lumqiie

que la conjonclive, mais est pourvue d'un réseau de vaisseaux ' .m.queuse sanguins plus riche; elle présente donc des conditions anato- canaidigesuf. miquestrès favorables à l'exercice de la faculté absorbante dont toutes ces membranes sont douées. Il en est à peu près de même des tuniques muqueuses qui se trouvent dans le voisi- nage des oritlces externes des autres cavités de l'organisme, et, dans les parlies profondes de celles-ci, le tissu épilhélique change généralement de caractère pour devenir mou et iaeile à imbiber. Dans l'eslomac et dans l'intestin, par exemple, les membranes tégumentaires offrent en général ce mode d'or- ganisation , et par consécpient la faculté absorbante s'accroît sans égaler toutefois ce que nous avons vu dans l'appareil res- piratoire (1); mais ce sont des particularités sur lesquelles

du cerveau (a). Ce reflux me semble peu probable; mais, du uioment que Tacidecyanhydrique serait arrivé dans !e sang des sinus de la dure-mère, on conçoit la possibilité de sa prompte dispersion dans tous les liquides adja- cents, non par le fait du transport du sang, mais par dill'usion, et, comme la distance à parcourir est très faible, il serait fort possible que le poison arrivât ainsi au cerveau plus vile par les veines ophtbalmiques et les siuiis de la base du crâne que par la circu- lation générale, dont la rapidité est du reste extrêmement grande cbez les petits Mammifères , ainsi que nous l'avons déjà constaté (6).

(1) Nous verrons, dans une pro- chaine Leçon, qu'il existe de grandes variations dans le degré d'épaisseur et de densité de la couche épithéliale de la membrane muqueuse de l'esto-

mac chez divers Animasix, et c'est <i raison du peu de perméabilité de cette tunique que parfois l'absorption est beaucoup moins rapide dans celte portion du canal alimentaire que dans l'intestin. Un exemple de cette dispo- sition nous est fourni par le Cheval. Ainsi M. Bouley et CoUn ont con- staté que si Ton injecte dans les voies digeslives d'un de ces Animaux 30 grammes d'extrait alcoolique de noix vomique, ou o ou à grammes de suli'ale de strychnine , la mort arrive d'ordinaire au bout d'un quart d'heure par suite de l'absorption du poison ; mais si préalablement on fait la liga- ture du pylore, de façon à empêcher le liquide injecté par l'œsophage de pénétrer dans l'intestin, l empuisoû- nenient n'a pas lieu, et l'on peut re- trouver la matière toxique dans Tes- tomac au bout de viugt-quaire heures.

[a) Bérard, Couru de physiologie, l. II, p. OGO.

(b) Tome IV, page 304.

^ÎC) ABSORPTION

je ne m'arrèlerai pas en ce moinerit, rar j'aurai à y revenir lorsque je traiterai de la structure et des fondions de l'appareil digestif. Aij>oii,iinn ^10. Les grandes cavités du corps qui sont tapissées par kN membranes Ics tuuiqucs sércuscs sont disposées aussi d'une manière favo- rable à la j^apidité de l'absorjttion, car ces membranes sont très minces, leur tissu est fort perméable et de nombreux vaisseaux capillaires serpentent j)rcs de leur surface adbércnte. Ces con- ditions sont reuiplies de la manière la plus parfaite par la plèvre pulmonaire ; aussi l'absorption est-elle très active dans l'intérieur de la cavité tapissée par cette membrane, et, pour se convaincre de ce fait, il sufiit des observations palbologiques relatives à la disparition des épancbements pleurétiques(i). Absorpiicin Enfui, le tissu conjoncfif qui occupe les interstices que les

(■ar le lissu ,

cellulaire, divcrs organcs de l'économie laissent entre eux, et qui se com- pose, ainsi rpie nous l'avons déjà vu, de fibres et de lamelles réunies coQime dans un feutre, de façon à circonscrire incom- plètement une multitude de petites lacunes ou cellules con- lluentes, est aussi très apte à servir de voie pour l'introdui^tion des fluides jusque dans le torrent de la circulation, car il se laisse imbiber très facilement ; mais il forme des masses considérables, il ne loge généralement que peu de vaisseaux

L'absorption du cyanofernire rie po- les expériences de Magendie sur la

tassiiim par les parois de l'estomac rapidité comparative de l'einpoison-

paraît être aussi à peu pi'ès nulle chez nemenl i)ar la noix vomique, quand

le Cheval. Chez le Chien, le Chat, !e celle substance est introduite tantôt

Porc et !e Lapin, l'absorption paraît dans la. plèvre, tantôt dans la cavité

au contraire se faire à peu près aussi du péritoine. Eu opi-rant de la sorte

activement dans l'estomac que dans sur des Lapins, il a vu que la mort

i'inteslin [a]. arrivait beaucoup plus vile dans le

(1) .Te cilerai également à ce sujet j)remier cas que dans le second (/>).

(a) H. linnley, fiecherchcs sur l'hifluence que la sertion des nerf.i pneumoijastriques exerce sur iabsoriilioH f:(omacnle (HuUetin de VAcadéntie iwpcrialc de médecine, IS.'.i, i. XN'II, p. (H", 774, plr.).

Coliii, P'njsMoQie des Animaux doinesliques, t. (I, p. 50 cl siiiv.

(fl) Ma;ronilic, Lernns .iiir len phi'Domènes physiques de la vie, I, 1, p. 20,

var les Mî<;MRi{.vNr.s f.kkeiseï;. "217

sanguins, et par ronséqiiont, sous ce dernier rapport, il n'est: pas lavorablement disposé pour l'absorption. Cependant l'expé- rience prouve que cette fonction peut s'y exercer d'une manière active.

D'autres tissus n'absorbent, au contraire, que fort lentement les liquides qui sont en contact avec leur surface ; les tendons, les aponévroses et les nerfs sont dans ce cas, et cela s'explique par le jietit nombre de vaisseaux sanguins (pi'ils renferment et par la compacité de leur substance (1).

^ \'\ . La rapidité avec laquelle l'aljsorption s'eflectue ne influence

' _ tlo l'étiit

dépend pas seulement des conditions anafomiijues que nous derépicuon

des voisscaiix.

venons de passer en revue , et parmi les autres circonstances qui intluent sur la marcbc de ce phéimuiène, je citerai en pre- mier lieu l'état de réplétion plus ou moins grande du système vasculaire en général, et la vitesse du courant sanguin dans les vaisseaux de la partie par laquelle l'introduction de la matière étrangère s'effectiie.

Les expériences de Magendie et celles de mon frère William Edwards prouvent que, toutes choses étant égales d'ailleurs, l'absorption est activée par la diminution de la proportion des liquides dont l'organisme est chargé, et ralentie par l'état de plénitude du système vasculaire (2).

(1) Ainsi Fontana a trouvé que le ve- saignée copieuscl'absorption était telle-

nin de la Vipère et d'autres poisons ne inciit activée, que dans quelques-unes

déterminent que peu ou même point de ses expériences les symptômes de

d'elîels toxiques lorsqu'on les applique rempoisonneaicnt par rintroduction

à la surface dénudée de diverses par- de certaines subslances vénéneuses,

lies du système nerveux (a). L'es fails qui d'ordinaire ne se déclaraient qu'a-

analdgues ont été constatés par Em- près la deuxième minute, se mani-

inert, ^lacarlney, Millier et d'autres feslaient avant la irenlième seconde,

expérimeniateurs {h]. Dans d'anires expériences, ce physio-

{'2] Magendie a vu qu'après une logiste délermina un état de plélliore

((() Fonlana, Troilc sMc le venin de la Vipère, I. I. p. 273 ot suiv. ; t. II, p. HT. ctsiiiv. (bj l'iiiiiiieri, Kinige Hcmerkun'jen iïber die mvkun(i&art dcr Gifle ^Mcckel's Deutschefi Avchiv fïtr die Physiologie, 1815, t. 1, p. 170).

Voyez Orfila, Trnilc des poisons, t. Il, p. 51 x.

Millier, Manuel de pinisioloqir. l, I, p. 2IVp.

:218

ABSORPTION,

Influence Nous QVons déjà VU comment le degré de rni^idité du cou- des capillaires, rant circulatoire influe sur les effets de rabsor[)tion (1), et, d'après ce que je viens de dire au sujet des conditions physio- logiques qui favorisent l'exercice de cette fonction, il est aisé de concevoir comment l'action de certaines substances dites corrosives^ sur une membrane vivante, peut opposer de grands obstacles à l'introdirction rapide de ces matières dans l'éco- nomie. En effet, si le contact de la substance irritante pro- voque une exsudation abondante, et surtout si ce contact déter- mine la stase du sang dans les capillaires adjacents, ou même la coagulation de ce liquide et des autres humeurs albumineuses dans la partie ainsi altérée, le passage, soit d'un courant endos- motique, soit d'un courant de diffusion dans ce point, doit être rendu presque impossible, et, lors même que l'imbibition s'effec- tuerait, le transport au loin de la matière imbibée ne s'opérerait pas (2). Cela nous explique en partie l'utilité des caustiques pour empêcher l'absorption des virus déposés dans les plaies (3), et

en injectant de l'eau dans les veines d'un Chien, et il vit que les symptômes de l'empoisonnement dus à Tai^sorp- tion de la matière toxique inlroiluite dans la plèvre se montraient beau- coup plus tard que d'ordinaire (a).

Dans les expériences de William Edwards, la quantité d'eau absorbée en un temps donné a été d'autant plus grande, que l'Animal était plus éloigné de son élat de saturation. Ainsi, l'absorplion se ralentissait à me- sure que l'expérience se prolongeait davantaj^e (6).

(1) Voyez ci-dessus, page 195.

(2) M. Ségalas a constaté expéri- mentalement que les substances qui

désorganisent instantanément les tis- sus sur lesquels on les applique ne sont pas absorbées , même à l'état liquide : par exemple, les acides sul- furique et azotique concentrés (c).

(3) Il est bien entendu qu'en tenant compte de Tutilité de Teschare comme barrière contre l'absorption des ma- tières vénéneuses, il ne faut pas ou- blier que dans un grand nombre de cas le caustique agit aussi sur le poi- son lui-même, et le détruit ou le mo- difie de façon à le rendre innocent. C'est à ce double titre que la cautéri- sation, soit par le fer rouge, soit par l'application du beurre d'antimoine ou toute autre substance analogue, est

(a) Magendie, Méin. suj' le mécanisme de l'absorplion {Journal de physiologie , 1821, t. 1, p. •4), (6) W. Edwards, De l'influence des agents physiques sur la vie, p. 99. (c) Ségalas, Note sur quelques potnis de physiologie (Journal de physiologie de Magendie, 1824, t. IV, p. 287).

INFUJENCE DE l'aCTION NKRVKCSE. '219

le mode tl'aelion de eerlains poisons qui produisent la mort plus promptement (juand ils sont délayés dans une grande quantité d'eau (jue lorsqu'ils sont concentrés, circonstance qui se remarque quand l'acide oxalique est introduit dans l'esto- mac (1).

«i 12. Il me parait évident que la puissance absorbante intiuence

«-' i 1 "^ de laclion

des diverses parties de l'économie animale est soumise aussi à nervei.se. rinfluence d'une force physiologicjue dont le mode d'action n'est pas connu, mais dont les effets sont souvent bien mani- festes : savoir, la force nerveuse.

Ainsi, dans beaucoup de cas, on a remarqué que les matières étrangères en contact avec les parois de l'estomac arrivaient moins promptement dans le torrent de la circulation quand les principaux nerfs de ce viscère avaient été coupés que lorsque ces derniers organes remplissaient leurs fonctions d'une ma- nière normale (2). Il est possible que ce retard soit seule -

si iilile dans les cas de morsure par un Chien enragé ou par un Serpent venimeux.

(1) CeUe parlicularité remarquable dans les effets toxiques de l'acide oxalique a été parfaitement établie par les observations et les expériences de MM. Christison et Coindet. Admi- nistré en dissolution très concentrée, celte substance détermine la mort en corrodant les tuniques de l'eslomac, et n'est absorbée que lentement, tan- dis que, étendue de beaucoup d'eau, elle n'agit pas notablement sur les parois de ce viscère , mais, étant ab- sorbée rapidement, elle exerce sur le système nerveux une influence toxique

qui produit promptement la mort (a).

M. Miahie a montré qu'il faut bien se garder de négliger l'action coagu- lante ou fluidifiante des agents toxi- ques sur les tissus ou les liquides de l'économie animale, quand on veut se rendre compte des symptômes et de la marche de l'empoisonnement produit par l'absorption de ces ma- tières (6).

[2) MM. Christison et Coindet, en faisant des expériences sur les eflets toxiques de l'acide oxalique, ont re- marqué que les symptômes dus à l'absorption de ce poison par l'esto- mac se déclaraient moins prompte- ment quand les nerfs pneumogastri-

(a) Christison et Coindet, An Expérimental Inquiry on Poisoning by Oxalic Acid {Edinburgh Med. and surg. Rcvieiu, 1823, t. XIX, p. 165), uu Mémoire sur V empoisonnement par l'acide oxalique {Arch. gén. de méd., iS'-Id, t. I, p. 574 et suiv.).

(6) Mialhe, Chimie appliquée à la physiologie et à la thérapeutique, p. 201 .

2'2C} ABSOni'TION.

nient, an tronble que l:i seelion (les nerfs délermine dans la circnlation capillaire; mais, en ])résence d'un résultat pareil, l'esprit se reporte nécessairement aux phénomènes dont nous avons déjà été témoins lorsque nous avons vu l'influence que le galvanisme exerce sur les courants endosmotiques. Nous avons vu alors ces courants devenir plus rapides ou plus lents, suivant (|u'on faisait intervenir ou non l'électricité, et nous avons ])u constater que cet agent rend parfois les membranes perméables à des substances que d'ordinaire elles se refusent à admettre dans leur inlérieur (1). Il est aussi à noter que l'in- fluence d'im courant galvanique paraît favoriser la production

qiios avaient ctt' coupés que dans les cas ordinaires («). M. liOnget a ob- tenu un lésai lat analogue en admi- nistrant comparativement, soit de l'a- zotatedeslryclinine,soitderéniétiquei à des Chiens dont les pneumogastri- ques élaient intacts chez les uns et coupés chez les aulrcs (6). M. CoUard (de iMartigny) a vu que l'empoison- nemenlpar imbibilion, déterminé par rinlroduclion d'une certaine quantité de noix vonuque dans la pal te, chez des Cliieus la circulation était in- terrompue dans ce membre par la ligature des vaisseaux t-anguins, était relardée par la seelion des nerfs (c).

i\!ais les effets dont je viens de parler ne se numifeslèrent pas toujours, et quelques physiologistes n'en ont ob- servé aucune trace (c/). Il est presque

superflu d'ajouter que Dupuy et M. Bra- da t se sont évidemment trompés quand ils ont cru constater que la sec- tion des pneumogastriques empêchait l'absorption de la noix vomique par l'estomac (e). Le fait de l'cmpoisonne- nient après cette section a été constaté bien des fois, non-seulement par des expériences faites avec cette sub- stance (/■), mais à la suite de l'admi- uislralion de l'opium et de plusieurs autres matières toxiques. M. Brodie a conslaté aussi que la seelion de tous les nerfs de la patte chez le Lapin n'empêche pas l'animal d'être empoi- sonné par suite de Tabsorplion du woorara (on curare) déposé dans le tissu sous -cutané, à l'extrémité du membre ainsi paralysé {g).

(1) Voyez ci-dessus, page 168.

(a) Clirislison otCoindel, Op. cit. {Ediiib. med. andsîinj. Journal, ^^'■2'i, t. XIX, p. 103).

(b) I,oni;et, Anatomie el physiologie du système nervexi.T, t. U, p. 347.

(c) Collard (île Martigny), Hech. expérim. et critiques pour servir à l'histoire de l'absorplinii {iVouv. Bibliolh. médicale, t. 111, p. 25 et 20).

(d) Millier, Manuel de pliysiologie, t. 1, p. 407.

l'aiiizi-ii, DeU'assorbimentu venoso {i)U'm. dclV Istltulo Lombarde, 1843, I. I, p. 178).

lîoiiley, 0/1. cit. [Bulletin de l'Acad. de mt'd., 1S.")-J, I. XVII, p. 04';).

(e) Brachol, liecherchcs expérimentales sur le système nerveux, p. 220. {!') l.oni;et. Traité de physiolnyie, l. l.S'pnrlie, p. 37!).

((/) lirodic, K.Tper. and Observ. on Ihe dilferent Modes in Wldch Jleath is produced by certain Vepetable Poisons (Philos. Trans., 1811 , et Phijsiolotjicnl Expenment.i, \\ C,;,).

t:'Jl i

INFLUbliSCE HE L ACTiON NKllVKrSK.

des phénomènes d'imhihition cliez les Aiiiuiaux vivaiUs aussi bien que dans les vases inerles (i). Ces aetions sont trop mal connues pour que je puisse en tirer des lumières utiles à l'étude de la question dont nous nous occupons en ce moment; mais il V a souvent tant de ressemblance entre les effets produits par la force nerveuse et par l'électricité, qu'il y aurait intérêt à examiner î)1us attentivement qu'on ne le fait encore le rôle de ce dernier agent comme moditicateur des phénomènes d'absorption fl2).

(1) Foderà a vu que s'il injeclait une dissolution de cyanoferriiie de polassiuiii dans la vessie d'un Chien vivant, et une dissolution de sulfate de fer dans la cavité périlonéale du même animal , les tissus inlernu''- diaires s'imbibaient de ces liquides et se coloraient par suite du précipilé de bleu de Prusse résullantdela réaction de ceux-ci ; mais que dans les circon- stances ordinaires ce résultat ne s'ob- tenait qu'au bout d'une demi-heure ou davantage, tandis qu'il se produisait en quelques secondes quand il faisait passer un courant galvanique de l'un de ces liquides à l'autre {a).

(2) Quelques physiologistes ont pensé que la paralysie des parois des vaisseaux lymphatiques par l'action de certains poisons narcotico acres et autres était la cause de la lenteur avec laquelle l'absorption s'elfectuo parfois. Dans des expériences faites il y a en- viron quarante ans par Emmerî, l'in- terruption de la circulation sanguine

déterminée dans le train de derrière d'un Animal par la ligature ds l'aorte ventrale n paru empêcher l'absorp- tion des poisons végétaux dans les membres postérieurs, et ne pas influer de la même manière sur le passage de matières salines telles que le cyano- ferrure de potassium jusque dans le torrent de la circulation, dans les par- lies situées au-dessus de la ligature (6). La non-absorption de divers poisons qui agissent sur le système nerveux avait été observée aussi dans des cir- constances analogues par Schnell et par Schabell, ainsi que par M. Kiirs- chner (c), et ^ï. llenle a cru pouvoir expliquer ce phénomène en attribuant à ces substances une action paraly- sante sur les parois des lymphatiques qui constituaient les seules voies de- meurées libres pour le passage des matières étrangères {cl). Cette opinion fut corroborée par les expériences de M. Behr. Celui-ci, après avoir prati- qué la ligature de l'aorte abdominale,

[a) t'udL'i'à, tlecluirches cxpà'imcntaks sur L'absovption et l' exlicdallon , 18!i4, |i. 2-2.

[b) Eiiiiiiurt, Elnïae Bemerkumjeii ûber dk Wirkimdsart und chenmcha ZasammenseliuiKj dcr Gifle (Meclcel's DciUsches Arddv fiir die Plujsiologie. 1815, t. I, |). Hfi).

[c) St:liiicll, Dissert, iiiaurj. sistens historiam veneiii upas antiar. Tubingcn, 1815.

Suliahi;!, De effectibus veneni radici^ Veratri albi et Helleboriniijri. Tubins-oii, 1815.

Kui-scliiier, art. Aufsauguiiy (Wag-iicr's Uandwijrterbucli dtr [•liijsiologie, t. I, p. 46J. {(i) Houle, Traite d'anatomia générale, t. 11, |i. 101.

222

ABSOKPTlOiN.

ii.nuence § 13. D'ajifès CG que nous savons déjà touchant la nature ''ph3"é's"^' et le jeu des forces dont dépend l'osmose, et d'après l'iinpor- des ^fluides ^^j^çg çi^ j,5ig qyg jjoLis vovons jouer par ce phénomène dans leur absorption. |^ rnécanismc dc l'absorption physiologique, nous pouvons pré- voir que les premières conditions requises pour qu'une sub- stance étrangère arrive rapidement de l'extérieur de l'organisme dans le torrent de la circulation, sont que cette substance soit à l'état fluide, et soit apte, sous cette forme, à mouiller les tissus qu'elle doit traverser, ou miscible aux humeurs dont ces tissus sont imprégnés. Ainsi de l'eau injectée dans la cavité du péri-

introdiiisit sous la peau de la patte postérieure , d'un côté du corps le poison , et de l'autre côté le cyano- ferrure; cette dernière substance se montra bientôt dans l'urine, et par conséquent elle avait été absorbée, tandis qu'il ne se manifesta aucun symptôme d'empoisonnement ; d'où l'on pouvait conclure que le poison n'avait pas été absorbé ou avait été altéré dans les vaisseaux lymphati- ques. Puis, dans une autre expérience comparative, la circulation étant in- terrompue de la même manière, les deux substances furent déposées dans la même plaie, et il n'y eut alors ab- sorption appréciable ni de l'une ni de l'autre (a) ; mais M. BischolT, ayant re- pris cette question, constata que si l'ab- sorption est extrêmement lente dans ces conditions, elle n'est pas complète- ment arrêtée, et, au bout d'un certain temps, il a presque toujours vu les symptômes d'empoisonnement se ma-

nifester aussi bien que le transport du cyanoferrure s'effectuer jusque dans l'appareil urinaire (6). M. Dnsch a fait diverses expériences dont les résultats étaient favorables à l'hypothèse de 1\1. Ilonle (c). Cependant d'autres re- cherches, dues à JM. BischofT et à M. Ludwig, ne purent laisser aucune incertitude sur la possibilité de l'ab- sorption des poisons végétaux, tels que la strychnine, dans des parties la circulation était arrêtée (r/) ; et il pa- raît résulter seulement des faits con- statés par M. Henle et les autres physiologistes cités ci-dessus, que l'in- troduction des matières étrangères dans les tissus vivants, ou leur trans- port au loin dans l'économie est ra- lenti par l'action locale des substances toxiques en question; mais rien ne me semble prouver que ce ralentisse- ment soit à une paralysie des vais- seaux lymphatiques, et je l'attribuerai plutôt à l'immobilité du membre.

(a) Belir, Ueher das Ausschliessungsvermôgen der Lymphgefdsse bei Résorption (Zeitschrift fiir rationelle Medicin, 4 844, t. I, p. 35).

{b) Bisclioff, Vcber die Résorption der narkotischen Gifle durcti die Lymphgefdsse (Zeitschrift fur rationelle Medicin, 1840, t. IV, p. 62)-.

(c) Duscl), Versuclie iiber das Verhalten der Lgmphgefâsse gegen die narkotischen Gifle {Zeitschrift fiir rationelle Medicin, 1840, t. IV, p. 308).

{d} Bisclioff, Noch ein \Vorl iiber die Aufnahnie der narkotischen Giftediirch die Lymphgefdsse (Zeitschrift fiir rationelle Medicin, 1846, t. V, p. 203).

Hcnle, Anmerkung %nr vorstehenden Abhandbtng (Zeitschrift fiir rationelle Medicin, t. V, p. 306).

lnfliji:m;i: uks propriétés physiquks des liquides. 22o

toine d'un Animal vivant est promptement absorbée , tandis que de l'huile, liquide qui ne contracte pas d'adhérence avec la surface de cette mennbrane séreuse, peut y séjourner fort long- temps sans diminuer notablement de volume (1).

Il est aussi à noter que la pénétration des matières grasses Absorption

' des matières

dans les passages capillaires des membranes animales peut être g^^^^es. beaucoup aidée par la présence de certaines humeurs dont le tissu de ces membranes serait préalablement imbibé. Nous avons déjà vu que l'attraction adhésive exercée par l'eau sur l'huile est considérablement augmentée quand le premier de ces liquides est chargé d'une petite quantité de soude ou de potasse (2); et par conséquent lorsqu'une substance perméable, au lieu d'être mouillée par de l'eau, est imbibée d'un liquide alcalin, l'action capillaire, au lieu d'être un obstacle à l'entrée de la matière grasse, peut appeler celle-ci dans les cavités interstitielles de ce corps. Ainsi la force nécessaire pour faire filtrer de l'huile à travers une membrane animale diminue beaucoup quand celle-ci est imprégnée de bile (3), et j'insiste sur cette circonstance parce que nous verrons bientôt que la nature emploie ce procédé pour faciliter l'absorption des ma- tières grasses dans l'appareil digestif.

Du reste, les matières qui ne sont susceptibles d'adhérer

(1) M. Ségalas a vu que de l'huile in- jectée dans la cavité abdominale d'un Chien s'y retrouve huit ou dix jours après sans avoir subi de diminution appréciable, mais que la présence de ce liquide détermine une inflamma- lion vive du péritoine (a). Emmert et Hôring avaient fait précédemment des expériences analogues, et avaient vu aussi que Phuile n'est absorbée

qu'en très petite quantité par la sur- lace péritonéale ; ils ont trouvé ce- pendant des traces du passage de ce liquide par les vaisseaux lympha- tiques adjacents (6).

(2) Voyez ci-dessus, page 77.

(3) Ce fait a été constaté expéri- mentalement par M. Wistingshausen et par M. Hoffmann, en opérant sur des morceaux de muqueuse intesti-

(a) Ségalas, Note sur quelqiies points de physiologie {Journal de physiologie de Magendie, tSSi, t. IV, p. '286).

(b) Emmcrt iind Hôi'iiig, Ueber die Veraiuleruagen, welche einige Stoffe in dem Kôrper soivohl hervorbringeii aïs erleiden, wenn sic in die Bauchhôhle lebender Thiere gebracht luerden (Meckel's Deutsches Archiv filr die PhysioL, 1818, t. IV, p. 522).

Irl'i/l AtiSOlll'TlOA.

ni à la substaiice des tissus organiques, ni aux li(jaicles dont ecs tissus sont enduits, ne sont pas néeessairement exelues de l'éco- nomie animale; elles n'y ont. que diflicilemeut accès, mais leur absorption peut avoir lieu dans certaines circonstances, et parait pouvoir être déterminée de deux manières : tantôt jiar l'action mécanique d'un courant endosmotitpic, quand ce cou- rant est rapide, que les matières solides ou non miscibles sont tenues en suspension dans le îi([uide par lequel ce courant est constitué, s'y trouvent dans un état de grande division, enlin que les voies capillaires à parcourir sont larges ; d'autres t'ois.

nale on de vessie de divers Mammi- fères , et en employant lanlôt des alcalis purs, tantôt de la bile (a). L'al- calinité des sucs intestinaux exerce aussi beaucoup d'influence sur l'ab- sorption des malièresaibun)inoïdes(6), ainsi que nous le verrons quand nous nous occuperons de la digcslion.

M. Malleucci a fait aussi quelques expériences sur l'influence que les alcalis exercent sur la perméabililé des membranes animales pour les corps gras. Ayant préparé une solu- tion de le',30 de potasse caustique dans 300 grammes d'eau, il employa une partie de celle liqueur à former avec de l'huile d'ol.ve une émulsion d'aspect lactescent qu'il renferma dans un morceau d'intestin; puis il plon- gea celui-ci dans un bain formé par la même eau légèrenienl aicalinisée de la sorte, el il reconnut bientôt, par le trouble produit dans ce dernier liquide, qu'une portion de la matière

grasse s"y était répandue. Dans une autre expérience, l'endosmomèire lut chargé d'eau légèrement aicalinisée el plongé dans l'émulsion dont il vient d'être question ; bientôt il y eut en- dosmose, et l'énuilsion pénétra dans la solution alcaline. Enlin, dans une troisième expérience , deux enton- noirs furent ren)plis avec du sable également tassé : sur l'un on versa de l'eau, el sur l'autre une dissolu- tion alcaline; puis, lorsque ces li- quides s'étaient écoulés , on déposa sur chacun des deux filtres ainsi constitués une même quanlilé d'huile, et l'on vit que sur le sable mouillé par la dissolution alcaline ce corps gras disparaissait promptemenl par suite de son imbibition , tondis que dans l'aulre entonnoir il resta plu- sieurs heures sans pénétrer dans la substance poreuse sur laquelle il re- posait (c).

(«) \Vistiiii;-sliausen, lindosmolisclie Yersuche iïbcr die Wirlumij. der Galle bei dei- Absurpimii, der /''e/Je. (Uisseit. inau^'.). Dorpat, 4851.

C.-E. HolVmami, Ucber die Aufnahme von QuecksiWcr iind die l'elle in den Krcislav f. Wiirlzburff, 1854 (CanstaU's Jahrcsber., 1855, p. 80).

(6) Funlic, Ueber das endosmotische Verhalten (Vircliow's Arcliiv ftir Anat. iind Phijsiol., 1858, t. XIII, p. 44'.)).

(c) Watlciicci, Leçons sur les phénomènes jihysiqucs de la vie, y. 105.

INFLUENCE DES PJIOPUIÉTÉS PHYSIQUES DES LIQIIDES. 225

lorsque, étant également sous la forme de partiCxiles très me- nues, ces malières sont poussées dans les cavités interstitielles des tissus absorbants par une pression extérieure.

Ainsi, les liquides qui ne sont pas aptes à mouiller une mem- influence brane organique, c'est-à-dire à adhérer à sa substance, peuvent de division

, , n- 111 II I de ces liquides

cependant la traverser sous 1 niiluence d une pression plus ou sur

.,,,,_ , , ' 1 leur absorption.

mouis considérable. Par exemple, le mercure comprime dans une pochette de peau de chamois traverse cette membrane et se répand au dehors sous la forme de très petites gouttelettes. L'huile filtre aussi à travers un morceau de vessie, mais la force nécessaire pour déterminer ce mouvement est beaucoup plus considérable que celle employée pour effectuer le passage de l'eau ou d'une dissolution saline (1). Du reste, cela se con- çoit facilement ; car pour séparer de la masse d'un de ces liquides les filets capillaires d'une ténuité extrême qui doivent s'engager dans les cavités interstitielles du tissu et traverser ces passages, il faut vaincre, non-seulement les frottements développés par ce mouvement, mais aussi la force de cohésion en vertu de laquelle ces liquides résistent à l'attrachon exercée par la substance de ce tissu et ne le mouillent pas. On voit donc que les obstacles à surmonter diminueraient beaucoup si les particules de ces liquides, au lieu d'adhérer entre elles, étaient isolées préalablement de façon à ne constituer que des petites masses d'un volume approprié au diamètre des passages à tra- it) Ainsi, dans les expériences de cure pour oblciiir lo même effet avec M. Cima sur la lillrallon forcée des une dissolution concentrée de sel liquides h travers les membranes commun , l'huile extraite des os ne animales , nous voyons que dans les passait que sous une pression de circonstances une pression de 3'i pouces de mercure. En opérant l'i pouces de mercure déterminait la sur le péritoine du Bœuf, les diffé- transsudation de l'eau au travers d'un rences étaient encore plus considé- morceau de vessie, et il fallait une râbles {a}. pression de 18 à 20 pouces de mer-

(a) Cima, Sull'evaporazioiie e la Iransiidaiione dei liqiddi altraverso le membrane animali (Mcmoives de l'Académie de Turin, série, 1853, t. XIII, p. 279).

V. 15

226 ABSUHPTION.

verser. Or, cette condition est toujours plus ou moins facile à réaliser au moyen de l'émulsionnement.

Nous avons vu que lorsque deux globules liquides homogènes viennent à se rencontrer, ils tendent à se confondre et à ne former qu'une seule masse arrondie (1); mais quand la sur- face de ces globules est revêtue d'une couche mince d'une autre malicre, l'attraction moléculaire, qui ne produit des effets appré- ciables qu'à des distances insensibles, ne peut plus déterminer ce rapprochement, et les petites masses de liquides tenues ainsi - à distance par une substance intermédiaire conservent leur individualité. Cet effet se produit d'autant plus facilement que les liquides hétérogènes en présence, sans être miscibles, sont plus aptes à adhérer entre eux, et c'est de la sorte qu'en agitant de l'huile dans un liquide albumineux, on divise peu à peu la matière grasse en une multitude de globules qui restent distincts, et qui deviennent de plus en plus petits à mesure que l'opé- ration est poussée plus loin. Ce sont ces mélanges intimes de liquides non miscibles que l'on désigne sous le nom (Vémul- siojis, et l'on conçoit que si le fractionnement de l'iiuile a été porté assez loin pour que le diamètre de chacun des globules microscopiques formé par cette substance soit inférieur au calibre du conduit le liquide circonvoisin est appelé par le jeu des forces osmotiques, ces corpuscules i)ourront être charriés par le courant, tout comme le sont les particules de matières hétérogènes tenues en dissolution dans le même véhicule.

Ainsi, en définitive, la condition essentielle pour qu'une substance étrangère à l'organisme soit absorbable, c'est un état de division ou de mobilité moléculaire suffisante, et cet état peut être le résultat d'un fractionnement mécanique aussi bien que de l'état de fluidité.

Pour montrer rinlluence que l'état de division d'un corps

(1) Voyez <:i-clessiis, page 9/i.

INFLUENCE DES PKOPRIÉTÉS l'HYSlQUES DES LIQUIDES. '1^1

non miscible, soil aux liquides qui baignent une membrane, soit à ceux dont le (issu de celle-ci est imprégné, peut avoir sur les produits de l'endosmose, je citerai les expériences suivantes, dues à M. Morin (de Genève). Si l'on prend pour cloison osmo- tiqtie la portion du placenta d'un Ruminant se trouvent les cotylédons, et si l'on charge successivement l'endosmomètre avec divers liquides tenant en suspension des matières grasses, on voit que tantôt ces matières ne passent pas avec les autres substances en dissolution dans les liquides qui leur servent de menstrue, mais (]ue d'autres fois elles traversent la membrane, et que cela a lieu quand elles sont émulsionnécs d'une manière très parfaite. Ainsi , dans ces expériences , les globules de beurre en susitension dans le lait étaient retenus par la mem- brane, tandis que les matières grasses émulsionnécs dans le jaune d'(ïîuf, bien divisées dans l'eau, traversaient la cloison osmolique (1).

Des différences analogues s'observent dans l'économie ani- male. Ainsi, (juand de l'huile, dans son état ordinaire, est em- prisonnée dans une anse intestinale, le volume de ce liquide ne change que très lentement , t;indis (ju'il disparaît prom[)te- ment s'il a été préalablement émulsionné (2).

La connaissance des voies par lesquelles ce transport s'ef- fectue a été beaucoup avancée par les observations microsco- piques faites depuis quelques années sur certaines parties de la

Mode

d'iiitroduclioa

dos matières

trrasscs.

(1) Ainsi que nous le verrons bien- le courant qui ifs charriait devenait tôl, M. Morin a trouvé aussi que le plus rapide (a). transport des particules de maUères (2) Cette expérience a été faile d'une grasses tenues en suspension dans un minière coiiip:uMîive par M. Don- liquide était d'autant plus facile, que diM-s (6) et par M. Jeannel (c).

(a) Morin, Nouvelles expériences sur la pi'.rméabilUé des vases poreux et des membranes des- séchées par les substances nutrilives {Mém. de la Société de phijsique et d'histoire naturelle de Genève, 1854, t. XITl, p. i!55 et 258).

(&) Donders, Uebcr die Aul'saufjung von Fetl in dem U.irmkanal (\!oiusclioU's Untersuchungen *!(!• Nalurlehre des Menschens und dcr Tiiiere, t. II, |i. lU3j.

[c] Jeannel, Hecherches sur l'absorption et l'assimilation des huiles grasses émulsiûiindes {Comptes rendus de VAcad. des sciences, 1859, t. XLVIII, \<. 581).

!228

ABSORPTION.

tunique muqueuse de l'intestin pendant que l'absorption des produits de la digestion est très active. En étudiant ainsi les villosités qui garnissent cette membrane, MM. Dclafond et Gruby ont pu constater que les globulins de graisse pénètrent d'abord dans l'intérieur des cellules cylindriques dont se compose le revêtement épithélique de ces filaments perméables, et que ces corpuscules traversent ensuite la substance amorphe située entre l'épitliélium et les cavités adjacentes qui constituent, soit les racines des lymphatiques, soit le réseau capillaire sanguin (1). L'entrée des particules graisseuses dans la cavité de ces cellules épilhéliales a été observée plus récemment par un grand nombre de micrographes, et ne peut être révoquée en doute; mais nous ne savons pas encore d'une manière bien précise com-

(1) Le fait de la piiiiélration de parliciilcs graisseuses de la cavité de l'inlcstin dans l'intérieur des cellules épithéliques des villosités fut aperçu en 18/i2 par M. Goodsir (d'Edimbourg) ; mais ce physiologiste distingué croyait que, dans l'acte de l'absorption, ces appendices spongieux se dépouillaient de leur tunique épithéiiale, et que les matières étrangères n'avaient qu'à traverser les tissus sous-jacenls pour arriver dans le canal lymphatique creusé au centre de chaque villo- sité (a).

En 18/i3, MM. Gruby et Delafond décrivirent ce phénomène d'une ma- nière plus exacte , et en comprirent mieux la signification. Ils regardèrent

chaque cellule de l'épitliélium des villosités comme étant un organe chargé de recevoir dans son intérieur les molécufes graisseuses qui consti- tuent le chyle, et de les transmettre, par son extrémité effilée au tissu spongieux dans lequel est creusée la cavité radiculaire du vaisseau lym- phatique correspondant. Les parti- cules de graisse logées de la sorte dans les cellules épilhéliales avaient de 7^ à ~„ de millimètre de dia- mètre, et se voyaient chez les Herbi- vores aussi bien que chez les Carnas- siers (6). Plus récemment, l'entrée de petites gouttelettes de graisse dans ces cellules a été constatée par M. Kôlliker, M. Briicke et plusieurs autres.

(«) Goodsir, Structure and Functions of the Intestinal villi {EiUnburgh Philosoph. Journal, 1842, cl Anat. and Pathol. Observ., in-8, 1847, p. 6).

(fc) (Iruliy et Dolafoml, Résultats de recherches faites sur l'anatomie et les fonctions des villo- sitcs intestinales, l'absorption, etc. {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1843, t. XVI, p. 1104).

Briicke, Uebcr die Chylus'jcfiissc imrf die Résorption des Chylus (Mém. de l'Acad. de Yie7me, 1854, I. VI, p. 09).

Ktillilicr, FAnige Bemerkungen ûber die Résorption des Fettes in Darm {Vcrhandl. der Fhys.-Med. Gescllschaft in Wûrzburg, 1856, t. VII, p. 174).

INFLUENCE DES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DES LIQUIDES. 229

inent cette introduction s'o})ère. Il existe, à la surface libre des cylindres épithciiaux des villosités, une couche assez épaisse de substance albuininoïde qui en ferme l'entrée, et qui constitue ce que les anatomisles appellent quelquefois le bourrelet de ces cellules. M. KôUiker et quelques autres micrographes pensent qu'elle est formée par la paroi solide de l'utricule, et que cette lame membraneuse est percée de pores ou lacunes d'une ténuité extrême, qui livrent passage aux graisses, et qui se laissent même apercevoir sous l'apparence de stries perpendiculaires. M. Brùcke la considère comme étant constituée par une matière molle, élastique et glulincuse, qui serait comparable à la sub- stance sarcodique des Animalcules les plus simples, et qui se laisserait Iraverser par les particules étrangères sans olïrir, pour les recevoir, aucun passage préétabli (1). Je suis très disposé à

(1) Ainsi que nous le verrons plus en détail par la suile, la tunique épi- théliale qui revêt la membrane mu- queuse de l'intestin se compose d'une couciie unique d'organites de forme cylindrique ou conique, disposés pa- rallèlement entre eux et soudés côte à côte, de façon à être liiîres par une de leurs extrémités et <> adhérer aux tissus sous-jaconts par le i)out opposé, qui est toujours plus ou moins aminci (a). L'intérieur de chaque cy- lindre ou cellule est occupé par un noyau clair entouré d'une substance albuminoïde, et son extrémité libre est constituée par une sorte de cou- vercle assez épais qui est garni de cils vibratiles. MM. Delafond et Gruby

ont considéré ce couvercle comme étant pourvu d'une ouverture cen- trale, dilatable et contractile, qui livre- rait passage aux particules de matières grasses dont l'absorption est en voie de s'accomplir (6).

Cet orifice ne paraît pas exister, et 1\1. KôUiker a remarqué, dans l'épais- seur du bourrelet ou couvercle de CCS cellules, un grand nombre de stries parallèles d'une finesse extrême et perpendiculaires à la surface libre de la lame mcmbraniforme ainsi consti- tuée. Il pense que ces lignes corres- pondent à autant de pores linéaires on de passages conduisant de l'exté- rieur dans l'intérieur de l'utricule (c) ; mais il résulte des recherches plus

(a) Hsnic, Sumholœ. ad anatomiam vlllonun ïnteslïnalïum, 1837, et Ti-ailé d'anatomie géné- rale, 1. 1, p. 244, pi. 1, fig. 8.

(6) Delafond et Gruby, Résultats de recherches faites sur l'anatomie et les fonctions des villo- sités intestinales, l'absorption, etc. {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1843, t. XVI, p. HOî.).

(c) KôUiker, Nachweis eines besonderen Baues der Ciilinder'iellen des Duimdarmes der zur Fettresorption in Deiug zu stehenschcint {Verhiindl. der Pliysikalisch-Med. Gesellschaft m W'xirzHrg , 1855, t. VI, p. 253), et Éléments d'histologie, p. 459.

2oO ABSORPTION.

croire que eeltc dernière opinion est l'expression de la vérité; mais, dans l'élat actuel de la science, la question ne me semble pas j)Ouvoir être tranchée , et par conséquent je ne la discuterai pas en ce moment; j'aurai d'ailleurs à y revenir quand je traiterai d'une manière spéciale des actes complémentaires de la fonction digeslive. ^

La pénétration des matières grasses dans l'intérieur des cellules épithéliales ne se voit pas seulement à la surlace des villosités intestinales ; elle a été reconnue dans d'autres parties du corps, et il est probable que c'est en passant par cette voie, plutôt qu'en s'insimiant entre les utricules constitutives des tissus épitbéliques, que les liquides traversent en général la couche

récentes de MM. BreUauer et Steinach que ces stries sont dues à une autre disposition ; que le couvercle se com- pose principalement d'un agrégat de petits corpuscules filiiormes ou bâton- nets, qui ne sont probablement autre chose que les cils vibraliles aperçus il y a quinze ans par MM. Gruby et Delafond, et observés plus récem- ment par M. Funke; que les lignes parallèles décrites par M. Kulliker seraient dues, non à des pores, mais à ces cils ou bâtonnets accolés les uns aux autres, et que l'ensemble formé par ceux-ci adhérerait au con- tenu de la cellule sous-jacente bien plus qu'aux parois latérales de cette utricule (a).

Les observations de ces derniers physiologistes sont par conséquent favorables à l'opinion de M. Briicke (6), et me portent à concevoir le phéno- mène de l'absorption de la graisse

comme s'efTectuant de la manière sui- vante. Les particules graisseuses dans un état de division extrême s'engage- raient entre les filaments constitutifs de l'espèce de pinceau qui forme la majeure partie du bourrelet ou cou- vercle de la cellule, et rencontreraient au-dessous une couche membrani- forme de matière sarcodique qui se- rait eu continuité latéralement avec la portion solide des parois de l'orga- nite cylindrique, mais qui, n'étant pas consolidée au même degré, céderait sous la pression de ces particules et les laisseraient passer jusque dans l'intérieur de la masse albuminoïde logée dans la cavité de celte cellule, puis reviendrait sur elle-même et re- prendrait sa foime primitive, ainsi que cela se voit à la surface du corps chez les Amibes et autres animalcules du groupe des Sarcodaires, dont il sera question dans la UT Leçon.

(a) BreUaiier et Ricinacli, Untcrsiichungen ûher das Cyliiulerepilhelmm dcr Darmzotten und seine Beaieimng zur Fetlresorption (Sitzîuigsbcv. der Wiener Acad., 185T, t. XXlll, p. 303, fig. 1-3).

(b) Driinkc, 0;). rit {Iknhschriflen der Wiener Akad. dcr Wissenschafl., 4854, t. M, p. 99j,

INFLUENCE DES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DES LIQUIDES. 231

formée par ceiix-ei à la surface libre des membranes et arrivent dans les aréoles des tissus sous-jacents (1 ). IMais on voi que pour expliquer le mécanisme de cette transmission de rutricule épi- tbélique aux parties voisines , il existe les mêmes difficultés qu'au sujet du mode d'entrée des matières étrangères dans ces cellules, et qu'à moins de supposer que celles-ci soient per- cées de pores à leur paroi interne aussi bien qu'à leur sur- face libre, on ne se rend bien compte du phénomène qu'en adoptant l'hypothèse de M. Briickcet en admettant que la sub- stance constitutive de ces parois est une matière sarcodique qui ne se serait consolidée en forme de lame solide cpie latérale- ment dans ses points de jonction avec ses semblables, et serait restée à l'état semi-fluide aux deux pôles de l'utricule, tandis que dans d'autres régions du corps , à la surface de la peau, par exemple, cette consolidation se serait effectuée dans toute l'étendue des parois des cellules épithéhales (2).

(1) M. Viichow a constalé la péné- iralion des nialièrcs grasses dans les cellules épithélialcs qui tuplssenl la vésicule biliaire {a), cl M. Kolliker a observé le même l'ait dans l'estoniac chez divers petits Mammifères à la mamelle (6).

('2) M. Donders, qui partage l'opi- nion de M, Kolliker, relativement à la structure des cellules épithéliales des villosités , oppose à l'hypothèse de M. IJrïicke le fait du gonflement de ces utricules en présence de l'eau ou d'une dissolution saline faible. Par reflet de celte turgescence , ces ulri- cides peuvent acquérir même la forme

d'un sphéroïde, et il en conclut qu'elles doivent être limitées de tous les côtés ])ar une paroi membraneuse (c; ; mais ces modilications ne me semblent pas incompatibles avec le mode de struc- ture indiqué ci-dessus, car le gonfle- ment peut être déterminé par la tur- gescence de la matière albuminoïde logée dans l'intérieur i!e la cellule, tout aussi bien que par la distension directe des parois de celle-ci.

Je dois ajouter que ce physiologiste, de même que M. KuUiker, a vu dos traces de la présence de particules graisseuses dans l'épaisseur même de la couche superficielle de matière qui

(a) Viichow, Ueber das Epithel. der Gallenhlase, undûber einen intermediaren Stofl'tuechsel des Fettes (Archiv fur palhol. Anat. laid P)iysiot., !857, l. XI, p. 574).

(b) Kolliker, Emige Bcmerkumjen ùbev die Résorption des Fettes im Dann {Verhaiidl. der phys.-med. Gesellschafl in ]Vilrx:biu'g, ISuO, t. VII, p. 17-i).

(c) Uoiulers, Op. cit. (Moleschou's Untersucli. x^itr Naturleitrc des Mensalien und der Thiere, 1857, t. Il, p. ilC<).

2â2

ABSORPTION.

Alisorplioi) (lu niercmc.

§1/1. Les graisses liquides ne sont pas les seules sub- stances non miscibles aux humeurs de l'organisme qui sont susceptibles de pénétrer à travers les tissus vivants, et d'ar- river jusque dans le torrent de la circulation. Ainsi la pra- tique médicale nous a appris depuis longtemps que cer- taines matières qui ne sont pas susceptibles de former une émulsion avec de l'eau peuvent se diviser d'une manière ana- logue dans un corps gras, et que sous cette forme leur absorption devient plus facile que si on les appliquait sur la surface absor- bante sans leur avoir fait subir cette préparation. Le mercure nous en offre un exemple remarquable ; mis en contact avec la peau quand il est à l'état liquide, ce métal ne pénètre dans l'organisme qu'avec une lenteur extrême et en quantité fort minime , tandis que, incorporé à de la graisse de façon à y être comme à l'état d'émulsion, il est absorbé avec assez de rapidité pour déterminer prompfement certaines modifications dans les fonctions des glandes (1).

recouvre répitliélium des villosite's; mais ce fait s'explique également bien dans les deux hypothèses de l'existence préalable de pores dans une lame membraneuse solide ou de l'état semi- fluide de la matière constitutive de cette couche membraniforme.

(1) Lorsque le mercuie arrive en contact avec les surfaces absorbantes de l'éconoiiiie animale à Télat de va- peur, c'est-à-dire à l'élat de division extrême, ce métal pénètre facilement dans l'organisme, et, transporté par le torrent de la circulation dans ie système nerveux, l'appareil salivaire et d'autres organes, il exerce une in- fluence considérable sur le mode d'ac-

tion de ces parties, et peut déterminer la salivation, la chute des dents, la paralysie, et même la mort. Comme exemple de ce mode d'action, je cite- rai les accidents survenus à bord d'un navire chargé de mercure, et sur le- quel l'équipage tout entier fut atteint par l'action toxique de la vapeur for- mée par cette substance (a).

Quand le mercure est sous la forme liquide et ne se trouve pas dans un état de grande division, il peut rester pendant fort longtemps en contact avec une membrane absorbante sans y pé- nétrer en quantité appréciable. Ainsi on cite beaucoup de cas dans les- quels ce métal a été introduit en doses

(«)î3uriK:U, An Accnunt of the E/fects ofMcrcurialYapourson the Crew oflI.N's ship Triumph [Philos, rrans., 18^23, p. 402).

1NPLUE^'CE DES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DES LIQUIDES. 233

Les voies par lesquelles l'absorption s'effectue sont en général trop étroites et trop difficiles à parcourir pour que les liquides non miscibles aux humeurs dont les tissus sont imbibés puissent les traverser sous l'inlluence des courants endosmotiques seule-

considérables dans le tube digestif, sans déterminer aucun accident (a). On sait aussi que ce liquide injecté dans les veines obstrue les vaisseaux capillaires sanguins, et y arrête le passage du sang (6), On aurait donc pu croire que dans cet état il ne pour- rait être absorbé, et que dans les pré- parations mcrcuriellcs au moyen des- quelles on le fait pénétrer dans l'or- ganisme, il devait être toujours dans un état de combinaison chimique qui le rendrait soluble. Mais cela n'est pas. Incorporé à de la graisse, i! est simple- ment divisé en globulins d'une très grande ténuité, et sous cette forme il est susceptible de passer dans les vaisseaux sanguins. Ce fait a été con- staté expérimentalement par Aulen- rieth et Zeller (c) , ainsi que par plusieurs autres physiologistes. Par exemple, Oesterlen, ayant rasé une partie du corps d'un Lapin, y prati- qua des frictions avec de l'onguent gris. Quelques henres après, il dé- tacha un lambeau de peau à environ un centimètre au-dessus de l'endroit frictionné , puis il ouvrit qnelques-

unes des veines sous-cutanées, et en examinant au microscope le sang ob- tenu de la sorte , il y reconnut des particules de mercure , tandis qu'il ne put découvrir aucune trace de ce métal dans le sang fourni par les veines du côté opposé du corps {d}.

Précédemment , l'absorption du mercure à l'état métallique avait été constatée dans plusieurs cas, soit parce que ce métal s'était retrouvé dans le sang ou dans quelques autres parties du corps, telles que les os ou le cerveau, les articulations, dans l'intérieur de l'œil ou dans le pus d'un abcès, soit parce qu'après avoir traversé l'orga- nisme il s'était échappé au dehors par les voies urinai res (e) ; mais, ainsi que je l'ai déjà dit, on n'était pas d'accord sur le mode d'introduction de cette substance dans l'économie, et quel- ques physiologistes pensaient qu'avant son absorption, le métal avait être transformé en bichlorure de mercure 01! en quelque autre composé soluble. Ainsi M. Miahle, ayant reconnu qu'en présence de l'oxygène et d'un chlo- rure alcalin ( surtout du chlorure

(a) Voyez Orfila, Traité des poisons, t. I, p. 352.

(6) Gaspard, Mémoire physiologique sur le mercure (Journal de physiologie âe Magendie, 1821, t. I, p. -105).

(c) Aiiteiirietli und Zellor, Ueber das Daseinvon Quecksilber das âusserlich angewendct worden in der Blutmasse der Thiere (Rcil's Archiv fur die Physiol., 1808, t. VIII, p. 2-28).

(d) Oesterlen, Uebcrgang des regidinisclien Quecksilbers in die Blutmasse und die Oi'gane {Archiv liir plnjsiologische Heilkunde, 1843, t. II, p. 536).

(e) Cantu, Fresenz-a del mercurio nelle orino dei sijildici doppo i remcdii mcrcuriali adminis- Irati {Annali di med. di med. di Omodei, 18-24, t. XXXII, p. 53), et Spécimen chcmlco-medicum de mercurii prœsenlia in urlnis sypbiliticorum mercurialem curationem patienlium (Mcm. délia Soc. délie scienz.. dl Torino, 18-24, t. XXI.\).

Voyez aussi : A. van Hasselt, Over het Vergiftig vermogen van mctalllsch kwik vooral in des vloeibarten toestand (Nederlandsch Lancet, série, I. V, p. 81).

Absorption

présumée

des matières

solides.

2S/l ABSORPTION.

ment, et le concours d'une certaine pression parait être toujours nécessaire pour en déterminer l'entrée dans le torrent irriga- toire. A plus forte raison, les membranes organiques opposent- elles de grands obstacles à l 'introduction de matières solides, et lorsque celles-ci se trouvent à l'état massif ou même réduites en poudre assez fine pour être apte à rester en suspension dans un liquide, elles sont d'ordinaiic inabsorbables. Ainsi, dans la plupart des cas, les corps solides qui ne sont pas solubles dans les humeurs de l'organisme ne peuvent y pénétrer, et lors- qu'une force mécani(pie les jiousse jusque dans la profondeur d'un tissu vivant, ils y restent inaltérés. C'est de la sorte que les particules de substances colorantes qui sont logées dans l'épaisseur de la peau à l'aide du tatouage y forment des taches indélébiles, et jusqu'en ces derniers temi)s tous les physiolo- gistes s'accordaient à penser que l'état de fluidité était une con- dition pour que l'absorption d'un corps quelconque fût possible. Mais, en examinant le cadavre de personnes dont la peau avait été comme incrustée par des dé|)ôts de substances minérales insolubles employées pour y tracer des dessins, on a vu parfois que des particules très ténues de ces matières colorantes en avaient été détachées, suivant toute apparence, par l'cflét du frottement, et avaient été transportées dans des parties plus ou moins éloignées de l'organisme (1). Or, ce transport ne

d'ammonium ) , ce métal entre dans une combinaison de ce genre, a cru pouvoir établir que c'est seulement à l'état de composé soiubie qu'il est ab- sorbé (a). On a argué aussi dos expé- riences de (iaspard sur l'obstruction des vaisseaux capillaires par !e mer- cure liquide injecté dans les veines [b), pour soutenir que ce corps ne pouvait être absorbé à l'élat métallique ; mais

quand le mercure est divisé en parti- cules extrêmement fines et dans un état comparable à celui des graisses dans ime émulsion, sa présence dans les vaisseaux sanguins ne doit pas pro- duire ies mêmes effets que lorsqu'il se trouve réuni en gouttelettes d'un diamètre supérieur au calibre des ca- pillaires.

(1) Ainsi M. Cl. Bernard a trouvé

(a) Miallie, Chimie appliquée à la physiologie, p. 4-51.

(b) Gaspard, Mémoire sxir le mercure (Journal de physiologie de Magendie, 1821, 1. 1, p. 1G5).

INTRODUCTION Î)K COnPlSCtLES SOLIDES. 235

semblait pouvoir être expliqué qu'en supposant que ces cor- puscules avaient é(é absorbés et charriés par les fluides nour- riciers. On devait donc penser que les substances insolubles, aussi bien que les liquides non miscibles aux humeurs, sont absorbables à la condition d'être réduites en particules suffi- samment ténues , et effectivement cela parait être ; seule- ment, pour déterminer leur passage à travers les tissus vivants et leur arrivée dans le torrent irrigatoire, il faut l'in- tervention de forces mécaniques qui ne sont pas nécessaires pour effectuer l'absorption des fluides miscibles aux humeurs de l'économie.

Depuis quelques années, un grand nombre d'expériences intéressantes ont été faites sur l'introduction de corpiiscules solides de l'extérieur de Torganisme jusque dans le sang, et si elles n'établissent pas d'une manière satisfaisante la possibilité de ce passage par suite du travail normal de l'absorption, elles prouvent au moins que sous l'influence d'une pression peu considérable, ces particules, quand elles sont très ténues, peuvent se frayer un chemin jusque dans l'intérieur du système vasculaire, et circuler dans l'organisme avec les fluides nourri- ciers sans (ju'il en résulte aucune lésion appréciable dans les parties qu'elles ont traversées.

Ce fait a été aperçu, mais incomplètement démontré, il y a environ quinze ans, par M . Herbst, dont j'ai déjà eu l'occasion de citer les travaux sur le système lymphatique (1). Ayant ingéré

des granules de cinabre dans les gan- Uon du passage des globules du lait

glions de l'aisselle cbez un sujet qui de l'intestin dans le chyle et dans le

portait sur le bras du même côté sang. Il opéra sur des petits Chiens

des tatouages colorés par cette sub- qui venaient de leter, et, apr^s avoir

slance minérale (a). lié le canal ihoracique, il examina au

(1) i\i. lierbst fit d'abord une série microscope le contenu de ce vaisseau,

d'expériences en vue de la constata- l'arnii les corpuscules de dilFérentes

(fl) Cl. Beninnl, Sur l'absorption {Union médicale, 1849, I. lil, p. 457),

"236 ABSORPTION.

dans le tube digestif de plusieurs Chiens des liquides tenant en suspension des corpuscules insolubles fort petits et plus ou moins faciles à reconnaître par le secours du microscope, des globules de lait ou des granules de fécule, par exemple, ce physiologiste trouva, tantôt dans le chyle, tantôt dans la lymphe, ou dans le sang de ces Animaux, des particules solides qui avaient la même apparence, et qui lui parurent appartenir à la matière étrangère employée dans l'expérience. Peu de temps après, M. OEsterlen, sans avoir eu connaissance des recherches de M. Herbst, arriva à un résultat analogue en administrant à divers Animaux du charbon réduit en poudre très fine, et plusieurs autres physio- logistes annoncèrent avoir constaté des faits du même ordre (1);

grandeurs qui nageaient dans le chyle, il s'en trouvait beaucoup qui lui pa- rurent ôlre des globules du lait, et il vit aussi des globules semblables dans le sang («) ; mais la distinction entre les globules graisseux du chyle et ceux du lait n'est pas toujours assez nette pour que ce résultat ait pu être considéré comme décisif. Dans d'au- tres expériences, M. Ilerbst ingéra de la fécule dans l'estomac, et, en ajou- tant de l'iode, soit au chyle, soit au sang, il vit une légère coloration bleue qui semblait indiquer la présence d'un peu de fécule dans ces liquides; mais ici encore la réaction n'était pas assez bien caractérisée pour décider la ques- tion de l'absorption des granules amy- lacés {h).

(1) Dans une première série d'expé- riences, M. Oesterlen étudia l'absorp- tion du mercure (c), puis il chercha à constater la possibilité du passage

de corpuscules solides de la cavité digestive jusque dans le chyle et le sang, sans lésion apparente ni de la muqueuse intestinale, ni des parois vasculaires. Dans cette vue, il fil ava- ler pendant plusieurs jours consécu- tifs a un certain nombre de Lapins, de Chiens et d'Oiseaux, du cliarbon réduit en poudre impalpable et délayé dans de l'eau. Puis il tua ces Animaux et examina au microscope du sang extrait de leurs vaisseaux en prenant toutes les précautions nécessaires pour empêcher !e mélange de ce liquide avec des matières étrangères quel- conques. Toujours il y trouva en plus ou moins grande abondance des cor- puscules noirs anguleux et de diverses formes, qu'il n'hésita pas à considérer comme ét.int du charbon; la plupart n'avaient que de ^ à ,'^ de ligne de diamètre; mais beaucoup avaient en- viron ,'3^ de long sur ^'^ de ligne en

(o) G. llurlist, Das Lymphgefdsssystem und seine Vevvichtung, p. 105 cl sniv.

(b) Herbst, Op. cit., p. 323 et suiv.

(c) Oesierlcn, Uebergany des regulinischen Qiiecksilbers in die lUulmassc und die Organe (Archiv (ûr l'hysiol. Jleilkunde, 1843, t. II, p. 53C).

INTRODUCTION DE COllPUSCULES SOLIDES. 2o7

mais, (ians toutes ces expériences, on pouvait concevoir des doules sur l'identité des corpuscules observés dans le sang ou dans la lymphe et ceux déposés dans le tube digestif, et, pour

longueur, et l'on en voyait qui avaient jusqu'à i^ de ligne. Ces corpuscules abondaient principalement dans le sang de la veine porte, et se voyaient aussi en nombre considérable dans la rate, les cavités droites du cœur et les poumons ; mais on n'en aperçut pas dans le canal thoracique. M. Oesterlen administra delà même manière à des Lapins et à un Coq du bleu de Prusse, et il trouva dans le sang de ces Ani- maux des corpuscules qui lui sem- blèrent être formés de celte sub- stance. Enfin il ne put constater ni à l'œil nu ni au microscope aucune lé- sion, ni dans les vaisseaux sanguins de l'intestin, ni dans la muqueuse parla- quellelcs corpuscules solides auraient passer pour aller du tube digestif dans le torrent de la circulation (a).

En 18Û7 , J\I. Eberhard répéta ces expériences en se servant non-seule- ment de mercure et de charbon, mais aussi de soufre en poudre très fine, et il arriva aux mêmes résultats. Des particules qui lui parurent être for- mées, les unes de charbon, les autres de soufre, se rencontrèrent dans la lymphe et dans le sang (6).

Des faits du même ordre ont été constatés par M. Claude Bernard et par M. Bruch (c).

Les recherches de MM. Donders et

Mensonides diminuèrent la valeur des conclusions qu'on croyait être en droit de tirer des résultats dont je viens de parler , mais fournirent de nouvelles preuves de la possibilité du passage de corpuscules solides de la cavité de l'intestin, ou de la surface de la peau, jusque dans l'intérieur du système vasculaire. Ainsi, après avoir fait avec de l'onguent mercuriel des frictions sur la peau tie quelques Lapins préa- lablement rasée, ils retrouvèrent dans le sang de ces Animaux des corpus- cules qui pouvaient bien être de la poussière de ce métal , mais dont la détermination ne présentait rien de précis. Leurs expériences sur le soufre leur parurent encore moins con- cluantes ; chez les Grenouilles, les résultats furent négatifs, et chez des Lapins on trouva quelques corpus- cules irrégulières qui semblaient être des grains de soufre, mais on ne put les identifier d'une manière satisfai- sante. Dans d'autres expériences faites sur des Lapins avec du charbon de bois réduit en poussière très fine, ils trou- vèrent dans le sang et dans le tissu du poumon de ces Animaux des cor- puscules noirs et anguleux qui avaient l'apparence des particules de charbon employées ; mais ayant examiné le sang d'autres individus qui n'avaient

(«) Ocstcdcn, Ucber den Eintritt von Kohle und anileni unlôslkhen Sloffen vom Darmkanal aus in die Bliumasse {Zeitschr. fur rationelle Medicin).

(b) Ebei'hardt, Versuche iiber den Uebergang (ester Stoffc von Darm und Haut aus in die Sdfte- masse des Kôrpers, Zimcli, 1847 (voyez GimsUdl's Jahresbericht, 1847, t. I, p. 120).

(c) Bernard, De quelques particularités sur l'absorption {Union médicale, 1849, t. III, p. 458). Brucli, Beitrdge zur Anatoinie und Physiologie der Dïmndarmschleimhaut [Zeitschr. fur

wissenschaftliche Zoologie, 1852, t. iV, p. 290).

:238 ABSORPTION.

bien établir que des matières solides peuvent être absorbées, il fallait expérimenter sur des particules mieux caractérisées et dont la provenance ne pouvait être douteuse. C'est ce que MM. Moleschotl et JMarfels ont cherché à faire à l'aide du sang d'un Mammifère ingéré dans le tubedigestif d'une Grenouille. En effet, les globules hématiques des Mammifères ne peuvent

pas élé nourris de la sorte, ils y trou- vèrent aussi des corpuscules tellement analogues aux précédents, que ce fait leur ôla toute confiance dans la déter- mination des précédents comme frag- ments de charbon. Enfin ils portèrent dans l'estomac de plusieurs Gre- nouillesdesgranulesd'amidon délayés dans de Teau , el quelques heures après, en examinant le sang des veines mésentériques, ils y virent quelques particules qui bleuirent par l'action de l'iode, et qui, par conséquent, de- vaient être considérées comme étant formées par de la fécule. Dans ce cas, il ne pouvait donc y avoir aucun doute quant à la nature des corpuscules en question ni à leur provenance (a).

M. l'nnke a cherché à résoudre la question de l'absorption de matières solides à l'aide d'expériences faites sur des substances grasses qui ne se liquéfient pas à la température du corps : de la stéarine el de la cire, par exemple. Pour obtenir ces graisses dans un état de grande division, il les faisait fondre à l'aide de la cha-

leur et les émnlsionnait alors en les agitant dans une dissolution de gomme leurs particules restaient en sus- pension après qu'elles eurent repris l'état solide par le refroidissement. L'énuilsion ainsi préparée fut intro- duite, tantôt par Ttesophage, tantôt directement dans l'intestin ; mais ja- mais M. Funke ne put reconnaître la pri'sence de ces graisses solides dans les cellules de l'épithélium intestinal, tandis qu'il vit toujours ces cellules se gorger de particules graisseuses, quand, au lieu de stéarine ou de cire, il administrait des corps gras qui sont fusibles à moins de ZiO degrés b).

Je dois ajouter que M. Mialhe, en répétant les expériences de M. Oester- len, n'a obtenu que des résultats né- gatifs (c).

M. UolTmann a fait des expériences analogues, et n'a pu, dans aucun cas, constater l'absoriition , soit du mer- cure métallique, soit de la poussière de charbon (d), et Bérard est arrivé au même résultat en employant du noir de fumée (e).

(ft) Ces reclierclies, faites sous ta direclion de M. Uonders, ont été publiées d'aljord sous forme de thèse par M. Mensnnides (De ahsovptione molecularum solidarum nonmilla, 1848), puis par le premier de ces niileurs dans un ouvrage spécial intitulé ; Ondenoclcingen omirent den overgang van vaste mulecukn in het vaatstelsetl (Nederlandsch Lancet, série, 1848, t. IV, p. 141).

(b) Vun\ic, Beitrcige %ur Physiologie der Vevdaming (Zcltschr. filr jcissenschaftl. Zoologie, t. VII, p. 315).

(c) Miallie, Chimie appliquée à la pliyslologic, p. l'J7.

(d) lloffmanu, Ueber die Aufnahme des Queclisilbers und der Fette in den Kreislauf (disserl. inaug.). VViirt/.liurg, 18-54 {Cai\il-M's Jahresbercht, 1855, p. 80j.

le) Bérard, Cours de physiologie, I. II, p. 72o.

INTRODUCTION DE CORPUSCULES SOLIDES. 239

être confondus ni avec ceux des Batraciens, ni avec aucun autre produit de l'organisme de ces Animaux : par conséquent, si, après en avoir introduit dans le canal alimentaire, on en trouvait dans le sang, il fallait nécessairement admettre que ces corpus- cules solides avaient traversé le tissu de la muqueuse intestinale pour arriverjusque dans le torrent circulatoire, et si cette intro- duction s'était effectuée sans lésion de cette membrane, on devait croire qu'ils avaient été absorbés. Or, dans plusieurs cas, ces deux auteurs reconnurent des globules du sang de IMammiiëre employés de la sorte, soit dans le sang en circulation dans l'intérieur des vaisseaux de la Grenouille, soit dans des gouttelettes de ce liquide extraites du cœur ou de l'une des grosses veines de ce Batracien (1). 11 est vrai que d'autres physiologistes, en répétant cette expérience, n'ont obtenu que

(1) Dans les recherches de M. Mar- fels, faites à l'instigation et sous la di- rection de M. Moleschott, on a choisi d'ahord le sang de Brebis, parce que les globules de ce liquide sont plus petits que ceux des autres Mammifères que Ton pouvait fiicilemeiit si' procu- rer, et qu'à rnison de la mollesse de ces corpuscules, on ne pouvait supposer que leur présence dans le tube digestif de la Grenouille serait une cause de lésion mécanique pour la surlace ab- sorbante. Le sang fut introduit dans l'estomacdes Grenouilles à l'aide d'une seringue, el dans plusieurs cas, en exa- minant, après un certain temps, diver- ses parties de l'ajjpareil circulatoire, on trouva dans fintérieur des vaisseaux des globules hématiques qui offraient tous les caractères de ceux de la Bre- bis; dans d'autres cas, on ne parvint pas à en distinguer à travers les parois vasculaires, mais on en reconnut dans le sang extrait du cœur. Dans une de

ces expériences, M. Marfels trouva même que les globules du sang de la Brebis qui étaient mêlés delà sorte aux globules hématiques de la Grenouille étaient plus nombreux que ces derniers. En employant de la même manière du sang de Veau et de Bœuf, ce physiolo- giste oblint des résultats analogues , maispUisdiÛicilement. Enfin, dansune autre série d'expériences , M. Marfels ingéra dans l'estomac de plusieurs Gre- nouilles du pigment choroïdien des yeux du Bœuf, après s'être assuré que les corpuscules de cette substance étaient reconnaissables dans le sang. Observant ensuite la circulation sous le microscope, il vit plusieurs fois des particules de cette matière colorante en, mouvement dans l'intérieur des vaisseaux mésentériques. Dans d'au- tres expériences analogues, ce phy- siologiste examina le contenu des vaisseaux chylifères du mésentère, et il y reconnut aussi la présence des

"IkO ABSORPTION.

des résultais négatifs ; mais le fait annoncé de la manière la plus nette par MM. JMolescliott et Marfels ne saurait être révoqué en doute, car il est impossible de supposer que des observateurs aussi babiles aient pu se tromper dans la détermi- nation des petits globules hématiques circulaires et biconcaves qui sont caractéristiques du sang des Mammifères, et qui se trouvaient mêlés aux gros globules elliptiques et biconvexes du sang de la Grenouille.

Reste donc à chercher la valeur qu'il convient d'attribuer à ce fait.

En étudiant au microscope les tuniques intestinales des Gre- nouilles qui avaient été nourries pendant un certain temps avec des aliments mêlés de particules du pigment de la choroïde de Vm\ du Bœuf, M. Marfels a trouvé beaucoup de cellules épi- théliales occupées par cette matière noire, et il pense par con- séquent que les corpuscules solides de très petites dimensions peuvent, de même que les globules de graisse, pénétrer dans ces utricuies d'une manière normale et passer de dans les vaisseaux sous-jacents. Dans une autre expérience, ce physiolo- giste employa un tronçon d'intestin séparé du corps et rempli de liquide chargé du même pigment ; il opéra à une chaleur douce et soumit le tout à une certaine [)ression ; vingt-quatre heures après, il examina au microscope les parois de ce tube membraneux, et y trouva sur plusieurs points des cellules épi- théliales qui lui parurent contenir des particules du pigment (i).

corpuscules du pigment qui avait été inférieure d'un tube de verre. Une

mêlé aux aliments ingérés dans l'es- dissolution de sel commun tenant en

tomac du Batracien (a). suspension le pigment choroïdien fut

(1) Dans une première série de ces introduite dans cet appareil à la hau-

expériences, M. Marfels fit usage d'un teur voulue pour déterminer dans

tronçon d'intestin de Bœuf disposé l'intcslin une poussée égale à une

en manière de sac et fixé à l'extrémité pression de 9 à 10 centimètres de

(a) Marfels, Recherches sttr la voie par laquelle de petits rorpvsc}tles solides passent de l'in- testin dans l'intMeur des vaisseaux chylifères el sanyuins i^Ann. des sciences nat., i' iéùc, 1850, t. V, p. 144 elsuiv.).

IISTRODUCTION L)E CORPUSCULES SOLIDES. 2/^1

Ce résultat est, comme on le voit, très favorable à l'opinion de M. Briicke, relativement au mode de constitution de ces cellules et à leur rôle dans l'absorption de la graisse. IMais je dois ajouter que M. Donders, ayant répété avec beaucoup de soin les expé- riences de M. Martels, est demeuré convaincu de l'impénétra- bilité de ces cellules pour les particules solides, et pense que c'est toujours en se frayant un chemin anormal que les cor- puscules durs traversent les tissus organiques et arrivent jusque dans les canaux occupés par les fluides nourriciers (1). D'autres recherches dues à M. Hollander n'ont donné aussi que des résul- tats négatifs (2). Enfin, la plupart des expériences faites sur le

mercure. On opéra d'abord à la lem- péralLire ordinaire , et l'on n'obtint que des résultats négatifs ; mais d'au- tres essais , faits à une chaleur de 2!i degrés, eurent un plein succès, car au bout de vingt-quatre heures on trouva dans les parois de la muqueuse des particules de pigment qui paru- rent être engagés dans l'intérieur des cellules épilhéliques. Dans d'autres expériences, on employa un morceau d'intestin provenant du cadavre d'une femme , et l'on obtint un résultat analogue; mais la plupart des cellules épithéliales étaient détachées de la muqueuse, et dans ce cas, aussi bien que dans plusieurs autres expériences analogues la muqueuse s'était dé- pouillée plus ou moins complélement, on remarqua l'existence d'un grand nombre de corpuscules pigmentaires dans la substance des villosités (a).

M. Moleschott a répété ces expé- riences sur des Animaux vivants, chez

lesquels il excitait de forts mouve- ments pérlstaltiques des inteslins au moyen du galvanisme, et dans plu- sieurs circonstances il a constaté de nouveau la présence des particules pigmentaires dans les cellules épitiié- liales ; mais dans la plupart des cas le résultat était négatif (ô).

(1) M. Donders a répété plusieurs fois les expériences de .MM. Marlels et Moleschott, relatives au passage des globules du sang de la Brebis, de la cavité digestive des Grenouilles dans le torrent circulatoire de ces Ani- maux, sans pouvoir, dans un seul cas, constater la présence d'un glo- bule hématique de ce Mammifère dans l'intérieur des vaisseaux sanguins des Batraciens. Il n'a obtenu aussi que des résultats négatifs en employant, soit le pigment choroïdien, soit do l'indigo, et en opérant sur des Lapins aussi bien que sur des (irenouilles (c).

(2) !M. ilollandL'r a fait, sous la di-

(a) Mai-fcls, Op. cit. {Ann. des sciences nat., série, 1856, t. V, p. 159 etsuiv.).

(6) Moleschoit, Erneuter Beweis filr dus Eindringen von festen KOrpcrcheii in die kegelfôr- migen Zellcn der Darmschleimhaut [Uiitcrs. ztir Naturlehre des Menschen und der Tliiere, 1857, t. II, 1». 119).

(c) Donders, Uéber die Aufsaugung von Fett in dem Darmkanal (Moleschott's Untcrsuchungen ztir Naturlehre des Menschen und der Thiere, 1851, t. Il, p. 113 el siiiv.).

V.

16

245

ABSORPTION.

cadavre par M. Marfels l'ii-même me semblent devoir être con- sidérées comme venant à l'appui de cette manière de voir, et, dans l'état actuel de nos connaissances, la question en litige entre ces physiologistes ne me semble pas résolue. Mais, quoi qu'il en soit à cet égard, il me paraît bien démontré que sous l'in- fluence d'une pression peu considérable, et qui ne dépasse pas celle développée parfois par les contractions des fibres charnues du tube intestinal, les particules solides d'une grande ténuité peuvent fticilement passer à travers la substance de la membrane muijueuse et arriver jusque dans les courants lym[)hatiques ou sanguins adjacents. Ce phénomène, il est vrai, n'est probable- ment pas un résultat normal de l'absorption , et me semble devoir être considéré comme la conséquence d'une solution de continuité produite par l'action du corpuscule solide sur la matière constitutive de la membrane; mais cette matière est si molle, si extensible et si élastique, que la lésion microscopique ainsi effectuée ne laisse aucune trace appréciable et ne déter- mine aucun trouble dans les fonctions. Ce serait donc un phé- nomène analogue à celui dont nous avons déjà été témoins en étudiant le mode de passage accidentel des globules sanguins

reclion du professeur Bidder, de Dor- pal , d'aiUres expériences qui sont également défavorables aux vues de MM. Molescholt et Marfels. 11 a mon- tré qu'on ne pouvait attacher que peu d'importance aux essais faits sur l'ab- sorption de l'indigo en suspension dans l'eau, de la fécule ou du charbon en poudre, et, après avoir constaté que les globules du sang de Bœuf que l'on injecte directeuient dans les veines de la Greoouille sont reconnais-

sablés dans le sang de cet Animal pendant plusieurs heures, il en in- troduisit dans les voies digestives d'un nombre considérable de ces Batra- ciens, dont il examina ensuile avec soin le sang à diverses périodes pen- dant et après la digestion. Or, dans aucun cas, il ne put découvrir dans ce liquide un seul globide de sang de Bœuf ou de Veau, et il en conclut que ces corpuscules solides ne peuvent être absorbés (a).

(a) (j. liollaïuier, Quxstiones de corpusculorum soiidorum e tracta iiitestinali in vasa sangui- fera transitu (dissert. iiiaut?.), Dorpat, 1850 {Zeitsclir. fur ratwnelle Medicin, 3" sériu, 1857, t.l, p. 180. Uericht fur 1850).

à

CARACTÈRE GÉNÉRAL DK CE PHÉNOMÈNE. 2/lS

(les vaisseaux capillaires dans les radicules du système lym- phatique (1 ).

§ 15. En résumé, nous voyons donc ([ne l'absorption est Résumé. un phénomène physique qui est subordonné aux relations de grandeur entre les particules de matière qui se trouvent en contact avec la surt^ice d'un tissu organique et les cavités inter- stitielles ou autres par l'intermédiaire desquelles cette surface communique avec l'intérieur des canaux sanguins ou lympha- tiques adjacents ; que jmr conséquent un certain degré de division de la matière est la première condition qui doit être remplie pour que l'absorption de cette substance soit possible; que, toutes choses étant égales d'ailleurs, l'introduction de celle-ci jusque dans le torrent circulatoire sera d'autant plus facile que ses particules seront plus ténues et jilus mobiles; et que, dans l'immense majorité des cas, sinon toujours, ce degré de division n'est atteint que si le cor|)S sur lequel la puissance absorbante tend à s'exercer se trouve à l'état tluide.

Il résulte également de (;e f[ui précède que, toutes choses étant égales d'ailleurs, la grandeur de la puissance absorbante d'un tissu vivant est proportionnelle à la brièveté et à la largeur des voies interstitielles qui sont creusées dans son épaisseur et qui font communi(pier sa surlxice libre avec les canaux irriga- toires adjacenis, ou, en d'autres mois, avec son degré de per- méabilité.

Nous avons vu aussi que les })uissances motrices qui déter- minent l'absorption sont [irincipalement les attractions molé- culaires qui entrent en jeu pour produire les phénomènes osmotiques; que la capillarité, la diffusion des liquides et les courants dus à l'endosmose sont par conséquent les causes principales de ce transport des matières de l'extérieur jusque dans la cavité du système irrigatoire ; mais que d'autres

(1) Voyez tome IV, page 5/i8.

0/j/| ABSORl'TION.

forces mécaniques, et notamment la pression, peuvent inter- venir.

Enfin nous avons vu que le degré de plénitude des vaisseaux et la rapidité avec laquelle les iluides nourriciers se renou- vellent dans les points par lesquels l'introduction s'eftectue, sont aussi des circonstances qui influent sur la quantité de matière absorbée en un temps donné.

Cette quantité est donc nécessairement variable suivant le lieu l'absorption s'effectue, suivant l'état de l'économie, et suivant la nature des substances qui se trouvent en contact avec le tissu organique.

Ainsi, tout en étant un phénomène essentiellement physique, l'absorption se trouve, jusqu'à un certain point, soumise à l'inlluence de la puissance vitale. Celle-ci n'est pas la cause de l'introduction des matières étrangères dans le torrent de la cir- culation ; mais, d'une manière indirecte, elle règle en partie le degré d'activité avec lequel ce transport s'effectue, car elle détermine quelques-unes des conditions dont ce degré d'acti- vité dépend : par exemple, la vitesse avec laquelle le fluide nourricier se renouvelle dans le tissu absorbant, et probable- ment aussi l'état de contraction tonique ou de relâchement de ce tissu, ainsi que la nature des sécrétions dont sa substance peut être lubrifiée.

En tenant compte des diverses circonstances que nous ve- nons de passer en revue, on peut juger d'une manière approxi- mati\e des résultats que l'absorption donnera ; mais nous voyons que ce phénomène est en réalité très complexe, et que les propriétés physiques des tissus vivants qui en sont le siège peuvent être modifiées i>ar l'action des forces physiologiques, de sorte qu'il n'est pas toujours possible de calculer avec quelque degré de précision les elTets qui se produiront dans un cas déterminé. Nous jKuivons néamnoins nous former une idée assez nette de la nature du travail qui s'effectue de la sorte

CARACTÈRK GÉNÉRAL DE CE PHÉNOMÈNE. 2/l5

dans l'organisme des êtres vivants, et prévoir ce qui doit arriver dans la plupart des eas il est appelé à intervenir.

L'absorption, eomnie je l'ai déjà dit, peut s'exercer de deux manières et déterminer ainsi des résulîats très difterents. Elle peut effectuer l'introduction de matières qui sont étrangères à l'économie et qui se trouvent en contact seulement avec la surface libre du corps, ou bien opérer l'enlèvement de sub- stances qui sont logées dans la profondeur des tissus au milieu desquels serpentent les courants irrigafoires formés par le fluide nourricier. Le premier de ces actes est destiné à assurer l'alimentation du travail chimique et histogénique dont la ma- chine vivante est le siège ; le second est utilisé dans cette même machine pour l'expulsion des matériaux dont le rôle physiolo- gique est terminé. Nous aurons donc à étudier l'absorption d'aboi'd comme prélude, puis comme complément du grand phénomène de la nutrition, et, en examinant tour à tour celle fonction dans ses rapports avec l'assimilation et avec l'excré- tion, il nous faudra chercher quelle part les veines et les vais- seaux lymphatiques peuvent prendre dans le transport des matières qui arrivent aux organes ou qui en sortent, sujet dont la discussion serait prématiu\^e aujourd'hui.

Sans nous arrêter davantage sur ces considérations géné- rales, nous passerons donc à l'examen de l'un des cas parti- culiers que je viens de signaler, et nous chercherons à nous rendre compte de la manière dont l'introduction des madères nutritives s'effectue.

Mais, avant d'aborder cette question, il me faudra traiter d'une autre fonction. En effet, la plupart des substances que les Animaux ont besoin de porter ainsi dans la profondeur de l'économie ne se trouvent pas dans la Nature sous une forme qui les rende absorbables, et, [JOur devenir aptes à pénétrer de la sorte dans l'organisme, il faut qu'elles subissent une cer- taine préparation. Au lieu d'aclii'ver immédiatement l'étude de

246 ABSORPTION.

l'absorplion, nous devrons par conséfjuent nous occuper main- tenant de l'examen des actes physiologiques à l'aide desquels les matières nutritives sont placées dans les conditions vou- lues pour que leur arrivée dans l'apitareil irrigatoire soit pos- sible, actes qui constituent le phénomène de la digestion. Dans la prochaine Leçon, nous commencerons donc l'histoire de cette partie importante des fonctions de nutrition.

QUARANTE -SIXIÈME LEÇON.

De la digestion. Nature de ce phénomène. Agents qui le produisent. Carac- tères anatomiques et physiologiques de l'appareil de la digestion. Mode de perfectionnement de cette fonction et des organes qui y sont affectés.

SI. Le sang, dont nous avons étudié le mouvement dans consici^mions

•^ _ _ prtliniinaires.

l'organisme au commencement de ce cours, doit en partie ses propriétés vivifiantes à la présence de l'oxygène que nous avons vu y pénétrer par les voies respiratoires ; mais ce liquide nour- ricier, pour remplir son rôle physiologique, a besoin de rece- voir aussi du dehors des matières combustibles et organisables. Les Animaux ne possèdent pas la l'acuité de créer de toutes pièces ces matières, et ne peuvent les trouver que dans la sub- stance constitutive d'autres cor[)S qui sont ou qui ont été doués de la vie. Or, ces substances alimentaires qui doivent être absorbées ne se rencontrent d'ordinaire qu'à l'état solide, et nous avons vu dans la dernière Leçon que les tissus de l'orga- nisme ne se laissent traverser facilement que par des fluides. Pour que l'Animal puisse utiliser de la sorle la plupart des matières étrangères que la Nature lui fournit, il faut donc qu'il les transforme en liquide, ou, en d'aulres mois, il faut qu'il les digère^ et, afin de pouvoir effectuei- ce travail, il est pourvu d'instruments particuliers dont le plus important est une cavité appelée estomac, et dont la réunion constitue ce que l'on nomme un appareil digestif.

Les Plantes ont le pouvoir de former de toutes pièces ces mahèies organisables à l'aide de fluides qui se trouvent répan- dus partout à la surface de la terre, et qui réunissent toutes les conditions voulues pour être absorbables. En effet, ces êtres peuvent conshtuer les aliments dont ils ont besoin en puisant

'•IkS DIGESTION.

directetïient dans le milieu ambiant de l'eau, de l'aeide car- bonique et (juelciues autres substances qui s'y rencontrent à l'état de gaz ou qui se trouvent en dissolution dans les liquides dont leurs racines sont baignées. Elles peuvent donc se nourrir sans faire subir aux substances qu'elles doivent absorber aucune élaboration préliminaire, et par conséquent elles n'ont jamais d'appareil digestif.

Dans une des précédentes Leçons, nous avons vu que l'Ani- mal diffère de la Plante par son mode de respiration ; à ce premier caractère vient donc s'en ajouter aujourd'bui un second, tiré de l'existence de la faculté digestive et des instruments physiologiques à l'aide desquels cette faculté s'exerce. Dans l'immense majorité des cas, cette particularité anatomique est bien prononcée et facile à constater. Une cavité ({ui commu- nique librement avec le dehors, et qui est appelée estomac, reçoit les aliments dans son intérieur, en opère la digestion, et transmet ensuite au (luide nourricier les produits de son travail L'existence d'un organe de ce genre suffit pour établir (jue l'être chez lequel on l'observe appartient au Règne animal ; les Végétaux n'en présentent jamais de trace: mais je dois ajouter que, sous ce rapport comme sous tous les autres, la ligne de démarcation entre les deux grandes divisions de la Création organique est moins nettement tracée qu'on ne pourrait le croire au premier abord. En effet, chez quelques Animaux à structuie dégradée, l'appareil digestif s'amoindrit et disparaît plus ou moins complètement. xYlais ce sont des exceptions dont nous n'avons pas à nous occuper en ce moment, et la digestion n'en est [las moins une des fonctions générales des êtres animés qui leur appartiennent en proj)re. DesHiimenis. g 2. Si uous étious astrciut à suivre rigoureusement ici l'ordre méthodique dans lequel les idées s'enchaînent, nous ne devrions aborder l'iiistoire de la digestion qu'après avoir étudié les matières sur lesquelles cette fonction s'exerce, et par con-

CONSIDÉRATIONS PRÊLlMlNAlUKS. -M^)

séquent j'aurais à traiter d'abord des aliments. Mais, ainsi que je l'ai déjà dit plus d'une fois, je n'hésite pas à me départir de cette règle toutes les fois qu'une autre marche me semble plus favorable à l'intelligence des choses dont j'ai à m'occuper. Or, l'examen approfondi de la nature et des propriétés des substances nutritives me semble trouver mieux sa place dans la série de Leçons j'aurai à parler de l'emploi de ces corps dans le travail de la nutrition. Je ne m'y arrêterai donc pas en ce moment, et je me bornerai à indiquer brièvement le sens que le physiologiste doit attacher au mot aliment.

Dans le langage ordinaire, on désigne sous ce nom les sub- stances qui se mangent, se digèrent et servent à l'entretien de la vie ; mais on peut y donner une acception plus large, et l'ap- pliquer à toute matière qui, introduite dans l'organisme, est susceptible de servir, soit à l'entretien de la combustion phy- siologique, soit à la constitution des tissus ou des humeurs de l'économie animale. Ainsi, la digestibilité de ces matières, c'est-à-dire leur aptitude à être modifiées d'une certaine ma- nière dans leurs propriétés physiques ou chimiques avant leur absorption et leur entrée dans le torrent circulatoire, n'est pas une condition nécessaire à leur admission dans la classe des aliments; et lors même qu'une substance introduite dans l'es- tomac serait digérée, c'est-à-dire rendue absorbable, et irait ensuite se mêler au sang, nous ne devrions pas la considérer comme un aliment, si elle n'est pas propre à être employée dans l'organisme et à fournir, soit des matériaux constitutifs des tissus ou des humeurs, soit des combustibles propres à l'entretien de la respiration. Ainsi, pour nous, l'eau est un aliment aussi bien que le sucre ou la fibrine, car c'est une matière indispensa'ble à la nutrition du corps , et quelle que soit la voie par laquelle ce liquide arrive dans l'économie, son rôle est toujours le même. Le physiologiste doit donc classer parmi les substances alimentaires des corps minéraux aussi

250 DIGESTION.

bien que des matières organiques; mais eomme ce sont ces dernières surtout qui se trouvent soumises aux forces diges- tives, ce sont elles principalement dont nous aurons à nous occuper en ce moment , et j'ajouterai qu'à raison de leur nature chimique et de leurs propriétés, on les divise en deux groupes, savoir : les aliments plastiques^ {[u\ ?,oi)isi\sce\)nb\es d'entrer dans la composition des tissus organiques et de deve- nir ainsi des parties vivantes, et les aliments respiratoires^ dont le principal rôle est de foiu'nir du carbone à la combustion physiologique. Les aliments plastiques sont des matières orga- niques azotées neutres, telles que la fibrine , l'albumine et la caséine. Les aliments respiratoires sont des substances non azotées qui sont riches en carbone et en hydrogène : elles se ressemblent à beaucoup d'égards ; mais, pour la facilité de nos études, il est nécessaire de les diviser à leur tour en deux groupes comprenant, l'un les matièi'es amylacées ou sucrées, l'autre les matières grasses. , , . ^3. Les aliments, comme ie l'ai déjà dit, sont en gêné-

Phénomènes ^ ? J J ^ c^

généraux j^jjl dcs coros solides, et si on les examine après qu'ils ont

de la digestion. '■ . . . ,

séjourné pendant un certain temps dans l'appareil digestif, on voit qu'ils y ont été ramollis, désagrégés et transformés en une sorte de pâte plus ou moins liquide appelée chyme, qui exhale mie odeur à la fois acre et fade. A mesure que le travail digestif s'avance, celte matière pultacée abandonne les sucs dont elle est imprégnée, ainsi que les autres substances ({ui sont susceptibles d'être absorbées par les parties voisines de l'organisme ; enfin, elle se trouve réduite à un magma de débris qui ont résisté à l'action des forces mises en jeu pour les attaquer et qui doivent être rejetés au dehors. 0 inions Pendant longtemps les physiologistes n'ont pas cherché à se des anciens ^m^vQ ncttcment compte de la nature du travail qui s'effectue

physiologistes ' , , /

sur la nature ^g j^^ g^j-jg (jjjjjs l'économic animale, et se sont bornes à enon-

du travail

digestif, ^gj. ç,^ ujj langage figuré le fait dont je viens de faire mention.

NATURE DE CE PHENOMENE.

^251

Ainsi Hippocrate disait que la digestion est une coclion ; mais, en exprimant ainsi sa pensée, il ne prétendait ni expliquer le phénomène , ni établir que les changements imprimés aux aliments dans l'estomac fussent du même ordre que ceux dé- terminés par la cuisson ; il voulait dire seulement que ces madères sont préparées, élaborées, rendues aptes à servir à nos besoins (1).

Quelques autres médecins de l'antiquité ont cru pouvoir pénétrer plus avant dans ce mystère. Ainsi Érasistrate, ayant probablement aperçu certains mouvements qui s'opèrent dans l'estomac pendant la durée de la chymification , l'ut conduit à penser que la digestion n'est qu'un travail mécanique , une sorte de tritin^ation des aliments. L'un des disciples de Praxagore, PHstonicus, n'adopta pas cette hypothèse, et crut voir dans le phénomène de la digestion une simple putréfac- tion analogue à celle que la plupart des matières organiques éprouvent spontanément quand elles restent exposées à Faction de la chaleur, de l'humidité et de l'air. Entin, Asclépiade, l'ami de Cicéron, parait avoir pensé que la digestion consiste en une sorte de dissolution des ahments (•2).

(1) Hippocrate n'avait évidemment (Jue des idées très vagues à ce sujet, et, bien qu'il se serve en général du mot TTc'i}/'.;, ou cuisson, quand il parle du travail digestif et qu'il attribue cette coction à la chaleur de l'esto- mac , il paraît , dans quelques pas- sages, regarder la digestion des ali- ments comme une sorte de putré- faction.

Galien semble attacher à l'expres- sion de coction un sens diflerent ; il fait jouer à la chaleur un rôle plus

important dans l'opération de la chyniilicalion ; mais il suppose que les aliments sont transformés ain4 en une substance analogue à celle dont l'organisme se compose, et que cette transformation est la conséquence du mode d'action pariiculier de l'estomac, qui serait doué d'une faculté coc- trice (a) ; selon lui, la digestion serait donc, non une simple cuisson, mais plutôt ce que l'on appelle aujourd'hui une élaboration.

(2) Les idées d'Érasistrate, de Plisto"

(rt) Galien, De naturalibiis facultalibus, lib. II, oap. iv.

'•1^2 DIGESTION.

Ainsi nous trouvons déjà cliez les anciens les germes des principales théories qui jusque dans ces derniers temps ont régné tour à tour dans nos écoles. Par exemple, l'expression métaphorique employée par Hippocrate a fait naître la doctrine ùeVéliœation (1), et divers commentateurs de ce grand médecin ont cru pouvoir assimiler la digestion au phénomène de la cuis- son ; à leurs yeux, les changements que les aliments suhissent dans l'estomac étaient dus à la chaleur de cet organe (2) ; mais, pour accepter une pareille idée, il fallait ignorer ce qui se passe dans plus des neuf dixièmes du Règne animal, car chez tous les Animaux la digestion s'effectue, et cependant chez la [ilupart de ces êtres la température du corps ne diffère

niciis et d'Asclépiade sur la nature du travail digestif ont été résumées de la manière suivante par Celse :

« Exquilnis, qiiia maxime pertinere » ad rem concoctio videlur, liuic po- » lissimum insistunt ; et duce alii » El asistrato, teri cibum in ventre con- » tendunt ; alii Plistonico Praxagorse » discipulo putrescere ; alii credunt » Hippocrati per calorein cibos con- » coqui ; acceduntque Asclepiadis )) aemuli qui omnia ista vana et super- n vacua esse proponunt : nibil enim » concoqui , sed crudam materiam, » sicul assumpia est in corpus omne » diduci (a). »

Asclépiade , dont il est ici question, n'était pas un des descendants d'Escu- lape, comme on pourrait le croire par son nom ; il habitait Rome du temps de Pompée, et y jouissait d'une très grande réputation, mais il paraît avoir été très ignorant en anatomie et en

physiologie. Galien dit aussi qu'il con- sidérait la digesUon comme le résultat d'une simple division des atomes dont se composent les aliments. ;\lais cette opinion paraît avoir eu peu de parti- sans, et Cicéron, qui avait des rela- tions intimes avec Asclépiade, avance de la manière la plus positive que la digestion est une cuisson effectuée par la chaleur (6).

(1) De elixare, cuire.

(2) Parmi les auteurs qui, dans des temps plus modernes, ont cru pouvoir expliquer le travail digestif en le représentant comme une coclion opérée par la chaleur animale, je ci- terai Michel Servet (c).

J'ajouterai que, même au commen- cement du siècle dernier, on se con- tentait d'hypothèses de ce genre. Ainsi Drake compare l'estomac à la machine de Papin {d).

(a) C. Celsus, i>/c(/ici?iœ liber iiririuis, p. 5 (ciiit. de nianconi, 1"85).

(6) De natura deorum, lib. II, g nv.

(c) Voyoz Sprengel, Histoire (le la médecine, t. III, p. 'S'y.

{d} Aitthvopotogianova, 1717, p. 80.

NATURE DE CE PHÉNOMÈNE. 253

pas sensiblement de celle de l'atmosphère (1). La théorie tonte mécanique de la digestion par trituration a eu de nombreux parlisans, et a conduit même à la découverte de plus d'un fait important, mais elle a donné lieu à un nombre bien plus grand de vaines spéculations déguisées sous le masque de la science positive (2). Enfin , l'hypothèse suivant laquelle la digestion serait une sorte de fermen(ation, ou serait déterminée par l'eftet de dissolvants, a revêtu successivement diverses formes, suivant la nature des idées régnantes parmi les chi- mistes de chaque époque ; et si l'on s'en tenait aux mots au lieu d'aller au fond des choses, on pourrait trouver dans les écrits de plus d'un auteur des xvu* et xYm" siècles l'énoncé succinct de la théorie généralement admise de nos jours. Mais en réalité on ne savait alors rien touchant la nature du travail digestif, et, jus(|ue vers la fin du siècle dernier, presque tous les ftdts tondamentaux sur lesquels la théorie de ce phénomène repose étaient encore à découvrir (3). L'exposé des opinions et

(1) Voyez IJallcr, Elementa physio- qiies médecins de iiiérilo, même dans logiœ, t. VI, p. oo5. les temps modernes : Cheselden , par

(2) Gomme exemple de ces vues exemple (6).

toutes spéculatives des physiologistes L'hypothèse d'une fermentation di-

dits iatro-mathématidens , je citerai gestive a été imaginée, vers le milieu

les hypolhi'ses de Pitcairn sur la puis- du xvir' siècle, par Van Helmont (c),

sance triturante de l'estomac, qu'il a dont j'ai déjà eu l'occasion de men-

cru pouvoir évaluer à 12 951 livres («). tionner les travaux {cl). Elle a eu

(o) L'assimilation de la digestion à beaucoup de partisans, parmi lesquels

la putréfaction ne pourrait résister à je citerai Sylvius, Willis, Boyie, Lo-

une simple discussion sérieuse, mais wer, Macbride, etc. (e). Mais il ne

a été soutenue cependant par quel- faut pas oublier qu'à cette époque, les

(a) Pitcairn, Uissertalio de molu quo cibi in venlrkulo rediguntur ad formam sanguini refi- ciendo idoneam {Disscrtationes medicœ, p. 81 , Rotterdam, 1701, et Elementa medtcina physicu- malhemalica, 1718, cap. v, p. 25).

(b) Clieselden, Anatomy of the tiuman Body, 17G.3, p. 155, édit.

(c) Van Helmont, Sextiiplex digestio alimenti humani (Orlus medkinœ, p, 167).

(d) Tome I, page 379.

(e) Sylvius (ou Dultois), Dissert. med. I, et Prax. med., lib. VU, cap. vu.

Willis, De fermeiUatioiie, cap. i, p. 17 [Opéra omnia, 1680, t. I).

Boyle, Worlis, t. 11, p. 622. - Lower, De corde, p. 204.

Macbride, Expérimental Essay on the Fermentation of Alimentary Mixture, 1761, p. 59.

Leicli, Discours e concerning Digestion (Philos. Trans., 1684, t. XIV, p. 694).

25/i DIGliSTlON.

des conjectures qui ont précédé la connaissance de ces faits serait une tâche non moins oiseuse que longue. Je ne l'entre- prendrai donc pas, et je nie bornerai à rendre compte des découvertes successives à l'aide desquelles la question si long- temps en litige a été entin résolue. ., ^ h. La première série d'expériences méthodiques et

Premières c ^ i i '

recherches instpactivcs entrcpriscs à ce sujet est due au célèbre Réaumur,

expérimentales '■ ''

'*"'■ dont les beaux travaux sur l'histoire naturelle des Insectes

la digestion.

constituent une des principales richesses de rentomologie (1).

connaissances chimiques touchant la nature des phénomènes auxquels ou donnait le nom de fermentation étaient si vagues et si incomplètes, qu'en réalité l'emploi de cette expres- sion n'avançait guère la question, et signifiait seulement que, dans l'o- pinion de ces physiologistes , les modifications éprouvées par les ali- ments dans l'estomac sont le résultat d'un changement qui s'opère dans leur constitution , soit spontanément, soit sous l'intliience d'un agent com- parable au ferment connu sous le nom de levure, et non le résultat d'une action mécaniqui^ ou d'une simple dissolution. Du reste, la ligne de dé- marcation entre la théorie de la diges- tion par fermentation ou par dissolu- tion était rarement indiquée d'une manière nette ; dans cette dernière hypothèse, on attribuait !a désagréga- tion et la transformation des aliments en chyme à l'action d'un liquide pro- duit dans l'estomac , et appelé suc gastrique ; mais à celte époque l'exis- tence de ce suc n'était nullement

démontrée, et les propriétés qu'on y attribuait ne pouvaient s'expliquer en aucune façon par les propriétés chi- nn'ques d'aucun corps connu. C'était donc un être de raison seulement. Ainsi Cureau de Lachambre, un des premiers médecins qui aient soutenu la théorie de la dissolution, admettait que celte transformation était effec- tuée, non par une humeur aqueuse ou acide, mais par des esprits dissol- vait is (rt), et Lamy, son contemporain, qui attribuait ce rôle à un suc gas- trique, assurait que ce suc dissolvait les métaux aussi bien que les ali- ments [h]. Quelques-uns de ces phy- siologistes, il est vrai, avaient deviné assez juste, et, comme exemple, je citerai Grew (c) ; mais leur opinion ne reposait sur aucune base solide, et il suiDt de lire l'exposé de l'état de la question dans le grand ouvrage de Haller, pour reconnaître combien il régnait d'obscurité dans toute cette porlion de la physiologie (f/).

(1) Keiié Ferciuult de Réaumur naquit à la l\oclieile en ItiSii, et entra

(a) De Lachambre, Nouvelles conjectures sur la digestion. Paris, 1(138.

(b) I.aniy, Discours aiiutoiiiitiues. Paris, 1075.

(c) Grew, Coiii.]!. Anutomy oj tlie Stvniach, p. 2G.

(d) Haller, Ëlemeiila plnjsiolouia:, lib. MX, sect. v, I. V, p. 327 et suiv.

NATURE DE CE PHÉINOMÈNE. 255

On savait déjà, par les expériences faites à Florence par les membres de l'ancienne Académie del Cimento, que des corps, même des plus durs , introduits dans l'estomac de certains Oiseaux, tels que rAutruche, sont usés et souvent même réduits en poudre par l'action de cet organe (1). On avait reconnu aussi que chez ces xVnimaux les parois de cet organe soîU garnies de muscles puissants, et les partisans de la théorie m.écanique de la digestion arguaient de ces faits pour soutenir que cet acte phy- siologique consistait essentiellement en un phénomène de tritu- ration. Mais, d'un autre côté, les anatomistes avaient vu aussi que chez l'Homme, ainsi que chez un grand nombre d'Ani- maux dont la puissance digestive est assez grande, l'estomac n'a ({ne des parois minces et membraneuses plutôt que char-

à l'Académie des sciences en 1708, comme niatliémalicien. H se fil con- naître d"abord pyr plusieurs publica- tions i:!iporlantes sur la fabrication de l'acier, du fer-blanc, des perles fausses, etc., ainsi que par des tra- vaux relatifs à divers points d'histoire naturelle, et les perffclionnemeiits qu'il introduisit dans la construction des thermomètres rendirent son nom populaire. Mais son ouvrage le plus important est une série de mémoires sur les mœurs des Insectes, formant six volumes in-/i et accompagnés de nombreuses planches. Réaumur mou- rut en 1757.

(!) UAccademiadel Cimento, fon- dée en 1657 par léopold, grand-duc de Toscane, et composée principale- ment de disciples de Galilée, n'exista que pendant un assez court espace de

temps, et s'occupa principalement de questions de physique, mais fit aussi diverses expériences sur la digestion. Ainsi elle constata que chez des Poules et des Canards , des boules de cristal , des balles de plomb et d'autres corps très durs introduits dans l'estomac de ces Oiseaux sont bientôt usés, tordus ou même réduits en poudre (a).

r.edi, l'un des membres de cette Société savante, fit beaucoup d'expé- riences analotiues sur ces Oiseaux de basse-cour, ainsi que sur une Autru- che, et il eut le soin de déterminer la perte de poids que les corps divers subissaient dans l'intérieur de l'esto- mac de ces Animaux (6).

On cite aussi des expériences du même genre faites vers la même époque par M. iVIagalotti (c).

(a) SoQgi di naturali esperUnze faite neW Accademia del Cimento, 1667, esp. ccLXViii. 2'édU.,tG'Jl.

{b) Fr. Hedi, Opuscnlovuni pars secunda, s'we exiterimenla circa varias res naturales, p. iu_ el suiv. {éJ. de Leyde, llid).

(c) Magalotti, Sagio di naturali esperiemc.

256 DIGESTION.

nues, de façon qu'il était difficile d'alliihucr à ce viscère une grande force musculaire. On avait recueilli également divers faits qui tendaient à prouver que la digestion peut s'opérer lors même que les parois de l'estomac restent écartées, et cela chez les Oiseaux, la puissance triturante de cet organe est le plus développée (1). Réaumur se trouvait donc en présence de deux opinions nettement formulées, toucliant la nature du tra- vail digestif : suivant les uns , c'était parce que les aliments sont broyés dans l'estomac qu'ils sont transformés en cette Expériences cspècc dc pâtc quc l'ou nommc clnjme ; suivant les autres, ce prr Réaumur. résultat était à l'action dissolvante d'un agent chimique, d'un suc digestif. Pour décider de quel côté était la vérité, Réaumur eut l'heureuse idée de soumettre à l'action des forces digestives de l'estomac divers aliments renfermés dans une enveloppe solide, de façon à les protéger contre toute pression, tout frotte- ment, toute action mécanique quelconque, mais à les laisser accessibles au contact des liquides qu'ils pouvaient rencontrer dans la cavité stomacale. Les premières ex[)ériences exécu- tées de la sorte ne donnèrent aucun résultat décisif, car elles furent faites sur des Oiseaux dont le gésier est très puissant, et les tubes de verreoude métal employés pour garantir les aliments contre l'action triturante de ce viscère ne purent y résister; ils étaient brisés ou aplatis et tordus en peu de temps par les contractions énergiques de l'estomac, et par conséquent les faits observés n'ajoutaient rien à ceux constatés précédemment par Redi et les autres académiciens de Florence. Réaumur répéta donc ses essais, en faisant usage d'enveloppes plus résistantes,

(1) Ainsi Valiisiieri, en faisant l'a- faisant saillie dans rintéiieur de l'es-

nalomie d'une Autruche, a trouvé un toniac, circonstance qui semble avoii

gros clou implanté dans les parois empêcher cet organe de se con-

charnues du gésier de cet Animal, et tracter comme d'ordinaire (a).

(a) Vallisneri, Notomiadello Stru*w (Opère /isico-viediche, t. I, p. 24-2, pi. -2[), dg. 2).

NATURE DE CE PHÉNOMÈNE. 257

et, au premier abord, il put croire que l'aclioii mécanique de l'eslomae était au moins une des conditions nécessaires pour la transformation des aliments en chyme, car l'orge qu'il avait renfermée dans des tubes métalliques d'une solidité convenable et qu'il avait introduits ensuite dans le gésier de divers Oiseaux de basse-cour, s'était retrouvée intacte après avoir séjourné fort longtemps dans cet organe (1). Mais, en variant davantage ses expériences, il ne tarda pas à reconnaître que souvent, sinon toujours, la digestion peut s'opérer sans l'intervention d'aucune force mécanique et par la seule influence des sucs gastriques. Cette seconde série de recherches porta sur des Oiseaux à estomac membraneux, et, afin de pouvoir multiplier facilement ses observations, Réaumur mit à profit un fait bien connu de toutes les personnes versées dans l'art de la fauconnerie. On avait rem.arqué que les Oiseaux de proie rejettent facilement par le bec les matières que leur estomac n'a pu digérer, et que d'ordinaire ils se débarrassent de la sorte des plumes ou autres dépouilles des Animaux dont ils se repaissent. Les fauconniers avaient môme riiabitude de leur faire avaler de grosses boules de matières indigestes afin de provoquer des vomissements qu'ils considéraient comme salutaires (2). Réaumur, au lieu de sacrifier les Oiseaux soumis à ses expériences, se contenta donc

(l) CeUe première série d'expé- riences fut faite sur des Dindons, des Canards et des Coqs. Réaumur em- ploya d'aijord des ijoules de verre creuses dont on se sert pour fabri- quer les perles fausses , puis de courts tubes de verre ou de fer-blanc ; mais ces corps ne résistaient pas à l'action triturante du gésier, et furent promptcment brisés ou aplatis ; enfin

il réussit en faisant usage de tubes de plomb d'une épaisseur considérable. Ceux-ci ne furent ni aplatis ni tordus par les contractions du gésier , mais les grains d'orge qu'il y renfermait se retrouvaient sans altération notable après un séjour fort long dans l'es- tomac (a).

('2) Ces bols vomitifs, que l'on dé- signait sous le nom de cures, étaient

(a) Rôaumur, Sur la digestion des Oiseaux (premier mémoire). Expériences sur la manière dont se fuit la diijestion dans les Oiseaux qui vivent principalement de grains et d'herbes et dont l'eslomae est un gésier {Mém. de l'A.cad. des sciences, 1752, p. 2G0).

V.

17

258 DIGESTION.

de faire descendre dans leur estomac des tubes métalliques renfermant des aliments, et d'en examiner le contenu lorsque l'Animal les rejetait spontanément. Les résultais obtenus de la sorte furent décisifs. Des morceaux de viande convenablement assujettis dans l'intérieur d'un tube à parois inflexibles et sous- traits ainsi à toute pression exercée i)ar l'estomac, n'en furent pas moins digérés dans l'espace de quelques heures; tantôt on retrouvait dans l'intérieur du tube métallique des portions sim- plement ramollies ou transformées en pulpe à la surface, mais encore intactes vers le centre, et d'autres fois le tout avait dis- paru, bien que les deux extrémités du tube eussent conservé intacts les grillages dont on les avait garnies pour empêcher le passage de tout corps solide. Or, ce résultat ne pouvait être produit par des forces mécaniques et s'expliquait facilement i>ar l'action d'un dissolvant.

Réaumur pratiqua des expériences analogues en substituant à la viande dont il venait de faire usage des os de Poulet, et il vit que ces corps, bien que protégés efficacement contre toute espèce de trituration , |)Ouvaient être digérés par les Oiseaux de proie; mais lorsqu'il remplaçait ces matières ani- males par de l'orge ou d'autres grains, il n'y observa rien de semblable ; ces aliments résistaient à l'action du dissolvant, qui était si puissant pour transformer en chyme les aliments azotés.

Convaincu ainsi de la nature chimique des forces qui, dans un grand nombre de cas, suffisent pour effectuer la digestion, ce physiologiste illustre voulut faire un pas de plus, et repro- duire dans un vase inerte, à l'aide du suc gastrique, les jthé- nomènes dont l'estomac des Animaux vivants est le siège. Dans cette vue, il chercha à se procurer une quantité snflisante de

formés en général de filasse ou de hait, les rendaient en général dans plumes pressées et collées ensemble. les vingt-qualre heures. Les Éperviers , à qui on en adminis-

NATURE DE CE PHÉNOMÈNE. 259

ce suc au moyen d'épongés qu'il faisait avaler à des Oiseaux de proie, et qu'il pressait après qu'elles avaient été rejetées au dehors. Il soumit même à l'action du liquide ainsi obtenu quelques aliments, mais il ne réussit pas à en opérer la diges- tion artificielle, et il abandonna la tentative (1).

La découverte de la nature du travail digestif resta donc incomplète entre les mains de Réaumur; mais un demi-siècle après, le résultat qu'il avait espéré obtenir fut réalisé par un autre expérimentateur plus persévérant, l'abbé Spallanzani , dont j'ai déjà eu l'occasion de citer les beaux travaux, et dont le nom reviendra souvent dans le cours de ces Leçons (2).

Pendant cet intervalle de temps, un médecin écossais, Stevens, Expériences

de

fit sur l'Homme des ex[)ériences semblables à celles pratiquées stevens. sur les Oiseaux de proie par Réaumur. Ayant rencontré un bateleur qui avait l'irabitude d'avaler des pierres , puis de les rejeter par la bouche, il profita de cette circonstance pour sou- mettre à l'action de l'estomac de cet Homme des substances alimentaires renfermées dans une sphère métallique criblée de trous, et pour examiner les altérations que ces matières éprou-

(1) Les expériences décisives dont tières végétales résister à la seule il est ici question furent faites princi- action des sucs dont elles étaient bai- palenienl sur une Buse, et Réaumur gnées dans l'estomac de ces Animaux, trouva que des fragments d'os proté- et il en conclut que la nature du tra- gés de la sorte contre toute aciion mé- vail digestif n'est pas la même partout, canique étaient attaqués et digérés par Les essais infruclueux de digestion les sucs gastriques de la même ma- artificielle tentés par Réaumur furent nière que cela avait lieu pour la faits avec du suc gastrique obtenu viande. Une expérience relative à la au moyen de morceaux d'épongé in- digestion des os dans l'estomac du troduits dans l'estomac d'une Buse. Cliien lui parut également favorable Ce liquide avait un goût acide et à riiypolhèse de la formation du rougissait le papier bleu de tour- chyme p.ir voie chimique ; mais chez nesol (a), les Moutons, de même que chez les (2) Voyez tome I, page /il7. Oiseaux de basse-cour, il vit les ma-

(a) Réaumur, Sur la digeslion des Oiseaux (second mémoire). De la manière dont elle se fait

dans l'estomac des Oiseaux de ■proie {Ném. de l'Acad. des sciences, 1752, p. 461).

Expériences

de Spallanzaiii.

Digestions arlificielles.

260 DIGESTION.

valent par leur séjour dans ce viscère. Il lit aussi des expé- riences analogues sur des Chiens, et il reconnut, comme l'avait fait Réaumur, que les aliments protégés de la sorte contre toute action mécanique, et exposés seulement à l'influence des liquides contenus dans l'estomac, peuvent être complètement digérés (1).

Les expériences de Spallanzani portèrent sur un grand nombre d'Animaux différents , et mirent également hors de toute contestation le principal résultat obtenu par Réaumur, car elles démontrèrent la possibilité de la digestion dans des circon- stances où les aliments introduits dans l'estomac étaient sous- traits à l'action mécanique de cet organe et accessibles à des fluides seulement. Mais, ainsi que je viens de le dire, Spallan- zani alla plus loin. Il constata que la digestion peut s'effectuer dans l'estomac d'un cadavre aussi bien que dans celui d'un Animal vivant. Enfin il parvint à opérer dans un vase inerte des digestions artificielles, en faisant agir sur de la viande le liquide extrait de l'estomac de divers Animaux. Il reconnut que la désagrégation des matières alimentaires qui amène leur transformation en chyme ne dépend pas de leur putréfaction ; que le suc gastrique est au contraire un agent qui s'oppose à cette décomposition spontanée des substances organiques ; enfin il fit voir que la digestion n'est pas accompagnée des signes ordinaires de la fermentation, et il établit que les phé- nomènes physiologiques dont l'estomac est le siège dépendent

(l)LcsexpéiicncesdeStevcns datent de 1777 (a); elles confirmèrent et éten- dirent Icsrésnllats obtenus précédem- ment par lléaiinmr, mais elles étaient encore insuffisantes pour établir sur des bases inattaquables la lliéorie cbi- miquc de la digestion : car on pouvait

supposer encore que la transformation des aliments en chyme était duc à une action vitale, une influence nerveuse, bypolhèse qui comptait déjà des par- tisans célèbres et qui a été soutenue, même de nos jours , par quelques physiologistes.

(a)Stcvcns, De alimenlonwi concoclionc. Edinli., 1777.

NATURE DE CE PHÉNOMÈNE. 261

cssentiellemeni; de la propriété dissolvante dont est doué le suc gastrique, c'est-à-dire l'humeur particulière contenue dans ce viscère (1).

Les recherches nombreuses et variées faites sur ce sujet par les physiologistes de nos jours sont venues confirmer le résultat important obtenu par Spallanzani, et donner gain de cause à ceux qui voyaient dans la digestion un phénomène chimique. Nous savons aujourd'hui, à ne plus en douter, que la transfor- mation en chyme est due uniquement à l'action du liquide dont ces matières s'imbibent dans l'estomac, et qu'à l'aide de ce suc la digestion peut se faire dans un vase quelconque. Grâce aux procédés commodes inventés pour obtenir cette humeur gas- trique (2), les expériences de digestion artificielle sont devenues

(1) Je reviendrai bientôt sur ce tra- vail important, et je me bornerai b ajouter ici que dans ces expériences de digestion artificielle, la désagréga- tion des aliments, leur transformation en une pâte semblable au chyme, ne s'eflecluaient pas aussi rapidement que dans l'estomac d'un animal vivant, et que le concours d'une certaine cha- leur était nécessaire à l'accomplisse- ment du phénomène. Spallanzani re- marqua aussi que le renouvellement du suc gastrique accélérait beaucoup la réaction (a).

Les expériences de Spallanzani fu- rent commencées en 1777, mais ne furent publiées que fort longtemps après.

(2) Dans les recherches de Spallan- zani, de même que dans celles de

Uéaumur, le suc gastrique employé pour les digestions artificielles était en général obtenu par la régurgitation d'épongés introduites dans l'estomac. MM. Tiedemann et Gmelin curent recours à un procédé diflerent : ils firent avaler aux Chiens soumis à leurs expériences des cailloux ou d'au- tres corps inattaquables pour stimuler les parois de l'estomac, puis ils tuèrent ces Animaux pour recueillir la petite quantité de suc gastrique qui pouvait se trouver dans leur estomac {b). Mais à la suite des observations inté- ressantes faites par un médecin amé- ricain, M. W. Beaumont, sur un homme dont l'estomac était resté ou- vert à la suite d'une blessure (c), quelques physiologistes eurent l'idée d'établir une communication perma-

(a) Spallanzani, Expériences sur la digestion de l'homme et de différentes espèces d'animaux, avec des considérations par Senebier. ln-8, Genève, 1183.

{b) Tiedemann et Gmelin, Recherches expérimentales physiologiques et chimiques sur la diges- tion, 1827, t. I, p. 92 clsuiv.

(c) W. Beaumont, Experiments and Observations on the Gastric juice and the l'Itysiology of Digestion, 1833.

Action

de

la pepsine.

î262 DIGESTION.

vulgaires, et l'on a pu étudier la nature intime de cet agent ainsi que ses pro|)riétés physiologiques, et les modifications plus ou moins profondes qu'il détermine dans la constitution de certaines matières alimentaires. A l'époque vivait Spallanzani la chimie organique existait à peine, et ne pouvait nous fournir à ce sujet aucune lumière utile ; mais , aujourd'hui , cette science nous est d'un grand secours, et nous donne la clef de tous les phénomènes fondamentaux de la digestion. Elle nous a fait connaître les principes dont dépend la puissance du suc gastrique, et nous a fourni même les moyens d'en produire artificiellement (1). Bientôt j'exposerai tous les faits intéressants

nente entre cet organe et l'extérieur, à l'aide d'une incision pratiquée aux parois de l'abdomen chez des Ani- maux vivants. Un médecin russe, M. Bassow, fut le premier à appeler l'attention du public sur ce procédé expérimental dont il lit usage avec beaucoup de succès (a), et peu de temps après, M. Hlondlol, do Nancy, arriva., de son côté, aux mêmes résul- tats (6). C'est surloul ce dernier e\pé- rimentaleur qui a vulgari.sé l'emploi des fjstides gastriques pour l'étude des phfMiomènes de la digestion, et lorsque je traiterai spécialement de la cbymification chez les Animaux supé- rieurs, je ferai connaître le procédé opératoiie dont il fait usage.

(1) En 1839, M. VVasmann, de Ber- lin, parvint à extraire la pepsine de la

membrane muqueuse de l'estomac du Porc, et il reconnut que cette matière, dissoute dans de l'eau aiguisée d'acide chlorhydrique, détermine tous les phé- nomènes de la digestion arlificielle, comme le ferait du suc gastrique na- turel (c). Depuis lors la préparation de la pepsine et du suc gastrique artificiel a été l'objet de beaucoup de reclierches dont il sera rendu compte dans une des Leçons suivantes. Enfin cette substance est tombée dans le domaine de la théra[)eutique (J), et M. L. Corvisart a fait voir que dans certains cas on pouvait employer le suc gastrique artificiel comme mé- dicament, pour supi)léer à la sé- crétion insufDsante de l'estomac dans le travail physiologique de la diges- tion (e).

(a) Bassow, Voie artilicielle dans Veslomac des Animaux {Bulletin de la Société des natura- listes de Moscou, 1843, I. XVI, (.. 3t5).

(fc) Bloiiilldt, Trnilé nnahjt.iqw de la digestion, 1843, p. 201 et suiv.

(c) VVa.sinaMM, De diQcslione nonunlla {i\\f-iCT\.. inaiig.). Berulini, 1830.

(d) Boiidanll, Mémoire sur le principe digestif, etc. {Moniteur des hôpitaux, I 854).

(e) Lucion Corvisarl, Recherches ayant pour but d'administrer aux malades qui ne digèrent pas des aliments tout digérés par le suc gastrique des Animaux {Comptes rendus de l'Acad. des ëciences, 1852, t. XXXV, p. 244).

Dyspepsie et consomption, licssoiirces que la poudre nutrimentivc {pepsine acidulée) offre dans ce vas à la médennc pratique, )8,=)l.

NATURE DE CE PHÉNOMÈNE. 263

dont l'histoire physiologique de la digestion a été enrichie de la sorte ; mais en ce moment je cherche seulement à donner nne idée générale de la nature de cette fonction, et par consé- quent je ne dois pas m'arrêter sur ces détails ; je me bornerai donc à ajouter que les parties actives du suc gastrique sont un /

acide et un principe immédiat qui porte le nom de pepsine (1). C'est ce dernier agent qui joue le rôle le plus important dans le travail de la chymification ; mais, pour opérer la désagréga- tion et la dissolution des aliments qu'il est destiné à digérer, la présence d'un acide est nécessaire, et par conséquent l'acidité est un des caractères du suc gastrifjue.

§ 5. Du reste, toutes les substances nutritives que les Animaux rencontrent dans la nature, el qu'ils pourraient intro- duire dans leur estomac, ne sont pas susceptibles d'éprouver des changements de ce genre en présence du suc gastrique ; il en est beaucoup qui résistent à Faction digestive de ce li(juide , et par conséquent, pour utiliser d'une manière complète les ali- ments dont ils sont environnés, ces êtres auraient besoin de les soumettre à Tinfluence d'autres agents. En effet, nous avons vu, par les expériences de Réauniur, que Forge et le blé ne sont pas attaqués par le suc gastrique, dans lequel la viande se dis- sout (2); nous savons cependant que ces mnlières, et beaucoup uinité

d'i Li ''/1 l'j •'<'!•• d'autres asenls

autres substances végétales douces de propriétés chuniques digestif!

semblables, sont employées à Falimeulaiion de FHomnie et

d'une multitude d'Animaux. îl en résulte (pie les découvertes

(1) Le nom de pepsine, donné an antenrs ont appelé ce principe (jas-

principe actif du suc gastrique par térase {b) ou chymosine (c) , mais la

M. Scliwann (o) vient du mot grec première dénomination a prévalu. 'ni'^i; îcoction ou digestion). D'autres (2) Voyez ci-dessus, page '258.

(a) Sclnvann, Ueber das Wesen des Verdauungsprocesses (Poggendorff's Annalen, 1836, t. XXXVIII, p. 362).

{h) Paycn, Note sur le principe actif du suc gastrique {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1843, t. XVII, p. fiSG).

(c) Deschamps, De la prcmvc (Journal de pharmacie, 1840, t. XXVI, p. 41(3).

digestif.

2G/l DIGESTION.

dont je viens de rendre brièvement conapte ne nous fournissent pas la clef de tous les phénomènes essentiels de la digestion. Mais d'autres recherches, dont l'exposé serait prématuré en ce moment, sont venues compléter la théorie générale de cette fonction, et montrer que c'est par des procédés analogues que les aliments rebelles à la puissance dissolvante du suc gastrique sont rendus absorbables. C'est toujours par l'action de liquides dont ces substances s'imbibent que leur constitution se trouve modifiée de façon à rendre leur pénétration dans l'organisme possible; seulement les propriétés chimiques de ces humeurs varient suivant le rôle qu'elles ont à remplir dans l'économie, et, de même qu'il y a différentes sortes d'aliments, il y a divers sucs destinés à en elTectuer la digestion. Caractères § 6. Ccs uotious élémentaires sur la nature du travail dfïf'pa'di digestif nous permettront de prévoir quelles sont les conditions générales qui devront être satisfaites par tout appareil destiné à en être le siège, et, en appliquant à ces données extrêmement simples les lois physiologiques dont nous avons fait si souvent usage dans le cours de ces Leçons, il nous sera facile de prévoir aussi quels sont les moyens de perfectionnement à l'aide des- quels le jeu de cet appareil augmentera de puissance chez les Animaux dont la nutrition a besoin de devenir de plus en plus active.

Puisque la digestion consiste essentiellement en une dissolu- tion des substances solides qui doivent servir à la nutrition de l'Animal , que cette dissolution s'effectue à l'aide de liquides fournis par l'organisme, et que les produits ainsi obtenus doi- vent j)énétrer dans l'intérieur du corps pour se mêler au sang et se répartir ensuite dans toutes les parties de l'économie, il faut évidemment que l'appareil digestif se compose d'un vase propre û contenir ces huiueurs ; que ce réservoir soit en com- munication avec l'extérieur, de façon à pouvoir recevoir du dehors les aliments et se débarrasser du résidu qu'ils laisseront;

CONDITIONS DE PERFECTIONNEMENT. ^05

qu'il soit pourvu d'ageuts moteurs susceptibles d'y détermiuer l'entrée de ces matières, et que des organes aptes à fournir les agents chimiques dontja digestion dépend y versent les liquides dissolvants ; enfin , que ses parois soient propres à absorber les matières élaborées dans son intérieur. Ce travail physiologique, réduit à sa plus simple expression, suppose donc le concours de plusieurs actes : la préhension des aliments et leur ingurgitation; la sécrétion, ou production du suc digestif; l'absorption des matières digérées, et l'expulsion du résidu fécal .

Considérons l'appareil digestif au point de vue de chacun de ces usages, et voyons comment, d'après le principe connu du perfectionnement des organismes par la division du travail phy- siologique, il devra se modifier chez les Animaux de plus en plus élevés.

Cet appareil, ai-je dit, doit être un vase, ou réservoir, dis- posé de façon à admettre facilement dans son intérieur les sub- stances alimentaires, à conserver le suc digestif qui y est versé par l'organisme, et à rejeter au dehors les matières que ce suc est impuissant à dissoudre. La forme la plus simple que l'on puisse concevoir pour un pareil récipient est celle d'une fosse ou poclie dont l'orifice se dilaterait pour laisser entrer ou sortir les substances alimentaires, mais resterait contractée pendant la durée du travail digestif, afin de ne pas perdre le réactif à l'aide duquel ce phénomène doit s'accomplir.

Si, comme je l'ai posé en principe au commencement de ce cours, la Nature se montre toujours économe dans ses créa- tions, et proportionne les moyens mis en œuvre à l'importance du résultat à obtenir, nous devons donc trouver l'appareil di- gestif constitué de la sorte chez les Animaux les moins perfec- tionnés. Et, en effet, c'est précisément le mode d'organisa- tion qui domine dans l'embranchement des Zoophytes.

Chez la plupart des Radiaires, l'appareil digestif consiste

Réservoir alimentaire.

Poche stomacale.

^66 DIGESTION.

en une vaste cavité qui se termine en cul-de-sac, et qui ne communique avec l'extérieur que par un seul oritice destiné à servir tour à tour à l'entrée des aliments et à la sortie des fèces.

Tube digestif. Mais cctlc confomiation si simple et si grossière ne se ren- contre jamais chez les Animaux plus élevés, et un des premiers indices du perfectionnement des types zoologiques consiste dans l'introduction de la division du travail dans les relations de la cavité digestive avec l'extérieur. Cette cavité s'ouvre alors au dehors par deux orifices opposés, dont les fonctions sont parfaitement distinctes: l'un sert essentiellement à l'entrée des aliments, c'est la bouche ; l'autre livre passage au résidu laissé par la digestion, et constitue l'anus. La cavité digestive, au lieu d'avoir la forme d'une poche, devient alors un tube plus ou moins renflé vers le milieu, mais ouvert aux deux bouts, et c'est toujours d'avanten arrière que les aliments traversentce conduit.

Spécialisation § 7. Lc grand principe du [lerfectionnemcDt des orga-

de;

fonctions nisiiics par la division du travail physiologique régit également digesavè.'' l'emploi de la cavité ainsi constituée. Nous avons vu, dans une autre partie de ce cours, que chez beaucoup de Zoophytes, c'est un seul et même appareil qui est chargé de l'élaboration et de la distribution des liquides nourriciers : la cavité digestive tient alors lieu d'un système irrigatoire; parfois aussi elle paraît être en môme temps le siège principal delà respiration, et dans toute une classe de Radiaires, celle des Coralliaires, elle remplit aussi les fonctions d'une chambre génératrice, car elle loge les organes reproducteurs et les jeunes y passent pour s'échapper au dehors ; mais ce cumul physiologique cesse bientôt, et chez les Zoophytes supérieurs, de même que chez les Animaux des trois autres embranchements, on en voit rarement quelques traces. Mode L'i même tendance à la division du travail, comme moyen

^ *^°"i'c""''°" de perfectionnement, se révèle dans le choix des matériaux 1 estomac, ^^^j. j^ Nature fait usage pour constituer le réservoir alimen- taire. Chez les Animaux les plus simples, cette cavité est creu-

CONDITIONS 13E PERFECTIONNEMENT. 267

see directement clans la substance générale du corps, et le tissu qui en forme les parois ne diffère pas notablement de ce- lui des parties circonvoisines ; mais chez tous les Animaux un peu plus élevés, elle est tapissée par une membrane délicate et d'une structure particulière, puis cette membrane propre se sépare des tissus d'alentour, et constitue une poche ou un tube suspendu plus ou moins librement au milieu d une cavité gé- nérale ; il y a toujours continuité entre les parois extérieures du corps et les parois de la cavité digestive sur les bords des ori- fices de celle-ci, mais partout ailleurs il y a indépendance plus ou moins com[)lète.

Comme exemple d'Animaux dont la cavité digestive se pré- sente sous la forme d'une simple excavation creusée dans le tissu commun de l'organisme, je citerai les Hydres ou Polypes à bras, de nos eaux douces. Chez les Méduses et les autres Aca- lèphes, les parois de ce réservoir sont également en continuité de substance avec les parties adjacentes de l'organisme, et il n'y a point d'espace Hbre entre ces parois et les téguments com- muns, mais le revêtement intérieur de la cavité alimentaire est formé par une membrane particulière. Enfin, chez les Coralliaires , une portion de l'appareil digestif acquiert une existence indépendante de celle de la cavité générale du corps, et chez les Échinodermes, ainsi que chez tous les Mollusques, les Annelés et les Vertébrés, cette séparation devient complète et la cavité a partout des parois propres (l'

^8. Le même procédé de perfectionnement se reconnaît structure

♦^ r r des parois

dans les modificafions apportées à la structure des parois de la '^^^.J.y,;^"^ cavité digestive. Toujours ces parois sont composées essentielle-

(1) On donne quelquefois le nom cette dénomination à une des grandes

([''Animaux parenchymateux à ceux divisions des Vers intestinaux ; mais

dont la cavité digestive n'a point de elle n'y convient pas, car chez tous

parois libres, et semble être creusée ces Animaux l'appareil alimentaire est

directement dans la substance com- suspendu dans une cavité viscérale

mune du corps. Cuvier appliquait distincte.

268 DIGESTION.

ment d'une membrane dite muqueuse (1), qui est douée de la faculté de sécréter certains liquides dont les aliments s'imbibent, et est apte à absorber les matières fluides en contact avec sa surface ; mais chez les Animaux les plus simples elle a aussi d'autres fonctions à remplir. Les matières alimentaires intro- duites dans ce réservoir ne doivent pas y demeurer en repos; pour en hâter la digestion, elles doivent y être agitées avec le suc gastrique, et le résidu qu'elles laissent doit être expulsé au dehors ; l'intervention de forces mécaniques est donc néces- saire, et chez les Animaux les plus simples, c'est cette tunique muqueuse qui est chargée de remplir aussi le rôle d'un agent moteur. En effet, sa surface est pourvue de cils vibratiles et les courants excités par ces petits appendices produisent le résul- tat voulu. Mais chez les Animaux plus élevés, les mouve- ments de ce genre doivent être plus énergiques, la division du travail s'établit sous ce rapport comme sous beaucoup d'autres, et l'appareil digestif s'enrichit d'instruments moteurs spéciaux. Une nouvelle tunique, composée de libres musculaires, se dé- veloppe alors autour de la cavité alimentaire, et, par la con- traction de ces fibres, les parois de celle-ci changent de forme et de rapports, suivant les besoins de la fonction, et déplacent les matières étrangères en contact avec leur surlace. Enfin, la couche de substances organiques qui recouvre tout l'appareil, et

(1) Par leur structure , les mem- dans répiihélium ; elle correspond

branes muqueuses ressemblent beau- au derme ou cliorion de la peau, et a

coup à la peau. Leur surface libre est été appelée le feuillet tnuqueuœ pro-

occupée par une couche de tissu ulri- prement dit. Enfin une troisième cou-

culaire qu'on désigne sous les noms clie, composée principalement de tissu

cVépithéliumoacVépidermemuqueux. lâche et nommé tissu sous^muqueux,

J'ius profondément, on y trouve une l'unit aux tuniques sous-jacentes. Du

couche composée cssenliellement de reste, les caractères de ces membranes

tissu conjonctif et de fibres élastiques, varient beaucoup dans les diverses

mais renfermant d'ordinaire aussi parties de l'appareil digestif et dans

des nerfs et des vaisseaux sanguins, les dilîérentes classes d'Animaux ,

parties qui ne se rencontrent pas comme nous le verrons bientôt.

CONDITIONS DE PERFECTIONNEMENT. 2G9

qui s'étend également sur les parois de la chambre viscérale, n'est d'abord que du tissu connectif ordinaire ; mais quand les mouve- ments dont il vient d'être question deviennent plus étendus et plus fréquents, elle se transforme en une membrane lisse, ana- logue à celle que nous avons déjà vue se développer autour des poumons et du cœur, et destinée à diminuer les frottements.

Ainsi les parois de la cavité digestive, au lieu d'être formées par une membrane sim})le, sont composées alors de trois couches distinctes : une membrane muqueuse, une tunique musculaire et une enveloppe séreuse, ayant chacune des fonc- tions spéciales. J'ajouterai que, chez les Animaux supérieurs, cette dernière gaine se perfectionne aussi de façon à bien as- surer la fixation de l'appareil digestif dans la chambre viscé- rale sans gêner ses mouvements, et, à cet effet, se prolonge dans une grande partie de la longueur du tube alimentaire, de la surface de celui-ci jusqu'à la paroi adjacente de l'abdomen, et constitue ainsi une sorte de voile suspenseur nommé mésentère.

§ 9. Les modifications qui se remarquent dans la forme Division de ce réservoir s'expliquent d'après les mêmes principes. Chez navaii di-esiu les Animaux dont 1 organisation est peu perfectionnée sous ce les diverses

1 I 1 / 1 A 1 régions

rapport, le tube alimentaire présente la même structure dans du canni toute sa longueur, et les voies par lesquelles les corps étrangers y entrent ou en sortent sont de simples orifices à bords con- tractiles. Quand ces orifices deviennent béants pour livrer pas- sage aux aliments ou aux fèces, il doit y avoir, par conséquent, 'tantôt une perte considérable des sucs digestifs qui s'épanchent au dehors, et, d'autres fois, introduclion de beaucoup de matières inutiles à l'organisme. 11 y aurait donc avantage à substituer à ces orifices des espèces de conduits étroits et assez longs pour qu'ils puissent livrer passage aux matières alimentaires sans se dila- ter dans toute leur étendue à la fois, et maintenir la séparation toujours bien établie entre la portion de l'appareil la diges- tion s'opèreet le milieu ambiant. Or, cette disposition se réalise

270 DIGESTION.

chez tous les Animaux d'une structure perrcclionnée, et la cavité digestive, au lieu d'être constituée par un estomac seulement, se compose de trois parties distinctes : une portion étroite et vestibulaire , nommée œsophage-, une portion principale et élargie en manière de réservoir, Vesto?nac, et une portion termi- nale, rétrécie et plus ou moins allongée , qu'on appelle intestin. ^10. La division progressive du travail se reconnaît aussi

Organes '^

producteurs j^ns les pertéctionnoments de cet appareil, considéré sous le

des liquides

digestifs, rapport de la production des liquides digestifs. Chez les Ani- maux les plus intérieurs, cette fonction sécrétoire n'est l'apa- nage d'aucun organe en particulier, et toutes les parties de l'économie sont aptes à produire du suc gastrique quand elles sont stimulées par le contact des aliments. Une preuve de cette diffusion de la faculté sécrétoire nous est fournie par des expé- riences dues à Tremblay et faites sur les Hydres ou Polypes à bras, qui nous ont déjà offert des phénomènes physiologiques si importants à connaître pour la philosophie de la science (1). Le corps grêle et cylindrique de ces petits Zoophytes d'eau douce est creusé dans toute sa longueur par une cavité de même forme qui se termine intérieurement en cul-de-sac et est ou- verte à son extrémité su[»érieure ; cette cavité est un estomac, et son orifice, qui tient lieu de bouche et d'anus, est enlouré de tentacules longs et préhensiles. L'Hydre est carnassière et se nourrit des Animalcules qui nagent dans l'eau, elle fait sa demeure ; quand elle introduit un de ces petits êtres dans son estomac, on voit qu'elle le digère promptement, et qu'après en avoir extrait les principes nutritifs, elle en rejette la dépouille ; mais on n'aperçoit dans la structure de sa cavité aliinenlairerien (|ui distingue celle-ci des parties voisines, et ce Zoo})hyte tout entier ressemble à un simple sac étroit et contractile, dont l'orifice sciait frangé. Or, Tremblay s'est assuré qu'on pouvait

(1) Voyez tome I, page 18,

CONUITIUNS DE l'ERFECTlONNEMENT. ^71

facilement le retourner comme on le ferait d'un doigt de gant, de façon à rendre intérieure la surface qui, naturellement, était extérieure, et à substituer à celle-ci la surface gastrique. Il a fait souvent cette expérience, et il a trouvé que le Polype disposé de la sorte n'en continuait pas moins à se nourrir de la manière ordinaire. Ce singulier Animal, ainsi retourné, introduit, comme de coutume, sa proie dans l'espèce d'estomac adventif formé par le renversement de la surface extérieure de son corps, et limité par ce que l'on api)ellerait la peau, si le tissu constituant cette surface était distinct du tissu subjacent; les aliments ingur- gités dans ces circonstances se digèrent de la manière accou- tumée. En un mot , rien ne paraît changé dans les fonctions digestives, et ce sont seulement les matériaux constitutifs du réservoir alimentaire qui ne sont plus les mêmes : comme si la forme de cette portion de l'organisme était la seule condi- tion voulue pour la rendre apte à remplir les fonctions d'un estomac (1).

(1) Le renversement de l'estomac des Hydres est une opération délicate et assez difficile , mais, à l'aide des précautions indiquées par Tremblay, on y parvient presque à coup sûr (a), et Laurent, qui a répété les expériences de ce physiologiste avec un plein suc- cès, a vu parfois ce phénomène se produire spontanément (6). Trem- blay a remarqué qu'en général l'Ani- mal ainsi retourné cherche à re- prendre son état normal, ou, pour me servir de l'expression employée par cet auteur, à se « dérelourner »; mais, lorsqu'on l'en empêche, il re- commence bientôt à prendre des ali-

ments comme avant l'opération, et à les digérer au moyen de son estomac de nouvelle formation. Un des Polypes ainsi retournés a continué à vivre pen- dant deux ans et a beaucoup multi- plié.

Tremblay a vu aussi que de très jeunes individus développés par bour- geonnement à la surface du corps d'un Polype qu'on retourne ainsi, et logés par suite de ce renverse- ment dans la cavité intérieure du corps de l'individu souche, se re- tournent spontanément, de manière à faire de nouveau saillie à l'extérieur, et achèvent leur croissance dans cette

(a) Tremblay, Mémoires pour servir à l'histoire d'un genre de Polypes d'eau douce à bras en forme de cornes, t. 11, p. 212 et suiv.

ib) Laurent, Recherches stir l'Hydre et l'b^iioiifje d'eau douce, p 83 (cxlr. du Voyage de la Bonite).

272 DIGESTION.

Mais cette diiïusion de la faculté de sccrcler l'agent digestif est extrêmement rare, et chez presque tous les Animaux la production de ce principe est localisée et a son siège dans les parois de l'estomac, dont la structure se modifie pour s'appro- prier à l'exercice actif de cette fonction. En effet, chez les Animaux supérieurs, cette portion de tuhc alimentaire s'enri- chit d'une foule de petites cavités appelées follicules, qui sont creusées dans l'épaisseur de sa membrane muqueuse, et (jui servent spécialement à la sécrétion du suc gastrique. Enfin, chez quelques espèces, la division du travail est portée encore plus loin : ce liquide ne se produit pas dans l'organe il s'emploie, et, au lieu d'un seul réservoir, il y en a deux; un premier estomac est alors chargé de fournir l'agent digestif et d'en imbiber les aliments, tandis qu'un second estomac reçoit ces matières ainsi préparées et les emmagasine pen- dant que la chymification s'opère. Les Oiseaux nous offriron des exemples de cette disposition. En effet, ils ont un estomac sécréteur appelé le ventricule succenturié, et, en général, un autre réservoir gastrique situé plus avant et nommé gé- sier, où les aliments séjournent a[)rès avoir été imprégnés du suc gastrique pendant leur passage dans la cavité précé- dente (1).

Il est permis de supposer que les modifications à imprimer

ics'pintl'pics aux matières alimentaires pour les rendre assimilables par un

carnÏÏers. Auimal doivcnt être d'autant plus grandes, et par conséquent

plus difficiles à effectuer, que ces substances diffèrent davan-

tao-e de celles dont l'organisme de cet être se compose. Nous

pouvons donc penser que, toutes choses étant égales d'ailleurs,

position ; de sorte que cliez eux aussi jabot, le ventricule succenturié de- là suifuce de rorganisnie destinée à vient le second estomac, et le [gésier cire extérieure devient la surface gas- le troisième; mais ce changement trique, et vice versa. n'inllue en rien sur les rapjjorls de (1) Chez les Oiseaux pourvus d'un posilion que je viens d'indiquer.

CONDITIONS DE l'EHKECTlOXNEMliM'. "JTo

le travail digestif à l'aide duquel ces niodificatiûiis s'obtiennent sera plus facile à accomplir si l'aliment consiste dans le corps ou une portion du corps d'un Animal que si c'était un tissu végétal. Il s'ensuit que les Animaux dont l'organisme est le moins parfait et la puissance digestive la moins développée doivent être carnassiers plutôt que phytopliages. Effectivement, dans les groupes zoologiques inférieurs presque tous les Animaux se dévorent entre eux, et le régime herbivore ne s'observe que fort rarement. Or, nous avons de^à vu que la chair musculaire et les autres substances analogues qui constituent en majeure partie le corps de tous les êtres animés sont sus- ceptibles d'être digérées par le suc gastrique, ou plutôt par la pepsine dont ce suc est chargé. Par conséquent aussi nous Perfectionne-

ment

devons nous attendre à ne trouver chez les Animaux les plus du travail

cliimique

simples qu'un liquide digestif de ce genre, tandis que chez de la digestion. les êtres mieux organisés qui ont le pouvoir d'utiliser plus com- plètement les substances diverses contenues dans leur proie, ou qui ont la faculté de se nourrir de végétaux, le suc gastrique devra coexister avec d'autres humeurs du même ordre, mais douées de propriétés différentes et aptes à attaquer les matières organiques que le premier de ces agents ne saurait rendre absorbables.

§ 11. Lorsque la partie chimique du travail digestif se perfectionne de la sorte, et que les substances nutritives sont soumises successivement à l'action de deux ou de plusieurs dis- solvants doués de propriétés difll'rentes, la production de ces nouveaux sucs s'eftectue d'abord dans les parois mêmes du tube alimentaire, dont certaines portions sont plus ou moins modi- fiées pour s'adapter au rôle d'organe sécréteur spécial. Mais chez les Animaux d'un mode d'organisation plus élevé, l'éla- boration de ces sucs se fait principalement à l'aide d'instru- ments nouveaux qui se développent autour de ce tube et qui y versent leurs produits. Ce sont des organes nommés glandes V. 18

Division

du travail

entre

les organes

sécréteurs.

27/l DKiESTION.

qui viennent ainsi s'ajouter aux parties fondamentales de l'ap- pareil digestif, et leur position, ainsi que leur structure, varie suivant la nature des humeurs qu'ils sont destinés à fabri- quer.

bi'uaTrf ^' "'^ ^ ^^"^ quelques Zoophytes et un petit nombre de Vers dont l'appareil digestif ne présente aucune trace de complications de ce genre, et pour peu que l'on s'élève dans l'une quelconque des séries zoologiques, on voit presque toujours un liquide par- ticulier, appelé bile, venir se mêler au chyme préalablement élaboré dans l'estomac sous l'influence du suc gastrique. Ce li- quide nouveau est en général reconnaissable à sa couleur jaune ou verte et à son amertume ; il est doué de propriétés alcalines et ressemble à une sorte d'eau savonneuse. Nous étudierons plus tard sa nature et ses propriétés, ainsi que la structure des organes à l'aide desquels il se produit, et je me bornerai à ajouter ici que chez quelques Molluscoïdes il est sécrété par les parois même de la portion de l'intestin qui fait suite à l'esto- mac, et que chez quelques autres Animaux du même embran- chement il se forme au fond de divers appendices dépen- dants soit de cet intestin, soit de l'estomac lui-même ; tandis que chez la plupart des Mollusques, ainsi que chez tous les Animaux supérieurs, il provient d'une grosse glande appelée foie.

Appareil Bhus uu très grand nombre d'espèces, un troisième liquide digestif, doué également de propriétés alcalines, mais qui d'ail- leurs diffère beaucoup de la bile, et consiste principalement en eau chargée de quelques sels et de quelques princi[)es orga- niques , la salive, est également versé sur les aliments pen- dant leur passage dans le canal digestif; mais c'est dans la })remière portion de ce tube, en avant de l'estomac, que ce liquide afflue, et c'est aussi dans le voisinage de la bouche que les organes spéciaux chargés de l'élaborer, et appelés glandes salivaires, se développent.

salivaire.

CONDITIONS DE PERFKCTIONNEMENT. '21 0

Enfin, chez les Animaux les plus élevés en organisation, les aliments rencontrent aussi dans la portion post-stomacale du tube digestif un quatrième dissolvant, qui ressemble un peu à la salive, mais qui jouit de propriétés particulières : on lui a donné le nom de suc pancréatique, et il a sa source dans le pancréas^ organe glandulaire situé près du foie.

Ces divers liquides qui viennent ainsi compléter l'action di- gestive du suc gastrique sont destinés surtout à attaquer et à rendre absorbables les matières végétales, ou, pour parler d'une manière plus j)récise, les aliments organiques non azotés.

Pour s'en assurer, il suffit d'un petit nombre d'expériences faciles à répéter.

Ainsi le pain, comme chacun le sait, n'est pas soluble dans l'eau, et serait pres(iue insipide s'il ne contenait du sel ; mais il suffit de le bien imbiber de salive en le mâchant pendant quelque temps dans la bouche pour y développer un goût sucré à la transformation d'une certaine quantité de sa matière féculente en dexUine, puis en glycose; et si l'on filtre le li({uidequi s'écoule delà pâte ainsi imprégnée, on peut, à l'aide de réactifs convenables, tels que la solulion cupro-potassique, y constater la présence du sucre formé de la sorte aux dépens des principes amylacés. Cette expérience est due à l'un des agrégés de notre Faculté de médecine, M. Miahle; mais je dois ajouter que la découverte du mode d'action de la salive sur les madères amylacées appartient à un [)liysiologiste alle- mand, M. Leuchs (1).

Appareil pancréatique.

Usages des liquides

digestifs accessoires.

(1) Devant, dans une prochaine Leçon , traiter d'une manière plus complète du mode d'action de la sa- live sur les aliments, je ne rendrai pas compte ici des divers travaux qui ont été faits sur ce sujet, et je ne parlerai pas en ce moment de la com- position chimique du suc salivaire, si

ce n'est pour dire que l'on trouve dans ce liquide un principe particulier apte à jouer le rôle de ferment, à peu près comme nous l'avons vu pour la pepsine, mais ayant la propriété d'a- gir de la sorte sur certaines matières amylacées, et ne paraissant pas dif- férer de la diastase qui se développe

276 DIGESTION.

Des expériences analogues, faites presque en même temps par M. Yalentin en Allemagne, et par MM. Bouchardat et San- dras à Paris, montrent que le suc pancréatique agit de la même manière sur les éléments amylacés, et contribue à en effectuer la digestion (1). Il est aussi à noter que le suc formé par les parois mêmes de l'intestin jouit de propriétés analogues (2), et

pendant la germination des graines. La découverte de M. Leuchs date de 1831 (a), et a été confirmée peu de temps après par les expériences de M. Schwann, do M. Mialile et de plu- sieurs autres pliysiologisles (6) ; mais il est à noter que tous les liquides dé- signés sous le nom de salive ne pos- sèdent pas les propriétés digeslives dont il vient d'être question , et que c'est la salive mixte , telle que celte humeur existe dans la cavité buccale, qui détermine la transformation de l'amidon en dextrine , puis en gly- cose {c).

(1) En IS/ii.M. Valentin a constaté ce fait en soumettant de l'empois à l'action d'une certaine quantité- d'eau dans laquelle il avait fait infuser des fragments du pancréas {d). L'année suivante, MM. Bouchardat et Sandras ont obtenu le même résultat en opé- rant sur le suc pancréatique de la Poule (e) , et plus récemment ces expériences ont été répétées avec succès par beaucoup d'autres physio- logistes if).

(2) Ce fait a été constaté par i\I. Frerichs, ainsi que par MM. Bidder et Sclimidt (g).

(fl) Leuclis, Ueber die Verzuckenmg des Stârkmehls durch Speichel {Ka^tner' s Areh. fur die gesammle Naturlelire, 1831, t. XXI, p. lOG).

(b) Schwann, Ueber das Weseii des Verdauungsprocesses (Miiller's Archiv fi'W Anatomie und Physiologie, ISSO, p. 138).

Séliastian, voyez Burdacli, Traité de physiologie , t. IX, p. 2C8.

Wright, Thè Physiology and Palhology of Saliva {The Lancet, 1841-1842, t. II, p. 217).

Mialhe, Wem. sur la digestion et l'assimilation des matières amyloUes et sucrées. Paris, 1846. - Chimie appliquée à la physiologie, p. 41.

Jacuhowitsch, De saliva (dissert, inaiig.). Dorpal, 1848.

Bidder und Schmidl, Die Verdauungssdfte und der Stoffwechsel, p. 1 5.

Longet, Traité de physiologie, t. I, partie, p. 171.

(c) Lassaigne, Recherches pour déterminer le mode d'action qu'exerce la salive pure sur l'ami- don {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 184.5, t. XX, p. 1347, etc.).

Magendie, Étude comparative de la salive parotidienne et de la salive mixte du Cheval (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1845, t. XXI, p. 902).

Cl. Bernard, Mém. sur le râle de la salive dans les phénomènes de la digestion (Arch. gén. de médecine, 4" série, 1847, 1. XIII, p- 1).

(d) Valentin, Handbuch der Physiologie, 1847, t. I, p. 356.

(e) Bouchardat et Sandras, Des fonctions du pancréas et de son influence sur la digestion des féculents {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1845, t. XX, p. 1088, et Suppléments à l'Annuaire de lliérapcutique pour 1846, p. 147).

(/■) Cl. Bernard, Mém. sur le pancréas {Supplément aux Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1850, i. I, p. 410).

{g) Krorichs, Die Verdauung (Wagner's Handivbrterbuch der Physiologie, 1846, t. III, 1" par- tic, p. 852).

.— Bidder und Schmidl, />ie Verdauungssdfte und der Slo/fwechscl, 1852, p. 281.

CONDITIONS I'ËRPECTIONNKMENT. ''lH

mon savant collègue, M. Cl. Bernard , a souvent rendu les élèves de celle Faculté témoins de l'action remarquable que le suc pancréatique exerce sur les matières grasses (1). Il suffit, en effet, d'agiter pendant (juelques secondes ime graisse liquide avec quelques gouttes de cette humeur, pour la transformer en nne émulsion d'apparence laiteuse qui ressemble beaucoup à un des produits du travail digestif, le chyle, dont l'étude nous occupera bientôt. Enfin des expériences faites récemment par M. L. Corvisart tendent à établir que le principe actif du suc pancréatique jouit de la propriété d'attaquer et de rendre solu- bles les matières albuminoïdes comme le fait le suc gastrique, et cela en présence des alcalis aussi bien que des acides, de façon que cette substance serait apte à continuer la digestion commencée, soit par la salive, soit par la pepsine stomacale (2). Quant au rôle de la bile dans le travail digestif, les résultats sont moins nets ; mais, ainsi que je le ferai voir plus tard, il y a tout lieu de penser que ce liquide attaque aussi les matières grasses contenues dans les aliments, et les expériences endos-

Ci) En lS3i, M. Eljcrle reconnut que le suc pancréatique jouit de la propriété de tenir les graisses en sus- pension sous la forme d'émnlsion (o), et plus récemment ce fait a été mis en évidence d'une manière plus com- plète par les expériences de M. Claude Bernard (6).

{'!) Le principe actif du suc pan- créatique , que l'on désigne assez gé- néralement aujourd'hui sous le nom

de pancréatine (c) , peut être préci- pité par l'alcool , puis redissous dans l'eau sans perdre la propriété d'agir comme ferment [digestif. M. L. Cor- visart a constaté que cette substance, soit à l'étal acide ou à l'état alcalin, transforme la fibrine, l'albumine coa« gulée, la caséine, etc., en peptones, comme le fait le suc gastrique {d)i mais elle parait ne pas exister ton-* jours dans le liquide fourni par le

[a] Eberle, Physiologie der Vérdduunij, ISai, p; 251.

(6) Cl. Bernard, Du suc pancréatique et de son rôle dans ta digestion {Ai'ch. géit. de méd,f série, 1849, t. XIX).

Méin. sur le pancréas {Snppléni. aux Comptes rendus de l'Acad, des sciences, 1S56, 1. 1( p. iï\ ei suiv.).

(c) Robin et VerJcil, Traité de cliimie anatomiquc et physiologique, t. IIÎ, ji. 34.5i

((/) Li Corvisart, Sur une fonction peu connue du pancréas dans la digestion des tiliménta azotés, 1858 (cxir. de la Gaiette hebdomadaire de médecine, 1807, l. IV, p. 250 et suiv.j.

de plusieurs

cavités

successives

pour l'action

de ces sucs.

278 DIGESTION.

motiques dont j'ai déjà rendu compte prouvent qu'il doit con- tribuer A en faciliter l'absorption (1). utilité § 12. Pour tirer de ces divers agents chimiques tout le

parti possible, l'appareil digestif doit être pourvu, non d'un réservoir alimentaire unique, comme chez les Animaux oii le suc gastrique intervient seul dans le travail de la digestion, mais de plusieurs estomacs, ou tout au moins de plusieurs cavités les aliments peuvent séjourner en contact avec ces liquides.

Aussi, chez un assez grand nombre d'Animaux phytophages, dont la digestion est puissante, trouve-t-on, au-devant de l'esto- mac proprement, dit un estomac accessoire qui est désigné tantôt sous le nom de jabot^ tantôt sous celui de panse, et qui sert de magasin pour les aliments déjà imprégnés de salive, mais non encore soumis à l'action du suc gastrique.

Le réceptacle les matières alimentaires sont mêlées à la bile et au suc pancréatique fait généralement suite à l'estomac, mais n'a pas, comme les cavités précédentes, la forme d'une poche, parce qu'il doit servir aussi à un autre usage, et que cette circonstance nécessite une disposition particulière ; mais cette espèce d'estomac complémentaire n'en est pas moins nettement délimité, et sa capacité est surtout très grande chez les Animaux herbivores. Elle est formée par la première por- tion du tube intestinal, et on la désigne généralement sous le nom iVintestin grêle, par opposition à la portion terminale du

pancréas (a), et, d'a.)rès les dernières MM. Bidder el Scliniidt avaient con-

expériences faites par le jeune pliy- slaté précédemment que les sucs in-

siologiste que je viens de citer, elle leslinaux sont aptes à produire des

ne se produirait qu'au moment effets analogues (c). la digestion stomacale s'eiïectue {b). (1) Voyez ci-dessus, page 223.

(a) MM.KefersteinetHaUvoclis n'ont obtenu que des résidtats négatifs (voyez Sclimidt'sJflVtriiic/ier,

4859).

(6) Corvisart, Coniribulinu à l'Hude du panrvcas dans la digestion {Comptes rendus de l'Ara demie des sciences, 1^59, l. XLIX.p. 43).

le) liidder und SclimidI, Die Vevdaimngssàfle und der SloU'weehsel, 1852, p. 272 el suiv.

l.elimann, lehrbvcU der physiologisclien Cliemie, I. 11, p. !•!•.

CONDITIONS DE VF^RFECTIONNEMENT. 279

même conduit, qui, à raison de son volume, est appelée le gros intestin et qui sert de réservoir pour le résidu excrémentitiel.

J'ajouterai que les physiologistes désignent souvent sous le nom de clujmiflcation cette digestion complémentaire qui s'ef- fectue dans l'intestin grêle, parce que l'un des produits les plus remarquables de ce travail est un liquide généralement laiteux, appelé chyle (1).

(1) La plupart des anciens physio- logistes emploient presque indifférem- nient les mots chyme et chyle pour désigner les produits uliles de la di- gestion sioniacaie. Ainsi Wiilis, Syl- vins , Fabricius , Lower, l'itcairne , Riolan et Bartliolin, parlent de la for- mation du chyle dans l'estomac (a), et Boerhaave ne paraît même avoir reconnu aucune différence essentielle entre les matières alimentaires élabo- rées dans cet organe et dans Tin- testin (b). Haller semble avoir eu des notions plus justes à cet égard, bien qn'il ne s'en explique pas d'une ma- nière précise. Cependant Juncker avait déjà établi une distinction nette entre les fonctions de ces deux por- tions du canal digestif, car il avait dit positivement que les aliments sont transformés en chyme dans l'esto- mac, puis poussés dans le duodénum, ils se changent en cliyle par leur mélange avec d'autres substances.

