;' " f^ .^ ■■ • . ... jc?^ ' ■■S?»--.*? ,^. ^f^4^*>^à] '■> "^^ i5 »■ ■;v^Z/ ft^.Vt 'Vw»',..-',,^;-»..; /*^ .asçS %^:-r<;;-Njvy< \yQ mi ^'^ C^i«^_ L E JOURNAL SCAVANS POUR A P A R I S, liez JEAN CUSSON, rue faint Jacques , à l'Image de famt Jean Baptifte. "^ M. D C. XCIII. JVEC PRIVILEGE DV ROT. LE JOURNAL DES se AY ANS Ç Du LuNDY 5. Janvier. M. DC. XCIII. PARALELLE DES ANCIENS ET DES MODERNES en ce qui regarde la Poéfie. Par M. Perrault de l' yica demie -f Frarii^oifè. In iz. à Paris chez la Veuve de J. B. Coignaid , rue faint Jaques. 1692. M R- Perrault , au lieu de commencer par les arts , où les modernes font conftamment fupericurs aux anciens , I a commencé par l'Eloquence où il fembloit qu'il y euft plus de difficulté , &: continue maintenant par la Poëûe. La ma- tière s'eft tellcmcnt^augmcntcc entre fes mains , qu'il n'a pu 1693. ' A ij ■^ LE J O U R N A L la renfermer dans un feul dialogue. 11 déduit dans celui-ci les raifons qu'il a de prccendrc que fi les Poètes anciens font ex* cellem , comme on ne peut pas en di [convenir , les modernes ne leur cèdent en rten , ^ les furp^ffint mefme tn bien des chofes. L'Abbc qu'il y a charge de la dcfcnfe des modernes, y fcu- tient qu'Homère ayant vécu dans un llecle qui efloit comme l'enfance de laPoclle , cft toml é dans des défauts que d'au- tres Poètes qui l'ont fuivi ont évitez ; & pour le montrer avec ordre , il confiderc quatre chofes dans fes ouvrages , le fujet, les moeurs , la penfée , la didion. Sur le premier point il remarque , que fi ce que dit Elien cft ( vrai qu Homcrc n'a jamais compofc l'Iliade ni rOdiffce que par morceaux , \\ ett impoflible que le hazard en ait formé un fujct ou une fable dont la conllruclion foit admirable , com- me les Profeffeurs l'enfcignent à leurs écoliers. A l'égard des moeurs qu'Homère donne à (z^ Héros, l'Ab- bé en diflinguc de paruculiçres au temps où ce Poète a vécu, &: d'autres qui femblent communes à tous les temps. Pour les premières , quelque ridicules qu'elles paroilîent par rapport aux nôtres , comme de voir des Héros faire leur cuifinc , eu des PrincelTcs laver la leffive , l'Abbé trouve qu'il y auroitdc l'injuftice à en accufer le Poëtc : mais pour les autres , il ne peut l'excufer d'avoir fait dire par Neftor à Agamemnon & à Achille , qu'il a converfé avec des gens qui valoient mieux qu'eux ; d'avoir fait appeller Agamemnon ivrogne par Achil- le , d'avoir fait Achille emporté , inexorable , fe moquant des loix j &: d'avoir donné à Ulille une prudence mêlée de four- berie. Qaand l'Abbé parte des mœurs & des caradteres aux fcnti- iBCns & aux penices , il trouve que ce que Vulcain dit à Ju- I non fa mère , qu'il craint que Jupiter ne la batte ;, n'cft guc- res digne ni des Dieux ni d'Homcre. Pour ce qui eft de la didion , il admire ceux qui fe pafmcnt de plaifir en prononçant les vers d'Homère , comme s'ils en cntendoient l'harmonie , eux qui n'en articulent pcut-eftre pas un feul mot comme il faut. Mais fuppofc que la pocfic d'Homcre fuft très nombrcufe, i'Abbé DESSCAVANS. 5 ;f Abbc juge qu'il ne lui cftoic pas mal-aifé de la fu're ainii avec les licences qu'il s'cft données. Il a equippé cous Tes Dieux &tousfes Héros d'cpiceces de diverfcs longueurs pour finir le vers commodément. Les cpitctes bien loin de con. venir au fait qui y ell rapporte , y lonc le plus fouvent dire- ' dlement oppofces. De plus pour remplir le nombre neccflaire au vers , il fe fcrt , fuivant le bcfoin , de fepc ou de huit particules qui ne fîgnifient rien. Et pour troificme commodité , il employé in- différemment toutes fortes de dialeftes , qui lui fournirent ) des fillabcs longues 5c brèves félon l'exigence de la verfîfîca- t4on. L'Abbé s'attache enfuitcaux endroits que Longin a choifis pour eftre les plus fublimcs , & montre qu'ils ne font pas irre- ' prehenûbles. Il a traduit en profe Françoifc l'endroit où Ho- liierc a fait le dénombrement de l'armée des Grecs , le bou- clier d'Achille , &: les jardins d'Alcinoiis ; & a aulfi mis en profe les endroits où les Poëces modernes traitent de chofcs approchantes , afin de les pouvoir oppofcr à ces chef-d'ceu- ¥res des anciens dans le dialogue qu'il promet. Il tient le mcfme ordre dans l'examen de Virgile , & juge que s'ira plus de fineffe , plus de gravité , plus de raifbn dans / l'Eneïde qu'on n'en trouve dans l'Iliade m dans rOdifrée,ce- la ne vient que de la différence du temps , &: que de ce que Virgile cft plus moderne de huit ou de neuf cens ans, i Le fujet ou la fable de l'Eneïde lui paroit quelque chofe de fort grand 5c de fort bien entendu. C'eft un Héros echapé des ruines de Troye , qui après avoir furmonté de grans ob- ftacles de la part des Dieux Se des hommes , jette enfin les fondemens de l'Empire Romain. Mais il ne peut fouffrir que le poème finiffe à la mort de Turnus , par laquelle Enéc ne + fut pas encore clcvc fur le trône des Latins ; fans quoi l'adion "^ cft imparfaite. -Quant aux mœurs , il trouve à redire que le caradere d'E- née fbit d'eflre pieux , d'eftre timide , &: de pleurer. La ' qualité de pieux ne s'accorde gueres avec l'infidélité qu'il fie àDidon. Les pleurs qu'il vrrfc à chaque moment en voyant ' iéf)3. B C LEJOURNAL un tableau dîs avancurcs de Troyc , en quittant Accftc , eiV pcrdint Palinurc , en rencontrant Didon aux enfers , s'ac- cordent peu avec la magnanimité d'un Héros, Quant aux fentimens , bien qu'ils femblent partout Eres' naturels Sz très nobles , il y en a pourtant quelques-uns que l'Abbé ne peut fupporter, comme quand Venus prie Vulcain fôn mari de forger des armes à Enée. Cette prière a félon lui , quelque chofe de plus outrageant que l'infidélité qu'elle avoit euii de s'abandonner à Anchife. Il ne refte plus que la belle didion , que l'Abbé reconnoic cflre le fort de Virgile. Cependant fcs commentateurs y I trouvent pluficurs endroits inexplicables. Si cette obfcuncé vcnoit de quelque point d'hiftoire. de fable , de Géographie, on pourroit dire que le Poète n'a pas diî fe metcrc en peine de l'ignorance où fes lecteurs tomberoient dans la fuite des temps : mais elle vient du vice dclaconftruclion, que rien ne I peut excufer. De tous ces défauts que l'Abbé reproché à Homère &: à Virgile , il n'en voit aucun qui puiife ettre reproché aux mo- dernes , parce que la politellc &: le bon goiàt qui fe font per- fectionnez avec le temps , leur ont rendu infupportables une infinité de chofcs qui avoient elle fupportées, &: mcfme louées dans les anciens. Du pocme épique l'Abbé pafle aux autres efpeces, & com- mence par les odes. Le jugement qu'il porte de Pindare efl ( que fi les Sçavans le lifoient à dellein de le bien comprendre , ils s'en laiferoient bien tôt ; mais qu'ils paHent légèrement fur tout ce qu'ils n'entendent pas , & ne s'arrêtent que fur les beaux traits , qu'ils tranfcnvcnt dans leurs recueils. II de- meure d'accord qu'il y a de beaux endroits dans Anacreon : mais il croit que leur plus grand mérite confifle dans le filjec, qui ne demande qu'un heureux naturel pour eftre imaginé j en quoi les anciens ont pu égaler , &L mcfme furpalVerles mo- dernes : ce qui ne fait rien contre les modernes , puis que dans les chofes qui dépendent de la feule vivacité de l'et- prit , les ficelés n'ont aucun avantage les uns fur les autres. Il avoue que les expreilions d'Horace font vives , juftesfiû DESSCAVANS. 7 délicates , & ne laifle pas de découvrir des defliuts dans fcs odes. La première efi cellemenc conftruite , que les com- \ mentaceurs n'ont encore pu convenir comment elle doit ellre ponduée. II examine après cela les pièces dramatiques , & préfère les modernes aux anciennes , fur ce fondement , qu'elles ont prefque toujours relTemblé au teâtre où elles ont elle rcpre- ientées. Lors que les comédies eftoient jouées dans des tom- , bereaux , elles n'eftoientgueres moins ridicules que leur fee- ne. Maintenant qu'elles ont des décorations magnifiques, elles ont auffi des règles plus juftes & plus fures , & des cara- éleres qui vont jufqu'à la perfedion de leur idée ; &: c'eft en ) quoi Molière a mieux réuflî que Tcrence. L'Abbé en parlant des fatires d'Horace qui a furpafle en ■ ce genre tous les Latins , dit qu'il n'a que des reflexions va- gués contre l'avarice , au lieu que l'Avare de Molière eft d'un / autre caractère , d'un autre fel , & d'une autre vivacité. Son Fâcheux donne auflî plus de plaifir que le Fâcheux que décrit / Horace dans fa neuvième fatire. L'Abbé pour oppofcr aux fatires d'Horace les fatires de ce- lui qui y réuflit le mieux aujourd'hui , dit qu'en plufieurs en- droits il a imité Horace ; mais que ce qu'il a fait de lui-mef^ î me eft beaucoup meilleur que ce qu'il a imité. La converfation cftant tombée de la forte fur les fatiriques modernes , l'Abbé reprend la liberté que quelques-uns d'en- tre eux ont prife de nommer ceux qu'ils avoient envie de mal-. traiter, & défend M, Chapelain, Quinaut , Cotin , Se Cafla.- ' gnes , qui font du nombre des mal- traitez. L'Abbé après avoir parlé de toutes les grandes pièces en vcrSj vient aux petites. Il préfère nos fonnets &: nos madrigaux aux epigrammes de l'antologie -, & non content d'avoir montré + que les modernes avoient porté la poëfie à un nouveau degré de perfection , il entreprend de montrer qu'ils ont accru (on étendue , & inventé des efpeces que l'antiquité n*avoit point connues. Il s'arrête principalement aux opéra, aux pièces galantes , & aux burlefques. Les opcra font tous compofez de merveilleux , comme la- { 8 LE JOURNAL / comédie roule toute fur le vrai-femblable ; au lieu que la tra- /gedie eft mêlée de vrai fembldble &: de merveilleux. Cette invention ingcnieufe qui plait à toute forte d'cfprits , n'cll pas un accroifTemcnt peu conlîderable. Ce qui s'appelle galanterie n'ell pas toujours un certain ba- (dinage qui cache l'amour fous des apparences de raillerie. Elle comprend toutes les manières fines & délicates dont on parle de toutes chofes avec un enjouement libre & agréable. C'eft ce que l'elegancc Grequc & l'urbanité Romaine avoicnt commencé , &: que la politefle des derniers temps a porté à fa perfcdion. Le burlefquc a fes grâces & fes beautcz , & confifte dans 'j^ladifconvenance qu'on donne d'une chofe d'avec fon idée vé- ritable. Or il y en a de deux fortes. Car cette difconvenan- j_ce fe fait ou en parlant baflcmcnt des chofes les plus relevées,' (OU en parlant magnifiquement des chofes les plus baflcs. Là' première manière eft celle du Virgile travefti , où les plus no- bles fujcts font revêtus d'expreffions communes. La féconde eft celle du Lutrin , où les chofes les plus communes font ex- primées en termes pompeux. Outre les opéra, les poëfics galantes , &: le burlefquc, dont l'invention eft duc aux modernes , l'Abbé propofe en- core d'autres pocfies d'un nouveau genre , & dont les anciens n'ont point laiffé de modèle. Il met de ce nombre les fables de M. de la fontaine , où il dit qu'il entre un fel d'une efpecc toute nouvelle , une naïveté &c une plaifantcrie d'un carade- rc qui lui eft particulier. Les vers que M. Benfcrade a faits pour les balcts du Roi font encore une nouvelle forte de pocfie. Ils font tournez de manière qu'ils s'entendent également de la perfonne &: dii I pcrfonnage , de Jupiter , par exemple , &: du Roi. Ce qui caufc un double pJaifir , en faifant concevoir deux chofes à la fois. Les devifcs qui font une cfpccc de poëfie , ne nous vien- nent point des anciens. Les hieroglifes des Egiptiens eftoient comme des devifcs commencées. Mais c'eftoicnt des corps DESSCAVANS. 9 ;fans amc. Les nôtres quand elles font bonnes , difenCplus de chofes en un feu! mot que de gros volumes. Les médailles d'aujourd'hui font aufli fort cftimabics. Il y encre beaucoup d'efprit npereurs , ^ des Rois de France , de celle des Princes Normans , ^ des Princes de Lu Maifon d' An. hou , ^ celehrera de belles aciions de la Noblejfe du Royaume, q^i avoient efii feu connues jufques ici. EJi: TRAIT BV PRIV ILBGE BV ROY. PA R Privilège du Roi du 4. Mai 1691. figné de Saint H I LA IRE , il eft permis à Jean Cusson Impri- meur &: Marchand Libraire , de continuer l'impreffion du Journal des Sç^vans : Avec défenfes à toutes fortes de per- fonncs d imprimer , vendre & débiter ledit Journal , à peine de 3000. 1. d'amende , &: autres ; ain(i qu'il eft porte plus au long par ledit Privilège. Regi/lrè fur le Livre des Libraires ^ Imfrimeurs de Paris y ce zo. Mai 16^2. St^nè A u B o u y N , Syndic. îl. '■ 15 LE JOURNAL P E s s C A V A N s Ç Du LuNDY 12. Jantier m DC. XCIIÎ. PLAIDOYEZ DE M"^». NICOLAS DE CORBERON, Chevalier Seigneur de TorviUiers , ConfetHer du Roy en jes CoU' feils , Avocat General au Parlement de Mets , ^ enfuite Maî- tre des Kequefles ordinaires de l' Hofiel de Sa Majefié. Ave des ATtefls intervenus fur ces Plaidoyez^ Enfemble les Flaideyez^ de JM. Abel de Sainte- Marthe Avocat au Parlement , ^ depuis ConfeiUer du Roi en [on Confeil £ E(lat , & Garde de la Biblio- thèque de Sa Majefte * Fontainebleau. Donnez^ au Public par Mre. Abel de Sainte- Marthe , Chevalier , Seigneur de Corbe- VI lie , ConfeiUer du Roi en fa Cour des Aydes , Garde de la Bi- bliothèque de Sa Ma'YJîè à Fontainebleau. In ^. à Paris chez Charles de Sercy , Guillaume de Luyne , & Etienne Mi- challcc. 1693. LA famille de Corberon qui tire Ton origine d'une terre du mefme nom , fituée en Bourgogne cnrre Bcaune &: Bellegarde , s'établit dans la fuite du temps en Champagne , où lors que les principales villes fe laifloient entraincr par la rébellion qui avoit pris le nom de ligue , Nicolas de Corbe- ron Commifl'aire gênerai des poudres & falpccrcs de Cham- pagne , Claude de Corberon Capitaine de cent Arquebo- iGi)i, D 14 LEJOURNAL fiers , &: Jean de Coibcron Trcforicr de France , demeu- rcrenc inviolablcrnciit attachez au fcrvicc du Roi Henri IV. Le premier eut un fils nommé comme lui Nicolas, qui fiic Lieutenant particulier au Prcfidial de Troyes , &: pcrc de M. de Corberon qui lui fucceda en cette charge , & l'exerça a- vec autant de ftiffifance que de probité jufqu'en l'année 1654. que le Roi Louis XIIL qui s'eftoit mis en poflefllon de la Lo- raine , lui donna gratuitement une charge de Confciller au Confeil Souverain de Nanci , d'où , à la perfuafion de M. Cornucl Intendant des Finances , & Prciidcnt en la Cham- bre des Comptes fon oncle , il pafla en ié}6. à celle d'Avo- cat General au Parlement de Mets qui venoit d'eftrc créé. II fut honoré prefque au mcfmc temps d'un brevet de Confeil- ler d'Eftat , &: eu 1641. reçu en une charge de Maître dc« Requêtes. Deux ans après il eut l'intendance des Provinces de Limou- fin , la Marche , Saintonge , Angoumois , &: pays d'Aunis, Ci l'exdrça avec une intégrité &: un zcle qui méritèrent l'appro- bation générale de la Cour &: de ces Provinces , où il mouruc le I 9. Mai i 6 jo. âgé feulement de 41. ans. Ce fut dans la charge d'Avocat General au Parlement de Mets qu'il prononça ces PlaidoyCz , que Mr. de i'aiiite- Mar- the Confciller en la Cour des Aides , &î Garde de la Biblio- rcque de Fontainebleau , fon gendre-, donne maintenant au Public. La profonde fcicnce de M. de Corberon l'avoit mis en cftac de parler fouvcnt fur le champ , & fins avoir»ricn écrit du fait , ni des moyens de la caufe. Quelquefois il n'ecrivoit que fur des feuilles volantes -, ce qui a fait que plufieurs de fcs Plaidoycz ic font trouvez imparfaits , &: prcfquc tous font demeurez dans une grande confufion. M. de Sainte- Marthe avoir dclfein d'en mettre cent dan« ce recueil : mais entre ceux qu'il avoir choiils pour cet effet, il en a retranché douze qui ne lui ont pas paru alfez entiers. II en a rangé foixante &i onze fuivant la date des arrêts qu'il a recherchez avec beaucoup de peine , &: en a laiûé fans aucun- ordre dix-fcpc donc il iVa pu trouver la date. Des scavans. t^ Ces Plaidoycz doivent cftrc d'aucanc mieux reçus , que lious en avons peu des Avocats Généraux. Car au lieu que ceux qui ne portent la parole que pour les particuliers , en- trent (bavent trop avant dans leurs intérêts & dans leurs paf- fîons , & s'efforcent de dégiiiferla venté du fait , &: d'altérer Ja pureté des maximes ; ceux qui la portent pour le Koi font délivrez de ces préjugez , &: cxemts de ces défauts ,.& par confequent plus difpofez à rcprcfentcr fidellement aux Juges le droit des parties. En la place des douze Plaidoyez que M. de Sainte Marthe « retranchez , il en a fubftitué douze autres de M. de iaintc- Marthe fon père, Avocat au Parlement , Confcillcr du Roi en fon Confeil d'Éftat , &; Garde de la Bibliotequc de Sa Ma- jtfté à Fontainebleau. Bien que M. de Sainte Marthe cuft écrit de fa main ces douze Plaidoycz , il ne les avoit pas tous prononcez. Les quatre derniers font fur une reflitution de- mandée par deux focurs contre leur profeflion religieufe. M; Robert plaida pour l'une : M. de faintc -Marthe pour l'autre : M Arnaud pour le neveu de ces deux Religieufes, quis'eftoic emparé de leur bien ; 5c M. Servin pour le Roi. M de Sainte- Marthe Confeiller en la Gourdes Aides, x cru que le Public feroit bien-aife de voir quatre difcours de quatre des plus grans hommes qui fullent alors au Bateau -, d'autant plus que le difcours de M. Servin n'a point efté im- primé parmi fcs plaidoyez , ni celui de M. Robert dans fon U^ ▼rc rerum juJicatarum, Le cinquième Sz le fixiémc des douze de M. de Sainte- Marthe font auflî fur le mefme fujet , &: ont tous deux eflc ccrits de fa main , foit que par un eftort de fa mémoire qui cfloit fort heureufe , il cuft recueilli le difcours de l'Avocat qui avoit plaidé contre lui ; ou que pour fe divertir il cu(t compofé dans fon cabinet un plaidoyé oppofé à celui qu'il a- Toit prononcé. M. de Sainte- Marthe Confeiller en la Cour des Aides , « joint à ces Plaidoyez un difcours qu'il prcfenca au Roi en 1668. pour le rétabliflcment de la Bu>!iotequc de Fontaine- bleau jdans lecjuel il y. a un excellent elogc de Sa Majefté. je LEJOURNAL^ Parmi les papiers de M. de Corberon il a crouvc diffcrcns re- cueils en forme de difcours , fur différentes matières dont il «ompofcra un fécond volume , dans lequel il fera entrer les harangues prononcées à l'ouverture des audiances du Parle- ment de Mets , au cas qu'il les puiife recouvrer , &: qu'elles lui foicnc communiquées par ceux qui les ont entre leurs mains. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. CHAUVIN DO- j &eur en Médecine^ (^ ■^'L%^''^^ *** CoHeze des Médecins de Licn^ ' fur les moyens dont on s'eft fervi four découvrit tes auteurs d'uM LE 5. de Juillet dernier , fur les dix heures du foir , un Marchand de vin &: fa femme furent égorgez à Lion dans une cave , &: leur argent fut volé dans une boutique qui leur fcrvoit de chambre. Cela fe fit avec tant de fecret , qu'on ne put ni découvric ni mefme foupçonner les auteurs du crime. Un particulier touché de cette mort , ou poufle par le defic d'éprouver le talent d'un payfan de fi connoiflance qui fe mc- ( k>it de fuivrc à la pifte les voleurs te les meurtriers , le fit vc« nir en cette ville. Le payfan fut mené à M. le Procureur du Roi , à qui il pro- * jnit d'aller fur les pas des meurtriers , & de les rencontrer, I pourvu qu'il commençafl: par defcendrc dans la cave où l'af, lâflînat avoir elle commis. M. le Lieutenant Criminel &^ M. le Procureur du Roi l'envoyèrent dans cette cave. Il n'y fut pas plutôt entré qu'il fc fentir tout ému , &: que fon poux s'é- leva comme dans une grolfe fièvre ; & la baguette qu'il te- noit en (a main de la mefme façon qu'il la tient lors qu'il cherche les fources d'eau , tourna rapidement dans les deux endroits où l'on avoir trouvé les corps morts du mari &: de \x femme Il tut conduit enfuitc par le mouvement de fa baguette , ©u par un mouvement intérieur , dans la bourique où le vol avoit clic fait , & cnfuite dans toutes les. rues où les aifaUjas avoiens DES SCAVANS- 17 -avoient pafTé. Il entra dans la Cour de l'Archevêché , fortic de la ville par le ponc du Rofhe , ic prie à main droite le long de ce fleuve. Trois perfonnes qui l'accompagnoicnt iarcnc témoins qu'il s'appercevoit quelquefois detrois meurtriers ou complices du meurtre , & quelquefois il n'en comptoir que deux. Mais il fut eclairci de leur nombre en arrivant à la maifon d'un Jardinier , où il foutint pofitivement qu'ils a- voient entouré une table vers laquelle la baguette tournoit , & que de trois bouteilles qu'il y avoir dans la chanibre , iij en avoient touché une fur laquelle la baguette tournoit aufïl. Deux cnfans qui le nioient par la peur d'ellre punis pour a- voir lailfé la porte ouverte contre la dcftenfe de leur père , avouèrent bien- rôt après , que trois hommes qu'i's dcpei'jni- rent s'eftoienc glilTez dans la maifon , où ils avoient bu le vin d'une bouteille que le payfan indiquoit. Après cet aveu on fut au bord du Rofnc , à demie lieuë plus bas que le pont , où leurs traces imprimées fur le fable montrèrent vifiblement qu'ils s'eftoient embarquez. Ils furent exaftemcnt fui vis par eau , & le payfan fît con- duire fon bat:eau fous une arche du pont de Vienne où l'on nepafle point 5 ce qui lui fit juger qu'ils n'avoient point de batelier , puis qu'ils s'eftoient écartez du bon chemin fur la rivière. Durant ce voyage le payfan faifoit aborder a. tous les ports où les meutriers avoient pris terre. Il alloit droit à leur y,îte. Se reconnoifîoit , au grand etonncmcnt des hôtes & àes fpe- dateurs , le lit où ils avoient couché , la table où ils avoient mangé , & les pots & les verres qu'ils avoient touchez. On arriva au camp de Sablon en Dauphinc , où le payfan fe fentit plus ému , &: s'imagina voir les meurtriers fans les connoitre. Il n'ofa pourtant faire agir fa baguette pour s'en convaincre : car il craignit que les foldats ne fe jettaflent fur lui. Frappe de cette peur il revint à Lion pour y demander de la protedion. On le renvoya au Camp dans un batteau , avec des lettres de recommandation. Les meurtriers en ef- toient partis avant (on retour. Il les pourfuivit donc jufqu a Bcaucaire où la foire les avoic attirez j & dans la route il \iCi- 1693. E iS LE JOURNAL ta tous leurs logemcns , marqua fans ccflfc les tables fc \et lies , les pots Se les verres qu'ils avoienc touchez. Eftant arrivé à Beaucaire , & les ayant cherchez dans les rues , il s'arrêta devant la porte d'une prifon , &: dit polîtivc- ment qu'il y en avoit un dedans. La porte de la prifon ayant cftc ouverte, on lui prcfenta douze ou quinze prifonniers, parmi lefqucls un bofl'u qui vcnoic d'cfîre eiifernic depuis une heure pour un petit larcm , fut celui que la baguette dciigna pour un des complices. On chercha les autres. Le payfan découvrit qu'ils avoienc pris un fentier qui aboutifloit au chemin de Nifmcs -, &: le bofTu fut conduit à Lion. Au commencement il nia d'avoir la moindre connoifTancc du meurtre , Se mefmc d'aVi^ir jamais eftc à Lion. Cepen- dant à Bagnols , foit qu'il fuft prcffc par la force de la vcrité, foit qu'il fuft confondu par fes hoces qui lu! fourenoient qu'il avoit lo^c chez eux en delcenJant par le Rolne , avec deux perfonnages tels qj'on dcpeignoit les deux autres meurtriers , dont les cnfjns du Jardinier avoient rendu compte -, il avoua que deux Provençaux l'avoient engagé à tremper dans cet aU fadînat, comme s'il cuft elle leur valet, fans qu'il euil pourtant ni tué ni volé 5 alTurant que c'eftoicnt ces Provençaux qui avoient fait le meurcrc Ôc ciilcvc l'argent, dont ils ne lui a- voicnt donné que llx ecus & demi. Ce qu'il y eut de remarquable le long du chemin , fut que $ le payfau ne pouvoit aller derrière le bofl'u fans fcntir des maux de cœur infupportables : il falloit qu'il marchafl: loin devant lui pour les éviter. Et ce qui mérite le plus d'eftrc ob- I fervé , c'cit qu'il ne fçauroit fc placer dans les endroits où quelque meurtre a efté commis , fans avoir envie de vomir, fans fuer , & fans fouffrir une efpcce de fîevre. Il n'elt pas tant tourmenré quand il cherche des fourccs d'eau ; &c il l'eft beaucoup moins lors qu'il luit des meurtriers fur une ri- vière. Le bofl'u dans le premier interrogatoire ne fit pas de diffi- culté d'. vouer que le ji^ur du meurtre deux homme-, qui par- loient Provençal , l'avoient mené dans la boutique d'un Mar- DES SCAVANS. ij chand , dans laquelle ils achccerenc deux ferpcs à bucheton ; que fur les dix heures du foir ils furent tous trois enfemblc • chez les afianinc^ , fous prccextc de remplir de vin une gref- fe bouteille couverte de paille, dont ils cfloient munis. Il ajou- ra que fes deux compagnons defcendirent fans lui dans la ca- ve avec le Marchand de vin &: avec 1.x femme , & que L\ ils les ruèrent à coups de fcrpc ; qu'ils remontèrent cniuite dans la boutique ; qu'ils ouvrirent un coffre , Se volèrent ccnc trente ccus , huit Louis d'or , & une ceinture d'argent. Il avoua mefmc qu'après le meurtre ils fe réfugièrent prom- tcment dans Grande. cour , fortirent de Lion le lendemain par la porte du Rofne , burent en la maifon du Jariinicr en prefcnce de deux enfans , détachèrent un battcau du rivage, furent au camp de Sablon , &: puis à Beaucairc. Il ajouta que fur la route ils avoienc logé dans melmes cabarccs où le pay- fan l'avoit fait partcr au retour. Cette confeifion débrouilla Icscirconftanccs du crime. Car dans la boutique qui fi.ivoit de chambre , on avoir trouve une fcrpe à bûcheron neuve &c fanglance , avec une grolfc bouteille prcfque pleine de vin. Avant l'exécution de ce malheureux boflu , on a fait à Lion beaucoup d'expériences pour la lausfaftion des curieux , de- vant lesquels le payfan ayant parcouru la cave , marqua par le mouvement de fi baguette les deux endroits où le Mar- chand de vin & fa femme eftoient tombez en mourant. Mais ce ne fut pas fans fuer beaucoup. Son poux s'éleva , & il demeura prés d'une heure en cet elLic. Un homme de confiderarion qui trouve des fources d'eau , eftoit à la cave. Il prit la baguette , qui tourna fur les mef- mes endroits : il fentit d'abord un grand mal de cœur , donc il fe remit incontinent. Il fut au cabinet de M. le Procureur du Roy. La ferpe fanglante , &: deux autres de mefme gran- deur & du mefmc ouvrier, y furent rangées à demi aulne de diftance l'une de l'autre II pofa le pied fur chacune fuccefîi- vement , &: la baguette ne tourna que fur la fanglante Com- me cette perfonnc fe ret voit , clic fut faille dans les lucs d'u- ne agitation violente, qui l'obligea de moaccr chcî un de fes ao LEÎOURNAL amis ponr y prendre du vin , &: pour attendre que cette enio- tion qui .'m dura tout le foir , fuit appaifce. Deux jours après le paylan avec des archers fut renvoyé à Bcaucairc Se au (entier dont il a elle parlé , pour reprendre la pilèe des autres meurtriers. De là fa baguette le ramena par de longs détours dans Bcaucaire , à la porte de la mcfmr pri- fon où l'on avoir trouve le premier alfalTin. Il affura qu'il y en avoir encore un autre coupable dedans ; ic n'en fut détrompé que par le Geôlier qui lui dit qu'un certain homme , tel qu'on dccrivoit un des deux meurtriers qu'il chcrchoit , efloit venu depuis peu demander des nouvelles du boilu. Il fe remit en- fuite fur leurs traces , fut jufqu'à Toulon , dans une hôtclie- .ric où ils avoient dîné le jour précèdent , &: les pourfuivit fur la mer où ils s'ertoient embarquez. Il reconnut qu'ils pre- noicnt terre de temps en temps fur nos côtes , qu'ils avoicnc couché fous des oliviers ; &: enfin malgré les tempêtes , il les fuivit journée par journée jufqu'aux dernières limues du Royaume. Cependant le procès s'inflruifoitavec une grande exaditu- de ; &: quand le payfan fut de retour , le boflu fut condamne le 50. d'Août à élire rompu vif, & à palTer en allant au fup- plice devant la porte du Marchand de vin , où fa fenrencc fut lue. A peine ce condamné fut-il vis à vis cette maifon , que de Con propre mouvement il demanda pardon , & décla- ra avoir caufé la mort de ces deux perfonnes , en fuggerant le vol , & en gardant la porte de la cave pendant qu'on les cgorgeoit. Après l'exécution du boffu on a fait encore de nouvelles expériences , & il y a déjà huit perfonnes qui fe font trouvées revêtues de cette vertu ignorée jufqu'à prefent. Les uns font tourmentez aulTi-tôt qu'ils fe mettent aux endroits où le meutre a eftc commis. Les autres ne font agitez qu'une heu- re après ; & leur mal s'appaife en mangeant. Il y a une cer- taine perfonne âgée de foixante ans , & fçavante à chercher les fontaines , qui n'a fait néanmoins tourner la baguette dans la cave que très foiblcmcnt. On a pris garde aufli que la ba- guette entre les mains du payfan , ne tourne fur la bouteille donc DESSCAVANS. n dont i! a efté parlé , qu'à l'cndroic de l'anfc , par où les aflal- fins la tcnoienc fans douce , &: qu'elle ne tourne en ce cas qu'entre Ces mains. Ce payfan cft natif de S. Vcran prés S. Marcellin en Dau- phiné. Il Ce nomme jaques AimarTcrnay , &: eft ne le 8. S- p- tembre 1661 encre nunuit & une heure. Avec une bagucccc fourchue de coucc cfpecc de bois , &: coupé en touc ccrnps , il trouve la fourcc &c le cours des fontaines , les bornes , l'or Se l'argent cachez , fans que fon frerc unique air ce ralen;:, quoi qu'il fbit né dans le mcfme mois de l'année 16^4. Voila des faits fort ex trord inaires , donc je cacherai de rcn». drc raifon dans un auire Journal. BIBLIOTECA NAPOLETANA ET APPARATO A gli huomini lUufln in Ut t ère di NupoU {^^ del Regno , de/le fa. miglie_y terre , citta , t religioni che fono nello ftejfo Regno ; dal- le loro origini , fer tutto l'éinno 16^8. Opéra del Dottor Nicolo Toppi Patritio ài Chieti , Archtvario per S. M. Cattolica nel çrande Archivio deUa Regia Caméra délia Ss?nmaria , ^c. Jn Felt». In Napoli. & fc trouve à Paris chez Thomas Mocttc. LEs catalogues des livres (ont toujours utiles , en ce qu'ils montrent les lieux où chacun peut trouver les inftrudions &; les eclairciiTemens dont il a belbin. Celui-ci contient les noms & les ouvrages d'une infinité d'auteurs , dont il v en a quelques-uns qui eftoicnt peu connus hors d'Italie. S. Tho- mas d'Aquin n'eft pas de ce nombre , puis que , comme le dit celui qui donne au Public cette Biblioteque , il a cfté ua aftrequi s'eflant levé à Naples , a rempli toute l'Eglifc de l'é- clat de fa lumière. On trouve ici la table de toutes Ces œu- vres imprimées à Rome en dix-fepc volumes in folio , fous le Poncificac de Pie V. & enfuice une lifte de vint ou Théolo- giens ou Hiftpricns qui ont comp.ofc fon cloge. 1693. F il "LE JOURNAL RECUEIL DES TRAITEZ DE MATHEMATIQUE ^ui peuvent eftre nec((faires à un Gentil- homme pour fervir par ~^ mer ou par terre. Par le Père P. Hofte , de la Compagnie de JefttS , Profcffeur Royal des Mathématiques a Toulon. Jn 12, ^.vol. à Paris chez Jean AnliFon. 1692,, IL n'y a dans le premier tome que trois trairez , dont l'un cH: un abrège des fix premiers livres des Elcmcns d'Eucli-. de, avec quelques proportions de l'onzicme , . parence que les Catoliques d'Afrique ayent contrevenu au huitième canon du Concile d'Arles dans le temps qu'ils ob- fervoient religieufement tous les autres. D'ailleurs Optât n'a point elle dans les principes fur lef. quels faint Ciprien & d'autres Evêques de fon temps, avoient autrefois foutenu qu'il falloit rebaptifer les Hérétiques : au contraire il les a combattus. L'un de ces principes elloit , que l'Herecique qui n'a pas la grâce , ne la peut donner. Quiddatqui non hahet quoddeti difoit autrefois Parmenien. Optât lui rêpondoit que ce prin- cipe eftoit faux , parce que ce n'eft pas le Mmifire qui cohfc- rc le baptême qui donne la grâce , niais que c'eft J. C. 36 LE JOURNAL De pîus il eft confiant qu'Opcac foucicnr par tout que le baprcme confcré au nom de la Trinité, ne peut eftrc réitéré. Il eft vrai qu'en parlant du baptême valablement conféré, il excepte toujours celui des Hérétiques , & qu'en p'us d'un endroit il déclare qu'il le f.iut réitérer, parce que l'eau qu'ils y employent eft une eau profane, & qui n'elîace point le péché. Mais il eft vrai aulTi que dans tous ces endroits-là il le icrtde quelques termes qui font voir qu'il ne parle que des Héréti- ques qui erroient touchant le miftere de la Trinité. Quand le P. Pctitdidier défend Oprat de la forte, ce n'efl que par amour de la vérité. Car en d'autres endroits où il lui paroit qu'il s'eft trompé , il fe déclare contre lui. Par ex- emple , il l'accufe davoir tenu une erreur très confiderable, lors qu'il a écrit dans fon fécond livre , que l'homme peut en- trer dans la voye du flilut , & mefme y avancer beaucoup par "^ies feules forces du libre arbitre. De tous les Pères du quatrième fiecle aufquels M. Dupin attribue des erreurs , je n'ai plus à parler que de faint E- phrem , qui félon fon jugement, femble expliquer miftique- ment le feu d'enfer. Le P. Petitdidicr montre que faint Ephrem eft très éloigné de cette explication , &r que pour donner une véritable idée du feu d'enfer , il le reprefente comme celui qui confuma So- dome , & qui certainement n'eftoit pas un feu miftique. Ce qui refte de cet extrait fervira de fujet au premier ar- ticle du Journal de la femainc prochaine. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Medifations fur le Pater. Par le P. L^ AlleTnant. in 16. à Paris chez Jean Boudot. 1692. La véritable Politique des ferfomei de qualité. In 12. à Paris chez le me fme. i .6 9 z . A PARIS, Chez Jean Cusson , rui; faint Jaques , à rimaEs Reflexions de M. Cufac tendent à découvrir l'abus de j la pratique d'Hippocrate &: de Galien , fur ce fondement que les fréquentes faignécs cpuifcnt la chaleur naturelle , & ruinent les forces des malades j & à fubdituer en fa place ua efprit de vin préparé , qui procure la tranfpiration par laquelle fortent les humeurs corrompues qui caufoient &c entrete- Doicnt la fièvre &: les autres maladies. Il prétend que ce remède ôte les obflrudions , &: donne lieu à la chaleur naturelle de purifier le fang , d'en arrêter l'é- bullition , & de le rafraichir fans le tirer des veines ; de con- tribuer à la guerifon des playes compofées , &: de guérir ea peu de temps les fimples fans incifion , d'en dilliper la concu- Con & l'inflammation , & d'en appaifer la douleur. Sandonus efl: le feul qui a traite à fond de cette tranfpira- tion dans un livre imprimé à Venife en 1614, fous centre: jirs de Stattca Mcdtcma , aphorifmorum fethonibui feptcm corn- frehenfa , &: dont M. Cufac a inféré ici toute la doctrine. Pi DES se A VANS. 45 lA TOLERANCE DES PROTESTANS , ET L'AUTO- rite de l' Eglife , ou réponfe au libelle de M.Juriea , qui porte pour titre : Lettre Paftorale aux Fidcles de Paris , d'Oricans , &: de Blois , &c. avec une lettre k M.Juneu fut ce qu'il y a de ferfonnel dût.'S ce libelle. Pur M. Papm , de îilois , ci- devant Prêtre de C E^lifè Anqlicane , ^ à prefent réuni à. l' F.zlife CV- thdiqve. In 12. à Paris chez la Veuve de Claude Thibouf}, .& Pierre rErclallan. 1692, L'Auteur de ce traité eîevé dans la communion des Pro- tclians , &: inUruit dans leur ecoie , y apprit que le pre- mier devoir de chaque particulier eftoit de lire l'Ecriture, de Pinterpreter , & de juger des interprctatioMs des autres , pour choifir la meilleure. Dés lors il fît cette reflexion : Nos Do-, (^.eurs n'exigent pas que nous foumettions notre confcienceà leur autorité. Ils veulent feulement que nous la foumettions à l'Ecriture qu'ils croyent claire fur les articles de foi. Si ce- la eft , les articles fur lefquels ils ne s'accordent pas, ne font pas clairs , ni par confequent neceflTaires au falut : & partant ceux qui les entendent &: les expliquent différemment , font mutuellement obligez à.fe tolérer. Il s'apperçut depuis que cette maxime n'engagcoit à rien moins qu'à fupporcer tous les Hérétiques .- que c'edoic l'avis de M. Claude ; & que M. Jurieu qui paroit quelquefois le plus rigide de tous les Intolerans , ell quelquefois aufli le plus relâc4ié des Tolerans. A Bordeaux il connut les auteurs Anglois , &: les trouva prefque tous déclarez pour la tolérance , d'où il conclut que xous ces Minifires , pour ne pas abandonner leur principe , dévoient tolérer l'Eglife Romaine. L'oppofition de leurprin- i:ipe & de leur conduite lui fembia Çi importante , qu'il com- pofa un traité qui fut imprimé en 1687. à Roterd.im fans ion confentement , fous ce titre : La Foi réduite à fa jufes iornes. Le deffein qu'il fe propofa dans cet ouvrage fut de pcrfu^- i6j)3. M 4(S L E J O tr R N A L ^ der à Ces amis de fa communion de ce temps-là , qu'ils ne devoïenc pas exclure les Cacoliqocs de leur tolérance , puis' que cet Catoliqucs farfoicnt profcfîion de fuivrc TEcrcurc , & de ne rien recevoir qui lui fuft contraire. Ccft cet écrit que M. Jurieu a attaqué , & que M. Pjpin défend dans la première nartie de ce traité. La féconde partie cft divifée en deux livres. Le but du premier efl: de montrer , que la voye d'examen , &: la tolé- rance fans bornes détruifcnt le Chriftianifme ; ce qui ell mcr- veilleuferaent bien expliqué par un excellent palfage de Mal- donaf. Dans le fécond il efl: montré que puis que îa voyc d'ex»- nien n'eft pas fufiîfante pour fe bien conduire , il fuut neccf^ fairement prendre celle de l'autorité , & fe foumettre au té- moignage &: au jugement de l'Egliie. La lettre qui efl; à la fin de ce volume , ne contient que dcF dilFcrens perfonncls entre M. Papin & M. Juricu. DE REBUS SACR:S ET ECCLESIASTICIS EXERCI- tationes hiftorico-cntiCie , in qu:hui CardtnuLi B.iromi Annalei ab an. C ^f-ifi f«o Ciif{}*(>onui dcfiit , expfrtditntur s tunt ^ ~^ wulta ciàverfus BelLirmmum , Lightfootum , P^gium , ^aliot itfcttîiuniur , pîtirimique h:JïoriiC û" chronologie errores emen- d.tntur. Auitore Samuele JJaJndgio ïlot.fnuinvillcd. In ^,- yitrajcHi. 1691,. Es Excrcitations de Cafaubon contre Baroryjns , impri» imccs à Londres en 1614. ne s'cîtant étendues que juf- I qu à la trente- quatrième année de l'Ere chrétienne , M. Bafl nage MinilVre de Zutfen , lc5 continue dansce volume ju(l qu'à la quarante- cinquième , &: fait paroitrc beaucoup d'éru- dition & de jugement fur tous les points d'hiftoirc & de àiC- ciphnc qu'il y traite. Il révoque en doute la propofition fliite par Tibère au Se* nat , de mettre J. C. au nombre des Dieux , & fe perfuade ' que ce fait-là a pu eUte avancé de bonne foi par TercuUienj, CES se AV ANS. 4^ Je mefmequc celui d'une ftatuc errgéc ^ans Rome enrl'ftfHî- DCur de Simon , l'avoic efté par f*inc Juftin , quoi qu-r Turr &: l'autre pufîent eftre démentis par les Romains. Il croit que ce Simon le Magicien eft le mefine que eeim dont Jotc- phe parle dans le cinquième chapitre du vintiemc livre de ibn Hiiloire. L'impofition de mains , de laquelle il eft- parlé par faine Luc dans le huitième chapitre des Ades , donne fujet à M. Bafnage de s'étendre fur divcrfcs impofidoiis de mains quj -4- cfloienc en ufage parmi les Juifs. "'' La première cftoit celle qu'ils faifoienr fur les vi£timc*= pour les confacrer. La féconde , celle qu'ils faifoient fur ï-es perfonnes pour les bénir. La troifiéme , celle qu'ils fai- ibient fur les malades pour leur rendre la fanté 5 & la quatriè- me , celle qu'ils faifoient fur ceux qu'ils deftinroient \ quel- que miniftere. Quand ils ordonnoient un Lévite , ils lui impofoient les mains : & depuis les Apôtres les impofcrcnt de la mefmc forte à ceux qu'ils voulurent élever au Sacerdoce, AufTi M. Bafnage afiure-t il que pluiieurs autres importions de maiiis paflcrent des Juifs aux Chrétiens , comme celles des Encr- gu menés , celles des Catecumenfs , & celles des Péni- tens. A l'égard de l'impolîtion de mains par laquelle les Apôtres conférèrent aux Samaritains les dons du faint Efprit , il ne fait point de difficulté de dire qu'elle avoir quelque chofe d'extraordinaire , & rien du tout de commun avec la Con- firmation , puis qu'elle n'eftoit accon}pagnéc ni de Chrê- me , ni de figue de croix , ni d'aucune autre cérémonie pra* tiquée par les Catoliqucs dans l'adminiftration de ce Sa» cremcnt. Il employé beaucoup de paroles pour prouver que Pear- /ôn s'eft trompé quand il a dit que l'ufjgc du Chrême a efté introduit incontinent après le temps des Apotrcs. Il fou» ' tient au contraire que TcrtuUien qui vivoit au troifiéme fie- cle , eft le premier qui en ait parlé : que faint Juflin n'en- 44 L'E JOURNAL^ a lien die en dccrivnnt les cérémonies du Baptême j & que faine Irenéc en rapportant que les Valentinicns fe fcrvoicnc de baume quand ils confcroient ce facrcment , donne clai- rement à connoicre que les Catpliq\ies ne s'en fcrvoicnjc pàs. Enfin faifant reflexion fur les chanr;emcns furvcnus aux cérémonies obfcrvccs dans radminiihanon des Sacrcmcns, il en tire cette confequcnce , qu'elles ne font que d'infuiu- rpn ecclefiailique , èc non de la tradition des Apôtres. La multitude des belles qucftions que M. Bafnage agite fur les dix années dont )'ai parlé , ne me permet pas de les toucher en particulier. Ceux qui dcfircront s'en inflcuire , les verront dans l'original. MISN^ PARS : ORDINIS PRIMI ZtRAIM TITULI feptem. Latine vertit , ^ commentario iBufir.'.vu GuiUclmuS Cuifius. In 4. Oxon'te , è Theatro bhddoni.ino. EN faifant l'extrait de la grande Bibliorcquc de Jules £ar- toloccius de Celleno , dans le vint-lepticme Journal de l'année dernière , je rapportai fort au long ce qu'il dit de la I Jvltfcna , qui cft un livre compûfé au fécond fiecle de l'Ere Chrétienne , & qui contient les traditions des Juifs. Plufieurs Sçavans fe font appliquez à traduire en Latin quelques traitez de ce livre. M. Guilius ProfeilVur de l'Uni- ■ycrfiré d'Oxfort , en a traduit fept , & en auroit traduit beau- coup d'autres , s'il n'avoit eftc prévenu par la mort. Il a joint à (a traduction des notes, où il explique lestermes les plus difficiles de la Bible &: du Talmud , &: découvre plu- sieurs fautes des Dodeurs juifs. A PARIS, Chez JiAN Cusso n, rue faint Jaques , à l'Image de faine Jean Baptiilc. y^vcc Privilège du Roi. V. 49 LE JOURNAL DES SCAVANS Du LuNDY i. Février M. DC. XCIII. . jlPS. ANTELMII P. F.'C NOVA DE SYMBOLO ^ y4ihanaJiano difquifitio. Jn S. à Paris chez Antoine De- zallier , rue faine jaques. 1693. c E n'eft pas une queftion peu confidcrable parmi les Cri- / tiques de fçavoir quel cft le véritable auteur du Simbo- T Je qui porte le nom de faine Atanafe. L'on a cru pendant + pluiîeurs ficclcs , que ce Père l'avoit compofc pendant qu'il •, fut exilé dans les Gaules , ou pendant qu'il fut à Rome pour ^ défendre fa caufe devant le Pape Jules. Mais beaucoup de fçavans hommes ayant eu de grandes raifons pour en douter, Jean Gérard Vofllus publia fur cela une differtation particu- Jiere en 1641. par laquelle non feulement il montre que ce Simbole n'cit pas de faint Atanafe, mais il s'efforce encore de prouver que cet ouvrage eft fort récent , & qu'il n'a efté con- nu dans l'Eglifc que vers le dixième fiecle. Il n'eft pas mcfme éloigné de croire avec M. Pithou , que quelque Théologien François en eft l'auteur. Mais cet auteur mefme n'ayant pu eftre connu de plus prés , on a prefque abandonné ce fenti- ment ; &' l'on a foupçonné depuis , que Vigile de Tapfe Evê- quc d'Afrique , qui vivpic dans le fuiéme fiecle , eftoit ce- 1693. N 50 LEJOURNAL lui à qui l'on dévoie ce pccit traité , tant parce qu'il a publié quelques-uns de fcs livres fous le nom de (aine Atanafe, que parce que dans d'autres il fe fert de quelques phralcs & de quelques exprciïions qui font employées dans le Simbolé. Le P. Qjefnel a, tâché d'appuyer ce fentiment par beau- coup de conjectures &: de convenances , &: l'on peut dire que I cette opinion el\ celle qui a prefentement la vogue ; quoi- qu il ne manque pas encore de perfonnes qui vou Jroient con- I ferver ce Sirabole à faint Atanafe , &: qui ne font pas tout à à fait convaincus qu'il ne foit pas de lui. M. l'Abbé Antelmi ayant fait autrefois quelques remarques fur cette difpute , les donne aujourd'hui au Public dans une difTertarion nouvelle qu'il divife en quatre parties. Dans la première il ajoute quelques preuves fort fingulieres à celles qui avoient e'\è données jiifqu'ici , pour montrer que le Simbole n'eft pas & ne peut pas eftrc de faint Atanafe. Dans la féconde il fait une exacte recherche du temps au- quel ce Simbole a efté connu , & publié depuis tous le nom de faint Atanafe ; & en remontant depuis le dixième fiecle auquel Vofijus a prétendu que cette confellion de foi a com- mencé de paroitrc , jufqu'à d jutres plus reculez ; il avance û confidcrablemenc par cette forte de gradation l'ancienneté de l'époque de ce traité , qu'il la fixe par des caraderes très certains & très autentlques , vers le milieu du cinquième flecIc. Dans la troihéme partie il examine quel peut edre le pays de Faureur du Simbole , 6c s'il elt Afnquain ou François, il fait entrevoir qu'il cH François : mais comme l'on a déjà pré- jugé en quelque façon pour l'Afiiquain , & que prcfque tous les furtrages lont pour Vigile de Tapie ; M. l'Abbé Antelmi prouve qu'il ne fçauroit avoir compofé ce Simbole , i. parce que les traitez dans Icfquels on remarque des formules & des cxprelTions qui fe trouvent dans le Simbole , ne font poinc des traitez que l'on puiilc attribuer inconteftabicment à Vi- gile , au fentiment mcfme du P. Chifflet qui a donné l'édi- tion de cet auteur , Se qui avoue qu'ils ne peuvent élire mis que dani le rang des ouvrages douteux. Or , comme on le DESSCAVANS. ji tem'arquc ici , c'efl: une prétention infoutenable de vouloir c- tablir une opinion fur un principe qui n ert pas certain, z On fait voir encore que ces traitez ne Içauroient cftre de Vigile , & qu'ils font d'Idace , dont ils portent le nom ; &: l'on répond aux argumens du P. Chitflet d'une manière qui ne peut îouf- frirde réplique , & qui mente qu'on y fafle attention. 3 . On avance que quand mefme ces traitez feroient de Vigile, oh ne pourroit tirer une bonne indudion de la conformité de quelques expreflTions qui leur font communes avec le Simbo-- Ic , pour le lui attribuer ; puis que faint Auguftin en a adopte de femblablcs dans quelques-uns de fes livres , fans que pour cela on Ce foit jamais avifé de douter qu'il puft eftre l'auteur du Simbole. 4. Et fur ce que l'on oppofe , que Vigile ayant publié quelques uns de fes traitez fous le nom de faint Ata- nife , &c fous celui de quelques autres Pères , pour leur don- ner plus d'autorité , il y auroit plus d'apparence qu'il euft au{l fi compofé le Simbole , auquel , dans cette mefme vue, il au- roit fait porter le nom de faint Atanafc : fur cette objection , dif-je , M. l'Abbé Antelmi forme une nouvelle preuve pour fon fillêmc : car il fait obfcrver fort à propos , que le Simbo- le ayant paru dés le commencement fous le nom de fbn au- teur , ceil une marque infaillible que Vigile ne lui a pas don- né l'eftre , puis que runiqiie but de celui-ci n'ayant dû eftrc que d'autorifer fa nouvelle confeflïon de foi par le nom de S. Atanafc , il n'auroir pas manqué de le mettre à la tefte de fon ouvrage ^ & ne l'ayant pas fait , il eft vrai de dire qu'il ne l'a pas compolé. La quatrième partie eft plus étendue que les autres : car êflant dtftinéc à découvrir l'Ecrivain François qui a pu edre l'auteur du Simbole , M. l'Abbé Antelmi propofe certains nouveaux traits ou caraderes fort fpecifiques pour le recon- noitre. Il en marque jufqu'à dix , &c juftifie parfaitement qu'ils fc trouvent tous en la perfonne du célèbre Vincent de \ Lcrins , l'auteur de l'avertillemcnt contre les hcrcfies. C'cfl de ce traité mefme qu'il tire prefquc touces les preuves de ce qu'il avance ; Se il cil vrai que par dellus tout U y a fait re-- 5» I. EJOURNAL marquer un grand nombre d'cxpreflions , de tours , & de tranficions fî juftcs &: li mcfurccs avec celles du Simbole. qu'il fcmble que les unes &i les autres ne peuvent avoir eftç conçues que par un mermc efprit , ni tracées que par une jnelmc plume/ Et ce qui fortifie d'autant plus ce jugement , c(\ que l'auteur de la dillertation rapporte encore un pall'age formel de Vincent de Lerins , par lequel il s'engage folen- nellement à retoucher plus au long ces exprellions mefmes qui regardent la confelîion du miftercde la Trinité, ôc celui de l'Incarnation du Verbe ; Se c'eft ce qu'il ne fçauroit avoir rempli plus exactement , ni d'une manière plus éclatante que parjc Simbole mefmc , qui efl tout confacré à cette ex- plication. Rien ne pourroit donner atteinte à ce nouveau fiftêmc,quc Je filence de Gcnnade > qui ne parle point de ce Simbole en parlant avec eloge de l'avertiflcment du melme Vmcent de Lerins contre les hcrefies. Mais outre qu'une preuve nega- .tive ne feroit pas reçue contre tant d'argumens pofitifs , M. i' Abbé Antelmi en découvre la foibleife , en faifant voir que Ccnnade a négligé ou oublié de mettre beaucoup d'auceurs François dans Ton catalogue. Il démontre encore qu'à 1 égard de ceux qu'il y a placez , il ne fait pas mention de plulicurs traitez qui leur appartiennent. Et il remarque enfin que dans cetre mefme efpece d'ouvrages & de fimboles Gennade n'a point du tout parlé dans le dénombrement des livres de faint iHilaire d'Arles , d'une admirable expofition du Simbole, que Tauteur de fa vie lui attribue comme une des plus belles pro- ductions de fon efprit. L'on voit donc allez par là , que cet argument négatif ne prouve rien contre Vincent de Le- rins , & que tous les autres qui font pour lui fubfillent dans leur force. Ainfi quoi que M. l'Abbé Antelmi parle fort modeftemenc de fon fillême , & qu'il offre d'en embraflcr un meilleur lors qu'on le lui prefentera , il eft pourtant fcur que celui-ci , roue nouveau qu'il paroit , ell établi fur des raifons très folides, &c qu'il en fournit auffi qui font plus que fuliifantes pour ré- • pondre DES se A VAN S. 55 ^pondre aux difficultez qu'on peut lui oppofer. Et s'il ne fauc que cette allurance à Ton auteur pour l'obliger à donner au Public de pareilles remarques qu'il fait cfpercr fur le Simboie des Apôtics ,on peut lui répondre qu'il ne les donnera jamais auflî-tôt qu'on le fouhaitc. DISSERTATIONS SUR LA PHILOSOPHIE DES yicademiciem. Livre troiftéme. In 12, à Pans chez Etienne Michallec. 1692. QUoi Qji^E pluficurs dogmes des Académiciens ayent déjà elle rapportez dans le premier livre, qui contient l'huioire de ces Piiilofophes, néanmoins M.Foiicher a trouve bon de les rapporter encore ici pour combattre l'opinion vul- ' j gaire p:ir laquelle on s'imagine que les Académiciens dou- toient de toutes chofes, & a voient renoncé à toutes les fcicn- ces. 11 montre premièrement, qu'on n'a pas toujours fait le mefmc jugement de ces Philofophes , puis que Philon qui a çftc le chef de la quatrième Académie , a foutenu hautemenr que les nouveaux Académiciens n'avoient point efté dilferens èiÇ^s premiers en ce qui regarde le fond de la doiTtrine , mais feulement en ce qu'Us ne dogmatifoient pas fi ouvertement : ce qui a obligé Ciceron de dire d'ArcefiIas : lAuluu dcdoceie quos videbat mule docioi ^ quam docere quoi dociles non arbitraba, îur. Or il eft certain que les premiers Académiciens n'ont point douté de toutes chofes ; &: c'ed ce qu'on ne leur a ja- mais attribué : de forte que la question ne regarde que les nouveaux Académiciens , dont Arcefilas a elle le chef ; &: lors que Phi'on réduit les nouveaux Académiciens à la à.o- flrine des premiers , il prouve conftamment qu' Arcefilas &: « fcs fectatcurs ont reconnu plufieurs veritez , parce que les au- ' ciens Académiciens en avoient reconnu plufieurs. C'eft ce que l'auteur prouve par le témoignage de Ciceron qui dit : Philo putarat duas Academtas ejfe , etrore?ttqut eorum qui ita />«- tarant coarguit. Antiochus chef de la cinquième Académie , avoir encore entrepris la mefmc chofe. De plus Scxtus £m- piricus témoigne qu'on difoit d' Arcefilas , qu'il enfeignoit en 1693. Ô j4. LËJOURNAL' fecttt les dogmes de Platon à côux qu'il ch jugeôÎÉ Capables; <^uoi que publiquement il s'appliquait à combattfc lis préju- gez des Dogmatiltes de fon temps. Pour ce qui regarde le fcntiment de faitlt AUguftin , l'au- teur afTure que ce Père a cru qu'ils avoient cohfcrvé la dotSlrU ne de Platon -, Si pour le prouver , il cite la lettre à Hermo- genicn , &c la conclufion du troifiémc livre des Académiciens,- où famt AugulHn parle en ces termes : Qjta fit uutem /!c:ide- micorum fententij , Dtus viderit. Eam tamen arbitror Platonis ftiiffe. Et il renvoyé à Ciceron , qui dit que ces Philofophes avoicnt accoutumé de cacher leurs fentimens , &: de ne les découvrir qu'à kurs intimes amis. Nec e.iin cuitjuum nifi qui fccum nfque ad feneciutim zuxiffet , aperite confuevijfe. Après avoir fait connoitre que l'on fe trompe en fourenanC ; que les Académiciens doutoicnt de toutes chofcs , M. FoU- cher recherche la caufe de cette erreur j & il trouve qu'elle vient de ce qu'on s'imagine communément , qu'en aétrui- lant la certitude des fens , on s'exclut de la connoiirance de la vérité ; d'où l'on infère que les Académiciens ne voulant point reconnoicre les fens comme juges de la veiiré des cho- ies qui font hors de nous , fe réduilbiCnt à l'impodibilité dé fbrtir de leurs doutes. Mais les Acadeniiciens avoicnt un O/^ ivTiiim rationnel , qui leur fcrvoit de guide pour les conduite à la connoillance de la vérité -, &: c'eft ce que les Stoïciens ne comprenoient pas. Outre cela , on autorife ce faux jugement que l'on fait des Académiciens , fur ce que Ciceron leur attribue certaines propolîcions qui femblent décifives contre eux : car il leur impute d'avoir dit , ^ué tontes chofa ejls'.ent in.b't ptihfnfiblei ^ èi. qui L'on vt potivoit rien [(^avoif. Mais outre que l'auteur ex.» pliqué CCS propoiitions , & lés interprété en un Cens qui s'aC* corde aVec le (îlléme qu'il fe forme de ces Philolbphés , Ciceron attribue ces mefmès propofitions à Socratc , à" Platon , 6^ à prefque tous les anciens. ï)'\:>\i il s'enfuit quô s'il el^ vrai qUc quand on prouve trop on ne prouve tieti , il f.iut conclure que ces piopofitions ne font pas plus con- tre les nouveaux c^a. contre les anciens Académiciens , quô DES se AV ANS. ff l'on Tçait eoftftatriment avoir eu des dogme* , éz avoir re- connu pluficurs veritez. Cependant cette erreur a efté c.uifc de ce qu'on a négligé jufqu'à cette heure de s'inftruire d'une Philofophie que l'auteur prétend élire la meilleure de toutes , & laplusfolide. Enfuite il diftinguc les Académiciens de toutes les autres fortes de Philofophes , des Pitagoncicns , des Platoniciens , des Epicuriens , &d de rouies les autres Ccd:cs de Dogmatidcs, tant Pofitifs que Négatifs , 6c enfin des Sceptiques ou Pirro- liiens. 11 les compare auffi avec les Cartefiens, & fait voir en quoi ils Conviennent & en quoi ils difconviennent. Il finit par quelques reflexions fur la meilleure manière d'enfeigncr & d'appren- dre , qu'il prétend ertrc celle des Académiciens , & fur l'u- fâge des mots pour découvrir la vérité , foit de vive voix , ou par écrit j en quoi il fait voir que ce n'efl: ni la lettre ni le Con des paroles , qui inftruifent , mais les conceptions claires &: réglées que l'on fe doit former depuis les premiers principes, fuivant la metode des Acadcmiciens. DE L'AMITIE'. PAR M. L'ABBE' *** /» II. à Paris chez Etienne Michallet. 1692. ON trouve dans ce petit traité l'idée de Tamitié , avec fes avantages , fes loix , fes devoirs , {es défauts , &: les qualitez neccfT.iircs à un ami, La plus jufte idée de l'amitié eft une parfaite conformité de fentimens, accompagnée d'une bienveillance mutuelle. Le mérite & la raifon lui donnent naidance ; l'eftime & la con- fiance l'entretiennent. Elle efl: rare parce qu'elle cil trop no- ble , & qu'elle requiert efrcnticllcment la generofité & la pro- bité. ' Les avantages de l'amitic font le bien honnête , l'utile , Se l'agréable. Rien de plus honnête que d'aimer quelqu'un pour lui fans aucun retour fur nous. Rien de plus utile qu'un ami Édcle qm ne nous flate jamais. Rien de plus agréable que [& 5-5 L E J O U R N A L plaifir que l'amitic caufc. Il fc faic mieux fencir qu'il ne fc peur exprimer. La principale loi de l'amicic cft, qu'elle ne peutcftre qu'en- tre des gens vertueux. Le premier devoir de l'amitié cfl:,de tenir exactement fa pa- ro"c , &: de garder inviolablcmcnt le fecrer. Le grand défaut de ramitié efl la flatcric , qui marque le ' peu de finceritc de celui qui Hâte , &c la mauvaiic opinion qu'il a de celui à qui elle s'adrefTc. La probité , la vertu , la fidélité font les qualiccz les plus ciTentielles de l'ami. D'ailleurs il faut qu'il ait l'efprit bien f^it , le cœur tendre , l'humeur égale , qu'il publie les fervi- ces qu'il reçoit , & oublie ceux qu'il rend. L'ANTIQUITE' DES TEMPS DETRUITE , OU peti/c à U défenfe de l' Antiquité des temps. Par te R. P. OU RE- Mi- chel Lequicn , de l'Ordre des Frères Prefcheurs In 1 1 . à Paris chez Jaques y lUeri , rue de la vieille JBouclcrie , &: Louis Guerin , rue faine jaques. 1693. LE titre de Défcnfc de l'antiquité des temps , que le P. Pezi'on a donné à fon dernier ouvrage, ne paroit point du tout Julie au P.Lequien, parce qu'il prétend que fon advcrfaire bien loin d'y avoir détruit plufieurs objedions confiderables qu'il lui avoir faires dans fa détenfe du texte Hchreu, né les a pas feulement effleurées j ce qu'il trouve d'autant plus étran- ge , qu'il efl: bien pcrfuadé que cela ne vient d'aucun mépris que ce fçavant Bernardin fade de fon livre , puis qu'il en té- moigne une ellime particulière , & reconnoit de bonne foi qu'il eft écrit avec plus d'cxaditudc &; plus de jugement qu'un autre auquel il a bien voulu répondre. Le P. Lcquien confirme dans la préface ces objcdions par de nouvelles réflexions & par de nouvelles remarques, !>c infinue que quand le texte Hébreu auroit efté corrompu , comme le P. Pezron le foutient , il ne pourroit montrer les endroits qui auroicnt cfté altérez , pour n'avoir pas une allez grande connoi/fancc de cette langue. Il prouve DES s CA VANS. 57 îl prouve dans le premier chapitre , que quand les Apôtres ont cité l'ancien Teltamenc , ils ont préféré le texte Hcbreu x a la veriion des Septante , &: qu'ils n'ont eu recours à celle-ci que par condefcendance pour les Payens & pour les lu.fs con- vertis au Chridianifmc , qui avoient accoutumé de la lire. Pour ne laifl'er aucun iieu d'en douter , il remarque que les palFagcs que les Apôtres ont citez de la verfion dts Scpcantc-, /ont conformes au texte Hébreu quant aulens ; & qu'a l'égard de quelques endroits de l'Evangile de faint Marhieu Se de l'Epitre aux Hébreux , qui s'accordent avec les Septante, c'efl: qu'ils ont elle changez par les Interprètes qui les ont tra- duits pour des gens qui ne les ponvoient lire qu'en Grec. Dans le fécond chapitre il tâche de faire voir que ce que je P. Pezron avance que le texte Hcbreu a efté falffié par K. Akiba dans le temps qui s'cll écoulé depuis la delhudica dejcrufalem jufqu'au milieu de l'Empire d'Adrien , ell: une pure imagination -, que la tradition qui portoit que le Mclîie r des médailles battues fous le Pontife Simon , où l'on voit des caraderes femblables à ceux des Samaritains , c'eft à dire les lettres Greques renverfées Se un peu polies , différentes des lettres quarrées dont les juifs fc fcrvoicntpouf écrire les livres lainrs. En répondant dans le chapitre fuivant a. d'autres objections du P, Pezron contre l'intégrité du texte Elebreu , il fe fert d'une lettre manufcrite du P. Morin , & d'un partage de fes Exercitations fur la Bible , pour montrer qu'il n'a pas cru que les Juifs eulfent altéré les Livres Sacrez ; enfuite de quoi il réfute ce que le P. Pezron a avancé touchant les Deu- çerofcs. Au commencement du fcptiéme chapitre il avoue que plu-, fieurs Pères ont fuivi la cronologie des Septante : mais il leur oppofe Jules Afriquain , & Euftbe , qui (e font contente^ de propofer les deux cronologies , fans fc déclarer ni pour l'une ni pour l'autre ; & Jofephc , faint Jérôme , & faint Augu- ftin , qui ont (uivi celle du texte Hcbrcu. 11 prouve après cela que celle du texte Samaritain cil corrompue en plufieurs endroits Dans le huitième chapitre il rejette comme fabuleufe la durée que l'on attribue aux Dmafties d'Egipte, &: montre qu'elles font dans une grande confulîon , qu'elles ne font pas pour la plupart diredes, mais collatérales feulement , & que pluficurs Princes ditferens ont cfté mis dans les mefincs fous diflcrens noms. Il contelledans le dernier chapitre la fucceiîîon des Rois Caldeens , &: des Rois Arabes que quelques-uns prétendent avoir régné dans Babilonc avant Ninus Pour ce qui cft des Rois de la Chine , il foutient qu'il s'ea DES se A VANS. j^ /aut tenir à la dernière des trois opinions qui régnent dans ce pays- là touchant l'antiquité de la nation , & qui confifte à di- re qu il y a 402 5. que le Royaume commença par un Prince nommé Yao. Le P. Lequien prie ceux qui liront Ton livre , de corriger «ne faute que les Imprimeurs ont faite à la page 243 . où ils ont mis que le livre de l'Ecclefiaftique fuc écrit fous Artaxer- ces. Il faut mettre , depuis Artaxerces , comme la fuite de ion raifonnea^ent le fuppofe. LEXICON MATHEMATICUM , HÔC EST RERUM omnium ad univerfam plane Maihejim , quoquo modo , directe vel indirecte fpectavtium , coUeîiio ^ explicatio , contineni termiïiorum , prafertim exoticorum , dlucidationcm , nominii latioïiem atque etimoloqjam , principia , pracepta communia , axiomata , ^^. ac brevem ^ exaftum doftrina truditionem ;■■ adjeftis , ué>i opus eft ^fchematibui , ad pleniorem tyronum iniel^ ligentiam , ui non immento quadrivium fcientiaium , ac totiui M.athefis promptuarium dici poijit. authore Mieronimo Vttali , Clerico Regulari. In 4. Ronia. &C Ce trouve à Paris chez J, Boudoc , &ù Jean Anilfon , rue faine Jaques. 1691. CEtte féconde édition a tout ce qui la pouvoic rendre propre à exciter la cunofité des ledeurs , &c à leur don- ner du plaifir. Elle eft beaucoup plus ample que celle qui pa- rut à Paris il y a déjà quelques années, &: comprend non feu- lement les termes dont on fe fert dans toutes les parties des Matematiques , mais encore ceux dont on fe fert dans la Phi- lofophie , dans la Médecine , dans la Géographie , &: dans les autres fciences. L'auteur n'a pas pourtant cru fe devoir engager à décrire toutes les régions. Il a renvoyé là delfus fes ledcurs aux vo- cabulaires des meilleurs Gcographes. Mais en récomperife il a fait d'agréables digreffions fur divers fujcts. Il y en » une fur l'Aftrologie , où il diftmgue la judiciaire , qui fe mêle de prédire les avions libres , & qui eft défendue par les loix ; & celle qui faïc profeffion de connoitre les effets par leurs êo LE JOURNAL caufcs , & d'obfcrver les faifons propres à la Navigation , %. la culture des terres , & à l'application des remèdes. 11 aver- tit néanmoins que cette dernière, bien que moins incertaine que l'autre , ne lailîe pas de fc tromper Ibuvcnt dans Tes con- jedurcs. LE PARAVENT DE LA FRANCE CONTRE LE ,veni: du Nort , ou Réflexions fur un livre anonime , intitulé : Le vrai interelt des Princes Chrétiens depuis , &:c. In 12. k Poitiers. i6qî. i> quorumdam ejus qejioyum ordine , anno monu^ili , nccnon de i- S. Briccto fucccffjre , Jofephi Amelmii Epifiola , ad R. P. Ant. Pagium , M. F. C. In S. à Pans chez Antoine Dezallicr,. rue faint Jaques. 1693. IL ne faut pas s'étonner que l'on difpute encore fur les an- nées de la naiirance , de la vie Se de la mort de J. C. donc -Jes Evangeliftes n'ont parlé que fort obfcurément , puis quç l'on n'eft pas mefme d'accord fur 1 âge & fur l'année de la mort de faint Martin , qui a vécu plus de trois cens ans après, & duquel tant d'hiftoriens contemporains & autres, ont ccric la vie , & marqué les années avec beaucoup d'exadirude. Car encore que ceux-ci n'ayent pas manqué d'eflre fuivis en divers temps de beaucoup d'Ecrivams qui ont tâché d'eclair- cir les endroits des anciens qui paroiilent oppofez , il elt feiir pourtant que toute leur apphcation femble n'avoir fervi qu'à rendre les difficultez plus grandes , & à donner matière à un nouveau travail pour les refoudre» M. l'Abbé Antelmi n'a pas laifle de l'entreprendre ; &: quoi qu'il femble qu'on ne pufl'e rien ajouter fur un fujet fi rebattu, 1693. Q_ 6i LEJOURNAL il y a pourtant trouve quatre nouveaux points de critique à? propofer & à difcuter avec beaucoup d'érudition , en fc re- tranchant feulement fur ce qu'a écrit Severe Sulpice. Il les adreife à un autre fçavant homme, G connu par Ces belles cri- tiques fur B ironius. 11 établie dans le premier point, tout ce qu'on peut dire de plus raifonnable fur l'âge de fiint Martin ; &c il fait d'abord remarquer, que l'endroit fameux où Sulpice avoit donne a. ce Taint foixante & dix ans , lors que vers l'aii 3 86. la femme du Tiran Maxime le fcrvit à table dans un repas qu'elle avoit elle mefme voulu apprêter , a efté vifiblement altéré ; com- me il le juftifie par l'autorité des manufcrits , & par l'impo/lî- bilitc qu'il y auroit d'-iccorder fans cela Sulpice avec lui mef- me , lors qu'il ne donne que dix- huit ans à faint Martin en 5yé. auquel il le fait foidat. Comme c'elloit-là l'ecueil ordi- naire des Hiftoriens &: des Cronologiftes , qui ne manquoienc pas de fe donner de trop grandes hbertez povtr rétablir le tex- te de Sulpice , & pour lui faire dire ce à quoi il n'avoir pas penfé , l'auteur de la nouvelle lettre les réfute , & prouve qu'il ne faut plus s'arrêter ni à leurs raiions , m au pallage corrompu de Sulpice. Mais il fait obferver en mefme temps par d'autres témoignages de celui-ci , que faint Martin n'elt pas mort à l'âge de 64. ou de 66. ans ; ce qu'il faudroit pour- tant avouer , s'il efloit vrai qu'il n'en eu(t que i 8. lors qu'il portoit les armes fous Julien. La dilcudion de ce fait important eft la matière de la fé- conde partie de la lettre. L'auteiir y découvre la véritable origine de l'erreur , en prouvant invinciblement , que faint Martin n'a pu combattre (ous Julien : & il rapporte pour ce- la des caradercs de cronologie fi autorifez , & des témoicna- gcs (ï formels , qu'on fera contraint d'avouer avec lui , que Sulpice pourroic bien avoir pris dans cette occa.'ion quelque General d'armée du nom de Julien, pour Julien l'Apoftac , comme il a pris dans une autre Hilaire Diacre de l'Eglife de Rome, pour ("aint Hilaire de Poiriers ; Ci le nom de Julien ne s'eft point gUflc dans fon texte par quelque autre avan- ture. DES5CAVANS. 6^ De quelle manière que ce puitle eftre , M- l'Abbé Antel- m'i prétend qu'on peut s'éloigner de cecte rencontre , après que Paulin de Perigord & Fortunac , qui le fuivent preique mot 3. mot dans leurs vers , l'ont abandonné -, ce dernier té- moignant mefme , que quand fhint Martin fut congédié de' fa milice , il alla dans l'iralie , où il demeura long-temps , &: non pas dans les Gaules pour y voir faint Hilaire , ain(î que l'écrit Siilpice , lequel n'a pas pris garde que faint Martin n'auroit pu faire ce voyage dans la fin de l'an 356. puis que faint Hilaire Evêque de Poitiers , avoir déjà elté exilé en Phrigie. Ce fait qui n'avoit pas encore eflé bien eclairci, donne lieu de rétablir l'ordre des adions de la vie de faint Martin, Hc de parler avec plus de certitude de fon âge. Le troificme point de critique que cet auteur examine dans fa lettre , regarde la grande queftion de l'année delà mort dà faint Martin , que Sulpice fcmble fixer en l'an 400. & que Grégoire de Tours met trois ans auparavant. M.l'Abbé Antelmife détermine à la vérité en faveur du pre- mier , &c rapporte pour cela un beau monument de l'antiqui- té dans une infcription qui nous avoit efté inconnue jufqu'à prefent, par laquelle il paroit que la nuit du Dimanche qui tombe dans l'onzième jour de Novembre , efl: le jour de la mort de S. Martin , & non celui de fes funérailles ; comme le prétendent les partifans de l'époque de Grégoire deTours-. Et quoi que cela femble trancher la difficulté , parce que la lettre Dominicale ne tomboit pas dans l'onziémc Novembre l'an 397. mais feulement l'an 409. l'auteur de la lettre ne laide pas de propofer les raifons qu'il y auroit de douter que cette nuit du Dimanche 11. Novembre , ne fuft plutôt celle qui pilfe du Dimanche au Lundi , que celle qui pafle du Samedi au Dimanche. Car en ce cas il faudroit avouer que faint Martin feroit mort l'an 401. 11 met cet argument dans toute fa force , par la difculfion de tous les evenemens qui ont concouru dans la condamnation de l'hercfie & de la perfonne de Prifcillien , dans lefquels faint Martin a eu tanc de part. Enfin il ne diifimulc pas une nouvelle difficulté q.u& ^4 LE JOURNAL^ l'on peut encore oppofer pour foucenir la prétendue époque de Grégoire de Tours. Le quatrième point delà lettre ne regarde pas direftcmenc faine Marcin : il regarde en particulier faint Bricc Ton fuccefl icur immédiat. C'cll une nouvelle difcuflion de critique, .dans laquelle M. l'Abbé Antclmi entreprend de julliilcr (iunc •Bricc des crimes qu'on lui impofe , & Sulpice du rcptochc qu'on pourroit juftcment lui faire de les avoir autorijez par ion tcmoisnage. II y prouve donc que ce Brice ou Briccius , fuccefleur de S. Martin , ell: différent de BuBio Prêtre , que Sulpice accufe d'avoir ajouté a fcs autres excès celui de perfccuter &: de ca- lomnier (on Evéque : Ce que Grégoire de Tours , ou ceux qui ont altéré (on hilloire, n'ayant pas fçu dilbngucr, ils ont attribué au faint Prélat Brice tous les déreglemens ào\\x.Bii- iiio Prêtre eftoit coupable. En effet M. l'Abbé A.ntelmi fait remarquer que Sulpice qui a écrit fcs dialogues huit ou dix ans après la mort de S. Mar- tin , ne marque point que ce Briîiio duquel il fait l'hiftoire dans l'un de ces dialogues , ait efté le fuccellcur de fon Siège. Il en parle au contraire comme d'un très méchant Prêtre, qui avoir mérité mille fois d'cllre dépofé , &: que faine Martin néanmoins vouloir bien foujfrir , comme Jefus-Chrift avoit foutfcrt Judas. Or qui croiroit , dit ce Critique , qu'un hom- me auflTi faint & auffi prudent que l'eftoit Sulpice , euft parlé en des termes fi durs de faint Brice , s'il euft pour lors occu- pé Je Siège de Tours : car il en euft elle Evéque au temps que iîulpice ecrivoit fes dialogues. • 11 ajoute à cet argument beaucoup d'autres raifons très for- tes , que les bornes que je me prefcris ne me permettent pas pas de rapporter, 'it il en conclut que la relfemblance des ïioms de BriBio Se Bncciui ont efté la caufe qu'on a ainfi con- foudu leurs adions. Voyages DESSCAVANS. 65 VOYAGES HISTORIQJTES DE L'EUROPE. Tome premier , qxi comprend tout ce qu'il y a de plus curieux ^ en France. In 12. à Pans chez Pierre Aubouyn , quai des Auguftins. 1693. CE n'cfl ici que le premier de huit volumes que routeur promet fous le titre de Voyages Hilloriques , & qu'il a compofcz tant fur fcs propres remarques , qu ' fur les iT>emoi- res d'un de Tes amis , que ia mort a empêché de les mettre en ordre , & de les donner au Public. Ce volume-ci ne regarde que la France : mais il contient quantité de parncularitcz , aufqueiles on n'avoit peut-eftrc pas fait toute l'actention qu'elles méritent. J'en mettrai ici une affcz fingulierc. Il y a peu d'années qu'un homme de ' Tarafcon faifant creufet dans fa cave qui eltoit aflez proche ' du Rofne , y trouva un mur dans lequel il y avoir une porte de fer. Elle ne fut pas (itôt ouverte qu'il vit une voûte d'où il entendit un bruit fi effroyable , qu'il n'ofa porter fa curio- té plus loin. Les Magiftrars qui voulurent découvrir ce que c'eftoit , promirent la vie à un criminel condamné à mort, au cas qu'il allaft reconnoitre cette voûte, il y entra , & muni de tout ce qu'il crut capable de l'afliircr contre le danger , il alla jufques au bout où il trouva une autre porte de fer , & rapporta que le grand bruit qu'il avoir ouï eftoit au milieu de la voûte , &: fcmbloit eftre au deflus de fa telle. La carioficé des Magiûrats augmentée par ce rapport , en- gagea des ouvriers parla promeile delà vmt-cinquicme par- tie des richcifcs qui fe trouveroient dans cette galerie foucer- rainc , à aller jufqu'à la dernière porte , & à l'ouvrir. Ils l'ou- vrirent, & trouvèrent qu'elle conduiloit dans la villede Beau- caire , & que le bruic qu'ils avoient entendu neprocedoitquc de la rapidité avec laquelle roulent fur cette voûte quantité de pierres que le Rofnc entraîne. Depuis ce temps là les ma- çons de Tarafcon ont dit que la vint- cinquième partie de ^^eaucaire leur appartient. 1653. R 66 LE JOURNAL VOYAGES HISTORIQTIES DE L'EUROPE. TOME "^ fécond , qui comprend tout ce quily a de plus curieux en Efpagne é- en PortHZdl. In 12. à Paris chez Pierre Aubouyn , qiui des Auguftins. 1693. LE promt débit qu'a eu le premier tome de ces voyage?,. &: les deux traduclions qui en onc cité faites , l'une en Flamand , & l'autre en Anglois , ont avancé la publication de ce fécond , qui reprc fente tout ce que l'Efpagne a de plus digne de la curiofité des Etrangers, 0{^ y voit d'abord les funeftes effets du jufte refTencimcnc de Julien , qui pour vanger l'cutrage fait à fa fille par D. Ko- ^ dricruc ufurpateur de la fouvcrauie puifl'ance , appella les Mores , qui le vainquirent en plus d'une rencontre , & s'é- tablirent par la force des armes dans une vafte étendue de pays , d'cij après une longue fuite d'années , ils ne furent entièrement chalfez qu'au commencement du ficclc cou- rant. A mcfure qu'ils furent contraints d'abandonner quelque province , celui qui y avoit le plus de crédit , s'y fit rccon- noitre pour Souverain ; & c'clt ainfi que fe formèrent les differcns Royaumes , qui après la mort de Ferdinand & d'I- fabellc, fc rèiiiurent en la perlbnne de Philippe perc de Char^ Ic-quinr. Les titres faftueux pris par ce Prince , & par ceux qui lui ont fuccedé , font rapportez ici tout au long , avec l'étiquete du Palais , qui apprend ce que les Rois d'Efpagne ont accou- I tumé de faire en chaque faHbn , à chaque jour , & à chaque heure , avec les maximes du gouvernement prcfcnt , & (es différences de l'ancien. Car au lieu que les hftats Généraux rcgloicnt autrefois les difterens qui furvenoient touchant les affaires publiques , ils ne jouiffent plus aujourd'hui de ce droit- là. ■ Il y a jufques à quinze Confcils qui fe tiennent à Madric dans des chambres tcllcmcnc difpofccs le long d'une galerio,. D E s s C A V A N s. éi éwc le Roi peut entendre d'une jaloufie tout ce qui s'y die. La fevericé de celui de l'inquificion y a caufc la perte des Pro- * tinces Unies , & le dcpeupicment de rEfpagnc. L'auteur n'oublie pas les quatre ordres de Chevalerie. Cc- Jui de la Toifon d'or n'cfl: qu'un titre d'honneur que les £fpa-| gnols fe foucientpeu d'obtenir. Les trois autres ont des Com- fnanderies , dont le revenu elt exprimé ici fort cxadcment, avec le temps de l'inftitution de chaque Ordre. Un des plus beaux privilèges des Chevaliers eft qu'Us peuvent s'afleoir &: fe couvrir en prefence du Roi lors qu'il tient la Chapelle. La découverte des Indes Occidentales , &: les richellcs que J'Efpagne en tire , font un des p'us confiderables endroits de cette relation. Le Roi a le dixième de tout l'or qui eft tranf. | porté fur i'cs vaiifcaux en Europe. Mais il eft fouvent fruftr» de la plus grande partie , par l'adrefl'e des Capitaines des ga- lions , & par l'avidité des Marchans Etrangers , aufqucls les- Efpagnols naturellement parcifcux , ont abandonne prcfquc tout le g-iin. Les dix derniers chapitres contiennent un grand détail de ce qu'il y a de plus fingulier dans chaque Royaume , des ri- vières , des porcs , des villes , des palais , & des Eglifes. Le Royaume d'Arragon avoir une forme particulière d'clirc fes Souverains , qui rehaudoit extrêmement le pouvoir &: la di- gnité des Eledeurs. La ville de Grenade a cent trente tours , dix huit portes , cinq places, &r des palais bâtis par les Mores; L'Eglife de Cordouë eft un des plus beaux relies de leur ( Architedurc. C'cftoit autrefois la plus fuperbe Mofquée qu'ils cufl'ent après celle de la Meque. On y entre par vint-quatrc portes. La voûte eft foucenue par huit cent cinquante co- lonnes de marbre noir, d'un pied &: demi de diamètre. Sa longueur eft de fix cent pas fur cinquante de large. La def- cription des Ides de Majorque & de Minorque , &: celle du Royaume de Portugal , avec les difterens cftats de fa fortu- ne , terminent ce fécond tome. i% LE JOURNAL REFLEXIONS PHYSIQUES DE M. CHAUVIN, DoBeuT en Mtdtcine , ^ ^%^'%^ '** Collège des Medecim de Zion y fitr les mtycns i»nt on s'e/i fervi pottr découirrtr Us au- te»Ti d'un ajjfa^nat commis à Zion le ^.JuiSct i 691. '^"yj^i-^r— C-^E qu'il y a de pins fingulier dans les faics propofez dans j\c iccond Journal de cectc année , touchant la bjf!;i!ctcc de Lion , condfte dans un certain mouvement intérieur &j extraordinaire du fang &: des clpnts animaux , fans lequel on ne pourroic concevoir ni les inquiétudes , ni les envies de vomie , ni les fueurs , ni la fièvre , ni les maux de cœut que relTcnt le Payfan qui Te fcrt de cette baguette. C'eft pourquoi comme tout mouvement fe fait par impul(îon,& que toute impulfion cfi: immédiate , M. Chauvin a raifon de conclure que la caufe qui pro Juit ce mouvement , doit tou- cher immcdiatemenî le Payfan. Or rien ne le touche im- médiatement que la terre fur laquelle il marche , le bois du batreau dans lequel il eft lors qu'il fuit les meurtriers fur le Rofnc &: fut la mer ; l'air qui l'environne ; la matkere fubtilc qui eft contenue dans les porcs de l'air ; ou enfin quelques corpu feules qui font fortis du corps des meurtriers par la tranf- piration , & qui font reliez dans le chemin par lequel ils ont pall'é. Mais ce n'eft pas la terre ni le batteau qui meuvent le fang &: les cfprits du Payfan , parce que l'un &: l'autre font en repos , & qu'un corps qui eft en repos n'en peut faire mou- voir un autre. Ce n'cll pas aufli l'air feul , ni la matière fub- tilc , puis que tous les deux environnent toujours cet hom- me , & que néanmoins il n'cft pas toujours agité de la maniè- re dont il s'agit. Il n'y a donc que les corpufcules qui (ont fortis du corps à. d'où il s'enfuie que fi la preflîon des mains eft plus ou moins force , ou plus ou moins régulière lois que le payfan eft emu , que lors qu'il ne l'clt pas , il doit necefiaircment arriver ou que la fourche de la baguette qui eft élevée s'abaifTcra , ou (î elle eft abaiflcc qu'elle s'elcvera ; ce qui ne fe peut faire que par un mouvement circulaire ; ainfi que l'expérience le flut yoir. 4. L'AMBASCÎADORE POLITICO CRISTIANO. In f, Maz^reni. PEu de pcrfonnes pouvoicnc mieux écrire des devoirs d'un Arabalfadcur que le Prince Charles Marie Carafe , qui en a autrefois exercé les fonctions à la Cour de Rome , où \\ avoit efté envoyé par le Roi d'tfpagne. Que s'il en a traité avec moins d'étendue que d'autres Ecri- vains , il n'en a pas traité avec moins de clarté , & n'a pas expliqué avec moins d'ordre les qualitcz que doit avoir un Amball'adeur , fes manières d'agir &: envers le Prince qui. l'envoyé , 3c envers celui à qui il eft envoyé ; ce qu'il doit ob- fcrver dans C&s voyages , dans fes converfations particulières, & dans fa vie intérieure. Il n'oublie pas de parler des privi- lèges dont il doit jouir , & des recompenfes qu'il doit rece- voir de Ces, fervices. Ce qu'il y a de plus curieux dans fon ou- vrage , eft la dcfcription des cérémonies obfcrvécs à Rome à Paris , à Vienne , à Madrit , à Londres , à la Haye, à Con- ftantinople , &: en Pcrfe dans la réception des Ambaftadeurs. A PARIS, CKcz Jean Cusson , rue fxint Jaques , à l'Imacrc de faint Jean Baptiftc. Avec Privilège du Roy, VIL 75 LE JOURNAL DES s C A V A N s 9 Du LuNDY i6. Février M. DC. XCIII. JOHANNIS ANTIOCHENI COGNOMENTO MALA- Ar , Hi/ïoria Chronica. In ^. Oxonii. 1691. CE TT E Croniquc n'avoit jamais vu le jour , quoi qu'il y aie plus de quarante ans qu'elle fut traduite en Latin par Edmond Chilmeade , qui mourut en i (Î53. M. Hodius en- tre les mains duquel le texte Grec eft tombé, avec la veifion & les notes de Chilmeade , les donne maintenant au Public avec une préface où il parle fort au long de tous ceux qui onc eu le nom de Jean à'Amioche. Il prouve que celui qui a eflé furnommé Malala , eft diftercnt de celui dont M. de Valois publia un extrait en 1634. avec d'autres extraits de Con- ftantin Porphirogenete ; qu'il n'a point efté Patriarche d'An- tioche , &: qu'il n'a vécu que long-temps depuis celui dont parle Gennadc. Il joint à cela deux catalogues. Le premier contient les noms des auteurs dont Malala a rapporré des partages , mais tellement défigurez que fi ces auteurs-là re- venoient au monde , ils ne les pourroicnt plus reconnoitre. Le fécond contient un grand nombre de termes barbares qui ne fe trouvent point dans le GlolVaire Grec de M. du Cangc. Les Icdleurs verront à la fin de ce volume une fçavance 1693. T 74 LE JOURNAL Icccrc de M. Bentleius , où il explique pluficurs pafTiges de' Malala , & où il en reprend &: en corrige pluficurs ancres. 11 y fait aufli de fréquentes digreflions , où il teftitue quantité d'endroits d'Hcfychius , dans lequel il a-fllirc qu'il a trouve plus de cinq mille fautes dont nul autre ne s'cftoit encore ap- perçu. Il feroit à fouhaitcc qu'il les communiquaft à ceux quf ont entrepris une nouvelle édition de cet auteur. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. L'ABBE' DE Myenmontier , à M. AUitt , Conf ciller Médecin Ordinaire du Roi. CE que je vous avois écrit , Monfieur mon très cherfrerc, touchant la montagne de Framont , n'eftoit venu à ma connoifTance que fur le rapport d'autrui. j'en fuis mainte- nant mieux informé , puis que je l'ai vue de mes propres yeux. Cette montagne fituée à l'extrémité des terres que le Roi Childeric donna à l'Abbaye de Sennone , efl: au milieu des fnontagncs de Voge , à fix lieues de Molsheim qui clt à fon Orient , à fix lieues de fainte Marie aux Mines qui cft à fon Midi , à fix lieues de Sarbourg qui e(l à fon Septentrion , & à fix lieues de Raon l'Etape qui cft à fon couchant. Cette montagne eft certainement la plus haute de toutes les mon" tagncs de Voge. A fon pied e(t un grand chemin qui la tra- verfc, & qui eftoit autrefois le paflage le plus ordinaire pour aller de Loraine en Allemagne. Apres avoir marché environ quatre cent pas , on voit une fontaine fort fraiche qui arrofe un pré. Depuis cette fontaine on monte afî'ez doucement l'efpacc d'un quart d'heure , après quoi la pente devient fi rapide , qu'elle ne peut eftre montée qu'en tournant. Dés cet endroit on commence à appcrcevoir un rocher ef. carpe tout au tour , à la refervc du côté d'Orient. Il forme au Couchant une efpece de ravelin foutcnu par deux demi bartions naturels , de la hauteur de vint pics. On y monte par les ouvertures que les pierres y ont laifices en s'en déta- chant. Quand on eft au haut , on trouve un tcrrc-picin large DES se A VAN s. 7j d'environ cent pies, Se long de quatre cent pas en tirant vers l'Orient , Se qui Ce termine à un autre rocher encore plus devé. A cent pas du premier rocher font les reftes d'un bâtiment dont le contour eft aifé à reconnoitrc. Il avoir dans œuvre trente- fept pies de long fur vint- huit de large , & treize de haut jufques au toit. Les deux portes , dont l'une eftoit à l'Orient , & l'autre à l'Occident , avoicnt quatre pies fept pouces de haut fur deux de large , & les fenêtres qui eftoient au Septentrion &: au Mi- di , avoient cinq pies de haut fur quatre de large. Les pier- fes eftoient û bien jointes , qu'ayant voulu en détacher une de l'angle , elle Ce cafta au milieu plutôt que de Ce feparer à l'endroit de la jointure. Les tuiles &c les charbons qui furent trouvez en creufant un fofie de quatre pies dans cette en- ceinte , font voir que ce bâtiment a efté achevé , Se qu'il n'a cfté ruiné que par le temps ou par le feu. A vint pies de là ont efté trouvées les ruines d'une colonnd de 35J. pies de haut , dont toutes les pièces ayant efté réunies, il a efté reconnu qu'elles faifoient comme trois colonnes l'une fur l'autre , ornées chacune de leurs chapiteaux & de leurs bafes. H paroit qu'il y a eu une ftatuë au defl'us de la der- nière. En avançant vint- cinq pics vers l'Orient , on a rencontre les ruines d'un autre femblable bâtiment. En tirant vers le Septentrion , on voit l'endroit où eftoit le puis. A deux cent pas du dernier bâtiment paroifl'ent les re- lies d'un troiiiéme ; & en avançant toujours vers l'Orient, on arrive aa fommet terminé par un rocher de quinze pies dd hauteur , & de figure ovale , dont la longueur d'Occident en Orient eft de i jo pas , & la largeur de Septentrion au Midi de vint- cinq pies. Sur la face de ce rocher du côté de Midi , un cartouche long de trois pies Se haut de deux , & enfoncé de quatre pou- ces dans le roc , reprefcnte en bas relief un lion &un fan- glier. Le lion s'avance de bas en haut , la gueule bcantâ vers le far>glicr j & au bas eft écrit en gros caractère Ro- ^o LE JOURNAL main BELLIC c US. Le fécond c eft plus petit que le pre- mier. Le fanglier paroit accule contre un rocher fur un terrain plus élevé que le lion , & au delTous eft écrit Surbur. Au tour du rocher, &: principalement vers le Midi &: le Sep- tentrion , ont efté trouvées pluficurs ftatucs. La première pa- roit eftre d'un homme vctu d'une cfpecc de pourpoint qui lui ferroit fortement les reins , & finilfoiten pointe fur le bas ven- tre. Il avoit fur les épaules une peau que l'on juge parles pics de derrière qui y relient eftre une peau de mouton. Il ne refte que des morceaux des cuiffes , des jambes &: des pics de la féconde ftatuë. Ils fem.blent eftre les pies d'une femme. La troifiémc ftatuë eft d'un Mercure qui tient de la main gauche fon caducée , & de la droite une bourfe. La tefte ell rompue de mefme que celles de toutes les autres ftatuës ; ce qui vrai-femblablement eft arrive par le faut qu'on leur a fait faire du haut du rocher. La quatrième pourroit eftre d'une PretreftTe de Bacchus , qui tient de fa main droite deux couleuvres entrelaflces , &: çcrafc la tefte de l'une des deux. On voit tout proche un ani- mal dont on ne diftingue pas bien l'cfpece , &C qui peuteftrç un bouc. La cinquième ftatue eft: double , ayant d'un côté un enfant, & de l'autre un homme , taillez tous deux d'une mefme pier- re , dont le grain eft fin , blanc & tendre j au lieu que le grain des autres eft gros , brun , & dur. La tunique de l'homme ne defcend que jufqu'au milieu de fa jambe , & eft couverte d'une efpece de manteau. L'enfant n'a point de manteau, mais feulement une double tunique , dont la première def- cend jufqu'au pied , & la féconde ne defcend que jufqu'au milieu de fa jambe. Il tient de la main droite un jouet qui ïcC- femble à une petite malfue. Les trois autres ftatues n'ont rien de particulier. De cette montagne fortent trois rivières , dont les fourccs font à mefme hauteur. La Pleme fort du tôté du Couchant, èc fe joint à la Meurtre proche de Raon l'Ltape, La Saur fore d'un DESSCAVANS. 77 4'un endroit qui n'efl: éloigné que d'un jet de pierre, & fe de- charge dans la Mofelle proche de Confarbrucli. Enfin laPruf- che fort de la meinie moncagne , & fe décharge dans l'Ifle à Strafbourg. Les peuples qui habitent au tour de cette montagne , tien- nent par tradition, qu'elle n'a erté appelléc Framont que par- ce que Faramond y avoit cfté enterré. D'autres pourtant Ce pcrfuadent que le mot de Framont ne fignifie rien autre chc- fe que Mont des Francs ; ce que le nom Allemand de Fran- chenberg rend vrai fembiable. Pour m'inftruire de ce fait , je lus avec foin ce que les an* ciens & les modernes ont écrit de Faramond & de Marcomi- re ; & je trouvai dans l'abrégé d'Hunnibalde fait par Trirè- me, Se publié par Scardius , quelque chofe qui femble con- firmer cette opuiion du peuple. En voici les termes : O^nt ( anno ^oj. ) Marcomerus Dux Fruncomm O'ientalium , in mor,~ te qui dicttUT Franchenberg , 7nore gentiUao fcpultus. l'ofl quem fi» liui ejus Pharamundus in Ducatu fucceffit. Et plus bas , Phara- mundus Ducatum Francia Onentalh Marcomero Fratri fuo commendavit Marcomerus autem fojiquam annii 18. Francii prafuijjet , moiitur anno Dominiez Nativitads ^2^. in monte Francheùerg, Je fçai bien qu'Hunnibalde ni Tritéme nepafîent pas dans ^ l'efprit des Sçavans pour des auteurs fort feurs quand il s'agit de l'antiquité Mais je croi auffi que l'on ne peut fans injulti- £e leur refufer toute forte de créance , quand ils ne font que cendre témoignage à l'opimon commune de leur pays &: de leur temps. Que s'il m'eftoit permis , Monfieur mon très cher frerc, de vous propofer mes conjedures , que je foumettrai toujours volontiers à vos lumières , je vous dirois que cette monta- gne a pu fervir à (es anciens habitahs , ou à faire les aifemr .blées de leur Religion , ou à fe retirer en temps de guerre. Ceux qui embraflent le premier fcntiment , le pourront appuyer par la defcription que Lucain fait au troifiéme livre jde fa Pharfale , de l'horreur du filence qui regnoit aux lieux où les Gaulois otïiroient autrefois leurs facrifices. 1693. V 75 LEJOURNAL Zucui erat longo nunquam vioLttus ab avo , Obfiurum cinqem connexii aère Tamis, i^c. Le débris des ft.mies , & fur tout de celle de Mercure qud' CCS peuples adoroient, félon le témoignage de Cefar au (ixiéme livre de fcs Commentaires , fervira auflî à le confirmer. Ceux qui fuivronc le fécond fcntiment, ne manqueront pas de quoi le foutenir. lis peuvent montrer au tour de la mon* tagiie de funtc Otile , qui n'cft pas loin de celle de Framont , àzs ruines de murailles , dans l'enccinre dei'quelles les peu- ples de la plaine fe retiroient lors que les Romams paroifibienc en Al face. Peut-cftrc que ceux qui les en chafiferent gravèrent le lion & le fangiier dont je vous ai parlé , pour fcrvir de monument ide leur vidoife. Le lion reprefente les Etrangers alHuilans j & le fangiier les payfans retranchez fur cette montagne. BeU licui eft l'cpitcte du lion , pour marquer le courage des af* faillans ; &: Surbxr l'epitete du fanglict , pour marquer U refill^ancc des payfans qui défendoicnt leur retranchement. Ce monument a pu eftre mis ou par les Romains ou par ks Francs, Ce qui pourroit faire croire qu'il a cfté mis par les Romains , eft que l'infcription eft en caradteres de leur lan- gue j &: que patmi les ftatucs il y en a une Romaine. D'ail- leurs il y a peu d'apparence que les Francs enflent voulu gra- ver une infcription en une langue etraftgete. Ceux qui croiroient qiî'il a efté mis par les Francs , pour*. roient (e fonder fur une ancienne prcdidion attribuée à Hil"- degaftc , qui porte encre autres chofes : Et franqet Aquilam Léo. Ainïî le lion autoit efté rcmblêmc des Rois Francs ; & fi •ce n'eftoit porter la conjedurc trop loin , on diroit que c'eft de lui qu'eft defcendu le lion des anciens Ducs de Bourgogne ^ des Comtes de Flandres. A l'égard des bârimcns trouve^ fut cette montagne , ils peuvent avoir efté ou les tombeaux des premiers chefs de« François , ou k demeure des Druides, DES SCAVANS. 79 Voila , Monfieur mon très cher frère , ce qui s'cfl prefen- té à mon efpric au fuiec de ce que nous avons découvert. Lors que nous aurons fouillé plus à loiiîr aux trois bârimcns, com- me j'efpere le faire au printemps prochain , nous en pour- rons peut-eftre porter un jugement plus certain &c plus fo- lide. HISTOIRE DU REGNE DE LOUIS LE GRAND PAR les meditilles , emblémei, dcvtfes , jettons , infcriptiom , armoi- ries , ^ autres monumens publics ; recueillis S' explique;^ par le P. Claude François Meneflrier de la Compagnie de Jefus. Se- conde Edition , corrigée ^ aagmentée d'un di (cours fur la vie du Rot, ^^ de plujfeurs médailles défigures. In folio, à Paris chez Robert Pépie , rue faint Jaques , &: J. B. Nolin, fur le quai de l'Horloge. 1693. IL y a quelques années que le P. Meneflrier commença à donner f hiltoire du Roi par les médailles , & qu'il s'arrêta prindpalement a. décrire ce que ce grand Prince a fait pour la religion , pour la juftice , pour les fciences , & pour les •arts. Je donnai l'extraie de cet eflai dans le trente- quatrième Journal de l'année i 689. L'auteur ne put alors placer les mé- dailles , les jetions , les devifes , & les autres monumens, fé- lon l'ordre du temps , parce que les médailles Ce frappoient ■encore ; comme il s'en frappe mefme aujourd'hui pour des aftions arrivées dans les premières années de ce règne. C'eft ce qui l'a obligé à mettre au devant un {bmmairc de la vie du Roi , où l'ordre des temps ert obfervé , avec un renvoi aux médailles qui marquent chaque événement. Cette hiftoire commence par la rcfolution que prit le Roi Louis XIII. d'élever une Eglife magnifique dans la rue faint Antoine , en l'honneur de faint Louis. Il y mit la première pierre le 6. Mars 1627. & fit battre deux médailles pour cette Cérémonie. Dans l'une eft le bufte de faint Louis , & au re- vers la façade de l'Eglife. Dans l'autre eft la tefte de Louis XIIÏ. avec une infcrij^w 8o LEJOURNAL tion qui porte qu'après avoir vaincu comme David , il h^tiC- foit comme Salomon. Le jour de la fciic de l'Aflomprion de l'année 1638. le feu Roi mit Ton Royaume fous la protedion de la fainte Vierge. H n'y a point d'autre monument public de cette cérémonie, qu'un )ctton qui reprcfcncc un autel fur lequel eft la Couron- ne Royale -, & au revers une Chapelle , avec une edain d'a- beilles , 6c cette devife : Rc<^à ^d excmplutn. Le temps qui fe paiFa depuis la fefte de l'Aflomption ')\iC- .qu'au 5. Septembre jour de la nailîance du Roi , fut employé à des prières publiques. Les circonllances de cette nailTiince font marquées par une médaille faite depuis quelques années feulement , & où il y a deux défauts. L'un eft , que la difpo- fition des planètes qui y eft reprefentée , n'eft pas la mefme que celle que M. Morm Profefleur en Matematique , avoic trouvée , &: qu'il avoir depuis inférée à la page jjj. de ion Aftrologie Françoife. L'autre eft , qu'au lieu de la tefte du feu Roi qui rcgnoit alors , on y a mis la tcfte du Roi Louis Quatorzième , dans un âge qui ne convient ni au temps de fa naiflance , ni à celui auquel la médaille a efté frappée. Le Roi Louis XIIL eftant mort , &: le Roi Louis XIV. lui ayant fuccedé à l'âge de quatre ans neuf mois , fous la xegence de la Reine , Varin grava une médaille, où leRoieH vêtu en jeune C.efar, &: où la Reine Mère eft en habit de VeUr ve au revers. Le Roi ayant fouhaité d'eftre facré , la cérémonie fe fit le fj. Juin 16 54. Les médailles frappées à cette occafion , re- prefentent le Roi en deux eftats. Dans l'une faite avant le fa- cre , la tefte du Roi eft couronnée de laurier. Dans l'autre il a les habits royaux , & le grand collier des Ordres , qu'il ne reçut que le lendemain de fon Sacre par les mains de l'Evêqu.e .de Soilfons, Le traité de paix & de mariage ayant efté conclu le 7. No- vembre 1659. quantité de médailles & de jettons furent fgbri- ijucz pour ces deux cérémonies. Monfeigneur DE5 SCAVANS. gi Monfeigneur le Dauphin cftanc né le i. Novcm'bre i66i. un jecton parut Je premier jour de l'année fiiivantc, iTur lequel eftoic Ton portraic , avec ce vers : Cui Pater aternas fofi fecula tradat habenas. Le Roi pour affermir la paix de (es Eftats , retira la ville de Ounquerque d'entre les mains des Anglois -, ■fur quoi fut frap-, péeune médaille qui reprefente la ville fléchiirantJes genoux devant le Roi , & lui oûfanc k plan d'un<; farterefle à cixiq baflions. L'infulite faite par le Baron de Vatteviile à M. le Comte d Eftrades dans la ville de Londres , fut reparée par une ^^^ tisfa£lion que le Comte de Fuente en fît au nom du Roi d*El- pagne. Il y en eut une médaille , dant la légende explique le droit qu'ont les Ambafladeurs du Roi de précéder ceux d-u Roi d'Efpagne. Dans la médaille fabriquée fur la Chambre compofée ^^ plus habiles Magiftrats du Royaume pour reformer les Fi- nances , la Juftice afllfe foule aux pieds des monftrcs , t-c- nant d'une main fon epée , &; de l'autre fa balance j avec ces iBors : Ex^minando Saculo. Le revers eft un grand creufêt plein de pièces d'or : Aurum omne probabit. L'infulte faite à Rome par les Corfcs de la Garde de Sa Sainteté à M. le Duc de Crequi , donna lieu à la dépofuion du Cardmal Impériale Gouverneur de Rome , à l'eredion d'une piramide , & au voyage du Cardinal Chigi en France. 21 y eut trois médailles & un jetton fur cette affaire. Peu après l'etablifrement de la Compagnie du commerce des Indes Orientales , il y eut une médaille frappée pour conferver le ibuvenir de la première colonie envoyée à Ma^ dagafcar. La jondlion des mers ayant eflé cntreprifc en 1667. par ua canal pratiqué entre le Cap de Cette & la Garonne , il y eue trois médailles frappées fur ce fujet. Dans la mefme année jl y en eut deux fur la première pierre mife au Louvre par le Roi. Elles a voient deux revers , qui reptefent oient deux fa- 1693. V %i LEJOURNAL t çades différentes. Mais ni Tune ni l'autre n'ayant eftc élevées, une troifiémc qui !'a eftc , a fait depuis le revers d'une autrd médaille frapce en 1673. Le Roi ayant appaifé les differens des Théologiens fur les queftions de la Grâce , on frappa en 1669. une médaille où l'on voit un autel fur lequel eft un livre ouvert , avec une clef & un fccptre croifcz fur le livre ; Se cette légende : Gratia ^ Pax à Deo, La ligue d'Aulbourg , & les heureux fuccés des armes de la France , les prifes de Mons & de Namur , les batailles dd Fleurus & de Stcmkerke ont auffi efté marquées par des mé- dailles que le P. MencUrier rapporte dans cette première par-i tie , de mcfme que les lits de Juftice tenus par Sa Ma;ellé , les Maréchaux de France , &: les Chevaliers des Ordres créez fous fon règne , les oraifons prononcées en fon hon- neur dans le Collège qui depuis quelques années porte fon nom. Dans la féconde il donnera des médailles qui ne font pas encore achevées , une fuite de deux cent jettons hifhoriques, & d'autant d'infcriprions fur les principaux evencmens de no- tre temps ; outre la defcription de la ftatue qui fera mife à la place de Vendofme , &: de piufieurs autres qui doivent eftrc bien-tôt élevées dans les provinces. DE ABBREVIATORUM DE PARCO MAJORI , SIVË j4ffilieniium S. R. E. Vicccancelljrio in Litterarum Apoftolica- rum expeditioniéus , antiquo ftatv , iUoTU7nve incoUegiuni ereïiio- ne, munere , diyntate , fraroyiiivii , ac privilegiis , àffertatia hifioncajoannii Ciampini Rom.-tni. 2n folio, Roma. i 692. LA fondion des Abbreviateurs confifte à expédier les brefs du Pape , ou les lettres de moindre importance fellées en cire rouge de l'anneau du Pefcheur feulement, &r fans bul- le de plomb. Us ont efté appeliez Abbreviateurs du Parc , à caufe que le lieu où Us s'aliemblent eft fermé comme un parc , & entouré d'une baluftrade de bois à hauteur d'homme. Le dcfir de leur donner une origine ancienne &: lUultre , a DESSCAVANS. S5 fait dire qu'ils avoienc fuccedé aux fepcNoraires que Clément I. inftitua dans fepc quartiers de Rome , pour rédiger par ecnc les ades des Martyrs. Mais ceux qui ne veulent rien avancer légèrement, ne trouvent rien de plus ancien touchant leurs fondions , que ce qui s'en lit dans une bulle de Jean Vint- deuxiéme. A l'égard de la forme de leur Collège, tel qu'il eft àprefenr, ce fut Pie II. qui l'inftitua en 1464. Paul II. fon fucceflcur - l'abolit dix ans après comme inutile & fcandaleux ; &;: quatre | autres années après Sixte IV. le rétablit comme neceflaire : Exemple mémorable de l'inconftance des hommes , &: de la foibleife de leur prévoyance M. Ciampini qui veut tâcher de faire: autant d'honneur à fâ charge qu'il en reçoit d'elle , employé la première partie de fon livre à montrer quelle a çi\c l'inftitution des Abbrevia- tcurs , quelles font leurs fondions , leurs honneurs , leurs droits , & leurs prérogatives aux cérémonies publiques , aux feftes , aux cavalcades , aux Chapelles , &: aux pompes fu- nèbres. Dans la féconde il fait un catalogue qui contient les noms, les qualitez , cS<: les adions des Abbreviateurs qui ont vécu depuis l'an I4i9. jufqu'à ce temps-ci. Les plus illuftres font Pie II. Platine , Grégoire XIII. Paul V. Urbain VllI. & le Cardinal François Nerli , qui a traduit en Italien les annales de Baronius, &: ne les a pas encore don- ' nées au Public. ELOGE DE LOUIS LE GRAND , PRONONCE' LE f. t)eptembre , jour de fa naiffance , dam U parrotjfe Royale de ftiint Germain en Laye , en prefence de Leun M.a']eftcz^Britan'. niques , l'an 16 p2. par le Sr. le Fehvre , Prevbt ^ Théologal d'y^rras , ^-r. Jn 4. â Douay. 1651. L'Avantage qu'a la ville de faint Germain en Laye d'a- voir vu naitre Louis le Grand dans fon Château le y. Sep- tembre de l'année 1638. la diftingue Ci fort des autres villes du Royaume , qu'elle a cru en devoir confervcr la mémoire. f4 LEJOURNAL par un pancgîriquc qu'elle fait prononcer tous les ans a parcU jour en l'honneur de cet incomparable Monarque. M. le Fcbvrc Théologal de l'Eglife Catcdrale d'Arras , choifi l'an. HCC dernière pour cette éclatante Fondion , s'en aquitta en prcfencc du Roi &: de la Reine d'Angleterre , avec une en- tière facisfadion de leurs Majeftez , &: un gênerai applau- diflcmcnt du refte de Ton auditoire. L'ordre qu'il fe propofa dans {on difcours fut de faire voir les avantages que la fagcflc Ju Roi procure à Tes fujets , les vidioires que fa valeur rem- porte fiu: Tes ennemis , les benedidions que fa pieté attire iur l'a. pcrfonnc &C fur fa famille. £IBLIOTH£C-£ DOMlNICAN>E AB ADMODUM R. P. M. F. ATïérofio de Altumurs , uccmatii coûeHieruina frimà ab Ordmii conjbtutiont tifquead annumjôoo. poduUa hot ftculari apparatu , incrementum ac profecutio. /^c In Fol:», Koma. &c Ce trouve à Paris chez Thomas Moëtte. L'Ordre de faint Dominique inRicuc pour rendre des Re* lic^icux capables de la plu^ importante de toutes les fon- (ftions ccclcGaftiqucs , qui confifte à annoncer l'Evangile , a dû produire quantité d'hommes inftruits non feulement des verirez fâintes de la religion , mais encore des belles lettres &: des fciences profanes. Le P. Ambroife de Altamura a recueilli les noms & les ou» yrages de ceux qui ont vécu depuis le premier etaJ^lilTemcnt de l'Ordre jufqu'au commencement du ficelé courant , avec le lieu & le temps où ils ont efté imprimez -, & les a difpofcx félon l'ordre de la cronologie. Le Libraire fait efperer que quelque autre continuera ce recueil , &: donnera le catalogue des autres Ecrivains du raefme Ordre qui ont fleuri depuis ce temps-là. A PARIS, Chez j£AK CussoN , xuë faint Jaques , à l'Image àc iaint Jean Bapuflc. j^vcc Fnvilege d» £^y. V 1 1 r. s î LE JOURNAL DES se AVANS ç Du LuNDY 23. Février M. DC. XCIII. MEMOIRES DE LA VIE DE FREDERIC MAURICE de la Tout d Auverqne Duc de Bouillon , avec quelques parti- — laritez^de la vie (^ des mœurs de Henri de la Tour d' Auvergne ^ Vicomte de Turenne. In 12, à Paris chez Pierre Trabouillec, au Palais. 1692. CEs Mémoires compofez autrefois psr M. de Langladc Secrétaire du Cabinet , &: trouvez après (a mort , nous apprennent quantité de particularitez de la vie de M. le Duc de Bouillon , & de celle de M. le Vicomte de Turenne. Je ne mettrai ici que celles qui m'ont paru les plus remarquables. Frédéric Maurice de la Tour d'Auvergne , fils de Henri de î la Tour d'Auvergne Duc de Bouillon , Souverain de Sedan , ■; Se d'Ifabelle de Naflau , fit Tes études à Sedan , où il eut pour précepteur le Miniftre Pierre du Moulin. A l'âge de Ceizc ans il alla en Hollande qui eftoit alors le teâcre de la guerre , ' &: la meilleure école où il la puft apprendre fous le Prince d'Orange Ton oncle , qui prit foin de le former , &c le com- manda dans toutes les occalions où il y avoir de la gloire à aquerir. Une des plus confidcrablcs fut à Boifleduc. Le Prince 163^3. Y i6 LE JOURNAL d'Orange qui cftoic devant cette ville • rebuté de la longue relîflance des habicans , & appréhendant que les Efpagnols n'y fîdcnt entrer un convoi , avoit pris fccrctcment la refo- lution de lever le ficge j lors que le Duc de Bouillon s'offrit d'empêcher le fecours de la place ^ & conduifit fi bien Ton deffcin qu'il réuiîit. Les Eftats Généraux rccompenferent ce' Tcrvice par le gouvernement de Maltrich. Pendant que les troupes eftoicnt en quartier d'hiver , le Duc de Bouillon alla à Brufelles , où il vit à un bal M.idemôi- fclle de Bergh , &: conçut pour elle une fi forte palîion , qu'il l'cpoufix nonoblLmt la rcfilîance de Madame fii mère, &: celle du Prince d'Orange fi^n oncle. Il mena Madame fii femme à Sedan , à dcffein d'y faire quelque fejour ; &c comme (es aftaires ne ruffifoicnt pas pouf l'occuper , il donna beaucoup de temps à la Icclure de Calvin, dont Madame fa mcre eut beaucoup de joye, dans la créance que cela ferviroit à l'atîcrmir dans fa religion. Mais de la lecture il paffa au doute , & du doute au defir de s'eclaircir ; &: après pluheurs conférences fccretcs il reconnut ' ics erreurs , ^ les abjura. Incontinent après les Efpagnolsaflicgercnt MaQric. Le Duc de Bouillon s'y enferma , &: le défendit fi vaillamment , qu'il donna au Prince d Orange fon oncle le temps de le fecouriî-; après quoi il retourna à Sedan , &: envoya aux Eftats la dé- Jïiiflïon de fon gouvernement de Maftric. Ayant ainfi renonce par la feule confideration de fon falut aux erabliffemens qu'il avoit en Hollande , & à de plus gran- des efperances , il vint en France où il avoit de belles terres, & où la guerre déclarée aux Efpagnols fembloit lui ouvrir un large champ pour la réputation &: pour la fortune. Il fut très bien reçu du Roi &: de toute la Cour , & vit plufieurs fois Je Cardinal de Richelieu , fans faire avec lui une union fore etfoite. Ce Minière ne vouloir que des perfonncs dévouées à fes intérêts -, &c le Duc de Bouillon né Souverain , & éle- vé dans un pays libre , n'efloit pas fait pour la fcrvicude. Le Comte de Soldons le traira avec une diftindion qui mar- quoit une clhmc particulière , &: un defir ardent de l'avoir DES se A VANS. 87 ^bur ami. Peu de temps après ce Comrc fc recira à Sedan pour fe mettre à couvert de la haine du Cardinal. Le Duc de Bouillon écrivit au Roi pour lui en donner avis , & pour le fupplier de ne pas trouver mauvais qu'il eufl; reçu un Prin- ce qu'il croyoit n'avoir rien fait qui lui puft déplaire. Le Roi approuva fa conduite ; &: le Cardinal lui écrivit que Sa Ma- jefté trouvoit bon que le Comte de Solfions demeuraft .\ Se- dan. Mais les négociations n'ayant pas produit les cftets que cette Eminence en attendoit , elle voulut que le Duc de Bouillon abandonnaft ce Prince. Il le refufa , & prévit tou- tes les fuites que pourroit avoir ce refus. Sa plus grande pei- ne fut de fixer l'efprit du Comte de Solfions , &: de le déter- miner ou à un accommodement , ou à une guerre. Il choific cette dernière , dans la créance qu'elle n'avoir point de péril aufii terrible qu'eftoit celui de tomber entre les mains du Car- dinal. Pour la foiitenir il fallut traiter avec l'Empereur &: avec le Roi d'Efpagnc , qui promirent chacun une armée de fept mil- le hommes. L'Empereur envoya la fienne fous le comman- dément de Lamboi. La bataille fut donnée le 6. Juillet de l'année 1641. La cavalerie du Duc de Bouillon mit toute l'ar- mée Françoife en déroute. Le Comte de Solfions perdit la vie fans avoir combattu ,&: la perdit après la viéloire. L'au- teur de ces Mémoires eft perfuadé qu'il fc tua lui mefme , &• ' afilire que c'efioit aufiî l'opinion du Duc de Bouillon. Le fon- dement qu'il en a , eft que ce Comte leva deux fois la vificre de fon cafque avec le bout d'un de fes piftolets , & que Ri- quemonc Con Ecuyer l'avertit du malheur qui lui en pouvoit- arriver. Apres cette bataille le Duc de Bouillon abandonné des EC- pagnols , &c réduit à s'enfermer dans Sedan , &: à s'y défendre fcul , ne crut pas devoir refufer l'entremife du Cardinal de Richelieu pour négocier Ion accommodement avec la Cour, Il l'accepta donc avec une confiance égale à la fincerité de celui qui la lui oflfroit. Dés que la négociation fut commencée, Cinq-Mars Grand Ecuyer de France , &c favori du feu Roi , rechercha raraici» 71 LE JOURNAL du Duc de Bouillon , qui rcpondic à ces avances comme {« dctnandoit l'eftat prcfcnt de fcs aftaires. Le traité fut ligné le huitième du mois d'Août ; & le quin^ zicrae du mois fuivant le Duc partit de Sedan pour aller trou- ver la Cour qui eftoit à Ne fie. Alors M de Thou n'oublia rien pour affermir la liaifon qui eiloit commencée entre le Grand Ecuycr &: le Duc de Bouillon. Mais celui-ci ne crut pas devoir faire un long rcjour à la Cour , & la quitta pour al- ler vifiter les terres qu'il avoir en Guyenne. Trois femaincs après il reçut une lettre du Roi qui lui ordonnoit de revenir à la Cour , où le Cardinal lui déclara qu'il cfloic defliné pour le commandement de l'armée d Italie. Pendant ce temps- là le Cardinal découvrit que Monfieur avoir traité avec les Efpagnols. Monfieur avoiia tout ce qui s'eftoit paUc , &: donna une copie du traité qu'il figna, Qaand le Cardinal eut entre les mains une pièce fi importante il don- na les ordres pour arrêter Cinq Mars & de Thou , &: dépécha un Courier en Italie pour s'alîurer de la pcrfonne du Duc de Bouillon. Car bien qu'il n'euft pas parlé dans le traité , Fon- trailles avoit affûté qu'il le ranfîeroit , &c donneroit Sedan pour place de retraite. Il fut pris à Cafal , & conduit au châ- teau de Pierre Encife. Sa furprifc fut extrême lors qu'il apprit que Monfieur avoir obtenu une penfion pour lui par le traité de Madrit , &: qu'en fignant une copie de ce traité il n'avoit pas déclaré en quel Cas il lui avoit promis retraite dans Sedan, Cinq Mars & de Thou furent condamnez &: exécutez. 11 n'y eut point d'ar* reft contre le Duc de Bouillon , foit par le défaut de preuves, ou par les follicitations que fit le Vicomte de Turcr.nc Ion frère , ou enfin parla menace que la Duchellc de Bouillon fie de livrer Sedan aux Efpagnols. Kîademoifelle de Bouillon ayant déclaré au Cardinal, qu'elle avoit pouvoir d'entrer en négociation , & de tout engager pour conferver à fon frère la vie & la liberté , le traité fut conclu , & arrêté que le Roi auroit Sedan , & qu'il en don- neroit la récompcnfe en terres dans le Royaume. Le Duc de Bouillon fortit de pnfon dépouillé d'une fbuve- raineté DES SCAVANS. 89 fainctc &: d'une excellente place , & fe retira à Turennc , où -cinq mois après fon arrivée il apprit la mort du Cardinal , ôc cinq autres mois après , celle du Roi. Alors il fe rendit à Pa- ris , où il fut très bien reçu de la Reine & de Monficur. Mais quand il leur demanda ce qui lui edoit dû en recompenfe de Sedan , il fut peu favorablement écouté •, & le Confeil pour fe délivrer de fes importunitez , propofa de l'arrêter. Il en fut averti , & prit la porte pour s'en retourner à Tu- icnne. Voila les particularitez qui regardent la vie & les mœurs du Duc de Bouillon ; enfuite de quoi il y a des traits perfonnels me de bien. Après qu'il eut gagné la bataille des Dunes , & pris Dun- kerque , le Cardinal Mazarin fouliaita ardemment de pou- voir s'attribuer la gloire de ces deux grans fuccés. Il voulut que le Vicomcc de Turennc lui ecnvill une lettre qui mar- tiuaft qu'en etfet ils n'eftoient dus qu'à lui fcul ; qu'il avoit; projette les chofes dans Ion cabinet , ôc qu'on n'avoit fait que fuivrc fes ordres. Celui qui négocia l'affaire fit ce qu'il put pour ôrcr de l'cf. prit du Cardinal une pcnlée qui convcnoit peu à fon cftat& à fi profclUon j &c d'un autre côté il remontra au '\Aicomtc de Turenne , qu'un refus auroic peut-eltre des fuites dcfagrca- bles pour lui. Mais fans cltre ébranlé ni par rcfpcrance ni par la crainte , il répondit toujours , ijue le Cardinal pouvait faire mettre dans l'hijhire tout ce qui flateroit davantage fon avibition^ ^ qui ferait capable de faire croire à la poflcrite qu defoit un zrand Capitaine : maii que pour lui il ne lui froit jaman reproché d'avoir donné un titre pour autonfer une chofe f contraire à fon honneur (^ à la vérité. Il fit prés de cinquante ans profefTion de la religion préten- due reformée fans en eftre beaucoup inllruit. Quand il vou- lut s'eclaircir , il ne s'en ouvrit à peilonnc , & tâcha de le fai- re feul par des leélurcs qui ne fervircnt qu'à accroître & à multiplier fes doutes. Il les communiqua à-quelques Prélats ; & enfin convaincu qu'il edoit hors de la véritable Egafe, il abjura fes erreurs , &: donna tout le rcflc de fa vie des preu- ves de la fincenté de fa convcrfion. DES SCAVANS. 91 EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. GRANDÎN LE fils , À M. de Vallemont BoHeur tn Theeloqte. NOus vîmes l'an pafle, Monfieur, avec plaifir votre trai- céde l'aimant, formé au haut du clocher de Chartres : J'efperc que nous ne ferons pas moins contens de celui que vous faites imprimer fur l'homme à la baguette , qui a fuivi à la pifte le meurtrier de Lion. On eft perfuadé que vous traiterez cette matière avec exaditude. Pour moi tout m'y paroit peu naturel , & je croi que Defcartes avec toute fa Phi- lofophie s'y perdroit lui mefme. Je voudrois bien douter du fait : mais il me femble incontcftable. Je murmure quelque- fois de ce que tant d'autres pays fourniflent aux Philofophes quelque chofe de rare , pendant que le nôtre ne s'éloigne ja- mais de la plus commune route de la nature Cependant on a découvert ici une chofe dont je veux vous rendre compte , n'ayant rien de plus confidcrable à vous mander. Vous fça- vez qu'on travaille toujours à notre canal, qui doit bicn-tôc rendre le Ponteaudcmer une ville maritime : car quand ce canal fera achevé , la mer dont nous fbmraes éloignez de quelques lieues , viendra mouiller le pied de nos murailles. En creufant ce canal on a trouvé depuis peu , à i 7 ou i8 pieds de profondeur , parmi des fafcines qu'on en tiroir , des bran- ches de bois de hêtre beaucoup plus dures &: plus pefantes que les autres. M. de Colmier Ingciîieur , qui a la conduite de cet ouvrage , en fit ramalfer plufieurs morceaux , & recon- nut que c'cftoit du bois tout à fait pétrifié. Il m'en donna quelques uns qui n'cftoicnt pas également avancez. Ils a- voient pourtant tous cela de commun , que la pecrification commençoit dans le milieu du bois , &: eftoit toujours moins achevée vers la fuperficie où le bois paroillbit feulement pu- tréfié. Il y avoit plus de cent ans que ce bois eftoit-là. La terre où il a cfté trouvé eft noirâtre , pcfantc , rempHe de fa- ble , & d'une infinité de petites fourccs II femble que par le long temps les eaux ayant relâché les fibres , & ouvert tous les pores du bois , ont donné entrée aux parties, de cette ai- ,5* LE JOURNAL gilc noirâtre , qui ont cfté cnfuicc unies & lices par les Coufrei dont cette terre ne manque point. La preuve de cela cfl; , qu'il y a une veine de métal roiige très belle , &: de la largeur de trois lignes, qui s'cft forme dans ce bois pétrifié. Voila , ce me femble , une pétrification d'autant plus cii».' rieufc , que je n'avois point oui dire qu'il fe fuft trouvé dans du bois converti en pierre une génération métallique, C'cfl: ce que vous remarquerez dans le morceau que je vous en- voyé , &: que vous ferez voir à vos Sçavans de Paris , qui rendront mieux raifon que je ne pourrc«s faire de ce nouveau phénomène. I- Il eft vrai que les pièces tiennent de l'argile , où elles fe for- ment ; puis que notre pétrification ell noire , comme l'argile où elle s'eft faite. Il eft encore confiant que les pierres fe font p3T juxta-pofition : car j'ai bien obfcrvé que le milieu de tout ce bois pétrifié eftoit le plus dur , &: que la pétrification y eftoit plus achevée. Le morceau que l'on vous porte, quoi que parfaitement pétrifié , confcrve encore vifiblement l'ar- rangement des fibres , & certaines petites parties luifantes & polies , que l'on remarque dans le hécrc quand il cfl fendu» Tout cela a fes raifons : Félix qui fotutt rerum cognofcere camfas. i'OEDIPE, ET L'ELECTRE DE SOPHOCLE. Tragédies Greques ^ traduites en FratK^ois avec des remarques. In 22. à Paris chez Claude Barbin , au Palais. 1691. LA traduiSlion que M. d'Acier donna il y a peu de temps de la Poétique d'Ariftote , contient les règles de la Tra- gédie. Celle qu'il donne maintenant de deux pièces de So- phocle en montre la pratique. Ce font deux chef-d'ccuvres pour la fable , & pour le fujet , pour les mœurs ou les cara- ûercs , pour les fentimens , & pour la didion. Le tradudeur doute lui-mefmc qu'il foit poflible d'approcher des beautez de cette dernière partie , & que la profe Françoife exprime af^ fez bien le nombre & l'harmonie des vers Grecs ; mais il ne doute point qu'il n'ait égalé les beautez des autres parties. . L'OcJipç DES s CA VANS. 93 L'Oedipe eft une pièce fimpic parce qu'elle n'a qu'une ca- taftrofc. Elle cft auÂi implexe , parce qu'elle a la rcconnoif- fance avec la péripétie. L'Hiftoire en a fourni le fujer, & Sophocle en a inventé les circonftances -, de manière que la fable e(î: générale & allé- gorique. Le but du Poëte eft de faire voir que l'orgueil & la violence attirent de grans malheurs à des hommes qui d'ail- leurs ont de bonnes qualitcz. 11 faut donc que le carafterc d'Ocdipc foit de n'ellre m tout à fait bon m tout à fait mc- chanc. L'aûion fe paflfe dans un mefmc lieu qui eft public , & la durée n'eft que de quatre heures. L'Eledrc eft une tragédie double , qui a une double cata- (Irofe , une hcureufe pour Jes bons , & une funefte pour les méchans. Quoi qu'elle foit double , elle ne laifte p.is d'eftre implexe. Car elle a fa reconnoiftance &ù fa péripétie ; &: c'eft ce qui fait fa grande beauté. Le but de Sophocle eft d'y faire voir qu'encore que Dieu diffère quelquefois le châtiment des mêchans , il ne les laifte pas pourtant echapcr a. fa juftice. L'unité du temps & du heu y eft parfaitement obfervéc. Les remarques de M. Dacier fur ces deux tragédies , en dé- couvrent en détail l'art ôc les beautez. DES BONS MOTS ET DES BONS CONTES , DE leur u/âge , de la raillerie des anciens , de la raillerie ^ des rail--^ leurs de notre temps, lu 12. à Paris chez Claude Barbin , au Palais. 1692. LEs obfervations d'un Commandeur fur les mots à la mo- de ayant efté bien reçues , il a cru en devoir faire aufli fur les bons mots &: fur les bons contes. Par un bon mot il entend un fentiment vivement d^ fnement exprimé fur les cho Ces qui fe prefentent , ou une repartie pronte (^ ingenieufe fur ce qui a tfiè dit auparavant. La première règle pour diftingucr un bon mot d'avec une 1693. A a 54, LE JOURNAL fauilc pcnfce , cft qu'il pullFc cftrc traduit en toute langue fans perdre de fa jurtelle. Il ne faut donc pas qu'il roule fur un jeu de mots , ni fur une équivoque. Il doit encore avoir deux conditions. L'une eft un jufte rapport à ce qui a eflc dit auparavant. L'autre eft qu'il en faite connoicre adroite- tement le ridicule. C'eft le fujet du premier difcours. Le fécond eft fur les bons mots des anciens , qui confi- ftoicnt en ce qu'outre leur fens littéral , ils avoicnt un fcns caché attaché aux chofcs dignes d'eftre remarquées , plutôc qu'aux termes. De là il s'enfuit qu'il faut que le bon mot laif- fe deviner quelque chofe à l'auditeur qui a le pUiifir d'en dé- veloper le millere , & qu'il ne faut pas que le fens en foit fi caché qu'il tienne de l'énigme. Il y a cette dirforence entre l'.-.oophtegme &: le bon mot , que le premier eft d'ordinaire grave & inUrudif , au lieu que le fécond réjouit en inftruifant , & fouvcnt réjouit feulement fans inftruire. Les Grecs ont inventé ces bons mors auflî-bien que les beaux arts ; ce qui procède de ce qu'ils avoient cultivé les fcicnccs , & eftoient plus éclairez que les autres peuples. D'ailleurs ils vivoicnt pour la plupart fous des Républi- ques , &: n avoient aucun refpeâ: qui les cmpêchaft de dire ce qu'ils penfoient. La plupart de leurs bons mots rouloient donc fur la liberté qu'ils avoient de fe reprocher leurs défauts. Mais il y en a de trop durs , & que nous appellerions rompre en v'fiere. 11 faut que le bon mot ne fente jamais la préparation ni l'étude , qu'il vienne fur le champ , &: furprenne par la nou- veauté de lapenfée , aufli-bien que par fa beauté , par fa for- ce &: par fa juftcflc. Le rroilîémc difcours eft des bons contes , qui cxpofenc leur fujet dans route leur étendue , & ne laiftcnt d'ordinaire rien à deviner fous un fens caché , comme font les bons mots. Ils inftruifent quelquefois : mais leur but n'cft que de réjouir , parce qu'au lieu d'eftre fondez (lir la delicateflc de la pcnfce , ils le font d'ordinaire fur la naïve dcf^;ripcion des fotcifcs d'autiui. DESSCAVANS. 9^ Ùufage des bons mots & des bons contes eft de ne les fai- re que lors qu'ils viennent naturellement au fujet , &: en pré- fence d'une compagnie difpofée à s'en divertir ; de ne pas affeder d'y faire tomber la converfation ; de ne les pas van- ter avant que de les dire , de n'en pas rire le premier , & de ne les pas dire plufieurs fois à la mefme perfonne. C'eft ce que le Commandeur explique dans le quatrième difcours , laiflant à un Prefident à inltruire la compagnie dans le cinquième de la beauté de la raillerie des anciens. Voici ce qu'il en dit de plus remarquable. Les Grecs introduifirent dans les feftins des ^ens dont l'emploi eftoit de dire fur le champ des chofes pJaifantes pour réjouir les conviez , dont il y a un bel exemple dans le j?C que ces derniers n'ont aucun fujet de tirer vanité de leurs grans biens, qui ne leur donnent aucun avantage extérieur à cet égard par dcffus les plus pauvres. M. Chadcbras de Cramailles, qui s'cft fort appliqué , dans les voyages qu'il a faits , à obferver les loix , les maximes , & les ulâges des lieux où il a refidé , a eu la curiofité de faire peindre, avec beaucoup d'ex altitude , en plufieurs petis ta- bleaux de mignature qu'il garde dans fon cabinet, tous ces diflferens habits, depuis celui du Doge jufqu'au moindre des officiers 5 ayant demefme fait reprefenter ceux des femmes & des filles chacun fuivant leur condition , ceux de quelques Religieufes dont la façon de s'habiller & de fe coeffer eft bien différente de celle des autres nations , & ceux qui fervent aux Jnifs dans les cérémonies de leur Religion , avec la manière dont ils paroiiî'ent dans leurs Sinagogues , & la iblcnnité avec laquelle ils portent le livre de la Loi , & l'expofent aux quatre parties du monde toutes les fois qu'ils en doivent lire pubU- qucment quelque chapitre. ,C4 LE JOURNAL C'eft ce que le fieur Bonnart a commence de graver fur les tableaux que M de Cramailles luy a communiquez. II en a déjà mis vingc-quatie au jour , & y mettra incedammenc la fui ce. On voit dans ceux qui paroiflenc prefentcirient , les habirs du Doge de Venife; du General de mer; des Gentilshommes; ides Avogadors, qui font comme les Avocats Généraux de nos Cours Supérieures; des Chevaliers de la Stoie , donc la Repubhquc honore les Gentilshommes qu'elle a envoyez en ambaliade auprès des Telles Couronnées ; du Capitaine- I Grand , qui eft comme le Grand Prévoit ; du Cavalier du Doge , qui eft Ton Maître de cérémonies ; des Commenda- teursou Huilîîers du Palais ; du Clerc de Chapelle du Doge, qui porte fon cierge devant lui quand il marche en cérémo- nie ; des Joueurs de iîutes &: de hautbois , qui précèdent audî le Doge en pareilles occaiions 5 des Muliciens qui vont chanter aux Proceffions ; des Enfans qu'on porte au baptême, joù on prend pluilcurs parains & jamais de maraines ; des Gentilsdonnes, ou Dames Vénitiennes qui fe coëlîenc avec des fleurs fur la tefte ; des filles de Gentilshommes qui vonc toujours par la Ville le vifage voilé ; des Citadines nouvelle^ mariées qui portent le voile blanc j des Barcarols qui con- duifen,c les Gondoles ; des Artifans qui vont crier des Lote- ries par les rués ^ des femmes des gens de métier , 8c xHç quelques villageoifes qui font d'une grande propreté ; des jeunes filles de Barcarols , qui font danfer leurs compa- gnes dans les places publiques avec un tambour de Bafque, Jcs jours de Perte ; &: quelques habits de mafqucs d'hom- mes & de femmes , avec lefquels toutes fortes de perfonnes peuvent aller comme inco^ito par la Ville , & dans tous les lieux publics , mefme dans les Tribunaux de Juftice duranc qu'on plaide j n'eftant néanmoins permis de les porter qu'au -Carnaval , le jour que les Ambafladeurs ont leur première .Audience publique, &: en d'autres temps de réjouillance. DES S C AVANS. loj REX UNCTUS DEI , HOC EST DE DNCTIONE Rezum j Deo annuenîe , in incliia y^rqcntoratenjïum Aca^ (iemia , Pr^fide D.JohanneJeachimo Zantgravio ^ D. Phiio- fophia praB. frofeffute , falemniter difputahit Jacohus Veniker, Jn -f . Argentarati. LEs thefes qui fe foutiennent à Strasbourg foriE appuyées , de leurs preuves, &: peuvent paU'cr pour des dilTerta-, | tarions , où des matières choifies font trai ées avec une jufte étendue. Je parlerai ici de deux feulement qui fervironc do modèle de toutes les autres. L'une eft fur le Sacrç des Rois , & fe réduit à ce qui fuir. Les Rois font appeliez les Oints de Dieu dans l'Ecriture, Cyrus , quoi que Payen , fut honoré de ce titre par Ifaïe. L'oni^ion qu'ils reçoivent efl: un figne de la puiflance que pieu leur met entre les mains. Les Juifs obferverentles pre» piiers cette ceremopie , & Samuel facra fucccfl]vemenc Saiil & David. Les autres i>euples eurent d'autres manières d'erablir leurs Souverains. Les Perfes revêtirent le leur delà Robe de Cyr xus , lui firent manger des figues , & boire du lait aigre. Les Macédoniens ceignirent la terte de leur Roi du diadème. Les foldats Romains portèrent l'Empereur Claude dans fa chaire. Au temps de Conltantin Us lui mirent la robe de pourpre , giij ^apport de Ladancc. Le jeune Andronique fut facré dans )'£glife de faintc Sophie par Ifaïe Patriarche de Conliantino- ple , avec des cérémonies racontées par C^ntacuzene. Char, Jemagne fut facré & couronné à Rome par le Pape Léon IIL ce qui a cfté continué jufqu'à Charlequiut qui fut facré à Bou- logne par Clément VIL Pépin fut le premier des Rois de France qui fe fit facrer une |)remiere fois par Bonifacc Archevêque de Maycnçc , &: une féconde fois par le Pape Etienne. L'inllitution du facre cil fainte. Il peut attirer les graçeç ^U Ciel furies Rois , & rendre leurs perfonnes plus vcnera- Jblcs à leurs fujets, Mais elle ne leur donne aucune nouvejlç 1 693. D d io6 LE JOURNAL autorité , & peut cftrc omife , comme elle le fut par Henri de Sixc , fans que leur fouveraincté en fouttre aucune diminu- tion. Les Papes ont abufé de cette cérémonie , pour étendre leur pouvoir fur le temporel des Princes. Les Canoniftes ont prétendu que l'ondion des Evêques qui ' fc fait 3. la telle , &c celle des Empereurs qui fe fait au haut du dos & au bras , fignificnt que la puiifance Ipintuelle des Evê- ques eft au dcfifus de la puilîancc temporelle des Princes. Quelques Hilloriens alTurent que Charîemagne fut facré de ri-uiile fainte depuis la teftc jufqu'aux pieds. Charle quint f Jt facrc Roi des Romains au fommet de la tcfte. Henri - Qaatricmc Roi de France , fut facré a Chartres en la mefme partie. L'autre thefe donc j'ai deflcin déparier dans cet extrait, eft fur le droit que les peuples d'Europe ont d'aller par mer aux Indes. Alexandre Sixième donna à Ferdinand d'Arragon les Illes , &: ic continent qu'il découvriroit à l'Occident &c au Midi. Martin Cinquième donna à Henri Roi de Portugal les ter. res qu'il découvriroit depuis les Canaries jufqu'aux Indes-. François Viéloria Doélcur de Salamanque , a prétendu que par ces conceffions du faint Siège les voyages aux Indes font interdits aux autres peuples. Cela n'a pas empêché que la Rei- ne Elifabeth n'ait prétendu contre le Roi Philippe II. avoir droit d'envoyer fes vaifteaux par toutes les Indes , ni que leis Anglois , les Hollandois , 5c les autres peuples ne l'ayent enfîa emporté fur les Efpagnols. Le plus plaufible de tous les motifs qui s'allèguent des voya- ges aux Indes , eft celui de convertir les Infidèles. Mais cd n'cft pas toujours le plus véritable. Le commerce aux Indes eft utile : mais il eft libre ^ & les Indiens peuvent le refufer , puis qu'ils font maîtres de leur bien. L'aurcur de la thefe exa- mine h les Espagnols peuvent prendre contre eux les armes , ,^en haine de ce qu'ils adorent de faux Dieux , de ce qu'ils leur — immolent des honimes , &: de ce qu'ils commettent des pé- chez donc la nature eft deshonorée. DES SCAVANS. rc/ R. P. LUDOVICI NOGUEIRA LUSITANI SOC. JESTJ Theologi , expofitio BuUa Cruciatie Znjïtania conceffa. In fol. Colonia yigrippma. léç^z, URbain fécond fut le premier de tous les Papes qui don- na des indulgences à ceux qui prendroient les armes pour la conquefte de la Paleftine. Depuis que l'Europe chrétien- ne eut laifTé refroidir fa dévotion pour ces expéditions d'ou- tre-mer , les fouverains Pontifes continuèrent d'ufer d'une fembiable libéralité envers ceux des Catoliques qui gardc- roient les places maritimes d'Efpagne & de Portugal contre les incurfions des Mahometans , & envers ceux qui contri- bucroient à une dépenfe fi ncccifairc au repos de la Chrétienté. En 1591. Grégoire quatorzième publia une Bulle, par la- quelle il accorda une temiflion entière de toute forte de pé- chez , & une communication générale des prières , des au- mônes , &c des autres bonnes œuvres qui fe pratiquent dans l'Eglife , avec le privilège de manger des œufs & de le vian- de aux jours défendus , à ceux qui fourniroient la fomme ta- xée par le Commiiraircapofrolique a proportion de leurs biens, pour eftre employée à l'entretien des garnifons qui défendent les places maritimes des Portugais. Clément huitième & Paul cinquième confirmèrent depuis cette Bulle , & y ajou- tèrent de nouvelles grâces , & les Papes leurs fuccelfeurs ont accoutumé de la renouveler de fix en fix ans , pour entretenir & pour accroître les charitez des fidèles. Cette Bulle a paru fi importante au P. Nogucira Jefuitc Portugais , qu'il a cru la devoir illullrer par un gros commen- taire, où il a fait entrer une foule d'aucoritez du droit Cano- nique touchant les Indulgences , les Abfolutions, les Refer- ves , les Interdits , les Cenfures , &c d'autres fcmblables ma- tières. ic8 LE JOURNAL LA VIE DE SAINTE ELISABETH FILLE DU ROI de Hongrie , Duchejfe de Tkùnqe , ^ première Retigieufe du troifieme Ordre de famt François . Par le P. Archavge Reli- qteux Pénitent du troifieme Ordre de faint François. In 8, à Pa- ns chez J. B. Coignard. 1692. LEs vertus de fainte Elifaberh fille d'André Second Roi de Hongrie , ont efté célébrées par plus de cent auteurs. Ce qu'ils ont écrit de plus merveilleux a efté recueilli par le P. Arcangc Pénitent du tiers ordre de faint François , & rédigé en vint livres , avec cette Proteflation , qu'il ne pré- tend point donner aux faits extraordinaires qu'il rapporte plus àc créance qu'en méritent ceux de qui il les a tirez. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Ld Concordance des Prophéties de TTofiradaTrius , avec l'hifioire depuis Henri Second \ufqua Louis le Grand -, la vie ^ l'upologie de cet auteur : enfemble quelques effais d'explications fur plufieurs de/es autres prédirions , tant fur le prefent que fur l'avenir. Par M. Guynaud Ecuyer , ci- devant Gouverneur des Pages de la Charru hre du Roi. In 12. à Paris chez Jaques Morcl , au fécond Pi,. lier de la Grand'Salle du Palais. 1693. Camus PafTienum fecandum quatuor Evangelifias , ^ Lamen- tationumjeremia Propheia , fro majore hebdomada. à Paris che? pierre de Bats. 1693. Le Poéfie £ Anacreoete , tradotte in verfo Tefcano , t d'annal tdz^oni illufrate. In 8. à Paris chez la Veuve de J. B. Coi- gnard , & J. B. Coignard le fils. 1693. A PARIS, Chez Jean C u s s o n , rue faint Jaques , à l'Image de famt Jean Baptifle. Avec Privilège du Roy. Xf 109 LE JOURNAL DES s C A V A N s 9 Du LuNDY 9. Mars M. DC. XCIII. L'ETAT DE LA PROVENCE , CONTENANT CE qu'il y a de plus remarquable dans la Police , dans la Ju(lice , dans l' Eglife , é" dans la Noblcjfe de cette Province , avec les armes de chaque famille, par M. l'Abbé R. D. B. Jn 22. Trois volumes, à Paris chez Pierre Aubouyii , Charles Clouzier , Se Pierre Emery , fur le quai des Auguliins. 1693. DE p u I s plus de deux cens ans que la Provence eft réii- nic à la Couronne , elle eft plus floriflance qu'elle n'a- voir jamais efté fous fes Comtes. Pour connoure l'heureux eftac où elle fe trouve aujourd'hui, il n"y a qu'à fuivrc la divifion marquée dans le titre de ce li- vre , ôd à confidercr la Police , la Juftice , l'EgUfe , &: la No- blefle. Quant à la Police , les Rois y envoyeur un Gouverneur qui y commande en leur nom , & un Lieutenant qui y comman- de en l'abfence du Gouverneur. Autrefois en l'abfence du Gouverneur & du Lieutenant de Roi , le Parlement faifoic leurs fondions. Mais maintenant c'eft à l'Intendant que cet- tç commiflîon eft donnée, 1693. " E e iio LE JOURNAL Les Confuls d'Aix , & ceux des autres lieux de la provin- ce , ont le gouvernement particulier des chofes qui regardent la police de ces mcfmes lieux , & jugent en dernier rellbrc jufqu'à une certaine fomme. Les affaires les plus importan- tes font réglées par le Parlement. Les ordres du Gouverneur 5«: du Lieutenant de Roi ne font point exécutez fans l'attache des Procureurs du pays, qui (ont de deux fortes , les uns appeliez Procureurs nez , & les au- tres Procureurs joints. Suivant la nature des atraires il fe fliit en Provence quatre fortes d'aflemblécs. La première efl: celle des trois Eftats , la féconde des Communautcz , la troificrae des Procureurs du jpiys nez , & la quatrième des Procureurs nez Se des Procu- reurs joints. Le premier tribunal de Tuftice de la Province eft le Parle- ment d'Aix établi par lettres de Louis Douzième , données àt ' Lion le lo. juillet 1501. Il n'y eut qu'un Prefidenr , onze Confcillers , un Avocat &: deux Procureurs Généraux, qua- tre Secrétaires , & un Avocat des pauvres , au temps de fon inftitucion. Il a depuis efté accru comme les autres Compa- gnies de Judicatuic. Le corps de la Cour des Comptes , des Aides , & des Fi- nances clî fort ancien , &: efloit en grande confideration fous les Comtes de Provence. Il fut réglé comme il elt prefente- ment par edit de Henri IL donné à Anet au mois d'Août de lanrjjj. La Juftice fubalterne confifte dans les ficges de Senechal^ &: dans les autres Jurifdidions qui relèvent du Parlement. La charge de Senechal n'avoit point autrefois de pareille. Il commandoit en l'abfencc du Comte , & avoit la diredion des Armées , de la juftice , & des Finances , & avoit le pou- voir d'afî'embler les trois Eftats , de lever des armées , & d'a- liéner le domaine. En 165^. cette charge fut divifée en autant de Sencchaul^ fées qu'il y a de Sièges dans le pays. Il y a maintenant douze Sénéchaux dans douze villes. Dans chaque bourg & dans chaque village il y a un Juge DES SCAVANS. i,t que le Seigneur ecablit pour connoitre en première inflancc des ditïerens civils & criminels. Il y a encore d'.uures jurif- didions, comme celle des Monnoyes, celle de la Marêchaufl fce , celle des Greniers à Tel. 11 y a outre cela des Juges d^s Marchans , un tribunal de l'Amirauté , un autre qui connoit de la pefche. A l'égard de l'eftat de l'Eglife , il y a dans la Provence deux Archevêchez, Aix & Arles. La Métropole d'Aix a cinq fuffra- gans , qui font les Evêques d'Apt , de Frejus , de Riez , de Sifteron , & de Gap. Il y a quatrevint deux paroilTes dans le diocefe , y compris l'Eglife Métropolitaine qui eft fous le titre de faint Sauveur, & qui a vint Chanoines , & autant de Beneficiers qui n'ont que des demi- prébendes. L'Archevêque d'Arles a autrefois difputé de la primatic avec l'Archevêque de Vienne. Il a quatre fuftragans, qui font les Evêques de Marfeillc , de Toulon , de faint Paul- Trois Châteaux , & d'Orange. L'Eglife Métropolitaine n'eft pas pafoifle , &: a vint Cha- noines. Les Maifons Religieufes font en grand nombre dans la Province. On en peut voir le dénombrement dans l'ori- ginal , de mefme que celui des Paroiffes &: des autres Béné- fices. On y peut voir auflî les Commanderies de l'Ordre de Mal- te qui dépendent de deux grans Pricurez , celui de faint Gi- les , & celui de Touloufe. La Nobleffe de Provence a toujours efté en grande répu- tation. Comme les Gentilshommes s'eRiment égaux , l'au- teur ne les a rangez dans fa quatrième partie que félon l'or- dre de l'alphabet. Mais dans le difcours de l'eredion des Refs il a fuivi celui de la dignité , & a parlé premièrement des Duchez , puis des Marquifats , des Comtez , &c des Baronies. 1,2 LE JOURNAL TRAITE' DES REMEDES VULNERAIRES , DANS lequel on explique leur nature (^ leun effets , avec la théorie dci accidens qui fe rencontrent dam la pLiyes , fuivant les anciennes ^nouvelles opinions , tjj' par l.t mécanique ^ ^c. par Jean Fran- çois Lctuqier Maitre Chiruryenjurè à Marfetlle , ^ aq^rezé i la focieté Royale de Médecine de Paris. In iz. à Lion. Se fe trouve à Paris chez Edme Coutcroc. 1693. JL n'cfl: parle que par occafion dans ce livre des opérations qui fe font par la main fur les playes. Mais il y ell: princi^ paiement traité des remèdes propres à les guérir ; & les dif- férences de ces remèdes y font expliquées dans un grand dé- tail , foit par rapport à l'efibnce du remède , foit par rapport à la partie bleflce , ou par d'autres rapports qu'il feroit trop long de déduire. Par rapport a. l'eflence du remède , l'auteur en dillingue de trois fortes , les diététiques , les pharmaceutiques , & les chirurgicaux. Les premiers confiftent dans un régime qui corrige le dér faut du fang , qui , s'il eftoit mal difpofé , rendroit inutiles tous les (oins qui pourroient eftre pris pour la guerifon des bJefl'ures. Les fccons font ceux que la Pharmacie prépare , & ils font ou fimples ou compofcz , ou internes ou externes. Les troi- fiimes fe font par la main , & par les inftrumens , lors que les incifions font neceffaires pour donner illue aux humeurs , ÔC CCS derniers remèdes font de plufieurs fortes. Outre cela il y a des remèdes qui ne fervent qu'à confoli- der la playe lors qu'elle ell fimple. Il y en a d'autres qui font la fuppuration lorsqu'il y a contufion ; & il y en a d'autres qui fervent d'antidote , lors que la playe a de la malignité. Quand cette malignité cft interne , elle conlifte toujours dans le fang Se dans les humeurs qui l'accompagnent , & elle fe communique de la playe au fang. Pour connoitre quel an- îidotc doit cftre appliqué à la playe , il faut fçavoir la qua- iitc maligne , &: l'auteur l'explique par les principes des Chi- miftes DES SCAVANS. 113 «lîftcs qui font confifter la malignité en trois chofcs, en une coagulation exceflîve , en une difl'olution auffi excelîive , ou en une compoficion dans laquelle il fe fait une combinaifon fi extraordinaire des principes du iang , qu'il n'en peut refulter que de dangereux cftets. La coagulation fe fait dans le fang en quatre fortes , ou par l'exhalaifon de l'humidité , ou par la codion , & par une fer, mentation qui l'epaiflk trop , ou par congélation, ou par fixa- tion. La dilTolution fe fait par l'eau ou par le feu , c'efl à dire par l'humidité ou par la chaleur. L'eau & l'humidité ecar-r tcntles parties du fang,& leur impriment un mouvement trop violent , d'où fuit la ditfolucion du fujet. Le feu & la chaleur caufent une exaltation des principes adtifs , tellement que les cfprits & les foufres eftanc débarraflez des fcis fixes , ils s'cvaporent prefque tous , &: ceux qui relient ne confervent aucune liaifon. La compofition dont il s'agit ici cft une tifiiire particulière des figures du fang , par laquelle leur figure & leur mouve- ment font tellement changez , qu'ils ne peuvent s'accorder avec les difpofitions naturelles. Les antidotes doivent eftre oppofez à l'efpece de la mali- gnité. Que fi elle vient d'une coagulation cxceffive , il faut la.chafler par des remèdes difiblvans, Sx elle vient de diflblu- tion , il faut des coagulans. Que fi elle vient de la compofi- tion , il faut encore des diflblvans. L'auteur piopofe dans ia fuite les remèdes particuliers qui ont ces qualitez , & qui doivent eftre appliquez par un habile Chirurgien félon la na^ îure du mal. DE L'ORIGINE DU DROIT D'AMORTISSEMENT. - Par M. Eufebe de z, * * * Avocat au Purtement. Jn 12. à Paris chez Jérôme Bobin , au cinquième Pilier de la Grand'Salle du Palais. 1692. Œrtullien a dit autrefois à l'occafion des regle- mens faits contre les Chrétiens , qu'il ne fuffit pas qu'tt- 165)3. Ff 114 LE JOURNAL ne loi foie jude , Ci d jaflice n'efl connue à ceux de qui clic veut eftre obcie. 11 femble qu'il fe peut avancer quelque cho- ie de fcmblable du droit d'Amortiflemenc , &: qu'il feroit fuf- pecl s'il n'avoit cité examiné , & Ci ceux fur lelqucls il vient d'ellre exercé dans toute fon étendue , n'efloient informez de fon origine , &: des folides fondemens fur lefqucls il cft établi. C'eft le but que s'eft propofé l'auteur de ce traite, qui cftanc perfuadé que le droit d'amortiflement ne feroit pas auifi jufto qu'il l'efl: , s'il n'eftoit appuyé que fur les raifons qui en ont elle apportées par Bacquec , &: par de pareils Ecrivains , a en- trepris de faire voir la foiblefle de ces raifons -là , &: d'en ap- porter d'autres plus fortes &: plus convaincantes. Les raifons que Bacquet en apporte dans le ij. chapitre de fon traité des nouveaux aquêcs , fe réduifent à quatre. La première eft , que dans la primitive Eglife les Apôtres , ni leurs fucceflcurs ne poflederent aucuns biens , à l'exemple des Lévites qui n'avoient point eu de part à la divifjon des terres. La féconde efl que les Ecclefiaftiques font incapables de pofleder des fiefs , parce qu'ils ne peuvent rendre aux Sei- gneurs les fervices qui leur font dûs par leurs vafîaux. La troifiéme eft , que les Communautez ne peuvent pofle- der d'héritages ni féodaux ni roturiers , fans faire préjudice au Roi &: aux Seigneurs hauts Julliciers , parce que ne mou- I rant point , &: ne pouvant aliéner , ils les privent des droits qui leur appartiennent en cas de déshérence , de contifcation, de vente &: d'échange. La quatrième eft: , que s'il eftoit permis aux Communautez d'aquerir des héritages , elles pollcderoient la plus grande partie des fiefs du Royaume , diminueroient par la fuite du temps les fervices dûs au Roi , èc rejetteroient la taille fur le reftc des fujcts qui fc trouveroienc hors d'eftat de la payer. 11 y a une cinquième raifon , qui fonde le droit d'amortifl fe ment fur la loi neuvième, dig.de rerum divijione , qui dé- fend de dédier un Ucu publie fans la pcrmillîon de l'Empe- reur. DESSCAVANS. uj L'auteur de ce craité ne convient de rien de ce qui eft a- vancé dans l'expofition de la première raifon. Il ne convient: pas que les Lévites ni les Apôtres n'ayent pu pofleder aucun héritage. Il demeure d'accord que fous les Empereurs Payen« les Eglifes ne pouvoient recevoir aucuns legs , parce qu'elles cftoient regardées comme des affemblées illicites. Mais des l'an 311. que Conftantin fe déclara en faveur delà Religion Chrétienne, elles commencèrent à aquerir ; & neuf ans après le mefme Empereur leur permit parla quatrième loi du Code Theodofien , au titre de Epifcopis , de jouir de ce qui leur au- roit efté légué par toute forte de perfonnes. L'auteur convient encore moins que les anciennes loix du Royaume ayent défendu aux Ecclefiaftiques de pofleder des héritages. 11 eft vrai que Chilpcric caffa quelques tellamens faits en leur faveur , comme Grégoire de Tours l'allure dans le dernier chapitre du fixiéme livre. Mais le Roi Gontrart leur fut aufli favorable que Chilpcric leur avoir efté con- traire : &: d'ailleurs le cinquième Concile de Paris tenu en 615. déclara valables les liberalitez qui leur feroient faites , quoi que les cérémonies requifes par les loix n'y enflent pas efté obfervèes. En cela les Evêques du Concile femblerent excéder leur pouvoir , qui par fon inftitution ne s'étend que fur les cho- fes fpirituelles. Mais l'edit de Clotaire Second , fils de Chil- pcric , qui eftoit prefent à leur alTemblée , fuppléa à ce dé- faut. Depuis ce temps- là les donations faites aux Commu- nautez Ecclefiaftiques devinrent plus fréquentes qu'aupara- vant , & l'abus alla jufques à refufer la fepulture à ceux qui 1 ne leur avoient rien laiffé par teftament. Que fi par les anciennes loix du Royaume , les Eglifes n'eftoient point incapables d'aquerir ni de pofleder des im- meubles , la difcipline de l'Eglife n'a aucune application au droit d'amortiflement , &c la première raifon de Bacquetno peut fubfifter. La féconde n'eft pas plus forte. Car bien que les Clercs ne puiflcnt rendre par eux mefmes le fervice auquel les fiefs obligent , ils le peuvent rendre par des Vicaires , par des Vi- ii<Ç L E J OUR NAL dames , & par des avouez , comme les mineurs le rendent par leurs gardiens. De plus quand il Icroit vrai qu'en France les Clercs font mcapablcs de polleder des fiefs , mcfme avec le fecours des Vidâmes & des Avouez , il ne s'enfui vroit pas que cette incapacité cuft donné lieu au droit d'amortiilemcnç, puis que ce droit n'eft pas moins àù pour les héritages en roture que pour les fiefs, La troifiéme raifon eftla meilleure , & néanmoins elle n'çft pas fufBfante pour établir le droit d'amortilîement. Car bien que le Roi foutfre quelque préjudice lors que les Communau- tez aquierrent des fîefs qui relèvent immédiatement de fes vaflaux , il n'en foulfie aucun quand elles n'aquierrent que des arricrefiefs ; &: alors il n'a aucun prétexte de prétendre le droit d'araortiflement. La quatrième raifon renferme une abfurdité manifefte. Car /uppofé que les aquifitions des Communautez privent le Roi du fervice qui lui eft dû , èc rejettent la taille & les autres charges fur le refte de fes fujcts , le droit d'amortiHement n'a pu eftre établi pour remédier à cet inconvénient qu'il ne fait que faciliter &c accroître. Enfin ce droit-là n'eft point fondé fur la loi 5. au Digcfte de rerum divifione , dont l'cfpece eft d'un lieu public , qui ne pouvoit eftre confacré fans la pcrmifllon de l'Empereur. Les héritages que les Communautez aquierrent , n'en deviennent pas publics , èc ce n'eft pas pour les rendre tels que le Roi ac- corde fes lettres d'amortiftement. L'auteur ayant détruit de la forte ces cinq raifons , en cher- che d'autres fur lei'quelles il puiffc plus folidement appuyer le droit d'amortiflement. Il trouve que ce droit n'a elle ea ufage ni fous les deux premières races , ni au commencement de la troifiéme. Que fi les Rois de ces temps-là ont quelque- fois confirmé des aquifitions faites par les Communautez ec- clefiaftiques , ce n'eftoit pas pour les rendre valables , mais feulement pour les mettre fous leur proteâiion , & les défen- dre contre la violence &: la chicane. Que fi nos Rois bien loin d'oter aux Communautez Ecclcfiaftiques la liberté d'à- querijr DES S CAV ANS. 117 ^ueiir , l'ont perpétuellement favorifée , elles ne l'ont pu perdre à moins qu'il ne furvinft un changement confiderable dans la qualité des héritages qui fervent de matière aux a- quifitions. Or ce changement furvint au commencement de Li troifiéme race , lors que les fiefs qui n'eftoient auparavant qu'à vie , devinrent héréditaires , &; que la plupart des aleus furent convertis en fiefs. Ces fiefs devinrent d'abord hérédi- taires par un eft'et de la gcnerofité des Seigneurs , qui en ac- cordèrent l'inveftiture aux héritiers de leurs vafTaux : mais dans la fuite ne l'ayant plus voulu nccordcr gratujrement, ils exigèrent les droits de reliefs de rachat , les lots & ventes , les quints & les requints. Comme ils fc trouvoient privez de ces droits lors que les Communautcz aqucrroient des fons , ils commencèrent à leur en refufer l'inveftiture , à moins qu'elles ne leur payaffenc l'indemnité. Elles trouvèrent par l'écablilTement de ce droit une nouvelle facilité de faire des aquificions ; & les Croifa- des eftant furvcnues , elles firent des profits immenfcs en a- checant à. bas prix les terres que les nobles vendoicnt pour fai- re le voyage d'outre mer. Cet abus s'cftant augmenté, les Officiers du Roi tâchèrent d'en arrêter le cours vers la fin du treizième iieclc , en faiiill fant en fon nom les fons poiTedez par les Egiifes , & aquis fans fon confentemenr. Car comme tous les fiefs du Royau- itie relèvent ou mediatement ou immédiatement de lui , ils n'avoient pu cdrcaèregez^Cans fa permiffion , & i! avoir droit de contraindre les polTelfeurs de les mettre hors de leurs mains. Ce fut ce qui donna lieu à l'ordonnance de l'an 127J. par la- quelle Philippe Troifiéme furnommé le Hardi , fils de faint Louis , déclara que les Egiifes ne feroient point inquiétées dans la pofieffion des héritages qu'elles auroient aquis depuis vint-neuf ans fans fon confentement , pourvu qu'elles le dé- dommageaflent, en lui payant en argent la valeur d'une , de deux , de trois , ou de quatre années des fruits de ces hérita- ges , fuivant les difFercns cas qui font exprimez dans fon or- donnance. Philippe Quatrième fon fils furnommé le Bel, fit à l'cxem- 1693. G g I 1 15 L E î OU R ^J A L pic du Roi fon pcic , une autre ordonnance en 1 191. par li- quclle il ftacua iix chofes à l'égard des aquilltions faites par les Ecclefiaftiques. Quatre ans après les Beneficiers du Royaume lui ayant pro- I mis de lui payer les décimes que le Pape lui avoir accordées pour le dédommager des dépcnfes faites en la guerre de Flan- dre , il amortit gratuitement toutes les aquilkions qu'ils a- voicnt faites. Louis Hutin fbn fils aîné , accorda la mcfme grâce aux Ecclefiaftiqucs en 1 31 j. à caufe des mefmes décimes. Mais en 1310. Philippe Cinquième furnommc le Long , fon frerc & fon fuccelfeur , les taxa à une plus groll'e finance, comme il fe voit dans l'ordonnance rapportée toute entière par notre auteur. Cette ordonnance demeura fans exécution , parce que quelque rigoureufe qu'elle paroiiîc , elle n'avoit elle faite que pour obliger les Ecclefialtiques à payer les décimes. Charles le Bel en 1 3 lé. fit une autre ordonnance pour con- damner les Ecclefiaftiques à lui payer finance pour les aquifi- tions qu'ils n'avoient point amorties. Philippe de Valois , & Jean fon fils , furent fi fort occupez aux guerres contre les Anglois, qu'ils ne firent rien de nou- veau furies amorcinemcns à larefcrve de deux ordonnances de Philippe de Valois de l'an i 344. Charles Cinquième fils du Roi Jean , en fit deux autres. Par la première qui ell de l'an 1370. il taxa les Eglifes à dif- férentes (bmmcs pour les héritages qu'elles avoient aquis dans fes fiefs & dans fes arrierefiefs ; &: par la féconde qui eft de deux ans après , il déclara qu'au Roi feul appartient d'amonir dans fon Royaume. NonobRanr cette ordonnance les Eglifcs continuèrent d'a- querir dans les lieux où elles avoient haute , moyenne , & baile Jufiice , & y amortirent les héritages que les autres gens de mainmorte y aqueroienr. Le fondement de cet ulagc eftoit que leurs terres amorties ne relevoient de perfonne , & dévoient eftre confiderées comme de francs alleus. Mais cet DES SCAVANS. m 9 ûfage qui auroit enfin caufé la ruine de l'Eftat , fut aboli par Charles VI. Les aquifitions des gens d'EgUfc eflanc ainfi afllijetties au droic d'amortiflement , il ne reftoit plus qu'à fixer la finance due au Roi , laquelle jufques alors avoir elté arbitraire. C'eft ce que fit Charles V l. par Ton ordonnance de l'an 1401 par laquelle il déclara que ceux qui voudroicnr obtenir de lui des lettres d'amortillcment , lui payeroient le tiers de la va- leur des hcrirages amortis. Ce qui n'a efté entendu ni exécu- té que des pofleflîons nobles & féodales , les roturières ayant toujours efté taxées à moindre finance. De tout ceci l'auteur infère , que jufques ici le droit d'a- ttiortilfement a efté mal défini , une fermiffion accordée par le Roi aux gtns de main-morte de pojfeder des immeubles. Ce n'eft point pour devenir capables de pofleder des immeubles , que les gens de main- morte ont recours au Roi. Ce n'eft que pour obtenir qu'il confente que fes fiefs foient diminuez J & c'cft pour cela que la Cronique de l'Abbayc du Bec a fort bien dit qu amortir nefi autre chofe qu'affranchir une terre des droits ta* des fervices quelle doit. L'auteur après avoir affermi de la forte les fondemens fur lefqucls il appuyé la juftice du droit d'amortiflement, propo- fe cette queftion , S'il peut s'étendre aux rentes conftituées ; & pour la décider il fuppofc que les rentes a prix d'argent ne commencèrent qu'au treizième fiecle ; qu'avant ce temps- là on ne doutoit pas qu'un propriétaire en aliénant fon fons ne puft le charger d'une rente , parce que c'eftoit fe referver un revenu fur une chofe qui produifoit des fruits : mais qu'on doutoit que fans l'aliéner , & fans ccffer d'en jouir , il pufl: vendre deftus pareil revenu en bled ou en vin. Car c'eft ainfi que les premières rentes furent payées en fruits , jufques à ce que cet ufage fut changé par l'ordonnance de Charles IX. de l'an I jôf. Martin V. & Callixte III. déclarèrent que cela fe pouvoic faire , & que ces rentes eftoient legicimes , parce que l'achat &: la vente fe rencontrent dans le contrat , &: que la rente izo LE JOURNAL doic eftre afllgnée fur un héritage certain , &: réputé vendai jufqu'à la concurrence de ce dont il eft chargé. Or fi les rentes conllituées à prix d'argent afFectent telle- ment le fond fi.ir lequel elles font affignécs , qu'il foit réputé vendu à proportion du prix de U rente , il f^uc conclure que l'indemnité elt due au Seigneur pour ces reiites , quand elles font aquifes par des gens de main morte : autrement les Sei- gneurs perdroient leur droit de rachat , & de lors & ventes. Et comme les Seigneurs ne pouvoicnt recevoir l'indemnité pour les rentes conftituées , fans diminuer leurs profits féo- daux, & fans abréger leurs fiefs , &C nul abrègement de fief ne pouvant cftre fait fans le confentemenc du Roi , &c fans lui payer finance , il eft évident que les gens de main-morte doi- vent au Roi le droit d'amortifl'cment pour les rentes confti- tuées. Que s'ils ne font plus taxez pour ces rentes , c'eft que le Roi ne veut pas exercer fon droit à la rigueur. Car quant aux ren- tes conftituées par dons & par legs au profit de gens de main- morte, elles font fujettes au droit d'amortifl'ement ; en quoi elles font de pire condition que les rentes conftituées à prix d'argent. L'auteur n'ayant rien voulu avancer dans ce traité qui ne foit bien appuyé , y a joint deux fortes de preuves. Les pre- mières font d'anciennes ordonnances , les unes Françoifes,&; les autres Latines. Les Françoifes font tirées d'un regitre de feu Monficur P. Pithou , &: communiqué par M. Defmarés avocat au Parlement. Les Latines avoient déjà efté impri- mées dans l'ancien ftile du Parlement. Les fécondes preuves font compofécs d'acles tirez d'anciens mémoires , &: de quelques arrêts. Il promet de donner bien- tôt au public de nouvelles obfcrvations fur les Infiituîei Cou~ tumieres de Loifel. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue fiinc Jaques , à /'Image de faine Jean Baptifte. Avec Privilège du Rot. XI. 121 LE JOURNAL DES s C A V A N s 9 Du LuNDY lé. Maks m. DC XCIII. RELATION DU VOYAGE ET RETOUR DES INDES Orientales , pendant les années jépo. ^ i6pi. par un Garde de-f la ?Aanne fervant fur le bord de M. Duquefne Commandant ds l'Efcadre. In 12. à Paris chez la Veuve de J. B. Coi- gnard^, &: J. B. Coignard le fils. 1691. LA France toute occupée qu elle eft depuis quatre ans à foutenir la guerre en Europe, a eu encore des forces aiFez confiderables non feulement pour maintenir fon commerce aux Indes Orientales , mais auffi pour y traverfer celui de fes ennemis. Ce fut dans cette vue qu'en 1 690. elle cquippa une Efca- dre de fix vailTeaux , qui partit du port Louis le 14. Février, doubla le Cap de Firtiftere le z. Mars , laiffa à droite les Ifles de Madère fans les reconnoicre , & fe trouva proche du Pic de Tenenffe l'onzième à Midi. P'eft une des plus hautes montagnes du monde, à laquelle on donne fept lieues de hauteur. Derrière la montagne eil bâtie la ville de Canane. Elle pafla le Tropique du Cancer la nuit du quinzième au feiziéme , & mouilla à demie lieuë de l'Ifle de Santiague le 1693. Hh 111 ^ LE JOURNAL dix-huitiéme à deux heures après Midi. Le P. Tachard Jc- fuice , le Garde-Marine auteur de cette reiation , & un Offi- cier , y dcfccndirent , & y virent des Nègres tout nus , à la- refcrve d'un linge qui couvre les parties que la pudeur ne per- met pas de montrer. Ils allèrent chercher le Gouverneur dans une Eglife , où un Prêtre Nègre célébra la Melle aflilté d'un Diacre pauvrement vêtu. La ville de Santiague bâtie dans un fond ,eft d'environ trois cent feux. L'Evêque eftunCordelier venu de Lisbonne. L'Ef- cadre en partit le vint- unième Mars , &: paffa la ligne le neu- vième Avril , après avoir fouffert durant plufieurs jours des chaleurs très incommodes. A cent lieues par delà les voya- geurs commencèrent à refpirer un air tempcrè qui apporta un grand foulagement aux malades. Le dix-huitieme Mai ils pallerent le Tropique du Capri- corne ;, & dix jours après doublèrent le Cap de Bonne Efpe- rance fans y pouvoir prendre de rafraichid'emens , à caufe de la guerre avec les Hollandois , & refolurent d'aller jufqu a Anjouam , qui ert: à huit cent lieues par de- là. Le quinzième Juin ils apperçurent l'Ifle de Madagafcar ; & fur l'avis que reçut M. Duquefne , qu'il eftoit aifè de faire l'eau à rille de Moëlh , il voulut y aller , afin qu'arrivant à Anjouam , il fufc en eflat de battre les Anglois qu'il efperoit y rencontrer. Moclli ed une Iflc de l'Arabie qui peut avoir trente lieues de tour. La terre eft très fertile, & les forêts y font remplies d'une infinité de gibier, L'efcadrc y prit les rafraichillemens dont elle avoit befoin , & en partit le premier Juillet à deJlein d'aller chercher les Anglois. Les François apperçurent bien-tôt un vaifleau de cette na- tion , qui eltoit proche de terre , & le criblèrent de leur ca- non ; ce qui porta le Capitame à la rcfolucion defefperèe d'y mettre le feu , de peur que les François n'en profitaient ; ce qu'il exécuta à leur vue , après s'cftre jette dans un canot fur lequel il leur echapa. Le dixième Juillet ils palîerent la ligne une féconde fois, mais fans beaucoup d'incommodité. Le vint- huitième ils dé- à DES SCAVANS. 123 couvrirent i'Ifle de Ceilan , qui eft un des meilleurs pays du monde , &c d'où les Hollandois tirent un revenu immenfe par la mufcade , par la canelle , & par les perles. L'Efcadre y fît plufieurs prifes fur eux. Le dixième Aoiit elle aborda à Negrapatam ville de la côte de Coromandel , où les Hollandois ont une forterefle & un compcoir. Deux jours après elle arriva devant Ponticheri , principal etabliflTemenc que la Compagnie ait aux Indes. Cet- te arrivée donna l'allarme aux Anglois & aux Hollandois, qui peu auparavant menaçoienc leDiredeur François de le brûler dans fa forterefle. En clïet l'Efcadre de France mit aufli-tôc à la voile pour aller combattre des vaifleaux Anglois & Hol- landois qui eftoient fous la forterelî'e de Madras. Le vint-cin- quiéme elle apperçut plufieurs navires rangez en ligne fous le canon du fort faint George L'aureur en compta quatorze , dont il n'y en eut qu'onze qui firent feu. Le combat dura qua- tre heures 5 après quoi l'Efcadre continua fa route } & le fep- tiéme Septembre arriva devant Balaçor, Le treizième elle en partit pour aller à Mergui , & efluya une furicufe tempête. Le douzième Odobre elle découvrit les Ifles des Andamants habitées par les plus fauvages &C les plus cruels du monde, qui mangeur ceux qui tombent entre leurs mains. Une heure après elle découvrit l'iHe de Cocos , dont l'au- teur fait une ample defcription dans le 34. chapitre. L'Efca- dre y arriva le dix-feptième , &: après y avoir pris les rafraî- chifTemens neceflaires , en partit le vint unième pourNe- grailîe ou pour Mergui. Negraille confifte en deux Ifles feparèes d'une portée de canon , à quatre lieues de la terre ferme du Pegu. Il y a beau- coup de gibier , & point d'hommes. Le douzième Novembre l'Efcadre fortit d'entre les deux Ifles de Negraille , &: le quatorzième , ayant pris environ qua- trevint tortues , fit voile pour aller à Balaçor. Le vint- unième elle arrêta devant Chedube Iflc du Royau- me de Rocam , a. deflein d'y prendre des rafraîchifl!emcns. Mais il lui fut impoflible de traiter avec les Sauvages. Le dernier Novembre elle arriva à la vue de Balaçor , avec Î14 LE JOURNAL quacrevint malades , de qui le P. Tachard prit beaucoup de foin. L'air de la terre les guérit en peu de temps ; de forte que Je trentième Décembre l'Efcadre fut en eltat de lever l'an- cre pour retourner à Ponticheri , où le P. Tachard débarqua pour demeurer a. terre. L'auteur témoigne en cet endroic combien il fut furpris du peu de regret que ceux de l'équipa- ge eurent de cette feparation , & du peu de reconnoifl'ance qu'ils firent paroitrc à ce Jcfuite de qui ils avoient toujours re- çu de très bons offices. Le vint- quatrième Janvier 1691. l'Efcadre quitta les Indes, le quatrième février pafl'a la ligne fans aucune incommodité confiderablc , le vint- cinquième du mefme mois le Tropique du Capricorne , & peu après fut battue deux jours durant d'une tempête qui lui ôta toute efperance de falut. Elle en echapa pourtant , doubla le Cap de bonne efperance avec un vent favorable , paffa la ligne pour la quatrième fois le vinc- deuxième Mai , mouilla à la vue de la Martinique le cinquiè- me Juin, paifa le Tropique du Cancer le vint- unième Juil- let , & entra heureufcment dans le port Louis le dix-huitié^ me AoiJt. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. FOUCHER CHA^ nome de 'Dijon , pour répondre à M. de Leibniz^ fur quelques ^- xiomes de Philofophie. JE croi , Monficur , que vous ferez content de ce que j'ai dit dans mon 3. livre des differtations fur la Philofophie des Académiciens , au fujct du doute gênerai qu'on leur attribue vulgairement. Car non feulement j'ai prouvé dans ce livre , que les Académiciens n'ont pas douté de toutes chofes , mais encore qu'ils avoient des dogmes ; &c c'eft ce que j'ai mon- tré par le témoignage de Ciceron , qui parle ainfî de Philon Chef de la quatrième Académie : Quamquam Anùochi Ma~ gi^er Philo , m.ignus vir , ut tu exiftimai ipfe , negarit in lihrii quoi corarn eiïam ex ipfo audicbamui , àuai Academiai ejje -, crrorcm- que eorum qui ita putarunt coarguit. C'eft encore ce que j'ai ptouvé par un fragment de Clitomaque , où il eft dit que l'on fe DES SCAVANS. izj fc trompe d'attribuer aux Académiciens d'avoir douté des fenfations : Veher-entfr erra': c^s grt: dicur.t at Acaderr'cii [en- fui eripi , à quitus 7 ufcjuani diHum fit aut colorem , aut f porem , aut jonum nuUum ejfe : fed , (yc. Outre cela, on voit aufii par le nicfme fragment , que les Académiciens ne doutoienc point de ce qui eftoit m:inicdiatement connu ou apperçu par iui-mefine , Propterca quod nikil falf cognitum ^ peneptum tjfe foUit. D'où il s'enfuie que ce qui cft immédiatement connu cft rouiours vrai, &■ nedou point eftre révoqué en ucutc ; & c'cft ce que ces Philofophes ont reconnu. Ou-re cela j'ai fait voir que les Académiciens n'ayant rien i écrit , on en juge vulgairement fur le rapport de leurs Ad- verfaires , qui cfloient les Stoïciens , qui avoient coutume ' de dire que ces Philofophes renvcrfoient toutes les fcicnccs en refufmt le témoignage des fens , pour juger de la vérité des chofes qui font hors de nous. Qoant à ce qui regarde cet axiome : Natura non .^ EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. SAVIARD , Maïue Chirurgien Juré de Pans ^ de ï' Hotei-Dieu. LE huitième Juin dernier un porteur d'eau qui demeuroic ; dans la rue de la Bucherie , prit fur les quatre heures du niatm un rafoir pour fe couper la gorge. Sa femme s'cflanc apperçue de fon deflein , &. voyant qu'il commençoit à l'exe- çutcr , fe mit promtemcnt à la fenêtre , &: cria au voleur. Un Cordonnier du voifinage cftant accouru au bruit , fut étran- gement furpris de voir l'adion de cet homme. Le Porteur d'eau le voyant entrer dans fa chambre , jctta fon rafoir , & courut à lui. Le Cordonnier ayant peur, s'enfuit , & fut cher- cher du fccours. Cependant le Porteur d'eau reprit fon ra- foir , & continua à fe couper la gorge : ce qu'il n'avoir pas en- core achevé de faire , lors que deux Menuifiers voifins père & fils arrivèrent. Le fîls plus fort que le perc, fe jetta à corps perdu fur le Porteur d'eau , & l'ayant jette par terre, tous les voifins arrivèrent , fans que le Porteur d'eau vouluft quitter le rafoir, dont le jeune Menuifier fut bleffé à un doit. Le Por- teur d'eau céda enfin à la force ; & on l'emmena fur le champ à I Hotei-Dieu , oij je fus mandé. En arrivant j'apperçus que la partie fupcricurc du Larinx cftoit coupée , avec les aîlcs du Tiroïde, au deffiis de fa par- tie convexe , qui fait ce qu'on appelle vulgairement la pora- 1693. Pp 155 LEjOU^NfAl me d'Adam j que rEfofngc efloit aiifli coup6 , &: tjii'îl tfé" tcnoit qu'à fa partie poiteneurcparune largeur d'environ deux lignes. Je vis encore que les tegumcns & les mufcles eftoienc coupez de la largeur de cinq grans travers de doit , fans pour- tant qu'aucun vaideau conliderablc fuft endommage , n'y ayant point d'iicmoiragie. Uu tel fpewlacle me fie horreur : & voyant que cet homme ne pouvoir parler ; pour s'afTurer fi l'ETofagc eftoit coupe, auf- fî-bien que la partie fuperieure du Larinx , M. Bûcher pre- mier Chirurgien Interne, lui fit avaler de l'eau qui forcit auffi- tôt par l'ouverture, J'allurai le Prêtre qui eftoir prefenc , que je fcrois parler le Porteur d'eau en f^iifant la fijcure , après la- quelle l'air reprendroit ù route pour venir dans la bouche afin de former la voix. Pour cet eftet ayant pris mon eguillc cour- be enfilée , je fis la future à points continuez d'un bout à l'au- tre de la playe. A mefurc que je bouchois l'ouverture, la voix & la parole lui rcvenoie;it. Je mis enfuitc de la charpie fur la future , avec une emplâtre , une compreflc , &: un bandage ^ après quoi il parla fort diftmètement , de forte qu'on l'auroic entendu de fix pas &: de plus loin. Il feconfella, &: répondit au Commiflairc qui le vint interroger fur le fujct qui l'avoit déterminé à fe couper la gorge. On parle divcrfcmcnt de cet accident. Les uns difenr que cet homme ayant une fommc d'argent alfez confidcrablc par rapport à fon cllat , avoir beaucoup perdu au rabaificment des monnoyes. Les autres affurent que ce mal ou cette envie de fe tuerie prcnoit tous les mois , Se que pendant qu'elle duroit on ne lui laiiroit rien entre les mains qui pull le blefTer. Il y a apparence que la dernière raifon l'a emporte , puis qu'il a cfté jugé digne d'cllre inhumé en terre fainte. Il vécut depuis lès quatre heures du matin du jour qu'il fe blefla , jufqu'au lende- main à dix heures du matin. Lors qu'on lui faifoit prendre quelque nourriture, elle dèmcuroit dans la playe , fans fortisr en haut ni par en bas. Il parut toujours fore raifonnabic. DE5 ^tAi'Ar^S. tp llELATION DE LA MORT DE M'^^ FRANÇOIS- H^innibald'Efirèes , Ducé" Puir de France ^ Gein'ctneur de l ijle de France , ^ du Soijfmnots , ylmhafRidsur cxtrordinaire d% Roi auprès de Sa Sainteté , arrivée à Rome le p. jour de Jan- vier de l\innce j68ç^. où bon voit la hnncars qui fe rendent en (ette ville aux obfeques des An^baffadeurs des Tefies Vûurovnèes. par Jaques Chapbras , Ecuyer Seignear de Cramai/les. In ^. à Paris chez R, J. B. de la Caille. 1 6 9 3 . LEs cérémonies qui s'obfèrvent à Rome aux obfeques det Ambaffadeurs Acs Telles Couronnées , font femblabics à celles qui s'Gbfervent aux obfeques des quatre Cardinaux revêrus des quatre grandes charges , fçavoir de Doyen du Sa- cré Collège , de Camerlingue de la lainte Eglife , de Vice- chancelier , & de grand Pénitencier. Le Pape Innocent On- zième fit rendre les mefmcs honneurs à la mémoire de la Rei- ne de Suéde , & voulut qu'elle fuft enterrée dans l'fglife de S. Pierre du Vatican. La relation que M. de Cramaillcs nous donne de la pompé funèbre qui fe fit après la mort de M. le Duc d'Eftrces , eil d'autant plus fidèle , qu'il la compofa dans le temps melme qu'il venoit de l'obfcrver de Tes propres yeux, &: qu'il en avoir encore toutes les particularitez prefentcs à refprit. ÀDAMI RECHEMBERGII LIBER MEMORIALIS^ frxleFiionuin hifioncarum m Acadcmiu Lipjùnjt. In 8. Li^" fa. 1 6 9 ï . T Es leçons que l'auteur de ces Mémoires a données fuc ■^■'l'hiftoire dans TUniverfité de Leipfic , fe peuvent réduire à trois chefs. Le premier explique la nature de l'hiftoire, l'or- dre qui doit eftre tenu pour la lire , &: les fecours qui doivent cftre empruntez de la Cronologie , de la Géographie , &C de Ja Politique , pour la bien entendre. Le fécond cft un rccic abrégé de roriginc , du progrés , 5ê ïji LE JOURNAL de la décadence des quatre grandes Monarchies , avec une dcfcripcion de la République des Juifs. Le troificmc e(l un tableau où l'Empire Romain efi reprc- fente avec route l'étendue qu'il a eue en Orient &: en Occi- dent , & où fe voit enfuite d'un côté le prodigieux accroiile- iTicnt de la puifflmcc Ottomane ; & de l'autre rcftac de la Monarchie d'Allemagne dans trois intervalles de temps , l'un depuis Charlem;igne jufqu'à Rodolte de Ilatfljourg : l'autre depuis ce Rodolfe jurqu'à Maximihen I. & le dernier depuis Maximilicn jufqu'à notre temps. L'auteur touche les plus mémorables cvenemens arrivez, non feulement dans l'Empire, mais mefme dans le relie de l'Europe durant ce dernier in- tervalle , & montre les changemens furvenus en la forme du gouvernement. rXPLICATION DES PHENOMENES DES LARMES de verre brifeei dam le vuide. Par Loua Henn de JSeauch.imp^ £cuyer. MR. Homberg qui s'efl mis en réputation par fon indu- (Irie à faire toute forte d'expériences dans la machine Pneumatique , vient de nous apprendre dans les Mémoires de l'Açademie Royale des Sciences , publiez le 31 . Décembre dernier , qu'il a plufieurs fois obfervé que les larmes de verre fe brifent dans le vuide avec beaucoup plus de violence que dans fair libre 5 que leurs fragmens font beaucoup plus pc- tis ; qu'ils caflent quelquefois le balon vuide ; &: qu'enfin en fe brifant ils font voir une foible lumière , fi l'expérience cft fuite en un lieu obfcur. M. Homberg rapporte enfuite trois différentes explications des phénomènes des larmes de verre brifécs dans le vuide , & s'attache particulièrement à réfuter celle des nouveaux Phi- lofophes , c'cft à dire des Cartcfiens. Il dit que leut explica- tion ne peut plus fubfiRer depuis qu'on voit des larmes de verrre fe brifcr dans le vuide comme dans l'air libre : car cet fzTtia UiTtioini délicates de la matière fubtile , ( il veut parler des globules DES SCAVANS. 155 globules du fccond clément ) feraient dam le balon , ou ellis viendraient de dehors. Ce dénombrement a trop coûté pour ne pas l'accorder. £//es ne font pas dans le balon. C'cft ce qu'il f.iut démontrer ; & c'efl ce que M. Homberg , ni tous les Acadé- miciens de l'univers ne fçauroient faire. Puis qu'il a ejie bien , vuidé par le moyen de la machine Pneumatique. Qljc M. Hom- berg s'imagine s'il veut , qu'il a entièrement pompé tout l'aie qui cftoit dans fon balon -, comment démontrcra-t-il qu'il en a fait de nvcfmc des globules ? C'cfl; ce qu'on le défie de fai- re. Ou au moins s'il y en refle quelques-uves. Non feulement il tcfle quelques globules dans le balon , c'cft à dire autant qu'il y en avoit avant qu'on en pompait l'air ; mais il y en a enco- re davantage depuis que l'air en eft forti , parce que le mon- de eftant plein , l'air ne peut fe loger autour du balon , fins déplacer une partie des globules qui l'environnent immédia- tement, ni ceux-ci trouver place ailleurs que dans le balon , par les pores duquel ils entrent en toute liberté ( comme nous 1-e verrons bientôt ) à mefure que l'air en fort parle corps de la pompe. Ou au moins s'il y en refie quelques-unes , ce peu qui y refle rie fi pas capable de f Aire un effort affcz^grand pour briferla lar- me. Cela eft détruit par ce qui précède immédiatement. Elles ne peuvent pas non plus venir de dehors : car ou c Ses font arrctèes par le balon qui enferme la larme. On défie M. Kombcrg de prouver l'un &: l'autre de ces deux.cas. Ou fi elles peuvent p.iffer au tra- vers des pores da balon fans le rompre , elles pourront auffi pafjer par les pores de la larme fans ta brifer. Voila ce qui s'appelle raifon- ner jufte , pourvu qu'il plaife .1 M. Homberg de concevoir qu'on ne cafle point la queue de la larme , ou que fi on le fait c'cfi; en un endroit fi menu , que les porcs qu'on découvre re font pas plus ouverts que ceux qui font \ la furface de la larme. Qar les pores à% balon qui eft de verre aulfi-hien que la lar^ me , ne font pas moins étroits que ceux de la furface de la larme. Cela paroitra faux, fi l'on confidere que le balon ayant efté re- froidi peu à peu, toute (brte de globules gros & petis, ont eu le temps de s'y former des palfages par tout uniformes & égaux parlefquellcs ils peuvent entrer &: fortir en toute liberté : au lieu que la larme ayant elle plongée daos l'eau froide lors 16^3. Q_q 154 LE JOURNAL qu'elle eftoic encore toute en feu , les pores qui font vers fa furface, fe font rétrécis fi promtcmcnt & avec tant de violen- ce , qu'ils ne peuvent recevoir que les plus pctis des glo- bules. II n'en eft pas arrivé de mcfmc aux parties intérieures de la larme , lefquellcs s'eftant enfuitc refroidies peu à peu , & n'ayant pas cité poufl'ces en dedans par les extérieures qui cftoient déjà en repos , ont elle obligées de s'approcher les u- nes des autres ; ce qu'elles n'ont pu faire fans l.-;ller entre elles des pores ou des intervalles en forme de cônes conca- ves , dont les fommecs vonc fe terminer à la circonférence de la larme. Apres avoir réfuté la réfutation de M Homberg , il fcroic de mon devoir de réfuter aurtî l'explication qu'il donne des phénomènes dont il s'agit : mais ce feroit le vouloir accabler tout à fait. Je n'en dirai clo-jc mot pour ne le pas chagriner i & je me contenterai de la réfuter en tâchant de faire mieux que lui , afin qu'il foit obligé d'avouer que les Cartefiens rai- fbnnent mieux qu'il ne penfc. M. Homberg ayant employé toute fon induftrie à pomper cxaiftemcnt tout l'air contenu dans fon balon , la larme ne fera donc plus environnée que de la matière fubtilc , c'ell à dire de celle du premier élément , &: des globules du fécond, & pendant qu'on ne caiTcra point la queue de la larme , il ne lui arrivera rien de nouveau , parce que les plus petis des glo- bules pouvant entrer & fortir par fes pores avec la mcfmc vitefl'c , n'y feront par confcqucnt aucun fracas. Mais des qu'on cafiera la larme en quelque endroit de fa queue où il fe trouvera des porcs plus larges que ceux qui font vers fa cir- conférence , les globules de toutes grofieurs y entreront en fi grand nombre &: avec tant de vitefic , que ne pouvant en forcir avec la mefmc liberté , ils agiront fur la larme de la mcfmc manière que les Cartefiens conçoivent qu'ils agififenc quand ils caufent le refi'ort des autres corps durs , je veux di- re , qu'ils élargiront les pores de la larme , dont les parties n'cftant point rameufes ou entrelaflees , elles fe feparent les unes des autres , dés qu'on les cbranlc de dedans en dehors -, DES SCAVANS. 15^ ce qui ne devroic pas arriver au balon , quand mefmc on le cafreroit en quelque endroit de fon goulot , parce qu'ayant des pores partout uniformes &: égaux , les globules de tou- tes grofleurs peuvent , en le traverfant , entrer & fortir a- vec la mefme viteffe , fans qu'il foit neceflairc qu'ils y déran- gent rien. Comme il n'y a plus d'air dans le balon , qui foutienne par Ton refl'ort les parties extérieures de la larme , les globules du fécond élément agiffent fur elle par toute leur force , & la fe- parent prefque en un inftant en parties de différentes grof^ feurs , Icfquelles ne rencontrant point d'air en leur chemin qu'elles foient obligées de déplacer , arrivent aux parois du balon 3 & le choquent avec tout l'effort que les globules leur ont imprimé } de forte que s'il n'eft pas afiez fort pour foute- tenir ce choc , ce n'eft pas merveille qu'il fe cafTe. D'ailleurs les parties de la larme qui fc trouvent fêlées, venant à heurter contre le balon , fe divifent derechef en de plus petites par- ticules que dans l'air libre. Le plus curieux phénomène des larmes de verre brifées' dans le vuide , eft fans doute cette foible lumière qui paroit quand on fait l'expérience en un lieu obfcur. Cependant il eft facile à un Cartehen d'en rendre raifon , fi l'on confidere que les particules de la larme , & les globules qui l'ont brifée, fc meuvent avec tant de rapidité , qu'ils ont la force de chaffec à la ronde tous les globules d'alentour ; ce qui nous fait a- voir la fenfation de lumière lors que cette impuUîon parvient feule jufqu'à nos yeux , comme il arrive dans un heu obfcur j tout au contraire de ce qui arriveroit fi elle eftoit confondue avec une plus forte impullion , comme elle le feroit fi l'expé- rience eftoit faite en un lieu fort éclairé. MEMOIRES DE MATHEMATIQUE ET DE PHYSÎ- ^ue y tirez^dei Regi/îtes de l'Académie Royale des Sciences , du 28 Février 16^^. In ^, à Pans chez Jean Aniflbn. 1693. I Es Mémoires contiennent des expériences fur la refra- I clion de la glace. Par M. de la Hirc. 1 3 5 LE JOURNAL Des expériences de la glace dans le vuidc. Par M. Hota- bcrg. Une obfervaticn de l'oppoficion de la plancce de Jupiter au Soleil , arrivée au mois de Décembre dernier. Par M. Se- dileau. La dcfcription d'une produdion extraordinaire de la plan- t-c appellce Fraxinellc , avec quelques reflexions. Par M. Marchant. SUITE DES FORCES DE L'EUROPE , OU QUA- tricme partie de L' Introduïlion à la Fortification , mife au jour , ^ dédiée k Monfet'zneur le D'iKpbin pur fort très humble ^ très obcifflint fervitcur ^ Géographe N. de Fer. In ^. à Paris fur le quai de l'Horloge du Palais , à la Sphère. 1693. CEtte quatrième partie des forces de l'Europe eft compo- fce des plans de vint &: une villes , & fuivie d'une table où l'on voit en un moment combien il y a de diftancc entre les principales villes de l'Europe. Le mcfmc auteur a £iic [graver une carte de Piémont fur de nouveaux mémoires , une de Dauphiné , une du Comté de Flandre , &: une du pays de Liège , de Juliers , & de Cologne. Les montagnes décrites dans les deux premières , font d'une beauté à furprendre, & y font un effet tout contraire à celui qu'elles font ordinaire- ment dans les autres cartes , qui eft de les embaraflcr. Il donnera bien- tôt une carte géographique , hiftorique & généalogique de France, dont la bordure fera chargée de plus de deux cent cartouches remplis de figures parfaitement bien dcffinées. Faute i corrigerons l'onzième Journal de cette année. Page ixGjJik^c 10. rapport , /î/?;^ tran (port. A PARIS, Chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean ]3aptifte. Avec PrmUy: du Roy Xiy. 157 LE JOURNAL DES SCAVANS Ç Du LuNDY 13. Ayril m. DC. XCIII. HISTOIRE DES REVOLUTIONS D'ANGLETERRE dtpuis Le commencement de la Monarchie. Par le P. d'Orléans d< la Compagnie de Je fus. In ^. deux volumes, à Pans chez Claude Baibin. 1693. OUoi Q_u,E cette hiftoire ne foit pas l'hifloire générale d'Angleterre , mais feulement celle de fcs principales révolutions , elle ne lallfe pas de reprefenter ce qui a elté fait de plus confiderable depuis plufîcurs fiecics par cette nation , belliqueufe & inquiète. Il y a quelques années que le P. d'Or- ^ jeans en donna au Public le commencement : il lui en don- ' ne maintenant la fuite, comprife en huit livres. Le nom de Bretagne a une origine incertaine. II y a appa- rence que la petite produifit les Conquerans de la grande. /Leur poltenté y regnoïc encore lors que Jules Cefar y porta iès armes vidorieufes. Jules Agricola remporta tant d'a- vantages dans cette Ifle , qu'il en fit une province de l'Em- pire. Les chofes demeurèrent en cet eftat , jufqu'à ce que les E- Cd11'oi5 vinrent d Hibernie habiter la partie Septentrionale de la Bretagne , où ils fe liguèrent avec les Pides peuples htran- 1^93. R r i^i L E J OUR NAL gers comme eux , & firent avec eux des courfes fur les terres des anciens habitans. Maxime contraignit les EcofTois de fortir de l'Ifle. Les Pi- etés les rappcllercnt depuis ; fi bien que fous la conduite de Fergus ils débarquèrent au port d'Argile avant que les Bre- tons ni les Romams fufibnt avertis de leur deficin. Fergus fe rendit fans peine maitrc du Royaume de Ces pères , &: fc fie couronner Roi d'Ecofle. Aëtius envoyé en Occident au fecours de Valentinicn HI. fît pafîer en Bretagne une légion qui gagna deux batailles Cut les Barbares ; après quoi les Romains aidèrent les Bretons à • conflruire une muraille depuis une mer iufqu'à Pautre entre leur pays &: rECofïe. Apres que les Romains furent partis de l'Ifle , les Pieles ic les EcofTois forcèrent la muraille , 6c entrèrent dans le pays des Bretons , qui implorèrent de nouveau le fecouts des Ro- mains , & ne l'ayant pu obtenir , eurent recours à Aldroëne Rci de la petite Bretagne , qui leur accorda un petit corps de deux mille hommes fous la conduite de Conllantin Ton frère. Celui-ci ayant efté tué en trahifon par un Pitle, Vorti- gcr fut élu Roi,& montra d'abord qu'il eltoit digne dereflre. Mais les Pi£les &: les Ecollois préfixèrent fi vivement les Bre- tons, qu'ils appellerent les Saxons Anglois , qui de leurs dé- fcnfeurs devinrent leurs ennemis &: leurs maîtres. Ce fut en 449. que ces avanturiers qui voguoient fur trois vailleaux le long des côtes de Bretagne , promirent à Vorriç^er de le bien Icrvir , lui tinrent parole, vainquirent les Piâes 6c les Ecoflbis , & pour rccompenfc de leurs fervices ne fe pro- poferent rien moins que la poUcffion du pays qu'ils venoicnc de fe courir. Par la fuite du temps ils y firent de fi grans progrés , qu'ils y formèrent fcpt nflats qui portoient tous le nom de Royau- me. Egbert les réunit tous en fii perfbnne au commencement du neuvième fieclc. Il penfoit jouir en repos de l'es conquê- tes , lors que les Danois tournèrent leurs armes contre l'An- gleterre , s'y établirent , &: y eurent une allez longue fuite de Rois. DES SCAVANS. i^^ lors que Canuc II fuc morr , les Anglois refolurent de re- mettre fur le trône un des Frères d'Edmond retirez depuis long temps en Normandie. En 1066 Guillaume depuis furnom- mé ie Conquérant , entra en Angleterre , & Ce mit par les ar- mes en pofiedîon du Royrtume. Il mourut en 1087. laiflant Ja Normandie à Robert fon fils aîné , l'Angleterre à Guillau- me , & de l'argent feulement à Henri , qui depuis réunit ca fa perfonne tous les Eftats de (es frères. Il mourut en i i 3 5. après avoir régné trente-cinq ans. Alors Matilde fa fille , Hc Henri fon petit fils fe trouvèrent mal établis. Etienne de Blois fils d'Adèle fœur du feu Roi , forma un parti pour ufurper la Couronne , Se y réullk. Depuis il perdit la Normandie con- quifepar Gcofroi Plantagenetc Comted' Anjou. Bien-tôt a- prés il perdit Eultache Comte de Boulogne Ion fils unique , & alors n'ayant plus d'enfans , il voulut terminer la guerre, adopta Henri fils de Matilde. Quelques uns difent qu'elle lui perfuada qu'il clloit de lui , &c non de Geofroi Comte d'Anjou. C'eft en cet endroit que finit le premier livre , avec les changemens de plufieurs maifons qui donnèrent fucccllive- ment des Souverains à l'Angleterre. La Mai fon de Norman- die lui en donna trois : celle de Blois ne lui en donna qu'un ; & celle d'Anjou lui en donna une longue fuite qui va paroi- tre dans les autres livres. Henri II. fut le premier des Plantngcnctes qui monta fur le trône. L'étendue de d domination , &: le dchr de l'accroi- tre, lui attirèrent l'inimitié de deux Rois de France, Louis le Jeune , &c Philippe Auguflc , qui ne lui laillerent aucun re- pos. PJchard Premier fon fils , furnommé Cœur de Lion , lui fucceda , & entreprit une expédition en Paleftine. Au retour il entra en guerre contre Philippe Augufte , & ayant reçu devant Chalus un coup de flèche au bras , il en mourut en 1199. Richard n'ayant point laifle d'enfans , la Couronne fut con- teftée par Artus Duc de Bretagne ,&: par Jean Sans terre , frère du feu Roi , contre lequel le Pape Innocent lll. anima le Roi Philippe Augufte , qui ménagea li bien les Anglois rc-. «^o LE JOURNAL bellcSjtj u'ils dJfcrcrent la rouveraincpuifTance à Louis VIIL fou fils , qui fuc couronne dans Londres. Jean Saiis terre eftant iDort bienroc aprcs d'une fièvre dans la cinquante umémc année de Ton âge , & la dix-huitictnc de {on règne , l'amour des Princes naturels , & faverfion des étrangers rcrcveillercnt dans les Anglois , & leur /îrent pro- clamer Henri III. âgé feulement de dix ans. II en régna j/. ,6^ finie fcs jours en 1173. Edouard I, fon fils lui fucccda, & régna 37. ans. Il mou- rut comme il efloit fur le point de conquenr J'ECoflfe ; & en iniourant ordonna à Edouard II. fon fils , de ne fe point mon- .trer en Angleterre qu'il n'euH d:o,mté le relie des Écoflois rc- hcllcs, Edouard II. epoufa Ifabelle fille de Philippe le Bel , qui ay^nt cftc malrr.ajtce par les fiivoris , forme un puillant parri, taiet le Roi fon époux dans les fers , & l'oblige à ic démettra ce toute fon autorité en faveur d'Edouard III. leur fils , ic à confentir à fon couronnement , dont la cérémonie fut faiic «n jyi'ô. Le premier objet de l'a^mbition d'Edouard III.. fut la poC- feflion de rEcolTc. Le fécond fut le Royaume de France, au- «quel il prétendit fucccd^r à Charles le BcL Son exclufion fut i'occafion de plufieurs guerres , où il eut fouvent de l'avanta- ge. Le Prince de Galles fon fils , qui avoir g^gné la bataille de Poiriers mourut d'hidropifîc en 1376. & Jaifla Richard II, fonifils , qui l'année fuivante fucceda à l'âge d'onze ans à E- idouard lll. fon ayeul. 11 eut le déplaifir de voir une formida- hhc ligue de fes fujcts formée contre lui. Les fadicux cntrc- jirirent d'elevcr fur le trône Henri de Lancaftre Comte de Dcrbi ; & ayant abandonné leur légitime Soii'^*-< z*^'— ~-^ •./«vu .»~/»"'5 .»-—'. Henri Vl. Ton fils fe trouva au berceau chargé de deux Cou- ronnes. 11 fut déchargé de celle de France par la rédudiort de Paris à l'obeïflance de Charles VII. & privé de celle d'An- gleterre par le Parlement , qui lui donna trois tuteurs. îl fe délivra de la tutele : mais ce ne fut que pour retomber en- tre les mains de fes ennemis , qui le menèrent à Londres , où Richard Duc d'Yorc , eut l'infolencc de s'all'eoir fur le crône. Le traité qui fuivit porta que Henri VI. demeureroit Roi : mois qu'après fa mort la Couronne pafl'eroit à Richard Duc d'Yorc , &: à fes enfaiis. Richard ayant elle tué bien- tôt après dans une bataille , le Comte de la Marche fon fils , fe fit déclarer Roi , feus le nom d'Edouard IV. Dés le commencement de fon reane il mé- contenta le Comte de V^arvick , qui pour fe venger tira de prifon le Roi Henri Vl. &: le remit fur le trône. Edouard IV. rtfugiè en Hollande , y levé des troupes , à la tefte defquelles il repaife en Angleterre , & remet le Roi Henri dans la tour, oià il fut tué , &: meurt lui-mefme ea J481. 11 avoir pris de grandes précautions pour alTurcr la couronne 3 Edouard V. fon fils. Mais le Duc de Glocellrc fon oncle &: fon tuteur , qui fembloit la lui devoir conferver , fut celui mefme qui U lui ôta avec la vie, 11 n'eut pas fi tôt cfté re- connu fous le nom de Richard lU. qu'il découvrit la violen- ce de fon naturel , Se irrita tellement les Grans par la dureté 1 6 9 3 . se i6t LE JOURNAL de Ton gouvernement , qu'ils formèrent un parti pour mettre Henri Comte de Richement en fa place. Ce Comte eftoit en Bretagne où il avoit efté prifonnier , &: où il commcnçoit à jouir de quelque liberté depuis le règne de Richard III. pour lequel le Duc de Bretagne n'avoit pas eu les mcfmcs egars que pour Edouard V. fon frère. Quand il fut arrivé en An- gleterre , il donna bataille à Richard , qui en la perdant per- dit auflî la vie ; après quoi le victorieux fut proclamé Roi fous le nom de Henri VII. epoufa Elilabcth fîllc aînée d'Edouard IV. pour reiiinr les droits des maifons d'Yorc &: de Lan- caftrc. Son règne fut troublé par de fréquentes révoltes. Mais les heureux fuccés de fcs armes le délivrèrent de la plupart de fcs ennemis & l'affermirent fur le trône. La mort du Com- te de Warvick , rcfte du fxng des Plantagcneces , fut une honteufe tache a fi vie. Ce Pnnoe infortune fut la vidime de la politique cruelle de Ferdinand d'Aragon , qui pour marier Catcrine fa fille à Artus fils .nîné de Henri , témoigna qu'il ne trouvcroit jamais de fcurecé à ce mariage tant que ce Prince feroit au monde. Henri VII. cftant mort de maladie ÎCiz. Août 1509. Hen- ri VHI. fon fils monta fur le trône , avec de grans avanrages pour régner heureufemenr. 11 fit la guerre avec (accès , &£ la paix avec dignité. Mais la fin fut différente de ces beaux commencemens. Trois chofes les firent changer : un mau- vais mariage , un mauvais confeil , & une pafllon déréglée. 11 epoufa Caterine Veuve de fon frcrc , pour ne lui poinc rendre fa dot. 11 fuivit les mouvemens de la vangeance que le Cardinal Volfei vouloit tirer de Charlcquint -, &: fe laiifa aveugler par l'amour d'Anne de Boulen, Pour l'epoufer il s'expofa aux anatêmes de 1 Eglife , & attira un mterdit fur Ces Eftats. Edouard VI. fon fils , lui fucccdaàragedcncufans en JJ47. & mourut en i j'Jî. Marie fa fœur , n'eut pas fi-tôt le pouvoir entre les mains, qu'elle l'exerça avec une grande feverité contre ceux qui lui bES se A VANS. 1^3 âVoîent edé contraires , & rétablit la religion Catoliquc. Elle mourut d'hidropifie le 17. Novembre lyjS. La vue principale d'Elifabeth fut de régner & de gouver- ner. Le defir de confcrver Ton autorité l'attacha à la nouvelle Religion. A fa. mort elle nomma Jaques Stuard Roi d'Ecoflc héritier de Tes royaumes , dont il prit poflcflîon en la troifiémc année du fiecle courant. Ainfi la maifon de Stuard forma de trois Eitats une puilfante Monarchie. Le fécond tome des révolutions d'Angleterre finit en cec endroit. Le troifiéme qui n'eft pas encore achevé , fera com- me les autres divifé en quatre livres , dont le premier com- prendra le floriffant règne de Jaques L & la fin tragique de Charles fon fils. Le fécond contiendra l'interrègne , après le- quel l'ufurpateur eftant mort , Charles IL fut rétabli furlo trône de Ces pères. Le troifiémc renfermera l'heureux com- mencement de Jaques IL &c le changement que fa Religion a apporté à fa fortune. Le quatrième décrira la révolution que nous fouhaitons. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. DE LEIBNIS A M. l'y^bbé Nicaife , fur la Fhilofophie de M. Defcartes. J'Honore infiniment M. l'Evêque d'Avranchcs ; & je vous fupplie , Monfieur , de le lui témoigner quand l'occafion S'en prefentera. Un de mes amis de Brème m'ayant envoyé le livre de M Sioeling , qui eft Profeifcur , contre la Cenfutc de ccz illuftre Prélat , pour en avoir mon fenrimcnt j je ré- pondis , que la meilleure réponfe que Meifieurs les Cartefien» pourroient faire , feroit de profiter des avis de M. d'Avran- chcs ; de fc défaire de l'efprit de fede , toujours contraire à i'avancement des fcicnces ; de joindre à la le£lure des excel- lens ouvrages de M Dcfcartes celle de quelques autres grans hommes anciens & modernes ; de ne pas méprifer l'antiqui- té , où M Defcartes a pris une bonne partie de fcs meilleu- res penfées ; de s'attacher aux expériences & aux démonftra- tions , au lieu de ces raifonnemens généraux qui ne fervent qu'à entretenir l'oifîvcté , & à couvrir l'ignorance ; de tâcher xéAr LE JOURNAL défaire quelque pas en avant, &: de ne fe pas contenter d'eftrc de (impies paraphraflcs de leur maure ; de ne pas nc- glijfcr ou mcpnfer l'Anatomie , l'Hiftoire , les Langues, la Critique , faute d'en connoitre l'importance & le prix j de ne fc pas imaginer qu'on fçait tout ce qu'il faut , ou tout ce qu'on peut cfperer ; enfin d'elUe modeftc &: ftu- dicux , pour ne fc pas attirer ce beau mot : le. Paul Philippe de Chjimon: , ancien Evique dlAcqs , ConfeiUer du Rsi en fti Confeils. In 12. 2. vol. à Paris chez Claude Barbin , Ami- ble Auroy , & Simon Langronnc 1695. L n'y a rien de pliis cclacint ni de plus folidc que lesprctK vcs fur lefqiiclles les anciens Pères , & mcfme ce célè- bres Ecrivains de ce temps-ci ont établi la venté de la Rc- }jgion Chrétienne. M, l'Evêquc d'Acqs les a recueillies dans cet ouvrao-e , &: fortifiées de nouvelles reflexions qui en dé- couvrent de plus en plus la certitude & l'cvidence. ÇKiclqnc fecours qac la rcvcîation puiflc fcarnir , il n'ai point voulu toucher aux explications difficiles de l'Ecriture , ni aux difcvinlons epincufes de la critique ; mais fculcmcnc cniployer la raifon pour perfuarlcr à fcs leclcurs , que l'Eglifc Cacoliqiic enfcignc de la parc du Maicre de l'univers l'unique' culte qu'il veut ellrc fuivi. Pour cet Ciïct il avance d'abord trois prapofiticHTS : qu'il y a> un maitre de l'univers ; que nous fomuics fcs créatures ; qu'en- cette qualité r.ous lui devons le culte que nous appelions Re- ligion. Quant à la première propofition , il en remet l'examen exact à un traire particulier, & n'en don::c maintenant qu'u- ne fimpîe notion , qui confiée à dire que ce qui eit entendu par le nom de Dieu , eft le premier moteur de tout ce qui elï en mouvement , la première caafc qui a produit toutes les au- tres, un eftre qui fubllRe par lui-melme , qui polfcde par ex- cellence toutes les perfections , & qui conduit les créatures' dépourvues de raifon aux fins aufquelles il les a deftinées. De CCS cinc[ notions il tire les deux autres propoficions , S^ conclut que nous fommcs les créatures de cet Eltre fouverain, & que nous fcntons un defir naturel de nous aquirer envers lui de robéiifance 6c de la gratitude que nous lui Ucyoïis, Ô Ê s S C A V A N S. fj^ Cette obciiTance & cette gratitude c fiant les deux pKis Foris îitres qui puilTcnt fonder les dehors d'une Religion , ce fça- vant Prélat prouve, que de toutes les Religions celle-là feule cCc comaiandce de Dieu , qui feule porte un caradere indu- bitable d'avoir elté cnfeignée par lui , & qui prononce en mcfnte temps qu'elle feule doit eftrc fuiyie à l'exclufion de toutes les autres , connues ou inconnues. De là il pa(îe à l'examen des Religions , & cherche en la- quelle d'entre elles fe trouve ce caradcrc de venir necefi'ai- rement de Dieu. Et comme il montre que c'en cft un très certain d'avoir ua ctabhdcmcnt contraire à toutes les règles ordinaires , joint à de véritables miracles opérez en preuve d'une Religion, il entreprend l'examen de celles qui fe (ont fait reconnourc dans le monde. Pour commencer par l'idolatric , il la d'ivife en Paganifine ancien , c'eft à dire celai des quatre premières Monarchies ; & en Paganifme moderne , c'eft à dire celui de diverfes na* lions qui adorent prefentement tout autre eftrc que Dievt. Bien qu'il n'y ait point maintenant de pcuples^qui prai- rent incercft à la dcfcnfe de l'ancicn Paganifme , &: qni fou- rienncnt fes erreurs , M. l'Evêquc d'Aeqs , pour n'oublier au- cune partie de fbn cnumeration , ne laifle pas d'établir deux chofes à fon égard : l'une que dans fbn erablilî'c ment il n'a rien eu que de très capable d'attirer naturellement les hommes à le fuivre. L'autre, que les effets merveilleux dont on a tâ- ché de l'appuyer , font fufpeclsde fuifleté, & d'ailleurs n'onc rien qui fbit au defî'us du pouvoir du démon. Q^jant 2 la première , il jufîifîe qu'il n'y a guercs eu de na- tion qui n'ait attribué une extraftion divine aux hommes qui s'elloient rendus illuftrcs par les loix ou par les arn>cs , & à ceux qui avoicnt inventé les arts , & qui leur avoient enfei- gné à cultiver la terre, a. foutenir leur vie, ou à reprimer leurs pafîions. Pour ce qui eft de la féconde , il montre que les miracles des anciens Paycns ne font prefque tous fondez que fur deî sémoignages aulli peu recevablcs que leurs fables. ^7^ LE JOURNAL Continuant le dcnombremcnc des autres parties du Paga- nifmc , après avoir touché l'opinion des Druides, qui à l'Aftro- Jogic fi propre à impofer aux peuples , joignoient une polui- quc qui les rendoit maicres de la plus grande partie des Gau- les , èc avoir montré combien il leur fut ailé d'établir leur opi- pion par la créance de l'immortalité de l'ame , que les hom- mes défirent naturellement élire véritable ; il dit la mcrme chofç de l'idolâtrie moderne , fiai vie par tant de peuples d'A- i\e , d'Afrique , &: d'Amérique , qui fans révérer aucune àes divinitez de l'ancien paganifme , conviennent avec lui dans ^e culte gênerai qui confifte à reconnoitre pour Dieux des t'ftres créez. II juPtihe Caus peine qu'il n'y a rien ni dans l'etabliiTcment tie ce nouvecîu paganifme, ni dans les merveilles donc il fç vante, qui puiile paifer pour furnacurel. Parcourant les prin- cipales opinions fur lefqueilcs il femblc établi , il trouve en plufieurs endroits la connoiiTance d'un fouverain Maitre dç î'.univers , quoi que défigurée par la penfée que ce fouverain Mairrc demeure dans une molle oifivecé , & ne daigne pas répondre aux defirs déréglez & aux demandes frivoles des hommes. A l'égard des merveilles que ce Paganifme racon- te , les feuls auteurs de ce parti , & les relations de nos voya- geurs fuififent pour les rejetter. M. l'Evèquc d'Acqs parlant enfui te du Mahometifmc, mon- tre que bien loin d'avoir rien eu de furnaturel , il n'a trouvé de la créance dans des efprits greffiers que par les difpofitions çù cftoient les peuples d'Orient quand il parut , que par ce qu'il avoit de favorable à la férocité de leur naturel , &: que par la licence qu'il leur donnoit d'exercer impunément toute lotte de brigandages , & de s'abandonner aux plaifirs. Notre illuftrc auteur paflant du Paganifme à la loi de natu- re , & à celle de Moïfe , montre que la première eftoit fage i)C jufle , mais qu'elle n'eftoit pas l'unique culte qui duft eRrc toujours rendu à Dieu ; & que la féconde a efté agréable à Dieu , & confirmée par des miracles : mais qu'elle n'oblige j^iiis depuis la venue du Msjfic , &: que les miracles qui l'auto- nfoienc DES se A VANS. 177 «rîfoient autrefois ont ccfic , & que le mefme Lcgidateur qui J'avoit publiée de la part de Dieu , avoit ordonné au peuple Juif d'écouter tout ce que diroit celui qui devoit arriver après lui , c'eft à dire le Mcflie. Il faudroit maintenant entrer dans un vafle champ, &: four- nir une longue carrière , fi je voulois fuivre notre fçavant E- vêque dans la dédudion des preuves qu'il apporte de la vcrir ■té des miracles de Moife j & de l'autoriré de Tes livres. J'en montrerai feulement comme de loin quelques-unes, &: ren- ■voirai les Icclcurs à l'original pour les y voir de plus prés Se dans toute leur étendue. M. l'Evêque d'Acqs y fait voir d'une manière invincible, que les miracles de Moïfe n'ont pu eftrc fuppofez , & que s'ils l'avoient eflé, il fe feroit trouvé dans une narion aufli nom- breufe que celle des Juifs des perfonnes aifez finceres &: aOez gencreufes pour révéler l'impofture , de pour l'expofer aux yeux de toute la terre. Il montre cnfuite que les livres qui portent le nom de Moï- fe , font véritablement de lui ; qu'ils ont pcrpecueUement efté Jus par un grand peuple , &: regardez comme le fondement d'une Religion qui detcftc le menfonge. Il montre encore qu'ils n'ont point efté altérez depuis fa mort, & répond à deux fortes d'objections qui fe font fur ce fujct. Les premières font fondées fur des paffages de l'ancien &: du nouveau Teftament , qui femblcnt infinuer que les livres attribuez à ce grand Legiilareur , n'onc efté compofez qu'en des temps & en des lieux fort éloignez de ceux où il a vécu. Ces objedions-là qui font en afl'ez grand nombre , roulent prcfquc toutes fur un prétendu anacronifmc. Les autres confiftent à dire que Moïfe avoit compofé ua livre intitulé , le livre de l'alliance du Seigneur ; un autre ap- pelle lei guerres de Dieu , &: un troifiéme nommé le livre de la loi i &c que de ces trois- là le Pentatcuquc a efté compilé par un Ecrivain plus récent que Moïfe. M. l'Evêque d'Acqs répond que le livre de l'alliance du Sei~ gneur ne comprcnoit vrai-femblablcment que les reglemens contenus depuis le vintiéme chapitre de 1 Exode jufqu'au 1695. Y y 178 LE JOURNAL vint- quatrième , qui ayant d'abord clic écrits à part poui^eftrc obfcrvcz par le peuple , furent depuis inferez dans l'Exode , lors que Moife le compofa. Qj^ant au livre des guerres du Seigneur , il dit que ce pouvoit eftre un récit des expéditions militaires qui ont depuis edc décrites avec plus d'étendue dans le Pcntatcuquc.Etquant au livre de la lot de Dieu, que ce pouvoit eflre un recueil de loix ou de fjits rapportez plus au long dans les quatre premiers li- vres de Moife , & dans les trente &: un premiers chapitres du dernier. Enfin il ajoute que foit que ces trois livres ayent eflé corn- pofez par Moife , ou par un autre , on n'en peut pas conclu- re que le Pcntateuque ne foit pas de lui ; & il tait voir les malheurs temporels où font réduits les Juifs d'aprefcnt , pour ne vouloir pas ouvrir les yeux aux lumières que le Melhe leur prefcn:e. Voila à peu prés à quoi fc réduit la première patrie des re* flexions de M. l'Evéque d'Arqs. La féconde tend à juftifier Ja ncceflîté de fuivrc le Clirittianifme depuis la publication de l'Evangile ; & à cet égard notte fçavant Prélat prend tout Je contraire de ce qu'il a pris à l'égard des faufl'cs Religions, Comme il a prouve qu'elles n'ont aucune marque infaillible d'eftre le culte que Dieu veut qu'il lui foit maintenant rendu, il prouve que la Religion Chrecicnnc a ces marques , & qu'el- le cfl: fondée fur des moyens furnaturels. Selon les apparences humaines , bien loin de s'élever au point de grandeur où nous la voyons , elle devoir toujours eftre le fuict du mépris & de la moquerie, comme elle le fut durant trois cens ans. Des hommes charnels ne dévoient pas embraifer une foi qui promettoit des biens futurs & invifibles, & des maux prefens &: palpables, à moins qu'Us n'y fullenc portez par des motifs fprt au deifus de leut nature. Aurtî n'y furent-ils pas excitez par la feule beauté de la Morale Chré- tienne, comme par un mouvement purement naturel, ni en- gagez par le crédit que des efclaves Chrétiens eulfent pris fur les enfans des maifons chez qui ils fervoicnt. Les efclaves ne pouvoienc cux-niefmcs trouver d'attraic humain dans une rc- DES SCAVANS. 179 ligion qui leur ordonnoit de demeurer dans les fers , &: d'en fiipporter la dureré &c la pefanteur jufqu'à ce que leurs maî- tres euiïenc agréable de les affranchir. Les hommes n'ont point efté non plus attirez au Chriftia* nifme par les charmes de la nouveauté. Il n'avoir aucuns char- mes dans les temps où il cftoit chargé d'opprobres , & expo- fé aux plus (anglantes perfecutions. Ils n'y ont donc efté atti- rez que par l'évidence des miracles qui les convainquoient que c'cftoit le culte que le fouverain Maitrc de l'univers vou- loir lui eftre rendu. Ces miracles n'ont efté produits ni par les forces de la na- ture j ni par les prefliges de la magie. Ces miracles , ni les li- vres qui les racontent, n'ont point efté fuppofez. On ne trou- ve dans aucune biblioteque , foit des Juifs ou des Payens, au- cun auteur des deux premiers fiecles qui ait ofé reprocher aux Chrétiens la fuppofition des faits hiftoriques avantageux à leur Religion. La refurrcélion de N. S. ni les autres faits miraculeux du nouveau Teftament, n'ont pu eftre inventez à plaifir. Il fau- droit pour cela que quelque fourbe euft fuppofé les écrits qui le compofent , ou qu'ayant efté faits par les Apôtres , ils eud fent depuis efté falfifîez , ou qu'enfin les Apôtres les cuflenc eux-mefmes remplis de fables. M. l'Evêque d'Acqs montre que rien de tout cela n'a pu eftre. Les écrits du nouveau Teftament n'ont pu eftre fuppo- fez : outre qu'ils ont toujours porté le nom de leurs auteurs} ce qui à l'égard du refte des livres , eft prefque le feu) aro-u- mentdonr on puift'e fe fervir. Rien de ce qui peut faciliter la fuppofition d'un ouvrage ne fe trouve en cette rencontre. £n fécond lieu le profond refpeâ: qui a toujours efté confer- vé pour ces livres divins , ne permet pas feulement de penfer qu'ils ayent pu eftre falfifîez. Si un Evêquc ou quelque autre avoir couçu im deftein û criminel , les autres s'y feroient in- dubitablement oppofez. Si tous les Evêques y avoient con- fenti , les peuples fe feroient élevez contre eux. Quand les Pafteurs & les peuples auroient efté d'accord , les Juifs & les Payens n'auroienc pas manq^ué de le découvrir &c de l'empês. iSô LE JOURNAL cher. Quand le filencc des ennemis Etrangers aurolc favorifc ce deccftablc dertein , les hcrefies ôc les partis qui fe formèrent dans le fein de l'Eglife , y auroicnt apporté un obftaclc invin- cible. II y a aufTi peu d'apparence de précendre que les Evange- liftes & les Apotrcs aycnt voulu impofer à la poftcrité , &: lui faire croire des faits enriércmenc fabuleux. En premier lieu ils s'accordent parfaitement , bien qu'ils n'ayent point con- certé cnfemblc ce qu'ils ont écrit. D'ailleurs les Apôtres n'c- crivant par aucun principe d'intérêt , n'avoicnt garde d'ufer d'aucune fuppofirion pour faire recevoir leur dodrine. A ces raifons générales M l'Evéque d'Acqs en joint de par- ticulières appuyées fur le témoignage uniforme de divers au- teurs , donc les uns ont vécu au temps des Apôtres , & les autres dans le premier ou dans le fécond fiecle. Les miracles ne font pas les feules preuves de l'obligation de fuivre le Clnriftianifme comme l'unique culte que Dieu ,vcut lui cftre rendu. M. l'Evéque d'Acqs en accumule une infinité d'autres , comme la fainteté de N. S. celle des Apô- tres &: des premiers Chrétiens , la fublimité de leur dodrine, la pureté de leur morale , l'antiquité de leur hiftoire , & l'ac- compliflement des anciennes prophéties , defquelles notre fçavant Prélat compte jufqu'à trente-cinq , prefquc toutes iurlaviede N. S. outre plufieurs qui concernent le temps de fon arrivée , les concilie les unes avec les autres , & diflîpe les contradictions que les adverfaires ont cru y trouver. Après cela il fliit deux parallèles ; l'un du Chnflianifme & des faurtcs religions , l'autre de l'Eglife Catolique & des au- tres focietez Chrétiennes j d'où il infère l'obligation de la /uivre à l'exclufion de toutes les fedes connues ou inconnues : & il tire de tout cela une conclufion démonftrative , appuyée fur la fageflc , la jullice & la bonté de Dieu. C'eft par où il £nit le premier tome. L'extrait du fécond fera le premier article du Journal fuivanr. A Paris chez Je AN Cujîon , rue S, Jaques, à l'Image S. Jean Bapt. XVI. I 8 1 LE JOURNAL DES s C A V A N s Ç Du LuNDYi/, Avril M. DC. XCIII. REFLEXIONS SUR LE CHRISTIANISME ENSEI- ^aé dum l' Eg'ifi Cathot'!<]ue , tirées de divcrfes preuves que la. rai fon fournit touchant la Rctigton Chrétienne enfeignèt^ dans l' E- glife Catholique. En trois parties. Par Aire. Paul Philippe de Chaumont , ancien Evèque d'Acqs , Confciiler du Roi en fei Confeils. Jnj2. 2. vol. à Paris chez Claude Barbin , Ama- ble Auroy , & Simon Langronne. 1693. DA N s le fccond tome M. i'Evêque d'Acqs , après avoir montré que Dieu ayant donné comme une lettre de créance à la Religion Chrétienne , pour eftrc crue comme un Ambalfadeur fur tout ce qu'elle enfeigne de fa part, elle n'efl pomc obligée de rendre rai(bn d'aucun des articles de foi j il ne laiûTe pas néanmoins de ju{t>fier qu'elle fournit des notions admirables fur leur fuiet ; & pour le prouver il prétend , que touchant les plus diiHciles , tout homme defintcrellé fe dira que fi l'on répond aux objections que nos adverfaires croyenc les plus folidcs , le Chrillianifme à plus forte railbn détruira celles qui portent prefque avec elles leur réfutation. Il commence donc par la réponfe à deux fortes d'obje- <5ions qui fe font contre le Chriftianifme, Les premières con- 1693, Zz iSi LE JOURNAL fiftent en des contradictions qui paroiffcnc en quelques points- de la dodnne ; & les fécondes en des difficukez qui fe trou- vent en quelques endroits de l'Ecriture. La plus grande contradiction qui paroiflc fur la docHirine, eft celle de l'unité de l'eircnce de Dieu , & la tiinité des perfon- nes. Bien que pour la diiîipcr , & que pour entendre &c pour expliquer ce fublime milterc , la Religion n'ait pas befoin d'un fecours aullî foible que celui de la raifon , M. l'Evêque d'Acqs tâche pourtant de s'en fervir , &r de la conduire com- ine pas à pas vers cette fourcc de clartcz infinies pour lui faire entrevoir quatre veritez que la foi cnfcigne. La première , que l'entendement divin a de toute éternité formé une image infinie de Dieu. La féconde , que cette im.ic;c procédant d'un principe vivant ^ agifiant , doit eflre vivante & agillanre commeku ; ce que l'Eglife appelle le Ver- be , le Fiîs , & la féconde Perfonne. La troinémc , que cette image ne pouvant eftre diilinguée de Dieu !c Père par cflcncc & par nature , elle l'eft feulement de perlbnne & de relation. La quatrième , que comme le Fils épuifc la fécondité de l'en- tendement divin par l'exprefTion defon image, l'amour epui- fe l'écoulement de la volonté divine , & cit ce que l'Eglife nomme le Saint Efpric. La difproportion qu'il y a entre la nature divine & la natu- re humaine , devoit félon le jugement des ennemis du Cliri- ftianifme , en empêcher l'union ; & c'eft la féconde contra- diftion qu'ils s'imaginent avoir trouvée d.ins la doârine que la foi cnfcigne : fur quoi ils demandent s'il n'y a point d'ido- Jatrie dans l'adoration que nous rendons à J. C. M. l'Evêque d'Acqs répond que cette dirproportion ne for- me aucune véritable contradiction , & ne nous expofe à au- cune idolâtrie , parce le Verbe en élevant la nature humaine jufqu'à l'unir à foi pour touiours , fans qu'elle ait d'autre fubfi- ftancc que la fi^nne , en a fait le jufte objet de nos adorationSy & de plus a fourni le fond necelfaire qui lui manquoit pour s'offrir en facnfice , pour fatisfairc à Dieu fon père , & pour racheter l'homme coupable. Les fécondes objcdions qui confiftenr en des difncultcz fur DES SCAVANS. ^ i8j quelques endroits de l'Ecriture , fe réduirent à demander pourquoi N. S. a frémi & sciï troublé à la refurredion du La- z;ire ; pourquoi il a elU pénétré de triftefFe dans le jardin des Oliviers , & pourquoi il a permis que Ton Eglife ait efté expo- fee à tant d'horribles peifecutions , & à tant d'extravagantes herefies ? Bien qu'il ne foit pas aifé de découvrir toutes les vues que Notre Seigneur a eues quand il a opéré ces merveilles , no- tre fçavant Prélat dit que la refurre^tion du Lazare peut eftre confiderée comme le premier coup de trompeté qui donnoit le fignal du combat où N. S. devoir vaincre par fa mort , dans la certitude de laquelle la nature frémit alors, de mefme qu'elle fentit depuis les vives atteintes de la triftefle dans le jardia des Oliviers. Que fi nos adverfaires ofoient nier toute forte de providen- ce à l'égard des hommes , & prétendoient que les bons &c les ftiéchans evenemens qui les concernent ne procedaflent que de l'enchaînement de piufieurs caufes , ou du caprice du ha- zard , ou de la feule prudence humaine ^ notre illuftre auteur fatisfaitpar ordre à ces nouvelles difficultez. 11 faut à fon fens avoir peu de connoiffance des affaires hu- maines , pour n'cîlre pas perfuadé que Dieu les gouverne. Mais fans s'arrêter à cette réplique générale , il en fait de par- ticulières, pour montrer que les effets dont il s'agit ne partent d'aucune des caufes que je viens de dire. Elles ne peuvent venir d'un enchaînement de caufes juf^ qu'à l'inftni , puis que cet enchaînement meneroit ncceilai- rement à la première , que Ton entend par le nom de Dieu. Elles viennent aulfi peu du hazard &; du concours fortuit des atomes, ou d'autres corps dont le monde ait pu recevoir (a naiflance & fa durée. Elles ne viennent pas non plus de la pru- dence. Car fi d'un côté la nature ne relevé nullement de fon pouvoir , & fj les artres & les fleuves ne règlent point leur mouvement fur fes confeils , il n'eft que trop clair de l'aUtre, qu'en piufieurs rencontres Ces mcfures font fauflcs , & les é- venemens démentent tous fes projets. la conduite des hommes dépend encore moins de la difpo* ,J4 LE JOURNAL fition & de Tinfluencc des allrcs. Les règles de l'Afirologiô ne viennent d'aucune démonftration fondée fur le rapport que les aftres aycnt avec les adions humaines , ni d'aucune expérience faite en tous les temps &: en tous les lieux , ni en- fin d'aucune tradition confiante 6c non interrompue. Au con- traire l'expérience enfeigne qu'il y a des chofes commandées eu défendues. Il n'y a donc nulle apparence de s'imaginer que les éve- nemens dont il s'agit ayeiit efté réglez par les AUrcs , ni la moindre couleur de prétendre qu'ils aycnt quelque part à I4 jiailTance , à l'accroillement , ou à la décadence des Re-' îigions : Ce que M. l'Evéque d'Acqs fait voir avec beau- coup de fcrce & d'étendue fur la fin de fa féconde partie. Dans le troiliéme il reloue les difficultcz que les ennemis de la Religion Chrétienne trouvent dans l'Ecriture fainte, qui eft la règle de fa foi &: de fes mœurs ; & fuivant la mefme metode qu'il a gardée touchant les objedions qui concernenc les articles de foi , que tout homme fans prévention fe dira qu'il efl: aifc de répondre aux moindres contradiélions appa- rentes de l'Ecriture fainte , quaud on aura fatisfait aux plus fortes. Dans cette vue il s'arrête aux contradictions que ces enne- mis croyent y avoir découvertes , &: qui fe réduifent à fepc chefs. Le premier regarde le temps auquel l'hiftoire de Judith e(l arrivée. M. l'Evêque d'Acqs ne doute point qu'il ne foit aifé de le fixer , &: de détruire l'imagination de quelques Criti- ques qui la veulent faire paffcr pour une allégorie inventée dans le feul deilein de confoler les Juifs. Il foutient donc qu'elle n'a pu arriver avant David ; que n'eftant pas évident qu'elle foit arrivée depuis David jufqu'.i Jeconias , ni depuis le retour de la captivité jufqu'à Jellis Chrift , il efl: proba- ble qu'elle eft arrivée depuis la cinquantième jufqu'à la foi. xante & huitième année de la captivité. Pour appuyer ce fiiléme , il en examine trois autres que divers auteurs ont fui- .:vis j & fait voir enfuite ce qui l'a détourné de s'y arrêter. Le fécond chef regarde le temps auquel l'on peut placer riulloire DES SGAVANS. iSj l'hidoire d'Efter. Quoi que nos adverfaires fe figurent qu'el- le n'a pu arriver ni avant la captivité , ni depuis la captivité jufqu a Cirus , ni depuis ce Conquérant jufqu'à Jefus-Chrift, iiocre illullre Prélat entreprend de prouver qu'elle a pu arriver fous Artaxerce Othus j prédecefleur immtdiat de Darius III. vaincu pai Alexandre le Grand ; & pour cet eftec entre dans un détail fort particulier , &c Te fonde fur une découverte ti- rie de l'exemplaire Romain , qui ôte toutes les ditficulrez. Le troifiéme chef concerne lafameufe prophétie de Jacob, qui eft une des fortes preuves que le règne de Herode le Grand, fous lequel naquit Jefus-Chrift , a du eftre le temps de la venue du Meflle. Les différentes fignifications de Se- bet , de Mehokec , & de Silo qui entrent dans cette prophé- tie , la rendent extrêmement difficile. M. l'Evêque d'Acqs y répond d'abord , en difant que quand il s'arrcreroit à la fo~ lution ordinaire , qui concerne les Princeftes de la tribu de Jiida mariées dans celle de Levi , elle devroit fuffire , puis qu'il feroit toujours vrai qu'au temps de la naiOance de N. S. le fcptre feroit forti de Juda , en tombant entre les mains de Herode le Grand , qui eftant Afcalonite, ou du moins Idu- méen par Antipater fon père , & fils de Profelite par Cipros fa mère , n'eftoit point du fang de Jacob par aucune des tri- bus qui avoienc formé le Royaume de Juda. Mais fans avoir befoin de cette réponfe , il fe contente de foutenir que le moc f àejuda peut fignifier dans la prophétie les deux tribus &: de- mi qui formèrent le royaume de Juda. Ainfi le fens fera que jufqu'à la nailfance du Meffie l'autorité fouverainene fortiroit point d'entre les mains de ceux des defcendans de Jacob qui formeroient le royaume de Juda -, &: la prédidion aura elle manifeftement accomplie , lors que Herode le Grand , d'ex- traélion Payenne , ou au moins Iduméenne, & fort éloigné d'eftre du fang de Jacob , parvint au Royaume. Le chef qui fuit concerne quelques difficultez qui fe pre- fcntent dans deux Evangelil^es touchant la généalogie de N. Seigneur , &: qui au fens de notre fçavant Prélat , bien loin de nuire à notre Religion , fournifient une nouvelle preuve dff fa yenté. 11 refouc la plupart de ces difïicukez , & concUie 1653. A a a iSÔ LE JOURNAL les deux Evangeliftcs , en montrant que faint Luc a pu faire la généalogie naturelle qui conduit de père en fils le fang d'A- dam &: d'Abraham jufqu'à N. Seigneur , le faifant dcfcendrc de David par la branche de Natan fils de ce Prince & de Ber- fabée , aulTi bien que Salomon ; &: que faint Mathieu a pu faire la généalogie légale , qui par la force d'une fubllitutioa à l'infini , établie par la loi dans la nation Juive , juftifie com- ment les droits fucceffifs de David ont cfté tranlmis à Jefus- Chrift , &: fournit l'hiftoire de deux branches aînées , donc l'une commençant à Salomon finit à Jeconias , & tranfmec fes droits à Salathiel , alors aîné de la branche de Natan , à laquelle fuivant la fubftitution , il falloit recourir ; & l'autre commençant à Abiud fils de Zorobabei , finit à Jacob, qui mourant fans enfTns , laille héritier de fcs droits Jofeph , la fainte Vierge &: Notre Seigneur , fortis d'une féconde bran- che lifue du mefmc Zorobabei par Refa Cadet d'Abiud. Il employé pluheuvs chapitres à traiter cette matière avec beaucoup d'cxaditude , &: à examiner les difficultez qui font particulières à faint Luc , & celles qui lui font communes a- vec faint Mathieu, & celles ou qui naiflcnt de leurs différen- tes manières de conter , ou qui font fondées fur quelque o- miflion. Il fait tout cela néanmoins fans prendre parti contre le fi- ftême d'Africanus , qu'il explique ; & bien loin que fuivanc l'imagination de nos advcrfaires , il n'y ait point de concilia- tion fur ce fujet entre les Evangeliftes , il montre qu'il y en a deux , qu'il fait voir d'un coup d'œil dans une carte genealo. gique très claire qui fe trouve à la fin de l'ouvrage. De là il palFe au cinquième chef, qui confilte en tout ce qui s'allègue contre l'adoration des Mages , que quelques-uns croyent que faint Mathieu infinue avoir efté faite le quator- zième jour de la naiffance de N. S. Pour le traiter avec plus d'ordre , il en fait crois chapicres. Le premier renferme les raif>ns qui fembient montier que cette adoration nes'eft point faire à Betléem dans la première année de Notre Seigneur. Il faut qu'elle ait efté faite ou a- vaac la prcfcncation de Notre Seigucur au Temple , ou d«<. DES SCAVANS. 187 Éuis. Si on veut qu'elle ait efté faite avant la prefcntarion au Temple , lors que Notre Seigneur n'avoit que quatorze jours, il fera dilîicile d'accorder cette fuppolirion avec Tordre que fair.t Jofcph avoir reçu de l'Aigc, de porter Notre Seigneur en Ei^ipte , d*où il ne retourna en Judée que trois ans aprcs. D'ailleurs il eft peu croyable que les Mages , qui félon l'o- pinion commune elloient de Caidée, ayent pu faire en qua- t torze jours un 11 long voyage. Ajoutez à cela que le maflacre des enfans fait par l'ordre de Herode depuis l'âge de deux ans & au deifous , femble marquer que l'adoration n'a elle faite que dans la féconde année de la nailTance de J, C Qj^e fi on veut que l'adoration ait eflé faue depuis la pre- fentation au Temple , on aura de la peine à répondre au té- moignage de faint Luc , qui marque que du Temple N. S. fut porté à Nazareth. Le fécond chapitre contient le plan que notre auteur s'eft formé fur ce qu'ont écrit plufieurs fçavans qui ont traité cette matière. Il fe perfuadeque les Mages n'arrivèrent à Jerufa- lem qu'un an &: quelques jours après la naiflance de N. S. &: s'y décermine par trois raifons. L'une , pour leur donner le temps neceflairc avant que de réfoudre d'entreprendre , & d'exécuter un fi long voyage. L'autre pour laiffcr après la nai/Tance de N. S. un temps de quarante jours au bout def- quels il fuft prefenté au Temple fans eftre découvert par le témoignage de Simeon , & par celui d'Anne la Prophecefle , & enfuite livré à Herode. La dernière , parce qu'il n'cfi: gue- res croyable que Herode , quelque cruel qu on l'imagine, ayant elle extrêmement habile , ait voulu fe charger contre fon propre intcrcft, d'un crime aufli exécrable qu'auroit cflé celui de maffacrer fans neceflité tous les enfans de deux ans & au dcifous y pour ne pas laiiler echaper à fa cruauté N. S. qui n'auroit eu alors que peu de jours. Le troifiéme chapitre explique les moyens d'accorder ce |)lan avec les paflages de faint Mathieu qu on voudroic luiop- pofer. Les deux derniers chefs regardent les contradidions qui fembleiK fc rencontrer dans le difcours des voleurs qui furenç ï88 LE JOURNAL crucifiez avec N. Seigneur , & celles qui touchent le temps qu'il demeura au tombeau , Se diverfcs chofes qui fc pafle- reiK après la rcfurreclion. Apres que M. lEvcque d'Acqs a répondu de la forte aux objcdions qui font faites fur quelques articles de lafoi , &; fur quelque'^ pallages de l'Ecriture, il établit l'obligation que nous avons de recevoir de l'Eglife Catolique la dccilion des dilîi- cultez de la Religion Chrétienne à l'exclufion de toutes les autres fecles , l'oit connues ou inconnues. Que fi, dit il, quand il s'agit de nos affaires ou de notre fanté , nous nous foumettons à la pluralité des Jurifi:onrultes ou à celle des Mé- decins , n'ell-il pas plus )urtc de nous foumettre au jugement de l'Eglife quand il s'agit du culte de Dieu &c de notre propre falut ? Il poufle fort loin cet argument , &: montre combien cette foumiffion des fcntimens particuliers aux fentimens gé- néraux cft utile dans la vie civile , &: neceilaire dans la mo- rale , &: qu'au fait de la Religion , ce n'cfi: pas feulement mo- deftie Se condefcendance , mais juftice &: devoir indifpen- fable. Il jointà ceiaplufieurs préjugez en faveur de l'Eglife Ca- tolique , pour prouver que Dieu a confié à elle feule le culte qu'il veut lui edre rendu , & que cette vérité eft confirmée par des miracles opérez dans chaque fiecle écoulez depuis f^ iiaifiance, & mefme par ceux qui Ce trouvent vérifiez aux pro- cès verbaux des canonifations, fans qu'ils puiflent cftre rendus fufpeds de faufleté ni par les recommandations des Rois , ni par les follicitations des Ordres Religieux , ni par les fommes immenfes employées aux frais. A la fin de ce fécond tome fe trouve une réfutation parti- culière des miracles du Paganifme ancien , de laquelle il eft aifé de faire l'application aux miracles des autres fauffes Reli- gions. On y trouve encore un recueil des paflagcs de l'Ecri- ture , qui prouvent que N. S. eft le Mcdie promis ; Se une lettre de feu M. Bernier , qui juflifie que le padage de la mer rouge , la fource d'eau que Moïle tira d'une roche , &: la man-r ^ic qui nourrit les Ifraëlues dans le defeit , n'avoicnt rien de naturel , DES SCAVANS. ig^ naturel , ni rien d'ordinaire , & donc il rcfle maintcnanc le moindre vertige dans le pays. VOYAGES HISTORIQUES DE L'EUROPE. TOME Jll. qui comprend tout ce qu'il y a de flui curieux en Italie. In 12. à Paris chez Nicolas le Gras , au Palais. 1693. BI E N qu'une infiniré d'auteurs aycnt écrit d« l'Italie , ils ont omis des parcicularicczqui fe trouvenr dans ce volu- me. Chaque chapitre traite en particulier de quelque Eftat , & apprend ce qu'il y a de plus curieux touchant fon etablifle- ment , fa fituation , &r fa police. Dans le chapitre du Mila- nez on voir que la ville de Milan fut détruite par Frédéric I. en n6i. &: que neuf ans après elle fut rebâtie , & tellement accrue , qu'elle cft aujourd'hui furnommée la Grande. Son Eglife Catedrale eft la plus fuperbc d'Italie , après celle deS. Pierre de Rome. Dans celui de Gènes on voit ce qui donna lieu au bombar- dement de l'année 1684. &on y lit la harangue que le Doge prononça à Vcrfailles au nom de fa Republique. Les fuivans décrivent ce qu'il y a de plus rare en tableaux, en flatues , en armes , en pierreries dans le palais du Grand Duc. Ils décrivent auffi la forme de l'eledion des Papes , &: les cérémonies obfcrvées dans les Conclaves , les Eglifes & les palais de Rome , les biblioteques , &: ce qu'il y a de plus fagemenc établi dans fa police. Les articles de Naplcs & de Sicile font d'une grande éten- due. Le dernier contient le récit du tremblement de terre arrivé au commencement de cette année, EXTRAIT D'UNE LETTRE ECRITE AU P. CHEVÎ- yii , ABfiam du Père General de i Oratoire. "^"yR^ ^^ ^.^ ■ ,C ^ f.t^o .^: .. . >- ■Mr. IL cft vrai , Mon R. P. que tout ce qui fc debitoit à l'avan- rage de Jaques Aimar &c de fa Bnguete , donna à Monfieuc le Prince la curiofité de le voir. Il eft vrai encore que quand il fut venu à Paris , le prix dç deux flambeaux d'argent qui i65>3. B b b 190 L E J OUR NAL deux ans auparavant avoienc efté volez , fat rapporte, Mon-* ficur le Prince qui doutoit de la vertu attribuée à la baguccc de ce Jae-jues Aimar , m'ayant fait l'honneut de me demander ce que j'en penfois , je lui répondis , que pour en reconnoitre la venté , je le menerois s'il avoir agréable avec Jaques Aimar en des lieux où des vols & des meurtres avoient eflé commis. 3'eus donc l'honneur d'aller avec Monficur le Prince à la rue faint Denis , dans un lieu oit un Archer du Guec avoir eflé tué de quinze ou de feizc coups d'epéc par des Moufquetaircs. Jaques Aimar pafTa Se rcpalTa deux ou trois fois fur le lieu , fans que fa baguere tournaft. Il nous dit pour excufc, qu'elle ne tournoit pomt pour les meurtres commis ou dans la colère ou dans l'ivrcife , mais feulement dans les alfaflînars prcmc- ditez , & dans les vols ; & qu'en toute forte de crimes elle n'avoir point d'effet lors que les coupables avoienr avoué leur crime , bien qu'ils n'eulTent pas encore efté condamnez. Pour éprouver de qucile confi Jcration de voit eftrc cette cx- cnfe , je )c menai à la rue de la Harpe dans une maifon où a- voit efté commis un vol dénié couftammcnt par l'auteur, bien que furpris en flagranr délit, & chargé de plufieurs dépofi- nons ; &c Cl bagucte demeura aufli immobile qu'elle l'avoic efté en la rue faint Dcnys ; de quoi il ne put alléguer aucune raifon. Voila , Mon R P. ce que j'ai vu de l'affaire. J'ai oui dire que la bagucte n'avoir pas tfté plus heurcufe à Vcrfailles & à Chantilli, où plulîeurs épreuves en avoient e(ié faircs. S. A.R. veut bien que le Public foit informé déroutes ces chofes. T>*y*^lé': Cff. J^i- J-7* i*^- V MEMOIRES DE MATHEMATIQUE ET DE PHYSÎ- ^ae , tirez^dei Reqiliiei de l Ac~idem e Royale des Sciences ^ du ^r. Mars j6p]. 7» ^, à Pans chez jcan Anilfun. 1693. CEs Mémoires contiennent la rcfolucion de la queftion l poui quoi le fœtus & la tortue vivent très long temps fan» relpirer. Par M. Merry. Une obfeiv tion faite à l'Obfcrvatoire Royal , du partage de la Lune par les Pléiades le u. Mars au foir. Par M. de I4. Hirc, t)ES SCAVAN5. ,5^ Des expériences du reflbrc de l'air dans le vuidc. Par M, Homberg. Les Cicloïdes , ou roulettes à l'infini traitées à la manière des lignes géométriques. Par M. Varignon. Des reflexions fur la caufe de la froideur extraordinaire de quelques fources d'eau dans les plus grandes chaleurs de l'efté. Par M. Charas. NOUVELLE PRATIQUE D'ARITMETlQjJE D'UNE methude tra facile par fa abregez^^ ^ par la fuppn(Jîon des par^ iiei aliquotei -, enfemhU de quantité dérègles nouvelles ^parti- culières pour les payeurs des troupes , pour les vivres de mer ^ dg ter>e , pour le toifé , pour C arpentage , pour les aSi.tges , pour les monnoyes , /fi poids , les ms fûtes , la guerre , le^Jîn xions fur les diffcrens de la Religion. Il donna la féconde ^ l'année fuivante , pour répondre aux objections d'Angleterre & de Hollande. Ce fut le feul livre que le Cardinal Ottobo- ni emporta pour s'entretenir dans la folittide du Conclave ou il fut élevé au Pontificat. La troifiéme fuivit en 1689 ^^'^^ le titre des Chimères de M Jurieu. La quatrième , à laquel- le le fçavant & fage M. de Leybnits a donné lieu, & qui traite de la tolérance des Religions , fut mife au jour en 1 6 9 r. Dans tous cç.% Ouvrages on trouve beaucoup de folidicé , de 1695. £ c e ioi ^ LE JOURNAL nectecé , de juftclTi? ; un zelc fans amertume , une controver- fe qui n'a rien de Cec ; une charité éclairce qui arraclic &'qui plance,qui renvcrfe & qui édifie. On yvoicauiîi des Elo- ges du Roi qui ont charmé tout le monde , &: qui ont elfe le fujetd'une agréable diTpute entre quelques uns des meilleurs Ecrivains duficcle, qui en ont mefme donné leur fcnciment dans des Icttrcsqui pourront eftre imprimées. Ce nouveau Paul autrefois Ci oppofé à i'Eglife , en eftoic devenu un des pluszelezdéfcnfcurs , & depuis qu'un fécond Ananie avoir fait tomber les écailles de fcs yeux , il ne celfoic point de travailler pour defiUer ceux de fes Frères. Mais afin que les offices de fa charité ne l'empêchaflcnt point de rem- plir les devoirs de fcs emplois dans toute leur étendue , il fe déroboit fouvcnt le repos de la nuit pour afl'urer aux autres le repos du jour éternel. Lors qu'il commença d*e(tre incom^ ïnodé au mois de janvier dernier , il travailloit aduellemenc / Contre Aubcrtin a un traité de l'tucarillie, que l'on a trouvé fort avancé , & qu'il efpcroit pouller jufqu'à la demonftration , ne fouhaicant la prolongation de fa vie, que pour donner en- core à I'Eglife ce nouveau témoignage de fa foi. Comme il avoir beaucoup de courage, & que fes infirmircz ne lui ôtoient point le fommeil , m ne lui donnoient point de fièvre , il ne les croyoït pas dangcreufes, & les negligeoit. Il voulut encore affiftcr aux faints Myltercs le Dimanche pre- mier de Février , &: le jour de la Purification ; & fur ce que , M. l'Evéque de Meaux s'y oppofoit , il répondit en riant à ce ' vénérable Prélat , C^'il n'eiioit pas naturel que ce fuft lui qui l'empéchaft d'aller à la Mclfe. Le Mardi, le Mecredi & le Jeudi il continua de s'habiller & d'agir à (on ordinaire , paroilfant tantôt un peu mieux ,& tantôt un peu plus. mal. Le Vendredi crtant averti par fes a- mis que fes maux pouvoient le tromper , il fe difpol'a à rece- voir les facremens , dont il s'aprochoit à toutes les grandes r fclU s , & qu'il avoir reçus à Noël dans l'Abbaye de faint Ger- main des Prez , & mefme encore depuis , à ce qu'on allure. Il remit feulement au lendemain pour s'y préparer davantage. Mais il fut privé de cette confolacion par une défaillance îli- DES S C A V A N S. 103 bice qui l'emporta le Samedi au matin à fept heures & trois quarts ; &: le Dimanche au foir Ton corps fut inhumé dans r£;.;lire de la Paroin'e de Verfailles , où Ton cpicafe Cera mife. Le faux zcle , le libertinage , & 1 herefie ont employé avec cmprcdement leurs noirs artifices , pour accommoder cette furprife félon leur goiir. Mais les bonnes atlions du mort ra- contées fimpicment par la vtrité , leur ont fermé auflî tôt la bouche ; & il ne leur rtftc pour :out fruit de leur deteftable calomnie, que la honte de l'avoir enfantée ^ &: le defefpoir de la voir détruite. AinfiM. PclLIfon , après avoir eu pour amis en France & dans les pays Etrangers cous ceux qui l'eftoicnt de la probité, du (çivoiT , de la poluelfe , de la pieté; après avoir elté efti- mé, chéri du fage Montaufier, cet excellent juge du vrai mé- rite ; après avoir reçu mille marques de diftinclion de l'incom- parable Chrifline de Suéde : mettons le comble à fes louan- ges; après avoir elle honoré des bontez inelhmables de LOUIS LE GRAND , a elle défendu mort avec le mefme zèle , la niefme jultice , le mefme fuccès qu'il défendoit vivant la véritable Religion. Sa première Amie , qu'il a louée fi ingenieufement dans le poëme d'Eunmedon qui lui eftadreifé, eft la feule perfonne chez qui fe trouvent tous (es vers ingénieux : car pour lui il les negligeoit ; quoi que par la noblelfe & la faciluédu tour,, par l'agrément & la nouveauté des peniees , par la variété des fujets & des caraderes ils fuffent le charme de 1 Hôtel de Rambouillet , & de tous les gens de bon goût. Il feroit à fouhaiter qu'elle vouluft répandre dans le Public de fi pré- cieux trefors. Ils ferviroienr avec les ouvrages de Droit , d'E- loquence , d'Hiftoire , & de Controvtrfc dont j'ai parlé , & avec quelques aui res qui ne font pas moins dignes de leur au- teur , à faire voir qu'il avoit cinq ou (ix eiprits au lieu d'un^ tous délicats , tous jufies , tous excellens. 204 LE JOURNAL LES OPERATIONS DE LA CHIRURGIE , AVEC une t'atholo^te duns laquelle on explujue touta les maLtdies ex~ ternes du corps humain , i^c. Par J. B. Verduc , Dofieur en Médiane. In \2.2. vol. à Pans chez Laurcnc d'Houry. 1695 LORS Q^E les Opérations de la Chirurgie parurent , il en fuc pané dans le journal du 13. Mai de l'année 1690. Mais ce n'elloit alors qu'un effai ; au lieu que c'eft ici un traité compofé avec tout l'ordre & toute la netteté poffiblc , appuyé de raifonncmens folides , & de reflexions judiciculcs , avec un grand nombre de remèdes & d'obfejrvations titécs des meil- leurs auteurs anciens & modernes. M Verduc a ajouté aux Opctations une Pathohigie entière de Chirurgie, où il fem- ble n'avancer rien qui ne foit fondé fur de bonnes rajfons tanc pout ce qui regarde \q% caufcs des maladies , que la metodc de les guérir Toute la Théorie des maladies qu'il explique dans cette Pathologie cil fondée fur une hipotefe , qui eft le changement des tuyaux & des liqueuts des parties. Il prétend que lors que les vaifîcaux ou les humeurs ont perdu leur difpofition natu- tellc, il arrive plulieurs changemcns qui font les caufesdes maladies, 11 explique cnfuitc ces changemcns avec beaucoup d'ordre & de clarté. Il a commencé par les opctations qu'il a cru les plus neceffaircs pour la pratique. Le manuel qu'il en donne ell /i facile , qu'il ne faut que le lire pour l'entendre. Dans la féconde partie de la Pathologie , il fait l'Ethiologic de toutes les maladies externes en particuliers , en commen- çant par celles de la teftc. Il examine les moindres accidens qui furviennent à toutes les parties qui la compofent, & faïc la mcfme chofe pour les maladies de la poitrine &: du ventre , & pour celles des jambes & des bras. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faine Jaques , à l'Image de faine J can Baptille. Avec ^uvtle'^e du Roi. 1695. xvîir. toi LE JOURNAL DES SCAVANS Ç Du LuNDY II. Mai M. DC. XCIII. MEMOIRES POUR SERVIR A L'HISTOIRE EC ciefiaftique des fix pTemten fecles , juftifiez^par La citations dei Jinteurs Onq^inaux , avec une chror.ologie où l'on fait an abrégé de rhifiotre Ecclefiuflique f^ Profane ; t^ des notes four éclaiicit les d'fflcultez^des faits ^ de la chronolegte. Tome premier , qui tmtient le temps de Notre Seigneur ^ S- l^i y^pôtres. Par le Steur D. T. In ^. à Paris chez Charles Robuftel , rue faint Ja* ques au Palmier. 1 69 3 . L 'Histoire des Empereurs donc M. de Tillemont a lai {Té pafekfc depuis trois ans trois volumes , n'a efté entrcpri- fe que par rapport à celle qu'il fait paroitrc aujourd'hui; en •quoi il s'elt conformé à l'ordre de Dieu , félon lequel tout ce qui peut arriver dans les Royaumes & dans les Eftats de la ter- re , doit infailiiblemenc fervir au bien de l'Eglifc, Le titre de Mémoires qu'il lui donne , n'en diminuera en rien le prix dans l'efpric des perfonnes intelligentes, & les ar- ticles qui en interrompent la fuite , ne la leur rendront ni moins agréable , ni moins utile. Au contraire cette interrup- tion ne leur permettant de voiries taies que l'un après l'autre, leur en prcfentera une idée plus diiiinfle, & une connoiflan- «e plus claire. 1693. Fff ioS L E J O U R N A L M. de Tille mont a borne ce premier volume aux acîVions &; eux (buffranccs de N. S. &: à celles des Apôtres. Il a renfer- me la vie de N. S. en vinrquatre articles , où il n-'a rien omis de ce qui regarde Cà conception , fa naiîlancc , fa prefcnta- tion au temple , fli fuite en Egipte , fon baptême , fon jeûne, la vocation de Tes Difciples , fcs miracles , fa palFion , f» more , fa rcfurrefVion , fon afcenfion &: fon entrée au ciel. Quelque foin qu'il aie pris à exprimer les circonflances des adions & des fîiufïrances du Sauveur , il a beaucoup plus tra- vaillé à les cclaircir par le témoignage de tous les anciens Au- teurs , par les reflexions des faints Pères, par les époques de la cronologie , & par les règles de la critique. Lors qu'il approfondit les plus grandes diiîîcultez qui fc ren- contrent à fixer l'année $c le jour de la nailljncc o.c Jcfus C. il veut faire croire qu'il n'a pas affcz de lumière pour y réufllr, & fcmble appréhender que ce qu'il en dira ne lui donne trop de réputation , &: ne lui attire trop de louanges. Il les fuit ds la mefme forte en traitant les autres points les plus impor- tans , &: les mérite bien mieux que tous ceux qui les recher- chent. Pour revenir au temps de la naifTince de N. S. il déclare qu'eftant certain qu'elle précéda la mort du grand Herode ar- rivée en la quarante- deuxième année depuis la corrcclion du Calendrier de Jules Ccfar , &: que fuppofant qu'elle doit cftre mife au vintcinquiéme Décembre , il faut necelFairement la mettre à la fin de la quarante- unième année depuis la corre- ction du Calendrier , en laquelle Auguftc eftoit Confiil pour la douzième fois avec Sill*, en la quarantième d'Augulle de- puis la mort de Jules Cefar , en la rrcntc-fixièmc depuis que Hcrodc avoir efté déclaré Roi de Judée , en la vint-rcptiémc depuis la bataille d'Aftium , en la 749. de la fondation de Rome , en la quatrième de l'Olimpiadc 193. ôccnlù. ^-,0^ de la Période Julienne. Du jour auquel N. S. naquit à Bctlccm M. deTillemonc pafîe à celui auquel l'Eglife en célèbre la mémoire , &: nous avertit que quand elle fixe ainfi la lolennité des miltcres, cl- \ le n'a point du tou: intention de décider qu'ils ayent cfté cq DES SCAVANS. 107 cJTcc accomplis en ces jours-là. L'Eglifc Latine depuis le commencement du cinquième fîcclc fait commcmoranon de l'adoration des Rois , du baprêrne de N. S. &: du miracle des noces deCana au mefnie jour, qui cflle flxicmc de Janvier: tout le monde cependant demeure d'accord que le Baptême , &: le miracle ne furent pas faits au mcfme jour. Saint Chrifoftome témoigne que fuivant une ancienne tra- dition la feftede la naiffancede Jefus-Chrift fe celebroità Ro- me , & en Occident , le vintcinquiémc Décembre. Samt Auguftin alTure la mcfme chofc de l'Afrique. Clément d'A- lexandrie en parle avec incertitude , &: dit que de fon temps ' les uns la mettoient au dix-neuviéme Avril, les autres au vintiéme , Se les autres au vintiéme Mai. Cela donne lieu de croire que la feile ne Ce faifoit pas encore alors en Egipte , ni aux provinces voifincs. Au qujtnéme fiecle elle s'y faifoic conjointement avec celle du Baptême le jour de l'Epiphanie. La pratique de l'Eglifc d'Afie en ces temps-là cft un peu obfcure , &: les Pères ne nous en ont rien laifl'e de certain. En l'an 377. quelques perfonnes apportèrent de Rome en Sirie la pratique d'y célébrer la fefte de la nailîance de N. S. au moi* de Décembre , & bien-tôt après elle fut établie à Antiochc , bien que quelques-uns en murmuraflent comme d'une nou- veauté. Avant l'an 452. l'Egiptc fc conforma à i'ufage de l'Occident. M. de Tiilemont parle avec la mefme modeftic du temps de la mort de Jcfus-Chrift ; £c bien qu'il la mette avec les plus habiles Cronologiflcs au Vendredi troifléme Avril de la trente- troîfiémc année de l'Ere chrétienne , il avoue qu'il n'o- fe entreprendre .d'examiner les raifbns fur kfqucl'cs ces Cro- liologiftes s'appuyent , ni de refoudre les difficultcz qui leur peuvent eQrc oppofées. Il ufe de la mefme retenue en en- trant dans les qucftions de la dernière Pâquc , où il s'agit de fçavoir û J, Chrift mangea l'agneau le mefme jour que les f ]uifs , ou mefme s'il le mangea abfolument. A l'égard du premier point , il fuppofc avec le P. Lami , fçavant Prêtre de l'Oratoire qui a traité depuis peu ce fujet • avec beaucoup d'étendue , q[u'ii cil difficile de fe perfuada? «e8 LE JOURNAL rjuc N. S. ait mingé l'agneau un autre jour que les Juifs; mai» ï! a de la peine à demeurer d'accord avec lui que Jes Juifs ne l'immolèrent que le Vendredi au fbir , &: qu'ainfi J. C. qui à cette heure- là ertoit attaché à la croix , ne le mangea poinc Ju!le terre farn Scionenr ^ que le relie du Royaume reçoit. Il avoit aulfi l'avantage d'eflrc cxcmc de tailles , & en a j ouï jufqu'au règlement de l'année 1 63 ;j. DES SCAVANS. X15 Le Confcil Souverain fut érigé en 14^3. en Parlement par Lo'.iis onzième encore Dauphin. Il n'y eut qu'un Prclidcnc jufqu'au temps de Ciau le Believre pourvu en i 541 . Michel de Gives qui ]ui fut joint bien tôt après, mourut li pjuvrcle 15. Octobre 1J58. qu'il ne lailfa pas de quoi le faire enterrer, de qu'il faiiut que le Parlement ordonnait que fur le fond des me- nus frais de la Cour , la femme de trente fept livres , fcizc fols, iîx daniers (eioit prile pour fournir aux funérailles. Le Parlement de Grerioble eft compofé aujourd'hui de dix Prefidens , de 5 i . Confcillcrs , d'un Procureur &c de àcwK A- vocats Généraux. Les Conleillers Clercs y inftruifent les pro- i ces crinMnels , &r affilient mefme au jugement^ quand il n'y a point de peine afflidive. Il elt défendu par anêt aux Prefidens 5^ Confcillcrs , à leurs femmes &: à leurs enfans , de folliciter , fi ce n'eft pour leurs parcns , leurs alliez , ou leurs domcftiques. Dans le quatrième livre , qui elt des contraéts & des crimes, Pauceur remarque que la ville de Grenoble a des ftatuts par Icfquels l'adultère n'efl puni que d'une amende de cent lois. 1 Les Juges d'£glife ont favoriié le relâchement dans le temps j où lis ont pris feuls connoi/fance de ce crime , & où les amen- des faifoient partie de la ferme de l'Evcché. A Grenoble on ne punilfoit point les bêtes , comme on les puniflbità Chalon , où Gui Pape rapporte qu'au retour de fon ambalfade d'Angers il vit un porc pendu pour avoir tue un ' enfant. Dans le cinquième livre , qui cft des aétions &: des excep- tions , l'auteur dit que dans les caufes fommaires le Parlemcnc de Grenoble ne s'aflujettitpoint àla rigueur des formalitcz, & les remet à la prudence des Juges. Le règlement de 1 678. compte jufqu'à quinze efpeces de ces aifaires fommaires. ANTIQUI LIBRI MISSARUM ROMAND ECCLESI^ id c/i ^ntiphonanui Grci^orii Papa: , t^f. Ex AiJJ. Cod. (ivt prirfùyn édita , Jîve emend.ita. Studio ^ curkj' f. M. Cari , frciLs'teri Theoiogi. in ^ Roma. & fe trouve à Paris chez Jean Boudot , rue faine Jaques. ii6 LE JOURNAL CEur qui recherchent les anciens livres de prières, qui les rcvoycnc &c les rcilituenr, rendent lans doute un grand fcivicc à l'Eghfc , puis qu'en nicfme temps ils lui conCcrvcnc des nionumens de fa doûrinc, & lui fournillcnt des moyens de rendre à Dieu le culte qu'elle lui doit , &: datcircr fcs bc- neditlions &: Ces grâces. Paraclius travailla hcurcufcment fur ce fujct au ficclc pp.fTc, Celui qui nous donne les anciennes prières contenues dans ce volume , marche fur ics traces. Il a mis au coramenccmcnc une dillcrtation fur tout ce qui fe chante à la mclîc , & y a remarqué d'abord , qu'au temps du Pape Cclcftin I. au lieu de chanter ['JntroU à Rome , comme on le chante maintenant, on y lifoit l'Ecriture , &: que les Eglifcs d'Afrique gardoicnc le Jiicfme ufage. Il y en a une preuve convaincante dans le 8. chap. du ti. li- vre de la Cicé de Dieu , où faint Auguftin raconte un miracle arrivé le jour de Pâque de l'année 415. dans l'Eglifc d'Hippo- îie en la pcrfonne d'un jcune homme de Cefaréc en Cappado- ce, qui fut guéri d'un tremblement qu'il avoit par tour le corps. Lors que faine Auguftin à qui l'on avoit amené ce jeune homme , fut entré avec lui dans l'Eglifc , ds trouvèrent qu'el- le retentifloit des cris de tout le monde , qui remercioit Dieu de la guerifon qu'il venoit d'opérer ; & aulîi tôt que ces cris eurent ccrt'é, la Melfe fut commencée par la le(5ture de l'Ecri- ture 5 dont faine Auguliin expliqua les paroles à l'an'embléc, 11 paroit par ce témoignage , que la coutume de commencer la Meflc parle chant de \' Introït , n'eftoit pas encore alors éta- blie dans les Eglifcs d'Afrique, non plus que dan^s celles de Rome, Fautes JlcorTi'zer dans le Journaf prèctdtnt. Paçe 19J. ligne i^^effirePeliiron , /«/>=. Ki^ire Paul PelilTbn. P. 194. lig. 17. matiereg^ /i/ri manicrcs. Pag. içS/lig. 6. S:pt. Ufez. Sept 1670. P. lOj. lig.^^1691. ilfe^ 1681. P. zoj.J/30. de PocTie, lifez^ de Concro- vcrlc. A Paris chez Jean Cus!cn , rue S. Jaques, à l'Image S. Jean Bapt. 317 JOURNAL DuMercredy 13. MayM. DC. XCIII. DESCRIPTION CURIEUSE ET PHYSIQUE D'UNE ma([e de chair pefant quarante- deux livres ^ un quart , trouvée dans le ventre d'une femme qui Cavoit fortee fendant vint-cinq ans. Pat M' B. è Connor , BoHeur en Médecine , é" Anatomtfte. UNe Veuve à Paris âgée de cinquante fepc ans , mourut le premier jour d'Avril 1693. d'une tumeur prodigieufe de bas ventre qu'elle avoit portée vint- cinq ans. M. Sihy de la Cham- bre Royale , qui avoit efté Ton Médecin pendant quelques an- nées de (on indifpofition , eftant curieux de fçavoir d'où proce- doic cette tumeur , rciblut de la faire ouvrir -, & m'ayant fait l'honncuf de m'inviter pour l'ouverture , je voulus avant de dé- couvrir la tumeur, exam.iner la fituation , la figure, & les dehors de la matrice &; de la tumeur : fur quoi ayant fait les obferva- tions fuivantes, je veux bien en fajre part au public comme d'u- ne chofc fore extraordinaire. Il fortit de l'Abdomen deux ou trois pintes d'eau touffe & un peu faléc. La matrice eftoit attachée du côté gauche au Péri- toine. Tous les vaifTeaux du Bjflin edoient extrêmement grof- fis ; la veine cave avoit un pouce & demi de diamètre , &: relfembloit à un boyau rempli. Les vaifleaux fpermatiques & hypogaftriques eftoient gros à proportion. Les nerfs de la ma- trice embraifoient comme de groiVts cordes certains endroits de fa furface extérieure ; ce qui empcchoit la tumeur de croître également par tout. Elle occupoit toute la capacité du corps de la matrice , &: s'etendoit jufqu'à l'extrémité Je la trompe gau- che. De ce mefme côté l'ovaire & le ligament large ne paroiC foient pas. Cette femme avoit efté mariée deux fois -, & ce: accident lui arriva pendant le fécond mariage , cnfuite d'une frayeur qu'elle «ut , fon mari qui ciloit yvrc l'ayant pourfuivie jufques dans la 1693. Fff 3i8 rue l'cpcc a. la main. On me dit mcfmc qu'il lui avoit donné an coup de pied dans le ventre, après lequel elle n'eut plus Tes mois, fz commença à fentir bien- tôt au bas ventre une pcfanteur qui ]ui fit croire qu'elle cftoit groffe. Elle mangeoic beaucoup & de très grand appétit : eu marchant elle eftoit obligée de fc tenir courbée , avec une petite difficulté de rcfpircr , fans toutefois avoir aucune rétention d'urme , ni autre incommodité. Tou- tes les autres parties du bas ventre &: de la poitrine elloient en bon eftac. La tumeur eflioit d'une figure irregulierc. Elle avoir plufieurs avanccmens , dont la plus coniiderablerempliiroit toute la trom- pe gauche. Au dcflous de celui-là il s'en trouvoit deux autres, J'un au côté droit , l'autre au côte gauche. Ces différentes re- prcfcntarions faifoicnt dire à pluficuis pcrfonnes que ccfioitun enfant dont la tefic ôz les deux ep.iules rclcvoicnt. Mais ayant fait une inciilonlor.gitudinale , on vjtbien que ce n'caoït qu'une mifle de chair blanche & uniforme , fembiablc à une loupe du poids de quatre ou cinq livres qu'avoir un Bourgeois de Monc- pelier en la partie poilcrieurc du coi deilbus la nuque , auquel je l'ai vu emporter. Notre maHc charr.uc avoir vint deux pou- ces en longueur , douze en largeur , & dix en epaiîlcur , &: eilant mife dans la balance, clic pefa quarante deux hvrcs & un quart. Pcrfonnc de l'afrembléc ne donra que cette maîFc ne fui} un faux germe , ou pîutoll une mole : Mais l'ayant fait porter chez moi , je voulus l'examiner plus particulièrement ; &c je trouvais propos d'en faire une démonilration publique à mes écoliers. Cependant la chofc ayant elle connue , beaucoup d'autres per- fbnnes m'ont fait l'honneur d'y afliller , comm.e Mr. Chomel, Mr. du Moulin Médecins du Roi , Mr. Régis , Mrs. Tournc- forr , Fedé, Sihy, Lemery, Calanan , Souhait, Tauvrv, Deidier, Barbaroux, Coppingcr , Docteurs en Médecine , avec plufieurs autres tant Médecins, Chirurgiens, & Etudians , que Curieux, au nombre de cent à lix- vingt perfonnes , en prefence defqucls j'ai eu l'honneur de taire un difcours raifonnc fur les obfetva- tions fui vantes. J'ai trouvé la matrice par tout étroitement attachée à cette mafl'e , excepte qu'en certains endroits je pouvais avec le doigt la fepaicr , quoi que diliicUcment. La fubUance de la macncc 1 1 9 cfVoit fort epaiflTe , & Ces fibres cliarnuës fort apparentes. Je n'y pouvois faire^voir en aucune manière la tunique glandulcu- le. j'ai conduit les vaiffcaux fanguins de la macncc jufqu'au milieu de cette chair , où ils cflcicnt fort variqueux. Je pou- vois fxilcment pailcr mon doigt dans le calibre d'une de Tes vei- nes: mais il ne m'cftoit pas polliblc d'y trouver aucun nerf, j'ai \u pourtant que les grofles cordes de nerfs qui ferroient le corps de la matrice , jetcoient quelques pctis fîlamcns à la fuperfîcie ex- térieure de cette maffe. Il ne s'y trouvoit aucune figure régu- lière qui cuft rapport aux os, aux cartilages, aux chairs mud culeufes , ni à aucune partie intégrante de notre corps. Elle cftoi: charnue , blanche , tout uniforme , & homogène, extrê- mement compade. Toute la m-îlle eRoit compofée de plnfieurs molécules d'une grofleur confidcrabie , les unes d'une figure pyramidale , les autres d'une figure applatic , en forme de cou- ches longues , qui s'etcndoicnt fur ks molécules pyramidales. Je fcparois toutes ces molécules les unes des autres avec le doigt fans couteau ni (blet : mefme elles fe trouvoient fcparées par u- ne membrane propre , dont chacune eftoit revê:uc étroitement. Il fe trouvoit pourtant des fibres qui traverfoicnt d'une mem- brane à l'autre : femblables à celles qui fc crouvcni; aux colom- nes du cœur. Cette dilïcrencc figure des molécules faifoit qu'el- les laiiîûient pîufieurs vuides &; finuofitez entre elles , comme des yentriculei Caverneux j & entre ces anfraduofirez glifibicnc beaucoup d'artères &: de veines , qui faifoicnt plufieurs détours & circiimvolutions. Cependant la tilHire de toutes ces molécu- les eftoic partout cgalc , &: de la rncfrne folidité. Chacune de ces molécules eîtoit compofée d'autres petites parties de diffé- rente figure fenfible. Les unes approchoient du quarrc -, les au- tres du rhoniboïde , les autres de l'ova'c , &: les :iutrcs du poly- gone irregulier : les unes de la grofi'eur d'une fcvc , les autres d'une noifetce , les autres comme le pouce. Ces petis corps cftoicnt tous attachez les uns aux autres par de petis cordons tendineux. Le corps de chaque particule eftoit fohde , & je le pouvois feparcr facilement de fa partie voifine fans incifion par le bout d'un ftilet , excepté à l'endroit où le ligament ttanfvcr- fal & tendineux leslioit. L'allcmblée eftoit partagée fur la nature & fur le nom qu'il 110 ' fmdrok <î«iin« x cette maffe. Les uns rappclloient une chaif grniflcufc : mais en ayant mis une partie (ut les charbons ar- dens , &: en ayant approché une autre d une chandelle allumée, j'ai vu qu'elle ne donnoic pas plus de flamme que lî l'on jcctoic de l'éponge mouillée fur le feu. D'autres affuroient que c'eftoit une véritable mole. Mais on fçMt que la mole s'engendre , ie nourrit , & ero/Iît de la mefmc manière à peu prés que le fœtus ic les monftres. Elle fe forme d'un œuf, dans lequel , comme tous les Motlerncs en tombent d'accord, toutes les patries font féparément rangées en telle forte que li elles reçoivent une explication & un développement ré- gulier & par tout égal , elles formeront un embryon. Si une ou plufieurs parties fouffrent une dilatation plus grande qu'il ne faut par l'cfpnt fcminal , il s'en fait un monftre. Enfin fi tous les fi- lets tracez font obligez par un trop grand mouvement de quit- ter leur ficuation natuteîle , & de fe confondre , il en rtfultera un faux-germe : mais jamais la confulîon des parties ne fera fi grande , que quelques-unes ne gardent leur tilTure naturelle. Ainfi l'on verra toujours dans le faux germe un pied , une main, un doigt, ou une chait mufculeufe , ou au moins le Chorion ou X Amnioi , comme les obfcrvations de Schenkius & de plufieurs autres le font voir ; ce qu'on ne pouvoit pas obferver dans cette maflc. D'ailleurs les femmes accouchent de leurs moles auflî-bicn que de leur fœtus , parce que la mole , auflî-bien que le fœtus , neft attachée que légèrement à la matrice par l'extrémité des veines bL des artères , qui fe portant au delà des parois intérieurs de la matrice , fe plantent fuperficicllement dans les membra- îies du faux- germe. Ainfi la mole fe détache d'eile-mefme, a- prés avoir acquis une certaine groifeur , &: une pefantcur capa- ble de la faire détacher. Et qu'on ne me di(e pis , qu'une mole n'ayant point d'cfprits animaux , ni de mufclcs , ni parconfc- qucnt de mouvement , ne peut fe détacher de la matrice com- me un fœ-tus vivant s'en détache par fa calcitration , & par di- vers mouvemens que la mcre s'apperçoit qu il fait dans fon ven- tre ; puis que ie fœtus mort , quoi que privé de mouvement &C de fentiment , ne laifl'e pas de s'en détacher , parce qu'alors les ,femmcurs &: les parties folides perdant entièrement leur mouve- ment , î 1 1 ment , tant fenfiblc que fyftalcique , le fœtus par confequcnc devient plus pefant, rompt les vaifleaux umbilicaux , & les at- taches du Placenca avec rCJteius , &: par Ion poids ie fait un paflage dehors , en ouvrant l'onfice incerne , aidé par Ja conrra- dion des fibres muicuIeuCcs de l'Ucerus , & par la coniprcdioa des mufcles de l'Abdomen Se du Diaphragme. Enfin, cft-il croyable que les vaifîeaux de la matrice puif- fent groflir et fc prolonger en force qu'ils entrenc dans les cel- lules caverncufes , Se jufqu'au centre de cccce malle , f.ippcfi que ce foit une mole î D'autres prccendoient que ce fufl l'ovaire du côcc gauche tu- méfié , puis quil ne fc trouva pas. Mais la tumeur ne fe trouva pas feulement dans la trompe : fa plus grande partie eftoicdans le corps de la matrice. D'ailleurs la tumefaiTdon de l'ovaire n'ed que celle des œufs , de leurs loges ou de leurs membranes, qui venant à gioffir , feioicut ou des embryons , ou des mon- tres , ou des taux -germes , parce qu'il n'ef!: pas conceva- ble que les ttaits fulfcnt fi effacez , qu'il n'en rcllall au moins quelques-uns entiers, & capables de rcprefcnter dans la fuite quelque partie de notre corps. Outre cela les groli'es tumeurs des ovaires font ordmairement accompagnées ou d'hvdatides,ou d'un abfcés : car j'ai appris par une lettre de Hollande , que de- puis peu de temps Mr. Cyprianus LichotoniiRe d'Amflerdam , a tro ivé dans l'ovaire gauche d'une iemmc une tumeur pefant foixance livres , dans le milieu de laquelle tiloit un abfcés prodi- gieux , & dont la Circonférence eiloic charnue. Il ne faut pas conclure de ce que l'ovaire ne fe trouve pas , qu'il s'eft changé en cette malle , puis qu'il eft facile de con- cevoir que le fcul poids ôd la comprelîïon de la tumeur cftoic capable de l'ctFaccr ^ car la tumeur s'crendoic jufques au dia- phragme : de ibrce que fon milieu portoit lur les vertcbrcs des lombes , i>ii fe doit naturellement trouver l'ovaire. Ainfi la maffe pefant beaucoup fur l'ovaire d'un côté , Se les vertèbres ^■efiftant de l'autre , fes pcti:cs velîies prolifiques dévoient de neceillté crever , & s'applacir ; &; couc i ovaire dévoie fe réduire à une feuille mince & membrancufe. Ayant enfin via le peu d'apparence qu'il y a que cectc tumeur Coït un faux-gcrm.e , &c eucore iBolns lovauc tuméfié , & ayanc 1693. Ggg fcricufemcnt fait les reflexions & les obfervacions fuivantcs, j'ai conjedurc que ce n'cft autre chofc qu'ftn? Exacfcence de U ma- trice mefine , approchante de la nature des Goitrei ou des Loup, fei : je veux dire que les glandes qui font parfcmées ( comme tous les Anacomiftcs en tombent d'accord ) dans la membrane incericure de la matrice , venant à fc tuméfier , ont compofé cette grofle malfc, qui n'eftoit pas Carcinomateufe , comme quel- ques uns le préccndoient j puis qu'elle ne caufoit aucune dou- leur à la défunte pendant fa vie. Or qu'eft ce qui empêche que les glandes ne puifî'cnc parvenir à ce point de grandeur ? Car qu elloient ces Fungus de la matrice dont parie Tulpius, que àcs Sincomei produits par la tuméfaction de la tunique glaiidu- leufc ? Qjc font ces cxcrefccnces de la matrice & de fon Vao-i_ na que Kcrkring décrit , que la tumcfaclion des glandes de ces mefmcs parties ? M. Graef ne fait il pas mention d'une cxcref- cence énorme de la matrice qui pefoit pluhcurs livres ? Il tauc pourtant avouer qu'il n'y a aucun auteur , que je fçache , qui aie jamais fait mention d'une ex^crefcence Sarcoinateufe de la pefan- teur ni de la erolleur de celle-ci. Il fcmblc que toutes les oblirvations que )"cn ai faites fervent à prouver ce que j'avance. Car qu'eit devcni.e la membrane g.'andulcufc que je n'ai pu découvrir en aucune raai.icre ? Qi/elî- cc qui fcroit capable de l'eliacer ? 11 y a apparence qu'elle s'eft convertie en cette inaffe : j'cntens que les glandes qui fe trou- vent enchafPé^s , pour ainfi parler , dans cette membrane, ayant grolll en tout fens , ont fait dilater la membrane glandulcufe fi jneguheremcnr, qu'elle ne peut plus avoir une fiiperficic plane & égale , ni faire une coui.:he régulière comme auparavant. Ainlî il ne faut pas s'étonner (i on n'a pu ladiilinguer en cet étar. L'infertion des vaitlcaux fanguins de la matrice dans le milieu de la malTe, prouve afîez que ce n eft que la rumcfadion des glandes ; car on conçoit bien que les veines & les artères qui aboutiflVnt dans ces glandes , peuvent fc prolonger & fe dilater, quand les glandes où elles font inférées , viennent à grofljr & à s'étendre j comme on voit que les vaillcaux de la matrice , qui avant la grolTcilc ne font que de petis luyaux courts &: ecroits, croiflVnt conlidcrablem.enc en longueur &c en largeur dans la groirtlTe. Dans le cancer des mammeilcs, &; dans les Parotides, 113 on voit de gros vaifTeaux quieftoient imperceptibles dans l'eftac naturel , parce que la tumeur en croiffant reçoit plus de nourri- ture , & par confequenc l'artère doit plus fournir de fang qu'au- paravant , lequel pjflant dans l'extrcmité des vaitreauy. , doit cecen'airement en dilater la cavicé , pendant que la tumeur a- vançant &: fe poufîant , tire après elle les vaifleaux qui y font attachez. Ainfi la tumeur en groffifî'ant prolonge les vaiflcauxî & le fang paiîant en plus grande quantité dans leurs extrenùtez, dilate Se amplifie leur canal. La I. Figure rcprefcnre la tumeur cnvclop|)ée dans la matrice, où l'on voir toute la matrice , avec (es appendices. A A A A revrefenie toute ta tumeur , avec la matrice ^ui l'enveloppe f fans y avoir fait aucune incijten. B. La Trompe f^auche tumefée ,fani Ovaire ni ligaments C. L'orifice externe du Vaq^ina. D. Le f^a^ina entier , fins incifon. E. L'orifice interne de la matrice , à demi fermé. F F. Les deux veines Hypogaflricjucs , cjui ra?npent fur la matrice. G G. Les deux artères Hypogajlri(jues. \\, La veine Spermati^ue , cjhï prenant un rameau d; la Trompe ^au^ che, vient de finaflomoftr fur le corps de la matrice , avec la veine HypO" gafl/ufue, I. I. Les deux ligamens ronds, K. L'Ovaire du côté droit. L. Le fufpcnfoir ou le ligament de V Ovaire droite M. M. Les deux avancemens latéraux de la tumeur. , N. Le cordon de nerfs & de vaifeaux qui empêchaient la dilatation de la tumeur en cet endroit. La II Fig. fait voir la tumeur découverte , & coupée au milieu. A A A A. La fubfîance de la tumeur découverte , oh l'on voit les petits globules , e}uefai obfrveT^avec le ?nicrofcôpe , a'vec mie infinité de filament vafct'.leux. BBBB. La matrice développée , & renverfée ftf les cotez.. C C C C. Incifon cruciale faite au milieu de la tumeur. D D p D D D. Les vaifeaux fanguins qui pafcnt deffous & a travtrS U matrice développée , & qui entrent dans l'intérieur de la maffe, E E. Le ligament rond renverfé, F F. L'orifice interne de U matrice , & le Vagira tout ouvert. G G G G G. Les finuofitez. , ou les Ventricules Caverneux de.U mafe. H. La te fie del a tumeur coupée au milie». J'ai fait bouillir un lambeau de ccrrc chair pendant un trcs lon^ temps dans un pot de terre , pour voir fi cJlc le ramolliroit , ou fî les fibres tcndineufcs le fcparcroicnt : mais j'ai vu que plus je la fajfois cuire , plus clic devcnoit dure &: compare ; de mtl- mc qu'il m'arriva autrefois en faifant cuire un Pancréas Schir- rcux. Ce lambeau après la cuite s'eft réduit à un volume beau- coup plus petit , parce qu'apparemment l'agitation des particu- les du feu a fait dclcget le peu de parties aqueufcs qui fe font trouvées entre les vcllics glandulcufcs & leurs fibres charnues , qu'elles tenoicnt fcparées comme de petits coins ; S^ après l'cva- poration de ces parties, les iibrcs par leur propre reflbrt s'cftanc approchées , tout le lambeau a du par confcqucnt devenir plus petit & plus folide, fans compter que les particules ignées s'cltanc tngagécs- entre les fibres & les glandes , ont rendu la tiffurc de la glande plus compare après I4 cuite. Quoi que je fuppofeque les particules ignées font engagées dans cette malfe , elle ne doit pas avoir le mefme volume que quand les particules aqueu- fcs y eftoient logées , parce que les particules ignées font beau- coup plus petites que les aqueufcs, puis qu'elles entrent par les porcs d'un pot de cuivre où l'eau ne trouve aucun paflage. Enfuite j'ai obfervé avec diffcrens microfcopes , que cette marte cftoit parfemée d'une infinité de petis globules qui eftoienc en certains endroits ovales , &: en d'autres , tout à fait ronds. 3'cn voyois en certains endroits pluficurs enfcmble comme des monticules cntaiTcz les uns fur les autres. En d'autres endroits X^s globules eftoicnt diflinéts, &c fcparez d'une diftance confidc- rable ; Se avec le microfcopc j'obfcrvois des fibres fines &: dé- liées comme des filets de foye, qui palfoicnt encte les globules , èc fembîoient les foutenir ; & de temps en temps je voyois ces filets s'cntrecroifer , tantôt à angles dtoits , tantôt à angles o- bliques , & faire comme un corps rericulaire. Toutes ces ob- fcrvarions démontrent alfcz la tifîure glanduleufe de notre maflc. Elles me paroilfent mcfme conformes à l'idée que nous donne le fameux Malpighi de la flruclure des glandes dans fa dernière let- tre à la Société Royale de Londres, dans laquelle il prétend que Jes glandes font compofécs de petites vclTies minces , qui font logées dans les intervalles que laiifenc quantité de fibres char- nues , qui , fclon lui , forment un refcau admirable dans le corps delà de la glande. Car qu'edoienc ces cordons tendineux qui lioicnt les molécules de cccce louppc , que les fibres charnues groiîles & endurcies en tendon ? Que font ces globules que les petites vefiîes tuméfiées ? Qu'eftoicnt ces monticules globuleux qu'un tas de veilles jomtes enfemblc ? Q^'eftoicnt ces diricrentcs fi- gures des particules fenfiblcs qui compofoient les molécules, que les vedlcs glanduleufes avec leurs loges charnues tuméfiées en différent fcns , fclon que les filets charnus qui les cnviron- noicnt cedoient plus d'un côté que d'un autre ? Je voyois fcnfi- blement fans microfcope plufieurs de ces veflîes ; il forroic des unes par incifion une matière très gluante & comme mielleufe, femblable a. celle d'un Meltcem •■, & des autres il n'en fortoic rien , à caufe que la matière cffoit trop endurcie. Il n'y a perfonne, pourvu qu'il entende tant foir peu !a Mé- canique du corps humain, qui ne comprenne qu'une frayeur fou- daine , un coup au ventre , &: une fuppreffion des mois , font des caufes fuffifanres pour faire une obftrudion dans la matrice , & pour produire cette tumeur : on fçait qu'enfuiie de certaines paffions de l'amc l'économie des humcuts change , & l'cxperien- ce fait voir que la Peur diminue le mouvement des efprits ani- maux & de tout le corps , puifque dans une frayeur extraordi- naire le corps tombe à terre fans pouvoir fe foulever i on fçaic que la peur rallentit la circulation du fang , ce qui donne le loi- fir & l'occafion à fcs principes , ic principalement à (ts parties fîbreufes , de fe joindre &: de faire une maffe plus épaifle ; ce qui a cftéla caufe de la fuppreilîon des mois de cette femme : on voit en mefmc temps que ce fang épais ayant de la difficulté à couler par les tuyaux capillaires des veflîes glanduleufes de la matrice &: de leurs fibres charnues , s'y arrêtera & comprimera \ts veines & les conduits excrétoires des glandes , pendant que fa fcrofîté furnagcantc palTe dans la cavité de la vefîîe , d'où ne pouvant fortir par les conduits excrétoires déjà comprimez , il doit faire gonfler la glande &: la ramollir en mefme temps : ainfî la veffie cllant ramollie & recevant intérieurement de la matiè- re , elle groflit extrêmement , & toutes les glandes de la matri- ce grofîîfTant de mefme, doivent de ncccfîité, au moins dans la fuite de quelques années , faire une maffe énorme; mefme il cfl 169 3, Hhh 7X6 croyable que ccfu>jgtts:iuroïz encore groffi julqu'à faire à peu prcs un volume égal à un cnfanc de vingt- quatre ans , s'il avoir eu un cfpace libre pour s'cttndre , & (i la matrice , le diaphrag- me, l'os pubis , & les muCcIcs de l'abdomen n'cuircnc cfté au- tant de rcniparrs qui s'oppofoient à Ton aggrandincment. L:i contufioii qu'a fi't le coup de pied, n'a pas peu contribué , en prefTant les vailTi-aux , & en atfaillàiit les veflîcs des glandes , à incercfpter le palîàge du fan" , & Ton retour par la veine. Aii.fi la veine ne rappottant pas ce que l'anere fournit, les fibres charnues îles glandes s'en imbibent, & les vedîes s'en farcillent -, & la partie doit de necelliic fc tuméfier. Cependant cette ferofité qu'on peut fuppofer lymphatique, qui remplit la veflTie , t:e fait pas des hy- datides ou der, bourfes d'eau , parce que ce qu'il y a de plus volatil & de plia •aqueux dans cette humeur , s'evaport? ; & la partie la plus tartareufe refte , & remplit entièrement la cavité des veflies. C'eft ce qui a fait la dureté & la folidité delà malle. Plufieurs de l'aifcmb'ée ne ponvoient concevoir comment les glandes de rUterus qui font cxttémement petites , pouvoicnt grodir , & faire un volu- me fi cnoune. Véritablement c'tll une chofe furprtninte : mais on n'aura pas de peine à le comprendre quand on fera rtflrxion liir certaines excrtlcen- ces qui s'engendrent dans ufitrc corps , qiù ^or.t iin^-crcfpiib'es dans leur naiC- fance , & grofTiniiU dans lafi'iic eMiêmcn.cnt & fii ptu de ten ps. Ne voit- on pas que trois ou quatre petites glandes cor.globées delà membrane Pitui- taire , erodîllant & fe joignant cnfenblc, forment ce Sarcome qu'on appelle Polype , qui s'étend h fort dans l'cfpace décrois ou de quatre ans , qu'il fort quelquefois par le nez , de cend dans le Lncuti.ir , & ton bant fur le I.armx, bouche le p;ifCige de la lefpiranon î Nv.' !çait- on pas qu'un Pancréas . qu'un Mefentcre , que 1rs Parotides grofliircnt prodigicuCement en peu de temp' ■} que les Goitres à force de groflir , ton bent lut la poitrine , & fuflôquent le malade en comprimant trop la Trachée artère î N e voir- on pas qu'une petite vefîîe , que nous appelions Otuf, qui n'clt en quelque manière qu'un atome dans Çx première formation , vient à faire un E!eph::nt qui pefe plufîeui^ quintaux î Après qu'on aura fait rt flexion que ces rymptomes & ces phéno- inenes , fe font en peu d'années, on fe perfuadera facilement que toutes les petites glandes conglobc.s delà matrice qui font en très grande quantité, croiflant pendant \int-cinq ans , pounoiit a la fin foimtr une malle prodi- gieufe. Les mefiucs perfonnes dilbient que fi c'efloit les glandes de la matrice tu- méfiées , on auroit pu conduire les nerfs dans la lublla- ce . & dans le milieu de la tumeur , auili-bien que les Viilléaux l'angu ns. Mais ceux qi'i enten- dent l'Anatomie , Içavcnt que les nt ifs de la matrice le répandei t tous dans fes fibres charnues pour leur donner du mouvement. Je ne nie pourtant pas qu'il n'y ait quelques petits filets i:npercept'b'.cs qui vont aux glandes po ir tenir les Sphincters de leurs orifices dans un T'a»»; requis, pour ne rien laiilèr 2i7 paiTer par Ifurs por« quf ce qui y doit palTf r naturellement ; d'ailienrs poaf donnT un pet'C mouve-renr Svflrilliqiie aux fibres charnues des glandes ront exprimer le fan^ d'enrre les veilles , 6< pour , en comprunanf les, v( iïiis nied mes , en faire fortir la m.uiere qu'elles filtrent. Ce font ces filamens nerveux que j'ai conduits fur la larface extérieure de cette louppe. D'au'tcs ne comprenoient pas comment cette chair glandulcufe avoit pu parvenir à cette grolleur fins une influence des clprits animaux par le tnvau des nerfs. Mais qu'on falfr réflexion qu'un faux- germe ne lailFe pas de croî- tre , quoi qu'il ne reçoive point d'efprics animaux ni de lui- mefme, puis qu'il n'a pas de cerveau , ni de la matrice , puis qu'il ne lui efl: pas intimemerit uni. Ainfi ce n'eft pas une necefiîté que les elprits aniuiaux dilatent les pores des fibres , pour que la matière nourricière s'y paii?- plus ficilement inlînner : il fuffitque lefang lui- mefme abonde en parties volatiles ^; Niiro-aerlcrnes, capables de dilater les porcs , & dj donner entrée aux parties fulfureufes & balfamiques du fang , qui eftant une fois introduites dans 1rs pores , perdent d'abord leur mouvement ^' par ce moyen elles font une fibre dure ; comme l'eau quand elle petd fon mouvement, de fluide devient un corps fort folide qu'on appelle Glace ; car pour nourrir il ne faut autre choie qn'ajufler certai- nes parties auprès des antres -, & félon que les pores où la matière s'introduit feront plus ou moins flexibles ou intbrai. labiés , la liqueur nourricière fera plus ou moins en repos , & par confequcnt fera des filets ic des titfures plus ou moins folides ; connn)e les porcs des os , des cartilages , des tendons , des chairs , &c. le prouvent évidemment. Qu Iques-uns trouvoient étrange que cette mallè après tant d'années ne full pas corrompue ni gangrenée. Mais qu'on falTè rtfiexion qu'une partie ne fc corrompt que quand elle n'cft pas arrofée piar le fang artériel , & que la gangrené n'y arrive que quand le fang y cronpit , & que fes principes faiins s'accro.-hertenftmb'e , & font des n-.olecules -acides- falcis-c.n-.ftisjiies , ca- pables de décliirer la tifiure de la partie. Or dans ce cas k fang de la femme circuloit librement dans cette malTe ; ce qui l'empêchoit de fe refoudre en pourriture : de (orte que les parties propres du corps de cette femme eftoient aufiî fujertes à la corruption & à la gangrené , que cette Excrefcence. Par ce te defcription on voit bien qu'il eftoit impodible que cette femme fe dé.hargeaft de cette Excrefcence , puis qu'elle eftoit contint c à la martice fans compter que les gros vaifleaux qui y entroiert eftoicnt autant de cordes fiftulf ufes qui 1 artachoient fortement à la matrice ; de forte qu'il eftoit auffi facile qu'elle fe dtfifl: de fa propre matiite que de ce Fiincrns. D'ailleurs il auroit efté bien dangereux &: fort téméraire d'en tcnttT l'extirpation par aucun inftrument trenchant qu'on ei ft. \oulu introduire par le Vagina , par- ce qu'il s'en feroit fuivi une hémorragie que ni des eaux ftip-iques , ni des tampons , ni des poudres aftringentes , ni des ligatures , n'auroient pu airêter en aucune manière. On a efté en peine de f^avoitla véritable caufe de la mort de cette fem.me n'ayant eii ni fievic , ni rttention d'uiine, ni vomiircmcnt, ni tranfoort au cfrvfaii , ni aucun autre fymptome dangereux ajiparent ; mais on ne doit pas cftre furptis que la leule comprcflîon de la mafle !ur la veine cave , ait efté ca- pable de la faire mourir en interceptant l'afcenfion du fang vers le cœur. Si on demande donc pourquoy elle ne mourut pas plutôt , c'eft parce q.ie la tu- meur n'eftoit pas encore alTvîz lourde ny aflèz pelante , puis qu'elle grolUlIoit infenfihlement de jou: en jour : mais enfin eftant parvenue à ce point de grandeur qu'elle ne pouvoir plus dilater les mulcles de l'AbJoTen , elle commença à pefer davantage fur la veine cave , non fenlement par fa propre pefanteur , mais encore par le relïbrt des mufcles de l' Abd wen qui h prelfoit contre les vertèbres. Outre cela le fang contenoii julqu'ici des principes vo- latils qui lui donnoient un mouvement de fermentation & de circulation fuf- fifant pour foulever la tumeur , & pour continuer fa route vers le cceur : mais ces Sels voUtils venant à eftre trop difîbus par un (âng fereux, qui eft trop or- dinaire aux gens avancées en âge , ils fe trouvoient enfin trop éloignez les uns des autres pour fermenter enfemble , & pour donner alTez de vivacité au fanç^ pour fe faire padage delTous un fi grand fardeau, Ainfi la tumeur groffilTànt & prelTant exttcaiement d'un coté , & le mouvement du fang di- minuant de l'autre , les veines dévoient de neceflîté s'afKiiirer -, de forte que toutes les colomnes du fang tant artériel que vénal , qui fe trouvoient entre le point de la compreffion & l'extrémité des deux pieds , qui font prés de la moitié , ou au moins le tiers de tout le fang du corps , ne pouvant pas mon- ter , il ne le trouva pas afTez de fang pour dilater les ventricules du caur , qui par confequent ceira de battre ; comme il arrive dans \' Hydrocéphale , qui au commencement ne prcîfe pas fi fort qu'il ne laifTe toujours un chemin libre au fang & aux efprits animaux à travers la fubftance corticale & médullaire du cerveau. Mais enfin quand les eaux augmentent fi fort , qu'elles ne peu- vent plus dilater ni les membranes du cerveau , ni éloigner les os du crâne, elles compriment fi fort la fubftance du ceiveau , qu'elles caufent , en inter- ceptant le cours des efprits animaux , une apoplexie qui eft fuivie infailhble- j?ienc de la mort. A PARIS, Chez Jean C u s s o n , luë faint Jaques , à l'Image de faint Jean Bapcifte. yivec Privilège du Roi. XIX. î 1 7 LE JOURNAL DES se AVANS Du LuNDY 18. Mai M. D C. XCIII. ANTIQUITAS ECCLESI^ , DISSERT ATIONIBUS, 7nonnncntis , ac nous illa/îrata. Operû (^ ftuiio Emunuelii à Scheljîrate , S. T. D. Btbliothcùe yaticame Prafc[H , BafUca Principis Âpo/iolorum de urhe Canonici , é'C. Tomus prtmus , contincns opus chronologicum à Cafaris imperio ufcjne adjufiinia- niobitu^ , <^c. In folio. Rom.c. ic fc crcuve à Paîis chez Jean Ani/lbn. 1692,. IL y a environ quinze ans que M. Schelflrate, fuivant les tra. ces d'Onufrius Panvinius , de Baronius , &: d'autres célè- bres Ecrivains , fit imprimer à Anvers un ouvrage , où par quantité de pièces nouvellement tirées des ténèbres des Bi- blioteques , il entreprit d'éclaircir la doélrine &: la difciplinc de l'EgUfe Catolique. Ayant depuis fait de longues & de profondes méditations fur fon travail, il trouva de riches matériaux pour i'accroitre , & pour en former un corps plus étendu & plus folide que le premier. Il fe propola pour éviter la confufion qui règne tou- jours parmi les plus belles chofes quand elles font mal arran- gées j de le dillnbuer en quatre parties. La première doit contenir les Canons des Conciles , & les décrets des Papes. 1691. I i i 2iS L E J O U RN A L La féconde , les peines canoniques , &: les ccrcmonies des or- dinations. La troinéme , les adcs des Martyrs , & les ouvra- ges des Pcres ; &: la quatrième , les points les plus difficiles de l'hilloire faintc. Mais parce que ce vafte defTcin renferme tout ce qui eft arrivé dans le Chriftianifme depuis p!uficurs ficelés , M. Schelftrate a appréhendé de s'égarer quelquefois, à moins qu'il ne fuivift la lumière que la cronologic & la géo- graphie prefcnrcnt pour reconnoitre diftindement les temps & les lieux. Il s'eft donc alTiirc de ce fccours , &c a refolu de mettre deux traitez à la tcftc de tout l'ouvrage. Le premier décrira la fuite des temps j &: le fécond, l'alfiete des lieux , des royaumes , des provinces , & des dioccfes où les Evêchc:i & les autres dignitcx ecclcfialliques ont elle inftituées. Il n'y a dans le volume qui paroit maintenant que le pre- mier de ces traitez, lequel eft divifé en trois dillertatwns. L'une rcprefcnte la fuite des années de la vie de J. C. Mr. Scheiftrace met fa nailfancc fiX ans avant l'Ere vulgaire , en la 39. année du rcgne d'Augufle , fous le Confulat de Balbus &c d'Antiftius. 11 tient qu'il fur baptifé à l'âge de trente ans ; que depuis fon haprême il piê^ha trois ans & trois mois ,- & mourut en la X9. année de l'hre vulgaire , fous le Confulat des deux Geminus. L'autre dillertation comprend la cronologie des Papes, de- puis la première année de la vie de J. C. jufqu'à la dernière de J'Empire de Juftinien ; & parce que le commencement dti Pontihcat des premiers Papes eft incertain , &: que la durée mefme n'en eft pas trop afturée, M. Schelftrate pour en fixer quelque chofc , a attaché leur Pontihcat ou aux Coiifulats, ou aux années des Empereurs fous Itfquels ils ont vécu , & a principalement gardé cette merode depuis faint Pierre jufqu'à Jean III. c'cftà dire jufqu'au temps où finiilent les Faftes Con- fulaircs. La dernière differtation eft far les anciens catalogues , def- qucls le livre Pontifical, vulgairement attribué à Anaftafe le Bibliotecairc , a efté compilé. M. Schclftrate , après avoir fait un long dénombrement de ces catalogues , entre dans i'€xaraen du livre Pontifical , & remarque les cortedions t^ui DES se A VANS. ai, y ont cfté faites par deux fçavans de ce fieclc , Annibal Fa- broc , &: Lucas HoUlenius, Il propofe enfuite Ton fentiment - touchant l'auteur de ce livre , réfute ceux qui l'attribuent au Pape Damafe , & déclare qu'il croit que la première partis depuis faint Pierre jufqu'à Grégoire Ili. eft d'un auteur qui vivoit au temps de ce Pape ; &: que la féconde eft de diffe- rens auteurs , comme il le juftifie par la différence de leur ftiîe. Il infère après cela le livre Pontifical corrigé par Holflenius, & y joint fes propres notes. A la fin du volume il a mis une appendice , qui renferme d'anciens monumcns propres à illu- flrer l'hilloire de ces premiers temps. Les uns n'avoient ja- mais paru , comme les Fragmens d'Hippolite de Thebcs , & quelques Lroniques. D'autres avoient déjà cflé imprimez , comme les Faftcs d Idace , & la Cronique de Cafliodore. Mais ils ont elle revus depuis , fi bien qu'Us font aujourd'hui plus correds qu'ils n'avoient jamais efté. Les Fafles Confu- laires compofbz par un Anonimc qui vivoic fous l'Empereur Confiance, & publiez par le P. Noris dans fon livre des Epo- ques des Siromacedomens , doivent élire confiderez comme le plus excellent de ces ouvrages. Il y a aufll piufieurs médailles , comme celle de Herode An- tipas , & quelques-unes des Gouverneurs de Siric , avec l'ex- plication de leurs figures &: de leurs époques. LES PRINCiPhS ET LES REGLES DE LA VIE Chrétienne, Traité compofe en Latin far M. le Cardinal Bona^ ^ traduit en François par M, Coufm , Prefident en la Cour dei '^ Monnayes. Quatrième édition. In iz. à Paris chez Jeremic Boulllerot , rue faint Jaques. 1693. IL y a long temps que ce livre a vu le jour, bien qu'il ne pa- roiffe qu'aujourd'hui dans le journal. Le P. Dom Luc d'A- cheri Religieux Bcnediûin de la Congrégation de faint Maur, en ayant reçu en 1674. un exemplaire Latin que M. le Car- dinal Bona fon ami particulier , lui avoit envoyé de Rome, le fit réimprimer à Paris. Dans le cours de l'imprefTion il m'ea îio LETOURNAL iTiontra les premières feuilles , &c me propofa de les traduire en François. L'engagement où j'cftois alors de publier ma traduction des anciens Hifloricns de l'Eglife , qui n'crtoic que trop fulfifante pour m'occiipcr , auroit pu rac fcrvird'excufe. Il ne m'empêcha pas néanmoins de lire lesfeujUes que le P. Dom Luc m'avoit mifes encre les mains j & je ne les eus pas (î-tôt lues que je commençai à les traduire. Ce petit travail a efté fi bien reçu , qu'en voici la quatrième édition. Ce que ' j'ai dit dans l'avertillcment , de l'utihré qui s'en peut tirer, du mérite de M. le Cardinal Bona , & de l'excellence de ("es au- tres ouvrages , me difpenfc d'en entretenir plus au long Iç Public. RECUEIL DES TRAITEZ DE PAIX, DE TREVE, I £le Neutralité , de Confédération , d^ Alliance , (^ de Commerce . faiti par les Roii de France avec tous les Princei ^ Potentats de i' Europe , ^ antres depuis prés de trois fiecles : enfix ternes. Af- fcmblé , mis en ordre ^ imprimé par Iredenc Léonard. In jf. à Pans chez le mefme , rue faint Jaques , 1693. JE propofaile deflein de ce Recueil dans le premier journal de l'année dernière , &: en fis connoitre 1 importance. Il de- voir alors élire renferm.é dans quarre tomes. Par l'événe- ment il s'eft étendu jufques à fix , & s'étendra encore davan- tage au cas que les traitez qui ont efté omis, puilfeiit étire re- couvrez. Le premier tome contient les traitez du quinzième fieclcj Je fécond ceux du feiziéme , le troifiéme ceux du ficelé cou- lant avec les Princes d'Allemagne , le quatrième ceux du inefme dcclc avec l'Italie , 1 Efpagne , & le Portugal , & ceux qui ont efté faits avec les Suifles , & les Grifons depuis l'an 1444. jufqu'à ptefent. Le cinquième contient les traitez faits dans ce fiecle-ci a- vec l'Angleterre , la Hollande , le Dannemarc , la Suéde , la Pologne , &c avec d'autres Eftats d'Afie , d'Afrique , &: d'A- mérique. Le fixiéme contient des déclarations de guerre, &: des trai- tez DES SCAVANS. 'm tcz d'alliance , dcs_ Arrefls de la chambre royale Je Mers , du Parlement de Befançon , & du Confeil fouverain d'Alface. LA PHySIQTŒ OCCULTE, OU TRAITE' DE LA ^ Bitiuette Divinatoire^ pur M. de Vallewont Ptètre, *^ Dociiur ^ en ThcoUgie. In iz. à Pans chez Jean Aniflî^n , 1655. TOut ce qui a edé dit jufqu'ici de la Baguette Divinatoi- re , n'elt qu'un échancillon de ce M. de Vailemont nous en donne aujourd'hui. II traite à fond cette matière , X'd'u- i\c manière fort accommodée à la portée de tout le monde. On trouvera que ce fujet , quoi qu'obrcur de !ui mefme , ne laiiïepas d'efire égayé par un grand nombre d'expériences rres curieufes , &: foutcnu du témoignage de plus de cent auteurs anciens & modernes, M. de Vallcmont montre dans la préface , que MefTicurs de l'Académie royale d'Angleterre avoient dell'cm de traiter de la Baguette Divinatoire par rapport aux utilitcz qu'on en peut tirer pour la recherche des mecaux,& des minières. C'clt en effet ce que l'on peut voir dans les Actes Philosophiques du mois de Novembre 1666. pag. 344. où l'on trouve l'article fuivant , qui elt le dix-huitiéiuc d'entre cent articles , que M. Boyle avoic drclfez pourtour ce qui concerne les miniè- res : Vtrum virgula divinutoria adhibe.itur ad inve(î'n^^Hionem ve~ narum piopojîturtim fodinarum : & fi fie , quo id fîat Jucce(Ju 1 L'auteur s'attache d'abord à la queftion du fait , &: montre par de fortes raifons , qu'il n'y a pas lieu de douter de ce qui eft contenu dans les relations venues de Lion , au (ujet de ce que Jaques Aimar a fait avec fa baguette pour la découverte du meurtrier fugitif. Après tout le mouvement de la baguet- te fur les eaux &: fur les minières , eft une chofe fi reconnue depuis long- temps en mille endroits de l'Europe , que quand le fait de Lion ne feroit pas aufll confiant qu'il l'cli en eftet , Louvrage de M. de Vallcmont fc foutiendroic toujours , puis qu'il a eu principalement en vue rutihcé de la baguette, pour découvrir les métaux & les eaux foutcrraines j & que s'il s'cd appliqué à expliquer philiqucmçnt ce que lePayfan a fait à 1633. Kkk iii LE JOURNAL Lion , c'eft qu'il eft certain que ce n'cft pas une chofc nou- velle qu'on puide fuivre un homnne à la pille par les feuls é- couicmens de la inaciere fubtile qui fe tranfpirc de fon corps. Il a dit ià-deirus cane de belles chofes , & qui ont cftc fi goû- tées des fçavans, qu'il vaut mieux y renvoyer les curieux, que d'en donner un extrait qui ne peut pas les rcprefentcr dans la jude étendue que l'auteur leur a donnée. Il attribue le mcdne mouvement , & l'inclinaifon de la ba- guette aux vapeurs , aux fumées , & à la maticrc fubtile qui s'exhalent des fources d'eau , des minières , & du corps des criminels fugitifs. Il explique comment ces petis corps pu- rent s'infinuer dans les pores de Jaques Aimar , Se dans ceux de la baguette. Il prouve mefme par quantité d'expé- riences , que cesagens invifibles ont allez de force pour cau- fcr ce mouvement fi violent qui (e remarque dans la baguet- te quand elle s'incline ; &c dans toutes ces explications il pré- fère la Philofophie Corpufculaireà routes les autres, tant par- ce qu'elle eft la plus ancienne , qu à caule qu'elle eft plus pro- pre à expliquer les merveilles de la nature. Il pofe pour une maxime conftante dans la Philofophie cor- pufculaire , que la nature fuit toujours les melmcs loix da mouvement ; d'où il conclut que le mouvement Se 1 inclinai- (bn de la baguette , ell la mefme'chofe que le mouvement Sô ]'inclinai(bn d'une verge de ter aimantée. Cette comparaifon cfl fort belle & fort jufte par les trois raifons qu'il en donne r & qui font voir le mei'mc mecanifme de la nature , & une par- faite analogie dans ces deux mouvemcns. Car en premier lieu , quand l'homme à la baguette eft fut une fource d'eau , ou fur une minière , la baguette qui cftoic , parallèle à l'horifon, doit tourner la pointe en bas , par la tneC- me raifon que l'eguilic de bouifole s'incline vers l'un ou l'au- tre pôle , en de- ça ou en de-fà de l'Equateur. En fécond heu , les corpufcules qui s'elevent des fources d'eau & des minières , imprègnent la baguette , eftant attirez par ceux que celui qui la tient entre fes mains lui a commu- niquez en la touchant , de la mefme manière qu'une eguille de boulTolc bien aimantée fe lailic diriger & inchner par U DES SCAVANS. îsj ftiâriere magnétique qui circule par les pôles aatour de la terre. hn troifiémc lieu , comme il faut que la verge de fer foit aimantée afin d'eftre fcnfible , pour ainfi dire , à l'adion du tourbillon de la matière magnétique , il faut pareillement que la baguette foit touchée par une main imprégnée des cor* pufcules qui s'exhalent des iburces d'eau , &c des minierei. Car enfin cette mam ouvre les pores de la baguerte , pouc donner pallage aux vapeurs aqucufes & aux exhaLifons mé- talliques. C'ert de là que M. de Vallemont tire la raifbn pourquoi la baguette ne tourne pas entre les mains de tout le monde. Il dit que la contcxture des fibres cfl: telle dans beaucoup de gens , qu'elle ne laiifc pas des pores proportionnez à la figure des corpufcules qui s'clevent des rameaux d'eau , & des mi- nières ; ce qui fait que ces pcrfonncs là ne font nullement fenfibles ùu mouvement & à 1 adion de ces petis corps. Il fc peut faire , félon M. de Vallemont , qu'elle ne tour- nera pas quelquefois entre les mains de la mefme pcrfbnnc, qui l'a employée fouvcnt avec fuccés , puis qu'il peut arriver qu'il fe dérangera quelque chofe dans fa conOuution , &: que fon fang fermentera de telle forte , qu'il fera tranfpircr une matière plus roide &: plus groffiere , qui partant des mains dans les interfticcs du coudrier , y fera rcbrouffer chemin aux vapeurs &: aux exhalaifons qui fortent des fources d'eau , des minières , & du corps des criminels fugitifs. Audi M. de Vallemont fe contentant de fçavoir certaine- ment que la baguette tourne fur les rameaux d'eau , fur les minières , &c furies trefors cachez , ôc ayant reconnu par lé lontg examen de tout ce qu'a fait &c dit Jaques Aimar , qu'ii a , comme plufienrs autres perfonncs , la faculté de Ce fervit de la baguette pour découvrir ces chofes , il ne s'cft point rais en peine des bévues dans lefquelles ce Payfan peut eftre tom- bé , puis qu elles ne font rien contre fon fille me , qui fuppa- fe mefme qu'on ne peut pas toujours avoir la fenfibilité pro* prc a. cette opération ; comme il arrive fort naturellement qu'on n'a pas toujours affez d'appctit pour foupcr : &i. il eii 4î^ LE JOURNAL fans doute bien furprenant que des gens qui Ce piquent d'eflre Phillcicns, alïcdeucdene point reconnoitrc une chofe fi fen- iible. Il fouhaiteroit que l'on gardafi: quelque vrai- femblance dans ce qu'on public contre jaques Aiaur , afin de convaincre le Public , qu'il eft un tourbe , s'il l'eft elfeclivcment. Car on vient de voir dans le Mercure du mois d'Avril deux lettres où i'on dit des chofes qui ne font gueres propres à perfuader le Public. L'une marque au fujet des flambeaux volez, qu'on croit qu /^imuT lui-wefmc avait renvoyé l'argent , ^ifin d'uv-nr lui' mefme de la réputation , ^ de le rc'Z^igner au centuple. Il feroit bien facile de fçavoir fi c'eft Aimar qui a donné l'aigcnt. Il n'y a qu'à s'aJrcder à M. le Curé de fainr Su'pice qui l'a rap- porté , &: qui ne fera jamais foupçonné de s'entendre avec ja- ques Aimar. • Si l'on demande comment les corpufculcs des meurtriers de Lion ont pu demeurer fiir la rivière &: fijr la mer , où rien ne paroit propre à les tenir attachez ; M. de Vallemont ré- pond que les corpufcules qui nagent dans l'air , n'ont pas be- foin d'un fujct d'inhérence pour les arrêter , afin que le venc ne les emporte pas , puis que c'eit par les loix inviolables de la nature qu'ils font ftagnans dans la bafle région de l'air , & qu'ils ne peuvent s'clever ni s'abaiiTer , tant qu'ils ne feronc pas p!us légers ni plus pefans en pareil volume , que l'air dans iequel ils roulent. C'eft ce qui eft très certain. Si l'on demande encore , d'où vient que l'aimant agit éga- lement fur le l'cr , qui que ce foit qui le tienne , & que les (:orpufi:u!cs n'agillcnt fiir la baguette que lors qu'elle eft er.trc les mains de certaines gens , M. de Vallemont répond fins peine, que l'aimant eft la caufe totale de ion adion l'ur le fcr, &: que le mouvement de la baguette eft produit en partie par les corpufrules , &C en partie par la difpofition de celui qui la tient , &: qui la doit imprégner des mefmes corpufcules donc il eft imprégné lui mefme ; ce qui prouve évidemment que la baguette n'eft que l'organe, le véhicule , Si rinftrunictic par Icfquels on s'allurc de la prefence des corpufcules j com- me DES SCAVANS. jij ine on s'afTiuc par le fecours du microfcope de la prefencc des iiifcdes , donc on n'auroic jamais eu connoidancc fans ce merveilleux inftrumenc Ainfi tout ce que la baguette con- tribue , c'eft qu'elle ell capable de fe laiiler pénétrer &: im- prégner par la matière que les mains exhalent , & d'attirer a foi par analogie ou par convenance , les corpufcules des va- peurs &c des exhalaifons qui s'y portent , comme fait la flam- me d'une bougie allumée au lumignon fumant d'une bougie nouvellement éteinte. M. de Vallemont fc plaint qu'il y a eu dans l'Allemagne , &: pcut-cftrc ailleurs , des gens qui ont corrompu l'ufage fi na- turel de la baguette , en l'employant à trop de chofcs , & en y ajoutant des cérémonies criminelles. Ce qui fait que des gens qui n'ont pas aflez diftingué l'ufage légitime d'avec le îuperl^itieux , ont condamné abfolumcnt une chofc dont il ne falloit que retrancher l'abus. Et il foutient tout de nou- veau , que le mouvement de la baguette cft très naturel , &c que l'ufage meime qu'il a cnfcigné pour reconnoitrc la ditfe- rcnce des métaux , & la profondeur des fourccs , cft fondé conftamment en bonne Phifiquc. Et il fçait très certaine- ment que ceux qui veulent abufer de la baguette pour la dé- couverte de certaines chofes en particulier parla voye de la direftion de l'intention , font obligez de rechercher des gens & qui la baguette tourne naturellement : après quoi ils leur apprennent le manège de la direction de l'intention , qu'il condamne entièrement. M. de Vallemont avoir fait cette di» ftindlion dans fon ouvrage : mais il a fouhaicc qu'on la mar- quaft ici , pour fcrvir de réponfe à des Ecrivains qui confon- dent ce qui doit cftre foigneufement diftingué. Voila l'idée en gênerai de ce qu'il a dit fur la Baguette Di- vinatoire , & qu'il fonde fur la Phifique , où tout eH problé- matique, 11 n'y a perfonnc qui ne foit obligé de reconnoicre que ce livre contient beaucoup d'érudition , & un grand nom- bre d'expériences qui conviennent parfaitement bien au fujCt. 1693, LU ii6 LE JOURNAL NIC. GURTLERI HISTORIA TEMPLARIORUM , obfervationibui Ecde^aftuii auHa. In S. Amfieloàami. IL y a prés de quarante ans que parut l'hifloire de la Con- damnation des Templiers , compofcc par M Dupuy , & appuyée de preuves d'aucant plus autenciques , qu'il les avoit f rifes dans le trefor des chartrcs , à l'inventaire dcfquclles il avoit employé plufieurs années avec une applicaiion infaci- gablc. M. Gurtler vient de nous en donner une autre, q li cmbraflc tout ce qui regarde l'etabliflemcnt & la fupp cjfijn de cet Ordre. Il y convient avec M. Dupuy , de plulieurs circon- fîanccs , & fur tout de l'orgueil infupportable qui avoit cfté infpiré aux Templiers par l'excès de leurs richcncs. Il ne peut pourtant fc perfuader qu'ils fufTcnt tous coupables des crimes dont ils eftoient accufez , ri s'aflurerque les deux Puiflànces qui confpirerent à leur ruine , n'y fulient poufltes par aucun motif d'u-itcreft ni de vengeance. Les digreffions qu'il fait fur l'inflitation des Chanoines, fur les va'ux des Religieux , fur la différence de leurs habits ^ fur raccroiflcmcnt prodigieux de quelques Socierez qui ni.. voient eu que de foibles commencemcns , fur les Vêpres de Sicile , & fur le maflacre de la faint Barthclemi , n'ont poinc de rapport necefl'aire à fon fujet , & ne laifTcnt pas néanmoins de donner beaucoup de plaifir. MENAGIANA. In 12. A PARIS CHEZ FLORENTIN & Pierre de Laulne. 1693. LE caraôerc particulier de M. Ménage cftoit de parier beaucoup , &: d'aimer à débiter ce qu'il avoit appris dans- les livres , ou dans la convcrfation. Quelques-uns des plus artîdus aux affemblées qu'il tenoit chez lui, ont recueilli ce qu'ils ont trouvé le plus à leur goijt, & en ontcompofe ce vo- lume fur le modèle de ceux qui parurent il y a quelques an« DES SCAVANS. 117 ifiées , (bus les noms de Scaligerana , de Fnronîana , &: de "thuane^t. Les bons mots qu'ils y ont mis ne font pas tous de M. Mé- nage. Piudcurs font de M. le Prince de Gui mené , & plu- fieurs de M- Bautru. Les traits d'érudition font en petit nom- bre , en compnraifon de ce qu'il en eft forci de la bouche de M. Ménage. Ce qui a eflé omis pourra entrer dans un fécond volume , fi ceux qui les fçavent veulent les communiquer au Libraire. Entre ceux qui paroiflent ici , il y en a qui ont eftc l'mpri- mez autrement qu'ils n'avoient efté prononcez. C'eft ainfi que les citations , les contes , & mefme les nouvelles s'altè- rent fôuvcnt en pafTanc par les bouches qui les répètent , & par les mains qui les copient. Je ne parle point de la faute qui efl: à la première page , & que j'apprens devoir cftre bien- tôt corrigée. Outre celle-là il y ena plufieurs autres qui ne peuvent cftre i attribuées à M. Ménage , & qui ne viennent que de (es amis, ^ qui n'avoient pas bien pris fa penféc , ou qui ne l'avoient pas bien retenue. Il n'avoit garde de dire que M. de Racan avoir fait quatre vers qu'il avoir depuis trouvez en propres termes dans Mathieu Paris ; & il n'auroit pas confondu cctHiUorien >\ng!ois avec Mathieu Hiftoriographe de France. En parlant du différent du P. Vavallcur & du P. Rapin , il lî'avoiE pas dit que ce dernier avoit fait acheter toute l'impref- fion du livre de Efigrammate , pour la fupprinier. Le trai- té de EpiqTtimrr.ate ^ miprimé en 1669. a la relie des trois livres d'Epigrammes du P. V-ivafleur , n'avoit point cfté faïc contre le P. Rapin , & ne fut point fupprimé à fa folncitation. Celui qu. fut fait contre lui , parut fans le nom du P. Yava^. feur en 1675. fjus le titre de Remarqua fur le i nouvelles lefie- xions touchant U Poétique. C'elt celui-là dont M. Mcnage di- fbic que l'impt cffion avoic elle achetée , & qu'il efioit devenu fort rare. Il 3 pu fc faire honneur d'avoir cfté caufe que M. Blondel ait faic imprimer fon aairé de la Papeffe Jeinne. Il a pu dire guc ce n'eiîoK d'abord qu'un difcours François que l'auteus'- iiî LE JOURNAL ■ lui picca écrit à la main , &: que quand il le lui redemanda , il l'afllira qu'il y vouloïc encore travailler , & le donner au Pu- blic. Ma:s il n'y a point d'apparence qu'il ait dit que M. Blondcl l'ait fait imprimer en Lann : car il ci^ certain que f M. Blondel ne l'a jamais fait imprimer qu'en François , ££ que ce fut M. Courcelle qui le fit imprimer en Latin en 1657. feulement , &: deux ans après la mort de M. Biondcl , & qui y joignit une préface apologétique , pour répondre à ce ous M. Defmarés , Minière de Groninguc , avcit écrit contre Xf, Elondel. Ce que les auteurs du recueil font rapporter à M. Ménage d'Ammien Marceliin , eft contre le fcns de cet auteur. Voici le palfage où il ell parle de l'Empereur julien : Innmr.erui fine piircimonta pecudes macLim : ut a^fhmaretur , fi revertijffit de Par- this , bovti ) im defntuioi : Marci tûiui fimilis Cafarts , in quem hoc accenimus diHum , e'fc. Au lieu de cela on lui fait dirc,^«tf dam tes moindres vu/oires de M^rc ^ntomn il ne pouvait trouver ajfez^de forte de befles pour les facnfices. Comme il sayffcit un jour d'une grande butudle , fes amis lui dirent : Si votif vatnquez^^ roui fommes perdus. Ammicn Marccllin ne dit point que les amis de Marc Antonin lui ayenc jamais parlé de la forte. Il cite ffsulement deux vers Grecs , où des bœufs blancs lui ticnncnc à peu prés ce langage-là. M. Ménage ayant cité un vers d'Horace , que les moindres écoliers fçavent par cœur, ces paroles ont efté mifes en fa pla- ce : Rem pravifam verba invita fequuntur. Le changement t;omt la mefure du vers , & détruit la penféc du Poète. Je ne remarque cç% petites méprifes , qu'afin que ceux qui travailleront à un fécond volume, examinent avec plus de I fbin ce qu'ils imprimeront fous le nom de M. Ménage , & qu'ils n'y laiflent pas glifler des fautes qui , contte leur inten- tion, pourroient lui ellrc attribuées. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à l'Image . D'autres font des déclamations contre Julien ; & enfin d'au- tres font des fermons fur les Milleres , fur les Sacremei s, fur les devoirs de la vie chreiiennne , & contre les Hcre- tiques. Les Remarques jointes à la traduction font cgaiemenc fçavantes & judicieufes. La ledure dé ces di (cours en norre langue peut cltre extrêmement utile à des Curez , &: i d'autres Ecclehaftiqucs de la campagne, qui n'ont paS' les bonnes éditions de laint Grégoire , & qui ne les pou- roient pas lire dans la langue ongina'e. Ses lettres leur font moins ncceifaires , parce qu'elles contiennent moins de do- ctrine que d'elcgance. li- peuvent aulfi fe palier aifémcnc des poëiies , quelque ellimabks qu'elles foicnt pour leur beauté. ESSAY D'UN COMMENTAIRE LITTERAL ET ' hiflortque fur les Prophnei. Parle P. Dom "uul l'eiron ^Re- ligieux de C Abbuye de Prières de V ttrotte Obfervar.ce ^ de l'Or- dre de Citeau < , i^ DoHeur en Théologie de la Faculté de Fa-» ris In 12. à Paris chez Jean Boudot. 1693. LA prophétie a toujours efté regardée non fcuicmcnr com- me la marque la plus éclatante, mais cncoce comme l'ap- pui le plus terme de la Religion. Aulfi Dieu qui a fondé celle- ci dés la création du monde, n'a- t-il jamais manqué de fe fcr- vir de ce puiffant moyen pour la conferver. Avant le déluge il infpira Enoch pour reprimer les déreglemens des premiers hommes , fufcica Noé pour prédire à ceux qui avoient cor- rompu leurs voyes , qu'il inonderoit la terre , appella long- temps depuis Abraham pour l'oppofer au progrés de l'idola- DES SCAVANS. ^ 231 trie , choifit Moïfe pour donner la loi à la pollerité de Jacob , fit naicre Jofiic pour maintenir cette loi , plaça David fur le tronc pour la faire revcrcr à tout le peuple , & envoya fouS les ri'ancs fuivans quantité àc Prophètes pour arrêter le cours de l'iippicté , & principalement pour menacer des e&cs de fa. colee les dix tribus qui avoicnt élevé les veaux d'or, &: a- ba:idonné fon culte. Le torrent de l'idolâtrie Ce forrifia tellement refpace de deux cens ans dans le Royaume d Ifrael , que peu s'en f.dluc qu'il n'cntrainafi: aufli celui de Juda, En ces temps d'aveu- glement & de ténèbres , Se avant qu'elles eulVent couvert toute 11 terre , Dieu voulut bien avertir encore les Juifs de leur devoir , &: envoyer fous le règne d'Olîas , & fous celui de joachan jufqu'à huit hommes remplis de fon efprit , pour reprendre Juda de fes egaremens , &: pour menacer Ifraël de fa ruine entière. Il y a deux chofes fouvent marquées dans leurs prophéties. L'une eft la ruine de la Sinagogue , qui entraine avec foi la reprt>bation des Juifs : l'autre , la fondation de l'Eglife, qui renferme la vocation des Gentils. La Sinagogue ne tomba pas tout d'un coup : elle fut frappée auparavant de plulieurs playes dans le cours de fept ou de huit (iecles. La plupart de ces prophéties font voilées ; &: ceux qui re- cherchent avec le plus d'ardeur les vcritcz qu'elles renfer- ment , n'y trouvent fouvent que des énigmes qu'ils ont peine à expliquer. Une grande partie des evenemcns prédits par les Prophètes , cft demeurée obfcure , & peu cclaircie par les Commentateurs , foit anciens ou modernes. Le fens littéral & hiflonquc n'a pas encore cité aflez dévelopé. Que fi l'on en demande la raifon , il y en a deux. L'une que les Interprètes fe font beaucoup attachez au fens fpiri- tuel & allégorique , qui eft plus facile que celui de la lettre. L'autre , qu'ils n'ont pas affez travaillé pour s'inftruite de ce qui s'cft paflc dans l'Afie au temps ues Prophètes. Le P. Pe- zron s'cfl: pitciculiéremcnt appliqué à cette pénible & labo- ricufe étude , dont s'il n'a pas diflîpé tous les nuages , aufli fc promet-il de n'en avoir pas epaifli les ténèbres. 11 médite un 15 i LE JOURNAL grand ouvrngc fur tous les Proplicccs , & n'en donne main= tenant que rclT.ii. L'ordre qu'il y garde ert tout nouveau, il fuit autant qu'il peut les années aufquelles les Prophcrcs ont annoncé les paroles que Dieu leur mcttoic dans la bouche j &; au heu d'expliquer de fuite chaque chapitre d'un Prophè- te , il explique les ptcdidions faites par ce Prophète dans un certain temps , puis pallc aux prédirions faites dans le incC ine temps par les autres Prophètes, Ainfî commençant par Ozéc , il n'cxphque que les trois premiers chapitres ; puis prend les premicres prédictions de Joël, Si. cnfuite celles d'A- mos faites dans la mcfme année. De là il reprend celles de Joël , palfc au premier chapitre d'Ifaïe , cnfuite à Abdias ; &: après cette longue interruption retourne à Oi'éc^ Sz au fécond chapitre d'Ifaïe , par où il finit cet crtai. Cet ordre naturel des prophéties félon le temps oij elles ont eflé publiées , donnera une merveilleufe lumière , à la fa- veur de laquelle les lecteurs découvriront à quelle occafion les prophètes ont parlé ; en quel eftat eftoicnt alors les affaires des Juifs , & combien de temps s'efl: écoulé entre la publica- tion de chaque prophétie , & fon accompliflemeut. Suivant cet ordre , il eft clair qu'Ofée le plus ancien de tous les Prophètes , ne fut proprement envoyé que pour an- noncer la ruine des dix tribus , & la réprobation du peupi* d'Ifraël. Cette ruine & cette réprobation furent précédées de plu- sieurs playcs prédires par deux autres Prophètes, Joël &c Amos. Pour b:cn entendre ces chofes , il eft neceifaire de fçavoir en quel eftat eftoient les afïaires non feulement du peuple de Dieu , mais auffi celles des nations profanes , lors que ces faints Prophf^tcs commencèrent à exercer leur miniftere. Le P. Pezron obfervc donc qu'Oféc , Joël , &: Amos ne com- mencèrent le leur que fous le règne d'Ozias , ôc fous celui de Jéroboam II. L'un commandoit à deux tribus, & l'autre à dix. Celles-ci avoient formé après la mort de Salomon un ichifme qui n'a pu cftre éteint depuis , fii qui règne encore aujourd'hui entre les Juifs & les Samaritams. Oziàs eitoic alors le plus foible , & le fut plus de la moitié ■ ■ de t DES SCAVANS. 233 de Ton règne , qui dura cinquance-dcux ans. Il avoir cité vaincu par joas , qui après fa vittoire eftoic enrré comme ea triomphe dans Jerufalem , &: en avoic enlevé couces les li- cliefles. Jéroboam Ton fils trouva donc le royaume d'Ifra'él très flo- riffant lors qu'il monta fur le trône : mais Dieu pour réprimer Ton orgueil , lui fuTcita un puilîant ennemi en la perfonne de Eenadad Roi de Damas ou de la bade Sirie , qui prit Tes vil- les , ravagea l'es terres , &: mit au dernier pcril le royaunic de Samarie. A l'égard des nations profanes , il y avoit alors prés d'un fzecle que les Medes tenoient l'Empire de la haute Afie , de- puis la chute de Sardauapale dernier Monarque des AiTîriens. Artidâs eftoit leur quatrième Roi. Cet Empire qui dura 350. ans jufqu'au temps de Cirus , fut fi heureux, qu'il cécruifitune fçconde fois le royaume des /ifliriens avec Ninive, & depuis les Caldéens avec Babilone. Le royaume des Egiptiens fituez fur le Nil , eQoit gouverné par Pharaon Z^c qui refidoit à Tanis. Le nouveau Royaume des Aflîriens relevé par Ninus le Jeune environ vint- quatre ans depuis la chute de Sardanapalc , fubfifloit au mefme temps & cftoïc gouverné par Tilgame. Les Princes qui comman- doient alors à Babilone , rclevoicnt des Medes , & ne devin- rent indépendans que 747. ans avant J. C. Tour ceci n'eft obfervé que pour donner plus de jour aux prédi(Sbions des Prophètes. Ozéc commença les ficnnes vers la dixième année du règne d'O/ias , & vers le milieu de celui de Jéroboam Second , huit cens ans ou environ avant Jefus- Chrift , plus de vint ans avant les Olimpiades , & plus de qua- rante avant la fondation de Rome. 11 continua cette fon- ftion fous quatre Rois de Juda , &: fous fept d'ifraël , l'efpa* ce de quacreviius ans. il a parlé le premier de la ruine de Samarie , &c l'a vu lui-inefmc arriver 7Z0. ans avant la venue du Me (lie. Joël e!l le fécond Prophète dans l'ordre des temps. S. Au- guftin s'efl: trompé après Eufebe quand il a placé (es prophé- ties fous Joatham Roi de Jerufalem -, &:lcs Juifs fe font trom^ 1693. Nnn 134 L E J OURNAL pez encore plus lourclemcnt quand ils les ont rcjertécs iurqu'a Manafl'cs. Il exerça, fon minillere dans Jcrufalcm vers la vniciéme année du règne d'Ozias , environ 790. ans avant J. C. environ quatorze ans avant les Olimpiadcs , &: environ^ trente quatre avant la fondation de Rome. Amos Palleur du Bourg de Thecué de la tribu de Juda , eue ordre d'aller a Bcthel ville de Samarie , où eftoïc un des veaux d'or , &: y alla en eftct fur la fin du règne de Jéroboam , en la vint - troifiéme année de teUii d'Ozias , deux ans avant le tremblement de terre de Jerufalem , 2 87. avant J. C. Ifaïe eftoit de Jerufalem , & dtfcendoit de David par une longue fuite de Rois. Le P. Pezron cl} perfuadé qu'il com- mença à prophetifer en la vint- fcpticme année du rc^ne d'O- zias ; ce qu'il rit l'cfpace de quatre vint dix ans fous quatre , ou fous cinq Rois. Abdias el^ placé par notre iiiteur vers la trcnriéme annér du règne d'Ozias. Les prédictions faites par ces Prophètes dans ces temps là, Se expliquées par le P. Perron dans cet clVai , n'ont rien de plus important pour la Cronologic & pour l'Hiftoire, que les trois irrupcions des Scites fur la Palelhnc. La première arriva en la vint fixiémc année du règne d*0- zias , & environ 789 atis avant J. C. La féconde arriva vcry la dixième année du règne de Jofias , & 63 i . avant J. ChrilK Et la troifiéme n'arriva que fur la fin du règne de Xcrxés , a- prés le retour de la captivité de Babilone , & vers la foixante & quinzième Olimpiadc. Ces trois irrupcions des peuples du Nort font marquées dans pîuficurs Prophètes. La première a efté prédite par Amos, par Joël , «S.: mefme touchée par Ifaie &: par hzechiel L» féconde n'a efté annoncée que par Sophanie , mais d'une ma- nière obfcure , & prelque imperceptible. La troifiéme cft fi clairement exprimée par Joël , par Ezechiel , & par Zacarie, qu'il y a lieu de s étonner du peu d'attention qu'y ont fait les Commentateurs. Pour bien entendre comment ces trois ir- ruptions ont efté en elîcc prédites par ces hommes inipircz dut ciel , il eft necelfaire d'avoir recours à leurs paroles , ôc de pcj DES S C AV ANS. î 3 y fer les explications que le P. Pezron en donne. Ceux qui prendront cette peine feront furpris de voir en quelle éviden- ce il met le texte de l'Ecriture , auquel les autres Iruerpreres r'avoient donné que des fens forcez , &C propres feulement 3 le rendre inintelligible. Dieu qui a menacé les Juifs par l'organe de Ces Prophètes de ce prodigieux débordement des nations Septentrionales fur une grande partie de l'Alîe , 5i des horribles ravages qu'ils •y cauferoient , a exécuté fes menaces dans les temps prcfchts par fa Providence , &c a permis que des Poètes &: des Hiflo- riens profanes en ayent rendu témoignage dans leurs ou- vrages Le P. Pezron nous montre clairement les traces rcflées danî l'ancienne hiitoire de cette première irruption des Scithes. Callinus Poète Elegiaquc , qui florifloit en Afie au temps qu'Amos & Joël prophetifoicnt en Paleftine , fut témoin de Tinondation des Scitcs , & du liegc qu'ils mirent devant la ville de bardes , & en confcrva la mémoire par des vers donc Srrabon rapporte un fragment dans le quatorzième livre de fa Géographie. Paul Orofe allure dans fon hi^oire , que cette irruption des Scites arriva trente ans avant la fondation de Rome i & il pouvoit l'avoir appris de Trogue Pompée , ou de quelque autre hiftonen qui n'ell pas venu julqu'à nous. La féconde irruption des Juifs efl racontée dans le premiet livre d'Hérodote , où il dit que Ciaxarcs Roi des Medes ayant mis le fiege devant Ninive pour vanger la mort de Phaortez fon père tué par les Affînens dans un combat , en fut chafl'é par des Birhares venus des Palus Meotides , Se conduits par Madias leur Roi, 11 c(t vrai que la troiiiéme irruption de ces peuples n'a trou- vé aucune place dans les monumens qui nous relient de l'an- cienne hiftoire , & que le paganifme ne fournit aucune preu- ve de fon accompiilfement. Elle cft pourtant exprimée très clairement dans le 3. chapitre de Joël , dans le 38 & le 39. d'Ezechiel , & dans le 1 4 de Zacarie , après quoi il eft etrars- ge que les Literpretes ne s'en foient pas apperçus. Mais raccompliflcmenc des deux premières qui a fes pfeu- + 15^ LE JOURNAL ves dans l'hiftoire profane , cft un prcjugé de l'accompiifTc- mène de Ja croilicme. Les Scices appeliez Gog de Mjgog dans Ezechicl , fonc les mefmes dans ces trois irruptions. Ce font ces Barbares partis des extrcmitez du Nort pour Ce ré- pandre comme l'auiore , 6c pour faire entendre le bruit de leurs chariots , comme celui d'un feu allumé qui brule les pailles. L'acccmpliffcment de ces prophéties efl un des meilleurs moyens de confondre les Juifs de leurs erreurs , &: de détrui- re les vaines efperanccs dont ils fe flatcnt. l's difent que qjuand le Mclîie qu'ils attendent fera arrivé , il régnera mille ans avec eux dans Jerufalem , & qu'après que ces mille ans feront écoulez , Gog & Magoii^ , c'clî à dire des peuples de Septentrion , viendront leur faire la guerre ; mais que le Meflîe les frapera de toutes les playes exprimées par Joël, par Ezechiel , &: par Zacarie , &: les exterminera , &: avec eux tous les autres ermemis , au nombre defquels i!s mettent les Chrétiens. Il n'y a rien de plus feur pour les détromper , que de leur prouver , comme le P. Pczron fait ici , que ce que les Pro- phètes ont prédit de Gog & de M^gog , c'eft à dire des Bar- bares du Nort , efl; arrivé il y a long temps ; & c'eft fans dou- te un des grans avantages qui fe tirent des interprétations lic- tcrales de l'Ecriture. DE LA DEVOTION A LA SAINTE VIERGE , ET du culte qui lu: eft dû. In j2. à Paris chez Cl. Cellier. 16515. L'A u T E u R qui a donné des preuves de fon érudition par p'ufieurs ouvrages dont j'ai eu occafion de parler ailleurs, iîgnale par celui ci (on zèle pour l'honneur de la fainte Vierge contre deux Cotzts de perfonnes. Les uns font des ennemiis déclarez de l'Eglife , qui regardent comme une idolâtrie le culte qu'elle rend à la Mère de Dieu ; & les autres font des iîdellcs peu éclairez , qui font confilter toute leur dévotion dans des pratiques purement extérieures. Pour confondre la calomnie des uns , &: pour guérir la ^fu- perllition DES SCAVANS. 237 pcrnition des autres , il pofc pour principe , que le culte de la fainte Vierge fondé fur fa qualité de Mère de Dieu , fc re- cuit à trois chofcs j aux penfces de rcfprit 5c aux fencimens du cœur , aux prières publiques & particulières , & à 1 imita- tion de fes vertus. Cette divifion lui fournit tout le fujet de Ton livre. Dés le commencement il montre que les pcnfécs & les fen- timens que nous avdns de la fainte Vierge , doivent neccflai- rcment procéder de l'amour que nous avons pour elle , eftant impoffible de l'honorer fans l'aimer. L'ordre veut que nous l'aimions par rapport à Dieu , & dcpendemmcnt de lui : au- trement notre amour feroit déréglé & idolâtre. Si nous n'ai- mons la fainte Vierge que dépendcmment de Dieu , les priè- res que nous lui adrelfons , &: les honneurs que nous lui ren- dons ne s'arrcrcnt pas à el!e , mais s'elevent jufques à Dieu , comme à l'unique terme de notre fouvcrainc félicité. Ainfi quand nous implorons fon adïftance , ce n eit pas que nous nous imaginions qu'elle ait un tribunal fcparé de celui qui nous doit juger : ce n'clt que pour l'engager à fuppléer ^ar fon fuf - fragc , à la foiblelfe de nos prières. Quand nous l'appelions notre médiatrice &: notre Avocate-, nous n'entendons pas qu'elle le foie au fens auquel J. C. eft notre médiateur Se no- tre Avocat devant fon Pcrc , auquel il a fatisfait pour nous par l'effufion de fon fang. Qinnd nous lui donnons le titre . DES SCAVAN5. 'lés ployé à Tufagc de Ton fils , il ne faut pas racccprer, pour ne pas cxpofcr le fils au danger de violer Ton vœu de pauvreté. La pcrmiflion des Supérieurs ne peut juftifier ces refcrves- là de- vant Dieu. A pi es que M. Van Efpcn a prouvé de la forte que les Reli- gieux qui pofledent quelque chofe en particulier, commettenc le péché de la propriété , il répond à quelques diiHcuItcz qui peuvent élire propofées contre fa doûrine. Les premières font fondées fur quelques textes du Droit Canonique, Mais il fait voir fans peine que ces textes s'accordent avec fa do- ârine , & ne favorifent point du tout le vice de la propriété. Quant à la difficulté qui vient de la coutume de plufieurs monafteres , il fc contente de dire qu'elle ne peut prefcrirc contre la règle , & que pour reconnoitre combien ces arou_ mens- là font dangereux , il n'y a qu'à confiderer que les abus les plu'i pernicieux prévalent quelquefois fi fort , que ceux qui s'y 1 jiffent encrainer les regardent comme des loix. Il n'y a point de defordre dans les maifons Religicufcs qui ne puft eftre autorifé par la Coutume , puis que la corruptiori y a quelquefois elU û générale , qu'il n'y reftoit prefqu'aucun veftige de régularité. Ces difficultez eftant ainfi refolues , l'auteur propofe aux Religieux quelques remèdes dont ils fe peuvent fervir contre le vice de la propriété. Les uns dépendent des Supérieurs & les autres des fujets. Les Supérieurs ont deux choies à fai- re pour éloigner de leur monaflere la propriété. Lune c(l de fournir à leurs Religieux ce qui leur eft cccelTaire , afin qu'ils n'aycnt pas befoin d'avoir recours à leurs parens , ni à leurs amis. L'autre eft de ne pas recevoir un plus grand nombre de Religieux que celui que le mona'lcre peut entretenir ^ & Je fe tenir toujours en cftat de fubvcnir à leurs befoins. Les Religieux de leur côté doivent fc contenter de peu , &; ufer des biens temporels avec la modération qui convient à des pauvres. a«4 Î'E JOURNAL SERMONS DE S. BASILE LE GRAND , ARCIIEVE- / ^ue de Cfftrée en Cappadoce , avec les fermons de faint ^flere , Evcque d'Amafée , traduits du Grec, in S, à Paris chez André Pralard. 1693. M Etrant à part les lettres de S. B-ifilc dont je parlerai bien- rôt ailleurs, Tes autres ouvrages peuvent clVedivifcz en trois dalles. La première contient les commentaires qu'il avoit faits fur prefque toute l'Ecriture, & defqucls il ne reftc qu'une petite partie. La féconde clad'e comprend les livres dedodri- ne , comme celui du faint Efprit, &: les cinq contre Eunomc -, & la troifiéme renferme les écrits de morale , comme les Af- ceriques , les grandes & les petites règles. Les fermons donc on donne la rradudion dans la première partie de ce volume , font prefque tous de la dernière claiîe -, n'y ayant pcut-eltre que celui du baptême, & celui contre les Sabellicns, les Ariens éi les Anomccns qui doivent eftre mis au nombre des ouvrages de doârinc. Mais enfin les uns & les autres ont toujours efté admirez comme des chef d'œuvres où l'érudition eltfoutenue par l'éloquence ; ce qui doit infpirer au public de la gratirude pour celui qui a ptis la peine de les mettre en notre langue. Il s'en faut beaucoup que faint Aftcre dont les fermons tra- duits en François font la iecondc partie de ce volume, ait efté autfi célèbre que faint Bafile. Il Hcurit à la fin du quatrième fiecle de l'Eglife &c au commencement du cinquième , &: fut Evêque d'Amafée ville de Pont. Ses onze fermons furent re- cueillis il y a peu d'années par le P. Combefis , joints à Ac% extraits de Photius , & inferez dans le premier tome du Sup- piément de la Bibliotcque des Pères. Il excelle dans les por- traits qui font h fort au goût de ce fiecle , & donne de l'hor- reur pour le vice , & de f amour pour la vertu par la peinture qu'il fait de l'un & de l'autre. A PARIS, Chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptifte. Avec Privilège du Roy XXIII. 2^5 LE JOURNAL DES SCAVANS Ç Du LuNDY 15. Juin M. DC. XCIII. LE ANTICHE LUCERNE SEPOLCRALI FIGURATE ^ raccolie d'aile cave fotterranee ^ grotte dt Roma , nelle qua- li (i csntenqono moite erudite memorie , difegn.ne ed intaqliate nelle ioro forme da Ptetro Santi Bartoli , divife in tre parti , eon rojfervationi di Gio Petto Bellori. In folio. In Roma. &C fe trouve à Paris chez Jean Aniflbn. CEux qui aiment les précieux reftcs de rantiquicé , font obligez à Piecro Santi , très habile Graveur de Rome, d'avoir confervé dans ce recueil de lampes la mémoire d'une curiofité très fragile. Celles qu'il rapporte font prefque tou- tes de terre, & il n'y en a que très peu de bronze. Les obfer- vations dont M. Bellori les a illuftrées , quoique trcs fçavan- tes , ne font qu'une des moindres marques de l'erudicion de ce fameux Antiquaire. Cet ouvrage eft divifé en trois parties. La première con- tient diverfes cérémonies obfcrvées pat les Romains à leurs pompes funèbres. Piufieuri de ces lampes rappellent la mémoire des facrifices offerts aux Dieux Mânes. Il y en avoit nommez Infena, dans lefquels on verfoit fur l'autel du vin , du laie , de l'eau , &: du 1693. X x X i(^C LE JOURNAL Taiig. Lucien fe moque de cette coutume dans le dialogue de luRu , où im fils more demande à Ton pcrc , s'il s'imagine que toutes ces liqueurs qu'il verfoit fut fcui tombeau , coulc- roient jufqu'à Jui dans les enfers î Aux jours anniverfaires les parens &: les amis faifoiefit des afperfions avec ces liqueurs furies cendres & fur les os de leurs parens &: de leurs amis. Il y avoir d'autres facnfices nommez P.irentalia ou Fer.ilia, éib inferii epulii , dans icfquels les parens portoient tous les ans au mois de Février à manger aux morts , & offroient des îç.- vcs , de lâche , des laitues , du pain , & des gâccaux ; comrnc il paroit dans la dix huitième planche. Les vint fuivanccs reprefentent les jeux des gladiateurs & des lureurs , qui fc faifoient ordinairement autour des fepul- tures , dans la créance fupcrftitieufe que le fang qu'ils rcpan- doient pouvoit app.iifer les mânes des m.orts. Dans les f.inerailies appcllécs Indichvu , puùlica funera , I« peuple Romain cftoit invué par le Crieur public j &: les cou- reurs appeliez Defultora y couroient. Cette pompe n'avoic lieu qu'aux obfeques des plus riches. Les autres courfcs à deux & à quatre chevaux fe faifoient encore aurour du bûcher des Empereurs &: des personnes lîlu- ftres. Mais cependant les jeux du cirque & les courfes à qua- tre chevaux eftoicnt particulièrement dcihnées pour la confc- cration des Empereurs & des Impératrices , bc leur elloient décernées par le Sénat entre les honneurs divins. M. Bellori demeure ici d'accord que bien que ces courfes, ces jeux , & ces combats , forent des jeux funèbres , ils peu- vent aulîî avoir elle marquez f.ir ces lampes pour reprefcntcr la charge &c la proFcIlîon du défunt. Les trois dernières figures , avec le defiein de mofaïquc, ont eftc trouvées enfcmble dans un tombeau de la vigneCor- Ûm. La mofiï |ue &: les lampes reprefentent des fauteurs &: des boufons. On dit que d.uis les funérailles des grans , par- mi les lamenrations & les chants lugubres qui accompa- gnoicnt le lit du more , il y avoic encore des fauteurs , des DES SCAVANS. tC-j înimes , & des boufons , qui préccdoienc la pompe , & qui faifoicnt rire. La féconde partie contient les divinitez. On voit fur la première lampe le Jupiter Cuftos , avec un chien à Tes pieds , qui marque la vigilance. Jupiter eftoit un des Dieux Pé- nates. La quatrième figure rcprcfcntc Jupiter emporté par un ai- gle. Les R.omains dans la confecration feignoicnt que l'ame de leurs Empereurs eftoit enlevée par un aigle dans le Ciel &: placée parmi les étoiles. 11 Te trouvoit mefme des particu- liers qui avoient l'ambition de confacrer ainfi leurs parens. Sur la cinquième figure ell la telle de Serapis , avec le boifl Teau ou le panier , & la couronne de rayons folaires. Les Egiptiens prenoient ce Dieu pour le Soleil , qui eft le principe &: la fin de toutes chofes Ils le prenoient encore pour Plu- ton : c'efl: pourquoi il cil très fouvcnt reprefenté fur ces lam^ pes fepulcrales. Il cil fur la huitiénie accompagné de Caftor &: de PoIIux, qui font les fimboles de l'immortalité. M. Bellori dit que la neuvième où eft le Serapis avec quan- tité d'autres Dieux, comprend les mifteres de la nature. On y voir dans le plus haut heu les trois divinitez qu'on appelloit grandes , Jupiter , Junon & Minerve , qui eftoient les Péna- tes des Romains. A\x deflous font le Soleil &: la Lune dans leurs chars , avec plufieurs autres divinitez. Les II. 1 2. & 13. reprefentent la Lune & le Soleil. Les Romains avoient la fuperftition de croire qu'après plufieurs révolutions de ces deux planètes , les morts dévoient retour- ner au monde purgez des fautes commifes autrefois fur la terre. Apollon eftoit encore pris pour le Soleil. C'eft pourquoi on le voit reprefenté dans la quatorzième , & figuré dans la quin- zième &: la feiziéme par le Grifon & le Pegafe , qui eftoient employez à tirer fon char. Mercure qu'on voit fur la dix-feptiémc & fur la dix-huins- me , eftoit au nombre des Dieux infernaux , & le coadui^eus des amcs dans leur paflage aux cnfeis. i5S ^ LE JOURNAL La trentième rcprefcnte Cibclc Deeflc de la terre. Son cuite à l'cgard des morts confiftoit à leur fouhaiter la terre légère , Sit tibi terra levii. Quand on trouvoit un corps fans fcpulture, on lui rendoit ce pieux office de le couvrir trois fois de terre j &i. cela s'appclioit icrra in-jcWo, Diane clt reprefcntce au mefme endroit , parce qu'on la prenoic aujTi pour Proferpinc qui eftoit une Divinité Infer- iiallc. La trente quatrième efl: dédite à Diane d'Ephcfe , avec fa ilatuc fimboliquc. Ow voit fort bien reprefenté fur le man- che le Leïhfierniun% , fur lequel font Scrapis & Ifis , le Soleil & la Lune. Les Egiptiens prcnoient ces divinitez pour les jnefmes , & les invoquoieut également. Le Lefit/iernium par- mi les Romains , eRoit un banquet qu'on apprêtojt ordinaire- ment aux Dieux pour les appaifer , & pour fe les rendre pro- pices : c'efl pourquoi on les voit reprefentez fur le lit, avec la table au devant en forme de trcpié , fur lequel font les viandes. On faifoit principalement ce banquet à Jupiter , à ]unon & à Minerve dans le Capitolc j &: il y avoit des Prê- tres prépofez pour l'apprêter, appeliez Septemviri epulonum. Souvent ils reprcfentoient fur ces lampes leurs Dieux tutc- laircs , comme on voit Mars &: Diane dans la trente fixiéme. Minerve eft auffi reprcfencée fur plufieurs , parce qu'on la prc- noit encore pour Proferpine. On la voit fur la quarantième , qui preffe une olive dans un vafe , Oleaque Mmerva invenirix. Les anciens lui attri- buèrent cette invention, comme à Cercs &i à Bacchus celle des gtains & du vin. Sur la quarante-unième eft Venus Libitina. Cette DècfTc préfidoit a la naifïïince & à la mort. C'efl pour cela que dans fon Temple à Rome on voyoit toutes les chofcs qui apparte- noient aux funérailles. Elle eftoit aufll prife pour une des di- vinitez Infernales , &: on lui attribuoit le pouvoir de foulager les âmes en les conduifant dans les champs Eiifiens , &: parti- culièrement les âmes des amans. La dernière partie contient diiferens fîmboles & emblèmes. M. Bellori dit qu'on les peut attribuer à la patrie de ceux pour c]ui DES S C A V A N S. 2^9 ^ui les lampes avoient efté faircs , & croire que c'eft pour quelque Troyen qu'on reprefentc dans la dixième Enée qui poice Ton pcre Anchife 5 & que c'efl: auflî pour quelque ha- bitant de rifle d'Itaque qu'on reprefcnte JJhiïc lié au maft du navire , pour s'aflurer contre le chanc des Sirènes. Il en attribue d'autres à la profefllon , comme font les maf- ques fccniques , & les couronnes de laurier, qui conviennent aux Comédiens &c aux Poètes ; Se la roefure de grain dans la feiziéme , qui convient à quelque Préfet des vivres , ou à quelque vendeur de bled. Il y en a plufieurs qui reprefentent la viâ:oire. Telle eft I9 .cinquième , où l'on voit la victoire , avec un bouclier fur le- quel font CCS mots : ANNO NOVO FAUSTUM FtL. dont M Bellon fe fert heureufement pour confirmer l'expli- cation qu'il avoir donnée de ces quatre lettres A. N. F, F. qui fe trouvoient fur une médaille d'Antonin Pie. Mais il eft difficile de fçavoir comment ces fouhaits fe peuvent rappor- ter aux tombeaux. M. Bcllori en donne fa conjedure par les diverfes opmions des anciens fur la vie future : car il y en a- yoit qui croyoient que l'on ne quittoit cette vie que pour pall • fer à un nouveau monde feroblable à celui-ci. Pluton dans ClaudienconfoleProferpine après l'avoir enlevée, &: luidic; Annjfum ne credc diem : funt altéra nohis Sidéra , funt orbes alii , lumenque videbii Punus , Elyfofque mugis mirabere campos , Cuit are fque pioi ; tllic pretiojîor atas Aurea progenies habitat. Les autres lampes font des lampes de Chrétiens , qui ayant fandifié les fuperftitieux ufages des Payens , mettoient aufli des lampes dans les fepulcrcs de leurs morts .- mais au lieu des faux emblèmes &: des fauHes divinitcz , ils y raettoient fou- vent le monogramme du nom de Jcfus-Chrill. On voie fur leurs lampes & fur leurs rombeaux la colombe, fous la figure de laquelle les Apôtres &: les Chrétiens reprc- fentoicnc la fimplicité , la chanté , & l'innocence de l'E- glife. lé^}. Yyy 270 L E J OURN AL On y trouve fouvcnt J. C. en bon Pafteur, avec une brebis fur Tes épaules. La vint neuvième efl: de cette manière , avec pluficurs fim- boles. Jefus Chnil y ert reprefenté en habit de Pallcur , a- vec une tunique courte, & la brebis fur Tes épaules. A Tes pieds font fcpt brebis fidelles , dont !e nombre cft miftericux dans la fainte Ecriture , parce qu'il contient la pctfediorïv D'un côté ell: l'arche de Noé fur laquelle clt la Coloaibe ; aii •dcfl'ous on voit le Prophète jonas fortant du ventre de la Ba- leme j de l'autre ce mefme Prophète fe rcpofe à l'ombre d'une Courge : ( c'ell un petit arbre d'où l'on voie pendre de longs fruits &: des feuilles ) Au haut font le Soleil , la Lu- ne , & fep étoiles qu on peut appliquer aux fept étoiles de l'Apocalipfc. Une autre reprefcnce le vaifleau de faint Pierre/imbole mi- ftique de l'hglile de J. C Les deux dernières foin Hébraïques. Sur l'une cft reprefen- té le chandelier à fept branches , dont les Juits fc fervoienc dans les Sinagog*ies &r dans les Ecoles. On remarque quils ont encore aujourd'hui cette coutume de mettre une lampe allumée pendant fept jours à la telle du lit du mort après Ci fepulturc. LETTRES Qnj DECOUVRENT L'ILLUSÏON DES Pbilofoph^i fur la Buytctce , ^ qui àetruifent ieun Jîjièmei. lu 72. à Paris chez Jean Boudot. 1693. ^^^-^i-J.v- ->-i-«- s»-'^d-^ L'Histoire de la Baguette donc Jaques Aimar s'eft fervi pour (uivre à la pilte les meurtriers de Lion , n'a pas fi- tôt efté répandue dans le monde , que les Philofophes fcfonC emprellez à l'cnvi de rendre rniibn de fon mouvement. Plu- sieurs n'en ont point trouve de plus probable que les petis corpj fortis des meurtriers par la tranfpiration , &; répandus dans les lieux par où ils avoient paflTé. L'auteur de ces lettres prend leur fentiment pour une illufion , &: montre que ce n'eft pas d'aujourd'hui que des gens ont voulu expliquer par ces petis corps ce qu'il y a de plus caché dans la nature. t>E s' SCA VANS. î7T Le premier exemple qu'il apporte eft celui d'Epicure , rjui fans reconnoitre de Providen» e , attribuoit aux atomes tout ce qui fe faifoit dans le monde, II joint à Epicure d'autres Philofophes qui faifoient dépendre de la matière fubtile dei effets tout à fait furprenans. Les uns dont Ciceron parle dans les deux livres de la Divination , s'imaginoient que des par- ties infenfiblcs fortiés des concavitez de la tctrc entroient dans les pores de la Prêtrefle de Delfc , &c lui faifoient prédire l'a- venir. Les autres introduits par Plutarque dans le dialogue de la caufe de la ceifacion des oracles , croyoient que les devins avoient elle réduits au filence lors que la terre cpuifée ne leur avoir plus envoyé les vapeurs qui faifoient leur cnrou- fiafme. Notre auteur paflant des anciens aux modernes , dit que Cardan nous a donné des pierres précieufes d'où fortcnt des corpufcules qui écartent le tonnerre , & préfervent de la pcftc, & que Van-Hclmont a foucenu que pout purger une perfbn- ne fans qu'elle en fçache rien , il n'y a qu'à tenir entre Ces mains une feuille de Cabaret. Si celui qui la tient la preflc par en haut , il en pouflera des corpu feules qui purgeront l'autre pcrfonne par la bouche , &: s'il la prelfe par la racine, les corpufcules la purgeront par en bas. M. Chauvm & d'autres Philofophes , n'ont point trouvé de iTioyen plus fimple & plus naturel pour expliquer le mouve- ment-de la baguette entre les mains de Jaques Aimar , que les corpufcules fortis des meurtriers, & répandus dans les lieux par où ils avoient parte. Notre auteur ne tient pas ce moyen fuftifant , & ne le juge pas plus propre à produire cet effet que tous les autres dont je viens déparier, &: lui femblentab- folument impoffibles. La raifon qu'il en rend eft que les petis corps fortis des meurtriers , n'ont pu fe conferver dans tous les lieux où l'on fuppofe que la baguette a tourne , & qu'ils n'ont pu avoir un âQez grand mouvement pour agiter le fangde Jaques Aimar, &pour faire tourner la baguette, il croit que les vens & les tcznpêccs les ont bien-côc djffipez , &i rrae chapitre, il apporte pluficurs Ecrivains qu'UlTerius n'avoit point alléguez. Je croi en devoir indiquer quelques-uns , comme Cednomus qui fit au feptiéme fieclc une paraphrafc en langue Saxone fur la plupart des livres hi- ftoriqucs de l'ancien Tellament Aldhehrius Evêque de Screwu/buri mort en la neuvième apece du fiecle fuivant , écrivit une lettre à Efroi fur l'ufage des livres faints en langue vulgaire. Ufferius en tira autrefois ,une copie qu'il collationna fur trois nianufcrits. M. \^har- j6?3. Zzz 474 ,L ^ JOURNAL ton l'ayant trouvée imparfairc parmi les papiers d'Urfcrius , a fuppléé par le moyen d'un autre manufcric ee qui y manquoir, &: l'a le premier donnée au Public. Ocfroi Mo;ne de Wciflcmbourg , dédia dîns le neuvième iieclc à Luirbert Archevêque de Mayence une Concordance des Evangiles en vers Tcuconiques. Merhodius & Cyrillus Moines Grecs, convertirent dans le mefme ficelé les Efciavons à la Foi , &: leur donnèrent l'E- criture & la Liturgie en leur langue, UiTerius a cru qu'ils abolirent la Liturgie Latire : mais M. Wharton prétend qu'il l'a cru fans fondement, & qu lis n'tu- rent garde de l'abolir parmi des peuples nouvellement con- vertis , & qui n'avoient jamais entendu parler d'aucune au- tre Liturgie que de celle que leurs premiers prédicateurs leur donnèrent en leur langue. L'Abbé Elfric fît au commencement du dixième fîecleune vcri^on de la GencTe en langue Sjxone , & mit au devant une pretace pour la dcfendre contre ceux qui fe plaignoicnt de l'abus que le> ignorans en pourroicnc faire. M Wharton l'a donnée ici au Public. Yves de Chartres compofa dans l'onz.éme ficelé un livre des ofiices Ecciefiaftiq es , dont les Soixante &: deux derniers chapitres ont elle la première fois imprimez par Pamelii.s^ Se depuis réimprimez dans le dixième tome de la Bibhoteque des Pères fous le titre de Microloge , & fans nom d'auteur. M. Wharton a reconnu par la Icâure d'un manufcrit qui lui femble eftrc du temps d'Yves de Chartres , & qui poite fon nom, qu'il cfl en cftot de lui. Les huit premiers chapitres qui traitent des Noiflurnes , des Matines , des Laudes , de Pri- me , de Tierce, de Scxte , de Noue , de Vêpres, & de Com- plies , ne fe trouvent point dans le Micrologc , dont le pre- mier ch.ipitfe commence par l'explication de la Medc. A la fin M. W'harton fait une critique de quelques pafllages de la tradudion Françoife des Docteurs de Louvain , & les- reprend d'avoir ajouré le mot de /'urgaioiredu quinzième ver- fet du croifiéme chapitre de l'Lpitre aux Corinthiens. Outre cette iiiftoire des vcrfions de l'hcricure , il y a dans DES S C A V A N S. a -5 If mcfmc volume deux diilertations d'UiTeri'us , une fur les œuvres attribuées à faint Denis d' Athènes , l'autre fur l'Epi- tre aux Fidcles de Laodicée. Dans la première il témoigne avoir changé de fencimcnc touchant l'aurcur de ces œuvres. Car au lieu que dans Ta Bi- blioteque Theologique qui n'cft encore que manufcritc , il les avoir données après les Centuriateurs de Magcebourg , à . Apolhnaire qui vivoïc au quatrième llecle , il les donne dans ' cette dilTertatjon a un autre qui n'a vécu qu'au ficelé fui vanc. Dans la féconde il examine les motifs qui ont fait croire aux Marcionites que TEpitrc aux Fpheficns ne leuravoit pas efté adrefTée par famt Paul , mais à ceux de Laodicée. Il Ce perfuade que cette penfée leur eft ve^ue en lifant le quatrié- ine chapitre de i'Epitre aux Coloircns , où faint Paul leur or- donne d'avoir foin de faire lire leur epitre aux Laodicéens , ôc de lire cux-mcfmes celle qu'il avoir adrclfée aux mefmes Laodicéens. Ce qu'il confirme par un partage de faint Bafile qui témoignedans le fécond livre contre Eunome , qu'il y a- Voit des excmplau-cs de l'epitrc aux EphcTjcns , dans Icfqueîs hu: nom ne fe trouvoit point au premier verf.-c du premier chapitre. LETTRES DE SAINT BASILE LE GRAND ARCHE, vé./ue de Ce farce en Cappadoee , tradmtei au Grec , difpofèes en \ meillcut ordre , avec des noces , ^ la fommaires de chaque leitre. 2n J2. à Pans chez André Pralard. 1653. ÏL n'y a pas long temps qu'un fçavant Théologien promit de tirer les Ictues de faint Balile de la cor.fufion où elles font dans les éditions Greques &: dans les Latines , & de les traduire en Latin & en François. Une partie de ce qu'il pro- jctta alors vient d'ellre exécuté par celui qui nous donne les mefmes lettres eu notre langue. Il les a dirpofées autant qu'il a pu félon l'ordre du temps où elles ont efté ecrues , a fuivi fidellemenc le fens de l'original , & en a expliqué quelques en- droits par de courtes notes. Ce qvi'il dit dans fon avertiflement des fautes donc la ver- 476 L E J O U R N A L fion Latine cft remplie , Tcrc beaucoup à relever l'urilirc de ion travail, hii voici un exemple que les fçavans feronc bien- aifes d'apprcDclre. Il e.Q tiré d'un endroit de la première let- tre à Chilon , où le Tradudeur Lacin ayaiit parlé de Smodei JLcihfi !f:icjucs ^ il a donné lieu au P.Dom Jean Mab;l!on & à M. l'Abbé de la Trappe de fe fervir de ce pailagc , l'un poi.r prouver que les Moines peuvent airiilcraux Conciles, &: l'.iu- çre pour combattre cette opinion ; parce qu'en effet ce n'eil pas un confcil que faint Bafilc donne à Chilon , mais une rai- fon que le démon lui Taggcre pour le rccircr delà folicudc. Toute la ûifpuce de ces deux gr.ins hommes roule , félon no- tre Traducbeur fur la fjutc de la vcrfion Latine , où fe trouve le mot de Smodes Lcdcfî.ifliquei , qui ne fe trouve point dans l'original. Car fi faint Bafile n'a point parlé des allemblées q;:c faifoicnt les Evêques pour décider des points de doctrine , mais feulement de celles que faifoicnc les fi-^elcs pour célé- brer les feftcs , il n'a rien dit qui fervift à décider leur qiie- Ition. Au refle ces lettres de faint Bafile fant un des plus précieux ijionumcns que nous ayons de l'antiquité Eccleliaftique. Les unes reprefentent ce qu'il y a de plus fingulier dans l'hiftoirc de ces temps là , avec les diftercns caraclcres des efprics, les intérêts des partis , les motifs qui les faiioient agir , & les in- rri2;ucs dont ils ufoient pour fe combattre &: pour fe détruire. Les autres eclaircifl'cnt une iniîiiité de queflions de dodrinc , de difcipline &: de murale. Les autres font ou de tendres ccn- folations dans les difgraccs , ou de puillanres exhortations aux devoirs de la vie Chrétienne ; fi^ celles mefmes qui femblenc n'cllre que de fimples complimens, font pourtant remplies de pcnfées également ingcnieufes & folidcs. Enfin toutes onc une pureté &: une nnblelle de langage qu'il n'cft pas aile d'i- ir.iter, & que le Traduclcur a feu néanmoins conferver en notre langge. A PARIS, Chçz Jean Cusson, rue faint Jaques , \ l'Image .de fftinc Jsan ^aptille, ^\çi i-nvile^e du Rçi, XXIV. Î77 LE JOURNAL DES SCAVANS Ç Du LuNDY 21. Juin M. D C. XCIII. CLAVIS ECCLESIASTIC^ DISCIPLINA. SEU IN- dcx ttmz-erfaUi totiui Juiii Ecclefiu(lici , ad regicim non modo , fed ad qujmcunque aham Concdiorum edittonem accommodatus. In quo quidqmd ufpiam vel in Qonciliis tum gencralibai , tum ■provincialibus , vd in Ponùficum refcriptis , Imperatorum , Re- gumque gS Epifcoporum de fa cris rébus cdiciii adjuris Canonici materia7n ftMumque Ecclc/t-ifiictim fpefiat , ncva méthode, nova erdine , ^ qua potuit fierl brcvitate dige/îum ad manum ponttur. X)pus ab eruâiti(Jimo viro Godefndo Mermant , Bociore Theolo. go , Ô" Soao S or boni co , nec non Catheiralis Ecclejîa BcRova- cenjti Canomco , ingenti lubore conannatum. Operà ^ftuâio Pé- tri Awier in lucem prodit. In folio. Infulis. &C fc trouve à Vz- ris chez Antoine Dezaiier. 1^93. MR. Herrnant a partagé toute fa vie entre les fondions de Ton minifiere , & l'étude des fanâtes lettres. La pro- fonde connoiflance qu'il en avoit aquife a paru par les ouvra- ges qu'il a donnez en divers temps au Public , foit en Latin ou en François , foit fous fou nom , (bit fous des noms em- pruntez , ou mefmc fans nom. L'.hiftoire de la ville & de l'Eglife de Beauvais , à laquelle 1693. A a a a I7S LE JOURNAL il mie la dernière main peu avant fa mort , eft attcn.'liie avec j impatience par le Ciiapitre &: par tout le Diocefc. Parmi les écrits troDvcz dans Ton cabinet , il y en a pluficurs en eftac ci'efhe mis au jour. Celui-ci n'avoir pas elle Fiit par M. Hcr- niant à ce delfcin là , mais feulement pnur lui fcrvir d'unc^ table générale des Conciles , Se pour lui reprefenrcr en abré- gé tout ce qu il avoit lu de canons , de lettres de Papes, d'or- Qonnanccs d Evêo,ues , de con'licutions de Princes touchant la difcipline de l'tglife. Celui entre les mains de qui cette table cfl: tombée, a- pris la peme de la tranfcrire j &: après l'avoir communi- quée à d'habiles aens , il l'a coIIa:ionnce par leurs avis avec l'es originaux d'où elle eft tirée, ôc a fuppleé en quelques en- droits ce qui y manquoit. Tout l'ouvrage elt divifé en deux parties. Les titres de I3- premicre font difpofez en trois dalles. Dans la première claf- fe fe trouvent premièrement les fondemcns de la Rcîigioa Chreiiennc, qui font la foi , la pieté , & l'Ecriture ; puis ce qui regarde la hiérarchie, &c les pcrfonncs Ecclefialhques , fçavoirle Pape, les Patriarches , les Cardinaux , Ks Primats, les Métropolitains , les Evêques , leur uiHitution , leur ordi- nation, leur rcfidence &: leurs fondions j les Abbez, IcsCha- iioines , les Prêtres , les Diacres, les Clercs infciieurs , Si. les Moines. La féconde clarté eft des S-icremens , & la troifiéme des- Hérétiques , des Schématiques, des Juifs & des Payens. La féconde partie , quoi que la plus longue , n'a que deux clartés de tiues. La première eft des choies ccclcfiatliques , fçavoir des cérémonies ,des heures canoniales , des fertes, des jeufnes , de l'invocation des Saints , de leurs images & de leurs rcliqties , des miracles , & des pèlerinages La féconde clarté elt de la jurifdidion Ecclcfiaftique , àcs biens & des revenus , des défenfeurs, & des avouez , des afi- les , des caufcs des Clercs , de leurs habits , de leut tonfurc, de lafingulanté des bénéfices, des accufations , dcstcraoïns, de l'excommunication , & de l'interdit. Dans cette féconde partie il y a quantité de canons Se de décrets rapportez eniieis Ï>ES SCAVANS. 27^ i^ec des remarques de M Hermanc. L'ufjge de cette tabJe lui eftoit fins doute plus avantageux qu'.i ne Içauroit eftre à aucun autre , parce qu'elle rappcUoit fans peine dans fa mé- moire non feulement ce qu'il avoit lu dans la valle colledion des Conciles , mais aufli les reflexions &: les obfervations qu il avoit f.mes fur ce qu'il avoit lu. Chacun pourtant en tirera du profit à proportion du progrés qu'il aura fait dans l'etudc des Conciles. HISTOIRE DU MINISTERE DU CARDINAL XIME- nez^. Archevêque de Tolède, ^ Régent d' tfpagve , eà t on voit -f ïonqine de la grandeur de la Monarchie à' Efpaqne , lei cavfei de fa décadence ^ ^ l'bifioire particulie>e de la conquête dei Royau- Thei de Grenade , de Navarre , ^ d'itne parue de l'Afrique. In j2. à Teuloufe. 8c fe trouve à Paris chez £dme Couterot, • rue fainc Jaques. 16513. 'v«/^5'.>. ^-3 . 17~» LA fortune qui s'efl; accordée avec la vertu pour élever le Cardinal Ximenez , fcmble avoir encore foin de fon nom après fa mort , & lui fufcitcr de nouveaux Ecrivains pour Je rendre de jour en jour plus célèbre Nous attendons incef- famment fon portrait d'une main qui ne fait que des chef- d'œuvres. Cette hilloire de fon mmiftere a aufTi de grandes beautez. Celui qui nous la prefente , la recommande par deux endroits. L'un eft le parallèle du Cardinal de Ximenez & du Cardmal de Richelieu , que chacun peut faire en la li- fanr. Leur génie, leur politique , leur hardicfl'c à entrepren- dre , leur bonheur à exécuter , tout fe rcfl'emble. L'autre eiï le rapport entre la converfion des Mores au Chriftianifme, ô& ia réunion des Proteftans de France à l'Eglife Catolique. Il décrit dans le premier livre fa naifl'ancc , fon educatioti, & le commencement de fa fortune. 11 naquit à Villaivar , dans le diocefe de Tolède , d'Alfonfe de Cifneros Ximenez , Procureur de la Jurifdidion de Tortclaguna , qui n'eut point de vue plus relevée pour lui , que de le rendre capable de lui fuccedcr dans fon emploi. Mais l'inclination de Ximenez le porta à la lecture des Poëces & des Orateurs , & à retude dss' fciencesi iSo LE JOURNAL La pauvreté de fa famille augmentée par le grand nonibre d'cnfans nez après lui , lui donna du dcgoûc de fa patrie , &c l'envie de chercher un ecablincmcnt ailleurs. Ayant entre- pris le voyage d'Italie , il fut volé en Provence , & gencrcu- iemcnt fecouru par un Gentilhomme .Caftillan avec lequel il avoir étudie à Salammquc. Quand il fut arrive à Rome il n'y trouva aucun moyen de parvenir aux charges ni aux emplois. Sixte IV. ne les don- uoit qu'à fes proches ; & s'il leur en cchapoit, il cftoitrcfcrvé pour CCS illuftres fugitifs que laprife de.Conftantinoplc avoit jcttez en Occident. Xmicncz fubfi'ta de ce qu'il put gagner à plaider pour des Efpagnols qui avoicnt des caufes aux Tribunaux Eccleiialii- qucs. A la mort de fon pcre il fut rappelle en CaftiUe , où il ne fut pas (î- tôt di; retçur , qu'il vit vaquer l'Archiprêtré d'Uceda par la mort du titulaire , & qu'il en prit polTelîion.cn vertu d'une expedative qu'il avoit apportée de Rome. Alfonfe Gaulle Aïchcvcque de Tolède , qui en avoit pour- vu un de fes Aumôniers , fit mettre Ximenez en prifon , où il auroit demeuré long- temps fans la recommandation de ia Comtefle Bondiano, fœur de cet Archevêque, qui obtint fa liberté (Je le bénéfice. ^ Ximenez le permuta bientôt après avec un Canonicat de Siguenza. Le Cardinal Gonzalez Mendofe , qui en eftoit alors Evêque , & qui fut depuis Archevêque de Tolède , le fît fon ^rand Vicaire. Nonobilant la feverité de (on humeur, il s'aquifta de cette charge au contentement gênerai de tout le Clergé : mais il ne l'exerça pas long-temps, parce qu'il r^figna fes bénéfices àJBcrnaidin Ximenez le plus jeune de fes frères , pour entrer dans l'Ordre de faint François. Il joi- gnit une ettude alfiduë à la pratique exaûe de fa règle. Ses rares talcns portèrent fes Supérieurs à l'engager à laprédica- tion , où il réuiTitfi heureufemcnt , que les Dames de la pre- mière qualité fe mirent à l'cnvi fous {a conduite j Se en peu ^.e temps il devint diredcur au/Ti célèbre que prédicateur fa« r.^cux. , Sa rcpuration lui fit des envieux. Pour ccdcr ^ leur jalou- fiç DES SCAVANS. igc fie , il demanda à fc retirer , &: dans fa retraite il fut cîu Gar- dien, &:enruice Provincial de Ton Ordre. Ses vertus parurent dans l'exercice de ces deux charges avec encore plus d'eclac qu'auparavant. Apres la vidte de Cx Province il retourna en Caftille , cù la Reine Ifabelle lui déclara qu'elle l'avoit choifi pour (on Con- fe/Teur ; en quoi elle n'avoir fait que fuivre le confeil du Car- dinal Mendofe , qui de i'Evêché de Siguerza elloit paiFé à l'Archevêché de Tolède. En cette qualité il cftoit Chef du Confeil d'Eftat de Caftil- Ic , & meditoit de faire la guerre aux Mores de Grenade, per- fuadé que l'occafion elloit favorable pour les renvoyer en A- friquc. Il en conféra avec Xi menez qui en parla à la Reine. Le Roi Ferdinand en approuva le projet. Ainlî fut refoluë la conquête de Grenade qui aquic aux Rois d'Efpagne la qualité ûe Rois Catoliques , dont ils font encore aujourd'hui le plus glorieux de tous leurs titres. La ville de Grenade après huit mois dix jours de fiege , fc rendit à ces conditions : qu'à l'avenir les Mores ne rccon- noitroient point d'autre Souverain que la Reine Ifabelle & Ces fuccelTeurs , qu'elle prendroit fous fi protedion les Mo- r^s qui voudroient demeurer en Efpagne , &c les traireroit comme Ces autres fujets ; que ceux qui voudroient parler en Afrique , auroient la liberté de vendre leurs biens. Le Cardmal Mendofe Archevêque de Tolède , accompa- gné de Xi menez , &: d'un grand nombre de noblelfe , prit polleirion de la ville de Grenade au nom de la Reine , & fie arborer fur les plus hautes tours la Croix &: les ctendars de Caftilie. C'eftoit alors la plus grande ville de toute l'Efpagne. Son enceinte eftoit de plus de quatre lieues. Ses murailles avoienc plus de cent tours ornées de créneaux. On y comptoit foi- xante 3ù dix mille maifons , &: plus de trois cent mille ha- bitans. Ferdinand &: Ifabelle n'épargnèrent rien pour embellir cet- te conquête. Alexandre VI. y établit à leur prière un Arche- vêché & une Univsrfitc. Mais les fréquentes révoltes des 1693, Bbbb lit LE30URNAL . More? , Se leur bannifTcmcnt qui arriva en iCoq. l'ont rédui- te à l'crtac pitoyable où l'on la voit aujourii'liui. Le fécond livre découvre le promt & prodigieux clian^cr- jnent de la fortune de Ximenez. Les fatigues iourtertes pai Je Cardinal Mcndofe au ficgc de Grenade , lui caulerent u- ne maladie fous laquelle il luccomba aprcs deux ans de lar>- gueur. Avant que de mourir il confeilla à la Reine de donner l'Ar- chevêché de Tolède à fon Confcfieur. Fcrdmand le vouloiE faire tomber à Dom Alonfe Archevêque de SarragofTe , fon fils naturel , à delVein de fc rendre par là aufll ablolu en Ca- flille qu'il l'cftoit en Arragon Mais la Reme hiidoit trop l'Archevêque de Sarragofl'e , a caufc de la Comtelle d'Ebolj fa mère , contre laquelle elle avoit conçu une plus grande p.* louHe que contre aucune autre maureflc de Ferdinand. Elle fit donc venir les bulles de Rome fans en ritn dire à» perfonne , & les prefenta à Ximentz lors qu'il y penfoit lo moins. 