C'est dans cette dernière acception que les mots chymification et chyli- fication ont été employés par Sœm- liiering, Chaussier, iMagendie et la plupart des physiologistes du siècle

aciuel (c). Quelques auteurs récents en critiquent l'emploi, parce que ces mots ne peuvent s'appliquer à aucun résultat nettement délini , et qu'on réalité la digestion commencée dans l'estomac est continuée dans l'intes- tin. Mais ces objections ne me sem- blent pas avoir beaucoup de valeur, et il est utile de pouvoir désigner par un nom particulier les deux pé- riodes principales du travail digestif. Ainsi j'emploie le mot chyme pour désigner la matière pulpeuse obtenue dans l'estomac par l'action du suc gastrique acide et chargé de pepsine sur les aliments, et chymification l'acte (|ui amène ce résultat; tandis que je me sers de l'expression chyli- fication pour indiquer la digestion complémeniaire qui s'rffectuc dans l'intestin à l'aide des sucs alcalins ou neutres et plus ou moins chargés de diastase, pliéiiomène qui di^lermine la formation du chyle ainsi que des autres liquides nourriciers dont l'ab- sorption a lieu dans l'intestin grêle. Quant au mot chyle, on le réserve généralement au fluide nourricier qui pénètre de l'intestin dans la portion

(a) Voyez Castelli, Lexicon, art. Chvmus cl Chvlus, 1712.

(b) Boerhaave, Prœlect., 18, 95.

(c) Sœnimei'iiiL;', Corp. hum. fabr., t. VI, p. 306, etc.

Cliaiissicv, Digestion (Dictionnaire des sciences médicales, t. IX, p. 400 et 429).

Magciiclif, Précis élémentaire de physiûloijie, t. II, p. 81 et siiiv.

Bérard, Leçons de physiologie, t. III, p. ISt, etc.

280

OlCiESTION,

ciinnçrcmenis § 13. Le SUC gnstrif|ue et les antres humeurs que les ali-

chimiques

déterminés meiils rcncoutrent dans les diverses parties de l'appareil diges-

pur

le suc gastrique, lif nc déterminent pas seulement dans ces substances le chan- gement d'état qui est nécessaire pour les rendre absorbables ; souvent la constitution chimi(pie de ces corps est profondément inoditiée par l'action de ces agents, et les transformations effec- tuées de la sorte peuvent se produire dans les liquides aussi bien que dans les solides. Il paraîtrait même que dans certains cas les matières alimentaires, tout en présentant les conditions voulues pour être absorbées, ne sont utilisables dans l'écono- mie qu'après avoir éprouvé des changements de cet ordre.

Ainsi le sucre de canne, et le sucre de raisin, ou glycose, sont l'un et l'autre très solubles dans l'eau et traversent assez faci- lement les membranes organiques ; mais lorsque ces substances se trouvent mêlées au sang et circulent dans l'économie ani- male, elles ne se comportent pas de même : le sucre de canne est rapidement expulsé par les voies uiinaires, tandis (pjc la glycose est d'ordinaire employée comme combustible respira- toire et utilisée de la sorte pour l'entretien du mouvement vital (1). Le sucre de canne, néanmoins, est un aliment dont les Animaux peuvent tirer grand parti, mais c'est à la condition

correspoïKlaiile du système des vais- seaux lyiiiplialiques ou vaisseaux cliy- iifèrcs, et qui présente d'ordinaire un aspect laiteux. IS'ous verrons plus loin quelle idée doit y être attachée.

(1) M. Cl. Bernard a obtenu la preuve expérimentale de ce fait en injectant d'une manière comparative dans les veines de divers Animaux vivants les deux espèces de sucre. Le sucre de canne introduit ainsi direc- tement dans le torrent d(î la circula- tion s'est montré bientôt dans les urines, et a été expulsé de l'organisme

par la sécrétion rénale, sans avoir subi aucun changement, par conséquent sans avoir été utilisé dans le travail chimique dont la machine vivante est le siège. La glycose, au contraire, di.s- paraîl rapidement du sang, et, dans la plupai t des cas, n'arrive pas dans les urines. Or, M, Cl. Bernard a reconnu que le sucre de canne se transforme en glycose sous l'inllucnce du suc gastrique, cl que si on l'injecte dans les veines après l'avoir mis en pré- sence de cet agent, au lieu de tiaver- ser simplement l'organisme, il devient

CONDITIONS DE PEnFECTlONNESlENT. ^81

de le transformer préahiblement en glycose. Or, le suc gaslriqne détermine ce changement, et par conséquent le sucre de canne, tout en étant absorbable, a besoin d'être digéré, c'est-à-dire de subir une certaine élaboration déterminée par l'action des agents digestifs.

Les substances albuminoïdes sont également modifiées dans leur constitution chimique par l'action de la pepsine et des autres ferments qui interviennent dans le travail de la diges- tion ; elles acquièrent ainsi des propriétés particulières, et con- stituent des matières que l'on désigne généralement sous le nom de peptones (1); enlln, dans certains cas, les matières

utilisable dans l'économie (a). Or, cette transforma lion du sucre de canne en sncre de raisin ou en glycose, dans l'intérieur de l'cslomac des Animaux vivants, est un des plH-nomènes ordi- naires de la digestion, ainsi que cela a clé constaté par MM. Sandras et Boucliardat , Lelimann , von Becker et plusieurs autres physiologistes [h), contrairement à l'opinion de MM. Fre- richs et Biondiot (c). Dans certains cas, la modification de celte sub- stance est portée même beaucoup plus loin, et le sucre se trouve changé en acide lactique par l'action soit du

suc gastrique, soit des liquides qui se rencontrent dans l'intestin (d).

(l) M. Mialhe a appelé l'attention des chimistes et des physioloi;istes sur les niodilicalions que le suc gastrique détermine dans les matières albumi- noïdes (ej, et ce sujet a été éludié d'une manière plus complète par M. Lelimann, qui donne à ces sub- stances le nom de peptones quand elles ont été transformées de la sorte (/'). Je reviendrai sur ce phéno- mène lorsque je traiterai des produits de la digestion.

(a) Cl. Beriuii'il, Mémoire sur le suc gastrique et son rôle dans la nuirition [Gasette médicale, 184/t),

{b) Boucliardat et Sandras, De la digestion des matières féculentes et sucrées, et du rôle que ces substances Jouent dans la nuirition {Supplém. à l'Annuaire de thérapeutique pour t846, {), 83 ei sliiv.),

Lelimann, Lehrbuch der physiolôgischcn Chcmie, t. Il, p. 255.

Von Beckcr, Ueber das Verhalteii des Z^ickers Deim thleriscUen StoffU'echsel{BiehoUnnd kollikcr's Zeitschfift ftir wissenschnftl. Zoologie, 185i, t. V, p. 1:24).

-— Loni;ct, Traité de physiologie, 1857, t. 1, 2" partie, p. Sid.

(c) Frcrichs, Verdauung (Wogiier'f Handworterbuch der Physiologi-e, I. lll, p. 802). ^-Biondiot, Traité analytiqiie de la digestion, p* âttt'i

(d) Boucliardat et Sandras, Op. cit. [Supplément à l'Annuaire de thérapeutique pour 1840, p. 102).

Ch. Schinidt, De digestionis natura (dissorl. inaiiif,), Uorjial, 1840, cl Ann> der Cheni. xntd P/iam., t-LXI.p. 2'2,

Lclimann, Lehrbuch der phijsiologischen Chemie, t. Il, p. 249.

(e) Mlalile, Mémoire sur ta digestion et l'assimilation des matières albhminoldcs, 1847, p. 31 et suiv.

(/■) Lehmann , Lehrbuch der physiolôgischcn Chemie, I. H, p. 4(i <l suiv.

282 DIGESTION.

grasses subissent aussi des transformations remarquables sous l'influence des mêmes agents (1).

Nous voyons donc que la digestion n'est pas une fonction aussi simple qu'on aurait pu le supposer d'après les résultais obtenus par les recherches de Réaumur et de Spallanzani. Les réactions chimiques qui en dépendent sont même très com- plexes; mais, pour le moment, nous pouvons laisser de côté l'étude des transformaiions qui sont effectuées ainsi dans la nature des matières alimentaires, et ne prendre en considération que les phénomènes les plus apparents et les plus généraux de ce travail physiologique, c'est-à-dire le changement d'état qui s'opère dans les aliments solides et qui les rend propres à péné- trer à travers les tissus pour aller se mêler aux lliiidcs nourri- ciers de l'organisme. Actions § ^^- Indé[)endamment des actes essentiels que nous

adjuvantes, ^çj^^j^g ^q passcr rapidement en reVue, il en est d'autres qui offrent parfois aussi une grande importance, et qui viennent en aide aux précédents sans produire ce qui est fondamental dans le phénomène de la digestion. Ainsi, quoique l'agent par lequel ce travail s'accomplit soit un dissolvant chimique, il est aisé de comprendre que le concours de puissances mé- phénomènes canlqucs puissc être très utile, ne fût-ce que pour diviser les

mécaniques. ., ^ i^- n i . »

matières soumises a 1 influence du suc gastrique ou autres, et à multiplier ainsi leurs points de contact avec ces liquides. La pression exercée sur les aliments, dans l'intérieur du tube digestif, par la contraction des libres charnues dont ses pa- rois sont garnies , peut suffire pour assurer cette division , et lorsqu'elle doit devenir très puissante, une portion parti- culière de ce conduit se trouve appropriée à l'exercice de cette

(1) Dans certains cas, les matières gras ; mais en générai les graisses grassesneuires paraissent pouvoir être sont absori)ées sans avoir subi aucune décomposées en glycérine et en acides transformation.

CONDITIONS DE PEUFKCTIONNEMRNT, 283

fonction. De encore une nouvelle complication de l'appa- reil, et l'apparition d'un réservoir gastrique à parois essentiel- lement charnues, qu'on nomme gésier. Mais cette adaptation d'une partie préexistante à des usages nouveaux ne suffit pas toujours pour obtenir le résultat voulu, et la nature a alors recours à la création d'instruments nouveaux ({ui viennent s'aiouter aux organes déjà si nombreux, dont se compose le organes

■• D j 7 -^ masticateur;

système digestif, et qui constituent un appareil de mastication. Ces organes sécateurs ou triturants interviennent aussi d'une manière active dans le phénomène de la préhension des ali- ments, et chez beaucoup d'animaux cette portion préliminaire du travail digestif s'effectue aussi à l'aide d'autres instruments accessoires empruntés à des parties voisines de l'économie ou obtenus par l'adaptation des bords de l'orifice buccal à ce genre d'usages.

Il est aussi à noter que l'appareil masticateur est perfectionné progressivement par les mêmes procédés que les autres organes digestifs. La bouche ne tarde pas à s'enrichir de leviers qui augmentent la précision et la force des mouvements déterminés par la contraction des muscles qui l'entourent, et ces parties rigides sont d'abord empruntées à l'appareil de la locomotion, puis obtenus à l'aide d'une création organique spéciale. Ainsi, chez certains Animaux, les pattes, ou des parties analogues à ces appendices, constiluent des mâchoires et des mandibules qui agissent à la manière de pinces, soit pour saisir, soit pour couper ou pour broyer les aliments; chez les Animaux supérieurs, non-seulement les leviers buccaux sont le résultai d'une création ad lioc^ mais encore ils se garnissent d'instruments qui sont destinés à en rendre le jeu plus j)arfait, et qui constituent l'ar- mature dite dentaire. Or, ces organes complémentaires, qui sont d'abord de simples tubercules ou crochets épidermiques, sont bientôt constitués par des tissus spéciaux, et chez les Ani- maux les plus élevés ils offrent dans les différentes parties de la

^S/i DIGESTION.

cavité buccale des formes variées, de façon à être mieux appro- priés à des modes d'action divers. La division du travail s'in- troduit donc dans les phénomènes mécaniques de la digestion, aussi bien que dans les actions chimiques dont il a été déjà ques- tion, et en assure aussi le perfectionnement. rcifcciionnc- § 15. Eutîn, les dispositions anatomiques à l'aide des-

ment

de l'appareil qncllcs la Naturc accroît la puissance de l'appareil digestif,

diijestif comme i ^ 17 ,•!• ■• 1 1 . i . m i

instrument V^^ rapport a 1 utilisation des produits du travail physio- absorpiion. JQgiq^^,g accompli dans son intérieur, c'est-à-dire considéré comme un agent absorbant, sont également faciles à com- prendre, et je dirai même à prévoir. En effet, la première con- dition à remplir pour rendre facile et rapide ce passage des matières li(juéfiées de la cavité digestive dans la profondeur de l'organisme, c'est de donner une étendue considérable à la sur- face perméable baignée par ces matières, et cela peut s'obtenir de diverses manières. Le procédé le plus simple consiste à sub- diviser le réservoir alimentaire de façon à rétrécir beaucoup la cavité dont il se compose sans en diminuer la capacité totale. Chez beaucoup de Zoophytes, cette disposition se trouve réalisée et coïncide avec l'adaptation de l'estomac à une autre fonction : celle de l'irrigation physiologique. En étudiant les premières ébauches de l'appareil circulatoire, nous en avons vu divers exemples (1), et je me bornerai à ajouter ici que le développement de certaines portions de la cavité digestive en tubes appendicu- laires, tantôt simples, tantôt rameux, se voit aussi chez beau- coup d'Animaux la division du travail physiologique est parfaitement établie entre les grandes fondions de la vie végé- tative, et l'état imparfait du mouvement circulatoire des fluides? nourriciers ne semble commander en aucune façon cette parti- cularité organique, mais elle paraît être destinée seulement à activer l'absorption des matières nutritives préalablement

(1) Voyez tome III, page 55 et suivantes,

isnio

CONDITIONS DE PliKFECTlONNEMKIST. 285

élaborées clans l'cslomac. Nous verrons bientôt que chez plu- Phiébemér sieurs Vers, ainsi (lue chez certains Mollusques, les appendices gastriques ainsi constitués affectent la forme de vaisseaux, et composent parfois un système dendroïde des plus remarquables. C'est ce inode particulier de conformation qui a été désigné par jM. deQuatrefages sous le nom de phlébentérisme; et lorsque nous étudierons le mode de formation de certaines glandes an- nexées au tube digestif, le foie, par exemple, nous verrons que c'est en empruntant les canaux gastro-vasculaires dont je viens de parler, ou leurs analogues, (jue la Nature paraît avoir con- stitué les canaux excréteurs de ces organes.

Ailleurs, les ciiecums ainsi développés autour du tube intes- vaivuics

. , .,,.,. coiiniventes

tmal disparaissent ou cessent de recevoir dans leur intérieur etvinosiiés

, ,.,,,.. , ., delà muquoiibo

les produits de la digestion, et, par conséquent, ne contribuent intesunaic. plus à faciliter l'absorption des matières nutritives, mais cette absorption est favorisée par une autre disposition anatomique. La portion du canal alimentaire qui fait suite à l'estomac, et qui est le siège du complément du travail digestif effectué à l'aide de la bile, du suc pancréati(|uc et de quelques antres liquides analogues, s'allonge beaucoup et se recourbe sur elle-même , de façon à constituer une multitude de circonvolutions. Les ma- tières élaborées par les sucs digestifs trouvent donc une sur- face absorbante très vaste elles s'étalent en couche mince ; et chez les Animaux supérieurs l'étendue de cette surface est encore augmentée par l'existence d'une multitude de replis, upi^elés valvules conniventes^ que la membrane muqueuse intes- tinale forme dans l'intérieur de ce conduit long, étroit et tor- tueux. Souvent cette membrane se garnit même d'espèces de franges molles et perméables, appelées villosités, qui en aug- mentent encore la puissance absorbante.

§ 16.— Ce coup d'œil rapide sur l'ensemble des phéno- P'««™«'- mènes de la digestion et sur les instruments qui y sont em- ployés, nous fait voir que ce travail est fort complexe, et

286 iUGESTlON.

résulte de deux séries d'actes principaux : les uns mécaniques, les autres chimi(pies.

Les premiers ont pour objet la préhension des aliments, leur division , leur introduction dans l'estomac et les autres cavités ils peuvent être soumis à l'intluence des dissol- vants chimiques ; puis l'expulsion des résidus qu'ils auront

laissés.

Les seconds sont destinés à donner à ces corps une forme et des propriétés telles qu'ils puissent pénétrer de la cavité di- gestive dans la profondeur de l'organisme, et y être employés à la nutrition ; résultat qui s'obtient au moyen de certaines transformations apportées dans leur constitution chimique, et qui s'effectuent à l'aide de liquides particuliers tels que le suc gastrique.

Pour compléter l'histoire de cette fonction importante, il nous faudrait donc examiner le mode de production de ces agents chimiques ; mais celte étude ne pourrait, sans inconvé- nients graves, être séparée de celle du travail sécrétoire consi- déré d'une manière générale, et par conséquent je ne l'abor- derai pas en ce moment. En parlant ici de l'action des sucs digestifs sur les aliments, je ne pourrais me dispenser de faire connaître les organes qui en sont la source, et d'indiquer les relations qui existent entre ces parties et les cavités digestives; mais je ne m'occuperai pas de la manière dont elles remplis- sent leurs fonctions, et je me bornerai à étudier ceux de leurs produits qui ont un rôle à remplir dans le travail de la digestion.

Le transport des matières ainsi élaborées de l'intérieur de la cavité alimentaire jusque dans le système irrigatoire ne dépend pas du travail digestif lui-même, bien qu'il en soit le complé- ment ; c'est un phénomène d'absorption, et il résulte, par con- séquent, du jeu d'autres instruments. Chez les Animaux infé- rieurs, les liquides noui'riciers i>assent directement de l'estomac

CUNUITIOIVS DE PEKKECTiOISNEMEINT. 287

OU de rinlestin dans le sang, et les veines de ces organes sont les canaux qui puisent en quelque sorte dans la masse alimen- taire la totalité des matières récrémentitiellcs dont le sang s'en- richit. Mais, ainsi que nous l'avons déjà vu, il existe chez l'Homme et les autres Animaux supérieurs un système vascu- laire spécial qui est annexé à l'appareil sanguin et qui est aussi un instrument d'absorption , savoir, le système lymphatique (1). Or, une partie notable des produits de la digestion traverse ces conduits pour se rendre dans le torrent de la circulation, et la portion du système lymphatique qui est employée de la sorte, et qui se compose de vaisseaux dits chylifères ou lactés, est par conséquent, de même que la portion correspondante du système veineux, un auxiliaire nécessaire de l'appareil digestif: on pour- rait même la considérer comme taisant partie de cet appareil.

Pour mettre dans nos études l'ordre désirable, nous n'aurons donc à nous occuper d'abord que de la constitution de l'appareil digestif, des actes mécaniques qui s'y accomplissent, et des phénomènes chimiques dont il est le siège. Les deux premiers points sont tellement connexes, que je ne crois pas devoir les séparer ; mais la partie chimi(pie du travail ne dépend pas de la disposition matérielle des organes elle s'accomplit, et son examen devient plus facile quand on la sépare de tout ce qui n'y est pas essentiel.

Je diviserai donc l'histoire de la digestion en deux parties. Dans la première, je traiterai des instruments qui sont em- ployés à l'exercice de cette fonction, de leur jeu et des phéno- mènes mécaniques résultant de leur action. Dans la seconde, j'étudierai les agents chimiques qui interviennent dans l'accom- plissement de ce phénomène, et je ferai connaître les chan- gements qu'ils déterminent dans la constitution des matières alimentaires.

(1) Voyez lome IV, page /|/|7 et suivantes.

288 DIGESTION.

Enfin, après avoir exposé l'état actuel de la science en ce qui concerne la digestion proprement dite , considérée ainsi au point de vue de l'anatomie et de la physiologie, je passerai à l'étude des actes complémentaires de la fonction, et j'examine- rai comment les n^^atières ainsi élaborées sont absorbées, soit par les veines, soit par les lymphatiques, et mêlées au sang.

Dans la prochaine Leçon j'aborderai donc simultanément l'examen de la constitution de l'appareil digestif et des actions mécani(|ues qui s'y effectuent. Pour point de départ, je choisi- rai, comme d'ordinaire, les Animaux dont l'organisation est la plus simple, et je passerai successivement à ceux dont la struc- ture est de plus en [ilus complexe, ^fais afin de ne pas trop scinder l'histoire de l'appareil digestif dans cliacune des diverses classes dont j'aurai à parler, je subordonnerai quelquefois cette marche à la distribution méthodique des êtres qui se trouvent liés entre eux par la sorte de parenté dont le zoologiste cherclie à présenter le tableau dans ses systèmes de classification.

atlvenlive ues Sarcodaiies.

QUARANTE -SEPTIÈME LEÇON.

De l'appareil de la digestion chez les Zoopliytes.

§ 1 . Si les expériences curieuses de Tremblay, dont il a c^vué digesiive été (juestion dans la dernière Leçon, ne nous avaient en quelque dequëiq sorte préparés à l'étude des laits que je vais exposer, il nous serait difficile de comprendre comment la digestion peut s'opérer chez quelques Animaux d'une simplicité extrême, qui, au pre- mier abord, ne semblent consister qu'en une sorte de gelée vivante, et qui appartiennent au groupe des Sarcodaires : les Amibes , par exemple. Effectivement , chez ces Zoophytes dé- gradés, on ne trouve dans l'intérieur du corps aucune cavité qui soit disposée pour recevoir des ahments, et il n'y a pas d'estomac, comment supposer qu'une digestion puisse s'ef- fectuer ? Mais l'observation nous apprend que la faculté existe malgré l'absence de l'instrument, et qu'au moment elle doit entrer en jeu, l'organisme se modifie de façon à en rendre l'exercice possible.

De même que chez le Polype de Tremblay, toutes les parties du corps de l'Amibe paraissent être aptes à sécréter un liquide digestif, et lorsque l'animalcule rencontre une substance dont il veut se nourrir, on le voit s'y accoler, se prolonger tout autour, et enfin l'envelopper complètement comme dans une bourse. L'aliment reste assez longtemps emprisonné dans cette espèce d'estomac adventif, s'enfonce plus ou moins profondé- ment dans l'organisme de l'Amibe, s'y trouve baigné par un liquide particulier, et, après avoir été en partie digéré, est V. 19

290

APPAREIL DIGESTIF

rejeté au dehors ; ensuite la fossette ou vaeuole qui le renfer- mait s'efface et cesse d'exister (1).

§ 2. Chez les Actinophrys, la digestion s'effectue à peu près de la même manière, mais la préhension des aliments est facilitée par l'action d'expansions filiformes et rétractiles qui rayonnent de la surface du corps. Il n'y a ni bouche, ni esto- mac, ni anus ; mais les matières nutritives se creusent en quelque sorte une niche dans la substance molle du Sarcodaire, s'y enfouissent complètement et y sont digérées ; puis le résidu qu'ils laissent est évacué sans qu'il y ait rien de constant ou de préétabli, soit pour leur entrée, soit pour leur sortie (2).

(1) Les Amibes, dont une espèce a élé décrite vers la fin du siècle der- nier par Othon Fréd. Millier (a), sous le nom de Proteus diffluens, sont des Animalcules infusoires de consistance gélatineuse, qui changent sans cesse de forme en s'élalant, pour ainsi par- ler, ou en se rétractant dans divers sens par un mouvement lent. M. Du- jardin a très bien observé el décrit les principaux phénomènes mention- nés ci-dessus, et pense que la sub- stance gkitineuse de ces petits êtres n'est pas limitée par une membrane, et peut se creuser de vocuoles sponta- nément aussi bien que sous l'influence de la pression exercée par des corps étrangers {b). Du reste, ce zoologiste ne se prononce pas sur la nature du travail effectué de la sorte, et il pa- raît même penser que les Amibes ne se nourrissent que par une simple absorption.

M. Carter a observé aussi le singu- lier procédé d'ingurgitation à l'aide duquel les Amibes introduisent dans leur organisme des corps étrangers, et il n'hésite pas à considérer cet acte comme un phénomène d'alimenta- tion (c).

Enfin, M. Claparède, à qui l'on doit beaucoup de recherches délicates et bien faites sur les Infusoires, vient de décrire col acte d'une manière plus précise et de l'interpréter, à peu près comme je le fais ici (d).

L'inglutition des aliments paraît se faire chez les Difflugies à peu près de même que chez les Amibes, mais seu- lement à l'aide de la portion protrac- tile du corps de ces Rhizopodes, qu'on désigne d'ordinaire sous le nom de pied (e).

(2) En 1777, Otii. Fréd. Millier et Wagler virent un EntomosUacé mi- croscopique logé dans l'intérieur du

{a) 0. F. Millier, Animalcula infusoria, i78G, p. 9, pi. 2, fig. \ à 12. (6) Diijardin, Histoire naturelle des Infusoires, 1841, p. 228.

(c) Schncidci-, Beitrdge %ur Naturycschichte lier Infusorien (Miiller's Archiv fiir Anat. tind PhysioL, 1854, p. 204).

(d) E. Claparède, Ueber Actinop/irys Eichhornii (Miiller's Arch. fur Anat. und PhysioL, 1854, p. 408).

(e) H. .1. Carter, Notes on the Species, Structure and Aiiimallly of llie Fresh W'ater Sponges in the Tanks of Bombay {Ann. and Mag. of Nat. Hist., 2' série, 1848, t. I, p. 311). Notes on Ihe Fresh Water Infusoria ofthe Island of Bombay {Op. cit., 185G, t. XVIIl, p. 123).

CHEZ LES ZOOFHYTES.

^291

Chez les Spongiaires, des voies permanentes sont disposées cavués

* 3CIltiI6rCS

pour donner accès aux particules solides dont ces singuliers et digesuvcs

êtres se sustentent; mais les canaux destinés à cet usage consti- spongiaires. tuent en même temps l'appareil respiratoire, et c'est à l'aide des

corps d'un Aclinophrys, et ils en con- clurent que ces Animalcules dévorent la proie dont ils peuvent s'emparer (o). Vers la même époque, Eichliorn fut souvent témoin de phénomènes d'in- gurgitation de ce genre (6), et M. Eli- renberg, qui les a également constatés, a été conduit à penser qu'il existe chez les Actinophrys un nombre considé- rable de cavités digeslives ou esto- macs (o) ; mais à une ('poque plus ré- cente l'organisation de ces Sarcodaires a été étudiée d'une manière plus appro- fondie, et aujourd'hui presque tous les micrographes sont d'accord pour reconnaître qu'ils sont complètement dépourvus de tout appareil digestif spécial, et que les matières solides dont ils se repaissent peuvent péné- trer dans leui' profondeui- par un point quelconque de la surface générale du corps. M. Nicolet, qui fut, je crois, le premier à signaler ce fait, remar- qua qu'il se forme de temps en temps, à la surface du corps de l'Actiiiophrys, une sorte de tumeur vésiculaire, et que la proie amenée en contact avec cette espèce d'ampoule par l'action des expansions rayonnantes, y déter- mine une dépression ou fossette plus ou moins profonde qui se referme pour emprisonner la matière alimentaire et la digérer, puis, après avoir rempli le

rôle d'un estomac adventif, rejette les fèces dont elle était restée chargée, et s'elTace (d). ^]. Kijlliker a publié, peu de temps après, des recherches plus étendues sur le même sujet, et comme ce point de Thistoire de la digestion olïre beaucoup d'intérêt et n'est encore que peu connu de la plupart des phy- siologistes, je crois devoir raj)porter ici les principaux faits observés par cet habile micrograplie (e).

La n)anière dont s'eîl'ectue l'alimen- tation de l'Actinophrys, dit M. KoUi- ker, est d'un grand intérêt. Quoique ce petit être ne possède ni bouche ni estomac, il prend des aliments solides et rejette ce qu'il ne peut en digérer. Ce phénomène, qu'on pourrait appi;- 1er presque un miracle, s'effectue de la manière suivante. L'Actinophrys se repaît d'Infusoires de toutes sortes, de petits Crustacés et d'algues (par exemple , de Kotifères, de Lyncées et de Diatomacées). Lorsqu'en nageant dans l'eau il rencontre un de ces vé- gétaux, ou lorsqu'un Infusoire s'en approche et que ce corps étranger est louché par un de ses filaments ten- taculiformes , il y reste en général accolé et se trouve peu à peu attiré par la contraction de ces appendices. Les filaments radiaircs circonvoisins s'y appliquent aussi, et la proie ainsi

(a) 0. F. Millier, Animalcula infusoria, i786, p. 304.

(b) Eichliorn, Beitr. zur Kenntniss der kleinsten Wasserthiere, 1783, p. 15.

(c) Ehrenberg, Die Infusionsthierchen, p. 303.

(d) Nicolul, Observations sur l'onjanisalion et le développement de i Actmophrijs (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1S4S, t. XXVI, p. H5).

(e) Kolliker, Uas Sonnenthierchen, Actijnophrys sol [Zeitschrift fur wissenschaftliche Zoologie, 1849, t. I, p. 201 et siiiv., pi. 17, fig. 2 et 3).

292

APPAREIL DlGliSTlF

courants déterminés par les cils vibratiles dont ces conduits sont garnis que les substances alimentaires tenues en suspension dans l'eau ambiante sont portées dans la profondeur de l'orga-

entourée est amenée lentement jusque sur la surface du corps de l'Animal, qui se déprime dans ce point pour le loger comme dans une fossette. La cavité ainsi formée devient peu à peu de plus en plus profonde, et bientôt se referme sur le corps étranger qui s'y trouve logé, tandis que les filaments tentaculiformes se déploient de nou- veau et reprennent leur disposition primitive. L'espèce de bourse ainsi formée, après s'être fermée sur sa proie, s'enfonce graduellement vers la partie centrale de l'Actinophrys, et le corps étranger emprisonné de la sorte est peu à peu digéré et absorbé. S'il est susceptible de se dissoudre complète- ment, comme cela a lieu pour un In- fusoire, la cavité qui le renferme se contracte à mesure que la digestion s'avance et finit par disparaître tout entière ; mais s'il en reste quelques portions indigestes, telles que l'enve- loppe cutanée d'ime Lyncée, ce résidu est rejeté au debors en suivant à peu près la même voie que lors de son in- gurgitation ; puis le passage se ferme et ne laisse au 'une trace de son exis- tence. i\l. Kolliker ajoule que par des observations multipliées el approfon- dies, il s'est assuré que ni l'orifice d'entrée servant de boiiclie, ni celui de sortie qui tient lieu d'anus, ne préexistent ni ne subsistent après que le pbénomène qui vient d'être décrit s'est accompli ; que la fossette servant d'estomac adventif peut se former dans un point quelconque de la sur- face du corps, et que souvent deux ou plusieurs de ces cavités digestives

temporaires se constituent à la fois sous l'influence du contact d'autant de fragments de matières alimentaires sur des points différents de la surface du corps ; il en a compté jusqu'à dix ou douze, et les seize estomacs décrits par M, Ehrenberg étaient certaine- ment des vacuoles produites de la même manière. Enfin, M. Kolliker a remarqué aussi que l'espèce de bol alimentaire ainsi englouti dans le corps de l'Aclinopbrys baigne dans un liquide diaphane, mais il n'a pu déterminer si ce fluide est de l'eau provenant de l'extérieur ou le produit d'une sécrétion. La digestion s'achève ordinairement dans l'espace de deux à six heures.

Les observations récentes de M. Cla- parède sont venues confirmer pleine- ment tous les résultats les plus impor- tants annoncés par M. Kolliker ; seu- lement ce physiologiste n'est pas tout à fait d'accord avec ses prédé- cesseurs sur le mécanisme à l'aide duquel l'estomac adventif se produit : il pense que ce réservoir n'est pas primitivement une dépression ou fos- sette creusée dans la substance du corps de l'Actinophrys, mais le résul- tat d'une expansion gluiineuse, qui entoure la proie et l'enfouit, puis rentre peu à peu avec elle dans la profondeur de l'organisme. Cette in- terprétation se rapproche, comme on le voit, de celle adoptée par M. ]\ico- let. Ouoi qu'il en soit, la cavité ou va- cuole ainsi constituée est occupée aussi par un liquide qui, à raison de sctn aspect, est considéré par M. (.Ia|)a-

CHEZ LES ZOOPHYTES,

293

nisme. \À\ elles s'accumulent dans des vacuoles qui sont proba- l)leinent de même nature que les estomacs adventlfs des Amibes,

rude comme étant probablement le résultat d'une sécrétion, et qui paraît jouer le rôle d'un suc gastrique. Les Animalcules engloutis de la sorte con- tinuent quelquefois à se mouvoir pen- dant un certain temps, mais en général ils meurentassez promptement, et sont bientôt Iransforniésen une petite masse arrondie de matière informe (a).

Plus récemment encore de nou- velles observations sur le mode d'ali- mentation des Actinophrys ont été publiées par M. Weston, quia remar- qué aussi le développement d'une ex- pansion glutineuse autour de la proie avant l'introduction de celle-ci dans la substance du corps de l'animal (6). Il est également à noterque, suivant ce micrographe, le contact des filaments tentaculaires produirait sur les Infu- soires dont l' Actinophrys se repaît une sorte de paralysie, opinion qui avait déjà été émise par quelques naturaliste, et notamment par M. Ehrenberg, mais qui a été contestée par M. Kôlliker.

J'ajouterai que M. Stein n'a pas été témoin de ces phénomènes d'ingurgita- tion , niaisil a étudié le mode de produc- tion des ampoules qui se développent à la surface du corps de l'Actinophrys, et il rend compte du mécanisme de l'introduction des aliments à peu près comme l'avait fait M. Nicolet (e).

MM. Claparède et Lachmann pen- sent que les Opalines sont dépourvues d'orifices digestifs (rf). Du reste, la nature de ces petits êtres est encore fort obscure.

M. Dujardin range dans la famille des Actinophryens le genre Acineta de M. Ehrenberg, qui, effectivement, a quelque ressemblance avec l'Actino- phrys, à rason des rayons filiformes dont il est garni {e) ; mais il paraî- trait, d'après les observations récentes de M. Lachmann, que la structure de ces Animalcules serait en réalité fort ditférente, et que chez les Acinètes les prolongements filiformes seraient des trompes ou suçoirs terminés par une bouche , dont le rebord labial ferait fonction de ventouse. Ces ap- pendices sont susceptibles de s'allon- ger beaucoup, et se fixent par leur extrémité sur la proie dont l'Acinète veut se repaître ; mais ce n'est pas pour l'attirer seulement à lui qu'il agit de la sorte, c'est pour en sucer la substance, qui pénéirerait dans un canal dont l'axe de chaque filament serait creusé, et arriverait ainsi dans le corpsderAnimalcule (/"}. Les Acinètes seraient donc pourvus de plusieurs bouches, et probablement d'un ou de plusieurs estomacs. On ne sait rien au sujet de l'anus de ces petits êtres.

{a) Claparède, Op. cit. (MûUer's Archiv fiir Anat. und PhysioL, i85-i, p. 400).

(6) Weston, On the Actinophrys sol {Qiiarterly Joxmial of the Microscopical Society, 1856, t. IV, p. ni).

(c) Stcin, Die Infusionsthiere auf ihre Entwickelungsgeschichte untersucht, p. 153.

{d) Claparèfle et Lachmann, Études sur les Infusoires et les Rhizopodes, 1858, p. iO.

(c) Ehrenberg-, Die Infusionstlderchen, p. 240, pi. 20, fig-. 8 à 10.

Dujardin, Hist. nat. des Infusoires, p. 267, pi. 1, fig. 12.

if) Lachmann, De Infusoriorum, imprimis Vorticellinor^lm structura (dissert, inang.). Berlin, 1855, p. 29, pu 2, fig. 14. Ueber die Organisation der Infusorien (Mùller's Archiv. fiir Anat. iind PhysioL, 1856, p. 372, pi. 14, fig. 14).

294 APPAREIL DIGESTIF

et le résidu qu'elles y laissent est rejeté au dehors par les canaux expirateurs (1).

Cavité di estive ^ ''' ^^^'^^ '^ grande section des Zoophytes Coelentérés,

^ ,'^f, , la division du travail phvsioloeique commence à s'établir, et

l'appareil digestif cesse d'être en même temps l'instrument

princii)al de la respiration, mais il continue à remplir les fonc-

fl) Les grands orifices qui existent sur divers points de la surface des Spongiaires n'ont pas éciiappé à l'at- tention des premiers observateurs qui se sont occupés de l'étude de ces corps à l'état vivant (a) ; mais Ellis, guidé par une fausse analogie, a supposé que ces trous étaient les ouvertures de cellules ou loges occupi'es par des Polypes (6), et cette opinion a régné pendant fort longtemps parmi les zoologistes (c), malgré les observa- tions positives de Cavolini, d'Olivi et de Montagu et Schweigger, sur l'ab- sence de toute trace de corps de ce genre {d).

L'existence de courants dans les canaux dont la substance des Éponges est creusée, et dont j'ai déjà indiqué la disposition générale, avait échappé à Cavolini et aux autres naturalistes que je viens de citer, mais fut consta- tée vers la même époque par M. Th. Bell et par M. Grant {e). Ce dernier a reconnu expérimentalement que

l'eau n'est pas attirée et expulsée al- ternativement par les oscules de l'É- ponge, ainsi que le supposaient Ellis, Olivi, etc. , mais constamment rejetée par ceux-ci, et qu'elle entraîne fré- quemment au dehors des malicies floconneuses, il ne s'explique i)as sur le mode de nutrition des Éponges, mais il est évident qu'il leur suppose quelques fonctions analogues à la di- gestion, car il appelle les corpuscules qui sont évacués comme je viens de le dire, des fèces, et il désigne toujours sous le nom d'ouvertuies fécales les orifices qui leur livrent passage. Enfin, peu de temps après la publication des beaux travaux de M. Grant sur les Éponges, nous avons , Audouin el moi , étudié at- tentivement ces corps (/], et c'est d'après les observations faites, soit à cette époque, soit plus récemment, que j'ai été conduit à professer depuis fort longtemps à la Facullé Topiniou annoncée ici , touchant l'espèce de

(a) Mnrsigii, Jlisloire physique de la mer, p. 59.

[h) Ellis, Essai sur l'Iiistoire naturelle des Coralllnes et [d'autres productions marines du même genre, trad. de l'anglais, 1165, p. 04.

(c) Laiiiarck, HLstoii'e des Animaux sans vertèbres, 1816, I. II, p. 348.

(d) Cavolini, Memor.ie per servira alla sloria de' PoUpi mariiii, 1785, [i. 230 el siiiv.

Olivi, Zoologia adriatica, 1792, p. SCS el siiiv.

Moulagu, An Essay on Sponges {Werneriun Memoirs, 1818, t. II, p. 71).

Scliwciirger, Ueobachluiigen auf nalurldstorischcn Reisen, 1819, p. 28 et siiiv. {e'i Th. lîcll, Hemarks on the Animal Nature of Sponges {Zoological Journal, 1825, l I, p. 203).

Oraiil, Observations and Experiments on the Structure and Functions of Sponges (Edinb. Philos. Journ., 1825, l. Xdl, p. 94, et Ann. des sciences nat., 1827, t. XI, p. 150).

(/■) Audouin et Milne Edwards, Résumé des recherches sur les Ajiimaux sans vertèbres, faites aux lies Chausey {Ann. des sciences nat., 1828, t. XV, p. 15 et siiiv.).

CHEZ LES ZOOPHYTES. ^95

tions d'un système irrigatoire, et à ce titre nous avons déjà eu l'occasion d'en étudier la disposition générale.

Chez les Hydres, ou Polypes à bras, et chez les Sertulariens, Hyd.cs

et

qui constituent la forme agame des Zoophytes nageurs, dont les senuiaricn? Acalèphes proprement dits sont les représentants complets , la cavité stomacale règne dans toute la longueur du corps et se termine inlîîrieurement en cul-de-sac. L'orifice qui en occupe

cumul physiologique des fonctions digestives et respiratoires par les canaux aquifèies de ces Zoophytes dégradés, Burdach etphisieuis autres zoologistes ont admis aussi que ces canaux tiennent lieu d'une sorte d'es- tomac (a), mais un de mes confrères de la Facidté de médecine, M. lié- rard, déclare que cette manière de voir est inadmissible (6).

Elle vient cependant d'être confir- mée de la manière la plus nette par les recherches de M. Carter, sur les Spongilles d'eau douce. Après avoir reconnu que chez ces Zoophytes, de même que chez les Éponges marines, la couche ou membrane tégumen- taire est percée d'une multitude de petits pores qui servent à l'entrée de l'eau, tandis que ce liquide est expulsé par les oscules ou grandes ouvertures réparties de loin en loin, M. Carter a mis des particules de carmin en sus- pension dans l'eau vivaient les Spongilles soumises à ses expérien- ces, et il n'a pas tardé à constater que cette substance colorante, entraînée par les courants d'eau inspirée, péné-

trait dans la substance du Zoophyle, et allait s'accumuler dans des vacuoles ou cellules qui se creusent dans le tissu sarcodique de celui-ci. Ces par- ticules organiques paraissent s'y en- foncer de la même manière (jue cela a lieu chez les Amibes, et, après avoir séjourné dans ces espèces d'esto- macs adventifs, elles sont poussées dans les canaux efl'érents et expulsées au dehors, comme le sont les ma- tières fécales ordinaires remarquées par M. Grant. Aussi, d'après l'en- semble de ses observations, M. Carter n'hésite pas à admettre qu'un travail digestif s'ellectue dans ces cavités temporaires chez les Spongiaires de même que chez les Actinophrys, etc. (c).

Quant aux mécanismes à l'aide des- quels s'établissent les courants qui amènent les matières alimentaires , ainsi que le fluide respirable, dans l'intérieur du corps des Spongiaires , nous avons déjà vu que ce résultat est obtenu par le mouvement flagelliforme de cils vibratiles disposés sur les pa- rois des canaux respirateurs (//).

(a) Burilach, Traité de physiologie, t. IX, p. 134.

Rymer Jones, General OutUne of the Animal Kingdom, 4 841, p. 4 5.

{!)) Béraid, Cours de plujsiologie, t. II, |i. 500.

(c) Carter, On the Ultimate Structure of Spongilla (Ann. and Mag. of Nat. flist., 2' série, 4857, t. XX, p. 28 et siiiv.).

(d) Voyez tome II, page 2.

296 APPAREIL DIGESTIF

l'extrémité supérieure, et qui tient lieu de bouche et d'nnus, est contractile, et ses bords sont garnis de longs appendices cylin- driques disposés en couronne. Chez les Hydres, ces tentacules sont prébensiles et s'enroulent autour des corj^s étrangers que l'Animal veut introduire dans son estomac (1); mais chez les

(1) Les Hydres se noiirrissent d'En- tomostracés et de petits Vers qui abondent dans les eaux stagnantes ces Polypes habitent, mais parfois elles s'emparent aussi d'une proie beaucoup plus volumineuse, et Tremblay les a vues engloutir dans leur estomac, dont les parois sont très extensibles, des Myriopodes et même de jeunes Pois- sons (a). Elles sont très voraces et sem- blent tendre des pièges pour leur proie en laissant flotter les longs tentacules fdiformes ou bras, qui sont aussi pour eux des organes de locomotion. Ef- fectivement, dès qu'un Eniomostracé ou quelque autre Animalcule, en pas- sant auprès de l'Hydre, vient à lou- cher un de ces appendices, il se trouve arrêté, car le tentacule qu'il a ren- contré adhère si fortement à son corps, que, malgré les efToris violents qu'il peut faire pour se dégager, il parvient rarement à s'échapper, et d'ordinaire il ne tarde pas à être saisi par d'autres bras, puis attiré lentement vers la bouche du l'olype, qui bientôt l'en- gloutit dans son estomac. Quelquefois la proie ne se débat même pas, et semble être frappée de paralysie ou de mort dès qu'elle a été touchée par les bras de l'Hydre. Il n'est pas nécessaire

que le tentacule s'enroule autour du captif pour le retenir prisonnier, il suffit qu'il s'y applique ; et il résulte des observations de Tremblay, que l'action adhésive ainsi exercée est su- bordonnée à la volonté de l'Hydre, ou tout au moins à l'état physio- logique de cet Animal, car celui-ci, lorsqu'il est repu , n'arrête pas de la sorte les corps étrangers qui vien- nent se heurter contre ses tenta- cules (6). L'imperfection des micros- copes dont les naturalistes du xviii« siècle pouvaient disposer ne permit pas à 'J'remblay et à ses successeurs immédiats (c) d'approfondir davan- tage l'étude de ce phénomène singu- lier; mais depuis quelques années plusieurs zoologistes ont fait à ce su- jet de nouvelles recherches, et à l'aide d'instruments plus puissants, ils ont pu mieux comprendre le mécanisme de la préhension des aliments chez ces singuliers Zoophytes.

Mn effet, les bras des îlydres ont une structure i)lus compliquée qu'on ne le supposait autrefois. Ces appen- dices filiformes sont garnis d'un grand nombre de tubérosités verruciformes qui sont disposées en spirale, et qui recèlent dans leur intérieur une foule

{a) Tremblay, Mémoire pour servir à l'histoire d'un genre de Polypes d'eau douce à bras en ferme de cornes, t. 1, p. 171 cl siiiv. {b) Idem, ibid., p. 223. (c) Backcr, Essai sur l'histoire naturelle du Polype insecte, p. lOC et suiv.

j. C. ScliàlTiT, Die Ariiipolypeu (Abhandlunçien von Insecten, 17(14, t. I, p. 155 cl suiv.).

Rœ.sel, Insecten-lielustigunij, i. III, p. 405 et suiv.

CHEZ LES ZOOPHYTES. 297

Serlulariens ils sont susceptibles seulement de s'étendre en manière d'entonnoir on de se recourber sur la bouche en se contractant, et ils servent à diriger vers cet orifice les cor- |)uscules tenus en suspension dans l'eau ambiante, plutôt qu'à saisir ces matières alimentaires. Cependant, si qnelque Animal- cule vient à les toucher, ils se referment brnsquement sur cette

de petites nématocystes ou capsules, pourvues chacune d'un fil exsertile. Ces fils, d'une ténacité extrême, sont lancés au deliors quand le tentacule est irrité par le contact d'un corps étranger, et soit en s'enroulant au- lour de la proie , soit en péné- trant même dans sa substance, pa- raissent en effectuer la capture. Ces capsules filifères ont été étudiées avec beaucoup de soin , d'abord par MM. Corda, Ehrenberg et Erdl , puis par M. Doyère [a], et ils ont beau- coup d'analogie avec les nématocystes ou organes urticants des Coralliaires oïdes Acalèphcs, dont il sera bientôt question.

IVaprès ce dernier naturaliste, ils sont de trois sortes. Les plus remar- quables ont été décrits par M. Corda sous le nom de hastœ, et occupent le centre des tubérosités verruciformes; ils consistent en un sac ovalaire et transparent qui renferme dans son intérieur un long filament pelolonné et un dard qui, l'iui et l'autre, sont susceptibles de se renverser au de- hors ; le fil , ijrimitivement enroulé

au fond du sac, constitue l'espèce de coussinet que M. Corda a décrit sous le nom de vesica patellifor- mis, et se retourne comme un doigt de gant pour se dérouler au de- hors. Le dard est une sorte d'é- toile à trois branches, qui , réunies en faisceau, peuvent saillir incomplè- tement au dehors de façon à simuler un stylet , et c'est dans cet état que !\L Corda les a observés et figu- rés ; mais quand la projection du contenu du sac est complète il se dé- ploie en forme de calice à la base du fil, qui alors flotte librement au de- hors, tout en adhérant par sa base aux bords du goulot du sac. Enfin, le calice étoile et le fil ainsi lancés au dehors peuvent se détacher complè- tement, et ils produisent alors l'appa- rence qui a été figurée par M. Ehren- berg ; mais dans l'état naturel des parties, l'hameçon que ce naturaliste a représenté comme terminant chaque fil émis par rHy<lre n'occupe pas l'extrémité libre de cet appendice et se trouve à sa base, car ce n'est autre chose que le calice ou dard. M. Doyère

(a) Corda, Anatome Hydrœ fuscœ {Nova Acta Acad. nat. curios., t. XVIII, p. 299, pi. 15, fig. 5-10).

Ehrenberg, Ueber das Massenverhâltniss der jetzt lebenden Kiesel-Infusorien, etc. (Mém. de l'Acad. de Berlinpour 183G, pi. 2, fig-. i).

Erdl, Ueber die Organisation der Fangarme der Polypen (Miiller's Archlv fur Anal, vnd PhysioL, 1841, p. 429. pi. 15, lîg. 10 et 12).

Doyère, Note sur quelques points de l'analomie des Hydres d'eau douce {Comptes rendus de VAcad. des sciences, 1842, t. XV, p. 429).

Quatrefiiges, Allas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 04, fig. 1, la, Ib, ic.

298

APPAREIL DIGESTIF

proie et le poussent dans l'entrée de la cavité digestive (1). 11 est aussi à noter que cette cavité se continue non-seulement dans toute la longueur de l'espèce de tige formée par le corps

pense que l'action toxique exercée par l'Hydre sur sa proie dépend d'une piqûre faite par le dard quand ses branches sont réunies en faisceau, et de l'évolution subséquente du fil qui pénétrerait par cette voie dans le corps de la victime. Eireclivement, il a eu l'occasion de voir les filaments enfon- cés de la sorte dans le corps d'une larve d'insecte dont une Hydre s'était emparée.

Les capsules de la seconde espèce sont pins petites que les sacs basti- fères, et contiennent seulement un fil exsertile enroulé en spirale, comme dans les nématocystes ordinaires des Coralliaires et des iNléduses. Ce fil sort comn»e le précédent, et le sac dans le- quel il était engaîné le suit. Enfin, les corps sacciformes de la troisième sorte ne laissent apercevoir dans leur intérieur qu'une masse muqueiise, mais M. Ooyère pense que ce sont

des capsules hastifères en voie de dé- veloppement.

Il est aussi à noter que tout autour des capsules hastifères situées au centre de chaque tubercule, on aper- çoit un grand nombre (Vacicules ri- gides qui se détachent avec beaucoup de facilité. M. Corda les a décrits et figurés sous le nom de poils ou cils vibratiles, appendices dont j'ai eu sou- vent à parler ailleurs ; mais M. Doyère pense que ce sont des aiguilles sili- ceuses,

(1) La bouche des Sertulariens se prolonge en une sorte de trompe pro- tractile et très dilatable, située au fond de la couronne tenlaculaire. Celle-ci est simple chez les Sertulaires (a), les Campanulaires (h), les Euden- driums (c), mais est double chez les Tubulaires id), et dans les genres Coryne ou Syncoryne (e), et Condy- lophores (/"), ces appendices sont dis-

(a) Voyez Ellis, Histoire naturelle des Corallines, pi. 4, fig. C; pi. 5, fig. A, etc.

Cavolini, Mem. per servire alla storia de' Polipi marini, pi. 8, fig. 9.

Lislcr, Observ. on Polypi, etc. (Philos. Trans., 1834, pi 8, fig. 3).

Milnc Edwards, Zoopiiytes de l'Atlas du Règne animal de Cuvier, pi. C7, fig. 3 a. (&) Voyez Ellis, Op. cit., pi. 12, fig-. C.

Cavolini, Op. cit., pi. 7, fig. 7.

Lister, Op. cit., pi. 9, fig. 1.

Milnc Edwards, Op. cit., pi. 66, fig. la et 2 a.

Meyen, Observ. %ool. {Nova Aeta Acad. nat. curies., t. XVI, suppl., pi. 30, fig. 1).

Van P.encden, Mém. sur les Campanulaires, pi. 1, fig. 2 et 3 (Mém. de l'Acad. de Bruxelles, 1844, t. XVII).

(c) Efiis, Op. cit., pi. 17, fig. A.

Van Bencden, Recherches sur l'embryologie des Tubulaires {Mém. de l'.icad. de Bruxelles, t. XVII, pi, 4, fig. 1).

Johnston, Hist. of Dritish Zoophytes, t. H, pi. 4. (rf) Voyez Ellis, Op. cit.. pi. 10, fig. 10.

Lister, Op. cit. {Philos. Trans., 1834, pi. 8, fig. 1).

Van Benedeii, Rechercltes sur l'embryologie des Tubulaires, pi. 1, fig. 1 ; pi. 2, fig. 1 {Mém. de l'Acad. de Bruxelles, t. XVII).

(ê) l'allas, Spirilegia zoologica, fasc. x, p. 40, pi. 4, fig. 8.

Van Beni'den, Mém. sur l'embryologie des Tubulaires, pi. 3, fig. 12.

(/') Allnian, On the .\natomy and Physiology of Condylophora {Philos. Trans., 1853, pi. 25, fis. 2).

CHEZ LES ZOOPHYTES.

299

du Polype et dans les prolongements radiciformes qui partent de son extrémité inférieure, mais aussi dans les branches conslituées par les individus qui naissent de cette tige par

poses irrégulièrement à des hauteurs différentes. Le nombre do ceux qui composent cliaque couronne varie avec l'âge, et paraît être d'abord de quatre ou de huit seulement , mais s'élève parfois à vingt - quatre ou même davantage.

Ils sont en général médiocrement allongés et cylindriques, mais leur portion terminale étant la plus con- tractile, ils paraissent souvent renflés en forme de bouton vers le haut ; disposition qui a conduit M. Lôven à penser que chez les Syncorynes ils étaient terminés par une ventouse (a). Chez les Tubulaires, ils ont des mou- vements indéj)endauts , et peuvent s'enrouler de façon à constituer une sorte de boule terminale ; mais chez la plupart de ces Zoophytes , chez les Campanulaires, par exemple, ils se meuvent tous à la fois, et, quand l'animal est en repos, il les étend en forme d'entonnoir à bord renversé, tandis qu'au contraire il les rac- courcit et les recourbe seulement en dedans , au-dessus de la bouche, lorsqu'il se contracte et rentre dans l'espèce de cloche formée d'ordinaire par la portion terminale de son étui tégumentaire. Ces tentacules ne sont

pas garnis de cils vibratiles, mais leur surface est verruqueuse, et les nodo- sités qui s'y remarquent portent un grand nombre de petites vésicules ur- ticantes (6) dont la stiucture paraît être très analogue à celle des néma- tocystes de l'Hydre d'eau douce, dont il a été déjà question. Chez l'Eleullié- rie on trouve de ces capsules spiculi- fères sur toutes les parties de la sur- face du corps (c), et, comme nous le verrons bientôt, le même mode d'ar- mature existe chez les Acalèphes. Quelques naturalistes pensent que les tentacules de ces Anin)aux, de même que ceux des Hydres, sont creusés d'un canal longitudinal en commu- nication avec la cavité digeslive {d} ; mais ce mode de conformation ne me parait pas exister, et M. Van Bencden considère aussi ces appendices comme élanl pleins et divisés d'espace en es- pace par des cloisons transversales (e). Quelques auteurs réservent le nom d'estomac à la portion de la cavité di- gestive qui fait suite à la bouche des Scriulariens , et qui s'élend jusqu'au fond de la cloche tégumentaire (/'). En effet, les substances alimentaires y sont d'ordinaire retenues pendant un certain temps , et souvent un rétré-

(a) Lôven, Zoologlska Didrag {Vetensk. Acad. Handl., 1835). Observ. sur le développe- ment, etc., des genres Campanulaire et Syncoryne {Ann. des sciences nat., série, 1841 , t. \V,

p. no).

(b) Quatrefages, Mém. sur la Synhydre parasite {Ann. des sciences nat., série, 1843, t. XX, p. 240, pi. 9, lig. 5).

Dujardin, Mémoire sur le développement des Méduses et des Polypes hydraires {.\nn. des sciences nat., 3' série, 1845, 1. IV, p. 259).

(c) Quairefages, Mémoire sur l'Èleuthérii [Ann. des sciences nat., 2" série, 1842, t. XVIII, p. 276 et 283', pi. 8, fig. 3, 4, 5).

{d) Loven, Op. cit., p. 159.

(e) Van lieneden, Recherches sur les Tubulaires, p. 10 {Mém. de l'Acad. de Bruxelles, I. XVII).

(/■) Cavolini, Memorie per servire alla storia de' Polipimarini, p. 4 20, 164, etc.

300 APPAREIL DIGESTIF

voie de bourgeonnement ; en sorte que la matière nulritive prise par un de ces petits êtres profite à toute la colonie dont celui-ci l'ait partie (1). Cette disposition permet même une sin- gulière division du travail physiologique chez quelques-uns de ces Zoophytes. M. de Quatrefages a trouvé que chez les Sertu- lariens qu'il désigne sous le nom de Synhydres, il existe dans chaque colonie deux sortes d'individus : les uns qui sont pourvus, comme d'ordinaire, d'une bouche et d'un estomac; et d'autres (pii ont aussi un estomac, mais qui sont privés de bouche et sont spécialement chargés du travail reproducteur, tandis que les premiers sont les Polypes nourriciers de cette association bizarre (2).

Du reste, la puissance digeslive de ces Zoophytes paraît devoir être assez faible, et l'on ne distingue dans leur orga- nisme aucun instrument spécial qui soit affecté à la sécrétion des sucs gastriques (3).,

cissement la sépare de la portion de la même cavité qui occupe la tige du Zoopliyte (a) ; mais cette distinction, qui est possible dans quelques esp^ces, telles que les Campanul aires, ne Test pas chez d'autres et ne me semble pas avoir de l'importance.

(1) M. Van Beneden a constaté que le Coryne squarnata {Clava multicor- nis, Johnston) fait exception à cette règle ; les divers individus d'une même colonie fixés sur une expansion membraneuse commune ont chacun un estomac distinct et sans communi- cation avec ceux de ses voisins (h).

(2) Les Synhydres sont des Polypes

marins qui ressemblent beaucoup aux Corynes, et qui se trouvent souvent sur nos côtes, fixés à des coquilles de Buccin ou de Turbo habitées par des Pagures. Les estomacs de tous les in- dividus d'une même colonie commu- niquent entre eux par leur partie infé- rieure ; mais dans les individus repro- ducteurs cette cavité se termine en cul-de-sac supérieurement, tandis que chez les individus nourriciers elle communique librement au dehors par un orifice buccal (c).

(3) M. Van Beneden pense que ces Polypes ne se nourrissent guère que do substances muqueuses tenues en

(a) Van Beneden, Sur les Campamdaires, p. 10 {Mém. de l'Aead. de Bruxelles, t. XVII).

(b) Idem, Recherches sur V embryolnyie des Tubulaires, p. lO.

(c) Qiialrcfaircs, Méw. sur la Synlnidrc parasite {Aiin. des sciences nat., 2" série, 1843, I. XN, p. 230).

CHEZ LES ZOOPHYTES,

c^Ol

§ h. Chez les Médusaires, qui constituent les représen- tants sexués de ces Zoophytes dimorphes ou à génération alter- nante, l'appareil digestif est constitué d'abord à peu près de luême que chez les Sertulariens; mais, par les progrès du déve- loiipcment organique, il se complique davantage, et l'estomac s'entoure de prolongements en forme de loges ou de canaux qui sont affectés d'une manière de plus en plus spéciale au ser- vice de l'irrigation nutritive. Nous avons déjà étudié leur mode de conformation lorsque nous nous occupions des premières ébauches d'un système circulatoire chez les Animaux infé- rieurs (1), et je n'y reviendrai pas ici ; mais je crois devoir entrer dans quelques détails de plus relativement à la structure de la portion centrale et essentiellement digestive de cet en- semble de réservoirs.

(]omme les Médusaires occupent en nageant une position in- verse de celle des Polypes sertulariens, c'est au milieu de la face inférieure de leur cor|>s que se trouve la bouche. Quel- quefois cet orifice est situé à l'extrémité d'un prolongement en forme de trompe, ainsi que cela se voit chez les Géryonies (2) -,

Appareil

digestif

(les

Médusaires.

suspension dans Peau (a) ; mais plu- sieurs observateurs ont vu des Ani- malcules solides dans leur cavité di- gestive (b).

(1) Voyez tome III, page 55 et suiv.

(2) La trompe des Géryonies est très allongée , et pend en forme d'ombrelle sous le corps de ces Médu- saires, de façon à ressembler au bat- tant d'une clocbe, et à dépasser de

beaucoup le bord inférieur de cet instrument. Cbez la Géryonie hexa- pliylle, son extrémité libre est mem- braneuse et élargie en forme d'en- tonnoir (c) ; mais chez d'autres espèces du même genre {cl), ainsi que chez les Orylhies, les Lymnorées et les Favonies, elle est aussi très allongée , son bord labial est sim- ple (e).

(a) Van Bciiedcn, Mcm. sur les Campanulaires, p. 16 (iVeî)i. de l' Acad. de Bruxelles, t. XVII). {b] I,ovoii, Observ. sur les Campanulaires, etc. {Ann. des sciences nat., série, 1828, t. XV, p. 161).

Rathke, Bemerk. iiber die Coryna squamata (Arc/i. fur Naturgesch., 1844, p. 15 5), ou Observ. sur le Coryna squamata (Ann. des sciences nat., série, 1844, t. II, p. 207).

(c) Voyez Péi-on et Lesiicur, Voyage aux terres australes (Histoire générale et particulière des Méduses, pi. 4, (ig. 5).

Milne Edwards, Atlas du Règne animal de Ciivier, Zoophytes, pi. 52, fig-. 3.

(d) Voyez Pérou t't Lcsucur, Op. cit., pi. 4, ûg. 1.

(e) Milne Edwards, loc. cit., pi. 52, lig. 1 et 2 ; pi. 54, fig. 3.

«^0'2 AI'l'AREIL DIGESTIF

mais, en général , il est placé au centre de la base crun lais- ceau de gros tentacules ou bras à bords membraneux et con- tractiles, qui sont suspendus à la face inférieiu^c du disque ou ombrelle représentée par le corps de l'Acalèphe (1).

L'estomac occupe aussi l'axe du corps et fait suite à l'ouver- ture que je viens de décrire (2) : mais chez quelques Médusaires, la cavité gastrique est située de la manière ordinaire, cette bouche centrale manque ; les bras sont complètement réunis entre eux à leur base, et c'est par d'autres voies que les aliments arrivent du dehors jusque dans l'appareil digestif. Ce mode d'or- ganisation a été constaté par Guvier chez un grand Acalèphe très connu sur nos côtes, et a valu à ce Zoophylc le nom de Rhizostome (o). Effectivement, dansées Animaux, le réservoir central qui correspond à l'estomac des Méduses ordinaires est bouché en dessous, mais communique latéralement avec une

(1) Ces bras on tentacules labiaux sont généralement au nombre de quatre, etcomposéschacun d'une por- tion médiane épaisse et subulée, de chaque côté de laquelle est suspen- due une bordure membraneuse plus ou moins froncée. Ils sont très dé- veloppés chez les Pélagies (a) et les Cyanées (6). Chez les Aurélies, ces appendices sont garnis d'une frange marginale (c).

{^1) Chez quelques Médusaires, tels que les Pélagies (d), les parois laté- rales de l'estomac sont garnies d'une multitude d'appendices tentaculifor- mes qui font saillie dans la cavité de

cet organe et qui sont très mobiles. Ils correspondent aux points occupés parles organes reproducteurs, et sont probablement des instruments de sé- crétion. M. Frit? Millier vient de constater que ce ne sont pas des tubes, comme on l'avait pensé, mais des cy- lindres à axe solide ; et d'après quel- ques expériences laites par ce natu- raliste, ils paraissent produire un suc susceptible d'attaquer les aliments à la manière de la pepsine et d'en opé- rer la digestion ; leur surface est gar- nie de cils vibratiles (e).

(o) De pi'Ca, racine, et o-6^.%, bou- che.

[a] Voyez Milnc Edwards, Atlas du Règne animal de Ciivier, ZoOPHYTES, pi. 45, fig. 1. (h) Voyez Milno Edwards, loc. cit., pK 47, fig;. ^, \ b.

(c) Voyez Ehrenhuri?, Ucler die Akalephen des rothcn Meeres {Mém. de l'Acad. de Berlin pour 1835, pi. 3,ni,'. •!).

Milnc Edwards, loc. cit., pi. 48, l\g. 1.

(d) Milne Edwards, Atlas dîi Règne animal ic Cuvier, Zoophytes, pi. 40, lîg. i a.

(c) Fr. Millier, Die Magenfaden der Quallen {Zeilschr. fiir ivissensch. Zool., 1858, t. IX, p. 542).

CHEZ LES ZOOPHYTIiS. 305

série de caiiiiuxrameux. Ceux-ci deseeiidciit dans Tépaisseiir des bras, et s'ouvrcnl au dehors par une mulliludc de petits orifices, qui sont autant de bouches. Par consé{iuent, au lieu d'une bouche centrale, ils ont, comme leur nom l'indique, des bouches multiples et radiciformes (1).

(1) Les bras des Rhizostomes, d'une consislance suhcaililagiiieuse, sont au nombre de buit, et naissent par paires de quatre pédoncules qui partent du disque et se réunissent au-dessous de Testoinac, en laissant entre eux quatre espaces creux ou logesdestinées à contenir les organes reproducteurs. L'extrémité libre de ces bras est un peu renflée, et présente trois faces sé- parées par des bonis arrondis vers les parties inlérieures desquelles on dis- tingue un certain nombre de petites ouvertures béantes, qui donnent nais- sance à autant de canaux ascendants. Ceux-ci se réunissent à la manière des veines, et le tronc commun ainsi formé se dirige vers l'estomac , mais, chemin faisant, reçoit un certain nom- bre de branches latérales dont les racines sont situées dans des mem- branes froncées et pourvues de franges maiginales qui garnissent la portion moyenne de chaque bras, ainsi qu'un appendice en forme d'auricule placé plus haut, près du pédoncule (a). Or, chacune des divisions terminales de ces canaux latéraux, de même que les

branches inférieures dont il a déjà été question, se termine par un orifice extérieur , et M. Huxley a constaté que les espèces de bouches ainsi con- stituées tout le long du bord des bras sont entourées par les membranes frangées dont je viens de parler (6) ; elles sont très dilatables et deviennent souvent infundibuliformes. M. Huxley les considère comme étant autant d'estomacs comparables à ceux des Stéphanomies , etc. La membrane dont elles sont tapissées est garnie de cils vibraliles, et en continuité de tissu avec la tunique des canaux qui se rendent à Testomac central.

Il est aussi à noter que la portion membraneuse des parois de l'estomac central qui loge les organes repro- ducteurs est garnie d'appendices ten- taculiformes analogues à ceux des Pélagies, mais moins allongés (o).

Les Cassiopées ressemblent aux Rhizostomes par l'absence d'une bou- che centrale, mais leurs bras sont frangés jusqu'au bout (d), et, d'après M. Délie Chiaje , les petites bouches latérales seraient situées à l'extrémité

(a) Ciivicr, Méni. sur V organisation des Méduses (Journal de physique, t. XLIX, p. 430). Ej'sciiliardt, Zur .hiat. und Naturgesch. der Quallen (Nova Acta Acad. naturizcuriosorum. t. X, pi. 34).

Milne Edwards, Allas du Règne animal de Ciivicr, Zoophytes, pi. 50.

Délie Chiaje, Animali seu%a vertèbre del regno di Napoli, pi. 143, fia;. 1 et 7.

{()) Huxley, On the Anatumy and the Ajjinities of the Family of Médusai (Philos. Traiis., 1840, p. 41.5, pi. SA, tig-. 28 ; pi. 30, fig. 29).

((,') Miliic Edwards, Mdin. sur la structure de la Méduse marsupiale, etc. {.inn. des sciences nat., 1833, t. XXVIII, pi. 13, fig. 3).

(d) ïilesius , Beitrdge zur Naturgesch. der Medusen [Nova Acta Acad. nat. curies., 1831, t. XV, p. 254, pi. 70, lig. 1 ; pi. 72, fig. 1,5).

30/1

APPAREIL DIGESTIF

Appareil

digestif

des

Hydrostatiques.

Un mode d'organisation assez analogue se voit chez les Phy- salies, les Stéphanomies et les autres Siphonophores ou Aca- lèphes hydrostatiques, mais avec cette différence que la [)ortion profonde et centrale de l'appareil gastro-vasculaire tend à de- venir rudimentaire et n'est affectée qu'à l'irrigation physiolo- gique, tandis que sa portion vestibulaire ou buccale se perfec- tionne et devient le siège principal du travail digestif. En effet, ces Zoophytes sont pourvus d'un grand nombre d'appendices en forme de tromiies, qui font fonction d'autant de bouches et d'estomacs, et (jui transmettent les produits de la digestion à un système de canaux chargés de les répartir dans les autres parties de Téconomie (1).

globuleuse de filaments maiginaux chez la Cassiopea borbonica {a).

Dans le genre Cépliée, Tappareil (ligeslif est organisé aussi sur le même plan que chez les Tihizoslomes, et il est à noter qu'ici chacune des petites bouches latérales portées par les bras est entourée d'une membrane labiale infundibuliforme (6), à quatre languettes h-angées, au lieu d'èlre garnie seulement de deux replis mar- ginaux en forme de voiles, comme chez les Rhizostomes.

(1) Chez la Physalie, les appendices proboscidiformes,ou suçoirs, sont sus- pendus sous la vessie hydrostatique, au milieu d'un grand nombre d'au- tres organes appendiculaires réunis en paquet (c). Us consistent chacun en une sorte de sac très allongé, ou- vert à son extrémité inférieure el fort dilatable, qui est susceptible de s'ap-

pliquer sur les corps étrangers à la manière d'une ventouse, ou de s'élargir en forme de cloche pour recevoir dans son intérieur les matières alimentaires, qui y sont digérées et transformées en une espèce de pulpe ou chyme. Le fond de chacune des trompes gastri- ques se continue supérieurement sous la forme d'un canal étroit, et commu- nique avec une cavité commune si- tuée entre les tuniques de la vessie hydrostatique, ainsi qu'avec les con- duits creusés dans l'épaisseur des autres organes appendiculaires [dj.

Chez les Stéphanomies, les Physo- pliores, les Agalmes, etc. , la confor- mation des appendices proboscidifor- mes, ou trompes gastriques, est à peu près la même, mais ces organes sont suspendus à une sorte de ruban com- mun qui donne également insertion aux appendices générateurs , urli-

(a) Dclle Cliiajo, Descr. e notom. degli Anim. senza vertèbre, t. IV, y. 05, pi. 1 40, 1 41 .

(b) Huxley, Op. cit. {Philos. Trans., 1849, p. 415, pi. 39, fig. 35, 30).

(c) Olfers, Ueber die ijrnsse Seeblasc (Mém. de i'Acad. de Berlin pour 1831, p. 155).

(d) Quatrel'.igcs, Mém. sur l'organisation des Physalics {.\nn. des sciences nat., 4" série, 1854, t. H, p. 114, etc., pi. 3, fig. 1).

CHEZ LES ZOOPHYTES. o05

L'appartiil digestif des x\calèpljes du genre Béroc offre une disposition différente, qui est également digne d'attention. La cavité centrale qui représente l'estomac des Méduses ordi- naires est ouverte en dessous comme chez ces dernières, mais fort réduite et dépourvue d'appendices labiaux ; du reste, elle paraît être suppléée dans une partie de ses fonctions par une chambre vestibulaire constituée à l'aide du disque de l'animal, qui, au lieu de s'étendre en manière d'ombrelle, se contracte en dessous, de façon à prendre la forme d'une bourse ovoïde, dont l'orilice, dirigé en bas, tient lieu de bouche (1).

cants, clc, et qui se termine supé- rieurement à l'appareil natatoire. Un vaisseau en occupe toute la longueur, et communique avec un canal prove- nant de chacun des estomacs, ainsi qu'avec des conduits appartenant aux autres organes appendicuiifonnes (a). Les zoologistes ne sont pas d'ac- cord sur l'inlerprétation à donner à ce mode d'organisation. Jusque dans ces derniers temps on considérait géné- ralement ces assemblages de suçoirs, d'organes reproducteurs , d'instru- ments de natation et de filaments ur- ticants comme constituant un seul et même animal ; mais depuis quelques années plusieurs naturalistes ont été conduits à le regarder comme un agré- gat de divers individus hétéromor- phes, dont les uns auraient pour fonction de pourvoir à la nourriture

de toute la colonie, d'autres de don- ner naissance à des individus nou- veaux, etc. (6). Dans cette hypothèse, les parties décrites sous le nom de trompes gastriques seraient des indi- vidus nourriciers comparables aux Polypes serlulariens. Mais quoi qu'il en soit à cet égard, chacun des esto- macs ainsi constitué est pourvu de parois dans l'épaisseur desquelles on distingue un tissu glandulaire coloré qui semble être le représentant de l'appareil iK'patique des animaux su- périeurs.

(1) Cette grande cavité vestibulaire, en forme de cloche, qui occupe presque tout l'intérieur du corps des Béroïdes, correspond en réalité à l'évasement de la face inférieure de l'ombrelle des Médusaires, et l'analogue de la bouche de ces dernières se trouve au fond de

(a) Milnc Edwards, Description d^i Steplianomia conlorta {Ann. des sciences nat., série, I. XVI p. 221, pi. 7 et 9, fig. 1).

Vogt, Recherches sur les Animaux inférieurs de la Méditerranée. Mém. sur les Sipho- nophores, p. 4(5, 89, elc, pi. 4, lig. 5 ; pi. 8, fig. 1 ; pi. H , fig. 1 ; pi. li, tig. l , etc.

U. Luiickart, Zoologische Untersuchiingen, t. I, p. 12.

(6) Leuckart, Ueber die Morphologie der luirbellosen Thiere, 1848, p. 27 ; Ueber den Poly' morphismus der hulividuen, 1851. Zoologische Untersuchiingen, erstes Heft, 1853, p. 71.

Huxley, Upon Animal ladividuality {Ann. of Nat. Hist., série, 1852, t. IX, p, 505).

Kollikcr, Die Schwinimpolypen von Messina, 1853, p. 04 et suiv.

Vogt, Op. cit., p. 1 29 et suiv.

Gegeiibaucr, Dcitrage Tiur nàliern Kcnntniss der Schwimmpolypcn, 1854.

V.

'20

300 APPAREIL DIGESTIF

Chez plusieurs Acalèphes, l'appareil digestif est pourvu aussi d'un certain nombre d'orifices, que les zoologistes considèrent généralement comme des anus ; mais ces pores , situés d'or- dinaire vers la partie périphérique de la portion vasculaire du système irrigatoire, ne semblent pas être destinés à livrer passage au résidu laissé par le travail digestif, et c'est par la bouche que la sortie des fèces s'effectue (1).

l'espèce de sac ainsi constitué. Elle est bordée seulement de deux lèvres épaisses (a).

C'est une cavité analogue à cette chambre vestibulaire ou pharyn- gienne qui, très rétrécie et garnie in- férieurement d'une bordure membra- neuse, constiiue l'estomac principal des Lesueuries (6), des Alciopes (c), des Gestes {d), etc., chez lesquels la partie correspondante à l'estomac cen- tral des Méduses est très réduite et forme le confluent des canaux irriga- toires que j'ai désigné sous le nom de réservoir chylifique (e).

Une autre modificaiion organique se rencontre chez les Cydippes. La cavité gastrique centrale prend desdi- mensions considérables, et un prolon- gement labial tubulaire, au lieu de s'a- vancer au dehors en forme de trompe, se renverse en dedans, de façon à oc- cuper Taxe de l'estomac et à consti-

tuer une chambre pharyngienne inté- rieure qui a beaucoup de ressemblance avec l'estomac tubulaire des Alcyo- naires, dont il sera bientôt question (/") .

(1) M. Ehrenberg fut le premier à bien apercevoir ces pores excrétem'S chez les Méduses, ils sont placés sur le bord de l'ombrelle, au milieu de cha- que espace compris entre les organes oculiformes. Chez VAurelia (ou Mé- dusa aurita), le canal gastro- vascu- laire marginal présente dans chacun de ces points un petit prolongement en forme de sac, à l'extrémité duquel se trouve l'orifice en question ; M. Ehrenberg en compte huit et les a vus dégorger au dehors des matières étrangères, de sorte qu'il n'hésite pas à les appeler des anus (y).

Will a décrit une disposition ana- logue chez le Cephœa Wagneri (h).

Chez les Béroés, j'ai trouvé quelque chose de semblable. La portion cen-

(a) Milne Edwards, Ohserv. sur le Beroe Forskalii [Ann. des sciences nat. ,2* série, 1841, t. XVI, p. 2H, pi. 5 et 0).

(6) Idem, Description dw Lesueuria vitrea {Ann. des sciences nat., 2* série, t. XVI, p. 199, pi. 3,fig. 1; pi. 4, fig. 1).

(c) Idem, Note sur l'appareil gastro-vasculaire de quelques Acalèphes (Annales des scie/nees naturelles, série, 1856, t. VII, pl. U).

(d) Idem, loc. cit., pl. 15 et 16, fig. 1.

(e) Voyez tome III, page 65.

(/■) Milne Edwards, Atlas du, Règne animal de Cuvier, ZOOPHYTBS, pl. 36, fig. 2 b, et Note sur l'appareil yastro-vasculaire [Ann. des sciences nat., 4* série, 1856, l. Vit, p. 287, pl. 16,

H- 2).

(g) Ehrenberg, Vorlduftge Mittlieilung einiger bisher unbckannter Structurverhâltnisse bci

Acalephcn und Echinodermen (Mullcr's Archiv fur Anat., 1834, p. 5GT, ci Ann. des sciences

nat., 2' série, 1835, t. IV, p. 204).

{h) Will, llovcc Tergeslinw, p. 00.

CHEZ LES ZOOl'HYTES.

307

§ 5. Dans la classe des Coralliaires, l'appareil digestif est conformé à peu près de même que chez les Acalèphes, mais la distinction entre la portion stomacale et la portion irrigatoire de ce système de cavités tend à devenir [tlus complète (1). Ainsi, chez les Alcyons, les Gorgones, le Corail et les autres Alcyonaires, les bords de l'orifice buccal se continuent intérieu- rement avec une membrane disposée en tube, qui est suspendue au milieu de la grande cavité centrale du système gastro-vascu- laire, et qui s'y ouvre par son extrémité opposée, mais est garnie intérieurement d'un muscle sphincter, dont la contraction le

Appareil

digeslif

des

Coralliaires.

traie de la face supérieure du disque de ces Acalèphes est occupée par une fossette qui loge l'organe oculiforme, et j'ai souvent vu deux vésicules se dé- velopper sur les côtés de celte dépres- sion, puis s'ouvrir à leur sommet et laisser échapper au dehors le liquide qui tourbillonnait dans leur intérieur, puis s'all'aisser et disparaître. Ces émoncloires communiquent avec la ca- vité gastrique (a). INous verrons bientôt que chez certains Coralliaires il existe aussi, sur divers points du système gaslro-vasculaire, des pores, mais ces orifices ne me paraissent pas remplir les fonctions d'un anus, et ine sem- blent être plutôt des dépendances de quelque organe excréteur.

(1) La forme qui est dominante chez les Médusaires se retrouve assez exac- tement chez les Coralliaires de la divi- sion des Podacliuaires. En ellet, chez lesLucernaires,quiconslitucntlesprin- cipaux représentants de ce groupe,

l'orifice buccal est situé à l'extrémité d'un prolongement proboscidiforme qui occupe le milieu d'un disque con- cave dont le pourtour est garni d'espace en espace par des tentacules. L'esto- mac qui fait suite à celle espèce de trompe renferme un grand nombre d'appendices filiformes, très contrac- tiles, qui ressemblent beaucoup à ceux de l'estomac des l'élagies, et 11 se continue latéralement avec une sé- rie de grandes loges disposées radiai- rement; mais ici, au lieu d'être très court, ainsi que cela se voit chez les Médusaires, il s'allonge en forme de cylindre jusqu'à l'extrémité inférieure du corps de l'animal, il se termine en cul-de-sac (6).

Chez les autres Coralliaires, la bou- che n'est pas saillante, et la conforma- tion générale de l'appareil digestif rap- pelle davantage ce que nous venons de voir chez les Acalèphes du genre Gydippe.

(rt) Milnc Edwards, Observ. sur la structure et les fonctiojis de quelques Zoophytes, etc. {Auii. des sciences nat., 2= série, IS'il, t. XVI, p. 214, pi. 5, fig. 4 ; jil. 6, fig-. Ib).

Agassiz, Contrib. to the Nat. Hist. of Acalephœ, pi. 5, fig. 9 {Mem. of the Amer. Acad., 1850, t. II).

(/)) Milne Edwards, Zoophytes du Règne animal de Cu\ier, pi. G3, ûg. la, 1 e.

Sars, Fauna Ultoralis Norveyiœ, pi. 3, fig. C.

H. Frey et R. Leuckart, Ileitrage z-ur Kemitniss der wirbellosen Tliierc, 1847, pi. 1, fig. 3.

J. Carus, Icônes .lootomiccc, pi. 4, fig. 2.

308 APPAKEIL DIGESTIF

transforme en une sorte de poehe les alimenls se trouvent arrêtés et plus ou moins complètement digérés avant que de passer dans la portion irrigaloire du système. Les parois de ce vestibule gastrique renferment un tissu glandulaire de couleur jaune, qui semble être un organe héjialique, et la portion sui- vante de l'appareil gastro-vasculaire se continue au loin dans l'organisme sous la forme de loges radiaires et de canaux ra- meux, dont nous avons déjà eu l'occasion d'étudier la disposi- tion lorsque nous nous occu}»ions de l'irrigation nutritive cbez ces Zoophytes (1). Je ne m'arrêterai donc pas davantage sur ce sujet, et je me bornerai à faire remarquer que chez les Coral- liaires de l'ordre des Zoanthaires, les Actinies, par exemple, le vestibule gastrique est moins développé et moins contractile inférieurement, de façon que cbez ces Animaux les aliments pénètrent souvent dans la cavité conunune, située au-dessous, avant que d'avoir été digérés (2). Il est aussi à noter que, cbez beaucoup de ces Radiaires, la portion périphérique du système gastro-vasculaire communique avec l'extérieur à l'aide de pehts orifices particuliers; mais ici, de même que chez les Acalèphes , ces pores sont des émonctoires pour le liquide en circulation ou pour les produits de certaines sécrétions, et ne

(1) Voyez tome III, page 55 et sui- vantes.

("2) La préliension des aliments se fait soit à l'aide de ces tentacules, soit par l'action de la bouche, dont les pa- vois soûl très dilatables et garnies de cils vibraliles aussi bien que de fibres musculaires disposées en manière de sphincter. La puissance digestive de ces Zoophytes est parfois assez grande, et ils se nourrissent de Mollusques, de Crustacés et de petits Poissons, aussi

bien que des Animalcules qui se trou- vent en suspension dans l'eau dont ils sont baignés. Dicquemare, natura- liste qui habitait les côtes de la Nor- mandie, et qui, vers le milieu du siècle dernier , a fait beaucoup d'observa- tions intéressantes sur les mœurs des Actinies, a vu ces Zoophytes digérer des Moules, de la viande, etc., et rejeter par la bouche les coquilles et les au- tres résidus dont ils ne pouvaient tirer parti (a).

(a) Dicquemare, Mémoire pour servir à l'idsloire des Anémoties de mer {t'hilus. Truiis,, 1773,

CHEZ LES ZOOPHYTES. 309

paraissent pas devoir êlre considérés comme les représentants de l'anus des animaux supérieurs. Chez plusieurs Actiniens, ces ouvertures se trouvent à l'extrémité des tentacules dont la bouche est entourée ; chez d'autres, des pores en commu- nication avec les loges périgaslriques sont disposés tout autour de la portion basilaire du corps, et, chez les Alcyonaires, des orifices analogues se voient sur la surface du cœnenchyme, ou tissu commun , situé entre les divers individus réunis en colonies (1).

§ 6. Dans la classe desÉchinodeumes, la division du tra- vail s'établit d'une manière complète enlre la digestion et l'irri- gation. La cavité qui est destinée à recevoir les aliments ne communique plus directement avec celle qui renferme le lluide nourricier, et n'est pas creusée dans la substance commune de

Appareil

digestif

des

Echinodermes

(1) Les tentacules qui entourent la bouche des Coralliaires, et qui sont presque toujours disposés en couronne, sont, en général, des ap- pendices coniques et simples (a) ou irrégulièrement ramifiés (6) chez les Zoanlhaires, mais garnis latéralement d'une série de filaments courts et cy- lindriques chez les Alcyonaires (c). Ils sont très rétractiles, et susceptibles de se reployer en dedans, au-dessus de la bouche. Quelquefois ils se termi- nent par un petit élargissement qui agit à la manière d'une ventouse, et adhère très fortement aux corps sur lesquels il s'applique, disposition qui est très commune chez les Acti-

niens (c?) ; mais ces appendices ne sont jamais garnis latéralement d'tme bordure de cils vibratiles , ainsi que cela a toujours lieu chez les Bryozoaires.

Il est aussi ii noter que les tenta- cules des Actinies sont doués de propriétés urticantes, et que leur con- tact est en général promptement mortel pour les Vers et les autres petits animaux dont ces Zoopliytes se nourrissent. Des expériences intéres- santes sur ce sujet viennent d'être faites p;ir M. Waller, et il est pro- bable que l'action toxique de ces or- ganes est due à l'introduction des fils de leurs nématocystes, ou capsules

(a) Par exemple, chez les Actinies (voyez V Atlas du Règne animal de Cuvior, Zoophytes, pi. Gl , fig. 1 et 2) ; et les Astréens (Op. cit., pL 83, fig. 1 et- 2).

(6) Par exemple, chez les Aciiniens du genre Thalassianthe (Op. cit., pi. 62, fig. 3), et du genre Phjllactis ou Mcthridium (Dana, Zoophytes, pi. 5, fig. 39 ; Milne Edwards, Hist. naturelle des Coralliaires, pi. C2, fig. 1).

(c) Exemples : les Cornulairos {.Atlas du Règne animal, Zoophytes, pi. Gr>, fig. 3) ; le Coiail {Op. cit., pi. 80, fig. la) ; les Vérélilles {Op. cit., pi. 91 , fig. i) ; etc.

{d) Par exemple, chez les Actiniens du genre Anemonia (voy. V Atlas dii Règne a7iimal, Zooph., pl. Cl, fig. 1).

310 APPAREIL DIGESTIF

lorganisme, mais a pour parois une membrane perméable et se trouve suspendue dans la ebambre qui sert de réservoir cen- tral pour le sang (1). Par conséquent, cbez ces Zoopbytes, l'absorption doit intervenir pour utiliser les produits de la digestion et les porter dans le système irrigatoire.

Ce perfectionnement n'est i)as le seul qui se fasse remarquer dans la classe des Écbinodermes. Cbez quelques-uns de ces Animaux, de môme que chez Ions les Zoopbytes inférieurs dont il a été question jusqu'ici, il n'existe qu'un seul oritice pour l'entrée des aliments et j)Our l'évacuation des malières fé- cales ; mais, cbez d'autres, la division du travail physiologique s'introduit aussi dans cette partie des fonctions digestivcs, et l'estomac communique au dehors par deux ouvertures qui sont affectées d'une manière toute spéciale , l'une à l'inglulition des matières alimentaires, l'autre à la sortie du résidu laissé par ces substances après qu'elles ont fourni à l'organisme tous les principes nutritifs que les agents digestifs ont pu en extraire. La bouche occupe toujours l'une des extrémités de l'axe du corps, et se trouve au centre de la face inférieure ou à l'extré- milé antérieure de celui-ci, suivant que l'animal a une forme élargie ou allongée et qu'il se tient dans une position verticale ou horizontale. Parfois l'anus est fort rapproché de cette ouver-

nrlicantes, dans le corps des animaux sur lesquels ils se fixent (a).

Chez les Lucernaires, qui appartien- nent à Tordre des Podactinaires, les tentacules ne sont pas de simples pro- longements tubulaires, et se terminent par un petit disque préhensile, A la base de chacun de ces appendices on trouve une vésicule contractile qui se

continue par un col long et étroit dans le pédoncule de l'appendice, et se ter- mine par une seconde ampoule au centre du disque ; un liquide est ren- fermé dans ce petit appareil, et reflue dans l'une ou l'autre ampoule termi- nale, quand la portion opposée se con- tracte (6).

(1) Voyez tome lit, p. 289 et suiv,

(a) Waller, On the Means by wliich Actiniœ kill their Prcy {Proceed. of the lioy. Soc, 1859, t. IX, p. 722).

(b) Miliie Edwards, Histoire naluvelle des Corallinires, t. I, p. !)4, y], A(>, f]g. ib, 1r, cl Allas du fiègne animal de Cuvier, Zooi'iiytks, pi. 03, 11g. M), \c, id.

CHEZ LES ZOOPHYTES. 311

tiirCj mais il tend à s'en éloigner de plus en plus, et, chez les espèces les plus élevées en organisation, il se trouve au pôle opposé du corps.

L'appareil digestif de ces Zoophytes se perfectionne aussi sous le rapport de la puissance productive des agents chi- miques destinés à attaquer les substances alimentaires et à les dissoudre, car il s'enrichit d'organes sécréteurs spéciaux qui versent dans l'estomac les sucs doués de cette propriété.

Enfin, la partie mécanique du travail digestif acquiert une grande puissance chez quelques Échinodermes, et non-seule- ment la préhension des aliments s'effectue bien mieux que chez les autres Animaux radiés ; mais parfois aussi la division de ces matières est opérée d'une manière très complète avant leur introduction dans l'estomac, résultat qui ne s'obtient que par l'intervention d'instruments particuliers de trituration dont la bouche se trouve garnie.

L'appareil digestif se complique donc beaucoup dans cette classe de Radi aires ; mais les différents genres de perfection- nements que je viens d'énumérer ne s'y introduisent pas si- multanément, et les combinaisons organiques obtenues de la sorte sont très variées.

§ 7. Ainsi, chez les Holothuriens et les autres Èchino- Appareil dermes de la même famille, la cavité digestive a la forme d'un 'des' tube à parois contractiles, qui s'étend d'une extrémité du corps à l'autre, et qui offre, par conséquent, sous le rapport de sa conformation générale, un caractère de supériorité, compa- rativement à ce qui existe chez la plupart des Animaux de cette classe; mais les organes sécréteurs qui en dépendent sont peu développés et les instruments préhenseurs des aliments sont très imparfaits, de sorte que ces Zoophytes sont condamnés à se nourrir presque exclusivement des Animalcules et des débris organiques qui peuvent se trouver mêlés au sable dont ils vivent entourés et dont ils introduisent des quantités considé-

312 APPATIEIL DIGESTIF

rables dans leur intestin. Il est cependant à remarquer que la bouche est située au fond d'une couronne de tentacules préhen- siles et entourée de pièces solides articulées entre elles de fa- çon à former un anneau auquel s'insèrent des fibres muscu' laires destinées à dilater cet orifice (1).

(1) M. A. de Quatrefages a étudié avec beaucoup d'atlenlion le mode de préhension des aliments cliez les Ho- lolliuriens du genre Synapte. La bou- che de ces animaux est entouréed'une couronne de tentacules pinnatifides qui sont susceptibles de se déployer au dehors par TclTet d'iuie sorte de tur- gescence, ou de se contracter par le jeu des fibres musculaires dont leurs pa- rois'sont garnies. Ces appendices sont à la fois des organes de respiration et de locomolion,car lai-ynaple s'en sert pour se frayer un chemin dans le sable et pour setraîneràla siu'face des corps résistants; mais ce sont aussi des in- struments de préhension, et leur face interne est garnie, à cet elïet, d'une double série de petits tubercules qui paraissent jouer le rôle de ven touses(a) . L'animal, quand il reste en place, fait sans cesse mouvoir ces tentacules, qui tour à tour se déploient et se renver- sent au dehors, ou se contractent et se recourbent en dedans, de façon à en- trer dans la bouche, qui se dilate pour les recevoir, et se resserre ensuite pour lécher en quelque sorte chaque appen- dice à mesure que celui-ci ressort. Gel orifice est entouré d'un anneau solide, composé de deux pièces subcartilagi- neuses et articulées entre elles (6) qui

donnent insertion aux grands muscles longitudinaux du corps, ainsi qu'à une partie des fibres charnues des tenta- cules, et à d'autres faisceaux de même nature qui se répandent dans le bord labial. Celui-ci est garni aussi d'un sphincter assez fort, au delà duquel la cavité bucale s'élargit de façon h con- stituer une sorte de chambre pharyn- gienne dont le fond est entouré d'un second sphincter. Au delà de ce se- cond détroit, le canal digestif s'élargit brusquement, et constitue un tube cylindrique qui s'étend en ligne pres- que droite jusqu'à l'anus, situé, comme je l'ai déjà dit , à l'extré- mité postérieure du corps. Ses pa- rois sont très minces et transparentes comme du cristal , mais on y dis- tingue plusieurs tuniques, savoir : une couche épithéliale très délicate, deux couches de fibres musculaires , les unes transverfrales, les autres longi- tudinales; enfin, extérieurement, une gaine épiihélique qui, d'espace en es- pace, se continue sur des brides te- nant lieu de mésentère. La structure de ce canal paraît être la même par- tout , et l'on n'y distingue aucun or- gane qui puisse être considéré comme instrument spécial de sécrétion ; il représente tout à la fois l'estomac et

(rt) QiiaU'ofages, il/c'm. sur la Synapte de Duvernoy (Ann. des sciences iiat., série, 1842, t. XVII, p. f)3 et siiiv., pi. 4, fig. 1 ; pi. 5, fig. 3).

.1. Millier, Ueber Synapta digilala, pi. d, fig. 4 et G. (b) Qimlrefaere.s, Op. cit., pi. 4, (Ig. 5; pi. 5, fig. 7.

Millier, Op. ("if., pi. 1, 11-. 9 et 10.

CHEZ LES ZOOPHYTES. 313

Dans un autre ordre de la classe des Échinodcrmes, celui des Echinides^ l'armature buccale, qui est si imparfaite chez les Holothuries, se perfectionne d'une manière remarquable et pos- sède une grande puissance. C'est chez les Oursins que cet appa- reil arrive au plus haut degré de force et de comphcation; on le

Appareil

digestif

des

Eciiinides.

l'intestin. D'ordinaire, cet appareil est rempli de grains de sable qui sont peu à peu évacués par l'anus, et ce der- nier orifice est pourvu d'un muscle sphincter bien caractérisé (a).

Chez les Chiridotes, qui sont très voisins des Synaptes, l'anneau pha- ryngien est garni de six gros tubercu- les dentifornies, et le canal alimentaire s'allonge beaucoup, de façon à for- mer deux anses dirigées en sens op- posés (6).

Chez les Holothuries, le mode d'alimentation paraît être le même que chez les Synaptes, et l'on trouve ordi- nairement le tube digestif rempli de sable (c). Les tentacules labiaux sont dendroïdes, et la portion antérieure du corps qui les porte est quelquefois susceptible de rentrer sous l'enveloppe cutanée générale, ou de se prolonger au dehors en manière de trompe, dis- position qui se voit chez les Pso/ms ou Holothuria pliant apus {d). L'anneau pharyngien se compose d'une série de pièces dures dans la constitution des- quelles il entre beaucoup de carbonate de chaux. On en compte généralement dix, dont cinq plus développées et se

prolongeant intérieurement sous forme de dents (e) ; mais dans les espèces que j'ai eu l'occasion de disséquer, elles ne m'ont pas paru susceptibles de fonctionner à la manière d'un ap- pareil masticateur. Dans une espèce exotique qui paraît se rapporter au genre Mulleria de Jaeger, Duvernoy n'a compté que huit de ces pièces, dont quatre verticales etquatre latérales (/"). Le tube alimentaire, qui fait suite à la cavité pharyngienne, présente par- tout à peu près le même diamètre, si ce n'esta son extrémité postérieure, il s'élargit beaucoup pour constituerle cloaque dans lequel vient s'ouvrir, comme nous l'avons déjà vu, l'appa- reil respiratoire aquifère {g). La lon- gueur de ce canal est très considéra- ble: dans quelques espèces, telles que VHolothuria mauritiana, elle paraît être de 10 fois celle du corps, et sui- vant Quoy et Gaimard, elle serait même de 16 fois la longueur du corps chez VHolothuria yuamensis (h) ; en général, cependant, la différence est bien moindre, et quand l'animal n'est pas contracté sur lui-même, elle n'est que dans le rapport de 1 à 3. L'espèce de

(o) Qualrefages, Op. cit., pi. 2, ûg. 1.

(6) Brandt iind Grubo, Echinodennen (Middendorff's Reise in den âussersten Norden und Osten Slbirieiis, Bd. H, Zool., tli. i, pi. 4, fig. 1 et 7).

(c) Redi, Observ. eivca Animalia viventia, qucc in Animalihiis viventibtis reperiimtur (Opus- culaA. m, p. 134).

(d) Voyez Milne Edwards, Atlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 20, fig. 1. {e) Tiederaann, Anatomie der EiJhven -Holothurie, pi. 2, ûg. 4 et 5.

(f) Duvernoy, Leçons d'anatomie comparée de Cuvier, t. V, p. 385.

in) Voyez tome 11, paçe i'2.

(h) Qiioy et Gaimard, Voyage de l'Astrolabe, ZooLor.iE, t. IV, p. 114.

âl/l APPAREIL DIGESTIF

désigne souvent sous le nom de lanterne d'Jristote^ parce que ce grand naturaliste a été le premier à le décrire, et que pour donner une idée de son aspect, on Ta souvent comparé à un ustensile de ce genre qui serait de forme pentagonale. 11 se compose de vingt-cinq pièces principales , rigides et très riches en carbo- nate calcaire, dont les plus importantes constituent par leur réunion cinq grosses mâchoires , qui ont la forme de pyra-

1

boyau ainsi constitué se porte d'abord en arrière sur le côté droit du corps, puis revient sur lui-même en forme d'anse, et arrivé dans le voisinage de la bouche, se recourbe de nouveau en arrière (a). Sa portion antérieure est libre, mais dans toute sa portion moyenne et postérieure il est fixé à la partie correspondante des parois de la cavité générale du corps perdes replis membraneux ou mésentères. Cepen- dant ce mode d'attache n'est pas as- sez solide pour empêcher un phéno- mène très remarquable de se produire quand l'Animal se contracte avec force, savoir, la rupture du tube alimentaire près du pharynx, et son expulsion au dehors par l'anus avec les autres vis- cères et le liquide dont la cavité abdo- minale était remplie (b). Les Holothu- ries se vident ainsi avec une très grande facilité, et peuvent continuer à vivre pendant plusieurs jours après avoir subi cette mutilation spontanée,

qui n'avait pas échappé à l'attention des naturalisles de la renaissance (c), et qui se produit presque toujours quand ces animaux se trouvent à sec ou dans un petit volume d'eau sta- gnante ((/).

La portion antérieure du tube ali- mentaire de ces Échinodermes est faiblement pourvue de vaisseaux san- guins, et me paraît devoir être consi- dérée comme un œsophage. Dans quelques espèces on aperçoit dans son intérieur des replis circulaires qui rem- plissent les fonctions de valvules (e).

La seconde portion qui forme les deux branches de la première anse a au contraire des parois très vascu- laires (/"), et me paraît devoir jouer le rôle d'un estomac. On y re- marque souvent un liquide jaunâtre, mais on ne sait rien au sujet des organes producteurs de ce suc , et c'est à tort que Blainville a cru pouvoir assimiler à un appareil hé-

(a) Tiedemann, Anatomie der Bôhren-Holoth^lrie, pi. 2, fig. G.

Délie Chiaje, Memorie sîilla storia e notomia degli Animali senza vertèbre del regno di Napoli, t. I, pi. 8, fig-. 1.

Rymer Jones, A General Outline of the Animal Kingdom, p. 175, fig-. 74.

Caruset Otto, Tabulœ Anatomiam comparatlvam illustrantes, parsiv, pi. 1, fig-. 2t.

(6) C'est à tort que Mockel décrit ce piiénoniène comme ayant lieu par la bouciie {Anat. comparée, Irad. par Ricster et Sanson, t. VU, p. 94).

(c) P.edi, Lettre à Cestoni {Collect. Acadcm., t. IV, p. 587).

Boluidscli, De quibusdam Animalibus marinis liber, 17G1 , p. 81. {d) Délie Chiaje, Op. cU.,pl. 7, (\g. i.

(e) Duvcrnoy a trouvé cette disposition dans une Holothurie inédite provenant de Waigou {Leçons d'anatomie comparée de Cuvier, t. V, p. 384).

(/■) Milne Edwards, Atlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 18.

CHEZ LES ZOOPHYTES.

315

niides renversées cl qui sont nnies entre elles par des cloisons muscnlaires. Ces mâchoires sont terminées inféricurenient par une dent tranchante, et les muscles qui s'y insèrent sont dis- posés de façon à les rapproclier ou à les écarter de l'axe du corps, et, par conséquent, à dilater on à resserrer le cercle formé par leur assemhlage (l). Le tube alimentaire commence immédiatement au-dessus de cette couronne de dents et occupe

patiqiie les pinceaux vasculaires si- tués dans le mésentère adjacent (a), car, ainsi que nous l'avons déjà vu, ces parties ne sont que des plexus vasculaires bipolaires appartenant au système circulatoire et n'ayant au- cune relation avec l'intérieur de la cavité digestive (b). Enfin , le tiers postérieur du tube alimentaire est peu vasculaire ei ne me semble cire le siège d'aucun travail digestif, mais servir seulement à compléter l'absorp- tion des matières nutritives, et à con- duire les fèces jusqu'au cloaque dont son extrémité est séparée par un sphincter.

Cuvier considérait les sacs /"ofif/niens ou caecums tubuleux qui sont grou- pés autour du pharynx comme étant des organes salivaires (c) ; mais, ainsi que nous l'avons déjîi vu, ces appen- dices ne débouchent pas au dehors, et font partie de l'appareil vascu- laire ((/).

Quelques analomistes pensent que

les appendices glanduliformesqui sont fixés aux parois do l'intestin un peu au- devant de l'ovaire (e), et qui ont été pris pour des testicules par M. Tie- demann , ainsi que par Cuvicr et M. Délia ClnajeC/"), constituent un ap- pareil salivaire (gi) ; jusqu'ici on ne lui a pas trouvé de canal excréteur et l'on en ignore les usages.

Jaeger a désigné sous le nom d'an- neau hépatique un amas de granules situé près de la bouche, vers le point d'attaché des tubes foligniens [h] ; mais on ne sait pas même si ce sont des fol- licules sécréteurs, et dans tous les cas je ne verrais aucun motif pour les considérer comme étant chargés de produire de la bile.

(1) Le squelette tégumentaire des Oursins se termine inféiieuremenlpar un cercle de pièces solides qui consti- tue, en quelque sorte, le cadre de l'espace péristomien et donne attache à la membrane labiale {i). L'orifice buccal en occupe le centre, et laisse

(a) Blainville, Manuel d'actinologie, p. 72.

(b) Voyez tomo III, page 293. Ces mèches sont représentées dans la figure citée ci-dessus, sous les lettres w [Kègne animal, Zoophytes, pi. 18).

(c) Cuvier, Règne animal, t. UI, p. 238.

(d) Voyez tome III, page 294.

(e) Voyez Milnc Edwards, Atlas du Règne animal de Cuvier, pi. 18, ap.

if) Deile Gliiaje, Memorie sulla storia e notomia degli Animali sema vertèbre del Regno di Napoli, t. I, pi. 8, fig. 1 0.

{g) Siebold et Stannius, Nouveau Manuel d'analomie comparée, t. I, p. 94.

(/i) Jœger, De Holotlntriis (disserl. inaug.). Turini, 1833, p. 42, pi. 3, fig. 2 g.

(i) Voyez Tiedemann , Anatomie der Ruhren- Holothurie des pomeranzfarbigen Seesterns und Stein-Seeigels , pi. 10, fig. 5.

316 APPAREIL DIGESTIF

le centre de la lanterne, il constitue ce que l'on nomme le pharynx, et présente à l'intérieur cinq bandes longitudinales séparées par des lignes ligamenteuses et garnies de plis obliques disposés en forme de chevrons.

Cet appareil masticatoire est très puissant, mais paraît être

passer plus ou moins le sommet de la lanterne, ou appareil masticateur, qui est suspendu au-dessus et qui a été dé- crit par plusieurs anatomistes (a), mais étudié avec le plus d'attention par MM. Sharpey, Valenlin, Rymer Jones et Mayer (6). La charpente solide de cet appareil consiste essentiellement en deux séries de pièces disposées circu- lairement autour de l'axe du corps; savoir , cinq mâchoires et autant de supports ou rayons pharyngiens. Les mâchoires constituent parleur réunion un cône renversé , et ont chacune à peu près la forme d'une pyramide té- traèdre dont le sommet serait dirigé en bas, la base évidée, l'une de ses arêtes tournée vers l'axe du système et la face opposée légèrement bombée. Leur structure est très complexe et l'on y remarque d'abord deuxpartiesprin- cipales: l'une extérieure ou engainante, que j'appellerai Veœognathe, l'autre intérieure ou dentaire , qu'on peut désigner sous le nom cVendognathe. L'exognathe, ou pyramide, se compose d'une paire de pièces calcaires princi- pales, ouexognathifes, qui constituent chacune l'une de ses faces latéro-in-

ternes et la moitié de son pan externe. La première de ces faces est formée par une lame verticale qui est garnie extérieurement d'une série de lignes transversales saillantes ; son bord in- terne est libre et correspond à celui de l'autre exognathite, de façon que l'arête interne de la mâchoire est re- présentée par un espace vide limité de chaque côté par une lame denticu- lée. Le bord externe de ce même pan est réuni, sous un angle un peu aigu, avec la lame qui constitue la moitié de la face externe de la pyramide. Dans sa moitié inférieure, cette dernière lame se réunit à sa congénère par une suture verticale, et à son extrémité supérieure elle se prolonge aussi en forme d'arc- boutant, de façon à rejoindre la partie correspondante de l'autre exognathite ; mais dans l'intervalle elle est profon- dément échancrée, et par conséquent il existe au milieu de la face externe de chaque mâchoire, vers le haut, un grand espace vide ou fenêtre. La pyramide résultante de l'union des deux exo- gnathitesest ouverte à sa base et creuse dans toute sa hauteur. Sa cavité con- stitue une loge ou alvéole, se trouve

(a) Monro, The Structure and Pliysiology of Fishes, 1785, p. 67, pi. 43, fig. i, et pi. 44, fig. 13, 10, 17.

TieJeiiiann, Anatomie der Ruhren-llolothurie, p. 72 clsiiiv., pi. 16, fig. 2.

(b) Sharpey, Echmodermala (Todil's Cyclop. of Anat. and Physiol., t. II, p. 38, flg. 17 et 18).

Valentin, Anatomie du fjenre Ecltinus, p. 63 et suiv. (Agassiz, Monographies d'Échino- dermes).

r.vmei- Joncs, A General Outline of the Animal Kingdom, 1841, p. 166, fig. 70 et 71.

Mcyor, Ueher die Lanterne des Avistoteles (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1849, p. 191).

CHEZ LES ZOOI'HVTES. 317

desliuc à diviser les substances végétales plutôt qu'à agir sur une proie animale. Cependant les Oursins entassent dans leur estomac beaucoup de fragments de coquilles, et il est probable que ces Zoophytes sont en réalité omnivores.

Dans le groupe des Clypéastrides, la bouche est armée aussi

renfermée la pièce denlaire, ou enJo- gnathe. Celle-ci est une lame étroite, arquée et carénée en dedans, qui est appliquée contre lasympliyse ou ligne articulaire externe des exognathites, et y glisse dans une rainure verticale. Son extrémité inférieure est amincie en forme de dent incisive de Rongeur, et fait saillie au sommet de la pyramide dont elle dépend. Enlin, supérieure- ment, elle se prolonge au delà dubord de la cavité alvéolaire, se recourbe sur elle-même, perd sa dureté, et con- stitue ce que MM. Valentin et Agassiz ont appelé la plume dentaire,

bes cinq mâchoires , ainsi consti- tuées, sont appliquées les unes contre les autres par leurs surfaces latéro- internes, et, à Textrémité supérieure de leurs arêtes externes, elles se sou- dent inlimemcnl avec de petites piè- ces complémentaires (ou épiphyses), par l'intermédiaire desquelles elles s'articulent avec le système des pièces basilaires ou supports pharyn- giens.

Ce dernier système se compose de deux séries de poutrelles calcaires , disposées en manière de rayons au- dessus de la base de l'appareil maxil- laire. On y remarque d'abord cinq pièces qui alternent avec les mâ- choires, et qui correspondent à la ligne de jonction du bord supérieur de

ces organes ; on les a désignées sous le nom de faux , et il est à noter que l'extrémité externe de chacune d'elles s'articule avec l'angle supérieur et externe de deux mâchoires adjacentes; enfin, elles sont recouvertes par cinq autres pièces basilaires qui ont la forme de la lettre Y, et qui ont été ap- pelées les compas. Celles-ci sont com- posées à leur tour de deux portions distinctes (a) ; leurs branches sont dirigées vers la périphérie do l'appa- reil et recourbées un peu vers le bas; enfin elles donnent attache à des liga- ments qui descendent obliquement vers les bords du cadre péristomien, et s'y fixent.

En résumé, on peut donc, ainsi que le fait voir M. Mayer, compter 65 pièces constitutives de l'appareil maxillaire, savoir : 5 dents , 10 endognalhes ; 10 épiphyses, 5 faux, 5 pièces basi- laires des compas et 5 pièces termi- nales des mêmes organes. Mais l'u- nion entre les pièces exognalhaires et épiphysaircsest si intime, qu'on peut, en général, négliger cette distinction, ainsi que celle des deux moitiés de chaque compas, de façon que le nom- bre des organes distincts se réduit à 25; savoir: 5 dents, 10 exognathes, 5 faux et 5 compas.

Les muscles qui mettent en jeu cet appareil masticateur sont très nom-

la) Mcyer, Op. cU. (Miillor'â .\rchiv fur Anal, uiid Fh<jswl., 1849, p. Wi, pi. 2, liij. i).

318

APPAREIL DIGESTIF

d'un appareil masticatoire très compliqué, quoique beaucoup moins parfait (|ue celui des Oursins proj)remenl dits. Mais dans d'autres genres de la même grande famille, tels que les Spa- tangues, il n'en est plus de même^ et l'orifice oral est complète- ment agnalhe (i).

La portion du tube digestif qui surmonte l'appareil mastica- toire des Oursins est étroite , et constitue un œsophage qui remonte presque verticalement jusque dans le voisinage de

breux. Oji distingue pour cliaque mâ- clioire :

1" Une paire de ??iusc/es abclucleurs, qui s'aUaclient, d'une pari à l'extré- milé inférieure de l'exognaihe , et d'antre part à une portion du cadre périslomien disposée en forme d'ar- cade ou d'auriculc, au-dessous des lignes and^ulacraires (a).

2" Une paire do nuiscies adducteurs, qui sont antagonistes des précédents, et naissent de la portion interauricu- iaire du cadre péristomien, pour re- monter vers la base de la pyramide maxillaire correspondante, et s'y fixer à l'arc transversal formé au-dessus de la fenêtre de l'cxognalhe par les deux arcs-boutants décrits ci-dessus.

Un muscle intermaxillaire, qui se lixe aux stries de la face latérale des pyramides, et s'éiend de l'un de ces organes à l'autre, de façon à rappro- cher ceux-ci.

Les pièces basilaires sont pourvues aussi d'une série circulaire de cinq muscles transverscs, qui s'étendent entre les compas. Enfin, il y a aussi quelques faisceaux musculaires qui se délacfient des muscles des mâchoires

pour aller se fixer sur la membrane qui enveloppe la plume dentaire.

Il est également à noter qu'une membrane très fine, et pourvue de cils vibratiles , revêt non-seulement les pièces dentaires, mais toutes les autres parties de cet appareil masti- cateur.

(1) L'ordre des Échinides se com- pose de quatre familles , dans deux desquelles, les Spatangides et les Gas- sidulides, l'appareil masticateur man- que complètement. Dans les deux au- tres, celles des Cidarides et des Cly- péastridcs, il est au contraire toujours bien constitué, et se compose de cinq mâchoires dentifères, disposées à peu près comme chez l'Oursin commun, qui appartient au premier de ces groupes.

Chez les Clypéastrides , les pièces basilaires ne manquent pas, comme l'avait supposé M. Agassiz, mais sont réduites à un état plus ou moins rudi- mentaire, tandis que les mâchoires sont très massives. Ainsi, chez les Clypéastres, cet appareil a été dé- crit d'abord par Klein, Parra, etc. (6), puis étudié plus complètement par

(a) Valcnlin, Op. cit., pi. 5, dg. 75.

(b) Ivlciii, Oursins de mer, pi. 20, fig. 4. Echinodenna, c'dil. de Leske, pi. 38. A. i>;u-ia, Descripcioii de diffcvcnlcs picxos de Uistovia tialuml. Havaniia, 1T87.

CHEZ LES ZOOPllYTES. 319

l'anus, puis se recourbe brusquement et débouche dans l'esto- mac. Ce dernier organe a la forme d'un gros boyau qui se porte horizontalement à droite, et décrit, en se contournant, un cercle onduleux presque complet, puis se recourbe sur lui-même, et marche en sens inverse pour suivre la même route et aller entin se relever près de l'axe du corps pour gagner l'anus (1) . Ses parois sont très minces et sa tunique interne est garnie partout de cils vibratiles. Dans la portion œsophagienne on

M. Cil. Desmoulins et par J. Millier, ces organes sont très larges et dépri- més; ils constituent par leur assem- blage une étoile pentagonale, et sont surmontés par cinq petits supports, ou pièces pharyngiennes, qui correspon- dent aux faux des Échinides ; celles-ci ont été désignées sous le nom de rotules (a), et se trouvent logées entre deux pièces épipliysaires bien distinc- tes [b). Chez les Scntelles, qui appar- tiennent à la même famille, ces pièces basilaires ont une forme un peu dif- férente (c), et Ton remarque quelques variations dans la disposition des exo- gnathes et des dents : ainsi, chez les Laganes , ces derniers organes sont presque verticaux (i).

Chez les Spatangues et les autres Échiniens sans mâchoires, la bouche est généralement excentrique.

(1) Une multitude de brides mem- braneuses tiennent lieu de mésentère,

et fixent le bord externe du tube di- gestif contre les parois de la cavité viscérale. D'autres brides analogues unissent entre elles les deux portions de l'anse intestinale qui s'enroule delà sorte autour de l'œsophage. La pre- mière portion de l'estomac se pro- longe plus ou moins en forme de cul- de-sac, à côté du point l'œsophage vient s'y ouvrir, et en général il n'y a aucune distinction à établir entre les parties suivantes de ce tube (e). Mais dans une espèce, dont l'anato- mie a été faite par M. Délie Chiaje, VEchinus ventricosus, il y a une po- che stomacale large et de médiocre longueur, qui est suivie d'un tube cylindrique et beaucoup plus étroit, lequel peut être considéré comme un intestin proprement dit (f).

Il est aussi à noter que la tunique externe du canal intestinal, qui se con- tinue avec le mésentère et avec la mem-

(a) Cil. Desmoulins, Études sur les Échinides, p. 66, pi. 2, fig. 7 à 15.

(b) Mùller, Ueber den Bau der Echinodermen, p. 74, pi. 7, fig. 13, 14, etc. (extr. des Mémoires de l'Académie de Berlin pour 1853).

(c) Agassiz, Monographie des Scutelles, p. 15, pi. 16, fig. 4-7; pi. 17, fig. 7-9, etc.

(d) Agassiz, Op. cit., p. 106, pi. 22, fig. 26, etc.

(e) Tiedemann, Op. cit., pi. 10, fig. 1.

Délie Cliiaje, Descriz. enotomia derfli Anim. sema vertèbre, pi. 121, fig. 1.

Milne Edwards, .\tlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 11, fig. 2.

Valenliii, Op. cit., pi. 7, fig. 127, 128, 130.

if) Délie Chiaje, Descri». e notomia degli Anim. sema vertèbre del regno di Napoli, pi. 122, fig. 4.

320 APPAREIL DIGESTIF

y reconnaît aussi une foule de petits Ibllicules qui sont des organes sécréteurs ; niais dans la portion gastrique ou intesti- nale de ce tube, la structure aréolaire est beaucoup moins marquée, et l'on ne voit y déboucher aucun organe sécréteur spécial (1).

Chez les Spatangues, la bouche est située près du bord de la face inférieure du corps, et l'anus vers la partie opposée de la môme région, la direction suivie par le tube alimen- taire est un peu dilTércntc, mais toujours il s'enroule horizon- talement (2).

brane péritonéale dont la cavité com- mune est tapissée, est garnie comme celui-ci de cils vibrntiles, dontles mou- vements déterminent des courant s dans le liquide nourricier cavitaire (a).

(1) Chez le Spatanguspurpureus, le tube alimentaire est presque cy- lindrique et forme une grande anse qui s'enroule à peu près comme chez les Oursins, si ce n'est que la portion antérieure se trouve en dessous de la postérieure, et que celle-ci forme en arrière une seconde anse pour gagner l'anus (6). Mais, chez le Spatangus ventricosiis, M. Délie Cliiajc a trouvé une disposition plus simple, car l'en- roulement se fait toujours dans le même sens. Il est aussi à noter que, dans cette dernière espèce, il existe, appendu à la parlie antérieure de cette sorte de boyau, un gros prolon- gement cœcal, ou estomac latéral (c).

('2) On remarque chez les Échinldes des différences très grandes dans la po- sition de l'anus. Dans toute la grande famille des Cidariles , la bouche est centrale, et l'anus est diamétralement opposé à cet orifice, de sorte qu'il se trouve au sommet du disque. Dans la famille des Clypéastrides, ainsi que dans celles des Cassidulides et Spatan- gides, la bouche est le plus souvent reportée un peu plus en avant, et l'a- nus est toujours plus ou moins rap- proché du bord opi)Osé du test ; tantôt il est situé à la face dorsale du corps, à mi-distance du sommet et du bord: chez les Nucléolites, par exemple {d) ; d'autresfois, il est encore dorsal, mais tout à fait marginal, ainsi que cela se voit chez beaucoup de Dysasters (c). Dans d'autres genres, il descend sous le bord postérieur du test : par exem- ple, chez les Galérites (/"), les Anan-

(a) Sliarpey, Cilifl (Todd's Cyclop. ofAnat. and Physiol., I. I, p. 017).

(b) Milnc EdwaiMs, Atlas du liègiie animal ilc Guvici-, Zoopiiytes, pi. 1 1 bis, (\g. i .

(c) Ucllc Cliiajc, Op. cit., pi. 123, fig. 42.

Gains el Ollo, Tabula: Analomiam comparalivam illustrantes, pars iv, pi. d, 11g. 15.

(rf) Exemple : Nucleolitcs recens (Milno Edwai-Js, Hègnc animal de Ciivicr, Zoophytes, pi. li,

H- 3).

(e) Voyez Agassiz, Monographie des Dysasters, pi. 1 , llg. ",15, cic.

(/■) Voyez Milnc Edwards, Hèijnc animal de Cuvicr, Zoophytes, jil. 14, fig. 4a.

Agassiz, Monographie des Galdrites, pi. 1, fig. 3, G, 14, clc.

CIŒZ LES Z00lMl\Tt:S.

o21

Dans 1 oixlrc des SfellendcsT 1 appareil digestii est jjeaiicoiip Appordi moins bien constitue, comme instrument mécanique, mais se . ^i^s

- . Etoiles do mer.

pertectionne davantage comme producteur des agents cliimiques dont dépend la dissolution des aliments, et comme organe ab- sorbant. L'estomac a la forme d'une grande poche arrondie qui souvent ne communique au dehors que par la bouclie, et cet orifice est dépourvu d'organes spéciaux de mastication. Il est vrai que ces Animaux peuvent saisir leur proie avec force, et même parfois l'écraser contre les tubercules ou les épines dont le pourtour de leur bouche est armé (1 ), car les branches radiaires qui sont formées par les prolongements périphériques de leur corps, et qui sont garnies de tentacules préhensiles, peuvent se recourber en dessous et saisir les matières étrangères pour les appliquer contre cet orifice ; mais celui-ci ne joue qu'un rôle passif dans la déglutition et se dilate seulement pour laisser passer les aliments (2). La portion voisine de l'estomac est susceptible

chiles (a), etc. Enfin, chez les Éclii- nonées, il se trouve à environ égale dislance de la bouclic et du Lord pos- térieur du test [b).

(1) Chez les Astériens, l'armalure buccale est constituée par une portion du système des pièces solides qui se développent dans la peau et consti- tuent le squelette légiinientaire de ces Echinodenues. Chaque portion inler- anibulacraire de ce système se termine près de la bouche par un angle sail- lant qui s'avance vers cet orifice, et

qui est armé d'une manière plus ou moins puissante, de façon à constituer un organe broyeur, auquel quelques anatomistes ont donné le nom de main (c). Chez les Astéries, on y re- marque un tubercule ovalairc garni d'épines (d), et chez les Ophiures un tubercule dentilorme (e).

(•i) Quelquefois les Astéries se réu- nissent plusieurs autour d'un Mol- lusque bivalve pour s'en repaître (/"), et les pécheurs assurent qu'elles dé- truisent beaucoup d'fluîtres.

[a] Exemple: Ananchijtes ovatus (voyez Goldfiiss, Petrefacta Gennnniœ, 1. 1, pi. 44.,fii,'. i, elc).

{b} Exemple lyEchinoneus semiluraris (voy. Milne EJwanIs, ZooniYTCS du Règne animal, pi. 14, ùg. la). E. cruenlatus (Agassiz, Op. cit., pi. 6, fij. 3, etc.).

(c) Uuvernoy, Leçons d'anatomie comparée de Cuvier, t. V, p. 370.

(rf) ir^avigny, Échinodermes de l'Éijypte, pi. 3, Rg. \-^ pi. 4, ûg. l^, o^, etc. (Expêdilion de l'Egypte, Hisi. nat., t. II).

Dolle Cliiajo, Animall senz-a vertèbre del regno di Napoli, pi. 129, ûg. 9.

(c) J. MLiller aiul Trosclicl, System der Asteriden, pi. 7, fii,'. 1-4; pi. 10, fig-. 3.

(/') Eudes Ueslongchamps, Nute sur i Astérie commune lAnn. des sciences nat., 182G. t. IX p. 2J9).

V. 21

322 APPAREIL DIGESTIF

de se renverser au dehors et de s'appliquer sur les substances alimentaires qui sont trop volumineuses pour passer par la bouche ; il paraît même que par ce moyen celles-ci sont sou- vent en partie digérées avant d'avoir été portées dans l'inté- rieur du corps ; mais les résullats obtenus de la sorte ne peuvent être que très imparfaits.

L'estomac, séparé de la bouche par un anneau contractile seulement cliez les Ophiures et par un court tube œsopliagien chez les Astériens, remplit presque toute la portion centrale ou discoïde de la cavité viscérale. Ainsi que je l'ai déjà dit, il 'consiste principalement en un grand sac membraneux qui occupe l'axe du corps (1) ; mais latéralement il se prolonge de façon à constituer des loges ou des tidjcs aveugles plus ou moins compliqués, dont la disposition semble être empruntée à l'appareil gastro-vasculaire des jMédusaires.

Ainsi, chez l'Étoile de mer, qui abonde sur nos côtes et qui porte le nom cVAstracanthion glacicUis (2), l'estomac est globu- leux, mais incomplètement divisé en deux portions par un re- pli de sa membrane interne, et la première chambre, ainsi délimitée, paraît être plus spécialement chargée de transformer les matières alimentaires en une pâte liquide qui passe peu à peu dans la chambre supérieure. Celle-ci se continue supé- rieurement avec un petit intestin, et communique latéralement avec cinq prolongements cylindriques qui ne tardent pas à se diviser chacun en deux tubes très allongés et garnis d'une double série d'appendices creux ramifiés et terminés en cul-de-sac (3) .

(1) La Uinique interne de l'estomac (3) Pour plus de détails sur l'ana-

est garnie de cils vibraiiies. lomie de cette espèce, je renverrai à

{1) Ou Asterias glacialis,0. F. Miil- un mémoire de Konrad (a).

1er (voy. Zool. Danica, pi. M), L'appareil digestif d'une autre es-

(ffi) Konrad, De Aslcriar>nn fahrica (dissert, inniie:.). Halltc, fîg-. l.

Sharpcy, art. Echinodermata (Todd's Cyclopœdia of Anal, and Physiol. , t. II, p. 37,

i

CtÇiO

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CIIKZ LES ZOOPHYTES.

Ces organes s'avancent dans l'intérieur des rayons ou bras dont le corps de l'Astérie est pourvu, et y sont fixés par des replis de la membrane périlonéale qui se détachent de la tunique séreuse de la grande cavité viscérale (1). Ils baignent dans le liquide nourricier dont cette cavité est remplie, et ils sont très dilatables, de façon (jue la matière pulpeuse élaborée dans la portion centrale de l'appareil digestif y pénètre facilement Il en résulte que les produits de la digestion trouvent dans ces appendices une surface absorbante d'une très grande étendue, et doivent passer rapidement de dans le fluide nourricier cir- convoisin. Ces appendices de l'estomac paraissent être aussi des organes sécréteurs, car leurs parois renferment un tissu granuleux qui a l'aspect d'un amas de follicules, et l'on trouve dans leur intérieur un liquide jaunâtre, mais on n'est encore que peu renseigné sur cette partie de leurs fonctions.

Chez les autres Astériens à larges rayons, la disposition de ce système de caecums gastriques est à peu près la même (2) ; mais chez les Ophiures, dont les bras sont très grêles, ces ap-

pèce dn même genre , VAstracan- thion rubens, a l'té figurd par J. Mill- ier et Troschel (o).

(l)Ces replis mésentériqiies, au nom- bre de deux pour cliaque caecum péri- gastriquc, naissent de la paroi dorsale des rayons et circonscrivent un espace longitudinal qui , dans le voisinage de l'eslomac, communique avec la portion centrale et la cavité com- mune. Le péritoine s'élend aussi sur l'estomac, et revêt la cavité viscérale. Sa surface libre est garnie de cils vi-

bratilesqui mettent en mouvement le liquide caviiaire (6).

(!2) Souvent les deux appendices cae- caux du même bras, au lieu de naître d'un tronc unique, comme cela se voit chez VAstracanfhion rubens, sont dis- tincts dès leur origine, de façon quel'es- tomac donne directement naissance à dix de ces organes. Cette disposition se voit chez V Astropecten aurantiacus (c) , VArchasler typicus {d),\ç.Culcita co- reacea{e}, etc. Chez Y Asteriscus pal- mipes, ces caecums sont très courts (f).

(a) J. Millier und Troscliel, System der Asteriden, pi. il, (îg. t.

J. Carus, Icônes zoolomicœ, 1857, pi. 15, fig-. 15.

(/)) Sharpcy, Cilia (Todd's Cyclopœdia of Anatomy and Physiol., t.l, p. 01 G).

(c) Ticdcmann, Oji. cit., pi. 7.

(d) Millier et Troscliel, Op. cit., pi. xi, fig. 3.

(e) Millier et Troscliel, Op. cii., pi. 12, fig. 1.

(/') Meckel, Traité d'analomie comparée, l. VII, p. 71.

M.li AI'I'ARi:iL DIGESTIF

pendices sont moins développés ; ils ne dépassent pas les limites de la cavité centrale du corps, et ils paraissent être plus spécia- lement destinés à sécréter les liquides qui se répandiint dans l'estomac (1). Enfin, chez les Astrophytes ouEuryales, ils sont représentés par une rangée circulaire de caecums simples, mais fort nombreux (2).

Un second appareil appendiculaire, beaucoup moins grand que le précédent, et offrant d'une manière plus nette les caractères d'un instrument de sécrétion, repose sur la face supérieure de l'estomac. Il se comi)ose de caecums plus ou moins rameux et il renferme un liquide jaunâtre qui, par son aspect, ressemble à de la bile et qui contient de l'acide urique. Les grappes ainsi constituées alternent avec les précédents, et correspondent, par conséquent, aux espaces inlerambulacraires. Dans les espèces il existe un intestin à la suite de l'estomac, c'est dans cette dernière portion de l'appareil digestif que ces ccecums épigas- triques débouchent (3).

(^hez les Ophiurides, ainsi que dans une des subdivisions de la tribu des Astérides, comprenant les genres Jstropecten,

(1) Les caecums périgasUiques des Ophiurides sont au nombre de dix, et repliés sur le pourtour de l'esto- mac; quelquefois ils paraissent avoir une slruclure peu compliquée (a); mais, dans d'autres espèces, chacun d'eux porle une double rangée de tubes secondaires autour desquels naissent un grand nombre de petits prolongements plissés et groupés eu forme de touffe foliacée (6).

(2) Chez VAstrophy ton arborescens (Euryale de la Méditerranée), M. Délie

Chiajc a trouvé l'eslomac entouré d'un cercle radiaire formé de A 5 cae- cums, simples et effilés vers le bout; savoir : un pour chaque espace inter- ambulacrairo, et (piatre à la base de chacun des dix bras (c).

(3) Chez les Astérides du genre Culcita, ces appendices sont très dé- veloppés et disposés radiai rement dans les espaces interbrachiaux de la région dorsale du corps ; chacun d'eux naît de l'estomac par un tube mem- braneux simple et assez large, mais ne

(a) SiehoUl et Rlannins, Nouveau Mamiel d'anatomie comparée, t. I, p. 92.

(b) Dclle Cliiajc, Memovie per scrvire alla storin deyti Aniinali senza vertèbre, t. II, iil. 20, fig. 5, 7,8, cl Uescriz. e notom. dcgli Animali invertcbv., pi. 13^2, fig. 5,1, 8.

(c) Ddlc Cliiiijc. Ucscrii. e notoiii , t. IV, p. 73, pi. 138, (\s;. 5

CHEZ LES ZOOPliVTES. o25

Ctenodisus et Luidia, l'estomac ne coiniimnique au dehors que par la bouche, qui est située au milieu de sa face inférieure; et jusque dans ces derniers temps, on croyait qu'il en était de même pour tous les Echinodcrnics de cet ordre, excepté les Comatuliens, mais chez la plupart de ces Zoophytes on a constaté l'existence d'un pore anal vers le centre de la région dorsale du disque, et un intestin rudimentaire y conduit (l).

Chez les Comatules, cette portion terminale de l'appareil di- gestif est beaucoup plus développée ; l'estomac est petit et arrondi ; l'intestin qui en naît est garni d'un prolongement csecal , puis contourne l'axe du corps pour gagner l'anus. Enfin, celui-ci est situé à peu de distance delà bouche, sur la face ventrale du disque ('2), position r[ui se remarque aussi

tarde pas à se bifurquer el à s'entou- rer de petits caecums groupés irrégu- lièrement (ffl).

Gliez VArchasler typicus, les cae- cums éj)igastriques sont disposés à peu près de la même manière, mais sont Joeaiicoup plus courts, et ne se IjifurqiieiU pas toujours Ijjen distinc- tement [b). Dans YAstracanthion gla- cialis (c) elVAstracanthion rubens {cl), ils sont encore plus réduits el plus ir- réguliers dans leur forme. Enfin, chez VAslropecten aurantiacus, ils ne sont représentés que par deux petits cae- cums gibbeux {e), disposition qui se voit aussi cliez le Solaster jjappostis et r^sfra^onmmp/îTj/^mnitjn. Us parais-

sent manquer dans le genre Luidia{f).

(1) MM. Délie Chiaje et Sharpey ((/) ont décrit ce petit intestin comme étant un appendice caecal de l'estomac, mais sa véritable nature a élé consta- tée par MM. Millier et Troscliel, qui l'ont figuré chez VAstracanthion ru- bens et VArchaster typicus {h). Ainsi que je l'ai déjà dit, les cœcums épi- gastriques y débouchent.

D'après ces auteurs, toutes les As- térides, à l'exception des trois genres mentionnés ci-dessus, sont pourvues d'un anus, et cet orifice est toujours subcentral.

(2) L'appareil digestif des Coma- tules a élé étudié par Ileussinger (0,

(a) ,1. Millier uncl Troscliel, System der Asleriden, pi. 12, ilg;. 1.

(b) Millier iind Troscliel, System der Asteriden, pi. 11, fig. 2.

(c) Konnrd, De Asteriarum fabrica, fig-. 1. ((/) Millier cl Troscliel, Op. cit., pi. H , fi^. t .

(e) Tiedom.inn, Anatomie der Rohren- Holothurie, etc., pi. 7 6, b.

Délie Cliiajo, Memorie per servire alla storia degli Animali sema vertèbre, t. Il, pi. 19, fig. \r. Descrii. e notom. degli .Anim. invcrtebr., |il. 129, fig. 1.

if) Millier et Tiosclicl, Op. cit., p. 132.

(g) Sliarpey, Echinodermaia (Todd's Cyclop. ofAnat., t. II, p. 30).

(/() Millier el Troscliel, Op. cit., pi. 11, fig. 1 el 2.

(i) Heiissiiiger , Anatomische Untersuchung der Conialiila iiicditcrranca (Zcilsihrifl fiir die organische Physil;, ISi'), t. III, p. 371, pi. x, fig. Ui).

326 APPAREIL DIGESTIF CHEZ LES ZOOPlîYTES,

chez les Crinoïdcs, Écliiiiodermes dont les mers étaient abon- damment peuplées à des époques géologiques fort reculées.

Quant aux Siponcles et aux autres Animaux que Cuvier ran- geait dans la même classe que les précédents, sous le nom d'Échinodermes sans pieds, je n'en parle pas ici, car ils n'ap- partiennent pas au type des Radiaires et se rapprochent des Annélides ; j'y reviendrai donc dans une prochaine Leçon.

I

OUARÂNTE- HUITIÈME LEÇON.

De l'appareil digestif chez les Infusoires ciliés , les Bryozoaires , les Tuniciers et les Mollusques proprement dits.

SI, Le mode d'organisation de l'appareil digestif que caractères

. généraux

nons avons rencontré d'une manière exce[)tionnelle chez quel- doiappareii

digestif

ques Zoophytes supérieurs est dominant dans le grand em- dos branchement des Malacozoaircs : chez tous les Animaux ce type zoologique est nettement caractérisé, la cavité alimentaire affecte la forme d'un tube ouvert aux deux bouts; mais les ori- fices ainsi constitués ne sont pas situés aux extrémités opposées du corps, et l'anus est fort rapproché de la bouche, de façon que ce canal est disposé en forme d'anse. 11 est aussi à noter qu'en général, les instruments mécaniques qui entrent dans la compo- sition de cet appareil sont peu perfectionnés, tandis que les or- ganes sécréteurs qui y appartiennent se développent beaucoup. Les Animalcules que nous avons choisis comme point de dé- part dans l'étude des Zoophytes sont aussi ceux qui paraissent avoir le plus d'affinité avec les représentants inférieurs du type Malacozoaire. Les Molluscoïdes se lient intimement à certains Infusoires ciliés, et ceux-ci, à leur tour, ont des liens de parenté intimes avec les Monadaires ; en sorte que pour arriver à l'exa- men des Mollusques en passant successivement des formes les plus simples aux plus complexes, je crois devoir m'occuper d'abord d'une classe nombreuse de petits êtres qui sont rangés par la plupart des zoologistes dans l'embranchement des Zoo- phytes, mais qui n'ont rien de radiaire dans leur structure, et qui, de même que les Mollusques, sont généralement organisés

Appareil

digestif

(les

Infusoii'cs

ciliés.

3lî8 APPAREIL DIGF.STIF

d'une manière asymétrique, suivant une ligne courbe : ce sont les IisFusoiREs proprement dits {\).

§ 2. Les moyens d'observation dont nous disposons n'ont pas permis aux naturalistes de scruter d'une manière satisfai- sante l 'organisation intérieure des Animalcules d'une petitesse extrême qui constituent la division inférieure de celte classe, c'est-à-dire les Monades les autres Infusoircs fia gelli f ères [T].

(1) Ou Polygaslriquesdc T\I. Eliren- berg, moins les Uliizopodcs et les vé- gétaux microscopiques que ce naliira- iisle réunit dans la même classe.

En 1836, j'ai signalé les ressem- blances entre les Vorticelliens et les Bryozoaires, et j'ai émis l'opinion que les Infusoires devaient être considérés comme se rallacliant au type des Mol- lusques plutôt qu'à tout autre embran- chement zooli)gi(iuc (a). Enfin, dans une autre publication dont la date est à peu près la même, j'ai proposé de réunir les Vorticelliens aux illustres, aux Vésiculaires et aux autres Ani- maux poiypiformes dont se compose la classe des Bryozoaires, et de diviser ce groupe appelé Tuniciens, à cause de ses aflinités avec les Tuniciers de Lamarck, en deux sections: les Tuni- ciens cî7('es(Vorticellcs, etc.), qui sont dépourvus de tentacules, et les Tu- niciens tentacules, ou Bryozoaires (6). Celte nomenclature ne peut être con- servée aujourd'hui, mais les groupes dont il est ici question me paraissent

toujours bien fondés. Plus récemment M. Agassiz, sans avoir connaissance de ma manière de voir à cet égard, a été conduit à rapprocher aussi les Vorti- ceiles des Bryozoaires (c). D'autre part, MM. Claparèdc et Lachmann pensent que cette idée ne mérite guère d'être discutée, parce que le caractère essen- tiel des Bryozoaires est d'avoir un canal alimentaire continu, ouvert à ses deux extrémités, et que ce caractère, ajou- tent-ils, fait défaut aux Vorticelliens comme aux Infusoires en général {d); mais nous verrons au contraire que, d'après les observations de ces natu- ralistes eux-mêmes, les Vorticelliens ont une cavité digestivc munie de deux orifices très rapprochés, et à ce trait de ressemblance vient s'ajouter la disposition spirale de l'organisme, qui ne se voit guère ailleurs que dans le type malacozoaire.

(2) Au sujet de la classification des Infusoires, je renverrai à un travail récent publié par MM. Claparèdc et Lachmann (e).

{a] Voyez les noirs jointes m la cditinn do l'onvrnge de Lamarck {Histoire 7ialurclle des Ani- maux snns vertèbres, 183G, t. II, p. 55).

(6) Miliio Edwards, Classification nalurcllc des Polypes {Journal rinslitui, 18r,7, t. V, p. 178K

le) A;assi-/, Thc Kainral Mations belween Animais and the Eléments in which Ihcy Uve C^illinian's American Jonrn. of Science and Arts, 2' série, d85(t, t. 1\, p. 3li9).

((/) Claparède et I,;ii|]niann, Éludes sur les Infusoires el les niiizopodes, \\ 78.

(e) Claparède el Laeliinann, Éludes sur les l'ifusoircs cl les nui-^opodes. Genève, 1858.

CHEZ Lr,S INFiJSOtRrS CILIÉS. 329

Beaucoup de micrographes pensent qu'ils sont astomes(l), mais dans certains cas on a vu des matières étrangères pénétrer dans l'intérieur de leur corps, et celte introduction paraît se faire à l'aide d'un orifice buccal situé à la base de l'appendice flabclli- forme que quelques auteurs ont appelé une trompe. JMais nous ne savons rien de positif quant à la disposition des parties inté- rieures où la digestion s'opère, et les ligures tbéoriques qui ont été données des estomacs multiples de ces Animalcules ne mé- ritent aucune confiance (2).

(1) Par exemple, M. Siebold {a).

('J) M. Ebrenberg assure avoir va des Monades et d'aulres Animalcules du même ordre avaler des corps étrangers, et notamment des particules de carmin ou d'indigo (6). Al. Cobn a publié des observations analogues (c), et dans quelques cas M. Perly a con- staté des faits du même ordre : ainsi il a trouve un fragment de fibre ligneuse dans l'intérieur d'un Infusoire flagel- lifère de la famille des Astasiens, VAmbhjophis viridis (cl), et une Dia- tomée dans rinlérieur d'une autre espèce du même groupe> le Paranema protraclum (e). Enfin, MM. Claparèdc et Lachmann ont été souvent témoins de la manière dont le Bodo grandis (f) avale des Vibrions qui sont trois ou quatre fois plus gros que lui quand il est dans son état ordinaire. Ils ont vu

aussi un Astasien, qui paraîl être le Trachelius tridwphorusdG M. Ebren- berg (g), dévorer des Bacillariens {h). M. Dujardin, il est vrai, suppose que les matières étrangères ne pénètrent que dans des fossettes adventives creusées à la surface du corps de ces Animalcules (/) ; mais dans beaucoup de cas cela n'est guère probable, et il est même des Alonadaires dont la bou- che est munie d'une armature solide fort analogue à celle que j'aurai bien- tôt à faire connaître chez les Dysté- ricns (j).

Quant à la disposition de la cavilé stomacale de ces Animalcules, nous ne savons rien de satisfaisant. M. Ebren- berg pense qu'ils sont poiu'vus d'un nombre plus ou moins considérable de petits caecums réunis en faisceaux et débouchant directement au dehors {k);

{a) Sifbold et Slaiinius, Nouveau Manuel d'analomie comparée, t. I, p. 8. (6) Elirenlierg', Die Infusionsthierclien, 1838, p. 8. (c) Colin, Eniwick. der Algcn und Pilze, p. 08. ((/) Voyez Elirenljerg-, Die Infusionstliievchen, pi. 7, fig. 5. (f) i'crly, Zjw henntniss der kteinsten Lebensfoi'men, 1852, p. Cl. (/■) Vovez ElirenlxTi;', Op. cit , pi. 2, fig. 12. {(j) Idciii, ibid., pi. 33, lig. M.

(/i) Clapavède et Laclimanii, Eludes sur les Infusoivcs, p. 41. (i) Dujardin, Histoire nalurelle des Infusoires, p. 7 5 et siiiv. (j) Claparôde et Lacliniann, Op. cit., p. 42.

(/i) EIn-eiilicrg, Recherches sur les hifusoircs {.\nn. des sciencfs nnt., 2* série, I. I, pi. 12, fi?. 2).

330 APPAREIL DIGESTIF

L'appareil digestif des Vorlicellicns et de la plupart desautres Infusuir es ciliés est moins imparfaitement connn. Les cils vi- bratiles dont j'ai déjà eu l'occasion de parler comme étant à la fois les organes de la respiration et les instruments ordinaires de la locomotion (1), en déterminant des courants dans l'eau circonvoisine, amènent vers l'entrée de cet appareil les corpus- cules nutritifs qui flottent dans ce liquide ; ces appendices sont, par conséquent aussi, les organes préhenseurs des aliments, car ces corpuscules, parvenus dans l'orifice buccal, sont portés bientôt dans l'intérieur du corps de rAnimalcule et servent à le nourrir. Le spectacle des tourbillons produits de la sorte par ces petits êtres a souvent fixé l'attention des micrographes, et afin de s'éclairer sur la nature de certains points que l'on aperçoit dans l'intérieur de l'organisme de la plupart des Infu- soires, un physiologiste allemand du siècle dernier, Gleichen, eut l'heureuse idée de répandre, dans l'eau avoisinant les Ani- malcules dont il faisait l'étude, du carmin en poussière très fine. Il vit alors cette matière colorante pénétrer dans le corps de quelques-uns de ces Animalcules, et s'y accumuler sur certains points, mais il ne tira de ce fait aucune conclusion touchant la disposition des organes digestifs, et ce procédé d'expérimen- tation resta stérile jusqu'au moment M. Ehrenberg y eut recours pour étudier la structure interne de ces petits êtres (2).

de le nom iVAnentera qu'il donne à idées, ce physiologiste les considéra

l'ordre comprenant tous les Infiisoires comme favorables à l'opinion d'après

flabellifèrcs, etc. Mais il est plus pro- inquelle les spliérules auraient été des

bable que la cavité digestive est simple. œufs (a).

(1) Voyez tome II, page 13. Du reste, jusqu'au moment

(2) Les expériences de Gleichen !\i. Ehrenberg publia ses recherches datent du siècle dernier; mais, par sur ce sujet, la plupart des zoologistes un singulier entraînement dans les persistaient à considérer tous les Ani-

(a) Gleichen, Disserialion sur la génération des Animalcules spermaliques el ceux des Infii- soires, trad. rk' l'nlleiiinnil, nn Vil, p. 197.

CHEZ LES INFUSGIUES CILIÉS. oSl

Je ne saurais admettre Ions les résultats que cet habile obser- vateur a cru pouvoir déduire de ses nombreuses et intéressantes recherches sur ralimentation des Infusoires avec de l'indigo, du carmin ou d'autres matières colorantes. Mais avant de réfuter quelques-unes de ses opinions, je crois devoir, en bonne justice, dire le bien que je pense de l'ensemble de ses travaux. C'est à M. Ehrenberg que la science doit presque tout ce que l'on sait de plus important sur le mode d'organisation des Infusoires; il a changé le caractère des études dont ces petits êtres avaient été jusqu'alors l'objet, et il a fait dans cette partie de la zoologie des découvertes presque innombrables ; enfin il a montré que ces êtres, malgré leur exiguïté, jouent un grand rôle dans les phénomènes géologiques, et que, par la perfection de leur structure, ils rivalisent souvent avec les géants de la création.

Depuis longtemps, les observateurs au microscope avaient remarqué dans l'intérieur du corps de divers Infusoires des espaces clairs qui avaient l'aspect de petites bulles, et qui res- semblaient à des cavités arrondies contenant de l'eau. En nour- rissant ces Animalcules avec du carmin ou de l'indigo, M. Ehrenberg vit des dépôts de ces matières colorantes se for- mer sur divers points et atïecter la même disposition ; les sphé- rules de carmin ou d'indigo avalées par les Infusoires avaient un volume à peu près constant chez les différents individus d'une même espèce, et après avoir séjourné plus ou moins longtemps

malcules dont il est ici question comme après dans les Mémoires de cette So- étant astomes (a). Ses travaux sur ce ciété savante. On en trouve des ex- sujet furent présentés à l'Académie traits dans les Annales des sciences de Berlin en 1830, et publiés bientôt naturelles (6).

(a) Lamarck, Histoire des Animaux sans vertèbres, t. I, p. 392.

Guvier, Règne animal, 2" édition, 1820, t. III, p. 325.

(6) Elireiiberg, Beitrdge zur Kenntniss der Organisation der Infiisorien {Abhand. der Akad. der Wissensch. zu Berlin ans dem Jahre 1830 (publié en 1832). Dritter Beitrag zur Erkennlniss grosser Organisation m der Richtung des kleinsten PMumes {Mém. de l'Acad. de Berlin, 1833). Recherches sur V organisation et la distribution des Infusoires, particuliè- rement ceux de la Sibérie {Ann. des sciences nat., séiie, 1834., t. I, p. 129 et suiv.). Je citerai aussi son grand ouvrage inlitulo : Die Infusions Ihierchen ats vollkommene Organismen, in-fol, 15eilin, 1838.

3o'2 APPAREIL DIGESTIF

dans l'inlérieur de l'organisme, elles étaient évacuées au dehors, comme le seraient des matières fécales. Il en conclut que la formation de ces bols colorés était due à l'accumulation de la matière tinctoriale dans autant de pctiles poches arrondies; que chacune de ces poclies était un estomac, et que l'introduction des aliments dans Fintérieur de ces réservoirs, ainsi que l'éva- cuation des fèces, devait s'opérer au moyen d'un canal commun ou intestin autour du(|uel ces poches seraient appenducs. Dans quelques cas, M. Ehrenberg crut même pouvoir distinguer nettement le trajet de ce canal intestinal et ses connexions avec une multitude d'ampoules pédonculées. Enfin, généralisant les conclusions tirées de ces observations et de celles qu'il avait faites également sur les Infusoires flagellifères, il admit comme démontré, que clicz tous ces Animalcules il existe un nombre considérable do poclies stomacales distinctes, et ce fut pour rappeler cette disposition qu'il désigna sous le nom de Poly- gaslrica la classe formée par la réunion de tous ces petits êtres (1).

Mais les apparences sur lesquelles M. Ehrenberg se fonde pour admettre la multiplicité des estomacs chez les Infusoires ciliés sont susceptibles d'une autre interprétation, qui me paraît être l'expression de l'état réel des choses. On peut supposer que les espèces de globes colorés qui se montrent dans l'inté- rieur du corps de l'Animalcule re[»u de carmin ou d'indigo ne sont pas limités par une membrane, et ne sont pas dus à l'ac- cumulation de ces matières colorantes dans autant de petites poches, mais consistent dans des espèces de bols constitués par la matière alimentaire dont chaque gorgée, réunie en une masse arrondie, serait poussée dans une substance pâteuse

(1) L'opinion de M. Ehrenberg, an cales multiples, a été soulenuc pat- Sujet de Texistcnce de cellules slonia- M. Eckard (a).

(a) Eckhai'J, Ilic Organisalionsverhciltidsse tler poiygastrichcii Infiisoricn (Wiepninnn's Archlv fia- ^al1ll^!|csclnchle, ISiG, t. I, p. 209).

i"» o o

CHL;Z les INFUSOIUES CILIES.

elle ne se disperserait pas, et continuerait à avancer en (conser- vant sa forme. En effet, ces sphérules de matière alimentaire changent de place, et, en cheminant de la bouche vers l'anus, on les voit souvent se dépasser les nnes les autres d'une manière qui semble être incompatible avec leur emprisonnement dans des appendices qui seraient attachés d'espace en espace à un canal intestinal (1). Cette explication des phénomènes observés par M. Ehrenberg a été donnée pour la première fois par mon savant collègue de la facnlté des sciences de Rennes, M. Du- jardin, et aujourd'hui elle est adoptée par presque tous les naturalistes qui ont fait des Infusoires une étude attentive; mais il existe parmi ceux-ci des divergences d'opinion au sujet du mode de constitution de la cavité les bols alimentaires se logent. Le zoologiste que je viens de citer pense que chez ces Animaux, de même que chez les Rhizopodcs, le corps n'est

(1) Ces mouvements des bols ali- mentaires , observés d'abord par Grnitbuisen, Al. Carus et M. Focke (a) , supposeraient le déplacement des es- tomacs eux-mêmes; car ce n'est pas en revenant vers l'axe du corps, puis en retournant vers la périphérie, que ces sphérules cheminent, mais en descendant d'un côté et en remontant de l'autre; et, ainsi que l'a fait re- marquer M. Focke, elles se dépa.ssent et s'entrecroisent souvent, de telle sorte que si elles étaient logées dans des caecums adliéicnls à un intestin centrai, et si leur déplacement dépen- dait des mouvements exécutés par ces appendices, ceux-ci ne tarderaient

pas à s'entremêler d'une manière inex- tricable (6).

M. Griffilh a cherché à rendre compte de ce mode de déplacement des bols alimentaires, en supposant qu'ils étaient logés dans un tube intes- tinal à circonvolutions nombreuses qui les embrasseraient étroitement et les pousseraient par des contractions péri- staltiques; mais s'il en était ainsi, ces sphérules devraient se trouver toujours dans le même ordre, tandis que sou- vent elles se croisent et se dépassent les unes les autres (c).

Frdl a publié aussi quelques obser- vations sur le mode de déplacement des bols alimentaires {d).

(a) Carus, Traité cléinentaire â'anatnm'ie comparée, t. II, p. G.

{h) Fockc, Ueber eiiiige Organisationsverhdltnisse der polygastrichen hifusorien und Ràder- ihiere{Isis, -1830, p. 785).

(e) W. Grillitli, On tlie saccuU of tlie Polijijastrica (.\nn. and Mag. of Nat. Hist., 1843, t. XI, p. 438).

(d) Enil, Ucber den Kreislauf der Infusorieii (.MuUci's Archiv fiïr Auat. luul FlvjsioL, 1841, p. 278).

33i APPAUEIL DIGESTIF

formé que par une substance molle et glutlneuse dont j'ai déjà eu l'occasion de parler sous le nom de sarcode; que les matières alimentaires s'y tracent un chemin, et ({ii'il n'y a pour les rece- voir aucune cavité préexistante, aucun estoma('(l). M. Meven envisage ces faits autrement, et il me. semble s'être rapproché davantage de la vérité lorsqu'il rej)résenta ces petits êtres comme étant creusés d'un grand estomac simple occupé par une matière pul|)cuse plus ou moins analogue au mucus des Animaux supé- rieurs , matière dans laquelle les masses alimentaires s'enfon- ceraient successivement (2). En efl^t, toutes les observations

(1) M. F. Diijardin fut un des pre- miers à s'élever contre l'opinion de M. Ehrenberg, relativement à l'exis- tence d'estomacs multiples chez les Infusoires, et il se laissa d'abord en- traîner à des exagérations en sens con- traire. Ainsi il affirma que chez ces Animalcules il n'existe ni bouche, ni anus, ni cavité digestive préformée, et que les espaces les matières ali- mentaires pénètrent sont seulement des vacuoles creusées par ces sub- stances elles-mêmes dans la masse de sarcode dont le corps de l'être se composerait (a). Dans ses publications subséquentes ce savant distingué ne tarda pas à reconnaître qu'il s'était trompé au sujet de la non-existence d'une bouche (6) , mais il persista dans sa première opinion, non-seu- lement au sujet de l'absence de parois propres pour les cavités contenant les

bols alimentaires, c'est-à-dire les esto- macs multiples de M. Ehrenberg, mais relativement à ia non-existence d'une cavité digestive préformée et d'un anus, l'énionctoire par lequel les fèces s'échappent au dehors n'étant, d'après lui. qu'un orifice accidentel qui se produisait sous l'influence de la pres- sion exercée par ces matières, et dis- paraissait aussitôt après leur sortie (c).

M. Perty, M. Slein et Carter, ont adopté l'opinion de M. Dujardin , au sujet de la pénétration des aliments dans la substance sarcodique du corps (d), et M. Siebold ne s'en éloi- gne que fort peu (e).

(2) Après avoir parlé de l'impossi- bilité qu'il avait toujours rencontrée à découvrir les moindres traces d'un intestin central, et de la manière dont il avait vu neuf ou dix globules tourner autour d'im centre chez les Vorticelles,

(a) Dujardin, Sur les prétendus estomacs des Animalcules infusoires, et sur une substance appelée sarcode {Ann. des sciences nat., 2' série, i.S35, t. IV', p. 3Gi et siiiv.).

(b) Idem, Recherches stir les organismes inférieurs (Ann. des sciences nal., série, i836, 1. V, p. 195).

(c) Idem, Histoire naturelle des Infusoires, 1841, p. 51, etc.. ((/) Pcriy, Zur Kenntniss der klcinslen Lebensformen, \>. 58.

Slein, Ncue Beitrdge zur Kenntniss der Eniwicklungsgeschichte und des feineren Daues der Infusionsthiere (Zeitschr. fur wissenschlaftliche Zoologie, 1851, t. Itl, p. 487, 501, etc.), et Die Infusionsthiere.

(e) Siebold et Slannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, 1854, t. I, p. 10, 114, etc.

CHEZ LES INFUSOIKES CILIÉS. 335

les plus récentes tendent à établir que l'appareil digestif des Infu- soires ciliés se compose généralement : d'une bouche dis- tincte; 2° d'un canal pharyngien dans lequel les aliments pren- nent souvent la forme d'un bol ; d'un grand estomac à parois distinctes et plus ou moins éloignées de la membrane tégumen- taire commune : enfin d'un orifice excréteur ou anus.

La bouche des Infusoircs présente des différences très grandes quant à sa position et à son mode de conformation.

M. Meyen expose de la façon suivante ses vues sur la constitution de ces Ani- malcules. « Les vérilables Infusoires, dit-il, sont des êtres vésiculeux dont l'intéricm- est rempli d'une substance muqueuse ; l'épaisseur de la membrane qui forme la vésicule est facile à aper- cevoir dans quelques-uns de ces ani- maux et présente parfois une structure spirale. Dans les gros Infusoires, un canal cylindrique traverse oblique- ment cette membrane, et se dilate vers sa partie inférieure, il est garni de cils vibratilcs qui font tourner sur elles-mêmes les matières alimentaires et les réunissent en boule ; celle boule est ensuite poussée dans la cavité si- tuée au-dessous, et de nouvelles ma- tières alimentaires transmises par la boucbe sont pétries en un second bol, qui bientôt suit le premier, et ainsi pour les autres. Ces bols sont formés

principalement de mucus, et quelque- fois on voit deux de ces spbérules, pressées fortement l'une contre l'au- tre, s'unir {a). »

Cette manière de voir ne diffère en rien d'essentiel de l'opinion professée par MM. de Qualrefages (h), Cohn (c), Haim (d) , Carpenter {e) , etc. Elle vient d'être développée d'une ma- nière plus complète et appuyée sur de nouvelles observations par Al M. Cla- parède et Lacbmann (/). Enfin M. Carter applique, il est vrai, le nom de sarcode à la matière muqueuse qui remplit la grande cavité dont le corps est creusé, mais il considère celle-ci comme étant limitée par des parois solides, et la description qu'il donne de l'appareil digestif des l*a- raméciens et des Vorticelles s'accorde très bien avec ce que j'ai dit ci- dessus (g).

(a) 3. Meyen , Einige Bemerktmgen ûber den Verdatiungsappavat der Infusorien (Miiller's Archiv fiir Anat. und Physiol., 1839, p. 74), et Irad. en franc. [Ann. des sciences nat., série, 4839, t. XII, p. 12i>).

(6) Voyez Dujardin, art. INFUSOIP.ES {Dictionnaire universel d'histoire naturelle de d'Orbigiiy, 1845, t. VU, p. 46).

(c) Colin, Beitrdge ziir Entwickelungsgeschichte der Infusorien (Zeitschrift fiir wissenschaft- liche Zoologie, 1854, t. lit, p. 20).

{d) Haimc, Op. cit. (Ann. des sciences nat., 3' série, t. XI.K, p. 119).

(e) Carpenter, Principles of Comparative Physiology, p. 156.

Greene, .4 Mamial of thesubkingdom Prolozoa, 1859, p. 03.

(f) Ciaparède et Laclimann, Études sur les Infusoires et les Wdznpodes, 1858, p. 28 cl suiv.

(g) Carier, Notes on the Freshwater Infusoria of the Island of Bombay (.inn. of Nat. Ilisl., 2" série, t. XVIII, p. 122, pi. G, fig. 65, et pi. 7, lig. 74).

OoG APPAREIL DIGESTIF

Chez beaucoup de ces AniiBalcules, elle occupe le fond d'une fossette ou vestibule, et souvent les bords de cette dépression sont garnis de cils très développés dont les mouvements déler-, minent l'arrivée des matières alimentaires dans cette cavité. Ainsi, chez les Vorticelliens, dont le corps s'évase antérieure- ment en forme de clochette ou de cornet, et se termine par un bord contractile ou péristome au dedans duquel se trouve une espèce de couvercle cilié, on voit, dans le sillon circulaire qui sépare cet opercule du péristome dont je viens de parler, une fossette béante au fond de laquelle est située l'entrée de l'appa- reil digestif (1). La frange ciliée qui borde l'opercule descend dans ce vestibule en décrivant une spirale, et se prolonge même jusque dans le canal œsophagien qui y fait suite. Cest par l'ac- tion de ces appendices que l'ingurgitation des aliments paraît s'effectuer, et l'on n'aperçoit pas de mouvements de déglutition proprement dits (2).