11 falutun commandement expiés du Pape pour lui faire accepter cette dignité : encore ne fut-ce que fou:> deux conditions. L'uîsc , qu'il ne la quitteroit jamais pour quel- que confideration que ce fuit : l'autre , que rArche\êché ne ' feroit chargé d'aucune penfion. La Reine les obicrva con-« ftammcnt toute fa vie. Mais après fa mort Ferdinand fît toc» Tes efforts pour y donner atteinte. Ximenez fut facré dans une tglifedefon Ordre proehe de Burgos , & ne chargea prefque rien en ù manière de vivrc^ Il ne prit point de linge , ne quitta point fon habit de Corde- lier , pas mefme la nuit , ne couchant que fur une païUallc piquée. Ourre les jeufncs de l'Eglile il obfervoit tous ceux de îa règle & des conîtitutions de fon Ordre. Les autres jours il Tivoïc avec une frugalité furprcnante. Il prit pour Aumô<« niers des Religieux de fon Ordre y ne voulut entendre parleC Hi de maure d'hôtel , ni d'ecuyer , ni de pages , ni de laquais» Ayant ainfi retranché toute (orte de dcpcnfe , il employa le levenu de ce riche Archevêché à fccounr une infinité depau<- ytes. S'il avoic continué à vivre de k force: , ïiCcsok aujoucd'hur DESSCAVANS. ^ a 5^ propofé comme le modelé des plus faints Evéques. Mais il y a peu de metamorfofc égale à la ficnne. Ce Prélat qui juf- qu'alors n'avoit paru occupé que des penfées de pieté , ne fut I plus rempli que des idées de ù grandeur , & des projets am- bitieux de la Monarchie Efpagnole, Il ne fe fouvint ni de la médiocrité de fa nailfance , ni de fa profeflion Rehgieufe , m des devoirs de l'Epifcopat , & s'abandonna entièrement aux affaires politiques. L'ambition devint fa paflîon dominante. IlfurpalTa la ma- gnificence de tous fes prédcceiFeurs. Il fit pourtant toujours profeflion de probité , aimant la juftice . & protégeant le» opprimez. Lors qu'il travailla pour la gloire de la Religion, il le fit avec un faflc qui montroit bien qu'il ne fongeoit qu'àr s'immortalifer^ Ce changement n'arriva pas tout d'un coup II falut pouï cela faire inccrvenir l'autonté du funt Pcre qui l'avertit que la - trop grande auitcnté de fa vertu rendoit fa dignité méprifable ' aux yeux des foibles , & que pour la leur faire refpeder , il la faloit revêtir de dehors cclatans. Cependant ù faveur augmenta à proportion du rang où il avoir elle élevé. La Reine ne mit point de bornes à fa con- fiance. En le faifant Chef du Confeil , elle le rendit maitro' des délibcraciony. Enfin il lui devint Ci necellairc , qu'il ne puitt obtenir d'elle la pcrmiffion d'aller prendre polTtfîion de l'Ar* chevêche dcTolcde. En changeant de façon de vivre , il ne renvoya pas les Cor- dcliers qui faifoient partie de fa famille. Ils^ s'efloicnc imagt^ nez qu'ils feroicnt plus à leur aifc dans fon palais que dans leitë €onvent Us avoicnt partagé entre eux en efperancc les meil- leurs Evêchez du Royaume ; & les plus modérez ne s'eftoieni rien promis moins que les premières charges de leur ordre^ Tout le contraire citant arrivé , ils firent éclater leur mécor»- tentement par leurs plaintes. Mais quelque defir qu'ils eu{^ iènt de fe venger , ils reconnurent bien qu'ils ne pourroiene rien contre un Miniftie fi autorifc , à moins qu'ils n'engà- geaiVenc tous les Coîdelier^ de Ca(Ullc à fo déclarer contre lui» iS4 LE JOURNAL Ils en trouvcrcnc bicn-tôc l'occafion lors qu'ils découvri- rent qu'il lûngcoic à procurer à TOidrc la reforme dont il a- voit bcfoin . &c a unir les Conventuels aux Obfcrvanrins. Au fcul nom de reforme , tous les Cordeiiers le loulcverent con- tre XuTienez , & ne parlèrent plus à leurs dévores que de Ton orgueil & de fon ambition. Ils firent da railleries de ce qu'il j^'avoit fongé à reformer l'Ordre que depuis que fa promotion à l'Epifcopar l'avoir cxemté des autkeritez aufquellcs il vou- loir ("oumcttre les aunes. Le General averti de fon deflcin , obtint du Pape une com- midîon pour le prévenir Se pour l'éluder. Bernardin de Cifneros , le plus jeune des frères de Xime- nez , &: celui auquel il avoir religiié ies bénéfices en fe faifanc Religieux , les avoir quittez bien-tôt après pour entrer dans le mefme Ordre. Il prit le parti des autres Cordelicrs , & tompofa contre rArchevcquc fon frcrc un libelle diftamatoi- rc contenant plus de quarante chefs , dont les uns regardoienc fa conduKc domeftique , les autres le fpiritucl dudiocefe, & les autres le temporel de l'Archevêché &L l'adminiftration de lajufticc. Sa fureur alla plus loin. Eftanc un jour entre fcul dans la \ chambre de fon frère qui elloit malade , après lui avoir faic nit point de fa difgrace ^ & la fupporta avec une fermeté qui lui fut encore plus gloticufe que n'avoient elle toutes fes vi- doires. Ferdinand eftoir aux côtes d'Italie , & rctournoit en Efpa- gne quand il reçut les lettres de Ximenez , avec l'ade de fon cleélion à l'adminiHration de la Callille. Il répondit à l'Ar- chevêque & aux Eftats pour les alTurer de fa rcconnoiifance , & pour leur promettre qu'il fe montreroit digne de leur choix. En mefme temps il dépêcha un Courier à Jules II pour lui de- mander le Chapeau de Cardinal en faveur de Ximcncz. Ce Pape qui avoir bcfoin du fccours de Ferdinand peur l'exécu- tion du delfein qu'il avoir formé de chalTcr les François d'Ita- lie , n'eut garde de lui refafer la grâce qu'il avoir accordée à Louis Douzième &c à Henri Huitième en faveur de leurs Mi- ;niilres, 1653. E e e e 194 LE JOURNAL Xirncncz reçut le Chapeau des mains de Ferdinand , avdc un bref du 17. Mai i 507. Bien qu'il fenible que ce fuit le comble des vœux de ceux qui afpirenc aux dignirez Ecclcùa- ftiques, & que Ximenez n'euft plus rien à fouhuter , la for- tune encicrcmenc décl.uée pour lui ne laiila pas de lui faire encore un autre prcfenc La charge de grand Inquificcuc ayant vaqué, Ferdinand lui en fie expédier les proviiîuns.fans qu'il eull la peine de les demander. 11 n'y avoir pas long-temps que l'Inquifition cfioiL t'cablic en Caftiile. Jean de Torqucmada de l'Oidre de iaiat Domi. nique , Confelfeur de la Reine Ifabeile , lui avoir aucrefoi» fair prome:tre que fi jamais Dieu l'clevoit fur leTione , elle n'épargneroit rien pour chaiîcr de fcs Eflats les hérétiques, & les infidèles, Qiund elle y eut eflc élevée Torqucmada lui demanda l'exécution de fa parole , &: lui rcprcfenta que le meilleur moyen de confcrver la religion eitojt d e:ablir l'In- quifition en Caftillc, comme elle l'avoit cRé en Arrcg'>n. La Reine pcrfuadcc par les raifbns de ^on Confefîcur , en paila au Roi Ferdinand ion epoax , qui y coi.fentit f.ms pei- ne Ils obtinrent de Sixte IV. les bulks qui eiloicnc ncceirai- ics , &c nommèrent Torquemada grand Inquifiteur. Le Pa- pe qu'il avoir ù bien fervi en cette oecafion , le fit Cardinal, il répondit parfaitement bien au jugement des Puiffar.ces qui l'avoient élu. En quatorze ans qu'il exerça la ch ïfge de Grand Inquifiteur de Callille , il y fit le procès à plus de cent mille pcrfonncs , dont fix mille furent condamnez au feu. Cette charge au ccHus de laquelle il n'y avoir que la Royau- ïc , fembloit devoir mettre Ximenez à couvert de l'incon'» ftance de la fortune , & le retenir en fureté à la Cour de Fer- dinand. Mais il connoiif^jit trop bien ce Priuce pour y de- meurer. Il craignoit de fe commettre avec lui , ôi ne man» qua pas de prétextes pour demander fon congé. 11 n'y avoit pas long- temps qu'il eltoit dans fon dioccfe lors- qu'il reçut des lettres par lefquelles Jules Second plus brouille alors avec Louis Douzième que jamais , le pnoit de porterie Clergé d'Efpagnc à lui accorder une levée de décimes ex- traordinaires pour les affaires preflantes du faim Siège. DES SCAVANS. 29j 5oic que Xi menez n'approuvaft pas la conduire du Pape à reg.îrd du Roi très Chrétien , ou qu'il cruft que de pareils fc- cours ne doivent s'accorder que contre des Infidèles & des Hérétiques , ou qu'il vouluft épargner cccte charge au Cler- gé d'Elpagne qui n'elloic pas trop en eftat de la i'upporter i il répondit au Pape, que rien ne fe pouvoir ajouter au zèle qu'il avoir pour Sa. Sainteté ; mais qu'elle ne pouvoit furchargec les Eccleliaftiquts de CaRillc fans aliéner leurs cfprits : qu'ils vcnoient de s'cpuifer pour la conquête de Grenade , &: qu'ils n'avoient plus aucune rellource. Que ce n'elloit que pour eux qu'il parloir de la forte ; que ia perfonne & Tes biens eftoient au fervicc du faint Siège , & qu'il eftoiç prêt de lever vint-cinq mille hommes à Tes dépens. On ne fçait pas (i le Pape fut content de cette réponfe. Ce qui ert certain , eft qu'il n'accepta pas Tes offres, & lui confer- va toujours fon eftime. Ximcnez reriré de la Cour , invin Confalve de Cordouc , Pierre de Navarre , & Jérôme Viancîli à palier quelques jours avec lui à Alcala. Il s'entretenoit fouvent avec eux de ce qu'ils fçavoicnt lo mieux* Vianelli lui fie voir les plans qu'il avoit tracez des p'a- ccs maritimes d'Afrjquc. Entre ces plans eltoit celui d'Oran. Ximencz l'examina avec tant d'exaditude, que Vianelli s'ima- gina qu'il avoit formé quelque dc/Tcin fur cette place. Il re ic trompoit pas. Il y avoit déjà quelque temps que le Cardi- nal en fouhaitoit la conquête ; & c'eftoit dans la vue de !k fendre plus aiféc , que trois ans auparavant il avoir confeillc la prifc de la fortercile 5c du port de Mafaquivir , qui ne fonc éloignez d'Oran que d'une Iieuë. Après en avoir confère x- vcc Confalve de Cordouc &c Pierre de Navarre ^ il refoluc de n'épargner rien pour porter Ferdinand à cette entre- Ferdinand occupe alors a la conquête du Royaume de Na- pies , loua le projet de Ximenez , & en remit l'exécution à un autre temps. Le Cardinal que les plus grandes difficultcz ne rebutoicnt jamais , offrit de faire à fes dépens la conquête d'Oran. Le Roi ia lui permit , à condition que s'il ne réu& 195 LE JOURNAL fAÏok pas, tous les frais fcroient perdus pour lui , far.s qu'il en puft jamais efpercr le rembourfcmcnc. Ximcncz acccpra la condition , Se en propofa une aurrc , ([VÀ clk que s'il rcuflîUbic , Oran rcleveioic de i'/\rchcvc- ché de Tolède , jufqu'à ce qu'on lui cuit reftituc à lui , ou à Ton Eglife , tout ce qu'il auroi: dcpcrjfc pour en faire la con- quête. Le projet drcfië par Vianelli porroit , que l'armcc A-roit de dix mille hommes de pied , &: de quatre mille chevaux; qu« le Cardinal en fcroit le General ; que Confalve de Cordouë &r Perre de Navarre fcroient fcs Licutenans Généraux , & que Vianelli y fcroit h fonclicn de Marc jhal de Camp Ge- neral. L'avejfion que Ferdinand avoir conçue contre Confalve.nc Lii permit pas de lui accorder cet emploi. Lors que le delfein fut déclaré , il excita divcrfcs pcnfécs , 2^ fut loué des uns, ôc blâmé des autres. Les reflexions que chacun prenoit hx liberté de faire deffus, furent accompagnées de piquantes railleries ; & pluHeurs ns manquèrent pas de regarder comme un caprice iîngulicr de la fortune , que pendant que le grand Capitaine relégué à Vallaidolid , frequontoit les Eglifes 5c les Monaftercs , .un Cordclier endofloit la cuirafle , &: commandoit les armées. Ximencz n'ignoroit rien de ce qui fe debiroit contre fon dclfein , &c ne le pourfuivoit pas avec moins de vigueur. Peu s'en falut que la jaloufie de Pierre de Navarre contre le Car- dinal ne le R'.\ échouer. Mais nonobflant tous les obfla- cles qu'il £t naître , &c la fedition de l'armée , la flote partie ou port de Cartagcne le i6. Mai 1509. &: le foir du jour fuj- / yant elle débarqua au port de MarHiquivir. L'armée Chrétienne marcha vers Oran , &: l'intelligence que Ximencz avoit dedans réuffit. Deux Mores & un Juif livrèrent une porte par où la Cavalerie entra fans rchilance. l-cs habitans , bien loin de fonger à Ce défendre, coururent en foule aux mofquées pour y trouver un afile. Pierre de Navarre à h tcfte de fcs troupes, battit les Mores à la carci- pagne , & en lailfa cinq injUe fur la place. 11 entra en.lijce dans DES S C A V A N S. 197 ^ans Oran , l'abandonna au pillage , & fie paiFer les habicans au fû de l'cpée. Quand le Cardinal y entra , il ne put s'empêcher de verfcr àcs larmes à la vue de tant de fang répandu. Après avoir pris podtlîîon du château , & ordonné de nouvelles foriificaiions qui fe voyent encore aujourd hui , il abandonna le butin aux officiers & aux foldars , & ne fe rcferva que des livres Ara- bes qu'il envoya à la Bibliotcque d'Alcala. II y retourna bientôt après pour fe delaHcr de Tes fatigues, & en partant laifla le commandement gênerai à Pierre de Navarre , qui fe rendit maitre de Bugie & de Tripoli, Mais de tant de conquêtes il ne rcfte plus maintenant aux Efpa- gnols que la feule ville d Oran. Pierre de Navarre fer vit depuis les Efpagnols en Italie , fut pris à la bataille de Ravcnne , languit dans les priions jufqLcs au règne de François Premier , Ibus lequel indigné de l'in- gratitude des Efpagnols , lî s'engagea au fei vice de la France. Accompaç;nant Laorrec an royaume de Nap'es , il fut pris èc traité en fujet rebelle. Quelques HiRoncns difent qu'il fut crranglc en prifon 5 & d'autres , qu'il y mourut de cha- A peine le Cardinal fut-il arrivé à Alcala , qu'il y apprit qu'Oran & Ces dépendances avoienc cfté réunies à la Cafiille. Au mefme temps il dépêcha un courier à Ferdinand pour lui offrir de lui remettre la fouveraineté d'Oran , en lui rendant les frais de la conqucre : ajoutant que fi le Roi lui rcfufoic cette jufiice , il la demanderoit aux Eitats. Ferdinand en apprehendoit la convocation ; & ce fut l'uni- que motif qui le porta à rendre à Ximenez les frais qu'il avoïc faits dans cecte guerre. Pendant que ces chofes fe paflcrent en Efpagnc , les diffe- rcns de Ju^cs Second & de Louis douzième s'augmentèrent en Italie, &r obligèrent ce Pape à implorer le fccours de Fcr- dmand. Il ne manqua pas de fe feivir de cette occafion pour obtenir Tinvcrtiture du royaume de Naples Mais comme le 1 royaume de Navarre eftoit plus à fa bienfeancc que les Eftars I d'Italie , il trouva dans l'excommunication du Roi de France 16^;}. Ffff 198 L E J O U RN A L ^ &: de fc5 aJhcr.ins un prccexic fpecicux pour l'uTurpcr. Jamais conqucre ne fu: fane en aulu peu de ccmps j ni avec tant de facilité. Le Duc d'AIvc n'entra dans la N.ivarre q-ie le ii. JuiHer, & n'eue bcloin que du rcftc de la campagne pour s'en rendre niaitre. Aucune place ne fc défendit. Jean a'Albrcc aban- donna Ton royaume , &: Ce retira en France. Il faloit quelque apparence de droit pour foutenir cette u- furpition. La Cour d'Efpagne fît courir le bruit que le Pape l Ja lui avoit donnée. On n'a jamais pourcjnt vu !a buHc , ic les Rois d'Efpagne ont continué à retenir la Navarre. Ferdinand n'en jouit que peu de temps. Qj_oi qu'il fe fu(ï toujours promis une longue vie , il futitraquc d'une maladie qui lui fit fcncir qu'il eftoit proche de fa fin. D.ins cette ex- trémité il révoqua ic teftamcr.r qu'il avo:t .'.utietois fait à Bur- gos en faveur de Ferdinand Ton peàcfJs , Ôi lailTa au Cardi- nal Xmienez l'adirinillr.aion de la Cafiille durant ic bas ajc de ce Prince 6.; de Charles Ton frère .iné. 1! ne me rcfte pins qu'à rcprefcnr-er dans l'extraie du fi.xié- mc livre de cette Ivlioirc les choies extraordinaires que Xi- mcncz fît en moins de deux ans que dura la rcgtnce doiit le Roi Ferdinand l'avoit charge. Auffi fât que le Cardinal Xin-enez eut appris la mor: de Ferdinand , il partit pour Guadaluppe , où le Coi)fciI de Ca- fiille s'eflioit rendu. Le lendemain de fon airivce le teriament du feu Roi fur lu en la prefcnce des Gtans. Ximenez .lyanc voulu prendre la régence , Adiicn Fioienc Doyen de Lou- vain s'y oppofi , &ù mor-trades providons en bonne fuinie, que l'Archiduc Cb.arlcs lui avoit données dans ie preiîciui- ment de la mort de Ton aycul, Ximencz ayant foutcnu que cci:s commifîlon ne pouvoic l'emporter iur le teftamciit de Ferdinand ni fur celui d'ifa- belle , ils convinrent de s'en rapporter au jugement de l'Ar* chiduc , & de gouverner cependant conjointement. Nonob- flant cet accord , le Caiduia! agit avec une autorité aulfi ab- foluc que s'il n'eull: point eu de collègue , fit proclamer Jean- ne Se l'Archiduc fon tils Rois de Caibik. Ce 1èr vice fut d'aii- DES SCAVANS. 1Ç9 tant pl'JS agréable à ce Prince , que Dom Aloncc Archevê- que àc SzTfzgodc , n'avoic pu faire p-iilcr la mefmc prcpofi- tion aux Eftats d'Arragon. . Charles en confcrva tcujours le fouvcnir -, Se lors que les Grans mécontens lui demandèrent la dépofîtion de Ximencz, bien loin d'y conTcntir , il confirma par des lettres patentes la régence qu'il n'avcit encore confirmée que par des lettres par- ticulières , & de plus ôta toutes les limitations qui avoieat elle miles à ("es pouvoirs. L'autorité fans limites dont il jouiiïbit lui fervirà confcr- vcr la Navarre, nonobftant les citorts que fir le Roi Jean d'Al- ( bret pour la recouvrer. Cette expcduicn donr.a lieu à de ' grandes plaintes contre lui. Les uns publièrent que connoifiant l'injuHice de l'ufurpa- tion, il n'avoit pas dii la tavonf'er -, Se les autres exagercrcnc le rcnverfement de quelques Eglifes. Il repondit à la pre- mière , que ce n'eftoit pas à un fujct comme lui à examiner il Ton Souverain avoir dioit fur un Eftat. Qa.int à la démoli- tion des F.gliles , il dit qu'il les auroit épargnées , G. elles n'a- voient pu fervir qu'au culte de Dieu. Tout lui avoit réullî , ^ il n'avoir point encore reçu de di(^ grâce , lors que Horuc frerc aîné de Barberoude , bloqua Bu- ^ic, prit Alger, & ravagea les côtes d'Efpagne. L'armée que Xmienez envoya contre lui fe divifa en quatre corps qui fu- rent défaits ftparcraent. Quand cette mauvaife nouvelle fuc apporcée en Caftille , le Cardinal répondit fans s'cmouvoir , qu'en cette tenconrre l'ETpagne n'avoit perdu que des gens capables de troubler la tranquillité publique. Quelque foin que prid ce grand Miniftrc pour retenir les peuples de Caftille dans le devoir jufqu'à l'arrivée du R.oi, les murmures & les faélions augmentèrent. Les villes s'allcm- blerent pour en délibérer, &: refolurent de fupplier Sa Ma- jeflé de n'admettre au Confcil , aux charges , & aux bénéfi- ces , que les naturels du pays. Ximenez ne les put appaifer qu'en le chargeant d'écrire en leur faveur. Il le fit , & donna par là le dernier coup à fa fortune. Les Courtifans de Bru- fclles perfuaderent à Chailes, qu'il propofoic fes propres fcB- ^ce LE JOURNAL limens , en feignant «J'ertre rculcmcnc l'intcrfrcte de ceux ^cs peuples : Qu^ii ne fongeoic par là qu'à éloigner du gcu- verncmeiiC les pcrîonnes les plus capables , &: à tenir Sa Ma- jcfhé dans Cd. dépendance. Qi_nnd les Grans deCiiftille furent informez de cette ligue .des Fiamans , ils Songèrent de leur côté à fe foulcver , & ils ne demeurèrent en repos que fur l'aflurance qu ils ejrtnt que le Roi arrivcroic bicnLÔr ea Efpagne. Le Cardinal partit de Madnt pour aller l'attendre , 3j s'a- yança jufqu a Aranda , menant avec lui l'Infant Ferdinand , qu'il n'avoir prefque jamais perdu de vue depuis la mort du ^oi Ton Ayeuî. Eftani arrivé à Bos-Eguil!as il y dîna , & au lever de table fe trouva mal, Leiang qui lu: fortit par les o- rcilles 5c par les jointures des ongles , fit foupçonner qu'il ve- noit d'eltre envpoifonnc. Ce foupçon lut augmente par un iccit que fit le Provincial des Cordelicrs. Les Efpcgp.ols & les Flamans.s'accufcnt mutuellement de ce crime. Le Roi citant arrivé aux Afturies fur la fin de Septembre J j I 7. Xi menez demanda laper miflîon de l'aller trouver, qui lui fut toujours refufcc (bus prétexte de conferver fa fanré. L'excufe eftoit d'autant moins recevable qu'il devoir partir au rnefme temps pour Vailladolid où fc dévoient tcnirlcs Ellats. Il fut chicané (ur le logement qu'il y avoit retenu , &: en fît des plaintes , dont les Flam.ans fe fervirent pour aigrir le Roi contre lui. Ils n'oublièrent rien pour le rendre odieux , & pour faite figner cette terrible lettre qui fut la caufe de fa pore. Charles lui mandoit qu'il cftoit jufte de le décharger du poids des affaires , afin qu'il ne s'occupait plus que du foin de fa fanté , &: qu'il palfaft tranquillement le rcftc de fcs jours dans fon diocefc. A la Icdure de cette lettre fa fièvre redou- bla. Alors détrompé du monde il rappella les grans fenti- meiis de pieté dont il avoir toujours fait profeflion , &: rendit l'erprit le jour mefme 8. Novembre 1517. âgé de quatre- vints ans , vint-deux après qu'il euft cHé pourvu de l'Archevêché' | de Tolède. Ses amis & fcs ennemis avouèrent que jamais i'£f- » pf.gne n avoit perdu un plus grand homme. A Paris chez Jean Cusson , rue S. Jaques, à l'Image S.Jean Bjpt. XXVr. jor LE JOURNAL DES SCAVANS Du LuNDT 6. Juillet M. D. XCIII. ABREGE' DES PRINCIPAUX TRAITEZ DE LA Theoloqie , contenant ce quily a de plus necejfaire dans la Théo- logie pour la connoijjance des verttez^de L Religion Chrétienne. Jn ^. à Paris chez Jaques Villery, 1693. CEt ouvrage qui n'avoit cfté fait que pour un particulier, a cfté )ugé propre à tous ceux qui n'eftant pas Théolo- giens de profcfîîon , veulent néanmoins pour leur propre fanâification s'inl^ruire des ventez de la religion Chrétienne, &L mis au jour depuis la mort de l'auteur , qui durant fa vie s'eftoit fait connoiire par d'autres ouvrages qui font encre les mains de tout le monde. C'eft un abrégé où il n'a pas compris les queftions les plus cpineufcs , parce qu'il ne l'a pas cru nccelîaiic pour la fia qu'il s'eltoit propofée. Dans la première partie divifée en cinq traitez , il expli- que ce qui s'enfeigne dans les Ecoles de l'cxiftienie de Dieu, de fa nature , & de Ces attributs ; &: à l'égard de la Trinité des Perfonnes , il fc contente d'établir ce que la foi en dé- couvre. Dans la féconde partie qui eft des créatures , il parle de la ^693- Gggg 30» LE lOURNAL crcjtion du monde , des Anges , de l'homme , de fa chute, de fa réparation , & des Sacremens. £n expofant ce qui Te dit du minifterc des Anges , vl n'a pas omis les neuf Ordres où ils ont efté rangez par l'auteur de la Hiérarchie Cciclle qui porte le nom de ifàint Denis Arco- pagicc , &: par faint Grégoire I. dans la trente quatrième ho- mélie fur les Evangiles. Mais il ajoute qu'en tout ccU il n'y a rien de certain. Il n'a point fait de traitez particuliers de l'extrcmc Onction, de l'Ordre, ni du Mariage , parce qu'U a cru qu'il ii'y avoic aucun dogme à établir touchant ces trois facremens » &c que ce qu il avoit dit des facremens en gênerai , fuffifoit à cet é- gard. Mais il a traité avec beaucoup d'cxailitude du Baptê- me , de la Pénitence , & de i'Eucanibe. Dans la dernière partie , qui cft du Rédempteur , il fait «e» abrège de tout ce que faint CiriUe d'Alexandrie a écrit con- tre Ncftorius. MEMOIRES DE MATHEMATIQUE ET DE PHYSI- ^ue , tirez^des Rngt/irsi de- 1 Académie Kayitle dei Sdeecei. Du jo Avril j6pj. Jn ^. à Paris chez Jean AniiTon , rue faine Jaques. 1693. IL y a cette différence entre ces Mémoires &r les atJtres qui on: paru auparavant , qu'au heu que ces derniers contien- nent de pctis traitez entiers, les premiers ne contiennent qu'un extrait du fécond recueil que Mrs. de l'Aeademie Royale des- Sciences viennent de mettre au jour. Tous les ouvrages dont ce recueil efl; compofé , font confi- derablcs , & les noms feuls de leurs auteurs qui font M. Fre- nic'c , M. de Roberval , M. Hugens , M.Pvcard , & M.Au- 2out , fuffifcnt fKjur les faire eilimet. On trouve dans l'extrait pluûeurs circonftances de la vie de M. Frenicle , & de celle de M. de Roberval , & du pro- grés de leurs études.. On a imprimé au mefme temps &: en mefme volume que ces Mémoires , des obfervations faites, à la Qiine par les PP. DES SCAVANS. jo} de la Compagnie de Jefus , avec les notes du P. Gouye de U mefmc Compagnie. CODEX JURIS GENTIUM DIPLOMATICUS , IN quo tabula authentica affuum puhlicorum , traliatuum , alia- rumque rerum wajoris momenti per Europam ^eflarum , plereequt inedHie , vel [eleita , ipfo verborum tenore exprejjic , ac tcmptf» rum ferie àigefix centinentur, A fine faculi undeami ad voflrtts, t^- monuwennt reyorttm aliorumque archivorwm , ac propriis denique celleUaneiS ediàit G.G. L. lîifolto. Hannovera. 1693. LE nom de Code a eRé donné ici à un recueil d'a£tes de pltifieurs nations , comme il a cfté donné ailleurs à des recueils de lolx , & à des recueils de canons Pariîîi les a(î}c$ qu'il conciendra, il y aura des eoneradsde ma'-iage, des teftâ- inens , des adoptions , des tranfadlions , des ventes , des Co- ciecez de navigation & de commerce , des cartels de défi, àts déclarations de guerre , des manifeftcs , des ekdionS , des inveftirures , des hommages , des dirpcnfcs , des privilè- ges, des crevions de principautez. La plupart de ces ades avoicnt efté enfèvelis jufqaes ici dans les ténèbres des Biblioteques j & ceux qui avoient vu \o jour cftoient devenus fort rares. Ce qui efl prêt d'eftre inv primé , & qui paroitra à la première foire de Francfort, vien- dra jufqu'en l'année 1 500. Le relie fuivra incontinent après. Ceux qui ont quelques pièces propres à entrer dans ce deC- fein , obligeront le Public s ils ont la bonté de les communi- quer à M. Leibniz, l'un des plus fçavans hommes de 1 Europe & à qui nous fommes obligez de ce travail , où fon exa- ditude BOUS fait trouver des pièces très rares, au nombre àcC- quelles on peut mettre le traité pafle à Eftaples en 1492 entre Charles VUL Roi de France , & Henri VIL Roi d'Angleter- re , qui n'a point efté inféré dans l'ample recueil que Frédéric Léonard a publié depuis peu detemps. 11 eft énoncé dans l'In- ventaire de du Tillet, J 3©^ LE JOURNAL LETTRES QUI DECOUVRENT L'ILLUSION DES rhilufophei fui la B'gHttte. m J2. à Pans chez Jean Bou- dot , rue faine Jaques. 1693. x.«-y-»-» '~>*^ ^yfj r^l -c-^-i , fc T'Ai déjà parle de ce qui cft contenu dans les premières Icc- •f ^'^ J cres de cet ouvrage. Il ne me relie plus qu'à ajouter quel- que chofc de ce qui fe trouve dans les fuivantcs. L'auteur y entre dans les fentimens du Pcrc Qiiirket , qui foutenoitquc quiconque connoitra la maiiierc donc les corps agilfcnt les uns fur les autres , & ce qu'ils peuvent exhaler , ne dira jamais que les v.ipcurs qui fortenc des métaux , peuvent faire tour- ner une baguette qu'un homme ferre de fes deux mains. Mais il lescclaircic par des reflexions &r par des expériences qui lui fervent à répondre à plufieurs difficultez, &: à faire voir que le mouvement delà baguette ne peut eftre comparé à celui de l'eguille aimantée qui fe tourne vers le Nort. Il prouve dans une autre lettre que ce n'eft pas une caufe rnacerielle qui fait tourner la baguette , &: qu'il n'eft pas poflî- ble d'en alTigner une par laquelle tous les phénomènes fe puif. fcnt expliquer mécaniquement. Q^e fi le mouvement de la baguette ne peut eflre attribué à aucun corps , il en tire cette eonfequcnce qu'il doit necefiairement eftre attribué à quel- que efprit. C'eft le fujet de la fixiéme lettre , où par uneana- Jiie de ce que la raifon & la foi nous enfeignent touchant la nature des efprits , l'auteur prétend montrer, ou qu'il n'y a que fourberie dans l'ufage de la baguette , ou que l'erfet cft produit par une intelligence déréglée. Les dernières lettres (ont deiiinées à répondre à quelques objedions , &: à con£rmer ce qui a efl^é avancé Touchant le fcntiment de laint Augullin &: de plufieurs autres auteurs. Il y a auflî dans cet ouvrage deux lettres de l'auteur de la Recherche de la vérité , une de M. l'Abbé de la Trappe , a- vpc un jugcmenc de M. l'Abbé Pirot fur cette matière. Traductiom DES SCAVANS. 305 TRADUCTION NOUVELLE DES SATYRES DE Peife en ven François , avec des remarquei fur ki p-^ff-'ges \ les p.tis difficiles. Par M. de Silvccjne , Prefïdent en /al Cour des Monnayes , Commiffaire General de Sa Maje/îé en Le- dite Cour au depurtewcm de Lton ^ (^autres provinces, anccn Prevoji des Marchands de ladite ville. In 12. à. Lion. & fe trouve à Paris chez Florentin & Pierre de Laulne. 1 69 3. DE rous les Poëtes qui ont comrofc des Hitires contre les vices de l'ancienne Rome , Perfe a elle le plus fçavant. Eltanc né avec de grans biens 5^ avec un heureux naturel , il fut élevé avec foin par le Philofbphe Cornutus , & apprit de lui les maximes des Stoïciens , qu'il rrouva fore conformes .\ la feverité de Ton humeur. Les (îx fatircs qu'il a laifl'ccs , &: aufquelles le peu de temps qu'il a vécu ne lui a pas permis de mettre la dernière main , font remplies des dogmes de cette fède. Ses expreflïons font violentes & hardies , mais obfcu- res , & fouvent peu intelligibles. Peut- eltre que les com- mentaires des anciens qui ne font pas venus jufqu'à nous, y avoient apporté du jour & de la lumière. Mais ceux de la plus grande partie des modernes n'ont fait qu'en augmenter les ténèbres. Cafaubon les a plus eclaircics que nul autre. M. le Prefident de Silvecane a achevé de les difilper. Sa tra- dudion a découvert toute la penfée de Perfe , bc fes remar- ques en ont dévelopé la beauté &: \ts richefles. MISCELLANEA ITALICA ERUDITA. TOMUS Tertius. CoUeq^tt Gaudentius Robenus , Carm. Cong. Jn a. Parmce. & fe trouve à Paris chez Jean Aniflon , rue faine Jaques. 1693. J'Ai parlé ailleurs des deux premiers tomes , où le P Gau- dentio Robert! a recueilli plufieurs traitez qui eftoient de- venus fort rares. 11 y en a dix dans ce troilîeme tome. ]_ci deux qu'il a mis à la telle font de Pierre Léon Cafella , & re- i . j L pcuprés le mefme fujet. L'un a pour titre : Italu 1693. Hhhh 3o5 L E T OTJRNAL vel de ahorifijnibus f^ j inigcnh pnmti li.di^ ccloflis. Cifclla affû- te fur la foi de quelques auteurs , que cent huit ans après le déluj^e , & vint- trois ans avant la conftrudion lie la tour de Babel , Janus arriva en Italie , y bâtit des villes , & y fit de bonnes loix. S'il eft vrai qu'il y (bit arrivé avant la confufion des langues , ceux qui y habicoicnt avec lui p.irloicnt la lan- gue qui tftoic feule en ufagc depuis le commencement du nionde. L'autre traité de CafcUa a ce titre : De Tu fi orum origine , colonntu , ^ revubltca Florentina. Ce traité eft diviié en chapi- tres. Dans le premier Cafclla dit que Sabatius qui avoir cfté favorablement reçu par Janus en Italie , alla par fon confeil jetter les fondemens d'une nouvelle ville qu'il nomma Fl»- rence. Dans les chapitres fuivans il décrit les difFerens cftars de fa fortune au temps des Gots &: des Lombars , avec les effort* que firent les Empereurs pour ralTujettir à leur puifTance , &: la vigoureufc rcfiftance qu'elle fit pour conlcrver fa li- berté. Il touche aufli quelque chofe des affaires Ecclefiafti- ques , de la tranflation du fiege Epifcopal , & de la fucceffion écs Evêqucs. Le traité qui fuit eft des loix. Paul Manuce qui en eft au- teur , le détacha de pluficurs autres dont il mcditoit de com- pofcr un corps des antiq litcz Romamcs. Il pourroit fervif de préface au corps de Droit ; &: les jeunes gens qui font de- ftinez à l'étude de la Jurifprudence , & qui en le lifant au. roient appris par quelles loix les Romains furent gouvernez par les Rois, par les Confuls , & par les premiers Empe- reurs , entendroient beaucoup mieux celles qui ont elle de- puis en vigueur , &: qui ont efté rédigées dans les livres du Digcfte , & dans ceux des Codes. La metode que Manuce garde dans ce traité eft naturelle & aifce , parce qu'il y fait un dénombrement gênerai de tou- tes les loix qui ont cfté en ulage parmi les Romains depuis la fondation de leur ville jufqu'aux premiers lîeclcs de leur Em- pire. Pour rendre ce dénombrement plus incelligible , il fepa- DES se A VANS. 507 tt les matières -, &: fiipporanc que tout droic vient eu de la na- ture , ou de la courume , ou de la loi , il avertit qu eiitre les loix il y en a qui regardent TtlUt delà communauté, &: d'au- tres qui ne regardent que l'utilité des particuliers. De là naît la diftn dion du droit public & du droit p.u'ticulier. Le premier a deux parties , dont l'une rci;le les chofes de la Religion, &r l'autre les temporelles. Le fécond a aufll deux parties , dont l'une difpofe des affaires civiles, & l'autre pu- nit les crinies. Suivant cet ordre Paul Manuce commence par les loix qui concernent le droit public , pour venir enfuite à celles qui concernent le droit particulier. hcs loix qui concernent le droit public furent faites les u- nes par les Rois , & les autres par les Magiltrats , depuis que la Royauté eut efté abolie par Brutus , &: la liberté intro- duite. Entre les loix que Romulus fit touchant le droit public , il yen eut une par laquelle il ordonna que les murailles de la ville feroicnt racrées& inviolables , &: défendit d'entrer ni de fortir par un autre endroit que pat les portes. Il en fit une autre pour défendre de rien entreprendre tou- chant les affaires publiques , fans avoir auparavant confulté les Augures 11 n éleva que les Patrices à la fou verai ne fa cri- ficature & au facerdoce , &c exclut le peuple des fondions qui regardoicnt les facrifices & le culte des Dieux. Il défendit très cxpreflemcnt de veiller la nuit dans les temples, de peur qu'à la faveur des tencbtes il ne s'y palValt quelque chofc de con- traire à l'honnêteté. Il défendit d'ajouier foi aux narrations fabuleufes touchant les Dieux , & enfin défendit le culte des Dieux Etrangers , à la referve de Faune. Numa qui lui fucceda , s'appliqua particulièrement à l'ac- croiflement de la Religion , & augmenta le nombre des Prê- tres qui n'avoient cfté que foixante fous le règne précèdent. 11 inftitua aulli quatre Veltales , & fie d'autres reglemens tou- chant le culte des Dieux. Les Rois fes fucceffeurs en firent auffi quelques uns Lors que Tarquin le Superbe fut chaffé , les loix furent ^ 3o8 LE JOURNAL bolies , & le peuple Romain ne Ce conduific par aucune règle certaine. Vint ans après il envoya dix hommes choifis en Grè- ce pour emprunter les loix des plus fages Conimunautez. 11 ell probable que parmi les loix des douze tables , il y en avoir p'utîeurs qui rcgardoient le culte des Dieux. Mais le long temps en a tellement effacé la mémoire , qu'il en refle peu de velligcs. Il y a quelques fragmens de celles qui tou- chent l'eledion des Prêtres La loi Romili t elloit la plus ancienne , qui ordonnoit que les Patnces î<«f les Magiltrars exerceroient fculs les fondions «jui concernoient le culte des Dieux , l'ans que les pcrfonnes du peuple y pufl'cnt avoir aucune part. La loi Sextia L'cinijt changea cette difpofition , & ordonna ^uc les Decemvirs qui avoient foin des chofes faintcs ne fe- roient plus tous élus comme auparavant d'entre les Patnces , mais que cinq feulement feroient élus entre les Patrices , &: cinq entre le peuple. La loi Ozulnia augmenta le nombre des Pontifes, &: ordon- na qu'il y en auroit quatre qui feroient pris d'encre le peuple, comme les quatre anciens l'avoient elle d'entre les Patnces. La mefme loi fit à peu prés la mefme chofe à l'égard des Au- gures. Cn. Domitius Tribun du peuple, l'un des ancêtres de l'Em- pereur Néron , propofa dans l'année du troifiéme Confulat de ^larius une loi par laquelle il transfera au peuple le droit de choifir les Prêtres , &: peu après fe fit élire fouverain Pontife par le peuple. Silla ayant ufurpé un pouvoir abfolu dans la Republique , çta au peuple qui avoit fuivi le parti de Marins , le droit d'eli- re les Prêtres. Mais peu d'années après Labienus abrogea la loi de Silla , comme Silla avoit abrogé celle de Domitius j & ce fut par le peuple que Jules Cefar fut fait Grand Pon- tife. La dernière loi que Manuce rapporte touchant la Religion cîl celle par laquelle les Prêtres eiloient exemts d'aller à la . guerre , à moins que ce ne fuil contre les Çaulois. Les Pre-, 1 ces DES SCAVANS. 309 %rcs n'uroicnt pas tous de cette exemtion , &: {ouvcnc ils fervoient dans les armées bien qu'ils n'y fulfcnt pas obligez. Les Loix qui prefcnvoicnc l'ordre des Jeux , doivent iui- vrc celles qui prefcnvoicnt l'ordre des chofes l^^aices , par la raifon que les Romains ne ceîebroient point de jeux Hins of- frir des facrifices. La première que Manucc rapporte , eft celle dont parle Macrobe dans le premier livre des Saturna- les. Dans le temps , dit-il qu'Annibal eftoit en Italie à la refte d'une formidable armée , Licinius V^itus confcil'a de faire vœu à Apollon de célébrer des jeux en fon honneur s'il chaffbit ces étrangers. Le confcil fut iuivi , les Jeux ordon- nez , & depuis ils furent perpétuels. La loi Titia Corneha ttéfcndoit de jouer de l'argent , fi ce c'eft aux jeux qui dépendoient de l'adrefle , comme fout ceux du palet , de la lutte , & de la courfe. Après les loix qui règlent ce qui touche la Religion , Ma- nuce vient à celles qui rendent ce qui touche les Magiiîraîs , les armées , & les aucres chofes publiques. La pcemierc loi qui regarde les Magiftrats eft celle que fît Romulus , & que tous les Rois Ççs fucceiîeurs obfcrverent , de tirer les Magiitrats des familles des Patnccs , à l'exclu- fion des familles du peuple. Plufieurs temperamcns furent depuis apportez à cette Loi pour confervcr la tranquillité pu- blique , & pour éviter les feditions que le peuple privé des charges & des emplois , eftoit preli: d'exciter contre les grans. L'honneur du triomphe eftoit ce qu'il y avoir le plus écla- tant dans la milice Romaine. Ceux à qui il eftoit décerné , lîc dévoient point entrer dans Rome avant leur triomphe. La raifon eft que ceux qui avoient efté chargez du commande- ment de l'armée , s'en demcttoient en rentrant dans la ville, & que les vainqueurs le dévoient conferver durant la céré- monie de leur triomphe. Pour obtenir cet honneur , il faloit avoir tué au moins cinq mille des ennemis dans le combat , &: avoir perdu un mom- dre nombre des iîens. Il f'ioit aufli avoir fait des conquêtes , &: ilne fuffifoit pas d'avoir répiré les pertes. ^c l'on tirera ae ce lieu l'égalité qui exprime Tes foûcangentes. Ce lieu , cette éga- lité , &: régaliié donnée exprimeront un prob'ên-ic donc les inconnues iont , ou de le chercher par exclufion ; & il cft toujours cerrain qu'en prenant un dcgîé plus clevc qu'il ne faut , la nictode donnera le heu qu'on demande, fans- qu'il foit ncceiraire de faire une féconde tentacive. Voici une autre voye peur trouver ce degré. Il cH: facile de fçavoir com- bien de termes & au delà , peut avoir chaque inconnue a, et, dans !c lieu que l'on cherche -, & s'il y en avoir de fuperiîus , la metode les découvriroit. Ainll il n'y a qu'à prendre autarc de femblables termes ou davantage pour le lieu fuppofé , ^ ayant marqué le degré de chacun par une indéterminée , il fera aifé d'y accommoder la mctodc. Cela c'a encore utile pour trouver par ordre tous les cas particuiiçrs poiîibics , lors que l'cgalité propofcc renferme des quantitcz conçues en ter- mes généraux , ou bien des quamitez indéterniinécs. Quoi que cette invcrfe des tangentes foit tirée des régies générales de l'Algèbre , je ne laiflerai pas de vous en envoyer la démon- ftracion , &c de l'expliquer par des exemples. DES SCAVANS. jr}: JOH. CHRISTOPH. STURMII P. P. MATHESîS ENtT- cUata , eu jus pracipua contenta fnb finem pr^fationis , uno qtiaf obtutu fpeiiandd exhihcntur. In jz. Norimbcrga, EN T R E tous les ouvrages que M. Sturm a compofèz joC- ques ici , il n'y en a aucun donc il cfpcre que le Public puifle recevoir autant de fruic que de cet abrégé de Marem.i- tique démontrée par une mecode fimple , courte , & dégagée d'un long enchaînement de propofitions & de confequences qui mettent de la confufiûn dans les plus excellens ouvrages dEuclide , d'Archimede , d'Apollonius, &: donnent quel- quetois du dégoût à ceux qui les Iifcnr. Ce n efl: pas qu'il ne reconnoilTe la fi)rcc invincible de leurs preuves , & la necclfiré du confentcmerit qu'elles jmpofenc aux efprits les plus rebelles. Mais c'cfl; qu'il eft perfuadéquè' d'illuflres modernes, entre kfquels il nomme Vieta &: DeA cartes , ont hcurcufcmcnt enchéri fur leurs inventions quand ils ont joint l'cvidencc à la certitude , & qu'ils ont établi aufîi folidement qu'eux les mefmes vericez j mais^ moins defrais,» avec moins d'efprit ^ &: plus d'ordre. Suivant donc cette nouvelle metode j Gomrr.'e la plus fure, il prouve quiiniré de propcfitions d'Euclide , d'Archimede , & d'Apollonius parles feules définirions qu'il propofe. Déplus il démontre les principaux théorèmes de ces anciens par des principes plus propres &c plus direftes que les leurs ; &f enfin il commence toujours par les notions les plus générales & lc$' plus communes > d'où il fait fortir les particulières, , Il renferme tout fon fujet en deux livres , dont le premier compofé de fept chapitres , traite de la compofition &c de U^ diviGon de tout ce qui confiflc en quantité , des proportions , â.çs puiflanccs des cotez du triangle &: des autres figures regu-' lieres ; &: le fécond des propriété z des ferions coniques , des cfpaccs paraboliques , hipcrboliques , & elliptiques , & des lignes fpirales. L'introduQion à l'analife fpecicufe qui eft à la.fin ferc de concluGoni & comme de couronnemcnc à cotfE' l'ouvrage. 314 LEJOURNAL MISSIONARIUS, SIVE VIR APOSTOLICUS IN SUIS excurfiombtti fvintuaUbui in urbihui (^- oppuiii , ad De: glotiam Ô" faluicm antmauitn fufceptii , t^c. Auliore P.Jucoho Tiran^ £cc.J:fu. In S. 2 vol. Ltiiduni. &i à Paris chez Edme Cou- tcroc. 1692. LE Prédicateur qui donne ces fermons au Public, les a compofcz pour le foulagement des Miflionnaires , donc Je ftile fimple &c familier lui paroit incomparablement p'us propre à rinllrut^ion des peuples , que les difcouts élevez d'u- ne éloquence &; d'une fagclle hiunaine déployée avec pompe Si cflencation dans les grandes chaires. Il V établit le» vêtirez de la morale Chrericnne non fuv de fubtils raifonnemens , m.i\s fur les principes folides dcl'Ccri- nirc & de la Tradition , &: y fuit à peu prés le mcfmc ordre que le fondateur de U compagnie s'y clîoit prefcrit dans fcs exercices fpirituels. Des cinquante 6c un fermons dont il a rempli ces deux to- mes, il a marqué ceux qui peuvent cftre prêchez les diman- ches de Tanncc , &: les jours du carême &c de l'avent , & eij proniet d'autres pour toutes les fcftcs des Saints. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMtZ. l-Ufloire ttniverfeP.e de Trcgue Pompée , réduire en abrégé pat ij^fiin. Traduction nouvelle. Avec des remarques. Jn 12. z.vol, à Paris chez Thomas Guillain. 1693. Dcfcription des plantes de l'Amérique. Avec leurs figures. Par le R. P. Cbarles Plumier , Religieux Minime. In folto. de l'Im- fnmerie Royale. & fe trouve à Paris chez Jean Anifl'on. 165)5. A PARIS, .Chez Jean Cusson j rue faint J.iqucs , à l'Image de (aint Jean Baptille, Avec Privilège du Roy XXVIII. 3îf LE JOURNAL DES SÇAVANS. Du LuNDT io. Juillet M. D. XCIII. MISCELLANEA ITALICA ERUDITA. TOMUS Qu^^irtus. CoUegit Gaudentius Robertus , Carm. Cong. Jn ^. J?arm<£. & fe trouve à Paris chez Jean Aniflbn , rue faine Jaques. 1693. LE Perc Gaudentio Roberti a commencé ce quatrième recueil par un traité de Comitiis Romanorum , qui devoit entrer dans le grand ouvrage des Antiquitez Romaines de Taul Manuce , aufli-bienque le traité des loix Romaines, dont il n'y a que qumze jours que je donnai l'extrait. L'auteur ayant e(té enlevé du monde avant que d'avoir pu mettre la dernière main à ce traité , Aide Manuce Ton fils , fuppléa ce qui y manquoit , &: le publia en i 59 j. L'ordre en efl: fort naturel. Car comme le peuple Romain s'aflembloit ou per tribus , ou fer curias , ou per centurias , il y eft expliqué fort clairement ce que c'eftoit que ces tribus &: ces centuries. Trois Rois diftribuerent le peuple Romain en trois maniè- res. Romulus le diftribua en trois tribus, fçavoir m Ramnenfes, Titienfes é" Luceres. Ceux de la première tribu furent appeliez Rarnnenfes , du 1693. N nn n 3i6 LE JOURNAL prcnom deRomuIus. Ceux de la féconde furent appeliez Titienjes , de Ticus Tatius Roi des Sabins , & ceux de la troi- fic-mc furent appeliez Zucercs , à Ltico az^yli , ou du bois où Romule adcmbia toute forte d'Etrangers. 11 divifa chacune de CCS tribus en dix parties , qui furent appellées Curia:. Tarquinius diftnbua le peuple Romaui en llx tribus ; &: pour cet effet de chaque tribu il en fît deux , fçavoir Rammri' fes primas ^ fecundos , & ainû des deux autres. Servius Tullius diftribua le peuple en trente tribus , & depuis elles furent augmentées jufqu'au nombre de trente- cinq. Quant aux centuries , Romulus en inrtitua trois , & leur donna les mcfmes noms qu'aux tribus. Chaque centurie ne fut alors que de cent hommes à cheval. Le nombre en fut augmenté par Tarquin de mefme que des tribus. Mais il le fut encore davantage par Servius Tul- lius qui dilînbua tout le peuple en fix claflcs , & mit dans \x première 98. centuries , dans la féconde vint- deux , dans la troifiéme vint , dans la quatrième vint- deux , dans la cin- quième trente , & dans la fixiéme une feulement. Le nom- bre de toutes ces centuries montoit à 185. Manuce explique ce que ces affemblées du peuple Romain avoient de commun. Car premièrement il ne fe tenoit point d'affemblée à moins qu'il n'y euft un Magiftrat pour y préfi- dcr , eu au moins un homme conftituc en grande dignicc, tel qu'eftoit le fouvcrain Pontife. Qiiand ces aifemblées fe faifoient pour créer des Magi- flrats , elles fe tenoicnt dans le champ de Mars. Quand elles fc faifoient pour propofcr des loix , elles fe tenoient dans le marché. Elles ne fe faifoient pas tous les jours , mais feulement en ceux qui efloient appeliez Profe/ii , &: qui fc divifoient tnfa^ fios , conntialci , comperendinos , Jîatos , ^ pr.tliares. Il explique enfuite ce qu'elles avoicnt de particulier, & ce qui s'obfervoit quand le peuple eltoit allemblé par tribus . & ce qui ne s'obfervoit pas quand 1! eltoïc allemblépar cen- turies. DES se A VANS. 327 Le fécond traité que le P. Gaudcntio Roberti a mis dans ce volume , avoit e(lé imprimé en 1592. fous ce titre ; De Gallorum Cifalfmorum antiquitate dr origine , Gaudentio Mcrula auclore. Le premier livre contient la divifion générale des Gaules , & la dcfcription générale de la Gaule Cifalpinc. Le fécond livre fait le dénombrement des peuples qui 1 habitent , & ce- lui de fes montagnes , de fcs rivières , &: de fes lacs. Le troifiémc examine plus particulièrement l'origine des habirans , 6^ s'étend fort au long fur les antiquitez de Milan', fur la nobleffe de fes fondateurs , fur fon alliette , fur la ma- gnificence de {q^ bâtimcns , fur fa puiU'ance , & fur fes ri- ehefles. Le traité fuivant a pour titre : Opinionumjoannis Marii Mai- tii Brixiani vin eTudtttffimi , lié ri très , in qiiibus pturima locaau- Bornm Latinorum ^ Criccorum , haîienm a, nuUo traïiata , aut non rdie expofita expiicantur , aut corrupta emendantur. Il y a quantité de corrcélions hardies faites fur de fimples conjedutes , & fans l'autorité d'aucun manufcrit. J'en don- nerai ici un exemple. Mattius a vu quantité de manufcrirs de Properce où fe trouvent ces deux vers de la yintiéme élé- gie du troifiéme livre : Non quantum ferro , tanttim fietate patentes Stamus : vifirices tempérât ira manus. Cependant il ne fait point de difficulté de dire qu'au lie;S dVnï , il faut lire lia. Sa raifbn eft que la colère , bien loin de donner de la modération aux vainqueurs , ne fait qu'auo-- menter leur infolence. Il eft perfuadé que le Poëtc avoit '] écrit ila , félon la coutume des anciens qui ne doubloicnt pas ' les voyelles , ce qu'un copifte ayant remarqué depuis dans un temps où l'on les doubioit , il a cru que c'eftoit une faute, & a écrit ira au lieu êiila. Le dernier traité eft à peu prés de mefme nature. Le titre en eft conçu en ces termes : Jofephi NeniJ. C. Anahcta , m quihus prater ea quai ad jui pertinent , varia tam in fucra quam in pophana hijioria , ^ quadam in Tacïto expliçantur , iliujirantur^. tmendantur. 3i8 LE JOURNAL Entre les reftitutions que l'auteur fait dans Tacite , en voici une qui paroit hcureufc. Les paroles font du quatorzième li- vre des annales , chap. 6 1 . I(ur ettam in Principn lauda repe^ titum vsnerantium, 11 n'y a point là de fens. L'auteur en trou, ve un fort bon en lifant , Venere Antium -, &: pour rendre la ledurc indubitable , il prouve que Ncron de qui Tacite par- le en cet endroic-là , n'cftoit pas alors à Rome , mais à An- tium. DESCRIPTION DES PLANTES DE L'AMERIQUE, avec leun figures. Par le R. P. Charles Plumier , ReligieuM Minime. In folio, de l' Imprimerie Royale , & fc trouve à Pa- ris chez Jean Aniiron. 1693. LA ville de Marfeille a produit de temps en temps des voyageurs curieux , comme Pitheas fçavant en Matc- matiques , Eutimene célèbre par les découvertes qu'il a faites dans le Nort , Vincent le Blanc qui parcourut prefque tout l'Orient , Bermont qui fit imprimer à Rome la relation de fes voyages au Levant il y a peu d'années , &: la dédia au Pape Innocent XL Le P. Plumier Religieux Minime , né dans la mefme ville, communique aujourd'hui au public un premier volume de ce qu'il a vu de plus rare dans les Antilles touchant l'hiftoire na- turelle des plantes. Ce furent les démonftrations qu'il en vit faire au Père Phi- lippe Sergeant Minime, &c à François au Ontiphriis Médecin dans le convcnt de la Trinité du Mont pendant qu'il eftoit à Rome , qui lui donnèrent le premier goiit de la Botanique. Il quitta dés-lors comme infenfiblement les Matematiqucs, auxquelles il s'eftoit toujours plus adonné qu'à nulle autre fciencc 5 & quand il fut de retour en Ton pays , il obtint de Ççs Supérieurs laperraillion de parcourir les côtes de Proven- ce , bL les montagnes des Alpes , pour y chercher ce qu'il y a de plus curieux en matière de plantes. Il avoir mcûne refolu d'en commencer un recueil gene- xal lors qu'hetbonfant le long des côtes de Marfeille il trou- va DES SCAVANS. 319 ^Si îoccafion de faire le voyage de l'Amérique avec M. Su- cian. Le fejour de deux ans qu'il fît dans les Antilles en deux voyages , lui fournit de quoi fatisfaire fa curiofité. Il y defli- na prés de fix cent plantes différentes dans leur grandeur na- turelle. Il les a depuis gravées lui-mefme. Il donne le fîm- ple trait fans ombre de celles qui font dans ce volume , afin que le coloris y puiffe cftre plus facilement ajouté. Il les décrit en peu de paroles , fins néanmoins omettre ïien de ce qui eft neceffaire pour les faire connoitre. Pour en faciliter l'intelligence, il les a rangées fous des genres con- nus , &: a divifé ces genres-là en trois claifes. Dans la pre- mière font les fougères , les hcmionires , les polipodes ^ les langues de cerf, & les capillaires. Dans la féconde les Arum, &c les Dracontium , aufqucUes le P. Plumier a joint un nou- veau genre , qu'il appelle Saururus , à caufe de la reffemblan- ce que les plantes qu'il range lous ce genre ont avec la queue d'un lézard. Dans la troifiéme les periploques , qui font les plantes qui grimpent |aux arbres. Entre ces plantes il y en a quelques-unes qui fervent à la Médecine. L'Arum montant eft fouverain contre la morfure des bêtes venimeufes. Auili en trouve- c- on beaucoup dans la Martinique, qui efl: infedée de vipères très dangereufes. La Liane à ferpent guérit leurs morfures , fi on en pile la feuille , & qu'on l'applique fur la partie bleffée. La racine efl fouverainc contre la gravelle , & un Médecin Portugais ^*en fervoit avec grand fuccés. LaCoIocafia montante , (lerile, à larges feuilles, efl: un vio- lent cauftique. Le P. Plumier ayant voulu en goûter , à pei- ne eut-il mordu le bout de la tige, qu'il fcntit fa bouche s'en- flammer de telle forte , qu'il fut prés de deux heures fans pouvoir parler. L'oxicrat diminua l'inflammation : mais il fut plus de dix jours fans avoir aucun goût de ce qu'il man-- geoit , tant l'Acrimonie de la plante lui avoic brûlé la langue ,& le palais. Le fuc epaiffi du Liferon marin eu un bon purgatif Aufîi 1693. O o o o 3 30 LE JOURNAL cft-ce une efpece de Scamonée donc on peut prendtc lamef- me dofcque de la fcamonée ordinaire. JOBI LUDOLFI COMMENTARIUS AD HISTORIAM fuam yEihioptcam. In folio. Francofuiti, 1 T L y a douze ans que M. Ludolf mie au jour fort hiftoire J d'Echiopie , qui fut au(îi-tôc traduite en François , en An- glois , &: en d'autres langues. Il y joint maintenant un com- mentaire compofc de nouvelles obfervations , de relations da pays , de lettres écrites par des Rois d'Ethiopie , & par des particuliers , &: de plufieurs ades autcntiques. Le commentaire fur le premier livre de l'hirtoirc commen- ce par une longue dilîertation touchant le temps auquel les Abiflins payèrent d'Arabie en Ethiopie. Il y eft prouvé coii- tre Scaliger , que ce ne fut pas depuis l'Empire de juftinieD-, mais plufieurs fiecles auparavant. L'auteur y découvre des fautes groflïcres que les Geografcs ont faices en marquant les bornes de TAbaflie , & propofe ui alphabet vmiverfel , par lequel il fe figure que toutes les na- tions du monde pourroient écrire chacune en leur langvie. Se fe communiquer mutuellement leurs penfces. En parlant de la zone torride , des peuples qui l'habitent , &: des pluyes qui y tombent , il foutient que ce font elles qui donnent naillance à toutes les fontaines & à tous les fleuves , & que cette opinion eft appuyée fur le premier chapitre d« l'EccIefiafte. Il décrit enfuite la fource du Nil , fon cours , fcs canaux , fcs embouchures. En décrivant les animaux de l'AbafTie , il s'étend fur les ^ faucerelles , montre qu'elles font bonnes à manger , que faine Jean Baptifle s'en nourrit , & qu'avant lui les Ifraelites en vé- curent dans le defert , & que c'eft encore aujourd'hui un ali- ment ordinaire aux Indes , à la Chine , &C en Afrique. Quand il parle des habitans du pays , il les loue de la bonté de leur naturel , & de l'excellence de leur efprit j ce qui eft caufe que ceux de leur nation qui font pris en guerre fe ven- dent plus chèrement que les autres. DES SCAVANS. 331 Enfin il promet un long traité de la langue Ethiopienne , où il montrera combien elle peut fervir à l'intelligence de l'Ecriture fainte. Sur le fécond livre il entre en dilpute avec M. Bocharc. Car bien qu'il convienne avec lui que les Cuféens eftoieuc Arabes , il défend pourtant contre lui les Septante qui ont tra- duit le mot de Cuféens par celui à'Eihiopiem , félon l'ufagç de leur temps. Au mefme endroit il examine le nom de Prête-Jean, &ies autres qui ont eflé donnez en Europe aux Rois d'Abaflîe , &c rejette les faux catalogues qui ont elle faits de ces Rois-là. Il décrit plufieurs cérémonies qui s'obfervoienc autrefois à leur Gouronnemenc , & qui ont efté abrogées comme inutiles j parle de la jurifdidion qu'ils prétendent exercer dans les affai- res ecclefiaftiques , & de la dureté avec laquelle ils gouver- nent leurs fujets , & par occafion eclaircic très bien l'hiftoire du Roi Caleb, &: le martyre d'Aretas rapporté par NicephorC Callixte , au 6. chap. du 17. livre. A la fin il infère un eftat prefent de l'Ethiopie , dreffe fur des mémoires qu'il reçut de la Meque en i6 8y. & fur ce que M. Tavernier lui en avoic raconté de vive voix deux ans au- paravant* Sur le commencement du troifiérrie livre il rapporte quan* tiré de pratiques obfervées non feulement par les Abiflins, mais auffi par d'autres Chrétiens des premiers fiecles. 11 prou- ve que ce n'a pas efté des Juifs , mais des Homerites ou des Sabéens , que les Abiflîns ont reçu la circoncifion , & paroc» eafion explique comment la marque en cftoit effacée par quelques Juifs dont parle faint Paul dans le j. chapitre de fâ première epitre aux Corinthiens. II prouve auffi que la coutume que les Abiffins avoient dans les premiers fiecles d'obferver également le jour du Sabat & celui du Dimanche , ne leur venoit point des Juifs , mais des- Chrétiens d'Alexandrie i & à ce fujec il appuyé dp pinfieurs argumcns ce qu'il avoit avancé dans fon hiltoire touchant le temps auquel Frumentius convertit les Abiflîns à la foi ^ &: fait voir qu'U n'y a jamais eu qu'un Frumeqtius , ôc non deux^ 35Î LE JOURNAL comme le Cardinal Baronius Te l'efl imaginé, II eclaircitauni quantité de particulancez de la vie des neuf Saints qui ont le plus travaillé à étendre le Chnftianifme dans l'Abaflie. 11 s'ecend aifez au long fur leurs verfions de l'Ecriture fainte, fur le Code de leurs canons , far leurs liturgies , &; fur les au- tres livres dont ils fe fervent. Il dit qu'il», ont deux verfions de l'Ecriture fainte en leur I.ingue , defquelles les auteurs font inconnus ; qu'il y en a p!u- ileurs parties , les unes imprimées , &: les autres manufcrites , & que le nouveau Teftament imprimé à Rome elt rempli de fautes. II ajoute que les Abiflîns ont un fi grand amour de l'Ecriture , que des perfonnes de qualité , &; mefme des da- xnes apprennent par cœur les pfeaumes de David , & les epi- xresde faint Paul. Dans le Code de leurs canons ils mettent les furnumeraires du Concile de Nicée. Ils ont auifi des conftitucions des Apô- tres différentes en beaucoup d'endroits de celles que nous a- vons en Grec fous le mefme titre. A l'égard de leurs liturgies , ils en ont fous le nom de J. C. fous celui de la Vierge , &: fous celui des Apôtres. Mais l^. Ludolf n'approuve pas ceux qui les mettent au nombre'd^ livres apocnfes faulTement attribuez aux Apôtres, parc^^^'il efl: perfuadé que ce n'eft pas pour les en faire auteurs qu'elles ont efté mifes fous leur nom , mais feulement parce qu'elles fervoient aux jours de leurs fcûes. Le Simbole dont ils fe fervent n'eil: pas celui des Apôtres , mais celui du concile de Nicée. Ils nient avec lesGrecs Schif- mitiques , que le faint Efprit procède du Fils , croyent que les âmes n'entreront point au ciel avant le dernier avènement du Fils de Dieu , mais qu'elles demeureront dans un lieu de délices. M. Ludolf eft perfuadé qu'ils ne reconnoiifenr point de purgatoire , &ù avoue pourtant qu'il a vu un de leurs livres où il crt fait mention du limbe des Pères. .. Il demeure d'accord qu'ils invoquent les Saints, & criait qu'en cela ils ne font qu'imiter la coutume que les Juifs et--' les premiers Chrétiens avoient d'honorer la mémoire de ceux qui s'elloienc diftinguez par leur vertu. 11 ne doute point que les DESSCAVANS. 333 les autres ooutiimes obfervées par les Chrecicns dés les pre- miers temps , ne leur eufTent cfté données par les Juifs ; & entre les preuves qu'il en rapporte , il n'oublie pas de dire que la plupart des Eglifes Epifcopaîes fureur f .itcs fur le mo- dèle du Temple de Jcrufalem , 6c les autres fur celui des Si- n on rien avait jamais propofe un plus beau pour la refolution des ega'.itez^ De plus cette refalution efiant ahfolument neceffaire pour perfeHionner toutes les parties des Matemaltquei , il importe de fcavoir s'il n'y a point pour cela de metade qui fait diffe? unie de celles que M. Rolle a données au Public. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Prbnes de Meffire Claude Joly , Evèqtte ^ Comte d'Agen, ^ -f- auparavant Curé de faint Nicolas des Champs , fur dijferens fujets de Morale. Tome troifieme , contenant feiz^ difcours , ^c. In 8. à Paris chez EdmC Couceroc. 1693. Explication des Commandemens de Dieu, Jn 12. 2. volumes. à Paris chez le mefme. 1693. Traité delà Mignature , dédié à Madame la P rince jfe de Gui. rjtené. Par Mlle. Perrot de l'Académie Royale. Jn zz. à Paris chez Arnoul Seneufe. 1693. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à /'Image de faint Jean Baptifle. Avec Privilège du Roi. XXIX. 337 LE JOURNAL DES SCAVANS Du LiiNDY 27. Juillet M. D. XCIII. HISTOIRE DU CARDINAL XIMENEZ PAR W^^. à Paris chez Jean y EfpTit Flechier , Evèi^uede Nifmes, Jn ^. a. AnifTon, 1 6 9 3 . '^">'^ ^i-i, j'en par- lai dans le trente fixiéme Journal de la mefme année. Mais il a efté augmenté de moitié depuis ce temps-là , & il con- tient maintenant fix livres , au lieu qu'alors il n'en contenoic que trois. Le fécond eft un traité des corps fpheriques folides , de M, Toricelli Matematicien de M. le Grand Duc. 344- ^ LE JOURNAL Le troifiémc cfl: un traite des trcmblemens de terre , cnTiH- tc duquel fe trouvent trois lettres de M. Cafllni fur les refra- ûioas , avec la théorie de la comète de l'année 1664. &: quel- ques autres petis ouvrages. LUCII C^CILII FIRMIANI LACTANTII DE MOR- tièus perfecutorum , cum notis Stephani £j!uJii Tutelcr.fn , qui frimui ex vetcri Codice Mf. Bibliotheca CoLbertiv^ vulguv/t. Editio fcunda. Accefjerunt Giih. Cuperi ^Joannu Columhi^ Th. Sp^irk^, Nie. Toinurdi , Joan. Georgtt Gravii , Th. Gale , Elite BobereHi , caterommque , de quibui prafatione ad leUorern^ ani- madverjionei tam haficnus édita quam ineditx. Reccnfuit , /»/> auxit,cum verfionibtis conttd'.t Paulm Bauidù. yiddita^pcfl re~ liqua H. Dod^ae/h dijjeïtatto de Ripa Striga -, nec7ion Theodori Ruinarti pr^fjtio ad acLt Martyrum , cum itldicibui neceffariii. In 8. Tïa]cch ad Rhenum. 1692. DEpuis que M. Baiuze a donné au public l'excellent traité de la mort des Perfecuteurs , il a efté réimprimé pludeurs fois avec des remarques de plufieurs Sçavans , que M. Bauldri a recueillies dans cette nouvelle édition , & ac- compagnées des Tiennes , où il donne des preuves de Ton fça- voir & de Ton bon gouc. Il auroit bien voulu imprimer le texte tel qu'il eft dans le manufcrit de la Biblioteque de M. Colbcrt duquel M. Baiuze s'eft fervi : mais n'en ayant pu avoir de copie , il a efté obligé de fuivre la première édition , & de l'imprimer avec les cor- redions que M. Baiuze a faites à quelques endroits manife- dément corrompus par l'ignorance des copiftes. A l'égard des remarques , il les a diftribuées en deux claC^ Tes. Il a mis dans la première les plus courtes au bas du tex- te ; & dans la féconde les plus etcnduif s , qui peuvent tenir lieu de diOertations. Entre les dernières , les unes font de M. Baiuze , les autres de M. Cuper , les troifiémcs de feu M. Columbus Profelfeur à Upfal j & les dernières de M. Toinard. Elles font cnfcmble comme quatre petis corps à parc. M. DES se A VANS. 345 M. Bauldri y a joint deux pièces qui ont grand rapport z\ec elles. La première efl: la diflertation de M. Dodwcl de Ripa Striga ; & l'autre la préface du P. Ruinart Religieux Bene- didin de la Congrégation de faine Maur , fur les anciens ades des Marcirs. Je ne dirai rien ici des remirques de M. Baluze qui ont paru les premicrcs. Il en a eflé parlé en fon temps de en fon lieu. Entre celles de M Toinard , il y en a qui expliquent trcs clairement des palTages qui n'avoient pu eftre entendus aupa- ravant de perfonne ; &: il y en a d'autres qui fixent par d'exa- £tes fupputations les plus grans evencmens dont parie Ladan- ce , comme je l'ai rapporté dans le trente huitième Journal de l'année i 690. Quant à celles de M Columbus &: de M. Cuper , voici ce qui les fit naître. Quand M Columbus eut lu le traité de la mort des Perfecuteurs , il mit fur le papier ce qui fe prefenta à fon efprit , & le communiqua à M. Cuper qui lui en dit fon avis. Ayant depuis repafle tous deux fur les fujers de leurs entretiens , & y ayant ajouté de nouvelles pcnfécs , ils en ont enfin compofé ces remarques , telles qu'elles paroiflcnc dans cette dernière édition. Celles de M. Cuper font les plus amples & les p!us recher- chées. Dans fa préface il traite la qucltion du lieu où nâquic Conftantin qui eft regardé comme le héros de la pièce , par- ce qu'il fit cefler la perfccution , & procura raccroiffement de ia Religion Chrétienne. L'opinion de M. Cuper efl: qu'il eftoic de Naifus , petite ville de la Dace Méditerranée. Il l'appuyé fur deux témoi- gnages , l'un de Conftantin Porphirogenece dans la defcrip- tion de l'Empire ; Se l'autre des extraits publiez par M. de Valois a la fin d'Ammien Marcellin, où ce qui regarde lanaif. fance de Conftantin eft conçu en ces termes : Hic igitur Con- ftantinui natm Helena mutre viltffïma in oppido Natfo. Ce paf- fage eft fufped à M. Cuper , qui dans la créance qu'aucun auteur n'a écrit qu'Helene mère de l'Empereur Conftantin fuft de baffe condition , lit viliJTinio r.u lieu de vilifTinik. Pour 1693. Sfff 34^ LE JOURNAL moi je ne puis me rendre à fa conjeifture , parce que Zofime dont j'ai autrefois traduit l'hiftoire en notre langue, dit dans le 1. livre , qu'Hclene n'cftoit pas de qualité ; &: que S. A mbroi- fe dans l'oraifon funèbre de Tlieodofe , affiire qu'elle cftoic maicrefîe d'une hôtellerie où Conftancius Clorus Père de Conftantin la vit la première fois. Mais de quelque manière que le paflage doive eflve lu , il eft clair &: formel pour prou- ver que Conltantin prit naiflance dans Naifus. M. Cuper montre d'ailleurs par la cronologie , qu'il ne la put prendre dans la Grande Bretagne , parce qu'il vint au monde en zjz. &: que Conftancius Clorus fon pcre n'alla dans cette Ifle que depuis qu'il eut efté créé Cefar ^ ce qui n'arriva qu'en z 9 i . & lots que Conftantin avoir déjà dix neuf ans. Il eft vrai que d'anciens Pancgiriftcs dont Baronius , UfTe- rius , & d'autres modernes fe fervent pour conferver à la Grande Bretagne l'honneur d'avoir porté Conftantin , fcm- blent dire que ce fut en etfcc fous fon ciel qu'il vint au mon- de. Mais M. Cuper s'imagine pouvoir donner un autre fens à leurs paroles fans leur faire de violence , & les expliquer de l'avantage que la Bretagne eut fur les autres parties de l'Em- pire , de le voir proclamer Cefar. Sur le quarante- quatrième chapitre de ce traité , M. Cu- per donne un plan fort curieux de la ville de Conftantine en Afrique , qui lui a efté communiqué par M.'W^irzius Conful d'Amfterdam , qui l'avoir reçu d'un particulier qui avoir de- meuré trois ans dans cette ville-là. Elle eft bien avant dans les terres , à cinquante lieues de Tunis , & à foixante & dix d'Alger , bâtie au haut d'un ro- cher , auquel il n'y avoir autrefois qu'un chemin taillé fous le rocher mefme. 11 eft maintenant bouché , & a efté abandon- né à caufc de la dcpcnfe qu il faloit faire pour y entrerenir jour & nuit les feux & les lumières , fans lefquellcs il auroic efté impoftjblc de s'y conduire. L'autre chemin par où l'on monte aujourd'hui à la ville , eft fi roide &:fi efcarpé , queperfonne n'y peut aller qu'à pied. Cette ville s'appelloit autrefois Cirta. Elle fut ruinée par Rufus "Volufunus Préfet du Prétoire , envoyé par Maxcnce DES SCAVANS. 347 en Afrique contre Alexandre qui avoir ufurpé la {ouveraine puilTance. Conftanrin la releva , & lui donna Ton nom. Les colonnes de marbre qui s'y trouvent fous des ruines , font ju- ger que les bâtimens en eftoient autrefois magnifiques ; au lieu que ceux d'aujourd'hui n'ont rien que de commun &: d'ordinaire , non plus que les autres du pays. II paroit par un canon du fécond Concile de Milevis , qu'elle eftoit autrefois Métropole de Numidie. M. Cuper croit qu'il n'y a eu que cette ville-là en Afrique qui ait efté appellée Cirta. Cela me paroit douteux , parce que je trouve un Concile tenu à Cirta en 41 z. contre les Do- natiftes j & il eft probable que ce n'eftoit point la mefme que celle qui avoit efté rebâtie par Conftantin , qui eit nommée Conftantine par le Concile de Milevis tenu en 401. dix ans feulement auparavant , ic honorée du titre -de Métropole. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. MAGLIABECHI, du /p. T^ovemère j6pz. LE P. Dom Benoit Bacchini a accepté la Chaire de la fainte Ecriture en l'univerfité de Boulogne ; ce qui ne lui laiflant pas afifez de temps pour continuer feul le Journal / de Parme , il va s'aflbcier avec M. Guglielmini , qui fera l'ex- trait des livres de Matematique. M, Ramazzini le fera des livres de Phifique , de Médecine , d'Anatomie , & de Bota- nique. Le P. Jean Franchini aura pour fa part les livres de Théologie. M. Cancelli ceux qui traitent de Géographie , de Cofmographie , & de voyages. Le Provincial des Fran- cifcains Zoccolanti dont je ne fçai pas le nom , y aura aurti quelque part. J'ai reçu un livre intitulé : Pyrologia topographica , id e(l de igné difjeitatio , juxta loca cum eorum defcriptionibus , Dowinici Bottoni Leontim m publico Gymnafo Neapolitano frimant rhilo- fophiiC ZeBorti. In /{.. Neapolt. On a imprimé dans la mefme ville la defcription de Napîes de Scipion Mazzola , avec des cartes du Royaume, & ua nouveau volume de lettres d'érudition & d'hiftoire. 34-8 LE JOURNAL Ottinger a fait une rcponfe à l'hilloire du Cardinal Palavicin, mais je ne l'ai pas encore reçue, j'ai reçu le fécond volume de la Biblioccque Romaine , dont voici le titre : Bibiotheca Romana , feu Romanorum Scriptorum Centuria. AuUore Profpero M-jndofio Nobili Romano Ordints fanlli Stephani Equité, in ^, Romx. j6ç2. J'y ai trouvé à ma confufîon , que la féconde centurie m'eft dédiée. L'auteur travaille maintenant à la Bi- blioteque des Chevaliers , c'cfi: à dire à la recherche des Che- valiers de quelque ordre que ce foit , qui ont ou imprimé, ou au moins compofé quelque ouvrage. Le P. Dom Odoardo Bilfoni, Lecteur de Mont-Caflîn, m'a envoyé fon oraifon funèbre de Dom Vital Terra Rolîa , Abbé de S.Jean l'Evangelifle de Parme, &: Profefleur de Boulogne & de Padoue. Je viens d'apprendre qu'il y a deux nouvelles lettres impri- I mées contre M. l'Abbé de la Trappe , outre les quatre qui a- ' voient déjà paru , 6c que l'on débite à Paris des exemplaires de cette féconde édition. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Seïmom prèchci^pendant 1,^ OBave des Mons , par le R. P. Thco- dofe Bertet Prédicateur Capucin. In S. à Lion , & fe trouve à Paris chez Jean Aniflbn. 1693. 4 Jn/îitution à la pratique Beneficiale ^ Ecclcjtaftique , accommo^ dée à l'ufige nouveau , introduit par les édtts ^ déclarations dti Roi , de création en titre d'office formé ^ héréditaire de Notaires Royaux ^ y4pofloliques , ^c. Contenant tous les aïies ^ fonflions du Notariat Apojlolique Royaf ^ plufteurs trattez^^ edits , ^ déclarations du Roi , ^c. concernans lefditcs fonchom du Notariat ^poflolique Royal , qui ont eftè inconnues 'jufquà cejourd'hut Par iV/. Claude Horry , ancien Notaire Apoflolique de £ Archevêché de Paris j ^ c. In ^. à Paris chez Nicolas le Gras , Guillaume Cavelier, &: Charles Ofmont, au Palais ; & Pierre de Bats, rue faint Jaques. A Paris chez Jean Cusson , rue S. Jaques, à l'Image S. Jean Bapt. XXX. 34? LE JOURNAL DES SCAVANS. 5 Du LuNDY 3. Août M. D. XCIII. SANCTI HILARII PICTAVORUM EPISCOPI OPE--^ ra , ai manufcripios Codices Gallicanoi , Romanos , Belgicos , nec non ad veteres editiones cafligata ; altquot aullu opujcuhs , fr,tviii in locos difficiles difputationibus , pr^rfationiéus , admo- nitioniSus , notis , novk funiii Confefforii vita , ^ copiofiffîmis fcripturarum , rerum , glofjarum indicihus locupletata (^ lUuftra.- ta. Studio ^ lubore Monachorum Ordinis fanBi BenediHi , è Conytegatione fanïii Mauri. In folio, à Paris chez François Muguet. 1693. LE rang que faintHilaire de Poitiers a toujours tenu par- mi les Evêques des Gaules , & la conftance invincible avec laquelle il a foutenu la Divinité du Fils de Dieu contre un parti artificieux , &c puiflant à la Cour des Empereurs , meritoient bien que les Religieux de la Congrégation de faine Maur encrepriflent de revoir Tes ouvrages , comme ils ont re- vu ceux de plufieurs autres Pères , &: qu'ils nous en donnaC /ent une édition plus ample & plus exade que toutes celles qui avoient paru par le parte. Tout ce que faint Hilaire avoit écrit n'eft pas venu jufqu'à nous. Saint Jérôme cite un livre compofé contre Diofcoïc , 1693. Tttt 3 5Q LE JOURNAL Se adrefle à Salulle , un commentaire fur Job , & des him- ncs, Severe Sulpice loue fcs lettres ; &: le fécond Concile de Seville infiniic qu'il avoir fait un commentaire fur les Epirres de faint Paul. Dans la préface générale que les Porcs Bcnedidins ont mi- fe à la tcftc de cette édition , ils nous font obferver au fujcc des himncs de faint Hilairc , qu'Alcuin & quelques autres ont afluré qu'il avoir augmenté le Gloria in cxceljîi ; &: qu'Abbon Abbé de Fleuri avoïc dit dans une de fcs lettres encore ma- -^ nufcrite , que le Te Deum eft de lui ; ce qui elt contraire à l'opinion commune fondée fur une croniquefort fulpedequi l'attribue à faint Ambroife & à faint Augullin. Je ne parlerai point des manufcrits fur l'autorité defquels les fçavans Benediâ:ins ont rétabli le texte de faint HiLiire. L's en ont mis le catalogue à la fin du volume. Je me conten- terai de dire que le plus ancien eft de la Biblioteque du Vati- can 3 & qu'il fut écrit en Afrique en la troiilcme année du règne de Trafamond , qui fuivant la fupputation d'HoIflenius, revient à l'année cinq cent dixième de l Ere Chrétienne. Le plus entier fut autrefois de la Biblioteque de faint Denis en France, &; fe trouve maintenant dans celle de feu M. Col- bcrt fous la cote 8 2 y. Les Religieux delà congrégation defiintMaur ont ufé d'u- ne grande circonfpeclion dans le choix des différentes leçons, dont ils ont rendu raifon dans les notes qu'ils ont fait impri- mer à la fin àcs pages , où ils ont aufli concilié les paHages qui ferabloicnt renfermer quelque contradidion , & expli- qué ceux où il y avoir de l'obfcuricé. Pour ne laiifer aucun doute dans les cfnrits touch.mt la pu- reté de la doctrine de faint Hilairc , ils ont fait dans leur pre- face générale une longue difcuffion de certains chefs fur let quels ce fçavant Evêque a efté foupçonné par des Catoliqucs & par des Proteftans , de s'eftre éloigné des fentimcns com- muns , &: d'eftre tombé dans l'erreur. Le premier de ces chefs regarde la conception du Sauveur. Erafme s'eft imaginé que faint Hilaire avoir reconnu que la faince Vierge avoic conçu le corps (k foû Fils , qu'elle l'àvoic DES SCAVANS. 35: porté dans Ton fein , &: Pavoit mis au monde ; mais qu'il n'a- voic point reconnu qu'elle euft fourni le fang dont il avoir efté formé. Nos fçavans Religieux détruifent cette imagination / d'Erafme par une foule de paffages où faint Hilaire dit ex- preflément que la (ainte Vierge a contribué à la nailfance de ion Fils tout ce que les aurres mères contribuent à la naiflan- ce de leurs enfans ; que Jcfus Chrift a tiré fon corps du corps de fa mère , du corps de David , de celui d'Abraham , & de celui d'Adam mcrme. Enfin ce faint Evêque s'efh parfaite- ment conformé à l'article du Simbole , qui porte que J. C, a cité conçu du f tint Efprit , ^-^ né de la fiinte Vtcrge. Ils découvrent enfuite la fource du faux foupçon qu'Eraf. me a conçu contre faint Hilaire, qui procède de ce qu'Erafme n'a pas fçu ce que faint Hilaire entendoit par ces paroles de l'Ange : Spiritus fanUui Çuptrveniet inte. Erafnie croyoit qu'il entendoit la troilîéme ÎPerfonne de la Trinité ; au lieu qu'il entendoit la féconde qui fe forma un corps du plus pur fang de la Vierge , félon cette parole de Salomon ; Sapientia adt- ficavit fbi domum. Les paroles de l'Ange ont efté expliquées de la mefme forte par Tertullien , par Ladance , par faine Irenée , par faint Juftin , & par faint Ciprien. Car au lieu que les éditions du livre de la Vanité des Idoles portent : Car^ nem Spiritu fanïio coopérante induitur ^ les Religieux de la Con- grégation de S. Maur ont trouvé dans la biblioteque de l'Ab- baye de faint Germain un ancien manufcrit qui porte : Carne Spiritus fanciui inditilur. Le fécond chef fur lequel Erafme a foupçonné faint Hilai- re d'erreur , regarde la manière dont les fidelles font unis au Fils de Dieu , & par fon moyen à fon Père. Car Erafme a penféque faint Hilaire foutenoit que les fidelles eftoient un par nature avec le Fils &c avec le Père , & non feulement par adoption. Les Benediélins montrent qu'Erafme n'a jamais compris le fens de ces trois termes , un par nature , dans le langage de faint Hilaire. Il leur donne un fens plus étendu que nous ne leur donnons ordinairement. 11 s'en explique en ces termes: Qj*i perrem eamdem mumfunt , naturk unum Jiint. D'où il in- 351 LE JOURNAL fcre que les ficklles qui font un par la foi, font un par nature.' Or quand il veut faire entendre comment nous femmes un par nature avec J. C. il confidcre le corps de J. C. en trois ellacs : fçavoir, comme formé du plus pur fang de la Vierge j comme voilé dans l'Eucarillie ; ne comme glorifié dans le ciel. Aind il trouve que les hommes iont un avec le Sauveur en trois façons par rapport à ces trois cil:ats. La première , entant que prenant un corps dans le fein de fa mcre , il s'eft uni à toute leur nature. La féconde , entant que fe donnant 2. eux dans le Sacrement , il s'unit à eux en qualité d'aliment; &: la troifiéme , entant qu'il leur communique la gloire qu'il pofifede dans le Ciel , quand il les fait jouir de l'elïct de cette prière : Vtfintunum , fîcut & nos unutn fumus. Le troifiéme chef fur lequel faint Hilaire a efté foupçonné d'erreur , concerne la crainte , la tnftefte , la douleur , & les autres paflTions defquelles il femble qu'il ait exemté Notre Seigneur. Saint Thomas & faine Bonaventure avoient autre- fois jurtifîé faint Hilaire à cet égard 5 &: les Religieux de I4 Congregarion de faint Maur le juftihent encore plus forte- ment , en faifant voir par quantité de paflages , qu'il a recon- nu que J. C. comme homme , eftoit fujet aux palBons & aux infîrmitez humaines , defquelles il eiioit exemt comme Dieu. Le chef qui fuit regarde J, C. confidcre non dans fa vie iportelle , mais dans l'eftat de fa gloire. Les expreffions dont faint Hilaire s'eft fervi pour expliquer cet eftat , font extraor- dinaires , & éloignées de l'ufage commun ; ce qui a donné lieu de le foupçonner d'avoir cru que l'humanité avoit chan- gé de nature quand elle avoit pris pollelîion de la gloire. Mais nos fçavans Religieux découvrent fi clairement le fens de tou- tes ces expreflions , qu'il ne refte aucun lieu de douter qu'il n'ait enfeigné la mefme do£lrine que les autres Percs , qui confifte à dire que le Corps de J. C. eft devenu impalîible &: incorruptible après fa refurredion , fans avoir néanmoins cédé d'eftre un véritable corps. Les Benediétins pour faire encore mieux entendre ce que faiïit Hilaire a penfé de la gloire de J. C. rapportent ce qu'il a enfeigné o DES se A VANS. 3 H enseigné de Con règne, qui fait une partie de cette gloire, ils difent donc qu'il a diftingué deux règnes dans le Fils de Dieu, au(îj-bien que deux natures. Que le premier qui lui appjr- tienc félon la nature divine , lui eit commun avec le Perc , &: fera exercé conjointement par le Père & par le Fils fur les ju- jftes reflufcitez. Le fécond qui appartient au Fils félon fa nature humaine , commença lors que fon corps fut glorifié , & s'exerce fur les âmes des juiles délivrées de leurs. corps . 6c reçues dans le feiii d'Abraham. Saint Hilaire en reconnoifl'ant ce règne ne fivo- rife point l'erreur des Millénaires. Car il ne le fait confifter que dans la Compagnie du Fils de Dieu , & dans la joye de ù prefence : au heu que les Millénaires fe promettoient la jouifTance de route forte de plaifirs fenfucls. Cela fuppofe dans le fiflême de faint HiIaire , que tous les hommes font jugez au temps de leur more : que les jufies font portez par les Anges au fein d'Abraham ; &: que les impics font jettez dans l'enfer, ^d judicium unumqucmque aut Abra- ham refervat , aut -pœna. Saint Hilaire a cru qu'au jugement gênerai tous les hommes tant les juftes que les que les impies , palferoienr par le feu , & s'eft fondé pour cela fur ces paroles de faint Paul : Vniuf- cujufque opui quale fit tgnii probabit. Il a pourtant mis cette différence entre les uns & les autres, que les juftes pafferoienc par le feu fans en eftre le moins du monde incommodez. \.cs autres chefs de la doélrine de faint Hilaire s'expliquent en moins de paroles. Bien qu'en un endroit de fon commen- taire fur faint Mathieu il ait femblé infinuer que tout ce qui eft créé eft: corps , nos fçavans Benedidins font voir qu'en plufieurs autres il a reconnu que les Anges &: les âmes rai- .ibnnables font des fubftances purement fpirituelles. Ils mon- trent auflî que bien que la matière de la grâce n'cuft pas efté auffi- bien eclaircie en fon temps qu'elle l'a efté depuis , il n'a ■paslaiffé d'en fçavoir les veritez les plus neced'aires. Après avoir diffipé les foupçons formez contre la pureté des fnenmens du célèbre Evêque de Poitiers , ils nous donnent 1693. V u u u 354 LE JOURNAL une vie qu'ils ont compofce fur fcs écrits , Se fur d'autres aiî^ cicns monumens. A l'égard des œuvres , ils ne les ont point rangées félon l'ordre du temps , & ont donné la première place au cont- mentairc fur les Pfeaumes , bien qu'il n'ait cftc compofé que depuis le retour de faint Hilaire ^ &: durant les dernières an- nées de fon repos. 11 s'cft fcrvi d'Origcne , fans pourtant s'afTujectir ni à fon ordre ni à fes penfécs. Sixte de Sienne infinuë que faint Hilaire avoir écrit fur tous les Pfeaumes , Sc que l'ouvrage entier fe trouve manufcnt dans quelques bi- bliotequcs d'Efpagne. Le fécond ouvrage eft le commentaire fur faint Mathieu , J'un des premiers &: des plus anciens qui ait jamais cflé corri- pofé par les Latins fur les Evangiles félon le témoignage de de faint Jérôme. Les argumens divifez en trente- trois cha- pitres , qui fe trouvent dans les éditions précédentes fous ie titre à' tlenchus Cunonunu^ bien qu'ils ne fe trouvent poir.t dans les rnanufcrits , ont cfté mis dans celle-ci fous celui de Ca^ut pour deux raifons. L'une , que c'eft un titre plusufité; ^c l'autre , que le nom de Canon donne une autre idée. Canon tîebra'ica veritatU ^ que ie P. Martianai donnera bien-tôt au Public , fignifîe dans le langage de faint Jérôme qui en cft auteur , le recueil ou la table des livres reçus comme vérita- bles par les Juifs. Le filence que fiint Hilaire garde dans ce cottimentairc au fujet des Ariens , perfuade qu'il a efté compofé avant Çon exil. \^Q% douze livres de la Trinité furent compofez durant l'exil mefme , auifi bien que celui des Sinodes. Les Pères Benedi- ûins n'omettent rien dans leur préface , ni dans leurs notes de ce qui elloit necefl'aire pour eclaircir les difficultcz qui s'y rencontrent. Ils ont mis enfuite la lettre à Abram fille de faint Hilaire , bien que Gillot ait écrit qu'elle avoit efté faite à plaifir par Fortunac , & qu'Erafme l'ait rejettée comme le vain amufe- nient d'un ignorant qui abufoit de fon loifir. Non feulement ils foucicnnenc fur la foi de faint Jérôme , DES S C A V A N S. 3 j j èz de Facundus , que le livre contre Confiance efl de faine Hilaire , mais ils juftifîent la véhémence des invedives donc il eft rempli. L'appendice qui efl: à la fin du volume , contient un poè- me fur la Genefe , attribué par le P. Quefnel à faine Hilaiic d'Arles } l'excellente préface fur les fragmens de notre faine Hilaire , adreflee à M. le Prefîdcnt de Thou par M. le Fevrc Précepteur du feu Roi , & des tables fore amples. REPONSE DE M. DE LEIBNIZ A L'EXTRAIT DE Ij lettre de M. Faucher Chanoine de Dijon , inférée dans le Jour-* nul du 16. Mars jôp^. ONdoiteflrebien-aife, Monfieur , que vous donnez uïï lens raifonnable aux doutes des Académiciens. C'eft fa meilleure apologie que vous pouviez faire pour eux. Jeferai ravi de voir un jour leurs fencimens digérez & eclaircis par vos foins. Mais vous ferez obligé de temps en temps de leur prêter quelque rayon de vos lumières, comme vous avez com- mencé. Il efl vrai que j'avois fait deux petis difcours il y a vint ans, l'un de la théorie du mouziement ahfirait , où je l'avois confideré hors du fîfîême , comme fi c'cftoit une chofe purement ma- tematique : l'autre de l'htpolefe du mouvement concret ^ Rfle- matique , tel qu'il fe rencontre efFeftivcment dans la nature. Ils peuvent avoir quelque chofe de bon, puis que vous le ju- gez ainfi , Monfieur , avec d'autres. Cependant il y a plu- sieurs endroits fur lefquels je crois eftre mieux inftruit prefen- tement ; & entre autres , je m'explique tour autrement au- jourd'hui fur les indivifibles. C'eftoit l'efTai d'un jeune hom- me qui n'avoit pas encore approfondi les Matematiques. Les loix du mouvement abftrait que j'avois données alors , de- vroient avoir lieu effedivemenc , fi dans le corps il n'y avoic autre chofe que ce qu'on y conçoit félon Defcartes , & tncC me félon Gaflendi. Mais comme j'ai trouvé que la nature en ufe tout autrement à l'égard du mouvement , c'efl un de mes argumens contre Unotion reçue de la nature du corps v corn-» 3 5« ^LE JOURNAL nie j'ai indique dans le Journal des Sçavans du (ccond Juin 1 691. Qiianr aux indivijtbles , lors qu'on entend par là les fimplcs cxtrêmiccz du temps ou de la ligne , on n'y fçauroit conce- voir de nouvelles extrcmitez , ni des parties actuelles , ni po- tentielles. Ainfi les points ne font ni gros ni pctis , & il ne faut point de faut pour les palfcr. Cependant le continu , quoi qu'il ait par tout de tels indivifiblcs , n'en cft point com- pofé ; comme il fcmble que les objedlions des Septiqucs le fuppofcnt, qui à mon avis n'ont rien d'infurmontable , com- me on trouvera en les rédigeant en forme. Le P. Grégoire de faint Vincent a fort bien montré par le calcul mefmc de la divifibiiité à l'infini , l'endroit où Achille doit attraper la tor- tue qui le devance , Iclon la proportion des viteflTes. Ainfi la Géométrie fert à diffiper ces difficultcz apparentes. Je fuis tellement pour Xir^fini aïiuel ^ qu'au lieu d'admettre que la nature l'abhorre , comme l'on dit vulgairement , je tiens qu'elle l'aftede par tout , pour mieux marquer les per- fedions de {ow auteur. Ainfi je crois qu'il n'y a aucune par- tie de la matière qui ne foit, je ne dis pas divifible, maisaduel- Jement divifée ; & par confequent la moindre particclle doit eflre confiderée comme un monde plein d'une infinité de créatures différentes. LA GEOMETRIE PRATIQUE DE L'INGENIEUR, ou l'art de mefurer. Ouvrage également neceffuire aux ingé- nieurs , aux Tcifeurî , ^ aux Arpenteurs. Jûivife en huit ti~ vres , ^c. Dédié à M. de Vauban. In 4. h Stra^bourq^. & fe trouve à Paris chez Jean Boudot , & la Veuve Nion , fur le^juai des Auguftins. 1695. MR. Clermont employé depuis fept ans à enfeigncr les Fortifications à une partie confiderable de la Noblcffe de France , a cru devoir commencer par lui donner de bons principes d'Aritmetique & de Géométrie. Comme ce n'eft pas ici le lieu de parler de fon traité d'Aritmetique , je n'ea ^irai rien û ce n elt qu'il n'a point d'autre défaut que d'avoir efté DES SCAVANS. 3^7 cfté imprimé par un Libraire dont le compofiteur n'entcndoïc pas le François. Quant à ce traité de Géométrie , il contient tout ce qui cft îiecellaire pour la poiîeder à fond. Le premier livre après avoir expliqué les définitions , en- feigne la pratique du compas , tant pour les lignes , les an- gles , les cercles , les ovales , les cllipfes , les paraboles , &: kshiperbolcs , que pour les poligoncs réguliers &:irregulieis, & pour l'infcription &: la circonfcription des figures au dedans & au dehors de quelque autre. Le fécond livre commence par quatre teorémcs qui fer- vent comme de bafe à la Trigonométrie -, d'où l'auteur tire quelques corollaires qu'il applique à la pratique du mcfuraf^e des lignes fuppofées inaccelfibles : ce qu'il fait en deux fa- çons , fçavoir par les inftrumens géométriques &: les tables des finus , & par le toile & les piquets qui embaralient moinï, & ne laiflent pas d'eftre julies fur le terrein. Le troifiéme enfeigne la manière de refondre tout ce qui peut eftre propolé touchant l'art de niveler , & de corriger le def.iut qui furvient dans le nivellement p.ir la différence que les coups du niveau apparent ont par delfus le niveau véri- table. Le quatrième explique les principes du toifé moderne, plus facile que l'ancien par la raifon que. les lignes y font parties aliquotes du pouce , les pouces du pied , &c les pieds de la toife. Le cinquième traite de la manière de lever les plans, & de mefurer les fuperficies. Le fixiémc enfeigne à mefurer les corps folides ; & le ledcur y trouve fouvent fur un fcul problême jufqu à trois exemples qui fervent à fe prouver mutuellement. Le feptiéme traite de la charpente , ou du bois mis en œu- vre dans les bâtimens. L'auteur y dit ce qui doit eftre ob- Tervé à l'âge & à la coupe des bois ; puis il donne quatre me- todes de les toifer , qui font toutes quatre faciles &c feures , &: fe prouvent réciproquement. Il y range le nom des pièces 1693. X X X X 358 LEJOURNAL félon l'ordre de l'aifabct , afin qu'elles puiiTent cQrc trouv^-es plus facilement. Le huicicir.c qui eft le dernier , donne le toifc de routes les pièces qui fervent à la conftruclion d'une forrcrede , ôi l'applique au mefuragc des terres des ramparcs , des foUcz , & des parapets , à celui de la maçonnerie, des rcvccilfemens^ des efcaliers , des voûtes , des puis , Se de pluiicurs autres ouvrages. Les planches &: les figures qui fervent à l'intelligence des propofitions , Ce trouvent à la fin de chaque livre où elles font expliquées. Ce traité ne fc vend pas feulement à Str^fbourg & à Paris ^ il fe vend encore à Lion , à Mets , à Be(ançon , à Rouen, & à rifle. L'auteur promet d'en donner bien- tôt un autre qui contiendra tout ce qui peut iervir à la fortification des places. HISTOIRE UNIVERSELLE DE TROGUE POMPE'E rcdtiire en ab'czè p^irjuftin. TriiduBion nouvelle , avec da re~ ïtutrques. par Mr. D. L. M. In f2. 2. volumes, à Paris chez Thomas Guillain , au bout du Pont neuf , proche les Au- guilins. 1693. TR o G u E Pompée fleurit fous Auguflc , & composa en quarante livres l'hilloire , non tant de la Grèce que de tout le monde. L'abrégé que Jufliin en fit , contribua plus qu'aucune autre chofe à le lupprimcr. On ne fçait pas prc- cifément en quel ceir.ps ce Juftin vécut. Vollius le met fous Antonin le Pieux , au^^jucl il veut qu'il ait adrefle fon ouvra- ge. Les anciennes éditions ont mis dans la préface des pa- roles qui peuvent fervir de fondement à cette opinion. Mais elles ont efté retranchées dans les nouvelles, &: ne fe trouvent point dans les manufcrits. Quelques-uns l'ont placé volon- tiers en ce temps- là , pour le pouvoir confondre comme ils ont fait par une erreur grofliere , avec faint Jullin Martir. Celui qui nous en donne la traduction , en a confervé les DES S C A VANS. 33-r^ beautez , & reparc les défauts. Il imite la clarté du llile , Se évite la contulion de la cronologie. Les années qu'il a mifes à la marge , montrent l'ordre du tenips , dont il n'y a prefque nulle trace dans loriginal. Les remarques qui font à la fin de chaque livre , fervent tantôt à corriger le texte , & tantôt à l'cclaircir. EXPLICATION DES ECHELLES POUR LES calculs de M-inne , pour fcrvir d'introduction aux cartes mari^ «es qyff virtulibui ^ viens morum,fve dt/j>utiUi- velation , il n'y traite des vertus & des vices que félon la lu- mière de la raifon. En quoi il fuit la mctode des autres In- terprètes de ce Philofophe , &: principalement de fiint Tho- mas. Qiiand il a pourtant trouvé quelque maxime contraire à la Religion Chrétienne, il n'a pas manqué d'en avertir fes lecteurs , ii. il les en avertira encore avec plus de loin dans la 'féconde édition qu'il inédite de cet ouvrage. DES SG A V A N S. 363 En 1679. & aux deux années fuivantes , il fie imprimer à Salamanquc fa Théologie de faine Anfelme , qui vient d'efire reimprimée à Rome avec beaucoup de corredions , & avec une augmentation confiderable du troifiémc tome , en ce qui regarde Janfenius. En 1685, il publia un aflez gros livre contre la déclara- tion du Clergé de France. Le titre en eft conçu en ces ter- mes : Defenfo Cathedra fanHi Petri adverfui decUrationem illu- y Jin/Jimi Ckri Gallicani éditant anno 1682. die jp. Martii. Tomm unicui. In folio. Jamais M. le Cardinal de Aguirre n'avoir apporté autant de ■diligence à compofcr ni à imprimer aucun ouvrage , qu'il en apporta à celui-ci. La déclaration du Clergé de France pu- bliée à la fin du mois de Mars , n'arriva à Salamanquc qu'au mois de Juillet fuivant. M. le Cardinal de Aguirre ne l'eue pas fi tôt lue , qu'il la jugea contraire au fentiment de toute l'antiquité chrétienne , & principalement à celui de l'Eglife Gallicane , & appréhenda que la dodrine qu'elle contenoif ne fuft reçue fans difficulté , & ne fift des progrés , vu fur tout qu'aucun des Codeurs de Salamanque ne fe mettoit en de- voir de la combattre. Il crut donc fe devoir hâter d'en em- pêcher ou d'en arrêter le cours , & employa fix mois à par- courir les conftirutions des Papes , les Conciles , les Pères , les Hiftoriens , &: principalement ceux de France ; &: fix au- tres mois à faire imprimer fon ouvrage avec des approbations autentiques des Doéteurs de Salamanque , de 1 Ordinaire , & des Théologiens de fon Ordre. Si cet ouvrage lui donna de la confideration à la Cour de Rome , il lui fit aufli des envieux qui durant une dangercufe maladie qu'il eut cinq ans après , publièrent que cette dé- fenfe du faint Siège n'eftoit pas de lui , mais d'un autre Do- cteur de Salamanque qui l'avoir compofée au raefme temps <]ue parut la déclaration du Clergé de France. M. le Cardinal de Aguirre fe moqua alors de cette fable, & méprifa ceux qui la répandoient. Mais maintenant il les menace de les nommer à moins qu'ils ne la retracent , & de 4écouvrir le lâche raonf qui les aj)ortez à Tinventer, 5^4 L E J OURNAL Outre CCS ouvt.igcs que M. le Cardinal de Aguirre a don- nez au Public , il en a d'autres qu'il promet de donner bien- tôt. Le plus grand &: le plus confiderable ell: une colle^lion de Conciles &: d'autres anciens monumcns d'ETpagrie , avec des remarques &: des dillertations fur l'hiltoire , la cronologic, &: la difcipline ecclellartique. En 1686. il fit imprimer in 8. à Salamanque la notice &c le projet de cette longue &: la- borieufe entreprifc. Ce qui excita quantité de Sçavans à lui envoyer des mémoires , des inftruclions , & des titres qu'il garde pour les mettre en ordre quand il en aura le loifir. Les autres ouvrages qu'il prépare font un quatrième tome de la Théologie de faint Anfelme , un fécond tome des jeux de Salamanque , ou de la Théologie fleurie , un volume de lettres écrites à des Princes & à des fçavans , & deux volu- mes d'ceuvres mêlées ; une apologie pour faire voir que Jean ' Gerfen Abbé de l'ordre de (aint Benoit, eft le véritable au- teur des quatre livres de l'Imitation de J. C. des méditations & dcsoraifons de faine Anfelme, accom.pagnées de quelques notes. Voila en gênerai le delTein des livres que M. le Cardinal de Aguirre a donnez jufques ici au Public , ou qu'il lui donnera à l'avenir. Mais il faut dire quelque chofe en particulier de celui de fa Théologie de faint Anfelme. Dans le temps qu'il fe difpofoit à mettre au jour un cours de Théologie qu'il avoic enfeignée plus de vint ans à Sala- manque , il fut exhorté par fes amis à compofer un commen- taire fur la do(5trine de faint Anfelme. La raifon la plus forte & la plus prcflante dont ils fe fervirent pour l'engager à ce travail , fut que la Théologie de faint Anfelme , quoi que fort eftimée depuis fix cens ans , n'avoit encore trouve au- cun interprète ; au lieu que celle du Maicre des Sentences , celle de faint Thomas , &: celle de Scot en avoient eu chacu- ne un grand nombre. Il e(t vrai néanmoins que quelques Théologiens avoienc touché comme.cn paifant une partie de la dodrine de faine 4^nfe.lme. Mais aucun n'jcn avoit embralVé le corps entier , ni entrepris DES se A VANS. ^r^^ nî entrepris de l'illuftrer par un commentaire fuivi , & non interrompu. M. le Cardinal de Aguirre entreprit de le faire ; &: pour cet effet amafFa toutes les éditions qui avoient paru àcs œuvres de faint Anfelme jufqu'en Tannée 1630. &: lut les bibliotequcs & les catalogues qui contiennent des ji'ge- niens fur les Ecrivains Eccltfiadiques. Pendant qu'il les examinoit , il apprit que le P. Dom Ger- beron , Religieux Benedidin de la Congrcgaiion de flunt Maur , avoir travaillé avec fuccés à une nouvelle cdirion de faint Anfelme , qui avoir paru à Paris en 1675. & dont il y avoir déjà quelques exemplaires en Efpagne. M. le Cardinal de Aguirre fut affez heureux pour en recevoir bien-tôt après un qu'il vit avec beaucoup de plaifir , admirant la peine que ce fçavant Benedidin avoit priie de conférer le texte (iir tou- tes les éditions précédentes, 5z Cm plulîcurs manufcrits , de marquera la marge les divcrfcs leçons , de metcre des ar- gumens à la telle des chapitres , &: d'ajouter des traitez qui n'avoient jamais vu le jour. Il trouva dans cette dernière édition les œuvres de faint Anfelme rangées en quatre clafles : dans la première les trai- tez qui regardent les dogmes , dans la féconde ceux qui ex- citent à la pieté , dans la troifiéme les pratiques & les exer- cices des Religieux , & dans la quatrième les lettres. M. le Cardinal de Aguirre n'ayant deffein d'expliquer que les traitez dogmatiques de faint Anfelme , s'arrêta principa- lement au Monologe , comme au plus confiderable par l'im- portance de fon fujet , qui renferme tout ce que la foi nous cnfeigne touchant la nature &c les attributs de Dieu. Saint Anfelme lui donna le nom de Monologe ou de Solilo- n ^ue , parce qu'il y parle feul , fans y citer aucun palTage de l'Ecriture , des Conciles , ni des Pères. L'occafion qui l'engagea à compofer cet ouvrage cft rap- portée par Eadmerus dans fa vie , & a quelque chofe de mer- veilleux. Il y a traité deux fortes de qucftions. Les unes font celles que les Théologiens ont agitées dans l'Ecole , & fur lefquelles ils ont foutenu des opinions différentes , fans s'éloi- gner en rien de la foi. Les autres font les veritez certaines 1693. Z z z z 36^ LE JOURNAL & indubitables de la Religion contre les athées , les Payens, les Juifs j les Hérétiques , ôi les Schifmatiques. M. le Cardinal de Aguirre ne touche que légèrement les premières dans Ton commentaire : mais il y approfondit les iecondcs , &: y appuyé par l'autorité de l'Ecriture , par celle des Conciles & des Pères tout ce qu'il avance. Outre les queflions traitées par faint Anfclme , il en pro- pofe d'autres qui n'ont cfté introduites dans l'Ecole que dans les fiecles fuivans. Mais en les examinant il apporte toujours quelque paflage de faint Anfelme pour appuyer le fencimenc qu'il embraiTe. L'ordre qu'il a fuivi confifte en ce que le premier tome contient le commentaire fur les vint-fcpt premiers chapitres du Monologc ; &: les tomes fuivans contiennent le commen- taire furie refte des chapitres. Dans le temps qu'il demeuroit à Salamanque , & qu'il y jouilFoit d'un profond repos , il s'cfloit refolu de faire aufli un commentaire fur les autres ouvrages doi^matiqucs de faint Anfelme. Maintenant qu'il eft accablé d'affaires à la Cour de Rome , il n'efpere guercs d'accomplir ce dcfl'ein-là, & fe tiendra aifez heureux s'il peut achever Ces remarques fur les Conciles d'Efpagne, DISCOURS PRONONCEZ DANS L'ACADEMIE Francoife à lu réception de M. VÂkbe Bignon , fjj' de Ai. de la I Bruyère , Le Lundi jj.Jum j6pj. In ^. à Puis chez J. B. Coignard. 1693. I Es trois difcours quoi que differcns dans leur ftile & dans ,^^ leur cara£tere , peuvei^; eftre propofez comme des mo- dèles d'éloquence. La brièveté de celui de M. l'Abbé Bi^ ^non ne lui ôtc rien de ce qui eftoit neceilaire .\ fon fujet. Il découvre d'abord le portrait de M. le Comte de Bufli auquel il a fuccedé , & le fait reconnoitre à la polttej[fe de fon efprit , à la delicateffe de [es pcnféei, & aux autres riches talens qu'il avoic reçus delà nature , & perfedionnez dans l'Académie. Ce mot le fait heurcufemenc tomber fur le deflein qu'eut DES SCAVANS. 367 le Cardinal de Richelieu quand il établie cette célèbre aflem- blée , qui fut de former des orateurs , des hiftoriens , &: des poètes , pour rendre à la vertu les honneurs qui lui font dus , & pour lui donner une forte d'immortalité. 11 montre enfuite combien croifTcnt de jour en jour le poids & la difficulté de cet emploi , à mefure que croiifent les profpcritez de la Fran- ce fous l'heureux règne de LOUIS LE GRAND. Le difcours de M. de la Bruyère eft d'une jufte étendue , & chargé d'un grand nombre de portraits. Quoi que celui du Cardinal de Richelieu fuft un des plus difficiles, il y réuffic parfaitement bien. Suivez^, dit- il , le reyie de Louis te Jujle ^ ceft la vie au Cardinal de Richelieu , c'ejîfon éloge. Ouvrez^ fon tcftament politique , c'efi la peinture de fon efprit , fon ame toute entière s'y develope. Il dit que tout chargé qu'il eftoit du gouvernement de l'Lftat , i! a trouvé le loifir d'eftre fçavant , il a aimé les gens de lettres , &: les a affemblez pour compofer l'Académie Françoife. Il décrit ces premiers Académiciens comme des hommes rares que Ton s'eraprefloit de voir , que l'on mon- troit dans les places , & que l'on defignoit par quelque ouvra- ge fameux. Il ajoute que ceux d'aujourd'hui ne font pas regardez avec moins d'admiration , &: qu'ils ne cèdent aufli ni en fçavoir ni en mérite à aucun de ceux qui les ont pré- cédez. Après avoir fait l'cloge de quelques-uns qui vivent encore il vient à l'illufke mort dont il a la place , & paffe légèrement fur l'érudition & fur l'éloquence de M. l'Abbé de la Cham- bre , pour célébrer de plus foiides vertus, pour relever un mé- rite qui eftoit héréditaire en fa perfonne. Les marques d'efti- me & de confiance que M. le Chanceher Seguier donna à M. de la Chambre fon Médecin , conduifent infenfiblement M. de la Bruyère à ce Magiftrat éclairé, &: également habile dans les belles lettres & dans les affaires , qui fut le fécond prote- deur de l'Académie Françoife. 11 dit que la perte que l'Académie fit .\ fa mort , fut avanta- gcufemenc reparée par la bonté que LOUIS LE GRAND» 368 LE JOURNAL eut de la prendre fous Hi procedion. De là il lui' eft aifc d'en- tcer dans le dctail des vertus qui éclatent dans la vie de ce grand Prince. Il rehaude par les plus belles figures la gène- roficé qu'il a de foutenir feul le trône chancelant d'un Roi lâ- chement abandonné par le plus grand nombre de fcs fujers j de continuer avec vigueur une longue guerre pour donner à fcs peuples une heureule paix -, de fe livrer aux travaux S£ aux fatigues pour afl'urcr leur repos. Ces reflexions fur le bonheur de la France , & fur celui de l'Academie , lui en font taire une autre fur celui qu'il a d'eflre admis dans une Compagnie lUuflrèe d'une (1 haute protcdion , & de ne devoir cet honneur qu'à un choix dont il n'a ofé ef- fleurer la liberté par une importune follicitation. Le difcours de M. Charpentier eft une réponfe aux deux autres. I! l'adrelle d'abord à M. l'Abbé Bignon , pour lui té- moigner combien l'Académie cfl: touchée de fon éloquence , &: du bonheur de le recevoir dans un âge où la facilité de fcn génie lui a déjà fait aquerir ce que les autres n'achètent que par de longues veilles aux dépens de leur fanté. il lui dit que le partage de ceux de fon nom efl: d'aimer les belles lettres ; que Monfieur fon Père après avoir efté long- temps l'oracle du Parlement , eft maintenant un des oracles du fancluaire du Prince; digne fils &: digne fucceiî'eur du grand Jérôme Bi- gnon, ce célèbre Avocat General, & fi fameux par fon erudi» lion , par fon intégrité , & par fa fagelfe. M. Charpentier remarque que ce grand homme publia dans «n âge peu avancé les excellentes notes fur Marculfe , que tous les fçavans de l'Europe lurent avec admiration ; qu'à e le peuvent dire de la première efpcce de mouvemcns qui fc>nt les fculs dont il s'agit. Comme les mouvemcns naturels ne font en nctis m la fuite ni rcrtx;t de la connoirtance ^ & que de là on con- clut qu'ils n'ont point d'autre principe dans les bcrtcs que 1a difpofuion de la machine ; de mefme l'auteur des difiiculcez croit pouvoir conclure que comme les mouvemcns volon- taires qui procèdent en nous de certains fentimens qui s'ap- pellent lafllcudc , faim , & foif , nous font aller libre- ment au lit ou à la table ; ainfi les mouvemcns qui répon- dent dans les beftes à ces mouvemcns volontaires , ne fe font point en elles par la feule diipofition de la machine. La féconde propofition e(t que nous avons en nous de quoi nous perfuader que les m.ouvcniens dont il s'agit ne fe font point dans les bertes par les feules loix de la mécanique. L'au- teur des diftîcultcz l'établit à peu prés de cette forte. Qnoi que notre corps foit une machine compofée félon les loix de la plus cxafte mécanique , &: que dans les mouvemcns volontaires nous fuivions naturellement ces mefmes loix , & fans y faire de reflexion , il ert: vrai pourtant que la mécani- que n'crt: point le principe de ces m.ouvemens. Qinnd un homme a faim , qu'il s'approche d'une table , qu'il y prend du pain , & qu'il le mange , la difpofition de la machine con- tribue à tous ces raouveipens : mais encre la prefence du pain DES SCAVANS. 37 j & ces mouvemcns il y a une coimoiflance & un a£le de la la volonté ; fur quoi on raifonne ainfi : La machine du corps de l'homme cft difpofée cora me celle du corps des beflcs ; & le défaut de nourriture met l'cfto- inach de l'homme dans le mefme ellac que l'eftomach d'une befte. Si on demande à un Cartcfien ce qui fait qu'un cheval qui a faim va à l'écurie , & qu'il panche la tefte vers la mangeoire où eft l'avoine , il répondra que les corpufcules qui forcent de l'avoine entrant parle nez du cheval , ébranlent fon cerveau d'une manière propre à ouvrir des pafTages aux efprits ani- maux pour couler dans les mufcles qui fervent à remuer fes jambes & fa telle. Si le fiftême du Cartefien c([ bon dans cette matière, quand un homme aura faim , & qu'il veira du pain fur une table, la machine de fon corps eftanc dans la mefme difpoiition où celle du cheval a efté fuppofée , les corpufcules du pain en- treront par fes narines dans fon cerveau , &: ouvriront des partages aux efprics animaux pour couler dans les mufcles qui fervent à remuer Ces jambes. Or l'expérience cft contraire , & la prefence du pain ne produit peint ce mouvem.ent dans le corps d'un homme preOe par la faim. Il eft donc faux qu'un femblable mouvement doive fe faire dans le corps d'un che- val. Si ce raifonnement n'a rien de faux , il renverfe toute la dodrine des Cartefiens. Il efl: donc à propos de l'examiner. Tout confilte à voir Ci en effet tout efl: égal de part & d'autre , & s'il n'y a rien de particulier dans le corps de l'homme qui doive empêcher le mouvement qui n'eft point empêché dans le corps du cheval. £n ne confidcrant que les objets , fçavoir le pain & l'avoi- ne ,&: la proportion que le pain a avec la machine de l'hom- me , &: celle que l'avoine a avec la machine du cheval , tout cft n femblable félon les principes des Cartefiens , que s'il n'y avoit point d'ame dans le corps de l'homme, il marcheroic auflî neceflairement vers le pain que le cheval marche vers !'*> voine. 3 7<$ LE JOURNAL Il"faut donc que ce foit l'âme de l'homme qui empêche ce mouvement. Voyons donc comment elle le peut empêcher. Elle n'cmpcche pas l'imprcffion que le pain fait fur le corps de l'homme parles corpuTculcs qu'il y envoyé. Elle n'empê- che pas que ces corpufculcs n'ouvrent le palîage aux efprics animaux pour les faire couler dans les mufclcs qui fervent à remuer les jambes. Elle n'empêche pas que les jambes ne fe remuent , comm.e elle n'empêche pas que les autres par- ties ne Ce remuent quand elles ont des convulhons caufées malgré elle par le cours irregulier des efprits. Il refte donc qu'elle empêche que l'imprellion du pain portée au cerveau n'ouvre le paflage aux cfprits animaux. Or elle ne peut empêcher que ces paffages ne s'ouvrent fans faire un ciïbrt qui les tienne fermez nonobllant l'imprcf- fion que le pain fait pour les ouvrir, L'amc ne peut faire un effort proportionné à cet effet , félon les principes des Carce- fiens qui fe moquent de la puiffance motrice que les Peripa. teticiens attribuent aux efprits. Tout ce que l'ame peut faire , félon eux , c'eft de connoitre & de vouloir. QujUe connoiffe & qu'elle veuille tant qu'il lui plaira , elle ne fera jamais remuer un corps , ni ne l'empêchera de fe remuer, s'il cft pouffé par un autre avec affe/. de force pour cela. Dans cette neceffué les Cartefiens ont recours à Dieu qui a foin d'ouvrir &: de fermer les paffages des efprits animaux j de manière que dans le corps des beftes les mouvemens fe font félon les loix de la mécanique , & qu'au contraire Dieu les viole à tout moment dans le corps de l'homme. Cette infraction des loix de la mécanique a fait de la peine aux Cartefiens. Ils ont rêvé long-temps pour tâcher de les fauver. Il n'y a pas eu moyen. La neceffité de ces loix eft incompatible avec la connoiffance de l'homme , & encore plus avec fa liberté. Si l'ame ne peut empêcher queJ'imprefïîon du pain portée au cerveau n'ouvre le paffage aux efprits animaux , & que ce foit Dieu qui l'empêche , il ne l'empê.heque fuivant la vo- lonté de l'homme. Or l'homme bien loin de vouloir que Dieu l'empêche , fer oie bien-aife que fa main fe portaft au pain DES SCAVANS. ^ 377 pain , que fa bouche le préparait , & le fift defcencîre dans Ton cttomach , fans que fa volonté s'en mêUft ; de mefme que fôn fang circule , &: que fon cœur bat , foit qu'il le veuille ou qu'il ne le veuille pas. Rien n'oblige donc Dieu à changer le cours que les efprirs animaux excitez par la prefence du pain devroient avoir. Que ne l'ont- ils donc , &: que ne font- ils remuer les jambes de l'homme pour aller prendre le pain , & pour le manger ? Cependant rien de cela ne fe fait en lui. La chofe devroit arriver de la mefme force dans le cheval , jDuis que dans la fuppofirion tout eft égal de p.irt &• d'autre. La 3. propoficion eft , que tout ce qui fe palic dans l'exté- rieur des belles doit nous faire penfcr tout le contraire de ce que les Cartefiens enfeignent. Le fens de la propohcion eft qu'en demeurant dans une certaine étendue de connoiiïance qu'on ne peut palier , & en fe fervant des principes les pies evidens de la mécanique , il doit paroitre certain que plu- fieurs mouvemens qui fe voyent dans les belles ne s'y font point par la feule difpolîtion de la machine. Cela s'explique par l'exemple d'un cheval qui eft fuppofé à cent pas d'un foffé efcarpé & profond où il y ait du foin &: de l'avoine. L'odeur du foin &: de l'avoine le détermine à marcher de ce côté-là. Mais quand il eft au bord du Ç^iXc , il s'arrête tout court. Son corps ne fe remue pas en cette oc- cafion parles feuls principes de la mécanique. C'eftun prin- cipe de cette fcience , qu'un corps poulfé fuit la détermina- tion qu'il a reçue , à moins que quelque obftacle plus fort ne l'oblige à changer fon mouvemenr. Ici deux chofes font con- liantes. L'une que le cheval reçoit du foin & de l'avoine une forte détermination pourfcjetter dans le folTé. L'autre eft qu'il y eft encore pouftc par l'éperon , & que d'ailleurs il ne fe rencontre rien qui doive changer fon mouvement , la lui en donner un autre. La quatrième propofuion cfl: , que jamais les Cartefiens n'ont touché le point eft'entiel de la difficulté en cette matiè- re. Toute leur dodrine fe réduit à dire que les efprits ani- maux font déterminez par l'impreffion des objets à couler dans differens mufcles , & à y produire divers mouvemens. 1693. C c c c c 378 LE JOURNAL Q^nd ils appliquent cette propoficion générale aux efTctî paiciculiers , ils ne difcnt rien que ce qu'Us ont dit d'abord ; &: les Pcripatcticiens à qui elle eft très rufpedlc , ne la trou- vent pas plus cclaircie par cette application. La cinquième propoluion eft qu'en cette matière les Car- tçficns ne parlent point du tout confequemmenr. Pour parler confequemment ils doivent dire que les hommes font des automates auffi bien que les belles. Un Pcripatcticien leur demandera fi Dieu ne peut pas faire une machine feniblable à un homme , & qui par les feules ioix de la mécanique fade ce que les hommes font tous les jours. Sils répondent que iion , &: que deux hommes ne peuvent pas avoir enfemble urre converfation fuivie par les feules loix de la mccanique , le Peripateticien leur reprochera la hardieife qu'ils auront de mettre ainfi des bornes à la puillance de Dieu , & leur de- mandera quel plus grand miftere ils trouvent dans les convcr- fations fuivies des hommes que dans les aftions fuivies àes belles. Dans les converfations fuivies les hommes remuent les lèvres & la langue , & par ce mouvement poulî'ent l'air , le brifent , &: le font réfléchir en divcrfcs façons. Un principe qui penfe n'efl point du tout neccffaire pour produire ces ef- fets. Les modifications de ces mouvemcns qui forment cer- tains mots pkuôt que d'autres , ne font rien encore. Les per- roquets forment tous ces fons , Se ne penfent pas. Les fons produits par la langue , & les paroles fuivies ne font pas plus des fignes de fcntiment & de connoiifance , que les mouve- mens des m.ùns , de la tcfte &: des yeux. Et c'eft fur ce prin- cipe que les Cartefiens font la grâce aux muets de ne les pas prendre pour de pures machir,cs , non plus que les hommes dont ils n'entendent pas la langue. Que Cl l'on fait la comparaifon de la manière dont un maitrc dreffe un chien , & de celle dont il inftruit un valet, fourd Sc muet de naifl'ance , on y trouvera peu de diiîerence , &: on reconnoitra qu'il n'a pas plus de communication de penfées avec fon valet qu'avec fon chien. Les Peripateticiens ne prétendent pas prouver abiblumenc par cet exemple , que les beftes connoiflent , mais feulemenc DES S C AVANS. 379 «îe montrer aux Cartefiens qne fi nonobftanc la fuite des aâions des beftcs , ils jugent qu'elles n'ont point de fentimenc ni dd connoifl'ance , ils doivent auffi juger que nonobftanc les con- verfations fuivies que les hommes ont enfemble , ils n'ont point non plus de connoiirance ni de lentiment. Les Carte- iîensdifentque les beftesagillcnt comme fi elles connoifl'oienc, & que cependant elles ne connoifl'ent point ; & les Peripa- teticiens leur difent à leur tour, que les hommes parlent com- me s'ils connoiffoient. Tout Ce réduit donc à fçavoir fi les dif- cours des hommes peuvent aufll-bien que les adions des bê- tes , élire produits par le feul artifice des organes. L'auteur du voyage du monde de Defcartes a fait une ré- ponfe à ces difficukez , par laquelle il témoigne que ce quC les Cartefiens tiennent liir ce point , ne lui paroit ni vrai ni vrai-femblablc , tant l'idée qu'ils ont d'une machine qui feroic par les feules loix de la mécanique ce que nous voyons faire aux bcftcs , cft confufe ; & tant les fondemens de leur para- doxe font foibles contre la poflefllon où le fentiment contrai- re a toujours efté. Mais avant que de s'expliquer fur ce point , il déclare fon fentimenc touchant les livres philofophiques de M. Defcar- tes. La Metaphifique comprife dans fes Méditations , efl; à fon fens , le plus méchant & le plus inutile des ouvrages de ce Philofophe. Il a voulu trop rafiner fur la manière de chercher la venté. Ce qu'il dit d'abord qu'il faut douter de tout , ne fignific rien finon qu'il faut fe donner de garde des préjugez. 11 falloir fe contenter de cela. Ses principales démonftrations de l'exiftence de Dieu font de purs paralogifmes. Dans la mecode il s'éloigne de la fin de la Philofophie qui eft de trouver la vérité , quand il y avance des chofes incom- patibles avec ce que la révélation nous apprend , Se qu'il ac- coutume l'efprit à regarder comme vrai & comme évident ce qui détruit nos mifteres. Le plus beau de tous Ces ouvrages de Phifique c'eft fon trai- té des paillons. Quelques-unes de Ces lettres contiennent des explications fort naturelles de plufieurs difficultcz de Phifique. 3?o LE JOURNAL Le livre des principes, &: celui du monde renferment beau- coup de bonnes chofcs , & pour le moins autant de mauvai- fcs, L'afTcmblage des tourbillons ,&: la difpofition univer- fcllc des corps celeftcs , la manière dont le cahos s'eft dé- brouillé , &c les raifons par lefqucUes les fpheres liquides ilib- firtent fans fe confondre , font des idées creufes que M. Ro-- hault n'a eu garde de foutenir. Cette rcponfe efl: fuivie d'une réfutation de deux dcfenfes du fiftcme gênerai de Defcartes , contre lequel l'auteur du Voyage avoit propofé trois démonftracions dans fa quatrième partie. La critique qui a efté faite de ces trois dcmonftrations ert: examinée dans la réfutation avec une pénétration qui fait voir que l'auteur pofl'ede parfaitement bien ces matières , &: qu'il a un talent particulier pour les faire entendre aux autres. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. PANTHOT. Doyen du CoSege des Médecins de Lion , écrite à M. D.iquin frenuer Médecin du Roi , fur une opération de la taille fort exr traordinaire, MR. SoifTon Secrétaire du Roi à Lion , avoir joui d'une fanté parfaite jufqu'à fa foixante cinquième année , où il eut une difficulté d'uriner qui l'incommoda beaucoup. Comme fes douleurs augmentoient , il 6t affembler des Mé- decins &: des Chirurgiens qui refolurent de le faire fonder. Le Sr. Horace Panthot qui a le plus de réputation pour la taille , fut choifi pour cela. Il trouva dans le fond de la veflîa la refîflance d'un corps charnu qui empêchoit la fonde de tourner. Cette oppofition donna lieu de croire qu'il y avoip un fungus dans la veflie , qui contenoit une ou plufieurs pierres. Une féconde aflTemblée ayant efté faite pour prendre une refolution certaine , tous les confultans conclurent que quand il n'y auroic que le fungus , il falloir necefl'airement faire l'o- pération de la taille , parce que le fungus coupé fuppureroit, ternum ne s'y trouvent pas. Tous ces os qui dans l'ellat naturel font au nombre de trente huit , tous feparez &: diftincts les uns des autres , font ici fi étroitement unis , leurs ligamens tellement offîfiez , &: leur articulation fi effacée , qu'ils ne font vérita- blement qu'un feul os continu & uniforme ; en forte qu'il eft aufîi difficile de rompre une vertèbre dans le milieu de fon corps , que de feparer les côtes d'avec les vertèbres , les ver- tèbres d'avec les vertèbres , & l'os Sacrum d'avec les os des lies, ]e n'obfervois pas plus de diftindion entre tous ces os qu'on en obferve communément dans les adultes entre l'os J'ubis , l'os Ifchion , & l'os des llei , qui ne font qu'une mê- me pièce offeufe. Les racines dé toutes les côtes ne font qu'une mefme fuperficie plane , égale &: polie avec les corps & les apophyfes tranfvcrfes des vertèbres. Les apophyfes o- bliques de toutes les vertèbres font fi confondues , qu'il efl; impoifible de remarquer les vefiiges d'aucune en particulier^ Le bord cartilagineux du corps des vertèbres eft: tout à l'en- tour exaftcment oflîfié. En un mot tous ces os font aulTî con- tinus que fi un Menuificr avec fcs outils avoir charpenté danS une mefme pièce de bois un tronc artificiel de fquclette, avec les côtes , les vertèbres, l'os Sacrum, & les os des Iles. Ayant voulu découvrir enfuite fi les vertèbres êtoient unies dans tout leur diamètre , )C fciay dans la conjondion de deux ; & 3 peine j'avois pénétré jufqu'à l'epaifleur de deux lignes , que j'apperçus que les deux vertèbres eftoient feparécs comme dans l'eflat naturel pat une cavité qu'elles laiflcnt entre elles en fe touchant feulement par leur rebord qui relevé un peu fur le niveau de leur milieu. Du côré gauche à un demi tra- vers de doigt des vertèbres , deux côtes (but unies cnferablc (Jafis f erenryfa/^, parce que cet acide n'auroit pas feulement la vertu d'olfifier , mais encore celle de pétrifier , fi la com- 404 ^araifbn qu'on en fait avec les eaux pétrifiantes , avoit force. Outre cela fi ces fufcaux pointus s'y cftoient embarrallez , il y a apparence qu'il s'y en fcroit cryflallifé beaucoup , comme il arrive à IV./» forte, dans toutes les fubhnations si précipita^ (ions du Mercure, dans la ptetre infernale , dans le Viuiol de Mars , &CC. & qu'à chaque jointure il y auroit eu une grande /élévation de matière. L'efprit acide qui coule &: circule dans ics veines Se conduits fouterrains , ne Ce fublime que rare- ment à la furface de la terre & jufqu'au tombeau des morts ; car les minéraux dont la génération efl: un elfet de cet acide, ne fe trouvent que fort avant dans les entrailles de la terre ; & il y a apparence que fi cette oflîfication en eftoit un eH-'et , nous en verrions plus fouvcnt des exemples. Si l'on répend que ce n'eft pas la terre pure , ni aucun prin- cipe en particulier qui en fera la caufe , mais un mixte tout çntier , comme une terre arqilleufe , ou quelque autre terre minérale , qu'on faife reflexion qu'un ciment tout à fait mine- rai eft trop greffier àc trop maffif pour s'infinuer entre les fi- bres , & pour les coller les unes contre les autres , &; qu'il laifieroit des bofles , des éminences difformes , & des concré- tions pierreufes fur l'endroit dts jointures. On fçait qu'unQ terre argilleufe & gralTe n'eft pas propre à oflifier ; car l'ex- périence démontre que les pierres qui fe trouvent dans ces ibrtes de mines font toujours les moins folides. Il feroit inutile d'objeder que V Vnicornu foMle eft un os qui fe forme dans la terre , puis que ce n'eft qu'une terre miné- rale , friable , de la nature de la craye ou du bol ^ moins foli- de que les pierres , & qui n'a rien de commun avec les os. Enfin il y a apparence que fi la terre ou quelque principe particulier, ou un mixte tout entier avoient colé ces os en- femble, ils auroient auffi uni de mefme les deux os du Penil^ les cartilages du Sternum , &: généralement tous les ligamens du corps , qui pourtant font feparcz. Il ne faudroit pas defefperer de trouver la caufe de cette union , fi on pouvoir dccouvrix le véritable principe de la courbure des vertèbres. Car il y a apparence que c'eft de lui <^ue dépendent tous les autres phénomènes. On ne peut pas raifonnablemenc 40 5 ^ faifonnablement avancer que ce (bit par une chute ou par un coup , ou par quelque caufc externe , comme le vouloienc quelques- uns , que cette figure ait cfté produire ; parce que Je coup répondroit ou aux épines du dos , Se alors l;i boflere- Icvcroic en dedans ; ou aux coftez & aux apophifcs tranfver- fes , & les vertèbres avanceroient du coflé oppofé ; ou à la partie antérieure du tronc , comme à la poitrine on à l'ombi- Îjc; &r alors les vertèbres nereculeroientqueforr diffiicilcmcnc en arrière , parce qu'elles Ce trouvcroint éloignées de l'im- preflîon du coup ou de la chute : ou au moins il n'y auroit que celles qui répondroient à l'endroit où le coup auroit elté donné , qui fe déplaceroient ; & elles ne feroient pas toutes enfemble un arc G régulier , & il y auroit eu ou une d. /loca- tion , ou une fradure , ou un froidement. D'ailleurs la vio-. lencc d'un coup ou dune chute , bien loin d'unir les os , ne fait que les feparer. ]'ai encore de la peine à croire que ce Toit par un defordre inteOin des humeurs que ces accidens foient produits , comme par un R.icb/in , ou par une difpofi- tion écroiiclleufe , comme prérendoient quelques autres. Car CCS maladies bien lom de fecher &c d'olTih'er les ligamens , les relâchent en les humedant par une fcroficé copicufe qui fur- nage dans le fang épais qui les caufe. D'ailleurs dans le Ra- chitis il y a des tuberofitez contre nature fur les os , qu'on n'ob- ferve pas ici ; &r les os , bien loin d'eftre durs , font fi mois qu'ils quittent facilement leur figure naturelle , pour en rece- voir quelqu'sutre irrcguiiere. Quoi que les vieillards ayent le tronc courbé à caufe de la foibicire des mufcles du col & du dos , les carribges de leurs vertèbres font comme des briques cuites , privées de toute moUell'e, qui ne fçauroients'entremcflerni fe confondre pour faire un corps continu. Ayant enfin ferieulement examiné le peu d'apparence qu'il y a que la terre ni aucun accident pendant la vie ayenc pu donner ce pin femi-anulaire ni ce degré d'endurcidement, j'ai crû qu'il falloit de neceflîte recourir à la génération & à la formation du fœtus dans le ventre de la mère. Je ne puis pas e^i mefme temps l'attribuer à aucun défaut de \'œuf ^ devant 4o^ ni mcfme dans le temps qu'ii cft rendu prolifique par refprfc fcmiiul , puis qu'il faut croire que dans tous les œufs les fi- Ie:s fe trouve .t régulièrement tracez , & toutes les parties placées dans une (ymmerrie requife. Il faut donc cherchée quelque dcfordre dans la formation de \'emhrvi>n , ou dans Vac croisement du fœtm , capable de produire l'cfi^t qui nous em- barralîe. ^uppofons donc que l'œuf gonflé par la rarcfadion qu'il a reçue du ferment feminal , venant à crever fon petit domicile membraneux , s'ouvre un padagc de l'ovaire dans la matrice. Alors par*un mouvement doux & inteftin de Ton hu- meur lymphatique , les parties commencent à s'allonger , 6c à grolTir en tout fens , parce que cette liqueur ainfi raréfiée c(h allez fine & afltz fubtile pour s'infinuer dans les pores des fi- lets , &c par confequcnt pour les étendre. Le Canna , ou les j^Ieis offtux du tronc , prennent nourriture à proportion , & fe poulfent en toutes les dimenfions. Mais Ç\ par hazard dans cette expanfion il arrive qu'ils ne trouvent pas aflez d'efpace pour s'étendre en long , à caufe que peur élire les membranes de l'œuf ne cèdent pas allez , &: ne fe dilatent pas facilement; ou bien à caufe que l'crft/eft étroitement ptellé parles parties qui l'environnent 5 comme il pourroit arriver fi l'œuf s'efloic engagé dans les trompes de la matrice , qui par leur confor- mation fe trouveioient par hazard trop étroites ; le Carina fe- ra obligé de fe replier ; &: au lieu de s'étendre en long , où fon accrolifement naturel le porte , il fe recourbera en arc en changeant de figure &: de détermination , d'autant plus faci- Jement que les filets olfeux font encore fouples &: ployables. Et il ne faut pas s'étonner fi ces fibres prenant ce plis quand elles font tendres , gardent la mefmc fiiuation quand elles de- viennent folides. Outre cela , quand mcfme dans le premier développement des delincamens de l'œif , les parties ne trou- veroient aucun obftacle à s'étendre, il peut arriver que quand le fœtus viendroit à croitre conliderablement , il trouveroic de la difficulté à dilater fon domicile , foit parce que la ma- trice feroit étroite dés fa première conformation , foit parce (es fibres charnues feroient trop tendineufcs ou trop eU/iiqucs pour fe laifler étendtc ; ou bien parce qu'il fc trouveroic quel- 4<»? Bue groHc tumeur dans l'Abdomen , comme une ob^ruftidU ou un abfces au Mefentcrc , au Pancréas , au Foye , à la Ka-i ce , & à la matrice mefme , qui pefant fur le fœrus , & le preflapc de tout coftc , &r l'empêchant ainfi de s'étendre li- brement , obligent les vertèbres qui font encore tendres , à fe recourber en demi- cercle ; & à proportion qu'il aura plus ou moins de peine à s'étendre , la courbure fera plus ou moins fenfible , &: le fœrus fera à proportion boffii, il y a apparence que c'eil là la caufe de toutes les beffa qui fe font dans le ven- tre de la mère. Le feul poids des vifceres fans tumeur ni au- tre défaut , doit neceffairement prefTcr le corps délicat du fœtus. C'eft peut-eftre la caufe que nous avons tous le dos naturellement un peu courbé. Or la raifon pourquoi cette coutbiirc fe fait en devant plutoft qu'en derrière eft parce que le fœtus a toujours la tefte panchée vers les genoux qui font appuyez contre le ventre. II faut mefme que les parties tiennent cette fituation dans l'œuf, afin que le corps du fœ- tus tienne moins de volume. Ayant ainfi développé la caufe de cette courbure , il ne fe- ra pas difficile d'en déduire tous les autres phénomènes. On conçoit très bien que le tronc cftant ainfi courbe , \cs coftes doivent de necefllté en s'abaiffant avec le flcrnum aller tou- cher les os des Iles, On peut l'expérimenter en foi- mefme : on verra qu'en abauTant la tcfte autant qu'il fe peut vers \cs genoux , les faulfcs colles porteront fur les os des Iles par leurs cxtrêmitez , quoique leur ^^ry^' demeure fixe au mefme endroit. Cette figure fait que les corps de toutes les vertè- bres , l'os Sacrum, S: les os des lies font extrêmement prclTcz les uns contre les autres ; ce qui a beaucoup contribué à l'ol- , fification de leurs cartilages & de leurs ligamens. Car les po- I res eftant extrêmement ferrez , le f\ng m aucune autre hu- ; meurnc pouvoir qu'avec peine circuler entre les fibres ; C'eft pourquoi celles ci n'eftant pas fuffifamment arrofées , fe font fechées , & par la force de la compreflîon s'eftant forte- . ment approchées , ont dû faire une tiflure folide & oncufc. j Car pour rendre un corps compadc , il ne£iut que faireap- ' prochcr fcs parties , U en faire fortir l'humidité. C'eft ainlî 4c9 qu'avec de la terre pêrric avec l'eau on fait une parte , quî cllanc iïii("e fur le fourneau , fait un corps folidc qu'on nom- me brique ; La laine , le coton , les plumes , & les corps les plus rares , deviennent auflî Colidcs quand on en rapproche les parties. Par la mermc mécanique les coftes cftant prcflecs pendant plulicurs mois contre les verrebres dans le ventre de la merc , & ne recevant par confequcnt dans leur entredeux que peu d'humidité , leurs cartilages & leurs ligamens dé- voient s'endurcir , parce qu'cftant fortement appliquez les uns fur les autres , leurs fibres dévoient en s'entrt mêlant fc recevoir en manière de petits tenons &: de mortaifes , &: faire un corps continu , d'autant plus {-acilement qu'elles font tou- jours abbrcvces d'une humeur lymphatique , qui s'arrétant au moindre obftaclc , & s'cpailTiilant aifémcnt , pouvoir fervic de glu pénétrante & fubtile pour les coler enfemble. Cette union des codes s'clt faite encore plus facilement , parce que le fœtus ne refpirant point dans Yutcrus , les codes ne font ni haulîees ni abaiflces , puis que l'union n'efl que l'application des parties dans un repos refpe£^if. Qu.md le fœtus vint à naître , ce% oseftoient trop joints les uns aux autres pour pou- voir en fe remuant rompre leur union. Quoi qu'ils n'ayei^.t pas cdé entièrement ofiliicz dans le ventre de la merc , ils n'one pas laifl'é d'achever leur endurcillement après la nairtanr e j comme i! arrive à plufieurs os dans les enfms. Nous voyons que la mâchoire inférieure, les pièces du crâne , l'os hyoïde, les apophifes des vertèbres , 1 os Sacrum , les os des Iles , tou- tes les Epiphyfes , & plufieurs autres os qui dans les enfansne font que caniLigineu^ , &: quelquefois muaUgineux , comme les denti , n'acquièrent leur dernière dureté que long-temps a- prés la naiiî'ance. Car il fuffit pour qu'un corps cartilagineux devienne un jour os , que fes fibres loient fort ferrées dés la formation du fœtus , lefquelles dans la fuite ne manqueronc pas de s'ofllfier quand la chaleur des parties , ou h fermenta' tion des humeurs qui s'augmente avec i'.îge , aura fait didlpcr 1 humidité qui crGupiUb.t cntr'elles , & quand les molécules déliées du fuc nourricier auront rempli , comme autant de pctis eoins , les diamètres de leurs pores , Se les auront ainfi- obligées 409 oHtgées à s'approcher les unes prés des autres. Quoi que cette mecam que les Apophyfes obliques aytrrc efté autant prellces que les corps des vertèbres , les premières n'ont pas lailfe de s'unir pareillement enfcmble ; ce qui eft une fuite necdlâire de l'u- nion des corps des vertfbres. Car les apophyfes obliques eftant ainfi im- unobi'es , atiachérs par leurs ligamens , & prelFées de tout côté parle mê- me fardeau des parties voifines qui pefoit fur les corps des vertèbres , ont diî necelTairement s'enit'unit , quoy qu'apparemment plus tard , parce que h. lig^ne de direElion de toute la pefanteur des corps voifins, portoit plus fut le devant des corps des vertèbres , que fur leurs parties pofterirures , ni fur le Rachis. Il y a leu de croire que c'eft cette grande compreflion de tou- tes les vertèbres qui fait que tous ceux qui nailfent hojfus , font ordinaire- ment petits, & d'une tailletresmediocre, parccque les fibres ollèufesefunt extraordinairrment comprimées , & leurs pores par conftquenten quflque manière affàificz , elles fe fcichcnt & s'endurciflent trop tôt -, de force qu'elles ne lailTcnt pas alTez de temps ni c^e liberté à la fève nourricifre {)our s'ajufter aux porcs , ni pour les faire croître fufiifammeni en toutes es dimcnfions. Il faut de neceffité que letro-^c de cet homme ait efté immob.Ie , qu'il n'ait pùfefléhir ni b'étei dre , s'é'evcr nifecouther, ni fe tourner fir '.es codez, il n'y avo t que la leftc , les pieds , & les mains qui poavoient fe mouvoir. Le tronc ne faifoit que fiivre leu mouvf ment , comme i ne fta- tuc de bois qu'on feio:t marcher fur une rove , tandis qu'elle feroit immo- bile. Il y a de quoy s'étonner que cet homme ait pu vivre fi long temps & qu'il ait pu refpirer , puis que les côtes qui eftcient continues aux ver- tèbres , & où le principal mouvement fe doit fiirc , ne poiivoient pas Ce mouvoir. Cependant il v a lieu de croire qu'il ne faut pas une dilatation fort confiderable de la pontinc ni du bas ventre pour faire entrer dans les veficules bronchioles allez d'air pour vivre. Car nous voyons dans les paillons hyjlencjHes , ou dans l'apoplexie forre , que le malade n'a prêt que aucune refpiration fcnfible , ik pafTe quelquefois pour mort un cer- tain temps , après lequel il ne laifle pas de revenir. Il eft feur que pen- dant ce teir.ps le fang circule par les poumons , & que quelque air , pour peu qu'il y en ait, en facilite le padàge -, l'air de lui-mcfme a du rtjfort pour fe gliilcr oà il trouve de la facilité , il ne faut que peu de mouvement pour le déterminer. L'air externe eftant plus craiTe , a plus de reirort que celui qui eft dans la poitrine : c'eft pourquoi il l'oblige de forcir , & va oc- cuper fa place , jufqu'à ce qu'eftant raréfié lui mefme, il cède fa place à un autre. .Amfi dans les paffions hyfteriques l'air circule dans les poumons : Ji trachée attere donne à la fois paftàge à deux courans d'air oppofez : l'air •jdcnfe du dehors entrant avec vitelfe , chalfe l'air échaufc ; & perdant .d'abord la force elafliejuc , dilaïc par la chaleur ces poumons il eft obliaé jde fottir par une colomne d'air qui le ptefTc par derrière ; comme il arrive quand on cchaufFe une chambre exaucement fermée. On remarque aifé- 1693. Lltli ment qvie l'air externe fait relTort pour entrer a-^ec vitellè par le trou ie U porte , pendant que l'air échaufé ne cherche qu'à trouver iiruc. Or puis que dans les paiïio:is hyrteriques on vit un temps conlîderable fam pou- voir remiriucr piefqu'aucune refpiration fenfib'.e, {lins mouvement de poi- trinc , du diaphragme , ni de l'abdomen , nous n'aurons pas de peine i trouver des moyens fuffi ans pour faire refpirer &: pour £ure vivre très long- temps le hofTu dont il s'agit. On ne peut pas douter qiir la vertu éUftirjuc de l'air n'ait fait dans lui-mcfme & dans tous les autres hommes, ce que )e viens de dire qu'il fait dans les femmes hyfteriques : mais outre cela il eft probable çue les côtes confervoient toujours qur Iqi e mouve- ment : quoi qi'elles fulfent unies aux verrebres, elles ne laiiroient pas de fe foulcver un peu du cô:é du Sternum , ori les cartilages ne s'eftoient pas cd'ifiez. Car on ne peut pas nier que cinquante mufcles qui fervent au mouvement des côtes , recevant autant qu'il faut d'efprits animaux & de fang pour fe mouvoir , ne fuflent des cordages aiTez forts pour les hauiret"- & pour les plier malgié route leur liaifon avec les vertcbtes ; car prefen- tement , quoi qu'elles (oient plus feches & plus dures , je les plie fa- cilement au moindre effort que je fais avec le doigt fur leurs exttêmitez : à plus forte raiion d.ins le temps qu'elles eftoient plus fouples & plus pliantes par les humeur* qui les artofoiert , tous les mufcles de la ref- piration ag (Tint de concert , dévoient foulever au moins leurs exttêmi- tez qui regardent le Sternum , eftant l'endroit du levier le plus éloi- gné du point fixe. Mais c'tft le diaphragme qui eftoit icy le principal organe de la refpiration , parce qu'il efto'.t libre à le mertre en contra- âion , & à prfiTer en bas l'eftomach &c les intcftins pour faire entrer l'ait dans les poumons en foulevant le ventre : & cependant comme la dilata- tion de la poitrine & du bas ventre n'cftoit pas fort confidetable , &c que. la quantité d'air qui entroit par chaque infpiration ne fi ffifoit pas pour di- ftendre entièrement les poumons . il filloit pour (uppléer à ce défaut, que cette perfonne rtfpiraft plus fouvcnt & plus vide , comme il arrive dans les pleuritiques , dans les empiryques, & dans tous ceux qui ont des embarras dans les poumons , ou qui onr la poitrir« trop étroite. Il y a ericore apparence que le fang de rerte pirfonne s'eftoit toujours confcrvé une route par le trou ovalaircàt B Jtal , fc par le Ciinal ^rteritt, qui n'ont pas pii fe fermer ; comme il arrive quelquefois, par la le far* de la veine cave qui doit traverfer le ventricule droit du cœur pour palier tour entier dans les poumons par fon ruyau ordinaire , eft obligé de le par- tager en trois ruiffeaux diffc^rents , dont l'un palfe par le trou de Botal dans le ventiicule gauche du cœur , l'autre part de l'artère pulmonaire pour fe décharger dans l'aorte defcendante par le canal arretiel ; & le rroi- îiéme enfile l'artère des poumons. Ainfi fe faifant une grodè dépenfe de fang à l'embouchure du trou ovale & du canal artériel , il ne fiilloit pas une dilatation fi confidetable des veffies glanduleufes des poumons pout fevorifer le partage du peu de iàng qui y couloit. Il femblc mcfmc que 4M cVftune riiite mécaniqnp if la ft'uft nre 4.' de la difpofition: particulière de ce tronc , que le trou ovalijie ^ le canal aritriel ne (nieiu pss bouchez ; car il y a lieu de cioire par h s raifons rappor;écs cy-defHis , qu'ici les pre- mières rcfpirations n'ont pa^ cflé fi libres ni fi coiifiderab'cs qu'elles le font dans les enfans ordinaires qui viennent de naître. C't ft pourquoi le fang trouvant de la peine à p 'Ift r tout entier par les poumons , il a 'Ki de neccflîté e' filer en partie le trou ovalaire ■< le « qui les enft ci- mentfz -, .e qui confirme tou|Ours que les ligamens commencent a s'oiïifirr avant d'eftre e: fcvelis dans la terre. Il faut donc qu'au premier dévelopement des filets oflèux de l'œuf , la jambe n'eut pas alfcz de liberté pour s'étendre. Se qu'elle fe trouvaft trop flé hie & irop forcer contre les fcllcs & coi tte la teftedur^wK;-; ce qui a fait que leurs fibi es olTeufcseftant encore tendres , Ce font facilcmei t entre- mtflt-es & confondues enfctrble , & dans la fuite en s'endurciflant (e font converties en un feul os. C'cft la raifon pourquoy du cofté du ;arrct la jonâion en eftoit beaucoup p'.us (blide ■■, d'ailleurs dans cettt flexion extra- ordinaiie ies mufclesflechilleurs de la jambe dévoient eftre fort courts , & leurs atuafenlfles trop longs; ce qui a obligé ces deux osa achever leur endurcilfement après la nailFance ; car la jambe devoir refter imn-.obile, parce que les mufcles extenfcuts cftant ciop allongez , ils ont perdu leur r(fn---t , & font demeurez incapables d'agir , comme il arrive à ceux à qui on donne la queftion fur le chevalet. En attachant de gros poids a leurs jimbcs, leurs mufcles s'allongent fi fort qu'ils perdent leur fo««,j -, ce qui met leurs membres hors d'eftat de fe mouvoit : Au fi les fifchijfeurs ne trouvar.t aucune lefiftancedu ccfté de leurs atJtagoniJies , tirent & pref- fent toî'jouts le tibia contre le/îrwar. Je ne nie pas que dans certaines perfonnes d'un tempérament ardent, \' j^orte proche du cctur , les Sinus du cerveau , & plufieurs autres par- ties ne s'offificnt. Je fçai que quelques cartilages , & mefme des liga- mens s'olTifient en certains vieillards caducs. Je ne doure pas que certai- nes parties qui auroient acquis un dc^rc d'oflificarion pendant la vie , ne s'endurcilTent dans la terre qui les feche er quelque manière. Mais je ne voi pas d*autrc caufe pourquoi ce phénomène paroift dans certaines par- ties du corps plutoft que dans d'auties , fi; on que les fibres des unes fonc plus unies dés la génération que cellfs des autres ; ce qui leur donne occafion de s'oflifirr dans la fuite. Et puis qu'on vojt qu'entre plufieurs millions de peifcnnes il ne s'en trouve pas quelquefois une feule qui ait les vertèbres & les cotes unies enfemblc , ni le tihia colé contre le ftmur , on peut conjefturer raifonnablcment que dans le cas prcfent cette oflîfica- tion a pris naiirance dans le ventre de la mère. On voit fouVer.t qu'un ou plufieurs os dilloquez & mal rCRiis, s'entt'unifient par Enchylofe , furrout (î la d'iTocation eft accompagiée de fraAure : mais dans ces fortes d'£r- ehyUfes on voit des bolFes &c des ditFotmitcz fur l'article , formées par le fuc ép.iis qui a fervi de ciment pour unir les os. A Paris chez Jean Cusson , rui; S. Jaques, à l'Image S. Jean Bapt. XXXIV. 397 LE JOURNAL DES SCAVANS Du LuNDY 31. Août M. DC. XCIII. HISTOIRE ECCLESIASTIQUE. PAR M. FLEURY, prêtre , Abbé de Locdieu , Sous-precepteur dt Monfeigneur le Duc de Bourgogne ^ ^ de Monfeigneur le Duc £ An')ou. Tome Troifiéme , depuis l'an ;/;. jufjues k Lin ^6 1. In 4. à Paris chez Pierre AuboLiin , Pjerre Emery , &: Charles Cloufier, fur le quai des Auguftins. 1693. LA Préface qui efl: à la tefte de ce volume , y a efté mife pour fervir à tous les autres , & pour expliquer le fujec de toute l'hiftoire Ecclefiaftiquc , qui eft de reprefenter le Chriftianirme depuis fon établiflement par une fucceffion non interrompue de Dodeurs & de Difciples , & par des tradi- tions qui ont pafle des pères aux enfans. M. l'Abbé Fleury n'a tiré fes preuves que des auteurs origi- naux , c'cfl: à dire de ceux qui ont écrit dans le temps mefmc ou peu après. 11 a omis les faits douteux , &: mefme les cer* tains qui lui paroifl'ent inutiles , &: a circonflancié les utiles, fans néanmoins les charger de reflexions , de diflertations , &: de dilcurtlons de critique. Dans l'examen qu'il en fait il a évité deux excès ; l'un d'une crédulité qui reçoit tout fans 1693. Hhhhh 39S LE JOURNAL difccrncment : l'ancre d'une critique qui va jufqu'à ne vou- loir croire ni miracles ni vifions. Voila ce qui regarde le choix des matières. Quanc à la ma- nière d'écrire , il y en a deux. L'une de rapporter les pdlfa- ges des originaux , comme ont fait les Ccntunaceurs & Ba- ronius. L'autre, d'écrire d'un ftile uniforme , prenant feule- ment le fens des originaux , fans s'aifujectir à leurs paroles. M. l'Abbé Flcury a pris un milieu entre ces deux manières, en écrivant d'un iHle fuivi , employant fouvenC les paroles des origmaux traduits fidellemenc en notre langue , & inter- rompant quelquefois fa narration par des extraits de dodnnê qui fervent à prouver des cérémonies &c des traditions an- ciennes , par des formules de foi arrêtées dans des Conciles , par des actes de Martirs . par les a£lions de Moines les plus ce- Jebres, dans le récit defquelles il s'eft plus arrêté à leurs vertus qu'à leurs miracles. Il n'a pas remonté jufqu'à la naiflance de J. C. Son hifloi- re ne fe peut mieux apprendre que par la Udure de l'Evangi- le. 11 n'en el\ pas de mefme de l'hilloire des Apôtres : ou- tre ce que leurs Adts &c leurs Epitres nous en enfei- gnent , il en a emprunté des faits importans de Philon & de Jofephe, Dans rout le cours de cette longue hifloire fon principal foin efl: de faire confidcrer trois cliofes à fes Icdeurs , la do- ûrine , la difcipline , & les mœurs. 11 leur prefente donc une Eglife vifiblc à toutes les nations, fubfillant par une fuccefllon continuelle de peuples fidèles , de Pafteurs &: de Miniltres , diftinguée des Infidèles par le nom de Chrétienne -, des Hérétiques & des Schifmatiques par celui de C.uolique , qui fait profclfion de n'enfeigner que ce qu'elle a reçu d'aboid Elle fe croit infaillible en vertu de la promelfe de (on Fondateur j la règle de fa foi eft la révélation divine , compiile dans l'Ecriture & dans la Tradi- tion. Quant à la difcipline , M. l'Abbé Fleury fait voir dans fon hiftoue un gouvernement fondé fur la charité , fans aucun interêc de ceux qui gouvernent. Ils font appeliez d'en haut , DES S CA VANS. 399 cHoiûs pour leur mérite , n'acccprenc que par obeïnTance le Miniftcre , dont il ne leur revient que du travail à: du pcril. Us ne prétendent pas dommcr comme les Puifl'anccs du fiecle. Ils ne fc fervent des biens temporels que pour airiftcr les pauvres , vivant pauvrement euxmefmes, & fouventdu travail de leurs mains. Dans les premiers fiecles la plupart des Evêques eftoient tels qu'ils font ici décrits. Si dans la fui- te ils n'ont pas tous également gardé ces règles , l'Eglife a t.^- ché de temps en temps de les y rappellcr. La dernière chofe qu'il prie Ces lefteurs de confiderer dans fcn ouvrage , c'ert la morale chrétienne. Il leur fait voir par des exemples fenfibles , que tout ce que les Philofophes cnc enfeigncde plus excellent , a elle pratiqué par des ignorans , par des ouvriers , par de (Impies femmes : Que la loi de Moï- fe a cfté amenée à fa perfeâion par la grâce de J. C. des gens qui on: renoncé aux honneurs pour vivre dans le mépris , qui fe font dépouillez de leurs biens pour en revêtir les pauvres , & qui ont fouffert les plus ciuels tourmens plutôt que d'aban- xlonner la vericé. Ce tome qui comprend ce qui s'eft pafTé depuis l'an 313. jufqu'à l'an 36 1. eft divifé en cinq livres. Le premier qui eft Je dixième de toute l'hiftoire , décrit l'heureux changement qui arriva dans l'Empire , lors que Dieu infpira à Conftantin Ja penfée d'ariêter la fureur des perfecutions , & de permet- tre l'exercice public de la Religion Chrétienne. Alors les Eglifes furent élevées de toutes parts. Celle de Tyr fut u- ne des plus magnifiques , & fervic de modelé à pkifieurs aiitres. Le difcours qu'Eufebe de Cefarée prononça en cette occafion eft venu jufqu'à nous. Il y aplufieurs années que « je le donnai au Public en notre langue à la fin de fon Hi- ftoire. Au temps de la dédicace de cette Eglife le mefmc Eufebe \ compofa fous le nom de Préparation & de Démonftration E- I vangelique , un corps de controverfe contre les Payens & con- ' tre les Juifs , duquel M. l'Abbé Fleury fait l'analife en cet endroit. 11 montre aufli comment de faints Solitaires honoroient le 400 I-E JOURNAL Chriftianifme par leurs vertus , pendant que les Sçavans lè foutcnoient par leur dodrine , ôc rjpporte quancité de porci- cularitcz de faint Antoine , de faine Ammon , de faint Pa- f corne &: de faint Hilarion. Saint Pacome fut le premier qui compofa une règle , & qui donna la forme à la vie céno- bitique. Il y découvre l'origine du fchifme des Donariflcs , &r celle de l'herefie des Ariens, Les premiers s'crtant plaints à Con- ftantin de la condamnation intervenue à Rome contre eux , il convoqua un Concile à Arles pour examiner leur caufe. Cecilien y fut encore abfous , &: fcs accusateurs condamnez, Les Evêques avant que de fe fcparer , firent vint-deux ca- nons , qu'ils adrcffcrent au Pape Silveflre. Leur lettre eft fignée de trente-trois , à la tefte defquels efl: Marin d'Arles ; ce qui donne lieu de croire que ce fut lui qui préfida à ce Concile. Quant aux Ariens , ils curent pour chef Arius Pictre, char- gé de la conduite d'une des Eglifcs de la ville d'Alexandrie. Il répandit d'abord dans les alfemblces particuUeres , puis dans les prédications publiques le venin de fon hercfie , qui confirtoit à dire que le Fils de Dieu avoir eu un commence- ment. Alexandre fon Evéque fit ce qu'il put pour le retirer 4e l'erreur. Mais quand il vit qu'il y eftoic attaché avec une .opiniâtreté invincible, il le condamna. Les Audiens s'élevèrent au mcfmc temps en Mefopotamie, & curent ce nom d' Audius , homme zélé &: de bonnes mœurs. Il difoit hardiment la vérité , & refiftoit en face aux Ecclefia- ftiques qui negligeoient leur devoir. Sa liberté ne manqua pas de lui faire des ennemis , qui fe portèrent à cet excès de le battre &: de le chafler de l'Eglife. Au commencement il ne fit qu'un fimple fchifme , &: n'avança rien de contraire à la doûrine de l'Eglife : mais depuis il tomba avec fcs fe- ^lateurs dans l'erreur des Quartodeci mains , & dans celle des Antroporoorfites. D'ailleurs leur vie elloic innocente. Le Uvre fuivant commence par un récit de ce qui fe paffa au Concile de Nicée. Les Evéqucs invitez par l'Empereur CoBitantin DES SCAVANS. 401 Conftantin , s'y rendirent au nombre de trois cent dix-huit , fans les Prêrres &c les Diacres. Ils y déclarèrent la dodrine Catolique , & l'expliquèrent par le terme de Confubftanciel , publièrent le Simbolc drelfé par Ofius , décidèrent la queftion du jour de la célébration de la Pàque , &: firent vint canons qui ont efté reconnus de toute lantiquité. L'année fuivantc Conftantin à roccafion de la vintiéme an- réede fon règne , exerça de grandes liberalitcz , entre lef- quelles on peut mettre les dépenfcs qu'il fie pour bâtir des Églifes , & fur tout dans la Terre Sainte. Hélène fa mère alors âgée de quattevints ans , fe chargea d'en aller élever une magnifique à jcrufalem , où les Paycns pour abolir la mémoire de la refurreftion de J. C avoient comblé la grote du Hiint Sépulcre , &: élevé au deil'us un tem- ple en l'honneur de Venus. Q^iand elle fut arrivée à Jcrufalem , elle fit abattre le tem- ple de l'Idole , & creufer jufqu à ce qu'on eût découvert le faint Sépulcre. Non feulement on le découvrit » mais on trouva trois croix , entre lefquelles celle du Sauveur fut re- connue par les guerifons miraculeufes qu'elle opéra. Hélè- ne mourut au mois d'Aoïit de cette année- là. Dés le mois précèdent Conftantin eftoit arrivé à Rome, où U fit bâcir quantité d'Eglifes , &: ordonna de démolir en plu- fieurs provinces les temples où fe commetcoient les plus gran- des abominations. P.ulîeurs Payens fe convertirent : les uns parce qu'ils re- connoiftbient leur égarement ; &: les autres parce qu'Us efpe- loient entrer par là dans les bonnes grâces du Prince. Mais le plus grand nombre demeura attaché aux anciennes fuper- ,ftitions, &C témoigna beaucoup de douleur du mépris qui le faifoit de fes Dieux. Conftantin dégoûté liiimefme d'une ville à laquelle le changement de Religion l'avoit rendu o- dieux , rcfolut de l'abandonner , & d'établir ailleurs le fiege de^fon Empire. 11 choific la ville de Bifance, à laquelle il don- na fon nom. Il n'y lailfa aucun temple confacré au culte des Idoles , &: y éleva quantité d'Eglifes, pour le fervice defquel- 1693. I i i i i 401 LE JOURNAL les il fîc écrire cinquante exemplaires delà Bible çnbeau par- chemin. Eufebe Evêque de CcCavcc fut chargé de l'exécution de cec ordre , 6c du foin de choifir les copiftcs qui y furent employez. II compofa au mefme temps fon hiRoire hcclefia- I flique , la plus ancienne qui foie venue jufqu'à nous. Saint Atanafe fut envoyé bientôt après en exil, par un cfFcc des fauffes impreffions que les calomnies de fes ennemis a- voient faites fur l'cfpric de l'Empereur. Ils ulbieiicde toute forte d'artifices pour rétablir Arius lors qu'il fur enlevé du monde. Conftantin en fut auflî reciré pour aller jouir d'une couron- ne plus éclatante que celle qu'il avoit polfedée fur la terre. Apres avoir célébré la felle de Pique avec une pictc exem- plaire , il tomba malade , & fe fentant proche de ù fin , de- manda le baptême qu'il avoir autrefois dcfiré de recevoir dans le fleuve du Jourdain II finit fes jours dans la trente &: u- niéme année Je fon règne , le plus long qui euft efté vu de- puis Auguflc. On voit dans le douzième livre comment les deux fils de Conftantin partagèrent entre eux l'hmpire , ainfi qu'il l'avoic ordonné. Confiiancin qui eftoit l'aîné eut l'Efpagne , la Gau- le , & tout ce qui cil: au deçà des Alpes II fut tué en 34p. par des foldats de Conllant fon frère , avec lequel il elioic en* tré en différent couchant l'Afrique &: l'Italie. L'Eglife commencée à Antioche par le grand Conftantin , ne fut achevée que l'année fui vante. Les Lvéques aflemblez pour la dtdicr firent vint- cinq canons touchant la difciplinc qui ont efté reçus en Orient & en Occident Les ennemis de faint Atan^fc (é fcivirent du quatrième & du douzième pour continuer la perfccuîion qu'ils lui faifoienr depuis long temps. Ces canons ôtoicnt à un Evêque dèpofé l'elperance d'ellrc rétabli , quand depuis fa dépofition il avoir continué d'exer- cer fes fonctions , ou qu'il avoir imploré la protection de l'Empereur. Saint Atanafe perfecucé de la forte eut recours au Pape Jules qui écrivit aux Evêques d'Orieac en fa faveur avec fort peu de fuccés. DES SCAVANS. 405 Sa caufc fut encore examinée au Concile de Sardique qui fit vint canons fur la difcipline , propcfez prefque tous par Oiius. Le cinquième ordonne que fi un Evêque dépofc a le- cours à Rome , & que le Pape juge que l'affaire doive eHrc examinée de nouveau , il pourra envoyer des Commifl'aires pour juger avec les Evêques des lieux. M, l'Abbé Ficury croie que le jugement que le Pape Jules avoit rendu en faveur de faint Atanafe , pouvoit avoir donné lieu à ce canon. Le treizième livre eft rempli d'une grande diverficé d'eve- nemens Un des plus remarquables eft la more de l'Empe- reur Conftant, contre lequel fe forma un parti qui le contrai- gnit de s'enfuir vers les Pirenées , où il fut tué. Ainfi Con- ïlance fe vit feul poilefTeur de tout l'Empire. Il ne manqua pas de prendre les armes contre ceux qui avoient eu part à la mort de fon frère. Le combat fut donné en Pannonie , où Valens Evéque de Murfe , fameux Arien , le fuivit , & l'a- vertit le premier que Magnence eftoit en déroute. Conftan» ce lui ayant demandé qui en avoit apporté la nouvelle , Va- lens répondit que c'eftoit un Ange. Ce Prince le crut , & dit fouvent depuis , qu'il devoit cette vidoire aux prières de Va- lens plutôt qu'à la valeur de fes troupes. Cette impofturc accrut le crédit des Ariens , &: leur fournit de nouveaux moyens de perfecuter les Evêques Catoliqucs , &c de rem- plir les Conciles de confufion par leurs intrigues &: par leurs formules. Ofais âgé de plus de cent ans , & abbatu par la violence des tourmens , figna celle que Potaraius Evêque de Lifbonne a- voit dreflee à Sirmium. Le Pape Libère ennuyé de la lon- gueur de fon exil , & prefle par Fortunatien Evêque d'Aqui- lée, approuva aufli une formule de Sirmium , & renonça i la communion de faint Acanafe. L'inconftance de Julien qui retourna au paganifme, fut un grand fujet de douleur pour tous les fidèles. 11 eftoit fils de }ules Conftance frère de l'Empereur Conftantin , & dés fon bas âge fut élevé avec Gallus fon frère dans la Religion Chre-» tienne , dont il fit prufeffion jufqu'à l'âge de vint ans. Lors queGaiius fon frère fut fait Cefar, il obtint de Conftance la 404 LEJOURNAL peimiffîon d'aller étudier dans l'Afie Mineure , qui fut pour lui une école d'impicté. Apres la more de Gallus il fc fît ini- tier aux cérémonies profanes. Le mauvais eftac des Gaules ravagées par les Barbares, por- ta Confiance à le déclarer Cefar , à lui faire epoufcr Helcne fa fœur , & à lui donner le commandement des troupes defti- iiées à la défenfe des provinces d Occident. Le dernier livre de ce volume reprefcnce la continuation des troubles excitez par les Ariens , & les divers moyens qui fyrent employez pour les appaifcr. Deux Conciles furent convoquez au mefme temps pour cet ci^'ct , l'un à Sdeucic en Ifaurie , & l'autre à Rimini. Le Concile de Rimini s'aflembla le premier , & fe trouva compofé de plus de quatre cens Evcques , entre lef'quels il y en avoir environ quatrevints Ariens. Ceux ci s'aO'emble- rent dans un lieu feparé de l'Eglife où s'aflembloicnt les Ca- toliques. Ce Concile ayant fait lire plufieurs profelHons de foi , s'arrêta à celle de Nicée , &: rcjetta toutes les autres , Sc- condamna les Evcques Ariens qui ne voulurent pas confcntir à fon décret. Après cela les Catoliques députèrent dix Evé- ques à Confiance pour l'informer de ce qu'ils avoient refolu. Les Ariens lui en députèrent un pareil nombre. Les uns Sc les autres furent conduits à Nice , petite ville voifine d'An- drinople. Là les députez Ariens furprircnt les députez Ca- toliques , qui edoient de jeunes gens fans expérience, & leur firent foufcrire une formule de foi femblable à la dernière de Sjrmium, qui avoir eflércjcttée à Rimini. L'Empereur man- da en mefme temps au Préfet Taurus de ne point fouffrir que les Evêques fe feparalTent avant qu'ils eufTent tous figné cet^ te formule arrêtée à Nice. Alors les Ariens prirent le deflus, s'emparèrent de l'Eglife : la plupart des Catoliques cédèrent par foiblelle. Quant au Concile de Seleucie , il s'y trouva cent foixante Evêques de differens partis , de Demi- Ariens, d'Eunomécns,| &: de Catoliques. Il eftoit difficile qu'ils puffent jamais s'ac- corder. 5aitic Atanafe n'eut pas fi -top appris ce qui s'efloii paffc ; DES se AV AN S. 40; pafle dans ces deux Conciles , qu'il compofa fon traite des Si- nodes , dont M. FJeury fait un extrait fidèle. Il fait auflî un rccit fort cxa£t des principales actions de faint Martin , l'un des plus grans ornemcns de TEglife Galli- cane. Il avoir efté difciple de faint Hilaire , au devant du- quel il alla en ce temps- là lorsqu'il eut appris qu'il rctournoic du lieu de fon exil à fon Eglife de Poitiers. Quand il y fut arrivé , il y écrivit contre Conilance , & le traita de tiran Se à'Amcclmll. Julien qui faifbit de grans progrés dans les Gaules , y fut proclamé Empereur par les foldars. Confiance marchoit con- tre lui , & eftoir déjà à Tarfe lors qu'il eut un accès de fièvre. Ilefpera la dirtîper en continuant fon voyage : mais il mourut à Mopfucrene, Avant fa mort il fe fit baptifer par Euzoius Evcquc d'Antioche , l'un des chefs du parti Arien. SOLUTION D'UN PROBLEME PROPOSE' DANS U 28. Journal de une année , fa^e 336. J?ar M. BernouUi le Médecin. PROBLEME. .Ayant une ■partie fi petite qiion voudra d'une courbe géométrique., on demande une metode pour re foudre une eqalitè donnée par le moyen d'une autre li^ne cowbe , dont le heu fou le plus fimple qu'il fera, fofible. SOL VT ION, J'Appelle ici équations femblables, celles qui eftant du mefme degré , ont le mefme nombre de termes difpofez de la mefme manière , &: affedez des mefmes fignes , & dont les quantitez connues diltribuées dans le mefme ordre , ont cntr'elles une mefme raifbn. Ainfi ces deux équations ^' ^ -^aaxx — abbx — c"^ î=o & j;^'^ -jf -+- ddt^x^ — <^ff^ — g *"= ° feront appellées fembla- bles , parce que la dernière a un mefme nombre de termes difpofez dans le mefme ordre , &: avec les mefmes fignes tjue la première , & dont les quantitez connues d^f, 7 fonc 1693. Kkkkk F 406 LE JOURNAL telles , que .i . l> : : d . f S>c è . c : : f . g &CC. Je fuppofe que les racines des equarions fcmblablcs , ( ce qui efl: facile à dé- montrer ) ont entre elles la inefme raifon que les quanticcz connues difpoCccs de la mefme manière , c'cft à dire , par exemple , que x . z^:: a . d-.xb . f :: c . g !Lc. je fuppofe de plus que toute équation propoféc peut cllrc transformée en une autre femblablc , dont les racines aycnt une raifon don- née avec celles de la propoféc. Soit maintenant l'equ^rioa folidc x'^ -^aax — b^:=zo dont il faut trouver la racine x , par le moyen d'une portion don- née B C d'une parabole , qui a pour fommet A , pour paramè- tre Ja ligne A D , & pour ordon- nées les droites B E , C G. On cherchera par les règles de Schooten les limites entre lef- G r ^Ç quelles la racine de l'équation propofée eft reflerrce , & on trouvera dans notre exemple x plus grand que — — & moin- aa-\-l>b dre que h. Cela pofé , il peut arriver difïerens cas qu'il çft à propos d'expliquer en particulier. Premier cas , lors que les limites font égales , ou tombent entre les appliquées données B £ , C G. Ayant pofé , félon Defcartes DA=/, AH=p, Hl=3^, \l = r ^ &LF =: a: ; on formera une équation qui eftant comparée avec la propofée , donnera en termes connus des valeurs de/), ^ , r telles , que le cercle décrit du centre I , du rayon I L , cou- pera la parabole en un point L fitué entre les cxtrcmitcz B C de la portion donnée. Ce qui eft évident , puis que l'on fuppofe dans ce cas la racine LF plus grande que B E , &: moindre que C G, Second cas , lors que les limites ne font point reircrrécs en- DES S C A V A N S. 407 trc les ordonnées BE, CG, On tran<;formera l'equarion propofée x^ ^ -^U'^x — i> =0 en une autre Icmblablc : c ^ 2'^ -ycci — ft:=o , donc la limite en dcfl'ous foit égale à B E : ce qu'on fera par le moyen de ces propor- tions BE : : a , c :: è . f. Or fi la limite en dellus a a -<- ù è f de la transformée efl égale ou moindre que C G , on trou- vera fa racme L F par le premier cas ; & faifant f. « : : L F , ou ^.;e, cette quatrième proportionnelle fera la racine de l'équation propolée x ' &:c. Troifiéme ii. dernier cas , lors que la limite en dcflus /de l'équation transformée eft plus grande que C G. Ayant fait une progrefllon gcom.etrique -il g , /> ^ i ^ -i&c. dont les dcLix premiers termes g, ^, qui fervent à trouver les autres, folent B E , C G , &: dont le dernier k, foit égal ou plus grand que /, il eft évident que la racine j; fera relTerrée entre /;&/', ou cntfe i SsC k. &c. Or pour la trouver on transformera de nou- veau la transformée ^^ &c. en d'autres femblables , /' -)f -h nimf — «'= 0 &:_^'* -+■ eey — <^'i=io tttles, que h. g:: c. m::f.n & ' ■%•• c. e::f.d. D'où il fuit que la féconde tranf- formée/' &c. a fa racine/ entre g , h ^ lors que la racine j^ de la première eu entre h,t ; &c que la troifiéme^ ' &:c. a fa racine y entre g, ^ , lors que la racine ^ de la premiete eft entre /, k,. Si donc on cherche féparément la racine de cha- que équation , il faudra necelfairement qu'il y en ait une qui tombe entre B E & CG. Que ce foit , par exemple , la ra- tine/ou LF de la féconde équation/' &c. ofi trouvera auffi-tôt la racine cherchée x , en faifant m. a ::/. x. Ce qiii cftoit propofé. Cette metode eft générale pour toutes fortes d'équations : car fi l'on propofoit par exemple , de trouver les racines d'u- ne équation du douzième degré par une portion donnée d'u- ne courbe de trois dimenfions , il faudroit employer une au- tre courbe de quatre dimenfions ; & ayant trouvé les limites dçs ratines de l'équation propofée , on feroic des équations 4o8 LE JOURNAL Icmblabics, & on chercheroic la policion &c l'crpccc de la courbe de quatre dimcnlions , de la mefme manière qu'on vient de faire celle du cercle. Au refte fi l'on trouve ici quelques difficultez on eft prcft de les éclaircir , &c de fatisfairc pleuicmcntdes Juges équita- bles, ANTIMENAGIANA , OU L'ON CHERCHE CES ' éons mots , cetfe morale , ces penfccs juJicieuJes , ^ tout ce que t affiche du Menaaiana nous a profuis. In 12. à Paris chez Laurent d Houry , rue faint Jaques , & Charles Ofmont , au Palais. 1693. LA préface efl: comme une g.iîerie où font expofez les por- traits de ceux qui ont contribué a l'édition des bons mots & des contes de M. Ménage. Leurs amis ont peine à les y reconnoitre , tant ils les trouvent chargez , &r s'en prennent à l'humeur où eftoit le peintre lors qu'il les a faits. Le corps du livre cft une critique pcrfonnelle , qui pourra un jour étire ajoutée au fameux recueil de celles que nous a- Yons fous le nom d' a N t i. Il n'y a prcfque pas une parole rapportée de M. Ménage , qui n'y (oit condamnée ou comme àeihonnejle , ou comme folle , ou comme boufone. La cenfij- re paroit trop rigoureufe à beaucoup de gens qui aiment tout /ce qui les fait rire ; Muîtum ridere parati , ^c. Les quatre lettres d'un Médecin de Paris à un Médecin de Province , qui font à la fin , roulent prefque toutes fur les differens furvenus entre feu M. Ménage & l'auteur des Eflais de Mcdecinc. La dernière lettre traite un autre fujet , & découvre l'igno- jrance des Empiriques. A Paris chez Jean Cusson , rue S. Jaques, à l'Image S. Jean Bapt. XXXV. 4o^ LE JOURNAL DES SÇAVANS Du LuKDY 7. 5ît?temb;r>e m. DC. XCIII. gOANNIS HARDUINI SOCIETATIS JESU PRESBY^ teri , de fupTemo Chrifii Domini Pafchats. In ^.\ Paris chez Jean Aniflbn. 1693. CEtte diflerration fur la dernière Pàque de N. S. cfl une pièce d'applique qui aura fa place dans la féconde «dition corrigée &: augmentée que le P. Hardouin promet de Ton traité des médailles des Herodiades. Il la donne ce- pendant par avance , pour examiner les opinions qui parta- ient fur ce fujet les Interprètes , dont les uns croyent que N. Seigneur l'année de fa mort mangea l'agneau Pafcal le mef- :jne jour que les Juifs : les autres , qu'il le mangea un jour •différent ; & les ancres , qu'il ne le mangea point du tout, -mais qu'il fit feulement un repas ordinaire avec {^s difciplcs , -aufquels il donna fon Corps &: fon Sang fous le Sacrement du ,pain& du vin. Après avoir déclaré «ju'il iwvetiC décider la queftion que par l'autorité de l'Ecriture & par les coutumes des Juifs , fans -5'arrêcer aux imaginations fabuleufes des Rabins , il fuppofe ■que bien que les Evangeliftes n'affûtent pas précifément que le5 Apôtres qui avoient reçu ordre de N. S. de lui pceparcr 1693. LlUl -! 410 L E J O U RN A L la Pique ayent acheté un agneau , ni qu'ils l'aycnt immole dans le temple , la raifon force de croire qu'ils l'achctcrcnc , qu'ils l'immolèrent , qu'enfuite ils le mangèrent avec N. S. au temps prefcrit par la loi , fçavoir dans la nuit qui efl entre Je folcil couché du quatorzième du premier mois , &c le foleil levé du quinzième. Cela fuppofé , il réduit toute la difficulté a. ce que les trois premiers tvangelifles difcnt que N. S. inftitua le Sacrement de Ton Corps , & fut Crucifié le premier jour des Azimes , qui efloit le jour de Pàque } & que faint Jean femble dire que ce fut le jour précèdent : fur quoi le P. Hardouin propofe une conjedurc , par laquelle il prétend découvrir le véritable fens de leurs paroles , les concilier tous cnfemble , & ne rien a- vancer qui ne s'accorde parfaitement avec les anciens rus des Juifs. Cette conjedure confifle à dire que les juifs s'eftant extrê- mement multipliez , ils ne purent plus immoler tous l'agneau pafcal en un feul foir. Le P. Hardouin pour rendre ce fait vrai- fcrablabic, remat- f que que fous le règne de Jofias il y eut trente-fept mille a- gneaux ou un peu davantage immolez en un feul (bit , &: que les Piêcres fuient occupez jui'ques à la nuit. Lors donc qu'il en fallut immoler un plus grand nombre fins / comparailbn , & jufqu'à deux cent cinquante lix mille cinq cerit , qui eft le nombre que Jofephe allure avoir efté immolé au temps de la guerre des Juifs , un leul foir ne fut plus fuiîi- fant , &: il fallut y en employer deux. Dans l'un ceux du Royaume de juda firent leur Pâquc , & dans l'autre ceux du Royaume d'Ifracl. En cela ni les uns ni les autres ne contrevinrent point à ia loi , parce qu'ils célé- brèrent tous la Pâque au jour qu'ils prcnoient pour le quinziè- me du premier mois , bien qu'ils le contaffent différemment, & que les Juifs millent la Neonienic du mois Nifan un jour plus tard que les Ifraëlites, Pour confirmer la diftindion des deux foirs aufquels les deux troupes , fçavoir celle des Juifs & des Citoyens de Jc- rufalem, &: celle des Iftaclites à: des Galilécns immolèrent DES se AVANS. 4r! féparémcnt leurs agneaux , le P. Hardouin cite en pafT. gedu I j. chapitre de faine Luc , où cet Evangelifte parle des Gali- Iccns fur lefquels Pilare fie faire main baffe à l'heure mcfme de leur facrifice , &: en infère qu'ils olïiroienc à parc ce facri- fice , puis qu'il ne paroic point qu'il y ait eu des Juifs tuez a- vec eux , comme il auroïc dû arriver s'ils l'avoient offert con- jointement. Suivant ce plan , il die qu'il eft clair qu'en l'année trcnte- troifiémc de l'Ere vulgaire de laquelle il s'agit , la Pdque & le premier jour des Azimes fut différent du jour de fefïe , &: du jour folennel de Pâque ; que celui-là fut la Pâque des Ga- liléens , &c celui-ci le jour de la Pâque des Juifs. Notre Sei- gneur aura immolé l'agneau avec fes Apôtres la veille de fa mort , & les Ju.fs le jour &: 1 heure mefme de fa mort. Les trois premiers Evangeliftes auront parlé de la première immo- lation , & faint Jean de la féconde. Voila le dénouement inventé pour concilier les £vangcli>- ftes , &c inconnu aux faints Percs , aux auteurs Ecclefiafli- ques de tous les iieclcs , aux Interprètes anciens &: moder- nes. Que fi l'on demande pourquoi les Galiléens firent cette an- née-ià la Pâque avant les Juifs , le P. Hardouin nous apprend que ce fut en exécution d'un accord par lequel ils avoienc diftribué entre eux les jours de la femaine pour la célébration des fefles , & par lequel la première fenc eftoit échue aux Juifs , la féconde aux Galiléens , & ainfi de fuite. : Depuis ce partage les années aufquelles la fcfle de Pâque tomba dans la féconde , dans la quatrième , ou dans la fixié- -rne ferie , les Galiléens la célébrèrent les premiers , &: les •Juifs le lendemain, C'eft ce qui eft appelle Régula Bidu , qui fe trouve dans ie$ nouveaux rituels des Juifs. Le P. Hardouin en porte l'o- rigine jufqu'au delà du temps du grand Herode , & mefmc jufqu'au temps de Moïfe j au lieu que quelques auteurs la tcmettcnc jufqu'au deçà du dixième fiecle de l'Ere vulgaire. II n'en eft point parlé ni dans la Mifna , ni dans la Gemare du Thalmud Jcrofolimitain , ni dans celle du Babilonien. Ce 4:i>t LE JOURNAL qui faitrrorre avec raifon qu'elle n'cftoit pas encore inventée lors que ces ouvrages furent compofez. Cliacun la peut faire •remonter par la pcnfée aufFi haut qu'il voudra. Mais perfon- ne ne pcrfuadera par là qu'elle ait erté en uiage durant la vie ilc.N. Seigneur 5 &: il faudroit le prouver d'ailleurs. . Ce qui s'allègue de l'Ecriture pour l'autorifer , ne fatisfait pas l'cfprit. Il n'y a que deux palïages. L'un cft du 23 . cha- pitre du Levitiquc , v. 10. & 11 où il eft ordonné d'oftVir une gerbe nouvelle le lendemain de Pique. Qjjand la Pàque ar- .Tivoit la veille du Sabat , la gerbe ne pouvoir eftre offerte , m jnefme cueillie le lendemain ; & alors les Juifs pour obfervcr rcligieufemem la loi, remettaient la célébration de la Pâque au jour du Sabat , afin de pouvoir offrir la gerbe le jour fui- .vant. • Les cojîfcquenccs qui fe tirent de ce palTage font qu'en l'année trente-troifiéme de l'Ere vulgaire , les Juifs qui par ia xcgle Badu firent la Pàque plus tard que les Galiléens ^ Ja re- -mirent au jour du Sabat , pour pouvoir offnr la gerbe nouvel- 4e le lendemain , & que cette règle qu'ils obferverent eftoit fondée fur la loi du Levitique à laquelle ils fatisfirentau mc£. xnc temps. Le défaut de ce raifonnement efl: que ceux qui Je font apportent pour preuve ce qui cft en queftion, lli'a- .git de fçavoir fi cette année-là les Juifs firent la Pâque un att- ire jour que les Galiléens , en exécution de la règle Badu , ^ s'ils connoiflbieat cette règle dés ce temps- là. Pour le proii- "ver on dit qu'ils la connoifloient , parce qu'elle eftoit confor- jtic à la loi du Levitique qu'ils ne pouvoient ignorer. C'cft ^ne pétition de principe. L'autre paffage eft du douzième chapitre dx-^cb — da. & cette prc- paraton, avec les metodcs de cet auteur.refoudront generale- mentie problême. On peut couper la courbe donnée, & appli- quer les mctodes fur chacune de fes parties , lors que cela fer- vira pour fe procurer quelque avantage , ou pour éviter quel- que inconvénient : maison donnera encore d'autres metodes où cela ne fera jamais ncceffaire , foit qu'on veuille trouver chaque racine féparément ou plufieurs à la fois , &: qu'on ne veuille point s'occuper du choix des réduites. LEXICON MEDÎCUM ET YMOLOGICUM, ^^c. Authore M.Joan. B^pt. Callard de U Dnquerie , Cadomi Régis Confîltario , Med. profeffure Reyo , ^ Decano. Edttio '■ nova. Jn/2. à Paris chez Laurent d Houry. 1693, OUoi que la première impreffion de ce livre , dont j'ai parlé dans le 2.1 . journal de Tannée dernière , renfer- mait l'explication fuccinte de prés de trois mille mots les plus obfcurs de la médecine , l'auteur l'a encore augmentée dans cette féconde d'une infinité de termes qui concernent la Chirurgie , la Chimie , la Pharmacie , & toutes les autres facultez qui ont rapport à la Médecine. Ce livre ne paroic pas moins neceflTaire à ceux qui commencent à étudier ces fortes de fciences , qu'il efl utile à ceux mefmes qui les veu- lent fçavoir à fond, ou les enfeigner aux autres : car on y peuc trouver en abrégé èc dans un ordre fore metodique tout ce 41 8 LE JOURNAL que contiennent les plus gros dictionnaires qui ont traité de ces matières , &c outre cela pluiicurs remarques particulières qui contenteront la curiofité des ledeurs. COSMOGRAPHIE , OU TRAITE* DE LA SPHERE du monde univcrjel , contenant une cxuHe defcription des paniei de lu région etherée (^ élémentaire -, avec un traite de I'MotoIc- qeoixraphie. Le tout fuivi d'une Géographie qeometrujue i^> hi~ fionque , é^c. à l'ufage (^ en faveur des Cadeti Gentilshommes de l'Ecole Royale de Longouy. Par le S^ Louis Goqeon , leur ProfelJeurà Luxembourg. In S', à Pans chez Jean Aniflon , rue faint Jaques, y (>')},> LA Sphère de Pcolomce eft négligée depuis fi long temps, qu'il eftoit à craindre qu'elle ne tomball dans l'ouuli , Çi M. Gogeon ne l'avoir relevée par cet ouvrage. II la donne dans touteTon étendue , comme lui paroillant la plus raifon- nable , & la plus conforme à l'Ecriture , dont il rapporre un grand nombre d'autontez , pour prouver que les Cieux fe meuvent , & que la terre eft immobile. Sa metode eft forç exade. Il définit d'abord tous les cercles qu'on imagine dans les cicux & fur la terre ; il fait voirleurs uîages , & explique enfuite la théorie des planètes. Jl ne dit rien de particulier des quatre elemens. Il fait feu- lement remarquer que l'élément du feu a quarante mille lieues de hauteur -, au lieu que la plus grande profondeur de l'eau n'cxcede pas une lieuë. Il enfeigne une manière facile de mettre la fphere dans fa jufte poikion , afin de trouver les afcenfions & les defccntcs des fignes , le lever & le couche^ de diverses étoiles , leur lo'igitude &: leur latitude. 11 y a joint un traité de 1 Horologeographie , ou manière de conltruire les cadrans folaires de toutes les efpeccs ; après quoi il parle du temps confideré en lui-mefme , 6i par rapport au Calendrier Romain. Tout cela ell fuivi d'un nouveau traité dje Géographie. Réponse DES SCAVANS. 419 P.EPONSE A DES MEMOIRES QUI ONT PARU contre un etablijjcment d'une Académie de belles lettrci dans U ville de Toulon fe. In jz. à Montauban. 1691. MR. de Bafville Intendant de Languedoc , ayant eu la penfée de changer les jeux floraux de Touloule en une académie de belles lettres , cette Compagnie allarmée de la feule propofition, chercha auffi-tot un fujet capable de la dé- fendre. Elle ert compofée d'un Chancelier , de fept Mainte- fieur^, &c de pUifieurs Maitres. Le Chancelier eft d'ordinaire un Officier des pîus confide- rables de la Robe , élu à la pluralicé des voix. Les Mainte- murs font des perfonnes d'une nailTance diftinguée , qui a- chcrent ces dignitez. Les Maitres ne parviennent à ce rang que lors qu'ils ont remporté les trois fleurs ou les trois prix de poëfie , qui dans l'ancien bngage de cette Compagnie efl: appel lee gaye fcience. Celui qui a efté chargé de la défcnce des jeux floraux , n'a xien oublié de ce qu'il a cru devoir intereifer la ville de Tou- Joufe à les conferver. II leur a attribué une inflicution fore ancienne & fort illufl^re , & a relevé leurs exercices par des paroles fort avantageufes. L'auteur de cette réponfe le fuit pas à pas , & montre que les jeux floraux ne font pas aufli anciens qu'il fe l'imagine, & le renvoyé pour cela à Mrs, Catel , Cafcneuve , & de la Faille qui ont tiré ce qu'ils en ont dit du regifire mefme des Capitous. Ces trois célèbres Ecrivains conviennent que tout ce qui fe débite de Dame Clémence Ifaure , à laquelle quelques- uns attribuent l'inftitution de ces jeux eft une fable inven- tée feulement vers le milieu du fiecle paflé. Que leur vé- ritable origine eft de l'an 1324. Qu'ils ont eu autrefois quel- que éclat } mais qu'ils font extrêmement déchus depuis que la brigue a pris la place du mérite. L'auteur de la Réponfe dit , qu'il n'y a plus aujourd'hui 1693. ' Q.qqqq 430 LE JOURNAL que des gens fans ctude qui vcuiUenc paroicre fur les banc des jeux floraux. Ce qui efl fi vrai , que celui qu'il rcfut* n'a trouve que treize Maitrcs dignes d'eftre nommez dans un corps qui fubfiftc depuis prés de quatre ficclcs. Il ajoute que les ouvrages en vers que l'on couronne aux jeux floraux , font tout à fait contraires à la belle poëfie ; & c'eft pour cela que M. Mainard , qui avoit le goi^it excellent , ecrivoit à un de fcs amis en ces termes : Je vous envoyé la meillatri chants royaux qui fe font trouvez^dans mon cubimt. Cc-i une forte de pocjîe contre laquelle f ai toujours eu beaucoup d'à- verjion ; ^ je fais une grande corvée quand je lis de bout à bout une de ces ptéccs. II ajoute encore que la fcftc des jeux floraux cft plus inui tile que leur po'elîe ; que le fcftin eft magnifique , & qn.* la dépcnfe en eltoic autrefois fi exceffivc , que les Commif- faires du Roi furent obligez de la modérer , & de réduire à quatorze cent livres les frais d'une fefte qui ne dure que deux jours. Apres avoir montré l'inutilité des jeux floraux , il mon- tre la neceflité qu'il y a d'établir dans Touloufe une Acadé- mie de Belles Lettres. C'eft une des plus grandes villes du Royaume , une des plus éloignées de la Capitale. Il feroit donc à fûubaiter que les heureux génies qu'elle produit eul^ fent les moyens de le perfcttionner d ms l'éloquence, & qu'ils formalTcnc pour ce dellein des Compagnies , à l'exemple de plufieurs autres villes , qui bien que de moindre etejiduë , n'ont pas lailfé de trouver plufieurs fujcts dignes de cet cn> ploi. Il relevé le mérite des Académiciens de toutes ces villes , & foutient que Touloufe ne manquera pas de fournir quan- tité de fujCts capables de les imiter ; & pour en convaincre fon advcrfiire , il lui fait une longue Iifte d'excellens efprit:5 fortis de Touloufe , entre Icfquels il n'oublie pas Mrs. Fer- mat, Medon , Saint- UflTans , &; le P. la Blandioicre. DES SCAVANS. 451 NOBILIAIRE DE PICARDIE , CONTENANT LES Generalitez^ d'Amiens , de Soiffons , p^iys reconquis , ^ partit de l' Eieîhon de Beauvais. Le tout yiflifié conformcftient aux Juqemcm rendus en faveur des Nobles de la province , tant par les Arrcfls du Confeil ^ de la Cour dei Aydes , que par les Or- donnances dé Mrs. Us Jntendans. Enfemble l' Efiat Ecclefiap- que , Gouverneurs de provinces , p^iys , villes , ^ citadelles , Zieutenans Généraux , & Lieutenans de Roy des mefmes lieux ; Jntendans & Officiers de Judicature de la province. DreJJe fur les mefmes Jugeyyiens , ^ fur plnjieuri chartres d' Eglifes , hifloires^ chroniques , titres , epttaphes , regifires , ^ mémoriaux du Par- lement , de la Chambre des Comptes , é" de la Cour des Aydes. par Mr. Haudicquer de Blancourt. In ^. à Pans chez Rob. J. B. de la Caille. 1693. » L'ApïiLiCATio^r continuelle avec laquelle M. Hau- dicquer de Blancourc a recherché depuis piufieurs aiv hées l'origine & les titres des plus illuQres maifons du Royau- me, jointe à l'amour de la Province qui lui a donné la naiflan- ce , l'a rendu très capable de compofer ce Nobiliaire de Pi- cardie. Il a efté beaucoup fccouru dans ce pénible travail par les rcgitres des Compagnies fuperieures , par les archives des Eglifes , & encore plus par les rares manuîcrits de feu M, Duchefne fon beaupere , qui les avoir eus pour la plus gran- de partie du fameux André Duchefne fon père , le rellaura- teur de notre hiftoire. Comme les Ecclefiaftiques tiennent le premier rang , M. Haudicquer de Blancourt a mis dans cet ouvrage les noms de cîux qui pofledcnt les principaux bénéfices de Picardie. 11 a iris aufli ceux qui s'y diftinguent dans les principaux emplois, comme font les Gouverneurs, les Lieutenans de Roi, &; mef- me ceux qui y pofTedent des terres confiderables. Eftant difficile de régler les rangs des principales Maifons , il les a rangées fuivanc l'ordre de l'alfabet , pour éviter le re- proche d'avoir favorifé les unes plutôt que les autres. Quoi que ce delTein foie fore gtand , M. Haudicquer en 43Î LE JOURNAL médite un beaucoup plus vafte , qui comprendra l'hiftoire générale de toutes les Maifons du Royaume , avec toutes leurs alliances. Il fupplie ceux qui ont des titres & des in- ftruftions qui fervent à la connoillance de ces familles , de les lui communiquero METHODE FACILE POUR APPRENDRE l'hijioire de l' Eglife , dtvifce en deux parties : la première depuis Adam ]ufquà J. C. la féconde depuis J. C. jufjuafix yîpbtrei faim Pierre é'f'^int Paul. Par M. B. G. Prieur de CourccUes. Bedi'ceau R. P. de la Cbaife Confefftur du Roi. In zz. à Paris chez Pierre de Launay 5 rue faine Jaques. 1693. LE Public a déjà reçu des mains du mcfme Auteur deux femblables metodes : l'une pour apprendre l'inftoire de France ; & l'autre pour apprendre la fable héroïque. J'expli-, quai le deflein & l'économie de cette dernière dans le quator- zième Journal de l'année paffée. La metode qui paroit aujourd'hui l'emporte fur les deux au- tres par le mérite de fon fujec , qui embrafle tout ce qui eÛ arrivé fous la loi ancienne &: fous la nouvelle , & enfeignc aux Chrétiens ce qu'ils doivent croire & ce qu'ils doivent faire pour parvenir au bonheur auquel ils font appeliez. Elle eft divifce en deux parties , dont la première eft d'une vafte étendue , puis que commençant à la création du monde, elle ne finit qu'à la naiflance de N. S. La féconde efl: courte , & fe termine à la mort des deux grans Apôtres. // n\ aura point de Journal jufqu'au premier Lundi d'apréi U Saint Martin. A PARIS Chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à l'Image •de faint Jean Baptifte. Avec Privilège du Roy xxxvir. * ,433 LE JOURNAL DES SCAVANS. 5 Du LuNDY 16. Novembre M. D C. XCIII. BIBLIOTHECA TELLERTANA , SIVE CATALOGUS iibrorum Bibliotheca iRufin.^mi ac RevereJiii.lJîmi DD. Caroli Mamitii Le Tcllier , Archiepifcofi Ducn Remenjis , Primi Trancia Pans , &c. Typis Repis. In folio. & fe trouve à Paris chez Jean AnifTon , rue f'ainc Jaques. 1693. IL y a long-temps que l'on a commencé à donner au Public les catali gués des grandes Bibliocequcs , &: nous ne con- noiffons les ucheircs de celles de l'Empereur , du Cardmal Barbeiin , du Cardmal Slufe , &: de plulieurs autres , que par ceux qui en ont efté imprimez. Tous les Sçavans (ont pcr- Tuadez de l'utilicé de ces (brte> d'ouvrages ; àc il feroic a (bu- hâiterque ceux qui ont fait de grans amas de livres &: de piè- ces cuncufes , vouluflenc en donner des liltes , qui feront coujours reçues avec plaifir. C'eft dans cette penfée que Monfieur l'Archevêque Duc de Reims , dont la Biblioteque eft un choix riche & exquis de ce qu'il y a de meilleur parmi les livres , fur tout pour la Théologie & l'hiftoire Ecclcfiaftique , a pris le deflem d'en faire imprimer le catalogue, où l'on trouve les livres difpo- fez dans un bel ordre , U qui peut fervir de modèle pour 1 ar- 1695. Rrrrr 454 L« J O U RN A L rangement des autres Bibliotequcs. Celle-ci efl: d'autantplus conliderable , qu'elle renferme celle de feu M. Faute Do- uleur en Théologie de la Faculcc de Paris , dont tout le mon- de a connu le rare mérite &c la profonde érudition , &: à qui pendanr plus de trente ans de recherche rien n'cftoit cchapé de ce qui pouvoir fc rrouver de plus curieux Se de plus excel- lent en fait de livres. 11. mourut à Paris le 29. jour de No- vembre de l'année léRy. ayant légué par Ton tcflamcnt à M. l'Archevêque de Reims par une genercufe reconnoifl'an-- ce ceux d entre Us livres qui ne le trouveroicnt pas dans la Eibliotcque de ce Prélat. Mais ce qui doit eftre encore plus agréable aux gens de lettres , c'eft que ce catalogue que l'on donne prcfentement n'ett qu'un elfai de celui de la Bibliote- qiie du Roi , lequel Sa Majcfté par une bonté toute particu- lière veut bien permettre que l'on rende public , pour ne pas priver davantage les Sçavans de la connoilfancc des trefors infinis qui y font renfermez. DISCUS-blON DE LA SUITE DES REMARQUES nouveiei du P. Bouhoun fur la langue Frari^oife , pour defen^m f dre ou pour condanner plujîeurs pajjaies de lu Verfion du Nouveau Tejlument de Mons , td^ principalement ceux que le P. Boubours y a repris. In iz. à Paris chez Luurent d'Houry , rue fainc Jaques , & Louis Lucas , rue de la Harpe. 1693. LE P. Bouhours donna au Public l'année dernière un ou* vr.)ge intitulé : Sw.te des remar/ue* nouvelle'^ fur la langue Irun(^oife , dont je parlai dans le vmticme Journal de cette année-là. C'elt cet ouvrage qui cft examiné dans celui-ci. L'auteur fc dit /ibbé Albigeois , appartmment de mefme que le P. Bouhours fe dît autrefois Gentilhomme Bis- Breton. Son principal delfe'n eft de donner fon jugement lur les partages que le P. Bimhours cruique dans la Verhon du Nouveau Te- \ ftament de Mons , pour iaqirelle cet auteur femble ne pas prendre beaucoup d'intereft. Voici la metode qu'il s'elt pres- crite. Avant coûtes ehofes il iranfcrit \t% partages donc il s'agit, DES S G A V AN S. 435 & les range fclon l'ordre qu'ils tiennent dans chaque Evan- gelifte , au lieu que le P. Bouhours ne les avoit rapportez que confufément , ôc mefme le plus fouvent fans indiquer les en- droits d'où ils elloicnt tirez. Il met enfuite les textes de la Vulgate avec la Verfion de Mons , &c quelquefois il y joint Je texte Grec. Apres cela il rapporte tout au long la cenfurc que le P. Bouhours fait de cette Verfion j de enSn il ajoute une Note fur chacune de ces cenfures. Il examine auïïî par occafion quelques pallages de cette Verfion aufquels le P. Bouhours n'a point touché , comme ce- lui du premier verfet de faint Mathieu , où Li&er generationii Jcfk Chrifli , cft rendu par La généalogie de Jefui-Chrifi. Ce qui lui a donné lieu d'en parler, elt que ces paroles du fécond ver- fet : AbrahAm genuit Jfiac , ayant efté traduites par celles-ci : jibiaham engendra JJac , il a feniblé au P. Bouhours que le mot àîengendrét falir l'im^igination. 'Les, tradudeurs de Mons ayant rendu ces paroles de faine Jean Baptille du douzième verfet du troihéme chapitre de faint Mathieu : Cu\m venulahmm in manu fua , par lia le van en la main ; ils en ont elle repris par le P. Bouhours en ces termes : Lei traduïîemi qui ont mii : Jl a le van en la main , ont fuivi en cela les traducleun de Genève -, ^ il efi aife de i égarer dam le langage auffi bien que dam la doctrine en fuivant de mauvais guides. Ce qu'il y a de certain , ceft qtton ne tient pas un van com- me un éventail : on l'a entre les mains , ^ non pas en la main. Notre Auteur fait ici une Note fort ample pour défendre la Verfion de Mons. 11 dit que quand les Juifs vannoient , ils tenoient le van d'une main feulement , parce qu'il eftoit fou- tenu par des cordes attachées enfemble à trois perches , écar- tées par le bas en tiers point , & pofees en terre ; &: qu'ainfî ils ne remuoitnt le van que d'une main , pendant qu'ils ô- toicnt de l'autre tout ce qui devoit eftre feparé d'avec le grain. Il prouve cela par une figure où fe voit un crible fufpendu. Elle fe trouve dans un livre où tout ce que les anciens Juifs faifpient pour célébrer la Pâque , & tout ce que doivent fai- te encore ceux d'aujourd'hui , elt reprefenté en tailles de 4i« L E ï O U R N A L bois. De là il conclue que s'ils rufpendoient le crible , à plus force raifon ils {ufpendoiencaufli le van. Il ajoucc que quand il feroit vrai que le van Ce tienc cou- jours des deux mains , le P. Bouhours n'en cireroit aucun a- vantage , puis qu'aux termes de l'Evangile , faine Jean Bap- tille veut feulement avertir les Pharifiens & les Saducéens de faire inceflamment pénitence : parce que celui qui doit net- toyer fon aire a déjà le van à la main pour fcparer le bled d'a- vec la paille -, c'eft à dire qu'il a pris fon van pour vanner bien- tôt j fans expliquer s'il vannera avec une main ou avec deux. Quoi que l'auteur de la difcufllion défende en cet endroit le Traducteur de Mons, il ne laide pas de reconnoitre que le plus fouvent le P. Bouhours le reprend avec raifon , & mc(l me montre dans la Verfion de Mons un grand nombre de fau- tes qui n'ont pas cfté reprifes par ce Jefuite. Par exemple, dans r faint Mathieu ch, i. v. i8. c zr. v. 1 1. 2 3. 33. 41. c. 26. v. i 17. & 18. En faint Marc c. 12,. v. i. c. 1 4. v. 1.5.1 j. 4-7. ^ 58. c. l'y. V. 38. En faint Luc c. 5. V. 5. 7. & 9. c. 21. V. II. ■c. 23.V. 4y. En faint Jean c. i. v. 27. 35. 46. c. 2.v. i.c. 3. V. I. C.4. V. 1.6.45. 5'- 5^' c. 5. V. 1. &: 2. c. 7. v. 31. 58. c. 8. V. 25. 28. 51. 53. c. 9. V. 2. 3. 34. c. ly. V. 20. II y a quelques-uns de ces verfers où il trouve jufques à quatre &: à fix fautes , &: quelques-uns où il en trouve [ulques à dix &: à douze. Il s'étend beaucoup lur quelques endroits, comme fur le 7. ch. de faint Luc v. 5. & 8. où il montre que pour traduire de vice Abia èc in otdme vicn fua , on doit em- ployer le mot de claiîe au lieu de ceux de famille , de rang , ou de tour. Il explique en cet endroit l'ordre &: le ciclc des ■Soixante & huit jours des vinc-quatie ckifes facerdotales infti- Tuées par David ; comme il fe voit au vint- quatrième chapi- tre du premier livre des Paralipomcncs , &: où il fc voit aulli que la clafle d'Abia elloit la huitième. Et parce que Zacarie •père de faint Jean Bapcifte eftoit de cette claife a'Abia , félon laint Luc ch. i. v. 5. il propole à un Ecrivam des plus fameux de ce temps-ci , &: des plus verfez dans la Cronologie , un 'Problême, qui «ft de trouver par le calcul des révolutions du ciclc DES SCAVANS. 457 ciclc (acerdotal en quel jour d'un mois Juif lié avec un mois Julien Zacarie cftoit entré de fervicc au Temple lors que l'Ange Gabriel lui annonça la nailTance d'un fîls. 11 explique le nombre des jours dont il eft parlé depuis le 1 9. verfec du premier chapitre de faint Jean jufqu'au quaran- te-troifiéme ; ce qu'il rend très clair Se très intelligible par une table. Enfuire il dit que les noces de Cana dont il eft fait men- tion dans le fécond chapitre de cet Evangeliftc , furent célé- brées le 18. jour d'Adar , qui eft le douzième Se le dernier mois de l'année Ecclefiaftiquc des Juifs , &c le fixiéme de la Civile. Il s'étend aflcz au long fur le premier verfet du quatrième chapitre de faint Jean , pour faire voir que le mot d'unucav qui jufques ici a toujours cfté traduir par audierunt , y devoir eftre traduit en fignification adivc , pour exprimer frent entendre ^ parce qu'en cet endroit ce verbe eft dans la forme appelléc Jiiphtl^ax les Hébreux. Par occaiion il nous avertit que la ville de Capharnaum cftoit d'une autre Galilée que celle dont Herode Antipas eftoit Tetrarque , & qu'elle appartenoit à Phihppe (on frcre Tetrar- que d'Iturée & de la Traconitc. Il fait voir qu'au 8. ch. de faint Jean v. 5 1 . & au 1 j. v. 2 o. fervare doit eftre rendu par obferver pris en bonne &: en mau- vaife part , &: donne en plufieurs langues des exemples de ces mors qu'il appelle parallcles. Il remarque fur le 17. v. du zy. ch. des A(5tcs des Apôtres, <\vi'armamenta y doic eftre rendu par agrez^ , &: confirme par plufieuTS preuves la correction de M. Simon qui a fort bien repris les rradu£leurs de Mons & le P. Ameloce , de l'avoir rendu par équipage. En quelques endroits il croit avoir trouvé des fautes contre la langue dans les Nouvelles Remarques du P. Bouhours, & y reprend de mauvais arrangemens de paroles , & des articles mis devant des mots où il n'en faloit point mettre. Il le re- prend auffi d'avoir dit en parlant d'un rofcau , qu il eft incapa- Ue de faire du mal , èi. foutient que le mot à'incap.tble ne le 1693. SÇÇCÇ 4.3» LE JOURNAL dit en fignification adivc que des pcrfonnes , & non des cho- fcs inanimccs. , Enfin il garde une mctodc très claire dans tout l'ouvrage j y exprime fes fentimcns avec une parfaite netteté , &: y fait paroitrc une fingulierc connoiflance des Joix &: des coutumes des Juifs , mclée de beaucoup d'érudition. SUITE DU TRAITE* HISTORIQUE DE L'ANCIEN- ne PUque dei Juifs. Re flexions fur te nouveau fifième du R. P, Hutdouinjefune touchant la derniire Pàjue dej. C N. S. In 72, à Parib chez André Pralard. 1693. v-'-y-^wi^^^ LA fuite du traité de l'ancienne Pâque confifte en des re- flexions , dont les unes teudent à défendre Icfentimenc du P. Lami , & les autres à combattre celui du P. Hardouin» Ce dernier pour prouver qucle fentimentdu P, Lami cfl con- traire à l'Ecriture, dit qu'il n'eft pas aifé de croire que les Apô- tres ayent préparé la Pàque , que N. S. ait mangé ce qu'ils avoient préparé , &: qu'il n'ait pas mangé l'agneau Pafcal. Le P. Lami repond que le Jeudi au foir où commençoit le quatorzième du mois Pa(cal & le premier des Azimes , les Apôtres , félon que le temps les en aveitifibit , demandèrent à N. S. où il vouloir qu ils lui préparaflent ce qui eftoit necef- Laire pour manger la Pâque , qu'ils allèrent à Jcrufalem, choi- firent un lieu , préparèrent de quoi fouper ce jour- là , &: ache- tèrent un agneau pour le lendemain. II ajoute que N. S. arri- va peu de temps après , foupa de ce qui avoir efté préparé, & le lendemam auroit mangé de l'agneau Pafcal s'il ne fuft point mort : mais que rien n'oblige à croire qu'il en mangea ce foir-là , parce qu'il auroit falu que cet agneau eult efté immolé dans le Temple , où l'Ecriture ne témoigne point que les Apôtres ayent elle. Il renvoyé ceux qui voudront juger de ce différent au treizième chapitre de fon traité de la Pà- que , & efpere qu'ils ne trouveront pas que fa fuppofition don- ne lieu à des explications forcées de l'tcrirure contre le fens •naturel de fes termes. Voila l'abrégé de fa défenfe. Pour ce qui elt du fentimenc du P. Hatdouin , qui prétend DES SGAVANS. 435> que l'année de la more de N. S. les Galiléens firent la Pâque le Jeudi , que N. S. qui cftoic Galilécn la fie avec eux ce jour- là , &: que les autres Juifs ne la firent que le Vendredi j le P. Lami le juge évidemment contraire à l'Ecriture , qui mar- quant le jour & l'heure de la Pique , parle fans diftindlion à tous les Juifs , & détermine un feul jour , fçavoir le quator- zième du mois , fans dire en aucun endroit qu'il y ait deux quatorzièmes , ou deux commencemens de mois. Elle fait plus, & ordonne à toute la multitude des enfans d'ifi-acl d'im- jmoler tnfcmble l'agneau , (ans dillmdion de Galiléens ou de JerofoIimitsHns. Le P. Hardouin fe perfiiade qu'il eftoitimpoflîbic d'immo- ler en un fcul jour autant d'agneaux que l'Ecriture & Jofephc iaflurent qu'on en immoloit à la feftc de Pâque. Le P. Lami ne nie pas que la chofe ne fuft difficile : mais la difficulté ne iui paroit pas infurmonrable. Elle confifte à expliquer com- ment le Temple de Jerufalem eftoit alfez fpacicux pour con^ tenir la multitude de ceux qui offroient leurs facnfices , & comment ces facrsfices fe faifoient en fi peu de temps. C'eft ce que le P. Lami fait en entrant dans le détail , &: en montrant par le calcul qu'il y avoir beaucoup plus d'efpace &: plus de temps qu'il n'en falloit pour cette cérémonie. H exa- mine enfuite un paffage du commencement du treizième cha- pitre de faint Luc , duquel le P. Hardouin s'eftoit fervi pour prouver qu'au temps de N. S, les Juifs ne pouvoient faire la Pâque qu'en deux jours , &: foutient que ce paflage eft au -moins douteux , &: par cette raifon ne peut fonder unfiftê- me. Enfin il promet de traiter à fond dans le commentaire furfon Harmonie de l'Evangile, cette queftion S'il eft vrai :quc l'on ne puifTe ranger les aélions de N. S. félon l'ordre du -temps , à moins que d'entendre le calendrier des Juifs à la i manière du P. Hardouin. ; Depuis que ces reflexions du P. Lami ont vu le jour , on a trépan du un écrit fur le mefme fujct fans nom d'Auteur ni id'Imprimeur. Il a deux parties. Le titre de la première eft LCn ces termes : Extrait du traité du P. Hardouin fur lademiert Pàfne de JSotn Sfigneur. C'cft.un dialogue entre deux per* 419 LE JOURNAL fonnages empruntez , &:dcguifezfous les faux nom<;d'Ircnéc & d'Eufebc. Ils repèrent prcfque tout ce que le P. Hardouirt avoir écrit de la dernière Pâque , expliquent Ces fcncimcns , Tuivcnt fes intentions , &: le louent à Ton gré. Ils dévoient le borner à cela , fans s'ingérer de donner des avis à l'Auteur du Journal. Ce n'eft pas qu'il ne croye en avoir fouvcnt befoin (ûr tant de fujcts différons qu'il eft obligé de toucher, ni qu'il ne les reçoive avec joye. Mais il veut connoicre auparavant ceux qui les lui donnent. Sur tout il n'avoit pas befoin d'eftrc averti de la faute que le P. Hardouin a faite en attribuant à Maimonides l'ouvrage intitulé , yîrbaah Turim. Il fçavoic que le P. Lami l'avoit relevée il y a plus d'un mois dans la dix-feptiéme page de Ces reflexions. La féconde partie de cet écrit cft une lettre où Eufcbe rend compte à Ircnée d'une longue converfation qu'il avoir eue avec un Abbé Docteur de Sorbonne , fur la reflexions du P. ç- O"?^*™'' SUITE DE LA LETTRE DE M. DE LAGNY SUR LA Ref ration , propofée dans le Journal dn lo. Décembre i6^i„ MR. Dcfcartcs eft le premier qui a expliqué phifique- ment la caufe de la refradion : mais quoi que ce grand homme foit allé fort avant , il n'a pas epuifé la matière , & il refte encore bien des difficultez à eclaircir. Voici les princi- pales objcélions qui me femblcnt pouvoir cftre faites contre fon explication & contre celles des autres Philofophes mo- dernes. î. Ils n'examinent que ce qui doit arriver à un corps de fi- gure fpherique , & ce qu'ils difent là-defTus eft tellement propre & particulier à cette figure , qu'il ne convient à aucu- ne autre. Ainfi dans une queftion où il s'agit d'un eft^ct qui regarde également tous les corps , de quelque figure qu'ils foicnt , ils ne s'attachent qu'à refoudre un cas parriculier qui «eft le plus fîmple de tous. C'eft pourquoi quand mcfmc la rcfolution feroit bonne, elle fcroit très imparfaite, à caufc de la rcftriâion de rhîpôtefe. 2. Le DES SCAVANS. 441 X. Le corps peut cftre de telle figure , que paffanc perpen- diculairement d'un milieu dans un autre, il ne continuera pas de fe mouvoir en ligne droite ; & ce qu'ils établi iFent comme un axiome gênerai, n'eft vrai qu'à l'égard du globe & de quel- ques figures régulières. 3. Ils luppofent que le corps fe meut obliquement en ligne droite ; ce qui eft toujours tauxà la rigueur , &; qui l'ertmcf- me Icnfiblcment , à moins que la vitclFc ne icit très grande. 4. Le mouvement uniforme qu'ils fuppofent dans ce glo- be , eft une ruppofition doublement impoiFiblc , parce que le corps perd continuellement de fa force horifontalc àc de fa force perpendiculaire imprimée par le moteur ; &: il augmen- te continuellement la force perpendiculaire cauféc par la pe- fanteur. Cette diminution & cette augmentation font très Tenfiblcs : l'hipotefe eft donc fenfiblement faufle. 5. L'exception pour les angles d'incidence fort aigus eft entièrement contraire à l'expérience : car fi on jette li obli- quement qu'on voudra un corps de l'air dms l'eau avec peu -de force , il ne fe refiéchira point du tout ; 6c afin que cette fcflexion fe faite , il faut , î. que le corps foit jetcé avec une certaine force déterminée _, ou avec une force plus grande. z. Que ce fpit félon un angle d'incidence déterminé , ou fé- lon un angle plus périt. 3. Q£C le corps foit d'une certaine iîgure ou approchante. 4. Q^m! foit d'une certaine lolidité ou confiftence. Ainfi de quatre conditions ablolument necef- •faires à l'exception , ils ne font wiention que d'une. 6. M. pefcartes examinant ce qui doit arriver dans un glo- .be quipaftc de l'air dans l'eau , dit que dés que ce corps com- ..mencc à toucher l'eau , il perd de la décerminacion perpcn» .diculaire , àc .'■•■. pt-rd point du tout de fa détermination hori- fontalc ; èi. il prétend expliquer par là pourquoi le globe s'é- carte de la perpendiculaire : mais cette explication ne paroic pas foutcnable : car la rcfiftancc des liquides par rapport aux folides , eftant proportionnée à la quanrtité & a l'obliquité de l'immcrllon , fi cette immerfion eft infiniment petite ou nulle, jCûmme lors que le globe eft (uppofé ne toucher l'eau que dans «n point matematique ; alors la tcfiftancccft infiniment peti- 1693. T 1 1 1 1 4+t LE J O tJ R N A L te , ou nulle en tout fcns. Mais des que le globe eft enfonce félon une partie déterminée quelque petite qu'elle foit , il foutfrc de la refiftance horifontalement & pcrpcndiculaire- iiient , comme M. Baylc &: M. Rcgis l'ont fore bien remar- qué. Mais il ne l'ailni pas pour prouver que le globe doit s'é- carter de la perpendiculaire dans un angle d'mcidencc obli- que , de prouver avec ccsPhilofophes qu'il perd plus de la dé- termination perpendiculaire quederhonfontalc; il faur prou- ver encore que dés le commcncemenc de l'immcrlion il perd indéfiniment plus de l'une que de l'autre • Se c'cft ce qui n'a- voit pas encore cité prouvé par aucun Philîcien ni par aucun Géomètre que je fçachc. DISCOURS PRONONCEZ DANS L'ACADEMIE Francoife le Mariy 2f. j4oiit fe/ie de fatnt Louii , à lu récep- tion de M. de la Loubere. In ^. a Paris chez Jean Baptillc Coignard. 1695. RIen ne pouvoir mieux juftifier le choix fait par l'Acadc. niic Francoife de la perfonne de M. de la Loubere pour remplir la place vacante par la more de M. l'Abbé Tallemanc, que le rcmcrciment qui témoigne fa rcconnoiffance. Il y re- levé l'importance de l'emploi dont cette Compagnie eft char- gée , & le mérite des ouvrages qui forcent incellammcnt de tes mains. Le (wccks dont fon ecabliilemcnt fut fuivi le fait entrer dans les motifs qui portèrent le Cardinal de Richelieu 2 le procu- rer , & dans les grans dclîcins qu'il forma pour la gloire de la Monarchie. Il décrit enfuite l'eftat florillant où l'Académie fe trouverons le règne de Louis le Grand, & où elle re- double (es efforts pour célébrer les adions héroïques àc. les vertus immorcelles de fon augufte Proteéteur , dont il a ouï lui-mefme retentir le nom jufqu'aux extremitcz de la terre. La réponfe de M. l'Abbé de Dangeau qui eftoit alors Di- redeur de l'Académie , commence par les louanges de l'ef- prir , de l'érudition , &: des traduirions de feu M. l'Abbc Tal- maut j &: par celles des pocfics de M. de la Loubere , & de's DES SCAVANS. 443 ùbfêrvations qu'il a. faites du gouvernement , des mœurs , & des loix des lutions Jcs plus éloignées où il a cftc par ordre du Roi. II lui dit enfuitc que rAcadcmic qui s'approprie les ralcns de ceux qu'elle reçoit , fe fervira des connûilfances qu'il a aquifcsdans fcs voyages pours'aquiter defes devoirs ; Se que pour y mieux réulTir , elle n'a qu'à prendre pour modèle le grand Roi qui l'honoTe de fa protection , & que pour publier dignement les glorieux exploits dont il étonne toute l'Euro- pe , elle n'a qu'à imiter la force Se la julkelfe de fcs paroles. INSTITUTION A LA PRATIQUE BENEFICIALE ^ Ecclefiafiique , accommodée à l'ufage nouveau , introduit par les éditi ^> déclarations du Roi , de création en titre d^ office formé «^ héréditaire de Notaires Royaux ^ yîpofioliqtus , ^c. Contenant tous les aclcs ^ fonfliens du Notariat ApojloUque Royal , ^flufieurs traitez^^ edits , ^déclarations du Roi , ^c. Ctncernans lefdites fendions du Notariat Apoflolique Royal , qui 0nt efié inconnues ]ufquà cejourd'hui Par M. Claude Horry , ancien Notaire Apojitlique de l' Archevêché de Paris , ^c. In 4. à Paris chez Nicolas le Gras, Guillaume Cavelier, &: Charles Ofmont , au Palais ; &: Pierre de Bats , rue faint Jaques. 1693. L'Edit de création des Notaires Royaux & Apofîoliques donné à Verfaillcs au mois de Décembre 1691. & regi-i ftré au Parlement le 2 Janvier fuivant , a introduit un nou- vel ufage dans les matières beneficiales & ecclefiaftiques , & retranché quantité d'abus qui s'y eftoient gliffez parla mul- titude des Prêtres , des Notaires , àc% Huiffiers , & des au- xxc% perfonnes qui partageoient les fondions que \t% Notaires Royaux & Apoftohqucs doivent exercer feuls à l'avenir. C'eft pour les foulager dans ces fondions , & pour \t% in- ftfuire du nouvel ufage , que M. Horry aramafle dans ce li- vré les edits , les déclarations , les arrêts du Confeil qui Jcs concernent , &: les formules de tous les ades , avec le tarif de tout ce qui doit cftre payé pour i'cxpcdilion U pour i» ii- gniÂcacion des mçfmes adcs. 444 LEJOURNAL LE TABLEAU DE L'EGLISE CONTENANT UN£ infimBion ùmilttre ^ htftonque , tirée de l'Ecriture faintt ^ des Pères. In 12. à Paris chez Jean ^nillon &: Thomaj Moettc. 1693. CE n'eft ici que la première partie de tout l'ouvrage , où M. l'Abbé de Lionnicrc employé les plus bcsux traits des faints Pcrcs pour faire le portrait de l'Eghfe , & pour re- prefentcr Ton antiquité & fa durée , l'autorité de Ion facerdo- cc , & la fainteté de Ton facrificc. L'autre partie contiendra des matières auflî belles & auflî utiles. Le Public a déjà vu deux autres ouvrages du mefmc au- teur, le Panegiriquc de Louis le Grand , iL le Portrait de Monfcigncur le Dauphin. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Inlîruïlions fnr tes principaux fujets de la pieté ^ de la moralt chrétienne. In 12. à Paris chez François Muguet, 1^93. De limitation de J. C. en Latin é" '» François. Traduihon nouvelle. Par M . .. Neuvième Edition. In it. à Piiris chez Louis RouUand. 1693. jtbbatiaram Italie krevis notitia , quarwm tam excifarnm qaàm extantinm titulas , crdo , dioecefis , fmdatio , mutationes , fitus , g^c.exaHitisexprimantm. Dicata Emtnenti.^mo ^ Revcrendif/imo Prinapi Leandro S. R. E. Card. CoHoJcdo , Ma^ori Pœnitentta. rio. Authore Reverendo admodgm Pâtre Awittfîino Lultn Ordinii Ercmitarum fanch Auytjiini y^JTilhnte GeneraU , i^ Clfr-.ftianif//- nii Calîiarum Régis Geoqrapho Ordinario. tn ^. Ronia, &: fe jto.uve à Paris chez Jean Anillon. 16^)}. A PARIS, Chez Jean Cusson , rue {aint Jaques , à l'Image de ûint Jean Baptifte. Av^c Pnpilege du Roy XXXVIII. 44î LE JOURNAL DES SÇAVANS. Du LuNDY 23. Novembre M. DC. XCIII. TITI PETRONII ARBITRI EQUITIS ROMANI SA- tyricon , cum fragmentis Albx Grac^ recuperatis anno j6SS. In 12. à Paris chez Jean Baptifte Langlois , dans la grande Salle du Palais. 1693. MR. Nodot qui fait prefent au Public de ces fragmens de Pétrone, rapporte dans une lettre écrite à M. Char- pentier Doyen de rAcademie Françoife , fon ami particulier, par quel bonheur il les a découverts. Eftant en Allemagne il apprit qu'un Gentilhomme François qui fervoit dans l'armée de l'Empereur contre les Turcs , les avoit entre les mains. II trouva moyen de lui écrire , & reçut de lui réponfe , par la- quelle il lui manda qu'un Grec chez lequel il avoit logé à Bel- grade lui avoit donné un manufcrit confufcment jette parmi plufieurs autres , & que l'ayant voulu lire il n'avoit pu en ve- nir à bout -, que l'ayant fait lire par un autre , & appris que c'eûoit un Pétrone , il en avoit fait faire une copie qu'il gar- doit avec foin , & qu'il lui communiqueroit pourtant avec plaifir , s'il vouloir le venir trouver à Francfort où il dévoie paffer l'hiver fuivanr. M- Nodot ne put obtenir durant la guerre les paflcports ne- 1693. Vuuuu 44<> LE JOURNAL ccfl'iires pour ce voyage. Mais il rencontra heurcufementun Marchand de Francfort , homme intelligent , qui lui promit de lui faire avoir la copie qu'il deùroit , & qui cftant retourné à Francfort s'aquitta en eû'ct de Cà promclTc. Le Marchand s'entretint long-temps avec celui qui fît la copie , s'informant de la figure du manufcrit , de Ton antiqui- té , de la forme des caractères , & apprit que le manufcrit cftoit divifé en pluficurs nombres marquez en chifre , &: que le copilte n'avoir pas cru qu'il fuft ncceflaire de les figurer. Cependant fi le copifte s'cftoit donné cette peine , M. No- dot n'auroit pas manqué de conférer cette divifion avec celle / du fragment trouvé à Trau il y a environ trente ans , &: qui fe trouve encore dans cette copie. Au reRe ces fragmens font, au jugement de M. Nodot, de mefme ftile que le refle de l'ouvrage , ôc s'accordent fi par- faitement avec ce qui elt devant &: ce qui cil après , comme il promet de le faire voir par les remarques qu'il prépare , qu'il n'appréhende point qu'ils loient fufpecls de fuppofition, mef'- me aux critiques les plus ombrageux. TRAITE' DES MONNOYES , DE LEURS CIRCON- fiances & dépendances. Far Jean Boiz^ird Confeiller en la Cour des Monnoyci. In 12. à Paris chez la Veuve de J. B. Coi- gnard , &: J. B. Coignard le fils. 1691. IL y a dans ce traité beaucoup de cbofes qui lui font com- munes avec trois ouvrages imprimez à Paris depuis trente ans ou environ fur le mefme fujet. Des trois parties qui le compofent , la première plus longue toute feule que les deux autres enfemble , explique en trente chapitres les termes de monnoyes , l'ordre tenu dans les elfais , dans les affinages , dans 1rs alliages des métaux , & dans la fabrication des efpe- ces i. les difl'crens prix àcî, Louis d'or & d'argent , les divifions du poids de mare & des poids de fin. Quoi que ces matières ne foient pas d'clles-mcfmcs fore agréables , je ne laiffcrai pas d'en mettre ici un abrégé en faveur de ceux qui par le devoir de leur charge font obligez de les fçavoir. DES se A VANS. 247 Le nom de monnoye fignifie dans fon Cens propre une por- tion de matière à laquelle l'aïuorité publique a donne un poids & une valeur certaine pour fcrvir de prix à toute chofe dans le commerce. La monnoye de France , comme celle des autres pays , Ce divife en réelle ou ctl-eclive , &: en imaginaire ou de compte, La réelle comprend les efpeces qui ont cours ; l'imaginaire a efté inventée pour la facilité du commerce. Telle cftoit au- trefois la ir.aniere de comprer par Parifis ou Tournois , par marcs d'or ou d'argent , par écus d'or fol ,• & telle cil: au- jourd hui celle de compter par livres , par fols , 8c par de- niers. On peut confiderer d ins la monnoye réelle la fubflance &: les qualitez qui lui font attachées. Par la fubftance on en- tend fa matière &c fa forme , &: parles qualitez on entend le nom , le volume , la figure , le grcnetis , la légende , le mil- lefime , le difftrent , le point fecret , &c le lieu de la fabri- cation. La matière de la monnoye efi: ou prccieufc comme l'or & l'argent , ou vile comme le cuivre , ou alliée par le mélange de deux de ces trois métaux. Le prix de l'or & de l'argent dépend de leur titre , qui efl un terme qui fignifîe le fin , la loi , la bonté intérieure. Les monnoyes ne font pas fabriquées lur le hn : mais on s'y fern d'alliage, parce que naturellement il y a toujours du mélange dans les métaux , & que la necellué de les rendre durs & ca- pables de refifter au frai , veut qu'il y en ait ; outre que h dépenfe de l'affinage feroit trop grande. Cet alliage Ce fait dans une proportion autorifce par le Prin- ce qui veut , par exemple , que l'or dont on fait les Louis foit mêlé d'un douzième de cuivre. Mais parce qu'il efl: im- pofljble que l'alliage des métaux fe trouve fi jufte qu'il ne foit un peu au deflus ou au delfous du titre fixé , le Roi accorde aux Maitres de fes Monnoyes le remède de loi , qui n'efl: rien autre chofe qu'une permiffion qu'il leur donne de tenir la bon- té intérieure des efpeces d'or ôi d'argent un peu moindre qu'il ne leur eft ordonné. 44S LE JOURNAL La forme de la monnoye confiftc au poids de refpcce , en la taille, & au remède de poids , en l'imprcffion qu'elle por- te , &; en fa valeur. Le poids elt la preuve de la bonté d'une efpecc , eftant im- polfible qu'un mctal compofé par artifice foie égal en poids à un pareil volume d'or ou d'argent. La taille n'eft autre chofe que la quantité des efpeces que le Prince ordonne eftre faite d'un marc d'or , d'argent , ou de cuivre. Le remède de poids eft une permilîîon que le Roi accorde aux Maitres de fcs Monnoyes de pouvoir tenir le marc d'ef- pcces plus foiblc d'une certaine quantité de grains que le poids juftc. A l'égard de rimprelfion de la monnoye , dés le commen- cement de la Monarchie , &: fous la première race des Rois leur effigie a cfté gravée fur les pièces qu'ils faifoient fabri- quer. Cela a elle difcontinué fous la féconde , & fous plu- ficurs règnes de la troifiéme : mais cela fut enfin rétabli par Henri IL Par le mot de valeur on entend trois chofes , le prix de la matière , le feigncunage, & le bralfage. Le prix de la ma- tière n'eft pas égal par tout , il dépend de la proportion qui efi: entre l'or & l'argent. Parmi les Romains la proportion eftoit douzième , c'eft à ' dire que douze livres d'argent en payoicnt une d'or. La mef- me proportion eftoit en France fous le règne de faint Louis. La proportion entre l'or &: l'argent cft de deux fortes , fçavoir de la matière en œuvre , & de la maticre hors œuvre. Cette , dernière eft maintenant quinzième en France où il faut quin- ze marcs d'argent fin pour en payer un d'or fin. Le fcigneuriageert un droit que le Roi levé fur la monnoye qu'il fait battre. Il a efté tantôt plus grand , &: tantôt plus petit fclon les temps. Sous le règne de faint Louis il eftoit de trois fols cinq deniers fur marc d'argent , compris les frais de fabrication. Le bralfage n'eft autre chofe que le pouvoir accordé par le Roi aux Maitres des Monnoyes de prendre fur chaque marc ouvré DES S C A V A N S. 449 ouvré une fomme modique de laquelle il retient environ la moitié pour le déchet de la fonte , pour le charbon , & pour les autres frais ordinaires , &c dillrjbuc l'autre moitié aux ou- vriers qui ont travaillé à la fabrication. Rendage eft un terme dont on fe fert pour comprendre le Scigneuriage &: le Brafl*adla coupelle a elle imbibée de ce métal , & de l'alliage impur qui s'eltoit mclé avec l'or ou l'argent , le plomb s'éva- pore , & en s'évaporant enlevé l'alliage , fi bien que l'or &c l'argent demeurent purs dans les coupelles , parce qu'ils font les leuls des métaux qui puiilenc relliter à l'adion du plomb. Les affinages qui ont quelque chofe de commun avec les cffais, font expliquez dans le vinnéme chapitre. Quand on veut affiner des matières d'argent , on met du plomb dans la coupelle , (Se lois que ce plomb a bouiili quelque temps ,on y jette la matière d argent , & quand elle bout on en foufie la furface avec un fouflct , &: on chaflc dehors l'ccunîc , & l'im- pureté du plomb, du cuivre , &: des autres métaux qui eftoienc mêlez avec l'argent. L'or s'affine ou avec l'antimoine , ou avec le fublimé , ou avec l'eau forte -, comme il fe peut voir dans le 21. chapitre. On voit dans le fuivant les dillcrens ulagcs de l'eau forte , de l'eau regale , de l'eau fimple , &c de l'eau féconde. Le vint troifiéme montre comment fe font les lavures ; & le vint-quatriéme comment fe font les alliages : le vint-cin- qiiiéme ce qui fe pratique dans une convcrlion d'efpeces Bapt. XXXIX. 457 LE JOURNAL DES SÇAVANS Du LuNDY 30. Novembre M. DC. XCIII. VALESIANA , OU LES PENSE'ES CRITIQUES, hifloriques , ^ morales , ^ les foejies Latines de M. de Valaii Confeiller du Roi g? Hijioriographe de France^ recueillies par M. de Valois fort fïh. In iz. à Paris chez Florencin & Pier- re de Laulne. 1693. BIen qu'on ne doive juger du merice d'un auteur que par les ouvrages où il s'eft ferieufemenc appliqué , & où il a mis la dernière main , il efl; vrai pourtant qu'il ne faut rien négliger de ce qui vient des hommes extraordinaires , &: que tout ce qui fort de leur bouche , &: tout ce qui tombe de leur plume doit eflre précieux. Par cette raifon )e ne doute point que les gens de lettres ne fçachcnt gré au jeune M. de Valois d'avoir ramatlc parmi les papiers de M. de Valois fon perc ce qu'il ajugc plus digne de voir le jour. Il y a des remarques critiques fur le nouveau Teftamenc & fur les auteurs profanes. Feu M. de Valois trouve dans le quatrième livre de l'Enéide une contradiftion qui eftoit echa- pée aux Interprètes de Virgile. Elle confiée en ce que Didon lient Afcaigne encre fes bras comme un enfant de quatre ans, hç le prcffe fur fou fcin , & que peu de jours après il parpiç. 1693. " " Z z z z z 458 L E J O tJ R N A L dans une chafle folcnnelle monté fur un excellent cheval , ic fouhaicc de voir forcir un fangitcE ou un lio» qu'il puiflc com- battre. Il y a' d'autres refriarcjùe? fur Jes vies de Saints , & entre / autres fur celles de fainteCaterine & de faint Euftache qu'il tient fabuleufes. 11 y en a far les antiquitez de Paris , & fur la prééminence des Rois de France. Le recueil des Comtes d'Anjou eft un beau morceau de notre hidoire. Ce qu'il rap- porte de Severe Sulpicé & de Grégoire dd Tours fur le temps auquel faine Denis Evcque de Paris arriva dans les Gaules , peut paffer pour une dilîertation où il réfute trcs folidemcnc un Carme des BiUetes qui avoir écrit une longue lettre pour fomenir l'opinion des moddrnès fur ce fujet. Dans ce volume il n'y a rien de (î curieux que l'examen qu'il avoJE commencé du premier tome du Glolfaire Latin dt M. du Cange , où il découvre des fautes qui ne font pas cx- cufablés , &- (jui l'éroicht condannées par ICur auteur s'il vi- voit eiifcdre. Si M. de Valois avoit pu continuer cette criti- que , il auroit fait un ouvragd plus exaét & plus excellent que le Gloffaire mèfme. Ces remarques font environ la moitié de ce volume. L'au- tre eft remplie de petites pièces en vers que M. de Valois a- voifc cditipofééS en divèrfes occafions. 11 ne faifoit pas profefl fîon d'eftre Poète : fes études eftoient plus relevées II ne liiflbiï pas d'y réuffir parfaitement bien quand il lui prenoit envie de fe délafler. Parmi ces pocCits il y a une pièce d'une jufte longueur fur la prife de la Rochelle , neuf élégies , plu- ftèms odes & plufieuts épigrammes. TRAITE' DES USURES , OU EXPLICATION DES prêts ^ des intérêts par les loix if ut ont efiè faites en tous les fieclès. In 8. à Pans chez Jean Guignard, dans la Grand* falle du Palais. 1653. MR. Collet ayant efté obligé par plufieurs raifbns à trat- ter du droit municipal des provinces échangées au- trefois avec le Marquifat de Saluées , n'a point trouvé de ma» DES SCAVANS. 4^9 tîére plus difficile que celle des obligerions par lerquelies les parties convienncnc que les deniers ptecez feront rendus avec le profit réglé fur le pied de'- Edits. Il ne fe promet pas de remporter la vidoire en défendant un ouvrage combattu par les loix civiles &c ecclefialtiques , condanné par la plupart des Parlemens , reprouvé par les Uni- verfitez les plus fameufes , & par une foule de cafuiites & de directeurs , &c fera content s'il obtient qu'il foit toléré comme le font les maux qui ne peuvent eftre empêchez. II faic au commencement deux chapitres où il établit pour principes dans l'un , ce que c'eft que l'équité naturelle &c ci- vile j & dans l'autre ce que c'ert que l'équité chrétienne. Dans le premier il parcourt diverfes fcdes de Philofophes qui ont formé des idées de l'équité étrangement oppolées les unes aux autres. Mais à fon fens aucun n'en a formé de plus jufle qu'A- riftotc , qui l'a fait confit^er a. fe conformer aux loix de l'Eftac dans lequel on eft , & aux mœurs publiques & autorifécs. Selon cette idée il n'y a point de meilleure école pour appren- dre l'équité que la focieté civile , que la necelVité de vivre a- vec les autres hommes , que l'obligation d'obéir aux loix de fon pays. Dans le fécond il dit qu'au lien que la parfaire juftice des Juifs eftoit de vivre félon la loi qu'ils regardoient comme l'u- nique règle de l'équité , les Chrétiens s'élèvent au dcffus , & détachez au dedans de l'amour des biens de la terre , ils ne fuivent au dehors que la route des loix publiques , &: le mou- vement qui leur eft donné par le Prince &: par les Magiftrats aufquels l'Evangile leur ordonne d'obéir. Il traite après cela de l'ufure félon les Juifs , les Grecs Se les Romains , & explique merveilleufement bien les difterens cllats de ces trois peuples. A l'égard des Juifs , ils habitoient une terre dont Dieu s'cftoit refervc la propriété , & dont il leur avoit défendu l'a- liénation. Leurs biens eftoient en quelque forte communs , en ce qu'ils n'en avoient que l'ufufruit limité à un certain nombre d'années. Les dettes perfonnelles efloient aquittées h repciéme an- 4^0 LE J O U RN A L nec , & les rentes cafl'ccs la cinquanticrae. Le prcc de com- merce cftoit incompatible avec ce partage de la terre promife, avec la défenfc de l'aliéner , avec l'égalité des biens , &: avec l'étroite amitié que Moifc vouloit entretenir parmi les Juifs. Voila pourquoi il leur défendit le prêt de commerce non com- me niauvais_en foi , mais comme contraire à la confticution de l'Ertac où ils vivoicnt. En le leur défendant à l'égard de leurs frères , il le leur permit à l'égard des Etrangers , &: leur confeilla mcfme au chapitre onzième de l'Exode d'emprun- ter les vafes d'or & d'argent des Egipticns, ic de les empor- ter hors de leur pays. Il n'en eft pas de mcfme du prêt gratuit. Dieu l'ordonna aux Juifs à l'égard de leurs frères , &: fe chargea de le récom- pcnfer de fcs benediélions & de Ces grâces. 11 ne fe peut rien voir de plus exprès fur ce fujet que ces paroles du quinzième chapitre du Deuteronome : Si eflunt dam la terre que le 5«- , yituï votre Dieu vous doit donner , un de vos frères qui demeurera I dam vos villes tombe dans la -pauvreté , vous ri endurcirez^ point votre cœur , ^ vous ne reffcrrercz^foint votre main j mais vous l'on- j vrire\au pauvre , ^ vous lui prcterez^tout ce d'-nt vous verrez^ qu'il \ aura bcfuin. Prcncz^gatdc de ne vous point laijfcr fur prendre à cet-- ■ te penfee impie , C^ de ne pas dire dam votre cœur ; La fepticnie année qui ejî l'année de la lemife t fi proche. Les Grecs ont inventé prefque toutes les loix &: routes les règles de la focieté civile : mais ils n'ont pas tous fuivi la mef- me forme de gouvernemenc. Sparte choifit le monarchique, ■ & Athènes le populaire. La Royauté eiioit tellement bornée- à Sparte , qu'il n'elloit pasaiféau Roi de contrevenir aux loix, ri d'abufer de fon pouvoir. A Athènes les bourgeois eftoienc fi jaloux de l'égalité, que les Magilhats changeoient fouvent,- &: que la vertu dcvenoit fufpeéte pour peu qu'elle païutl ex-, traordinaire. Les ufures n'efloient pas connues à Sparte , parce que les biens y cftoient communs. Au contraire le commerce fleu- riObic à Athènes , & il y avoit de deux fortes d'ufure, cellcj de mer & de l'argent prêté pour la navigation , & celle da terre 3 SiC les profits de lune Hc de l'autre cùoicnt fort grans. Dans DES SCAVANS. ^6i Dans cette liberté dont les Athéniens jouïflbient d'augmen- ter leur bien par les intérêts qu'ils exigeoientde leurs débi- teurs , les plus éclairez & les plus équitables condannerenc parunfentiment d'humanité &: d'honneur l'avarice des créan- ciers , Se l'excès dans toutes les manières d'aquerir , & parti- culièrement dans les prêts. L'ufage des prc:s a cflé différent parmi les Romains , félon les diffcrens cllats de leur fortune. Dans les premiers llecles fous les Rois Se fous lesConfuls lors qu'un Romain réduit à la neceffité d'emprunter devenoit infolvable , il eftoit vendu & fait efclave de Con créancier. Les armes furent prifes juf- ques à cinq fois pour tempérer lacruauré des maitrcs, & pour rcgier les u'urcs qui avoicnt cfté arbitraires au comiiicncc- nient. Le temps qui s'ccoula entre les deux guerres de Cartagc qui a efté regardé par quelques uns comme le fiecle d'or de Rome , fut en eftet le temps de (a plus grande injuflice. La profcription de Silla enrichit tous fes parrifans. Craffus poffe- doic plus de dix- fcpt millions de notre monnoyc. Pompée a- miCù de fi immciifcs richclTes , que le Roi Auobarzanes lui devoir 72900. livres d'arrérages par mois. Qu^and Jules Ce- ùr fut fur le point de p.irtir pour fon gouvernement d'Efpa- gnc , fes créanciers firent faifir fon équipage , &r Craflus fuc f j caution pour deux millions feize milie neuf cent livres. Un homme qui ne fe ménagecit non plus que lui fur les em- prunts & fur les largcffes , devoir payer de grans intérêts. On ne fçauroit mieux coiinoicre que par les lettres de Ci- ccron comment fe faifoit alors le commerce de l'argent. Il nous apprend que le Sénat défendit par un décret de tirer par mois plus d'ui pour cent de l'argcnc prêté. Le décret tut inutile dans Rome où l'abondance des riehcilcs f.ufûit trou- ver de l'argent à moindre intérêt : mais il tut ouvertement violé dans les provinces par les Sénateurs qui tireicnt le plus grand profit qu'ils pure nt. Brutus ce dernier des Romains piêca de grolles fommcs à la vilie de SaLmi se , &c en exigea l'inceict a raifbn de deux pour cent. Ciccron le donna dci peines incroyables pour tai- 1693. Aaaaaa 4(5 z LE JOURNAL re entendre raifon à Ton ami. Il falut coder quelque chofe des deux cotez. Ciceron tcduifk Brucus à fe contenter d'un pour cent , fuivart le décret du Sénat ; & Brutus obtint de Ciceron i'Anatocifme , ou les intctets des intérêts, Ceiar s'appercevant que les meilleures familles couroient rifquc de fe ruiner par leurs dettes , réduilit l'interct à un de- mi par mois -, & les Empereurs qui lui fuccederent firent di- vers règle m eus fut ce fujer. En cet endroit l'auteur rapporte une déclamation de Se- neque dont il croit que les Cafuiftes (e dévoient fervir con- tre les prêts de commerce , plutôt que d'un pallage où Ari- iïo:c ne dit rien (Inon que rufure eft contre la nature , com- me font toutes les chofcs que les hommes ont inventées. Car enfin Seneque dit que les profits du commerce font des fon- ■ges, que c'eft vendre le temps , & s'enrichir de biens qui echa- pent également aux mains & aux yeux. Cependant ce fu- rieux déclamateur avoir de l'argent à ufurc dans routes les provinces. Tacite rapporte qu'en quatre ans de faveur il a- maOa plus de douze millions , & que fcs grandes richelîts fi- rent fou crime. Depuis le temps de Trajan jufques à celui de JuRinien l'Em- pire a elle gouverné avec plus d'équité qu'il ne l'a efté en nul autre. Alors les loix ayant reconnu la julxice du profit qui fc tiroir du prêt , en ont régie l'ufage. Premièrement elles ont ordonné que le plus grand profit qui puft eftre tiré de l'argent prêté n'e.xcedcroit pas un pour cent par mois. En fécond lieu jamais elles n'ont permis rAnatocifme, ni accordé l'intérêt de l'intérêt. De plus elles n'ont pas voulu que le revenu de l'argent prê- té puft excéder le principal. Enfin la loi 16 au Code de ufuris a fait trois clafTes de créan- ciers , dont les uns pourroicnt tirer par mois le tiers d'un pour cent ; les autres les deux tiers , &: les autres un pour cent ; &c ces derniers elloient ceux qui mettoient leur argent fur mer , &: ceux qui prêtoicnt du blé &: d'autres cfpeces. Les Chrétiens délivrez des perfccutions qui durant trois fie- DES se AV A N S. 4^3 des avoient éprouve Icvir patieri'ce , obferverent depuis rÈm- pire de. Conftantiii jufqu'à celui de Jul^inien les loix qui a- voient eftc faites pour le profit des prê s. Les Evêques don- nèrent aux Empereurs les avis qu'ils crurent neccrtaircs pour la corredion des mœurs, & célébrèrent des Conciles cù ils fi;, rent toute (brre de regicmens tooclvint la police. Quand l'Empire fut démembré , les Fr.;nçois s'établirent aux Gaules , les Gors en Italie & en Efpagne , les Vandales en Afrique; & dans ces Eltats qui n'avoient aucune obliga- tion de fuivre les loix Romaines , il y eut plufieurs Conciles dont les décifions ont eilé depuis approuvées , & inférées dans le droit Canonique Mais les Evêques foit dans les Confei's des Empeteurs , loit dans les Conciles tenus ou fous la domi- nation des Empereurs , ou fous celle des Princes qui avoicnc p:!rcagé les dépouilles de l'Empire, n'ont jamais blâmé le pro- fit des prêts dans les perfonr.es aufquclles il eftoit peimis p;.r les loix. Ils ne l'ont défendu qu'aux Clercs , parce que loiirc forte de commerce leur cRoit interdit , de mefnie que toute adminiltration d'aff.iires temporelles. Il e(l vrai que ce profit a depuis efté défendu en trois eftats differers entre eux en religion , en loix , en manière de vi- vre , & en langue. Le premier eft l'Empire deb Grecs. Le fécond eft celui des Franço;s &: des Allemans ; & le t'oifié- me celui des Arabes tantôt fous les Mammelus , tantôt fovs les Califes , tantôt fous des Princes particuliers , tantôt fous les Sultans d'Egipte , &: tantôt fous les Ottomans. Ces trois Eftats fe font accordez en ce feul point de défen- dre le profit des prêts qui avoient toujours efté regardez com. rnc des aétes indifferens de leur nature. Depuis cela le mot d'ufure qui eftoit le mefme que celui d'ufige , fut pris en un I autre fens , & regardé comme un crime. Les Chrétiens à qui tous les biens font étrangers , doivent déférer fans peine à cette défenfe comme faite par l'ordre de Dieu. Quand elle s'etendroit aux ventes , aux donations , & aux teftaniens, ils , y defcrcroient de la mcfme forte. Cela n'empêche pas qu'ils ne recherchent quelles en ont efté les caufes dans chaque Eftat où elles ont efté faites , &c 4(^4 L E J O U R N A L qu'ils ne les troiivenc fondées fur la conftitution particulière de ces Edars. Le peu de fidclitc des Grecs qui n'onr jamais exécuté un concrad a détruit les prêts à Conftantinoplc. La jalouiie des Empereurs contre les Marchans a rumé leur commerce par le retranchement de ce profit , &: les Patriarches qui avoicnc parc au gouvernement ont pu le détendre. Les Empereurs d'Occident contraints de vivre dans la dé- pendance de l'autorité à laquelle ils dévoient leur ctablilîc- nicnr , fournirent que les affaires temporelles fulfent dccidces par les conllitiirions canoni>.]ues qui defcndoicnt les prêts de commerce aux Clercs. Ceux-ci voulurent que cette loi qui eitoit julle pour eux , le full aufll pour les Laïques. Maliome: & les Arabes les défendirent par u'autrcs motifs tels que pourroit cltic une imitation fervile de quelques cou- rûmes des Juifs. D'ailleurs des gens qui n'avoicnt point ce demeure arrc:ce , & qui ne vivoicnt que de larcin , ne pou- voient entrccenir de correipondance. Enfin nul ne piétoic ni n'empruntoïc dans un Eliat où tous les fujecs croient cf- clavcs. L'auteur s'approchant du p.iys dont il fuit l'hiftoire & dé- fend l'ufage , trouve une autre raifon qui y ruina le commer- ce. C'ed que les Rois qui conquirent ces terres les partagè- rent à leurs foldats , qui les tenant en Hcf ne pouvoiciu les en- gager ni faire d'emprunt. Cette police dura jufqu'aux Croifades aufquclles pour a- voir de l'argent on mit les fiets dans le commerce. Les Italiens fecouerent les premiers le joug des loix qui a- vo;enc banni l'argent de l'Europe Ils fournirent les vairtcjux &: les vivres aux Chrétiens qui paflerent en Afie & en Afrique pour conquérir les lieux faints. Les Génois fe mirent à la fuite de faint Louis pour recueil- le l;r fes largclfcs , & depuis par un fembl.ibie intérêt fcrvirenc Mahomet H. au ficge de Condantinrplc. Durant ces guerres laintcs qui contraignoient les Gentils- homincs à vendre leurs biens à vil prix , & à acheter extrême- I m^iit cher , ces Italiens qui avoient inventé falteranon dc^ nionr.oyts DES se A VANS, 46 j monnoyes, les partis & la banque , épièrent l'occafion de pro- fiter de la neceffité publique. Ils n'achetèrent que les chofes qui fe pouvoient tranfporter , &: ne prêtèrent que fur de bons gages. Voila pourquoi Philippe le Bel les chafîa, comme laine Louis fon ayeul avoit chade les Juifs. L'auteur fait enfuite une dilledion fort exade de l'arric/c I. de la queft. 78. de la 1 1. de faint Thomas , où ce Dodeur Angélique prouve l'injuftice des prêts par cette raifon que c'eft vendre ce qui n'cft pas. M. Collet tourne ce principe de tous les cotez pour en examiner la certitude , & entre les autres chofes qu'il lui oppofe , il dit que dans les rentes confticuées on vend une chofe qui eft encore moins que n'cft l'ufage de l'argent dans le prêt. Ces rentes conftituécs font de l'invention des Allcmans. j Les Nobles qui defiroient augmenter leur revenu, prêtèrent aux artifans & aux payf.xns, à condition qu'ils s'obligeroient à payer tous les ans un cens ou une rente. Au temps du Concile de Confiance les débiteurs de ces rentes s'avifcrent de les condanner , & de dire qu'il y avoit de l'ufure. Martin V. qui venoit d'eftre élu déclara qu'il n'y en 1 avoit point. Callixte III. fit une femblable déclaration, & Leurs bulles furent reçues par toute la Chrétienté en ce qu'el- les exemcoicnt ces contrats d'ufure. Les claufcs par lefqucl- les les Papes pcrmetcoient au ctcancicrdc contraindre les dé- biteurs par cenfurcs eccleflaftiques , ne furent pas reçues en France. Les ordonnances de nos Rois ont ajouté la modifi- cation du prix qui eftoit à la di-fcretion des parties. L'ANALISE DES CORNES DU LIMAÇON DES jardins , avec la raifon mécanique de leur mouvemtnt. Pur frunc^oii pvupatt, IL n'y a rien de plus connu que l'extérieur des cornes du li- maçon : elles attirent les rcgars des curieux , elles font le divertilfemcnt des enfans , elles ont mérité les reflexions des Sçavans. On connoit d'une feule vue que cet animal a quatre cornes 1693. B bb b b b 466 L E J O U R N A L chaperonnées , une cache à leur cxcrêaiité , une h'gnc noire tout au loncT de leur cavicé , un rcntrcnient de dehors en de- dans &: de dedans en dehors , comme celui d'un bas de foye qu'une main cire par dedans &: rcpoulî'c en dehors. L'aaiaHCc que j'en ai faite m'apprend que cette hgne noire qu'on voit à la faveur de leur tranfparence , cft un petit muf- cle dans fa méninge fortement attaché au fommec de la cor- ne , roue au long de laquelle il règne à fon aife , fans con- trainte , fans attache , & continue fa route par le col juf- qucs au milieu de fa bafe , qu'il abandonne pour entrer dans ia coquille , à laquelle il s'attache vers les petites volutes de la fpirale. C'eft ce mufcle qui tire les cornes du limaçon en dedans avec tant de vitelfe , qui les fait badmer , fouetter , fonder le gué , en haut , en bas , à droite , à gauche avec tant de vi- vacité. Car i\ l'on emporte l'extrémité du mufcle , il fe reti- re de la corne avec une vitede extraordinaire , & n'y paroic plus. La corne demeure lâche , languiifante , oifive. On ne la voit plus dans cette vive activité, quoi qu'elle ait encore quelque mouvement par fa vertu mufculcufe. La petite tache noire qu'on voit au fommet de la corne , n'efl: qu'un peloton , un lacis , un entortillement de l'extré- mité des fibres du mufcle. Car fi on débaralTe adroitcmcnc le mufcle d'avec fa membrane , on voit la continuité du muf. cle avec le petit corps noir. Si fans décacher le peloton on le met fur l'ongle , & qu'on le frote doucement avec le doit , il fe fait un dévelopement de ce petit lacis. Si on touche à la corne, fon enfoncement commence toujours par ce petit point. Si on la lie par fa bafe , il n'y a que cette tache qui foit enfoncée , ridée , & qui faife effort. Ce globule n'eft donc que l'extrémité des fibres du mufcle. Car de croire avec le curieux Lifter de l'Académie Royale des Sciences de Lon- dres , que ce corpufcule noir foit l'œil de l'animal , je ne fçaurois m'y tefoudre. Quelque objet qu'on lui prefence fans le toucher , il ne donne aucune marque de fon appercevance. Ce n'eft pas une merveille de voir un organe s'aquitter de fbs fon(n:ions lors qu'il eft armé de tous fcs mufclcs : mais de DES SCAVANS. ^..7 le voir prive de ce fecours , & obéir aux ordres de l'animal , c'elt un paradoxe pour tous les Anaromirtes. O belie nature, que d'écononiie dans votre gouvernement ! que de (aotHe dans routes vos adiions l que de grandeur dans vos moindres produdions • Cette grande artifanne qui fe plaie à varier Ces ouvrages , &rqui peut-eflre en cette occafion n'a pu commodément mec tre en ulage la règle générale des mufclcs pour faire mouvoir de dedans en dehors les quatre fcnllbles barons donc elle a pourvu fon petit aveugle, a eu recours à une machine hi- drolique- Les cornes du limaçon en font les pompt-s , fa bou- che & Tes lèvres les pillons qui refoulent l'eau dans ces ca- naux par quatre ouvertures fenfibles qu'ils ont fous la lèvre fuperieure. C'eli^ par ce refoulement d'eau que les cornes du limaçon font lancées en dehors avec tant de viteiTe après que le petit muf^'le les a retirées en dedans. Les expériences qui iuivenc démontreront^cecte vérité. ]'ai coupé le moins que j'ai pu dune corne par Ion cxticmité : elle s'cft vuidce de quantité d'eau àcaufc de la grande contraélion & du rentremenr que l'animal faifoic dans fa coquille. Quel- que temps après la corne a paru , &r s'cd remplie d'eau , parce que l'ouverture eftoit fi petite , que l'animal en pompoit da- vantage qu'il n'en pcrdoir. Je l'ai comprimée par fa bafe en- tre les deux doits : cecte comprelTion a produit un prand jec d'une eau bleuâtre , limpide &: tranfparentc , qui n'avoit rien d'analogue ûvec cette liqueur gluante qui fort de l'animal quand il fe contrade. J'ai fait une ouverture longitudinale au milieu d'une autre Gorne : l'eau en eft toute fortie ; la corne fe renfîa mollcmenr, & tomboit en bas , l'animal fournlifant un peu plus d'eau qu'il ne s'en ecouloic par l'ouverture. Enfin j'ai fait une grande incifion dans la bafe d'une corne faine : elle s'eft defemplie , & n'a plus paru , parce qu'il fe perdoic autant d'eau par rouverture que la pompe en four- niffoic. Le petit chapiteau qu'on voit à l'extrémité de la corne n'eft: qa'une dilatation de fa peau que l'eau fait bourfoufler par fon refoulement. 468 LE JOURNAL Il faut de la patience & de l'cxaditudc pour faire ces ex- périences. Je ne dcfcfpere pas que cette ingenicufe pompe ne fervc de principe Se de fondement pour rendre raifon de pluficurs niouvemens qu'on attribue" pcut-cftre trop légère- ment à l'adion des mufcles. FORCES DE L'EUROPE , OU CINQUIEME PARTIE de t Introduction a la Fortification , dediee à Monfeigneur le Dauphin par N. de Fer fon Géographe. In ^. à Pans chez l'Auteur, fur le quai de l'Horloge. 1693. CEtte cinquième partie contient les plans de L'Iflc , de Liège , de Luxembourg , d'Arras , de Fribourg , &• de quelques autres villes 5 le combat de Stenktrke , la bataille de Nerwinde , les fieges de Québec & de Charleroi, Le plan de Paris ell à la telte , avec trois feuilles du canal de Mauuenon. Le plan de Paris tout petit qu'il tft n'ed pas moins corred que le grand , la moindre ruelle n'y ayant pas elté oubliée, La gravure en cft une des plus belles qui ayenc jamais efté vues. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Recueil de quelques fermons pfononcez^par M. ï Abb'e de Pexene, In 12. à Paris chez Édme Couterot. 1693. ^ Traité des dfhenfes , divife en deux parties , ^c. In 12. à Pa- 1 ris chez le mefme. lé^^j. Les firaiagémes ^ les rufes de guerre , tir études Mifloriens Grecs ^ Latins , ^> François , tant anciens que modernes , (^c. Jn 12, ^ Paris chez Etienne du Caflin , au Palais. 1693. Manuale Epifcoporum ad vifitandas parochias. In 12. à Paris chez Antoine Dezallier. 1693. Sentimens fur îart de prêcher , avec le car.iciere des Prédicateurs, Par M. PAbbe dujarry. In 12. à Paris chez le mefme. 1693. A Paris chezjEAy Cussow , rue faim Jaques , à faint Jean Baptifte, XL. 4(59 LE JOURNAL DES SCAVANS 5 t Du LuNDY 7. Décembre M. DC. XCIII. ENTRETIENS SUR LES DIXMES, AUMONES , ET autres liberaiitez^faitei à l'Eglife. In 12. à Pans chez Jean Guignard , au Palais, i 693. IL n'y a pas long- temps qu'un Confeiller & un Abbé eurent dans le Caroire de Dijon en prefence d'un Dodeur de Sor- bonne & d'un Religieux , les entretiens qui font rapportez dans ce livre. Le Religieux qui alloit à Rome pour les affai- res de Ton Ordre , leur donna occafion de parler de l'mftitu- tion des Mandians. Le Confeiller dit q'je les anciens Moines n'avoient point d'actachemcnt particulier aux Papes , parce qu'ils vivoient dans la dépendance des Evêques , & que ce ne fut qu'en l'on- ziéme fjeclc que l'Eglife d'Occident entièrement fcparée de celle d'Orient s'abandonna prcfque abfolumeiit à la conduite des Papes , qui favoriferent la reforme des Ordres Monafti- ques , dont le principal point fut de mettre les maifons en congrciiâtion fous l'autorité d'un General. De* I Les Moines de Cluni , de Citcaux , de Prcmontre, & les Chartreux ayant pris leur origine au temps de cette reforme, l'Ordre de Citcaux fe dévoua particulièrement à la Cour de 1693. , Cccccc 4?o L E J O U R N A L Rome qui par rcconnoiflance le combla de fcs faveurs , &: lui donna les anciennes abbayes , avec une-partie des dixmes. Dans le treizième ficelé les ManJiansfuren: établis en qua- lité de troupes auxiliaires; & comme dans les dcflcins les plus pieux il ic mcle fouvent quelque vue de politique humaine, la Cour de Rome qui avoit bcfoin de perfonnes qui s'cxpo- fad'ent pour la qucrele à la puill'ance des Empereurs , &: à la fureur des Albigeois , &: qui apprchendoit que les anciens Moines trop attachez à leurs biens , &: trop accoutumez au repos de leur folitude ne le facrifiaircnt pas aveuglemcn. à fes intérêts , inventa la nouvelle milice de^Mandians qui ne pod'edant aucuns biens ne craignirent point de les perdre , &c qui jouiilant de grans privilèges pour faire toutes les fondions de Clercs , n'oublièrent rien pour les confcrver. L'Abbé prenant la parole , dit que ce qui lui faifoit de la peine dans l'inrtitution des Mandians , trtoit que leur mendi- cité cofl: eflé canoniféc contre TEcricurc famte qui dans l'an- cien Te ftament détend qu'aucune perfonnc vive d'aumônes, & dans le nouveau rcfulc les alimens à ceux qui ne les ga- gnent pas par leur travail. La neccllicé n'a pu difpcnfer de ces loix-Ià , ni juftifier par une bonne hn une chofc qui d'elle mefmc eil mauvaife. Que fi le Pape Honoré IIL vouloir lever ces nouvelles troupes pour Ton feivice , il falloit qu'il prift dans fon patrimoine de quoi les faire fubfiRer. Le Religieux aîloit répondre lors que le carolTe arriva à Sens , & la convcrfarion Hoir. Le jour fuivant l'Abbé continua le difcours de cette forte : Lors que Mo'ife a défendu qu'il y euft aucun mandianr parmi les juifs , il a voulu établir l'cgaliré , de forte que perfonnc ne fuft ni dans l'indigence extrême ni dans l'abondance ex- celfive. Il n'admit ni mendicité ni royauté , qui font les ex- trémitez des conditions humaines. Durant la captivité il ne fut plus poHjble de renouveler le partage des biens , ni de remettre les pauvres en polfenion des héritages de leurs Pères. Alors Daniel pour rétablir cet- te égalité il naturelle entre les Hébreux , exhorta les riches à DES SCAVANS. 47 r exercer leur libéralité envers les pauvres. C'efl comme s'il leur euft die : Vous n'avez plus de temple pour offrir vos facrifices : Regardez les plus pauvres de vos frcres comme des Lévites fans polTcirions 5 &: par la parc que vous leur ferez de vos biens vousconiervcrez l'egalicéque notre Legiflatcur nous a tant recommandée. Le Confeiller prenant le parti du Religieux dit : Si Daniel ordonnoit aux Juifs de foulager ceux de leurs frères qui man- quoient de bien durant la captivité , il permetcoit en mçfme temps à ceux ci d implorer le fccours des riches. S'il cnjoi- gnoic de donner , il ne ucfendoit pas de demander : on ne peut autorifcr l'un fans l'autre. Pardonnez moi, repartit l'Abbé. De la necefficé où cfloient quelques uns des Juifs qui ne pouvoicnr plus partager la terre p!-omife,il s'enfuit que ceux qui avoient du bien dévoient fou- lager ceux qui n'en avoient pas : mais il ne s"enfu:r pas qu'au- cun duft fejetter volontairement dans cet eflat dcniifcre, ni qu'une partie du peuple puft faire profciîion de vivre du tra- vail des autres , & de préférer l'oiliveté aux moyens honnêtes de fe procurer ce qui etl neceflaire à la vie. Cette conclufionfavoriferoit les plusgrans dcfordres, qu'il faut éviter non feulement pour le bien de la police , mais en- core pour celui de la confcience. L'auir.ône doit eflrc faite avec difcretion aulfi-bien que le facrifîce. Les Juits faifbient des aumônes conhderablcs : mais non indifféremment. Ils les envoyoient au Temple où il y avoic des officiers qui les diftnbuoient à ceux dont ils connoiffoicnc les necefîitez. Notre Seigneur voulut qu'il y euft un receveur dans fa com- pagnie , afin que ce qui tomboit entre fcs mains fufl difpenfé avec ordre L'inftitution des Diacres montre la mefme cho- fe , & prouve aufïï que les hôpitaux font conformes à la loi de Dieu , au lieu que la mendicité lui eft contraire. Dans les premiers fiecles l'Eglife n'eut point d'autre fond que les aumônes. Les fidèles y prenoienc parc félon leurs be- foins, Bien loin d'aller mandicr parmi le peuple , ils s'adref- foienc aux Diacres. 471 LE JOURNAL C'eft fur ce fondement que les Evcqucs s'attribuent ]a di- rcdion des hôpitaux. Il eft vrai que J. C. envoya Tes Apôtres fans argent : mais il ne leur ordonna pas de mandicr. Il leur ordonna feulement de prêcher fon Evangile , &c de vivre avec ceux qui les vou- droient recevoir. Le jour fuivant qui fut le troifiéme du voyage , la conver- fation tomba fur les biens temporels de l'Eglile. L'Abbé fou- tint qu'ils eftoient propres aux Ecclcfiaftiques. Le Confciller lui demanda comment il enrendoit donc les Conciles d'Efpa- pagne &: de Gaule , qui ordonnent que les revenus des Egli- fcs feront p.ucagcz en quatre portions , une pour les pauvres, une pour la fabrique , une pour les Ecclcfialtiques , une pour l'Evêque, Ce partage , répondit l'Abbé , efloir une condition des plus anciennes donations faites à l'Eglife.Mais les biens qui avoienc cflé donnez dans ces premiers temps le font perdus , &: ceux qui ont elle donnez depuis , n'ont point eftc chargez de ces conditions par les donateurs. D'ailleurs les fabriques &: les pauvres que les Conciles ap- pellent au partage des revenus eccleiiaftiques , ne font plus dans la neceirué où ils eftoient autrefois lors qu'il n'y avpic point d'hôpitaux pout fubvenir à leurs bcfoins , aufquels les Evéques ont pourvu en procurant ces etablillemens , & en ïss foutcnant par les biens quils ont détachez pour cet effet de leurs Eglifcs. Le Confeillcr répliqua que la fuppofition de l'Abbé ertoiç mal fondée , & qu'il n'eftoit pas vrai que le bien que les hô- pitaux poOcdent fuft une portion que les Evêques euflcnt de- ftinée au foi lagement des pauvres. Pour faire voir que les Eccledafliques n'avoient rien con- tribué à la fondation des hôpitaux , il cita les ordonnances qui s'expliquent d'une manière peu avantagcufc à la caufe du Clergé , puis qu'elles donnent à des Laïques la diredion de ces maifons de chante. Ce font , ajouta le Confciller, des mçnuinens publics qui nous apprennent que les Ecclclialîi- ques ont plutôt ôté du bien aux pauvres qif'ils ne leur en onç donné D E s se A V A N s. 473 donne. II me feroic aifé de faire voir par les a£les de leurs fondations qu'ils ont cfté établis & entretenus par la libéralité des Laïques, auflî-bien que les Eglifes & les Monafleres. Les dixmes qui font la principale partie des bietis ecclefiaftiques , ont elle données par les Rois. Avant que d'aller plus loin , dit l'Abbé , il faudroit exami- ner fi le Clergé a reçu les dixmes de la libéralité des Princes , ou s'il ne les tient que de Djcu. Le Confeiller , interrompit le Religieux , nous va dire que les dixmes ne font pas de droit divin .- mais je ne fçaurois accorder ma Théologie avec fa Jurifprudence. N'eftil pas certain que Dieu a demandé la dixième partie de tous les re- venus , en (Igne , comme dit Moïfe , de fon droit fouverain î La qucftion , répliqua le Confeiller, eft de fçavoir fi les dix- mes font de droit divin fous la loi de grâce. Je foutiens qu'el- les n'en font point. Si elles en edoient , on n'auroit jamais pu fe difpenfer de les payer , &: l'Egljfe en auroit fait un pré- cepte en tous les temps. Or il eft certain que dans tous les conciles tenus avant la ruine de l'Empire Romain il n'eft point parlé de dixmes. Le Religieux interrompant le Confeiller dit : L'Eglife ex- communie ceux qui reculent de les payer. Pourroit-elle le faire fans prcfuppofer un précepte qui oblige les confciences? Il y a plus de mille ans qu'elle eft dans cet ufage. Il faut toujours regarder , répondit l'Abbé , ce qu'un Con- cile ou un Pape ont voulu décider , &: quelle a efté leur in- tention. 11 ne s'agifloit pas dans les Conciles de fçavoir fi l'o- bliçration de payer les dixmes eftoit de droit divin. Cela n'a jamais efté ni pmpofé ni refoîu dans ces afiemblées. Il s'agif- foit feulement de fçavoir fi ceux qui ne les payoicnt pas me- ricoient d'eftre excommuniez ; & c'eft ce qui y a efté décidé pour punir la dcfûbeiffance de ceux qui contrevenoienc aux loix que l'Eglife avoit faites pour fa police. Le Confeiller fe dcclnrant contre l'Abbé & contre le Re- ligieux , leur dit : Je prétens qne les dixmes ont cfté données au Clergé par les Princes. Je vous prouverai ceice propôfi- tion.dans la maif^jn du Prieur d'Aifi que je commence à ap- 1693. Dddddd 474 I>E JOURNAL percevoir. Ils y defcendirent en cftcc bientôt , & après qu'ils y eurent dîne , ils entrèrent dans la Bibliotequc , où le Con- fcillcr ouvrit le Code juftinien . &: montra les loix cù Con- flantin &: les autres Empereurs Tes fucced'eurs permctient de faire des teliamcns en faveur du Clergé. Dans un (i grand nombre de loix, dit-il , il n'eft point par- le des dix mes , &: il ne paroit pas que les Ecclehafiiqucs les ayent prétendues au temps de ces Empereurs , dcfquels ils onc reçu quantité de droits & de privilèges. Si les dixmes ne Ce trouvent pas dans le Droit Civil , dit le Religieux , elles fe trouveront pcut-efhe dans le Canonique. Prenez la peine , s'il vous plait , Monfieur l'Abbé , d'y cher- cher de quoi nous défendre. Le Confciiler prenant la parole avança qu'il s'en falloic beaucoup qu'en cette occafioii les loix ecclefîafliqucs eullcnr la mefmc force que les loix civiles ; que les premières ne re- gloient que la police particulière de l'Eglife , au lieu que les autres obligeoient cous les fujets de l'Empire , les Ecclefiafti- ques & les Evêques comme les autres. Il ajouta que le décret où les loix ccclefiafliques eftoient recueillies contenoïc pluiieurs pièces fuppofées, &: qu'il n'eftoic pas d'une mefme autoriréque le Ce ie Juftinien. L'Abbé ayant pris le décret, chercha les endroits où Gra- tien y prouve l'obligation de payer les dixmes. Le Confeillcr accoutumé à recourir toujours aux fourccs , confulta les Pè- res cirez par Graticn au fujet des dixmes , & principalement faint Jeiome &c faint Auguftin , Se fit voir à la compagnie que ce Moine Italien avoit tronqué leurs paroles , & changé leur fens pour faire remonter au cinquième fiecle. un ufage qui n'avoit elle connu que long temps depuis. Je vous ferai voir li vous l'avez agréable , continua le Con- feillcr , ce qui fe pratiquoic au temps de Grégoire I. dans l'E- glife d'Occident : car pour celle d'Oricnc , elle n'a regardé les dixmes que comme des aumônes. Ce grand Pape nous apprendra mieux que nul autre Tuf^gc du fixiéme liecle où il a vécu. Vous verrez par fcs Epicres qui font les rr.onumens les plus certains de ce temps-là , (jue DES SCAVANS. 475 rEglifc Je Rome tiroit de grans revenus de la Sicile , de la Pouille , de la Saidaigne , & des Gaules. Mais vous ne ver- rez point qu'elle rcçuft des dixmes : vous verrez au contraire qu'elle les payoit aux Empereurs, Saint Grégoire dans l'Epi- tre trente- huitième parle de la peine qu'il y avoir à fournir en efpeces les bleds qui eftoient dus fur les terres de l'Eglife. Qu^e (] nous remontons plus haut , & que nous cherchioris fur quel pied ces tributs eftoient levez , nous trouverons que les Romains les avoient taxez à la dixième partie des grains qui fe recueillo:ent en Sicile. Ciceron ne parle d'autre chofe dans fcs oraifons contre Verres. Turnebe 1. i. ch. 6. dit qu'on ap. pelloit Agros Decumanos ceux iur lefquels on levoit la dixième partie des b'eds ; &: Coquille en parlant des dixmes a die qu'on devoir leur origine aux tributs que les Romains impo- foient aux pays conquis. Si cela ell l'Eglife au temps de fainc Grégoire payoit les dixmes aux Empereurs à proportion des fonds qu'elle pulfeioic en Sicile. Vous vous prévalez de vos ledures , dit le Religieux au Confciller , & n'ayant rien à y répondre , je me tiens à la do- drine des Pères qui ont enfeigné que les dixmes eÙoient de droit divin , ou au moins de droit ecclefiadique. Ne i'c peut- il pas faire , ajouta l'Abbé , qu'on levaft deux dixmes , une pour les Empereurs , &: l'autre pour les Ecclellaftiques ? C'eftce qu'il faut voir, dit le Confeiller-, & il me paroic peu vrai-femblable que faint Grégoire les eult oubliées, li elles avoienr efté en ufage. Il parcourut les epitres de ce Pa- pe , & fît voir que s'il n'avoir pas mis les dixmes au nombre des biens de l'Eglife Romaine , c'eftoit qu'elle n'en jou'iiîbic pas encore alors. L'Abbé chercha enfuite dans les Pères que le Prieur d'Aiil avoir rangez fur le bureau de fa Biblioreque , ce qui pouvoic fervir à la défenfe de fa caufe. Il ouvrit d'abord Origene, Se n'y trouva autre chofe fur le vint- cinquième chapitre de l'Exo- de , finon que les Chrétiens doivent offrir à Dieu les prémi- ces de leur efprit. Le Confeiller répondit que c'eftoit un fens allégorique qui ne fourniffoit aucune preuve. On lue eniuite un fcrmon de faint Chrifoftomc fur les çoL- ^'6 LEJOURNAL ]ccT:es dont Hiint Paul parle dans Tes cpicres ; & le Conftillcr fie voir que ce fcrmon ne pouvoir cftre applique aux dix mes , mais feulement aux aumônes. Il dit la mcfme chofc d'un pafl*age de faint Epiphane ; après quoi l'Abbé ayant apporté quelques partages de faint Ambroife & de faint Profpcr , le ConfeiUcr répondit fur le premier, que faint Ambroife feierc de l'ancienne loi pour montrer l'obligation où font les Chré- tiens d'employer une partie de leurs revenus à l'entretien des Mmiftres , & au foulagement des pauvres ; &c fur le fécond, que famt Profpcr parloit des terres que les Ecclefiaftiquespof- fedoient , & non de droits qu'ils levaient fur les terres des Laïques. Que fi vous prétendez , reprit l'Abbé , que les faints Pères n'ont pas cnl'eigné l'obligation de payer les djxmes, au moins reconnoitrez-vous que les Evêques l'ont impofcc par leurs dé- crets , &: qu'en cela ils n'ont fait que fuivre l'ordre de Dieu. Ceux du fccond Concile de Maçon tenu en j8y. s'en expli- quent de cette forte dans le cinquième canon : Decermmusut moi antiLjUHi a fdelibus repurciur , (^ décimas EccUjhfticis famu- lantihm ceremoniis popului omnis 'ifferat. Y a-t-il rren de plus clair ? Lifcz le refle , répliqua le Confeiller : Quas Sacerdotes attt in ptuperum ufum , aut in c.tptivorum rcdemptiomm prarogan- tes , fuis orationihus pacem populo , ac falutem impetrem. Vous voyez que ces Evêques ont regardé les dixmes , non com- me leur patrimoine , mais comme celui des pauvres. Outre cela faites attention au temps & au lieu où ce Con- cile 3 efté tenu. C'a efté au fixiéme fiecle & en France , donc les Rois avoient cédé leurs droits au Clergé qui par confe- quenc ne tcnoit les dixmes que d'eux. Le jour fuivant le Confeiller reprit la convcrfation en ces termes .- j'ai c:^.core une preuve à vous propofer qui établira trois chofes. La première , que le tribut ou le cens qui fe le- voit en efpeces fous le Bas Empire , &: qui fe regloit par la dixième partie de la rccolte , elloic connu dans les Gaules fous le nom de dixmes. La féconde , que les Rois de Fran- ce qui en chalfcrenc les Romains , les Gots bc les Huns , en onc DES se AV AN S. 477 ont joui j &: la troifiéme qu'ils l'onc cédé à 1 Eglife. Je n'ai pour cela qu'à vous Jirc les pallages des Capiculaires que j'ai faic tranfcrire , & à les eclaircir par quelques reflexions. Vous ne me ferez point de conteftation îlir l'autorité de ces loix , puis que je ne les employé maintenant que comme des preu- ves de l'hiftoirc. Quand il eut achevé , le Religieux parut fort fatisfait d'a- voir appris beaucoup de chofes donc il n'avoir jamais ouï par- ler , & témoigna néanmoins que n'ayant pas la liberté d em- bralî'er les opinions qui lui fembloient les meilleures , ilfc tiendroir à celles de Ton Ordre. L'Abbé confelfa qu'il admiroic la police des Capitulaires , & toute la compagnie convint que c'cftoit dommage qu'elle ne fuit pas étudiée avec plus de foin ; mais que cela venoitdc ce qu'on fc gâte dans le bareau par l'étude de la police prefen- te , dans les univerfitez par les préjugez dont les Dodleurs rempliflent l'efprit de ceux qu'ils inlhuifent , &C parla leéture de certains livres qui ne contiennent qu'une dodrine de parti, f EXTRAIT D'UNE LETTRE DU P. LAMY PRETRE de i'Oratoue. JE viens , Monfieur , de voir une réponfe aux Reflexions i'ur le nouveau fiflême du P. Hardouïn. Je ne veux pas répliquer ici à tout ce qui y eft avancé contre mon fiftéme de la Pâque, J'efpere le faire ailleurs : en attendant je toucherai légèrement trois articles. Le premier regarde ce que j'ai dit dans les Reflexions, que Léon de Modene ne difoic point que les Juifs ne commcn- çoient qu'après onze heures à faire cuire leurs azimes le qua- torzième jour du mois pafcal. Il eft vrai en effet qu'il ne le dit point dans le nombre 4. chap. 5. partie 5. des ccremonics juives , où le P. Hardouïn nous renvoyé , page ij. Ainfi je n'ai pas eu tort , quoi que ce Père ait eu raifon de l'avancer. Car il ne s'ell trompé que dans la citation , Léon de Modene le difant à la fin du nombre cinquième. Mais cet auteur ne i(ô-^l. Ececee 47S LE JOURNAL parle pas là des Juifs qui vivoienc au temps de N. S. &: qui font les feuls dont il s'agilloit. Il parle de ceux de fon temps qui ne pouvant plus facnfier d'agneau , faifoient confirter leur cérémonie pafcale dans les azimcs qui leur tenoicnt lieu de J'agneau. Le fécond article confiftc en ce que l'auteur de la Rcponfc dit que la loi que j'ai citée dans mes Réflexions , & qui dc- fendoit les œuvres ferviles durant les fept jours des Azimcs n'e(t pas dans fa Bible. Elle eft donc défedueufe : car voici comment cette loi eft exprimée au chap. iz. de l'Exode v. i6. de la dernière tradudion. Le -premier -jour fera faim t^ folennel. Le fcpticme fera une fcfle également vénérable. Vous ne fere::^ au- cune oeuvre fervde durant ces fept jours , hors ce qui regarde le man- ger. Dans la Vulgace elle eft conçue de cette forte : Dies pri- ma eut finci a atque folemnis ^ ^ dies feptima eadem fcjîivitate venerabilis : mhU operts facietis m eis , exceplis his quct ad vejcen- dum pertinent. L'auteur de la Réponfc avoue après le P. Hardouïn , que les coutumes prcfentes des Juifs fervent à interpréter les an- ciennes loix. Or voici ce qu'en dit Léon de Modcne dans le chapitre ci-delîus allégué. Les deux premiers jours d^ les deux derniers jours de la Pùqtte il efl fejie foicnnelle pendant les quatre -jours du milieu il ejî feulement défendu de travailler.. Le dernier article touche Herode Antipas. Quand j'ai dit dans mes Reflexions qu'il n'avoir pas efté honoré du titre de Roi , j'ai parlé des Romains qui avoient fculs droit de don- ner ce titre. Saint Marc l'appelle Roi au chap. 6. v. 14. Mais faint Luc qui au i i. ch. des Ades des Apôtres parle d'un Herode Roi , ne donne à Herode Antipas que la qualité de Tetrarque j ce qu'il n'auroit pas fait s'il avoit efté Roi. Car ç'auroit efté lui faire injure que de lui donner un titre infé- rieur à la Royauté. Saint Mathieu n'appelle non plus Herode Antipas que Tecrarque. Jofephe raconte le chagrin qu'eut Herode Antipas de ce que les Romains avoient donné à Herode Agrippa le titre de Roi , lequel ils lui avoient refufé. Je ne touche ce troifiéme arcicle que pour éclaircir la difticulcé qui m'a efté propofée par DES S C A V AN S. \^.. un de mes amis , & non pour fatisfaire rautcuf de la Répon- fe qui ne m'a rien objedé fur ce fujet. En finifTanc cette lettre permettez- moi , Monfieur , de re- marquer que cer auteur fuppofe que Jofephe attribué aux Sa- maritains ce que faint Luc dit des Galiléens. Ce n'eft pas Jo- fephe qui eft contraire à faine Luc. Ce font des commenta- teurs qui prétendent fans fondement que c'eft du malfacre que Pilate fît de quelques Samaritains que faine Luc parle dans le 13. chap. de fon Evangile. J'aurois beaucoup d'autres chofes à dire fur cette réponfe : mais je les referve à un autre temps. Je fuis, &c. REFLEXIONS SUR LES DEFAUTS D'AUTRUY. Seconde partie. In 12. à Paris chez Claude Barbin , au Pa- lais. 1695. IL n'y a pas dans cette féconde partie une audi grande di- verfité de fujets que dans la première : mais chacun y eft traité avec plus d'étendue. Il y eft principalement parlé des auteurs, delà nature du vrai, de la prévention, des louanges, de l'ambition, de l'efpric critique. La manière dont l'auteur traite toys ct% fujCts fait voir qu'il a le goût exquis , qu'il pen- fe & qu'il écrit bien. Il rapporte à l'occafion des auteurs, qu'il trouva il y a quelque temps une perfonne qui ne lifoic les livres de pieté que pour y remarquer les fautes contre la langue ; fur quoi il le railla , en lui difant qu'attaquer un livre de pieté par la didion , c'eft attaquer un General d'armée par fbn habit , c'eft accufer Cefar d'avoir cfté mauvais homme de guerre parce qu'il eftoit chauve, 11 court depuis peu de jours feuille volante pour la défenfe d'un de nos meilleurs Ecri- vains qui croit que cette reflexion a efté faite contre lui. Au fujet des louanges il femble à l'auteur que fonder un éloge c'eft faire injure & à celui qui fera loué , & à ceux à qui la fondation eft laiftee. C'eft fe défier du mérite de l'un & de la reconnoiflance des autres. A l'égard de l'ambition , il demande s'il y en a une plus a- yeugle que celle qui brigue l'Evêché, & répond que celle qui 4So LE JOURNAL brigue la place de Supérieur dans un Monaflere l'eft encore p.'us , parce que cecte ambicion viie à jcufner à la première place du refcdoirc , à perdre le mente du jeufne , & à fo priver du ciel après l'avoir payé. Sur l'cfprit critique il dit qu'on ne peut jamais faire des ou- vrages utiles au Public quand on cent par cabale ; que la plus jnauvaifc manière de répondre à la cenfure eft la récrimina- tion , &C que dire des injures anonimes à celui par qui l'on a efté repris , c'cfty^ uchcr derrière un. huiffon pour lui tirer un coup depi- fiolet. Cejl la dernière njfource des lâches (5" des fripons. Les traits de ce portrait-là font fort vifs. L'auteur ne l'a fait pour perfonne ; ce qui n'empêche pas que quelques-uns de ceux qui le voycnt ne trouvent qu'il rell'emble aulll bien à Irenée &: à Eulebe que s'il avoit elle tait pour eux. RECUEIL DES PIECES D'ELOQUENCE ET DE roc'fie qui ont remporté les prix donnez^ pur l' Au demie Fran- coife en Cannée 1693. '^'^^'^ plufieurs difccurs qui ont efté proi noncez^ dans l' Académie -, (^ plufieurs pièces de Po'éfie qui y or.t efté lues en différentes occafions. In iz, à Paris Jean Baptiltc Coignard. 1693. TOut doit cftre excellent dans ce recueil. Je ne dirai rien prcfentement des Icpt remcrcimens faits à l'Academic Françoife , ni des réponfes de fes Diredeurs : j'en ai parlé en leur lieu. Le nom de M. Boyer &: celui de M. Perrault furtîfent pour faire cftimcr le fonnet fur la défaite du Prince d'Orange , les vers fur la prife de Namur , l'ode à l'Acadé- mie , & le poëme fur la création du monde. Les pièces qui ont remporté le prix ont le fuftrage de l'Académie. C'eft pour elles un gage de l'approbation publique. A PARIS, Chez Jean Cusson , rue faint J.iques , à l'Jmage de faim JeaivBaptifte. Avec FriviUqe du Roy XLI. -481 LE JOURNAL DES SCAVANS- Du LuNDY 14. Décembre M. DC. XCIII. ABBATIARUM ITALIE BREVIS NOTITIA , QUA- rum tam exafarum quàm extantium titulus , ordo , dioecejts , fundatio , mutationei , fitus , ^c. exafhus exprimuntur. Dicata £ininentt(limo ^ Reverendifjzmo Princtpi Leandro S. li. E. Card. Colloredo , Majori Pœnitentiario. Authore Reverendo admodum Patte Augu(ïino Lubin Ordinis Ercmitarum fanBi Au(guftm AMfiente Generali , ^ Chriflianiffinii Galliarum Ré- gis Gcographo Ordinario. in ^. Rema, & fe trouve à Paris chez Jean AnifTon. 1695. LE P. Lubin eft revenu depuis peu de Rome où il a de- meuré iix ans en qualité d'Afliftant du General de fon Ordre. Pendant ce long fejour il a efté exhorté par M. le Cardinal Colloredo à faire une étude particulière de tout ce qui regarde les Abbayes d'Italie , fans excepter celles qui ne fubfiftent plus , &: d'obferver les changemens que le temps a apportez à celles qui fubUftent encore. • Ql^Iquc appliqué que fufl; le P. Lubin aux fondions de la charge qu'il a toujours remplie avec beaucoup de capacité & de zèle , il n'a pu fc difpenfer d'entrer dans les deil'cins de cette Eminence , bc de fuivre (qs intentions. Après avoir don- 1693. Ffffff ; 4Si LE JOURNAL ne le temps ncccfTairc aux affaires de fon ordre , il a employé le rcfte à lire une infînicc de livres où il elt traité (oit par oc- cafion ou à dcllein , des fondations des Eglifes d'Italie , de leur deftrudion , de leur retabliflcment , & des autres chan. gemens qui leur font furvenus. Il a lu mcfme quantité de mémoires d'inftrudions, & de pièces manufcrites, Se entre autres les Codes des taxes de la Chambre Apoftoliquc, où le foin de lever des droits temporels a confervé des vclligcs de la pieté & de la charité des fondateurs. De tous ces ou- vrages foit imprimez ou manufcrits dont le catalogue eft à la fin de ce volume , le P. Lubin a chohl ce qui pouvoit fervir à illuftrer les Abbayes d'Italie , & à mftruire de leur origine > de leur progrès , des hommes illuftres qu'elles ont élevez, des titres daot elles ont efté honorez , des revenus &: des droits dont elles ont joui. De tout cela il a compofé fa notice où les Abbayes font rangées félon l'ordre de l'alphabet. Elle eft dé- diée à M. le Cardinal CoUoredo qui a donné à l'auteur la pre- mière penfée de l'entreprendre , qui lui a procuré les livres , & les autres titres &: monumens neceflaires pour l'achever , & qui a genereufement fourni aux frais de l'impreflion. VOus fouhaitez , Monfieur , de fçavoir ce que nos amis difent des nouvelles difficultez propofées à l'Auteur du Voyage du monde de Defcartes touchant la connoiflance des bêtes. Je vous dirai franchement qu'ils n'en font pas contens, comme vous le verrez par les re flexions qu'ils ont faites fur cinq propofitions qui contiennent tout ce que le Peripate- ticien dit fur cette matière. Voici la première : Jl ne fepajfe rien en nous qui puiffe nous convaincre , ^ mejme nous faire penfef que le mouvement des bctes qui répondent à nos monvemens volon~ taires ^fefajfent par la feule difpofttion de la machine. Nos amis difent que cette propofition eft fauife entant qu'elle fuppofe dans les bêtes des mouvemcns qui n'y font pas ; DE s se A V A NS. 483 comme il paroit par le dénombrement des mouvcmensqui fe rencontrent dans l'homme , &: que le Peripateticicn rcduic lui- mefme à quatre efpeces , fçavoir aux mouvemcns natu- rels qui fe font par la feule dilpofition de la machine ; aux mouvemens volontau-es qui fe font par la machine &: par la volonté ; aux mouvemens qui fuppofent la connoillance ou le fentiment ; Se aux mouvemens que le Peripateticicn ap- pelle metoyens , qui s'ils ne dépendent pas de la connoiflance & du fentiment , au moins en procèdent. Nos amis trouvent bien dans les bêtes des mouvemens qui répondent à nos mou- vemens naturels , des mouvemens qui répondent à nos mou- vemens qui fuppofent de la connoiflance &: du fentiment , &: encore des mouvemens metoyens : mais ils n'en trouvent point qui répondent à nos mouvemens volontaires ; d'où ils concluent que les prétendus mouvemens fpontanés des bê- tes font de pures chimères , touchant lefquclles on ne peut rien juger par ce qui fe palle en nous. Il ne ferviroit de rien a l'auteur des difficultez de dire qu'il entend par les m.ouvemens fpontanécs des bêtes les mouve- mens qui fuppofent des connoilTimces ou des-fentimcns, com- me il le déclare dans la page 45. Car il refte encore à fça- voir fi dans l'homme les mouvemens qui fuppofent la con- noiffance &: les fentimens font de véritables effets de la con- noilTance 6i du fentiment , ou bien fi la connoillance & le fentiment accompagnent feulement ces fentimens. Les Pe- ripateticiens foutiennentïlepuis long-temps la première partie de cette queftion : mais ils n'en donnent aucune raifon. Les Cartefiens au contraire fe font déclarez pour la féconde , & en apportent des preuves qui leur paroiflent convaincantes. Nous fçavons par expérience , difentils , qu'un mouve- ment en produit un autre ; & nous ne fçavons ni par expé- rience ni par raifon , qu'une connoiflance ou un fentiment produifent un mouvement. C'efl: pourquoi nous avons plus de raifon de dire que le mouvement du cerveau qui excite dans l'ame la faim ou la foif , produit en mefme temps dans les jambes les mouvemens par lefquels nous cherchons à manger ou à boire, «jue d'aflurer que la faim & la foif pro- 4S4 LE JOURNAL duifent elles mcfmes ces mouvemens. En effet comment pcuc-on concevoir que la faim & la foif qui font de pures paf- fions dans l'ame , piulVenr agir pour produire des mouvemens dans le corps ? Or Ci les mouvemens qui fuppofent en nous de la connoilVance &: du fentiment fe font par la feule difpo- fition de la machine , à combien plus forte raifon devons-nous pcnfer que les mouvemens des bêtes qui leur repondent , & que le Peripateticien appelle fpontanées , fe font auffi par la mefme difpofition. Voila les reflexions que nos amis ont fai* tes fur la première propofirion. Voici la féconde propofition. I7oui avons en nous de quoi nous ■perfuctder pojttivement que les n:ouvemens dont il s'a'iit ne fe font foint dans les bètes par la feule difpofition de la machine. 1 1 ne leur femblc pas que cette propofition foit mieux fondée que la première. Ils difcnt qu'il fuffit pour la détruire d'avoir prou- vé, comme les Cartefiens l'ont fait, que dans l'homme même les mouvemens qui fuppofent de la connoiffance &: du fenti- ment, dépendent de la feule machine. Néanmoins parce que l'exemple dont le Peripateticien fe fert pour établir la propofi- tion a quelque apparence de vérité, ils ont bien voulu l'exami- ner pour faire voir qu'il n'en peut rien conclure en faveur de la connoilîance des bêtes. Voici comment il raifonne. Un cheval qui a beaucoup marché , &: qui n'a pas mangé depuis long-temps , va du côté de l'écurie où il a y du foin & de l'a- voine ; & il y va parce que les corpufcules qui fortent du foin & de l'avoine ébranlent fon cerveau d'une certaine manière qui ell propre à ouvrir certains palfagcs aux efprits animaux pour couler dans les mufcles qui fervent à ces mouvemens iies jambes. Donc quand j'aurai faim, &:queje verrai du pain à quelque diftance , la machine de mon corps eftant dans la mefme difpofition où j'ai fuppofé celle du cheval , elle doit marcher auiîi neccdairement &: d'elle mefme vers le pain, que le cheval marche vers l'avoine. Or l'expérience clt con- traire à l'égard de mon corps. Donc il eft faux aufll qu'un fcmblable mouvement doive fe faire dans celui du cheval. Ce raifonnement , Monfieur , leur paroit un pur fophifme, parce qu'il eft compofc de deux propofitions particulières. Us en DES S C AVAN5. 485 Us en accordent la majeure & la mineure , Sc nient la con- lèquence. Ils difenr qu'il eft bien vrai qu'un cheval qui a faim va neceflfairement vers l'avoine , fi quelque caufe dont l'adion ne foit pas plus forte que celle des corpufculcs de l'avoine ne l'en empêche. Ils demeurent encore d'accord que l'homme quand il a faim , & qu'il eft dans la mefme difpofition où le cheval fe trouve lors que rien ne l'empêche d'aller vers l'a- voine , va aufli neceilaircment vers le pain que le cheval va vers l'avoine. Ils avouent enfin qu'il arrive quelquefois que l'homme ne va pas vers le pain quoi qu'il ait faim : mais ils foutienncnt qu'il ne s'enfuit pas de là qu'un femblable mou- vement ne doive pas fe faire dans le cheval par la feule dif- pofition defa machine : car c'eft toujours cette difpofirion de la machine qui fait &: que le cheval qui a fiim va vers l'avoi- ne lors que rien ne l'en empêche , & que l'homme ne va pas quelquefois vers le pain lors qu'il en eft empêché. Voila les reflexions que nos amis ont faites fur les deux pre- iBÏeres propofitions. Je ne manquerai pas de vous faire parc de celles qu'ils feront fur les trois autres. TRAITE' DES DISPENSES DIVISE' EN DEUX PAR- - tiei, dont /a première comprend les règles ^les principes généraux des difpenfes ; ^ l'autre efi une explication de ces règles (^ de ces principes aux difpenfes de mariage. In 16. à. Rouen , &: fe trou- ve à Paris chez Edme Couterot. 1693. LA dilpenfe fe prend pour une fage condefcendonce qui pour éviter un plus grand inconvénient fe relâche de la loi humaine pofitive en matière de mœurs &: de difcipline. Elle ne fe doit accorder , dit faint Bernard , que lors qu'une grande neccirné ou une évidente utilité le demande. 11 en-' tend l'utilité commune de l'Eglife , & non l'utilité des parti- culiers j & hors ce cas il avertit le Pape Eugène III. que ce n'eft pas une fidelle difpenfation, mais une cruelle diflîpa- cion. De là il s'enfuit que toute difpenfe doit eftre accompagnée de difcretion 5^ de connoilfancc de caufe ; & c'eft pour cela i^93- Gggggg 4^6 L E J OURNAL que le Concile de Tiente ordonne à ceux qui les accordent de pefer toutes les circonftances , &: de les accorder gratui- tement , à moins de quoi la dilpenfe fera cenféc fubrepticc. 11 eft vrai qu'il y a des Canoniftçs qui s'imaginent que la volonté du Pape eft la feule règle qu'il doit fuivrc en accor- dant les difpenfes : mais les plus habiles ont fait voir que cet- te imagination n'efl: bonne qu'à afFoiblir l'autorité du faint Siège , à deshonorer l'Eglife , &: à fcandalifer les Héréti- ques. Ceux qui follicitent une difpenfe font obligez pour ne Ce pas tromper eux mefmes , à confiderer deux chofes : L'une, fi ce qu'ils demandent r^efl: point contraire au droit naturel : car en ce cas la difpenfe comme donnée fans pouvoir, ne leuc ferviroit de rien. L'autre , fi n'ertant contraire qu'au droit pofitif , la difpenfe fera compenfée par une nectflltc ou par une utilité fuffifante. La fuppreffion d'une venté , ou l'ex- preflîon d'une fauffeté rendent la difpenfe nulle. Ces maximes générales touchant les difpenfes font folidc- lîient établies dans la première partie de ce traité ; & dans la féconde elles font appliquées aux cmpêchcmens de ma- riage. On y voit combien ces difpenfes- là eftoicnt autrefois diffi- ciles à obtenir ; qu'elles s'obtiennent aujourd'hui en forme de commiflion -, ce que doit obferver celui à qui la commif- fion efl: adrelTée. Il y efl parlé mefme de la difpenfe des bans qui , félon le Concile de Trente , ne peut efire obtenue qu'au cas qu'il y euft un jufte fujet de craindre que Ci les trois bans eftoient publiez , des gens par malice fiffcnt des oppofitions mal fondées au mariage. L'auteur remarque que le Concile de Paris tenu en 14^9. défend aux Evêques &c aux Archi- diacres d'accorder ces fortes de difpenfes pour quelque fona- mc d'argent que ce puifl'e elhe. lé DES SCAVANS. 487 DISSERTATIONS SUR LA RECHERCHE DE LA venté , contenant l'ht/ioife ^ les prinapss de la Philo (ophie des j4cademictens , avec plujîeurs reflexions fur les fentimens de M. D^fcuries, Par M. Foucher Chanoine de Difon. In 12. à Pa- ris chez Jean Aniiron. 1695. J' A i déjà parlé des crois premiers livres de ces diHxrrations , fçavoir , de l'Iuftoire , des principes , &: des dogmes des Académiciens ; &c je n'ai à parler ici que du quatrième livre où il efl traité des premières notions. L'auteur s'applique d'abord à faire remarquer que les pre- mières notions Ibnt indécera-anées d'elles mefmes , & ne po- fcnt rien en fait , à moins qu'elles ne foient appuyées par quel- ques vericez fixes qui les déterminent , & leur fervent de principes. Enfuite il éclaircit les principales notions , com- mençant par celle de la raifon, qu'il fait plutôt confiller dans la faculté de former des jugeraens intérieurs ,& de refléchir fur les idées , que dans l'art de faire desfillogifmes ; &c de la- quelle il prouve l'infaillibilité , auffi-bien que celle de la no- tion des contradictoires. En quoi il montre que M. Defcar- tes n'a point dû la révoquer en doute. Après cela il explique la notion du mefme & du diflhent , aufli bien que les autres notions particulières des efpeces de la raifon , fçavoir la rai- fon divine , la raifon humaine , l'intelligence , la droite rai- fon , la raifon éternelle , la raifon univerfelle , & la raifon par- ticulière. Il entre auiïi dans le developement des notions de la lumière naturelle , de celle du bons fens , &: de celle du fcns commun. Au fujet de la lumière naturelle , il évite une équivoque qui remplit de ténèbres & de paralogifmes la plupart des aC- ferrions des Dogmatiftes , qui fuppofenc une cauie générale de la production des eftres particuliers autre que Dieu , qui communique aux fubftances qu'il produit la force d'agir, quoi qu'elles dépendent continuellement de la production qu'il en fait à tout moment. Pour ce (jui, cft du bon fens & du fens commun , il montre 48S LE JOURNAL que les connoifTanccs qu'on aquierr par ces notions dcvroicnt cdrc infaillibles , &: que néanmoins fi elles n'arrivent pas au degré de certitude qui leur convient , cela procède de ce que nous apportons naturellement en naiflant des idées confufes, obfcurcs , &: mêlées de préjugez ; d'où vient que les hom- mes Ce trompent fouvent , &c tirent des confequences con- traires. En quoi M, Foucher nous fait remarquer que l'erreur ne vient pas de ce que l'on tire des confequences fauffcs ou doutcufes , mais de ce que l'on prend de mauvais principes. 11 montre enfuite comment on doit diftinguer entre le fens commun & le fens de la multitude que l'on pourroitappeller le fens du commun $ le jugement de la multitude en matière de fciencc eftant ordinairement le plus méchant parti. La notion du conteftable &: de l'incontcftable lui fert encore de • flijet pour éloigner les équivoques où l'on tombe communé- ment. De là il encre dans l'explication de la notion de la fa- gelfe &: de celle de la folie ; après quoi il s'applique à donner une bonne idée de la Philofophic , & fait connoitre que ceux qui n'eftiment point cette force d'elludc , n'ont pas la vérita- ble notion. Dans le chapitre qui fuit il diftingue ceux qui j font Philofophes , de ceux qui ne le font pas , & reprefente I leuts divers caractères. Enfin il montre la difterencedu Phi- lofophe & de l'Orateur , &:. fait voir fans s'éloigner du fenti- nient de Platon , ni de celui de Ciceron mefme , que l'élo- quence efl: moins utile qu'on ne penfe lors qu'elle n'eft pas gouvernée par une bonne &: faine Philofophie. Il finit en trai- tant de la diverfité des Philofophes. Tout cela eft précédé d'une préface dans laquelle il y a un extrait de la lettre de faint AugulHn à Hermogenien touchant les Académiciens que ce Père croyoit avoir eu des fentimens fort differens de ceux qu'on leur attribue vulgairement. Ces diirertations contiennent la première partie de fon fé- cond volume , & il avertit qu'elles peuvent eltre lues d'abord, ■ fans que l'on foit obligé de commencer parle premier volume qui contient fa critique du livre de la recherche de la vérité , ics léponfes &: fon apologie, dont il n'y a prcfquc plus d'cxcm- . pjaucs. C'eft ce qu'on peut faire d'autant plus que ces pre- mières DES SCAVANS. 4Î9 mieres difTcrtadons ont relation à d'autres ouvrages ; au heu que celles-ci doivent eftre regardées comme une introdudion à la Philofophie des Académiciens qu'il entreprend de réta- blir. THEOLOGIADOGMATICA ET MORALIS SECUN- dum ordinem Catechifmi Concilii Tndtntini in quinque iibroi tributa. Opus non folum Clcricis ^ Theoloqji qutbufque , fed ^ Parochii , Confejf.mis ^ Concionatoribm pemtile. AuUore F. T^atali Alexundro , Ordcnis FF. Pr^dicatomm , in facra Fa- cuitate P urifienfi TioHore , ^ Emerito Théologie Profefjore. In 8. 10. vol. à Paris chez Antoine Dezallier. 1693. CEt ouvrage n'eft pas de moindre étendue que les autres que le P. Alexandre a donnez par le palTé au Public : mais il eft de différente nature , & traité de différente ma- nière. Il n'y faut point chercher de queftions curieufes, com- me dans fes fçavantes difî'ertations fur les fix âges de l'hiftoire de l'ancien Tedamenc , & fur celle des feize fiecles de l'E- glife : mais on peut s'affurer d'y trouver une explication fo- lide des dogmes de la foi & des préceptes de la morale , ran- gez dans l'ordre du Catechifme du Concile de Trente , pour l'inftrudioii des Curez , des Prédicateurs , & des Ecclefiafti- ques chargez de la conduite des âmes. L'auteur n'y propofe ni (es penfces particulières , ni les o- pinions de l'Ecole de faint Thomas , mais la doftrine de l'E- glife Catolique , fondée fur l'autorité de l'Ecriture & de la Tradition. Il a pris l'efprit des Religieux de fon Ordre , & des Prélats qui par le commandement du Concile travaillè- rent à ce catechifme fous la dïreétion de faint Charles. Tout l'ouvragé du P. Alexandre eft divifé en cinq livres, & chaque livre en pluficurs traitez. Le premier livre traite de la foi & de fes articles , & comprend tout ce que nous de- vons croire de Dieu , de fon exigence , de fon unité , de la trinitédes perfonnes; des mifteres opérez par la féconde pour le falut du genre humain , de fon incarnation , de fa grâce , & de fon Eglifc. 1653. Hhhhhh •490 LE JOURNAL Le fccond livre efl: le plus étendu de tous , &: remplie feul cinq tomes entiers. Aulli cnfcigne-t-il tout ce que les Prêtres doivent fçavoir des Sacrcmens , &: tout ce qu'ils doi- vent obferver en les conférant. Il renferme mefmedes ma- tières très importantes qui ont un rapport neceflairc avec quelques-uns des Sacremens. Ainil dans le traité de l'Euca- riftie fe trouve ce qui regarde la célébration de la mcHe , Tes cérémonies , la confecration des Eglifes &: des autels Dans le traité de la Pénitence on voit ce qui regarde les indulgen- ces Se les cenfures ; dans celui de l'extrême onction ce qui regarde les teftamens &: la fepulture. Le traité de l'Ordre eft accompagné de plufieurs autres ab- folument neceflaires aux Ecclefialtiques pour s'inftruire de leurs devoirs. 11 y en a un où les cas dans lefquels la fimonie £e commet font expliquez avec beaucoup d'exaélitudc. 11 y en a un autre de la vie des Ecclcfiartiques , de leurs mœurs , des charges que les bénéfices leur impofent , de l'ufage qu'ils doivent faire de leurs revenus , & de l'obligation où ils fonc de reciter les heures canoniales , & des peines qu'ils encou- rent quand ils y manquent. Le troifiéme livre doit eltre continuellement entre les mains de ceux qui font employez à l'adminiliration du facremenc de Pénitence ; parce qu'il explique la différence des péchez, & les circonftances qui augmentent ou diminuent leur gra^ vite. Il contient une infinité de règles qui peuvent fcrvir à connoitre la loi de Dieu , à former la confcience , &: à diC- cerner les opinions qui peuvent élire fuivics feurement. L'auteur y foutient que quand deux opinions probables (e prefentenc dont l'une favorife la loi &: l'autre la liberté , il fe faut arrêter à celle qui favorife la loi. 11 foutient aufli qu'une opinion n'cft pas toujours feure pour eflre aucorifée du fuftra- ge d'un ou de plufieurs Ecrivains : Qu^au lieu de fuivre ces opinions qui peuvent cftre faulTes, il faut principalement con- fulter la parole de Dieu , &: après elle les Doéteurs les plus faints & les plus anciens , Se les préférer aux nouveaux à qui le P. Alexandre ne fait pas feulement l'honneur de les citer. DES SCAVANS. 491 II traice fort au long dans le mcfmc livre des fepc péchez ca- pitaux en particulier , & de leurs dépendances. Le quatrième livre contient l'explication des Commande- mens de Dieu , & fournie quantité de régies pour décider les difficultcz qui fe prefcncenc dans la pratique. Le dernier eft le plus court de tous , & découvre le fens des demandes de l'oraifon dominicale. Cet ouvrage cft l'accomplifTement du fouhait que fît au- trefois Alexandre VIL qu'un Doéleur du fçavant Ordre de faine Dominique compofaft une morale pure , exemte des relâchemens des cafuifles modernes , & qui pull eftre mife feurement par les Evêques entre les mains des jeunes Eccle- fiafliques qu'ils font élever dans leurs fcminaires. Le Roi dont la prévoyance s'étend fur tous les bcfoins de fes fujecs , ayant elté informé par M. l'Archevêque de Pans de l'utilité de cet ouvrage , en témoigna fi (atisfadion à J' Auteur , lors qu'il eut l'honneur de le prefentcr à Sa Ma- jefté. CARACTERES, SENTIMENS ET ENTRETIENS SUR deux per formes dont l'une parle mal ^ écrit bien , ^ ï autre par- le bien ^ êcnt mal. par M. Dupuy Ecuyer. In 12. à Paris chez Claude Barbin. 1693. CE livre tout petit qu'il eft fe peut divifer en quatre par- ties. Les caraderes en font la première. Ce font des traits vifs & piquans qui épargnent les noms , & ne touchent que les vices. S ils s'eftoient attachez aux perfonnes , bien loin de guérir le mal , ils n'auroient fait que l'aigrir. Les penfées qui font la féconde partie regardent la mora- le &: la religion. L'exiftence de Dieu &: l'immortalité de l'ame y font établies en peu de paroles , & néanmoins avec une force à laquelle tout l'entêtemenc des libertins ne peut refifter. Les maximes &: les fcntimens qui font la troifiéme partie , font des reflexions que l'auteur a faites fur ce qui arrive le 491 LE JOURNAL plus ordinairement dans le commerce des hommes , &: qu'il a tirées de l'ufage qu'il a du monde. La dernière partie eft un entretien de Philemon & d'Eu- thymc fur deux pcrfonnes dont l'une parle mal & écrit bien , &: l'autre parle bien &c écrit mal. La railon qui eft rendue de cette différence eft que ceux qui parlent mal &: écrivent bien n'ont pas alTez de netteté pour débrouiller fur le champ les idées qui fe prefentcnt confufément à leur cfprit , &: ont be- foin pour cela du calme de leur cabinet. LETTRE A MONSEIGNEUR LE MARECHAL DUC de NoaiUei , General de l'armée du Roi en Catalogne , fur la frife de Rofes , ^c. /« /2. à Paris chez Guillaume Cavelier, au Palais. 16^3. LA prife de Rofes a donné lieu à M. Pontier d'écrire cette lettre à M. le Maréchal de Noailles , & de lui propofcr quantité d'exemples qui font voir que la rufe ne s'employe pas moins utilement dans la guerre que la force ouverte. Le mcfme auteur a écrit une autre lettre à M. l'Archevê- que de Paris , pour le confoler de la mort de M. le Marquis de Chanvalon fon neveu. A la fin il en a mis une troifiéme , où il répond à plufieurs queftions qui lui avoienc efté faites par un Baron de (es amis fur le droit d'aubcine , fur la chalfe , & fur quelques autres fujcts. Toutes ces lettres fervent d'addition à fon Cabinet des Grans. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à /'Image de faint Jean Baptjfte. j4vec Privilège du Roi. XLir. 495 LE JOURNAL DES SCAVANS- Du LuNDY 21. Décembre M. DC. XCIII. DISCOURS PRONONCEZ DANS L'ACADEMIE FTani^oiJe le Jeudi 12. Novembre j6pj. à la réception de M.* du Bois. In ^. à Paris chez J. B. Coignard. 1693. LE remerciment de M. du Bois , & la réponfe de M. l'Ab- | bé Teftu Mauroy reiremblent par leur fujer & par leur élégance à plufieurs autres difcours prononcez en pareille oc- cafion. Dans l'un & dans l'aucre l'emploi de l'Académie , le dictionnaire qu'elle achevé , la grammaire qu'elle va com- I mencer , & les incomparables vercus de Ton Proteûeur , font relevées avec tout ce que notre langue a de brillant & de riche. Ce qu'il y a de particulier dans ces deux difcours , c'eft l'é- loge de feu M. le premier Prefidenc de Novion , & celui de M. du Bois , dont le premier a fourni une ample matière de louanges par l'éclat de fa naiOance , par l'éminence de fa magillracure , &: par la modération de fa vie privée ; & l'au- tre eft rccommandable par l'excellence de fcs talens , par "les foins donnez à l'éducation d'un Prince en qualité de Gou- "Verneur , & par la traduction des plus beaux ouvrages du plus grand Orateur de l'ancienne Rome, & du plus fçavanc Pcre de l'Eglife. 1693. r 1 i i i i 494 LE JOURNAL EXTRAIT DE LA II. LETTRE DE M. MASSIA A M. Verneuil , touchant les vonvellei difficultet^ propofees par un Pe- ripateticien a l'Auteur du Voyage du monde de Dcjcartes. VOicr , Monficur , la troifiéme propofition du Peripatc- cicicn , qui n'eft qu'une fuite de la fccondc. Ce qui fe •paffe dam ï extérieur des bétes^ doit nous faire pen fer tout le contraire de ce que nous en feignent les nouveaux philofophes. Pour prouver cette propofirion , il fuppofe un cheval à cent pas d'un foflé efcarpc (Se profond de (ïx ou de fept pieds , où il y a du foin & de l'avoine. L'odeur du foin &: de l'avoine le détermine à avancer de ce côté-là : mais eltanc arrivé au bord du folle , il s'arrête. Que fi nous fuppofons un cavalier monté defliis qui le poulfe avec l'éperon , i! fe cabre » fe jette à côté , &: retourne quelquefois plutôt fur Çç.s pas que de fe précipiter dans le forte. Cependant à juger par ce qui eft évident dans cette occafion , la machine du cheval ne fe remue pas par les feuls principes de la mécanique : car dans cette fcience c'eit un principe confiant qu'un corps poulie & déterminé au mou- vement fuit la détermination qu'il a reçue, firien ne l'en em- pêche. Or le cheval ell: détermine par l'odeur de l'avoine, &: par la piquute de l'éperon , à fe précipiter dans le folié ; &: d'ailleurs il n'y a tien dans le tolfé qui doive félon les principes de la mécanique , arrêter le cheval ou changer la dttecmina- tion du mouvement commencé. D'où le Pcripateticien con- clut que la celfation du mouvement du cheval ne fe fait pas par les fculs principes de la mécanique. Ce raifonncment a paru pitoyable à nos amis. Ils ont dit que les nouveaux Philofophes dcmeureroient d'accord du principe de la mécanique , qui eft que tout corps déterminé au mouvenient fuit la détermination qu'il a reçue , fi rien ne l'en empêche : mais qu'ils foutiendroient que la vue du pré- cipice cil une caufe plus que fi'ffifante pour changer la déter- mination du mouvement du cheval. En effet la force dcTim- preiTion d'un objet ne fe mefure pas pat la quantité de fon aclion , mais par la qualité , qui eft quelquefois telle ^u'uq ï DES- s CA VAN s. 49 j petit mouvetnenc caufé dans le cerveau , excitera de plus grandes agitations dans les membres que ne feroit un autre plus grand mouvement. C'efl: par cette raifon par ex. qu'il arrive quelquefois qu'cftant feuls dans un bois pendant la nuit le feul bruit d'une feuille nous émeut plus que ne feroit le bruit d'un canon pendant le jour ; ce qui eft une preuve indu- bitable que la ceifation du niouvement du cheval peut eftrc caiifée par la feule vue du précipice , &: par confequent qu'el- le fe fait par les principes de la mécanique malgré le raifon- nement du Peripateticien. La quatrième propofition eft , que lei Carte(iem ri ont jamais touché au point effentiel de la qncfiion. Cardans le fond toute la difficulté con{lil:e à expliquer leschofes en détail ; ce que les Cartedens n'ont fçu faire jufqu'ici. Le Peripateticien en eft fi perfuadé , qu'il promet d'etlre content d'eux s'ils lui expli- quent bien clairement la feule vire-voute que fait une brebis pour fuir le loup qui vient à fa rencontre. Les Carteficns ré- pondent qu'ils n'ont point de microfcopes aficz bons pour dé- couvrir dans la dilîedtion d'une brebis tous les péris organes & tous les péris palfages qui fervent à la vire voûte dont il s'a- git ', &: qu'ils font à cet égard comme un homme qui voit l'é- guille d'une montre marquer ks heures , d'où il conclut très certainement qu'il y a dans cette montre des refforts qui lui impriment des mouvemens fi réguliers , quoi qu'il ne puifie pas expliquer l'artifice de cette machine à caufe que les ref- forts lui en font cachez. C'eft donc une maxime confiante parmi les Philofophes mo- dernes, que tous les mouvemens des bêtes fe font par la feu- le difpofition de la machine : mais c'eft une qucftion parmi eux , fi ces mouvemens font accompagnez de connoifiance ou de fentiment , ou s'ils n'en font pas accompagnez. Le Pe- ripateticien dit que M. Defcartes &: M. Régis panchent pour l'affirmative. Mais fi cela eft, nos amis ne les croyent pas pour cela plus raifonnables que les autres. Ils craignent au contrai- re les fuites de leur opinion : car s'il y a de la connoifiance dans les bêtes , il y a de la raifon j s'il y a de la raifon , il y a de l'immortalité j s'il y a de l'immortalité , il y a apparemmcuc 49<î LE JOURNAL de la mcccmpficofe : ce qui eft plus dangereux que de dire amplement que les beftes fonc des machines. Nos amis n'ont point fait de réflexions fur la cinquième pro- pofition ; apparemment parce que le Peripateticien y parle de Théologie naturelle &: chrétienne. Au refte ils avouent que perlbnne n'a écrit contre M. Defcartes avec plus de force ni plus de politellc. INSTRUCTION SUR LES PRINCIPAUX SUJETS DE la pieté & de lu morale Chrétienne. In 12. à Paris chez François Muguet. 1693. LE nom de M. l'Abbé de la Trappe fufHr pour donner de l'aucoricé à ces inftrudions qu'il a faites pour fervir non feulement aux Religieux qui font fous fa conduite , mais au refte des fidclcs , fans en excepter ni les Supérieurs ni les Pré- lats. Elles comprennent les devoirs de toutes les conditions & de tous les eftats , &: enfcignent à toute forte de perfonnes l'obligation qu'elles ont d'aimer Dieu , d'cftre reconnoiffans de fes grâces , de mcprifer les vanirez du monde , de fuivre le Sauveur, & de vivre dans l'attente de fon avènement. Ceux qui les liront y reconnoitront des endroits qu'ils ont déjà vus dans d'autres ouvrages : mais ils y trouveront auflî des additions &: des retranchemens qui n'y eftoient pas. Lq% pcnfécs en font fublimes , les expreflions nobles ; & ce qui ell le principal , elles font foutenuës par la pratique & par l'exemple. DISCOURS DE MORALE SUR DIVERS SUJETS EN faveur des Curez^^ Ficaires , ^ Ecdefiajliqaes de lu campagne pour nnpuciion des peuplis , ^ très utiles à ceux qui semployent dans les mijjïons. par Mre. Laurent Chenart Doiieur de Sorbon- ne. In jz. z. vol. à Paris chez Edmc Couterot. 1693. IL y a douze difcours dans le premier tome , & quinze dans le fécond. Les fujers font les plus communs & les plus ne- ceffaires à l'inftrudion des peuples. Les preuves ne pou voient dire plus folidcs ^ puis qu'elles font tirées de l'Ecriture fainte ■expliquée félon le fentimencdcs-anciens Percs, TABLE ^i#t: •gg TABLE DES MATIERES CONTENUES DANS LES JOURNAUX DE L'ANNE'E M, D C. XCIII. ABhayei d'Italie , p. 481 yfhiffins , s'ils ont reçu des Juifs la circoncifion , 331 yîbreviateurs , &: leurs fon- «flions , 8 1 u4cademiciem , s'ils ont douté de toutes chofcs , j3 académiciens, &€ les principes de leur Philofophic , 487 yîcademie de Nifmes , 23 yiccidemie de Solfions, 200 yîcademie de Touloufe , 429 yjffinages des métaux , 446 A' Avocat au Par- lement , Profeircur du Roi en Droit François , &: Ton élo. Lettre de Mr. de Lagny fur la refradion , 440 Lettre du P. Lamy de l'Ora- toire , 477 Lettre de M. Pontier , 49 1 Lettres de M. Maffia , tou- chant la connoiflance des bê- tes, 482. 494 Liturgies des Abiffins, 332 Livre d'Enoch rempli de fu- perflitions , 333 Loi de nature , i ~j6. Loi de Moïfe > ibid. Loix Romaines , 5c leur hi- floire , 306 P. Lubin , Afîirtant General desAuguftins, 481 M Madigafcar , I 2 2 Maejînch affiegé par les Ef- pagnols , &: fecouru par le Pnnce d'Orange , 86 Ma(jies quand adorèrent N. Seigneur , 187 S. M^ytin^ années de fa naif- 1693. 501 61 T I E R E S. fance & de fa mort , MedaïUei xnoAcxnzs ^ 9 Médailles du Roi , 8 o M. Ménage &£. {es bons mots, 226. 408 Mendicité interdite parmi les Juifs, 469 Mef/eScMifCeb , 21e Metode pour apprendre l'hi- floire Ecclefiâftique , 432 Milan , fa fondation , fon afîiere , fa police , 189 Miracles des Payens auffi mal établis que leurs fables , i j6 Miracles de Moïfe , 177 Miracles de N. S. & des A- pôrres, 179 iV///z?e quand compofée, 48 Mo'éUi llle fertile , i 21 Moïfe , s'il a compofé le Pen- tateuque, 177 Monafteres mis en congréga- tion , 469 Monnayes des Romains , 172 Monnoye fe peut reconnoirre par l'odorat, ibid. Monnaye , fa matière & fon prix , 447 Montagne de Framont , à. fa defcnpcion , 74 Munulie de la Grande Bie- tagne , 158 N Namur & fa prife , 456 NegraïUe , 123 Neyrap.it an , ville de lacô;e de Coromandi. 1 , ^bid. Llllll 502 TABLE Noces de Cana en que! mois M. Pelijjon & Ton éloge, i 95 & en quel jour furent célé- brées, 437 Noftradamm , où & quand il naquit, 170. Tes études &: fon mariage, il>id. Tes prophé- ties &c Ces enfans , 171. fa mort , i^id. O Obfequei des Ambaiïadeurs , M' Odes d'Horace & leurs dé- fauts , 7 Onïiion depuis quand en ufi- ae dans l'ordination des Evê- ques, 32 Onïiion des Rois , 105 Opération Cefarienne, 254 O/'^r^^/ow de la taille , 380 Optât ^ s'il a rejette le baptê- me de tous les hérétiques, 35- Oracles des anciens , 317 Pepin le premier des Rois de France qui fe fit facrcr, loy Per^e éc fon caradere, 305 Pétrone avec de nouveaux fragmens, 445 Pic de Tenerife & fa def- cription , i 1 r Plantes de l'Amérique, 3 2 5 Poètes anciens &: modernes , 3. /'ot'/fi Anglois, 50 Pont de bateaux vis à vis la galerie du Louvre, 1 5 8 Portugal , & ce qu'il y a de plus remarquable , f>-j Principes de la vie chrétien- ne , 1 I y Problème propofé au P. H.ir- douin , 43 (> /'r(7j Religieux , s'il leur eft permis d'avoir quelque chofe en pro- pre , 261 Remède , terme de monnoye. Rentes cov\{\.[inccs , & quand elles ont commencé , 119 Republique de Venife , 103 Rejurieïiion de la fainte Vier- ge , 208 Comte de Rimhourg a le fe- crec de convertir les métaux en argent , loi Rivières^ & comment fe peu- vent rendre navigables , 173 M. Roberval^ & plufieurs cir- conftanccs de fa vie , 302, 503 Sacremens j & s'il n'y avoic que leurs cérémonies qui fuf. fent cachées aux Infidèles & aux Cacecumenes , 127. fur quoi cette coutume eftoit fon- dée, j 29 Sacrifices otFerts aux Mancs , 26e M. de Sainte Marthe , Con- feiller en la Cour des Aides , '4 Sanctorius , & ce qu'il a écrie de la tranfpiration , 44 Santiague ville , fon aflicte fon étendue , ui Scties &c leurs irruptions, 234 Sedan livre a.u Roi , 88 Seigneuridge , &: en quoi ce droit confilte , 44g i'/w^o/f attribué à faintAta- nafe , s'il eft conforme à la do- drine de cePere, 38. 49. Simboleà.^ Nicée, s'il eft d'O- fius , 3 8 Sifième de la pefanteur, 386 Statue de Mercure , 76 T Taille , ce qu'il fignifie au fait de monnoye , 449 Tarafcon a une galerie fous le Rofne , é 5 ZiTA:/^ Samaritain , de quel temps il eft , 26 T'fx/f Hébreu défendu, ^41 S. Thomas d'Aquin , fes œu- vres &: fon clogc , 1 1 504 TA Tibère , &: s'il propofa au Sé- nat de mettre J. C. au nom- bre des Dieux , 46 Ttfres fartueux des Rois d'Efpàgne , 66 T'/^w d'honneur , 257 Tolérance des Proteftans, 45 Tombeaux des anciens , leur m icicre &: leur figure , 314 M. de Toureiinu des quaran- te de l'Academie Françoife, 13 TraduHeun de Mons bien repris, 456 Traite, & ce qu'il fignifie 449 Traiiez^dc paix &r de trêve , 120 Tranfpiration efl: la meilleure voye de guérir les maladies , 44 TranfpoTt des mon noyé s , comment défendu , 449 Tremblement de terre arrivé BLE au Royaume de Naples &: en Sicile, 189 Triomphe , &: à qui il eftoic décerné , 309 Turci &: leur libéralité à bâ- tir des hôpitaux , 31-7 Turquet de Mayerne Méde- cin du Roi Charles II. 211 V Van , &: s'il ne fe -tient que d'une mam , 435- yen'ieunce , 414. Vtcei aes Grans plus dange- reux que les autres , 414 Fnivcrfiie de Leipfic com- ment établie , i8 Voyay:i hiftoriqucs de l'Eu- rope , 65 Voyaya aux Indes , &: leurs motifs , I 06 Vjjeriui fçavant dans la cro- nologie, 271 FIN DE LA TABLE. A PARIS, Chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à l'Image de faint jean Baptifte. Avec Privilège du Roy xLirr. J05 LE JOURNAL DES 5 Du LuNDY 18. Décembre M. DC. XCIII. BIBLIOGRAPHIE, OU CATALOGUE DES LIVRES imprimez^ tant en France que d.ms les pays Etrangers , dont il ejî parle dans les Journaux de l'année 16 p^. BIBLIA SACRA , INTERVRETES , ET CONCILIA. LEs Paralipomencs traduits en François , &c. in 8. à Paris chez Guil- laume Defprez. 5. journal. Edày d'un commentaire littéral & hiftorique furies Pronhetes. Par Dom Paul Pezron de l'ordre de Citeaux , Dofteur en Théologie, in 11. à Pa- ris chez Jean Boudot. 20. j, Clavis Ecdefiafticae difciplirx , feu index univerfalis totius Juris Eccle- fiaflici , ad regiam non modo , fed ad qoamcumque aliam ConciI:orum editionem accommodatus , &c. Ai (flore God. Hermant , Doôore Theo- logo , nec non cathedralisEcclefia; Bel ovacer fis Canonico. in folio. In- fuhs. & fe trouve à Paris chez Antoine Dezallier. 24 j. Libri Salomonis , Proverbia, Ecclt-llaftes , Canticnm Cantiforum , Sa- pientia , Ecclcfnfticus. Cum noiis Jic< bi Ber^igni Boiluet Epifcopi Mel- deiifis , &c. in S. à Paris chez J. AniU'on. 27. j. SANCTI PATRES ET TH EO LOG I. Abrégé des principaux traitez de la Thcologie , &c. in 4. à Paris chez. Jaques Villery. 26. j. 1693. M m m m m m joô LE JOURNAL San6li Hilarii PiAavorum Epifcopi opéra , admanu'cripro- codices Gal- licanos , Roiiianos , ^-c. caftigata. Studio & l>. Oxonix. 3.]. Eloge de Louis le Grand , prononcé le j. Septembre jour de (à naiflàn- ce , dans la paroiiPe Royale de lamt Germain en Laye , &c. Par M. le Fe- vre, Théologal d'Arras , &c. in 4. à Douay. 7. j. 1695. N n n n n n 5IO LE JOURNAL L'Oec^ipe & l'Elcflce de Sophocle , Tragédies Gveques traJuires en François , avec des remarques, in ii, à Paris chfz Claude B.irbin. 8. j. Le Poefif d'Anacreorce , tradotte in verfo Tofcano , &c. in 8. à Paris chezj. B. Coignard. u. j. Epitre de M. Betoulaud à Mademoifel'e de Scudery fur la mort de M. PcIifTon. in 4. à Paris chez la Veuve Langlois. xi. j. Tradu(5tion noiivelle des Satires de Pt rie en vers François. ParM.de Silvecane Piefident en la Cour des Monnoyes. in 11. à Lion, ôc fe trouve à Pans chez Florentin Se Pierre de Laulne. i6. j. Oraifon funeb-.e de tre'; haute & très puilîante PrincefTe Marie Louife d'Orléans Duchelfe de Montpenfier. Par Mre. M. A. Anfeime. in 4. à Paris chez George >: Louis Jolie. 28. j. Oraifon de Ciceron pour Milon nouvellement traduite, in 11. à Paris chez Guillaume de Luynes. 55. j. Recueil de vers chcifi?. in u. à Paris chez George 8c Louis JolTc. ^3. j. Titi Petronii Arbitri Equiti^ Romani Satyricon , cum fragmentis Albac Gtxcx recuperatis anno 1688. in li. à Paris chez Jean Bapiii\e Lan- glois. îS. j. Namurcum expugnatum , ex Gallico Nicolai Defpreaux. in 4. & in 8. Recueil de pièces d'éloquence & de pob'fie qui ont remporie les prix donnez par l'Académie Françoife en l'année 169 ^. avec plufieurs difcours qui V ont efté prononcez , & plufieurs pièces de j:oefie qui y ont efté lues en diftèrentes occafions. in u. à Paris chez la Veuve de Jean Bapiifte Coi- gnard , & J. B. Coignard. 40. j. Panegirique ou portrait de Monfeigneur le Daujhin. Pat M. l'Abbé de la Lionniete. in li. à Paris chez Mardn Jouvenel. PHILOSOPHI. De exiftentia Dei & humanx mentis immortalitate , fecundum Carte- fii & Ariftotelis doârinam , difputatio , &c. in 11. à Paris chez Charles Robuftel. I. j. Diflcrtations fur la Philofophie des Académiciens. Livre troifiéme. in 12. à Paris chez Etienne Micha'let. 5. j. La Phiiîque occulte , ou traité de la baguette divinatoire. Par M. de Valk-mont , Prêirc, Dodeur en Theoloçie. in u. à Paris chez lean Anif- ion. ly. ) Lettres qui découvrent l'illufion des Philofophes fut la baguette , &c, in li. à Paris chtz Jean Boudot. 1^. & 26. j. Joh. Claiibergii opéra omnia philofophica. in 4. Amft, 28. j. Nouvelles difEcultez propofées par un Peripateticien à l'Auteur du vo\ igc du monde de Defcattes , touchant la connoitrancc des befles ^ avec DES SCAVANS. jn la réfutation de deux defenfes du fiftcme gênerai dn monde de Defcartes. in 11. à Paris ch'z la Veuve de Simon Benard. 51. j. DifTèrcations furli recherche de la vérité, contenant l'hiftoire & les principes delà Philofophiedes Académiciens , avec plufieurs réflexions fur les Tentimens de M. De'cartes. l'ar M. Foucher Chanoine de Dijon, in 11, à Paris chez Jean Aniffbn. 41. j. A> L E JOURNAL SCAVANS POUR A PARIS, Chez JEAN CUSSON , rue faint Jacques , à l'Image de faint Jean Baptiftc. M. D C. XCIV. AVEC PRIVILEGE DV ROT. LE JOURNAL DES SÇ AVANS Du LuNDY 4. Janvier M. DC. XCIV. L'ART DE SE CONNOITRE SOY-MESME, OU LA recherche des four ce s de la morale. Far Jaque i Abbadie. in 12. à Reterdam. 1693. LA morale n'a pas toujours efté traitée avec la mefmc me- tode ni avec le mefmc fuccés. Le Paganifme lui a ôté faforce, fcs motifs, &fes exemples. Une religion qui n'eftoit qu'un tiffu de fidions , n'eftoit pas propre à difpofer les hom- mes à bien vivre. Les Philofophes n'ont efté gueres plus loin que le peuple , & nont eu aucune idée de Ja véritable digni- de l'homme. 1654.. Aï) 4 LE JOURNAL La morale rcvc'cc dans l'ancien &: dans le nouveau Tcfla- mcnt a des caratlcrcs tout oppufez , &: eft foutenue par des principes certains , &: animée par des motifs puiflans &: par des exemples parfaits. Elle confidcre l'homme comme venant de Dieu , comme retournant à lui, & n'ayant pas moins qu'une éternité de bon- heur en vue. Elle relevé l'homme abaille par Ces partions, avili par la fuperftition , dégradé par un honteux attachement aux créatures ; &: ce qui cil: de plus admirable , elle l'eleve fans l'enoriTueillir. Cette fcience qui fait partie de la religion , peut cftre con- nue par la foi , par le fentiment de la confcience , & par la Jumiere de la raifon. Ceux qui la voudront connoitre par la foi n'ont qu'à lire l'Evangile. Ceux qui la voudront connoitre par fenrimcnt n'ont qu'à la chercher dans leur cœur avec le fecours de la révélation. Ceux qui la voudront connoitre par raifon , ont befoin de cet ouvrage , où ils verront une fidelle peinture de l'honime entant qu'il eft capable de vertu & de bonheur , &: entant qu'il fe trouve dans un eftat de corruption & de mifere. La première partie leur apprendra quels font les devoirs & les forces de l'homme ; &: la féconde leur découvrira quel cit Ja fburce de fa corruption. L'homme paroit peu de chofc quand il n'eft regardé que par les fens. La peritefTe de fon corps eft la première qui fe pre- fenre. Sa fcibleifc eft proportionnée à fa petiteffe , &c elle a fait dire au Pfalmiftc , qu'il eiloit environné de tous cotez du néant. Par le paflé il n'eft plus , par l'avenir il n'eft pas enco- re , par le prefent il eft en partie , Se en partie il n'eft point. Tous Ces âges lui apportent une mifcre particulière. L'en- fance n'eft qu'une ignorance de ioi- mefme ; la jeunefte qu'u- ne longue tureur ; la vieilleife qu'une mort avancée , dont les principes fe trouvent dans l'air qu'il rcfpire , dans les alimens qu'il reçoit. Que (i pour fe confoler de ces malheurs il fc fait regarder comme revécu des avantages extérieurs qui font la différence des conditions, il fc dégrade , ^ ne veut plus cftre l'homme que DESSCAVANS. j que la nature a fait de corps & d'efprit , mais feulement un fantôme compofe des fîiflions &: des fonges de fon amour propre. Au lieu donc d'avoir recours à ces diftindions de perfonnes que la cupidité a inventées , il devoit rechercher dans lui- mefme ce qui fait fa dignité ; &: il auroit trouvé qu'outre la portion de matière dont fon corps cil compofé , il y a dans lui une fubltance qui penfe, qui doute , qui juge, & qui rai- (bnne. Elle redifie les fcns , corrige l'imagination , unit plu- fîcurs idées dans Ces jugemens, & plufieurs jugemens dans {es difcours. Cette fubftance n eft point corporelle , ni une ma- tière ecendue j &: il y auroit de l'extravagance à dire que cet- te intelligence n'a pour principe qu'un arrangement d'atomes. Cet eftre qui eft uni au corps peut fubfifter fans lui. Durant cette union les mouvemens du corps font l'occafion qui fMt naicre les penfées de l'efprit : mais la mort qui ôtera l'occafion des penfées, n'en détruira pas le fond. Cette fubftance qui pen- fe eft donc immortelle. Comme (on efprit n'eftjjmais las de connoitre , fon cœur n'eft jamais las de defirer , jamais content jufqu'à ce qu'il poflede le fouvcrain bien. Sa natu- Tc , fcs perfections &c fa fin forment ce qui s'appelle la dignité naturelle de l'homme ; & tout cela roule fur l'eternitc de fâ durée. La fin de l'homme lui fait connoitre fes devoirs, La nature lui ordonnede rechercher fon propre bien qui confifte a. fuivre la loi. LeUecalogue eft la loi naturelle accommodée à 1 cftat de l'homme mortel , &c à celui des Ifraëlites en par- ticulier. L'Evangile eft la loi naturelle accommodée à l'eftac de 1 homme immortel , &: à celui des Chrétiens. Il n'y a rien de fi puiflant fur le cœur de l'homme que le fentiment de fon immortalité. Non feulement il l'aflure con- tre les frayeurs de la mort , & coiitie les triftes idées d'aban- don , de neceflité , de foliiude, de deftriiélion , de jugement, de mifere qu'elle renferme : unis il l'eleve plus que la fagcfle tant vantée des Phiiofophes , plus que les vertus Payi.nnes n'ont jamais pu faire. Il lui découvre un monJe qui lui rcr.d niépri fable le inonde vifible qui nous éblouit Se qui nous en- chante. Dans cette aflîcce il voit pailer fous les pieds la vairrc 1694.. JS <5 L E J O U R N A L pompe de la grandeur humaine, &: le tourbillon aufTl vain des difgraces qui la rcnverfenr. Le fentimenc de l'immortalité n'cleve pas feulement le cœur de l'homme , il fatisfait à tous fes defirs , &: remplit la capacité infinie que ("on Créateur lui a donnée. Voila l'abrégé de ce que la première partie de cet ouvrage conrient touchant la nature , les perfections , les devoirs , &: les forces morales de l'homme. La féconde qui eft deflinée à découvrir fa corruption &: fes déreglcmens , commence par cette queftion, Si la première fburce de la corrupcion elt dans l'efprit ou dans le cœur j c'eii à dire fi elle eft dans l'ame entant qu'elle connoic , ou entant qu'elle aime. L'auteur prononce fans hcfitcr que tous les déreglemens de l'homme viennent du cœur comme de fa première fource. Pour le prouver il dit que h ces déreglemens venoienc de l'ef- prit, il auroit falu ordonner à l'efpnt de fe conduire par le d cœur , au lieu qu'il a efté ordonné au cœ-ur de fe conduire par Jl l'efprit. D'ailleurs Ci la dépravation eftoit originairement dans ce dernier , il porteroit partout fes ténèbres , feroit aveugle dans les fcienccs comme il l'efl: dans la religion , & ne con- noitroit pas mieux les objets qui lui font indifferens, que ceux où il a droit de s'uitci clfer. Or il a allez de lumière pour pé- nétrer ce qu'il y a de plus caché dans Iqi fciences : il doute des chofcs qui font doutcufes , afîirme*es vrayes , nie les fauffes. Que s'il lui cchape quelque miftere de la nature, ou quelque fecret de la providence , ce n'eft pas une ignorance dont on lui puifie faire un crime. Les erreurs de fpeculation ne doivent point non plus eftre regardées en lui comme des vices. Pour le juftifier il n'y a qu'à examiner fes manières de connoitre. 11 n'a point d'idée qui d'elle-mefme foit mauvai- fe. Celle du pechc n'a rien de criminel , puis qu'il ei\ permis de le connoitre. On doit dire la mefme chofe de fes juge- mens &: de fes railonnemens. C'eft donc le cœur qui trompe l'efprit en le remplifi'anc d'objets inutiles , & en le détournant de la vue de fi mifere, &: de fon devoir , en l'appliquant à ce qui lui fait couler le DESSCAVANS. 7 temps infenfiblemenc, & à ce qui le jette dans un profond ou- bli de foi mcfrae. Q3 Cl le cœur corromc rcfprit , celui ci corromt le cœur à /on tour. Dans ce cercle d'illuiions &: d'égaremens la lumière & la droiture ne peuvent venir que de Dieu qui commence notre guerifon en ôtant le défaut qui fait naitre tous les au- tres , & qui confirte en ce que l'imagination agit en nous plus fortement que la raifon , c'efl à dire que les idées corporelles font une plus vive imprelTion que les fpirituelles. Dieu pour nous reparer agit de telle lortc fur nous par fa grâce , que les idées de la vertu & de 1 éternité font une plus forte impref- fjon fur nous qu'elles n'avoicnt accoutumé ; &: qu'au contrai- re les images du plaifir &c du bien fcniible en font une plus foible. Pour trouver la fource de nos dcreglcmens , il fjut s'arrê- ter à celui qui fait naitre tous les autres ; &: celui là efl: l'a- mour de nous niefmcs. Quand deux partions fe combattent, l'ame délibère à laquelle elle (e doit abandonner , & elle fuit ce que l'amour propre lui infpire. Cet amour ne pêclie point en excès. On peut s'aimer tant qu'on veut quand on s'aime bien. Le dérèglement confilte à s'aimer mal , c'cft à dire par rapport à de faux objets. L'amour de nous- mefmes eft de lui- mcfme innocent. Quand il fc tourne vers les créatures , il eft corrompu : quand il fe tourne vers Dieu , il eft f\int. Si nous dcfirons , fi nous craignons , fi nous efperons , c'eft poumons mcfmcs. Nos amitiez fc réduifent à l'intérêt. Un père aime Ces en- fans parce qu'ils font à lui : il ne les aimeroit pas s'ils eftoicnt à un autre. La reconnoiifance fi eftimée dans le monde n'eft fondée que fur l'intérêt. Ce n'eft qu'un retour de l'amour de nous-mefmes qui fc fent obligé. L'afFedion varie félon le degré de proximité qui unit les au- tres perfonnes avec nous. La bienveillance qu'infpire la pro- ximité de nation , touche peu ceux qui habitent leur propre pays : elle eft plus fenfible dans un climat étranger. Aimer les gens par fimpathie n'eft que chérir la reflcmblance qu'ils ont avec nous. Souvent nous n'aimons la vertu qu'à caufe 8 LE JOURNAL de la convenance délicate qu'elle a avec noire amour propre, C'cll ainh que nous aimons la clémence qui nous pardonne nos crimes , la libéralité qui fc dépouille pour nous revêtir , l'humilité qui s'abaifTe pour nous relever , lajuftice qui dé- fend nos droits , la vaillance qui nous protège , la chanté qui nous fait du bien. Nous haillons de mefme par intcreft &: les pcrfonncs & les chofçs qui nous peuvent nuire. La première inclination de l'amour de nous- mefmes efl: celle qui nous fuit defirer d'eftre heureux. Les jeunes &: les vieux , les pauvres &: les riches s'accordent toui dans le dclîc de la félicité confiderée en gênerai. Cette feiicicéoù ils ten- dent ne doit point ellrc dilluiguce du plailir qui ell dans leurs idées , & qui fe divetfifie fuivant leurs paillons Le mcfme plaifir ne pljit pas à tous : l.^suns lont pour le plaifir groifier, les autres p.mr leplailîr délicat ; les uns pour le vif, les autres pour le durable. Le defir de la pcrfcdion efl fuborionné à celui de la féli- cité. L'homme ne peut eflie fatisfait tant qu'il confcrve l'idée de Ces défauts. 11 faut pour cela qu'il poffede les perfeclions dues à Ton efpcce. Tous les peuchans de l'amour preste portent le nom de vi- ce dés qu'ils cèdent d'eftre dirigez par la rnifon. Quand il fe porte aux plaifirs contre la raifon , il s'appelle volupté : quand il fe porte à l'ellime des hommes , il s'appelle orgueil. Ce font l.\ les deux dércglemens les plus généraux , & ceux aufqucls notre auteur termine fcs méditations. Il diftingue trois manières dont le plaifir peut cftrc confide- ré , fçavoir par rapport à 1 homme qui en a le fentiment , par rapport à la focieté, & par rapport à Dieu. De là il infère que le pbihr cft criminel dés qu'il s'oppofe au bien de l'homme , foit en ruinant fi fanté ou en troubhnt fon efprit ; au bien de la focieté en mettant dans les familles la confufîon des en- fans 5 &: au commerce de 1 homme avec Dieu par le mépris des préceptes. Et dans la fuite conliderant les efpeces de plailir aulquelles l'amour propre s'attache , il en découvre les diitercns degrez de malignité. ^ Comparant D E s s C A V A N s. 9 Comparant , par exemple , l'amour du vin à l'amour des femmes , il rrouvc le premier moins crimmel , parce qu'il eft fincere ; au lieu que le fécond eft compofé d'infidélité & d'artifice , & eft plus fouvenc que l'autre une fource d'homi- cides. Apres avoir parlé des voluptez corporelles , il parle des fpi- rituelles qui font les plus dangereufes , &r les réduit à trois ; à la volupté de la haine &: de la vengeance , à la volupté de J'orgueil &c de l'ambition, à la volupté de l'incrédulité &c de l'impiété. De là il paffeà l'orgueil qui aufli bien que la volupté afîai- fonne la plupart des adions des hommes , & y trouve cinq branches principales , qui font l'amour de l'cftime , la pré- fomption , la vanité , l'ambition, & la fierté. En patcou- r^nt CCS branches, il remarque que rien n'cftplus mal allbrti avec la dignité naturelle de l'homme , que la vanité qui a pour objet le luxe des habits. C'eft , dit- il , une chofe ridicule que la broderie &: la dorure entrent dans la raifon de l'eftimc for- melle ; qu'un homme bien vêtu foit moins contredit qu'un autre j qu'un ame immortelle donne fa confideration à des ameublemcns , à des chevaux , à des équipages , & à des li- vrées. Ce qui lui paroit plus infupportablc eft que des hommes tâ- chent à fe faire valoir par des crimes , qu'ils n'attachent l'op- probre qu'à ceux qui n'ont pas réufîi ; qu'ils puniftent dans un particulier les larcins & les brigandages, &: qu'ils refpe- ûentdans un Prince les injuftices éclatantes qui i'elevenc fur le trône. En continuant àexaminer les caraderes de la vanité, il mon- tre que les Philofophes ne font gueres plus raifonnables que le vulgaire quand ils s'enflent de leurs qualirez naturelles ou aquifes , de leurs vertus incelleduelles ou morales. 11 deman- de à quoi fe termine coût leur travail fi ce ncft à des queftions ridicules ou dangereufes , à de creufes fpeculations , à des difputes fans fin , à des fidions&: à des menfonges ? De quoi fouvenc fe félicitent ils fi ce n'elt d'avoir aquis des idées c». n - 1694. C 10 LE JOTIRNAL fufes , de s*"cftre remplis de nouveaux préjugez , & d'avorr- cnrallé erreurs fur erreurs ? De là il vient aux vertus humaines , comme le courage, l'intrepidicé , la libéralité. 11 trouve que la vertu en ce Cens nelt qu'un Cacrifi^e des moindres palFions aux plus grandes. L'amour de la patrie , qui a fi fort rehaudé les anciens Ro- mains , n'cftoit qu'un chcmm caché que leur amour propre prcnoit pour aller aux dignicez & à la g'oire. La libcralitc n'cft qu'un commerce qui préfère à ce qu'il donne l'avantage de le donner. La conliance n'eft qu'un dcfir de paroitre au dedus de la fortune : l'intrépidité , qu'un art de cacher fa crainte: la magnanimité qu'une envie de paroitre avoir des fencimens élevez. EnBn il fait voir les défauts de l'ambition , & ceux du mé- pris des autres , qu'il nomme infolence , hauteur , ou fierté , félon qu'il a pour objet les inférieurs , les fupcrieurs , Se les égaux, REPONSE DU P. MALEBRANCHE PRETRE DE l'Oratoi'e , à M. Regii. In 12. à Paris chez André Pra- lard. 1693. DAns ravertinemcnc qui cft à la cefte de cet ouvrage , le P. Malebranchc rend compte au Public de ce qu'il a dirtcré il long temps à faire cette réponlc. Il apporte pour raifon de ce retardement , qu'il avoir efté averti qu'une per- fonne qui avoit entrepris de réfuter les opinions particulières de M Régis (ur la Meraphifique principalement & fur la Mo- rale , devoir défendre fcs lent) mens avec beaucoup de vigueur. Mais voyant que cet ouvrage ne paroifToit pas , .& ne ("ca- chant s'il paroitroit jamais , il a pris eiiHn la refolution de fai- re lui-mefmc une courte rcponfe. Pour cela il a cherché dans le fiilême de la Philolophic de M Régis rous les endroits où. ce Phibrophelecitc en marge , & où il combat fesTcntimenS} & il a négligé to.is les autres. Il a cru que s il ne répondoit pas à M. Régis lors qu'il l'jn- tçrroge, lui &: fcs dilciplcs pouiroienc regarder fon lîlcncc. DES SCAVANS. it ou comme une efpecedc mépris: ce qui ne lui conviendroic giicres ; ou comme un aveu de (on impujliancc : ce qui feioit tort à la veriré de Tes fencimens. Ec au contraire s'il fait voir inconteftablement que M. Régis n'a paseu raifon dans ces endroits qu'il rcfutc avec le plus d'aplication en le citant à la marge , on aura un fondement raifonnable de fe défier de ce qu'il avance généralement contre la Recherche de la veriré. Le P Malebranche cft fi perfuadé que larailon eft de fon côté , qu il prétend que M Régis n en a jamais dans les en- droits où il le combat. Il avoue pourtant que cette prétenfion cft grande : mais il croit la pouvoir déclarer , parce qu'il la ]Ugc' bien fondée , comme il paroitra par fa réponfe aux objcdions principales de M. Régis. La première regarde la raifon phifique de diverfes apparen- ces de grandeur du Soleil &c de la Lune dans 1 horifon &c dans- Je méridien. Lexperience apprend que la Lune paroit d'au- tant plus grande qu'elle eft plus proche de Ihorifon. Laque- ftion eft de fçavoir la véritable railon de cette apparence. Le P. Malebranche dans le 9. ch du 1 . livre de la Recherche de Ja vérité a dit ,que la Lune nous paroifVoit plus grande dans l'horifon que dans le méridien , parce que voyant entre elle & nous piuficurs terres, nous lajugions d'autant plus éloignée qu'elle eftoit plus proche de l'horifon. M. Régis &: le P Ta- quet fçavant Géomètre ne conviennent pas de cette raifon. Le P Malebranche la foutient avec vigueur , (S<:la fortifie de nouveau par tant de preuves &; par tant d expériences . qu'il ne femble pas que (es adverlaires puilTcnt re^ufer de l'admettre. La féconde (que le P M'^'^branche tient pour beaucoup plus importante que la première ) regarde la nature des idées , & en particulier la manière dont nous voyons les objets qui nous environnent Le P. Malebranche enleigne que nous voyons les corps en Dieu , & que c'eft en Dieu feui que l'idéô de l'étendue fe trouve. M. Régis founcnt au contraire que" nous ne voyons point les corps en Dieu , & que nous les voyons en ' ux me! mes par l'idée que nous avons de retendue La troifiéme regarde une qucftion de morale touchant le l^laifir &c la douleur , fçavoir s'ils nous rendent aélueJJement iz LE JOURNAL heureux ou malheureux. Le P. Malebranche foutient que le plailireft toujours un bien; mais qu'il n'cft pas toujours avan- tageux d'en jouir: Que le plaillr nous rend toujours aduellc- ment heureux , mais qu'il y a prcfquc toujours des remors fâ- cheux qui raccompagnent M. Régis prétend que ce (ont là des concradidions , qui viennent de ce que le P. Malebranche confond le plaifir & la douleur qui (ont de pures feniations , avec la fatisfaiflion intérieure de I amc , &: le remord de con- fcicnce. Le P. Malebranche fe défend de ces contradidions en déclarant que quand il a dit que le plaifir nous rend heu- reux , il n'a pas dit foUdcment heureux , il n'a pas dit heureux ^ contens , il n'a pas dit heureux entant que le bonheur renferme la. ferfechon ; mais feulement heureux en quelque mamere : ce qu'il croit fuffire pour le mettre à couvert des prétendues con- tradictions que M. Régis lui attribue. Si m. Régis répond, comme il y a apparence, le Public fera fuffifamment inftruit pour juger leur différent. FABLES CHOISIES. PAR M. DE LA FONTAINE, In J2.Z Paris chez Claude Barbin. 1694. LE fujet de la plupart de ces fables eft emprunté ou d'E- fope , ou de Thcocritc , ou de quelque autre : mais avec un fuccés fi heureux , qu'elles auroient pu fervir de modèle aux anciens s'ils n'avoicnt vécu qu'après leur auteur. Le Pi- rame & la Ti(bé de M. de la Fontaine ne font point de dcf- honneur au Pirame & à la Tifbé d'Ovide, non plus que fa Dame d'Lphefe à celle de Pétrone. EXTRAIT DV p R I FI L E G E DV ROT. PAr Privilège du Roi du 4. Mai 1691. figné Dt Saint Hilaim , il eft permis àjEANCussoN Imprimeur & Marchand Libraire, de continuer l'imprelTion du Journal des SçAvans : .^vec défenfes à rou- tes forres de perfonnes d'imprimer , vendre & débiter ledit Journal , à peine de ^000. 1. d'amende , & autres i ainfi qu'il eft porté plus au long par ledit Privilège. Re Jovem illum ^optimum ^ maximum rite dices ^ ^ tonantcm ^fiatorem. Si buncnattiram vocas , fatum^fortunum , omnia cjujdem Dei nomi' nafmt^ varie utentis fua fotcflate. 1694. G i6 L E J OU RN A L II y a plus. Quand les eftats & les villes ont élevé des tem- ples à la fageffe , à l'intelligence , à la vertu , à la foi , à la pu- dicité , à la paix , à la concorde , ils n'ont donné ces beaux noms qu à la véritable divinité. C'eft en ce fens que Polibc dit que la vérité cil la plus grande déefTe que la nature ait dé- couverte aux hommes ; & ce fut dans cette vue que Nu ma jnflitua une fcfte en l'honneur de la foi , félon le témoignage de Tite Live ; & par là il ne portoit la penfée de Ces fujets à autre chofe qu'à la loi éternelle de Dieu qui nous commande d'eftre fîdeles. Par une fuite de ce principe lesHiftoricns profanes ont at- tribué au culte des Dieux ragrandiifement des eftats, comme il efl juftifîé par plufieurs palTages citez au troifiémc cha- pitre. Le quatrième fait voir que les fréquentes prières que les Payens faifoient avant que de rien entreprendre , prouvent le fentiment qu'ils avoient d'un eftrc fouverain duquel dépen- doient les fuccés de leurs entreprifcs. Cirus déclare dans Xenophon , qu'il ne commence jamais aucune aébion fans implorer le fecours du ciel ; &c la raifon que fon Hiftorien rend de cette conduite mente d'eftre pcfée. C'eft , die- il , que l'avenir eft inconnu aux hommes , & que Dieu le découvre a ceux qui le confultcnt. Toute l'hiftoire de Titc Live eft un tilfu de vœux & de fâ- crifices, d'aufpices, d'augures , & d'autres cérémonies infti- tuées pour demander le fecours du ciel. Jamais les Diélateuts, les Confuls , ni les autres Généraux d'armée ne partoicnt de Rome fans avoir facrifié au Capitole ; & jamais les Empereurs n'y rentroient fans aller vifiter le Capitole & les autres Tem- ples. Le foin que les Payens prenoient de confultcr les oracles eft expliqué dans le chapitre fuivant. Il nailfoit du mefme inftinét par lequel ils fe reconnoiftbient abfolument dépendans d'une fouveraine puiffance. Mais ce que la lumière naturelle leur découvroit à cet égard eftoit mêlé de beaucoup defupcrftitions & d'erreurs. Ils fc firent un art pour connoitre l'avenir parles oifcaux , par les prodiges , par les fonges , &: par les ora- DESSCAVANS. 17 clés ; ce qui les expofa à une infinité d'illufions. Q^nd Alexandre fut prêt d'entrer dans Babilone, les Cal- déens l'en détournèrent , fous prétexte que les aufpices lui eftoient contraires : mais il n'y eut aucun égard. Il fçavoic comment il en avoit ufé envers l'oracle de Jupiter Ammon auqueUl avoit fait répondre tout ce qu'il avoit voulu. Pen- dant le ficge de Tir , pour encourager Tes foldats , il feignit qu'Hercule lui avoit apparu en fonge , & lui avoit tendu la main comme pour le mener dans la ville. Il eftoit difficile que la religion payenneeftant toute faufle , elle ne s'appuyaft fouvent fur le menfonge. Mais enfin les impollures des Prêtres qui pour flarer la vanité ou l'intérêt des Grans , attribuoient aux Dieux de faulîes réponfcs , ne laiilent pas de montrer l'o- pinion qu'ils avoient que l'Elire invifiblc qu'ils reveroient ïbus des noms de ces Dieux, pouvoir les inflruire de la vérité. Les deux chapitres fuivans renferment plufieurs preuves des honneurs rendus aux Prêtres , aux Temples , & aux Afi- les. Le facerdoce durant pluficurs ficelés en plufieurs royau- mes a efté uni à la royauté. Les Egiptiens elifoient leurs Rois du nombre des Prêtres. Numa offrit lui-mefme la plupart des facrifices , &: inftitua pourtant un grand Prêtre , afin qu'il excrçaft les fondions facrées lors que les Rois feroient occu- pez à la guerre. Le chapitre neuvième établit la créance où plufieurs Hifîo- riens ont efté de l'immortalité de nos âmes. Hérodote aflure que les Egiptiens l'ont enfeignée les premiers, & que les Grecs l'ont apprife d'eux. Dion dit qu il parut une nouvelle étoile au ciel après la mort de Jules Cefar , & que plufieurs crurent que c'eftoit fon ame qui avoit efté mife parmi les allres. Ces bruits publics font foi de la perfuafion générale que l'amc furvic au corps. Le dernier chapitre contient ce que difcnt les Hiftoriens de la manière .dont les Payens fe preparoient à la mort. Platon dit autant en Hiftorien qu'en Philofophe , que les mêchans à la fin de leur vie commencent à fe défier de ce que les Po'é- tes débitent des peines de l'enfer ne Toit véritable. Xenophon fon difciple décrit la more de Cirus. Un homme d'une maje- îS LE JOURNAL ftc plus qu'humaine lui apparut en fonge pour l'avertir qu'il falloir retourner à Dieu. 11 s'y prépara par des prières & des facrifices , puis fit un long difcours à Cambife fon fils aine fur l'i m mortalité de l'ame , & l'exhorta à affermir fon trône par un crrand nombre d'amis & par la concorde. Cependant Xe- nophon fait parler Cirus comme le Phanfien qui remercie Dieu de fcs bonnes adicns , & ne lui demande point pardon des mauvaifes. Les Hiftoriens n'ont jamais donné à leurs hé- ros les difpofitions necelfaires pour bien mourir. Celles que Tacite donne à Pétrone répondent bien à la vie voluptueufc &: infâme qu'il avoit menée. En cette extrémité il ne s'entre- tint avec fcs amis que de bagatelles. Audiebat nthil referentei de immortalitate anima {^ fapentium flacitis , fed levia carmina ^ faciles ver fus. Le troifiéme livre eft un abrégé de la morale des Hiftoricns profanes , &: de ce qu'ils ont écrit des vertus & des vices. Les vertus règlent nos devoirs envers Dieu, envers nous-mefmes, envers les autres. Le premier devoir envers Dieu eft de re- connoitre qu'il eft la fource de tous les biens , & de faire re- tourner à lui tous Tes bienfaits par notre reconnoiffance. Les Payens qui ne s'imaginoienr point de bienfait plus éclatant qu'une vidoire , la rapportoient à Dieu comme reçue de lui, & ce fut dans cette vue que Romulus offrit à Jupiter les dé- pouilles Opimes, Les Princes lui rapportèrent non feulement leurs grandes adions , mais leurs penfées & leurs confeils ; & les Lcgiflateurs feignirent d'avoir avec lui des communica- tions fecretes. Tout ce qu'ils exécutèrent de plus grand par l'amour de la patrie , jufqu'à fe dévouer pour elle à la mort , faifoit partie du culte des Dieux ; le plus preflant motif qu'ils culfcnt de défendre leurs villes venant de ce qu'elles renfermoient les temples de leurs Dieux &les tombeaux de leurs ancêtres. Le premier devoir de l'homme envers lui-mefme eftd'eflre rnodede , de fe méprifer devant Dieu , & d'eftimer peu tout ce qui paffe. Ces fenrimens font bien exprimez dans un en- tretien de Crefus & de Selon , rapporté par Hérodote. La frugahté efUin autre devoir de l'homme envers lui-mefl me DESSCAVANS. t^ me. Xenophon raconre que quand les Perfes menoient JeS jeunes gens à la cli.ifîe, ils leur faifoienr quelquefois paiTer deux jours fans manger , pour les accoutumer à i'abftinence fouvenc finecefl'aire à la guerre. Les gens de Cirus ne fe mec- toienc jamais à table qu'ils n'euflenc mérité leur repas par quelque travail. Entre les Romains Luculle fut le premier qui fe fignala par fon intempérance, Seneque a detefté ceux dont la fcnfualité n'avoit point de bornes. Fomunt ut edant^ edunt ut vomant -, ^ epulas quai toto orbe perqnirunt , nec concoquefe diznantur. Ce fujet eft traité fort au long dans pluficurs chapitres où l'on peut voir des exemples fort contraires de la tempérance & du luxe des anciens. Le huitième eft de l'amour de la pau- vreté à laquelle les hiftoriens donnent la gloire d'avoir élevé les plus grans Eftats , au lieu que l'abondance les arenverfez. Comme la pauvreté & l'abftinence font d'un grand fecours pour garder la chafteté, le P. Thomaflin en parle enfuite , & propofeles exemples de Lucrèce, de Virginie, de Scipion, & de plufieurs autres qui ont efté fort vantez par les Ecrivains. Il en propofe après cela de la conftance dans les adverfitez, de la modération dans la plus haute fortune , du mépris des dignitcz & des honneurs. L'éloge que Juftin donne fur ce fu- jet à Epaminondas eft trop rare pour eftre pafle fous filence. Uam (^ imperium non fibi femper fed patria quafivit , ^ pecunia adeo parcusfutt, ut fumptm funeri defuerit. Gloria quoque non cupi- dier quant pecunia. Qaippe recufanti omnia imperia tngefia funt. Entre les vertus que les hommes doivent exercer envers les autres, le premier rang eft dû à celles qui regardent les enne- mis & les amjs. Plutarque dans un traité particulier des avan- tages qui fe tirent des ennemis , dit qu'ils nous peuvent don- ner \cs meilleurs avis pour nous corriger , parce qu'ils connoif^ fent nos défauts Atticus n'eut jamais d'ennemis, parce qu'il n'oftcnfa jamais perfonnc. Jules Cefar en eut , &: chercha toutes les occafions de fe reconcilier avec eux. A l'égard des amis , Suecone nous apprend qu'Augufte n'en faifoit pas volontiers de nouveaux , mais qu'il les confervoic avec beaucoup de conftance , reconnoiflant leurs fervices , &C 1694. H 30 LEJOURNAL fupporraiit leurs défauts. Les vcrcus que les Grecs &: les Ro- mains pratiquèrent le plus religieufement furent la fidélité à ne point mentir , à ne point découvrir un fecrct , à garder le ferment. Les devoirs réciproques des maitres Se des ferviteurs , des maris & de leurs femmes , des pères &: des cnfans , font expo- fcz avec une grande étendue. Les Romams mettoient autre- fois leurs efclaves à leur rable. Hérodote raconte qu'Anaxan- dridc Roi de Sparte n'ayant point d'cnfans , les Ephores le prenerent de répudier fa femme , &: d'en epoufer une autre. Cela prouve que les Lacedemoniens croyoïent que le maria- ge tend uniquement à donner des enfans au monde. Quoi que le principal devoir des pères foit l'éducation de leurs en- fans , Xcnoplîon nous apprend que les Petfes ne la leur laif- foient pas , mais la confioient à des hommes choifis qui pré- venoient toutes leurs fautes , &: les inflruifoicnt de forte qu'il ne fuft jamais neceifaire de les châtier. Ce livre finit par les exemples que les hiftoriens profanes rapportent de la douceur , de la clémence , Se de la libcrahté des anciens Grecs &c Romains, La politique des hiilonens doit naturellement fuivre leur morale. C'eft le fujet du troifiéme livre , où le P. Thomaffin avance d'abord que le plus parfait de tous les gouvernemens efl celui où Dieu règne feullur les hommes , comme il régna fur les Hébreux jufqu'a la promotion de Saiil, Il juge que le gouvernement qui approcha le plus de celui-là , fut celui de plufieurs villes d'Italie où des Philofophes de la fedc de Pita- gore commandoient , Se répond à cequ'Appien a repris dans leur conduite. Il montre enfuire que les fondemens les plus fblides fur lefquels les fouveraines puillances ont établi les ellats , ont efté les bienfaits , le travail , la modération , &c mefme le refus des honneurs. Ce fut par cette vue qu'Alexan- dre Severe refufa le nom de Grand , &c qu'il répondit au Sé- nat qui le lui offrit ; F'num me de vobis effe cenfete potins , quam I/f--igm nomen ingerite. Il dit que foit que les Princes parviennent à la couronne par fuccefllon ou par eledion , c'cft Dieu qui la leur donne, parce DES SCAVANS. 3t qu'il tient dans fa main le cœur des peuples qui leur obéiflenr, &: qu'il empêche qu'ils ne refufenc tous en mefme temps d'o- béir. Parlant après cela des confeillers & des favoris du Prince, il cite ce que Lampride écrit de ceux qu'Alexandre Severe avoit choifis : Alexander quidem ^ ipje optimus fuit , (^ amicoi fancioi ^ venerabiUs habuit ; non yyialiciofos , non fwracei , non fniiiofoi , non callidoi , non ad malum confntientes , non bonorum tnimicos , non libidinofoi , non cmdeles , non ciycumvento/es fui , ^ c. Il s'étend beaucoup (lir les vertus des Princes , fur l'amour qu'ils doivent avoir pour leurs fujets , fjr le foin de leur ren- dre lajuftice , fur la clémence , fur la modeftie , ôc fur la li- béralité. Il n'oublie pas l'inclination qu'ils doivent avoir pour les fciences , d'où ils peuvent tirer les inftrudions necelîaircs pour bien gouverner. Il en fait deux chapitres entiers , dans lefquels il propofe Texemple de plufieurs Princes & de plu- sieurs Empereurs qui fe font adonnez à la letlurede l'hiftoire, & à l'étude de la Philofophic 5c des Matcmatiqucs, & en ont tiré de grans fecours pour s'aquitter de leurs devoirs. Le P. Thomalîin paffe des vertus des Princes aux qu alitez des Gouverneurs de province , & des autres Magillrats qu'ils einployenr. Leur puiflJance ne s'étendit qu'à un certain temps au commencement de l'Empire. Juie Ccfar ordonna que les Confuls au fortir du Confular ne commanderoient que deux ans dans les provinces , & les Prêteurs un an feulement. Ti- bère au contraire les continua le plus fouvent tout le temps de leur vie. Alexandre Severe n'envoya point de Gouverneurs en province qu'il n'eufl; auparavant propofé leurs noms , afin que chacun puft les accufcr. Après que notre auteur a parlé des devoirs qui {ont propres au temps de paix , ou communs à la paix & à la guerre , il paffe à ceux qui regardent particulièrement la guerre. La première loi eft qu'elle foit jufte. Il faut encore qu'elle foit dénoncée, afin que ceux qui feront attaquez ayentle temps de reparer le tort qu'ils ont fait. Il finit ce livre par les impofitions qui fe lèvent pour la guer- re & pour les autres dépenfes de l'EOat. Sur quoi il avance 4eux choies : l'une , qu'il n'y a que la neceificé qui donne 3t LE JOURNAL droit de faire des impoficions ; &: l'autre , qu'il y faut joindre dans l'cxecuiion toute la douceur polTible. ;-- '^•--, REPONSE DE M. BERNOULLI LE MEDECIN , A l'ohjcfhon inférée dans le journal du 74. Septembre dernier^ contre une metode quia faru de lut dam le Journal du mois d Août pré- cèdent. CE n'eft pas depuis la publication de la queftion propofée dans le Journal du 10. Juillet , que j'ai trouvé la metode pour la refoudre : long-temps auparavant une perfonnc de la première qualité, qui ne cède en rien aux premiers Matema- ticiens de l'Europe , me Tavoit propofée en termes peu dif- ferens , & avoir fort approuvé la folution qu'on rejette ici. En effet elle cft fi évidemment bonne, qu'il faut eflre partie, & s'eflre propofé de ne jamais fe rendre , pour y trouver la moindre difficulté. Quoi qu'il en foit , je vois par avance que mon adverfaire entreprend de faire trainer l'affaire le plus qu'il pourra, puis qu'il eft prêt , dit il , à propofer de nouvel- les difficultez dés que l'on aura fatisfait aux premières. Mais que ne les a-t-il propofées toutes à la fois î C'a cfté fans doute pour fe referver de faux-fuyans. Il lui a eflé facile d'en faire provifion : car ces fortes de problêmes font fi généraux, qu'il eft impoffible d'en donner des folutions afiez précifes pour eftre à couvert de toutes les chicanes, quelque bonnes que ces folutions foient d'ailleurs. C'eft pour cela que je pourrois fort bien me difpenfer de répondre, comme d'une chofe tout à fait inutile. Cependant de peur que ceux qui n'auroient pas affez examiné ma metode , ne croyent que l'objcdion qu'on me fait foit de confequence , j'y répondrai : mais je déclare que c'eft une fois pour toutes , laiffant la décifion de cette affaire aux perfonnes intelligentes & defintereffées , & fur tout m'en rap- portant au jugement de Meflieurs del'Academic des Sciences. La principale objeélion qu'on me fait cft que pour reuffir ^f aurais befom d'une metode qui fufl fujfifunte pour re foudre par géo- métrie Us eyilitez^de tous les degrez^ ; ^ que celle que je cite n'a ejlé faite (^ ne fuj^t que pour le tro^^Jiéme feulement. J'avoue que j'ai befoifi DES SCAVANS. 33 bcfoin d'une telle metode , & que celle que j'ai citée n'a efté faire que pour le troifiéme degré ; mais s'enfuic-il qu'elle ne fuffife pas généralement pour tous les autres ? II eft vrai que l'application en devient très pénible dans les egalicez de plus de trois dimenfions : toutefois la difficulté n'ôce pas la polFi- bilité. L'autorité de M. Defcartes ne prouve rien courre moi ; car tout ce qu'il dit à l'endroit marqué n'aboutit qu'à faire en- tendre que fa règle pour le fixiéme degté eft très difficile à pratiquer , & qu'il n'y a que lui qui en puilTe trouver d'autres. Outre cela M Defcartes n'ciloic pas infaillible ; & je ne douce pas mefme que s'il eÛoit encore en vie , il ne revocaft plu- sieurs chofcs qu'il a avancées. La manière de M. Slufe de conftruire les racines n'eft elle pas beaucoup plus aifée & plus naturelle que celle de M. Defcartes î Quel cas n'a-t-il pas fait de fa manière de trouver les tangentes de courbes? Ql^el defir n'a-t-il pas témoigné de lafçavoir généralement ? Voyez comme il parle dans fa Géométrie page 48. J'ofe dire que cefi ùi le problème le plus utile ^ le plus geiieral , non feulement que je (cache , mais mefme que fayc 'jamais defir è de fi^avoir en Geome~ trie. Cependant fa metode ne s'étend qu'aux courbes géomé- triques ; outre qu'elle efl: très prolixe. Mais aujourd'hui que l'on a trouvé un nouveau calcul , c'cfl: un jeu d'enfant que de trouver les touchantes non feulement des courbes géomé- triques , mais auffi de celles qu'il appelle Mécaniques. C'eft en moins de rien que l'on trouve les maxtma & minima : C'eft pourtant ce qui a fait le plus de bruit entre lui &: Çt% contemporains. Tant s'en faut que mes fentimens foient contraires à l'ex- périence & au fcntimcnt des Géomètres , qu'ils font plutôt favorifez par l'une & par l'autre ; comme on peut le voir dans les Aétes de Leipfic de l'année 1688. au mois de Juin, où mon frère par le moyen de deux courbes dont il donne la pofition & l'cfpece , refout fans aucune peine une égalité du neuviè- me degré. Au refte pour ne rien omettre , j'ai lu les pages irt?. & 411. du troifiéme volume des lettres de M, Defcartes : mais je n'y 1654. I 34 LEJOURNAL vois pas ni ce que c'cll que les cgalitcz auxiliaires de M. Rol- le , m ce qu'elles me pourroient fcrvir pour trouver U pofitioit dr l'efpece des courbes. Ec touc ce que j'ai vu de M. Kollc , c'eft un pccic écrit concrc M. de Lagny , dans lequel il n'y a rien d'approchant. Mais pour donner un e clair ci jj'ement folide fans fortir de mon fu- jet , je nai ^ , eft plus éloigné de l'œil A , que l'objet m n. Je fuppoferay encore que les rayons ej l ^&cp k^, qui par- ient des deux extremiter de l'objet p ^ , Se qui tombent fur les deux extremitez du cryftal- Hn k„ l , font dans les meC mes lignes droites que les deux rayons n t Se m k^. qui partent des extremitez de l'objet m ». Cela pofé , il eft évident que ces quatre rayons fouflfrent les mefmes refraftions dans l'œil. Se par confequent qu'ils fe vont croifer entre le criftallin & la rétine au mefine point ç, D'oit il s'enfuit que les deux objets p ^ Se m n , font vus fous le mefme angle k.g l. Mais de ce qu'ils font vus fous le mefme angle k^g l, il ne s'enfuit pas qu'ils tracent fur la rétine une image égale r car il faut remarquer que l'angle vifuel kg ^ > °" ^°" oppofé au fommet egf, demeurant le mefme ^ la grandeur des images de l'objet p ij Se de l'objet »w n , peuteftrc fort diffl-rente : dont la raifon eft, que la grandeur de ces images ne dépend pas feulement de la grandeur de l'angle egf, mais encore de ce que les rayons qui partent des extremitez des deux objets, fe vout réunir plus prés ou plus loin du criftallin k^l. C'eft pour- 39 qdoy fi pour voir diftinftetnent l'objet w » , il faut qtte les rayons « t éc n k.. , qui partcm de l'extrémité droite de l'objet >n rt , s'aillent réunir fur la rétine au point e, il faudra que les rayons m l &cm k., s'aillent réunir au point f , c'eft à dire , que le diamètre de l'image de l'objet m » fera la ligne ef. Par une femblable raifon , fi pour voir diftindement l'objet/»^, faut que les rayons ^ l 8c nieref!^u>-e} que l'objet p f eftvù par l'angle pz.?. Ce qui prouve évidem- ment qu'il ne faut pas avoir remarqué la diftance d'un objet, pour qu'il nous paroilTe plus grand qu'un autre. Il faut remarquer aufli que l'Au- teur fe trompe beaucoup , lorsqu'il dit a la fin de cet article , que c'ell la mefme cbofe àl'egurd de deux objets diverfcment éloignez. ,d'ej}re vus fous des angles é^anv , & de tracer des images égales. Réponse a i.' A r t. 1 1 L II eft vray que les objets diver- f.mentélo'gncz peuvent eftre vus fous lemifme angle; maisj'ay prouvé dans la féconde remarque , qu'ils ne peuvent eftre vus par le melme a :gle , ni tracer une image égale ; d'où il s'enluit que l'inégalité de leurs a parences ne dépend pas de la connoilTluace adueUe de leur diftance ( comme l'Auteur le prétend) mais de l'inégalité melme des images qu'ils t cent , & des angles par lelquels ils font vus. Cette erreur de l'Au- t.ur dépend du faux prmcipe qu'il a établi à la fin de l'article pré- cèdent. Réponse a l' A r t. IV. Afin qu'un objet plus éloigné qui eft vu fous un mefme ai-.cle , paroilTeplus grand qu'un autre objet plus proche, il n'eft pas neccfùure que la diftance foit apperçuc par ks feu* 4? autrement que par la difKrcnte configuration que l'œil cft oWi2;é cïe prendre pourvoir cet objet diftindement. En cfFct , quand nous regar- dons par un tuyau des objets divcrfcment éloignez,quoy que nous n'ap- perccvions pas aducllemenc leur diftance , ils ne lailTent pas de paroîtrc plus grands 8c plus éloignez les uns que les autres : Et ii le plus grand nous pûroift toujours le plus éloigné , ce n eft pas parce que nous apper- cevons plus d'objets entre luy & nous , ( car nous n'y en appercevons aucun : ) mais c'eft feulement parce qu'il faut que l'œil s'applatilfe & fe configure diverfemcnt pour voir cet objet diftindcment. D'où il s'en- fuit , qu'afin que l'inégalité deja diftance prodiiife de l'inégalité dans les apparences, il n'eft pas necellaire qu'elle foit a(ft:uellement connue par les fens. En eflvt , il a efté prouvé dans la troifiéme remarque , que la diilance qui eft apperccuë par les feus ne contribue rien à produire la grandeur apparente des objets , & que c'eft toujours la diftance véritable qui produit cet efl-et. Réponse a l'Art. V. Je fuis perfuadé qu'il n'y a que l'Au- teur à qui la voûte du Ciel paroilfe comme un demi fpheroide applatf. Je connois mefme un de fes amis qui palfe pour Mathématicien & pour vtrfédans l'optique, à qui la ligne perpendiculaire A <^, paroift environ double de l'horifontale A G. ( Vojcl In figure de l\4ineuy. } Voila deux apparences, ou plutoft deux imaginations bien difFercntes. Je veux néan- moins lailTcr paftcr celle del'Auteur. Je luy accorde donc que lorsque la Lune eft dans l'horifon , fa diftance apparente ou ima2;inaire , eft double, ou triple de celle du méridien; mais je nie qu'une diftance ima- ginaire telle qu'il lafuppofe , puiflc produire un effet aufïï réel que l'eft: la grandeur apparente des objets , laquelle dépend toujours de la gran- deur des images qu'Us tracent, des angles par kfqucis ils font vus , & de leur diftance véritable , ainfi qu'il a efté prouvé dans les trois remar- ques précédentes. Ce qui trompe l'Auteur tft , qu'il regarde la Lune comme il regarderoit deux objets diverfement éloignez iJk de différente grandeur, qui feroient vus fous le mefme angle ; ce qui cft toutdiff'e- rent. Car félon la première remarque , la Lune en différentes fituations eft toujours vue fous des angles inégaux , ^ trace toujours des images inégales. Réponse a l'Art. VL Si l'Auteur ne fe contredit pas dans cet article, il s'explique au moins fort obfcurement : car il dit d'un cofté, c\Vi avec un verre Jilus ou moins enfumé on verra Li Lune fenjîhle- ment de mefme grandeur dam cjuelijue fit nation (fit elle foit , pottrveu aue le verre foit tout proche des yeux , & tju'il éclipfe entièrement le ciel CJ* les terres. Et il ajoute bien-toft aprésrl?/«ry? le Soleil ejl dan^ l'horifon, riftterpo/îiion du verre le fera paraître environ deux fois pins proche , & quatre fou plus petit. Ces deux propofitions femblent contradiftoires : mais pour interpréter favorablement lapenfée de l'Auteur , je veuxcror-. re que tout ce qu'il dit des difFerentes apparences de la Lune dans diver- 44 fes fitiiation? , , doit cftre entendu de la Lune qu'on voit tantod par le verre enfume , & tanroft fans le verre enfumé. Réponse a l'A r t. V 1 1. J'accorde la majeure , &: la pre- mière partie delà mineure de l'argument que l'Auteur propofcdans cet article : Mais je nie la féconde partie de cette mineure , & la confe- quence. Cette féconde partie de la mmeure eft ^ue l'nterpojîtion du verre enf:,wé ne cb.iniye point l'image de la I.^tne. Je dis au contraire qu'elle la change beaucoup, ^' qu'elle la rend plus petite, non en aug- mentant ou en diminuant les rcfraftions, (car je fuppofe qu'elles font les mefmes , ) mais en faifant réfléchir une grande quantité de rayons : car il (\iut remarquer qu'il y ma peu qui pcnetrcnt le verre, & que ceux qui le pénètrent fe rtiir.iirent fi peu cxaâicmcnt fur la rétine aux ex- trcmitez de l'image , qu'ils n'ont pjs la force de fe faire ft ntir -, d'où il s'enfu t que la Lune n'eft vue que par la partie de l'image qui eft la pUr. proche de l'axe ; ce qui fait qu'elle paroifi: plus petite. Cela eft confirmé par ':'cxpenence,qui fa't voir que plus un verre eft enfumé plus il rend la Lune petite, ju!quts-la cu'il pourroit cftrc tel- lement enfumé qu'il la rcndroit tout-à-fait infcnfible. Il y a donc cette difFerence entre l'Auteur & moy, qu'il croit que le verre enfumé fait paroître la Lune plus petite fur l'horifon , parce qu'il cache les parties du ciel & des terres ; & je foûtiens au contraire qu'il la fait paroître plus petite, à caufe qu'il fa-t qu'elle trace une plus petite image fur la rétine. Jj pourrois ajouter que l'argument de l'Auteur eft compofé de trois propofitions finguliercs , dont les deux premières ne contiennent aucun terme commun dans lequel le fujct &: l'attribut de la conclufiou foicnt unis -, d'où il s'enfuit qu'il n'eft pas en forme. Réponse a l'A r t. V 1 1 L Le R. P. Jacquet a eu ra'fon de dire que la grandeur apparente des objets dépend non utiiqtiemer.t , mais frefqut toujours de la grandeur de leurs images ; car en tfRt elle en dé- pend uniquement à l'égard des corps qui font vus feuls , &: elle n'en dépend pas uniquement à l'égard des objets qui font vus plufieurs en- femble ; ainfi qu'il a efté obfervé dans la première & dans la féconde remarque ; c'eft pourquoy le R. P. Jacquet n'eft en cela tombé dans au- cune erreur. Réponse a l'A r t. IX. Je pafle à l'Auteur tout ce qu'il dit dans cet article. Hormis laconfequcnce qu'il tire à la fin , qui eft , c^ue la Lurie en cjnelijue en irait du ciel qu'elle fait efiant vite fous un anf^le d'un demi de ^ré , L'efprit félonies règles dt TOpticfue la doit voir plus fr. m de fur l'ho-ifon cjHe dins te mei-idien. Or y: foûtiens que cette con- fequence eft abfolument fauife. Car outre que la Lune en quelque en- droit du ciel qu'elle foit n'eft pas vue fous le mefme angle , ni par le mefme angle ^ quand melme elle y fcroit vue , ( ce qui eft impoflible, ) de ce qu'elle paroiftroit plus éloignée, il ne s'enluivroit pas qu'tlk duc paroiûrc plus grande ; car il a efté prouvé dans la troifiéme remarque que 45. cjne la diftance apparente ne contribue rien à faire paro'ftre les objets plus grands. C'eft pourquoy ce raifonnement de l'Auteur eft une pure pétition de principe. Réponse a l'Art X. Je fuppofe que l'Auteur explique merveiUeufemcnt bien la manière dont les loix du mouvement , &: celles de l'optique s'allient enfcmble : mais comme cela ne regarde pas nollre difpute , je n'ay rien à dire pour ni contre. Voila comment le R. P. Malebranche adcfFendu jufques-icy fon opinion ;& voicy comment il va attaquer la mienne. Réponse a l'A r t. XI. J'ay dit dans la page 143. du tome 3. de ma Philofbphie , jne tant s'en faut •jue le jugemtnt cjue vous frifom ejue les objets font éloigtiez. contribué a les faire -paroiflre plus grands , il ferviroit au contraire à les faire paroi lire plus petits ,Jî If ur gran/ieur dé- fendait de ces jugemetis- Cette decifion a paru fort étrange à l'Auteur de la Réponfe, &.' avec raifon ; car elle eft direftementoppofée aux prin- cipes de fon optique. Toutefois avant que de réfuter mes preuves , il attaque une autre maxime, qu'il appelle la loy fondamentale de mon op— tlijue , qui eft que la grandeur apparente des objets dépend uniquement de la grandeur des images eju'ils tracent fur la rétine. Il dit que fuivant cette maxime, fi du milieu de ma chambre je regardois la campagne, tout ce que j'y découvrirois me paroiftroit plus petit que ma feneftre ; parce qu'il feroit vu fous un plus petit angle. Je foûtiens au contraire que cet- te coniequence eft faulfe, parce qu'elle eft trop générale ; & qu'elle eft trop générale , parce qu'elle comprend non feulement les objets qui font vus iculs , mais encore ceux qui font vus plufieurs enfemble fous un mê- me, ou fous diffèrens angles ; au lieu que mon principe ne regarde que les objets qui font vus fculs , à l'égard defquels il eft toujours infailli- ble. Ainfi qu'il a efté prouvé dans la première remarque. Après cette digrefTion , l'Auteur revient à l'examen de la raifon que j'ay apportée pour prouver que le jugement que nous faifons que les objets font éioignez fcrviroit à nous les faire paroiftre plus petits, qui eft aue ce jugement déptnd d'un tnowvement de la prunelle <^ui eft tel pour voir les objets diftintlemcnt , iju'ù me fure eju'ils font plus éloignez., elle s'élargit\, & a mefire tju'elle s'élargit rail & la criflallion s'appla- tiffent. L'Auteur ne demeure pas d'accord queces deux mouvemens de l'œil & du criftallin fe faflent enfemble: il me demande comment les rayons ferciiniroient lurla rétine, fi l'œil & le criftallin s'applatiflbient en mefme temps. Pour l'apprendre il n'a qu'à remarquer que l'œil & le criftallin ne s'applatiifem jamais tout a la fois que lorfque l'objet eft fort élo'gné. Or quand l'obj.t eft fort éloigné les rayons fe relinilTent fort prés du criftallin , te par confequent fort loin de la rétine , ce qui tend la vifion confufe ; il faut donc pour la rendre diftinde, ou applatir ic criftallin f.