(1) Pour la forme, générale des Vor- ticelliens et la position de la fossette buccale ou vestibule, que Ton confond souvent avec la bouciie elle-même, je renverrai auv planches de M. Ehren- berg et à une figura donnée par M. de Quatrefages {a) ; mais, pour la dispo- sition de la spire ciliée dans Tinté- rieur de cette cavité et les détails de sa structure, je citerai de préférence les figures faites plus récemment par M. Lachmann (6) et la description plus circonstanciée que ce zoologiste vient d'en publier conjointement avec M. Claparède (cj.

(2) Chez les Stentors, les Bursaires et les autres Infusoiresdont MM. Cla- parède et Lacbmanii ont formé la famille des Bursariens , la bouche est garnie d'une rangée de cils très gros, disposés en spirale. Dans le genre Chœtospira, celte frange vibra - tile est portée sur un processus en forme de bande étroite, qui occupe l'extrémité antérieure du corps ((/). Chez certaines espèces du genre Freia, celte même frange garnit un prolonge- ment infundibuliforme et bilobé (f). Chez les Stentors, elle entoure une sorte de disque frontal circulaire ,

(a) Elirenbcrg, Die Infiisionslliierchen, pi. 15 ù 19.

Quati'efai,a's, voyez Allas du Règne animal de Cuvier, Zoophvtes, pi. Ci, li„'. i.

(b) Lachmann, De Iiifusoriorum, imprimis Vorticelllaorum structura (dissert, inaug'.), 1835, pi. 1, fig. 1 et 2.

(c) Claparède el Lachmann, Etudes sur les Infusoires, p. 80 et sniv. ((/) Lachmann, De Infusoriorum structura, pi. 1, fii;. li et 7.

[e) Claparède et Laclunanii, Eludes, pi. 10, lij. 1 et G,

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CHEZ LES I^FL;S0IUEK CILIES. '

Chez d'aulres Infusoires ciliés, la bouclio est à découvert ou se trouve au ibnd d'une écliancrure qui ne présente dans sa structure rien de particulier ; mais alors cet orifice est contrac- tile et préhensile (1); quelquetois même la partie antérieure du canal alimentaire est susceptible de se renverser au deliors en forme de trompe (2), et dans un assez grand nombre d"espèces elle est pourvue d'une armature particulière composée d'nn taisceau de soies rigides disposées en l'orme de nasse, et sus- ceptible de se dilater ou de se resserrer suivant les besoins de l'Animal (3).

sur le bord duquel esl siluée la fos- selle ou vestibule infundibulairc qui précède la bouclie, et qui loge la por- tion terminale de la spire vibratile dont la direction est inverse de celle des Vorlicelliens (a). Gbez les lîur- saires, la fosse buccale ou vestibule est très grande, et indépendamment des cils qui en garnissent le pourtour, ou voit dans sa cavité une crête ciliée ^h).

(1) Cette espèce de prolapsus de l'œsopbage a été observé par MM. Cla- parède et Lachmann cbez les Para- méciens, les Stentors, etc. (c).

(2) Ainsi Haime a vu que chez le Trichoda lynceus la préhension des aliments se fait directement par l'ac- tion des lèvres mobiles dont la bouche est garnie (il).

(3) Cette armature dentaire, dont la découverte est due à M. Ehrenberg, se voit chez les Nassules, les Chilodon , les Proi'odons et quelques autres Infu- soires ciliés. Elle est protraclile, et se compose d'un faisceau de stylets d'une

finesse extrême , disposés parallèle- ment en cercle, au nombre de 16 à 30. Souvent elle reste dilatée pendant que les corpuscules alimentaires en- traînés par les courants la traversent pour descendre vers l'estomac ; mais dans d'autres moments, quand des Ani- malcules d'un certain volume s'y en- gagent, on voit les baguettes qui le constiluent se rapprocher par leur extrémité antérieure, et presser forte- ment siu- la substance alimentaire in- cluse dans cette espèce de cylindre ou de nasse. Il est aussi à remarquer que cet appareil masticateur se développe avec une très grande rapidité dans les portions du corps qui tendent à s'iso- ler pour consliluor, par lissiparité, de nouveaux individus. C'est de la sorte qu'on en voit quelquefois deux chez le même Animalcule.

Chez quelques espèces les baguettes dentaires paraissent être composées de chitine ou de quelque substance analogue; car M. Dujardin a vu que

(a) Elirunlici'g, Die Infusionsthicre, pi. 23, fiy. i, clc. Lachmann, Op. cit., pi. i, lîg'. î>.

(b) Clap:ircde el Laclimaiin, Eludes, pi. 13, llg'. 1.

(c) ClaparcJo et Laclimann, Éludes sur les Infusoires, p. 34.

(d) Haime, Observalions sur les métamorphoses et sur l'orgiuiisalion dit Trichoda lynceus {Aiin. des sciences nat., 3" série, t. XIX, p. \ 18).

V. "12

3i:8 APPAREIL DIGESTIF

Le pharynx ou œsophage, qui fait suite àlabouclie, se dirige en général obliquement en arrière; quelquefois il est muni de côtes longitudinales qui simulent des baguettes dentaires, mais (jui ne sont que des plis (1). Enfin, chez quelques Infusoires, on remarque dans l'intérieur de cette portion de l'appareil digestif un organe vibratile particulier, qui se compose de cils 1res forts. En général, elle se termine dans une grande cavité slomacale dont la tunique ne se distingue pas nellement de la substance générale du corps, et dont l'intérieur paraît être occupé par un liquide visqueux ou une pâte semi-lluide. Quel- quefois ce tube œsophagien se prolonge assez loin dans cette cavité, et s'y trouve suspendu librement, à peu près comme nous l'avons vu chez les Coralliaires : ainsi, chez le Chilodon cucuUus, il atteint presque l'extrémité postérieure de la cavité digeslive. Enfin, d'autres fois, au lieu de se terminer brusque- ment, il se confond avec l'estomac, qui affecte alors la forme d'un tube, et correspond assez bien à l'idée que M. Ehrenberg s'était faite de la disposition de l'intestin chez tous les Infusoires ciliés.

Ainsi , chez le Trachelhis omim , l'estomac parait être tubulaire et suspendu au milieu d'une cavité viscérale par un nombre considérable de prolongements ramiiiés ("2). Cette

chez le Chilodon cticullus elles ré- (2) En 18/i7, en examinant quel-

sistenl à l'acUon de la potasse ; mais qiies - unes des préparations que

chez les INassules il les a vues se dis- M. Ehrenberg a eu robligeaucc de me

soudie dans ce réactif (a). communiquer, j'ai aperçu assez dis-

(1) Ces plis longitudinaux du pha- tinctement cette disposition dont ce

rynx se voient chez le Lacrymaria savant a donné une figure dans son

olor, VEnchehjdon forcatus, etc. (6). grand ouvrage (c). \\. Ilymer Jones

niveus ,

bel-, Op. cit., pi. a, fig. 8)

((■) GUparède cl Lachmaiin, Op. cit., p. 32

CHKZ LES INFUSOIKES CILIÉS, ,339

disposition rappelle ce que nous avons déjà vu chez certains Zoophytes, tels (]ue les Astéries, et se retrouvera chez divers Mollusques ainsi que chez beaucoup de Vers. Or, il est pro- bable que chez la Trachélie les aliments peuvent pénétrer dans les appendices gastriques, car cela se voit chez la plupart des Animaux dont je viens de parler. Par conséquent, dans ce cas, un mode d'organisation fort analogue à celui que M. Ehrenberg attribuait à tous ses Polygastriques se trouve réalisé en grande partie; mais cette disposition est très rare dans cette classe d'Animaux, et, dans la grande majorité des cas, l'estomac paraît être une grande cavité indivise.

C'est à la partie intérieure du pharynx ou œsophage, dilatée en manière de cloche, que se forment les bols sphériques de matières alimentaires, qui, poussés ensuite dans l'estomac, y nagent dans un liquide plus ou moins épais, et constituent, ainsi que nous venons de le voir, les corps que M. Ehrenberg considère conmie des cellules stomacales. Le volume de ces bols est déterminé par les dimensions de l'espèce de moule ils se forment, et en général ne varie que peu chez le môme individu ou chez les différents individus de la même espèce. Ainsi ils sont très petits chez les Paramécies, divers ïricliodes et plusieurs Trachéiies, tandis qu'ils sont de moyenne gros- seur chez le Colpoda cucuUus^ le Glaucoma scintillans, etc., et qu'ils sont (rès grands chez les Stentors, le Paramecium Aurélia et quel(]ues autres. Leur progression est en général

paraît avoir eu le même avantage («); recherches de M. Gegenbauer (6), de

et phis récemment Texactilade des oh- M. Lieberkiihn et de MM. Claparède et

servations de M. Ehrenberg, an snjet Lachmann. M. Lieberkiihn a constaté

de la disposition de l'appareil digestif un mode d'organisation semblable chez

de cet Infusoire, a été conlirmée par les le Loxades rostrum (c).

(a) Rymer Jones, article Polygastuica (Todd's CyclopcBdia of Auat. and PhysioL, t. IV, p. ii). {b) Gegenbauer, Bemerkungeii M&ec Trachelius oviim (Miillcr's Archiv fur Anat. uiid PhysioL, 1857, p. 309).

(s) Claparède et Lachmann, Études sur les [nfusoires, p. 33.

340 API'AIŒIL DIGESTIF

lenle, mais quelquefois se fait très rapidement : (^hez le Para- mecium bursaria, par exemple, ils deseendent d'un côté du corps et remontent de l'autre ; mais on ne connaît pas le mé- canisme à l'aide duquel leur déplacement est effectué (1). Enfin, ils se réunissent dans la région anale, et sont expulsés au dehors par nn orifice particulier.

La position de l'anus varie beaucoup plus que celle de la bouche (2). Chez les Vorticelliens, ces deux orifices sont (rès rapprochés l'un de l'autre au fond de la fossette vestibulaire (3).

(1) Il me paraît probable que le mouvement rotatoire des matières contenues dans l'estomac des Infu- soires est à l'action de cils vibra - liles très fins, dont les parois de cette cavité seraient garnies; mais jusqu'jci il n'a pas été donné aux observateurs de les apercevoir. Quant aux diverses explications qui ont été proposées pour rendre compte du transport des bols alimentaires, je n'en vois aucune qui soit acceptable (a).

(2) L'évacuation des fèces par les Infusoires a été observée vers la fin du siècle dernier par O.-F. Millier (6), et constatée par la plupart des microgra- phes de l'époque actuelle ; mais les zoologistes ne sont pas d'accord sur la manière dont ce phénomène a lieu. M. Dujardin pense que ces Animal- cules n^nt pas d'anus, et que les ma- tières fécales s'échappent de leur corps par des ouvertures accidentelles qui seraient déterminées par la présence de ces matières, et qui se referme-

raient aussitôt, sans laisser de trace de leur existence (c). Une opinion ana- logue au sujet de la plupart des Infu- soires a été émise par I\l. Stein et par M. Perty {d) ; M. Ebrenberg, au contraire, regarde cette ouverture comme étant préexistante et perma- nente. Cette manière de voir est adop- tée par la plupart des observateurs qui depuis quelques années ont fait une étude spéciale de l'organisation des Infusoires (e), et me paraît être la seule admissible.

(3) Chezles Vorticelliens le vestibule' préstomien est très profond, et a été souvent pris pour la bouche elle- même; par conséquent on a pu croire que chez ces Animalcules il n'existe qu'un seul orifice digestif, mais en réalité les fèces sortent par une ouver- ture qui se trouve à côté de celle par les aliments passent. Cela a été distinctement vu par beaucoup de mi- crographes et très bien représenté par ^]. Lachmanu et par M. Carter (/").

(a) Voyez Claparèdc et I.acliniann, Op. cit., |i. 37 et siiiv. ((?) 0. 1''. Millier, Animalcula infusorin, 1780, p. 2i0.

(c) Diijnriliii, Histoire naturelle des Zooplujtes infusoires, p. 54 et sulv.

(d) Peily, Zur Kennimss der kleinstcn Lebensformcn, p. 58.

Stein, Die Infusionsthiere, p. 17.

(e) Voyez à ce siyet Glapai'éde cl Ijaclimann, Op. cit., p. 30 et 31.

(/■) Ijaclmiann, De Difusoriorum structura (disserl. inaiig.), 1855, pi. 1, fig. 1 et 2.

Carter, Notes on the Freshwalcr Infusona of Bombay (.4?iî^. of Nat. Hisl., série, 1856, l. XVIll, pi. 17, ik- 74).

digestif

dos

Bryozoaires.

DES MOLLrSCOÏDES JiKVOZOÂlRES. o/ll

Chez les Slentoriens, l'anus est encore fort rapproché de la bouclie, mais se trouve au dehors de la spire ciliée qui entoure cette dernière ouverture (1). Chez d'autres Bursariens, tels que les Leucophrys, il est situé sous le bord postérieur du corps ; enfin il est placé sur la face ventrale du corps chez lesOxy- trichiens.

§ 3. Le grand embranchement des Malacozoaires se com- Appareil

, dige-'-'

pose, comme on le sait, de deux groupes pruieq-iaux : les ^ do Mollusques et les Molluscoïdes. Parmi ces derniers, les Ani- maux polypiformes qui constituent la classe des Bryozoaires (2) occupent le rang le plus inférieur, et quelques-uns de ces petits êtres ont beaucoup de ressemblance avec les Vorticelliens, non-seulement par leur forme générale, mais aussi par la dis- position de leur appareil digestif. Enfin, chez les Bryozoaires, de même que chez les Vorticelliens, le corps est en forme d'urne , de cornet ou d'ampoule ; la bouche en occupe la partie antérieure, et les particules alimentaires en suspension dans l'eau d'alentour sont dirigées vers cette ouverture par l'action flagellante de cils vibratiles qui sont en même temps des organes de respiration. JMais ici ces cils, au lieu d'être insérés directement sur une sorte de plateau ou de lobe épistomien, sont portés par un certain nombre d'appendices tentaculaires grêles et allongés, qui sont disposés en manière de couronne autour de la bouche, et qui, en s'écartant vers

(1) M. Laclinianii pense que clicz diatenient au-dessous de la frange

ces Infusoires l'anus est séparé de la ciliée spirale qui aboutit à la bouche

grande cavité stomacale par un com- du côté ventral (o).

parliment particulier les fèces (2) J'ai déjà eu l'occasion d'expli-

s'amassent, et que l'on devrait con- quer pourquoi je conserve ce nom, de

sidérer comme une sorte de gros in- préférence à celui de Polyzoaires que

testin ou rectum. L'orifice anal est beaucoup d'auteurs- ont adopté (6;. situé du côté dorsal du corps, immé-

[n] Claparèdo cl Lnclimann, Éludes sur les Infusoires, p. 223. (6) Voyez tome III, pn^o 11.

â/l^ APPAREIL DIGKSTIF

le boni , constiliieiit une sorte d'entonnoir vestibulaire. Ces appendices sont rétractiles, et une bordure membraneuse ana- logue au péristome des Vorticelliens entoure leur base; sou- vent même une portion de cette bordure se développe beau- coup, et constitue un opercule comparable à un volet qui se rabat sur la partie voisine de la gaine tégumentaire de l'Ani- mal, quand celle-ci se contracte (1). Chez les Bryozoaires ma-

(1) Cette disposition se voit chez tous les Bryozoaires de la famille des Escharieiis, comprenant les Eschares, les Flustres, les Salicornaires, etc. L'opercule de ces animaux est un lobe péristomien en forme de disque cir- culaire plus ou moins tronqué, qui tient au côté ventral du bord antérieur de la loge tégumentaire ou polypier, et qui est susceptible de se relever ou de se rabattre sur l'ouverture circon- scrite par ce même bord. Une paire de muscles abaisseurs qui s'insèrent à sa face inférieure, et qui vont prendre leur point d'appui sur les parois de la grande cavité viscérale, détermine la clôture de cet appareil (a). C'est en rai- son de cette disposition que M. Busk a donné à cette famille le nom de Cheilo- stomata (6). D'après Cavolini, la dis- position de l'opercule serait différente chez le Myriapora truncata (c) , et cette considération m'avait porté à sé- parer ces Bryozoaires des Eschariens

pour en former une famille dis- tincte {d); mais j'ai reconnu depuis qu'il n'existe à cet égard aucune dif- férence notable entre ces animaux (e). En général, l'opercule est calcaire, mais chez quelques espèces il est sim- plement membraneux et ressemble à une lèvre semi-circulaire : par exem- ple, chez le Tendra zostericola (/").

Chez les Bryozoaires de la famille des Tubuliporiens, le péristome est cir- culaire et simple, c'est-à-dire ne porte pas d'opercule , et l'espace membra- neux compris entre ce rebord et la base des tentacules est très développé, de façon que la couronne labiale s'a- vance beaucoup hors de la cellule té- gumentaire [g). Dans la famille des Vésiculariens, le péristome est égale- ment membraneux, et prend une forme bilabiée dans l'état de contraction, mais devient circulaire dans l'état d'expansion et est souvent armé de soies rigides {h).

(a) Milne Edwards, Recherches sur les Eschares, pi. 1, ftg. le et li (Recherches anatomiques, physiologiques et %oologiques sur les Polypes, et Ann, des sciences nat., 2* série, 1830, t. VI, pi. i).

(b) Busk, Voyage of the Halllesnake, t. I, appendix, p. 340.

(c) Cavolini, Mi'morie per servire alla storla de' Polipi marini, pi. 9, fig. 7. {d) Miliie Ed\Yai'(ls, Classification des Polypes {l'Institut, 1837, t. V, p. 178).

(e) Milne EiUvards, ZoopiiYTES de V Atlas du Rcgue animal de Ciivier, pi. 89, fig. 2 6. If) Nordina/in, Fauna pontica, Polypi, pi. 2, fig. 3 [Voyage en Crimée, par Demidoff). (g) Milne Edward', Mém. sur les TubuUpores [Ann. des sciences nat., 2' série, 1837, t. Mil, pi. 12, fig. Ifc) Mém. sur les Crisies, etc. {Ann. des sciences nat., série, 1838, I. IX, pi. G,

fig. !(')•

' (h) Farre, Oburrv. on the Minute Structure of sinnc of the lligher t'onns of Polypi, l'I. 21 , (li^. 42, Vi, elc. Il'hilos. Trous., 1837).

DES MOLLUSCOÏDES ISRYOZOAIRES. S43

rins, ou Stelmatopodes , la [)artie de la région cireiimbucealc qui porte les tentacules, et qui a été désignée sous le nom de lophophore (1), est indivise, et tous ces appendices en naissent au même niveau, de façon à former une couronne ou cloche régulière. Chez les Bryozoaires d'eau douce, ou Lophopodiens^ elle est au contraire presque toujours divisée en deux lobes, sur les bords desquels les tentacules s'insèrent de manière à repré- senter par leiu" assemblage un double panache (2).

(1) M. Allman, à qui on doit «ne très bonne monogiapliie des Bryo- zoaires creau douce, a désigné de la sorte le support tentaculaire (a), et ce nom serait très bien choisi, s'il n'ap- partenait déjà à un genre d'Oiseaux de la laniille des Gallinacés.

(2) C'est en raison de cette disposi- tion que Tremblay et les autres natu- ralistes du siècle dernier appelaient ces animaux des Polypes à pana- ches {h). En général, le lopbophore des Bryozoaires d'eau douce est très développé et s'avance en forme de fer à cheval au devant de la bouche (c;.

Les Animaux polypiformes qui of- frent ce caractère composent la divi- sion des Polypiaires douteux de Blain- ville (d), les Hypocrépiens de M. Ser- vais (e) , et des Lopliopodiens de M. Van der Hœven [f]. Le lophophore n'est jamais bilobé chez les Bryozoaires marins, et ce caractère manque aussi

dans le genre Paludicella, parmi les espèces d'eau douce {g); il est aussi à peine marqué dans le genre Fre- dericella, de sorte que les tentacules forment une couronne circulaire assez régulière (/;). Gliez les l'édicellines, il en est de même; mais le loj)hophore, sans être bilobé, offre d'un côté une écliancrure étroite et profonde au fond de laquelle se trouve l'anus (/). Chez tous les autres Bryozoaires , le lopho- phore est régulièrement annulaire, et tous les tentacules se terminent à la même distance de la bouche, de façon à circonscrire un cercle. Celte disposi- tion caractérise l'ordre des Infundi- bulés de M. dervaisou des Stelmato- podes de M. ^ au der Hœven {j .

Il est aussi à noter qu'en général le bord externe du lopliophorc se pro- longe plus ou moins en forme de gaîne autour de la base de l'appareil tenta- culaire.

(a) Allman, A Monograph of Ihe Freshwater Polyzoa, p. 8.

(6) Tremblay, Mémoires pour servir à l'histoire d'un genre de Polypes d'eau douce, t. II, p. 12G el suiv.

(c) Voyez VAtlas du Règne animal de Cuvier, Zoophvtes, pi. (!4, fis;. 3, on toute autre figure lie Crislalc-lle, d'Alcyonelle, elc.

(d) lilainville, Manuel d'actinologie, 1834, p. 489.

(e) Gervais, Recherches sur les Polypes d'eau douce {Ànn. des sciences nat., sôrio, 1837,

t. VU, p. ■^^).

(f) Van der Hœven, Handboek der Dierkunde, 1849, t. I, p. H &. {g} Voyez Allman, Op. cit., pi. 10, ûg. 4 et 5.

(/() Idem, ibid., pi. 9, fig. 2 et 7.

(i)Idem, ibid., p. 20, lig. 3 et 4.

(i) Van der Hœven, Handboek der Dierkunde, t. I, p. 115.

?/|/l AM'AUEIL DIGKSTIP

Ln bouche, toujours inermc, et située au fond de Tespèce d'entonnoir tenlaculaire(l), est tantôt nue, tantôt précédée d'nn prolongement labial très mobile, en Ibrme de corne, que l'on a appelé Vépistome ("2). Ces caractères ont été employés par les zoologistes pour diviser la classe des Bryozoaires en deux urdres naturels, les Phylactolsemates et les Gymnolœmates (3). Mais on ignore les usages de cet organe.

1.ÎI cavité dioestive des Brvozoaires a touiours la forme d'un canal ouvert anx deux bouts, plus ou moins élargi dans sa partie moyenne et recourbé en manière d'anse, de façon que l'anus se tronvc fort rapproché de la bouche. La première por- tion constitue le pharynx ou œsophage, la deuxième l'estomac, et la troisième se rétrécit de nouveau pour donner naissance à un liibe évacualeur, ou intestin (h).

Chez les Brvozoaires marins du genre Pédicellaire, qui vivent

(1) La IjoiicIk^csI gc'n(5falement cir- culaire, mais quelquefois un peu cour- bée en forme de croissant, comme cela se voit chez la plupart des es- pèces de Lopliopodiens.

(2) Cet organe ressemble un peu à répiglotle par la manière dont il est placé obliquement au-devant de Tori- lice buccal. Il est creux, et sa cavité communique avec rextérieur par un orifice pratiqué dans le lophopliore. A l'extérieur il est garni de cils vibra- tiles, et il exécute sans cesse des mou- vements d'élévation et d'abaissement dus à l'aclioii de faisceaux musculaires qui sont visibles dans ses parois («).

(3) Cette classification est due à M. Allman. Dans l'ordre des Phylacto-

lœmata (de ouXâairw, garder, et XaTaa, gosier), il y a un épislome et le lopho- pliore est bilatéral. On y range la plupart des Bryozoaires d'eau douce ou Lophopodiens, ainsi que le genre Pédicelline.

Dans l'ordre des Gymnolœmata (de yjwh;, nu, et XaTu.a, gosier) , il n'y a pas d'épislonie , et le lopliophore est orbiculaire. Cette division comprend la presque totalité des Bryozoaires marins ou Stelmalopodes de M. Van der Hœven, et les l'aludicelles (6).

f/i) La disposition générale de l'ap- pareil digestif des Lophopodiens a été reconnue en grande partie par Trem- blay (c) , et l'expulsion des matières fécales par un orifice anal distinct fut

(a) Allni:in, .1 Monogini^li oflhe l-'rcshwaUv PoUjioa, p. 10, [il. 2, fiy:. ii.

(b) Mcm. (/)/(/., p. 10.

(f) Tiiiiililny, il é moires pour servir à l'hislnirc d'un (jenre de Pnlyjies d'enii douce, I. it, pi. 40,

fiiT. S.

t)KS MOLLUSCOÏUES BlWOZO.ViRES. 3/i5

fixés à l'aide d'un pédoncule, comme les Yorticelles, et qui, par leur forme générale, ressemblent beaucoup à ces ïnfusoires, la disposition des cavités alimentaires ne parait dilïérer aussi que très peu de ce que nous avons rencontré chez ceux-ci. Seule- ment un espace libre qui se trouve entre les parois de l'estomac

observée aussi vers le milieu du siècle dernier, par Baker, par P.œsel et pni- O.-F. Millier (a) ; mais jus- qu'eu 18'28 les zoologistes n'avaient, pas découvert la parenté qui existe entre ces Animaux et les Eschares, les Flustres et beaucoup d'autres Po- lypes marins, Spallanzani, il est vrai, avait aperçu le tnbe alimenlaire des Escliarres recourbé en forme d'anse, mais il l'avait pris ponr le corps tout entier de l'Animalcule (6). En 1827, M. Grant a mieux observé la dispo- sition de cet appareil chez les Fhis- tres; cependant il ne leur découvrit aucun orilice anal (c) , et l'on en était resté à de simples conjectures, au sujet de Texistence de cet émonc-

loire {d); mais, en 1828, de nouvelles recherches faites sur ces Animaux, aux îles Chausey, par Audouin et par moi, avancèrent davantage nos con- naissances relatives au mode d'orga- nisation de ces prétendus l'olypes, et firent voir qu'ils ont un anus parfai- tement distinct de la bouche et un tube digestif disposé à pen près comme celui des Ascidies (e). Plus récem- ment de nouvelles observations ont été faites sur l'anatomie de ces Bryo- zoaires par 1\1. Lister (/'), par moi- même (/y), par M. Farre [h], M. Nord- mann (i), M. Van Beneden (j), et plu- sieurs autres naturalistes.

L'appareil digestif des Lophopo- diens a été étudié aussi avec plus de

(a) Baker, Employmcnt for the Microscope, 1753, p. 310.

Rœsel, Insecten-llehistigiingen , I. HT, pi. 7 5, fig. 23.

0. F. Millier, Aiiim. infus., pi. 24.

(6) Spallanzani, Viagai aile due Sicilie, t. IV, p. 2(10.

(c) Grant, Observ. on the Nature and Structure of Flustra (Edinb new PIulos. Journ., 1827, t. III, p. 107).

((/) Blainville, an. Flustp.k {Dictionnaire des sciences naturelles, 1820, t. XVII, p. 173).

(e) Audouin el Milne Edwards, Résuiné des recherches faites aux lies Chausey {Ann. des sciences nat., 18-28, t. XV, p. 12).

(f) Lisler, Observ. on the Structure and Functions of Ttibular and Cellular Polypi, etc. {Philos. Trans., 1834, p. 384, pi. 12, fig. 2, 3).

(g) Milne Edwards. Recherches anatomiques, physiologiques et zoologiques sur les Eschares (Ann. des sciences nat., série, t. VI, pi. 1, fig. lo). Mém. stir les Polypes du genre des Tubulii.ores (.\nn. des sciences nat., 2= série, 1837, t. VIII, p. 321, pi. 12, fiar. id). Mém. sur les Crisies, les Hornères, etc. {Ann. des sciences nat., série, 1838, I. IX, p. 193, pi. C, fig. le).

{h] Farre, Observations on the Minute Structure of some of the higher Fonns of Polypi {Philos. Trans., 1837, p. 387, i^l. 20, fig. 3, etc.).

(i) Nordmann, Recherches .lur le Tendra zoslericola. Cellularia ovicularia. Recherches sur le riunialella {Voyage dans la Russie méridionale etla Crimée, par Demidoff, l. III, p. 051 et suiv., Polypes, pi. 1-3).

(j) VanBeiieJon, Recherches sur l'organisation des l.agnncnla {Mém. de l'Acad. de Rruxelles, 1845, t. XVUI'. Rerherchcs sur Vanaiondc, la physiologie et le diveloppement des Bryozoaires qui habitent ta cote d'Ostende (toc. cit.).

3/1.6 API'AI'.KIL DIGESTIF

et l'enveloppe générale du corps, c'est-à-dire une cl lambre viscé- rale, se développe beaucoup et devient facile à distinguer. Un œsophage fort simple, mais très dilatable et cilié à l'intérieur, descend obliquement de la bouche vers l'estomac, qui est 1res grand et occupe presque tout le corps. Des cils vibratiles dispo- sés dans l'intérieur de cette cavité v font tournover les matières alimentaires, et les poussent de l'œsopbage vers l'orifice opposé, ou pylore, qui est garni d'un sphincter, et se dilate de temps en temps pour laisser passerces substances rassemblées en sphérules ou bols, dont l'aspect rappelle ce que nous avons vu chez les Infu- soires; ces petites masses pilulaires pénètrent ensuite dans l'in- teslin et y séjournent quelque temps, puis sont brusquement rejetées au dehors par l'anus. La jsorlion du conduit digestif située entre l'estomac et cet orifice, et faisant ainsi fonction de réservoir fécal, est très courte et couchée obliquement sur l'es- tomac. Enfin l'anus est placé tout à côté de la bouche, et semble au premier abord être logé avec celle-ci dans la fossette vesti- bulaire qui est circonscrite par les tentacules, et occuper par conséquent l'intérieur du lophophore; mais il est en réalilé logé dans une échancrure élroite pratiquée dans celle-ci, et par conséquent ne se trouve pas complètement entouré par le cercle tentaculaire (1).

soin par MM. Raspail (a), Dumor- eu roccasion de constater ce mode

lier (6) , Van Beneden (c) , Han- d'organisation chez nne P(5dicelline

cock [d) et Allnian {p). des îles Chaiisey qui me paraît dis-

(1) En 1828, Aiidoiiin et moi avons tincte de celles décrites par les autres

(a) Raspail, Histoire naturelle de V Alcyonelle flnviatile {Mémoire de la Sociéld d'histoire natu- relle de Paris, ISaS, t. IV, p. 75).

(b) Dumortier, Mém. sur l'anatomie et la physiologie des Polypes d'eau douce {Bulletin de VAcad. de Bruxelles, 1835).

Dumortier et \an Ueiieden, llisloire naturelle des Polypes composes d'eau douce {Mi'm. de VAcad. de Bruxelles, t. XV).

Van Beneden, Becherches sur les Bryozoaires fluviatdcs de la Belgique {Mém. de l'Acad. de Bruxelles, 1S48, t. XXV).

(c) Hancock, Ow the Anatomy of Freshwatev Dryozoa (Ann. ofNat. Ilist., '2' série, 1850, t. V, p. -175, pi. 2-5).

((/) Allnian, .1 Monofirapli nf the Freshwater Polyxoa (Boy. Society, 1850).

DES WOLLUSCOÏDES BRYOZOAIRES. olil

Chez les autres Bryozoaires, l'anus s'éloigne davantage de la bouche, et se trouve sur le côté, à quelque distance au-dessous de la base de la couronne tentaculaire.

Le pharynx ou œsophage acquiert des parois plus épaisses, et s'entoure démuselés rétracleurs très puissants; il se trouve plus nettement séparé de l'estomac par un sphincter, et chez quelques-uns de ces Animaux il présente à sa partie infériein^e un renflement charnu qui constitue une sorte de gésier ou organe de trituration (]).

F/estomac es! très grand et se prolonge intérieurement en

naturalistes, mais qui ne fut désignée par nous que sous le nom vague de Vorticeile (a). J'ai proposé plus tard d'en former un genre particulier ap- pelé JAtsia (b) ; mais, à mon insu, M. Sars,de Bergen, m'avait devancé et avait donné à un groupe semblable le nom de Pedicellina (c). ^]. Lister et M. Van Beneden en ont fait connaître la structure avec plus de détails, et les observations de ces auteurs s'accor- dent très bien avec les miennes (d). J'ai souvent vu les boulettes de matières excrémenlilielles sortir par l'anus , et j'ai pu nfassurer ainsi de la position de cet orifice que le savant observa- teur de Louvain n'est point parvenu à apercevoir. Jusqu'en ces derniers temps, tous les observateurs s'accor- dent à considérer la couronne tenta- culaire comme entourant complète-

ment l'anus aussi bien que la bouche de ces Bryozoaires ; mais les recher- ches récentes de M. Allman nous apprennent que le premier de ces orifices est en réalité situé au fond d'une échancnu-e très profonde du lophophoro , ou membrane circum- labiale qui porte les tentacules (e).

(1) On doit la découverte de ce mode d'organisation à M. Farre. Le gésier, que ce naturaliste a trouvé chez les Vésiculariens du genre Bowerban- kia. est un organe globuleux, garni intérieurement de deux tampons ova- laires qui sont opposés l'un à l'autre et d'une structure radiaire. Dans l'es- pace intermédiaire on aperçoit une multitude de pointes squamiformes arrangées avec beaucoup de régula- rité, et paraissant remplir les fonctions d'un appareil dentaire, ou plutôt d'une

[a] Aiidouin et Miliie Elwards, Op. cit. {Ann. des sciences nat., 1'" série, 4828, t. XV, p. 44).

(6) Voyez Lamarclv, Histoire des Animaux sans vertèbres, 2" édit., t. II, p. 1'2, note.

(c) Sars, Beskrivelser og Jagttagelser, p. 4, pi. 4, fif;. 4.

{d) Lister, Observ. on the Structure and Functions ofTubutar and Celiular Pohjpi, etc. {Philos. Trans., 4834, p. 385, pi. 12, fig-. 6).

Van Beneden, Recherches sur Vanatomie. la pliysmlogie et le développement des Bryozoaires (Hist. nat. du genre Pedicellina, p. 73, pi. 0, fig. "1-4, extr. des Mém. de l'Acad. de Bru.velles, ,1845, l. Xl.\).

[e) .Mlnian, .4 Monograph of Freshwnter Pnhjxoa, p. 20, fig-. 4.

3/i8

APPAUKIL DIGKSTIF

un vaste ciil-de-sac; cnlin ses parois, généralement teintes en jaune, renferment une multitude de petites cellules qui parais- sent être des organes sécréteurs, et qui sont probablement les représentants d'un appareil bépalique. Parfois on aperçoit aussi des points gianduliformes dans les parois de l'œsopliagc (1).

sorte (le ràpc (a). On trouve le même mode d'organisation chez le Vesicu- laria spinosa (6).

M. dcSicbold avait criulislingucr un gésier chez les Alcyonelles (c) ; mais M. Allman s'est assuré de la non-exis- tence de cet organe chez ces Moilus- coïdes, ainsi que chez tous les autres Lophopodiens (d).

Le gésier manque aussi complète- ment dans les genres Valkeria et Lagenella, ou Laguncida, parmi les Vésicidariens (e), et chez tous les Es- chariens ou Bryozoaires operculés, excepté chez VHistopia lacustris, qui du reste ressemble beaucoup aux Flustrcs (/■). Jusqu'ici on n'a trouvé aucun exemple de ce mode d'orga- nisation chez les Tubuliporiens {g).

(1) La première portion de l'esto- mac est en général allongée, et suit les mouvements de l'œsophage, de façon à se porter en avant quand l'animal déploie ses tentacules, et à se renver- ser en arrière lors de la rétraction de

ces appendices. C'est celte portion de l'estomac que MM. Dumortier et Van Beneden ont décrite sous le nomd'œ- sophage chez les Alcyonelles, etc., et la valvule dont ces auteurs parlent comme exislanl entre le j)harynx et l'œsophage est ce qu'on regarde gé- néralement comme le cardia (h). La seconde portion de l'estomac descend en forme de cul-de-sac plus ou moins étroit, vers le fond de la cavité géné- rale; et la troisième, qui remonte pa- rallèlement à la première dans l'état d'extension, se termine au pylore. Les parois de celte grande poche sont épaisses et contractiles. En général, elles sont teintes en jaune , et AL Allman y a reconnu trois couches, dont la plus interne se couipose de cellules sécréloires. La coloration des matières alimentaires qui se remarque dans l'estomac paraît être due à leur mélange avec le liquide versé par ces organites {i).

{a} Farro, Op. cit. (Philos. Trans., 1838, p. 392, pi. 20, fig. 3, I, 5 et C). (()) Idem, ibid., p. 401, pt. 22, lig. 3.

Van lioneilen, Op. cit. (Mém. del'Acad. de Bru.rellcs, t. XVIIl, pi. i, Hg. C).

(c) Sicliold el Staiinliis, Nouveau Manuel d'auatomie comparée, t. 1, p. 40.

[d) Allman, A Monograpli. of Fveshwater Polyzoa, p. IG.

(c) Faire, toc. cit., p. 402 oi 403, pi. 23, fig. 5, et pi. 24, ùg. 8.

Van licncden, Op. cit., pi. 1, lîg. 1.

(/■) Carter, Description of a I.acustrine Bryoioon allied to Flustra {.Knn. of Nat. Hist., 3' série, 4858, t. 1,|'. 170, pi. 1, fi?. 2).

(g) Milnc Edward?, Op. cit. [Ann. des sciences nat., 2' série, t. VIH, pt. 12, fig. id; et I. IX, pi. C, fi^'. le, clc).

{h) Van Heneden cl Dumortier, Histoire naturelle des Pohjpes composés d'eau douce, p. 74 (extr. des Mém. de l'Acad. de Itru.velles, t. XVt).

(j) Allman, dp. ci/., p. 17, pi. 2, lif,'. (1 et 7.

DES MOLLUSCOÏDES TUiMCIliUS. 3/l9

Mais jusqu'ici on n'a trouvé aucune glande aiuiexée à l'appa- reil digestif de ces Molluscoïdes. L'inteslin remonte parallèle- ment à l'œsophage, et ne présenle rien d'important à noter.

^ k. La CLASSE DES TuMciERs nous offre chez les Ascidiens un appareil digestif peu différent de celui que nous venons d'étudier chez les Bryozoaires , et les particularités qui s'y remarquent dépendent pour la plupart de la rentrée de l'appa- reil ciliaire dans l'intérieur du corps. En faisant l'histoire des organes de la respiration, j'ai déjà eu l'occasion de dire que chez ces Molluscoïdes toute la partie antérieure du corps est occupée par une grande cavité dont les parois sont garnies de franges vibraliles et de fentes pour le passage de l'eau, et que ces parties correspondent au système tentaculaire des Bryozoaires, qui, au lieu de se déployer au dehors, resterait renfermé dans une gaine cutanée (1). Cette chambre bran- chiale constitue par conséquent le vestibule de l'appareil digestif, et l'oritice par lequel les aliments, aussi bien que le lluide respirable, y pénètrent, devient la bouclie (2).

L'entrée de l'œsophage fait face à cet orifice, et se trouve par conséquent au fond de la cavité respiratoire, dans le jioint

Appareil

digestif

des

Tuniciers.

Ascidies.

(1) Voyez tome II, page 17.

(2) Il en résulte que la bouclie de l'Ascidie n'est pas l'analogue de la bouclie du Bryozoaire, mais cones- pond au bord péristoniien ou enliée de la cellule polypiéroïde de celui-ci.

Cet oriiice est circulaire, et la partie circon voisine du syslènie tégumentaire y constitue un cercle de lobules qui sont presque toujours au nombre de quatre ou de six (a).

A l'intérieur, on y remarque des cirres qui s'avancent vers l'axe de cet anneau (6) et qui semblent corres- pondre aux soies que nous avons vues garnir le péristomede quelques Bryo- zoaires (c). Généralement ces appen- dices sont filiformes, mais quelquefois ils sont rameux, ainsi que cela se voit chez les Ascidies simples du genre Boltenia et chez quelques espèces du genre Cynthia (d).

(a) Savigny, Mémoires sur les Animaux sans vertèbres, 2" parlie, pi. 1, fig. 1, elc, etc.

(b) Idem, ibid., pi. 8, fig-. 1*, "2' ; pi. 9, Rç;. 2, etc.

Milne Edwards, Recherches sur les Ascidies composées, pi. 2, Cv^. d 6 ; pi. 8, fij. ia, etc.

(c) Voyez ci-dessus, page 342, note.

(d) Savigny, Op. cit., pi. 5, fig. P ; pi. G, fig. 1-, etc.

350

APPAREIL DIGESTIF

viennent aboutir les sillons longitudinaux compris entre les replis de la membrane branchiale. A peu de distance de ce point, le canal digestif s'élargit pour constituer l'estomac ; puis, sous la forme d'un intestin dont la longueur est assez considérable, il se recourbe sur lui-même, et va se terminer au-dessus de la face dorsale de la chambre branchiale, dans une cavité qui est traversée par les produits de la génération aussi bien que par le courant exi)iratoire, et qui constitue de la sorte un cloaque (1). Ce mode d'organisation se retrouve chez toutes les Ascidies, mais les dispositions accessoires varient.

Ainsi, chez les Clavelines, ou Ascidies sociales, et les Asci- dies composées de la division des Polycliniens, le tube digestif et ses annexes se trouvent suspendus au-dessous de la cavité respiratoire et au-dessus des organes reproducteui^s ; tandis que chez les Ascidies simples, ils sont refoulés sur le côté de cette poche branchiale (2) .

(1) 11 est aussi à noter que chez tous ces Molluscoïdes la masse viscé- rale est logée dans une poche mem- braneuse, ou sac péritonéal , qui fait aussi fonction de réservoir sanguin, et qui communique avec les vaisseaux de l'appareil respiratoire (o). Chez les Ascidies sociales et composées, ce sac donne naissance à des prolongements tubuleux à Textrémité desquels nais- sent par bourgeonnement les nouveaux individus, de sorte que la tunique péritonéale est commune à toute la colonie produite de la sorte.

(2) Savigny a fait connaître d'une manière remarquablement exacte la disposition de l'appareil digestif des Ascidies composées (h), qui avait été précédemment indiquée, seulement d'une manière sommaire, par Pliipps chez les Synoïques, et par Demarest et Lesueur chez les Botrylles (c). Chez les espèces que j'ai réunies dans le groupe des Polycliniens, de même que chez les Clavelines, cet appareil est logé' dans la région moyenne du corps {d) ; chez les Dîdémiens, il est réuni aux organes

(a) Voyez tome 111, page 87 et suiv.

(&) Savigny, Observ. sur les Alcyons gélatineux à six tentacules simples {Mém. sur les Animaux sans vertèbres, 2* partie, 1816, avec 24 plaiiclios).

(c) Phipps, Voyage au pôle boréal, fait en 1773, p. 203, pi. 12, ilg. C.

A. Desmarest et Lesueur, Mém. sur le Botrylle étoile, p. 0 (exlr. du Bulletin de la Société philomalique, 1815).

(d) Milne Edwards, Observ. sur les Ascidies composées des côtes de la Manche, p. 65, pi. 3, fig. 1, etc. (extr. des Mém. del'.Acad. des sciences, l. XVIII).

DES MOLLUSCOÏDES TUNICIERS. o51

Une autre différence plus importante à noter dépend de la conformation des organes sécréteurs dont l'estomac est entouré. Chez les Ascidies composées, les parois de ce viscère

reproducteurs, dans un abdomen très court (a) ; enfin, chez les Botrylliens, tous ces viscères sont accolés à la poche branchiale et logés avec elle dans la région Ihoracique (6). L'es- tomac est généralement de forme ovoïde, et ses parois, assez épaisses, sont tantôt légèrement plissées à l'ex- térieur (c), d'autres fois comme fram- boisées (d), d'autres fois encore assez profondément costulées (e). En géné- ral, elles sont colorées d'une manière assez intense, soil en jaune, soit en rouge.

L'inleslin qui fait suite à l'estomac est en général divisé en trois portions par une large bande d'aspect glandu- laire qui en occupe la partie moyenne, et qui est souvent colorée comme l'estomac. Les matières fécales s'accu- mulent dans la portion ascendanle de l'intestin sous la forme de boulettes dont la couleur est généralement bru- nâtre.

Chez les Ascidies simples, la dispo- sition générale de l'appareil digestif a été très bien indiquée par Cuvier (/") et par Savigny. Ce dernier a remar- qué que c'est toujours du côté droit que le paquet viscéral se trouve placé normalement, mais qu'il existe par- fois des transpositions. L'œsophage est toujours très court, et souvent resloiiiac est à peine dilaté , par exemple chez le Cynthia Momus {g) et l'Ascidie ampulloïde {h) ; mais en général ce viscère est très élargi [i), et quelquefois il acquiert des dimensions fort considérables, ainsique cela se voit dans le genre Cystingia (j); souvent il est plus ou moins costulé extérieu- remeni, par exemple chez le Cynthia canopus {k) et le rhallusia lur- cica [l], L'inleslin forme une anse plus ou moins allongée, et ressemble en gé- néral à ce que nous avons vu chez les Ascidies composées. i\l. Van Beneden a trouvé dans l'intérieur de ce tube,

{a) Voyez Savigny, Op. cit. {Mém. sur les Animaux sans vertèbres, il° partie, pi. 20, fig-. i. Milne Edwards, Op. cit., p. 79, pi. 7, fig. 5.

(b) Voyez Savigny, Op. cit., pi. 20, fig. 5.

Miine Edwards, Op. cit., p. 84, pi. 7, fig. l.

(c) Exemple : Ainaroiicium proliferum (Milne Edwards, Op. cit., pi. 3, fig. 2). {(l) Exemple : Amaroucium Argus (Milne Edwards, Op. cit., pi. 3, fig. l, ia).

(e) E\emp\es : Sigillina australis (Savigny, Op. cit., pi. 4 4, fig. l'M. Aplidium lobatum (Savigny, Op. cit., pi. 10, fig. 1 ^). Bolryllus polijcycleus (Savigny, Op. cit., pi. 21 , fig. l^). _ Botrylloides rotifera (Milne Edwards, Op. cit., pi. 7, fig. 1).

(/■) Cuvier, Mém. sur les .iscidies et leur aiiatomie {Mém. du Muséum, 1804, t. Il, pi. i fi,.- 5 et 8; pi. 2, fig. 3). ' "■

(g) Savigny, Op. cit., pi. 6, fig. 1'.

[h] Van Beneden, Recherches sur l'embryologie, l'anatomie et la physiologie des Ascidies simples, pi. i , fig. 2 (Mém. de VAcad. de Bruxelles, t. XX).

(i) Exemples : Cynthia papitlosa (Savigny, Op. cit., pi. 6, fig. 4). Phallusia intestinalis (Délie Chiaje, Descrii. e notom. degli Animali invertebr., pi. 82, fig. 12).

(j) Mac Leay, Anat. Observ. on the Natural Group of Tunicata (Trans. ofthe Linn Soc 1823 t. XIV, p). 19, lig. 3).

{k} Savigny. Op. cit., pi. 8, fig. 1^.

(/) Idem, ibid., pi. 10, fig. t».

352 APPAREIL DlGEbTIF

sont épaisses, et logent dans leur intérieur des tbllicules héjja- tiques, mais il n'y a pas de foie proprement dit; tandis que chez beaucoup d'Ascidies simples, l'estomac et le commence- ment de l'intestin se trouvent comme enfouis au milieu d'une masse de substance molle et jaunâtre qui constitue une glande hépatique indépendante et versant les ])roduits de sa sécrétion dans la cavité stomacale [)ar plusieurs orifices parliculiers (1). On rencontre aussi des modifications remarquables dans la disposition du cloaque qui est situé entre la terminaison de l'intestin et l'orifice excréteur commun. Ce réceptacle est formé par la portion dorsale de la grande cavité péripharyngienne, dans laquelle le sac branchial se trouve suspendu, et dans laquelle l'eau introduite pour le service de la respiration passe en traversant les fentes en boutonnière dont cet a})parcil est

chez l'Ascidie anipiilloïclc, une sorte de goutlière longitudinale à bords très saillanis, qui en occupe presque toute la longueur, et qui paraissait servir h mouler les matières excrémentitielies en forme de cordons (a). Chez le Cyn- thia microcosmus cette disposition n'existe pas (6).

(1) Savigny a signalé l'absence du foie chez les Cynlhics (c). Chez l'As- cidie ampulloïde, décrite par M. Van Beneden, cette glande manque égale- ment, et paraît être remplacée, comme chez les Ascidies composées, par des follicules hépatiques logés dans l'épais- seur des parois de l'estomac. Ce sont

ces organites sécréteurs qui paraissent verser dans ce viscère le liquide amer et jaune brunâtre que l'on y rencontre en abondance [cl). Cuvier a Irouvé un foie de structure granuleuse et d'un volume assez considérable chez l'As- cidie microcosme (e). Cet organe est de couleur verdàtre et adhère intime- ment à l'estomac, dans la cavité duquel il débouche par plusieurs orilices (/"). Dans le genre Chelyosoma, le foie est formé par un gros paquet de cae- cums tubulaires qui entoure l'esto- mac {g), et chez les Hollenies , il est lobule, ces appendices sécréteurs sont raincux (h).

(a) Van Deiicden, Op. cit., p. 18, pi. t, fi^. 7.

(6) Milnc Ethvards, Allas du Règne animal de Cuvior, Mollusques, pi. 120, lii;. la.

(c) Savigny, Op. cit., p. 95 cl 99.

(d) Van Bfiicacii, Recherches sur les Ascidies simples, \\ 1 9, |>1. 1 , lig. 2 et 8 (Mcm. de l'Acad. de Brtixelles, t. \X).

(e) Cuvier, Op. ci/., p. 13, pi. 1, fiij. 5. (/■) Savigny, Op. cit., p. 91.

(g) Esflnichl, Anatomisk Bc.-iln-ivclse nfChc\iùsomn Maclcayanum, p. 12, pi. 1, fig. i (oxir. des Mém. de l'Acad. de Openhague, série, t. I.\).

{h) Mac Lciiy, On ihe Nat. Group of Tunicata {Traits, vf the Linn. Soc , 1825, t. XIV).

DES MOLLI SCOÏUKS TLMCiLKS. o5â

criblé [\). Chez les Ascidies simples et sociales, ainsi que chez plusieurs Ascidies composées ("2), il débouche au dehors par un orifice isolé qui se trouve [ihis ou moins près de la bouche; mais chez un grand nombre d'Ascidies composées, il se réunit à la portion terminale de la cavité cloacale des individus adjacents, et donne ainsi naissance à un cloaque com- mun à tout un svstème d'Animaux. Tantôt, comme chez les Boirylles, ce cloaque commun est une fossette simple autour de la(|uelle tous les membres de cette singulière association sont rangés en cercle, de façon à représenter les rayons d'iuie étoile (3); mais d'aulres fois, par exemple dans le genre Ama- roucpie, les associés sont plus nombreux , il se compli(iue davantage, et forme w\\ grand nombre de canaux ramifiés qui se réunissent comme autant d'égouts autour d'un émonctoiro central (/i).

(1) Pour plnsdiîdélailsà ce sujet, je renverrai ù la desciipUon analomiqiie de la Claveliiie lépadiforme que j'ai donnée dans mon travail sur les Asci- dies composées des côtes de la Man- che (a)» et à mes dessins relatifs à i'a- natomie de VAscidia microcosiints {b).

Dans le genre Chondrostachys, le rectum remonte parallèlement au sac respiratoire, jusque dans le voisinage de l'orifice du cloaque (c).

('-') Comme exemple d'Ascidies composées à cloaques individuels,

je citerai les Diazones (d) et les Sigel- lines (e).

[o) Le cloaque commun situé au centre de chacun de ces systèmes étoiles est très profond chez les Bo- trylles, et ses bords se relèvent en forme de cône tronqué (/"). Dans le genre Synoicum, les anus des divers individus d'un même groupe sont réunis autour d'une fosselle centrale ; mais celle-ci ne constitue pas un cloaque commun (g).

(/i) Dans une des planches de l'atlas

(a) Milne Edwai-ils, Recherches sur les Ascidies composées, p. 54 et suiv., pi. 2, fig-. 1.

(b) Allas du Règne animal de Cuvier, Mollusques, pi. 120, fig. 1, ta, ib.

(c) J. M.nrdonakl, Anatomical Observ. ai a neiu form of Compound Ascidia (Ann. ofNat. Hist., 3" série, iS58, t. I. pi. 41, C\g.<-2).

{d) Savig-iiy, Op. cit., pi. 2, lig. 3, et pi. 12, fig. 1.

(e) IJeiii, ibid., pi. 3, fig-. 2, et pi. 14, fig. 1.

(/') idem, ibid., pi. 21, lig. 1.

Milne Edwards, Op. cit., pi. •>, tig. 4 a, 5a, 6a.

((/) Sa\igny, Op. cit., pi. 15, lig. 1.

V. 23

354 APPAREIL DIGESTIF

§ 5. L'appareil digestif des Pyrosoaies ne diffère que peu de celui des Ascidies composées (1).

§ 6 Enfin, dans l'ordre des Biphores ou Salpiens, l'ap- pareil digestif est conformé aussi sur le même plan général, et se trouve logé dans une petite cavité abdominale qui se fait remarquer par sa coloration intense, et qui est désignée d'or- dinaire par les zoologistes sous les noms assez mal choisis de tubercule ou de nucléus. L'enirée de l'œsophage est située au fond de la grande chtimbre branchiale, et l'anus s'ouvre à la base du cloaque formé par la portion dorsale et efférente de cette cavité (2).

du Règne animal de Cuvier, j'ai repré- senté ce syslème d'égouts rameiix in- jectés en noir (a). On trouve aussi un cloaque commun ramilié dans les genres Leptocline et Botrylloïde (6).

(1) L'organe costulé que Savigny a considéré comme étant le foie de ces Animaux (c) paraît être une glande sper- matogène {ch. La disposition générale du canal alimentaire a été indiquée par Lesueur {e), et mieux étudiée par Savigny. L'œsophage est parsemé de cellules pigmentaires, et l'estomac est subquadrilalèrc. Un système de tubes rameux se trouve appendu à l'intestin et constitue probablement un appareil sécréteur; l'intestin se termine sur le côté de l'estomac {f).

(2) La bouche des Biphores est une grandeouverture ])ilabiéequi se trouve à l'extrémité antérieure de leur corps,

et qui donne dans la cavité respira- toire où se trouve suspendue oblique- ment la branchie. L'entrée de l'œso- phage est située au-dessous de l'extré- mité postérieure de cet organe, et par conséquent au fond de la cavité bran- chiale ou pharyngienne. Une gouttière longitudinale formée par deux replis de la tunique interne de cette grande cavité, et faisant face à la branchie, conduit vers cet orifice. L'œsophage est très court, et l'estomac a la forme d'un sac ovalaire qui semble en naître latéralement plutôt qu'en être la continuation. L'intestin commence dans le voisinage immédiat de la ter- minaison de l'œsophage, et après avoir décrit une anse, remonte brusquement pour aller s'ouvrir dans le cloaque, au-dessus de la base de la branchie, et par conséquent à peu de distance de

(a) Op. cit.. Mollusques, pi. 130, fig'. ia.

(b) Miliic Edwards, Recherches sur les Ascidies composées, pi. G, fig. ; |il. S, fig. 5 a.

(c) Savigny, Op. cit., p. ôG, pi. 22, fig. l^, d'', etc. " P'.

(d) Huxley, Observ.upon the Analomy and l'hysiology of Salpa and Pyrosonia, p. 583 {Philos. Trans., 1851).

{e) Losiieur, Mémoire sur V organisation des Pijrosomcs, p. 1 !*(cxtr. du Bulletin de la Société philomalique, 1815).

(f) Huxley, Op. cit., pi. 17, fig. 1.

UES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 355

§ 7. Dans la grande division des Mollusques proprement dits, l'appareil digestif est (constitué d'après le nienie |»lari général que ehez les MolUiscoïdes dont je viens de parler, mais il se perfectionne davantage; le tube alimentaire affecte d'ordinaire la forme d'nne anse, et presque toujours l'anus est encore plus ou moins rapproché de la bouche ; mais les organes sécréteurs dont ce canal s'entoure acquièrent un très grand développement : le foie surtout devient fort volumineux, et des glandes salivaires très remarquables ne tardent pas à se mon- trer dans le voisinage du pharynx ; souvent la bouche est armée d'un appareil sécateur puissant; enfin les instruments de pré- hension dont cet oriiice s'entoure arrivent [)arfois à nn haut degré de complication. ]Mais ces divers perfectionnements ne sont introduits (pie successivement, et nn grand nombre de ces Animaux , de même que les Molluscoïdes, ne peuvent se nourrir que des Animalcules ou des petits fragments de matières aliinentaires tenues en suspension dans les courants que l'ap- pareil respiratoire dirige vers la bouche.

§ 8. Tel est en effet le régime de l'Huître et de tous les autres ^lollusques dont se compose la classe des Acéphales, et chez tous ces Animaux l'orifice buccal se trouve logé plus ou moins profondément dans l'espèce de chambre branchiale for-

Appai'oil

digestif

lies

Mollusques

proprement

dits.

Appareil

digeslif

des

Acéphales.

Poil vertiire œsophagienne (a). Les pa- rois de l'estomac ont une structure glandulaire, et M. Huxley a découvert récemment un système de tubes ra- meux qui débouchent dans la partie inférieure de cette poche et qui pour- raient bien constituer un ap[)areil !ié- patique (6). Une masse utricnlaire entoure ces parties, et se trouve ren- fermée avec elles dans le petit sac pé-

ritonéal qui circonscrit la cavilé abdo- minale; quelques auteurs ont consi- déré ces cellules comme étant tm foie, etje les avais prises pour l'ovaire ; mais il paraîtrait, d'après des recherches plus récentes, qu'elles ne peuvent être rapportées ni à l'uu ni à l'autre de ces organes ; elles contiennent en général une matière huileuse, et M. Krohn les a désignées sous le nom d'élœoblastes.

(«) Voyez Milnc Edwai'ds, Atlas du Règne animal de Cuvici-, Mollusquks, pi. 121, tig. 2 c et a (/ ; pi. 120, tig-. Irt.

(b) Huxley, Op. cit., p. 5T0, pi. 15, fig. ."> et G {Philos. Trans., ISôl).

Ui'.ichiopodes.

350 AI'l'.vniilL DlGl^STIF

mée, coniiTic nous l'avons déjà vu, par le rapprochement des deux grandes expansions du système cutané dont se compose le manteau (i). Il n'existe pas de glandes salivaires dis- tinctes (2) ; enfin, le tube alimentaire et le foie, ainsi que les organes de la reproduction , sont réunis en une masse viscé- rale dans le voisinage de la région dorsale, se trouve la charnière de la coquille, et s'avancent plus ou moins dans l'intérieur du pied, quand la partie ventrale du corps se déve- loppe de façon à constituer un organe de progression.

C'est dans Tordue des Brachiopodes que l'appareil digestif est le moins compliqué, et ressemble en général le plus à ce que nous avons vu chez les Tuniciers. Si les résultats fournis par les recherches anatomiques les plus récentes sont exacts, ces Molluscjnes nous offriraient même des exemples de dégra- dation que nous n'avons rencontrés ni chez les Bryozoaires, ni chez les Tuniciers, car dans plusieurs espèces l'orifice anal manquerait et l'intestin se terminerait en cul-de-sac ; mais je conserve encore beaucoup de doutes au sujet de l'existence de cette imperforation (3). La bouche est -située surlahgnemé-

(1) Voyez tome II, page 23.

('J) Ouelqiies anatomisios ont con- sidéré les lobes antérieurs du foie, chez les Brachiopodes, comme étant les glandes salivaires [a] ; mais toutes les masses glandulaires qui entourent Testomac de ces Mollusques dirent les mêmes caractères, et doivent être rapportées à l'appareil hépatique (6).

(3) M. Huxley n'a pu découvrir au-

cune trace de Texistence d'un orifice anal dans les Térébratules des genres Bhynchonella et Waldheimia, dont il a fait l'anatomie, et il pense que l'in- testin de ces Mollusques se termine en cul-de-sac {c). Plus récemment, M. Hancock est arrivé au même résul- tat en étudiant, soit les deux genres don! il vient d'êlre question, soit le Terebratula caput serpentis (d) ; et il

(a) Cuvier, Mém. stiv l'anatomie de la Lingulc, p. 1 {Mém. du Muséum, t. II, el Mcm. pour servi)' à l'histoire des Mollusques).

Vogt, Anatomie dcr Ling'iila anatina, |i. i'i (extr. des Nouv. Mém. delà Soc. d'hist. nat. suisse, U\l\, Npufchàlol, 184;!).

(b) Oweii, On the Analomy of Urachiopoda {Trans. of the Zoological Society, t. 1, p. 152 et 157).

(f) Huxley, Contributions to the Anatomy nf the Urachiopoda (Proceedings of the Itoyal Society o/'Lo)i(io», 1854, I. VIII, p. lOG, i\g. 1 el -2).

(d) HaiKofli, On the Oryauisatiuu of Urachiopoda {Philos. Traits., 1858, p. 814).

DES MOLLL'SQUES ACEriI\LES.

diîine, entre deux grands appendices qui s'enroulent en spirale et qui semblent tenir lieu des lopliopliores ou lobes lentaeuli- fères que nous avons vus cliez les Bryozoaires d'eau douce. Chez les Térébratules, ces appendices, communément appelés bras^ acquièrent un développement énorme, et sont portés sur une sorte de charpente intérieure de nature calcaire, qui pré- sente en général la forme d'un fer à cheval reployé sur lui- même, de façon à avoir sa portion transversale dirigée en arrière, et située au-dessous de la partie basilaire de ses deux branches, dont l'extrémité est fixée à la valve dorsale de la coquille, près de la charnière (1). Ils sont peu protractiles, mais

est à noter que le point celte por- tion du tube alimentaire vient abou- tir, et quelques anatomistes suppo- saient qu'il y avait un anus (a) , le corps est recouvert par la coquille, de façon que les fèces ne trouveraient aucune voie libre pour continuer leur route vers le dehors. î\iais avant d'ad- mettre l'existence d'une disposition si anormale dans l'embranchement des Mollusques, il faudrait èlre bien cer- tain que le cul-de-sac observé par MM. Huxley et Hancock est bien la portion terminale de l'inleslin, et non un appendice analogue à celui qui naît de l'estomac chez beaucoup d'A- céphales lamellibranches; enfin il faudrait s'assurer de la non-existonce de lout prolongem* nt latéral, qui 1 pourrait aller débouchrr au dehors, et qui constituerait alors l'intestin pro- prement dit. Ainsi que nous le ver- rons bientôt, il n'y a aucune incer-

titude quant à la position de l'anus chez les Lingules.

(1) Chez les Térébratuliens du genre Bhynchonella, cet appareil apo- physaire n'est constitué que par une paire de petites lames calcaires allon- gées et coiu-bes, qui s'attachent jjosté- rieurement à la valve dorsale de la coquille, près de i'échancrure articu- laire {b); mais, en général, ces deux pièces se confondent entre elles sur la ligne médiane par leur extrémité an- térieure, de façon à donner naissance à une arcade transversale, ou anse en forme de fer à cheval, qui laniôt ne se prolonge que médiocrement et reste à peu près horizontale (c), mais qui, d'autres fois, après s'être avancée très

oin au-devant des muscles adducteurs de la coquille, se recourbe en bas, puis en arrière, de manière à offrir

la disposition indiquée ci-dessus {cl) .

L'extrémité postérieure de chaque

(a) Graliolel, Recherches sur l'anatomie de la Térébratule auztrale [Comptes r:ndy.s de l'Acad. des sciences, 1853. t. XX.WII, p. 47).

{b) Exemple : Tcvehratula (ou Hhynchonella] psitlacea (voy. Davidion, Brilish fossil lirachio poda , intiodiiciioii, Palœoiit. Soc, 1853, p. 94, fig. 31).

(c) Exemple : Terebvaiula vilreu (voy. liavidsun, Op. cit., pi. 0, fi^'. 2).

((/) Exrin|iles : Teveiratula {]Valdheimia) austmlis (voy. Davidson, Op. cit., p. C4, fig-. G, et Hancock, Op. cit , pi. 5i, iig. 4). T. jlnvcscens (voy. Owcii , Lectures on the Comp. Aiiat. o Invertebr. Animais, 18 55, p. 487).

358 APPAREIL DIGESTIF

les franges qui les garnissent sont très mobiles, et des eou- rants, délerminés probablement par l'action de cils vibratiles, s'établissent à leur surface, et suivent une sorte de gouttière longitudinale qui est creusée à leur face interne et va aboutir sur le côté de la bouche. Chez les Orbicules et les Lingules, ces bras sont très élargis à leur base , mais peu développés dans leur portion enroulée, et s'insèrent seulement sur les

apophyse, ou de cliaque moitié du fer à cheval ainsi constitué, est gé- néralement bifurquée , et c'est par leur branche supérieure qu'elles s'u- nissent entre elles; l'autre branche est le plus ordinairement libre ; mais chez quelques-uns de ces Mollusques elle se réunit à sa congénère , de façon à former une seconde arcade transver- sale, et ù changer l'anse en un an- neau fermé, disposition qui se voit dans le genre Terehratulina (a). Dans le petit groupe dont d'Orbigny a formé le genre Terebratella, un pro- longement droit naît du bord dorsal de chaque moitié de l'anse , et après s'être réuni à son congénère sur la ligne médiane, se soude aussi en des- sus à la valve dorsale de la coquille {b). Enfin, dans d'autres familles du même ordre, la charpente brachifère ac- quiert un développement encore plus considérable : ainsi, chez lesThécidies elle prend la forme de grandes crêtes contournées d'une manière fort com- plexe (c) , et chez les Spirifères elle

constitue deux longues lames enrou- lées en spirale, qui occupent la plus grande partie de l'espace compris en- tre les deux valves de la coquille {cl). Chez les Lingules et les Orbicules, au contraire, on ne trouve plus aucune trace de cette charpente intérieure. C'est par l'intermédiaire d'une membrane aponévrotique disposée de façon à constituer la paroi anté- rieure de la cavité viscérale, que les bras sont fixés à la charpente inté- rieure dont il vient d'être question. Ces tentacules consistent chacun en une sorte de lige creuse dont le côté externe est garni d'une gouttière lon- gitudinale de consistance subcartila- gineuse, et porte une série d'appen- dices grêles et cylindriques disposés comme les dents d'un peigne, ou plu- tôt en forme de frange. AI, Owen n'a observé qu'une série simple de ces cirres ou filaments {e) , mais dans toutes les espèces dont M. Hancock a fait l'anatomie ils étaient insérés sur deux rangs (f). Leur longueur di-

(a) Excinplc : Terebratitla (ou Terebratulina) cciput serpentis (voy. Davidson, Op. cit., r- 63, fig. 4).

(b) Exemples : Tcrebratula (Terebratella) chilensis (voy. Owen, On the Anat. of the Hrachio- poda , in Trans. of the Zool. Soc., t. I, pi. "2"J, lig. 4). Terebratella dorsata (voy. DaviHson, lac. cit., \>. 60, fiff. 9).

(c) Exemple : Thecidia vermicularis, voyez Suess, Notice sur l'appareil brachial des Thécidés, dans Mém. de la Soc. linn. de Normandie, 1855, t. X, pi. 3, fig. 7).

(à) Exemple ; Spirifcr striatui: (voy. Davidson, Op. cit., pi. 6, Cij;. 48). (e) Owen, Lectures on the Comp. .\not. of Inverlrhr. .\nmah, p. 4111. (/■) lliMicock, Op. cit., p. Sfl7.

DES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 359

parois membraneuses de la cavité abdominale, sans y trouver une charpente calcaire pour les soutenir. Chez ces derniers Mollusques, le tube alimentaire ne s'élargit que peu pour con- stituer l'estomac, et, après avoir décrit plusieurs courbures, va s'ouvrir au dehors, sur le côté droit du corps, entre les lobes du manteau (i). Chez les Térébratules, l'estomac est au con- traire fort renflé et occupe la partie dorsale de l'espèce de siphon représenté par l'ensemble de l'appareil. L'intestin redescend vers la valve ventrale, et s'y recourbe brusquement sur le côté

miiiiie graduellement de la base à l'extrémité libre du bras, de façon que celui-ci se rétrécit de plus en plus, et se termine en pointe. A leur base, les bras sont unis enlre eux sur la ligne médiane, et chez les Térébra- tules ils se portent d'abord en avant, en longeant en dehors la portion su- périeure de l'apophyse calcaire, puis se recourbent brusquement en arrière, jusque vers leur base, et ensuite s'en- roulent en spirale, de façon à former deux cônes frangés, unis entre eux par une bande aponévrotique mé- diane et non déroulables («).

Les mouvements de ces appendices ont été observés sur le vivant par M. Barrelt [b), et sont dus en partie à des libres musculaires logées dans leur tige, en partie à l'afflux du li-

quide contenu dans les canaux longi- tudinaux dont celle-ci est creusée. L'im de ces canaux, le plus grand, se termine à sa base par une ampoule, ou rendement fermé, qui se trouve sur le côté de la bouche ; l'autre com- munique avec le système lacunaire viscéral. Tour plus de détails relatifs ù la structure de ces organes, je ren- verrai au mémoire de M. Vogt sur la Lingule, et au travail récent de M. Hancock sur les Térébratules (c).

(1) L'œsophage est de longueur médiocre, et, de même que l'estomac et la portion antérieure de l'intestin, il occupe la ligne médiane du corps; la portion moyenne de l'intestin forme plusieurs circonvolutions , et sa portion terminale se dirige eu avant (d).

(a) Voyez Ovven, Anat. of Terebraiula, in Davidson's British fossil Brachiopoda, pi. 2, fisf, 1 cl 2; pi. 3, fig. 2.

Hancock, Op. cit., pi. 55, fit?. 1, 2, 3 ; pi. 57, fig-. 2 ; pi. GO, fig. 3 ; pi. 01, fig. 2.

{b) BaneU, Notes on Ihe Brachiopoda ohserved in a dredging tour {.Ann. ofNat. Ilist., 2"'si'rie, t.XVl, p. 258).

(c) Vogt, Analomie der Lingula analina, p. 4, pi. 2, fib. 13-10 (exli-. dn Netien Denkschriften des Schwci%erischen GeselUchaft, 1843).

Hancock, Op. cit. {Philos. Trans., 185S, I. CXLVIII).

(d) Cuvier, Mémoire sur l'anatomie de ta Lingule (Ann. du Musctun, 1802, t. I, pi. C, fig. 10 tt 13).

Vogt, Op. cit., pi. 1, fig. 10.

ilaiicock. Op. Cit., pi. 65, fig. 1, 3 el 4; pt. 00, fig. 3.

Owen. Anat. of Terebraiula, m T)a\khon'ii British fossil Brachiopoda, pi. 1 , fig. 0 (/i»!/. Society, 1853).

3G0 APPAREIL DIGESTIF

pour se terminer |»nr un renflement en forme d'ampoule l'existenee d'un orifice anal est généralement admise, mais par analogie plutôt que par le Mi de l'observation directe (1). Il est aussi à noter (jue le tube alimentaire des Bracbiopodes est pourvu d'une tunique musculaire bien développée, et revêtu extérieurement d'une membrane péritonéale qui, sur plusieurs points, se prolonge sous la tonne de brides ou de lames d'at- tacbe analogues au mésentère des Animaux supérieurs (2). Le joie, de couleur verdàlre, est très volumineux, et se compose de plusieurs masses arrondies ou lobes dont l'aspect est gra- nuleux, mais dont la subslance consiste réellement en une mul- titude de petits tubes courts et aveugles f[ui ressemblent à des doigts de gant et se continuent avec des canaux rameux. Enfin les conduits biliaires ainsi constitués se réunissent en quatre gros troncs (pii vont déboucher dans l'estomac (3).

(1) Voyez ci -dessus , page 356, noie 3.

(2) Ces expansions membraneuses sont plus développées chez les Téré- bratules que chez les Lingiiles; elles ont été décrites avec soin par ]\1. Hux- ley et par M. Hancock. Le mode de conformation générale du tube ali- mentaire des Téréhratules a été re- présenté pai' M. Owon , mais cet anatomisic a figuré à Pextrémilé de Tampouie terminale de Tinlestin un orilicc anal (n) qui, dans l'état nor- mal, ne paraît pas exister dans ce point {h). Les belles ligures anatomi- ques qui accompagnent le mémoire de M. Hancock sur les Térébraiules font très bien connaître la disposition

et les rapports des dernières pnriies de l'appareil digestif avec les organes voisins (c).

(3) Le foie entoure toute la portion stomacale du canal alimentaire, et ses lobes, ou divisions principales, sont de forme très irrégnlière. Chez les Lingulcs, les quatre grands canaux biliaires qui en naissent, sont dispo- sés par paires; deux se voient dans le voisinage de l'œsopliage, au devant des grandes expansions mésentéri- ques de l'estomac; les autres débou- chent derrière cette membrane, près de l'origine de Tinleslin {d). Chez les Téréhratules, la disposition de ces ca- naux est moins régulière ; les lobes antérieurs du foie donnent naissance

(a) Ovven, On the Anutomy of the Drachinpoda, pi. 22, fii,'. 12 {Trans. of thc Zool. Snc, 1835, t I). Anat. of Terebvatula, m flavidson's liriti.ih fossil Brachiopoda, pi. \, fx'g. 4. (6) Huxley, Op. cil., tv^. \ el 2 c [Vroceed. oflhe noyai Soc, 1854, I. VHI, p. 108). (fl) H:iiieock, Op. cit., pi. 57, (1;^. 2; ]>\. 01, fig'. | ri 2, l'Ic. [d) \\<\C7. Hancock, Op. cil., pi. Ii5, fii;'. 2 ol ;;.

Oks Mollusques ac^^pUales lamiîllibranches.

361

§ 9. Dans Tordre des Acéphales Lamelluîranches , la Appardi

'^ , \ A f (lia^estif

bouche est située à peu près de ineme, et se trouve logée plus des Xcéphaios

, 1 ^ 1 Lamellibranclios

ou moins profondément sous le manteau, derrière le muscle adducteur, qui, chez la plupart des Animaux de ce grou[)e, s'étend d'une valve à l'autre, au-devant et au-dessous de la charnière. Elle n'est pas pourvue d'un appareil tentaculaire frangé, comme chez les Brachiopodes; mais les bras de ces derniers sont remplacés par deux paires de lobes membraneux qui ont en général la forme de voiles triangulaires et sont striés obliquement à leur surHice. Ces tentacules labiaux sont garnis de cils vibratiles, et ils concourent, avec les organes respiratoires, à diriger vers l'entrée du canal alimentaire les courants qui charrient les particules de substances nutritives dont ces Mollusques font leur subsistance (1).

à un troisième conduil qui débouche près de l'œsophage, et les lobes infé- rieurs communiquent avec la cavité de restomac par un quatrième ca- nal (a).

(1) Les tenlacides labiaux de la paire antérieure sont d'ordinaire réu- nis entre eux par un ,)rolongement basilaire, qui passe au-devant de la bouche, et ils sont appliqués par leur face interne contre les tentacules de la seconde paire, dont la commissure s'avance derrière la bouche. Cet ori- fice se trouve par conséquent au mi- lieu d'un sillon transversal, plus ou moins profond, qui se continue en dehors et en arrière avec la rigole formée par le rapprochement de la base des deux tentacules (6), et sou-

vent l'une des branchies vient occuper l'extrémité postérieure de cette der- nière gouttière; de façon que les cou- rants déterminés par le jeu de l'ap- pareil respiratoire (c) s'engagent en partie dans ce passage, et se trou- vent ainsi dirigés vers la bouche , phénomènes dont I\IM. Aider et Han- cock se sont assurés en suspendant des particules d'indigo dans l'eau qui ar- rivait aux branchies des Pholades et des .Myes {d). L'existence de cils vibra- tiles à la surface des lenlaculcs la- biaux a été constatée par M. Shar- pey (e). La face externe ou antérieure des tentacules de la première paire et la face postérieure de ceux de la seconde paire sont en général lisses, ou faiblement striées, mais sur les sur-

fa) Voyez tlancocli, Op. cil., pi. Gt, lig. 2 et 3, etc. (b) Voyez tome II, pag-o 3S.

\u) voyez loiiie ii, paifc on.

(c) Ailler and Hancock, On the Branchial cuvrenls in Pliolas and Mija{Ann. ofNat. Hist., 2" série, IS'.I, I. VIII, p. 37."), pi. 15, fi-. 1).

(d) Sliarpey, Cilia (Todil's Cyclopœdia of Anatomu and l'hysiology, I. I, p. 022/. (c) Exinipio : l'IInilre (voy. l'oli, Op. cit., t. II, pi. 29, f\g. 2).

o6'2 APPAREIL DIGESTIF

L'œsophage est en généra! conrt et resloinac fort renflé. Tantôt ce dernier organe est simple , dans l'Huitre , par exemple (1) ; mais chez beancou|) des Aninianx de cet ordre, il présente en arrière un grand prolongement lerminé en cul-de-sac et renlermant un corps styliforme, de consistance cartilagineuse, qui semble devoir être destiné à remuer les matières alimen- taires pendant qu'elles sont soumises à l'action des sucs gas-

faces adjacentes de ces appendices on remarque une multitude de lignes parallèles qui sont plus ou moins saillantes et dirigées Iransversalement ou obliquement (a).

Chez les Arches et les Pétoncles, la portion lohulaire de ces tentacules ne se dévelojipe pas, et leur portion ba- silaire, réduite à une bande étroite, constitue seulement la gouttière trans- versale destinée à conduire les ma- tières alimentaires vers la bouche (6). Il en est à peu près de même chez l'Anomie (c).

Chez la Moule commune de nos côtes, ces organes sont au contraire très grands et reployés longitudinale- ment {d).

En général, les bords de l'ouverture buccale sont lisses, et ne présentent rien de remarquable ; mais ciiez les

Pecten et les Spondyles , on y voit une sorte de frange labiale (e).

(1) Chez l'Huître, l'estomac fait im- médiatement suite à la bouche, et n'est que médiocrement reniîé; les vaisseaux allérenls du foie y débou- chent, et en arrière il se continue avec l'intestin, qui est grêle et très long. Ce tube se poite d'abord en ar- rière et en bas, entre les branchies et le muscle adducteur; puis se recourbe brusquement en avant, revient vers la partie antérieure de l'estomac, en- toure cet organe, et se dirige ensuite en airière, au dessus du nmscle, pour aller se terminer à la partie supérieure et postérieure de celui-ci, entre les lobes du manteau (/).

L'estomac est également simple, c'est-à-dire plus ou moins globuleux, et dépourvu de prolongement cœcal.

(a) Exemples : Soleil (\oy. Poli, Testacea utriusque Sicilice eorumque historia et anatome, t. 1, pi. 10, fig. 15; lieshayef, Expédition scienti/iquc de l'AUjérie, Mollusques, pi. t8B, fig. ii). Fsammobm (voy. Gariicr, On the Anat. of LamelUbranclUale Conchifera, pi. 18, lig. 2, in Trans. of the Zool. Soc, 1838, t. 11).

(b) l'uli, Up. cit., t. 11, pi. 24, fig. 3, elpl.2(î, lig-. 7.

Voyez aussi Desliayes , Atlas du Règne animal de Cuvier, Mollusques, pi. 80, fig. la, \b, le.

(c) Voyez Dcshayes, Atlas du Règne animal de Cuvier, Mollusques, pi. 89, fig. le.

{d) Laciizc-Oulhiers, Mém. sur l'organisation de l'Anomie {Ann. des sciences nul., 4= série, 1854, t. Il, p. 12, pi. 1, fig. 4).

{e) Exemples : Vecten (voy. Poli, Op. cit., t. 11, pi. 27, fig. 5 cl 10). Spondglus gœdvopus (voy. Poli, Op. cit., t. II, pi. 22, fig. 8 et 13). Desliayes, .Ulas du Règne animal de Cuvier, Mollusques, pi. 7 4, fig. 2«.

(/•) Voyez Poli, Op. cit., pl. 2lJ, fig. 3 (reprod. dans VAtlas du Règne animal de Cuvier, Mol- lusques, pi. 70, fig. 2).

Home, Comp. Anal., pl. 77.

IJranill ei J'.alzbnrg, Medicinische Zoologie, t. Il, pl. 3r., fig. 2.

363

DES JMOLLLSQUES ACÉPHALLS LAftlELLHU'.A^iCHES.

triques. Ce singulier organe est libre dans la eavité qui le loge, et [jaraît être le résultat d'une sécrétion épithélique, car il se (X)nipose de couches concentri(iues; son volume est très va- riable, suivant les individus, et parfois il manque dans des espèces d'ordinaire on le rencontre. Enfin il est aussi à noter que chez quelques Acéphales dont l'estomac ne porte pas de cgecum, on voit cependant un stylet hyalin semblable s'avancer dans son intérieur, et alors ce corps est logé dans l'intestin (1). Ce stylet est toujours cylindrique et atténué postérieurement, mais son extrémité antérieure, qui fait s;iillie dans la cavité de l'estomac, est souvent obtuse on branchue (2).

chez lesSpondyles (a), les Pecten (6), les Ptioncles (c), les Glycimères {d;, l'Aiiocloale (e), les l'innes (/";, les Cy- clades {g), etc.

(1) Cette disposition se voit dans la famille des Naïades [h). Chez les Ano- dontes, le stylet n'est représente quel- quefois que par un petit corps denti- fornie situé à la partie supérieure de Testoniac (/), d'autres fois par une pièce irrégulièrement quadrilatère {j).

(2) Chez quelques Acéphales, l'es- tomac est pourvu d'un appendice cœ-

cal très grand, sans avoir de stylet hyalin. Ainsi, chez les Mytilacées du genre Dreissena, M. Van Beneden a trouvé à côté de l'inieslin une poche cylindrique très longue, qui naît du côté droit de l'estomac, et qui ne ren- ferme qu'une suhstance gélatineuse (fc); M. Owen a constaté l'exislence d'un petit appendice caecal post-stomacal chez la Clavagelle, mais n'y a pas vu de stylet [l).

Chez la l'holade, l'estomac donne aussi naissance à un appendice caecal

(a) Voyez Poli, Op. cit., pi. 22, fig. 13, cl Atlas du Ri'jr.e animal de Cuvier, Mollusques, pi. 10, %. 2.

(6) Voyez Poli, Op. cit., pi. 27, lig. 0.

- Ganier, Op. cit. {Trans. oftheZool. Soc, 1. Il, pi. 19, fig'- 2).

(c) Voyez Poli, Op. cit., pi. 20, fig. 8 et 'J.

((/) Auilouiii, Mém. sur l'Animal de la Glyci.mfre {A7in. des sciences nat., t82fl, I. XWIII, pi. 16, fig. 2).

(ê) Home, Comp. Anat., t. III, p. T8.

Bojanus, Teichmuschel (Okeu's Isis, 1827, t. XX, pi. 0, fiif. 2 et 3).

Moquin-Tundon, Histoire natiirelle des Mollusques liuviatiles et terrestres, pi. 40, fij. 9. (/■) Voyez Poli, Op. cit., pi. 30, fi-. 2.

((/) Moqiiin-Taiidoii, Op. cit., pi. 53, Cig. 2,

(h) Siebold el Slannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, 1. 1, p. 206.

(() Bojanus, Teichmuschel (Okeu's Isis, 1827, t. XX, p. 758, pi. 9, fig. 7, 9 et 10).

(j) Moquin-TanJon, Hisloire naturelle des Mullusques terrestres et liuviatiles, p. 48, pi. 43, fig-. 11).

(fc) Van Bcrieden, Méin.sur le Dreissena (Auu. des sciences nat., série, 1835, t. III, p. 203, pi. 8, fig. 5).

(/) Owen, On the Anatomy of Clavagella (Trans. ofthe Zool. Snc, t. I, p. 272).

S6/i

APPAREIL DIGESTIF

L'intestin est en général étroit et très long; il décrit plu- sieurs circonvolutions entre les lobes du foie, et, ainsi que

très grand, et celui-ci ne renferme qu'un stylet liyalin fort petit (a).

Chez les Mactres, la disposition de celte portion de l'appareil digestif a été éliidiée avec beaucoup de soin par Poli, le caecum stomacal naît au- dessus et on arrière du pylore ; sa forme est conique, et il descend très bas au milieu des faisceaux muscu- laires de la partie postérieure du pied ; enfin il renferme un slylet hyalin 1res grand , dont l'exlrémilé anté- rieure fait saillie dans la cavité de l'estomac (6). L'appendice caecal el le Slylet hyalin oH'renl à peu près la même disposition chez les Donaces (c), les Tellines {d), les Soien (e), l'Ano- mie (/"), etc.

Chez le Cardiinn echinatum, l'in- testin naît de l'estomac, très près de la portion réirécie de cet or{j;ane qui représente l'appendice caecal et qui renferme le stylet hyalin, dont l'ex- trémité antérieure est recourbée et branchue (g).

Chez les Tarets, l'appendice caecal est développé d'une manière remar- quable, et paraît être quelquefois oc- cupé par les matières alimentaires

seulement, car M. Deshayes, qui l'a décrit sous le nom de second estomac, ne fait pas mention d'un slylet dans son intérieur (h) ; mais dans les indi- vidus étudiés par ^\. de Quatrefages, un corps cristallin de ce genre existait toujours el offrait des dimensions très considérables (/).

La substance constitutive du stylet est d'une transparence hyaline, et à l'étal frais, M. Quatrefages n'a pu y découvrir aucune trace de structure organique ( /). M. de Siebold y dis- tingue deux parties, l'une corticale, l'autre médullaire. La première con- stitue un tube, el se compose de cou- ches concentriques de matière en apparence albuminoïdo. La seconde est gélatineuse, el renferme des cor- puscules solides, qui sont insolubles dans les acides. Chez l'Unio, ces cor- puscules ont la forme de granules, et chez les Anodontes ils ressemblent à des bâtonnets (Â;).

Quelques analomistes ont considéré le stylet subcarlilagineux comme l'a- nalogue de la langue des Gastéro- podes (/) ; mais ce rapprocliemenl ne me paraîi pas fondé.

(a) Blanclianl, Organisation du licrjne animal, Mollusques Acéphales, pi. 3, fig. 2, 4 et 0, (/)) Poli, Op. cit., t. Il, pi. du, fig-. 1, 3, 4 et 5.

Garner, Op. cit., pi. 18, lig-. 9. (c) Poli, 0;).ci<., pi. 19, fi-. Ù.

Meckel, Traité d'anatomie comparée, t. VII, p. 273. ((/) (iariici-, loc.cit., pi. 18, fii(. 8.

(e) J. Cariis, Icônes xootomicœ, pi. 19, fig. 2.

(f) Lacazc-Dnlliicrs, Org .nisation de l'Anomie (Ann. des sciences nat., i' série, iShi, I. II, p. 13, pi. 1, fig. 3).

(g) Garner, Op. cit., pi. 18, fig. 10.

(/() Desliayes, E.tpédition scientifique de l'Algérie, Mollusques, t. I, p. 59, pi. 7, fig. 2.

(i) Qiiairc'fai;cs, Mém. sur le genre Tard (Ann. des sciences nat., 3* série, 1849, t. I.\, [i. 40)

(ji IJem, iliid.

(k) Sicliold ciSlaMiiiiis, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, t. 1, p. 200.

(/) Mcikul, Traiié d'analouiie cuniparéc, t. \ll, \\. 273.

r- Garnrr, Op. cit. (Trans. of tlit /ool. Suc, I. Il, ]k S").

DES MOLlASQLIiS ACÉl'H.VLES LAM1:LLIUU.V>C11ES. 3Co

nous l'avons déjà vu en étudiant l'appareil circulatoire de ces Animaux, il traverse d'ordinaire le cœur (1). Il passe ensuite au-dessus du muselé adducteur postérieur de la coquille, et se termine par un oritiee anal à la base du siphon expirateur ou dans la portion correspondante de l'espace compris entre les lobes du manteau, de façon que les matières teoales expulsées par cette voie se trouvent sur la route suivie par l'eau qui vient des branchies, et elles sont par conséquent entraînées au dehors par le courant expiratoire (2). Il est aussi à noter que l'intérieur du (uhc alimentaire est plus ou moins complètement garni de cils vibrahles (o).

Enfin, le foie est très volumineux et disposé à peu près de même que chez les Brachiopodes, c'est-à-dire divisé en lobes irréguliers qui se groupent autour de l'estomac et versent dans la cavité de cet organe les produits de leur sécrétion par plusieurs gros canaux membraneux {h).

^ 10. Chez les Acéphales dont M. Lacaze-Duthiers a Appareil

*" des

formé l'oRDRE des Solénocoques, c'est-à-dire les Dentales, l'ap- soiénocoques pareil digestif se complique davantage, et s'enrichit d'un instru- oentaics. ment mécanique ({ue nous rencontrerons souvent dans la classe

(1) Voyez tome III, page 105. . Chez quelques Acépliales, l'anus

Je rappellerai ici que les Huîtres, occupe l'extrémité d'un tubercule cy-

les Anomies et les Tarets font excep- lindriquc très allongé, situé à la partie

lion à cette règle, et que chez les supérieure et postérieure du muscle

Arches, le rectum, tout en traver- adducteur postérieur : chez la Pinne

sant un cercle artériel, dont les deux marine, par exemple (a).

moitiés latérales sont formées par les (3) Cela a été constaté chez les

ventricules, n'est pas renfermé dans la Cyclas et les Naïades (6).

cavité du cœur; mais chez les autres {h) les parois des canaux exté-

Lamellibranches, cette portion de l'in- rieurs de l'appareil hépatique sont eu

testin passe à travers le ventricule, continuité avec la tunique muqueuse

d'avant en arrière. de l'estomac, et garnies de cils vibra-

(2) Voyez tome II, page 38. tiles (c).

(a) Voyez Milne Edwards, Voyage en Sicile, t. T, pi. 28.

(5) Leydig, Lehrbuch der Histologie, p. 331.

(c) Lacazc-Dultiiers, Mém. sur Uorganisalwii de VAnomie (Ann. des sciences nat., i' ^ùiic, l. II,

p. 14).

366 APPAREIL DIGESTIF

des Gastéropodes : savoir, une sorte de ràpc buccale. Les bras frangés des Térébratules et des Lingules paraissent être rem- placés ici par deux houppes de filaments vermiformes et élargis au bout en manière de petites spatules, qui sont très mobiles et susceptibles de s'allonger fort loin hors du tube constitué par le manteau. L'appareil broyeur occupe l'arrière-bouche, et est armé d'une multitude de pièces cornées dont la réunion offre l'aspect d'un ruban hérissé de dents crochues. L'estomac se confond postérieurement avec la portion terminale de l'ap- pareil biliaire, qui est énormément dilatée. Le foie n'est repré- senté que par de longs tubes aveugles d'un volume considé- rable. Enfin, le rectum, ou portion terminale de l'intestin, traverse le réservoir sanguin qui tient lieu de cœur ; il est le siège de contractions rhythmiques qui l'ont fait prendre d'a- bord pour un cœur proprement dit, et ainsi que nous l'avons déjà vu, il contribue à effectuer le travail respii^atoirc par l'introduction de l'eau dans son intérieur et le renouvellement fréquent de ce liquide (1).

(1) La bouche des Dentales présente plusieurs particularités de structure. Elle est située au sommet d'un ma- melon subproboscidiforme, au fond du tube qui est constitué par le manteau et occupé en majeure partie par le pied du Mollusque. Une rosace de six feuil- les membraneuses, à bords découpés, garnit le pourtour de cet orifice (a), à peu près comme nous l'avons vu chez les Spondyles et les Peclcn , et de

chaque côté de la base du mamelon buccal on voit naîlre une touffe de filaments grêles et très contractiles (6), qui ont été tour à tour coni-idérés comme des branchies (c), des glandes salivaires (c/) et des organes tactiles (e). Morphologiquement, ils me parais- sent devoir être comparés aux tenta- cules labiaux des Lamellibranches et aux bras frangés des Brachiopodes, et il me semble probable que ce sont à la

(a) Laoaze-Diilhiers, Histoire de l'organisation et du développement du Dentale, pi. S, fiy. 1 (extr. des Ann. des sciences nat., i" série, 1850 et 1857, t. VI et VII).

(b) Voyez Desliayes, Anatomie et monographie du genre Dentale {Mém. de la Société d'histoire naturelle, t. II, pi. 15, fig. 12, et Atlas du tlêgne animal de Ciivier, Anneliues, pi. 7, fig. le).

Lacaze, Op. cit., pi. 3, Wg- 2 ; pi. M , li^'. 4 et 5.

(c) Deshayes, Op. cit., p. 334.

Blainville, ilanuel de malacolorjie, et Dict. des sciences nul., I. .\XXI1, p. 107.

(rf) Clark, Ou the Anat. «/■ Deiilaliiim tarcnliiuim (.!»». ofNal. llist.,^' série, 1849, t. IV,

p. 32G).

(e) Lacazc-Duthiers, Op. cit., p. 142.

DES MOLLUSQUES GASTÉROl^OUES. 367

§11. Les Gastéropodes, mieux organisés pour la locomo- tion que ne le sont les Acéphales et les Molluscoïdes, ne sont pas astreints, comme ceux-ci, à se nourrir des substances alimen- taires qui leur sont apportées par les courants respiratoires ; ils

fois des instruments de préliension et de touclier, ainsi que M. Lacaze s'est appliqué à l'établir. Quoi qu'il en soit, leur surface est couverte de cils vi- ijialiles, et par conséquent ils doivent être susceptibles d'aider à la produc- tion des courants nécessaires pour charrier vers l'entrée de l'appareil di- gestif les particules alimentaires en suspension dans l'eau ambiante. Il est aussi à noter que ces appendices fili- formes sont tubulaires et terminés par un petit élargissement creusé en fos- sette, qui agit à la manière d'une ven- touse. Du reste, ils ne sont pas essen- tiels à l'existence de ces Mollusques, car M. Lacaze a constaté qu'ils sont caducs, et que ces Animaux peuvent les perdre sans qu'il en résulte aucun trouble apparent dans leur manière de vivre. A l'intérieur du mamelon pro- boscidiforme, on trouve sur les côtés de la bouclie deux cavités qui ont été décrites sous le nom (Vabajoues (a) : ce sont des poches membraneuses, gar- nies intérieurement d'un épithélium ciliaire, qui s'ouvrent dans la cavité buccale par une fente en forme de boutonnière, et qui logent parfois dans leur intérieur des t'oraminifères ou quelque autre proie microscopique (6). M. Lacaze les considère comme étant des organes salivaires.

Cette première portion du tube di- gestif est séparée de la suivante par un étranglement au delà duquel on remarque un renflement globuleux, ou arrière-bouche (c), dont la face in- férieure est occupée par l'appareil broyeur, ou langue (d). Celui-ci a pour base une pièce cartilagineuse en forme de fer à cheval très large, dont les deux branches sont réunies à leur ex- trémité par un faisceau de fibres mus- culaires, de façon à constituer un anneau (e) ; d'autres faisceaux char- nus contournent les côtés de cette plaque, et dans l'excavation qui en occupe le centre se trouve une lon- gue bande denticulée, dont la struc- ture est très complexe. Elle constitue la râpe linguale, et se compose de cinq séries longitudinales de pièces cor- nées, articulées entre elles et dispo- sées par rangées transversales. La série médiane estimpaire, et constitue une sorte de tige articulée que l'on appelle rachis. De chaque côté se trouve extérieurement une série de plaques minces et assez larges, dites pièces costales, ou pleurœ ; enfin sur le bord interne de chacune de celles- ci s'articule une dent, dont l'extrémité interne se relève au-dessus de la pièce médiane correspondante. Les deux séries de pièces intermédiaires ou

(a) Lacaze, Op. cit., p. 10, pi. 3, lig. 2.

(b) Clark, Op. cit., p. 323.

(c) C'est la partie appelée (jésier par quelques auteurs.

{d) Lacaze, Op. cit. [Ann. des sciences nat., série, t. VI, pi. 9, Hl,'. H («) Idem, ibid., pi. 9, fig-. 3 à ii).

368

APl'AlUilL DIGESTIF

peuvent aller à la recherche de leur nourriture et s'en saisir directement : aussi voyons-nous dans celle classe l'appareil digestif se perfectionner beaucoup sous les rapports de son action mécanique, et la bouche, au lieu d'être logée plus ou

dentées, ainsi constituées, s'engrènent au-dessus du racliis par leur extré- milé interne qui est libre, et par le jeu des muscles adjacents; elles sont susceptibles de s'écarter ou de se rap- procher comme les branches d'une pince à bord denlicuié (a). Cette râpe linguale, dont la parlie antérieure occupe la face supérieure de l'anneau cartilagino-musculaire déjà décrit, et la parlie postérieure se conlourne en dessous de cette pièce basilaire, ne paraît pas être susceptible de s'avan- cer hors de la cavité pharyngienne, mais doit saisir au passage les matiè- res alimentaires et les broyer.

Immédiatement en arrière de la ca- vité pharyngienne, dans l'intérieur de laquelle la langue ou l'appareil broyeur faitsaillie, se trouve un petit renflement qu'on doit considérer comme un pre- mier estomac; puis vient une portion élargie du tube alimentaire qui est dis- posée en forme d'anse, et qu'on peut appeler l'arrière-estomac. Le fond de ce réceptacle se continue avec deux po- ches autour desquelles viennent s'ou- vrir les caecums hépatiques qui con- stituent l'appareil biliaire {b). Ces po- ches sont très larges, et il est probable que les aliments y pénètrent; mais, morphologiquement, elles représentent

une paire de canaux biliaires énormé- ment dilatés : et j'insiste sur cette cir- constance, parce qu'en traitant de l'or- ganisation des Gastéropodes, j'aurai bientôt à discuter la valeur de faits du même ordre. Les cœcums hépatiques s'étalent en forme d'éventail de cha- que côté de la base de l'abdomen, et ont été considérés à tort par quelques auteurs comme étant les branchies de ces singuliers Mollusques (c).

Enfin la branche ascendante de la grande anse stomacale se continue avec l'intestin, qui, après avoir décrit plusieurs circonvolutions , se dirige en arrièie et en haut pour aller se ter- miner à l'anus. iMais, ainsi que nous l'avons déjà vu, la portion terminale de ce tube est très élargie, et tra- verse le réservoir central de l'appa- reil circulatoire, ses mouvements de dilatation et de contraction servent à l'établissement de la circulation, en même temps qu'ils opèrent le renou- vellement de l'eau destinée à effectuer une respiration intestinale dans son intérieur (</). Jj'anus se voit sur la ligne médiane du dos, à la partie an- térieure de la région abdominale et près de la base du pied, dans l'inté- rieur de la gaîne formée par le man- teau (e).

(a) Lacaze, Op. cit. (.4jin. des sciences nat. , 4' série, I. VI, pi. 10, lig'. 1 ;i 0)

(b) Idem, ibid., pi. 8, lii,'. 1).

(c) Clark, loc. cit., p. 324.

{d) Voyez tome II, page !)2, cl Idiiie lit, p. OU.

(e) Lacnzc, Op. cit. (.\iin. lies sciences nat., i' sciic, 1. M, pi. 0, li^', lij. i, elt.).

1 ; I. Vil, l'I.

DliS MOLLUSyLES GAtîTÉKOl'ODi:». oG9

moins profondément entre les replis dn miuitcan, occnpe l'extré- mité antérieure du corps ou tête de l'Animal. Le régiine de ces Animaux est très varié ; les uns se nourrissent de végétaux , d'autres vivent de proie ou se repaissent de matières orga- niques en voie de décomposition. Du reste, la conformation générale du tube alimentaire ne diffère que [leu de ce que nous avons rencontré chez les Acéphales , et l'anus, rejeté tantôt sur le dos, d'autres fois sur le côté droit du corps, est toujours assez rapproché de la région céphalique se trouve la bouche. Il existe en général des glandes salivaires très dévelo[)pécs, et le foie, dont le volume est considérable, forme d'ordinaire, avec les ovaires et les testicules, une masse viscérale qui se prolonge de façon à constituer un cône contourné en hélice , au-dessus du pied charnu auquel ces Animaux doivent leur nom commun. Cette portion |)ostérieure ou abdominale du corps est souvent appelé le tortillon^ et elle se trouve dans le fond de la coquille dont la plupart des Gastéropodes sont pourvus. Les viscères y sont serrés les uns contre les autres dans un sac membra- neux; mais entre la masse compacte ainsi constituée et la tête, l'appaveil digestif flotte librement dans une grande cavité abdominale qui est tapissée par des prolongements de la tunique périlonéalc, et, ainsi que nous l'avons vu dans une précédente Leçon (1), cette chambre renqilit les fonctions d'un grand réservoir pour le sang veineux (2).

La bouche est plus ou moins protractile, et chez beaucoup de ivompo. ces Mollusques elle est pourvue d'une sorte de trompe, car la

(1) Voy. tome Ilf, p. 143 et siiiv. exemple le Colimaron, Mollusque dont

(2) Pour l'étude du mode général de Tanalomie a été faite avec beaucoup de conrormation de l'appareil digestif des soin par Cuvier, dont le travail sur cette Gastéropodes, on peut prendre comme classe d'Animaux est fondamental (a).

(a) Cuvier, Mémoire sur la Limace et le Colimaçon (Annales du Muséum, 1800, t. VII, et Mémoires pour servir à l'histoire et à l'anatomie des Mollusques, 1817, iii-4). Les principales figures ont été reproduites dans l'atlas de la grande édition du Bègue animal de Cuvier, Mollusques, pi. -21.

V. 2k

Appareil masticatoire.

370 APPAREIL DIGESTIF

portion antérieure du tube alimentaire est susceptible de rentrer en elle-même ou de se dérouler au dehors, et constitue ainsi un organe préhensile, cylindrique et très mobile, dont la longueur est souvent fort considérable (1).

Immédiatement en arrière de la bouche, quand les lèvres ne sont que peu ou point protractiles , ou tout auprès de

(1) Ainsi, chez quelques espèces du genre Mitre, la trompe est plus longue que le corps de Taniinal (a). Cet or- gane est également très développé chez les Tonnes [h). Chez les Tritons, il s'allonge moins, mais est très ro- buste (c). La structure en a été étu- diée, chez le Buccinum undatum, par Cuvier et par Osier [d). Poli l'a figuré chez le grand Triton de la !\Iéditer- ranée ; mais le texte de cette partie de son ouvrage n'a pas été pu- blié (e).

Lorsque la trompe de ces divers Gastéropodes est au repos, c'est-à- dire dans l'élat de rétraction, on y distingue deux portions : l'une termi- nale et interne, l'autre basilaire et vaginale; cette dernière se continue avec les bords labiaux et se dirige en arrière; sa surface cutanée est alors en dedans et en rapport avec la se- conde portion de l'organe ; enfin son extrémité postérieure se recourbe en

dedans pour embrasser l'œsophage et se continuer en avant avec la por- tion terminale de la trompe. Dans la protraclion, cette portion interne s'a- vance hors de l'espèce de fourreau formé lar la portion basilaire, en entraînant celle-ci à sa suite, de fa- çon à la retourner. Enfin, quand la trompe est complètement déployée, la portion basilaire devient extérieure et lait suite à la portion interne, au lieu de la loger dans son intérieur. Les faisceaux musculaires circulaires sont les principaux agents producteurs de ce mouvement en avant et du renver- sement qui en est la conséquence, tan- dis que d'autres muscles qui sont dis- posés longitudinalement, et qui pren- nent leur point d'appui sur les parois latérales de la grande cavité viscérale, tirent la trompe en arrière et en opè- rent le retrait. L'appareil lingual est logé à l'extrémité antérieure de cet appendice charnu (/").

(fl) Exemple : la Mitre âpiseopale {voy. Quoy et Gaimard, Voyarje de l'Astrolabe, Mollusques.

pi. 4.5, n?. 1).

(b) Exemple : le DoVmm perdix {voy. Quoy et Gainiard, Op. cit., pi. 41 , lîg. i , et .\tlas du Règne animal de Cuvier, Mollusques, pi. .54, f\g. 2).

(c) Exemple : le Triton noiiferum (voy. Poli, Testacea utriusque Slcilia;, t. 111, pi. 49, iig. 9).

(d) Cuvier, Mém. sur le grand liuccin de nos côtes, p. 6, pi. t , ft;. 7, S, 9 et 10 {Mém. pour servir A l'histoire des Molhisques, et Ann. du Muséiim, isns, t. II).

. Osier, Observalions on Ihe Anatomy and Habits of Marine Teslaceous Mollusca {Philos.

Tram., p. 508, pi. 14, fi;,'. 14-17).

(e) Poli, Op. cit., l. m, pi. 50, fi^. 1.

(f) Exemples : le riuccin (voy. Osier, Op. cit.. Philos. Trans., 1832, pi. 14, fig. 12).

Le Grand Triton de la Méditerranée (voy. Poli, Op. cit., t. III, pi. 51 , liu. 2 et 3).

Les Strombes (voy. Quoy tt (laimard. Voyage de V Astrolabe, Mollusques, pi. 49, fig. 18).

Le nolium. galea (voy. Troschel, Pas Gebiss der Schnecken, pi. 1 , fi^-. li).

La Paludine vivipare (voy. 0. Speycr, Zootomie der Paludiua vivipara, pi. 1 , lij. 3 1 , Cassel, 1555).

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 371

l'orifice terminal de la trompe, quand ce dernier organe existe, le canal alimentaire présente un rentlement assez grand qui est composé en majeure partie de laisceaux charnus, et qui est communément désigné sous les noms de bulbe pharyngien ou de 7nasse buccale. Il est ordinairement armé de deux sortes d'organes sécateurs de consistance cornée (1), savoir, une ou plusieurs lames maxillaires qui en garnissent la voûte, et d'iuie sorte de râpe allongée qui en occu[)e le fond, et qui constitue ce que les zoologistes appellent la langue de ces x\nimaux (2j.

L'appareil maxillaire manque parfois complètement, chez les Testacelles, par exeuiple, et sa composition varie beaucoup.

(1) On U'Oiive dans un mémoire de M. Lebert et dans l'introduction de l'ouvrage de M. Troschel, sur l'appa- reil masUcateur des Mollusques, une revue historique de l'état de nos con- naissances relatives à cette partie de l'organisme des Gastéropodes, depuis Aristote jusqu'à nos jours (a).

(2) Quelques auteurs onl considéré l'armature buccale des Mollusques comme étant composée de mucus endurci et uni à un peu de carbo- nate de chaux [b] ; mais on voit, par les recherches de M. Leuckart, qu'elle est formée essentiellement de la substance qui est connue sous le

nom de chitine, et qui joue un grand rôle dans la constitution de l'appareil tégumentairc des Insectes. Cela a été constaté par ce naturaliste chez les Limaçons et les Patelles (c). M. Bergh a trouvé aussi du phosphate de chaux- et du fer dans les pièces linguales du Buccin (d), et d'autres analyses faites par M. Bergmann s'accordient avec ces résultats. Ce dernier a trouvé environ 9^ de ciiitine et 6 de phosphate de chaux chez V Hélix nemoralis et le Dolium galea (e). C'est à tort que quelques naluraUstes ont considéré ces pièces linguales comme étant formées de silice (/").

(a) Lelierl, Beobnchtungen ûber die Mundorgane einiger Gasteropoden (Miiller's Archiv fur Anat und PhysioL, 1840, p. 463).

Troschel, Das Gebiss der Schneekcn , zur Begrûndung einer natûrlichen Classification, 1856, p. 5 et suiv.

{b) Bracoiinot, Analyse des Limaces {ihhn. de la Société des sciences, lettres et arts de Nancii 1845, p. 91).

Moquin-TanHon, Hist. des Mollusques terrestres et fluviatiles, p. 31.

(c) R. Leuckart, Ueber das Vorkommen ûnd die Verbreitung des Chitins bei den wirbelloseii Thieren (Wiegmann's Archiv fiir Naturijeschichte, 18ô2, t. I, p. 25).

(d) Bergh, Ridrag til en Monographi af Marseniaderne (Mém. de l'Acad. de Copenhague, 1853 3" série, t. III, p. 283). '

(e) Voyez Troschel, Das Gebiss der Schnecken, p. 28.

(/■) Hancock, On the Boring of Mollusca iulo Rocks, etc. lAnn. of Nal. Hist. série, 1848 l.II, p. 142).

ol'l Al'PAUElL DIGESTIF

Ainsi, chez les Colimaçons et les Limaces, il n'est représenté que par une mâchoire impaire et médiane (pii est implantée transversalement dans la paroi membraneuse du palais, et qui se termine par un bord libre armé de denticules en nombre variable, suivant les espèces. Celte lame tranchante n'exécute que peu ou point de mouvements, mais l'appareil lingual qui y est opposé pousse avec force les matières alimentaires contre son bord inférieur, et effectue ainsi la division de ces substances dont le tissu est en général peu résistant, car la nourriture ordi- naire de ces Gastéropodes terrestres consiste en fruits charnus, en cham[)ignons ou en feuilles tendres, bien qu'ils se montrent aussi très avides de matières animales, et que i)aribis on les voit se repaître même d'une proie vivante (1).

(1) Les Limaçons et les Limaces n'allaquent que raiemenl cerlains vé- gétaux , .tels que les Graïuinées ou les Fougères, et même les lîosacées et les Malvacées, mais ces Mollusques sont très avides de Champignons, de Solanées, d'Ombellifères et de beaucoup d'autres plantes à odeur vi- reuse (a). Pour plus de détails au sujet du mode d'alimentation des (ias- léropodes pulmonés , je renverrai

à l'ouvrage spécial de M. Moquin- Jandon (6).

La disposition de la màclioire, qui occupe la partie supérieure de la ca- vité buccale de ces animaux, a été in- diquée par Swammerdam et Lister, puis par Cuvier (c), et étudiée avec plus d'attention par MM. Troschel , Lebert, Moquin-Tandon, ErdI, lîinney et plusieurs autres zoologistes de l'é- poque actuelle ((/). Cet organe adhère

(a) Voyez Pcpin, Observations faites sur les diverses espèces de Limai'ons qui ravagent les Jar- dins, el indications des plantes auxquelles ils s'attachent et à l'abri desquelles ils se réfugient de préférence (oxtr. de ['Horticulteur universel, t. V et VI).

Recliiz, Ubscrv. sur le goût des Limaces pour les Champignons [(Giiérin, Revue zoologique, 1841, p. 3U7).

\b) Moiiuiii-Tandoi), Histoire naturelle des Mollusques terrestres et fluviatiles, p. 53 et siiiv.

(c) Lister, Exercitatio anatomica in qua de Cochleis maxime terrestribus et Limacibus agitur, i09i, p. O'J.

Swammerilam, liiblia A'aturœ, pi. 5, fig. 2.

Cuvier, Mcm. sur la Limace et le Colimaçon (.lu:!, du Muséum, t. Vil).

(d) Troschel, Ueher die Mundlheile einheimischer Sclinecken {Archiv fur Naturgeschichtc , 1 836, l. 1, p. oST.id. 0).

Mo(piiii-T;iiuloii, Obscrv. sur les mâchoires des -Hélices de France (Mém.de l'Xcad. de Tou- louse, 1848, t. IV). Histoire naturelle des Mollusques terrestres et fluviatiles, t. 1, p. 30 et suiv.

t^rill, llcitrdgc iur Anal, dcr Helicinen (dans Moritz Wagner, lieisen in dcr liegentscliaft Algier, I. III, p. iiOS, pi. 14).

Biiincy, The Terreslrialair-brcathing Molluslis of Ihc United States, 1851 , I. 1, l'I. 1 , fig. 0 ; pi. 4, fig. 0; pi. 5, fig. 4, etc.

375

t)ES MOLLtSQUES GAâTKROPOOES.

Che-A d'autres Gastéropodes, les Limnées, par exemple, l'armature palatine se compose de trois pièces, savoir, une mâ- choire médiane et une paire de lames latérales (1).

Ailleurs, dans la même classe, on ne trouve plus de vestige de la mâchoire médiane ; mais les mâchoires latérales acquièrent un grand développement et sont articulées entre elles par leur bord supérieur, de façon à tenir lieu de la première de ces pièces. Cette disposition est fort remarquable chez les Éolides(2).

à la muqueuse palatine par une lame basilaire, et se termine en avant par un bord libre dont la forme varie. Tantôt il présente une grosse carène médiane qui se prolonge eu manière de dent ou bec impair ; par exemple, chez le Zonite peson , ou Hélix algira (a). D'autres l'ois il présente trois ou un plus grand nombre de petites crêtes subégales et parallèles, terminées cha- cune par une pointe en l'orme de dent de scie : par exemple, chez VHelix nemoralis (6). Enl'm , dans quelques espèces, il n''ofl're ni ca- rène ni crête bien marquées, et se termine par un bord semi- lunaire à peine ondulé, ainsi que cela se voit chez la petite espèce de Coli- maçon des Alpes appelée Zonites glaber (c). Cette dernière forme est encore mieux caractérisée chez les Bulimes (d). Pour les détails spé- ciliques èi ce sujet, on peut con-

sulter les travaux des auteurs cités ci-dessus.

Chez VAinpullaria urceus, la mâ- choire supérieure est beaucoup plus développée, et encapuchonné, pour ainsi dire, la masse linguale, située au-dessous (e). Il en est à peu près de même chez une espèce de Doridiens, VAigirus punclilucens {(].

(1) Dans quelques espèces, ces mâ- choires latérales sont rudimentaires : par exemple, chez l'Ancyle lluviale. Chez la Limnée des étangs, elles ont la forme de lames semi-lunaires [g).

(2) MM. Hancock et Embleton ont décrit avec beaucoup de soin la struc- ture de cette portion de Tarmalure buccale chez VEolis violacea. Toute la partie supérieure et latérale de la ca- vité buccale est revêtue par les mâ- choires. Celles-ci ont chacune la forme d'une grande plaque concave qui se termine en avant par une lame tran-

(a) Vaii lieneden, Mém. sur l'anatomie de THelix alg-ira {Ann. des sciences nat., 2* séiio, t. V, p. 281, pi. 10, i\g. 7).

(b) Voyez Moqiiin-Tandon, Histoire naturelle des Mollusques terrestres et fluviatiles, pi. 13, fig. i .

(c) Idem, ibid., pi. 9, lig'. 3.

irf) Idem, ibid., pi. 21, lit,'. 1, 5, etc.

(e) Troscliel, Anatomia von Ampullaria {Archiv fur Naturgeschichte, 1845, t. I, p. 200, pi. 8, fin- 5).

(/■) Aider et Hancock, A Monograph of the British Nudibrancliiale MoUusca , lani. 1, pi. H, fig. 14 et 15.

(g) Moqiiin-Taniloii, 0/). cit., pi. Si, llj;-. 17.

374

APPAREIL DIGKSTIF

Langue

des

Gastéropodes.

Enfin, dans quelques cas, mais très rarement, une mâchoire palatine transversale se trouve opposée à une lame analogue i\u\ occupe la partie antérieure et inférieure de la cavité buccale, de façon qu'il existe en réalité une mâchoire inférieure aussi bien qu'une mâchoire supérieure : cela se voit chez la Nérite fluviatile (1).

§ 12. L'appareil lingual, qui occupe le plancher de la cavité buccale et s'y élève en forme de tubercule ovalaire, res- semble beaucoup à l'organe sécateur que nous avons déjà ren- contré dans la même position chez les Dentales, et se fait remarquer surtout par l'espèce de râpe dont il' est armé. Il a pour base une pièce cartilagineuse en forme de fer à cheval qui donne attache à de nombreux faisceaux musculaires et porte à sa face supérieure la râpe dont je viens de parler (2). Celle-ci est une bande membraneuse longitudinale qui est garnie d'une multitude de pièces solides en forme de crochets ou de tubercules ; antérieurement, elle est saillante et à découvert ; mais en arrière elle est engagée dans une gaine membraneuse, et elle se termine sur un tubercule mou qui naît des parois de

chante prolongée en forme de bec (a). nâlre, garnie de six à huit côtes verli- Quelquefois le bord libre de ces ma- cales et denticiilées sur le bord (d).

(2) Voyez ci-dessus, page 366. La disposition du tubercule lingual et la manière dont la ràpc s'engage dans son fourreau ont été très bien représentées par Cuvier chez le Turbo pica (e), par I\I. Troschel chez le Do- lium galeci [f), et par M. Speyer chez la l'aludine vivipare (g).

choires est fortement denliculé : par exemple, chez les Éolidiens désignés sous les noms de Janus Spinolœ (6) et (VAntiopa cristata (c).

(1) Les deux mâchoires médianes et opposées de la Nérite fluviatile sont formées l'une et l'autre d'une lame semi-cornée, arquée, de couleur bru-

(a) Hancock and Embleton, Anatomy of Eolis {Ann. of Nal. Hist., 1845, t. XV, p. 5, pi. 1, fig. 5 à H, et pi. 2, fig. 2 à 8).

(6) Bhuicliurd, Recherches sur l'organisation des Mollusques Gastéropodes de l'ordre des Opisto- branches [Aiin. des sciences nal., sciif, ')S49, t. 11, pi. 4, (ii;. 3).

(c) Aider et Hancock, Moiwgraph of ihe Brllish Nudibranchiate Mollusca, l'ani. 3, pi. 43, fig. 3 et 4 [Raij Society}.

{d} Moquiii-Tandoii, Op. cit., pi. 42, fig. 5.

(e) Cuvier, Mém. sur la Vivipare d'eau douce, etc., lig. 8 {Ann. du Muséum, ISOS, I. XI).

(fl Troschel, Dus Gebiss der Schnecken, pi. i, fig. (i.

((/) Speyer, Zoolomie der l'ahulina vivipara, pi. 1, fig. 19, 21, 31, 37.

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 375

ce fourreau, et qui paraît être l'organe chargé d'effectuer l'ac- croissement (le cette singulière armature (1). Les pièces solides qui la recouvrent sont en très grand nombre et se répètent longitudinalement; elles sont disposées par bandes transver- sales et varient beaucoup dans leur forme et leur mode d'arran- gement, suivant les genres et même les espèces (2). En général, une séiie de pièces impaires 0(;cupe la ligne médiane et sert de support à une double série de pièces latérales dont les internes se recourbent en haut et en arrière, de façon à constituer des crochets ou des dents aiguës. Souvent, au lieu d'une seule rangée de ces crocliets de chaque coté de la ligne médiane, il en existe plusieurs, et quelquefois, en même temps que ces parties latérales de l'armature linguale se multiplient beaucoup, la por- tion médiane disparaît, de façon que le tout ne resseml>le plus à un ruban unique, mais constitue une paire de larges plaques

(1) Le cartilage lingual des Mollus- ques Gastéropodes a échappé à Pat- tention de beaucoup d'anatomistes , mais ne paraît manquer que très ra- rement. M. Lebert fut Tun des pre- miers à en faire bien connaître la dis- position, qui, dans ces derniers temps, a été décrite d'une manière plus com- plète par M. Huxley, et surtout par M. Claparède (a). j\i. Semper pense qu'il manque dans le genre Limace, et que chez les autres Gastéropodes pulmonés le tissu des parties corres- pondantes à ce cartilage serait com- posé de fibres musculaires mêlées à

des cellules cartilagineuses (6), mais cela ne paraît pas être.

(2) Le mode de croissance de la râpe linguale me paraît avoir été très bien constaté chez la Néritine fluvia- tile par M. Clarapède, Ce naturaliste considère comme une espèce de bulbe ou de matrice le tubercule mou qui en occupe l'extrémité postérieure, et il a vu que les pièces dentaires, en s'y développant, sont d'abord très minces et délicates, mais se consolident en s'avançant vers la cavité buccalt; (c).

M. Semper pense que la râpe lin- guale ne s'accroît pas d'avant en ar^

(a) Lebert, Deobachtungen ûber die Mundorgane einiger Gasteropoden (Muller's Archiv fur Anal, und PhysioL, 1840, p. 435, pi. 13, fig. 22, etc.)-

Huxley, On the Morpholoyy of the Ccphalous Molluscu {Plulos. Trans., 1853, p. 5S, pi. 5, %. 12 et 13).

Claparède, Anatomie mid Entwickelungsgeschichle der Neritina tluviatilis (Miiller's Archiv fur Anat. und PhysioL, 1857, p. 144 et suiv., pi. 5, fig-. H-25).

(6) Semper, Zum feineren Baue der MoUuskenzunge (Zeitschr. fur wissenschaftliche Zoologie, 1858, t. IX, p. 271, pi. 12, fig. 5).

(c) E, Claparède, Op. cit. (Millier' .s Arrhlv fur Atutt. U7ul PhysioL, 1857, p. 142j.

t^76 Al'i'AnKlL t)l(;HSTlP

hérissées âe dentieiilos. Quoi qu'il on soit A cet égard, les cro- chets sont durs à la partie antérieure de l'appareil, mais vers la base de la langue ils sont plus mous, et ils paraissent se renou- veler à l'extrémité postérieure de cet organe à mesure qu'ils s'usent à sa prrtie antérieure, qui s'élève en arc de cercle. Cette partie saillante de la râpe, à raison de l'élasticité des par- ties sous-jacentes et du jeu des muscles insérés sur le cartilage basilaire, est susceptible de se porter alternativement en avant et en arrière ; chez les Gastéropodes ordinaires , elle ne se déroule jamais au dehors de la bouche, mais elle agit à la manière d'une scie articulée (1). La structure de cet appareil

vière, et naîUait directement comme produit épithélial de la membrane sous-jacenle (a) ; mais il ne se fonde snr aucune observation directe, et cette iiypotbèse ne s'accorde pas avec les divers degrés de dévelop- pemenl qui se remarquent dans le lissu de pièces dentaires d'arrière en avant.

(1) Il existe de grandes et nom- breuses variations dans l'armature de la langue des Gastéropodes, et depuis quelques années l'étude des pièces solides qui la constituent a été pour- suivie avec persévérance par plu- sieurs zoologistes, parmi lesquels je citerai principalement M. Lovén à Stockliolm,et M. 'J'roscbel à Berlin (b). J'ajouterai que les belles préparations microscopiques faites par Al. lîappart, de VVabern, et données à beaucoup d'établissements universitaires par ce naturaliste ( sous le nom d'Hngell

et C), ont beaucoup contribué à vul- gariser les connaissances relatives à ce point d'anatomie.

Le premier exemple que je crois de- voir choisir pour l'étude des pièces lin- guales est VEolis alla. Ici la râpe (ou radula) se compose d'une seule série longitudinale de plaques cornées, ar- mées chacune d'un prolongement co- nique et spiniforme qui se recourbe en arrière, au-dessus de la base de la dent suivante, de façon à constituer une rangée longitudinale de crochets simples dont la pointe est dirigée en arrière (c). On ne compte que vingt de ces dents. Chez d'autres Éolidiens, il existe également une seule rangée de pièces linguales, celles-ci s'élargis- sent davantage, et offrent de chaque côté de la grosse pointe médiane une série plus ou moins nombreuse d'é- pines ou denticules plus petites, de façon à constituer une série de pei-

ia) Scnipcr, ù}t. cil. (Zeilschr. fur wissenschaftl. Xnol., 1858, t. IX, p. 27-i).

(6) Lovéïi, (hn tungnns bevapiiinfj hos MoUuskev {Ofrersigt afVitcnskaps-A'iademiens rui'hcnid- Hngar., 1847, p. 175, pi. 3 à 6).

Troscliel, Dus Cebiss ilev Schnecken, iw Begrûndung einer natûrlichcn Classification. Berlin, 1850.

(r) Viiyoz H.iiii-()rl( .ind Emlilcluii, tlp. cil. {.\iiv. nf \,it. Ilisl., I. \V, pi. 2, liu^ 1 1 el 12).

t)KS MOLLUSQUES GASTÉftOVODES. 377

est extreinemenl complexe; on y distingue souvent jilusienrs milliers de pièces articulées entre elles, et la gaine qui renferme sa portion basilairc se prolonge en général au-dessous de la

. gnes : par exemple, chez VEolis nana, VE. stipata, etc. (o).

Dans un second type, Tarniature lin- guale se compose d'une série médiane de crochets, soit simples, soit pectines, et d'une série d'autres pièces cornées situées de chaque côté, et tantôt sim- ples, comme cela se voit chez VEolis pi'Uucida [b) ; d'autres fois à hord (lenticule : par exemple, chez VE. li- neata (c).

Chez d'autres Gastéropodes, l'arma- ture linguale se modifie par l'addition d'un nombre plus ou moins considé- rable de dents latérales de chaque côté des séries déjà décrites. Ainsi chez les Buccins, les Nasses, les Murex, etc. , chaque rangée transversale se com- pose d'une large dent médiane (en général garnie de pointes fortes ou nombreuses) et d'une paire de dents latérales, tantôt en forme de crochets simples, d'aulrcs fois terminées par deux, trois ou un plus grand nombre de pointes courtes {d). Chez le Cras- jjedoma lucidum (e), le Cyclophorus inca if), le Lamellaria prodita{g), les

AmpuUaires (h), etc., chaque rangée transversale se compose d'une grosse dent médiane et de trois paires de dents latérales à peu près de même forme.

Chez les Cyclostomes, la disposition de ces pièces est à peu près la même, si ce n'est que les dents de la rangée externe de chaque côté s'élargissent beaucoup et deviennent multidenticulées sur le bord (i). Ailleurs, on voit ces pièces latérales se développer davantage en- core, et se subdiviser vers leur bord antérieur en une longue série de cro- chets : par exemple, chez le Trochus cinerarius (j) et le Chondropoma Poeyanum {k). Ou bien encore les dents latérales, tout en restant simi- laires, se multiplient énormément , ainsi que cela se voit chez l'Ancyle fluviatile (/) et chez les Bulimes (m).

Chez les Siphonaires, on compte, dans chaque rangée transversale des deux côtés du crochet médian, une cinquantaine de crocliels de plus en plus petits (n).

Il arrive parfois que dans le cas les parties latérales de l'armure lin-

(a) Voyez, pour la forme de ces dents, la belle Monographie des Mollusques Nudibranches, p.ir MM. Aider et Hancock, pi. 47, fig. 17,4 8, elc. (Ray Society).

(b) Aider and Hancock, Nudibranchiate Mollusca, pi. 47, fig'. 12.

(c) Aider and Hancock, Op. cit., pi. 47, fis:. 10.

(d) Lovén, Op. cit. (Bulletin de l'Acadétnie de Stockholm, 1847, pi. 5). (ej Troscliel, Das Gebiss der Schneckcn, pi. 4, fig. 5.

(/■) Gray, Gn the Tceth of tlie Vneumonobrunchiate Mollusca {Ann. of Nnt. Hisl., 2* série, 1853, t. XII, p. 333, fig. G).

(g) Lovén, Op. cit. (Bulletin de l'Académie de Stockholm, 1847, pi. 4).

(h) Troschel, Op. cit., pi. 6, fig. 6 à 9.

(i) Exemple : Cyclostomus elegans (voy. Troschel, Op. cit., pi. 4, fig. 8).

( j) Lovén, loc. cit., \>\. 6.

(A) Troschel, Op. cit., pi. 4, fig. 13.

(/) Lovén, Op. cit. {Bulletin de r Académie de Stockholm, 1847, pi. 3).

(m) Troschel, Ueber die Mundtheile eini(jcr Heliceeii (.{rchii> fur iSaturaeschichle, I. I, p. 225, pi. 4, fig. 4 6, 0 b).

[n) Gray, Op. cit. (Ami. ofNat. Ilist., 2" série, I. Ml, p. 333, i]ç;. T.).

578 APPAREIL DIGKSTIF

masse viscérale. Chez la Patelle, par exemple, elle offre des dimensions très considérables, et se loge dans une poche mem-

guale se développent beaucoup, les pièces de la rangée médiane cessent de se prolonger en forme de dents, et se réduisent à de simples tubercules ou bandes cornées, dont l'ensemble constitue une sorte de tige articulée que les anatomistes désignent souvent sous le nom de rachis. Celte disposi- tion se remarque chez le Paludinavivi- para [a), le Doris diaphana (6), le Psammophora (c), etc. Ailleurs les pièces médianes disparaissent même complètement, de façon qu'alors le rachislingualmanqueetqiie toutes les parties de l'appareil sont paires : cela se voit chez la plupart des Doris, ani- maux qui ont généralement la langue très large et bilobée [d).

Il est aussi à noter que la forme de ces pièces latérales varie beaucoup. Tantôt ce sont de simples papilles obtuses ou coniques et plus ou moins recourbées en arrière , ainsi que cela se voit chez la plupart des Héli- cines (e) , les Janthines (/) , etc. ; d'autres fois des lames assez larges et faiblement denliculées sur le bord, par exemple chez le Valvata trica-

rinata (g) ; ou bien encore des cro- chets à plusieurs branches, disposi- tion qui se rencontre chez le Cyprea helvola {h).

Quelquefois les pièces d'une même rangée ne se placent pas sur une seule ligue transversale, et forment diflé- rents groupes qui compliquent beau- coup l'aspect général de la râpe : par exemple, chez Va plupart des Pa- telles [i) et chez les Oscabrions (j).

Ainsi que je l'ai déjà dit, le nombre des pièces constitutives de la râpe lin- guale est soiivcnL très considérable ; on en compte environ 6000 chez le Doris tuberculata (k), environ l/i 000 chez VHelix aspersa, 21 000 chez VHelix pomalïa, et près de 27 000 chez \ii Limax maximus (/) ; enfin, chez le Tritonia Hombergii, il y en a plus de 36 000 [m).

Chez quelques Éolides on ne trouve qu'environ vingt dénis.

Il existe aussi de grandes variations quant à la longueur de la râpe lin- guale. Chez le Trochus pagodus, cet organe est sept fois plus long que le corps de l'animal (/t).

(a) 'froschel, Op. cit. {Archiv fur Nalurgeschichte, t83G, pi. 41, lig. 2).

(b) Vojcz Aider et Hancock, Op. cit., pi. 4G, lig. 9.

(c) tjuoy et Gaimard, Voyage de l'Astrolabe, Mollusoues, pi. G9, fig. 10.

(d) Exemple : Dori^ tuberculata (Aider et Hancocli, Op. cit., pi. 1, fig. C, 7, 8 ; pi. ili, fig. 1).

(e) Troschel, Dos Gebiss der Schnecken, pi. 5, fig. 1 à 12. {[} Lovén, toc. cit., pi. 3.

{g) Troschel, Das Gebiss der Schnecken, pi. G, fig. 14.

{h} Lovén, loc. cit., pi. 4.

(i) Lovén, 0]).^ cit. {Uulletin de l'Académie de Stockholm, 1847, pi. 6).

(j) Savigny, Egypte, Mollusques gastéhop., pi. 3, fig. :>', 5**.

Schiiï, licitrcigc :iur Anatomie von CUilon ficeus {Zeitschr. fUr tvissensch. Zoologie, I. I.\, pi. ii, fig. 10).

(A:) Aider et Hancock, 0]). cit., \>. 11, fam. 2, pi. 1. fig. 5 et 6.

(l) W. Tlionison , Uemarks on Ihe Dentition of Brilish Pidmonifera ( .Intt. of Kat. llist , 2' série, t. Vil, p. 93).

(m) Aider and Hancock, Op. cit., p. 11.

(») Quoy et Gaimard, Voyage de l'Astrolabe, Mollusquk.'^, pi. 02, fig. 3.

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 379

brnneiise dépendant des sinus céphaliques dont j'ai déjà eu à parler en décrivant le système artériel de ces singuliers Mol- lusques (d). Enfin, chez les Haliotides, la portion basilaire de la langue, revêtue comme d'ordinaire de sa gaine membraneuse, se loge dans la cavité de la grande artère aorte. Lorsque l'es- pèce de scie courbe ainsi constituée est située à l'extrémité d'une trompe grêle et allongée , elle permet à l'Animal de tarauder en quelque sorte la coquille des Mollusques dont celui-ci veut faire sa proie , et de ronger les parties molles situées au-dessous de cette enveloppe calcaire. C'est de la sorte que les Buccins perforent beaucoup de coquilles de nos côtes (2), et c'est aussi à l'aide de cet appareil sécateur que d'autres Gastéropodes creusent parfois dans la substance des plantes marines des excavations profondes (3); mais en général la râpe linguale est employée surtout à pousser les matières ali- mentaires de la bouche vers l'œsophage (k). Quelquefois elle est susceptible de se déployer à l'extérieur et d'agir à la manière d'un organe de préhension; cela se voit chez les Firoles et les Carinaires (5).

(1 Voyez tome III, page loG.

{"2) Le Buccinum lapillus se nour- rit de la sorte aux dépens des Moules et de divers (lasléropodes ; quelque- fois il aUaque même des Animaux de son espèce (a),

(3) Cette observation s'applique au Patella pellucida qui se trouve sou- vent sur les côtes de la Manche, dans des trous creusés dans le pied du Zostera marina. Le Trochus crassus de nos côtes râpe aussi les plantes marines dont il se nourrit.

(Zi) Ainsi le Turbo Uttoreus de

nos côtes se nourrit d'alguos molles, et fait pénétrer par succion les fila- ments de ces végétaux dans son œso- phage. La Patelle commune paraît avaler aussi des fragments de plantes marines sans les diviser préalable- ment (6).

(5) Chez ces Mollusques, l'armature linguale se compose généralement de cinq séries longitudinales de pièces cor- nées, et celles de la série externe sont susceptibles de se reployer en dedans au-dessus des dents de la paire interne, ou de se renverser en dehors, de façon

(a) Osier, Observ. ou Ihe Anatomy and Habits of Marine Testaceous Mollusca,illiistrali,veof Iheir Mode of Feeding (Philos. Trans., 1832, p. 507).

(b) Osier, Op. cit. (Philos. Trans., \H>2, p. 503).

Ai'inaliire gasliique.

Gésier.

.'^80 AH'AHEIL niGESTIP

§ 13. Les organes sécateurs dont la bouche est armée ne sont pas les seuls instruments à l'aide descjucls la division mé- canique des aliments s'opère parfois chez les Mollusques Gasté- ropodes. Quelquefois une portion du tube digestif est disposée de façon à remplir des fonctions analogues. Ainsi, chez les Aplysies, il existe une sorte d'estomac triturant appelé gésier^ dont les parois , garnies de libres musculaires très puissantes, sont armées de plaques cornées en forme de dents et de crochets (1).

à former de chaque côté une rangée de crochets dirigés en dehors [a).

(1) Chez PAplysie (6) , l'appareil huccal, renfermant une râpe linguale multidenticnlée (c) , est suivi d'un (l'sophage étroit, qui bientôt se dilate subitement pour former un premier réservoir alimentaire , appelé jabot. Cette première poche se contourne sur elle-même en manière de spirale et a des parois membraneuses assez minces. Les aliments passent ensuite dans un second réservoir à parois très musculaires qui constitue le gésier. La surface interne de cet estomac triturant est garnie d'une douzaine de grandes plaques épi- théliqucs , de consistance semi-car- tilagineuse, qui ont la forme de py- ramides à hase rhomboïdalc, etqui sont disposées de façon à se rencon- trer par leur sommet, quand l'organe se contracte. Un troisième estomac,

qui fait suite au gésier, est armé en dedans de petits crochets dont la pointe est dirigée en avant et dont la nature est également épithélique. Près du pylore, on y remarque aussi deux petites crêtes membraneuses qui font saillie dans son intérieur et qui bordent l'entrée d'un gros appendice cœcal à parois membraneuses. L'in- teslin n'offre rien de particulier {d).

Le second estomac du Cerithium ielescopium paraît offrir une disposi- tion analogue : on y a trouvé une plaque solide garnie de plusieurs ran- gées transversales de denticules (e).

Chez les lîullées, il y a aussi un gésier armé de pièces solides pro- pres à triturer les aliments; leur dis- position varie un peu suivant les espèces (f).

Cliez le Bulla lignaria, deux de ces pièces calcaires sont unies par des libres musculaires, et ressemblent un

(a) Exemple : Cnrinaire (voy. Poli, Op. cit., l. Itl, pi. 44, fig-. 9 ot tO).

- Firole (voy. Ijeuckart, Zuoluijisclie Untersuchungen, Hefl 3, p. 39, pi. 1, C\g. 13).

(b) Cuvi(>i-, Mémoire sur le genre Aplysia, vnUjairement nommé Lièvre marin (Mémoire jmur servir à l'Idstoire des Mollusques, et Ann. du Muséum, 1802, t. II).

(e) Lovcn, loc. cit., pi. 3.

(d) Uellc Cliiaje, Descrii. e nolmnia degli Aitimali invcrlcbnili délia Sicilia citeriore, pi. .18, fig. 3.

(e) Berkeley ami lIofTiiiaiiii, A description of the Analomical Slniclure o/'Ccriliiiiim Iclescopium [Zoological Journal, t. V, p. 434, pi. 20, fig. 0).

(f) Cuvier, Méiit. sur les Accres, p. 12, pi. 1, tij. 2t cl 22 {Ann. du .Muséum, 1810, I. XVI).

UKS MULLUSUUES G.VSTliKOl'ODfcS. 381

§ 1^. Beaucoup de Gastéropodes sont omnivores ou même essentiellement phytophages, et il est aussi à remarquer que chez la plupart des Animaux de cette classe il existe un appareil salivaire très bien constitué. Quelquefois ces organes sécré- teurs ont la forme de tubes simples à })arois glandulaires, chez les Aplysies et les Calyptrées, par exemple ; mais en général

Glandes salivaires.

pou aux valves de la coquille d'uu Mollusque acéphale ; pendant quelque temps on les a fait passer pour telles dans le commerce, et on les désignait sous le nom générique de Gioenia (a).

Chez les Scyllées, Cuvier a trouvé un gésier garni intérieurement de douze lames cornées, disposées lon- gitudinalemcnt et tranchantes comme des couteaux [b). Une disposition ana- logue paraît exister chez VAuricula Midas, le gésier est très déve- loppé (c) ; et chez les petits Gastéro- podes que M. de Qualrefages a dési- gnés sous le nom de Pavois, on voit un estomac garni de quatre plaques solides denticulées (d).

Les Bythénies, petits Gastéropodes herhivores qui ont beaucoup de res- semblance avec les Paludincs, mais qui sont dépourvus de mâchoires, ont dans l'estomac un corps cartilagineux cylindrique qui paraît être analogue au stylet cristallin des Mollusques

acéphales (e). Quelque chose d'ana- logue a été signalé chez les Strombes et chez le Trochus turritus {f).

Enfin M. Huxley a découvert chez les Ptérocères un stylet cartilagineux qui est logé dans un csecum pylorique, et qui fait saillie au fond de l'esto- mac ig).

Quelques autres Gastéropodes sont pom-vus d'un gésier qui, sans être armé de la sorte, n'en est pas moins un organe triturant. Ainsi, chez la Limnée des étangs, cette portion du tube alimentaire est garnie de deux masses musculaires, qui sont réunies par un tendon, et Cuvier la compare au gésier des Oiseaux granivores {h).

Chez les Onchidies, on trouve aussi un gésier musculaire très puissant, qui est revêtu intérieurement d'une tunique de consistance carlilagi - neuse {i). Une dispusition analogue se voit chez l'Ombrelle de la Méditer- ranée (j).

(a) Owcii, Lectures on Ihe Comparative Aiiatomy of Invcrlebr. Aninmls, p. 557.

(b) Cuvier, Mém. sur la Scillêe, etc., p. 10, pi. 1, f\§. G (Mém. du Muséum, 1805, 1. VI, et Ann. pour servir à l'histoire des Mollusques).

(c) Quoy et Gaimard, Voyage de l'Astrolabe, Mollusques, pi. 14, fig-. 0 et 12.

((/) Qualrefages, Mém. sur les Gastéropodes phlébentérés (Ann. des sciences nat., série, 1844, t. I, Y.\h'A, pi. 4, lig. 5, et pi. 5, lig. 7).

{e) Mocpiiii-Taivioii, Histoire des Mollusques terrestres et fluviatiles, t. I, p. 44, pi. 38, liy. 21, et pi. 39, tli,^ 30.

(/■) Collier, General Observations on Unlvalves [The Edinb. new Philosoph, Journal, 1829, t. VII, p. 231).

{(j) Huxley, On the Morphology of Ihe Cephalous MoUusca {l'hllos. Trans., 1852, p. (jO, pi. 5, tig. 16 et 17).

{h) Cuvier, Mém. sur la Ltmnée, etc., p. 7, |il. 1, lig. 9 m.

(i) Cuvier, Mém. sur l'Onchidie, p. 8, pi. 1 , lig. 4, 5 et 7 f.

(j) DellcCliiajc, Descr. et notom. degli .\nun. invertebr., t. H, p. 90, pi. GG, lig. 20.

382 APPAREIL DIGESTIF

ils sont massifs et consistent en un certain nombre de lobules d'apparence grenue, qui sont fixés à rextréniité d'un canal excréteur long et grêle. Ils débouchent sur les côtés de la langue, mais ils sont logés plus ou moins loin en arrière, sur les côtés de l'œsophage ou de l'estomac. D'ordinaire on n'en trouve qu'une seule paire, mais dans quekiues espèces il y en a deux paires, par exemple chez les Janthines (1).

(1) Chez les Aplysies, les glandes mais ont un aspect plus framboise ou

salivaires ont la forme de deux gros deviennent même subiobulées (g). cordons cylindriques, n)Ous et blan- Ciiez le Colimaçon, ces organes sont

châtres, qui naissent de la niasse beaucoup plus développés et s'élar-

buccale, sur les côtés de l'œsophage, gissent postérieurement en lobules

et se dirigent en arrière, traversent le minces et irréguliers qui s'appliquent

collier nerveux avec ce conduit, et sur la surface externe de l'estomac, et

vont se placer sur le côté gauche de se réunissent sur plusieurs points, de

l'estomac (a). façon à embrasser ce viscère (h). Chez

Chez la Calyptrée, ces glandes ont à la Limace ils se prolongent moins loin

peu près la même forme, mais sont en arrière, mais ressemblent davau-

beaucoup moins longues (6). tage à des glandes conglomérées

Un mode d'organisation semblable ordinaires («'). se voit chez la plupart des Doris (c). Chez les Onchidies , les glandes

chez les Calliopées {d) , les Cari- salivaires sont moins compactes, et

naires (e), les Firoles (/"), etc. ressemblent à des arbuscules toulfus,

Chez les Tritonies, les glandes sali- parce que leurs lobules ne sont unis

vaires sont encore grêles et allongées, que par leurs canaux excréteurs {j).

(a) Cuvier, Mém. siw l'Aplysie, pi. 3, fig. i (cxtr. des Ann. du Muséum, t. II).

DelleChiaje, Descrizione e notomia degli Animali invertebi'ati délia Sicilia citeriore , jil. 58, fig. i et 3).

Carus et Otto, Tab. Anato7n. compar. illustr., pars iv, pi. 2, ûg. 10.

(6) Ovven, On the Anatomy of Calyptridœ (Transactions of the Zoological Sociely of Londoii, I. I, p. 208, pi. 30, fig-. 6).

(c) Exemple : Doris lacera (voy. Cuvier, Mém. sur les Doris, pi. i , Rg. 3). Doris pilosa (voy. Aider et Hancock, Op. cit., pi. d, ûg. 12). Doris tuberculala (XWer et Hancoc.l<, Op. cit., pi. 2, tig. 1). Doris argo (Carus et Otto, Tab. Analom. compar. illustr., pars iv, pi. 2, fig. 3).

(d) Souieyet, Voyage de la Bonite (Hist. nat., t. II, p. 449, Mollusques, pi. 24 c, fig. 18).

{e\ Milne Edwards, Si»' l'organisation de la Carinaire (Ann. des sciences nat., 2' série, t. XVIlI, pi. H,fig. 1 et 2). Souieyet, Voyage de la Bonite, Zool., Mollusques, pi. 22, fig. l.

(f) Lesueur a figuré ces organes cliez les Firoles, mais les désigne sous le nom de Poli/pes internes (Journal of the Acad. of l'hiladelphia, t. I, p. 41. pi. 2, fig. 7).

(g) Exemple : Tritoniu llombergii (voy. Aider et Hancock, Op. cit., fam. 2, pi. 1, fig. 2 et 3). (ti) Cuvier, Mém. sur la Limace et le Colimaçon, p. 18, pi. 1, fig. 3 et 4, et Atlas du Règne

animal. Mollusques, pi. 21, fig. i c. (i) Cuvier, Op. cit., pi. 2, fig. fi et 12.

Brandi, Mediclnische Zoologie, t. Il, pi. 34, fig. 14.

(j) Cuvier, Mém. sttr l'Onchidie, pi. 1 , fig. 4, 5 et 6 (Ann. du Muséum, t. V).

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 385

§ 15. L'œsophage qui fait suite à la cavité buccale est en général un canal étroit et à parois minces ; sa longueur est considérable chez les espèces qui sont pourvues d'une trompe protractile, et alors il se recourbe souvent en forme d'S dans

Jabot.

Chez la Paludine commune , elles offrent à peu près la même disposi- lion, mais elles sont moins dévelop- pées (o).

Chez le grand Triton de la .Méditer- ranée {T. nodnlosum), ces organes sont 1res gros et divisés chacun en deux ou trois lobes fort distincts , mais fixés à un même canal excréteur (b).

Chez la Janthine, les glandes sali- vaires sont grêles et cylindriques , comme chez les Aplysies, mais au nombre de quatre. Celles de la pre- mière paire débouchent au bord anté- rieur de la trompe, tandis que celles de la paire postérieure s'insèrent au fond de la cavité buccale, sur les côtés de la langue (c).

Chez V Agathina maiiritiana , ces organes sont complètement bilobés, mais leurs canaux excréteurs se réu- nissent en un tronc commun de chaque côté de Toesophage {d;.

Rang a décrit el figuré deux paires de glandes salivaires chez les Atlan- tes (ei; mais, d'après des recherches de Souleyet,il paraît s'être trompé sur

la détermination des parties qu'il con- sidère comme constituant la paire an- térieure de ces organes (f), et il n'en existe, en réaUté, qu'une paire ((/).

M. AUman a trouvé aussi deux paires de glandes salivaires chez l'Ac- téon, l'une débouchant sur le coté de la langue, et l'autre tout près du bord labial ih).

Chez les Éolides, les glandes sali- vaires paraissent être réduites à deux petites masses de follicules logées dans l'épaisseur de la masse linguale {ij.

La structure intime des glandes sali- vaires n'a été étudiée que chez un petit nombre de Mollusques. En géné- ral, ces organes se composent d'une multitude de petits cœcums membra- neux et arrondis, qui sont suspendus à l'extrémité des divisions du canal excréteur et enveloppés dans une tu- nique membraneuse commune. M.Ley- dig a constaté que chez le Colimaçon chacun de ces acini renferme un certain nombre d'utricules ovoïdes pédiculées (j) ; leur canal excréteur est tapissé d'un épithélium vibratile.

(a) Olivier, Mëm. sur la Vivipare d'eau douce, fig. 3 et 8 (Annales du Muséum, 1808, t. XI). (6) f'oli, Testacea uiriusque Siciliœ, t. 111, pi- 50, ûg. \.

Milne Eclwanls, Voyage en Sicile, l. I, y>\. 25.

(c) Cuvier, Mém. sur la Janthine, etc., p. 9, lig. C, [Ann. du Muséum, t. XI).

((/) Quoy et Gaimanl, Voyage de l'Astrolabe, Mollusques, pi. -49, fig. 21, et Aths du Règne animal Je Cuvier, Mollusques, [il. 25, fig. 1 a.

(ej Rang, Observ. stir le genre Atlante (Mém. de la Société d'histoire naturelle de Paris, t. III, p. 377, pi. 9, liK-tS).

(f) Soiilcyet, Voyage de la Bonite, Zoul., t. Il, p. 303.

ig) Hiixlèv, On the Morplwlogy of Cephalous Mollusca, elc. (l'hiios. Trans., p. 37, pi. 3, fig. 1 /■).

Gegenhauer, Unters. iïher Pteropoden und Helcropoden,\',\. 0, fig. 1.

(h) Allman, On the Anatomy ofActœon (Ann. of Nat. Hist., 1845, t. XVI, p. 147, pi. G), (i) Hancock and Embleton, Anat. ofEolis (Anat. ofNal. Hist., t. XV, pi. 3, fig. 6).

.\lileret Hancock, Op. cit., fam. 3, [il. 7. fig. 6.

(j) Leydig, Ueber Paludina vivipara (Zeitschr. fiir wissenschaftl. Zoologie, 1850, I. H, p. 1(3(5, pi. 12, fig. 1 l,ct Lehrbuchder Histologie, p. 348, fig. 18ft, A).

Estomac.

oSli APPAREIL DIGESTIF

la portion libre de la cavité abdominale, quand cet organe est an repos. Quelquefois cette portion du tube alimentaire se dilate postérieurement de façon à constituer un réservoir alimentaire appelé ya6o«, qui précède l'estomac et le gésier, quand ce der- nier organe existe, et qui est probablement destiné à faciliter l'action de la salive sur les matières nutritives. Ce mode d'or- ganisation se remarque chez les Aplysies et la Limnée des étangs, par exemple (1).

§ 16. L'estomac des Gastéropodes, comme celui des Mol- lusques Acéphales, est en général entouré par le foie ; il se continue toujours avec l'intestin , et les canaux biliaires y dé- bouchent. D'ordinaire il est médiocrement développé et n'offre dans sa disposition rien de remarquable (2) ; mais chez la i)lu-

(1) Ainsi que je l'ai déjà dit (page 380), le jabot des Aplysies est très développé ; il se prolonge en cul- de- sac postéiieuiement, au-dessus de la porlion antérieure du second es- loniac ou gésier (a).

Chez la l'onne perdrix {Dnliuni perdix), Quoy et Gaimard ont figuré une poche membraneuse appendue au jabot [b] ; mais il est probable que cet appendice naissait plus en avant, et n'était autre chose que le fourreau de la langue , qui se voit très bien dans les ligures anatomiques de la Tonne cannelée faites par Poli (c).

Chez la Limnée des étangs, le jaijot est pyriforme et n'ofîre rien de remar- quable {d}.

Chez pi usieursGastéropodes qui sont dépourvus de gésier, la portion du tube

alimentaire qui correspond au jabot chez les Mollusques dont il vient d'être question, s'élargit aussi en manière de réservoir, mais se confond posté- rieurement avec l'estomac propre- ment dit. Je citerai comme exemple de cette disposition le Colimaçon (e). Il en est à peu près de même chez les Haliotides, si ce n'est que le premier estomac est séparé du second par une valvule semi-lunaire (/").

chez le Buccin onde, on voit sur le côté de l'œsophage un petit prolon- gement en cul-de-sac qui peut être considéré aussi comme un jabot (g).

(!2) Ainsi, chez le Colimaçon, l'esto- mac ne se distingue pas nettement de l'œsophage et ne s'élargit que peu ; sa portion postérieure est séparée de sa porlion antérieure par un léger étran-

(a) Cuvier, Mdm. sur VApbjsie, \à. 3, liy. l, o,c {.\nn. du ihiséuni,l. 11).

Miliie Eilwards, Vm/age en Sicile, t. 1, pi. 23.

(()) Quoy et Gaiinaiil, Votjaye de l'Astrolabe, Mollusques, |i1. 41, ûg. 4.

(r)Poli, Testacea ulrms(iue Siciliœ, l. III, pi. 50, fig^. 8.

(rf) Ciivier, Méiii. sur la Limnée, pi. d, fig. 9, l (A)ui. du Muséum, 1806, t. VII).

[e] IJcm, Mém. sur la Limace, etc., pi. 1, tl;^. 3 et 4 {Ahh. du Muséum, t. Vil).

(f) Idcni, Mém. sur VHalislide, etc., )>. 10, pi. 1 , lig. 15, 10, 17.

{g) Idem, Mém. sur le Grand Buccin, pl. 1, lig. G et 15, h {Ann. du Muséum, t. XI).

lues.

DES MOLLUSULES C.VSTÉROl'UDKS. 385

piu1 des Éolicliens et ehez quelques autres Animaux du même ordre, la eonformation de eelte porlion de l'appareil digestif est; fort singulière.

Ainsi, en étudiant au mieroseope un de ees petits Mollusques AppeiMiices dont les téguments étaient assez transparents pour me i)ermettre tiqu d'observer direetementee (jui se [)assait dans l'intérieur de son corps , j'ai vu tort distinctement la matière végétale de cou- leur verte qu'il avalait, traverser l'estomac et s'engager dans mi vaste système de canaux en communication avec cet organe. Ces conduits s'avançant au loin dans le corps du Mollusque, se divi- saient en branches et se terminaient par des culs-de-sac dont les uns se trouvaient dans la tète, d'autres dans l'intérieur des appendices branchiaux dont le dos de l'Animal était garni. En taisant connaître ce système de canaux dans lequel les matières alimentaires étaient charriées et parvenaient quelquefois jusque dans les [)arties les plus éloignées de l'économie, je l'ai dési- gné sous le nom iV appareil gaslro-vasculaire, et je l'ai comparé aux appendices tubuleux que nous avons vus naître do l'estomac des Méduses (1). Peu de temps après, des observatif)ns ana-

glement, et se prolonge un peu on forme de ciil-de-sacau delà du pylore, commence l'intestin (a).

Cliez le Buccin onde, l'estomac est mieux délimité ; il est arrondi, mais peu volumineux (6).

Chez le Pleurobranche , l'estomac présente une disposition beaucoup plus complexe. Les vaisseaux biliaires débouchent dans une première cavité arrondie qui est suivie d'un gésier

dont les parois sont médiocrement épaisses, et dont l'ouverture posté- rieure donne dans un troisième esto- mac à parois feuilletées longitudinale- menl. Enfin une quatrième dilatation stomacale se voit entre ce dernier et l'intestin (c).

(1) Mes observations ont été faites en 18/|0 sur un petit Éolidien de la mer de Nice, que j'ai désigné sous le nom de CalUopée de Risso {d). La

(a) Cuvier, Méni. sur la Limace et le ColimaMii, p. 18, pi. 1, fi-. 4 {Ann.dtt Muséum, I. VII), et Atlas du Règne animal, Mollusques, pi. 21 , fig. l c.

(b) Cuvier, Me m. sur le Grand fiucin. p. 10, Hj. 1 fj (Ann. du Muséum, t. XI).

(c) Cuvier, Mém. sur la PInjllidie et le Pleurobranche, i\<g. 5 et 0 (Ann. du Muscun, IS'Oi, t. V), et Atlas du lièijne animal, Mollusques, pi. 3-2, l'v^. 1 /{.

((/) Mihii; Edwards, Observations sur la structure et les l'onclions de quelques ZouiiUijtes, Mol- lusques et Crustacés des cotes de France {Ann. des sciences nat., i' série, 1842, t VIII, p 3.'i0 pi. 10, lig. 2).

V. 25

386

APPAREIL DIGESTIF

logiies furent faites sur d'autres Mollusques de la même famille par plusieurs zoologistes, et M. de Quatrefages proposa de désigner ces Gastéropodes sous le nom commun de Phlé- bentérés. Les vues qu'il présenta au sujet des usages de ces dépendances de l'estomac et des relations qui peuvent exister entre ces fonctions et le travail d'irrigation nutritive don- nèrent lieu à des débats fort vifs, dont il serait inutile de nous occuper aujourd'hui ; mais, en laissant de coté les discus- sions sur les mots et en dégageant ces questions de ce qui y était étranger, il me paraît nécessaire de m'y arrêter un instant (1).

Le fait anatomiquc que j'avais signalé, et que M. de Quatre- fages, ainsi que MM. Lovén, Nordmann et plusieurs autres zoo- logistes avaient constaté ensuite chez d'autres Éolidiens, n'est plus mis en discussion aujourd'hui. Des erreurs avaient été

disposition générale de ces canaux est d'ordinaire visible sans dissection, à raison de la transparence des tégu- ments et de la coloration des cellules glandulaires contenues dans les pa- rois de ces organes. Tantôt ils sont jaunes ou verts, d'autres fois bruns ou rouges , et c'est à leur présence dans les branchies dorsales des Éoli- diens que ces appendices doivent les teintes particulières dont elles sont ornées.

(1) Ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de le dire, la plupart des auteurs qui ont écrit sur le phlébentérisme ont introduit une singulière confusion dans celte discussion, en appliquant ce mot à l'étal laciuiaire d'une por- tion du système circulatoire (a) , tandis qu'il ne se rapportait en réa- lité qu'éi la forme vasculaire et den-

droïde d'une portion de la cavité ali- mentaire.

M. de Quatrefages, il est vnii, avait supposé que ce mode d'organisation de l'appareil digestif coïncidait avec un état imparfait de l'appareil circu- latoire, el pouvait contribuer à faci- liter le travail d'irrigation ; mais c'est à tort que ses adversaires ont mêlé toutes ces questions sous une même dénomination. Pour éviter tout mal- eniendu, je pense qu'il vaut mieux abandonner les mots phlébe7itéré el phlébentérisme ; mais quand je les emploierai, je n'y altacherai d'autre sens que celui indiqué ici. En effet, pour moi, l'expression « Animal plilé- benléré » a toujours signifié Animal dont les dépendances de l'estomac ont la forme des tubes rameux à la ma- nière des veines.

(a) Voyez loiuc 111, page 233.

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. o87

commises par ces observateurs au sujet de la structure de quel(|ues parties adjacentes de l'organisme ou du mode de divi- sion de ces appendices tubuleux (1); mais leur existence ne pouvait être révoquée en doute, et les opinions n'étaient en réa- lité partagées que sur deux points : relativement à la détermi- nation de ces canaux rameux et à leurs usages.

Ainsi M. de Quatrefages reconnut parfaitement que les caecums par lesquels l'appareil gastro-vasculairc des Éolidiens se termine dans l'intérieur des branchies dorsales olïrent dans leurs parois une structure glandulaire, et qu'on doit les considérer comme les représentants d'un foie dont les élé- ments, au lieu d'être agglomérés comme d'ordinaire, sont épars dans l'organisme ; mais il pensa que la portion cen- trale de ce système de tubes qui débouchent dans l'estomac était formée par un intestin rameux. Il ne tarda cependant pas à trouver toutes ces parties disposées à peu près de même chez des Éolidiens l'intestin se présentait avec ses caractères ordinaires. Enfin Souleyet, qui, de son côté, avait constaté la même coïncidence, fit voir que le système gastro-vasculaire tout entier était constitué à l'aide des parties qui d'ordinaire concourent à former l'appareil biliaire seulement, c'est-à-dire les follicules hépafiques et leurs conduits excréteurs. Effecti-

(1) Ainsi c'est h tort que M. de Quatrefages avait cru à la non-exis- tence d'un anus chez l'Éolidien, il a d'abord étudié cet appareil gastro- vasculaire , et la description qu'il donna de la portion périphérique de ce système péchait à plusieurs égards (o). M. Nordniann s'est trompé

aussi au sujet du mode de terminai- son de l'appareil digestif (6), et Sou- leyet a fait voir que chez tous ces Mollusques l'intestin proprement dit débouche au dehors de la manière ordinaire (c) ; mais ces erreurs ne pouvaient exercer que peu d'influence sur la question dont je m'occupe ici.

(n) Qualrefages, Mémoire sur l'Éolidine paradoxale {Ann. des sciences nat., série, 1843, t. Xix', p. 274).

(b) Nordmann Versuch einer Monographie des Tergipes Edwarsii (ilfe'm. de l'Acad. des sciences, de Saint-Pétersbourg , partie étrangi-Te, l. IV).