-ul ,ou applatir l'œil feul , ou applatir l'œil & le criftallin 1694. M 46 «ut enfemMc. Le premier & le fécond fonr trop trop difficiles à fiiire, pAfcc que l'œil & le criftallin feroient obligez à de trop grands efforts pour s'applatir alTcz : il faut donc que le dernier fe fdfe , c'eft a dire que l'œil & le criftallin s'applatillent en mcfme temps. En effet la vifion fcroit encore confufe fi ( comme l'Auteur le prétend ) l'œil s'allongeoic tandis que le criftallin s'applatit , parce qu'alors l'œil en s'allongeant éloigneroit autant la rétine des points de la rciinion des rayons que le criftallin en s'applatilfant approchcroit ces points de la rétine. Ce qui trompe l'Auteur eft qu'il fuppofe un œ i qui voit diftinftcment un ob- jet -, car cet œil eft alors tellement configuré, que pour continuer à voir diftindement cet objet , il faut que (î le criftallin s'applatir , l'œil s'al- longe: mais comme cela n'eft jamais necellaire , la nature n'a point difl pofé l'œil en forte qu'il s'allonge , lorfque le criftallin s'applatit ; au contraire, elle l'a difpofé de manière que l'œil &: le criftallin s'applatillent en mefnie temps , parce que cela eft tout à fait neceflairc pour voir les objets fort éloignez tel qu'cft la Lune. Quant à la grandeur de l'image, j'avoue que plus le criftallin eft ap- plati,plus l'image que l'objet trace fur la rétine eft grande : c'eft une fai- te necelfaire des principes que j'ay eftablis touchant la refrattion qui fe fait par des verres diverfement convexes, ( j. tom. p. 154. O" ifj. ) Mais quoi que l'image foie plus grande, mon argument ne iailfe d'avoir tou- jours fa mefme force. Se il eft toujours vrai de dire qu'un niefme objet paroît plus petit à mefure qu'il paroît plus éloigné , parce qu'il trace une plus petite image , &*qu'il eft vu par un plus petit angle. Réponse a l'A r t. X I I. Dans la page 145. j'ay attribué la grandeur apparente de la Lune fur l'honfon, aux vapeurs c]ui s'élèvent continuellement en l'air, & qui compofentun atmofphere concentrique à la terre. L'Auteur avoué que cette explication eft fortiîmple^ mais, il affure qu'elle eft fauffe, par quatre raifons principales. J'ay répondu a la première raifon dans le fcptiémeanicle, ou j'ay expliqué phyfiquement l'effet du verre enfumé à l'égard de diverfes apparences de la Lune dans le méridien &a l'horilbn. Je répons à la féconde, en demeurant d'accord de l'expérience des Géomètres , & de la raifon de leur txperience : Je conviens mefme que fî les Tcfraélions augmentent l'image de la Lune dans les yeux,ellesraug- mentent aufïï dans la lunette : mais je dis qu'elles ne l'augmentent pas tant dans la lunette lors que la Lune eft à l'horifon , que lorsqu'elle eft dans le méridien ; dont la raifon eft , -, par la ligne mfr, c'eft à dire , que cette extrémité paroîtra clevce de la quantué k^. Par une femblablcraifon, lors que l'extrémité inférieure du diamètre perpendiculaue de la Lune fera parvenue au point k,, elle paroîtra au point r , ^ par ce moyen toute la Lune fera élevée de la quantité k^r, de telle forte néanmoins que l'extrémité inférieure dud ametre perpen- diculaire fera plus élevée que la fuperieure , à caufeque les refraftions font d'autant p'us grandes, qu'elles fe font plus prés de l'horifon ; ce qui fait que la Lunedoit paroître moins haute que large , de toute la quan- tité dont le bord fupcrieur eft n-rfiins élevé que l'mferieur. Mais ce qu'il y a de confiderable , & a quoy l'Auteur Itmble ne pas faire alfcz de rcflcx on . eftqu'cn mcfme temps que la Lune cft élevée parles vapeurs, ellcparoift plus grande par la melme raifon qu'un petit cercle qu'on voit par la partie fuperieure d'une loupe , paroift plus grand &; plus élevé. Il eft vrai que ielon moy , les réfractions fe font dans les vapeurs comme dans les verres convexes : l'Auteur mefme n'en dilconvient pas dans fa recherche de la venté : car il dit en propres termes dans le Livre I. chap. 9. art. 3. <]ue les vapews rompant les rayons des objet' les font payohriplw grands : Il eft vray qu'il achangé depuis de fentiment; car il dit dans fa réponfe , que cette opinion n'cft que vray-femblable ; qu'il a eu tort de déférer au fentiment de ceux qui le fuivent j & que fon delfein n'eftoit pas alors d'examiner l'effet des refradior.s. Mais tout cela ne fait rien au fuj,.t de notre dilpute. Quand j'ay critiqué l'endroit de la recherche de la vérité , où il attribue la grandeur apparente de la Lune dans l'horifon à fâ diftance apparente . je n'ay confideré que ce que l'Auteur pcnfot lors qu'il ccrivoit cet ouvrage , & je n'ay eu aucun égard à ce qu'il pcnfe maintenant. pour revenir donc à notre lujct , je prétens que fi un verre con- vexe concentrique à la terre , eftoit à la place des vapeurs, il produi- roit à peu prés le mefme effet qu'elles produifent. Mais il y a une fort grande différence entre un verre qui feroit concentrique à la terre , & une loupe qui cft excentrique à la mefine terre. Car de ce qu'un verre feroit concentrique à la terre , il s'enfuivroit que nous ne pourrions voir la Lune dans l'horifon que par la partie fuperieure de ce verre : & au contraire , de ce que la loupe eft excentrique à la terre , il s'enfuit que nous pouvons voir le petit cercle dont parle l'Auteur , non feulement par la partie fuperieure , mais encore par la partie inférieure de cette loupe ; avec cette différence pourtant,que fi nous le voyons par la partie fuperieure , il doit paroitre plus grand éi plus élevé -, & li nous le voyons par la partie inférieure , il doit paroitre plus grand , mais plus ab- baiffé. Pour prouver que le petit cercle doit paroitre ainfi , foit A H N D X Une loupjie : foit LNM fon axe : foit AHN la partie fuperieure de cette 49 cette louppe : foit N D X la partie inférieure : foit l'objet G qui en- voyé un rayon en I : foit ce rayon rompu en H ; en force çu'j! ail'e dans l'œil F. Pour lors il cft évident que l'objet G paroîrra en O ; c'cft à dire qu'il paroitra élevé delà quantité GO. Soir maintenant le mef- me objet en C, d'où il envoyé un rayon en E : Soit ce rayon rompu .en D , pour aller dans l'œil K. Four lors l'objet qui eu. en C paroîrra en P ; c'cft à dire qu'il paroîtra abbaifféde la quantité CP. Ce qu'il fallcit prouver. Cr par la mefoe raifon que le petit cercle paroift s'élever eu s'ab- baiffer , Icr; qu'où !c regarde par la partie fuperieurc ou inférieure et? la loupe ; ii doit paroicre dans la mefme fituarion , rrais bcaucorp p!i>3' grand lors qu'il cft vu par le cerrre de la loupe. Il cO' rricfrne évident eue lovs cit'il cR- vu pa-' la p-Tvie la plu? haute de la 'cure , fon bord, fupericur doit p.ircltre p'"'; ék'/é cre i'irfci'ie-iT , à proportion que les' rcycns c^ui ton.bcnt Cv.r fa Icnpe v^rs H , font p!Tis incrincz cuv. cetîX oui ton:b:nt Vers N. Prr Ane frrrb'able raifcn , c,r}Ar:d on regarde !-; petit cercle par la prrric la plus î^sfTè de la loupe , le bbird ir^/rtciT doit' parcirr? plus ■.■'.h:.'(îà que le faperieur , à propoiticrt que 1rs rayons font plu:; ii.clincz vcr: D que vers N. Et parce que quand en ne rcpa'"!c prs pr^r '? ccnrrc de la loupe , les rayons qnï toiTîbi'nt a\'.x cxt'êm'tcz du diari^ctre pe'rpe?id:culaire , font rôujdurs ph:.i iii- c''n"X 'l!'" ceux qui totnb.-nt aux cxtremîtez dû diartietrè hôrifôil. ta' -, c'ift luie réctffré que le fSt'f cercle pàrcifTc? el!i'pt?qi»e , rdrrs de tclk'forte que fd hauteur furj^àlTc Hi iargéUr : ce qui ne peut cdirvcnlr' À h Lune , parc? au-' noiu !i voyons toujours par lapirtie fiipcricure à:t v:.pcars , & que les rcfradions élèvent toujours Ion bord inférieur plus que le fupcricur : d'oi\ il s'enfuit qu'elle doit paroitre ellipcique à rebours du petit cercle. C'eft pourquoi la comoaraifon de la Lune vue par les vapeurs , & du petit cercle vu par une loupe , eft tout àfaic im- propre par rapport au dtflcin de l'Auteur. Rfi>onse a l'Art. XI il L'Auteur fe trompe fort de croire que 'es vapeurs n'augmentent pas la grandeur apparente de la Lune dans riioriion , & qu'au contraire elles la diminuent. Cette méprife paroift d'autant plus grande , qu'elle répugne à l'explication mefme qu'il vient de donner des refraftions : car il cft évident par cette explication , que les vapeurs doivent élever la Lune ; & il eft conftant que fi elles l'éle- A^ent , il faut neceflairement qu'elles la grofiTiflent , parce que la Lune s'élevc & fe grofTît par le mcune principe , fçavoir par les réfractions de fes rayons vers la perpendiculaire. L'Auteur fera convaincu de cette vérité par l'expérience , s'il veut regarder encore une fois fon petit cer- cle par la loupe ; car elle le lui fera paroitre en mefme temps plus grand, & plus élevé ou plus abailTé , félon qu'il le regardera par la partie fupe- rieure ou inférieure de la loupe. Réponse a l'Art. XIV. Je demeure d'accord que plus les objets approchent de l'horifon , plus leur élévation apparente augmente. Je conviens mefine que le bord fuperieur de la Lune lors qu'elle ell dans l'horifon , eft moins élevé parles vapeurs que le bord inférieur. Mais je nie qu'il s'enfuive delà que fi les vapeurs augmentoient fon diamètre norifontal , au lieu de voir la Lune prefque circulaire , nous la dufîlons voir fort elliptique. Cette confequencc auroit lieu ieulement ii l'on fuppofoit que les vapeurs augmentaftent beaucoup le diamètre horifcm- tal de la Lune , fans augmenter le perpendiculaire -, ou qu'elles dimi- nuaflent beaucoup le perpendiculaire , fans augmenter l'horifontal : au lieu que je (uppofe qu'elles augmentent en melme temps ces deux dia- mètres , mais en forte que l'horifontal eft un peu plus augmenté que le perpendiculaire. L'Auteur finit cet article en difiint que les refradions diminuent da- vantage la haureur de la Lune , qu'elles n'en augmentent la largfur ; & qu'ainfi bien loin qu'elles augmentent fon apparence dans l'horifon , elles la doivent fiiire paroitre plus petite. Je répons que ce principe & fa confequence font manifeftcmcnt faux : car il a efté prouvé dans l'an, li. que bien loin que les vapeurs diminuent la hauteur de la I.une , ellts l'augmentent au contraire ; &c que fi l'on peut dire qu'elles la dimi- nuent , ce n'eft qu'à caufe qu'elles ne l'augmentent pas autant qu'elles augmentent fa largeur. D'où il s'enfuit que l'Auteur confond ici . ■ctai-hy'îqnc pnvcîrra la frri.rine procHâîrie. ;iii|r l'augmenta. Alexandre Si-verc prie un tel foin d'en amaft'cr, qu'au temps de fa mort il en iailfa pour les fept années fui- vantes. Aurelien partant de Rome pour l'Orient , promit à tous les citoyens de leur donner des couronnes à ion retour. Ils cru- D E s s C A V A N s. 43 renc qu'elles feroient d'or : mais quand il fut revenu , il leur en donna de pain , & commanda d'en distribuer chaque jour un à chacun. Voila l'origine de la diftribution du pain , qui fucceda à celle du froment ; avec cette différence que le froment n'a- voit efté donné qu'à un certain nombre , au lieu que le pain le fut indifféremment à tous. Il y en avoir encore une autre , qui eft que le froment n'avoit efté donné qu'une fois le mois , &: que le pain l'eftoit tous les jours. Il y eut des particuliers qui voulurent imiter la libéralité des Princes , & qui entreprirent des ouvrages dont la gloire rc- tourna au Public. Demetrius fit à Ces dépens le teâtre au- quel il donna le nom de Pompée de qui il eftoit affranchi. Craflus aquit de grandes richeffes , &: ne put s'en contenter , puis qu'il difoit que pour eftre riche il faloit pouvoir entrete- nir une armée. Caton le jeune poffeda un million d'or. Les accufateurs de Seneque lui reprochèrent qu'en quatre années de faveur il avoir amaffe fept millions & demi d'or. Néron à qui il avoir demandé fon congé , lui répondit fur le point des richefles dont il redoutoit l'envie , qu'il y avoit des affranchis qui en poffedoient de plus grandes. Sur quoi Pline s'écrie : Ô»^ , malum ! amentia eft , id in vita cupere, quoi autetiam fer- vis contigerit , aut ne in Regibus quidem invenerit finem ? Apicius porta fous Tibère le luxe & la dépenfe plus loin que nul autre. Il diffipa deux millions & demi d'or , & ayant re- connu que quand il auroitpayé fes dettes, il ne lui reftcroic que deux cent cinquante mille éçus de bien , il s'empoi- fonna. Le P. Thomafliin entaffe une infinité de femblables faits furlefquels les Percs de l'Eglife , & mefme les auteurs pro- fanes ont fait d'excellentes reflexions , qui font répandues dans toutes les pages de ces deux tomes. 44 LE JOURNAL OBSERVATIONS FAITES PAR M. DROUIN, Maître Chirurgien Juté à Paris , ^ Aide Major de /'ff •^trir ces mots , l'idée du cercle en gênerai , je n'entens tfue ce ejHe je vois cjHand je penfr an cercle. Or ce cjite je vois aBuellemint efl gênerai. Certainement l'idée du cercle ne me refrefcnte rien t^nclle m(fmc. Je ne crois pas que l'Auteur prétende que cette propo(îtionCfî l'idée du cercle en gênerai ne me rtprefcnte rien cjU'He mefme , foit une fuite des deux précédentes ; ni par confcquent que fon argument foit en forme. Mais (bit qu'il le prétende, ou non , il eft neceflaire d'examiner chaque propofition dont cet argun^cnt tft compole. Quant à la premiè- re, je demeure d'accord que les dcfinitions des mots lont arbitraires , & que l'Auteur peut entendre tout ce qu'il sOMàiz. par Vidée du cercle en général, pourveu qu'il defi[;ned:ftinâ:ement la lignification qu'il att.ache à ce mot. Mais y foûtiens que fi par l'idct du cercle en gênerai , il entend ce qu'il vo^t quand il penfe au cercle , pour lors il confond le cercle qu'il %'oit avec l'jdée ou la perception par laquelle il le voit: en quoy il tombe dans 'a mefme abl'urdité où ton.beroit celuy qui parlant du Portrait da Roy de Siam , diro t que par ce Portrait il entend ce qu'il voit quand il penfe au Roy de Siam. Qiiand l'Auteur penle au cercle en gênerai, ce n'efl pas l'idée ou la percLption du cercle en gênerai qu'il voit; mais par cette idée ou perception il vo't plufuurs cercles confufément ,ou pour mieux die , il voit un feul cercle dans lequel il ne confidere que ce qu'il a de commun avec tous les autres cercles -, ce qui fe fait par des ab- itraûions d'i.fprit en la manière qu'on enleigne aux Ecoliers de Logi- que. Quant à la féconde propofit'on, je la diftingue. Ce que je voù ttdueUe' ttiCT t efl generûl dans ii.on efprit cjui le r-nd tel par des ahffraEl on'-. Je l'accorde, E/} fenrr.:len lHy-mefme\ je le nie: car il n'y a rien d'aâucUe- ment cxiftant qui (oitçeneral. Quant a la troifiéme propo{îtion,je la nieabfolument. Caries idées ne le reprefentent point elles-mefmes ; elles rtprefement feulement leurs objets, & elles les reprefentent audî necdlairenîentque les tableaux re- prelenttnt leurs originaux , {ans quoy nous {êriojis bien ailurcz que nous aurions des idées , mais non pas qu'il y eût aui une choie dans le monde qui répondît a ces idées ; ce qui détru-roit toute la ccrtitnde hu- maine: & il ne fcrviroitie renferme rien de qencral . piiifc^iie ce n'eft eju'une modalité particulière de i'ame filon Ai. R>'gis ; donc l'idée du cercle en çeneral ne me reprrCoTte rien de gênerai. Je répons encore une fois à cet argument con^me l'hom- me qui ioûticnt Thcfe ; Cr cette idet rie r'ï.firme rien de général : In elfcndo , Je l'accorde ; In repntfentando ,Jc le nie. Donc l'id . du cercle en général ne repnferte rien de gênerai ; Je le nie : Et je le nie fans tom- ber dans aucune contradidlicn. Réponse a l'Art. XXII. L'Auteur dit dans cet article de fà Réponfe , qu'il difringue fes idées de lapcrc^pton cjuil en a. Cela a efté rebattu fi fouvent que je n'ay rien de nouveau à y répliquer. Réponse a l'Art. XXIII. Dans la page i86. contmuart de com- battre la troificme railbn de l'Auteur,j'ay dit cjutl cft bien plus ittfé de cor- avoir que les corps particuliers font renfermez, cerfufément dans l étendue ^ ait'il n'efl aifé de concevoir ^h ils font renfer?nez dans Dieu cjui n a nul rapport avec eux. En effet , fi Dieu efloit tout eftre ou l' eftre univerfel, c-omme cet Auteur Venfeigne , il faudrait ejue tous les efîres ftiffent des parties intcgrant&s ,ou des parties fubje^ive s de Dieu parce cju'it efl im- pojfible de trouver un autre genre de parties:or les tfires ne font pas &c. L'Auteur au lieu de réfuter mes preuves, fe plaint de ce que j'ay vou- lu dire que Dieu n'cfl; pas l'eftre univcrfel , ou qu'il n'eft pas tout eftre, parce que s'il eftoit l'un ou l'autre , tous les eftres feroient des partes intégrantes , ou des parties fubjcdives de la Divinité. Mais afin que le Ltdeur puille jngcr plus facilement fi fa plainte eft juftt ou non je le prie de confiderer qu'il n'y a que deux cfpcces de Tout: il y a un Tout que les Latins appellent toturn dont les parties font nommées parties in- tégrantes, tels que (ont les apparttmens d'une maifon , les quartiers d'une ville , &c. Et il y a un autre Tout qui eft appelle en Latin o>»nc, dont les parties font nommées fuiefti-ces . parce que ce Tout eft un ter- me commun , Se (es parres lont les fujets compris dans l'cfttnduc de ce terme. Or cela tftant luppofé , il s'agit de fçavoir fi l'Auteur a dir quelque part que Dieu eft tout Eftre , & qu'il eft V Eftre univerfd-^ & s'il l'a dit, s'il n'eft pas viay que Dieu eft , ou ce Tout que les Latins ap- pellent tot'^m ou ce Tcui qu'ils appellent omnr. Voici comn-ient il par- le dans le 5.Chap. du 3.L1V. C'eftfi je ne me trompe la vanité naiiirclL\ l'amour de l'indépen lance , & le dcfir de reffemhlcr à Dieu , à l' Effre univerfel , efui coiripren-î en Itty tous Us Eflres , ejul nous brokill ■ l'cforit. Voilà donc Dieu qui cft i'Eftre univerfel. Voicycomnunt il parie en- core dans le 6. Chap. Ils voycnt de la matière divifibU & fgwce , drc. Etilny a rien en Dieu qui fou divfible, & figuré : car Dieu eft tout Ejlre , parce qu'il eft infini , & cjuil comprend tout : mais i- n'eSI aucun Eftre en particulier. F'oila, encore Dieu cjui efl tout Ffire. Or Dieu ne peut eftre tout Eft-e , ou V Eftre uti- erfei , fans eftre compofé de par- ties intégrantes ou fiibjtélives. Donc tous les Eftres, c'eft à dire tous les 1694. i' î8 efprits 5*: tous les corps font des parties fubje(rbives ou des parties intc- giAiues de Dieu. Lt il ne ferviroit de rien de dire que par V Elire uni- v;i/>/,par tout Eflre , le P. Maleliiaiiche entend l'Eftre premier qui a pro. duit & qui conferve tous les autres Eftres ; car il ne s'agit pas icv d'un Eftre qui produit les autres Eitrcs hors de luy ; mais d' un Eftre qui com- prend en luy-mefine tous les autres Elire?. Il s'enllnt donc que ces propofuions ejite D':eit t si tout Eflre , la fati s faction intérieure, que celle. cy eft un lien, abfolu , au lieu que lesplaifirs des fens ne font des biens qu'en- tant qu'ils fe rapportent à la fatisfaStion intérieure de l'âme ; ce qu'il faut bien re- marquer, pour s'empêcher de tomber d^'as l'erreur où font ceux qui confondent la fatis- faHion intérieure del'ame avecles platfns des fens ; cari'eft une confufion qui ies fait tomber itns de manifejles ccnlradiciiots , Icrs qu'ils difent que le phifir 4 toujourt un bien , mais qu'il n'ejl pas toujours avantageux d'en jouir : SUie te pUi/lr notii rend toujours actuellement heureux , mais qu'il y a frefque toujours des remords fàtheux qui l'accompagnent . car tlejlvifible que par te pUiJirqui nous relui toujours aduelle- ment heureux , ils ne peuvent entendre que la fA,isfajion de lame ^ nj par le pla'Jir qui eji prefque toujours accompagné Je remords , que le pta: qu;- la joye n'elî: qu'un bien refpcclif . paicc qu il n'ell pas tou/ours bond'ulcr delà |oyc. L'Auteur répond en fécond lieu , qu'il ne trouve point de contradiction dans cette propofition : Leplaifir ejiun bien , mats il n'e/t pas tou]ours avantageix de» jouir. Et ileft viay aulli qu'il n'y en a point dans cette propolîtion là ; mais il y en a une manifefe dans celle cy. Le flaijiriji toujours bc» ; mats il n'ejt p»i toujours avantageux d'en jouir. Or c'eft icy la vraycpropolition de l'Auteur, (Ljh 4. chat, to, fag. 74. D'où il s'enfuit que fâ contradiéliou fubfille encore. Il dit enfin, que fon dcflèin dans le chapitre cité a efté de réfuter l'opinion des Stoï- ciens , qui prétendent que la douleur n'clt point un mai, ni leplaiùr un bien , i: qu'il prétend le contraire : \'c:cy comment il pai le dans la réponfe , page 64 Jeprétens donc que li douleur nota rend aciueiiemeni malheureux , Qf que le plaijimous rer.d heureux; je ne dis pasfolidement heureux ; je ne du ptn heureux (y- content , je ne dis f.ii heureux entant que le binheur renferme la perfection ^ je diftingue ces chofes Or il me femble qu'il n'y a rien de plus contr.idir ^u:enir les dogmes de la foi. Ces livres cftoient appeliez Canoniques , à la diftindion des autres appeliez Ecclefialti- ques , qui n'eftoienc lus que pour l'édification du peuple. Et ces derniers eftoient la Sagejje , V Ecdefiafiiqjie , Tcbie , Judith^ & les Macahiei. Ils ont néanmoins efté mis depuis par le Con- cile de Trente dans le canon de l'Eglife Catolique comme les premiers. Lçs Canoniques eftoient divifez en trois parties ; la Loi , les Propheres , les Agiographes. La Loi contenoit les cinq livres de Moïfe , la Gcnefe , l'Exode , le Levitique , les Nombres , & le Deuteronome. La féconde partie contenoit les premiers Prophètes , qui font Jofué , les Juges , & les Rois ; & les fccons qui font Ifaïe , Jeremic , tzechiel , & les douze petis Prophètes. Les Agiographes eftoient Job , les Pfeaumes , les Proverbes , l'Eccleiiaftique , le Cantique des Cantiques , Daniel , les Paralipomenes , Efdras , &: Efter. Saint Jérôme en tradiiifant Daniel , marqua avec des obe- lifqucs l'hiftoire de Sufannc , le cantique des trois cnfans , &: l'hiftoire de Bel , pour faire connoitre que ces trois pièces ne fe crouvoient pas dans les exemplaires des juifs. Outre ces obelifques mis dans le livre de Daniel , il y en avoir dans les livres des Rois & dans les Proverbes , qui a- voient un autre ufage. Ils fervoient à faire voir ce qu'il y a- voit dans le Latin qui n'eftoit pas dans l'Hébreu , & qui avoic efté tiré du Grec des Septante. A l'égard des notes qui font à la riiarge du Canon de la véri- té Hébraïque , elles ne font pas de faint Jérôme , mais d'un auteur qui , félon la penfée de Rabanus Maurus , vivoit vers le huitième (iccle , & qui apparemment eft le mefme que l'au- teur des queftions Hébraïques fur les livres des Rois , & fur ceux des Paralipomenes , autant que l'on en peut juger par la conformité du ftile. Les Pères Benedidins traitent dans la dernière partie de leur Préface , des titres, des argumcns, des diftiniflions, des verfets , & des vers de TEcriture. A l'égard des titres , des argumcns , &: des diftinâions , il* 5i la 'Luné s'approche du méridien , Se que cette raifon cft que lorfque la Lune cft dans l'horifon, clic cft plus éloignée de nous que lors qu'elle eft dans le meridien,d'enviion un demi diamètre de la terre : d'où il conclut que les Geomctres doivent trouver fon diamètre plus grand dans le mé- ridien que dans l'horifon. Cette conclufïon me paroift fort exafte &c fort conforme aux prin- cipes des Géomètres ; mais je trouve qu'elle n'a aucun rapport avec ceux de l'Auteur : car il y a cette différence entre les Géomètres &: luy , que les Géomètres regardent la Lune comme faifint un plus grand an^le vifuel dans le méridien que dans l'horifon -, d'oi\ il s'enfuit qu'elle y doit paroître plus grande : au lieu que félon l'Auteur , arric!c9. la Lune fait toujours un angle égal dans ces deux fituations ; d'où il s'enfuit qu'elle doit paroître égale , tant parce qu'elle trace une image égale, que parce que la lunette rend fa diftance apparente auflî égale. Voila pour ceux qui regardent la Lune avec une lunette. Quant à ceux qui la regardent fans lunette . la queftion eft de fcavoir pourquoy , félon les principes de l'Auteur , ils la voyent plus grande dans l'horifon que dans le méridien. Carce n'eft pas i. parce cjue dans l'horifon on la voit par un plus grand angle ; car félon luv cet angle eft égal. Ce n'cft pas i. parce que la diftance réelle cft plus grande; car il a'^efté prouvé dans la première remarque , que la diftance réelle diminue toujours la grandeur apparente du mefme cbjer. Ce n'eft pas 3. parce que la Lunedans l'horifon paroift plus éloignée par T'utcrpolition des terres ; car l'expérience du P. Taquet fait voir que les terres eftanc éclipfées , la Lune ne perd rien de fi grandeur apparente. Ce n'eft pas enfin , parce que la Lune paroift plus éloignée par l'interpofition des' par- ties du ciel ; car outre que les parties du ciel ne font pas plus réellemenc entre la Lune & nous, lors qu'elle cft dans l'horifon , que lors qu'elle eft au méridien; l'expérience fait voir que k s parties du ciel tftant ca- chées par un tuyau de lunerte par lequel on regarde la Lune, elle ne kilïe pas d'avoir la mefme grandeur apparente. Je perffte donc à conclure, que la grandeur rpparcnte de la Lune dans l'horifon ne dépend point de ce eue r.ous la voyons pins élo'gnée, mais de ce que les refraétions de fcs rayons cauiécs par les vapeurs augmentent fon image fur la rétine, Sr font qu'ellccftycnc parnn plus grand angle. Ce qui eft d'autant plus vrav-ftmblable , cu'il fi'y.a pcr- fetine qui ne puiire avoi'- expérimenté pluficurs fois en fa vie, crue pen- dant un temps de broliillard ily a des jours cvî le diamr-tredt la Lune paroift dans l'horifon plus que double ce ce qu'il a cou:ur cde p;r.oHre dans le mefine horifon pendant un temps Ic-rr. n. La Réplique aux deux queftions de >, ■eta|-hy'!qnc pavcîrra la frri.rîne prochaine. «K ■ ^r/ :*) Aî^afiscîuz jpAN CirssbN , ruc'S^. Jr.cîuês,ii l'Inisgé S. jcari Bipifffe*. j^z/ec Friviif£i r'.n Koy. IV. 37 LE JOURNAL DES se AVANS Du LuNDY 15. Janvier M. DC. XCIV. LA METHODE D'ETUDIER ET D'ENSEIGNER chrétiennement ^ fo.i dément Lei Hifioriens profanei par rap» fort à La Reliqon Chrétienne ^ aux Ecritures. Par le R. P. Louii Thom.t.fjin , Prêtre de t Oratoire. In 8. 2. vol. à Paris chez Louis RouUand le fils. 1694. JE n*ai plus à expliquer que le fujet des deux derniers livres du fécond tome. Dans l'un (ont les reflexions des faints Pè- res &: desHilloriens protanes fur la conduite de tous les Eftats du monde. La diHxrcnce que les auteurs hcciclial^iques onc trouvée encre les biens & les maux qui arrivent aux Payens & aux Chrétiens dans tous les royaumes , ell que le culte que les Payens rend 'ient à leurs Dieux , fe terminoit aux biens temporels ; au heu que le culte des Chrétiens a les biens é- terne'.s pour fin & pour récompenfe. De ce principe il s'en- fuit que dans les calarriitez publiques la condition des Payens & celle des Chrétiens n'ell jamais la melnie. Ce qui ell un fupplice pour les uns, ell un mérite pour les autres. Les faints Pères ont inféré du meime principe , que ceux qui ne rechcrchoient que les biens temporels , ne pouvoienc former de véritable république , puis qu'ils n'avoientque d? 1694. K 5^4 LEJOURNAL nicncement de l'ovaire : leur tronc fe divifc en cent ptth rameaux flotans 8c fans attache. Ce font des canaux : car quand on les lailîe tremper dans l'eau , ils fe remplifTent , & deviennent allez gros. Je prcfumc que l'humeur prolifique pourroit bien recevoir des préparations en circulant dans ces labirintes. La verge a quatre ou cinq pouces de long : elle cfl: conftruitc de plullcurs petites fibres ùtuces prcfque paral- lèlement , Se creufe tout au long ; de manière qu'on y peut aifcmcnc introduire une grode foye de cochon. Elle cil liée à deux grans mufcles ou ligamens , diltans l'un de l'autre de trois ou quatre lignes. Un de ces mufcles eft attache vers le côté gauche de l'animal au fac membraneux qu'il porte flir le dos : l'aucre piiîe tout proche l'éfophage , au travers de quelques membranes qui lui font faire un angle , & lui fer- vent de poulie , pour tuer obliquement, comme fait le grand oblique de l'œil. Leur lîcuation me fait croire qu'un de ces mufcles fert a. tirer la verge en dcd.îns lors qu'elle eft fortie ; & que l'autre aide à la faire fortir dehors lors qu'il eft necef- faire. ]*ai vu dans le temps de l'autonne , tout au long de la ver- ge la melme humeur qu'on trouve dans le tefticuie de l'ani- mal. Le foureau blanc &: cartilagineux a la figure d'une pe- tite poire longuette ; il renferme une épée blanche , ccailleu- fe, raboteufc comme du chagrin , longue de deux ou de trois lignes, extrêaiement pointue , Se plantée dans une petite glan- de. C'eft avec cette epée qu'il pique Se qu'il eguillonne l'a- nimal auquel il efl marié, parce qu'cftant tort lent Si fortpa- rcdeux ,' & la matière prolifique epai(îc&: tenace , les bléll'u- res qu'il en reçoit le réveillent , le mettent en jeu , en amour. Se en mouvement. Je ne veux point de l'honneur qui ne m'appartient pas. M. Lifter de la Société royale des Sciences de Londres , a vit l'epée ecailleufe forcie de l'animal : mais il ne fçait ce qu'elle devient lors qu'elle eft rentrée. 11 a connu la verge fans l'exa- miner autrement , Se fçu que cet animal cftoic Lrmafrodite. DES se AV AN S. 55 DESCRIPTION DU ROYAUME DE FRANCE, contenant fa princtp.iles divifim géographiques drcjfces pour la grande Carte intitulée ^ Le Royaume de Fmnce^ avec fes ac- qtuftions éi'C. Dédiée à Louis le Grand Roi de France ^ de Navarre , par Jean Baptifie Nolin ; avec une table alphabé- tique de tous les noms qui font fur cette Carte , pour les y trouver aiftment. Par le fieur Tillemon. ïn 12. à Paris chez Roberc Pepie rue S. Jaq & Jean Bapr. Nolin fur le quai de l'horlo- ge , à l'enfcigne de la place des Victoires. 1693. C"^Etce Carte a tous les orneraens qui s'y pouvoient defi- j rer. L'Hidojre y paroit au haut occupée à décrire à la vue du Soleil les glorieufcs aétions du Roi. L'Immortalité à laquelle i'Hiltoire confacre fes ouvrages tient celui-ci parla main , & s'engage à le faire palier à la pofterité la plus recu- lée. Les Villes prifes depuis la ligue d'Aufoourg , & ks ba- tailles gagnées font une partie des preuves de cette hiftoire. Le Groupe où le Roi efl a/lis, marque fa tranquillité au mi- lieu des plus furieux mouvcmens de la guerre. Il eft armé pour protéger la religion , la jultice , & fes alliez ; & foule aux pieds l'herclie , caufc fatale des troubles dont l'Europe eft a- gicée. La France prcfente à fa Majeflé l'Angleterre, qui n'a plus d'autre appui que les forces de ce Royaume ci rcprefentées par Hercule. La Pieté &: la Valeur l'accompagent , parce qu'elles prefident à toutes fes entreprifes. Les ennemis é- blouïs de leur éclat paroiifent derrière. La renommée levé le voile qui couvre leurs mauvais defl'eins. La Cronologie &: la Géographie font jointes à l'Hiftoire, comme fes deux fœurs. Autour de la bordure fe voyent les portraits des Rois qui ont gouverné cette puilfante Monar- chie depuis fon établidement. A coté de chaque portrait fbnc ks années de la nailfance , du couronnement, & de la mort, La Carte feule eft de quatre planches , &: les ornemens de cinq 5 & CCS neuf planches font imprimées fur fix feuilles & demie. 5^ LE JOURNAL L'explication de la Carre a deux parties , dont la premiè- re contient en phificurs Chapitres les divifions géographiques du royaume ;, & de Tes aquifitions. Le premier chapitre rc- prefentcles Provinces, qui font ordinairement divifc es en plu- ilcurs parties , comme en haute &C en baflc. Dans chaque partie ibnt diftingucz divers pays , avec les principales villes qui s'y trouvcnr. Le fécond chapitre fait voir les Provinces Fcclefiafliques, qui comprennent non le feul Archevêché , mais auili les H- vêchcz iuffrai^ans. Souvent une Province Ecclcfiaiiîque s'é- tend dans pluficurç provinces temt^orelles ou feculiercs. Le troiliéme chipitre eit delliné à décrire les goiivcrne- mens d'Kllats , & les gouvernemens de provinces. Dans le dénombrement des gouvernemens d'Elbts , l'auteur s'eit at- taché au ransj; qui fur gardé à l'allemblée de i 6 i 4. Dans le dénombrement des gouvernemens de Provinces , il a corn- mencé par Pans , &: enfuitc a mis les autres félon qu'ils fe touchent. Le quatrième chapitre contient IcsParlemens avec les Pre- fidiaux de leur reilort ; le cinquième les Gencralirez , (ubdi- vifces en pays d'Elcétions , &: en pays d'tibts ; à quoi a eflé jointe la manière dont les deniers lé lèvent dans les pays nou- vellement conquis. Les deux chapitres fuivans font un dénombrement des vil- les où il y a des chambres des Comptes , & des cours des Ai- des. Le huitième contient les villes où il y a des hôtels de Monnoye. Les Univcrfitcz font dans le neuvième ; les Gre- niers à fel dans le dixième , & les grandes Maîttifes des eaux & forets dans le dernier. La féconde partie eft une table alphabétique , qui peuc pafler pour un petit didionnaire de ce qu'il y a de plus confi- derable en France. La carte pour laquelle cette table a efté faite eft divifèe en plufieurs carrez , qui en haut & en bas fonc marquez par des lettres capitales , àc aux cotez par des lettres Romaines. Pour trouver le mot que l'on cherche , il n'y a qu'à voir au haut ou au bas , Se en fuite à l'un des cotez. Pour rendre DES SCAVANS. 57 rendre cette table plus utile , les prérogatives des villes y ont cfté marquées félon leurs dift'erenccs jurifdid:ions, ierquclles, pour éviter la conrufion , y ont efté mifes rcparemenr. Par exemple au mot ai Aiencon , on voit que c'tft un Bailiage delà Lieuccnancc générale de Normandie, & un Prefidial du Par- lement de Kouen. LA LUMIERE DU CHRETirN. DIVISE'E EN DEUX faniei : la première , qtn lut fiit voir ce quii doit trAre (^ f^avoir , lei afùam quil doit flnre , ^ celles dont il fe doit ab- (ienir : hi féconde , les moyern qud a de j'dtnfaire à fes devoirs, Cor-i^fe ^ augmentée par 1,^ Auteur. In 12. à. Nantes. SC le trouve à Paris chez Claude Cellier. 1693. CEt ouvrage eft appuyé fur deux fondemens. Le pre- mier c(t que toute !a bonté de nos avions vient delà chanté parfaire ou imparfaite. Par la charité parfaite l'Au- teur entend la contrition , par laquelle l'homme confidere les feuls intérêts de Dieu ; & par la c harité imparfaite il en- tend l'attrition, par laquelle il confidere les intérêts de Dieu & les ficns , & ne laille pas pourtant d'obtenir la miferi- corde de Dieu & la remilliondcs péchez par le moyen du facrement de la pénitence. Le fécond fondement efi; le fujet de cette charité , qui ne peut eitre autre que i'Edre , & fur tout l'Elire intelli- gent. De ces deux fondemens l'auteur tire ces trois con- fequences. La première , que le feul motif qui fait agir Dieu dans fes opérations fur nous, efl; la chanté : la féconde, que Dieu a donné l'eltre à la créature intelligente , pour la rendre heure ufe , parce que la charité feule la fait agir dans toutes fes opérations : la croifiéme , que la jultice de Dieu attaque toujours la difi-ormité , &: jamais l'ellre de la créature intellii^ente Cette confequence a plus d'étendue qu'on ne penfe i Se l'Auteur s'en fat pour expliquer les plus gran- ,des diificultez de la grâce 6c de ia piédeuination tj^ratuite des hommes. Cet ouvrage eft divifé en deux parties. Dans la première 1694. P 5? LE jOtJRNAL l'Auteur explique le Simbolc des Apôtres, les Commande- mens de Dieu , & ceux de l'Eglife ; & dans la féconde il trai- te de la grâce , touchant laquelle il évite les opinions extrê- mes, pourfuivre les moyennes & les communes. On peut dire en général , que cet ouvrage cft traité d'und manière que tout le monde y peur trouver de la fatisfadlioti. Les ignorans feront inftruits dans l'explication fimple des ma. tiercs qui font nccelTaires. Ceux qui n'ont point d'etudc, mais à qui la nature a donné un bon fens , comprendront tout ce qu'il y a de plus élevé , eftant traité d'une manière qui fc laide entendre fans le fecours de la Philofophie. Les Philofophes y verront la caufe de tous les mouvemens de nos pafllons -, & les Théologiens la refolution de toutes les difficultez les plus conliderables de la prédeftination &c delà réprobation. L'Auteur a voulu cacher Ton nom ; &: c'efl: apparemment par modeftie. Mais on peut dire fans la blelî'er , que c'eft une perfonne de qualité, qui après avoir éclairé long-temps l'E- glife par une vie fainte & exemplaire , a voulu enfin éclairer tout le monde par une dodlrinc pure &: apoftolique. SACRUM MUSEUM MANTUAN^E CONGREG. Carmelitarum de obfervantia , m quo ceiebnorum Meroum fin* ^ula fimttlacra propriis gemmis coronata , fuifque locis apte àifpofita confpiciunttcr. Anihore Rêver endijjimo facrte Theol. Mag. ac Doti. Clémente Maria Felina , olim in eadem Cetl- greyttione iterato Vicarlo Gênerait. Jn ^. Bownia, LE P. Gaudentio Roberti a eflTuyé de pénibles trataux, entrepris de longs voyages , & fait de grandes dépenfcs pour rechercher les ouvrages fortis de l'Ordre des Carmes , & les autres monumens qui concernent fon hiftoire. Il ne man- quera pas de les mettre au jour quand il les aura recueillis. Cependant il nous donne les petites Poefies que le P. Clément Maria Felina Religieux du mefme Ordre, prefentâ écrites à la main au Chapitre General de la Congrégation de Mai>- DES SCAVANS. ;^ Ce font des Diftiques, dont les premiers décrivent les tni- raclcs d'Elie , & les autres célèbrent les louanges des Reli- gieux qui fe font diftinguez par leur pieté , par leur fçavoir , par leurs prédications, ou par d'autres emplois , depuis le com- mencement de la Congrégation jufqu'à ce temps ci. Le P. Gaudentio Roberti , pour rendre ces diftiques plus intelligibles , fait un plan de la reforme ; dont voici l'abrcgé. Elle fut commencée en 141 3. dans le Convent de Foreft en Tofcane , par le P. Jaques Alberti. En 1415. le Convent de Gironde artîs proche des Alpes dans le diocefe de Sion , fuc porté par l'exemple de celui de Mantouë à l'embraffer. De- puis ce temps- là jufqu'en l'année 1443- la reforme fit de grans progrés fous la conduite du P. François Thomas de France qui en eftoit Prcfident. Il furvint alors une fâcheufe contcftation entre le Provin- cial &: la Congrégation , laquelle fut portée devant Eugène IV. qui la termina à l'avantage de la Congrégation , ca cxemtant les trois maifons reformées de lajurifdidion du Pro- vincial. Dans le chapitre gênerai de la mefme année , le P. Pierre Etienne de France fut le premier honoré de la qualité de Vi- caire gênerai , titre qui s'eft toujours confervé depuis dans la Congrégation. En 1465. il fut ordonne quil n'cxerceroit cette fonction que deux anS j après quoi il rcprendroit le rang de fimple Re- ligieux, & fe foumettroit comme les autres à l'obéiflancc. Le faint Siège a quelquefois étendu ce terme pour des raifons particulières. En peu d'années la Congrégation s'agrandit extrememenc fous le gouvernement des Vicaires généraux , & eut jufques ^ fôixante Convens d'Hommes , & jufques à douze de Filles. En 1484. il y eut un grand différent entre les Conven- tuels &c les Reformez pour la couleur de l'habit. La couleur brune , & non teinte l'emporta fur la noire. Le P. Baptifte de Mantoui; qui eftoit bon Poète, coropolà deux Eclogues fut ce fujec. ^o LE JOURNAL LE CARACTERE DES VRAIS CHRETIENS. Jn 12. à Paris chez la Veuve Pepingué se Jaques le Fevrc , rue de là Harpe. 1693. L'Idée de ce livre eft toute nouvelle , & confifte à faire connoitre les véritables Chrétiens par oppontion aux ma- ximes communcnicnt reçues parmi les honneltes Gens du monde. 11 ertdivil'c en plufieurs Sentences , qui font toutes fuivies d'une preuve abrégée des vericcz qu'elles contiennent. Chaque (entence reuferme un des traits qui forment le cara- ftere des vr.iis Chrétiens , & ell prcce.lée de l'erreur ou de la faulfe idée de vertu qui lui elt oppofce. Il eti difficile de trou- ver un ouvraire qui en fi peu d'étendue contienne tant de ve- rirez. Cependanr l'auteur n'en avance au.:ur,e qu'il ne prou- ve : Ton livre n'eit preCq.ie qu'un tifî'u de pafî'.ges de l'Ecritu- re fainte. L'application qu'il en fait ne fçauroit ellrc plus ju- fte , & les confequcnccs qu'il en tire (ont coûtes très naturel- les. La netteté ou flile &: la vatiété des ma: iercs rendent cet ouvrage très agréable , &: la folidicé des chofcs qu'il contienc le rendent un des plus utiles en ce genre qui ayent jamais pa- ru depuis long- temps. LIVRES NOUVELLEMENT ' IMPRIMEZ. Za vie de Je fus Chrifi , tirée des qu.itre Evarf^Ues , ^ réduite en tin co'pi d'hifloire. Par le R. P. Bernardin de Aiontreuil , de la Compagnie de Jcfus. Revue nouvcUemem par le P. Jean Bri- jgnon , de la mefme Compagnie. In 12, 2. vol. à Paris chez Louis Roulland, 1694, PhilofophtJ in xitram^jue partent , fîve feleH.'C ^ limata d.ffl. cuhates in uiramptc pariem , cum rt:fponJîonihus , ad ufum fcuota: , circj célèbres univerj'.t I hilofoph;^ contrcverftas. Pars prima ^ fecunda de rebtis Loqicis ^ Phyjias. Opéra (^ la bore Laurentii Duhjn , Lueriuati Theologi^ Socii àorbonia , ac Philufophia Pro~ ftfjotis in j4c idcmia Partfienfi. In 12. à Pans chez la Veuuc de Cl-iiide Thibouft. 1694. A Paiis chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à faintjc-an Baptiftc. Al VI. éi LE JOURNAL DES SÇAVANS. Du LuNDY 8. Février M. D C. XCIV. LES LOIX CIVILES DANS LEUR ORDRE NATU- rel. Tome Troifiéme, In ^. à Paris chez la Veuve de J. B. Coignard , & Jean Baptilte Coignard , le fils , rue fainc Jaques. 1694. VO I c I le troifiéme tome des loix civiles , où il eft trai. té des fuccefiions. Elles font regardées en gênerai dans le premier livre : leurs efpeces y font établies , avec les dif- férences des héritiers purs & fimples , &: des beneficiers j & la manière d'aquenr une hérédité &L d'y renoncer , y eft expliquée. Le fécond livre eft des fucceflîons légitimes , où l'on voie comment fuccedent les pères &: les mères , les enfans , les frères &: les fœurs , &: les autres collatéraux. Le troifiéme eft des fuccelTions teftamentaires , des tefta- mens inofficieux , & de l'exheredation. Le quatrième eft Aq% codicilles & des donations à caufe de mort , des legs & de la falcidie. Le dernier eft des fubftitutions & de la Trebellianique : Après quoi il ne refte plus à parler que du Droit public ; ce que l'Auteur rcfervc à un dernier tome. 1694. Q_ 61 LE JOURNAL EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. MARCEL Commijfaire de la Manne , du S. Juillet j6^j. IL eft arrivé ces jours paflez que des payfans qui creufoienc dans un champ pour en cirer des pierres à bâcir , ayant dé- couvert un monument très curieux dont l'infcription paroif- foit inexplicable à nos Antiquaires , j'en ai trouvé le fcns (I jufte , qu'on m'a fait l'honneur de s'en tenir à mon explica- tion , que je foumets pourtant à votre jugement , n'en con- noilTant point de meilleur. La table de marbre trouvée à Arles a cette infcription : SAN. A. B. C. SAC. H O L. DIA. IN. TER. D E F. AMP. A R E L. CAL. MAR. OLIM. III. PREMIERE CONJ ECTV RE. Sanitatii /4uU Balbi cattft , facrum holocaullum "Diana. In terra defodiuntur ampuUa. Areiate , Calendis Mardis olim tertiis. Cette explication eft d'autant plus vrai-femblable , que Ju- les Cefar parlant des Gaulois dans le fixiéme livre de Tes Com- mentaires , dit qu'ils font fort [uperflitiettx , ^ mefme que ceux qui font dans de grans dangers de maladie ou de guerre , facrifient des hommes , ou font vœu d'en facnfier ; ce qui s'exécute après par l'entremife des Druides, ils croyent qu autrement les Dieux ne peu^ vent eftre appaifez^ , ^ qu il faut la vie d'un homme pour en rache- ter un autre ■■, de forte quih en font des facrifices publics. J'ai patlé plus au long de ces mefmes facnfîces , & des cé- rémonies qui s'y faifoient, dans le cinquième chapitre de mon hiftoire des Gaules , qui fe vend à Paris chez Denis Thierry, imprimée en 1686. SECONDE CO NjECTV RE. SanBos Anatili Bardi cinerts^ Sacerdos holocauforum Diana, in ternis defodit ampuUis. Arelate , Calendis Martiis olim tertiis. DES SCAVANS. ^3_ i f B BB i c E vi 1 H D ^ 1 o 1 A I Dli 'iï i. -*^ F «4 LEJOURNAL SanHos. C'eft à dire des cendres pures &: inviolables. Cic. & Liv. Anatili. Nom ancien & propre au pays d'Arles , vers la cô- te maritime. Burdi , Bardes. C'cftoicnc des Poètes illuftres des Gaalois, du corps des Druides & des Prêtres , dont Lucain parle au livre premier de la Guerre Civile , de cette forte : Vouiauffî^ Bardes, qui par les louanges que vous donnez^faites revivre les amei gencreufes de ceux qui ont efté tucz^ dans les combats , vous avexjeci- îé plufeurs de vos vers avec fureté. Cineresfanïlos. Cette epitete convient aux cendres de Bar- dus. Voyez la reprcfcntation du tombeau de Chyndonax Prince des Druides , ( car il n'y avoir que lui qui leur com- mandaft , félon Jules Cefar au livre 6. de la guerre des Gau- les ) que j'ai mife au chapitre 6, de mon hiftoire des Gaules, où je dis ; Retirez^vous ^ i?npies ; car (es Dieux libérateurs gar- dent mes cendres. Sacerdos holocauflorum Dian^c. Tout le monde fcait que la Dcefle Diane cftoit honorée à Arles plus particulièrement que les autres Divinitez j qu'on offroit des vidimcs fur fes autels, & qu'on faifoit à cette DéefTc des holocaultes ou des facrifî- ces , où l'on bruloit toute la vidirae. Entre plufieurs monu- mens que nous en avons , il s'en trouve un très beau chez M. Girard Géomètre d'Arles. Il a efté tiré d'une des bran- ches du Rofne qui efl: au deflTus de Trinquetaille , pendant une grande fechercife d'auronne. C'eft un vafe de verre d'un pied &c demi , le fond duquel eft un quarré fur lequel font ces lettres : c. E. V. H — O. D I A. par lefquellcs on conjecture avec artez de raifon , qu'on a fait un holocaufte d'une vidime a Diane. DESSCAVANS. 6y Calendis Martiis olim tertiis. Le premier jour de chaque mois eft appelle les Calendes , & dans chaque mois il n'y a qu'un jour de Calendes. Ainfi eu égard à l'année , on peut appliquer Calendis tertiis au troifiéme mois ; ce que l'on peur voir dans Ulpien & dans Martial, Otitn. Les Sçavans d'Arles ont beaucoup difputé fur la fîgnification de ce mot : ainfi je n'en parlerai pas , &c le lailfe- rai comme un mot confacré dans les Ecritures de ces Prêtres, & comme il eft fur les marbres ; fuivant en cela Alexander ab Alexandre , qui dit dans Ton livre troifiéme Generaltum die- rum : M'iii tifaut remarquer que ce que tioui dtfons de Mars, qu'il a fait le commencement de l'année depuis la fondation de Rome , a ejîé obfervé reliqieufement par différentes nations dans les premiers temps. Car Numa a commencé , ^ enfuiie les Albains , les Ari- ciens , ^ les Tufculans , à faire Mars le troifiéme mois de l'an- née. Ovide le confirme : Mars , nous commen(^ons par vous l'année Romaine ; ^ notre premier mois fera appelle Mars de votre nom. Et plus bas : Si le temps vous permet de lire lesfafîes ou le Calendrier Etranger , vous trouverez^un mois appelle du nom de Mars. Les Albains l'ont fait le troifiéme de l'année , les Phalifques le cin- quième , ^ les Herniques lefixieme. C'eft pourquoi , à l'exemple des Romains & des Etrangers, ce mot olim , ainfi qu'il eft fiir les marbres , femble s'accor- der avec le changement arrivé aux Faftes des Gaulois dans la Gaule Narbonnoife , lors qu'en l'année de la fondation de Rome 708. avant J. C. 45. Jules Cefar publia par tout l'Em- pire Romain un edit pour le changement de l'année civile, & pour l'abrogation de l'ancienne manière de commencer l'année. Car il femble que les Prêtres n'ignorant pas le chan- gement des temps de cette époque , n'ont pas écrit mal à propos : Calendii Martiis oiim tertiis ; foit que la dernière an- née du ftile ancien des Gaulois finift , foit que la première année du ftile nouveau de Jules Cefar commençaft , puis que mefme ce mot olim , au fentiment des meilleurs auteurs, peut également bien avoir rapport au futur , au pafl'é , &: au prefent. 1694. R 66 LEJOURNAL Voici la dcfcription de ce monument nouvellcmenc (Jc- couverc. A. Un tombeau en forme de petit tonneau. B B B. Trois vafes de verre , dans Icfqucls font tes cen- dres ou les rcfles de rholocaudc, C Un étui de cuivre jaune partagé en cinq , avec de pe- tites poignées , & compofé de pluficurs petites lames liées enfemble. D. Un couteau dont les Prêtres fe fervoient dans les facri- fîces , ou dont ils diflequoicnt la viftime. Le manche eft faic de corne noire. E. Une guaîiie à deux trous : l'un pour fourer le couteau ; & l'autre pour le ftilet qui ne fe trouve pas. F. Une table de cuivre jaune de la figure d'un quarrc long ou parallélogramme , au haut de laquelle efl: un creux rond. G. Une table de marbre fcmblable aux pierres de touche > jointe à l'autre qui eft proche , de manière néanmoins qu'elle fe peut tirer , fur laquelle eft gravée en caravfleres aflez beaux l'infcription mife ci- devant. LA PRATIQUE DES ACCOUCHEMENS. PAR M. Peu Maître Cmrurgien , é' cincien Prevoft ^ Garde des Mai- trei Chiru'penijure\ de Parti. Jn 8. à Paris chez Jean Bou- dot. 1694. QUoi que TAuteur n'ait voulu mettre dans ce volume .}ue des chofes de pratique , il n'a pas laifle d'y mêler, au jugement de M. Lyenard ancien Dodeur , Doyen & Pro- fefleur de la Faculté de Paris , &: de la Phifique la plus re- cherchée , & (le r Anatomic la plus nouvelle , &: de la McdeJ cine la plus curiciife. ^ Plus la matière eft délicate , plus les termes ont efté choifis avec foin , pour ne blcifer en rien la pudeur. Tout y eft ré- duit à deux points qui en font la divifion. Le premier expli- que ce que le Chirurgien doit faire lors que l'cnftnremenc eft naturel ; & dans le fécond ce qu'il doit obfervcr quand l'accouckemcnt eft laborieux , que l'enfant y apporte dci'ob- DES SCAVANS. 6f ftâclc par fcs différentes poftures , Su que des corps étranges eu augmentent le danger. ELOGE DU P. ANSELME , AUGUSTIN Dcchaujfè. LE P. Anfelmc eftoic de Paris. Bien qu'il fuft d'un tem- pérament extrêmement délicat, il entra à l'âge de dix- neuf ans dens Tordre des Auguftins Déchauffez , &c obferva toutes leurs pratiques les plus aufteres pendant le cours d'une longue vie. Il s'appliqua particulièrement à la Théologie morale & à l'Hiftoue. Les pcrfohnes qu'il eut fous fa conduite depuis l'âge de trente ans jufqu'à fa mort , recueillirent les fruits de la première j &: toute la France profita de la féconde pat la lecture de fes livres. En 1664. il mit au jour le Palais le l'honneur , où il expli- qua les généalogies des maifons de Loraine , de Savoye , &C de plufieurs autres ; décrivit l'mftitution des Ordres militai- res , &: celle des principales charges de la Couronne. Il y traita aufll des cérémonies obfervées au facre des Rois & des Reines , à leurs entrées folennellcs , au baptême des Fils de France , aux pompes funèbres des Rois &: des Princes. Comme ces fortes d'ouvrages font fort fufcepcibles d'ac- croiflcmenr , le P. Anfelme fie reimprimer celui ci en deux volumes in 4. en l'année 1 674. fous le titre de la Mai/on Roy. lie , ^ dei qram Officiers de la Couronne. Enfin ayant en- core aquis depuis ce temps-là de nouvelles lumières , & ayanc efté aidé de quantité de mémoires &; d / ritres , il a augmenté fon travail , & y a joint quantité de Maifons Souveraines de l'Europe. Il meditoit d'en faire une troifiéme édition en trois volu- mes , lors qu'il fut attaque d'une maladie qui en huit jours le mit au tombeau , au grand regret des Religieux de fon Ordre , qu'il avoir édifiez durant cinquante ans par l'exem- ple de fa vertu , & de quantité de pcrfonnes du ficclc , qu'il gg LE JOURNAL avoit aflîftées de fcs inftrudions &: de Ces confeils. Il mou- rut le dix-feptiémc Janvier de la prefcntc année , âgé de foi- xantc &: neuf ans, BIBLIOTHECA T H E V E N O T I A N A , Jtve C^talogus impreffomm ^ manufcnptorum librorum Biblio- theca vin dariffimi D. MeUhifedecii Thevenot. In 12. à Pa- ris chez Florentin &: Pierre de Laulne , place de Sor- bonne. 1694. LA première vue de ceux qui ont fait imprimer ce Cata- logue des livres de feu Mr. Thevenot , a efté d'inftruire de leur qualité & de leur nombre , ceux qui les voudroienc acheter. Les Hébreux y tiennent le premier rang , puis les Arabes , les Siriaques , les Caldecns ; puis les Grecs , les Latins , les François & les autres. Les livres de chacu- ne de ces langues font difpofez félon l'ordre que le nom de l'auteur , ou le titre de l'ouvrage tient dans l'alfabet , fans diftindion des fujets qu'ils traitent. Parmi ce grand nombre il y en a beaucoup de rares , Toit imprimez ou manufcrits , & il s'y en trouve plus de trois mille qui ne font pas dans la Biblioteque du Roi , bien qu'elle foit une des plus nombreufcs de l'Europe. Il y a quel- ques années que cela fut vérifié ; comme nous l'apprend un abrégé de la vie de M. Thevenot , imprimé à la tcfte de ce Catalogue. Cet abrégé , qui n a efté trouvé parmi {es papiers qu'a- prés fa mort , contient plufieurs particularitez qui peu- vent fervir de fupplement à l'éloge que je fis de lui dans le trente- feptiéme Journal de l'année 1 6 9 z . APP AR ATUS D E s s C A V A N s. €9 APPARATUS AD BIBLIOTHECAM MAXIM AM veterum Patrum ^ antiquorum Scriptorum Ecclefiajticorum , Luqâuni editam : in quo qmdquiâ ad eoruw Jcnpta & doihi- nam , varia fque fcnbcnài ^ docendi modos pertwet , dijJertaiiO" nibtts criticu examinatur (^ tllvftratur. De Scnptoubus primi Ecdefi/e fcculi. Opcrk ^ fludio Dom. Nicolai le Nourry Pref- bytt't ^ Monachi Ordinn faniti Benedicli è C.ongreqat'one fan&i Mauri. In 8. à Paris chez Jean AnilTon , rue faint Jaques. 1694. LA première penfée du P. Dom Nicolas le Nourry, Reli- gieux Bened;ctin de la Congreganon de faine Maur , a- von efté de compiler une nouvelle Biblioreque des Pères , &î de n y mettre que les ouvrages qui ne ruffifoient pas pour fai- re un jufte volume. 11 y auroic corrigé les défauts des précé- dentes éditions , mis les ouvrages Grecs avec de nouvelles verfions , lorsque les anciennes auroient efté défedueufes j ajouté avec choix les petites pièces des fpicileq[^es , desanale&es, & d'autres femblablcs collcdions , & fait à la relie de chaque traité un avertilîcmenr pour en expliquer le fujer & l'analife. Il auroic compofé pour chaque fiec!? une Préface, où il au- roic donné une jurte idée des auteurs qui s'y feroienr diftin- guez , de leur génie , de leurs emplois , de leur doctrine , Sc des adverfaires qu'ils auroient eu à combattre. Ce dcftein parut fort beau à quantité de Sçavans aufquels il avoit elle communiqué. Mais d'autres confiderant que pref- que tons ceux qui font profclllon d'étude , ont déjà des Bi- blioteques des faints Pcres ; que l'on venoir d'en imprimer une à Lion p!us ample que toutes les autres , jugèrent qu'il cftoit plus à piopos de fupplcer feulement ce qui manquoit a ces grans ouvrages , en compofanc un Apparat , où l'on fift une exadc critique de chaque traité qu'ils renferment. Le P. le Nourry s'eft rendu à cesraifons, & a travaillé fcrieufement à un apparat , dont il donne maintenant le premier tome , compofé de plulîcurs diflertations, La première traite des Ecrivains du premier fieclc de l'E- gUfe , décrit leur génie , leurs occupations, les occafions qui 1694. S 70 LE JOURNAL les ont engagez à écrire , l'origine , le progrés , & la déca- dence des herefies qu'ils ont combattues. De là on connoic clairement la dodrinc que l'Eglife Catoliquc enfeignoit dans ce'premier fiecle : Car les Pères en réfutant les Hérétiques qui difoient que Jcfus-Chrifl eftoit un pur homme , ou ceux qui foutenoient qu'il n'avoir eu qu'un corps fantaftique , ont établi les dogmes oppofez à ces erreurs , fçavoir , que J. C. eftoit Dieu , & qu'il avoir un véritable corps. Le P. le Nour- ry nous reprefente dans le mefme endroit quel eftoit l'eftac des Ecoles du mefme fiecle ; quelle eftoit la fuffifance des maîtres qui y préfidoient , & la mecode qu'ils gardoicnt pour enfeigner les veritez faintes de notre religion. Le P, le Nourry pafte après cela aux Ecrivains du premier fiecle , & commence par les liturgies publiées fous les noms de faint Jaques , de faint Marc , & de faint Pierre. Il montre d'abord combien la liturgie & l'oblation du facrifîce non fan- glant de la loi nouvelle a cfté fmiple dans fon infticution , & combien a efté étendu le pouvoir laifle parle divin Inftituteur a Ces Apôtres d'y ajouter des prières & des cérémonies. La règle qui lui paroit la plus fure pour reconnoitre ce que les Apôtres y ont en cft'et ajouté , confifte à confiderer attentive- ment ce qui en a efté écrit par faint Paul & par trois des E- vangeliftes ; ou mel'me ce qui en a efté rapporté par faint Ju- ftin dans l'une de fes apologies. Suivant cette règle, il exa- mine les raifons alléguées jufques ici ou pour ou contre la liturgie de faint Jaques ; &: découvre enfin le temps auquel elle a paru , &c le fujct pourquoi elle a efté mife fous le nom de cet Apôcre. Venant cnfuice à la liturgie de faint Marc & à celle de faint Pierre , il montre qu'elles ont ces caraélcres plus cerrains &: plus évidcns , qui font voir que la première n'eft point de cec Evangelifte , ni la féconde du chef du Collège Apoftolique. Ce que j'ai die jufques ici eft tiré des deux premières difl'erta- tionsde cet Apparat. L'Epitre de faint Barnabe fait le fujet de la troifiéme. Le P. le Nourry y fait une analife très exacle de cette epitre, propofe les diftcrentcs opinions des auteurs, ôc les nouvelles DES SCAVANS. yt' conjeftures du Miniftre le Moine fur ce fiijet , avec les fon- deraens de ceux qui k rejettent comme une pièce fup^oCée. 11 recherche en quel temps , &: à qui elle a efté adreflée , les manufcrits qui en reftent , les éditions qui en ont efté faites, les obfervations dont elle a efté enrichie , & l'accufation for- mée contre l'auteur de n'avoir pas bien entendu les prophé- ties qui regardent le Meftie. La diftertation fuivante eft fur les livres du Pafteur nommé Hermas. Notre auteur y montre qui eftoit cet Hcrmas , en quel fiecle , en quelle langue il a écrit , comment il a divifé fon ouvrage , ce qu'il a traité dans chaque partie , qui eft ce- lui qui l'a traduit en latin , & l'eftime que les anciens en ont faire. Il rcfute enfuite ceux qui ont cru qu'il eftoit rempli d'erreurs , & qu'il favorifoit les Novatiens , bien que Tertul- Jien ait reconnu qu'il leur eftoit contraire. Enfin il examine fi le mot de hegKfi dont il eft parlé dans ce livre , eftoit celui d'un ange ; fi le Jeufne appelle Xerofaqie , eftoit d'obligation dans les premiers temps , & quel eft le fens de ce que dit Her- mas , que les Apôtres prêchèrent à ceux qui cftoient dans les enfers. Le p. le Nourry rejette dans la cinquième diftertation, com- me une pièce faufte & fuppolée , la vie de faint Jean publiée fous le nom de Procore , & dans la fixiéme les deux livres de faint Lin fur la mort de faint Pierre & de faint Paul , avec tou- tes les particularitez de l'apparition de Néron , de la conver- fion de la ville de Rome , ic les autres circonftanccs fabuleu- fes dont ils font remplis. La diftertation qui fuit eft une des plus importantes. Le P. le Nourry y a renfermé avec beaucoup d'ordre & de nette- té , tout ce qui a efté répandu dans plufieurs volumes tou- chant les lettres de faint Ignace Martir. Dans la première partie de la diftertation il fait l'abrégé & l'analife de ces let- tres , prouve par des argumens très lolides qu'elles font véri- tablement de fùnt Ignace , & détruit fans reftTource tout ce que Daillé &"un autre Miniftre ont avancé au contraire. Il fait retomber fur Daillé fon fiftême , qui confifte à dire que les lettres de faint Ignace , fe perdirent prefqu'auffi-tôc qu'el- -î L E J O U RN A L les eurent cfté écrites , mais que cent quarante ans après un impoltcur compofa celles que nous avons ; &: l'accable du débris de toutes les machines qu'il avoit dreffées pout le fou- tenir. Dans la féconde pattie il montre par plufieurs raifons , que les interprétations de ces lettres ne font pas de famt Ignace. Et dans latroifiéme il fait le dénombrement des éditions de ces lettres , de leurs verfions , & des notes & des ohfervations niifes au jour pour les cclaircir. Ei.rin il en ajoute de nouvel- les fur le Sacrement de l'Eucarirtie , fur l'aucel où elle eftoit gardée , fur la divinité de J. C. &: fur la hiérarchie des Mini- Itres de l'Eglifc Dans la 8. dilTertation notre fçavant Benedidin établit la vérité de la lettre de S.Policarpe contre DaiLé qui ne l'a révo- quée en doute que parce qu elle ne s'accorde pas avec Ces pré- jugez. Il y combac fcparémcnt le Minillrc le Moine , qui rc- connoiffant que la première partie de ccrce lettre elt defaint Policarpe , nie que la féconde en foit aulîi. Dans la neuvième il montre que les deux lettres publiées fous le nom de famt Martial, font l'ouvrage d'un impofleur qui a vécu long temps depuis , & qui n'avoit point d'autre vue que d'attribuer une grande antiquité à l'Églife de Li- moges. Il refle encore dans ce premier tome trois diflertations , dont je referve l'extrait pour le Journal fuivant. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Zes quatre ftm de l'homme , dédiées au Roi. In 22. à Paris chez Simon Benard. 1694, Mitode ^ fujets dorai [on pour les Dimanches ^ Fefies de fart' née. In 12. à Paris chez le mefme. 1694. A PARIS, Chez Jean CussoN, rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptifle. Avec Privilège du Roi. VII. 73 LE JOURNAL DES SÇAVANS, Du LuNDY 15. Février M. D C. XCIV. APPARATUS AD BIBLIOTHECAM MAXIMAM veterum Patrum ^ antiquorum Scriptorum Ecclefiajiicorum ^ Lugàuni éditant : in ^uo quid'juid ad eorum Jcripta & dollri- nam , vanofque fcnbendi ^ docendi modos fertinet , dtjfertatio- tiibui criticti examinatur ^ illuflratur. De Scnptorthus pnmi Ecciejî^e faculi. Opéra é-fiudio Bom. Nicolai le Nourry Pref- byten S" Monachi Ordinn faniU BenedtHi è Congregattone fanïli Mauri. In 8. à Paris chez Jean Aniflbn , rue faine Jaques. 1694. LA dixième diflertation de l'Apparat donc je continue l'extrait , cil une rigoureufe recherche de tout ce qui a efté avancé jufques ici fur les œuvres de fainc Denis , tant par les Théologiens qui les ont reçues comme forties des mains du premier Evêquc d'Atenes , que par les Critiques qui ne les ont regardées que comme une production du cinquième fiecle. Le P. le Nourry n'oublie aucun des argumens qui ont efté propofez fur ce fujet , ni aucune des réponfes qui y ont efté faites , &: enchérit fur toutes les découvertes & fur toutes les. reflexions des auteurs qui ont traité cette qucftion avant lui. Il met dans tout fou jour la preuve fondée fur une 1694. T 74 LE JOURNAL tradition d'onze cens ans , découvre avec la mefmecrar^ te ce qu'elle a de défeducux , & fait voir combien il s'en faut qu'elle ne foit confiante & continue. Ilnousfiiit confidercrde quelle force eft le filence ou d'Eufebe &; de faint Jérôme qui n'ont fait aucune mention de ces ouvrages , ou de faint Ata- nafe &: de faint Cirille qui ne s'xn font point fervis contre les hcrcfies de leur temps. Il pefe avec beaucoup d'exaditude ce qui fe peut conclure des réponfes^que firent les Catoliques la première fois que ces livres furent citez ; car les Severiens ayant cru que le nom de faint Denis Arcopagite feroit un puifTant appui de leurs fentimens , ils les oppoferent aux Or- todoxes dans la conférence tenue à Conftantinople en 553. Alors Hipation leur répondit que ces livres qu'ils cicoicnc eftoient au moins douteux , & que s'ils avoicnt efté compo- fez par faint Denis l'Areopagite , ils n'auroient pas efté in- connus aux anciens qui n'auroicnc pas manqué d'en tirer de grans avantages contre l'impiecé d'Arius. Dans l'examen que fait notre auteur de ce que les fiecles fijivans fourniflent de preuve ou pour ou contre ces livres , il met en fa place le décret de la Faculté de Théologie de Pa- ris contre Luter, qui n'avoit point encore efté publié. Il eft conçu en ces termes : Addittir ^ hac exlibro de caftivitate Babylonica. In Dionyjio qtii fctipft de calcfli hierarchia , nihil ferme ejî folida eruditionis ; ^ omnta Jûnt tUiUi meditata in prafa- to libro y ac fomniis prope limiUima. Jn Theologia autem myfiick fermcioftdimus eft , pLttoniz^ins magis quam chnftianiz^im. In Ec- clefiaftica vero hierarchia iuàit alleyinii , quod eft otioforum homi~ num ftudium. Hiec propoftio eft fui fa , temere ^ arroyinter ad- ferta , ac viro fanito , ^ inftgni crud.tione claro , injuria ; qvem Damafcemts divinum y^reopagitam , Pauli difapulam , acerrimum ^ detloquentif/imum appelUt. Ce décret eft de l'année 1510. Un autre fcmblable contre Erafme , imprimé en pluficurs endroits, ne fut rendu que fept ans depuis. Comme le ftile de ces livres , les auteurs qui y font citez ,. îes traditions qui y font alléguées , ce qui s'y trouve de ladif- fiipline & des exercices des monallercs, des cérémonies Ec- D E s s C A V A N s, 7 j clefiaftiqucs , & deJa manière d'adminiftrcr les facremcns, fi;rc à faire juger du temps où a vécu celui qui les a ccmpo- fêz , l'auteur de la diAertacion fait de folides reflexions fur toutes ces chofes -, &: bien qu'il ne déclare pas ouvertement fa penféc , il lailTe voir de quel côté il panche. II infinuc mefmc qu'il eft fort probable que ces livres ne furent compo- lez que dans l'intervalle qui fe trouve entre le Concile Gene- tal d'Ephefe & celui de Calcédoine, Enfin en faifant l'ana- life de ces ouvrages , il montre l'utilité qui fe peut tirer de leur leéture , parle des éditions & des vcrfions qui en ont efté faites , des remarques & des commentaires compofez pour ks illiiftrer. L'onzième diflcrtation cft fur les récognitions de faint Clé- ment , fur lefquelles le P. le Nourry par le rapport &c la con- férence de ce qu'Eufcbe , faint Epiphane , faint Jérôme, Ru- fin , Photius , &i niefme les modernes en ont penfé , nouî- montre ce que nous en devons croire de plus vrai-fcmblable, ri recherche qui peut avoir compofé cet ouvrage tel qu'il pa- roit aujourd'hui , quel fruit s'en peut tirer , combien de fois il a efté imprimé , & par qui il a efté eclairci. Les ouvrages recueillis dans l'appendice du premier tome de la Biblioteque des Pères imprimée à Lion , font le fujet de la dernière dilfertation de cet Apparat. Elle eft divifée en plufieurs chapitres. Le premier traite de l'hiftoire d'Ari- ftée , dont l'analife remplit tout le premier paragrafe. Le fe- cond paragrafe contient Les difterentes opinions qui ont par- tagé les fçavans fur ce fujet. Les uns ont cru que la relation de la verfion des Septante eftoit l'ouvrage d'Ariftée. Le^ au- tres font demeurez d'accord qu'Ariftée avoir autrefois com- pofé cette relation ^ mais qu'elle avoir efté perdue , & que celle que nous avons eft une pièce fuppofée. D'autres enfin, comme Vives & Scaliger , ont foutenu qu'Ariftée n'avoir ja- mais fait de relation de cette verfion. La première opinion femble fondée fur l'autorité de Jofe- phe , de Philon , de faint Juftin , de faint Irenée , de Clé- ment d'Alexandrie , dont les uns ont parlé précifément de fhiftoire d'Anlléc ;,&: les autres fans faire mention d'Ariftée 7é LE JOURNAL ont raconté de quelle manière Ptolcmée avoit fait traduire les livres facrez en langue Greque. Scaliger & les autres mo- dernes qui fouticnncnt la féconde opinion , s'appuyent prin- cipalement fur le témoignage d'Hermippe de Smirne qui vi- voit fous le règne de Pto.'emce Evergete , & qui au rapport de Diogenc Laerce , a afluré que Demetrius de Phalere de- vmt fufpcd & odieux à Ptolemée Philadelfe , &c mourut au commencement de fon règne : d'où il s'infcrc qu'il y a peu d'apparence qu'il lui ait jamais confclllé de procurer une tra- dudion de l'Ecriture fainte pour en enrichir fa bibliotequc. Le P. le Nourry pefc exadement coures ces raifons & pluficurs autres, & rcduilant la principale difficulté à Toppolkion qui paroit entre Hermippe & Ariftobule , il déclare que le té- moignage de ce dernier lui femble plus fort que celui de l'autre. Le livre des teftamens des douze Patriarches eft examiné dans le fécond chapitre , & rejette comme fuppofé , &: com- me contraire en plulîeurs points aux divines Ecritures. 11 y efi: parlé des manufcrics de ces teftamens , &: de la vcrfion Latine qu'en rit Robert Grokede Evêque de Lincoln en 1141. Le dernier chapitre eft employé à agiter la fameufe que- ftion des huit livres des oracles , & à examiner trois opinions qui ont efté formées touchant les SibiUes. La première efl; de ceux qui croyent qu'elles ont compofé ces huit livres a- vanc la naid'ance de notre Seigneur. La féconde eft de ceux qui quoi que perfuadez qu'il y a eu des Sibilles qui ont fait des prédidions Touchant ce qui devoit arriver aux Romains, ne peuvent néanmoins demeurer d'accord qu'elles ayent ja- mais rien prophccifé touchant la religion Chrétienne , & qui attribuent les vers qui la regardent à un Chrétien qui a vécu vers le milieu du fécond fiecle. La troifiéme eft de ceux qui reçoivent les vers citez ou par les Payens ou par les faines Pe* res , &: rejettent tous les autres. L'auteur de l'Apparat exa- mine ces dirferens fentimcns avec fon exadicudc ordinaire , prouve contre les Sociniens , qu'il y a eu en effet des Sibilles ; qu'il y a un grand nombre de faufl'etez &c d'impoftures dans ks DES S C A V A N S. 77 îcs huit livres que nous avons fous leur nom ; après quoi il réduit toute la difficulté à Içavoir fi les paflTages citez ou pat les auteurs profanes , ou par les auteurs Ecclelialliques , font véritablement d'elles. Avant que de la rélbudrc il pefe tou- tes les raifons alléguées ou pour ou contre, & découvre ce qu'elles ont de fore ou de foible , & fait des icflexions tou- tes nouvelles fur les partages deCiceron , «S<: fur la quatrième eclogue de Virgile. De là palîant aux autoritcz de faint Ju- ilin , de Laélance , de Conitancin , il montre que Gallée qui a traité le dernier ce fujet dans un gros volume , eft tout à fait -inexcufable d'avoir rejette avec mépris le fentimentdes plus célèbres perfonnagcs de l'antiquité. Le P. le Nourry entre dans la difcuifion des raiions qui iervcnt à appuyer ce fenri- ment , &C des réponf'es qui peuvent le détruire. Enfin il pro- pofece qu'il juge pouvoir eftre plus raifonnablement avancé 'fur ce fujet. Il finit ce premier tome par un avertifl'emcnc -qu'il donne fur l'hiUoire de Bcrofe qui n'a pas efté imprimée dans la Bibliotequc des Pères , quoi que la ccnfureque Gaf- pard Varrerius en a faite ait eu fa place dans l'édition de Co- logne , & depuis dans celle de Lion, KEMARQJJES SUR LA RE'PONSE QJJI A ESTE' inférée fous le r.om de M. BernouUi dans te j. Journal de cettt annc€ , au fujet d'un problème de Geometrk. JE voudrois bien n'eftre pas obligé de refufer à M. Bernoulli le filence qu'il me demande par ià. réponie : mais elle eft publique , S<. (qs prétentions font telles que je fuis engagé ■à' en dire mon fcntiment , pour ne pas encourir le foupçon de favori fer l'erreur. Il prétend avoir refoUi dans le Journal du 3 1. Août dernier, le problème qui avoit efté propofé avec un prix de éo. piilo- Ics dans le Journal du 20. Juillet : & je prétens que des règles ■qu'il a données à celles qu'il auroit dû donner pour le rélou- ■dtc , il n y a pas moins de différence que du troiliéme dégté 3. un degré infiniment élevé. Cependant il parle de fa folution en plufieurs endroits de 1694, V 7g L E J O U R N A L fa réponfe comme fi l'on avoic grand tort d'y trouver à redi- re , & il s'ccric c^elle eftfi évidemment bonne , qu'il faut efi/e partie , ^ i'eflre propofe de ne jam^m fe rendre , pour y trouver la moindre difficulté. Toutefois il avoue qu'il auroit befoin d'une meiode qui fuft fuffifunte pour ré foudre par Géométrie les ei^alitez^ de tous lei deqrez^ , t^ qtie celle quil a citée na efiè faite que pour le troifiéme feulen.ent. Enfuite il ajoute o^dcfi vrai que l'appli- cation de cette metode du troifiéme degré devient très pénible dans les egali te z^de plus de trois dimenjîons ; que toutefois la difficulté note pas la poffibilité. Mais pour faire que la folution de M- Bernoulli foit bonne (^ générale , comme U le prétend , il faut quelle (atisfaffc au problême propofé ; & pour y fatisfaiie il ne fuiîit pas qu'il fok poflîble d'appliquer la metode qu'il a citée , il faudroit enco- re une metode pour régler cette application , ou bien en don" ner une autre qui fuft équivalence aux deux enfemble ; &: en quelque manière que cela arrive , l'on a befoin que la metode embraffe tous les dcgrez^^ ^ qu'elle foit différente de celle que M,. Rolle a donnée pour le mefme fi:]et. C'eft encore une à.Q% conditions du problème : Que des deux courbes qui doivent concourir pour refondre par Géométrie une égalité quelconque , il faut qu'il y en ait une qui fait donnée , ^ que ï au- tre foit du degré le plus fm pic qu'il efr poffible. Ainfi il eftoit inu- tile que M. Bernoulli fe donnait la peine de recourir à la me- tode de M. Siufe pour donner un eclairciffement folide à fa fo- lution , parce que cette metode ne fuiiîc que dans les occa- fions où il eft libre de prendre & de iîtucr des courbes ac- commodantes ; & l'on peut voir auill que bien \o\n..à'eclair- cir par cette metode la pvfiùon des courbes qu'il avoir donnée dans fa folution , il a elle oblige d'y faire un changement gê- nerai. Comme il fuffiroic de lire avec un peu d'at'ention les au- tres endroits de (x réponfe, pour s'appercevoir qu'ils ne prou- vent rien contre moi ,&: qu'ils font contraires à ^q% fentimens ^ )c ne donnerai point les obfervations que j'y ai faites , afin de me conformer en cela à fes intentions. Mais il y a des difficultcz imposantes qu'il a touchées dans DESSCAVANS. 79 fâ fblution fans en parler dans fa réponfe ; &: il eft bon de les remarquer , parce qu'il ell necelî'aire de s'en démêler pour ré- foudre le problême : C'eft de donner une metode pour trou- ver les limices des racines de coûtes les egalitez , qui foie au/li générale que celle que M. RoUe a donnée fur ce fujet , &: qui en foit différente. Et il eiï certain que celle que M. Ber- noulli a citée pour ce befoin , eil très dcfedueufe ; ce qui fe peut vérifier très facilement &c fort vîce avec des connoiffeurs dans une conférence. Ainfi il i'c trouvera que M. BcrnouUi n'a point fatisfait aux dilKcukez capitales du problême , & mefme que l'on feroit infinimem éloigné d'y latufairc parles metodes qu'il a citées pour ce fujct. Ce problème fuppofe aulfi que l'on prépare l'cgalité pro- pofée ; &: cette préparation le peut faire forr aifémcnt par le moyen d'une régie que je donnai fur ce fujet dans le Journal du 14. Septembre dernier. Pour y réuiîîr par la règle de M. Bernoulli , l'on auroit befoin de transformer &c de refoudre une fuite d'egalitez , du moins aulfi compolécs que celle qui ell en queftion ; &: comme il ne donne point de détermination analitique pour juger de celle qui réuifit , il fe trouvera pour cette raifon , & pour d'autres encore dont on ne parle point , que fa règle ell; inutile dans l'ufage. Mais après tout il y a un tour ingénieux qui marque en lui & de l'efprit & de l'Al- gèbre. Je confens qu'il prenne Meffieurs de l'Académie Royale des Sciences pour juges de notre difterend , quoi que j'aye de fortes raifons pour en recufer quelques-uns. Il me fufïit qu'ils veuillent bien figner le jugement qu'ils en porteront , &: qu'il me foit communiqué. La metode que j'avois promife pour faire évanouir les in- connues qui font communes à plufieurs egalitez , confifte à les multiplier par des quantitez pleinement indéterminées , dont l'origine foit l'inconnue mefme que l'on veut faire éva- nouir. Enfuite on compare les produits entr'eux , fçavoir les termes de l'un aux termes de l'autre , chacun à fon pareil: d'où il.refulte des egalitez auxiliaires qui ont pour inconnues- :z •80 LE JOURNAL Jes indéterminées introduiccs , &c dont la résolution donrw ce ■que l'on demande. Et généralement parlant , pour appli- quer l'Algèbre à l'Algèbre mefme , pour l'appliquer aux courbes géométriques &: aux queftions qui s'y rcduifent , un des meilleurs moyens d'y réulllr , c'cù. de fuppofer des ega- hiez pleinement indéterminées pour en tirer des egalitc" auxiliaires. Cela fera expliqué dans la fuite. CAR.MINA PACIFICI MAXIM! POET^ ASCULANI. /« ^. Paru a. jépz. PAciEicus Maximus vint au monde au commence- du qumziéme (îecle , duranc les troubles dont l'Italie cltoit alors agitée. Ses parcns qui avoienc fuivi le parti qui s'cftoit trouvé le plus foible dans A/coh , furent contraints de s'enfuir ; &: fa mère prelfée des douleurs de l'enfantement, s'arrêta dans le château de Murri , où elle accoucha de lui fous un olivier. Les troubles ne furent pas fi- tôt appaifcz que fcs parens retournèrent à Afcoli , où dans la fuire du temps ils l'cleve- rent avec foin , & lui firent apprendre les belles lettres , la Philofophie & la Juriiprudence , dont il fit àcs leçons pu- bliques dans les univerfitez les plus fameufes d'Italie. Il ex- cella principalement en Poëfie : mais fon inclination pour les fcicnces ne l'empêcha pas de fuivre la profeflïon des ar- mes , dans laquelle il fervit utilement Alfonfe Roi de Si- cile. Il fut cftimé de tous les Sçavans de fon fiecle , & n'eut entre eux aucun autre ennemi qu'Ange Poiitien , contre le- quel il compofa une facire. il mourut à Fano âgé de prés de cent ans. Dans fa vicillcire il eut un fils qui ne vécut que â\x ans. Ses poëfies eftant devenues fort rares , l'Imprimeur de Par- me qui a fouhaiié de les mettre une féconde fois fous la preflc , a reçu de M Maghabecchi un exemplaire fur lequel .cette édition a elle faite. On en a rctranciié ce qui bleflbit le moins du monde l'hon- nêceté DESSCAVANS. 8t néceté , & ce que l'auteur avoit condannc lui-mefme avant fa mort. Outre les d'x livres d'elegies , les deux fur Lucre- ce , & les deux fur Virginie qui font dans ce volume , il en avoit fait fcpt de la fageffe , huit de la continence &: de la chalieté , ne^f de la modération de l'eTprit , du bien , de la deftinée , & de l'anie , Se dix de la Providence. MEMOIRE SUR LA QTJjESTION DE PRESEANCE four MeIJieuri les Ducs ^ tatrs de France , contre M. le Ma- réchal Duc de Luxembourg, In 12. à Paris chez Louis Se- veftre. 1693. IL s'agit de fçavoir fi M. le Maréchal Duc de Luxembourg n'ayant eu jufqu'à prcrentrang&: feance en qualité de Duc &: Pair de France que de l'année 166 i . il peut l'avoir de l'an- née 1581. temps de l'enregiltremcnt de l'ancienne Pairie accordée au Bifayeul de Madame de Luxembourg dans la li- gne féminine , fous prétexte que l'ereélion de Duché & Pai- rie eftoit pour ce Bifayeul & Tes héritiers , tant mâles que fe- melles , ïc ayans caufe. Mrs. les Ducs & Pairs de France fouciennent par ce mé- moire , que cent précenfion eft contre le droit commun, con- tre la nature & la dignité des Pairies , contre la poirclfion des Pairs , contre l'interelt public , contre l'ordre perpétuelle- ment obfervé entre les Pairs ; & pour la détruire fe fervent de quatre moyens qu'ils déduifent Fort au long , & que je ré- duirai à peu de paroles. Le premier efl l'arreft contradidoire intervenu en léôz. après une plaidoirie folenr.elle. 11 cl1: vrai qu'il n'a efté rendu que par provifion ; mais il ne lailTe pas de former un fort pré)ugé pour deux raifons. L'une ert qu'en matière de pré- feance les provifions ont prcfquc toujours pafl'é en définitive. L'autre eft , que cette provifion a edé exécutée , &: que M. de Luxembourg n'a pris rang & feance que du jour de fa réception. On trouve dans la déduflion de ce moyen des reflexions importantes fur l'origine &: fur la nature des Pairies. 165)4.. -^ $1 LE JOURNAL Le fécond eft que dans les Duchez &c Pairies femelles , le titre de la dignité perfonnelle des Ducs &: Pairs , la préro- gative de la fcance en la Cour , & les autres fon(5lions des Pairs ne peuvent paHcr à la hlic d'un Duc &: Pair , ni à Ton mari , pour avoir le rang de l'ancienne ereétion. L'auteur de ce Mémoire pour rendre ce moyen plus intel- ligible , établit deux propofuions. La première , que dans les Duchez Pairies il f.iut diftingucr le titre de propriété & les droits réels , de la dignité , du rang & de la feance en la Cour , au facre & au couronnement des Rois. La féconde , que dans les Pairies femelles les lettres d'é- reélion en faveur de l'impétrant & (es hoirs tant mâles que femelles & ayans caufc, ne fe peuvent entendre que des droits réels , & non de la dignité perfonnelle , ni de la feance en la Cour , ni des fondions du facre. Le troifiéme moyen eft que la dignité de Duc & Pair dans les Pairies mefmc femelles , & le droit de feance & de rang du jour de l'ancienne éreétion , ne peut paifcr à la fîlle de la fille d'un père , ni à fon mari. C'cft un des forts dont fe fer- vent Mrs, les Ducs & Paires. Ils foutiennent que les Pairies mefme femelles , n'ayant efté érigées que par un privilège particulier &: contre le droit commun , qu'en faveur de la maifon de celui à qui les lettres ont efté originairement ac- cordées , la fille du dernier mâle qui en a encore le nom , & qui eft de la famille , peut participer à la dignité donnée à cette famille. Mais la fille de la fille qui n'cft plus de la fa- mille , & qui n'en porte plus le nom , n'y peut eftre admife , moins encore fon mari & fes defcendans. Le dernier moyen eft , que les lettres obtenues par M. de Luxembourg en i 6éi. font une nouvelle eredion , &que les lettres de i 6-)6. n'ont donné aucune atteinte au droit aquis à Mrs. les Pairs par le titre mefme de M. de Luxembourg ; qu'il y a eu mutation en fa perfonne , & par fon mariage , &: par les claufes de fon concraél , qui font difcutces dans le refte de ce mémoire avec une grande pénétration. DESSCAVANS. gj PREMIERE REPLIQUE DE M. REGIS à U Réponfe du R. P. Malebranche , Prêtre de COratoirt j Touchant la raifon fbyjîrjue de diverfcs apparencei de qrandeur du Soleil ^- de la Lune dam Ihorifon ^ dans le nîeridten. In ^. à Paris chez Jean Cuflon, rue faint Jaques. 16^^. MR. Regjs pour rendre fa réplique plus intelligible, éta- blit d'abord les principes généraux de l'Opiique i & ces principes eftant établis , ii tâche de faire voir qu'il n'y a rien qui leur foie plus oppofé que l'opinion du P. Malebran- che couchant la grandeur apparente de la Lune dans Thori- fon. Ces principes font , i. Q^e lemefme ohjet ne peut ejïreva À différentes difiahces fous le mefme angle ni par le mefme anqle. z. Que deux objets diverfement éloignez^ eftunt vus fous un mefme angle , font vus par des angles differens , ^ tracent des images inè. gales i en forte que le plus eloiqné trace la plus petite , quoi quil foit le plus grand, 3 . Que la grandeur (^ la. difance véritable font la feule ^ unique caufe -phifique de la grandeur ^ de la dijiance appa- rente des objets. Ces principes eftant pofcz , M. Régis foutient , i. Que le p. Malebranche n'a eu aucune raifon d'établir dans le i. arc. de fa Réponfe , Q^e d.uA objets qui font vus fous le fmfme angle ^ tracent fur le nerf optique une image eyxle. Cela répugne au fé- cond principe. Il foutient i. Que l'Auteur de la Réponfe fe trompe beau- coup lors qu'il dit a la fin du lecond arc. Que cefi la r, efme chofe à l'égard de deux objets diverfement éloignez^, d'efire vus fous des angles égaux , ^ de tracer des images égales. Cela répugne encore au fécond principe. Il foutient 5. Que l'inégalité de l'apparence de deux objets diverfement éloignez ne dépend pas de ce qu'ils font vus fous le mefme angle , ni de ce que leur diftance eft avfluellemenc apperçue , ( comme l'Auteur de la Réponfe le prétend dans le 3.arr, ) mais qu'elle dépend de l'inégalité des images qu'jîs tracent , de l'inégalité des angles par lefquels ils font vus , & de l'inégalité de leur diftance véritable connue ou non con- nue âûuclleracnt. 84 LEJOURNAL il foutient 4.Qi£e fi de deux objets vus fous le mefmc angle, le plus grand paroit le plus éloigné, ce n'cfl pas parce que nous appercevoiis plus d'objets entre lui & nous, ( comme l'affure l'Auteur de la Réponfc art. 4 ) car fouvent nous n'y en apper» cevons aucun : mais c'cft ieulemcnr parce qu'il faut que l'œil s'applatiffe Sc fe configure diverfemenc pour voir cet objet dillinclcmenr. Il foutient 5. Que bien que la voûte du ciel paruft eftcdi- vement comme un demi Ipheroideapplan (comme l'enfcignc l'Auteur , ) cette apparence ne ferviroit de rien pour produire ]a grandeur apparente de la Lune dans l'horifon , parce que félon les trois principes d'Optique ci-deifus établis , la gran- deur apparente des objets dépend toujours de la grandeur des images qu'ils tracent , des angles par lefqucls ils font vus , &: de leur dillance véritable, M. Rtgis palle tout le 6. art. au P. Malcbranche ; mais il lui nie la féconde partie de la mioeure de l'argument qu'il pro- pofe dans le fcptiéme , qui ell que Linterpofition du verre enfumé fie ch.inqe point C imd'ie de la Lune. Il foucient au contraire qu'el- le la change beaucoup , &: qu'elle la rend plus petite en la manière qu'il l'explique. 11 foutient encore que c'cfl: fans aucune raifon que l'Auteur conclut dans le 9. art. que lu Lune en quelque endroit du ciel quelle fait , eft.int vue foui un angle d'un demi dcçé , l'efprit , fdon les rè- gles d'Optique , Le doit voir plus grande fur l'horifon que dans le mé- ridien. Car félon le premier principe , la Lune en quelque endroit du ciel qu'elle foit , n'eft pas vue fous le meime angle ni par lemefme angle : elle eft vue au contraire fous des an- gles &: par des angles toujours diiïcrens lors qu'elle ell à difte- rentes diltances. Enfin M. Rcgis conclut, que de toutes les raifops que le P. Malcbranche apporte dans fa Réponfe pour confirmer l' opinion qu'il a voulu établir dans fa recherche de la vérité , touchant la grandeur apparente de la Lune dans l'ho- rifon , il n'y en a pis une feule qui ne foit dircdement oppofce aux véritables principes de l'Optique. 11 prétend au con.raiic que fon explication y eft plus conforme ; comme il paroit par les répliques qu'il a faites à chaque article de la Réponfe. Q / A Paiis chez Jean Cusson , rue faim Jaques , à faim Jean Baptifte. VIII, «5 LE JOURNAL DES SÇAVANS. Du LuNDY 22. Février M. DC. XCIV. HISTOIRE D'EMERIC COMTE DE TEKELI , OU Mémoires pourfervir à fa vie , où l'on voit ce qui s'efi paffe de plui conjîderable en Hongrie depuis fa naiffance jufquk pefent, Jn 22. à Cologne. j6^j. CEs Mémoires font divifez en quatre livres. Le premier commence à l'année 1656. qui eft celle de la naiffance d'Emcric Comte Tekeli. Etienne Tekeli Ton père eftoit un des plus riches Seigneurs de la haute Hongrie , qui jouïffoit de trois cent mille livres de rente. Il fit élever Ion fils dans la Religion Luteriennc de laquelle il faifoit lui-mcfmc pro- feffion. Pendant qu'il paffoit Tes premières années dans les amu- femcns de l'enfance , les troubles de Hongrie s'accrurent par la défiance réciproque de l'Empereur & de la nobleffc de ce Royaume. François VeffeJmi en eftoit alors Palatin , & en cette qualité poffcdoit une autorité prefquc fouverainc. George Ragotski Vaivodc de Tranfilvanie eftant mort^plu- fieurs partis fe formèrent pour lui donner un fucceffeur. Fou- lon Gabor fils de Bctlcem ; qui avoit efté Vaivode avant Ra- gotski , l'emporta par le fecours du Grand Seigneur fur Chi- 1694. Y S<5 LE JOURNAL min Janos que l'Empereur fourenoit. Le Grand Seigneur ne voulut pas approuver cette elcdion , & conféra la principau- té de Tranfilvanic à Michel Abafi , qui fut reconnu par les peuples qui appréhendèrent de s'engager dans une longue guerre avec la Porte. Le Palatin mourut en i é6j. &: le Comte Nadafti Prefidcnt du Confeil Souverain brigua cette charge. Mais l'Empereur qui apprchendoit qu'il ne s'en fcrvift pour foutenir les privi- lèges du pays , ne voulut pas la lui accorder. On dit que pour fevangerde ce refus il fe refokit de tuer l'Empereur, ou de fe failirdeluij &: enfin de l'empi^fonncr. Il fut accule & condanné à la mort par des Juges que l'Empereur avoir nom- mez au préjudice des privilèges des Hongrois. Il fut exécu- té à Vienne le 30. Avril 16 71. les Comtes Serin &i Frangipa- nj à Ncuftad , &c celui de Tattcmbach à Grats, On voit dans le fécond livre , que l'Empereur à qui le trop grand pouvoir du Palatin avoir elic fufped , fupprima cette charge , & établit en Hongrie une Chambre compofée de huit Confeillers , &: de deux Secrétaires , outre le Prefidcnt. Les violences que cette Chambre exerça donnèrent ou fujec ou prétexte à la NoblelTe de s'alfembler , & de prendre les armes. Les Turcs entrèrent dans le parti ces mécontens qui avoicnt un corps de vint mille hommes , qui d'abord furent commandez par le Comce Uladjflas VcflVlini fîls du défunt Palatin : mais bientôt après le Comte Tekeli fut mis en Ci place. Lors qu'il eue le commandement des troupes il fit pu- blier qu'il n'avoir point d'autre dcflein que de rétablir la Hon- grie dans fcs anciens privilèges. Il fut foupçonné en i 680. d'avoir demandé à l'Empereur la permiffion d'epoufer la veuve du Prince Ragocski, & deux ans après il l'epoufa fans le confentemcnt de ce Prince. Bien- tôt après il fut déclaré Prince de la haute Hongrie par le Grand Seigneur , qui lui envoya pour cela une vefte , un fabre , & un etendart. Dés lors il fit battre de la monnoye , où eftoic d'un côté fon effigie , avec ces paroles : Emericus Cornes Te- keli Princeps y ac purtium Regni Hunyiriie Dominui , &c fur le revers , Pro Deo , Pairia , ^ Ubertate, 11 convint inconti- DESSCAVANS. tj nent après d'une fufpenfion d'armes avec les Impériaux. , Les deux partis firent de grans préparatifs au commence- ment de l'année 1683. & Tekeli publia un manifefte pour af- furer de la protedion du Grand Seigneur ceux qui fe rangc- roient fous fes ctcndars. Au mefme temps l'armée des Turcs s'avança jufqu'à Vien- ne , où elle mit le fiege que le Roi de Pologne fit lever le i z. Septembre. Cara Muftafa Grand Vifir voulut rcjetter ce mau- vais fuccés fur Tekeli qui juftifia fa condui;c , & fit voir que ce n'eftoit que parla faute du Grand Vifir que l'entreprifc eftoic manquée. A l'entrée du livre fuivant il cft raconté de quelle manière le Comte Humanaï qui avoit accepté l'amniftie accordée par l'Empereur à ceux qui avoient porté les armes contre fon fer- vice , fut a(Ticgé & pris par le Comte Tekeli dans le château d'Ungwar, S>c enfuite exécuté à mort Cette éxecution d'un ■Seigneur Catolique fit publier aux Impériaux que Tekeli ne travailloit qu'à établir la Religion proteftante dans la Hon- grie ; ce qui l'obligea à écrire une lettre au Pape le 1 1. Avril I 684. par laquelle il protège à Sa Sainteté qu'il n'a pris les ïirmcsni peut ruiner la Religion Catolique, ni pour priver le Roi de Hongrie de fes droits , mais uniquement pour confer- ver à fa patrie les privilèges qui lui avoient elle accordez a- vant que la Maifon d'Autriche y etift mis le pied. Des Officiers Turcs ayant accufé TcKeli pour fe juftifier eux-mefmes du mauvais fuccés de leurs armes , il fut arrêté par le Bafla du Grand Varadin au fortir de table en i 6 Sy. Mais les Turcs reconnurent bientôt après le tort que fa détention leur pouvoir faire , & le mirent en liberté. II ne fe fut pas fi-toft rendu à Temifwar , qu'il y publia un difcours qui eft inféré ici tout entier , & qui explique les fii- jets de plainte qu'il avoit contre lEmpercur. L'année fuivante fut remarquable par la prife de Bude, par celle de Segedin & des cinq Eglifcs , par une vidoire que le Duc de Bavière remporta le 1 1. Août fur les Turcs. L'é- leûion S>c le couronnement de l'Archiduc Jofeph fils de l'Em- 88 LE JOURNAL percur , fut le fruit de fes vidoircs. Ce notable changement arriva en 1687. La mefme année Mahomet IV. fut dépofc, & Sohman 111. Ton frère mis fur le trône. Le dernier livre de ces Mémoires eft rempli de grans cvc- nemens , entre lefqucls la capitulation de Moncatfeck fc prefente la première , après une longue &: opiniâtre reûftan- ce. TcKcli avoit alors cfté mandé à Conftantinople pour y dire Ton avis fur l'citat de la guerre de Hongrie. Le bruit que les Impériaux firent courir qu'il y avoir el^é' étranglé, le porta à publier un manifelte dont les raifons firent peu d'im- prcflîon fur les Hongrois , parce qu'elles n'cftoient pas ap- puyées de la force des armes. La PrinceflTe fon cpoufc ellant arrivée à Vienne , y eut le déplaifir d'cllre privée de fcs enfans qui jufqucs alors avoicnc cfté élevez dans la Religion Lutcnenne. Tekeli ne put ob- tenir permiflîon de lui écrire , Se le reft'cntiment des Offi- ciers de Vienne alla jufqu'à corrompre des foldats pour fe dé- faire de lui. Les coupables furent convaincus &: condanncz au dernier fupplice. La mort de Charles IV. Duc de Lorainc arrivée en 16^0. priva le parti des Impériaux d'un puiflant appui. Celle de Michel Abafi Vaivode de Tranfilvanie , donna lieu à des bri- gues pour lui élire un fucceffeur. L'Empereur fe déclara pour le fils du défunt , qui trouva moyen de fe faire élire nonob- ftant le manifeftc que le Comte TcKeli avoitpubhé pourfou- tenir fes prête nfions. Ce livre finit par le récit de la bataille de SalenKemcn que Je Grand Vifir perdit avec la vie. Quant au Comte TeKeli , l'auteur de ces Mémoires fouhaitc qu'il puifle éviter les effets de la jaloufie de la Porte , & ceux dureflentiment de la Cour de Vienne , & voir un jour la paix établie entre ces deux Em- pires , pour jouît lui. mefme de quelque repos après tant d'a- gitations Si. de troubles. r Le DES se A VANS. 8; LE TEMPS, A Mademoifelle de Scudery. CE n'efl: qu'un feul moment , S^^pho , que je m'arrête , Et pour un vol léger mon aîle cft toujours prête : Mais malgré mon chemin qu'on ne voit point finir , Et qui me conduira dans le vafte avenir , Pourrai-je m'erapêcher de refpeder fans cç^e De votre efprit charmant l'aimable politefle > De ma terrible faux ne craignez point les coups ^ Elle ne peut agir fur LOUIS ni fur vous. J'ai détruit mille Rois & mille £ftars célèbres , J'ai répandu fur eux d'éternelles ténèbres ; Leur nom mefme eft perdu dans le chaos des ans : Mais LOUIS que le Ciel guide à pas eclatans , Doit-il craindre un tel fort pour l'illuftre carrière Où tout n'eft que triomphe , &: miracle & lumière ? La vidoire attachée à fon nom glorieux , Le défend de l'oubli des hommes & des Dieux. Vous le fçavez , S a p h o : Mais un inrtant volage A peine vous laiflant remarquer mon vifage, Et me fcntant glifler fous mes pieds fugitifs, Pcindrois-je ce grand Roi de rayons aflez vifs ? \\ faut plus de repos ; ma courfe eft trop rapide , Et vous tracerez mieux un fi fameux Alcide. Racontez fes hauts faits. Echo de votre voix. Dans les fiecles fururs j'en inlkuirai cent Rois, Qui_ malgré mille exploits d'immortelle mémoire. Ne pourront égaler la moitié de fa gloire. Monfieiir de Bètoulaud. V REPONSE DE SAPHO AU TEMPS. Ous qui pafTez fi vite , &; pourtant lentement, Ne vous arrêtez pas , écoutez feulement. J'ai mille grâces à vous rendre 1694. Z 90 LEJOURNAL De l'elogc charmant que j'achève d'entendre r Car le plus éloquent des Dieux , S'il parloir de LOUIS, n'en paricroit pas mieux. Je l'ai via tout brillant d'une éclatante gloire, Tel que les Filles de Mémoire Le peignent tous les jours pour la poftcrité. Sans en avoir pu faire un feul portrait flaté ; Et de votre difcoars mon ame eft Ci ravie , Que j en ferai l'Echo le refte de ma vie. Parlerois-je fans vous du plus grand des mortels , Qui du temps des Cefars auroit eu des autels > A MADEMOISELLE DE SCUDERY, Sur fa réponfe au Timps. Madrigal. D E ces éloges cclarans Vous avez beau combler le Temps y Contre lui je fuis en colère ; Sapho , loin de pafl'er d'une aile fi légère, Il dcvroit s'arrêter fur cent faits inouïs : Peut ii mieux s'employer qu à célébrer LOUIS. M. Bo[qmUon. Ces trois pièces ont eflé faites à Poccafion d'une cornaline antique , fur laquelle le temps eft gravé avec fes ailes dé- plovées, & fa faux à la main , qui a eilé envoyée de Bordeaux à Mademoifelle deScudery par M. de Bétoulaud, lepremier jour de l'année. IL PAROCCO ISTRUiTO. OPERA IN CUI SI DI- mojïra à quai fi fia curato novcllo tl débita che lo ftrigne , ^ la via da unerfi neïï adempirlo. Data in luce da Paolo Stzncri délia Comp. di Giefu, é'C In 12. In Firenfe é" in Parma. j6p2. LE P. Segneri a reconnu dans les Mifîîons où il a efté long-temps employé , que la fandification du peuple fi- DES se AV AN S. 5,1 dele dépend principalement du foin des Curez , & dans cet- te vue il a compofé cet ouvrage pour les inflruire de leurs devoirs , qu'il réduit à la prédication de l'Evangile , à l'exem- ple des vercus chrétiennes , &: à l'adminiflration des Sacre- mens. Avant que de leur expliquer ces trois fortes de devoirs , il leur reprefente combien il eft dangereux en gênerai à qui que ce foit de s'engager dans une condition fans y eftre ap- pelle de Dieu , & en particulier combien il l'eft à un Eccle- fiaftique de fe charger de la conduite des âmes fans eltre é- clairé de trois lumières qu'il doit fuivre dans ce choix. La première eft au dedans d eux-mefines : la féconde eft au def- fus } & la troifiéme eft autour d'eux. La première eft la lu- mière de la raifon , qui leur découvrira s'ils ont l'âge , la fcien- ce , & la probité neceftaires pour s'aquiter des fondions pa- ftorales ; s'ils encrent dans une cure par les vues pour lefquel- les elle a efté indituée , ou fi ce n'eft point par des vues con- traires , pour y trouver les commoditez temporelles , &: pour y vivre à leur aife. La féconde lumière eft une lumière de Dieu ; & la dernière eft celle des hommes fpiritueis de qui il faut prendre confeil. Pour convaincre les Curez du premier de leurs devoirs qui eft de prêcher , il fait retentit à leurs oreilles la voix de la loi divine , qui a envoyé le Sauveur , &: après lui les Apôtres & leurs fuccefleurs , annoncer à tous les peuples la fcience du falut ; &: la voix de l'Eglife, qui dans fes Conciles a recom- mandé cette fondion aux Pafteurs. Le P. Segneri les avertit que pour rendre cette fonction utile à leurs paroifllens, leur parole doit reffembler à une epée tranchante , félon la com- paraifon de l'Ecriture. Cette epée doit eftre de bonne trem- pe , & dans une bonne main. La trempe demande de bon- nes matières , expliquées avec beaucoup d'ordre &: de clar- té. Mais la bonne main c'cft la grâce de Dieu , qui touche le cœur pendant que la voix du Prédicateur ne touche que l'oreille. Il leur dit que rinftruftion des enfans eft une des plus ne- ceflaircs parues de la prédication ; Se pour empêcher qu'ils ne 5>i LE JOURNAL la négligent, il leur apporte l'exemple de Gerfon qui dans uh âge avancé ne crut poinc fe rabaifler de faire le catechifme aux enfans , & qui pour confondre l'orgueil des Doâ:curs qui mépnfoienc cet emploi, compofa le traité de p.irvulis adChri- fium trahendii. A l'égard du fécond devoir des Curez , qui confîfte dans l'exemple , le P, Scgneri leur reprefente qu'il ne fuffit pas qu'ils n'en donnent poinc de mauvais , mais qu'ils en doivent donner de bons par rapport à D;eu , par rapport au prochain, & par rapport à eux- nicfmes. Par rapport à Dieu \\% font o- biigez à donner des exemples de religion , dont il y a des ûdes intérieurs qui confident à concevoir une haute idée de Ti Majefté , &: de le reconnoitre & comme éternel , & com- me immcnfe , c'eft à dire comme mr.itre des temps & des Jicux , entre Icfquels il s'en cft refervé quelques uns où il veut eftre parciculieremenc honoré. Il y en a aulTi d'exce* rieurs , comme l'adoration , le facrifice , & les cérémonies. Sur le Sacrifice , le P. Scgneri remontre aux Curez qu'il y a trois défauts à éviter , de dire la Meflc .1 la hâte , de la di- re par coutume , de la dire en péché mortel. A l'occafion du premier , il raconte qu'Avila voyant un jour un Prcftre qui manioit la faince hoRie avec peu de refpcct , il s'appro- cha de lui fous prctcxte de redreifer un cierge qui eftoit pan- ché, & lui dit tout bas ; Traite^le honnêtement ; ilefifihde boa fere , ^ de bonne mère. Pour les détourner du fécond , il les exhorte à fe préparer toujours par un grand recueillement à dire la Mefle , & à ne manquer jamais à en rendre de profondes adions de çraces. Comme le dernier défaut eft le plus important , il tâche d'en imprimer une horreur extrême , en comparant à Judas ceux qui y tombent, & en montrant qu'ils font coupables comme lui, &: de vol , & d'homicide, puis qu'ils prennent le corps du Fils de Dieu avec des mains impures , & le met- tent de nouveau en croix. Qiie fi un jour de Dimanche auquel le peuple efl: aflcmhlc pour alliltci à la Mclfe, un Curé fe fent chargé d'un péché mortel D E s s C A V AN s. 93 mortel & n'a point de Confefleur , le P. Segneri l'exhorte à former un adte de contrition avant que de s'approcher de l'au- tel , & de fc confelTer en fuJte aufTi-tôc qu'il en aura i'occa- fîon, félon que le Concile de Trente l'ordonne dans lafeiriou treizième. Le troifiéme devoir des Curez regarde Ics^acremens ; fur quoi notre Auteur les inftruit de ce qu'ils doivent obferver en adminiftrant le baptême , l'cxtréme-ondion , la péniren- ce., & l'EucariIlie j &: à l'égard des l'acremens qui font refer- vez à l'Evêque , il les avertit de ce qu'ils doivent faire pour y préparer ceux qui les veulent recevoir , & enfin leur repre- fente tous les fecours qu'ils lont obligez de rendre aux ma- lades , aux mourans &: aux morts , 6c le befoin qu'ils ont de recourir à d'ardentes &: à de continuelles prières pour at- tirer les grâces &: les benedidions du Ciel fur leur Mini- ftere, 5EC0NDE REPLIQTIE DE M. REGIS A LA REPON. fe du R. P. Mciiebranche ^ Prêtre de l'Oratoire ■., touchant La minière dont nom voyons Ici objets qui nom environnent. In ^, à Pans chez Jean CufTon , rue faint Jaques. 1694. ,. .-^ MR. Régis prétend avoir prouvé dans fa première Ré- plique , que la grandeur apparente des objets eft abfo- lumcnt indtpendante de leur diltance apparente ; & il croit l'avoir prouvé par les meimes expériences dont le P. Male- branche s ell fervi pour faire voir le contraire. Sur tout M. Rtgis a employé l'expérience du verre enfumé , laquelle , à fon fens , le P Malebranche n'a rapportée qu'obfcurément, pour ne pas dire d'une manière contradiéloire ; d où vient que M. Ri gis ne s'en eft fervi qu'entant qu elle fait voir que l'intetpcfition du veire enfumé fait que la Lune paroit plus petite dans le méridien , &: encore plus dans l'horilon. Qjant à la manière dont nous voyons les objets qui nous environnent , le P. Malebranche dans {à Recherche de la vé- rité, hvre 3. partie 2. chap. i. fait un dénombrement exaél 1 694. A a 94 I^E JOURNAL de coures les manières dont nous pouvons voir les corps ; & ayant donné l'exclufion à toutes les autres , il conclut que nous voyons les corps en Dieu. M. Régis traitant le mefmc fujec dans fa Merapiiiiique livre i. partie i. chap. 14, combat cette opinion. L'Auteur de h Rcponfc ayant voulu la défen- dre depuis peu , M. Régis ràchc de faire voir par cette repli- plique , qu'il l'a combattue avec raifon. Pour le prouver il (butienc que fi Dieu fait voir à l'amc tous les corps , en voulant fimplemenc qu'elle voye ce qui cft au milieu d'elle , fçavoir la propre efl'ence de Dieu , il faut , par les principes mcfmes de l'Auteur , que l'anie foit unie à l'ef- fence de Dieu : &c M. Régis précend que l'amène peut cftre unie àl'eflence de Dieu philiquement. Il croit melme qu'el- le n'y peut eftre unie moralement , qu'entant quelle dépend de Dieu comme l'effet dépend de fa caufe ; ce qui ne fulfic pas pour le P. Malebranche , &c ce qui eîi néanmoins l'uni- que fondement fur lequel eft établie la dépendance abfoluë où l'amc ell non feulement de la-puifl'ancc de Dieu , mais encore de fa fagefle j comme il le fait voir. M. Régis avoue enfuicc qu'il y a une grande différence en- tre connoicre par idée &: connoitre par fenciment. Mais par- ce que l'Auteur de la Réponfe prérend que nous ne connoif- fons par idée que nos corps , M. Régis enfeigne au contraire que nous connoilîons aulli par idée nos âmes ; &: la raifon principale qu'il en apporte eft que nous appelions Jènnr toute qualité fenfible qui n'a point d'objet , ôc que nous appelions appercevoir ou connoitre par idée , avoir quelque connoilfan- ce qui a un objet. Or il eft évident que nous connoilîons tou- tes nos fenf.itions de la première manière ; & que nous connoiifons la penfée fubhliante qui leur fert de bafe & de fondemenc, de la féconde. M. Régis a lieu de croire que l'Au- teur de la Réponfe lui abandonne ce point par la déclaration qu'il hiit en ces termes : Le temps nom apprendra fi ^e me fuis t'iarè. Mali je croi devoir dire quil en faut beaucoup avant qu'une opinion aulfî extraordinaire ^ auffi contraire aux pre-jugez^def ima- gination ^ des fins , auj/taùfraite d^ aujfi difficile que la miennt^ DESSCAVANS. 9j fuiffe devenir la flui commune , Je ne dis pas parmi les hommes : cela n'arrivera jamais i je dis parmi les fçav,ins , ^ cette cjpece de f(^avans qui s appliquent ferieufement à la Mctaphifque. Car quelle apparence de vérité peut avoir une opinion que loa auteur merme ne peut efperer qu'elle deviendra la plus cem- jnune parmi les Sçavans ? Dans le zo. arc. l'Aureur de la réponfe réduit la queftion à fçavoir fi Tidce de l'étendue eft une modalité de l'ame ; & ayant conclu qu'elle ne l'efl: pas parce qu'elle eft infinie , M. Régis tâche de faire voir que l'idée de l'étendue n'eft infinie qu'objcclivemcnt , &: que rien n'empêche qu'une idée qui n'eft infinie qu'objedivement , ne foit la modalité d'une fub- ftance finie ; d'autant que par une idée infinie objeclivement on n'enccnd pas une idée qui a une realité formelle infinie, mais feulement une idée qui reprefenre autant de perfeélions que l'efprit qui a cette idée , en peut concevoir. L'Auteur de la Réponfe dit dans le ii. article , que quand on penfe au cercle en gênerai , l'objet immédiat de l'ame n'eft rien de particulier. M. Régis prétend au contraire que quand on penfe au cercle en gênerai, ce n'eft pas l'idée ou la perception du cercle en gênerai qu'on voit ; mais par cette idée ou perception on voit plufieurs cercles confufément , ou pour mieux dire , on voit un feul cercle , dans lequel on ne confidere que ce qu'il a de commun avec tous les autres cer- cles-, ce qui fc fait par des abftraélions d'eiprit , en la ma- nière qu'on l'enfcigne dans la Logique. Dans le zj. art. M. Régis foutient que fi Dieu eft tout efire ou Vefire univerfel , comme l'Auteur de la Réponfe le fijppo- fe , il faut que tous les eftres foient des parties intégrantes ou des parties fubjeélives de Dieu ; ce qui va plus loin qu'on ne penîe : Car il eft impofîîble de donner un bon fens à ces ex- preflions ; à moins de dire que par tout efire , ou par i'e/??-^ »»/- verfel on entend le premier eftre , & celui qui produit les au- tres eftres. Mais afin que Dieu reprcfente les corps il ne fufiît pas qu'il lesproduife & qu'il les contienne éminemmenCj il faut encore qu'il les contienne formellement ; ce qui ré- pugne. ^6 LE JOURNAL Dans l'art. 14. l'Auteur fe plaint de ce que M. Régis a trop abrégé Ton dii'cours. M. Régis avoue qu'il l'a abrégé , mais qu'il l'a fait en force qu'il ne lui a rien ôcé de fa force. 11 a changé feulement le mot d'ouvrages en celui de corps ; en quoi il croit n'avoir fait aucun tort à l'Auteur de la Réponfe , par- ce qu'il ne s'agit en ce lieu que des ouvrages qu'on voit en Dieu , & que , félon (es principes , on n'y voit que les corps. M. Régis finit fa féconde réplique, en difant que les idées & les perceptions font une mefme cho(e ; comme il paroit de ce qu'elles ont les mefmes proprierez , & de ce que toutes les dilficultczque le P". Malebranchc forme contre Tertre for- mel & objedif des idées , peuvent eilre formées contre l'eftre formel &: objedif des perceptions. M. Régis foutient dans la troifu'n-.c réplique , que le P. Malebranche a cor.forjdu le plailît des fens d\ec la fatisfaélion inteiicurc de lame , & qu'il le trompe beaucoup de croire, comme il fait , que la joye &: la fuisfjétion intérieure de i'a- me font une melme chofc : Elles font au contraire deux cho- fcs tout à fait différentes ; la fatisfadlion intérieure de l'ame procédant toujours du bon ufage que nous faifons de notre li- berté ; au lieu que la joye procède fouvent des cliofcs qui font indépendantes de nous. Voiîa en gênerai trois répliques fur lefquelles M. Régis pré- tend eltre ju^é par le Public (çavant &: defintcrcflc. Auiïï finit-il en prote.tant ^ue quoi que Le P. Mahhranche ^ (es difci- fles puiffent écrire contre lui , ilve leur répondra y.tmais , tant farce que fes principes font trop eloiynezjies leurs pour pouvoir difputer en- fcmble , quà. caufe qu'il eft pcrfuadé que le Public connoitra par ces Répliques ce qu'il feroit capable de faire en de pareilles rencontres : ")- A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à l'Image de faine Jean Bapciile. Avec Privilège du Roi. IX. 97 LE JOURNAL DES se AVANS Du LuNDY I. Mars M. D C. XCIV. ORAISON FUNEBRE DE TRES HAUT ET TRES fttijfant Pnnce Loua de la 7 our cC Auvergne Prince de Tu*en~ ne , frononcie le 12, jour d'Ociobre /épj. en t EgUfe de L' Abbaye de Cluny où e(i la ftpulture de fu mai fan , par le Père Gaillard de la Camp, de Je fus , en prepnce de Monfeiqneur le Cardinal de Bouillon. In ^. à Pans chez Théodore Muguet ^ rue fainc Jaques. 165)3. LEdifcoursque fiint Ambroifecompofaàla mort de l'Em- pereur Valcntinien , a fervi de modèle à cet éloge funè- bre du Pruice de Turennc. Le P. Gaillard s'y ell ouvert une foute toute nouvelle dans ce genre, & ne s'yell point propofé d'autre ordre que celui qui eft tracé dans le Plcaume 38. qui lui a fourni fon texte , & l'image fîdelle de la vanité des grandeurs humâmes. Les inflrudions qu'il y donne à Ççs auditeurs roulenr fur trois fortes de néant qu'il leur fait confiderer dans la perfonne de ce jeune Prmte : ie néant de fes qualitcz perlbunelles , dont il auroit elté ébloui fi Dieu ne lui en avoic découvert l'illufion ; le néant de la difgrace , où il fe feroic abîmé Ci Dieu ne l'avoit foutenu j le néant de fa mort, où il aurait 1694. B b 58 LE JOURNAL eu tout à craindre , û Dieu ne lui avoic fait efpcrer Tes misé- ricordes. EXTRAIT D'UNE LETTRE DU P. MALEBRAN- che , Prctre de l'Oratoire. J'Ai Jéja averti le Public dans ma Reponfe à M. Régis , que les lecteurs dévoient eftre extrêmement fur leurs gardes lors qu'ils hfoicnt fes ouvrages aufli-bien que les miens. Je vous prie, Monfieur , de me permettre de l'en avertir encore une fois. Pcut-eltrc n'ell-il pas un auceur fi exaft & fi fcur, qu'on doive s'en tenir à i'.s dccifions. Car enfin il me femble que fi les IciSVcurs croycnt toujours ce qu'il avance le plus hardiment dans fes répliques , ils feront très fouvent trompez. Voici , Monfieur, quelques preuves qui pourront ce me femble en convaincre tout le monde, je les ai tirées de la dernière pa- ge de fa Réplique , parce qu'il s'y agit d'une quelbon qui elt à \.\ portée de tous ks Icdeurs , &: que c'eft le feul endroit qui ne iiippofe ni Géométrie ni Mctjphifique. Voila pourquoi je commence par où je devrois finir. Je laifle maintenant aux Geoinecrcs & aux Metaphificiens à examiner à fond les deux premières répliques de M Régis : car je ne prétcns pas y re- pondre ici en forme. M. Régis m'avoit accufé dans fon Sift'cme de PhiUfophie ^ tom. I. p. zij.^. d'cibe tombé dans des contradiîhoni matnfeflei^ à caufe que j'avois dit dans la Recherche de la vérité , liv. 4. ch. 10. Q^e le plaijiY ejî (oujouri un bien , man qu'il rîejî pas toujours avantageux d'en jouir. Dans ma Reporfe page 6i. j'ai rapporté cxadement le texte de M. Régis , &: un peu plus fidellemcnt qu il ne le rapporte lui-mefme dans fa Réplique -, ]c (ouhàiie qu'on en faile la confrontation. J'ai obfervé le changement de caractères qui y eft, & mis en marge la citation de l'endroit de lu Recherche comme il avoir fait, afin qu'on reconnuft d'où eltoit tirée cette propoficion. En eftct cette propofirion clfc d .iis le chapitre de mon livre cité par M. Régis. Mais dans ù Réplique il n'y a plus de changement de caraderes dans (on icxtc qu'il reprcfente , m de citation en marge. On en verra DES SCAVANS. 99 fcîentoft la raifon. J'ai donc fait voir dans ma Répenfe , qu'il n'y a point de contradidion dans cette propoficion : Le flaifir efi iofi jours un bien , w^/ii il ne/ipcis toujouri avantageux d'en jouir. ]c voudrois bien qu'on vouluft en voir la preuve dans ma Ré- fenfe , & dans le chapitre de la Recherche cité par M. Régis, Qaoi qu'il en foit , M. Régis lui mefme convient qu'il n'y a foitit de contradiBien. Mais voici ce qu'il réplique. Il eft vrai , dic-il, qu'il n'y a point de contradiBion dans cette ■proposition Ik ; mais il y en a une mamfefte dans celle-ci : Le plai- iir eit toujours bon , mais il n'eil pas toujours avantageux d'en jouir. Or cefl ici la vraye propofitton de l' Auleur ( liv. 4. ch. 10. p. 74. ) d'oà il s'enfuit que fa cont^adiBion fubfijie encore. On voit bien , ce me fcmble , que ce n'elt là qu'un détour peu fincere. Car enfin ma vraye fropofinon , celle que je de- vois juftifier de contradiBion manifefle , elt celle-là mefine que je trouvois imprimée en caradcres italiques dans le texte de mon Cenfeur , i dans mi Rép'jnfe , p. 64. j'en avois averti M. Régis , & cité en marge la page 267. où cet en quelque manière heureux fe trouvoit , afin de le rendre un peu plus équitable en mon en- droit. Je prie le ledeur encore une fois de ne m'en pas croi- re , & de tout confronter. Voici donc ce que M Régis me réplique : L' Auteur tài.he defauver cette contradiBion à la faveur de ces termes En quelque manière. Jl prétend avoir écrit que \cs plaifirs des fens (ont capables de nous rendre en quelque ma- nière heureux. Je p>étein au contraire quilne l'a point écrit , e^ qu'il a feultmtnt dit qu'il ne niott pas que des cette vie les ju/fes nefuf- fent heureux en quelque manière j ce qui efi tout difftrent. Cette DES SCAVANS. ^ ICI Cette réplique hardie & imprudente de M. Régis me mec dans une fàcheufc neccfllté. Oui je prétens avoir écrit, que les plaifiyi font capables de nous rendre en quelque manière heureux. Je l'ai écrit en pluficurs endroits de mes livres, mais dans le cha- pitre mefme critiqué par M. Régis , page ïôy.lig. lo. & 1 1, qui eft la page mefme que j'avois marquée dans la marge de jna Réponfc , pag. 64. afin que M. Régis la trouvsft aifé- ment : mais je n'avois pas marqué la ligne. Il n'y a nulle tau- te d'impreflîon dans les deux citations. Mais fuppofé qu'il y en euft , un auteur équitable &: retenu auroit-il eu l'afl'uran- ce d'écrire ces paroles : Je frétem au contraire qu^il ne l'a point écrit , ^ quil a feulement dit , (^c. M. Régis ne devoir-il pas du moins lire tout entier le chapitre cité , malgré le dégoût qu'il trouve dans un /îile de dedamateur f Alors il auroit eu quelque droit , non de prétendre abfolumcnt que je n'ai point ccric ce que je foutiens avoir écrit , mais peur-e(îre de don- ner quelque légère défiance de ma fincerité ou de mon exa- ctitude. Enfin je prétens que cet en quelque manière eft nc- ceflTairement foufentendu dans ces propofitions , & dans d'au- tres femblables : Le platfir nous rend aîiuellement heureux ; mais il nefi: pAi toujours avantaz^eux den jouir ; ou bien , mais il ne flous rend pas foltdement heureux , &c. Car personne n'cft ca- pable de tomber dans la çontradiétion que M. Régis m'at- tribue. Voila les principales preuves que la dernière page de la Keplique de M. Régis me fournit pour le droit que je précens avoir depuis fa critique , d'avertir le Public qu'il faut lire fcs Jivres auflî bien que les miens , avec beaucoup d'attention 6i de défiance , & qu'il ne faut juger de rien que lors que l'évi- dence y force après un ferieux examen. Car s'il y a tant de méprifes dans cette dernière page qui traite d'une matière fi fcnfible & fiaifée , il pourroit bien y en avoir autant à pro- portion dans ce qui regarde l'Optique & la Mctaphifique. Pour moi je trouve autant de faudctez dans la i. pagequedans laderniere, quoique plus courte delà moitié Pour le marquer en peu de mots , car on ne m'en doit pas croire fur ma paro- le , il eft faux , I . Q;ie M. Régis fe fou fervi de ma ^gure. Car 16514. , Ce ^^v 'loî L E JO URN A L dans ma Rèponfe les lignes P M & QN font les rayons prin- cipaux ou les axes des cônes de r.iyons , donc le (ommet cft dans un point de l'objet , & la bafe fur la prunelle de Tceil. Mais dans la Réplique ces mefmcs lignes maïquenc des rayons arbitraires de la furface de ces cônes. 2. Jln'a point rapporté mon explication , & les éclaire fftmens qu'il a ajoutez nie paroi f^ fent des brouilleries. 3. Cette propofition , Si un objet efi vu fcul ^ ( Qu'un objet foit vu feul ou avec un autre , cela ne change rien dans fon image ) i^ par un mefme milieu , il ne peut Jamais paroitre de mefme /grandeur que lors qu'il efi a une mefme difiance l cette propofition , dis je, eft faufîe : car un homme au bout d'une chambre paroit de mefnie grandeur que lors qu'il n'clt qu'à trois pas ; &: la raifon que donne M. Régis de ia propofition , ne prouve rien. Car la grandeur de l'im.ige doit cltre comparée à la dillance de l'objet pour en fçavoir la grandeur apparente , [ Voyez le 9. chap. de la Recherche de la venté , ou plucôt la Dioptriquc de M. Defcartes. ] 4. Ce qu'il met en italique comme une venté de confequence , n'a rien de vrai , fçavoir que U grandeur apparente d'un mefme objet vu a differentci diflances , efl toujours proportionnée à la Candeur de limage quil tr.ice fur la rétine , ^ a la corde de l'angle fous lequel il efi vu. Si ce qu'il penfc eftoit vrai , un éléphant à cent pas paroitroit beaucoup plus petit qu'une mouche à un demi pied. La démonftration en elt ailée. De plus 1! ne prend pas gar- de , i . Que les grandeurs apparentes devroient eftre propor- tionnelles , non aux cordes des arcs , comme il le dit , mais aux quarrez de ces cordes, z. Que fi la grandeur des objets eftoit proportionnelle aux images , elle ne pourroit pas l'eftre aux coides exactement bc en rigueur géométrique : car les arcs ne font pas cntr'eox comme les cordes , & encore moins les quarrez des arcs comme les quarrez des cordes. Cette dernière propofition ne contient donc que desfauffetez com- pliquées. Pour ce qui regarde la nature des idées , qui efl le fujet de la féconde Réplique , il en faut dire aufli deux mots. M. Ré- gis s'appuye d'abord fur l'autorité de M. Arnaud , pour s'ex- cmter de répondre aux quatorze premiers articles de ma Ré-^ DES se AV ANS. .105 fonfe , où je croi avoir démontré la faulTcté de Ton fcntinicnt par les principes mermes qu'il reçoit ; &: il décide que ce Do- deur^ a pleinement fatiifait. A l'égard du relie , il y répond comme il peut. Il feroit difficile que M. Arnaud eufi pleinement faiisfait à ces 14. premiers articles. Car iln'efl: pas vrai que jene fus ^uer.ip- porter les raifons que '{ai déj.i propopei dans la réponfe au livre des vrjyes ^ de^favffcs idées. M. Régis n'y trouvera pas , par ex. celle de la page 34. Quoi qu'il en ioic , ce n'efl: ni à M. Ré- gis ni à moi , à décider li la vidoire de M Arnaud fur le P. Malcbranche a efté ou non tout à fait coinplete. Nous fem- mes parties incereflees. Mais puis qu'il s'appuye fur l'autori- té Je M. Arnaud , je puis bien lui oppolér celle de fjint Au- guftin. Celle-ci vaut bien l'autre. Q^ûl écoute donc pa- tiemment ce faint Dodeur. Q^uis mente tam atcus eji , ces paroles font bien injurieufes à M Régis ; mais il faut citer fîdellcment : il fuffitquejene les traduife pas. qui non videut ijlas fiyirus qua: in Geometrtca do- centur , hahitare in ipft ventute , aut in hii etium veritateni? Solii. 1. 1. Qu-Apropter nullo modo nc^.iveris efjc incommutabilem veriutem , hccc emnia qu^c incommutabiliter vera junt continentem^ quam non poffii dicere tuam , vel mcam , veL cujufvii hominis , feà omnibus incommutabilia vera cernentibus , tanquam miris modis fe- crettim ac publicum lumen pro'flo effe , ac fe pra:bere communiter. Omne autcm quod coynmumter omnibus rdtiocinantihus atque intcl. ligentibus prajio eft , ad uUius eorum proprie naîuram pcrttncre quis dixerit Hanc erqo veritJtcm de qu.i jiim diu loqutr.iur , 1^ in qua tam multa confpicimus , excellcntiorcm putas quam mens no- fira ejî. Lib. 2. de Lib. Arb. c. 12. Sapientia Dei , Verbum Dei , Dominus Jefus ubique prafens eJi ; quia ubique efi veritas ubique (fi fapientia. Jntelligit quts in Oriente jufîitiam , intelliqit alius m Occidente ]ufiitiam : numquid alia eft jujîitia quam ille in- ielltgit , alla quam ifte / Separati funt corpore , ^ in uno habent acies mentium fuarum. Traité 35. fur faint Jean. Il y a cent autres palfages dans faint Auguftin , qui prou- vent que nos idées font bien différentes de nos perceptions ; qu'elles font immuables , éternelles , &: neceffaires -, en un 104 LE JOURNAL mot qu'elles font en Dieu , dans le Verbe ou la SagefTe de Dieu , dans cette raifon univerfelle qui éclaire toutes les in- telligences. ]e l'ai fuffifamrnenr prouvé dans ma réponfe au Jivre des vrayes &c des faullcs idées , contre M. Arnaud qui croyoit que laint Auguftin ne l'entcndoit que des veritez de morale. Je ne croi pas que les vrais Augultiniens en puifî'enc douter , ni que perfonne préfère rautorité de M. Arnaud à celle de faint Augiiflm , fur un fentiment que ce faint Do- «^eur a eu toute fa vie , &r qu'il fuppofe dans prefque tous Ces ccrits. Que M. Régis , à l'imitaucn de M. Arnaud , trai- te ce fenciment de chimérique , & qu'il me tourne (ur cela en ridicule. Je me contenterai de lui répondre que fon aveuglement me fait pitié. Rideat me , dit ce laint Docleut parlant de l'immutabilicé des idées que nous avons des nom- bres , ^u! eoi non videt , 6^ ego doleam rideniem me. ConfelV. 1. I o. ch. I z. Pour les répliques que M. Régis fait au rcfte de ma répon- fe , je ne penfc pas qu'elles mentent d'cftre refutées , parce que je n'y trouve que de perpétuels détours , par Icfquels il Si l'expérience appieiid que lors qu'on voie la Lune à l'horifon par un tuyau qui cache exadcmenc le ciel & les rerres , elle ne laifle pas de paroître de mefme gran- deur. Sur tout , j'efpere qu'ils ne jugeront de rien qu'après avoir jullihc les citations , confronté les pallages,& bien con- çu les opinions de l'Auteur &: les miennes. Et cela ruppofé, je croi que la vérité de mes fentimens , aulfi bien que de ceux de M. Régis , fera aflez à couvert , &: que je puis m'occuper à quelque chofe de meilleur qu'à des conteftations inutiles, & qui ne finiroient jamais. ! ; v LA BELLE EDUCATION. PAR M. BORDELON. In 12. à Paris chez Nicolas Bellcy, 1693. L'Education des jeunes gens eft fi importante , que ceux qui en font chargez ne fçauroient jamais apporter trop de foin j ni recevoir trop de fecours dans ce difficile emploi. Celui que M- Bordelon leur oftre ici leur doit eflre d'autant plus agréable , que lors mefme qu'il ne leur pvopofe rien qu'ils ne fçachent déjà , il l'orne toujours de quelque nouveau traie de poëfie ou d'hiRoirc ; ce qui doit faire cfperer que cet ou- vrage aura un aufli heureux fuccés que les autres qu'il a mis au jour. Les avis qu'il y donne s'adreflent féparémenc les uns aux parens , les autres aux précepteurs , &: les autres aux enfans mefmes , & tendent tous à former de telle forte l'efprit &: le cœur de ces derniers , qu'ils foient capables de rendre à Dieu^ à leurs parens & aux autres hommes ce qu'ils leur doivenc. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. MAYER a M. Clément Bihliotecaire du Roi. E ne fçai , Monfieur , Ci vous fçavez que M. le Cardi- nal d'Aguire fait imprimer à Rome les Conciles d'EC pagne en cinq^ volumes in folio. 11 y en a déjà deux d'achc- J io8 LE JOURNAL vez. Le titre efl: conçu en ces termes : CoUeBio Maxima Cott- cttiorum omnium Hijp^niie , tQ- novi orbii , epijioLirumque decre- talium celcbnorum, necmn plunum monumentorum veterum adiQam fpciiantium. C»m notis & dijfertationibus , qutbus facri canones , hijloria ac difcipliva Ecc.efiafiica, ^ chronoloya accurate iUuftrantur. Le P. Philippe Bennami achevé Ton livre de la vie des Pa- pes par les médailles , dans lequel il prétend corriger quantité d'cndroirs de celui du P. du MoUnet. Ce fera unTupplément de Ciaconius. M. Ciampini met la dernière main à un volume in folio , de adifian à Con^luntino Magno conûruciis. Il fera enrichi de plus de cinquante figures. M l'Abbé Fabretci travaille à fon recueil ce trois mille cinq cens infcriptions antiques qui ne fe trouvent ni dans Gruterus, ni dans Reinefius , ni dans Spon. Il prétend découvrir une infinité de fautes qui font echapées à ces trois auteurs. On imprimera dans peu de mois en deux volumes, Epitorne Jtali^c facr.c. Le premier fera un abrégé des neuf tomes d'L/ghejlus ; & le fécond un recueil des fautes qui s'y font gliffées. On achevé d'imprimer au CoWcge de prop^^anda , le cin- quième tome de la Biblioteque Rabinique de Bartolocci , & on le vendra avec le quatrième qui cft achevé, j'ai envoyé à Paris quelques livres , dont voici les titres: Zancelottt Annales M-^tiuni. Jn folio. Hilhria Fulienfis O'd'nis. Jn folio. Cataloqus vtrorum tUufirium Congregationis Vallis Vmbrofa. Jn 4 Rom^. i6^^. Mi^on.i fiera de gli huomini iUuJîri délia Congregatione de Ce- Cefiini. In ^. Napoli. yita délia ferevUima Infante £ Auftria. Jn 4. Vannii Joannn Franctfci Soc. J. Inve(ligatio momentorum qui- i>ui qravia tendum deorfum. In S. Avertimenti Catoltci contra Maimbourg. In ^. ^ A Paris chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à faint Jean Baptifte. X. ic»9 LE JOURNAL DES se AVANS Du LuNDY 8. Mars M. D C. XCIV. LES VIES DES HOMMES ILLUSTRES DE PLUTAR- que , traduitei en François , avec des remarques. Tome pre^ mier. In ^. à Paris chez Claude Barbin , furie fécond Per- ron delà faiate Chapelle. 1694. f~- ^'^ i^.n-.'^ PL u T A R QJiE efl: le plus utile de tous les Hiftoriens , & celui qui poiiede parfaicemenc les talens necetlaires pour corriger & pour in 11 ru ire. Il peint les hommes tels qu'ils font non feulement dans le public, mais encore dans le parcicu- calier , avec leurs mœurs & leurs partions , fans déguifemenc & fans mafque. Il fait connoirre ceux dont l'antiquité a le plus parlé, & dont nous avons les plus beaux ouvrages. L'ex- cellence de l'art avec lequel leurs vies font écrites , a porté M. d'Acier à en entreprendre une nouvelle tradudion. Ayant prévu les contradiélions que ce delTein auroit à eC- fuyer de la part de ceux qui admirent Amioc , il a fait fon apologie dans fa préface , où bien loin de dimmuer le mérite de cet Ecrivain , il avoue qu'il a parfaitement bien connu le génie de notre langue , &: fçu le premier combien elle cil ca- pable de nombre Si d'harmoiue. Le temps n'empêche pas 1694. £ e no LE JOURNAL qu'il n'ait encore de la grâce , & qu'il ne confcrvc en beao- coup d'endroits toute la fleur de la nouveauté. Mais M. d'Acier ne loue pas le ftilc d'Amiot en ce qu'il a de vieux & d'aboli par l'ufage. Ce langage dont la moitié des phrafes ne (ont plus Françoifes au jugement de Vaugclas^ lui paroit non feulement defagreable , mais dangereux en ce qu'il peint cerramcs chofes d'une manière trop libre &: trop naïve. D'ailleurs il y a trouvé beaucoup de fautes à corri- ger i en quoi il n'y a pas pour lui moins de gloire qu'il y en auroit eu à travailler le premier fur Plutarque. Pour le foulagcment des Icdeurs qui fçavent peu les cou- tumes des Grecs &: des Romains , il a fait des remarques fur tout ce qui a bcfoin d'eftre eclairci , comme les facrificcs , les feftes , les cérémonies. Il a expliqué les fcntimens d-? Plutarque , le plus fouvent pour en relever la beaucé , &: quel- quefois pour en faire fentir le défaut. Dans fa traduélion il a confervé toute la force de l'original. Se auroit bien voulu lui donner les agrémens qui lui man- quent. Pour cela il a renverfé les périodes qui lui fembloienc trop embaraflées , &: a donné du jour à ce qui eftoit obfcur. Enfin il a recherché par tout la netteté & l'elcgance du dif- cours , fans s'éloigner jamais du fens. Il a retenu les anciens noms des peuples & des charges , parce que les noms d'aujourd'hui n'y répondent point du tout. Il reconnoit avoir tiré un grand fecours dans c.€ travail d'un Plutarque dont toutes les vies font notées de la main de M. le P.elident de Thou ; ce qui lui a épargné de longues re- cherches. Comme il n'efi: pas pofTible de marcher feurcment dans le pays de l'hiftoire fans la connoiflance des temps , il a mis à la tefte de i\\ tradudion une Cronologie qui fait voir en quel ordre les fix vies de ce premier tome doivent eHre lues. Il a recherché avec foin les tefles des hommes illuftres de Plutarque , pour les mettre au commencement de chaque vie. Il ne s'en eft point trouvé de Publicola. Il y en a une que l'on croie elhe de Thefée , quoi que cela ne foit pas ccr- Câia. DES S C A V A N S. ht A l'occafion de ces certes , il répond à deux reproches qui Jui ont eflé faits depuis peu : l'un , d'avoir mis dans la tradu- dion des reflexions de Marc Antonin une tefte de Commode pour celle de cet Empereur ; Se l'autre , de l'avoir appelle Marc Antonin , au lieu de l'appeller Marc Aurele. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. DE VALLEMONT DcHeur en Théologie , à M. Pintart ancien Ecbevin de la viUe de Charires. VOrci , Monfieur , une découverte curieiife que vous ne ferez pas fâché d'apprendre. C'eft un phénomène peu connu dans le monde , qu'une perfonne d'efpnt obferva à Bourges le i8. Juillet 16513. ^^^ (\yio\ elle m'écrivit en ces ter- mes : Je viens de remarquer une choje qui ma paru extraordinaire^ (^ que vous trouverez^ peut- efire fort commune , vous quiefies accou- îumj aux obfs)vationi aft onomiques Auymyà'hui à p. heu- res ^ un quart du foir , la Lune efiant afjez^ claire du cote de Midi^ ^ le ciel couvert d'un nuage fort épais du cote de Septentrion , il s'efi formé un arc en ciel dans ce nuage , auquel -je n'ai rien vu de pareil jufquà prefent. il navott aucune des couleurs ordinaires à l'arc en ctel que l'on voit de jour, ion cintre eftoit plein ^' entier, il paroiffoit blanchâtre , euplu:bt comme une lumière embarafféedans celte nuée epitiffe , de la largeur de l'arc en ciel ordinaire. Je l'ai obfervè un bon quart d'heure , éi" ^'<^i f^if remarquer a un honme qui ejîoit avec mot. Faites m.oi la grâce de me mander s'il y a des arcs en ctel lunaires , (^ s'ils font ordinaires. Voici à peu prés la réponfe que je fis à cette lettre : Vous avez parfaitement bien jugé , que le phénomène dont vous m'avez fait l'honneur de m'ecrire , e(l quelque chofe d'ex- traordinaire , & que c'eft un arc en ciel lunaire. Quand mef- me les Phificiens ne vous en auroient encore rien dit , la def- cription fi exade que vous en faites ne permettroit pas d'en douter. Car enfin puis qu'il paroiffoit vers le Nort , & que la Lune eftoit alors dans la partie du ciel oppofée , c'eft à dire vers le Sud , il eft évident que cet arc en ciel eftoit formé pas Ht LE JOURNAL la reflexion qui Ce faifoitdans cette nuée cpaiflc, des rayohs de 1.1 Lune vers vos yeux. Et c'eft ainfi que l'Iris folairc (c fait dans une nuée pkivieufe par la reflexion des rayons du Soleil dans la partie du ciel qui lui ed oppofée. D'ailleurs comme le Soleil s'eftoit couché à l'Occident , &C qu'il y avoit quel- ques deux heures qu'il eftoit fous l'horifon , il ne pouvoir f lire la caufe d'un phénomène qui paroilloit au deflus de l'ho- rifon vers le Nort. Mais ce qui achevé de démontrer que c'eftoit effectivement un arc en ciel lunaire , c'eft fa couleur foible &: blanchâtre. Car comme il n'y a dans la Lune de lumière que ce qu'elle en reçoit du Soleil , p.ir confequent l'arc en ciel lunaire, qui n'eft qu'une reflexion de cette lumière empruntée, doit eftre moins coloré Se p'ui blanchâtre pour l'ordinaire , que l'iris que forment les rayons vifs & ardens du Soleil. J'ai parlé de ce phénomène à M. Calïîni de l'Académie Royale des Sciences, qui tout diligent &c tout infatigable qu'il eft à obfcrver fans ceife le ciel , n'a point vu d'arc en ciel lu- naire depuis tant d'années qu'il eft en France. Mais il m'a die qu'il fe fouvient bien d'en avoir vu en Italie un tout fembla- bie à celui que vous avez remarqué à Bourges. Pour moi je n'en ai jamais vu ; & fi je n'en avois cfté informe d'ailleurs par ceux qui en ont oblervé , j'aurois efté dans l'erreur de ces anciens Philofophes dont parle Ariftote , qui croyoiem qu'il »e fe faifoit point d'arc en ciel durant la nuit , parce qu'ils n'en avoient jamais remarqué, y^ifcus tnterdiu qmàemfit : noHtt vero à Luna fciiicet : veterum quidem fententtà minime fiebat. tîoc atttem tUis accidit propter rantatem : eoi cnim latehat. Fit tumen , fed raro. Meteora/ogic. lié j. cap. z. Ariltote qui a elle en cela plus heureux que les anciens , déclare pourtant que dans l'efpace de plus de cinquante ans il n'en a vu que deux. Qnant à ce qu' Ariftote ajoute , que l'arc en ciel lunaire I. n'a qu'une feule couleur , i. qu'il n'arrive qu'une fois le mois , 3. qu'il fe fait le jour mefme de la pleine Lune , 4. qu'on en voit rarement , & dans des temps fon éloignez; 5 . qu'enfin la Lune doit eftrc alors à lOticnc ou à l'Occident j ilfc DES SCAVANS. 113 il fe trompe extrêmement en tout cela. Autant d'articles, autant d'erreurs. Telle ell la deftince de la Phifique , qui ne pouvant fe perfedionner que par une longue fuite d'années 5c d'obfervations , eft toujours très défcdueufc dans fcs com- mencemens. I, Il eft faux que Tare en ciel lunaire n'air jamais qu'une couleur blanchâtre. Cornélius Gemma Médecin de Louvain, en I 569. apperçut le ii. de Mars à minuit , un Iris ou arc en ciel lunaire , qui eftoit parfaitement revêtu de toutes les cou- leurs que l'on remarque d'ordinaire dans l'arc en ciel du So- leil. Jris expre//a no&u hork 22. vifa efi Martti 12 Stabat htec diu , fuis perfecle coloribui infiyiita, De naiur. divinis cara- Uerifmh ^ Itb. 2. Cap. 2. p^g. 6^. Daniel Sennert célèbre Médecin de Wirtemberg , racon- te auffi qu'en l'an 1599. dans le milieu de l'Eté, après une pluye & un tonnerre eiïroyables , il remarqua vers la fin de cet orage nofturne , entre le Septentrion & 1 Orient , un arc en ciel de lune , avec des couleurs fi diflindes & fi belles , qu'elles n'en dévoient rien à celles que nous prefente fi (bu- vent l'Iris folaire. Sennert. in epitom. z II n'cft pas vrai que l'arc en ciel lunaire ne puifle arriver qu'une fois le mois. M. Bernier fi connu par fon grand voya- ge des Indes d'Orient , & pour avoir traduit &: abrégé la Phi- lofophie de M. GaiTendi , nous apprend dans Ces mémoires fur l'Empire du Grand Mogol , qu'il a obfcrvé un arc en ciel lunaire deux nuits de fuite. Voici comme il rapporte la cho- fe dans la defcription qu'il a faite du royaume de Kachemire. Après avoir d'abord parle de quelques avaniures qui lui arri- vèrent en allant par eau de Pipli à Ogouli , il dit : La nuit que 'je faifois la garde , ilfurvint un accident philofophique, tel qu'il m'en ejhit déjà arrivé deux fou à Dehh : J'appet^us un arc en ciel ou une Iris de Lune , que je montrai à tout le monde , ^ qui furprtt beaucoup deux pilotes Portugais que j'avais re^ui dans mon bateau ^ à la prière d'un de ma amis , qui n avaient jamais vu ni oui parler de chûje femhhible. Le troijiémc jour .... tl y eut un fécond acci- dent phdofophique. La nuit que nous efiions à l'ordinaire retirez^ à l'abri dans un petit canal , mes Portugais quifefouvenoient de l'arc 1694, F f 114 Î-E JOURNAL en ciel ou de C Irii de la nuit frlcedcnte , ^ que cette remarque a- voit rendus plui curieux , rri éveillèrent , ^ m'en wontrerent un au- tre auffi beau ^ aufji bien formé que celui que ']'• leur avoii fait voir Ces Iris dont je parle , neftoient pas àl entour de la Lu- ne , mais à loppojite , (^ dans la mep' e dtfpofition que fe trouvent ceux que forme le Soleil. Et toutes Les fois que fen ai vu , la Lune eftoit vers l'Occident , e^ les Iris vers i Orient. La Lune e/bit auffi environ fon plein ; ce qui efi à mon avis bien neceffaire , parce qu'en un autre temps elle n aurait pas aff^z^de lumière pour les former. Et enfin ces Iris n'efloient pas f, blancs que ce qu'on appelle des Couron- nes , mais beaucoup plus colore'^ ; ^ on y remarquait mefme quelque foiblc diftinHion de couleurs, pag. zjS. i^ fuiv. Il peut donc fc faire plus d*i#i arc en ciel de lune dans un mois , quoi qu'en ait dit le grand Maitre de la Philofophie Péripatéticienne. 3. Ariltote eft encore dans l'erreur , quand il s'imagine que l'Iris lunaire ne fe peut former qu'au temps mefme de la plei- ne Lune. Albert dit qu'il en a vu un avant que la Lune fufl pleine , & lors qu'il n'y avoit encore qu'un peu plus de fa moi- tié d'illuminé. Ce qu'il prouve par les lieux du Zodiaque où eftoient aiftuellement les deux luminaires. Car s'il eft vrai , comme il l'aflure , que la Lune f ilt alors au commencement du figne du >D , &: le Soleil à la fin du ^ , il s'en falloir quel- ques deux jours que la Lune ne fuft pleine. Ncc erat Luna flena , fed aixçr/.-jfTK , hoc e/l ,fitis plus quatn dimidia , aliquantu- lum deficiens à plenitudine. Luna erat .... in fiyio Capricorni , in ■principio illius Jîqrii , Sol autcm in fine Tauri , circa initium Gémi- norum. Pour ce qui efl; de l'arc en ciel lunaire de Bourges , à la vérité il s'elt fait le jour mefme de la pleine Lune. Cela doit pour l'ordinaire arriver de la force ; puis que la Lune eftanc alors toute lumineufe , & chargée autant qu'il fe peut des rayons du Soleil , elle eft davantage en eftat d'en cranfmettre dans la nuée qui lui eft oppofée ^ ^on(ç. fait cette reflexion à laquelle r.ous fommes redevables de cet agréable enchan- tement que nous appelions arc en ciel. Cependant il n'eft pas neccftaire que la Lune foit pleine. M. Bernier dit dans ion abrégé de Philofophie , que l'arc en ciel de Lune qu'il a DES SCAVANS. i,j vu fur le Gange dans les Jndes deux jours de fuite , fefit dvant aite la Lvne ftiji entièrement pleine. Livre des Météores , chap. 6. p. 2J9. 4 Une autre beviië d'Ariftote , efl: d'avoir dit que l'Iris de Lune n'arrive que rarement , & dans des temps fort eloiî^nez. Car outre que M. Bernier l'a obCervc fur le Gange deux jours de fuite , Snellius dans le livre qu'il a compofé au fujet de la Comète qui parut en iéi8. aflure qu'il a vu un arc en ciel lu- naire deux années de fuite au mois de Décembre ; le pre- niier en 1617, & le fécond en 16 18. entre 5. & 6. heures du foir , lors qu'il alloir à la Haye, &: qu'il obferva ce dernier avec beaucoup de plaifir. Jndem lunarem hoc continua hiennio vip'.m memmi , anno 1617. menfc Deccmbri , circa plemlunium: Et 1618. propridie Calendai Janu^irias , à /. ad 6. vejpe/tinam , dum Hitg.im iter ftcetem , Iridem conjïmilcm mdgna cum volup- tate JpiUdvi. Enfin les Iris lunaires font fi peu rares , que G^/y- Citus raconte dans fa Météorologie , p. 453. qu'il en a vu en 1 523. 1524. 1515. & 1537- & po^r peu qu'on rccherchaft a« vec quelque foin les auteurs qui en parlent , il n'y auroit gue- rcs d'années où l'on n'en trouvafi quelqu'un. 5. tnfin voici un cinquième chef qu'il n'cft pas po/îîb!e de pafier à Anfiote , non plus que les quatre prccedens. 11 en- fcignc que l'arc en ciel lunaire ne peut fe former que quand la Lune eft à l'Orient ou à l'Occident : & au contraire nous fçavons que celui dont parle Albert , fe fie lors que la Lune elloit au Midi : Et erat Lunain Meridie. Ceux qui pour excufer les défauts que l'on voit dans la Phi- Cque d'Ariftote , difent qu'il a compofé cet ouvrage efianc encore jeune , avancent apparemment cela en l'air. Car en- fin Ariftote philofophant fur la rareté de l'arc en ciel lunaire,, déclare que dans l'efpace de plus de cinquante ans , il n'en avoiï obfervé que deux. Or un homme qui parloit dans un livre , après plus de cinquante années d'obfervations qu'il a- voit faites lui- mcfmc, n'elloit pas afl'urément fort jeune quand il le compofa. Voila à peu prés, Monfieur , ce que je répondis en ce temps- là à là peribnae qui me fie l'honneur de me demander mon 116 LEJOURNAL Sentiment Cm cet admirable phénomène. Mais ce n'eft pas tout. Le temps a ajouté quelque chofe à mes premières pen- fées. 3 'ai remarqué depuis, que les Alkologues à qui il ne plaie pas qu'il y ait dans le ciel aucun adre ou phénomène qui foit muet , oifif ou innocent , prétendent que l'arc en ciel lunai- re fe mêle fort mal à propos de dire ou de faire beaucoup de chofes dont le monde fe palFcroit bien. Ils l'accufent d'an- noncer & meirne d'exciter des miERVAT:ONS SUR LA GROSSESSE ET L'AC- couihement de: ftmmei , ^ fur Iciin maladies , i^ celle des en- fans nouveaux nc\ -, en chacune depjuelles les cufes , ^ les rai~ fons , & principaux evenemens, font décrites ^ expliquées, par Frani^ois Mauriceau , Maître es Arts , ^ ancien prevot de la Compagnie des Maîtres Chirurpcm de la ville de Pans, Jn ^. à Paris chez l'Auteur , rue de Richelieu , & Laurent d'Houry , rue faint Jaques, 1694. LE livre des maladies des femmes grofî'es & de céffeffqui font accouchées, que M. Mauriceau donna en 1688. fut favorablement reçu du Public j & il fuffit pour en faire con- noitre le merire , de dire qu'il travaille prcfentcment à la quatrième édition. Cependant comme les exemples perdia- dent mieux que les raiionnemens , l'AUtcur a bien voulu con- firmer les préceptes qu'il a propofez dans ce livre, par des ob- fervations exactes qu'il a faites depuis plus de trente-cinq ans, & dont il donne aujourd'hui le recueil. Ov^ trouvera dans ces obfervations des exemples qui doivent eftre imitez , &: d'au- tres qui doivent ertre évitez -, &; comme il n'a coniideré en les communiquant, que l'utilité que le Public en peut rece- voir , il ne s'eft pas contenté de rapporter les feuls exemples des bons evenemcns , il a fait encore un fidelle récit des mau- vais , auiîi-bien que de tout ce qu'il a reconnu pouvoir con- tribuer au foulasement des femmes groiles &: accouchées. Cette longue fuue d'expériences femble lui donner droit d'examiner les ouvrages de tous ceux qui écrivent fur des ma- tières qui regardent (a profeflTion. C'eilauffi fur ce principe qu'il a examiné celui que M. Peu vient de donner au Public fous le titre de la pratique des accouchemens , où il croit avoir trouvé quantité de fes propres obfervations déguifécs , & rap- portées peu fîdcllement , &: d'ailleurs des erreurs confide- rables. M. Peu a depuis fait imprimer ce qui le touche dans l'a- vertiflement de M. Mauriceau , avec une réponfe e repone ^ qui fe trouve chez fon Libraire en mefme volume que la Pra- DES SCAVANS. 119 tique des Accouchemens , &: qui ell écrite avec beaucoup de modération. LES DIFFERENS CARACTERES DES FEMMES DU Jiede , avec la defcription de l\imour propre , contenant Jïx cara- Heres (^ Jtx perfeflion!. In 12, à Paris chez la Veuve Char- les Coignard , &c Claude Cellier , fur le quai des Augu- ftins. 1694. LEs fix caradercs font des coquetes, des bigotes, des fpiri- tuelles, des économes, des joueures,& desplaideufes Les (îx perfeftions oppofées , fonda modeftie , la pieté, la fcien- ce , la règle , l'occupation , la paix. Ce qu'il y a de vicieux dans ces caraderes , procède de l'amour propre , dont la def- cription remplit toute la féconde partie de cet ouvrage. LE CANTIQUE DES CANTIQUES , EXPLIQUE" dans fon fer.i li itérai. Par Aire. F. Auntt , Prêtre , Prieur de faint Aliyre , habitué en l' Eglifc de Lion. In 8. à Lion , & fe trouve à Paris chez Edme Coutcrot , rue faint Jaques. 1693. IL y a une infinité d'explications allégoriques du Cantique des Cantiques. Celle-ci eft littérale. Qoe fi elle eft reçue favorablement du Public , l'Auteur en communiquera de ^ ferablables fur les autres livres de 1 Ecriture , aufquels il a travaillé pour fon inftrudion partie uhere. ATTESTATION POUR LE P. MALEBRANCHE, Prêtre de l'Oratoire. aS^ J'Ai lii la Réponfe du P. Malebranche à M. Régis j & j'ai trouvé que les preuves qu'il rapporte de fon fentiment tou- chant les divcrfes apparences de grandeur du Soleil &: de la Lune dans l'Horifon &: dans le Méridien , eftoient dcmonftra.» izo LE JOURNAL nves j Se Clairement déduites des véritables principes de l'Op- tique. Signé Ze M. de L' Hofpital. yarignon. Sauveur. VAbbè de Catelan. AVIS TOVCHANT V ATTESTATION INSERE'E CTVESSVS. D[ [ES trois cfuej}:ons •jiie le P. AI alebr^inche avait à foittenir contre moi, il femble ijn'il en a h dindon ne deux , puis cjiie Catteflation inférée ci- dejfut , ne fait mention ejue de celle ejui -regarde l'Opticjue j (^touchant celle-là mefme je fuis bien-aifc cjii on fçache cjue f ni de fortes raifons pour rectifer ceux fjul ont firnè ce formulaire. M. Varir^non , contre le^itel j'ai écrit , ( Iifez le lo.chap. du i. livre de ma Philique ) ne peut eflre jttge dans cette caitfe , ejlant partie intereffée : Outre eju'il efl fi fujet aux- retraElations , ( voyez les Journaux des Scavaiis , & les Mémoires de l'Académie ) que je ne me tiendrai jamais pour bien juge par lui. Adonfieur le Marquis de V Hôpital ejl un Alathematicien Ulujire ; & je foitrrois ni en tenir a fa decifion bien plus raifonnablement qua celle de A^, Varignon : Mais l'amitié étroite & ancienne dont il ejl joint au P. Jl-falebranche , à laquelle il n'a pu refufer fa fignature , me difpenfe de 7ne fonmettre k fon jugement. M. Sauveur , vrai difciple du P.Ma- lebranche , en ftgnant le formulaire , fe déd-ommage du chagrin qu'il a d'ejlre obligé d'expliquer mon Siflême a fes Ecoliers ^ aufqucls il dit néanmoins que ma Philofophie ne luifertquedegu'de, & que du refte il leur débite fes opinions , qu'on fcait bien n'ejlre que celles du P. Ma— lebranche : Sans compter encore qu'ayant toujours eu plus en recomman- dation fon interefl que l'honneur des fciences , il n'a pas eu de peine à fe tourner du coté d'un parti qu'il a cru pouvoir contribuer k fon avance- ment C k Ca fortune. Il ne(l pas neceffaire de s'arrêter fur M. l' Abbé de Catelan. Outre qu'il a mandié les fiijfrages pour le P. Malebranche , fes erreurs ont ejlé fi fouvent relevées , tant dans les Journaux des Sça- vaps que dans des pièces détachées, quil ne peut eflre juge competant dans cette affaire. Au rcfie , fi cette conduite avoit lieu , le P. Malebranche pourrait efperer de gagner fa caufe contre tous les Auteurs qui auraient des opinions différentes des fiennes. Il s'en remettrait au jugement des Sçavans -, & ces S çavans feraient trois ou quatre de fes amis, qui figne- reient ce qu'il voudrait. A Paris chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à faint Jean Baptifte. X I. iir LE JOURNAL D ES SÇAVANS. Du LuNDY 15. Mars M. D C. XCIV. LE CANTIQUE DES CANTIQUES TRADUIT EN Franc^ois , avec une explication ttree des faints Pères t^ des au- teurs Ecclefiafliques. In 8. à Pans chez Guillaume Defprez, rue faine Jaques, i 694. LA tradudion du Cantique des Cantiques , & les expli- cations qui y font jointes, terminent le travail de I'au- teur fur l'ancien Teltamcnr. Il a cru que le fens fpirituel qu'il fuit p.îr tout , eftoit aufli le fens littéral , &: s'eft attaché à Thcodoret qui a traité de fables ridicules &: indignes de la fainteté de ce Cantique , les imaginations de ceux qui ont voulu que Salomon n'y ait décrit que fon mariage avec la fille de Pharaon , & de ceux qui fe font perfuadez que ce livre ne rcgardoit que les Rois figurez par Salomon , & le peuple figu- ré par l'Epoufe. La raifon qui a pu porter ces auteurs à confidererce Can- tique comme une pièce qui décrivoit un mariage charnel, & qui figuroit en mefme temps le mariage fpirituel de l'hglife avec Jefus-Chrift , cit qu'ils y trouvoient beaucoup d'exprefl fions metaforiques , &r qu'ignorant ce langage, ils ont négligé de percer ce voile , cS»: de contempler la gloire qu'il couvre. 1694. H h m LE JOURNAL L'auteur de la tradudion Se des remarques a recueilli les penfées des plus grans hommes qui ont fait de ce Cantique le fujet de leurs méditations , & l'a expliqué après eux en un fcns fpirituel , bien qu'envelopé de metafores prifcs des cou- tumes qui s'obrervoient dans les mariages des Hébreux. Ces auteurs foutiennent que ces metafores n'ont efté choi- fics par Salomon que pour conduire a. la connoiflance des plus haucs miitcres des hommes aulfi grolTiers que les Juifs. Âuf- fi ces auteurs ne prennent-ils pomt ce Cantique pour un poè- me figuratif, mais pour un poëme purement allégorique, qui ne luppofe la vérité d aucune hiftoire , & n'enferme qu'un fens fpirituel , qui fans reprefenter le mariage de Salomon , ne reprefente que l'union fainte de Jefus-Chrill avec fon E- glife. Pour faire enrendrc ce fens , ils confeil'ent de confiderer trois temps dans le Cantique des Cantiques. Le premier a précédé l'Incarnation , avant laquelle les juftes foupi- roient après le Meflîe. Le fécond comprend le cours de fa vie fur la terre ; & le troifiérae eft celui de l'etabliifemenc de l'Eglife. Cette metode a elle obfervée dans les explica- tions tirées de leurs livres^ HISTOIRE GENERALE DES DROGUES , TRAI- tam dei plantes , des animaux , ^ des minéraux. Ouvrage en. tichi de plus de quatre cent figures en taille douce , tirées d'après nature. Avec un di [cours qui explique leurs diff'crens noms ; les pays d'où elles viennent ; la manicre de connaître les véritables d'avec les falfifiees , ^ leurs propriété^-, où l'on découvre l'errettf des anciens & des modernes , ^c. Par le Sr. Pierre Pomet , Marchand Epicier ^ Dïoquifte. In folio, à Paris chez l'Au- teur, rue des Lombards, à la Barbe d'or ; Laurent d'Houry., rue faint Jaques, & Jean Baptille Loifon &: Eftienne du Caftin , au Palais. 1694. IL y a long-temps que l'on s'eft apperçu que le débit des drogues qui fervent à la Médecine & aux arts les plus uti- les à la vie, fe fait dans les boutiques avec beaucoup demau;; DES SCAVANS. 113 vaife foi. L'on a mefme reconnu que de toutes les fupeiche- ries qui fe font par les Marcliands , il n'y en a point de fi pré- judiciable à la fanté , que celles qu'ils comniettent à cet é- gard On s'eft mcfme plaint de ce dcfordre avec des termes qui ne montrent que trop combien il feroit important de re- médier à un abus f] dangereux. Van Helmont dans Ton traité des fièvres, confeiile à celui qui veut réullir dans la pratique de la Médecine , de préparer foi-meime la plupart des fcls , des poudres , &: des eflences qu'il employé dans la compofition des remèdes , parce que tout cela dans les boutiques eft mélangé, altéré &: fophiftiqué par la malice des Marchands. Ne pourroiton pas rcjetter fur ce débit des drogues peu finceres &: contrefaites , le peu de fuccés qu'ont quelquefois les remèdes que les Médecins ordonnent à leurs malades î Du moins ce foupçon n'tft pas fans fondement. Car enfin le célèbre M. Boyie , de la Société Royale des Sciences en An- gleterre , recherchant pourquoi on réuifit fi difficilement dans une expérience qui s'eitoit faite heureufement la pre- mière fois , & pourquoi mefme il y en a qu'on n'a jamais pu refaire , en artribue premièrement la caufe à la mau vaife fci de ceux qui vendent les drogues. En effet , fi l'on n'employé pas dans une féconde opération une matière auffi légitime que celle fur quoi on a travaillé d'abord , il n'y a pas lieu d'ef- perer le mefme fuccés que l'on en a eu la première fois. Ec ce grand Phificien continuant de déclamer contre une four- berie fi criminelle & fi punifiable , fe recrie : Celui qmfc con- duit bonnement , (^ qui ne iefl pas appliqué à examiner les drogues ^ les fimples qu'il acheté dans les boutiques , ne s imaginera pas fa^ cilemem jufqu'à. quel excès la perfide avarice des Marchands poujfe la tromperie , fur tout quand eue augmente confiderablement le g'iin, Jl déclare enfuite qu'il a appris d'un très habile Chimifte d'Amfterdam , qui faifoit un très grand commerce de dro- gues aux Indes , que celles qu'on apporte dans ces parties Occidentales où nous vivons , font extrêmement altérées , &: que les Indiens ne manquent gueres de tirer des effences de la canelle &c du girofle, avant que de les envoyer en Euro- 124 LE JOURNAL pe. Or fi on y ajoute encore quelque mélange ou altération dans les boutiques où l'on les vend en détail, quelle idée doit- on avoir de ce qu'on y acheté ? Il eft vrai que la (agefle de nos Rois toujours Ci attentifs au bien de leurs fujets , a fait des reglemens qui , s'ils eftoient fidcllement gardez , nous met- croient à couvert de la mauvaife foi de ces corrupteurs de drogues. Henri III. pour empêcher que l'on ne dilUibue dans les boutiques des drogues , des herbes , des eflences vieilles , fans vertu ou altérées , a voulu par fon ordonnance aux Elîats de Blois , art. S7. que les boutiques des Apotiquai- res fudent vificées deux fois l'an en prefence des Codeurs Re- gens en Médecine. Enfin M. Boyie dit qu'il montreroit par p.lufieurs exemples les fraudes qu'on commet au fait des drogues , s'il ne crai- gnoit que q^ielques mal intenrionnez , apprenant ce qu'ils ne fçavent peut eftrc pas , ne priflenc de là occafion de tromper le Public par un commerce que l'on ne (çauroit trop detefter. Cependant il alTure que parmi ces tromperies des gens de boutique , il y en a de fi énormes & de (i criminelles , que l'utilité qu'il y a d'en avertir le Public , doit l'emporter fur le danger que des fripons ne l'apprennent. Ccllceparti que M. Pomttapris dansl'ouvrage qu'il vient de donner au Public. II y découvre toute la mauvaife foi qui règne depuis tant d'années dans un commerce où lafinceriré eft plus neccfiaire que dans aucun autre. Car comme les drogues entrent dans le corps humain , qu'elles fervent à la compofition des remèdes externes , &: font employées dans les arts qui contribuent le plus à la confervation de la finté & aux necelfitez de la vie ; il eft certain qu'il n'y a point d'é- tude plus importante que celle qui tend à découvrir les frau- des qui fe font dans cetre force de commerce. Il nous donne iur toutes les drogues des lumières très utiles, & en developc les fourberies avec une ingénuités une franchife que l'on ne Tçauroit trop eflimer &: trop rcconnoitre. On lui a d'autanc plus d'obligation , qu'il eft le premier qui ait rompu la glace- Car avant lui perfonne ne s'eftoit avifé de caradcrifcr les drogues DES SCAV AKS. I2J drogues véritables &: légitimes , &: de nous donner un CritC' rium pour reconnoitre les fauffes , les mélangées , & les (b- phiftiquées. Ainfi quoi qu'on faife après lui , il aura toujours la gloire de s'eftre déclaré le premier en faveur de la focieté des hommes contre des abus qui vont à la détruire. Peu de gens pouvoient comme M, Pomet entreprendre ce travail. Car au lieu que les Apotiquaires , les Chimill:es & \t% Phificiens , à qui il convenoit li bien de nous éclairer fur ces defordres , n'ont pour l'ordinaire que quelques onces de chaque drogue , qu'ils n'achètent pas mefme de la pre- mière main ; au concraue M. Pomet qui depuis prés de vint ans en fait un grand commerce , en a toujours des balles, des caifTes entières , des tonneaux , des barils , des paniers , des facs tous pleins , &: fouvent dans le mefmc eftat qu'on les prend dans les Indes Orientales &: Occidentales , & dans les autres parties du monde. Outre cela il en a fait une étude particulière. Il a confulté les Sçavans de Paris , il a eu des avis des Marchands mefmes de l'Orient &: de l'Occident, qui lui ont répondu fur fes queftions -, il a comparé ces avis avec toutes les parties de ces immenfes balles de drogues , dont il lui a pafle Çv grand nombre par les mains : en un mot il n'a rien négligé pour s'inflruire , & pour mettre tous ceux qui vendent , qui achètent , ou qui employent des drogues , en eftat de s'y bien connoitre , &: de ne s'y pas laiffcr tromper. On a tout fujet d'efperer que ce livre fera bien reçu du Pu- blic , & que les Médecins qui ont plus d'intérêt que perfon- nc qu'on bannifle de chez les Droguiftes & les Apotiquaires \zs faulfes drogues , puis qu'elles ne fervent qu'à faire décrier la Médecine , verront avec plaifir un livre dont touc le but eft de faire connoitre les bonnes drogues qu'ils ordonnent de donner aux malades , &: defquelles feules on peut cfperer le fecours qu'ils fe propofent de rendre au Public par leur pro- fcfl'ion. C'eft pour cela que l'Auteur a préféré dans fon ou^ vrage le langage des gens de boutique &: de ceux qui débi- tent ou employent les drogues, à celui des Sçavans qui n'auroic pas eftc iî bien entendu de ceux à qui il a particulièrement en 1694. I i 11(5 L E J OU R N A L vue de fe faire entendre. Il avoue que quelque peine & quel- que application qu'il ait apportce pour décrire exa£lement les drocTues , il n'ofe pas dire qu'avec des fccours tels qu'il au- roit pu les fouhaiter , il n'auroit point mieux fait. Il n'y a pas de doute qu'une matière fi valîe &: fi importante demandoic plufieurs mains différentes pour eftre maniée comme il le faut. Mais puis que les Phificiens occupez depuis quelque temps à chercher vamement avec le microfcope ce que l'auteur de la nature a voulu cacher à nos yeux , &: à démêler des confi- gurations & des arningemens de parties invifiblcs qu'il nous eft allez indiffèrent d'ignorer , ncgligcoient de confiderer des alcerations efîentielles &c des mélanges dangereux qui cor- rompent les drogues les plus nccelfaires à conferver & à réta- blir la fanté, il a cru qu'il pouvoir faire entendre fa voix, en attendant qu'une autre plus forte & plus fçavante s'eleve con- tre des abus Ci pernicieux. Il eft mefme allez furprenant qu'un particuher comme lui ait entrepris de faire cette guerre à la deteftablc avarice d'une infinité de Marchands qui ne fe verront pas attaquez dans cet ouvrage fans relTentir tout ce qu'une paflîon aulTi puilTante que celle de s'enrichir , peut infpirer de violent quand elle fe voit dévoilée , &c expofée à la cenlure de tous ceux qu'elle meditoit de tromper. Ce n'elt pas tout. L'auteur ne s'cft pas contenté de faire à fes frais une infinité de recherches qu'il donne au Public ; il a fait graver & imprimer à fes dépens plus de quatre cent figures en taille- douce , tirées d'après nature , oùTouvoitce qu'il y a de plus curieux & de plus utile dans l'hiftoire des plantes & des animaux. Il y a encore plus que tout cela. Dans un temps où le com- merce eft allez diminué , & que les plus hardis Libraires n'o- feroient fe charger d'un livre dont les frais font fi grans , M. Pomet a fait la dcpenfe de l'impreflîon. Quant à l'ordre qu'il a donné à cette hiftoire générale des drogues , il a fuivi le plus naturel , & celui que les Phificiens nous ont marqué il y a long temps , en renfermant dans les DES se A V A NS. 117 trois claflcs des minéraux , des végétaux , & des animnux , ce qui ei\ l'objcc de la Phiiîque , & fur touc de la Pharmacie, &: des arts les plus utiles à la focieté des hommes. Ainli il a divifé Ton ouvrage en trois parties. Il partage la première partie , qu'il deftine aux plantes ^ en huit livres. Dans le premier il parle des femences ou grai- nes , & montre combien il cft facile d'ellre trompé par ceux qui les débitent. Dans le fécond il traite des racines , & die que dans leur choix il faut beaucoup de circonfpeâ:ion pouc reconnoitre fi elles ne font pas fuppofécs : car alors on ache- té une once d'une racine fuppofée plus que n'en vaut la livre, 11 allure qu'il a vu vendre pour du Contrj-y-erva de la Tor- niencillc fur le pied de plus de cinquante francs la livre. Dans le troificme livre il parle des bois qui font de quelque ufage dans la Médecine , parmi les teinturiers , & pour les ouvra- ges de marqueterie. Dans le quatrième il explique comment il faut connoicre les ecorces , telles que font la canelle , le quinquina , &c. Dans le cinquième il pafle en revue les feuilles , comme le Séné , & dit qu'il le faut choifir de feuilles epaiflt's , grandes , de couleur verdâcie , &: fe garder d'eu prendre de noirâtre, parce qu'il ne vaut rien eftant trop vieil, & fans doute mariné. Dans le fixiéme il examine les fleurs , & veut qu'on choififfe le fafran bien nourri , & celui fur tout qui vient de Boifne & de bois commun en Gatinois. Dans le feptiéme livre, il parle des fruits , & découvre coûtes les friponneries de ceux qui vendent en détail le poivre & le gerofle, 11 traite enfuitc de toutes les fortes de gommes , & rien n'eft plus curieux que touc ce qu'il en dit. Le huitième & dernier livre contient les fucs , tant ceux qui fe rédui- fent en confiftance d'eleftuaires liquides , que d'extraits foli^ des. La féconde partie regarde les animaux , tant cerreftres qu'a- quatiques , & contient de belles curiofitez qui tendent tou- tes à la confervation & au retabliffcment de la fanté. Il com- mence par examiner ce que la Médecine emprunte du corps humain , U qui fait partie des drogues. Et à cette occafioia. •ïî8 LE JOURNAL il décrît avec tout le foin qu'il a pu ce que c'eft que la Mumîe & rUfnce , auTquelles Paracelfe , Crolius &: leurs fedateurj attribuent des qualitez Ci eminentes. Enfin la troifiémc partie eft pour les foflîles , qu'il divife en cinq clalfes , &: qu'il traite dans cinq livres. Le premier par- le des fcpt métaux , de leurs régules , de leurs teintures , des marcaflîces, des émaux, fur tout des difterens ufages du mer- cure ou vif argent. Le fécond elt pour les minéraux , tels que l'Antimoine , l'Emeri , le Safie , l'Orpiment , le Salpê- tre , & l'Aimant , à l'occafion duquel il parle de l'Aimanc qui fut découvert en i 69 i . au clocher de Chartres , &: donc M. de Vallcmont nous a donné un traité fort curieux. Dans le troifiéme livre il parle des bicumes tant durs que mois , ou liquides. Les durs font l'ambre , le charbon de terre , les pierres noires , les foufres , &:c. Les mois font le Matta , le Bitume de Colao , &c. Les liquides font le Naphta d'Italie , le Petroleum. Le quatrième nous reprc- fente les pierres tant prccicufes que communes ; & le cin- quième ell fur les difterentes terres , à fçavoir les figiliées , & toutes celles qui entrent dans l'uf.ige de la Médecine, com- me le Cachou , les bols, &c. Il n'oublie pas mefme les ocres, & toutes les terres qui fervent à la Peincut e , puis qu'elles font partie du commerce des Droguiftes. Je ne rapporterai ici aucune des curiofitez qui font con- tenues dans ce livre , parce qu'il y en a un fi grand nom- bre , & qu'elles font toutes d'une telle importance , qu'il n'eft pas jufte de donner dans cet extrait lieu aux unes prcferable- mcnt aux auttes. Il fuffit d'afiurer que les curieux qui voudront avoir un dro- guicr, trouveront dans ce livre le plan du plus exad & du plus important qu'on puifTe former , puis qu'il reprefente J'ordre de celui de M. Pomet , qui contient plus de deux mil- le huit cent curiofitez différentes , toutes tirées des trois fa- milles des minéraux , des végétaux , &: des animaux. Réponse DES se A VANS. itp REPONSE DU P. MALEBRANCHE, PRESTRE DE l'Oratoire , ^ l'Avis de M. Régis. > J'Avois joint à l'Atteftarion qui a paru dans le Journal précèdent, quelques reflexions qui , par je ne fçai quelle rencontre, y ont efté fiipprimées. Il n'cft plus temps de les rapporter. Puis que M. Régis ne m'entend pas , & que Tes manières ofFenfantes m'ôtenc le moyen de le convaincre par l'autorité non feulement des Géomètres que je lui ai propofez, mais de tous ceux qui n'aiment pas à le fane dire des durerez; je l'abandonne à lui-mcfme , &: je men tiens au jugement du Public , auflî-bien que ceux qu il a fi injuftement otFenfez. HISTORÎCA DISSERTATIO ROMANO ECCLESIA- Jiica , de toUenàk pcnes qraviljîmos Scriptores inolita ambtyiita- te ^ confufione imer duas antiquas Romanus Matronas , pro- feffione Chri^iank célèbres , videlicet Aniciam Faltonicim Pro- bam , 5^^. Petronii Probi V. C. uxorem , Olybrii , ^ Probi- ni , (^ Probi Conftilum matrem : ^ VaUriam Faltonium Pro- bant , Adelfii Procof. con)uqem , Poetriam ingeniojï.f/îmam , qu,^ centonem VtrqiUanupi de Chrijîo confecit. Auîiore Thomk de Siyneonibus Vibo Valentirïiano Augujîiniano , vuli^o a Monte Leone nuncupato , fac Theol. Mag. ac in JEmilik fui Ord. Pr. Provinciali. In ^. Bononia:. 16^2. LE P. Thomas de Simeonibus , Provincial de l'Ordre de faint Auguftin dans la Romagne , ell un des plus célè- bres Prédicateurs d'Italie , qui prêcha le Carême dernier dans Rome , avec l'applaudidement gênerai de Ton auditoi- re. Cette éclatante fonction qui femble demander un hom- me entier, ne l'empêche pas d'enfeigner la Teologie , &: de donner encore beaucoup de temps à l'étude de l'Hidoire &: de la Cronologie. Ayant entrepris de faire un recueil des femmes qui ont excellé dans les fciences , il a trouvé que plufieurs auteurs avoient confondu Anicia Faltonia Proba , avec Valeria Fal- 1694. K k 130 LE JOURNAL tonia Proba , &: a compofé cette differtation pour les difti» gucr. Le premier qu'il réfute eft VolTms , qui dans le quatrième chapitre de fon livre des Poëtcs Latins , a écrit que Proba \ Falconia ou Faltonia eftoit femme d'Adelfius ProconfuI , mè- re de Julienne , & ayeule de fainte Demetriade , &: qu'elle avoir fait la vie de Notre Seigneur en vers tirez de Virgile. Notre fçavant Auguftin découvre là trois fautes qui ne Ce peuvent excufer dans un homine audî habile qu'cftoit Vofl fius. L'une confifte en ce qu'il appelle cette illuftre Dame Romaine Proba Faltonia , au lieu de l'appeller Faltonia Pro- ba. L'autre , en ce qu'il la fait femme d'AdeJfios ; & la der- nière , en ce qu'il lui attribue le Centon de Virgile , à elle qui ne s'ell jamais mélce de poëfie. Le fécond auteur qu'il rcfutc eft Gafpard Barthius,qui dans Tes animadvcrfions fur le panegirique compofé par Claudien en l'honneur de Probinus &: d'Olibrius , où Faltonia Proba eft louée , foutient qu'elle s'appelloit Falconta , & non Faltonia. Le mefme Barthius lui attribue le centon de Virgile. Avant que d'entrer dans l'explication des vers de Claudien , il exa- mine le titre du panegirique , & approuve les anciennes édi- tions où il efi: conçu en ces termes : Jn ConfuLttum Prohi ^ Prohini ^ Olybrii. Par Probus que Barthius met le premier dans ce titre , il entend Sextus Aoicius Petronius Probus pè- re de Probinus & d'Olibrius j & il s'imagine que Proba (iforc célébrée par faint Jcrôme , eftoit mère de Probus , & ayeule de Probinus & d'Olibrius. Notre auteur s'en tient au titre des nouvelles éditions ou ne fe voyent que les noms des deux frères Probinus &: Oli- brius, qui eftoient Confuls enfcmble en l'année 395. Bien loin de demeurer d'accord que Probus leur pcre partageaft avec eux cette fublime dignité , il fe pcrfuade qu'il eftoit mort avant qu'ils la poftedaflent , & le prouve par fon epi- tafe où il n'eft fait aucune mention du Confulat de fes deux fils, qui vrai-femblablement n'y auroit pas efté omis s'il eftoic arrivé de fon temps, A l'égard de Probus pete , il avoir efté ConfuI en 371. Àinfi le P. Thomas de Simeoiubus reprend DES SCAVANS. 131 Barthlus fur plufieurs points. Le premier , d'avoir prcfcré le nom de Fukcnia à celui de Faltonia. Le fécond , d'avoir cru que Faltenia eftoit mère de Probus , donc elle eiloit femme ; & le troificme , d'avoir nié que Probus père des deux Con- fuls , l'euft jamais efté lui-mefme. Letroifiéme auteur qu'il réfute eft Glandorpius , qui met Q. Ciodius Hermogenianus Olibrius en la place de Sextiis Petronius Probus , le fait mari de Faltonia Proba , &: père des deux Confuls donc je viens de parler. A ces trois auteurs il joint le Cardmai Baronius , qui fur l'année 3515. en laquelle Probinus & Olibrius fils d'Anicia Faltonia Proba , eftoient Confuls , s'eft mépris en plufieurs façons. Car en premier lieu il a cru qu'Anicia Falconia Proba cltoit celle qui avoir compofé de Cencon de Virgile , &; deux epirafcs , l'vne de Probus fon mari , & l'aucre d'elle mcfme. £n fécond lieu il die , que du mariage de Probus & de Proba naquirent quatre enfans , Olibrius , Probinus, Probus, &: Julienne femme de Ciodius Hermogenianus Olibrius , & merc de fainte Dcmetriade. Baronius s'cfl doublenienc trompé au fujec de Julienne , &C en ce qu'il la fait fille de Probus &- de Proba , & en ce qu'il lui donne Ciodius Hermogenianus Olibnus pour époux. Elle n'clioir poinc fiile , mais feulement belle filie de Probus & de Proba , & femme d'A'iicius Hermogenianus Olibrius. Cecte généalogie elt clairemcnc expliquée ; ar iaint AuouHin. Alaric ayant pris Rome en 409 & l'ayant abandonnée au pillage , Proba , julienne ,&: Oemctriadc ic réfugièrent en Afrique , où Demetriade , après avoir ouï un fermon de fainc AUgulhn fur les avantages de la virginité , conçut le dcifein de la garder toute fa vie , &c peu après en reçue le voile des mains de ce grand Evéque. julienne lui demanda une in- ftru6lion par ecric fur l'cflac & fur les devoirs des veuves. C'cft le livre de hono viduttatis , dans le dix- neuvième chapi- tre duquel il lui parle de cecte forte : Nunc ergo illi Rcgt qui uniCiC Sponfe cnjus membra cfits , fpeciem concttpivit , vemciter jt. mulplacete j Jtmul inharete. jUa ( Demeifias } integritate vhgi- nali , tu continentik viduali ; amba puUhntuditie fpmtaU : in quii 1^1 LE JOURNAL pulchritudine ettam illins Avia , Soctus tua , qua ]dm ceHe fenuVi, e^ pukhra vohifcum. Baronius ayant depuis faic reflexion fur ces paroles de faine ""AUguftin , s'eft corrigé dans les additions , & a reconnu que Probus & Proba n'avoienc eu que trois Hls , à l'un dcfqucls Julienne avoir efté mariée. Notre Aureur , pour ne lallFer aucun doute , fait la généa- logie de Sextus Anicius Petronius Probus, dont voici l'abrégé. Petronius Probianus Conful , fur père de Celius Probinus qui fut Conful en 341. &: père de Sextus Anicius Petronius Probus Conful en 371. 11 epoufa Anicia Faltonia Proba fille d'Anicius Probus Pro- conful d'Afrique , de laquelle il eut trois fils. Le premier fut Anicius Hermoçenianus Olibrius, Conful en 39 j. mari de Julienne , & pcrc de fiinte Demetriade. Il mourut vers l'an 409. Le fécond fut Anicius Probinus Conful en la mefmc année ; & le dernier fut Anicius Probus Conful en 406. Outre Anicia Faltonia Proba , mère des trois Confuls , il y a eu Valeria Faltonia Proba , femme d'Adelfius , laquelle a vé- cu au mefme temps , &: a fait un centon très ingénieux des vers de Virgile , pour exprimer les evenemens les plus remar- quables de l'ancien & du nouveau Tcftament. Ce Centon qui fc trouve dans le huitième tome de la Biblioteque des Pè- res de l'édition de Pans , a cflé ajouté par le P. Thomas de Simeonibus à la fin de ce petit volume dédié au P Gaudentio Robert! , auquel la Repubblique des Lettres eft redevable du Journal des Sçavans qu'il publie chaque mois à Parme , & d'un recueil dont il a déjà donné cinq tomes in 4. fous le titre de Mtfce/lmea Itahca Erudita , pour remettre dans le commer- ce d'excellens traitez qui n'y paroiflbicnt prefque plus. Faute à corriger dans le Journal précèdent. Page I I 7, lig, i8. l'arc en ciel lunaire , lifezji.'zxc en ciel folaire. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptiftc. Avec Privilège du Rei. XII. ,33 LE JOURNAL DES SÇAVANS Du LuNDY 22. Mars M. D C. XCIV. VITtE PAPARUM AVENIONENSIUM , HOC EST Htftoria Pontificum Romanorum qui in GaUia federunt ab anno Chtifti M. CCC. ufque ad annum M. CCC. LJ^XÏ^l. Ste- fhanus B iluziui Tutelenfii magnampartem nunc primùm edidit, reliquam emendavtt ad vetera exemplaria , notas ad)ecit , {^ (^ coBeHioncm aUorum veteium. Jn ^. 2. vol. à Paris chez François Muguet, 1693. LEs vies des Papes qui ont tenu leur fiege dans Avignon , font partie de l'hifloire Ecclcfiaftique de France , de la- quelle M. Baluze découvre dans ces deux volumes quantité de circonftances qui jufques ici n'avoienc pas efté afTez con- nues. Ces vies font celle de Clément V. nommé auparavant Ber- trand Got , Archevêque de Bordeaux , qui ayant efte elu en fon abfence par les Cardinaux aiVemblez à Peroufe en 1305. transféra le faint Siège à Avignon. Enfuite font celles de fept de fes fuccelTeurs , fçavoir de Jean XXII. de Benoit XII. de Clément VI. d'Innocent VI. d'Urbain V. de Grégoire XI. &: de Clément VII. Grégoire XI. ellanc mort à Rome où il avoit reporté fon I 694. L 1 134 LE JOURNAL Siège, Clément VII. Napolitain fut clu par les Cardinaux, dont quelques-uns qui prétendoient n'avoir pas eu la liberté de leurs fuffragcs à caufe des clameurs & des menaces du peu- ple , &C qui d'ailleurs ne pouvoicnt s'accommoder de l'hu- meur fevcre & inflexible de Clément VII. fe retirèrent trois mois après à Fondi , & y procédèrent à une nouvelle eledion qui tomba fur le Cardinal de Gennes , nommé depuis Urbain VI. Ce qui caufa un fchifme qui dura cinquante ans en Oc- cident. Il n'y a aucun de ces Papes dont la vie n'ait efté écrite en Latin parplufieurs auteurs contemporains ou peu éloignez de leur temps , &: dont quelques-uns ne font connus que par leur qualité , comme le Chanoine de Bonn j d'autres par leur pays , comme le Vénitien. Quelques uns le font auflï par leur nom , comme Jean Chanoine de faint Vidor de Paris, Ptolemée de Luqucs Duminiquain , Bernard Gui Evêque de Lodeve , Amauri Auger de Bcziers , Pierre de Herentals de l'ordre de Premontré , Aimeri de Peirac ; 5c d'autres font en- tièrement anonimes. M. Baluze nous donne le premier une partie de ces vies ; & à l'égard de celles qui avoient déjà efté publiées , il les a revues Se corrigées fur les manufcrits. Elles font toutes en- femble environ le tiers du premier tome. Les deux autres tiers font remplis de remarques fur ce qu'il y a de plus impor- tant dans ces vies. Le fécond volume contient quantité de pièces originales qui n'avoient point encore vu le jour , & fur lefquelles les remarques font appuyées. La préface roule principalement fur la comparaifon odieufe que quelques auteurs Italiens ont faice de la demeure des Pa- pes dans Avignon avec la captivité de Babilone ; ôc M. Balu- ze y prouve très folidcment , que s'il y avoit quelque plainte à faire de cette demeure , elle devoir cftre faite non tant par les Italiens de ce que Rome fut réduite à une trifte folitude Se à une déplorable p>iuvrcté , que par les François de ce que leur frugalité fut changée en luxe , &: de ce que la fimplicité & l'innocence de leurs mœurs furent altérées par des vices ^ui leur avoiem efté jufqa alors étrangers Se inconnus. DES SCAVANS. 135 EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. GALLAND. Du If. Février 16^ f. NOus nous entretenions hier , Monfieur , de l'infcrip- tion Latine que l'on découvrit à Arles l'année palTéCs avec une urne , des vafes de verre , & avec d'autres chofes ; & je vous difois que j'en avois vu des explications dans le 6. Journal de cette année , dont je n'avois pas efté fatisfaic. Vous m'en fitcs voir d'autres qu'on vous avoir envoyées d'Air- les avec l'infcription , qui ne me fiitisfirent pas davantage 9 & nous convinmes que ceux qui avoicnc donné ces explica- tions paroidoient n'avoir pas une grande habitude du déchi- frement des inicriptions Romaines. Il fe font imaginez qu'il crtoic libre de donner aux abbreviations telle explication que l'on vouloit , pourvu qu'on en formaft un fens. Mais ils fe font trompez. Il y a des règles qu'il efl aifé de fe former foi- mefaie, pour peu qu'on ait de pratique dans ces monuraens de l'antiquicé. Voici une de ces règles : Les noms propres ne font jamais abrégez , ou s'ils le font , c'eft d'une manière qu'il efl: im- poflible de ne les pas reconnoitre. Ils ne l'ont pas obfervée en expliquant A. B. par Auli Balhi , &: par d'autres noms. Néanmoins le prénom efl: ordinairement reprefcnté par une feule lettre , parce qu'on ne peut pas s'y tromper , à caufe que les prénoms chez les Romains font en petit nombre , & que le nom qui les fuit les fait connoitre fuffifamment. Ainfi quand on trouve un A , un C , un M , ou un T avant un nom, on eft certain que l'A fignifie v^a/»; , le C Caim , l'M Mar- cui , & le T Tttus. Le foin a mefme efté Ç\ grand pour ôter Jes équivoques , que pour diflinguer l'abréviation de Caiui d'avec celle de Cneus , on a abrégé Caius par le fcul C ^ & Cneus par CN. Cette règle pofée , on ne peut douter que les lettres A. B. dans l'infcription d'Arles ne peuvent en au- cune manière eftre expliquées par un nom propre & par un prénom. Voici une £,utre règle : Les mots qui nefe rencontrent pas; i3<î LE JOURNAL fréquemment dans les infcriptions , fonc abrégez avec cette précaution qu'une lettre décide du mot entier , ou que ce qui ïuit le détermine. On a manqué contre cette règle dans l'ex- plication de SAN. par le mot de Sanquis , parce que pour l'expliquer ainfi il fiiudroit qu'il y euft un G, SANG. &: ce qui fuit ne donne aucun indice de cectc explication. Je croirois que celui qui l'a expliqué par le mot de Sanitas , a- voit connoifFance de la règle , (î le reRe de Ton explication ne faifoit voir qu'elle lui eltoit inconnue de mefmc qu'aux au- tres. Mais vous direz que ce n'cfl: pas afTez de rcjetter les expli- cations des autres , &: que je dois en donner une meilleure, puis que je ne trouve pas dans celle là de quoi me facisfaire. Pour vous dire la vérité , je trouve beaucoup de difficulté dans cette entrepiife , & je ne puis m'empêcher de me plain- dre des auteurs de l'infcripcion qui n'ont pas prévu que leur langue pouvoir changer , & que ce qui leur paroilloit facile, pourroit un jour devenir très dilHcile & inexplicable. En gê- nerai je ne puis approuver que les Romains ayent introduit tant d'abbreviations dans leurs infcriptions , & mefme fur leurs médailles , où nous en trouvons quelquefois qui ne font pas intelligibles , ou qui donnent bien de la peine aux Antiquaires. Néanmoins je veux bien vous marquer le fens que j'y trou- ve : mais je ne vous le donne pas pour le lens conforme à l'in- tention de ceux qui ont fait l'infcripcion. Je vous le donne feulement comme plus convenable au ftile des infcriptions anciennes, fuivant mon fenciment que je foumets entière- ment au vôtre : Sancios acque beatos cineres facn holocaujîi Dia- na in terram defoiit ampliffimu Arelate , Calendii Martiii ob li- hertatem impetrutam tertiàm. Je ne m'arrête pas à chercher de quoi l'appuyer , parce que je ne fuis point perfuadé que ce foit là'la véritable explication. Pour ce qui regarde le fens que je donne aux lettres OLIM, je l'ai imaginé , parce que je ne puis fouffrir Cdlendts Marùis oUm tertiis. Cela ne (ignifie rien, &: je croi véritablement que CCS lettres ibnt des abbreviations de mots entiers. Je ne veux donc DES SCAVANS. ,37 donc pas affirmer que mon explication foie bonne : car pour prouver ce que j'avance , il faudroic avoir des mémoires de i'hiftoire ancienne & particulière de la ville d'Arles. Quoi qu'il en Coit , j'ai de la peine à croire qu'on puifTe en donner une qui foit jufte , à moins que les copies de l'infcription qui ont cfté publiées ne foient pas exadcs, C'eft pourquoi il fe- roit à fouhaiter de voir l'original , ou pour le moins d'en avoir une copie qui fuft fidelle. OPERA JACOBI SIMANC^E EPISCOPI PACENSIS ^ foftmodum Zumorevfii , Junfconf priefianttjf. De Catholicii inflitutionibus liber ad pr^cavendas ^ extirpandas hitrefei ad- modum neceff.