(c) Souleyet, Observ. anat. et physiol. sur les genres Actéon, Eolide, Vénélie, etc. (Comptes rendus de VAcad. des sciences, 1845, t. XX, p. 89).

o88 M'i'AlîElL UK.i^STiF

veiricnl il en ost niiisi ; niais co dcrnior anatomislc cnt fort &cn conclure que les larges cananx rameiix cpii sont ainsi foi-més, et qni communiquent librement avec l'estomac, devaient servir seulement à livrer passage à la bile. Il me paraît indubitable que dans certains cas, sinon toujours, les matières alimen- taires très divisées y pénètrent, y séjournent même assez long- temps, et y sont en partie digérées comme dans l'estomac lui- même; enfin qu'à raison de la grande étendue de la surface perméable constituée par les parois de ces tubes, l'absorption des produits de la digestion doit s'y opérer comme dans le canal alimentaire, et que, par conséquent, cet appareil gastro- vasculaire, tout en étant un organe sécréteur de la bile, est aussi im instrument de digestion ('!). Du reste, il n'y aurait

(l) Les observations que j'avais faites en ISZiO, sur la Calliopée de Hisso, ne nie laissèrent aucun doute à cet égard {a), et, bientôt après, la pénétration des matières alimentaires dans cette portion rameuse de l'appa- reil digestif fut constatée de nouveau, non-seulement par M. de Quatre- fagcs (6), mais aussi par MM. Han- cock et Embleton (c), M. Aider (d) et M. Nordmann {e). Un phénomène analogue a été observé aussi par M. Vogt chez les jeunes Aciéons (/").

Les corpuscules solides charriés par les liquides contenus dans l'appareil digestif sont ballottés par un mouve-

ment de va-et-vient, et on les voit souvent entraînés par les courants jusque dans les parties périphériques du système. Ces courants me parais- sent être dus principalement à l'ac- tion de cils vibratiles qui garnissent la surface interne des gros conduits biliaires , aussi bien que du tube alimentaire. M. de Qualrefages a vu cet appareil ciliaire chez des Éoli- diens (g), et MM. Aider et Uancok en ont consiaté l'existence chez le Deudronotus {h).

Chez les Gastéropodes non phlében- térés, tels que le Paludina vivipara, on trouve aussi des cils vibratiles très

(a) Milnc EcKvnrds, Op. cil. {Ann. des sciences nal., 2- série, 1842, t. VIII, p. 330).

(b) Qualrefa^'es, Op. cit. [Ann. des sciences nat., 2' série, t. XIX, p. 286).

(c) Hancock and Embleton, On Ihe Anatomy of Eolis {Ann. of Nat. IHst., 1845, t. XV, p. 84). {d) .\lilcr and Hancock, Monogr. of Ihe Brilish Nudibrancliiale MoUusca (texte explicaiif de la

pi. 1 , fani. 3).

{e) Nordmann, Note sur le système gnslro-vasculairc des EoUdiens {.\nn. des sciences nal., série, 1850, t. XIII, p. 237).'

(/■) C. Vo^'t, liecherdies sur l'cmbrijoloijie des Mollusques Gastéropodes (Ann. des sciences nal., t. XIX, p. 286).

(g) Qnatrcfagcs, Mcm. sur les Mollusques phlébenlérés [Ann. des sciences nal., série, 1844, t. I, p. 160).

(h) Aider and Hancock, Nudibr. MoUusca (texte cxplicalil' de la pi. 2 de la 3* série).

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. o89

rien qui étonnerait ceux qui connaissent les moyens dont la Nature lait souvent usage pour répondre à certains besoins de l'oreanisme animal , et nous v voyons seulement un nouvel exemple de ces emprunts physiologiques dont il a déjà été question plus d'une fois dans le cours de ces Leçons.

Chez (|uelques Gastéropodes , cette portion de l'appareil digestif est loin de pr<;scnter la complication de structure qui la rend si remarquable chez les Éolides. Ainsi, chez les Pavois et les Chalides, elle n'est pas rameuse, et consiste en mie ou deux grandes poches membraneuses qui se confondent avec l'estomac et qui paraissent loger les follicules hépatiques dans l'épaisseur de leurs parois (1). Dans le genre Rhodope, elle consiste aussi en un énorme eul-de-sac en prolongement de l'estomac; mais les parois de cette poche se dilatent sur plu- sieurs points de façon à former de ])etits cœcums autour des- quels se groupent les follicules biliaires ("2). Une disposition analogue se voit chez les Diphyllidies; seulement les ai)pen-

développés dans la portion anlérieure du tiihcî alimentaire, ainsi que dans Tesloniac ; mais la porlion terminale de l'iiueslin en est dépourvue. En géné- ral, ces appendices sont disposés par bandes longitudinales {a).

(1) Dans le Pelta coronata le gésier est suivi d'une énorme poche qui se prolonge en avant sur les côtés de cet organe, de façon à y former deux gros caecums qui sont bossues en dessus aussi bien qu'en arrière (6). M. de Qualrefages n'a pu découvrir l'intes- tin, qui d'ordinaire naît sur le côté de l'estomac et va déboucher au dehors ; mais il est probable que cette portion

terminale de l'appaieil digestif ne manque pas.

Cliez le Chalidis cœrulea, la por- tion centrale ou stomacale de cet ap- pareil se continue latéralement avec une paire d'énormes poches qui se prolongent en cul-de-sac, en avant sur les côtés de la niasse buccale, et en arrière jusqu'au fond de la cavité abdominale (c).

(2) !\l. Kulliker, à qui l'on doit la découverte du petit Mollusque désigné sous le nom de Rhodope Veranii, a trouvé que l'estomac de cet Animal présente en avant deux prolonge- ments en forme de caecums, à peu près

(o) Lcydig-, Lehvbuch dcv Histologie, p. 33t.

(b) Ûnalrofagos , Mém. sur les Gastéropodes plilchcntcrés {Ann. des sciences nal,, 3* série, 18-44, I. I,p. 153, pi. 4, lig. 5).

(f) QiialrefaiîPs, Op. rit. {.\nv. des scieiices luil., 3" soiip, t. 1, pi. i, llg-, 4).

390

APPAREIL DIGESTIF

(lices liépaliques, au lieu d'être simples, se ramifient, et consti- tuent deux séries d'arbuscules qui se logent dans l'épaisseur des branchies situées sur les côtés du corps (1).

Dans l'Éolide papilleuse et quelques autres Mollusques du même genre, la portion centrale^de l'appareil digestif ressemble beaucoup à ce que nous venons de voir chez les Diphyllidiens; mais le grand cul-de-sac postérieur de l'estomac se rétrécit un peu, tandis que les canaux qui en partent pour pénétrer dans les appendices branchiaux et y constituer des lobules hépa- tiques, se développent davantage et s'élargissent beaucoup, de façon à former un système de tubes rameux en communication facile avec la portion centrale de l'estomac (2). Dans d'autres

comme chez les Pavois, et donne nais- sance à l'intestin du côté droit, puis se prolonge postérieurement en une énorme poche impaire qui se termine en cul-de-sac, et qui porte sur sa face dorsale un nombre considérable de petits appendices pyriformes de nature glandulaire (a).

(1) Cette dispositiou , qui avait été imparfaitement aperçue par J. Meckel , est très bien représentée dans les planches anatomiques de M. Délie Chiaje et de Souleyet (6). 11 n'existe aucune ligne de démarcation entre l'estomac, d'où naît l'intestin, et l'é- norme cul-de-sac qui se prolonge jus- qu'à l'exliémité postérieure du corps, et qui porte en dessus deux ran- gées de canaux hépatiques, lesquels passent entre les muscles sous-cutanés et vont se ramifier dans l'épaisseur

des appendices branchiaux. ils s'entourent d'un tissu glandulaire, et forment autant de petites touffes hépa- tiques.

(2) Chez VEolis papillosa, il n'y a aucune ligne de démarcation entre la portion antérieure de la grande poche stomacale se trouve le pylore, et par conséquent l'intestin prend nais- sance, et le cul-de-sac conique qui se prolonge jusqu'à l'extrémité posté- rieure du corps. Les branches laté- rales qui s'en détachent proviennent, les unes de la portion antérieure de la poche gastrique au-devant de l'ori- gine de l'intestin, les autres du côté de la portion rétrécie et postérieure de la poche médiane. Elles sont très larges, et se divisent chacune en deux ou plusieurs branches qui se dirigent transversalement en dehors et don-

(a) Kollilier, Rhodope^ miovo gcnere di Gasteropodi, fig. 1 {Giorn. del Islïi. Lombardo-Venct., 1847).

(&) J. F. Meckel, Beschvcibung ciner neuen Molluska (Deutsches Archiv fur die Physiologie, 1823, t. VIII, p. 190, pi. 2, fig. 4).

Délie Chiaje, Descri%ione e notomia degli Animali invertcbrati delta Sicilia citeriore, t. II, p. 42, pi. 45, Cg. 14.

Souleyet, Yoyage de la Bonite, Zool., t. II, p. 458, pi. 24 R, fig. 4, ,''. nt 10.

DES MOLLUSQUES GASTÈROI'ODES. oOi

Mollusques de la famille des Éolidiens, ce même prolongement postérieur de la poche stomacale se rétrécit encore davantage, de façon à prendre la forme d'un vaisseau cylindrique, et ailleurs cet appendice médian se bifurque, ou se trouve représenté par deux tubes membraneux qui naissent de l'estomac et qui se ramifient dans les parties périphériques de l'organisme (1).

nent naissance aux caecums qui pénè- trent dans les branclùes dorsales (a). La disposition de cet appareil est à peu près la même chez VEolis Cu- vierii (h).

Chez VEolis coronata et VE. oliva- cea, la partie centrale de l'appareil di- gestif se divise en deux portions assez distinctes : Tune, qui est située au- devant du pylore, reste renflée, et constitue alors l'estomac proprement dit; l'autre, qui fait suite à celle-ci, se rétrécit de façon à devenir tubu- laire et à avoir l'apparence d'un ap- pendice gastrique ou d'un gros canal biliaire (c).

Le grand tronc gastro-hépatique est également impair cliez le Fionia no- hilis [d), VEmbletonia pulchra {e), le Tergipes Edwards ii (/"), etc.

(1) Ainsi que je l'ai déjà dit, ce mode d'organisation se voit chez les Calliopées, et il se lie à celui des Cha- lides de la même manière que la dis- position de l'appareil gastro-hépatique des Éolides se rattache à celle des Pavois. Chez les Chalides, nous avons

vu l'estomac se prolonger on deux grands culs-de-sac {g) ; chez les Actéo- nies , la grande poche stomacale est bifurquée dans presque toute sa lon- gueur, et envoie latéralement cinq ou six prolongements dans les appendices branchiaux [h).

Chez YHermœa dendritica , les deux caecums postérieurs sont encore assez larges dans le voisinage immé- diat de l'estomac proprement dit, mais se rétrécissent bientôt de façon à ne constituer qu'une paire de vais- seaux à peu près cylindriques, qui se prolongent jusqu'à l'extrémité posté- rieure du corps, et, chemin faisant, fournissent beaucoup de branches dont les unes se ramifient sous les tégu- ments communs du dos, et les autres pénètrent dans les branchies pour y constituer les [grands caecums hépa- tiques. Une autre paire de vaisseaux rameux naît de la partie antérieure de l'estomac, et paraît correspondre aux cornes antérieures de la poche hépalo - gastrique des Chalides. Ces derniers canaux se ramifient dans

(a) Hancock and Einbleton, On the Anatomy of EoUs {Ami. of Nat. Hist., t. XV, pi. 2, fig-. 0). Aider and Hancock, Monogr. of the Nudibr. Mollusca, fam. 3, jd. 7, fig. 1, 2 et 13.

(b) Souleyet, Voyage de la Bonite, t. H, p. 423, Mollusques, pi. 24 A, pi. 41 et 12.

(c) Hancock and Eniblelon, Op. cit. (Ann. of Nat. Hist., t. XV, pi. 3, fig. 1 et 2). {d) Aider and Hancock, Nudibr. Mollusca, fam. 3, pi. 38 A, fig. 2 et dO.

(e) Aider and Hancock, Op. cit., fam. 3, pi. 38, fig. 2 et i.

(/■) Nordmann , Versiich einer Monographie des Tergipes Edwarsii , pi. 2 (Mém. de l'Acad. de Saint-Pétersbourg , Savants étrangers, t. IV). (gi Voyez ci-dessus, page 383. [h) Qualrefages, Op. cit. {Ann. des sciences nat., 3' série, t. I, |d. 4, fig. 3).

392 APPAREIL niCKSTiP

(]liez iieaucoLip d'Eolidiens, ces canaux, ainsi (juc Je l'ai déjà dit, sont assez larges pour se laisser pénétrer par les aliments inconiplétemenf digérés, et ils constituent, alors ce que j'ai appelé nn système fjastro-vasculaire; mais ailleurs ils deviennent trop étroits pour livrer passage à ces substances, et ne servent plus qu'à conduire vers l'estomac proprement dit lesli(piides sécrétés par les giandules biliaires dont leurs liranches terminales sont entourées. Ainsi la portion de l'appareil digestif qui, cbez les nns, constitue une partie de l'estomac et ne consiste qu'en un grand prolongement terminé en cul-de-sac, devient cbez d'autres un tube rameux, et cbez d'autres encore, se transforme en un système de canaux efférents pour l'appareil hépatique (1).

la lêie et s'avancent jusque dans les tubercules frontaux ; leurs parois sont garnies de giandules biliaires, comme dans tout le reste de l'appa- reil (a) .

Chez d'autres Éolidiens, ce système de canaux est disposé à peu près de même, et les principaux groupes de giandules biliaires sont également lo- gés dans les appendices branchiaux ; mais ces canaux, dans le voisinage immédiat dt* l'estomac , deviennent fort grêles, et se trouvent ainsi allectés uniquement au transport des produits de la sécrélion biliaire. Il est aussi à noter qu'ils se réunissent toirs (ceux de la lète comme ceux de la région dorsale) en deux troncs principaux qui vont déboucher sur les côtés de l'estomac. Ce mode d'organisation se

voit dans le genre Janus de M. Ve- rani , ou Antiopa de J\IM. Aider et Hancock [b).

Chez les Actéons (ou Kiysies), le foie est également dilTus et relié à l'esto- mac par un système de tubes étroits dont les ramifications s'étendent dans presque toutes les parties du corps (c).

(1) AI M. Hancock et Embleton ont cru que chez les Éolides ces canaux s'ouvraient au dehors, à l'extrémité de chaque appendice branchial {d). On voit, en eflet, au sommet de ces or- ganes, un orifice : mais M. de Quati^e- fages a constaté que ce pore ne com- munique pas avec l'appareil gastro- hépatique, et appariient à une petite poche qui sert de réservoir pour des nématocystes ou capsules hlifères urti- cantes (e). Souleyet pense même que

la) Aider nnd Hancock, Monogv. of Ihe Niidibr. MoUusca, faiii. ."î, pi. 40, fig-. \.

[h) Dulle Chiaje, Descriz. c notom. degli Aniniali invertclir. délia Sicilin rilcr., pi. 88, ùg. 2.

Blancliaid, Op. cit. {Ann. des sr. nat., 3" scrio, IS/pS, t. IX, p. 185, it t. XI, pi. ?,, ûg. i). Aider aiid Hancock, N%ldibr. MoUusca, fam. 3, pi. i3, lii,'. i et 2.

(p) Qiialrefagcs, Màn. sur les Mollusques phlébmlcrn {Ann. des sciences nat., 18i4, I. I, p. 141, pi. 4,'fig. 2).

Allman, On the Anatomy of Actœnn {Ann. of Nul. Ilisl., 18i.''>, i. XVI, p. 1 18, jil. C).

Soideyet, Yni/age de la ftnnile, Zool., I. II, p. 48(>, Mollusques, pi. 2i L), i'is;. 7. ((/) Hancock ami Kinldelon, ()/). rit. {Ann. of \at. Ilisl., I. XV, p. S, p|. 4, fi?. 0). {e) Soidcvel, Voyuçie de la llouilr, i. Il, p. 12 'i.

DKS MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 393

Cliez les Éolidicns, le foie est donc épars et se trouve repré- senté par les branches terminales du système de canaux gastro- vasculaires qui sont en quelque sorte la continuation delà poche stomacale. Cette glande ne se compose, par conséquent, que d'un certain nombre de caecums dont les parois sont occupées par les follicules ou cellules hépatiques, et ces caecums sont logés principalement dans les appendices respiratoires dont le dos de l'Animal est couvert.

Mais chez la plupart des Gastéropodes , l'appareil hépatique est centralisé (1); les cœcums sécréteurs se multiplient beau-

Foie.

celle poclie ne s'ouvre pas extérieu- rement, mais cette opinion ne me paraît pas être fondée.

Ces caecums terminaux de l'appa- reil gaslro-hépalique sont en général plus ou moins élargis, et paraissent être quelquefois des cylindres simples il parois folliculiléres : par exemple, cliez VEolis concinna (a) ; mais d'autres fois ils deviennent comme framboises ou se couvrent de végéta- tions de tissu glandulaire {h); ils de- viennent alors plus ou moins lobules tout autour, et, dans quelques espèces, le canal qui en occupe le centre se ramifie d'une manière très élégante dans l'intérieur de ces prolongements latéraux, ainsi que cela se voit chez VHermœa bificla (c).

Souvent le même tissu glandulaire se voil sur les parois des gros troncs, et ([uclquefois il s'en trouve des pe- tites niasses qui naissent directement sur les parois de l'estomac : chez le Dendronotiis, par exemple [d].

(l) L'état dilTus de l'appareil hépa- tique est très ordinaire chez les Gas- téropodes de l'ordre des Opislhobran- ches, mais ne se rencontre pas chez les Prosobranclies, les Pulmonés et les iléléiopodes.

Chez les Onchidies, le foie offre, comme d'ordinaire, les caractères d'une glande conglomérée, mais il n'est pas réuni en ime seule masse, et forme trois lobes parfaitement indépendants les uns des autres. Le foie antérieur est situé à gauche, vers le milieu de la masse viscérale , et débouche dans l'œsophage, près du cardia; le second lobe, moins grand que le précédent, est situi' à droite, plus en arrière, et s'ouvre dans la même partie du tube alimentaire ; enlin le troisième, beau- coup plus petit que les deux autres, est situé sur le dos, derrière l'estomac, et s'ouvre dans le gésier (e).

Chez la Limace, le foie se compose de beaucoup de lobules agglomérés en cinq lobes, dont les canaux excré-

(«) Hancock ami Enibleloii, Op. cil. {Ann. of Nat. Illsl., t. XV, pi. 4, ttg. i).

{b\ Exemple : Enlis papillnsa (voy. Hancock anJ Embleton, loc. cit., pi. i, fig'. 4 cl 5).

(c) Allier ami Hancock, Nudihr. MoUmca, faiii. 3, pi. 3'J, fig. 3 et 4.

[d] AMei- and Hancock, Op. cit., fani. 3, pi. 2, fi^'. 2.

(c) Cnvior, Mém. sur l'Onrhidie, p. 0, pi. 1, fitr. i (Ann. du Mu.iéum, I. V, •1S04).

Glandes accessoires.

394 APPAREIL DIGESTIF

coup, et les tubes rameiix (\m les portent se raccourcissent, de façon ffue toutes ces parties rentrent dans la cavité abdominale et se groupent autour du tube digestif sous la forme d'une masse lobuleuse.

En général, le foie, ainsi constitué par une multitude de petits caecums disposés en grappe autour des ramuscules des canaux biliaires, est très volumineux et plus ou moins entremêlé avec les organes de la génération, de façon à former avec la portion voisine du tube digestif une masse viscérale qui est revêtue d'une tunique membraneuse assez serrée et qui se loge dans la région dorsale du corps, sous la coquille (1).

Quelques anatomistes donnent le nom de pancréas à un petit prolongement en cul-de-sac (]ui se voit à coté du pylore, à l'extrémité de l'estomac simple de divers Mollusques Gastéro- podes , les Doris, par exemple (2) -, mais rien n'établit que cet appendice soit un organe sécréteur particulier , et, lors même que ses parois seraient glandulaires, il n'y aurait, dans l'état

leurs se réunissent tous en deux troncs qui vont déijouciier dans le fond de feslomac, près du pylore (a).

Cliez le Colimaçon, il n'y a que quatre lobes hépatiques, et tous les conduits biliaires se réunissent en un seul canal qui s'ouvre également à côté du pylore (6).

Enfin, chez les Testacelles , le foie est réduit à deux lobes {<:).

(1) Les canaux biliaires, qui débou- chent dans l'estomac, sont en général très larges, et celui de gauche est

plus développé que son congénère {d). Les ampoules ou organilcs sécréteurs qui terminent les ramuscules de ces tubes hépatiques sont garnis inté- rieurement de cellules épilhéliqiies dans la cavité desquelles on distingue souvent des gouttelettes graisseuses. La structure en a été étudiée, chez le Colimaçon, par M. Laidy (e).

(2) Ce petit caecum naît du py- lore (/'), et se voit aussi, mais moins bien développé, chez les Téthys.

(a) Cuvier, Mém. sur la Limace et le Colimaçon, \>. 19, pi. 2, fig. 12 {Ann. du Muséum, t. Vil). *eile Cliiaje, Descn%ione e notomia deyli Anhnali invevtehrati, pi. 37, fig. 0. (6) Cuvier, loc. cit., pi. ■! , de;. 3.

(c) Moquin-Tamlon, tl'istoire des Mollusques terrestres et lluvïaliles, l. I, p. 52.

(d) Voyez Poli, Testacea utriusquc Siciliœ, t. 111, pi. ,'>, frj;. 8.

Dellu Chiiije, lk'scri%. c iiotuvi. deoli .^nimah invcrlelnall. pi. r)X, (ig. 3.

(e) i. l.aiily, Kesearches into the comparative Structure of the Liver, pi. 1, fig. 15 ù 24 (cxlr. de V American .lourn. of Médical Science, 1848).

(/') Alrler and Hancock, Nudibr. Mollusra, fam. 1 , pi. -2, lig. 1 i.

DES MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 395

actuel de la science, aucun motif pour le considérer comme l'analogue du pancréas des Animaux supérieurs.

§ 17. L'intestin, qui fait suite à l'estomac et qui est le plus intestin. souvent en grande partie caché entre les lobules du foie, varie beaucoup en longueur et ne présente dans sa structure rien d'important à noter. Sa portion terminale, qu'on désigne d'or- dinaire sous le nom de rectum, traverse le cœur chez les Halio- tides, et il est probable que chez tous les Animaux de cette classe il débouche au dehors par un orifice anal, bien que chez quelques petites espèces cette disposition n'ait pu être con- statée (i).

La position de l'anus varie beaucoup ; mais presque toujours

(1) Plusieurs des petits Mollusques niant des anses fort remarquables (6).

chez lesquels on avait d'abord nié- Chez les Oscabrions, dont l'estomac

connu rexistence de l'anus en sont est aussi très simple et de médiocre

incontestablement pourvus (a) ; mais grandeur, l'intestin est extrêmement

jusqu'ici on n'est pas parvenu à long et forme diverses circonvolu-

découvrir cet orifice chez certains lions (c).

Opisthobranches, et notamment chez Chez le grand Triton de la Méditer-

les Pavois et les Chalides. ranée, l'intestin ne diflère que peu de

L'intestin des Gastéropodes paraît restomac, et décrit à peine quelques

être généralement plus long chez les circonvolutions (d). 11 en est de même

espèces phytophages que chez celles chez la Janthine (e) ; maisc'est chez les

dont le régime est carnassier. Quel- Gastéropodes phlébentérés , c'esl-à-

quefois l'intestin semble aussi compen- dire dont l'appareil gastro-hépatique

ser par sa grande longueur le peu de se développe en manière de gros tubes

développement de l'estomac. Ainsi, iameux,que l'intestin est le plus réduiL

chez les Patelles, l'œsophage est très Ainsi chez l'Actéon il ne consiste qu'en

court et l'estomac petit, cette portion un petit cylindre membraneux très

du canal alimentaire fait plusieurs fois court qui se porte presque directement

le tour de la cavité abdominale en for- de l'estomac à l'anus, situé tout au-

(a) Quatrefages, Mém. sur les Mollusques phlébentérés {Ann. des sciences nat., 2- série, ■1844, t. T, p. 170).

(b) Cuvicr, Mém. sur l'Haliotide, etc., pi. 2, fig. 9 et 12.

(c) Ciivier, toc. cit., pi. 3, fig. 11 et 13.

Délie Chiaje, Op. cit., pi. 74, fig. 13.

Middendorff, Beilrage %u einer Malacoioologia Rossica {Mémoires de l'Académie de Saint- Pétersbourg, 6' série, 1849, Sciences naturelles, t. VI, pi. 6, fig. 1 et 2).

(d) Milne Edwards, Voyage en Sicile, l. I, pi. 25.

(e) Délie Chiaje, Op. cit., pi. 67, fig. 3 ; pi. 68, fig. 11 .

o90 APPAREIL DIGESTIF

Position cet orifice se trouve dans le voisinage de la nuque, soit sur le

de l'anus.

dos, soit sur le cote droit du corps, et il se loge en général sous le manteau ou même dans une grande cavité formée par un pro- longement de ce repli cutané. L'oviducle et l'appareil urinaire s'ouvrent d'ordinaire dans la poche membraneuse ainsi formée, et celle-ci remplit par conséquent les fonctions d'un cloaque. Chez les Patelles, elle n'a pas d'autre usage (1), mais, dans la grande majorité des cas, les branchies, ou le réseau des vais- seaux pulmonaires, viennent s'y loger, et elle devient ainsi une chambre respiratoire. Comme telle, nous avons déjà eu rocca- sion d'en étudier le mode de conformation (2), et par consé- quent je ne m'y arrêterai pas ici. J'ajouterai seulement que le rectum longe la voûte de cette cavité du côté droit et débouche près de son bord antérieur, de façon à se trouver sur le trajet du courant cxpiratoire (3). Chez les Opisthobranches et un petit nombre de Pulmonés cette cavité palléale n'existe pas, l'anus se voit tantôt dans le sillon qui sépare le manteau du pied, d'autres (bis vers le milieu du dos, entre les appendices bran- chiaux, (>t presque toujours il y a connexité entre ces or-

près (a), el cliez la plupart des Éoli- el sons le bord anléileur du nian-

dieiis il est également fort court et leau (c).

très simple [b). (2) Voyez tome II, page 56 et suiv.

(1) La chambre palléale des Pa- (3) Chez lesHaliotides, lereclnm fait

telles est assez grande, quoique les saillie dans la clianibre cloacale ou

organes respiratoires ne s'y logent respiratoire, entre la base des deux

pas, et elle s'ouvre au dehors par branchies {d} ; mais chez la plupart

une large fente transversale située des l'rosoi)ranches il est placé à droite

derrière la tète, au-dessus du dos de ces organes , et marche parallèle-

(a) Allman, On Ihe Aiiatomij of Aclœon {Ann. of Nat. Ilisl., 1845, t. XVI, p. 1 47, |)1. 0 g).

Souleyet, Voyage de la Bonite, Mollusques, pi. 24 D, fig'. 1 el 8.

{h) Hyiicuck ami Emlilcloii, Analomy uf Eolis {Ann. of Nat. Hist., I. XV, |i|. 2, fi"-. 0; pi. 3, fis'- -1. 2, 4).

Soulcyel, Op. cit., pi. il A, fig'. H el i2.

(c) Cuviei-, Meiii. .sur Vllaliotide, etc., pi. 2, liff. 8.

Poli, Testacea ulriusque Siciliu', 1. III, pi. 55, fig'. 26.

Milne Edwards, Voyage en Sicile, t. I, pi. 27, fii?. 2. {d)Cu\\ev, Mém. sur illaliolide, etc., pi. 1,fij;. 12 ('114.

Milne Edwards, Op. cit., pi. 2tî, li;;-. i.

HKS MULLUSQUtS G ASTÉKOrUDIiS. o')7

piiies (1). Les Gasioropodes chez lesiiiicls raims se trotivo sur la ligiio médiano sont en très |»etit nombre, et il est eneore plus rare de trouver cet orifice à l'extrémité postérieure du corps, disposition qui existe cependant cliez les Oscabrions et les Onchidies [2).

ment à la partie terminale de Tovi- dncte, jusque' clans le voisinage de la tète (fl). Il en est de même chez le Colimaçon [b), les Agalhines (c), etc.

(l) Chez les Gastéropodes Opislho- branches, l'anus est souvent placé beaucoup plus en arrière que chez les l'rosobranches. Ainsi, chez les Pleuro- branches, il est situé à la base de la branchie, vers les trois quarts posté- rieurs du sillon qui sépare le manteau du pied (d), et chez les Aplysies il se trouve du même côté, mais encore plus en arrière (e).

Chezla plupart des Éolidiens, l'anus tend à devenir dorsal, mais se trouve encore du côté droit, à la base des branchies, à quelque distance de l'ori-

fice des organes génitaux, et non con- fondu avec celui-ci, comme le pensait Cuvier {f).

Dans le genre Janus ou Antiopa, cet orifice se porte beaucoup plus loin en arrière , presque sur la ligne médiane du dos (g). Il en est de même dans les genres Proctonotus ou Venilia [h) et Alderia (i). C'est aussi la place qu'il occupe chez les Doridiens, il se trouve vers le tiers postérieur du corps plus ou moins complélemcnt entouré par les branchies (j). Enfin dans les genres Hermœa et Stiliger de la famille des Éolidiens, il est égale- ment dorsal, mais se trouve à la partie antérieure du corps [k). '

(2) Chez ronchidie de Pérou, il

(a) Exemples : Turbo pica (voy. Cuvier, Mém. sur la Vivipare, etc., fijr. 7).

Turbo maruioratus (voy. Qiioy er GaimarJ, Voij. de l'Astrolabe, Moll., pi. 59, fig. 10).

La Phasianelle (voy. Cuvier, Mém. sur ta Jantliine, etc., fig. 11 et 12).

La Porcelaine (voy. Quoy et GaiiiwH, Op. cit., pi. 49, fig-. 4).

La Tonne ou Dolium galea (voy. Poli, Op. cit., t. III, pi. 50, fig. 1).

Le Triton de la Méditerranée (voy. Miliic Eilwards, Voyage en Sicile, t. I, pi. 25).

L.impullaire de Célèbcs (voy. Quoy et Gaimanl, Op. cit., pi. 57, fig. 0 et 7).

La Jantliine (voy. Délie Chiaje, Descrix,. e notom. degli Anim. sem-avertebr. dzlla Sicilia citeriore, pi. 07, fig. 3 ; pi. 08, fig. H).

(b) Cuvier, Mém. iur la Limace, etc., pi. 1, fig. 2 et 3 {Ann. du Muséum, t. VII).

(c) Quoy et GaimarJ, Voyage de l'Astrolabe, Mollusques, pi. 49, fig. 21, et Atlas du Règne animal ûc Cuvier, Mollusques, pi. 25, fig. 1 a.

(d) Cuvier, Mém. sur la Phyllidie, etc., fig. 2 (Ann. du Muséum, t. V).

(e) Cuvier, Mém. sur VAplysia, pi. 2, fig. 3 (Ann. du Muséum, 1802, t. II).

Délie Cliiaje, Descriiione e notomia degli Animali sema vertèbre délia Sicilia citeriore, pi. 58. fig. 1.

tf) Hancock and Embleton, .inat. of Eolis (Ami. of Nat. Hist., t. XV, pi. 5, fig. 10). (g) Blancharil, Op. cit. (Ann. des sciences nat., 3" série, t. II, pi. 3, fig. 1 ; pi. 4, fig. 2).

Aider and Hancock, Monogr. of the Drit. Nudibr. Mollusca, fani. 3, pi. 43, fig. 2.

(b) Aider and Hancock, Dcscr. of a ncw Gcnus of Nudibr. Mollusca (Ann. of Nat. Hist., série, 1844, t. XIII, pi. 2, fig. 1).

(i) Aider and Hancock, Monogr. of the British Nudibranchiate Mollusca, fum. 3, pi. 41 , fig. 1. (j) Cuvier, Mém. sur le genre Doris, pi. 2, fig. 1 (.\nn. du Muséum, t. IV).

Délie Chiaje, Descriz., pi. 40, fig. 3 ; pi. 41, fig. 12.

.\lder and Hancock, Op. cit., fam. 1, pi. (fe) Aider and Hancock, Ofi. cit., p. 13.

Appareil

digestif

des

Ptéropodes.

Tentacules.

398 APPAREIL DIGESTIF

§ 18. Dans le petit groupe des Ptéropodes, l'appareil digestif ressemble beauc-oup à ce rpie nous avons vu chez les Gastéropodes de l'ordre des Prosobranches , mais ])résente quelques particularités dignes de remarque ; et il est à noter que chez les uns sa portion antérieure est fort bien consti- tuée, tandis que sa portion profonde est disposée d'une manière beaucoup moins parfaite, mais que chez les autres c'est le contraire qui se voit : les organes qui avoisinent la bouche sont plus ou moins rudimentaires , tandis que l'estomac et le foie ont une structure plus complexe. Le premier de ces modes d'organisation se voit chez les Ptéropodes nus, c'est- à-dire qui n'ont pas de coquille; le second, chez les Ptéropodes conchylifères.

Ainsi, chez quelques Ptéropodes nus, les Clios et les Pneimio- dermes, par exemple, l'appareil digestif est enrichi d'organes préhensiles qui sont aussi des instruments de locomotion, et qui ont quelque analogie avec les bras circumbuccaux des Céplialo- podes : ce sont des appendices labiaux en forme de papilles ou de tentacules fort courts dont la surface est hérissée de petites ventouses susceptibles d'adhérer fortement aux corps étran-

existe, comme nous l'avons déjà vu, trois estomacs {a), lïntestiu qui fait suite à ces organes a environ deux l'ois et demie la longueur du corps, et va déboucher au dehors à l'arrière de l'abdomen , sur la ligne médiane , entre le pied et le manteau , au- dessous de l'ouvoriure de la poche pulmonaire (6).

Chez les Oscabrions, l'anus est placé de même à l'arrière du corps, entre le manteau et le pied (c), et il occupe la ligne médiane.

M. de Quatrefages a cru trouver un anus à l'extrémité postérieure du corps chez l'Acléoii [d) ; mais cet orifice est placé sur le côté droit du cou [e).

(a) Voyez ci-dessus, page 385.

(b) Cuvior, Mém. sur l'OncIddie, pi. 1, fiij. 2 et 5.

(c) Idem, Mém. sur l'Haliotide, etc., pi. i, fig. 9 et 13.

(d) Quatrefages, Mém. sur les Mollusques phlébentérés (Ann. det sciences nat., 2' série, 1844, 1. 1, p.^38.

(e) AUman, On the Anatomu of AcUroii {Ann. uf Nal. HlsL, 1845, t. XVI, p. 147, pi. G). Souleyet, Voyage de la Bonite, MoLLUSftUES, pi. 24 U, lig. 1 et 8.

DES MOLLUSQUES PTÉHOPODES. 399

gers (1). Chez les Hyales et les autres Ptéropodes conchyli- fères, on ne voit rien de semblable.

Chez les Ptéropodes nus, la bouche se prolonge souvent en Aimaïur forme de trompe rétractile (2) ; et non-seulement elle est armée d'un appareil lingual fort complexe et semblable à celui des Gastéropodes, mais parfois aussi elle est garnie d'organes pré-

buccalc.

(1) Chez les Clios, la bouche est entourée d'un certain nombre de pe- tits appendices coniques et rétractiles dans un repli cutané que Pallas a comparé à un prépuce (a) ; ce ne sont pas des tentacules labiaux ordinaires, comme le supposait Cuvier (6), car le professeur Eschricht (de Copenhague) a trouvé que leur surface est garnie de venlouses microscopiques, et par conséquent on peut les considérer comme analogues aux bras des Cé- phalopodes (c). Chez le Clio borealis, il y a trois paires de ces organes, et chez le Clio lonyicaudatus deux paires seulement, mais ils sont plus déve- loppés (d).

Chez les Pneumodermes, on voit également sur les côtés de la bouche un appareil préhensile de ce genre. Il se compose de deux appendices mem- braneux et tentaculiformes, portant

une douzaine de ventouses pédoncu- lées. (e) Ce mode d'organisation existe aussi dans le genre Spongiobranchia d'Alc. d'Orbigny (f). Dans le genre Euribia, on trouve, sur les côtés de la bouche , des appendices analogues , mais qui paraissent être dépourvus de suçoirs {g).

(2j La trompe est très grande et fort charnue chez les Pneumodermes (h) et les Spongiobianches (i) ; mais chez les Clios cet organe manque , et la bouche n'est pas protractile.

Chez les Ilyales, cette ouverture est située au fond de l'échancrure qui sépare en avant les deux nageoires, et ses bords sont à peine saillants (j). Les Cléodores et les Cuviéries sont également dépourvus de trompe.

Il en est de même chez les Cymbu- lies, mais leur lèvre supérieure se pro- longe en forme de voile plissé {k).

(a) Pallas, Spicilegia Zoologica, x, p. 28.

(b) Cuvier, Mém. sur le Clio borealis, p. 5 {Ann. du Muséum, t802, t. I).

(c) Eschricht, Anatomische Uiitersuchungen ûber die Clio borealis, 1838, p. 7 et suiv., pi. 11, fig. 12 et 13.

Souleyet, Voyage de la Bonite, Moi.lusquks, pi. 15 bis, fig. 5 et 6.

(d) Souleyet, Op. cit., t. II. p. 279, pi. U, fi-. 20.

(e) A. d'Orbigny, Voyage dans l'Amérique mêrid., t. V, Moll., p. 129, pi. 9, fig. 10 et 11.

Van Beneden, Exevc. zootom., pi. 47, elMém. de l'Acad. deBrux., t. XI, pi. 3, fig. 1 et 2. Gegenbaur, Untersuchungen ûber Pteropoden, pi. IV, fig, 10.

if) D'Orbigny, Op. cit., pi. 9, fig. 1 à 0. {g) Sovdeyet, Op. cit., t. II, p. 245, pi. 15, fig. 1 et 3. [h) Souleyet, Op. cit., pi. 14, fig. 12.

(i) D'Orbigny, Voyage dans l'Amérique méridionale, Mollusques, pi. 9, fig. 1. (j) Gegenbauer, Op. cit., pi. 1, fig. 1.

(fc) Van Benedeu, Mém. sur la CymbuUe de Péron, p. 15, pi. 1, fig. 3 (Exercices %ootomiques, et Mém. de l'Acad. de Bru.telles, t. XII).

Souleyet, Op. cit., t. II, p. 232, pi. Ibbis, fig. 20, 21.

ÛOO

Al'l'AHEIL DIGESTIF

hensiles latéro-supéricurs l'urt grands (]iii sont comparables aux mâchoires de ces derniers Mollusques. Chez les Ptéropodes nus, la masse linguale est petite, son armature est moins com- pliquée (1), et il n'y a que des rudiments de mâchoires ;!2).

(1) L'appareil lingual des Ptéro- podes est disposé à peu près comme celui des Gastéropodes. Ainsi, chez le Clio boréal, la râpe se compose d'une série longitudinale de pièces rachi- diennes mousses et d'un grand nom- bre de crochets qui forment de chaque côté de celles-ci vingt séries transver- sales (a).

Chez les Hyales {b) et les Lyma- cines (c) , l'appareil lingual est peu volumineux et ne se compose que de trois rangées longitudinales de pièces cornées, consistant en un crochet mé- dian et une paire de crochets laté- raux. Chez les Hyales, ces dents sont disposées sur huit ou dix rangées transversales. Chez le Cleodora tri- phyllis, il n'y a que cinq rangées trans- versales de dents (d).

(2) Les mâchoires des Ptéropodes diffèrent beaucoup de cellesdes Gasté- ropodes. Ainsi chez les Clios ces organes consistent en une paire de tubercules charnus qui sont logés dans une gaîne

membraneuse en forme de caecum, et qui portent une série d'appendices cornés disposés en faisceau ou comme les dents d'un peigne (e).

Chez les Pneumodermes, celte par- tie de l'appareil buccal est encore plus remarquable. De chaque côté de la masse linguale se trouve un grand appendice cylindrique qui se dirige en arrière, au-dessous de la masse viscérale, se termine en cul-de-sac, et renferme dans son intérieur un tube cartilagineux de même forme, qui est hérissé de crochets, et qui est suscep- tible de se dérouler au dehors, ou de rentrer dans sa gaîne par le jeu de dilTérenles fibres musculaires logées dans celle-ci (/).

Chez les Cliopsis , qui du reste ressemblent extrêmement aux Clios, il y a trois mâchoires hérissées de pointes [g].

Enfin, chez les Hyales, les Cléudores et les Cymbulies, les mâchoires sont représentées par deux séries de petites

(a) Eschricht, Op. cit., pi. 3, l'ij^. 22.

Lovén. Op. cit. pi. 3 {Ofversirjt af li. Vetenskaps-Akad. Furhandlimjar., 1847).

Troscliul, Das Gebiss der Schnecken, pi. 3, lisj. 8. Lovén, Op. cit., pi. 3 {Revue des travaux de V Académie de Stockholm, 1847). Soiileyet, Op. cit., pi. 9, fig. 9 et 10. ïroscliel, Das Gebiss der Schnecken, pi. 2, fig. 17. Lovén, loc. cit., pi. 3. Troscliel, Op. cit., pi. 2, ùg. 1.5. Troàclicl, Op. cit., p. 51. Eschricht, Op. cit., pi. 3, fig. 20, 21 a. Souleycl, Op. cit., pi. 15 bis, frg. 10 et 11.

Van Beneclon, Recherches sur le Pneumoilerinoii viulaciuii {Kxerciccs xoolomiques, p. 47, ûg. 5, el Mém. de l'Acad. de Bruxelles, t. .M).

Souleyet, Op. cit., t. 11, p. 262, pi. 14, fig. 13, et pi. ir., lii? 17, 18,19 ut 20. Gegenbauer, l'nlcrsurliunijcn iiher l'teropoden, \'\. 10, lig-. 10.

Troscliel, lieitraijc v»r Keniilniss der l'teropoden {.irchiv fUr Kalurgeschichte, 1854, l. 1, 2, pi. 10, fig. 10).

(b)

(c) (d)

in

pl. 1.

(il) p. 22

DES MOLLUSQUES l'TÉllOl'ODLS. /|0l

Enfin, chez ces derniers, les organes salivnires nian(|nent complètement on n'existent qn'à l'état rudinientaire, tandis qne chez les Ptéropodes nus, ils sont en général très volumineux, et consistent en une paire de longs caecums à parois glandu- laires (1).

L'estomac ^st d'une structure fort simple chez les Clios et les autres Ptéropodes sans coquille ; il ne consiste qu'en une poche membraneuse aux parois de laquelle le tissu hépatique adhère directement, ainsi que nous l'avons vu chez les Mol- lusques Acéphales {"2). Chez les Ptéropodes conchylifères, cette

Glaiulcs

salivairos.

Eslomac.

plaques cornées qui sont très petites et difficiles à apercevoir ; aussi ont- elles échappé à l'attention de la plu- part des zoologistes (a). Mais M. Tros- cliel en a constaté Texistence (6).

Chez les Tiedemannies, il ne parait y avoir aucune pièce dure dans la cavité buccale (c).

(1) Les glandes salivaircs des Clios consistent en une paire de caecums glandulaires qui descendent sur les côtés de l'œsophage et se renflent un peu vers le fond {d).

Chez les Pneumodermes, leur dispo- sition est à peu près la même, si ce n'est qu'on remarque une petite dila- tation en forme de vésicule sur le trajet de leur canal excréteur (e).

Chez les Euribies, ces organes sont simples et plus courts (/").

Chez les Ilyales, les glandules sali- vaires sont rudimenlaircs et ne con- sistent qu'en une paire de petits corps globuleux, situés derrière la cavité buccale, et s'ouvrant dans celle-ci par des canaux excréteurs filiformes {g). Il en Cbt à peu près de même chez les Cuviéries.

Chez les Cymbulies, ces organes manquent complètement {h) ou sont tout au moins réduits à de simples vestiges («). On n'en a pas trouvé de traces chez les Tiedemannies (j).

(2) Chez les Pneumodermes, l'œso- phage est long et cylindrique. L'esto- mac, qui y fait suite, a la forme d'une

(a) Soiileyet, Voyage de la Bonite, t. II, p. 50.

(b) Troschel, Op. cit. (Archiv fur Naturgeschichte, 1854, t. I, p. 199 et suiv.). Bas Gebiss der Schnccken, p. 5G et suiv., pi. 3, fig-. 4 et 5.

(c) Van Beneden , Mém. sur un nouveau genre de Mollusques voisins des Cymbulies, p. 26 {Mém. de l'Acad. de Bruxelles, t. XII).

((/) Ciivior, Mém. sur le Cliu {.inn. du Muséum, 1 802, t. l, pi. 17, fig. 4, et Mém. pour servir à l'histoire des Mollusques).

Soulejet, Op. cit., pi. 15 bis, fig. 8 et 9.

(e) Olivier, Mém. ««?• l'Hyale, etc., p. 9, pi. B, fig. 8 (Ann. du Muséum, t. IV, 1804, et Mém. pour servir à l'histoire des Mollusques).

Van Beneden, Op. vit. (Mém. de l'Acad. de Bruxelles, t. XI, pi. 1, fig. 4).

Souleyet, Op. cit., pi. 15, fig. 17. (/■) Iden:., ibid., pi. 15, fig. 4.

la) Idem., ibid., t. II, p. 114, pi. 9, ûg. 8s.

(h) Van Beneden, Mém. sur la Cymbutie de Pérou, p. 17 {Mém. de l'.\cad. de Bruxelles, t. Xll).

(i) Souleyet, Op. cit., t. Il, p. 234.

( j) Van Beneden, Mém, sur un nouveau genre de Mollusques voisins des Cymbulies, p. 27.

V. 26

Foie.

Anus.

402

APPAREIL DIGESTIF

portion du tube digestif est au eoiitraire divisée en deux ou plusieurs eliambres , et un de ces estomacs est armé intérieu- rement de plaques cornées dentiformes, de façon à remplir les fonctions d'un gésier masticateur. Enfin, le foie constitue un organe glandulaire distinct et d'un volume considérable, qui est séparé du tube alimentaire et y verse la bile par un canal par- ticulier. 11 est aussi à noter que l'anus se trouve sur le côté du corps, vers sa partie antérieure, à droite chez les Ptéropodes nus, et à gauche chez la plupart des Ptéropodes conchyli- fères (1).

grande poche oblongue ; il se termine en ciil-de-sac, el communique avec rinteslin par une ouverture pylorique située à droite, assez près du cardia ; les follicules hépatiques le recouvrent extérieurement et y débouchent par un grand nombre de caecums à large orifice, à peu près comme chez les Acéphales. L'intestin est très court, et l'anus se trouve à droite, près du bord postérieur de la nageoire cervicale (a). La disposition de ces parties est à peu près la même chez les Glios [b).

Chez l'Euribie, l'estomac est égale- ment enveloppé par la substance du foie, et se prolonge au-dessous du py- lore en un grand cul-de-sac, mais il présente du côté droit une dépression dans laquelle un corps dur et jaunâtre a été trouvé encliâssé. L'intestin est beaucoup plus long que dans les gen- res précédents, et décrit quelques cir-

convolutions autour de la masse hépa- tique, avant de remonter à côté de l'œsophage, et de gagner l'anus, qui se trouve à droite, près de la base des nageoires (c).

(1) Gliez rUyale, l'œsophage se di- late inférieurement en une espèce de jabot plissé longitudinalement, qui se continue avec une portion plus mus- culaire du lube digestif {d), que l'on désigne généralement sons le nom de gésier, à raison de son armature. En effet, ses parois sont revêtues de qua- tre plaques connées et jaunâtres, dont la surface libre est hérissée de deux ou trois côtes saillantes (e). Le pylore, qui en occupe l'extrémité inférieure, communique avec un caecum grêle et allongé, à l'ouverture duquel viennent aboutir les canaux biliaires. M. Van Benoden a considéré cet organe comme une dépendance \le l'estomac (/"), et

(a) Cuvier, Mém. sur le Clio {Ann. du Muséum, t. I, pi. 17, fig. A).

(b) Cuvier, Mém. concernant l'animal de l'Hyale, etc., p. 8, pi. i B, fig:. 7 {.inn. du Muséum, t. IV).

Sotileyut, Voyage de la Oonile. Zool., t. 11, p. 2G2, pi. 45, (tg. 13 cl 17.

(c) Idpin., ibid., t. II, p. 240, pi. 15, fig-. 4.

(d) Cuvier, Mém. concernant l'animal de l'Hyale, etc., p. S, pl. A, ûg. 0 et 7.

(e) lilainville, art. Hyale [Dictionnaire des sciences naturelles, 1821, t. XXll, p. 73).

Van lieneden, Mém. sur l'unatomie des genres Hyale, Cléodore et Cuvlérie, p. 38, pl. 3, Cg. 2, 3 {Exercices iootomiijues).

Soiileyet, Op. cit., I. II, p. 112, pl. 9, ûg. 7, 11, 14, itc.

(f) Van Doncdcn, Mém. sur l'anatomie des genres Hyale, etc. , p. 38,

DES MOLLUSQUES CÉPIL\LOPODES. 405

§ 19. En général, dans la classe des Céphalopodes, la préhension des aliments est effectuée par l'action des organes locomoteurs dont la bouche est entourée et par le jeu des parties dures dont cet orifice est armé.

Chez le Nautile, les divers appendices céphaliques ne parais- sent pas être susceptibles de remplir des fonctions de ce genre ; mais chez les Poulpes, les Sèches, les Calmars et les autres Céphalopodes dibranchiaux, les bras qui naissent de la partie antérieure de la tête sont des organes de préhension très puis-^ sauts (1) ; nous en étudierons la structure lorsque nous nous

Souleyel la décrit sous le nom de. vési- cule biliaire («). Le foie est volumi- neux et de couleur verdàtre ; il est divisé en deux lobes, et se compose d'une multitude de petits caecums qui ont l'apparence de granules. Enfin, l'inleslin contourne cette glande, puis remonte à côté de l'œsophage, et va déboucher au dehors sous le bord du manteau, à la face inférieure du corps du côté gauche (6).

L'appareil digestif des Cléodores ne diffère pas notablement de celui des Hyales (c). Chez les Cuviéries (cl), les Cymbulies (e) et les Tiedemamiies (/"), on trouve la même armature stoma- cale, et l'anus est placé également du côté gauche ; mais dans le genre Li- macine, le gésier est conformé de même, on trouve, un peu plus en ar- rière, une troisième dilatation stoma- cale, et l'anus est placé à droite, comme

(a) Souleyet, Voyagede la Bonite, ZooL, t. II, p. 114.

(6) Gegenbauei-, Uiitersuchungeu ûber Pteropode7i, pi. t,fig- 1-

(c) Van Beneden, Op. cit., pi. 4 A, fig. 5.

Souleyel, Op. cit., t II, p. H3, pi. 10, Cvg. 4, 9, 44; pi. H, dg. 3, etc.

(d) Van Beneden, Op. cit.. pi. 4 B, fig. 3.

Souleyet, Op. cit., t. II, p. 111 et suiv., pi. 12, fig. 16, 23 et 29.

(e) Van Benelen, Mêm. sur la Cymbulie, pi. 1, fig- 3.

If) Idem., Mém. sur un nouveau genre de Mollusques voisins des Cymbulies, p. 26, pi. 2,

{g) Idem., Mém. sur le Limacina arctica, p. 55, pi. 5, fig. 5, 0 et 7. (h) Gegenbauer, Op. cit., pi. 2, fig. 1.

Appareil

digestif

des

Céphalopodes.

Organes préhenseur».

chez les Ptéropodes nus (g). Chez le Creseis acicula, l'estomac est simple et inerme , mais se prolonge posté- rieurement en un long caicum grêle et cylindrique (h).

(1) Les Poulpes sont carnassiers et très voraces; ils se nourrissent priu- cipalement de Crustacés et de Pois- sons, et les pêcheurs des côtes de la Manche les considèrent comme l'en- nemi le plus redoutable pour les Homards. Leur puissance musculaire est très grande, et leurs nombreuses ventouses adhèrent si fortement aux corps sur lesquels elles s'appliquent, qu'il est fort difficile de s'en débar- rasser. Dans nos mers, ces Mollusques sont d'assez grande taille, et leurs bras ont souvent près d'un mètre d'enver- gure; mais dans l'océan Pacifique il en existe qui sont beaucoup plus grands et plus puissants. Ainsi, pendant le

[\0[i APPAKEIL UIGIiSTIF

occuperons de r;i|)[)areil locomoteur des .Mollusques^ et je me bornerai îÎ dire en ce moment que par l'action des faisceaux musculaires dont ils sont pourvus, ils peuvent non-seulement s'étendre ou se raccourcir, mais s'enrouler autour des corps étrangers avec beaucoup de force, et qu'ils ont la faculté d'y adhérer à l'aide d'un système de ventouses dont leur face interne est garnie; disposition qui a fait donner à ces Animaux le nom de Céphalopodes acétabulifères. Chez les Poulpes, il existe huit de ces appendices préhensiles, dont la longueur est très consi- dérable; mais chez les Sèches, les Calmars et les autres genres de la même famille, on en trouve dix (1), dont deux diffèrent des autres par leur forme, et semblent être surajoutés à la cou- ronne tentaculaire ordinaire ('ij.

Sepiola, Loligopsis, etc.), les Spirille et les Béleninites.

(2) C'est chez les Poulpes que l'ap- pareil Ijracliial présente le mode d'or- ganisation le plus simple. Il se com- pose de quatre paires d'appendices coniques très allongés, qui sont insérés en cercle sur la partie antérieure de la tèie, autour de la bouche, et qui ont tous la même forme. Chacun de ces organes présente vers l'axe un ca- nal longitudinal qui renferme un gros nerf et qui est enlouré de libres muscu- lairesdisposées radiairement ; d'autres faisceaux charnus qui en occupent la base s'élargissent et s'entrecroisent de façon à se réunir et à constituer une sorte d'entonnoir contractile qui entoure l'appareil buccal, ci s'insi-re postérieurement sur la charpente so- lide de la tète, formée par un carti- lage annulaire (c). La peau qui revêt

{a) Owen, art. Cephalopoua (ToiM's Cyclop. of Anat. and Phys., t. I, i). 521)).

(b) Dnnis du Montfoit, Histoire nalurcUe des Mollusques, t. 1, p. 250 cl suiv.

(c) Cmicr, Mf'm. sur les Cc'phalojiodes et leur anatomie, y. iO, pi. 1, fig. 1,2; pi. 2, lig. d {}Iém. pour seiviv à l'histoire et à l' anatomie des Mollusques, 1817).

premier voyage de Cook dans ces pa- rages, Banks et .Solander trouvèrent la carcasse d'un Poulpe gigantesque qui, à en juger par les débris con- servés dans le musée Muntérien à Londres, devait avoir environ h mè- tres d'envergure (a). Les natifs des îles polynésiennes qui font la pèche en plongeant au fond de la mer, re- doutent extrêmement ces Céphalo- podes , et leurs craintes ne sont pas mal fondées ; mais quelques écrivains ont singulièrement exagéré la force et la taille de ces animaux {b).

(1) De la division des Céphalo- podes dibranchiaux en deux sections : les Octopodes, comprenant les Poulpes, le Élédons et les Argonau- tes; 'J" \e^ Décapodes, comprenant la famille des Sèches, la famille des Teulhides (genres Calmar ou Lolitjo, Sépioteuthe, Onycholeuthe, Rossia,

DES MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. ^05

La bouche, située au centre de l'appareil brachial, est entourée d'une lèvre membraneuse circulaire à bord plus ou moins

i..(,'\res.

ces prolongements céplialiques consti- tue à leur base une série de palmures plus ou moins grandes, et chez quel- ques animaux de cette famille , le Cirroteulhis de M. Eschriclit (a), ou Sciadephoriis{b), par exemple, trans- forme (le la sorte tout ce système ap- pendiculaire en un vaste entonnoir ou ombrelle péristomienne. Les ven- touses occupent la face interne des bras dans toute leur longueur. Ciiez les Poulpes proprement dits, elles sont disposées sur deux rangées, excepté dans le voisinage de la bouclie, les rangées longitudinales sont sim- ples (c); mais dans une autre division de la même famille, le genre Elédon, elles ne forment partout qu'une seule série {d). Ces organes ont à peu près la forme d'une cupule scmi-spbé- ri(iu(', de la convexité de laquelle des faisceaux musculaires s'étendent vers les parties adjacentes du bras ; en de- dans on y distingue un disque concave qui est garni d(! plis radiaircs renfer- mant des faisceaux musculaires, et qui est percé au centre par l'ouverture d'une fossette, au fond de laquelle s'élève une sorte de caroncule en forme de tampon (e). Ce tubercule central est susceptible de s'avancer de façon à remplir le trou du disque, ou

à se retirer en arrière, de manière à agrandir la capacité de la fossette qui le renferme, et par conséquent la ven- touse peut s'appliquer à plat sur un coips étranger, puis, par la rétrac- tion de l'espèce de piston ainsi con- stitué, produire dans la partie centrale du disque un vide, en raisou duquel celui-ci adhère avec force à la surface sous-jacente.

Il est aussi à noter que le Poulpe peut à volonté mettre ses ventouses en jeu, ou faire cesser l'espèce de succion à l'aide de laquelle ces organes se fixent aux corps étrangers. Chez le Poulpe commun, on compte à peu près deux cent quarante ventouses sur chaque bras, et par conséquent leur nombre total s'élève à environ mille.

Chez les Sèches, il y a, outre les huit bras qui sont disposés h peu près comme ceux des Poulpes, mais qui sont plus courts et garnis de quatre rangées de ventouses , une paire d'appendices dont le mode d'inser- tion est un peu dilférent. Ces bras complémentaires naissent du carti- lage céphali(jue en dedans et en avant des précédents, et traversent une cavité séreuse pour arriver au dehors, entre les bras ordinaires de

(a) Eschriclit, Cirroteiithis Mûlleri, eine neue Gathmg der Cephalopoden bildend {Nova Acta Acad. nat. curios., t. Wlll, pi. 40 et 47).

(6) J.T. Reinliardt og V. Proscli, Om Scladephorus Mûlleri (Mém. de l'Acad. de Copenhague, 1840, t. XU,pl. 1).

(c) Necdham, Nouvelles découvertes faites avec le microscope, trad. par Tremblay, cliap. il, p. 25 et siiiv., p!. i .

Savigny, Egypte, Mollusques Céphalopodes, pi. 1, fig. 1 (ou Allas du Hègne animal de Cuvier, MoLLUSQuiis, pi. 1 , fig. 1).

(d) Voyez l^ériissac, Histoire des Molhisqiies Cryptodibr anches, genre Elédon, pi. 1 et 2, ou Règne animal de Cuvicr, Mollusques, pi. 2, fig. 1.

(e) Savigiiy, loc. cit., pi. \, fig. IW (ou Règne animal de Guvier, Mollusques, pi. 1, fig. \g,\ h).

406 APPAREIL DIGESTIF

frangé, qui est garnie intérieurement d'un muscle spliincter et de fibres charnues rétractrices, disposées radiairemcnl (1). En se dilatant, ce voile complexe laisse à découvert un appâ-

ta troisième et quatrième paire , à l'intérieur de la couronne formée par ces organes. Ils sont beaucoup plus longs que ceux-ci et très rétractiles ; dans la plus grande partie de leur étendue, ils sont grêles, cylindriques et inermes; mais vers le bout ils sont élargis et garnis de ventouses. J'ajou- terai que les suçoirs des Sècbes sont pédicules et plus mobiles que ceux des t'oulpes ; on y remarque égale- ment une petite bordure denticulée, et souvent ils varient beaucoup entre eux, sous le rapport de la gran- deur (a).

Dans la famille des Calmaricns, ou Teuthides, la disposition générale de l'appareil brachial est à peu près la même que chez les Sèches; mais les bras complémentaires acquièrent quel- quefois une longueur excessive, par exemple, cb.ez le Loligopsis Vera- nn{b), et il existe souvent des parti- cularités remarquables dans l'arma- ture de ces appendices. Ainsi, chez les Calmars, les ventouses sont pour- vues d'un disque annulaire carti- lagineux dont le bord antérieur se

prolonge de façon à constituer une série de crochets aigus (c), et chez les Onycholeulhes ces appendices pren- nent la forme de grosses griffes ré- tractiles [d). Il est aussi à noter que chez ces derniers Céphalopodes, les deux longs bras adhèrent entre eux à l'aide d'un groupe de ventouses ordi- naires, situées à la partie postérieure de la portion terminale ou spatuli- forme, qui est armée de crochets, et ces organes constituenit ainsi une es- pèce de pince protraclile (ej.

Les Bélemnites, qui n'existent plus à l'épocjue actuelle, mais qui vivaient en grand nombre dans les mers des périodes secondaires, avaient aussi les bras armés de crochets très puissants, ainsi que M. Owen a pu le constater par l'élude des fossiles (/"),

(1) Le voile labial des Céphalo- podes est double. Chez le Poulpe, il est peu développé et d'une structure assez simple {g) ; mais chez d'autres Mollusques de cette classe il se com- plique à divers degrés. Ainsi, chez les Calmars, la lèvre interne est frangée et entourée par une lèvre externe qui se

(a) Voyez V Allas du Rèyne animal de Cuvier, Mollusques, pi. 4, fig. 2, 2 a, 2 6,2 c.

(b) Fôiiissdc, Histijire des Molhmpies Cruplodibranches, genre Calmant, pi. 2.

Voyez aussi le lièQne animal de Cuvier, Mollusques, pi. G, fig. 1.

(c) Lesiieur, Descript. of Several NewSpecies Cnttlc-fish iJourii. oflhe Acad. of f'hilad., 1820, t. II, pi. 8, fig. d).

Férussac, Op. cit., genre Calmar, pi. 3, fig. 8 ; pi. H, lig. 4a, 1 b, elc.

Délie Chiajc, Descriz. c notomia deijli Animait invevtebr., pi. tO, fig. C, 7.

(d) Lesueur, Op. cit. (Journ. of the Acad. of Philad., d821, t. II, p. 13, pi. 9, fig. d, e).

Férussac, Op. cU., genre Onyclioteuthe, pi. 1, fig. 1, 2 6, ib'^, 1 ; jd. 1 , fig. 1, 3, 4, etc.

Deshayes, Atlas du Rèijiie animal de Cuvier, Mollusques, pi. 3, fig. 1, 1 a, ib.

{e) Owen, art. Cephalopoda (Todd's Cyclopœdia of Anntomy and Physiology, t I, p. 529, Cg. 215).

(/■j Owen, A Description of certain Bélemnites preserved with a (jreat Proportion of their soft Parts in the O.tford-clay (Philos, l'rans., 1844, p. 73, pi. 3, 4, .^i el 0).

(g) Cuvier, Mém. sur les Céphalopedes, pi. 3, fig. 3, 4, 5.

DES MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. /l07

reil maxillaire très puissant, qui se compose de deux mandibules Mâchoires. impaires et médianes, de consistance cornée, dont l'aspect est fort semblable à celui d'un bec de Perroquet. Ces organes séca- teurs sont portés sur une masse charnue de forme sphéroïdale, et se composent chacun de deux lames solides convexes et con- cenlrifpies (]ui sont écartées entre elles postérieurement pour loger leurs muscles moteurs , mais se confondent antérieure- ment en un bord tranchant dont la partie médiane se prolonge

prolonge en pointe vers la base de chacun des huit, bras ordinaires (a), et porte quelquefois de petites ven- touses assez bien constituées (b).

Chez les Sépioteulhes, la lèvre in- terne est épaisse et plissée; elle paraît papilleuse, et elle est entourée de deux autres replis labiaux dont l'externe se prolonge en huit points, coiuine chez les Calmars, mais ces appendices ne sont pas libres au bout et sont fixés entre la base des bras ; chez quelques espèces, on y aperçoit aussi de petites ventouses (c). Chez les Onycholeu- thes la lèvre externe est quelquefois très développée et l'interne épaisse (d). Chez les Loligopsis, la lèvre externe s'étend beaucoup (e). Enfin, chez la Sèche, il y a une lèvre interne frangée

et une lèvre externe à huit divisions; mais celle-ci est inerme (/').

Chez les Nautiles, l'appareil labial est beaucoup plus développé que chez les Céphalopodes dibranchiaux. Au- devant des mandibules se trouve d'abord une lèvre intérieure circulaire et à bord frangé; puis, plus en de- hors, une couronne labiale extérieure, composée de quatre grands lobes, dont le bord est garni d'une sx'rie d'appen- dices cylindro-coniques, qui sont ré- tractiles (g). Ces tentacules ou cirres ont la même structure que ceux dont la tête est entourée , et M. Valen- ciennes les considère comme les repré- sentants des ventouses dont sont pourvus les Céphalopodes dibran- chiaux (h).

(a) Voyez Lesueur, Op. cit., pi. S, lîg;. c.

Féruàsac, Op. cit., genre Calmar, pi. 5, fig. 4.

Milne Edwards, Voijage en Sicile, t. I, pi. 18 et 19.

(b) Exemple : Loliyo Pealeii (voy. Férussac, Op. cit., genre Calmar, pi. H, fig. 3).

(c) Exemple : le Sépioteuthe de Maurice (voy. Quoy et Gaimard, Voyage de l'Astrolabe, Mol- lusques, pi. i, fig. 3).

(d) Voyez Férussac, Op. cit., genre Onychoteiithc, pi. 3 bis, fig. 4 ; pi. 4, fig. 3, clc.

Quoy et Gaimard, Op. cit., pi. 5, fig. 17, et Atlas du Règne anim.al de Giivier, Mollusques, pi. 3, fig. A.

(e) Verany, Mollusques méditerranéens, l.l, pi. 39. (/■) Voyez Férussac, Op. cit., genre Sèche, pi. 3 bis, fig. 3.

Quoy et Gaimard, Op. cit., pi. 1, fig. 3 et 13; pi. 2, fig. 3, 6.

(g) Owen, Mem. on the Pearhj Nautilus. Sur l'Animal du Nautile (Ann. des sciences nat., 1833, t. XXVIll, p. 100, pi. 2, fig. 1).

(h) Valenciennes, Recherches sur le Nautile flambé (Archives du Muséiim, I. Il, p. 270, pi. 11, fig. 1).

Voyez aussi à ce sujet : Owen, On ihe Structure and Homology ef the Cephalic Tentacles in the Pearly NatUilus {Ann. ofNat. Hist., 1843, t. XII, p. 305).

hOS APPAREIL DIGESTIF

en manière de crochet (1). Ils se meuvent verticalement et se rapprochent par leur bord tranchant comme des ciseaux cour- bes, mais ils agissent surtout en déchirant la proie à l'aide de leur crochet terminal. Langue. Enfin l'armaturc de la bouche est complétée par une râpe lin- guale fort semblable à celle que nous avons vue chez la plupart des Gastéropodes, et portée sur une masse charnue d'un volume considérable. Au-devant de cet organe on remarque aussi des papilles charnues qui paraissent constituer un instrument de dégustation, et le fond de la cavité pharyngienne, (pii loge toutes ces parties, est garni latéralement de papilles qui sont tantôt molles , d'autres fois dures et spiniformcs ("2).

(1) Cl lacune de ces mandibules res- semble ù un fer à cheval concave, ou plulùt à une demi-cuiller dont le bec serait ciochu et le bord postérieur échancré au milieu. La lame interne se prolonge plus loin en arrière que la lame externe, maiscelle-ci est plus large postérieurement (a). La forme de ces organes varie un peu suivant les es- pèces; mais, en général, le crochet de la mandibule inférieure s'avance beaucoup au-devant de celui de la mandibule supérieure.

La conformation des mandibules est la même chez le Nautile. Dans l'exem- plaire disséqué par M. Owen, le bord libre de ces organes élait recouvert d'un dépôt calcaire (b) ; mais, dans

celui décrit par M. Valencienncs, rien de semblable ne se remarquait (c).

(2) La râpe lin-^niale du Calmar a été assez bien représentée par Need- ham {(I). Celles du Poulpe et de la Sèche ont été mieux hgurées par Sa- vigny (e), et Poli a étudié avec soin celte partie de l'appareil digestif chez l'Argonaute [f). Enfin M. Lovén a fait connaître avec plus de précision la forme des crochets constitutifs de celte armature chez l'Élédon, la Sépiole et le Calmar {g) ; mais pour la disposition générale des diverses parties de la cavité buccale, je renverrai de préfé- rence à une ligure faite d'après l'Ony- choleulhe par M. Owen {h).

La langue de ce Alollusque, consi-

(a) Swammeidam, Biblia Naturœ, t. II, pi. 50, fig. dl.

Cuvicr, Méin. sxir les Céphalopodes, pi. 3, fig. 6 (Mém. sur les Mollusques, 1817).

Savigny, Op. cil. pi. 1, iig. 1*, 1^, fig. 3^ 3^, 3*.

DoUe Chiaje, Op. cit., pi. 10, fig. 0.

(b) Owen, Sur le Naiilile [Ann. des sciences nat., t. XXVUI, p. 110, pi. i, fiy. 2-4).

(c) ValLticienncs, Hechei-ches sur le Nautile, p. 280, pi. 8, fig-. 3, et pi. 11, llg. 1 et 2.

(d) Needliam, Nouvelles découvertes faites avec le microscope, pi. 3, fig. 1. {e) Savigny, É'jypte, Mollusques Céphalopodes, pi. 1, fig. le, 3 c, 3^*, clc. (/■) l'oli, Testacea ulriusque Siciliœ, t. III, pi. 42, fig. 5-9.

{g) Lovén, Op. cit. (Ofversigt of Yelenskaps-.Mcademiens Furhandlingar, 1840, p. 188, pi. 3). (/») Owen, art. Cepiialopoua (Todd's Cyclopœdia of .Anal, and Ptnjsiol., I. 1, p. 532, fig. 21),

DES MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 409

§ 50. L'appareil salivaire n'est que rudimentaire chez le Nautile , mais chez la plupart des Céphalopodes dibranchiaux il est très développé, et ressemble beaucoup à ce que nous avons déjà vu chez les Gastéropodes. Il se compose de deux paires de glandes dont l'une est logée dans la tête et appliquée contre la partie latérale et postérieure de la masse buccale , tandis que l'autre est située beaucoup plus loin en arrière, et se trouve à la partie antérieure de la cavité abdominale, sur les côtés de l'œsophage. Les glandes salivaires antérieures sont multilobulées et s'ouvrent isolément à l'entrée de l'œsophage; celles de la seconde paire donnent naissance à un conduit excré- teur commun très long qui débouche à la base de la langue (1).

Glamie» salivaires.

divée dans son ensemble, forme une masse ovalaire qui occupe la lotalilé de l'espace compris entre les deux branches de la mâchoire inférieure. Sa portion antérieure constitue une sorte do caroiiciilo charnue dont la surface est garnie de papilles et pré- sente des orifices de cryptes mu- queux. La portion moyenne de la langue porte la râpe, qui est ployée à angle droit et composée de crochets cornés dirigés en arrière. Enfin sa portion postérieure est papilleuse et logée entre deux replis de la mem- brane pharyngienne dont la surface est armée de crochets épidermiques. La râpe se compose ordinairement d'une dent médiane et de trois paires de crochets latéraux par rangée trans- versale (a).

La disposition de l'appareil lingual est à peu près la même chez le Nautile, si ce n'est que la caroncule antérieure

est plus développée et divisée en trois lobes médians {h). La râpe descend dans un cul-de-sac se trouve un organe qui paraît être chargé de re- produire les dents spiniformes (c), ainsi que nous l'avons déjà vu chez les Gastéropodes. Les papilles de la portion postérieure de la langue sont molles, larges et épaisses. Enfin, sur les côtés, on voit deux appendices charnus très larges, dont la surface est également papilleuse et présente au milieu une ouverture salivaire.

(1) Chez le Poulpe, les glandes sali- vaires antérieures ou pharyngiennes sont divisées très irrégulièrement en plusieurs lobes. Celles de la seconde paire sont beaucoup plus grosses, et, quoique subdivisées en lobules, sont concentrées de façon à former deux masses à peu près ovalaires et à surface presque lisse (d). Ces organes se composent d'une réunion

(o) Lovén, Op. cil. (Ofversigt of Vetenskaps-Akademiens FOrhandlingar , 1847, pi, 3).

(b) Ovven, Op. cit. (.Ann. des sciences nat., I. XXVIII, pi. 4, fig. 7).

Valencicnnes, Op. cit., pi. la, tic:. 3 el 4.

(c) Idem., Op. cit., pi. 10, fig. 4.

(rf) Cuviei-, Mém. sur les Céphalopodes, pi. 3, fig. 3.

Milno Edwards, Voyage en Sicile, t, I, pi. 11, et Atlas du Règne animal de Cuvier, Mol- lusques, pi, le.

Jabot.

410 APPAREIL DIGESTIF

Canal digestif. ^ ^i . L'œsoplioge (Ics Cc'phalopoiics est long et grêle; il préseute à l'intérieur beaucoup de plis longitudinaux, et, après avoir traversé le cartilage cépbalique, il arrive dans l'abdomen, il se dilate parfois pour constituer une première pocbe sto- macale ou jabot. Chez les Poulpes et l'Argonaute, cette seconde portion du canal alimentaire, élargie de la sorte, est libre dans la grande cavité péritonéalc, qui, ainsi que nous l'avons déjà vu, remplit les fonctions d'un réservoir veineux (1 j ; mais chez les Céphalopodes décapodes elle reste étroite, et elle adhère aux viscères circonvoisins, qui ne laissent entre eux aucim vide dans la région abdominale. Ses parois logent dans leur épais- seur des follicules glandulaires (2). Un second estomac fait

i

de petits caecums grêles et disposés en grappe (a) .

Cliez lesOnyclioteuthes, les glandes salivaires antérieures ne sont pas sim- plement accolées à la masse charnue de la bouche, comme chez le Poulpe, mais se prolongent dans Tépaisseur des deux replis de la membrane mu- queuse du pharynx, qui se trouvent sur les côtés de la base de la lan- gue (6). Les glandes salivaires de la seconde paire sont en général dispo- sées comme chez le Poulpe ; mais ces organes paraissent manquer chez les Loligopsis (c).

Chez le Nautile, l'appareil salivaire ne paraît être représenté que par une paire d'organes glandulaires lo^és dans l'épaisseur des replis pharyn-

giens, et s'ouvrent dans la bouche par un petit orifice situé au centre c!e ces api)en(lices charnus [i).

(1) Voyez tome HT, page 168.

(2) Chez le Poulpe (c) , le jabot commence à peu de dislance de la tète, et se dilate brusquement en un grand cul-dc-sac dont le fond , di- rigé en avant, s'avance paiallèlement à l'œsophage et occupe la partie an- térieure de la cavité viscérale. En arrière, cet organe se rétrécit gra- duellt'mcnt et se continue avec le se- cond estomac dont il est séparé par un sphincter.

La conformation de ces parties est à peu près la même chez l'Argo- naute (/■).

Il existe aussi un jabot très bien

(a) J. Millier, De ylandalarum secernenlium structura penitiori, p. 54, pi. 5, fig. 9.

{&) Owcn, art. Cei'HALOPoua (Todd's Cyclopœdia ofAnat. and Physiol., t. I, p. 532, iig. 218).

(c) Owon, Op. cit., p 533.

(d) Ovven, Sur le Nautile {.Ann. des sciences nnt., t XXVIlI, p. 114).

(e) Cuvier, Mcin. sur les Céphalopodes, pi. 4, lig. i.

Férussac, Uist.des Mollusques Qrijplodibr anches, [il. 13, fig. 9.

Wagner, Icônes zootomicœ, pi. 29, fig. 14.

Milne Edwards, Atlas du Hcijue animal lio Ciivier, Mollusques, pi. le.

J. Cariis, Icônes anatomicœ, pi. 22, lig. 17.

(/■) l'oli, Testacea utriusquc Siciliœ, I. 111, pi. 43, fig. 1 et 2.

Van Benedcr., Méui. s?tr l'Argonaute [Exercices %ootomiques, pi. 3, fig. 3)

J. Canis, Icônes %ootomicœ, pi. 22, fig. IG.

Gésier,

DES MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. Hl

suite à cet organe, et consliliie un gésier dont les parois sont en général très charnues et les deux orifices fort rapprochés. La tunique épithélique (\m le tapisse est é|)aisse et offre souvent une consistance presque cartilagineuse (i).

A côté du pylore se trouve l'entrée d'un autre sac, qui est Append.ce

t . _ pylorique.

en général étroit, allongé et contourné en spirale, disposition en raison de laquelle Aristote l'a comparé à une coquille de Colimaçon. Les fonctions de cet appendice ne sont pas bien connues. Quel(|ues naturalistes le considèrent comme un organe sécréteur, et Tassimilent au |)ancréas des Animaux supérieurs ; mais il n'offre aucun des caractères de cette glande et res- semble davantage à un réservoir biliaire, car les conduits hépa- tiques viennent y dél)Oucher ('2).

développé chez le Nautile, mais cette poche est plus dilatée en arrière qu'en avant, et communique avec le second estomac par un canal étroit (a).

Cliez les Calmars et les Sèches, l'cpsophage conserve à peu près le même cahbre jusque dans la région du cœur, el il n'existe pas de ja- bot {h).

(1) Chez le Poulpe, ce gésier est de forme ovale ellogé dans un comparti- ment particulier de la grande poche péritonéale, qui sert de réservoir pour le sang veineux et qui est traversé par l'altère aorte (c). Sa surface interne est profondément sillonnée.

Chez la Sèciie, cet organe est plus grand, mais ses parois sont moins musculaires (d).

Dans le Nautile, la disposition du

gésier est à peu près la même que chez le Poulpe (e).

(2) Chez le Poulpe, l'orifice de sortie du premier estomac conduit presque aussi facilement dansce caecum ou dans l'intestin que dans le gésier (/"). Cetap- pendice est logé à gauche et un peu en arrière de ce dernier organe, dans une cavité dépendante du réservoir périto- néal, de sorte qu'il baigne dans le sang veineux, comme le font les deux esto- macs (g), c'est un caecum assez gros et intesliniforme, contourné en spirale et décrivant un tour et demi ; à l'intérieur il est garni d'une double lame saillante longitudinale, et ses parois renferment beaucoup de follicules sécréteurs. En- fin les canaux biliaires rampent dans sa columelle, et s'y ouvrent près de sa pointe, de façon que c'est dans son in-

(a) Owen, Su;- le Nautile {Ann. des sciences nat., t. XXVIIT, pi. 2, fig. 1).

(b) Voyez Carus et Olto, T'ai). Anatom. compar. illuslr., pars iv, pi. 2.

(c) Milne Edw.'irds, Op. cit. {Voyage en Sicile, pi. 15).

(d) Brandt et Ratzeburg, Medizinische Zoologie, t. 11, pi. 32, fig. 3.

(e) Owen, Sur le Nautile {A)in. des sciences nat., t. XVIIl, pi. 2, fig. 1). (/■) Ciwier, Mém. sur les Céphalopodes, pi. ^,iia;. 2 et 3.

Férussac, Histoire des Mollusques Cryptodibranches, genre Poitlpe, pi. 13, ûg. i. (y) Milne Edwards, Voyage en Sicile, \. I, pi. 1.5.

/il2 APPAREIL DIGESTIF

Il est d'ailleurs à noter que, chez la plupart des Céphalopodes, on trouve dans le voisinage de ces derniers canaux un petit organe glandulaire qui est souvent disposé en grappe, et qui semble avoir beaucoup plus d'analogie avec le pancréas (1).

lérieur que les matières alimentaires se mêlent à la bile (a). Duveinoy a fait remarquer que cet organe a plus d'a- nalogie avec le duodénum des Verté- brés qu'avec le p;incréas de ces Ani- maux (6); mais il faudrait le comparer plutôt à la vésicule du fiel.

Chez l'Argonaute, l'appendice pylo- rique est plus large et beaucoup plus court que chez le Poulpe (c); sa dis- position est à peu près la même chez les Sèches {d) et les Sépioles, une grande valvule spirale en divise l'in- térieur (e).

Chez les Calmars, cet organe est, au contraire, beaucoup plus long. Dans quelques espèces il est grêle et enroulé en spirale; par exemple, chez le Cal- mar sagilté (/") ; mais chez d'autres, tels que le Calmar commun, ou Loligo todarus , il constitue un grand sac membraneux et pyriforme, qui ofl're à peine quelque indice de contourne-

ment et se prolonge jusqu'à l'extré- mité postérieure du corps (g). Il est aussi à noter que chez ces Animaux, l'extrémité de la valvule spirale fait office de soupape, et tend à empêcher les aliments de passer directement du gésier dans l'intestin.

Dans le Céphalopode du genre Loli- gopsis, que M. Kathke a décrit sous le nom de Perolhis Eschscholtzii, cet organe est représenté par une poche arrondie (h). Il en est de même dans le genre Rossia [i).

Chez le Nautile, l'appendice pylo- rique, ou pancréas (Owen), est une poche globulaire appenduc au com- mencement de l'intestin et divisée intérieurement par de larges lames parallèles, froncées transversalement, qui logent dans leur épaisseur des follicules 'j). La bile y arrive par un large canal.

(1) Ces glandules, de couleur jau-

(a) Cuvier, Mcm. siir les Céphalopodes , p. 29, pi. 4, fig. 2.

(b) Duvernoy, Additions à l'Anatomie comparée de Cuvier, t. V, p. 45.

(c) l'oli, Teslacea utriusqjce SicHia;, t. 111, pi. 43, fig. 2.

Van Benedcn, Op. cil. {Exercices zootomiqucs, pi. 3, fig. 3).

(d) Swammerdani, Biblia Naturœ, t. II, pi. 5, fig. 5.

Dellc Cliiaje, Uescrizione e notomia degli Animall sema vertèbre délia Sicilia citeriore, pi. 15, lig. 2.

Biandt et Ratzebui'g, Medizinische-Zoologie, t. II, pi. 3-2, fig. 21.

(e) Grant, On the .Xnatomy of Scpiola vulgaris {Trans. of Ihe Zool. Soc. ofLondon, t. I, p. 81, pi. •H,fig. 1 et 8).

(/") Cuvier, Op. cit., p. 52.

Home, Lectures on Compar. Anat., pi. 83.

Owen, art. Ceplialopoda (Todd's Cyclop. of Anat. and PhysioL, t. I, p. 535, fig. 221). (g) Monro, The Structure and Physiology ofFishcs, pi. 42.

Uellc Cliiaje, Uescriz. e notom. degli Animali invertebrati, pi. 10, fig. 3.

Milne Edwards, Voyage en Sicile, i. I, pi. 18.

(/ijUallikc, Perothis, ein neues Genus der Ccphalopoden (Mém. de l'Acad. de Saint'Pétersboitrg, Savants élrongevs, 1835, t. 11, p. 15y, pi. 2, fig. 10 et 12).

Owen, Cephalopoda (Todd's Cyclop., I. I, p. 53'i, fig. 223).

(i) Owen, voy. Appendix to Ross's Voyage, p. xcvi, pi. c, fig. 2 et 3.

{jjOwe.n, Sur le Nautile (Ànn. des sciences nat,, t. XVIII, p. cxvi,pl, 2, fig. 1 g).

DKS MOLLLSOUliS CÉPHALOPODES. /j 1 3

Le foie des Céplinlopodes est une glande très vukimiiieuse, de couleur rouge brunàlre, qui occupe presque toute la partie inférieure et antérieure de la cavité abdominale; elle est séparée du tube digestif par une cloison membraneuse et n'est que rarement divisée en lobes (j).

Enfin l'inleslin, qui est court et d'une structure assez simple, se dirige en avant, et va se terminer sur la ligne médiane du corps, vers la partie antérieure de la cavité brancbiale, à la base de l'entonnoir, de façon que l'anus se trouve sur le trajet du courant expiratoire, et celui-ci entraîne directement au debors les matières fécales (2).

r'oio.

nâtre, sont 1res développées dans le genre liossia, elles constiUient une masse arborescente qui naît des deux conduits biliaires, près de l'extréniité postérieure du foie, et recouvre la moitié antérieure de l'estomac et de l'appendice pylorique {a). Elles sont assez volumineuses chez le Loligop- sis (6), et se voient aussi très facile- ment chez le Calmar (c) , ainsi que chez les Sépioles, les Onychoteuthes etlesSépioteulhos (d). Chez le Poulpe, elles sont représentées par des folli- cules logés dans l'intérieur de la capsule hépatique {c;. Hunter fut le premier à les comparer ai'i pancréas des Vertébrés (/").

(1) Chez le [^oulpe, le foie constitue une grosse masse ovalaire tronquée

postérieurement; deux canaux excré- teurs s'en détachent dans le voisinage du pylore, et, après avoir embrassé l'intestin , se réunissent en un seul tronc pour s'engager dans la colu- melle de l'appendice pylorique eu spirale (cj).

D'après M. Grant, le foie serait qua- drilobé chez le Loligopsis guttata (h). Les deux canaux biliaires se réunis- sent après leur sortie du foie, chez les Calmars (^).

{•>) En général, on remarque à l'in- térieur de l'intestin deux replis longi- tudinaux adossés l'un à l'autre et en continuité avec ceux dont l'intérieur de l'appendice pylorique est garni (j) . La muqueuse de cette portion du tube digestif, ainsi que celle du caecum

(a) Owen, On Rossia {Appendix tn Sir J. Ross's Voyage, p. xcvi, pi. 2, ûg. 2 et 3).

(6) Ratlike, Op. cit. {Mém. ilel'Acad. de Saint-PélersboiLrg, Sav. étrang., 1835, I. Il, pi. 2).

(c) Monro, Struct. and Anal, of Fisltes, pi. 4 1 , L.

(d) Owen, Cephahpoda (Tocid's Cyclopœdia nf Anat. and PhysioL, t. I, p. 537).

(e) H. Millier, Bau der Cephalopoden {Zeitschr. fur wissensch. Zool.. 1852, t. iV, p. 343). (/■) Catalogue of the Physiol. Séries of ihe Hunterian Muséum, n" 775, t. I, p. 2-29.

belle Cliiaje, Descri-^. e notom. degli Animali invcrtebrati délia Sicilia cllcrlorc, [<\. 13, fig. 8 et 10.

{g) Ciivicr, Mcm. sur les Céphalopodes, pi. 4, ûg. 4.

Féiiissac, Histoire naturelle des Mollusques, pi. 14, fig. G.

{h} Grani, On the Structure and Characters ofthe Loligopsis (Trans. of the Zoological Society, t. I, p. 25, pi. 2, fig. 7).

(i) Délie Chiaje, Descrix,. e notom. degli Animali invcrtebrati, pi. 13, tig. 16. (j) Cuvier, Op. cit., pi. 4, fig. 2.

Inleslin.

llih APPAREIL DIGESTIF DES MOLLUSQUES CÉPHALOPODES.

Résumé. § 22. En résumé, nous voyons donc que chez les Mol- Insques les plus élevés en organisation, de même que chez les Molluscoïdes les plus dégradés, la cavité digestive est consti- tuée par un tube à parois propres, qui est recourbé en forme d'anse, de façon à communiquer au dehors par une bouche et un anus situés, non aux deux extrémités opposées du corps, comme nous le verrons dans l'embranchement des Animaux annelés, mais dans des régions voisines. Ce rapprochement entre les orifices du canal aliuientaire n'est pas un caractère constant de la division des Mollusques, mais nous l'avons ren- contré chez la plupart de ces Animaux, et, en terminant l'étude de l'appareil digestif dans ce groupe zoologique, j'appellerai de nouveau l'attention sur le défaut de symétrie que nous y avons souvent remarqué.

pyloiique, est garnie de cils viljra- Fin générai, l'exlrémilé de l'in- tiles {a). teslin fait saillie dans la cavilé bran- chez le l'oulpe, l'inleslin décrit cliialc. L'anus est simple chez les quelques circonvolulions avant de Poulpes (d) , mais chez lis Cal- gagner la face inférieure du foie et mars (c), les Loligopsis (/") et les Sé- de se terminer à l'anus (b) ; mais, pioteutlies (g), il est bordé par deux chez les Calmars, il est plus court, et petits appendices membraneux qui se porte presque directement en ont la forme de feuilles ou d'ailes et avant (c). sont dirigés en avant.

(a) H. Millier cl KôUiker, Bericht iiber einige iin Ilerbste 4 852 in Messina angestellte vergl. anal. Untei-such. (Zeitschr. fur wissenschaftl. ZooL, 1853, t. IV, p. 343).

(b) VoyezVAtlas du Règne animal de Ciivicr, Mollusques, pi. 4 c.

(c) Voyez Owen, Cephalop. (Todd's Cyclop, t. I, p. 535, fig. 221).

Carus et Otto, Tab. Anatom. compar. illustr., pars iv, pi. 2, fig. 41. {(l) Voyez V Allas du Règne animal de Cuvier, Mollusques, pi. 4 a. (e) Miliie Edwards, Voyage en Sicile, t. I, pi. 48.

(/■) Ratlike, Op. cit. (Méin. de V.\cad. de Saint-Pétersbourg, 4835, Sav. étrang., t. II, pi. 2). ig) Owen, Descript. of some new and rare Cephalopoda {Trans. of tlie Zool. Soc. of London, t. II, pi. 24. tig. 4 0).

OUAIUNTE- NEUVIEME LEÇON.

De l'appareil digestif chez les Vers.

§ 1 . Dans rembranciiement des Animaux annelés, la caractères cavité digestive se compose d'ordinaire d'un tube ouvert à ses " deux cxtrémilés, comme chez les Mollusques , mais dont les orifices, au lieu d'être rapprochés, sont situés le plus loin pos- sible l'un de l'autre, et dont la disposition générale est symé- trique : la bouche se trouve à la face inférieure de la tête, et l'anus, |)lacé également sur la ligne médiane, occupe l'extré- mité postérieure du corps. Mais dans ce groupe, de môme (jue dans les deux grandes divisions zoologiqucs dont j'ai traité dans les dernières Leçons, ce mode d'organisation ne se rencontre pas toujours, et il existe (jiKdques espèces qui offrent sous ce rapport des caractères d'infériorité très remarquables. En effet, chez quelques Vers, l'appareil digestif tout entier paraît man- quer pendant une certaine période de la vie, sinon toujours, et cliez d'autres la cavité alimentaire ne communique au dehors que par un seul oritlcc, comme cliez la plupart des Zoophytes inférieurs; mais ces exceptions sont fort rares, et, dans l'immense majorité des cas, l'appareil digestif est con- formé d'après le plan que je viens d'indiquer, et offre même une structure très perfectionnée dans tout ce qui a rapport à son action mécanique.

Pour le moment je laisserai de côté les anomalies que je viens de signaler, et, pour donner une idée nette do la dispo- sition typique de l'appareil digestif de l'Entomozoaire ou Animal annelé réduit à sa plus grande simplicité, je choisirai mes \)ro-

/ll6

APPARKIL DIGESTIF

micrs exemples parmi les Vers inteslinaiiv de la classe des

Appareil Nématoïdcs (1) ou des Helminthes proprement dits {"2). Chez

dansYa^iassc les Stronglos, les Ascarides, les Pilaires et la plupart des autres

nénJoides. Animaux de ce groupe, il ne consiste qu'en un tube presque

droit, qui présente à peu près les mêmes dimensions et une

structure identique dans toute sa longueur, ex(;epté dans la

partie antérieure, il est plus étroit et plus musculaire, de

façon à constituer un œsophage bien caractérisé. D'ordinaire

on ne peut y reconnaître un estomac distinct de l'intestin (3),

(1) C'est-à-dire filiformes (de vnu.a, fil, et 'd'^o;, apparence.

(2) Jusque dans ces dernières an- nées les zoologistes réunissaient dans une même classe, sous le nom com- mun d'Helminthes ou de Vers intes- tinaux, des Animaux qui se ressem- blent par leur manière de vivre en parasites dans l'intérieur de diverses parties du corps d'autres Animaux, principalement les intestins, mais qui diffèrent beaucoup entre eux par leur mode d'organisation. Aujour- d'hui on est assez généralement d'ac- cord sur la convenance de les répar- tir dans plusieurs classes distinctes, et d'élever à ce rang l'un des grou- pes qui avait élé considéré précé- demment comme formant seulement un ordre ou famille naturelle, sa- voir : les Nématoïdes de lUidoIplii, ou Vers cavitaires de Cuvier (a). M. Blanchard et quelques auteurs réservent aux Vers de cette division le nom d'Helminthes (b) ; mais cette expression est généralement employée dans une acception beaucoup plus large, et Ton ne peut sans incon-

vénient le restreindre de la sorte, car cela occasionnerait beaucoup de confusion dans le langage zoolo- gique.

(u) Chez l'Ascaride lomhricoïde , Ver d'assez grande taille, qui habite l'intestin de l'Homme, la bouche, si- tuée à l'extrémité antérieure du corps, est triangulaire et entourée de trois tubercules arrondis, qui, en s'écar- lant plus ou moins , dilatent cet ori- fice, ou bien ne laissent libres que trois petits espaces ayant l'apparence de pores, disposition qui en a imposé à quelques hclmintliologistes (c). Un œsophage musculaire et un peu élargi postérieurement fait suite à cette ou- verture ; il est attaché aux parties voisines des parois de la cavité vis- cérale par des brides membraneuses, et il présente à l'intérieur trois rai- nures longitudinales, de façon que sa cavité est iriquètre. Un étranglement le sépare de l'estomac, qui a la forme d'un boyau cylindiique et libre, et se dilate un peu vers l'arrière du corps. Quelques anatomistes don- nent le nom d'intestin à sa partie

(a) l'iudolplii, Entoxoorum sive Vermium inleslinalium historia naturalis, 1808, t. II, p. 1. Cuvier, Règne animal, -1817, 2" cdit., f. IV, p. 2i).

(b) Blanchard, ncclierches swr l'organisation des \'crs (Voyage en Sicile, l. 11, p. VJ cl 21G).

(c) Brera, Memorie lisico-mediche, pi. 3, lig-. 11).

DES VEHS DE LA. CLASSE DES NÉMATOÏDES. ^17

et il trnversc plus ou moins librement la grande cavité viscérale, ou n'y est retenu que par des lames mésenté-

postérieuie ; mais il n'y a ni rétrécis- sement l)ien niarqné, ni différence de structure dans les parois de ses deux portions, et partout ses tuniques sont minces et transparentes , mais con- tractiles (a). La lunique muqueuse est garnie d'une multitude de villosités microscopiques qui donnent à sa sur- face un aspect velouté {b).

La structure de cet appareil est la même chez l'Ascaride du Cheval [c) et l'Ascaride de l'Ours ; mais, chez d\iutres espèces, telles que VAscaris heterura et VA. semiteres [d) , on aperçoit à la base de l'œsophage une petite expansion latérale en forme de caecum. Il en est de même chez l'Ascaride des l'oissons, ou Asca- ris capsularia {e), et chez VHetero- cheilus tunicatus, espèce d'Ascari- dien qui vit sur le Dugong, cet ap- pendice est assez allongé et dirigé en avant parallèlement à l'œsophage (/). Il est également très développé chez VAscaris depressa , VA. acula, VA. a7igulata et VA. mucronata; enfin, chez VA. speculigera et 1'^. osculata, il se prolonge jusqu'à l'extrémité cé- phalique du corps {(j).

Chez le Filaire du Cheval, la struc- ture du tube digestif est à peu près la même que chez l'Ascaride lombri- coïde ; mais la longueur de cet or- gane, comparée à celle du corps, est plus grande, de sorte qu'il se con- tourne un peu sur lui-même {h).

Le canal alimentaire ne présente rien de particulier chez le Sclérostome du Cheval, si ce n'est que la cavité buccale est entourée de beaucoup de fibres musculaires qui constituent un bulbe pharyngien ovalaire (i).

Chez l'Oxyure vermiculaire [Asca- ris vermicularis , L. ) , qui habile dans le gros intestin de l'IJonime, il existe entre l'œsophage et l'intestin une dilatation particulière du tube alimentaire, qui est de forme globu- laire et peut être considérée comme un estomac distinct, ou plutôt comme un gésier. Il est aussi à noter que chez ce Vor l'anus se trouve à quelque distance de l'extrémité postérieure du corps (j). Ce mode d'organisation se voit aussi chez VOxyuris acumi- nata [k). Enfin, ciiez VOxyuris or- iiata, dont la structure a été étudiée avec soin par J\I. VValter, le jabot est

(«1 J. Cloquct, Analomie des Vers intestinaux, p. 26, pi. 1, fig. 2 et 4 ; pi. 2, fig. i.

(h) Morren, Quelques ronarques sur l'anatomie de l'Ascaride lombricoïde (Bulletin de l'Acad. de Bruxelles, t. V, p. 172, ùg. 7, H et 12).

(c) Blancliard, Op. cit. {Voyageen Sicile, t. I!I, p. 223, pi. 18, fij. 1 a, 16).

(rf) Melilis, Bemerkunijen [Isis, 1831, p. Ul, pi. 2, fii,-. 16, 17).

(e) SieboM, Helmintlwlogische Beitrdge (Archiv fiir Naturgesch., 1838, t. I, p. 309).

Blanchard, Op. cit., l. III, pi. 19, fig. 2.

(/■) Diusing, Neue Gallungen von Binneniuimnern {Annalen des Wiener Mus., t. II, p. 231, pi. 19, fi-. 3, i et 12).

(a) Mchlis, Op. cit. {Isis, 1831, pi. 2, fig. 18).

(/i) Blanchard, Op. cit., t. Ill, p. 233, pi. 19, fig. 3.

(t) Idem, ibid., pi. 21, Hg. 2 a, 2 h.

( j) Dugès, Recherches sur l organisation de quelques espèces d'O.rijures et de Vibrions (Ann. des sciences nat., 1820, t. l.\, p. 228, pi. 47, lîg. 1).

Blancliard, Op. cit., t. HI, p. 247, pi. 20, hg. 3.

(k) Mayer, Beitrdge iur .\ualomie dcr Entoiocn, p. 15, pi. 3, fig. 16.

V. 27

Zl.18 Al'PAUElL DIGESTIF

roïdes (1). La bouche est presque toujours inerme et entourée seulement par quelques papilles. Enfin, le système glandulaire dépendant de cet appareil est rudimentaire ; il n'y a pas un foie distinct, et, dans un petit nombre de cas seulement, l'appareil salivaire paraît être représenté par quelques appendices en forme d'am[)oulcs, gTou[)és autour de la région buccale (2). Cette classe de Vers renferme aussi des espèces qui ne sont

garni intérieurement de trois émi- nences coniques qui sont revêtues de cliitine, et constituent une armature triturante (a).

Cliez le Spiroptera sanguinolenta l'œsopliage est remarquablement long (6), et chez les Tricliocépliales ceue portion du canal alimentaire dé- passe de beaucoup en étendue la por- tion stomacale; on y aperçoit aussi des stries transversales qui y donnent une apparence moniliforme, et Mayer pense que ses parois, dont l'épaisseur est considérable, renferment un tissu glandulaire assez semblable à un ap- pareil salivaire (c). M. Busk considère la conformation du canal alimentaire du Trichocephalus dispar comme étant moins simple quechez la plupart des Nématoïdes. Il y a remarqué, à la suite d'un œsophage court et grêle, un estomac étranglé de distance en distance, de façon à paraître monili- forme , et un intestin dans lequel il croit devoir distinguer trois parties sous les noms de ca-cum, de côlon et de rectum (c/).

(1) Le Strongle géant présente une

particularité organique remarquable dans le mode d'attache de ce lube, qui, au lieu de flotter librement dans la cavité viscérale, comme d'or- dinaire, est fixe aux parois du corps dans toute sa longueur, par quatre rangées de brides mésenlériques com- posées principalement de fibres mus- culaires. Il est aussi à noter que chez cet Animal l'œsophage est moins distinct du reste du canal diges- tif que chez la plupart des Néma- toïdes.

(2) ]\1. de Siebold est disposé à rap- porter à l'appareil salivaire un an- neau circumbuccal que Mehlisa figuré comme un vaisseau chez le Strongylus armatus (e); mais cette détermina- lion (/■) ne me paraît pas admissible, et la partie en question me semble devoir être plutôt le système ner- veux.

M. Owen a trouvé chez des Vers intestinaux qui ont beaucoup d'ana- logie avec les Strongles, mais qui en ont été distingués sous le nom géné- rique de Gnathostoma, quatre tubes terminés en caecum et insérés autour

(a) G. Wallor, Dcitvâge i^ur Anatomie und Physiologie von Oxyuris oniata (Zeitschr. fur wissensch. Zool. von Siebold uiiH Kolliker, 1857, t. VIII, p. 192, ]A. C, Ctg. 20, 25).

(b) Blanchard, Op. cit. (Voyage en Sicile, t. III, pi. 20, fig-. 1 a, 1 b).

(c) F. Maycr, Deitràge ziir Anatomie der Entozoen, 1841, p. fi, pi. 1, fig. 1 et 7, et pi. 2, fi-. 1 .

(rf) linsk, Obscvv. un llie Anal, o/ Trichocoplialns dispar, 184!, p. 33. (e) Voyez Blanchard, Op. cit., t. III, p. 267, pi. 22, lijj. 1. (/•) Mehlis, Op. cit. [Isis, 1831, pi. 2, fig. C 3).

DES VEUS DE LA CLASSE DES NÉMATOÏDES. 1^19

pas parasites, et dont le mode d'organisation ne dil'ierc pas notablement de ce que nous venons de trouver chez les Ento- zoaires précédents. Ainsi, chez l'Anguillule, ou Vibrion du vinaigre, il existe aussi un tube digestif à peu près droit, étendu d'un bout du corps à l'autre et ouvert à ses deux extrémités; mais dans d'autres Animaux appartenant à ce type zoologi(jue, la portion [)ostérieure de ce canal paraît ne pas se développer, ou bien s'airophie par les progrès de l'àgo, car il semble se ter- miner en cul-de-sac. Enfin, il y a même des Vers de ce groupe chez lestjuels on n'a pu découvrir ni bouche ni anus : tels sont les Dragonneaux ou Gordius (i).

de la bouche [a). Il les considère comine étant des glandes salivaires, mais il les compare aux vésicules dont le pharynx des Holothuries est en- touré, lesquelles n'ont aucune com- munication ni avec le canal digestif, ni avec l'extérieur. r3cs appendices semblables se voient chez les Cheira- canthus et les Aiicyracanthus, décrits par M. Diesing (6). M. de Siebold pense que deux caecums situés sur les côtés de l'œsophage, chez le Strongylus striatits, sont également des organes salivaires (c).

Des ulricules d'une forme particu- lière, et offrant une teinte jaune ou verdàtre, se voient dans l'épaisseur des parois de la portion antérieure de l'intestin, et paraissent être des glan- dules liépatiques {d).

(1) Le lube digestif de l'Anguillule du vinaigre [Rhabditis aceti , Dujar- din) est conformé à peu près cou)mc

celui de l'Oxyure vermiculaire, dont il a été question ci- dessus (e). Mais chez l'Anguillule du blé niellé l'orifice anal paraît manquer. Ces Vers ont la ca- vité buccale armée d'un stylet conique qui est protractile et rétractile. En arrière du bulbe pharyngien qui loge cet organe, le tube alimentaire pré- sente un renflement fusiforme , puis un bulbe dit œsophagien, qui est ar- rondi et sans cesse agité de mouve- ments rhythmiques ; une quatrième dilatation, que l'on désigne sous le nom cVestomac, est pyriforme, et se continue en arrière avec un intestin irrégulièrement contourné sur hii- mênie et logé dans l'intérieur d'un mésentère tubuleux. La partie posté- rieure de cet intestin se rétrécit gra- duellement, et paraît se terjiiiner en un cul-de-sac qui serait rattaché à une fossette anale imperforée par un cor- don membraneux. Le sac méscnté-

(d) Sifbokl ot Slamiius, i^ouvcau Manuel d'aiialomie comparée, t. I, p. 133.

(6) Oweii, 0)1 two Eiitoioa infcstiiig tlie Stumach of the TUjer {l'roceedlngs of the Zool. Soc. of London, 18o('>, t. IV, p. 1-25).

(c) Diesing, iVeiic Oattungcn von Hiniiciiwûnneru {Ànnalen des Wkuir Mus., l. Il, )•!. 10, lig. 13 ; pi. n, fig. 8, 9 ; pi. 18, lig. 3).

{d} Siebold clStamiius, youvcau Manuel d'anatomic comimirc, I. 1, p. 133.

(e) Diigès, Op. cit. {Ann. des sciences nal., l8i-2, l. IX, p. 22y, pi. 47, ilg-. -2),

llW Al'l'AUElL DIGESTIF

Anomalie Oii pcut miiger aussi dans la classe des Nématoïdcs certains ÉchiUri.ymiucs Vcps iolcstinaux d'assez grande taille, qui constituent le genre Échinorhynque, et qui se font également remarquer par l'ab- sence d'une cavité digestive, bien que l'extrémité antérieure de leur corps ait la forme d'une sorte de trompe spinifère et qu'on y distingue même une petite fossette stomatoïdienne. Il y aurait beaucoup d'intérêt à suivre le développement de ces singuliers Animaux, et à chercher si dans le jeune âge ils ne posséderaient pas un tube alimentaire : quelques observations faites par

riqtie s'cleiid en ligne droite d'un jjoiil dn corps à raiitrc ; il conimcnco en arrière du renflement sloniacal, oîi il occupe toute l'épaisseur du corps, ei il se rétrécit en arrière; enfin, il est constilué par une membrane mince, et renferme une subslance granuleuse de nature albumino-graisseuse qui pour- rait bien cire un tissu hépatique (a).

Chez les Nématoïdes dont M. Du- jardin a formé le genre Mcrmis, on aperçoit aussi une bouche, un œso- phage et un tube stomacal intestini- forme, mais on n'a pu découvrir au- cune trace d'anus (6).

D'après ce zoologiste , le Gordius aquaticus et le G. tolosaniis seraient même dépourvus de bouche et d'a- nus, ainsi que de tout aulre organe digestif (c) ; et M. de Siebold consi- dère ce mode d'organisation comme se trouvant aussi chez le Sphœrularia

Bomhi [d] et chez le Filaria riyida qui vit dans l'iiilériour du corps de VAphodius ftnip.tarius (e) ; mais je dois faire remarquer que ces orifices, ainsi que le tube digestif, ont été décrits et figurés chez le Gordius aquaticus par M. Berthold (/").

Le Syngamus trachealis , Ver très singulier qui se trouve dans la tra- chée des Oiseaux, et qui paraît bifur- qué antérieurement, par suite de la soudure du mâle et de la femelle, présente un mode d'organisation ana- logue. Chaque individu est pourvu d'une bouche, d'un œsophage muscu- laire et d'un estomac intesliniforme qui paraît se terminer en cul-de-sac. chez le grand individu, qui est la femelle, la bouche est placée dans une cupule cornée et armée de crochets, comme chez les Scléro- stomcs {g].

(a) Dav.-iinc, Hccherches sur l'An(]uillule du blé niellé, 1857, p. 24, pi. 2, lie:. 12-15 (oxir. des Mém.de la Soc. de hiolo(jie, 2" série, t, III).

(h) Diijardiii, Hém. sur la structure anatmniiiue des Gordius et d'uu autre Helminthe, leMer- mis, qu'on a confondu avec cu.r {Ann. des sciences nat., i' série, ISit!, I. XVIIl, |). liO).

(c) Siebold, llelminthologischc Beitrâge {Archiv fur Naturgeschiclite, 183S, 1. I, p. 303).

Dujardin. Op. cit. (Ann. des sciences nul., '2,° série, 1842, I. .WIII, p. 14t)).

((/) SielioKI, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, I. I, p. 131.

(f) Siebold, Ueber die Spermatox^oen der Cruslaceen, /«sec^e/t, clc. (Miiller's .\rchiv fiir Anat. und l'hysioL, 1S36, p. 33).

(/■) A. Berlbold, Ueber de'i Bandes Wasscrkalbes, y. 13, \\g. 1 el 17 (Goltiiig:iic, 1842).

(y) Uwcn, arl. Enloiua (Todd's Cyclopxdia uf .\nat. and l'IujsiuL, I. II, p. 134).

DES VERS DE LA CLASSE DES NÉMATOIDES. /l21

M. Blanchard tendent à faire supposer qu'il en est ainsi, et que cet organe s'atrophie lorsque l'appareil reproducteur se déve- loppe (1). Du reste, les Échinorhynques vivent au milieu de matières alimentaires déjà digérées par leur liôte, et les parois de leur corps sont douées d'une puissance absorbante très grande ; par conséquent, on conçoit que ces parasites puissent se sustenler malgré l'absence d'instruments spéciaux pour l'élaboration de leur nourriture (2).

Quant à l'armature dont la bouche de quelques Nématoïdcs

(1) L'Écliinorliynqiie géant, qui se trouve dans l'intestin grêle du Porc, ei qui a souvent plus de 3 décimètres de long , présente h rextréuiité anté- rieure de son corps une trompe pro- tractile et rétractile, de forme globu- leuse et armée de cinq ou six rangées de crochets. Cet organe est muscu- laire, et. sa base se prolonge dans la partie antérieure de la cavité viscérale selogentscs muscles rétracteurs(a). Au milieu de son extrémité anté- rieure, on y aperçoit une petite dépres- sion qui ressemble à un porc buccal, et son axe paraît être occupé par un petit canal; mais on ne trouve aucun orifice à sa partie postérieure, et il n'est pas suivi d'un tube alimentaire. 11 ressemble donc à un bulbe pharyn- gien qui aurait persisté après la des- truction de tout le reste du tube di- gestif, et qui se serait oblitéré posté- rieurement. En etïet, cliez ces Vers à l'état adulte, on ne voit dans la cavité viscérale aucune trace de tube ali-

mentaire. .Mais M. Blanchard a décou- vert, chez quelques jeunes individus d'une autre espèce du même genre ( VEchrnorhynchus proteus, qui vit sur la Perche), un appendice mem- braneux faisant suite à la trompe, et cet organe lui a paru être un tube digestif en voie d'atrophie [b).

On ne sait rien sur les fonctions de deux organes appendiculaires qui sont suspendus aux côtés de la trompe, et qui ont été désignés sous les noms de lemnisques ou de bandelettes latérales. Gœze a cru distinguer dans chacune de ces bandelettes un tube garni de sacs ovoïdes (c); et elTcctivement elles sont creusées d'un canal cen- tral qui donne naissance à quelques ramifications, ainsi qu'à des vési- cules(t/;. Mais ce canal ne paraît avoir aucune communication ni avec l'exté- rieur, ni avec la cavité de la trompe (e). M. Dujardin suppose que ces lemnis- ques sont des organes salivaires (/").

(2) On doit à Treuller, à Rudolphi et

(a) Rudolplii, Entoioorum, t. I, p. 252.

Cloquet, Anatomle des Vers intestinaux, p. 70, pi. 5, dg. 3.

Blancliard, Rech. sur l'organis. des Vers (Voijage en Sicile, t. III, p. 289, pi. 94, flg. 5). {i)ldem. ibid., p. 290.

(c) Goze, Versuch einer Naturgeschichte der Eingeweidewûrmer thierischer Kôrper, p. ilT.

(d) Cloquet, Op. cit., p. 84.

(e) Blanchard, Op. cit., p. 292.

(f) Dujardin, Histoire natiireUe des Helminthes, p. 492.

/i22 APPAREIL DIGESTIF

est pourvue, elle paraît être destinée à intervenir dans les phé- nomènes de la locomotion plutôt que dans le travail de la diges- tion. Tantôt elle consiste en une espèce de dard ou de stylet rpie l'Animal emploie pour perforer les tissus à travers lesquels il a besoin de se frayer un chemin (1); d'autres fois ce sont de petits crochets qui lui permettent de se cramponner sur les membranes auxquelles il doit adhérer (2).

à M. J. Cloquet quelques expériences sur le pouvoir absorbant de la surface du corps de ces llelmintl:es (a); mais on ne sait rien de satisfaisant tou- chant leur mode de nutrition.

(1) Plusieurs des petils INéinatoïdes qui s'enkystent dans le corps des In- sectes , des Poissons et même des Mammifères, et qui ont été décrits sons les noms de Filaires ou d'Asca- rides, mais qui ne sont que des lar- ves de Vers d'espèces indéterminées et qui aclièvent leur développement dans d'autres gîtes , ont la bouche armée d'un stylet ou dard corné, ainsi que cela a été constaté par M. irtein et par plusieurs autres liclmintholo- gistes {b).

Dans d'autres Vers de cet ordre, la bouche renferme deux petits styleis ou mâchoires très grêles : par exemple, chez le Hhabdiles bioculcita gi le Diplu- gaster micaiis de M. Max Schuize (c).

('2) Chez VAncijloitomuni duode- nale, dont le tube digestif est con-

formé de la même manière que chez les Ascarides, la bouche a la forme d'une cupule rigide, et son bord su- périeur est armé de deux paires de crochets cornés (d).

Chez le Gnathostoma spinigerum, la bouche est entourée d'une sorte de lèvre renflée et garnie de six ou sept rangées circulaires de crochets mi- croscopiques ; on aperçoit aussi en dedans de la fente buccale une paire de replis membraneux niaxilliformes dont le bord antérieur est armé de pointes cornées [p).

Chez quelques Nématoïdes, le bulbe pharyngien est non-seulement charnu, comme chez les Scléroslomes, mais garni intérieurement de pièces solides de consistance cornée.

Chez le Strongylus armatus, celte disposition existe, le bord labial est armé en outre d'une série de pe- tites pointes épidermiques (/").

L'armature céphalique des Ecliino- rhynques est plus puissante, et l'on a

{«) Trcutler, De Echinorliyiichovnin nalura. Lipsiœ, 1791.

niiilolplii, Entoioovnm sire Vcrmimii intcstinalhim historia naturalis, t. I, p. 25-2.

Cloqiicl, Anatnmie lies Vers intestmau.r, p. 87.

(/;) Slcin , lleitrage xnr Eniwiclieliinijsgeschichte der Eliigeii'eidewunner { Xeilsclirift. fur H'issensfli. Zool. von Siebold iind KulliUer, 1852, t. IV, p. 200, pi. tO, tig. 5, G, 8).

(c) Voyez J. Canis, Icônes zootomicw, pi. 8, dg. t et 2.

((/) Uiibini, Nitovo Verme intestinale [Annali univ. di Medicina di Oniodei, 1843, I. CVl, pi. 1 , fiar. •*).

(c) Owcii, 0/). cit. (Prnceed. nf Ihc Zool. Snc. tS.'.G, t. IV, p. '12-i).

(/') \. WesUniml), lieitr. ztir Anat. des Slrong:jlus .irnintiis (/sii, 18-22, p. 085, pi. fi). - Lch\ond, Quelques matériaux pour sevvir à Vkislmve des Filaïres et des Strnngles, 18,'ÎC, p. 31, pi. 4, fil,'. 2 el 3.

. Scliinitz, Tubulœ Anatomiam Enlinnnnim ilhtstranles, pi. tR, flg. 1 1 .

DES VERS DE LA CLASSE DES GÉPHYRIENS. /l'S^

^2. Chez les Vers qui ont été désignés par ÏM. de Quatre- f'^^^e fages sous le nom commun de Géphyriens, et qui semblent être Géphyriens. intermédiaires entre les Annélides et les Échinodermes de l'ordre des Holothuriens , l'appareil digestif est également très simple, et parfois ne diffère que peu de ce que nous venons de voir chez les Nématoïdes. Ainsi , chez les Échiures et les Bonellies, il ne consiste qu'en un tube à peu près cylindrique qui est ouvert aux deux extrémités du corps (1) ; mais dans la

constaté expérimentalemeiit remploi que ces Vers en font pour attaquer ies tissus auxquels ils s'attaclient (a). Le nombre et la forme des crocliets de la trompe varient un peu suivant les espèces (b).

(1 ) Chez les Échiures, le tube diges- tif est beaucoup plus long que le corps et décrit plusieurs circonvolution» dans la grande cavité viscérale il flotte, attaché à un repli membraneux qui fait office de mésentère (c), ou à des brides qui remplissent les mê- mes fonctions ((/). y distingue trois parties principales. La portion anté- rieure, dont les parois sont d'abord membraneuses, puis très charnues et rigides, correspond à l'œsophage mus- culaire des Ascarides, et a été consi- dérée comme un estomac par {'allas (g) et comme une trompe par M. de Quatrefages, qui en a fait une étude

approfondie (/"). La portion moyenne du canal alimentaire est boursouflée, de façon ù rappeler par son aspect le tiros intestin des Mammifères ; elle me paraît représenter l'estomac. Enfin la portion postérieure est grêle, et près de son extrémité elle donne insertion à une paire d'api)endices lubuleux qui ont quelque analogie avec l'appareil aquifère des Holothu- ries, et qui sont probablement des organes de respiration ig).

Chez le Bonellia viridis, l'appareil digestif présente les mêmes caractères généraux, mais la bouche ne paraît pas ètie terminale, car la portion frontale du corps se prolonge de façon à con- stituer un énorme tentacule labial qui est bifide au bout et creusé en gout- tière à sa face inférieure [h). On désigne communément cet appendice sous le nom de trompe., mais il ne ressemble

[a] Cloqiiet, Analomie des Vers intestinaux.

{b) Voyez Weilrumh, De Helminthibus acanthocephaUs, i8'2i, pi. 1.

Diijardiii, Histoire naturelle des Helminthes, pi. 7.

Diesing', Zwolf Arien von Acanthocephalen [Mém. de l'Acad. de Vienne, 1850, t. XI, pi. i, fig. G, 19, 2\); pi. 2, Rg. 15 ; pi. 3, fig. 14, elc).

(c) Voyez l'Atlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 23, fig'. 1 a.

{dj Foibes aiiJ Goodsir, On the Nat. Hist. and Anal, of Thalassema and Echiurus (Edinburgh new Philos. Journal, 1841 , t. XXX, p. 373).

(e) Pallas, Specilegia ^oologica, 1774, fasc. x, p. 7.

(/■) Q\\a\reh'^es, Mém. sur l'Echiurede Gtertner (Ann. des sciences nat., 3" série, 1847, t. VII, p. 318, et Voyage en Sicile, t. II, p. 232).

(fl) Voyez ci-dessus, t. II, p. 9.

{h) Voyez V Atlas du Règne animal, Zoopii., pi. 21 , fig. 3, 3 a.

Lacaze-Dulhieis, Mém. sur la BonelUe {,.Ann. des sciences nat., 1858, 4* série, t. X, pi. 1, fig. 1 et 2).

Classe

(les

Annélides.

U'^li APPAREIL DIGESTIF

famille des Siponcles , sa conformation générale est à peu près la même, il offre une disposition qui rappelle jusqu'à un certain point celle que nous avons rencontrée chez quelques Échinodermes et chez tous les Mollusques : car l'anus, au lieu d'être terminal, est fort rapproché de la bouche, et se trouve vers le tiers antérieur du corps, bien que l'intestin se prolonge beaucoup plus loin en arrière, sous la forme d'une anse (1).

§ 3. Chez les Aisnélides, la bouche et l'anus se trouvent toujours aux deux extrémités du corps, et en général le tube digestif s'étend en ligne droite de l'un de ces orifices à l'autre; mais souvent sa structure se complique plus que dans les classes dont je viens de parler, et les organes destinés à la préhension des aliments se perfectionnent parfois d'une manière assez remarquable. Du reste, ces dernières parties

en rien à la trompe des autres Vers, qui est formée par une portion exscr- tile du canal digestif, tandis que la bouche est située sous la base de l'organe dont il est ici question. Le tube alimentaire de ces Vers est très long; il se contourne autour d'une partie de l'appareil génital, et est attaché aux parois de la cavité vis- cérale par des brides mésenlériques. Sa portion antérieure n'est pas droite et rigide connne chez l'Écliiure; mais sa portion moyenne présente la même disposition bouillonnée, et ses parois

sont colorées en jaune par des cellules hépatiques (a).

Chez le Sternapsis, le tube alimen- taire est presque cylindrique, et paraît n'offrir rien de remarquable (6).

(1) Le tube digestif des Siponcles est tr»'S long, et se contourne en spi- rale de façon à se pelotonner (c). La bouciie est garnie d'une frange la- biale, et toute la portion antérieure du corps est susceptible de ren- trer en dedans ou de se dérouler au dehors, de manière à simuler une trompe.

(a) Scliniarda, Ziir Naturgeschichte der Adria {Mém. de l'Acad. des sciences de Vienne, 1852. t. IV, p. H 8, pi. 5, fig.i).

J. Canis, Icônes z-ootomicœ, pi. S, 11^. 21.

Lacazo-Duthiers, liecherclies snr la lionellie {Ann, des sciences nat., 4" série, 1858, I. X, p. 67, pi. 2, fig. t).

(b) A. G. Otio, De Sternapside llialassemides, etc., pi. l , et Allas du Règne animal de Ciivier, Zooi'HYTEs, pi. 22, fiçr. 3f.

Max. Mueller, Observaliones analomico: de vermibns quibusdam mavitimis (dissent, iiiaiig.). Derolini, 1852, pi. 1, fig. 13.

(r) Voyez Délie Cliiaje, Descriiione e noionda degli Animali invertebrati délia Sicilia citeriore, pi. 108, fiiï. 5 et tj.

Griibe, Yersnch einer Anatnmie des Sipunculus nudus {MiiUer's Archiv (ûr Anat. und Physiol., 1837, p. 245, pi. ii.fig- 1 et 4).

Blanchard, Atlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 22, fig. 2.

DES VERS DE LA CLASSE DES ANNÉLIDES. /]25

varient beaucoup suivant le régime de l'Animal, et, à cet égard, on remarque des différences très grandes entre les Ché- topodes, ou Annélides sétifères, et les Hirudinées, ou Anné- lides suceurs. En effet, les premiers sont destinés à se nourrir d'aliments solides, tandis que les secondes ne vivent guère que de liquides, et ont par conséquent la bouche organisée en manière de ventouse.

Chez les Chétopodes, cette ouverture occupe la face infé- rieure de la tète, dont la région frontale s'avance plus ou moins ; ses bords sont en général protractiles, et chez quelques-uns de ces Annélides les appendices céphaliques qui l'entourent sont disposés de façon à y diriger les corpuscules charriés par les courants respiratoires ; mais d'ordinaire les aliments sont saisis directement par une trompe plus ou moins exsertile.

Le premier de ces modes d'organisation se voit chez beau- coup d'Annélides sédentaires ou tubicoles : les Serpules et les Sabelles, par exemple, la bouche est située au fond d'une couronne de longs tentacules ciliés qui ont la forme de, pana- ches, et qui servent aussi à la respiration (1).

Les Annélides errants ou dorsibranches ont en général une trompe rétractile, qui est très musculaire et susceptible de s'a- vancer au dehors, à une distance plus ou moins grande, pour saisir les aliments par l'orilice dilatable situé à son extrémité antérieure et conduisant dans l'œsophage (2). Tantôt cet organe

Appareil

digestif

de»

Chétopodes.

Trompe.

(1) Voyez ci-dessus, tome II, page 103.

Chez les PoIyopliUialnies, il existe de cfiaque côté de la lète un organe prolfBctile et cilié qui paraît être spé- cialement destiné à produire des cou- rants dirigés vers cet orifice , et à y envoyer de la sorte les corpuscules alimentaires en suspension dans l'eau

circonvoisine. Chacun de ces organes consiste en une sorte de pelote bilobée et couverte de longs cils vibraiiles (a); ils ne sont que peu vasculaires, et ne paraissent servir ni à la respiration, ni à la locomotion.

(2) La trompe des Annélides est toujours formée par la portion anté- rieure du tube digestif, qui est dis-

(a) Quatrefagfes, Mém. sur la famille des Polyophthalmieiis [Ann. des sciences nat., 1850, t. XIII, p. 14, pi. 2, fig. 1, 2 et 3).

426 APPAREIL DIGESTIF

est inerme, mais d'autres fois il est armé de crochets ou de lames cornées qui fout office de mâchoires, et qui constituent, chez certaines espèces, un appareil sécateur fort com])lexe.

posée de façon à pouvoir se renverser au dehors comme un doigt de gant que l'on retourne, ou à rentrer dans l'intérieur du corps. Quand elle est dans cette dernière position, on y distingue deux portions : l'une, anté- rieure et flexible, qui fait suite aux bords labiaux ; l'autre qui est située plus en arrière et qui a des parois très musculaires. Lors de la protraclion, la partie antérieure de la trompe s'avance au dehors en se renversant de manière que sa surface libre, au lieu d'être in- terne, devient extérieure, et constitue une sorte de gaîne au centre de la- quelle se loge la portion suivante, jusqu'à ce que le tout .se soit déroulé. Chezquelques-uns tfe ces Animaux, cet organe a une longueur ti'ès considé- rable : par exemple, chez les Phyllo- doces, il est un peu claviforme(o). Chez d'autres, tels que les Lombrics ou Vers de terre (b), et les Arénicoles (c), il est au contraire fort court, et chez certaines espèces il est même tout à fait rudimentaire : par exemple, les Cirra-

tules (d). Son extrémité antérieure est tantôt simplement plissée, ainsi que cela se voit chez les Euphrosines (c), ou granuleuse, comme chez la Phyllo- doce clavigère (/") ; mais d'autres fois elle est garnie d'une ou deux rangées de papilles tentaculiformes, chez les Nephthys, par exemple (y).

Chez la plupart des espèces que je viens de citer, la trompe est inerme ; mais chez d'autres elle est plus ou moins fortement armée, et la disposi- tion des pièces dentaires dont elle est pourvue varie dans les difl'érents gen- res. Ainsi, chez les Néréides, il existe tout autour de sa surface externe un nombre considérable de petits tuber- cules ou poinles cornées, et son extré- mité est garnie d'une paire de mâ- choires latérales qui ont la forme de crochets lamelleux, tantôt simples, tantôt denticulés sur le bord in- terne (h). Chez quelques espèces du genre Glycère, l'entrée de la trompe est armée de quatre petites mâchoires pointues, disposées en croix (î),et chez

(a) Voyez Milne Edwards, Annelida (Todd's Cyclop. of Anat. and PhysioL, t. I, p. 108, fig. 06, et Atlas du Règne animal de Cuvier, Annélides, pi. 13, fig. 1 a et 3fl).

Qiialrefiiges, Description de quelques espèces nouvelles d' Annélides (Magasin de zoologie, de Guérin-Méneville, 1843, pi. 1, fig. 1).

[h) Voyez l'ontallic. Observations sur le Lombric terrestre (Ann. des sciences nat., série, 1853, I.'XIX, p. 18).

(c) Voyez Milne Edvvanls, Annki.ides de VAtlas du Règne animal de Cuvier, pi. 8, fip:. 1 a.

{(/) Voyez l'Atlas du Règne animal de Cuvier, Annélides, pi. 17, fig. 3 6.

(«) Snvigny, Système des Annélides d'Egypte, pi. 2, fig. 1-'' et l".

if) Audouin cl Milne Edwards, Annélides des cales de la France (Ann. des sciences nat., 1833, t. XXI.\, pi. 16, dg. 10).

(g) Voyez V Allas du Règne animal de Cuvier, pi. 15, fig. 2 a, 2 b.

(h] Pavi;,'ny, Op. cit., pi. i,ùg. 1", 1^, etc.

Audonin et Milne Edwards, Op. cit. (Ann. des sciences nat., t. XX\'lI,pl. 23, fig. 2 et 3, clo. et Atlas du Règne animal, Annéi.ide.-^, pi. 12, fig. 1 a, 1 &, 1 c).

(?) Voyez VAtlas du Règne animal de Cuvier, ANNÉl.inES, pi. 14, (Ip. 1 .

DES VERS DE LA CLASSE DES ANNÉLIDES, /l27

Ainsi que je l'ai déjà dit, le tube alimentaire do ces Animaux s'étend d'ordinaire en ligne droite depuis le pharynx jusqu'à l'anus (1). Sa portion œsophagienne est libre dans les espèces

Canal alimentaire.

lesGoniacles ces organes inanqiienl, ou ne sont qu'au nombre de deux, on remarque à la face inférieure de la U'ompe une paire de râpes constituées par une série de crêtes cornées en forme de V {a).

Cliez les Aphrodisicns, la trompe est pourvue de quaire mâchoires réunies par paires , deux du côté dorsal et deux du côté ventral, et'opposées par leurs bords. Chez les Polynoés [h] et les Polyodontes (c), elles sont très fortes, mais chez les Aphrodites elles ne sont que peu développées.

Enfin, chez les Euniccs, cet appareil maxillaire se complique davantage, l^e plancher de la cavité buccale est garni d'une paire de pinces cornées qui ont été désignées sous le nom de lèvre inférieure {d) ; elles sont géminées comme les mâchoires des Aphrodi- sicns et terminées en avant par un bord tranchant. Au-dessous se voit une double série de dents qui sont portées sur une pièce basilaire, et dis- posées de façon à se renverser au dehors latéralement, quand l'Animal fait saillir sa trompe. On en compte trois d'un côté et quaire de l'autre :

celles de la première paire sont crochues et très fortes ; les autres sont lamellenses et denliculées sur leur bord ; toutes se rapprochent sur la ligne médiane lors de la rétrac- tion (e). La disposition de cet appa- reil est à peu près la même chez les Aglaures (/"), les I^ysidices et les Lom- brinères {g).

f 1 est aussi à noter que la surface de la trompe des Annélides est souvent garnie d'une multitude de petites pa- pilles qui sont considérées par quel- ques naturalistes comme étant des organes sécréteurs (/;) ; mais cette opinion ne repose sur aucune obser- vation positive.

(1) Chez quelques Annélides Chélo- podes, le canal digestif est au con- traire beaucoup plus long que le corps et forme des anses ou des cir- convolutions plus ou moins nom- breuses. Ainsi, chez rAmphitriteauri- come, l'estomac, qui est séparé de l'œsophage par un sphincter et qui a des parois très vasculaires, est reployé sur lui-même en forme d'U, et l'in- leslin grêle qui y fait suite décrit plu- sieurs courbures ; enfin la portion

((-() Aiiiiouin etiMilne Edwiinls, Op. cit. {Ann. des sciences nat., t. XXIN, pi. 18, fi^^ A et 5). [b] Savigny, Egypte, Annélides, pi. 3, fig. i^, i^, a**.

Quatrolages, Allas du Règne animal de Cuvier, Annémdes, pi. 19, fig-. 2 e, 2 /".

(f) Ucllo Cliiajo, Descrixione e notoiiiiadegli Animali ùivertebrall délia Sicilia citer iore, pi. 09, dg. 2).

{d) Savigiiy, Système des Annélides, p. 4S.

(f) Savigny, Egypte, Allas, Annélides, pi. 5, fig. i'" à 1**.

Audouin et Milne Edwards, Op. cit. {Ann. des se. nat., t. XXVII, pi. H, fig. iO et 11). {[) Savigny, Egypte, Annélides, pi. 5, fig. %^.

(y) Aiuloiun et Milne Edwards, Op. cit. {Ann. des sciences nat., t. XXVII, pi. 12, fig. 1 1). {/») T. Williams, Report on the British Anneltda (British Association for Vie advancement of science, 1851, p. 232).

428 APPAREIL DIGESTIF

à troni[)e protractile, et se contourne plus ou moins quand cet organe est rentré ; mais la portion suivante est lixée aux parois de la grande cavité viscérale par des brides ou des cloisons membraneuses, et dans beaucoup d'espèces les expan- sions mésentéroïdes ainsi constituées l'étranglent un peu au niveau de cliaque sillon interannulaire du corps, de façon que dans les espaces intermédiaires il olTre des boursouflures plus ou moins marquées. Sa surtace interne est garnie de cils vibratiles ('1). On y distingue aussi une tunique musculaire, et près de sa surface externe se trouvent des follicules et d'autres organites sécréteurs dont le développement varie beaucoup. Naïs, eic. Daus quclqucs espèces, la disposition de des parties est à peu près la même dans toute la longueur du corps, et la structure

posiérieure de l'intestin, qui est dila- Polyophthalmes et beaucoup d'autres

tée, se dirige de nouveau en ai- Annélides {g).

rièic (a). M. 0. Schniidt a cru apercevoir que

Cliez le Siphonostoma plumarum, chez les Naïs du genre Chœtogaster,

le tube digestif est également reployé l'action de ces cils vibratiles dans le

deux fois sur lui-même (6), et il od're bulbe œsophagien et dans la portion

la même disposition chez les Chlo- terminale de l'intestin est soumise à

rèmes (c). la volonté de l'animal. Quoi qu'il en

(1) Le moiivement ciliaire sur la soit de cette particularité, il a pu surface interne du tube digestif des constater l'existence de ces appen- Annélides a été constaté d'abord chez dices épilhéliaux dans toute la lon- les Aphrodites par M. Sharpey (cl). , gueur du tube digestif de cet Anne- Aï. Henle l'a observé ensuite chez les lide. Il a remarqué aussi que ces cils Nais et les Lombrics (e), et plus ré- sont extrêmement longs dans la partie cemment le même phénomène a été antérieure du canal intestinal chez le signalé chez les Chlorèmcs (f), les Naïs elinguis {h).

(a) Ratlike, Beitrâge xnr vergl. Anat. und PhysioL, 1842, p. 64, pi. 5, fi^. 4 et 5. {!)) Idem, ibid., p. 8G, pi. C, lig-. 5.

(c) Qnatrcfag-ps, Op. cit. (.\nn. des sciences nat., 3' série, 1849, t. XII, pi. 9, fig'. 3). ((/) Sliarpoy, C.ilia (Todd's Cyclop. of Anal, and PhysioL, t. I, p. 018).

(e) Henlo, Ueber Enchylrœus, eine neue Anneliden-Gattting (Miiller's Archiv fur Anal, tind PhysioL, 1837, p. 81).

(f) Qiialrefages, Mém. sur la famille des Chlorémiens {Ann. des sciences nat., 3" série, 1849, t. XII, p. 298).

(g) Qiiatrefagc.'!, Mém. sur la famille des Polyophthalmiens {Ann. des sciences nat., 3" série, 1850, t.XlII, p. IG).

(h) Ose. Sclimidt, Beitrâge zur Anatomie und Physiologie der Naïden (Miiller's .Archiv fiir Anal. und PhysioL, 1840, p. 410, cl Ann. des sciences nat., série, 1847, t. VII, p. 185).

1!ES VKKS DE L.V CLASSE DES ANNÉLIDES. /l'29

de l'estomac, on intestin, comme on voudra l'appeler, est très simple. Dans divers Naïs, par exemple, le canal alimentaire, après avoir constitué un (esophage assez court, prend la forme d'un cylindre dont les parois logent une multitude d'ulricules d'un brun jaunâtre, surtout vers sa partie moyenne (1). Mais Tdrdbeiics, de ans d'autres Annélides de la môme famille, on remarque à peu de distance de lïesopbage un renflement stomacal (jui est très musculaire (2), et cette espèce de gésier acquiert même un

(1) Ce mode d'organisation se ren- contre cliez le Tubifex des ruisseaux. Le bulbe pbaryngien, qui est prolrac- tile, se continue postérieurement avec un œsophage étroit et incolore, situé dans les troisième et quatrième an- neaux du corps. La portion suivante du tube digestif est plus large, colorée en brun jaunâtre et légèrement étran- glée d'anneau en anneau par des cloi- sons musculo-membraneuses qui re- présentent autant de petits diaphrag- mes. Les cils vibratiles qui garnissent la surface interne de ce tube sont très apparents dans le voisinage de ses deux extrémités. Enfin, on distingue dans ses parois des glandules de deux sortes : les unes sont des utricules contenant un nucléole ainsi qu'un li- quide jaunâtre, et paraissent s'ouvrir dans l'intestin comme autant de petits caecums; les autres offrent une slruc- ture analogue, mais contiennent un

liquide incolore dans lequel nagent des gouttelettes de graisse («).

Comme exemple d'un tube digestif olfrant à peu près la même struclure dans toute sa longueur, je citciai aussi celui de V Amphicora (6). Chez les Sabelles, le rétrécissement œsopha- gien est aussi à peine marqué, et la portion stomaco-intestinale offre par- tout le même diamètre, si ce n'est dans les points elle est resserrée par les cloisons transversales de la cavité viscérale qui correspondent à chaque sillon interannulaire (c) : ce sont les boursouflures ainsi produites qui ont été figurées comme des cir- convolutions par Viviani {d).

(•>) On ne voit pas de dilatation stomacale chez les Naïdes des genres Tubifex, Lumbriculus , Euaxes (e) et Capitella (/"),- elle manque aussi dans la plupart des espèces du genre En- chytœrus {g) , mais se rencontre chez

(a) J. d'Udekcni, Histoire naturelle du Tubifex des ruisseaux, p. 15, pi. i, llg-, 3 et 12 (exlr. des Méin. de l'Acad. de Bruxelles, Savants étrangers, t. XXVI).

(6| E. 0. Sohmidt, i\eue Beitrdge zur Naturgeschichte der Wiirmer, pi. 2, Rg. 6 (lena, 1848).

(c) Milnu Edwards, Annémuks de VMlns du Règne animal de Cuvier, pi. le, Rg. 2.

{d) D. Viviani, l'hosphorescentia maris, 1805, pi. 5, lig. 7.

(c) Udekciu, Nouvelle classilicatlon des Annélides séligères abranches, p. 9 (exlr. des Mém. de l'Acad. de Bruxelles., t. XXXI).

(/■) Van BciiL'don, Histoire naturelle du genre Capitella, ou Luuibriconaïs, p. H , pi. 1, li-. 2 (exlr. du Bulle tin de IWcad. de Bruxelles, 2' série, t. III).

(y) LideUcm, DescripUoii d'une nouvelle espèce d'Enclujtncus (BiUietiH de i.\cad. dcL'ru.vcUes,

I. XXI, pi. i,n-. 1).

I\o0 APPAREIL DIGESTIF

développement très considérable chez quelques Tubicoles : les Térébelles, par exemple (1).

Il est aussi à noter que chez divers Annélides on voit accolés à l'œsophage un certain nombre d'organes glandulaires qui ont été considérés par quelques auteurs comme constituant un appareil salivaire, mais qui ne sont encore que très imparfaite- ment connus sous le rapport de leur mode d'organisalion aussi bien que de leurs fonctions (2).

VEnchytœrus ventriculosus(a) etchez les Nais proprement dils (6), ainsi que chez les LomI)rics (f). Chez le Chœto- Qastcr dioplianus on voit deux dila- tations sloniiicales séparées par un délroit ((/).

(1) Fj) piénéral , cet estomac mus- culaire, de forme cylindrique, est situé près delà bouche, et paraît correspon- dre analomiquement au bulbe charnu qui, d'ordinaire, l'orme la portion basi- laire et interne de la trompe. Telle est sa disposition chez les Térébelles, par c;cempk', la portion pharyngienne du tube alimentaire n'est cependant pas protractile. Chez l'Arénicole, le gésier est situé à peu près de même, et cependant ne pénètre pas dans la trompe,, quand cet organe se déve- loppe au dehors (e); mais chez les

Ilermelles il se trouve beaucoup plus en arrière, et affecte une forme globu- laire (/■). Chez ce dernier Annélidc la portion suivante du tube digestif se distingue de la portion terminale par sa forme boursouflée et par la cou- leur jaunâtre de ses parois; la por- tion terminale, qu'on peut considérer comme étant l'intestin, est lisse et incolore (g).

(2) Chez les Lombrics, il existe de chaque côté de l'œsophage une agglo- mération de glandules disposées en forme de cordon cylindrique, qui offre plusieurs circonvolutions et sécrète un liquide visqueux {h). M. de Siebold pense que ces organes peuvent être considérés comme des glandes sali- vaires buccales (i). M. Ilcnle attribue le même rôle à quatre paires de vési-

(a) Exemple : le Nais prohoscidea (voy. Gruitluiisen, Anat. der Gezûngellen Naide, \n Nova Acta Acad. nat. curios., t. XT, pi. 35, fig. 1).

(fc) Moiren, De Uimbvici tcrrcstrls historia naturali nccnou anatomue traclalus , p. 132, pi. 7, fig. \ m (Bruxelles, 1829).

Quatrefagcs, Annélides du Règne animal de Cuviev, pi. 21 , fig-. 1 ij.

(c) Gruitluiisen, Ueher die Nais diaphana (Nova Acla Academiœ naturoi curiosoriim, t. \1V, pi. 25. fig. 2).

(d) Milne Edwards, Annklides de V Atlas du Règne animal de Ciivicr, pi, l b ol pi. i c, lig. i .

(e) Home, Lectin-es on Comp. Anal., pi. 140, fig;. 1.

Milue Edwanls, Op. cit., ])!. 1 , fig. 1 a.

(Irube, Zur Anal, und Physiol. der liiemenivurmcr, pi. 1, lig. 1. (/') Milne Edwards, Op. cit., pi. 1 b et 1 c, fig. I.

(g) Quatrefagcs, Mém. sur la famille des Hermclliens {.inn. des sciences nat., 3' série, 184S, (. X, p. 39).

(Il) Morren, De Lumbrici terrestris hist. nat. necnon anal, tractatus, p. 1 29, pi, 10 bis, fig. I . (i) Siebold cl Staiinius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, t, I, p. 207.

DES VERS DE LA CLASSE DES ANNÉLIDES. 431

Chez l'Arénicole, l'appareil digestif se complique tlavanlage. L'œsophage est suivi par un gésier musculaire de forme cylin- drique, à l'extrémité postérieure duquel sont appendus deux cœcums volumineux ; un estomac renflé, dont les parois sont très vasculaires et offrent une multitude de petites bosselures, occupe la portion moyenne du corps ; on distingue ensuite un intestin grêle dont les parois sont garnies extérieurement d'une foule de caecums filiformes qui sécrètent un liquide jaune, et qui paraissent constituer un appareil hépatique ; enfin la por- tion terminale du tube alimentaire qui se trouve en arrière

Arénicoles.

Cilles transparentes qu'il a vues s'ou- vrir dans l'œsopliage chez les Naïciéens du genre Enchytrœus {a).

Chez les Néréides, on voit de chaque côté de la base du bulbe pharyngien, sous les muscles rétracteurs de la trompe, un corps d'apparence glan- dulaire qui est probablement un or- gane salivaire (ô).

Chez les Arénicoles, ces glandes sont représentées par une paire d'appen- dices beaucoup plus volumineux, qui ont la forme de sacs cylindrico-coni- ques et s'ouvrent dans le lube diy;estif, immédiatement en arrière du gé- sier (c). Quelques auteurs ont pensé qu'ils pouvaient être assimilés au foie des Animaux supérieurs (cl) ; d'autres

supposent qu'ils sécrètent un suc pan- créatique (e). Un mode d'ori,'anisalion analogue se rencontre aussi dans le genre Ammotrypane if).

Chez les Syllis, on trouve en arrière du gésier deux pairesde petits caecums gros et courts qui semblent également être des organes glandulaires (g).

On peut rapporter aussi à cette classe d'organes une paire de gros caecums qui, chez les Siphonoslomes, naissent beaucoup plus en avant sur les côtés de la bouciie (h). Ces appen- dices sécréteurs sont disposés de la même manière chez les Chlorèmes, oi!i ils renferment un liquide limpide qui tient en suspension quelques globules diaphanes (/).

(a) Henle, Op. cit. (JliiUer's Archiv fur Anal, und Physiol, 1837, p. 79, pi. 6, fig. 6).

(b) Railike, De Bopyro et Néréide comment., 1837, pi. 2, fig. 7 et 8.

Milne Edwards, Annélides du Rèijne animal de Ciivier, p\. 1 a, fig. 1 j.

(c) Home, Lectures on Comparative Anatomy, pi. 140, lig;. 1.

Milne Edwards, Annélidks du Règne animal, ji!. 1, fig. 1 et 2 t'.

(d) Siebold etStannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, t. I, p. 20 ?

(e) Meckel, Anatomie comparée, t. VII, p. 100.

(/") P.athke, Beltrâqe %ur Fauna Nortvegens, p. 197, pi. I 0, ti^;-. 13 h.

(g) Milne Edwards, AnnÉlides du Règne animal de Cuvier, pi. 15, li^. 1 a, g.

{h) Rathko, Beitrâge iurvergl. Anat. und PhgsioL, p. 87, pi. 6, lis- 5c, c.

Belle Cliiaje, Descrizione e nolomia degli Animali invertebrali délia Sieilia citeriore, pi. 94, fig. 0.

(i) Quatrefages, Mém. sur la famille des Ghlordmiens {Ann. des sciences nat., 3= série, 1. .\ll, p. ^297).

llO^l APPARlilL DIGESTIF

(le la région broncliifère du corps a des parois lisses, minces et fixées aux parties voisines par un grand nombre de brides membraneuses (1).

Aphrodisiens. ^-'^ structurc dc l'apparcil digestif des Apbrodites est aussi Ibrl remarquable. En effet, de chaque côté de rcstomac se trouve une rangée de grands appendices tubuleux qui se terminent en cul-de-sac près de la base des pattes, et qui envoient des prolon- gements ccecaux dans les tubercules cutanés situés entre les expansions foliacées dont le dos de ces Annélides est couvert (2). oigrnus î-e tissu glandulaire hépatiijue, qui, chez la plupart des Anné-

gianduiaiies. jj^j^^^ ^^^ appliqué dircctcment sur les parois du tube digestif et en rend la surlace extérieure tomenteuse (3), est disposé

(1) L'appareil (ligeslif de rArénicole grêles, maisserenneiU vers leur partie

des pêcheurs a été souvent figuré par lerininale, qui est recourbée en dessous

les analomistes (a). et en dedans ; enfin chacun de ces ap-

(■2) Chez V Aphrodite! aculeata, dont pendiccsporle en dessus trois ou quatre

ranatomie a été faite par Hedi et par petits caecums secondaires qui, vers la

l'allas (h), le bulbe pharyngien qui partie moyenne du corps, se ramilient

concourt à la formation de la trompe plus ou moins sous les téguments. On

est très volumineux; et lorsque ce en compte une vingtaine de paires.

dernier organe est rentré, il se loge Chez les Polynoés, ces aj)pendices

en partie sous l'estomac, de façon à gastriques existent aussi et sont dis-

enlraîner l'œsophage d'avant en ar- posés à peu près de même, mais sont

rière (c). L'estomac est presque cylin- moins développés [d).

drique et assez large, mais se rétrécit (o'i Ce tissu glandulaire, dont j'ai

postérieurement dans le voisinage de déjà dit quelques mots en parlant des

l'anus. Les caecums qui en naissent de ÏNaïs et des Arénicoles, s'observe chez

chaque côté, et se portent transversa- tous les Annélides Chétopodes. Chez

lement en dehors, sont d'abord assez les Lombrics, par exemple, il est très

(a) Voyez Hnmc, Lectiires on Comparative Anatnmy, pi. 40, fig-. 2 et 3.

Milnc Eilwards, Allas du Hêgne animal de Cuvier, Annélidics, pi. i , fig. i .

Grnljc, Ziir Anat. und Phijsinl. dcr KiemenwUrmcv, pi. 1, llg-. ^.

,1. Cai'iis, Icônes ioohniiicœ, pi. 9, lig-. i.

(b) Redi, Ve Animalcxilis vivis qiiœ in corporibus Animalium vivonim reperiunliif observa- tiones, y. STO, pi. 25, lig;. 3 {Opuscula, t. lit).

l'iiUas, Miscellanca zoologica, p. 85, pi. ■! , fig. lO et H .

(c) Trcviranus, Ueber den innern Bau der stachlichten Aphrodilc {Zciischrift fiir IVnjsiulogie, 4829, t. 111, p 161, pi. 12, li;?. 9).

Milno Edwanls, Annki.ides de V Allas du Hcrjnc animal de Ciivin-, pi. 2, lig;. 1. (f/) l'allas, 0/). cit., p. 94.

GiuIk', '/.ur Anatomic und l'iujswloijic der Kicuieuwitrmer, p. ()2, pi. 2, liy. 13.

T. Williams, Ikport un llie LIritisli Annelida, pi. 10, fig. 02 {Uril. Assoc, 1851).

DKS VliUS DE LA CL.VSSE DES ANNÉLIDES. /[33

exclusivement autour de la portion terminale de ces ccecums, et [)ai' conséquent ces appendices peuvent être considérés comme constituant un foie diftus; mais, d'après le calibre de leur cavité, il est probable que les produits de la digestion v pénètrent, et que par conséquent ils remplissent des fonctions analogues à celles des canaux gastro-hépatiques des Mollusques dits pblébentérés (1).

développé, et il paraît coiislitiier ce que Moneii a décrit sous le nom de chloragogena («).

En général, les glandes gastriques sont colorées en jaune; mais chez quelques espèces, par exemple, les Aplnodites et les Phyllodoces, elles sont chargées d'une matière verte, et M. Williams pense que cette particu- larité se lie à l'absence d'hématosine dans le sang, qui chez ces Annélides est incolore [b).

11 existe chez les Lombrics un or- gane fort singulier que Willis a ap- p<dé uu intestin dans l'inlestin, et a considéré comme étant une glande hépatique (c). Morren, qui lui a donné le nom de lyphosolia, est porté à le regarder comme un réservoir du chyle (d), et M. Sichoid partage cette opinion (e), tandis que Duvernoy le compare à une veine mésentérique (f). C'est un repli membraneux longitu- dinal qui fait saillie dans la cavité de l'intestin , et qui adhère à sa paroi

supérieure dans les trois quarts de la longueur de ce tube; dans sa moitié antérieure il est froncé transversale- ment, et en arrière il allecte la forme d'un cylindre droit ; enfin il est creusé d'un canal longitudinal qui est fermé à ses deux extrémités et ne com- munique pas avec la cavité intesti- nale (g). Enlin il est composé d'ulri- cules sécréteurs [h). Dans l'état actuel de nos connaissances, on ne peut for- mer que (les conjectures très vagues louchant les fondions de cet organe.

(1) Il est cependant à noter qu'il paraît y avoir un sphincter à l'entrée de chacun de ces appendices, et le liquide contenu dans leur intérieur ne ressemble jamais aux matières lo- gées dans l'intestin, ^]. de Quatre- fages et i\I. Williams pensent qu'ils servent à établir des relations entre les jjroduils de la digestion et le (luide respirable (/), mais ils me paraissent être plutôt des organes hépatiques.

(a) Morren, De Lumbrici lervcstris hist. nat. necnon anal, traclatiis, p. 142, pi. 15, 16, fiy. 3. (6) T. Williams, Report on Ihe British Annelida {Bril. Assoc, 1851, p. 233). (c) Willis, De anima brutonim exercitationes, 1692, p. 97, pi. 4, Fil;-. 1, k. {d) Morren, Op. cit., p. 138, p.l. 16, (ig-. 1.

(e) Sieliolcl cl Stanniiis, Nouveau Manuel d'analomie comparée, t. 1, \i. 208.

(f) Voyez Cuvier, Leçons d'an a tomie comparée, 2" édit., t. V, p. 334.

(3) Voyez Home, 0)1 the double Onjans of Génération of the Lamprey, cic. {Pliilos. Traits., 1823, p. 148, pi. 18, fig. 1).

{h) C. B. .iouc-s. On the Stnicltire of Ihe LiveriPhil. r/'^nii., 1849, p. 1 H , pi. 9, fig. 5).

(i) De Qimtrcfases, Notcsiirlc phlébetitérisme {.inn. des se. nat., 3" série, 1845, 1. IV, p. 91).

Williams. Op. cit., p. 237.

V.

28

kotl APPAREIL DIGESTIF

Appareil § Û. Dans la .seconde grande division de la classe des

digestif i / 1 /

des Anneiides, l'ordre des Hirudiisées, le régime n'est pas le même

Hirudiiiées. i i /-,i / i i

que chez les Cnetopodes, et se compose pnncipalcment, smon exclusivement, de sang puisé directement dans le corps d'autres Animaux : aussi l'appareil digestif n'est-il que faiblement pourvu des organes sécréteurs qui sont chargés de prodm're les sucs propres à attaquer et à dissoudre les alimenls; mais l'ori- fice préhenseur ai'fecfe une disposition particulière, en accord avec ce mode de nutrition, et la cavité stomacale se développe de façon à devenir un vaste réservoir pour les liquides ingur- veniouse gïtés. La bouclic cst conforméc pour la succion et est aidée des Sangsues, daus SOU actiou par le jeu d'une partie de l'appareil de la loco- motion qui se compose de deux ventouses situées aux extrémités du corps. En effet, cet orifice occupe le centre de la ventouse céphalique , et celle-ci est disposée de façon à pouvoir s'aj)- pliquer très exactement sur la surface des corps étrangers et à y adhérer fortement ; de petites mâchoires cornées, dont le bord labial est en général armé , itcuvent alors entamer cette surface, pour peu qu'elle soit d'une texture délicate, et les mouvements de succion opérés par le pharynx déterminent l'écoulement du liquide sous-jacent et le portent jusque dans le réservoir stomacal de l'Animal. Ce mode d'alimentation a valu à ces Vers le nom commun de Sangsues, mais les zoologistes réservent plus particulièrement celte a|)pellalion aux espèces qui forment une des divisions génériques de ce groupe, et qui sont employées cji médecine pour opérer des saignées locales. Quand on veut étudier le moded'action decette ventouse orale, il est bon d'examiner d'abord la manière dont l'Animal l'ajtplique sur le corps auquel il veut se fixer, et pour cela de placer une Sangsue ordinaire sur une lame de verre, afin de voir à travers cette substance diapliane ce(pii se passe dans la région circuin- buccale. En observant de la sorte un de ces Annélides, on le voit alors donner à sa ventouse la forme d'ime cut>ule, puis en faire

DES \\A\S UK LA LLASSE DES ANNÉLIDES. /|o5

saillir le fond comme une, espèce de bourrelet et le coller sur le point dont il a fait choix; ensuite il abaisse de dedans en dehors les bords du godet, et apphque si exactement la totalité du disque péristomien sur le verre , qu'il ne reste pas la moindre bulle d'air enirc les surfaces ainsi amenées en contact. Le fon<l de la ventouse tend alors à reprendre sa posilion pri- mitive et à deveuii' concave : sur un corps rigide comme le verre il n'y parvient pas; mais si la surface d'application est extensible, comme l'est d'ordinaire la peau des Animaux que les Sangsues a[ta(juent, elle suit ce mouvement et s'avance jusque dans la cavité buccale , elle est saisie et coupée par les mâchoires de cet Annélide suceur (1). Enfin des contractions péristaltiquess'établissentdans l'œsophage, et lesang (juis'écoule de la petite blessure ainsi produite est [)ompé avec force et porté dans l'eslomac du Ver. L'aspiration opérée de la sorte dépend imi(picment {][\ jeu de la ventouse orale et du pharynx, qui est entouré de fibres musculaires divergentes aussi bien que concentriques : l'estomac ou les autres parties du corjis de la Sangsue n'y contribuent en rien. En effet, le courant ne s'arrête pas quand, d'un coup de ciseau, on coupe en deux le corps d'un de ces Animaux en train de se re()aître, et qu'on ne laisse adhérente à la piqûre que la portion céphaU(|ue de la Sangsue ainsi mutilée ('2j.

(1) Jusque vers le milieu du siècle dernier les médecins se formaient des idées très fausses sur la manière dont la Sangsue enlame la peau de l'Homme ou des Animaux dont elle prend le sang : les uns pensaient qu'elle était pourvued'un aiguillon, d'autres qu'elle déterminait la rupture de celte mem- brane par la seule force de succion. Un chartreux, D. Allou, paraît être le

premier qui ail bien vu les espèces de màclioires ou de râpes dont la bouche de CCS Vers est pourvue, et qui ait donné une expiicalion passablement juste de leur mode d'action ; ses ob- servations ont été publiées et confir- mées par Morand (a).

(2) Quelques naturalistes ont pensé que dans le mécanisme de la succion la partie postérieure du corps de la

(a) Morand , Ubservations sur raiiatomie de la Sangsue {Mém. de l'Académie des sciences, 1739, p. 189, ni,^ E, F).

ll'oO AI'I'AIIKIL DIGESTIF

L;i forme de la ventouse orale varie un peu : ehez rjii(>l(juer5 riiriiLlinées, telles (jue les Pontobdelles et les Piscieoles, elle est presque liéuiisphérique et séparée du reste du corps par un étranglement (1) ; mais, en général, il n'existe pas de rétrécis- sement à sa base, et elle est constituée prinei])alement par le bord frontal de l'extrémité antériein^e du corps qui s'avance en ma- nière de voûte (2). Des différences plus importantes se remar-

Sangsiio faisait fonclion de pompe aspiranle (a). Thomas a réfuté cette opiiiioii par l'expérience citée ci-des- sus, mais il combat également l'ex- plication fondée sur l'action de la venlouso, et il attribue l'afflux du sang seulement; à l'irritation déter- minée dans la plaie par la morsure de la Sangsue. Il se fonde sur ce qu'il a vu une Sangsue rester attachée pen- dant quelques minutes à un cœur sai- gnant placé sous le récipient de la pompe pneumatique il faisait le vide (/j) ; mais cette expérience, qui est en désaccord complet avec les résul- tats obtenus par Du Piondeau (c), ne paraît pas avoir été faite de façon à prouver que dans les circonstances ordinaires la ventouse n'agit point par succion, et M. Fermond, en substi- tuant à la lame de verre mentionnée ci-dessus un disque de baudruche humide et médiocrement tendu, a vu que cette membrane extensible était attirée dans l'intérieur de la ventouse,

quand la Sangsue s'y attachait. Il com- pare donc avec raison cet organe à l'iustrumenl connu sous le nom Ci' arrache-pierre ((/).

(1) Chez les l'ontobdelles, llirudi- nées qui habitent la mer et se tiennent sur divers Poissons, la ventouse orale est grande, très concave, en forme de godet, et garnie d'un bord pourvu de tubercules (e).

Chez les Piscicoles, ou Ilœmacharis, qui s'attaquent aussi aux Poissons, mais vivent dans les eaux douces, cette ventouse est également assez grande, quoique peu concave (/').

Chez les Branchellions, cet organe est rétréci à sa base, comme chez les espèces précédentes, mais plus petit (g).

(2) Chez les Sangsues proprement dites, les IJaemopis, les Aulaslo- mes, etc., la ventouse orale est sans étranglement, et plus ou moins dis- tinctement bilabiée. La lèvre supé- rieure s'avance en forme de bec de

Du lUiiideaii, Mém. sur la Sangsue médicinale (Journal de jihysique, 1782, 1. XX, p. 288). Tliimias, Mcm. itour servir à l'histoire naturelle des Saïujsues, 180G, p. 40. Du liondcaii, Oj). cil. (Journal de physique, t. XN, p. 201). Fcrnioriii, Monographie des Sangsues médicinales, 1854, p. 94.

Voyez Doll(3 Cliiajc, Mem. sulla stoiia e notomia degli Animall sema vertèbre di Napoli, .\. 1, lig. 14.

yiiaiicl'iiiîfs, A.NNKi.iDiiS (lu liègne animal de Ciivicr, pi. 23, lig. 2. lî(isul von l'icsfiiliol', lnsccten-i>eluslujung,l. III, pi. 32, lig. 1. tjiiatrfrtigct^, Annki.iues iIm liêgne animal du (',ii\icr, pi. 23, liy. 1.

Idem, Mém. sur le Branchellioii (Ann. des sciences nal., térie, 1852, t. XVIII, p. 294, ti, '•'■£. 1).

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DES VKRS DK LA CLASSE Dt:S ANNÉLIDKS. /lo7

qiieiit dans s(in armature. Chez la Sangsue médicinale, la Ijoiiche, située, comme ie l'ai déjà dit, au milieu de la ventouse antérieure, Màchuiros

' <• 0 ' des Sangsues

est de forme à [teu près triangulaire et garnie de trois papilles ovalaires qui sont divergentes et pourvues chacune d'une crête médiane convexe et denticulée (1). Ces papilles sont autant de mâchoires et sont mises en mouvemer.t par des fd^res muscu- laires propres, de façon à agir comme de petites scies courbes, et à inciser par déchirure la portion de la peau sur laquelle ces Annélides ont appliqué lem^ bouche. L'appareil maxillaire est conformé de la même manière chez les Birudinées des genres Hœmopis, Aulastoma, Bdelle ou Limnatis, et Trochela; mais chez les Branchiobdelles il n'v a que deux mâchoires, et chez les Pontobdelles et les Piscicoles ces organes sont rudi- mentaires (-2) ; enfin, chez les Néphélis et les Branchellions,

cuillei' renversé , et se compose de trois ou quatre segments transversaux suivis de trois anneaux dont la por- tion inférieure ou sternale forme la lèvre inférieure (a). Djns l'état de repos , ces deux lèvres se rappro- chent et la ventouse se ferme; mais, dans l'état d'activité , elles s'écartent et la lèvre supérieure se projette en avant.

Chez les Malacobdeiles , au con- traire, elle est peu développée (6).

(1) C'est à cause de cette disposition que la plaie faite par ces Animaux a la forme d'une petite étoile à trois branches (c).

(2) Les mâchoires des Sangsues proprement dites sont à peu près

ovalaires et très comprimées; leur longueur est de '2 à 3 millimèties, et leur bord médian ou crête porte une rangée d'environ soixante denticules en forme de V, qui sont disposées comme des chevrons avec leur angle dirigé vers la bouche, [-'une de ces mâchoires est antérieure ou supé- rieure, les autres sont latéro-posté- rieures ou inférieures; elles sont dis- posées en triaiigie cl logées chacune dans un sillon buccal ou gaîne dont les bords soiU élevés. Les denlicules dont elles sont armées paraissent naître chacune d'une capsule particulière [d). Beaucoup d'auteurs ont considéré ces points comme étant séparés sur la ligne médiane, et par conséquent dis-

(n) Moqiiin-Tandon, Monographie Oc la famille des Hinulinêes. 184G, p. 52, pi. 3, fis- ''O.

(h) Blaiicliard, Mémoire sur la Malacobdelle {Aiin. des sciences nal., série, 4845, t. IV, pi. 18, n-. i}.

(c) Moi-and, Observations sur Vanatomic de la Sangsue {Màn. de VAcad. des sciences, 1739, p. 192, ng. C).

{d] Qiiairefages, ?\olc sur l'analomie des Sangsues {Ann. des sciences nat., 3' série, 1847, t. VIII, p. 3S).

/l38 AiTAiîKii, iii(:!;sriF

ils manquent complètement : il en esl de même eliez les (ilos- siphonies ou Clepsines, mais celles-ci sont pourvues d'une trompe exserlile semblable à celle de la plupart des Annélides Gbétopodes (1). Mode Les Sangsues proprement dites et les Htemopis sont des

d'alimentation , . , . , , . , , 1 1

des Anuïiaux exclusivement suceurs, et se nourrissent essentielle- "■" 'nées. ^^^^^ ^^ ^^^^ ^^^ cUvcrs Vcrtébrés qu'elles peuvent mordre :

posés par paires siir deux rangs; mais M. Biaiull a constaté que celle dispo- silion n'cxisle pas (a).

Chez les Ilœmopis, les mâchoires sont plus peliles, moins comprimées el armées d'un moindre nombre de denlicules (6).

Chez les Aulaslomes (c), les mâ- choires sont presque parallèles el moins enfoncées; chacune est année d'environ quatorze denlicules assez grosses el obtuses (</).

Chez les Bdelles, ou Limnatis, ces organes ont une carène peu saillante el dépourvue de denlicules ou de dé- coupures quelconques (e).

Chez la'l'rochète, les mâchoires sonl très petites et tranchantes, mais sans denlicules (/'), Leur position esl in- verse de celle* des Sangsues : deux se trouvent en avant ou au-dessus de Touverlure buccale, el une seule en arrière.

Chez la Branchiobdelle, les mâchoi- res, au nombre de deux, sonl mé- dianes, cornées el noires ; Rosel les a prises pour des yeux {g). L'une esl siliiée au-dessus, l'autre au-dessous de la bouche (/t).

(1) La trompe dos Glossiphonies a été aperçue d'abord par Bergniann, el ensuite mieux observée par John-

(a) Bramlt et llalzebiirg, Mcdkinische Zoologie, t. 11, p. 245, pi. 29 A, lig. 13-18.

Qualrefages, Annéliues du Réyne animal du Cuvier, pi. 21, fig. 3, 3 a,

Moquin-TandoM, iMoiiograpliie de la famille des Hirudinécs, pi. 9, lig. l 2 à 10.

Feiniond, Monograplue des Sangsues médicinales, pi. 2, lig. 32.

(b) Savigny, Op. cit., yl. \, lig. 5.

Qiiekett, Lectures on Hisloloijy, t. Il, p 381, fig. 34-4.

(c) WAulastoma giito a clé smivent confondu avec VHœmopis sanguisuga ou H. vorux, et c'esl sous ce dernier nom que les niàcliuiies de ceUe Hirudince ont été représentées dans Y Allas du Règne animal, Ankélides, pi. 21, fig. i*^.

Moquin-Tandon, Op. cit., pi. G, fig. 9 et 10.

(d) Caréna, Monographie du genre Hirudo [Mem. délia H. Accad. di Torino, 1820, I. X\V, pi. 2, fig. 25; pi. 24).

Pellclicr et Huzard, Recherches stir le genre tlinido (Journal de pharmacie, 1825, pi. 1, Cg. 5, (i, 7).

Brandt et Ralzeburg, Op. cit., pi. 29 B, tig. 13 à 17.

Moi)uin-Taiidon, Op. cit., pi. 5, fig. 12, 13, 14.

(e) Savigny, .\NiNÉlides deVÉgypte, pi. 5, fig. i"', 4''. (/■) Moquin-Tandon, Op. cit., pi. 4, fig. 11.

(g) Rose! vuii Uosenliof, Insecten-Delustigvng , 1755, t. III, p. 327.

{h) Odier, Mém. sur la Branchiobdelle [Mém. de la Société d'histoire nalnrelle de Pari.'i, 1823, I.I, p. 71, pi. 4, fig. 5, 8, 11,12. 17J.

Henlc, l'eber die Gattung Branchiobdella (mWer'ii Archiv fttr Anut. und PhysioL, 1835, pi. 14, fig. 1).

DKs vi:ns I)!': lv classk I)i:s an.nki.idks. I\o9

il esl aussi à nolci^ que eo soûl les seules Hirndiuéesqui aieutla facullé d'eulnuier la peau de l'Homme (1) : les Aulastoiues décliireut leur proie et eu avaleiil des lambeaux; enfui, les

son (a). La sUiicture en a élo éludiée avec soin par M. F. de Filippi, ot sur- tout par M. Budgc (6). C'est un lube pharyngien charnu, cylindrique et susceptible de se dérouler au dehors ou de rentrer comme un doigt de gant.

M. Leydig a trouvé une trompe semblable chez le Branchellion , et M. de Oualrefages, qui en a également fait Tanatomie, s'est assuré qu'elle est complètement inerme (c).

(i) Ainsi que chacun le sait, on l'ait en médecine un grand usage de ces Animaux pour opérer des saignées locales. Pour la France seulement, on en consomme de la sorte plus de oO millions d'individus par an , et. quelquelois beaucoup ])lus : ainsi en 1832 on en a importé 57 Y^i. UOO [dj. Ils appartiennent tous au genre Hi- rudu, et sont, pour la plupart, de simples variétés de l'espèce connue

sous le nom de H irudo medicinalis oa de H. troctina. VHœmopis sangui- suga (ou Sangsue de Cheval), qui se rencontre en Espagne et en Afrique, ne peut entamer facilement que les membranes muqueuses, et donne sou- vent lieu à des accidents graves en s'introduisant dans les fosses nasales ou les autres cavités du corps {e).

Les marais de l'Europe n'ont pas sulli pour alimenter le commerce dont les Sangsues sont l'objet, et depuis plusieurs années on en tire de l'Asie Mineure et de la Syrie, aussi bien que de l'Algérie; enfin on s'est appliqué à en élever arliliciellement, et dans quelques parties de la France, parti- culièrement aux environs de Bor- deaux, Vhirudiniculture, comme on l'appelle, est devenue une branche d'industrie agricole trèsimportante(/"). l'our nourrir les Sangsues, on emploie

[a) T. Bergniann, Afluindling ont fglar (Vetenskaps Acad. Uandlinçjar {Or dv 1757, t. XVIIÎ, p. H3).

--Johnson, Observations on Ihe Itirudo complanata and H. slagnalis , iww l'ormed inlo a distinct Genus under Ihe Name. ()/■ Glossopoia (Philos. Trans., 1810, p. 341, pi. 17, fig. 9 et 10).

(6) I''. de Filippi, Leticra al D. Rusconi sopra i'anatumia e lo sviluppo délie Clepsine, p. 12, pi. 1, fig. 1 et 2 (extr. ,lit Giornale délie scienae medico-chirurgicale di Pavia, t. XI).

Biidge, Clepsine hwculata [Verhandlungen des Xaturhisl. Vereins dcrpreussischenRhein- lande und Westphalens, 6. Jahrgang 1849, p. 97, pi. 5, fig. 13 et 15).

(c) Leydig, Anatomisches ubcr Branchellion und Pontobdella [Zeitschrift fur wissensch. Zool., 1851, t. lit, p. 314).

-- Oualrefages, il/cm, sur le Branchellion {Ann. des sciences nat., 3= série, 185i!, t. XVIII, p. 296, pi. 0, lig. 3).

(d) Fermond, Monographie des Sangsues médicinales, p. 255.

(e) Giiyon, Note sur i'Hsemopis vorax {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1841, t, XIII, p. 785, etc.).

(f) Voy.'ion, Guide pratique des éleveurs de Sangsues. Bordeaux, 1852.

Masson, Elève des Sangsues, l'aris, 1854.

LaLirens, L'élève des Sangsues. Bordeaux, 1854.

Busquet, Manuel d'hirudimcullure. Bordeaux, 1854.

Soubeiran, De la multiplication des Sangsues dans les Landes {Ann. de l'agriculture française, 1854).

Ebrard, Nouvelle monographie des Sangsues, 1857, p. 239 et suiv.

hhO APPAni'lî. DlGi:STlK

Trocliùlcs (k'voreiil des Lombrics et les larves n(|iinli((ues pnr troïK'ons OLi même (ont eiiliers. Du reste, Ions ces Animaux sont (l'une voracité extrême, et la quantité d'aliments qu'ils prennent en un seul repas est souvent énorme : ainsi, on a vu des Sangsues médicinales se gorger au point d'augmenter près de sept fois le poids de leur corps (1), et par conséquent

généralement de vieux Clievaiix qae Ton fait entier dans les élangs CCS Annéiides sont parqués ; ceux-ci s'y attachent on choisissant de pré- férence les parties du corps la peau est la moins résistante, la face interne des cuisses, les jambes et le dessous du ventre, par exemple, et se gorgent avec une grande avidité. Ils ne sucent pas les cadavres , et ne paraissent pas capables de boire du sang liquide dans lequel on les plon- gerait (rt) ; mais si on leur fournit comme point d'appui un tissu spon- gieux imbibé de ce liquide, ils s'en repaissent sans difficulté, et l'une des méthodes employées pour l'élevage de ces Vers, celle de M, Borne (6), est fondée sur la connaissance de ce fuit. Quelques agronomes ont pensé que le sang obtenu par l'abatage des Animaux de boucherie, et rendu in- coagulable i)ar la ll.igellation , lors même qu'on l'emploie tout de suite, ne leur était pas aussi utile que celui puisé directement sur un Animal vi- vant (c) : mais cette opinion ne paraît

pas être fondée. Les Sangsues peuvent se gorger aussi de sang coagulé, niais en le suçant, et non en avalant le caillot lui-même.

(1) Les Sangsues ne se gorgent que très rarement à ce point, et il existe beaucoup de variations dans la quan- tité de sang dont elles peuvent char- ger leur eslomac. Ces différences dé- pendent en partie de l'âge, en partie des races. Dans une série d'expérien- ces faites par M. Ad. Sanson, l'aug- mentation du poids du corps a varié entre 0,8 et G, 7 {(/), et dans d'autres pesées faites par 1\1. Moquin-Tandon, les extrêmes ont été , d'une part, 2, et d'autre part 5 { (e). M. Ébrard a trouvé que les très gros individus (dits Sangsues vaches) triplaient de poids seulement, tandis que les indi- vidus connus dans le commerce sous la dénomination de petites moyennes devenaient quatre fois plus pesantes; et les petits individus, dits filets, acquéraient quatre fois et demie leur poids initial if). .M. Moquin - 'l'an- don évalue en moyenne à environ

(a) Ébrard, Nouvelle monographie des Sangsues médleinaks, 4857, p. 103.

(fc) Cliov.-iUicr, liapport sur tin mcmuiye de .V. Home relatif à la conservation et à la reproduc^ lion des Sanijsves (bulletin de la Société d'encouragement puvr t'indiistrie nationale, ISSi).

Roiibeiran, I\'ote sur les nlarais à Sangsues de i'.lair fontaine, IS.'ii.

(c) Quciianl, De l'élève et de la multiplication des Sangsues (Dullclin de la Société centrale d'ayriculture, 1854, p. 2"7).

{â) J. Martin, Histoire pratique des Sangsues, 1845, p. 44.

(e) Moquin-Tandoii, Monographie des Uirudinées, p. 208.

[f) ICbrartl, Nouvelle Monographie des Sangsues, p. 21 1>.

l)i;S VKI'.S DR L.V CLASSE DES ANNÉLIUES. /| /] 1

nous pouvons prévoir que la capacllé de leur eslomac doit être énorme. EUectivenient , c'est ce qui s'observe chez presque toutes les Hirudinées.

Le tube digestif de quelques-uns de ces Animaux est simple canai digestif et cylindri({ue dans toute sa longueur, chez les Malacobdelles Hirudinées. et les Ncphélis, par exemple (1) ; mais chez les Sangsues pro-

15 grammes la quantité de sang sucé par iinegi'osse Sangsue marchande, de bonne race, telle que la variété verte de Turquie; mais cette estimation me paraît un peu exagérée. En elTet, dans les expériences publiées par M. de Quatrefages, la quantité de sang pris par les Sangsues bordelaises n'était en moyenne que d'environ 12 gram- mes, et les Sangsues dites Dragonnes {Hirudo troctina) se sont chai'gées d'un peu moins {a).

T)u reste, la capacité de ces Ani- maux paraît dépendre essenliellc- ment du degré d'extensibilité de leur estomac. M. Ébrard a trouvé que, proportionnellement à leur poids, ils prennent d'autant plus de sang qu'ils sont moins vieux, et les médecins ont remarqué que si d'un coup de ciseau on coupe en travers la partie posté- rieure du corps de l'un de ces Animaux en train de se gorger, il continuera à sucer pendant très longtemps, et que le sang s'écoule goutte à goutte par la troncature (6).

(1) Le tube digestif des Malaco-

bdelles est d'une structure très simple : sa portion pharyngienne est courte, droite et garnie intérieurement de papilles épidermiques; la portion sto- macale est membraneuse, cylindrique et légèrement flexucuse (c).

Chez les Néphélis, le tube digestif est cylindrique, et s'étend en ligne droite d'un bout du corps à l'autre (f/); on y distingue une portion œsopha- gienne qui est garnie intérieurement de stries longitudinales, et une portion moyenne ou stomacale qui ne présente rien de remarquable (e'.

Chez les Trochèles, ou Géobdelles, l'estomac est divisé intérieurement en cinq chambres par une série de brides transversales; l'intestin est également divisé en deux portions par un étran- glement. L'œsophage est charnu et présente des plis longitudinaux dont un, situé en dessus, est très gros (/").

L'estomac des Branchiobdelles est également dépourvu d'appendices , mais on y remarque des étrangle- ments qui le divisent en plusieurs loges arrondies {g).

(n) Quatrefages, Noie sur quelques expériences relatives à l'emploi des Sangsues algériennes {(Jomptes rendus de l'Acad. des sciences, d857, l. XLV, p. 681).

(6) .1. n. .T.ilinsoii, .1 Treatise on thc médicinal Leitch, 1816, p. 14^.

(c) )ik>nchavL\, Mémoire sur la MalacobdeUe(Aiui. dcsscicnces nat,, 3' série, ifi-iô, l. IV, p.3(>", pi. 18, fig. 1 i-i 2).

{d} F. (le Filippi, Memoria surjli Anellidl dclla famiglia délie Sanrjuesughe. Milan, 1837, pi. 1, fig. 4.

(e) Moqiiin- Tandon, Op. cit., p. 102, pi. 3, iig. 17.

(0 Idem, i&irf., p. 102, pi. 4, fig. 9.

(fl) Henle, Op. cit. (Miillei-'s Archiv fiïr Anat. und PhysioL, 1835, pi, U, fiff. 1).

U^i'^ Al'I'AKKIL ilICKSTlF

premeiil diles Cl hi [ilupini dos aiilros Hiriidinées, restoniac se prolonge latéralement do laeon à consliluer de grands réservoirs en forme de sacs.

Ainsi, chez les Pontobdelles, l'eslomac, divise intérieurement en une série de cinq ou six chambres par des cloisons membra- neuses, se continue postérieurement sous la l'orme d'un vaste csecum impair et médian (jiii recouvre l'intestin (1). "

Chez les Aulastomes, l'estomac est également cylindrique, mais donne naissance postérieurement à deux grands appen- dices ou csecums (jiii se prolongent sur les côtés de Tin- testin (2).

Chez les Sangsues proprement dites, l'estomac est divisé en une série de chambres connue chez les Poniohdelles; mais ces loges, au lieu d'être sim[)les, se reullenl i\c chaque côté de façon à former des sacs plus ou moins grands et oblongs. On compte

(1) La porlion^antérieiire du canal digestif des Cniilobdeiles constiUie un œsophage cylindrique qui sVMari^Ml peu à peu et se conl'ond postérieure- ment avec l'estoniac. Celui-ci ijaiaîl simple extérieurement, mais à l'inié- rieur il est divisé par une série de cloisons li'ansversales qui sont perfo- rées au milieu, et garnies cliacune de fibres musculaires disposées en ma- nière de sphincter. La dernièic des cliamhres ainsi consiiiuées se trouve vers le tiers postérieur du corps, el comrnuni((ue d'une part avec Tappen- dicc caecal mentionné ci-dessus ,

d'autre part avec un intestin grêle cylindrique (a).

(2) Le pharynx ou œsophage des Aulastomes est remarquable par sa stiuclure charnue et les plis ionyilu- dinaux saillants qui en garnissent l'intérieur ; on en compte douze, dont trois, plus grands que les autres, cor- respondent à la base des mâchoires [h). L'estomac offre quelques indices d'une division en neuf chambres égales, et les deux cîecums qui le terminent sont très grêles. L'intestin est au con- traire fort grand, et présente latéra- lement des boursouflures (c).

(a) Bibieiia, De Hirudine sermones quinque (Commenlavii Instiluti Ilonoineiisis, 1791, t. Vit, pi. 3, fi|^. 5).

Délie Cliiiije, Memorie Siilln storia e nnlmnin dcqU Anhnali senxa Vertèbre di Napoii, I. I, lil. 1, fi^'. U.

M()(niin-Taii(liin, Monographie de ta famille des IhruduUes, pi. "2, fii;. 1 cl 11.

(fc) Pelletier cl Fliizard, Op. cil. {Journal de pharmacie, 18i25, t. I, pi. i, i\g. 5 el 12) (c) Délie Gliinje, Op. cit.,[. I, pi. 1, fig;. 10.

Moquin-Taiidon, Op. cit., p. 105, pi. 0, 11;,'-, il.

Milne Edwiinis, Annémdks iln ftètine animal tic Cnvier, pi. 2, fig. 3.

DES VK15S ni", Lv t'.Lvssi: DKS annéliues. hho

onze paires (\c cesapjieiidiccs qdi sont (rnnlaiil plus dcveloppés (|u'ils sont situés plus loin de l'œsophage; eeux de la première paire sont à peine indiqués, tandis que eeux de la dernière paire sont très vastes et se prolongent jusque dans le voisinage de l'anus, de chaque côté de l'intestin (1).

(1) L'œsophage des Sangsues pro- prement dites est court, membraneux, faiblement plissé en long, et teimiué par un spiiincler puissant qui s'op- pose à la régurgitation. Il est aussi à noter que des brides musculaires s'é- tendent de sa surface externe aux parties voisines des parois du corps, et ces fibres paraissent jouer un rôle important dans la succion. L'estomac est divisé en onze cbambres, dont la première n'ollVe que des vestiges d'appendices. Les poches stomacales des preniièr(>s paires sont simples et arrondies, mais les suivantes se re- couibent en arrière, et se recouvrent un peu mutuellement quand elles sont gontlées; celles des parties moyennes de la série sont faiblement bilobées, et celles de la dernière paire .sont un peu étranglées de dislance en dis- tance. Le pylore, ou entrée de l'intes- tin, est infundibuliforme et pourvu d'un sphincter iiès fort (a). L'intes- tin, qui nail de l'extrémité |)0stérieure de la |)ortion médiane de l'estomac et se trouve logé entre les deux poches gastriques de la dernière paire, est grêle et présente a sa partie terminale

un renllemenl que les naturalistes ap- pellent cloaque, mais qui ne mérite pas ce nom, car ce n'est pas un émonctoire commun, et aucun autre appareil ex- créteur n'y débouche. Enfin l'anus est situé du côté dorsal du corps, à la base de la ventouse postérieure. Cet orifice est difficile à apercevoir, et pen- dant longtemps il avait échappé aux lecherches des anatoniisles (6). Du l'iondeau fut, je crois, le premier ù en constater l'existence (c).

Quelques auteurs considèrent les poches slomacaies i)ostérieures comme étant des réservoirs alimentaires seu- lement, mais ces appendices ne pa- raissent pas dillérer des autres. Quand ia Sangsue se gorge, les contractions j)éristal tiques de son cor|)s et de son estomac poussent tout de suite le li- quide alimentaire dans ces poches qui se remplissent les premières, mais le sang ne s'y accumule que par l'effet de la pesanteur ; et quand l'Animal est placé la tète en bas, ou suspendu de manière à décrire une anse, les matières contenues dans son tube di- gestif affluent toujours dans la partie la plus déclive {d}.

(n) Voyez Brandi et Ilat/ebiirt!', Mediciniachc Zoolotjie, t. 11, pi. 29 A, fitr. 19 el 20.

'— Moqiiiii-Tandon, Monorjvapliie des iiirudlnées, p!. 9, fig-. 9.

Qualrefages, Annklides du Règne animal de Cuvier, pi. 24, fig. 1 (c'est aussi à celte espèce qu'appartient l'appareil digestif représenté dans le mcme ouvrage, pi. 2, fig. 2, sons le nom d'//(E- moins).

(b) Morand, Oj). cit. [Mém. de l'Acad. des sciences, 1739, p. 195).

(c) Du Rondeau, Op. cit. (Journal de physique, 1182, t. XX, p. 286). ((/) EIn-ard, Nouvelle monographie des Sangsues, p. 170.

hhh APPARKIL D1G[:STIF

La eonrormation de la cavilé digeslive est à peu près la mémo chez les Hsemopis, mais les poches slomacales sont plus Ibrte- ment lobulées (1).

Chez les Branchellions, il existe aussi de chaque côté de l'es- tomac une série de poches bilobées, mais ces appendices sont moins nombreux (2).

Enfin, chez les Glossiphonies ou Clepsines, le nombre des poches gastriques est également réduit à six ou sept paires, ces appendices sont très grêles, et ne communiquent avec la por- tion centrale de l'estomac que parties orifices étroils ; dans quel- ques espèces elles sont plus on moins lobulées, et celles de la dernière paire sont quelquefois rameuses. L'inlesliu, qui fait suite à l'estomac, est garni aussi de cœcums latéraux, mais les aliments n'y pénètrent pas directement comme dans les appen- dices stomacaux, qui, à raison de cette circonstance et de la transparence des téguments, sont très faciles à observer (3).

(1) Chez rHœmopis, chacune des poches stomacales est bilohce, et le lobe postérieur tend à se subdiviser en lobules. Celte disposition est sur- tout remarquable dans les sacs de la dernière paire (a). M. de Filippi a donné une descriplion très différente de Tappareil digestif de ces Hirudi- nées, mais ses observations se rap- porlent à l'Aulastome (6).

('J) M. Moquin - Tandon a trouvé chez le Branchellion Torpedinis six paires de poches stomacales bilobées, et a vu les deux postérieures se pro- longer sur les cùlés de Tinteslin, comme chez la plupart des autres Ilirudi-

nées (c). Mais dans le Branchellion Orbigniensis M. de Quatrefages a ren- contré une paire de poches stomacales dans chaque anneau du corps jusqu'à l'anus ((/).

(ci) Chez le Glossiphonia hioculata, on voit, derrière le pharynx renfer- mant la trompe, un estomac cylindri- que garni latéralement de six ])aires d'appendices ou caecums simples: ceux de la dernière paire sont beaucoup plus grands que les aulres, et se pro- longent sur les côlés de la porlion suivante du tube intestinal qui donne naissance à quatre paires de i.oches latérales; enhn lu porlion terminale

(a) Miiiiiiiii-Tainloii, Up, (il., pi. C, t\g. 8.

{b'j V. i\(: lMli|i|ii, Mem. suoll Anellidi délia fainiijlia délie SaïKjiiesurjlie, \\ 11, pi. i , fig. 3. (f) Muquin-Taiicloii, Op. cit., p. -100, pi. 1, fii?. 0.

{d} Qiiatrcfages, Mém. sur le Branchellion (Ann. des sciences val,, 3" f-ùvW, 1^52, t, XVHI, p. 297).

Les IllrLidinées sont pourN'uosd'iin nppnroil salivairo roniposo d'une nudtitnde de petites vésicules disposées en grappes et réu- nies en masse autour de l'œsophage (1). On remarrpie aussi sur les parois de leur estomac une couche de tissu utriculaire qui paraît être un organe hépatique (2), Mais le système glandu-

glaiiilulaircs

des Hiriidinùes,

(le l'intestin est simple et flexueuse (a).

Chez la Piscicole géométrique (ou Hœmocharis, Sav.), l'appareil digestif est conformé à peu près de même, si ce n'est que les poclies stomacales sont beaucoup plus larges et plus nom- breuses , car ou en compte dix paires (6).

Chez d'autres Glossiphonies, les ap- pendices stomacaux sont grêles et plus ou moins branclius. Cette disposition se voit 1res bien chez le G. sauguinea, quand l'Animal est repu de sang (c). Elle est encore plus marquée chez le Glossiphonia catenigera {d} et le (t. marginata (e).

(1) Les glandes salivaires des Sang- sues, découvertes par M. Brandt, con- sistent en petites ampoules blanchâtres dont les canaux excréteurs se réunis- sent entre eux et débouchent dans l'œsophage (/'). Elles forment, par leur assemblage, une masse d'apparence grenue.

La structure de ces glandes est à peu près la même chez l'Haeniopis,

mais elles forment deux masses très distinctes [g). On a constaté aussi l'existence de ces glandes salivaires chez les Pontobdclles et chez les Bran- chiobdelies. Chez ces dernières, elles consistent en six pairesde petits paquets d'uiricules dont les canaux excréteurs se réunissent autour de l'œsophage, i'i la base de la trompe {h).

"SI. Moquin-Tandon considère comme étant aussi des glandes salivaires deux petits organes irrégulièrement arron- dis et rougeàtres, qui se trouvent dans les quatrième et cinquième, ainsi que dans les sixième et septième anneaux du corps de la Branchiobdelle, et qui paraissent déboucher dans la portion antérieure du canal digestif (^j.

('.>) Le tissu glandulaire dont il est ici question constitue ce que quelques anatomistes ont appelé la tunique villeuse de l'estomac. 11 se trouve principalement vers la partie centrale de cet organe, dont il occupe la face inférieure aussi bien que la face supé- rieure. Sa couleur est brunâtre, et,

(a) lîiiJge, Op. cit. {Verhaiull. des Natur.-historlsclieii Vereines der preussischen Rheinlande, i84<1, pi. 5,fig. 13).

(6)Leyclia:, Zur AncUomie voii Piscicola gcumeirica {Zeitschr. fiir ivlsscnsch. ZooL, 1849, l. 1, p. 110, pi. 8, fig. 54).

[c) Filippi, Op. cit., pi. 1, Rg. 15.

((/) Muipiiii-Tundoii, Op. cit., pi. 14, tig. 9.

(e) Fr. Minier, Ueber Ilirudu Icssellala M(iiZ iiiargiiiala (Archiv fiir Natiwgeschichle, 1S44, I. I, [A. lO.ng-. 14). .

(/■) lïraiidt et Raizeluir-, Medicinisclie Zoologie, t. II, p. 247, pi. 2'J A, lig-. 2ï! cl 23.

(y) Moqiiin-Taiideii, Op. ci.t., p. 109, pi. 0, lig-. 11.

(Il) Uuairefages, Op. cit. (.4/ut. des sciences nal., série, 1852, l. XNHl, p. 29G, |'l. G, tig. 3).

(i) Moi|iiin-TaMdoii, Op. cit., p. 109.

khi) UM'AIiKIL DIChSïlF

laire est très peu doveloppé chez ces Aiiiinnux, et en général la di-csiion leur digestion ne se t'ait qu'avec ime grande lenteur M). Ainsi,

chez \ y T

les Sangsues, lorsqu'unc Saugsuc a été gorgée, elle reste pendant i)lusieurs mois sans prendre (]e nom^riture, et souvciit on retrouve <lii

Lenteur

de

lig-cs

chez

examine au microscope, il se monlre composé d'une mnllitiide d'utriculcs de forme irrégnlière. M. Briindt considère comme des canaux excré- teurs les prolongements j^rèles qu'on en voit partir, et pense que ces tubes vont déboucher dans l'estomac (a) ; mais M. Lcydig, qui vient d'étudier de nouveau ces organes, n'adopte pas cette manière de voir. Ce naturaliste est même porté à croire que celle concile n'est pas un organe hépatique, comme le supposent la plupart des auteurs (5), et n'est que du tissu grais- seux, semblable à celui qui se trouve sur d'autres viscères (c). Il est, en effet, probable que des cellules adi- peuses s'y rencontrent ; mais la ma- tière verdàtre qui est souvent évacuée par les Sangsues paraît être un pro- duit biliaire, et il y a lieu de croire qu'elle provient des glandules logées dans la couche tomenteuse dont l'es- tomac est revêtu. Celte évacuation de matières verdâlres par l'anus s'ob- serve surtout chez les individus qui sont à jeun depuis longtemps, et dans le commerce on la considère comme un signe de l'élat de vacuité des or- ganes digestifs et d'aptitude à bien piquer [d).

(1) Dans une série d'expériences faites par M. lïbrard, la digestion a duré, en général, plus de dix-huit iiiois ; mais lorsque les Sangsues sont en liberté et dans les conditions normales, ce tra- vail est beaucoup moins long : il ne pa- raît être que de six semaines ou deux moispour les très jeunes individus, dils germemeiUs; de trois à six mois pour les individus âgés d'un an, dits fdels ; de cinq à neuf mois pour les individus âgés de deux à trois ans; et de six à quinze moispour les vieux individus, dits vaches. Il est aussi à noter que la digestion est ralentie par l'aclion du fi'oid et s'active pendant l'été. Du reste, les Sangsues sont disposées à piquer de nouveau longtemps avant que d'avoir digéré tout le sang dont leur estomac s'était chargé pendant un précédent repas (e). Quand elles sont repues, il est aussi très facile de les faire dégorger : par exemple, en les plongeant pendant quelques instants dans de l'eau salée, puis en les pres- sant entre les doigts; et, après une huitaine de jours de repos, elles sont a[)tes à sucer de nouveau. 11 existe beaucoup de préjugés relatifs à l'em- ploi des Sangsues qui ont déjà servi, mais la pratique des hôpitaux prouve

{a) BranJt et Tinlzeburç, Medicinische Zoologie, t. II, p. 24fi. (&) Carus, Traité d'anatomie comparée, l.U, p. 253.

Blainville, arl. Sangsues (Dictionnaire des sciences naturelles, 1827, t. XLVII, p. 214).

C. B. Jones, On Ihe Structure of thc Lira- [Philos. Trnns., lî^iO.p. 102).

Moquin-Taiiilon, Op. cit.,\i. 109.

(c) l-cyilii,', Lelirlnich dcr Ilistoloiiie des Menschcn und der Thiere, 1857, p. 30(i. ((/) (;h:ir|i('ulior, Mnudijraphic de.i San(jfues médiciiialex, 1S3S. (e) Elirard, Nouvelle monographie di's Sangsues, p. Kl'J cl suiv.

DES VKUS !)!•: LA CLASSE DLS LEPTOZOAIKES . /|/|7

sang dans son estomac un an après ce repas. 11 est aussi à noter que ce licpiide ne s'y pufrétle pas, et que son mélange avec les sucs gastriques lui tait perdre immédiatement la propriété de se coaguler spoidanémcnt (1).

§ 5. Le mode d'organisation que nous venons d'étudier chez les Annélides suceurs conduit à celui (pii domine dans une classe de Vers que je désignerai ici sous le nom de Lei^to- zoAiREs ("2), afin de rappeler la Ibrme déprimée de ces Animaux, dont les uns sont parasites et constituent l'ordre des Tréma- todes, et dont d'autres mènent une vie errante et se répartissent en plusieurs groupes, tels que les Planariés et les Némer- tiens (3). En eflet, chez ces Annelés inférieurs, l'analogue de

Ap|iareil

digestif

des

Leplozoaires.

([ne CCS réapplicalions sont sans in- convénient pour les malades (a).

La digestion s'eflectne beaucoup plus rapidement chez les Aulastomes. Ainsi, dans des expériences faites par Johnson, trois de ces Animaux n'of- fraient, au bout de cinq jours, aucun vestige du corps d'auties Sangsues qu'ils avaient dévorées; et chez un quatrième individu le cadavre trouvé dans son esloniac, après un séjour de même durée, était à moitié digéré (6).

(1) Le sang éprouve d'autres alté- rations par son séjour dans l'estomac des iiirndinées ; il s'épaissit, devient visqueux et noircit.

(2) De Xettto;, mince, et "Çwov, ani- mal.

(3) Dans l'état actuel de la science, il est très ditRcile de bien classer les Animaux dont se compose le sous- embranciiomeiit des Vers, non-seule- ment parce qu'il règne beaucoup d'incertitude relativement à la struc-

ture intérieure de plusieurs d'entre eux, mais encore parce que nous ne connaissons pas encore d'inio manière suffisante la valeur zoologique des modilicalions qui se remarquent dans leur organisation ; aussi y a-t-il pres- que autant de systèmes ditlerents de classification pour ces Animaux qu'il y a d'ouvrages consacrés à leur étude, et il est très difficile de se faire bien entendre quand on fait usage de la plupartdesnoms dégroupes générale- ment usités, parce que ces noms sont

employés dans un sens un peu différent par chaque auteur. Je ne pourrais, sans sortir du cadre tracé pour ce Conrs, discuter ici la valeur des divi- sions adoptées par les divers zoolo- gistes du moment actuel, ni exposer les raisons qui me portent à réunir dans une même classe les Turbellariés de AL r':brenberg, les Trématodes et même les Cestoïdes; mais à mesure que nous avancerons dans l'étude

(a) Soubeiraii, Sur le commerce des Samjsues, sur les moyens de les nmllipUer, et sur l'emploi des Sangsues qui ont déjà servi, \>. i!7 (extr. du liutletiu de l'Acad. de médecine, 1848).

(b) Joliiisoii, .-l Trealise on Ihe médicinal Leeeh, p. 50.

Ordre

des

Ti émalodes.

/l/|8 Al'l'AHElL DIGKSTIF

l'intestin des Sangsues disparaît d'ordinaire, ainsi que l'anus, et l'appareil digestif est réduit aux parties correspondant à celles qui composent la bouche , le pharynx et l'estomac rameux de ces derniers Vers. Il en résulte que chez la plupart des Lepto- zoaires, sinon chez tous, la cavité alimentaire ne communique au dehors que par un seul orifice, la bouche, comme chez les Zoophytes inférieurs.

Chez les Trématodes, cette ouverture se trouve vers l'extrémité antérieure du corps (l), et quelquefois, chez les Fascioles (2) ou Distomes, par exemple, elle occupe le fond d'une ventouse céphaliquc, comme chez les Sangsues. D'aulres fois la bouche est située entre deux de ces organes préhensiles, disposition qui se voit chez les Tristomes. Enfin il est aussi des Animaux de ce groupe, tels que les Polystomes, les ventouses manquent complètement dans cette région du corps, et alors cet orifice est pourvu d'un bulbe cliarnu pharyngien (S). La portion sui- *vante delà cavité alimentaire est toujours courte, et d'ordinaire se bifurque bientôt pour constituer deux longs coecimis qui sont tantôt simples, d'autres fois plus ou moins rameux (/i).

analoniiqiie et physiologique du règne Animal, j'aurai souvenl l'occasion de monUer combien ces Vers ont réelle- ment entre eux des liens de parenté zoologique.-

(1) Le Gasterostomum fimhriatum fait exception à cette règle : sa bouche est située vers le milieu de la face in- férieure de son corps [a).

(2) Le genre Fasciola (sous-genre Cladocœlium de M. Dujardin) est con- fondu avec celui des Distomes par la plupart des auteurs, mais doit en être séparé; il ne renferme que la Douve du foie, qui se rencontre chez beau-

coup de Ruminanls, ainsi que chez le Cheval, le Lapin, le Cochon, etc.

(3) Dans le genre Rhopalophorus, l'appaieil digestif est conformé de la même manière que chez les Disiomcs, il existe de chaque côté de la ventouse buccale un appendice prolracliie et cylindrique qui a l'apparence d'une trompe et qui est liéiissé de ciochets. Ces singuliers organes ressemblent beaucoup aux appendices céphaliques des Tétrarhynques, et servent à l'Ani- mal pour s'accrocher aux parois de l'inlestin des Sarigues, il vit (6).

Cl) La bifurcation de la cavité di-

(rt) Siebnld elSIaiiniiis, Nouveau Manuel d'auatomie compavc'e, t. i, p. 130. (h) Uicsing, Sechsz-ehn Gathingeu von lUnnciuviirmcrn nnd ihve Aricn, pi. t, ûg. 1 {Mém. de lAcad. lie Vienne, 1805, t. IX).

UKS VKUS DE LA CLASSE DES LEt'TOZOAlHES. llk^J

Ce dernier mode d'organisalion est facile à conslater chez la Douve du foie , qui se rencontre très communément dans les vaisseaux hépatiques du Mouton. En effet, ces Vers sont en général gorgés de bile, et la couleur foncée de cette sub- stance rend leur appareil digestif fort apparent à travers les téguments. En les observant à la loupe, dans cet état de réplé- tion, ou mieux encore après avoir injecté dans leur estomac une matière colorante telle que l'indigo, on voit que cette cavité est constituée par une [)aire de canaux rameux dont les arbo- risations s'étendent dans toutes les parties du corps et sont partout terminées en csecums (1). La disposition de ce système

geslive (appelée tantôt estomac, d'au- tres fois intestin, par les diirérents auteurs) est presque générale chez les Trématodes, mais ne s'observe pas chez le Diplozoon paradoxwn, un gros tronc stomacal médian rèj;nedans toute la longueur du corps et fournit de chaque côté un <;rand nombre de brandies rameuses. I^orsque , après l'accouplement , les deux individus conjugués se sont soudés entre eux de façon à affecter la disposition bizarre qui se voit dans les figures de ces Vers données par M. Nordmann , il y aurait, d'après ce zoologiste, une communication directe entre les deux cavités digestives (a) ; mais M. Van Beneden a constaté récemment que cette disposition n'existe pas (6). H est aussi ù noter que chez ce singulier Trémalode, on aperçoit dans le pha- rynx un organe conique et très mobile

qui paraît être analogue à la trompe des Glossiphonies, etc.

Chez VAspidogaster conchicola la poche stomacale est également im- paire, mais elle ne donne pas nais- sance à des branches latérales, et reste simple dans toute sa longueur (c).

(1) La bouche de la L'asciule , ou Douve du foie, a la forme d'une cupule dont les parois sont de consistance car- tilagineuse et revêtues d'une masse charnue qui constitue un bulbe pha- ryngien. Un tube droit en part, et pres- que aussitôt se divise en deux Ironcs qui se portent à peu près parallèle- ment jusqu'à l'extrémité postérieure du corps, et qui, chemin faisant, donnent naissance à une multitude de branclus. Les principales divisions ainsi formées seramifient beaucoup, et, en se portant en dehors, gagnent les côtés du corps. Toutes ont la forme de vaisseaux à

(a) ^ordm»nn, Mikrographische Beitrâgezur Nahirgeschichte der uiirbellosen Thiere, t. I, pi. 5, fig. 2.

{b) Van Beno'len, Mém. sur les Vers intestinaux, p. 39, p'. 4, fig'. t.

(t) Baer, lieitrâge ziir Kenntniss der niedern Thiere (Nova Acta Acad. Cœs. Leopold. Carol. Nattirœ cvriosorum, 1827, t. XUI, pi. 18, Cig. 4, etc.).

Aubcri, Ueberdas Wassergefdsssystem, die Kibildung uud die Entwickelung des Aspidogaster {Zeilsdir. (Hr wissensch. Zoologie, 1854, t, V[, pi. 14, tig. 1).

V. '29

/l50 APPAREIL DIGESTIF

gastro -vasculaire ressemble beaucoui) à celle des canaux hépatiques que nous avons vue chez les Gastéropodes dits Phlébentérés. Seulement , ici , la poche stomacale et l'in-

parois minces et gibbeuses ; elles ne s'anastomosent jamais entre elles et se terminent chacune en cul-de- sac (a).

Chez le Polystome de la Grenouille (P. integerrimum), l'appareil dis'estif affecte également la forme d'un sys- tème gaslro-vasculairc fort rameux ; mais les deux troncs principaux sont plus écartés et se réunissent entre eux dans la partie postérieure du corps ; il est aussi à noter que plu- sieurs des grosses branches qui en naissent s'anastomosent directement entre elles dans la région dorsale (6).

Chez VOnchocofyle appendiculata, Ver très voisin des précédents, les deux grands caecums intestinaux sont couverts de végétations creuses qui donnent à leurs parois l'apparence d'un tissu glandulaire (c). Il en est à peu près de même chez le Calceo- stoma elegans (d).

La disposition de l'appareil digestif est à peu près la même chez le Tri- stomacoGcineum. Le bulbe buccal est suivi d'un œsophage très court qui se

sépare bientôt en deux tubes stoma- caux subcylindriques. Ceux-ci, après s'être beaucoup écartés l'un de l'au- tre, se réunissent au-devant de la ventouse postérieure, de manière à former un cercle, et ils donnent nais- sance à un grand nombre de branches rameuses ; mais ces dernières sont plus grêles que chez les Douves (e).

Chez VEpibdella hypoglossi, qui a été jusque dans ces derniers temps considéré comme une Hirudinée, mais qui paraît être, en réalité , un Tristo- mien, l'appareil digestif est disposé à peu près de même que chez les Tri- stomes; studemcnt les branches qui naissent de la grande anse stomacale, au lieu d'avoir la forme de vaisseaux rameux, consistent en gros caecums branclius (f).

Le Nitschia elegans, que quelques auteurs ont rangé aussi parmi les Hiru- dinées ig) , présente le même mode d'organisation (h), et doitprendre éga- lement place dans la tribu des Tristo- miens. La même remarque s'applique au genre Axine («).

(a) Mehlis, Obscrvationes analomicœ de Distomate hepatico et lanceulato, p. 14, (ig. t.

BlanclianI, Recherches sur l'organisation des Vers, pi. 4, fig. 1 {Voyage en Sicile, l. III). Atlas dxi, Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 36. fig. \.

(b) Baer, Beilrdge zur Kenntniss der niedern Thiere {Nova Acta Acad. Nat. curios., 1827, t. Xm, pars II, pi. 32, fig. 7).

Blanchard, Recherches sur V organisme des Vers, p. 135, pi. 6, fig. 4.

(c) Van Boiieden, Mém. sur les Vers intestinaux, p. 50, pi. 5, fig. 2 ot 8 (e.\tr. du Supplément aux Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1850, t. II).

(d) Van Bcncdcn, Op. cit., pi. 7, fig. 3.

(e) Blanchard, Op. cit., p. 127, pi. 11 , fig. H, et Atlas du Règne animal do Cuvier, Zoophytes, pi. 3C bis, fig. 1 b.

(f) Van Bencden, Op. cit., p. 24, pi. 2, fig. 3.

(g) Moquin-Tandon, Monographie des Hirudinées, 1846, p. 394.

(h) Baer, lieilrage zur Kenntniss der niedern Thiere (Nova Acta Acad. Nat. curios., 1827, l, XllI, pars il, pi. 32, fig. 2).

(i) Van Bencden, Mcm. sur les Vers inleslinaiu, p. 52.

DES YEllS UE LA CLASSE DES LEl'TOZUAIRES. 451

testin dont ces Mollusques sont pourvus manquent complè- tement.

Gomme exemple de Trématodes à caecums gastriques simples, c'est-à-dire non ramifiés, je citerai les Distomes proprement dits, les Monostomes, les Amphistomes et les Holostomes (1).

(I) Chez les Distomes proprement La forme des caecums est la même dits, l'œsophage est plus allongé que chez les Brachylèmes (e). Dans quel- chez les Douves, et décrit quelquefois ques figures ces appendices sont plusieurs courbures avant de se bifur- représentés comme se réunissante quer : par exemple, chez le Distoma leur extrémité postérieure chez le perlatum, qui vit dans l'intestin de la Distoma tereticoUe{f), mais c'est une Tanche («). Dans ce genre, les deux erreur du dessinateur (g»), grandscaeciimsquiennaissentsonttrès Les caecums gastriques sont égale- étroits et à peine dilatés postérieure- ment grêles et allongés chez les Holo- ment,oùilsse terminentisolément(5). stomes (li) ot la plupart des Mono-

dhez le Disto7na Biiccinimidabilia, stomes {i). l'extrémité postérieure de l'œsophage Chez les Diplostomes , l'appareil est plus renflée (c), et une disposition digestif présente aussi ce mode d'or- analogue se remarque chez le ZJïsfoma ganisation , mais les deux cœcums globiporum {d). se renflent graduellement d'avant en

(a) Nordmann, Mikrographische Beitrdge %jir Naturgeschichtedermrbellosen Thiere, 1. 1, pi. 9, fi2^. 4 (Aiin. des sciences nat., t. XXX, pi. i'J, li^. 4).

(b) Exemples : le Distoma ylobiporum (voy. Elirenberj, Ziisdtze z-ur Erkenntniss grosser orga- nischen Ausbildung in den Idelnsten thierischen Organismen {Mém. de l'Acad. de Berlin pour 1835, p. 178, pi. l.lig. 1).

Le Distoma lanceolatuia (voy. Blanclianl, Op. cit., pi. 8, fis. 1).

Le Distoma korridum, trouvé dans les uretères du Boa constrietor (voy. Leidy, Descript. of two species of Distoma, in Joitrn. of the Acad. of Nat. Hist. of Pliiladelphia, 2' série, t. I, pi. 43, fig. 2j.

Le Distoma militare Erinacei (voy. Van Benedeii , Mém. sur les Vers intestinaux, pi. 9, fig. 8 et 9).

(c) Voyez P. de Filippi, Mém. pour servir à l'histoire génétique des Trématodes {Mém. de l'Acad. de Turin, 2- série, t. XVI, pi. 2, fig. IG).

(d) Burmeister, Distommi globiporum ausfûhrlich beschrieben {Archiv fur Naturgesch., 1835, t, n, pi. 2,tig. 1).

(e) Exemple : le Brachylœmus cylindraceus (voy. Mayer, Beitrdge zur Anatomie der Entoxoen, 1841, pi. 3, fig. 17; Blanchard, Op. cit., pi. 8, fig. 2(i).

Brachylœmus Erinacei (voy. Blanchard, Op. cit., pi. 6, (\g. 2).

(/■) Voyez Jurine, Note sur la Douve à long cou (Fasciola Lucii) (Ann. des sciences nat., 1823, t. II, p. 493, pi. 23, ûg. 4).

Schmatz, Tab. Anat. Entozoorum, pi. 8, fia;. 2 et 3.

(g) Siebold et Stannius, Nouveau Manuel d' anatomie comparée, t. I, p. 131.

Jurine, Op. cit. {Mém. de la Société d'histoire naturelle de Genève, 1823, t. II, pi. 4, fig. 4, 5).

{h) Exemple : VHolostomum alatum, qui se rencontre dans l'intestin du Renard (voy. Blanchard, Op. cit., pi. 7, fig. 1 a).

(i) E^mple : le Monostoma verrucosum, qui se trouve dans les intestins du Canard (voy. Blan- chard, Op. cit., [il. 9, fig. 2).

/j52 APPAREIL DIGESTIF

Vers ccsioïdes. § 6. Les dcLix tiibes digestifs que nous venons de trouver chez les Distomes ressemblent beaucoup à des canaux longitu- dinaux (|ui se voient sur les côtés du corps cliez les Ténias et les autres Vers de la division des Cestoïdes ; mais chez ces derniers Entozoaires il ne paraît exister aucune communica- tion entre ces vaisseaux latéraux et une ouverture buccale; aussi , quoique la plupart des zoologistes les considèrent comme remplaçant les fonctions d'un appareil digestif, quelques observateurs leur refusent ce nom, et les rapportent à un appareil sécréteur dont nous aurons à nous occuper ailleurs. Dans réiat actuel de nos connaissances , la question peut paraître indécise , et je me bornerai à y ajouter que, chez le Ténia, ces tubes, au nombre de deux, communiquent entre eux d'anneau en anneau par une série de branches transver- sales simples (1). Chez plusieurs Cestoïdes on aperçoit, entre

anièro (a). Knlin, chez les Amphisto- mes, ils sont beaucoup plus larges, et ressemblent à des sacs allongés plutôt qu'à des tubes (6). Ces organes sont encore plus renflés chez le Mono- stoma bijugum (c) ; enfin, chez le Mo- nostomamulabile, ils sont étroits, ils se réunissent et communiquent entre eux par leur extrémité postérieure, de façon à former une anse \d).

Il est aussi à noter que chez les Trémalodcs le bulbe pharyngien, qui est situé immédiatement derrière la bouche, et semble quelquefois se con-

orale, est une masse musculaire de forme o\alaire dont l'axe est parcouru par le commencement du canal ali- mentaire. r,a structure en a été étu- diée par M. Van Beneden (e).

(1) Les canaux latéraux du Ténia, qu'il ne faut pas confondre avec les vaisseaux beaucoup plus grêles dont j'ai déjà eu l'occasion de parler en faisant l'histoire des organes de la circulation (/■), sont des tubes cylin- driques à parois membraneuses , qui régnent sans interruption dans toute la longueur du corps de l'animal, ou

fondre avec la base de la ventouse de la série des Animaux réunis en

(a) Exemple : le Diplostomum volvens, qui se trouve il;ms le corps vilrd de l'œil chez la I^crclic et plusieurs aulres froissons (voy. Noi-dniann, Op. cit., pi. 3, fig-. 1 et i ; pi. 4, :ig'. 0 ; Ann. des sciences iiat., l.XW, pi. dS, fij:. 1 et 2, pi. 19, ûg. i).

{b) Exoiiiiilc : VAjnpUislomiim conicum (voy. Laurcr, Disquisiliones anatomicœ de Amphistomo co?!i>f),disseit. iiiaut,'., Grypliiaî, 18;i0. lig. 12, 21 , 22 ; lilancliard, Op. cit.,[<\. 10, fi-. 2&, 2 c).

(e) Mies.clier, Tieschreibiuiç] und U.itersucli.uiig der Moiwsioiin bijui^iuii, Iilj. 7. Itasle, 18ïS.

(d) Van lî(!iH"den, Méiii. sur les Vers iiilestinaux, \'. 71 , pi. 12, li^'-. 3.

(c) Meiii, ibid., pi. 8, fi;,'. 4, 10, 1 1 , etc.

(/■) Tuiiie 111, l'aije 28(i.

DES VRP.S DE L\ CLASSE l)K^ Lia>TOZOAIRES, /l53

les ventouses céplialiques ou les poches qui en tiennent lieu, et qui logent des appendices proboscidiformes,une pelite fos- sette que beaucoup de naturalistes considèrent comme une

chaîne (on slrobile), si Ton considère chaque segment, ou cuculan, comme formant un individu distinct (ou pro- (jloltis), opinion qui aujourd'hui pré- vaut parmi les zoologistes. Souvent il est facile de distinguer ces canaux à travers les téguments, sans prépara- tion ; mais pour les mettre bien en évidence, il est bon de les injecter comme l'ont fait Ernsl , Carlisle et beaucoup d'autres helmiutliologis - tes («). On voit alors qu'ils sont sim- ples et ne se ramifient pas, mais com- muniquent entre eux par une branche anastomoliquc transversale près du bord aniérieur de chaque segment, ou proglotUs. Les anciens helmiutliolo- gisles croyaient qu'ils débouchaient au dehors par les pores génitaux qui se trouvent sur les côtés du corps, et dans les figures analomiques que M. Uelle Chiajc en a données, cette disposition est nelteitient indiquée (6), de façon à faire considérer ces ori- fices comme étant autant de bouches ; mais il n'y a en réalité aucune com- munication de ce genre, et ces canaux sont complètement fermés latérale- ment (c). M. Platncr a cru aper- cevoir des valvules dans leur intes-

tin [d) ; mais ses observations ont été infirmées par les recherches plus ré- centes de I\l. Van Beneden (e). Ces ca- naux naissent à la base des ventouses qui , au nombre de quatre , garnis- sent l'extrémité antérieure du Ver, et quelques zoologistes ont considéré ces derniers organes comme étant des bouches, tandis que d'autres ont pensé qu'il existe entre ces suçoirs un pore buccal central ; mais il est bien reconnu aujourd'hui qu'il n'y a dans ce point aucune communicalion directe entre les canaux latéraux et l'extérieur. M. Tilanchard pense qu'à leur exlrémité antérieure ces tubes sont en rapport avec une sorte de la- cune où les malières alimentaires ar- riveraient à travers le tissu perméable des ventouses, et que c'est par cette voie que ces matières pénétreraient dans leur intérieur (/"). Mais M. Van Beneden , en se fondant sur des re- cherches faites sur d'autres Vers de la même classe, repousse cette opinion, et croit devoir admettre que les tubes la- téraux de tous ces Animaux ne sont pas des cavités digeslives , mais des organes sécréteurs.

Les observations de ce dernier nalu-

(a) Ernsl, Dissertatio de Tœnia. Basileœ, t743, p. 3t.

Cai-lisle, Observ. upon the Structure and Œconomy of Tœnia (Tmns. ofthe Lbinean Society, 1794, i.II).

(b) tiflle Chiiije, Compendio di elmintografta îimana, 1825, pi. 7, fig-. 2, cl Mem. sulla storia enotomia degli Animall senza vertèbre di Napoli, t. I, pi. 12, lîg. 2.

(f) Rudolphi, Entozoorumhist. nat., t. I, p. 2(3G et suiv.

Owen, art. Entozoa (Todd's Cyclop. of Anat. and Physiol. , t. II, p. 131).

Blanchard, Op. cit., pi. 14, fii^. -2.

(d) Plalner, fleobachtung am Dannkanal der Tœnia soliiiin (Miiller's Archiv fiir Anat. und Physiol., 1S38, p. r.72, |.|. 13, 11-. 4 et 5),

[e] Van Beneden, Reciterche.^ svr la Faune liltoralc de nclijiqve : Vers cesloïdes, p. 40 (cxir. des Mém. de l'.\c(ul. de UruxeUcs, 1S50, I. XW).

(/■) Blanchiiid, Op. cit., ]k 152.

ll'ok

APPAREIL DIGESTIF

bouche , mais cette cavité se termine presque aussitôt en cul- de-sac et ne peut avoir aucune importance pliysiologique (1). Quoi qu'il en soit de la détermination de ces parties, il est pro-

raliste portent principalement sur r^w- ihohothrium cornucopia, VEcheneibo- thrium variahile, et le Ligula simpli- cissima; mais, d'après la description qu'il donne des canaux latéraux de ces Vers, il me paraît probable que ses ob- servations s'appliquent aux analogues des vaisseaux qui, chezle Ténia, coexis- tent avec les tubes réputés gastriques et qui ont été considérés par M. Blanchard comme constituant un appareil circula- toire. En eflet, M. Van Benedenditque de chaque côté du corps il y a deux ou même trois de ces vaisseaux, et qu'ils sont reliés entre eux par des branches transversales beaucoup plus nom- breuses que dans l'appareil dit yastro- vasculaire du Ténia (a). Or ces ca- ractères se remarquent précisément dans le système réputé vasculaire qui, chez ce dernier Ver, coexiste avec les grands canaux latéraux, ainsi qu'on peut s'en convaincre en jetant les yeux sur les figures que M. Blanchard en a données (6). M. Van Beneden ajoute que, chez VEcheneihothrium, chacun des deux vaisseaux du même côté pénètre dans la bothridie cépha- lique correspondante, s'y recourbe en anse, et après y avoir fourni des ra- muscules , redescend pour s'anasto- moser avec son congénère ; enfin qu'à l'extrémité postérieure du corps, tous ces vaisseaux longitudinaux se ter-

minent dans une petite vésicule mé- diane qui à son tour débouche au de- hors par un pore (c). Ce serait là, comme on le voit, une disposition semblable à celle du système vascu- laire des Douves {d), lequel n'a aucune relation avec l'appareil digestif de ces Animaux , et est considéré par M. Van Beneden comme un système urinaire, tandis que M. Blanchard le regarde comme un système circula- toire. H reste donc à savoir si, chez les Cestoides dont il est ici question, les analogues des tubes réputés gastro- vasculaires chez les Ténias manque- raient ou seraient unis aux vaisseaux décrits par M. Van Beneden.

(1) Cette fossette, en forme de bouche , a été aperçue chez des Bolhriocéphales par Bremser et par F. Leuckart (e). Chez les Scolex, ou individus agames de quelques espèces de Tétrarhynques ou de Phyllo- bolhrium, cet orifice occupe le sommet d'un tubercule céphaloïde, et se laisse apercevoir très distinctement (/■) ; mais chez les Strobiles on n'en dislingue que rarement des traces.

Quelques anatomistes ont pensé que les gaines des appendices proboscidi- formes des Tétrarhynques remplis- saient le rôle de cavités digestives (g), mais cette opinion ne paraît avoir aucun fondement solide.

(a) Van Bcncdcn, Recherches sur la Faune litt. de Belgique: Vers cestoides, p. 38.

(6) Blanchard, Hech. sur V organisation des Vers (Voyage en Sicile, t. 111, pi. 44, Rg. 2 et i)

(c) Van Beneden, Op. cit., p. 40, pi. 3, fig. 2 et 13.

{d} Voyez ci-dessus, tome 111, page 270.

(e) F. S. Leuckart, Zoologische Bruchstûcke, 1819, p. 22.

{f) Voyez Van Beneden, Op. cit., pi. 1, tig-. '2, G, 7, etc.

ig) i. Millier, Bericht, Archiv fur Anat. und PhysioL, i 836, p. cvr.

des Planariées,

DES VERS DE LA CLASSE DES LEPTOZOAIRES. /i55

bable que ces Helminthes se nourrissent principalement, sinon exclusivement, par l'absorption des matières déjà digérées par les Animaux dans l'organisme desquels ils vivent, absorption qui doit pouvoir s'effectuer par tous les points de la surface de leur corps, et qui paraît devoir rendre inutile l'existence d'une cavité stomacale (1).

§ 7. _ Dans le groupe des Planariées, ou Dendrocéliens de Appami M. Ehrenberg (2), la disposition de l'appareil digestif ressemble beaucoup à ce que nous venons de rencontrer chez les Fasci- coles, ou Douves : seulement il n'y a pas de ventouses; la bouche est reportée plus en arrière, vers le milieu de la face inférieure du corps (3); il y a souvent une trompe protractile, et l'œsophage est remplacé par une poche stomacale assez vaste, d'où partent les nombreuses branches d'un système gastro- vasculaire. De même que chez les autres Leptozoaires dont il vient d'être question, l'anus manque (/i).

(1) Par l'absence d'une cavité sto~ rieure du corps, et qui ont été con- macale,ces Vers ressembleraient donc fondus avec les Planariées |)ar la plu- aux Kcliinorliynques, dans la division part des anatomistes , appartiennent des Nématoïdes {a). à des groupes voisins : les uns sont

(2) Il existe beaucoup d'incertitude des l'.habdocéliens, les autres des M- relalivenient aux limites naturelles de merliens.

l'ordre des Planariées, et la plupart Chez quelques espèces, cet orifice

desanatomistes y ont rangé des espèces est situé à peu de distance de l'extré-

qui paraissent devoir prendre place, mité antérieure du corps, par exemple

soit dans le groupe des Khabdocé- dans les genres Proceros et Prosthio-

liens, soit dans celui des Némertiens. stomum (c) ; mais, en général, il se

J'y réunis tous les Leptozoaires mo- trouve beaucoup plus loin en arrière,

noïques acolytes (6) et à estomac ra- et occupe à peu près le milieu de la

meux. face inférieure du corps, ainsi que

(o) Les Proslomes et les autres cela se voit chez le Pohjcœlis lœvi- Leptozoaires acolytes , qui ont la galus {d). bouche située à l'extrémité anté- (U) L'existence d'un anus n'a été

(fl) Voyez ci-dessus, page 420.

(b) C'est-à-dire, dépourvues de ventouses.

(c) Quatrefages, Mém. sur quelques Planariées marines (Voyage en Sicile, t. H, pi. G, fig. 6 et 4).

(d) Idem, itid., pi. 4, fig. 26, et Atlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes , pi. 38, fis. 2&.

/|56 APPAHRIL DIGESTIF

Le suçoir de ces Vers à corps déprimé varie beaucoup dans sa forme. Chez les uns, il est cylindrique, et ressemble à la trompe rpic nous avons déjà vue chez divers Annélides infe- l'icurs ; chez d'autres, il s'élargit vers le bout, de façon à res- sembler à une trompette; enlin, chez plusieurs de ces Animaux, il consiste en un disque ou un grand voile disposé en manière d'entonnoir et plissé ou même fortement lobé sur le bord. Dans l'état de rétraction , cet organe se loge dans une grande cavité buccale, et, lorsqu'il se déploie au dehors, il acquiert en général une longueur très considérable (1).

bien constatée chez aucun Ver de cet ordre. L'orifice que M. Dello Cliiajc a figuré sous ce nom clicz son Planaria auranliaca n'est autre cliose que le porc f,'éniial, et n'a aucune relation avec l'appareil digestif [a).

(1) Les fonctions de la trompe des l'ianariécs a été Ijien constatée pour la première fois par J. Johnson (6j ; mais le jeu en a été mieux observé par Dugès, à qui l'on doit beaucoup de recherches intéressantes sur l'ana- lomie et la physiologie de ces Ani- maux (c). La disposition de cet organe dans l'état de repos se voit très bien dans les ligures anatomiques données par M. de Quatrefages (J).

Gomme exemple de Planariées à

trompe cylindrique et charnue, je citerai la Prostonm lineare, la por- tion antérieure de cet organe est hérissée de petites pointes épider- miques (e), et le Palycladus Gayi, il est terminé par deux bourrelets labiaux {f). La trompe du Planaria torva , ou P. subtentaculata de Du- gès ((/), et du Planaria laclea (h), est également cylindrique dans l'état de repos, mais s'évase en forme de trom- pette , lorsqu'elle se déploie au de- hors.

Chez d'autres espèces, cet organe s'élargit et s'arrondit en forme de disque ou de cupule : par exemple, chez le Slylochus maculatus (i), etc. Chez le Leptoplana tremellaris [j], le

(a Délie Chiaje, Descriiione e nolomia degli Aiiimali invertebrati délia Sicilta citeriore, f. IH, p. -134, pi. 109, fig. 19.

(b) i. l'i. Jolinson, Observ. on the chenus Planaria {Philos. Trans., 4822, p. 437).

(c) LJui,'ès, Hecherdies sur l'organisation et les mœurs des Planariées (Ann. des sciences nat., i" série, ]8=>8, t. XV, p. 152).

(d) Qualrcfai^cs, Mém. sur quelques Planariées, [.|. 0, Cig. 4 et 5 ; pi. 7, fig. 4. {«) ŒrsIcJ, System. FAntlieilung der Plaltwilrmer, pi. i, fig. 13.

{[) Blanchard, Recherches sur l'organisation des Vers (Voyage en Sicile, t. I, pi 1, flg. 1 b, i c, 1 d).

{(j) Dii-i's, Op. cit., pi. 4, i]g. 18 et 23.

(/i) liaor, Iteitrage utr Kenntniss der ntedcrn TUiere {Nova fcla Acad. Nat. curlns., 1827, I. Mil, pi. 33, li^'-. 8 et 9).

Œrsiod, Op. cit., pi. l.fig. 14 et 1*5.

(i) Qualrefages, Oji.cit., pi. G, fig. 2.

(j) Diigès, Op. cit.

\)K9, VF.RS DE LA CLASSE DES LEPTOZOAIRES. Û'^7

L'ouverture pharyngienne de celte lroni|)e est entourée d'un sphincter qui affecte parfois la forme d'un bulhe musculaire, et elle débouche en général directement dans la poche stoma- cale. Celle-ci est tantôt arrondie, d'autres fois très allongée, et presque toujours elle donne naissance latéralement à un certain nombre de canaux qui se ramitlent dans les parties périphériques du corps, et y constituent souvent, en s'anastomosant entre eux, un lacis gastro-vasoulaire très riche. En dernier lieu, toules ces branches se terminent en coecums, et chez la plupart de ces Animaux on n'a remarqué rien de particulier dans la structure de ces canaux ; mais dans quelques espèces de Planariées dont le dos, au lieu d'être lisse, comme d'ordinaire, est couvert de gros tubercules papillilbrmes, il en est autrement; car le sys- tème gastro-vasculaire envoie dans chacun de ces appendices cutanés un prolongement en forme d'ampoule, qui est très contractile, et qui ressemble beaucoup aux cœcums terminaux

Planocera pellucida [à, el ciiielqiies antres ospi'ccs, il s'élargit au point de resseml)ler aux filets que les pèclieuis connaissent sons le nom d^'éperviers. Enfin, chez la Planaire licliénoïde, son 1)01(1 libre s'étend sous la forme de grands lobes froncés et d'une lar- geur remarquable (6;.

D'ordinaire ces Vers s'enroulent autour du corps dont ils veulent se repaître, et y appliquent Tcxtrémité libre de leur trompe. Quand la proie n'est pas trop volumineuse pour pas- ser par l'orifice pharyngien, ils l'en- gloutissent promptement; mais, dans le cas contraire, ils se bornent à en

sucer le sang Leur trompe, formée par un repli circulaire de la membrane muqueuse du pharynx, est garnie de fibres musculaires disposées, les unes circnlairement, les autres d'une ma- nière radiaire, et l'irritabilité de cet organe est si persistante, que souvent on le voit continuer à fonctionner pendant fort longtemps après avoir été séparé du reste du corps : par son extrémité antérieure il continue à s'emparer des corpuscules qu'il ren- contre, el les fait passer par l'orifice opposé, qui est devenu libre, mais qui, dans l'état normal, conduisait dans l'estomac [c\

(a) Mc-rlcns, Untevsuchiinricn ûhcr den Inneni P.au verschiedener in der See lebender Plana- rien (Mém. de l'Acad. de Saint-I\'tersbouf(j, 0°s('TiL', 183/!, t. II, pi. 2, (\g. 3, 4 et 5), (6) Meilens, Op. cit., pi. l , fig. 3.

(Eisled, Op. cit., pi. i 2, fig. 2, (c) Dugcs, Op. cit., p. 155.

Baer, Op. cit., pi. 33, fig. 19.

/|58 APPAREIL DIGESTIF

du système des tubes gastro-hépatiques dans les braneliies dor sales des Mollusques de la fomille des Éolidiens (1).

(1) M. de Quatrcfages a étudié très attentivement le mode de conforma- tion de l'estomac et de ses dépen- dances chez plusieurs espèces de Planariées, et a montré qu'il existe à cet égard de nombreuses varia- tions.

Chez le Prosthioslomum arctum {a), l'orifice postérieur de la trompe donne directement dans une poche stoma- cale conique très allongée, qui occupe la ligne médiane du corps et se pro- longe jusqu'à son extrémité posté- rieure. De chaque côté ce réservoir central donne naissance à une série de tubes qui ne tardent pas à se rami- fier. Ceux de la première paire, plus gros que les autres, se portent en avant, de chaque côté de la cavité pharyngienne, et arrivent jusque dans la région frontale, après avoir fourni un grand nombre de brandies laté- rales; les suivants se dirigent direc- tement en dehors, et se ramifient de façon à fournir chacun une douzaine de caecums terminaux. Les divisions de ce système gasiro-vasculaire se trouvent ainsi répandues dans toutes les parties du corps, et il est à noter que nulle part elles ne s'anastomosent entre elles.

La disposition de l'appareil digestif est à peu près la même chez le Poly-

clados Gayi et le Proceros velutmus, dont M. Blanchard a fait connaître la structure ; seulement , chez la pre- mière de ces Planariées, les branches secondaires du système gaslro - vas- culaire sont plus allongées et sub- parallèles (6), et chez la seconde les branches de la paire antérieure ne sont pas plus développées que les suivantes (c).

Chez le Proceros, l'estomac est également allongé et intestiniforme, la moitié postérieure de cet organe ne fournit aucune branche et con- stitue un cul-de-sac simple, tandis que les prolongements nés de la moi- tié antérieure se ramifient dans toute l'étendue du corps (d).

Chez les Planariées dont la bouche est située vers le milieu de la face inférieiue du corps, l'orifice pharyn- gien est, en général, recouvert par la poche stomacale, et ce réservoir, dont la forme est ovalaire, ne se prolonge que peu en arrière, mais fournit laté- ralement et en avant plusieurs grosses branches qui divergent dans tous les sens et se ramifient partout. Chez le Planaria lactea (e), le Planocera pellucida (/") , le Polycclis pallidus {g), le Stylochus maculatus (h) , les ca- naux ainsi constitués ne s'anasto- mosent pas entre eux ; mais, dans

(a) Qualrefages, Méin. suv les Planariées {Voyarje en Sicile, I. 11, pi. 0, fig. i). [U) IMancliard, Oroanisation des Vers {Voyage en Sicile, t. III, pi. l, ùg. 1 b). (c) Idem, ibid., pi. 3, fig. 2 c. , (d] Quatrcfages, Op. cit., pi. 0, ûg. 5. (e) bacr. Op. cil. {Nova Acta Acad. Nal. curios., t. XllI, pi. 33, fig. 8). Diigès, Op. cit. [Ann. des sciences nat., t. XV, pi. 4, ùg. 17),

(/■) Mcrlens, Op. cil. {Mém.de l'Acad. de Saint-Pétersbourg, série, t. H, pi. 2, fig. \ à 4). {g) Uuatrclagcs, Op. cil., pi. G, fig. 1, [h) Idem, ibid., pi. (!, fig. 2.

DES VERS DE L.\ CLASSE DES LEPTOZOAIRES.

459

§ 8. L'appareil digestif des Rhabdocélieins (1) ressemble Appareil beaucoup à celui des Planariées , si ce n'est que l'estomac TeV

I -il' 1 1 1 Rliabdocéliens.

rameux de ceux-ci est remplace par une grande poche sunple, terminée en cul-de-sac et revêtue intérieurement de cils vibra- tiles. La bouche de ces Vers varie beaucoup dans sa position, et se trouve quelquefois vers le tiers postérieur de la face infé- rieure du corps (2). En général, la trompe est très forte, mais courte, et elle est incrme, comme chez les Planariées.

d'autres Planariées , ils se ramifient de façon à former un réseau à mailles serrées. Celle disposition a élé con- statée par M. de Quatrefages chez les espèces à dos papilleux dont il a formé le genre Eolideceros (f?), groupe qui ne paraît pas dilTérer du genre Thysanozoon de M. Grube. C'est des points de réunion do ces branches anastomotiqucs que naissent les cae- cums ou ampoules qui se logent dans les appendices papilliformes du dos de ces Animaux. Il est aussi à noter que, chez ces dernières Planariées, l'estomac, qui est grand et allongé, est rattaché à rextrémité postérieure du pharynx par un œsophage élroil.

M. Délie Chiaje a figuré aussi le système gaslro-vasculaire sous la forme d'un réseau chez la Planariée qu'il désigne sous le nom de P. auran- tiaca (6).

(1) Le nom de Rhabdocœia a été introduit dans la science par M. Ebren- berg (c), mais en y donnant une ac- ception beaucoup plus étendue que je

ne le fais ici, car ce zoologiste l'appli- quait aux Ciordius, aux Nais, aux INémertes , etc. M. OErsted l'a res- treint aux Animaux dont il est ques- tion ici {d), et j'ajouterai que le groupe ainsi composé me semble devoir con- stituer, avec les Planariées, une divi- sion naturelle à laquelle on pouvait conserver le nom de Turbellaria, que M. Ehrenberg employait dans un sens plus large, mais moins convenable, à mon avis.

(2) Dans les genres Vortex et Dero- stoma, la bouche est située à la face inférieure du corps, mais à peu de distance du bord frontal, et livre pas- sage à une trompe charnue de forme plus ou moins ovoïde qui, dans l'état de rétraction, se place symétrique- ment sur la ligne médiane du corps, et paraît être suivie immédiate- ment par un grand sac stomacal qui se prolonge jusqu'à la partie posté- rieure du corps. De chaque côté de l'œsophage M. Schultze a trouvé un petit groupe d'utricules pédoncules

(a) Quatrefages, Op. cit., pi. 5, ûg. 1 c.

(b) Délie Chiaje, i)esm«. e notom. degli Animali invertébr. délia Sicilia citeriore, pi. 109, fig. 19.

{c) Ehrenberg, Symbolœ physicœ, seu Icônes et descriptiones Animalium evertebratorum sepo- sitis InsecUs, quœ ex ilincre Africam borealem et Asiam occidcntalemF. Hemprich et C. Ehren- berg «hidio novœ aut illustratœ rcdienmt. Decas 1 : Phytoz-oa turbellaria, 1831.

(d) Œrsled, Plaltwiirmer, p. 59.

/iGO

apparfjl digestif

Appareil

digestif

des

Némerliens.

§ 9. Les Némertiens (1), qui par leur forme générale ressemblent beaucoup aux Planariées et davantage encore aux Rhabdocéliens, mais qui s'en éloignent par plusieurs caractères organiques d'une grande importance, sont très difficiles à bien étudier. En effet, leur corps est si contractile et si facile à

qui paraissent consliiuer des glandes salivaires {a).

Chez les Macroslomes, la bouche, qui a la forme d'une grande fente longitudinale, se trouve beaucoup plus en arrière, et il ne paraît pas y avoir de trompe ni de bulbe pharyngien charnu (6).

Dans le genre Mesostomum (c), la bouche se trouve vers le tiers posté- rieur du corps, et la trompe a la forme d'un disque ou d'une cupule à peu près, comme nous l'avons vu chez plusieurs Planariées.

Dans le genre Opislomum, celte ouverture est rejelée encore plus loin en arrière, ci la trompe, qui est grosse et cjlindrique, .■■e place obliquement dans l'élat de réiraclion (d).

Le genre Microsiome paraît établir le passage entre les rdiabdoccllens or- dinaires et lesNcmertiens, car les sexes y sont séparés comme chez ces der- niers. IMais l'appareil digestif est dis- posé comme chez les premiers. La bouche, dépourvue de trompe, se

trouve vers le tiers antérieur du corps et donne immédiatement dans une grande poche stomacale qui, suivant M. Scluiltze, s'ouvrirait au dehors par un pore anal situé à l'extrémité posté- rieure du corps (e).

(1) Les Néniertienset les Planariées sont les principaux membres de la classe des Turbellariées, telle que ^L Ehrenberg a établi cette divi- sion (/■). Mais M. Blanchard, qui réu- nit les Planaires au\ Trématodesdans la classe des A vernies, en exclut les iXémertiens, qu'il considère coiume devant constituer une classe particu- lière (;7). Quelques-uns de ces Vers sont remarquables par leur grandenr. Ainsi \cBorlasia Angliœ (h) s'allonge souvent de façon à avoir 3 ou /i mè- tres de long, et iVlontagu parle d'un individu qui aurait eu 30 ijanls de longueur, c'est-à-dire environ 30 niè- trcs {i). Tous ces Animaux parais- sent se nourrir en suçant le corps de divers Mollusques ou en avalant des Infnsoires.

(a) Scluiltze, Beitrâge zur Naturgescltichte dcv Tuvhellavien, 1851, pi. 3, fig. 4, et |>1. 4, ilg. 1 et 2.

{b) Idem, ïbid., pi. 5, fig. 3 et 4.

(c) Exemples : Mesostomum Elirenbergi (voy. Focke, Plaiiaria Ehrenhergi, Ann. des ]Viaier Muséum, t. I, pi. 17, tig. 1).

Mesnslotiium nblusum cl M. marmovatum (voy. ScluiUze, Op. cit., pi. 5, llg. 1 et 2).

((/) Scliullze, Op. cit., |il. 3, fig. 1 et 'i.

{e} Idem, Ueher die Mikrosloineen, eine Familie der Tarbellarien (Avchiv fiir Nnturgeschichte, 184'J, 1. I, p. ^280, pi. li, fig. 1).

(/■) Elireiitierg, Sgmbolœ pliysicœ.

(g) Blanchard, Recherches .lur l'organisation des Vers, p. 47 {Voyage en .Sicile, I. Itl).

{h) Voyez Qiialiefagcs, Atlas du liègne animal de Olivier, Zoophvtk.'^, pt. 33.

(i) iMontiigu, Desoipt. of sercral Marine .inimals fouiid on tlie South coast of Dcvonsliirc {Trans. of Ihc l.iniieun Society, 1K04).

DES VEKS DE LA CLASSE DES LEI'TOZOAIKES.

/iGl

rompre, qu'il est presque impossible de les disséquer d'une manière satisfaisante, et en général leurs téguments sont trop opaques pour se prêter à l'observation des organes intérieurs [rar transparence. Aussi y a-t-il peu d'Animaux sur la structure desquels plus d'opinions discordantes aient été émises, et, dans l'état actuel de la science, il serait prématuré de se prononcer sur plusieurs questions dont la solution est en général très facile : par exemple, la présence ou l'absence d'un anus, et même sur la détermination de la partie fondamentale de l'ap- pareil digestif, c'est-à-dire la cavité stomacale.

Deux ouvertures sont en général fort apparentes à l'extré- mité antérieure du corps : l'une terminale, l'autre située à la face inférieure de ce que l'on pourrait appeler la tôle du ]Mémertien. Le premier de ces orilices livre passage à une énorme trompe (1) qui est creusée d'un canal central, et qui se continue postérieurement avec un tube membraneux intestini-

(1) Oliion Fabricius, zoologiste da- nois fort distingué du siècle dernier, a constaté l'existence de la trompe des Nénierliens, mais il a cru que cet organe naissait de l'orifue céphaliqiie postérieur (a). Quelques auteurs plus modernes ont pris cet appendice pro- traclilc pour un pénis {b). i>ugès, M. Elirenberg et Johnson furent les premiers à faire connaître la structure

de cet organe et ses rapports avec les parties voisines ; ils l'ont considéré comme étant la voie par laquelle les aliments arrivent dans l'organisme, et par conséquent ces auteurs ap- pellent bouche l'orifice aniérieur par lequel cet appendice se déroule au dehors (c). La même détermination a été adoptée par IV1\L de Quatrefages, Coodsir et Williams (Jj.

(a) 0. Faliricius, Beskrivelse over 4 liJet bekjende Flad-Orme (Skrivler af Natiwhistorie-Sels- kabet, ■l'I98, t. II, part. 2, pi. x(, fi?. H).

(6) Hiisclikc, Beschreibwifj und Analomie euies neueii bel Sicilien gefundenen Meerwurmes : Notospcrmus drenanensis (Isis, 1H30, t. XXIIl, p. 081, pi. 1, ûg. 2 à 5).

Œrsied, Entwurf eincr systemalischen Elatheiluii'j und specielten Beschreibung der l'ialt- wiirmer, pi. 3, fig. 41 .

(c) Diigès, Aperçu de quelques observations nouvelles sur les Planaires, elc. {Ann. des sciences nat., 1" sprie, 1830, I. XXI, p. 140).

Ehrenborg;, Symbol œ physirœ Anim. evcrtebr. : Polijioa turbellaria, 30.

Jolinson, Miscellanea Zoologica (Maq. ofZool. and Botany, 1837, t. I, p. 530).

(d) Qiialrof.iges, Mcm. sur la famille des Némertiens (Voyage en Sicile, t. Il, p. 157).

Goodsir, Descript. of some gigantic l'ornies of Invertebrate Animais (Ann. of Nat. IlisL, 1845, t. XV, p. 279).

Williniiis, Beport on the British Annelida (Reporl of tlie 21 ' Meeltng of tlie British Asso- cialion lield al Ipswuh in 1851, p. 343, I85'2),

/l6*2 APPAHEIL DIGESTIF

forme dont l'extrémité est fermée (1). La seconde ouveilLirc céphalique conduit dans nne grande cavité qui règne dans toute la longueur du corps, qui d'ordinaire présente de chaque côté une série de prolongements en forme de cœcums, et qui ne pa- raît avoir aucune communication directe avec l'intérieur du tube intestiniforme dépendant de la trompe (2). M. de Quatrcfages, qui a publié un beau travail anatomique sur ces Animaux, pense que cette dernière cavité n'est autre chose qu'une chambre viscérale , que l'orifice situé à sa partie antérieure est un pore génital, et que le tube aveugle qui fait suite à la trompe est un estomac terminé en cul-de-sac; mais d'autres naturalistes con-

(1) M. T. Williams, dont les ob- servations sur la disposition générale de la trompe des Némertiens et des annexes de cet organe s'accordent, pour la plupart, avec celles faites pré- cédemment par M. de Qualrefages, décrit et figure le tube intestiniforme en question comme ouvert à son extrémité postérieure, et débouchant au dehors, sur le côté, vers le tiers antérieur du corps (a). Johnson avait cru voir ce même tube se prolonger jusqu'à l'extrémité postérieure du corps et s'y ouvrir par un anus ter- minal (6), mais ni l'une ni l'aulre de ces dispositions n'existe. M. de Ouatrefages a très bien constaté que le tube qui fait suite à la trompe, et qui est désigné sous le nom (^intestin, se termine en cul-de-sac (c), et der- nièrement ce fait a été vérifié par M. Schultze (d).

(2) L'absence de toute comuiunica-

tion directe entre le canal du tube intestiniforme et la grande cavité située au-dessous n'est mise en douté par aucun des anatomistes qui, depuis quelques années, se sont occupés de l'étude des Némertiens; et, par con- séquent, la plupart des auteurs qui considèrent ce dernier réservoircomme un estomac admettent que les aliments y arrivent par l'orifice céphalique poslérieiu-, sans passer par la trompe. Mais M. Williams conçoit les choses autrement : il décrit la grande cavité en question comme étant fermée de toutes parts, m.iis il y attribue les fonctions d'une poche digestive, et suppose que les matières nutritives y sont transmises de l'intestin (ou tube postproboscidien ) par endosmose. Il y donne le nom de grand cœcum alimentaire (e), mais il n'apporte à l'appui de son opinion aucun fait pro- bant.

(a) Williams, Op. cit. (Brit. Associât., 1851, p. 'iii). (fc) Johnson, Op. cit. {Mag. ofZooL, t. I, p. 580, pi. 17, ùg. 5).

(c) Quatrefages, Mém. sur la famille des Némerliens {Voyage en Sicile , I. Il, p. 1G7, pi. 18, fig. lrt;pl. 20, fig. A cl 6).

((/) Max. Schultzi!, Beitrdge zur Naturgescliichte der Ti',vbellarlen,\A. G, lijj. 2. (ej Williams, Op. cil. (Repurl uf the Bvilish Assuc. for 1851, p. -45].

DES VEKS DE LA CLASSE DES LEPTOZOAIUES. /l63

sidèrent la grande cavité longitudinale connue étant l'esto- mac (1) , et regardent la trompe comme étant un organe de fixation comparable à celle de différents Vers intestinaux, et ne constituant pas l'entrée des voies digestives (2). Faute d'obser-

(1) Jusque dans ces derniers temps presque tous les zoologistes qui avaient observé les Némertiens considéraient l'ouverture qui se voit d'ordinaire très facilement à la face inférieure du corps, un peu en arrière de l'extrémité fron- tale, comme étant la bouche de ces Animanx(a). Mais M. Ehrenberg, ayant admis que le pore cépbalique anté- rieur était l'entrée des voies diges- tives, attribua à ce second orifice d'autres usages, et le décrivit comme étant la terminaison de l'oviducte (b); enfin M. de Ouatrefagos, qui a adopté une opinion analogue, l'appelle le pore ijénital (c). U est aussi à noter que ce dernier anatomiste n'a pu dé- couvrir aucune trace de cet orifice chez quelques Némertiens, ce qui l'a conduit à penser que son existence n'est pas constante ù toutes les pé- riodes de la vie de ces Animaux (d).

Quoi qu'il en soit, celte grande ca- vité est tapissée par une membrane très mince. Quelquefois elle paraît être simple , par exemple chez le Tetrastemma obsctirum (e). Mais, en

général , elle paraît communiquer latéralement avec une série de loges autour desquelles sont groupés les or- ganes génitaux, disposition à raison de laquelle on remarque, dans une section transversale et verticale du corps de ces Vers, trois cavités : une médiane et deux latérales {/").

Beaucoup de zoologistes pensent que la grande cavité abdominale ou stomacale des Némertiens s'ouvre au dehors par un pore situé à l'extrémité postérieure du corps, et désignent cet orifice sous le nom d'anus {g) : mais d'autres, par exemple M. de Quatre- fages, M. Goodsir et M. Williams, pensent que, dans l'état normal, cette disposition n'existe pas, et que ce prétendu anus n'est que le résultat de la division accidentelle de la portion postérieure du corps, dont les tron- çons se détachent avec une facilité extrême.

(2) Lorsque la trompe des Némer- tiens est dans l'état de repos, c'est-à- dire de rétraction, on voit que le pore céphalique antérieur est suivi d'un

(a) Bla'mville, art. Vers {Dictionnaire des sciences nat., 1828, (. LVII, p. 575).

Délie Chiaje, Descviiione e notomia degli Animali invertebrati délia Slcilia citeriore, t. III, p. 128, 129, pi. 101, fig. 2.

Ralhke, Beitràge i^ur vergleich. Anat. und Pliysiol., p. 94, pi. G, fi^. 8 {I^eueste Schriften der naturforschenden Gesellschaft in Dan-Ag, 1842, Heft 4).

Sieboldei Stannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, t. II, p. 202. (6) Ehrenberg, Symbolœ physicœ {loc. cit.].

(c) Qiialrefages, Op. cit. (Voyage en Sicile, t. III, p. 97, etc.).

(d) Idem, ibid., p. HO.

(e) Schultze, Beitr. %ur Naturgesch. der Turbellarien, pi. 6, Rg. 2.

(f) Quatrefages, Op. cit., pi. 18, fîg. 1, 1 tt ; pi. 20, fig. 4; pi. 21, fig. 1.

(g) Ehrenberg, Symb. pliys. (art. Nemertes, sans pagination).

Johnson, Op. cit. (Mag. ofZool. and Botany, t. I, p. 530).

Œrsted, System. Eintheilung der Plaltwurmer , p. 81.

Siebold et Stannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, t. 1, p. 204.

Schultze, Op. cit., \i\. 6, fig. 1 h.

46/1

API'AIŒIL DIGESTIF

valions directes sur les fonctions de ces organes, je n'émettrai aucun avis sur leur rôle physiologique, mais j'engagerai beau- coup les zoologistes qui habitent les bords de la mer à faire sur ces Animaux de nouvelles recherches.

Quoi qu'il en soit, la structure de la trompe des Némertiens présente plusieurs particularités remarquables. En effet, cet

long tube à parois minces, dont la surface interne est papilleuse et dont l'extrémité postérieure est fixée à m\ bulbe charnu (a). L'axe de ce ren- flement musculaire est creusé d'un canal étroit qui est en communicalion avec le conduit dont je viens de par- ler et avec un autre tube intesiini- forme appendu à sa partie postérieure. Ce dernier décrit des circonvolutions plus ou moins nombreuses, et s'a- vance en général jusque vers le tiers postérieur du corps , puis se recourbe en avant et se termine en cul-de-sac. Son extrémité aveugle est attacliée aux parois du corps par un prolongement cylindrique ou par des brides rameuses, et sa surface interne est garnie de cils vibralihs. Enfin , tout ce long canal est logé dans un repli membraneux qui se trouve suspendu à la paroi supé- rieure de la grande cavité médiane (ou cavité viscérale de M. de Quaire- fages, et estomac de MM. de Siebold, Scbuitze, etc.).

Quand le Némerlien veut prendre de la nourriture, il darde au dehors sa longue trompe, et alors les parties

que je viens de décrire changent de position ; la portion antérieure et papillifère du tube se renverse à l'extérieur, de façon que sa surface libre, au lieu d'être interne, devient externe, et que son extrémité posté- rieure se trouve portée en avant. Le bulbe charnu en occupe alors l'extré- mité libre, et la portion suivante du tube intestiniforme s'y engage comme dans luie gaîne (6).

Chez quelques-uns de ces Vers, par exemple les Borlasies et la plu- part des espèces appartenant au genre Némerle proprement dit, la trompe est iiierme (c),mais en général elle est armée d'une manière puissante. On y remarque d'abord un gros stylet im- pair, qui est renflé à sa base et inséré sur le bulbe charnu. D'autres stylets plus petits sont placés de chaque côté, et quand la trompe est dans l'état de rétraction, ils se replient dans des fossettes latérales, de façon à paraître comme s'ils étaient logés dans une capsule ; mais quand cet organe se déroule au dehors, ils se redressent et se montrent à découvert. Leur dispo- sition a été indiquée par Johuston,

(a) Dans la nomenclature employée par M. ilc Quatrefages, la portion de cet appareil qui précède le bulbe cbarnu est appelée trompe. Le bulbe est pour cet anatomisie un œsophage, et la portion posté- rieure du tube est appelée intestin. Elles sont très bien représentées dans les belles figures dont son mémoire est accompagné. {Op. cit., pi. 18, fig. 1 et 1 a ; pi. 19 ; pi. 20).

(6) Voyez Quaircfages, Op. cil., pi. 20, lig. t.

Williams, Op. cit., pi. i I , lig. 04

Scliubze, Op. cit., pi. (i, fig. ;i. ((,) Qualrefages, Op. cit., p. lOJ.

D!:s VERS m: l\ classe di-:s uutateius. ^l65

orguiie, exli'èmement long, est presque toujours nnné d'iui gros stylet médian et exsertile, qui ressemble à un dard.

^;j 10. Les Rotateurs, qui iiendant longtemps ont été confondus avec les Infusoires, mais qui en diffèrent extrême- ment par leur mode d'organisation , me paraissent devoir prendre place dans le sous-embranchement des Vers, et par consé(pient je ne puis terminer cette Leçon sans avoir parlé de leur appareil digestif, bien que sa structure soit fort diffé- rente de celle que nous venons de rencontrer chez les Némer- tiens ou les Trématodes. Ces Animaux sont de si petite taille, (|u'on ne peut les apercevoir qu'à l'aide du microscope, et il en résulte qu'on ne peut les disséquer ; mais leurs téguments sont assez transparents pour permettre à l'observateur de dis- tinguer les parties, même les plus profondes, de leur organisme, et M. Ehrenberg est parvenu de la sorte à faire connaître admirablement bien leur structure intérieure. Ainsi (pie je l'ai déjà dit (1), cet habile zoologiste a fait faire des progrès immenses à l'histoire des Animalcules microscopifiues , et [u-esque tout ce (pie nous savons de l'appareil digestif des Rolateurs lui est dû. Or, dans rimmense majorité des cas , sinon toujours, cet appareil est fort complexe , et offre des

Appareil

digestif

des

Picilateurs.

mais M. de QuaU'efagcs les a fait con- naître d'une manière beaucoup plus complète (a).

(,)uand un Némertien attaque sa proie , il fait pénétrer ses stylels dans le corps de sa victime, qui paraît être presque aussiiôt frappée de mort, il est donc probable que cette arme verse dans la plaie quelque liquide véné- neux, et que celui-ci est sécrété par les parois de la portion suivante de

l'appareil proboscidiforme ou par quelque org;nne glandulaire adjacent, Uans l'hypothèse suivant laquelle la trompe ne conduirait pas dans la cavité digestivc, et serait seulement un organe de préhension ou de fixa- lion, on expliquerait de la sorte l'existence du long caecum inteslini- forme qui se voit en arrière du bulbe stylifère.

(l) Voyez ci-dessus, page d'ôi.

{a) .Juliiisoii. Vi>. cit. (Mag. of Zool. and Botanij, 18;n, l. I, p. 531, fig. l el'i). Qualrefagos, Op. fit., p. 103 l'I suiv., pi. 10, 11-. 1 ; pi. 1", lig'. "7, 10, M,

17;

rm'.

V.

30

^6() APPAREIL DlGESTir

caractères de supériorité physiologicjue r|iii ne se rencontrent pas dans les Animaux de faille beaucoup {)Uis considérable dont l'étude vient de nous occuper, et se rai)procbe de ce que nous avons vu cbez les Annélides les plus partaits. Ainsi, presque toujours il existe chez ces petits êtres lui tube ali- mentaire étendu d'un bout du corps à l'autre et ouvert à ses deux extrémités , un appareil maxillaire très complexe , un estomac distinct de l'intestin, et des organes glandulaires particuliers qui versent dans la cavité alimentaire les pro- duits de leur sécrétion. Les anomalies sont extrêmement rares dans cette classe zoologique; mais je dois dire que si les obser- vations récentes de quelques micrographes habiles ne sont pas entachées d'erreur, il y aurait eliez un {)elil nombre de Rotateurs une dégradation organi(iue des plus remarquables. Ainsi, non-seulement on connaît une espèce l'anus })araît manquer, mais chez une autre la femelle est organisée de la manière ordinaire, il paraît n'y avoir chez le maie aucune trace d'un appareil digeslif quelconque (1). Si nous laissons

(1) M. Dalrymplo, qui a fail nue étude très alteiilive d'une grniide espèce do r.otateiir appartenant au genre Notom)nata de Aï. Ehronberg, y a trouvé l'appareil digestif très développé chez les individus fe- melles, mais n'a pu en apercevoir aucune trace chez les individus mâles, cependant tous les autres or- ganes intérieurs se disliiiguaienl faci- lement (a).

M. Leydig, qui est également un micrographc très habile, est arrivé au même résultat en étudiant le Notoni- mata Sieboldii. il n'a trouvé chez le

mâle ni bouche, ni bulbe pharyngien, ni estomac ; niiiis il a ropiarqué dans la cavité abdominale im amas de tissu utriculaire qu'il considère comme le produit d'un srrèt de développement du blastènie destiné d'ordinaire à constituer les organes digestifs. Chez la femelle, il n'a aperçu rien de sem- blable (b).

L'absence d'un orifice anal a été signalée aussi par chacune de ces ob- servations chez les individus femelles du Xotomniata anglica , Rotaleurs dont les mâles présentent la singu- lière anomalie que je viens de men-

(a) .1. r);ilrj'mplc, ni'scrlplion of n)i [nfusonj Animalcule alHcil to the g'enns Noloinmala of Elircn- bcrg liUherlo iindefcribcd {l'IiUos. Trans., 1849, p. 342, jil. 34, fig. H et 12).

(b) V'r. Ijcytliir, liebe.r dcn Bau und die syslemalisclie Slelluiifi der lldderlhiere, p. 32, pi. -, û'^. 42 ut 13 (i_'.\lr. (kl /ettscltr. fur wiimeiisclt. Zuol., 1854, t. VI).

l)i:S Vl'lîS !)!■: L\ CLVSSH DKS ROTATEllKS. h(')l

de côté ces exceplioiis peu nombreuses, nous trouvons une très grande uniformité dans la structmT, des organes dincslils des Rotateurs. (]es petits êtres se nourrissent principalement de Monades, de Navicules, de Conterves ou de Crustacés mi- croscopiques qui nagent dans l'eau on ils habitent, et qui sont amenés vers leur bouche par l'action des lobes ciliés dont l'extrémité antérieure de leur cor[)s est garnie, et dont nous avons déjà étudié le rôle dans le travail respiratoire (1). Ces organes varient dans leur ibrme , mais sont tonjours disposés de façon à entourer presque complètement ou à occuper les deux côtés de l'orifice buccal, qui est en général susceptible de s'élargir beaucoup (2). Cet orifice n'est presque jamais

tionnor («). M. Leydig pense que le Noloininata myrmeleo est également clépoiu'vu crun anus, cl il se fonde, noii-seiilenienl sur les résiillats néga- til's fournis par toutes les recherches faites pour découvrir celte ouverline, mais aussi sur le mode d'évacuation du résidu laissé dans l'eslomac par le travail digestif, car il a toujours vu ces matières sortir par la bouche après avoir séjourné dans restomac, dont le fond paraît être disposé en cui-de- sac {b). Ce zoologiste pense que la même anomalie existe aussi chez le Notommata syrinx , VAscomorpha helvetica cl VA. germanica (c).

(1) Voyez ci-dessus, tome II, p. 97.

('2) Chez les espèces dont Fextré- niilé antérieure des corps est garnie d'un seul lobe ou disque cilié, la bouche occupe à peu près le centre de cet organe, et correspond à Pextré-

miié supérieure de l'écliancrure qui se trouve à sa partie inférieure, ainsi que cela se voit chez les Lacinul- laires et les Alégalroques (r/). Chez les lîotateurs à deux roues ou lobes ciliés, par exemple chez le Rotifer vulgaris (e), elle .>-e irouve entre la base de ces organes sous im | lolon- gement céphalique qui porte les points oculiformcs. i.a manière dont les particules solides qui floltent dans Teau circonvoisine se trouvent diri- gées vers rentrée de la cavité diges- tivc par Paction de ces cils peut cire très bien mise en évidence , si l'on suspend de l'indigo ou du carmin en poudre dans ce liquide (/').

chez les Stephanucero.s, les ap- pendices ciliés se prolongent en forme de tentacules céphaliques ou de bras, la préhension des aliments est sou- vent cflcctuée par la contraciion de

{(i) Dalryraplu, loc. cit., p. 3.S3, pi. 33, llg-. 1 et 0.

(b) Lcy.liï?, loc. cit., p. 21 , pi. -i, fig-. 3o'.

(f) l-e.Yiliir, loc. cit., p. 71.

(f/) Elimibcrg, Die liifusionslhicrcltcii, pi, ti, li^'

((') hlcin, ibid., pi. (iO, fv^. i.

(/■) IJuiu, ibiil., pi. (iO, Rg. 3, Ole,

3 ul 4.

/i68 AIM'AHEIL Dlt;ESTIF

iiitîrmc, cl d'ordinaire il est suivi d'un gros 1ju1I)C clianiii dont. MàdK,ircs l'armature est Ibrt reinarquable (1). Efteetivenienl, il est garni latéralement de màehoires très dures qui sont disposées de faeon à s'éearler ou à se rapproelier de la ligne médiane, et([ui peu- vent môme se porter au dehors pour saisir la proie ou coui»er les aliments au moment de leur inglutition. Les muscles (jui mettent cet appareil en action se contractent [)resque sans cesse avec beaucoup de régularité, et avant que ^I. Ehrenberg eut fait connaître leurs véritables usages, plusieurs micrographes avaient pris ce bulbe pharyngien pour un co^ur, à cause de ses mouvements rhythmiques ('D. La forme et la dis[)osition des mâchoires varient. Tantôt ces organes sont simplement

ces organes, ([iii, en se recourbant en dedans, se rabattent snr la bouche (a). La cavité buccale est susceptible de se dilater en forme d'enionnoir, et ses parois sont presque toujours gar- . nies de cils vibraliies. Ces appendices épithéliques paraissent manquer ciiez les Floscularia et les LIndia (h) ; leur disposition a élé étudiée avec soin chez les Melicerta ringens par M. VVilliamson, et chez les Lacinu- laria socialis par M. Huxley (c). Chez le Floscularia et le Stephano- ceros, la cavité buccale se dilate laté- ralement en un réservoir comparable à des abajoues, et désigné pai quel-

ques naturalistes sous le nom de proveniricule ((/).

(1) M. lîhrenbeiga désigne sous le nom commun d'Agumphes les Hota- tours qui sont dépourvus de mâchoires, et il a constaté ce caractère chez VEn- Icroplea (e), ainsi que dans les genres Ichtliydium (/') et Chœtonotus {g) ; mais ces deux derniers groupes ne paraissent pas appartenir à la classe des lîotateurs. Ce naturaliste n'avait pas vu les mâchoires des Rattulus , mais ces organes paraissent avoir ét(; observés par 1\1. Weisse [h].

(Tj Par exemple, Bory-Saint-Vincenl en 1828 (/).

(rt) Voyez Ehreni)eig, Die Infuslonsthierchen , \A. i'), liy. '■1, ••.

\b) Diijai-iliii, Histoire iialurelle des [nfusoircs, p. 583.

(c) Willi.-iiiisoa , On tlie Analomy of Mclicerl:t i'itii;ens {Quartcriij Jaiinial of Mii roscoiiical Sciences, 1S5i2, I. 1, p. 70, pi. 2, iig. 28).

Huxley, Incinularia socialis. A Contribution lo l'ie Aiialoniii unit l'Iiijsioloijij af lioliltra [Qtiarterly Journal of Microscopicnl Sciences, 1852, t. I, Transactions, p. :!, pi. 2).

{(Il Leydil,^ Op. cit., p. 4 et U, pi. 1, llg. 1.

(<;) Elii-eiiljcrg, Die Infusionsllnerclœn, \>\. 13, fig 2.

(/•) Mcm, ibid., pi. -43, (ig. 3, -i, .■>.

((/) Idciii, ibid., pi. il, i'iç;. 1.

(/il Weisse, Scuc Infusnnen [linllclin de la classe pUtjsico-inatltrinalujuc de I' \cad. de Suinl- l'élersbouru, ISiT, I. V, p. 22S, lli^-. 'n.

[ij Liiiiy, :ul. UoTiri';uKS du Duiiinnaire classiiiac d'iiisloire r.alureil:, I. .\l\', p OST).

DES VERS Dli L\ CLASSE DES P.OTATRi.ns. /j69

iniplaiilés dans le biilbo ehàniii qui les porte, et. ils ressem- blent aux deux branches d'une pince terminées par une ou [»ar plusieurs denticules ; d'autres ibis ils sont logés dans une espèce de cadre (|ui a la l'orme d'un étrier dont le niarcbe- pied serait évidé et laisserait passer leur extrémité libre. M. Elirenbert-' a appelé Gymnogomphia les Rotateurs dont les inàcboires présentent la première de ces deux dispositions, c'est-à-dire dont les dents sont nues ou libres, et Desmogoinphia ceux dont les dents sont enclavées dans une cbar[)ente solide à deux ou à plusieurs branches. Il a fait connaître aussi beau- coup de modiiications d'une importance secondaire dans la conformation de chacune de ces sortes de mâchoires ; mais l'étude de ces détails nous entraînerait trop loin, si nous nous y arrêtions ici (1).

(i) chez les nymnogomplies de M. Ehrenberg (a), cliaqiio niùclioire se compose do deux pièces : Tune, antériemo ou denlain-, qui est libre et dirigée en de 'ans (6) ; l'autre, basilaire , qui est articulée à l'extré- inité externe de la précédenle, et dirigée en arrière de façon à faire avec elle un coude très prononcé et à s'en- foncer dans la masse charnue du bulbe pharyngien (c). Enfin, on dis- tingue en général entre les deux pièces basilaires une pièce médiane ou support qui avait presque entière- ment échappé aux recherches de IM. Ehrenberg, et qui paraît destinée.

soit à donner attache aux muscles adducteurs des mâchoires, soit à four- nir un point d'appui à ces organes eux-mêmes (f/j.

Tantôt la pièce dentaire est simple, et par consé(iuent l'appareil préhen- seur n'est armé que d'une paire de crochets, disposition qui se voit chez les Gymnodontcs que M. Ehrenberg appelle Monogomphes : par exemple, V Albert ia verinicularis (e), le No- tommata aurita (/") , et surtout le Notommata myrmeleo (g), ou le Di- gleua grandis [h) , espèces 1res car- nassières, où ces crochets soûl remar- quablement grands et protiacliles.

{a] Ehrenberg, Recherches sur les Infusoircs (Ann. des sciences nnt., sùrie, 1 R3i, l. X, p. 27a el suiv.).

{b) C'est \e processus antcv'mr de M. Ehrenberi;', el \:\ fiiiM.c nppeléo acies pnr M. Diijirtlin.

(c) Processus poslerior, Elirenliei'L;' (scaphus, Uiijardin).

{d} Ligament transversal, Elireiibori; (fuhruin, Dujanliii).

(c) Diijardin, Mém. sur nu, Ver parasite constituant un noui'enu genre voisin des liotifèrcs (Ann. des sciences nat., 2* série, 1832, I. X, pi. 2, fig-. 3).

(/■) Ehrenberg, Die Infusionsthierchen, pi. .52, dg. '^.

(i)) Idem, ibid,, pi. 40, fig. i.

{Il) Idem, ihid., pi. oi, (ig. .">.

/l70 APPAREIL DIGESTIF

TMi..Mii2;csiif. Le canal aliiiienlairc s'étend dans presque tonte la loniineiir du corps et est ouvert à ses deux extrémités. Sa portion anté- rieure est étroite et constitue nn œsophage plus ou moins allongé (1); sa portion moyenne ou stomacale est en général

Il est aussi i"i noter que souvent ces màclioircs sont solidement articulées par leur hase sur le support mé- dian (a), de façon à avoir beaucoup de ressemiilance avec la partie prin- cipale de l'appareil maxillaire des Aiinélides du [,'enre Lysidice (6).

AI. Elirenberg désigue sous le nom de Pulijiioinphes les Uota leurs gymno- gomphes dout les j)ièces dcn laires sont terminées par ûcux ou plusieurs pointes disposées comme les doigts de la main ou les dents d'un râteau, et il a remarqué que ces Animalcules se nourrissent ]>rincipalement de sub- stances végétales. Tels sont le Notoiu- mata tuba [c], le N. davulata (f/), VHijclatiiui senla {c\

chez les Uolateiirs dits Desmo- tjomphcs, le cadre maxillaire se com- pose généralement de trois pièces courbes réimies par leurs extrémi- tés ; un arc supérieur et un arc inférieur qui sont situés plus en dedans, et disposés de façon à re- présenter ht marchepied de l'étrier, tandis que Tare externe en con-

stitue la voûte. Les pii^^ces dentaires sont styliformes , reposent par leur base sur ce dernier arc , et traver- sent l'espèce d'anneau fourni par les pièces internes, de façon à simu- ler giossièrement un arc garni de flèches. (;hez quelques-uns de ces animaux (que M. Elirenberg appelle /yijogomphes), il n'y a de chaque cùlé que deux aiguilles dentaires ; mais chez d'autres (les Lochoçjom- phcx), il y en a un plus grand nom- bre rangées parallèlement. Gomme exemple des premiers, je citerai les llolifères proprement dits {f), les Ac- linures, les Monolabies et les Pliilo- dini's {g). Pour les Lochogomplies , je prendrai comme exemple les Cono- chiles (/i) et les MéIicertes,où le cadre maxillaire est disposé d'une manière un peu différente (/) , et les stylets dentaires deviennent quelquefois si nombreux , qu'ils sendjlenl former par leiu- réunion une grande lame striée (/).

(l) L'a'soj)liage est remarquable- ment long chez VEnteraiilea hyihi-

(fl) Exemples : Notommla, Dilryiiiijlc, Op. cit. {l'hilos. Tran.i., 1849, pi. 33, i\a;. 3 cl 4).

Lcyilig, Op. cit. [Zeitschrifl fur wisscnsch. /uni., t. VI, pi. 2, fig. i'.)).

{b] Voyez ci-dessus, page 427.

(r) EhrenlHTg, Op. cit., pi. i'J, lli;-. 3.

((/) Idem, ibid., pi. 50, Cig. 5.

[e] Idem, iliid., pi. 47, (ig. 'i.

(/■) Idem, Und., pi. 00, fig. 8.

(f/i Idem, ibid., pi. Gl, li^'. 8.

[h) Idem, ibid,, pi. 43, lig. 8.

(i) r.ossc. On the Structure, Fonctions, Habits and Development of .Meliccrla lingens (Quarterhj Journal of Microscopical Sciences, 1852, t. 1, p. 71, pi. 2, li^'. 10 h 21).

(j) Williamsoi), On the Anatomij of Melicerln {QtKirlcrhj Jonrnnl of Microncnpical Sciences, 1852,1. I,p. 00, pi. 1, fie:. 17).

DES VEKS RK L\ CLASSE \>K?< l'.CrTATEl P.S. /| 7 1

très éinrgie, et il se termine \mv un inlesliii dont la l'orme et In grandeur varient dans les diClerentes es|)èces (1). Les parois de l'estomac sont garnies de cils vihraliles dont l'aetion est parfois très énergique, et elles offrent aussi dans leur é|)ais- seur une multitude d'ufricules qui sont souvent colorés en jaune et paraissent être des organes hépatiques ('2). En général, on y remarque aussi beancou[)de petites boursouflures; et, chez

iina (a), leNofomrnatasyrinx (6), elc. ; tandis que, chez d'autres Rotateurs, il est si court, que l'estomac semble naître directement du buli^e pharyn- gien : par exemple, chez VEuclanis triquetra {c) et VAnurœa acuini- iiata {cl). Entre ces deux extrêmes on trouve une multitude d'intermé- diaires.

Chez plusieurs l'.olateurs, tels que les Lacinulaires et les Brachions, ou a distingué, de chaque côté du j)lia- rynx, un corps jaunâtre, et M. Leydig a pensé que ces organes pourraient bien être des glandes salivaires (e); mais les recherches de M. Huxley tendent à établir que ce sont seule- ment lies lames chitineuses servant à renforcer les parois de cette portion du canal digestif (/').

(I) M. Ehrenberg a pensé qu'il sciait utile do donner des noms parti- culiers aux Uolaieurs qui présentent

des didérences notables dans la con- formation de leur tube digestif (y). Ainsi , Il appelle Trachelogastrica ceux ce tube est simple (/;); Cœlo- gasirica, ceux qui ont un œsopiiage court et un grand estomac oblongo- conique suivi d'un intestin court et simple (^) ; Gasfnrodelu, ceiix l'es- tomac est en forme de poche et est séparé par un étranglement d'un intestin également renllé (j) ; enfin Trachelocijstica, ceux dont le canal intestinal est très délié dans toute sa longueur, excepté dans la région anale, il s'élargit en forme de cloaque (A.). Mais ce zoologiste a soin de faire remarquer que les distinctions établies de la sorte ne correspondent en au- ( luie façon aux divisions naturelles de la classe des Rotateurs.

('2) Chez le Notommata anglica, la disposition sacculée des parois de l'estomac est très marquée, et Ai. Dal-

In) Kltronlierg-, Die Iitfiisioiistliicrcht-n, pi. 4", lîsr. 1. (/;) Idem, ibi'd., pi. -'i!>, fig'. 2. (c) Idem, ihid., pi. 57, fi^. 8. {il} Idem, ihid.. pi. (i-2, li-. 9._

le) Loyclii;, Uebur dei' liau und dw xystcinaUsclic Sirllniiq der ûadefllderi', p. 70. (/■) Huxley, 0;i Laciniiliiria ioc'aWi [Quarierhj Jouni. of Micros. Se, t. I, Traits., p. 3). (ij) Elircnbei-g-, Uebcr die Entwickelunn und Lebensdaucr der Infusionsthiere (Mém. de l'.Acad. de Berlin pour 1832, p. 40, pi. 3, et Ann. des sciences nat., sûric, t. I, p. 260). [h) Exemples : Iclilhydium (voy. Ehrenberg-, Die Infusionsthiere, pi. 43, fig. 2).

ChMonotus [loc. cit., pi. 43, fig. .1, 4 et 5;. {() Exemple : Hijdalina (toc. cit., pi. 47, fi^'. 2J. [j] Exemple : Brachionus {loc. cit., p!. 03, fiir. 1). {li} Exemples : Botifer {loc. cit., pi. 00, ivj;. 2).

Aciinurus {loc. cit., pi. Ot, t\s;. 1).

in-2

Ai»P.\REiL DIGESTIF

Orgaiios séorplenis.

quelques es{)èees , eette grande poche digestive est pourvue d'un certain nombre de cseeums très allongés qui paraissent être aussi de nature glandulaire (1).

D'antres organes sécréteurs, beaucoup plus remarqnables, se voient près de l'extrémité antérieure de l'estomac, de cliaque côté de l'œsoplinge. Ce sont, en général, des corps ovoïdes ou rénilbrines, d'un volume considérable, cpii communiquent avec le tube alimentaire à l'aide de caiiaux excréteurs, et y versent probablement quelque liquide digestif. La plupart des zoolo- gistes les considèrent comme des glandes pancréatiques, mais on ne sait rien de positif quant à la nature de leurs produits -2).

rymple a constaté que, dans chacune des hoursoulluies, il existe une grande cellule nucléolée (a).

(1) Ces caecums gastriques sont très s^rands chez le Xntommala davu- latn (6).

D'après M. Ehrenberg, l'estomac du Philodrna roseola paraît être en- tièrement couvert de petits caecums liliformes très serrés les uns contre les autres (c).

(2) Chez la plupart des liotatein-s, il n'y a qu'une paire de ces glandes éi)igastriques ; mais chez quelques espèces , telles que le Xotommata myrmeleo {d), le N. hyptopus (e) et le Lacinularia, on en trouve deux pai- res. En général, elles sont globuleuses ou ovoïdes, et appliquées directe- ment contre le bord antérieur de la

grande i)0che stomacale, ainsi que cela se voit chez le NotomiiuUa ccii- taura, par exemple (/"}. Chezquelques espèces elles sont pédonculées, pt pa- raissent attachées à l'exl rémité de l'œsophage plutôt qu'à l'estomac : par exemple, chez le Brachionus milita- ris (y). Enliii, cliez un petit nombre de Piotateurs, ces organes sont allon- gés [h], et quelquefois ils sont bifur- ques, ainsi que cela se voit chez le l)i(;lena grandis [i) et le Brachionus Mtdleri (j). Ils sont revèlus d'une Ciipsule membraneuse très délicate, et se composent d'un tissu granulaire renfermant des cellules luicléolées. Dans quelques espèces on a pu y dis- tinguer un conduit excréteur qui dé- bouchait dans l'eslomac [k].

(a) Datrymple, Opcit. {l'hilns. Traiis., 1849, p. ^ilî:}). (/;) Ehrenberg, Op. cit., pi. 50, fig. 5, g.

(r) Idem, Ue'her die Eniwickelunrj vnil l.rhensdnvrr ilrr Iiifu.^ion.tlliiri'e, pi. 3, tltr. -1 il {.Mrm. (In IWcad. de Berlin pour 4 832). id) I.eydi-, Op. rit., pi. i, ng. nH. (c) Eliroiiberg, pi. .il , fis;. 6, rj]i. Il'} Idem, Pie Infiislnnsllnerclicn, pi. 51 , fiçr. -■ {(l) Idem, ibid., pi. Ii4, lig. 3.

(Il) Exemple : Notommnta clavulata (voy. Elirenlinrg, Op. ril., pi. 50, fi^'-. 5). (i) IHem, ihid, pi. .54, dg. 4, cjp. (j) Jrlom.ibid., pi. 03, (1^. 5. (/.) Dalrviiiple, 0)1. rit. {Plnh.<!. '/'(vni.v., 1S40, p. 333).

DI'.S VKHS l)i; LV CLASSR DES ROTATEURS. /l73

Enfui, rniiiis (1) s'ouvre ù la face dorsale du coriis, près de la base de l'espèce de pied ou de queue qui foruie l'extréniiti' postérieure de ces Animalcules.

(I) La position de ranus se voit très reporté un peu plus en avant, et alors

bien clans quelques-unes des figures Tinlestin esl souvent recourbé sur

données par M. Elirenberg : par lui-même, ainsi que cela se voit chez

exemple, dans celles de VHijdatina le Melicerla ringeus (d) , et, mieux

senta (a), du Xotoinmata capeus (6) encore, cliez le Liinnias rerato-

et du Diijlena grandis (C Chez les phylli (e). Uotateurs à foiwneau, cet orifice est

(rt) Elircnlicrtf, Op. cit., pi. 47, (ig. i.

{b) Klein, ibid., [il. .")1, fvj;. i,

{!■) Idem, ibiit., pi. ,">i, lii;. 5.

((/) Williamsoii, 0/). rit. {Quarlerhi Jnnvnal of Mirroscnpiral Srienci's, IS'iS, I. T, pi. ■! ,

fl!,'. 14, /().

(f) KhriMiberij, 0/). cit., pi. 4(i, fig. I!, ir.

Disposilioii

(!._■ r:ip]i;ir('il

(liijcsiif

lies

Arliciilcf.

r.dUSlJIllIinll

lie

r;i|ipareil

liiicriil.

CINQUANTIÈME LEÇON.

De l'appareil digestif chez les Animaux articulés. Armature buccale des Crustacés, des Myriapodes, des Insectes et des Arachnides.

§ 1. Dans le sous-embranchement des Animaux articu- lés, comprenant les Crustacés, les Arachnides, les ÎNlvriapodes et les Insectes, l'appareil digestif se perfectionne beaucoup sous le rapport mécanique, et la bouche, (pii est toujours distincte de l'anus et située à la face inférieure de la portion cépl)ali(pie du corps (1), se trouve entourée d'un système de leviers fort complexes destinés à effectuer la préhension des aliments.

î,o régime de ces Animaux est très varié : les uns se nour- rissent de matières solides, les autres ne vivent que de liquides, et la conformation de la bouche diffère suivant le mode d'action qu'elle est dcsiinée à exercer. Tantôt elle est garnie de mâ- choires disposées en manière de i»ince , d'autres fois elle affecte la forme d'une trompe; et au premier abord on j)Ouvait croire qu'il n'existait [iresque rien de commun dans sa struc- ture, non-seulement chez les Articulés appartenant à des classes distinctes, mais aussi chez les espèces de la même classe (pii soûl, les uns des Animaux masticateurs, les autres des Animaux suceurs (*2). Cependant Savigny a fait voir qu'il n'en est [las ainsi,

(1) Lorsque les moyens d'observa- rilé comme étant un tics caractères

lion doni on disposait étaient moins du genre OEsirus ; mais cet orifice,

parfails (|iu' ceux dont nous sommes quoique fort rtklnit, existe cliez ces

anjourd'liui rede\al)ies aux opticiens, Diptères comme chez tous les autres

les enlomologistrîs pensaient que di- Insectes (a).

vers Insecies manquaient de bouche. (2) Les variations qui se remar-

Ainsi Linné indiquait celle parlicnla- quent dans la structure de la bouche

(a) .Iiilv, nrcherches sur /■■.? Œstres, ISiO, p, ^^).

APPAREIL DIGESTIF DE.-> ANIMAUX^ AUTICLLES.

et qu'il règne une uniformité remarquable dans les malériaux dont la Nature fait usage pour la construction de ces appareils divers. 11 a constaté que chez tous les Insectes, (juel que soit leur régime, la bouche est pourvue d'im même ensemble de mem- bres articulés ou appendices, et que c'est par suite de change- menls introduits dans la forme et les dispositions accessoires de ces parties, qu'elles constituent ici des organes sécateurs, nne sorte de pipette ou de (rompe. Enfin il a reconnu aussi que, souscera[)port, il va, chez tous les Animaux arliculés, unilé de plan fondamental et tendance à l'unité de composition, malgré des variations sans nombre dans les caractères accessoires.

Savigny fut un des premiers à enrichir la science de résultais généraux de cet ordre, et à diriger les esprits vers la recherche des parties correspondantes ou analogues dont la Nature peut faire usage dans la constitution d'organes différents par leurs formes et leiu^s usages. Cet habile observateur, de même que Gœthe et Geoffroy Saint-Hilaire, doit être rangé au nombre des fondateurs de cette branche de l'élude des êtres organisés qu'on appelle aujourd'hui VancUomie philosophique, pour la distinguer de Vanatomie descriptive ; et si le nom de ce savant modeste

(les Insectes l'uni iiissenl d'exceilciils Ciiraclères pour la cliissilicnlioii de ces Animaux. Vcis le milieu du siècle dernier, unnalnraiisle stiéduis.Cliarles de Oeer, décrivil avec soin cet aj)pa- reil dans un très grand nomi)re d'es- pèces dilTérenles («), et bientôt après J.-C. l-'abricius, de Copenliagne , le prit [îoiir base de tout un système entomoiogique (6). I)e|)uis l'introduc- tion de la méthode naiureile dans cette partie de la zoolotjio, on a aban-

donné l'emploi exclusif des caractères fournis i)ar l'.ipjjareil buccal, mais on en fait toujours un très grand usage, et dans presque tous les travaux des- criptifs qui paraissent journellement sur riiisloire des Insectes, des Crus- tacés, etc. , on entre dans beaucoup de détails à ce sujet, de sorte qu'on a en- regislré mie foule presque innom- brable de particularités relatives à la conformation de cette partie de l'orga- nisation des Animaux arliculés.

(d) De Geer, Mémoires pour servir à l'histoire des Insectes. 7 volumes iii-4, Stockliolin, 1752 •i 1778.

(j)) J. Cliv. Fulii-icius, Sijsletna entomologiœ. In-8, 1775. Enlomologia sijstematica. 5 vol., 1792 ;i 179S, et [iliisioiirs lr;iilés spc'ciaiix sur les nrinciiiau\ ordres de la classe des liisocles.

lllCj

APPAREI!. DK.KSTIF.

est moins populaire que ceux des hommes de j^énie nuxquels je l'associe, sa gloire ne sera pas moins durable, car ses travaux sont non moins solides que brillants , et ils ont exercé une grande intluence sur la marche de la science depuis plus d'un demi-siècle (1). Appareil ^2. Pour tacilitcr l'étude de l'appareil buccal des Animaux

buccal ^ ' ^

d's . arhculés, il me semble utile de commencer j)ar l'examen des

Crusiacôs

masticateurs. Cpustacés masticatcurs. La bouche de ces Animaux est située à

(1) Jules-César Lelorgne de Savi- GNY, à Provins en 1777, fit partie (le la Commission scienlifique qui, ou 4798, accompagna l'armée française en Egypte. Ue retour en France à la Un de 1801, il entreprit l'élude des riches collections zoologiques qu'il avait formées en Orient, et il prépara, pour le grand ouvrage sur l'Egypte publié aux frais de l'Klat, une magni- fique série de planches relatives à l'histoire des Animaux invertébrés. De 181/i à 1817 il publia un beau travail sur les Annéiides, une série de mé- moires sur les Ascidies qui font épo- que dans l'histoire de cette partie de la zoologie, et des recherches capi- tales sur la structure de la bouche des Insectes. En 1821, il fut nommé membre de l'Institut de France. Mais déjà, depuis quelques années, une affection nerveuse qui lui rendait l'ac- tion de la lumière impossible à sup- porter avait interrompu toutes ses recherches anatomiques. Il ne mourut

qu'en 1851, mais les trente dernières années de sa vie ne furent qu'une longue suite de souffrances.

L'ouvrage que je cite dans celte leçon porte pour devise : Patientia, et se fait remarquer par l'exactitude des détails aussi bien que par la grandeur des vues générales. Il est intitulé ; Théorie des organes de la bouche des Animaux invertébrés et articulés compris par Linné sous le nom d'In- sectes ; il parut en 1816, et forma le premier fascicule des Mémoires sur les Animaux sans ver timbres , par J.-C. .Savigny (Paris, 1 vol. in-8" avec planches).

L'étude comparative des différents appendices, et principalement des piè- ces de la bouche, a été reprise en- suite, mais d'une manière peu fruc- tueuse, par Latrcille {a). J'ai publié aussi quelques observations à ce su- jet (6), Enfin M. Brullé en a fait l'ob- jet d'un travail important que j'aurai souvent à citer (c).

(a) Latrcille, Observations nouveUes sur l'organisation extérieure et générale des Animaux articulés et à pieds articulés, et applications de ces connaissances à la nomenclature des prin- cipales parties des mêmes Animaux (Mém. du Muséum, 1822, I. VIII, p. 169). Art. Borr.[iE ilii Dictionnaire classique d'histoire naturelle, t. II, 4822, p. 428.

((;) Milne Edwards, il/ém. sur l'organisation de la bouche des Crustacés suceurs {Ann.des sciences nat., \" série, 18^3, t. .WVill , p. 78). Histoire naturelle des Crustacés, t. 1, p. Gl , etc. Observ. sur le squelette tégumentairc des Crustacés Décapodes lAnn. des sciences nat., 3* série, •18,'il, t. XVI, p. 2ti5).

(f) Brullé, Recherches siw les transformations des appendices dans tes Arlicnlés (Ann. îles sciences nat., 3' série, 1844, t. 11, |i. •"!).

AUMATUKK BUCCALK UliS CRUSTACÉS. /j77

la t'acc intérieure de la tète, entre la base d'une séi'ie d'appen- dices articulés (jui sont disposés par paires de eliaque côté de la ligne médiane du corps, et q-ui sont employés par la Nature pour constituer les organes de la locomotion anssi bien (jueles instruments de la mastication, et d'autres parties dont il est inutile de nous occuper en ce moment. Chez quelques Crustacés, aucune division de travail n'est introduite dans la portion cé[)balo-tlioraciquc de ce système d'appendices, et chacun des membres dont elle se compose est chargé de remph'r les triples Ibnctions d'une patte pour la locomotion, d'une sorte de main pour la préhension des aliments, et d'une mâchoire pour la mastication. Ce cumul physiologique se rencontre chez les Limules, (pii sont connues aussi sous le nom de Crabes des Mohiqiœs , mais qui ne ressemblent pas aux Crabes propre- ment dits, et ont le corps divisé en deux grands segments, dont l'antérieur, ou céphalothorax, a la forme d'un lerge bouclier,- et le second porte les branchies à sa face inférieure et une (jueue styliforme en arrière. Les membres qui naissent de la face inférieure du céphalothorax sont allongés, à peu près cylindri([ues ., et composés d'une série de leviers placés bout à bout et mobiles les uns sur les autres. A raison de cette dispo- sition et des muscles dont chaque article est pourvu, ils peuvent s'allonger ou se raccourcir et changer de direction, de façon qu'ils sont aptes à agir comme autant de pattes ambulatoires; mais à leur extrémité ils sont bifides, leur pénultième arhcle donnant naissance à un prolongement digitiforme qui s'avance parallèlement à leur article terminal. Cette dernière pièce est susceptible de se mouvoir sur sa base comme sur une char- nière, et de s'écarter ou de se rapprocher de l'apophyse dont je viens de parler ; elle forme par conséquent avec elle une pince à deuN. blanches, et c'est à Taide de cet instrument que l'Animal saisit ses alimeids et les porte vers sa bouche. Enfin l'article basilaire de ces mêmes pattes, (juc l'on [)ourrait ajipclcr la

Liimilcs.

/l7(S AVPAUEIL DIGESTIF.

hoMche^ se prolonge du côté interne, de mrinièrc à constiluer un gros tubereule ou une lame arniée de denticules qui s'avance vers le milieu de la bouche et y rencontre sa congénère du côté opposé du corps. Ces hanches sont aussi articulées en charnière sur les côtés de cet orifice, et elles peuvent, en exé- cutant un mouvement de bascule, s'éloigner ou se rapprocher de la ligne médiane ; de sorte que la l)ase de chaque paire des membres céphalo-thoraciques constitue une espèce d'étau ou de pince à deux branches occupant l'entrée des voies digestives (1). Mais un organe qui fonctionne alternativement connue patte ambulatoire, comme pince et comme mâchoire, ne peut bien remplir aucun de ces rôles; caries conditions qui seraient favorables à son action comme instrument de préhension nui- raient à son jeu comme levier moteur, et celles qui contri-

(i) Les Limules, ou Xipliosuros, sont les seuls Ciustacés cliez lesquels ce nintlc crorganisalion se rencontre. La bouche est située vers le tiers |)oslé- ricur du bouclier céplialo-llioracique, au centre du groupe formé par les patles-niàcboires dont il vient d'être question («). Ces membres sont au nombre de six paires. Ceux de la pre- mière paire sont beaucoup moins grands que les autres, et prennent leur inseition sur une pièce solide impaire qui garnit le devant de l'ouverture buccale et fait office de lèvre supé- rieure, mais paraît correspondre aux deux pièces basilaires ou hanches con- fondues entre elles sur la ligne mé- diane. Les hanches des quatre paires suivantes sont distinctes, très grosses et fortement armées d'épines et de

denticules sur leur face interne , qui se prolonge en forme de lobe ou de couperet. L'article basilairc des paltes-màchoires de la dernière paire est encore plus forte , et porte en dedans un gros tubercule qui, en s'a- vançnnt dans la bouche, agit à la façon d'une dent molaire. Enfin le bord postérieur de la bouche est garni d'une paire de lames cornées à bords épineux, qui semblent cor- respondre à une septième paire de membres avortés et réduits à leur article basilairc.

l'our plus de détails sur la confor- mation de ces palles-màclioires, je renverrai à la monographie des Li- mules par M. Van der ilœven, pro- fesseur de zoologie à Leyde (6).

(n) Savigny, Théinic des onjancs de In bouche, p. 04, pi. S, fij;. {.

Miliic KiIwai-tU, CiiUSTACKS ilc VMlns du Hègne animal ilc Cuvicr, pi. 7G, fig. 2, 5 a à 2e. (/)) V;iii ilii- Ilfovcn, lleclieirlies 8ur l'hisloire valurelle et l'anatomie des Limules, j». 12, pl. i, irg. 2 il 1) (Ia'JiIc, 1838, iii-lbl.).

AHMATURt; ÎÎUCCALH DKS CUUSTACKS.

/i7'J

biieraient, à son perfcclionnement comme ngcnt locoiiutleiii' seraient nuisibles nu développement de la puissance dont il a besoin pour ])ien mâcher les aliments. Ce genre de cumul entraine donc nécessairement \m certain degré d'infériorité physiologique dans deux grandes fonctions, la digeshon et la locomotion; aussi ne se rencontre-t-il rpie très rarement dans la classe des Crustacés, et chez tous les autres Animaux de ce groupe la division du travail s'établit dans la série des appendices ou membres qui, chez les Limules, sont à la fois des pattes et des mâchoires : ceux qui entourent directement la bouche sont affectés exclusivement au service de l'alimenta- tion, et ceux qui sont situés plus en arrière sont des pattes seulement. Les appendices qui deviennent ainsi des instru- ments spéciaux de mastication ressemblent encore jtlus ou moins, soit aux pattes-màchoires des Limules, soit aux pattes ambulatoires des Crustacés supérieurs ; mais c'est surtout leur partie basilaire qui se développe : les articles qui cor- respondent à la cuisse, à la jambe et au t)ied de celles-ci, deviennent de plus en plus rudimenlaires, et, lorsque l'adapta- tion est caraclérisée de la manière la i)lus complète, le membre se trouve peu réduit au co.vocjnatliite , c'est-à-dire à la pièce basilaire qui est aillem\s la hanche seulement (I). Du

Division

tlii liavail

cliez

les Crustacés

ordinaires.

(1) Lori-curon vciil ypprofoiulir l'é- Uule comparative du système appeii- diciilairc des Crustacés, il devient nécessaire d'employer des noms par- liciiliers pour désigner, d'une part, chacun des articles ou éléments ana- tomiques qui entrent dans la consti- tution des membres ; d'autre part, certains organes qui peuvent être for- més de deux ou de plusieurs de ces pièces, et qui sont caractérisés, soit par leur position, soit par leur forme et leurs usages. Dans un travail spé- cial sur le squelette tégumentaire des

Décapodes , j'ai proposé un système de nomenclature de ce genre que j'emploie , avec quelques légères mo- difications, dans mes leçons sur l'en- tomologie , au iMuséum d'histoire na- turelle. J'aurai à y revenir quand je traiterai des organes de la locomotion des Animaux articulés ; mais , afin de pouvoir introduire de la précision dans le langage dont je fais usage en ce moment, il me semble utile d'en donner ici la clef pour ce qui concerne lappareil buccal.

Lorsqu'il s'agit d'étudier, au point

/l(SO Al'PAKKIL UIGKSTIF.

reste, il existe, à eet égard, une miillilude de variations, el le [)artage du système appendicnlaire entre l'aiipareil digeslil" et l'appareil de la loeoniotion ne se fait pas toujours de la même manière. Dans l'immense majorité des cas, on trouve dans eette région du eorps le même nombre de membres ; mais, eliez les Crustaeésles |)]us élevés en organisation, il y a plus d'appendiees buceaux que ehez les autres, et eette aug- mentation s'obtient aux dépens de l'ajipareil loeornoleur, qui est réduit d'autant. Je ne déerirai pasiei toutes les modill- eations (jui se remarquent dans la conformation de l'appa- reil masticateur îiiusi l'onstilué ; mais, jiour en l'aire coimaifrc

de vue théorique, les différenls mem- bres dont cet iipparcil se compose, sans avoir égard à l'emploi que la Katiire peut avoir fait de ces appen- dices, je les désigne sous le nom com- luun de ynaUies , et je les dislingue entre eux, d'après leur rang dans la série , par l'adjonction d'une racine adjective. Ainsi j'appelle prolognathes les membres (|ui constituent les ap- pendices buccaux de la première paire, ou mandii)ules ; deutognathes, ceux (|ui forment les appendices buccaux de la seconde paire, ou mâchoires de la première paire , et ainsi de suite, en comptant d'avant en arrière (a).

Lorsque ces membres, ou tout autre organe correspondant, une patte am- bulatoire ou une antenne, par exem- ple, arrivent à un haut degré de dé- veloppement, ils se dédoublent pour ainsi dire dans leur portion terminale, et se composent d'ime brandie prin- cipale accompagnée d'une, de deux ou

même de trois branches accessoires. Je désigne d'une manière généiale la brandie principale du membre sous 1(! nom de prijfopoJitc [b], et sous celui de parerrjopodites (c) les bran- ches accessoires , que je distingue entre elles, d'après leur position eu rnésopodites, exopoditesai épipodilcs; ou bien encore en méiugnathe, exu- gnallte, etc., quand il s'agit spéciale- ment de ces parties dans l'appareil buccal.

Le prolopodite, dans son état de dé- veloppement normal, se compose d'une série d'articles placés bouta beat, dont six principaux, et d'autres accessoires produits par le fractionnement des précédents. Pour désigner ces pièces, j'ai cessé d'employer une partie di:s noms dont j'avais d'abord fait usage quand je m'occupais des Crusiacés seulement, et je les appelle d'une ma- nière générale : coxite, trocliite, iné- roïlc, :uiuéUlc , tarsile et daclijlih',

{(i) Miliio Edwaids, Olmcrvaliùnii sur le squclcllc làjumculairc des Crustacés Dccairdcs Ole- laiiyes carcinologiques, ul Ann. des sciences uni., 1851, li" ^ôvw, i. \Vl, p. iG"j. (b) l'c Tzrjwi'j:, lirinL-i|i:il, et tiov:, patic. [c} Uo nx-.toyj;, actcssoiie, cl ■no'j;, paUc.

ARMATURE BUCCALE DES CRUSTACÉS. /l81

la stnictiire d'une manière suffisante, il me semble nécessaire d'entrer dans quelques détails, et d'indiquer les caractères prin- cipaux qui s'y remarquent dans chacun des types carcino- logiques principaux.

Je prendrai pour premier exemple la Langouste, qui est très commune sur nos marchés de comestibles, et qui est un excel- lent représentant de la grande division des Crustacés Déca- podes. De même que chez les autres Animaux de cet ordre , raj>pareil buccal est logé dans une sorte de fosse limitée en avant par la région antennaire, sur les côtés par les prolonge- ments ptérygostomiens de la carapace , et en arrière par le plastron sternal (1). Il se compose essentiellement d'un lobule

Appareil

buccal

des

Décapodes.

paixe qu'elles constituent d'ordinaire la hanche, le trochanter, la cuisse, la jambe, le tarse et le doigt ou crochet terminal d'une patte. Je désigne aussi sous le nom de basitrochite un article qui se forme parfois aux dépens du Irochile, et qui serlà l'articulation avec le coxite. Quant aux divisions qui se rencontrent souvent dans le tarsite, il m'a paru suffisant de leur donner des numéros d'ordre. Enfin , lorsque je veux parler d'une manière parti- culière de ces articles employés dans la conslitulion de l'un des membres de l'appareil buccal, j'abrège parfois en les appelant coxogitathite , tro- chojjnalhite , etc. ; ou bien encore coxopodite, etc., s'ils appartiennent aux pattes ambulatoires, et coxocé- rites, etc., quand ils entrent dans la composition d'une antenne. Dans des circonstances semblables , j'appelle aussi épignathe, cxognathe et méso- gnathe les trois branches accessoires qui, chez les Ciustacés, peuvent se

trouver fixées à la base du proto- podite du côté externe.

Au premier abord, cette nomencla- ture peut paraître trop compliquée, mais dans la pratique elle est en réalité fort commode.

(1) Chez les Macroures, les Ano- nioures et certains Bracliyures , la fosse buccale est ouverte en avant et n'est bien délimitée que sur les côtés, se trouve le bord inféro-intcrne du canal expirateur formé par la par- tie interne de la région ptérygosto- miennc de la carapace. Mais, chez la plupart des Ijrachyures, elle est plus ou moins complètement fermée en avant par une crête transversale qui sépare la portion antérieure de sa voùle (ou endostome) de l'espace si- tué à la base des antennes, et nommé cpistome [a). Les bords de cette fosse , se logent les appendices buccaux, constituent ce que j'ai appelé le cadre buccal, partie dont la forme varie beaucoup dans les dillérentes

(a) Voyez l'atlas de hi iji'ande cdilioii du Régne animal de Cuviur, CRUSTACÉri, pi. à, li-\ 2 el 3 ; pi. 29, lig. 2a ; pi. 34 bis, lig. 1 a, etc.

Y.

31

482 APPAREIL DIGESTIF.

médian ou lèvre su|)érieure,d'un repli latéral postérieur qui est bitide (1), et de six paires de membres qui dilTèrent beaucoup entre eux par leur forme, et qui sont le plus ordinairement désignés par des noms particuliers. Ceux de la première paire, appelés mandibules, occupent les côtés de la bouche, et sont couverts en dessous par les autres. Ils sont très gros, d'une soli- dité remarquable, et se terminent du côté interne par une surface masticatrice large et garnie d'un bord tranchant -, leur bord anté- rieur donne insertion à un petit appendice coudé qui ressemble à une patte rudimentaire, et qui est désigné par les zoologistes sous le nom de palpe 7naxillaire; enfin ils sont articulés sur les parties voisines du squelelte tégumentaire par deux points diamétralement opposés de leur bord, et ils sont pourvus de muscles très puissants qui les renversent au dehors de iaron à les écarter entre eux, ou les rapprochent de manière à couper ou à broyer les aliments qu'ds saisissent (2). Les deux paires

familles naturelles de cel ordre, et fournit d'excellents caractères pour les distinctions zoologiques {a).

(1) Ces lobes labiaux, qu'on appelle d'ordinaire la lèvre supérieure et la lèvre inférieure, ne sont pas pour- vus de muscles moteurs, et n'appar- tiennent pas au système appendicu- laire. Le premier, épais et impair, naît de l'endostome et s'avance un peu au-dessus de la ligne de ren- contre des mandibules. La lèvre infé- rieure ou postérieure se compose aussi d'un tubercule médian, mais présente en oulre deux expansions iamelleuses qui s'appliquent sur la partie pos- térieure des mandibules. La forme

de ces parties varie suivant les es- pèces (h).

(2) Ces organes sont par conséquent formés essentiellement par les coxo- giiatlilles de la première paire, qui paraissent être soudés intimement à l'article suivant ou trochognatliitc. Leur palpe est constitué par la portion suivante du protopode, et se compose généralement de trois articles qui pa- raissent être le méroïte, le carpile et le squélile. La portion terminale du membre ne se dévelopi)e jamais dans ces organes, qui n'otlrent non plus aucune trace de parergopoditcs.

Chaque mandibule offre à peu près la forme d'un demi-cylindre placé trans-

(o) VoyozMilnc Eiiwards, Histoire nalurelk des Crustacés, 1. I, p. 252Î, çlc. (&) Voyez Savi-ny, BijypU, Cr.usTACÉs, pi. 4, fig-. 7, etc. ; pi. 8, Pu?. I , etc. ; à lèvre suiéricmc el à lèvre infériL'uin.

ARMATURE BUCCALE DES CRUSTACÉS. /l83

de membres suivants sont appelées mâchoires proprement dites, mais elles sont presque lamelleuses, et servent à retenir les aliments contre la bouche plutôt qu'à les diviser ; l'une d'elles

veisalement et donl la convexité est tournée en dessous, c'est-à-dire à l'ex- térieur (a) ; elle est libre à sa partie interne, et, dans le reste de son éten- due, elle est très solidement attarhéô aux parties voisines du squelette légu- nientaire, à l'aide d'une membrane arti- culaire et de deux cliarnières occupant les extrémités d'une ligne oblique di- rigée d'avant en airièrc et de dedans en dehors et situées, l'une au sommet d'un gros tubercule conique , l'autre à l'angle postéro-externe de son , bord. La mandibule pivote sur ces deux points d'appui, et, en s'abais- sant, s'écarte de sa congénère. Ses muscles moteurs s'insèrent, l'un à son bord antérieur, l'antre à son bord postérieur ; et ce dernier, qui déter- nnne la clôture de l'espèce de pince dont chacun de ces organes constitue une des branches, est disposé d'une manière très favorable au déploiement d'tme force considérable, car il se fixe sur ce levier, très près de l'extrémité triturante de celui-ci , et il remonte presque à angle droit pour prendre son point d'attache opposé sous la

voùle formée par la carapace, ou il occupe un espace considérable sur les côtés de l'estomac.

La conformation des mandibules est à peu près la même chez les autres Décapodes ; seulement, chez les Bra- chyures, leur partie externe se rétrécit, et leur portion interne ou masticatoire se recourbe plus ou moins en avant, et se trouve d'ordinaire séparée du reste par un étranglement (6). L'extré- mité triturante de ces organes otTre ou général une surface large, inégale et d'une grande dm-eié ; mais sa forme varie suivant les espèces, et paraît être en rapport avec la nature des substances donl ces Animaux se nourrissent (c). Quelquefois elle se bifurque, et constitue un tubercule tiilurant ou molaire et une crête ou lame incisive : par exemple , chez l'Alphée rouge de la Alédilcr- ranée (d).

Chez les Crangons , ces organes sont grêles et dépourvus d'appendice palpiforme {e). La même anomalie se rencontre dans les genres Atya et Lijs- mata (/').

(a) Les appcmlices Iniccaux des Langoustes, ou l'alinurus, ont élé très bien figurés par De Haan dans son grand travail sur les Cruslacés publié dans le Fauna japouica de Siebold {\\\. M). On peut s'en former aussi une idée assez juste d'-iprèsles ligures représentant les uicnies parties cliez le Scvllare (Saviguy, Egypte, pi. 8).

\b) l'ar exenip'c, di.z le Maia squinado {\o\. V.Mlas du Ucgne animal, CiiUST.^cÉ.'^, pi. i, fig. \, D).

(c) Voye? les llgiu-es iloiinécs par Savigny dans le grand ouvrage sur l'Egypte (CliUSTACK- , pi. 1 h 10), celles faites par De llaaii {Op. cit., pi. A à pi. (J), ou bien encore l'atlas des Crust.\cÉ3 dans la grande éditinn du lîègne animaL de Cuxier.

((/) Milne Edwards, CiU'sT.^ciîs de V.\tlas du Itêrjiie nn'niial, pi. -"iS, lig. 1 b.

(e) Idem, Histoire des Oiistnccs, I. Il, \k 310, pi. 25, lig. 15, et CnusTACli.s du nèijiu aniiiial i\c Cuvier, pi. 51 , fig. 1 a.

(/■) Idem, (i)j(/., I. tl, p, 385, pi. '25, lig. 11, cl /i(-(/;i« (i(a//(ai de Cuxier, pi. 5i, tig. 3 «, e;t,

[xSli Al'PARElL DIGESTIF.

est employée aussi comme instrument moteur dans l'appareil de la respiration (1). Enfin les appendices buccaux des trois dernières paires, nommés pieds -mâchoires, sont plus allongés et ressemblent davantage à des pattes; mais ils sont reployés en avant sous la bouche et servent essentiellement à retenir les aliments (2).

(1) Voyez tome II, page lo6.

(2) Les mâchoires de la première paire sont presque foliacées, et se com- posent il\m coxite ou pièce basilaire suivie (le trois articles, dont deux se recourhent en dedans pour former la partie préliensile de l'organe, et l'au- tre, situé du côté externe, constitue une espèce de palpe. Les deux lobes Internes sont garnis de soies roides le long de leur bord interne, et s'ap- plirpicnt sur les mandibules. La con- forniation de ces organes ne varie que peu cliez les divers Décapodes ; cepen- dant leur lobe interne devient souvent fort grêle, et leur lobe externe ou terminal se compose parfois de deux articles placés bout à bout (a).

Les mâchoires de la seconde paire sont rejetées plus en dehors, et sont d'une structure plus compliquée; leur branche principale n'est que peu dé- veloppée, mais elles portent en de- hors un énorme lobe qui paraît être forme par leur épignatbe, et qui con- stitue la valvule dont nous avons étu- dié ailleurs le rôle dans le mécanisme de la respiration (6).

(a) Voy«z U'.$ phinclics citées ci-dessus dans les oiivrag'js Je Suvii,'iiy, De Ha.in , Miliie Ed- vviii'ds , etc.

(b) Voyez liiiiio 11, ji.'i.^e \'M>.

((,•) Celte partie des patlcs-iiiàclioircs maïKji.ie géncralcmciit dans les fii,Mircs de ces organes doiiiiéca pai' Savii;-iiy, De Ilaaii, etc.; elle se li'oiive rcpiéseiiléo dans d'aMires oiiviM^es plus rcfeiils (voy. Jlilrie Edwards, Histoire naturelle des Crustacés, I. I, pi. ;>, li-'. 8, 'J et 10 ; Allas du Hcijiu uHunul de Olivier, (.'.llUSTAOtlS, pi. 4, liy. \ , C, II, 1, t , elc, elc).

[d] Vuyez Idiiic II, paL;e 130.

(c) Voyez r,-U/«4' du Hi'yiic animal pi. i, liy. 1 , G, M, 1, b. "N,

Toutes Jes mâchoires auxiliaires ou 'pieds-màchoires des Décapodes arri- vent à un haut degré de complicalion, et présentent, outre leur branche in- terne ou protopodile, au moins deux parergognathites ou branches acces- soires , dont une , appelée cpigna- thile (c), se relève dans l'intérieur de la cavité brancliiale, et constitue l'ap- pendice lamelleux et flageiliforme (lue j'ai déjà eu l'occasion de mentionner en décrivant l'appareil rcspiraloire de ces Animaux(f/). Un autre pareigo- podile se porte en avant, parallèle- ment au protopodile, et, à raison de sa position, je l'ai appelé exo- gnathite (e). Chez la Langouste et quelques autres Macroures, il est la- melleux et s'atténue graduellement vers le haut ; mais en général il se compose d'une portion basilaire en forme de lige ou manche ( le .scaplo- gnathile), et d'un appendice terminal et mulliarliculé, qui est flabelliforme.

Les pieds-mâchoires de la première paire sont encore plus compliqués, car on y trouve une branche acces- soire moyenne, ou iiiésuijnathilc; mais

ARMATURE BUCCALE DES CRUSTACÉS. /|85

[.il ('onforination de ces divers organes est. à peu près la même chez l'Éerevisse et tous les autres Crustacés décapodes de l'ordre des xAIaeroures. On les trouve aussi disposés prescpic de la même manière chez les Crabes et tous les autres Décapodes brachyures ; mais dans ce groupe zoologique les pieds-màchoires externes (ou postérieurs) affectent une forme un peu dilTérente,

leur branche principale est peu déve- loppée, et ne se compose que d'un coxite portant deux articles, dont l'un très petit, et l'aiitie étendu en forme de lame arrondie et ciliée sur le bord Interne (a). Le mésognatliiie est rudi- mentaire chez la Langouste et beau- coup d'autres Décapodes macrou- res (6). Alais, chez les Crabes, il s'a- vance au deh'i du protognalhite, et a la forme d'une lame étroite à sa base, mais élargie vers le bout, il con- court à former, sons l'épistome, le plancher du canal expirateur (c). Enfin Vexûcjnalhite, ou branche externe, est grêle et très allongé ; quelquefois il porte à sa base une expansion lobi- forme ('/).

Les pieds-mâchoires de la seconde paire, qui naissent derrière les pré- cédents et s'avancent au - dessous d'eux, ne varient que peu dans leur structure , et leur protognathite ou branche principale ressemble davan- tage à une petite patte qui serait re- ployée sous la bouche. Leur mé- roïle est très allongé, et leurs trois derniers articles , de grandeur mé-

diocre et garnis de poils roides, se recourbent en dedans, en manière de grattoire, sous la bouche. Leur exo- gnalhite ne présente rien de parti- culier (e).

Les pieds-mâchoires externes varient beaucoup plus dans leurs formes ; ils portent aussi un exognalhe, et en gé- néral un épignalhe assez semblable à ce que nous venons de voir chez ceux des deux paires précédentes, mais leur protognathite, ou branche principale, est beaucoup plus développé. Chez quelques Macroures , celte partie est très grêle et s'allonge excessivement, de façon à ne pas différer notablement des pattes suivantes : par exemple, dans le genre Pandalus (/'). Mais chez la Langouste (r/)et la plupart des autres Macroures, elle est trapui', et sa por- tion moyenne, formée par le tro- cliite et le méroïte, est disposée de fa- çon à fonctionnera la manière d'une mâchoire, car le bord interne de ces deux articles est large et armé d'une multitude de tubercules ou de dents, ainsi que de toulfes de poils loides. La première de ces deux pièces ren-

ia) Op. cit., pi. 4, fig'. 2, G.

(b) Exemple ; le Maia (voy. le Règne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 4, fig;. 1 , G, «).

(c) Miliie Edward.>!, Recherches sur le mécanisme de la respiration che:, les Crustacés (Ann. des sciences nat., 2' série, t. XI, p. ISS, p!. 4, fig. 3 et 4). Règne animal de Cuvier, Crustacés, pl. 7, ûg. i'<- (l 1 f, ele.

((/) Exemple : Palcmon squille (Règne animal, pl. 4, IIl;-. 2, G, b]. (e) Exemple : le Maia {\o\-. le Règne animal. Crustacés, pl. 4, fig. 1, H, elr.). {/■) Voyez Miliie Edwards, Crustacés dn Règne animal, pl. 54, lig. 2, 2 c. {g) Op. cit., pl. 40, fisr. i b.

/|86 APP.vr.Eir. dic.f.stif.

cf s'élargisseiil de laron à constituer une paire d'opereulcs qui se rabattent clans le cadre circuinbuccal comme une porte à deux vantaux. Cliez tous ces Crustacés, les cinq paires de membres (jui l'ont suite à cet appareil buccal constituent les pattes proprement dites, et servent principalement à la loco- motion. Cbezla Langouste et quelques autres Animaux de cet ordre, ils n'ont pas d'autres usages; mais, chez la [)lupart des Décapodes, les pattes de la première paire sont détournées de leiu's fonctions ordinaires pour devenir des organes de pré- liension et de défense. A cet effet, elles sont terminées par une sorte de main conformée en manière de pince, et l'on peut les considérer comme des parties complémentaires de l'appareil digestif, bien qu'elles ne soient pas appliquées contre la bouche, comme lespieds-màchoires. Quelquefois les i)attes de la seconde et mrMne celles de la troisième paire sont également terminées par une pince didactyle ; mais les organes de préhension ainsi constitués ne servent, en général, que |)eu ou point dans l'ali- mentation, et c'est surtout counnc leviers locomoteurs que ces membres sont destinés à agir (1).

I

contre sa congénère sur la ligne mé- diane (le la région buccale, et une espèce (le (loiiit formé parles Iroisder- uiois articles du membre se recourbe contre le bord interne du niéroïle.

Chez les Brachyures, celle portion terminale di's pieds - mâchoires ex- ternes se trouve réduite à de très pcliles dimensions, et constitue un appendice palpiforme, situé à Textré- milé de la portion moyenne, qui est au contraire fort élargie. En effet, Ici le trocliil(; et le méroïle consti- tuent une espèce d'opercule ou de porte qui clôt en dessous la fosse buccale, et ([ui a été désignée sous

le nom de gnathostégite [a). On y remarque de nombreuses variations de formes qui fournissent d'excel- lents caractères poiu' les divisions génériques établies parmi ces Ani- maux, aussi trouve-t-on ces organes représentés avec soin dans tous les ouvrages modernes sur l'iiistoire na- turelle des Crustacés ; mais les mo- dilications qu'on y rencontre n'ofireut que peu d'intérêt au point de vue anatomique et physiologique, par con- séquent je ne m'y arrêterai pas da- vantage ici.

(1) IjCs pinces didactyles des Ho- mards, des Écrevisses, des Crabes et

(a) Milnn Edwards, Observ. sur le squelette téuuiii en taire des Crustacés {Ann. des sciences nat., 3' ?riie, t. XVI, p. 288, pi. 10, fiir. 8).

ARMATUr.l': RUCCALi: DKS CHl STACKS. /l87

Chez d'autres Crustacés, les S(|uilles, par cxcirijde, l'appa- reil buccal se complique davantage ; il n(^ reste plus que trois paires de membres tboraci'ques pour conslituer des paltes pro- prement dites, et indépendamment des mandibules, des deux paires de mâchoires, d'une paire de pieds-maclioires liliformes, et d'une paire de grands bras préhenseurs constitués par les représentants des pieds -mâchoires de la seconde paire des Ci'abes, il y a trois paires de pieds-mâchoires accessoires qui s'appliquent sur la bouche et qui sont préhensiles à leur extré- mité (1).

Ap|iai'eil burcal

des Squilles.

(les autres Cruslacés du même ordre sont formées par ie tarsite ou péniil- lii''me article, qui d'ordinaire s'élargit alors en forme de main, et se pro- longe au-dessous de l'article suivant ou didactylite, de façon à constituer une espèce de doigt immobile ou index sur lequel celte dernière pièce se rabat en manière de ponce. Le bord préhensile de chacune des branches de la pince ainsi constituée est, en général, garni de tubercules arrondis ou de denlicnles tranchantes, et cet instrument s'ouvre ou se ferme par l'aclioM de deii\ muscles situés dans la portion palmaire du tarsite.

Chez les Brachyures , ce mode d'organisation n'existe qu'aux pattes ihoraciques de la première paire, et les membres des quatre paires sui- vantes sont affectés uniquement à la locomotion (a), il en est de même chez beaucoup de Décapodes ano- moureset macroures; mais chez qucl-

qiies-mis de ces Animaux, tels que les Langoustes, les Scyllares et les Rénii- pèdes (h), les pattes antérieures sont monodaclyles, tandis que chez d'au- tres Crustac('s du même ordre, celles de la deuxième et même de la troisième paire sont terminées en pince didac- tyle. Chez les Kcrevisses et les Ho- mards où cette disposition se rencon- tre, ce sont cependant les pattes de la première paire qui seules acquièrent un granddegré de développement, et ser- \ent d'ordinaire à la préhension (c). .Mais dans le genre Stenopus, ce sont les pattes de la troisième paire qui de- viennent les plus fortes et qui s'avan- cent en forme de bras (d) ; chez les Callianasses, cette terminaison en pince didactyle est même pli;s on moins visible dans toutes les pattes thora- ciques (e).

(l) Les mandibules des Squilles, formées comme d'ordinaire par les pro-coxognathiles, et portant chacune

(a) Ci'tle ilispositiiin se voit 1res bien dans loiiles ks figures destinées ;i repre'senter les Décapodes P.raclivures (ou Crabes) : par exeiii|ilo, dans celles de V Atlas du Règne animal de Cluvior.

(b) Voyez VAtlas du liègne animal de Ciivier, Ciilstacés, pi. i-2,, i\g. 1 ; pi. 45, fiy, i ; pi. iG, fil?. 1 , Ole.

(c) Voyez le même ouvrage, pi. 49, lii;-. 2 cl 3.

(d) Voyez VAtlas du liègne animal, Crustacés, pi. 50, fig. 2.

(e) Voyez lo même oiivrajo, pi. 48, l\g. .S.

/i88

APPAREIL DIGESTIF.

Appareil Daiis iinc aulrG grande division de la classe des Crustacés,

bucral , ^

des celle des Edrionhthalines, nui comprend les Amnhipodes, les

Edrioplithalmes ' ' ' i i '

Isopodes et les Lœmipodes, l'appareil buccal est au contraire réduit à quatre paires de membres, et les appendices (jui, chez les Crabes ou les Écrcvisses, constituent les pieds -mâchoires des deux dernières paires, sont transformés en pattes, de façon que le nombre de ces derniers organes, au lieu d'être de dix, comme dans l'ordre des Décapodes, s'élève à quatorze. 11 est aussi à noter que chez la plupart de ces Animaux les pieds- mâchoires s'unissent entre eux par la base, et forment à la partie

un petit palpe, sont armées du côté luterne, de deux grosses dénis co- niques et à bords denticulés , dont Tune se dirige horizontalement en dedans, tandis que l'autre se relève à angle droit, de façon à se loger dans l'œsophage età pénétrer même jusqu'à l'entrée de l'estomac, qui est située au-dessus (a).