înus. Thconce i^ praxis h^rcfcos , jive Enchiridion Judicum violâtes religtonis. Annotationei in Zanchinum , cum animadvcTffonibui in Campei^.um ; t^ tiberjîngnlaris de Pâtre Maretico. Qtjje omnia bue ufque dtfperfa , ad commodiorem ufîim in hac noviffîmk imprcffl'-ne coiige^t in unum , nous illu- firavit , ^ confiituîionibus apoliolicis recentioribus ad S. Inquifi- tionis tribunal Çpeciantibîis locupletavit Francifcus Cafiracanius Fcrrarienjis Catbedralis Canonicus , J. V. I). Prioralis fanBi Romani Mart. Vicar. perpétuas , acfanïla: Inquijîtionis Conful- tor. Jnfol. Ferraria. 16^2. JAqJ2-ES Simanca naquit à Cordouë vers le commence- ment du dernier fiecle , enfeigna le Droit dans le Collège de fainre Croix de Valladolid en 1540. & y compofa fes In- ftitutions Caco'iques pendant qu'il eitoit Confulteur del'In- quifition. S'eftant mis depuis dans l'eftat Ecclcfiaftique , il fut pourvu fucceflivement de trois Evêchez. Il eftoit encore dans celui de Badaios , lors qu'il fut envoyé à Rome par le Roi Cato- lique , pour y foUiciter les aftau-es de Caranza Archevêque de Tolède. Dans le cours de cette follicitation le Viceroi de Naples eftant mort, Simanca fut chargé de cette fondion , & s'en aquitta au grand contentement de fon Maître. Il vécut long- temps , & compoTa plufieurs ouvrages , dont les principaux qui eltoient devenus fore rares ont efté reim- 1694, M m I3S LE JOURNAL primez dans ce volume par les foins de M. Caftracanio Cha- noine de Ferrare , & illuftrcz de fes notes. Les Infticutions Catoliques qui font à la telle, conticnnenc les procédures qui fe font dans les tribunaux de l'Inquifition , rangées félon l'or- dre de l'alfabet. Le Manuel des Inquifiteurs qui fe trouve après , traite les mefmes matières , mais avec moins d'étendue. A la fin de ce Manuel font des remarques de M. Cafttacanio fur le livre de Zanquin de H^redcis , & fur les additions faites à ce livre par Camile Campcge. Le dernier ouvrage de Simanca eft une difTertation de paire tiaretico , où il s'agit de fçavoir fi un fils qui fçait que fon père ell: tombé dans l'herehe , efl: tenu de le dénoncer. Si- manca fuie l'opinion de Toftar , comme la plus probable , & tient la négative, ^cs raifons font qu'il n'y a point de loi qui impofe au fils cette obligation , &: que d'ailleurs il fe priveroic de la fucceflîon dont tous les cftets feroient confifquez , & fe couvriroic de l'infamie qu'un père coupable d'herefie répand fur Çqs, defcendans. L'auteur excepte pourtant deux cas : l'un quand le fils eft juridiquement interrogé ; l'autre , quand il y a danger que l'hcrefie de fon père n'infecle tout le pays. Bien qu'il ne tienne pas le fils obligé à dénoncer fon père, il croit pourtant qu'il lui eft permis , que quand il le fait il eft louable de facrifier la tendreife de la nature à l'intercc de la. foi , & qu'en cette occafion il ell juRe que le Prince le grati- fie de la confifcation , & l'exemte de l'infamie. M. Caftracanio a mis à la fin de ce volume plufieurs confti- tutions des derniers Papes concernant l'Inquifition , les livres^ & les propofitions défendues. Outre les livres de Simanca qui font réimprimez ici , il y er» zvkwde dignitate Bpifcoporum , wnde Epifcopisjurifperitii , un qui a pour titre : Defenfio flatuti Tcletani , quod ex Habrais Mau^ rifve defcenden'C! arcet à beneficiii , fub nomine Dtdaci VeUfqués. Ces trois font imprimez à Anvers , auffi-bien qu'un autre in- titulé : Liber difceptationum. Celui qui a pour titre : Be repu-. bkca coUeïianea. fut imprimé à Valladolid en 1565. DES SCAVANS. 139 LA PROGRESSION DU LIMAÇON AQUATIQUE, dont la coquille eft tournée en fpiralc conique, par le Jieur Fran- çois Pouf art. SI le limaçon n'avoir point eu d'autre fecours que le capri- ce & l'inconftance des eaux pour eftre porté fur les diffé- rentes rives qui lui fourniffent la nourriture , il auroic erté fu- jer à bien des difgraces. Mais la narure qui n'a point de plus preffans defirs ni de plus nobles partions que de triompher par fes liberalirez , y a pourvu d'une manière fort obligeante. Elle lui a mis fur le dos un grand fac membraneux , qu'il vuide &: remplir d'air par une ouverture qu'il ouvre & qu'il ferme fi cxadcment de dehors en dedans avec un Ibupape à clapet , qu'il ne peut forcir ou entrer le moindre globule fans le confentement de l'animal. C'efl: par cet artifice qu'aug- mentant ou diminuant le volume de fon corps, il en augmen- te ou diminue la pefanteur par rapport à un pareil volume d'eau ; il nage fur la fuperficie des eaux , il fe précipice dans le fond , il elV quelquefois obligé de ramper furies bords , &: monte fitt^iccment du fond à la fuperficie. Quand ce petit animal veut mettre à la voile , il fe tire à nioicié de fa coquille , il fe tourne lur le dos pour eflre porté furie fac qu'il a refoulé d'air ( les cnfans fe mettent fur des gourdes pour apprendre à nager , Zc les hommes nagent plus aifément fur le dos qu'en toute autre firuation. ) Il dilate la plante de fon pied qui lui fert de gouvernail , auquel il fait fai- re mille petites ondulations qui font comme autant de coups de rame qui le pouffe doucement fur quelque rivage. Mais s'il veut précipiter fa coiyrfe , il allonge fon petit corps fur la fuperficie de l'eau , en le tirant à moitié de fa coquille , à la- quelle il donne une fecouffe pour la faire fuivre , & pour don- ner un mouvement favorable à l'eau. 11 s'allonge une fécon- de fois, il donne une nouvelle fecouffe , il imprime un nou- veau mouvement. Enfin continuant cette manœuvre pendant quelque temps , il arrive fur une côte étrangère où il cherche a prendre fci ébats , de nouveaux alimens , ou à faire quel» 140 LE JOURNAL que amoureufe conquéce. Quand notre petit avanturier veut efquiver les infultes de quelque ennemi , il chafle prompte- incnt tout l'air qui l'cnvifonne , &: devenant par ce moyen plus pefant qu'un pareil volume d'eau , il eft fubitement précipité dans le fond. Mais il a ce defavantage qu'il ne fçauroit re- monter qu'en grimpant fur quelque plante , ou bien en ram- pant fur le bord de la rivière. Il exécute Ci habilement cette progreifion , qu'il fcmble plutôt gliller que marcher , parce que faifant faire mille pences ondula.ions prefque infenlîbles à la plante de fon pied , elles fe fuccedent i\ immédiatement les unes aux autres , qu il n'y a point d'inilant de repos dans fon mouvement. Aulîî-tôt qu'il eft arrivé à la fuperficie, il prête le côté , il ouvre la foupape pour Ce remplir d'air , fans lequel il ne fçauroit furnager. Si derechef il veut aller s'cgayer dans le fond des eaux fans epuifer fon air , il faut qu'il tampe tout au long du bord ou d'une plante , parce qu'en cet citât il clt plus léger que l'eau : mais en récompenfe il a cet avantage que lors qu'il veut re- monter à la fuperHcie , il n'a qu'à fe lailler aller , il y efl: porté avec viceffe. Chacun peut faire ces expériences dans fon cabinet. Il faut mettre plufieurs de ces limaçons dans un grand baflin plein d'eau : on les verra nager fur le dos de la manière que je l'ai expliqué. Si on les pique , ils fe précipiteront tout d'un coup dans le fond , en lailfanc après eux une grande colonne ou traînée de globules d'air qui font bouillonner l'eau. Ils re- monteront enfuite tout au long du vailfeau , & l'on verra qu'aufli-rôt qu'ils arriveront .1 la fuperficie , ils prêteront le côté , &: ouvriront la foupape pour fe remplir d'air qui fait un pecit bruit en entrant dans leur fie. Si on plonge bien dou- cement dans l'eau les limaçons qui fe font remplis d'air, & puis qu'on les laifl'e aller , ils remonteront tout d'un coup à la fuperficie. Ga LLOS DES se A VANS. 141 GALLOS TAM FALLI AB HOSTE NESCIOS QUAM vinci. Oratio habita in regio Ludovici Ma^ni CoUegio Soc. Jefu , à Gabriele Francifco lejay , ejufdem Scaetatis Sacerdote. In 12. à Pans chez la Veuve de Simon Benard , rue faine Jaques. 1694. LEs Orateurs du Collège de LOUIS LE GRAND ont (buvent célébré la valeur de la nation &: les fuccés de Tes armes. Le P. le Jay a ouvert au commencement de cette année académique un plus vafte champ à Ton éloquence , &: s'eft propofé d'égaler la prudence des François à leur coura- ge. Il a pofé pour fondement que les plus eclatans exploits de la guerre procèdent &: de la prévoyance qui découvre & évente les rufes des ennem.is , & de la force des armes qui les domte , & du dcfir de la gloire qui porte inceflamment les grandes âmes à des adions héroïques. Sur ce plan , il a montré que les nations Conjurées contre la France n'ont pu lui ravir dans la dernière campagne aucun de ces avantages ; que la fageffe de fes confeils a évité leurs pièges & diflipé leurs projets ; que fa valeur a pris leurs villes, gagné des batailles , & lui a aquis la louange de ne pouvoit non plus eftre trompée que vamcuë. La fale où ce difcours fut prononcé eftoit ornée de ta- bleaux , de portraits , & d'infcriptions , qui répondoient aux penfées de l'Orateur , & qui reprefentoienc aux yeux le mef- me fujet. REPONSE DE M. SAUVEUR A L'AVIS DE M REGIS inj^erè au Journal des Scavans du S. Mars dernier. UN homme piqué comme M. Régis , peut recufer au ha- zard toute la terre , & imaginer des raifons de fa recu- fation. Mais la véritable manière de répondre à l'atteftation eftoit de faire figner des gens de lettres à une attcftation de fon fentiment contre le P. Malebranche ; 8c alors il fe feroit épargné les puerilitez dont fon avis eft rempli. 1694. N n 141 L E J OURNAL A l'égard des reproches qu'il fait en particulier à M. S.ni- veur , on répond , i. Qne s'cftant principalement attaché aux Matcmatiqiics&: à la Phifique , dont le P. Malcbranche n'a point fait Ton capital , il ne peut cflre Ton difciple, à moins qu'on ne le veuille faire difciple de toutes les perfonnes de fcience qu'il eftime. 2. Il n'y a pas d'apparence qu'il ait eu du chagrin d'eftrc oblige d'expliquer la Phifique de M. Ré- gis , puis qu'il lui cftoit libre de ne le pas faire ; & l'on s'cft toujours allez rapporté à fon expérience &: à fes lumières pour lui laifler faire le choix des matières & des livres qu'il jugeoit à propos d'expliquer aux Princes aufquels il a eu l'honneur de montrer. 3. Il cft naturel qu'enfeignant la Phi- fique , il prenne un livre imprimé pour lui fervir de guide dans l'ordre des matières qu'il doit expliquer-, &: alors fefer- vant de celui de M. Régis , il approuve (es opinions lors qu'il cft du mefme fentiment , & les abandonne lors qu'il n'en eft pas ; & M. Régis doit eltre fatisfait de la modération avec laquelle il l'a fait 5 ce qu'il ne peut ignorer. 4. M. Régis con- noit bien peu le caradere de M. Sauveur , & il ne paroit pas qu'un honnête homme foit capable de faire de femblables re- proches. Si l'intérêt feul l'avoit conduit , il y auroit eu bien plus de fureté &: de politique de refufer à ligner pour éviter la fuite d'une difcuiïîon inutile pour fa fortune. M.iis pour montrer que le feul intereft de la vérité & l'honneur des fcicn- ces l'ont engagé à (Igner cette atteftation , il déclare qu'il en fera autant pour M. Régis , contre le P. Malcbranche lors qu'il aura la vérité de fon côté. SELECTIORA NUMISMATA IN ^RE MAXIMI moduli , è Mufao tllufiri.^mi D. D. Franafa de Cawpi yibba- tis S. Marcelle & B. Maria de Siniaco. Concifn interpretatio- nibus per J). ViùUant D. M. ^ CenomanenÇium 'Ducis Anti- quarium iRujîrata. Jn ^. à Paris chez Antoine Dezallier, rue faint Jaques, 1694. M R. de Camps poflede depuis long-temps un cabinet rempli de toute forte de médailles anciennes , qu'il a DES SCAVANS. ,45 defTein de fl>jjf que l'on prétend exprimer la nature de la courbe C M.w dont les tou- chantes M T font doubles des parties C T de l'axe faites par leuf rencontre , c'cft à dire où p= iq. Cette folution n'eft accompagnée d'aucune démonftration , parce que l'on refcr- ve à une autre occafion de donner l'analifè qui lui fert de preuve. Quant à la difficulté qui fait le fujet de notre remarque, elle eft fondée iur les principes les plus connus de l'analife ordi- naire ; &; elle demande fimplement qu'on veuille fuivre le calcul avec un peu d'attention. Soient , comme il a efté dit, MN=^ &: NC=x: Soient de plus NT^=:? &TM = j; TC fera x — / ; & dans le triangle redangle TNM, où TM elt l'hypotenufe , il y aura égalité entre is Se tt-^yy.^ Or par la propriété que M. Bcrnoulli attribue à la touchante de la ligne courbe C Mw, on a cette analogie S'.x — t::p:q^ px — pt & confequemment i=^ î donc aufïi ss-= ppxx — xppxt^pptt , ,v „ „ t-il 11 il— =ztt+yy i de là Ce fait — ippxt -+- ppxx — qqyy ppx^ïz. Vppqqxx^ 1 1 -— -Q ^ enfin /= , pt>—n pp— ppqqyy — q'^yy _ , que la fuppofition de />= i q réduit à Texpref- ^? fion plus fimple jx^\y ^xx-h lyy pour l'exemple de l'Au- teur de la folution. Mais cet exemple eft l'equation y*-H;xyy — 81 ^/^yv allez fenlible- ment différente de la propofée j' '* -h xxyy _;^ 1 g dxjy , iy-c. Et il feroit inutile de les élever à un plus haut degré en multi- pliant quarrément les deux membres de chacune ; car cela ne feroit point évanouir leur différence. La folution parole donc telle dans Ton premier cas , que x èc y ne font plus in- déterminées & en nombre infini , ainfi que le prob'ême le demande ; C\ bien qu'elle ne donne au plus qu'un point M au lieu d'une ligne courbe C Mw : d'où il femble qu'il faille plu- tôt conclure , puis que toute équation locale exprime la na- ture d'une certaine courbe , que les touchantes de la gcome- trique en queflion n'ont point la propriété fuppofée. Mais il vaut mieux fufpendre fon jugement làdelîus jufqu'à ce que fauteur de la folution fe foit expliqué lur cette difficulté. Ce- pendant cette verice-ci , que l't^aiité de deux différentes expref- jiom d'uni mcfme fou-tonchinte reflitue tûujoun teijuuiion du lieu à Ut courbe , demeure inconteltabîe ; & tout Géomètre Ana- lilte peut s'en aflurcr par tant d'épreuves qu'il voudra fur tou- tes fortes d'exemples. En voici des plus faciles : L'equarion locale d'une des paraboles cubiques e{ïy^=ax^ 5 & les diver- /-A " 5^ iy^ ^ax^ fe$ cxpreffions de fa fou-touchante font — ; ; 2 z a X ly^ lefquellcs DES se A VANS. 149 lerquelles j'égale encre elles deux à deux j & j'ai trois fortes de comparairons. Dans chacune jc divife par 3 & je multi- plie par 2 : Dans la première je multiplie par ax , &c rien da- vantage. Dans la deuxième aptes avoir multiplié par y je divife par x : Dans la troifiéme , ayant fait la multiplication en croix par ax & j' je tire la racine quarrée. Toutes ces téduélions qui font fort courtes , me rendent exademcnt la inefme équation du //f» donné. Il en eft ainfi quand Iclieu eft retrouvé par le moyen d'une foû- touchante & de quelque autre condition doi.nées , comme dans l'exemple fuivant. Ayant le lieu géométrique ddx^=icljy — xjj à une certaine ligne coutbe , qu'on peut démontrer eftre la qtiadratrice cir- culaire de M. Leibnuz ; & ayant aulfi l'expreflion v — ^ ■d'une fbû-touchante t d'une autre courbe , l'on veut en re- trouver \c luu. Pour cet effet {bit fuppofé^:=v — /=^^ V Donc j'v='^'ïf qui fubftitué à y y dans l'équation donnée, •w rend ( lors qu'on a multiplié par i^v & divife par ddx de part & d'autre , ) vv=izdx — xx pour le lieu cherché , dont l'or- donnée ett X , &: l'abfciffe v , &c qui eft à un cercle ayant cha>- que finus droit égal & patallele à chaque v , & chaque finus verfe parallèle &: égal à chaque x. Or il s'agit de voir Ci la foii- touchante fuppofée v — ^ lui appartient. Le moyen le V plus feur & le plus général pour cela c'eft de déduire de ce lieu géométrique l'expreffion de la fou- touchante par le cal- cul dont j'ai parlé ci-devant , & de l'égaler à la donnée ^ fî elle ne lui eft pas toute égale terme pour terme j car leur éga- xdx' — ixx lité pofée reftituera le lieu au cercle. En effet de ' :s=v — ^1 il vient vifîblement idx — xxr^vv lieu trouvée. "On pourroit pouffer cette remarque plus loin , fi elle n'eftoit déjà que trop écenduepour un Journal: Le fçavant Auteur qui a rendu à celui èit% Sçavans fon premier lullre , & qui le lui conferve avec le mefme éclat , marque bien , en y donnant 1694. Pp 150^ LEJOURNAL^ place à ce mémoire , qu'il aiinc la vérité jufqu'à vouloir qu'elle Ce découvre &c s'eclaircille furies macicrcs raefme les moins importantes. DE FONTIUM MUTINENSIUM ADMIRANDA fcaturigine , traFi^itus fhyfïco-hyàrofl.iticm Bernardini Ramaz^ zlni , in Mutinenfi Lic^o Mediona Profejforis. Adftreniirimum. Franctfcum 11. Mutina , Rei^ii , ^c. Ducem. In ^. Muti^ «<*. 1 6^z. LA ville de Modene eft aflife dans une plaine entre le Pa- naro & la Sechia , à dix milles du pied des montagnes. Il y a fi grande abondance d'eau fous fon terroir , qu'en quel- que endroit de la ville ou des environs que l'on creufe , on ne- manque jamais d'y trouver des fources. Il ne coûte d'ordinaire que quarante ecus pour y faire un puis. Il faut néanmoins creufcr jufqu'à foixante &: trois pieds de profondeur pour trouver l'eau. A quatorze pieds de pro- fondeur les ouvriers trouvent des pierres , des reftes de che- mins pavez, des ruines de boutiques & de maifons ; ce qui prouve que la ville efloit autrefois plus baffe qu'elle n'eft au- jourd'hui. Au dcffous lis trouvent des branches d'arbres , & des troncs, des os d'animaux , des charbons , des coquilles^ & de petis morceaux de fer. Quand ils ont creufé jufqu'à vint- huit pieds, ils rencon- trent une terre blanche & graffe qui en a onze de profon- deur. A trente-neuf pieds ils découvrent un lit de terre ma- rêcagcufe, mêlée de feuilles , de jonc , & de rofeaux. Deux pieds plus bas , fe découvre à eux un autre lit de terre blanche &£. graffe qui finit à cinquante deux pieds de profon- deur ; après quoi fe ptefente un autre lit de terre marêcageu- fc , puis un aucre de terre blanche & graffe, & enfin un der- nier lit de terre marêcageufe , qui fe termine à un bon fond , auquel quand les ouvriers font parvenus , ils entendent un grand bruit que fait l'eau qui coule par deffous , & recon- Doiffent par là que c'eft le lit qu'ils doivent percer avec leur icriere. DES s C A V A N s. ijï Quand ils l'ont enfoncée à cinq pieds de profondeur , l'eau }aillic avec impecuofité jufqu'au deffus de l'ouverture du puis, & fe rép.md de tous cotez. Le premier jour elle traîne beau- coup de limon , de fable , & de gravier ; le fécond elle com- mence à fe purifier 1' à s'eclaircir. Il arrive d'ordinaire qu'au medne temp'; que l'eau monte de la force dans un puis fait de nouveau , elie delcend dans les puis voiiÎRS , & les jours fui- yans elle y remonte , jufqu'à ce qu'elle fe mette à mefme hau- teur dans les uns & dans les autres. Sur le lit où les ouvriers enfoncent leur teriere , l'air efl; auffi chaud en hiver qu'il l'efl: ordinairement ailleurs durant la canicule ; & en elle il efl: auffi fioid qu'ailleurs en hiver ^ Gc qui efl caufe que les ouvriers ne veulent gueres faire de puis en efté , où ils fe trouvent encore incommodez fur le mefme Ht de terre & par une extrême difficulté de refpirer, &c par une odeur infupporrable. Ce qui incommode le plus les ouvriers dans leur travail , efl: que jufqu'à ce qu'ils ayent creufé à la profondeur de vint- huit pieds , ils rencontrent des eaux qui coulent de tous cô- tez , &! qu'ils ont beaucoup de peine à arrêter. Quand ils ont achevé le puis , ils en couvrent l'ouverture avec une pierre de marbre , & mettent aux cotez des tuyaux pour conduire l'eau aux endroits où elle efl neceffaire. L'Auteur ayant fait de la forte l'hiftoire des puis de Mode- ne , fuppofe que l'eau qui jaillit du fond de la terre pour les remplir , eft une eau vive & coulante ; ce qui fe prouve par le bruit qui s'entend avant que d'enfoncer la teriere. Cetce fuppofition eft; fujette a. une difficulté , qui confifte en ce que fi cette eau avoic un cours perpétuel , il femble qu'elle ne pourroic s'élever comme elle fait jufqu'à la hauteur de foixan- te & huit pieds. L'Auteur répond à cette difficulté par une expérience qu'il explique dans le fécond chapitre. Dans le troifiéme il demande fi l'eau qui fore par le trou que fait la teriere , vient d'une rivière qui coule fous terre,. Se quelle eft fa fource. Il ne nie pas qu'il n'y ait des rivières qui ont un long cours- Jfiïus la terre , comme il y en a beaucoup d'autres qui agréa rst LEJOUUNAL avoir coulé long-rcmps fur fa furface , fc cachent defTous, Mais il ne fçauroit fe perfuader que l'eau qui coule fous le terroir de modene foie en eftec une rivière , parce que cctcc «au qui a conltamment plus de quatre milles dans fa largeur, furpaderoit le Pô & les plus grans fleuves. 11 s'imagine donc plutôt, que cette eau vient d'un refer- voir que la mer qui dans les premiers temps du monde elloic proche de l'Apennin, a jette dans fes concavitez ; qu'il n'elt «1 contre la raifon m contre l'expérience de dire que cette eau ibrtant de ce refcrvoir , peut traverfcr un long efpace fous les fables, &c fe répandre fous tout le terroir de Modene, d'où elle jaillit avec inipecuofité toutes les fois que l'on perce avec une teriere la terre qui la renferme. La raifon de croire que cerefervoir vient de la mer plutôt que des pluycs ni des neges , cft que l'eau des neges & des pluycs ne dcfcenJ pas aulli bas qu'eit l'eau des puis de Mode- iie , ëc qu'elle ne paiferoit pas aifcment à travers les lits de terre grade. D'ailleurs l'eau qui vient des pluyes & des ne- ges ne fe conlerve pas auiîi conftamment que celle-là , mais ■carit d'ordinaire durant les grandes chaleurs. L'Auteur , pour donner un air de vrai-femblance à la con- ^eélure qu'il a que l'eau des puis de Modene vient des refer- voirs que la mer jetta autrefois dans le creux des montagnes d'alentour , ne fait point de difficulté d'avancer que la plaine •où Modene ell urlîife, eftoit extrêmement balfe au commen- cement du monde , ^ peut-eftrc mefmc inondée de la mer •qui y porta les coquilles qui s'y trouvent encore. Il eft certain qu'entre la voye Emilie Se le Pô il y avoir un Tnarais , dont parle Virgile dans l'onzième de lEneïde , & que ce marais empêcha Annibalde mener fon armée en Etru- ■rie. Scaurus citant Edile le dcflecha , Se mit des digues aux rivières des environs pour arrêter leur débordement , & pour les contraindre de fe décharger dans le Pô , qui avant ce jemps là n'cfloit pas un fleuve de grande réputation. Les terres que les inondations & les déluges ont détachées des montagnes par la fuite des temps , Se entraînées dans les plaines , ont formé peu à peu les diflcrens lits de terre grade, de DES se AV AN S. ij3 de terre marêcageufe , de rerre fablonneufe qui Ce remar- quent dans le terroir de Modene. Chacun de ces lies a efté en Ton temps la furface de la terre , comme il paroit par le bois , par le fer , par les os , &: par les coquilles qui s'y trou, vent. Les endroirs pavez & les boutiques qui fe font trouvées à la profondeur de quatorze pieds , donnent lieu de Cioire que c'eftoit la hauteur qu'avoir le rerrain il y a dix- huit cens ans, lors que la Colonie y fut menée de Rome. Il fe peut prouver par Appien , que Modcnc n'cftoit pas alors loin des marais. Car il dit qu'Antoine &: Panfa y don- nèrent combat entre des rofeaux & des marécages , & que les Triumvirs s'alTemblercnt dans une petite Ifle du fleuve La- binius qui cftoit proche. Il n'y paroit plus aujourd'hui ni de marais ni d'Ifle , tant le temps a changé la face du pays. Les incendies & les déluges ont apporté de pareils chan- gemens en pluficurs parties du monde. Hérodote infinue que le limon qui couvre l'Egipte y a eRé porté par le Nil , &c que s'il avoir tourné fon cours vers le golfe Arabique, il l'au- roit enfin comblé dans la fuite des années. Polibe dit que les Palus Meotides & le Pont Euxin reçoi- vent continuellement le fable que les rivières y châtient , Se qu'ils en deviendront un jour aufîl fermes que la terre. Le P. Kirquer dans fon Monde fouterrain témoigne avoir appris par la ledure des annquitez d'Arabie , qu'avant le de- luge la plaine qui fepare le golfe Perfique de la mer rouge cftoit toute couverte d'eau. Il feroit aifé de produire beaucoup d'autres exemples fera- blables qui onc fait dire à Ovide : ■ yidi faïtdi ex aquorc terras ^ Bt prccul a pelugo concha jacuere marina. Il n'eft donc pas hors d'apparence que la plaine de Mode- ne s'eft élevée peu à peu de la melme forte. L'Auteur parle dans la fuite de ce traité de l'excellence de Cç% eaux , qui fe confervent mieux que les autres dans les voyages de long cours , &: examine les opinions des anciens touchant la pré- 1694. Q_q 154 LEJOURNAL fcrence des eaux de pluycs , èc des eaux de fontaines &: dt- rivière. RITUEL DU DIOCESE DE SENS , PUBLIE' PAR Monfei(^eut 1^ lllujifijjîme é" Rêver endiIJime Mtffire Hardoum Fortin de la Hoguette , Archevêque de Sens , Primat des Gau- les ^ de Germanie. In ^. à Sens. &c Ce trouve à Paris chez Pierre Lefclairan. i 694. IL y a long- temps que le Rituel de Sens eftoit devenu fort rare , & que chaque Curé fe fervoit du premier qui lut tomboit entre les mains. M. l'Archevêque , pour entreteniu l'uniformité de l'ufage dans toutes les Eglifes de Ton dioccfe, a travaillé à ce nouveau , qu'il a rendu aufll conforme à l'an- cien qu'il lui a efté pofllble , en ne changeant que les endroits où il manquoit quelque chofe. Il a mis au commencement de chaque Sacrement une in- ftrudion qui enfeigne ce qu'il faut faire pour le bien admi- niftrer & pour le bien recevoir. Ces inftrudions font précé- dées d'un avis gênerai , qui cft que le Curé doit mener une vie innocente , pour eftre toujours en eftat de s'aquitter des foniSions faintes de fon miniftere , &: qu'il ne doit jamais rien demander ni diredement ni indircdement pour l'adminiftrar tion des Sacrcmens^ & s'éloigner non feulement du crime , mais du moindre foupçon de fimonie & d'avarice. Que li après qu'il fe fera aquitté de fa fonftion , quelque chofe lui ert: oflTerre ou par dévotion ou à titre d'aumône , il lui fera libra de la recevoir. ARLîQnrNIANA , OU LES BONS MOTS , LES HI- foires plaifantes ^ agreaèfes recueillies des converfations £ Arle-. quin. In iz. à Paris chez Florentin & Pierre de Laulne , devant l'Eglife de Sorbonne ; &: Michel Brunet , au Pa- lais. 1694. LE portrait que fait d'Arlequin celui qui nous donne Cç%, bons mots ^ a quelque chofe de.forc furprcnant, II ie re-; DES S C A V A N S. i y^ prefente comme fort différent en public de ce qu'il eftoiten particulier. Quand il prenoit Ton mafque , & qu'il montort furie teâtre , il eftoit agréable & divcrtiffant ; mais quand il entroit en converfation avec Tes amis , il eftoit ferieux & gra- ve. Ces deux perfonnages qu'Arlequin jouoit féparément, font caufe que ce recueil eft mêlé de contes plaifans & de penfees folides. Ce qu'il difoit fur le teâcre fembloit n'avoir efté inventé que pour faire rire : mais ce qu'il dcbitoit dans la converfation eftoit propre à inftruire. EXTRAIT D'UNE LETTRE ECRITE TOUCHANT un traité de la longue vie. S' I L eft vrai que les voyes les plus fimples font les meilleu- res , on peut dire que les manières de gucrir les malades & de conferver la fanté que je propofe dans mon traité de la longue vie , font auffi les plus convenables , puis qu'elles font très fimples , & qu'elles fe réduifent à la feule aflimilation & à la diflimilation. Les Médecins d'aujourd'hui , tant Galeni- fies que Chimiftes , à force de vouloir rafiner fur la nature; s'éloignent fouvent de fa conduite. Ils fe font extrêmement cmbarraflcz dans la connoiffance de l'homme , dans celle des caufcs de fes maladies j & enfuite ils fe font beaucoup appli- quez à trouver des remèdes pour les guérir : mais tout cela s'cft fait avec beaucoup de peine & peu de fuccés. Ils con- viennent de peu de chofes ; ils font la plupart du temps divi- fez dans leurs opinions -, & la contrariété de leurs fentimens eft une marque aflurée de leur incertitude. Pour moi je fup- pofe la nature fimplement ; & fans m'embarrafler de queftions inutiles , je ne m'occupe que de la fuivre pas à pas , & de fça- voir ce qui la peut aider , & ce qui la peut faire arriver plutôt à fa fin. En tout cela je n'ai égard qu'à cette forte de diffimi, lation qui caufe la maladie. C'eft pour cela que mon fiftéme eft plus fimple , & que je prétens mieux réuffir que les au- tres , parce que je ne yeux qu'un feul remcde ; & j'ofe aftu- rer que celui qui en connoitra bien l'ufage , fera le maitre da là. difpofuioft de fon corps. II l'echaufera ou le refroidira ,, i5« LE JOURNAL riiume£bcra ou le dcirechera ; il rendra fcs humeurs plus flui- des ou plus epaiflcs , & il les adoucira à Ton gré ; Se cela avec rant de certicude , que la falive mefme en donncrades témoi- gnatres très affurez. Le Public auquel je vais donner mon ou- vrage en jugera. Je lui prefence ce proj.ec par avance. Je ne fuis" ni Galenille ni Chimifle. Je ne fuis pas Galcnifle , puis que je rejette cetce grande maxime : Contraria contrariis caran- tur , qui eft le principe fondamental de Galien & de ceux de fa fcfte. Je ne fuis pas non plus Chimifle : car bien que je demeure d'accord avec eux que SttniUa Jimilthui curavtUT , je ne l'entens pas au mefme fens. Les Galeniftcs & les Chimi- fles entendent ces deux maximes des qualitez de la maladie & du remède ; & j'entens la dernière des fubllanccs de l'hom- me & du remède , qui , félon mes principes , doivent clhe femblabics , & des qualitez du remède que je veux bien eflre contraires à la maladie , mais pourtant toujours fem.blables au tempérament , en ce que je ne veux pas qu'elles fortcnt jamais de fes limites. Cela eftant ainfi , j'ai lieu de croire que les perfonnes qui font prévenues des principes des Galeniftcs ou de ceux des Chimiftes , n'approuveront pas mon delVein, & que leur prévention les empêchera de faire de mon ouvra- ge un jugement équitable : mais j'efpere aulîî que les Sçavans defînceredez qui en jugeront par les feules lumières du bon fens & de la raifon , me feront juftice. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Lei Hiftoriens Latins réduits en maximes. Premier v.lume. Tite Ltve. In 12. à Paris chez George &: Louis Jolie , rue S. Jaques 1694. Obfervattons fur le Pétrone trouvé à Belgrade en 1688. ^ im~ frimé i pans en 169^. Avec une lettre fur t ouvrage ^ la ferfon- ne de Pétrone. Jn 1 1. a. Paris chez la Veuve de Daniel Hor- theraels , rue faine Jaques, i 694. Fat/tes à corriger dans le Journal précèdent. Page 154.. lig. 1. Clément VII. ///^^ Urbain VL Ligne 5. Clément VII. lifez. Urbain VI. Ligne 7. fur le Cardinal de Gennes nommé depuis Ur- bain VI. lifez. fur le Cardinal de Genève nommé depuis Clemen: VU. A Paris chczjean Cuflbn , tue faint Jaques. Avec Privilège du Roy. LE JOURNAL DES SCAVANS. 5 Du LuNDY y. Avril M. D C. XCIV. RECUEIL DES ORDONNANCES DE NOS ROIS-, utiles aux Officien tant d'Epee que de Robe , qui ont fart à ta convocation ^ conduite du Ban ^ ^rnereban , aux Noblef^ ^ens vivans noblement , (jr Roturiers qui y font fu jet s ^ contri- buables ; ^ faretUement à ceux de toute condition qui s en prém tendent exempts , ^f. Jn u. à Paris chez Nicolas le Gras, au Palais. 1693. E mot de Ban & d'Arriereban fignifie un cri public que lle Seigneur fait à fes vaflaux de fc trouver à tel jour en tel lieu pour faire la guerre. L'origine du fervice du Ban & de l'Arriereban procède de ce que nos Rois après leurs con- quêtes ont donné aux Capitaines & aux foldats des terres avec dignité , à condition de les fervir dans les occafions pendant un certain temps. Avant le règne de Charles VIL le Ban & l'Arriereban cC toient les plus grandes forces de nos Rois ; ce qui leur dorl- na lieu de faire plulieurs ordonnances qui ont eftc peu con- nues depuis qu'ils ont mis fur pied des troupes réglées , & qu'ils n'ont plus fait que rarement ces convocations. Maintenant que par «dic du 3. Janvier de l'année 1635, 1694, R r 158 LE JOURNAL le Roi a créé en titre d'office un CommifTairc Infpedleur , un- Controlleur Secrétaire , & un Treforier du Ban &; de l'Atiie- reban en chacun des Bailliages &: des Senechauflees du Royau- me , & qu'il en a ordonné la convocation , l'auteur de ce re- cueil a cru qu'il ne feroic pas inutile de faire connoitre à fcs fujets leur obligation naturelle de défendre l'Eftac contre les ennemis qui l'attaquent ^ & de les inftruire de la part qu'ils doivent avoir foie à la convocation ou à la conduite de la NoblefTe. Suppofant donc que tous les fujets du Royaume ont une obligation naturelle de le défendre , il découvre l'obligation particulière que les Nobles qui pofTedent des fiefs , ceux qui vivent noblement fans en pofleder , &c les Roturiers qui en , pofledent ont de contribuer à fa défenfe. Les Roturiers n'eftoient point fujets autrefois au Ban ni à , l'Arriereban. Philippe III. furnommé le Hardi , leur accor- da le premier pcrmiflîon de tenir des fîefis j & les Rois fes fuc- cefleurs qui la leur ont confirmée , ont cru qu'il eftoit juftc qu'ils fuffent fujets aux charges qui les fuivent. L'Auteur ne rapporte pas les Ordonnances faites à cet égard . dans les deux premières races , mais feulement celles qui ont efté faites dans la troifiéme depuis environ deux fieclcs. Il commence par François I. qui ordonna une montre annuelle du Ban &: de l'Arriereban. Depuis qu'il eut augmenté Ces troupes réglées , il le convoqua dans les neceifitez prefîances, & voulut querouslcs Gentilshommes &: autres tenans fiefs s'y trouvaflent fous peine de connfcation de leurs fiefs. Hen- ri lU. y ajouta la peine de privation du titre de nobleffe. Louis XIII. la modéra , & la changea en celle de privation de l'hon- neur de porter les armes. Par les Ordonnances faites fur ce fujet les Gentilshommes qui ne fervent pas perfonneliement , doivent contribuer dans tous les Bailliages où ils ont des fiefs. Ceux mefmes qui n'ont point de fiefs , ont efté convoquez par la raifon que puis que leur qualité les exemte des contributions ordinaires que le peu- ple fournie pour le maintien de l'Ellat , ils doivent contribuer aux fecours cxtraordmairesqui ionc neccfl'aircs pour fa dé^.. fenfe, ' DES se A VANS. i y^. Ceux mcfme qui font enrôlez dans les troupes , ne font- cenfcz avoir fatisfaic à l'Arriereban s'ils ne fervent fix mois.. Les Roturiers tenant fiefs qui ne font pas en eflat de fervir , peuvent mettre en leur place une perfonne capable du mef-^ me bailliage. Les veuves , les ufufrutiers, les feigneurs des rentes inféodées , les invalides , les gens de main-morte quiv tiennent fiefs non amortis , les Ecclefialtiques qui ont des fiefs, patrimoniaux , & les gardes nobles font fujets à la mefme contribution. Les bourgeois des villes franches ont quelquefois efté obli-> gez de contribuer dans des neceilitez prenantes, nonobrtant. leur cxemtion , & fans préjudice d'icelle.- Les Ordonnnances n'ont pas feulement marqué les perfotî- nés fujettes à i'arriereban , elles ont exprimé le temps du fer-, vice , l'âge & l'équipage de ceux qui fervent. Louis l5 . GRAND-en 1674. ordonna que le temps feroit de trois mois -^ dans le royaume , & de quarante jours hors du royaume. Quant à l'âge, Philippe le Bel le fixa autrefois depuis dix- huit» ans jufqu'àloixantc. Louis XIII. en 1 63 5 déclara que l'équi- page feroit en une feule forme de cheval léger , &: c'cft ce qui s'obferve aujourd'hui. Les mefmes ordonnances ont aufli réglé la contribution de ceux qui ne fervent point perfonnellement. A l'égard des Gentilshommes , elles veulent que ceux qui ne fervent point contribuent en tous les bailliages où ils ont des fiefs. Elles font bien rigourcufes à l'égard des roturiers. Car bien qu'ils fervent pour le fief du bailliage de leur refidence , elles les • obligent à contribuer pour les fiefs qu'ils ont en d'autres bail- liages. Elles obligent encore les feigneurs des rentes infeo*. dées de contribuer à proportion du quart de leurs rentes. La contribution fe doit faire en argent à proportion du re- venu des fiefs. Par l'Ordonnance de i6}j. confirmée par l'Editdu 3. Janvier delà prefente année j (île fief eft de neuf cent livres de revenu , le propriétaire contribuera un cheval léger. Si le fief eft de dix-huit cent livres , il en contribuera deux. Que fi le fief eft de moindre valeur, les OlHciers }. c^çommij. tn chaque baillage afl'embleut plufieurs fiefs juG.- î^o LE JOURNAL qu'à la concurrence de neuf cent livres , pour faire coticff- buer les propriecaires à l'équipage de celui qui auroic efté ju- gé le plus capable de fcrvir. L'équipage d'un cheval léger el\ eftimé prefencemenc quatre cent livres. Tous Exemts , à l'exception des villes , font obligez de comparoitre à la première montre du ban & de l'arriereban , Se de juftifier de leur exemption ; à moins de quoi ils n'en jouilfent point. Les Exemts font les Eccicfiafliques pour leurs fîefs qui onc cfté amortis, les Chevaliers de faint Jean de jerufalem, ceux de l'Ordre du faint Efprit , les Officiers qui fervent fix mois dans les troupes en l'année de la convocation , les Capitaines Gardes- côtes , & autres Officiers de marine ; les Commiflai- res & ControUcurs des guerres , les Lieutenans des Maré- chaux de France dans les bailliages, les Maîtres des Requê- tes , les Secrétaires du Roi , les Officiers des Parlemens , de la Chambre des Comptes de Pans , du grand Confeil , de la Cour des Aides, les Treforiers de France , le Prévôt des Marchands , les Echevins , ôc les habitans de la ville de •Paris. La manière de convoquer l'arriereban n a pas toujours ciié uniforme. Anciennement cette commiffion ertoit donnée à des Seigneurs de marque , qui eftoient appeliez Mi£î ûomi- •nici. En 141 3. Charles VI fit défenfes à toutes perfonncs de fe mettre en armes au mandement d'aucuns Seigneurs finon de lui. Au temps de François L la convocation fe faifoit par un Capitaine gênerai ,qui fut (upprimé parHenri III. en 1J79. Maintenant elle fe fait par les Baillis , par les Sénéchaux , & ..par leurs Lieutenans, Lors qu'elle a efté faite , & que les Gentilshommes y com- paroKfcnt , ils font tenus de donner la déclaration de leurs ■iic^s. Cette obligation ne vient pas de l'Ordonnance , qui ne l'exige pas expreflement : elle vient de ce que les Gentils- hommes doivent le fervice dans l'équipage proportionné au revenu des fiefs ; ce qui ne fe connoit que par la declara- ;«ion. Les Excrat5 doivent cette déclaration par l'Ordonnance de DES se A VANS. i6i de Henri II. & nommément les Maîtres des Requêtes , & les Secrétaires du Roi. La raifbn eft que leurs fiefs peuvent puC- fer à l'avenir à des perfonncs non excmtes ; & en ce cas le Roi a intereft de Tçavoir qui font ceux de qui il peut attendre le fervice. Après les comparutions &r les déclarations , il Ce fait un pre- mier rôle de ceux qui s'offrent pour fervir , & de ceux dont on juge fur le champ que les excufes ne font pas légitimes. Ce rôle eft fuivi de la première montre de ceux qui fe font offerts , & qui ont efté jugez en eftat de fervir -, après quoi il leur eft permis d'aller à leurs maifbns jufqu'à la féconde mon- tre. Les Officiers des Bailliages & des ScnechauiTces procè- dent enfuite au jugement des excufes , & à la taxe des excu- fez , & à celle des défaillans dont ils font un fécond rôle. Enfin ils en font un troifiéme de ceux qui ont éfté marquez pour marcher. Les Rcfs de ceux qui ne coraparoiffent pas à la première montre èc ne fe font pas excufer , font faifis. Les Officiers de Robe , comme les Lieutenans des Baillis , qui font em- ployez à la convocation de l'arriereban , ne reçoivent aucune taxation ni autre falaire quand ils ne fbrtent pas du lieu de leur domicile : mais quand ils en fortent , ils font payez à raifon de ce qu'ils ont accoutumé de recevoir lors qu'ils vont en commiffion pour les affaires de fa Majefté. Par l'Ordon- nance de Henri II. ces frais doivent eftre pris fur les deniers des contributions des roturiers. La conduite de l'arriereban appartient aux Baillis & aux Sénéchaux , & à leur défaut au Gentilhomme élu par le Gou- verneur de la province. Chaque compagnie doit eflre de cent maitres. Ceux qui conduifent en îa place des Baillis &: des Senechaux'j, reçoivent leurs gages. Ceux qui deviennent malades deman- dent congé au General d'armée 5 & il eft défendu aux Capi- taines d'en accorder. Les routes font données par les Gouverneurs & par les Lieu- tenans généraux des provinces , 6c les logemens par les Mai- 1^94. S f j6i le journal res , par les Confuls , Se par les Jurats des villes. Les vivres fournis aux gens de l'arriereban fonc par eux payez fur le pied du prix des trois derniers marchez. Par edit du 3. Janvier de l'année 1693. '^ ^*^' ^ érigé en titre d'offices formez & héréditaires , pour les tenir en fiefs mouvans de la Couronne , les commiiîions d'Infpedeur du ban & arriercban , de Secrétaire Contrôleur , & de Trefo- ricr. Les fondions de ces trois Officiers font réglées par le mefme édit. Il y en a qui leur font communes , & j1 y en a qui leur font particulières. Les communes font d'affiftcr les Baillis &: les Sénéchaux à la comparution des nobles , à la ré- ception de leurs déclarations , au jugement de leurs ex- cufes. Les particulières des Treforiers font de décerner des con- traintes contre les redevables des taxes , & de payer les ta- xations des Officiers & les autres dépenfes. Les appointemens de ces Officiers font réglez par le mef- jue édit. Les Commilfaires Infpe£teurs ont cinquante livres pour affilier à la taxe des fiefs , & foixante pour affilier à la reddition des comptes , outre les gage5 attribuez fur la re- cette générale des finances à proportion de celle qu'ils don- neront pour leurs offi<:es. Les Contrôleurs & les Treforiers ont des droits &c des gages à peu prés femblables. Les privilèges attribuez à leurs offices font d'avoir feance immédiatement après les Baillis , & les Sénéchaux , & leurs Lieutenans dans les aflemblées qui Ce font pour l'arriereban -, & préfeance dans toutes les autres afl'emblécs fur les Gentils- hommes de leur bailliage. Pendant l'année de leur exercice leurs offices ne peuvent cftre faifis , non plus que leurs taxations ni leurs gages ; & en matière civile il ell furcis à toute pourfuitc contre eux. DES S C A V AN S. 163 TRAITEZ DE META PHI SI QUE DEMONTRE'E félon lu méthode des Gcometrci. In 12. à Puris chez André Pralard. 1694. CEux qui font peu accoutumez aux fciences abHraites, regardent comme des chimères les queflions qui fe trai- tent en Mecaphifique. L'auteur mefme de ces traitez trou- ve qu'on a raifon de tourner en ridicule les termes vagues oC généraux , &: les queftions inutiles que la Philofophiede l'E- cole donne ordinairement pour Metaphifique : mais il ne croit pas qu'il foit jufte de traiter de la mefme façon les Phi- lofophes qui par Metaphifique n'entendent autre chofe que là connoifl'ance qu'on peut aquerir de Dieu ou de l'efprit hu-» main , ou certains axiomes qui font les principes les plus clairs & les plus certams de nos raifonnemens. 11 femble mefme à cet auteur , qui a caché fon nom (appa- remment par modellie , ) que la Metaphifique prife en ce fens , eft non feulement une fcience très folide , mais enco- re la première & ia plus necefifaire , puis que c'eft d'elle que les autres dépendent i comme il paroit de ce que les axiomes fur lefquels font établies les proportions les plus claires & les plus certaines de l'Aritmetique , de la Geometiie , &: de l'Algèbre , ne font que des confequcnces des premières no- tions de Metaphifique. Ce qui eft fi vrai , que notre Auteur par une invention toute nouvelle a tâché de foumettre cette partie de fcience , tout abftraite qu'elle eft , aux règles les plus exaéles de la Géométrie, Il faut avouer qu'on ne peut donner plus d'ordre à une ma- tière qu'il en a donné à celle de ces traitez. Avant que de nous propofer les veritez qu'ils contiennent , il s'en eft in- ftruit lui-mefme par cette metode qu'on appelle Analife, dans laquelle on commence à examiner les queftions qu'on trai- te, par ce qu'elles ont de plus particulier &: de plus connu, pour pafl'er à ce qu'elles ont de plus gênerai & de moins con- nu, C'eft ce qu'il a fait en.coinracnçanc par l'attention qu'i^ I «4 I E JOURNAL a eue àconfultcr l'idée de l'Ertrefouveraincment parfait. Car de cette vérité il eft facilement parte à d'autres plus cloi- gnécs , en empêchant feulement que fon attention n'ait efté divertie ailleurs ; ce qui eft la principale règle qu'il faut ob- fcrvcr dans l'analifc. Voulant enfuice nous enfeigner les vcritez dont il s'eftoit inftruit lui mefme , il s'eft fcrvi de la Simefc , qui eft une me- tode où l'on commence à examiner les chofes par ce qu'elles ont de plus gênerai , pour defcendre à ce qu'elles ont de plus particulier. C'eft proprement la metode des Géomètres , qui confilîe principalement en trois règles : i. à ne laifl'er aucune ambiguïté dans les termes dont l'on fe ferr. i. à n'établir Ççs raifonnemens que fur des principes clairs &: evidens , & qui ne puiflent eftre concertez par aucune perfonne raifonnablc. 3 à prouver démonftrarivcment toutes les propofitions qu'on avance , en ne fe fervant que des dcfinitions qui ont eRé po- fées , des principes qui ont efl:é accordez comme ertant très evidens , eu des propofitions qui ont elle dé|a tirées par la for- ce du raifonneraent , qui deviennent après autant de princi- pes. C'ert ce que notre Auteur a obfervé régulièrement, lia pofé d'abord les définitions , il a établi enfuitc les axiomes , & ne prouve rien que par les définitions qu'il a pofées , & par les axiomes qu'il a établis. Ce qui fait que fa Meraphifique -ert véritablement démontrée félon la metode des Géomètres, comme le porte le titre de l'ouvrage. Mais quelque exaéte que ibit cette metode , elle ne fera pourtant convaincante que pour ceux qui admettront toutes les définitions & tous les axiomes de l'AUteur. LES ERREURS DES PROTESTANS TOUCHANT la Communion fous la deux efpcces. Jn 12, à Paris chez Jean AnirtTon. 1693. QUand m. Gandon a entrepris de découvrir les erreurs des Proteftans touchant la Communion fous les deux -cipeces , il n'a pas eu la prcfomption de mieux réurtir que l'-iliurtre DES S C A V A N S. i ^ y l'!llu(tre Prclac qui a traité ce fujet avant lui. Il a fculemenc fuivi le confeil de Tes amis , entre lefquels il nomme Mrs. les Marquis de Villete &: de Verac, qui ont cru que les nouvelles preuves qui lui font venues dans l'efprit pourroienr contri- buer à la confolation de quelques nouveaux convertis. Le fondement fur lequel le Concile de Confiance a retran- ché au peuple la communion fous l'cfpece du vin , efl: dire- d:ement contraire à l'erreur àes Protefîans qui s'imagmoicnt que le Corps feul de Jefus-Chrifl pouvoir eftre reçu fous l'ef- pccc du pam , & le fang feul fous celle du vin. Le Concile pour détruire cette erreur , oblige les fîdelies à croire que le Sang fe reçoit fous lefpece du pain , &: que la communion fous l'efpcce du vin n'a pas elle commandée par les termes de fon inllitution à tous les Laïques. Pour montrer aux Proteftans qu'ils ne doivent rien trouver d'étrange dans le changement qu'a fait l'Eglife quand elle a retranché au peuple l'ufagc de la coupe , il leur oppofe deux fortes de changemens qu'ils ont reçus fans difficulté. Les premiers font ceux que l'Eglife Catolique avoit faits avant leur feparation. Les fccons font ceux qu'ils ont faits eux- mefmes depuis. Les changemens que l'Eglife Catolique a faits avant leur feparation , regardent les Agapes des premiers Chrétiens , & l'heure de la communion qui ne fe fait plus au foir comme dans les premiers temps , mais au matin feulement. Les changemens qu'ils ont faits eux mefmes , confiflent en ce qu'ils ont réduit la célébration de la Cène à quatre jours en toute l'année , & en ce qu'ils ont défendu à leurs anciens 5c a leurs Diacres de proférer les paroles miftiques furie pain ôc fur le vin , &: de les diflribuer enfuite au peuple. M. Gandon leur prouve que ces changemens font de telle importance , qu'ils n'ont pu ni les recevoir ni les faire fans s'engager à recevoir celui qui a eflé fait pour le retranche- «nent de la coupe. Ce qui a efté changé avoir efté , félon leurs principes , ou inftitué , ou commandé par Notre Sei- :gneur : d'où il s'enfuit que l'inftitution de la communion fous 1694. Te i66 LE JOURNAL les deux efpeces ne leur peut fcrvir pour juftifîer le refus qu'ils- fonc de la recevoir fous une feule. Il fe fcrt encore du changement apporté en la manière d'adminiftrcr le Baprcme. Car au lieu que par fon inftirution ceux qui le recevoient eftoient plongez dans l'eau , cela ng fe pratique plus aujourd'hui ; & les Protcflans en ufent à cet égard de la mefme forte que les Catoliques. Il détruit fans beaucoup de peine la différence que les Proteflans tâchent de mettre entre ces deux Sacremens , &:leur prouve folidemenc qu'ils 3'jroient plutôt dii recevoir le char.gemeiic qui a e(té fait dans la communion du peuple ^ que Qtlui qui a efté fait dans l'adminillration du bapccme. Car la communion fous une feule efpece elt fondée & fur l'Ecriture & fur la Tradi- tion ; èc il s'en découvre un veftige dans l'abus qui s'cftoic introduit au quatrième fieclc de donner la communion aux morts , & qui fut défendu par le fixiéme canon du troifiime Concile de Cartage. On ne la leur donnoit que fous l'efpece du pain , & par confequent on eftoit alors perfuadé que cette efpece fulHfoit pour l'intégrité du facrement , &: pour l'entier récablilîcment en la communion de l'Eglife. Au contraire la manière dont le Baptême e(l adminidré maintenant , n'eft ap- puyée que fur l'interpreration que l'Eghfe a faite des paroles qui ordonnent l'immerlion. Notre Auteut ne s'arrccc pas là , il juHiiie l'Eglife Catoli». que des erreurs que les ProteRans lui imputent touchant le retranchement de la coupe , &: rejette lur eux ces n;efmes erreurs. Pour les en convaincre il fc fcrt de trois raifons ti- rées de l'inflitution de l'Eucariftie , qui fonc voir que ces pa- roles : JBuvez^en tous , ne furent adreffées qu'aux Apôtres Se à leurs fucceifeurs dans le facré miniftcre. La première cft que quand Notre Seigneur en prefentanc Ja coupe à fes Apôtres leur dit : Buve::^en tous , il leur appric la différence qu'il y avoir entre cette coupe de la nouvelle alliance , & celle de l'ancienne qu'ils venoient de boire. H avoir efté permis à chacun d'eux de boire feui la coupe en- tière de l'ancienne alliance ; &: Notre Seigneur en prcfen*- DES SCAVANS. 1^7 tant celle de la nouvelle, vouloic qu'ils la bunfent avec telle retenue , qu'il en rellaft pour le dernier de la troupe. La féconde raifon fe tire du choix que N, Seigneur fie ds Tes difciples pour eftre prefens à l'inflitution du facremcnt de l'Eucarilhe ^ à rexcliilion des aucrcs fidelies ; & la troihéme de l'union inleparable de trois coniniandcmcns fairs aux Apc^ crcs dans l'inflitunon de ce facrement : l'un de prendre Se ds manger ; l'autre de boire tous j, & le dernier , de faire tout Gela en meaioire du Sauveur. Si le commandement de èoir^ s.'ércndoic généralement à tous les Chrétiens, &:leurimpo- foic la ncceilké de communier fous l'efpece du vin , il leur donncroit aulfi le liroit de confacrcr &: d'adminiflrer le Corps & le Sang de J. C. ce que les Proteftans reconnoiffent n'ellre pas véritable. A ces troiS' raifons tirées de l'Ecriture , M. Gandon en ajou- te deux autres , dont l'une eft fondée fur l'horrible divifion qui règne entre ceux-là mefmes qui founennent avec le plus d'o- pin.'âcreté la ncccllité de la communion fous l'efpece du vin, &: qui ks empêche de convenir des partages- fur lefquels ils s'appuyent , ni du fcns auqtel ils les doivent entendre. L'.!u:re raifon elï tirée du décret que les Protcllans ont fait eux mefmes d'adminiftter l'Eucanllie fous la feule efpeceda pain à ceux qui ne la peuvent recevoir fous celle du vin , dc qui ont une averfion infurmontable de cette liqueur. Quant à l'erreur où font les Proteftans , que la communion fous la feule efpece de pain eft une communion imparfaite, notre Auteur la détruit en ecabliflant par l'Ecriture & par la Tradition , que le Corps & le Sang de J. C. fe trouvent non feulement fous chaque efpece , mais fous la moindre partie de l'une & de l'autre. Il montre que quand N. S. prefenta Je pain à fes difciples , & leur dit : Prenez^ ^ mangez^^, il leur donna fon Corps , fon Sang , fon Ame , & fa Divinité , & que les Chrétiens qui communient fous la feule efpece du pain , reçoivent de mefme le Seigneur entier fans aucune di- vifion. La raifon eft que fon Corps , fon Sang , fon Ame, & fa Divinité font infcparables. Le Seigneur dit lui- mefme dans ]si ûxiéme chapitre de faine Jean , qu'il donne fon Corps vï- j6î le journal vant dans l'Eucariftic. Or il ne peut cftrc vivant qu'il ne Coit entier , avec le fang , l'ame , & la divinité fous chaque cfpe- ce. La fuite de ces preuves juftific que i'Eglife Catolique eft innocente de la divifion que les Protelkns l'accufent d'intro- duire dans l'Eucatiflic , qu'elle n'adminiftre au peuple que fbus refpece du pain , & que ce font les Protcftans qui font coupables de cette divifion , puis qu'ils Ce perfuadent faufle- ment que le Sacrement eft divifc , & que le Corps du Sau- veur e(t feu! fous refpece du pain , & le Sang feul fous celle du vin. Ces preuves font déduites avec une metode fort clai- re & en des termes fort propres. PHILOSOPHUS IN UTRAMQUE PARTEM , SiVE feleci^ é" limatiC ciifficuliarcs m utrarrique partent , ^c. Opcri Zauyentit Vuhan Philofoph-.ec Profcffjrii m y4cademia Pari- ficnfi, é'C. In iz. à Paris chez Pierre \^ï.Cc\AC!^àu. L'Exercice continuel de répondre & de difputcr imprime bien avant dans l'efprit des jeunes gens les opinions qui leur font données par écrit & expliquées de vive voix. II en- tretient d'ailleurs entre eux une honnête émulation qui redou- ble leur ardeur pour apprendre , & qui leur fait furmonter les plus grandes difficultcz. Le défit de les foulager dans ce tra- vail a tiré ce petit ouvrage des mains de M. Duhan Profefieur en Philofophie au Collège du Pleflls , où il a étendu par une longue fuite de fillogifmes les objcdions qu'il avoit renfer- mées dans fon Cours en peu de paroles fur les quefiions les plus importantes. Il n'y a dans ce volume que celles qui re- gardent la Logique ou la Phifique, Celles qui regardent les autres parties paroitront dans un volume feparé. 2l n'y aura point de Jourriid qu'au premier Lundi Captés la Quafimode. Faute a corriger dans le Journal précèdent. Page I4J. ligne lo. Ce font des traductions , lifez. Ce font des pièces ^ont quelques-unes ont efté traduites par feu M. Corneille, &c. A Paris clic z Jean Cuflbn , rue faint Jaques, ^vec Privilège du Roy, XV. j^j, LE JOURNAL DES se AVANS 5 Du LuNDY 19. Avril M. DC. XCIV. OBSERVATIONS SUR LE PETRONE TROUVE' A Belgrade en 1688. & imprimé à Paris en 16 p^. Avec uni lettre fur l'ouvrage ^ la perfonne de Pétrone. In 12. à Paris chez la Veuve de Daniel Horthemels , rue faint Jaques. 1694. LA première queftion que propofc l'Auteur de ces obser- vations, cft de {çavoir fi quand le fragment fcroit de Pé- trone , celui qui l'a publié auroit rendu un bon office au Pu- blic , & fi la fuppreffion de l'ouvrage entier ne feroit pas plus avantageufe , que la découverte de ce qui fert à en remplir les lacunes. Mais bien loin de recevoir ce qui a efté trouvé à Belgrade , il prétend qu'il ell aifé d'en voir la fuppoficion. II dit que l'Auteur du fragment n'eft pas heureux dans le cara- & aulVi lon- gues.*^JJs ouvrent la coque qui ciï graH'e , & au dedans il y a de la chair & de petis grains femblables à ceux des figues, qui font fort doux & ont un bon goiit , fpecialement les blanches, qui cwit une certaine odeur fort agréable ; mais les rouges ne font pas ordmaircment fi bonnes, 11 y a une .iutre forte de Tunaux qu'ils cftim^nt beaucoup davantage , encore qu'ils ne donnent point de fru;t Néanmoins ils rapportent un autre profit, qui e(l de I4 graine ; d'autant que certains petis vers naiflent aux feuilles de cet arbre quand il eft bien cultivé , & y font attachez , couverts d'une certaine petite toile délice, lefqucls on circuit délicatement ; &c eft la Cochenille des In- des tant renommée , de laquelle on teint en graine. Ils les JAiiTcnt fecher , & ainfi fccs ils les apportent en £(pagnç. DES S C A V A N S. 1 79 . tïs Curieux pourront cependant jugerparcepeuderaifons àjqui on doit plutôt foufcrire , ou au finiple rapport d'un fcul Marchand , ou àrautoritc de fr bons auteurs, je me difpoic pour un troifiéme voyage àl'Ille fainr Domingue. je promets que je n'en retournerai pas que je n'aye bien examiné J'affaire par m.i propre expérience , dont j'informerai avec finceritélc Public ^ un peu mieux que le ficur RouO'eau , qui nous ayant promiila plante de fa Cochemlle depuis, quatre ans , n'en a pourtant ncn encore exécutée SCRIPTURA SACRA AD FACILIOREM INTELLI- gsniiiim acc.9n2modj.ta , à Franctfco Philippe Lalouctte , Fref- byiero^ fada FacuUatis PaTiJîe/ifs JDochrc. In 8. à Paris chez Simon Bcnard. 1694.. L'Excellence des livres facrez & Tucilité de leur ledure ^ font établies dans la prcf^ice , &: relevées par des témoi- gujges tirez de ces livres mefmes , & de ceux des laints Pè- res. Dans le cqrps de l'ouvrage les titres de chaque livre de l'ancien &r du nouveau Teflament , font mis en vers pour le foulagcment delà mémoire, avec les divers fcns , & les noms des Pères qui ont le mieux réutftdans l'explication de chaque fcns. Les argumens de chaque Uvre , & mefme de chaque chapitre, font aufli exprimez en vers. Par exemple, l'ar- gument de la Gcnefe eft compris dans ce vers : Eue tibï Genejîi rerum pnmordia pandtt. L'argument des trois premiers chapitres eft compris dans le vers fuivant: Fit mundus , formatur homo , moK peccat Adamus. Se ainfi des autres, Outre ces vers , il y a un petit traité en profe , pour expli- quer les divifions des livres fainrs , & les règles qui fcrvenc à les bien entendre. Les divifions {ont en livtes canoniques, &r apocrifes , en livre de la loi , livres profctiques , livres de morale. Les règles font ou communes pour tous les livres, ou particulières pour les profctiques , pour les hiftoriques , pour les Eva;igiles , & pour les Epitrcs. r8o LE JOURNAL La table qui cft à la fin dévelope les différons (cns aufqncls plufieurs mots font employez dans l'Ecriture. Ainfi le moc ■ d'Abîme qui fe trouve le premier dans la table , fignifie en .quelques endroits un lieu de Tupplice , en d'autres un miltcrc •caché , & en d'autres une rufe du démon. SERMON DE DISCIPLINE EGCLESI ASTIQUE, compofe ^ prononcé par Monfeigneur H Eve que Comte de Noyon Pair de France , ConfeiUer Ordinaire du Roi en fon Confeil d'Efiat , en l' Eglife de la M ai fon Profeffe des RR. PP. Je fui- tei de lu viàe de Paris , le Dimanche de la Quinquaqtfime en tannée /6p^. In 4. a Paris chez la Veuve Claude Thibouft, & Pierre Efclaflan. i 694. CE fcrmon nous donne dans la perfonne de l'Aveugle de l'Evangile du Dimanche de la Qmnquagefimc , l'idée d'un pénitent public qui demande pardon de fon péché en |)refence de tout le monde , d'un Catccumene modefte qui attend avec une patience rerpeélueufe fa réception dans la -focieté des fidelles ; d'un parfait Chrétien qui fuit avec ua zèle ardent le Sauveur. Le pénitent apprend aux pécheurs à confefler leurs crimes ■avec douleur , & à les expier par une falutaire fatisfadion. Le Catecumene condanne la curioilté de ceux qui veulent voir de trop prés les mifteres , &: la pareffc de ceux qui diffé- rent leur baptême, jufqu'à leur mort. Il étend enfuit^ fes in- ftrudions fur deux fortes de Cacecumenes , fçavoir fur c-eux des facremens, & fur ceux des dignitez &:de5 bénéfices Eo- clcfiaftiques. Le parfait Chrefien reprend les mauvais qui font feparei ou de la vérité par l'herefie , ou de l'unité par le fchifme, ou de la grâce par le péché ; & ks imparfaits qui ne marchent -que dans la voye de la chair. A PARIS, Chez JjE A N C u s s o N , ruë faint Jaques , à l'Image de faint Jean Bapuftc. Avec J^tivilegedu Roi. XVÏ. ,8r LE JOURNAL DES se AVANS. 5 Du LuNDY lé, A vRi L M. DC. XCIV. LES ANCIENS HISTORIENS LATINS REDUITE en vraximes. Premier volume. Tite Live. In 12. à Paris chez George & Louis Jolie. 1694. J'^QiJES Corbinelli vint en France au temps de CaterinC dé Medicis , dont il avoit l'honneur d'eftre allié. Elle le donna au Duc d'Anjou Ton fils , comme un homme de belles lettres & de bon confeil. Il lui hfoit tous les jours Palibe & Tacite , & lui difoit librement la vérité. Lipfc a parlé de lui comme d'un homme du caraderc de ces anciens Romains qui cftoienc incapables de la moindre lâcheté. Le grand Chancelier de IHofpital avoit une elHme toute particulière pour lui , 5£ prenoic plus de plaifir dans fa converfation que dans celle d'au- cun autre de fcs amis. Raphaël Corbinelli fon fîls, fut Secrétaire de Marie de-Me- dicis , & un des plus honnêtes hommes de ce fiecle là. Il fut père de M. Corbinelh auteur de cet ouvrage où les anciens Hiftoriens Latins font réduits en maximes. Il a fait Ççs pre- mières études fous les Jefuites de Rome , & à leurs dépens , en vertu de la fondation du P. Louis Corbinelli , qui encra 1694. 2 z i8i LE JOURNAL dans leur compagnie des Ton commencement . & fut un dés , premiers Fondateurs du Collège Romain. Comme M. Corbinellli a paiTé i'z vie dans l'étude des belles lettres , & qu'il a toujours fait des reflexions fur Tes ledures, il a remarqué les maximes qui font répandues dans les Hido- riens. Ces maximes lui ont efté prifes par fes amis , qui ont voulu en enrichir le Public. Ils en commencent la publica- tion par Tite Live , qui fera bientôt Tuivi de Taçire, Les au- très Hiftoriens viendront après , avec tous les trefors de leur morale & de leur politique. ECLAIRCISSEMENT D'UNE DIFFICULTE' PROPO- feedans le /_,'. Journal fur la foiution d'un problème de M.' Ber~. nouUi , inférée dam les Memoirei de Matematique ^ de Phifiv que du p. Juin l6pj, J'Aurois fouhaité que l'Auteur de la difficulté cuH: donna . une folution nouvelle du problème de M. Bernoulli , ou du moins qu'il euft découverc ma metode. Cela m'auroit peut-eflre donné lieu d'approfondir une matière qui me pa- roitdes plus importantes dans les Matematiques. Mais com- nic il s'eft contenté d'edayer par le calcul dans un exemple particulier , Çi la couchante a la condicion marquée , je me renfermerai à fuivre le calcul mefme qu'il a laide imparfait , l'ayant jugé contraire à ma folution fur des apparences qui, l'ont trompé. Caries plus habiles Géomètres font fujets à l'erreur , lors qu'ils jugent fur des apparences , & avant que. l'évidence les y force. L'AUteur prend l'équation que j'ai donnée j'^-i-.f.v^-f-iS^x^ -^ 1 6 bx^-rin 2.J bhyy , qui exprime la nature d'une certaine ligne, courbe C M w , dont j'ai dit que les touchantes M T eftoient doubles des parties C T de l'axe faites par leur rencontre : &, il arrive à cette autre équation t^bxx-^^byy -\- xyyV^xx -^lyy- ^r^.'ixbbyy — Gy* — -jxxyy — <)obxyy^<)Gbx^ , que j'avoue de- voir fe réduire à celle que j'ai donnée j"" &:c. fuppoféque j'aye. r^ifon. Enfuite il quatre les membres de chacune de cejv. DES se A VAN S. 183 équations Mais parce qu'il obferve que leur différence fcn- fible ne s'évanouic point , il en conclut que la réduditm eft impodîble. Cependant fi on quatre chaque membre de la féconde équation , & qu'on tranfpofe à l'ordinaire , on trou- vera 4^*-v9x:xy*-t-i i^.^xy'^ — i ^^ùèy^-i-^xy^-h i^^bx ^j/*-t- y)^hby>iy'^ — -i 6ioh^ xy*^-^']i<)b*y'^-h li.'^hx'yy i-i ^jôùbxyy.^ I -/ iSPx^yy-h-j6^bi>x'^=:o , qui divifé par la première v'^-h xxyy-t-iSl>xyy-hi6i>x^ — ^7^byy;=o donnera pour quotient j^y'*-h^x>^y-h^.zl>xyy—iyé>i>yy-i-^%bx\ Et la divifion fc fera fans rerte. D où je conclus que l'équation ^y'^ &:c. Ce réduit par la divifion à la propofée^y* &rc. puis quejc n'employé que les règles ordinaires de la rédudion qui onr cfié reçues juf- ques ici par tous les Algebriftes. Amfi il eîl évident parle calcul mefme de l'AUtcur , poulie autant qu'il le doit cftre , que la ligne courbe CM. m dont la nature cft exprimée par l'équation donnée ^*&c. a fcs touchantes MT doubles des parcies C T de l'axe , faites par leur rencontre ; ce que j'a- vois avancé dans les Mémoires. On peut encore ajouter que M. Bcrnoulli le Profencur a- donné dans les A êtes de Leipfic une folution fort différente- de la mienne , & qu'on trouve néanmoins en l'appliquanc dans le cas propofé la mefme équation. HISTOIRE DE L'INQUISITION ET SON ORIGINE. Jtt 12. A Cologne. 16^^. DEs quatre livres qui compofent ce volume , i! n'y a pro^ prement que le fécond qui découvre l'origine dcl'ln-- quifition. Le premier explique quelle a cfté la conduite de- l'Eglifir durant onze fiecles envers les Hérétiques. La doélri- ne de l'Evangile n'eut pas fi-tôt elle publiée qu'il y eut des Hérétiques qui tâchèrent de l'altérer. Les Apôtres prêchè- rent & écrivirent contre eux , & avertirent de les éviter , fans prefcfire d'autre moyen pour fe garantir de leurs erreurs. Depuis la mort des Apôtres jufqu'à la converfion de Con- ftantin , nu! autre remède ne fuç en ufage. Les fuccefleurs, de Conftantin ayant à fon exemple embraffélafoi , les Chre- i84 LE JOURNAL tiens commenccrent à avoir des tribunaux & des prifons , &: leurs Souverains ne fe crureut pas moins obligez à faire ob- fcrvcr les Joix de Dieu que celles des hommes ; pas moins obligez à punir les blafphêmes , les parjures & les herefies, que les vols , les empoifonncmens & les meurtres. On commença donc alors à punir les Hérétiques : mais on ne procéda pas contre eux de la mefme forte que contre les autres coupables. On diftingua la connoilfance du droic de celle du fj'.r. La connoiflance du droit , t]ui confifte à fçivoir fi une opinion eft hérétique ou non , fut déférée auK Lvcques que les Empereurs an'cmblerent pour en juger. Ils condanncrcnt i'hercfie d'Arius dans le Concile de Ni- cée , celle de Macedonius dans celui de Conllantinople , cel- le de NeRorius dans le Concile d'Ephefe , ce'Ie d'Euricliés dans le Concile de Calcédoine , Ongene & les trois chapi- tres dans le fécond de Conftantinople , les Mcnotclires dans le troificme , les Iconoclaftes dans le fécond de Nicce. Ces fcpt Conciles généraux , Se mefme le huuicme tenu encore à Conftantinople , ne fu'^cnt prefque compofez que d'Evêques d'Orient; au lieu que les autres Conciles Géné- raux alfemblez depuis , ne l'ont efté que d'Evcques d'Occi- dent. Il y a eu encore une autre différence , en ce que les Con- ciles généraux d'Orient n'ont eflé afîemblez que pour con- danncr les herefies ; au lieu que les Conciles generaiix d'Oc- cident l'ont efté aufli pour d'autres bcfoins , pour les expé- ditions de la terre fainte , &c pour des affaires tempordies. Outre les Conciles Généraux , les Provinciaux agirent effi- cacement pour étoufer les herefies dans leur naiffance. L'he- refie de Paul de Samofate fut condannée dans deux Conci- les d'Antioche. La queftion du baptême des Hérétiques fuc traitée dans plufieurs Conciles d'Afrique & d'xfie. Les er- ijreurs de Pelage furent profcrites dans le fécond Concile d'O- range &: dans plufieurs d'Afrique. Les Evcques particuliers uferent du mefme droit ; comme il feroic aifé de le prouver par une infinité d'exemples : ôc par là il paroit combien font vaines DES SCAVANS. igj vaines & infourenabJes les prétenfions de quelques partifàns de la Cour Romaine , qui s'imaginent que le droit de connoi- tre des herefies eft refervé au faint Siège. Si cela avoit efté vrai , les Papes n'auroient pas laiffé paffer plus de mille ans fans fe l'attribuer, La Cour Romaine a une autre prétenfion auffi mal fondée , qui eft qu'il n'appartient qu'au Pape de reconcilier les Héré- tiques. £t en effet Clément VIII. ne voulut jamais recon- noitre pour légitime rabfolution donnée à Henri IV. par les Evêques de France. L'hiftoire Ecclefiaftique eft pleine d'ex- emples contraires. Le Concile de Paleftine qui avoit con- danné Pelage , lui rendit la communion de l'Eglife quand il vit qu'il Ce recradoit. Comme la connoifiance du droit appartient aux Evéqucs, celle du fait , qui confifte à fçavoir fi une perfonne accuféc d'herefie en eft coupable , appartient aux Princes &: aux Ma- giftrats feculiers. Ce n'eft pas que les Evêques ne condan- naffent autrefois l'herecique auffi- bien que l'herefie : mais ils ne prononçoient contre lui que des peines fpintuelles. Ils l'excommunioient s'il n'eftoit que Laïque , & joignoient la dépoficion à l'excommunication quandil eftoit Clerc. Les peines temporelles n'eftoient ordonnées que par les Ju- ges feculiers , qui en ce point n'agiftoient point comme exé- cuteurs des condannations portées par les Conciles & par les Evêques. Pour s'en convaincre , il ne faut que lire les loix , où les Empereurs s'expliquent en fouverains , & or- donnent des peines contre les herefies, comme contre les au- tres crimes. Le premier qui condanna les hérétiques au dernier fup- plicc , fut Maxime ufurpateur de la partie Occidentale de l'Empire Romain , qui punit ainfi Prifcilien , Fcliciflîme, & trois autres. Ccrte rigueur fut exercée jufques en l'année 800. oij fe fît la di vifion des deux Empires ; & jufqu'à ce temps- là les Juges Laïques demeurèrent en polleffion de connoitre du fait de l'herefie. Depuis ce temps là il fe trouve peu de loix en Oc- 16^4. A a a i8é LE JOURNAL cident contre les Hérétiques , parte qu'il s'en eft peu élevé durant trois ficelés. Quand il s'en efl: élevé aux fieclcs précedens , les Empe- reurs & les autres Princes ont ufé du droit qu'ils avoient de les reprimer par les fupplices ; & alors les Ecclefiaftiques con- fervant l'efprit de douceur que l'Evangile leur infpiroit , folli- citoient fouvent en leur faveur. Quand Idace & Itace pourfuivirent Prifcilien devant Maxime, & folliciterent fa mort, faint Martin les prefla d'abandonner cette follicitation , & les autres Evêques la defipprouverent. De là il s'enfuit que les Eglifes d'Ef- pagne & de Gaule n'eftoient pas perfuadées que les Héré- tiques duflent eftre punis de mort , ou du moins qu'ils leduflent eftre à la follicitation des Evêques. Il s'enfuie en- core que ces Eglifes trouvoient bon que les caufes des Héré- tiques fulîent portées devant les Princes aufquels il apparte- noit fans difficulté de les punir de peines corporelles : mais la jufle feverité des Princes n'empêchoit pas quelesECclc- fiaftiques ne gardalTent alors un efprit de modération &: de douceur. Cet efprit s'eft confervé dans les ouvrages des faints Percs^ dont l'AUteur rapporte fort au long les témoignages pour mon- trer qu'ils ont cru qu'il falloit plutôt ufer d'inftruâion que de contrainte contre ceux qui s'éloignoient des fentimens oito- doxes. Il examine particulièrement ce que faint AUgu{bn a enfcigné fur ce fujet , & commence cet examen par ces bel- les paroles du i. chap. du livre contre l'Epitre de Fondamcnt : Jll: in vos [,tviant qui nefciunt cum quo lu bore verum inveniatur, (^ quant diffiale caveamur errores , &::. De tout ceci l'Auteur conclut que ce qui fe pratique au- jourd'hui contre les hérétiques dans les lieux fiijcrs à l'Inqui- iKion , eft diredcment of pofé à l'efprit de douceur que i'E- glife a confervé pendant plus de mille ans. Pour mettre cet- te conclufion dans fon jour , il reprcfente dans le fécond livre par quels mocifs l'Inquificion fut inventée , par quels moyens cMe fut introduite , &: quelle eft !a procédure qu'elle obfcrvs envers ceux qui ont le malheur de tomber entre. fes mains. DES SCAVANS. ^ igy Tl répète donc que peu d'herefies s'eftant élevées en Occi- dent depuis la divillon des deux Empires iufqu'au milieu du douzième fiecle , celles qui parurent n'attaquèrent pas les mi- fteres de la foi comme celles des premiers temps , mais s'at- tachèrent à la morale , à la difcipline , & à l'autorité des Pa- pes , qu'elles voulurent renfermer en des bornes trop étroi- tes. Les Papes n'oublièrent rien pour les éteindre. Ils ex- hortèrent les Evéques , les Princes, & les Magiftrats à s'unir pour les combattre, Adrien IV. fît brûler Arnaud de Brefie dans Rome en 1155. &: Innocent III. publia contre les Vau- dois & les Albigeois une croifade &: des indulgences. Les Croifcz leur fîtent la guerre avec la dernière inhumanité, mi- rent le fiege devant la ville de Bcziers , &: l'ayant prife de fer. ce , y firent palier les vaincus au fil de l'épée , Cms diftindion d'âffc ni de fexe. Mais ce Pape confiderant que quoiqu'il puft faire à force ouverte contre les Albigeois , il en échaperoit uîî grand nombre à la fureur du foldat, &: que ceux qui auroienc évité la mort , feroicnt profeflion en fecret de leur doélrine-, crut devoir choifir des gens dont le principal emploi fuPt de les rechercher & de les punir. Il trouva les Religieux de faint Dominique &: de faint François , deux Ordres alors nouvel- lement inflituez , les plus propres à ce délit in. Il ne les char- gea d'abord que de travailler à la converfion des Hérétiques par la voye de la prédication, &c d'exhorter les Puin'anccs fou- vcraines à exterminer ceux qui demeureroient obftinez dans leuis erreurs. Quelque temps après ils eurent le pouvoir d'ac- corder des indulgences & de publier des croifades. Leschoi- fcs demeurèrent environ cinquante ans en cet cftat. En 12.44. Prederic II accufé par les Papes de vouloir ai- bandonner la Religion Chrétienne pour fe faire Mahomecan, ne trouva point de meilleur moyen pour repouiïcr cette ca^ Jomnie , que de témoigner du zèle contre les Hérétiques par quatre édits qu'il publia dans Pavie. Il mit les Inquificeurs fous fa protedion , leur attribua la connoillance de l'herefie-, ordonna la peine du feu contre les Hérétiques obftinez , & la prifon perpétuelle contre ceux qui témoigneroient du repeoi. tir. Cette loi fut de peu d'effet à caufc des difFcrens qui cou- i8S LE JOURNAL tinuerent entre cet Empereur & les Papes. Il fut excommu- nié & dépofc au Concile de Lion , nonobftant les foUicitacions des Rois de France. Les Hérétiques s'cftant accrus pendant que les Empereurs & les Papes ne fongeoicnc qu'à fe faire la guerre , Innocent IV. reprit le deifein de l'inquifition pendant la vacance de l'Empire ; Si pour détourner les obflaclcs que les Evêques & les Magiftrats y pourroient apporter , il les flata de lefperan- ce de leur laifler une partie de leur autorité. Avec ce tempé- rament il envoya les Inquifitcurs dans la Lombardie , dans la Pvomagnc, &: dans la Marche d'Ancone , trois provinces où il cxerçoit un pouvoir plus abfolu qu'au relie de l'italic. Il publia au inefme temps une bulle qui contenoit 31. re- glcmcns pourrétablillement del'Inquillcion , avec un pouvoir aux Inquificeurs d'interdire les lieux , & d'excommunier les perfonncs qui refuferoient de s'y conformer. Cette bulle reçut tant d'oppofitions,que fcpt ans après elle eut befoin d'cllre renouvellée par Alexandre IV. qui y mit des adouciffemens qui ne purent encore la faire recevoir. Six ans après Clément IV. la renouvella avec aufTi peu de fuccés. Quatre de leurs fuccefleurs continuèrent leurs tentatives, & furent contraints de fe relâcher. Pour faire cefler les plaintes des peuples , les Papes déclarèrent que les lieux le Pape Vitalien alla au devant de lui , &: le reçut a- vcc DES S C A V A N S. 197 vcc rcfped , quoi qu'il fçuft qu'il eftoit rombé dans l'hcrcfie, & qu'il avoit commis un fratricide. Quand Conftantin fils d'Irène eut répudié fa femme pourépoufer une concubine, Taraife Patriarche de Conflantinople ne le retrancha pas pour cela de la communion des prières, L'Abbé Platon blâma la conduite du Patriarche , & Ce fepara de fa communion ; en quoi fon zcle fut defapprouvé. Maurice envoya à Rome une loi que Grégoire t. crut con- traire à la liberté du Clergé. Ce faint Pape ne laifTa pas de la publier ; &: après cela il écrivic à l'Empereur ce qu'il en penfoit. Léon IV. ayant appris que l'on avoit fait pluficurs plaintes contre lui , écrivit à Louis le Débonnaire dans les termes du monde les plus fournis , que s'il avoit fait injure à quelqu'un, il eftoit prêt delà reparer de la manière que l'Empereur le ju- geroit à propos. Des Papes qui parloicnt de la Cône, eftoicnt bien éloignez de fonger à. excommunier des Souverains , & encore moins à les dépofer. Il eft vrai que leurs fuccefteurs changèrent de fentimens & de langage , &c traitèrent les Empereurs &les Rois comme leurs fujets. Mais enfin la conduite des pre- miers Papes dont je viens de parler , s'eft trouvée parfaite- ment conforme aux penfées & aux fentimens des plus famts Pères , & des plus fçavans Dodeurs de l'Eglife. Saint Auguftin a traité cette matière dans le troifiéme livre contre la lettre de Parmenien. Il eft vrai qu'il ne parle pas des Empereurs ni des Rois , parce que les Evêques eftoicnc alors bien éloignez de fonger feulement à les excommunier; mais il parle de perfonnes conftituées en dignité , & qui en- traînent beaucoup de monde après elles ; &: il déclare qu'il n'efl pas à propos de les excommunier , lors mcfme qu'ils l'ont mencé par leurs crimes , parce qu'alors l'Eglife en fouffriroit, ^ feroit-déchiréc par un ichifme. Il traite d'arrogantes , de pernicieufes & de facrilcgcs les excommunications qui troublcroient ainfi la paix des fidelles. L'expérience a fait voir que les excommunications pronon- cées en pareilcs occafions ont efté plus dangereufcs que le 1 65/4. D d d 198 LE JOURNAL mal mefine. Si les Papes en avoicnc ufé avec moins de pfc- cipitacion au fiecle pail'é , la Suéde , le Dannemarc, l'Angle- terre , la Saxe , &: cane d'autres Eftats d'Allemagne , ne fe- roient pas feparez de communion d'avec nous. Saint Ambroife ell dans le mefme fenciment que faint Au- guftin. Eftant perfecuté par le jeune Valentinicn , il n'a point recours aux anatêmes , & protcfte qu'il n'employera point d'autres armes que les larmes & la patience. L'Auteur rappotce les témoignages des autres Pères qui ont enfeigné la mefme dodrine , & répond aux exemples &: aux raifons qui s'allèguent au contraire. Il montre dans la fuite de ce livre , que Ci les Princes ne f peuvent eftre excommuniez m privez de tout commerce ci- vil , ils peuvent encore moins eftre dépofcz. Les preuves -qu'il en apporte ne pouvoient e(ire plus fortes , puis qu'elles font tirées de l'autorité de l'ancien &: du nouveau Teftament, 'du témoignage des faints Pères , de l'exemple de huit ficelés, durant lefquels les Papes ont fait une humble & fincere pro- 'fcflîon de leur dépendance , des loix que les Empereurs , Se 'des Capiculaires que nos Rois ont faits pour le règlement de la difcipline Ecclefiaftique ; & de plufieurs raifons convaiji- -cantes. Que fi nonobftant toutes ces preuves , un Pape tntrepre- noit d'excommunier ou de depofer un Prince , comme il ell ''quelquefois arrivé , l'AUteur demande comment fcs fujets, "& principalement les Ecclefiaftiques , devroient fc conduire ■ dani une fi délicate occafion. Pour décider la queftion, il ré- :pond qu'en ce cas-là ou le Prince le foumectroit à la fenccn- •ce du Pape , ou ncs'y foumettroit pas. S'il s'y foumcttoit, il •n'y auroit plus de difficulté , &: alors fcs fujets en devroient avoir plus de foumiffion , & mefme plus de vénération pour lui , puis qu'ils rcconnoitroient qu'il auroit de la pieté. Que fi pour des raifons dont il cft feuî juge , il ne s'y vouloit pas foumettre , (es fujets n'ayant point droit de le contraindre, le devroient laifler au jugement de Dieu , & communiquer avec lui en toutes chofes hormis en fes fentimens. Que fi le- Pape le veut dépofcr , fcs fujets doivenc regarder la leiitcnce. DES SCAVANS. 199 comme nulle , & demeurer fidellcs dans l'obeiflance. Ger- foii & d'autres Dodeurs Catoliques difcnt davantage , & en- feignent qu'il ert permis de repouHer la force par la force , &c que la refiiUnce qui fe fait avec les armes temporelles à une excommunication injufte , n'cft pas un mépris des Clefs de faint Pierre. Sx pour les péchez du Prince le Pape mec Tes Eftats en in- terdit , les fujets qui font innoccns , &: qui par leur baptême ont aquis le droit de faire exercice public de leur religion, n'y doivent point déférer. En ces rencontres- là où les fcan- dales & les foulevemens font à craindre , les Magiftrats ont accoutumé d'empêcher l'exécution de l'interdit. En 1468» le Parlement de Paris ordonna la continuation du fervice di- vin à Nevers , où Paul Second l'avoit défendu ; &: le Senac de Venife défendit fous peine de la vie aux Ecclelialliquesde garder l'interdit prononcé par Paul V. LA PRATIQUE DE MEDECINE DE PAUL BAR- bette ^ celfbre Meàectn d Amji rd.im ; enrichie de quantité de notes , d' obftrvatiom , ^ hifioires Médicales , par Frédéric Decken , S" augmentée en dernier lieu de pinceurs maladies qui y avoicnt efié omifes , ou traitées trop brièvement^ Avec des an- notations très utiles pour la pratique , par Jacob Manget Docleur en Médecine. Le tout nouvellement traduit en Fran(^ois. In 12. à Lion chi\fean Bapt. Gmlliimn ^ &c fc trouve à Paris ches Laurent d'Houry. PA u L Barbette , fameux Médecin d'Amfterdam , a ren- fermé toute fa Pratique de Médecine dans un fort petit volume , mais qui contient une infinité de chofes admirables. Il a écrit fort fuccindemenc , parce qu'il n'a voulu écrire que pour les fçavans. Cependant fon ouvrage cft exaél ôc rem- pli , fes raifonnemcns font juftes , fes remèdes aflurez , & Ces obfervations fidelles : mais , comme nous l'avons déjadit,ce n'eft que pour les fçavans qui font en petit nombre , qu'il a écrit. Frédéric Dcckers croyanc qu'il cfloic de l'honneur 4e k- îoo LE JOURNAL Médecine que la Pratique de Barbette fuft connue de tout le inonde , l'a commentée & enrichie de raifonnemcns , de re- mèdes , & d'obfctvations allez fuccintes , à l'imitation de I'au- reur , qu'il fe donne pourtant quelquefois la liberté de con- tredire. M. Manget Médecin de Genève, illuftre par {on érudition, par Ton expérience , & par mille cures très heurcufes qu'il a faites , a cru qu'il falloir écrire pour tout le monde j &c dans cette vue il ne s'eÙ. pas contencé d'augmenter d'annotations très excellentes , de remèdes éprouvez , &: d'obfcrvations très recherchées la Pratique de Barbette qui lui fembloit en- core trop nue avec les notes de Deckers ; il y a ajouté plu- fieurs maladies qui y manquoient. Ce dernier ne fe fait pas un point d'honneur , comme Barbette , de ne nous dire rien que de fon fonds : il nous fait connoitre fon bon gc ufl:, en nous donnant outre ces méditations propres un recueil choifi de tout ce qu'il y a de plus fin dans les plus fameux Médecins modernes. IXTRAIT D'UNE LETTRE , OU L'ON REFUTE /es preuves de M. Ahadie contre M. Defcariei touchant texù ficnce de Dieu. J'Ai lu, Monfieur, avec coure l'exaditude pcffible le cin- quième chapitre de l'Art de fe connoitre Ibi-mefmc ; & je me fens d'autant plus obhgé à le réfuter , que je fuis pcrfua- dé que fi M. Abadie avoir raifon , nous n'aurions plus aucun n:ioyen pour prouver l'cxiftcnce de Dieu. M. Defcartes a cru que tous les hommes en venant au monde avoient une idée de Dieu naturellement imprimée dans l'efprit. M. Abadie croit le contraire ; &: pour le prou- ver , il partage toutes nos connilTances en quatre cfpeces , fé- lon la divifion reçue dans l'Ecole , qui font la fimple Appre- bcnfion , \e Jugement , le Raifonnement , &: la Metode. Il divifc cnfuite les idées en deux efpcces : les unes font fimplcs , &: les autres font compofées. Il divife encore les idées fimples en deux efpeces , fçavoir en idées de fcntimcnt , &: en idées de t> E s S C AV A N S. i,ar ^e prccifion Les idées de fentimcnt font les idées qui nou s* rf prefentcnc quelque fentiment de notre ame , ou des objets revécus de ce fentiment ; &c les idées de précifion font des idées générales que l'ame a des chofes , lors qu'elle les con- noit fous des notions communes. Les deux pfemieres diviiions paroiflent exactes : mais on peur aflurer que la dernière n' eft pas entière , & que pour la rendre telle , j1 falloit divifcr les idées fimples en idées fin^u- Jieres , & en idé^s générales ou de précifion , pour parler com- me l'Au^eur ; & fubdivifcr encore les idées fingulieres en idées de fer.timent , & en d'autres idées qu'on peut appcUer de conception ou d'imaginatroTi ; de conception quand elles re- prefencent quelque efprit fingulier ; & d'imagination quand elles reprcfentcnt quelque corps (îngulier. Si M. Abadie veut rentrer un peu en lui mefme pour voir ce qui s'y pafTe , il trouvera qu'il connoit d'une manière fore diftcrent® la pcafée fubâilante qui eft Fattribut effentiel de fon e'prit , &: les penfées particulières ou fenfanons qui en font des modalicez. Il trouvera encore qu'il connoit fort di- verfcment la lumière du Soleil, &. le Soleil mefme qu il reveft de cette lumière.. Car en eftct il. connoit la pcnlce fiibfilhin.- tc qui eft l'attribut clîenticl de fon efprit , par une idée de- conception qui lui reprefente cette penfée comme quelque chofe d'immuable ; au lieu qu'il connoit fes penfées particu- heres , ( que je ne diftingue pas de fes fenfations ) par des idées de fentimcnt qui lui reprefentent ces penfées comme quelque chofe de changeant & de niuabie. Ce que je dis de la manière de connoitrc l'attribue effenricl de l'cfprit , & fes modalités, doit eftre entendu par propor- tion de la manière de connoitre la lumière du Soleil & le So- leil mefme , c'eftàdire que l'ame connoit la lumière dont elle- rcveft le Soleil , par une fimple idée de fentiment laquelle n'a aucun objet ; au lieu qu'elle connoit le Soleil par une vérita- ble idée qui lui reprefente le Soleil comme hors d'elle , & qui le lui reprefcntant fous la forme d'une image , s'appelle par cette rai fon idée d'imagination. Or fi M. Abadie trouve neceffairenient en lui une pcnfc^ îOî LE JOURNAL qui exifle cnclle-mefme ; & fi d'ailleurs l'cxpcriencc lui ap- prend que cette penfée qui exifte en elle-mefme , n'exiftc pas par elle-mermc , & qu'elle cft dépendance , cecce idée le conduira neccfl'aircment à la connoiflance d'une pcnftc plus excellente que la fiennc. Car comme le;; privations ne font pas connues par elles- mefmes , mais par les realitez qui leur font oppofées , fi M. Abadie connoii; quelque dé- faut &: quelque dépendance dans la penfée qui conftituë fa nature , c'eft une nccefllté qu'il connoiffc ce défaut & cette dépendance par la perfcdion & rind.épendance qu'il connoic dans une penfée parfaite Or c'cft cette penfée par- faite que nous appelions Dieu. D'où il s'enfuit que l'idée de Dieu précède en nous l'idée de nous-mcfmes , lors que nous nous confiderons comme une fubllance qui penfc impaifaice- xnent. L'idée de Dieu n'eft pas feulement la première de nos idées, aufcnsqueje viens de dire; elle eft encore la plus fimple : car elle n'cft compofée ni de genre & de différence , ni d'eflTcncc & d'exiRence , ni de fubftance &: de mode , ni enfin de fujec & d'accident ; d'autant que toutes ces fortes de compofition* jcnfermcnt quelque efpece de défaut, qui ne fe peut rencon- trer dans une penfée parfaite, ou pour parler plus félon l'ufa- ■ge , dans une fubftance qui penfe parfaitement. Nous ne dirons donc pas avec M. Abadie , que l'idée de Dieu eft formée de certains matériaux que nous trouvons en nous- mefmes , d'fy?« , àc fulpance ^ à'efpm, à' intelligence ^ de fageffe , de ùonté , &cc. Car tout ce qui eft en nous eft genre .& différence , elîence & exiftcncc , fubftance &: mode , fu- jet &: accident i 8c il vient d'eftre prouvé que rien de tout ce- la ne peut convenir à la penfée parfaite. Nous ne dirons pas non plus avec lui , que l'idée de Dieu •cft compofée par l'intelligence , étendue par l'efprit , accom- modée par l'entendement , & compofée de divers raifonnc- mens. Car i. elle n'eft pas compofée par l'intelligence ; car je viens de prouver qu'elle eft très fimpIe. z. Elle n'eft pas «tendue par l'efprit ; car l'efprit ne peut rien ajouter , je ne àis pas à l'idée de la penfée parfaite , mais non pas mefme à DES se A VANS. 205 l'idée de la plus petite chofe du monde ; d'autant que fi l ef- prit connoiflfoit dans un objet quelque chofe qui ne fufl pas, il auroit la propriété de connoure le néant; ce qui répugne. 3. Elle n'eft pas accommodée par l'entendemenc ; car l'en- tendement ne fe fert point d'une idée étrangère pour fe re- prefenter la penfée parfaite. 4. Elle n'eft pas compofée de divers raifonnemens ; car félon les principes de M. Abadie, les raifonnemens fuppofent les jugemens , & les jugemens fuppofent les idées fimples. Ainfi nous accorderons bien à M, Abadie, qu'il ne peut confiderer la dépendance qui eft entre les ades de fbn ame & les chofes extérieures , fai-s reconnoitre qu'il y a un auteur de cette dépendance. Mjis il faut qu'il avoue auflî qu il ne pourroit pas conclure que Dieu eft cet auteur , s'il ne fçavoic auparavant qu'il cxifte, & qu'il eft une penfée parfaite. Cat il faut remarquer que la fin du raifonnement n'eft pas de nous faire connoitre les thofes en elles-mefmes, mais de nous dé- couvrir les rapports qu'elles ont entr'elles. Par exemple , la '£n du raifonnement n'eft pas de nous faire connoitre un trian- gle & deux angles droits , mais de nous découvrir le rapport d'égalité qui eft entre un triangle & deux angles droits. C'eft pourquoi le raifonnement peut bien nous faire connoitre que la peifée parfaite a un rapport de caufc à l'égard de tout ce qui eft produit dans le monde : mais il ne peut pas nous don- ner l'idée de cette penfée parfaite laquelle il fuppofe. Cela eft fi vrai , que ceux qui ne connoiftent de Dieu que ce que le raifonnement leur en enfeigne, ne manquent pas de s'en former une f^ufCe idée ; dont la raifon eft que quand le raifonnement a fait connoitre qu'il y a une caufe de la dépen- dance des créatures , il refte encore à fe former une idée de cette caufe. En quoi l'on fe trompe aifément , les uns con- cevant cette caufe fous des idées corporelles , comme fous l'idée du Soleil ; & les autres la concevant fous des idées ab- straites , comme fous l'idée de Ve^re parfait ^ de ï'e^re en gêne- rai, de la raifon untverfelle , &CC. qui font des termes généraux, qui ne peuvent convenir à Dieu qui eft l'eftre le plus fîngulier éi. le plus décerminé qu'on puilfe concevoir. Z04 LE JOURNAL On objederoic en vain que l'idée de Dieu n'cd pas natUil îellc , mais aqoife , parce qu'il y en a plufieurs qui adurenc qu'ils ne l'ont pas. Car on peut répondre que quoi que l'idée de Dieu foit naturellement imprimée dans l'cfprit de tous les hommes , il ne s'enfuit pas que tous les hommes y falTent ne- cefTaircment attention. Il en eà de l'idée de Dieu comme de l'idée de notre ame ; c'efl à dire que comme l'ame fe connoic toujours , bien qu'elle femble s'ignorer , elle connoit aulïl toujours Dieu , bien qu'il lui femble qu'elle ne le connoic pas. L'application continuelle de l'ame aux chofes maté- rielles , & la peine qu'elle fent à fe connoitre elle-mcfm^ & à conncitre Dieu , font merveiUcufement bien expliquées, dans le livre de l'Efprit , qu'on attribue à faint Auguihn. Enfin il eft fi vrai que l'idée de Dieu ell naturellement im- primée dans tous les efprits , que M. Abadic tombe lui-mef- me fans y penfer dans le fentimcnt de M, Defcartcs , lors qu'il dit , que l'Auceur de la Genele a fait le catalogue de toutes les créatures , pour nous faire voir que Dieu les a pro- duites par fa fimple volonté. Or fi Dieu a produit toutes les créatures par fa fimple volonté , il y a donc une volonté ca Dieu. S'il y a une volonté en Dieu , il y a donc un enten»- dément. Et s'il y a un entendement , il y a necelfairenicnc une intelligence parfaite , qui efl: l'attribut cfîenticl de Dieu. Or il eft évident que nous ne pouvons pas aqucrir par le rai- fonnemcnt l'idée d'une intelligence ou penfée parfaite, Ll faut donc que cette idée foit naturellement imprimée dans l'efprit de cous les hommes ; ainfi que M. DcLcarces l'en- feigne. Je vous cnvoyerai , Monfieur , au premier jour les refle* xions que j'ai fuites fur ce que M. Abadie a dit dans le mcf- me livre touchant la liberté hum.aine. A PARIS, Chez Jean Cusson , rucf faint Jaques , à l'Image- de iainc Jean Baptifte. ^'îvec PriviUze du Rey XVIII. i05 LE JOURNAL DES se AVANS. 5 Du LuNDY lo. Mai M. D C. XCIV. DISSERTATION CHRONOLOGIQUE ET HISTO- rique touchant l'année de la naijfance de Jejus-Chnft. Par M. le Noble ^ Baion de faint Georges. In 12. à Paris chez Cl. Mazuel , rue faint Jaques. 1693. LA témérité de Morin qui s'eft imaginé pouvoir prouver la véritable année de la nairtance de N. Seigneur par fa figure genctliaque , a donné lieu à M. le Noble de faire voie dans cette dilFertation combien groflierement cet Aftrologue s'eft trompé pour avoir raifonné fur un faux principe. Avant toutes chofes M. le Noble demeure d'accord de l'erreur de calcul où tous les Chrétiens font tombez touchant leur épo- que , & en affigne deux raifons. L'une eft , qu'ils n'ont commencé à compter par les années de N, Seigneur que plus de 530. ans après fa naiflance , à la perfuafion de Denis le Petit , qui en compofant fou Ciclc Pafcal fe trompa dans fes fupputations. L'autre etl que les Chrétiens s'eitant fcrupulcufement ar- rêtez aux paroles de famt Luc , qui dit dans le troifiéme cha- pitre de fon Evangile , que quand N. Seigneur commença à prêcher après fon Baptême , en la troifiéme année du règne 1694. F f f xo\t mort fous celui de Calvifius & de Paifienus , qui tombe à la quarante- deuxième année de la Reformation Julienne. Pour en convaincre encore de plus en plus fcs ledeurs , il femarque comn\ent le Royaume d'Herode fut partage après DES SCAVANS. to7 fa. mort en quarre Tecrarchies. Arqucbus l'aîné cîe^fiis ,, eue Jerufjlem &i la moitié du Royaume. En qucUe année com- mença c-il à rcgiier ? Jofephe nows apprend que trence-fepc ans après la bataille d'Aftium il fut relégué en Gaule. Cette bataille fut donnée en la quinzième année de la Reformation Julienne fous le Confulat d'Augufte & de MelTala Corvinus. Q_ie fi à CCS quinze premières années on en ajoure trenre- fix Jiîtres , on aura la cinquante unième année de la Rcfor- marion Julienne, qui fe rapporte au Confulat d'Emilius Le- pidus ic d'Aruntius , fous lequel Dion allure que cet Arque- laiis fur relégué. Il régna neuf ans j de forte qu'ayant celle de régner fous le Confulat de Lepidus & d'Aruntius , c'eft une neceifité qu'il ait commencé à le faire fous celui de Cal- vifîns &: de Partienus , qui revient à la quarante-deuxième an- née de la Rctormation julienne. Philippe fut un des autres fucccfleurs d'Hcrode , qui félon ic témoign.Tge de Jofephe régna trente fix années entières , & mourut en la vintiéme de Tihcre, qui ç.ll la foix.inte &; dix- huiriéme de la Reformation julienne ; fi bien qu'ôtant les trente fix années du legne de Philippe du nombre des foixan- ïe & dix- huit , il reliera quarante deux , qui eft le nombre de l'année en laquelle mourut Herade père de Philippe. A CCS preuves plus claires que le jour , M le Noble en a- joute d'autres tirées des particularitez qui ont ou précédé ou accompagné , ou fuivi la mort d'Herode, & qui la fixent im- rauablcmcnt à cette quarante. deuxième année. Antipater l'un des fils d'herode , fc voyant éloigné de la Couronne par Alexandre & Ariftobule fes frères aînez , in- venta tant de calomnies contre eux , qu'Herode les fit mou- rir environ un an avant qu'il mouruft lui mefme. Antipater pourluivant fes pernicieux defleins , refolut dç faire périr fes autres fferes , &: mcfme fon père ; &: poijr ceç effet Ce fit mander à Rome par les intrigues de fes amis , dan? l'efpcrance de gagner l'amitié d'Augultc , & d'y couvrir par fon abfence l'empoifonnement d'Herode fon père. Mais fes projets ayant elle découverts , il fut rappelle en Judée par ce vieux politique , qui le fie cond4nner à m"fc io8 LE JOURNAL cinq jours avant qu'il mouruft lui-mefme. Ce fut Quintilius Varus (uccciîeur de Saturnin au gouver- nement de Judée , qui prononça cette condaiination. Or Jo- fephc met la promotion de Varus à ce gouvernement fous le Confulat de Calvifius & de Paflîenus ; &c par confequent l'an- née de ce Confulat cftant la quarante-deuxième de la Refor- m.uion Juhcnne , M. le Noble en conclur que ce fut en cette anr.ée qu Hcrode mourut, L'Eclipl'e de Lune qui précéda la mort de ce Roi , lui four- ninin autre argumenr qui lui paroît invincible. Voici en quoi il confiée. Hcrode mouiut peu de jours avant lafefte de Pâ- quc , & la Pleine Lune qui précéda fa mort fut une Lune Ecliptiquc. Or la pleine Lune de la Pâque des juifs eft tou- jours celle qui fuit i'Equinoxc du Printemps. Il faut donc que l'Eclipfe foit arrivée immédiatement avant l'Equinoxe. Cet- te obfervation vérifie incontellablement l'année de la mort d'Hcrode. La période des Eclipfes c(t infaillible , & en un million d'années on ne peut fe tromper (ur le jour d'une Eclip- fc de Lune. Comme on peut montrer à point nommé tou- tes celles qui font arrivées , on peut aullî prédire toutes celles qui arriveront jufques à la fin du monde. Cela furpofé , on trouve fuivant les tables Rodolfines qui (ont les plus juftesdc toutes , qu'en la quarante deuxième année de la Reforma- tion Julienne la Lune fut nouvelle le vint feptiéme Mars, trois jours après l'Equinoxe , & par confequent l'année Lé- gale Judaïque commença le mefme jour vint feptiéme de Mars ; & ainfi la Pleine Lune Pafcale fut l'onzième Avril fuivant. On trouve par les mefmes tables , que la Pleine Lune qui précéda cet Equinoxe , fut eclipiée de cinq doits 3 y. minu- tes. La mefme chofc ne pouvant arriver en plufieurs années ni avant cela ni après , il tant avouer que le ciel s'accorde avec l'hiftoire pour fixer la mort d'Herode à la quarante-deu- xième année de la Reformation Julienne , entre l'Eclipfc de Lune qui fut le treizième Mars , & la Pleine Lune Pafcale qui fut l'onzième Avril. Que fi tant d'argumens de ce qui a précédé ou accompa- gné DES S C A V A N S. 209 "gné , ou fuivi la mort d'Herodc , ne luffifcnt p.is pour en fi- xer l'année , M. le Noble y joint deux traits de l'iiifloirc Ro- maine. L'un eft , que Caius Cefar fils d Agrippa , prclîda au jugement rendu entre les fils d Hcrode pour le partage de Ces £ftacs. Or par deux palî'ages , l'un de Tacite , &: l'autre de Dion conférez tnfemble, il eftjuftifiéque Caius partit de Ro- me pour l'Arménie en la quarante- quatrième année de la Re- formation .'ulicniie ; d'où notre AUteurconci'ut certainement qu'il n'a pu connoicre de ce partage en la quarante cinquième année de la mcfmc Epoque , comme il faudroit qu'il en eull connu j fi N. Seigneur eftoit né en la quarante- troifiéme an- liée , comme le prétend Caffiodore. L'autre trait de l'hiftoire Romiaine eft , que Philippe fils d'Herode tâtit la viile de Betfaide , &C la nomma juliade, en l'honneur de Julie fille d'Augufle, pour reconnoitre lapro- redion qu'elle lui avoit donnée dans la conteflation qu'il avoit foutenuë contre fcs fieres touchant le partage des Eftats de leur perc commun. Or il efl confiant que Julie fut reléguée dans rille Pandataire , fous le treizième Confulat d'Augufte avec Piauîius Silvanus , c'eft a. dire en la quarante- quatrième année de la Reformation Julienne ; d'où M. le Noble con- clut qu'elle n'a pu donner de protedion a. Philippe dans la qua- rante- cinquième année de la mclme Epoque, ni encore moins recevoir les marques de fa rcconnoilfance par la dédicace d'u- ne ville fous Con nom. Cette ville n'a pu eRre dédiée qu'ea l'année quarante- troifiéme , ou au commencement delà fui- vantc , puis qu'il avoit fallu du temps pour la bâtir depuis le jugement , & que le jugement n'avoit pu cflre rendu qu'un temps confiderable après la mort d'Herode. De là il s'enfuie que cette mort doit élire arrivée en la quarante- deuxième an- née de la Reformacion Julienne. Ce fondement citant pofé de la forte qu'Herode mourut en la quarante-deuxième année Julienne , & eliant indubitable d'ailleurs que N. Seigneur naquit avant la mort de ce Roi, vers le Solftice d'hiver , il ne relie qu'une chofe à eclaircir , ■fçavoir fi ce fut en la quarantième ou en la quarante-unième année de la rcformation du Calendrier Romain. 1694. Ggg '»io LE JOURNAL M. le Noble pour refondre cette difficulté , conGdcre les différentes circonlUnces que (nint Mathieu & faint Luc nous apprennent de cette naifl'ance. Il commence par le dénom- brement fait en Judée ; &: après avoir expliqué le véritable fens des paroles de faint Luc , il recheri-he en quelle année Auguftc ordonna le dénombrement de l'Empire & pour con- nojtre Ces forces , &£. pour s'allurcr du fecours qu'il en pouvoïc tirer. Augufte ne prit cette refolution qu'après qu'il eue terminé la guerre en Allemagne par Drulus , en Pannonie par Tibè- re , & en Macédoine par Pifon -, &.' au mefme temps le Scnac ordonna de fermer le Temple de Janus. Cela arriva en la trente-fixiémeannéedcla Rc formation .uhenne , & ce fut en exécution de cet ordre que Qiùrinius commença alors en Ju- dée le dénombrement dont parle laint Luc. Mais les trou- bles excitez par les Daces , parles Celtes , & par d'autres peuples alarmez au premier bruit du dénombrement , durè- rent trois ans, comme le porte une infcription dont parle 'Pline, c'eft à dire jufqu'à la quarantième année de la Refor- mation Julienne , en laquelle le Temple de Janus fut fermé, &C le dénombrement de l'Empire entièrement accompli. Le Temple de Janus demeura fermé jufqu'à la nouvelle que reçut Augufte de la défaite de Qmncilius Varus. Cette défaite arriva incontcftablcment en la cinquante troifiémc année de la Reformation Julienne. Orofe nous aflure que lors qu'Augude commanda d'ouvrir le Temple de Janus , il y avoir treize ans qu'il eftoit fermé. Il l'avoit donc efté en la quarantième année, qui eft ctUe du dénombrement de l'hm- pire , & de la naiifance de N. Seigneur. La féconde circonftancc de cette naiirance cft l'apparition de l'Etoile que faint Mathieu dit que les Mages virent en O- EÏenc. M. le Noble s'en (ert pour en tirer non une connoil- fance certaine , mais au moins une conjeélure curieufc de l'année de la naillance de N. S. Il fc perfuade que cette é- tf i!e eftoii de la nature de celles qui de temps en temps fe ferment de nouveau dans le ciel , Se qui n'ont qu'une certaine durée. Hipparque qur compta le premici toutes les étoiles », DES SCAVANS. xn en (découvrit une nouvelle environ fix-vints ans avant l'Inc^f- nation du Sauveur. Depuis ce temps-là on ne fçait poipc qu'il en ait paru d'autre que celle fur laquelle Tico Bralié fie un traité , & qui avoit paru en i 571. dans laconftellacion de Caffiope ; en i 604. une autre parut dans la connellacion du Serpentaire. Les plus fçavans qui l'obfervercnc ne douè- rent point qu'elle ne duft eltre attribuée à la révolution des trois planètes fuperieures , qui après huit cens années reve- noit en con)onâ:ion dans la rriplicité ignée. Kepler in alors une remarque peut-eftre plus curieufe que foiide , que les plus grans incidens font arrivez environ de huit cens ans en huit cens ans , dans les momens de ce retour à la triplicité ignée. Huit cens ans auparavant l'Empire futtranf- ferc en Occident en faveur de Charlcmagne. Les huit cens ans qui précèdent tombent juflement à la naillance de N. S. Huit cens ans plus haut fe trouve le lîecle d'Kaïc , l'origine des Olimpiades , & la fondation de Rome. En remontant encore huit cens ans , on voit la naifTancc de Moïfe , la dé- livrance des Ifraëlices , & la publication de la toi. Huit cens ans auparavant arriva le déluge , précédé de huit cens pat les prophéties d'Enoch , qui vivoit huit cens ans après U création du monde. La conjondion des trois planètes fuperieures arrivée dans Je Sagittaire au temps de la detniere révolution de la triplici- té ignée , ayant produit l'étoile qui parut en i 604. il ell prp- babic que celle que les Mages virent environ un an avant la nailfancc de N. Seigneur, eftoit un effet de la conjondion dçs mefmcs planètes dans le commencement du Bélier. Cette étoile ayant paru au mois de Février ou de Mars de la quaran- tième année de la Reformation julienne , il y a apparence que les Mages arriveront en Judée l'année fuivante pout adorer le nouveau Roi qui venoit de naître. La troifiéme circonftance qui fuivit la naiffance de N. Sei- gneur , fut le maflacre des enfans , parmi lefquels Macrobc dic dans le 4. chapitre du z . livre , qu'un des fils d'Herodc fuc envelopé. Cela ne fe peut entendre d' Antipater , qui depuis le maflacre des Innpcens fie un voyage de fepç mois 3,B>x>xa^^ 111 LE ^JOURNAL & fut condannc & cxcuté cinq jours feulement avant la more de fon pcre. Cela fc doit donc entendre d'Alexandre &: d'A- riftobule condanncz par Saturnin en la quarante unième an- née de la reformation Julienne , en laquelle le mafTacre des cnfans fut commis. De là il s'enfuit nccefTairement que N. S. naquit fur la fin de la quarantième année Julienne , quinze ou fcize mois avant la mort d Hcrode. Car s'il cftoit né en la quar.inte &: unième , & tro:s ou quatre mois fcu'cmcnt a- vant la mort de ce Roi , il ne fc trouveroit pas un temps fuf- fifant pour placer le voyage des Mngt s , & la fuite de Jofcph en Egipte. Cette fuite cft là quatrième circonftance que M. le Noble examine , &: par laquelle il décide que N. S. naquit en la qua- rantième année Julienne , Se non en la quaranie &c unième. Car s'il clloit ne en cette dernière , trois mois & huit jours feulement avant la mort d Hcrode , il ne fc treuvcroit pas alfez de temps pour la fuite de Jofeph en Egipte , & pour le fejour qu'il y fit. il eft conftmt par le témoignage de faine Luc , que la fainte Vierge fe fournit à la 'oi de la purificatiorj après laquelle cet Evangelifle dit qu'elle retourna à Nazarer. Oi foit que les Mages ayent adoré le Sauveur dans Nazaret , ou dans Betleem -, la purification de la Vierge a dîi précéder l'adoration des Mages , puifque faint Mathieu aflurc qu'au(Iî- tôr après l'adoration , Jofcph fut averti par l'Ange de s'enfuir en Egipte avec l'enfant. Il faut donc prendre d'abord les quarante jours qui s'ècoulc- rent entre la naiflance de N S. & la Purification, avec le temps -neceffairc pour faire le voyage de Jerufalcm. Il faut enfuitc trouver le temps du retour à Nazaret , puis celui de l'adora- tion des Mages , &: enfin celui de la fuite en Egipte qui n'a pu fe faire qu'en beaucoup de jours , y ayant cent cinquante heucs de Jerulalem à la frontière d'Egiptc. Il n'cft pas aifé de dire précifement combien Jofeph de- meura en Egipte jufques à la mort d'Herode. Mais il paroic évident à M. le Noble , que toutes les circonftances que je viens de marquer ne peuvent fe raflcmbler en aufll peu de temps qu'il y en aurojt eu entre le zy. Décembre de la qua- rante- DES SCAVANS. 213 rante- unième année , &: le 4. Avril } d'où il conclut que N. Seigneur naquit en la quarantième année Julienne , & que ce- la s'accorde pacfaueaient avec l'ancienne traduion , qui don- ne deux ans au Sauveur lors qu'il rccourna d Egipie,S<: qu'Ar- quelaiis eut fucccdé à Herode au roy.umie de Judce ; ce qui arriva en la quarante deuMeme année de la aiclnie Epoque. Le concours de tant de preuves que l'Ecriture faune, l'Hi- ftoire , &c l'Altronomie fournillent à l'cnvi , fait dire à notre Auteur avec une encicre confiance , qu'il n'y a point d'hom- me intelligent dans la Cronologie , qui ne demeure d'accord de l'erreur du calcul vulgaire ; qui n'avoue que N. S. ell né l'année quarantième de la Reformation Julienne , la trente- huitième de l'Empire d'AUgufte , fous le Conluiat de Balbus &c d'Antiftius , &c quinze n ois avant la mort d'Herode , & qui ne reconnoiife qu'au lieu de compter la prefente année 1694. nous la devrioi s compter 1699. DE FURORE POETICO, é'C. In ^. Arq^entor.iîi. 16^2. TOus ceux qui ont écrit de ce fujet font demeurez d'ac- cord que l'excellence de la Poëfie procède bien moins de l'art dont les Poètes fuivent les règles , que de l'infpiration ou de l'cntoufufme qui les tranfportc. Platon a dillingué dans le Phèdre quatre fortes d'infpirations : une qui vient d'Apollon, & qui découvre l'avenir ; une qui vient de Bac- chus , & qui donne la connoiilance des milteres ; une qui vient des Mufes , & qui fait les Poètes j &: une qui vient de Venus , &: qui fait les amans. M. Zentgrave Profelfcur de Philofophie à Strasbourg , trai- te dans cette diffettation , de celle qui fait les Poètes , & lui attribue pluficurs caufes, La principale eft Dieu , qui répand dans leurs amcs un feu fubcil qui les eleve &: les agite. Les autres les difpofent à la recevoir ; les autres les pouUent , &: les autres les aident. Celles qui les difpofent font un naturel heureux , &; un tempérament mélancolique , qui les rend propres à concevoir 1 694. 41 H h h 1Î4 LEJOL/RNAL les étincelles de ce feu. Celles qui les pouflenc font ou au dedans ou au dehors deux mefmes. Au dedans fonda pieté, l'amour , la colère , la joye , & les autres paflîons. Au de- hors font le vin qui echaufc leur imagination , les applaudif- fcmens qui les excitent, 6c les récompcnfes qui les animent. Les caufes qui les aident font la Iccîure , la méditation , Se l'afliduité à compofer , & les avis de ceux aufqucls ils com- muniquent leurs ouvrages. Après avoir parlé des caufes de l'infpiration , il parle des effets qu'elle produit &c dans le Poëtc , &C dans ceux qui 1 c- coutent , 6c appuyé tout ce qu'il en dit lut des autoritcz fort curicufes. LA PRATIQUE DE CHlRUPvGIE DE PAUL BAR- bette ^ ceUbre Meàecin (Ji Amftadam. Piejr.iere partie conte- nant les opérations de Chtrur^ic Enrichie ^ augmentée en der- nier lieu de plu^eurs remanjues , bifioires , guerifons , ^ explica- tions qui concernent la pratique de Chirurgie , ^ l' Anaromie, Par Jacob Manget DoBeur en Médecine. Le tout approprié à la doflrine de la circulation , S" nouvellement traduit en Fran- çois. In iz. j. volumes, à Lion chcz^Jean Bapt. Guiûimin , & f; trouve à Paris chez Laurent d'Houry , rue faine Ja- ques. 1693. PAuL Barbette , fameux Médecin d'Amflerdam , com- pofa fes œuvres de Chirurgie & d'Anatomie en Hollan- dois , dans le dell'cin qu'il avoit de les donner feulement à fon pays. Mais comme elles ne manquèrent pas d'avoir le fuccés qu'ont ordinairement les exccliens ouvrages , elles fu- rent bientôt traduites en Latin pour la commodité cfe tout le monde. M. Manget Médecin &' excellent Praticien de Ge- nève , à l'imitation du fçavant Fredcric Deckers qui avoic fait des remarques fur les ouvrages de Mtdecinc de Paul Bar- bette , a joint les ftennes à fes oeuvres de Chirurgie , & y a ajouté tout ce qu'il a trouvé de plus curieux & de plus nccef- faire dans la pratique; entre autres les exccliens traitez de la faignée , des fontanelles , & de la.Jcpre des Grecs ^ tirez de. ♦ DES SCAVANS. îiy l'inuflte M. Willis. On trouvera encore dans les remarques qui ont elle faites par les foins de M. Manger , pluficurs au- tres cbofcs tirées de M. Defcartcs , de Silvius de le Boë , de Malpigius ,• de Barrhoiin &c. de la pratique raifonnée de chi- rurgie de M. Muys , &: de plufieurs autres traitez de divers Clururgicns aufquels ils ont le plus excellé. Ces œuvres a- voient elle traduites en notre langue avant les remarques de M.Manget ; & quoi que cette tradudion fufl en quelque ma- nière ancienne, cependant elles ne laifioicnr pjs defrre re- ceuës de tous les Médecins &: de tous les Chaurgiens , cJc forte qu'elles avoient elle imprimées ainfi plulicurs fois. Au- jourd'hui pour les rendre de meilleur goûc , on a chanoé les cxprefîions les plus anciennes , & l'on y a ajouté toutes les augmentations , les recueils , &: les remarques de M. Mnn- get donc il a cfté parlé cy-dcvar.t , qui doivent rendre ces œu- vres d'une utilité indirpcnfable. LE CERCLE DE SOUABE DRESSE' SUR LES ME- moires de Jeun Chri/]ophe Huoten à Auibovrq;^ , par N . de Fer Ce graphe de Monfeigr.euT le Dauphin. A Paris chez l'Au. teur , fur le quai de l'Horloge du Palais, à la Sphère Roya- le 1694. LA Carte de la Souabe gravée à Aufbourg en rrcnte pe- tites feuil'es , ayant cfté fort efiiméc , M. de Fer s'en cil fervi pour drcfler celle-ci , de mefme qu'il s'eft fervi des m.e- moircs de Jean Weirich Roiflm , pour drelfcr la carte parri- culicredu Duché de Wirtemberg. Cette dcfcription exade de ces pays contribuera beaucoup à bien entendre les mar- ches & les expéditions que les armées y ont faites durant les dernières campagnes. M. de Fer a mis la Carte de Souabe en quatre feuilles &: celle du Duché de Wirtemberg en une grande. Il donnera au premier jour la Mappe du monde fur de nouvelles obfer- vations j &: la fixiéme partie des Forces de l'Europe. 11 (S LE JOURNAL DISCOURS SUR DIVERS SUJETS DE MORALE. Par M. Laurent Chenart , Piètre , Dofieur de Sorhonre. Jn j2. trois volumes, à Paris chez Edme Couccroc , rue fainc Jaques. 1694. L'Extrait des deux premiers tomes de ces difccurs a dé)a eu la place dans !c dernier journal del'année der- nière. Le croifiémc tome qui a efté ajouté dans cette édition, contient des matières femblables à celles des deux autres. Le premier tome a efté augmenté de deux difcours qui ont paru fort iroportans à l'AUteur. L'un cil fur lutilité d'une confeC- fion générale ; &: l'autre fur les avantages que reçoivent les Penitens , lors qu'en certains cas l'abfolution leur cft dif- féré e. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Zes Sermons de faint Auyiftin fur le Nouveau Tefiamerit , tra- duits erj Francoii fur Sédition Latine des PP. Benedicims de la Congrégation de faint Maur. Par i Auteur de la Traduction des Lettres ^ des Conférons du mefme Saint, Contenant les Sermom fur f tint Mathieu , fur fatnt Marc , ^ fur faint Luc. Jn 8. i. volumes, à Paris chez la Veuve de Jean Baptifte Coignard , &: Jean Baptiite Coignard. 1694. Les Sermons du R. P. Séraphin , Capucin. Jn 12. .^.volumes. à Paris chez Edme Couteror. 1694. La vie de fainte Cécile , avec des réflexions chrétiennes fur fei principales circon/iances . Par M. Dubois Prêtre , Chapelain Or- dinaire de la Chapelle ^ Mujtque du Roi , ^c. Jn 12. à Paris chez le mefme. 1694. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue fainc Jaques , à l'Image de fainc Jean Baptilte. Avec Vtivilege du Roi. 1694. XIX. 1SJ7 LE JOURNAL DES se AVANS. Du LuNDY 17. Mai M. D C. XCIV. DICTIONNAIRE ETYMOLOGIQUE OU ORIGINES de la Langue Fran^oife , par M. Ménage. Nouvelle Edition revue é" (augmentée par l'Auteur, Avec les Originei Fran^oijei de M. de Cafeneuve ; un difcoun fur la fcience des Etymologies ^ far le P. Befnier de la Compagnie de Je fus ; ^ uyie bfte des nomi de Saints qui paroijjent éloignez^ de leur origine , (^ qui s expri- ment dtiei Cernent félon la diverjité des lieux , par M. l Abhè Chajlelain ^ Chanoine de l' FgUfe de Pans. In fAio. à Paris chez Jean Aniflbn , rue faint Jaques, i 694. L y a plus de quarante ans que M. Ménage publia Tes Ori- gines de k Langue Françoife , & qu'il les dédia à M. Du- puy , de qui il avoir reçu de grans fecours pour les compofer. Depuis ce temps là il n'a point celTé de les augmenter : il y travaillait peu de jours avant fa mort ; & fi elle elloit arrivée de quelques mois feulement plus tard , il y auroit mis la der- nière main , & y auroit joint une préface , où il n'auroit pas manqué d'étaler ce qu'il fçavoit de plus rare touchant une é- tude qui avoit fait la principale occupation de fa vie. Le P. Befnier a fuppleé à ce défaut , &: mis à la tefte de ce volume une préface qui fc réduit à trois propofinons : que ce i6c)4. 1 i i iig LE JOURNAL n'eft point un deflein frivole que de travailler fur les étimoI(v gies -, qu'il n'efi: pas impoflîble de l'exécuter , & qu'il a eftc honoré par le mérite particulier de M. Ménage. Il établit la première fur le confentement de tous les peu- ples , de tous les fiecles , & de toures les fciences , qui pref- que de concert ont pris parti pour les écimologies. Dans le dénombrement qu'il fait des peuples qui ont eu foin de re- chercher l'origine de leur langue , il commence par ceux de l'Europe , & après avoir parlé des Cailillans & des Portugais, des François & des Italiens , il remonte aux Romains &: aux Grecs. Il rapporte les témoignages des auteurs qui ontpcnfé que la langue Grcque efloïc dcfcen.aië de l'Hébraïque , de la Siriatfue , & de la Caldaïque. Quant aux Hébreux , il dit que fuppofant que leur langue cftoit la première du monde , ils n'ont pu en rechercher l'ori- gine hors de fon propre fonds ; que pour cela ils fe font con- tentez de la réduire à les premieies racines formées par la combinaifon de deux ou de trois confones , &C d'expliquer par ce moyen touce la fuite des dérivez &: des compofez. Paflant d'Europe en Afie, il remarque que les Turcs & les Tartares ne manquent pas de diiiinguet ce qu'ils ont du Per- fan Se de l'Arabe , dont le premier fait leurs belles lettres, & l'autre ert le langage de leur Religion. £nân venant tn Afrique , fans s'anêter à l'Arabie qui en occupe plus de la moitié, il obfcrve que les Coptes diltingucnt dans leur langue ce qu'elle a d'original d'avec ce qu'elle a re- çtL des fuccelïeurs d'Alexandre , ôc au voifinage des Feniciens & des Hébreux. De ce long dénombrement dont je palTe la plus grande par- tie , il conclut que puis que toutes les narions qui ont quel- ■que connoillance des lettres ont recherché l'origine de leur langue , c'ell une faulle delicaielfe que de blâmer cette cu- riofité. Pour faire voir que ce goût eft auflî ancien qu'il eft étendu, il n'a recours ni aux nombres de Puagore , ni aux figures des Géomètres , ni à la force naturelle de chaque fon , ni aux fim- -bolfs de l'Aftronomie , mais tire de f hiftoire iainte l'origine DES SCAVANS. i,^ de toutes les langues ; d'où font venues enfuite par une alté- ration infenfibje toutes celles que les différentes nations p,ir- lent aujourd'hui. Il dit que le premier homme fut le premier Etimologifte ; qu'il jmpola aux animaux des noms qui eRoienc des images de leur eilence ou de leurs ptmcipaies proprietez. Defcendant enfuite de ficcle en iîecle , il fjic voir que les plus vantez ont favorilé cette étude ; que dans celui d'Au- gufte l'Eneïde de Virgile apprit aux Romains que pour décou- vrir la véritable origme de leur langue aulll bien que celle de leur nation , ils dévoient fouiller dans les ruines de Troye. Enfin il monrre que la connoilTance des chofts ne peut cftre feparée de celle des mots , & que les fciences les plus lolides font fouvent fondées (ur l'explication claire des termes. C'eft par la necefîîié de cette union que Pliton a mêlé cette partie de la Grammaire aux plus hautes fpeculations de la Philofo- phic , &:qu'Arifto:e qui faifoit gloite de le contredire l'a imi- té en ce point. Notre Auteur parcourant les principales fciences , montre combien elles rirent de fecours de la connoiiTancc des c(imo- logies. Il dit que la Médecine , l'Anatomie , &: la Chimie ne le peuvent gueres paifer de l'origine de leurs termes , Se que c'ed pour cela que l'on a fait des dictionnaires des ani- maux de l'Ecriture , &: que l'on en a fait d'autres de Méde- cine , de Maternatique , &: de Droit. Il ajoute que les commentaires fur l'Ecriture font remplis de quedions fur la force des mots Hébreux. Puur établir la féconde propofuion , qui eft que la fcience des Etimologies eO: réelle dans l'exécution , il montre qu'elle a de trois ferres de principes ; fçavoir des principes d'origine, des principes de connoiflance , & des principes de mcrode. Les principes d'origine neceffaires pour découvrir les etimo- logies des mots François font , au jugement du P. Bcfnier, une parfaite connoillance de la langue Latine d'où la nôtre cft venue ; quelque connoiffance de la Greque , dont nons avons emprunté les termes des fciences ; quelque teinture des langues des nations voifines ^ avec lefquclles nous n*à- izo LE JOURNA L vons pu avoir ni commerce ni guerre fans prendre beaucoup de leurs mots. Les principes de connoifTance viennent au fecours de ceux d'origine , & fervent comme de guide pour conduire plus fû- rcment les mots qui Ce font déguifez fur la route. A l'égard des principes de metode, ils font difFerens. Quel- ques Auteurs ont fuivi l'ordre des fources où chaque langue a puifé. D'autres fuivant les canaux par où les mots font pa(^ fez , ont recherché ce que les arts , la religion , le commer- ce &: les amb-iffades nous ont communiqué en divers temps. D'autres ont rangé les parties de cette fciencc félon le plus ou le moins de rapport qui paroit entre les mots ; & pour con- vaincre l'incrédulité , ils ont placé à la tefle ceux qui ne font point altérez pour frayer par là le chemin à ceux qui le fonc le plus. L'éloge de M. Ménage par où le P. Befnier finit fon dif- couts , fait la preuve de fa troifiéme propofition. 11 dit que quand les étimologies n'auroient point d'autre mérite que d'avoir plu à un fi grand homme , ce n'en fcroit pas un mé- diocre , & que le goût qu'il avoit pour elles vaut encore mieux que toutes les raifons qui peuvent eftrc apportées à leur avan- tage. On a joint deux autres ouvrages à ces Origines de M. Mé- nage. Le premier eft un recueil de noms de Saints , &: prin- cipalement de ceux que l'ulagc a éloignez de leur origine, & ceux qui s'expriment diverfement félon la divetfité des lieux. Il peut eflre d'un grand fecours à ceux qui écrivent l'hiftoire , a ceux qui traduifent les auteurs Latins , aux Cu- rez quand ils adminiftrent le baptême , &: qui ne fçachant pas en Latin le nom que le parain donne à l'enfant, en forment quelquefois fur le champ de fort éloignez du véritable , &: di- fent Druje au lieu de Drogo , &: Omari au lieu ai Auàoma^e. Nous en fommes redevables aux fçavantes &: laborieufes recherches de M. l'Abbé Chaftelain Chanoine de i'Eglife de Paris , qui a amalfé plus de mille de ces noms ; au lieu que le V. Labbe n'en avoir mis que cent foixante & douze dans fon Année DES SCAVANS. air Année Sainte , & M. Robert cent fix à la fin de GaSia Chu- ftiana. Le fécond ouvrage font des Origines Françoifes , que M. de Cafeneuve avoit autrefois commencées. H naquit le der- nier Odobre 1591, Après l'étude de la Théologie , il a- quir une connoifl'ance parfaite de la jurifprudence , chercha le repos dans l'eltat Ecclefiaftique , & fe contenta d'une prcbeiide de faint hftienne de Touloufe. Il compofa le trai- re du franc Alleu de Langue^ioc, &l fur engagé par les louan- ges qu'il en reçut , à écrire l'hilloire de la province , qu'il in- titula la CataLoqnt Francoife. Il mourut le dernier Odobre 11^51 Le manufcrjr de fcs Origines de la langue Françoife tomba entre les mains de M. Tornier Avocat de Touloufe, de qui M. Foucault Maitre des Requêtes les acheta , lors qu'il efloit Intendant de Julhcc à Montauban. II les a depuis com- muniquées à M. Ménage par l'cntremife de M. Segrais ; & c'cfi; par ce moyen qu'elles onc vu le jour. L'ouvrjge n'eft exaifl: que dans la p .rtie qui a efté remife au net par l'Auteur, Le leflc eft demeuré dans une grande confufion, LA VRAYE ET LA FAUSSE METAPHYSIQUE , OU t'en réfute la fentimens de M. Regii ^ de fei Adverjuires fur cette matière, in 12. à Lion. 16 p^. IL y a apparence que l'Auteur de cette Critique efl celui dont parle le P. Malebranche , lors qu'il dit dans l'Avercif- fenient de fa Rcponfe à M Régis , qu'il avoit appris qu'une autre perpmne , à fon infcù , avoit entrepris de réfuter les opiriions particulières de ce philofophe fur la Metaphifique principalement (^ fur la Morale , (y- qui mcfme dans fon ouvrage défendait fcs fen- timens avec beaucoup de vigueur. En effet cec Auteur foutient mei veilleufcmenr ces caraftcres : car outre qu'il cache d'éta- blir les opinions du P. Malebranche , il rcnvcrfc autanr qu'il peut celles de M. Régis. Il n'épargne pas mcfme la do- drme de M. d'Avranches & de M, du Hamel , qu'il appelle les adverfaires de M. Régis , & qu'il ne traite guetes mieux que lui. 1694. K k k ' m LE JOURNAL 11 objeilc d'abord à M. Régis , que la matière n'cft pas U caufe exemplaire de fon idée , &: que l'ame n'a pas aflcz d& réalité pour contenir l'idée de Dieu. Je ne m'arrêterai pas fur cela : car ces diffïcultez onr efté traitées à fond dans les Répliques de M. Régis au P. Malebranche. Je me conten- terai de dire comment l'Auteur tâche de prouver à M. Hucc qu'fl a l'idée de Dieu , bien qu'il croye ne l'avoir pas. Mr. Huer , dit-il , penfe quand il lui plait à un petit cetcle , à un pflus grand , &: à un autre encore plus grand. Comment cela >. Nelt-ce pas parce qu'il conçoit dans 1 idée qu'il a de l'éten- due divers points également éloignez d'un fcul qu'on appelle centre, &: qu'il en prolonge le diamètre autant qu'il veut ? Il penfe à un cercle en gênerai , c'eit à dire à un cercle dont il ne détermine point la grandeur. Comment cela , fi ce n'eic parce qu'il a l'idée de la généralité , qu'il rép.md fans y penfer fur l'idée particulière du cercle ? Or cette idée de la gencra- Jicé n'ert pas l'idée de tel eftre : c'eft donc l'idée de i'eftre. Et qu'efl: ce que l'idée de l'eftre , û ce n'ell l'idée de l'infinij l'idée de Dieu mein^e ? M. Reg.is pourroit répondre , que fuivant cette dodlrinC;, l'idée de Dieu ne feroit autre chofe que l'idée d'une générali- té , c'eft à dire d'une nature univerfelle , qui n'exiile que dans l'entendement qui la conçoit : ce qu'on ne peut dire fans impiété ; ainfi que M. Régis l'a prouvé au P. Malebran- che dans l'article 13. de l'd féconde Réplique. Selon l'Auteur , M. Régis rcnveife également les princi- pes des fciences pai faites & de la Morale ; il dit que Dieu ne voit pas les choies dans (es propres perfedions , mais dans (a volonté comme dans leur principe. Si cela eft , dit rAuteur, nous ne fçaurons plus û les trois angles d'un triangle font é- gaux à deux droits ; fi deux & deux font quatre , Ôtc. Car on nous renvoyé à une volonté libre & indépendante qui règle tout comme il lui plait ; & on ne nous montre point qu'elle ait réglé aucune chofe de ce que nous voudrions fçavoir. Voi- la donc tout en contufion , plus de certitude dans les fcien- ces , plus de règle dans les moeurs , plus de religion , plus de juftice. DES SCAVANS. tij M. Régis pourroit dire que la volonté de Dieu efl: à la vé- rité libre & indépendante , mais qu'elle efl immuable , cvclu du nombre des biens raifonnabU s la connoif- ftnce de la vérité & l'amour de la jullice : au co traire il les y a roujours compris , comme il paroit dans la page 4.1 o. du 3 tome de Ton Siltcmc. M Régis a enfeigné dans Ton Sinême , que les loix ne dé- rivent pas mimediatement de ce que les hommes (ont raifon- nnblcs , mais de ce qu'en fuivant la raifun ils fe font liez en- fcmblc par des patles. L'Auteur louaient au con raire que toutes les loix & toutes les (ocietez dérivent immediaremenc de ce que de ccrtams hommes lagcs ont reJuit les autres hommes à la railon. M Régis répondra que réduire les hommes à la rai Ton , n'eft pas établir une diTcipline entre eux , & que la didipli- ne qui elt maintenant entre les hommes , rippole des pactes & des conven-ions : Ce qui cft fi vrai , que l'Auteur avouë lui- mefme dans la page 130. que les hommes conduits Par La rai- [on ont (.lit effort f^our fe nrer du davi^er où le-ir corrupaoi le> rret^ toit ^ (^ iLs ont f ut iesrciLmem Or comment ont ils fait des reglcmens , répondra M. Kegis , (i ce n ell par des pactes &: par des conLr.;£ls ? Quoi que les hommes foient tel'emcnt fujccs à la puifTan- ce de Dku qu'ils ne puill'ent rien faire contre fa volonté, M Régis prétend que ce n'elt pas pourtant par là que Dieu eli dit rcgr.er fur eux eri un (ens propre & dans une lign.rica tion exaàe : Car ce n'eft pas le gouvernement qui s'exerce en agjifant , qu'on nomme rciner , mais celui là feulem.enc qui fe pratique par l'autorité des loix qu'on appelle judicuUei ou polittqties. C'cd pour cela, dit il ,que Dieu n'avoit jamais pris la qualité de Roi avant cette tameufc alliance qu'il fit a- vec les juifs , de laquelle font dérivées toutes les loix judiciel- les & ceremoniales dont il cft parlé depuis le 21. chapitre de l'Exode jufqu'à la fin du Pentateuque. M. Régis ajoute que la nouvelle alliance regarde cous les hommes , mais qu'il n'y a que ceux qui croyenc en Jcfus- Chnft , & qui reçoivent le bap:éme , qui en foicnc parcici- DES se A VANS. 117 pans. L'Aurcur de la critique Ce moque de ces prérein^jes alliances. 11 aflure que qnand Dieu fir at'ijnce avec At>ra- ham , ce ne fut point pour aquerir de noiive.iux droj s fur ce Patriarche : ce fut par une pure bonté & par une pure dirtin- dion que Dieu avou faite du peuple qui en d^voit forcir , d'a- vec tous les autres peuples de la ttire. Et quant à la nou- velle alliance que Dieu a faite par la rrufllon de iefusChrift, il dir que ce n'ell une alliance que parce qnç Dieu veut par JefiS Chrill fe réconcilier les hoinines. M Régis répondra que fi par les alliances Dieu n'aqueroic aucun nouveu d:oit fur le^ hommes , ce fei-Mc injtilcmenc que tJ>ieu auroit fait alliance avec Abraham ._/f>? d'e^e fou Dieu (^ ce.u! de fa po/ierite : car avant cette alli.uKe Dieu elloïc !e Dieu d'Abraham par le roit inaliénable de fa nature. Ce fe- roit encore inurilemenr que Dieu uioic voulu renouveller a- vec cous les Ifraëlites l'alliance qu'il avoic faite avec Abra- ham , Ifric , &• !acob , pour s'en f>irc un peuple particulier; car les Ifraëlues eiloient déjà un peuple qui app ittenoit à Dieu, hnfîn ce feroit inucilcmeut que l'Eglilc prétend a voit un droit particulier (ur ceux qui font entrez d .ns la nou- velle alliance par le bap'ême, puisque jefus-Chrift fon époux a un droit cçal fur tous les hommes 5 ce qui ne (e peut dire Un'i temcnté. Voila les principales objcdions que l'Auteur fait à M. Re- gi<;. Je ne parle p'^mt des autres, pour éviter la loi^.gucur. Ce dérail ne regir^/'e que M. Régis , au cas qu'il veuille répondre : Mais '1 y a apparence qu'il ne le voudra pas. Car ouiic qu'il J'a déclaré ainfi dans fa dernière réplique , l'iioniieur qu"il a eu de difputer avec des pcrfonnes d'un grand nom , fembJe lui défendre de fc coinmertie avec un homme qui n'en a point. 5'il avoir à lépondrc , ce ne feroit que pour juftificr divers endroits de fon (îdéme que l'Aureur de la critique a failîfiez. I . Il lui fait dire dans la page 41 que Dieu voit tou- tes chofes dans C\ volonté comme dam leur mode e ; & M. Ré- gis a dit : comme dans leur princine ( voyez^li paie 90. du \ . tom. art. j. ) 1. 11 lui fait dire dans la page 70. que le corps 5c l'e/piic font des ejires modaux ; ôd M. Régis dit qu'ils font des 2i8 LE JOURNAL epci fuhftanùeh^ ( voycij.t page io\. du mefmc tome art. i. ) 3 . TI Jui fait dire dans la page i o i. que Came efi dans le corp comme Dteu e/î par tout ; &: M. Régis dit exprclltment dans fon Siflc- me , quelle y cfi d'une manière diff.remc , ( voyczja page i }i. du i . 'om. art. z. ) 4 H lui fait dire dans la page icy que le corps ^ l\-me font enfcmbie les loix de ^eur union ; 5c M. R'gis dit ex- prcir/mcnr que l'efprit & le corps ("ont unis enfcmbie par l'au- teur de la nature , ( voyczja page i i6. du i . tome ^trt i .) j. Il Jui fait dire dans la page 187. que Dieu produit r.os niauvai- fes ,jtftcl:ions pour rendre plus parfait l'univers ; &; M Régis dit feulement , qu'il produit nos affedions , ( wy cibles pages 238. & ^l^. dit I. tome. ) f t , ■ ^ .- '2-^ '*• JOURNAL DES MARCHES, CAMPEMHNS , BA- taiûci , feges , «^ mouvemens des Armca du Roi en fUnd>es , ^ de celhi des y^lluz^deputs t'annce 16^0 ■jufqu'à prcfcnt. pre~ feritèau Roi pur le Sr, f^autlier, Co»:m/f[.jire Ordin.are de l'y^r- îillcrre. In jz. à Paris chez la Veuve de Charles Coi^nard, fur le quai des Auguftins. i 694. L'Uulicé que non feulement les gens de guerre , mais tous ceux qui lifent notre hiftoire peuvent tirer de ce: ouvra- ge , eft évidente , en ce que les marches , les campemens, & Jes manières d'occuper un terrain à la vue de l'ennemi , font des fccrcts de l'art militaire d'où dépend fouvent le fuccés des plus grandes expéditions. M. Vautlicr Commilfaire Ordinaire de l'Artillerie , a écrie ce qu'il en a obfervé en Flandres durant les quatre dernières campagnes , & ce qu'il a trouvé dans les mémoires que Mrs. les Généraux lui ont fait la grâce de lui communiquer. Pour rendre plus intelligible ce qu'il en dit, il en afaitdreC- fer par M. Moullart Sanfon Géographe du Roi , une carte du lieu où les mouvemens fe font palfez , dans laquelle les cam- pemens de chaque année font marquez par des traits de dif- férentes couleurs. La carte n'eft; pas jointe au livre ; mais fc vend fcparémenc. h Paris chez Jean Cussom , rue faim Jaques , à faint Jean Baptiftc. XX. 1 LE JOURNAL DES se AVANS. 5 Du LuNDY z4. Mai M. D C. XCIV. TRAITE* DE L'EUCHARISTIE. PAR FEU M. Pelijjon , Confeiiler du Roi en [a ConfeiU , Maitie des Re- qucftei Ordinaire de [on Hoftel. In iz. à JPans chez Jean AniC- fon , rue faint Jaques. 1694. LEs écrits trouvez après la mort de M. PelifTon , font con- noitre qu'il avoit étudié à fond la Religion fur tous les articles controverfez , & qu'il s'elloit particulièrement atta- ché à celui de l'Eucariftie. Un travail aulll pénible que celui- là fut récompenfé par la découverte de la vérité , & par la grâce de fa converfion. Pour contribuer à celle des autres, il crut devoir leur propofer clairement &: fincerement la véri- té , fans s'engager dans des difputes dont l'eft'et le plus ordi- naire cft raccroilferaent de l'aigreur. Dans cette vue il fit imprimer fcs Reflexions fur les diffe- rens de la Religion. Plufieurs qui en furent vivement tou- chez , délirèrent qu'il éclaircift principalement deux points, la Tradition & l'Eucariftie, Il travailloit fur le dernier au temps de fa mort -, & bien qu'il n'y ait pas mis la dernière main , il n'y manque rien d'eflentiel au fujet. Plus les autres Auteurs ont étendu la quedion de la prc- I 654. M m m 6 3° ^ LE JOURNAL fence réel'c , plus M. PeliflTon l'a refTcrréc. Il la réduit à trois parties, dontU première cft la vrai femblance ou la pof- fibilicé des opinions ("clon le fens humain : la féconde eft l'E- criture ; & la troilléme les Pcres. Touchant la vrai femblance ou la poffibilité , il diflinçuc quatre fentimens qui partagent le monde chrétien. Le pre- mier eft celui des Catoliques qui croyent une prefence &' u- ne inanducacion réelle , avec un changement furnacurel &: miriculeux. Le fécond efl: celui des Lureriens , qui croyent la prefen- ce réelle &: la manducation , fans changement de fubftance. Le troiliéme e!l celui des Zuingliens , qui ne reconnoidenc ni changement de fubltance , m prefence réelle du Corps de N. Seigneur. Le quatrième eft celui de Calvin , qui confiile à rejcttcr toute prefence réelle , & à admettre pourtant une niandu- cntion réelle par l'opcranon que fait fur nos amcs la vertu vi- vifiante arta hée à la (ubliance du Corps de N. S. indépen- damment du figne vifible. Cette di(}indion fuppofée , M. PelifTon déclare qu'il n'a point Luter à combattre, parce qu'il reçoit la prefence réelle, &: tient a quellion de la (libftance du pain plutôt curieufe que neceflaire ; & quM n'a pour advcrfaires que Zuingle & Cal- vin. 11 montte donc premièrement , que l'opinion de Znin- gle fc détruit d'elie mefme à l'égard de la vrai-femblance ou de la polîlbiliré , fur tout en recevant ce principe , qu'en cet- te matiete il faut un vtai-fcmblable merveilleux , puis que tous les peuples Chrétiens ont reconnu une merveille dans l'tucaridie Selon Zuingle ^ il n'y a point de merveille, puis qu'il n y a que du pain. Il n'y a donc point non plus de vrai- femblable. Pour examiner enfuitc le merveilleux qui refulte de l'opi- nion de Calvin , & pour voir s'il cft vrai-femblable, il le com- pare au merveilleux des Catoliques j & pour cela il fait trois obfervations. L'une eft , que croire n'eft pas imaginer, l'ima- gination ni les fens ne devant point cftre appeliez au confeil des miftercs. L'autre eft , que croire n'eft pas comprendre. DE s se A VANS. 151 De la vient que l'Eglife ancienne a défendu notre Reîiaion contre les Payens par l'autorité de Dieu. La dernière ert: que Dieu peut faire tout ce qu'il peut vouloir. De ces trois ob- fervations il conclut que l'opinion de Calvin efi: impoUîble. £lle pofe la manJuLarion réelle du Coîps , (jns prelcnce du mefme Corps ; ce qui renferme une contradiction formelle dans notre penfée & dans la volonté de Dieu ; ce qui fuppo- fe que Dieu veuille & ne veuille p.^s en mefme temps la nief- mc chofe. Il elt clair qu'cftre mangé en un lieu enferme eftre prelent en un lieu : l'un ne le peut penfer fans l'autre. Ceux que Calvin a feduirs Tentant l'imp^iribilité de (on opinion , J'ont adoucie autant qu ils ont pu. M. Claude a avoué à M. PelilTon , que l'opinion de Calvin ne fe pouvoit défendre. Le merveilleux du fennment des Catoliques n'a rien que de vrai fembiable. II eil vrai qu'il ne fe peut comprend; e : Mais comme il a e'ié die , croire n'ciï pas comprendre; & bien qu'il ne puilfe ertre compris , il peut cltie reçu par une raifon éclairée de la foi. Dans ce merveilleux des Catoliques il y a trois chofes qui blelfcnt l'elpru des Proteftans , le mot de tranfubllantiation , le changement de fubftance , &: la prc- fence d une mefme fubltancc en plufieurs lieux. M. Pcliffon les détrompe fur ces trois points dans le rcfte de la premictc partie de ce traité. - La féconde contient les preuves de l'Eucariflie par 1 Ecri- ture. La clef de cette féconde dilpute eft , que dans les cir- conftances dont il s'agit , ces paroles .• Cea efi mon Corps ne fe peuvent entendre en un fens figuré , parce qu'en matière d'ex- plication , ce qui eft contraire à la droite raifon cil impofllble. Or le fens figuré eft contraire à la droite raifon , puis que du confentement de tous les Chrétiens , l'Eucariftic eft une gran- de merveille , & qu'il n'y auroit plus de merveille, fi ces paro- les fignifioient fimplement : Ceci e/i la figure de mon Corps. De plus M. Pelifton prouve que le fens que l'Eglife Caro- lique donne à ces paroles, fe trouve formellement dans l'E- criture ; au lieu que celui que Calvin leur donne ne s'y peut trouver. J'ai d'autant plus abrégé cet extrait , qu'un habile homme 13X - LE JOURNA L en a fait depuis peu de jours un autre beaucoup plus étendu,' auquel je donnerai au premier jour fa place dans le Journal. DE FINE HOMINIS , VULGO SUMMO BONO , SE- cundùm difciplinam Philofophia Barbaries ^ Italicic : item fecundum difcipUvam Phdofophi.e Gracanica , Poetica : item fecunium difciplinam EleatiCiC {^ Pyrrhoni^ : item fecundum difciplinam Epicuri ; t^ dentque fecundum difciplinam Philo fa. ■phiiC lonica & Socraticorum. In 8. Ar^entorati. 1693. CE ne font pas ici de fimples propofitions , mais de juftes traitez , où font expliquées les opinions de toutes les fcdcs touchant le fbuvcrain bien , avec les preuves que fcur- niOcnc les plus anciens livres qui font parvenus jufqu'à nous. La première thcfe , ou le premier traité , reprefente ce que Jes Juifs j les Egiptiens , les Perfes , les Caldéens , les Indiens, les Chinois , les Japonois , les Celtes , & les Italiens ontpen- fé de la dernière fin ou du fouvcrain bonheur de l'homme. Salomou a excellemment e>;pliqué le fcntiment des Juifs dans lEcclefiafte , lors qu'il a découvert la vanité de ceux qui s'attachent aux créatures , comme fi elles pouvoient les ren- dre heureux. Il eft vrai pourtant que les fcdes qui fe font formées parmi les Juifs depuis la conftruûion du fécond temple , ont aban- donné l'ancienne dodrine de la nation , &: fe font éloignées de la véritable fin de l'homme. Les Pharifiens ont recherché la vertu pour les refpeds qu'elle s'attire , &: ont afFedé dans leurs jeûnes des vifages pâles &: défigurez , pour eftre eftimez àcs hommes. Les tîfeniens ont fui la focicté par mé- pris des autres , & fe font privez par orgueil de la propriété de leurs biens , & de la commodité qu'ils leur pouvoient pro- curer. Les Saducéens ont nié la providence de Dieu , & la refurredion des morts. Les Egiptiens inftruits par Mercure Trifmegifte , ont fait confiftcr toute la fagedc des hommes , & tout le bonheur des eftats dans le culte qu'ils rendent à Dieu. Les Perfes , félon le témoignage de Platon , faifbienc en- feigncr DES SCAVANS. 233 feigner aux jeunes gens par quatre Maitres la dodrine de Zoroaftrc , qui fe rcduifoic à fuivre la raifon & à garder la ju- ilice. Les Caldéens qui reconnoifl'oienc auffi Zoroaflre pour au- teur de leur Philofophie , mectoient toute la perfection à pur- ger l'ame des fouiUures qu'elle avoir contradlces en s'unidanc au corps. Les Indiens ont cru que le bien propre de l'homme efloic de fervir Dieu & de pratiquer la vertu. Les Chinois ont fait dépendre le fouverain bien des adions de l'entendement , &: de celles de la volonté , conduites fe- Jon l'ordre de la nature. Il y' a eu au Japon piufieurs feélcs qui n'ont point reconnu l'immortalité de l'ame , & qui ont pourtant eu quelque om- ■bre de vertu dont elles ont donné des préceptes. La principale maxime des Ccices a efté , que toutes les a- étions dévoient eftre réglées par la pieté envers Dieu , &: par la juilice envers les hommes. Les Mahometans ont tenu que Je bonheur de la vie prefente confifte uniquement dans l'exer- cice de la vertu. Pitagore qui avoir appris fa Philofophie des Egiptiens & des Caldéens , & qui la porta en Italie , ne recommanda rien tant à fes difciples que de rechercher la vérité comme le moyen le plus propre de s'approcher de Dieu , &c de lui ref- fembler. Le fécond traité rapporte le fenriment des Grecs Touchant le fouverain bien. Les plus anciens parmi eux ont efté les Poètes. Mufée , Linus , &: Orphée ont enfeigné ce qu'ils avoient appris des Caldéens , que l'ame eft purgée de la cor- ruption de fes mœurs , Se du trouble de fcs pallions par des oeuvres de pieté. Homère a auffi enfeigné que la vertu rappelle les hommes à la pureté de leur origine, & à la rellemblance de Dieu. He- fiode a dit la mefme chofe , &c les lept Sages ont eu la mefme dodrine ; & c'eft ce que Solon encendoit lors qu'il dit à Cre- fus , que nul homme ne devoir eftre appelle heureux avant fa inort , après laquelle il ne peut plus décheoir de. fa perfedtion. 1654. Nnn i54 LE JOURNAL Les préceptes que les autres Sages ont donnez de vivre félon la vercu , tendent à la mefme fin. Le traite fuivant explique les opinions des Pirroniens. D&- mocrite compofa un livre de la fin de l'iiomme , & la fie con- fîl^er dans la tranquillicé de l'efprit. Les auteurs n'ont pas con- venu de ce qu'il entendoit par ce mot Clément d'Alexan- drie & Theodoret ont cru qu'il entendoit le plaifir. Diogenc Laerce s'ell perfuadé qu'il n'cntcndoit que le repos d'une ame qui n'elt troublée ni de la fupertiition , ni de la crainte ^ ni d'aucune autre padîon. Seneque Icmble avoir eu la mef. me pcnfce , quand il a dit que cette tranquillité confilloit à n'eltre ébranlé de rien , &c à approcher de la fermeté de la na- ture divine Ce qui eft certain eft que jamais Democrite n'a dit qu'il faluft rechercher les plaifirs du corps ; & qu'il a conftammenc aduré que l'excellence de l'homme dépendoit delà pureté de fes mœurs. Bien que Protagore difciple de Democrite, ait fait profef- fîon d impieté , & déclaré qu'il ne fçavoit s'il y avoit des Dieux , il e!t vrai pourtant qu'il a mis fa fin Se fon bonheur dans la tranquillité. Heraclite a changé le nom plutôt que la chofe , quand il a dit que le bonheur confilloit à ellrc con- tent } & il y a apparence que par ces mots il entendoit la tran- quillité , comme Democrite , & non la volupté. Les Pirro- niens ont retenu le mot de tranquillité , comme Democtite ; mais , fi l'on en croit Sextus F.mpincus , ils n'ont pas retenu fa penfée , & ont enfcigné que dans la conduite de la vie if faut fuivre la nature &r la loi. Le quatrième traité e(t une expofi:ion des fentimens où les Epicuriens ont elle touchant le fouverain bien. Au lieu que les Pirromens fufptndoient prefque toujours leur juge- ment de peur de fe tromper , &: qu'ils ne croyoïent rien fur les apparences , Epicure lugca du bien & du mal furie rap- port des fens , &: mit le ptincipe & la fin de toute fclicité dans le plaifir, auquel il requit deux conditions : l'une, que l'amc fuit fans trouble ; &: l'autre , que le corps full fins i ou leur. 11 u'enccndoic donc poiuc par le plaifir la démangeaifon qui DES SCAVANS. i3y touche les Cens ; & il croyoit que quand la douleur furvienc il la fauc fupporter avec confiance. Le dernier traité contient les fentimens de la fcâe d'Io- nie. Talés crut que pour eftre heureux il faloit avoir trois chofes; un corps fain , un efprit content , un nariirel docile & propre aux fciences. Anaxagore regardant le ciel comme fa patrie , méprifa tout ce qu'il voyoic fur la terre , &: renon- ça à la jouiflance de fcs biens , pour vaquer à la contempla- tion. Arquelaiis joignit à la contemplation les devoirs de la vie civile j & Socrate , le plus excellent de tous les Phiiofo- phes , & qui foutenoit plus fortement que nul autre la provi- dence de Dieu & Timmorcalité de l'ame , mit la perfcQion de l'homme dans la polTellion de la beauté fouvcraine. PIECES DE THEATRE DE M. BOURSAULT, di^C j4vcc une lettie à' un Théologien illu(}:i-e par Lt qualité ^ par fon mente , confulie par l' Auteur , pour fl^avoir Jt la Comé- die peut eftre permije , ou doit efire abfolument défendue. Jn /^, à Paris chez Jean Guignard , dans la Grand'SalIe du Pa- lais. 1694. L'Auteur confulté fur la Comédie ne fait paroirre que de l'embarras au commencement de fa lettre , quand il du que plus il examine les faints Pères , plus il lit les Théo- logiens & les Cafuiftes , & moins il fçait à quoi fe détermi- ner. D'abord pour ne rien avancer de lui mefme , il fait par- ler faint Thomas , qui enfeigne que les jeux & les divertifle- mens font non feulement permis , mais en quelque forte ne- cefl'aires. Puis s'eftant ob)edé qu'il femble que les Comé- diens partent les bornes du divertiHement , eux qui confu- nient toute leur vie à jouer ; il répond que puis que le diver-- riflement eft neceifairc dans la vie des hommes , les emplois deftinez a cette fin font permis. De cette réponfe faint Thomas tire trois confequences ; que la comédie eft comprife fous le nom gênerai de jeu & de diverciffemcnt; que les Comédiens qui jouent toute leur vie, ae font pas pour cela en eftat de péché ; 4. MR. de la Rochelle a efté employé dans la milice du fie- cle avant que d'eftre appelle à la milice fpiritueile de leilat Ecclefiaflique : mais dans l'une & dans l'autre il n'a fer- vi que le mefme Mairre. Les fervices qu'il a autrefois rendus dans la première à fou Prince &: à fa patrie , & les combats qu'il donne dans la féconde aux ennemis invifibîes , font le fujct des louanges qu'il reçoit dans cette lettre. Eftant grand V.cairc de Strafbourg , il a utilement travaillé à purger le dic- ce("e des tefles de l'erreur de Lutcr ; & maintenant Evêquc de la Rochelle , fortereiTe du Calvinifme durant les troubles du ficelé palTé , il augmente &: fortifie la foi de ceux qui fc font heureufement réunis à l'Eglife Catoliqce. LETTRE A M. FOUCAULT, MAITRE DES RE. queftes , Intendant dejujiice en Normandie. Par le mefme. Jn 12. à Paris chez Guillaume Cavclier. 1694, LEs charges & les emplois de M. Foucault donnent lieu à M. Pontier de relever & le mérite par lequel il les a ob- tenus , & les rares qualitcz qu'il y fait paroitre. Il nous ap- prend que pendant que ce Magiftrat cftoic Intendant en Poi- tou , il y parla avec tant de force dans une aflemblée de la No- bleflc , que fon difcours fut fuivi de la promte converficn de cinq cent Gentilshommes qui renoncèrent aux erreurs donc ils avoient efté prévenus dans leur jeunefle , & reconnurent la vérité de l'ancienne dodrinc. A PARIS, Chez Jean CussoN.ruë faine Jaques , à l'Image de faine Jean Bapcille. Avec Ftivile^e du Roi. 1 6 94. X X r. 241 LE JOURNAL DES se AVANS S Du LuNDY }i. Mai M. D C. XCIV. SUITE DU TRAITE' HISTORIQUE DE L'AN- cienne Paque deijuifi. Riflexiom fur quelques d^ljertcitions de L' Auteur de C Analife de ^Evangile , gS fur un livre intitulé: Apologie de M. Arnaud.^ du P. BouhouTi. In zz. à Paris chez André Pralard. i 694. LEs reflexions que fait le P. Lami dans la fuite de fon traité de la Pàque , regardent deux fortes de perfonnes. Les premières font contre le P. Mauduit Prêtre de l'Oratoi- re , qui a inféré dans fon Analife de l'Evangile deux differta- tions , où il attaque ce que le P. Lami a tâché d'établir dans le traité de l'ancienne Pâque des Juifs , & où il prétend que les Prêtres & les Doéteurs de cette nation , pour rendre jefus- Chrift odieux à toute la poAerité Judaïque , & pour le con- vaincre de contravention à la loi , ont falfifié leurs coutumes outré leur difcipline , &:-afFcété d'introduire des reglemens contraires à prcfque toutes les circonftances de la dernière Pâque , qu'ils fuppofent fur le rapport des Evangeliftes qu'il a célébrée avant (a paffion. Pour prouver cette falfification , il commence par le temps de l'immolation de l'agneau , &: convient que c'eftoit l'apiés- 1694. Ppp 141 LE JOURNAL niidi du quatorzième jour du mois appelle Nifan : Mais il ne convienc pas de la manière de compter le quacorziéme joue de;ce mois. Car au iicu que le P. Lami a ecric que pendant que le temple a fublillé , les Juifs comptoicnt les jours de leur mois en cornu. ençaut à la première pha("e de la Lune , &: a faïc voir que c'elloit la dodrine coullantc du Talmud ; le P. M iuduit fonticnt qu'ils les comptoicnt en commençant à Ijl conjondion de la Lune avec le Soleil , &C que (cachant que JSI. Seigneur avoit Irait la Pâque félon la loi le quatorzicme jour en le comptan. de cette conjonction , ils s'clloient avi- fez de faire aptes coup un règlement contraire de ne le comp- ter que de l'apparition du premier croiilant , qui leur donna le quatorzième un jour plus tard qu'à J. C. A cel.i le P. Lami répond que Dieu avoic ordonné aux Ifraë- lites de faire un ("acriiice à chaque Neomcnie 5 c'eft à dire toutes les fois que la lune recommençoit à paroiCre : qu'ils obfeivcrent pour cet effet la première pliafé avec beaucoup de foin , &: ne recherchèrent point la conjonQion de la Lune qui ne fe peut reconnoitre que par le calcul : qu'ils ne fça- voient point encore d'Agronomie , & n'avoient point de ta- bles ni de cicles lors qu au forcir d Et^iptc Dieu leur comman- da de lui faire un facrihce à chaque Neoinenie. D'où il con- clut qu'il n'cll pas vrai que l'Ecriture au attaché la Ncome- nic à la conjondion de la Lune avec le Soleil , comme le dit le P.Mauduit ; & que les Juifs n'auroient pu s'en inftruirc fans le fecours d'un art c]ui leur eftoit alors inconnu. Après que le P Mauduit a parlé du temps auquel la Pàquc fe celebroit , il parle du lieu où clic fe devoir immoler , &; foutient qu'il n'elloit pas nectllaire que ce tull dans le tem- ple de Jerufalcm , & qu'il iuffiioit que ce fuft dans la ville. Le P. Lami dit au contraire , que la Pâque elloit un vérita- ble facrifice , & que félon l'Ecriture , tout facriiice fe de voit faire dans le temple. Le P. Mauduit trouve de la difficulté à affembler tant de monde dans le temple , & pour le perfuader montre que le ta- bernacle où fe faiioient les facnfîccs avant que le temple fuft bâti , ne pouvoit contenir tous les députez de chaque focicié: pafcalcj. DES se A V A N S. 245 Le P. Lami répond , que ceux qui oftroienc l'agneau pareil comme tout autre facrifice , Ce prciencoieiic à la porte du Ta- bernacle , c'etl à dire d'une enceinte de cinquante coudées Je larjie fur cent de long, au milieu de laquelle citoit la ten- te ou le Tabernacle qui couvroit l'Arche. Les p-irticulurs egorgeoicnt eux mefmes leur viélime à cette entrée , &: les Prêtres en recevoienc le fang , &c l'alioient verfcr au pied de l'Autel. 11 n'clloit pas necelîaire que les particuliers eiitraf fent dans le Tabernacle : ils s'approchoient reiilement de l'entrée , &c Ce retiroient pour faire place à d'autres. Lors que Salomon bâtit le Temple , il eut dellein de re- prefcnter le tabernacle. Mais parce que le nombre des Htaé- lites eltoit accru , il fît le temple plus grand ; & au lieu d'une enceinte il en fie trois : l'intérieure où elloic l'autel des holo- eaurtes : une féconde pour les lliaëiites ; & une rioihcmc pour les Gentils. La première où cftoit l'autel , avoit cent coudées en tout iens. Pour concevoir comment tous ceux qui apporcoient leurs agneaux , pouvoient tenir dans le tem- ple , il faut (çavoir qu'ils fe prcfenroient à une des trois por- tes de la première enceinte , 6c qu'après qu'ils avoient otfcit & tué leurs agi, eaux , ils fe retitoient ; & ainfi en trois ou qua- tre heures uac infinité d'hommes pouvoient in:imoler la Pi- que. Ces deux difficultez du temps Se du lieu de la Pâque edanc cclaircies , les deux Pçres de l'Oratoire traitent d'autres cir- Gonftances de cette felte. La première ell: la recherche que les Ifraëlites faifoient du pain levé à l'entrée du quatorzième jour après le coucher du (oleil ; le foin qu'ils avoicnt de brû- ler le lendemain tout ce qui reftoit de ce pain ; après quoi il ne leur cdoit plus permis d'en manger. LeP.Mauduit prétend que cette recherche eftoit inconnue aux anciens Juifs , & que c'eftoit une invention des llabins. Sa feule preuve eft que la loi de Moïfe n'ordonne point cette recherche. Le P. Lami demeure d'accord qu'elle ne l'ordon- ne pas : mais il croit que puis que dans le douzième chapitre de 1 Exode elle défend que le premier jour des Azimes il Ce Kouvc aucun levain dans les xnaifons des Juifs ,. elle les obli. 144- LEJOURNAL geoic à le chercher & à l'ôter -, que cette obfervation tendan- te à l'exécution de la loi eftoit en pratique avant la mort de N. Seigneur , &: que faint Paul y fit alluiion dans le cinquiè- me chapitre de la première Epitre aux Corinthiens , lors qu'il les avertit de fe purifier du vieux levain. Une autre circonftance e(l la tranflation que les Juifs font des fcftes , de forte qu'il ne s'en rencontre point deux de fui- te , & qu'elles ne (c célèbrent point en certaines fcries. Ru- pert qui crut cette pratique ancienne , s'en fervit pour conci- lier les trois premiers hvangelirtes avec le dernier qui eft faint Jean ; & Paul de Burgos foutint depuis , qu'en l'année de la more de N. Seigneur , à compter de la conjondion de la Lu- ne avec le Soleil , le quinzième de Nifan eftoit le Jeudi au foir veille de cette mort , &: qu'ainfi c'elloir l'heure de man- ger l'agneau pjfcal félon la loi : que les Juifs transférèrent cette cérémonie au jour fuivant , félon la règle qu'ils ob(cr- voient de ne point faire deux fcftes de fuite ; mais que N. S. ne s'aflujettit point à cette règle qui eftoit nouvelle. Le P. Mauduit s'appuye fur ce fentiment de Rupeit &: de Paul de Burgos , pour renverfer celui du P. Lami. Mais ce dernier croit avoir déjà ruine le fondement de fon adverfiire quand il a montré que les Juifs ne comptoient point leurs mois de la conjonvStion de la Lune avec le Soleil. De plus il a prouvé qu'avant la dcftrudion du remple, les trarflations des ferics eftoient inconnues aux Juifs , &r par.confcquent qu'en l'an- née de la mort de N. S. ils célébrèrent la Pâque au jour pxcC- crir par la loi ; & Notre Seigneur ne la put célébrer le jour précèdent , parce qu'il auroit contrevenu à la mefme loi. La coutume que les Juifs avoient de manger l'agneau fort avant dans la nuit , & de ne point fonir de jerufalem cette nuit- là , de peur de contrevenir à la loi qui défendoit de por- ter hors de la ville aucune portion de l'agneau , font encore àcs circonftances fur lefquelles nos deux Auteurs ne s'accor- dent pas. Le P. Mauduit avance que c'eftoit un règlement fait à plaifir par les Juifs , pour trouver à redire à la dernière Pâque de N. Seigneur , après laquelle il fortit la nuit mefme de Jerufalem pour aller à la montagne des Oliviers. Le DES S C A V A N S. 145 •Le P. Laiiii foutient que ce n'eftoit point un rcglemenc faïc par les Juifs dans cette vue , mais qu'ils en ufoienc ainfi pour obeïr à la loi félon laquelle ils croyoïenc que la chair de l'a- gneau pafcal ne dcvoit non plus que celle de toute autre vi- tlime, eftre mangée ailleurs que dans le lieu faint. H a re- marqué auffi que c'eftoïc par la mefmc apprehenfion de con- trevenir à la loi , qu'ils prenoient des précautions extraordi- naires pour ne pas rompre les os de Tagneau ; fur quoi le P. Mauduic ne trouve rien à reprendre , & ne die pas que c'eft un règlement fait après coup , parce qu'il ne fcrt de rien à ' appuyer le fcntiœent du P. Lami. Outre toutes ces circonftances , il y a encore quelques ar- gumens qui ont cfté employez par le P. Mauduic , & auf. quels le P, Lami tâche de répondre dans le refte de fes Re- iîexions. Le plus grand eft tiré de l'Ecriture qui nous aflure que le premier jour des Azimes les Apôtres ayant demanJé à N. S. où il vouloir qu'ils lui préparadent la Pâque , & N. S leur ayant dcfigné un lieu , ils la lui préparèrent , & le foir il s'y rcndir 5 &c y mangea avec eux de ce qu'ils avoienc préparé. Le P. Lami s'étonne que cet argument puifl'e faire quelque imprcllîon , l'Hcriture ne difant point formellement que N. Seigneur mangea la Pâque. Elle ne dit pas que les Apôtres la préparèrent pour ce jour-là , ni que pour ce jour- là ils ne préparèrent rien autre chofe. L'Ecriture n'oblige donc pas à croire que N. S. mangea la Pâque , parce que d'ailleurs d'au- tres circonftances nous apprennent qu'il ne la put manger a- vant que le temps de la manger fuft arrivé. Un autre argument dont fé fert le P. Mauduic , eft que le ■Tentiment qu'il attaque dément toute la Tradition. A quoi le P. Lami répond qu'il y a des Pères & des Auteurs Eccle- iialliques qui l'ont foutenu , &c que ceux qui l'ont combattu ne l'ont fait que par occafion , & fans avoir aflez examiné la matière. La féconde partie des reflexions du P. Lami tombent fur ;un Anonime qui s'cll avifé depuis peu de défendre par un mef- jne écrit M. Arnaud &c le P. Bouhouts , deux hommes qui ne 1654. Q^qq 246 LE JOURNAL font ni de mf^Tme caradcre ni de mefme fcnriment en beau- coup de chofcs Le P Lnmi n'a pas cru devoir employer un long difcours pour réfuter cet ouvrage , parce qu'il n'y a trou- vé (ur ce qui le touche que des lieux communs , que des ar- gumensufez par fes autres adverliires , que des railleries hors de fjifon fur les cérémonies de l'ancienne Pâque , qu'un mé- pris mal fondé des traditions Judaïques & de la dodrinc des Kabins. Au lieu donc de répondre de nouveau aux difficultez qu'il croie avoir ftiffifammcnt eclaircics ailleurs, il prie une fois pour tou:cs ceux qui lin kront l'honneur de l'attaquer dans la fuire , de ne pas l'obliger à dire toujours la mcl'me chofe. Pour les railleries , il leslailfe tomber d elles- mefmcs, bien éloigné d'en vouloir f iire de fembLblcs dans un fujct aufTi fc- rieux & aulTi grave que celui qu'il traite, il n'en eft pas de mefme du mépris que l'Apologilie témoigne des Rabins ps'ur ruiner la foi de kur témoignage. Car le P. Lami déclare ouc lors qu'on n'oppoiéra que du mépris à ce qu'il allègue des Ra- bins , il n'aura aulli que du mépris pour ceux qui i'ans raifon & fans auronté rejettent ce que les juifs difent des'chofes qu'ils fçavent par expérience. Parce que l'Apologifte dit dans la fixiéme page de fa pre- mière p.ircie , que l'Abbé Albigeois cft en elfe: M. Toinard , quune affcmbicp g-nerale du CUrge de F ance a invite far des qra- tificatiom conjider.ihiei ( au pluriel ) à publier fort Harmonie Gre- que ; & que dans les pages cinquante cinquième & cinquante- neuvième de la féconde partie , il dit encore qu'il en a tflé paye par avance ; le P. Lami s'elt douté que ce qu'il en a ouï dire , & qu'il avoir écrit lui- mefme , avoit pu induire lApo- logiite en erreur. Jefusplui hardi , dit- il dans la vint fixicme page d'une lettre à un Père de l'Oratoire , anres que M Toi- nard m cul fait connaître quil y avait plus de vint ans qu'il avait eu la mefme penfce. C e fut en l'année 168 ^ que feus i honneur de le voir en p 'ffm' à Orléans. M, Toinard n'a rien publié fur cette matière qui fait venu k ma conno'.ffancc. Dans la page 574. du traité de la Pàque , il ajoute ce qui fuie : Lors que je m'en ouvris à M. Toinard avant cette imftefjion DES se A V A N S. 14^ // me dit qu il y avait plus de vint am quii en efîoit perfuadé. Ncus ne fommes pas ni lut m mot autews de ce fenttr/ient ; comme il Paraît par ce 'iruni nombre dC auteurs qui l'ont foutenu. M ns la réfutation de M. Tomird lui donne un nottveau poids , dcpr/is que li dernière affemoUe générale du Clergé de France a excité ce fc ivant homme par la gratifie itton qii^elle lui a fite , à publier l' Harmonie Gre- que des quatre fvangeliftes qu'il promet depuis long-temps. Main- tcn mr qu'il cft informé de !a vérité de ce fait , il déclare à la marge de la foixante & Tepticme page de la fuite du traité de la Paque , qu'il a appris depuis que M. Toinard n'avou point accepté cette gratification. L'Apologiftc eclairci comme il l'eft à prefent de la vérité ne reprochera plus à M. Toinard la gratih -arion dont le Cleri é de France l'a jugé digne , &: qu'il n*a pas acceptée ; comnie l'aurcur de l'écrit intitulé pro Eumenio Pacato ad Norijîum , re- procha il y a quelque temps au P. Nons la penlion qu'il tou- choit de la liber. due de M. le Grand Duc , & le mauvais iifa- ge qu'il en faifoit : 0 fpes mumfîcentiffimorum prtnctpum Ccpe dclufai l O ficri fccuniam Airurii fapenumero m.dè coUocutuml L'Apologifte après s'cftrc objcélé dans la cinquante qua- trième page de la féconde partie , que le P. de Tournemine Jefuite , jeune Théologien d'un fort grand mérite , avoit fou- tenu le fentiment de M. Toinard touchant la Pâque , in/inuë dans la p^ge 61. que le fait n'elt pas verit.iblc. Voici fes ter- mes : Vn Jefuite vient de me dire cbez^ M. y4niffon où fâche ton le traité dr la Pà^nue du P. Hardouin , qu'il nef pas vrai que l on ait foutenu dans leur Collège le fiftcme du P. Lami ; qu'il y a du mal entendu d.ms ce que ce Père a mis là- dcffus au bout de Ton livre & que le Soutenant dont il parle ne ma pas quejcfus ChnJ} euli manoj la Pâque la veille de fa mort , mais qu il dit feulement queJefus-Chrif mourut lors que la Pkque fe célébrait parmi lesju fs. je ne vous garantis pas ce fait. Je m'en eclaircirai , ^f. Le P. Lami s'en eft eclairci lui-mefme , & pour lever tou- te forte de doute , il a mis à la fin de fes Reflexions une let- tre du P. de Tournemine qui s'explique de cette forte : Le Jefuite à qui l'on a fait dire dans la prétendue yipologie de M. Ar- naud ^ du P. Bouhours , que votre fentiment fur la dernière Cens 148 LE JOURNAL de N. S. J. C. n'a point eflè foutenu dans notre Collège de Paris , ej} apparemment un perfonna(ie feint par C Auteur. Mais ce quon lui fait dtie eft très affureinent une fiHion. J ai foutenu à Paris dans deux thefes de Théologie , le 17. Deccn^bre j6çi (^ le y/. Juillet 16^2. votre fentiment , ou plutôt celui de ces Pères voifinsdu temps des Apôtres , ^g-c. Il ijouce que dnns les mefmcs thefes il combatcic le foup- çon que le P. Hardouïii vcnoit de faire naicre fur les ouvra- ges de faint Juftin , &: qu'il y (bucint contre le fentinient de beaucoup de jefuues , qu'on doit fuivre l'opinion \^. plus pro- bable. NOUVELLES EXPERIENCES SUR LA VIPERE, où l'on verra une defcnption exucie de toutes fei parties , la fuur- ce de fun venin , fes differens effets , d* ^^-f remèdes excjuis que lei Arti]hs peuvent tirer du corps de cet animal par Mo'ife charas^ DoH'ur en Médecine , de l' Académie Royale des i^ ci en ces. Se- conde Edition , revue t^ atigmentèt par C Autcw. In 8. à Pa* ris chez Laurenc d'Houry. 1 694. L feroit inutile de parler ici des expériences contenues dans la première édition : car elles font déjà connues de tout le monde , tant de ceux qui ont lu l'ouvrage de M. Cha- ras , que de ceux qui ont aflîflé aux alîemblées qui fe font faites chez lui pendant plus de trois mois fur ce fujet. 11 fe- Toitauffi fuperflu de faire mention de ladiifertation du niefme Auteur furie venin de la vipère , pour fervir de réplique à une lertre que M. Redi Gentil- homme d' Arezzo avoit écrite à Mrs. Bourdeiot &: Morus , imprimée à Florence en l'année 1 670. dans laquelle il ptétendoit , i. Que le fuc jaune con- tenu dans les veficules des gencives de la vipère , eft le feul & véritable ficge de fon venin. %. Que ce fuc n'eft pas veni- meux ertant pris par la bouche , mais qu'il l'cft par les morfu- res que la vipère fait pendant qu'elle eft en vie , & mefme dans celles qu'on lui peut faire faire plufieursjours après qu'el- le eft morte , pourvu que le fuc jaune y intervienne. 3. Qlic je nicfme fuc tué d'une vipère vivante aulli-bien que celui d'une DES se A VANS. 149 â'une vipère morte , eft toujours venimeux s'il cft introduit dans des playcs , & s'il elt mêlé avec le fang de l'animal blef- fé , foit qu'on s'en ferve eftant liquide , ou après l'avoir deffe- ché &c mis en poudre. 4. Qu^il eue généralement toute for- te d'animaux dans les playes defquels on l'aura mtroduit. On fçait que M. Charas n'avoue de tous ces articles que l'jnno- cence du fuc jaune pris par la bouche , & qu'il s'oppofe for- mellement à tous les autres. L'obligation où M. Charas s'eft trouvé de revoir fon livre <]jns la nouvelle édition qu'on en a faite , l'a engagé à l'aug- menter du récit fuccint de deux morfures de vipère qui lui arrivèrent par hazard en 1691. au milieu de raircmblée de l'Académie Royale des Sciences , & des moyens affurez donc il fe fervit heureufcment pour fe guérir. La première morfure arriva dans raOcmblée du zo. Août, où ayant à fon ordinai- re tenu fucceiTivement dans fes doits les mâchoires ouvertes d'onze vipères, pour donner lieu aux plus curieux d'exami- ner les parties internes de la gueule de cet animal , il mépri- fa en quelque forte la douzième qui rampoit fur la table, SC la prenant trop négligemment avec des pincettes par le mi- lieu du corps , elle lança fa tefle dans le moment , & lui mor- dit le deflus du doit du milieu de la main gauche. Il fentit à J'inftant quantité de piquures prefque dans tous les endroits du corps : mais la douleur en eltoit médiocre &c tolerable. Ayant dés lors en vue de faire rétrograder les cfprits irritez introduits dans le doit par la morfure , il luça lui-mefme l'en- droit mordu j ce qu'il fit une fois feulement , fcntant le bout de fa langue couvert de fuc jaune , & de quelque fanic mê- lée dont il ne pouvoir fouftrir le goût fade. Il continua en- fuite d'exprimer avec les doits de la main droite l'endroit inordu pour en faif e fortir quelque peu de fanie , & avec elle quelque peu des efprits irritez. Mais croyant que cela ne fuf- £foit pas s'il n'arrêcoit le cours dt ces eipiits , il eut recours au mefme temps à une ftlfelle , dont il lia de trois tours affez ferrez le doit mordu prés de fa racine , environ un pouce plus haut que l'endroit de la morfure. La perfuafion où il efloit d'avoir airêré le cours du venin 1694. R r r 150 L E JO n R N A I par la ligature , l'empêcha de recourir , cottiic il l'avoir fjîc aurrefois pour d'aurrcs perfonnes mordues , à la teftc , au col, au cœur & au f.iye de la vipère legercmrnr grillez &r man- gez. M is pour ne pas pafler pour téméraire , il prit du fel volatil de vipcre, qui lui pnwoqua une fueur univerfelle La douleur qu il (entoit au doit par la ligature qu'il avoir laifTéc cinq heures entières , lui devenant de plus en plus infuppor- table , il rcfolut de l'ôtcr , & l'ayant ôtée , fes douleurs fu- rent calmées fur le ch-imp , & il tomba bien-tôt après dans un agieable fommeil Le peu de confequencc & de durée des accidens qui fuivi- ï.ent laligarure, lui tirent croire dés lors quil l'avoit pouHec 9U de là du temps neceiFiiTe , & que la ligature , ôtée mfimc au bout du le heure , auroit elle fuflSlante pour le garantir de toute», les douleurs qu'il fouftrit. Cette première morfure qui fuffifoir pour autorifer les an- ciennes expériences de M. Charas , fe ttouva le i. Septembre fuivie d'ime aucre morfure , qui dans la me me aifemblcc lui arriva à la partie latérale du doit Indice voifine du pouce , environ une ligne loin de l'ongle , par une grande & vieou- reufe vipère à qui il tenoit les mâchoires ouvertes , &: qui ayant avancé peu à peu fes grandes dens , les enfonça tout à coup dans ce doit. Après avoir exprimé & efliiyé le (ang de fon doit , il le lia de trois tours d'une petite fillelle , immédia- tement au delfus de la première articulation voifine de la mor- fure I. ne voulut point recourir ni ju fel viilatil m à aucun autre remède , perfuadé que la ligature qu'il venoit de faire fermoit la porte au venin ; & il tut paifaitcment gucri. D'oiÀ il conclut, I • Q^ la feule ligature faie au plutôt un peu plus haut que la moriure aux parties du corps où on la peut prati- quer , peut prévenir Se éloigner tous les accidens mortels qui fuivent ordinairement la morfure des vipères, z. Que Ci la morfure avoic cfté faite à la ttftc , ou en quelque autre en- droit du corps trop gros pour y pouvoir employer à propos la ligature , ou lors que ne l'ayant pas faite à temps , le venin s'cft infinué dans l'hibicudc du corps ; ces mefmes accidens peuvent cftre prévenus par le fel volatil tiré chimiquement des DES S C A V A N S. i î t vipcres dcrferhées , pris pit la bouche au poids de 14. grains dan", du vin , ou dans quelque autre liqueur cordiale , & rcï- rerée fuivant le befoin. Ce Ton: là les deux iroyens que M. Cluras donne &: qu'il croit fuffifans pour gucnr furemenc les morfures des vipcies , fans toutefois rejetter la celle , le col, le cœur ic le foye de la vipère qui a mordu , légèrement s^riU lez & mangez par ceux qui ne pourroicnt à pomt nommé a- voir du fel volatil. REPONSE A LA LETTRE DU THEOLOGIEN DE- fenfcur de lu Comédie. In \x- à Pans chez Th. Girard, i 694.. L'Auteur de cette réponie examine ce qu'un illuftre Théo- logien a écrit pour la défenfe de la comi die , & convienc avtc fui que la dodtine de faint Thomas e(t raifonnabic , puis qu'il déclare que des Comédiens qui joucroieiit d'une manière fcandaleufe , ne pourroie a tftre cxcuicz de péché. IJ s'agic entre eux de fç.ivoir fi les Comédiens d'aujourd'hui jouent fans fcandaie , & fi leurs pièces (ont des divertiHcmcns ne- cefiaires pour delalfcr un efprit ordinairement occupé à des affaires fericufes , &: fi p ir cette raifon elles peuvent eltrc mi- fes au nombre des chofcs ind.fferentcs. L'AUtcurdela répon- fe foutient que non , &: qu'eftant imitées de celles des an- ciens , elles font comme ehes accommodées à la corruption de la nature , & confpirent à faire oublier Dieu , à remplir le cœur de l'amour des créatures , à y exciter des feotimens pro- fanes , &: à donner du plaifir en rc muant les pallions j de for- te que jamais perfonne n'cft forti de la comédie plus challc ni plus modéré , & qu'il n'eit pas rare d'en fortir plus dilfipé, plus pafllonné & plus mondain. L'iUulke Théologien ayant remarqué que la comédie fe corrige & fe petfedionne, & que plus les laints Pcres s'ap- prochent de nous , pius ils s'adoiciflent à l'égard de la comé- die ; fon adverfaire lui demande en quoi la comédie fc corri- ge > fi les cœur^ ne s'y enflamment plus d'un amour impudi- que , & s'ils ne s'y enyvrcnt plus d'eux- mefmes ? Qfie l'on compare , dit-il , notre ceâtre avec celui des anciens , nos aji LEJOURNAL adeurs avec ceux de Plautc & de Tcrcnce , & on verra fi pour avoir reçu la lumière de l'Evangile, nous en fommcs devenus plus ("âges. I! examine dans la fuite de fa rcponfc ce que le dcfenfcur t aux petfonnes , je les ref- pecle , t^ principalement M- d' Avranches , que fa dignité feule doit faire refpecler , quand fon mérite d'ailleurs ne ferait pas au.ffi connu qiiil eft. Je n'en vtux quaux faujfei etudei , ^ â la mauvatjç DES SCAVANS. 259 fhiîcfophie ; tout pefl à defuvouer ce que la vérité nautorife pai. L'Auteur dit que fuivant le raifonncment que je fais à M. d'Avraoches fur l'exiilcnce de Dieu , on pourroic répondre que l'idce de Dieu tie ferait autre chofe que l'idée d'une gmer^lué ^ c'efi à dire d'une nature univerfelle , qui n'exige que dam l'entende- ment qui la concnt. On (çait bien que M. Régis peut répon- dre ce qu'il lui plaît : mais fi on veut fe donner la peine de lire mon texte & d'examiner (a rcponfe , on verra clairement qu'il n'a pas de quoi répondre. On dit pour lui , que lu volonté de Dieu efi immuable , ^ que far conséquent la certitude des fcietices , des mœurs , ^ de la reli- gion , eji plus fol: dément établie fur fon tr> mutabilité , ûuelle ne le ferait fur un prétendu ordre immuable que 'j'invente. Commenc l'cntend-on ? Tout le monde convient que c'eft un ordre im- muable -, qu'on doit , par exemple , préférer l'homme à la bê'.e. Suis-je l'iiiventcur de cet ordre ? M. Rcgis me fait trop d'honneur. Qujl prouve que Dieu ne peut pas ne vou- loir que pour un temps ce qui dépend de (x voloucé , s'il veut rendre fes principes moins lufpeéts. 