Les mâchoires de la première paire sont très petites, et réduites à un article hasilaire portant deux lobes presque membraneux. Celles de la deuxième paire sont formées seule- ment par un protognathite divisé en une série de cinq petits articles lamel- leux, et elles n'offrent aucune trace de l'éi^gnathe, qui est si développé chez les Décapodes.

Les tétartognathes , ou pieds-mà- choires antérieurs , sont constitués aussi en majeure partie parla branche principale qui est grêle, et très allon- gée; mais on voit à la base de chacun

de ces appendices un petit lobe pédi- cule , ou vésicule comprimée, qui est formé par un épignalhe.

Les pemptognathes, ou pieds-mâ- choires de la seconde paire, offrent un développement énorme, et leur branche principale constitue une paire de grandes pattes diles ravisseuses, qui sont susceptibles de se reployer contre la bouche ou de s'étendre fort loin, soit en avant, soit sur les côtes de 1h tète. Chez les Squilles pro- prement diles , leur dactylile con- stitue une griffe 1res puissante dont le bord interne est armé de grosses dénis spiniformes , et disposé de fa- çon à se reployer contre le bord in- terne du tarsile , qui est également épineux et pourvu d'une rigole pour recevoir les crochets de l'espèce de doigt mobile dont je viens de par- ler.

Enfin les membres des trois paires suivantes, correspondants aux hexo-

(rt) Milne Edwards, Histoire natureUe des Crustacés, t. II, p. 4.91 , pi. 21, fig. 3. ^ Diivern'oy, Mtm. sur quelques points d'organisalion concernant les appareils d'alimentation et de circulation des Squilles {Ann. di:s sciences nat., i' série, 1837, t. VIII, p. 40, pi. 2, %. 4 à 7).

Délie Cliiajc, Descrizione e noloinia deçili Aniinali invericbrali délia Sicilia citeriore, pi. 8(3, fig. 4.

ARMATURE BUCCALE DES CRUSTACÉS. /l89

postérieure de lo bouche un organe inipair que les zoolo- gistes comparent souvent à une lèvre intérieure. J'ajouterai que chez quelques Amphipodes, par exemple chez la Talitre, qui abonde sur nos côtes sablonneuses et s'y fait remarquer par la vivacité de ses sauts , les mandibules sont dépour- vues de la petite branche palpitbrme qui d'ordinaire indique l'analogie de ces organes avec les autres membres, et elles ne se composent que d'une seule pièce comparable à ime hanche sans cuisse ni autre partie appendiculaire , disposition qui se rencontre aussi chez un petit nombre de Décapodes macroures (1).

gnathcs ot aux patles ihornciqiios des deux premières paires cliez lis Déca- podes, sont confoi niés à peu près de la même manière , si ce n'est que leur larsile, au lieu d'êlre très allongé, est fort court et arrondi; que leur grlIFe terminale est simple et petite ; enfin, que dans la position ordinaire, ces or- ganes sont dirigés en avant, entre la base des pattes ravisseuses, et appliqués contre la bouche, de façon que l'espèce de main discoïde qui termine chacun d'eux sert à retenir les aliments près des mandibides (a). De même que les pemplognatlies , chacun de ces membres porte à sa base un lobe pé- dicule semblable à ceux que nous avons déjà vus fixés aux pieds-mà- choires de la première paire. Ce sont des vésicules qui paraissent servir à la respiration (6).

Pour la comparaison de cette série d'appendices avec les pièces de l'ap-

pareil buccal des Décapodes, je ren- verrai aux figures que j'en ai données dans i'allas de la grande édition du Rfijne animal de Cuvier (Crustaci^s, pi. U).

L'appareil buccal esiconforméde la même manière chez les Alimes et les Érichtbes (c). Chez les Gonodaclyles, qui, du reste, sont extrêmement voi- sins des Squilles , le dactylitc des pattes ravisseuses n'a pas la forme d'une griffe, mais est droit et très élargi à sa base {d).

(1) l'our plus de détails relatifs à la conformation des appendices buc- caux (les Crustacés de la division des Édriophllialmes, je renverrai aux tra- vaux de Savigny, et à divers ouvrages spéciaux dans lesquels j'en ai traité. M. Kroyer et M. Dana ont fait con- naître aussi beaucoup de variations de forme dans les appendices buccaux chez ces Animaux, et M. Lereboullet

(a) Voyez tome II, page 128,

(b) Milne Edwards, Histoire naturelle des Crustacés, pi. 27, fis:. 2 et 10. Atlas du Tlègne animal de Cuvier, Ckustacés, pi. 05, fi^'. 1 a, et pi. 50, fig. d .

(c) Voyez V Atlas du Règne animal de Cuvier, Ckustacés, pi. 57, fi|;. \ , \ c, \ d, Z, elc. {d)lbii., Crustacés, pi. 55, fiff. 2.

Apiiaivil

buccal

des

Braiicliiopoilo.',

Appareil

buccal

des

Cirrliipôdes.

ll^^^ APPAREIL DIGESTIF.

Eiifiii, cliez les Bmncliiopodes, l'appareil biiceal se sinipliric davanlage ; les mandibules sont robustes et disposées eoinnie d'ordinaire, mais elles ne sont suivies que d'une ou de deux paires d'appendices foliacés qui paraissent correspondre aux mâcboires des Crustacés supérieurs , et les pieds-mâchoires manquent complètement, ou plutôt sont transformés en |)attes natatoires (1).

Les Balanes, qui demeurent fixées sur les rochers ; les Ana- tifes, qui, à l'état adulte, sont également condamnés à une vie complètement sédentaire, et les autres Animaux marins dont se compose le groupe des Cirrhipèdes, diffèrent beaucoup des Crus- tacés ordinairespar leur forme extérieure, mais appartiennent au même type organique fondamental, et paraissent devoir prendre place dans la même classe. Aussi l'appareil buccal de ces sin-

a décrit avec soin cet appareil cliez les Cloportides (a).

Cliez les Cyciopes et les autres pe- titsCriistacés de l'ordre des Copépodes, il y a une paire de mandibules très fortes et portant souvent un appen- dice j)alpifornie assez grand ; deux paires de mâclioires et une paire de pieds-niàclioires larges et terminés par deux brandies garnies de longs poils plumeux (6).

Chez les Cypris, on ne trouve, à la suite des mandibules, que deux paires de mâchoires fort petites (c).

(1) Ciiez VApus cancriformis , le labre est très grand ; les mandibules sont robustes et denticulées, mais dé- pourvues d'un appendice pal])iforme ; la paire de mâchoires antérieures se compose de deux lames simples et presque quadrilobées, articulées par leur bord postérieur, et épineuses sur

(a) Savig-ny, Théorie des organes de la bouche, \i. 51, pi. i, ai Description de l'Kyypte , Crus- tacés, pi. \\.

Milne Edwards, Recherches jinur servira l'histoire des Crustacés Amphipodes {Ann. des sciences nal., \" série, 1830, t. XX, pi. 10 et H). Histoire naturelle des Crustacés, I. 111. Atlas du Règne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 58 à 6t.

Kroyer, Grunlands Anifipodes (Mém. de l'Acad. de Copenhague, 1838, t. Vil).

Zonker, De Cnmmari pulicis hist. nat.,^]. 1, tig'. D-G. lence, 1832.

ft:ina, Cnistarea, \>\. i(\ à C7 {United States e.rploring E:ipedition under the Command nf C. Wilke.i, Pliilailelphia, 1855).

Lerclionllot, Mém. sur les Crustacés de la famille des Cloportides qui liabitenl les environs de Strasbourg, p. 75 et siiiv., pi. i.

{b) Milnc Edwards, Atlas du Règne animal de Cuvier, Cuustacks, pi. 72, fig-, 2 6 à 2 c, pI fii;. 3 à 5. ' IXma, Op. cit., pi. 75, fig. 1 b.

Liljebi.rfî, De Crustaceis e.r nrdinibus tribus : Ci,adocera, Ostracoda efCopEPODA, in Scania occurrenlibus, pi. H, fi-. 5 ; i^l. 10, lis. 3. Lund, 1850.

(c) Stiaus, Méw. sur les Cypris, p. 1 5, pi. 1 , fisj^. 7, 8 et 9 (extr. des Mém. duMuséum, t. Vil). •— Atlas du. Règne auirnnl, pi. 73, fig:. 1 rf .i 1 f.

ARMATURE RUCCALR DES CRUSTACrs. /l91

guliers Animaux est-il consliliic à peu près de ninne (pic eliez plusieurs des espèces dont je viens de parler; mais les niemhres qui chez celles-ci sont alTectés à la locomotion, et deviennent des pattes ambulatoires ou des rames natatoires, ne servent plus, cliez les Cirrhipèdes, qu'à amener vers la bouche les matières nutritives en même temps qu'ils établissent des courants néces- saires à l'entretien du travail de la respiration. Chacun de ces appendices se termine par deux branches grêles et allongées divisées en une multitude de petits articles et garnies de longues soies ; sans cesse ils se déploient au dehors, puis se recourbent ens en scontraire, et se rabattent sur l'entrée des voies diges- tives. On peut donc consid(;rer ces organes comme étant en (juelque sorte des mâchoires axillaires ou pieds-mâchoires, et, en se plaçant à ce point de vue, on peut dire que, chez les Cirrhipèdes, la totalité du système appendiculaire se trouve

leur bord interne ; les mâchoires de la seconde paire sont représentées par des appendices foliacés el bilobés ; enfin il existe derrière la bouche une pince transversale que Savigny con- sidère comme l'analogue de la lèvre inférieure des Crustacés lîdriophlhal- nies ou des Décapodes, et qui, en effet, ne paraît pas appartenir au système appendiculaire (a). Un mode d'organisation analogue se voit chez risaura cxjdaloichs (h).

Chez les Branchipcs, la lèvre supé-

rieure et les mandibules sont confor- mées à peu près comme chez l'Apus, mais ne sont suivies que par une paire de mâchoires presque rudinien- taires (c). Il en est à peu près de même chez les Artémies (d), les Lim- nadies (e) et les Limnéties (/").

Chez les Dapiinies, on ne Uouve aussi en arrière des mandibules qu'une paire de mâchoires, mais ces organes sont bien développés et armés de crochets puissants (y).

(a) Savigny, Théorie des organes Je la bouche, p. G3, pi. 7.

Voyez aussi V Atlas du Règne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 75.

(b) Joly, Heclterches zoologiques, anatomiques et physiologiques sur Tlsaiira cycladoiJos (Ann. des sciences nat., 2' série, 1842, t. XVII, p. 296, pi. 8, fig-. 22 et 23).

(c) Voyez VAtlas du Règne animal, CriusTACRS, pi. 74, fig. 3 a, 3 c, 3 d.

(d) Joly, Histoire d'un petit Crustacé auquel on a faussenvnt attribué la coloration en rouge des marais salants [Aiin. des sciences nat., 2" série, 1840, I. XIII, p. 234, pi. 0, Rg. 2 et 3).

(?) Miliiu Edwards, Atlas du Règne animal, Crustacés, pi. 74, li^'. 1 /;, ic. (/■) Gralie, l'emerl!. ûber die Pliijllopodeu {Archiv filr Nalurgesch., 1853, l. 1, pi. 7, fiaf. 24). (g) Slraus, Mém. sur les Daphnies, p. 20, pi. 20, Wg. 8 et 9 (oxtr. des Mémoires du Muséum, t. V).

Liljeliorg, Op. cit., pi. 1, fig;. 0, etc.

Appareil buccal

A92 APPAREIL DIGESTIF.

affectée au service de la digestion et employée dans la con- stitution de l'appareil de la mastication ou de ses dépen- dances (1).

§ 3. Chez les Crustacés suceurs, qui vivent en général .les Crustacés fixés sur Ic corps des Poissons, et qui se nourrissent à l'aide des

suceurs. i ' i

fluides qu'ils y puisent, la bouclie affecte la forme d'une petite trompe conique dans l'intérieur de laquelle se trouvent des stylets aigus, et de chaque côté de cet organe, on voit, à la face inférieure de la tête, un ou plusieurs appendices au moyen des- quels l'Animal se cramponne sur sa proie. Chez les Caliges et

(1) Chez les Balanes, qui se Irouvenl dans une position renversée à l'inlé- lienr de l'espèce de loge concliyli- foime dont leur corps est revêtu, la bouche est située au-dessous du pa- naclie formé par leurs tentacules ou pattes- mâchoires. Elle occupe le cen- tre d'une petite éminence, et présente du côté frontal une lèvre supérieure très développée. Latéralement on y voit une paire de mandibules fortement dentées et portant un appendice la- melieux qui est analogue h la branche palpiforme dont ces organes sont gé- néralement pourvus chez les Crustacés supérieurs, mais se trouve soudé au labre près de sa base. A la suite de cette paire de membres vient une paire de mâchoires lamelleuses, puis une sorte de lèvre inférieure formée par une paire de branches élargies et biarticulées , insérées par une pièce basilaire impaire et médiane. Ce der- nier organe semble résulter de la réu-

nion d'une paire de mâchoires, et res- semble beaucoup à l'appendice buccal médian qui , chez les Amphipodes sédentaires, est constitué de la sorte par la jonction des deux mâchoires auxiliaires. Enfin derrière cet assem- blage de pièces, on voit naître une série de six paires d'appendices por- tant chacune deux longues branches tenlaculiformes etmultiarticulées, qui se dirigent en haut, puis se recourbent en avant, au-dessus de la bouche («), Chez les Anatifes, l'appareil buccal est disposé à peu près de la même manière. M. INlartin Saint- Ange décrit, il est vrai, une paire de mâchoires de plus que je n'en ai compté chez les Balanes, mais cela me paraît dépendre de ce qu'il considère comme des mandibules les lames ou palpes qui naissent sur ces organes (b), M. Dar- win a donné une description plus exacte de l'appareil buccal de ces Animaux (c).

(a) Milne Edwards, Allas du licgne animal de (luvicr, Mollusques, pi. 13!^, Ilg-. 2rt, 2c, 2/".

Voyez aussi à c; sujet Uarwin, A Monogr. of the sub-class Cihriiipeda, Dalanid.e, p. 74, pi. 2G, fig. 2, 3, 4 iliay Society, 1854;.

(6) Martin Saint-Anije, Mém. sitv l' organisa l'wii des Cirrhipèdes, p. 1.5, pi. i, ti!^ !l, ri pi. 2, (ig. (extr. des Mém. des Savants étrangers, t. VI).

(c) Darwin, Op. cit. (Lei'aoid.k, p. 39 et suiv., pi. x, fig. 1 ii 1 T {Bay Society, iS.'it).

AHMATURE BUCCALE DES CRUSTACÉS. /jOS

les autres petits Crustacés de l'ordre des Siplionostonies, ces organes de fixation sont au nombre de trois paires; mais chez les Lernéens, qui sont des représentants dégradés du même type zoologique, on n'en trouve d'ordinaire qu'une seule paire dont la forme est souvent très bizarre. Diverses considérations m'ont conduit à penser que ces membres correspondent aux pieds-machoires des Crustacés supérieurs, et que les stylets du suçoir, ainsi que plusieurs appendices rudimentaires situés auprès, sont constitués par les éléments organiques qui ailleurs forment les mandibules et les mâchoires; enfin, que la gaine conique de cetapi)areil est l'analogue de la lèvre supérieure (i).

(l ) J"ai constalé que chez le Panda- rus, le bec ou suçoir, qui se voit vers le milieu de la face iulcrieure du bou- cliei' céphalique, est composé de deux pièces médianes qui, de chaque côté, vers leur base, laissent entre elles un vide , mais se réunissent en forme de tube vers le bout, et qui m'ont paru devoir être considérées comme les représentantsde la lèvre supérieure ou labre, et de la lèvre inférieure ou postérieure des Crustacés supérieurs. De chaque côté de la base de cet or- gane se trouve une paire de petits appendices styliformcs, et une apo- physe cornée ; enfin, dans son iulé- rieur se logent deux aiguilles rigides, et d'après l'ordre d'insertion de ces parties j'ai été conduit à les regarder comme les analogues des mandibules et des mâchoires. Enfin, une paire de gros appendices terminés par une grille se trouve refoulée en avant de la bouche ; une seconde paire de mem-

bres coudés s'insère sur les côtés de cet organe, et une troisième paire d'appendices crochus au bout est placée en arrière des précédentes et au-devant de la série des pattes nata- toires. Conformément aux principes des analogies, j'ai rapporté ces six organes de fixation aux mâchoires auxiliaires qui, chez les Crustacés su- périeurs, occupent la même position dans la série des appendices céphalo- thoraciques (a).

La conformation de ces pattes-mâ- choires , dites ancreusea , présente quelques variations reuiarquables chez certaines espèces de l'ordre des Si- phonostomes. Ainsi, chez le Dichéles- tion, qui vit sur l'Esturgeon, la pre- mière paire de ces appendices est portée encore plus en avant que chez les Pandarus ou les autres Caligiens, et constitue une paire de cornes ter- minées par une sorte de pince bi- fide (6); enfin, chez les Argules,

(a) Milne Edwards, Mém. sur l'organisation de, la bouche chez les Crustacés suceurs {Ann. des sciences nat., i" soi-ie, 1833, t. XXVIII, i.. 78, pi. 8, fig. 3 à 10).

[b) Hcrinuiiii, Mémoire aptérologtque, 1804, pi. 7, fîg. 7.

r.atlikc, Lkmertiungcn ilhcr dcii Bau des Diclicloslliimii Sttirioiiis {Xova Acta Acad. nul. curws., I. XIX, pi. 17, lig. 1).

Miliie Edwards, Atlas du licgne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 7D, lib'- - et 2rt.

^"^ APPAREIL DIGESTIF

Mais je ne (,liscuterai pas ici cette question, parce que les rela- tions entre des parties correspondantes du même ordre sont beaucoup plus faciles à saisir chez d'autres Animaux articulés dont nous allons bientôt nous occuper. Illfccaf ^ ^* ^'"^"^ ^^ petite CLASSE DES Myrlipodes, la bouche est des Myriapodes, prcsquc toujours organiséc pour la préhension et la mastication

ces pattes-mâchoires ancreuses de la chets, et souvent on distingue, auprès

première paire ont la forme de petits de la base de cet organe, des appen-

crochels, et celles de la paire suivante dices rudimentaires qui sont évideni-

s'élargissent au bout et se creusent ment les analogues de certaines pièces

d'une cavité cupuliforme , de façon à mentionnées ci-dessus cliez les Cali-

ressembler à des ventouses (a). giens: par exemple, chez le Lej'neocem

fa siructure du suçoir ne paraît eyprinacea (c) , VAchtheres Perca-

oHrir que peu de variations chez les rum {d},\eBrachiellauncinata{e), \e

Crustacés de ce groupe ; la forme des Chondracanthus Triglœ ( /") , et le

stylels maxillaires se modifie, et les Chondracanthus Merlucii {g). Enlin,

rudiments d'appendices maxillaires il existe aussi, chez quelques-uns de

situés de chaque côté ne sont pas ces Crustacés parasites, des organes de

conslanis (6), mais ce sont des dé- fixation qui pourraient bien être des

lails sans importance. pieds-màchoires déformés : parexem-

Cliez les Lernéens, il existe également pie, chez le Tracheliastes polijcol-

un suçoir conique dans l'intérieur du- pus {h), le Brachiella impudica (i) et

(juel se voient deux stylets ou rro- la Penella Klainvillei (/").

(o) Jurine, Mém. sur l'Àrgule {Ann. du Muséum, t. VII, pi. 2C).

L)ana and Hcn'iik, Descript. of the Argulus Caloslomi [American Journal of Science, t. XXXI, pi. 3, fig. i).

Milne Edwards, CRUSTACÉS de VAtlas du Règne animal de Cmier, pi. 78, Cig. i a.

(b) Voyci, par exemple, ces organes chez le Caligus Nordmannii (Milne Edwards, Atlas du Rcijne animal, Crustacés, pi. 77, fig. 1 a, 1 b à 1 0-

Le Dinetnatura gracitis ( Burmeister Beschr. einiger neuen oder weniger bekannten Schmnrotierkrebse (Nova Acta Acad. Nat. curios., t. XVII, pi. lU, fig. 3 li 0).

Le Caligus americanus (Pickering and Dana, Descript. of a Species of Caligus (American Journal of Sciences, t. XXXI V, pi. i, fig. 1 ; pi. 2, fig. t2 à 17).

Le Nicothoa Astaci (Milne Edward», Op. cit., pi. 79, fig. 1 a).

Le Dichéleslion (Iiatlikc, Op. cit. ; Milne Edwards, Op. cit., pi. 79, fig, 2a i 2c).

L'Elytrophora brachyplera (voy. Gerslacker, Ueber eine neue Siphonostomen-Gattung., in Archiv liïr Nnlurgeschichte, 1853, pi. 3, fig. 12).

(c) Burmcislor, Op. cit., pi. 24 A, fig. 2 el 3 (Nova .ictn Acad. Nat. ciirios., t. XVII).

(dj Nordniann, Micvographische Beitrdge %ur Naturgeschichte der wirbeliosen Tliiere, pi. 5, fig. 1 à 6. Atlas du Règne animal de Ciivier, Zoophvtes, pi. 30, fig. 1 b, elc.

(el Nordmann, Hlivroscop. Beilr-, t. II, pi. S, fig. 12. Règne animal de Giivier, Zoophytes, pi. 31, fig. 4 c.

(/■) Nordiuann, Micvosrop. Reitv., pi. 9, fig. 9, 10, etc.

{(j) Milno Edwiirds, .Mlas du Règne animal de Cuvier, Zoophytes, pi. 3-2, fig. 2, 2 b.

{!,) Novcliiinnn, Op. cit., pi. 7, fig. 1.

(i\lt\c\\\,ibid., pi. 8, fig. 1 et 2. Atlas du Règne animal, ZQOPti\rE:i, pi. 31, Cg. 4.

(J) Milne Edwards, Atlas du Régne animal de Cuvier, Zoophytes, i-t. 31 , fig. J , 2 «,

AUMATLRE fcUCCALE DES MYUIAPODES.

/l95

traliments solides; sa structure se rap[)roche beaucou[» de ce que nous avons vu chez certains Crustacés, mais elle présente diverses particularités dignes d'attention , et l'on y distingue deux formes principales appartenant, l'une à la division des Scolopendres, l'autre à celle des Iules.

Chez les premières, dont Latreille a formé l'ordre des ("hilo- podes (1), on trouve sous le front une lèvre supérieure, ou labre , formée, par une pièce cornée médiane large, courte et cintrée ; puis quatre paires d'appendices, savoir : une paire de mandibules formées chacune d'un article disposé transversale- ment et armée à son bord interne de dents qui garnissent les côtés de l'ouverture buccale (2) ; une paire de mâchoires anté- rieures, (jui sont grosses, trapues, dirigées en avant et termi- nées par une surlace triturante fort large (o) ; une jiairc de

(1) C'esl-à-dire ayant la lèvre for- nn.'e par des pieds (de yv^z, lèvre, et Tïoù?, pied).

('2) Par leur forme générale, les mandibules des Clsilopodes ressem- blent i)eaucoup à celles des Crustacés, et elles se composent essenlieilenient d'un coxite [a).

Ces organes sont évidemment les analogues de ceux qui, chez les Crus- tacés et les Insectes, portent aussi le nom de mandibules, et ce serait intro- duire dans le langage entomologique une confusion fâcheuse, si on les ap- pelait des mâchoires, comme le vou- draient certains auteurs (6).

(o) Les mâchoires antérieures des Scolopendres ressemblent à une paire de i)elites pattes grosses, courtes et tronquées au bout ; leur base est élar-

gie transversalement, et leur extrémité antérieure recourbée en dedans de façon à se rencontrer en manière de pince ; enfin, on y distingue cinq ar- ticles placés bout à bout, et entre leur base on aperçoit une paire de petites pièces que Savigny considérait comme les représentants d'une seconde paire de mâchoires (c), mais que INewporl a reconnu être constituées par les par- ties de l'arceau sternal correspondant appelées épimérites {d). Ces membres, et les i)ièces mitoyennes dont je viens de parler, appartiennent au segment postmandibulaire de la tète, et doi- vent, par conséquent, être assimilés, non aux deux paires de mâchoires des Crustacés, mais seulemeni aux deutognathes ou mâchoires antérieu- res de ces Animaux. Quelques entomo-

((() Savigny, Théorie des pièces de la bouche, 2* mémoire, pi. i!, fig-, i t, 2 i. (h) Walckenacr, Histoire naturelle des Insectes aptères, t. IV, p. vij. (r) Savigny, loc. cit., fig. 1 o, 2 o.

[d) Sc\v|ioii, MonoQvaph of the Class Myriapoda, p. 297, |)1. 33, fig. 6, c, c (Ltiin Truns 1844, t. Xl\).

/l06 APPAREIL DIGESTIF.

mâchoires postérieures, ( jiii sont grêles et palpilbrmes (1 ) ; enfin une paire de mâchoires auxiliaires, ou pattes-mâchoires, qui sont terminées par un gros crochet mobile, et réunies à leur base sur une grande phupie médiane, de façon à clore en dessous l'ap- pareil buccal et à constituer une sorte de lèvre iul'érieure ou plutôt de mentonnière (2). C'est à l'aide de ces pieds-mâchoires

logistes les désignenl sons le nom de palpes maxilli formes , cl appellenl langue ou languette, la paire de lames épislenialcs placées entre leur base (a).

(1) Les mâchoires postérieures des Scolopendres correspondent aux trilo- gnallies ou mâchoires de la seconde paire des Crustacés, cl non aux pieds- mâchoires antérieurs deces Animaux, (omme le supposait Savigny. Nowport leur donne le nom de palpes labiaux, et VValckenaer les appelle des palpes maxi informes. Elïeclivemenl ils ont à pou prrs la forme d'appendices de ce genre, ci ils servent aussi à ra- moner entre les mandibules et les mâchoires antérieures les matières alimentaires que ces oiganes doivent diviser. Leur article basilaire est un peu élargi, de façon à se joindre à son congénère sur la ligne médiane, et les pièces suivantes, au nombre de quatre, sont cylindriques et de plus en plus grêles (6).

(2) Les mâchoires auxiliaires ou pattes -mâchoires des Scolopendres sont désignées par Newport et VValc- kenaer sous le nom de mandibules, que la plupart des entomologistes appli-

quent aux appendices buccaux de la première paire.

Ces pieds-màchoires, ainsi qu'une paire de pattes ambulatoires, naissent du segment posicéplialique ; ils sont très robustes et s'articulent sur une sorte de mentonnière fort large qui s'avance enire leur base, au-dessous de la bouche (c), et qui est formée par les pièces sternales de l'anneau dont ils dépendent. Dans le jeune âge, cette portion basilaire médiane est divisée en deux moitiés par une suture lon- giiudinalc {d) ; rtiais par les progrès du développement, elle se consolide d'une manière complète et constitue une grande plaque impaire qui se lermine antérieurement par une paire de lobes denliculés sur le bord (e). Elle consti- tue ce que iNewporl appelle la lèvre inférieure , et elle est considérée par Savigny comme l'analogue des hanches. Souvent les coxites y sont soudés, ainsi que cela se voit dans le genre Scolopendra proprement dit; mais d'autres l'ois, par exemple, dans les genres Mecistocephalus et Geo- philus, ils sont libres. Le second ar- ticle des mâchoires auxiliaires est

(ni W.ilckcnacr, llisloire naturelle d^-s Insedcs nptères, I. IV, p.vj.

(b) Savi-iiy. Théorie delabouche, pi. "2, %. i b, i>6.

New-port, Op. cil. (Linn. Trans., I. MX, pi. 33, fv^. G).

(c) Savigny, toc. cit., pi. 2, fii;-. 2 f. (rf) Newport, Up. cit., pi. 33, tig. 30. (e) Idem, ibkl., pi. 33, tig. 31, 32, etc.

ARMATUKE DLCCALi: [>KS MYKIAPODES. /jO?

que les Sculopeiulres saisissent leur |»roie; et il esl ù noter que le eunduit exeréteur d'une glande vénéneuse vient s'ouvrir près de la pointe des eroehets qui les lenninent, et rend la morsure de ees Animaux fort redoutable.

Dans l'ordre des Ghilognathes (1), comprenant les Iules et les genres voisins, rap|)areil buccal se simplifie davantage, et d'or- dinaire se réduit en réalité à un labre rudimentaire suivi d'une paire de mandibules et d'ime paire de mâchoires disposées en manière de lèvre inférieure ; mais les pattes des deux paires suivantes diffèrent de peu des autres, et concourent à assurer le travail de la mastication en retenant les matières alimen- taires ["2). Enfin, dans les genres Polyzonum , Siphonotus et Siphonophora, l'appareil masticatoire maniiue, et la bouche est allongée en un |)etit suçoir conique (?>).

grand et souvent aimé d'un prolon- gement denlil'orme sur son bord in- loriie. Enfin, ces organes se lermi- nenl chacun par un gros crochet dirigé en dedans. Le nonihre de leurs arti- cles varie un peu dans les dilïércnts genres.

(1) C'est-à-dire ayant la lèvre for- mée par les mâchoires (de /.îTàoç, lè- vre, et pocôoç, mâchoire).

{'!) Chez les Iules (a), le labre esl confondu avec le chaperon ou partie antérieure de la tète. Les mandibules sont grosses, courtes et fortement den- tées. Les mâchoires sont réunies en une sorte de lèvre inférieure médiane dans laquelle on distingue une por- tion moyenne composée d'une paire de branches internes, terminées cha-

cune par un petit lobe, et une portion externe portant, en avant, deux pe- tits articles. Savigny considère les branches internes comme représentant une troisième paire de membres buc- caux ; et par conséquent, pour cet anatomiste, l'espèce de mentonnière dont il est ici question serait l'analo- gue des deux paires de mâchoires des Crustacés : mais la ressemblance de ces parties avec celles que je viens de dé- crire chez les Scolopendres, et lesob- servationsde Newport surcesderniers Animaux, sont contraires à cette ma- nière de voir.

(o) La structure de ce suçoir n'est que très imparfaitement connue ; son existence a été signalée par M. Brandt (6).

[a) ['ourles pièces de la bouche do ees Myriapodes, voyez : Savigny, Op. cit., iiieiii., ])I. 1. Blancliard, Atlas du Règne animal de C.uvior, Insectes, pi. i I , fig-. 2 &, i c.

[b) Biaiidi, Sole sur un ordre nouveau de la classe des Myriapodes {Bulletin de l'Acad. de Saint-Pétersbourg, t. 1, et. Ann. des sciences nat., i' série, 1837, t. VIII, p. 316).

-— Waickenaer et (Jervais, Histoire des Insectes aptères, t. IV, \>. 203,

V.

32

buccal

is Itisec

masticateurs

/i98 APl^ARElL DIGESTIF.

Appareil § 5. L'opparci! buccal des bsECTEs masticateurs, c'est-à-

bnccal i- i ^ -, . / i .->

des Insectes cliTe clcs cspcccs qui sont organisées pour se nourrir de matières solides, n'oH're i)as des variations comparables à celles que nous avons rencontrées dans la classe des Crustacés ou même dans celle des Myriapodes ; il présente dans sa composition une fixité remarquable, et Ion n'y rencontre, même dans les différents ordres constitués par ces Animaux, (jue des moditi- cations de peu d'importance quant à la forme de ses principales parties.

Effectivement, chez tous ces Insectes, l'appareil buccal se compose d'un même nombre d'appendices, et ces organes affectent constamment la môme disposition en tout ce cpii est essentiel. Le devant de la bouche est toujours garni d'une |)iècc médiane et transversale qui dépend de la région frontale, et (pii est désignée par les entomologistes sous le nom de labre ou de lèvre supérieure. Sur les côtés de celte ouverture se trouve une paire de mandibules tjui ne portent jamais d'ap[)cndice palpiforme, et qui jouent sur une articulation en charnière, de façon à se ra})procher entre elles, ou à s'écarter en se portant en dehors , comme nous l'avons déjà vu chez les Crusiacés broyeurs. Une seconde paire d'appendices maxillaires s'insère un peu plus en arrière, et constitue des mâchoires qui se portent en avant, au-dessous des mandibules. Leur structure est plus compliquée et rappelle ce que nous avons déjà vu chez quelques- uns des appendices buccaux des Crustacés. En effet, quand ces organes sont le mieux constitués , ils ressemblent chacun à une petite patte dont la portion basilaire serait robuste et pourvue de deux branches accessoires, et la portion termi- nale très grêle, de façon à mériter le nom de palpe. Mais ici les branches accessoires sont situées du côté interne du membre, et en deviennent les parties les plus utiles : en effet, c'est l'une de ces parties ipii, en se rencontrant avec sa congénère^ constitue l'espèce de pince à l'aide de

ARM.VrURK BUCCALl': DES INSFXTKS. 'j91)

hiquelle hîs mâchoires portent les aliirienls entre les man- dibules et les y retiennent pendant que In mastication s'ef- fectue.

Une autre paire de membres buccaux aide ces mâchoires dans l'accomplissement de leurs fonctions, et complète l'appareil masticatoire en arrière , oii elle constitue l'organe que les entomologistes désignent sous le nom de lèvre inférieure. Ces appendices ressemblent aussi à deux petites pattes ; mais , au lieu d'ctrc séparés à leur base, comme le sont les mâ- choires, ils sont réunis par leur partie postérieure, de façon à constituer une espèce de support médian qui donne nais- sance antérieurement à une paire de palpes formés par la portion terminale de leur branche principale et à des lobes intermédiaires formés par des branches accessoires et con- stituant ce que l'on appelle la lançjuette. Cette lèvre inté- rieure se loge en grande partie entre la base des deux mâ- choires, et s'avance au-dessous de ces appendices et des mandibules ; mais elle prend son origine plus en arrière, et elle représente la troisième et dernière paire des membres céptia- liques enqtloyés dans la constitution de l'appareil buccal des Insectes fl).

(l) En résumé, nous voyons donc que la bouche des Insectes màclieurs est pourvue tantôt de six palpes, tan- tôt seulement de quatre de ces petits appendices dactylilormes ; qu'il existe toujours une paire de palpes labiaux et au moins une paire de palpes maxillaires, mais quelquefois deux paires de ces derniers, que Ton dislin-

gue alors en palpes niaxiliaires ex- ternes, et palpes maxillaires internes ou accessoires. Ce dernier nombre se rencontre chez les Carabes et les autres Coléoptères de la famille des Carnassiers [a] ; le premier, chez le Hanneton et une multitude d'autres Coléoptères, aussi bien que chez les Orthoptères, clc (6).

(a) Exemple : le Garabus auratus (voy. V Allas du Rè(jne animal lie Cuvier, In.suctes, pi. l>4, lig. 12c, ou tout ouvraijc clémeiilaire d'enlomolosie). (6) Exemples : le Haanelon {Op. cit., pi. 4-2, fiy. 7c).

WAleuchus sacer, ou Scarabée sacre îles anciens Égypiicns (Oy), cit., pi. L'O, fiir. 1 t).

La Cantharide (0/). cit., pi. 55, llu". 3c).

Les Sauterelles {Op. cit., pi. 82, li,:;'. 3 e).

^- La Demoiselle, ou Aijrion virgo (Op. cit., pi. lOl, lib'- 3n)-

500 APPAREIL DIGESTIF.

Ainsi, cil adiiieltaut que les mandibules des Insectes et des Crustacés soient constituées par la même paire de membres céplialiques, liypotbcse qui réunit en sa faveur un grand nombre de faits anatomiques et embryologiques dont il sera rendu compte dans une autre partie de ce cours, on voit que les mâchoires des Insectes doivent correspondre aux appendices que nous avons appelés mâchoires antérieures chez les Crus- tacés, et que les mâchoires de la seconde paire chez ces der- niers Animaux sont les analogues de la lèvre inférieure des Insectes. Or, ce sont précisément les trois paires de mem- bres (pii ne man(]uent presque jamais dans l'appareil buccal des Ciustacés , tandis que les appendices complémentaires auxquels nous avons donné les noms de mâchoires auxiliaires ou de pieds-mâchoires , organes dont l'emploi varie beaucoup chez ces divers Animaux , sont ceux qui n'ont jamais de re[)ré- senlanlsdans le groiqie des membres céphaliques de l'Insecte.

^ (3. Les Insectes maxillés ou broveurs sont très nombreux. A l'état de larves, presque tous les Animaux de cette classe sont pourvus des instruments de mastication que je viens de nom- mer, et les espèces qui, sous ce rap[)ort, offrent le môme mode d'organisation à l'état adulte, constituent l'immense groupe des Coléoptères , l'ordre des Orthoptères et celui des Névroptères, ainsi que quelques petites divisions de moindre importance. Leur régime est fort varié : les uns sont carnassiers et ne se nourrissent que de proie vivante; d'autres se repaissent de matières animales en voie de décomposition ; beaucoup sont frugivores ou herbivores, et il en est qui rongent le bois ou les racines des arbres (1). Eiiliii on connaît aussi (piclques Insectes <|ui, à l'état parlait, ne sont destinés à vivre ({ue ibrt peu de temps, et qui durant cette période de leur existence ne

(I) Lois(|iie je Irailerai dr rinhtiiict clirz les Insocles, je rcviciulr.ii sur ce

SIIJCI.

ARMATURK HUCCALR DES INSECTF.S. 501

prennent aucune nourriture (1). Or, ces ditTérences clans le mode d'alimentation coïncident avec des particularités dans la conformation des diverses parties de l'appareil buccal, et par conséquent on rencontre dans la disposition de ces organes de nombreuses modifications : tantôt ils sont réduits à l'état rudi- mentaire, comme cela se voit chez les Éphémères ; d'autres fois ils sont constitués d'une manière très puissante, et leur structure varie avec le régime; mais on y remarcjue aussi d'autres différences de forme dont la significalion physio- logique ne nous est pas connue, et dont on ne saisit de rela- tions qu'avec les divisions que la Nature semble avoir établies parmi ces petits êtres. L'étude approfondie de toutes ces varia- tions est du ressort de la zoologie descriptive, et je ne l'abor- derai pas ici; mais, alin d'en donner une idée générale, je citei'ai ici quelques exemples.

Cliez les Sauterelles, les Criquets et beaucoup d'autres Orthoptères qui, à raison de leur grande taille et du dévelop- pement considérable de leur appareil masticateur, se prêtent très bien à l'étude des diverses parties de la bouche, le labre est un lobe corné, de forme discoïde, (|ui est attaché au bord inférieur de la partie frontale de la tète appelée épislome par une articulation linéaire transversale, et qui descend au-devant des mandibules en manière d'écran (:2). Chez beaucoup d'autres

Labre.

(1) Les Éphémères et quelques au- tres Névroplères sont dnns ce cas, et, à l'état parfait, leurs appendices buc- caux sont rudinienlaires , bien que chez la larve ces parties aient été bien développées [a).

(2) Ainsi que je l'ai déjà dit en par- lantdes Crustacés, le labre des insecies ne me semble pas appartenir au sys-

tème des membres ou appendices de ces Animaux, et me iiaraît devoir être considéré comme une dépendance de la portion siernale de l'anneau cé- phaliquc préstomien. Lorsque je trai- terai de la théorie du squelette légu- mentaire des Animaux articulés , j'exposerai les raisons sur lesquelles je me fonde ; mais je dois ajouler ici

(a) Voyez Pictol, Hhtoh-c cihiérnlr et particulière des Insectes itévroptères , fam. i\et Ephéwi'- riens, i^iS, p. 70 et sniv.

50'?- APPARKIL DIGESTIF.

Iiiset^tes, cette lèvre supérieure at'feele la l'oniie d'une lame large et courte qui est également à découvert : par exemple, chez le Carabe doré, si commun dans nos jardins. Ailleurs elle est cachée sous un prolongement de l'ëpistome, ainsi que cela se voit chez le Fïanneton, et dans quelques espèces elle est rudimentaire et confondue avec cette partie de la tête, comme chez les Lucanes. Sa l'orme est aussi très variable , et chez quelques Insectes qui ne se nourrissent que de substances molles, par exemple les Copris ou Bousiers, elle est d'une consistance presque membraneuse: mais, en gén('ral, elle est cornée et garnie de poils à son bord inférieur ; quelquefois même elle est armée de denlicules margiuides, et d'ordinaire elle est susceptible d'exécuter quelques légers mouvements de flexion ou d'élévation par l'aclion d'une paire de petits muscles qui s'insèrent à son bord supérieur et sont logés dans la partie antérieure de la cavité céphalique (1 ).

que M. Biullé, à qui on doit un travail spécial et très approfondi sur l'iippareil buccal des Insectes, ne partage pas cette opinion, et pense que le labre est formé par une paire d'appendices analogues aux mandibules et soudés directement entre eux ou avec une pièce médiane h laquelle il donne le nom de palatum [a). Edeclivemcnt, cet organe n'est pas toujours formé d'une pièce médiane unique ; souvent on y distingue deux ou même trois pièces: chez les Ateuchus, par exemple ; mais il en est généralement de même pour l'arceau sternal dans les autres par- ties du squelette tégunientaire , et celte disposition ne saurait être invo- quée comme preuve de la nature

ap|)endiculaire de ces parties. Du reste, si les pièces constitutives du labre des Insectes devaient être rap- portées au système appendiculaire , elles seraient les analogues des an- tennes postérieures des Cruslacés, et non des mandibules ou des luft- clioires.

(1) Les muscles élévateurs du labre ont été très bien représentés chez le Hanneton, dans le beau travail anato- mique de M. Slraus-Durkheim (b). Quand leur contraction cesse, le la- bre se rabat sur les mandibules, en vertu de l'élasticité des parties qui constituent son arliculation épisto- niienne. Cet organe buccal sert prin- cipalement à empêcher que les ali-

(«) Brullé, Recherches sur les transformations des appendices dans les Articulés (Ann. des sciences nat., 3' série, dS^i, t. II, p. 345).

(h) Straus, Considérations sur l'analomie des A^nmaux articulés, p. 153, pi, 3, Ciç;. \,d.

AUMATIJRK BUr,(;.\LF. DKS INSIlf.TKS, 50.)

§ 7. Los mandibules ont beaucoup plus (riui[)orlaiiee, Mamiibnie. et constituent la partie principale de l'appareil masticateur. J)e même que cliez les Crusiacés, elles sont situées sur les côtés de la bouche, op[)osées Tune à l'autre, et articulées de façon à pouvoii' s'écarter entre elles en se porlant en dehors, ou se joindre en se rapprochant de la lii^ne médiane. Chacun de ces organes est formé essentiellement d'un seul arlicle plus ou moins conique, dont la base, tournée vers le haut et évidée, présente à son bord, sur des poinis diamétralement opposés, deux éminences arrondies ou condvles qui sont enoa^és dans des fossettes correspondantes ménagées dans les parties voi- sines de la charpente solide de la tète, et qui constituent avec elles une charnière ou articulation en ginglyme. Deux muscles situés de chaque côté de la tête, dans l'intérieur de la boîte crânienne, s'attachent à des points intermédiaires du même

ments ne s'échappent au dehors , quand ils sont poussés en avant par les màclioires et pressés pas les man- dihules.

Ainsi que je l'ai déjà dit, la forme du labre varie beaucoup, et cela même chez les insectes qui ont entre eux une parenté zoologique très étroite. Ainsi, ciiez les Cicindélètes du genre Méguct'pliale. il est très court, ter- miné par un bord presque droit et inerme («) ; tandis que dans le genre Oxycheila, qui appartient à la même l'amiile, il est très allongé et triangu- laire [b] ; et que dans le genre Cot- lyris, éi;alement très voisin du pre-

mier, il est fortement denticulé en dessous (f). Chez le Hanneton, il est profondément hilobé, chez les Cé- toines il est entier et seulement un peu échancré vers le milieu de son bord inférieur. Chez les i^auterelles, les Criquets et beaucoup d'autres Or- thoptères, le labre est presque circu- laire et bombé en avanl (r/), mais chez les l'hasmes il est bilobé.

Quelques entomologistes ont cru que le labre manquait chez les Scara- béides (e) ; mais, ainsi que l'a très bien fait remarquer Al. .\ewman , cet or- gane est seulement caché sous le chaperon de ces Coléoptères (/").

(a) Voyez l'Atlas du Règne animal de Cuvier, Insectes, pi. Ui, fii,'. ia. {b) Loc. cil., fig. 3 a. ((■) Loc. cit., |il. 8-2, fig. 3a. {d} Loc. cit., pi. 80, ûg. i b, 1 b.

((') Olivier, Entomolofjie, Coléoptères, i. I, Scarabée, p. 3.

(/■) E. N'ewman, Oslenlogy or Externat .Anatomy of Insecls (Entomolofiical Magazine, 4835, \. H, p. 74j.

50/i apparf.il digestif.

bord basilaire de In m!indil)idc , et, en se contractant alterna- tivement, ils font basculer celle-ci sur cette espèce de double pivot, et produisent ainsi les mouvements de va-et-vient néces- saires à la mastication (1). D'ordinaire la forme générale de ces organes est celle d'un cône ou d'une pyramide frièdre dont le sommet serait dirigé en l»as et recourbé en dedans, dont la face externe serait bombée et le bord interne armé de prolongements dentiformes, ainsi que d'une sorte de brosse située près de sa base (*2). Mais il existe dans les disposi- tions secondaires nne multitude de variations qui sont en rapport avec la manière dont ces instruments doivent fonc- tionner (3). Ainsi tantôt les mandibules aoni préhensiles seule-

(l) Les muscles moteurs des mandi- bules ont été très bien représentés par M. Slraus, chez le Hanneton. Le muscle abducteur s'insère au bord externe de la mandibule par un tendon rigide, très grêle, et il prend son point d'attache opposé sur les côtés des pa- rois de la cavité céplialique. L'adduc- teur est beaucoup plus puissant, et f^e fixe au milieu du bord inicrne de la mandibule, très loin de la charnière sur laquelle cet organe pivote, et p:ir conséquent dans une position favora- ble à l'emploi de la force développée par ses contraciions ; son extrémité supérieure est très volumineuse et so fixe à la voûte crânienne [a].

{'2) Chez le Hanneton, celte brosse, composée d'une loulle de poils roides et serrés, est très grosse {b) ; on la rencontre chez la plupart des Coléo-

ptères, ainsi que chezd'autres Insectes, et M. Slraus pense qu'elle est en partie le siège du sens du goût ; mais cette opinion ne repose sur aucun fait probant.

(o) Knoch fut, je crois, le premier à appeler l'attention des entomologistes sur les relations qui existent entre la manière d'agir et la forme de ces organes, et il les a distingués j)ar les noms de mandihulainoisoria , M . mo- laris , M. canina , M. dentata et .1/. palœformis (c). .M. Alarcel de Serres a publié des observations sur le même sujet, et a décrit avec détail, chez les Orthoptères, la disposition des prolongements ou dents dont ces or- ganes sont armés ; d'après leur forme, il les dislingue comme celiesdes Mam- mifères, en incisives, laniaires, ou ca- nines et molaires (//).

(a) Slraus, Considérations générahs sur Vaualoinie comparée des Animnu.r nrliruU's, p. ] 'A, pi. 3, fii;. d et 2.

((;) Idem, iliid., p. GG, pi. i, f\g. 1.

(r) A. VV. Kiiocli, Neue Beitràge xur Insectmkunde , 1801, 1. 1, p. 20.

(d) Marcel do Serres, Comparaison des organes de la maslicalion des Orthoptères avec ceux des autres Animaux {Annales dn Muséum , 1K()!1, I. MV, p. r)G).

ARMATURE RUCCALE DES INSECTES. 505

ment, et alors elles s'allongent en forme de crocs dont la pointe, courbée en dedans, est tantôt simple, d'autres fois hilide , mode d'organisation qui est très bien caractérisé chez la larve des Dytisques (1), et qui, en s'exagérant, donne lieu à la formation des énormes pinces dont la létc des Lucanes, ou Cerfs-Volants, est garnie (2). D'autres fois, par exemple chez la plupart des Coléoptères carnassiers, les mandibules méritent l'épilhète de lacérantes, car non-seulement elles se terminent par un croc aigu, mais leur bord interne est garni de prolongements dentiformes qui sont tranchants ou pointus, et se rencontrent de façon à pouvoir déchirer la proie dont les Insectes ainsi armés se nourrissent. En général, une de ces saillies, située près de la base de la mandibule, est beaucoup plus robuste que les autres, et on la désigne souvent sous le nom de dent molaire {'à). Une troisième forme est celle des man-

(1) Chez la larvo, des Dylisqiies, les mandibules conslitiioni une paire de crochels simples qui sont saillanlsan- devanl dn front, et qui servent à l'Ani- mal ponr saisir sa proie (a). Ces or- ganes ont la même forme générale, mais sont encore plus grands cliez les INévroplères mâles du genre Cory- dalis (6).

('2) C'est chez le mâle seulement que les mandibules des Lucanes pren- nent ce grand développement, et se garnissent des prolongements qui don- nent à ces organes une apparence hrancluie (c).

Un mode de conformation analogue se voit chez les Coléoptères longi- cornes du genre Marrodontia, mais chez ceux - ci les mandibules sont dentelées tout le long de leur bord interne {d).

Chez les Lucanides du genre Chia- sognalhe , les mandibules du mâle sont également préhensiles, mais s'al- longent d'une manière excessive, et deviennent trop grêles pour agir avec force ; leur longueur dépasse de beau- coup celle du corps (p).

(3) Comme exemple d'Insectes à mâchoires lacérantes , je citerai , de

(a) Voyez I.yoïiiiet, Hecherclies sur Vanalomie elles métamorphoses de diverses espèces d'In- sectes, pi. 11 , fijr. 2.

(b) Voyez V Atlas du Règne animal de Cuvier, Insectes, pi. 1 04, iiij. 1 . (f) Op. cil., pi. 43 bis, i\s. 0.

(d) Op. cit., pi. 64, fig. 3.

(e) J. Siephens, On Chiasognaltius Graiitii {Trnns. nf the Cambridge Philos. .Sof., 1833, t. I\', p. 204, pi. 9 et 10).

Lesson, Illustrations de zoologie, pi. 24.

Gay, Historia de CInle, Coléoptères, pi. 1 5, fi"-. 1 .

506 APPAREIL DIGESTIF.

dihiiles incisives, qui, deslinées à coupecdes feuilles ou (j'aiitres substances végétales d'une faible consistance , sont robustes et terminées en dedans par un bord tranchant et écliancré comme une scie; elle est nettement caractérisée chez la plupart des Chenilles (1). j'appellerai mandibules ôroî/ewies, celles qui, tout en participant de la structure des dernières, sont plus élar- gies et garnies vers leur base de tubercides molaires propres à triturer les aliments, ainsi que cela se voit chez les Criquets et les Sauterelles (2). Ou pourrait distinguer aussi par l'épithète de rongeuses les mandibules de beaucoup d'autres Insectes qui se nourrissent aussi de substances végétales plus dures, et chez lesquels ces organes sont remarquablement robustes et garnis

préfdionce à loin antre, la Manticore, Chez ce Coléoptèrc carnassier , de même que chez la plupart des aiUres espèces du même ordre qui se nour- rissent de proie vivante, les mandi- bules sont très pointues, fortement courbées en dedans vers le bout, et susceptibles de se croiser de façon à faire joindre les éminences dont la partie moyenne ou inférieure de leur bord interne ou concave est armée, éminences qui constituent ce que l'on appelle les dénis molaires, et sont gar- niesdegrosses pointes comprimées (a). En général, chez les Coléoptères de la famille des Carnassiers, les mandi- bules sont moins grandes, mais elles se dirigtMU toujours en avant, et con- stituent une pince aiguë (6j.

(1) La Clienille du Cossus ligni- perda peut èlre choisie comme exem- ple pour les mandibules incisives, et Jjyonnet en a donné de très belles figures (c). Ces organes offrent les mêmes caractères généraux chez la Pyrale de la vigne {fJ), la fausse Che- nille du pin, ou Lophyrus pini (e), et beaucoup d'autres larves phyto- phages.

(2) Ici la portion marginale de la mandibule est en forme de cuiller denticulée,à peu près comme chez les Chenilles à mandibules incisives; mais il existe, en outre, une grosse dent molaire dont la surface est hérissée de tubercules et de stries. Savigny en a donné de très belles figures chez \in grand nombre d'Orthoptères (/').

(ft) WoynV Atlas du Règne animal de Ciivier, Insectes, pi. 10, fig. 1 et 1 a. {b) Exemples : les Oxyclieilcs {Hêgne animal, Insectes, pi. IG, fig. a).

Les Carabes {Op. cit., pi. "24, fig. ■! 2 el 12 6).

(cl L>'onnet, Traité anatomique de la Chenille qui ronge le hois.de saule, pi. 2, fig. 1 à 5.

(d) Aiicloiiiii, Histoire des Insectes nuisibles à la vigne, pi. 7, fig. 4 et 5.

(e) liaizeburg, /)((; h'orst-Insekten, t. 111, pi. 2, fig. 13.

If) Savigny, Égijpte, Oi\THOi>TiiiiES, pi. 3, fig. 1 i ; pi. i, fig. Oi,; pi. 5, fig. 1 i, 3 ; ; pi. (1, fig. 1 i; pi. 7, fig. 1 ), etc.

Voyez aussi (pielqries figures données par M. Doyère dans l'Atlas du Règne animal dr. C.nviBr, Insectes, pi. Sr>, fig. 46, 4r; pi. SC, lig. ïe, if, etc.

AIIM.VTURK BUCCALi: DKS INSKC! ES. 507

de crêtes trancliantes du côté interne, ainsi que cela se voit cliez les Capricornes et d'autres Coléoptères longicornes (1). Enlin j'appelle mandibules racolantes, celles qui se terminent par nn lobe membraneux ou semi-corné, projire à récolter des poussières plutôt qu'à diviser les aliments, et qui ne sont conformées pour la trituration que dans leur partie basilaire, disposition qui se rencontre chez les Cétoines ('î), et qui semble conduire à un autre inode d'organisation dans lequel ces organes sont simplement foliacés, c'est-à-dire réduits à un petit article lamelleux et ilexible, comme cela a lieu chez cer- tains Névroplères cette |)ortion de l'appareil buccal devient rudimentaire (3). Il existe aussi d'autres modifications de forme dont il est souvent nécessaire de tenir compte dans l'étude physiologique des Insectes, mais sur lesquelles je ne m'arrê- terai pas ici, et entre les divers modes de structure dont je viens de parler on rencontre aussi une multitude d'inlermé-

(1) Par exemple, chez le Cerambyx héros (a), le CaUichromamoschata [b), le Scolytus destruclor (c), la Canlha- ride (d), etc.

('2) Les figure.-; au trait par les- quelles ces organes sont représentés dans la plupart des ouvrages d'ento- mologie ne peuvent donner qu'une idée très imparfaite de leur mode de conformation. Chez le Cetonia aurata, les mandihules sont presque carrées, et portent en dehors um' lamelle étroite et allongée qui est assez rigide et dépasse un pQu la portion princi- pale de ces organes, qui est également lamelleuse, mais sulimembraneuse ,

faiblement ciliée sur le bord, et renflée en forme de tubercule ovalaire vers son angle postéro-interne. Chez d'au- tres espèces du même genre , par exemple le Cetonia flavo-marginata, celte portion tuberculeuse se déve- loppe beaucoup plus, et, dans quel- ques aulres goures de la même fa- mille, au lieu d'être simple, elle se complique par la formation de crêtes et de dents accessoires : par exemple, chez le Goliath brillant, ou Cerato- rhina micans.

{'6) Par exemple, chez la plupart des l'erlides, mais surtout chez les Éphémères (e).

(a) Atlas du Règne animal de Cuvier, Insectes, pi. 60, fia:. a. {b) Op. cit., pi. 65, ftg. Sa.

(c) Op. cit., pi. 01, ûg. 3a.

(d) P.alzolnirg, Forsl-'jnsekten, t. I, pi. 2, fii;. 27b.

(e) Voyez Piclel, Ephànérïems, p. 88.

508 APPAREIL DIGESTIF.

diaires. J'ajouterai cependant, que lorsque les mandibules n'of- frent pas le haut degré de consolidation qui est en général si remarquable dans ces organes, et qui est nécessaire à la puis- sance de leur action masticatoire, on y aperçoit souvent cer- taines divisions en raison desquelles on peut présumer que leur composition anatomique n'est pas aussi simple qu'elle en a d'ordinaire l'apparence. Ainsi, chez les Ateuchuset les Cétoines, les mandibules sont en partie membraneuses, on y distingue plusieurs pièces solides disjointes , et chez quelques autres Insectes la consolidation de cette portion du squelette tégu- mentaire est plus complète, une ou deux de ces parties con- servent leur individualité et constituent des prolongements mobiles. Ainsi, chez certains Staphyliniens, par exemple, on voit près de la base de chaque mandibule une bimelle acces- soire, et chez les Hydrophiles ces organes portent, vers le milieu de leur bord interne, deux petits articles mobiles etdcnti- formes (1).

(I) M. Brullé a été le premier à ap- peler rattenlion des naturalistes sur la structure complexe des mandibules chez certains insectes, et sur les con- séquences qu'on peut tirer de ces faits relativement à la théorie anatomique. Il a remarqué que chez divers Coléo- ptères phytophages ou coprophages, dont les mandibules sont imparfaite- ment développées et en partie mem- braneuses , ces organes offrent plu- sieurs pièces cornées distinctes qui sem- blent être les analogues des principaux articles constitutifs des mâchoires ou de la lèvre inférieure, et il a cru pou- voir reconnaître les représentants de ces pièces dans certaines portions des

mandibules indivises des autres In- sectes; de sorte qu'il a été conduit à penser que toujours ces organes re- présentent, non pas un article unique des membres suivants (tel que la han- che), mais résultent de la soudure ou fusion des principales pièces dont ces derniers appendices se composent.

Ainsi, chez les Ateuchus [a), on trouve réunies par une membrane commune : une pièce dorsale, qui occupe le bord externe de la mandi- bule ; 2" une pièce basilaire, dont l'ex- trén)ilé interne constitue le gros tu- bercule ou dent molaire dont la partie interne de la mandibule est armée; o" une pièce marginale interne, qui est

(fl) BniUd, Recherches sur les transformations des appendices des Articulés {Ann. des sciences tiat., 3" série, IHU.t. II, p. 340, pi. U, fiç:. \1).

AUMATUKE lîUCCALE DES INSECTEJ. 509

§ 8. Les mâchoires ont une structure beaucou{) [)lus Mâchoires compliquée, et présentent dans leur forme des variations plus nombreuses. Parfois ces différences sont même si grandes, que les entomologistes ont pendant longtemps méconnu l'uniformité de composition qui en réalité existe dans cette partie de l'appa- reil buccal chez tous les Insectes broyeurs, et que l'on a donné plusieurs noms à la même partie plus ou moins modifiée (1).

élroite, garnie de poils, et disposée le long du bord interne delà mandibule; Zl" enfin, une portion apiciale garnie de poils nombreux, et située entre la pièce dorsale et la pièce marginale interne. M. lîruUé considère la pre- mière de ces piècescomme étant l'ana- logue de celle qu'il désigne sous le nom de maxillaire, quand il parle de mâchoire ; la seconde comme repré- tant son sous-maxillaire ; la troisième son intermaxillaire, et la quatrième, qui est demeurée membraneuse, com- me correspondant au yalea.

Chez les Géotrupes {a] et beaucoup d'autres Insectes dont la mandibule n'offre aucune division de ce genre, et n'est formée en apparence que d'un seul article, M. BruUé rapporte à ces divers éléments anatomiques des por- tions de l'organe qui y ressemblent par leur forme et leur position. En- fin, c'est par la consolidation com- plète d'une portion de l'organe, et la

non-soudure de la partie à laquelle il donne le nom cVintermaxillaire, que cet entomologiste habile explique le mode de structure qui se remarque, non-seulement chez les Hydrophiles, mais aussi chez les Passâtes (6), les Blaps(c), et pkisieursautres Insectes les mandibules sont pourvnesde parties accessoires plus ou moins remarqua- bles, notamment les Staphylins, chez lesquels Kirby et Spence ont trouvé près de la base de ces organes une lamelle pilifère qu'ils nomment prus- theca (d).

(1) Kirby et Spence furent les pre- miers à entreprendre une étude com- parative des parties constitutives de ces organes, et à faire usiige d'un sys- tème régulier de nomenclature pour les décrire. Des travaux analogues ont été entrepris par plusieurs autres entomologistes, ^tels que : Lalreille , M. Slraus, Audouin, Newman, M. Bur- meister, etc., etc. (e) ; mais c'est à

(a) (6) (f) {d)

(e)

la pi cl su

Brullé, loc. cit., fig. 22.

Idem, ibid., ûg. 21.

Idem, ibid, ùg. 20.

Kirby and S|ieiice, An [iitroduction to Enlomolugy, 1820, l. III, p. 430, [il. 13, fig-. 7.

Brullé, Op. cit., pi. 14, fig. 10.

Kirby and Spence, Op. cit., t. III, p. 439 et siiiv.

- LalreillL-, art. Bouche du Dictionnaire classique d'histoire nalurelle, t. H, (i. 431.

- Straus, Considérations sur l'anatomie comparée des Animaux articulés, p. 68.

- Audouin, 1nsi:cte3 de l'atlas de la grande édition du Règne animal de Cuvier, explication de incITe 1(J, lig. 1 b.

- Newman, Osteoloijy, or External Anatomij of Insects (Entomoloifical ilaçjax-inc, l. Il, p. 82 iv.).

Burnieislcr, Uandbuch der Entomologie, t. I, p. 57 et suiv., pi. 2.

510 APPAREIL DIGESTIF.

Ainsi que je l'ai déjà tlit. , ces organes ressemblent heiuiconp aux mâchoires auxiliaires des Crustacés (1), et se composent ordinairement d'une portion basilaire qu'on peut appeler le corps ou support^ dont naissent trois divisions terminales ou branches. Ce support est formé de deux articles principaux analogues aux pièces constitutives de la hanche d'une patte chez tous les Animaux articulés ("2). La branche externe est

M. Brnllé que l'on doit les recher- ches les phis approfondies sur ce sujet [a).

(1) En mentionnant ici la ressem- blance qui existe entre les mâchoires des Insectes et les mâchoires auxi- liaires des Crustacés, je dois cependant insister de nouveau sur la différence importante qui existe dans la position relative des parties consiitutives de ces organes. Chez les Crabes et les Écrevisses, la branche interne des mâchoires auxiliaires correspond évi- deuiniont à le patte ambulatoire des membres suivants, et constitue le pro- topodile, tandis que le palpe ou exo- gnathe, ainsi que le mésognatiie, nais- sent du côlé externe du membre, et sont constitués par des parergopo- dites. 11 en est de même chez les Crevetlines ; seulement les lames cor- respondantes à ces parties accessoires sont portées en dessus de la base du membre (6). Mais, chez les insectes broyeurs, le protopodite, c'est-à-dire l'analogue de la patte, est la branche externe du membre, et constitue le palpe , tandis que les deux autres branches, qui sont des parties acces-

soires, naissent du côté interne de la première. Cela est rendu évident par le mode de conformation des mâchoires de quelques Kévroplèrcs. Ainsi, chez le Perla rivulorurn, ces organes se composent d'une série d'articles cylindriques placés bout à bout, de façon à former une sorte de tige qui a la plus grande ressem- blance avec une palte, et qui porte à sa base, du côlé interne , deux petits appendices (c) ; or, ces derniers cor- respondent aux lobes interne et moyen des mêmes organes chez les autres Insectes . et la partie princi- pale du membre n'est autre chose que le palpe très développé.

(2) Le premier article des mâchoires est attaché à la tête par une jointure en ginglyme, et correspond à la pièce que j'ai désignée d'une manière géné- rale sous le nom de coxits, en parlant des Crustacés (d). Dans les écrits des entomologistes, il porte des noms très variés : ainsi, c'est le cardo ou char- nière de Kirby et Spence, le style dans la nomenclature d'Audouin, la branche transversale de M. Straus, et \e sous -maxillaire de M. Brullé. Chez

(a) UiiiUé, Op. cil. {Ann. des sciences nat.., 3" série, t. II, p. 280 cl siiiv.).

\b) Voyez Y Atlas du Règne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 00, i\g. ia, la,

etc.

(c) Voyez l'iciet. Histoire naturelle des Insectes névroptères {Monographie des Pcrlides, pi. '3i,

%. 8).

[d] Voyez ci-dessus, page 481.

XUMATL'RE BUCCALE DES INSECTES. .") 1 l

celle dont la disposition varie le moins ; son premier arlicle est cuniondu avec le support, et les autres, grêles et cylin- dri(|ues, constituent un palpe ^ c'est-à-dire un appendice (ili- forme et très mobile (|ui ressemble un peu à une patte rudi- mentaire (1). La branche moyenne de la mâchoire affecte

les Insectes parfaits, il est souvent très court, mais chez; les larves il est en général plus grand proportionnelle- ment (a).

Le second article basilaire de la mâchoire, qui fait suite au précédent, correspond à un Irocliile , et con- stitue la pièce nommée stipes ou tige parKirbyetSpence,s^?/^'par Audouin, pièce dorsale par M. Slraus, maxille par M. Newman, et maxillaire par M. Burmeister et M. Brullé.

A partir du bord ;i intérieur de cet article, le membre se bifurque, et sa portion externe, représentant la suite du protopodite , constitue le palpe, tandis que sa portion interne donne naissance aux branches accessoires ou parergopodites. Mais le corps de la mâchoire est souvent en quelque sorte complété par deux autres pièces qui en occupent les angles antérieurs, et qui sont : l'uno, la pièce suivante du protopodile, appelée le palpiger; Taulre, rurticlo dont naissent la bran- che interne et la branche moyenne de la mâchoire. En général, cette der- nière pièce est plus apparente en de- hors qu'en dedans, et, à cause de ses relations avec l'nn de ces lobes plutôt qu'avec l'autre, on la désigne souvent

sous le nom cVhtjpodactyle (Audouin), ou de sous-galea (Brullé) ; dans mes leçons au Muséum, j'ai préféré l'ap- peler le maxillaire accessoire. Elle n'est jamais distincte chez les Ortho- ptères , et quelquefois même toutes ces pièces sont soudées ensemble ou confondues en un seul article qui représente aussi la branche terminale moyenne : par exemple, chez le Sca- rabé Hercule (6).

(1) Le palpe maxillaire n'est d'or- dinaire que très peu développé chez les Insectes à l'état de larves : ainsi, chez la Chenille du Cossus, il n'est représenté que par un petit maïuelon conique formé de deux articles (c), mais il est néanmoins la continuation principale de la portion basilaire et commune de cet organe. Oiiflf]"efois il reste toujours rudimentalre, et ne se compose que d'un très petit nombre d'articles , par exemple chez divers Charançonites (d) et chez les Scoly- tes (e) ; mais d'autres fois il s'allonge considérablement, et l'on y compte jusqu'à six articles placés bout à bout. Chez beaucoup d'Hyménoptères, tous les segments du protopodite qui vien- nent après le trochite, c'est-à-dire le méroïte et les articles suivants, sont

(a) Exemple : la larve du Hanneton (\ov. V Atlas du Règne animal de Ciivier, Insectes, pi. 15, fis- 16).

(b) Voyez l'Atlas du Règne animal, pi. 40 bis, Cig. i c.

(c) Lyoïinct, Anatomie de la Chenille du saule, pi. -, fiy- 1- {d) Voyez V Allas du Règne animal, Insectes, pi. 58, lig. 9 c. le) Op. cit., pi. 61, lig. 3 b.

512 APPAKlilL DIGKSTIF.

des formes très variées : chez les Sauterelles et les autres Orthoptères, elle s'élargit en manière de (lis(]ue, et eueapu- ehoiine pour ainsi dire la })artie adjaeente de la branche interne, disposition qui lui a fait donner le nom de casque ou galea; chez d'autres Insectes, elle s'incline en dedans, se garnit de poils rigides, et devient la principale partie préhensile de l'or- gane, par exemple chez les Lucanes et les Bousiers; enlin, chez d'autres Coléoptères qui composent la famille des Carnas- siers, elle devient filiforme, et constitue un palpe surnuméraire semblable à celui formé par la branche externe du membre, mais plus petit (1). La branche interne forme quelquefois à

gièlcs,cyliiidiiqiiesel réunis pour con- stituer le palpe (a); mais, en général, la première lie ces pièces, ou basitrochite, est élargie et plus ou moins confondue avec la pièce maxillaire, de façon à entrer dans la composition du corps de la màclioire, et, ainsi que je l'ai déjà dit, la plupart des entomologistes la désignent sous le nom de pal- piger. Le palpe est alors composé de cinq articles ou d'un nombre moindre. Cbez les Orthoptères, on y compte toujours cinq articles (/j), et chez les Coléoptèrer, il y en a ordinairement quatre, dont le premier ( ou tro- chile) très court, et le dernier est de forme variable, suivant les genres (c). Chez la plupart des Névroptères, ces palpes sont également filiformes et composés lie quatre ou cinq arti- cles ((/). Enlhi , les entomologistes

pensent que chez les Ijbelluliens ces appendices manquent complète- ment ; mais ils me paraissent être en réalité représentés par la branche externe de la mâchoire, que l'on con- sidère généralement comme étant le galea (e).

(1) l^a branche moyenne des mâ- choires est coniparabie à ce que j'ai appelé le mésognathiie chez les Crus- tacés, bien ([u'ell;; naisse du côté in- terne du j)r(ttopodite, au lieu d'être placée du côté externe de cet or- gane. Lorsqu'elle est large et plus ou moins foliacée, ou en forme de lame, Lalreille lui donne le nom de lobe externe chez les Coléoptères, et de galea chez les Orthoptères ; Kirby et Spence l'appellent lube supérieur , et Audouin dactyle ; mais lorsqu'elle devient filiforme et articulée, ou l'ap-

(d) Exemples : Andncne {Atlas du, Hèyne animal, pt. Ii25, lig. 3 c.

Guêpe (toc. cit., pi. 124, liij. 5 c).

Mulille (loc. cit., pi. H 8, l\g. 4 b).

(b) Exemple : Sauterelle (Op. cit., pi. 83, lig. 1 a). ((,) Exemples : Cicindèle {Op. cit., pi. IG, li^. 4t).

Ad'inc [Op. cit., pi. 33, fig. 4).

Hydrophile (Op. cit., pi. 38, fig. 3t').

((/) Exciii|ilijs : Fourmilion (Op. cit , yl 10."), liir. 1 b).

Seiiibhde lOp. cit., pi. lO.'î, tig-. 1 b).

(e) Voyez le Hcgue animal, l.NSKCTiij, pt. lui, lig. 1 a.

►' I o

A15MATLUI': «ICiJLVi: DES l.NSLCTIiS.

clie seule In portion préliensilc de la mâchoire, et alors elle se lermine souvent |)ar une sorte de gritïe ou d'ongle mobile, ainsi que cela se voit chez les Cicindcles ; mais d'autres t'ois elle est lamelleuse seulement, et dans quelques cas elle est rudi- mentaire (1).

Le bord de la portion préhensile de la mûchoire est, en

pelle généralement palpe maxillaire interne, ou palpe accessoirr. Il se conipose alors de deux articles.

Chez les Orthoptères, le galea est toujours inenne ; mais chez les Coléo- ptères il est en général garni de soies marginales, et souvent il est armé de dents.

La branche interne des mâchoires ne se compose d'ordinaire que d'un seul article appelé lacinia par Mac Leay, lobe interne par Latrcille, en- dognathe par Audouin, manda par M. Burmeister, stipes par Erichson, et intermaxillaire par M. Straus et m. Brullé.

Chez les Cicindélètes, il porte à son extrémité un article mobile qui est dis- posé en manière de crochet ou de grilTe (a), et qui est appelé onglet par Latreille , et prémaxillaire par M. Straus. Chez les Libellules, on trouve aussi, à la face interne de la mâchoire , des épines mobiles que M. Brullé considère comme les ana- logues de celte pièce prémaxillaire.

Chez beaucoup de Coléoptères car- nassiers qui sont très voisins des Cicin- dèles, et qui constituent le groupe des Carabiques, la portion préhensile de - lu mâchoire est formée aussi par la

branche interne de cet organe seule- ment, et se termine d'ordinaire par un crochet aigu qui ressemble beaucoup à l'onglet dont je viens de parler, mais qui est immol)ilc (6). W y a beaucoup de raisons pour croire que c'est l'a- nalogue de cet article soudé à l'in- lermaxillaire.

Chez d'autres Insectes du même ordre, par exemple chez les Longi- cornesdu genre Lamia (c), la bran- che moyenne , au lieu d'être palpi- forme , est lamelleuse et arquée du côté interne , le bord préhensile de la mâchoire est forméautant par cette pièce que par l'intermaxillaire.

Enfin, dans beaucoup de cas l'inter- maxillaire devient très petit ou même rudimentaire, et la partie préhensile de la mâchoire est formée entièrement ou presque entièrement par la bran- che moyenne, qui alors s'élargit bciui- coup; disposition qui se voit chez la Phalérie des cadavres [d], le Diapère du bolet (p), etc.

(1) Chez beaucoup de ces Insectes, la branche interne de la mâchoire n'est représentée que par une petite bordure lamelleuse et poilue qui occupe le bord interne du maxillaire, et toute la portion terminale du corps de cet

(a) Voyez V Atlas dti Règne animal, Insectes, pi. 16, fig'. \ b , A c, etc.

(b) Exemple : le Carabe doré {Op. cit., pi. 2-i, 11^. ■] 2 c).

(c) Voyez le Règne animal, pi. G8, fig. 2 o. {d) Op. cit., pi. 50, llg. 1 b.

(e) Op. cit., pi. 50, fig. 2 c.

V.

33

Lèvre

inft'iieiirc.

51 /| APPAREIL DIGKSTIF.

général, garni de pointes aiguës chez les Insectes chasseurs, et l'on trouve une disposition semblahle chez beaucoup d'espèces qui se nourrissent de substances végétales difficiles à ronger (1); mais cette partie de Tarmalure buccale est destinée principa- lement à amener les aliments sous le bord tranchant des man- dibules ou à les y retenir, et, chez les espèces (jui vivent de poussières végétales ou de matières animales peu résistantes , ces organes se terminent en général par une large expansion en l'orme d'' |>cllc plutôt que de râteau : par exemple, chez les Cétoines et les Bousiers (2).

^9. Au premier abord on pourrait croire que la lèvre iiitérieure des Insectes broyeurs est un appendice impair, car elle est simple à sa base et se trouve sur la ligne mé- diane à l;', [)artie postérieure de la bouche ; mais elle est en réalité un organe appendiculaire double analogue aux mâ- choires et composé d'une paire de membres réunis à leur base (5). Les entomologistes donnent le nom de menton à l'es- pèce de sujjport impair constitué par la coalescence de la por- tion coxale de ces mâchoires postérieures (4), et celui de palpes

organe est formée par la branche moyenne, qui et>l tanlôl allongée (a), d'autres fois courte, mais très large (6). Chez quelques espèces, le lobe moyen est armé de grosses dents: par exem- ple , chez le Uaiineton (c).

(1) Il est aussi h noter que, chez les Insectes dont les mâchoires sont armées de crochets puissants, ces pointes sont presque toujours portées par la branche interne de ces or- ganes {d).

(2) Ainsi, chez le Bousier, les mâ- choires sont foliacées et terminées par une large lame formée par la branche moyenne de ces organes [e] ; chez les Cétoines, ce lobe est recouvertde longs poils très serrés (/").

(o) C'est surtout chez les Ortho- ptères que cette analogie est mani- feste.

(/O Lv. menton, ou ganache, se trouve engagé entre la base des deux mâchoires, et articulé par son bord

(a) Bxem[ile : Céloineu (voy. VAllas du Règne animal île Ciivier, Insectks, pi. iS, ûg. 6 a), ib) Exeiiiple ; Meuclius (Op. cit., pi. 39, %. ■) c).

(c) Voyez Slraiis, Considcr. sur l'anat. comp. des Animaux articulés, pi. 1, lig. 8 et 12.

(d) Exemple : Orthoptères (voy. V Atlas du Hègne animal, Insectes, pi. 81, lig. le; pi. 82, i\g. 3c ; pi. 84, fig. 1 a, elc).

(e) Voyez VAtlas du Hègne animal, I.nsectes, pi. 3'J bis, fig. 3 t. {() Op. cit., pi. ib, l\. Ort.

ARMAÏUr.t: IILCCALE DES LNSECTES. 515

labiaux à une paire (r;]|)})eiid!ces grêles, et ordinairement tri- arliculés, qui les terminent du eôté externe. Enfin les parties qui se trouvent en avant du menton entre les deux palpes constituent ce que l'on appelle communément la languette; elles correspondent aux branches moyenne et interne des deux

pofitéricur à une pièce Uansversale du squeleUc légiimentaire, qui est tanlùt mobile, d'aistres fois soudée à la base de la boîle crânienne, et qui est dési- gnée par les entomologistes sous les noms de submentum (a) ou de pièce prébasilaire (6). Il paraît correspon- dre aux deux paires d'articles qui con- stituent le support des mâchoires, c'est-à-dire les coxites et les basi- trochites. Enfin, il porte à ses angles antérieurs les palj)es labiaux, cl gé- néralement il n'olî'ic sur la ligne !né- diane aucune trace de division, mais quelquefois il est incomplètement partagé en deux moiliés par une petite éciiancrure ou une suture mé- diane : par exemple, chez les Or- thoptères des genres Xiphicère et Truxale (c).

Les palpes labiaux n'olfrent dans leur disposition rien qui soit important à noter ; mais la languette présente des modifications très nombreuses. C'est chez les Orthoptères qu'elle se développe de manière à être le plus facile i! étudier. Chez les Phasmes, par exemple (d), elle se compose d'une première paire de pièces séparées par une suture médiane et correspondante

aux articles maxillaires accessoires des mâchoires, qui portent chacune deux lobes terminaux. Ceux-ci sont évidem- ment les analogues des parergopo- dites, qui, dans les mâchoires, con- stituent, d'une part le galea ou les palpes accessoires, d'autre part l'in- termaxiilaire ou lame interne. Les branches de la paire interne peuvent être appelées endochilites (e) ; les autres ont depuis longtemps reçu le nom de paraglosses.

CiiezlaCourlilière [Grxjllolalpa oui- garis), ces branches sont composées chacune de deux articles placés bout à bout, et au-dessus d'elles on voit sur la ligne médiane un organe im- paire ; mais celui-ci appartient à l'in- térieur de la bouche et ne dépend pas de la lèvre inférieure (/).

Chez beaucoup d'Insectes, la par- tie basilaire de la languette (ou basi- chilite) n'est constituée que par une pièce médiane qui représente les deux maxillaires accessoires, comme dans le cas précédent: par exemple, chez les Tétryx (y). Chez ces Orthoptères, ainsi que chez plusieurs autres, on remarque aussi que les endochilites , ou branches internes de la languette,

{a) Newport, art. Insecta (Todd's Cijclop. of Anat. and Physiol., t.II, p. 854).

(b) Slraiis, Considérations sur les Animaux articulés, pi. i, tig. 3, /".

(c) Voyez Doyère, Insectes de VAtlus dit, Règne animal de Cuvier, pi. 85, liy lig. 2 d.

{dj Voyez V Atlas du Rèyne animal, Insectes, pi. 80, fig. 2 d. (e) De j^£~)oç, lèvre, et î'v^otsoo;, interne. (/■) Voyez VAtlas du Règne animal, Insectes, pi. 81, fig. 1 d (0) Op. cit., pi. 8t>, tig. ig.

4 c, et Hi,

516 APPAIŒIL DKilïlSTIF.

inîichoires proprement dites. Chez (jnehiLies Insectes, elles sont distinctes les unes des autres, et constituent deux paires de petits appendices lamelleux grêles et biarticulés ; mais, en général, ce sont de simples lobes, et, dans beaucoup de cas, elles manquent en partie, ou se confondent entre elles de façon à ne constituer qu'une pièce médiane qui à son tour est souvent complètement soudée au menton. Du reste, ces moditications ne [)araisscnt pas avoir beaucoup (Timportance, et c'est surtout au [loint de vue tic la classification ([uc leur étude offre de l'intérêt (\).

tout en restant distincts entre eux, tendent à devenir nidinientaires ; et ciiez d'autres Insectes du même or- dre, ces parties de la lèvre inférieure disparaissent complètement, de façon que la languette n'est représentée que par les deux paiaglosses ou branches moyennes, disposition qui se voit chez les Cneumores, les Trnxales, les Xi- phicères{a^, etc.

Enfin , chez d'autres Insectes broyeurs , la languette est réduite à une seule pince médiane : par exemple, chez le fourmilion (h) , le Hanne- ton (c), etc. ; et souvent cette pièce ter- minale est même complètement con- fondue à sa base avec le menton, ou n'est représentée que par un ou deux prolongements du bord antérieur de cette pièce qui s'avancent entre les palpesen chevauchant lantôtau-dessus, tantôt au-dessous du point d'insertion de ces appendices. Cette fusion de toutes les parties basilaires et acces-

soires de la lèvre inférieure en une seule pièce médiane se voit chez les Cétonides.

(1) Les Coléoptères, les Orthoptères et les Névroplères ne sont pas les seuls Insectes dont la bouche soit orga- nisée pour la mastication, et, sous ce rapport, les Thysanoures présentent les mêmes caractères. Chez les Lé- pismes , par exemple , on trouve toutes les parties dont il vient d'êlre question très bien développées : sa voir, un labre, une paire de man- dibules ; une paire de. mâchoires pourvues d'un palpe et d'un petit galea ; enlin , une lèvre inférieure composée d'un menton et d'une paire de palpes (cl).

Chez les Anoplures, de la famille des Ricins, Insectes i)arasitesqui vivent presque tous sur des Oiseaux, la bou- che est également armée d'un labre, d'une paire de mandibules, et d'une lèvre inférieure portant une paire

(a) Atlas du liégne animal de Ciivier, Insectes, pi. S4, Iîl;. \ il et 2(/ ; pi. .S5, fig. ie.

(b) Op. cit., [il. 103. fig. i c.

(c) Slnuis, Considcv. sur l'anal, cnmp. des Animaux articulés, pi. i , fig. 13 /).

(d) SaviL,M)y, É(j\jple, Myriapodes, pi. 1 , lig. 1 , 2, i, o, u.

-- Trcviramis, Ikber die Saugwerkzeuge der Inschlen (Vermischlc ScUrijini, I. Il, pi. 2,

ARMATLiRn RUCCALF, W.S, INSF.CTKS.

17

Le mode d'orgaiiis;ition que je viens d'iiulKiiier se reiieontre chez presque tous les Insectes masticateurs. Il y a cependant quelques Animaux de celte classe dont la bouclie, tout en étant conl'ormce pour la préhension d'aliments solides, ne présente pas une structure si compliquée ; les a[tpendices dont elle est armée tendent parfois à icntrerdans l'intérieur du tube digestit, et à se cacher })lus ou moins complètement derrière deux replis cutanés qui représentent, d'une part le labre, d'autre part la lèvre inférieure ; enfin, les mâchoires, aussi bien que les mandibules, sont (pielquefois réduites à une seule pièce cornée en forme de crochet articulé siu^ une longue tige comparable aux baguettes qui, chez la plupart des Arthropodair(>s, rem- })lissent les tonctions de tendons. Ce mode d'organisation se voit chez la plupart des Podurelles (1).

lie palpes ((/) ; mais quelquefois les màclioires sont nidimentaires , ou mnnqueiil : par exemple, dans le genre Trichudectes {b).

(1) L'appareil buccal des T'odureiles a été étudié avec beaucoup de soin par M, Mcolet. Cet enlomologisle a trouvé que dans le genre Achoriites . tous les appendices masticateurs manquent, et la bouche a la forme d'un tubercule conique peicé au sommet; mais chez les autres Insectes de cette famille il a trouvé im labre, une paire de mandibules, unepairedc mâchoires dépourvues de palpes, et une lèvre inférieure large, sans palpes, et formée par une pièce triangulaire analogue

au menton. Les mâchoires, et surtout les mandibules, ont la forme de gros crochets denticulés sur le bord (r).

La bouche est organisée d'mic ma- nière analogue chez les larves de certains Diptères : LOEstre du Cheval, par exemple , les mandibules con- stituent une paire de crochets articu- lés sur une pièce médiane ; et les man- dibules sont représentées par une paire de petites pièces cornées denliculées sur les bords [d).

Chez d'autres larves du même ordre, par exemple chez le PiopJula Peln- sionis, on ne trouve plus qu'une seule l)aire de crochets qui sont constitués par les mandibules, et s'articulent sur

(a) Lyonnct, Recherches f!uv Vanatomie et les métamnrpkases de âilférentes espi'ces d'Insectes, pi. S.fit^. 7.

Denny, Monofjraphia Anoplurorum Britanniœ. pi. 'iO, fig. -c.

(b) Niizscli, Die FamiUeii vnd Galtungen der Thierinsekteii (Gcrniar's Ma(jaiin dcr Eiilnmn- Ingie, t. 111, p. 294).

(c) Nicolet, Hechcrches pour servir à l'histoire des Podurelles, p. 33, pi. -i, fig. 0 à 8 (exlr. lies Nouveaux Mémoires de la Société helvétique des sciences naturelles, 48-41 , t. VI).

(d) Jo'.y, liecherches %nnlo(iiques, anatnmiqurs, pliiisi,)toqiqiief; et médicales sur les Œstrides, p. 34, pi. 5, fijr. 3, 4, 5.

Aniialiire pharyngienne

518 APPAREIL DIGKSTIF.

§ 10. Il est aussi à noter que, indéi)en.lnmmeiit de l'ap- pareil dont je viens de parler, il existe, en général, dans Tinté- rieur de la bouche des Insectes broyeurs, des parties saillantes qui paraissent intervenir dans le travail de la mastication en retenant temporairement les aliments dans cette cavité pendant que les mandibules les écrasent ou les hachent. Ce sont de petits lobes saillants qui sont lixés, d'une part derrière le labre, à la face supérieure de la cham!)re buccale, d'autre part au plancher de cette cavité, en arrière de la languette. Le premier de ces organes est désigné d'ordinaire sous le nom (Vépipha- rynx, et constitue, chez beaucoup de Coléoptères, un lobe impair garni de poils qui se voit immédiatement derrière l'échancrure médiane du labre, ou bien encore une espèce de bourrelet saillant (1). Chez les Orthoptères et les Névroptères, il est rudimentaire. L'autre lobe intrabuccal , appelé hypo- pharynx, à raison de sa position à la partie intérieure du vesti- bule digestif, est très développé chez les Libellules et quelques autres Névroptères, il constitue une éminencc trapézoïdale

un support médian formé de deux ti- gelles longitudinales {a). Swammer- dam, qui les avait assez bien vus, les comparait à la griffe d'un épervier, et Fiéaumur les appelle des harpons.

(1) L'épipliarynx, ainsi nommé par Savigny, a été décrit par quelques au- teurs comme une langue palatine (6), et a été appelé aussi Vépiglosse (c). fl est très visible chez les Coléoptères lamellicornes des genres Ateuchus,

il constitue un lobe médian appli- qué contre la face interne du labre. Chez les Copris et les C.éolrupes, il a la forme d'un bourrelet saillant; mais chez d'autres Coléoptères de la même famille, tels que le Hanneton, il n'est pas développé. Chez les Dytisques , il est au coiitraire fort saillant, el se loge dans une cavité située vers le bord supérieur du labre , entre les deux grands lobes mandibulaires (d).

(a) I-éon Dufour, Histoire des métamorphoses et de l'anatomie du Piophila Pelasionis (Ann. des sciences nat., d844, t. I, p. 37^, pi. 16, fig. 8 et -10).

(b) Savigny, Théorie de la bouche, p. ïi.

Kirljy ond Spence, Introduction to Entomolody, t. III, p. 358.

(c) Saviifny, Théorie des pli'ces de la bouche, p. ii.

Latrnilic, Observations sur l' organisation extérieure des Animaux articulés {Mém. du Mtiséum, t. VIII, |>. ■ISf)).

((/) Briillé, necherches sur les transformations des appendices dans les Articulés (Ann. des sciences nat., 3" série, 1844, i. Il, p. 3(i4).

AKMATURE BUCCALE DES l^'SECTES. 519

garnie do poils H appliquée contre la base de la lèvre inte- rienre. Il est très développé anssi chez les Ortlioplères, on il s'allonge davantage, et se divise en den\ portions, de lacon -a ressembler à nne paire de macboires rndinienlairos. Enlin, chez les (',oléoptcres, il est (pieUinefois rndinienlaire et ne con- siste qu'en (\qu\ on trois tubercules velus; mais d'autres l'ois il s'allonge considérablement et ressemble à \\\u' langue bilide. Du reste, cet organe, de même que l'épipbarynx, n(^ paraît pas api)artenir au système aj»pendiculaire dont naissent les mandibules, les mâchoires et la lèvre supérieure; c'est seide- ment un repli des tégimients de la cavité buccale, qui est sou- vent fortifié par une iùèce cornée particulière (1).

§ 11. Dans une autre grande division de cette classe, formée par les Insectes lécheurs, c'est-à-dire ceux qui, à IV-tat parfait, se nourrissent de matières plus ou moins liquides dont ils s'emparent à l'aide d'une sorte de langue longue et flexible, l'appareil buccal offre un mode d'organisation ditTérent, mais se compose des mêmes i)arties que chez les [nsectes mastica- teurs dont nous venons de nous occufier. Ainsi, chez l'Abeille, le Bourdon et les autres Hyménoptères qui récoltent le miel, Hvménoi.itres

Appareil

IllICl'ill

lies Insectes lédienrs.

(1) Oivors pnfomologistes donnonl fi cel organe le nom de langue. M-iis beaucou|) d'anires désignent de la même tnanièie la paiiie de la lèvre inférienre qne nons avons appelée languette, et il règne dans lenrs écrits une grande confusion relative- ment àces parties de Pappareil buccal. Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai à un travail spécial de M. Brullé, la question de syno- nymie a été très bien traitée (a),

Comme exemple des Fn.'-ccles ayant

un liypopharynx b'on dr've]op:>é, je citerai en premier lieu le llanncion, cet ortiano a élé figuré jVar ,\i. Sir.iU'; Durkheim. C'est une petite tnasse charnue et mobile placée au-dessus du milieu du menton, el divisée en quatre lobes garnis de papilles ou de poils et portés sur deux (ilels coinés (ou apopiiyses glosso-pliaryngiennes) qui se prolongent en, arrière (6). et qui donnent attache à une partie de^ îibrcs constitutives des muscles du pharynx.

(a) Tirnllé, Recherches sur les transformations des appcndu-es (Inc. cit., p. ''ni cl sniv.) (()) Slrans, Cnnsidéralious sur l'anatomie des Animaux artirnl^s, p. "2, pi. 1, fig-. ii.

0

5'20 Al'P.VlîKlL DiGKSTlf.

11 trouve, coinine d'ordinaire, sur le devant delà bouche, une lame médiane qui est le labre, et sur les côlés une paire de mandibules (|ui sont disposées à peu près de la manière ordi- naire, bien qu'elles ne servent pas à la préhension des alimeuls, et sont employées comme instruments de seulplure dans les travaux architecturaux de ces Animaux (J). Plus immédiaie- ment en rapport avec l'entrée du canal digestif, on remarque un ûdsceau de baguettes ou lamelles très allongées. On compte facilement sept de ces appendices; dans quelques genres de la même famille, tels que les Panurges et les Nomades, on en distingue même neuf : el au jiremier abord il pent paraître difficile de reconnaître dans ces organes fililbrmes les ana- logues de mâchoires et de la lèvre inférieure d'un Coléoptère; mais, en les examinant attentivement, on ne tarde pas à se convaincre de leur similitude fondamentale. En effet, cinq de ces appendices sont portés sur une pièce cornée impaire qui est i)laeée derrière la bouche, et qui représente évidemment le menton des Insectes broyeurs. Les appendices de la paire exlé-

(1) Il osl à noicr cependant que les mandibviles des Al)eilles,au lieu de se lerniiiier en pointe, comme d'ordi- naire, sont élargies vers le bout (a) ; je reviendrai sur les particularités de leur structure, lorsque je traiterai des travaux d'architecture de ces Animaux.

J'ajouterai que j)arfois certains Hy- ménoptères parviennent, à l'aide de leurs mandibules, à ronger des sub- stances très dures, qui ne leur servent pas comme nourriture, mais qui s'op- posent à leur passajjfe au dehors, quand ils ont achevé leurs métamorphoses

dans une caviié close. C'est de la sorte que pendant la campagne de Crimée, on a trouvé dans des cartouches de l'armée russe des balles de plomi) qui avaient élé perforées par des Sircx ou Urocères i6). Du reste, dans des circonstances analogues, certains Coléoptères taraudent aussi des sub- stances très dures, telles que le plomb ou lalliage des caractères d'impil- mcrie (c), et j'ai observé beaucoup de cas dans lesquels des lames de i)làlre et des pierres tendres avaient été enta- mées par les mandibules des 'l'ermites.

(a) Voyez r,K/(7s du lîèijne animal de Cuvier, pi. 129, fit,'. 6&.

(/^) Duiiiéi'il , lleclievclies histoi'iqiics s^ir les csj èces d' Insectes iini ronfjenl el perforent le plomb {Comptes rendns de i Académie des sciences, 18r)7, t. \LV, p. Sli'l).

(c) besiiiaresi, I\'oiice sur qucUiues perfuralions faites par des Insectes dans des plaques métal- liques {Fteviie 'ipolofiiqiie di' ('■iK'nii-Mc'iii'vilIc, ISi-i).

Ar.M.VTtîRE RlCCALK dES INSkCTRS. 521

rieurc naissent aux angles antérieurs de ce support, et, par leur strueUuT. aussi bien que par leurs relations anatomi(jucs, ils cor- respondent aux palpes labiaux ; seulement leur premier article, au lieu d'èlre courtet cylindrique, est devenu excessivement long et himelleu.x. L'appendice médian, qui est la partie la plus impor- tante de l'appareil buccal, car il constitue l'espèce de langue déliée et flexible dont l'Animal se sert pour léclier le miel, est formé par la réunion des parties dont se composent les lobes moyens de la languette chez un Ordioptère. Enlln, de chaque coté de la base de cet organe, se voit une lamelle appelée jt)am- ylosse^ qui est le représentant du lobe externe de cette môme languette (1). Ainsi, chez ces Insectes lécheurs, toutes les parties

(1) Ainsi la langueltc de rAbcilloest formée par la portion de la lèvre in- férieure que j'ai appelée Vendochilite, et elle poite à sa base une paire de filanienls conslilués par les para- glossps. Elle est filiforme, 1res poilue, et divisée en une midtilnde de petits segments articulés et mobiles ; son extrémité est un peu aplatie en forme de spatule {a} ; enlin , sa face su- périeure est sillonnée sur la ligne médiane, et elle paraît être composée de deux petits cylindres accolés côte à côte.

Les palpes labiaux sont très allon- gés, slyliformes, et composés de quatre articles placés bout à bout. Chez plusieurs Mellifères, les deux pre- mières pièces sont fortes, et les deux dernières rndimenlaires et rejetées en dehors, de façon à ressembler à un petit palpe accessoire.

Les principaux muscles moteurs des pièces appendiculairesdc la lèvic infé-

rieure sont logés dans une sorte de gouttière formée par le menton, et il est à noter que l'ensemble de cet ap- pareil est rendu très protractilepar le jeu d'une pièce cornée de forme allon- gée qui s'articule avec le bord posté- rieur du menton, et qui fonctionne à la manière d'un levier pour pousser celui-ci en avant (6).

Dans l'état de repos, la langueite est cachée dans une espèce de gaîne for- mée par les palpes labiaux et les mâ- choires ; mais quand l'Animal veut s'en ;,ervir, il la projette rapidement en avant, et par des mouvements de va-et-vient ramène entre les valves de l'étui maxillaire la portion terminale de cet organe filiforme dont les poils se sont chargés de sucs visqueux et sucrc's puisés dans la corolle des Heurs. Ainsi ce n'est pas en pompant les liquides que l'Abeille se nourrit, mais pour ainsi dire en lapant, à peu près comme le fait un ChaL

(a) Swammcrdam, Diblia Nalurœ, pi. 17, llg. 5.

Brandi et nalzehiii--, SIeilicinische Zoologie, t. Il, pi. 25, fii,". 10. (6) Savigiiy, Egypte, Insectes hyménoptères, pi. 1, fi-. 1, u.

Newport, Inserta (TtHUl's Cnclop. of Anat. and l'Iiijsiol., t. II, p. 808, fiy. 3"5, 37 0).

o2j. appareil digestif.

constiliilives de la lèvre inférieure se retrouvent aux mêmes plaees que cliez les Inscetes broyeurs, seulement elles ont ('liang('' (le forme et d'usages par suite de leur grand allongement. Les mâchoires sont également reconnaissables, maigre des modiO- ralions analogues à l'aide desquelles ces organes, au lieu de former une sorte de pince accessoire, constituent une espèce de gaîne bivalve destinée à protéger la languette dans r('tal de repos. Ces membres occupent comme d'ordinaire les côtés de la bouche, entre les mandibules et la lèvre intérieure, et se composent principalement d'une pièce basilairc et d'une longue lame cornée qui s'atténue vers le bout, et qui est l'analogue du galea d'un Ortlioptère ; mais leur palpe ne manque pas et se trouve à sa place accoutumée, seulement il est réduit à de très petites dimensions. Chez d'autres Hyménoptères, ce dernier apj)endice se développe même beaucoup, et c'est ainsi que dans les espèces dont j'ai parlé comme ayant la bouche garnie de neuf organes filiformes, les branches comi>lémentaires du faisceau buccal se trouvent constituées (1).

Chez les Guêpes, la languette, formée toujours par l'endo- chile, ou portion médiane et terminale de la lèvre inférieure, s'élargit en forme de spatule, et se divise à son extrémité en

il)CIiez les Abeilles, le palpe rnaxil- lairc est loiit à f;iil rudinienlaire, et ne se compose que d"iiiie seule pièce (a) ; mais, chez la plupart des Mymc^no- plères, on y distingue quatre ou cinq arlicles, et il devient parfois aussi long qne la branche interne de la mâ- choire {b), ou même la dépasse de beaucoup; et alors celle dernière partie

est courte et élargie, comme chez les Fourmis (c) et les Crabro (d). Kiilin, chez les M util les, le p;dpe se développe davantage encore, et la branche in- lerne de la mâchoire devient rudimen- taire, de façon que le membre tout en- tier prend à peu près la forme d'une petite patte qui porterait à sa base un lobule aplati (e).

(rt) Br.indt et Riilzebnrg, Mcdicinische Zoologie, t. II, fl. 25, ûg. 10 A, /'.

(b) Exemples : Nomades (voy. Ciirtis, British Entomnlogy, t. IV, |il. 419, fig Atlas du liègne animal âe Cuvicr, Insrctes pi. 128, fig. 'Se.

(c) Allas du Règne animal de Cii\ier, Insistes, pi. 117, fip'. 1 r. {d) Op. cit., pi. 1-22, llg. 9 b.

{e) Op. cit., pi. 118, fis. 2 b, Ab.

Blaiifliani

A.RM4TURI!; BUCCALE DES INSECTES.

523

deux lobes, de façon à ressembler davantage à ce que nous avons vLi dans la lèvre inférieure de certains Insectes broyeurs et chez d'autres Hyménoptères , cette partie , ainsi que les mâchoires, se raccourcissant plus ou moins, et établissant tous les intermédiaires entre les lormes extrêmes que nous venons de passer en revue (1 ).

Enfin , les Hyménoptères se font i-emarquer aussi par le grand développement de leur épipharynx. Chez les ÎMellilères, par exem[)le , cet organe constitue un lobe membraneux (|ui est tout à fait distinct du labre, et qui est soutenu [)ar des pinces cornées particulières (2). L'hypopharynx, au contraire, est peu développé et quelquefois rudimentaire (3).

§ 12. Ainsi que chacun le sait, les Chenilles vivent pour la plupart de feuilles, et ont toutes la bouche puissamment armée d'organes masticateurs; mais lorsque ces Animaux ont Lépidopièn

Apparpil

buccal

des

(1) Chez plusieurs llyménoplères, la langueUe ou eiulocliilile se rac- courcit boaucouj) ; les paraglosses man- quent, et les palpes labiaux prennent la forme de petits filaments cylindiiques quadriarticulés, de fyçon à ressembler tout à fait à ceux des Coléoptères, etc.: par exemple, chez les Andrènes (a). Chez d'autres, au contraire, cet organe acquiert une longueur très considé- rable : par exemple, chez les fluêpes solitaires du genre i'iaphiglosse (6). En général, il n'est bifide que vers le bout ; mais, dans quelques insectes de cet ordre, ses deux moitiés consti- tuantes sont libres jusqu'à leur base :

par exemple, dans le genre Synar- (jis {(:). Du reste, c'est chez les .Alasaris que son mode de conformation est le plus remarquable. En effet, la lan- guette bifide de ces Insectes est d'une longueur extrême, et se recourbe en anse dans une sorte de gaîne qui fait saillie au dehors, en arrière du men- ton ((/).

(2j Cet organe n'avait pas échappé à l'attention de Réaumur (c).

(j) Chez les Eucères, l'hypopharynx est solide et s'emboite avec Tépipha- rynx (/'); mais c'est surtout chez les Fouisseurs, tels que les Sphex et les Scolies, qu'il est bien développé.

pi. 2,

(a) Voyez ['Atlas du Règne animal de Cuvier, Insectes, pi. 125, lig. 5 b. (6) H. de Saussure, Monographie des Guêpes solitaires de la tribu des Euménides, fig'. 1 a.

(c) Idem, ïbid., pi. 5, fig. 2 a.

(d) Idem, ?sote sur les organes buccaux des Masaris {Ann. des sciences nat., i' sério, 1S57, t. VII, |i. lui, pi. 1, lig. 1 à 7).

(e) r.éaumur, Mém. pour servir à l'histoire des Insectes, i. V, pi. '2S, fig. 9.

(;") Savigiiy, Théorie de la hi.urhe (M<'m. sur les Anim. sans verlèhr., t T, p. 12).

5 '2 a APP.VÎlEiL niGKSTiF.

achevé leurs inélamorplioses el sont arrivés à l'état de Papillons, leur régiîiie n'est plus le même, et ils se nourrissent exclusi- vement fie liquides sucrés qu'ils vont puiser dans l'intérieur des fleurs. Aussi, à celle péri'ode de leur existence, les Lépi- doptères ont-ils la bouche conformée pour la succion seule- ment, et |)rolongée en une sorte de pipette flexible qui s'en- roule en spirale pendant le repos on se déploie en avant. Quelquefois cette trompe est d'une longueur très considérable ; mais on connaît des Insectes de cet ordre qui jeûnent pendant toute la durée de leur état adulte, et souvent chez ceux-ci cet organe est complètement rudimentaire. 11 consiste en un tube composé de deux pièces semi-cylindriques finement striées en travers, creusées longitudinalement en gouttière sur leur i\we interne et réunies par leurs bords. De chaque côté de sa base on remanjue un appendice en forme de palpe qui s'avance comme une sorte de corne, et qui est couvert de poils très serrés; par un examen attentif, on découvre aussi au-devant de la trompe trois petites [)ièces semblables à des écailles, et de chaque côté, fixé à la base de cet organe, un appendicule composé de deux ou trois articles rudimentaires. On voit donc que l'appareil buccal des Papillons diffère beaucouj) de tout ce que nous avorls rencontré jusqu'ici chez d'autres Animaux de la même classe; mais Savigny a fait voir qu'il se compose néanmoins des mêmes éléments analomiques. En effet, il a reconnu, dans les trois petites pièces sous-frontales qui sont situées au-devant de la trompe, les analogues du labre et des deux mandibules; il a constaté que les deux grands [)alpes qui s'avancent sur les côtés de la bouche, et qui naissent sui- un article trans- versal, ne sont autre chose que la lèvre inférieure; enfin il a montré d'une manière satisfaisante que la trompe elle -niéine est formée par les mâchoires, dont le palpe devient rudi- mentaire et dont la branche interne s'allonge ex(;essivcmenl, affecte la foi'nie d'une sonde cannel('"\ et se joint à i-on congé-

AUM.Vl'L'Ui: BLICCALi: DES INSliCTES. 520

nèrc sur la ligne médiiuio, pour coiislilucr avec lui un tube aspiraleur ( l).

«i lo. Les mêmes malériaux organiques, einplovés d'une Appareil

«-' o 1 ' i ., Ijuccal

manière différente, forment, chez les Punaises et les autres ^i«Hémipic.cs.

(1) Jusqu'au momeiU Savigny publia sou beau travail sur la ibéorie des organes de la boucbedes insectes, la plupart des anatomisles pensaient que les Papillons étaient dépourvus de mandibules, et que dans la structure de leur bouche on ne pouvait décou- vrir aucune trace du plan d'organisa- tion propre aux Insectes niaxillés (o). Laireille, il est vrai, avait deviné que les grandes lames constitutives de la Irouipe étaient foruK'es par les mâchoi- res {b) ; mais celle vue n'avait été ni développée ni suivie, et l'on proposa même de donner à ces Insectes le nom iVagnathes (c). Savigny fut le premier à avoir une idée complète de l'appareil buccal des Lépidoptères. Cet habile observateur a trouvé que le labre, ou lèvre supérieure de ces Insectes, est une pièce médiane mince, membra- neuse, quelquefois semi -circulaire , mais le plus souvent allongée en pointe, qui est appliquée contre la base de la trompe et reçue dans un léger écar- temenl existant entre les deux (ilets constitutifs de ce tube ((/).

Les mandibules sont représentées ;)ar une paire de petites lamelles,

peu mobiles ou même soudées au chaperon , et situées de chaque côté du labre sur les côtés de la trompe ; elles sont, en général , moins grandes que les écailles épidermi- ques qui revêtent cette partie de la tête (e).

Les mâchoires, lorsqu'elles sont isolées, ressemblent beaucoup à celles des Hyménoptères, si ce n'est que leur palpe est plus petit et leur branche interne plus étroite , plus allongée et plus fortement canaliculée en dedans.

Le palpe maxillaire se compose tan- tôt de deux, tanlôt de trois articles, et il est assez facile à apercevoir chez quelques Lépidoptères nocturnes, tels que la Teigne du blé, il n'avait pas échappé à l'attention de Réaumur (/") , et chez le Galleria cerella {(j). Mais, en général, il est très petit et quel- quefois même tellement rudimen- taire, par exemple chez les Sphinx, que son existence a été révoquée en doute [h), quoique, en réalité, cet ap- pendice ne manque jamais.

La trompe est souvent très longue : chez le Sphinx ligustri, et le Macro- glossa stellatarum, par exemple («);

(n) Cuvier, Leçons d'anatomie comparée, 1805. f. 111, p. 323.

{b) LalreiUo, Histoire des Crustacés et des Insectes, t. H, p. HO.

(c) Spinola, Considera-iiuni sitlla bocca degli Insetti, p. 23 (Gènes, sans date).

(rf) Savigny, Op. cit. (Mém. sur les .inim. sans vertèbr. , l. 1, p. *, pi. l,lii;-. l ; lig- 2^ ot 2-, a).

Doj'ère, Atlas du Règne animât de Cnvicr, Insectus, pi. 131, liy. i b, le, a.

Newport, Insecta (TodJ's Cijclop., l. 11, p. 900, tig;. 3T").

[e] Savigny, Op. cit., pi. 1, lig, 1, i.

Doyère, loc. cit., pi. 131, lig. 16,1 c, 6.

(/■) Réauniur, Méin. pour servir à l'hisloire des Insectes, t. 111, p. 280, pi. 20, lig. Ki. (a) Savigny, Op. cit., pi. 3, lig. 3^. (h) Nevvman, On the Externat Anatoiinj of Insects {Entom. Mayai., p. 84).

(i) Voyez V Atlas du Règne animal de Cuvier, iN.'SiiCTiss, pi. 147, lig. 2 a.

520 APPAHEiL DIGKSllF.

Insectes de l'ordre des Hémiptères, un instrument de succion qui n'est pas une simple pipette, comme la trompe des Papil- lons, mais un appareil perforant que je comparerai à une petite canule renferniant un poinçon aigu, dont les chiruroiens font usage dans l'opération de la ponction (Ij. En elTet, la bouche des Hémiptères se prolonge en forme de tube, et dans l'intérieur de cet organe on trouve deux paires de stylets mobiles dont la pointe peut dépasser l'extrémité de leur étui, et pratiipier dans les tissus des Animaux ou des plantes dont ces Insectes

iiiiiis duns d'autres espèces de la même famille, telles que \e Smerintliusocel- latus{a), elle est fort comte, et chez les népiales elle est riidimenlaire. Tantôt elle est presque nue, d'autres fois cou- verle d'écaillés épidermiques, et sou- vent on y remarque une multitude de papilles qui hérissent en avant sa par- tie terminale : par exemple, chez les Vanesses (6). Ainsi que je l'ai di'jà dit, les deux demi-cylindres qui la consti- tuent sont creusés d'une gouttière lon- gitudinale .'d leur face interne, et, en se réunissant, forment ainsi un tube. IjOrsqu'on fait une section transversale de la trompe , on voit la lumière de ce conduit sur la ligne médiane, et l'on remarque aussi un tube vers le centre de chaque fdet maxillaire (c) : mais c'est à tort que quelques auteurs ont considéré ces dernières cavités comme servant à la succion [d); elles ne s'ou-

vrent pas au dehors, et sont formées par les trachées aérifères entourées d'autres parties molles. 11 est aussi à noter que ces deux appendices sont réunis par une nuiltilude de crochets microscopiques qui en garnissent le bord interne (e), et que leur face in- terne est simplement membraneuse, tandis que leur surface extérieure et convexe est de consistance couen- neuse. Enlin, il existe dans leur inté- rieur des fibres musculaires.

La lèvre inférieure (f) est consti- tuée par un support, ou menton, de forme triangulaire, sur lequel est arti- culée une paire de palpes composés chacun de deux ou de trois articles, et variant beaucoup quant à leurs for- mes et leurs dinicnsions {g). Quelques auteurs désignent ces appendices sous le nom de barbillons.

(1) Le trocart.

(a) Voyez V Allas du Règne animal de Cuvier, Insectes, pi. 14 7, lig. i a.

(b) Ncwport, Itisecta (TodJ's Cyclop., l. Il, p. 901, fig. 378).

(c) Savigny, Op. cit., pi. 2, fig. 1 e.

Doy.re, Atlas dît nègne animal de Cuvier, Insectes, pi. 131 , i\g. 4 d.

(d) l'.éùunmr, Mém. pour servir à l'hist. des Insectes, t. I, p. 235, pi. 'J, lig-. 'Jet 10. (c) Mem, ihid., t. I, p. 237, pi. 0, fig. 6.

Newpuit, Insecta (Todd's Cyclop., t. II, p. 901, lig. 378).

(f) Savigny, Op. cit., pi. 1 , fig. 2 u, etc.

Ooyèrc, lui:, cit., pi. 131 , fig. 1 c.

(g) Exemples : Vllerminia emortualls, les palpes laliiaiix sont très longs (Règne animal, pi. 15(), lig. 8 a), tt le Zereiie grossulariata, ils sont très potils (Up. cit., pi. 150, lig. iiaj.

AIIM.VTUKE BUCCALE DES INSECTES. 5'27

vciilenl sucer les humeurs une piqûre dans laquelle ce tube s'engage ensuite et pompe le liquide épanché (1).

La lèvre inférieure, qui est presque sans usage chez les Lé[)idoptères, joue ici un rôle important ; elle constitue la prescpie totalité de la canule de cette espèce de trocart ou [lilictte armée. En effet, la portion moyenne de ce membre s'allonge beaucoui) , et ses bords latéraux se recourbent en avant, puis en dedans, de façon à se rencontrer dans presque toute leur longueur et à constituer de la sorte un tube (2). En avant, la [)artie basilaire de ce conduit est complétée par le labre, (jui s'allonge aussi et se loge dans l'espace laissé entre les bords de la lèvre inférieure. Les mâchoires se trouvent ainsi entourées par les deux lèvres, et, s'allongeant aussi excessivement, con- stiUicnt dans l'intérieur de cette gaine une paire de slylets grêles et acérés. Enfin, les mandibules, qui se réduisent à l'état de simples vestiges chez les Lépidoptères, prennent ici un déve- loppement semblable à celui des mâchoires, et conshtuent une seconde paire de stylets dans l'intérieur du tube labial (o). La

(1) Linné et Fabricius ont désigne cel appareil sous le nom de rostre; Kiiby Pa appelé proinuscis.

(2) IjC liibe labial (a) est composé en généial de quatre articles réunis bout à biiul, el il présente en avant une fente niédiane. Cliez quelques Hé- miptères, les Nèpes, par exemple, on remarque de cbaque cùlé de la por- tion basilaire de cet organe un appen- dicuie (jui est généralement considéré comme le palpe lingual (6); mais cette détermination me semble très criti- cable, et diverses raisons qu'il serait

trop long d'exposer ici me portent à penser que les palpes réunis entre eux. comme le sont les deux moitiés du menton , constituent les trois der- niers articles de la gaine labiale.

(3) Les appendices qui représentent les mâchoires et les mandibules sont des stylets très grêles et renflés à leur base. Leur extrémité est tantôt simple (par exemple, chez les Pentatomes), d'autres fois armée d'une rangée de petites pointes récurrentes , comme une flèche barbelée, ainsi que cela se voit aux mâchoires des Nèpes (cj.

(a) Saviy-ny, Théorie de la bouche, pi. 4, Cig. 2*, etc.

Doyèrc, Atlas du Règne animal de Cuvior. pi. 88, fig. 2 a, etc.

(b) Savigny, Op. cit., pi. 4, lig. 3\ 3'-*, ô. M. Uoyère a ti-ouvé, chez le Ranalra liucaris, deux petils appendices qui naissent du troisième article, et qu'il assimile à ceux observés par Saviguy. Il les appelle, mais par inadvertance, sans doute, tloi palpes maxillaires (Atlas du Règne animal de Cuvier, INSECTKS, pi. 94, lig. 3o).

(fj Savigny, Op. cit., pi. 4, lit;. 3' et 3o .

528

APPAP.LIL DIGESTIF.

Appareil

buccal

des

Diptères.

forme cl les caracfères accessoires de ra})|)areil de succion ainsi constitué varient un peu : chez les Cigales, par exemple, il se trouve refoulé jusque entre la base des pattes antérieures, tandis que chez les Punaises il est placé sous le front; mais sa structure est partout essentiellement la même (1).

§ 1/i. Les Mouches et les autres Diptères sont aussi des Insectes dont la bouche est organisée pour la succion (2); mais respcc(f de trompe dont ces Animaux sont pourvus ne res- semble ni à la pipette des Lépidoptères, ni au suçoir des Hémi- ptères. Elle se compose cependant des mêmes matériaux organi(jues , seulement plusieurs de ces parties ont subi des modilications j>lus [)rofondes; on y rencontre des variations beaucoup plus considérables que dans les ordres dont l'étude vient de nous occuper, et les analogies y sont souvent plus difficiles à saisir (o). Chez quelques espèces, cet appareil est

(1) Chez la Cigale de l'orme, il existe, indépendamment de la gaîne du suçoir formée par la lèvre infé- rieure et le labre, et des quatre slylels " coiislilués par les mandibules et les mâchoires , quelques pièces acces- soires qui paraissent correspondre aux palpes maxillaires [a).

11 est aussi à noter que chez cer- tains l'ucerons cet appareil s'allonge beaucoup, el dans le repos se re- ploie en arrière, de façon à dépasser beaucoup Fabdoinen el à simuler une queue à l'arrière du corps de l'In- secte {b). Chez les Coccus, le luhe du suçoir n'est représenté que par un tubercule conique très court ; mais les stylets maxillaires et mandibulaircs s'allongent excessivement, el se re-

plient en forme d'anse dans la cavité abdominale , ils paraissent être logés dans une gaîne membra- neuse (c).

(2) Le régime des Diptères varie beaucoup. Les uns, les Cousins, par exemple, vivent du sang de l'Homme ou de divers Animaux, dont ils piquent la peau pour en lirer ce liquide ; d'aulres, tels que les Empides, font la chasse aux petits Insecies dontiissucent les humeurs; il en est aussi qui s'a- breuvent des liquides contenus dan? les matières animales en putréfaction, diverses Mouches, par exemple; mais la |)lupart des Insecies de cet ordre se nourrissent du suc des fleurs.

(o) L'étude de l'appareil buccal des Diptères n'a été qu'ébauchée par Savi-

(a) liriiiiill ri llalzcbiiri,', Ulcdiciuische Zooloçiic, t. 11, p. 207, pi. 27, lig. U h l'J. {b) Px-annuir, Mcm. pour servir à l'histoire des Insectes, l. Ut, pi. 29, fig. H à 14. (c) braiull cl Ralzcliiir^-, Up. cit., t. 11, p. 21, 'i, pi. 27, lig. l à 4.

AUMATLRE BLCCALK DES INSECIES. 520

d'une longueur déuiesurée, eompnrativement à la grandeur du corps de l'Animal : par exemple, chez les Némcstrines d'Égvple, il est en môme temps extrêmement grêle (1). Chez d'autres, telles que la Mouche de la viande, il est trapu, coudé et terminé par une sorte de grand disque charnu. Kntln il est aussi des espèces il est fort réduit, et l'on remarque également des différences importantes dans le nomhre des instruments vulné- rants dont il est [)0urvu.

C'est cliez les Cousins que l'armature huccale paraît avoir le plus haut degré de complication, et, à raison de la petitesse de ses parties constitutives, |)lusieurs de celles-ci ont échappé à l'attention de la plupart des observateurs. On y remarque d'abord une sorte d'étui grêle et allongé qui en occupe la partie inférieure et qui loge une espèce de dard ou de poinçon ; puis, insérée près de sa base, une paire de {letits palpes. Ces parties ont été aperçues dès qu'on a pu se servir d'une forte loupe pour en faire l'étude ; mais, lors(pi'on examine de plus près l'espèce de dard dont je viens de parler, on voit qu'elle est très complexe, et se compose de cin([ aiguilles réimies en un faisceau qui est en partie embrassé par une sixième lancette un

gny, et laisse encore beaucoup à dési- rer. Cependant , plus récemment , Newport a fait à ce sujet des recher- ches importantes ; et M. Blanchard, après avoir donn»-, dans Patlas de la grande édilion du Règne animal de Cuvier, une série de bonnes ligures de celle partie de la tèle dans toutes les principales divisions de l'ordre , a publié une note très intéressauie

sur la théorie de sa coniposilion ana- toniique (a;. On doil aussi à .M, Gersl- feldt des observations sur le même sujet (6).

(1) La Némestrine d'Egypte c>t un Diptère à corps veiu de la famille des Tanystomes, voisin des Anlluax, qui paraît vivre du suc des Heurs ; sa trompe est filiforme et a trois ou quatre fois la longueur du corps (c).

{a] Savigny, Théorie de la bouche, p. 13, pi. i, fig. i.

Nuwpoi-t, an. iNSECTA (Todd's Ctjclop. of Anat. and PliijsiuL, 1839, t. Il, p. 900 etsuiv.).

Blaiicliard, De la composition de la bouche dans les Insectes de l'ordre des Diplcres (Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1850, l. XXXI, p. 424).

(b) Gerstfeliit, Ueber die Mundthcile der sauijenden Inscclen (Jisscrt. inaug.). Dorpal, 1853.

[c) Voyez y Allas du Régne animal de Guviur, Inskcies, pi. 108, lig. 5.

V. 34

530 APPAREIL DIGKSTIF.

peu plus large et inlléehie latéralement en manière de gouttière renversée. Cette dernière pièce est impaire et s'insère au bord frontal de la bouche ; elle correspond donc au labre des autres Insectes. Les deux stylets situés immédiatement au-dessous sont pairs et dentelés près du bout; ils doivent être considérés comme les analogues des mandibules. Une seconde paire d'ai- guilles cornées, qui ont à peu près la même forme, représente les mâchoires, et, quand on les désarticule avec soin, on voit que les appendices palpilbrmes dont il a déjà été question y sont attachés; ceux-ci sont par conséquent des palpes maxil- laires, lùifin, la sixième aiguille est impaire, et elle paraît être formée |)ar la languette ou branche interne de la lèvre infé- rieure, dont les branches externes ou principales constitueraient l'étui tout ce faisceau de stylets se loge quand l'appareil est au repos (1).

(1) .Swammerdam Itit le premier à faire connaître d'une manière gé- nérale la conformation du suçoir des Cousins, et bientôt après, l'exa- men de cet organe fut porté plus loin par son contemporain Leeuwen- lioek. l'iéaumwr ajouta de nouvelles observations sur ce sujet (a); mais, jusqur dans ces derniers temps , la plupart des entomologistes ont laissé inaperçues plusieurs des parties con- stituantes de cet appareil, bien qu'elles eussent été toutes aperçues et ligu- rées vers le milieu du siècle der- nier par un naturaliste italien, l'abbé Holfredi (6). La détermination de la

plupart des pièces énumérées ci-des- sus ne laisse aucune incertitude, et lous les entomologistes sont aujour- d'hui d'accord pour considérer la lamelle impaire supérieure comme un labre, et les deux paires de sty- lets comme les représentanis des mandibules et des mâchoires. Robi- neau-Desvoidy avait pensé que les palpes appartenaient à la lèvre supé- rieure [c] ; mais les observations de 'M. VVeslwood prouvent qu'ils dé- pendent des mâchoires. Il est évi- dent que la gaîne ou demi-étui infé- rieur correspondu la lèvre inférieure. Reste donc seulement le sixième sty-

(a) Swainmerdam, Histoire générale des Insectes, 1G82, pi. 3, lig. B, C.

I-eeinveiilioeli, Arcana Nalurœ, epist. lxiv, fig. i-9.

Réaiimur, Mémoire pour servir à Vliistoire des Insectes, I. IV, p. (i03, pi. 41 el 42.

(6) lîoflVoiii, Mém. sur ta trompe du Cousin et sur celle du Taon (Mélanges de philosophie et de inaUiémattques de la SociiHc royale de Turin pour 1766 à 1709, t. IV, p. 1, pi. 1 à 3).

[c) Hobineau Dcsvoidy, Essai sur la tribu des Culicides (Mém. de la Société d'histoire naturelle de Pana, 1827, l. 111, p. 399).

Ali.M.VTLr.E RL'CCALl:: DUS INSECTES. 5'^1

Chez (rmitrcs Diptères, les Taons, par exemple, la boiiehe est constituée à peu près de la même manière (1); mais, chez la plupart des Insectes de cet ordre, on y remarque de grandes dilTérences dépendantes, les nnes de la suI)stitution de certains appendices impairs à des pièces qui d'ordinaire sont doubles et symétriques , d'autres d'un développement excessif de diverses parlies de la lèvre inférieure et du chevauchement (jui parfois en résulte, ou bien encore de l'atrophie de quel- ques autres parties de cet appareil com[)lexe. Ainsi, chez les Ti|)ulaires, qui sont très voisins des Cousins, la portion basi- laire de la trompe se développe beaucoup ; il en est de même pour les palpes maxillaires. Mais tous les appendices qui constituent les organes iierlbrants dont je viens de parler sont

let, qui est médian cl qui a échappé aux recheiT.lifs de la plupart des au- teurs , excepté UollVedi , Curtis et M. Westwood (a). Ce dernier natura- liste le considère comme étant l'ana- logue de la languette, et je partage son opinion; mais je dois ajouter que cet organe correspond aussi à une lame allongée découverte par Savigny dans la Uompe d'un autre Hiplère (le Ta- banus italicus), et désignée par cet iinalomiste sous le nom û'hypopha- rynx, parce qu'il l'assimilait à nue partie interne de la bouclie dont j'ai déjà eu l'occasion de parler (6). Quant à' la gaîne inférieure, elle appartient certainement à la lèvre inférieure ; mais je suis porté à croire qu'elle n'est pas fournie par la portion linguale de

cet organe, comme on l'admet géné- ralement, et qu'elle se compose des deux palpes labiaux réunis sur la ligne médiane.

(1) Chez les Taons, les appendices buccaux sont moins elTilés que chez les Cousins, et, au-dessous du labre, on trouve une paire de mandibules en forme de lames allongées, une paire de mâchoires dont la branche prin- cipale est styliforme et le palpe grand et lamelleux; enlin, une lèvre infé- rieure terminée par deux grands lobes ovalaires, et entre cet organe et le labre une lame impaire que Savi- gny considère comme une langue ou hypopharynx (c , mais que Newport a mieux déterminée en l'appelant une languette {d).

(a) Curlis, British Enlomology, i. VIII, pi. 537.

Westwood, Introduction ta the modem Classifkaiion of Insects, 1840, t, II, p. 508, fig. iWK

(b) Voyez ci-dessus, page 518.

(c) Saviijny, Théorie de la boucliC des Insectes, p. 13, pi. 4, fig. 1.

Geistfeldt, Ueber die Muiultheile der saugenden Insecten, pi. 1 , fig. 8, 9 et 10. ((/; Newport, art. Insecta (Todd's Cyclup., I. II, p. 1)04).

So^ APPAREIL DIGRSTIF.

en général rudimentaires ou représentés seulement par des lobes foliaeés (1).

La soudure des mandibules entre elles, ou la substitution d'un stylet médian à ces deux organes pairs , est un phéno- mène analogue à celui dont la lèvre inférieure de tons les Insectes nuus offre un exemple, et elle se voit chez beau- coup de Diptères. Un stylet impair se trouve alors au-dessous du labre, qui tantôt conserve la forme grêle et allongée si remarquable chez les Cousins, d'aulres ibis se raccourcit ou disparaît (2).

(1) La forme générale de l'appareil buccal des Tipiiles a élé représentée par riéaiuniir (a); mais la disposition des parties terminales se voit mieux dans une figure donnée par \1. Blan- chard. Les palpes sont remarquable- ment longs et composés de six arti- cles (6) ; du reste, il existe chez les différents 'ripnlaires des variations considéiables dans la conformation de cette espèce de trompe prolractile, et quelquefois elle ressemble beaucoup à ce que nous avons rencontré chez les Cousins (c).

(•2) Celte irane forma lion des man- dibules en un appendice impair et médian a élé constatée d'abord par Newport chez VAsilus crabroniformis et quelques autres Diptères {d), puis par M. lilauchard chez un beaucoup plus grand nombre de ces Insectes {e\ D'autres naluralisles considèrent ce stylet comme un hypopliarynx (/").

Comme exemple de ce mode d'orga- nisation chez les Insectes dont l'appareil buccal est, du reste, disposé à peu près comme chez les Cousins, je citerai les Empis. On leur voit : 1" un labre séli- forme et très long ; un grand stylet maxillaire; o" une paire de mâchoires également séliformeset portant à leur base des palpes simples el grêles; W une lèvre inférieure très allongée et creusée en gouttière à sa face supé- rieure (g). Chez les Bombyles, la lèvre supérieure paraît être, au contraire, très courte et réduile à une petite lame obtuse, tandis que les autres parties de la bouclie sont fort allongées. Le stylet mandibulaire impair est ro- buste ; mais les mâchoires ne sont re- présentées que par une paire de soies très grêles el des palpes fort réduits. Enfin , la lèvre inférieure s'allonge excessivement et se termine par deux branches divergentes (/;).

(a) liéaimiiir, Mémoire pour servir à l'histoire des Insectes, t. V, pi. -2, iig. 8.

(b) lilaiicliurd, Insectks do ['Atlas du Rèçjne animal de Cuvicr, pi. IGS, t'ig. 5(1.

(c) Voyez Westvvood, An Inlrod. ta the modem Classification of Insects, t. Il, p. 513,

(d) Newport, Op. cit. (Todd's Cijclop, of Anat. and Physiol., t. 11, p. 'J04).

(c) lilaiiclianl, De la composition de la bouche dans les Insectes de l'ordre des Diptères {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1850, I. XXXl, p. 425). I/'J Savii,'My, Théorie de la bouche, p. 1.').

Ger.^ifeldi, IJebcr die Mundthcile der sauqcnden Inseclen, p. 30. (g) Blaiicharil, Atlas du Hègne animal de Cuvicr, Inseutes, pi. IGO, iiy. 1 d, 1 b. [Il) Iduiii, ibid., \<\. I(j7, lig. 6ff.

AnM.VTrRlî lU'CCALK MS INSECTFS. 53.!)

Le grand dévolopitenient de la lèvre inférieure porte quelque- fois sur la portion basilaire de cet organe, qui eonslitue alors, pour la totalité de la troni|»e, une espèce de support mobile; d'autres lois il affecte la portion terminale, qui s'élargit extrê- mement et constitue une sorte de palette ou de disque charnu. Celte disposition se remarque chez les Anthrax, dont la bouche est du reste conformée à peu près comme celle de plusieurs des Diptères dont je viens de parler (1 ) ; mais elle est portée beau- coup plus loin chez les IMouches, elle coïncide avec d'autres moditicationsde structure très considérables. En effet, chez ces Insectes, l'appareil buccal consiste en une grosse trompe coudée, qui porte en dessus une paire de palpes, qui est armée de deu\ stylets médians, et qui est terminée [lar mi grand disque ou lobe ovalaire. Sa portion basilaire, dépendante de la lèvre inférieure , est membraneuse, et chevauche sur les parties voisines de façon à les engaîuer plus ou moins complètement et à repousser en avant le labre, qui constitue, comme d'or- dinaire, un stylet médian, et qui s'avauiM? au-dessus de la portion antérieure de la lèvre inférieure. Un second stylet, également impair et situé au-dessus du précédent, repré- sente les mandibules, et se continue postérieurement avec une paire de branches cornées entre lesquelles se trouve un troi- sième organe impair. Celui-ci est formé d'une lai'ge lame

(1) Gliez les Antlirax, l'appareil bue- formées par les mâchoires et leurs

cal se compose de deux gros slylels palpes (a).

impairs et médians, de deux paires Chez les Mydas, la conformation du d'appendices sétacés et d'une grosse labre et du stylet niiindibnlairc est lèvre inférieure charnue. Le slylet mé- la même; mais les niiu boires sont dian supérieur est le labre ; le second réduites à une paire d'appendices stylet impair représente les mandi- palpiformes, tandis que la lèvre iu- bules ; enfin, les deux paires de soles férieure, de consistance charnue, de- allongées situées au - dessous sont vient extrêmement grosse (b).

(a) Blancliard, Atlas du Règne animal île Cuviei-, Infectes, pi. 1(18, fig-. 2 a, (6) Mem, ibid., pi. 172, (\g. 2a.

53/l APPAREIL DIGKSTIF.

médiane ployëe longiludiiuilement en manière de gouUièie et cachée dans l'intérieur de la trompe, mais portant une juiire de palpes qui se montrent au dehors à la partie supérieure de cet organe ; il correspond aux mâchoires des autres Insectes. Enfin, la lèvre inférieure est extrêmement développée, et sa portion terminale, au lieu de se bifunpier seulement, se ren- verse en bas et en dehors, de façon à constituer une espèce de disque ou de suçoir. Ainsi, chez ces Diptères, tous les appen- dices principaux, qui d'ordinaire sont pairs et bilatéraux, sont représentés par des organes impairs et médians (1). Chez d'autres Insectes du même ordre, l'appareil buccal se simpHfie davantage, et chez certaines larves les mandibules paraissent être devenues des organes de fixation plutôt que des instruments destinés à effectuer la préhension des aliments (2j.

(1) M. Blanchard a donné une très belle figure de celle partie de l'appa- reil huccalchezla Mouciie de la viande (il/«sca(;o»iiio?'ia),etiladéleru)iné les dilléienls appendices comme je viens de rindiqaer,non-se«lementpar leurs rapporls de position , mais par la con- sidération des nerfs qui s'y rendent (a).

('2) Ainsi les larves d'OEslre qui vi- vent à la manière des Vers intestinaux dans l'estomac ou dans d'autres cavi- tés inlérieures de divers Mammifères, onl la bouche armée d'une paire de crochets qui ne paraissent être autre chose que les mandibules. On y trouve aussi deux petites pièces, cornées et denticulées sur les bords, qui semblent

devoir représenter les mâchoires [b). Il est aussi à noter que ces larves sont pourvues de crochets épidermiquesqui entourent leur extrémitécéphalique, et qui servent également à les fixer ù la membrane muqueuse sur laquelle elles doivent rester cramponnées. On trouve un mode d'organisation assez ana- logue chez la larve du Sarcuphaga hœmorrhoidalis (c),du Piophila Pe- tasionis (d), du Sapromyza blephari- pteroides (e). Enfin, chez d'autres larves, ces appendices ne consistent d'abord qu'en une paire de papilles molles qui se transforment en îuandi- bules cornées vers l'époque ces Insectes doivent se frayer un chemin

(a) Blanclianl, Atlas du Règne animal de Cuvicr, Insectes, j.!. 178, fi^. i a, i b. {b) Joly, Recherches zoologiques, anatomtques, physiologiques et médicales sur les Œstrides, 1840. p. 34, pi. 5, fig. 1 à 5, etc.

(c) Léon Dufour, Études anatomtques et physiologiques sur une Mouche, p. 5, pi. \, fitr. 1 (exlr. lie V Académie des sciences, Sav. étrang., t. IX).

(d) Idem, Histoire des mctamorphoscs et de l'anutomie du Piopiiila Pclasionis {Ann. des sciences nat., 3- série, 1S44, I. I, p. 372, pi. ■ICr, lig. 8 et 10).

(e) I lem, Mém. sur les viélaniorphoscs de plusieurs larves (nngivorts apparteiiant à des Diptères (Annales des sciences nat., 2' série, 1830, I. Ml, p. :>, y]. 5, Iç. 75, etc., el I. XIII, p. 148, pi. 3|.

AUMATUHF. ËUCCALE DES INSECTES. 535

Enfin, (rnulres modifications se rcnconIronUhins In hoiK'lie (le qneliines Insccles suceurs, tels que les Hi[)pobos(iucs, les Puces et les Poux ; mais elles ne paraissent pas porter sur le plan Ibndamental suivant lequel cet appareil est généralement orga- nisé dans cette classe d'Animaux, et elles ne sont pas assez bien connues pour que je m'y arrête ici (1). J'ajouterai seulement

dans la peau des Animaux qu'ils habi- tent : cela se voit chez les Strepsi- ptères (a) et chez les jeunes larves de Microgaster (b).

(1) L'appareil buccal des Diptères de la famille des Pnpipares on llippo- bosciens est très remarquable ; mais, quoiqu'il ait été étudié successivement par Lyonnet , Latreille , Newport , M. Léon DufouretM.Westwood, on ne le connaît encore que très imparfaite- ment, et la détermination de ses tlitfé- rentes pièces constitutives est fort incertaine (c). On y distingue deux appendices valvuiaires qui, dans Pétat de repos, sont rapprochés et dirigés en avant, de façon à avoir l'apparence d'un rostre cylindrique, et qui logent entre eux une sorte de trompe protrac - tile composée d'un stylet filiforme im - pair (ou peut-être bifide), embnîté dans un tube résultant du rapproche- ment de deux appendices sétacés. La portion basilaire de cette trompe est

articulée sur des branches cornées courbes, qui sont logées dans l'inté- rieur de la tète, et qui paraissent jouer le rôle de ressorts pour déterminer la protractiou de l'appareil. Dans les genres Hippobosca et Orypteruni (d), la trompe est courte ; mais chez le M elophagus , elle est c\lrêmeinenl longue (p).

La bouche des Puces, dont la structure a été entrevue par Leeuwen- hoek et par plusieurs autres anciens micrographes (/'), mais bien étudiée pour la première fois par Savigny, et décrite avec plus de détail par Du- gès [g], est armée de stylets à peu près comme celle de quelques Diptères ; mais les zoologistes ne sont pas d'ac- cord sur la détermination de ces pièces. On y remarque d'aboicl laté- ralement une paire d'appendices la- melleux qui portent à leur base un palpe articulé {h) et qui correspondent aux mâchoires ; un peu en avant nais-

(rt) Sieholil, t/e6«r Strepsiplera {Archiv fur Niiturgeschichir, 1843. I. I, p. t59,|il. 7, llg. 3). (6) Ratzeluirg, Die Forst-Insekten, t. III, pi. 9, fig-. •■26 et 'M.

(c) Westvvood, Introd. to Ihe modem Classific. of Insects, t. 11, p. 581.

(d) Lyonnet, Recherches sur l'anatomie et les métamorphoses de différentes espèces d'Insectes, pi. 1 , fig. 5 à 13.

Léon Dufûur, Éludes analomiques et physiologiques sur les Insectes Diptères de la faniille des Pupipares (Ann. des sciences nat., 3' série, 1845, t. III, p. 52, pi. 2, llg-. 1).

(e) Newport, art. Insecta (TofW's Cijclop.. 1. II, p. 900, fig. 3S1).

if) Lcemvenhoek, Arcana Naturœ détecta, 17-22, p. 332, fig. 8, 9 et 10.

Hooke, Micro(iraphia,p\. 34 (1067).

(g) Savigny, Théorie des pièces de la botiche, p. 28.

Dugès, Recherches sur les caractères zoologiques du genre PmIcx {Ann. des sciences liai., 1" série, 1832, t. XXVII, p. 149).

{h} Ces palpes maxillaires ont été pris ponr îles antennes parFabricins et plusieurs autres entomo- logistes.

î>3(> APPAR?.1I, tMfiRSTlF.

que, (Jiuis (|iielqiies cas, la constitution d'iui instriuiient de succion à l'aide des matériaux organiques propres à former un appareil masticateur, s'obtient sans aucun des changements considérables que nous venons de passer en revue. Ainsi, cliez la larve du Fourmilion, ce résultat est réalisé par le creusement d'une gouttière le long de la face inférieure des crochets man- dibulaires que l'Animal enfonce dans la proie dont il veut pomper les humeurs (\).

sent deux lames étroites allongées et denliculées sur les bords, qui parais- sent être les analog;iies des mandi- bules, et sur la ligne médiane un stylet impair qui est probablement le labre, mais qiu'Savignyregardecomme étant la langue ou liypopharynx (a). Enfin, plus en arrière ou en dessous, on voit une sorte de gaîne bivalve et composée de plusieurs articles, qui paraît être conslituée par les palpes labiaux, et qui est courte cliez le Pulex péné- trons ib) et le Pulex Canis (c), mais aussi longue que les autres appendices buccaux chez la Puce commune ou Pulex irrilans, et les recouvrant pen- dant le repos (d).

L'appareil buccal des Poux est beaucoup plus simple (e) ; il se com- pose d'une sorte de trompe molle et garnie de crochets, qui est réiraclile et qui loge dans son intérieur des petits stylets aigus.

(1) Réaumur a fait connaître cette

disposition curieuse. Les larves du Fourmilion se bornent à sucer le corps des Insectes dont elles s'em- parent à l'aide de leurs puissantes mandibules disposées en forme de pince au-devant de leur tète, et il existe à la face inférieure de cha- cun de ces crochets une gouttière qui loge les mâchoires. Ces derniers ap- pendices ont la forme d'un stylet courbe et sont susceptibles de se mou- voir d'avant en arrière avec une grande rapidité. Iléaumur les a vus fonctionner de la sorte avec beaucoup d'activité pendant la succion, et il les considère comme agissant à la manière du piston dans une pompe (f).

Il en est à peu près de même chez la larve de l'Ilémérobe {y) et chez celle des Dylisqnes, oii les mandibules , comme nous l'avons déjà vu, sont très allongées et canalicidées, mais ne lo- gent pas les mâchoires (h).

J'ajouterai que chez une larve indé-

la) D'après S,iviL;iiy, le lalire niiinqncrait {Théorie des pièces de la bouche, p. i!8). (/;) Diigès, Noie sur les caractères zoologiques des l'ule.c pénétranls (Aaii. des iclences nat., 2' série, t. VI, p. 433, pi. 7, fig. i).

(c) Ciirlis, ISiilish Entomolngy, 1. VII, pi. Hi, fier. A, T!, (',.

(d) Weslwdod, Introd. to the modem Ctassillc. of Insects, l. H, p. 489, Cif. 123, 3 à 7.

[)iijar(liri, Nouveau Manuel de l'observateur au microscope, atlas P'- 't^-

Swanimorilam, Uiblia Naturic, \i\. 2, fij. 3 et A.

le) Hlancliaid, Atlas du Rcijne aniinnl de Ciivier, Insectes, pi. 1 i, fiir. \ a, \ b.

(f) Réannuir, Màn. pour servir à l'histoire des Insectes, t. VI, p. 301, pi. 33, llg-. 4 à 8.

(leisllVIilt, IJebcr die MuudthcHe der saugenden Inseclen, pi, 2, lig. -il à 43. (;/) lialzcluirt,', Dii-. Forsl-lnsel-iteu , t. 111, |p1. 1(!, i]'^. 0 ».

[h] Iileiii, ibid., pi. 2, Wg. 40.

AtiMATrr.E BlCCALK DES AItACHNll3ES. 537

^ 15. Les Arachnides sont aussi des Animaux (jui, pour la plupart, sont destinés à vivre de liquides seulement (l),et leur l)ouehe est i)ar conséquent toujours conformée pour la succion ; mais ils sont en général chasseurs , et, pour s'em- parer des Insectes dont ils font leur proie et dont ils hument les lluides nourriciers, il leur faut de puissants organes de préhension (2). Aussi leur bouche est-elle enlom\'e d'instru- ments de ce genre, et, en l'étudiant attentivement, on a pu reconnaître (uie son armahire est constituée à l'aide de maté-

Appareil

buccal

(les

Arachnides.

terminée, mais paraissanl appartenir ù quelque ]\6vroptère voisin des Hémérobes, M. C.rube a trouvé deux tubes suceurs très longs et fort grêles qui s'avancent entre les an- tennes, et qui semblent être formés chacun par la réunion de la mandi- bule et de la mâchoire du même côté. Ces appendices conduisent dans la cavité buccale («).

(1) Quelques-uns de ces Animaux écrasent leur proie et en avaient des fragments. Cela a été constaté d'abord pour les daléodes ou Soipuges, qui rongent non-seulement le corps des Insectes dont elles font leur proie ordinaire, mais parfois aussi dévorent les parties molles d'un Lézard ou de quelque autre Animal d'un volume très considérable (6). L'examen des matières contenues dans l'estomac des Faucheurs {Phalangium opilio) a fait voir aussi que ces Arachnides avalent

les parlies dures aussi bien que les humeurs des Insectes dont ils se nour- rissent (r).

(:2) Les Araignées , les Scorpions et la plupart des autres Arachnides se nourrissent principalement d'Insectes vivants, et quelques-uns de ces Ani- maux déploient un instinct remar- quable dans la construction des toiles ou autres pièges qu'ils tendent pour s'emparer de leur proie. On en con- naît qui capturent ainsi, non seule- ment des Mouches et d'autres Insectes d'un volume plus considérable, mais même de petits Oiseaux {d). Ou reste, ils sont généralement fort sobres et peuvent supporter l'abstinence pen- dant très longtemps. Ainsi dillerents entomologistes ont conservé des Scor- pions vivants pendant six et même neuf mois dans des boîtes ces Animaux ne pouvaient trouver aucune nourriture (e).

(a) E. Gnibe , Beschreibung einer auffallenden, in Siisswasserschwdmmen lebenden Larve {Archiv fin- Naturgeschichle, 1843, t. I, p. 332, pi. lO.fig. 1 et 2).

(6) Huitoii, Observ. on the H ibits of a large Species of Galewles {A:in. of Nat. HisC, 1843, l. Xn, p. 81).

(t) Tulk, On the Aiialomtj o/TbaliiiiL.'iuin npilio [Ann. of Sat. Hist., 1843, t. XII, p. 240).

{(l) Walckenaer, Histoire des Insectes aptères, t. I, p. 169.

Mac Loay, On Doubls respecting the Existence of liird-catching Spiders {Ann. of Xat. Hist., 1843, t. VIII, p. 524).

ShuckartI, On Bird-catching Spiders {Ann. of Xat. Hist., t. VllI, p. 435).

(e) L. Dufour, Histoire anatomique et physiologique des Scorpions, p. 021 (exir. des Mém, de l'Acad. des sciences , Savants étrangers, t. XIV).

Scorpion.

538 APPAREIL DIGESTIF.

riaux annlogiies à ceux dont se compose r;i|tp;iroil innslicnfeur d'un lusccle; mais, en liéuéral, les appeiidices qui, chez ces derniers, joueni le principal rôle, manquent pour la plupart ou ne se trouventqu'à l'état rudimentaire, et les parties les plus impor- tantes sont Ibnrnies par d'autres membres du n)ême système. Comme premier exemple, prenons un Scorpion. Sous le bord antérieur de la tête se trouve articulée une paire de petites pinces didactyles appelées chélicères^ qui se portent directement en "avant et qui servent à saisir les aliments (j ). Une autre paire de membres situés sur les côtés de la bouche remplit des fonctions analogues, mais avec beaucoup plus de puissance. Ce sont des pattes-mâcljoires qui ont la (orme de grands bras ; elles se dirigent en avant et se ternn'nent par une grosse main à deux doigts conformés en manière de pince (2). Entre leur base,

(1) Ces organes, appelés par les uns mandibules, par les autres forcipules, (]u l)ien encore antennes-pinces et ché- licères, sont composés chacun d'un article basilaire dont Tangle antéro- inférieur se prolonge en manière de doigt, et d'un article terminal qui s'in- sère au-dessus de la base de cet apo- physe et forme avec elle une pince à deux branches (a).

(2) L'article basilaire ou hanche de CCS pattes- mâchoires est dirigé en avant, et présente en dedans une large surface qui est souvent garnie d'une bordure de poils roides (h), et qui, en s'appliquant contre son congénère, constitue une sorte de pince à deux branches ou de pressoir dont l'action sur les aliments en facilite la succion. Les articles suivants (le irochite, le méroïte et le sclérite) sont à peu près

cylindriques et n'ottrenl rien de re- marquable ; enfin, le tarsite est très renllé, en forme de main, et porte à sa partie anlérieiu'e un proIon^en)ont dactyliforme contre lequel s'applique le dactylite, ou article terminal, de fa- çon à constituer une pince semblable à celle des Crabes et des Écrevisses. Les Scorpions font la chasse le soir, et saisissent avec ces pinces leur proie, qui consiste généralement en Insectes, puis la portent près de leur bouche, elle est promptement écrasée par l'action des coxognalhitfs. Lorsqu'ils se sont emparés ainsi d'un Insecte vigoureux, ils ont quelquefois recours t'i leur dard caudal pour le tuer avant que de le sucer; mais, en général, cet instrument, dont le venin ejt très i)uissant, est seulement employé comme arme défensive.

(o) Voyez YAilas du nè<jne animal de Cuvier, Arachnides, pi. 17, flg. 1, le, cl pi. tS, {\g. i, ia.

(&) Savigny, Egypte, Arachnide?, pi. 8, fier. i*.

ARMATtJliE BUCCALE DES AHàCHNIDES. 539

qui est disposée de façon à pouvoir saisir les alinieiils, on trouve un tubercule comprimé en l'orme de carène, fjui est garni d'une petite pièce solide impaire et médiane au-dessous de laquelle est l'orilice buccal (1 ). Entin, la partie postérieure de cet appareil périslomien est constituée par une sorte de lèvre sternale formée d'une pièce médiane semi-ovalaire et de deux pièces lalérales qui ressemblent à des mâchoires et qui embras- sent la précédenle. Ces lames maxilliformes ne sont que des prolongements de la hanche .ou article basilaire des pattes de la première paire, qui ressemblent beaucoup à celles des Crustacés du genre Limule, ces organes servent à la mastication aussi bien qu'à la locomotion. Enfin, la pièce médiane est constituée de la même manière par des prolonge- ments de l'article coxal des pattes de la seconde paire, qui, au lieu d'être mobiles, se joignent entre eux sur la ligne mé- diane (2). Au premier abord, on pourrait croire que tous ces organes buccaux sont les analogues de ceux qui reinplissent les mêmes fonctions chez les Crustacés ou les Insectes , et, en effet, la plupart des naturalistes ont été de cet avis; mais, en réalité, cette unité de composition n'existe pas, et nous avons ici un nouvel exemple de ces emprunts physiologiques variés

(1) Cetro pièce médiane [a) me pa- raît être Tanalogiie des mandibules confondues entre elles, comme nous l'avons déjà vu ciiez beaucoup d'In- sectes Diptères.

{'2) Les prolongements coxaux des deux pattes de la seconde paire se réunissent sur la ligue médiane par une suture longitudinale, de façon à constituer une sorte de mentonnière qui s'avance horizontalement entre la base

des pattes précédentes, et qui est em- brassée latéralement par les prolonge- ments coxaux de ces derniers membres. Ceux-ci ont à peu près la même forme, mais chevauchent sur les précédents, de façon à être en partie cachés par eux et à ne se montrer au dehors que sous la forme de grosses dents cour- bées en dedans, entre le bord externe de la mentonnière médiane el la base des pattes-mâchoires (6).

(a) lilaiichard, Organisation du Règne animal, Ahachnides, pi. 1, fig. lib.

(6) Savigny, Egypte. Arachnides, pi. 8, fii,'. d , ^.

Milne Eilwards, Atlas du Règne animal .le Cnvier, Abac.hniiies, pi. 18, flg. 1, ia, ib, ic.

Galcodes.

^^l\(^ Al'PAHF.lL DlGKSTlF'.

à l'îiido desquels la Naliire eoiistitue souvent des instruments similaires avec des matériaux différents. Ainsi, les chéiicères ou pinces buccales antérieures des Scorpions et des autres Arachnides ne sont pas les représentants des mandibules ou des mâchoires d'im Insecte ou d'un Crustacé, mais des organes constitués avec la paire d'appendices frontaux qui cliez tous les antres Animaux articidés deviennent des antennes; nous en aurons la preuve quand nous étudierons le système ner- veux (1).

Pour arriver à la détermination analomique des autres parties de l'appareil buccal des Scorpions, il est nécessaire de connaître la structure des mêmes parties cliez un second Animal de la même classe, le Galéode, quelques-unes d'entre elles sont mieux développées. Chez ce dernier Arachnide on trouve, comme chez

(1) Savigny pensait que , chez le Scorpion et les aulres Arachnides, les analogues des antennes manquaient coniplétcnicnt ; que les chéiicères représenlaienl les mandibules des In- sectes ; que les bras, ou palpes, cor- respondaient aux mâchoires de ces derniers, et que les membres employés à former la lèvre inférieure de ceux ci devenaient les pattes ambulatoires de la première paire chez les Arachnides : de façon que chez ces Animaux, de même que chez les Insectes, la série complète des organes masticateurs et andjulatoires se composerait de six paires de membres céphalo-thoraci- qnes (o). Mais celte théorie si simple, et, par cela même, si séduisante au premier abord, n'est plus en accord avec les f.iils connus aujourd'hui, et doit être abandonnée.

Ainsi, les chéiicères ou forcipulesdes Arachnides ne sont pas constituées à l'aide des protognaihes, comme le sont les mandibules dos Insectes ou des Crustacés , mais bien par une paire d'appendices appartenant à un aulre groupe de membres dépendant de la ré- gion frontale et correspondant aux an- tennes. Latreille avait deviné cette ana- logie (6), et c'est pour l'exprimer qu'il a donné à ces appendices buccaux le nom de chéiicères ou antennes pin- ces (c). On pouvait cependant croire que leur position an devant de ia bou- che était seulement le résultat d'un chevauchement organique des mandi- bules,semblable à celui que nous avons déjà rencontré chez quelques Crusta- cés, les Dichélcslions, parexemple, les paltes-màchoires antérieures sont devenues sous frontales ; mais l'étude

(a) Savigny, Théorie des pinces de la hourlie, p. S5.

(6) Lati-eilli', Familles vatiirelles du lièrjuc aiwvnl, p 307.

(C) De ;^r,À-/)i P'fi' fuiiiclm ou pince, cl xf'paç, corne eu anlennc.

ARMATURE BUCCALI': DES ARACUMDES.

5/1 1

le Scorition, une [lairo de chélicères ou pinces frontales (1), une paire d'appendices en forme de palpes, (]ui correspondent évideniinent aux bras des Scorpions, quoiqu'ils ne soient pas terminés par une pince, et plus en arrière des pattes ambula- toires qui sont au nombre ordinaire dans cette classe d'Animaux . Mais l'ouverture buccale située entre la base des palpes dont je viens de parler n'est pas garnie seulement d'une pièce cornée médiane : au-dessous d'un rudiment de labre, on observe, de cliaque coté, deux petits appendices, le premier formé d'un seul article himclleux, le second composé d'une pièce basilaire et d'un palpe. D'après les rapports anatomiques de ces pièces, il faut nécessairement les considérer comme les représentants des mandibules et des màclioires antérieures des autres Ani- maux articulés. Enfin, une petite saillie tégumentaire, située [»lus en arrière, semble correspondre aux mâcboires de la seconde paire des Crustacés ou lèvre inférieure des insectes (2).

des lappoi'ls de ces appendices avec le système nerveux a Uanclié la question. Nous verrons dans une aulre pailiede ce cours que, chez les insectes et les Crustacés, les nerfs des antennes et (les autres appendices frontaux sont fournis par les ganglions cérébroïdes, tandis que ceux des mandibules et des mâchoires proviennent des ganglions sous- œsophagiens. Oi-, iXewporta con- staté que, chez le Scorpion, les nerfs des forcipnies ou chélicères naissent des ganglions cérébroïdes, comme ceux des antennes, et non des ganglions sous-œsophagiens, comme ceux des

membres gnalhiqnes (a). M. Blanchard a lait la même observation chez les C.aléodes, et il en a conclu avec beau- coup de raison que ces organes corres- pondent non à des mandibules, mais à des antennes [b).

(I) Les chélicères des Galéodes sont très gros, et leur article basilaire porte à la base de leur doigt immobile un petit appendice articulé et palpi- forme (c).

{'J) La bouche, ainsi enlourée, fait saillie entre la base des chélicères et celle des pattes -mâchoires. Les ap- pendices dont elle est garnie ont été

(a) Newport, On the Structtire, Relations and Development of llie nervous and circulatorij Systems, etc., in Myriapoda and Macrourous Arachnida {Philos. Trans., 1843, p. 201, pi. 12, fig. 15), et Atlas du Règne animal de Ciivicr, AiiACHMDKS, pi. IDA.

(6) Blancliard, Observ. sur l'organisation d'un type de la classe des Arachnides, le genre Galéode {.inn. des sciences nat., 3' série, 1847, l. VIII, p. 231 ei siiiv.).

(c) Voyez V.Mlas du Règne animal de Guvicr, Auaçhmdes , pi, 20, (ig. \ , \b c^ \c.

542

AI»PA!\i:iL DIGESTIF

Les membres pédilbrmes ou paliiesqui viennent ensnile, et (|iii sont les analogues des bras du Scorpion, ne peuvent donc être que les représentants des pieds-mâeboires ou màcboires auxi- liaires des Crustacés, et, de même que eliez ces Animaux, le nombre total des appendices céphalothoraciques doit être i)lus grand ijue cbez les Insectes. Un mode d'organisation analogue se voit cliez les Chélil'ères, les Thélyphones et les Faucheurs (1) .

très bien représenlés par Savigny et par M. Blanchard (a). Los mandibules, altacliées à rextréniité d'une espèce de support saillant, ont la forme d'une serpelteel sont appliquées l'une contre l'autre comme deux valvules. Les mâ- choires sontsiluées au-dessous, et con- sistent cliacune en un lobe basilaire portant un appendice sétiforme qui représente le palpe maxillaire des In- sectes.

(1) Chez les Chélifères ou lances, la disposition des appendices buccaux est essentiellement la même que chez les Scorpions; suulement leschéliccres deviennent souvent très petits, les pattes-mûchoires s'allongent davan- tage (6;, et se rencontrent à leur base devant la bouche; enîin, les pattes ambulatoires ne donnent pas naissance aux prolongements maxiiliforines qui constituent la mentonnière des Ara- chnides décrits ci-dessus.

Chez lesThélyphones(c), l'armature buccale ressemble beaucoup aussi à ce que nous avons vu chez les Scor- pions ; il y a une paire de chélicères didaclyles , un mbercule oral garni

d'un article mandibulaire médian, et une paire de grosses pattes-mâchoires qui s'avancent en manière de bras. Mais la forme de ces derniers appen- dices est un peu différente : ainsi les deux premiers articles présentent, du côté interne, de gros prolongements dentiformes très remarquables, qui, en se rencontrant sur la ligne mé- diane au devant de la bouche, peu- vent fonctionner à la manière de te- nailles. Il est également à noter que la pince terminale ou main de ces mâ- choires est au contraire moins bien conformée.

Chez les Faucheurs (genre Phalan- gium], les chélicères se développent davantage, et se composent d'un grand article basilaire portant une sorte de main didactyle qui est su.sceplible de se reployer en dessous contre la bou- che, et qui présente chez le mâle une forme très bizarre {d). W. Tulk a donné une description fort détaillée, mais un peu obscure, des dillerenles parties qui entourent directement l'orifice buccal, et qu'il nomme labre ou épi- stonie, lèore inférieure, mâchoires de

(a) Saviiçny, Écjijple, Arachnides, pi. S, fig. i^, 4 e, 4, /), etc.

Hlancluird, Organisation du liègne animal, Arachnides, pi. 25, fig. 5.

(b) Voyez V Atlas du llègne ariimal de. Cuvier, Arachnides, pi. 20 bis, fig. 5 6, 5 c.

((■) HlancliaiH, Op. cit., Arachnides, p. Hl, pi. 8, fig. 1 et 2.

((/) Voyez VAllas du Hègne animai de Cuvier, Arachnides, pi. i:\, lig. ib, ic

3, ia, i c, 5 a.

ARMATURE BUCCALî: DES ARACHNIDES. f)!l2>

Cliez les Araignées, la bouche est constituée à peu près de Aianéues. la même manière; les parties qui entourent immédiatement cet orifice, et qui forment ailleurs les mandibules et les mâchoires, sont rudimcntaires(l); enfin l'appareil préhenseur des aliments se compose essentiellement d'une paire de chélicères et d'une paire de itieds-mâchoires, en arrière desquels se développe une lèvre sternale lY)rmée, non par les hanches des pattes anté- rieures, comme chez les Scorpions, mais par une pièce sternale impaire et médiane qui dépend de l'anneau dont ces membres naissent, et qui est comparable à la mentonnière des Scolo- pendres. Ajoutons que dans la grande famille des x4ranéides, les chélicères ne sont pas conformés en manière de pince didactyle, et leur article terminal, (jui se replie comme une griffe contre le bord de l'arhcle précédent, doime issue à un liquide veni- meux fourni par une glande adjacente (!2). Il est aussi à noter que les pattes- mâchoires n'affectent pas la forme de mains,

la première paire et mâchoires de la comprimé, appelé museau par quel-

seconde paire [a). Ces dernières me ques naliiralisles, et placé an fond de

paraissent être analogues aux lobes i'et>pèce de fosse préstoinienne com-

maxilliformes de l'article coxal des prise entre les chélicères, la base des

pattes antérieures chez le Scorpion, et patles-mâchoires etla mentonnière (c).

les précédents me semblent être à la La portion supérieure de cette crêle

fois une portion de l'article basilairc verticale tient lieu de lèvre supé-

des pieds-màclioires et des appendices rieure, et présente une pièce solide

correspondants aux mandibules et aux qui semble représenter les appendices

mâchoires des Galéodes (6). mandibulaires; au-dessous de la bou-

(1) L'orifice buccal des Araignées che est un petit prolongement qui pa-

esl extrèmemenl petit et situé à peu raît correspondre à la lèvre inférieure

près comme chez les Scorpions, vers des Insectes (d). la partie inférieure d'un tubercule (2) La griffe des chélicères se re-

(a) Tiilk, Upon the Anatomy of Plialangiiun opilio (Ann. of Nat. Hist,, 1843, t. XII, p. 160, pl. 3, liij 3 à 14).

(b) Idem, ibid., pl. 3, fig. 12.

(c) Straus, Considérations sur les Animaux arlimlés, p. 244.

Dutjcs, Observations sur les Aranéldes {Ann. des sciences nat., 2* série, 1830, t. VI, p. nS), et Atlas du Règne animal do Ciivier, Arachnides, pl. 3, fig. 1 et 2.

Wasiuanii, Beilrâge %ur Anatomie der Spinnen [Abhandl. ans deni Gebiete der Naturwis- seuschaflen. HerausyeçieUu von dem naturwiss. Vereiii in Uamburg, 1840, 1. 1, pl. 13, ûg. 10).

(a!J Blanchard, Organisation du Régne animai, AuAGHNiuiià, pl. 12, liy. 8.

bkli APPAREIL DIGKSTIF.

mais celle de palpes grêles et eylindriques terminés par un petit crochet. Chez le mâle, ces appendices sont détournés (le leurs usages ordinaires pour être employés d'une manière

plie coiilre le bord inférieur de l'ar- ticle basilaire de ces appendices chez les Mygales (a), et contre son bord antérieur chez les Araignées dipneu- mones (6). Près de son extrémité se trouve un petit orifice destiné à livrer passage au venin sécrété par une glande logée dans l'article basilaire de cet organe, ou dans le voisinage de la tête (c).

La plupart des entomologistes dési- gnent, sous le nom de lèore, la plaque médiane que j'ai appelée ici la men- tontiiere, afin de faire bien ressortir que ce n'est pas l'analogue de la lèvre inférieure des Insectes. Sa forme varie dans les dilTérenls genres, et fournil de bons ciU'aclères pour la classifica- tion {d).

Les. pattes - màclioires qui s'insè- rent de chaque côté de cette pièce impaire ressemblent beaucoup à de petites pattes , mais leur article ba- silaire se prolonge antérieurement

en forme de lobe, et constitue ainsi une paire.de lames qui embrassent latéralement la mentonnière, et sont d'ordinaire désignées sous le nom de mâchoires, tandis qu'on appelle pr/Z/je maxillaire le reste du membre. Chez la femelle, ces appendices sont grêles et cylindriques dans toute leur lon- gueur; mais, chez le mâle, ils sont renflés vers le bout, et y logent un appareil copulaleur particulier dont je ferai connaître la disposition quaiid je traiterai des organes de la généra- tion chez ces Arachnides (e).

Dans le genre Phryné, qui prend place à côté de la famille des Ara- néidcs, le lobe maxilliforme des pieds- niàchoires est très réduit, mais le propodite acquiert des dimensions considérables, et constitue de chaque côté, au-devant de la tète, une espèce de bras monodactyle qui est très fort et hérissé d'épines sur le bord in- terne (/■).

(a) \o},cz\' Allas du Règne animal de Cuvier, Arachnides, pi. 2, 11^'. 1 pI i.

(b) Op. cit., pi. 8, fig-. 3 b, ch:.

(c) Treviraniis, Ueber den innern Ban dev Araclmiden, pi. 2, fii,'. 2t.

Braiidt et lialzeliurg, Mediiinischc Zoologie, I. 11, pi. 15, fig. G.

Dujtcs, Atlas du Hcgne animal de Cuvier, Arachnides, pi. 2, li^- C.

Blanchard, Organisation du lièijne animal. Arachnides, pi. 17, lîl,^ i.

{d) Les variations de forme de celle lèvre sieriiale et des pattes- mâchoires adjacentes ont été étu- diées, au point de vue zoologique, par Walckenaer, et sont représentées dans tous les ouvrages descriptifs qui traitent de l'histoire namrelle des Arachnides. Je nie bornerai donc .'i citer ici le prin- cipal travail de cet entomologiste, intitulé Tableau des Aranéidcs (i 805), et à renvoyer, pour plus de détails, à l'Atlas du Règne animal de Cn\ier, toutes les jilanches relatives à la famille des Ara- néides ont été faites par Uiigès.

(e) Voyez Lyonnet, Rech. sur l'anatomie et tes métamorphoses de différentes espèces d'Insectes, pi. 9,lig. ■) à':.,

Savigny, Èggple, ARACHNIDES, pi. t , fig. 3 E, 3 /", etc.

Brandt et Uatzeliurg, Op. cit., pi. 15, fig. 1 et 2.

Dugès. loc. cit., pi. 8, fig. 1 r, 'id, etc.

Menge, IJeber die Lebensweise der Araclmiden, pi. 2, fig. 13 à 27 (Neitesle Schriftcn der Naiurforsrhenden Cesellsctinfl in Damig, 1843, t. IV).

Blanchard, Organisation du Règne animal, Arachnides, pi. 17, fig. 9 cl 10. (/■) Voyez lu Règne animal. Arachnides, pi. 10, lig. 1,16.

buccal

des

Acariens.

armatijrl: buccall; uiîs arachnides. 5^5

fort singulière dans l'acte de la copulation; enlin, il existe à leur base un prolongement lamclleux qui s'avance sous la bouche, à peu près comme le font les lobes coxaux des pattes antérieures du Scorpion, et qui font office de mâchoires. La mentonnière, ou lèvre sternale, qui s'avance entre ces deux lames maxilliformes, est tantôt mobile, ainsi que cela se voit chez les Araignées proprement dites , d'autres fois soudée au plastron sternal, comme chez les Mygales.

§ 16. En général , les Acariens ne sont pas, comme les Appa.e Araignées et les Scorpions, des Animaux chasseurs, mais des parasites qui mènent une vie sédentaire et s'accrochent à leur [iroie; aussi leur armature buccale est-elle autrement dis- posée (1). Les appendices dont cet appareil se compose sont réduits à de très petites dimensions, et ilst endent à rentrer de plus en plus complètement dans l'intérieur de la tête, ou plutôt dans une gaine tégumentairc qui est formée par la parlie circum- buccale de la peau, et qui constitue, avec plusieurs de ces organes devenus styliformes, un siphon ou suçoir. Chez quelques-uns de ces petits Arachnides, lesOribates, par exemple, les analogies qui existent entre ces parties et les appendices buccaux d'un Scorpion ou d'une Araignée sont faciles à constater; mais chez d'autres Acariens, tels que les Ixodes et les Sarcoptes , la dégradation est poussée plus loin, et il est difficile d'établir cette concordance d'une manière satisfaisante.

Chez les Oribates, l'appareil buccal est logé dans une petite cavité pratiquée sous la partie frontale du céphalothorax, et se

(1) M. Diijardin pense que les Aca- mais ce mode d'organisation ne me

riens dont Dugès a formé le genre paraît nullement démontré, et il est

Hypopus sont, dépourvus de l)oaclie, probable que roridce buccal existe,

et il considère ces Animaux comme quoiqu'il ait écliappé aux recherches

étant des larves de Gamases {a) ; de ce naturaliste.

(rt) Dujanlin, Mémoire sur les Acariens sans bouche dont on a formé le genre Hypopus (Ann. des sciences nat., 'i' série, t. \1I, p. 3i'3, cl p. ^50, pi. 1 1).

V. 35

5/i6 APPAREIL DIGESTIF.

compose d'un faisceau de petits appendices, dont les uns sont des chélicères à pince didactyle, d'autres des pieds-màclioires formant chacun un palpe et une branche interne ou endo- gnathe, bifurqué au bout (1).

Chez les Sarcoptes, l'invagination de cet appareil est plus complète, mais sa composition paraît être à peu près la même (2), tandis que chez d'autres Acariens on y observe des

(1) M. Nicolet a étudié et figiué avec beaucoup de soin l'armature buc- cale d'un grand nombre d'Acariens delà famille des Oribatides {a). Cet appareil est logé dans une cavité ap- pelée camérostome , qui résulte du prolongement du bord frontal du céphalothorax en une sorte de rostre voûté {b). A sa partie inférieure et postérieure on aperçoit une lame mé- diane qui oHre en générai à peu près la forme d'un triangle dont le sommet serait dirigé en avanl. M. Nicolet dé- signe cette pièce sous le nom de lèvre, et, en effet, elle correspond évidem- ment à la mentonnière ou lèvre infé- rieure des Araignées. De cliaque côté et un peu plus en avant se trouve un palpe grêle et cylindrique composé de quatre ou cinq articles placés bout à bout, et en connexion par sa base avec une pièce maxilliforme qui s'avance au-dessus de la mentonnière et se ter- mine par deux lobules lanielleux ou deux articles placés côte à côte , de façon à ressembler extrêmement à une mâchoire d'Insecte (c). M. Nicolet

désigne cet organe sous le nom de mâchoire, et ne s'explique pas nette- ment au sujet de ses rapports avec le palpe ; mais il me semble évident que ce sont des portions d'un seul et même membre , lequel correspond à une patte-mâchoire d'Araignée : seulement ici le coxite, au lieu de se prolonger en un lobe maxillaire, donne nais- sance à une branche accessoire in- terne, comme le font les deutognallies chez les Insectes. Enfin, plus en avant et au-dessus de ces organes, se trouve une autre paire d'appendices confor- més en manière de pince didactyle, comme chez les Scorpions (cl). M. Ni- colet les appelle mandibules ; et, en effet, ils correspondent évidemment aux organes que la plupart des ento- mologistes désignent de la même ma- nière chez les Araignées, c'est-à-dire les chélicères. Un mode d'organisa- tion fort analogue se retrouve chez les Trombidions , les Gamases , les Ixodes , et beaucoup d'autres Aca- riens (e). (2) La bouche du Sarcopte de la

(a) Treviranus, Ueher den innern Dau der ungeflûgelten Insekten. Die milbenartigen Insekten {Vermischie Schriflen, l. I, p. il, pi. 5,fig. 28 à 30).

Dujardin, Mém. sur les Acariens (Ann. des sciences nat., série, 1855, t. III, p. i 0).

(b) Nicolet, Histoire naturelle des Acariens qui se trouvent dans les environs de Paris (Archiv. du Muséum, 4855, l. Vil, p. 403, pi. 24, iig. 16, 18, etc.).

(c) Atlas du Hègne animal de Ciivier, Arachnides, pi. 25, lig. 2 a.

(d) Nicolet, Op. cit., pi. 33, fig. 1 c, 4c, etc.

(e) Idem, Op. cit., pi. 33, lig. le, etc.

AUMATUHE BUCCALE DES ARACHNIDES. 5/l7

particularités de slniclure qui paraissent avoir de J'analogie avec certaines dispositions dont les Insectes suceurs de l'ordre des Diptères nous ont déjà olTert des exemples. Ainsi, chez les Ixodes, indépendamment des palpes et d'une paire d'appen- dices allongés et barbelés au bout, qui paraissent correspondre aux chélicèrcs des Araignées, on trouve une lame médiane étroite et impaire qui est également denticulée, et qui paraît résulter de la soudure des branches internes des deux pattes- màchoires (1). Il est aussi à noter que chez plusieurs Arachnides

gale est très difficile à bien observer, à cause de cette invagination et de la petitesse des parties. Cependant, quand on compare les figures qui en ont été données par MM. Vandenhecke et Le- roy, ou par M. Bourguignon [a], avec celles de l'appareil buccal d'un Ori- balien, on y reconnaît une grande analogie ; et j'ajouterai qu'au moment de mettre cette Leçon sous presse, je vois que les observations de ces au- teurs s'accordent très bien avec les résultats fournis par de nouvelles re- cherches dues à M. Ch. Robin (6). En effet, M. Vandenhecke a représente sur la ligne médio -inférieure (sous le n" 7) une pièce impaire qui cor- respond évidemment à la menton- nière ou lèvre inférieure; puis, sur les côtés, une paire d'appendices co- niques qu'il nomme mâchoires , et que M. Bourguignon appelle mandi- bules, mais que je considère comme

les analogues des palpes ou branches principales des pattes - mâchoires. Entre ces deux organes on voit, de chaque côté, une pièce allongée et denticulée à son extrémité antérieure (5 et 8), qui me semble correspondre à la branche interne ou maxilliforme de ces mêmes patles-màchoires. En- fin, au-dessus de ces derniers appen- dices, se trouve une paire de pièces fusiformes et terminées en pince , qui me paraissent être des chélicèrcs réduits à un état presque rudimen- taire : M. Bourguignon les a décrits sous le nom de mandibules secon- daires. M. Dnjardin les a représentés dans l'état de protraction chez l'Aca- rus du fromage (c) ; enfin, j'ai publié dans V Atlas du Règne animal de Cu- vier une figure de l'ensemble de l'ap- pareil buccal chez ce dernier Aca- rien {d). (1) Lyonnel a figuré ces trois lames

(a) Leroy et Vandentiecke, Recherches microscopiques sur TAcarus scabiei, p. 1-i, pi. 4 (extr. des; Mémoires de la Société des sciences naturelles de Seine-et-Oise, 1835).

Bourguignon, Traité entomoloijique et pathologiqjie de la gale de l'Homme, pi. 5, Rg. 24 à 32 (extr. des Mémoires de l'Académie des sciences, Sav. étrany., 1852, t. XU).

(!)) Robin, Mém. sur la composilioii anatomique de la bouche ou rostre des Arachnides de Ut famille des Sarcoptes {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 22 août 1859).

(c) Dujardin, Nouveau Manuel de l'observateur au, microscope, 1842, atlas, pi. 17, lig-. 11.

(d) Atlas du Règne animal de Cuvier, Ahaghnides, pi. 2li, li^. 2 c.

5/|8

APPAUKIL niGICSTlF.

de cet ordre, la porliori basilairc de la gaine li'giiinentairc (|iii entoure ces organes [)our conslitiier le si|)hon s'allonge heati- coiip, et (jiie les appendices logés dans son intérieur deviennent grêles comme des aiguilles (1).

denliciilées chez la Tique {Txodes rici- nus) ; Treviiamis et Audoiiiii les ont rcprL'sonh''es clicz (rentres espèces du même genre ; enfin Diigès a fait mieux connaître leur disposition chez l'Ixode plomhé (a). Les palpes situés de chaque côlé sont égidement lauiel- leux, et, dans Tclal de repos, engaî- nent les pièces précédentes, comme le ferait un étui bivalve, l^es lames mandibuliloiines (ou chélicères) sont étroites, allongées et terminées par un onglet mobile et denliculé, ainsi que. par une sorte de griffe innnobile. La lame impaire , qui a été consi- dérée comme une lèvre inférieure par Audouin et |)arDugès, est également très allongée et concave en dessus, mais garnie en dessous de crochets dont la pointe est dirigée en arrière, de façon à simuler sur les bords des dents de scie.

(1) Ainsi , chez la Smaridie papil- leuse, l'appareil buccal se com|)osc d'une sorte de Irompe cylindrique, qui est à pi'ine visible dans le repos, mais qui est très proiraciile, et qui

porte vers sa partie antérieure une paire de palpes. Dans son intérieur se trouvent deux stylets aigus qui représentent It's chélicères ou bien les branches internes des paltes - ma - choires (6), et qui glissent dans une pince métiio-inférieure en forme de goullière, qui est probablement l'ana- logue de la mentonnière (c).

11 est aussi à noter que les palpes ou branches principales des pattes- mâ- choires présentent beaucoup de varia- lions dans la disposition de leur por- tion terminale. Tantôt ils sont anten- niformes ou fdiformes : par exemple, chez les Scires ou Bdeiles ((/) ; d'autres fois valvulaires, ainsi que nous l'avons déjà vu chez les Ixodes; d'auires fois encore ancreux , c'est-à-dire armés de pointes vers le bout, disposition qui est propre aux Hydrachnes ou Acariens aquatiques (e); enfin, ils sont appelés ravisseurs quand leur premier article est armé d'un ou de l)lnsieurs crochets, et leur arlicle ter- minal mousse et pyriforme, de fa»;,on à rappeler un peu li;s pattes ravisseuses

((() Lvoiiiicl, lieclierclics sur l'anatoiide cl les mclainoriilioscs de difj'crenles espèces d'Insectes, p. 57, |i|. G, lig. 4.

Trovirariiis, Ucbcr itcii Uau der .\iiji(a {Zeitsclirifl. fur Physiologie, I. IV, |i. 187, pi. 10, fig. i et 5).

Aiidoiiin, Lettre coiileiKiiil des recherches sur quelques Aviichnides parasiles {Ami. des sciences nal., 1'" .-cric, t. XW, pi. 14, ù'j;. 2, 3 et i).

Dugès, Recherches sur l'ordre des Acariens, nuMii., p. 18, pi. 7, li^. 1 1 (exir. des Ann. des sciences nat., 2' .-^ério, 1831, i. il).

(6) Diiifès, Op. cit., 1" iiiciii., 11. 31, pi. 1, rii,^ \A, 10 (Ann. des sciences nat., .série, t. I).

((,■) Mriii, itiid., pi. 1, i\g. 15.

[d) E.Nciiiple : Scirus Inlicnriiis (lièrjne animal i\o Ciivior, Aiur.HNiDES, pi. 25, fv^. i, i c) .

le) Op. cit., pi. 28, lii;-. 2 a, ele.

ARMATURE BLCCALE DES ARACUÎNIDES.

5/i9

Kiilin, chez les Tnrdigrades, qui paraissent devoir êtreratta- cliés à l'ordre des Acariens, ra|)])areil buccal est réduit à luie trompe charnue et conique qui renlernie un canal corné médian, dans lequel glissent deux stylets (1).

§ 17. En résumé, nous voyons que chez tous les Arthro- podaires, ou Animaux ariiculés proprement dits, l'armature buccale, malgré la variété de ses formes, est composée de matériaux similaires, et que ces éléments anatomiques sont des membres disposés par paires sur les deux côtés de la ligne médiane, à la face intérieure du corps, et analogues aux ajjpen- dices que la Nature emploie pour constituer des pâlies ambula- toires ou des antennes. Mais ce que l'on pourrait appeler l'ori- gine commune de tous ces membres destinés à des fonctions variées devient encore plus évident lorsque, au lieu de s'en tenir à l'examen de ces parties quand leur développement est achevé, on les étudie aussi pendant les premières périodes de la vie de l'embryon. En effet, on voit alors ([ue leur structure est d'abord

Résumé.

des IManles : par exemple , chez les 'rronilmlions («). Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai aux mémoires de Dugès et de M. Dujardin {h).

(1) M. Doyèrc a étudié avec beau- coup de soin rorgaiiisaliou de la ré- !;ion buccale de ces Aidmalcules. Ce qu'il décrit sous le nom cVanneau buccal et d''anneau pharijngicn me paraît correspondre à la gaîne du su- çoir des Smaridies, et les deux petits tubercules qui en garnissent les cotes pourraient bien être des vestiges de l)alpes maxillaires. Le tube intérieur

dans lequel les stylets se logent me semble être Paiialogue de la pièce labiale ou menlionnière de ces mêmes Acariens. Enlin, les deux stylets ont une très grande ressemblance avec les deux lames dentées que nous avons vuesdansla trom|)e (les lxo(les,elc. (c). Mais chez les Tardigrades on n'aper- çoit rien qui paraisse ressembler à la lame médiane qui, chez ces derniers, tient probablement lieu de la paire do branches internes di'pendaniesdes pieds-màchoires chez la plupart des Arachnides.

{a) Atlns du Bètjne nniwal de Ciivior, Auachnides, pi. 24, (ly. 1 6.

(b) Dugès, liecherches sur l'ordre des Acariens (Ann. des sciences nai.., 2' série, 1834, I. I, p. M ei siiiv.).

Dujarilin, Mi'tii. sur les Acariens {Ann. des sciences nul., 3" série, -IfitS, I. III, |i. 9 el suiv.).

(c) Dojèrc, Mémoire si.r les Tardiijrades., p. 33 el 57, pi. i3, fig. 2 ; pi. 14, fig. 2 el 3 (exir. des Ann. des sciences nat., 2' série, ■1840, l. MV).

550 APPAREIL DIGRSTIF, ARMATURR BUCCALE DES ARACHNIDES.

uniforme , que dans le principe ils ont tous la même forme, et que c'est à mesure qu'ils se développent davantage qu'ils acquièrent les particularités d'organisation à raison desquelles les uns deviennent des mandibules ou des mâchoires, les autres des pattes, des antennes ou même d'autres instruments physio- logiques dont nous aurons à nous occuper par la suite (1). Lorsque je traiterai de l'organogénie , je reviendrai sur ce sujet pour l'étudier d'une manière plus complète ; mais, dès aujourd'hui, j'ai indiquer le fait que je viens de signaler, car il prouve la vérité des rapprochements auxquels la compa- raison seule avait d'abord conduit.

(1) Cette identité apparente dans les développement de l'Écrevisse , par

parties de l'embryon qui constituent celles de Newport sur rcmbryologie

les premiers rudiments de tout le des Myriapodes (a), et par Tcnsenible

système appendiculaire d'un Animal des faits connus relativement aux méla-

articulé a été très bien établie par les morphoses des Insectes. belles recherches de M. liathke sur le

(a) Rathkc, Untersuchungen ûber die Bildung und Entwickehmg des Flusskrebscs , 1829, et Ann. des sciences nat., i" série, 1830, t. XX, p. 442.

Newport, On the Organs of Reproduction and Vie Development of Myriapoda (.Philos. Trans., 1841, p. 99).

CINQUANTE ET UNIÈME LEÇON.

Suite de l'histoire des organes digestifs des Animaux articulés. Du tube alimentaire et de ses annexes chez les Crustacés, les Arachnides, les Insectes et les Myria- podes.

gestil des Crustacés.

§ 1 . D'après le mode d'orga'nisation complexe et puissant Appareil

, . digestif

de l'appareil buccal chez les Crustacés, nous aurions pu sup- poser que les aliments, avant d'arriver dans l'estomac de ces Animaux, se seraient trouvés dans un état de division suflisante pour rendre efficace l'action des sucs digestifs, et n'auraient pas à subir dans l'intérieur du corps une nouvelle trituration. Mais il en est autrement, et chez les Crabes, les Écrevisscs et tous les autres Crustacés supérieurs , l'estomac est le siège d'un travail de mastication complémentaire qui est opéré par un appareil particulier dont la structure est très remarquable.

En effet, chez tous les Décapodes, l'estomac est une grande poche arrondie qui surmonte iunnédiatement la bouche, et qui n'en est séj)arée que par un œsophage court et vertical (1). Cette chambre digestive se trouve par conséquent dans la tête, et la

Estomac.

(1) L'œsophage des Crustacés Déca- podes est larj^e, plissé longitudinale - ment, et pourvu de fibres musculaires transversales très puissantes, qui con- stituent un sphincter. Son orifice su- périeur, que Ton appelle quelquefois le cardia (nom emprunté à Tanatomie humaine), débouche vers le miheu de la face inférieure de reslomac, et se trouve entouré de plusieurs tubercules mous, ou replis tégumentaires, qui

font office de valvules, pour empêcher la sortie des aliments (a).

Chez les Crustacés inférieurs, l'œso- phage ne présente en général rien de parlicuher ; mais il est à noter que chez les Cirrhipèdes, qui appar- tiennent au même groupe zoologique, cette portion vestibulaire du canal di- gestif se termine par une expansion en forme de cloche qui maintient la jjartie cardiaque de l'estomac dilatée {b).

{(/) Milne Edwards, Atlas du Règne animal de Cuvier, C.RUSTACiis, pi. 5, fig. 1 a et d b. (b) Maiiiii-Sainl-Angc, Mém. sur l'organisation des Cirrhipèdes, p. 16, pi. 2, f\s;. \ D. Darwin, A Nonogrnjth of Cirripedia : TiALANiDyi:, p. 85 {Ray Soriely, 1854).

552 ORGANES DE LA DIGESTION.

région qu'elle occupe est d'ordinaire reconnnissable extérieu- rement, à raison d'un sillon de la carapace qui la sépare des parties adjacentes (1). L'estomac se compose de deux portions dont la structure est très différente : dans sa moitié antérieure ses parois sont même membraneuses et llasques (2); mais dans sa moitié postérieure, au fond de laquelle se trouve le

(1) La région stomacale de la cara- pace est un conipiirlinienl de ce t!;rand bouclier céphalo-tlioracique qui se trouve sur la ligne médiane, immé- diatement derrière le front. Chez les Écrevisses , les Homards, etc., elle se confond latéralement avec les régions hépatiques, et n'est bien déli- mitée que postérieurement , se trouve un grand sillon transversal et oblique, appelé sillon cervical; mais chez les Cancériens et beaucoup d'au- tres Brachyiues , elle est séparée de toutes les parties voisines de la sur- face supérieure du test par une dé- pression linéaire plus ou moins pro- fonde {a).

La cavité dans laquelle l'estomac est logé renferme aussi tous les autres viscères, et se continue dans tonte la longueur du corps, mais elle n'est élargie que dans la région céphalique. Dans la rrgion Ihoracique, elle est resserrée entre les cellules épimé- riennes qui logent les muscles de la base des pattes, et se trouve adossée cl la voûte des flancs. Enfin, dans la

région abdominale, elle est rendue étroite par la forme de cette partie du corps, chez les Brachynres, et par la présence des muscles de la queue chez les Macroures. En dessus elle est limitée par la carapace.

(2) L'estomac est revêtu extérieu- rement par une portion de la tunique péritonéalc, membrane séreuse qui tapisse la totalité de la chambre viscé- rale et qui se replie autour de tous les organes contenus dans cette grande cavité.

La tunique interne de l'estomac est revêtue d'une lame épitbélique com- posée principalement de chitine, qui, dans certains points, acquiert une très grande épaisseur, et s'ossifie pour ainsi dire par le dépôt de matières calcaires dans son intérieur. On y remarque aussi par places des poils ou soies roides dont la structure est souvent fort remarquable ; ainsi beaucoup de CCS appendices, au lieu d'être slyli- formcs , comme d'ordinaire, sont élargis et digilés en manière de peigne (b).

(a) rtrsinaipsl, Considérations (jênéralcs sur la classe d(s Crnslaccs, 4 825, p. 20.

Milnr Edwards, Hisloire naturelle des Crustacés, dS34, I. 1, p. 2-iS, pi. 14- bis, fig'. 2, etc. (Ihscrvnliims sur le S(iuelette térjunientairc des Crustacés Décapodes {Ann. des sciences nul., 3' fwio, I. XVI, pi. 8, fvj;. 5, 6, etc.).

(fi) Valunlin , Ueber das Vorkommen von verschiedenartitjen vnd eiijenlhùmlichen llaurfor- mationen avfder inncrn Oberfldche dcr Schleimhaut des iyahrtinskanalcs (liepertorium fur Anat. und Physiol.; 1837, 1. 1, p. H 5, pi. i, dg. -IS-^O).

Cl-'-sieilen, Ueber dcn Magen des Flusskrebses {Miillci's Archiv fur Anat. nnd l'hijsioL, 1840, p. 4H,pl. tï!,fig. H et 12).

553

TCBE ALlMElSTAlRE DES CRUSTACES.

pylore ou orifice conduisant à l'intestin, ces mêmes parois sont soutenues par une charpente solide, composée d'un grand nombre de pièc^es cornéo-calcaires articulées enlre elles, et appartenant au système épitliéli(pie, comme le squelette exté- rieur (i). Plusieurs de ces pièces l'ont saillie dans l'intérieur de l'estomac, et v constituent des tubercules dentiformes et des espèces de cardes qui entourent rorifice pylorique, et qui sont disposées de façon à se rencontrer. Enfin des muscles qui s'étendent entre ces pièces dans l'épaisseur des parois de l'es- tomac, ou qui se portent des principales d'entre elles aux parties voisines de la carapace, mettent cet appareil en mouve- ment, et déterminent l'écrasement complet des matières alimen- taires à mesure que celles-ci s'engagent dans le pylore pour se rendre à l'intestin. Les principales dents stomacales, ainsi constituées, ont la forme de gros tubercules jaunâtres, d'une grande dureté, et sont toujours au nondire de trois : l'une est supérieure el occupe la ligne médiane; les deux autres sont

Annaiiire stomacale.

(1) L'iirmalure stomacale des Crus- tacés est siijelte à des mues périodi- ques , comme les autres parties du squelette té^uuientaire de ces Ani- maux. Ce phénomène a été connu de Van Ilelmonl el observé par plusieurs naturalistes plus modernes (a).

Chez les Cirrhipèdes, la tunique épi- Uiélique de l'estomac se détache sou- vent tout d'une pièce, de façon à for-

mer un sac membraneux dans lequel le résidu des aliments est évacué au dehors par Tanus. M. Darwin a con- stalé ce singulier phénon)ène chez les Anatifes aussi bien que chez les Ba- lancs (6). Cest probablement une dé- pouille épitliélique de ce genre que M. Martin-Saint-Ange a prise pour un second tube intestinal inclus dans le premier (c).

(a) Van Hclniont, Tmctatus de Ulhiasi (Opuscula medka, 1(i48, cap. vu, p. G7).

ficolTroy, Observations sur les Ecrevisses de rivière {Mcm. de l'Acad. des sciences, 1709, p. 30'J).

r.éaiimiir, Sur les diverses reproductions qui se font dans les Ecrevisses, etc. {Mcm. de l'Acad. des sciences, 1712, p. 239).

K. E. von Bai r, Ueber die sogenanntc Erncnerung des Magcns der Krebse (Miiller's Archiv fur Anat., 1834, p. r.10).

Œstorlen, Op. cit. (MùWer' s Archiv filr Anal, und Phijsiol., 1840, p. 4191.

(&) Darwin, .4 Monograpli of CirrijCdia ; Lei'AIjid.e, p. 40; 1!alaniu.-e , p. 80 (linij Society, d851, 18.-,4).

(c) Mar(in-Saint-Ang-o, Mém. sur l'organisation des Cirrhipèdes, p. 17, pi. 2, fig. 2 el 3.'

554 OKGANics Dr: la digestion.

paires, hérissées de pointes on de poils roides, et placées sur les côtés, de façon à se rencontrer et à s'opposer également à la précédente. Il en résulte une espèce de pince à (rois brandies, que les alimenls sont obligés de traverser pour arriver an pylore; et en général d'autres pièces accessoires latérales ou inférieures sont disposées de manière à exercer aussi une action triturante et à compléter cet appareil de mastication sto- macale (1).

(1) L'appnreil triturant de Pestomac des Crustacés Décapodes a été étudié chez l'Écrevisse et quelques autres espèces par plusieurs naturalistes {a). Dans mon ouvrage général sur les Crustacés, j'ai donné une description détaillée des différentes pièces dont il se compose [b). Ici je me bornerai à en indiquer les dispositions princi- pales.

On remarque d'abord, vers le mi- lieu de la face supérieure de Peslo- mac, une bande cartilagineuse trans- versale qui est composée de trois pièces dites cardiaques (savoir, une mésocardiaque et deux ptérocardia- ques) ; en arrière, elle s'articule avec une pièce impaire et médiane qui se prolonge postérieurement vers le py- lore, et qui peut être appelée dentaire supérieure ou urocardiaque ; puis, de l'extrémité de chacune des branches de l'espèce de T ainsi formé, part une

pièce latérale courbe, qui se rend vers le bout pylorique de la pièce dentaire supérieure, et s'y articule par l'inter- médiaire d'une autre pièce médiane nommée pylorique antérieure. Vues en dessus, ces pièces latérales sem- blent être seulement des bandes cor- néo-calcaires étroites, qui simtdent la corde tendue d'une arbalète dont la tige et l'arc seraient représentés par les pièces réunies en forme de T; mais postérieurement elles s'élargissent beaucoup en dessous , et elles mé- ritent le nom de pièces dentaires latérales (c). En effet, ;'i leur exi ré- mité postérieure, ces deux pièces, de même que la pièce dentaire supé- rieure, se renflent en dedans de façon à faire saillie dans l'intérieur de la cavité de l'estomac, et à y constituer un gros tubercule denliforme dont la disposition varie un peu suivant les genres. Au-dessous de chacune des

(a) Rôsel, Insecten-Belustigung , 1. 111, pi. 58, fi'j;. 12 et 13.

Siickow, Anatomisch-physiologische Untersuchungen der Insehlen und Krustenthiere, 1 S 1 8, p. 52,pl. lO.tig. 41 ('112).

Brandt et natzrbnri^, Medix-inische Zoologie, t. II, p. G2, pi. il et 12.

F. Œslcrl(;n, Ueber den Magen des Flusskrebses {MiiUer's Archiv fïtr Anal, vnd l'hysiol., 1840, p. 390, pi. 12).

{b) Milne Edwards, liistnire naturelle des Crustact's, 1834, t. I, p. G" et siiiv., pi. 4, fi^. 1, C, 7, 8,9cH0.

(e) Dans mdn cnsciirucn-.ent au Musciim d'iiistoiru iKiluielle, j'ai substitiii; ce nom à celui de pièces cardlmiues laléro-itiférieures, (pie j'avais adoidé dans mon ouvrage sur l'Iiisloiru naturelle des Crustacés, mais que j'ai trouvé d'un emploi incommode.

TÎJBE ALIMENTAIRE DES CRUSTACÉS. 555

L'eslomac de ces Crustacés est. donc un véritable gésier, comparable à l'estomac triturant que nous avons déjà rencontré chez divers Mollusques, les Aplysies, par exemple; mais il n'est pas seulement un instrument mécanique, il est aussi le siège des principaux phénomènes chimiques de la digestion. En effet, la bile et probablement d'autres sucs dissolvants y

pièces dentaires latérales, on remarque sur les côtés de l'estomac une large plaque cartilagineuse qu'on peut ap- peler dentaire accessoire (ou car- diaque latérale), dont l'angle postéro- supéricur donne également naissance à un tubercule denliforme, et dont le bord interne est liérissé de poils. Enfin la paroi postérieure et inférieure de l'estomac est garnie aussi d'une plaque médiane nommée cardiaque postérieure, qui se porte obliquement vers le pylore, et se termine au-des- sous du tubercule médian dépendant de la pièce dentaire supérieure, en con- stituant parfois une dent médio-infé- rieure très remarquable (a). D'autres petites pièces solides, d'une moindre importance, servent à réunir les précé- dentes entre elles. Enfin, derrière la pièce à trois brandies formée parle rap- prochement des tubercules dentifornies dépendants des trois grandes pièces déjà décrites, on trouve une autre cliar- pente composée de pièces cartilagi- neuses dites ptjloriques, qui soutien- nent les parois du fond de l'espèce d'entonnoir conduisant de l'estomac à l'intestin, et y donnent naissance à divers tubercules ou replis mem- braneux dont quelques-uns fonction- nent à la manière de valvules pour

empêcher le retour des matières ali- mentaires dans l'eslomac (6).

Les principaux muscles motetirs de cet appareil de trituration consistent en deux paires de gros faisceaux char- nus qui naissent de sa partie supé- rieure, et vont prendre leur point d'appui sur les parties adjacentes de la carapace. Une paire de ces muscles, appelés gastriques antérieurs , se fixe d'une part au front, et d'autre part à la traverse formée par les pièces ptérocardiaques; l'autre naît de la région pylorique de l'estomac, et remonte obliquement en arrière pour s'insérer à la partie terminale de la région stomacale de la carapace. Une troisième paire de muscles extrinsèques de l'estomac, beaucoup plus grêles que les précédents , descend de la portion pylorique de ce viscère au bord postérieur de la bouche. Enfin, on trouve aussi divers faisceaux muscu- laires étendus d'une pièce à une autre dans l'épaisseur des parois de l'es- tomac.

11 est aussi à noter qu'à l'époque de la mue, une sorte d'ampoule discoïde se développe de chaque côlé de l'es- tomac, dans l'épaisseur des parois de sa partie cardiaque, et qu'une concré- tion calcaire se forme daii^ la loge

(«) l'ar exemple, chez le Fayurus yranulatus, celte pièce constitue sous i'entre'e du pylore une dent en forme de fer à cheval finement striée en râpe.

(b) Milne Edwards, Crustacés de VAtlas du Règne animal, pi. 5, fig. i a et i b.

556

ORGANES DK LA DIGESTION.

affluent (1), et les aliments n'en sortent, pour se rendre dans l'intestin, qu'après avoir été Iranstormés en une pâte cl J y m eu se.

Chez les Squilles et les Édrioplitlialmes, In charpente solide de resloinac se sini|)liiie et se dégrade heaucoup; enfin, chez les Crustacés inférieurs, on n'en découvre phis de trace (2);

ainsi conslitiiée. Celte pièce se détache ensiiile et devient libre dans la cavité de l'estomac, mais ne tarde pas à dis- paraître, soit parce qu'elle est expulsée au dehors, soit parce qu'elle est ré- sorbée. Ce sont CCS concrétions que les pharmacologistes désiiMiaient jadis sous le nom ù'yeiiœ d'Écrevisse.

(1) Chez la plupart des Crustacés il n'y a, dans le voisinage de l'estomac, aucun ors^'ane qui puisse être consi- déré comme une glande salivaire ; quelques auteurs (a) ont pensé que l'on pourrait attribuer des fonctions de ce genre à un organe veidiitre qui se voit de chaque côté de l'œso- phage chez l'Écrevisse {b\ et qui est beaucoup plus développé chez le Ho- mard ; mais j'ai constaté que ces glan- des débouchent à l'extérieur du corps par un orifice pratiqué dans le tuber- cule dit auditif, qui se remarque à la base des antennes externes de tous les Décapodes ; par conséquent, il n'y a aucune raison pour regarder ces

organes comme étant des annexes de l'appareil digestif (c). Vn peu en ar- rière de l'd'sophage, on trouve , chez le Homard, une seconde paire de corps verdâtresqui paraissent être aussi des organes sécréteurs, mais je n'ai ])u leur découvrir aucune connexion avec la cavité alimentaire. Chez les Cir- rhipèdes, au contraire, on voit autour de l'extrémité postérieure de l'œso- phage un groupe d'ampnules dispo- séesen grappes, (jui paraissent être des organes sécrétems de ce g(?nre ((/).

MM. Pickeringel Dana altribuenldes fonctions analogues à un petit organe glanduliforme qu'ils ont trouvé près de la bouche, chez les Caliges (e).

Enfin, M. Leydig pense qu'une paire de tubes disposés en anse, et attachés à la partie postérieure de l'œsopliage, chez l'Argule foliacé, est aussi une glande salivaire ou un ap- pareil vénéniliquc (/').

(2) Ainsi, chez les Palémons, presque toute la partie supérieure de la char-

((/) Canis, Traité élcmcnlairc d'anatomie comparée, l. H, p. 2 iO.

(b) r.osfl, Insi'kten-liehtsligmig, t. III, p. 3^2, [il. 4S, fig. 1.

(f) Milr.n Edwards, llisloire naltirelle des Crustacés, l. I, p. iii, pi. ii, dg. 10.

[d) Ces yiappc'S ont èlé rcpi csonloes chez les Analifes par Cuviei" {Mcni. sur les Animaux des Anatifes cl des talanes^ p. 10, pi. 1 , fig. '.) cl 1 1 . Mém. ptnir servir à l'iiisluire des Mollusques).

Glicz les lialaïu's, elles ont été oliscrvécs par K.uslcn [Disiiuisilin microsriipica et cheiiiira lieputis et bitis Cnisluceurvm Cl DIolluscoruiii, \n Nuva Acia Acad. Nul. vurios., t. \X1, pi. -0,

lis- -l)-

(e) l'ickerini; ami Dana, Descript. nf a Species uf Caligns, p. ;i2, pi. 'i-, Wy:. 9 l'I '.'a {.Uiiericaii Jourii. of Science, t. XXXIV).

(D l-ejdig, Ueber Argulus (ZcilschriH fur wisscusilt. /.caluiiie, tSIiO, I. 11, p. Ii33, |il. t9, flg. 2).

TLlBiî ALlAlEiNTAlIlE L>i:S CKUSTACÉS.

557

mtiis ('liez presque fous ces Animaux la portion postœsopiia- gienno du [iibo aliuicntairc est dilatée en manière de poche

penic; solide de l'estomac disparaît. Par exemple, cliez le P. jamaicensis, cel organe se prolonge poslérien- remciil ca un grand cid-de-sac mem- braneux au-dessus de l'œsophage, on y voit un disque carlilagineux qui paraît correspondre à la pièce cardiaque médiane, et son plancher est revêtu d'une pièce disposée en forme de gouUière el analogue à celle que j'ai appelée cardiaque infé- rieure; enlin l'entrée du pylore est garnie de quelques autres pièces dont une inférieure estrentlée en forme de boîte. Mais, ciiez d'autres Salicoques, cel appareil est très diiveloppé et pré- sente des particularités remarquables. Ainsi, chez le Caridina Desmarestii , M. .loly a trouvé à la partie inférieure de l'estomac un appareil triiurant bivalve qui est très complexe, et qui nie paraît correspondre aux pièces dentaires accessoires de l'Kcrevisse ; puis, dans la porlion pylorique de ce viscère, il a rencontré d'autres pièces dont le mode d'action n'a pu èlre bien déterminé (a). Chez les Mysis , au contraire , l'armature stomacale est réduite à un très petit nombre de pièces peu développées (h).

Chez les Squilles, ainsi que je l'ai déjà dit, l'armature stomacale est en partie remplacée par un prolonge- ment des mandibules qui s'élève verti-

calement dans l'intériem- de l'esto- mac, au-devant du pylore (c). Il y a, en outre, des plaques cornées qui garnissent le pourtour de cet orilice. Il est aussi à noter que la portion cardiaque de l'estomac s'avance dans la tète, très loin au-devant de l'ouver- ture œsophagienne.

D:ms la grande division des Édrio- phlhaimes, rarmalure stomacale est moins puissante que chez la plupart des Décapodes, mais sa structure est ce- pendant en général lort compliquée : ainsi, chez les Cloporlides, l'esto- mac, logé tout entier dans la tète, est petit et globuleux , cet organe est pourvu aussi d'un appareil triturant fort complexe et assez semblable à celui des Décapodes. M. Lereboullet en a donné une description très détaillée, et y a reconnu des pièces épiihéliques analogues à celles dont il vient d'clre question, sous les noms de pièces den- taires supérieures et latérales. Mais les pièces cardiaques manquent. La portion pylorique de l'appareil est très développée et fort compliquée (d).

M. lîathke a constaté l'existence d'une armature stomacale bien déve- loppée chez Vldottiea entomon ; mais la description qu'il en a donnée n'est pas assez détaillée pour que l'on puisse établir utilement une comparaison entre les pièces dont cet appareil se

(a) l''rcy et Lciickari, [ieiU'âge ziir KennUiins wirbelloser Tldere, p. 1 18.

(b) Joly, Eludes sur les mœurs, le développement et les métamorphoses d'une petite Snitcoquc d'eau douce (Ann. des sciences nat., série, 1843, t. XIX, p. 74, pi. 3, Cig;. 27 à 3)).

(c) r)ello Cliiaje, Descrnione e notonUa deoll Animali invertebrati délia Sicilla citeriore, pi. 8<j, %• *•

{d) Lereboullet, Mc'iii. sur les Crustacés de la famille des Cloportides, p. 85 et suiv., ]ii. ,' ('\g. i-2i il \ 30, et |il. Ci, lig'. 131 (extr. (.les fléiu. de la Société d'histoire naiurellc de SU-asboW(\, t. IV, 1853).

L'intestin

et ses

dépendances.

558 OKGAIVES DE LA DIGESTION.

arrondie, cl l'iippnreil biliaire débouche dans sa partie pylo- rique (1).

§ 2. L'intestin, qui naît à la partie postérienre de l'es- tomac, se porte généralement en ligne droite jusqne dans le dernier anneau du corps, il débouche au dehors par un anus médian situé à la face inférieure de ce segment. Il passe sous le cœur et repose d'abord sivr le foie, j)uis sur les muscles fléchisseurs de l'abdomen. Chez les Crustacés supérieurs, tels que les Crabes et les Écrevisscs, il estétroit'et cylindrique dans

compose el celles de la charpente so- lide de resiomac des Crustacés supé- rieurs (a).

Chez les Cyaines, qui vivent en parasites sur la peau tle la Baleine, l'estomac présente encore des vestiges de l'appareil de trituration. Roussel de Vauzème y a trouvé une paire de colonnes ciiarnues portant chacune trois arêtes cartilagineuses, dont l'ex- trémité, bifiile et libre dans la cavité de cet organe, est opposée à une pièce triangulaire médiane (6).

L'appareil triturant paraît nianqKcr complètement chez quelques autres Édriophthalmes, tels que r//ypen'a La- treillii{c) et le Nelocira bivittala(d).

(1) Chez les Limules, la conforma- tion du tube alimentaire est un peu didérente. L'œsophage se dirige hori- zontalement en avant, et débouche dans une espèce de gésier qui se re- courbe en haut, puis en arrière, et

qui a des parois charnues très épaisses garnies intérieurement de quinze ran- gées longitudinales de tubercules cor- nés. L'extrémité jystérieure de ce gésier se prolonge en un cône étroit qui pénètre dans la portion suivante du canal digestif. Celle-ci, qui peut être considérée comme un duodénum cylindrique assez large, s'étend en ligne droite vers l'anus, à quelque dis- tance duquel elle se rétrécit brusque- ment pour constituer un intestin rec- tum. En (in , de chaque côté de la partie moyenne du céphalothorax , on y remarque deux pores qui sont les orifices de l'appareil hépatique. L'anus se trouve à la partie posté- rieure de l'abdomen, au-devant du stylet caudal (el.

Chez les Isopodes du genre Gyoc, qui vivent en parasites dans la cavité branchiale des Gébies, l'estomac est ovoïde, et sa surface interne est garnie

(a) Rathke, Anatomie dev Idolliea entomon (/?Êi(ca;7e sîtr (ie^c/ùc/i-fe der Thierwelt. Schriflen der NaturforschendcH Gesellschaft zu Daiizig, iS'20, t. 1, p. 120, pi. 4, fig. 19 et 20).

{b) lîoussel de Vau/ènie, Mém. sur le Cjainus Celi (.4)1». des sciences nat., 2* série, 1834, t. I, p. 251, pi. 8, lig-. U et 14).

(c) Struus, it/('?(i,. sur les Hiella , nouveau genre de Crustacés {Mém. du Muséum, i XVIII, p. 59).

(d) Leieboullel, Op. cit., p. 90.

(f) Van der Hœvcn, Hcchcrches sur l'hisluire walwclle cl l'aiialumie des Limules, p. 17, pi. 2, lig. 1 à G.

T[1BE ALIMENTAIRE DES CRUSTACÉS. 559

toute sa longueur, mais divisé plus ou moins distinctement en deux portions par un étranglement qui correspond à un cercle de petits replis valvulaires de la tunique interne. La première portion, que l'on désigne ordinairement sous le nom de duodé- num^ par assimilation à ce qui existe chez les Mammifères, varie beaucoup en longueur : ainsi, chez les Crabes, elle est courte et ne constitue pas le tiers ou même le quart de la totalité du tube intestinal, tandis que chez le Homard elle en forme [très de sept huitièmes (1). En général, ses parois sont assez é|iaisses, et souvent leur. surface interne est garnie de petites villosités; enfin on y voit déboucher quelques appendices tubu- laires (jui paraissent être des organes sécréteurs. Ainsi, chez

d'une multitude d'appendices fili - i'ormes, scnii)lal)les à de grosses vil- losités qui flottent librement dans sa cavité (a). Une structure analogue pa- raît exister chez, les Bopyros (/*).

Il est aussi à noter que chez quel- ques espèces de Balanides, telles que \eCoronula balœnaris et le Xenoba- lanus, il existe à la partie supérieure et élargie de l'estomac des replis lon- gitudinaux serrés les uns contre les autres (c).

(1) La ligne de démarcation entre ces deux portions du tube intestinal est en général très nettement tracée, soit par la présence de replis valvu- laires, ainsi que cela se voit chez le Maia {d) , soit par uii changement dans la structure de la tunique mu- queuse. Ainsi, chez le Homard, cette

membrane est lisse dans le duodénum et plissée longitudinalement dans le rectum, et chez l'Écrc visse elle est villense dans la première de ces deux portions de l'intestin et lisse dans la seconde.

Chez les Cloportides , le duodé- num est très dilatable, et se trouve séparé du rectum par un sphincter fort large. A sa surface interne, on remarque un sillon médio-dorsal qui loge une sorte de bourrelet longitu- dinal élargi en arrière, et qui offre de chaque côté une série de cellules. On ne sait rien quant aux usages de ces parties (e).

il est aussi à noter que chez les Cypris, l'intestin est pyriforme et sé- paré de l'estomac par un étrangle- ment très marqué (/").

(a) Conialia e Panceri, Osservazlonizoologico-anatomiche sopra un nuovo génère de Crostacei isopodi sedentarii, p. 15, pi. -2, fig. 9 (exlr. des Mém. de lAcad. de Turin, 2" série, 1858, t. XIX).

(6) RaUike, De Bopyro et Nereide, p. 8.

{c) Darwin, A Monoijraph of the Cirrlpedia : Balanio.e, p. 85.

(d) Milne Edwards. Allas du Règne animal de Cuvicr, Crustacés, p. 5, dg. 1 c.

(e) LerebouUet, Op. cit., p. 91, pi. 5, t\g. 123; pi. 6, iig. 136 à 139.

(/■) Straus, Mém. sur les Cypns, p. 18, lig-. 10 (cxir. des Mém. du Musctom, t. VII).

Moilificalions

lie l'iippareil

(ligcslif

chez

les Crustacés

iillbi'icui's.

5G0 ORGANES DE LA DIGESTION.

les Crabes, on trouve, à peu de distance du pylore, une paire de cœcuins longs et filiformes qui s'enroulent sur eux-inemes en manière de j)elole, et qui s'ouvrent dans la partie antérieure de cet intestin. Un troisième organe de même forme est fixé à son extrémité postérieure. Chez les Macroures, ce dernier tube membraneux manque complètement, et les deux autres ne sont représentés (jue i»ar une paire de petits sacs membraneux qui sont larges, très courts et simplement recourbés (1).

La portion terminale de l'intestin, que l'on appelle (pielque- Ibis le rectum, n'olTre dans sa structure rien de particidier.

Chez quelques Crustacés inférieurs , le canal digestif est d'une structure [)lus simple; on n'y dislingue ni renflement stomacal, ni rectum, et il présente dans toute sa longueur le môme aspect (2). Mais, chez d'autres espèces appartenant aux

(1) Chez le Carcinus Mœnas, par exemplo,ces appendices pyloriqiies sont U'ès développés. Us consistent chacun en un tube membraneux et fort grêle, qui est beaucoup plus long que l'in- testin et se rétrécit graduellement vers son extrémité postérieure. Dans l'état naturel, ils sont conionrnés el pelo- tonnés (le façon à former de chaque côté du [)ylore une petite masse ar- rondie qui est accolée à la face laté- rale de l'estomac. Le troisième appen- dice, que j'appelle le cœcum duodé- nal, est de même structure , et dé- bouche, au milieu de la face supé- rieure de l'intestin, immédiatement au-devant des valvules qui séparent

le itctum de cette portion du tube digestif (a).

chez rÉcre visse, les appendices pylo- riquessont remplacés par une paire de vésicules ovoïdes qui se remarquent à la partie latérale et inférieure du py- lore [h). Il en est à peu près de même chez le Homard et les autres Macrou- res dont j'ai eu l'occasion d'examiner l'estomac.

Chez le lîernard l'ermite, ou Pa- gure, il exisic un caecum diiodénal filiforme et très long (c).

('i) Ce mode d'organisation a été constaté chez le Dichelcstiuin Sturio- nia {(/), le Lampro(jlena i ulchella (e), et quelques autres Lernéens.

(a) Milne Edwards, Allas du Rêfiiie animal io Ciivier, Crustacés, pi, 5, lly. 2 et 1 c. (6) l'Kisel, Insecten-ltelustiiinnii, l. III, pi. 58, fi^'. 22 r/.

Suckow, Ariat. pluisiol. llntersucliungen (1er InseUlcn niid linislcnlliicyc, pi. 10, liij. 1 1 , i. (c) Swaminerdaiii, Hihlia Saturœ, pi. Xl, fiy. ;i.

(rf) Hailiki!, liemerkungen ûber den Bau des Diclic'.csiiuni Simionis [.\ova Acla Acnd. i\(il. curios., t. XIX, pi. il, liiT. 2).

(c) Nordiiiauri, ilikroyr. ISeiUùije, 1. 11, pi. 1, 11:,'. ), 2, i.

TUBE ALIMENTAIHK DES CUL'STACÉS. 561

nicincs groupes, on y remarque une disposition analogue à celle que nous avons déjà rencontrée chez beaucoup de Vers suceurs, ainsi que chez quelques-uns des Mollusques gastéro- podes dits ;j/î/e6ew^ërei\ En ctïet, le tube alimentaire, au lieu d'être cylindrique dans toute sa longueur, s'élargit dans cer- tains points, de façon à constituer de grandes poches latérales, ou même il donne naissance à des prolongements tubuliformes qui se terminent en caecums et s'avancent jusque dans l'intérieur des pattes. Le premier de ces modes de conformation se voit chez un petit Crustacé parasite (]ui vit sur les branchies du Homard et en suce le sang (i); le second, chez les Pychno- gonidcs, Animaux qui, par leur aspect général, ressemblent beaucoup à des Arachnides (!2). Enfin, on connaît aussi des

(1) Ce singulier parasite, que nous cliile (J). Un œsophage très étroit

avons fait connaître, V. Audouin ctnioi, conduit dans un estomac longitudinal

il y a environ trente ans, présente do d'où naissent cinq paires de tubes

chaque côté du thorax un énorme sac membraneux très longs et très grêles,

dans l'intérieur duquel se logent divers ainsi qu'un petit intestin terminai,

viscères, et notamment l'un des deux Ces appendices pénètrent les uns

caecums gastriques dont il est ici ques- dans la tète, les autres dans les pattes,

tion. Ces appendices de l'estomac sont et arrivent jusqu'auprès de l'exlré-

très grands, et l'on y remarque des niité de ces organes. Enfin ils sont le

mouvements péristaltiques assez éner- siège de contractions périslaitiques,

giques (a). Nos observations à ce sujet et les liquides contenus dans leur

ont été confirmées par les rcclievches intérieur sont chassés par ondées

plus récentes de M. Van Beneden (6). tantôt dans un sens, tantôt dans un

('i) Cette particularité, que j'ai fait autre, connaître chez les Nymplions (c), a Chez les Daphnies, on voit naître de été l'objet de nouvelles recherches la partie antérieure de l'estomac deux faites par M. de Qualrefages chez caecums intestiniformes (e), qui res- tes Pychnogonides du genre Phoxi- semblent un peu aux prolongements

{a) Auilouin et Milno Edwarils, Mémoire S'ar la Nicolhoc, animal singulier qui suce le sang des Homards {Ann. des sciences nat., i" sério, 1820, t. l.\, p. 330, pi. 4;.),fig-. ii et 3).

(b) Van Beneden, Mém. sur le dcveloppement et l'organisation des Nicolhoés (Mtm. de l'Acad, de Bruxelles, t. XXIV, et Ann. des sciences nat., 3= série, J850, t. Xlil, p. 303).

(c) Voyez Cuvier, Règne animal, 2" tdit., I. III, p. 277.

(rf) Qualrefages, Mém,. su,r l'organisation des Pychnogonides {Voyage en Sicile, t. Il, [i. 5, pi. 1 , fig. i ; pi. 2, fig. 1 , 2, 3, 61 Ami. des sciences nat., 3" série, 1845, t. IV). (e) .Jurine, Histoire des Monocles, p. 102, pi. 8, fig. 2; pi. 10, fig. 7, elc.

V. 36

562 ORGANES DE LA DIGESTION,

Crustacés chez lesquels ces tubes stomacaux se ramifient dans les parties latérales du corps, de façon à rappeler tout à fait le système gastro-vasculaire d'une Douve oud'uneÉolide. L'Argule foliacé, Animal parasite qui vit sur le Brochet et sur quelques autres Poissons d'eau douce, présente ce singulier mode d'or- ganisation (1). Les matières ahmentaires pénètrent dans ces appendices gastriques et y sont même ballottées par des mou- vements de va-et-vient ; mais cependant ici , de même que les

latéraux de l'estomac de la Nicothoé, bien qu'ils soient beaucoup moins grands; et M. Strans pense que les matières alimentaires y pénètrent (a), mais Jurine assure le contraire, et, d'après la couleur verdâlre ou jau- nâtre du liquide qui s'y trouve, il y a quelque raison de croire que ce sont des appendices biliaires seulement.

(1) L'existence de ces appendices rameux de l'estomac des Argules a été constatée par L. Jurine, et ce na- turaliste a très bien reconnu non- seulement que les aliments pénètrent dans ces tubes, mais que ces sub- stances y sont continuellement agitées par l'eftet des contractions péristal- tiques dont les parois de ces organes sont le siège (b). MM. Vogt etLeydig ont été également témoins de ces mou- vements. Le premier de ces obser- vateurs a cru reconnaître un tissu glandulaire autour de ces tubes ra- meux (c) ; mais le second assure

que leurs parois n'en contiennent pas et ressemblent tout à fait à celles de l'estomac. Ce dernier organe est globu- leux et séparé de l'intestin par un étran- glement; de chaque côté il se prolonge sous la forme d'un canal cylindrique qui bientôt se divise en deux troncs dirigés l'un en avant, l'autre en ar- rière, lesquels donnent naissance du côté externe à une série de branches ramifiées dont toutes les divisions se terminent en caecums {d).

Chez quelques Girrhipèdes, tels que les Anatifes, les Conchodermcs et le Balanus perforatus, l'estomac donne aussi naissance à des caecums qui sont un peu rameux et tapissés par une tunique chilineuse comme cet organe lui-même (e). Chez quelques espèces de Balanes, ces appendices sont sim- ples et au nombre de six à huit ; enfin, dans les genres Coronule, Tubi- cinelle, Xenohalanus et quelques au- tres, ils manquent complètement (/■).

(a) Siraus, Mém. sur les Daphnies (Mém. du Muscuin, t. V, pi. 29, fig. (3). Atlas dît, Règne animal <\c Cuvier, GnusTACiis, pi. 73, fig-. 2 c.

(b) Juriiiu fils, Mém. sur l'Argule foiiacc (Aiiii. du Muséum d'histoire nattirelle, 1800, t. Vil, p. 440, pi. 20, ùg. 1, etc.).

(c) Vogt, lieitréiyc zur Naturgeschlchle der scliweix,eriscncii Cruslaceen, p. 8 (extr. des Nouv. Mém. de la Société d'histoire naturelle de Neufchdtel, d843, t. Vil).

(d) F. Leydig, Ikber Argiilus foliaccus {Zeltsrhr. fiïr wiss'ensch. Zool. vuii Siobold iind Kolliker, 1850, t. Il,p.';i32,pl. i[), lîg. 2).

(e) Darwin, A Monoçir. nf Cirripedla : Halanid/e, \k 85.

(/■) Martiii-Sainl-Angc, Mém. sur l'organisation des Girrhipèdes, [k 6, pi. 2, fig. 1, d'.

TUBE ALIMENTAIRE DES CRUSTACÉS. 563

.Mollusques dont je viens de parler, ces tubes membraneux qui se terminent tous en cul-de-sac me paraissent correspondre aux parties qui, chez les Crustacés supérieurs, constituent les canaux efférents de l'appareil hépatique, et chez les Apus,tout en ayant assez de largeur pour admettre dans leur intérieur les alimenls en voie de digestion, ils s'entourent d'une multitude de petits caecums glandulaires et constituent avec ces organites sécréteurs un foie ramifié (1).

Chez quelques Crustacés inférieurs, tels que les Lernées, la Appareil bile paraît se former dans des cellules qui sont logées dans l'épaisseur des parois du tube stomacal , ou apphquées en couche mince tout autour de ce canal (2) ; mais chez les Crus-

(1) L'estomac de VApus cancrifor- sur la face externe du tube diges- mis est une dilatation du tube inles- tif (6).

linai qui se trouve dans la tête, et Chez beaucoup de Lernéens, un qui de chaque côté se prolonge en tissu utriculaire, contenant un liquide une sorte de corne à deux branches : coloré, est disposé par traînées sur la l'une de celles-ci s'avance dans le surface externe du tube digestif, de fa- front, l'autre se porte obliquement en çon à y former une sorte de réseau (c). arrière et en dehors ; enfin le bord Mais, chez le Dichélestion, M. Ilathke concave de l'espèce de croissant ainsi n'a pu découvrir aucune trace d'un formé donne naissance à une série de tissu hépatique quelconque {d). gros canaux coniques qui, à leur tour, Chez les Daphnies, le tube digestif fournissent un grand nombre de ra- est entouré d'une masse d'utricules muscules latéraux, autour desquels d'un volume considérable et conte- se groupent de petits caecums sécré- nant un liquide coloré. M. Jones, leurs renflés en manière d'am - qui a étudié avec soin ce tissu, le poules (a). considère comme constituant un ap-

(2) Chez YArtemia salina, le foie pareil hépatique, mais il n'a pu dé- paraît être représenté par une foule couvrir aucune communication entre de petits caecums sécréteurs insérés ces glandules et la cavité digestive (e),

(a) Zaddach, De Apodis cancriformis anatome et historia evoliitionis (dissert, inaug.). Bonn, 1841, p. 8, pi. d, fig. 10 et 11.

(b) Joly, Histoire d'un petit Crustacé auquel on a faussement attribué la coloration en rouge des marais salants {Ann. des sciences nat., 2' série, 1840, t. XIII, p. 239).

(c) Par exemple, chez Xa Lerneopoda elongata (Grant, On the Structure o/" Lernœa elongata, in Brewsler's Ê(i(ni)Mr3/t Jo^tm. of Science, 1827, t. VII, p. 151).

Le Lerneocera fluviatilis i^oxAmmm, Microgr. Beitrage, t. II, p. 125, pi. 6, fig. 2 et 4).

Le Lamproglena pulchella (Nordmann, Op. cit., pi. 1, fig. 4).

((/) Raliike, Bemerkungen ûber den Dau des Dicheleslium {Nova Acta Acad. nat. curios., t. XIX, p. 143).

(c) C. B. Jones, On the Structure oftlie Liver {Philos. Trans., 1849, p. 115).

56/|. ORGANES DE LA DIGESTION.

tacés supérieurs, l'appareil hépatique acquiert une existence indépendante et se développe beaucoup. Ainsi, chez les Crabes des Décapodes, ct Ics Écrevisscs, il forme de chaque côté de l'estomac une grande masse glandulaire de couleur jaunâtre, qui est divisée en plusieurs lobes, composés eux-mêmes de lobules, lesquels se résolvent à leur tour en lobulins constitués chacun par une multitude de petits csecums remplis d'utricules sécréteurs et groupés autour d'un canal excréteur rameux dans lequel ils débouchent (i).Unetunique membraneuse et translucide, dépen- dante du péritoine, revêt extérieurement le foie, et se replie en dedans entre les principales divisions de ce viscère; enfin, les conduits excréteurs qui naissent des lobules ou paquets de petits cœcums sécréteurs se réunissent entre eux de façon à

et M. de Siebold pense que les uiri- cavité viscérale qui se trouve comprise

cilles en question sont seulement des entreleslogesépimériennes ;là iipasse

cellules adipeuses (a). sous le cœur, puis il se prolonge sur les

Une structure analogue a été oliser- côtés de Pintestin, mais il ne s'avance

véedans la couche pulpeuse qui recou- que très peu dans la portion abdomi-

vre l'estomac des Cirrhipèdes, et qui nale du corps (r/). Chez les l'xrevisses,

est généralement considérée comme les Homards et la plupart des autres

étant le foie de ces Animaux [b). Chez Macroures, cet organe s'élargit beau-

les Anatifes, ces glandules paraissent coup moins antérieurement , mais

être un peu renflées et sont en général s'étend plus loin dans l'abdomen {e).

disposées en séries longitudinales (c). Enfin, chez le Bernard-l'ermite, ou

(1) Chez les Décapodes Bracliyures, Pagure, il est très étroit en avant,

le foie s'étend beaucoup de chaque mais se loge presque entièrement dans

côté de l'estomac, il est recouvert la région abdominale du corps, et s'y

en partie par les ovaires ou les testi- prolonge jusque sur les côtés de l'a-

cules. 11 recouvre à son tour la partie nus (/). Swammerdam a connu cet

antérieure des chambres branchiales, organe, mais il le considérait comme

et il occupe la majeure partie de la une sorte de pancréas {cj).

a) Sieliold et Stannius, Nouveau Manuel (Vanalnniic comparée, l. II, p. 44(5. Martin-Saiiil-Ange, Mân. sur les Cirrhipèdes, p. ■)•>. (b) Darwin, A Monmjraph of Die sub-dass Cirripedia : Iîai.ANID.*;, p. 80. (cl M('in, Op. cit. : Lepadidjî, [k 44.

(d) Exemple : lo Tourteau, ou l'iatycarcinus paourus {.MIas du liàjue unimal de Ciivier, Crii.stjicés, pi. \).

(e) Millier, De (jlandutarum seceruentium slructura pcndwn, pi. 8, li^'. 13.

(/') Milnc Edwards, Crustack.s do l'Ai/rts rfit /{èg«(î animal àa Ciiviur, pi. 5, lig-. 3. (y) Swaniiiicrdam, liiblia Naluric, t. I, p. ^6-2, pi. ::!1, lig. 5.

TUBE ALIMENTAIRE DES CRUSTACÉS. 565

conslituer des canaux de plus en plus gros, lesquels se dirigent vers le pylore et y débouchent de chaque côté par un tronc unique (1). En général, les deux foies ainsi constitués sont

(1) Chez le Maia et la plupart des autres Bracliyures, les caecums termi- naux de Tappareil hépatique sont très courts, et renllés de façon à avoir la forme de vésicules groupées autour d'un canal excréteur rameux (a). Cliez le Homard, ils sont cylindriques et plus allongés; chez i'Écrevisse, ils s'al- longent encore davantage (6) ; enfin , chez le Pagure ou bernard-l'ermite, ils ont la forme de tubes grêles disposés en manière de frange sur le Ciinal ex- créteur et très contournés sur eux- mêmes (c).

La structure intime des caecums hépaliques a été étudiée avec soin par MM. Goodsir, Schlemm, H. Karsten, H. Meckel et Laidy (c/). On y trouve une tunique propre qui est garnie de libres disposées en réseau à mailles car- rées et tapissées intérieurement d'une couche d'utricules sécréleurs arrondis et à divers degrés de développement; enlin leur axe est occupé par une

cavité en continuité avec le canal excréteur, et contenant des utricules hbres ainsi que le liquide sécrété. D'après M. H. Meckel, cette cavité serait tapissée par une cuticule ou tunique interne ; mais cette disposi- tion ne me semble pas exister, et la couche utriculaire me paraît y être à nu.

Duvernoy a décrit le foie des Palé- nions comme étant un grand sac mem- braneux, à cavité anfractueuse, divisé en plusieurs petites poches et conte- nant une malière jaune (e) ; mais la structure de cette glande est en réa- lité semblable à celle du foie chez les autres Décapodes , et la disposition observée par Tanalomiste que je viens de citer ne pouvait être que le résul- tat de la putréfaction de toute la por- tion esseniielle de l'appaieil hépatique, dont la tunique péritonéale, vidée de son contenu, constituait probablement le sac en question.

(a) Milne Edwards, Crustacés de Y Atlas du Règne animal de Cuvier, pi. 5, fig. 1.

(b) Idem, ari CKUSTACEAi'l'odd's Cyclopœdia uj Anatomy and Pliysiology, t. 1, p. 774, fig. 417). Suekoiv, Anatcm. pliys. Unters. der Inscklen und Kruslenlliiere, pi. 10, iig. 14.

Brandt et Ralzeburi;, Mediiinisvhe Zoologie, l. II, pi. 11, lig. 9.

Milne Edwards, Histoire des Cntstacés, pi. 4, fig. i.

le) Voyez l'Atlas du Hègne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 5, fig. 3a.

Délie Chiaje, Descri%ione e notomia degll Animali inverlebi'., pi. 8U, fig. C.

(d) Goodsir, Secreting Structures {Anatomical and Physwlogical Observations, p. 30).

Scldcmm, De hepale ac bili Cviistaceurwn et Molluscorum quoruindam (dissert, inaug.). Berlin, 1844, p. -2, pi. ii, lig. 1.

H. Karsten, Disquisitio microscopica et chimica hepatis et bilis Crustaceorum et Mollus- corum {Nova^Acta Acad. nat. cîmos.,l. XXI, p. 3'J8, pi. 19, fig. 2 à 9).

H. Meckel, Mihrographie etniger Drusenapparale der niedcren Thiere (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiot., 184(5, p. 35, pi. 1, fig. 13 à 16).

Laidy, Hesearches on the comparative Structure of the Liver, p. 4, pi. 2, fig. 8-13 (extr. de \' American Journ. ofmed. science, 1848).

(e) Duvernoy, Du foie des Animaux sans vertèbres, en général, et particulièrement sur celui des Crustacés {Ann. des sciences nat-, série, 1830, i. VI, p. 250).

56(3

Foie des Squilles,

des

Édrioplitlial-

mes, etc.

ORGANES DE LA DIGESTION.

complètement séparés enlre eux; mais, chez les Main et la plupart des autres Brachyures, ces deux glandes, quoique res- tant en réalité distinctes, se joignent sur la ligne médiane au-dessous de l'intestin, et y donnent naissance à un lobe mé- dian impair (1).

Chez d'autres Crustacés, l'appareil hépatique présente un mode de conformation intermédiaire entre ces deux états opposés. Ainsi, chez les Squilles, il entoure l'intestin dans toute la longueur de cet organe, mais en outre il se prolonge latéralement en un certain nombre de lobes rameux qui en sont parfaitement distincts (2). Chez les Bopyres, il est con-

(1) Les deux moitiés de l'appareil hépatique sont toujours symétriques, et en générai parfaitement indépen- dantes l'une de l'autre , ainsi que cela se voit chez le Homard (a). Quel- quefois elles sont plus ou moins con- fondues sur la ligne médiane , en arrière de l'estomac ; mais elles sont toujours complètement distinctes phy- siologiquement , car il n'y a jamais anastomose des canaux hiliaires de droite et de gauche, et tous les cae- cums d'un côté se rendent au conduit excréteur qui débouche dans le py- lore du même côté.

En général, on dislingue dans cha- cune de ces deux masses glandulaires quatre divisions principales ou lobes, qui sont tantôt simples comme chez riicre visse, d'autres lois profondément subdivisées en lobules. Une paire de lobes, qu'on peut appeler céphaliques, s'avance sur les côtés de l'estomac ; les deux paires suivantes, que je nomme

thoraciques, se placent entre les deux flancs ils embrassent l'intestin ; en- fin une paire de lobes postérieurs se prolonge jusque dans l'abdomen au- dessous de l'intestin.

Chez le Maia, on remarque aussi derrière l'estomac un lobe médian qui est formé par la réunion d'une partie des lobes thoraciques antérieurs, et qui recouvre la portion duodénale de l'intestin ; les lobes postérieurs sont également confondus en une masse impaire ; enfin les lobes céphaliques sont divisés en plusieurs lobules de formes très variées (6).

(2) Chez les Squilles, l'inleslin est très étroit, excepté dans le voisinage de l'anus, il se renfle un peu, et il est pour ainsi dire enfoui dans le tissu hépatique, qui à son lour est revêtu, comme d'ordinaire, par une tunique péritonéale. Ce tissu, qui est très mou, se détruit facilement chez les individus qui ont été mal conservés dans de

(rt) Aiidouin et Miliie Edwards, Recherches sur la circulation che% les Crustacés {Ann. des sciences nat., i" série, t. 11, pi. ^8, fig. 2).

(6) Milne Edwards, Histoire des Crustacés, pi. 4, lîg. 5, et Allas du Règne animal de Cuvicr, CUUSTAClis, pi. 5, fig-, i.

TUBE ALIMEINITAIRE DES CRUSTACÉS. 567

stitué par une double série de petits paquets d'ampoules sécré- toires, appendus de chaque côté de l'intestin par autant de canaux excréteurs (1). Enfin , chez la plupart des autres Édriophthalmes du même ordre, il affecte la forme de sacs grêles et très allongés, qui semblent être des appendices tubuleux de l'estomac, et qui ont beaucoup d'analogie avec les vaisseaux malpighiens des Insectes, dont l'étude nous occupera bientôt (2).

l'alcool faible, et alors rintestin semble flouer au milieu d'une grande poche membraneuse, disposition qui en a imposé à Duvernoy, lorsque cet ana- tomiste a cru reconnaître dans la tunique du foie un sinus ou réservoir veineux {a).

Ce viscère s'étend depuis la partie postérieure de l'estomac jusqu'à l'ex- trémité de l'abdomen ; il est placé sous l'ovaire ou le testicule, organes qui, à leur tour, sont recouverts par le cœur, et par sa face inférieure il limite en dessus le sinus veineux abdominal (b) ; latéralement il forme dans chaque an- neau, tant du thorax que de l'abdo- meti, un prolongement plus ou moins branchu, et dans le dernier segment du corps il constitue une série de di- gitations disposées en éventail (c). Les conduits excréteurs des vésicules dont il se compose ne se réunissent pas en deux gros troncs, comme chez les

Décapodes, mais se rendent presque directement à l'intestin, en formant une multitude de petits canaux ra- meux dirigés transversalement.

(1) M. Rathke a trouvé que chez le Bopyre femelle il existe dans chaque anneau du thorax une paire de grappes hépatiques attachées au tube digestif, chacune par un pédoncule ou conduit excréteur particulier; ces glandes sont situées à la face inférieure du corps, sous les ovaires, et quelques lobules de même structure se montrent à la face dorsale de cet organe, derrière l'es- tomac (d).

MM. Dana et Pickering ont trouvé une disposition analogue chez les Ca- liges ; de chaque côté de l'intestin il existe plusieurs petites masses glan- dulaires arrondies, qui paraissent sé- créter le liquide jaune dont ce tube est rempli (e).

(2) Chez les Cloportides, l'appareil

(«) Duvernoy. Mém. sur quelques points d'organisation concernant les appareils d'alimen- tation et de circulation et l'ovaire des Sqiiilles {Ann. des sciences nat., '2° sévis, 1837, t. VIII, p. 41, pi. 2, iig. 3 et 4).

(b) Voyez V Atlas du Règne animal de Cuvier, Crustacés, pi. 56, flg. 1 b.

(c) J. Muller, De glandularum secernentium structura pcnitiori, d830, pi. 9, C\g. i , etc.

Délie Chiaje, Descri&ione e notomia degli Animali invertebrati délia Sicilia citeriore, pi. 86, fig. 4.

Duvernoy, Op. cit. , et Mém. sur le foie des Animaux sans vertèbres {Ann, des sciences nat., 2' série, t. VI, p. 247, pi. 15, fig. 1).

(d) Rathke, De Bopyro et Néréide comme7itationes anatomico-physiologicoi dua:, Dorpat, 1837, p. 9, pi. l,lig. 7 et 8.

(e) Pickering and Dana, Descript, of a Species of Caligiis, p. 32, pi. 2, fig. 9 (Americ. Journ. of science, t. XXXIV).

Appareil

dig^estif

des

Arachnides.

Scorpion.

568 APPAREIL DIGESTIF.

§ o. Le mode d'organisation du liibe digestif que nous venons de rencontrer chez quelques Crustacés inférieurs est dominant dans la classe des Arachnides ; mais cliez ces derniers Animaux , d'une part, l'estomac n'est jamais pourvu d'un appareil triturant comme chez les Crabes et les Écrevisses, et, d'autre part, le système glandulaire annexé au canal alimentaire se perfectionne et se com[)lique beaucoup plus que chez aucun de ces derniers Articulés.

Ainsi, chez le Scorpion, que je prendrai comme premier exemple, l'orifice buccal, très petit, logé, ainsi que je l'ai déjà dit, au fond d'une sorte de fosse sous-frontale (1), et occupant, comme d'ordinaire, la ligne médiane du corps (2), donne accès

hépatique se compose de deux paires d'appendices qui ont la forme de sacs grêles Cl très allongés, ou plutôt de tubes membraneux et fermés au bout, situés sur les côtés de l'intestin et s'é- tendant jusqu'à l'extrémité postérieure du corps (a). Les parois de ces tubes présentent de petites boursouflures arrondies, disposées en spirale, et ils débouchent dans la partie pylorique de l'estomac, de chaque côté, par un canal commun ; enfin, ils renferment un tissu utriculaire sécrétoire. M. Kars- ten a représenté ces cellules comme des ampoules pédiculées (h); mais M. Lereboullet, a constaté que cette apparence est accidentelle, et que dans l'état normal ce sont de grosses vési- cules closes renfermant dans leur in- térieur d'autres vésicules plus petites,

ainsi que des globules graisseux (c).

Chez les Lygies, j'ai trouvé trois paires de ces appendices hépatiques cylindriques {d), et M. Ilathke les a rencontrés en même nombre chez V/Ega bicarinata (e).

Ce mode d'organisation de l'ap- pareil biliaire existe aussi parfois chez les Crustacés Décapodes. Ainsi MAI. f'rey et Leuckart ont trouvé que chez les Mysis le foie n'est pas massif comme chez la plupart des Animaux de cet ordre, mais se compose de quatre paires d'appendices étroits et très allongés, qui naissent de la por- tion pylorique de l'estomac (f).

(1) Voy. ci-dessus, page 539.

(2) Savigny, dont les descriptions sont en général d'une exactitude re- marquable, s'est trompé au sujet de

(a) lerchnuWcl, Mémoire sur les Cloyorlidcs, p. 96, pi. 5,fig. ■123{.i;m. de la Société d'histoire naturelle de Strasbourg, t. IV).

(b) Brandi ut Riiizdjiiri,', Medizinische Zoologie, t. II, pi. 1."), fii;-. 39.

(c) H. Karslen, Ulsquisitio microscopica et chemica hepatis et bilis Gnistaceorum et Mollutco- rum (Nova Acta Arad. nat.curios., t. \\I, p. 2!)(î, pi. tS, fig. d, 3).

(d) Miliie Edwards, Histoire naturelle des Crustacés, pi. 4, fis;. 3.

{(') P.alliko, lieilraije zur Fauna Norwegens, p. 30 (cxlr. dos Nova Acta Acad. nat. curios., 1843, I. XX, |i. 30). (/■) Fivy cl Linii-.karl, Heilrage zur Kenntniss wirbelloser Thicre, p. \ 19, pi. 2, fiif. 13.

TUBE ALIMENTAIRE DES ARACHNIDES. 5G9

dansiin tube œsophagien étroitdont la partie postérieure se renfle de façon à former un petit jabot, et dont les parois sont garnies de muscles extenseurs aussi bien que de fibres charnues annu- laires (1). L'estomac, placé à la partie postérieure du thorax, est petit et ovalaire (^2), mais se continue de chaque côté avec deux gros appendices tubuleux qui se portent en dehors et se cachent bientôt dans une masse de tissu glandulaire située dans la région frontale. L'appareil sécréteur, ainsi constitué, verse dans l'estomac un liquide digestif très acide ; enfin, il se com- pose d'une multitude d'utricules disposés en lobules irréguliers plutôt qu'en grappes, et d'une paire de capsules ovoïdes ren- fermant chacune un long tube membraneux terminé en csecum et pelotonné sur lui-même (3).

l'entrée des voies digestives des Ara- (2) La distinclion enlre l'estomac et chnides; il n'a pas vil rorifice buccal, l'intestin n'est bien apparente que et il attribue à ces Animaux un double chez les individus très frais, et dispa- pharynx communiquant au dehors par raît cbez ceux qui ont été conservée deux trous « imperceptibles » situés dans l'alcool. Cette circonstance ex- sur les côtés de la langue (a). plique comment le premier de ces (1) Vers le milieu de l'œsophage, organes, après avoir été décrit par on voit de chaque côté de ce tube une iVIeckel (c), a échappé aux recherches bandelette musculaire qui se porte en de Treviranus {d). Ses parois sont arrière, et un peu plus loin «ne se- minces et lisses (e). conde paire de faisceaux semblables (3) Ces glandes gastriques ont été dirigés en avant. Ces brides conlrac- considérées par J. Millier, Newport liles se fixent aux parties voisines du et la plupart des autres anatomistes, squelette tégumentaire et doivent dé- comme étant des organes salivai- terminer la dilatation de celte partie res (/"); mais, ainsi que M. Blanchard du canal digestif. [| est donc à présu- l'a fait remarquer, elles versent les mer qu'ils interviennent dans le méca- produits de leur sécrétion non dans nisme de la succion (6). la bouche, mais dans l'estomac, et le

(a) Sa\igny, Théorie des pièces de la bouche des Insectes, p. 57.

(b) Blanchard, Organisation du Rèyne animal, Arachnides, p. 00, pi. 4, ûg. 4.

(c) Meckel, Traité d'anatomie comparée, t. VII, p. 241.

(d) Treviranus, Ueber den innern Bau der Arachniden, p. G.

(e) Blaiicliard, Op. cit., p. 01, pi. 4, fig. 4 et 0.

(/') i. Millier, Beïtrdge zur Analomie des Scorpions (Meckcl's Archiv fur Physiologie und Ana- ternie, 1828, p. 52).

Newport, On ihe Structure, Relations and Development of the Nervous and Circulatory Systems in Myriopoda and Macrourous Arachnida, pi. 15, fig. 39 {Philos. Trans., 1843).

L. Diifour, Histoire anatomique et physiologique des Scorpions, p. 022 {Mém. de l'.Kcad. des sciences, Savants étrangers, t. MV).

570 APPAREIL DIGESTIF.

L'intestin, qui fait suite à l'estomac, est un long tube divisé en deux portions, l'une anlérieure et très étroite, l'autre posté- rieure et plus ou moins renflée (IV

L'intestin grêle occupe toute la longueur de la portion élargie de l'abdomen, et ses parois, bien que très minces, se composent de deux tuniques et logent dans leur épaisseur beaucoup de granulations. Latéralement, cette partie du canal digestif com- munique avec l'appareil hépatique dont le développement est très considérable. En effet, on voit y déboucher de chaque côté cinq canaux grêles qui se divisent en une multitude de ramus- cules autour desquels sont groupés des multitudes d'utricules sécréteurs, et dans l'intérieur de ceux-ci on aperçoit un liquide contenant des granules d'un brun verdàtre (2).

liquide qu'elles élaborent est acide , comme l'est tout suc gastrique bien caractérisé (o).

Les deux capsules ovoïdes [b] ren- fermant les lubes contournés sont réniformes, et reposent sur la lame aponévrotique qui constitue une sorte de diaphragme entre la cavité céphalo- thoracique et l'abdomen. Elles sont constituées par une membrane mince et transparente. Le tube qu'elles ren- ferment est long, grêle et très difficile à dérouler; ainsi que je l'ai déjà dit, il se termine en cul de- sac, mais on ne connaît pas bien ses connexions avec l'estomac ou avec le tissu utricu- laire adjacent (c). Celui-ci constitue trois masses assez distinctes : l'une médiane , qui repose sur l'estomac

aussi bien que sur l'œsophage, et deux latérales. Il se compose d'ampoules arrondies, serrées les unes contre les autres, et communiquant avec l'esto- mac par deux paires de canaux larges et courts.

Les usages du suc gastrique fourni par cet appareil ne sont pas douteux; car, en y plongeant des matières ali- mentaires, M. Blanchard a pu opérer des digestions arlilicielles {d).

(1) M. Léon Dufour réserve le nom d'intestin à cette dernière partie, et appelle la portion antérieure le ventri- cule chyii/ique (p).

('i) Le foie du Scorpion, après avoir été sommairement décrit par Mec- kel (/■), a été considéré par ïreviranus et quelques autres naturalistes comme

(n) Blaiicluird, Organisation du liègne awirnaî, AracHNîDEs, p. Cl.

{b} Ces corps sont les seules parties de l'appareil glandulaire gastrique qui aient été décrites dans la monographie analoniique de M. Léon Liufour. (f) Blanchard, Op. cil., p. Gl, pi. 4 et 6.

(d) Idcni, ibid., p. 6(>.

(e) h. Dufour, Op. cit., p. 626.

(/■) Mcckel, Traité d'anatomie comparée, t. VII, p. 239.

TUBE ALIMENTAIRE DES ARACHNIDES. 571

Deux paires d'autres (?anaux s'ouvrent aussi dans la partie postérieure de l'intestin grêle, et se ramifient entre les grappes formées par les utricules séeréteurs dont je viens de parler, mais ne proviennent pas de ces organites, et, comme nous le verrons dans une autre Leçon, ils paraissent constituer un appareil urinaire (1).

étant seulement un corps graisseux entourant une série de prolongements tubuleux du canal digestif («); mais les recherches plus récentes de New- port, de M. Léon Dufour et de iM. Blan- chard, ne laissent aucune incertitude sur la nature glandulaire de cet organe et sur le déversement de ses produits dans le tube alimentaire (6). C'est une glande volumineuse très molle et de couleur jaunâtre, qui occupe la pres- que totalité de la portion renflée de la cavité abdominale, et qui se compose de deux moitiés parfaitement dis- tinctes, logées sur les côtés du tube digestif. Elle est revêtue d'une tu- nique périlonéale très mince, qui en- voie des prolongements latéraux sur les parois de la cavité viscérale , et elle est maintenue aussi en place par des muscles qui sur divers points traversent sa masse. Son tissu se com- pose de petits sacs ovoïdes longs d'environ un quart de millimètre et disposés en manière de grappes au- tour de petits canaux excréteurs très

déUés. Ces tubes se réunissent entre eux, et, en se dirigeant vers l'in- testin , deviennent ainsi de plus en plus gros ; enfin ils s'y terminent sous la forme de cinq paires de gros canaux à parois membraneuses. Les conduits biliaires des quatre premièaes paires sont dirigés transversalement ; mais ceux de la dernière paire, beau- coup plus gros que les autres et à ramifications plus fortes , marchent obliquement d'arrière en avant (c).

Suivant M. Léon Dufour, le nombre des canaux hépatiques ainsi constitués varierait de i à 6 paires. Le calibre de la portion terminale de ces tubes est assez considérable pour que les ma- tières alimentaires puissent y pénétrer facilement, et cette introduction paraît en effet avoir lieu (d) ; par conséquent, ces cliver ticnlum intestinaux doivent être considérés comme ayant des fonc- tions analogues à celles des appendices gastro-hépatiques des Crustacés infé- rieurs.

(1) Treviranus, Audouin et les au-

(a) G. R. Treviranus, Veber den innérn Bau der Ai'achnidm, 1812, p. 0.

J. Millier, Beitrage Aur Anatomie des Scorpions (Meckel's Archiv fur Anat. Und PhysioL, 1828, p. 35).

Audouin, art. Arachnida (Todd's Cyclop. of Anat. and PhysioL, t. I, p. 204).

(b) L. Dufour, Recherches anatomiques et observations sur le Scorpion roussdtrc (Journal de physique, 1817, t. LXXXIV, p. 447). Histoire anatomique et physiologique des Scorpions, p. 037 (Mém. des Savants étrangers, t. XIV).

Blancliard, Organisation du Règne animal, classe des Arachnides, p. 63.

Newport, Op. cit. (Philos. Trans., 1843, pi. 14, lig. 32).

(c) Blancliard, Op. cit., pi. 4, fig. 4.

(d) Idem, ibid., p. 07.

Tliélypliones.

Galéodes.

57^2 APPAREIL DIGESTIF,

Enlin le gros intestin commence par une dilatation assez brusque, et ses parois, plus ou moins renflées d'anneau en anneau, laissent apercevoir des bandes musculaires disposées les unes en long, les autres en travers. L'anus consiste en une fente transversale située à la face inférieure de l'abdomen, entre le dernier anneau du corps et l'article en forme de crochet qui constitue le dard caudal du Scorpion.

Chez les Thélyphones, la structure générale de l'appareil digestif est àpeu prèsla même que chez les Scorpions, si ce n'est que l'estomac se développe davantage et donne naissance à quatre paires de gros prolongements qui ont la forme de poches plutôt que de tubes; disposition qui établit le passage vers le mode d'organisation propre aux Aranéides et à la plupart des autres Animaux de la même classe, les espèces de diverticu- kim ainsi constitués acquièrent des dimensions énormes (l).

L'appareil digestif des Galéodes ou Solpuges présente quelques

très naturalistes qui considéraient le foie comme un corps adipeux , ont décrit ces vaisseaux sous le nom de canaux biliaires (a). M. Léon Dufour pense que ce sont des filets « in fonc- tionnels», représentants inactifs des vaisseaux biliaires des Insectes (6). M. Blanchard les appelle des vais- seaux urinaires , et il a constaté l'existence d'une anastomose fort sin- gulière entre ceux de la dernière paire et les canaux biliaires posté- rieurs (c).

(1) On voit par les belles figures anatomiques de la Tliélyplione , pu- bliées récemment par M. Blan- chard (cl), que chez ces Arachnides

l'œsophage est grêle et fort allongé ; les glandes salivaires sont très déve- loppées et recouvrent l'estomac dans toute la lonj;ueur de la région thora- cique du corps; les caecums gastri- ques, au nombre de quatre paires, sont de gros tubes terminés en cul-de- sac; la portion antérieure de l'intestin est renflée vers ses deux bouts, et reçoit latéralement cinq paires de ca- naux hépatiques dont les ramifications prennent naissance dans une masse glandulaire qui occupe la plus grande partie de l'abdomen et qui constitue un foie lobule ; enfin, la portion ter- minale du tube digestif est étroite et s'engage dans la base de la portion

(a) Treviranus, Ueber den innern Bau dcv Arachniden, p. C. pi. 1 , fi^;. G, i, i. {h) LéonDiifour, Histoire aiiatomiquc elpltijsiologique desScorinons {Mcm. des Savants étrang., t. XIV, p. (133, pi. 3, fi-. 25).

(r) lihiiuhard, Op. cit., p. 05, pi. 4, fig. 4.

((/) KlarKli;inl, Orijanisation du Règncaiiimal, ARACHNIDES, pi. 9, fig. 1, 2 et 3.

TUBE ALIMENTAIRE DES AUACHMDES. 573

particularités remarquables ; les appendices cgecauxcle l'estomac s'allongent plus que chez les divers Arachnides dont je viens de parler, et ceux des deux dernières paires, au lieu d'être simples comme d'ordinaire, se bifurquent. Les glandes salivaires sont formées chacune par un long tube tortueux assez gros et terminé en csecum, qui est peletonné sur lui-même, et qui se rend dans une masse utriculaire située autour de la portion postérieure de l'œsophage et la partie voisine de l'estomac. Enfin, le foie se compose d'une multitude de petits sacs presque tubuliformes, réunis en groupes, et ressemblant beaucoup à ceux que nous avons vus constituer l'appareil biliaire chez les Crabes et les autres Crustacés supérieurs (1).

L'appareil digestif des Aranéides est constitué aussi d'après le même plan général que celui des Thélyphones, mais offre d'autres particularités de structure importantes à noter. La cavité pharyngienne qui surmonte la bouche est garnie en dessus d'une pièce cornée longitudinale et convexe qui est reçue dans une sorte de gouttière cornéo-mcmbraneuse formée par la paroi opposée du canal (2). Cette première portion du tube

Aranéides.

caudiforme de l'abdomen, pour ga- gner l'anus, qui est situé à la face in- férieure de cette partie du corps (a). (1) Al. Blancliard a fait connaître la conformation du tube digestif des Galéodes en 18/j7 ; l'année suivante, des recherches sur le même sujet fu- rent publiées par M. Kittary ; enfin le premier de ces naturalistes a donné plus récemment de très belles figures anatomiques de ces Animaux, et a

complété ses premières observations par une étude plus attentive du foie et des glandes qu'il considère comme des organes salivaires , tandis que M. Kittary les regarde comme étant les analogues du pancréas. M. Léon Dufour a présenté à l'Académie des sciences une monographie anatomi- que des Galéodes, mais ce travail est encore inédit. (2) La treille a confondu celte pièce

(a) BlaiieharJ, Observations sur l'orgniiisatioii d'un type de la classe des Arachnides, le genre Galéode (Ann. des sciences nal., série, 1847, t. Vlll, p. tJ-28 et suiv., pi. 6, fig. 1).

Kitiary, Anatomische Untersuchung der gemeinen (Galéodes aranoïJes) und der fitrchtlosen (G. intrepida),Solpiiga, p. 55 et suiv., pi. 8, fig. 12 (exir. an Bulletin de la Société des naturalistes de Moscou, 1848, t. XXI).

Blanchard, Organisation du Régne animal, Arachnides, pi. 28, tig. 1, 4 et 5.

L. Dufour, Anatomie, physiologie et histoire naturelle des Galéodes (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1858, t. XLVI, p. 1247).

^lll APPAREIL DIGESTIF.

alimentaire s'élève à peu près verticalement, et l'œsophage s'en détache sous un angle presque droit pour traverser le collier nerveux et se rendre à l'estomac. En y arrivant, elle débouche dans une cavité à parois cartilagineuses qui est disposée de façon à agir à la manière d'une pompe aspirante, et qui est pourvue à cet effet de muscles dilatateurs, dont l'un monte obli- quement vers la voûte de la cavité céphalothoracique et s'y insère au squelette tégumentaire (1). Ce jabot aspirateur se con-

palatine avec le labre, sous le nom de camérostome ; mais Diigès en a fait mieux connaître la disposition. Ce dernier le compare à l'épipharynx des Insectes et le désigne sous le nom de palais. De même que les autres parties épithéliques, cette lame chiti- neuse se renouvelle à chaque mue, et elle s'emboîte dans la pièce pharyn- gienne inférieure, que Dugès appelle la langue. Sur la ligne médiane de l'une et de l'autre, il y a un sillon lon- gitudinal qui sert pour le passage des liquides vers l'estomac (a).

(1) L'œsophage est très grêle et ses parois sont membraneuses en des- sous, mais de consistance cartilagi- neuse en dessus. Il se recourbe en arrière, et, après avoir traversé l'an- neau nerveux, débouche dans une sorte de boîte cartilagineuse élargie en arrière, et, garnie de quatre crêtes longitudinales qui en occupent les angles. Dans l'état de repos, les parties

comprises entre ces crêtes se rappro- chent au point de se toucher presque ; mais, par l'action des muscles circon- voisins, elles s'écartent entre elles et dilatent la cavité de l'espèce de pompe ainsi constituée. Une paire de ces muscles aspirateurs s'insère sur les côtés de la boîte cartilagineuse dont je viens de parler, et s'étend trans- versalement jusqu'aux parties laté- rales de l'endosquelette ; un autre faisceau charnu naît de la face supé- rieure de cet organe, et va prendre son point d'appui sur la partie dorsale du système tégumentaire, vers le milieu du thorax, en traversant l'anneau formé, comme nous le verrons bientôt , par l'estomac de ces Animaux. Cet appa- reil, qui semble devoir servir à opérer la succion, a été vu en partie par Lyonnet et par Dugès (6) ; M. Brandt l'a fait mieux connaître (c) ; mais c'est Wasmann qui l'a décrit et figuré de la manière la plus complète {d).

(a) Dugès, Observations sur les Aranéides (Ann. des sciences nat., 2" série, t. VI, p. 178, et Allas dit Règne aiiimalàa Ciivier, Arachnides, pi. 3, ùg. l et 3).

(b) Lyonnet, Recherches sur l'anatomie et les métamorphoses de différentes espèces d'Insectes, p. 97, pi. 10, fig. 4.

Dugès, Op. cit.

(c) Braneit, Recherches sur l'anatomie des Araignées (Ann. des sciences nat., 2" série, 1840, t. XIII, p. 181 et suiv.).

Brandt et Ralzehurg, Medizinische Zoologie, t. H, pi. 15, Cig. (5.

(d) A. Wasmann, Deitrdge ^ur Analomie dcr Spinnen (.\bhandlimgen aus dem Gebicte der Naturiuissenschaflen in Ilamburg, 1846, t. I, p. 142, pi. 13, lig;. 13,?», ein,b; pi, 12, fig. 4, cj.

TUBE ALIMENTAIRE DES ARACHNIDES. 575

tinue avec la partie postérieure de l'estomac, et celui-ci donne naissance antérieurement à deux prolongements qui embrassent la colonne charnue dont il vient d'être question, et se réunissent entre eux au-devant de ce muscle, de façon à constituer un anneau du pourtour duquel on voit partir une série de grands tubes gastriques assez semblables à ceux de l'estomac simple des autres Arachnides (1). En arrière, ce singulier estomac,

(1) M. Brandt a fait bien connaître cette singulière disposition de l'esto- mac antérieur, ou proventricule des Aranéides , qui , au lieu d'être une poclie arrondie ou fusiforme comme d'ordinaire, est annulaire, et se trouve traversé par un gros muscle étendu obliquement de la paroi dorsale du céphalothorax à la pièce cornée du jabot aspirateur à laquelle cet anato- miste applique le nom d'hyoïde (a).

M. Grube a trouvé que chez les Argyronèles et quelques Épéires cette disposition annulaire est plutôt appa- rente que réelle, car les deux bran- ches semi-circidaires de l'estomac sont simplement accolées l'une à l'autre au-devant du muscle central, et ne s'anastomosent pas entre elles (6). Mais M. Wasmann s'est assuré que chez les Mygales il n'existe en ce point aucune cloison, et que par conséquent la cavité stomacale est annulaire, comme la forme extérieure de cet organe l'indique (c).

Le second estomac, ou ventricule

chylifique, pour employer ici la no- menclature adoptée par M. Léon Du- four et la plupart des autres entomo- logistes, naît du milieu du bord pos- térieur de cette couronne, et une autre poche membraneuse s'en dé- tache inférieurement pour se porter en avant, au-dessous du proventricule, et constituer un estomac accessoire inférieur. Enfin, de chaque côté de l'anneau gastrique susmentionné, on voit partir quatre poches tubulaires (d) qui, après avoir gagné les côtés du corps, se recourbent en bas et en de- dans, passent enlre les muscles de la base des pattes (e), et reviennent en- suite en dedans, vers l'estomac acces- soire ou poche stomacale inférieure. D'autres appendices plus courts, et dont le degré de développement paraît varier beaucoup suivant les espèces , naissent de la partie antérieure de cet estomac annulaire et s'avancent plus ou moins vers le front. Chez la Mygale aviculaire, ces derniers cae- cums sont très allongés et se rendent

(a) Brandt, Recherches sm' Vanalomie des Araignées {Ann. des sciences nat., série, 1840, t. VI, p. 182, pi. 4, fi-. 2).

(b) Grube, Einige Resultate aus Untersuchungen ûber die Anatomie dcr Araneidea (MuUer's Archiv fur Anat. uud Phijsiol., 1842, p. 298).

(c) Wasmann, Op. cit., p. 144.

((/) Treviranus n'a reiirésenté que deux paires de ces poches chez la Tésfe'naire domestique {Ueber deii iiinern Bau der Araclinldeii, p. 2, fig. 24), et la figure qu'il en a donnée se trouve reproduite dans plusieurs ouvrages modernes, mais ne me parait pas être exacte.

(e) Wasmann, Op. cit., pi. 13, lig. 17.

576 APPAREIL DIGESTIF.

en Ibrme de couronne, donne naissance à une poche gastrique inférieure qui se porte en avant, au-dessous de sa portion car- diaque ; puis il devient cylindrique et pénètre dans l'abdomen, ou se renfle un peu de nouveau, et reçoit les canaux biliaires provenant d'un foie très volumineux et assez semblable à celui des Scorpions (1). Un intestin grêle, un peu fluxueux, fait

à la base des pieds-mâclioires (o). Il en est de même chez VEpeira dia- dema (6); mais chez la Mygale de Leblond (c), et chez une autre espèce du même genre, étudiée par M. Was- mann, cette cinquième paire d'appen- dices gastriques est rudimentaire. Sui- vant ce dernier anatomisie, les grands tubes gastriques se ramifieraient et s'anastomoseraient entre eux à leur extrémité qui se recourbe sous le pro- ventricule {d) ; mais M. Blanchard a trouvé qu'ils s'unissent aux parois de la poche stomacale inférieure ou esto- mac accessoire, et il pense qu'au lieu de se terminer en cul-de-sac, ainsi que le font les appendices gastriques analogues chez les autres Arachnides, ils s'ouvrent directement dans la ca- vité de ce viscère, de façon à consti- tuer des tubes en forme d'anse, et non des caecums.

Sous le premier estomac on trouve une masse glandulaire qui est formée par des tubes sécréteurs pelotonnés, mais on ne connaît pas bien ses con- nexions avec la cavité digestive {c). Elle est désignée, par M. Blanchard,

sous le nom de glande gastrique, et elle paraît être l'analogue de l'organe que les anatomistes appellent tantôt glandes salivaires, tantôt pancréas, chez les Scorpions et les Galéodes.

(1) Cette portion du canal alimen- taire, c'est-à-dire l'estomac abdomi- nal ou ventricule chylitique (/"), est étroite en avant, mais renflée dans sa partie postérieure qui se trouve vers le milieu de l'abdomen, et elle se continue postérieurement avec une paire de conduits biUaires très larges.

Le foie, composé d'une multitude de petites ampoules réunies en grap- pes, est très volumineux, et se divise en un grand nombre de lobules d'un aspect granuleux, dont les canaux excréteurs se réunissent successive- ment entre eux pour constituer de chaque côté une série de troncs prin- cipaux qui se dirigent en dedans et vont s'ouvrir dans le tube digestif ((;). Ceux des deux premières paires sont très grêles; mais ceux de la troisième paire sont assez forts, et ceux de la paire postérieure sont si larges, que les matières alimentaires doivent facile-

la) f)iigcs, Arachnides de \' Allas du Règne animal de Cuvier, pi. 3, fig. 0. (ft) lîrnndt et Ra.zebiiri,', Medizinische Zooloyic, t. II, p. 89, pi. 15, fig. G. Itakerclies sur ianatomie des Araujnccs {Annules des sciences naturelles, pl. 4, fig. 2).

(c) Blaiirhard, Organisation du licgne animal, AnACiiMUEj, pl. 14, fig. 1 el k. (rf) Wii.sniaiin, Op. cit., pl. i'.), fig. 18.

(e) Hlancliiinl, Op. cit., pl. ii, fig. 2, c, el fig. C.

(f) Dugcs, Atlas du IXègne animal de Cuvier, Arachnides, pl, 3, fig. (J cl 7. ((/) Blanchard, Op. cit., pl. 1 i, fig. 1 cl (!.

VI,

TLlîli; ALniENTAir.L DKS AP.ACSIMDKS. 577

siiilo au second eslouiac ainsi consliluc, et dél)onche dans ini réservoir fécal en forme de poche arrondie, vient égale- ment s'ouvrir une paire de canaux rameux très grêles, ([ui sont des organes sécréteurs et qui paraissent constituer un appareil urinaire (I). Enfin, l'espèce de cloaque ainsi formé s'ouvre au dehors [lar l'anus, qui se trouve à la partie inférieure et postérieure de l'abdomen.

Il est aussi à noter que chez les Aranéides il existe de cluKjue côté de l'extrémité antérieure du tube digestif un organe sécré- teur qui paraît être l'analogue d'une glande salivaire, mais (jui est destiné à produire non un liquide digestif, comme d'ordi- naire, mais une humeur vénéneuse à l'aide de laquelle ces Animaux engourdissent ou tuent leur proie. En effet, le canal excréteur do ces glandes va s'ouvrir au dehors sous la pointe de la griffe mobile des chélicères, et quand elle est versée au fond de la [)etite [)iqùre faite par un de ces instruments, elle détermine promptement des cIYets toxiques très puissants ("2) . C'est à l'aide de cet appareil venimeux que les Araignées [»ar-

véiicniliiiiics des

Al'illHMlll,'»

nient y pénétrer, comme cela a lieu dans k-s canaux liépaliques de cer- tains ^JolllIsques.

Pinsieurs anatomisles ont considéré le foie des Araignées comme étant seu- lement un amasd'ntiicules adipeuses, et l'ont désigné sous le nom de corps graisseux (a) ; mais aujourd'hui que la structure de cet organe est mieux connue, il ne peut y avoir aucune incertitude quant à sa détermination. Il est aussi à noter que lorsque les Araignées sont repues, les liquides

dont elles se gorgent paraissent péné- trer non-seulement dans Teiilomac, mais aussi dans les grands canaux biliaires qui communiquent avec cet organe (6).

(1) Ces tubes (c), qui sont extrême- ment grêles et difijcilcs à bien séparer de la substance du foie, ont été dé- crits sous le nom de vaisseaux bi- liaires par les analomistcs qui ont méconnu la nature du foie, et ont a|)- pelé cet organe un corps adipeux (d).

i'I) On trouve dans l'ouvrage pos-

(a) Trcviraïuis, Ueb^'v dcii innerii flan dcr AvacJinidcii, p. 27.

Auilouiii, art. Auachnida dans Todd's Cyclopœdia of Aiiat. and Physiol., I. I, ]i. !^03.

(b) Diigès, Observations sur tes Arancides (Ann. des sciences nat., 2' série, I. \I, y. iSO).

(c) Voyez Blancliard, Organisation dn ftêgne animal, AhaCHNIdes, pi. \i, i\g. \ et 7. (rf) Treviranus, Op. cit., p. 31, pi. 2, 11-. 2i, B.

AuJoiiin, Op. cit. (Todd's dj-iopœd., t. I, p. 2U3).

V.

37

578 APPAREIL DIGESTIF.

viennent faeilemenl à s'emparer de grosses Mouehes et d'autres Animaux dont la taille est très considérable relativement au volume de leur propre corps ; mais, ainsi que nous le verrons plus tard, quand nous étudierons les instincts, ces Arachnides savent aussi dresser des pièges pour arrêter leur proie au pas-

lliume de Lyonnet, publié en 1832 (a), une description de l'appareil veni- meux des Araignées dont Trcviranus avait fait connaître la disposition en 1812 (6). De chaque côté, dans la ré- gion frontale de la tête, ou bien dans l'article basilaire des chélicères , il existe une poche presque cylindrique, formée par une tunique membrano- musculaire, tapissée intérieurement d'une couche de petites cellules, et 'débouchant au dehors par un canal membraneux qui est logé dans la griffe et se termine à l'orilice pratiqué près de la pointe de ce crochet (c). Chez les Mygales , on remarque à l'extrémité postérieure de ces glandes un petit appendice tubuleux {d}, ou des ligaments suspenseurs (e).

La petite quantité de venin qui peut être déposée au fond de la plaie faite par le chéiicère d'une Araignée est en général à peine suffisante pour

déterminer, chez l'Homme, un peu de douleur et de rougeur de la peau (f); mais on connaît des espèces dont la piqûre n'est pas sans danger. Ainsi la morsure faite par le Théridiou mar- mignaltc ou malmignatte {Latrodecfus malrnignattus , Walck.), qui habite quelques parties de l'Italie , de la Corse, etc., est parfois suivie de sym- ptômes nerveux graves ; elle peut même déterminer la mort chez les Oiseaux et les Mammifères de petite taille {g), et il est à remarquer que l'appareil vénénifique de cette Arai- gnée est très développé {h).

Quelques médecins ont attribné à la morsure d'une Araignée appelée vulgairement la Tarentule, mais dont l'espèce n'est pas bien déterminée par les entomologistes , des accidents nerveux fort singuliers {i) ; cependant celte opinion ne paraît reposer sui- aucun fait bien constaté.

(a) Ljonnet, Recherches sur l'anatomie et les métamorphoses de différentes espèces d'Insectes, l<. 02, v'I. 9, fig. 16.

(b) Treviranus, Ueber den innern lUiu dcr Arachiiiden, p. 31, pi. 2, fig. 2'1.

(c) Brandi el Ralzeburg-, Medlcimsche Zooloyie, I. II, pi. 15, fig. G.

(d) Dugès, Arachnides de VAllas dti Règne animal de Cuvicr, pi. 2, fig. G.

(e) lîlanchard, Oryanisation du Régne animal, Arachnides, pi. 17, fig. 1. '

(f) Dngès, Observations siir les Aranéides {Ann. des sciences nat., soric, t. VI, p. 211).

(g) Toli, Mcm. sopra il Falangio o Ragno venefico deW Agro volterrano (Atti deU'Acad. délie Scienxe di Siena, 1794, l. VII, p. 245).

Cauro, Exposition des moyens curalifs de la morsure du Théridion malmignatte (ihèse). Paris, 1833.

Raikeni, Recherches, observations et expériences sur le Théridion marmignatte de Volterra et sur les effets de la morsure (Ann. des sciences nat., 2' série, I83'J, t. XI, p. 5).

(h) Laïubotlc, Notice sur le Théridion marmignatte {Bulletin de l'Académie de Bruxelles, 1838, I. IV, p. 488).

(i) Voyez Walckenaer, Uiet, nat. des Insectes aptères, l. I, p. 178.

TUBE ALIMENTAIRE DES ARACHNIDES. 579

sage, et c'est un des principaux usages des toiles légères qu'elles tendent avec un art admirable.

Les poches appendiculaires de l'estomac, qui sont tubulaires chez les Araignées, se dilatent beaucoup plus chez les Fau- cheurs, et présentent chez ces Animaux une structure plus complexe. On compte jusqu'à trente de ces organes: mais l'appareil hépatique est rudimentaire (1).

E^lolllill;

des Faucheurs.

(1) Dans le genre Phalangium, de même que chez les Aranéides, la par- lie antérieure du tube digestif est cou- sliluée par un pharynx cornéo-mem- braneux logé dans une cavité formée par un prolongement du squelette té- gumenlaire que M. ïulk a décrit sous le nom cVépipharynx (o). Sa paroi su- périeure est garnie d'une crête cornée longiUidinale qui, par son bord infé- rieur, rencontre deux autres lamesana- logucs appartenant aux parois latérales de ce conduit, de façon à circonscrire un canal triangulaire ; et c'est proba- blement celte circonstance qui a induit Savigny en erreur, lorsque cet habile observateura cru qu'il existait chez ces Animaux trois orifices œsophagiens. Des prolongements cornés qui naissent des pièces pharyngiennes dont je viens de parler donnent attache à divers muscles ; enfin l'œsophage qui fait suite à cet appareil complexe est membra- neux, et, après avoir traversé le collier nerveux, présente un petit renflement avant que de s'ouvrir dans l'estomac. Cette dernière poche , qui est très large et ovalaire, donne naissance à

un grand nombre de prolongements caecaux (6) , parmi lesquels on re- marque : une paire de grandes poches postéro-dorsales qui occupent toute la longueur de l'abdomen , qui laissent entre elles, sur la ligne mé- diane, un sillon se loge le cœur, et qui adhèrent à l'intestin ; quatre paires de poches antéro - dorsales , qui sont de petites dimensions et se trouvent au-devant des précé- dentes, dans la région céphalo-thora- cique du corps; une paire de grandes poches laléro-inférieures, qui sont très allongées et se placent sur les côtés du rectum ; h" quatre paires de petites poches latéro-posléiieures, qui se dirigent de côté entre les poches postéro-dorsales et les grandes poches laléro-inférieures, mais qui ne nais- sent pas de celles-ci, comme lîamdohr et Treviranus le supposaient; 5" enfin trois paires de petites poches latéro- antérieures, qui se portent en dehors, au-dessous du caecum dorsal antérieur dont il a été déjà question. L'estomac descend et s'élargit beaucoup enlre les caecums latéro -postérieurs; en

(a) Tulk, Upon Ihe Anatomy of Phalangium opilio (Ann. of Nat. Hist., 1843, (. XII, \A. i, H- 15).

(6) Ramdohi-, Abhandlung ùber die Verdauungsiuevkzeiige dcr Inscctcn, p. 505, pi. 2'J, fig'. 1 à 5.

Treviranus, Ueber den innerii Bander imgeflûgelleii Inseklen {Vennischle Sclu-iflen, I. I, p. 30, pi. 3, fig. 16 et 17).

Tulk, Op. cit., p. 240, pi. 1-2, lig. 17 et 18.

E>loiiiac

(les Acariens.

5<S0 » AI'J'AUKIL !)lt;i;.STlF.

Enliii, les Acariens, (|iii seiioumssciit, les uns de sucsvégé- I;hi\, et les autres des liquides ([u'ils prennent dans le corps des Animaux sur lesquels ils viveiit en parasites, sont pourvus de cœcums gastri(pies dont le développement est non moins remarquable. En effet, ces appendices forment de chaque côté de l'intestin une ou plusieurs grandes poches lohnlées, ou même rameuses, et souvent c'est aux matières alimentaires accumulées dans leur intérieur ([ue sont dues les taches ver- dàtres ou d'un brun rouge qui se voient sur Tabdomen de ces petits êtres (1) ; mais chez quebjues Aiachnides de cet ordre, le canal digestif se simplifie, et l'estomac est tubulaire, ou dilaté seulement, de façon à offrir une multitude de [tetites boursoullures (2).

arrière, il se coiiliniie avec un inteslin ou rectum qui se dilate beaucoup , puis se termine à l'anus.

Le foie paraît être représenté par un tissu p;raiuileux disposé on bandes longitudinales, de façon à offrir l'ap- parence d'une série de canaux vari- queux à la surface inférieure de l'es- tomac (a). Enfin, il existe au-dessus de ce viscère deux paires de tubes sécréteurs fort grêles qui ont été con- sidérés comme des vaisseaux biliaires par Treviranus (6); maison ne con- naît pas leurs connexions avec l'intes- lin, et M. Tulk e^t porté à croire que ce sont des glandes salivaires, parce qu'ils lui ont paru se rendre à la partie antérieure du tube digestif (c).

]1 est aussi à noter que chez ces

Araclinides qui ne se bornent pas à sucer leur proie, mais l'écrasent et en avalent des fragments, les parties non digestibles des aliments se trouvent réunies dans l'estomac en une masse ovalairc revèine d'une sorte de cap- sule mcinbraniforme, résultant pro- bablement d'une mue de la tunique épitliélique de ce viscère [d).

(1) Cette circonstance a été souvent notée par Dugès : par exemple, chez le Tetranichus telarius, qui vit sur le tilleul, le rosier, qIc, cAVErythrœits ijinipes, qui est carnassier (e),

(2) Nous ne savons encore que fort peu de chose relativement à la struc- ture des parties intérieiues de tous ces petits Arachnides; mais rien ne me paraît jusiilier l'opinion émise par

[a] Trcviramii, Op. cit. {Vennischte Scliriflen, t. I, pi. 3, fi;^. 17).

Tiilk, Op. cil. (Ann. of Nal. lUsl., I. XII, pi. 4, fi^'. 18, /').

(6) Treviranus, Op. cil-, pi. 3, lig. 10.

(c) Tulk, Op. cit., pi. i, C\g. n, sv.

[dj Idem, Op. cit., p. 248.

(<;' IJiijjùs, licchcrclics sur l'ordre des .{eavieiis {.\nn. des sciences nal., -' sùiic, I. I, p. 45, 44,

. 1, Ils- ai).

TIRR ALIMI'MAII'.I': DES INSKCTKS. 581

^ A. Le cnnnl alimentaire des Insectes est constilué comme Appami chez les autres Animaux articulés, par une membrane muqueuse dos

*■ Inseclos.

revêtue d'une couche musculaire et garnie extérieurement d'une

M. Dujardin, iclativement à la dispo- sition de la cavité digostive des Trom- bidioiis, des Leiniiocharis, des Uy- draclinés , etc. , chez lesquels ce zoologiste a bien distingué un œso- phage et un orifice anal , mais n'a pu apercevoir de parois propres à l'eslo- niac ; d'où il conclut que cet organe est remplacé par des lacunes qui exis- teraient dans le foie, et se prolonge- raient entre les muscles, etc. ; enfin, que les aliments se répandent ainsi directement entre les diirércnls or- ganes intérieurs (a). M. Hoiirguignon a décrit ù peu près de la même ma- nière l'appareil digestif du Sarcopte de la gale {b], mais il y a tout lieu de croire que c'est la ténuité des ioniques membraneuses de l'eslomac qui a em- pêché ces observateurs de les distin- guer, et que cet organe ne manque pas de parois propres.

En eiïel, Treviranus a trouvé chez VIxodes americanus une poche sto- macale allongée, qui donne naissance antérieurement à une paire de cae- cums tubiformes et bifurques vers le bout . et postérieurement à une se- conde paire d'appendices analogues, qui bientôt se divisent en deux bran- ches dont l'une se trifurque vers le haut, et l'autre, après s'être portée en

arrière , se recourbe en bas et en avant. L'intestin est très court et situé vers le tiers postérieur de la face infé- rieure de l'abdomen. De chaque côte de cette dernière portion du canal ali- mentaire se trouve un tube sécréteur que Treviranus considère comme un vaisseau biliaire. Enfin cet anatomisle a vu dans la région thoracique une autre paire de caecums longs et très grêles qui se rendaient vers la bou- che, et qui lui ont paru être des vais- seaux salivaires (c).

M. de Siebold est arrivé à des résul- tats analogues par l'examen de divers Ixodes ; et chez les Oribates, cet anatomistc avait reconnu également l'existence des parois propres du tube intestinal ((/). M. JNicolet a vu que ce canal se contourne beaucoup sur lui-même et offre des boursouflures considérables , mais ne donne pas toujours naissance à des appendices gastriques : par exemple, chez VHoplo- pliora iiuKjna (e). Chez le Damœusgi'- niculatits, cet entomologiste a trouvé de chaque côté de l'eslomac un appen- dice en forme de poche ovoïde ; enfin il a distingué aussi chez cet Acarien, à la suite de l'œsophage, un jabot, un esto- macou ventriculechyiifique,séparédu réceptacle précédent par un sphincter,

la] Ruiardin, Mémoire sur les Acariens {Ann. des sciences nat., série, 1845 t. III, p. 15) (b) Treviranus, Ueber den Bnu dev Nigiu. {ZeHscUnn fiir Physiologie, 183:2, t. tV , p. 18,'.

"" '(ci'liôu'-guignon. Traité entomoloçiiqtw et patholûgique de la fjale deVHomme, p. 90.

(d) SioliolJ cl Stannius, Nouveau Manuel d'analomie comparée, l. I, p. 514.

,«) Nicolet, Histoire naturelle des Acariens qui se U-ouvent aux environs de Pans [Archives du Muséum. 1855, t. VU, p. ill, pi. 24, fig. 18).

58*2 APPAREIL DIGESTIF.

tunique séreuse fi); mais il présente de nombreuses modifica- tions de forme et de slruelure : on n'y rencontre que des ves- tiges du système d'appendices gastriques qui acîquièrent, comme nous venons de le voir, un si grand développement chez la plu- part des Araclmides, et ses annexes glandulaires sont généra- lement moins nombreuses que chez ces Animaux. L'étude de cet appareil a été poursuivie chez un très grand nombre d'espèces par un des entomologistes les plus distingués de l'époque

un inlestin grêle, et un rectum qui est îiiissi long que reslomac et séparé de l'anus par un léger iélrécisseri;ent (a).

L'estomac du Saico[)le de la gale a été décrit par !\1. Lanquetin, comme étant placé transversalement à la suite de l'œsophage, et offrant à peu près la forme d'un rein {b .

Chez les Tardigrades, qui se rat- tachent au groupe des Acariens, et qui ont été très bien étudiés par M. Doyère, l'armature pharyngienne dont j'ai déjà parlé (c) est suivie d'un bulbe muscu- laire très puissant et d'une structure très.coniplexe,qui paraît être un organe de succion. Puis vient un œsophage garni d'un sphincter cardiaque et dé- bouchant dans une grande poche sto- macale dont les parois offrent une nmltitude de boursouflures irrégu- lières et ont un aspect lomenteux ; on y aperçoit des utricules sécréteurs qui se colorent sous l'influence de certains aliments et qui constituent probable- ment un appareil hépatique. Poslé- rieurement l'estomac s'ouvre dans une espèce de cloaque qui conduit à l'anus.

Enfin, de chaque côté du pharynx on aperçoit une glande salivaire d'im volume considérable ,(/).

(1) La tunique interne ou muqueuse du tube intestinal di:s Insectes est })Ourvue d'une couche épithéiique qui présente les caractères d'un lissu sécréteur dans la portion moyenne de cet appareil , mais qui est chilineuse vers les parties terminales, et acquiert parfois sur certains points, une con - sislancc cornée. Lors de la mue, il arrive souvent que la portion posté- rieure de ce lube intestinal se dé- pouille de cette tunique sans que celle-ci cesse de tenir aux téguments extérieurs : ce ))hénomène s'observe chez le Ver à soie, par exemple (e).

La tunique musculaire se compose de deux couches de fibres : les unes transversales et circulaires, les autres longitudinales ; sa puissance varie beaucoup dans les différentes parties de cet appareil.

La tunique externe ou péritouéale est extrêmement délicate.

Enfin, on trouve dans l'épaisse ui

{a) Nicolol, Op. cil., pi. 24, lig. -17.

(b) I.anqiielin, Notice sur la ijale et sur IWnimulcule qui la yniduil, -ISTiO, p. 44.

(c) Voyez ci-Jcssus, page 540.

{(l) Doyère, Mémoire sur les Tardigrades, p. 02, |il. 14, (ii;. 1 cl 2 ; pi. 15, Cvj;. 1 à 4 liij. 3 (cxir. des Annales des sdenccs nat., 2" série, I. -NUI fi( .\I\). (e) ('.(iriinlia, Mnnoijrafta del llomlncr del (jclso, p. lOC

10,

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 583

acluelle, M. Léon Diifoiir (1); et pour en faire connaîire ici la structure, je crois utile de décrire d'abord d'une manière brève sa constitution chez nn Insecte il offre un haut degré de complication ; puis de passer en revue les princi[)ales variations qui se rencontrent dans chacune de ses parties constitutives.

Chez une Sauterelle du genre Épippigère, par eNem[)le, le Disposiiion tube digestif est étendu presque en ligne droite d'un bout du de cet appareil

cllGZ

corps à l'autre (2), et il est retenu en place, au milieu de la les santeiciies.

des parois ainsi constituées un grand Dufour que l'on doit les recherclies

noml)re d'utricules sécrétoires et de les plus variées et les plus conipa-

raniilkations du système tracViéen. lalives sur ce sujet; ses principaux

(l) Malpighi et Svvammerdam (a) travaux ont été publiés dans une

furent les premiers à faire jjien cou- série de monographies sur l'organi-

naîlre la disposition générale de l'ap- sation des différents ordres de la

pareil digeslif d'un certain nombre classe des Insectes (cj ; mais il a con-

d'Insectes, et, de nos jours , Tana- signé aussi beaucoup d'observations

tomie en a été faite avec soin chez importantes dans une foule de mé-

plusieurs espèces par Uamdohr, Tre- moires spéciaux insérés dans les An-

viranus, Suckovv et quelques autres nales des sciences naturelles.

naturalistes {h) ; mais c'est à M. Léon ('2) il ne présente qu'une seule cir-

(«) Malpiglii, Dissevtatio epistollca de Bombyre (Opéra omnia, 1G80, t. II).

S^Yamme^dam, Biblia Naturœ, 2 vol. jn-fol. avec 53 planclies, dont 32 sont rolalivcs à l'or- ganisation des Insectes, publié en 17G7.

{b} Ranidohr, AbhamUunrj ûber die Vei'dauungswerkieuge dcr Insecten, 1 vol. in-4 avec 30 plunclics. Hallo, 1811.

Posselt, Deitrâge %ur Analomie der Insekten. Tnbingen, 1804.

Marcel de Serres, Observations sur les Insectes considérés comme rnminauls, et sur hs fonctions des diverses parties du. lube intestinal dans cet ordre d'Animaux, in-4, 1813 (cxtr. des Annales du Muséum, I. XX).

Gaede, Bcitvage %ur Anatomie der Insekten, 1815, \n-i avec 2 planches. —Wiedemann's Zoologisches Magasin, 1817, 1. 1, p. 87.

Treviranus, Ueber die Saugwerkxexigc und den Sit:s des Geruchssinns bei den Insekten (Ver- mischteScliriften, 1817, t II, p. 95 cl siiiv.).

Suckow, Verdauungsorgane der Insekten (Ilensinger's Zeitschrift fur organische Physik, 1828, t. III, p. 1, pi. 1 à 9).

(c) L. Uufoin-, Recherches anatomiqnes sur les Carabiqucs et plusieurs autres Insectes coléoptères, in-8 avec 23 planches (extr. en majeure partie des Annales des sciences naturelles pour les années 1824, 1825 et 1826).

Recherches anatomiques et considérations entomologlqucs sur quelques Insectes coléoptères compris dans les familles des Dermestins, des Byrrhiens, des Acanthopodes et des Leptodaclylcs [Ann. des sciences nat., 2" série, 1834, t. I).

Recherches anatomiques et physiologiques sur les Hémiptères, in-4, 1833, avec 19 planches (extr. des Mém. de l'Acad. des sciences, Savants étrangers, l. IV;.

Recherches anatomiques et physiologiques sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névroptères, in-4, 1841, avec 13 planches (cxtr. des Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. étrang., t. VU).

Éludes anatomiques sur une Mouche, in-4, 1848, avec 3 planches (extr. des Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. étrang., t. IX).

--- Recherches anatomiques et physiologiques sur les Diptères, 1851, in-4, avec M planchi's (extr. des Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. étrang., l. XI).

r)8/| APP.VniilL DIGIISTIF.

grande cavité viscérale, par des biides membraneuses, el nnc multiliidede pelites tracliées qui naissent des conduits aériens voisins et qui vont se ramifier dans réjiaisseur de ses parois. On y distingue : un œsophage, qui se dilate graduellement, de façon à constituer dans sa |)ortion postérieure un premier réservoir alimentaire que l'on désigne sous le nom de jabot; 2" un gésier\ ou estomac triturant, qui est garni intérieurement de plusieurs arêtes longitudinales en forme de râpes composées de séries de pièces épitliéliques triangulaires et de consistance cornée; un estomac proprement dit, ou ventricule chyli- fîque (1), dont la partie antérieure se prolonge latéralement de façon à donner naissance à une paire de sacs ou appen- dices csecaux, appelés bourses ventriculaires ; li" un intestin grêle^ qui est cylindrique ; et 5" un gros intestin^ dont la por- tion antérieure se dilate de façon à constituer un réservoir stercoral qui est garni de six bandes musculaires écartées entre elles et croisées par des faisceaux charnus transversaux, de manière à circonscrire des boursouflures, et dont la portion jios- térieure, d'une structure plus simple, est communément dési- gnée sous le nom de rectum. Sur les côtés de l'o'sopbage, on remai'qiie un appareil salivaire très voluniincux et d'une structure fort complexe. Enfin, un nombre considérable de tubes sécréteurs très Jongs, simples, fort grêles et terminés

convoliilion dans sa portion inlcsli- sur des considoiations physiologiques

nnlc. el sa longueur ne di'passe que que je ne puis adniclU'e sans beau-

de peu relie du corps, i'our ce qui est coup do réserves, mais il est assez

relatif à sa fornip gi'nérale et à ses généralement adopté par les eiito-

différenles parties c()nstiluli\es , je jnologistes, et je no vois aucun in-

rcnveirai à la (igure qui en a été convénient à en faire usage comme

donnée par M. I.éun Dufour {a). synonyme du mot estomac propre-

(1) Ce nom, introduit dans la ment dit. science par M. Léon Dalour, est fondé

(a) !.. Iiiifniir, fu'i'hci'ihcs niiatnmiiiucs et iilnislnloiiiques sur les CrU.oj tn-cs, etc., pi. 3, fi?. 3-.. . '

TLliE ALIMKNT.MRK DES INSECTES.

585

en cseciiin par un de leurs bouts qui est libre, s'insèrent à l'extrémité postérieure du ventricule chylifique et déboucbent dans la cavité de cet estomac. La plupart des entomologistes les désignent sous le nom de vaisseaux biliaires^ mais d'autres les considèrent comme des glandes urinaires; et afin de ne rien préjuger quant à leurs fondions, beaucoup de physiologistes préfèrent les appeler tubes de Malpighi, d'après le naturaliste illustre à qui on en doit la découverte. Je dois ajouter que chez cet Orlhoptère on ne trouve pas de glandes anales groupées autour de l'intestin, mais que, chez beaucoup d'autres Insectes, des organes de ce genre existent, et que parfois ils prennent un déveloj)pement considérable (1).

(1) On Irouve iinc figure do l'appa- reil cligcslif (le. la giaiule Saiitcrollc verte { Locusfci viridissima) dans l'ouvrage de lîamdolir , el celui de VEphippigera diurna a été très bien représenté par M. L. Dufour {a). Le jabot est plissé longiuulinalcnient ; le gésier est petit et globuleux; les pla- ques cornées qui en constituent Tar- niatiire intérieitre ont la forme de che- vrons placés à la lile, avec leur angle médian dirij;é en dedans et en avant (A); enfin, dans les sillons qui séparent les arêtes triturantes ainsi constituées, se trouvent des tubercules cornés. Les deux cœcums gastriques, ou i)0urses ventriculaiies, sont arrondis et formés par la dilatation des angles latéro-an- téricurs du ventricule cbylilique, qui, dans tout le reste de sa longueur, est cylindrique et inleslinifornie. Chez les Épbippigères, les Pbanéroplèreset les Conocépbalcs, il est assez long pour

faire une circonvolution sur lui-même; mais chez les Locustes ou Sauterelles proprement dites , il est court et droit. Les tubes malpigbiens, qui s'in- .'èrenl à son extrémité postérieure, sont très nombreux , fort grêles et souvent colorés en violet ou en brun. Us sont réunis en cinq faisceaux (pii déboucbent cbacun dans l'estomac par un polit trou commun; enfin plu- sieurs d'entre eux adhèrent au som- met des bourses ventriculairos par leur portion supérieure, de façon que leurs bouts (loilants constituent une sorte de pinceau ou de couronne fixée à ces organes. Mais c'est à tort que quelques auteurs ont cru qu'ils s'ouvraient dans celle partie du canal digestif (c). L'in- testin grêle est beaucoup plus long chez la Sauterelle veric que chez rEpliippigère, mais il ne présente rien de remarquable dans sa struc- ture.

(a) Rnmilûlir, Ahhandl. Ubev die Vcnlauuiigswcrkieiifie dev Insectcn, pi. 1, fi^-, '.]. I,. niiroui-, Recherches anatomiquc s sur les OrthojJtères, etc., pi. 3, fig. '^^i.

(b) Raiiidolir, Op. cit., pi. 1 , f\g. 1 et S.

(f! Miiri'cl lie Scrns, Ohuen'. sur les hisecles considérés comme riimiiiaiils, p. Cl) d 73.

586

APPAREIL DIGESTIF.

De l'œsopiia-e §5. La séfie (les réservoirs alimenlaires que je viens

et dii jal)Ol 11'-

desiMsocies. dedecrire n existe pas toujours d'une manière oonnplete. Le ventricule chylifique ne manque jamais ; mais chez un grand nombre d'Insectes l'œsophage est très réduit (i), et l'on ne trouve ni jabot, ni gésier : par exemple, chez les Crio- cères, les Leplures et les Donacies, parmi les Coléoptères (2), ainsi (jue chez beaucoup de larves de Diptères (o). Le jabot

(1) Quelques auteurs ont pensé que, cliozies Lépidoplères, l'œsophage était bifurqué à son exlréuiilé antérieure pour correspondre aux deux tubes que l'on avait cru reconnaître dans la trompe de ces Insectes (o) ; mais ni l'une ni l'aulrc de ces dispositions n'existent en réalité, et cette portion vestibulaire de l'appareil dit;estif est toujours un canal simple et médian.

(2) Chez les Criocères, l'œsophage, court et cylindrique, s'ouvre directe- ment dans un estomac ou ventricule chylifique très simple, dont la partie postérieure est léliécic et donne in- sertion à trois paires de tubes lual- pighiens; l'intestin grêle est assez long et flexueux; enfin le gros intestin est rende, et donne attache à l'extrémité postérieure et caecale des tubes mal- pigliiens, de façon que ceux-ci sont disposés en forme d'anse (h).

Chez les Leptures, l'œsophage est encore plus court et le ventricule chy- lifique presque cylindrique, mais le gros intestin est plus allongé (c). Il en est à peu près de même chez les Anlhrènes (d), les Dryops (e), les Co- Itispis (/■), etc., ainsi que chez beau- coup de larves : par exemple, celles des Priones et des Ténébrions (g).

Chez les Donacies, l'œsophage s'al- longe davantage et devient presque filiforme; les tubes malpighiens pré- sentent aussi des particularités de slructure sur lesquelles je reviendrai bientôt (/(.).

Il en est à peu près de même chez les Urocérates («), parmi les Hyméno- ptères.

(3) L'œsophage est très court et dé- bouche directement dans l'estomac, ou ventricule chylifique, non-seulement chez la larve de divers Diptères, telsqiie

(a) Truviraniis, Ueber dlc SauQuirrkx-mrie der liisekten {Verinichien Sclirifle, t. II, \<. lOt).

Iîiiiiiici>lcr, Handbuch der Entomologie, t. I, p. 182.

(b) L. iJufoiii-, Heclicrches aiiatoniiques stir les Carabiques, etc. {Ann. des sciences nat., 1. IV, l'I. 7, dg. 3).

(c) Mem, ibid., jil. 7, dg. 2.

(rf) Idoiii, Recherches anatomiques sur quelques Insectes coléoptères compris dans les famïUcs des Dermestins, des flyrrhiens, etc. [Ann. des sciences nat., 1' sci-ic, 1834, 1. 1, pi. 2, (Ig. 8).

fc) Idem, ïbid., pi. 2, n^-. \0.

(f) io\-^, Recherches sur les mœurs , l'analomii: et l'embryologi'c d'un petit Insecte coléopt ère (Cohipsis alla) quiravagc les luicrncs, etc. [Ann. des sciences nat., 3= série, 1841, t. II, pi. i,

fis- ij-

ifl) Posscll, Beilrùqe zur Anatomie der Insekten, pi. 3, fitr. 1i et 22. (/() L, Diifour, Recli. sur les Carabiqms. etc. (Ann. des scienrcs nat., ï" férié, I. IV, pi. 7). (jj Siickow, Verdauunqsorgane der Insekten {\\ti\\f.m<^cr'i Zcitschrifi fur dieorganisclic l'hy- sik, 1833, t. III, pi. 8,fig-. IIS).

L. Diifour, Recherches anatomiques .<<ur les Hume nopl ères de lu famille des Vrorératcs (Auit. des sciences nat., série, IS^i, t. I, pi. 4, fi^;. 0).

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 587

esl , en général , comme chez les Sauterelles , une simple (lilalalion de la portion postérieure de l'œsophage ; mais, chez divers hisectes, cette poche tend à se séparer du canal par- couru par les aliments, pour arriver dans l'estomac, et elle constitue quelquefois un organe appendiculaire tout à tait distinct de ce tube. Son mode de formation a été très bien observé chez le Papillon du chou par Hérold. Quand cet Insecte est à l'étal de larve ou de chenille, la portion œsophagienne du canal digestif est d'abord courte et cylindrique; mais, par les progrès du développement, elle s'allonge plus que ne le fait le ventricule chylilique, et se renfle un peu vers son extrémité postérieure. Ce changement se prononce davantage quand l'Animal est arrivé à l'état de nym()he ou chrysalide, et alors, à l'extrémité de l'œ^sophage, qui est devenu long et grêle, on distingue un petit jabot fusiforme; mais cette dila- tation ne continue pas à se faire d'une manière régulière, et s'avance du côté dorsal seulement , de façon à donner naissance à une petite poche latérale dont le fond s'agrandit plus que l'entrée. A mesure que les métamorphoses du Pa- pillon s'avancent, l'appendice œsophagien, ainsi constitué, grandit rapidement et son col s'allonge beaucoup, de sorle qu'au terme de son développement, il constitue un sac pyri- forme suspendu à la partie postérieure de l'œsophage et com- muniquant avec l'intérieur de ce tube alimentaire par un canal étroit (i).

\g Cecidomyia popuH {a), mais aussi Hérold, sur le dévoloppemenl dos

chez quelques Insectes du même ordre Papillons, une série très intéressante

qui sont arrivés à i'état adulte : par do ligures représentant les diverses

exemple, les OEstrcs (6). formes de l'appareildigeslifdu Ponlia

(1) On trouve dans l'ouvrage de ou /'/eris 6ms6/cœ à l'élat de chenille,

(a) L. Dufuiii-, Histoire des métamorphoses des Cécidomyics du pin maritime et du peuplier {Aun. des sciences nat., ■1840, l. XVI, l'I. li, Rg. 9).

(ft) Joly, Ilcherches zoologiques, anatomiqiies et médicales sur les Œstrides, p. 50, jil. 0. %. 3.

'^^° APPARKIL DIGIiSTIF.

Lorsque le jiibol est simplement une porlion dilatée de l'œsopliage, il ne sert que comme réservoir poui* les matières alimentaires, qui s'y accumulent avant dépasser dans l'estomac proprement dit, et qui sont parfois destinées à être régurgitées en partie. Ainsi les Abeilles, après avoir recueilli sur les Heurs des liquides sucrés, retiennent ces nnatières dans leur jabot pour les transporter à leur demeure, puis en regorgent la majeure partie, soitpour nourrir leur reine et leurs compagnes retenues au logis par d'autres travaux, soit pour constituer le miel dont elles emmagasinent des quantités considérables dans les alvéoles de leurs gâteaux, afin de s'en nourrir en temps de disette (I). Quelquefois il en est de même cbez les Insectes

(le nymphe et d'Insecte parfnit (a). Des observations analogues, mais moins complètes, ont été faites par Ncwportsur le Sphinx ligustri, donl cet entomologiste a représenté com- parativement l'appareil digestif chez la larve , la nymphe et l'Insecte par- fait (b). Enfin, les transformations su- bies par le tnbe digcslif du ^o?h6?/x mori ont élé décrites par M. Corna- lia (c). Dulrocliet s'était occupé pré- cédemment du même sujet, mais ses observations sont très incomplètes et souvent inexactes (r/).

Les niétamorphoscs du tube digestif ont été étudiées aussi avec beaucoup de soin chez le Gastrophaga pini par Suckow (e) ; mais chez ce Lépidoptère il ne se forme pas de jabot, comme chez la plupart des Insectes du même ordre.

(1) Comme exemples d'insectes dont le jabot est bien développé, mais ne consiste qu'en une dilatation régulière de l'œsophage , je citerai les Four- mis (/") , les Andrènes (y), les Cy- nips (h), les Scolies (i) et les Sphex (j), parmi les Hyménoptères ; les Blattes (/.•)

(a) llerold, Enlwickeluiifisgeschichty, lier Schmelteflinge, -1815, pi. 3, fi_L,'. 1 i 1-2.

(6) Newport, On tlie ^en■ùus System of tlie Sphinx liguslri {l'Iiilos. Trans , 1834, pi. H, fi?. 11.12 cl 13,1.

(r) Cornalia, Monograi'ia dcl Bomhlce del gelso, 185G, j.l. 4, (l^^ 51; pi. 10, 11;;-. 141 et 153 ; pi. 12, lii,'. 181) et 202.

(d) Duirocliei, Recherches sur Ica mctamorjthoses du canal intestinal chci les Insectes (Joiirn. de pliysique, 1818, i. L.WWI. p. 131. tig. 1 ;i 8).

(e) Siickovv, Analuinischc pliysiolofjiuiie Vnlevsuchunqen der Insckten und Krustcnthiere, 1818, I. I, pi. 2.

if) r.amdolir, Miliaiidlung iiher die Verdauungswerkicuge der Insectcn, pi. 14, fi--. 3.

1-. iJiifour, l'u'clierches sur les Ihihoprèrcs, etc., pi. 7, lig. 80.

(g) Idem, ibid., pi (1, {ïg. 72.

\li) Uem.ibid., \>\.^,i\X- ■122.

(!) Tdeiii, ihid.. ]>\. 8, 11$^. 89.

0) t*..inidolir, 0/). cit., pi. 1 l, fi.-. 1 .

(/i-i L. hiildiir, It'iiii'rrhes sur les llrtlinplères, etc., pi. 5, fijr. 4 4.

TLBli ALlMtiM'All'.i: DliS INSLCTlib. 58'J

le jabot se développe latéralement en l'orme de panse : par exemple, ehez la Courtilière (1); mais quand cet organe se sépare davantage du canal œsophagien pour eonsliluer un sac

parmi les Orthoptères ; les Phry- ganes (a) et les l'ciles (6), parmi les INévroplères ; les Lépismcs (c), parmi les 'J'iiysanoiircs ; enfin les Carabes {d), les llarpales (e), les Ci- cindèles (/"), clans Tordre des Coléo- ptères.

Chez PAhcille, la partie postérieure de l'œsophage se dilate moins régu- lièrement, et constitue un jabot un peu excentrique dont la capacité est considérable (g) ; chez le Bourdon terrestre {h), les Guêpes (i), VAthalia centifoliœ (j) , les Xylocopes {k) et quelques autres espèces d'Hyméno- ptères, Télargisscmcnt de cette por- tion du canal digestif se fait principa- lement en dessous, de façon à donner naissance à un sac qui a presque la forme d'une panse.

(1) La panse de la Courtilière (Gryllutalpa vulgaris) est une pochi" ovoïde (pii conununique latéralement avec la partie postérieure de Tœso- pliage, par un orilice dépourvu de valvules (/), et non par deux ouver- tures, comme M. Marcel de Serres l'avait supposé (m). Ses parois sont lirincipalement musculaires, et M. L. Dufour a reconnu que les matières brunâtres accumulées dans son inté- rieur consistent en petits fragments des substances végétales dont ces Fn- secles se nourrissent. Dans le Grillon domestique, qui apparlient à la même famille, le jabot est quelquefois déjelé de côté(?t), mais ce réservoir alimen- taire ne constitue pas une panse laté- rale bien caractérisée, comme chez la Courtilière.

(a) L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. 13, fi^. 208.

(6) Idem, ibul., pi. dS, fig. 198.

((■) Ramdohr, Op. cit., pi. 10, fig. 3.

{d) Gaede, lleltrAge zxir Analomieder Insekten, 1815, pi. 2, ûg. i.

Ramdolir, Op. rit., pi. 25, Crj;. 2.

(e) L. Dufour, Anatomic des Carabiqnes {Ann. des sciences nal., I. II, pi. 21 , fig. 3). (/■) Idem, Op. cit. (Ann. des sciences nat., t. 111, pi. 10, fv^. 2). {g] Swamnierdam, Bibtia .\aturœ, pi. 18, frj;. I.

Treviranus, Op. cit. {Verm. Schrift., t. II, pi. 14, lig. 3),

Suokow, Op. cit. (Heusinger's Zeitschr. filr ortjan. Phijsik, t. lit, pi. G, (i;.;-. 121).

I,. Dufour, Recherches anatomiques et physiologiques sur les Orthoptères, les lly:iicno- ptères »t les Ncvroptères, pi. 5, fig. 48.

(h) Ramdohr, Op. cit., pi. 13, fig. 1. (t) Idem, ibid., pi. 12, lig. 6.

Suckow, Op. cit. iUeusinscr's Zeitschr., t. III, pi. 5, fig-. 128).

Burmeister, Op. cit., pi. 0, lig. 10.

(j) Newport, Observation» on tlie .hiatomy, Habits and Economy of Ihe AUialia ceuiifoliœ, 1 Sôii, p. 7, lig. 0 cl 7.

(fc) L. Dufour, Op. cit., pi. G, ^l^^ 122.

{1} Suckow, Op. cit. (Heusingcr's Zeitschrift, 1833, I. lit, pi. 1, li,^. I 34).

L. Dufour, Recherches anatomiques et physiologiques sur les Orthoptères, 18 41, p. 05, pi. 2, fig. 10.

Burmeister, Uandbuch der Entomologie, I. I, pi. 11, lig. 7.

[m) Marcel do Serres, Observations sur les Insectes considérés coiiime riiiniiia}i!s, p. 08. (u) Ramdohr, Op. cit., pi. 1, fig. 1.

Marcel de Serres, Op. cit., pl. 1, fig. 1.

590 APPAREIL DIGESTIF.

appeiidiculaire, ainsi que cela se voit chez les Lépidoptères, il paraît être (luelquel'ois destiné à intervenir principalement dans le mécanisme de la succion, et faire fonction de pompe aspi- ratoire; du reste, son jeu n'est pas encore connu d'une manière satisfaisante (1). Il est aussi à noter que dans l'ordre des Di- ptères, où le jabot présente presque toujours ce mode d'orga- nisation, cet appendice œsophagien est pourvu d'un col étroit et fort long (|ui naît dans le voisinage de la bouche, au lieu de se détacher du tube alimentaire près de l'estomac, comme chez les Papillons (2).

(1) Ctiez les Lépidoptères , cette poche , que les entomologistes alle- mands appellent Vestomac suceur, ou vessie aspiratoire (a) , consiste ordinairement en un sac arrondi qui naît à angle droit de l'œsophage par un col étroit, et se prolonge en arrière au-dessus de Tesloniac proprement dit (6). Quelquefois il est profondé- ment bilobé, par exemple chez les Zygènes (c), et son développement paraît être généralement en rapport avec celui de la trompe. Ainsi, chez le Vanessaurticœ, cet appendice œso- piiagien est très grand {d), tandis que chez VAttacus pavonia minor

il est fort réduit (c); enfin, chez le Chelonia caja (f), ainsi que chez le Cossus ligniperda et le Gastrophaija pini, la trompe est rudimentaire, cette espèce de panse paraît manquer complètement [g).

11 est aussi à noter que, chez les Lépidoptères, cet organe ne contient ordinairement que de l'air, et ce serait en cédant à la dilatation de la partie voisine de la cavité viscérale, qu'il pourrait déterminer dans l'œsophage un mouvement d'aspiration.

(2) Chez les Diptères, ce jabot ap- pendiculaire contient souvent des ma- tières alimentaires (/?), et ses fonctions

(a) Saugblase (voy. Trevii-anus, Op. cit., in Verm. Schrift., t. II, p. lOi).

Sauijmaçjcn (voy. Burmcisler, Op. cit., t. I, p. 134).

(6) Exemples : Pontia brassicœ (voy. Newport, art. Injecta in Todd's Cyclojncdia of .Uial. and PhysioL, l.lh p. 973, fig. 431).

Sphinx ligustri (voy. Newport, art. Lnsecta, loc. cit., p. 973, fig. 430).

Ypoiwmeula cvonymella (voy. Suckow, Verdauxingsorg. der Insekteii, in Hcusiagcr^s Zeitscltr . fur org. Phtjsik, t. 111, pi. 9, fig. 161).

(c) Ramdolir, Verdauungswerk%etige der Insccten, pi. 18, fig. 1.

Suckow, Anat. PhysioL Uniersmhungcn der Inseliten und Krustenthiere, pi. 2, fig. 10.

(d) Treviranus, Ueber des Saurjeu und das Genichsorgan der Insekten {.\nnalen der Wet- terauischen Gesellschafl fur die gesammte Naturkunde, 1812, t. III, p. 158, pi. 10, lig. 7).

(e) Iilem, ibid., pi. 17, fig. 8. (/■) Hem, ibid., pi. 17, fig. 9.

(g) Treviranus, Ueber die Sauwerkzeuge und den Sitz des Geruchssins bey der Jiisekteu {Venu. Schriflen, t. Il, p. 109).

(h) Ranulolir, Op. cit., p. 173, etc.

Newport, art. Insecta (ioc. cit., t. Il, p. '.)72).

L. Uufour, Analomiedes Diptères, p. 253, elc.

TUBE ALIMENTAIUE DES INSECTES. 591

Les parois de ce premier réservoir alimentaire sont revc- Armaim-c

. . inicrne

tues, comme l'œsophage, d'une couclie cliitmeuse qui est juj^hoi. souvent lisse et homogène, mais qui, d'autres fois, s'épaissit sur certains points plus que sur d'autres, et donne ainsi nais- sance à des plaques squamitbrmes dont le sommet se dirige

comme organe de succion me paraissent encore moins probables que chez les Lépidoptères. Quoi qu'il en soit , ce réservoir ne nianque presque jamais dans cet ordre, et se compose généra- lement d'un canal cylindrique très long et étroit qui se termine par une dilatation en forme de poche simple ou bilobée. Chez la larve de la grande Mouche commune {Sarcophaga hœ- inorrhoidalis),ce\. appendice œsopha- gien consiste seulement en un caecum membraneux qui prend naissance près de la bouche, et qui est susceptible de se distendre beaucoup (a) ; mais chez l'Insecte parfait son col s'allonge con- sidérablement, et il se termine par un grand sac bilobé (6). Comme exem- ples de Diptères à panse bilobée . je citerai aussi la Mouche de la Viande, ou Sarcophaga carnaria (c), VEphip-

pium thoracicum (cl) et le Tabanus tropicus (e).

La poche terminale de cet appen- dice œsophagien est même multi- lobée chez quelques Diptères , tels que la Mouche domestique ( / ) . le Bombylius major (g), le Leptis tringaria [h) et le Dolichopus niti- dus [i).

Cet organe est au contraire simple chez les Cousins (j), la plupart des Tipulaires [k], les Dasypogons (/), le Scenopinus fenestralls (m), etc.

Chez le Phora paUipes, son pédi- cule, au lieu de naître près de la bouche comme d'ordinaire, provient de la partie postérieure de l'œso- pliaj^e , comme chez les Lépidop- tères In).

Enfin, la panse manque chez les Pupipares, et peut-être aussi chez les

(a) L. Dufoui-, Éludes anatomiques et physiologiques sur une Mouche, p. 38, pi. 3, fiy. 20 (extr. des Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. àtmii/j., t. IX;.

(&) L. Dufour, loc. cit., pi. 3, fig. 27.

(c) Suckow, Verdauungsorgane der Insekten (Huiisiiigcr's Zeitschr. fur orgaii. Plujsilc , l. III, pi. y, lig. 153).

(rf) L. Diifoui', Recherches anatomiques et physiologiques sur les Diptères, pi. 4, lig-. 43.

(e) Ilamdolir, Op. cit., pi. -1, fig'. 4.

L. Diilour, Recherches anatomiques et physiologiques sur les Diptères, pi. 4, fig. 37. (/■) Ramdohr, Op. cit., pi. 19, fig. 2.

{g) Idem, ibid., pi. 20, fig. 2.

{h) h. Dufour, Op. cit., pi. 0, fig. 70.

(i) Idem, ibid., pi. 6, fig. 73.

(j) Exemples : Tipula lunata (voy. Ramdohr, Op. cit., pi. 20, fig-. 1).

Tipula oleracea (voy. L. Uiifour, Recherches anatomiques et physiologiques sur les Diptères, pi. 3, tijj. 23).

(k) Exemple : Culex annulatus (voy. Dufour, Op. cit., pi. 2, fig. 18). |l) L. Dufour, Op. cit., pi. 5, fig. 52. (m) Idem, ihid., pi. 7, fig-. 84. (n) Idem, ibid., pi. •Il, lig. 134.

59'i APl>AUi:iL UIGKSTIF.

en arrière, ou à des llhimenls qui ressemblent à des poils (1). Enire la tunique muqueuse (jui porte ee revêtement epitlié-

Asiles ^a). En gciu-ral, les larves en sont également privées (6).

Phisicurs NévroiJlèrcs sont, à l'élat adulte, pourvus d'une panse à col étroit, qui naît à la paille postérieure du jajjot : les Foumilions (c) , les Corydalcs (d), les Sialis {c) , les lié- mérobes (/") et les Osmyles {g) , par exemple ; mais cet organe n'est pas encore développé chez leurs larves (h).

11 n'en existe aucune trace cliez d'autres Insectes parfaits du même ordre , tels que les Éphémères (/;, les Perles (j) , les Panorpes (/.), les Phryganes (/}, les Termites (m), et les Libelluliens (n).

Chez quelques Hyménoptères, il existe une ])anse à coi très couit à peu près comme chez les Lépidoptères : par exemple, ciiez les Crabronites du genre Lyrops (o), le l'aiarus et le Trijpoxijlon. Mais, en général, dans cet ordre, Tresopliage ne se di- late que circtilaireiiicnt, de manière à constituer un jabot simple. Oucl- quefois il est bilobé de façon à simu- ler une double panse, disposition qui se voit chez plusieurs Chrysidiens (//).

(1) Ainsi, chez VOryctes nasicur- nis, la concile épithélique du jabot est lisse {q}, tandis que chez les llan- neloiis elle est hérissée de pointes (?•);

fa) L. Diifour, licclierches aiudomiques et plujsiologiqu.-s sur les Diplcres, 'iii.

(b) E\cwp\\;i : Cecilomyiapini mcirilimœ (voy. L. Diifuur, Hislore ils mctamorphoses des Cecidomyics, (l;iiis Aini. des sciences mit., 3' série, t. VII, pi. 14, ihg. 0).

Saproimjia blcphavipteroides (voy. L. Diifour, Mém. sur les métamorphoses de plusieurs larves fomjtvores, dans Aim. des sciences nat., 2' série, t. Xtl, pi. 1, fi,^'. 4).

(c) Rnmildlir, Verdauunqswcneuge der Inserlen, pi. 17, tij. i.

L. Diifoiir, Recherches sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les ^livroptères, pi. \i, lig. ITJ.

(d) Laiily, On the internai Analomy of Cor}\hU\s coi'iuilus {Journal of the American Academy of Arts and Sciences, 1848, pi. 2, lig-. -2).

(e) L. Diifoiir, Op. cit., pi. 12, fi-. 184. (nPinnidolir, Op. cit., pi. 17, fig'. C.

L. Dnfdiir, Op. cit.,p]. 13, lii^. 191.

(g) L. l);iluiir, Recherches sur l'analomie ci l'histoire naturelle de rOsmylus aiaciilaUis {\nn. des sciences nat., série, 1848, t. l.\, pi. 10, fii;. 17).

(h) Exemple : la larve du Fourmilion (voy. Ranulolii-, Up. cit., pi. 17, lii;. 1). (i) L. Dul'inir, Op. cit.. pi. 1 1, fig-. 107. ij) Idem, ibid., pi. 13, fi;,'. I'J8. (fc)Meiii, ibid., pi. 11, ûg. 1(59. (/) Raiiulolir, Op. cit., l'i. 10, fi-. 1.

L. Dnfoiir, Op. cit., pi. 13, li-. 208. {m) Idem, ibid., pi. 13, fig. 190.

(n) rianuldlir, Op. cil. \i\. 1,5, fi-. 3 cl 4.

L. Diiloiir, Op. cit., pi. 11. %. 158.

(0) Idem, ibid., pi. 8, fig. 90, 97, 08 cl 100.

(p) Exemples : Chrysis fulgida (voy. L. Dufour, Op. cil.', pi. 9, fig. 113).

Hedychrum lucidulum (voy. L. Dufour, Op. cit., pi. 9, fig. IfO).

(q) H. Meckcl , Mikrographie einiger Driïsenapparate der niederen Thierc (Miiller's Archiv fur Anat. nnd l'hysiol., 1840, p. 10.

Bascl], rnlcrsuchuny ïtberdas chylopoclische nnd uroimclisrhe System der Blalla orieiilalis {Miungsber. der Wiciicr Almd., 1858, l. .W.Mll, p. 241, pi. 2, fig. 2 cl 3).

Sirodol, Recherches sur les sécrétions che:, les Insectes (Ami. des sciences nat., 4* série, 1858, t. X, p, 153),

;r) SliMus, Considéraliiiiis sur l'analomie comparée des Animaux articulés, pi. 5, fig. 8,

TUBE ALIMENTAIHE DES INSECTES.

595

liqiie et la couche musculaire qui l'enveloppe, on trouve par- fois un nombre considérable de petites cellules ovoïdes : le développemeiU de ce tissu utriculaire paraît être en raison inverse de celui des glandes salivaires, dont j'aurai bientôt à parler, et, chez les Insectes ces divers organes sont plus ou moins rudimentaires, les ampoules en question ici pré- sentent tous les caractères de follicules et communiquent avec la cavité du jabot par des conduits excréteurs d'une grande ténuilé (1).

Le gésier, que nous avons vu faire suite au jabot chez la Saute- relle, et y constituer un a|)[)areil de trituration, est également très développé et armé d'une manière i)uissante chez la plupart des Insectes broyeurs qui se nourrissent d'herbes, d'animaux à téguments coriaces, ou d'autres substances dont la consistance est assez considérable pour être difficilement attaquées par les sucs digestifs ; mais cet organe manque ou se trouve réduit à un état rudimentaire chez les espèces dont les aliments sont liquides

Structure du

gésier.

mais, dans ce cas, ceUe porUon du tube digestif me semble, en général, mériter le nom de gésier pkitùl que celui de jabot.

(1) M. Sirodotn'a pu découvrir au- cune communication entre les grandes uliicules sous-muqueuses du jabot et la cavité de cet ofgane cbez les Gril- Ioniens, qui ont un appareil salivaire très développé ; mais chez les larvesde rOryctes nasicornis, qui sont privées de glandes de ce genre, il a trouvé sous la tunique muqueuse de cette portion du tube digestif une couche épaisse composée de grandes utriculcs

ovoïdes dont il a vu naître des cylin- dres très grêles, et, en étudiant ceux- ci, il a reconnu que ce sont des lubes d'une ténuité extrême qui vont débou- cher à la surface interne dujabot (a). Il en conclut que ce sont autant de glandes simples, et des considérations dont j'aurai à parler ailleurs l'ont conduit à les regarder comme des organes sécréteurs de la salive. Quel- quefois les glandulesdu jabot se pro- longent même à la surface externe de cet organe sous la forme de petits caecums viUeux : par exemple, chez les Cicindèles (6).

(a] Sirodot, Op. cit. (Ann. des sciences nat., 4' série, 1. X, p. 474 et suiv., pi. Il , fig. 1 à 4). (&) L. Diifour, Recherches sur les Carabiques, etc. {.\nn. des sciences nat., 1824, 1. III, pi. 10,

594 APPAREIL DIGESTIF.

OU très mous. Ainsi, chez tous les Orthoptères (1), il existe un gésier très bien constitué ; chez les Grilloniens, surtout les dents cornées qui garnissent l'intérieur de cet organe, et qui consti- tuent six râpes disposées de façon à agir les unes contre les autres, sont extrêmement nombreuses et fortes {'!) . Il existe aussi un estomac triturant chez un grand nombre de Coléoptères qui se nourrissent, soit de matières végétales plus ou moins dures,

(1) M. Léon Dufour considère les Criquets ou Acridiens comme faisant exception à celte règle ; mais la por- tion de leur tube digestif, que cet anatomiste appelle jabot, me semble être en réalité un gésier. En effet, la tunique interne de cet organe est garnie d'un grand nombre d'arêtes linéaires de consistance subcartilagi- iieuse et armées d'une série de petites pièces dentiformes, de façon à agir à la manière de râpes très fines. Ces plaques épidermiques manquent à la partie antérieure de la paroi inférieure de ce premier estomac, l'on re- marque un espace inerme qui est limité par un filet calleux (a).