11 nie que de (a doétrine , qui eft que l'objet qui eft prefent a l'efprtt lors qu'il contimple l'étendus , efi l'étendue mefme , il y ait aucun rapport au fentiment de Spinofa , & fouticnt que c'eft tomber dans les excès de cet impie , que de dire que nous voyons les corps en Dieu. Selon M Reg's, l'ctcndue qui eft prcfentc à mon efprit eft une vraye &: formelle étendue ; c'eft une étendue immen- fe , infinie. Ce font du moins les attributs qu'il donne à la matière ; & félon moi , l'étendue idéale eft infiniment diffé- rente de la matière ; c'eft l'idée générale des corps , compri- fe dans la fubftance de Dieu , infiniment infinie , idée pure- ment intelligible , immenfe , éternelle , neceffaire , immua- ble , & par tous ces attributs infiniment différente de l'éten- due matérielle qui a commencé , qui a des bornes , & qui change continuellement. Lequel de ces deux fentimens a le plus de rapport aux excès de J>pinofa ? II n'eft pas nccef- faire de pouffer plus loin la comparaifon du fentiment de M. Régis avec le mien. Mais il voudra bien remart^uer que puis 1^0 LE JOURNAL qu'on ne voit les corps que par les idées qui les reprcfcnrert , dire qu'on voit les corps en Dieu , c'eft dire que Dieu pre- fente à notre efprit les idées des corps qu'il a créez , & par confequcnt que M. Régis ne difpute pas avec trop de bonne foi. II prétend qu'il n'y a que la fucceflion des mouvemcns du corps qui puilîe produire celle des fentimens de l'amc. Se* roit ce point- là une des veritez neceflaires de M. Rcgis? Pour moi )e Philofophc tout autrement que lui. Je croi que Dieu ne peut faire que deux &■ deux ne ioient pas qua- tre ; mais que quand il lui pbira il donnera à mon amc (ans Je corps , tous les fentimens qu'elle a prelentcment avec le corps. Je ne fçai pas pourquoi après avoir voulu appuyer Ton fen- timent par l'exemple des Anges , il nous vient dire qu'«« Phi^ iefophe ne doit fai différer d'un Chrétien. Car cela n'a rul rap- port à notre difpute , fi ce n'eft que je prétens qu'un Pliilofo. phc qui eft Clireticn doit travailler a mettre la railon dans le parti de la Religion , & que M. Régis ne femble pas vouloir faire cet uf-iac de la raifon. Je ne croi pas , dit l'Auteur de l'Ecrit , que M. Régis vou- lu'] admettre une dodrine qui réduit Dieu à la cruelle neceC- iîté de faire des loix du mouvement plus compofécs pour évi"- rer les monftres , ou de foufïrir àcs monftres malgré lui pour conferver la fimplicicé de (es loix. On voit bien par là que M. Régis n'eft pas cruel. Qunnd il exprimera nettement ce qu'il veut dire , «S<: qu'il aura bicfi compris ce qu'il critique , on répondra à (es diicours. Sa Morale , dit (on défenfeur , cil f.iitc pour des hommes, & non pas pour des Anges , il lui fuffit que (a Morale foit rai- fonnablc. De quoi fe plaint-il ? On ne lui en demande pas davantage. Dés qu'il aura fait voir que fa Morale eiï fondée en raifon & en religion, on n'aura rien à lui dire. Mais qu'il fc (buvienne que c'eit ici que ie Fhtlofophe ne don p ai différer du Chrétien Il avoue qu'il a parlé •des alimens heccfTaircs à notre confer- vation,'poii^r donner on ««empledes biens raifonnables ; mais il nie DES SCAVANS. 261 il nie qu'il ait exclu du nombre des biens raifonnables la cori- noiflTance de la vérité , &: l'amour de la juflice. Ce (eroit une chofe bien étrange qu'il euft exclu en termes formels cette connoiirance & cet amour du nombre des biens raifonnables. Ce que je lui ai attribué , & qu'il ne nie pas, c'eft d'avoir fait des alimens propres à iaconfervâtion de fon corps , l'objet de fon amour propre éclairé. Il prétend que réduire les hommes à la raifon , n'eft pas éta- blir une difcipline entr'cux , &: que la difcipline qui eft main- tenant entre les hommes , fuppofe des pades & des conven- tions. Mais indépendamment de ces pades & de ces conven- tions , n'y a-t il pjs ui.e loi qui crie aux hommes : On doit é' on ne doit pai , ïifaui ô' ilne faut pas. Loi immuable & ne- celfairc , qui nous parle à tous le mefme langage ? Si M. Ré- gis admet cette loi , adieu celle du plus fort , adieu le fonde- ment de fa Morale. Comment peut-il foutenir encore , que Dieu n'a pas tou- jours recinè fur les hommes & fur les Anges ? Dieu ne regfte pas , félon M. Régis , s'il n'établit des loix judicielles & poli- tiques. Et moi je lui foutiens que Dieu règne en tout temps par le droit naturel de Créateur. La nouvelle alliance , dit il , regarde tous les hommes. Mais il n'y a que ceux qui croyent en Je fus Chrifi , ^ qui rc^on ent le Bap. me , qui en foient participans. L'auteur de la Critique , ajoute t il , y^ moque de ces prétendues alliances. M. Régis doit prouver ce qu'il avance par ces dernières paroles ; à moins de quoi je pourrois prétendre qu'il m'auroic calomnié. Le refte ne mente pas de réponfe après ce que j'ai dit dans mon livre. L'Auteur prétend en avoir recueilli les principales objections. Cela ne me paroit pas ainfi. Ré- pond-il aux preuves que j'ai données que les principes de M. Régis ébranlent les fondemens de la Morale & de la Reli- gion , confondent l'ame avec le corps , rendent la matière éternelle , font d'un amour propre qui ne tend qu'à lacon- Icrvation du corps , la règle d'une vie raifonnable j font de 1694. V u u a6i LE JOURNAL la loi du plus fort 1 1 loi fondam?ntaIe &: primitive des focie-- tcz , privent Dieu mefinc de Ton empire , ôtent à J. C. la qualité de Lcgiflateur , & qu'enfin félon lui la nature n'cft point corrompue. Ce font autant de confcquences que j'ai tirées dircdement de fes principes , & que M. Régis avoue , puis qu'il n'y répond pas. C'clt pourtant à lui à s'en julli- fier. Au refle je confens que ['honreur qu'a eu M. Requis de difpu. ter avec des perj^umei d'un grand nom , lut deffende de fe commettre avec un homme qui n'en a point. Cette reflexion ert dii^ne de lui , & il ne falloit pas qu'elle manquad plus long- temps à (à Pbilofophie. Il m'accufe d'avoir falfifié divers endroits de fon Siflème ; &: pour le prouver , il fe fert de divcrfes exprefljons qu'il tire de fes écrits , dcfquelles je ne me fuis pas Icrvi. Je ne croi pas qu'on voulult m'obliger à me fcrvir des exprcfllons de M. Ré- gis , quand je ne m'attache pas à rapporter fon texte. Il au- roit donc mieux f.iit de montrer que je n'ai ; as pris fon fens , & que jedifpute fans l'entendre. Mais je puis aflurer qu'il voit que je ne l'encens que trop , &: que je ne le lui fais que trop fcntir. ,^^r' LETTRE FRANÇOISE ET LATINE DU REVEREND Fere François Caffuro à Monfeiqrcur C Archevêque de Parti. In jf.. à Paris chez François Muguet , rue de la Harpe. 1694. LE P. C.iffaro déclare dans cette lettre, qu'il n'a pu ap- prendre qu'on le croyoit auteur d'un libelle fait en fa- veur de la comédie , fans en eftre fenfiblemcnt affligé ; qu'il n'y a aucune part , &' qu'il le dcfavoue abfolument. Il ne peut néanmoins fe difpcnfer de rcconnoitre ce qui peut avoir donné lieu de le lui attribuer, C'eft qu'il y a dix ou douze ans qu'il composa en Latin un écrit fur la Comédie , où ("ans avoir mcurcmcnt examiné la matière , il prit le parti de la ju- ftifier , de la manière qu'il fe figuroit qu'elle fe rcprefcncoïc 1 Paris, n'ea ayant jamais vu aucune. DES se A VANS. 263 II rcccnnoit que les principes & les preuves qui fe trouvent dans le libelle public fans fa participation , (bnr les mcTmes que dans Ton écrit , quoi qu'il y ait quelques endroits dilfc- rcns. Il convient qu'en comparant le libelle avec ion écrit il e(l vifible que l'un e(l tiré de l'autre prefque mot à mot , &c que par là ce qu'il avoir fait avec précipitation a donné , con- tre Ton deflein , ouverture à ce libelle. Il protefte qu'il en a un très grand regret , & qu'il n'y a rien qu'il ne ûil volon- tiers pour reparer le fcandale qui s'en clt fuivi , & qu'il ne prcvoyoit point ; qu'il ne lui a pas cfté difficile de chan- ger de fentiment , & que maintenant après avoir examiné ja chofe à fond , il eft très convaincu que lesraifons qu'on apporte d'un côte pour excufer la Comédie font toutes Fri- voles , & que celles qu'a l'Eglife au contraire , font très foli- des &: incontertables. CATALOGUS UNIVF.RSALIS P RO NONDINIS Francofuïte^ifibus -veinaUbus âc anno M. DC. A'CIIJ. De. Jignatio ommum librorum qui hifce Nundinis Vertialibui , vcl no- vi , vel emi.ndatioTei ^ auci^orss prodierunt. Jn ^. Frar.cofuni ad Mœmm. 1693. LE bruit des armes qui ont ébranlé l'Allemagne , n'a pas entièrement interrompu le commerce des livres, je man- querai ici les p!us confidcrables expofez en vente à Francfort aux deux foires de l'année dernière. Traciaiui afceticus de Opère ^ Labore , è fcUEiis prifcomm p!e- roYumque Patrum ^ Sapientum aliorum difiis (^ fentennii con/hu^ féas , in quo a^itur de o^em ^ lahoris neceUitate , qualttate , mo- do Jhmulii , ^fruciu. AuUoh Conrado Frejler Cationico Rrgu- Liri. In ^. Vlma. Joannis Ânà. Schmidii Exercitationum Hifl. Thecl. Triyc. /. de Miffu ficca. 2. De muliere in Ecole fia. ^. De cultu Evangelio- rum. m 8 .Jena. Novum Te(îamentum Gractim , in quo non tanium felcUi verR- culi ipoo. continentes omnes voces novi Tejiamenti , aficricii no tan- ié4 I^E JOURNAL tur , feâ etiam omnes é- f^'guU voces feniel velfapm occurrevtes , fecttliaribus in textufignii difiinguuntur, ^ in mar^ine Latine tranf- fermtur. In 8. Francofurti. Phil. Jo. Tileman D. Schenck^Commentarius in Eptflolamjuda. Cum appendice de Aj^tpis veterum Chnfiianorum. Recenjto nova , cui accefjcrunt differtationes dutc de communione percqrma , (^ de oblatione fine communione. in 8. "^^ cffuri^ ^ Marpurgi. Conjpclhi Inftitutionurr.Juris publia , in Imp. Rom. Germ. ac- curuta meihodo ^ concmnata hrevtlate en ipfis fontibus, ^c. In ^. Francofuui. VocabuLirium majus Zatino Germanicum , ^c. in 8. France- furti. Henrici Mtihlii differtatio de origine lir.guarum variarum , (lir- peque ac maire Gra:ca ^ Laiina ^ Germanica , Hibraa. in 8. Ktlon. Burcatdi Golth. Struvii Bibliotheca Numifmatum antiquontm^ in qua continentur , /. /iuUoiei qui de Numif atibus fcripferunt, 2. Familia ^ Imperatores , quorum numifmata ex'.ftunt, j. No- mina ^ materite Numifmatum. ^. Frequentiores Numtfmatum chara&eres ^ infcriptiones. /. Nota in Num.finatibm occurrentes. in 8. Jena. Joan. Budai de origine Cardinalitia diqrittatii. in 12. Jena:. Smopfis Criticorum. in ^. Francofurti. Richardii Simonii Exercitatio de ceremoniisjudaicis cum difci- flina Ecclefiafiica coUatis y ^c. in 8. Francof. Polycarpi Tenz^lii felefia Numifmata , aurea , afgcntea , ^ 4erea. in ^. Jena. DiBionnaire François de P. Richelet , revu ^ augmente, in ^. i Genève. A PARIS, Chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à l'Image de (aint Jean Baptifte. yivec fr'ivi/ege du Roy XXIII. 1^5- LE JOURNAL DES se AVANS. Du LuNDY 14. Juin M. D C. XCIV. LA CONNOISSANCE DU MONDE , OU L'ART DE bien élever la jeuneffe pour les divcn e/iats de la vie. In 12. à Pans chez Jean Guignard , à l'entrée de la Grand'Salle du Palais. 1694. UiV homme élevé dans les fciences par les bonnes règles ayant efté confulté par un àts plus grans Seigneurs de la Cour fur l'éducation de Ton fils , lui fit un long difcours fur la metode la plus jufte & la plus aifée de former l'elpric des jeu- nes gens. Ce Seigneur fut fi fatisfait de ce qu'il avoit enten- du , qu'il le pria de le lui donner par écrit. 11 le fit , & à pei^ ne l'eut il fait que fon difcours fut lia par plufieurs pcrfonnes qui le preiferent de 1 imprimer. Il eut beau s'en défendre; il falut le leur promettre. Ayant depuis fait reflexion fur fon engagement , & reconnu qu'un fi vafte fujet ne pouvoit eftre traité en peu de paroles fans perdre beaucoup de fa for- ce , il le partagea en plufieurs lettres , dont il donnera une tous les mois. Il traitera dans la première des principes de la bonne edu* cjtion , qui font les lumières de la railon univerfelle qui doi* vj;nt fervir à éclairer l'efpric &: à fortifier le cœur contre les I 694. X X X i&G LEJOURNAL préventions & les injulliccs ; les prcniicres notions de l'inteî- ligencc , qui eleve le jugement au dellus des prccepres ordi- naircs , qui em^>êchc l'ame d'cflre feduite par les maximes du temps , qui aftcrmit dans la connoiirance de la Reli- gion , qui apprend la véritable morale , &: rend propre à la focieté civile. La féconde fera fur le choix du Gouverneur, & fur les qualitez qu'il doit avoir. La préface n'explique pas les fnjets qui feront trairez dans la (uitc. La lettre du mois courant avertira de ce dont il fera parlé dans celle qui viendra immé- diatement après. On dira feulement ici que l'Auteur après avoir donné les premiers préceptes de leducation , parcou- rera tous les eltacs , commencera par l'Eglife , continuera par la Cour , par i'Epée , &: par la Robe , & finira par le Com- merce. Il confiderera dans TEglife les trois différentes clafles qui la compofent , les bcnefices à charge d'ame , les bénéfices fîmples , & le Cloître. Il regardera la Cour en elle-mt fme , par fcs maximes , & par fcs vues ; enfuite par trois fortes de personnes qui y font attachées , les Officiers ou Miniftres du Prince , les Officiers domeftiques , & ceux de l'Armée. Il Éiudra pour cela entrer dans un grand détail des ncgoci.itions, de la guerre , & des finances , & faire une defcripnon parti» culiere de tous les Edats de l'Europe , de leurs loix , de leurs coutumes , &L de leurs intérêts. NOUVELLES REFLEXIONS, OU SENTENCES ET Mdximei morales ^ politiques ^ dedièes à Mud.de Muirucnon fur M. Vernw^e Docteur en Théologie , Chanoine de l' Eglife Royale de faint Qu_ ntin , ^c. T'O-Jien.e Edition , auimentce d'un tiers , & de trois petits train \mordUx fur Lt brcveré de la vie , les maLdies , ^ lu mort. Jn 12. à Paris chez Antoine Lambin, rue faint Jaques. 1694. JE ne repérerai rien ici de ce que je dis de la première édi- tion de ces Rtflexions dans le Journal du y. Juin lépo. ni de Jafcconde dans le Journal du 7. Mai de l'année fuivantc. Je DES S C A V AN S. 167 remarquerai feulement que cette ttôilîéme édition cft aucr mencée d'un tiers , & que les augmentations ("ont de Jeux fortes. Les unes (ont courtes , & Ce trouvent répandues dans touc le livre felan l'ordre des matières. Les iuures i'oiM un pcj pUis étendues , & font trois pctis traitez mis à la fin. ■ Le premier conlille à faire voir combien la plus longue vie ei} courte, fur tout quand elle e(l comparée à l'eternué , &: à déplorer l'aveuglement de la plupart des hommes , qui la pad'enc en de vams amufemens , ou en des travaux inutiles. Le (econd fait regarder les maladies comme des cifets ou de la jiiftice de Dieu qui punit par là le mauvais ufage de la finté , ou de ù mifencorde qui prive des douceurs de la vie, & dccache des faux plailïrs. Le dernier apprend à confiderer la mort comme fajnte par rapport à Notre Seigneur qui cft mort pour far.ûificr nos fouf- frances ; & comme aimable dans Ces effets , puis qu'elle nous délivre de la concupifcencc , & qu'elle met fin au pcché. LE PASTORAL DE SAINT GREGOIRE LE GRAND ^« miniflere ^ des devoin des P^tficurs. Trjdufiion nouvelle. Par P. ^4n'o:ne de Marfilly. In 12, à Paris chez André Pra- lard , rue (aint jaques. 1694. C'EfI ici le premier ouvrage que faint Grégoire comnofa après qu'il eut efté ordonné. Il fut auffi-tôt traduit en Grec par Anaftafe Patriarche d'Antioche , afin qu'il pull (cr- vit à l'inltrudion des Eglifes d'Orient. Celles d'Occident en ont toujours fait une eihme particulière. Les Evêqucs de France le confidererent comme leur règle , & il leur cfloic mis entre les mains lots qu'ils eftoient ordonnez. Il elt divifé en quatre parties. Dans la première il eft traité des difpolîtions au Miniflere Ecclelïaflique ; & ceux qui les recherchent par ambition , & ceux qui les refufent avec trop d'opiniâtreté , y font égale- ment blâmez. Les qualicez que doit avoir un Pafteur , font reprefentées dans la féconde. Dans la troifiéme font contenues les inftru- 2<58 LETOURNAL dions qu'il doit donner a. Ces peuples , avec la manière de les proporcionner aux difpoficions & aux beibins de ceux à qui elles font données. La quatrième n'eft qu'un retour que les Pafteurs doivent faire fur eux-mefmes pour s'abaiffer devant Dieu , & pour reconnoitre que ce qu'ils ont pu faire de bien en s'aquittant de leurs emplois , vient uniquement de fa mifericorde. LETTRE DE M. L'ABBE' BOISOT A M^iàemoifcUe de Scudery. 'Oui me faites trop d'honneur, Mademoifelle , de me demander mon fenriment fur le traité de l'Eucariftie. Ma voix mérite t elle d'eftre comptée ? &: les approbations de tant de Prclats lUuflrcs ne vous répondent elles pas de l'appl.'.udillcment public ? Mais apparemment vous voulez que j'encre un peu plus dans le détail , &: que je juftifie les louanges qu'ils donnent à cet ouvrage. Cela ne fera pas diffi- cile. Je n'ai qu'à faire un extrait de l'ouvrage meftne. On verra qu'il mente encore plus de louanges qu'ils ne lui en ont donné. Mais comment faire l'extrait d'un livre où tout eft lié &.' fe foutient d'une manière , qu'il ne femble pas qu'on en puiffe ôter un feul mot ? Tâchons toutefois de vous obeïr. Lors que feu M. Peliiïbn publia le dtflTein de fon traité de l'Eucariftie dans le premier volume de fes Reflexions fur la Religion , il n'y eut perfonne qui n'en trouvaft le plan très Jurte , & qui n'euft de l'impatience que ce traité parull- L'im- portance de la matière , les difficultez dont on l'avoit emba- raflee au (kcle paile , les longues &: fameufes contcftations qui ont elle de nos jours fur ce fujet ; tout donnoit lieu de croire que ce feroit le chef-d'œuvre de M. Pelilfon ; & l'on n'a point elle trompé en cette elperancc. Jamais il n'a rien écrit avec tant de foin , avec tant de force , avec tanr de delica- teflTe. Mais à la clarté répandue dans tout l'ouvrage, on diroic qu'il lui a efté donné de pcncrrer au travers de la lumière in- accelfible, où ce Dieu caché dans l'Eucariftie fait fa demeure. Au lieu d'étendre cette importante matière, comme o\\ fait DES se AV AN S. ^ 1^9 ■fait otdinairemenr , M. Pelliil'on a jugé plus à propos de Ja reilcrrer. II dit que la qucflion de la prelence réelle , qui dé- cide & entraîne toiucs les autres , a trais parties , qui font le Tujet de ttois loi. gués difputcs , & qu'en chacune de ces dif- putes il y a un moyen gênerai de parvenir à la decifion , &c qu'il en appelle la Clef. La première di^ure eft touchant la vrai femblance , poffi- bilité ou imp(inibilii:é de la ptefence réelle ; & la clef de cet- te piemiere difpucc eli , que par les principes & les fentimens communs à tous les Chrétiens , un vrai- femblable ordinaire en cette matière n'eft point vrai femblable. Il faut chercher un vrai-fcmblable merveilleux. Or le merveilleux de Calvin, eft veritablenient impoffible , & en tout cas fans comparai- fon plus difficile à comprendre &r à croire , que celui de l'E- glifc , qui d'un au:re côté n'eft point tel que la plupart de nos frères fcparez le pcnfenr. La féconde difpute regarde les paffages de l'Ecriture Main- te. La clef de cette difpute eft , qu'en vain on allègue des exemples pour montrer que les paroles de Notre Seigneur , •Ceci ei} mon Corps , fe pourroient prendre au fens figuré. Car dans le lantraçje humain les circonftances des chofes détermi- nentle fens des paroles; & tous les Chrétiens convenant qu'il s'.igit ici d'une chofe tout à fait au deftus de la nature , d'une des plus grandes merveilles , & d'un des plus grans miftercs de la Religion Chrétienne ; toute l'Eghfe depuis pluficurs fie» cles , comme on ne le fçauroit nier , ellant en puifeifion de croire la prcfencc réelle , quand on eft venu annoncer un dog- me contraire ; enfin dans le cas où nous fommes , & cians les circonftances des paroles de Notre Seigneur , nos frères fe- parez n'ont dû &: ne dtMvent en taçon du monde prendre ces paroles au fens figuré, & par confequent ils ne le peuvent : car ce qui eft contraire au devoir & au bon fens , s'appelle im- ,po(îib!e entre les gens qui raifonncnt. La troifiéme difpute eft touchant les partages &: l'autorité des Pères. La clef de cette d;fpute efl , que la difHcuIcé n'eft |)as à trouver des paft'ages pour le dogme Catolique. Tout en *cft plein. Elle confifte en quelque petit nombre de paifages 1694. Y y y Î70 LE JOURNAL qu'on oppofc comme contraires. Mais il y a un fait dont on convient de part &: d'autre, qui peut tout accorder & tout dccidcr. C'ell que devant les Infidèles , devant ceux qui n'cftoient pas encore baptifez , les Pcres n'ont point entière- ment expliqué la doLtrinc de l'Eglife , & fe font contentez de dire quelque petite patrie de la venté ; l'ont couverte mefnic & enveloppée comme d'un voile que les Etrangers ne pullenc percer , les laill'anc errer fur cela dans leurs propres penfécs. Ce fait , qui eft très confiant , eftant pofé , les pafl'ages qui paroiflent contraires les uns aux autre s , quoi qu'ils ne le foicnc pas en effet , ne doivent plus nous embarafler. Il n'cft plus queftion d'entrer daus le détail de chacun. Il n'y a qu'à di- ftinguer quels font ceux de ces pafTagcs où la vérité Q^l toute entière ; quels font ceux où elle n'dt qu'en partie. Nous a- vons pour cela deux moyens très naturels ; l'un gênerai, qui eft la comparaifon de ces palFages en leur nombre & en leur qualité ; l'autre parciculier , qui font quatre grandes & lon- gues inftru«fVions données à ceux qu'on venoit d'initier , ou qu'on alloïc initier aux Mifteres , lefquelks la providence nous a confervées. Le bon fens ne nous permet pas de douter que Jà tous les voiles ne foient levez & tous les rideaux tirez ; & que l'Eglife , qui y parle elle mefme aux nouveaux Fidèles precifemcnt comme nous parlons à nos frères féparez , jus- qu'à prévenir au quatrième fiecle les objedions qu'ils nous font au dix fepcicme , ne crufl alors ce que nous croyons aujour- d'hui. M. Pcllilfon ajoute que ces trois moyens généraux qu'il ap- pelle Clefs , fc donnent un grand fecours l'un a l'autre. Car le merveilleux qu'il faut ncccffairement établir par le princi- pe commun de tous les Chrétiens , explique les paroles de N. Seigneur , ou pour mieux dire , fait voir qu'il ne faut point les expliquer , mais les prendre en leur fens naturel. Ces mef. mes paroles 6c tous les autres paflages de l'Ecriture fainte, pris enfemble , ne fe peuvent jamais bien entendre que par le merveilleux de l'Eglife. Ce merveilleux & ces pafljges en- femble ne lailfent aucune difficulté fur la quellion comment i.ifau,c ciuendrc ces palfajjei de l'Ecriwre , Se ce merveilleux. DES se A VANS. 171 dont tous les Chrétiens conviennent : & nulle opinion enfin, hors le dogme Catolique , ne peut accorder & lier cnfcmble les confequences neceiîaires du principe commun à tous les Chrétiens , qu'il y a un merveilleux furnaturcl en ce Mifle- re, & les confequences oppofécs en apparence qui Ce peu- vent tirer des partages de TEcricure &: des Pères. Apres avoir ainfi propofé fon dertein en gênerai , M. Pcl- Jiflbn defcend dans le détail des trois queftions. Sur !a première touchant la vrai-femblance , pofllbilité ou impolîîbilicé de la prefence réelle , il dit que ce fera toujours le premier mouvement d'un cœur bien chrccien , de ne point douter de la toute puiiî'ance de Dieu. Nos frères feparcz di- ront eux- melmes qu'il n'efl: queftion que de Ça volonté ; qu'il l'a pij s'il l'a voulu. Mais le mouvement de l'homme animal fuccedc bientôr à celui de l'homme chrétien. Dieu n'a pu le vouloir , diront- ils un moment après , non plus que vouloir mentir , ou mourir , ou avoir quelque autre défaut , ou faire que ce qui eft nefoit point, ou fe contredire foi mcfme. Ainfi la quelUon n'eft changée qu'en paroles. 11 s'agit toujours de fçavoir fi la chofe eft impoflible. 11 remarque enfuire qu'il y a une diflTerence eflcntielle en- tre les chimères qu'ils nous oppofent , où il faudroit que Dieu changeait fa propre nature, ce qui ne peut j^imais clîre , &: entre les merveilles dont ils difputent, où il fuffic qu'il lui plai- fe de changer l'ordre qu'il a établi dans la nature des chofes qu'il a faites lui-mefme ; ce qui doit eftre éternellement en fa main & en fbn pouvoir. Mais comme une imagination prévenue de l'impcffibilité n'écoute plus rien , ils demande- ront toujours qu'on leur montre qu'il l'a voulu ; que cette cx- preflîon , Ceci eft mon Corps , eft claire à la lettre : mais ils s'i- maginent qu'il eft clair qu'on ne la doit pas prendre à la lettre, & qu'ainfi il faut avoir recours au fens figuré. Il conclut que cette impoffibilité prétendue eft la racine de l'erreur, & qu'il feroit inutile d'en abattre les branches ,tanc que le tronc en repouiferoit de nouvelles. Pour couper ces erreurs par la racine , il explique en peu de mots les quatre fentimens qui partagent aujourd'hui en g^e- 171 LE JOURNAL neral le monde Chrétien fur le fujec de l'Eucariftie. L'Eglifc Cacolique croie toujours , comme elle croyoic a- vant CCS malheureufes feparations , une prefence réelle ôc u- ne manducation réelle du corps de N. Seigneur en ce Sacre- ment augulle , avec un changemenc furnaturel & miracu- leux , non pas en ce qui paroit &: qui tonibc fous les fens , qui demeure toujours le mcfme ; mais en ce qui n'ell pas leur ob- jet, &: qui ne paroi: p.is , ou qui c(t l'objet de l'entendemenc icul , &quc !cs Philolophes nomment fubftance. La fublbn- cedu pain n'y eftplus; c'cfl la fubftance du corps de N. Sei- gneur. Ce qu'on appel'eTran'ubltantiation. Les Luthériens qui fe font fcparez les premicis de l'EglirCj ■ croyent une prefence réelle &: une manducation réelle du •Corps de Notre Seigneur. Mais ils ne croyent pas , ou du moins ils ne troiivent pas necellaire de croire ce changement miraculeux en la fubftance. Ils difentquec'eft celle du pain, & celle du corps tout enfembic ; & néanmoins Luther alaif. ifé à chacun la liberté d'en croire ce qu'il voudroit. Selon les Zuingliens ou Sacramentaircs , il n'y a ni change- ment en la fubftance du pain , ni prefence réél!e de corps, ni manducation réelle. Le facrement n'eft que facrement , que ;fimple figure , reprefentation , commémoration ; mais eftant reçu avec foi , il nous applique les mérites & la paflîon de TVotre Seigneur , par la vertu & l'opération du Saint Efpric fur nos âmes. Ils difent bien quelquefois que Jefus Chrift nous eft véritablement donné en ce facrement ; qu'il y ell mangé d'une manducation fpirituclie : mais ils expliquent ces termes magnifiques , en ajoutant que cette manducation fpi- rituelle fe fait aufli hors le facrement dans tous les aclcs de foi , &: en quelque lieu que ce foit. Calvin & ceux qui le fuivenr , ne rcconnoilTent nulle pre- fence réelle , mais ils reconnoift'ent une manducation réelle & très réelle de la fubftance du Corps. C'cft ainfi qu'ils nom- ment l'opération que fait fur nos âmes, non le faint Efptic feulement , ( car c'eft une opinion que Calvin rejette ) mais Aiiffi la vertu vivifiante attachée à la fubdancc du Corps de Notre DES se A VANS. 273 Notre Seigneur , & qui ne s'en peut jamais fcparcr ; fans tou- tefois reconnoitre qu'il y ait rien de changé au pain , ni meC- nie que cette vertu vivifiante du Corps de Notre Seigneur foir attachée au fignc vifible , ou y demeure attachée. Ec cette operatiou fe fait bien de notre côté , à ce ou'ils difent , par la foi comme par un inllrument , mais ne coiififte pas en Ja feule foi. Voila les quatre créances dont il faut examiner la vrai- femblance, poflîbilicé ou iropofllbilité, fans s'arrêter aux au- tres créances qui peuvent naître de celles ci en les mêlant de différentes aianiercs , ni les opinions de quelques particu- Jiers , comme de feu M. Claude , de Mcftrezar, d'une troupe d ludctermincz , tSc' d autres Ecrivains, qui font des projets pour réunir, s'il cftoit polTible, toutes les fcdes & toutes les opinions , dans le dcfirde fauver les hommes par la variété de leurs caprices, au lieu que Dieu les veut (àuver par l'unité d'u- ne mefme foi. Des trois opinions oppofées à la foi de l'Eglife , on n'a point à combattre la première fur l'impoflïbilicé. Les Luthériens ne font point cette objcdion. Ils croyent eux- mcfmes la pre- fcnce réelle. L'opinion de Zuingle tombe fi l'on reçoit ce principe com- mun , qu'on a appelle clef, qu'en cette matière un vrai-fem- blable ordinaire n'eft pas vrai-femblable , &: qu'il faut un vrai* femblable merveilleux. M. Pelliflbn prouve excellemment ce principe. Il fait voir par les lumières générales de la Religion Chrétienne, par les exprefi[îons des Pères , par la voix de tous les peuples fidèles, par les liturgies , qu'il faut que le Chriftianifme ne foit qu'un efprit d'erreur , ou qu'il y ait dans ce pain confacré quelque chofe de plus grand , de plus augufte , de plus merveilleux, qu'en tout ce qu'on fait pouf fe préparer à le confacrec ou à le recevoir. Il confirme par les paroles de faint Paul ce que tous les fidèles ont cru par toute la terre , d'une gran^ de ô£ très grande merveille en l'Eucariftie -, & il finit cet arti- cle en difint , que comme il feroic très pollible «&: très vrai- I 694. Z 2 Z 274 LEJOURNAL feniblablc , au fctis naturel , que Dieu ne Ce fuft point fait homme , mais que rien n'elt moins pûflTible ni moins vrai- feniblable en fuppofant la Religion Chrétienne ; il feroit très pofllble & trcs vrai (emblable , au fens naturel , qu'il n'y euft aucune merveille en l'Eucariftie , rien que du pain &: du vin, & une rcprefenration du corps &: du lang ; mais que rien n'efh moins pollîble ni moins vrai-femblable en fuppofant que nous fommes Chrétiens. Il p.;iîc enluite à examiner le mei vcilleux de Calvin. Mais auparavant il fait trois obfervations qui font necelfaires pour bien juger de la poflîbilité ou impoffibilité en chofes merveii- leufes. La première , que croire n'eft pas tmuginer -, &c par confe- quenc aux chofci divines &C en tous les mifleres de la Reli- gion , fi nous ne voulons nous tromper , il ne faut point ap- pellcr notre imagination au confeil. Elles paflent fa portée , auffi-bien que celle de nos fens. La féconde , que croire n'eft pas comprendre. C'cft plutôt ne pas comprendre , mais recevoir par une autorité fuperieu- re ce que l'on ne comprend pas , & fe perfuader feulement qu'il eft polTîble , tant par cette autorité fupcrieure qui nous l'ordonne , que par la comparaifon de cette merveille avec d'autres , ou par la proportion de la merveille avec fon aureur, C'eft pourquoi nous aurions tort , fi nous contentant fur les autres mifteres d'une lumière médiocre & imparfaite pour croire qu'ils font poffibles , nous en demandions une entière &: parfaite fur celui-ci. La troifiéme, que Dieu peut faire tout ce qu'il peut vouloir, car vouloir & fcire (ont en lui la mefme chofe. Comme il a tout créé , il peut tout anéantir & tout changer. Il eft vrai feulement qu'il ne fçauroit fe changer lui- mefme ; ce qui ne fcroit pas un pouvoir , mais une iiîipuilfance & une foibleflfe. Pouvoir mourir, mentir , fe contredire , vouloir & ne vouloir pas en même temps une même chofe, ne (ont pas des poflibi. litcz, mais des défauts dont fa pertediion infinie n'eft pas capa- ble. I! s'entiiic de là qu'il nous eft toujours très difficile de con- DES SCAVANS. 275 noitre cette forte d'impofTibilité , qui feroit une contradidion formelle dans la volonté de Dieu , c'eft à dire qu'il ne peut vouloir que cela ne foie pas , parce que cela cft de rclFence d'une chofe qu'il veoc ; car il faudroic que nous connufllons toute redence des chofes , que nous ne connoiifons prefquc jamais qu'en partie. Après ces trois obfcrvations , M. Pelliflon fait voir que l'o- pinion de Calvm prifc à la lettre, elt abfolumcnt impofllble: car elic coniîftc à pofcr une manducacion réelle du corps, fans aucune prcfcnce réelle du corps ; ce qui eft une contradidion formelle , &: ne peut jamais etlre fans que Dieu veuille &c ne veuille pas la melme chofe en mefme temps. Que cette opinion mefme eflant adoucie autant qu'jl Ce peut , eft encore impoffible. Car par la manducation réelle Calvin entcndoit , comme l'entendent ceux qui le fuivenc , qu'il fe faifoit fur nos âmes je ne fçai quelle opération vcrica- ble &: réelle de la chair de Notre Seigneur abfentc , avec les mefmes etfets que les alimens quand on les mange , font fur nos corps. 11 lui avoir plu d'appeller cette opération, man- ducation , pour s'accommoder avec les Luthériens & les Zuin- gliens , quoi qu'en trompant les deux partis , il entendift au- tre chofe que ni l'un ni l'autre ; c'eft à dire que la venu vivi» fiante aducllement 6c phifiquement attachée à la chair de N. Seigneur , &c qui n'en pouvoir jamais eftre feparée , vcnoit toutefois aclucllement & phifiquemenc jufqu'à nous , Gns que la chair y vinft , par un miracle fort au defl'us de la natu- re , & qu'il nommoit incroyable. Calvin pour faire conce- voir que cela eftoit poffible , fc fecvoit de la comparaifon du Soleil qui fans eftre en terre , ne laifte pas d'y produire tant d'admirables eft'ets. Mais M Peliffon montre que cette corn- paraifon n'eft pas )ufte , parce que félon Calvin , la chair de Notre Seigneur n'opère fur nos amcs ni par aucune eiïufioii de fa fubftance , ni par aucune impreffion ou fur elles , ou fur le Sacrement , ou fur tout ce qui elt entre le ciel & nous ; & que l'opinion de Calvin , quoi qu'ainfi adoucie , n'enferme pas moins une contradidion formelle , puis que cette vertu • 76 LE JOURNAL vivifiante phifiqucment attachée à la chair de Notre Seigneur, n'en peut jamais eftre feparéc ; &: néanmoins elle vient à nous fans cette chair. Enfin que l'opinion de Calvin tombe dans les mcfraes in- convenicns qu'il oppofe à la nôtre : mais ces inconveniens font bien plus grans pour lui que pour nous ; paice qu'il ne prend aucun des moyens que nous prenons pour expliquer ceccc merveille. Car fi la chair de N. Seigneur nous com- munique véritablement la vertu vivifiante , qui elt infepara- blcment attachée à fa fubftance , il faut ou que cette vertu vienne à nous avec fa fubftance , &: alors ce fera une fubftan- ce en plufieurs lieux ; ou qu'elle vienne à nous fans fa fub- ftance , & alors ce fera un accident fans aucun fujet , mais d'une manière très chimérique , bien différente de la maniè- re donc l'Eglife explique & foutient ce qu'il y a de merveil- leux dans fon dogme. C'cft fur ces raifons que feu M. Claude avoijoic franche» ment à fes amis que l'opinion de Calvin ne pouvoir fe défen- dre j & c'eft à nos frères feparez à voir fi l'on peut eftre de la religion de Calvin , fans croire comme Calvin fur ce grand article , &:jurerfut fa Confeifionde Foi fans l'entendre com- me lui. *\j <"">;■ f v' « '^ I 45 »>.,.* LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Parochui , ^ AntiqtM Statuta Ecclejta Lu^dunenjis , a Fran-' cifco Cardinali à Turnone an. jf6o. fromulytia. Editio nova , menais expurgata. Jn 4, Luyiuni. &C fe trouve à Paris chez Antoine Dezalicr. 1 6 94. Zudovici Magni Galliarum Régis panegyr'tcus , à D. Joanne Baptifia Pouhat , in Senatu Vefontionenfi ConfiUario. In ^. Ve- fonttone. 1694. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à l'Image de faine Jean Bapciftc. Avec Privilège du Roi. 1 694. XXIV. LE JOURNAL DES s Ç A V A N ; Du L u N D Y 2 1. Juin M. D C. X C I V. 477 SUITE DE LA LETTRE DE M. L'ABBE' BOISOT à Mademoip.Ue de Scudery. L re^^e à examiner l'opinion de l'Eglife Catolique. M. Pe- _ liflon remarque d'abord , que personne ne nous peut op>. pofer rimpollîbiliré fur l'Eucaridie ; ni Lucher qui croit une merveille aulli grande que nous j ni Zuingle , donc l'opinion n'eft ni poffible ni vraifemblable , en (uppofant la Religion Chrétienne ; ni Calvin , dont le merveilleux fans autorité, ji'a pas moins d'inconvenicns que le nôtre , autonfe par le coiifcntement de tant de peuples & de tant de liecles. On pourroic en demeurer là. Mais on cherche à perfuader nos frères fcparez , &: à leur faire connoitre que notre mer- veille , fi elle ne fc peut entièrement comprendre , non plus que les autres grans mirtetes de la Religion , cil au moins de celles que la raifon éclairée par la foi , peut &: doit recevoir. Mais pour cela il faut Uur ôter trois imaginations qui les blef- fent principalement fur le dogme Catolique : le mot de Tranfubltantiacion , qu'ils regardent comme un nom nou- veau , &: comme un nouvel article de foi , qui n'eftoit point ^u .pouvoir des hommes , mais de Dieu fcui : le changement 4694.. A a a a 178 LE J O U R N A L de fub.lance , qui renvcrfc , difent ils , le tcmoignaiTc Je r.os fcns , &: par confequenc ôcc toute ceicicude dans les cUo- fcs humaines ; &: la prelcnce d'une mefmc fubftance en plu- (ieurs Hcux , qui leur fcmblc faire qu'une Tubllance u'eft plus une , mais plulicurs. M, Pcliffon examine ces trois chofes. Il die que ce que l'Eglife croit aujourd'hui de l'Eucanftic , eft la mefmc chofc que ce qu'elle en croyoit au temps de faint Irenée. Il y a en cet aui^ulle Sacrement quelque chofe de tcrreftre &: quelque choCe de cclefle. Ce qu'il y a de ccrte:tre, eft ce qui tombe fous nos fens. Ce qu'il y a de celtlle , cft ce que la feule foi y découvre , mais qui ne laifle pas d'y dire au(fi réelU mène que ce que nos l'eus y ont trouvé. M is depuis que l'incre- dulité humaine a voulu entendre les exprelfions générales d'une autre manière qu'on ne ics enrendoit naturtl'ement ^ depuis qu on a imaginé une prefence réelle , qui ne fbft pour- tant qu en figuie , qu'en vertu, qu'en efficace , &: une ^-^er- tu ou effi^ ce , non pas attachée au bacrement , mais à notre feule pcnfée, il a elle necelfaire d'éloigner toutes ces fauiles explications par des termes lî propres , qu'ils ne fuiTent capra- bles d'aucune équivoque. Ce qui n'eft pas faire un nouvel article de foi , mais défendre la foi ancienne contre les fubti- litez nouvelles , fans nous impofer rien à croire que ce qu'on croyoit avant que ces (ubcilitcz nouvelles eulfent paru. Ainfî le Concile de Nicée fe fervic du mot de Confubftanciel. Ain- fi le quatrième Conci'e de Latran a expliqué la foi de l'Eglife par le mot deTranfubltantiation , après Edienne d'Autun :V: Pierre de Blois , qui s'en eftoient fervi dans le fiecle précè- dent. Mais (1 ces termes précis ont rendu quelque fervice à la Religion , en faifant entendre nettenient aux perfonncs in- telligentes quels en eftoient les dogmes , ils ont produit par accident un cflfet prefque contraire pour les perfonnes du peu- ple qui ne les entendent pas. Car elles fe font fur ces nou- veaux termes d'autres équivoques , parce qu'elles prennent toujours au fens ordinaire du . ilcours commun , ce qu'il f .ut prendre au fens précis &ù propre des Philofophcs. SublUace DES SCAVANS. 2^9 Gorporcllc , au lens ordinaire du difcours conimun , cft ce qu'on voie , ce qu'on touche. Au fens précis & propre des Pliilofoplies , fubftance corporelle ell quelque choie qu'on ne vi it pouic & qu'on ne touche point , mais que l'on connoic &C que l'on entend , parce qu'elle elt ordinairement environ- née bc revêtue de ce qu'on voit & de ce qu'on touche , qu'on appelle des jccidens. L'efprit du fimplc s'embarrallc là de- dans ; & quand on lui dit : La (ubllance du pain n'y ei\ plus , donriant tnujouis à ce terme le (eus ordinaire auquel il efioic accoutumé , il ("e pcrluade qu'on lui ordonne de croire que ce qui lui paroic ne lui paroit pas. Mais c'cft à quoi l'Lglifc n'a jamais penfé. Voici donc à quoi fe réduit ce qui effraye dans la tranfub- ftantiition. En cet objet qu'on appelle communément pain, pris tout enfemble , il y avoit je ne fçai quoi d'invifible &; d'impalpable qui failbit Ton eftre , & qui foucenoit tout le rcllc, comme ur-e c\ei cachée dans la voûte fans y paroitre. l.a nicfme main qui avoir tait tout raiicmblage", a ôré cette clef de pierre, pour y mettre une clet'd'or ou dcpierrerie, aufli cachée que la première. L'invifible & l'impalpable du pain n'y efl p'us ; mais un autre invifible &: impalpable , infi- niment plus précieux , y cil en fa place. La merveille elt grande. Mais dés qu'on réduit ce miracle à un invifible ôré, & un inviiîbie mis en d place , il eft impodiblc que cela foie impoffible à celui qui peut tout , qui avoit tout fait, tant !e vilîble que l'invihble , qui avoit lié l'un à l'autre , &: pouvait aufTî facilement ne les pas lier , ou les délier l'un d'avec l'au- tre quand il lui plairoit. Il ne faut point ici fe recrier fur le témoignage des fens. Il n'en eft point queUion. On voit , on touche comme aupara- vant. L'Eglife ne dit point auflTi qu'il y ait rien de changé en ce qui fe voit & ce qui fe touche. Les fens ne trompent pas : mais la raifon fe trompe quand elle dit : Rien n'eji chunqé au dehors. Donc il eft abfolumcnt impolTiblc que rien foit chau- gt au dedans. Mais la fubftancc corporelle ne fe peut feparer de Çç.% acci- dens, Qui^voiis l'a dit \ Efticz-vous duconfeil de Dieu quand iSo LE JOURNAL il tiroit du ncanc les accidcns & les fubftances ? On n'a ja- mais rien vu de fcmblable. Mais avoic-on vu que l'eau com- mune devinlt en un inftant d'excclienc vin , ou qu'un feul pain en dcvinll mille, ou tant d'autres merveilles dont nos frères feparez ne doutent non plus que nous ; non pas pour les trouver vrai-fcmblables par elles mefmcs , mais parce qu'une autorité fupcrieure leur pcrkiade qu'elles font vravcs î Ici nous avons cette autorité fupcrieure , fi on l'eut jimais. Dieu parle -Fort clairement , Ceci eji mon Corps ; & l'Egife n'a jamais cherché d'autre fens plus oblcur à ces paroles , puis qu'en tous les temps elle nous a dit : Ce rCift plm dupcun, quoi qit^i puïo.fje toujours du pMti : c cft le Corps du Sei^eur ^ quoi qu'il ne le p:troiffe fai -, puis que dans les monumens les plus auten- tiqucs de fa foi , elle nous a toujours parlé d'un grand mira- cle , d'un changement divin , d'une tranfmutation , d'une tr.uifclementation au delî'us des forces humaines & contre l'orJre de la nature. Sur la troilîéme difficulté , qui efl la prefence réelle d'une fubftance corporelle en divers lieux , M. Pelillbn dit auc nos frères feparez fe ttompent de s'imaginer que nous croyons que le Corps de Notre Seigneur ert dans l'Eucariftie de la mef- me forte qu'il ell au ciel, ou qu'il elloit iur l'arbre de la croix ; ou que nous attribuions ce privilège d'eftre en divers lieux au Corps de Notre Seigneut , comme glorifié , ou comme uni à la nature divine. Car ni fa gloire , ni fon union à la di- vinité , n'empêchent point qu'il ne foit un corps humain , vé- ritablement tel que le nôtre , &: par confequent piefcnt en un feul lieu , d'une preience ordinaire , corporelle & vilible , telle que les corps ont accoutume de l'avoir ; prefence bor- née , limitée , & renfermée pour ainfi dire par le lieu mcfme où le corps efl: placé , laquelle , pour fe mieux faire entendre, il appelle prefence unique. Mais nous concevons en mefmc temps , loutenus par la foi , que ce corps divin , & tous les autres corps , qu-and il plait à Dieu de franchir les bornes de la nature , peuvent avoir une autre forte de prefence, très véritable & très réelle , que M. Pclifion appelle prefence »2a/- îi^liie , &: qu'on a toujours nommée facraincntale & fpiritucl- le. DES se A VANS. iSi !e , non pas pour croire qu'elle n'efl qu'en figure & en efpric, mais pour exprimer que nous ne la connoiflons qu'en ce Sa- crement augulte ; &: que les corps y peuvent eftte parleur feule fubftance , fans nen de ce qui l'environne , & la fjic tomber fous les Cens. De la mcfme manière que nous con- cevons la prefence de Dieu , celle des Anges , celle de notre ame , toucc dans le corps , & toute en chaque partie ; fans que la prefence de cette ame toute entière au picd , farte au- cune contradiction avec la prefence de cette ame toute entiè- re à la telle , parce qu'en l'un ni en l'autre lieu elle n'cft point bornée & limitée comme les corps le font en leur prefence uatureHe &c corporelle. M. Peliflbn n'avance pas que ce miracle ne confonde poinc notre raifon ; mais il du que ce miracle confondoit de mcf- me la raifon des premiers Chrétiens & des principaux Pères de lEglifc, fars confondre ni ébranler leur foi. On voit dans tous leurs écrits , qu'ils s'elevoient à la créance de ce miracle par celui de la multiplication des pains , qui feroit un exem- ple ridicule , s'il n'efloit queftion dans lEucar.ftie que d'une multiplication du Corps de Notre Seigneur , faite par l'ima- gination & par la penfée de chaque particulier. Un Patriar- che de Conftantinople , que l'hilloire appelle une grande lu- mière de rf.glife , pour exprimer cette prefence multipliée du Corps de Notre Seigneur , fe fervoit de deux comparai- fons ; l'une du cachet, un en lui-mefme , & mulcip.ié par une infinité d'empreintes , dont chacune contient autant que lui i l'autre de la voix humaine , une en la bouche de celui qui parle , multipliée & toujours la mefme dans les oreilles d'une infinité d auditeurs ; toutes deux fort imparfaites à la venté, parce que les merveilles de la nature ne peuvent ja- mais eftre qu'un crayon très imparfait des merveilles qui font au dertus de la nature. Mais les premiers C hretiens ne laif- foicnt pas de (butenir leur foi fur la ("ainte Trinité & fur ! In- carnation , par des comparaifons auflî foibles , plus utiles à la foiblelfe de l'homme que propres à exprimer la grandeur & Ja majelté de Dieu. A ces deux premières comparaifons M. PcU/îon en ajoute 1694. Bbbb ,«i LE JOURNAL une troifiéme qui n'a pas efté inconnue à faint Thomas. C'eft celle d'un aveugle né , à qui l on diroic que le fens de la vue donc il eft privé , ne nous découvre pas feulement de fort loin les objets que l'aveugle ne peut découvrir que de fort prés 5<: en les touchant , mais encore une autre chofe admirable : c'cft qu'encore que chacun de nous ait une prcfence unique dans le lieu qu'il occupe , ne pouvant jamais cilre prefent en un autre lieu en mefme temps & de la mefme forte ; il a néanmoins ou peut avoir une prefcnce multipliée en cinquan- te miroirs qu'on pourra lui oppofer , & mefme en cinquante pièces de chacun de ces miroirs , auifi prefent en la plus pe- tite qu'en la plus grande ; que rous les autres corps du mon- de ont de mefme avec leur prefencc unique une prefcnce multipliée qui dépend de leur prcfence unique j que cette prefence multipliée s'jppclle communément image , & n'eft pourtant pas une imagination , mais quelque chofe de réel , &; mefme de corporel , que les Philofophes nomment efpece» fans qu'ils ayenc encore pu déterminer ce que c'eft , ni com- ment il fe peut faire que ces efpeces qui partent en mefme temps de tous les corps , & traverfent le me(me cfpace de l'ait , fe percent les unes les autres , fans néanmoins fe mê- ler , fe confondre , ni le détruire. L'aveugle né ne compren- droit rien à ce difcours. Nous fommes pis qu'aveugles nez dans les miflercs du ciel. Mais quand nous trouvons en nous-mcfmcs & dans tous les autres corps du monde , une double forte de [ refence , donc l'une dépend de l'autre : la première unique ; la féconde mul- tipliée à l'infini dune manière véritable , réelle, mefme cor- porelle , fi claire à nos yeux , fi obfcure à notre raifon , au- rons-nous l'audace de prononcer hardiment qu'il n'cft pas poflible à celui qui peut & qui fait tout , de multiplier d'une manière toute furnaturcile Se toute divine , non le Corps uni- que de Notre Seigneur , ni la prefencc unique , corporelle, vifible &c divifibje , mais une autre forte de prefence facra- mentale , fpirituelle , &: de fa feule fubflance , libre & déga- gée de fes q)alicez corporelles , avec Icfquelles il eu en ua ièul lieu, comme cous les autres corps i DES SCAVANS. 185 M. Peliflon finie cecte première partie de fon traité , en faifant voir que Calvin propofc des miracles à la vericé , mais àci, miracles fans ordre , (ans fuite , fans but. Au lieu que rEi;li(e Catoliquc propofe des miracles , mais avec un ordre, une Cuire , &: une raifon qui engagent le cœur &;' rcfpMt , Se nous obligent de nous ecner , comme faifoit un Pcre de l'£- glife fur le l'ujet de l'Incarnation : Nous vous rendons grâces, Seigneur , de ce £[ue voui faites pour f homme ce que l'homme ne peut croire. La féconde partie de ce traité n'eft pas moins belle que la première : mais )e m'y arrêterai moins. Elle contient les preuves de la prefence réelle par l'Ecriture fainte. On a dit dés le commencement de l'ouvrage , que la clef de cette difpute cft , qu'il n'eft point queftion de fçavoir Ci en certaines occafions telles qu'on pourroit les fuppofer ou les imaginer , ces paroles de Notre Seigneur , Ceci c(i mon Corps ^ pourtoient fignifier : Ceci eft la figure de mon Corps ; mais qu elles ne peuvent le fignifieren 1 endroit dont ils'agit, quand une fois on a reçu & rallemblé ce que l'Ecncure & la Tradi- tion ont appris aux Chrétiens del'Eucarillie. 11 n'en faudroic point d'autre preuve que ce qui a elle dit dans la première partie. L'Eucariftie eft un grand millere , une grande mer- veille , du confentement de tous les Chrétiens. Mais où eft le miltere & la merveille , quand on entendra fimplement : Ce pain eft la figure de mon Corps, Ce vin eft la figure de mon î>ang ? Il n'y a rien de plus éloigné du bon fens, que ce fens fi nud & fi miferable des Sacramentaircs. On n'en dit pas davantage à leur égard. Mais contre ceux qui fe retrancheront fur le fens merveil- leux & incroyable de Calvin , M. Pelliftbn entreprend de prouver trois chofes. Que le fens de l'Eglife fe trouve for- mellement dans l'Ecriture , non pas une fois , mais plufieurs & en plufieurs fortes. Que le fens de Calvin ne s'y peut ja- mais trouver en aucune manière. Et que les objedions des paf- fages de l'Ecriture qu'on fait contre le fens de l'hglife, ne font que confirmer ce fens- là , quand fa créance eft une fois bien exphquée &: bien entendue. i84 I- E JOURNAL Perfonne ne doute que le dogme de l'i-glife Cafolique fîir l'Eucariftie ne foie dans l'Ecriture fainte. Nos frères feparcr ne nient pas cux-mefmes qu'il n'y foit à la lettre Mjis ilsdi- fent que la lettre tue. Nous avons donc déjà pour nous les paroles à la lettre j ce qu'ils n'ont pas. Et pour faire voir que cette lettre ne tue point , &: que le fens littéral e(t le vérita- ble , M. Pelilfon apporte trois preuves qu'il explique au long, & qu'il fait valoir admirablemenc. La première tft le confenrement & l'uniformité pourainfî dire , des quatre Ecrivains facrez à rapporter les paroles divi- nes de l'inltitution , Ceci e/î mon Corpi ^ fans changement, fjns variété , fans commentaire, fans explication , quoi que par tout ailleurs ils en ufcnt autrement , & que l'explication fufl: ici plus nccelfaire que par tout ailleurs. Ceux qui s'etonnenc que tous les faits n'ont pas elté rapportez p.ir tous les Evan- gelifles , ni avec les mefmes circonftances , trouveront de quoi s'appaifer & de quoi s'inflruire , dans ce que dit en cet endroit M Pelillon ; mais nos frères feparcz feront touchez fans doute de l'application qu il en fait à fon fujcr. La féconde preuve fe tire du fixicme chapitre de fain Jean. L'infticution de l'EucariRie à la vérité n'y cil point rapportée. Mais M. Pelliifon montre qu'elle y e(} clairement prédite & annoncée , &: d'une manière qui ne s'accommode qu'avec le fens littéral de 1 Eglife. Il dit que manger la chair d'un homme &: boire fon ûng, efl: une chofe Ç\ éloignée de notre penfée & de notre nature, que ni les hommes , ni Dieu quand il parlera aux hommes, ne parleront ainli que pour fignifier quelque chofe d'extraor- dinaire, de furnaturel , & de divin. Qifil faut ou que Notre Seigneur ait entendu ce que les Catuliques entendent , & qu'on ne pouvoir concevoir j ou du moins qu'il ait entendu quelque chofe de fort extraordinaire , quoi qucfii;uré, &c nicfme qu'il foit venu à cette expreflion fi forte de penfée en penfée. Que cela ne peut convenir à ce que difcnt nos frères feparez , que l'occadon du pain multiplié avoir porté N. S. à dire qu'il eltoit lui melme un pain celeRe , par où il com- mence fon difcours ; & que la penfée de fa chair vi6lime lui a- voic / DES SCAVANS. iSj voit fait ajouter , que ce pain qu'il promcttoit efloit fa chair mcfme. Car s'il regardoit à ce pain multiplié , pourquoi nous parle- 1 il d'un bruv.ige donc ce pair, multiplié n'avoir point ■cfté accompagné ? Et s'il regardoic à fa chair vidime , pour- quoi nous parle-r-til de boire ion fang , lui qui fçavoïc bien qu'on mangcoir la chair des vidimes , mais que c'eurt cfté une impieté parmi les Juifs d'en boire le fang , qui au contraire devoir eftre répandu en l'honneur & en la prefence de Dieu ? Il faut prcfque vouloir s'aveugler pour ne pas voir qu'en re- gardant au pam multiplié , il annonce un pain nouveau &: ex- îraordmaire , muiriplié infiniment plus que le premier , &: qui fera accompagné de fon bruvage 5 qu'en regardant à ù chair ^'idiale fur la croix , il a promi'; un facrifice tout nouveau & tout extraordinaire , où non feulement il ne fcroit pas défen- du , mais où il feroit commandé de boire le fang de la viùi- jne 4 ce qui ne fe trouve non plus qu'en l'Eucariltie. Cette penfée conduit M. Pelliiïon à la véritable explica- tion non feulement du fixiéme chapitre de faint Jean , mais ien élever la jeunejfe pour les divers efîats de la vie. A Mon- fe teneur le Duc Première lettre fur les principes de l'éduca- tion, in 12. à Paris chez Jean Guignard dans laGrand'Salle du Palais, i 694. L'Education propofée dans cette lettre ne dépend pas d'u- ne Philofophie enveloppée de certains termes , & alTu- jectie à une certaine metode de raifonner ; elle doit avoir des principes plus folides, quirempiiflent l'efprit d'un jeune hom- me d'une fagelTe aquife , &: qui faflcnt germer les fcmences de l'infufe ; d'où procédera le progrés qu'il pourra faire dans la connoilîance àcfon eftre chrétien , àcfon eftre ratfonnable , de fon eftre animal. Pour lui donner h connoiflance de Ton eflre chrétien , il faut lui imprimer profondément cette vérité , qu'il y a une por- tion de lui-mefme qui penfe , qui rappelle le paOe , qui for- me des conjedures fur l'avenir , qui ne peut fupprimer le de- fir qu'elle fcnt de fubfiller toujours , ni nier une autre vie qui ne finira point , &: à laquelle elle fe doit difpofer avec plus de précaution qu'à celle qui. pafle. I 694. D d d d î9o L E JOURN A L Après cela i! fera aifé de le dcccrminer à fe foumettrc par raifon & par choix à une loi fupcricure qui lui demande l'o- bcïlFance , &: qui fera infailliblemcnc l'uivie de récompcnfcs ou de châtimens. Le fonds du Chriftianirme s'établira fur ces impreilîons , qui croilTant avec 1 âge , le porteront à crain- dre & à adorer le prcnnier eflre. Faute de lui avoir impri- mé de bonne heure ces maximes , les pratiques de piccé où il auroit elle élevé , ne ticndroient qu'à peine contre le pre- mier foulcvement de fcs palfions. Que fi Vefire chrétien ne peut s'érablir ni fe foutenir long- temps dans l'cfprit & dans le cœur d'un jeune homme , que par cette fagelle infufe &: aquifê que cette lettre propofc, fbn efite rAifonnahle n'a pas moins befoin du mefme fecours. L'Auteur le montre par la dédudlion de cinq choies qu'il fauc connoitre dans le monde , Ton propre efprit , refpric des au- tres , les railons d'Eltat , des pays , des Couronnes & des fa- milles ; le foiidement des loix &: des coutumes , & Tordre du grand monde pour découvrir l'arrangement du petit. Enfin il fait voir que c'eft par le moyen de ces notions gé- nérales , qu'il faut apprendre à un jeune homme les principes qui compofent fon ejire animal , ce qui peut ou le confcrver ou le détruire. Par là on lui explique comment la nouiriture fe diltribue , comment fe fait la circulation du fang , com- ment la chaleur naturelle s'entretient dans un julle degré, comment s'évitent ou fe guenflcnt les maladies caufées par Ja repletion ou par l'inanition , & mille autres chofcs qui con- tribuent à la durée de la vie. Cela fe peut expliquer aux heures de récréation ; & de cet- te Phifiquc qui d'elle- mefme ell très agréable , un jeune hom- me fera ir fenfiblement conduit à l'origine des partions, à leurs diffcrences , & à leurs effets ; ce qui lui fcrvira extrê- mement pour bien régler fa conduite. La lettre fuivantc traitera du choix d'un Gouverneur , &: des qualitez qu'il doit avoir, A ;' ^j DES se AV AN S. 791 PREMIERE LETTRE DE M. ARNAUlD DOCTEUR dd Svrbonne , au R. P. MaLebruiiche Prêtre de l Orjtoire. <•% *vt TE ne m'atcendois pas, Mon Révérend Perc , d'avoir jamais ' plus lien à déméier avec vous , fur deux des plus infoutc- nables opinions de votre nouvelle Phiiorophie. L'une tit cccte bizare peufce , Que Ion ne fçauroic voir qu'en Dieu ics corps qu'il a créez ; ou plutôr que nous nous trompons lors que nous penfons les voir , parce que n'eftanc point vifibles , ce ne font pas eux que nous voyons , mais des parties quelconques de l'étendue intelligible infinie que Dieu renferme. L'autre e(l cette étrange leçon de Morale, Q^e les pîaifirs des fens rendent heureux ceux qui en -jouiffent , ^ à'dut.int plus heureux qu'ils font plus 'rrar.s : & Qj4^il ne fiut pas dire aux hommes que us pUnfi'S ne les rendent pas heureux en quelque manière dans le t.mps qu'ils en jouijjent , parce que cela n'efi pas vrai. je penfois avoir mis ces deux points dans un fi grand jour j le premier d.ins le traité de^ vr^^yes ^ des fuufjcs idées , Se dans la Defenfe de ce traité : le fécond dans le i. volume des Réfle- xions fur votre nouveau Siftême de la Nature & de la Grâce 5 & dans la differtatton fur le prétendu bonheur de> plaifin des fer.s , que je m'citois flaté que vous vous trouveriez réduit au filence fur ces deux matières. Et je ne m eftcis pas trompe. Car il y a dix ans que vous y cftes réduit à l'égard de la vue des corps en Dieu, & Ç\\ ou fept à regard des pîaifirs des fens. On a donc diâ eilre fur- pris , Mon Révérend Père , qu'après un fi long fi'ence fur ces deux points , n'ayant eu rien à répliquer à celui qui les avoir traitez à fond , vous vous foyez avifé de les foutenir contre un habile Philofophe qui ne les avoir traitez que légèrement, & qui vous avoir renvoyé , fur tout à l'égard du premier , qui cfl: la vue des corps en Dieu , à ce que j'en avois ecrir. Car fi vous vouliez vous juftifier fur ces deux dogmes , pour agir de bonne foi , & ne pas tromper le Public , vous ne deviez pas VOUS arrêcCi: ieulemenc à ce qu'un nouvel advcrfaire vous eu 191 L E J O U R N A L ' avoir dir en paHant , mais répondre folidement à celui à qui il vous renvoyoit. Et au lieu de cela , vous employez di- verfes lUufions , & deux faufletcz infignes , pour ôter à M. Rcgis l'avantage qu'il avoit cru pouvoir tirer de ce que j'avois écrit contre vous. C'ell ce que je viens d'apprendre par l'extrait d'une de vos lettres imprimée dans le Journal des Sçavans du i. Mars 1694. Et c'cft au (Il ce qui m'engage à vous écrire cette lettre , que je tâcherai de rendre publique par la mefme voye , parce qu'il y va de mon honneur que le Public ne croye pas les deux cho- ses que vous m imputez contre toute raifon & fans aucun fon- dement. Vous dites donc , Mon Révérend Père, qu'à l'égard de la vue des corps en Dieu M. Régis s'appuye d'abord fur l'auto- iicé de M. Arnauld. Ce n'eft pas parler jufte. Cela fe pourroit dire , (1 n'ayant point traité expredément cette matière , j'avois feulement témoigné dans quelque livre , que je n'eftois point en cela du fentiment du P.Malebranche. Mais l'ayant combattu par des raiTons qui m'ont paru convaincantes , & qui ont cité jugées telles par beaucoup d'habiles gens , pourquoi voulez-vous que ce foie fur mon autorité & non pas fur mes raifons que M. Ré- gis fe foit appuyé. Eft-ce que vous avez appréhendé qu'on ne vous dift : D'où vient donc que vous ne répondez pas à ces raifons de M. Arnauld , & que vous avez cfté dix ans fans , ofer entreprendre d'y fatisfaire ? Qjioi qu'il en foit , ajourez- vous , ce rieflni à M. Reijs ni à moi à décider ^ la viBotre de M. y^rnauldfur le P. Malebtanche a efiè tout k fuit complette. Nous fommes parties tnterefftcs. Ce n'efl: plus parler d'un fi haut ton que vous faifiezdans vo- tre réponfe au traité des vrayes & des faulfes idées. Defefpe- rant de pouvoir perfuader au Public que vous ayez eu l'avan- tage dans cette difpute , vous feriez content qu'il demeurai!: en fufpens , ne fçachant à qui de vous ou de moi la vidoire doit eftrc ajugée. C'eft à quoi vous vous réduifcz quand vous prétendez qu'on ne fe doit arrêter pour cela ni à ce que die M. Régis en faveur de M. Arnauld , ni à ce que vous auriez pu DES SGAVANS. 193 pu dire contre ce Dodcur , parce que vous cfles parties jiite- reirées. Mais on peut , Mon Révérend Pcre , fortir de ce doute, fans s'en rapporter ni à l'un ni à l'autre de vous deux. Ceux qui voudronr s'en eclaircir , n'ont qu'à lire les livres de M. Arnauld aufquels M Régis renvoyé , tels que font le traité des idées , &r la défenfe de ce traiié. C'cll par là qu'ils pour- ront juger Cl vous avez elle bien ou mal refuté par M. Ar- nauld. Et fans niefme lire ces livres , on peut préfumer rai- fonnablement que vous y avez elle fort bien refuté. Car ayant témoigné tant de zcle pour ce fentiment de la vue des corps en Dieu , juCques à dire que vous vous croyiez indil^ penfablemcnt obligé de le fourenir par principe de Religion AUTANT Q^iL vous SEROiT POSSIBLE ; n'a- C-OH pas droit dc conclure qu après un tel engagement il n'y a nulle apparence que vous fullirz demeuré dix ans entiers lans le fuutenir , Ci vous n'aviez reconnu qu'il ne vous eftoit pas poJTible de répon- dre pertinemment au livre qui le combattoit. C'eft aulîî ce que vous ne faites pas au bout de ces dix an- nées. Car au lieu de répondre aux preuves de M. Arnauld, vous fuppofez n'avoir qu'à vous défendre de Ton autorité, Ec c'cft ce qui vous fait dire : Muii puii que M. Regts s appuyé fur l'autorité de M. Arnauld , je puis hien lui oppojer celle de faint Au- g'^^in. Celle- ci vaut bien l'autre. Ouï fans doute , Mon Révérend Père , & infiniment da- vantage. Mais avant que d'examiner fi l'oppofition que vous faites de ces deux autoritez elt bien fondée ; c'elt: à dire , s'il ei\ vrai que je n'aye pu combattre votre opinion de la \uc des corps en Dieu , fins combattre la doilrine de faint Augullin ; j'ai à vous dire que vous deviez conHderer (1 la queftion donc il s'agit entre nous c'a de la nature dc celles qu'on doit déci- der par autotiié ; ou fi , félon vous niefme, c'cft par rai fon & non par autorité qu'elle doit élire décidée. Car quand une queftion ert de ce dernier genre , vous voyez bien , Mon Pcrc , qu'on ne feroit rien pour la décider en oppofant 1 au- torité d'un grand homme qui auroit enlcigné l'affirmative , à l'autorité d un autre beaucoup inférieur qui auroit enlcigné iancgitive. E e c e 194 LE JOURNAL Il fauc bien que vous en conveniez. Car que diriez vous d'un homme qui auroic entrepris de réfuter tant de nouvelles opinions de M. Dcfcartes que vous avez foutenucs dans vo- tre Recherche de la vérité ; telles que font par exemple , que les couleurs , les fons , & autres femblables qualitez (enfibles ne font que des modifications de notre ame , & que les bêtes ne font que des machines , fans aucune connoilî'ance de ce qu'elles font ? Vous croiriez- vous bien refucé fi on vous di- fbit : Pttii que vous vous appuye\ fur l\iutonté de M. Defcartes , ^e fuis bien vous oppofet l'autorité de fuivt AuyiRin. Celle ci vaut bien l'autre / Or il eft certain , ajouteroit-il , que faint Augu- ftin a cru que les couleurs eiloicnc dans les corps colorez , &: que les beftes ne font point fans connoinTance. Vous lui ré- pondriez fans doute : M. Dcfcartes peut avoir efté caufe que j'ai ces fentimens , que je n'aurois jamais trouvez de moi- mefme. Mais ce n'ell pas fon autorité qui m'en a perfuadé ; ce font fcs rai fons , parce que ce font des matières de Philo - fophie qui fe doivent décider par la raifon , &: non par l'auto- rité des hommes. Ce n'cft donc point en préférant l'autorité de M. Defcartes à celle de faint Auguftin , que j'ai fuivi les opinions de ce Philofophe ; mais c eft en me rendant aux preu- ves dont il les a appuyées. C'eil ce que M Régis vous auroit pu dire , s'il eftoit vrai que ce qu'il loutient avoir elle bien refuté dans les livres de M. Arnauld aufquels il renvoyé , eftoit la dodrine de S Au- gullin. Mais comment avez- vous pu le prétendre , après a- voir efté convaincu par ces livres mefmes , que ce que dit S. Auguftin dans les palfages que vous oppofez à votre adver- faire , n'cft point ce que vous enfeignez , & que vous l'avez reconnu vous-mefme. C'cll de quoi il faut vous convaincre de nouveau. Pcrfonne n'ignore que faint Auguftin qui avoit fort étudié la Philofophie de Platon , n'ait dit en plufieurs endroits , &: principalement dans fes premiers ouvrages , qu'on ne pou- voir voir les vcritez neceifaires &: immuables que dans la vé- rité éternelle qui eft Dieu ; qu'il étend cela aux veritez de Geomecrjie &: d'Aritmcti«]ue; mais qu'il l'applique encore plus DES se A VANS. 19 j fouvent aux vencez de Morale, qui fonc la règle de nos mœurs, i'. Thomas examine cecce queltion i . p. q. 84. a. j. &: il marque le fens dans lequel on pourroic prendre cectc opinion de Samc Auguftin , afin qu'elle fuil vraye. Quoi qu'il en foit, c'eli: tout ce que dic faint Auguftin dans les trois palFages que vous objedez à M. Régis , & dans beau- coup d'autres femblables , que vous pourriez rapporter. Mais outre que ce n'eft point du tout de quoi il s'agit entre vous &: M. Pvcgis , comme on le verra dans la fuite ; on vous a prou- vé dans le Traité des Idées ch. i 2. qu'à l'égard mefme de voir en Dieu les veritez éternelles, vous avez reconnu vous- mefme que vous n'eftiez point du fcntiment de faine Auguftin. Nous n'avons qu'à vous écouter. Noui ne dtfons pas que nous voyons Dieu en voyant les veritez^ éternelles , cornue dit fuint Augu/îm : mais en voyant les idées de cet veniez^ Car les idées font réelles ; mais l'igalité entre ces idees^ qui ejî la vérité , nefi rien de réel. Qjumd , far exemple , on dit que le drap que l'on mefure , a trois aunes , le drap ^ les aunes font réels ^ mais f égalité entre les aunes S" le drap n'eft point un efire réel : ce neji qu'un rapport qui fe trouve entre les trois aunes (^ le drap. Pouviez vous avouer plus expreflement que vous ne croyez point que l'on voye en Dieu les veritez neceiîaires & immua- bles, qui eft ce que difent les pailages de S. Auguftin que vous rapportez , qu'en déclarant généralement qu'on ne voit point les veritez en Dieu, parce que la vérité n'eft point un eftre réel , mais un fimpie rapport. On ne voit donc point en Dieu , félon vous, ni les veritez géométriques, ni les veritez morales -, &c vous n'eftes point en cela de l'avis de S. Auguftin. On a montré au mefme endroit que vous vous eftiez fait honneur de cet aveu dans la Recherche de la Vérité. Car a- prés avoir reconnu que vous ne croyez pas comme a cru S. Auguftin , que nous voyons en Dieu dés cette vie les veritez éternelles : Nous ne voulons donc pas , ajoutez- vous , nous fer- vir in)u(lement de l'autorité d'un fi grand homme four appuyer notre fentiment. Pourquoi donc diffimulanc tout cela , faites vous prefen- ^menc votre plus grand fort de l'autorité de ce Pcre contre i 196 LE JOURNAL M. Rcgis ? Eftce à caufc que dans vocre Réporfc au Traire des Idées , vous vous repentez d'avoir fait cet aveu ? Car il ert vrai que vous le dcfavouez en ces termes : M. Arnaulà fc trempe fort d' avoir cru que je r,e fuis pas de l'opinion de faint Aft^ gufiin pour ce qui eft de voir en Dieu les veritez^etcrncUes. Alats il ne prend pas o. ^vril j6p^. DES SCAVANS. 2 09 LT.COLE DU MONDE, OU INSTRUCTION D'UN jicie à un fits , icuchant lu manière dont il faut vivre dans le monde , divifec en Entretiens. Pftmicr Fntrctien. Jn iz. à Pa- ris chez Martin Jouvenel , rue de la Bouderie , & Claude Mazuel , rue fainc jaques. 1694. UN pcre accablé de difgraccs veut laifTer à ic'i enfans quelque chofe de plus lolide que les biens qu'il a per- dus , &L dans cette vue leur donne des inllrudions , non pour s'a^juicter des devoirs de la religion ; fur quoi il fe rapporte aux Théologiens , mais feulement pour rcuffir dans le mon- de , & pour y aquerir de la réputation &r des amis , & p;Hir y parvenir aux emplois. Le premier entretien qu'il a avec Ton fils , efl de la connoilTance des hommes. Les onze au- tres qui fuivront de mois en mois , feront fur d'autres fujets choifîs. Pour lui apprendre à connoitre les honimes avec lefquels. il entre en quelque commerce , il lui fait condderer leur tem- pérament , qui eft le principe de leurs inclinations , leur âge, & leur qualité , qui modifient le tempérament , laftuibliiîent, ou Je forrificnt. Il préfère le tempérament fanguin à tous les aurrcs , &: le- juge le plus propre à fe faire aimer. Il montre enluitc com - ment chaque âge a des quilitez particulières qui changent le tempérament ; de forte que le racfme homme jufqu'à vint ans eft plus foible &: plus indiffèrent ; jufqu'à cjuarante plus porté au plaifir ; jufqu'à foixantc plus impérieux , &: depuis Ibixante plus défiant & plus avare. Enfin pour montrer les différences que les qualitez peu- vent apporter au tempérament , il les réduit à quatre , à la noblcfle , aux richelfes , à la faveur, & à la profellion , donc il découvre les avantages & les défauts. Quand il traite des profeflions & des emplois , il les réduit à fix ; à l'Eglife , à l'Epée , à la Cour , à la Robe , aux Finan- ces , & au commerce. Dans chaque emploi il diftingue la. 300 LE J O U R N A L vcrcu du vice , Se fejiare le vcrcucux Ecclcfiaftique du vi- cieux , le bon Juge du corrompu. 11 clt vrai pourtant qu'il ne fuit plus la mefme mctode quand il parle des gens de Cour , parce qu'ils cachent fi bien leurs vices , &c font une fi grande oftcntanon de vertu , qu'il cft dif- ficile de les démêler. La mefme difficulté ne fe trouve pas à l'égard des gens de Finances Ils ne dilïerent que du plus & du moins , rappor- tant tout à leur intereft , eftant moins touchez de Ihonneur que du profit , &: ne tenan: leur parole qu'autant qu'ils y trou- vent leur avantage. Il donne un caradere tout contraire au Marchand , & fait que fon crédit & fa fortune roulent fur fa bonne foi. Quant à i'arcifan , il le décrit pour l'ordinaire ivrogne , brutal, en- vieux , &C n'ayant prefque point d'honneur. SUITE DES FORCES DE L'EUROPE. Sixfème partie. Par Nicolas de Fer Géographe de Monfeiyieur le Dauphin. In ^. à Paris chez l'Auteur , fur le quai de l'Horloge , à la Sphère Royale. 1694. CEtte fixiéme partie des Forces de l'Europe , cft compo- fée des plans de Brufl'elles , de Saint Orner , de Gand , de Philippeville , & de plufieurs autres places. Nous aurons au premier jour une carte particulière des Frontières de France & d'Efpagne , à laquelle le raefme Au - teur vient de mettre la dernière main , & où il a renfermé la Catalogne , l'Arragon , le Roullillon , & partie des Gouver- nemens de Gafcogne & de Languedoc , avec les cols , les partages , les ports , & les pertuis des Pirenées. Le mois prochain il donnera fa grande Mappemonde , fui- vant les dernières obfervations. A PARIS, Chez Jean CussoN,ruë funt Jaques , à l'Image de faine 7^ Jean Baptidc. Avec fiiviley: du Roi. 1694. 4 xxvr. 3ot LE JOURNAL DES se AVANS 6 Du LuNDY j. Juillet M. D C. XCIV. DISCOURS DU COMTE DE BUSSY RABUTIN A jei enfam , fur le bon ufage des adverjiiez^^ ^ Us divers evene- mens de fa vie. In zz. à Paris chez Jean Ahiiïbn , rue faine Jaques, 1694. LE traire que Plucarquc nous a laiflTé de l'utilité quife peut tirer des ennemis , clt alTcz fernblable à ce difcours quant à la matière , bien qu'il le foit moins quant à la forme. Dans celui- là )1 y a plus de raifonnemens, & dans celui ci plus d'ex- emples. Ceux des illudres malheureux des (îecles paflez ne font touchez que légèrement par M. de Bufli Rabutin ; au lieu que le ficn cft reprefcnté dans une juftc étendue. 11 fça- voit mieux fes propres difgrace^ que celles des autres ; & s'il avoir efté bien inftruit des avantures de Belifairc , il ne l'auroic pas enfermé dans une prifon imaginaire , privé de l'ufage de la vue , & réduit à implorer le fccours de la chanté publique. Il dit de foi mefme le mal comme le bien , & ne s'excufe point lors qu'il croit devoir e(tre blâmé. Qjiand j'avoue mes fautes , dit- il , ce n'efl pas que je ne lespuijfe défendre , en forte que fimpo ferais peut- epe au public. Mais il me faudrait parler contre msnjentiment > ^f]ene fuis content de moi ^ il m importe fort 2 i^_ 1694. Gggg 3ot LE lOURNAt que les autres le [oient. Je fuis abfolument incapable de goàter te flaîfir d'une réputation que ■je fennrois bien n'avoir point méritée^ En iCéj. il fut mis à la Baftillc pour avoir écrit Ihiftoire dct- amours de deux Dames , n'en fonit qu'après avoir donné la démiilion de d chtrgc de Meftre de Camp General de la Ca- valerie légère , &: demeura dix fept ans exilé. Ce fut là la principale fourcc de lés malheurs. L'aveu qu'il fait de (à fau- te , & le repentir qu'il en témoigne , montrent bien qu'il n'a- voit garde d'y retomber. Dans le récit qu'il fait delà campagne de 1656. & des deux fuivantes , il mec des circonltaoces qui ne peuvent eftre con- nues que de ceux qui comme lui ont eflé témoins des éve- nemcns. Un homme qui fe trouve dans un combat , nefçaic pas tout ce qui s'y ell: palfé. Il n'a vu que ce qui s'eft fait de- vant lui. Encore faut il qu'il ait confervé tout (ov\ jugement. Pour ce qui s'ell fait ailleurs , il n'en fçauroit parler que fur le rapport d'autrui , qui peut élire faux. Les Hiftoriens qui d'ordinaire n'ont jamais elle à la guerre , écrivent fur les mc- cioires de gens qui diftribuent la gloire à leurs amis , ou qui fe la donnent à eux mefmes. Durant le loifir de fon exil il mit en ordre les mémoires qu'il avoir compofez de ce qui lui eftoit arrivé à la Cour & à Ja guerre , & de ce qui s'efloit p-iflé depuis fa difgrace. On cfpere qu'ils paroitront bien-tôt ; 6i. il ne faut pas douter qu'ils ne répondent à ce que le Public attend d'un homme qui eftoic un des plus beaux efprits du Royaume , & qui écrivoit avec le plus de delicatelle. SECONDE LETTRE DE M. ARNAULD DOCTEUR de Sorbonne ^ au R. P. Malebrancht Pr'ctre de l Oratoire. J p i JE me fuis engagé dans la lettre précédente , Mon Rcvc- rend Père , de me défendre de ce reproche , que je vous ai tourné en ridicule pour avoir enfeigné ce que faim Auyiftm enfeijrie partout. Ce que vous faites en ces termes : Je ne croi pas que perfonne préfère l'autorité de M. Amauld à (file defaint Auyi^in fur m fentiment q^ue ce faim DoBeur a £% DES SCAVANS. 305 iottte fa vie , ^ quil fuppofe dans prefque tous fa ouvrages. Que M. Régis , k l' imitation de M. Arnauld , traite ce fenimuni de chimérique, & quiL me tourne fur cela en ridicule , yV me contente- rai de lui répondre que fon aveuglement me fait pitié. N'ed-ce point plutôt un aveuglement digne de pitié de dé- fendre une mauvjife caufc par une faulTcré manifefle ? Car il n'ell: point vrai que M. Rcgis ait traité de chimérique au- cun fenciment de faint Augullin. 11 n'ell point vrai qu'il vous ait tourné en ridicule pour avoir foutcnu ce que ce faint Do- deur auroit enftigné. 11 n'ell point vrai que s'il l'avoit fait , ç'auroit cfté à mon imitation. Ce dernier fur tout cil bien étrange. Car pouvez vous m'imputer une telle chofe , ne pouvant pas avoir oublié que je n'ai rien écrit contre ce que j'aurois pu appeller votre chimère , qu'après vous avoir con- vaincu par votre propre aveu , que ce n'elloit point le fcnti. ment de faint Auguflin? Cependant il faut remarquer que lorsque j'en parlai la pre- mière fois , qui fut dans le livre des Idées , je le fis de la ma- nière du monde la plus honnête , & qui vous devoit donner moins de fujet de vous blelfer de ce que je n'approuvois pas votre fentiment. Car ce fut en prenant toutes les précau- tions imaginables , pour fatisfaire d'une part à ce que je croyois devoir à la défenfe de la vérité , & pour ne point manquer de l'autre à ce que les règles de l'amitié les plus fevercs , ou pour mieux dire, les plus fcrupuleufes, pouvoienc exiger de moi. Je croi en avoir perfuadé toutes les perfonnes raifonnables dans la quatrième partie de ma Défenfe : à quoi vous n'avez eu rien à oppofer ; comme votre filence depuis dix ans le fait allez voir. Que fi je ne vous ai pas tar>t ménagé dans cette Defenfè, c'eft vous , Mon Père , qui m'y avez obligé. Vous aviez parlé de moi dans votre réponfe au livre des idées avec tanc de mépris , & de vous-mefmc avec tanc de confiance & d'ef. time pour vos nouvelles découvertes , qu'il eftoit à craindre que cet air d'afTurance , fi capable d'impofer aux fimplcs , ne jtrompaft beaucoup de gens , & ne les portail à croire cju'il n'y 304 I^ E JOURNAL avoir rien que l'on puft raifonnablemenc reprendre dans Vûf mauvais fentimens. 11 faut ajoucer à cela , que pour empêcher qu'on ne s'op- pofaft à vos nouvelles penfécs , vous les avez revêtues de ter- mes (i mifterieux & fi dévots , que vous avez pu vous pro- mettre de les faire embralTer aux perfonncs de pieté. Pour leur en donner l'exemple , vous nous aviez afluré dans la Re- cherche de la Vérité , qu'elles eftoient fi conformes à notre Religion , que vous vous trouviez indifpenfablement obligé de les fouteny: , quelques railleries qu'on vous en puft faire. Vous les avez enfuire traveflies en Méditations picufes , où vous nous les débitez comme des oracles que vous faites pro- noncer à la Sagelfe Eternelle. Enfin dans votre Réponfe au livre des Idées fuppofant faufiemcnt que j'ai cité un de vos partages qui dit tout le contraire de ce que je prétendois prou- ver , vous tâchez de m'effrayer par ce terrible cnroufiafme, comme G je devois craindre d'eftre abandonné de Dieu , pour avoir combattu vos miftericufes nouveautez. N'e[i-ce foint , dites vous , <^»f lors qu'on renonce k la raifon , ( par où vous en- tendez la r^ifon fouveraine qui eft Dieu ) cjnon combat fes pou- voirs , qu'on ne la veut point pour pn maitie , qu'on lui fuhfiitue des rnodalitcT^qui ne font que tenebrei , oureprefentativcs de fcnti- mem confus , elle nous abandonne à noui-mefir.es ? Ouy , Mon Père , je vous le protefte , ce n'efl point pour me vanger de vos malhonnê.etcz : Dieu fçait que je n'en ai eu aucun refientiment ; mais pour empêcher les mauvais ef- fets de ces injullcs préjugez , que je vous ai moins ménagé dans ma Defenfe , &: que je me (uis cru obligé de découvrir plus ouvertement le ridicule de vos paradoxes. Je l'ai fait néanmoins d'une manière fi mefuréc , que vous n'avez pu raifonnabicment vous en choquer, puis que ce n'a efté qu'en reprefenrant très fiJellemenr ce que vous avez é- cric touchant votre penfée de la vue des corps en Dieu. On en peut juger par le dialogue qui cft à la fin de la lettre, par où je commence ma Dcfenfe , permettez moi donc de rapporter ici cet endroit du dialogue , afin que le Public juge fi vous y avez pu trouver à redire. On DES SCAVANS. 30J On fait propofer votre dodrine par un Abbé , qui n'em- ployé pour cela que vos propres paroles. On fait dire cnfuitc au Duc chez qui le tenoit l'aflcmblée : Laiflanc à M. le Dodtsur que voici à nous dire fon fenri " ment fur cette nouvelle explication de l'immcnlité de Dieu, " qui me paroic bien grolfiere & bien charnelle , je prie M. '* l'Abbé de nous dire s'il croie de bonne foi tous ces parado- " xes que fon Maître a pris pour des réponfes de la Sageffe " Eternelle : Que nous penfom voir le niondi. matériel que Dieu a " cyeè , mais que nous nous trompons ; parce que le monde matériel ^^ efl invifible , tf^ que nous avons tort de lui attribuer ce que nous " voyons , parce que mus ne voyons rien qui lui appartienne. ** Et on fait repondre à l'Abbé : Ne doutez poinr que je *' ne fois très pcriuadé de ce que vous appeliez des paradoxes; ** & ce n'ert que faute d'attention que vous rejettez à&% veri- '* rcz qui paroilîent fi claires à rous les cfprits attentifs. Car " enfin quoi que vous en puiiîiez dire , fi nous y prenons bien^* garde , le corpi matériel que nous animons riej} pas celui que nous '* vcyons lors que nous le regardons , )e veux dire ^ lors que nous tour- " nons les yeux du corps vers lui. C'e^ un corps intelliqible que r ..«j " voyom. Il en eft de mefme de rous les autres corps que Dieu ** a créez. Car, comme je vous l'ai déjà dit , le Soleil , par '' exemple que l'on voit , n'efl: pas celui que l'on regarde. Le '* Soleil , &c tout ce qu'il y a dans le monde matériel , n'efl '' pas vilîblc en lui mefme ; l'ame ne peut voir que le Soleil '* auquel elle eft immédiatement unie , qui ell le Soleil intcl- '* ligible. « On fait prendre la parole au Dodeur en cet endroit. Obligez moi , dit-il à l'Abbé , de nous dire encore une" fois ce que vous entendez parées corps intelligibles que" nous voyons par les yeux de notre efprit , que vous dilhn- " guez des corps matériels vers lefquels nous tournons les ** yeux , mais que nous ne voyons point , parce qu'ils font , " à ce que vous prétendez, invifibles &c inintelligibles en eux- " mefmes. ** £c on fait répondre à l'Abbé : J'entens , comme je vous '* l'ai déjà marqué , une partie quelconque de l'étendue in- " 1654. H h h h 3o6 LE JOURNAL „ telligible , taillée &c formée comme elle le doit eftrc pour ,,cltre femblible au corps vers lequel je tourne les yeux , à ,, laquelle mon ame applique l.x fenfation de la couleur que „ Dieu lui a donnée à l'occalioti du corps matériel qui cft de- ,, vaut moi. Voila ce que nous appelions les corps intelh- ,, giblcs que notre ame peut feule appercevoir , parce que les „ autres ne lui peuvent eftre intimement unis. Jufqucs là , Mon Père , je ne voi rien dont vous vous puif- fiez tenir otïcnfé. Voyons donc (1 ce pourroit eftre ce que je fais dire cnluiic au Docltur. „ Cela me donne une plaifanre penfée. Je me reprcfente j, reftroyable armée des Turcs devant Vienne , & une aucrc j, fort nombreufe de Chrétiens qui la vint attaquer. Nous „ autres grofTiers nous aurions cru que les Chrétiens apperce- „ voient les Turcs, & les Turcs les Chrétiens. Mais M. l'Ab- „ bé ncius tait bien voir que c'eft en ;uger comme le peuple , „ qui n'a pas foin de rencrer en foi-mcfme pour écouter le „ Maitre intérieur. Il nous apprend que les Chrétiens ne „ voyoient qu'un nombre prodigieux de Turcs intelligibles, „ couverts de turbans & de veftes intelligibles , dont pluficurs j, eftoient montez fur des chevaux intelligibles , & le refte ,j de mefme : c'eft à dire, comme i! vient de nous l'expliquer, „ un nombre innombrable de parties quelconques del'ctcn- „ due intelligible , qui cft l'inim>.nfité de l'Eftre divin , tail- „ lées & foimées en Turcs , en vtftes , en turbans, en che- ,, vaux , en tentes, aufqucUes l'ame de chacun des fpeda- j, tcuis appliquoit les fenfations des couleurs convenables „ qu'elle avoir reçues de Dieu à l'occafion des Turcs invili- „ blés, des turbans invifiblcs , des tentes invilibks qui eftoient „ devant Ces yeux. Je me doutois bien que cela ne plairoit pas aux partifans de votre nouvelle Philoi'ophie ; &: c'elt ce qui me fît ajouter : „ Il vouloir pourfuivre : mais M. l'Abbé l'interrompit, ne „ trouvant pas bon qu'on tournait en raillerie une dodrinc „qui lui paroilîoit fi avantageufe à la Religion , en ce qu'elle ,j fait voit d'une manière adoairable l'union de nos efpnts a- DES SCAVANS. 307 vcc Dieu , Se la dépendance qu'ils onc non fenlemenc de " fa puiflance , mais auffi de fa fageOe. " Celafuffit, Monfieur, lui dit-il. Tout ce que vous ajou- " tcricz ne l'eroic que la mefmc chofe. Mais pcitnetrez moi " de vous dire que la dodnne que je vous ai expliquée , me " paroir (î conforme à la Religion , que jc me croi mdilpenfa- '* blemcnt obligé de la fouccnir aur.mc qu'il me fera pollible. " J'aime mieux qu'on m'appelle vifionnaire, qu'on me traite" d'illuminé , & qu on dife de moi cous ces bons mots que Fi- '* rnaginacion , toujours railleufe dans les petis efpiirs , a de " coutume d'oppoler à des raifons qu'elle ne comprend pas , " ou dont elle ne peut fe défendre, que de demeurer d'ac- " cord que notre elpric puilfeappercevoir autre chofe que des " corps intelligibles , puis que les matériels font ircapabks" d'elîre connus en eux-mefmcs , ne pouvant eike iutin:e- " ment unis à nôtre ame. " C'cft comme on a du faire parler l'Abbé , pour lui confer- ver f^n caradere ; puifque c'eft ce que vous mefme auriez dit fans douce fi vous aviez efté de cette ailemblée, &: que vous cuffiez eu à vous défendre en pcrfonne. Mais comme ce qu'avoir dit le Doéleur n'efl qu'une très fîdelle expofition de voire doctrine appliquée à un exemple particulier , de non feulement une confequence qu'on en euft tirée, vous n'auriez pu vous plaindre d'tftre tourné en ridicule , que ce ne fud avouer qu'il n'y a rien en effet de plus ridicule que cette ima- gination , que ce n'eft pas notre propre main que nous voyons lors que nous la regardons ; mais que c'eft une main intelligi- ble qui lui relfemble. Il eft donc permis d'en rue ; & ja- mais ce que dit le Poète ne fut plus vrai : -' Ridendo dicere verum Quid vetat ? Cependant , Mon Révérend Père , vous ne vous cftes pas contenté de vous plaindre que M. Régis à mon imitation avoic traité cette penfée de chimérique , & vous avoir tourné en ridicule : mais vous avez prétendu que le fentimcnt que nous avions pu traiter l'un &: l'autre de chimeriq^ue , efloit le fea- 3o8 L E J O UR N A L ciment de faine Auguftin, & qu'ainfi nous n'avions pu ^r ce- Ja vous tourner en ridicule fans que cela retombaft fur ce faine Dodteur. Pouvez vous nier que ce ne foie une calomnie , à moins que vous n'ayez prouvé par des partages bien clairs de ce Pè- re, qu'il a cité comme vous dans cette étrange imagination, que nous ne voyons point les corps que nous regardons &: que nous penfons voir ; mais que nous voyons au lieu de ces corps qui font devant nous , des parties quelconques de l'étendue intelligible qui leur rcfTemblent. Or comment le prouveriez vous ? Il faudroit pour cela qu'il cuft cru aulîi-bicn que vous, que la fubftancede Dieu ert formellement étendue : car cela e(l effentiel à votre dog- me , quelque peine que vous vous foyez donnée pour n'en pas demei rer d'accord , afin d'éviter la confufion qu'on vous auroic faite d'une erreur fi grofïïere , &: fi indigne d'un Philo- foplie Chrétien. C'eft de quoi , Mon Père , je précens vous avoir convain- cu dans les deux dernières des neuf lettres que je vous écri- vis il y a neuf ans , dans le dellein que je pris de m'adrefi'cr à vous-mefme , afin de tenter fi nous ne pourrions point ter- miner nos difputes d'une manière fi bon r, été & fi modérée, que les plus fcrupulcux en matière de douceur en fufl'cnt édi- fiez. La matière des deux dernières cftoit fi importante , com- me j'avois eu (bin de le faire remarquer au commcncemenc de la huitième , qu'il n'y a poinc d'apparence que depuis neuf ans vous n'y euflîez rien répondu , fi vous l'aviez pu ; & je ne doute point que tous ceux qui les liront ne fuyent perfuadez que cela vous elloit impolfible. Je n'ai donc qu'à y renvoyer, pour en conclure qu'il eft bien ctrangc que vous ayez o(é foutenir de nouveau votre opinion de la vue des corps en Dieu , après avoir cfté convaincu d'ad- mettre en Dieu une vrayc Se formelle étendue femblable à celle de i'efpace des Gaflendilîes -, dans laquelle on puiifc di- ftingucr de plus petites Se de plus grandes parties , quoi qu'el- les foicnc toutes de mefme aacurc. "j l C'cft DES s CA VANS. 309 C'eft parla que je finirai ce premier point ; Se j'attendrai pcut-eftrc que vous y ayez répondu, avant que de vous parler de l'autre , qui regarde le prétendu bonheur des plaifirs des fcns. Ce ^. Mai jép^. TRAITE' CONTRE LE LUXE DES COtFFURES. In 12. à Pans chez Edme Coutcror. t 694. Quelque peu de fuccés qu'il y ait à cfperer pour ceux qui ofent s'oppofer au torrent delà coutume , l'Auteur de ce [laité déclame avec véhémence contre le luxe des coefFu- rcs ; &: pour en infpirer de l'horreur , il fait voir qu'il eft con- traire à la nature confiderée en quatre manières , en clle-me{l me , comme ouvrage de Dieu , comme corrompue par le péché , & comme rétablie par la Religion. I! montre que la nature en elle-mefme eft fimple & fans afFeclation , (Incere , &: ennemie de déguifemcnt j que riche de fon propre fonds , fi elle fe fcrt de l'art , ce n'cft jamais pour s'abandonner à fon caprice. Comme fortie des mains de Dieu elle eft parfaite , &: ne veut pas eftre défigurée par l'artifice de nouvelles modes. Chargée de honte & de con- fufion depuis fon péché , bien loin de rechercher l'eclac des parures , elle fe couvre de cendres , & porcc les marques de fa pénitence. Reparée par le Chriftianifme , elle s'attache à Ja venté , à la fainteté , à la pureté , & à la jufticc , vertus qui condannent ia vanité des coeifures. Voila ce qui eft con- tenu dans le premier chapitre. Dans le fécond font reprcfentcz les dangereux effets qui naiftent de l'excès de ces ornemens , la dépenfe , la perte du temps , la galanterie , l'amour du bal &. de la comédie , le dcfir de plaire. Les raifons dont les femmes & les filles fc fervent pour autorifer leurs parures de rcfte , font examinées dans la fuite , avec les motifs qui les peuvent porter à renon- cer à cette vanité & à ce luxe. Ces deux chapitres font accompagnez de deux portraits, 1694. 1 i i i 3ïo L E JOURNAL dans l'un defqiu's on voit le caradere d'une Dame modefte, & dans l'aucre celui d'une coquece. LES PAROLES REMARQUABLES , LES BONS Mots , (^ les Max'.mes des Orientaux. TraduHion de ieun ouvrages en Arabe , en Perf.tn , e^ en Turc ; avec des nmar- ques. In 12. à Paris chez Simon Benard , rue faint Jaques, & Michel Brunec , au Palais. 1694. MR. Galland a fait ce Recueil à l'imitation ^c Valerc Maxime &: de Plucarque , qui nous ont lailîe par écrie quantité de réponfes ingenieufes des anciens Grecs & Ro- mains. Il l'a divifé en deux parties , dont la première contienc les paroles remarquables des Orientaux , qui font voir la viva- cité de leur efprit , & la droiture de leur amc ; & la féconde, leurs maximes , qui découvrent les règles qu'ils fuivoienc dans leur conduite. Sous le nom d'Orientaux il comprend non feulement ks Arabes & les Perfans , mais encore les Turcs &: les Tartarcs, & prefque tous les peuples de i'Afie jufques à la Chine , foie Mahometansou Paycns. A l'égard des paroles remarquables, il en a choifi une partie dans les livres imprimez , &: l'autre dans les manufcrits. Les livres imprimez dont il s'efl: le plus fcrvi , fonti'hilîoire des Califes par l'Elmacin ; l'hiftoire des Dinalties par Abou-lfarage , & le Guliltanqui cft un ouvrage de Sadi en Perfan. Les manufcrits font le Bahariftandc Giami en Pcrfan,com- pofé fur le modelé du Guliftan. L'inftrudion d'un Roi du Mazandcran pour fbn fils, auffi en Perfan. Ce Roi s'appelloic Emir Onfor el Maalj KiKiaous , &: vivoit dans l'onzième /îeclc de l'Ere Chrétienne. L'abrégé de 1 hiftoirc Mahometanc en Perfan. L'hiftoire des Poètes Turcs par Letifi , & pluiîcurs autres. Les Princes qui ont dit ces paroles , & les pays où ils or.c étendu leur domination , cfloient peu connus en Europe. M. Galland nous a appris par fes remarques , ce qu'il eftoic neccfTairc d'en fjavoir. II nous a avertis que Ginghizkan rc^ DES SCAVANS. 5ti gna vingt cinq ans avec grand éclat ,& mourut en iiié. qu'il porta. Ces arnics vidorieufcs dans la grande Tartaric, dans les Indes , dans la Chine , &l dans tous les pays qui font au Sud de laMoCcovic, delà mer Cafpiennc , &c de la mer noire. Ginghizkhan laifla aux peuples qu'il avoit conquis , la H- berté de demeurer dans la Religion où ilsavoient eflé élevez. A juger de celle dont il failoit profeflîon , par les circonltan- ces de Ton hiftoire il femble qu'il n'eftoit point M^hotnetanj, &: que le culte qu'il rendoit à Dieu n'avoir pas beaucoup dé- généré de celui que Japhet avoit porté en Tartarie. Ce qui a beaucoup fervi à pcrfuader qu'il n'cftoit pas Mahometan, c'eft qu'il ne reconnoilloit point la necclTîté du pèlerinage de la Mecque, duquel Mahomet a impofé l'obligation à Tes feda- teurs au moms une fois en leur vie. Ce commandement eftoit fondé lur une faufle fuppofition qu'Abraham & Ifmael y avoient élevé un temple. M. de la Croix le père a recueilli i'hiftoire de Ginghizkhan de ditïcrens auteurs Arabes , Per- fans & Turcs , & la doit bien-tôt faire imprimer. Ce qui efl: rapporté des biblioteques que les Indiens , les Perfans , & les autres Orientaux portoient fouvcnt dans leurs voyages , donne lieu à M. Galland d'obfcrver que le grand Vizir Kupruli tué a. la bataille de ialanKcmen , n'alloit jamais en aucun endroit qu'il ne fîft porter plufieurs coffres remplis de livres, & qu'il donnoit à la ledure le temps que lui laif. foient les affaires. Il faifoit plus , il enfeignoit ce qu'il avoic appris à foixante écoliers qu'il nourriifoit à Conflantinople, Les maximes qui font la féconde partie de cet ouvracre font puifées des mefmes fources. Mais la clarté avec laquel- le elles font énoncées , a rendu les remarques inutiles. M. Galand promet de continuer ce recueil , ôc de donner bientôt un fécond volume , dont d'autres originaux qu'il con- fulte lui fourniront la matière. 311 LE JOURNAL DE L'IMITATION DE JESUS- CHRIST, TRADU- flion nouvelle. Par Paul Antoine de MurfiUy. Jn iz. à Pa- ris chez André Pralard. i 694. T'Ai parlé djns le Journal de tant de tradudions de l'Imita- I tion de Jcfus-Chrift , que je ne fçaurois rien dire de nou- veau de celle-ci. La louange particulière de l'original cPt que plus on le lit , & plus on y trouve d'attrait. Ceux qui le lifent pour le tra- duire , y apportant plus d'attention que les autres , le doivent encore mieux goûter. Qii^e s'ils prennent la peine de conférer les précédentes traduélions avec le texte Latin , ils en re- marquent les beautez & les dctauts , &: profitent hcureufe- mcnt du travail de ceux qui le (ont occupez avant eux fur le mefme fujet. Je ne doute point que celui de qui nous te- nons cette tradudion , n'ait pris ce Coin- là : fort louable d'a- voir ajouté quelque nouvel agrément à des maximts & à des règles qui ne fçauroient jamais eftre lues avec allez d'^llîdui- té, ni obfervées avec allez d'cxaélitude. TRADUCTION DE L'ODE LATINE DU S. DE F repetit de Grammont , Profefjeur £ Eloquence au Colleys des Grjffîns^fnrU machine de Saint Maio. Jn S. à Patis chez Louis Sevcftre. 1694. LE mauvais fuccés de la Machine préparée par les Anglois contre la ville de Saint Malo , cil décrit dans cette Ode Latine &: dans la traduclion Françoife de M. de Prepetit de Grammont , avec la mefme élégance que le dcfordre de la Li- gue d'Aulbourg l'eft dans le poeine Latin & François du met- me Auteur , dont j'expliqu.ii le defl'ein dans le 11, journal. A PARIS, Chez Jean Cusson , ruë faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptlftc. Avec privilège du Roy XXVII. 313 LE JOURNAL DES se AVANS. 5 Du LuNDY 12. Juillet M. DCXCIV. CATECHISME OU ABREGE' DE LA DOCTRINE Chrétienne , impnmcx^par l'ordre de Monfeigneur l' 1 UuflriJJtme & Reverendiffime P. P. archevêque de Bourges , pour ejire feuls en feignez^ dans [on diocep. Troifiéme Edition , revue ^ titigmentée. In 12. 2. volumes, à Bourses, ^x. fe crouve à Pa- ris chez Louis Guerin. 169^. F Eu M. l'Archevêque de Bourges a donné dans ces deux volumes trois catechifmes à Ton diocefc. Le premier cfl: dune jufte étendue pour les fçavans , & pour les Cace^ hiftes mcfraes , & fe réduit à cinq chefs , fçavoir à ce que chaque Chrétien e(t obligé de croire , de recevoir, de faire , d evicer, & de méditer. Le fécond eft pour ceux qui commencent ; &: le troifiéme pour ceux qui fe préparent à recevoir les Sacrc- incns. Le premier efl; précédé d'une inftruétion necefTairc aux Cu- lez , & qui fait la féconde partie de la préface. Ces trois Ca- techifmes font fuivis de plufieurs traitez, fçavoir des prières du matin & du foir à Tufa^e du diocefc , d'une mecode de l'oraifon mentale à l'ufagc des Ecclcfiaftiques du Séminaire, 1694. K k k k 1,4 LE JOURNAL d'un exercice de pièce pendant la Melfe , dreflc particuliere- menc en faveur des jeunes Ecclefiaftiqucs du Séminaire ; d'une inibuâion fur la tonfure , d'une autre fur les Mifteres , pour fcrvir de fupplcmenr à ce qui en a efté dit dans les catechifmesi de motifs ou de vues pieufespour une Religicufe obligée à ré- citer le grand office dans une langue qu'elle n'entend pas , & d'un extrait des vies des Saints. Ces motifs propofez à la Religicufe confiftcnt a s'unir aux créatures inienfibles qui louent Dieu par un langage muet qu'elles n'entendent pas: à eftre bien-aifeparun efprit dcpé- nitence d'ignorer les chofes dont elle devroit eftre le plus in- ilruite ; à fe contenter que fes lèvres louent Dieu, à Ce fou- mettre avec humilité à l'ignorance des langues , dont la con- fufion elt le julte châtiment de l'orgueil des anciens qui a- voicnt entrepris la tour de Babel ; à s'imaginer qu'elle ert un inftrumenc de mufique , &: que les paroles que le faint tfprit lui mec dans la bouche , font comme le loufle qui anime les orgues dont on fe fert fi utilement dans les temples. PREMIERE LETTRE DU P. MALEBRANCHE frétre de l'Oratoire , a M. Arnauld DoHeur de Sorbonne. DE quoi vous avifez-vous , Monfieur , de réveiller les cfprits fur les conteftations que nous avons eues enfem- ble il y a dix ans ? Eft-ce que vous efpcrcz encore de me tourner en ridicule fur le fentiment que j'ai des idées , & de me rendre odieux fur celui que j'ai des plaifirs ? Aflurémenc vous vous trompez, le temps en eft parte. Vous pouviez pcut- eltre autrefois donner des airs ridicules à ce vifionnaire qui croit , que les- ohjeti que l'on voit font bien differem de ceux qu'on rcg.trde. Mais ce fentiment , tout bizarre qu'il vous ait paru &r qu'il vous paroille encore aujourd'hui , trouve créance dans les cfprits : S>c on commence à avoir une fecrete horreur de cette opinion que vous foutenez , Que les idées ne font que dei mod. Les deux volumes dont je viens de parler vous eftoicnt cer- tainement connus. Mais peur-eftre ne fçaviez-vous pas que depuis ce temps j'en ai compofé un troifiéme qui a pour titre : Entretiens fur la Metaphifique ^ fur la Religion^ imprimé pour la première fois en 1688. dans lequel je croi avoir démontré le fentiment que j'ai fur la nature des idées. Mais, Monfieur, fuppofé que ma Réponfe à votre Dcfenfe ne foit pas de plus nouvelle datte que votre Defenfe : fuppofé que je n'aye pas fourenu le m.efme fentiment fort au long dans quelque nou- vel ouvrage ; quel droit avez vous de conclure que vous m' a- vez^rédttit au filence par h yfand jour que vous avez répandu fur la matière contedée ? Par exemple , dans les lettres que j'ai publiées contre les vôtres en 1687. je croi avoir démontré que la Grâce n'edpomt efficace en elle mefme dans le (ens que vous l'entendez. Vous n'avez point que je fçache répondu à ces lettres. Penfcz- vous que cela me donne droit d'écrire que je vous ai réduit dans le (îlence pur le grand jour où j'ai mis cette matière ? Il y a trois de mes Réponfcs aufquelles je ne fçache pas que vous ayez répliqué , Içavoir ma Reponfe à vos lettres^ & mes deux Reponfes à vos Ref exions Philo fcphiques (^ Thtolo- gtques. Ne me rendrois je pas ridicule fi je me flatois fur ce- la que je vous ai réduit au filence , &: fi j'allurois publique- ment que je ne me trompe point , puis qu'il y a plufieurs années que vous me laifiez en repos ? Combien y a-t il d'Auteurs qui vous ont attaqué , & que vous avez laiffez fans réponfe ? Eft-ce qu'ils vous ont réduit au filence ? Vous n'efies peut- cdre pas fiché qu'on croye que vous les avez mépiifez. J'en- tens leurs ouvrages : car vous ne raéprifez pas leurs perfon- nes. Mais croyez-moi , vous auriez mieux fait de vous dé- fendre , que d'attaquer des gens qui vous lailfoienc vivre en paix. faites , Monfieur , un peu de reflexion fur tout ceci , & 1694. LUI 3 1 8 LE JOURNAL voyez fur quel fondement vous pouvez me dire : On a donc dû c^re fur pris , Mon R. P. qu après un fi Ion q^ filence fur cei deux points , n'ayant rien à répliquer à celui qui les avoit traitez^ à fond , vous vous fo\ez^ avifé de les foutenir contre un h.ibile Philo^ fophe qui ne la avoit traitez^ que Iczeremcnt , ^ qui ypus avoit renvcyé , fur tout à l'ègnâ du premier qui ejt Li vue de^ corps en Dieu , k ce que fen avois cent. Car fi vous vouliezjvous ^uftifia fur ces deux doinies , pour aqir de bonne foi , ^ ne pas iroynper le Pu- blic , vous ne dev.ct^pas vous arrêter feulement à ce quun nouvel advcrfaite vous en avoit du en pajfint , mais répondre folidement a celui k qui il vous renvoyoït. Et au lieu de cela vous ewploycz^di- verfes iUuJtons , i^ deux faujfetez^tn fuites , pour b er à M. Régis davantage qu'il avoit cru pouvoir tirer de ce que favois écrit contre vous. Réponse. H y a pluficurs années que je croi avoir mis le mcclunt procès que vous m'avtz l'ait en eliat d'eflre juge par le Public. Il paroit par mes deux premières RcponCes, qu'il n'elt pas vrai que/V ri avais rien à répliquerai, vos excellens ouvrages. Long- temps après il a plu à M Rcgi^ de m'inter- roger 5 j'ai ciu élire obligé de lui repondre. J'ai donné fix vo- lumes à votre réputation , &r fi vous le voulez , à vos raifons. Pourquoi ne voulez vous pas que j'accorde un livret à M. Ré- gis î Pour agr de bonne foi , dites vous , ^ ne pas tromper le Pu- blic ^ (tour cela coule de fource , & fans que vous y penficz) vous ne deviez^pas vous arrêter à ce qu'un n'.'Uvel adver faire vous avoit dit , m lis répondre foli devient à celui à qui il vous renvoyoït. Q^i vous a dit , Monfieur, que je me fois feulement arrêté à ce que M. Régis m'a du ? Je croi lui avoir bien prouvé la vericé de mon fentiment &c la fauiîeté du fien , en me fervant des principes qu'il reçoit ; & cela dans les quatorze premiers ar. ticles de ma Reponfe. Enfin je croi avoir folidement répondu il y a dix ans à votre livre des vrayes ^ desfaujfes idées ^ & fuf- fifamment à voti e Dcfenfe. Le bon fens veut qu'on oblige M. Régis à répondre aux preuves que j'ai données de mon fi^ntiment , parce que je les ai appuyées fijr des principes qu'il reçoit dans le livre mefmc qù il m'attaque. M. Régis n'a nul droit de me renvoyer à.vc. DES SCAVANS. 3,9 tre ouvrage , parce qu'outre qu'il fçait bien que j'y ai répon- du , il n'eft pas vrai-femblable que vous puiiïiez réfuter foli- demenc des livres avant qu'ils foient faits. Du moins me de- voitil marquer les endioics q^\ fatufaifoient fkincment i^ux 1^. premiers afticies de ma Rèponfe. ht en ce cas au lieu de le ren- voyer généralement comme j'ai fait à ma Rcponfe , je lui en aurois aufli fpecifié quelques endroits. Cependant il vous plaie de dire que je n'agis pas de bonne foi , (^ que je veux mompcr le Puhlic. Prenez donc , Monfîcur , le fait & caufe de M. Re^is. Ré- pondez vous-mcfme pour lui aux quatorze premiers articles de ma' Rcponfe à ce Philofophe , aufquels il afiurc ^ue vous avez^pletncment fatufuit. Cela ne doit pas eftre difficile : car apparemment vos principes s'accordent avec les fiens. Si vous mettez la queftion dans un grand jour , je me rendrai avec joye à l'évidence de vos preuves. Mais je pourrai bien gar- der le filence , s'il me paroit comme il m'a paru jufquà pre- fcnt , que vous ne faites qu'obfcurcir la nutiere des idées. Mais voyons hi illtijions ^ les deux faiijj'cte\in[i'ines qu'il vous a. plu de m'attnbuer. Le fondement de ces, illufions jc'eft que j'ai oppofé Tautori- té de faint Auguftin à la vôtre. Cette oppofition n'eft pas ju- (ie , dites vous. Cela fe pourrait dire fi n'ayant point traité ex- preffement cette matière^ j'avais [euieryient témoigné dans quelque livre que je neftois point en cela du [intiment du P. Malebranchs. M^is l'ayant combattu par des raifovs qui m^ont paru convaincan- tes , (f?- qui ont ejié jugées telles par beaucoup d'habiles C qui commence par ces paroles : Jl y a damfaint yîugu- Jim une infinité de pajf.iges , &: la page fui vante entière. Et par- ce que j'y parle de l'ordre Se des loix éternelles , que je n'ex- plique pas aflez en ce lieu , &: qu'il faut bien entendre , pour juger d'une partie du feptienie Exemple de votre Dèfenfe , il y joindia ce que j'en dis dans les Eclaircijjemcns , page y^o. & les deux ou trois fuivantes. Enfuite il lira dans ma Reponfe à vo- tre livre dci vrayei t^ des fauffes idées , page 150. de la premiè- re édition , ou 1 40. de la féconde , ce que je rapporte de vo- DES SCAVANS. 3i7 trc texte ; & il le confrontera avec foin avec ce mefme texte dans votre livre p. 191. pour voir s'il y eft conforme ; & puis il lira la réponfe que j'y ai faite. Cela fait , il examinera avec foin le feptiéme exemple de votre Defenfe , p. 313. & con- frontera toujours les endroits citez , afin de s'alfurer fi vous avez bien pris & bien expofé ma penféc. En un mot il fera toujours dans une jufte défiance de furptife : parce que des difcours coupez n'ont que le fcns qu'on leur veut donner , Se que daiM les matières abflraites ils font très fouvent équi- voques. Cela fuppofé , je prétens , i. Que le Lcûcur verra claire- ment que dans le texte de la Recherche de la Vrricé que vous rapportez dans le Journal , p icjy. lig, 54. je r.'ai pas dit ce que vous m'attribuez , qui efi: : iju'on rje voit point en Dieu les veritezjmmuables ^ necejj.tireu Car cfledivcmenr je ne l'ai die nulle part. Y i\{cv\ç.mzT\x. à^\i^qu iti ne voit point Dieu envoyant les veritez , ( quoi qu'on les voye en Dieu ) rriAis eu voyant les idées de ces veritez^ Car quoi qu'on voye en Dieu les idées , Ôc par confequent les veniez^, ( puis que les veritez ne font que les rapports qui font entre les idées ) j'ai cru ne devoir pas di- re comme faint Auguftm , qu'on voyait Dku en quelque marùcre dés cette V'e en voyant Us veritez^, mais pluibi en vcyjjit les idées de ces veritez^; parce que les veritez ne font que des r.ipports entre les idées Mais les idées font la fuhfîancc mefme de Dieu , non félon fon eftre abfolu , mais entant que rcprefcn- tative àts créatures , & participable par elles ; ainfi que je croi l'avoir bien prouvé dans mes livres. Mais quoi qu'il y ait quelque différence entre la manière dont faint ÂuguRin s'ex- prime ordinairement & la mienne , ( non à l'égard de la vue des veritez en Dieu , car à cet égard il n'y a point de diffé- rence ; mais à l'égard de la vue imparfaite de Dieu en cette vie, ) il ne peut y avoir de différence dans le fond. Car Ci c'eft voir Dieu en quelque manière que de voir en lui les ve- ritez éternelles , comme que deux & deux font égaux à qua- tre , il efl: neceffaire qu'on voye auffi en lui ces nombres entre lefquels il y a un rapport d'égalité. Auffi depuis que j'ai com- pofé. la Recherche de la vérité , j'ai remarqué fouvent dans 3i8 LE JOURNAL faîne Auguflin , qu'il met en Dieu les nombres, & qu'il les ap- pelle dtvms ^ éternels , pour les diftir.guer des chofes nom- brces. Mais il ne s'agit ici que d'un fait , que vous répétez fbuvent comme le fondement dune in/tgne fan/Jeté du P. Male- branche , fçavoir fi j'ai dit expreffement qu'on ne voit point en Dieu les veritez^ neceffaires ^ immucibles. 1. Le Ledeur verra clairement , <^^\'aveti tant rebattu, dont vous dites que je me fuis fait honneur dans la Recherche de la Vérité ^ de n'eftre pas de l'avis de faint j4uquftin touchant la vue des ■verite^eternelles en Dieu , n'eft qu'une méprife de votre part. Il n'y a qu'à lire ce qui précède & ce qui fuit ces paroles dont vous tirez cet aveu : N^us ne voulons donc pas nous fervir -, ^c. & on verra bien qu'il s'Jgit , 5/ on voit Dieu en voyant les ve- ritez éternelles ; &: non pas, Si on voit en Dieu les verirez eter- ncllcs. Tout mon raifonnement (uppofe qu'on voit en Dieu les veritez éternelles , bien loin d'avoir fait un aveu contraire. Mais comme ces veritez ne font que des rapports qui font en- tre les idées éternelles , j'ai cru qu'il eftoit plus clair de due qu'on voit Dieu en quelque manière lors qu'on voit les idées éternelles , que lors qu'on voit leurs rapports. 3. Ce qui furprendra étrangement le Lcclcur , c'efl que dans le chap. 21. de ma Reponfe au livre des vrayes & des fauf- fes idées , il verra que je vous avois averti de votre méprife par un paffage que vous en rapportez vous-mefme, Joarn. p. ijf^. Il fera furpris , dis je , qu'au lieu de tâcher de la recon- noitre en eftant averti , vous avez employé dans votre Defen- fe Exemple 7. une douzaine de pages à de perpétuelles brouil- Jeries , &: à quantité de jolis traits de votre defobligeante Re- torique. Il jugera apparemment que fi j'ai cftè réduit au [tien- ce , ce ne peut eftre du moins à cet égard par le grand jour où vous avez mis la matière , mais plutôt parce que je ne croi pas devoir répondre à ceux qui ne me veulent pas entendre , &C qui me paroiflent trop émus. 4. Quelque attention qu'apporte le Lefteur à l'examen de votre lettre , voici une chofe qu'il ne comprendra pas bien aifcment. Vous rapportez ce texte , Journ. p. 296. Selon ce faffuge faint Augitfiin prétend que l'on voit Dieu ( en quelque ma- nière DESSCAVANS. 329 nicrc ) Ion quon voit les veritez^ éternelles. Et moi je dis dans ce tnefme fajjage , qu'on voit Dieu fen quelque mamcre J iors qu'on voit les idées de ces veritez^ Le Lecteur croira fans doute que cet tn quelque maniete n'a efté ajouré ( en l'ajoutant j'avois obfervé le changement de caraderes) qu'afîn qu'on ne crull pas que le fentiment de faint Auguftin ni le mien fuft que àks cette vie l'on vift l'efTence divine , ou que l'on vift Dieu parfaitement Jors qu'on voit les vcritez éternelles. Mais félon vous , il fe trompera fort ; car voici ce que vous décidez. Ces mots en quelque manière ne fontni dans le pajfj^e de faint Anqufltn ni dans le votre -, ^ vous ne les avez^ ajoutez^ que pour faire trouver quelque conformité entre le ouy ^ le non. Voila ce que le Lcdeur ne comprendra pas Car enfin , que ces mots qu'on fuppofe finement ajoutez à ce paffage , en foient retranchez , il me femble qu'il n'y aura ni plus ni moins de conformité entre faint Auguftin &: le P. Malebranche. Enfin quand ce Leéleur attentif Si laborieux , qui ne veut point juger au hazard , aura examiné mon fentiment fur l'or- dre immuable &: les loix éternelles , & les cinq ou fix der- nières pages de votre 7. Exemple , j'efpere qu'il décidera que vous n'avez pas bien compris mes fentimens. Mais je crains qu'il ne s'irrite par la leélure de vos lettres , & qu'il ne vous traite devant fes amis comme vous m'avez traité devant tout Je monde. Comme dans ma première lettre je n'ai expliqué qu'en peu de mots ce que c'eft que voir les corps , & pourquoi en fuppo- fant que les couleurs ne foient que dans l'ame , il eft necelfai- re félon les principes de faint Auguftin , ( il n'eft maintenant queftion que de ce faint Dodteur ) de dire que ce n'elt qu'en Dieu qu'on les voit , vous me permettrez de renvoyer le Le- £leur qui voudra prononcer fur cet article à ma Reponfe à vo- tre Defenfe depuis la page 1 4. jufqu'à la 20, au chap. 7. de ma Heponfe aux vrayes ^ faujps idées , &c à ma Reponfe à M. Régis fur cette matière. Il jugera par là du 8. Exemple -, Se quoi qu'il foit encore traité plus au long que le 7, je croi qu'il ne le •trouvera pas plus folide. A l'égard du 6. & du 9. j'y ai ré- pendu exadement dans ma première lettre à vo:re Z)e/(e«y?. 1694. Oooo 33Û LE JOURNAL Le Lcdcur en eflat de prononcer par la Icdurc cxaftc des pièces , jugera en ma faveur , fi je ne me trompe. Du moins rcconnoicra-t-il que tout ce que je dis n'eft point après coup. Se 'jue je iùmpoff point ^offierement au Public. Il verra que je n'ai fo:nt efte contraint d'avouer que félon faint Augufiin on ne voit en Dieu que lei natures immuables. Je l'ai toujours avoué , ( Rccber~ cheds Liveriic p. 20 j.) parce que ce faint Dofteur croyoit qu'on vift les corps en eux-mcfmes ou par leurs efpeces , &: que les couleurs elloient dans les objets , ( voyez ma première lettre. ) ^e n'ai point de (avoué cet aveu dans le 7. chap. de ma Reponfe. Le Leiîtcur équitable qui comprendra clairemenc ce que c'ell: que voir Us corps félon mon fentimcnt , en jugera. Voila , Monfieur , bien des faits que vous appelleriez des in- fignes fauffètcx , & que vous me permettrez de nommer des nicprifes grolîieres , & qui pis cfl: , opiniâtrement foutenucs. je ferois trop long fi je rapportois toutes vos paroles , &: li je faifois fentir ce qu'elles fignifient &: ce qu'elles vallent par quelques rc flexions. Je lailfe cela à faire au Letleur éclairé & fans prévention. Le fond de l'affaire ell de fçavoir fi votre fentimenc eft dircdcment contraire à celui de faint Auguftin. Voici donc Ç\.\ï cela un petit raifonnement auquel je vous prie de me répondre. Vous ne pouvez pas nier que le fentiment de faint Augu- llin ne foit , qu'en voit en Dieulesveritez^eternelles. Je croi vous l'avoir prouvé, chap. 7. &: 2.1. de ma Reponfe à votre livre des idées par quantité de paflages formels de ce Père. Et fi l'on en veut une infinité d'autres , fans avoir la peine de les chercher dans la fource , il n'y a qu'à lire le 1. volume de la Philofophie Chrétienne d'Ambroifc VuSor, imprimée à Paris en 1667. Et votre fentiment eft que les modalitez del'amc font rcprefentatives de toutes chofes , & mefme de l'infini ( des vrayes & des faufTcs idées p. 3 • 5. ) vous prétendez que les idées ne font point différentes des perceptions que nous en avons. C'eft far ce fondement qu'eft bâti votre premier ouvrage touchant cette matière. Je raifonne donc ainfi. C'eft une vérité éternelle que deux fois deux font quatre., ou que \t^ triangles qui ont roefmc bafc Si mefmc hauteur ^ DES SGAVANS. 351 (ont égaux. Or cette vérité numérique n'cftant que le rap- port d'cgaliré entre les nombre z & i & 4 , &: la géométrique que le rapport d'égalité entre les triangles , on ne peut voir ces veritez qu'où on voit les nombres & l'idéede l'étendue, fans laquelle il cft impoflîble de concevoir aucune figure. Donc , félon votre fentiment , on ne voit point en Dieu ces veritez , mais en foi- me(me , dans Tes propres modifications , puis que félon vous , l'idée de l'étendue Se les nombres ne font que des modalitez de l'ame, comme vous le dites , ch. 6. des vrayes & des faufl'es idées , & p. 33 j de votre Defenfe, Ce raifonnement me paroit démonftratif , & à quelques méditatifs. Du moins fuffic-il pour vous faire avouer que j'ai eu quelque raifon de vous reprefenter comme contraire à faine Auguftin fur la nature des idées , & pour juftifier mon fenti- ment fur l'idée de l'étendue qu'on voie en Dieu : fentimenc que vous avez \\ fouvent raillé , & qui pis cft (lu lequel vous m'avez attribué d'adraetre en Dicu de l'étendue formelle, Defenfe 9. Exemple. Je ne fçai ce que vous en penferez : mais je fuis bien aflliré que le reproche que je vous ai fuit fur cela ne m'a pas dil attirer toutes les douceurs de vos lettres. J'ef- pere que vos meilleurs amis vous condanneront , pour peu qu'ils foient équitables. Il faut bien , Monfieur , que j'appelle des douceurs toutes les durerez de ces lettres , car vous n'avez point de fiel, ^ous m'avez^attaqué de la manière du monde ta plus honnête dans votre livre de Idées , pour ne point manquer à ce que les règles de l'amitié les plus feveres , ou pour mieux dire les plus fcrupuleufes pouvaient exiger de vous. Vous en avez^ perfùadé toutes les perfonnes raifonna- bles dans la quatrième partie de votre ©cfcnfe : à quoi je n'ai rien eu à. oppofer i comme monjîtence depuis dix ans le fait affe'Z^oir. Journ. p. 305. Rep. Je croi que le Le«Seur équitable qui aura lu votre livre des Idées avec ma Reponfe , & ma troifïeme lettre contre votre Defenfe , fur tout les premières &: les dernières pages, fera fort furpris de cet endroit de votre lettre. Mais s'il y joint la Remarque fur l'avis au leBeur de ma première reponfe à vos Rejîexiom philofophiques & thcojo^iquei , depuis la page 55» 331 ^ LE JOURNAL jufqu'à la dix-fcptiemc, fa furprife ccflera , & il fera convain- cu que ce que vous venez de dire eft de la meilleure foi du monde. C'eft une maxime parmi les Auteurs honnêtes gens, & qui fçavcnt vivre , que celui qui attaque a tore, s'il n'ufc de cer- taines précautions qu'il eft inutile que je rapporte. Mais de plus j'eftois votre ami : vous me donnez à chaque page de vo- tre première critique cette honorable qualité. Sur quel prin- cipe prétendez- vous donc avoir eu droit d'attaquer publique- ment la Recherche de la vérité qui paroiflbit depuis dix ans , &c de laquelle tout le monde fçait que vous avez dit mille biens, fans tenter auparavant ma converfion fur la nature des idées par la ledurc de votre manufcrit ? Vous en aviez envoyé une copie à Paris pour d'autres que pour moi & que pour notre ami commun, qui devoir le voir aulîî-bien que moi, puis que c'cft à lui à qui vous y parlez de moi. Et cependant ni lui ni moi ne l'avons pu voir. Dans le traité de la Nature ^ de la Grâce , je ne vous defigne ni directement ni indiredcmenr. Cependant j'en avois fait faire une copie , que je vous avois envoyée , & que vous aviez reçue. Tous ces faits-là font cer- tains par votre Defenfe mefme. C'eft donc , Monfieur, que cet infortuné traité qui ne defigne perfonne ni directement ni indircélcment , a eu le malheur de vous déplaire. Hé bien , que ne le réfutiez- vous, & que ne lailîiez-vouslàcelivre que vous aviez relevé par d'excclîivcs louanges ? Qiiel rapport entre la vue des corps en Dieu , pour me fervir de vos termes, &: le traité de la Nature ^ de la Grâce ? C'eft qu'il falloit d'à. bord faire pafler pour un vifionnaire qui voit en Dieu toutes \ chofcs, cet auteur tefheraire qui fappc le fondement de votre ( doftrine. Je fçai ce que je dois penfer de tout cela, & je vous protefte , Monfieur , que j'ai de bonnes raifons pour n'cftrc pas tant choqué des emportemens de votre deferife , que des prétendues honnêtez de votre livre des Idées. Le Ledeur fage & fans prévention , qui aura reconnu par j les endroits de mes livres que je lui ai marquez , qu'il n'y al prefquc rien de vrai dans la page 304. du Journal , aura peut- cftre' DES SCAVANS. 333 cftre la curiofité de s'eclaircir fi vous ne jugez point témérai- rement des defleins du P. Malebranche dans fes Méditations Chrétiennes, Et s'il jette les yeux fur la page 139. & les fui- vantes de ma reponfeot votre defenfe , où je vous lépons fur ce- la & au Miniftre Juricu , de qui apparemment vous avez pris votre raillerie; j'efpere que s'il la trouve plaifante , il ne la trouvera pas fage. Et s'il rencontre la page 2.7, de ma reponfe au premier volume de vos Reflexions Philosophiques ^ Theolo- qjques , dans laquelle je démontre la faufl'ecé d'un autre juge- ment téméraire que vous portez fur le mefme deflein de ces Méditations ^ il croira fans doute que vous jugez ici fans rai- fon des intentions fecretes. Mais venons au dialogue que vous apportez pour preuve certaine de votre honnêteté &c de votre équi- té à mon égard. On l'a lu : mais il mérite d'eftre relu , puis qu'il a mérité d'eflre r'imprimé. Je ne fçai , Monfieur , s'il vous fied bien à votre âge , de ftindre des hiftoriettes pour divertir le Public. C'eft une af- faire ferieufc que la queflion prefente , fçavoir s'il y a en Dieu de l'étendue formelle , &c s'il eft vrai qu'un Prêtre qui a dit cent & cent fois que c'eftoit une calomnie que de lui attribuer cet- te impieté , la foutient effedivement. Cependant au lieu de la traiter ferieufement , vous ne penfez qu'à faire rire vos a- mis. Cela paroit fade aux perfonnes bien fenfées. Nihilfœ- dius rifu irrijîone dîgniffimo , dit faint Auguftin ; & votre Poète quelque railleur qu'il full, n'auroit jamais dit dans une pareille affaire : Ridendo dicere verum quid vetat .' Il auroit appréhen- dé de fe rendre ridicule. Mais au fait , & ferieufement. Il eft certain que pour voir un objet , il n'eft pas abfolu- mcnt necefiaire qu'il foit prefenr ; il fuffit que les organes de la vue foient affedez de la mefme manière que s'il eftoit prc- fcnt. Il y a mille expériences qui prouvent cette vérité. C'eft pour cela que durant le fommeil , les fièvres chaudes , la fo- lie , on voit aduellement ce qui n'eit point en effet ; & que fi on regarde une piftole avec une lunette à fix facettes , il en patoit fix pour une , parce qu'alors le nerf optique reçoit fix imprcflïons femblables. Suppofons donc pour une plus gran- J694. PPPP 334 LE JOURNAL de précifion , que Dieu ait anéanti tous les corps qui nous en- vironnent , & que néanmoins les organes de nos fens foicnt âffeùez ou ébranlez par le cours des efprits ou autrement, de la mefme manière que fi les objets efloient prefens. Cer- tainement nous les verrions aduellemcnt comme nous les voyons. Mais où les verrions-nous ces objets & leur éten- due î Nous ne la verrions pas en eile-mefme ; car elle ell ruppofée n'eftre point j & le néant n'ayant point de proprie- tez , il n'eft pas vifible. II y a environ trente ans que les principes de faint Augu- ftin joints avec ceux de Defcartcs , m'ont fait naitre cette penfée , que dans cette fuppofition ']z ne verrois immédiate- ment que l'idée de l'étendue, ou l'étendue intelligible , & que par elle je verrois de l'ctendue matérielle , s'il y en avoir devant moi ; &: dans cette étendue intelligible des corps in- telligibles , & par eux des corps véritables. Car encore un coup il y a des preuves inconteftables qu'on ne voit point les corps en eux mefmes. Je penfe l'avoir bien prouvé après plu- fieurs autres , dans les Entretiens fur la Metaphifique. Je ren- voyé plutôt à mon dernier livre qu'au premier , parce que je Je croi plus exad &r plus précis , & qu'on me doit juger aujour- d'hui moins ignorant qu'il y a vint ou trente ans. Ce n'efl: pas fans flijet que je fais cçtx.ç. parentefe. Or je fuis perfuadé, Monfieur , par bien des raifons dites ailleurs , que cette éten- due intelligible qui feule peut affcfter les intelligences , \c% éclairer, les toucher , les frapper de toutes les fenfations & perceptions que nous éprouvons , ne fc peut trouver qu'en Dieu. Donc. C'eft uneimpieté, dires-vous dans votre <^ Or ces fix piftoles 33é - L E JOUR N A L {croient formellement étendues fclon vous. Car c'eft fur ce fondement que vous m'accufez d'admettre en Dieu de reten- due formelle : & ces fix piftoles idéales , ou pour le moins cinq , fcroient des modalitez de votre ame. Car fclon vous, ce font ces modalitez qui font reprefentativcs des objets , &: mefme de l'infini. Voila donc auffi votre ame formellement étendue , & par confcqucnt matérielle , divifible , mortel- le, &c. Il me paroit que ces confequences fuivent affez naturcllc- îTient de votre fentimcnt : mais je veux croire que je ne les comprens pasafl'cz bien. Rendez- moi la même juftice. Je dois fçavoir ce que je penfe mieux que vous ni que perfonne. Qu^cl- le peine avez- vous donc d'avouer que vous ne m'entendez pas, puis que je vous en ai fouvent averti , & que je vous l'ai fuffifamment prouvé, mefme dans cette lettre ? On croira que c'eft ma faute , & que je m'explique mal , ou pcut-eftre que je ne m'cntens pas moi- mefme. Cet aveu , Monfieur , vous feroit honneur , & j iftifieroit en partie votre courroux &vos invedives , & je ferois en repos : en eftat de m'occuper aulfi- bien que vous à quelque chofe de meilleur qu'à des contefta- tions qui fcandalifent les gens de bien. Ce ^.Juiâet z6pf. Fautes a corriz^er dans le Journal précèdent. Page 313. ligne 31. les efprits , lifez^\c$ efprits attentifs. P. 315.1. I 9. plu m'attribucr , Itfez^jpln de m'attribuer. P. 317. 1. 19. efficace en clle-mefme , ///^^ efficace par elle- mefme. P. 3 z 2. 1. 4. fi l'étendue , lifez^Ci l'idée de Tcrenduc. P 'A RIS, Chez Jean Cusson , rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptifte, Avec pivile^t du Roy XXIX. 337 LE JOURNAL DES se A VANS Du LuNDY lé. Juillet M. D C. XCIV. FASTI LUDOVICI MAGNI ACCURATE DIGESTT. In folio, à Paris chez Jean Aniflon , rue faint Jaques. 1654. QUoi que tous les genres d'écrire briguent de fervir à la louange du Roi , les Faftes n'avoicnt point encore eu cet honneur. Les y voici maintenant employez dans une ta- ble à plufieurs colonnes , qui contiennent en peu de paroles les principales adions de Sa Majcfté , & les plus remarqua- bles evenemcns de fon règne. Elle commence par la naiflan- ce de ce grand Prince, arrivée le 5. Septembre 1638. & finie par la vidoire remportée en Catalogne fur les Efpagnols par M. le Maréchal Duc de Noailles , le vint-feptiéme Mai der- nier. La langue Latine a elle préférée à la Françoife , en con- fideration de l'étendue qu'elle a, de la durée qu'elle fe pro- met , de l'avantage dont elle jouit de pouvoir faire palTer plus furcment les exploits les plus iurprenans à un plus grand nom- bre de nations , &: aux fiecles les plus éloignez. Les fuccés defavantageux à nos armes , qui ne font qu'en petit nombre , y font marquez avec des afterifques. Les noms propres des Généraux d'armée &: des autres Officiers qui onc 1694.. Qqqq 358 L E J OU R N A L eu part aux affaires , y ont cfté laifTcz en leur propre langue", de peur de les déguifer en les craduifanc. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. LEIBNITZ. JE ne fçai fi on continue encore à Paris les eftats ou liftes- anniverfaires des Baptêmes & des Mortuaires de cette gran- de ville j qu'on y donnoit du temps que j'y cltois. Ce deffeia a paru fort utile, aulîï bien que les Bdls ofmortalityàc Londres dont les habiles gens ont tiré des obfervations de confequen- ce. Cependant on pourroit aller plus loin , en faifant dreffcr une hiftoire annale de Médecine pour Pans 6c l'Ifle de Fran- ce , aufli bien que pour d'autres provinces ; fijr le plan que nous en a donné M. Ramazzini habile Médecin du Duc de Modene , avec lequel je fis connoifiance lors que je fcjour- nois dans ce pays-là. Je l'exhortai fort à exécuter & àpourfiji- vrc un deffein fi louable, il s'y eft porte enfin , & nous a déjà donné quelques années , m'ayant mcfme fait l'honneur de me dédier la féconde. Je les ai fait inférer dans les Colledions ou Ephemendes que nos Médecins Allemans qui s'appellent Curieux de la Nature , publient tous les ans depuis long- temps. Mais je ne doute point qu'en France on ne puifle en- chérir de beaucoup fur ces commenccmens. Ce Médecin y parle premièrement des faifons , & de la conftitution de l'air qu'on a remarquée durant le cours de l'année dans le pays dont il a entrepris de donner l'Hilioire Médicinale, fçavoir de la ville de Modene & de la Lombardie voifine. Apres cela il rapporte comment les grains & les fruits y ont réuffi , bc les maladies qui ont régné parmi les animaux ; & tout cela en abrégé. De là il vient au principal , qui eft la fanté des corps hum.ains , où il remarque non feulement les maladies & les fimptomcs epidcmiqucs , mais encore comment d'au- tres maladies en ont reçu du ch.^ngement , puis qu'il eft feur qu'il y a de grandes variarions , félon les confiirutions des temps. Sur tout il obferve quels medicamens ont eu le meil- leur effet , & ce qu'on appelle Nocentta ^Juvantia : & dans les deux années que j'ai déjà remues de lui , il a obferve de DES SCAVANS. 339 grandes diverfitcz , & comme des changemens du blanc au noir; entre autres , à l'cgard du quinquina, qui a incompa- rablement mieux rcufli dans une année que dans l'autre. Ec il ne faut point douter que des années femblables aux précé- dentes ne reviennent fouvent , où le paflTé feroit de grandifli- mc ufage pour fe régler làdeflus dans l'avenir : au lieu qu'à prefent on eft réduit à apprendre quafi toujours de nouveau aux dépens des malades. Il eft aifé de juger quel trefor d'obfervations nous aurions û Ton avoir fait quelque chofe de femblable depuis long- temps. Mais il eft toujours temps de commencer les bonnes cliofesï Ce qui fe devroit faire en plufieurs provinces , & mcfme par ordre public , eftant un point conridcrabie de Police , d'au- tant plus digne d'eftrc exécuté , qu'il ne faut que vouloir , & qu'il ne demande gueres d'embarras ni de dcpenfe. Et com- me la police eft excellente en France , ces fortes de deifeins s'y peuvent mieux exécuter qu'ailleurs. 11 ne ^roit point necelfaire qu'on fift par tout des livres en- tiers , comme on a commencé à Modene. Une lettre de quel- ques pages fulîîroit , qu'un habile Médecin Praticien enpour- roit écrire à l'égard de fa ville ou province , l'adrefTant , par exemple , à Monfieur le premier Médecin du Roi , fous l'au- torité duquel on en donneroit tous les ans un recueil. Il eft" vrai que les grandes villes , & fur tout la Capicalc du Royau- me , mcriteroit qu'on s'y etendift davantage ; & je m'ima- gine que Monfieur le Lieutenant de Police feroit ravi d'y te- nir la main , & de procurer des encouragemens à ceux qui le voudroient entreprendre. La France en donnant un fi bel exemple d'exaditude & de curiofité , rcndroit un fervicc très confiderable au genre humain , qui ne feroit pas indi- gne du glorieux règne du Monarque qui la gouverne prefen- temcnt. Les Mitradates , les Jubas, & les Gentius , à qui nous {bmmes redevables de quelques medicamens , n'au- roient rien fait de comparable à ce qu'on devroit à Sa Maje- ftc, fi elleprenoit en main le fait & caufc de la Médecine, comme elle l'a fait à l'égard de l'Aftronomie avec un fuccés auquel les foins des Alphonfes , des Ulug-Bcgs, &: d'autres- 340 LE J O U R N A L Rois femblables ne fçauroient êcre comparez. En cft'ct les hom^ mes ont bcfoin d'une aucorité aurtl grande que la fienne pour eftre ramenez au vrai chemin ; eux qui cxtravaguenc toujours hors d'eux- mefmes , fc négligent par un aveuglement qui femblc fatal , & qui meriteroit le plus leur application. Ec J'on peut dire que c'cft une vérité auflî certaine que déplo- rable , que l'ame & le corps font les premières chofes auf- quelles on dcvroit penfer, & les dernières aurquellcs on penfc. ANALYSE DE L'cVANGILE SELON L'ORDRE hiftoriquc de Li Concorde , avec dei d:jJertMions fur les lieux diffi- ciles, rar le R. P*** Prêtre de l'Oratoire. In 12. ] vol. à Paris chez Louis Roulland &: Jean de Nully , rue faine Jaques. 1694. L'Ordre du Nouveau Tcftamcnt fembloit demander que l'Anahfe des Evangiles precedaft celle àes Epitres qui parut il y a déjà quelque temps , &: dont je donnai l'extraie dans le feiziéme Journal de l'année 1691. La matière des dernières plus fufceptible de cette forme à caufc de leur obf. curité , fut ce qui détermina l'Auteur à commencer par elles. Maintenant il continue les Evangiles > avec cette metode, que comme ils font compofcz de faits hifloriques &r de dif- cours dogmatiques , il explique les premiers d'une manière qui n'y laiffe rien qui ne foit de la dernière évidence ; & quant aux fecons , il fuit la mefme forme que dans les Epitres, com- me la plus propre à en donner l'intelligence , examine quel cft le deHein gênerai qui règne dans tout l'ouvrage , &: U fu jet que l'Auteur s'eft propofé d'y traiter , dévelope les raifons dont il fe fert , défigne les preuves par leurs propres caraûc- rcs , & marque les lieux d'où elles ont efié tirées. Il s'c(t trouvé irrefolu fur deux diflSculcez qui touchent le fond de l'ouvrage. La première , s'il devoir faire à part l'a- nalifc de chaque Evangelifte , ou feulement celle de la Con- corde. En fuivant chaque Evangelifte , il feroit tombé dans deux inconveniens que nul avantage n'auroir pu reparer. L'un autoit efté de repeter plufieurs fois la mcfme chofe , fcloa qu'elle DES se A VANS. 341 qu'elle eft rapportée par plus ou par moins d'Evangeliftes. L'autre, de manquer à l'obligation de l'arialife , qui eft de re- mettre chaque chofe en fa place , quelque rang que les Evan- geliftes lui ayent donné. Ces confiderations Tont enfin déter- miné à entreprendre l'analife de la Concorde. La féconde difficulté eftoit de choifir entre les Concordes celle qui approcheroit le plus de la vérité de l'hiftoire. Celle qui fut imprimée à Paris par Savreux en 1654. lui a paru fidi- ftinguée de toutes les autres, qu'il n'a pas balancé à la leur pré- férer. L'Auteur de celle qui fut imprimée par Pralard en 1689. accufe toutes les autres d'un manifeftc renverfemcnt en ce qui regarde le bapcêmc de Jefus-Chrift , & la prifon de ]ean Baprifte , dont l'Auteur de cette Analife ne demeure point du tout d'accord ; ce qui l'oblige à répondre à tout ce qui eft avancé pour prouver ce prétendu renverfement. Apres tout , il reconnoit qu'il y a encore quelque chofe à redire dans la Concorde de l'année 1654. & en la fuivant il a pris la liberté d'y faire quelques changemens , foit pour la diftribution des matières , ou pour l'arrangement des pa- roles La prodigieufe diverfîré de fentimens qui partagent les In- terprètes fur les partages obfcurs , lui a impofé la necelîîté de confronter leurs explications aux fiennes , & de mettre à la fin de chaque volume des dilfertations pour rendre raifon de la préférence. La première efl fur ces paroles du 56. verfet du premier chapitre de faint Luc : Marie demeura avec Elifabeth environ trois mon : fur lefquelles il montre qu'elle n'y demeura pas jufqu'à la naiffance de Jean Baptifte. Car après que la fainte Vierge fut partie , l'Evangelifte rapporte la fuite des évene- merrs de cete forte : Cependant le temps auquel Elifabeth devait accoucher^ arriva. La féconde eft contre quelques Théologiens qui ont cru qu'il n'y avoir point eu de mariage , mais de fimples fiançail- les entre la Vierge &: faint Jofepii. L'Etoile qui apparut aux Mages , fait le fujet de la troifié- ine , où deux queftions fe prefentcnt. De quel pays de l'O- 1694. R r r r J4i LEJOURNAL rienc cftoient les Mages ; & en quel lieu l'ctoilc leur apparue, & fi tUc leur fervit de guide pendant cour leur voyage. Notre Auteur dcciiie la première , en ditant que les Mages ello.enc d'Arabie plutôt que de Perfe ou de Caldée , & fe fonde fur deux chofes. L'une ell la trop grande dillance de la Perfe &: de la Caldce ; & l'aucre la nature de leurs prefcns dont l'Ara- bie elloit féconde. Sur la féconde queftion il s'éloigne de l'opinion commune, qui porte que l'Etoile eftoit en Onenc. 11 tient qu'il ell au moins aulfi probable, que le fcns de ces paroles : Viàimm jîel- lam ejus m Oriente , eft que les Mages qui eltoient en Onenc virent l'Etoile qui eftoit fur la Judée , comme il eftoit necef- faire qu'elle y fuft pour vérifier cette prophétie de Balaam , rapporcéc au vint quairiéme chapitre des Nombres : Onetur fielLi exj.uoh. Si l'etoiIe s'eftoit levée en Orient pour de là conduire les Mages en Judée , la prophétie n'auroit pas eftc vérifiée. L'etoile fignifioic l'enfant qui de voit naître en Judée de la race de Jacob. Ce que j'ai dit ailleurs du fentimcnt du P. Lami fur les deux prifons de faint Jean Baptifte, me difpcnfe d'infcrer ici ce que i'Auceur de l'Analife allègue dans fa feptiéme diftcrtation pour établir l'unique prifon du f\int Précurfcur. L'onzième eft , de (çavoir fi la Magdeleine &: les deux Ma- ries font trois perfonnes diftinéles. Bien que notre Auteur mette cette queftion au nombre de celles qui font appuyées deraifons à peu prés égales , & qui demeurent toujours dou- teufes , il ne laiiTe pas de prendre le parti de ceux qui ne re- connoilfcnt qu'une mcfme perfonne fous le nom de Magde- laine , fous celui de Marie fœur du Lazare , & fous celui de la Pechereft'e. Il propofe fon argument de cette forte : Ma- rie fœur du Lazare , eft: la mefme que Magdelaine. La Pe- chereft'e eft la meinieque Marie fœur du Lazare : donc la Pc- chcrefte ell la mefme que Magdelaine. Il prouve enfuite les deux premières proportions La treizième eft iur le nombre des Pâques célébrées parj. C. depuis fon baptême jufqu'à fa mort. Notre auteur fuit l'o- pinion de ceux qui en rcconnoil&nc quatre , & ne die que ce DES S C A V A N S. 343 qu'il croie neceffaire poui établir ce point. Le nombre des Piques célébrées par J. C, durant fon miniftcre , dépend de la durée du minilicre mci'me. 11 eft probable félon notre au- teur que ce miniftere a duré trois ans , trois mois depuis le fî- xiéme Janvier , jour du baptêiiie de N. S. jufqu'au troificnie Avril jour de fa mort. Pour prouver que le temps du miui- ftere de J. C. eft au moins enferme d.uis cet efpace , il mar- que deux points fixes dans l'hiftoiie , l'ouverture de la miflicii de faint Jean , &lamortde J. C. Le com.nencemea!: de la Million de faint Jean eft attaché par faint Luc à la quinzième année de l'Empire de Tibcre. Cette quinzième année com- mença le 19. Aoàc de l'an 28. dej. C. La mort de J. C. fur laquelle il y a une variété furprenantc de fentimens , eft mife par quelques uns dans la 50. année de l'Ere commune, & par d'autres dans l'une des quarre fuivan- tes. Or notre auteur croit que de ces cinq années il n'y a que la trente-troiiiéme à laquelle les trois dates de l'Eucarilbe, de la Padion , &: de la Refurreélion puiiTent convenir. Voila les deux points fixes entre lefquels il faut trouver les Pâques arrivées pendant le Miniftcre de Jefus Chrift. Or ccc efpace de temps comprend quatre ans , cinq mois , 1 5. jours. Si Jefus- Chrili a commencé fon Miniftcre au mcfme temps que fon Précurfeur , on ne peut éviter de reconnoitre qu'il a célébré cinq fois la Pâque depuis fon baptême jufqu'à fa mort. . C'eft en elTet la conclufion qu'en tite Calvifius. Mais notre Auteur s'étonne que Calvifius n'ait point efté frappé de l'in- congruité qu'il y a de faire baptifer J. C, des l'ouverture de la million de famt Jean. Il fouticnt que cette concurrence du baptême de J. C. avec le commencement du miniilere de faint Jean , eft contraire à l'Ecricure , par cete raifon que Jean Baptifte ne rendit qu'à la fin de fa carrière ce glorieux témoi- gnage qu'il vcnoit après lui un homiaie dont il n'eftoit pas di- gne de délier les fouliers. Or félon faint Mathieu , S. Marc , & faint Luc , Jean rendit ce témoignage à J. C. avant que de l'avoir baptifé , & félon faint Jean , avant mcfme que de ra- voir connu. Notre Auteur ne peut donc fuivre Calvifius dans 344 LEJOURNAL le dénombrement des Pâques & des années du miniftere de J. C. La jufte médiocrité à laquelle il fe tient, cft de lui don- ner trois ans , trois mois, & quatre Pâques. Selon cette cro- rologie faint Jean commença à prêcher &: à baptifer l'an i8. de l'Ere commune , le i 9. Odobre ; & environ quinze mois aprcs , c'eil à dire le fixiéme Janvier de l'an 30. J. C. reçut le baprême. Depuis cette année jufqu'à la 3 3. au mois d'Avril il y a trois ans, trois mois , & quatre Pâques. Notre /À uccur touche encore la mefme difficulté dans la 30. dillertation , & y ajoure de nouvelles preuves tirées de la pro- phétie de Daniel , de la parabole du figuier fterile , & de Î'A- pocalipfe. j'en avertis ici les ledeurs , pour n'en plus rien dire en ce heu là lors que la fuite de mon extraie m'y aura conduit. La feiziéme diffcrtation efl: fur le fens qu'il faut donner aux J^ones d Enfer dans \c 16. chap. de S. Mathieu. Grotius a pré- tendu que dans tous les auteurs facrez & profanes , le mot d Enfer fe prend ou pour la mort , ou pour l'eftat où la more réduit les hommes. Il foutient confequemment que les Por- tes de l' Enfer font la mefme chofe que les portes de la mort ou l'entrée du tombeau ; & pour appliquer cette idée au paffagc dont il s'agit , il dit que comme la mort n'a point d'empire fur J. C. reiïufcitéj J. C promet ici aux fidèles, qu'elle n'en aura plus fur eux , & qu'ils refTufciteront. Notre Auteur rejette ce fens , & foutient que dans ce paffage ce n'eft point la fortie du tombeau , la refurredion , ni l'immortalité qui eft promife à l'Eglife. Il rejette eufuite le fens de plufieurs Interprètes^ dont les uns prennent les portes pour un corps de gardes , &: une garni fon de foldats ; les autres pour la puiflTance du diable : & enfin prend un tour difterent pour donner à ce paffage un fens raifonnable. Il confiile à dire que les portes ont deux offices, l'un de fe fermer , & l'autre de s'ouvrir. Ainfi les portei d En- fer font ceux qui y font entrer les hommes par les fcandales dont ils font auteurs. Mais comme il y a des fcandales qui fe donnent par les mauvais exemples , se d'autres par les dodri- nes corrompues , il fe pcrfuade que le difcours de J. C. ne re- garde point les fcandales qui ébranlent les foiblcs par la vue des DES S C AV ANS. 34J des crimes , mais feulement ceux qui empoifonnent les âmes par les herefies ; & que J. C. en promettant à faint Pierre la perpétuité de la foi de l'Eglifc ^ avoir principalement égard à ceux qui la dévoient faire pafFer pour une Babilonej& le faine Siège pour le trône de l'Antechrifl:, La differtation fuivante eclaircit trois difficultez qui Ce pre- fentent dans le miftere de la Transfiguration. La première re- garde le lieu, la féconde le jour, & la troifiéme les circon- ftances. Quant au lieu , il y a des auteurs qui fc font avifez d'avan- cer que ce ne fut pas fur le Tabor , mais fur le Liban que N. S. fe transfigura. Leur principale raifon cfl: que dans l'hiftoire qui précède immédiatement la transfigurarion , J, C. eft re- prefenré proche de Cefaréc de Philippe , & qu'immédiate- ment après la transfiguration eiï rapportée fans qu'il paroifl'c que J, C. ait changé de lieu , ou foit parti de cette province pour accomplir la promelfe qu'il avoir faite à quelques-uns de Ces difciples de leur montrer le Fils de l'homme dans la gloire de (on règne. Notre Auteur ne trouve rien défi aifé que de répondre, que depuis cette promefl'ejufqu'à fon accompliflement , plufieurs jours s'ecoulerent , & furent un temps fuffifant à J. C. pour partir des environs de Cefarée , &: pour aller à la montagne de Tabor , qui n'en eftoit éloignée que d'environ 12. lieues. En cela N. S. n'épargna pas fa peine , dans le dedein qu'il avoit de cacher fa transfiguration à ceux de Ces difciples qu'il n'a- voir pas choifis pour en ellre les témoins. Pour ce qui eft du jour , quelques auteurs voudroicnt faire tomber la transfiguration au Sabat , à quoi l'Auteur de l'Ana- life ne trouve pomt de fondement dans les Evangeliftes. Les circonftances qu'il examine regardent ou la nuée , ou les pcr- fonnes de Moïfe ou d'Elie. A l'égard de la nuée , quelques Tnterpreres Ce font imaginez qu'elle ne couvrit que Moïfe. No- tre Auteur le conçoit autrement , &: pofe le fait de cette ma- nière. N. S. s'eftant transfiguré pendant fa prière , MoïCc Se ^ïic vinrent s'entretenir avec lui. Les deux Apôtres qui dor- 1694. SCCC î4-<î LE JOURNAL moienc, s'evcillcrcnc à la grande lumière qui fortoîc de rout fon corps , &: cmendircnt une partie de la converfation qui regardoit fa more Comme les Prophètes Ce dirpofoient à quirtcr J. C. faine Pierre , pour les retenir , propofa de dreiïcr trois tentes ; &: en ce moment fe forma un nuage fur la tête dej C. &: fur celle des deux Prophètes. Ces deux derniers s'élevèrent en l'air , & s'enfoncèrent dans le nuage ; ce qui frappi les deux Apôtres d'étonnement. Et aulTi-tôt il en for- tit une voix qui prononça ces paroles : Foui mon Fils bien- ainté. A l'égard du choix que N. S. fît de Moïfe & d'Elie pour dé- couvrir devant eux l'ecbt de fa gloire , c'eft , félon la penfée de notre Auteur , à caufe que l'un avoit donné la loi , & l'au- tre cftoir le pius grand des Prophètes j &r par là le Sauveur confondoit les Pharifieiis qui l'accufoient d'cnfeigncr une do- ftrine contraire aux Prophètes & à la loi. La dix-hu'.tiéine diirertacion eft faite pour déveloper le rai- fonncment que fii J C. à l'occafion du cribut qui hji eltoit de- mandé. Tout dépend de fçavoir la nature &: la fin de ce tri- but. Il eft exprimé dans le lo. ch. de l'Exode. Ce n'eftoic donc pas un tribut impofé par les Romaiqs , mais par la Loi pour les befoins du Temple. Il fe payoit encore au temps de J. C. SsL il ne fut diverti par les Empereurs qu'après la deflru- dion de Jerufalem & la difperfion desjuifs. Lors donc qu'il fut demandé àj C. il fît ce raifonnement pour prouver à faine Pierre fon exemption : Dteu levé tous les ans «n tribut pour four- nir aux dèpenfes ordinaires de fa mai fon. A qui efice à payer le tri- but / On en doit juger par l'exemple des Rois de la terre, ils l'exi' ^ent de leurs fujets , ^ non de leurs enfans. La confequcnce en elloit claire pour l'exemption de J. C. qui parloit à un Apôtre pcrfuadc qu'il eftoic Fils unique de Dieu. Néanmoins pour ne pas fcandalifer les parrifans , qui n'eftoient pas dans la mefme perfuafion , il commanda à Pier- re de le payer , & d'employer à cet effet le ficle qu'il trouve- loit dans la bouche d'un poifTon. Le raifonnement fait par Notre Seigneur fur la loi de Moi- DES SCAVANS. 347 Te, a donné beaucoup d'exercice aux Interprètes, C eft ce qui a porté l'aureur de l'Analife à l'examiner dans la dix-neu- viéme di/Tertation, N. Seigneur parloir en cet endroit de la Joi du Sabat , que les Juifi l'accufoienc d'avoir i^jolée en gue- ridant un paralitique de trente huit ans. Pour les confondre il leur demande fi la loi du Sabat n'a pas efté faite aufli pour eux , & s'ils ne la violenc pas quind ils donnent la circonci- fion le jour du fabat ? Q^c s'ils la violent en donnant h cir- concifion , qui eft établie par la Loi aulîi bien que le fabac , &:s'il la viole aufll en gucnflant les malades & en exerçant les œuvres de charité prefcrires par la Loi , tout cela fe fait innocemment & n'eft fbjet à aucun reproche. La vintiéme didertation a trois parties. Dans la première il s'agit de fçavoir fi l'hiftoire de la femme adultère eft apocri- fe. Elle ne fe trouve point dans plufieurs manufcrits , ni dans tous les auteurs Grecs qui ont commenté l'Evangile. Depuis que le Concile de Trente l'a reçue il n'eft plus permis de la rejetter. Mais il n'eft pas défendu de rechercher d'où vient Ja difterence des exemplaires. La conjedure de quelques- uns eft que faint Jean oublia d'abord cette hiftoire lors qu'il écri- vit fon Evangile , & qu'il l'ajouta depuis , & que c'eft de là que vient la diverfité des exemplaires Mais quelle apparence de lui attribuer cette abfence d'efprit , &i ce défaut de mé- moire ? Grotius s'eft imaginé que S. Jean ne l'a jamais écrite , mais qu'il l'aprêchéc , que Papias l'a ajourée à fon Evangile , & que les Nazaréens l'ont auftl ajoutée à leur Evangile Hcbreu félon S. Mathieu , où faint Jérôme aflure l'avoir lue. Cette imagination n'eft fondée que fur un paftage du dernier chap. du 3 , livre d'Eufebe mal traduit par Rufin, où Eufebe dit qu'u- ne femme fut accufée devant l. C. de plufieurs crimes , fans dire nommément qu'elle le fut d'adultère. La féconde partie regarde ce que J. C. écrivit de fon doic fur la terre. Les Percs ont médité pieufement qu'il avoit é- cric les noms des accufateurs , félon cette menace de Jcre- ïcmie : Receàentes à te in terra fcribentur. Les autres croyent 34.8 LE JOURNAL qu'il écrivit ces paroles : Voui voyezjtne faille dans l'ail de vo- tre frère , S^ vous ne voyez^pas une poutre dans le votre. Les au- tres enfin Çc pcrfuadent , que par cette adion, comme par une réponfe tacite , il voulut prévenir la demande inutile & cap- tieufe des Pharificns. La troifiéme partie regarde le tempérament que prit J C. de prononcer fans abfoudre la femme contre la Loi , &: fans la condanner contre le mouvement de fa Mifericorde. Qjie celui , dit il , d'entre vous qui e(i fans péché , lut jette la première pierre. Il fe prefcnte dans cette fentcnce une difficulté à laquelle les Interprètes n'ont pas fait allez d'attention. C'efl: qu'elle femb'e faire dépendre la punition des criminels de l'innocen- ce des témoins , ou de celle des Juges : d'où il s'enfuivroit que fi les témoins ou les Juges edoicnt atteints de quelque crime , ils ne pourroient plus procéder contre les accufcz : ce qui n'cft pas vrai. Par un homme fans péché on peut entendre un homme im- peccable , &c qui n'a point contracté la corruption de la natu- re. Cette pcnlée ne peut cftre attribuée à J. C. On peut en- tendre aulTi un homme qui peut pécher , mais qui adueJle- ment n'eft chargé d'aucun péché. Ce n'efi: pas encore là le fens , puis que tout homme a toujours quelque péché. Il faut donc entendre les paroles de J. C. comme s'il avoir dit aux accufateurs : Que celui d'entre vous qui n'eft point chargé du mef- me péché , lui jette la première pierre. Les accufateurs pouvoicnt eftre coupables du mefme péché , parce que l'adultère elloic fort commun parmi les Juifs , comme famt Paul femble le leur reprocher dans le fécond chap. de l'Epitre aux Romains: Qui dicts non mœchandum , mœcharis. Je referve les autres difl'ertations pour le Journal fuivanc. A P A R I S, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques ^ à l'Image de faint Jean Baptille. j4vec Privilège du Roi. \ 694. XXX. 349 LE JOURNAL DES SÇAVANS. Du LuNDT 1. Août M. DC. XCIV. ANALYSE DE L'EVANGILE SELON L'ORDRE hiflorique de la Concorde , avec des difjertatiom fur les lieux d'ffi'. elles. ParleR.P^^* Prêtre de C Oratoire. Jn iz. ^ vol. à Paris chez Louis Roulland & Jean de NuUy , rue faine Jaques, 1694. L'Auteur de l'Analife donne des règles dans la vint- dcuxiéme diflertation , à l'occafion du Pèlerin de Jerico, pour diftinguer les fimples paraboles des faits hiftoriques d'où N S. a tiré des inflru£lions dans fon Evangile. Il croie que Jors que la matière eft prifc des chofes naturelles , de la fc- mcnce , de l'ivraye, d'une perle , d'un talent , lors que le fens caché ne regarde que les vericez générales , & non aucu- ne vertu particulière ; lors que les qualitez des perfonnages font indifférentes par elles-mcfmes , ou n'ont qu'un rapport arbitraire aux mœurs , ce n'cft que parabole. Que fi les noms propres des perfonnes ou des lieux font exprimez ; fi les cir- conrtances particulières font marquées comme les cinq frères du mauvais Riche ; fi les adions font extraordinaires , & arri- vencrarcment ; fi (ans cilre rares elles fe trouvent déccrmmécs par le temps , par le lieu , ou par la qualité des perfonnes i a- 1664, T t c c 350 LEJOURNAL lors il veut que ce foie hiftoirc. Cependant les Interprètes font partagez là-dcirus ; & conviennent peu de ces regles-là. 11 s'agit dans la vint quatrième difl'ercation de fçavoir qui cftoient les Galilécns que Pilate fit maflacrer , & donc il mê- la le fang avec celui de leurs facnfices. Quelques Interprè- tes les ont confondus avec les Samaritains , &c de deux hiftoi- res n'en ont fait qu'une. Notre a uteur dit qu'on ne peut affuret qu'en devinant qui crtoienc ces Galilcens , &: que néanmoins il et\ probable que c'eftoient les fectateurs de Judas le Gali- Jeen , qui enfeignoit que les Juifs eftanc le peuple de Dieu, & lui payant tribut dans les décimes 3c dans les facrifîces, ils ne dévoient point le payer aux Romains. La diflercation fuivance cfl contre les Proteftans qui per- mettent à un homme de Ce remarier quand il a quitté fa fem- me pour caufc d'adukere. Les raifons qui font propofécs contre eux , ne regardent pas moins TEglile Greque qui ell dans le melme ufi^e. La dernière Pd-|ue de J G. eft traitée par notre Auteur avec plus d'étendue que nulle autre matière , comme eftanc abfolument neceflaire à l'intelligence de l'Evancrile, Il en fait deux queftions , dont l'une regarde le fait , & l'autre le temps. Sur celle du fait il fuit le fentiment commun de toutes les fo- cietez chrétiennes , qui nonobftant leur divifion fur d'autres points , s'accordent à foucenir que N. S. mangea l'agneau pafcal la dernière année de fa vie. Sur celle du temps, il trou- ve les Catoliques mefmes tellement divifez entre eux , qu'il eft fort empêché à prendre parti. Peut-eftre que leur irrefo- lution à cet égard eft un etïet de l'inceiticude du fait fur le- quel ils n'ont point eu de peine à fe déterminer , parce que leurs préjugez de leurs engagcmens ont eu beaucoup de part au choix de leur opinion. 11 s'agit dans cette féconde difpu- te de concilier faint Jean avec les trois Evangeliftes qui l'onc précédé ; & les divers moyens qui ont efté pris pour cet effet font reconnoitre à l'auteur de l'Analife combien cette entre- prife eft difficile. Il cherche néanmoins un tempérament pour en venir a. bout , & tâche de montter que J. C. & les juifs ont fait chacun leur Pâque en differcns jours , J. C. le I I DES SCAVANS. 351 Jeudi , & les Juifs le Vendredi. Je ne m'engagerai pas à dé- duire ici fes raifons , parce que )e les ai prefque touces cou- chées dans l'cxcraic que j'ai donné depuis peu de jours de la fuicc du traité de la Pâque du P. Lami. La trente troifiémc & la trente- quatrième diflcrtation ten- dent à établir l'accompUircmenc de la promeffe contenue au fixiéme chapitre de fiiinc Jean , &: la prefence réelle du Corps Se du Sang de J. C. dans l'Eucariftie par les paroles de l'Inlti- tution. La diflercation qui fuit joint trois paflages qui s'eclaircif- fent mutucUemenr. Le premier e!l au 22. chapitre de faine Luc V. 16. Duo enim vobii quia ex hoc non m.induc.ibo illud , do- nec impleatur in reyio Dei. Le fécond ell au v. 18 Dico enim vobii quod non bibam de generatione vitis , dor:ec Reqrittm Dei ve- ntât. Le troificme eft au 26. chapitre de faint Mathieu, v. 29. "Dico enim vobis : Non bibam amodo de hoc gtnimine viiii , ufque in diem illum , cum lUud bibam vohifcum novum in Regno Patris wei. Il y a des Interprètes qui confondent le pafTage de faint Ma- thieu avec celui de faint Luc , en prétendant que l'un &: l'au- tre ne regardent que la coupe Icgale qui ne contenoic que du vin. Notre Auteur les diftmgue , &c remarque que faint Luc dit en gênerai : Non bib.im de <^enerationevitis. Saint Mathieu au contraire ajoute le pronom démonllracif , pourdéfigner un vin particulier ; Non bibam amodo de hoc geni-'une vitis. Dans le premier J. C. dit amplement qu'il n'en boira plus jufqu'à ce que le règne de Dieu arrive ; ce qui n'enferme pas qu'il en ait bu après l'avencment de ce règne. Dans le fécond il defignc au contraire un terme , après lequel il afliire qu'il en boira. Enfin dans faint Mathieu il ajoute qu'il le boira nou- veau avec fes difciples dans le Royaume de fon Père. Ceux qui confondent ces deux palfages , n'ont que deux mots qui leur foicnt communs r Non bibam ; au lieu qu'il y a trois ou quatre différences pour les diftinguer. Ainfi pour trouver un fcns commode , & une fuite raifonnable , il n'y a qu'à laifler chaque partage en la place où les Evangeliftes les ont mis ; le premier de fainc Luc avant la manducation : le fécond à la 3îx LE JOURNAL fin du fôuper , ou de la Cenc légale ; & le troifîéme qui eft de faint Machieu , après la Cène Eucariltique. Ces trois pall'agcs ainfi difpofez fe communiqueront une lu- mière réciproque. Ce qu'ils ont de commun , qui eft que J. C. déclare qu'il ne mangera plus & qu'il ne boira plus, eltoic pour les difpoler à la feparation qui approchoit. Mais les deux premiers qui Ce doivent entendre de la Cène légale , les dif- pofoient particuliércmenc au Millere de l'EucarilHe qui alloic eftre infticué immédiatement après. L'agneau Pafcal qui clloic fur la table , rcprefentoit le Corps de J C- qui dévoie cRrc mis réellement dans l'Eucariftic ; & la coupe légale, qui ne contenoit que du vin , & qui eft appellée fimplemenc fruit de la vigne , rcprefentoit le !>ang auquel le vin dévoie cftre changé. Quand J. C. eut difpofé de la forte les efprirs de fes difci- ples, il influua les deux parties de rEucanllie ; il verfa du vin dans la coupe, leur déchira que c'eftoit fon Sang, en but le pre- mier , leur en donna à boire , &: leur déclara qu'il ne cele- breroit plus ce Miltcre avec eux qu'après farefurreflion. Dico autem vobis : Non biham amodo de hoc q^enimir.e vi'is , vfque in diem lUum , tum illud bibcim vobifctm novum in Regno Patm met. Il y a dans ce paffagc trois termes qui en font la difficulté, & qui font expliquez par l'Auteur dans la fuite de fa differ- tation. Dans la trente- fixiéme il explique deux verfers du treiziè- me chapitre de faint Jean : Erat ergo reiumhem unus ex dijctpu- lu ejus infinujefu. Cunt recubuiffet tU( fupta peHus Jefu. Pour les bien entendre , il faut fçavoir que les Apôtres elloient à table fur à.c% lits qui tenoicnt d'otdinaire trois pcrfonnes. La place du milieu eftoit la plus honorable , & s'appelloit le fein du père de famille. Notre Seigneur l'occupa dans le dernier repas , ayant S. Pierre à l'un de fes côcez, & S Jean à l'autre. Quand il eut déclaré que l'un des douze Apôtres le trahiroit, & que faifis d'etonncment ils fc regarJoient les uns les autres, faint Pierre fit figne à Jean de lui demander qui c'eftoit. Alors faint Jean appuyant fâ teftc fur l'cftomach de (on Maine, lui dit tout bas : Seiyuur , quicfi-ce] 11 ne demeura en cette po- fture DES SCAVANS. 353 fture qu'autant de temps qu'il en falloic pour dire cette paro- le , & fe leva aufîi-tôt. Les Interprètes n'ont pas eu cette idée de cette hiftoire. Ils ont pris pour la mefme chofc ces paroles du 13. veriec : Brai ergo recumbens unusinjinujefu ; & ces autres du 15. Cum recu- hiiiffèc iUe fupra pefius Jcfu. Ils ont cru que les noms àc finus & de peHus fignifioient dans l'un &: dans l'autre la mefme clio- fe , &: que le verbe accumbere eftoit mis au mcfnie Cens. Ce- pendant les deux verbes qui lui répondent dans le Grec , font differcns , & Cgnifient deux a£tions , dont l'une dure long- temps , & l'autre pade en un moment. Il en eft de mefme des deux noms , dont l'un fignifîc la place du lit , &: l'autre l'eftomach du Sauveur. Origene, faintChnfoftome,&: Thco- philade confirment cette explication avec une évidence qui ne permet pas d'en douter. La difficulté du palTage expliqué dans la difTertation qui fuit , ne dépend que de la ponctuation. Voici comment Ja Vulgate le reprefente au 14. chapitre de faint Jean , v. 31. Sed ut cognofcat mundus quia diliqo Patnm , ^ jicut mandatum dedttniihi Pater ^ fie facio. Surgi ! e eamus hinc. Apres (îc faeio , l'efprit demeure en fufpens , & attend quelque chofe. £n ô- rant le point d'après /^««o , & y mettant une virgule , comme il y en a une dans le Grec , l'efprit trouve fon repos dansl'af- furance avec laquelle le Sauveur déclare que pour obcïr à fon Père , il va au devant des ennemis qui fe doivent faifir de lui pour le faire condanner , &c pour le conduire au fupplice. La trentc-huiciéme dilTertation ne tend qu'à concilier faine Marc & faint Jean fur l'heure à laquelle N. S. fut crucifié. Le premier témoigne qu'il fut crucifié à latroifiéme heure; & le fécond , qu'il fut condanné vers lafixiéme. Us'eniuivroic qu'il auroit efté crucifié environ trois heures avant que d'eftre condannc. Notre Auteur fans avoir recours à aucune machi- ne extraordinaire , comme font quelques interprètes , ne trouve point d'expédient plus commode que de dire que c'eft une faute de copille , qui a cfté très facile en Grec , à caufe de larcifcmblance foie des deux mots qui fignifientla troifié- I 694. V u u u 3 54 , LE JOURNAL me &: la fixiémc heure , ou à caufe de celle des chifFres qui fervent à les marquer. La trente neuvième dilTertation cfl fur des contrarietez qui paroident dans le recic de la rcTurredion du Sauveur , foit Cur le nombre des femmes qui allèrent à fon tombeau , ou fur celui des Anges qu'elles y virent , ou enfin fur leuts voyages &c fur leurs adions. La difculTion eft difficile , & le dénou- ment que notre Auteur propole pour accorder ces circonllan- ces , eft de feparer les autres femmes d'avec la Magdelcinc dans le voyage qu'elle fit vers les Apôtres , &: de feparer la Magdeleine d'avec les autres femmes dans l'entretien qu'elles eurent avec les Anges. Dans la quarantiénic dilTcrcarion l'Auteur recherche le mo- tif qu'eut N. S. de défendre à la Magdeleine de le toucher , &: de la raifon qu'il rendit de cette défenfe. Elles lui paroif- fcnt toutes deux également obfcures -, &: rien ne lui a paru plus probable pour difliper cette obicuricé , que de duc que N. Seigneur défendit à la Magdeleine de s'attacher avec trop d'ardeur à fes pieds , & qu'il demtureroit encore quelques jours fur la terre , durant lefquejs elle auroic le phiiir de le voir. Enfin la dernière difiertation efl fur ces paroles de N. S. à faint Pierre : Sic enim volo rr.anerc iunec vemum , quià ad te? La première difficulté touche la manière de lire le palF.ige. Car au lieu que la propofition ell: abfolue dans la Vulgate, elle elt condiionnée d jus le texte Grec , & femble eftre pré- férable. Cela fuppofé , la principale difficulté confille dans le fens de ces paroles : Manere donecveninm. La première opinion eft que faint Jean n'eft point mort. Mais ceux qui la tiennent font partagez : car les uns voyant fon tombeau , ont cru qu'il y dormoit d'un fommcilpaifible , & qu'il y faifoit le- ver ic baiffcr la terre en refpirant. Les autres afturcnt qu'il eft dans le paradis terrellrc avec Enoch & Elic ; & entre ceux- ci il y en a qui prétendent qu'il eft encré vivant dans le tom- beau , & qu'il en eft furti de mcfme. Et il y en a qui difenc qi.i'il y a efté mis après fa mort , & qu'il eft reftiifcité. La preuve commune de toutes ces opinions , eft que quand le DES SCAVANS. 3^^ tombeau a efté ouverc , rien ne s'eft trouvé dedans ; ce qui ne s'accorde point du touc avec le PapeCeleftin , qui exhorte les Evcques du Concile d'Ephefe à fuivre dans leurs dccilîons les inlîrudions de cet Apôcre dont ils avoienc les reliques devant les yeux. REFUTATION D'UN ECRIT FAVORISANT LA Comcdte. In 12. à Paris cliez ildme Couterot , rue idint Ja- ques, 1 96+. CE qui a efté inventé de plus p!.uifible en faveur de la Co- médie , (e réduit à précendre qu'elle a efté introduite pour reprendre le vice des Grans j qu'elle n'a point efté dé- fendue par les oracles de l'Ecriture : Que fi les anciens Pè- res l'ont condannéc , ce n'a efté qu'à caufe des (bperftirions &: des impurctez que les Payens y avoieut mciécs : Qu^àme- fure qu'elle s eft corrigée de ces detaurs , elle a trouvé \c% Pè- res des fiecles fuivans moins déclarez contre elle : que les Comédiens fe peuvent fauver dans leur profeftîon ; & que la Comédie n'eft pas pîus mauvaife que les jeux de hazard. L'Auteur de cette Réfutation pefe toutes ces raifons l'une après l'autre , &: n'en laifte aucune fans réponfe. Bien loin de demeurer d'accord que ceux qui ont introduit les diver- tiftemens du teâtre , y ayent efté portez par un motif auftî louable qu'auroit efté celui d'arrêter les vices des Grans il donne une idée toute difteicnte des fpedacles, &: avance qu'ils font tous nez de la fuperftition ; qu'ils ont efté rafinez par le plaifir , & maintenus par la politique. Pour le faire voir avec ordre , il diftingue trois fortes de fpeétacles , les danfes , les combats , & les récits. Il dit que la danfe fut la première manière d'adorer les Idoles j que les peuples encore grofliers &: incapables de former des vœux , témoignèrent par les dan- fes qu'ils firent autour de leurs Idoles , la confiance qu'ils metcoient en elles. Ainfi les Juifs danfercnt autour du veau d'or , comme le témoigne l'Ecriture dans le chapitre 32. de l'Exode. Les Payens inftitucrent aufli des combats où ils ré- pandirenc le li:.ng des hommes en l'honneur de leurs Dieux, 5s6 LE JOURNAL Enfin ils compofercnt des difcours en leurs louanges ; &: c'eft d'où font venues les pièces qui ont cftc depuis rcprefencccs Tur les tcâtres. Ces fpedacles introduits de la forte par la fupcrftition, onc eflé rafincz par le plaifir. La danfe qui au commencement eRoir toure naturelle , a eu depuis une cadence réglée & des pas mefurez , avec des paroles & des inftrumens. La mal- lieurcule fuisfadion que les peuples prirent à voir répandre le fang des gladiateurs , leur ôta l'horreur du meurtre. Enfin ceux qui travaillèrent pour le rcâcre , cherchant plus leur ré- putation que l'honneur de leurs Dieux , choifircnt les fujcts les plus agréables , & les plus propres à entretenir le feu des paflions. La polit/que qui dcvoit s'oppofer à ces infamies , a cflé contrainte de les tolérer ; &: l'indocilicé des peuples l'a em- porté fur l'autorité du Magiflrar. Apres avoir parlé de ce qui regarde l'origine & le progrés des fpcctacles , il vient à la confcquence qui cft tirée en leur faveur du filence de l'Ecriture ; &: pour en découvrir la foi- bleffe^ il fait voir que bien que l'Ecriture ne parle en aucun lieu des fpcdacles , elle renferme pourrant des maximes qui ne fe peuvent accorder avec les delordres infeparables des fpedacîcs. Ces maximes nous ordonnent de donner aux pau- vres le fuperflu de nos biens , de garder nos fcns & notre cœur, de reprimer nos paffions , d'éviter les occafions du péché , &c de n'cflre à perfonne un fujec de chute. Ceux qui aiiiftent aux fpedacles violent toutes ces maximes , font un mauvais ufa- ge de leur bien , expofent leurs fens & leur coeur à tout ce qui les peut le plus tenter &c le plus exciter leurs paffions. De l'Ecriture notre Auteur pafTe aux fiints Pères , & mon- tre qu'encore qu'ils ayent quelquefois condanné la comédie -de leur temps , comme un refte d'idolâtrie , & comme un plaifir facrilege & impur , il l'ont condannée en d'autres en- droits pour d'autres defordres , & fans y fuppofer ni idolarrie ni impureté ; ce qu'il prouve par quantité depafl'ages, &: fur «out par l'excellente defcnption que faint Auguftin fait dans fcs DES SCAVA'NS. 357 fcs Confeflîons de l'amour déréglé qu'il avoir dans fa. jeuneflc pour les teàtrcs , & du plaifir vicieux qu'il prenoit à ces repre- fcntations. Il joint aux témoignages des faints Pères les Canons des Conciles qui ont condanné la Comédie en elle-mcfme ; & pour furcroit de preuve il ajoute les ordonnances de Philippe Augufte &: de faine Louis , qui chafTerent les farceurs ; & les arrêts du Parlement qui défendit à des Comédiens de jouer dans Paris. Le premier arreft eft du fixiémc Oâobre 1584. contre une troupe de Comédiens qui avoient établi un teâtre dans l'hotel de Cluni ; & le fécond du 10. Décembre 1588. fie de pareilles dcfcnfes à une autre troupe. Il montre enfuite que fi faint Thomas , faint charlcs , & S. François de Sales Ce font exprimez avec plus de referve au fu- jet des divertiflemens du teâtre , ils ne leur font pas pour ce- la aurti favorables que leur défenfeur voudroit le faire croire. A l'égard de faint Thomas , il dit qu'il a renfermé ces diver- tiflemens dans une gayeté modefte , & qu'il n'auroit eu garde d'approuver une Comédie, où l'amour , la colcre , & la ven- geance auroient cfté dans l'excès où elles paroiflent dans la Comédie d'aujourd'hui , puis qu'il a condanné le ris immode- ré avec une étonnante fevcrité , & cru qu'il pouvoir eflre un péché mortel. A l'égard de faint Charles, il condanné ouvertement la Co- médie dans fon livre des Spedacles ; & le troiftéme Concile de Milan exhorte les Princes à chafler de leurs Eftats les far- ceurs & les boufons. Saint François de Sales ne parle pas exprcflement de la Co- médie. Il ne parle que du bal & des autres divertiflemens, qu'il ne défend pas abfolument à fa Philotée : mais il lui en reprefente le danger en des termes fort propres à l'en dé- tourner. Cette uniformité de fentimens qui fe trouve au fujet de la 'Comédie entre les anciens Pères, ceux des fiecles fuivans , & ics Conciles , fait tiret à notre Auteur cette confequence, que la doârine qui condanné les teâtres efl: celle que le fainc 1694. X X x X 15S LE JOURN A L Efprit a infpircc à Ton Eglifc , & que celle qui lui c(l oppofee, ne peut venir que des hommes , ou pcuc-eftre d'une fource encore pkis mauvaife. Cela cft^inc de la forte , il ne peut fouflPrir que le Defenfeur des fpcft.icles mette la confcience des Comédiens en repos, & qu'il ofc les garantir au terrible tribunal du fouverain Juge de leurs paroles non feulement vaines , mais profanes , de leurs roUes tendres , des Fe'les profanées , des paflîons allu- mées dans le cœur de leurs fpedatcurs , & des autres fcan- dalcs qu'ils auront caufez. Enfin fur ce que le Defenfeur demande que les Comédiens foient traitez comme ceux qui tiennent des académies de jeu Contre lefquciles les invedives des Prédicateuts font moins fréquentes & moms fortes qu'autrefois , il répond qae ceux qui ouvrent leurs mai fons pour y donner à jouer, qui foulïrent que l'on y hazarde des fommes confiderables , que l'on s'y emporte en jutemens , ne font pas moms blâmables que les Comédiens , ni moins indignes de participer aux Sacremens, jufqu'à ce qu'Us ayent renoncé à cet infâme commerce. EXTRAIT D'UNE LETTRE ECRITE DE RIEUX , le 2^. Juin i6ç4. NOus entendions fi diftinélcment d'ici le canon du ficgc de Rofes , qu'au moment que nous ceflamcs de l'en- tendre , nous devinâmes au jurte fa prife. Maintenant que le canon bat Girone , nous l'entendons auflî diltindement , quoi qu'il y ait quarante lieues de diftance ; ce qui nous fait alfurer qu'aujourd'hui à midi cette place n'ell pas encore rendue. Ce font les ouvertures des Pirenées par où les riviè- res coulent, qui confervent la force du vent ; & le valon que forme la pente rivietc de la Rife , le conferve mieux que les autres , fur tout dans les temps où le vent de Midi foufle. Depuis midi nous n'avons point entendu le canon } ce qui nous fait croire «jue Girone eft prife : /i ce n'eft q[ue Je vent «ft changé.. DES SCAVANS. 3J9 EXTRAIT D'UNE AUTRE LETTRE ECRITE DE Tonloufe ^ le /. Juillet 16 ^■^. SI Monfieur de ""^ * * veut fc fouvenir de la lertre que je lui écrivis de Rieux , il trouvera que le 19. Juin après midi nous ceiFamcs d'entendre le bruit du canon qui battoir Girone. Elle battit en eftct la chamade ce jour- là mefine au foir ; & ainfi mon obfervation e(l: juftifiée , & il demeure con- ftanc que le bruit du canon fe porte jufqu'à quarante lieues au travers des montagnes ; ce que les Philofophes avoienc ignoré jufqu'à ce jour. LE DUC DE GUISE SURNOMME' LE BALAFRE'. In 12. à Paris chez Claude Barbin, au Palais j & Claude Mazuel , rue faint Jaques. 1694. HEnri de Loraine Duc de GuiTe, furnommé le Balafré^ reçut du Cardinal de Loraine Ton oncle une éducation qui répondit parfaitement bien à fes grans talens ; de forte qu'à l'âge de vint ans il fe vit capable de former &: d'exécuter les plus hardies &: les plus hautes entreprifes. La naiflance de Marguerite de France , fille du Roi Henri II. ne fut qu'une des moindres qualitez qui la rendirent di- gne àç,% vœux des plus grans Princes de la terre. Sa taille haute & majeftueufe , fes traits vifs &r réguliers , fa jeuncflc foutenuc du brillant des pierreries , donnoient à fa beauté un éclat que les yeux ne pouvoient foutenir fans en eftre éblouis. Les avantages de fon efprit égalèrent ceux de fon corps. Elle donna fon loifir à l'étude. L'hiftoire fut la première fcience pour laquelle elle eut du goiic , & l'Abbé Brantofme fut fon maître. L'amour que le Duc de Guife conçut pour une PrincefTe fi accomplie fut fortifiée par l'ambition , qui lui reprefenta que s'il pouvoir époufer la fille , & la fœur de fes Rois , ce lui fe- toit un degré pour monter un jour fur le trône. Ces deux. 3^0 LEJOURNAL paflîons caufercnt routes les agitations de fa vie , &: donnèrent lieu à la mort Tragique qui la termina. L'auteur qui nous en donne ici 1 hiftoirc , l'a accompagnée de tout ce qui la pouvoir rendre agréable. HOMELIES DU P. SERAPHIN SUR LES EVANGI- les des Dimanches. Jn 12. ^. vol. à Paris chez Edme Cou- terot. 1694. DE p u I s plufieurs années que le P. Séraphin prêche dans les principales chaires de Paris , il a elle écouté "-■'-, grande édification. Mais parce que la parole fe diffipe avec l'air , & que la vérité mefme s'efface de la mémoire , il a ju- gé à propos de fixer l'une & l'autre par l'écriture , & de les rendre en quelque forte immuables Le premier rome contient les homélies des Dimanches depuis l'Epiphanie jufqu'au Carême: le fécond depuis laQua- ■iGmodo jufqu'à la Trinité ; le troifiéme depuis le premier Di- manche d'après la Pentecôte jufqu'au treizième ; & le qua- trième depuis le treizième jufqu'à l'Avent. Les premières qui paroitront feront fur les Mifteres & fur les Pertes, avec quelques-unes fur les Evangiles & fur les Êpi- tres que l'Eglife lit en ces jours là. Le P. Séraphin donnera enfuite des homélies pour tous les jours de l'Avenc , du Carême , & de l'Oflavc du faint Sacre- ment , & finira par d'autres fur toutes les Epitres de l'année qu'il commence maintenant à expliquer dans les Paroiffes où il eft appelle pour exercer le faint minifterc. A P AJl I S, Chez J^E-A N 'Cu yso n , rue faint Jaques , à l'Image deiàinc Jean Baptifte. Avec Piivilege du Roi. 1 6 5^4. XXXI. 3^1 LE JOURNAL DES SCAVANS b Du LuNDY 9. Août M. D C. XCIV. LETTRE D'UN DOCTEUR DE SORBONNE A UNE perfonne de qualité , au fu)et de la Comédie. In 11. à Paris chez Claude Mazuel , rue faine Jaques. 1 694. LE Dodeur de Sorbonne confulté par une perfonne de qualité fur le fujet de la Comédie , examine avec beau- coup de foin la lettre defavouée par le P CafFaro , &r montre avec autant de clarté 1 abus qui y eft fait de l'Ecriture & des Pères. L'Auteur de la lettre ayant avancé hardiment que l'Ecri- ture ne défend en aucun endroit d'aflîftei à la Comédie, le Dodeur de Sorbonne demeure d'accord que l'Ecricure ne nomme en aucun endroit la Comédie : mais il fait voir qu'en pluficurs elle donne des préceptes qui la condannent ; com- me quand David prie Dieu de détourner iç% yeux de la vanité ; quand Ifaïc menace d'un terrible chânmcnt les fflles qui per- dent la modeftie de leur fexe ; quand N. Seigneur dit que le monde fe réjouira , &: que fcs difciples s'attnllcront ; quand faint Paul ordonne aux Chrétiens de prier fans ceffe , &: de faire toutes leurs adions au nom de J. C. & de s'abftenir de coûte parole folle & boufonne. 1694. Yyyy 36i L E JOURNAL Il découvre cnfuicc l'abus que l'Auteur de la lettre fait des faints Percs ; &: fuppofanc qu'ils ont condanné quatre fortes de fpedaclcs qui eltoicnt en ufagc parmi les Payens , fçavoir les courfcs de chevaux , les comedres , la lutte , &: les com- bats des gladiateurs , il ne s'arrêcc qu'à la comédie, de la- quelle feule il s'a>^it. L'Auteur de la lettre avoue que les Pè- res ont condanné la comédie de leur temps , & prérend que celle d'aujourd'hui n'a plus rien de ce qu'ils ont repris dans celle-là, fçavoir l'iualatric,& l'impudence , qui alloir jufqu'à faire paroitre des femmes nues fur le tcâtre. Le Dofteur de Sorbonne montre qu'elle n'eft point innocente , & qu'elle peut eftre combattue par plufieurs raifons qui ont fervi aux faints Pères contre l'ancienne. Il prouve que fi l'on n'y olïrc plus de facrifîces à Venus , on y reprcfcnte des intrigues qui honorent cette déefle ; que (i l'on n'y fait plus paroure de femmes nues , on y en fait paroitre dont les parures & les geftcs, pour infpirer moins d'horreur, n'en infpirent pas moins d'amour j enfin que le plaifir de la comédie d'aujourd'hui eft un plaifir du fiecle, que les Pères ont interdit aux Chrétiens, & apporte le témoignage de Tertullicn , de faint Ciprien , & des autres Percs. De là il palfe à Albert le Grand , à faine Thomas , à faint Bonaventure , à faint Charles Borromée, &c a. faint François de Sales , &: fait voir combien ils ont cfté é,- loigncz de permettre la comédie. L'Auteur de la lettre ayant tâché d'éluder les loixdes Empe- reurs , & les canons des Conciles , le Do£leur de Sorbonne leur confcrvc toute leur force , & venant aux comédies qui fe jouent dans les MaKbns Religieufes & dans les Collèges, répond qu'il a peine à croire que les Religieux les plus refor- mez en jouent jamais ; & à l'égard des Collèges ,. qu'il n'y a pas long-temps qu'elles y ont elle introduites ; qu'elles n'y peuvent eftfc tolérées à moins qu'elles ne foient modeftes, Se que les Profelfeurs nepourroient eftre exemtez de péché, s'ils faifoient reprefenter des pièces qui rcfTentilfenc la vanité du fiecle , où les garçons fuflent habillez en filles , & où fc dan- faflcnt des balccs qui ne pcuvcnc fervir à former ni l'cfprit ni les mœurs des écoliers. DES SCAVANS. 365 Il ajoute que le Cardinal de Richelieu fît rc habiliter les Co- médiens par une déclaration de l'année 1641. à condition qu'ils s'abfticndroient de toute rcprefentation qui pourroit blelîer l'honnêcetc ; mais que la fcene n'en a pas pour cela changé de face : que depuis comme auparavant , ils ont joué des pièces purement comiques , où ils ont paru avec les mefmes ajufte- mens &: les mefmes airs , & où les partions les plus vives ont éclaté dans les pièces les plus ferieufcs : Qu'ainfi la tache d'infamie portée parlcsloix leur cft demeurée j qu'ils ne Ce font pas mieux relevez des cenfures de l'Eglife , &r que les Rituels qui les privent de la participation des Sacrcmens &: de riionncur de la fepulturc , n'en ont pas eu moins de vigueur. Enfin il répond dans le refle de fa lettre à tout ce que l'Auteur avoir tiré de fa propre expérience pour la juftification des Co- médiens d'aujourd'hui , & pour celle de ceux c^ui affiflent 3 leurs fpcclacles , &c qui contribuent à en foutenir la dépenfc. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. DROUIN MAT. ire Chirurgien Jwc à Parts , S" Ma^or de l' Hôpital Royal de Landeau , à M. Fagon ConfeiUer du Roi enfei Confeils , ^ premier Médecin de Sa Ma\efié. VOus fçavez (ni eux que moi , Mondeur , qu'il n'y a point de maladie qui demande un plus promt fccours que la rétention d'urine , que ceux qui en font attaquez foutfrcnc àcs douleurs très violences , & qu'un grand nombre pcriflent faute de leur faire l'opération dans le temps neceflaire. On tente avec raifon plufieurs moyens avant que d'en venir à l'o- pération , comme les faignées réitérées , félon les forces du malade , les juleps apéritifs , les émulfions avec les quatre fc- mcnces froides , le petit lait avec le fel végétal , & enfin les bains pris plufieurs fois en un jour. Tous ces remèdes font quelquefois inutiles j de manière qu'on cft obligé , mais fou- vent trop tard , d'en venir à l'opération. La manière dont je la pratique cfl: bien différente de celle des Chirurgiens tant anciens que modernes ; &: c'cft ce que je veux avoir l'honneur de vous communiquer , afin qu'en 3^4 LE JOURNAL cas qu'elle ait le bonheur de vo s plaire , j'en faflfe part au Pu- blic. Mais auparavant il clt à propos d'expofcT la manière or- dinaire de la faire , afin que chacun puifle juger combien on s'embaraflc la plupart du temps indifcretemeut dans les ope- rations manque de médication. Cette operacion fe pratique au Pcriné , à trois lignes &à côté d'une raye qu on nomme en Grec vît». Se en François Suture. La fituation du malade cft d'avoir les cuifl'es écartées l'une de l'autre. Je palferai légèrement fur quantité de cir- conftanccs qui s'obfervent , & qui ne font pas de grande con- fcqucnce. Le Chirurgien a une lancette large , garnie de lin- ge , de manière qu'il n'y ait que deux , ou tout au plus , que trois péris travers de doit de tranchant libre. I! la plonge à l'endroit qui a efté dit ci-deiîus , jufques dans la veflle ; ce qu'il connoit par l'urine qui fort : puis fans retirer la lancette il introduit dans la veflTie un ftilct , à la faveur du plat de la lancette. Enfuite il retire la lancette, &r pafle le fUlet parde- dans une canule d'argent ou de plomb ; &: la faifanc glif- fer fur ce ftilet , il l'introduit dans la vcflîc. Vous voyez mieux que moi , Monfieur , que cette manière eil aflcz em- baralfante pour ceux qui ne font pas vericz dans la pratique de la Chirurgie , & qu'elle laiflc le plus fouvcnt après elle une firtule qui ne fe guérit que très difficilement ^ ce qui fait mener aux malades une vie larguiflantc , en ce qu'ils font obligez de fe retirer de la converfacion des hommes. Voici en peu de mots comment je pratique cette opération, & je puis afl'urer l'avoir fait plufieuts fois avec fuccés. Je me fers du trois- cars, que je plonge au Perinc , en obfervant tou- tes les circonitanccs qu'on obfcrvc ordinairement à la para- centefcj c'eft à dire que lors qu'on eft dans la veffie , on reti- re le trois- cars , & on laifle la canule ; &: lors qu'on a vuidé la vcffie de fon urine , on retire la canule , & on met fur le trou un petit plumafleau de charpie , une emplâtre de diapalmc, une comprelTe , & on fait le bandage en T. Si c'eft une pier- re qui fe trouve à l'entrée du canal, on fait l'opération du pe- tit appareil , en introduifant deux doits dans l'anus , & faifanc l'incilion fur la pierre , fi ce font des glaires , comme cela arri- ve DES SCAVANS. 3^5 vc {bnvent , ils fortenc par la canule du trois- cars ; & enfin û ce font des carnofitez dans le canal de la vcflîe , comme il arrive fouvcnt au malheureux en amour , on rcïcerc cetcc pondtion autant de fois que la neceflitc le rcquerera. J'ai pratiqué cette mefme opération avec le trois cars ''iir deux malades d'Empierac, en le plongeant encre la ti Miicmc & la quatrième des faulfes coftes , comptant de bas en hauc î dont j'ai eu bon fuccés. EXTRAIT DUNE LETTRE ECRITE DE ROTER- dam y le ^. Jtun jàp^. ON reimprime toutes les œuvres de Lilius Grcgorius Gf- raldus. On aura à la prochaine foire de Leipiic le Pau- fanias de Kuhnius fçavant Profed'eur de Strafbourg ,& le Ju- lien de M. Spanheim. On a reimprimé en Flandres in 4. le livre du P. General des Jefuites , de la Probabilité. Un ProFedcur de Nuremberg , nommé Omeifius , vient de donner au Public un traité de la Morale de Pitagore , S*' de la manière d'cnfeigner. Il y a joint Aurea Carmina , avec un commentaire. Un Danois nommé Chriftien Vormine a fait depuis peu un livre , de corruptis Antiquitatum J-iebraarum apud Taciium ^ ^artiidem veftigiis. Un jeune Profeflcur d'Hclmeftad fçavant dans les langues Orientales , nommé Vander-hard , a publié douze diflerta- cions fous le titre d'Ephemcrides Philofophiqucs , où il trai- te plufieurs fujets de critique , &: où il loucient des opinions particulières touchant la nudité de Noé , Se la ftatuc de la femme de Lot. Perifl'onius ProfeiTeur à Leyde , a mis au jour deux difler- tations de Originibus Babylonicis , où il tâclie de julbfîer le fcn- limcnt ordinaire fondé fur la Gcnefc , touchant le temps de la fondation de Babilone , contre les raifons de Marsham , us omnta pravta circa eleUio- ntm Ep'fcopi (^ Princims l eodrerfs etiarrantur. Jn ^. à Paris ^ chez Théodore Muguet , rue faint Jaques, i 6 94. R Ien ne pouvoir donner une connoifTance plus exaâc de la contcilacion dont il i'agic que ces Icccics de M. le Car< DES SCAVA N S. 379 dînai de Bouillon , ic les tépoiifcs du Chapitre de Licgc. Par Ja première du 17. Février de l'année prcfcnte , Son AltcflTc Bminentiflîme exhorte le Chapitre de Liège à obtenir des Princes Confcderez des pafireports pour ceux qui ont droit d'é- lire l'tvêque. La réponfe du Chapitre fc réduit à dire , qu'il ne dcpcndoic pis de lui d'obtenir ces p ifieports ; &i que d'ailleurs il y avoic de grandes difficultez à convoquer fon A. E. à l'clcdion , à Câufe des ftatuts par lelquels tout Chanoine qui n'a point cflé prefent , au moins par procureur , le jour de la fefte de faine Gi'lcs , c'\ repucé Forain. Les deux lettres fuivantes de fon A . E. portent que les ex- ceptions dont on fc feit pour lexclure delà voix aÔive qu'el- le a à l'eleftion de l'tvêque , devuienr eftre examinées en plein Chapirrc , & qu'il n'eftoit pas juftc de la condanner fans l'entendre. Qut ces iiatuts doivent eftre entendus p.îr rapport au remps , au lieu, aux perfonnes : QujtUc demande à dire Tes raifons dans le Chapicrc , d le Chapitre veut lui faire ex- pédier un pallcport don: il garantira l'exécution. Sinon elle propofe au Cl.apitre de députer à Hui le Doyen , frpc Archi- diacres, & deux Chanoines Codeurs, avec pouvoir de ju- ger la queftion. Les réponfes du Chapitre fc réduifent à dire , que les ex- ceptions dont on ft fervoit pour priver M. le Cardinal de Bouil- lon de fa voix , ne dévoient point eftie examinées en plein Chapitre , &c que cela elloic contre rufagc. Que fi pourtant il vouloit communiquer par écrit fes raHons , le Chapitre en jugeroic avec une entière matun.é. Q.;c l'obligation de ne condannei perfonne fans l'entendre n cft impofée que dans les affaires criminelles. QiTau refte il ell contre l'ufage d« députer 3 Hui des Chanoines pour ret miner le différent , vu ■ que le Chapitre ne députe jamais que pour écouter des pro- pofitions Se pour en faire le rapport , &: non pour juger. La quatrième lettre de M. le Cardinal de Bouillon cft ac- compagnée d'une déclaration du Roi qui offroit de retirer fei ■ troupes des environs de Liège, &: d'une nouvelle inftancc: pour avoir un paircport, Le Chapitre ayant répondu que le : 38o LEJOURNAL^ paflcport eftoit inutile , puis qu'il cftoit ccnfé forain , M. le Cardinal de Bouillon procéda de la nullité de l'elcdion qui fc- roit faite en fon abfencc , & fit fignificr la protcftation. Tous ces actes font fuivis d'un petit traité , où font exami- nez les ftatuts faits par le Chapitre de Liège touchant la Fo- raneïîé. Cet examen fe réduit à quatre points. Le premier re- garde l'autorité que les ftatuts peuvent avoir. Le fécond con- (ifte à rechercher quels font les termes , & quel cft l'cfprit des ilatuts. Le troifiémc cft dans les circonftances particulières du temps & du lieu ; & le quatrième touche la dignité d'une pcrfonnc élevée au Cardinalar. Quant au premier point , il faut demeurer d'accord que les Chapitres & les autres communautcz Ecclefiaftiqucs légiti- mement établies , ont le pouvoir de faire des ftatuts touchant la refidence & la perception des fruits ; mais ils n'ont pas le pouvoir d'en faire fur d'autres fujcts fans le confentement de î'Evcque , & fans l'autorité du faint Siège. Honoré IIL dé- clara nuls des ftatuts faits par le Chapitre de Pans fans l'auto- rité de l'Evêque 5 & Innocent IIL ordonna que ceux qui au- roicnt efté approuvez par le faint Siège , feroicnt feuls cxc. cutez. Le Chapitre de Liège a tellement reconnu la necef- fité de cette approbation , que le 7. Mars 1550. auquel il fit les ftatuts dont il s'agit , il refoiut qu'ils feroient obfervez fous le bon plaifir du faint Siège , duquel il n'en a pas obtenu de- puis la confirmation. A l'égard des ftatuts dont il s'agit , il y a deux chofes à y confiderer, les termes & l'efprit. Les termes regardent la Fo- raneité. Il n'y a que deux ftatuts qui foient oppofez par le Cha- pitre à M. le Cardinal de Bouillon. Le premier porte que les Chanoines qui ont fait la première refidence , & qui veulent commencer la féconde , doivent fe prefenter le jour de la feftc de faint Gilles, &: s'ils n'ont pas refidé l'année précédente, promettre de le faire en l'année qui va fuivre. Le fécond fta- tut porte , que les Chanoines qui le jour de la fcfte de faint Gilles auront promis la féconde refidence , refideront dans l'année au moins fix mois & un jour ; fi non qu'ils feront re- putcz Fotams , & ne percevront aucuns fruits , fi ce neft qu'ils DES SCAVANS. 381 quSIs aycnt obtenu du Chapitre pcrmiiîion de s'abfentcr. L'cfprit & l'intention du Chapitte cftoient d'obliger àlarc- fîdencc des Chanoines étrangers qui n'avoicnt alors aucun foin d'y fatisfairc. Qiiand un Chanoine a pris polTefllon d'un Ca- nonicac , il ne peut fe prcfenter à la première refidencc que deux ans après la mort de Ton prédccelîeur, parce que les fruits de la première année appartiennent aux héritiers , &:ceux de la féconde à la Fabrique. Ces deux ftatuts ne regardent point M. le Card. de Bouil- lon , & en vertu d'iccux il ne peut eflrc réputé Forain. Les Fo- rains font proprement les Chanoines qui ne fe font point prc- fcntez pour faire la première refidence. M. le Cardinal de Bouillon l'a faite ; & par confequent il ne peut eftre exclus de la voix a£live qu'il a en l'eledion de l'Evêque. Il ne s'eft poinc prefcntéle jour delà fefte de S. Gilles pour faire la féconde ré- lîdcncc. Il n'a donc ni manqué aux conditions aufquellcs cllo oblige , ni encouru les peines qu'elle impofe. Pour furcroit de preuves on peut ajouter que quand il fe Ce- roit prefcnté pour faire la féconde refidence , & qu'il auroic manqué aux conditions aufquelles elle oblige , il n'auroit en- couru aucune autre peine que celle de la privation des fruits, & ne pourroit eftre repucé Forain. Les peines ne s'étendent point , &: doivent eftrc conçues en termes exprés , & non en termes indireds &: fujcts à interprétation. Pour ce qui cft du troifiéme point , qui regarde les circon- ftances du temps &: du lieu , les ftatuts qui ordonnent la fé- conde refidence exceptent plufieurs cas aufquels un Chanoine cft difpenfé de fe trouver au Chapitre le jour de la fcfte de S. Gilles ; comme s'il eft malade , s'il eft en prifon , s'il efl; en vifitc , s'il eft abfent pour les affaires de l'Eglife. Or il eft cer- tain que la guerre qui empêcha M. le Cardinal de Bouillon de fe trouver au Chapitre le jour de la fefte de S. Gilles en l'an- née 1689. lui fournit une excule aufli rcccvable que tous les cas dont on vient de parler. Le dernier point regarde les privilèges des Cardinaux qui ne (ont point compris dans les ftatuts des Papes , ni à plus forte 1694. Ddddd 38i LE JOURNAL raifon dans ceux des Chapitres , à moins qu'ils n'y l*3ient ex- prcîremcnt nommez. Or ils ne le font point d.îns celui du Cha- pitre de Liège, qui traite de la (ccondc rcfidence. D'ailleurs les Cardinaux font dirpcnfcz de refider & de comparoitrc au Chapitre le jour de la fcftc de S. Gilles. De plus M le Card. de Bouillon a un Induit, duquel , s'il vouloit , il pourroic fe fcrvir. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE REMI LOCHELL» où il donne -plufieurs obfervatiom -pour refondre les égalilez^par nombres , far Géométrie , ^ en termes généraux. MONSIEUR , Je tâcherai de répondre en peu de mots à, routes les propofitions que vous m'avez faites par votre dernière lettre , &: je m'expliquerai plus amplement fur ce fu- jec , (î vous y trouvez des difficultez. 1°. Les égalitez de cette forme z^ — -fz^qy^ 9. fe rcfolvent aifémcnt en nombres par les moyens abregeans que j'ai don- nez pour routes les égalitez de dcgrez impairs : mais (î vous voulez vous fervir de la règle de Cardan pour le troificme de- gré , vous obfcrverez que dans le cas où cette règle eft inuti* le , il y a toujours une racine entre y\p & fon double j en forte que Cipy^ ^cc ^ l'égalité propoféc auroit une racine entre C &C IC. La mctodc des Gafcades ne fuppofc aucune préparation pour trouver les hipotcfes , ni pour l'approximation des raci- nes , pourvu que l'on ôte l'inconnue du dénominateur des fra- ctions. Car s'il y a des racines négatives , & qu'on prenne une hipotefe extrême qui foit négative , la quatrième préparation ne fera jamais necelliiire. Sur quoi il eft bon d'obfcrver qu'il y aura toujours deux hipotcfes encre la première racine pofi- tivc , &: ladcrnierc négative, qui ne donneront que le mefme figne , &: que le 9 fera toujours une des deux. Pour les au- tres préparations que fuppofe cette metodc générale , elles ne regardent que les racines rationnelles ; ce qui n'eftpas un inconvénient qui lui foit propre, puis qu'on eft obligé de fu^)- pofcr ces préparations pour juftihcr les autres règles que d'au- DES S C A VAN S. 5?5 très auteurs ont données touchant ce cas particuli^îr. Ain(î les termes évanouis de l'égalité n"cmpêchent point d'y appliquer immédiatement cette mecodc. l.'indudion dont on s'efl: fervi pour régler le i. cas de la qujtriémc règle des Cafcades , ne regarde pas ce qu'il y a d'eflcntiel , ôc elle eft fondée fur un dénombrement cxadl. D'ailleurs l'on a réuni enfuitc de cette règle , tous les cas qui la compofcnt fou? une autre cfpcce qui ct£ très précife. Se qui n'elt pas fondée fur des induélions.. t". Lors qu'on fait évanouir une inconnue commune à plu- fieurs égalitcz , & qu'on veut comparer la réduite à d'aucres égalircz , il faut chalVer de cette réduite tous les divifcurs qui ne donnent que des contradidions complètes , ou des folu- tions incomplètes ; & l'on peut fouvcnt éviter de les y intro- duire , (ï l'on compare à la fois toutes les égalitcz où le trou, ve l'inconnue que l'on veut fiire évanouir , &: que l'on falfc difparoitre les premiers & les dcrnieis termes de chaque éga- lité pour en comparer les refultats. Ou bien l'on cherchera divcrfes réduites qui aycnt pour commun divifeur la réduite que l'on demande. Pour l'exprcfllon ^ fon principal ufagc cfl pour déterminer quelques impoffibilitcz , ou de fervir déli- mites dans les occafions dont je vous ai parlé. Vous fcavez d'ailleurs que les fuppofitions ne jettent point dans l'erreur quand on les donne pour des fuppofitions. A l'égard du pro- blême de deux lignes droites qui font coupées parunetroifié- mc, avec les circonftancesque je vous ai marquées , on peur le rcfoudrc avec fcs invcrfes , par le moyen de la metode que j'ai donnée au Journal des Sçavans , pour rcfoudrc les égalirez par Géométrie ; & fa refolution cft bonne pour eclaircir cette metodç ic fcs invcrfes. Mais pour rendre cette metode encore plus intelligible , il cft bon delà dillribuer en deux cas. i°. Si les deux axes font parallèles, on les joindra par une traverfante j & l'on mènera par les points où les courbes s'entrecoupent des parallèles à cette traverfante , qui fc termineront aux axes. Ainfi l'on au- ra toujours un Parallélogramme. i°. Si les deux axes fe cou- 3 84 LE JOURNAL pcnc , on peut fc fcrvir de la travcrfantc , &: changer le Paral- lélogramme en Trapèze : ou bien, dans ce mcfmc cas, on mè- nera des parallèles aux deux axes par les points où les deux courbes fc coupent ; d'où il refultcra toujours un Parallélo- gramme. Comme ces points de la commune fedion des cour- bes peuvent citre diverfement placez par rapport aux autres points principaux &: aux principales hgnes de la figure, leur licuation différente fera diftribuer les cas généraux en plu- fieurs cas particuliers , que je ne fçaurois vous expliquer dans une lettte ordinaire. 4. Pour expliquer , par le mouvement , la génération des courbes qui doivent fervir à cette metodc , on peut fc fervir de la queftion fuivantc : Si l'on fuppofe que deux courbes fonc données fur un plan , & qu'elles fe meuvent le long de leurs axes immobiles , avec des virc(fcs dont le rapport eft donné par une équation : Je demande la courbe que peuvent décri- re tous les points où les deux courbes s'entrecouperont. Cet- te qucftion , & fes inverfes , fe refout à peu prés comme la quellion précédente -, pourvu que l'on introduife parmi les égalitez auxiliaires celle qui exprime le rapport des vitelfes, & que l'on ait égard aux points & aux momens où les courbes commencent à fe mouvoir , &c. On pourroit encore attri- buer du mouvement aux axes , & faire fur ce fujet pluficurs belles queftions : Mais celles qu'on vient de propofer fonc plus que fuffifantes pour expliquer la refolution des équations. Et toutefois pour en perfectionner la metodc , il eft bon de refoudre les inverfes ; ce qui fera aifé à régler , fi l'on prend des egalitez pleinement indéterminées , au lieu de celles que l'on cherche , & fi l'on place les données &: les indéterminées avec les auxiliaires , comme pour n'en faire qu'un fcul pro- blème , dont la folucion donnera ce que l'on demande. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à l'Image de faine Jean Baptilte. ylvec PtiviU^e du Roi. 1694. XXXIII. 3S5 LE JOURNAL DES S Ç A V A N S 6 Du LuNDY 13. Août M. D C. XCIV. ESTAT PRESENT DE L'EMPIRE E)E MAROC. Jn 12. à Paris chez Michel Brunct , à l'cnrrce de la Grand' Salle du Palais. 1694. C'EsT pour fatisfaire aux ordres du Roi , que M. Pidou de Saint Olon a renfermé dans cet Eftat de Maroc ce qui avoir cfté omis dans de plus amples relations de cet Empire. Il a 250. lieues du Norc au Sud , &: 140. de l'Eft à TOueft. Des quatre royaumes dont il cft compofé , Maroc & Fez fonc les plus grans. Leurs Capitales portent les mcfmcs noms. Celle de Maroc cftoit autrefois très peuplée , & ne contient pas maintenant plus de vint- cinq mille habitans. Après Ma- roc les feules villes confiderables font Safî & Mazagan , fi- tuées fur l'Océan. La dernière eft poiîedée par les Portugais qui y tiennent une bonne garnifon. Q^oi que l'étendue du Royaume qui fe divifc en fcpt Pro- vinces , foit alfez grande , il n'elt gueres peuplé. On efiimc qu'il peut y avoir dans fes campagnes jufqu'à trente mille ca- banes d'Adouards , qui font prés de cent mille hommes. Un Adouard efl une efpecc de village ambulant , compofé de familles Arabes , qui campent fous des tentes , tantôt en un 1694. Eccce 3 8(î LE JOURNAL lieu, & tantôt en un autre, fclon qu'elles y trouvent de quoi fubfifter. Le Royaume de Fez connu anciennement fous le nom de Mauritanie Tingitane , n'eft pas moins grand que celui de Maroc , & fe divife comme lui en fept provinces : mais il cft plus fertile &: mieux peuplé. 11 n'y a ni porte ni voiture pu- blique en tous ces pays. On n'y entretient les correfpondan- ces que par des mclTagers qui vont ou à pied ou à cheval. Les affaires prefTécs s'y font par le moyen des dromadaires , qui jne différent des chameaux que par leur maigreur & leur vî- teflc. M. de Saint Olon en vit un fur lequel on l'alVura que l'oncle du Roi avoit fait cent licuës en un jour. La fatigue de cette allure en ey-ale la diligence, La ville de Fez clt la plus belle de tout l'Empire de Maroc. II y a prés de trois cent mille âmes. La vieille efl; habitée par des Blancs , & la nouvelle par des Noirs. L'Auteur ne pue obtenir permilTion de la voir , quoi qu'il n'en fuft éloigné que d'une journée. Les autres villes remarquables font Teza, Miquenez, la Mamorre , Arzille, la Radie, Salé , Tanger, Ccuta , Alcafîar , & Tetouan. Miquenez elt la demeure ordinaire du Roi. Elle cft fituéc dans les terres ; petite , mais fort peuplée. Les autres villes bordent la mer , &: font fort marchandes. Salé & Tetouan font celles où les bâtimcns abordent le plus aifément ; ce qui a donné lieu au Roi très Chrétien d'y mettre des Confuls pour la commodité du commerce. AlcaHar devint fameufe par la bataille qu'y donna le Roi ScbaQicn de Portugal , le 4 Août de l'année 1 J78. &c où il fut tué. Il y a plus de cicognes que d'habitans. Elles y font en fu- reté , parce que les Mores défendent rigoureufement de les tuer , dans la créance qu'ils ont que Dieu changea autrefois à la prière de Mahomet en oifeaux de cette efpecc une trou- pe d'Arabes qui voloient les Pèlerins de la Mequc. Le Royaume de Suz concigu à celui de Maroc entre Ccn Midi &: fon Couchant , cft de peu d'étendue , & defert en pluùcurs endroits. 11 peut y avou dans fcs campagnes environ DES SCAVANS. 387 quinze mille Adouards d'Arabes , gens braves , Se impatiens de la domination du Roi. 11 y a deux montagnes qu'il n'a pu réduire , &: qui obéilltnt à un chef qu'elles Ce clioifillenr. Le Royaume de Tafilec eft pecit , & n'a de ville remarqua- ble que fa Capitale. Il a au Septentrion le Royaume de Ma- roc , dont il cfl: feparé par le mont Atlas. Les bleds & les au- tres grains y font aulîi rares que les dates y font fréquen- tes. Elles y fervent de nourriture au lieu de pain. L c Roi qui gouverne aujourd'hui ces quatre Royaumes , fc nomme MouUa Ifmael , prétend defcendrc de M.ihomet par Ali & Fatime , gendre &: Hlle de ce Profetc. Il ell âgé de 50. ans , d'une taille médiocre , bafané , maigre , avare , &C cruel jufqu'à l'excès. Il tua quarante-fept pcrfonnes de fa main pendant vint & un jours que M de famt Olon fut à fa Cour. Il a de refprir, de la valeur , &: de l'adreîfe à toute forte d'exercices ; abfolu dans Ces Eftats , &: fe compare fouvcnt à l'Empereur de Fran- ce , qu'il dit eftre le feul qui fçachc régner comme lui. Dans la premicfe auiiancc quil donna à M. de fâint Olon , il lui dit , que l'Empereur d'Allemagne n'eftoit que le compagnon de fcs Eledeurs ; que le Roi d'Efpagnc eltoit moins le maître de fcs Eftats que fes Miniftres : que le Roi d'Angleterre eftoic dépendant, & comme l'efclavc de fon Parlement. Mais mal- gré la pofl'efTion d'une domination abfolue dont il fc flate, Ces Alcaïdes le conduifent comme il leur plait , fur tout quand ils peuvent faire entrer dans leurs confeils des prétextes de religion , d'intereft , ou de vanité. M. de faint Olon mêle à ce portrait de l'Empereur de Ma- roc un petit rccit de la Religion des Mores. Elle eft fondée fur l'Alcoran, qu'ils entendent félon l'extravagante interpré- tation du Dodeur Mclich , lundcs quatre Chefs de la fedc de Mahomet. Ils tiennent qu'il n'y a qu'un Dieu , fans trinité de perfon- nes ; que J. C. cftoit un grand Profetc , né d'une Vierge j qu'il n'eft point mort » ayant cfté enlevé au Ciel lors que Ju- das le voulut livrer. Us reçoivent pour Ecriture fainte les li- vres de Moïfc , les Pfeauracs de David , & les Evangiles . 388 LEîOURNAL félon que Serge les leur a interprétez. Ils croyent IcParadic," l'Enfcr , la Rcfurredion , la Prcdcftination ; obfervent un Ca- rême de trente jours , durant lefquels ils ne iBangcnt qu'à la nuit , ne prennent aucun tabac , &c ne flairent aucune odeur : mais en recompcnfe ils pafTcnt toute la nuit en débauche. Le nom de Chrétien leur eft C\ fort en horreur, qu'ils en font J'injurc lapins mcprifantc qui foit parmi eux. Le menronge&: la liberté de le dédire font fi bien établis parmi eux , que bien loin d'en avoir de fcrupule , ils les pratiquent comme h c'cf- toit une vertu Leurs femmes n'entrent jamais dans les mofquées , & font jugées indignes d'entrer jamais en Paradis. Leur vénération pour ceux qui ont fait le voyage de la Mequc, va jufqu'à te- nir pour faints les chevaux qui y ont cfté. La principale vue qu'a le Roi de Maroc quand jl s'attire des ambaflades , eft de recevoir des prefens. La qualité de ceux que les MiniQres Etrangers apportent , eft la règle de l'accueil qu'ils reçoivent. Un Ambaftadeur d'Angleterre fut contraint de fe déchauftcr pour cftrc reçu. Le Roi d'Angle- terre en revanche n'admit l'Ambaftadeur de Maroc à fou au- diancc , que les pieds nus &: fans turban. Le fcjour ordinaire du Roi eft à Miquenez , lieu de fa naif- fance , à quarante lieues de Salé , à foixantc de Tccouan , à douze de Fez. La ville eft mal bâtie : mais le Palais eft com- pofé d'un grand nombre de pavillons qui en donnent une hau- te idée à ceux qui en approchent. Les écuries font magnifi- ques , & les chevaux d'une extrême beauté. Les Mores ont cette maxime de n'en laiflcr fortir aucun , non plus que des bleds. Ils ont encore cet entêtement pour les livres , qui font d'autant plus rares dans leur pays , qu'il n'y a prcfquc plus d'Imprimeries. Il y a dans Miquenez un Hôpital que le Roi d'Efpagnc y a établi depuis peu pour le foulagcmcnt des efclaves de l'es eitats. Il y a aufli plufieurs écoles , comme dans routes les autres vil- les , où l'on n'apprend aux cnfans qu'à lire , à écrire , &: à calculer. Les Juifs font fi maltraitez parmi les Mores > qu'il ne leur eft DES SCAVANS. 389 cfl pas permis de s'y défendre contre les cnfans qui les pour- fuivenc à coups de pierres. Leur manière de manger eft de s'afTcoir en rond , maicrcs, & valets , (ans fbuliers , autour d'une peau de cuir étendue a terre , pour fcrvir de table Se de nappe. Les hommes portent une chemife aflez courte , un calc- ^çon qui ne dcfcend que juqu'aux genoux , une vefte de drap fans manches , ceinte par defTus , &c en hiver une efpece de manteau. Qi.iand ils vont en campagne ils portent un cha- peau de paille. Partout ailleurs ils n'ont qu'un bonnet de lai- ne rouge. L'habillement des femmes n'eft différent que par les manches des chemifes qui leur couvrent les bras , & fonc ferrées jufqu'au poignet. Le Roi femble avoir choifi un de fes R\s pour lui fucccder. Il fc nomme Moulci Zidan , peut avoir vint-deux ans , parole moins attaché à l'argent que fon père , mais non moins porté à la cruauté. Il a déjà epoufé trois femmes , don: il a huic enfans. L'éducation de la plupart des autres cnfans du Roi, cfl; fi négligée , qu'il n'y a gueres de baffefiTe dont ils ne foienc capables. A mefure que ces cnfans croiflcnt , le Roi les éta- blit i^lcaïdes ou Gouverneurs de divers pays ; & celui qui fe trouve plus fort quand le père meurt , tue Ces frères pour ré- gner fcul. M. de Saint Olon n'a pu faire au vrai le calcul des revenus de l'Empereur de Maroc. On eltim.e qu'ils peuvent monter jufqu'à cinquante millions. Les Alcaïdes gouvernent , &: il n'y a ni Parlement , ni Chambre de Juflicc , ni Mmiftrc. L'Empereur eii feul Au- teur, Interprète , èc Juge de fes loix , qui n'ont autres bor- nes que fa volonté. Cette autovitc qui paroit fi defpotique , eft fubordonnée à celle du Moufti , que l'Empereur n'a pas le pouvoir de dcpofcr. U n'y a pomt d'appel de fes juge- jTîens. Ses forces de mer font peu de chofe. Celles de terre pour», roient élire confiderables , fi le Prince fçavoit difciplincr fes fujets. On prétend que dans une prelTlmte occafion il poui"- roit metrre fur pied cent mille hommes, 169^. Fffff 3 90 LE JOURNAL Quoi qu'il n'ait point de troupes réglées , il a une Gardff ordinaire de trois ou de quatre cent Noirs , & outre cela huic A'cjï les qui connpofent fa Cour , & qui ne l'approchent que les pieds nus Se fans turban Celui auquel le Roi femble avoir pus de confiance , cfl: Mehemcth Adou Ben Atar. C'ell: lui qui citant AmbaHadeur en Angleterre il y a douze ans , fut obligé d'a'lc- à l'Au'Iiance fans (buHcrs 5c fans turban. Mchcmct Tiicmin fut Amban.idcur en France eni68f. H n'ed que Lieutenant de Police à Tetouan , où il a un frcre Fripier , & un autre vendeur de cordes. Il ne devoit cftre que le Secrétaire de Hadgi Manino Gouverneur de Salé , le véritable Amballadeur : Mais fon nona fut inféré à l'infçu du Roi dans la lettre de créance. Auifi Ce garda- t-il bien de s'en vanter à fon rciour , non plus que des prefcns qu'il avoir re- çus en France , 5c qu'il vendit à Marleille , pour en ôccr la conno; (lance à ceux de fon pays. L'Empereur de Maroc a de deux fortes de fujets ; de Noirs qu'il faic acheter ou enlever , & qu'il envoyé dans des lieux défères pour les cultiver j & de Blancs qui nailTenc dans Ces Eftacs. Ses voifins (ont les Ncgrcs d'une part , &: les Algé- riens de l'autre. Il n'a rien à craindre des preinicrs , à caufe du grand fleuve & des montagnes qui les feparent. Les Algé- riens pourroieiit entrer aiicmcnt dans fon pays. Mais il les en détourne par le prétexte de la Religion , & par le compte qu'ils auroienc à rendre à Dieu &: à leur Profère du fang qut fc répandroit par des guerres conrraires à leur loi. L'avantage qu'il tire du commerce le lui fait entretenir a- vec les Clirc tiens , nonobftant l'averfion qu'il a de leur Reli- gion. Le dixième de toutes les marchandifes qui entrent dans fon Royaume , &c de toutes celles qui en (brtent , cft le droit qu'il a impofc. Les Marchans François n'y portent poinc d'argent , mais Iculemenc des denrées &: des manufadlures , qu'ils échangent avec des marchandifes de plus grande va- leur. Les monnoycs étrangères n'ont aucun cours en ces pays- là. Les Piitoles d'Efpagne &: d'Iralic, & les Louis de Fran- ce, fonc reçues à dix livres &c à dix livres dix fols : encore DES SCAVANS. 391 n'eft'ce qu'au poids, & pour les fondre. Les Juifs y prennent les Louis d'argent à foixante & cinq fols. On y en porto;?; beaucoup avant la reformation. La monnoyc courante du pays eft de crois fortes. Celle d'or Ce nomme Ducat : celle d argent Bîanquille ; &£ celle de cuivre Felous. Elle n'a que des lettres Arabes, & point défigure, leur loi n'en permet- tant aucune. Le Ducat vaut depuis fix livres jufqu'à fept li- vres dix fols de notre monnoye. La Blanqi;iî!e vaut deux fols (îx deniers ; & le F^ lous vaut un peu plus qu'un de nos de- niers , & il en fa"t vint-quatre pour une Bla'-.quil'e. \L de Saint Olon eut audiance de l'Empereur de Mavoc i'or.zicme Juin 1693. neuf jouis après fon .-jrrivéc à Mique- nez, pendant Icfqucls il n'eue la hbcrié de rccevcir aucune vifite, ni de forrir de fon Pal is , & ne fc pjfla cucun jour qu'on ne l'avertift de grand marin de fe tenir preil pour al'tr trouver l'Empereur , &: qu'on ne leremillchaque fuir au kn- dcmain. Lors qu'il eut cfté conduit au P.:lais , le Roi parut fur un chevil blanc , tei-.antune lance à la main, &c ayant le vif ge caché d'un mouchoir. Lors qu'il eut mis pied à terre , & qu'il fe fut alfis fans natte ni tapis , fur le /ucil d'un poteau de bojs, il répéta deux ou trois fois : Tui buon , terme qui fignifie, Soycr^le bien venu. L'Ambaifadeur lui fie en François un fort- beau compliment , qui fut lu enfuite pir l'Intcrprcte en Mo- refque. L'Empereur y répondit d'une manière qui fie coa- noirrc qu'il lui avoic piu , & s'étendit fur les louanges du Roi^, & fur les avantages que le Grand Seigneur tiroit de fon allian- ce. II confidera attentivement les prcfens de rAmbalfadeur, & s'arrêta particulièrement à deux tapis qu'il croyoit venir des Indes , &: qu'il témoigna cllimcr davantage , quand il fçuc qu'ils avoient cfté faits à Paris. Dix jours après l'Ambafladeur eut fon audiance de congé,. Ç)\x il fit encore un compliment. La réponfe du Roi de Maroc, & tout l'entretien , roulèrent fur des propofitions extraordi- naires , & peu conformes aux motifs qu'il avoir fait paroiae pour engager cette négociation , & entièrement oppofces à la lettre qu'il avoic écrite au Roi, &: qu'il dénia auccnciqucmen:. 39 i LE JOURNAL Cette lettre efl: infcrcc dans la Relation , avec quelques au- tres , &t jointe à quelques obfcrvations qui peuvent con- vaincre du peu d'aflurance qu'il y a aux paroles & aux pro- inefles du Roi de Maroc. DISSERTATION SUR LA CONDANNATION DES Théâtres. In 12. à Paris chez jaques le Fevre , rue de U Harpe. 1694. CE qu'il y a dans cette differtation de plus fpccicux en fa- veur de la comédie , eft fondé fur la différence qui Çz voit entre les jeux & les divertifl'emens des Payens. Tout y eîtoit miftcrieux, foit pour les caufcs de l'infticution , ou pour la qualicc de ceux qui y prefidoient , ou pour les vœux àQ% combattans , ou pour les actions de grâces que les vainqueuts cji rendoient aux Dieux.* L'AUteur demande il l'on en pou- voir dire autant de leur teâtrc ; & pour en juger, il remar- que , que le tcâ^rc ne fignifîoit pas proprement l'ecliafaut où paroilîoient les afteurs : que c'cfloit un grand lieu compolc de plullcars bâtimeiis , &: de ficges pour les fpedatcurs , où fe drcfl'oit un grand echafaut , fur lequel fe faifoicnt \zs jeux de danfe, de mufique, & de poëfie. La comédie & la tragédie commencèrent par les danfes &: par les chanfons faites dans Icarie bourg d'Atcncs , au tour d'un bouc qu'Icare avoir tué dans une vigne de Bacchus donc il izâtoit les fruits. Comme la comédie & la tragédie avoienc eu pour berceau les autels de ce Dieu , & qu'elles faifoicnt la plus folcnncUc dévotion de fcs fcftes , elles ont cfté tenues parmi les Payens pour uncccrcmonie de religion j & ce culte a depuis palTé de Bacchus aux autres Dieux. Sur ce fondement les anciens Pcres dcfcndirent aux Chré- tiens d'affifter aux tcâtres , parce que c'cftoit patticiper à l'ido- Jâtrie. Il ne falloir point diftingucr alors les teâcres d'avec les temples. On trouvoit dans les uns & dans les autres les mef- nies divinitez , les mefmes miftcrcs , les mcfmes autels , les imcrmes facrificcs , & de plus un plaifir public qui tiroit du fond DES se A VANS. 393 fond du cœur une approbation volontaire en l'honneur des idoles. Il n'y avoir point de crime plus énorme pour ceux qui fai- foicnt profeirion de l'Evangile. Ce fut- là toujoars le motif de la rigueur avec laquelle ks anciens Pères coadannerent les fpedaclcs -, comme l'auccur de la diilertation le prouve par leurs paroles qu'il rapporte. Maintenant que le tcâ re eft purifié des cérémonies de cet- te impiété , &: que l'idolatne elt bar.nie de l'Occident-, il croit que cette raifon autrefois fi puiifantc , n'ell plus confiderable. Mais parce que les Percs n"ont pas conJanné le teâtre des Payens pour la fociecé feule de leur idolâtrie , mais aulU pour l'impudence des adeurs , &' pour l'infan.ie des allions qu'ils reprefenroicnt , il entreprend de montrer deux chofcs : la première , quelle eîloit la licence de la fcene ; &: la fecon Je que la rcprefcntation des poèmes dramatiques fut toujours cxcmprc des peines portées contre cette licence. Il dit donc qu'environ quatre cens ans après b fondation de Rome , fous le Confulat de Peticus &: de Stolon , les habi- tans affligez de la maladie contagicufe , confulterent l'Ora- cle , qui répoïKiitquc pour s'en délivrer , ils dévoient inflituer des jtux en l'honneur de la DéelTe Flore. Ils fe firent inltrui- re par les htruricns , qui leur fournirent des hiflrions , parmi lefqucls les Mimes fuifiicnt un corps fcparé. Ils danfoienc & chantoicnt avec tant d'art , que leurs poflurcs &: leurs ^c- ftes cxpliquoicnc le fens des paroles. Au lieu qu'ils ne dan- fbicnt ordinairement qu'un perfbnnage qu'ils avoicnt étudié avec foin , les Pantomimes en danfoieijt pluficurs. Ceux qui ne danfoicnt que les poëfics d'Homcrc , eftoient appeliez Ho- mcriftcs On peut joindre ceux qu'ils appelloient Planipcdcs, à caufc qu'ils danfoient les pieds nus ; les Funambules , 013 danfeurs de cordes ; /es faifcurs de fauts périlleux ; les acc- tabulaircs , ou joueurs de gobelets ; les Grailatcurs , ou Por- techaffes ; les fauteurs à clochepicd ; les Petaurillcs, ou gens qui tournoient dans des roues avec beaucoup d'art j enfin ceux qui fc nommoicat Tecnitcs , ou ariifans de teâtre. *^94t . Ggggg 394 LEJOURNAL Les extravagances boufonncries de tous ces aùcots em- ployez à la rcprcicntation des fcftes de Elorc , n'ont pas efté f\ particulières aux Payens , que les Chrétiens n'en ayent fouf- fcn de femblablcs durant plufieurs années fous le nom de fefte des fous , où les Ecclefiadiqucs faifoicnc dans les Egli- fcî, dans ies rues & dans les places publiques toute forte d'ex- travagances. A CCS jeux &: à ces fpectacles de la fcenc les Romains joi- gnirent dans la fuite des rcprcfentacions plus honnêtes , dont les premières furent les fables Atcllanes , ainfi nommées d'A- telle ville de Campanie. C'eftoient des facircs fans aigreur & fans turpitude. Elles furent jouées alfcz long temps avant les poèmes dramatiques , qui ne furent connus à Romequ'au iiccle de Plaute &: de Ncvius , environ cent ci iquaiice ans après les jeux i'ceniques. La comédie fut alors confidcrée comme une peinrurc naï- ve de la vie commune ; &c la tragédie comme un portrait fen- fjble de la for. une des Grans. Ces trois fortes d'adcurs , les Atcllans , les Comédiens Sc les Tragédiens n'eftoicnc point compris Ions le nom d'Hi- ftrions , de Mimes , ni de Sceuiques, fi ce n'elloit par une li- gnification abufive ; &: jamais ils n'ont eilé mis en parallèle, ni traitez avec pareil mépris. Cerre diftcrencc cil marquée dans rOraifon de Ciceron pour Rofcjus Comédien , contre Fannius Mime , auquel il reproche d'avoir la tefte raféc , Se pas un feul poil d'homme de bien. Mais elle a efté fi peu con- nue parles modernes , que depuis plufieurs fiecles les plus doâes s'y font trompez , en attril^uint aux Comédiens &: aux Tragédiens tous les défauts des Hiftnons &; des i)ceniques. La République d'Atenes dc prononça jamais rien contre ceux qui reprefciitoient les comédies &: le.'^ tragédies, ni mtf- me contre les Sceniques qui danfoient lesdanfcs les plus dcf- honnêtes Elle fe contenta de les diftinguer par les marques de fon eftimc : julques là que Sophocle qui avoit joué quel- qjjes-unes de fes comédies , fut honoré du commanjemenc de l'armée ; au heu que les Sceniques demeurèrent au dcr- Tiier rang de la bourgcoific. DES SCAVANS. 395 Les Romains ne furent pas fi favorables aux Hiflrions. Ils les notèrent d'infamie , & n'étendirent pourtant jamais cette peine fur les-Atellans , les Comédiens , ni les Tragédiens ; & c cft en quoi l'auteur de la dillcrcacion prétend que les Mo- dernes fe font trompez ; ce qu'il fait voir par la difcuifion des textes de Droit , des Conciles , & des Percs, qui ont femblé mettre indifféremment au nombre des gens infâmes tous ceux qui contribuoicnt aux divertiiîcmens des fpedacles. Il foutient mefme que les Hébreux n'ont point jugé les poèmes dramatiques indignes de leur application , ni con- traires à la pureté du culte qu'ils dévoient à Dieu ; comme il paroit par le fragment qui nous relie de la tragédie d'Ezechiel intitulée /<< Sortie d'Egipie. De toutes les recherches les plus curieufes qu'il a faites de l'antiquité , & dont il a rempli fon ouvrage , il conclue que ni la comédie ni la tragédie n'ont rien qui les puiife expofcr à la cenfurc des loix , & que ce font des ouvrages ingénieux & agréables , dont les plus fcveres ont fait leurs plaifirs innocens. Que fi le libertinage des adcurs donne quelque peine à la pu- deur des âmes chrétiennes , il ne faut en cela qu'imiter les Empereurs , qui fans priver leurs fujets de ce diverciil'ement, en ont retranché les abus. Les comédies ont eftc fouvenc reprefcntécs dans les Eglifes fans que l'on y ait trouvé à redi- re. Mais lors que les tcclcfialhques yfirenc des boufonne- rics indignes de la fainreté de leur miniftcre , Innocent III. condanna le defordre fans défendre l'iifage. Quand on renouvcUa en Europe le divcrtilTement du tcâ- tre, il commença par des (atires mordantes, qui tirèrent bien- tôt après elles le libercinage ; &; cela fuc corrigé par les hiftoi- res faintcs que l'on y fit reprclenter. Les perfonnes de pièce en prirent tant de foin , qu'ils formèrent la Confrérie de la PalTfion , qui poffede encore l'Hoflel de Bourgogne. La li- cence des Poëces excita l'indignation des Rois , qui notèrent d'infamie ceux qui mor.coienc fur le teâtre. Le Cardinal de Richelieu remit la comédie en crédit , en n'y lailfant tien de ce qui l'avoit foumife à lu rigueur des loix. y)6 LE JOURNAL II y a long- temps que cette Defcnfe de la Comédie avoic elle conipofce par feu M. l'Abbé d'Aubignac. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. litfioTia Chronologica Pontificum Romanorum , R. P. F. Fr. Carrière , Aptenfii Minorité Convcnt D. Thcotog. cum prafigna- tione futurornm ex S. M-iUchia. Huic ultirute Edittoni acceffit Coritinuatio ejufdem hifîorta Chronoloqica ah Alexunàro V H. uf- que ad Innocennum J^ll. féliciter fedmt cm, jîucioïe Reiigiojô ejufdem Qrdinis. In iz. Lugduni. &c ie trouve à Paris chez An- toine Dezallier , & Louis Guerin , rue faine Jaques. 1 694. Laudatio Funehris lUupiffimi Ecclifix Principh Camitli de Nrufville , Archiepifcopi ^ proregn Lugdunenfii , ^c. Difit* die JT. K'i'. Auyifii ann. /6p;. in icde ftcra CoUegii Lu^danenfi fanHi_IJïrf!^ Tnnitatis Soc. Jefu , à Dommico de Colania , ejufdem Societatis Saccrdote. In ^. Ltigduni. &: fe trouve à Paris chez Robert Pépie , rue faint Jaques. 1 694.. Hypothefe raifonnêe , dam laquette on fait voir que la cavÇe iri' terne de toutei le fièvres , ^généralement de toutes le( atettes ?,> ata~ dus , vient aei levams acides , acrei , ou fu'.iz^ qw fe rmcontient dans les pre»j'C'ei voyes. Le tout ocpli que fur le> principes du célè- bre AI. Defuirtes , c^ confirma de l'expérience des meilleurs Prati.. tiens. Par M. Fror>,ent. In 12. à Paris chez Laurent d'Hou» ry, rue faintjiques. 1694. L' Anatomie de l'homme , fûivant la circulation du fang , ^ lei dernières découvertes. Démontrée aujirdin Roy d , par M. Oio. nii , premier Chirurgieri de feue Madame la Davphine , Chirugiea Ordinaire de la feue Reine , injure 4 Paris ^ Seconde Edition , re- vue & awrmentèe ctane table très utile. In S. à Paris chez le mcfmc. 1694. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaque* , à l'Image de faint Jean Baptifte. Avec privilège du Rov XXXIV. 397 LE JOURNAL DES • se AVANS. Du LuNDY 30. Août M. DC XCIV. ESTAT PRESENT DE L'ARMENIE TANT POUR le temporel que fcttr le fpiritucl , avac une defcnption du pays t^ des mœurs de ceux qui l'habitent. In 12. à Paris chez Ja- ques Langlois , rue fainc Jaques. 1 694.. BI E N que la principale vue de l'Aineur foit de décrire le progrés que la foi a fait depuis quelques années en at- inenie , il s'étend d'abord fur la defcription du pays , & fur les mœurs de ceux qui l'habicenr. 11 y a deux parties , donc l'une qui renferme prefque rouce la grande Arménie, eft fous la domination du Roi de Perfe ; & l'autre qui comprend rou- te l'Arménie Mineure , & une partie de la grande , relevé du Grand Seigneur. Le nombre des Mahometans y elt fore grand : mais celui des Clirecicns l'eft encore davantage. Ou- tre la langue Turque , qui a cours dans le pays , les Armé- niens ont leur langue vulgaire qui eft: en ufage parmi le peu- ple j & une langue particulière pour les Sçavans , qu'ils ap- pellent Littérale. Ils ont de très bonnes inclinations , & font profe/îion de la Religion Chrétienne , de laquelle ils reçurent les premières iuftructions par le minidere de faint Bartelemi. Au com- 1694. Hhhhh 398 LEJOURNAL mcnc du quariicmc fiecle ils furenc perfecucez à Ton fuiet , &: peu après aftwVii-is dan» la foi par Grégoire facré par Léonce Evoque de Cciarce en Cappadocc , fclon le tén;cignagc de l'aine Nicon Auceur du treizième ficcle , donc nous avons un fragmcnc dans le croilîime tome de la Biblioceque des Pères. Baronius dcnaeure d'accord fur l'année jti. que les actes de ce Grégoire ne font pas goûtez de tout le monde , & qu'ils font mêlez de faits incertains & peut eftre fabuleux. Le voyage qu'on prétend qu'il fit a Rome avec le Roi Tiridaie pour unir l'Eglifc Arménienne à l'Eglife Romaine fous le pon- cifîcac de faint Silvcflre , pourroit bien cftre de ce nombre. Autrefois les Arménie;, s dépendoient pour le fpirituel du Patriarche de Conftantinople. Mais depuis qu'ils font tom- bez dans l'erreur u'Eucichcs , ils fe font fcparez de lui , &: ont établi un Patriarche particulier qui demeure à Ichmiad- zin , qui n'a rien ni pour fes habits , ni pout ù table , ni pout fon train , qui le diilingue du commun des Ecclefiaftiques. Il V en a encore un au.re à Cis dans l'Atmenie mineure^ Son étabiilfemenc ne vient que des guerres qui ont quelque- fois obligé le Patriarche d'Ichmiadziu a fe réfugier en d au- tres villes j qui en ont pus occaiîon de s'arroger le Patriar- car. Les Vertabiets font des Dodlcurs , dont toute la fciencc confiltc dans une légère teinture de la langue licterale, dans laquelle il* débitent au peuple les fermons du fameux Dace- nitfi , qu'ils apprennent pour cet effc:. Ils gardent le céli- bat de mefme que les Evéqucs &: les Religieux , à la diftin- dion des Prêtres Séculiers qui font mariez , &: qui exercent un métier pour nourrir leur famille. Outre 1 erreur d Eurichés , ils en ont encore quelques au- tres mêlées de quantité de fuperditions. Une des plus ridicu- les vient de li\ confiance qu'ils ont aux Miniftres de Mahomet pour la guerifon de leurs maladies. Car quelques-uns après avoir fait hre l'Evangile fur le malade , y font lire l'Alcoran. La vie des Anacoreces efl: très auftcre. Ils ne mangent jamais qu'une fois le jour, ne vivent que d'herbes &: de légumes ; 8c bien loin de boire du vin , ne fouirrent pas qu'il en encre dans leur monaftere» DES se A V A N S. 399 Le peuple faic abftinence le Mccrcdi 5c K' Vcndt eJi , dans Icfquc's ils ne marigent ni chair ni poiirori. Il^ ont oiirrc cela plulîeurs fuois de jeafncs , qu'ils obfervenc avec une extrême rigueur. Notic Auteur dit que ces grandes abftincnces leur donnent de la préiotnption , & leur font croire que leur Eglife cil plus paifaiccque la Latine. Il ajruce mefmc que ces jeufnes ont elle iîilbtuez pour la plupart par des Hérétiques qui ont vou- lu répandre plus ailcrnentle poifon de leur erreur lous un ex- tciicur mortifi»; ; mais il n'en apporte aucune preuve. Il liC feroit pas dirficile de les réunir un jour à TEglife L-a- tine , s'ils edoienc délivrez du jou^ de la Icrvuude , dont i!s ic co.ifo'ent par i'cfperance qu'ils Fondent fui une rcvelatioii faite à faine Nierfés un de leurs Patriarches. L'AUteur ayant décrit de la ioiic l'eAat où !e trouve au- jourd'hui l'Arnicnie , Cou pour le temporel ou pour le fpin- tuel , reprcfente les quaîuez que devroit avoir un JMiifion- naire qui ftroit employé à l'inihuélion de ce^ peuples : un tempérament robulte , à l'cpreuve de touces les ini.ommodi- tez des fdifons , capable de ("uppoirer les fatigues des voya- ges &: des veilles , la faim &c la foif ; une connoilTlince futfi- fante des deux langues du pays , des erreuts 6c des abus qui y régnent ; une intelligence parfaite des Pîéaumes , des Evan- giles , & des Epitres de famt Paul , que les Arméniens fça- vent par cœur , Se fur quoi ils font chaqu^- jour mille que- flions. Ces qualitez fuppofées , l'AUteur entre dans le détail de ce que les Millionnaires y font depuis quelques années , &c com- mence par la miffion d'Ifpahara. Cette ville e(l la Capitale de Perfe , & une des plus grandes de tout l'Orient. Djus le feul faubourg nommé Julfa, il y a un grand nombre de Chré- tiens. Le P. Chezaut Jefuite , fameux Miifionnaire en Sirie, refolut d'y aller travailler , & apprit la langue à ce deifein. Sou zèle n'auroic pas eu la faîisfaélion qu'il defiroit fans une lettre de LOUIS LE GRAND , qui obtint du Sophi la permilîion de cet etabliflement , auquel la libéralité de Marie de Gon- lague Reine Je Pologne , fournie cous les frais ncceflaires» 400 L E J O U R N A L Le P. de Rodes premier Supérieur de ccrte MifTion, ayant efté appelle à la couronne que la Jurtice de Dieu prépare aux travaux des Ouvriers Evangeliques , le P. Chezauc lui fuccc- da , & entra bien avant dans les bonnes grâces du Sophi pat la connoiflance qu'il avoit de la Médecine Se des Materna- tiques Le P. Mercier fut le troifieme Supérieur de la refidcncc d'Ifpaham , d'où il fit faire des miflions volantes à la cam- pagne avec d'heureux fuccés. Les Capucins , les Carnics Dcchauflcz , Se Meflïcurs de la Compagnie des Miffions E- trangcres de Paris , ont fait depuis des établiiremens au mef- mc lieu. En 1685. lesjefuites cntreprircnr un autre ctabîiflemcnc à Bctlis pour la réunion des Arméniens à l'Eglife Catoiique. Betlis eft la Capitale d'un petit Eflat gouverné par un Emir particulier, qui ne reconnoit pas tiop la domination delà Por- te. Le P. Barnabe y fut bien reçu avec un Frère qui fçavoit la Médecine , & qui peu apr^s fon arrivée guérit d'une diflen- terie le His de l'Emir. Mais depuis ce Père y foufFut de gran- des perfccurions avec le P. Roche , qui lui avoit efté envojé pour partager Tes travaux. Quelque temps après ces Pères quittèrent cette miffion pour en faire une autre à Erzerom , où M. de Guilleragues >\mbafradeur du Roi à la Porte , leur avoit obtenu permiîllon verbale de s'établir. Le P. Barnabe y alla d'Alep à pied du- rant les plus grandes chaleurs , quoi que le voyage ibit de ; 5^. journées. Il y tut favorablement accueilli en vertu d'une Pa» tente que le Grand Seigneur lui avoit accordée depuis , & y travailla fort utilement. Le P. Roche employa fîdellement dans cette million les riches talens que le Ciel lui avoit donnez pour la convcifion des amcs. Il trouva moyen de gagner Eleazar grand Patriar- chc des Arméniens , qui s'elioit déclaré contre les Millionnai- res. Il le guérit d'une maladie qui lui elloit furvcnuc , & en reconnoifTancc en obtint pour lui & pour fcs contreres la pcr- ïnifîlon de dire la Méfie dans toutes les Fglilcs de la nation. Il explique t)ES SCAVANS. 401 îl explique lui- mefme dans une Icccre infcrée en cet en. droit , le fruit que le Ciel accorda a. (es foins &c à Ces travaux, îl fut frappé de la peile dans le temps qu'il artirtoit ceux qui en eftoient attaquez , &c confomma iàintement fon facrjfîcc. Le récit de fa mort cft fuivi de fon éloge , où entrent quanti- té d'adions remarquables. Le P. Villote fut envoyé d'Ifpaham à Erzerom pour Cucce- der aux emplois & aux fatigues du P. Roche j en quoi il fut beaucoup foulage par le P. Portier , qui n'eut pas il tôt pris quelque teinture de la langue Armcniennc , qu'il s'en fervic à l'inllrudion des enfans , dans l'cTprit dcfquels il tâcha défai- re entrer la foi par les yeux auflî-bicn que par les oreilles. II inventa un arbre , dont les feuilles & les fruits portoient la reprcfentation de tous les mifteres , & renferma fous d'au- tres images les erreurs , les abus , & les fuperftitions des Ar- méniens. Ces deux Jefuites fouffrircnt une cruelle perfecurjon à Er- zerom , d'où ils furent enfin chaflcz. Mais l'Ambafladeurdu Roi à la Porte y a obtenu des ordres précis pour leur rétablif- femcnt. Notre Auteur décrit enfuite la Million d'Erivan ville de Pcrfe au quarantième degré de latitude , & au quatrevint- deuxiéme de longitude , &: aflîfe au bout de la plaine , où l'on croit que Noé offrit le premier facrifice après le déluge. Le Monaftcre d'ichmiadzin où rclîde le Patriarche , eft à trois lieues d'Erivan. On en peuc voir la defcripcion dans l'o- riginal. Les Jefuites ayant obtenu du Roi de Perfc par l'en- tremife de Louis le Grand la permiffion d établir une refi- dence à cette ville là , jcttcrenr les yeux fut le P. Longeaux pour en eftre Supérieur. Il y arriva le i §. Juillet 1684. &c le iz. Septembre fuivant y mourut de poifon à l'âge de 3 S. ans. Le P. Roux s'y rendit pour remplir fa place 5 & il fe fervic avantageufemcnt pour le falut des amcb de la fa^. eur du Pa- triarche qu'il avoir fçu ménager lors qu'il fut attaqué d'une fièvre lente qui l'enleva du monde l'onzième Septembre 1686. Le Patriarche voulut que contre la coutume , fcs obfequcs fuflcnt aulîi m-ignifiques que celles des Evéqucs. 1694. liiii 40i LEJOURNAL Le P. Diipuis nommé avanc fa more pour l'aller foulager dans Tes travaux , arriva à Erivan le i 2. Octobre , & y reçut pluficurs marques de l'alïcftion du Parriarcke, que les remè- des avoicnc guéri d'une maladie dangercufe. Mais il chan- gea bien toc de fcntimcnc , &c Ce déclara contre eux par la feule haine de la Religion. Dieu retira le P Dupuis du mon- de dans le temps qu'il fembloic le plus ncccfTaire à cette Mif- fion. Le Patriarche défendit de l'enterrer ^ & ne confentic qu'avec peine qu'il fuiï porté à un Cimetière éloigné. Il y avoir long- temps que les Mifllonnaires rcgardoicnc ChamaKC ville Capitale de la Province de Kirvan en Pcrfc , comme une porte d autant plus importante pour la Religion, que les Negocians qui en partent continuellement, porteroienc avec eux en diverfcs provinces les Inftrudions qu'ils auroient reçues. Le Comte de Siri Ambaffadtur de Pologne en Per- fe y mena lui-mcfme le P, Puthier Jefuite François. Ils y ar- rivèrent le 1 o. Juillet p686. Le P. Pochier ne fut pas long- temps dans cette ville fans gagner la confiance des Chrétiens. De fi beaux commtncemens prometroient une fuite heureu- fe , lors que la providence permit qu'il fuft aflaflîné par cinq perfonnes qui entrèrent dans fa chambre le 17. Septembre 1 687. On crut qu'ils avoient efté apoftcz par un Mahomc- tan de qui le Gouverneur avoit acheté la maifon pour les MiC fionnaircs. Le P. de la Mafc fut retiré d'Ifpaham où il cftoit neceflai- re j & nonobftant fon âge de foixanre & cinq ans , il fe rcn- ditàChamakeavec une caravanne durant les rigueurs de Ihi' ver. II y travailla avec un zcle que rien ne put aftoiblir. L'au- teur ne dit rien de plus de la Mifijon de Chamùké , &: finie par celle de Trebizonde. Chacun fçait que c'elt une ville de Cappadoce , fur le bord de la mer Noire , où les Empereurs Grecs fe retirèrent après que les François fe furent rendus maîtres de Conftantinople. On y compte vint- cinq mille habitans , dont le plus grand nombre elt Mahometan. En Mai 1691. les Pères Fillac , Beauvollier, & un autre Jefuite , s'embarquèrent à Conllancinoplc , & après huit oa DES se A VANS. 405 dix jours de navigation arrivèrent à Trcbizondc , où ils furent bien reçus de l'Evêquc &: de Ton grand Vicaire , qui avant que d'eftrc Prêtre elloit Tailleur , &: en faifoit encore le métier poi'r gagner fa vie. Ces trois Jcfuites ayant cftc rappeliez de Trcbizondc pour de bonnes raifons , le P. Portier qui travaiUoit à Erzcrom , en fut retiré , & envoyé en leur place avec un Frère qui fçavoic la Médecine. Ils arrivèrent à Trcbizondc le 17. Avril 1692,. Se y apprirent que le P. Ricard &: le P. Chomel y efloient ar- rivez de Conftantinople un jour auparavant. Le Bâcha pré- venu contre eux tous , les reçut fort mal , &: leur fit de gran- des menaces. Le P. Chomel eftant parti avec une caravanne qui alloit à Erzerom , les autres Millionnaires Ce virent expo- fez à la perfecution des Schifmatiques , abandonnez de leurs amis , conduits en prifon , & chargez de fers. Us n'en forti- rent que pour de l'argent , Se furent renvoyez à Conltanti" nople. M. de Caftagnercs de Chateuneuf , Ambaffadeur de France à la porte , y obtint des ordres pour leur relachemenr. Mais quelque précis qu'ils fuifcnt ils Kucnt mal exécutez , Sc ne fcrvirent qu'à irriter le Bâcha. Toute la ville de Trebi- zondc parut fi envenimée contre eux , qu'on n'y parloir de rien moins que de leur faire leur procès comme à des împo- ftcurs , qui avoient furpris les Minières delà Porte. Bien- toc après lis appaiferent le Bâcha en le gucriflTant d'un ulcère qu'il avoir aux mains , & en délivrant fon fils d'une longue mala- die. Alors fa haine fe changea en tcndrefle , & il leur permit d'exercer leurs fondions. Après que l'auteur a parlé de toutes ces Miflîons, il propo- fc les moyens dont les Miflîonnaires fe peuvent fervir pour gagner les Arméniens , & pour établir parmi eux la Religion Catolique. Ils fe reduifent à reformer les mœurs , fans en- trer en des difcours de controvcrfe , à faire recevoir le dog- me fans toucher à la difcipline , .à aqucrir l'eftimc des Evê- ques , des Vertabiers , &C des Prê:res qui font fort refpedez du peuple , à faire des Miflîons volantes à la campagne , à ou- vrir des Ecoles &: des Séminaires. Le projet de ces Semiaaiw 404 , . , . ^' E JOURNAL res fut imprime à Paris l'année dernière , & propofc par le P. Portier , qui en partit avec fept autres Miflîonnaircs au mois d'Odobrc pour retourner àConflantinople,où ils font arrivez & où ils travaillent à cet établiflcment. CONSIDERATIONS SUR LA DIFFERENCE QU'IL jf a entre L' Analyfe ordinaire , ^ le nouveau calctil des tranfcen- dentci par M. Leibnits. LA folution d'un problême de confcquence , propofé par M. Jean Bernoulli , que M. le Marquis de l'Hofpital a donné dans les Mémoires de l'Académie Royale des Scien- ces , & tout ce qu'on a eu la bonté d'y dire en faveur de mon calcul qui ferc à ces chofes , m'engage à en dire un mot pour animer les Géomètres à le perfectionner. Il faut avouer que l'Analifc ordinaire eft encore aficz imparfaite ; le Public n'a pas encore le moyen de trouver les racines du cinquième de- gré , & au delà ; & il n'a pas encore de metode générale pour le calcul qui fe fait à la façon de Diophante pour refoucire les queûions en nombres. Ainii il ne Ce faut point étonner fi no- tre nouveau calcul des différences & des fommcs , qui envc- lopc la confideration de l'infini , & s'cloigne par confequenc de ce que l'imagination peut atteindre , n'clt pas venu d'a- bord à fa perfcclion. Mais comme il eft beaucoup plus utile que le calcul des équations du cinquième degré & au delà, ou que le calcul de Dicphante , quoi que j'ayc trouvé le moyen de les faire encore fervir au nôtre ; il eft important qu'on s'y applique. Mertîenrs Bernoulli ont efté les premiers qui ont témoigne publiquement avec un très grand fucccs , combien ils l'avoient trouvé propre pour refoudre des problè- mes Phifico-raatematiques , dont la porte paroilToit fctmée auparavant M. le Marquis de l'Hofpital y a pris goiit auffi, en ayant donné de beaux échantillons ; & enfin M. Hugens lui- mefmc en a reconnu & approuvé la confcquence. 11 faut rendre cette juftice à M. Newton , ( à qui la Géométrie, l'Op- tique ,& l'Aftronomic ont de grandes obligations ; ) qu'en- core en ceci il a eu quelque chofe de femblable de fon chef, fuivanc BES SCAVANS. 40 y Suivant ce qu'on en a fçu depuis. Il cft vrai qu'il Ce fercd'au- ircs caradercs : mais comme la caradcrirque mefme cfl: , pour ainfi dire , une grande parc de l'art d'inventer , je crois que les nôtres donnent plus d'ouverture. Pour ce qui eft de ceux quinefe fervent que de l'anahfe ordinaire, & pcnfent peut-eftre qu'elle leur Tuffir, il fera bon de leur propofcr des problêmes femblablcs au dernier de M. BcrnouUi. En voici un plus gênerai, qui le comprend avec une infinité d'autres. Soit donnée la raifon, comme M à N, entre deux fon- dions quelconques de la ligne A C C : Trouver la ligne, y^p- peWe fondions toutes les portions des lignes droites qu'on fait en menant des droites indéfinies, qui répondent au point fixe , & auy points de la courbe ; com- me font A B ou A ^ abfciflc , B C ou /g C ordonnée , A C cor- de, C T ou C 9 tangente , C P ou C n perpendiculaire , B T ou /5 9 fouftangente , B P ou |S n fous- perpendiculaire. AT ou A 9 re/ê&a , ou retranchée par la tangente ; A P ou A n re- tranchée par la perpendiculaire } T9 & Pn fous retranchées, fub-refe^a a tangente vel perpendicnlari ; T P ou 9 n correfeHa. Et une infinité d'autres d'une conftrudion plus compoféc, qu'on fe peut figurer. Le problême fe peut toujours réfoudre ; & il y a moyen de conftruire la ligne , au moins par les quadratures ou par les rectifications . Car cette metodc , ou ce calculus differentialis ^ fert non feulement aux différences , mais encore aux fommes qui font le réciproque des différences ; à peu prés comme le calcul ordinaire ne fert pas feulement aux puiffances, mais encore aux racines qui font le réciproque des puiffanccs. Et 1694. Kkkkk 4oé LE JOURNAL l'analogie va plus loin qu'on ne pcnfc. Dans l'analifc ordi- naire on peut toujours délivrer le calcul i vinculo , &: des ra- cines, pir le moyen àcs puifTances : mais le Public n'a pas encore la mccoie de le dcliver àcs puilTances impliquées par Je moyen des racines pures. De mcfme dans notre Analifc des tranfcendantcs , on peut toujours délivrer le calcul à vin- culo & des fommcs , par le moyen des différences : mais le Public n'a pas encore la metode de le délivrer des différen- ces impliquées par le moyen des fommes pures ou quadratu- res : & comme il n'efl: pas toujours poffible de tirer les raci- nes effcélivcmcnt pour parvenir aux grandeurs rationnelles de l'Arirmetiquc commune ; il n'eft pas toujours polîiblenon plus de donner effedivemcnt les fommcs ou quadratures , pour parvenir aux grandeurs ordinaires ou algébriques de î'analife commune. Cependant par le moyen des fcries infi- nies , on peut toujours exprimer des grandeurs rompues com- me en entiers , & des incommcnfurables en rationnelles , & des tranfcendantes en ordinaires. Et j'ai donné par là uns voyc générale , félon laquelle tous les problêmes non feule- ment à^s différences ou fommes , mais encore des diffcreiv. tio- différentielles , ou fommes des fommcs &: au delà, fc peu- vent conftruire fuffifamment pour la pratique : comme j'ai donné aulîî une coniftrudion générale des quadratures par un mouvement continu & réglé. Enfin notre metode eftanc proprement cette partie de la Xlîtematique générale qui traite de l'infini , c'eft ce qui faic qu'on en a fort befoin , en appliquant les Matematiques à la Phifique , parce que le caraderc de l'auteur infini entre or- dinairement dans les opérations de la nature. DISCOURS SUR L'INSTITUTION DE L'ORDRE Militaire de S. Louis ^ qui a remporte le prix de l^ Eloquence par le Jugement de l' Académie d' Angers. Jn ^, à Paris chez Jean Boudot , rue faint Jaques. 1 694. LEs plus glorieux fuccés de la dernière campagne , la pri- fe de Rofes , U celle de Gharleroi , la bacaille de Ner^ DES S C A V A N S. 407 vindc , Se celle de Marfaille font confiderées dans ce difcouis comme des exploits de valeur, aufqucls outre les autres mo- tifs , les Officiers des Armées ont efté excitez par le noble defir d'eftre honorez du Cordon de l'Ordre Militaire de faine Louis , & d'entrer dans un Corps qui a l'honneur d'eftre com- pofé de ce que la France a de plus illuflre , &: d'avoir le Roi à fa tcfte. La bonté qu'a eu fa Majcfté de récompenfer leurs fervices par cette éclatante diflindion , & la rcconnoiflancc qu'ils lui en témoignent par leur zèle , y font célébrées en des termes dont la pureté & l'élcgance ont remporté le prix par le juge- ment d'une célèbre Académie. LA CONNOISSANCE DU MONDE , OU L'ART de bien élever la Jeunejfe pour les divers eflats de la vie. Secon- de Lettre , fur le choix S" les qualtte\d'un Gouverneur. In 12. à Paris chez Jean Guignard , à l'entrée de la Grand'Sallc du Palais, i 694. LE choix d'un Gouverneur eft d'autant plus difficile , que les qualitez qu'il doit avoir font plus rares. Il faut qu'il ait l'efprit élevé & accommodant ; qu'il l'ait étendu & précis, qu'il l'ait fécond & refcrvé. Chacune de ces quahtez ren- ferme une efpcce de paradoxe , & a befoin de commentaire. L'élévation d'cfprit ne s'aquiert pas. Elle eft infufc. Ce- lui qui ne l'a pas apportée en naiflant n'y arrive jamais. Ceux qui l'ont ne s'attachent jamais à la bagatelle , & n'ont que du mépris pour toutes les vaincs curiofitez. Un Gouverneur qui a l'efprit élevé regarde un enfant par tant d'endroits , qu'il ne fçauroit manquer de le bien con- noîtrc. Il s'abaifTe avec lui , & entre dans tous fcs befbins. Celui-ci flaté par cette condefcendance , fent un éguillon qui l'oblige à s'étendre pour profiter de ce qu'il écoute. L'étendue de l'efprit eft une fuite de fon élévation. Elle n'cft pas infufc, mais s'aquiert par le travail. Ceux qui y (ont parvenus font fbuvent trop diffus dans leurs inftrudions. L'ef- 4o8 L E JOUR N A L prit d'un jeune homme eft borné, & n'cft pas capable de tour. Le Gouverneur en doit connoîcre le terme , pour ne le pas accabler. Plus vous le chargez , & plus vous lui faites de violence. II faut donc que le Maître s'accommode à la portée de l'Eco- lier , &que les inftrudions de l'un fe proportionnent aux ta- Icns de l'autre. L'étendue de refprit contribue à fa fécondité , mais clic ne la produit pas neceflairement. Elle demeure fterile dans un homme fçavant qui n'a pas l'art de fc faire entendre. Au contraire il y a des gens qui fçavcnt peu , &qui s'énoncent avec abondance. Il ne faut donc pas confondre la fécondité & l'étendue , non plus que le refcrvé &r le précis. La fécondité rend le Gouverneur capable d'enfeigner ce qu'il a appris , & de le tourner en pkifieurs façons jufqucs à ce que fon Ecolier l'ait compris , &: fe le foit rendu propre, ii le Gouverneur doit eftre fécond pour eftre utile , il doit cftrc refcrvé pour n'eftre pas dangereux. Cette refcrve cft de pluficurs cfpeces. Il y en a une qui regarde l'efprit. Elle confiftc à exciter dans un jeune homme le defir d'apprendre par la rareté des chofes qu'on lui propofc , fans toutefois l'accabler par la multitude. La féconde efpece de referve regarde le choix des chofes que l'on veut enfeigner , & la différence qui doit eftre faite des inutiles & des neceflaires. La troifiémc eft fur les curiofitez inutiles qui ne peuvent donner que de la vanité , & apporter qu'une fauflc érudition. La dernière fcrt à arrêter l'imagination des enfans , de peur que changeant fouvent d'objet dans leurs études . ils ne par- viennent jamais à aucune connoiftancc folide. A PARIS, Chez JiAN CussoN, rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptifte. jlveg Ptivilt^c du Roi. i i 94. XXXV. 40? LE JOURNAL DES se AVANS b Du LuNDY 6. Septembre M. DC. XCIV. HISTORÎA PERSECUTIONIS VANDALICi£ IN duas partes dtflinBa, Prior compleBitur likroi quinque P't fions Vitenfs Epifcopi , ^ alta antiqua monumenta ad Codicei ma- uufcriptos coUata ^ emendata -, cum notis ô" obfervationi~ bus. Pofierior comment arium hifioricum de perfecutionis Van- dalica ortu , prognjfu , (^ fine. Operk ^ fludto Domni Theo- dorici Ruinart , Vre^byteri ^ Monachi BenediRini e Congre- gatione fancii Mauri. In 8. à Paris chez Théodore Mu- guet , rue faint Jaques, i 694. CE que le P. Dom Thieri Ruinart nous donne ici touchant la Perfccution des Vandales , peut eftre confideré com- me une fu.tc des A£tes des Martirs qu'il nous donna il y a dé- jà quelque temps , & dont je parlai dans le fécond Journal de Tannée 1690. Cette perfccution a duré à peu prés autant que la domina- tion de cette nation en Occident ; c'eft à dire depuis l'an a^oG. qu'elle fit irruption en Gaule jufqu'en 534. qu'elle fut chaflcc d'Afrique. L'hiftoirc en a cfté écrite par Vi<^or , qui félon quelques éditions , cftoit Evêque d'Uciquc , &: félon d'autres , de Vi- 1694. LU 11 4ro LEJOURNAL tcnfc. Ce qui a trompé ceux qui ont cru qu'il cfloit Evéquc d'Utique , eft qu'ils conno^fToienc cette villc-là , & ne con- HoifToicnc pas le pays de Vicenfe. S'ils avoienc vu la Notice d'Afnquc , publiée en 1630. par le P. Sirmond , fur un ma- nufcrit de rHglife de Laon , ilsauroient reconnu qu'au temps de la pcrfecucion des Vandales auquel vivoit l'Auteur de cet- te hiftuire , l'Evéqued'Utique fe nommoic Florentin, & celui du pays de Vitenfc fe nomiDoit Viétor. Et fur ce fondemenc Je P. Chiflec qui fit réimprimer cette hiftoirc à Dijon en 16(34. rendit à l'Auteur le titre d'Evcquc de Vitcnfe , que tous les manufcrits lui avoicnt donné. L'Auteur allure lui-mcfme avoir compofé cette hiftoirc 6g. ans après que les Vandales eftoient entrez en Afrique. Or ils y encrèrent en 42.7. d'où, il s'enlbit qu'il la compofa en 487- Quant au lieu , il n'eft pas aufll certain que le temps. Car Je P. Chifiet a cru que c'cftoic Conftantinople , M Cotelier que c'eftoit l'Epire , & le P. Ruinart que c'cftoit quelque en- droit de l'Afrique , où il avoir elle relégué. Le fujet com- prend les mauvais traitemens faits aux Catoliques par les Vandales depuis leur encrée en Afrique jufqu'à la mort d'I-fo- noric. La divifion de l'ouvrage cft différence félon les manufcrits. Dans les uns elle eft en quatre ; dans les autres en cinq , & dans les autres en fix. Le P. Ruinart ne croit pas qu'aucune de ces divifions ait efté faite par l'Auteur , &: a fuivi celle de l'édition du P. Chifler. Pour l'intelligence de cette hiftoirc il a mis à la tcfte une table cronologique , où chaque événe- ment eft rapporté au temps auquel il clt arrivé. Il a joint à cette hiftoire quatre pièces qui y ont un grand rapport. La première eft le Martire de fcpt Moines qui fouf. frirent dans Carrage fous Honoric. La féconde eft une ho- mélie fur faint Ciprien. La tcoifiéme eft une petite cronique ; &: la dernière cft la Notice dont j'ai parlé. Le P. Ruinart a expliqué les endroits les plus difficiles de toutes ces pièces , & s'cft plus étendu fur les provinces d'A- frique que fur le rcftc i en quoi il reconnoit s'eftre beaucoup DES SCAVANS. 4.1 1 fcrvi de la fçavante critique que !e P. Noris fît il y a quelques années contre le P. Garnicr fur ce fujet , & des notes de M. Balufe fur la Conférence de Cartage. Voila ce qui entre dans la première partie de ce volume. La féconde eft un Commentaire iiinorique compofé par le P. Ruinait pour décrire le commencement , le progrés , & la fin de la perlecuuon des Vandales , & pour fupplécr à ce qui avoir eflé omis par Vidor , ou touché trop Icgcrement. Pour éviter la confufion , il l'a divifé en douze chapitres. Le pre- mier découvre l'origine des Vandales j fur quoi il y a deux opinions. L'une eft de Procope , qui met leur première de- meure aux environs de la Palus Meoride. Elle eft appuyée du témoignage de Salvien &: de Sidonius , qui vivoient au temps auquel ces Barbares ravageoicnt encore les Provin- ces de l'Empire. L'autre eft de Pime & dt Tacite , qui les comptent parmi les Germains , & les placent à l'embouchu- re de l'Elbe. Le fécond chapitre décrit l'irruption qu'ih firent en 409. en tfpagne. Treize ans après ils s'accordèrent avec les nfpa- gnois , & les traitèrent avec tant de modération , que félon le témoignage d'Orofe , pluficurs furent plus contcns de vi- vre fous eux , pauvres & libres , que d'eftre accablez d'im- pofitions fous les Romains , & rongez de foins & d'inquié- tudes. Le troifiéme rapporte leur entrée en Afrique , où ils furent appeliez par Boniface. Le récit eft tiré de Procope. Ce Boniface cftoit ami de faint Auguftin , qi. i lui écrivit une let- tre , qui eft la 70. dans les anciennes éditions , 5<: la zzo. dans la nouvelle , pour le reprendre de ce qu'au lieu de renoncer au monde , & de fe retirer dans une folitude , comme il avoir ïcfolu de faite après la mort de ù première femme , il en a- voit époufé une féconde qui eftoit Vandale de nation , & qui avoic efté autrefois infeélée des erreurs d'Arius. Ce faint Evêque fe plaint de ce qu'il avoit donné un Ci grand crédit aux Ariens dans fa maifon , qu'il avoit fouftcrc qu'ils baptifaflcnt une fille qui lui eftoit née de fon fécond ma- 411 LE ÎOU RN A L riage , &: de ce qu'il cntrctenoit encore d'autres femmes que la fienne. L'Aureur de fa vie décrit dans le chapitre vint-huitiéme le déplorable cflat où l'Afrique fut alors réduite , & dit que toutes les Eglifcs y furent ruinées , à la referve de celle de Cartnge , de celle de Cirte , &: de celle d'Hippone. La vil- le d'Hippone fut néanmoins abandonnée par les habitans , peu après la mort de faint Augultin , & brûlée par les Van- dales Le chapitre fuivant contient la perfecution faite par Gen- fcric aux Caroliqucs , de laquelle la violence tomba princi- palement fur trois Evoques , Poflldius auteur de la vie de S. Auguftin, Scverien, &: Novae. On voit dans ce chapitre une excellente lettre qu'Honorât Antonin Evêque de Con- ftantinople , écrivit à Arcadius , pour l'exhorter à la con- fiance. C'eiloit un Efpagnol , riche & confideré à la Cour , qui mourut pour la dcfcnfc de la Divinité du Fils de Dieu en 437. , . ., Le P. Ruinart rapporte dans le cinquième chapitre la prifc de Cartage , & les cruautez exercées contre les citoyens. Sur quoi il cite les louanges que Theodoret donne dans une de (es lettres à la patience de quelques-uns qui avoicnt elle exilez en Orient. Genfcric cftant mort en l'année 477. qui eftoit la quaran- tième de fon règne , Honoric fon fils lui fucceda , augmenta la perfecution , & fît couper la langue à plufieurs Catoliques, qui par un miracle vifible recouvrèrent l'ufage de la parole. Le Comte Marcellin ajoute un événement encore plus mer- veilleux , quand il dit qu'un jeune homme que la nature a- voit fait muet , commença à parler très diftmdement auffi- rôt que les Vandales lui eurent coupé la langue. Tout ceci efl: compris dans le fixiéme & dans le fepiiéme chapittc. Le huitième eft un recueil de ce qui fe trouve dans les an- ciens monurnens à l'avantage d'Eugène Evêque de Cartage. Gcnnadms a fait le catalogue de fes ouvrages , qui font un livre DES SCAVANS. 413 livre de la foi , une Conférence avec les Evéqucs Ariens , des Requêtes & des Apo!c[]ics prefentécs a. Honoric , une lettre écrite durant fon exil aux citoyens de Carragc , que Gi egoire de Tours nous a coniervée. Il fut ordonné vers l'an 481. & mourut l'an 505 dans les Gaules, Il eft enterré à Albi, où fa fefte fe célèbre le frxiéme de Septembre. Le neuvième chapitre eft confacré en l'honneur des Con- fcflTeurs chafTez d'Afrique , & réfugiez en Italie. Quodvulc- deus Evêque de Cartage leur chef , fe rerira à Naples , où (on corps repofe , & où fi mémoire eft révérée. Gaudiofus, Rofius , Sccundinus , Heraclius , Benignus , Prifcus , &: plu- fieurs autres imitèrent fa foi , & partagèrent Ces fouffranccs. Le P. Ruinart examine ce qui a elle écrit de chacun en parti- culier , &: juge que leurs ades ont efté mêlez de quantité de circonRances fortdouteufcs. Le dixième chapitre eft un récit de la pcrfecution que les Catoliqucs foulfrirent fous Gontamond fils de Genzon , & petit fils de Gcnferic. Après la mort d'Honoric , arrivée en la huitième année de (on règne , il prit poflcifion de fon royau- me au préjudice d'Hilderic fils d'Honoric , en vertu du cefta- mcnt de Gcnferic qui avoit ordonne que le plus ancien de fa race feroit toujours préféré en la fuccejffion à la Couronne. Procope dit , que Gontamond régna douze ans , & qu'il redoubla la pcrfecution. Vi£lor de Tunes écrit au contraire qu'il appnifa la pcrfecution , & rappella les exilez. Pour con- cilier ces deux Auteurs , on peut diftingucr les temps comme ils font diftinguez dans l'appendice de la Croniquc de Prof- per publiée par Canifius , & dire que Gontamond continua la pcrfecution jufqu'à la dixième année de fon règne , en la- quelle il permit aux Ecclcfiaftiques exilez de revenir en Itur pays , Si d'y faire leurs fondions. Ainfi il fera vrai qu'il aura continué la pcrfecution en un temps , &c qu'il l'aura finie en un autre. Au refte je ne puis omettre une remarque confiderable que fait le P. Ruinart en cet endroit , & qui confifte en ce que Galefiniiis a mis en l'annje 490 fojsles Vandales des J694. A'i mm m m 4T4 LE JOURNAL M.irtirs qui avoient (bufïcrc long- temps auparavant (bus les Empereurs Romains. La perfecution excitée par Trafamond fait le fujct de l'on- zième chipicre 11 fucccda en 469. à Gontamond Ton frère , & , (î on en croit Procope , iifa d'adrellc plutôt que de force pour porter les Carohqacs à renoncer à leur foi. Il cfi: vrai pourtant qu'il exerça de grandes rigueurs, &: qu'il défendit d'ordonner des Evêqucs. La contravention à cette défenfe alluma fa colère , dont les effets tombèrent principalement fur les Evéques. L'Auteur de la vie de faint Fulgence ait que plus de foixante furent chargez de fers, &: menez en capti- vité. Vider de Tunes en met jufqu'àfix-vint. Vittor Primat de la Bizacene , & faint Fulgence Evêque de Rufpe, furent les deux plus confiderables. Ce Commentaire hifiorique finit par la paix rendue à l'E- glifc d'Afrique par Hilderic , & affermie par la pnfe de Ge- limer fon fucccll'eur. EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. GRAVEROL de Nifnies , le nî: à peu prés de certc forte : Lors que je tour- ne les yeux vcis un objet , outre i'adion des rayons donc \% 1694. Ooooo 4îi ^ LE JOURNAL rétine eu. cbrar.lcc , j'apperçois cet objet , &: j'en ai l'idce : j'eti fcns du phiilir ou de la douleur. Qoclle eft la caufe de ce plaifir (Se de cette douleur î Eft-cc l'objet qui ébranle mes or- ganes ? Cet objet me peut il donner le plaifir ou la douleur qu'il n'a pa.s ? Cet objet qui eft corporel , ne peut agir fur mes organes que par Ton étendue , par la figure , par Ton mouve- ment, par Ton repos. De queile grandeur ou de quelle figu- re doit eflre un corps pour produire la plaifir oa la douleur i Il eft clair que quelque grandeur ou quelque figure qu'ait un objet , il n'en eft pas plus propre à caufcr de la douleur ou du plaifir. Tout ce qu'il peut taiie , c'c(t d'ébranler mes organes ; Mais je dois dilhnguer cet ébranlement , du fciuiment ou de la perception qui y eft atrachée. Que Cl CCI objet ne peut produite en moi la perception & le fenîimene , il faut examiner s'il donne du moins occafion à mon corps de les produire. Mon corps , non plus que l'objcc ne peut agir que par là grandeur , par fa figure , par Ton mou- vement , ou par fon repos. C'eft donc mon ame qui eft la feule caule de mes perceptions &: de mes fentimens , & qui produit mon plaifir ou ma douleur. Si on me marche fijr le pied , je lens de la douleur , & je m'en plains. Ce n'eft pas Je pied qui la Cent ni qui s'en plaint : c'eft moi qui réfléchis &" qui raifonne : C'eft mon ame. Ceux à qui on a coupe le pied Tentent long temps après les mcAncs douleurs qu'ils fen' toicnt au pied. Ce n'eftoit donc point le pied qui les fentoit avant que d'avoir efté coupé : C'eftoit l'ame. C'eft elle qui difi:eri:e entre la douleur t\C le plaifir , Se qui le difi;erne avec julieile, par^c qu'elle feule en a le fentimcnt. Par là je de- meure perfuadé qu'elle eft diftinguée du corps , qu'elle en ciï toute différente , & qu'elle n'cft ni corporelle ni divifiblc. La cinquième leflexian fait encore reconnoitre clairement que l'homme eft compofé de deux fubftances très différentes, du corps , &c d'un eltre qui n'a rien de corporel. Au bruit du canon , &: à la vue du carnage , mon corps fait effort pour les éviter. J'en ai honte , & je le contrains de prendre u- Me contenance plus ailurée. D où vient ce combat ? Il faut eftrc deux pour combattre. Moa corps a tout ce (ju'ii fauc DES se A V A NS. 42.3 pour fuir les occafîons pcrilicufcs. Qui cft-cc qui Ty reiienc, &c qui l'oblige à Ce laider tailler en pièces plutôt que de recu- ler î C'eft quelque chofe qui Ce pique d'honneur & de gloire. Ce n'eft ni mon cœur ni mon cerveau : c'eft un ellrc qui n'a rien de matériel ni de fciiflble. En continuant à m'cxamincr , j'éprouve dans moi quelque chofe qui choific &c qui fe détermine. Ce n'eft pas le corps. Il h'eft rien de Ci aifc que de l'enchaîner ; au heu que rien ne peut enchaîner ma liberté. A ce caraûcre je diftingue dans n:ioi deux natures très diiîercntes Plus je fais de reflexions fur moimefme, 5c plus je trouve de foi étions dont le corps ne peut tftre le principe. J'ai des idces purement fpirituelles ; je penfc à la juftice , à la vérité, à l'infini. Je coi.nois le rapport des choies , &: le rapport qui Ce trouve entre les rapports des chofes. je réfléchis fur mes idées pour voir (1 elles font nettes , fur mes jugcmens pour voir s'ils font vrais , fur mes inclinations pour vpir Ci elles font droites. Le corps ne réfléchie point de la forte ; une vapeur d'cfprits animaux qui coule daris mes chairs e(l ii. capable de ees fonifbions. La fuite de ces reflexions conduit infcnfiblemcnt tout hom- ■ me qui s'examine à avouer qu'il eft plus allure d'avoir une amc qu'il n'cft aifuré d'avoir un corps. Pluiieurs invalides ont efté un temps à croire qu'ils avoicnt encore les br..s & les jambes qu'ils avoient perdus. Tout homme fe peut concevoir fans corps , peut fentir , juger , & raifonncr fans corps. Nul ne peut fentir , juger , raifonner, ni rcflcchir fans eilre. Du mo- ment qu'il eft conftant qu'il a une perception , il eft conftanc qu'il exifte ; &: c'eft dans cette perception que coniîllc la na- ture de fon amc. Comme l'efl^ence de chaque chofe eft la fource de Ces pro- prictcz , fi par la perception feule on peut démontrer les pro- prietcz de l'ame, ce fera une nouvelle preuve que fon cfience eonfifte dans fa perception. C'eft auflTi ce que l'Auteur tâche- de faire dans Ces huitièmes reflexions. L'immatérialité de l'a- xnc eft clairement renfermée dans fa perception. Plus on com^ parc U^erçepiio/i avec l'idée «jue l'on a du corps , c'eft à dire 414 L E J O U R N A L avec l'étendue , plus on voir cjuc l'une ne tient rien de Tau- tre. Si l'cllrc appcrccvant n'a point d'ctcnduë , il n'a rien de matcricl. II n'cft pas moins aifé de fe convaincre de l'unité de l'ame. Car tout homme conçoit qu'il n'y a en lui qu'un cftrc appcr- ccvant. S'i! y en avoïc plus d'un, il y auroic plus d'un homme. La liberté n'ell qu'une fuite de la puifîance d'^ppcrccvoir. Un cftrc eiTcntieiicmcnt appercevant doit pouvoir fe porter aux objets de fcs perceptions. L'indivifibilité , la fpirituali'-é, l'immortalité coulent de la mefme fource Si l'amc cft imma- térielle Se indivifible , elle ne dépend pas du corps , & ne meurt point avec lui. Elle ne peut eftrc d<'truitc par toutes les forces de la nature. Le grand principe de la nature c eft le mouvement. Ses forces ne tendent qu'à dérarger , à di- vifer , à briftr : Mais elles ne peuvent rien divifcr dans un élire qui n'a ni étendue m parties. Dieu qui la peut anéantir en ccHant de la conferver , ne !e veut pas. Cela feroit con- traire à fon immutabilité , à fa fagtlTc , à fa bonté , à fa ju- (lice. Les quatre dernières réflexions fourniirent de nouveaux . cara£lcres de l'immortalité de 1 ame. Ceux qui ont efté mar- quez jufqu'ici , font tirez des fondiois de l'clprit , de fes per- ceptions , &: de fes raifonncmens. Ceux qui iuivcnt font ti- rez du coeur , &' fur tout de l'amour qu'il a pour la gloire, pour H vérité , pour fon bonheur , & pour fa pevfeclion ; & c'cft par où l'AUtcur finir la première partie du fécond traité. Dans la féconde il parle de l'union des deux fubltances qui compofcnt 1 homme , examine en quoi elle confifle , quelle en cit la caufe, les fuites , les défauts, &: les avantages. Qiiand il conlidere l'efprit & le corps , il trouve entre eux une étran- ge difpropornon , &: a peine à comprendre leur union, fur tout en la comparant aux autres unions qui lui font connues. Il cft aifé de concevoir comment deux corps font unis lors qu'ils ont une telle corrcfpondance par leur étendue , qu'ils Ce touchent immédiatement./ Il cft ai.fé aufli de conce- voir que deux cfprits le font , lors qu'ils tournent l'un vers l'autre leurs pcnfées &£. leurs affciî^ions. Ces deux unions ne fe DES SCAVANS. 415 fe peuvent trouver entre l'efprit & le corps. L'cfpric ne pcuc avoir d'étendue , ni toucher par là immédiatement le corps ; & le corps ne peut avoir de pen/ée & d'affe£tion pour fc tour- ner vers refprit. Cependant ils iont (î etroicement unis, qu'il cft impoflîble d'entamer le corps que l'efprit n'en fente de la douleur. La difficulté eft de découvrir en quoi confifte cette union. Elle ne peut confifler comme celle des corps dans le rapport de leurs étendues , ni comme celle des efprits dans le rapport de leurs penfécs & de leurs inclinations. Elle ne peut non plus eftre conçue comme un mélange de poudres ou de liqueurs , ni comme une pénétration telle que celle par où le feu s'infinue dans le fer , ni comme un entrelaflcment. Ces unions là ne le rencontrent qu'entre les corps. Pour décou- vrir le milieu qui approche des fubftances fi éloignées , il faut avoir recours aux moyens qui ont fait découvrir leur union. Un de ces moyens eft que l'efprit eft tout autrement trouble de ce qui arrive à Ton corps qu'il ne l'cft de ce qui arrive aux autres corps de l'univers. Il n'arrive nul changement à ce corps , que l'e/prit n'en foit averti par le plaifir ou par la dou- leur. L'autre moyen eft que le corps eft tout autrement fou- rnis à l'efprit que ne le font les autres corps. L'efprit lui commande , Se le remue comme il lui plaît ; au lieu qu'il ne commande point aux autres corps qui demeurent immobiles à tous ces commandemens. Ces deux moyens qui font con- clure l'union étroite de ces deux cftres , montrent qu'elle confifte dans la correfpondance mutuelle des pcnfées de l'ef- prit avec les mouvemens du corps. Par cette manière ces deux eftres font unis auffi immédiatement qu'ils le peuvent cftre. Ils ne peuvent cftre unis par le rapport de leurs fubftan- ces j puis que la fubllance étendue & la fubftance qui penfe n'ont nul rapport. Ils ne le peuvent eftre parle rapport des mefmes manières d'eflre , puis qu'ils n'en ont nulle fcmblable. Ils ne peuvent donc eftre unis que par leurs divcrfes manières d'eftre , qui ont une telle liaiiun , que les unes accompagnent ou fuivent ncvelfâircmenc les autres , que les penfécs de l'ef- prit excitent les mouvemens du corps , &: que les ébranle- 1694. PpPPP 4.iS LE JOURNAL mens du corps font naître les penfées de l'efprir. La plupart des Philofophesontcru qu'il ne faloir point cher- cher d'auTc caufe de cette union , que l'affinité qui eft entre rcfprit '^" le corps Ils fe les font reprefentez comme des eflrcs incomplets qui ont inclination l'un pour l'autre. Mais l'Au- reuf délivré de tous ces préjugez , fe trouve obligé à chercher une autre caufe ic cette union ; & après avoir eu inutilement recours à tous les cltres créez,, jl remonte jufqu'au Créateur. Tous les cftres créez font ou des corps ou des cfprits. Or comme l'union de l'efprit & du corps cft un ouvrage d'intelli- gence , il cfl: clair que les corps qui n'en ont point, n'en peu- vent elke la caufe. Les cfprits créez qui ne manquent pas d'intelligence, n'ont pas allez de pouvoir pour approcher deux fubrtances (î éloignées , pour rendre rcciproqucs des manières d'eflre tout à fait difîcrentes , & pour faire que certains ébran- lemens du corps foicnt ncceiïairemcnt accompagnez de cer- taines penfées de l'efprit , & que certaines penfées de l'efprit foient nccelldirement accompagnées de certains ebranlcmcirs du corps Nu! ne peut furmonter l'oppoficion de ces deux narures que l'Auceur meime de la nature. 11 faut une fagclTc infinie pour mventer les loix de cette union , &: une puiliancc infinie pour l'exécuter. Que fi l'on dit à norre Aiureur, que ce n'eft pas agir en Phi- lofiphe que de recourir à Dieu quand il s'agit d'expliquer les effets de la nature , il répond que c'eft une neccflicé abfoluë d'y recourir dans l'explication d'un effet qui ne dépend que de ù fagelîe & de fa puid'ancc. Continuant fes reflexions , il examine par quelles modalitez l'efprit & le corps (ont particulièrement unis. A confulter fon expérience , il lui paroit que l'efprit elt , & n'cft pas uni à tout le corps ; &: que le corps cft , &c n'eft pas uni à tout l'ef- prit. L'efprit cft uni à tout le corps , parce que le corps n'a nul- le partie qui par fes mouvemens ne puiffe exciter certaines penfées dans l'efprit. L'efprit n'cft pas uni à tout le corps, parce que le corps a très peu de mouvemens qui foient fournis à la volonté de l'efprit. Lçs uns font tout à fait indépendans^ DES se A VANS. 417 comme la toux , le lioquec , rérernumenc , le mouvement du t œur &.' des aitcres- l.ps uns en dépendent en quelque forte, CDUime !<> refpirarion , le lommeil , & la veille ; Se les autres en dvrpenuent abfoltjuiei.t , comme le moi) vemcnc ue la teftc, de la langue , des mams , & des pieds. Il eft: donc vrai que refpi ic efl- & n'cft pas uni à tour le corps. Ce n'ell pas pour- tant une contraoïccion , parce que le terme d'union n eft pas pris au meiine fcns dans les deujî parties de la propollcion. Il eft pris pnflîvement dans l'une, & acflivcnicn!: dans l'autre. L'efprit tft uni pafl'ivcment àtou: le corps, parce que le corps li'a point de parcie du mouvement de laquelle refpdt ne puiC- fe recevoir quelque impreliion. L'erj)nt n eft pas uni active- ment à tout le corps, parce que le corps a p.'ufieuri parties fur lefquc'les l'cTprit ne peur agir. On peut t nulle part. Il ne convient qu'aux corps d'eftre dans le lieu, La queftion eft donc uniquement de fçavoit Ci l'ame exerce fes fondions dans toutes les parties du corps, fi elle fent h don- 4i8 I. E JOURNAL leur djns le pied. Elle ne les exerce immediaremenr que dans le cerveau, où elle refide comme dans fon fiegc, qui cft la four- ce des nerfs répandus depuis la jusqu'aux cxtrêmitcz des or- ganes. Quant au fécond , il eft certain que des deux fortes de pcn- fées dont l'efpnt eft capable , les unes ont infiniment plus de parc que les autres à fon union avec le corps. Il a des pcrcep. tions pures &c diftindes , comme la connojtfance de la vérité, àcs joycs intellediielics dont il ne lui revient nul penchant vers les corps , &c dont il ne revient au corps nulle impreflîon. Il a des penfécs obfcures , confufes , &: fenfuclles , dcpen. demment des fens & de l'im-agination , qui le lient au corps d'une manière fi aveugle & fi flupide , qu'elles l'incarnent en quelque façon C'a cfté avec une extrême fagefle que l'Au- teur derocre eRre a particulièrement ctùbli dans ces percep- tions confufes l'union de l'efprit avec le corps , &: qu'il a or- donné que lorsqu'il arrive à celui-ci quelque mouvement ca- pable de lui nuire , l'efprit en fuil averti par la douleur , & interefTé par là a. la confervacion de fon corps. Quand Dieu nous avertit par ces perceptions confufes de ce qui fe palfe au dehors , il ne s'enfuit nullement qu'il ait eu deffein de nous expofer à l'illufion des fens , ni de nous jetter dans l'erreur. Il nous a donné un entendement fuperieur aux fens pour corriger leurs impreffions. Sa principale fondion eft de chercher la vérité , dont l'inf.illible caradere eft l'évi- dence. Ainfi pour éviter l'erreur des fens , &; pour découvrir plus furcment la vérité , tout ce que l'entendement a à faire, c'eft de ne fe rendit jamais à quoi que ce foit , & de ne con- fcntir jamais , qu'il n'y foit déterminé par une preuve incon- teftable. Si les fens nous trompent lors qu'ils nous rapportent que les qualitez fenfiblcs font dans les objets , c'eft à l'enten- dement a. les redrcfler par des idées claires &: dift.ndcs, qui le convainquent que ces qualitez ne font pas des lubftanccs , mais feulement des manières d'eftrc non de la lubltancc éten- due , mais de la fubftance qui penfe. L'Auteur pour connoitre de plus en plus l'union de Tcfprit & du co:ps , la compare à l'union qui cft enti e le pilote u le vaifleau , DES SCAVANS. 419 vaîflcau , & à celle qui cfl: entre un cfprit crcé uni à un corps, foie que cet cfprit agiflc fur l'efpric auquel il eft uni , com- me l'on croit que des Anges qui ont paru en forme humaine agiflbicnt fur les corps qu'ils avoient pris , foie que le corps agiiïc fur l'efprit , comme l'on croit que le feu agit fur le corps des danncz. Il montre fort clairement, combien ces fortes d'unions font différentes de celle du corps & de VeC- prit. Il pafle enfuite aux proprictcz de cette dernière , qui font les liaifons des idées avec les traces du cerveau ; celles àcs traces entre elles , & les adtions mixtes , comme les fcn- fations Se les paffions. La liaifon des idées avec les traces du cerveau a cfté tou- chée en plufieurs endroits de cette partie. Lors qu'il arrive quelque changement au corps , le cerveau en reçoit au mcC- me temps le contrecoup parl'cntrcmife des nerfs : ce contre- coup y laiflc une trace , à laquelle Dieu a attaché une percep- tion ou une idée. A l'égard de la liaifon des traces entre elles , qui emporte celles des idées auffi entre elles , il trouve qu'elle n'a rien que d'aifé à comprendre. Il n'arrive guercs qu'une trace s'impri- me dans le cerveau , qu'il ne s'en imprime au mefme temps d'autres qui font comme accefToires. Par exemple, fic'eft Li trace d'un vainqueur qui a trionfé de fes ennemis , elle eft accompagnée des traces de fon trionfe , &c de toute la magni- ficence qui l'environne. La liaifon de ces traces confifte en ce qu'ayant cfté imprimées au mefme temps , elles ne peu- vent prefque plus fe réveiller les unes fins les autres , parce qu'elles ont des chemins de communication On en doit di- re autant des idées qui leur repondent ; & ainfi l'idée d'une cijconftance fuffic pour rappcllcr toutes les autres. Pour ce qui eft des paftîons , quoi que les hommes les fen- tcnt très vivement , ils les connoidcnt fort peu , &' la plupart ignorent ce que l'efprit & le corps contribuent à les former. Notre fçavant Auteur explique très clairement comment cela fe fait. L ors , dit- il , que la trace d'un objet qui a frappé \ç^ fcns s'imprime dans le cerveau , fi cet objet a de grans J694. Qqqqq 450 LE J O U R N A L rapports avec la condrudtion du corps , &: qu'il foie propre ou à le conferver , ou à le détruire , les erprics font déterminez à le répandre aux parties extérieures , & font prendre au corps la pofturc nccedaire pour l'éviter ou pour lui rcfiflcri & cela arrive mefmc dans les bcftes. Ce n'eil Jà que le de- hors des pT/rions. Dans l'homme la trace que cet objet imprime fur le cer- veau , faic naître la vue de cet objcc , & excite une émotion Tcnlible , & en confequence l'amour ou l'averfion , la joye on la tridclfe. Ces chofes qui concourent à donner l'cftre à nos palfions , font en nous fans nous. Elles Ce paHcnt dans l'âme & dans le corps d'une manière purement mécanique , & fans que la liberté y ait de part. I! n'y a que le confente- menc qui dépend de nous ; iSj c'eft ce que nous devons rete- nir malgré la violence des pallions. Les dernières reflexions qui terminent cet ouvrage , font fur les detauts &c fur les avantages de l'union de l'efprit «S^ du Corp?:, Les défauts fort les combats de l'efprit &: du corps, Se ratfujcttiircment de l'efprit. L'efprit donne des combats au corps, lors qu'il le retient dans uneoccafion pcrillcuics le corps en donne à l'efpnt , lors que les efpiics animaux cau- fent une eœotion violente vers l'objet de la palfion. L'efprit ne peut arrêter qu'indiredement cette émotion , en excitant des pallions contraires. L'efprit capable de s'élever à la connoiflance des plus fu- blimcs veritez , cil honteufement alfujctti lors qu'il eft réduit à veiller aux befoins du corps , Se qu'il reçoit des impref- fions douloureufcs qui lui otent l'attention , &: qui le jettent dans i'illufîon &c dans l'erreur. Les avantages de l'union de fefprit &: du corps font les fo- cietez que les hommes forment entre eux par le moyen de la parole , les fcicnces & les arts qu'ils cultivent , &: les occadons qu'ils trouvent dans leurs abailfemens de fatisfaire pu leur patience à lajuftice de Dieu , & démériter la rccom- pcnle qu'il leur a promife. Voila l'abrégé de ce que l'auteur avoit à dire de l'eftrc phi- DES SCAVANS. 451 fique de i'iiommc ; il craiccra de Ton eflrc moral dans un vo- lume à parc. DISCOURS SUR LA COMEDIE , OU L'ON VOIT la reponfe au Théologien qui la défend , ^vec l'hiftoire du Tek- tre , ^ Us (eniimem des Douleur ; de ï* hqlifc dcpim le prtmiet Jiccle jufqu'à piefent. Jn 12. à Paris chez Louis Guerin , & Jean Boudoc, rue faine Jaques. 1694. CEs deux difcours on: clic prononcez daiis un Séminaire devanc des pcdonncs prévenues contre la Comédie , bi. indignées de ce qu'un Religieux & un Piètre en avoir entre- pris la defenfe. Le premier eft une rcfucation de la lettre qui contienc cette défenfe. Le fécond fait l'hilioire des divcrrifTemens du tcâtre , &: reprefcnie les fentimcns des Dodeurs (ur cet:e matière. Il ert divifc en trois parties , dont 1 1 première comprend le règne de l'idolâtrie jufqu'à fou extmdion fous JulHnien : la féconde décric Peftat du tcâtre depuis l'extindion de l'idolâ- trie jufqu'à la naiflance des Scolaltiqucs ; & la croifiéme de- puis les Scolafliques jufqu'i nous. L'idée que l'auteur donne de la Comédie des premiers fic- elés de l'Empire , eft qu'elle tut plus ou moins fiequente, plus ou moins honnefte félon l'inclination àt% Empereurs. A quoi il ajoute deux obfervations. L'une eft que tous les fpedacles des Romains ne furent pas mflicucz en l'honneur des faux dieux , & qu'il y en eut qui ne le furent que pour le divcrtif- femenc du peuple , comme il fe voit claircmenc dans le qua- torzième livre des Annales de Tacite. L'autre obfcrvation eft , que toutes les Comédies ne fu- rent pas alors auflî infâmes que quelques-uns fe le perfuadenr, &: qu'il y en eut de plus honneltes que celles d'aprcfent. A- prés cela notre auteur rapporte ce que les plus fages des paycns , comme Seneque , Pline, Tacite, & Plutarqueonc jugé de leurs Comédies , de quelque nature qu'elles fuflenc, &: cnfuite il cite les premiers Pères qui les ont condannées^ &: explique leurs raifons. 431 ^ LE JOURNAL 11 rapporte à la féconde Epoque les dcfenfes faites tant par l'Eglife d'Orient , que par celle d'Occident d'alfifter à la Comédie , &: n'omet pas les commentaires de Balfamon &: de Zonarc fur les dccifions faites par les Conciles à cet c- cgard Quand il cft venu aux temps des Scolaftiques , il remarque qu'ils permettent félon des fuppofitions mctaphifiques des a- Âions qu'ils condanncnt dans la Pratique , & que c'eft ainfi qu'ils fe font expliquez au fujet des fpcdaclcs du teâcre & des autres divercilfemens. II rapporte enfuitc les canons des Con- ciles , les ftacuts des Evcques , les arrcfts des Magiftrats qui les ont condanncz en France, Dans une lettre qui cft à la fin de ce petit volume , il refout quelques difficultez qui lui a- voicnr eftc propofces fur fcs deux difcours. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Elemens de Botanique , ou Méthode peur cornoitrc les Plantcu Par M. Pttton Tourne fort , de L'académie Royale des Sciences. Jn 8. trois volumes, à Paris chez Jean AnifTon , rue faint Ja- ques. 1694. Eclair Cl jfement de l'ancien droit de l' Evcque ^ deH Eglife de Pa- rii fur Pontoife «^ le Vexm François , contre les pretcnjions des Ar- chevêques de Ro' en , ^ les fauffes idées des Areopagiles. y4vec la réfutation d'un livre intitulé : Cathedra Roromagenfis in fuani Dioccefanam Pontefiam, Par M. Défiions Prêtre ^ ConfeiUer ^ Aumônier ^ Prédicateur Ordinaire du Roi , Doyen de l'Eglife de Senlis , ^r. Jn S. à Paris chez Maurice Villery , fur le quai des Auguftins. 1 694. A J^ J S. Jl n'y aura peint de Journal qu'au premier Lundi d'après la Saint Aianin. A Paris chez Jeam Cusson , rue ffiint Jaques , à faint Jean Baptiflis, XXXVII. 435 LE JOURNAL DES se AVANS. Du LuNDY 15. Novembre M. DC. XCIV. HISTOIRE DE HENRY III. PAR M. DE VARILLAS. In 4. à Paris chez Claude Barbin , fur le fécond Perron de la Sainte Chapelle. 1694. JAMAIS la France ne fut auflî proche de ^i ruine que fous le rcgne de Henri III. & jamais Prince ne fit autant de fau- tes que lui , & ne fe mit en aufli grand danger de fuccomber fous l'artifice de fes ennemis. L'hiftoire de ces troubles n'eft pas moins utile que celle d'un Eftat plus tranquille , & M. de Varillas n'a rien oublié pour la rendre agréable. Il décrit dans le premier livre l'impatience que Henri III. «ut de retourner en France aulfi tôt qu'il eut aj'pris la n)orc de Charles IX. fon frère ; les avantures de fon voyage, bL -& la ficuation où il trouva le royaume, Dans le fécond il rapporte deux négociations de grande importance. L'une fut celle du Prince de Condé & tiu Prin- ce Cafimir pour lever en Allemagne des troupes ci-nuc les Catoliques de France L'autre fut celle de Dtfptiles Am- bafladeur de France en Pologne pour faire éljre Batoti en la place de Henri m &: elle ne fut pas moins eitimee que cel- le que Monluc Evcque de Valence y avoit faite deux ans au- 1694. Krrrr 434 LE JOURNAL paravant pour un pareil fujet. Ce Prince de Tranfilvanic fembloir avoir mis un obftacle invincible à Ton cicftion pac l'écrit qu'il avoit donné aux Impériaux , & par lequel il leur avoir promis qu'il ne brigucroic point la Couronne de Polo- gne , & ne l'accepceroit point fi clic lui efloit otfcrte par bri- Cependant il Ce lailTa bien-tôt après perfuader par les Turcs que cet cent clloit contre les bonnes mœurs , & qu'il feroit moins blâmé d'y avoir contrevenu , que h Maifon d'Autriche d'en avoir exigé la fignature. Qtiant à Defpencs il rcprcfcn- ta fortement aux Polonois qu'il falloit que Dieu cui\ frappé les Efp.ignols d'aveugiemenc, puis qu'ils ofoicnt fe fervir d'un billet qui donnoic atteinte à l'iodépendance de la plus libre de routes les nations , en la réduifant à la neceflué de ne pou- voir élire d'autre Roi que le feul Archiduc d'Autriche. Le troificme livre contient deux faits qui avoient eRé igno- rez par tous les Hiitoriens. Ils font tirez de la négociation Phcnicien quicia (a patrie à caufe des émotions po- pulaires , 3<: enfeig'ia clairement l immortalité de lame, donc il avoit été inftruit en Egipre. Solon fur aufTi fage i egifla eur qu'éclairé Philofophe. Ses loix furent dans la (uite du temps empruntées par les Ro- mains. La principale fut de ne pas pirmetcre qu aucun A- tenien montafl; à un allez haut point de j uifl'ancc pour vio. Jer impunément ce qui avoit c!ie établi. Chilon de Lacedemone après s'cftie inOruic de tous les fc- crcts de la Philîque , fut le premier qui étudia le cours des aftres pour en tirer la connoiflance de l'avenir. Pittacus fut homme de guerre , & commanda l'armée des Mitileniens contre les Accniens. Après fa viûoire il fut re- vêtu d'un pouvoir abfolu dont dix ans après il fe dépouilla vo- lontairement. Il écrivit fcs fentimcns en vers tlcgiaques, defquels il ne nous refte rien. Bias de Thebes palfa toute fa vie dans la profeflion d'Avo- cac dont il ne prenoit point d'argent. Cleobule de la race des Heraclides , parloir obfcurémenr, & propofoit fouvent des énigmes, Diogene Laërce rappor- te celle qui défignoit l'année , avec les mois , les jours , &: les nuits. Periandre de Corinre cftoit auffi de la race des Heraclides, Il ufurpa l'autorité fouveraine , &c la retint toute & le mixte en ani- mé & inanimé. Les corps mixtes imparfaits font appeliez Météores. Ariftoce veut qu'ils fe forment des vapeurs de l'eau & des cxhalaifons de la terre. Avant que d'expliquer la nature des corps mixtes animez, il donne deux définitions de l'ame. Il en a fait trois livres ^ DES S C A V A N S. 45 j au commencement defquels il rapporte les fentimens des an- ciens , dont les uns difenc que c'eft un feu , les autres une harmonie , &c ne s'explique ni fur ù fpirituaiicé , ni fur l'ini- mortalitc. Il a fait auiTi dix livres de 1 hiitoire des animaux, & quatre de leurs parties. La Morale d'Ariftoce eft contenue prefque toute entière dans les dix livres qu'il adrelî'a à Nicouiaque fon fils. Après que M. le Noble en a fait l'analife , il décrit les di- verfcs avantures de la feâe de ce Philofophe. En voici les principales particuiaritez En mourant il laifTa fcs écrits à Theophrafle Con difcipic ôc fon fuccelfeur dans le Licée , & le pria de n'en rien pu- blier. Quand Silla prit Atenes , il les tirade la biblioteque d'Ape'licon homme riche , qui les avoit achetez. Après la mort de Silla fon Bibliotecaire les vendit pour peu de chofe à un Grammairien nommé Tirannion qui n'en fit aucun ufa- ge. Quand il fut mort , Andronique de Rodes , philofophe, les acheta, &c en fit faire plufieurs copies. Cependant plu- Ceurs fiecles s'écoulèrent avant que cette philofophie euft fait aucun progrés confiderablc. Au treizième elle fleurit à Con- fia n tin ople , aufli bien que celle de platon. Long-temps auparavant elle avoit cfté portée en Efpagne par les Mores qui l'avoient reçue des Arabes. Les livres d'Ariftote ne parurent en France qu'au commci}- cernent du treizième fiecle , & auflitôt ils y furent brûlez par l'ordre d'un Concile tenu à paris. Quarante ans après faint Thomas les mie en crédit. Le Cardinal de Touteville , commis en 1451. pour reformer rUniveifité , ordonna que ceux qui voudroicnt entrer en li- cence , feroienc interrogez fur la philofophie d'Ariftotc. En 1601. elle fut autorifée par de nouveaux reglernens. En 16x4. Jean Bitaud l'attaqua par des Thefes qui fu- rent fupprimées par arrefl. Gaffendi fe déclara contre elle au mefmc temps , & le fuccés qu'il eut donna à Defcartes la hardieflTe de l'imiter. Le refte de ce livre eft employé par notre Auteur à faire 4î^ LE JOURNAL l'extrait de la doctrine des Epicuriens , & de celle des Stoï- ciens. Epicure qui donna naifiance à cette fcùc , naquit d'une famille noble dans un bourg du territoire d'Atenes. Il ne mangeoit que du pain dz des légumes , & ne buvoit que de i'eau. Ses difciplcs vivoient avec la mefme frugalité. Il a- voic plus écrit qu'aucun autre philofophe. Mais il ne nous relie de lui que trois lettres , que Diogene Laërce a infé- rées entières dans fon hiftoire , & dont M. le Noble fait l'a- brégé. Qjant aux Stoïciens , ils eurent pour Chef Zenon de Ci- tie , qui avoir auifi beaucoup écrit. Sencque qui embralTa cette philofophic , ne la traite pas dogmatiquement. La Logique & la phifiquc font peu différentes de celles des platoniciens & des Académiciens. La Morale l'eft en pluficurs points. Ses principes font , que le fouverain bien de l'homme eft de vivre conformément à la nature ; que la vertu doit eftrc recherchée pour elle mefme j qu'elle peut ertre aquife , quoi que la nature ne l'ait pas donnée s que le plaifir & la joye font fcs fuites nccenaircs. Les Stoïciens ne mettoient que les vertus au nombre des bonnes chofcs , les vices au nombre des mauvaifes , & les autres , comme le plaifir ou la douleur , la fanté ou la ma- ladie , la vie ou la mort , ils les tenoicnt indifférentes. Le fécond tome contient le plan de la philofophie des Mo- dernes j dont je mettrai l'extrait au commencement du Jour- nal d« la femaine prochaine. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Bapti(lc« ^vec pfivilege du Roi. i 6 94. XXXIX. 457 LE JOURNAL DES se AVANS. 5 Du LuNBY 29. Novembre M. DC. XCIV, URANIE , OU LES TABLEAUX DES PHILOSO- phes. P-iï M. le Noble B-iron de f uni George. Jn 12. 2. vol. à Paris chez Guillaume de Luynes , au Palais , Claude Ma- zuel , rue laint Jaques , & Marcin Jouvenel , rue delà Bouderie. 165)4. LE fécond tome contient les nouveaux plans furlefquels les Philofoplies Modernes fe font appuyez pour attaquer ia dodrine d'Anftoce. E,c parce que GaHcndi & Defcartcs fe font particulièrement attachez à la Phihque en fuivant les principes de Democrite & d'Epicure , &: que la première connoifTance de Phidque confifte à fcavoir comment l'uni- vers cft compofé , M. le Noble rapporte les croîs fiiiêmes fui- vant lefquels il eit fuppofé que le monde eft fait de telle ou dételle nianiere , de Ibrte que l'on puide expliquer les por- tions & les mouvemens de chaque chofe. Le premier eft celui de Ptolomée Egiptien qui vivoit deux cens ans après Jefus Chiift. 11 n'apourrant doniiélbn numà ce fiftcme que pour l'avoir cclurci , & non pour l'avoir inven- té. Car long-temps auparavant Arirtore s'eltoir imaginé que le monde eftoit compolé à peu prés de la mclme forte. Les 1 694. Z z z z z 4^8 LE JOURNAL Modernes qui l'ont examiné avec plus de foin que les autres, onr juge qu'il eftoit infontenablc , fur tout à raifon des Epici- cles , &: des divcrfcs apparences de la planète de Venus. Co- pernic trouvint donc que fclon ce fiflême il efloit impolTible de rendre raifon de quantité d'apparences , &: principalement de celles de Venus & de Mercure qui tournent autour du So- leil comme autour de leur centre , il conclut qu'il falloit ne- cefîairement que le monde fuft difpofé autrement , & s'ap- pliqua à imaginer q'jclque chofc de plus probable. Il fêper- fuààa. qu'il n'eftoit pas plus difficile que la terre tournall: au- tour du Soleil que les autres planètes , & embrada cette opi- nion avec d'autant pkis de confiance, que Thaïes , ArilUrque, Se d'autres Anciens l'avoient cnfeignée ; & ce qui raHitra fut la facilité que ce fiUéme lui donnoir de rendre raifon de tou- tes les apparences. On ne manqua pas de faire plufieurs objedions contre cette nouveauté. Ou lui oppofa l'Ecriture , qui déclare en plufieurs endroits , que la terre eft llable &: inébranlable ; &: une Con- grégation de Cardinaux condanna Galilée qui ioutenoit l'o- pinion de Copernic Les Philofophes appuyèrent les Théo- logiens , &: prétendirent que la pefanteur de la terre eitoit un obltacle invincible à fon mouvement. Copernic tâcha de contenter les uns & les autres. Il re- montra aux Théologiens, que les matières de Phifique ne font pas de la connoiliance du Tnbun.il Ecclefiaflique , qui condanna autrefois les Antipodes. A l'égard des Philofophes, il leur répondit deux chofcs : l'une, que la terre prife dans fa mafTe n'a point de pefanteur, parce qu'ayant en elle-mefme fon centre , auquel tendent toutes fcs parties , elle eft indif- férente à fe poufi'cr d'un côté plutôt que d'un autre , &c n'a aucun poids. La Lune &L les autres planètes font comme la terre d'une matière epaifle ô£. tenebreufe, &: ne laiflenc pas de fe mouvoir nonobftant Icut prétendue pefanteur. L'autre chofe qu'il répondit efl: , que la pefanteur aide au mouvement, & qu'une piumc pour élire trop légère , ne peur cftre mué ni jett.^e comn\e une pierre. Tico Brahé prévenu de l'immobilité de la terre au centre DES SCAVANS. 459 de l'univers , félon ptolomée , & de la cencralité de la terre 3. l'égard des cinq planètes, félon Coperriic , inventa un nou- veau fîltême , qui à le bien examiner n'eil que celui de Co- pernic, un peu changé en plaçant la terre où l'aune place le fbleil , dans le cercle fur lequel l'aucre fait tourner la terre. Notre Auteur rapporte les objedions qui (e font contre ce fiftêmc , avec les rcponles de fes déi:cn(euis ; d'où il con- clut qu'il eft plus ingénieux que probable. 11 n'oublie pas Longomontan , difciple de Tico , qui forma un quatrième fiOême de ce qu'il prit de tous les autres , en évitant ce qui leur cltoit objcété de plus fort. Pour parer à l'incomprehenfi- bilité du mouvement rapide que Tico donne aux Etoiles fi- xes , il donna à la terre un mouvement diurne de circomvo- lution fur fes axes , & par la mcfme il prétendit parer à l'im- menfité del'efpicc que Copernic met entre le ciel de Satur- ne & les Etoiles fixes. Mais peu de gens ont applaudi à ce fifiême pour le peu de crédit de fon Aurenr , & puur la gran- de réputation de ceux qui l'avoicnt précédé. Ces liflênies eftant expliquez de la forte , M. le Nol le par- le de deux Philofophcs que le quinzième fiecle vit naître, &: dont l'un fuivit AVidote , & l'autre Platon l.e premier fiK Pomponace natif de Mantouë , & Profelfeur a. Boulogne. II compofa plulîeurs traitez à la manière de l'Ecole , &: d'un ùi- le affcz barbare. Ce qu'il écrivit fur l'immortalité de l'ame fut ce qui lui donna le plus de nom. Un Domiiwquain qui lui demanda ce qu'il en penloit (uivant feulement les railonne- mens naturels, l'engagea à fe déclarer. Il tira d'Aril^ote & d'Averroés tout ce qu'il avança fur ce fujet ; d'rù il refuire que l'ame ell fimplement immortelle , &: mortelle félon quel- que chofe. Enfuitc il en produifit d'autres toutoppofez, Se tirez auflî d'Ariftote ; d'où il tefulte que l'ame eft fimplement mortelle , & immortelle félon quelque chofe : d'où il con- clut que l'immortalité ne fe peut prouver par des raifons na- turelles , mais que Dieu l'a déclarée par la voix de fes Pro- fères , &: révélée par la bouche de (on Fils. Le fécond de ces Philofophes fut Marcile Ficin, Ses œu- vres font rédigées en deux volumes. Dans le premier il y a ^6o LE JOURNAL un traité où il établit la vcriré de la Religion Chretîerine par les témoignages des faints Percs , parla nailFancc & les mi- racles de Jefus Chrill , p.ir la pureté de la Morale qu'il a cn- fcignée , & dont Marfile Ficin fait un parallèle avec celle de Platon. Le mcfme volume contient un traité de l'immortalité de l'amCj divifce.n dix-huit livres. Il la prouve par des argumens de Platon , d'cù il ne refultc que des raifoDS de convenance. Non content d'y donner aux hommes des ames immortelles , il en donne au monde , aux Cicux , aux Planctcs èc aux E- toiles. Il y a enfuice un commcnrr.irc fur l'Epitrc aux Romains, des fermons , un traité dcvita caUtm comparanda , trois trai- tez de Médecine , douze livres dclertres , un petit traité du Soleil, & un aune de la lumière , &: enfin un autre pour prou- ver que la volupté n'cft pas un bien. Le fccond tome contient les commentaires fur Mercure Trifmcgifte , fur faint Denis , fur Piaton , fur Plotin , &: flir Jamblicus. Les deux plus célèbres Philofophcs qui font venus depuis font Gaflendi & Defcartcs. Le premier retrancha de la Lo- gique toutes les épines de l'Ecole, & fit fiprincip.de étude de la Phifique. Il imagina d'abord un lieu infiniment étendu pour recevoir ce que Dieu a voulu produire. En traitant la queftion du commencement & de la fin du monde , il tient que félon la raifon mefnie il eft impolîible que le monde n'aie comtnencé &: qu il ne finilfe. Paffmt enfuite au premier principe de la Phifique , qui eft î'cflcncc de la matière , il prétend qu'elle confiftc dans la foli- dité qui la rend impénétrable, de forte que fon étendue né foit qu'un mode. Les parties folides dont cette matière eft compofée (ont les atomes , qui fe joignent de telle forte, que leurs figures iaifi'ent toujours quelque petit viude. Comme c'eft leur mouvement qui opère la génération de tous les corps, il donne la définition de ce mouvement, en établit les efpe- ces , explique toutes les qualitez de la matière , fa dcnfiré , (jl rareté , fon opacité, fa tranfparence, fapefanceur , fa légè- reté. DES S C A V A N S. 46 r retc , & les autres , que M le Noble rapporte dans un grand détail avec fà netteté ordinaire. Defcartcs jugea que les atomes de Democrite eftoicnt pro- pres à fervir de fondement à h philofophie qu'il metluoit. Il en forma le projet de cette forte. Suppofant que Dieu après avoir créé la matière dont le monde eft compofé la divifa en une infinité de parties égales , il dit que ces parties ayant re- çu l'imprcffion du mouvement , commencèrent à fe mouvoir de deux façons ditîcrentes , fçavoir chacune à part autour de fbn propre centre , & outre cela pluiicurs cnfcmble autour de quelques centres particuliers. Quant aux preuves de cette fuppolltion , il n'en donne point d'autre que fa pofîibilicé II fait voir çnfuice que ces parties de la matière ont cii devenir inégales en figure &: en grolîeur , & fe joindre cr.femble en différentes manières , & par leur jondion compofcrun Ciel un Soleil, des Etoiles, une Ttrre , & des Mets. Defcartes n'admettoit point une matière première fcparcc de toute forn-ie. 11 ne l'admettoit que comme elle eft dans fon ciïence , avec fes propnecez Se fes accidens. Il faifoic confilter fon cllence en ccenduë, en longueur , largeur , & profondeur , fans quoi la matière ne peut cftrc conçue ; au lieu qu'elle peut l'edrc fans fes proprietez &C Ces accidens, tels que font la couleur , la dureté , ou la liquidité. Pour connoicre les formes , il examine les corps en parti- culier, & commence pai les plus fimples, qui font les Lle- incns. II rejette également les quatre des anciens Philofo- phes , & les trois des Chimiftes , & met en leur place trois différentes fortes de parties de matière. L'une eft de parties groflieres 5.:de figure embaraffante : l'autre départies ron- des; & la dernière e(l de parties déliées & de raclures C'eft: de ces trois formes qu'il compofe tous les corps. Ce n'eft pourtant pas de leur mélange ; car il veut que le Soleil & les Etoiles foient de la matière fubcilc du premier Elément; que les Cieux foicnt de la matière des globules qui font le fécond, & que les planètes , la terre , l'eau, &: l'air , foicnt de la ma- tière grolliere qui fait le ttoifiéme. I 6ç)^. A aaaa a 4^1 ^ LEJOURNAL Il a mieux rcufll fur la lumière que fur aucun autre fujec Il croie qu'elle n'cftrien de réel dans le corps lumineux, mais que c'eft feulemcnc un fcnciment excité par l'un des trois corps lumineux qui font feuls dans le monde , le Soleil , les E- toiles, & le feu. Pour faire entendre comment le Soleil excite en nous le fcnciment de la lumière , il fuppole que cet allrc compofé de parties du premier élément elt entouré de parties du fécond ; de forte que depuis le Soleil jufqu'à h furface de la terre , &C mefme jufqu'à 1 extrémité de la circonférence du tourbillon, tout eft p'ein de globules du fécond clément, dont les vuides font remplis de particules du premier. Les parties du premier clément tournant circulairemenc autour du centre , font un effort continuel pour s'en éloi- gner , & à cet effet pouffent les parties du fécond élément en ligne droite depuis le centre qu'elles occupent jufqu'à la circonférence du tourbillon ; & un rang de ces globules eft ce qui eft appelle Rayon , qui venant à fr^ippcr nos yeux , ébran- le les fibres du nerf optique , & caufe le fcntiment de la lu- mière. La couleur n'eft félon la penfce de Defcartes qu'une lumière affbiblie. Comme il a fuivi le fiftéme de Copernic , il a expliqué le flux ôc le reflux de la mer par le mouvement de la terre. 11 a jugé que ce reflux arrive lors que la terre tournant comme elle fait inceifammcnt fur fon axe , la mer fe trouve direéle- ment fous la Lune. Car il prétend qu'alors la mer prcffcc dans le milieu par l'air qui en cet endroit eff plus rcffcrré qu'ailleurs , il faut neceflairemcnt qu'elle fe répande vers les hors. Apres avoir parlé des quatre elemens des anciens Philoso- phes , il parle de l'aimant , & confidere fcs deux proprietez , qui font d'attirer le fer , &: de fe tourner vers le pôle. Def- cartes les a expliquées par l'infinuation d'une matière fubtile qui coule d'un pôle à l'autre. Il a pu confiderer la terre comme un gr.uid aimant , & l'aimant comme une petite terre. L'une &: l'autre a fcs pôles , dont l'un regarde le Septentrion , &: DES se A V A NS. 4^3 l'autre le Midi. L'une & l'aucrc a Tes fibres, au travers dei'- quelles Ce fait un flux perpétuel de matière fubcile qui pafTe d'un pôle à l'autre. Quand ces fibres de matière fiabcile ren- contrent ou du fer ou un autre aimant qui a de femblables difpofitions , elles y entrent de la mefme forte qu'une viffc entre dans un écrou , les joignent &c les unilTent. Dcfcartcs eftoic tellement rempli des idées de fa Phifiquc, qu'il en a applique les raifonnemens à toute forte d'autres fujets ; 5c au lieu que les autres avoient parlé des palFions fuivant leurs caufcs morales , il a pris une route nouvelle, & montré comment elles Ce produifent mécaniquement. Ce qu'il en a dit Ce réduit à deux parties , donc la première ex- plique comment i'ame reçoit les impreîîions des objets qui l'émeuvent , & la féconde découvre leur nature , leur qua- lité , & leur nombre. Le delfein de M. le Noble eftoit de mettre à la fin de ce volume un traité de l'Aftrologie judiciaire , pour marquer les bornes où elle doit eftre renfermée. Mais il ne le fera que dans un tome à part , qu'il divifera en deux parties. L'une renfermera la fcience de l'Aftronomie , &: l'autre di- ftinguera ce qui peut eftre reçu dans l'art conjectural , & ce qui en doit eftre rejette, FABII CLAUDII GORDIANI FULGENTIÏ VIRI Clmffîmi Ltbeï vclnmmum J^. S^lîl. de JEtat'ihs Mtin~ di , e?- hominis , refcrvatis perjïrigalos Ltbros Jïngulis litter'n ^c Eîuit è Manufcripiis Codidéus P.J^icobui Hommey An^ufti- nianm. Notis , Differtat. illujîravit. Accedit Traïiatm de tranjlatione corpons fanBi Fulqeraii Biiurigas. In S- Piïta- vii , & Ce trouve à Paris chez Florentin & Pierre de Laul- ne j en la Place de Sorbonne. 1 694. LA Copie fur laquelle a efté imprimé le petit Livre des Ages du monde à efté prife d'un Manufcrit de la Bi- bhoteque de Sorbone avec lequel font reliez d'autres ouvra- ges de faint Fulgence Evêque de Rufpe , auquel ce Livte 4<Î4 , LE JOURNAL clt attribué par l'auteur de la Croniquc de faint Riquier , imprimée dans le quacncme tome du Spictlez^ium de Dom Luc d'Achen , par Sjgcbcrt , par Triteme , par Gefncr , &: par Autbert le Mire. Il elt certain qu'il n'cft point de Fulgcnce Evcque d'Afli- gi , &c depuis de Carragene , Efpagnoi de nation , puis que l'auteur fe déclare lui mermc Afiiquain. L'artifice avec le- quel l'ouvrage efl: compofé , & l'aftedarion d'exclure de chaque livre une lettre de l'Alfabet eft plus pénible qu'u- tile. Pierre de Riga , Chanoine & Chantre de l'Eglife de Reims , qui vivoit au treizième ficelé , s'impofa une fem- hlable contrainte dans un poëine dont le P. Hommev nous donne ici un fragment , ôi. qu'il promet de donner entier dans la Continuation de fon i)upplcnienr de la B:b!ioccque des Pcrcs. Il a joint au Livre des âges du Monde des Remarques qui en expliquent les endroits les plus difficiles , &: a mis à la fin une Relation de la Trai'flation du corps de faint Ful- gence à Bourges , avec des noces &c des corrcdions du P. Lu- bin ci devant Affiliant General de l'Ordre des Auguftins fur la.Cronolosie , & fur l'Hiftoirc, EXTRAIT D'UNE LETTRE DE M. C y^bbé Boifot à Mademoifelle de Scudery. A Befar.(^on le 19. Septembre 1694. ON a trouvé dans un petit village à un quart de licuë j'ici le tombeau de Cefonia Donata femme de Candi- dus l'un des efclavcs de l'fcmpercur Antonin. Il y a quelque chofc dans l'infcription qui cmbarafTe On ne içait qui eft un certain Eul'cbe qui y eft nommé jufqu'à trois fois. Vous ferez peut-eltre bien-ai(c d'en faire part à vos amis , & d'erï fçavoir leurs fentimens. Je me fuis fait amener le tombeau. Il aura une place honorable entre pluficurs autres infcriptions antiques trouvées ici , que j'ai pris foin de ramafler Jnfcïiption DES SCAVANS. 4^5 Infcription d'an Tombeau Antique trouve à Saint Ferjea prés de BefttK^on , le 20. d'Aokt 16^^. Wil ilIliiUli IpifMWllIIf!^^ life,, =,'lllllilll!, ihlM ill|l(l)(ili,ll|lihl I lllllff(|lill|il!i|nillMllilll!lll ,M|.l|IMn.lllM|lM III 11(11 V t>j . S CiESONlAE DON ATAE QM4i:' VIXSIT ANNIS / ^' ^t^^ % XXX}{VJI DXflJORlSJ]][CANDÎDVS.WG 1 [3-'' \ fcPIi\^RNAEXTEST CONIVGlBENEMERENTiP^^^ POSVIT^EVSEBI ILWE ET YAL£ I,OG LIB SENTI MENS DE L'EGLISE ET DES iAlNTS Ferei pour fcrvii de décifjon fur l-i Comédie <^ les Cornedterj^ , oppoJeT^ à ceux de la lettre qui a paru fur ce fitjet depuis cjueU quesfnois. In 11. à Paris chez la Veuve de Charles Coi- gnard , (ur îc quai des Auguftins , ic Edme Coutcroc , rue iainc Jaques. 1694. LE torrent de la coutume entraîne tant de monde à la Comédie, que l'Auteur a cru que l'on ne pouvoic y apporter trop de rcliftance , fur tout quand il a vil que des Religieux &c des Preltres lembloient ne fonger qu'à en ac- croître la pente j &: à rendre le cours plus impétueux & plus rapide. La digue qu'il lui oppofe ne pouvoit eftre plus forte , puif- que c'ell la parole de Dieu écrite dans les Livres laints , &: contenue dani la Tradition. 11 cft vrùi qu'il ne rapporte aucun paflage dei'Ecrituie, où la Coiiiedic foit défendue en termes 1694. Bbbbbb 4^6 LE JOURNAL aufTi formels que l'eft l'idolâtrie , & les autres crimes ; mais il montre les principes que les Pères y ont découverts, & fur lefquels ils l'ont condannée par des confequcnccs très juftcs 6c rres naturelles. II n'en eft pas de mefmc de la Tradition , qui s'cft claire- ment expliquée par la bouche des Evéques aflemblez dans les Conciles , & par celle des faints Doifteurs, L'Auteur ci- te les canons des Conciles & les paffagcs des Pcres , &: dé- duit leurs raifons avec une jufle étendiië. Quand il vient à la réfutation de la lettre du Théologien qui approuve la comédie , il montre qu'elle ne peut eflremi- fe au nombre des chofes indifférentes ; que pluficurs circon- ftances la rendent mauvaife ; que ceux qui la teprcfentenc font excommuniez par l'Eglife , déclarez infâmes par les Empereurs , que la fin qu'ils fe propofent cft criminelle , que les effets de leurs pièces font dangereux & ne tendent qu'à exciter les palfions , à fortifier la concupifcence , & à étein- dre l'efpric du Chriftianifme , à profaner les jours les plus particulièrement delHnez au culte de Dieu. Il examine ce que notre fiecle fe vante d'avoir retranché de la licence de l'ancien Teâcre , & trouve encore non feule- ment dans Molière , mais mefmc dans le Grand Corneille des fentimens & des exprcfîïons qu'il ne peut accorder avec l'honnefleté &: les bonnes mœurs. Voila le fujet de la pre- mière partie de fon écrit. La féconde contient la réponfe à douze objeflions du dé- fenfeur de la Comédie , où par occafion l'auteur fait voir combien les fentimens des faints Pères doivent cflre plus vé- nérables aux Fidelles que les fentimens des Scolaftiques, & où il montre aulTi qu'il y a d'autres divertillemens , comme le bal & la danfe , qui font dangereux , &: défendus aufli bien que ceux du Teâcre. DES se A VANS. 467 O. MATHION GEOGRAPHIy£ A S T R O- nomicts Synoffii , verjïbus hsxametris com^rehenfa. LA connoiflance de la Sphère dépend d'un grand nombre de termes qui lui font propres , &: qu'on oublie facile- ment. C'eft ce qui a obligé M. Mathion Machcmaticien iliuflre , de renfermer tous ces termes en peu de vers , afin que ceux qui commencent l'écudc de cette fcience, les puif- fent retenir avec plus de facilité. Voici ces vers. fc-3 Spharict confflit quafi fun&um immobUe tellus , H" Quiim circa duplici volvuniur fidera motu. o ( 5£5W^«iiw pro duplici motu qui traditm aftris y 3 ynicui m fpiram fojmatm fufficit orbis.) D Primui ad Occiduas paries contendit ab Onu , y^lter ah Occafu contra conatur ad Ortum. V Hinc finxere poloi , circa quos ^qutdialis :g Vcniiur , ^ motum primura metitur (^ horas. 9, Hinc eiicim obliqua filia eft Ecliptica giro , n Anmi.i defignar)s Phxhei tempora curfus , S Et motus pïoprios quibus aftra feruntur ad Ortum, Séparât Aiquator bina Hemifpharia , Zonas Diftinguunt btni Tropici binique Polares , Damqtte ParallcU latum , longuwque Meridi- ^ anus ab Occafu metiri novit in Ortum. <^ Cunclorum ex lato fcitur menfura dierum , Quo foie urbs quavis , qtta tempeftMe fruatur i Qua felltt femper lateant j qua fidera nunquam Condantur , quicve alternis oriantur , ^ unde Et quando , ^ quantum ne^iurno tempore régnent ; Qtta Zenit atiingant , quas tantùm radat Morifon Infunclo média noïiis mediave diei : £t contra ex iflis Latum diftinguitur yiflris. Jdinc & noBe-die noflram cognofctmus horam : Ex Longo cu\ufque loci difiinguimus horas. Ex Lato Longoque datur pojîtura locowm 4^8 LE JOURNAL Mtttua , ^ à reliquts quantum fit quifque remotui; Quoi hiiheut fibi quifque locus toto orbe Sinac*i , Quas Antàccoi , Antipodas , quos ^ Periacos. Jnde data quocuyvque die , quocumque minuto , jyues quai lu/iret ftimmo de verttce terras , Et qu.intum dtflet reliquurum a veitice Titan Zucn ubi médium , quibui (^ fit qucclihet hora, Qjitii fimul ajfurgat , quoi auiem m no fée reltnquat^ Quti fuciai fine nocie diem , aut fine Lumme notiem. Mine msdio in pelago po^^ius fola Ajira -vtdendo Tsfon littui circumpofiium imb nec marn undai , Jnvento prope divmo diftmguet ubi fit yifironomus , quar.tum'jue Loco fiemotm ab omni. LIVRES NOUVELLEMENT IMPRIMEZ. Traité moral de la divine Providence envers Ces créatures , dans tous les efiats de la vie , où L'on fait voir l'.ivewiltment ^ la faux raifonncmens des efpnts forts dn (iecle fur ce fu]et ; la (g am avan- tages qu'il y a de iabandjr,ner avec confiance à la conduite de Dieu ; ^ les funejlei malheurs qui arrivent à ceux qui ne fe corfitnt qu'à leur propre conduite. In li. à Paris chez, Pierre Ballard , rue faine Jacques. 1694. La nouvelle Pratique ou Protocole des Hut.^ers ^ Sergcns^ qui leur en feigne la manière de bien dreffer tnus exploits , commande démens , faifies , ^c. far le fleur P. Duval de la Lijfandriere. In \^. à Pans chez Etienne Michallet. \ 694. La vie (^ la doilnne fpiriiuelle du P. L. LaSemant, de la Com- fagnie dejefus. In ii. à Pans chez le mcrme i 694. Veniez^ fur les mœurs. In iz. à Paris chez Simoa Beiiard, rùë faint Jaques. 1694. A PARIS, Chez Jean Cusson, rue faine Jaques , à l'Image de faine Jean Baptiltc. Avec privilège du Roi. 1 6 94. XL. ' 4^9 LE JOURNAL DES SÇAVANS DuLuNDY 6. Décembre M. DC. XCIV. TRAITE' DE LA LIBERTE', DE LA SCIENCE, ET de i Autorité , où l'on voit que les perfovnes du fexe pour en ejire privées ne laijjent pas d'avoir les quaùtez^qui les en peuvent ren- dre participantes ; avec un petit traité de la foiblejje , de la le- ■gereté , & de l' inconfiance quon leur attribue mal à propos- Par G. S. Arifiophile. In 4. k Lion , & fe trouve à Paris chez Robert Pépie , rue faint Jaques 1694. CE T Ouvrage compofé en moins d'un an fans aucun con- feil ni aucun fecours étranger , n'eft pas une des moin- dres preuves de ce que la perfonne qui nous le donne y fou- dent à l'avantage de fon fexe. Elle entreprend de montrer que la liberté , la fcicnce , & l'autorité qui rendent les hom- mes fi coniiderables dans le monde , ne leur font pas telle» ment propres que les femmes n'y puiflent avoir quelque parr, & que la privation qu'elles en fouffrent clt plutôt un effet de la coutume qu'une marque de leur incapacité naturelle. Elle relevé le prix de la liberté par la noblefle de fon origi- ne , par l'excellence de fa nature, & par la conltance de fa durée. Cette faculté qui nous donne le pouvoir de difpofer de nos actions cft l'ouvrage le plus délicat des mains de Dieu, 1694. Ce c c c c 470 LE JOURNAL & la plus precieufc prérogative de l'homme. C'cft une fou- veraine qui le conduit par la lumière delà raifon , & qui ell dans la vnlonré comme dans (on trône, C'cd par elle que Dieu elt fcrvi , le prochain fccouru , les repubhqucs gouver- nées , les ioix maintenues , les vertus rccompenfées , le vice puni. 5a durée efl: fi confiante , que Dieu qui l'a faite ne la peut détruire ; &: fi la volonté cclîoit d'avoir le choix des moyens ncccfTaires pour arriver à la fin qu'elle Ce propofe, elle cefTcroit d'eflre. Toute unique qu'elle cfl en Ton eflence, elle Ce multiplie en plufieurs eCpcces , & fe divife en liberté formelle , abfo- luë , conditionnée , foible , Se infirme. 11 y a une liberté de condition dont font privez ceux qui tombent dans la fervitu- de , foit par le malheur de leur iiaillance , ou par un confen- tcmenc aveugle qui les aflujcitit à la puillance des riches. II y a une liberté de profelîîon qui reg'e tous les emplois de la vie , en allure le repos , 6ù mefmc procure l'éternité, &: donc le choix ne le doit faire ni par coucumc , ni par hazard , ni par caprice. Il y a aulTi une liberté de lieu , une liberté d'ef- prit , une liberté de cœur , Se une liberté de confcience Dieu qui eft aulTi jufte que magnifique dans la dillribution de Ces biens , ne les donne pas également à tous les hommes. II a voulu que la terre tull diverlement en leur dii'pohcion. Les uns la poircdent à titre de fou veraineté, comme ks Rois Les autres en ont la propriété comme les riches , &: les pauvres ne l'ont que pour l'habiter. Mais tous généralement ont la puillance de la confiderer , & d'en parcourir les divcrfes ré- gions , & de tirer de leurs voyages des connoilTances qui fer- vent à I inflruction de leur eipnt &; à la corredion de leurs mœurs. L'efprit ne fouftre ni bornes ni limites. Il eft indépendant des lieux , des temps , des perfonnes , & melme de fon pro- pre corps Bien loin d'eltre enfermé en aucun lieu , il p.ifle en un rçoment comme l'éclair d'Orient en Occident , s'élève au defliis du ciel , & defoend au fond des abîmes. Le temps qui eft la durée de toutes chofes n*a point d'em- pire fur lui , de la nuit qui femble interrompre toute forte ds DES se A VANS. 471 commerce , n'arrête point Ton adivité. 11 médite , il raifon- ne , &: forme mille projets au milieu des plus épaifles ténè- bres. II ne relevé point de la puifîlance des hommes. Ni leurs commaiidemcns ni leurs défenfes , ni leurs promciles ni leurs menaces ne rerardcnt fes opérations. Bien qu'il (oit attaché à Ton corps , & qu'il fe fervc de l'es oiganes pour quelques fondions extérieures , il n'a pas befoin de lui pour agir. Il donne la vie à ce corps comme il reçoit la fienne de Dieu. Que s'il eft libre par Cà nature , il s'élève encore par fa vertu au ded'us des faveurs de la fortune , de l'eftime des hommes, de l'opinion du vulgaire , & des accidens les plus imprévus & les plus furprenans de la vie ; Se c'ell-là le privilège des grandes âmes. Le cœur a ù liberté aufll bien que l'cfpnt : mais pour en jouir il fiut qu'il s'aftranchifle de fes paflions , & qu'il l'oïc fans amour & fans haine. La liberté qui appartient a. la confcience ne confifte pas à croire ce que l'on veut des mirteres , ni à fe faire une religion à fon gré , elle conHlte à n'avoir rien à fe reprocher , & à ne fcntir aucun remors ; & pour cela il faut que l'ame foit pure, éclairée , & bien rcglée. Comme la liberté ell le plus eflimablc de tous les biens , la contrainte eft le plus redoutable de tous les moux. tlle a Ces différentes efpeces oppoféci à toutes les efpcces de liberté. Ses effets font l'incertitude , le trouble , la trirtefîe , & quel- quefois le defelpoir. Les deux contraintes aufquellcs la perfonne qui nous don- ne cet ouvrage s'arrête le plus elt celle qui s exerce fur l'efpric des filles ou pour les mectre en Religion , ou pour les pour- voir par mariage. Elle foutient que la vie religieufe efl: un ellat de contrainte pour toutes les perfounes qui y entrent fans vocation , ou par le mouvement d'autrui , ou d'elles mefuics , & par une fer- veur palfagere qui n'efl rien moins qu une infpiration du ciel. Ce qui fe fait fans connoiffance , du- elle , n'elt jamais par- faitement libr^. ,& la connoiffance ne s'aquiert que par un long 471 L E JO UR N A L temps , & ne Ce trouve point dans un âge foibic , à moins qu'il ne foit prévenu par une grâce extraordinaire. C'eft pour ce- la Ojue Louis le Grand fit il ya quelques années une ordonnance pour défendre les profeflions des Keligieufes a- vant l'âge de vint cinq ans. Il ert vrai que le Concile de Tren- te les permet à feize ans : mais c'eft une tolérance , &: non un précepte ; & l'intention du Concile qui ne veut que le d- lut des ridelles , clt que fi une fiiie n'a pas allez de lumière à Tcize ans pour une li importante entreprife , elle attende un âge plus avancé. Le mariage cft aulfi un eftat de contrainte quand il eftcon- traâié par ambition , par avarice , ou par quelque autre paf- fion. La conclufion qui fe tire de tout ceci efl: que la contrainte où les loix & les coutumes tiennent les filles & les femmes n'aura jamais allez de force pour les priver de la liberté que la nature leur a donnée , ni pour les attacher à un lieu , pour abaifler leur efprit , pour enchaîner leur cœur, & pour fouiller leur confcience. Il n'y a pas plus de fondement à leur interdire les connoif- fances , qui après la grjcc font le plus grand don de Dieu , <.V le plus bel ornement de Icfprit , & à les condanner à demeu- rer dans l'ignorance , dont les effets les plus ordinaires font d'obfcurcir l'efprit , d'afïoiblir la mémoire , de dérégler la vo- lonté , d'endurcir le cœur , & de produire tous les dcfordres qin corrompent les mœurs & troublent la focicté. Cela eft prouvé dans la féconde partie de ce livre par l'exemple d'un grand nombre de femmes qui ont hcureufcment réuffi dans l'étude des fcicnces. La troifiéme partie cft employée à montrer que la foibleffe qu'on leur attribue ne les doit pas priver de l'autorité fouve- raine , & que dans les Eftats dont les loix les admettent à la couronne , elles ont fouvcnt commandé avec une jullice &: une fageffe qui ont rendu leurs fujecs heureux. DES SCAVANS. 473 LA CONNOISSANCE DU MONDE , OU L'ART DE bien élever la jeunejfe four les divers efiats de la vie. Dialogue entre le Solide ^ le Délicat. In 12. à Paris chez Jean Gui- gnard , au Palais. 1694. LE Public qui attcndoit la fuite de l'Arc de bien élever la jcuncfle , fera peur-eftrc furpris de voir une pièce qui traite de tout autre cho(c , & qu'au lieu d'une lettre fur l'édu- cation d'une fille de qualité , on lui prcfente un dialogue en- tre le Solide &: le Délicat. L'Auteur n'a interrompu de la forte le dcflein de fon ou- vrage que pour juftificr la forme qu'il lui a donnée , & pour montrer qu'il a dû préférer la foiidicé des penfées & la force du raifonnement à l'élégance du langage & à la beauté des termes. Le Solide qu'il introduit dans ce dialogue , & qu'il charge de fa dcfenfc , y fouticnt que ceux qui méditent profondé- ment , &: qui creufent leur matière , vont au de-là de l'idée des perfonnes ordinaires , &: qu'ils fe trouvent obligez de parler auifi folidement qu'ils pcnfent , & de choifir des ex- preHlons qui tracent vivement les images qu'ils veulent re- prefenter. Il ne nie pas qu'une penfée folide ne puifl'e eftre revêtue de beaux termes : mais il prétend que cela cfl: difficile à exé- cuter , &: qu'il cft rare de trouver des gens alTcz heureux pour joindre l'élévation qui fait bien penfer à la fécondité qui fait bien parler. Il y voit non feulement de la difficulté, mais aufîî de la contradidion , par cette raifon que la penfée folide & l'exprcffion étudiée ne peuvent eftre produites au mefme temps j & demandent quelque fucccffion , qui ôte à la force de la penfée ce qu'elle donne au choix de l'exprcffion. Quand quelqu'un a médité profondément , & qu'il étudie les règles de l'art de s'exprimer élégamment , fa penfce luiechape, quelque effort qu'il faffi: pour la retenir. Les termes qu'il a recherchez avec le plus de foin , ont toujours fi peu de pro- portion avec cette penfée qui efl: toute fpirituelle , que b.cn 1694. Dddddd 47+ LE JOURNAL loin de l'cgalcr , ils ne manquent jamais de l'afFoiblir. Delà vicnr que ceux qui mectcnc kurétu k à bien parler , ne font pas, ceux qui pcnlent le mieux, & que ceux qui à force de penfcr ont aquis une folide érudition , ne fc tiennent pas aO'ujetttis à toute la dclicarclfe du langage. Entre deux chofes d'inegal prix ils ne balancent point à préférer la meilleure. Comme ils jugent que bien penfer , qui approche l'homme de l'Ange , eft meilleur que bien parler , ils s'appliquent pnncipalemenc à bien penfer , 6c contens de s'expliquer comme ils penfent, ils ricnnent le langage de la nature qui cil toujours plus clair & plus intelligible , que celui que l'art invente. Pour décider inconteftablement que bien penfer , & s'ex- pliquer comme on penfe ell préférable à parler félon l'ufage, ils s'en rapportent non à la raifon particulière de la France , ou d'une autre nation , mais à la raifon univerfclle dont le domaine a la mefme étendue que le monde , dont les fujets font defintereflez & n'ont aucune patrie. Cette raifon univerfelle a prononcé , à ce qu'ils prétendent, en leur faveur lors qu'elle a porté fon jugement fur deux li- vres François qui ont efté répandus par toute Tturope. Les Etrangers ont trouvé dans le premier une force de penfées, Si une folidité de raifonnement qui l'ont fait traduire en tou- tes leurs langues. Les mefmes clprits également capables d'en juger , ont traité l'autre d'une manière toute différente. Ils 1 ont négligé parce qu'ils n'y ont point trouvé de raifonne- mens capables de les convaincre , bien qu'il fuft écrit avec un ftile fleuri qui lui a donné grand cours en France. La difcuflion exade des matières a cité la pierre de touche à laquelle la raifon univerfelle de toutes les nations de l'Eu- rope a jugé du prix de ces deux livres , &: à laquelle jugeant de tous les autres , elle donne la préférence à ceux qui produifenc une conviâion ferme & inébranlable fur ceux qui ne caufcnt qu'un plaifir & une fenfibiliré paflTagerc Le Délicat fe rendant à ces raifons, déclare qu'il veut re- chercher à l'avenir ce qui lui manque, & aquerir le Solide, qui de (on côté répond qu'il habillera plus agréablement Ces penfées , afin qu'elles ne paroiilent pas étrangères à une na- DES se A VANS. 475 tion avec laquelle il a à vivre. Nous verrons comment il s'a- quittera de ù piomefFc dans la lettre qui va parourc fur l'é- ducation d'une fille de qualité. ORDONNANCE DE MONSEIGNEUR L'ARCHE- vique ai P nu , pO'torte pour titre : Cantique des Cantiques de S domon , interprété félon le fem n-iyfitqne , imprimé à Lion en 1688. In ^. à Paris chez François Muguet , rue de la Haipe. 1 694. LEs trois livres marquez dans cette ordonnance ayant cfté répandus dans le dioccfe de Paris , M. l'Archevêque a pris la peine de les lire , & a reconnu qu'ils contenoient une dodrine pernicieufe , & les condanne comme contenans des propoficions refpeftivement fauflcs , erronées , tendantes à l'hcrefie , contraires à la parole de Dieu , capables de fcan- daliftr les fidelles , d ofFenfer les oreilles pieufes , & d'entre- tenir les âmes dans une vanité toute vifionnaire , & qui em- pêche qu'on ne travaille pour s'avancer à la pcrfcûion , dans une oifivcté qui donne heu à toutes les tentations , & dans une faufî'e fuppofition qu'on peut vivre en grande fureté fans demander à Dieu ni la rtmiffion des pet hez , ni la grâce de la perfeverance dans le bien , & fans aucune application à l'œuvre du falut , & qu'on peut fe croire affranchi de tout af- fujeciffcment aux exercices de pieté. L'Ordonnance ne porte pas que toutes ct% propoficions fbicnt contenues dans chacun de ces trois livres , m que tou- tes les qualifications tombent fur chacune des propofitions, C'eft alTez que quelqu'une des pro ofitions foit dans l'un des trois livres , &: que queliju'unc àz^ quahfications tombe fur 47^ LE JOURNAL l'une des propofitions. Les fimples fidelles n'ont pas befôin d'une inftruction plus particulière pour cviccr la mauvaifedo- ûrine que les propofitions condannées contiennent. 11 leur fuffit que le Pafteur dont ils écoutent &: fuivent la voix en aie une entière connoiflance ; comme il fuffic aux brebis , félon ringsnicufe comparaifon du Cardinal Palavicin , que leur Berger fçache en quels pâturages font les mauvaifes herbes dont il les détourne , fans qu'il le mette en peine de leur ex- pliquer les qualitez de chaque herbe , ni le mal qu'elle leur pourroit faire. HISTORIA CHRONOLOGICA PONTIFICUM Romanorum , R. P. F. Fr. Carrière , Aptenfii Minorita Con- vent. D' Theolog. cum prafytaîiene futurerum ex S. Mala. chia, Huic ultim■ C ' de l^ Académie Fra. cotfe In foi. z. vol. à Paris chez la Veuve de j. B. Coignard , &: j. B. Coignard. 1694. MR. Corneille perfuadé des avantages que le Public re- cevrou u'un uidionnaire des Arts bc des Sciences qui fuit c^ plus ample & plus corred que celui qui parur en Ho- lande il y a quelques années, a travaillé fans re âthc à ramaf- fcr ce qui en a cité écrit de plus curieux , afin que ceux qui fouhaiceroient cette forte de fuppiement au travail de l'Aca- deniie , eulfent lujecd'cltre fatisfaits, il n'a rien cité d'aucun auteur qu'il n'ait confulté l'original, a décrit les plantes , s'tft éten u fur la Médecine, a ptofité des remarques d'EtmuHcr , a donné une hiftoire abrégée des animaux , des oifcaux &r des poiU'ons , fait le dénombrement des Ordres Religieux &: Militaires , celui des dignicez ancien- nes &L modernes , explique de vieux mois , & ajouté des ex- emples ou du roman delà Rofe, ou des plus anciens Poètes. GENESIS , SIVE MOSIS PROPHETE LIBER I EX tritnflattone Johanrdi Clerui, cum ciufàern purav ht. iji perpétua ^ commmentano philologico , (^c. InfoUo. Amftelodami. 1695. IL y a peu d'cntreprifes auffi difficiles &: aufli hardies que celle que M. le Clerc vient de fiire de traduire tour !e nou- veau Tcftament , de joindre une paraphraic à la tradudion , d'éclaircir le texte par un commcniaire perpétuel & non in- terrompu , & par un grand nombre de dincrtations. Il a misa la telle des prolégomènes qui contiennent trois difl'ertarions critiques. La première donne des préceptes de la lansz;ue Hé- braïque , fans lefquels k commentaire ne fcroir pjs aif à en- tendre M le Clerc y foutient qu'il eft probable que ni THe- breu , ni le <^ aldaïquc , m l'Arabe , ni .luci ne autre lai gue Orientale n'ed I ancienne langue qu Adam parloii, mais q /el- les en font toutes venues , de melmequei'ltahcn, le François & l'Lfpagiiui font venus du Latin, 496 LEJOURNAL Dins la féconde dinîcrtation il rend raifon de la manière qu'il a Tuivic en traduilanc pourrcndre le fcns des livres facrcz intcHig'.blc à ceux qui ne (çavenc pas l'Hébreu : &: parce que la nanacion des Hébreux &: la Façon de s'exprimer a toujours de robfcurité , il a joint à fa vcrfion une piraphrafc , où il s'éloigne quelquefois un peu des paroles de MoKe fans s'éloi- gner de fa pcnfcc , & a ajoucé un commentaire pour expli- quer les hcbraïlmcs , les allulions, les coutumes, Hermas^ s'il eft auteur du li- vre intitulé Le Palleur , 71 Merode le grand, & les diffe- rens eftats de la forcune , 10 6 Heure à laquelle Notre Sei- gneur fut crucifié , 3y5 Hincmar Archevêque de Reims, ^6 8. Hincmar Evo- que de Laon , 371 yot 43 5 Jernfilem fondée par des pa- ftcurs chaflez d'EgJpte, 19 Images & leur culte, 366 Jmaginatîon eft la feule qui agilTe dans l'enfance , 2 54. Combien elle nuit à laraifon , M5 Jmmortalîté àeViimc ^ 414. Jvd'ens & leur mauvaife foi dans le debic des drogues , 123 Inquiftturs & leurs devoirs , 138. Inijuifitian , fon inftitu- tion & Tes procédures ,183. Inquijition de Venife en quoi i://;7(?rn//f& fon autorité 4S0 différente des autres, 193 Htppurque compta le pre Infcripîion d'un monument mier les étoiles , zi o Htrc.in ruine le temple de Garifim, Z) H'^otre àe la femme adul tere ne fe trouve pas dans tous les exeniplaires , 347 Hiftoriens miniftrcs de la Providence , i 6 Homme , fa corruption &: fa foiblelfc , 4 HonoricHh de Gcnfcric con tmuë la perfecution commen- cée contre les catoliques, 41Z I Idée de l'étendue , & fi c'cft en Dieu feul qu'elle fe trouve, II. /dèes, fi elles font éternelles immuables &: necelTaires, 315 Jean d'Autrichc fils naturel de Charles quint, & comment 1694, trouvé à Arles , 6i Jnfcriptions & règles pour les expliquer, 135 Juifs , & comment ils comp- toient les jours de leurs mois , 241. Juifs comment trairez par les Mores , 389. S'ils efloient originaires de l'Ille de Crète, 491 Jurifprudence parée de beau- coup d'ornemens, 323 L Labirintes préférez aux pira- mides , 40 Lancfranâ écrit fur lEucari- ftie, 374 Lanque Françoife & fon ufa- M. Leibnix^ propofe de faire l'hiftoirc des maladies qui re- Llllll 5or T.A BLE g' ent chaque année en Fran- Monr)o\e bartuë par le Com- ce 338 404 tedcTtkcli, 8ô Zfo« dcTipprouve Taddirion Morcile des payens fort im- faice au fimbole , 377 parfaite, 3. Morale conzçuué Z^//^''<'j de faint Martial (ont dans l'iicritiire, 4 Tuppotccs, 72 Mort de Hcrodc en quelle JLfttresàcyi le Cardinal de année elle arriva , 106 Bouillon au Chapitre de I. le- N gc , & les réponfes , 378 Nabucodonofor envoyé Dj- Z/Wi/fo«& fadefcription 140 niel à B.ibilone , iO afliege S. Lin , & s'il eft auteur des Jérusalem & la prend , ibid. livres de la vie de faint Pierre N-Ji(fjtice de J. C. à quelle & de faint Paul , 71 année peut cftrc fixée, 2.06 Ziturgtes publiées fous les Naz^iréens &c leur Evangile, noms de faint Pierre & de S. 347 Jaques, 70 Nemrod jette les premiers Zîr(?n;apparcienncnt à l'a- nie ,&■ non au corps , 411 5/«<»»/f/?/ fournis à un Roi des Je temps de Noé , i 8 Sixte V. refiifc d'approuver Ja ligue ,& pourquoi, 436 Souverairti comment punis en Cis d'apoliafie & d'hcre- fîe , 195 Sub[}avce(:[\i'\ penfe, principa- le partie de l'homme , 5 T TahoT , &: fi ce fut le lieu de la Transfiguration , 345 Tecnuei , 393 Temper^iment fert à connoitre les hommes , 299 11 change avec l'âge , thid. Temple de Salomon hâci fur le modèle du Tabernacle, 243 Tharé tombe dans l'idolâ- trie , 1 8 Tibère rétablit des villes rui- nées par un tremblement de terre, 479 Tombeau de Cefonia Dona- B L E ta , 4^4 T^/sr des Geans, 39 Tracei du cerveau , & leur liaifon avec les idées , 429 Tran[fiq^uraiion , le lieu & le temps où elle fe fit , 345 Tribut demandé à j. C. 346 V M. Vaillunt^ & fa grande ca- pacité au fait des médailles 143 /^u/ifr/.'/ Fal.onia Probj, 119 Van-Helmont , &.' 1? confeil qu'il donne aux Médecins 115 Vertus des Payens , 29 ^/f/^r de Tunes , 414 ViHor Evéque de Rufpe , ib. Vipère' , & en quoi leur ve- nin confiftc, 248 Vmon du corps & de l'ame en quoi confille , 417 yoffiui^ & trois fautes qu'il a faites au fujcc de Faltonia, 130 Voyelles , combien il y en a dans la langue Françoife, 490 Vue des corps en Dieu, 3 04 Vues pieufes pour confoler une Rcligieufe de ce qu'elle n'entend pas l'office qu'elle chante , 314 X JTenophon & fcs ouvrages, 17 JU'erxéi ruine le tombeau de Bel, 39 A PARIS, Chez Jean Cu s s o n , rue faint Jaques , à l'Image de faint Jean Baptiftc. ^vec privilège du Roy XLIII. 505 LE JOURNAL DES s C A V A N s b Du LuNDY 27. Décembre M. D C. XCIV. BIBLIOGRAPHIE, OU CATALOGUE DES LIVRES imprime:;^ tant eu France t^ue duns ki pays Etrangers , dont il eft parlé dam le- Jourtjaux de l'année 16 ç^. BIBLIA SJCRA , INTERPRETES ET CONCILIA. LE Cantique des Cantiques , expliqué dans fon fens littéral. Par Mre. François Aurac , Prêtre, 5cc. in 8. a Lion , & fe trouve à Paris chez Edme Couterot. 10. journal. Le Cantique des Cantiques traduit en François , avec une explication tirée des faints Pcres & des Auteurs Ecclefiaftiqr.es. in S. à Paris chez Guillaume Defprez. 11. j. Scriptura Sacra , ad ficiliorem intelligentiam acccmmodata, àPhilippo Fr. Lalouette Pr^fbytero, ôcc. in iz. à Paris chez Simon Benard. 15. j. Analyfe de l'Evangile félon l'ordre hiftorique de la Concorde , avec des diflcrtations fur les heux difficiles. Par le R. P. . . . Prêtre de l'Oratoire, in II. 5. vol. à Paris chez Louis Roulland & Jean deNully 19. &• 50. j. Didertationum in Concilia gcneralia & parricularia , Tomus prinus. Authorc Lud. Thomadîno , Congreg. Oratorii D. Jefu. in 4. à Paris chez Antoine Dezallier. 41. j. Gcnefis , five Mofis Propherje liber primas , ex trai fljtione Johannis Clerici , cum ejufdem paraphrall perpétua , commcntario philologico, &c. in folio. Amftelodami. 41. j. SANCTI VATRES ET THEOLOGI. Fuiioamentum Theolog'aeMoralis , dercfto ufu opinionum probabi- 1694. M m m m m m SQ(y L E J O U R N A L lium. Ainh-^re R. P. Gonzalez , Prxpofito Generali Societatis Jefu. In 4.' à Paris oh z Antoine DeznUier. Si .o^iK Diœcefana, ah FpircopoParmenfi ThomaSaladino habita anno Dmiini 169- "^ c. -n 4. Parmi, v journal. Sanfli Ea"-bii Hirtonym'. StriHoi-.erfis P 'it teri , divina BiWiotheca antchac inedita , \c. St l 'io & labce Mo'i-icKo-um O-dinis f.ii £ti Benc- didVi c Con^r. S. Manri. In folio, à Paiis ch-z Louis Roulland. 5. j. Anparatut .'\^ B.bliothecain maxinnam vetcnmPatriim , & aiitiquorum Scdotorum.E^clt-fiariicoriim , Lugduni f-ditam , &'c. De Scriptorilv.s pri '.n fîECuli. Ope â Nicolai le Nourry Monachi c Congr. (ârdi Mauri. la S. a Paris chez Jean A ni (Ton. f.&ij.']. Opéra Jacobi Simancs Epi Icopi Pacer.fis, &■ poftmodum Z^-morenfis, &:c. Conv'flit in unum 6<: illultravit FranctTcus Callracanius , fanâx Inquilî- tionis Conlulror , .'-.c. In foiio. Fcrrariae. n. ). Le P.trtoral de faim Gnao're le Grand , du miriftere &- des devoirs des Pa'teurs. Tradu(flion nouvelle. Par P. Antaine deMarfilly. In u. a Paris chez AnHré Pr.la d. 15. j. P..i< M'ni/>[is yJnjilyjïs . prr Don. F>- •ncifc:un l.i Comb' , &c. Les 'i«*ux aut es Fran- çois & Anonymes , un iititulé : Moven court & très facile de faire orai- fon , &c. & un au're qui porte pour titre : Cai, tique de Cantiques de Salomon , Luerptité félon le fens m ftique , &:c. Ii, 4. à Pans chez Fran- çoi> Mugi-et. 40. j. ThL^oiogi.x Cl^ncorum Seminarii? accon^modarx Summarium. Tomi très., Authore J.B. du H:unel Pu{byrero . Reg ar icientiarum Acadcmis Socio , &c. In 11. aPaa*. chez Et.i^nn.' M'chaiiet 40 ). Mandement dr Monfeigneur l'Archevêque Duc de Reims , &c. pour la publicanon des indulgences accordées par notre faint Pete e Papelnno- cent XII. ^'Ux Religieux de la Comp. d Jefus , ^,c. In 4. à Reims. 41. j. Mndcme: tds Monfelgni-ur l'Archevêque Duc de Reims, &c. pottant règlement touchant les Autels privilégiez. In 4. à Reims. 41. i. A S C E T I C J. La Lumière du Chrétien , divifée en deux parties , &:c. In u. à Nan- tes , & fc trouve à Paris chez Claude Cellier, y j. Le Caractère des vrais Chrétiens. In 11. a Paris chez Jaq. leFevre. j. j. Il Parocho iftruito &c. Dato in luce da Paolo Segncri , délia Comp. di Giefu, In iz. inFirenze. 6'.j. DES se A V AN S. 507 L'hoiinf-fte homme Ch"ticn. In 12. à Paris chez Claude Ce'Htr. u. t. Rirnel du Dioccfe de Sens &c. In 4. à Sens & le trouve a Pari, rhez PieriT L'I fclafTàn 15. j. D'fco'irs fur divrrs fiijers de morale Par M. Laurent Chenarc Prêtie. In li. à Paris chfz tdme Coiiterc 'S. j. De l'ImitJti n de J. C, Tradi:d on rouvelle. Par P>;ul Anroire de M.ufili'v. In 11- à Pari^chf? André Prd.ui^. i6. j. Ca'echifme ou Abrégé de la Dod'ire Chrétienne, im-rimez par l'or- dre de Monreit;neiîi l'Arohevêquc de Bourges , pour tftre feiils enfeiçncz dans Ton diocefe. Troifiértie édicioi\ In 12. 1. vol. à Bourges , & fe trou- ve à Paris ;hfz Louis Guerin. 27. j. La Conduite du vr.iy Chrt tien daiis la ran<5lification des Dimanches Si des Fedes. I11 i:. à Paris ch.z Edme Coutcrot. 27 j. Heures Nouvelles , dédiérs à Monreij:;neur le Da'uhin éciiie- & era_ vces oar Flif.ibf thSenault. In 16 à Paris chez l'Auteur rue d? Bill;, à la Croix B-'anche , faubourg Hiint Germain , & J 1 îues le Gras , au Pa- lais. 41. j. Les i]uatre Fais de l'homme, dédées au Roy. In 12. à Paris chez Simon Benard. Mcthode & fuj ts d'oraifon pour le? Dimanches ^' Fcftes de l'année. In 12. à paris chez le mffme. Ir,ftr-..6tions tiers -'e 1 Ecriture fai: te pour toiislcs jours du mois. In 12. à P.iis chez Jean Couterot & Loui Gueiin. Joun^e Chrétienne, &; tirée des nuvr.iges du P. Suffren de laComp. de Je us. In 12. à Paris chez les melnies. Les œuvres fpiritu" les du bienheureuxjeandela Croix, &c. Tradiidion nouvelle. Parle P. Je^n Maillard , delà Comp^dejefus, In 4. à Paiis chez les mefmes. CONCION^TORES ET C ONTRO F FRTI ST^^. ^ La vie & les fermons de fiint Eloy Esêque de Noyon. In S. à Paris chez Jean Bapt. Coigrard. j. journal. Oraifon funèbre Ac très haut & très puilîànt Prince Louis de la Tour d'Auvergne Prince d: T :re>i. e , prononcée par le P Gailiaid de la Comp, de Jefus. I ^ 4. à Pari- chez Théodore Migut. 9. j. Les Erreur' des Proteftans touchant la Communion fous lesdeuxefps- ces. Ini2. à Paris chczjean AnifTon. 14.1. Sermon de Difripline Ecclefiaftiqu , prononcé par M. l'Evêquc Comte de Noyon , &c. In 4. a Paris chez Pierre l'Efclairan. 15. j. Traité de l'Eujaiiftie , par feu M. Peliiïon , Confeiller du Roy en fès Confeils , &c. In 12. à Paris chez Jean Aiiirttm. 10. j. Les ("ermoiis e (aint Auguftii fur le Noivcau Teftamenc , traduits en François fur l'édition Latine des Pères Benediâiins de la Congrégation de 5o8 LE J O U R N A L faint Maur. Par l'Auteur de la traduftion des Lettres Si des Confeflîons Jn mefme Saint, Sec. In 8. i. vol. à Paris chez la Veuve de J. B. Coi- gnard. zi. j. Homtrlies du P. Séraphin fur les Evangiles des Dimanches. In u. 4. vol. à Paris ch:z EdmeCoiiterot. 30. j. Di'.cours Moraux en forme ic prône<; pour tous les Dimanches de l'an- rée & les Ferjes de Carême. In 11. 1. \ol. à Paris chez Jean Couterot & Louis Guerin. HJSTORICI SACRI ET VRO? HANI. La vie & les Sermons de fa nt E'.oy Evêque de Noyon. In 8. à Paris cIk'z J. B. Coignard. 5. jour: al. Hiiloria gcnealogica 'k-lla famig'ia Carafa , Opéra del Signer Dom. B'agio A'dimari. In fdlio. 3. vol. in Nanoli. 4. j. Hiftoire d'Emeric Conne c'e T^ K li , &'c. In u. à Cologne. 8. j. Les vies des hommes illuftrcs d<' Plutarque, traduites en François, avec des ren:arqiies. Tome I. àP ris chz Claude Birbin. 10. j. Vita: papaîum Avenioncnilum , &.c. Opeiâ Stephani BalufiiTi'tcIerfis. In 4. 1 vol. à Paris ch?z Frarçois Muguet. 11 j, H'ftoire dellnquifition , 6c l'on origine. In n. à Co'ogr^e. :<;. 5^17. j. Journal des marches , campemens, batailles, fic'ges, &• mouvemensdcs Années ciu Roy en Flandres, & de c I!e« des Alliez demis l'anrée 1690. jufqu'à prefcnt. Prtf'nté a'.i Roy p^r lefi-'ur Vautlier Commiir^ire ordi- naire de l'Artillerie. In ji. à Pans chez !a Veuve de Charles Coignard Sc Clan.ie Cellier. 19. j, Hinoirefecrete de Bourgogne. In iz. 1. vr'. àP'ris chez S. Benard. 14.;. Fafti Ludovici Magni , &.'c. à Paris chi zjean AnilTbn. 19. j. Le Duc de Guife , furnommé le Balafic. In- 11. à Paris chez Claude pBarHn. 30. j, Eftat prêtent delTmcirede Maroc. In 11. à Paris chez M. Brunet. 55. j. Eftat prcfent d'Arménie tant pour le temporel que pour le fpirituel , a- vecune defcriprion du pays & des mœurs de ceux qui l'habitent. In 12. à Paris chez Jaques I.anolois. 54. j. Hiftoria perlecurionis Vandalua: , in duas partes dif'infta , &c. Opcrâ & (tud o D. Theo.lorici Ruinart , Monachi c Congr. fandi Mauti. In 8. à Paris chz Théodore Muguer. 35 j. Hifloire de Henri III. par M. Varillas. In 4. à Paris chez Claude Bar- bin. 37. j. Hiltorie Crono'oçith" deU'oiigine depl'Ordiri militari , e di tutte le religioni cavallrrefcbe , i: fine adhora inftiiuite nel mondo , ir.ftgne . cro- ci , ftendardi, habiti capitoaii ô di ceremonia , Sec. Opéra dell'Abbate Bernardo Giuflinian , &:c. In folio inVenezia. Elfe trouve à Paris chez J. Anillbn. 38. j. Hiftoria DES se A VANS. 509 Hiftoria Chronologica Pontificum Romanorum P F. Fr. Carrière Ap- tenfis Minorité Convent. D. Theol. &c. In 12. Lugduni.f & (e trouve à Paris chez Antoine Dezallicr ô\ Louis Guerin. 40. j. La vie des quatre Evangeliftcs , tirée des quatre Evangiles , & réduite en un corps d'hiiloire. Par le P. Bernardin de Montreuil de la Comp. de Jefus , &c. In II. 1. vol. à Pans chez Louis Rou'land. La vie de fainte Cécile , avec des réflexions chrétiennes fur fes princi- pales circonftanccs. Par M. Dubois piêcre , Sec. In 12. à Paris chez Edme Couterot. OR^TORES ET POETty£. Fables choifies. Par M. de la Fontaine. In 12. à Paris chez Claude Bar- bin. I. journal. Suite des reflexions critiques fur l'uiage prefent de la langue Françoifê. Par M. A. D. B. In u. à Paris chez Laurent d'Houry. 1. j. Ellày de Pfeaumes & Cantiques mis en vers , &• enrichis de figures. Par Mademoifelle . . . In 8. à Paris chez Théodore Muguet. 4.J, Carmina Pacifici Maximi Poetz Afculani. In 4. P^rinx. 7. j. Gallos tam falLi ûb hofte nefcios cjuam vinci : Oratio h. b^ta in regio Ludovici Magni Coliegio à Gabriele le Jay , S.J. à Paris chez la Veuve de Simon Benard. 12. j. Si.!r les dernières viftoires que le Roi a remportées fur tous fes enne- mis. In 12. à Paris chez Louis Seveftre. 11. j. Joannis Bapt. Santolii Opéra Poetica. In 12. à Paris chez Denys Thier- ry. .3. j. Pièces de théâtre de M. Bourfault , 8fc. Avec une lettre d'un Théologien illuftre pir fa qualité & par (on mérite , confulté par l'Auteur pi ur fça- voir fi la Comédie peut el^re permife , ou doit eftte abfolument défendue. In 12. à Paris chez Jean Guignard, 20. j. Difcours prononcez dans l'Académie Frarçoife à la réception de M. l'Abbé de Canmartin. In 4. à Paris chez J. B.Coignard. 21. j. Tradudion de l'Ode Latine du fitur de Prepctitde Grammont, Profct feur d'hloquence au Collège des Graflîus, fur la machine de faint Ma- lo. In S. a Paris chez Louis Seveftre. 26. j. Difcours prononcez dans l'Académie Françoife à la réception de M. i'AbbéBoileau. In 4. a Paris chez ]. B. Coignard. 57. j. La Viâoire , à Madcmoirclle de Scudery. In 4. à Pans chez la Veuve Langlois. 57. j. Le Diâionnaire de l'Académie Ftançoife. In fol. 2. vol. à Paris chez la Veuve dej. B. Coignard , &J. B. Coignard. 41. j. Le Didlionnaire des Aits & des Sciences, Par M. D. C. de l'Académie Fra' çoife. In folio i. vol. à Paris chez les mefmes. 42. ;. 1694. N n n n n n 5IO LE JOURNAL Trois Lettres d'un Académicien a un autre Académicien. In 4. à Paris chez J. B. Cotgnar '. 41. j. In TibiilaT) Siieciinuii l'hirmaceutico Siephani Fr. Geoffroy ptc-cfixam. In folio, à Parischezle nv.'fme. 41.J. Liidovici Magm Pant^giiicvis , a D. Joanne Bapt. Pouhat ,in Scnatu V«- fontioneniî Confiliano. In 4. Vclontione- PHILOSOPHA L'Art de fe connoitre foy mefme , ou la rccherdie des fources delà Morale. Par Jaques Abbadie. In u. a Roterdain. 1. journal. Réponfe du P. Mal'b'anche Prêtre de l'Oratoire, a M. Régis In 11. à Paris chez André Pralard. i. j. Répliques de M. Régis à la Réponfe du P. Malcbianche. In 4. à Pa- ris chc-z Jean Cu(Ibn. 7. & 8. j. Traitez de Metaphifique démontrée félon la méthode des Géomètres. In li. à Paris ch.z André Pra'ard. 14. j. Phi'ofophus in utramque parcem , &c. Opetâ Laurentii Duhan Phi!o- foph'x Profellbris. In 11. à Paris chez Pierre LefcalTan. 14. 1. La vraye & la faulle Metaphvfiqne , où l'on réfute les fentimens de M. Reijis & de Tes adverfiies fur cette matière. In 11. a Lion. 19. j. De fine homir.is , vulao fummo bono , fccundum dilciplin.im Philofo- phix BiibaricaE & Italicx : item lecundum difciplinam Phi'o o^ hix Gr^- canicx, Poerica: : ittm fecundum difciptinam Ele.iticx & Pirrhon'X : 'teni fecundùm difciplinam Epicuri , & déni que fecundum difciplinam Philoto- phix lonicx & Sc^craticorum. In 8. Argento'ati. 10. j. De la ConnoilTince de foy meline , & c. Par le P. Dom François Lamy Religieux Bencdidin de la Congtegation de faint Maur, In u. à Paris chez André Pralard. 55. & j6.j. Uranie, ou les tableaux des Phi'.ofophe';. Par NL le Noble , Baron de faint George. In n. 2.. vol. à Paris chez Guillaume de Luyne , & Martin Jouvenel. 3S. & 59.]. Jll E D I c r. La Pratique des accouchemens. Par ^L Peu, Maitre Chirurgien Juré à Paris. In 8. à Paris chezjean Bo dot 6.j. Obfervations fur la groirelle ^ l'accouchement des femmes, & fur leurs maladies & celles des enfans nouveaux- nez, &c. Par François Mauri- ccau , Maitre Chirurgien à Pans. In 4. à Paris chez L.d'Houry. 10. j. Hiftoire générale des Dogues , traitant des plantes , des cmimaux, & des minéraux , &c. Par lefieur Pierre Pomet , Marchand Epicier & Drogiiifte. In folio à Paris chez l'Auteur rue des Lombards , & Laurent d'Houry. n. j. DES SCAVANS. 511 La Pratique de Médecine de Paul B^ibettc , enrichie de quantité de no- tes , d'ohei varions , &: hiftnires iDedicales , par Frédéric DriKtrs. Avec des annotations très utiles pour la pratique , par J;ic(-b Maiget Dodeur en Médecine. Le to-it nonvellemtnt traduit en François, In 12. a Lion, & il trouve a Pari'- thez Laurent d Houry- 17. j. La Pratique de Chir.irgij de Pau' Barbette, enrichie & augmer.tée en dernier lieu de p'ufiturs remarques , hiftoires , guerifons , & expliiations qu\ concernent la pratique de Chiruig'e & d Anatomie , par Jacdb Man- E;et Docteur en Médecine Le tout approprié à la dotSrine dt la circula- tion , & nouvellement traduit en farçoi'--. In 11. 5. vol. à Lion. Et (e trouve à Paris chez Lauieut d'Houiy. 18. j. Nouvelles expériences fur la Vipère . oi\ l'on verra une defcrirtion exade de toutes Tes parties, la (burce de (on venin, fes diffèrens fffèts, &c. Par Moïie Charas Doâeur en Médecine , de l'Académie Royale des SciercfS. In 8, à Paris chez Laurent d'Houry. 11. j. Aphmifmes touihant la grolTeflè , l'accouchement , &■ les maladies des femmes. Par Fr. Mauriceau. In 16. à Paris chez le mefme. 40. j. MATHEMATICI. Corrs de Mathématique, qui comprend toutes les parties de cette firien- ce les plus utiles & les plus necelFaire^ à un homme de guerre, &c. Par M. Ozanam. In 8. 5. vol. a Paiis chfz Jean Jombert. 1. j. Le Neptune F'ançois , ou recueil des cartes marines levées & gravées par ordre du Roi. 1. volume , &c. In folio, a Paris chez Claude Gour- nay. 1. j. Recr^-aiions Mathématiques & Phifiques , qui contiennent plufieurs problêmes utiles & agréable'; d'Arithmétique , de Géométrie . d'Optique &c. Par M. Ozanam. In 8. a Pans chez Ji an Jombert- 24.. ], G EOG RA P H I. Defcription du Royaume de France , contenant fes principales divifions géographiques, \e. Parle fieurTillemon. In 12. à Paris chez Robcu Pé- pie &• j. B. Nolin, 5. j. Le Cercle de Souabe , drefle fur les mémoires de Jean Chriftophe Huo- tcn à Aultourg. Par Nicolas de Fer. à Paris chez l'Auteur, furlequay de l'Horloge du Palais. 18. j. Suite des Forces de l'Europe. Sixième partie. Par Nicolas de Fer. In 4, à Paris chez l'Auteur. 25. j. Mappe monde , ou Carte générale de la terre , divifée en deux he- mifpheres , fuivant la projeftion la plus commune , &c. Par Nicolas de- Fer, à Pans chez l'Auteur. 37, j. 511 LE JOURNAL O. Mathion Gcographia: Aftronomics Sinopfis , verfibus hcxametris comprehcnfa. 59. j. JV R J D ICI. LesLoix Civiles dans leur ordre naturel. Tome III. In 4, à Paris chez la VeuvcdeJ. B.Cognard. (,.]. Mémoire fur la quelHon de préfeance pour Mrs. les Ducs & Pairs de France , contre Monfcigneur le Maréchal Duc de Luxembourg. In 11. à Paris chez Louis Scvelhe. 7. j. Recueil des Ordonnances de nos Rois touchant le ban & arriereban , &c. In 11. à Paris chez Nicolas le Gras. 14. j. Dilfertation fur les requifuions des bénéfices en vertu des degrez pat procureur , ordonnées par !e Concordat. In folio, à Paris chez la Veuve Choiiqueux & Charles Caillou. 20. j. Eflàis de Jutifprudence. In 11. à Paris chez J. B. Coignard. 17. j. MISCELLANEL La metode d'étudier & d'enfeigner chrétiennement & folidement les hi- ftoriens prophanes par rapport à la Religion & aux Ecritures. Par le P. Louis Thomallîn. In %. z. vol. à Pans chez Louis RooHand. 2. %. & 4. j. Oeuvres mê'ées de S. Evremond. In u à Pans chez CI. Barbin j. j. La Fiance Chrétienne , ou l'Etat des Arrh-vêchez & Evèchezdc Fran- ce , &c. In 4. a Paris ch z ). Ch-villard, rue du Four, 3. j. Sacrum Miifeum Mantuana: Congregationis Carmclitarum de Obfer- vantia , in quo celebriomm H:'rouin fingula fimulachra , &c. confpiciun- rur, Authote R. P. Clémente Maria Fclina. In 4- B monix. j. j. Bibliotheca Thevenotiana , &c. In n. a Paris chez Florentm & Pierre de Laulne. 6. j. La belle éducation. Par M Bordelon. In ii. à Paris chez Nicolas Belley. 9.J. Les difFerens caradcres des femmes du fiede. Avec ta defcription de l'amour propre. In 11. à Paris chez Claude Cellier. 10. j. Hiftorica differtatio de tollcnda i.onfufione intcr duas antiquas Roma- nas Matror.as , profc-ffione chnlliana célèbres , Aniciam Faltoniam Pro- bam & Valeriam Faltoniam Piobam. Authore Thoma de Simconibus. In 4. Bononii. n. j. Seleftiora Numilmata in arre maximi moduli , è mufajo D. D, Francifci deCamps , concifis interi retationibus per D. Vaillant illufttata. In 4. à Pans chez Antoine Dezallier. 12. ). De Fontium Mutinenfium admiranda fcatiirigine , &c. In 4. Muti- nz. 13. j. Arliqmniana , ouïes bons mots Se les hiftoires plaifantcs recueillies des convetlations DESSCAVANS. 513 converfàtions d'Atlcquin. In iz. à Paris chez Florentin ôi Pierre de Lauliie. 13. j. Obrervations fur le Pctrone troué à B-.'lgrade en i6S8. Sec. In li. à Pans chci la Veuve de Daniel Hodhtmeis. 15. j. Les anciens Hirtoriens Litins réduits en maximes. Tome premier. Tite i ive. In n. a Pans cht z Louisjoire. 16. j. Didertatiou cronoiogique & hiftonque touchant l'année de la nailHince dej. C. par M. le Noble In iz. àPans^hczCl. Mazuel. iS. j. De Furoie Poetico , &.'c. In 4. Aigemorati. 18. j. Didionnaire Eti 1 ologique , ou Origines de la langue Frai çoife, par M. Ménage. Nouvelle édition augm-'ntée par l'Auteur. Avec les Oiigi- nes Franc )i:es de M. Cafeneuve ; un dilcours fur la iLience de Eiimolo- gies , par le P. Befr-ier de la Comp. de J. Ht une lifte des noms dt Saints qui paroilTent éloignez de leur origine, iSc.par M. l'Abbé Chaftelain Cha- noine de l'Eglile de Pans. In foiio à Paris chez J, Aniffon. 19 j Lettre a M.Frefèau de laFreleliere , Evêque de la Rochelle. Par M. Poncicr. In n. à Pans chez Guillaume Cavelier. 10, j. Lettre à M. Foucault Maitre desRequeftcs, &c, par M. Pontier. In \t. à Paris chez le mefmc. 10. j. Suite du traité hiftonque de l'ancienne Pâque des Juif";. Rtfl.xions fur quelques differtations de l'Aut.-ur de l'Analife de l'Evangile , & fur un li- vre intitulé : Apologie de M. Arnauld & du P Boiihours. In iz. à Paris chez André Pralard.\i. j. Réponfe à la lettre du Théologien défenfeur de la Comédie. Inii. à Pa- ris chez Théodore Girard. 11. j. Lettre Françoife & Latine du R. P.Fr. CsfFiro à Monfeigneur l'Arche- vêque de Pans. In 4. à Piris chez François l\ uguet. 11. j. Catalogus univerfalis pro Nundinis Francofuttenfibus Vcrnalibus de anno 1695. &CC 21. j. La conno'.llànce du monde , ou l'art de bien élever la jeune (Te pour tous les difFerens eftats de la vie. In 11. à Paris chez Jean Guignard. 25. j. La connoilfancc du monde , &c. Premitrc Lettre fur les principes de l'éducation. 25. j. Seconde Lettre , fur le choix & les qnalitez d'un Gouverneur. 34. j. Troifiéme Lettre , de l'art de connoitre les efptiis. 55. j. Quatriéinc Lettre. Dialogue entre le Solide S; le Délicat. 40. j. Nouvelles reflexions ou tentences . & maximes morales &' politiques, dédiées à Madame de Maintenon, par M. Vernage. Troifiéme édition , &c. In iz. a Paris chez Anroine Lambin. 25. j. L'Ecole du monde , ou inftruûion d'un père à un fils touchant la ma- nière dont il faut vivre dans le monde , divifée en Entretiens. Premier Entretien. In iz. à Paris chez Martinjouvenel. z^ j. Traité contre le luxe des cocfRires. In 12. à Pans chez Edme Conte- rot. i6. j. i^j)4. O o o o o o 514 LE JOURNAL Difccrs du Comte de BufTv Rabutin à Tes erviFans fut le bon ufage des advcifuez , & les divers éven'emens de fa vie. In u. à Patis chez Jean AniiTon. 26. j. Les parole; temarquables , les bons mots , S< les maximes des Orien- taux. Tradudlion de leurs ouvrages en Arabe, en Perfan , & en Turc, &:c. In iz. à Palis chez Simon Benard. 16. j. Réfutation d'un écrit favorifant la comédie. In u. à Paris chez Ednie Couteror. 50. j. Lettre d'un Dofteur de Sorbonne à une perfonne de qualité , au fnjet de la comédie. In 11. à Patis chezClaude Mazuel. ;i. j. Hiftoire des conttoverfes ôi des madères eccklîaftiques traitées dans le neuvième fiecle. Par Mre Louis Ellies Dupin. In S. à Patis chez André Praiard. 51. 5i 51. j, Litteri fcriptx à fereniflîmo Principe Se eminentilTîmo Cardinale Bul- lonio , Sec. ad Capituliim Leodiei.fe, necnon rcfpon'a fada ab eodem perilluftii Capitule Leodienfi, &c. In 4. .î Paris chez Th. Muguet. 51. j. DilTèrtation fur la condamnation des Théâtres. In iz. à Paris chez jsq. le Fevre. 53. j. DifcOLirs fur l'inftirution de l'Ordre Militaire de fair.t Louis , qui a remporté le prix de l'Eloquence par le jugement de l'Acadcmied'Angetf. à Paris chez J. Boudot. 54- j. Difcours fur la Comédie , où l'on voit la réponfe au Théologien qui la défend , avec l'hiiloire du Thràrre-, & les fentimens des Dodeurs de l'E- giife depuis le premier fiecle jufqu'à prcfent. In iz. à Paris chez Louis G.ierin & Jean Boudot. 56- j. Monac+iatus Auguftini ab Aug'iflino potiflîmum propugnatus , ubi ex Auguftino fuadetur Auguftinum Monachum excitilTe. Operà P. Bonaven- tura: à fanifta Anna Auguftiniani Excalceati. In iz. Lugduni. & fe trouve à Paris ch?z la Veuve de Rob. CheviUion. 57. j. Maximes Se Reflexions fur la Comédie. Par Mre. Jaques Bénigne Boflîict Evê^ue de Meaux. In iz. à Paris chez J; an AnilTbn. jS. j. Fabii Claudii Gorciani Fulgentii liber voluminumXXlII. de xtatibus mundi Si hominis. In 8. Pi£lavii. S: fe trouve â Paris ckez Florentin & Pierre de Laulne. 59. j. Sentimens de l'Egiife & des faints Pères pour fervir de décifion fur la Comédie & les Comédiens , oppolez à ceux de la lettre qui a paru fiir ce fu|et depuis quelques mois. In u. à Paiis chez la Veuve de Charles Coi- gnard , &.Edme Couterot. ;9.j. Traité de la lib.rté , de la ftience , &: de l'autotité , oi\ l'on voit que les perfonnes du fexe pour en eftre privées ne lailTentpas d'avoir lesqua- litez qui les en peuvent renr're participantes, S-c. In 4. a Lion. &fe trou- ve à Paris chez Rob. Pépie. 40. j. Cbrirti.inu'- Vormius decorrnptis antiquitatum Hebracatum apudTaci^ tum ijc Martialem vcftigiis. In 4. Hafnia:. 41, j. DES S C A V ^ N S. ^M 5 Jicobi Imhofïi Notitia Rom. Germanici Imperii procerum. In folio. Tubing.T. 41. j. Bib'iorliçca Magna Rabbiiiica de Scriptoribns & Scriptis Rabbinicis. In fol. Ronix pars 4°. Ec Ce trouve à Paris chez Ancoine Dezallier. Bib'ioihTca Latine Hebraica de Scriptoribus Lstinis. Autborc Imbo- natoMedioI. In fol. Romac. Ec fe trouve à Paris chez le mffmc. SVPPLEMENTVM AD B I B LIOGRA ? HI AM. Réponfede M. Bernoulli le Médecin , à l'objeftion contre une metode qui a paru de lui dans iejournal. j. journal. Obfervations faites par M. Drouin Maitre Chirurgien Jiné à Paris , & Aide Major de l'Hopiral de l'Armée du Roi. 4, j. L'Analife des vailTèaux prolifiques du Limaçon de jardin. Par Fraiçois Pojpart. 5. j. Extrait d'une lettre de M. Marcel Commifiàire de la Marine. (,■ j. Eloge du p. Anfelme , Auguftin DéchaufTé. 6. j. Remarques fur la Réponfe de M. Bernoulli au fujet d'un problême de Géométrie. 7. j. Le Temps , à Mademoifelle de Scudery. Réponfe de Sapho au Temps. A Mademoifelle de Scudery fur fa Réponfe au Temps. S. ]. Extrait d'une lettre^ du P. Malfbranche Prêtre de l'Oratoire. 9. j. Extrait d'une lettre de M. Mayer , à M. Clément Bibliothécaire du Roi. y.j. Extrait d'une lettre de M. de Vallemont à M. Pintart, 10 j. Atteftation pour le P. Malebranche Prêtre de l'Oratoire. 10. j. Avis touchant l'atteflation inférée cy-delTus. 10. j. Réponfe du P. Malebranche à l'avis de M. Régis. 11. ]. Réponfede M. Sauveur à l'avis de M. Régis. 11. ]. Avis touchant la réponfe de M. Sau\ eur. 12. j. Extrait d'une lettre de M. Galland. 12 ]. La progreffion du Limr.çon aquatique dont la coquille cft tournée en fpirale conique. Par le fienr François Poupatt. 12.). Difficulté fur la folution d'un problême de M. Bernoulli inférée dans les Mémoires de Mathématique du jo. Juin 1695. '5- )• Extrait d'une lettre touchant un traité de longue vie. 15 j. Réponfe du P. Plumier Religieux Minime, à M. Pomet, fur la Coche- nille. 15. j. Eclaircidèment d'une difficulté propofée dans le Journal , fur la foUitiorî d'un problême de M. Bernoulli mferée dans les Mémoires de Mathéma- tique. 16. j. Extrait d'une lettre où l'on réfute les preuves de M. Abbadie contre M. Defcartes touck nt l'cxiftence de Dieu. 17. j. 51(5 LE lOTJRNAL Rcponff à l'écrit infcré dans le Journal contre le livre de la vraye & de lafauHeMetaphifique. 2z.j. Lettre de M. l'Ablx- Boilot à Mademoifelle de Scudery. i'. &: 14. j. Première lettre de M. Arnauld Dodteur de Sotboiinc, au P. Makbran- che de rOiatoire. ic j Seconde lettre de M. Arnauld. 16. j. Première lettie du P. Malcbranche de l'Oratoire , à M. Arnauld Do- cteur de Sorbonne. ty.\. Extrait d'une lettre é.rite de Rieux en Languedoc, zj. j. Seconde lettre du P. Maie-branche .. M. Arnauld. zS. j. Extrait d'une lettre de M. Leibmz. 2.»/. j. Extrait d'une fecoiide lettre écrite de Rieux. jo. j. Extrait d'une autre lettre écrite dcTouloule. ^o. j. Extrait d'une lenre de M. Drouin Chirurgien Juré à Paris , à M. Fagon Premier Médecin de S.i Majelté. 31. /. Extrait d'une lettre écrite de Roteidam. 31 j. Extrait d'une lettre de Rémi Lochell , oiï il donne p'.ufieurs obfcrvations pour réfoudre les cgalittz par nombre , par géométrie , & en termes ge- raux. ji.j. Confideratioris fur la différence qu'il y a entre l'analyfc ordinaire & le nouveau calcul des tranfcendentes- Par M Leibniz. 54 j. Extrait d'une lettre de M. Gravero' de Nifmes. 35. j. Extrait d'une lettre- de M. l'Abbé Bo fot a Mademoilelle de Scudery, fut iin monument trouvé prés 'eBcfançon. 5^. j. Extrait d'une lettre traduite de l'Italien. 40. j. Extrait d'une lettre écrite de Rome. 41. j. F I N. Faute k corriger dans le Journal précèdent, page 495. ligne 21. Nouveau Teftament , Ufez. l'Ancien Teftamenr, A PARIS, Chez Jean Cusson , rue faint Jaque.'- , à l'Image de faine Jean Baptiftc. ^vec priviiegf dtt Rcy r * ■in. ,rPHHs' v'??*:'; H,; ■'' l: fir fi' '"^'■: . 4#\ '^^» 1- -^- iri. ■%_ .•♦?>■ #-f :' »«^,Sîi- • ♦ ?^¥ >-^^-