(2) Chez la Courlilière, par exem- ple, le gésier, qui est d'une forme ellipsoïdale (b) et qui se trouve à la partie antérieure de l'abdomen, a une consistance cartilagineuse, et présente à sa surface interne six côtes longi- tudinales saillantes et armées d'un nombre très considérable de dents

chitiniques, brunâtres, disposées sur cinq rangées longitudinales et offrant des formes variées (c). Les sillons, situés entre les espèces de râpes ainsi constituées présentent chacun deux filets cornés qui donnent insertion aux fibres musculaires destinées à mettre en mouvement cet appareil triturant.

Chez les Blattes, les pièces dentaires du gésier sont moins nombreuses, mais plus robustes que chez la plupart des autres Orthoptères ; elles ont une du- reté presque osseuse, et leur forme varie, les unes élant simplement co- noides, les autres garnies d'arêtes dcn- ticulées; par leur réunion elles con- stituent une râpe tubulaire, et quand on les renverse en dehors , en re- tournant la portion du canal digestif dont elles dépendent, elles simulent une rosace à six branches {d). La disposition de cet appareil triturant est à peu près la même chez les Mantes (e).

(n) Exemple : VŒdipoda cœnilescens (voy. L. Dufour, Recherches sur les Orthoptcres, etc.,

pi. 1, fi?. S et 10).

{b) Ividil, On the Atiatomy of the Mole-Cricket {Philos. Trans., 1825, pi. 15, fig. 5, G, 7, 8).

L. Dufour, Op. cit., pi. 2, fig. 19).

Suokow, Op. cil. {Ucus.inscr's Zeitschv. fur orijan. Pliysik, t. III, pi. 7, 11^'. 13G). (c) IfliTi), ilild., pi. 3, fij^. 24.

((0 H:inid()lir, Mihnndl. iïber die Verdauungswerkzcurje dcr fiisectcn, pi. 1, lit,'. 10 et 12.

M;ircel tlo Sciits, Obxcrv. sur les Insectes cuusidcrtls comme ruminants, etc., pi. 2, lig. 2 et 3.

L. Diirmu-, Op. cit., pi. ^, lig-. -iO.

(e) Marcel de Serres, Op. cit., pi. 2, fii,'. 5.

TUBK ALIMENTAIRE DES INSECTES.

595

soit de substances animales coriaces qui, pour être facilement digérées , ont besoin d'être très divisées. Chez les Cicin- délètes , les Carabes , les Dytisques et les Bostri(îhes , par exemple, le gésier est bien constitué et pourvu d'une armature puissante (1); mais chez les Insectes de cet ordre qui se repais- sent de débris de corps organisés, du pollen des fleurs ou de feuilles tendres, ainsi que le font les Coprophages, les Hanne- tons et les Coccinelles , on n'en trouve aucune trace. Cet organe manque aussi chez beaucoup de Névroptères, mais est assez puissamment organisé chez les Termites, qui, par leur régime, ressemblent à certains Orthoptères, et qui dévorent des substances très dures (2). Enfin, le gésier manque ou se

(1) Le gésier des Coléopères de la grande famille des carnassiers est globuleux ou ovoïde et de consistance cartilagineuse. A rintérieur, il est garni de quatre plaques cornées prin- cipales, qui soiit échancrées en avant et suivies en arrière de denticules acérées ; elles laissent entre elles au- tant de sillons longitudinaux au fond de chacun desquels se trouve une arête cornée ; enfin, sur les côtés de celle-ci sont rangés des poils roides et pointus qui sont disposés en manière de brosse (a).

Chez les Dytisques, ces huit séries de pièces, alternativement simples et doubles, sont toutes portées sur des tubercules charnus {b).

Chez les Siaphylins, il existe aussi

un gésier oblong dont les parois ont une consistance rénitente et sont garnies intérieurement de quatre arêtes brunes; mais Tarmalure de celles-ci est beaucoup moins puis- sante, et ne consiste qu'en denticules séliformes disposées en manière de brosse, avec leurs pointes dirigées vers l'axe de l'organe (c).

(2) L'existence d'un estomac tritu- rant chez les Termites a été signalée par M. Burmeisler ((/), et une description détaillée de cet organe a été donnée par M. Lespés. Sa surface interne est garnie de douze lames cornées et poilues, qui sont reployées sur elles- mêmes et disposées par paires sur six tubercules charnus (e). Il existe aussi un estomac triturant, très fortement

(a) Exemples : Carabus aumtus (voy. L. Diifour, Eech. sur les Carabiques, dans Ann. des sciences nat., \" série, t. II, pi. 20, fig. 2).

Cicimlelacampestris (voy. P.amdolir, Op. cit., pi. 3, fig. i et 4).

(b) Ramdohr, Op. cit., pi. 2, fig. 4.

(c) Idem, ibid., pi. 3, fig. 1 et 8.

Léon Dufour, Op. cit., p. 25.

(d) Burmeisler, Handbnch dev Entomologie, p. 137, pi. 1 1, fig. 8, 9 et 10.

(e) Lespés, Reclierches sur V organisation et les mœurs du Termite lucifnijc {.hin. des sciences nat., 4" série, 18513, t. V, p. 236, pi. 6, fig. 38).

596 AITAUEIL DIGESTIF.

trouve rédiiil à un lUat rudimentairc chez les Hyménoptères (1), les Hémiptères, les Lépidoptères et les Diptères, dont les ali- ments, comme je l'ai déjà dit, sont toujours liquides (^2). L'orilice qui conduit soit du gésier, soit du jabot, ou môme

armé, chez la larve du Corydalus cor- nutus. Mais, chez le même Insecte à Téla! ;idulle,lesp!aqiiesdentaiiesdont cet organe élait garni n'existent plus, et celte portion du tuJje digestif ne mé- rite plus le nom de gésier («).

Chez la plupart des auU'es Kévro- ptères, le gésier est rudimentairc. Cependant, chez les Fourmilions, cet organe, quoique très pelil, est armé intérieurement de huit écailles ou pièces cornées, lancéolées postérieu- rement et disposées en entonnoir (6). Chez la l'anoipe, le gésier, qui fait suite à l'œsophage, est plus volumi- neux (c) , et sa tunique épilhélique est garnie de poils ou appendicules cornés disposés en brosse (d). Enfin, chez les Ilémérobes, cet estomac tritu- rant esl globuleux et garni seulement de huit petites pièces cornées sub- triangulaires et linéaires {?). Chez les Libelluliens, les ferles, les Sialis, les Éphémères et les Phryganes, il n'y a pas de gésier.

(1) Chez les Hyménoptères, il existe généralement un gésier rudimentairc qui ressemble à un sphincter cardiaque

plutôt qu'à un véritable estomac tri- turant , et qui est souvent engaîné dans la partie postérieure du jabot, de façon à ne pas être visible extérieu- rement. Cette dernière disposition se remarque chez l'Abeille, le Bourdon, la Guêpe, etc., le gésier est garni intérieurement de quatre petites co- lonnes charnues à surface calleuse, el s'élève en forme de tubercule au fond de la cavité du jabot {[)■

(2) Chez les Lépidoptères qui sont encore à l'élat de larves et qui se nour- rissent d'alimenls solides, on trouve parfois, à la suite d'un jabot assez dé- veloppé, un gésier charnu, mais dont la tunique interne n'oflVe pas d'arma- ture comparable à ce qui se voit chez les Ordioptères et beaucoup de Co- léoptères. Cette disposition organique est très bien caractérisée chez la che- nille du Cossus ligniperda, le jabot constitue la partie du tube alimentaire que Lyonnet a appelée la portion ■moijenne de l'œsophage, et le gésier est représenté par celle que cet ana- tomiste a figurée sous le nom de portion postérieure de l'œsophage [g).

(a) Laidy, Internai Anatomy of Co\-\i\a]i\s cormitiis {Journal of the American Academy of Arts and Sciences, 1848, pi. 2, i\g. 0).

(b) L. Uufour, Recherches sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névroptères, p. 333.

(c) Ramdolir, Verdauungsiverk^euge der Insecten, pi. 20, fig. 1. ((/) L. Dufoiir, Op. cit., p. 320, pi. ti, Hg- 109 et 170.

(é) Idpiu, ibid., p. 338.

(/■) K\ciii|il(!s : Abeille (voy. ïrcviruiuis. Op. cit., Vcrmischte Schriften, t. 11, pi. 14, liif. 3 ; L. Diifour, Op. cit., pi. .">, lii;. 48).

liomblis terrestn.'i (voy. L. Uiiroiir, Oji. cit., pi. 5, li^'. 50, 51 , 52).

Vespn crabro tvoy. SiicUow, Op. cit., pi. 6, li^'. 128 el 129 ; L. DulViiir, Op. cit., pi. 7, li-. 77, TJ et 80).

il]} Ljoiiiiut, Anatonnc de la Chenille qui romje le bois de saule, p. 403, pi. 13, ti^'. 1 cl 2.

597

TIBE ALIMENTAIRE DES INSECTES.

direclement de l'œsophage dans le ventricule chylifiqne, ou esto- mac proprement dit, et qui peut être appelé le cardia (1), est généralement pourvu d'un] sphincter, ou même d'un appareil valvulaire disposé de façon à empêcher le passage trop facile des aliments de l'une de ces portions du tube digestif dans l'autre. Chez les Orthoptères, cet appareil cloisonnaire est très déve- loppé, et, chez la plupart des Hyménoptères, le gésier , fort réduit et enchatonné dans le jabot, remplit les mêmes fonc- tions (2).

§ 6. Le ventricule chylifique constitue toujours la partie la plus importante du tube digestif des Insectes, et chez quel- ques espèces il en occupe presque toute la longueur, son déve- loppement étant très considérable , tandis que les portions œsophagienne et intestinale sont d'une brièveté extrême. Ce mode d'organisation se remarque chez les Chenilles et beau- coup d'autres larves, mais ne persiste que rarement chez

Estomac

iiroprenient ilit,

ou

vcnliiciile

clivlifiiuic.

(1) Quelques auteurs désignent cet orifice sous le nom de pylore, parce qu'Hs considèrent l'estomac des In- sectes comme étant l'analogue de l'in- testin duodénum des Animaux ver- tébrés ; mais cette opinion ne me paraît pas fondée, et puisque le ventri- cule cliylilique est le siège principal de la digestion, je réserve le nom de pylore à l'ouverlure qui conduit de ce réservoir dans l'intestin.

(2) Ainsi, chez les Criquets, l'orifice d'entrée du ventricule cliyliiique, est gaini d'une valvule conoïde formée par six callosités en forme d'Y ren- versé , leurs branches étant dirigées en arrière et leurs sommets rappro-

chés en manière de nasse (a). Chez les Grilloniens, cette valvule est dis- posée autrement, et consiste en quatre liges calleuses qui, rapprochées en un faisceau conique , s'avancent dans l'intérieur du ventricule chylifique et y laissent lillrer les aliments, mais s'opposent à leur régurgitation. Enfin, chez lesBlattaires, la valvule cardiaque est composée de six mamelons con- vergents en forme d'étoile (b\

Chez les [Jyménoptères, le gésier est réduit à un petit cylindre charnu inclus dans la cavité du jabot, son ex- trémité antérieure est renflée et ollVe une ouverture cruciale qui fait oITice de valvule cardiaque [c].

(o) L. Dufour, Recherches sur- les Orthoptères, etc., p. 48, pi. 2, fig. 10.

(b) Idem, ibid., p. 07 etlOi.

(c) Exemple : lo Bourdon (voy. L. Dnfoiir, Op. rit., pi. 5, (\g. 50 el 52).

598 APPAREIL DIGESTIF.

rAniinaldontles métamorphoses sont achevées. Ainsi, cliez hi chenille du Papillon du chou, dont la structure et le dévelop- pement ont été étudiés avec beaucoup de soin par Hérold, on trouve un oesophage simple et très court, suivi d'un grand estomac cylindrique qui s'étend en ligne droite jusque dans le voisinage de l'anus, dont il n'est séparé que par un intestin fort court et également droit; mais, chez le même Insecte à l'état de nymphe, la portion stomacale se concentre vers le milieu du corps, tandis que l'œsophage s'allonge ainsi que l'intestin (1). Chez quelques Insectes parfaits, l'estomac conserve la prédominance qui est ordinaire chez les larves, cet organe, au Heu d'être étendu en ligne à peu près droite, se contourne beaucoup et acquiert même une longueur très considérable. Cette disposition est portée très loin chez les Copris ou Bou- siers, qui se nourrissent de la fiente des Animaux herbivores,

(1) Ilerold a représenté, dans une prédominance de l'estomac comparé

série de figures très intéressantes, ces à rintestin, chez la larve, et le déve-

changements successifs du tube diges- loppement ultérieur de cette dernière

lif chez le Pontia brassicœ (a), et Ton portion du tube digestif à une période

doit à Suckow des observations ana- plus avancée de la vie, quoique se

logues sur le développement de cet remarquant aussi chez beaucoup

appareil chez le Bombijx pini (6). d'autres Insectes, n'existent pas chez

Enfin, je citerai aussi à ce sujet trois tous les Animaux de cette classe, et

figures comparatives de l'organisation quelquefois les métamorphoses amè-

intérieure du Sphinx iigustri à l'état nent des changements en sens inverse,

de chenille, de chrysalide et d'Insecte Ainsi, chezlalarveduCopris,kporlion

parfait, publiées par Ncwport (c), et intestinale du canal digestif est aussi

des observations analogues faites ré- développée que la portion stomacale,

cemment sur le Bombyx mori par tandis que chez l'Insecte adulte l'in-

M. Cornalia (d). testin est de longueur médiocre et

Du reste, il est à noter que cette l'estomac extrêmement allongé (e).

(a) Hcrolil, Enlwickehingsfieschichle der Schmetterlinge, 1815, pi. 3, fig'. 1 à 12.

(6) Suckow, Anatoniisch-physiologlsche Untersuchungen der Insckleu und Krustenthiere , 1818, p. 24 etsuiv., pi. 2, fig. 1 à 10.

(c) Ncwpori, On the Nervous System of the Spliinx Iigustri {Philos. Trans., 1834, pi. 14, lig. 11, 12 ft 13).

{d) Cornalia, Monografm del Dombice del gelso, \A. 4, ïig. 51 ; pi. 10, fig. 137, et pi. 12, fig. 189 et 202.

(e) Fosselt, lieitràge zw AuaUnide der InseMcn, pi. 2, lig. 13, 15 et 37,

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 599

aliments dont un volume considérable est nécessaire, car ils ne contiennent que très peu de principes alibiles(l). Le ventricule chylifjque , quoique moins long , est aussi très développé chez plusieurs autres Coléoptères qui vivent de matières végé- tales (2); mais cette particularité de structure est loin d'être constante chez les Insectes phytophages (3) , et parfois on la rencontre chez des espèces dont le régime est ditïérent : par exemple, chez les Silphes, qui vivent de charognes (h). Par conséquent, dans l'élat actuel de nos connaissances, on ne

(1) L'œsophage des Bousiers ou Co- pris, très court et à peine dilaté posté- rieurement, est suivi par un estomac cylindrique qui a huit ou dix fois la longueur du corps, et qui se replie plusieurs fois sur lui-même de façon à former un paquetd'un volume considé- rable. Antérieurement il est grêle, mais il se dilate un peu vers son extrémité postérieure, et sa surface externe est recouverte d'une multitude de petits appendices caecaux et filiformes qui ressemblent à des villosités (a).

(2) Chez le fJanneton, le ventricule chylilique, que M. Straus appelle ven- tricule succenturié , est loin d'être aussi développé proportionnellement, mais il est néanmoins fort long, et il décrit plusieurs circonvolulions dans l'inlérieur de l'abdomen (6).

Comme exemple de Coléoptères phytophages dont le ventricule cliyli- iique est très long comparativement

au reste du tube alimentaire, je citerai aussi les Lamia (c).

Les Hydrophiles, qui, tout en dévo- rant parfois d'autres Insectes, se nour- rissent principalement de matières vé- gétales, ont aussi l'estomac 1res long et enroulé sur lui-même dans la cavité abdominale [d), tandis qu'à l'état de larves, quand ces Coléoptères sont es- sentiellement carnassiers, cet organe est de grandeur ordinaire et ne décrit que peu de courbures (e).

(o) Ainsi chez le Cerambyœ, qui vit à peu près de même que le Lamia et qui appartient à la même famille, le ventricule chylifique est remarquable- ment court (/").

(û) Chez le Silpha obscura, le ven- tricule chylifique est très long et forme dans l'abdomen plusieurs cir- convolulions fort remarquables {q). Cet eslomac est aussi très développé chez les Blaps.

■■■ (a) L. Dufoiir, Recherches sur les Carabiques {Ann. des sciences nat., l" série, l. III, pi. ti, fig. 3).

{b) Stiaus-Durklicira, Considérations sur l'anatomie comparée des Animaux articulés, p. 201, pi. 5, flg. 6.

(c) L. Uufour, Recherches sur les Carabiques, etc. (Ann. des sciences nat., i" série, I. IV, pi. 0).

(d) Suckow , Respiration der Insekten ( Heusinger's Zeitschrift fiir die organischc Physik, 1828, t. II, pi. 3, flg. 25, cl pi. i, lig. 27).

(e) Idem, ibid., pi. 4, fig. 2G.

(/■) Léon Dufoiir, Op. cit. (Ann. des sciences nat., i'" .série, 1. IV, pi. 0, fig. i). (g) Ranulolir, Yerdauungswerl<xeu{ie der Insecten, pi. ST, fig. 1.

GOO Al^PAilKlL IJIGESTII',

peut saisii- aucune relation physiologique constante entre la capacité du tube gastri(iue des Insectes et la nature de leurs aliments ; on remarque seulement que l'estomac ne présente jamais une grande longueur chez les espèces qui se nourrissent de proie vivante, et qu'il est généralement court ou très étroit chez les Insectes suceurs (1).

En parlant de l'estomac de ces Animaux, je dois signaler une disposition tort remarquable de cette portion du tube digestif qui se voit chez les Cigales ainsi que chez beaucoup d'autres Hémiptères de la même iamille, et qui a pu facilement

(1) Chez beaucoup frilémiplères, la portion du tube digestif qui est comprise entre l'œsophage et le point d'insertion des vaisseaux de Mal- pighi est fort longue , et quelques anatomistes la considèrent comme appartenant tout entière à IVstomac ; mais elle est d'ordinaire divisée en deux portions bien distinctes par un étranglement très marqué, et le pre- mier réservoir alimentaire ainsi con- stitué me paraît devoir être consi- déré comme un jabot (a). Le second réservoir, ou estomac postérieur, me semble cire en réalité l'analogue du ventricule cliylifique des autres In- sectes, Enfin, le canalélroit, etsouvent fort long, qui réunit ces deux poches, est comparable à la portion postérieure du gésier de divers Hyménoptères, cet organe est inclus dans le jabot et se termine par un tube cylindrique :

par exemple , chez le Bourdon Icr- reslre (b); seulement chez les Hémi- ptères ce détroit s'allonge beaucoup plus. Ainsi, chez lesLigies, on voit, à la suite de l'œsophage, qui se renfle un peu postérieurement, une grande poche subcylindrique on bossuée constituant un jabot, et se continuant avec un tube intestiniforme et contourné, à l'extré- mité duquel est un second réservoir ou estomac proprement dit, et ce ventricule chylifique communique à son tour, par un canal court et étroit, avec un élargissement débouchent les vaisseaux malpighiens (c). La dis- position de ces parties est à peu près la même chez les Scutellaires (rf), les Corises {e), etc. Chez la Punaise (/") et les Réduves (g), la portion postérieure du ventricule cliylifique est griMe et intestiniforme, comme sa partie anté- rieure.

(a) C'est la |inrlicd(J.Mi,'nGe sous lo nom d'estomac anléricur r^rM. L. [Uilonr {\oy . ses Recherclies sur les Hémiptères, pl.'2. fig. 13 et 19 ; pi. 3, fi-. 22, 23, etc.).

(b) L. Diifonr, Recherches sur les Orihoptères, etc., y\. 5, fig. 50.

(c) Idem, Recherches sirr les Ihhniptères, pi. 3, fig. 22 et 25. {(l) Idem, ibiil., pi. I, fig. 1.

(e) Idem, itàd., pi. 2, fig. 13. (/■) idem, ibid., pi. i, fig. 44. {il) Idem, ibid., pi. 4, fig. 48.

TUBE ALÎMENTAlftE DES INSECTES. 601

induire les anatomistes en erreur, louchant la route parcourue .par les aliments. L'estomac de ces Insectes parait se continuer, d'une part avec l'Intestin, et d'autre part avec un prolongement intestinitbrme qui, recourbé en manière d'anse, revient sur lui- même et semble se terminer dans l'organe qui lui a donné nais- sance. On a cru d'abord que cette anse communiquait avec la cavité du ventricule cliylifique par ses deux extrémités, et que les aliments, après s'y être engages, devaient par conséquent revenir dans cet estomac pour passer ensuite dans l'intestin; mais les recherches anatomiques de M. Doyère ont tait voir que cette anomalie n'existe pas en réalité, et que la portion récurrente du ventricule chylilique ne débouche pas dans la portion antérieure du même organe; (ju'elle s'y accole seule- ment, et qu'elle est en continuité avec l'intestin. Enfin, ce naturaliste a constaté que cet intestin ne communique pas avec la portion antérieure de l'estomac dont il semble naître, lorsqu'il se détache seulement de ses parois, et qu'il ne peut recevoir les matières alimentaires que de la branche récurrente de cet organe (1). La seule anomalie qui se remarque chez ces Insectes consiste donc dans Fadhérence intime des deux por- tions du tube digeshf dans leur point de rencontre, particularité qui n'a point d'importance physiologique.

(1) M. Léon Dufour a cru que tuniques de l'estomac que la branclic

l'estomac revenait s'ouvrir clans sa récurrente de ce lni)e serpente et se

propre cavité, non-seulement chez cache complètement, dans une cer-

les Cigales , mais aussi chez beaucoup taine longueur,

d'autres Homoplères (a) ; cependant II est aussi à noter que la portion

les recherches de M. Doyère (6) l'ont adjacente du ventricule chylifique est

conduit à reconnaître la non-exislencc comme suspendue par une bride mé-

de cette anomalie (c). C'est entre les sentérique très remarquable.

(a) L. Diifoiir, Recherches sur les Hémiptères, p. 02, 100, 102, etc., pi. 8, i'v^. 55,98; pi. 9, flg. 108.

(()) Doyùre, Note sur le tube digestif de-; Cigales {.\nn. des sciences nat., 2' sôrio, 1839, t. XI, [i.'si, pi. 1, fig. ."î).

(r) L. Diifoiir, Quelqiies observations sur la note de M. Dnyère relative au tube dicjentif des Cigales (Ann. des sciences nat., 2' séi'ie, I. XII, p. 287).

602 APPAREIL DIGESTIF.

Les parois de l'estomac proprement dit, ou ventricule chyli- fique, pour me servir du nom assez généralement employé par les entomologistes, ne sont pas conformées de la même manière que celles des portions vestibulaires du tube digestif qui consti- tuent l'œsophage, le jabot et le gésier. Celles-ci sont revêtues, comme je l'ai déjà dit, d'une couche chitineuse plus ou moins épaisse; mais au delà de la valvule cardiaque cette tunique épi- théliale est remplacée par une couche de tissu utriculaire de con- sistance molle, qui offre tous les caractères d'un épithélium muqueux. Les cellules qui le composent sont à peu près sphé- riques et n'adhèrent entre elles que très faiblement; enfin elles sont pourvues d'un noyau granulé, et elles paraissent devoir se renouveler avec une grande rapidité (1). Au-dessous de ce tissu utriculaire se trouve une membrane transparente, et en appa- rence homogène, qui présente de nombreuses dépressions dont la grandeur et la forme varient. Enfin les faisceaux musculaires logés entre cette tunique muqueuse et la tunique externe ou séreuse sont disposés, comme dans l'œsopliaoe, sur deux plans et dirigés les uns en travers , les autres longitudinalement ; mais, en général, ils sont plus ou moins espacés entre eux, de façon à déterminer des séries de rides et de renflements al ter-

Ci) \1. Sirodot, qui a étudié avec beaucoup de soin la conslilulion de l'épilhéiiuni stomacal cliez divers In- sectes, fait remarquer que la disposi- tion singulière observée par Rengger dans l'estomac du Hanneton, cet auteur a cru voir la membrane mu- queuse flottante librement dans un espace annulaire, n'est en réalité que le résultat de la séparation et de la

consolidation de cette coucbe mu- queuse autour de la masse alimen- taire (a), pbénomène dont nous avons déjà vu plus d'un exemple chez les Crustacés et chez certains Arachni- des (6). La sortie d'une partie des tu- niques de l'estomac que Ucngger a observée chez des Chenilles (c) me. pa- raît devoir être un phénomène du même ordre.

(a) Sirodot, Uecherches sur les sécrétions cha les Insectes (Ann. des sciences naturelles, 4" série, 1858, t. X, p. 150).

(/*) Voyez ci-ilessiis, pa^'cs 553 et 580.

(c) Rengger, Physlologische Untersuchungen iiber die thierische Jlaushallung der insekten, p. 13.

TUBE ALlMEiNTAIRE DES INSECTES. 603

natifs (1). Jl est aussi à noter qu'entre les deux couehes muscu- laires ainsi disposées, on découvre, à l'aide du microscope, des glandules dont la conformation varie, comme nous le verrons bientôt.

Le ventricule chylifique est dépourvu d'appendices chez ^tEornSc.

(1) Cliez beaucoup crinsectes, les fibres musculaires de l'estomac se développent davantage d'espace en espace , de façon à déterminer la formation d'une série régulière de rentlements et d'étranglements aller- natifs. Cette disposition s'observe chez le Hanneton (a), les Oryctes (6), les Mylabres (c) , les Méloés {d) , etc., parmi les Coléoptères ; chez les Libel- lules (e) et les Phryganes (/■), dans l'ordre des INévroplères ; enfin, chez beaucoup d'Hyménoptères , tels que les Abeilles (g), les Bourdons {h), les Andrènes {i], les Scolies (/), elc.

Chez d'autres Insectes, le déve- loppement prédominant de certaines bandes musculaires longitudinales dé- termine dans cet organe une forme différente. Ainsi chez le Ver à soie et la plupart des autres Chenilles, l'estomac est à peu près cylin- drique et très^ gros, on y remarque sur la ligne médiane, tant en dessus qu'en dessous, un sillon longitudinal,

et de chaque côté une série de bour- souflures irrégulières; disposition qui est due à la résislance plus grande des parois de cette poche sur les points qui sont garnis de fibres musculaires, et à la dilatation de leurs tuniques membraneuses dans les espaces inter- médiaires. Une paire de rubans char- nus longe la ligne médiane à la face dorsale de l'estomac; une seconde paire de muscles analogues se trouve à la face inférieure de cet organe, et d'autres faisceaux plus grêles et dis- posés moins régulièrement s'entre- croisent sur ses parties latérales. II est aussi à noter que vers les deux extré- mités de cette portion du tube intes- tinal, des faisceaux musculaires se détachent de ses parois latérales pour aller s'insérer sur les parties adjacentes de la cavité abdominale {k). Chez la larve du Cossus ligniperda, la paire postérieure de ces brides charnues naît plus loin en arrière et se détache du gros intestin (/).

(a) L. Dufour, Recherches sur les Carabiques, etc. (Aiui. des sciences nat., \" série, 1824, t. Ill, pi. 14., fig. 4).

(6) Sirodot, Op. cit. {Anii. des sciences nat., série, f. X, pi. 14, fig. I).

(c) L. Dufour, Op. cit., pi. 31, fig. 7.

(d) Idem, ibid., pi. 31, fig. 4.

(e) Idem, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. 11, fig. 158. (/■) Ramdohr, Verdauungsîverkzeuge der Insecten, pi. 16, flg. 2.

L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. 13, fig. 208. (g) Idem, ibid., pi. 5, fig. 48. (h) Ramdnhr, Op. cit., pi. 13, fig. 1. (i) L. Dufour, Op. cit., pi. 6, fig. 72. (j) Idem, (!)««., pi. 8, fig. 89. »

{k) Cornalia, Monografia del Bombice del gelso, p. 105, pi. 4, fig. 51 et 52. (l) Lyonnet, Traité anatomique de la Chenille qui ronge le bois de saule, pi. 13, fig, 1 et 2.

Rourses Vcnlriciilaires.

60/l APPAREIL DIGESTIF.

quelques Insectes ; mais, chez beaucoup de ces Animaux, il donne naissance à des prolongements cœcaux qui peuvent affecter deux formes principales. Tantôt ce sont des poches allongées et d'une capacité assez grande pour que l'introduction des matières alimentaires dans leur intérieur soit possible; d'autres fois ce sont des tubes courts et d'une grande ténuité, qui sont serrés les uns contre les autres comme les poils d'une brosse molle. Les premières sont appelées communément des cœcums gastriques^ ou bourses ventricul aires ; les seconds sont désignés sous le nom de villosités.

Les csecums gastriques sont très développés chez la plupart des Orthoptères, Insectes qui se nourrissent, comme je l'ai déjà dit, de substances végétales, et qui sont d'une grande voracité. Ainsi, chez les Criquets, l'extrémité antérieure du ventricule chylifique donne naissance à douze de ces appendices, qui sont de forme lancéolée et disposés de façon à constituer une double couronne, les uns élant dirigés en avant, les autres en arrière (1). Chez les Mantes, on ne compte que huit de ces

(1) M. Léon Dufoiir donne le nom de bourses ventriculaires jwincipales aux appendices caecaux antérieurs, et il considère les autres comme étant seulement des dépendances des pre- mières, parce que leur volume est plus variable suivant les espèces, et qu'elles ne communiquent avec la cavité de l'estomac que par un orifice linéaire situé vis-à-vis du point de jonction de chacune d'elles avec le caecum antérieur corres|)ondant. On en compte six dans chaque rangée. Celles de la couronne antérieure sont dirigées en avant et suspendues aux parois du thorax par des brides qui

naissent de leur extrémité effilée ; celles de la série postérieure sont ac- colées aux parois de l'estomac. Chez VOEdipoda cœrulescens , elles sont presque aussi grandes que celles de la première série (a) ; mais dans d'autres espèces de la même famille elles sont très réduites, et chez VOEdipoda hi- guttata, par exemple, elles sont pres- que rudimentaires.

Chez le Tetriœ subvlaln, cet appa- reil ajipendiculaire de l'estomac tend à disparaître, et n'est représenté que par six lobules triangulaires. Enfin, chez le Tridactylus variegatus, on ne trouve plus que trois prolongements

[n} L, Diifciii', Beclterches sur les OrllwiHi'res, etc., \\ 41), pi. 2, fig. 8.

TL'BK ALlMlîNTAinE DES INSliCTES. G05

caecums gastriques, mais ils sont beaucoup plus allongés, et ressemblent à autant de petits boyaux cylindriques qui seraient terminés en cul-de-sac à leur extrémité libre (1).

Un mode d'organisation analogue se voit cbez quelques Né- vroptères, tels que les Perles (2), et chez les larves de plusieurs Coléoptères phytophages ce système d'appendices gastriques est encore plus dévelopi)é, mais ne persiste pas chez rinsectc

gasU'iques qui naissent de la païUe supérieure et antérieure du ventri- cule chylifique , et qui se confondent avec cet organe postérieurement (a).

(1) M. Marcel de Serres a décrit ces appendices gastriques sous le nom de vaisseaux biliaires supérieurs, sans doule parce qu'on trouve souvent dans leur intérieur un liquide jaunâtre (6).

Chez les Blattes, il existe aussi à rcxtrémité antérieure du ventricule cliylifiques une couronne appendicu- laire composée de huit petits cas- cums (c).

Chez la Courtilière ( Gryllotalpa vulgaris), cet appareil est représenlé par deux grandes poches ovalaires qui se réunissent à leur base, et com- muniquent avec l'extrémité anté- rieure du ventricule chylifique par un orifice commun (d). Il en est à

peu près de même chez les Gril- lons {e).

Enfin, chez les jfauterelles, l'extré- mité antérieure de l'estomac se dilate latéralement , de façon à constituer aussi deux grandes poches arrondies en avant, mais ces prolongements ne sont pas étranglés à leur base et ressem- blent à de simples élargissements de cet organe (/").

(2) Chez les Perles, l'extrémité an- térieure de l'estomac est garnie de huit prolongements digitiformes, dont deux latéraux plus grands que les au- tres {g). Chez hCorydalus cornutus, on trouve quatre appendices de ce genre, qui ne se développent que lors- que l'Animal arrive à l'état de nym- phe (h). Les larves du Semblis bicau- data sont pourvues de six appendices de même nature {i).

(a) L. Diifoiir, Recherches sur les Orthoptères, etc., p. 52, pi. 1, tlg. 11.

(b) Marcel de Serres, Observations sur les Insectes considérés comme ruminants, et sur les usages des diverses parties du tube intestinal dans cet ordre d' Animaux , pi. 2, fig. 4.

Suckow, Op. cit. (Heiisinjer's Zeitschr. filr die urijan. l^hysik, t. ILI, pi, 7, Hlç. 134).

L. Diifour, Op. cit., pi. 4, li^'. 38.

(c) RamiloUr, Verdauunysiverkzeuge der Insecten, pi. 1, fig. 9.

Marcel de Serres, Op. cit., pi. 2, fig. 1. , L. Diifoiir, Op. cit., pi. 5, fig;. 44.

Gaedc, Deitriige ziir Anatomie der Insekten, pi. 1, fiiç. 1.

(d) L. Dufuiir, Op. cit.. p. 07, pi. 2, fig. 19.

(e) Marcel de Serres, Op. cit., pi. 1, fii,'. 1. (/■) L. Dufoiir, Op. cit., p. 85, pi. 3, fig. 33.

(g) L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, etc., p. 347, pi. 13, lig. 198.

Picict, Histoire naturelle des Scvroptèrcs, Perlides, pi. 2, fig. 1-5.

(h) Laidy, Op. cit. (American Academg of Arts and Sciences, 1848, pi. 2, fig. 1, 2, 4 cl 5). (i) Suckow, t/ebec Semhlis bicaiidala (Heusiiiger's Zeitschriit fiir die organische Physitc, 1^28, 1. Il, p. 207, pi. 7, fig. 7).

606 APPAREIL DIGESTIF.

adulte. Ainsi, chez la larve des Hannetons, des Cétoines, de VOryctes nasicornis et de beaucoup d'autres Lamellicornes, l'estomac présente trois groupes de ces prolongements digiti- formes, situés, l'un à son extrémité antérieure, le second un peu plus en arrière, et le dernier près de son extrémité posté- rieure (i); mais, chez ces mêmes Insectes à l'état adulte, on n'aperçoit plus aucune trace de ces appendices (2). On re-

(1) La disposition générale des ap- pendices gastriques de la larve de VOryctes nasicornis a été assez bien représentée par Svvammerdam et par Rosel {a), mais se voit mieux dans les figures données par de Haan (6), et surtout dans celles publiées récem- ment par M. Sirodot. Ce dernier au- teur a reconnu que le groupe antérieur de ces appendices se compose d'une double couronne de tubes borgnes très nombreux, reployés en avant, et va- riant un peu dans leur forme, les uns étant simples, les autres plus ou moins digités.soitàleurextrémité seulement, soit latéralement (c). Les caecums de la seconde couronne sont dirigés en ar- rière, et, de même que les précédents, disposés symétriquement de chaque côté de la ligne médio-dorsale. Enfin, ceux du troisième groupe sont dirigés en avant, et sur les côtés de Festomac

ils sont beaucoup plus longs que près de la ligne médiane.

La disposition générale de ces ap- pendices est à peu près la même chez les larves des Cétoines (d), du Hanne- ton commun (e), des Scarabées (f) et de plusieurs autres Lamellicornes.

Chez la larve du Hanneton foulon, les caecums du groupe moyen sont très courts et peu nombreux {g], et chez lesTrichies {h), ainsi que chez les IJoplies (/), il n'y a d'appendices gas- triques bien caractérisés qu'aux deux exirémités du ventricule chylifique. Enfin, chez la larve de VAphodius nigripes, ces appendices paraissent manquer complètement (;).

(2) Chez VOryctes nasicornis 'dVélàl parfait, le ventricule chylifique est beaucoup plus grêle que chez la larve, et ne donne naissance à aucun pro- longement appendiculaire [k). U en

(a) Swaramenlam, Biblia Naturœ, pi. 27, fig. H.

Picisel, Die Insecteii-BelusUgung, t. Il, pi. 8, dg. 1 et 2.

(6) W. de Haan, Mém. sur les métamorphoses des Coléoptères (Nouvelles Annales du Muséum, 1835, t. IV, pi. 16. dg.A, B, G).

(c) Sirodot, Recherches sjir les sécrétions cha les Insectes {Ann. des sciences nat., i' série, 1858, t. X, pi. 9, fig. 4, 2, 3 cl 4).

[d) r.amdolir, Verdauiingstverlaeuge der Inseclen, pi. 7, fig. 2.

De Haan, Op. cit., pi. 17, fig. 3.

(c) Newport, Insecta (Todd's Cgclopœdia of Anatomy and Physiology, t. H, p. 968, (Ig. 425).

(f) De Haan, Op. cit., pi. 17, fig. 1.

(g) Idem, ibid., pi. 18, Cig. i. {h) Idem, ibid., pi. 18, fig. 2. (i) Idem, ibid., pi. 18, fig. 3.

(j) Idem, îfciiZ., 11. ICI, pi. 18, lîg. 4.

(fc) Sirodol, Op. cit. (Ann. des sciences nat., 4" séi'ie, (. X, pi. 14, liy. 1).

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 607

marque aussi des changeuients analogues dans la constitution de l'appareil digestif de quelques Diptères : par exemple, des Cé- roplates(l) ; cependant, chez la plupart des Insectes de cet ordre, les bourses ventriculaires existent encore chez l'adulte (2). Il

est à peu près de même chez le Han- nelon (a) et chez les Cétoines, si ce n'est que l'estomac de ce dernier In- secte se couvre de petites ville - sites (6).

(1) Les Céroplates, qui appartien- nent au groupe des Tipulaires fongi- coles, sont pourvus, quand ils sont à l'état de larves, d'un jabot fusilorme, d'un petit gésier ovoïde, et d'un ven- tricule chylifique variqueux dont l'ex- trémité antérieure donne naissance à une paire de tubes cylindriques et aveugles qui égalent presque cet or- gane en longueur (c). Chez l'Insecte adulte, ces appendices sont représentés par deux petites bourses conico-trian- gulaires. Chez la larve du Tipula lu- »ia(«,il existeà la partie antérieure de l'estomac quatre bourses ventricu- laires ((/).

Comme exemple de Diptères ayant des appendices gastriques très bien développés dans le jeune âge, mais

ne conservant pas ces organes à l'état adulte, je citerai aussi la Mouche car- nassière ( Sarcophaga hœmorrhoi - dalis). Chez la larve, on trouve deux paires de longs tubes caecaux insérés à l'extrémité antérieure du ventri- cule chylifique, tandis que chez l'In- secte parfait ces appendices n'existent plus (e).

(2) En général, ces bourses ventri- culaires naissent très près de la tète, et consistent en une paire de caecums vésiculaires ou tubuliformes. Chez les Cousins (/"), le Vappo pallipen- nis {g), etc., elles sont très petites;' mais elles s'allongent davantage chez les Taons [h), VEphippium Ihoraci- cum (i), les Dasypogons (_/;, les Lep- tis (k), les Dolicopes (/), etc.

Chez quelques autres Diptères, ces appendices ont un aspect framboise , par exemple chez les Bombyles (m) ; et parfois aussi ils se développent de façon à constituer deux paires de cae-

(a) L. Dufour, Recherches anatomiques sur les CaraUques, etc. (Ann. des sciences nat., 1" série, 1824, t. 111, pi. 14, fig. 4).

Straus, Considirations sur Vanatomie des Animaux articulés, pi. 5, fig. 6.

(6) L. Diifoui-, Op. cit. {A>in. des sciences nat., 1" série, t. III, pi. 15, fig. 1).

(c) Idem, Révision et monographie dii genre Céroplate {Ann. des sciences nat., 2* série, 1839, t. XI, p. 50, pi. 5, fig. 23).

((i) Itlein, Recherches anatomiques et physiologiques sur les Diptères, pi. 4, fig. 36.

{e) Idem, Études anatomiques et physiologiques sur une Mouche {Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. étrang., t. IX, pi. 3, fig. 20 et 27).

(/■) Idem, Recherches ajiatomiques et physiologiques sur les Diptères, pi. 2, fig. 18 et 19.

(g) Idem, ibid., pi. 4, fig. 45.

(/() Idem, ibid., pi. 4, fig. 3T et 39.

(i) Idem, ibid., pi. 4, Cis;. 43.

(j)ldem, ibid., pi. 5, fig. 52.

(k) Idem, ibid., pi. G, fig. 70.

(l) Idem, ibid., pi. 6, fig. 73.

(m) Idem, ibid., pi, Ij, fig. 62.

608

Al'PAIlEIL DIGESTIF.

en est de même chez les Anopleures [\ ;. Enfin, on connaît aussi des Coléoptères qui, à l'état parfait, sont pourvus d'appendices de ce genre, mais ces exemples sont rares (2).

La structure de ces dépendances de l'estomac ne présente d'ailleurs rien de particulier ; on doit les considérer comme de

cums , par exemple chez le Rhingia rostrala [a). Chez le Volvucella zona- ria, ceUe bifurcation coïncide avec un développemenl beaucoup plus consi- dérable el une disposition lobulée (b). Clicz d'autres iJiptères, au con- traire , le ventricule chylifique ne donne naissance à aucun appendice, et ces variations se rencontrent chez des espèces appartenant à un même genre ou du moins à une même famille naturelle. Comme exemple de ce mode de conformation , je "citerai le Tipula oleracea (c) , le Trichoptera trifasciaia (d) , V Echi- nomyia grossa (e) et le Lucilia Cœsar (f).

(1) L'estomac du Pou commun (Pe- diculus capitis) est très élargi dans sa moitié antérieure, et présente de chaque côté du cardia un prolonge- ment digitiforme {g).

(2) On a constaté l'existence de

prolongements de ce genre à la partie antérieure du ventricule chylifique d'un petit nombre d'Insectes de cet ordre. Ainsi, chez quelques Taupins, tels que VElater murinus, cet esto- mac se dilate antérieurement de façon à former de chaque côté du cardia un sac arrondi dont la surface est liéris- sée de villosités comme Test celle des auties parties du ventricule {h), et chez les Buprestes on voit naître dans le même point une paire d'appendices borgnes et intesliniformes, dont la . longueur est très considérable (i). Chez les Dermestes il existe six bourses venlriculaires pyriformes et assez bien développées [j]. Enfin, on rencontre un mode d'organisation analogue chez le Macronijchus quadrituber- culatus (k) , et chez les Vrillettes l'extrémité antérieure de l'estomac est même entourée d'une double série de petits caecums bilobés (/).

(a) L. Dufour, Hecherches anatomiques et •physiologiques sur les Diptères, pi. 7, fîy. 79,

(b) Idem, ibid., pi. 7, ûg. 77 et 78.

(c) Idem, ibid., pi. 3, fig. 23. ((i)Idem, ibid., pi. 3, t\g. 32. (e) Idum, ibid., pi. 8, fig. 96. (f)Uem, ibid., pi. 9, fig-. 112.

{g) Swammerdam, Biblia Naturœ, pi. 2, fig. 3.

[Il) L. Dufour, Description de l'apjpareil digestif de /'Anobium striatiim {.\nn, des sciences nat., i" sério, 182«, t. XIV, p. 219, pi. 12 A).

(i) L. Dufour, Recherches sur les Carabiques, etc. {Anti. des sciences nat., 1" série, 1. III, pl. 12, fig. 3).

(j) Idem., ibid., pl. 12, fig. 1.

(k) Idem, Rcclurches anatomiques sur les Coléoptères des genres Macronique et Ebnis (Ann. des sciences nat., 2" série, 1835, t. III, pl. 6, fig. 17).

(/) Idem, Itecherches anatomiques sur quelques Insectes colcoptères comiiris dans les familles des Dermeslins, des liyrrhiens, etc. {.inn. des sciences nat., 2' série, 1834, t. I, p. 07, pl. 2, fig. 1 et 2),

TL1]E ALIMEiMAlHE DES INSECTES. 609

simples diverticiiles de cet organe, et elles ne paraissent pas être chargées spécialement de la sécrétion de suc gastrique ou de tout autre liquide digestif.

Chez les Insectes dont l'estomac est lisse extérieurement, c'est-à-dire dépourvu de villosités, l'élaboration du fluide pep- sique paraît être dévolue à des glandules dont j'ai déjà parlé comme se trouvant dans l'épaisseur des parois de ce viscère. Ce sont des follicules microscopiques logés entre les faisceaux de la tunique musculaire; leur forme est arrondie, et l'on aper- çoit dans leur intérieur des utricules contenant des granula- tions (1).

Les villosités qui font saillie à la surface externe de l'estomac d'un grand nombre d'Insectes paraissent être produites par le grand développement de petites fossettes analogues aux glandes gastriques dont je viens de parler (2), et tout porte à croire

Glandules pepsiques.

(i) Pour bien observer ces glan- dules, il est bon de laver avec de l'eau aiguisée par de l'acide acétique un fragment de l'estomac de l'Insecte dont on a fait cboix, puis de l'étendre sur une lame de verre qu'on place sous un microscope dont le pouvoir amplifiant est au moins de 150. M. Sirodoi a constaté de la sorte que chez VOnjctes nasicornis ces follicules sont dispo- sés en séries annulaires assez régu- lières, et leurs parois sont formées par une dépression de la membrane liomogcne qui constitue la base de la tunique muqueuse de l'estomac. Les utricules qui en occupent l'intérieur sont petites et arrondies ; enfin on remarque au milieu d'elles une goutte d'un liquide opalin («). Chez le Gril-

lon des champs, les follicules gastri- ques occupent les mailles d'un ré- seau formé par des fibres sinueuses de tissu conjonciif, et, d'après les recherches de M. Sirodot, les cellules incluses dans toutes ces glandules ont beaucoup d'analogie avec les utricules sécrétoires de la pepsine chez les Ani- maux vertébrés (6).

(2) On trouve une foule de formes intermédiaires entre les deux états ex- trêmes dont il est ici question. Ainsi, chez les Cétoines, les Lucanes, les Taupins et quelques autres Coléo- ptères phytophages, les glandules gas- triques ne sont pas enfouies dans l'épaisseur des parois de l'estomac, comme chez les Oryctes, mais sont un peu saillantes à la surface externe de

{a) Sirudot, Recherches sur les sécrélioiis chez, les Insectes {Ann, des sciences nat., 4' série 4 858, l. X, |i. 4 83, pi. 13, li-. 1 et "2}. (6) Idem, tbid., pi. 13, fig. 3.

V.

39

610 AFPAKEIL DIGESTIF.

que ce sont aussi les organes chargés plus spécialement de sécréter le suc pepsique ou quelque liquide analogue (1). On les trouve chez la plupart des Coléoptères , mais principale- ment chez les espèces de ce groupe qui se nourrissent de matières animales (2). Ce sont de petits appendices creux qui ressemblent à des doigts de gant, et qui sont en général serrés

cet organe, et y constituent une multi- tude de petites papilles arrondies (a). Chez les Copris, qui vivent de matières fécales, ces appendices gastriques s'allongent davantage (6) ; mais c'est chez les Coléoptères carnassiers, tels que les Carabes et les Dytisques, qu'ils acquièrent les dimensions les plus considéraljles (c).

(1) Je fais cette réserve, parce que les reclierches récentes de M. Bascli tendent à établir que, chez le Blattu orientalis, le liquide sécrété par les glandules de Teslomac n'est pas acide comme le suc gastrique ordinaire, mais alcalin, et susceptible d'agir sur les aliments à la manière de la dia- slase {d). Rengger est arrivé à un résultat analogue, en étudiant les li- quides contenus dans l'estomac de diverses Chenilles (e).

(2) Ainsi les viilosités gastriques sont bien développées chez les Cicin-

délètes, les Carabiques, les Dytisques, les Staphyliniens, les Escarbots, les Silphcs, les Diapères, etc.

Le ventricule chylifique est , au contraire, dépourvu de villosiléschez les Coléoptères des genres Buprestes, Lampyrus, Telephorus, Malachius, Driius, Anobium, Clerus, Geotrupes, Melolontha, Hoplia, OEdemera, Mor- della, Lytta, Mylabris, Meloe, Bos- trichiis, Prionus, Clytus, Cassida, Timarcha, Galleruca, etc. Or tous ces Insectes sont phytophages; mais il existe aussi un certain nombre de Coléoptères dont le régime est ana- logue et dont l'estomac est plus ou moins villeux : par exemple, les Sco- lytes , les ïénébrions , les Charan- çons, etc. Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai aux ouvrages déjà cités de l'.amdohr, de M. Léon Du- four, etc. , ainsi qu'à divers mémoires particuliers (/').

{a) Exemples: Cetonia aurnta (vny. L. Dufour, Recherches sur les Carabiques (Ann. des sciences liât., i" série, 1824, l. 111, pi. 15, ûg. i).

Lucaims cervus (voy. L. Dufour, loc. cit., pi. 15, tig. 2 et 3).

(b) L. Dufour, loc. cil., pi. 14, fig. 3.

(c) Exemple : Carabus auratus (voy. L. Dufour, Op. cit., dans .Ann. des sciences nat., 1" série, l. II, pi. 20, li^. 1 el 3).

((/) Uiilivsuchunfien ûber des chylopoctische und nropoelische System dcr Blalla orientalis [Sitz-uiKjsbcvichtc dcr \\'iencr Akud., 1858, I. XXXIII, |>. 250).

((.') ReniJger, /'/iysioZ. Unters. ûber die tliienschc Haushallung dcr Insekten, i8ll , p. 21 el suiv.

(/■) P.auidohr, Ahhnndlunn ùber die VerdaHungsiverkzeuge der Inseclen, pi. 2 et suiv.

Idem, Anatomic des Dannkanals und der GcscMecklstheile voin Caralnis nionilis (Matj. der Gcsellscliaft naturfurschendev Frennde m licrliii, 1807, I. I, p. 207, pi. i).

L. Dufour, lUcherches sur les CMrabiques, etc. (Ann. des sciences nul., 1'° série, 1824 et 1825, l. III et IV).

Idem, HechcrcUcsaiiatoiinqucs sur les Coléoptères compris dans les familles des Dermestins,

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 611

les uns contre les autres comme les poils d'une brosse molle : leur cavité, terminée en cul-de-sac du côté externe, commu- nique avec l'intérieur de l'estomac par son extrémité opposée, et loge des utricules sécrétoires à divers degrés de développe- ment. Ils sont en général plus nombreux à la partie antérieure de l'estomac que vers sa partie postérieure, et ils cessent tou- jours d'exister à quelque distance du point d'insertion des vais- seaux malpigliiens.

Chez les Insectes des autres ordres on ne trouve que rare- ment des traces de villosités gastriques. Comme exemple de cette disposition, je citerai cependant le Fourmilion, parmi les Névroptères (1). Elle ne se rencontre ni chez les Orthoptères, ni chez les Hyménoptères, les Lépidoptères et les Diptères.

§ 7. La portion intestinale du tube digestif qui fait suite à l'estomac, et qui se compose, ainsi que je l'ai déjà dit, de deux parties principales, savoir, un intestin antérieur ou intestin grêle, et un intestin postérieur ou réservoir stercoral, varie beaucoup dans son degré de développement, soit chez les

(1) Chez la larve du Fourmilion, il couvert de petits caecums verruci-

existc un jabot globuleux qui est se- formes. Ces appendicules se voient

paré du ventricule chylifique par un aussi chez l'insecte parfait, qui est

étranglement, et ce dernier organe est également carnassier (a).

des Byrrhiens, des Acanthopodes et des Leptodactyles (Ann. des sciences nat., 2* série, 1834, t. I, p. 50, pi. 2 et 3).

Mem, Mém. sur les métamorphoses et l'anatomie du Pyrochroa coccinca {Ann. des sciences nat., série, 1840, t. XIII, p. 3-21, pi. 5, fig. 5).

Idem, Histoire des métamorphoses et de l'anatomie des Mordelles {Ann. des sciences nat., 1840, p. 225, pi. 11, ûg. 9 et 10).

Idem, Histoire comparée des métamorphoses et de l'anatomie des Cetonia aurata et Dorciis parallelipipediis {Ann. des sciences nat., série, 1842, t. XVIII, p. 162, pi. 2, lig. 3, et pi. 3, %. 18).

Audouin, Recherches anatomiques sur le Drile flavescent {Ann. des sciences nat., l" série, 1824, t. II, p. 447, pi. 15, lig. 15el 10).

Idem, Recherches pour servir à l'hisioire naturelle des Cantharides {Ann. des sciences nat., \'° série, 1S26, t. IX, p. 44, pi. 42, fig. 42).

Buniieister, Zur Naturgeschichte der Gatlung Calandra, iii-4, Berlin, 1837 (appareil digestif de la larve du Calandra Sommeri, fig. 3).

Idem, Anat. Observ. upoti the Larva uf Calosuma sjcopliaiila (Trans. uf the Entomol. Soc. vf LondoH, 1830, t. I, p. 235, pi. 24, lig. 10).

(U) L. Uiilour, Recherches sur les Urlhoptères, etc., pi. 12, fig. 175 et 17'J.

Intestin.

61 ti Al'l^AlŒIL DIGliSTIF.

divers Insectes, soit ciiez le même individu à différents âges. (^Iiez les Chenilles et chez beaucoup d'autres larves, elle est cxtrèmenaent conrte, et chez les Héiniptères elle ne s'allonge que fort peu (1); mais, chez la plupart des autres Insectes adultes, elle se développe beaucoup plus et elle acquiert une structure assez complexe. La ligne de démarcation ([ui la sépare de l'estomac n'est pas toujours nettement indiquée, mais cor- respond à peu près au point d'insertion des tubes malpighiens. Seulement il est à noter que la partie du canal alimentaire ces vaisseaux débouchent, et que j'appellerai pijlorique, se confond (juelquefois avec l'estomac, et se trouve ainsi placée au-devant de l'intestin, tandis que d'autres fois elle est séparée

(1) Ainsi, cliez le l'apillou du chou (a), le Bombyx du pin (6), le Ver à soie (c), le Sphinx du troëne (d), la Pyrale de la vigne (e) et la plupart des autres Li-pidoptères à Tétat de larves, Tintestin consiste en un tube droit et presque cylindrique, qui n'a guiîrc plus d'un quart ou même un cinquième de la longueur du corps, et qui se divise en trois portions princi- pales auxquelles on peut donner les noms aCinlestin antérieur, (Vintestin moyen et d'intestin postérieur. L'in- testin antérieur a des parois très charnues, et donne insertion aux tubes nialpigliiens; Tinteslin moyen est plus renflé, et constitue le réservoir ster- coral; enlin Tinlestin postérieur, ou rectum, est très dilatable, mais dans l'étal de vacuité il ne constitue qu'un

petit canal membrano-musculaire qui aboutit à l'anus.

En observant les cbangements suc- cessifs qui s'opèrent dans la confor- mation de celte portion post-stoma- cale de l'appareil digestif, pendant que les Lépidoptères avancent en âge, on remarque d'abord qu'elle s'allonge beaucoup plus que les parties voi- sines, et l'on voit aussi que cet accrois- sement porte principalement sur la partie de l'intestin antérieur qui est comprise entre le lieu d'insertion des vaisseaux malpighiens et le réservoir stercoral ; un long tube étroit et cylin- drique se développe ainsi, et constitue ce que l'on appelle communément V intest in grêle de ces Insectes, tandis que la partie antérieure de l'intestin, qui était primitivement bien distincte

(a) Herold, Biilwickelungsgeschichle der SchmeUeriinqe, pi. 3, ti^'. 1 à 12.

f6)Sucliu\v, Allât. -physiol. Uiitersiichungea der lus élit en und Ki'usleathiere, pi. 2, ûg. I à 10.

(c) Cornalia , Mônmjraf'm del Bombke del gelso, pi. i, (iij. 53; pi. Id, tii;. 133, 135, 137; pi. l'i.lig'. 18'Jcl "2Ui.

(d) Newport, On ttie Servons System nf tlie Spluiix lijn>tri {Philos. Trans., 1834, pi. 14, lig. 1 , 1 -2 ol 1 3 .

icj .\uiioHiii, Histoire (l<!.s Insectes nuisibles à la vigne, pi. 7, li^'. lU.

TUllE ALIMENTAIRE t)ES INSECTES. 615

du ventricule chylifKjue par un étranglement et ne se distingue pas de l'intestin grêle. Ce dernier mode d'organisation se voit chez les Chenilles la portion pylorique du tube digestif est cylindrique, courte et plus étroite que le ventricule qui la précède (1). Une disposition analogue se voit chez quelques Hémiptères, tels que les Lygées, l'intestin grêle est représenté par une poche arrondie, et, chez quelques autres Insectes du même ordre, toute cette partie du canal digestif reste à l'état rudimentaire, de façon que le point d'insertion des vaisseaux malpighiens marque la limite entre l'estomac et le gros intestin ou réservoir stercoral : par exemple, chez les Capses (2). Mais, en général, c'est la disposition contraire qui s'ohserve :

de reslomac, se confond de pins en pins avec cet organe, de façon qne chez l'Animal adulte remboiichnre des vaisseaux malpighiens ne se trouve plus dans l'intestin proprement dit, mais à l'extrémité du ventricule ciiylifique (a).

Chez les larves des Coléoptères de la famille des Lamellicornes, la portion intestinale du tube digestif est, au contraire très développée, et se re- courbe sous l'estomac pour se porter d'abord en avant, puis en arrière ; enfin, sa partie moyenne est renflée de manière à constituer une grande poche stercorale ovoïde et à parois boursouflées (6).

L'intestin offre aussi une longueur assez considérable chez la larve de quelques autres Coléoptères, par

exemple le Calosoma sycophanta , mais il ne s'élargit que dans le voisi- nage de l'anus (c).

(1) Chez la Chenille du Cosstis ligniperda, cette portion de l'intestin se compose de deux zones assez dis- tinctes par la structure de leur tuni- que muqueuse, et c'est dans la seconde que s'ouvrent les tubes maipi - ghiens (d).

(t2) L'avortement de toute la portion du tube alimentaire correspondante à l'intestin grêle de la plupait des In- sectes se remarque aussi chez les Miris. En ellet, chez ces Hémiptères, l'estomac, ou ventricule chylifique, que M. Léon Dufour désigne ici sous le nom de second estomac, n'est sé- paré du réservoir stercoral que par un étranglement viennent débou-

(a) Voyez Herold, Op. cit., pi. 3, fie:. 12.

Newport, Insecta (Todd's Cyclap. of.Anat. and Physiol., t. 11, p. 972, fig. 430).

(b) Exemples : la larve de VOryctes nasicornis (voy. Swanimerdam, biblia Nalurœ, pi. 27, fig. 11 ; De Haan, Op. cit. (Nouvelles Annales du Muséum, 1835, t. IV, pi. 10, fig. A, B, C).

La larve du Hanneton (voy. Newport, I.nsecta, in ToJd's Cyclop., t. Il, p. 908, fig. 425).

(c) Burmeister, .\nalomiral Observations upon the Larva of Calosoma sycophanta { Transactions oflhe Entomol. Soc. of Loudon, 1830, t. 1, p. 237. pi. 24, fig-. 10 et U).

{;/) I.yonnel, Traité anatomique de ht Chenille qui ronge le bois de saule, p. 473, pi 1 3, fi^'. 1.

Gl/l APPAREIL DIGESTIF,

la portion pylorique portant les embouchures des tubes de Malpighi se confond avec l'extrémité postérieure de l'estomac, et la partie suivante de l'intestin se développe en un canal grêle et cylindrique, d'une longueur assez grande, qui conduit de ce dernier viscère dans le réservoir stercoral. Ce mode d'organisation est général chez les Coléoptères et les Ortho- ptères ; il ne manque que rarement chez les Hyménoptères, les Névroptères, les Lépidoptères et les Diptères ; enfin il se rencontre aussi chez plusieurs Hémiptères. En général, l'in- testin grêle, ainsi constitué, ne présente dans sa structure rien qui soit important à noter, mais quelquefois il devient très long : par exemple, chez VOryctes adulte (1), il se renfle

cher les tubes malpigliiens (a). Il en est de même chez la Punaise des lits (h), les Réduves (c), etc.

La portion pylorique de l'intestin reste au contraire distincte, soit de l'estomac, soit du réservoir stercoral, chez la plupart des autres Hémiptères et chez plusieurs de ces Insectes, tels que lesLygées (d) et les Gerris (e) ; elle se renile de façon à former une grosse poche arrondie, sur les côtés de la- quelle viennent s'ouvrir les tubes mal- pighiens. Chez d'autres Hémiptères de la même famille, cette poche de- vient excentrique , par exemple chez les Scutellaires (f), et chez les Pyr- rhocoris , elle est profondément bilobée (g).

Enfin, chez divers Hémiptères qui appartiennent aussi à la grande fa- mille des Punaises, l'intestin antérieur devient cylindrique, grêle et allongé, et le point d'insertion des tubes mal- pigliiens se trouve à la ligne de jonc- tion de cet organe avec l'estomac. Celle disposition se voit chez les Nèpes {h), les Naucores (/), etc.

(1) La tunique interne de l'intestin grêle forme souvent des plis longitu- dinaux, et ce sont les extrémités de ces duplicatures qui ont été décrites par M. Léon Dulour comme consti- tuant une espèce de valvule, d'une part à l'oritice postérieur de l'esto- mac, et d'autre part à l'entrée du réservoir stercoral. Chez quelques

(a) L. Dufour, Recherches sur les Hémiptères, \<\. 3, fig. 27.

(b) Idem, ibid., pi. 4, fig. 44.

(c) Idem, ibid., pi. 4, ùg. 48.

(d) Idem, ibid., pi. 3, fig-. 22 et 25.

(e) Idem, ibid., pi. 5, fig. G4. (/■) Idem, ibid., pi. 1, fig. 1. (g) Idem, ibid., pi. 2, fig. 19. {h) Idem, ibid., pi. C, fig. 82. (i) Idem, ibid., pi. 0, fig. 72.

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 615

beaucoup vers son extrémité postérieure et y devient très musculaire (l).

Le réservoir stercoral, que les anatomistes désignent aussi sous les noms de gros intestin^ de côlon, etc., est d'ordinaire une simple dilatation du canal alimentaire, dont les fibres mus- culaires sont disposées par bandes distinctes et dont les parois renferment des organes glandulaires particuliers (2); mais.

Gros intestin

ou

réservoir

stercoral.

Coléoptères, les Ctitoines et les Lu- canes, par exemple (a), cet intestin est fort court; tandis que chez d'au- tres espèces du même ordre, telles que le Ténébrion (6) , et surtout VOrxjctes nasicornis , il acquiert une longueur fort considérable (c). En gé- néral , il est lisse extérieurement , mais quelquefois il est couvert de petites papilles dans une grande partie de son étendue : par exemple, chez les Silphes (d) et les Nécro- phores (e).

(1) Celte disposition est très remar- quable chez le Hanneton, et la portion de l'intestin grêle qui est ainsi élargie constitue ce que M. Straus a appelé, à tort, le gésier de ces Insectes {/"). Sa surface interne est armée de six séries longitudinales de mamelons Iriangu - laires qui garnissent les colonnes for- mées d'ordinaire par un simple repli de la membrane muqueuse ig).

(2) Le réservoir stercoral simple, c'est-à-dire faisantcomplélement suite à l'intestin grêle et ne se prolongeant pas antérieurement en cul-de-sac, est presque toujours de forme ovoïde et strié par six bandes musculaires, entre lesquelles on remarque sou- vent un égal nombre de tubercules arrondis ou ovalaires, qui sont parfois transparents au centre et garnis d'une sorte de cadre corné : par exemple, chez les Zabrus (/(), parmi les Coléo- ptères, et chez la plupart des Hymé- noptères. Chez tous les Mellifères, à l'exccpiion des Bourdons, ces tuber- cules existent aussi , mais ils ne sont pas toujours encadrés de la sorte, et souvent ils sont disposés sur deux rangées transversales. Chez les Cra- broniles, les Sphégides et beaucoup d'autres Hyménoptères, ils s'allongent considérablement; enfin, les Ichneu- monides et les Gallicoles paraissent en

(a) L. Diifour, Recherches sur les Carabiques, etc. (Ann. des sciences nat., i" série, 1824, t. III, pi. 15, fisf. 1 et -2).

(6) Idem, ibik., pi. 29, fig. 6.

(c) Sirodot, Recherches sur Us sécrétions des Insectes {Ann. des sciences nat., i' série, f. X, pl. 14, fig. 1).

(d) L. Dufoiir, Op. cit. {An7i. des sciences nat., 1" série, t. III, pi. 13, fig. 5 à 7).

(e) UaUek, Necrophororummonographiceparticula prima {d'isserl. inaug.). Breslau, 1839, pl. 3, H- 57).

(/■) Siraus, Considérations sur l'anatnmie comparée des Animaux articulés, p. 263, pl. 5, fig. 6, h, i.

(g) Idem, ïbid., pl. 5, fig. 8.

Suckow, Venlauungsorgane der InseJiten (Heusinger's Zeitschrift fur die organische Physik, 1833, t. m, pl. 3, fig. 93 et 94).

(h) Biirmeister, Handbuch der Entomologie, 1. 1, p. 449.

6i() APPAP.EIL DIGESTIF.

chez quelqaes Insectes il se développe latéralement, de f;içon ù former une poche dont le fond se prolonge beaucoup en avant du point l'intestin grêle vient s'y ouvrir (1).

être privés (o). On remarque aussi des boutons en nombre variable dans les parois du réservoir stercoral de divers Névropières , et cbez les Pliryganes on en compte environ vingt (6). Chez la Mouche domestique, on n'en aperçoit que quatre; ils sont coniques, creux et hérissés de petites épines cornées (c). Plusieurs entomologistes pensent que ces bou- tons sont de nature glandulaire, mais ils paraissent être seulement dos orga- nites analogues aux papilles que nous verrons à la surface de la muqueuse digestive chez beaucoup d'Animaux supérieurs.

Quelquefois, chez le Ver à soie, par exemple, cette portion du canal intes- tinal est divisée en deux loges par un étranglement circulaire, et dans cha- cun de ces compartiments arrondis on voit quatre paires de tubercules ou plaques cornées ovalaires, dispo- sées transversalement en forme d'an- neau (cl).

(1) Cette disposition paraît êtregéné- ralechezles Lépidoptèresadultes, mais elle n'existe jamais chez ces Insectes à l'état de larves. L'appendice caecal, ainsi constitué, ne s'avance que peu au-devant de la terminaison de l'in- testin grêle chez quelques espèces, telles que le Ponlia brassicœ {e). Mais chez d'autres, le réservoir stercoral prend la forme d'un sac ovoïde à col plus ou moins étroit : par exemple, chez le Splmix Ugustri (/"), et VA- cherontia Alropos {g).

Ce mode d'organisation est au con- traire très rare chez les Coléoplères ; il s'observe cependant chez les Dy- tisques à l'état de larves (h) aussi bien qu'à l'âge adulte (i) , chez les Ténébrions (_/), le Nécrophore (A;) , etc. Il existe aussi chez quelques Hémi- plères , tels que les Pelogonus [l], les lîanatres (?n), les jNèpes (n), les Nauionectes (o), elles Dorthésies (p). Enfin, on l'observe également chez la larve du Tipula lunata [q] parmi

(a) L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, etc., p. 132. (6) Idem, ibid., p. 355, pi. 13, fig. 208.

(c) Leyiiifir, Lehrhich der Histologie, p. 339, fig. 182.

(d) Cornalia, Monografia del Bombice delgelso, pi. 4, dg. 54, 55 et 50.

(e) Newpori, Insecta (Todd's Cijclop., I. Il, p. 973, fig. 431).

(/■) Trevirainis, Op. cit. (Vermischte Sclu'ifien, t. Il, pi. 11, fiy. 1 k).

Nevvport, Op. cit., I. II, p. 973, fig. 430.

(g) Siickow, Anat.-plujs. Uiiters. der Inschten und Kriistenthiere, pi. 2, (Ig. 9 et 10. {h) P.anulolir, Op. cit., pi. 2, fig. 2. (i) Idem, ibid., pi. 2, (ig. 1.

L. Diifour, tiech. sur les Carabiques, etc. {.^nn. des se. nat., 1" série, t. Ill, pi. 10, fig. 3). (j) Ramdolir, Vei-dauungswerkzcitge der Insecten, pi. 4, fig. 2.

(fc) Idem, ibid., pi. 5, fig. 1.

(/) L. lUifour, Hecherches sur les Hémiptères, pi. 5, fig. 58 bis.

(m) Idem, ibid., pi. 6, fig. 81.

(?l)Ideni, ibi(/., pi. (i, fig. 82.

(o) Idem, ibid., pi. 7, fig. 89.

(p) Idem, ibid., pi. 9, fig. 108.

(g) Idem, Hecherches sur les Diptères, pi. 4, fig. 30.

TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES, 617

Le rec'lum n'offre rien d'important à noter.

Chez un petit nombre d'Inseetes à l'état de larves, on n'aper- çoit aucun indice d'évacuations alvines, et l'ouverture anale a échappé aux investigations des anatomistes (1). Mais, dans

Anus.

les Diptères. Je n'eu connais pas (rexenipie chez les Orthoptères, les Névroplèies et les Hyménoptères.

(1) La plupart des entomologistes admettent que chez plusieurs larves d'Hyménoptères et même chez quel- ques autres Insectes, il n'y a pas d'anus. Ainsi Réaumur attribuait ce mode d'organisation anormal à la larve du Fourmilion (a), et l'opinion de ce naturaliste illustre a été partagée par beaucoup d'entomologistes de l'é- poque actuelle (6) ; mais elle n'est pas fondée, car M. Léon IHifour a con- staté que chez cet Animal, à l'élat de larve aussi bien qu'à l'état adulte, le tube intestinal est conformé de la manière ordinaire et débouche au dehors par un anus terminal (c).

Ramdohr et Suckow ont repré- senté l'appareil digestif de la larve des Guêpes comme étant formé d'une grande poche stomacale terminée en cnl-de sacet n'étant pas pourvue d'un intestin (d). M. Burmeister le décrit de la même manière (e), mais New- port y a constaté l'existence d'un in- testin très court, viennent débou- cher les canaux malpighiens (/").

M. Grube a donné une bonne figure de cette portion terminale de l'appa- reil digestif, et il a nettement distin- gué son ouverture anale. Cependant il reste encore quelque incertitude au sujet de la perméabilité de la por- tion pyloriquc de ce tube, et, d'après l'ensemble de ses observations , ce naturaliste pense qu'à cette période de la vie de la Guêpe, l'estomac ne communique pas avec l'intestin et se termine en cul-de-sac; enfin, que l'in- testin, ouvert en arrière, est aussi un tube caecal en continuité avec le pre- mier par sa tunique musculaire et sa membrane externe seulement ((^). Il y aurait donc, comme d'ordinaire, une bouche et un anus, mais le tube étendu entre ces deux ouvertures se- rait interrompu par un cylindre im- perforé dans la région pylorique ; disposition qui me paraît peu pro- bable, et je suis porté à croire que l'oblitération observée par ce natura- liste tient surtout à un état de con- traction plus ou moins permanente du sphincter pylorique.

La larve de l'Abeille a été décrite comme ayant aussi l'estomac terminé

(a) (b)

(c) (d)

(f)

(0)

fur A

Réaimiur, Mém. pour servir à ihistûire des Insectes, I. VI, p. 366.

Latrei'.le, Hisloire naturelle des Crustacés et des Insectes, t. Xlll, p. 26.

Dulrochet, Op. cit. (Journal de physique, 1818, t. LXXXVI, p. 134).

Burmeister, Handbuch der Entomologie, l. I, p. 149.

Lacoi'iiairo, Introduction à l'entomologie, 1838, t. H, p. 5.

L. Dufour, Recherches siir les Orthoptères, etc., p. 320, pi. 12, dg. 175.

Raniilolir, Op. cit., pi. 12, tlg. 1.

Suckow, Op. cit. (Heusiugei-'s Zeitscitrift fur die ortjanische Plujsik, t. III, pi. G, fig. 130).

Buimeisier, Handbuch der Entomologie, t. 1, pi. 9, fig'. 9.

Newporl, art. Insecta (ïodd's Cyclop. of Anat. and PhysioL, t. II, p. 907).

Ed. Grube, Fehlt dea Wespen-und Hornlssenlarven ein After oder nicht (Midler's Archlv

nat. un d PhysioL, 1849, p. 47, pi. 1, (Ig-. 0).

glandulaires.

6J8 APPAREIL DIGESTIF.

l'immense majorité des cas, cette ouverture terminale de l'in- testin est facile à reconnaître, même à cette période pou avancée de la vie, et chez l'animal adulte elle se voit tou- jours, soit à l'extrémité postérieure du corps , soit dans une espèce de cloaque formé par l'invagination des derniers zooniles de l'abdomen dans l'un des anneaux précédents du squelette (égumentaire (1).

Annexes § 8. Alusl quc jc l'ai déjà dit, les annexes glandulaires du canal digestif sont de différentes sortes. Indépendamment des follicules gastriques que nous avons rencontrés dans l'épaisseur des parois de l'estomac, ou faisant saillie à la sur- face externe de ce viscère sous forme de caecums, on trouve appendus à ce tube jusqu'à trois systèmes d'organes sécré- teurs, savoir : un appareil salivairc, les vaisseaux malpighiens, et des glandes anales.

en cul-de-sac [a] ; mais depuis long- rement et dépourvue d'orifice pylo- temps Swammerdam a constaté i'exis- rique (c). Des recherches plusappro- lence de Pinteslin de cet Insecte en fondies me paraissent cependant né- voie de développement, ainsi que les cessaires pour établir que chez ces connexions de cette portion terminale larves il y ait réellement absence de du tube digestif avec les téguments toute ouverture anale, extérieurs (6). (1) Cette disposition est générale Newport, en étudiant avec beau- chez les Coléoptères, et c'est la fente coup de soin l'appareil digestif de comprise entre les deux valves de la certaines larves d'IIyménoptî'res qui chambre cloacale ainsi constituée qui vivent en parasites sur d'autres Ani- est communément désignée sous le maux , par exemple du Monodonto- nom d'anus par les entomologistes. merus nUidens, dans la famille des Les organes de la génération débou- Chalcidiles, et de Vlchneiunon Atro- chent aussi dans cette cavité, sur le pos, n'a pu découvrir chez ces In- mode de formation de laquelle je re- sectes aucune trace d'un intestin, et viendrai lorsque je traiterai spécia- jl décrit leur estomac comme étant lement du système tégumentaire de une grande poche arrondie postérieu- ces Animaux.

(a) Burmeister, Handbuch der Entomologie, 1. 1, p. \ 49.

Lacordaire, InlroducUon n l'Entomologie, t. 1, p. 12C.

(h) Swaninicrdani, }iib\ia Naturœ, pi. 24, fis;. G.

(c) Newpurt, The Analomg and Development of certain Chalrido' and khnevmonidœ (Trans. ofthe Linnœan Society, t. XXI, p. G8, pi. 8, fig. 9). Arl. In.secta (Todd's Cyclopœdia of Ana- lomy and Physiology, 1. 11, p. 996).

AÎ^NEXES DU TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 619

Les glandes salivaires paraissent manquer eomplélement chez un assez grand nombre d'Insectes (1), et chez ceux elles existent , on remarque de grandes différences dans leur mode de conformation. Dans leur état de plus grande sim- plicité, elles consistent en une paire de tubes grêles qui, d'une part se terminent par une extrémité aveugle et libre , et d'autre part s'insèrent sur les parois du pharynx ou de la bouche, et s'ouvrent dans la cavité de cet organe. Cela se voit chez les Papillons ('2), chez divers Coléoptères (3), chez

Glandes salivaires.

(1) La plupart des Coléoptères pen- tamères paraissent être dépourvus de glandes appendiculaires pour la sécré- tion de la salive («), et il est probable que ce liquide est formé seulement par les follicules qui, chez ces In- sectes, sont logés dans les parois même du tube digestif (b). Les cae- cums que Duvernoy a décrits sous ce nom chez les Dermestes, les Vril- lettes et les IMacroniques (c), ne sont autre chose que les bourses gastriques dont il a déjà été question ci-dessus (page 608). M. Léon Dufour a décou- vert un appareil salivaire spécial chez les Blaps [d), les OEdémères (e) , les Diapères (f), les Mordelles {g), les Lixus (/i), les Coccinelles {i) et quel- ques autres Coléoptères.

L'appareil salivaire spécial paraît manquer complètement chez les Né- vroptères appartenant aux familles des Libellulines et des Éphémé- rines (j).

(2) Chez les Lépidoptères à l'état parfait, il n'existe qu'une paire de vaisseaux salivaires simples et capil- laires {k) ; mais chez les Chenilles une seconde paire d'organes analogues à ces glandes constitue un appareil producteur de la soie, et débouche au dehors par une lilière pratiquée dans la lèvre inférieure (/). INous revien- drons sur l'étude de ces derniers organes dans une autre partie de ce cours.

(13) Chez les Coléoptères, en très petit nombre, qui possèdent des or-

la) L. Dufour, Recherches anatomiques sur les Carabiques, etc. {Ann. des sciences nat., 1 " série, •1824, t. III).

(6)Sirodot, Recherches sur les sécrétions che% les Insectes [Ann. des sciences nat., série, 1858, t. X, p. 174 etsuiv.).

(c) Ciivier, Leçons d'anatomie comparée, 2= édit., t. V, p. 197.

(d) L. Dufour, Op. cit. {Ann. des sciences nat., i" série, t. III, pi. 29, fig'. 4 et 5).

(e) Idem, ibid., pi. 30, fig. 7 et 8. (/■) Idem, ibid., pi. 30, fig-. 3.

(g) Idem, ifcid., pi. 31, fig. 1.

(h) Idem, ibid. (Ann. des sciences nat., {" série, t. IV, pi. 5, fig. 2).

(i) Idem, ibid., pi. 8, fig. 7.

(j) Idem, Recherches sur les Orthoptères, etc., p. 299.

(A:) Treviraniis, Op. cit. {Yermischte Schriften, t. II, pi. H).

{1} Herokl, Entwickelungsgeschichte der Schmetterlinge, pi. 3, fig-. 1 à 5.

Cornalia, Monografia del Rombice del gelso, pi. 4, fig. 52, et pi. 10, fig. 1 52,

G^O APPAREIL DIGESTIF.

cerlains Diptères (1) et chez un petit nombre de Névroptères (2). Un premier degré de perfectionnement dans la structure de ces organes est caractérisé par une certaine division du travail physiologique dont ils sont chargés ; la partie profonde s'ap- proprie d'une manière plus spéciale à la production du liquide salivaire, et la portion terminale du tube à l'évacuation de cette humeur. Celle-ci devient alors un conduit excréteur seulement, et chez quelques Insectes elle se modifie de façon à assurer le bon emploi du liquide qu'elle est chargée de verser dans le tube digestif. En effet, elle se dilate dans une portion de son étendue, et constitue de la sorte un réservoir salivaire dans lequel les produits sécrétés peuvent s'accumuler quand l'appareil digestif est au repos, et se trouver en quantité considérable au mo- ment où l'Animal a besoin d'en imbiber ses aliments. Comme exemple de cette disposition, je citerai les Sialis (?>); mais, en

ganes salivaires spéciaux, ceux-ci (1)11 y a aussi une seule paire de

consistent presque toujours en une tubes salivaires chez presque tous les

seule paire de tubes sécréteurs, cylin- Diptères ; mais, chez la plupart de ces

driques, capillaires, plus ou moins Insectes, ces organes ne sont pas capil-

longs et entortillés sur eux-mêmes, laires dans toute leur étendue, et se

ou seulement flexueux. Chez quelques renflent vers l'une ou l'autre de leurs

Charançonites, telsqueles Lixusetles extrémités, pour former tantôt une

Pachygastres, ces vaisseaux salivaires ampoule initiale, d'autres fois un ré-

se prolongent jusque dans l'abdo- servoir terminal,

men (o). Chez les Blaps et les Cocci- ('2) Ainsi on ne trouve qu'une seule

nelles, ces organes ont une structure paire de tubes salivaires simples et

plus compliquée. D'après P.amdohr, indivis chez le Fourmilion (c).

il n'y aurait qu'un seul vaisseau sali- (3) Chez les Sialis, on trouve de

vaire impair chez le Curculio lapa- chaque côté de l'œsophage un tube

thi {b), espèce du genre Cnjptorhyn- salivaire très court, qui est grêle dans

chus, mais il est probable que cet sa partie terminale, et se dilate vers

anatomiste a comnn"s quelque erreur son extrémité antérieure pour former

dans ses observations. un réservoir ovoïde dont le col pé-

(o) L. Dnfoiir. lieclierches sur les Carabiqiies {Ann. des sciences nat., \" série, t. IV, pi. 5, fig. 2).

(b) Raniili)lir, Op. cit., p. 55, pi. ■10, ùç;. 1.

(c) L. rtnfoiir, liecltcrclies svr les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névroptères, etc., pi. 12, fin-. 179.

ANNE\.ES DU TLliK ALlMIiNTAlKli DKS INSECTES. G '21

général, quand ce liquide digestif doit être emmagasiné de la sorte, la Nature crée un organe spécial pour le tenir en réserve, et une poche particulière appendue au canal excréteur se con- stitue i)our le recevoir. Ainsi, chez la plupart des Orthoptères, cet appareil arrive à un haut degré de développement, on trouve une vésicule salivaire indépendante du conduit excréteur de la glande (1).

La portion sécrétante de ce même appareil présente une série plus nomhreuse de modifications qui tendent à en aug- menter la puissance. Ainsi, chez beaucoup d'Insectes, les tubes grêles et cylindriques dont je viens de parler, au lieu d'être uniques de chaque côté du corps, se multiplient ; souvent on en compte deux, trois ou même davantage (2). D'autres fois, au lieu de se répéter de la sorte, les vaisseaux salivaires se dédou- blent seulement dans leur partie profonde, et deviennent plus ou moins branchus (o). Enfin, le cul-de-sac qui termine cljacun

nèue (l.ins la tête et débouclie dans le pharynx {a).

Ce type organique est encore mieux caractérisé chez certains Diptères , tels que le Sarcophaga hœmorrhoi- dalis (b) et le Lucilia Cœsar (c).

(1) M. Léon Dufour a donné de très bonnes ligures de ces réservoirs salivaires chez la Courtilière (Gryllo- talpa culgaris), une Sauterelle {Ephip- pigera diurna), la Manie commune [Mantis religiosa) et la Blatte {d).

(2) Ainsi chez le Coccinella septem- punctata , il existe trois paires de tubes salivaires d'une longueur con-

sidérable (e) ; mais , dans d'autres espèces du même genre, M. L. Dufour n'a pu découvrir aucune trace de ces organes sécréteurs.

Chez les Panorpes (f), dans l'ordre des Névroptères, il y a aussi trois paires de tubes siilivaires simples, mais beaucoup plus longs et plus gros que chez les Coléoptères dont je viens de parler.

(3) Cette disposition est très rare chez les Coléoptères ; elle existe ce- pendant chez les Blaps, les tubes salivaires se ramifient beaucoup (g); mais elle est dominante chez les Or-

fa) L. Diifoiii-, Recherches sur les Orthoptères, etc., p. 341, pi. 12, lig. 184. {b) hleni, Études analomiques et physioloijuiues sur une Mouche , pi. 3, fig. 27.

(c) Idem, Recherches sur les Diptères, pi. 9, fig. H 2.

(d) Idem, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. 2, Rg. 19 ; pi. 3, fi^'. 35 ; pi. 4, %. 38.

(e) L. Dul'ûui-, Recherches sur les Carabiques, etc. {.\nn. des sciences nat., i" série, t. IV, p. 121, pi. 8, lis- ■/).

if) Idem, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. H, fig. 169.

(g) Idem, Recherches sur les Carabiques, etc.. {.\nii. des sciences nat., l" série, t. lU, pi. 29, lig-, 4 et 5).

6"2'2 APPAREIL DIGESTIF.

de ces tubes simples ou ramifiés se renfle lorsque l'action sécrétoire de ceux-ci doit acquérir un nouveau degré de puis- sance, et, lorsque cette modification organique coïncide avec la forme arborescente du canal excréteur, la glande offre l'aspect d'une grappe de raisin, dont les grains, très petits et réunis en groupes, seraient suspendus à un pédicelle tubulaire (1).

Ces divers genres de perfectionnement organique se trou- vent tous réunis chez la plupart des Orthoptères, l'appareil saUvaire acquiert un développement très considérable. Chez les Sauterelles, par exemple, on trouve de chaque côté de l'œso- phage une masse glandulaire très volumineuse, qui se compose d'une multitude de petites ampoules ovoïdes dont partent autant de tubes capillaires; ces canaux excréteurs se réunissent suc- cessivement entre eux, de façon à constituer des troncs de plus

Ihoptères et les Hyménoptères, ainsi que chez divers Névroplères, elle coïncide avec d'autres modiiicalions organiques (o).

(1) Comme exemple d'Inseclesayanl une seule paire d'appendices salivaires simples et renflés en ampoule à leur extrémité libre, je citerai d'abord le Tipulaoleracea {h) et le T. lunata (c). Cette disposition est dominante parmi les Diptères ; mais, chez beaucoup de ces Insectes, le renflement initial du tube salivaire est peu marqué, et il y a des nuances insensibles entre la forme d'ampoule et celle d'un tube cylindri- que borgne qui se confond avec le canal excréteur, comme chez la plu- part des Coléoptères.

Il est, du reste, à noter que chez certains Diptères l'on n'avait décou- vert, jusque dans ces derniers temps, qu'une seule paire de glandes sali- vaires, il existe d'autres organes sécré- teurs de même nature, qui sont logés dans l'intérieur de la tète. Ainsi M. Henry Meckel et M. Leydig ont trouvé une petite glande salivaire im- paire située à la base de la trompe chez le Musca vomitoria et chez le Tabanus bovinus [d).

Chez la Puce, il y a de chaque côté du corps deux petites glandes sali- vaires arrondies, dont les conduits sécréteurs se réunissent bientôt en une seule paire de tubes fort grêles et très longs (e).

{a) I-.. Dufour, Rech. sur les Orthoptères, les Hyinéiioptères et les Névroptères, pi. 1 et suiv. (b] Idem, Recherches sur les Diptères, pi. 3, fife'. 23. (f) Iilcin, \bid., pi. 4, lig. «0.

(rf) 11. Muckcl, Mikroijraphie einiger Drûsenapparate dcr nicderca Tliiere (MiiUei's Archiv fiir Anat. und Physiol., 184H, p. 27).

Leydig, Zur Analomiedcr Inselilen {Archiv lilr Aiiat. und l'Iiyswl., ISôU, p. O'J). {€} Hamduhr, Vcrdauiuigstveriixeuge der Insecte a, pi. ^3, liy. ii.

ANNEXES DU TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 623

en plus gros, à mesure qu'ils se portent en avant pour gagner la région pharyngienne; enfin, on voit suspendue à la partie antérieure de ce système de tubes une poche longue, à col étroit, qui t'ait fonction de réservoir salivaire, et emmagasine le lifjuide élaboré dans les am[)oules sécrétoires et destiné à être versé dans le canal digestif (1 ).

(1) La conformation générale de l'appareil salivaire chez VËphippifiera diurna a été 1res bien représentée par M. Léon Dufour (a).

La disposition de ces organes est à peu près la même chez les Grilio- niens(6), les Blattes (c) et les Mantes ; seulement, chez ces dernières, la glande est moins lobulée, et le réser- voir naît du canal, excréteur à une dis- tance beaucoup plus grande de Pem- bouchure de celui-ci {dt. Chez les Tridactyles, ils ollrent le même mode d'orgiinisalion, mais ils sont beaucoup moins développés (e), et chez les OEdipodes, ces glandes sont égale- ment disposées en forme de grappe, le réservoir salivaire manque (/").

Dans l'ordre des Hyménoptères, on trouve aussi à la partie antérieure du thorax, sur les côtés de l'œsophage, des glandes salivaires très dévelop- pées, dont la disposition générale a été fort bien représentée par AI. Léon Dufour, et plus récemment, ainsi

que je l'ai déjà dit, des organes sécré- teurs de même nature ont été dé- couverts dans l'intérieur de la tète de plusieurs de ces Insectes par !\I. Henry Meckel et par 1\1. Leydig (g). Il est, du reste, à noter que dans cet ordre on ne rencontre jamais de ré- servoir salivaire , comme nous en avons vu chez la plupart des Ortho- ptères.

Chez les Abeilles, les glandes sali- vaires postérieures ou thoraciques sont constituées par des caecums ra- meux et un peu claviformes vers le bout {h). Les glandes salivaires cépha- liques sont au nombre de deux paires et disposées en forme de grappe {i). Chez la Fourmi il y a aussi trois paires de glandes salivaires, et chez les Bour- dons M. Leydig a trouvé une quatrième paire de ces glandes logée sous la racine de la langue (j). Chez le Vespa crabro, on n'a signalé jusqu'ici que deux paires de ces organes, savoir : une paire de glandes salivaires thora-

(a) L. Dufour, llecherehes sur les Ortlioptères, etc., pi. 3, fig. 33.

(b) Exemple : la Courtilière (voy. L. Dufour, Op. cit., pi. 2, ûg. 19).

(c) L. Dufour, Op. cit., pi. 4, fi^. 38 et 39. ((i) Idem, ibid., ]A. 3, lig. 44.

(e) Ideui, ibid., pi. 1, fig, 11. (/■) Idem, ibid., pi. 2, ùg. S et 9.

{g} H. Meckél, Mikroijraphie einiger Driisenapparate dei' niederen Thiere (Mùller's Archiv fiir Anal, und PIujsioL, 1840, p. 25 et sniv.).

Fr. Lcydi-, Op. vit. [Archii) fiïv Anat. und l'hysiol., 1859, p. 00 et .-uiv.). (ft) L. Dufour, Heclterches sur les Orthoptères, etc., pi. 7, fig. 48. (i) Lfydi^, loc. cil., p. 01, pi. 3, tiy. 21. (j) Idcui, ibid., p. 04.

O'i/i APPAKEIL DIGKSTIF.

Enfin, chez d'antres Insectes, et notamment cliez la plupart des Hémiptères, l'appareil salivaire se compli(iue davantage, et se compose de deux ou de plusieurs paires d'organes sécré- teurs qui n'ont pas la même structure, et qui remplissent pro- bablement des fonctions différentes. Ainsi, chez les Réduves, on voit de chaque côté du corps trois glandes salivaires qui sont pourvues chacune d'un canal excréteur particulier : deux de ces organes sécréteurs sont soudés ensemble de façon à former une seule masse fusiforme dont partent deux conduits excré- teurs; le troisième est isolé. Chez d'autres espèces appartenant également à la grande famille des Punaises, cette dernière glande est représentée de chaque côté par un tube sécréteur seulement, ou par deux appendices de ce genre, et les glandes géminées se développent au contraire beaucoup plus, en se digitant et en affectant des formes très variées (1).

ciques et une paire de glandes cépha- liqiips. Chez quelques Hyménoptères, tels que les Andrènes [a], les glandes salivaires thoraciques sont plus volu- mineuses que chez les Abeilles , et elles ont aussi un développement con- sidérable chez beaucoup d'autres Hy- ménoptères nidifiants , tandis qu'au contraire elles sont fort réduites chez certains Térébrants, tels que IcsChry- sidiens, qui ne bâtissent pas des nids pour leur progéniture (b).

On trouve aussi une paire de glan- des salivaires rameuses sur les côtés de l'œsophage chez quelques Névro-

plères, tels que les Perles (c), les Phry- ganes {cl) et les Termites (e). Chez ces derniers, il existe, comme chez la plupart des Orthoptères, un réservoir particulier appendu à chacun de ces organes.

(1) Chez la Punaise, des lils l'appa- reil salivaire ne présente pas une structure si compliquée, et il se com- pose seulement de deux paires de petites glandes arrondies et libres qui ont chacune un canal excréteur pro- pre ; seulement il est à noter que la forme de ces organes n'est pas la même (/"). Chez le Uéduve , l'une de

(a) I-. DufDiir, Heclierclies sur les Orthoptères, etc., pi. G, lig. 7:2.

(&) Exemples : Parnopes carnea (voy. L. Diifoiir, Op. cit., pi. .9, fig. i 15).

Hedychrvm Incidulum (voy. L. Diifour, Op. cit., pi. 9, (ig. H(5). (c) L. Uufonr, Op. cit., pi. i'i, fig. 198.

(d)ldem, ibid., pi. 13, 11-. 208. (e) Idem, ibid., pi. 13, fig. 190.

Lcspés, Ilechi^rches sur l'organisation et les niœiu-s du l'ermite lucifuge (Ann. des sciences nat., série, 185C., i. VI, pi. C, liy. 15).

(/') L. Uiifoiir, Hccherches sur les Hémiptères, pi. 4, liy. 4i.

ANNËXKS DU ïl'BE ALlM!:rvTAlRI-: DES INSECTES. Ciî5

Quant à la stnicfure intime des organes sulivaires dont nous venons de passer en revue les formes extérieures, je me bornerai à dire ici que, dans les parties la sécrétion -s'opère, on trouve un tissu utriculaire très développé, et quelquefois même on y distingue une multitude de cellules qui ont chacune non- seulement une vésicule centrale, mais aussi un canal excréteur dont l'extrémité débouche dans le tronc commun (1).

ces paires de glandes est représentée par une masse fusiforme et étranglée au milieu, que M. L. Dufour appelle la glande salivairo principale, mais qui me paraît être plutôt un organe double, ou glande géminée, car cha- cune des portions ainsi séparées dé- bouclie dans le tube alimentaire par un conduit particulier (a).

Chez les Gerris, les glandes prin- cipales ont à peu près la même forme que chez les Réduves; mais les glan- des accessoires, au lieu d'être lisses à l'extérieur et cellulaires en dedans, sont composées d'une réunion d'am- poules {b). Chez les Pijrrhocoris, la glande accessoire se simplifie et de- vient tubulaire, tandis que les glandes principales, ou géminées, se déve- loppent davantage et prennent une forme plus compliquée (c). Enfin , dans un groupe voisin, le genre Aly- dus, ces dernières glandes se digitent, et la glande accessoire, au lieu d'être formée par un seul caecum tubulaire, est représentée par deux appendices de cette nature de chaque côté du

corps (d). Il en est de même chez les Corées (e). Chez les Scutellaires, les deux lobes de la glande géminée diffèrent davantage entre eux, et de même que chez les espèces dont je viens de parler en dernier lieu, le canal excréteur de l'un est court et presque droit , tandis que celui de l'autre est devenu extrêmement long et flexueux (/").

Enfin, chez les Nèpes, les glandes géminées se séparent entre elles, et l'on remarque sur le trajet du conduit excréteur de chacun de ces organes, ainsi que sur les deux lobes corres- pondants aux glandes accessoires, un renflement vésiculaire faisant fonction de réservoir salivaire. Il est aussi à noter que la structure de ces glandes est utriculaire (g). On rencontre beau- coup d'autres variations de forme dans l'appareil salivaire des Hémi- ptères, et pour plus de détails à ce sujet, je renverrai à la monographie anatomique de ces Animaux, publiée par M. Léon Dufour.

(1) Je reviendrai sur ce sujet lors-

(rt) L. Dufour, Recherches sur les Hémiptères, pi. 4, liy

(b) Idem, ibid., ni. 8, lisj. 04.

(c) klem, ibid., pi. 2, (ig. 19.

(d) Idoin, ibid., pi. 2, lig. 17. {e) Idem, ibid., pi. 2, fig;. 13. (/■) Idem, ibid., pi. 1 , i\g. 1 cl 3.

(g) Hamdohr, Op. cil., pi. s3, fig'. 6. L. Dufour, Op. cit., pi. 6, fig. 82.

48.

/lO

malpighien

626 APPAREIL DIGESTIF.

Tubes § 9. Les .tubes malpighiens, que la [)luf>art des anato-

mistes désignent sous le nom de vaisseaux biliaires, varient beaucoup quant à leur nombre et à leur disposition. Ils sont toujours très grêles, fort longs, contournés sur eux-mêmes, et fixés, au moins par nue de leurs extrémités, au canal digestif, dans le voisinage du pylore, soit au fond de l'esloniac, soit à la partie voisine de l'intestin grêle. Souvent leur extrémité opposée est libre, et ils se terminent bien évidemment en cul-de-sac ; mais d'autres fois ils sont disposés en forme d'anse et fixés au tube alimentaire parleurs deux bouts, il y a aussi des différences considérables dans le point se fait cette seconde insertion. Tantôt les deux extrémités de chaque tube malpigliien sont rap- prochées et fixées à la portion pylorique de l'estomac ; d'autres fois l'un des bouts seulement est attaché de la sorte, et l'autre se réunit à la portion terminale de Fintestin. Jusque dans ces derniers temps, on pensait que ces vaisseaux débouchaient alors dans le canal alimentaire par leurs deux extrémités et envoyaient une portion seulement de leur contenu dans l'es- tomac, tandis qu'une autre portion de produits de leur sécré- tion était versée dans le gros intestin : cette opinion a même conduit quelques physiologistes à attribuer des fonctions diffé- rentes aux deux moitiés de chacun de ces vaisseaux, et à donner à leur portion postérieure le nom de vaisseaux uri- naires, tout en conservant à leur moitié antérieure le nom de canaux biliaires ; mais une investigation [)lus attentive de

que je irailcrui spécialemeut de la un iravail iutéressanl, publié il y a

structure des organes sécréteurs, et quelques années, stu- ce sujet , par

pour plus de détails relatils aux or- M. W. Meckel, et ;\ quelques observa-

ganes salivaires des Insectes, je me lions plus récentes dues à M. Leydig

bornerai actuellement à renvoyer à et à M. Cornalia (a).

[a] H. Meckel, IHunoaraphic einiger Dvilsenappamte dcr niecleven Thiere (Muller's Archiv fur Anat. und Physiul., 184(5, p. 25 et suiv., pi. 2, lig. tO it 22). Lejclig, I.ehrbuch der Uisloloyie, p. 350. Cornalia, Monogmjia del Dumbke del gelso, p. 108, [il. 5, fig. UO et 61 .

ANNEXES DU TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 627

leurs connexions avec le canal alimentaire a rectifié les idées à cet égard. Dans plusieurs cas, il a été facile de reconnaître que l'extrémité postérieure des tubes malpighiens, tout en s'at- tachant au gros intestin, ne s'y ouvre pas, mais se termine, comme d'ordinaire, en cul-de-sac, et, dans aucun cas, il n'a été possible d'y constater l'existence d'une communication entre leur cavité et celle de cette portion terminale du canal diges- tif (1). Il y a donc tout lieu de croire que jamais cet appareil

(1) L'adhérence intime de l'exlré- mité inférieure des vaisseaux nial- pigliiens au gros intestin ne se ren- contre guère que parmi les Coléo- ptères , chez lesquels ces tubes sont au nombre de trois paires ou davan- tage (a) ; je n'en connais aucun exem- ple chez les Orthoptères, les Hymé- noptères, les Lépidoptères, les Hémi- ptères et les Diptères; mais, suivant Ramdohr et M. L. Dufour, on la ren- contre d'une manière exceptionnelle dans l'ordre des Névroptères , car ces anatomistes pensent l'avoir constatée chez la larve du Fourmilion (6). Je dois ajouter cependant que, d'après les nouvelles recherches de M. Sirodot, cette anomalie n'existerait pas, et la soudure apparente de l'extrémité pos- térieure de ces tubes à l'intestin serait due seulement à la présence de quel-

ques brides du lissu conjonctif ou de ramuscules trachéens (c).

La continuité entre la portion gas- trique et la portion postérieure de ces tubes a été méconnue par plusieurs anatomistes (d), et quelquefois la pre- mière a été décrite comme un organe hépatique, et la seconde comme un vaisseau urinaire {e). Cependant Ham- dohr avait déjà constaté cette conti- nuité, ainsi que la non-existence d'une communication entre l'extrémité de ces vaisseaux qui est adhérente au gros intestin et ce dernier organe (/'), fait anatomique qui vient d'être con- firmé par M. Sirodot (g^). Dans ses pre- mières recherches sur l'anatomie des Coléoptères, M. L. Dufour, tout en confirmant les observations de r.am- dohr touchant la continuité des por- tions antérieures et postérieures des

(fl) Ainsi, les vaisseaux malpighiens sont fixés au gros intestin chez la plupart des Coléoptères appartenant aux di\isions des Héléromères , des Tétramères, des Trimères : par exemple, chez les Blaps{\oy. L. Dufour, Recherches sur les Carabiques, etc., dans Ann. des sciences nat., t. III, pi. !29. Iig. 4) ; les Ténébrions (L. Dufour, O/i. cit., pi. 29, fi;,'. G) ; les Diapères (L. Dufour, loc. cit. ,\il. 30, fig. 3) ; les Priones (L. Dufour, Op. cit., dans Ann. des sciences nat., t. IV, pi. 0, ûg. i) ; l'es Cassides (L. Dufour, loc. cit., pi. 8, fig. t) ; les Coccinelles (L. Dufour, loc. cit., pi. 8, fig. 7).

(6) Ramdohr, Op. cit., pi. 17, fig. 1.

L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. 12, fig. 17i.

(c) Sirodot, Recherches sur les sécrétions dieu, les Insectes {Ann. des sciences nat., 4" série, 1858, t. X, p. 254).

(d) Marcel de Serres, Sur les Insectes considérés comme ruminants, etc., p. 46.

{(,') Siraus, Considérations sur l'anatomie comparée des Animau.v articulés, p. 208 et suiv.

(f) Ramdohr, VerdauungswerkietKje der Insecten, p. 40.

(!/) Sirodot, Op. cit. [Ann. des sciences nat., série, t. X, p. 250, pi. 15, fig. 1 et 2).

f^2S AITAUHIL DIGKSTIF.

ne (IcboïK'iic ailleiiis (iuc thms le voisinage iininédial du |>yiore; et il est même très probable (jne dans les cas les tubes malpighiens simulent des anses qui s'ouvrent par leurs deux bouts en arrière de l'estomae, ils ont en réalité la siructure cœeale ordinaire, mais sont réunis deux à deux par leur extré- mité postérieure, de façon (pie cliaque moitié de l'anse se trouve eonstituée par un tube borgne (l).

Le nombre de ees vaisseaux sécréteurs varie beaucoup dans les différents ordres de la classe des Insectes, et, lorsque ce nombre est peu élevé, ils sont [)resque toujours pairs. Souvent on n'en trouve que deux de chaque côté du corps ; d'autres fois il y en a plus de vingt, et dans certaines espèces on en compte plus de cent. Il y a aussi quelques variations dans leur mode de groupement et dans leur forme.

C'est chez les Orthoptères que l'appareil, ainsi constitué, présente le plus haut degré de dévelo[)pement et de centralisa- tion dans sa portion terminale.

Ainsi, chez les Grilloniens, il existe une multitude de tubes

tubes malpighiens, avait cru recon- mais M. L. Du four a reconnu qu'ils se naître une embouchure à leurs deux séparent ensuite entre eux, et se ter- extrémités («). Mais, dans des publica- minent chacun par une extrémité lions plus récentes, il est revenu de caecale distincte (c). cette opinion, et a fait voir que la por- (i) M. Sirodot a vu que chez quel- tion adhérente de ces vaisseaux passe ques Carabiques les deux anses ainsi entre les tuniques de l'intestin sans constituéesétaient soudées ensemble à s'ouvrir dans la cavité de cet or- leur extrémité postérieure, et il pense gane [h). Souvent ces tubes s'accolent que leur anastomose n'est qu'appa- entre eux dans leur portion termi- rente; cependant il n'a pue onstater nale avant de s'enfoncer ainsi dans Texistence d'une cloison intermédiaire les parois du gros intestin, de façon à qui, dans cette hypothèse , séparerait former en apparence un tronc unique ; chaque anse en deux portions [d).

(a) L. Diifour, Recherches sur les Carabiques, etc. {Aim. des sciences nat., i" sûrio, 1825, t. V, p. 275).

{b) Voyez celtn disposition cliez VHammalichœrus hcros (voy. \j. Diifom-, Op. cif., ilans Ann. des sciences nat., série, 1843, t. XIX, pi. G, fi^'. 8 cl U).

(c) L. Uiifour, Métamorplioses et anatomie des MordMes (.Kn»,. des sciences nat., 2' série, t. XIV. p. 235, pi. H,fig:. H). Mém, sur les vaisseaux biliaires ou le foie des Insectes {.inn. des sciences nal., 2',sény, l. XIX, pi. 0, ûg. 8 et 9).

td) Siroilot, Op. cil. [Anii. des sciences nat., série, I. X, p. 258).

ANNliXES DU TOËE ALIMENTA lllli DES INSECTES. 6'i29

niiilpighiens fort courts et extrêmement grêles, qui sont dis- posés en houppe, libres à leur extrémité cœcale, et fixés, par leur extrémité opposée, à l'origine d'un conduit excréteur unique, lequel débouche à son tour dans la portion pylorique du canal digestif (j.). Chez les autres Orthoptères, ces vaisseaux sont également très nombreux, ils se rendent isolé- ment à Testomac; mais quelquefois, au lieu d'y avoir chacun une embouchure particulière, ils se réunissent en faisceaux au moment de se terminer, et chacun des groupes ainsi formés débouche par un canal commun (;2).

(1) Cette disposition, qui est tout à leur extrémité libre, sur le sommet

fait exceptionnelle clans la classe des des bourses venlriculaires (c/), de façon

Insectes, a été constatée par Cuvier et qu'au premier abord on a pu croire

par M. Léon Dufour chez la Courti- que celles-ci recevaient une portion de

lière {a), et par Hamdohr chez le ces vaisseaux sécréteurs (e).

Grillon champêtre (6). Les tubes mal- Chez les Mantes, cet appareil ne

pighiens sont au nombre d'environ présente rien de particulier (/").

cent, et ils deviennent excessivement Chez les Blattes, on compte une

grêles vers leur extrémité libre. soixantaine de tubes malpighicns, et,

('2) M. L. Dufour a constaté que chez comme d'ordinaire, l'extrémité libre

quelques Sauterelles, etnotamment les de ces vaisseaux plonge dans le tissu

Éphippigères, les tubes malpighiens adipeux circonvoisin (g).

se groupent en cinq faisceaux qui se Chez les Forflcules, qui, à certains

terminent chacun par une seule ou- égards, difl'èrent beaucoup des Ortho-

verture ventriculaire (c). ptères ordinaires, et ont été considérés

Chez les Criquets, ils sont éga- par quelques auteurs comme devant lement très nombreux, ils paraissent constituer un ordre particulier, les se terminer isolément dans le canal tubes malpighiens sont moins nom- digestif, et quelques-uns d'entre eux breux , mais on en compte toujours s'attachent, à une certaine distance de au moins trente à quarante {h),

(a) Cuvier, Mém. sur la manière dont se fait la nutrition dans les Insectes (Mém. de la Société d'histoire naturelle de Paris, 1799, t. I, jil. ■14, fig-. 8).

L. Dufour, Recherches anatomiques et phijsiologitiues sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névroptères, p. 10, pi. 2, lig. 19.

(bj ilauidolir, Yerdauungswerkieuge der Insecten, pi. 1, lig. 1.

(C) L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, p. 86, et Mém. sur les vaissea^ix hiliaires ou le l'oie des Insectes {Ann. des sciences nat., 2' série, t. XIX, pi. 0, fig-. 1).

(rf) Mem, Recherches sur les Orthoptères, pi. 5, fig. 44.

(e) Idem, ibid.. pi. 2, f\g. 8.

(/■) M. Marcel ilo Serres a appelé la porlion lornilnale des tubes ainsi adliérenls aux bourses gas- triques, les vaisseaux biliaires S2ipéricurs {Op. cit., p. 00, pi. 1, lig. 1).

(;/) L. Dufour, Op. cit., pi. 4, lig. :i8.

|/i)Mem, Recherches nnolomiques sur les l.ahuhiures {.^tlll. des sciences nat., 18'2S, I. Mil, pi. iiO, tlg. 1).

(330 APPAREIL DIGRSTIF.

Dans l'ordre des'Hyménoplères, les vaisseaux malpighiens sont aussi très nombreux et libres à leur extrémité caecale, ou du moins attachés seulement aux parties adjacentes du tissu adipeux par des brides membraniformes ; mais la multiplicité de ces tubes ne s'observe que chez les individus qui sont arrivés à l'état adulte, et chez les larves ils n'existent qu'au nombre de deux ou trois paires (1).

Chez plusieurs Névroptères, les tubes malpighiens sont également en nombre considérable : par excuiplc, chez les Libellules, les Éphémères et les Perles ; mais dans d'autres groupes du même ordre on n'en trouve que trois ou quatre paires, et toujours ils ne se fixent au canal digestif que par une de leurs extrémités (2).

(1) Celle différence remarquable enlre le même Animal à deux pé- riodes de son exislence a été con- stalée par Swammerdam chez l'A- beille (a) ; l'iamdohr Ta observée chez la Guêpe ordinaire et chez un Cim- bex {b); enfin M. L. Dui'our Ta signalée chez le Vespa crabro et le Cerceris bupresticida. D'après une observation de ce dernier anatomiste, faite sur la Guêpe frelon, il paraîtrait que, lorsque rinsecte est à l'état de nymphe, les deux paires de tubes malpighiens de la larve s'atrophient, et sont rempla- cées par un faisceau d'appendices ana- logues, mais beaucoup plus grêles (c). Chez les Hyménoptères adultes, ces vaisseaux sont toujours très grêles,

fort nombreux, el insérés autour de la portion pylorique du canal digestif par une de leurs extrémités, tandis que l'autre bout est libre ou engagé dans le tissu adipeux de la cavité splanchnique. Chez quelques espèces d'ichneumonides, M. L. Dufourn'ena trouvé qu'une quinzaine, mais presque toujours il y en a plus de vingt. Poiu- d'autres détails à ce sujet, je renver- rai aux ouvrages de M. L. Dufour et (les autres anatomistes qui ont décrit l'appareil digestif de ces Insectes.

('2) Chez les Termites {d), les l'Iiry- ganes (e), les Sialis (/") et les Panor- pes {cj), il n'existe que trois paires de tubes malpighiens.

Chez les Hémérobes {h) et les Four-

(a) Swammeidain, Bihlia Naturœ, t. I, p. 408 et 454.

(6) Ramdohr, Verdamingswerkx-euge der Insecten, {A. da, flg. 1,4 et 0.

(c) L. Dufour, Recherches sur les vaisseaux biliaires {Ann. des sciences nat., 2" série, t. XIX, p. 160, pi. 1, tig. 12 el 13).

(d) L. Dufour, Recherches sur les Orthoptères, etc., pi. 13, fig. 190. (e)Idem, ibid., pi. 13, fig. 208.

(/■)Idem, ibid., pi. 12, iig. 184. (g) Idem, ibid., pi. H, lij. 169. (h) Idem, ibid., pi. 13, fig-. 191,

ANNEXES DU TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. 631

Chez les Lépidoptères, soit à l'étal de chenilles, soit à l'âge adidte, il y a toujours trois paires de tubes iiialpighieiis à extré- mité lloltante (1), mais ces vaisseaux ne débouchent dans le canal digestif que par une paire d'orifices (2).

Chez les Coléoptères, les Hémiptères et les Diptères, ces appendices sécréteurs sont également en nombre très limité; on n'en trouve jamais plus de quatre paires, mais leur disposition est plus variée : car souvent, au lieu d'avoir un bout flottant, tandis que l'autre s'insère au ventricule pour y déboucher, ils affectent la forme d'anses dont les deux extrémités sont insérées comme d'ordinaire au voisinage du pylore et s'y ouvrent. Ainsi, chez les Carabiques, les Cicindélètes, les Dytisques, les Staphy- lins et quelques autres Coléoptères, on voit deux grandes anses de ce genre ; et par conséquent, si l'on admet que chaque anse n'est formée que par un même tube, on ne doit compter

milions (a), il y en a quatre paires, doutes sur l'exactitude de ses obser-

nombre qui est fort rare chez les valions à ce sujet.

Insectes. (2) Cette confluence des trois tubes

Chez les Libelluliens, leur nombre malpi^'hiens du même côté en un

paraît être d'environ quarante, mais tronc unique paraît être constante,

ils sont remarquablement courts (6). M. Léon Dufour considère le Ver à

Enlin, chez les Éphémères (c) et les soie comme faisant exception à la

Perles {d), ils sont si nombreux et si règle {g); mais M. Cornalia vient de

grêles, qu'il est difTicile de les compter. constater qu'il n'en est pas ainsi. Il a

(1) Suckow n'a représenté que deux vu les trois tubes se réunir de chaque

paires de tubes malpighiens chez l'I- coté en un tronc unique [h). La même

'ponomeuta evonymella (e) et le IHero- confluence a été constatée par Audouin

phorus pentadactylus {f); mais, à chez la chenille de la Pyrale («), que

raison de la petitesse de ces Lépi- M. L. Dufour a citée à tort comme ne

doptères, on peut conserver quelques l'oflrant pas.

(a) L. Dufour, Recherches s^(r les Orlhoplères, etc., pi. 12, fig. 179.

(b) Idem, ibid., pi. H, fig. 158.

(c) Idem, ibid., pi. 11, fig. 107. (d)lcieni, ibid.,\)\. 13, fig. 198.

(e) Suckow, Op. cit. (Heusiiii;er's Zeitschrlft fur die ovganische Ptiysik, t. Ill, pi. 9, fig. 161). (Hldeiii, ibid., pi. 9, fig. 159.

((/) L. Dufour, Mém. sur les vaisseaux biliaires ou le (oie des Insectes {Ann. des sciences nat., série, t. XIX, p. 103). {h) Cornalia, Monografm del Bombice delgelso, p. 142, pi. 4, fig. 52 pX 56. (s) Audouin, Histoire des Insectes nuisibles â la vigne, p. 95, pi. 7, \'\^. 10 et 10i(, h.

632 APPAUbllL DIGKSTIF.

chez ces Insectes (|irune seule paire de ces vaisseaux ; mais si l'on admet, ainsi que cela me parait très probaijle, que les anses en question sont constituées chacune par la soudure de l'extré- mité terminale de deux tubes aveugles, on doit considérer tous ces Coléoptères comme ayant en réalité quatre vaisseaux malpi- ghiens. Chez beaucoup d'autres Coléoptères, ce nombre ne peut être révoqué en doute, car tous ces tubes sont indépendants entre eux. Enfin il est aussi un grand nombre de Coléoptères qui possèdent trois paires de ces appendices sécréteurs (1).

(1) Chez presque tous les Coléo- plères penlamèrcs, il y a seulement deux paires de vaisseaux malpighieus, soit libres (a), soit simplement acco- lés aux parois de l'intestin par leur exirémilé postérieure (6) , ou bien une paire d'anses qui peuvent être considérées comme correspondant à ce nombre (c).

Chez les Dermestins (d), les Cle- rus [e), les Nécrobies (f), les Byr- riies (fj), et quelques autres Insectes qui appartiennent à cette division ar- tificielle de l'ordre des Coléoptères, il y a trois paires de ces vaisseaux, nombre qui est dominant chez les Coléoi)lères liétéromères [h) , lélra- mères (?) et trimères (j).

(a) Exemples : Telephoriis (L. Dufour, Recherches sur les Carahiques, etc., dans Ann. des sciences nat., 1" série, t. 111, pi. 13, ûg. i).

tilpha (L. Dufour, loc. cit., pi. 3, C\g. 5).

{b) Exemple : Timarcha (L. Dufour, Op. cit., dans Ann. des se. nat..i" série, t. IV, pi. 8, {[g. 1). (c) Exemples : Carabus auratus (L. Dufour, Recherches sur les Carabiques, dans ^4???!. des sciences 7iat., l" série, t. II, pi. 20, fig. 1).

Brachinus (Ramdolir, Verdatiungsiverkzeiige der Insecten, pi. 25, 11^. 2).

Cicindela (L. Dufour, lue. cit., t. III, pi. 10, fig. 2).

DijtiscHS (L. Dufour, loc. cit., t. 111, pl. 10, fig-. 3).

Hydrophilus piceus (L. Dufour, Sur les l'aissean.i-bitiaires, Ann.,'il' sér., t. XIX, pi. C, fig. 3).

Slaphylimis (I.. Dufour, Recherches sur les Carabiques, etc., ilaus Ann. des sciences nat., 1" série, t. 111, pi. 10, fig. 8).

Buprestis (L. Dufour, loe. cit., pi. 12, fig. 2).

Elater (L. Dufour, loc. cit., pi. 12, fig. 3 et 4).

Lampyrus (L. Dufour, loc. cit., pi. 12, ûg. 6).

Cetonia (L. Dufour, loc. cit., pi. 13, fig. 1).

Lucanus (L. Dufour, loc. cit., pi. 13, fig. 2 et 3).

{d) L. Dufour, Op. cit. {Ann. des sciences nat., t. 111, pi. 13, fig. 3).

(e) Idem, il/m. sur les vaisseaux biliaires {.\nn. des sciences nat., 2' série, t. Xl\, p. 150).

(/■) Exemple : le Dermestrs lardarius (L. Dufour, Recherches anatomiqitcs sur quelques Insectes coléoptères, dans Ann. des sciences nat., 2' série, 1834, 1. 1, pi. 2, fig. 1).

(fl) L. Dufour, Op. cit. [Ann. des sciences nnt., 2* série. 1. 1, pi. 3, lig. 13).

{h) Exemples : les Rlaps (L. Dufour, Recherches sur les Carabiques, etc., dans Ann. des sciences nat., 1" série, t. III, pi. 29, fig. 4).

Les Diapères (L. Dufour, loc. cit., pi. 30, fig. 3).

(i) Exemples : \cs Priones (L. Diifoui-, Recherches sur les Carabiques, dans A)in. des sciences nat., l" série, I. IV, pi. tl, fig. 1).

Les Lcptures (L. Dufotn-, loc. cit., i>\. 7, fig. 2).

Les Cassides (L. Dufour, loc. cit., pi. 8, fig. 1).

(;■) Exemi>le : la Coccinelles {L. Dufour, Op. cit., dans Ann. se. nnt., 1 " .^érlc, l. IV, pi, 8, fig, 7).

aNnkkes dc ïUbe alimentaire des insectes. Go5

En général, les tubes malpighiens des différentes paires sont fort semblables entre eux; mais, dans quelques cas, deux de ces vaisseaux sont moins gros que les autres et ont un aspect

M. L. Diifoiir a trouvé que chez les Anthrènes (a), les Histeis et les Hété- rocères, il existe trois anses à inser- tions ventriculaires, et, ainsi que le fait remarquer M. Sirodot, cette disposi- tion rentre dans la règle commune, si l'on considère chaque anse comme étant composée d'une paire de tubes malpighiens {b).

Chez VAnobiuni , il existe quatre anses analogues (r), ce qui suppose- rail huit tubes malpighiens ; mais il est possible que l'une des exirémilés de chacune de ces anses soit simplement soudée aux parois de l'estomac et terminée en caecum, ce qui réduirait leur nombre à deux paires : en effel, l'existence de huit orifices sécréteurs n'a pas été conslatée.

Chez les Hémiptères, il y a généra- lement deux paires de tubes mal- pighiens à extrémité libre, ou bien une seule paire d'anses à double in- sertion vcntriculaire. Cette dernière disposition est la plus fréquente (d). La seconde se voit chez le Ploia-

ria (e), le Syromastes et le Verlusia, parmi les Géocorises. M. Léon Oufour a pensé qu'il en était de même chez les Cigales (/"); mais M. Doyère a fiul voir que le point d'adhérence de ces tubes au jabot n'est pas leur point de débouchement, qu'ils y constituent des anses dans l'épaisseur des parois de cet estomac, puis se dirigent en arrière pour aller, suivant toute ap- parence , s'ouvrir comme d'ordinaire dans la portion post- stomacale du canal digestif (//).

Il est aussi à noter que chez quel- ques Hémiptères, les vaisseaux mal- pighiens paraissent manquer : ainsi Uamdohr n'en a pas trouvé chez le Coccus alni {h), et ^\. Léon Dufoiu" s'est convaincu de leur non-existence chez les Pucerons (i).

J'ajouterai que M. Sicbold n'a pu en découvrir aucune trace chez les Insectes de l'ordre des Strepsiptè- res (;■;.

Chez les Diptères, les tubes mal- pighiens sont en même nombre que

(a) L. Diifour, Recherches anatomiques sur quelques Insectes coléoptères {Aîin. des sciences liai., 2" série, t. 1, pi. 2, lig. 8).

{b} Sii'odot, Recherches sur les sécrétions chez, les Insectes (Ann. des sciences nat., 4* série, t. X, p. iîOO).

(c) L. Diifour, Recherches sur les Carabiq^tes, etc. (Ann. des sciences nat., \" série, t. XIV, pi. 12, fig. 1).

{d} Exemples : les Lygées (L. Dufoiir, Recherches sur les Hémiptères., pi. 33, f\g. 22).

Les Réduves (L. Dufour, Op. cit., pi. 4, ûç;. 48).

Les Sèpes (L. liufoiir, Op. cit., pi. 0, fig. 82).

(c) L. Dulour, Mém. sur les vaisseaux biliaires (Ann. des sciences nat., 2' série, l. XIX, 1 1. 7, fig. l'îl.

if) L. Diifoiir, Recherches sur les Hémiptères, p. 93, pi. 8, fig'. 95.

(g) Ddvère, Op. cit. (Ann. des sciences nat., séi'ie, t. XI, p. 84, pi. 1, lig. 3).

(/t) Raiiiilolir, Verdauuiigswerkzeuge der Insecten, p. t'JS, pi. 2G.

(i) L. Dufour, Rechcrcties sur les Hémiptères, p. '110.

(;) SieboUl el Stannius, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, 1. 1, \>. 005.

63/l. APPAREIL DIGESTIF.

particulier, de façon qu'on peut supposer qu'ils sont chargés de quelques fonctions spéciales (1).

J'ajouterai que cliez un grand nombre d'Insectes, ces tubes se réunissent entre eux à quelque distance de leur embouchure, de façon à former de chaque côté de l'estomac un seul tronc excréteur (2).

Quant aux autres variations de forme qui se rencontrent dans les tubes malpighiens, il est à remarquer qu'en général ces

chez les Hémiptères; mais en général ils sont tous les quatre libres à leur extrémité (a). Comme exemple de leur réunion en une paire d'anses, je citerai ceux du Tipula oleracea (6).

(1) Chez VOryctes nasicornis, par exemple, cette inégalité entre les deux tubes malpighiens du même côté est très prononcée , et les circonvolu - lions du petit vaisseau occupent toute la portion post-venlriculaire de Tab- domen, tandis que le gros vaisseau se recourbe en avant, et décrit beau- coup de flexuosités sur les côtés de l'estomac avant de se porter vers la partie postérieure de la cavité viscé- rale, où il se pelotonne de même sur le côté de l'intestin [c]. Cette inégalité

est encore plus marquée chez certains Cliarançonites, tels que les L2'.'Cî«s [d), et chez les Galéruques (e).

(2) Chez beaucoup de Diptères, les deux tubes malpighiens du même côté débouchent dans l'estomac par un canal excréteur commun d'une lon- gueur assez considérable : par exem- ple, chez la i\louche appelée Lucilia Cœsar (/), V Echinomyia grossa [g) et le Nemopoda cylindrica [h). Chez quelques-uns de ces Insectes, les tubes des deux côtés se réunissent en un seul tronc piès de leur extrémité , à peu près comme nous l'avons déjà vu chez la Courtilière («') : par exemple, chez VEphippium thoracicuin {j) et le Vappo paUipennis {k).

(a) Exemples : Tipula lunata (L. Dufoiii-, llech. anal, sur les Diptères, pi. i, ûg. 3 fi).

Taiamis tropicus (L. Dufoiir, Op. cit., pi. 4, fig. 17).

Dasypogon teutomis (L. Dufoiir, Op. cit., pi. 5, fig. 52).

Bombylius minor (L. Kiifour, Op. cit., pi. 6, fig. 02).

Ltptis triiigaria (L. Uiifoiir, Op. cit., pi. G, fig. 70).

Volucelta xonaria (L. Dufoiir, Op. cit., pi. 7, fig. 77).

Hypoderma bovis (L. Dufonr, Op. cit., pi. 8, fig. 95).

(b) L. Dufour, Op. cit., pi. 3, fig. 23.

(c) Sirodni, Op. cit. {Ann. des sciences nat., i' série, t. X, pi. 44, fig. i).

(rf) L. Dufour, Recherches stir les Carnbiques, etc. {Ann. des sciences nat., i" série, l. TV, pi. 5, fig. 2). (e) Idem, ibid., pi. S, fig, 4.

(/■) Wcm, Uecherches sur les Diptères, jil. 9, fig. tt2.

{y) Idem, ibid., pi. 8, fig. 90. ('() Idem, ibid., pi. 10, fig. 120. (i) Voyez ci-dfssus, page 029. \i) L. Uufoiir, Op. cit.., pi. 4, fig. 43. (k) Idem, iUd., pi. 4, fig. 45.

ANNEXES DU TUBE ALIMENTAIRE DES INSECTES. G35

vaisseaux sont cylindriques et atténués vers le bout, mais que chez quelques Insectes, surtout parmi les Diptères, ils sont renflés en forme d'ampoule à leur extrémité (1), et que cliez d'autres espèces ils sont comme verruqueux à leur surface, ou même quelquefois garnis latéralement d'une multitude de petits prolongements cœcaux. Chez le Hanneton, cette disposition est très prononcée, de façon que chacun de ces vaisseaux, au lieu d'être simple, ressemble à un ruban fort grêle qui serait garni de franges sur ses deux côtés (2).

Il est aussi à noter que chez quelques Insectes les tubes malpighiens se dilatent près de leur embouchure, de manière à constituer pour les produits de chacun de ces organes sécréteurs un petit réservoir, comparable à celui que nous avons déjà vu se développer parfois sur le trajet des vaisseaux salivaires (fij.

(1) Ainsi, cliez les Diptères du genre Phora, chacun des quatre tubes nial- pigiiiens présente à son extrémité libre une grosse ampoule ovaiaire (a). Une disposition analogue , mais beaucoup moins prononcée, se voit chez les Cousins (6) et quelques autres Diptères, iiamdohr a représenté de la même manière ces organes sécréteurs chez la Puce commune (c).

(2) Cette disposition ne règne pas dans toute la longueur de ces tubes ; elle s'étend seulement sur environ le tiers antérieur de ces organes, qui sont d'abord simples et cylindriques {d).

il existe aussi une multitude de petits caecums latéraux sur la surface des tubes malpighiens, chez le Sphinx ligustri à Télat de larve et chez beaucoup d'autres Chenilles ; mais chez les mêmes Insectes à l'état de nymphes, ces prolongements sont ré- duits à la forme de tubercules arron- dis, et chez l'Animal à l'état parfait ils disparaissent complètement, ou ne sont représentés que par des bosse- lures peu prononcées {e).

(3) Cette disposition est très bien caractérisée chez quelques Diptères, tels que les Trichoptères, il existe

(a) L. Dufour, Recherches sur les Diptères, pi. 11, fig'. 134.

(b) Idem, ibid., pi. 2, fig. 18.

(c) Ramdohr, Yerdauungswerkieuge der Inseclen, pi. 23, iig. 2.

(d) Ramdohr, Op. cit., pi. 8, fig. 1 et 2. '

L. Dufour, Recherches sur les Carabiques, etc. {Ann. des sciences nat., i'" série, I. 111, pi. 14, fig. 4 cl 5).

(e) Newport, art. Insecta (Todd's Cyclopœdia of .\natonvi and Physiology, I. II, p. 975, fig. 432).

636 API'AKEIL DIGESTIF,

La cavité qui règne dans toute la longueur des lubes mal- pighiens est tapissée d'une couclie épithéliale dont les utricules constitutives se détachent et se détruisent très facilement, en laissant échapper leur nucléus, ainsi que les divers produits élaborés dans leur intérieur (1). Le liquide fourni par ces organes est en général d'une couleur jaune et d'une saveur

quaire tubes mal|)igliien.s qui offrent chacun, près de leur inseilion ventri- culaire, un renflement fusifornie d'une capacité assez considérable (a). Une vésicule biliaire, qui paraît être con- stituée de la même manière par l'éiar- gissement d'un tronc commun appar- tenant aux deux branches de chacune des anses malpighiennes, se remarque de chaque côté du canal digestif chez plusieurs Hémiptères, et atïecle quel- quefois la forme d'une vésicule ar- rondie, par exemple chez VAlydus apterus {h) ; ou bien ce réservoir, se confondant avec son congénère, donne naissance à une poche impaire qui est appeiidue au canal digestif et qui reçoit les tubes sécréteurs, ainsi que cela se voit chez le Pentatoma bac- car um (c) et les Corises {cl).

(1) La tunique propre des vaisseaux malpighiens consiste en une mem- brane d'une grande ténuité et d'une structure en apparence presque ho- mogène, qui est revêtue intérieure-

ment d'une couche de grosses utri- cules de forme arrondie ou ovalaires. Ces cellules contiennent un nucléus granuleux à nucléole transparent, des globules graisseux et une matière granulaire tantôt blanchâtre , tantôt jaune ou brunâtre (e). Quand, pour observer au microscope leur struc- ture intime, on place un de ces tubes dans l'eau, les effets d'endosmose qui se produisent déterminent si ra- pidement la rupture de ces cellules membraneuses, qu'il est très difficile de les voir en place et de distinguer le canal central qu'elles circonscri- vent; mais si l'on emploie, au lieu d'eau, un peu de sérum, la couche épithéliale ne se désorganise pas si vite (f). C'est probablement à cause de l'action de l'eau employée pour mouiller les préparations, que M. H. Meckel n'a pu apercevoir dans l'inté- rieur de ces tubes qu'une agglomé- ration de cellules, sans canal cen- tral {g).

(a) L. Dufour, Recherches sur les Diptères, pi. 3, fig. 32.

(b) Idem, Recherches sur les Hémiptères, pi. 2, ûg. \9.

(c) Raiiidolir, Op. cit., pi. 23, ûg. 3.

(d) L. Dufour, Op. cit., pi. 2, ûç;. 13.

(c) ï. Williams, On llie l'hysiolorjy of Cells, luith the Viciv lo clacidatc the Structure and Funci'ion.'i of Glands (Guy's Hospital Reports, 4 840, 2' et suiv.).

Leidy, Researches on the comparative Structure of the Lircr, pi. ■) , I Journal of the Médical Sciences, 1848).

Karsten, Harnonjane des Bracliiniis complaiiatus (MuHlt's .\rcliiv, 1848 (/■) Siroiloi, Op. cit. {.\nji. des sciences nat., 4" smo, 1858, t. X, p. 209). (g) H. Muller, MiUrotjrapliie ciniger Driisenapparate der nicdcren Thiere

Anal, und l'hijsiiil., 1s4r,, p. 42 ,•[ suiv., |d. 2, flg. 28 à 33).

the Laws ' série, t.

iy. 1 ;• 7

, pl. 10,

(Midlei's

rerjulalinQ IV, p. 303

{American

Ûg. 0).

Arclitv fiir

AiNiNUXLS l)i; TUBK ALIMKNTAIUE DKS INSl^CTES, G37

amère; il ressemble donc beaucoup à de la bile, et, jusque dans ces derniers temps la plupart des naturalistes n'hésitaient pas à Ini donner ce nom. Mais on sait aujourd'hui qu'il ren- ferme les principaux produits caractéristiques de la sécrétion uriuaire : c'est donc une humeur excrémentitielle mixte, qui représente à la fois l'urine et la bile des autres Animaux, ou bien de l'urine seulement ; et les physiologistes qui adoptent cette dernière manière de voir pensent que la sécrétion hépa- tique est effectuée par les glandules situées dans les parois mêmes de l'estomac (1). Mais, dans l'état actuel de la science, les faits probants manquent pour décider cette question,

(1) Malpiglii, Swammerdam, Lyon- net et les autres anatomistes des xvn'^ et xviir siècles ne se pronon- cèrent pas sur les fonctions de ces tubes; mais Cuvier n'hésita pas à les considérer comme des organes hépa- tiques (a), et son opinion fut d'abord généralement adoptée. Gaede y fit quelques objections, et chercha à éta- blir que ces tubes sont des organes absorbants [b). Enfin Herold et Reng- ger furent les premiers à penser que les vaisseaux malj)ighiens pourraient bien être des glandes urinaires (t) ; mais ils ne s'appuyèrent sur aucun fait probant. L'existence de l'acide urique ayant été constatée dans les

excréments du Ver à soie par Bru- gnatelli (d), dans les produits four- nis par les vaisseaux malpighiens de ce Bombyx par Wurzer (e), et dans ceux du Hanneton par i\L Che- vreul (/"), cette hypothèse acquit plus de valeur ; mais ce fut surtout la dé- couverte d'un calcul urinaire dans l'intérieur même d'un de ces tubes, faite en 1836 par Audouin, qui déter- mina la plupart des physiologistes à considérer ces organes comme tenant lieu d'un appareil rénal (g). Aujour- d'hui quelques auteurs persistent en- core à ne voir dans les tubes malpi- ghiens que des vaisseaux sécréteurs de la bile (h) ; mais la plupart des

(a) Cuvier, Leçons d'anatomie comparée, 1805, t. IV, p. 153.

(b) Gaedo, Observ. physiol. sm- les vaisseaux biliaires des Insectes {Ann. gén. des sciences physiques, 1819, t. 11, p. 180).

(c) Herold, Entiuickelungsgeschichte der Schmetterlinge, 1815, p. 23.

Reiiirgei-, Physiologische Untersuchtingeii iiber die thierische Hausliallung der Insecteii, 1817, p. 21.

{d} Brugnalelli, Osservazioni sopra l'ossiurato d'ammoniaca {Giornale di /isica, 1815, t. Vlll, p. 42).

{c) Wurzer, Chemische Uiitcrs. des Stoffes, luelcher sicli in den sogenaimten (Jallengefâssen des Schme'Jerlmgs der Seidenraupe befindet [UeckeVs DeiUsches Archiv fiir die Physiologie, \S [H, t. IV, p. 213).

if) Voyez Straus, Considcralious sur l'anatomie comparée des Animaux articulés, p. 251.

(g) Audouin, Lettre concernant des calculs trouvés dans les canaux biliaires d'un Cerf-volant {Ann. des sciences nat., série, 183H, t. V, p. 129).

(h) h. Dufour, Mém. sur les vaisseaux biliaires ou le foie des Insectes (Ann. des sciences nat., 2' série, 1843, t. XIX, p. 145 etsuiv.).

638 APPAREIL DIGESTIF.

et je ne m'y arrêterai pas davantage en ce moment, me pro- posant d'y revenir lorsque je traiterai spécialement des sécré- tions. Glandes anales. § 10. C'cst également Ctt m'occiipant de l'histoire de ces dernières fonctions que je icrai connaître avec plus de détails la structure et les usages de l'appareil glandulaire qui est annexé à l'extrémité anale du canal intestinal de la plupart des Insectes. En eftét, les organes sécréteurs qui le constituent, tout en pouvant être considérés comme des dépendances du système

physiologistes les regardent comme étant chargés d'une double fonc- tion et comme représentant à la fois l'appareil urinai re et l'appareil hépa- tique (a). Enfin d'autres naturalistes leur refusent toute participation à la sécrétion des uialières carac- téristiques de la bile, et pensent que ce sont des organes exclusivement urinaires (6). M. Sirodot, qui partage celte dernifre opinion, n'a pu trou- ver de la cholestérine dans le liquide fourni par ces tubes, mais il a décou- vert dans les sucs sécrétés par les follicules de l'estomac des traces de cette matière grasse qui est un des principe? caractéristiquesde la bile (c). Cependant les faits sur lesquels on s'appuie pour établir que les vaisseaux nialpighiens, tout en étant des organes urinaires, ne jouent pas aussi le rôle d'un appareil hépatique, ne me sem-

blent pas décisifs , et , jusqu'à plus ample informé, je persiste à penser que ce sont des organes à fonctions mixtes. En effet, la transition entre le foie d'un Crabe et d'une Écrevisse, les tubes hépatiques des Isopodes et les vaisseaux malpighiens des Insectes, est si graduelle et si manifeste, qu'il est difficile de penser que ces derniers organes ne puissent fonctionner d'une manière analogue aux premiers ; et il est aussi à noter que les caractères chimiques des produits de la sécré- tion biliaire de ces Animaux ne sont pas encore assez bien connus pour que l'on puisse affirmer que certains de ces produits n'existent pas dans les liquides fournis par les lubes mal- pighiens. Du reste, celte question sera discutée plus complètement lorsque nous étudierons d'une manière spé- ciale les sécrétions.

(rt) J. F. Meckel, Ueber die Gallenitnd Harnorgane der Insectcii (Archiv fur AnatonUc itad Physiologie, 1826, p. 21).

Audoiiin, Op. cit. (Ann. des sciences nat., 2* série, I. V, p. \^lt).

liurmeisler, Handbuch der Entomologie, 1832, t. 1, p. 406.

- Laconlaire, Introduction à l'Entomologie, 1838, I. II, p. 53.

J. Millier, Mamiel de physiologie, (rad. par Jourdan, 1845, t. I, p. 421.

Owen, Lectures on thc comparative Aniitomy and Physiologij of Invertebrate Animais, 1855, p. 381.

(l)) Sicbold ei Slaiiniiis, \ouveuu Manuel d'anatomic comparée, t. I, p. 588 cl 604.

(c) Sirodot, Hecherches sur les sécrétions des Insectes [Anu. des sciences nat., série, 1858, t. X, p. 18(i et p. 301 cl siiiv.).

TUBE ALIMENTAIRE DES MYRIAPODES. 639

digestif, quand on se place au point de vue anatomique scule- nient, ne concourent pas en réalité à la constitution de ce sys- tème, et leurs produits n'interviennent pas dans le travail à l'aide duquel les aliments sont rendus aptes à nourrir l'Animal ; ces glandes sont destinées à d'autres usages, et par conséquent ce serait interrompre l'enchaînement logique de nos études que de nous en occuper ici (1).

§ 11. Les détails dans lesquels je suis entré relativement à la constitution de l'appareil digestif des Insectes me permet- tront d'être bref en traitant des parties correspondantes dans la petite CLASSE des Myriapodes, dont il me reste encore à parler dans cette Leçon. En effet, le canal alimentaire et ses dépen- dances sont conformés sur le même plan général dans ces deux classes d'Animaux articulés, et chez les Myriapodes ces organes ne diffèrent que peu de ce que nous avons vu chez les larves des Insectes de l'ordre des Lépidoptères. Le canal digestif s'étend presque toujours en ligne droite de la bouche à l'anus (2); l'œsophage ne se dilate que rarement en forme de jabot cylin-

Appareil

digestif

des

Myriapodes.

(1) Les glandes qui sont annexées à la partie terminale de l'intestin des Insectes sont en gén«5ral destinées à sécréter du venin ou d'autres liquides excrémentitiels que l'Animal utilise pour sa défense ; mais , quelquefois , ces organes sont détournés de leurs usages ordinaires, afin de constituer, ainsi que nous l'avons déjà vu pour les vaisseaux salivaires, un appareil producteur de la soie, à l'aide de laquelle l'Insecte construit un ber- ceau pour sa progéniture (à). C'est à tort que quelques physiologistes les ont considérés comme constituant

un appareil urinaire (6). Du reste, la structure de ces appendices sécré- teurs varie beaucoup ; et, pour s'en former une idée, il suffit de jeter les yeux sur les figures relatives aux or- ganes de la digestion, publiées par M. L. Dufour, car dans la plupart de ces figures ils ont été représentés comme des dépendances du gros in- testin. Au sujet de la structure inté- rieure de ces organes, je renverrai aux recherches de MM. H. Mcckel et Karslen (c).

(2) Les Glomeris font exception à cet égard : M. Brandt a trouvé leur

(a) Exemple : \' Hydrophile (voy. Lyonnet, Recherches sur l'anatomie et les métamorphoses de différentes espèces d'Insectes, pi. 13).

(b) Lacordaire, Introduction à l'Entomologie, l. II, p. 54.

{c) H. Meckcl, Op. cit. (MuUer's .Archiv, 1846, p. 45 et suiv.). Kaisteii, Oj>. ct(. (Miiller's Archiv, 184S, p. 367, pi. 10, lit;. 1-5).

G/lO APPAllEIL DlGIiSTlF.

droïdc ; restomac est cylindrique et suivi d'un inlestin grêle fort court; puis on rencontre un gros intestin dont la première portion, à parois 1res musculaires, correspond à celle que nous connaissons sous le nom de réservoir stercoral chez les Insectes; un rectum fait suite à cette partie, et se termine à l'anus (1). Des tubes sécréteurs, analogues aux vaisseaux mal- })ighiens des Insectes, serpentent sur toute la longueur du canal ainsi constitué, et vont débouclier dans la portion postérieure de l'estomac (2). Enlin, il existe également des glandes sali- vaires qui versent leurs produits dans la bouche, ou des organes analogues qui sécrètent du venin dont l'Animal fait usage pour tuer sa proie (3).

tube digestif reployé deux fois sur lui-même, et par conséquent beau- coup plus long que le corps (a).

(1) Chez les Iules, l'œsophage se di- late poslérieureçient en forme de jabot proprement dit (h) ; mais, chez les Lithobies et les Scutigères, on n'aperçoit rien de semblable : l'esto- mac commence presque immédiate- ment derrière la tète, et il ne paraît y avoir ni jabot, ni valvule cardiaque. Chez les Lithobies, la surface externe de cet organe est lisse (c); mais, chez les Scutigères [d), elle est couverte de petites granulations dues à l'existence de follicules gastriques analogues à

ceux que nous avons rencontrés chez les Carabiques et beaucoup d'autres Insectes.

La portion intestinale du canal di- gestif est remarquablement courte chez les Lithobies; elle est, au con- traire, beaucoup plus développée chez les Scutigères et chez les Iules [e).

(2) Les vaisseaux malpighiens sont au nombre de trois paires chez les Iules (/') , de deux paires chez les Scutigères {g) , et d'une paire seule- ment chez les Scolopendres [h) et les 'Lithobies {i).

(3) Les glandes salivaires sont très développées et en forme de grappes

(a) Brandi, Beitrâge x-iir Kenntniss des innern Baves von Glomcris iiKifijiiiala (Mùller's Arcliiv fiïr Anat. und PhysioL, i 837, p. 3i2, pi. 12, fig. 2).

(b) Ramdolir, Yerdauungswerkx-euge der Inseclen, pi. 15, lig. \.

Tieviranus, Op. cil- (Vennischle Scliriften, t. II, ni. 8, fig. (>). ((') Treviraniis, loc. rit., pi. 5, (\2^. 4.

L. Uiifour, Recherches unatomiques sur le Lilhobius l'orlicaliis c( le Sculigcra litieala (Ann. des sciences nat., d824, 1" sério, t. II, pi. 5, iig. i).

(dj Idem, ibid., pi. 5, fitr. i.

(e) Voyez les figures déjà citées.

(/■) Treviranus, loc. cit., pi. 8, fig. 0.

(f/l L. Dufiuir, loc. cit., pi. 5, tig. 4.

(/i) .1. Millier, Zur Anatoinie der Scolopeiidia iiRirsitaii» [Isis, iS^'J, p. 550, pi. 2, Iig. 5).

(i) Treviranus, loc. cit., pi. 5, Iig. 4.

.— L. Uufour, loc. cit., pi. 5, (ig, \ .

- TUBK ALlMEiMAlKI^ UES MYHIAi'OUES. G/l i

^ ]^2. En iTSumo, nous voyons donc que h disposition (lominiuitc de r;»i)pnreil digestif diffère dans les trois grandes divisions zoologiques eonsliluées par les Animaux inverté- brés : chez les Zooi)hytes, la cavité alimentaire est générale- ment un sac; chez les Mollusques, elle consiste d'ordinaire en un tube reployé en forme d'anse, et chez les Annelés elle affecte le plus souvent la forme d'un tube ouvert aux deux extrémités du corps, (^liez les premiers, cet appareil ne se perfectionne que peu, soit comme instrument mécanique destiné à diviser les aliments, soit comme agent producteur des sucs digestifs. Chez les seconde, les organes glandulaires propres à élaborer ces sucs acquièrent une puissance très grande, mais le travail mécanique qui doit favoriser l'action chimique de ces liquides est presque loujours faible et incomplet. Enfm, chez les derniers, les organes sécateurs destinés à cet usage se multiplient considérablement, et deviennent souvent très parfaits, mais la production des liquides, dont le rôle es! fondamental pour

Résumé.

chez les LiUiobies [a], 'J'icviranus les a prises pour des amas de cellules graisseuses. Chez les Scolopendres, il y en a deux paires (h). Chez les Sculigères, leur volume esl moins considérable (c). Chez les Géophiles, ces organes consistent en deux lubes très grêles et flexueux, qui sont élargis vers leur extrémité postérieure et forment de chaque côté de Peslo- mac une pelote à laquelle adhère la partie adjacente des tubes de I\lal-

pighi (d). Treviranus a figuré trois de ces vaisseaux salivaires (e), mais Ramdohr n'en a représenté que deux, et rexactitude de ses observations a élé constatée par M. Lîurmeister (f). On trouve un mode d'organisation analogue chez les Glomeris (g) ; enlin, chez les Iules, il existe également deux de ces tubes qui se réunissent par leur extrémité postérieure, de façon à constituer une anse ^h).

[a) L. Dufour, loc. cit., pi. 5, fig. i,

{b} Gacilc, Ih'itrcige :iiir Ana tonne der Insekten (WieôcMunn s Zoologisches Mayaiin, 181'

t. I, p. rj5, pi. d, lig-, 7). .

J. Millier, Zur Atiatomie der Scolopendra iiiorsilaiis {(sis, 1829, I. XXll, pi. 2, tig. 5).

(c) L. Dufour, loc. cit., pi. 5, figf. 4.

{d) Piaimiolir, Op. cit., pi. 15, Hij. 1.

[ei Trovirnuus, Op. cit., pi. 1, iV^. 3.

{/') Biu-muistcr, Ucbcr die Hespiratioiisorgcuic von lultis imd Lepisma {Isis, 1834, p. 13(>).

(^1 Sieliulil et Sliiuirus, A'ouveau Manuel d'analomic comparée, l. I, p. 444.

[Il) BiMiiill, 0/) rit. (Miillcr's Arrluv. ISiiT, p. oi:i, pi. I-J, liif. '.'}.

V,

h\

6/i2 TUBE DIGESTIF DES MYRIAPODES.

l'accoinplissement de la digestion, reste très i'aible, à eause du peu de développement du système de glandes annexées au tube alimentaire.

Dans rembranehenient des Vertébrés, dont l'étude doit maintenant nous occuper, nous verrons l'appareil digestif parti- ciper à la fois aux caractères (|ue je viens de signaler chez les Mollusques et les Arthropodaires, mais se perfectionner beau- coup plus comme puissance chimique, aussi bien que sous le rapport de son jeu mécanique.

FIN DU TOME CINQUIÈME.

TABLE SOMMAIRE DES MATIÈRES

DU TOME CrNQUlÈMK.

QUARANTE-TROISIÈME LEÇON.

De l'absorption 1

Preuves de l'existence de cette fa- culté * I

Opinions des anciens physiolo- gistes relatives aux vaisseaux

absorbants X

Preuves de l'absorption par les

veines 8

Expériences de Magendie 9

Preuves de l'absorption par les

vaisseaux lymphatiques 12

Résumé 21

Du mécanisme de l'absorption. . . 22 Perméabilité des tissus organi- ques après la mort 23

Perméabilité des tissus vivants. . 25 Perméabilité des parois des vais- seaux sanguins 26

Perméabilité des parois des lym- phatiques 28

Causes déterminantes de l'ab- sorption 29

Influence de l'aspiration thora-

cique sur l'absorption 32

Influence du courant circulatoire. 34 Découverte des phénomènes d'en- dosmose 37

QUARANTE-QUATRIÈME LEÇON.

Suite de l'histoire de I'absorption . 4 3 Étude des forces qui intervien- nent dans la production de ce

phénomène 43

De la capillarité 43

Notions préliminaires relatives aux

actions capillaires 44

Loi des actions capillaires 63

Influence de la température sur ces phénomènes 71

Influence de l'électricité 78

De l'imbibition 80

Pouvoir absorbant des tissus or- ganiques 82

Influence de l'élasticité des tissus sur leur pouvoir absorbant. . . 85

Influence de la nature chimique des liquides sur les quantités absorbées 86

Influence des actions capillaires sur la composition chimique des liquides absorbés 88

Insuffisance des actions capillaires pour l'établissenient des cou- rants observés dans le phéno- mène physiologique de l'ab- sorption 91

Étude des phénomènes osmo- tiques 92

Notions préliminaires : action des liquides hétérogènes les uns sur les autres 93

Cause de la miscibilité des li- quides 94

Action dissolvante des liquides. . 96

Etat moléculaire des corps en dissolution 99

Diffusion des liquides dans d'au- tres liquides 100

Lois de la dilTusion 10'?

DifTusibilité inégale de dilférents corps 106

Influence de la difl"usion sur la composition chimique des li- quides 106

Influence des diaphragmes sur la formation des mélanges 109

6l\h

TABLE SOMMAIRE

De l'osmose 111

Mécanisme de l'endosmose 112

Établissement d'un contre-cou- rant, ou exosmose par diffu- sion 114

Résumé relatif à la nature des phénomènes d'endosmose et d'exosmose 119

Étude des équivalents eiidosmu- tiques 123

Influence de l'étendue de la sur- face perméable sur la grandeur des effets osmotiques 128

Différences dans la puissance os- mogénique des divers corps.. . 129

Cause qui détermine la direction du courant endosmotique. ... 132

Influence du degré de concentra- tion des liquides sur l'endos- mose 136

Influence dos modifications pro- duites dans la perméabilité des cloisons osmotiques (lar les li- quides réagissants 140

Différences dans le mode d'action des deux surfaces d'une même membrane 144

Influence des liquides préexistants dans les membranes sur les phénomènes osmotiques 147

Causes des variations dans le cou- rant exosmotique 151

Action des membranes sur la composition chimique des li- quides qui les traversent 152

Résumé 163

Influence de la température sur les phénomènes osmotiques.. 163

Influence de l'électricité sur l'en- dosmose 165

Relations entre l'osmose et cer- taines réactions chimiques... 170

Résumé général 173

QUARANTE-CINQUIÈME LEÇON.

Suite de I l'histoire de I'absorp-

TION 176

Du rôle de l'endosmose dans l'ab- sorption i)liysiologique 176

Mécanisme de la résorption de la sérosité épanchée 177

Mode (rétablissement simultané de l'absorption et de l'exhala- tion dans un même point 178

Mécanisme de l'absorption des

DES MATIEHES.

matières étrangères à l'orga- nisme 182

Exemples d'actions osmotiques dans le corps vivant ; action

des (lurgatifs 183

Mécanisme de l'absorption des

matières salines, 187

De l'absorption élective 188

Étude des circonstances qui in- fluent sur l'activité de l'ab- sorption 192

Influence de la nature chimique

des matières à absorber 193

Influence de la richesse du sang. 194 Influence du courant circula- toire 195

Influence de la disposition des

membranes absorbantes 199

Action de l'épiderme 200

Influence des humeurs qui lubri- fient les surfaces absorbantes. 200 Comparaison de la puissance ab- sorbante des diverses parties

de l'organisme 201

De l'absorption pulmonaire 201

De l'absorption par la peau 20C

De l'absorption par les mem- branes muqueuses 214

De l'absorption par les mem- branes séreuses 216

De l'absorption par le tissu con-

jonctif ou cellulaire 216

De l'influence de l'état de réplé- . tion des vaisseaux sur l'absorp- tion 217

Influence de l'état des capillaires. 218 Influence de l'action nerveuse . . 219 Influence des propriétés physi- ques des fluides sur leur ab- sorption 222

De l'absorption des matières gras- ses 223

De l'absorption du mercure .... 232 Expériences relatives à l'absorp- tion de particules solides 234

Résumé relatif à l'absorption l)hysiologique 243

QUARANTE-SIXIÈME LEÇON.

Dk i.a digestion 246

Considérations préliminaires. . . . 2i6 Notions relatives aux aliments.. . 2 48 Phénomènes généraux de la di- gestion 2o0

Opinions des anciens physiolo-

TABLK SOMMAIRE

Eïistes relatives à la nature du

travail digestif 250

Expériences de Réaumur 234

Expériences de Stevens 259

Expériences de Spallanzani 260

Digestion artificielle 260

Principe actif du suc gastrique. . 262 Utilité de l'action d'autres agents

digestifs 263

Caraclères généraux de l'appareil

digestif. 264

Réservoir alimentaire 265

t^erfectionnement par la division

du travail 269

Organes producteurs des liquides

digestifs 270

Appareil biliaire 274

Appareil salivairc 274

Appareil pancréatique 275

Usages des liquides digestifs ac- cessoires 275

Utilité de l'existence de plusieurs réservoirs alimentaires dis- tincts 278

Changements déterminés dans la constitution des aliments par

les sucs digestifs 280

Peptones 281

Actions adjuvantes 282

Division mécanique des aliments. 282

Appareil masticateur 283

Perfectionnement de l'appareil di- gestif connue instrument d'ab- sorption 28 4

Phlébenlérisine 285

Résumé des phénomènes de la digestion 285

QUARANTE-SEI'TIEME LEÇON.

De l'appareil de la digestion. . . 289 Appareil digestif des Zoophytes. . 289 Cavité digeslive adventive de

quelques Sarcodaires 289

Cavités aquifères ctdigestives des

Spongiaires 291

Cavité digestivc des Zoophytes

cdîlenlérés 294

Appareil digestif des Hydres et

des Scrtnlariens 295

Appareil digestif des Médusaires. 301 Appareil digestif des Acalèphes

hydrostatiques 304

Appareil digestif des Coralliaires. 307 Appareil digestif des Echino-

dermes 309

DES M.VTIÈUKS. G/lT)

Holothuries 311

Échinides 31".

Stellérides 321

QUARANTE-HUITIÈME LEÇON.

De l'appareil digestif des Mala-

cozoaires 327

Appareil digestif des Infusoires

ciliés 327

Appareil digestif des Mollusques

de la classe des Bryozoaires.. . 341 Appareil digestif des Mollusco'ides

de la classe des Tuniciers. . . . 349 Appareil digestif des Molluscoides

de la classe des Acéphales. . . . 355

Brachiopodes 356

Lamellibranches 361

Solénocoques 365

Appareil digestif des Mollusques

de la classe des Gastéropodes. . 367

Trompe 369

Armature buccale 370

Armature gastrique 380

Glandes salivaires 381

.labot 383

Estomac 384

Appendices gastro-hépatiques. . . 385

Mollusques phlébentérés 386

Foie 393

Glandes accessoires 394

Intestin 395

Anus 395

Appareil digestif des Mollusques

de la classe des Pléropodes. . . 398 Appareil digestif des Mollusques

de la classe des Céphalopodes. 403

Organes préhenseurs 403

Lèvres 405

Mâchoires 407

Langue 408

Glandes salivaires 409

Jabot 410

Gésier 411

Appendice pylorique 411

Foie 413

Intestin 413

Résumé 414

QUARANTE-NEUVIÈME LEÇON.

De l'appareil di'jesdf des ]'ei-s... 415

Caractères généraux 4 15

Appareil digestif des Némalnides . 4 I (i Anomalies chez les Échinorhyu-

ques 420

GûO

TABLE SOMMAllîi:

Appareil digestif des Géphyriens.

Appareil digestif des Annélides. .

Cliétopodes

Hirudinées

Armature buccale des Sangsues. .

xMnde d'alimentation de ces Ani- maux

Canal digestif

Organes glandulaires des Hirudi- nées

Appareil digestif des Leplozoaires .

Trématodes

Cestoides

Planariées

Rhabdocéliens

Némertiens

Appareil digestif des Rotateurs. .

423 424 425 434 436

438 441

445 447 448 45-2 455 459 460 465

CINQUANTIÈME LEÇON.

De l'appareil digestif des Ani- maux articulés. Armature

buccale 474

Constitution de cet appareil 474

De l'appareil buccal des Crustacés

masticateurs 476

Pattes-niikhoires des Limulcs... 477 Perfectionnement par la division

du travail physiologique 479

Appareil buccal des Décapodes. . 481

Appareil buccal des Squilles. . . . 487 Appareil buccal des Édriophthal-

mes, etc 4S8

Appareil buccal des Cirrliipèdes. 490 Aijpareil buccal des Crustacés su- ceurs 492

Appareil buccal des Myriapodes. . 494

Chilopodes 495

Chilognathcs 497

Appareil buccal des Insectes. . . . 498

Insectes masticateurs 498

Du labre 501

Des mandibules 503

De la lèvre inférieure - . . 509

Armature pharyngienne 514

Appareil buccal des Insectes lé-

cheurs (Hyménoptères). .... 518 Appareil buccal des Insectes su- ceurs 519

Trompe des Léi)ifloptères 523

Bec des Hémiptères 525

Trompe des Diptères 528

Armature buccale des Ajibuno-

ptères, ctc 535

Apiiareil buccal des Arachnides. 537

DES MATIÈRES.

Chez les Scorpions 538

Chez les Galéodes, etc 540

Chez les Araignées 543

Chez les Acariens 545

Résumé 549

CINQUAiNTE ET UNIÈME LEÇON.

Suite (le l'histoire des organes digestifs des Animaux arti- culés 551

Du tube alimentaire et de ses an- nexes chez les Crustacés 551

Flstomac 551

Armature stomacdie 553

De l'intestin et de ses dépen- dances 558

Modifications de l'appareil diges- tif chez les Crustacés infé- rieurs 560

Appareil hépatique 5()3

Du tube alimentaire et de ses an- nexes chez les Arachnides.. . . 568

' Chez les Scorpions 568

I Chez les Thélypliones et les Ga-

i léodes 572

J Chez les Aranéides 573

j Chez les Faucheurs 579

j Chez les Acariens 580

I Du tube digestif et de ses annexes

chez les I)isecles 581

Disposition générale de cet appa- reil chez les Sauterelles 585

De l'œsophage et du jabot chez les divers Insectes 586

Du gésier chez les divers In- sectes 593

De l'estomac proprement dit, ou ventricule chylifique chez les divers Insectes 597

Des appendices de l'estomac. . . . 603

Glandules gastriques 609

De l'intestin chez les divers In- sectes 611

Du gros intestin , ou réservoir stercoral 615

Des annexes glandulaires du tube digestif 616

Glandes salivaires 617

Tubes malpighiens ( dits vais- seauv biliaires) 626

Glandes anales 638

Du tube digestif et de ses annexes chez tes Myriapodes (ii9

Résumé 6 i I

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